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COSMOS
ESSAI D UNE
DESCRIPTION PHYSIQUE 1)1) MOPE.
rAHlS — IMPRIMÉ PAR F Tm'NOT t.t C,
itiâ Ractn« , se
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COSMOS
KSSAI D UNE
DESCRIPTION PUYSIQIIi M MONDE
PAR
AliKXAiyBRE BE Hin^IBOIiBT
TRADUIT
Par H. PAYE,
MEMBRE DK l'iNSTITUT,
Vy »KI ASTRONOMES DE l'OBSERVATOIRE DE PARIS.
« Naluiœ vero rerum vis alque majesUa iu
omnibus momeniis Gde caret , si quis modo parte«
«jus ac non totam complectatur anime. »
Pline, H. N., lib. vu , c. 1.
TOME TROISIEME
PA R I S , «wKjiîa^ ^<
GIDE ET F. BAUDRY, ÉDITEURS,/'^
RUE DES PETITS-AUGUSTINS, 5.
t^ftfl
JÏU
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V . J
iN
TABLE DKS MATIEIIKS.
1" PARTIE DU m- VOLUME.
Avertissement du tiuduc.teur vu
Introduction 1
Partie uranologique de la Description physique du Monde.
— Résultats de robservation 28*
I. Considérations sur les espaces célestes et sur la matière
dont ils paraissent être remplis 33
II. Vision naturelle et télescopique. Scintillation des étoiles.
Vitesse de la lumière. Photométrie stellaire Zj9
l î r. Nombre , distribution et couleurs des étoiles. Amas d'é-
toiles. Voie lactée parsemée de rares nébuleuses. . . . 112
IV. Étoiles nouvelles. Étoiles qui ont disparu. Étoiles dont
l'éclat varie d'une manière périodique 160
V. Mouvements propres des étoiles. Existence problématique
d'astres obscurs. Parallaxe et mesure de la distance
de quelques étoiles 2ili
^ I. Étoiles doubles et temps de leurs révolutions autour de
leurs contres de gravité 230
VI
TABLES ÎNUMÉKlQUEfJ.
TABLK l'HOTOMÉTRlQUE DES ÉTOILES 106
Table des amas stellaires 154
Table des étoiles .nouvelles 171
Table des étoiles variables 197
Table des parallaxes 229
Table des éléments des orbites des étoiles doubles. . . . 257
AVERTISSEMENT DU TRADrCTETIR.
Ce volume étant spécialement destiné à compléter
la partie uranologique du Cosmos , M. de Humboldt
a cru devoir en confier la traduction à l'Astronome
qui déjà avait entrepris celle du premier volume.
J'ai prié cependant M. Galusky de traduire le pre-
mier chapitre, dont les développements littéraires
et philosophiques sortent du cadre de mes tra-
vaux habituels. C'est donc à l'habile traducteur du
second volume du Cosmos que je dois les 27 pre-
mières pages de celui-ci et les notes correspon-
dantes. De plus , M. Galusky m'a prêté son concours
pour la correction de toutes les épreuves. Je suis
— VIII —
heureux de pouvoir lui offrir ici l'expression de ma
vive reconnaissance.
Je dois ajouter que mon savant confrère M. Gui-
gniaut a bien voulu me permettre, plus d'une fois,
d'avoir recours à sa vaste érudition.
H. FAYF.
PREMIÈRE PARTIE.
ni
I
INTRODUCTION.
Je poursuis le but que je me suis fixé et que je n'ai
pas désespéré d'atteindre, dans la mesure de mes
forces et selon l'état actuel de la science. Confor-
mément au plan que je m'étais tracé, les deux vo-
lumes du Cosmos publiés jusqu'à ce jour présentent
la nature considérée d'un double point de vue. J'ai
essayé d'abord de la reproduire sous son aspect ex-
térieur et purement objectif; puis j'ai dépeint son
ima^e réfléchie à l'intérieur de l'homme par l'inter-
médiaire des sens, et j'ai recherché la trace de l'in-
fluence qu'elle a exercée sur les idées et les senti-
ments des différents peuples.
Le monde extérieur a été décrit dans ses deux
grandes sphères, la sphère céleste et la sphère ter-
restre, sous la forme scientifique d'un Tableau gé-
néral de la Nature. Ce tableau offre d'abord aux re-
gards les étoiles qui brillent parmi les nébuleuses ,
dans les régions les plus reculées de l'espace ; de là,
il nous fait redescendre à travers notre système pla-
nétaire jusqu'à la couche végétale dont est couvert
le sphéroïde terrestre , et aux organismes infiniment
III. 1
— 2 —
petits qui flottent souvent suspendus dans les airs et
se dérobent h l'œil nu. Pour rendre sensible l'exis-
tence du lien commun qui enlace tout l'univers, et
le gouvernement des lois éternelles de la nature;
pour faire saisir, autant qu'elle peut être connue jus-
qu'à ce jour, cette connexion génératrice qui unit
des groupes entiers de phénomènes, il fallait éviter
soigneusement l'accumulation des faits particuliers.
Une telle réserve était surtout nécessaire dans la
sphère terrestre du Cosmos , où , à côté de l'action
dynamique des forces motrices, se manifeste éner-
giquement l'influence produite par la diversité spé-
cifique des substances. Dans la sphère sidérale ou
uranalogique, les problèmes sont, pour tout ce que
l'observation peut atteindre, d'une admirable sim-
plicité , et se prêtent , en raison des masses énormes
et des forces attractives de la matière, à des calculs
rigoureux, fondés sur la théorie du mouvement. Si
nous sommes, ainsi que je le crois, autorisés à regar-
der les astéroïdes ou pierres météoriques comme des
parties de notre système planétaire , ces corps sont
les seuls qui, en tombant sur la terre, nous mettent
en contact avec des substances évidemment hété-
rogènes, qui circulent dans l'espace (1). J'indique ici
les causes pour lesquelles la méthode mathématique
a été jusqu'à ce jour moins généralement et moins
heureusement appliquée aux phénomènes terrestres
qu'aux mouvements des corps célestes, gouvernés
uniquement dans leurs perturbations réciproques et
leurs retours périodiques par la force fondamentale
— 3 —
de la matière homogène, aussi loin du moins que
peuvent s'étendre nos perceptions.
Je me suis surtout efforcé , en traçant le tableau
de la Terre , de disposer les phénomènes suivant un
ordre qui laissât soupçonner le lien générateur par
lequel ils se rattachent Tun à Tautre. J'ai décrit la
configuration du corps terrestre ; je l'ai représenté
avec sa densité moyenne, avec les variations de sa
température croissant en raison de la profondeur,
avec ses courants électro-magnétiques et les phéno-
mènes de la lumière polaire. La réaction de l'intérieur
contre l'extérieur de la Terre est le principe de l'acti-
vité volcanique : c'est à cette cause que doiveut être
rapportés les ondes d'ébranlement qui se propagent
dans des cercles plus ou moins étendus, et les effets de
ces ébranlements, qui ne sont pas toujours purement
dynamiques, comme les éruptions de gaz, de boue et
d'eau chaude. Le soulèvement des montngnes igni-
vomes est la plus haute manifestation des forces
intérieures de la Terre. Nous avons représenté les
volcans centraux et les chaînes de volcans, non pas
seulement comme des éléments de destruction , mais
aussi comme des agents producteurs, qui continuent
à former sous nos yeux , et le plus souvent à des
époques fixes, des roches d'éruption. En opposi-
tion avec les roches d'éruption, nous avons montré
les roches de sédiment se précipitant aujourd'hui
encore du sein des milieux liquides dans lesquels
leurs dernières particules flottaient suspendues ou
dissoutes. Cette comparaison des parties de la
Terre en voie de développement, dont la figure
n'est pas encore déterminée, avec celles qui, soli-
difiées depuis longtemps, forment les différentes
couches de la croûte terrestre , nous conduit à dé-
terminer avec certitude la série successive des
formations qui renferment dans un ordre chronolo-
gique les familles éteintes des animaux et des plantes,
et permettent de reconnaître distinctement la Faune
et la Flore de Fancien monde. La naissance, la trans-
formation et l'exhaussement des couches, aux di-
verses époques géologiques, sont les conditions d'où
dépendent tous les accidents de la surface terrestre:
la répartition de Félément liquide et de Félément
solide , ainsi que Fétendue et Farticulation des masses
continentales, en largeur et en hauteur. Ces re-
lations, à leur tour, déterminent la température
des courants marins, Fétat météorologique de
Focéan gazeux qui enveloppe la Terre , et la distribu-
tion géographique des différents organismes. Le
souvenir du lien qui unit les phénomènes terrestres,
et que j'ai tenté de mettre en lumière dans la pre-
mière partie du Cosmos^ suffit, je pense, pour prouver
qu'il est impossible de rapprocher les résultats si
vastes et en apparence si complexes de Fobservation,
sans approfondir la connexité qui rattache les causes
aux effets. La signification de la nature est d'ailleurs
considérablement affaiblie, lorsque, par une trop
grande accumulation de faits isolés , on enlève aux
descriptions dans lesquelles on cherche à la repro-
duire, toute leur chaleur vivifiante.
— 5 —
Si je ne pouvais sérieusement prétendre, quelque
soin que j'y apportasse, à n'omettre aucune par-
ticucularité dans le tableau des phénomènes exté-
rieurs , il n'était pas plus facile de tout dire , en
dépeignant le reflet de la nature dans l'esprit de
l'homme. Ici même les bornes devaient être plus
étroitement circonscrites. L'immense empire du
monde intellectuel , fécondé depuis des siècles par
les forces actives de la pensée, nous montre, dans les
diverses races d'hommes et aux différents degrés de
la civilisation , des dispositions d'esprit tantôt gaies ,
tantôt sombres (2) , un vif arnour du beau ou une in-
sensibilité grossière. D'abord l'âme de l'homme est
conduite au sentiment de la Divinité par le spectacle
des forces naturelles et par certains objets du monde
extérieur. C'est plus tard seulement que l'homme
s'élève à des aspirations religieuses plus pures et
plus spirituelles (3). Le reflet du monde extérieur
dans l'homme, les impressions de la nature envi-
ronnante et les dispositions physiques exercent
aussi plus d'une influence sur la formation mysté-
rieuse des langues (1). L'humanité travaille au de-
dans d'elle la matière que lui fournissent les sens ,
et les résultats de cette opération intérieure sont
aussi bien du domaine du Cosmos que les phéno-
mènes sur lesquels elle s'accomplit.
Comme l'éveil donné à l'imagination créatrice ne
permet pas que l'image réfléchie de la nature se con-
serve pure et fidèle, il existe, à côté du monde réel
ou extérieur, un monde idéal ou intérieur, rempli
— 6 -
de mythes fantastiques et quelquefois symboliques,
animé par des formes animales dont les parties hé-
térogènes sont empruntées au monde actuel ou aux
débris des générations évanouies (5). Des formes mer-
veilleuses d'arbres et de fleurs croissent aussi sur le
sol de la mythologie, comme ce frêne gigantesque
des chants de l'Edda, cet Arbre du Monde nommé
Ygdrasil , dont les branches s'élèvent au-dessus du
ciel, tandis que l'une de ses trois racines s'enfonce
jusque dans les sources retentissantes du monde
souterrain (6). Ainsi la région nébuleuse de la mytho-
logie physique est, suivant la différence des races et
des climats , peuplée de formes gracieuses ou effroya-
bles qui passent de là dans le domaine des idées sa-
vantes et, durant l'espace de plusieurs siècles, se
transmettent de génération en génération.
Si le travail que j'ai livré au public ne répond pas
assez au titre dont j'ai souvent moi même signalé la
hardiesse imprudente, ce reproche d'insuffisance
doit porter principalement sur la partie qui traite de
la vie intellectuelle et du reflet de la nature dans le
sentiment de l'homme. Pour cette partie surtout, je
me suis borné aux objets les plus rapprochés des
études qui ont rempli ma vie ; j'ai recherché l'ex-
pression du sentiment de la nature chez les peuples
de l'antiquité classique et chez les nations modernes,
recueillant les fragments de poésie descriptive qui
ont emprunté leur couleur au caractère national de
chacune de ces races , et à l'idée qu'elles se faisaient
de la création , en tant que l'œuvre d'une puissance
— 7 —
unique ; j'ai dépeint le charme gracieux de la peinture
de paysa^çe; enfin j'ai retracé 1 histoire de la contem-
plation du monde, c'est-à-dire l'histoire des décou-
vertes qui, en se succédant pendant un laps de vingt
siècles , ont permis à l'observateur d'embrasser l'en-
semble de Tunivers et de dégager l'unité qui do-
mine tous les phénomènes.
En admettant que , dans le premier essai d'une
œuvre aussi vaste, qui se propose, tout en restant
scientifique , de représenter l'image vivante de la
nature , on puisse avoir la prétention d'être complet
en quelque chose, du moins, doit- on chercher à
l'être plus par les idées que l'on soulève que par les
résultats que l'on fournit. Un Livre de la Nature
vraiment digne de ce nom ne pourra apparaître que
lorsque les sciences , condamnées dès le principe
à rester toujours incomplètes , se seront du moins
agrandies et élevées à force de persévérance, et
qu'ainsi les deux sphères en lesquelles se décom-
pose le Cosmos , le monde extérieur perçu par les
sens et le monde intérieur réfléchi dans la pensée
de l'homme , auront l'une et l'autre gagné en clarté
lumineuse.
Je crois avoir suffisamment indiqué les raisons
qui devaient me déterminer à ne pas donner plus
d'extension au Tableau général de la Nature, me ré-
servant, dans le troisième et dernier volume, de
suppléer à ce qui manque, et de réunir les résultats
de l'observation sur lesquels est fondé l'état actuel
des opinions scientifiques. Ces résultats seront ran-
— 8 —
gés dans le même ordre que j'ai suivi déjà pour la
description de la nature, conformément aux principes
établis plus haut. Avant toutefois de passer à des faits
particuliers et spéciaux , je demande la permission
d'ajouter encore quelques considérations générales
qui jetteront un nouveau jour sur l'objet de ce livre.
La faveur inattendue avec laquelle un public consi-
dérable a accueilli mon entreprise, dans ma patrie et
dans les pays étrangers, me fait doublement sentir le
besoin de m'expliquer encore une fois, et d'une ma-
nière plus précise, sur la pensée fondamentale de
cet ouvrage et sur les exigences que je n'ai pas cher-
ché à satisfciire , parce que je n'y pouvais prétendre,
d'après l'idée que je me fais personnellement de nos
connaissances expérimentales. A ces considérations
justificatives se rattacheront comme d'eux-mêmes
les souvenirs historiques des premiers efforts faits en
vue de découvrir la pensée du Monde, c'est-à-dire le
principe unique auquel doivent être ramenés tous les
phénomènes , lorsqu'on s'efforce d'en découvrir l'har-
monie génératrice.
Le principe fondamental de mon livre (7), tel que
je l'ai développé, il y a plus de vingt ans, dans des
leçons professées en allemand et en français, à Paris
et à Berlin , c'est la tendance constante à recomposer
avec les phénomènes l'ensemble de la nature , à
montrer dans les groupes isolés de ces phénomènes
les conditions qui leur sont communes , c'est-à-dire
les grandes lois qui régissent le monde ; enfin à
faire voir comment de la connaissance de ces lois on
— 9 —
remonte au lien de causalité qui les rattache les unes
aux autres. Pour arriver à dévoiler le plan du monde
et Tordre de la nature , il faut commencer par gé-
néraliser les faits particuliers, par rechercher les
conditions dans lesquelles les changements physiques
se reproduisent uniformément. Ainsi Ton est conduit
à une contemplation réfléchie des matériaux four-
nis par l'empirisme, et non « à des vues purement
spéculatives , à un développement abstrait de la pen-
sée, à une unité absolue indépendante de l'expé-
rience. » Nous sommes, je le répète, encore bien loin
deTépoque-où l'on peut se flatter de faire rentrer
toutes les perceptions sensibles dans une idée unique
qui embrasserait l'ensemble de la nature. Déjà , un
siècle avant François Bacon , la véritable voie avait
été frayée et signalée en peu de mots par Léonard
de Vinci : « cominciare dall' esperienza et per mezzo
diqucsta scoprirne la ragione (8). » Il y a, à la vérité,
des groupes nombreux de phénomènes dont nous de-
vons nous contenter de découvrir les lois empiriques;
mais le but le plus élevé, celui qui a été le plus ra-
rement atteint , est la recherche des causes qui re-
lient entre eux tous les phénomènes (9). On n'arrive
à une complète évidence que lorsqu'il est possible
d'appliquer aux lois générales la rigueur du raison-
nement mathématique. Pour certaines parties de la
science seulement, il est vrai de dire que la descrip-
tion du monde est V explication du monde. En général
ces deux termes ne peuvent pas encore être consi-
dérés comme identiques. Ce qu'il y a de grand , d'im-
^ 10 —
posant dans le travail intellectuel dont nous mar-
quons ici les lirailes, c'est la conscience de TefFort
fait pour tendre vers rinfini, pour embrasser l'im-
mense et inépuisable plénitude de la création , c'est-
à-dire de toutce qui existe et se développe.
De tels efforts tentés à travers tous les siècles, ont
dû souvent, et de diverses manières, conduire à
cette illusion que le but était atteint, que le prin-
cipe était trouvé, d'après lequel peuvent être expli-
qués tous les phénomènes sensibles qui se suc-
cèdent dans le monde matériel. Après la longue
période où , conformément au premier mode d'in-
tuition de l'esprit hellénique , les forces naturelles
qui fixent la forme des choses, les changent et les
détruisent, étaient honorées comme des puissances
spirituelles voilées sous des formes humaines (10), le
germe d'une contemplation scientifique de la nature se
développa dans les fantaisies physiologiques de l'école
ionienne. Cette école était partagée en deux directions
différentes. Guidés tantôt par des considérations mé-
caniques, tantôt par des considérations dynamiques,
les naturalistes, pour expliquer l'existence des choses
et la succession des phénomènes , recouraient à
rhypothèse de principes concrets et matériels, que
l'on appelait les éléments de la nature, ou à la rare»
faction et à la condensation des substances élémen-
taires (11). Cette hypothèse de quatre ou cinq élé-
ments spécifiquement distincts, qui peut-être a tiré
son origine de l'Inde , est restée mêlée h tous les
systèmes de philosophie naturelle, depuis le poëme
— il —
didactique d'Empédocle, et témoigne du besoin que
rhomnie a éprouvé de tout temps, de viser à la gé-
néralisation et à la simplification des idées, qu'il
s'agisse de l'action des forces ou seulement de la na-
ture des substances.
Un peu plus tard, lorsque la physiologie ionienne
eut pris un nouveau développement, Anaxagore de
Clazomène s'éleva de l'hypothèse des forces purement
motrices à l'idée d'un espri t distinct de toute espèce de
matière, mais intimement mêlé à toutes les molécules
homogènes. L'intelligence régulatrice (voûc) gouverne
le développement incessant de l'univers; elle est la
cause première de tout mouvement et par conséquent
le principe de tous les phénomènes physiques.
Anaxagore explique le mouvement apparent de la
sphère céleste, dirigée de l'Est à l'Ouest, par l'hy-
pothèse d'un mouvement de révolution général dont
l'interruption, comme on l'a vu plus haut, produit
la chutedes pierres météoriques (l'2). Cette hypothèse
est le point de départ de la théorie des tourbillons
qui , après plus de deux mille ans, a pris par les tra-
vaux de Descartes , de Huyghens et de Hooke une si
grande place entre les systèmes du monde. L'esprit
ordonnateur qui, selon Anaxagore, gouverne l'univers
était-il la Divinité elle-même, ou n'était-ce qu'une
conception panthéistique, un principe spirituel qui
soufflait la vie à toute la nature? C'est là une
question étrangère à cet ouvrage (13).
La symbolique mathématique des Pythagoriciens
bien qu'elle embrasse également l'univers entier,
- 12 —
forme un contraste frappant avec les deux branches
de l'école ionienne. Leurs regards ne s'étendent pas
au delà des phénomènes perceptibles aux sens, et
restent invariablement fixés sur la loi qui règle les
cinq formes fondamentales, sur les idées de nombre,
de mesure, d'harmonie et de contraste. Les choses,
suivant eux , se reflètent dans les nombres qui en
sont comme l'imitation (pV/iau). La faculté qu'ont
les nombres de croître et de se répéter sans mesure
est le caractère de l'éternité et de la nature infinie.
Les choses, en tant qu'existantes, peuvent être consi-
dérées comme des relations numériques; leurs chan-
gements et leurs transformations ne sont que de nou-
velles combinaisons des nombres. La physique de
Platon contient aussi des essais de ramener toutes
les substances qui existent dans l'univers et les déve-
loppements par lesquels elles passent à des formes
corporelles , et ces formes elles-mêmes à la plus
simple des figures planes, au triangle (14). Quant à
savoir quels sont les derniers principes, comme l'on
dirait les éléments des éléments, c'est, écrit Platon,
dans un sentiment de défiance modeste , ce qui n'est
connu que de Dieu et de ceux qu'il aime entre tous.
Cette application des mathématiques aux phéno-
mènes physiques, la formation de l'école atomistique,
ou la philosophie de la mesure et de l'harmonie, ont
longtemps influé sur le développement des sciences,
et conduit des esprits aventureux par des chemins
détournés que doit retracer l'histoire de la Contem-
plation du Monde. 11 y a dans les simples rapports
— 13 —
du temps et de l'espace , révélés par les sons , les
nombres et les lignes, un charme attachant qu'a cé-
lébré toute l'antiquité (15).
L'idée de l'ordre et du gouvernement de l'univers
ressort dans toute sa pureté et dans toute son éléva-
tion des écrits d'Aristote. Ses Juscultatwîies physicœ
représentent les phénomènes de la nature comme les
effets de forces vitales, émanant d'une puissance uni-
verselle. Le ciel et la nature (16), dit-il en désignant
sous ce nom la sphère terrestre des phénomènes ,
dépend du moteur immobile du monde. L'ordonna-
teur, ou en d'autres termes le dernier principe des
phénomènes sensibles, doit être considéré comme
distinct de toute espèce de matière et ne tombant
pas sous les sens (17). L'unité qui domine tous les phé-
nomènes par lesquels se manifestent les forces de la
matière est élevée dans Aristote à la hauteur d'un
principe essentiel , et ces manifestations elles-mêmes
sont toujours ramenées h des mouvements. Ainsi le
traité de Anima renferme déjà le germe de la théorie
des ondulations lumineuses (18). La sensation de la
vue est produite par un ébranlement , une vibration
du milieu placé entre l'œil et l'objet, et non par des
émanations qui s'échapperaient de l'un ou de l'autre.
Aristote compare l'ouïe à la vue, parce que le son est
aussi un effet des vibrations de l'air.
Aristote, tout en recommandant d'appliquer la
raison à rechercher le général dans le détail des par-
ticularités perçues par les sens, embrasse toujours
l'ensemble de la nature et la connexion intime non-
— la -
seulement des forces mais aussi des formes organi-
ques. Dans le livre qu'il a écrit sur les organes des
animaux [de Partibus Animalium), il exprime claire-
ment sa croyance à la gradation par laquelle les
êtres s'élèvent successivement des formes inférieures
à des formes plus hautes. La nature suit un déve-
loppement progressif et non interrompu , depuis les
objets inanimés ou élémentaires jusqu'aux formes
animales, en passant par les plantes, et « en s'es-
sayant d'abord sur ce qui n'est pas encore un ani-
mal proprement dit, mais qui en est si voisin qu'il y
a en vérité peu de dilTérence (19). » Dans cette grada-
tion des formes, les nuances intermédiaires sont in-
sensibles (20). Le grand problème du Cosmos est
pour le Stagirite l'unité de la nature : « Dans la na-
ture, dit-il avec une singulière vivacité d'expression,
rien d'isolé ni de décousu , comme dans une mau-
vaise tragédie (21). »
Tous les ouvrages physiques d'Aristote , observa-
teur aussi exact que profond penseur, laissent voir
clairement cette tendance philosophique à faire
dépendre d'un principe unique tous les phénomènes
de l'univers. Mais l'état iui parfait de la science,
l'ignorance où l'on était à cette époque de la méthode
expérimentale, qui consiste à susciter les phéno-
mènes dans des conditions déterniinées , ne permet-
lait pas d'embrasser le lien de causalité qui unit ces
phénomènes, même en les divisant en groupes peu
nombreux. Tout se bornait aux oppositions sans
cesse renaissantes du froid et du chaud , de la se-
— 15 —
cheresse et de riiuinidité , de la raréfaction et de la
densité primitives et aux altérations produites dans
le monde matériel par une sorte d'antagonisme inté-
rieur ( ay-iTTEptoTaGiç) , qui rappelle les hypothèses mo-
dernes des polarités opposées et le contraste du + et
du — (2*2). Les solutions proposées par Aristote ont
le tort de déguiser les faits , et dans l'explication des
phénomènes d'optique ou de météorologie, le style
d'ailleurs si énergique et si concis du Stagirite semble
prendre plaisir à s'étendre , et emprunter quelque
chose de la diiTusion hellénique. Comme l'esprit
d'Aristote était presque exclusivement dirigé vers
l'idée de mouvement, et se préoccupait peu de la
diversité des substances, il en résulte que sa pensée
fondamentale de ramener tous les phénomènes ter«
restres à l'impulsion donnée par le mouvement du
ciel, c'est-à-dire par la révolution de la sphère céleste,
se reproduit sans cesse, qu'on la retrouve partout,
qu'elle est, de la part de l'auteur, l'objet d'une sorte
de prédilection, mais que nulle part elle n'est présen-
tée avec une précision et une rigueur absolues (23).
Par l'impulsion dont j'essaye de donner l'idée, il
ne faut entendre que la communication du mouve-
ment , considéré comme le principe de tous les phé-
nomènes terrestres. Les vues panthéistiques sont
tout à fait laissées de côté. La Divinité est la plus
haute unilé ordonnatrice ; « elle se manifeste dans
tous les cercles de l'univers, donne leur destination
à tous les êtres distincts de la nature, et combine tout
en vertu de sa puissance absolue (24). » Les idées de
— 16 ---
but et d'appropriation sont appliquées , non pas aux
phénomènes subordonnés de la nature inorganique
ou élémentaire, mais principalement aux organismes
qui occupent une place plus élevée dans le règne
animal ou végétal (25). Il est remarquable que dans
ces théories, la Divinité se sert d'une quantité d'es-
prits sidéraux qui retiennent les planètes dans leurs
éternelles orbites , comme s'ils connaissaient la dis-
tribution des masses et les perturbations (2G). Les
astres sont , dans le monde matériel , l'image de la
Divinité. En dépit du titre qu'il porte , je n'ai pas
mentionné le traité de Mundo, faussement attribué à
Aristote et certainement émané de l'école stoïcienne.
L'auteur, dans des descriptions où Ton remarque sou-
vent une couleur et une animation un peu factices,
découvre à la fois aux regards le ciel et la terre , les
courants de la mer et de l'océan atmosphérique; mais
nulle part ne se manifeste la tendance à chercher
dans les propriétés de la matière des principes géné-
raux, auxquels puissent être ramenés tous les phéno-
mènes de l'univers.
Je me suis arrêté longtemps à l'époque de l'an-
tiquité, où se sont fait jour les aperçus les plus bril-
lants sur la nature , afm de pouvoir opposer ces pre-
miers essais de généralisation aux tentatives des temps
modernes. Dans ce mouvement des intelligences ap-
pliquées à élargir la contemplation du monde, le
xni* siècle et le commencement du xiv' se distinguent
entre tous les autres , ainsi qu'on l'a pu voir dans le
précédent volume du Cosmos (27). Cependant VOptis
-~ 17 —
7najus de Roger Bacon , le Miroir de la Nature de
Vincent de Beauvais , le Liber cosmograpliiciis d'Albert
le Grand et V Imago muncli du cardinal Pierre d'Ailly
sont des ouvrages dont le contenu ne répond pas au
titre, quelque influence qu'ils aient pu d'ailleurs
exercer sur les contemporains. Parmi les adversaires
de la physique péripatéticienne en Italie, Telesio, de
Gosenza, est signalé comme le fondateur d'un système
scientifique plus rationnel. Pour lui la matière est
passive et tous les phénomènes sont les efTets de
deux principes immatériels ou de deux forces, le
froid et le chaud. Toute la vie organique , les plantes
« animées » aussi bien que les animaux eux-mêmes
sont le produit de ces deux forces éternellement
opposées, dont l'une, la chaleur, appartient à la
sphère céleste, et dont l'autre, le froid, rentre dans
la sphère terrestre.
Emporté par une fantaisie plus désordonnée encore,
mais doué d'un esprit profond d'investigation, Gior-
dano Bruno, de Noia , a tenté d'embrasser l'ensemble
de l'univers, dans trois ouvrages différents (28) :
dans le traité de la Causa , Principio et Uno ; dans ses
Contemplationi circa lo Infinilo, Universo e Mondi in-
niimerabili , et dans \q de Minimo et Maximo. La phi-
losophie de la nature de Telesio , contemporain de
Copernic , laisse voir du moins l'effort tenté pour ra-
mener les transformations de la matière à deux de ses
forces fondamentales qui, à la vérité, sont supposées
agir du dehors, mais jouent néanmoins un rôle ana-
logue à celui de l'attraction et de la répulsion , dans
ni. 2
— 18 —
la théorie dynamique de Boscowich et de Kant. Les
vues de Giordano Bruno sur le Monde sont purement
métaphysiques : loin de chercher dans la matière
elle-même les causes des phénomènes sensibles , il
touche à l'idée d'un espace infini, rempli de mondes
qui brillent de leur lumière propre ; il parle des âmes
qui animent ces mondes et des relations de Tintelli-
gence suprême, de Dieu, avec l'univers. Bien que
moins versé dans les connaissances mathématiques,
Giordano Bruno fut, jusqu'au jour de son martyre,
admirateur enthousiaste de Copernic , de Tycho et
de Kepler (29). Contemporain de Galilée, il ne vit pas
l'invention du télescope par Hans Lippershey et Za-
charias Jansen , ni par conséquent la découverte « du
petit Monde de Jupiter, » des phases de Vénus et des
nébuleuses. Plein d'une généreuse confiance dans ce
qu'il nomme kime interno ^ ragione nalurale ^ altezza
deW inteUetlo, il se laissa aller à d'heureuses divina-
tions sur les mouvements des étoiles fixes, sur la na-
ture planétaire des comètes et sur la forme impar-
faitement sphérique du globe terrestre (30). L'anti-
quité grecque est pleine aussi de ces pressentiments
uranologiques, que le temps plus tard a réalisés.
En suivant la marche des idées auxquelles ont
donné naissance les relations des diverses parties de
l'univers , on trouve que Kepler fut celui qui ap-
procha le plus près d'une théorie mathématique de
la gravitation , et cela , soixante-dix-huit ans avant
l'apparition de l'immortel ouvrage de Newton, des
Principia philosopliiœ naturalis. Si un philosophe
— 19 —
éclectique, Simplicius, exprima d'une manière
générale cette pensée que l'équilibre des corps
célestes tenait à ce que la force centrifuge avait la
haute main sur la pesanteur, c'est-à-dire sur la
force qui attirait ces corps vers les régions infé-
rieures ; si Jean Philopon , élève d'Ammonius Her-
méas, attribua le mouvement de ces corps à une
impulsion primitive et à un effort constant pour
tomber; si enfin, comme nous l'avons remarqué déjà,
il ne faut voir dans ces mémorables paroles de Go*
pernic : « Gravitatem non aliud esse quam appetentiam
quamdam naturalem partibus inditam a divina pro-
videntia opificis universorum, ut in unitatem inte-
gritatemque suam sese conférant, in formam globi
coeuntes» que l'idée générale de la gravitation, telle
qu'elle s'exerce par le Soleil , centre du monde plané-
taire , sur la Terre et sur la Lune; ce n'est pourtant
que dans l'introduction au traité de Stella Martis de
Kepler que l'on trouve . pour la première fois , une
appréciation numérique de la gravitation réciproque
de la Terre et de la Lune , suivant le rapport de leurs
masses (31). Kepler cite le flux et le reflux comme
une preuve que la force attractive de la Lune [virtiis
tractoria) s'étend jusqu'à la Terre; il croit même
que cette force, semblable à l'action de l'aimant sut
le fer, enlèverait à la Terre toute l'eau qui la recou-
vre, si cette eau d'autre part n'était attirée par la
Terre (32). Malheureusement dix années plus tard,
en 1619, ce grand homme, peut-être par déférence
pour Galilée qui rapportait les marées à la rotation
— 20 —
de la Terre, abandonna l'explication véritable, pour
représenter la Terre , dans son Harmonice Miindi ,
comme un monstre qui, lorsqu'il s'endort ou s'éveille
à des moments réglés sur la marche du Soleil, produit
par sa respiration, semblable à celle d'une baleine, le
gonflement ou l'abaissement de l'Océan. D'après le
sens mathématique dont témoigne d'une manière
éclatante l'un des ouvrages de Kepler, ainsi que l'a
déjà reconnu Laplacc, on ne saurait trop regretter
que l'homme auquel est due la découverte des trois
grandes lois qui président à tous les mouvements pla-
nétaires, n'ait pas persévéré dans la voie à laquelle
l'avaient conduit ses vues sur l'attraction des corps
célestes (33).
Plus versé que Kepler dans l'étude des sciences
naturelles , et fondateur de plusieurs parties de la
physique mathématique , Descartes entreprit d'em-
brasser , dans un ouvrage qu'il appelait Traité du
Monde ou Summa Pliilosopliiœ , le monde entier des
phénomènes , la sphère céleste et tout ce qu'il savait
de la nature vivante ou de la nature inanimée. L'or-
ganisation des animaux, particulièrement celle de
l'homme , avec laquelle il s'était familiarisé pendant
onze ans par de sérieuses études anatomiques, devait
terminer l'ouvrage (34). Dans les lettres de Descartes
au Père Mersenne , on rencontre souvent des plaintes
sur la lenteur avec laquelle avançait le travail, et sur
la difliculté de rattacher entre eux tant de matériaux
divers. LeCosînos, que Descartes nommait toujours
son Monde, devait être défmitivement livré à l'im-
- 21 >~
pression vers la fin de Tannée 16o3, lorsque le bruit
de la condamnation de Galilée, répandu par Gassendi
et Bouillaud quatre mois seulement après qu'elle
eut été prononcée par l'inquisition romaine , fit tout
rompre et priva la postérité de ce vaste ouvrage ,
composé avec tant de soins et tant de peine. Descartes
renonça à publier son Cosmos^ de peur de compro-
mettre le repos dont il jouissait dans sa solitude de
Deventer, et aussi pour ne pas paraître manquer de
respect à l'autorité du Saint-Siège , en soutenant de
nouveau le mouvement planétaire du globe ter-
restre (35). Ce fut seulement en 1674, quatorze ans
par conséquent après la mort de Descartes, que
quelques parties de son Cosmos furent imprimées sous
ce singuliertitre : LeMondeou Traité de la lumière {"6^)',
cependant les trois chapitres où il est question de la
lumière forment à peine un quart de l'ouvrage. D'au-
tres fragments, qui contenaient des considérations sur
le mouvement des planètes et leurs distances relati-
vement au Soleil, sur le magnétisme terrestre, les ma-
rées, les tremblements de terre et les volcans, ont été
reportés dans la troisième et la quatrième partie du
célèbre ouvrage intitulé : Principes de la philosophie.
Malgré son titre significatif, le Cosmotheoros de
Huyghens, qui ne fut publié qu'après sa mort, mérite
à peine de trouver place dans cette énumération des
essais cosmologiques. Ce ne sont que les rêveries et
les vagues hypothèses d'un grand homme sur le règne
végétal et le règne animal des astres les plus éloignés,
particulièrement sur les altérations qu'a dû subir
— 22 —
la forme humaine dans ces corps célestes : on croit
lire le Somniiim astronomicum de Kepler ou le voyage
extatique de Kircher. Comme Huyghens , ainsi que
les astronomes de notre temps, refuse déjà à la Lune
l'air et l'eau , il en résulte que les habitants de la
Lune l'embarrassent plus encore que ceux des pla-
nètes plus éloignées, « qui sont entourées de nuages
et de vapeurs (37). »
A l'immortel auteur des PhilosophiœNaluralis Prùi-
çipia matliematica , il était réservé d'embrasser toute
la partie céleste du Cosmos, en expliquant la connexité
des phénomènes à l'aide d'un principe moteur qui
seul domine tout. Newton est le premier qui ait fait
servir l'astronomie à la solution d'un grand problème
de mécanique, et l'ait élevée à la hauteur d'une
science mathématique. La quantité de matière con-
tenue dans chaque corps céleste donne la mesure de
sa force attractive, force qui agit en raison inverse du
carré des. distances et détermine la grandeur des ac-
tions perturbatrices que non-seulement les planètes,
mais toutes les étoiles remplissant les espaces céles-
tes, exercent les unes sur les autres. La théorie de
la gravitation , si admirable par sa simplicité et sa gé-
néralité, n'est pas même bornée à la sphère uranolo-
giquejelle règne aussi sur les phénomènes terrestres,
et, dans ce domaine, a frayé des voies qui, en partie
du moins, n'avaient pas encore été explorées. Elle
donne la clef des mouvements périodiques qui s'ac-
complissent dans l'Océan etdausratmosphère(38),et
mène à la solution des problèmes de la capillarité ,
— 25 —
de l'endosmose et d'un grand nombre de phénomènes
chimiques, organiques ou électro-magnétiques. New-
ton alla jusqu'à distinguer l'attraction des masses,
telle qu'elle se manifeste dans les mouvements de tous
les corps célestes et dans le phénomène des marées ,
de l'attraction moléculaire qui s'exerce à des distan-
ces infiniment petites et au contact immédiat (39).
Ainsi, dans tous les essais tentés pour ramener
les phénomènes variables du monde sensible à un
principe unique et fondamental, la théorie de la gra-
vitation apparaît toujours comme le principe le plus
compréhensif et celui qui promet le plus pour l'ex-
plication du monde. Sans doute, malgré les brillants
progrès accomplis récemment dans la stœchiométrie,
c'est-à-dire dans le calcul appliqué aux éléments chi-
miques et aux volumes des gaz qui se combinent, on
n'a pu encore soumettre toutes les théories physiques
de la matière à des démonstrations mathématiques.
On a découvert des lois expérimentales, et grâce à
l'essor nouveau qu'a pris la philosophie atomistique
ou corpusculaire , un grand nombre de phénomènes
sont devenus susceptibles d'être calculés mathéma-
tiquement. Mais telle est l'hétérogénéité sans fin de
la matière, tels sont les divers états d'agrégation
suivant lesquels se combinent les atomes , que l'on
n'a pu trouver encore le moyen d'expliquer ces lois
empiriques par la théorie de l'attraction moléculaire,
avec le degré de certitude que donne, aux trois
grandes lois expérimentales de Kepler, la théorie de
la gravitation.
- 2i ^
Alors inêine qu'il avait déjà reconnu que tous les
mouvements des corps célestes sont les effets d'une
seule et même. force, Newton ne considérait pas en-
core la gravitation , ainsi que l'a fait Kant depuis ,
comme une propriété essentielle de la matière (40) ;
selon lui, elle était dérivée d'une autre force plus
haute qu'il ne connnaissait pas encore, ou produite
par « l'action de l'élher qui remplit l'espace, et qui ,
plus rare dans les intervalles des molécules , croît
en densité à l'extérieur. » Ce dernier aperçu est
développé en détail dans une lettre à Robert Boyle,
datée du 28 février 1678, et finissant par ces mots :
« Je cherche dans l'éther la cause de la gravita-
tion (41). ^ Huit ansplus tard, ainsi qu'il résulte d'une
lettre à Halley, Newton abandonna complètement
l'hypothèse d'un éther plus rare ou plus dense, suivant
la nature des espaces qu'il remplit (42). 11 est parti-
culièrement digne de remarque que neuf ans avant sa
mort, en 1717, dans la courte introduction placée en
tête de la seconde édition de son Optique, il crut né-
cessaire de déclarer en termes précis qu'il ne consi-
dérait nullement la gravitation comme une propriété
essentielle des corps, essential property of bodies ([i2>) ;
tandis que, dès l'année 1600, Gilbert proclamait le
magnétisme une force inhérente à toute matière.
Telles étaient les hésitations de Newton lui-même, le
plus profond des penseurs, mais en même temps l'ob-
servateur le plus docile aux leçons de l'expérience, sur
«la dernière cause mécanique de tout mouvement, a
C'est assurément un problème brillant et digne
— 25 -^-
d'occuper l'esprit humain que de fonder une science
générale de la nature, dont tous les éléments, depuis
les lois de la pesanteur jusqu'à la force créatrice qui
préside aux phénomènes de la vie, formeraient un en-
semble organique. Mais l'état d'imperfection où sont
retenues encore tant de branches des sciences natu-
relles, oppose à ce projet des difficultés invincibles.
L'impossibilité de compléter jamais l'expérience, et de
limiter la sphère de l'observation , font du problème
qui consiste à expliquer tous les changements de la
matière par les lois de la matière elle-même, un pro-
blème indéterminé. La perception est loin de pouvoir
épuiser le champ des phénomènes perceptibles. Si ,
pour nous borner aux progrès accomplis de nos jours,
nous comparons les connaissances incomplètes de Gil-
bert , de Robert Boyle et d'Haies avec celles que nous
possédons actuellement; si nous songeons en même
temps à la rapidité avec laquelle l'impulsion aug-
mente tous les dix ans , peut-être pourrons-nous em-
brasser les changements périodiques et indéfinis qui
sont aujourd'hui encore à l'horizon des sciences na-
turelles. De nouvelles substances et de nouvelles forces
ont été découvertes. Si un grand nombre de phéno-
mènes , tels que ceux de la lumière, de la chaleur et de
l'électro-magnétisme , ont été ramenés à la loi des on-
dulations , et se prêtent aujourd'hui à la rigueur des
formules mathématiques, il en est d'autres qui sont
peut-être insolubles. De ce nombre sont la diversité
chimique des substances , la loi suivant laquelle va-
rient, d'une planète à l'autre, le volume, la densité,
— 26 —
la position des grands axes, l'excenlricité de leurs
orbites , le nombre et les distances de leurs satel-
llites, la forme des continents et la situation des
plus hautes chaînes de montagnes. Ces relations,
que souvent déjà nous avons signalées, ne peu-
vent être considérées jusqu'ici que comme des faits ;
leur existence seule nous est connue. Ce n'est pas
une raison pourtant , parce que les causes et la
liaison de ces phénomènes sont encore ignorées,
pour qu'on puisse n'y voir que des accidents fortuits.
Ils sont le résultat d'événements accomplis dans les
espaces célestes , lors de la formation de notre sys-
tème planétaire, de phénomènes géologiques qui
ont précédé ou accompagné le soulèvement des
couches terrestres , dont sont formés les continents
et les chaînes de montagnes. Nos connaissances ne
remontent pas assez haut dans les premiers âges de
l'histoire du Monde, pour que nous puissions ratta-
cher complètement l'état actuel des choses au passé
et à l'avenir (44).
Bien que le lien de causalité qui unit tous les
phénomènes ne soit pas encore suffisamment connu,
l'étude du Cosmos ne saurait être considérée comme
une branche à part dans le domaine des sciences na-
turelles. Elle embrasse plutôt ce domaine en entier,
les phénomènes du ciel aussi bien que ceux de la
terre, mais elle les embrasse d'un certain point de
vue, qui est celui d'où l'on peut le mieux recomposer
l'ensemble du Monde (45). De même que pour
retracer les faits accomplis dans la sphère morale
— 27 —
et politique , rhistorien , placé au point de vue de
rhumanilé, ne peut discerner directement le plan sur
lequel est réglé le gouvernement du monde, mais est
réduit à soupçonner les idées par lesquelles ce plan
se manifeste, de même Tobservaleur de la nature,
en considérant les rapports qui unissent les diverses
parties de l'univers , se laisse aller à la conviction
que le nombre des forces auxquelles les objets doi-
vent le mouvement, la forme ou l'existence, est loin
d'être épuisé par celles qu'ont révélées la contempla-
tion immédiate et l'analyse des phénomènes (46).
28
PARTIE URANOLOGIQUE
DE LA
DESCRIPTION PfllSIQUE DU MONDE.
RÉSUI^TATS BE li'OBSEIiVATïOlV.
Nous prenons de nouveau noire point de départ
dans les profondeurs de l'espace, où des amas spora-
diques d'étoiles se présentent à l'œil armé du téles-
cope comme de pâles nébulosités. De là , nous descen-
drons successivement aux étoiles doubles , souvent
teintes de deux couleurs et tournant autour de leur
centre de gravité commun , puis aux strates steîlaires
dont notre monde de planètes paraît être entouré;
nous décrirons ensuite ce système planétaire, et,
par là, nous arriverons à la planète même qui nous
sert de demeure , au sphéroïde terrestre enveloppé
de l'océan liquide et de l'océan gazeux.
Dès le début du Tableau général de la Nature {Ixl),
j'ai montré que cet ordre d'idées est le seul qui puisse
convenir au caractère propre d'un ouvrage qui a
pour sujet le Cosmos, 11 ne s'agit point ici , en effet ,
— 29 —
de s'astreindre aux conditions logiques de l'analyse :
l'analyse commencerait par l'étude des phénomènes
organiques au milieu desquels nous vivons ; elle s'é-
lèverait progressivement aux mouvements réels des
corps célestes, en passant par l'étude préalable des
mouvements apparents. C'est le contraire que nous
faisons.
Le règne uranologique ^ opposé au règne îellurtgue,
se partage en deux branches : l'une est l'astrognosie
ou astronomie sidérale; l'autre comprend le système
solaire ou planétaire. Il est inutile de s'arrêter à si-
gnaler ici , une fois de plus , combien cette nomen-
clature ou ces subdivisions sont incomplètes et peu
satisfaisantes. On a introduit des noms, dans les
sciences naturelles, longtemps avant d'avoir suffi-
samment apprécié le vrai caractère de leurs divers
objets, et d'avoir délimité ces objets d'une manière
rigoureuse (48). Mais là n'est pas le point capital : il
est dans l'enchaînement des idées et dans l'ordre sui-
vant lequel doivent être traités les différents sujets.
Les changements dans les dénominations générales,
les sens nouveaux donnés à des mots d'un usage fré-
quent ont l'inconvénient de dépayser et peuvent
même induire en erreur.
Rien n'est immobile dans l'univers; les étoiles
fixes elles-mêmes se meuvent : Halley, le premier,
l'a prouvé pour Sirius , Arcturus, Aldébaran : et, de
— 30 —
nos jours, les preuves les moins contestables ont
surgi de toutes parts (49). Depuis vingt et un siècles,
c'est-à-dire depuis les observations d'Aristille et
d'Hipparque, la brillante étoile du Bouvier, Arctu-
rus, a sensiblement marché dans le ciel par rapport
aux étoiles voisines : le déplacement est égal à une
fois et demie le diamètre apparent de la Lune. Si
l'antiquité nous eût légué des observations analo-
gues pour f/ de Cassiopée et la Ci" du Cygne , on
pourrait aujourd'hui , d'après Encke , constater que
ces étoiles ont parcouru , sur la voûte céleste et dans
le même laps de temps , la première , un arc égal à
trois fois et demie, la seconde, un arc égal à six fois
le diamètre du disque lunaire. On est donc fondé à
croire, en se laissant guider par l'analogie, que par-
tout s'opèrent des mouvements de translation et
même de révolution.
Le nom (ï étoiles fixes conduit , comme on le voit ,
à des appréciations erronées , soit qu'on lui restitue
le sens qu'il avait primitivement chez les Grecs , celui
d'astres cloués à un ciel de cristal, soit qu'on lui laisse
le sens actuel , d'origine plus spécialement romaine,
celui d'astres en repos ou conservant du moins leur
immobilité relative. La première de ces deux idées
devait d'ailleurs conduire à la seconde. Toute l'anti-
quité grecque a classé les astres en astres errants
et en astres immobiles (â'arpa TiX^vw^aeva ou 7r}.av/;T5« , et
à-mlxytïz aaripeç OU aTrXavvî ê^.arpa). Cette notion remonte
jusqu'à Anaximène, philosophe de l'école ionienne,
ou au pythagoricien Alcméon (50). Outre cette dé-
— M —
nomination généralement employée pour les étoiles
fixes, que Macrobe a traduite en latin , dans le Soîn-
nium Scipionis , par le terme de spliœrci aplanes (51) ,
on rencontre souvent dans Aristote (52) , qui semble
avoir eu à cœur d'introduire un nouveau terme
technique, le nom à'aslres fixés (kvozèeu.éva aaroa).
De là sont sorties successivement, les expressions
deCicéron, sidéra infixa cœlo ; celles de Pline, stellas
quas putamus affixas , et même , chez Manilius , le
terme définitif astra fixa , équivalent fidèle de ce
que nous entendons par les fixes (53). Cette idée d'as*-
très attacliés conduisit à l'idée corrélative d'immobi-
lité, de repos dans une même position déterminée;
c'est ainsi que toutes les traductions latines du
moyen âge altérèrent peu à peu la sigRification ori-
ginelle du mot infixum ou affixum sidus, de manière
à laisser subsister seulement l'idée d'immobilité.
Cette tendance se dessine déjà dans le passage sui-
vant, où Sénèque [Nal. Quœst., 1. VII , c. 2/i) traite,
non sans quelque afleclation de langage, de la possi-
bi]ité de découvrir une nouvelle planète : Credis
autem in hoc maximo et pulcherrimo corpore, inter
innumerabiles stellas quee noctem vario décore dis*
tinguunt , quee aéra minime vacuum et inertem esse
paliuntur, quinque solas esse, quibus exercere se 11-
ceat : ceteras stare, fixum et immobilem populum?
Ce peuple-là , calme et immobile , ne se rencontre
nulle part.
Afin de distribuer commodément par groupes les
principaux résultats de l'observation , et les conclu-
— 32' —
sions ou les conjectures auxquelles ils conduisent, je
distinguerai successivement dans la sphère sidérale
les points suivants :
I. Considérations sur les espaces célestes et sur la
matière dont ils paraissent être remplis.
II. Vision naturelle et télescopique ; scintillation
des étoiles ; vitesse de la lumière ; recherches photo-
métriques sur l'intensité de la lumière émise par les
étoiles.
III. Nombre, distribution et couleurs des étoiles ;
amas stellaires ; Voie lactée dans laquelle on ren-
contre très-peu de nébuleuses.
IV. Étoiles nouvelles; étoiles qui ont disparu;
étoiles dont l'éclat varie d'une manière périodique.
V. Mouvements propres des étoiles ; existence
problématique d'astres obscurs ; parallaxe et mesure
de la distance de quelques étoiles.
VI. Etoiles doubles et temps de leur révolution
autour de leur centre de gravité commun.
VII. Nébuleuses mélangées parfois, comme dans
les nuées de Magellan, d'un grand nombre d'amas
stellaires; taches noires {sacs de charbon) qu'on voit
dans quelques régions de la voûte céleste.
— sa --
ESPACES CÉLESTES.
CONJECTURES SUR LA MATIÈRE QUI PARAIT REMPMR
CES ESPACES.
Lorsqu'on commence la description physique de
l'univers par cette matière , inaccessible à nos sens,
qui paraît combler les espaces célestes compris entre
les astres les plus éloignés , on est tenté d'assimiler
ce début aux origines mythiques de l'histoire du
monde. Dans la suite indéfinie des temps, comme
dans les espaces sans fin, tout nous apparaît sous un
jour douteux , semblable à un crépuscule trompeur :
l'imagination est alors puissamment provoquée à tirer
d'elle-même des contours , pour préciser des formes
indéterminées et changeantes (51). Un tel aveu suffira
sans doute à nous garantir du reproche de mêler ici
les résultats d'inductions incomplètes avec des théo-
ries que l'observation et les mesures directes ont éle-
vées à une véritable certitude mathématique. Certes,
11 faut reléguer les rêveries dans ce qu'on pourrait
appeler le roman de l'astronomie physique; mais il
faut aussi distinguer entre ces rêveries et les ques-
tions intimement unies à l'état actuel et aux espé-
rances de la science. Ces questions ont été jugées
m. i
— 3/1 -~
dignes cl*un sérieux examen par les astronomes les
plus éminenls de notre époque ; et les esprits exercés
aux travaux de Tintelligence aimeront toujours à s'y
arrêter.
La gravitation ou la pesanteur universelle , la lu-
mière et les radiations calorifiques (55) nous mettent
en rapport , selon toute vraisemblance , non-seule-
ment avec notre Soleil , mais encore avec les autres
soleils étrangers qui briiienl au firmament. D'autre
part, l'accord du calcul avecTobservalion a confirmé
une découverte capitale , celle de la résistance sensi-
ble qu'un fluide, dont l'univers serait rempli, oppose
à la marche de la comète périodique de trois ans
trois quarts. En parlant ainsi de quelques points re-
connus, en se fondant pour le reste sur l'anaîogie
raisonnée, on peut espérer de rapprocher de la
certitude mathématique les simples conjectures qui
toujours vont s'égarer vers les limites extrêmes et
nuageuses de tout domaine scientidque.
Puisque l'espace est indéfini, quoi qu'en ait pu
dire Aristote (56), il ne saurait être question d'en me-
surer que des parties isolées ; or les résultats de ces
mesures ont confondu toute noire puissance de com-
préhension. Beaucoup d'esprits éprouvent une joie
enfantine à méditer ces grands nombres ; ils croient
même que ces images de la grandeur physique, en
excitant l'étonnement et presque la stupéfaction ,
peuvent augmenter l'impression produite sur nos
âmes par la puissance et la dignité des études astro-
nomiques. Du Soleil à la 61^ du Cygne, la distance
— S5 —
est de 657000 rayons de l'orbite terrestre; la lu-
mière qui arrive du Soleil à la Terre en 8™ 17%78,
emploie plus de dix ans a parcourir cet espace.
D'après une discussion ingénieuse de certaines éva-
luations photométriques (57), Sir John Ilerschel a
pensé que des étoiles de la Voie lactée , visibles seu-
lement dans son télescope de 6 mèlres, sont si-
tuées à une distance telle que ^ si ces étoiles étaient
des rstres nouvellement formés, il aurait fallu 2000
ans pour que leur premier rayon de lumière arrivât
jusqu'à nous. Acquérir l'inluilion cotnplète de pa-
reils rapports numériquesestchoseiuipossible; toutes
les tentatives échouent, soit par la grandeur de l'u-
nité à laquelle sont rapportées ces distances, soit par
celle du nombre même qui exprime la répétition de
ces unités. Bessel disait avec raison (58) : « L'espace
parcouru par la lumière pendant une seule année
dépasse aussi bien la portée de nos facultés d'intuition
que l'espace parcouru pendant dix ans. » On s'effor-
cerait vainement de rendre sensible toute grandeur
notablement supérieure à celles avec lesquelles nous
avons l'occasion de nous familiariser sur latte, La
puissance des nombres humilie d'ailleurs notre com-
préhension dans les plus petits organismes de la vie
animale, comme dans la Voie lactée, formée de ces so-
leils que nous nommons étoiles fixes. Voyez, en effet,
quelle énorme quantité de Polythalames peut renfer-
mer, d'après Ehrenberg, une mince couche de craie!
Dans un seul pouce cube d'un îrlpoli c{ui forme, à
Bilin y une couche de 13 mètres de puissance , on a
-- 36 —
compté jusqu'à /liOOO millions de Gaillionelles [Ga^
lionella distans) ; le même volume de tripoli renferme
plus de 1 billion 750000 millions d'individus de l'es-
pèce appelée Galioîiella feiriiginea (59) . Ces nombres
reportent l'esprit au problème de l'arénaire d'Archi-
mède {'\)y.^.ijlxt,c,), au nombre de grains de sable qu'il
faudrait pour combler l'univers! L'impression pro-
duite par ces nombres, symbole de l'immensité dans
l'espace ou dans le temps, rappelle à l'homme sa
petitesse , sa faiblesse physique , son existence éphé-
mère ; mais bientôt l'homme se relève confiant et
rassuré par la conscience de ce qu'il a fait déjà pour
dévoiler l'harmonie du monde et les lois générales
de la nature.
Si la propagation successive de la lumière, si le
mode particulier d'affaiblissement auquel son inten-
sité paraît soumise, si le milieu résistant, dont la
présence nous est révélée par les révolutions de plus
en plus rapides de la comète d'Encke et par la disper-
sion des queues gigantesques de nombreuses comè-
tes, nous indiquent assez que les espaces célestes ne
sont pas vides (60) , mais qu'ils sont remplis d'une ma-
tière quelconque, il est prudent toutefois, avant d'em-
ployer les dénominations , nécessairement un peu
vagues, dont on se sert pour désigner cette matière,
de préciser le sens de certains mots et d'en chercher
l'origine. Parmi les termes de matière cosmique [non
pas la matière brillante des nébuleuses), de milieu
sidéral ou planétaire , d^éther universel , employés au-
jourd'hui , le dernier, qui remonte aux temps les plus
— 57 ~
reculés et vient des contrées méridionales et occiden-
tales de l'Asie, a souvent, dans le cours des siècles,
changé de signification. Chez les philosophes hin-
dous, réther [âkcVsa) faisait partie du règne des cinq
{pantscliatâ) ; c'était un des cinq éléments , un fluide
doué d'une ténuité incomparable , pénétrant le
monde entier, source de la vie universelle et véhi-
cule du son (61). Selon Bopp , « l'acception étymolo-
gique de âkâ'sa est lumineux^ brillant; ce mot est
donc en rapport aussi intime avec l'éther des Grecs
que lumière l'est avec feu, »
L'éther de l'école ionique, d'Anaxagore et d'Em-
pédocle (:/£9xp) , différait complètement de l'air pro-
prement dit [àr.o), substance plus grossière, chargée
de lourdes vapeurs, qui entoure la Terre et s'étend
peut-être jusqu'à la Lune. Il était» de nature ignée,
un pur air de feu, rayonnant de lumière (62), doué
d'une ténuité extrême et d'une éternelle activité. »
Cette définition répond à l'étymologie véritable {yl-
Ô£iv, brûler) qu'Aristote et Platon altérèrent plus tard
d'une manière assez étrange, quand ils voulurent,
par goût pour les conceptions mécaniques et en jouant
sur les mots («d Say), y retrouver le sens de rotation
perpétuelle, de mouvement circulaire (63). Les an-
ciens, dans leur conception de l'éther, n'avaient point
été inspirés par une analogie quelconque avec l'air
des montagnes, plus pur et plus dégagé de vapeurs
que l'air des régions inférieures ; ils n'avaient pas
songé davantage à la raréfaction progressive des
couches atmosphériques; et comme, d'ailleurs,
— 38 —
leurs éléments expriniciient les divers états physi-
ques de la matière, sans avoir aucun rapport avec
la nature chimique des corps (corps indécompo-
sables), il faut chercher l'origine de leurs idées sur
l'élher dans l'opposition normale et primitive du
pesant avec le léger, du bas avec le haut, de la tetre
avec le feu. Entre ces deux termes extrêmes, se
trouvaient deux autres états élémentaires : l'eau,
plus voisine de la terre pesante; l'air, plus semblable
au feu léger (64).
C'est seulement par son extrême ténuité que Féther
d'Empédocle , considéré comme un milieu remplis-
sant matériellement l'univers, a de l'analogie avec
l'élher dont les vibrations transversales expliquent
avec tant de bonheur, dans les conceptions purement
nialhématiquesde la physique moderne , la propaga-
tion et les propriétés de la lu mière, telles que la double
réfraction, la polarisation, les interférences. Mais
à cette simple notion , la philosophie d'Aristoto
ajoutait que la matière éthérée pénétrait tous les or-
ganismes vivants de la terre, les plantes comme les
animaux; en elle réoidait le principe de la chaleur
vitale et même le germe d'une essence spirituelle
qui, distincte du corps, douait les hommes de spon-
tanéité (65). Ces conceptions faisaient descendre l'é-
ther, des régions du ciel, sur celles de la terre; elles
le montraient comme une substance extrêmement
subtile, pénétrant sans cesse l'atmosphère et les corps
solides, tout à fait analogue, en un mot, à l'éther
d'Huyghens, deHookeetdes physiciens modernes, à
— 39 —
réther qui propage la lumière par ses ondulations.
Mais ce qui établit immédiatement une différence
entre les deux hypothèses , de Téther ionique et de
réther moderne , c'est que les philosophes grecs ,
excepté Aristote qui ne partageait pas tout à fait
ce sentiment, attribuaient à Téther la faculté de
briller par lui-même. L'éther igné d'Empédocle est
expressément nommé lumineux {-na.u/^avôoyj); c'était
lui que, dans certains phénomènes, les habitants
de la terre voyaient briller comme le feu à travers
les fentes ou fissures (yj.ay.cf.Ty.) du firmament (66).
A une époque, où Ton poursuit dans toutes les di-
rections les rapports de la lumière avec la chaleur,
rélectricité et le magnétisme, il y a une tendance na-
turelle à expliquer les phénomènes thermiques et élec-
tromagnétiques par des vibrations analogues à ces
ondes transversales de réther universel auxquelles on
rattache déjà tous les phénomènes de la lumière. Sous
ce rapport, de grandes découvertes sont réservées à
l'avenir. La lumière et la chaleur rayonnante qui erî
est inséparable, constituent, pour les corps célestes
qui ne brillent point par eux-mêmes, la source princi-
pale de toute vie organique (67). Et même, loin de la
surface, partout où la chaleur pénètre dans Tinté-
rieur de Fécorce terrestre, elle engendre des cou-
rants éfeclro-magnétiques , lesquels, à leur tour,
provoquent des actions chimiques de décomposition
et de recomposition, dirigent les lentes formations
du règne minéral, réagissent sur les perturbations de
l'atmosphère, et exercent leur influence jusque sur
- 40 --
les fonctions vitales de tous les êtres or^^anisés. Si
rélectricité en mouvement donne naissance aux
forces maj^métiques ; s'il faut croire , avec Sir Wil-
liam Herschel (68) , que le Soleil lui-même est « à
l'état d'aurore boréale perpétuelle, » je dirai pres-
que , à mon tour, à l'état de perpétuel orage électro-
magnétique, serait-il donc hasardé de penser aussi
que la lumière , en se propageant dans l'espace par
les ondulations de Téther, doive être accompagnée de
phénomènes électro-magnétiques?
A la vérité , rien , dans les changements périodi-
ques de l'inclinaison , de la déclinaison et de l'in-
tensité, n'a révélé jusqu'ici à l'observateur que le
magnétisme terrestre soit placé sous l'influence des
positions diverses du Soleil ou de la Lune. La pola-
rité magnétique de la Terre n'ofl're aucune ano-
malie relative à une telle cause, et capable, par
exemple, d'affecter d'une manière sensible la pré-
cession des équinoxes (69). On ne peut citer qu'un
seul phénomène de cet ordre : c'est le mouvement
d'oscillation ou de rotation si remarquable que
le cône lumineux , émergeant de la comète de Halley,
a présenté en 1835. Du moins Bessel, après avoir
observé ces apparences du 12 au 22 octobre,
« resta-t-il convaincu de l'existence d'une force po-
laire, absolument différente de toute gravitation ; car
la matière qui formait la queue de la comète éprou-
vait, de la part du Soleil, une action répulsive (70). »
La magnifique comète de 17/i4, décrite parHeinsius,
avait déjà suggéré à Bessel des conjectures analogues.
— 41 —
Les eflets de la chaleur rayonnante , dans les es-
paces célestes, paraîtront moins problématiques que
l'influence attribuée ici à Félectro-magnétisme. La
température de ces espaces est, d'après Fourier et
Poisson , le résultat des radiations du Soleil et de
tous les astres , radiations diminuées par l'absorption
qu'éprouve la chaleur en traversant l'espace « rempli
d'éther (71). »La chaleur d'origine stellaire a déjà été
indiquée sous plusieurs formes par les anciens Grecs et
Romains (72) ; non qu'ils y aient été conduits exclu-
sivement par l'opinion dominante , en vertu de la-
quelle les astres occupaient la région ignée de l'éther ;
mais parce qu'ils attribuaient aux astres eux-mêmes
une nature ignée (73). Déjà Aristarque de Samos avait
enseigné que les étoiles et le Soleil étaient d'une seule
et même nature.
L'intérêt que les travaux des deux grands géo-
mètres français, dont je viens de citer les noms,
avaient appelé sur la question de déterminer ap-
proximativement la température des espaces célestes,
est devenu beaucoup plus vif , dans ces derniers
temps, lorsqu'on a compris toute l'importance du
rôle que le rayonnement de la surface terrestre
vers le ciel joue dans l'ensemble des phénomènes
thermiques, et même, on peut le dire, dans les
conditions d'habitabilité de notre planète. D'après
la Théorie analytique de la chaleur de Fourier, la tem-
pérature des espaces planétaires ou célestes, doit
être un peu inférieure à la température moyenne des
pôles. Peut-être est-elle au-dessous du plus grand froid
— /i2 -^
qu'on ait jamais observé dans les contrées polaires ;
en conséquence Fonrier Tévalne a — 50** ou — 60°.
Le pâ/e glacial, c'esl-à-dire le point où se pro-
duisent les plus basses tonipéralures , ne coïncide
pas plus avec le pôle de rotation q'ie tèqnalenr ther-
mal ^ ligne formée par les points les plus chauds de
tous les méridiens, ne se confond avec Téquateur
géographique. La température du pôle nord, par
exemple, conclue par extrapolation delà marche
des températures moyennes dans les localités voi-
sines, est de— 25* d'après Arago, tandis que le
capitaine Back a mesuré, en janvier 18^^4, un \w\x\\^
mum de température de — 56 ,6 , au fort Reliance,
par 62" 46' seulement de latitude (74). La plus basse
température qui ait jamais élé mesurée sur la Terre
entière est certainement celle que NeverofFa obser-
vée le 21 janvier 1838 , à Jakoutsk, par 62" 2' de la-
titude. Ses instruments avaient été comparés à ceux
de Middendorf dont tous les travaux sont si exacts.
Neveroff trouva — 60 \
Une des nombreuses causer de l'incertitude qui
affecte l'évaluation numérique de la température
de Tespace, vient de ce qu'il n'a pas été possible
d'y faire concourir les données relatives aux pôles
de froid des deux hémisphères; et cela parce que
la mé:éorologie du pôle austral est encore trop peu
connue pour nous permettre d'en déduire la tempéra-
ture moyenne de l'année vers ce pôle. Quant à l'opi-
nion émise par Poisson, d'après laquelle les diverses
régions de l'espace auraient des températures très-
- 43 -
différentes, en sorte que le i^lobe terrestre, emporté
par le mouvement de translation générale du sys-
tème solaire, parcourrait successivement des régions
chaudes et des régions froides, et aurait ainsi reçu
de Textérieur sa chaleur interne (75) , une telle con-
ception ne peut avoir pour moi qu'un très-faible
degré de vraisemblance.
La question de savoir si la température de l'espace,
ou même le climat de certaines régions célestes, peut
subir, dans le cours des siècles, des variations consi-
dérables, dépend principalement de la solution de
cet autre problème posé par Sir William Ilerschel :
les nébuleuses sont-elles soumises à des transforma-
tions progressives? la matière cosmique dont elles
sont formées se condense-t-elle autour d'un ou de
plusieurs noyaux, en obéissant aux lois de l'attraction ?
Une telle condensation de la matière nébuleuse de-
vrait, en effet, donner lieu à une production de
chaleur, aussi bien que le passage des corps de l'état
fluide ou liquide à l'état solide (76). Mais s'il est éta-
bli, comme on le pense aujourd'hui et comme les
importantes observations de Lord Rosse et de Bond
paraissent le prouver, que toutes les nébuleuses, y
compris celles dont la puissance des plus grands té-
lescopes n'a pu encore opérer la résolution , sont des
amas d'étoiles excessivement serrées, cette croyance
à une production de chaleur perpétuellement crois-
sante doit être quelque peu ébranlée. Ne perdons
point de vue toutefois d'autres considérations moins
défavorables à cette thèse. De petits astres solides.
— 44 —
dont ragglomération produit, dans nos lunettes,
l'effet d'une lueur continue , pourraient encore
éprouver des variations de densité , à mesure qu'ils
se relieraient à des masses plus grandes. En outre,
des faits nombreux , constatés dans notre propre sys-
tème solaire , conduisent à expliquer la formation
des planètes et leur chaleur interne par le passage
de Fétat gazeux à l'état solide , et par la conden-
sation progressive de la matière agglomérée en sphé-
roïdes.
Il doit paraître singulier, de prime abord, d'en-
tendre parler de l'influence relativement bienfaisante
que cette effroyable température de l'espace , infé-
rieure au point de congélation du mercure , exerce
d'une manière indirecte, il est vrai, sur les climats
habitables de la Terre et sur la vie des animaux
ou des plantes. Pour sentir la justesse de cette ex-
pression , il suffit cependant de réfléchir aux effets
du rayonnement. La surface de la Terre, échauffée
par le Soleil, et même l'atmosphère, jusqu'à ses
couches supérieures, rayonnent librement vers le
ciel. La déperdition de chaleur qui en résulte dépend,
presque uniquement, de la différence de température
entre les espaces célestes et les dernières couches
d'air. Quelle énorme perte de chaleur n'aiirions-nous
donc pas à subir, par cette voie, si la température
de l'espace, au lieu d'être de — 60% se trouvait réduite
à — 800°, par exemple, ou à mille fois moins en-
core (77)!
Il nous reste à développer deux considérations
— 45 ^
relatives à rexistence d'un fluide qui remplirait Tu-
nivers. La première et la moins fondée repose sur la
transparence imparfaite de l'espace. L'autre , qui est
indiquée par les révolutions régulièrement accour-
oies de la comète d'Encke, s'appuie sur des observa-
tions immédiates, et supporte le contrôle des nom-
bres. A Brème, Olbers , et comme Struve l'a fait
remarquer, quatre-vingts ans auparavant Louis de
Chéseaux , à Genève (78) , ont posé ce dilemme. Puis-
qu'on ne saurait imaginer, à cause de l'espace infini,
un seul point de la voûte céleste qui ne doive nous
présenter une étoile, c'est-à-dire un soleil, il faut
admettre cette alternative : ou la voûte entière du
ciel devrait nous paraître aussi éclatante que le So-
leil, si la lumière parvient jusqu'à nous sans être
affaiblie; ou bien, puisque le ciel est loin de présen-
ter cet éclat, il faut attribuer à l'espace le pouvoir
d'affaiblir la lumière en raison plus grande que
le carré de l'éloignement. Or , comme la première
alternative n'est point réalisée, comme nous ne
voyons pas le ciel briller de cet éclat uniforme dont
Halley argue aussi en faveur d'une autre hypo-
thèse (79), il faut bien admettre dès lors , avec Ché-
seaux, Olbers et Struve, que l'espace n'est pas doué
d'une transparence absolue. Les jauges stellaires de
Sir William Herschel (80), et d'autres recherches ingé-
nieuses du même observateur sur la force de pénétra-
tion de ses grands télescopes , paraissent démontrer
que si, dans son trajet, la lumière deSirius était affai-
blie de 1/800 seulement, par l'interposition d'un mi-
- 46 ~-
lieu quelconque, cette simple hypothèse d*un fluide
ou d'un éther, capable d'absorber à un si faible degré
les rayons lumineux, suffirait à expliquer toutes les
apparences actuelles. Parmi les doutes que le célèbre
auteur des Outlines of Astronomy a opposés aux idées
d'Olbers et de Slruve, un des plus importants repose
sur ce que son télescope de 6 mètres lui laisse voir,
dans la plus grande partie de la Voie lactée, les plus
petites étoiles projetées sur un fond noir (8!).
J'ai dit déjà que la marche de la comète d'Enrke
et les résultats auxquels cette éîude a conduit mon
savant ami, pouvaient prouver, d'une manière plus
directe et plus certaine, l'existence d'un fluide ré-
sistant (82). Mais il faut se représenter ce milieu
comme étant d'une autre nature que l'éther dont
toute matière est pénétrée. Ce milieu, en effet, ne
résiste que parce qu'il ne saurait tout pénétrer. Pour
expliquer la diminution du temps périodique et
du grand axe de l'ellipse décrite par cette comète, il
faudrait une action , une force tangentîelle; or l'hypo-
thèse d'un fluide résistant est précisément celle où
cette force se présente de la manière la plus natu-
relle (8»^). L'effet le plus sensible se fait sentir vingt-
cinq jours avant et vingt-cinq jours après le passage
de cette comète à son périhélie. Il y a donc quelque
chose de variable dans cette résistance , et cette
variabilité s'explique encore , puisque les couches
extrên;ement rares du milieu résistant doivent gravi-
ter vers le Soleil, et devenir de plus en plus denses
dans le voisinage de cet astre. Olbers allait plus
— 47 —
loin (Sk) : il pensait que le fluide ne pouvait rester
en repos; qu'il devait tourner autour du Soleil , d'un
mouvement direct, et que la résistance opposée par
ce fluide aux mouvements de la comète directe
d'Encke devait être toute dilTérente de l'edet produit
sur ceux d'une comète rétrograde, comme celle de
Halley. Mais quand il s'agit de comètes à longues pé-
riodes , le calcul des perturbations complique les
résultats; d'ailleurs les diirérences de masse et de
grandeur des comètes empêchent de distinguer la
part qui revient à chaque influence.
Peut-être la matière nébuleuse qui forme l'anneau
delalumiére zodiacale n'est-elle, suivant l'expression
de Sir John Ilerschel, que la partie la plus dense de
ce milieu dont la résistance se fait sentir sur la
marche des couièles (85). Quand même il serait
prouvé que les nébuleuses se réduisent toutes à de «
simples amas d'étoiles imparfaitement visibles, il
n'en resterait pas moins établi, en fait, qu'un nombre
immense de comètes abandonnent continuellement
delà matière aux espaces célestes, par la dissipation
de leurs énormes queues dont la longueur a pu
atteindre et dépasser dix millions de myria mètres. En
se fondant sur d'ingénieuses considérations optiques,
Arago a montré (86) comment les étoiles variables
qui nous envoient delà lumière blanche, sans jamais
montrer de colora tion sensible dans leurs diverses
phases, pourraient fournir un moyen de déterminer
la limite supérieure de la densité probable de l'éther,
en admettant , toutefois , que cet éther possédât un
— 48 —
pouvoir réfringent, assimilable à ceux des gaz ter-
restres.
Cette théorie d'un milieu étliéré, remplissant Tu-
nivers , est intimement liée avec une autre question
soulevée par Wollaston , sur la limite de Fatmo-
sphère (87) , limite dont la hauteur ne doit , en
aucun cas, dépasser le point où l'élasticité spéci-
fique de l'air fait équilibre à la pesanteur. Faraday a
fait d'ingénieuses recherches sur la limite de l'at-
mosphère du mercure, déterminée par la hauteur à
laquelle les vapeurs mercurielles cessent d'atteindre
une feuille d'or et de s'y précipiter. Ces travaux ont
ajouté quelque poids à l'hypothèse d'après laquelle
la limite extrême de l'atmosphère serait nettement
tracée , et « semblable à la surface de la mer. »
Quelle que soit cette limite extrême , des substances
analogues aux gaz et d'origine cosmique peuvent-elles
pénétrer dans l'atmosphère, s'y mêler et réagir sur
les phénomènes météorologiques? Newton a touché
cette question et penchait pour l'affirmative (88).
S'il est permis de considérer les étoiles filantes et
les pierres météoriques comme de véritables asté-
roïdes planétaires, on peut bien admettre aussi que
pendant les apparitions de novembre (89), en 1799,
1833 et 1834, lorsque des myriades d'étoiles filantes,
accompagnées d'aurores boréales , sillonnaient le fir-
mament, l'atmosphère a dû recevoir des espaces cé-
lestes quelque chose d'étranger qui pût exciter en
elle le développement de phénomènes électro-magné-
tiques.
i9
11
VISION NATURELLE ET TÉLESCOPIQUE. — SCINTILLATION DES
ÉTOILES. — VITESSE DE LA LUMIÈRE.— RÉSULTATS DES MESURES
PHOTOMÉTRIQUES.
Depuis deux siècles et demi, la découverte du té-
lescope a donné à l'œil , organe de la contemplation
de l'univers , une puissance énorme pour pénétrer
dans l'espace, étudier la forme des astres, et pousser
l'investigation jusqu'aux propriétés physiques des
planètes et de leurs satellites. La première lunette
fut construite en 1608, sept ans après la mort du
grand observateur Tycho. De nombreuses conquêtes,
dues à cette invention , précédèrent l'application
qu'on en fil aux instruments de mesure. On avait déjà
découvert successivement les satellites de Jupiter, les
taches du Soleil, les phases de Vénus, ce que l'on
nommait alors la triplicité de Saturne , les amas léles-
copiques d'étoiles et la nébuleuse d'Andromède (90),
lorsque l'astronome français Morin, déjà célèbre
par ses travaux sur le problème des longitudes , eut
l'idée de fixer une lunette à l'alidade d'un instru-
ment destiné à mesurer des angles , et de chercher à
voir Arcturus en plein jour (91). La rigueur qu'on
a su donner depuis aux divisions des cercles a eu
pour elTet d'augmenter la précision des observations ;
111. ^
— 50 —
mais cel avantage eût été perdu si, par l'union des
instruments optiques avec les appareils astronomi-
ques, on n'eût porté au même degré de perfection
Texaclitude du pointé et celle de la mesure des an-
gles. Six ans plus lard, en 1640 , le jeune et habile
Gascoigne vint compléter cette découverte et lui
donner toute sa valeur propre, en tendant au foyer
de la lunette un réticule formé de fils déliés [99.),
Ainsi l'application du télescope à l'art de voir et
de mesurer ne comprend point au delà des 240 der-
îiières années de l'histoire des sciences astronomi-
ques. En excluant l'époque chaldéenne , celle des
Égyptiens et des Chinois, il reste encore plus de
dix neuf siècles, comptés depuis AristilleetTimocha-
ris (93) jusqu'à la découverte de Galilée , pendant les-
quels la position et le cours des astres ont été con-
stamment observés à l'œil nu. Quand on considère
les nombreuses perturbations dont le progrès des
idées eut à soufïrir, durant cette longue période,
chez les peuples qui habitèrent les rivages du bassin
méditerranéen , on s'étonne de tout ce qu'ont vu Hip-
parque et Ptolémée sur la précession des équinoxes,
les mouvements compliqués des planètes, les deux
principales inégalités de la Lune et les lieux des étoiles;
de tout ce que Copernic a découvert touchant le vrai
système du monde; de tout ce que Tycho a pu entre-
prendre, pour restaurer l'astronomie pratique et per-
fectionner ses méthodes; on s'étonne, dis-je, que tant
de travaux et de progrès aient précédé la découverte
de la vision té/escopique, A la vérité, de longs tuyaux,
— 51 —
employés peut être par les anciens et dont certaine-
ment les Arabes se sont servis pour pointer à travers
les dioptres ou les fentes de leurs alidades , ont pu
jusqu'à un certain point améliorer les observations.
Aboul-Hassan parle, en termes extrêmement nets, de
tuyaux à l'extrémité desquels on fixait les dioptres
oculaires et objectives, et l'on retrouve aussi cette
disposition en usage à Meragha, où un observatoire
avait été fondé par Houlagou. Comment ces tubes
aidaient-ils l'œil à trouver les étoiles dans le crépus-
cule, et à les discerner plus tôt et plus aisément?
c'est ce dont une remarque d'Arago va nous rendre
compte. Ces tuyaux suppriment une grande partie
de la lumière diffuse émanée des couches atmosphé-
riques qui se trouvent entre l'œil et l'astre observé;
même pendant la nuit, ils protègent l'œil contre
l'impression latérale que produisent les particules
d'air faiblement éclairées par l'ensemble des astres
du firmament. Aussi l'intensité de l'image lumi-
neuse et les dimensions apparentes des étoiles
sont- elles alors sensiblement agrandies. Dans un
passage souvent corrigé et controversé, où Strabon
parle de la vision à travers des tuyaux, il est ques-
tion de « la figure amplifiée des astres. » C'est à tort,
évidemment;, qu'on a cru trouver dans ces mots une
allusion quelconque aux effets des instruments ré-
fracteurs (94).
Quelle que soit la source d'où vienne la lumière,
qu'elle ait été lancée directement par le Soleil ou ré-
fléchie par les planètes, qu'elle émane des étoiles
ou du bois pou ni, ou de Taclivité vitale des vers lui-
sants» toujours elle obéit de la même manière aux
lois de la réfraction (95). Mais si des lumières d'ori-
gines diverses , provenant par exemple du Soleil et
des étoiles, sont soumises à l'analyse prismatique,
elles présentent des dilférences dans la position de
ces raies obscures que Wollaston découvrit dans le
spectre solaire, en 1808, et dont Fraunhofer déter-
mina la position , douze ans plus tard , avec tant
d'exactitude. Fraunhofer avait compté 600 de ces raies
obscures, qui sont, à proprement parler, des la-
cunes, des interruptions, des parties manquantes
dans le spectre. Leur nombre s'est élevé à plus
de 2000 dans les belles recherches que Sir David
Brewster fit , en 1833, à l'aide de l'oxide d'azote. On
avait remarqué que certaines raies manquent dans
le spectre solaire à certaines époques de l'année;
mais Brewster a montré comment ce phénomène dé-
pend de la hauteur du Soleil, et peut s'expliquer
par l'absorption variable que l'atmosphère exerce
sur les rayons lumineux.
On a reconnu, comme on devait s'y attendre,
toutes les particularités du spectre solaire dans les
spectres formés avec la lumière de même origine, que
la Lune, Vénus, Mars ouïes nuages réfléchissent vers
nous. Au contraire , les raies du spectre de Sirius
diffèrent de celles du Soleil et des autres étoiles. Cas-
tor présente d'autres raies que Pollux et Procyon.
Amici a confirmé ces différences, déjà signalées par
Fraunhofer; il a fait, déplus, la remarque ingé-
— 53 —
nieiise, que les raies noires du spectre diffèrent,
même chez les étoiles dont la lumière est actuelle-
ment du blanc le moins contestable. Voici donc un
vaste champ ouvert aux investigations de l'ave-
nir (96), puisqu'il reste encore à discerner, dans
les faits acquis , la part qui peut revenir aux actions
étrangères , à l'action absorbante de l'atmosphère ,
par exemple.
Il faut mentionner ici un autre phénomène, où les
propriétés essentielles de la lumière exercent une
influence considérable. La lumière des corps solides
rendus lumineux par la chaleur, et celle de l'étin-
celle électrique présentent de grandes différences
dans le nombre et la position des raies de Fraun-
hofer. Ces différences ne s'arrêteraient point là :
d'après les remarquables recherches que Wheatstone
a faites, à l'aide de son miroir tournant, sur la vi-
tesse de la lumière née de l'électricité de frottement,
cette vitesse serait à celle de la lumière solaire
dans le rapport de 3 à 2 , puisqu'elle a été évaluée
à 46000 rayriamètres par seconde.
Malus avait été conduit, dans l'année 1808, à la dé-
couverte de la polarisation (97), en méditant un phé-
nomène que lui avaient accidentellement présenté les
rayons du Soleil couchant, réfléchis par les fenêtres
du palais du Luxembourg. Cette découverte pénétra
bientôt comme d'une vie nouvelle toutes les parties
de l'optique. Là est le germe de ces profondes recher-
ches sur la double réfraction , la polarisation ordi-
naire (celle d'Huyghens) et la polarisation chro-
— 54 —
matique , dont les résultats féconds donnèrent à
Tobservateur le moyen de distinguer la lumière di-
recte de la lumière réfléchie (98), de pénétrer le se-
cret de la constitution du Soleil et de ses enveloppes
lumineuses (99), de mesurer les plus faibles nuances
de la pression et de Fhygrométricité des couches
d'air, de discerner les écueils au fond de la mer, à
l'aide d'une simple plaque de tourmaline (100) , et
même de prévoir, à l'exemple de Newton , la com-
position chimique de certaines substances, d'après
leurs propriétés optiques (1). Il suffît de citer les
noms de : Airy, Arago, Biot, Brewster, Cauchy, Fa-
raday, Fresnel , John Herschel , Lloyd , Malus , Neu-
mann , Plateau , Seebeck , pour rappeler au lecteur
une série de découvertes brillantes et les heureuses
applications auxquelles elles ont donné naissance.
La voie était frayée, d'ailleurs, et ce n'est peut-être
pas assez dire, par les travaux d'un homme de génie,
Thomas Young. Le polariscope d' Arago et l'observa-
tion des franges de diffraction colorées, résultant de
l'interférence, sont devenus un moyen usuel d'inves-
tigation (2). Sur cette voie nouvelle et féconde, la
météorologie n'a pas fait moins de progrès que la
partie physique de l'astronomie.
Quelles que soient les différences que présente la
force de la vue parmi les hommes , il y a pourtant là
une certaine moyenne d'aptitude organique, moyenne
qui est restée sensiblement la même dans la race
humaine, depuis les anciens temps de la Grèce et de
Rome. Les étoiles des Pléiades témoignent de cette
— 55 —
invariabilité , en montrant que les étoiles estimées
de 7" grandeur par les astronomes échappaient , il
y a des milliers d'années comme aujourd'hui, aux
vues de portée ordinaire. Le groupe des Pléiades
comprend : une étoile de 3^ grandeur , Alcyone ; deux
de 4% Electre et Atlas; trois de 5% Mérope, Maia et
Taygète ; deux de 6' à 1" grandeur , Pléione et Gé-
léno; une de 7' à 8' grandeur, Astérope, et un
grand nombre de très-petites étoiles télescopitjues.
Je me sers ici des dénominations actuelles , car,
chez les anciens, les mêmes noms ne s'appliquaient
pas tous^ aux mêmes étoiles. On ne distingue ai-
sément que les six premières étoiles de o% h" et
5^ grandeur (3) : Quae septem dici , sex autem esse
soient, dit Ovide (Fast. IV, 170). On supposait
que Mérope, une des filles d'Atlas, la seule qui eût
épousé un mortel . s'était voilée par honte , ou même
avait complètement disparu. C'était probablement
l'étoile de 6^ à 1" grandeur, aujourd'hui nommée
Géléno ; car Hipparque fait remarquer, dans son
Commentaire sur Aratus, que l'on distingue effecti-
vement sept étoiles, par des nuits pures et sans lune.
On voyait donc alors Céléno. Quant à l'autre étoile
d'égale grandeur, Pléione , elle se trouve trop voisine
d'Atlas qui est de h^ grandeur.
La petite étoile Alcor, placée, d'après Triesnecker,
à ir 48" de distance de Mizar, dans la queue de
la Grande-Ourse, est de S*' grandeur, selon Arge-
lander; mais elle est comme éclipsée par l'éclat de
Mizar. Les Arabes l'avaient nommée Saidak , c'est-à-
— 56 —
dire l'épreuve, parce que « l'on s'en servait pour
éprouver la portée de la vue j> ; ce sont les propres
termes de Kazwini , astronome persan (4). Sous les
tropiques, je voyais chaque soir Alcor à l'œil nu ,
malgré la faible hauteur de la Grande-Ourse ; mais
j'étais alors sur la côte sans pluie de Cumana , ou
sur les plateaux des Cordillères, à 4000 mètres au-
dessus du niveau de la mer. J'ai rarement réussi à voir
cette étoile , soit en Europe , soit dans les steppes du
nord de l'Asie où l'air est si sec, et encore n'étais-je
pas sûr de la reconnaître. Suivant une remarque
fort juste de Msedler, la limite de distance à partir
de laquelle deux étoiles ne peuvent plus être distin-
guées l'une de l'autre à l'œil nu , dépend de leur
éclat relatif. Par exemple , l'œil sépare sans peine
les deux étoiles de 3* et de 4" grandeur, désignées
sous le nom de a du Capricorne ; leur distance mu-
tuelle est de 6 minutes et demie. Quand l'air est très-
pur, Galle croit encore distinguer à l'œil nu e et la
5' de la Lyre dont la distance est de 3 minutes etdemie,
et cela , parce que ces étoiles sont toutes deux de
li'' grandeur. Au contraire , si les satellites de Jupiter
sont invisibles à l'œil nu, il faut en chercher la
raison principale dans la supériorité d'éclat de la
planète. Ajoutons , malgré des affirmations con-
traires , que ces satellites ne peuvent pas être tous
assimilés, pour l'éclat, à des étoiles de 5^ grandeur.
De nouvelles comparaisons, faites par mon ami le
docteur Galle avec des étoiles voisines, ont prouvé que
le ♦roisième satellite , c'est-à-dire le plus brillant ,
— 57 —
est tout au plus de 5' à 6" grandeur, et que les autres,
dont la lumière est variable , oscillent entre le 6* et
le T ordre d'éclat. On peut citer pourtant des exem-
ples isolés de personnes qui ont vu , sans lunette, les
satellites de Jupiter; mais ces personnes étaient
douées d'une vue extraordinaire; elles pouvaient
distinguer à Tœil nu les étoiles inférieures à la
6' grandeur. La distance angulaire du plus brillant
satellite (le troisième) au centre de la planète est
de 4' 42"; celle du quatrième est de 8' 16". Souvent
ces satellites ont plus d'éclat que la planète, à égalité
de surface (5) ; quelquefois , au contraire , ils parais-
sent , d'après des observations plus récentes, comme
des taches grises sur le disque de Jupiter.
On peut évaluer à 5 ou 6 minutes la longueur des
rayons qui paraissent émaner des planètes ou des
étoiles, quand on les regarde à l'œil nu. Ces queues
ou rayons divergents , qui servirent , de tout temps
et surtout chez les Égyptiens, à symboliser les astres,
ne seraient rien autre, d'après Hassenfratz, que les
caustiques du cristallin formées par les rayons ré-
fractés. « L'image d'une étoile perçue à l'œil nu est
agrandie par ces rayons parasites ; elle occupe sur
la rétine une place plus grande que le simple point
où sa lumière devrait se concentrer, et l'impression
nerveuse en est affaiblie. Un amas d'étoiles très-
serrées , dans lequel les étoiles composantes sont
individuellement au-dessous de la 7' grandeur, peut
être au contraire visible à l'œil nu , parce que
les images dilatées de ces nombreux points stel-
— 58 —
laires empiétant les unes sur les autres, les divers
points de la rétine se trouvent ébranlés plus for-
tement (6). »
Par malheur, les lunettes et les télescopes donnent
aussi aux étoiles un diamètre factice, quoiqu'à un
bien moindre degré. Les belles recherches de William
Herschel nous ont appris que ces diamètres factices
diminuent, lorsqu'on augmente le grossissement (7) ;
par exemple , le diamètre apparent de Yéga de la Lyre
se trouvait réduit à 0",36 quand ce célèbre observa-
teur appliquait à son télescope l'énorme grossisse-
ment de 6500 fois. S'il s'agit, non pas d'étoiles et de
télescopes, mais d'objets terrestres vus à l'œil nu,
l'intensité de la lumière émise n'est plus le seul
élément dont il faille tenir compte , pour apprécier
le degré de visibilité : d'autres conditions inter-
viennent, telles que la grandeur de l'angle visuel
et la forme môme de l'objer. Ainsi Adams a remar-
qué , avec beaucoup de justesse , qu'une verge
longue et étroite est visible de beaucoup plus loin
qu'un carré d'égale largeur; de même un trait se
voit de plus loin qu'un simple points toutes choses
égales d'ailleurs. Arago s'est longtemps occupé, à
l'Observatoire de Paris, de rechercher jusqu'à quel
degré la forme et les contours des objets influent sur
leur visibilité; il mesurait, dans ce but, les petits
angles visuels soutendus par des tiges de paraton-
nerres très-éloignés. Mais quand on a voulu déter-
miner l'angle limite au delà duquel la perception
cesse, je veux dire le plus petit angle sous lequel on
- 59 —
puisse encore distinguer un objet terrestre, les me-
sures n'ont pu aboutir à un résultat définitif. Robert
Hooke évaluait cet angle -limite à une minute entière.
Tobie Mayer assignait 34" pour le cas d'une tache
noire sur un papier blanc. Leeuwenhoek affirmait
qu'un fil d'araignée était encore visible , pour une
vue très-ordinaire, sous un angle de k",!* On voit
que la limite a toujours été en baissant. Dans une
série de recherches instituées récemment par Hueck,
pour étudier les mouvements du cristallin , on a pu
distinguer des traits blancs sur un fond noir, lorsque
l'angle visuel était réduit à 1",2; un fil d'araignée a
été vu sous un angle de 0'',6 , et un fil métallique
brillant sous un angle de 0",2 à peine. Le problème
n'est point susceptible d'une solution numérique
uniformément applicable à tous les cas ; tout dépend
de la forme et de l'illumination des objets , de l'effet
de contraste produit par le fond sur lequel ils se dé-
tachent, et même de la nature des couches d'air, de
leur calme ou de leur agitation.
Je puis citer à ce sujet la vive impression qu'un
phénomène de ce genre produisit sur moi, à Quito,
en face du Pichincha. J'étais dans une délicieuse villa
du marquis de Selvalegre , à Chillo , d'où l'on voyait
se dérouler les croupes allongées du volcan , à une
distance horizontale de 28000 mètres mesurée tri-
gonométriquement. A l'aide des lunettes de nos in-
struments, nous cherchions à voir mon compagnon
de voyage Bonpland , qui avait alors entrepris tout
seul une expédition vers le volcan. Les Indiens placés
— 60 —
près de moi le reconnurent avant nous ; ils signalè-
rent un point blanc en mouvement , le long des ba-
saltes noirâtres qui formaient les flancs de la mon-
tagne. Bientôt je pus, à mon tour, distinguer à l'œil
nu cette image blanche et mobile , et le fils du mar-
quis de Selvalegre, Carlos Montufar, qui devait périr
plus lard victime de la guerre civile , y réussit égale-
ment. Bonpland portait, en elTet, une sorte de manteau
blanc en coton, usité dans le pays (le poncho). Comme
ce manteau flottait par moments , j'estime que sa
largeur, prise vers les épaules , pouvait varier entre
i" et i'^jô; et, comme d'ailleurs la distance est bien
connue par mes mesures, il est facile de calculer
l'angle visuel : on trouve ainsi que l'objet mobile
était vu nettement, à l'œil nu, sous un angle de 7"
à 12". Au reste , on sait, par les expériences réitérées
de Hueck, que des objets blancs sur un fond noir se
voient de plus loin que des objets noirs sur un fond
blanc. Pendant l'observation que je viens de rappor-
ter, le ciel était pur, et les rayons de lumière, partant
de la région occupée par Bonpland , à 4682 mètres au-
dessus du niveau de la mer, traversaient des couches
d'air peu denses, pour arriver à notre station de Chillo,
dont la hauteur était elle-même de 2614 mètres. La
distance réelle des deux stations était de 27805 mètres
ou de 7 lieues environ. Les indications du thermomètre
et du baromètre différaient beaucoup d'une station à
l'autre : en bas, l'observation exacte donna 564°"", 41
et 18%7; en haut nous aurions trouvé probablement
437™"',6 et 8". L'héliotrope de Gauss , dont les Aile-
-- 61 —
mands ont tiré un si grand parti dans leurs mesures
géodésiques , va nous fournir un dernier exemple de
visibilité à grande distance. La lumière du Soleil,
dirigée héliotropiquement des sommets du Brocken
sur ceux du Ilohenhagen , fut vue à l'œil nu , à cette
dernière station , malgré une distance de 69000 mè-
tres (plus de 17 lieues). Dans d'autres cas moins
extrêmes, on a distingué souvent ce genre de si-
gnaux , sans recourir aux lunettes , lorsque l'angle
soutendu par le miroir de l'héliotrope (81 millimètres
de largeur) était réduit à 0'M3.
Parmi les causes nombreuses d'origine météoro-
logique, encore mal expliquées en général, qui mo-
difient profondément la visibilité des objets éloi-
gnés, il fautdistinguer l'absorption qui s'opère dans le
trajet du rayon lumineux à travers des couches atmos-
phériques plus ou moins denses, plus ou moins char-
gées d'humidité, et surtout l'illumination du champ
de vision par la lumière diffuse que les particules de
l'air réfléchissent vers l'œil. On sait , par les travaux
anciens mais toujours si exacts de Bouguer , qu'une
différence d'éclat de 1/60 est nécessaire pour la visibi-
lité. Aussi ne voyons-nous que par vision négative ,
suivant son expression, les sommets obscurs des mon-
tagnes qui se détachent comme des masses sombres
sur la voûte du ciel. Si nous les apercevons, c'est en
vertu seulement de la différence d'épaisseur des cou-
ches d'air qui s'étendent jusqu'à l'objet et jusqu'à
l'extrême limite de l'horizon visible. C'est par vision
positive j au contraire, que nous distinguons au loin
- — 6^2 —
des objets brillants , comme des cimes couvertes de
neige, des rochers calcaires blancs ou des cônes vol-
caniques formés de pierre ponce. Il n'est pas sans
intérêt pour l'art nautique de fixer la distance à la-
quelle on peut reconnaître, en mer, les cimes de
certaines montagnes très-élevées ; on pourrait en
tirer parti pour déterminer la position du navire
quand les observations astronomiques font défaut.
J'ai traité ailleurs cette question avec quelque déve-
loppement , au sujet de la visibilité du pic de Téné-
riffe (8) .
La question de savoir si les étoiles peuvent être
vues en plein jour, à l'œil nu , soit dans les puits de
mine très-profonds , soit sur le sommet de mon-
tagnes très-élevées, a été un des objets de mes re-
cherches , depuis ma première jeunesse. Aristote a
dit, je ne l'ignorais point, que les étoiles se voient
quelquefois en plein jour, quand on les cherche du
fond des citernes ou des cavernes , comme à travers
un tuyau (9). Pline aussi a rapporté ce dire ; il cite à
l'appui les étoiles qu'on a pu reconnaître distincte-
ment pendant des éclipses de Soleil. A l'époque où
je m'occupais de travaux métallurgiques, j'ai passé,
durant des années entières, une grande partie du
jour dans les galeries et dans les puits de mine, d'où
je m'efforçais, mais en vain, de distinguer quelque
étoile au zénith. Même insuccès au Mexique , au Pé-
rou , en Sibérie. Jamais je n'ai rencontré dans les
mines de ces pays un seul homme qui eût entendu
parler d'étoiles vues en plein jour; et pourtant, si
— 63 —
on songe aux latitudes si diverses par lesquelles j'ai
pu descendre sous terre, dans l'un et l'autre hé-
misphère , on comprendra que ce ne sont ni les
circonstances favorables ni les étoiles qui ont man-
qué au zénith. Ces faits négatifs rendent encore plus
singulier, à mes yeux , le témoignage , d'ailleurs
parfaitement digne de confiance, d'un opticien cé-
lèbre qui avait vu dans sa jeunesse une étoile en
plein jour par le tuyau d'une cheminée (10). Quand
des phénomènes exigent , pour leur manifesta-
tion , le concours fortuit de circonstances excep-
tionnellement favorables , il faut bien se garder
d'en nier la réalité par la seule raison qu'ils sont
rares.
Ce principe peut être appliqué, à mon avis, à un
autre fait rapporté par Saussure , dont les assertions
ont toujours tant de poids. Je veux parler de la pos-
sibilité de voir les étoiles en plein jour du haut
d'une montagne très-élevée , comme le Mont-Blanc ,
par exemple, à la hauteur de 3888 mètres. « Quel-
ques-uns des guides m'ont assuré, » dit le célèbre
investigateur des Alpes , (( avoir vu des étoiles en
plein jour ; pour moi, je n'y songeais pas, en
sorte que je n'ai point été le témoin de ce phéno-
mène; niais l'assertion uniforme des guides ne me
laisse aucun doute sur la réalité (11). 11 faut d'ail-
leurs être entièrement à l'ombre , et avoir même
au-dessus de la tête une masse d'ombre d'une épais-
seur considérable, sans quoi l'air trop fortement
éclairé fait évanouir la faible clarté des étoiles. »
-. 6/1 -
Les conditions de visibilité seraient ainsi à peu près
identiques à celles que présentaient naturellement
les citernes des anciens ou la cheminée dont je
viens de parler. Je n'ai rien pu trouver d'analogue à
cette assertion mémorable (datée du 2 août 1787 au
matin ) , dans les autres Voyages à travers les Alpes
suisses. Les frères Hermann et Adolphe Schlagintweit,
très-instruits tous deux et bons observateurs, ont par-
couru, il y a peu de temps, les Alpes orientales jus-
qu'au sommet du Grand-Clocher (3967 mètres), sans
avoir jamais pu distinguer des étoiles en plein jour,
ni trouver trace d'un fait pareil dans les dires des
bergers ou des chasseurs de chamois. J'ai moi-même
passé plusieurs années dans les Cordillères de Mexico,
de Quito et du Pérou ; je me suis trouvé souvent
avec Bonpland à des hauteurs de plus de 4500 ou
5000 mètres, par le plus beau ciel du monde, et
jamais je n'ai pu voir d'étoile en plein jour, pas plus
que mon ami Boussingault n'en a vu plus tard dans
les mêmes circonstances. Pourtant le bleu du ciel
était si sombre , si profond , que mon cyanomètre de
Paul , à Genève , le même où Saussure lisait 39° sur le
Mont-Blanc, m'indiquait entre les tropiques 46** pour
la région zénithale du ciel , par une hauteur com-
prise entre 5200 et 5800 mètres (12). Au contraire,
sous le ciel magnifique et pur comme l'éther de Cu-
mana , dans les plaines du littoral , il m'est arrivé
plus d'une fois, après avoir observé des éclipses
des satellites de Jupiter, de retrouver la planète à
l'œil nu, et de la voir de la manière la plus distincte,
— 65 —
quand le disque du soleil était déjà monlé à 18" ou
20' au-dessus de l'horizon.
C'est ici le lieu d'indiquer un autre phénomène
optique dont mes nombreuses ascensions de mon-
tagnes ne m'ont offert qu'un seul exemple. C'était
le 22 juin 1799, sur le versant du pic de Ténériffe ,
au Malpays ; je me trouvais, quelque temps avant le
lever du Soleil, à une hauteur d'environ 2>!ilb mètres
au-dessus du niveau de la mer : je vis à l'œil nu les
étoiles basses agitées en apparence d'un mouvement
bien singulier. Des points brillants paraissaient mon-
ter d'abord , se mouvoir ensui te latéralement et retom-
ber à leur place première. Ce phénomène dura seu-
lement 7 ou 8 minutes , et cessa longtemps avant le
lever du Soleil à l'horizon de la mer. 11 était parfaite-
ment visible avec une lunette, et tout examen fait, je ne
pus douter que ce ne fussent les étoiles elles-mO.mes
qui se mouvaient ainsi (13). Ces apparences provien-
nent-elles de la réfraction latérale sur laquelle on a
tant discuté? Y a-t-il là quelque analogie avec les
déformations ondulatoires que le bord vertical du
Soleil présente si souvent à soulever, quelque petites
d'ailleurs que ces déformations puissent être, quand
on en vient aux mesures? Quoi qu'il en soit, le voi-
sinage de l'horizon ne pjut qu'agrandir ces mouve-
ments latéraux, par suite de l'illusion optique bien
connue. Chose singulière , le même phénomène a
été remarqué im demi-siècle après, juste au même
endroit et avant le lever du Soleil , par un observa-
teur très-instruit et très-attentif, le prince Adalbert
ni. 5
— 66 —
de Prusse, qui Ta examiné pareillement à Toeil nu
et avec l'aide d'une lunette. J'ai retrouvé son obser-
vation dans son journal manuscrit; elle y avait été
consignée pendant le voyage même. Ce fut seu-
lement en revenant de son expédition au fleuve des
Amazones , que le prince put savoir que j'avais été
témoin des mêmes apparences (li). Jamais je n'ai
trouvé la moindre trace de réfraction latérale , ni
sur les versants de la chaîne des Andes , ni même
dans les plaines brûlantes de l'Amérique du Sud (les
Llanos), où les couches d'air inégalement échauffées se
mélangent de tant de façons diverses, et produisent
si souvent le phénomène du mirage. Le pic de Téné-
riffe est plus près de nous; souvent il est visité
par des voyageurs munis d'instruments de mesure;
on peut donc espérer que le phénomène curieux dont
je viens de parler ne sera pas oublié dans les recher-
ches scientifiques.
Il est digne de remarque , ai-je dit déjà , que les
fondements de l'astronomie proprement dite, celle
du monde planétaire , aient précédé l'époque mé-
morable (1608 et 1610) où la vision télescopique
a été découverte et appliquée à l'étude du ciel.
A force de travaux et de soins, George Purbach,
Regiomontanus(Jean Mullerj et Bernard Walther, de
Nurenberg, avaient augmenté le trésor de la science,
héritage des Grecs et des Arabes. Bientôt parut le
système de Copernic , développement d'idées hardies
et grandioses. Puis vinrent les observations si exactes
de Tycho, et les audacieuses combinaisons de Kepler,
— 67 —
aidées de la plus opiniâtre puissance de calcul qui
fut jamais. Deux grands hommes, Kepler et Galilée,
personnifient cette phase décisive de l'histoire , où
la science des mesures abandonne l'observation an-
tique, déjà perfectionnée, mais toujours faite à la
simple vue, pour recourir à la vision télescopique.
Galilée avait alors 44 ans et Kepler 37 ; Tycho , le
plus grand astronome observateur de cette grande
époque, était mort depuis sept ans. J'ai rappelé dans
le volume précédent (p. 2>91) que les trois lois de
Kepler, ses litres aujourd'hui irrécusables à l'immor-
talité, n'avaient pas valu à leur auteur un seul éloge
de ses contemporains, pas même de Galilée. Trou-
vées d'une manière purement empirique , mais plus
fécondes pour l'ensemble de la science que la décou-
verte d'astres nouveaux , ces trois lois appartiennent
tout à fait à l'époque de la vision naturelle , c'est-à-
dire à l'époque tychonienne ; elles dérivent même des
propres observations de Tycho Brahé, quoique l'im-
pression de VAstronomia nova, seu Pkysica cœleslis
de motibus stellœ Martis n'ait été achevée qu'en 1609,
et que la troisième loi, en vertu de laquelle les
carrés des temps de la révolution des planètes sont
proportionnnels aux cubes des grands axes de leurs
orbites, n'ait été exposée qu'en 1619, dans Vilar-
monice Mundi.
Le commencement du xvii" siècle, où s'opéra le
passage de la vision naturelle à la vision télescopique,
a été plus important pour l'astronomie et la con-
naissance du ciel que Tan 1492 pour celle du globe
- 68 —
terrestre. Par là se sont agrandies, presqu'à Tinfini, la
sphère de nos recherches et la portée du coup d'oeil
qu'il nous est donné de jeter sur la création; par là
ont été incessamment soulevés de nouveaux problè-
mes, dont la solution difficile a provoqué, dans les
sciences mathématiques . un développement sans
égal. Renforcer un des organes de nos sens revient
donc parfois à renforcer l'intelligence, à étendre le
cercle des idées, à ennoblir l'humanité. En moins de
deux siècles et demi, nous avons dû au télescope seul
la découverte de 13 planètes nouvelles et de 4 systèmes
de satellites (4 lunes pour Jupiter, 8 pour Saturne,
k et peut-être 6 pour Uranus, 1 pour Ne{3tune), la
découverte des taches et des facules du Soleil, celle
des phases de Vénus. On a pu étudier la forme et
mesurer la hauteur des montagnes lunaires, voir et
expliquer les taches hibernales des pôles de Mars, les
bandes de Jupiter et de Saturne, ainsi que l'anneau
qui entoure cette dernière planète. On a découvert
successivement les comètes intérieures ou planétaires
à courte période , et un nombre immense d'autres
phénomènes dont l'œil désarmé ne nous aurait rien
appris. Mais ce n'est pas tout : si notre système
solaire a reçu en 240 années de tels agrandisse-
ments, après être resté pendant tant de siècles res-
treint, en apparence, à 6 planètes et à une lune
unique, le ciel sidéral a gagné plus encore, et là
surtout les découvertes ont dépassé toute attente.
Des nébuleuses, des étoiles doubles ont été comptées
et classées par milliers. Les mouvements propres
— 69 —
de toutes les étoiles nous ont enseigné celui de
notre propre soleil. Les mouvements relatifs des
étoiles doubles qui circulent autour de leur centre
de [gravité commun , ont prouvé que les lois de la
gravitation sont obéies dans ces régions reculées de
l'univers, aussi bien que dans l'espace plus étroit
où se meuvent nos planète^. Depuis que Morin et
Gascoigne ont adapté les lunettes aux instruments
de mesure , Fart de fixer dans le ciel les positions
apparentes des astres a atteint un degré de préci-
sion inouï. Grâce à cet artifice , il a été possible de
mesurer, à une petite fraction près de la seconde
d'arc, Tellipse d'aberration des fixes, leur paral-
laxe, la dislance mutuelle des étoiles composantes
de chaque système binaire. C'est ainsi que l'astro-
nomie s'est élevée progressivement de la conception
du système solaire à celle d'un véritable système de
l'univers.
On sait que Galilée fit sa découverte des lunes de
Jupiter avec un grossissement de 7 fois, et qu'il n'a
jamais pu dépasser celui de 32 fois. Cent soixante-
dix ans plus tard, nous voyons Sir William Herschel
employer des grossissements de 6500 fois dans ses
recherches sur les diamètres apparents d'Arcturus
et de Véga de la Lyre. A partir du milieu du
xvii* siè le, tous les efforts se tournèrent vers la con-
struction des longues lunettes. Ce fut, il est vrai,
avec une lunette de 4 mètres seulement que Huy-
ghens découvrit, en 1055, le premier satellite de
Saturne (Titan , le sixième dans l'ordre des distances
^ 70 —
au centre de la planète); mais, un peu plus tard,
les lunettes qu'il dirigeait vers le ciel avaient 40 mè-
tres. Conslanlin Huyghens , frère du célèbre astro-
nome, construisit trois objectifs de il , 55 et 68 mè-
tres de longueur focale, que la Société royale de
Londres possède encore. Toutefois, on s'était borné
à essayer ces objectifs sur des objets terrestres; Huy-
ghens le dit expressément (15). Auzout construisit,
dès 1663, des lunettes gigantesques sans tuyaux, dans
lesquelles, par conséquent, l'oculaire n'était relié à
l'objec.if par aucun intermédiaire solide et fixe. Il
acheva, dans ce système, un objectif de 97 mètres
de foyer, capable de porter un grossissement de
600 fois (16). Ce furent des objeclifs de ce genre, taillés
par Borelli, Campani, Hartsoeker, et fixés à des
mâts, qui servirent si utilement la science entre les
mains de Dominique Cassini; ils lui permirent de dé-
couvrir l'un après l'autre le huitième, le cinquième,
le quatrième et le troisième satellite de Saturne.
Les objectifs d'Hartsoeker avaient 81 mètres de
distance focale. J'ai bien souvent tenu entre mes
mains, pendant mon séjour à l'Observatoire de Paris,
ceux de Campani qui étaient en grande réputation
sous le règne de Louis XIV ; et quand je songeais
à la faiblesse des satellites de Saturne , à la difficulté
de manœuvrer de grands appareils composés de mâts
et de cordages (17), je ne pouvais admirer assez
l'habileté et la courageuse persévérance des obser-
vateurs de cette époque.
Les avantages qu'on croyait alors forcément atta-
— 71 —
chés à des dimensions gigantesques conduisirent
de grands esprits à concevoir de ces espéran-
ces démesurées dont l'histoire des sciences nous
offre tant d'exemples. Ainsi Hooke a proposé de
construire une lunette de 10000 pieds (pins de
3 kilomètres ) afin de voir des animaux dans la
Lune; Auzout a même cru devoir combattre cette
idée (18). On ne tarda pas à sentir combien ces in-
struments devenaient incommodes dans la prati-
que, quand leur longueur focale dépassait 30 mè-
tres; aussi Newton s'efforça-t-il , après Mersenne et
James Gregory, d'Aberdeen , de populariser en An-
gleterre les télescopes beaucoup plus courts qui
opèrent par réflexion. Bradley et Pound comparè-
rent avec soin les effets d'un télescope à miroir de
Hadley, dont la distance focale ne dépassait pas 1™,6,
avec ceux du réfracteur de 11 mètres, construit par
Constantin Huyghens et dont il a été fait mention
plus haut : tout l'avantage resta au premier instru-
ment. Alors les coûteux télescopes de Short se ré-
pandirent de tous côtés; ils régnèrent sans partage,
jusqu'à l'époqne (1759) où John Dollond eut le bon-
heur de découvrir la solution pratique du problème
de l'achromatisme , posé par Léonard Euler et par
Klingenstierna et rendit ainsi aux lunettes une
grande supériorité. Disons ici que les droits de prio-
rité incontestables du mystérieux Chester More Hall,
du comté d'i^ssex (1729), étaient inconnus du pu-
blic, lorsque Dollond obtint un brevet pour ses lu-
nettes achromatiques (19).
— 72 ~
Mais celte victoire des réfracteurs ne fut pas de
longue dun'e. Dix-huit ou vingt ans s'étaient à peine
écoulés depuis que Dollond avait enseigné à réaliser
rachromatisme, par la combinaison de lentilles for-
mées de crown et de flint, et déjà les idées se modi-
fiaient sous la juste impression d'étonnementque les
travaux immortels d'un Allemand, William Herschel,
produisirent en Angleterre et sur le continent. Il avait
construit un grand nombre de télescopes de 7 pieds
anglais (2 mètres) et de 20 pieds (6 mètres) de lon-
gueur focale, dont on pouvait porter les grossisse-
ments à 2-200 et même à 6000 fuis; il en construisit
un de liO pieds (li'",2). Ce fut avec ce dernier téles-
cope qu'il découvrit les deux satellites intérieurs de
Saturne ; le deuxième d'abord , qu'on a nommé de-
puis Encelade, et bientôt après Mimas, le plus voisin
de l'anneau. Mais c'est au télescope de 7 pieds qu'ap-
partient la découverte d'Uranus, faite en 1781. Les
satellites si faibles de cette planète furent vus, en 1787,
à l'aide du télescope de '20 pieds, disposé pour la vue
de front [front-vieiv) (20). La perfection supérieure
que ce grand homme sut donner aux miroirs de ses
télescopes, l'ingénieuse disposition grâce à laquelle
les rayons lumineux ne sont réfléchis qu'une fois,
et surtoutune série non interrompucde quarante ans
de veillesetde travaux, ont porté la lumièredanstoules
les branches de l'astronomie physique , dans le monde
des planètes , aussi bien que dans celui des nébuleuses
et des étoiles doubles.
Le long règne des télescopes réflecteurs devait
— 73 —
avoir un terme. Dès les cinq premières années du
xix*' siècle, il s'établit entre les constructeurs de lu-
nettes achromatiques une heureu-e rivalité de pro-
grès et de perfection. Alors furent créées ces grandes
machines parallactiques, où des horloges font mou-
voir les plus longues lunettes , avec la régularité
des mouvements célestes. Il fallait un flint parfaite-
ment homogène et sans stries, pour les objectifs
d'une grandeur extraordinaire qu'on demandait déjà
aux constructeurs. Ce flint fut fabriqué avec succès en
Allemagne, dans l'établissement d'Utzschneider et de
Fraunhofer, auxquels succédèrent Merz et Mahler. En
Suisse et en France , les ateliers de Guinand et de
Bontems fournirent cette précieuse matière aux tra-
vaux de Lerebours et de Cauchoix. 11 suffit ici de jeter
un rapide coup d'œil sur l'histoire de ces progrès ,
et de citer comme exemples: les grands réfracteurs
construits, sous la direction de Fraunhofer, pour les
observatoires de Dorpat et de Berlin, qui tous deux
ont 24 centimètres d'ouverture et /r,4 de distance
focale ; les réfracteurs construits par Merz et Mahler
pour Poulkova, en Russie, et pour Cambridge, aux
États-Unis (21), qui ont l'un et l'autre 38 centimè-
tres d'ouverture et 6*", 8 de foyer; enfin l'héliomètre
de l'observatoire de Kœnigsberg, dont l'objectif a
16 centimètres d'ouverture. Ce dernier instrument,
que les travaux de Bessel ont immortalisé , est long-
temps resté le plus grand de son espèce. Citons en-
core les lunettes dialytiques, si courtes et pourtant
si puissantes de clarté, que Plôssel a construites le
~ 74 -
premier, à Vienne , et dont Rogers, en Angleterre,
avait reconnu presqu'en même temps les avantages;
elles méritent assurément qu'on essaye de les con-
struire sur de grandes dimensions.
A cette même époque , dont j'esquisse ici les tra-
vaux , parce qu'ils ont exercé une grande influence au
point de vue cosmique , les progrès de la mécanique
suivirent de près ceux de l'optique et de l'horlogerie.
Les instruments de mesure furent successivement
perfectionnés , surtout les micromètres , les cercles
méridiens et les secteurs zénithaux. Parmi tant de
noms distingués dans rette carrière , je rappellerai
ici ceux de Ramsden, de Troughton , de Fortin , de
Reichenbach, de Gambey, d'Ertel, de Steinheil, de
Repsold, de Pistor, d'Oertling pour les instru-
ments de mesure. Pour les chronomètres et les pen-
dules astronomiques, je citerai Mudge, Arnold,
Emery, Earnshaw, Bréguet, Jûrgensen, Kessels ,
Winnerl, Tiède..... C'est surtout dans les beaux tra-
vaux de William et de John Herschel , de South, de
Struve, de Bessel et de Dawes, sur les distances et les
mouvements périodiques des étoiles doubles , que se
manifeste cette rivalité de perfection entre les instru-
ments optiques et les appareils de mesure. Sans ce
double progrès, il eût été assurément impossible
d'exécuter d'immenses travaux , comme ceux de
Struve, par exemple, qui a mesuré un grand nombre
de fois plus de 100 systèmes binaires, où la dislance
des étoiles composantes est au-dessous de 1", et
336 autres systèmes compris entre i" et 2" ("Z'I).
— 75 —
Depuis un petit nombre d'années, deux hommes
étrangers , par leur position sociale , à tout genre
d'activité industrielle, mais animés d'un noble amour
pour la science, le comte de Rosse, à Parsonstown
(19 kilomètres à l'ouest de Dublin) , et M. Lassell , à
Starfield , près de Liverpool , ont fait construire,
sous leur direction immédiate et d'après leurs propres
idées, deux télescopes réflecteurs qui ont fait naître
la plus vive attente parmi les astronomes (23). Celui
de Lassell n'a que 01 centimètres d'ouverture et
6 mètres de distance focale; mais il a déjà procuré
la découverte d'un satellite de Neptune et d'un hui-
tième satellite de Saturne ; de plus il a fait retrouver
deux satellites d'Uranus. Le nouveau télescope de
Lord Rosse est gigantesque : il a 6 pieds anglais (l'",83)
d'ouverture et 50 pieds (15"') de longueur. Il est
placé dans le méridien, entre deux murs de 14 à
IG mètres de hauteur, lesquels laissent au tube un
espace libre d'environ 3 mètres et demi de chaque
côté du méridien. Plusieurs nébuleuses, qu'aucun
instrument n'avait encore pu résoudre , ont été dé-
composées en étoiles par ce magnifique télescope.
D'autres nébuleuses ont été complètement étu-
diées; on a pu déterminer pour la première fois
leurs formes et leurs contours véritables, grâce à
l'énorme quantité de lumière que le miroir con-
centre.
Le premier qui ait appliqué les lunettes aux in-
struments de mesure , ce n'est ni Picard ni Auzout ;
mais bien, ainsi que nous l'avons dit, Pastronome
— 76 —
Morin. En 1638, Morin conçut Tidée de tirer parti de
son invention pour observer les étoiles en plein jour.
Voici comment il exposa lui-même son idée (2i\
« Pour détermiiier les positions absolues des étoiles,
à une époque où les lunettes n'existaient pas encore
(en 1582, 28 ans avant cette invention), Tycho s'est
servi de Vénus, qu'il comparait aux étoiles pendant
la nuit et au Soleil pendant le jour. Ce n'est point le
désir d'éviter ce détour qui a suggéré à Morin une
découverte dont la détermination des longitudes
en mer pourra tirer un grand parti; il y a été con-
duit par une voie plus simple, en songeant que si,
avant le lever du Soleil, on dirigeait une lunette,
non-seulement sur Vénus, mais même sur Arctu-
rus ou toute autre belle étoile , on pourrait conti-
nuer à suivre cet astre sur la voûte céleste après le
lever du Soleil. Personne, avant lui, n'avait vu les
étoiles à la face du Soleil. » Plus tard, de grandes
lunettes méridiennes furent installées d'après les
idées de Rœmer. A partir de ce moment (1691), les
observations faites en plein jour se multiplièrent et
acquirent une hante importance; elles ont même au-
jourd'hui une valeur réelle pour la mesure des étoiles
doubles. Struve a mesuré à Dorpat les couples les
plus difficiles, avec un simple grossissement de
320 fois, lorsque la lumière crépusculaire était en-
core assez forte à minuit pour permettre de lire ai-
sément (25). Létoile polaire est accompagnée, à 18"
de distance, d'une étoile de 9' grandeur; Struve et
WraDgelont vu cette petite étoile, en plein jour, à
— 11 ~
l'aide de la lunette de Dorpat (26) ; Encke et Arge-
lander y ont également réussi de leur côté.
On a beaucoup discuté les causes de la puissance
que les télescopes donnent à la vue, même en plein
jour, alors que la lumière diffuse, provenant de
réflexions multiples , devrait lui opposer tant d'obs-
tacles (27). Ce problème d'optique excitait au plus
haut degré l'intérêt de Bessel, dont les sciences res-
sentent encore la perte prématurée. Il y revenait
souvent dans sa correspondance avec moi ; mais il a
fini par avouer qu'il n'avait pu en trouver de solu-
tion satisfaisante. J'ose compter que mes locteurs
me sauront gré d'insérer, dans les notes de ce livre,
les idées d'Arago sur ce su^et (28). Je les extrais
d'une collection de manuscrits qui ont été mis à
ma disposition pendant mes fréquents voyages à
Paris. D'après l'ingénieuse explication de mon ami,
si les forts grossissements aident à distinguer les
étoiles en plein jour, c'est que la lunette concentre
vers l'œil et introduit dans la pupille une plus grande
quantité de rayons lumineux, sans agrandir nota-
blement l'image de l'étoile, tandis que le même
a])pareil optique agit d'une manière tout à fait diffé-
rente sur le fond du ciel où cette étoile se projette.
En effet, la lumière de la partie de l'atmosphère
dont l'image indéfinie occupe le champ de la vision
émane de particules d'air illuminées que le grossis-
sement écarte les unes des autres; le champ doit
donc paraître d'autant moins éclairé que le grossis-
sement est plus fort. Or nous n'apercevons l'étoile
— 78 —
qu'en vertu d'une différence d'intensité entre la
lumière de son image et celle du champ lui-même
sur lequel cette image vient se dessiner. 11 en est
tout autrement des disques planétaires ; ils perdent
de leur éclat, par le grossissement des lunettes,
précisément dans le même rapport que l'aire aérienne
comprise dans le champ de la vision. Seulement il
faut remarquer ici que l'amplification de l'image
s'étend à la vitesse de son mouvement apparent.
Cet effet, qui a lieu pour les planètes comme pour
les étoiles , peut contribuer à la visibilité en plein
jour, à moins que le télescope ne suive le mouvement
diurne, comme font les machines parallactiques con-
duites par des horloges. En vertu du déplacement
continuel de l'image, la sensation se produit succes-
sivement en des points différents de la rétine , et l'on
sait, dit ailleurs Arago, que des objets très-faibles
peuvent devenir perceptibles quand on leur imprime
un mouvement.
Sous le ciel si pur des contrées tropicales , j'ai
réussi bien souvent à trouver dans le ciel le pâle
et faible disque de Jupiter, avec une lunette de
Dollond , grossissant seulement 95 fois , lorsque le
Soleil avait atteint déjà 15' ou 18° de hauteur. Plus
d'une fois le docteur Galle a été surpris de la
faiblesse extrême de Jupiter et de Saturne, vus en
plein jour à l'aide du grand réfracteur de Berlin ;
cette faiblesse forme un contraste frappant avec le
vif éclat de Vénus ou de Mercure. Cependant on
a réussi à observer en plein jour des occultations
— 79 —
de Jupiter par la Lune; on cite l'observation de
Flaugergues en 1702, et celle de Slruve en 1820.
Argelander a vu très-nettement , à Bonn , un quart
d'heure après le lever du Soleil , trois satellites de
Jupiter, avec une lunette de l'",6 de Fraunhofer; il
lui fut impossible de distinguer le quatrième. Son
adjoint, M. Schmidt, a même observé, à une heure
du jour encore plus avancée , l'émersion des satel-
lites , le quatrième y compris , au bord obscur de la
Lune ; il se servait de la lunette d'un héliomètre de
2"\5 de foyer. Il serait intéressant , et pour l'optique
et pour la météorologie , de déterminer les limites
de la visibilité télescopique des petites étoiles pen-
dant le jour, sous des climats dliférents et à diffé-
rentes hauteurs au-dessus du niveau de la mer.
La scintillation des étoiles est un des phénomènes
les plus remarquables et aussi les plus controversés
de cette catégorie dans laquelle nous rangeons les
principaux faits de vision naturelle et télescopi-
que. Il faut y distinguer, d'après les recherches
d'Arago, deux points essentiels (29) : 1° les chan-
gements brusques d'éclat , c'est-à-dire le fait de l'ex-
tinction subite suivie de la réapparition ; 2" les va-
riations de couleur. Ces deux sortes de changements
sont plus forts dans la réalité qu'ils ne le paraissent
à l'œil nu; car lorsque des points de la rétine sont
une fois ébranlés, lorsqu'une impression lumineuse
est produite, la sensation ne s'efface pas aussitôt,
mais persiste pendant un certain temps. 11 en résulte
que l'affaiblissement passager de l'étoile , ses rapides
— 80 —
changements de couleur, en un mot les diverses
phases de la scintillalion , ne sont point intégrale-
lement senties, ou du moins ne se perçoivent pas
aussi distinctement qu'elles se produisent en réalité.
Pour bien saisir les phases de la scintillation à Taide
d'une lunette, il faut impiimer à l'instrument un mou-
vement de rotation ; alors l'image de l'étoile dessine
un cercle lumineux coloré, souvent interrompu çà et
là. Qu'on se représente l'atmosphère comme étant
formée de couches superposées dans lesquelles la den-
sité, l'humidité, la température varient continuel-
lement, et on se rendra compte, par la théorie des
interférences, de tous les détails de ces apparences
où les phénomènes de coloration , d'extinction subite
et de brillante réapparition se succèdent avec tant de
vivacité. Cette théorie est basée sur un fait général,
à savoir que deux rayons ou deux systèmes d'ondes ,
émanés d'une même source , c'est à-dire d'un même
centre d'ébranlement, peuvent se détruire ou s'a-
jouter mutuellement, si les chemins parcourus sont
inégaux. Quand un de ces systèmes d'ondes est en
retard sur l'autre d'un nombre impair de demi-
ondulations, les actions produites par chacun d'eux
sur un même atome d'éther sont égales et de sens
contraire : les vitesses qui lui sont imprimées se dé-
truisent , l'atome reste en repos ; il y a neutralisation
de lumière ou production d'obscurité. Dans le cas
dont il s'agit, les variations de la réfrangibilité des
couches d'air successives produisent souvent plus
d'effet, pour déterminer les phénomènes de scintil-
— 81 -
lation, que la différence des chemins parcourus par
les divers rayons émanés d'une même étoile (30).
La scintillation présente d'ailleurs de grandes dif-
férences d'intensité d'une étoile à l'autre. Ces diffé-
rences ne dépendent pas seulement de la hauteur ou
de l'éclat des étoiles , mais aussi , à ce qu'il semble ,
de la nature propre de leur luuiière. Véga , par exem-
ple , scintille moins que Procyon et Arclurus. Si les
planètes ne scintillent pas, il faut l'attribuer à la
grandeur sensible de leur disque apparent et
à la compensation produite par le mélange des
rayons colorés, émis de chaque point de ce disque.
On peut , en effet , considérer ce disque comme l'ag-
grégation d'un certain nombre d'étoiles, où la lu-
mière de quelques rayons , détruite par l'interférence
de certains autres , se trouve compensée par celle des
points voisins , et où les images de couleurs diffé-
rentes recomposent du blanc, en se superposant.
Aussi ne remarque-t-on guère que des traces rares
de scintillation dans Jupiter et dans Saturne. Ce phé-
nomène est plus sensible pour Mercure et Vénus,
dont. le diamètre apparent peut se réduire à à",! et
9", 5. Il en est de même de Mars , parce que son dia-
mètre apparent descend presque à 3", 3 vers l'époque
de la conjonction. Dans les nuits pures et froides des
climats tempérés, la scintillation contribue à la ma-
gnificence du ciel étoile. Comme elle renforce, par
instants , la lumière des nombreuses étoiles de
sixième à septième grandeur, qu'on ne distingue
aisément qu'avec des lunettes, nous en voyons
ni. 6
— 82 —
apparaître par moments, tantôt ici tantôt là, et nous
sommes ainsi instinctivement portés à nous exa-
gérer le nombre des étoiles. De là l'espèce de sur-
prise avec laquelle on accueille , en général , les
dénombrements, pourtant exacts, où l'on compte à
peine quelques milliers d'étoiles visibles à l'œil nu.
Les anciens savaient déjà distinguer les planètes à
leur faible scintillation. Quant à la cause de la diffé-
rence qui existe à cet égard entre les étoiles et les
planètes , Aristote avait une théorie singulière (31) :
il l'expliquait par un système d'émission des rayons
visuels, allant palper au loin les objets avec plus ou
moins d'effort. « Les astres fixés , disait-il , scintil-
lent, et les planètes ne scintillent pas, parce que
les planètes sont proches et que la vue les atteint
aisément, tandis que les astres immobiles (îrpo; U
Toù; /aevovraç) sont trop éloignés; l'œil est obligé par
cette grande distance de faire effort, et son rayon
visuel en devient vacillant. »
Entre 1572 et 1604 , à l'époque de Galilée, époque
de grands événements astronomiques , trois étoiles
nouvelles apparurent dans le ciel (32). Elles sur-
passèrent en éclat les étoiles de première grandeur;
une d'elles brilla même pendant vingt et un ans
dans la constellation du Cygne. Leur scintillation fut
le trait caractéristique qui attira le plus l'attention
de Kepler; il y voyait une preuve que ces nouveaux
astres ne pouvaient être de nature planétaire. Mais
l'état de l'optique était alors trop imparfait pour que
ce grand génie, auquel l'optique doit tant, pût ex-
— 83 —
pliqiier ce phénomène autrement que par l'interposi-
tion de vapeurs en mouvement (33). Les Chinois ont
signalé , eux aussi , la forte scintillation des étoiles
nouvelles dont il est fait mention dans la grande
collection de Ma-tuan-lin.
L'absence de scintillation dans les régions tropi-
cales, du moins à 12*" ou 15° au-dessus de l'horizon,
tient à un mélange plus égal , plus homogène de la
vapeur d'eau avec l'atmosphère : elle donne à la
voûte céleste un caractère particulier de calme et
de douceur. J*ai souvent fait ressortir ce trait dans
mes descriptions de la nature des tropiques. Il était
d'ailleurs trop remarquable pour avoir échappé à des
observateurs tels que La Condamine, Bouguer et Gar-
cin , soit dans les plaines du Pérou , soit en Arabie ,
dans les Indes et à Bender Abassi, sur les côtes du
golfe Persique (34).
Cet aspect frappant du ciel étoile, pendant les
nuits si calmes et si pures des tropiques , avait pour
moi un attrait singulier ; aussi me suis-je toujours
efforcé d'en étudier les causes physiques, en notant,
sur mon journal, la hauteur où les étoiles cessaient de
scintiller, et l'hygrométricité correspondante de l'at-
mosphère. Cumana et la partie péruvienne du littoral
de l'Océan Pacifique, où jamais il ne tombe de pluie,
se prêtaient parfaitement à ce genre de recherches ,
tant que l'époque du brouillard connu sous le nom
de Garua n'était pas venue. D'après les moyennes dé-
duites de mes observations, c'est vers 10° ou 12° de
hauteur que les étoiles les plus brillantes cessent de
— 84 —
scintiller. Plus élevées sur l'horizon, elles n'émettent
qu'une douce lumière planétaire. Pour bien saisir cet
effet , il vaut encore mieux suivre la. même étoile de-
puis son lever jusqu'à son coucher, à travers toutes
ses variations de hauteur ; on détermine d'ailleurs ces
hauteurs par des mesures directes ou par le calcul ,
si Ton connaît l'heure et la latitude. Dans certaines
nuits isolées, tout aussi calmes, tout aussi pures que
les autres , j'ai vu la région où les étoiles scintil-
lent dépasser notablement la limite moyenne et
s'étendre jusqu'à 20% et même à 25° de hauteur; mais
je n'ai jamais pu saisir de relations entre ces ano-
malies et l'état thermométrique ou hygrométrique
des couches inférieures de l'atmosphère , seules ac-
cessibles à nos instruments. Quelquefois même , et
pendant plusieurs nuits successives, où l'hygromètre
marquait d'abord 85" la scintillation commençait
par être très- sensible pour des étoiles situées à eO''
et 70° de hauteur; puis elle cessait complètement
dans les régions élevées, jusqu'à une limite de 25°
au-dessus de l'horizon, et pourtant la seule mo-
dification appréciable, survenue dans l'atmosphère,
avait été un accroissement d'humidité : l'hygromètre
à cheveu de Saussure était monté de 85° à 93°. Ce n'est
donc pas la quantité de vapeurs dissoutes dans l'at-
mosphère, c'est leur inégale répartition dans les cou-
ches superposées, ce sont les courants d'air chaud
et d'air froid régnant dans les hautes réjions. sans
se faire sentir dans les basses , qui modifient le jeu
compliqué des interférences d'où naît le phéno-
— 85 —
mène en question. J'ai même vu certains nuages qui
venaient teindre le ciel d'une couleur rougeâtre, peu
de temps avant les secousses des tremblements de
terre, augmenter d'une manière frappante la scin-
tillation des étoiles élevées. Ces observations se rap-
portent toutes à une zone tropicale s'étendant à lO**
ou 12" des deux côtés de l'équateur, et à la sai-
son sans pluie et sans nuages, où le ciel est d'une
pureté si parfciite dans ces régions. Lorsqj.i' arrive
la saison des pluies , au passage du soleil par le zé-
nith du lieu , des causes puissantes , agissant
d'une manière très-générale et presque à la façon
de perturbations violentes, modifient les phéno-
mènes optiques dont je viens de parler. Les alises
du nord-est tombent tout à coup; le courant ré-
gulier des hautes régions qui va de l'équateur au
pôle, et le courant inférieur qui vient du pôle à l'é-
quateur s'interrompent et donnent lieu , par leur
cessation, à une continuelle formation de nuages.
Alors des torrents de pluie et des orages reviennent
périodiquement chaque jour, à une heure déter-
minée. Tous ces phénomènes de la saison des pluies
sont annoncés plusieurs jours d'avance par la scin-
tillation des étoiles élevées , là où d'ordinaire ce phé-
nomène est le plus rare. Cet indice est accompagné
d'éclairs qui brillent à l'horizon, sans qu'on voie de
nuages au ciel, si ce n'est quelques nuées apparais-
sant en longues et étroites colonnes et montant verti-
calement. J'ai souvent essayé de dépeindre, dans mes
écrits , ces signes précurseurs qui donnent au ciel
— 86 —
des tropiques une physionomie si caractéristique (35).
La vitesse de la lumière, ou du moins la pensée
que la lumière doit employer un temps quelconque
pour se propager, se trouve indiquée, pour la pre-
mière fois, dans le deuxième livre du Novum Orga-
num. Après avoir insisté sur l'immensité des espaces
célestes que la lumière traverse pour arriver jus-
qu'à nous. Bacon de Verulam soulève la question de
savoir ^si toutes les étoiles que nous voyons briller
en même temps existent réellement encore (36). On
s'étonne de rencontrer un pareil aperçu dans un ou-
vrage qui est resté fort au-dessous des connaissances
de son époque en astronomie et en physique. La
vitesse de la lumière réfléchie du Soleil a été me-
surée par Rœmer vers 1675. Rœmer fut conduit à sa
découverte en comparant les époques des éclipses
des satellites de Jupiter. La vitesse de la lumière
directe des étoiles a été mesurée, en 1121, par
Bradley qui donna ainsi, du même coup, la
raison de Taberration et la preuve matérielle du
mouvement de translation de la Terre, c'est-à-dire
de la vérité du système copernicien. Dans ces der-
niers temps, Arago a proposé de baser une troisième
sorte de mesure sur les changements d'éclat d'une
étoile variabie , telle qu'Algol dans la constellation
de Persée (37). A ces méthodes purement astronomi-
ques il faut encore joindre une mesure terrestre exé-
cutée récemment avec succès, près de Paris, par M. Fi-
zeaw. Cet ingénieux procédé rappelle une ancienne
leatative de Galilée, qui essaya vainement de déter-
- 87 —
miner la vitesse de la lumière par une combinaison
de signaux donnés à l'aide de deux lanternes éloignées.
En discutant les premières observations de Rœmer
sur les satellites de Jupiter, Horrebow et Ou Hamel
trouvèrent 14™ 7' pour le temps que la lumière em-
ploie à parcourir la distance moyenne du Soleil à la
Terre; Cassini donne li"" 10% et Newton, 7'" 30%
évaluation singulièrement voisine de la vérité (38).
Delambre n'employa dans ses calculs que les obser-
vations du premier satellite, et trouva 8"'13%2 (39).
Encke a fait remarquer avec raison combien il serait
important d'entreprendre , dans le même but , une
nouvelle série d'observations sur les éclipses des sa
tellites de Jupiter, aujourd'hui que la perfection des
lunettes donne l'espoir fondé d'obtenir par là des
résultats plus satisfaisants.
Les observations originales que Bradley avait insti-
tuées pour déterminer la constante de l'aberration
ayant été retrouvées par Rigaud, à Oxford, le doc-
teur Busch , de Kœnigsberg , \eb a soumises de nou-
veau au calcul, et en a déduit 20", 2116 pour la valeur
de cette constante (iO). Par conséquent la lumière
mettrait 8"' 12%14 à venir du Soleil à la Terre, et sa
vitesse serait de 31161 myriamètres par seconde.
Mais d'après une nouvelle série d'observations entre-
prises par Strave, à l'aide du grand instrument des
passages, dans le pi'emier vertical dePouikova, el
continuées pendant dix-huit mois , le pi emier de ces
nombres doit être notablement augmenté (41). Ce
grand travail a donné 2()",[[!\M pour la constante de
— 88 -
l'aberration; d'où Ton tire 8" 17',78 pour le temps
employé par la lumière à parcourir la distance du
Soleil à la Terre, et âl5i9 milles géographiques
(30831 myriamèlres) par seconde pour sa vitesse.
Ces deux derniers nombres ont été déduits de la con-
stante de Struve , en adoptant la parallaxe du Soleil
donnée par Encke en 1835 , et les dimensions du
sphéroïde terrestre calculées par Bessel (^Ép/iémé-
rides de Berlin pour 1852, Encke). C'est à peine si
Terreur probable de cette valeur de la vitesse atteint
un myriamètre et demi. Il y a une différence de 1/110
entre la constante de Struve et celle de Delambre
(8™ 13%2), que Bessel avait adoptée dans les Tabidœ
Begiomontanœ , et dont on se sert encore dans les
Éphémérides de Berlin, Au reste, il ne parait pas
que la discussion sur ce point doive être considérée
comme épuisée. On avait soupçonné, il y a plu-
sieurs années, une différence de vitesse de 1/134 en-
viron entre la lumière de l'étoile polaire et celle
d'une petite étoile qui l'accompagne ; mais cette
opinion est restée extrêmement douteuse.
Un physicien distingué par son savoir et par la
grande délicatesse de ses recherches expérimentales,
M. Fizeau , a exécuté une mesure de la vitesse de la
lumière sur une base terrestre de 8633 mètres seu-
lement, de Suresne à la butte Montmartre. Telle est,
en effet , la distance à laquelle il avait établi un mi-
roir, pour renvoyer à son point de départ, avec l'aide
d'ingénieux appareils, les rayons émis par un point
lumineux à l'une des stations. Cette lumière était
— 89 —
fournie par une sorte de lampe à oxygène et à hydro-
gène. Une roue portant 720 dents et faisant un assez
petit nombre de tours par seconde (12 tours 6/10) inter-
ceptait le rayon à son retour , ou lui livrait passage ,
suivant la vitesse de la roue; cette vitesse était
évaluée à l'aide d'un compteur. On a cru pouvoir
conclure de ces expériences que la lunûère artificielle
dont l'auteur s'est servi parcourait 17266 mètres,
c'est-à-dire le double de la distance des deux sta-
tions, en 1/18000 de seconde, ce qui donne 31079 my-
riamètres par seconde (42). La détermination anté-
rieure qui se rapproche le plus de ce résultat est celle
que Delambre a conclue des éclipses de l'un des sa-
tellites de Jupiter (3109/i myriamètres).
Des observations directes , et des considérations
ingénieuses sur l'absence de toute coloration pen-
dant les changements d'éclat des étoiles variables ,
ont conduit Arago à conclure que si les rayons diver-
sement colorés exécutent, d'après la théorie des on-
dulations, des vibrations transversales très-différentes
en vitesse et en amplitude, ils se propagent néan-
moins, avec des vitesses égales, dans les espaces
célestes. Ainsi , la vitesse de propagation des rayons
colorés dans l'intérieur des différents corps est indé-
pendante de la réfraction qu'ils y subissent (43). Les
observations d' Arago ont montré, en effet, que la
réfraction de la lumière stellaire , dans un même
prisme , n'est pas affectée par les combinaisons va-
riées de cette vitesse avec la vitesse propre de la
Terre. Toutes les mesures donnèrent constamment
— - 90 —
le résultat suivant : la lumière des étoiles vers les-
quelles la Terre marche, et celle des étoiles dont la
Terre s'éloigne, se réfractent exactement de la même
quantité. Parlant dans l'hypothèse de l'émission , le
célèbre observateur disait que les corps émettent des
rayons de toutes les vitesses , et que les seuls rayons
d'une vitesse déterminée produisent dans l'œil la
sensation de la lumière (44).
Il est intéressant de comparer la vitesse des rayons
émis par le Soleil, les .toiles ou les corps terrestres,
rayons qui sont déviés de la même manière par l'angle
réfringent d'un prisme quelconque, avec celle de la
lumière qu'engendre l'électricité de frottement. Les
admirables recherches de Wheatstone porteraient à at-
tribuer à cette lumière une vitesse plus grande, au
moins dans le rapport de 3 à 2. Si l'on s'en tient sur
ce point à la plus faible évaluation qu'ait fournie l'ap-
pareil optique à miroir tournant de Wheatstone, la
lumière électrique parcourrait encore ^288000 milles
anglais par seconde, c'est-à-dire plus de 46300 myria-
mètres, en comptant le slafut-mtle (69,12 par degré),
pour 1609 mètres (/i5). Admettons , avec Struve , que
la vitesse de la lumière steilaire est de 30831 my-
riamèlres , cette vitesse serait donc dépassée de
15500 myriamètres par celle de la lumière élec-
trique.
Un tel résultat contredit en apparence une opinion
déjà citée de W. Herschol , d'après laquelle la lu-
mière du Soleil et des étoiles résulterait peut-être
d'actions électro-magnétiques, et serait par consé-
— 91 —
qaent assimilable à une perpétuelle aurore boréale.
Je dis en apparence , car ces phénomènes électro-ma-
gnétiques pourraient être . sans aucun doute , de na-
ture très-complexe et très-variée dans les différents
corps célestes, et la lumière produite pourrait possé-
der des vitesses très-différentes. 11 faut le dire, d'ail-
leurs , les résultats de Wheatstone sont encore affec-
tés d'une incertitude qui laisse place à ces conjec-
tures. Leur auteur lui-même les considère « comme
étant trop peu fondés, comme ayant encore trop
besoin d'une confirmation nouvelle » pour pouvoir
être utilement comparés avec ceux de l'aberration ou
des éclipses des satellites de Jupiter.
L'attention des physiciens a été vivement excitée
par les recherches que Walker a faites récemment,
aux États-Unis, sur la vitesse de Télectricité. 11 s'agis-
sait de déterminer, à l'aide du télégraphe électrique,
les différences de longitudes entre Washington , Phi-
ladelphie, New- York et Cambridge. A cet effet, l'hor-
loge astronomique de l'observatoire de Philadelphie
fut mise en communication électrique avec un appa-
reil de Morse, où les battements du pendule mar-
quaient une suite de points équidislants, sur une
bande de papier sans fin. Le télégraphe électrique
transmettait presque instantanément chaque indica-
tion de l'horloge aux autres stations , et y ponctuait
de même le temps de Philadelphie sur d'autres bandes
de papier qu'un mouvement régulier déroulait con-
tinuellement. Dans cette combinaison, des signaux
quelconques pouvaient être intercalés entre ceux de
^ 92 —
la pendille. Un observateur n'avait qu'à presser du
doigt sur une touche pour signaler l'instant du pas-
sage d'une étoile par le méridien de sa station.
« Cette méthode américaine possède , dit Steinheil ,
un avantage essentiel , celui de rendre la détermina-
tion du temps indépendante de la liaison de deux
de nos sens , l'ouïe et la vue ; car pendant que la
marche de la pendule s'inscrit d'elle-même , sans
que l'observateur ait besoin de s'en préoccuper,
celui-ci saisit et marque le passage de l'étoile (avec
la précision de 1/70 de seconde , suivant Walker). »
Enfin, en comparant les résultats obtenus à Phila-
delphie et à Cambridge , par exemple , on trouve
une difiérence constante , et cette différence est due
au temps employé par le courant électrique pour
parcourir deux fois le conducteur fermé qui unit les
deux stations.
Ces mesures, exécutées sur des fils conducteurs
de 1050 milles anglais (1689 kilomètres), fournirent
18 équations de condition entre les inconnues du
problème : on en déduisit 18700 milles (30094 ki-
lomètres) pour la vitesse de propagation du courant
hydrogalvanique (46), c'est-à-dire, une vitesse quinze
fois moindre que celle de l'électricité dans les expé-
riences de Wheatstone ! Comme ces remarquables
recherches furent instituées à l'aide d'un seul fil, la
moitié du conducteur étant remplacée, comme on
dit, par la terre, on pourrait croire que la nature
et les dimensions du milieu parcouru influent à la
fois sur la vitesse avec laquelle se propage l'électri-
— 93 —
cilé (47). Dans le circuit vollaïqiie , les conducteurs
s'écliaufîent d'autant plus que leur conductibilité est
moindre, et Ton sait, par les derniers travaux de
Riess, combien les tensions électriques présentent
de phénomènes variés et complexes (48). Les vues
actuellement régnantes sur ce qu'on nomme d'ordi-
naire « fermer le circuit par la terre » sont oppo-
sées à toute idée de propagation linéaire de molécule
à molécule, entre les extrémités des fils conducteurs ;
ce qu'on regardait autrefois comme un courant réel-
lement formé à travers le sol, est remplacé aujour-
d'hui par l'hypothèse d'une restitution continue de
la tension électrique.
Quoique la vitesse de la lumière paraisse être la
même pour toutes les étoiles, du moins dans la limite
de précision avec laquelle les observations modernes
ont pu donner la constante de l'aberration , on s'est
cru pourtant autorisé à examiner sil ne pourrait pas
exister des corps célestes dont la lumière ne parvien-
drait pas jusqu'à nous, retenue qu'elle serait par
l'attraction d'une masse énorme et forcée de revenir
vers le corps d'où elle aurait été lancée. La théorie
de l'émission a donné une forme scientifique à ce
jeu d'imagination (49). J'en parle ici cependant,
parce que j'aurai plus tard occasion de revenir à une
hypothèse analogue, en traitant des mouvements pro-
pres de Sirius et de Procyon , dont les anomalies ont
été attribuées à l'action de certains corps obscurs.
11 entre dans le plan de cet ouvrage de signaler tout
ce qui a donné, de nos jours, une impulsion quel-
~ 94 -
conque à la science : à ce piix seulement, ce livre
pourra présenter un tableau fidèle du caractère de
répoque où il aura paru.
Depuis plus de deux mille ans, on s'occupe de re-
cherches pholométriqiies sur la lumière des astres qui
brillent de leur propre éclat dans l'univers; on s'ef-
force de déterminer ou d'estimer du moins leurs
intensités relatives. C'est que la description du ciel
étoile ne se réduit pas à fixer seulement , avec une
précision extrême , les distances mutuelles des astres ,
ou à coordonner leurs positions par rapport aux
grands cercles de la sphère céleste ; elle comprend
encore la connaissance et la mesure de leur éclat
individuel. Ce dernier caractère est môme celui dont
les hommes se sont préoccupés d'abord. Longtemps
avant de songer à grouper les étoiles en constella-
tions , ils ont donné des noms propres aux plus bril-
lantes. J'ai pu moi-même constater cette tendance
primitive chez les tribus sauvages qui habitent les
épaisses forêts du haut Orénoque et de l'Atabapo. Là
d'impénétrables fourrés me réduisaient à observer
d'ordinaire les plus hautes étoiles pour déterminer la
latitude, et quand je consultais les naturels, prin-
cipalement les vieillards, sur les plus belles étoiles, Ca-
nopus, Achernar, les Pieds du Centaure ou a de la Croix
du Sud , ils m'en disaient aussitôt les noms consacrés
parmi eux. Si le catalogue de constellations connu
sous le nom de Catastérismes d'Ératosthène avait la
haute antiquité que lui attribuèrent si longtemps ceux
qui en plaçaient l'époque entre Autolycus et Timo-
— 95 --
charis, cent cinquante ans avant Hipparque, une
particularité de ce catalogue nous permettrait d'assi-
gner une limite pour le temps où les étoiles n'étaient
pas encore rangées, chez les Grecs, par ordre de gran-
deur ou d'éclat. Quand il s'agit, en effet, d'énumérer
les étoiles qui constituent chaque constellation , les
Catastérismes citent assez souvent le nombre des
étoiles les plus brillantes ou les plus grandes et celui
des étoiles obscures, moins faciles h reconnaître (50) ;
jamais ils ne comparent entre elles les étoiles ap-
partenant à des groupes différents. Mais Bernhardy ,
Baehr et Letronne rejettent les Catastérismes plus
de deux siècles après le catalogue d'Hipparque. Ce
n'est d'ailleurs qu'une compilation sans mérite, un
simple e\\vdi\ià\xPoeticiim astronomiciim attribué à Ju-
lius Hyginus, ou même du poëme d'Eratosthène l'an-
cien , intitulé Epp.yjç. Il en est autrement du catalogue
d'Hipparque que nous possédons sous la forme qui lui
a été donnée dans l'Almageste. Ce catalogue contient
la première détermination des ordres de grandeur
ou d'éclat de 1022 étoiles, c'est-à-dire du cinauième
environ des étoiles visibles à l'œil nu sur le ciel
entier, depuis la 1'' jusqu'à la 6* grandeur. Seu-
lement nous ignorons si ces grandeurs ont été
déterminées par Hipparque lui-même, ou si elles
ont été empruntées aux observations de Timocharis
et d'Aristille, dont Hipparque a fait un si fréquent
usage.
Cette œuvre forme la base de tous les travaux pos-
térieurs des Arabes et des astronomes du moyen âge.
- S6 —
On y retrouve même l'origine d'une habitude qui
s'est prolongée jusqu'au xix^ siècle, celle de li-
miter à 15 le nombre des étoiles de 1" grandeur.
Mœdler en compte 18 ; Rûmker, qui a soumis le ciel
austral à une révision soigneuse, en compte 20.
L'ancien nombre est uniquement basé sur la classifi-
cation qu'on trouve dans l'Almageste, à la fm du ca-
talogue stellaire du 8' livre. Ptolémée appliquait l'épi-
Ihète d'obscures aux étoiles qui sont au-dessous de la
6' grandeur. Chose singulière, il ne cite que 49 étoiles
de 6' grandeur qu'il a choisies d'une manière à peu
près uniforme dans les deux hémisphères ; or comme
son catalogue comprend à peu près la cinquième
partie des étoiles visibles à l'œil nu^ il eût dû donner,
toute proportion gardée, 640 étoiles de cette gran-
deur, d'après l'énumération qu'Argelander en a
faite. Quant aux nébuleuses (vscpeXoeioerç) de Ptolémée
et des Catastérismes du Pseudo-Ératosthène, ce sont
pour la plupart de petits amas d'étoiles qu'on dis-
tingue aisément sous le ciel pur des contrées méri-
dionales (51) ; c'est du moins ce que me donne à penser
l'indication relative à une nébuleuse située dans la
main droite de Persée. Galilée lui-même qui ignorait,
comme les astronomes grecs et arabes , l'existence
de la nébuleuse d'Andromède , quoique cette nébu-
leuse soit visible à Fœil nu , a dit dans son Nuncius
sidereus que les stellœ nebulosœ sont de simples amas
d'étoiles , lesquels « sicut aerolae sparsim per selhera
fulgent » (52). Quoique l'expression de grandeurs de
différents ordres (twv /[/syaXwv rdhç) ait été restreinte,
— 97 —
dès l'origine, au sens de gradation d'éclat ou d'inten-
sité lumineuse , elle a pourtant donné lieu , dès le
IX' siècle, à des hypothèses sur les diamètres que
devaient avoir les étoiles d'éclat différent (53) ; comme
si cet éclat ne dépendait pas à la fois de la distance ,
du volume, de la masse, et avant tout des propriétés
physiques , spéciales , de la matière dont la surface
des astres est formée.
La science fit un pas de plus vers le xv" siècle, à l'é-
poque de la domination des Mogols, lorsque l'astro-
nomie florissait à Samarcande , sous le Timouride
Oulough Beg. Chaque ordre de grandeur de l'ancienne
classification d'Hipparque et de Ptolémée fut sub-
divisé; on y distingua les étoiles petites, moyennes
et grandes , à peu près comme Struve et Argelander
ont divisé depuis en dix les mêmes intervalles (54). Les
Tables d'Oulough Beg attribuent ce progrès en pho-
tométrie à Abderrahman Soufi , auquel on doit un
ouvrage sur « la connaissance des fixes » , ainsi que
la première mention de l'une des Nuées de Magellan ,
sous le nom à^Bœuf blanc. Depuis l'universelle intro-
duction des lunettes dans le domaine de l'astronomie,
l'estimation des grandeurs a dû aller bien au delà
du 6' ordre. Les recherches photométriques avaient
été fortement stimulées par le phénomène des étoiles
nouvelles qui apparurent subitement dans le Cygne
et dans le Serpentaire , et dont la première a brillé
21 ans. Il fallut en effet , pour déterminer les phases
d'accroissement et de diminution de leur lumière,
comparer continuellement ces étoiles nouvelles à d'au-
III. 7
— 98 —
très étoiles bien connues. Alors les étoiles nébuleuses
de Ptolémée purent être classées, dans l'échelle nu-
mérique des grandeurs, au-dessous de la 6% et peu à
peu les astronomes furent conduits à prolonger cette
échelle par delà la 16' grandeur, afin de représenter
des dégradations successives, qui sont encore ap-
préciables, suivant Sir John Herschel, pour les
astronomes munis de puissants instruments (55).
Disons pourtant qu'à cette limite extrême l'estime
devient excessivement incertaine : Struve assigne
quelquefois le 12" ou le 13^ rang à des étoiles que
J. Herschel place dans le 18' ou le 20° ordre de gran-
deur.
Il ne saurait entrer dans mon plan de discuter ici
les moyens très-variés qu'on a imaginés pendant un
siècle et demi, depuis Auzout et Huyghens jusqu'à
Bouguer et Lambert , depuis W. Herschel, Rumford
et Wollaston jusqu'à Steinheil et J. Herschel, pour
mesurer l'intensité de la lumière. Qu'il nous suffise
de signaler rapidement ces diverses méthodes. On a
eu recours à la comparaison des ombres des lumières
artificielles , en faisant varier le nombre et la dis-
tance de ces lumières. Plus tard on employa des dia-
phragmes , des plans de glacé d'épaisseurs ou même
de couleurs variables; puis des étoiles artificielles
formées par réflexion sur des sphères de verre. On
imagina de rapprocher assez deux télescopes pour que
l'œil pût se transporter de l'un à l'autre , durant le
court intervalle d'une seconde. On composa des ap-
pareils dans lesquels on pouvait voir simultanément
— 09 —
par réflexion les deux étoiles qu'il s'agissait de com-
parer, en ayant soin de rectifier la lunette de telle sorte
qu'une même étoile y donnât deux images d'égale
intensité (56). On construisit d'autres appareils où
un objectif^ muni d'un miroir, pouvait être masqué
plus ou moins par des diaphragmes tournants , dont
la rotation était mesurée sur un cercle divisé. On
a formé des images stelliformes , d'intensité va-
riable , en concentrant les rayons de la Lune ou de
Jupiter à l'aide de Vastromètre , instrument composé
d'un prisme réflecteur et d'une lentille (57). Enfin
on a eu recours à des objectifs divisés dont les
deux moitiés recevaient , par des prismes , la lu-
mière des étoiles. Le succès n'a point répondu à
tant d'efforts : Tastronome distingué qui s'est le
plus occupé des recherches de ce genre et dont la
judicieuse activité a pu s'exercer dans les deux hémi-
sphères. Sir John Herschel , avoue lui-même qu'a-
près tant de travaux une méthode pratique et exacte,
pour les mesures photométriques , reste un deside-
ratum en astronomie. A son avis, la mesure de l'in-
tensité de la lumière est encore dans l'enfance ; et
cependant l'attention des astronomes se porte plus
que jamais de ce côté, stimulée qu'elle est par le
problème des étoiles changeantes et par un phéno-
mène céleste qui s'est présenté de nos jours, l'ac-
croissement d'éclat extraordinaire que reçut en 1837
une étoile du Navire Argo.
En fait de grandeurs stellaires , il est essen-
tiel de distinguer soigneusement deux genres bien
— 100 —
différents de classification. L'un se réduit à une
distribution des étoiles rangées d'après leur éclat
décroissant ; le Manuel scientifique pour les Naviga-
teurs de Sir John Herschel en contient un exemple.
L'autre est basé sur l'évaluation numérique des
rapports de grandeurs, ou même sur des nom-
bres qui expriment l'éclat absolu , la quantité de lu-
mière émise (58). De ces deux derniers modes, le
premier, qui borne ses prétentions à reproduire en
nombres des évaluations faites à la simple vue, mérite
probablement la préférence , quand ces évaluations
ont été instituées avec un soin convenable (59). Dans
l'état imparfait où se trouve la photométrie , il ne
s'agit encore, en effet, que d'obtenir un premier degré
d'approximation. Mais , il faut le reconnaître , c'est
dans l'estime faite à la vue simple que se manifeste le
plus l'influence de l'individualité propre à chaque ob-
servateur. A cette diflîculté première, il faut ajouter
celles qui naissent de la pureté si variable de l'atmo-
sphère et de l'inégale hauteur des astres très-éloignés
l'un de l'autre, entre lesquels la comparaison n'est
possible qu'à l'aide d'intermédiaires nombreux; on
doit tenir compte surtout des erreurs qui peuvent
tenir à la différence des couleurs. La lumière est-elle
d'égale teinte et du même degré de blancheur, on ren-
contre de nouveaux obstacles dans la vivacité de son
éclat. Par exemple, il est bien plus difficile de com-
parer Sirius et Canopus, a du Centaure et Achernar,
Deneb et Véga , que des étoiles beaucoup plus faibles,
comme celles de 6' ou de 7* grandeur. La difficulté
— 101 —
s'accroît encore pour les étoiles très-brillantes, quand
il s'agit de comparer des étoiles jaunes , comme Pro-
cyon , la Chèvre ou Ataïr, avec des étoiles rouges,
telles qu'Aldébaran, Arcturus et Béleigeuze (60).
Sir John Herschel a tenté , à l'exemple de Wol-
laston, de déterminer le rapport qui existe entre
l'intensité de lumière d'une étoile et celle du So-
leil. Il a pris la Lune pour point de comparaison in-
termédiaire, et en a comparé l'éclat à celui de l'étoile
double a du Centaure, une des plus brillantes (la 3*)
de tout le ciel. Ainsi fut accompli , pour la seconde
fois, le souhait que John Michell formait dès 1787 (61).
Par la moyenne de 11 mesures, instituées à l'aide
d'un appareil prismatique, Sir John Herschel trouva
que la pleine Lune est 27408 fois plus brillante que
a du Centaure. Or, d'après Wollaston, le Soleil est
801072 fois plus brillant que la pleine Lune (62). Ainsi
la lumière que le Soleil nous envoie est à celle que
nous recevons de a du Centaure dans le rapport de
22000 millions à 1. En tenant compte de la distance,
d'après la parallaxe adoptée pour cette étoile, il
résulte des données précédentes que l'éclat absolu de
a du Centaure est double de celui du Soleil (dans le
rapport de 23 à 1 0). Wollaston a trouvé que la lumière
de Sirius est, pour nous, 20000 millions de fois plus
faible que celle du Soleil : son éclat réel , absolu ,
serait donc 63 fois plus grand que celui du Soleil ,
si , comme on le croit , la parallaxe de Sirius doit être
réduite à 0",230 (63). Nous sommes conduits ainsi à
ranger notre Soleil parmi les étoiles d'un médiocre
— 102 —
éclat intrinsèque. Sir John Herschel estime que
l'éclat apparent de Sirius est presque égal à celui de
200 étoiles de 6' grandeur.
Puisqu'on dernier résultat il paraît vraisemblable,
au moins par analogie , que tous les astres sont varia-
bles,non-seulement sous le rapport de la position qu'ils
occupent dans Tespace absolu , mais encore sous celui
de leur éclat intrinsèque, quelle que soit d'ailleurs la
durée encore inconnue des périodes de ces variations ;
puisque d'autre part toute vie organique est subordon-
née à l'intensité de la lumière et de la chaleur de notre
Soleil , on est en droit de regarder les progrès de la
photométrie comme un des buts les plus sérieux et les
plus importants que la science puisse se proposer.
On comprend quel intérêt les races futures attache-
ront à des déterminations numériques que de nou-
veaux perfectionnements en photométrie peuvent
seuls nous permettre de leur léguer sur l'état actuel
du firmament. Là se trouvera, par exemple, l'explica-
tion de nombreux phénomènes qui sont en rapport
intime avec l'histoire thermologique de notre atmo-
sphère et avec l'ancienne distribution géographique
des espèces animales et végétales. Des considérations
de même nature s'étaient déjà présentées , il y a plus
d'un demi-siècle, à l'esprit de William Herschel, ce
grand investigateur qui, devançant la découverte
des rapports intimes du magnétisme avec Télectricilé,
osait assimiler la lumière, perpétuellement engen-
drée dans l'enveloppe gazeuse du Soleil , à celle des
aurores boréales de notre globe terrestre (6ft).
— 105 —
Arago a reconnu dans l'état réciproquement com-
plémentaire des anneaux colorés, vus par transmis-
sion et par réflexion, le moyen qui laisse concevoir
le plus d'espérance d'arriver à la mesure directe de la
quantité de lumière. J'ai cité dans une note (65), en
conservant les propres termes de mon ami, l'indica-
tion de sa méthode photométrique, et celle du prin-
cipe optique sur lequel il a basé son cyanomètre.
En raison de ces variations cosmiques de la lu-
mière stellaire, nos cartes célestes et nos catalo-
gues, où l'on trouve soigneusement indiquées les
diverses grandeurs des étoiles , ne sauraient consti-
tuer un tableau homogène de l'état du ciel. Il faut
distinguer, en réalité, dans les diverses parties de
ce tableau , celles qui répondent à des époques très-
différentes. On a cru longtemps que l'ordre des let-
tres dont on s'était servi pour désigner les étoiles, au
xvn* siècle , pourrait fournir des indices sûrs de ces
variations de grandeur et d'éclat. Mais en discutant
sous ce point de vue V Uranométrie de Bayer, Arge-
lander a prouvé qu'il n'était pas possible de juger de
l'éclat relatif des étoiles, à l'époque de Bayer, d'après
le rang que leurs lettres occupent dans l'alphabet;
car l'astronome d'Augsbourg s'est laissé guider, dans
le choix de ces lettres, par la forme et la direc-
tion des constellations , plutôt que par l'éclat des
étoiles elles-mêmes (66).
104
SÉRIE PHOTOMÉTRIQUE DES ÉTOILES,
J'intercale ici un tableau que j'emprunte au récent ouvrage
de Sir John Herschel, Outlines of Mtronomy, p. 6^5 et 6/16.
JMon savant ami 5 M. le docteur Galle, a bien voulu se charger
de le coordonner et d'en rédiger l'explication. Voici un extrait
de la lettre qu'il m'écrivit, à ce sujet, en mars 1850 :
« Les nombres de V échelle phoiométrique , contenue dans les
Outlines of Astronomy, ont été formés à l'aide de ceux de
Véchelle vulgaire, en ajoutant uniformément 0,^1 à ces derniers.
Les grandeurs indiquées par les nombres de cette seconde
éclielle proviennent d'observations directes. L'auteur a institué
des séries de comparaisons (séquences) entre les diverses étoiles,
et a combiné ses résultats avec les grandeurs ordinairement
employées par les astronomes {Foyage au Cap, p. SO^-352);
sous ce dernier rapport, le Catalogue de la Société astrono-
mique de Londres, pour l'an 1827, lui a servi de base (p. 305).
Les mesures photométriques, proprement dites, faites sur plu-
sieurs étoiles à l'aide de Vastromèlre, n'ont pas servi directe-
ment à construire cette table, mais seulement à voir jusqu'à
quel point l'échelle ordinaire des grandeurs (la 1", la 2% la 3^ . . .
grandeur) peut représenter la quantité de lumière réellement
émise par chaque étoile. En procédant ainsi, l'auteur est ar-
rivé à ce résultat remarquable que la série de nos grandeurs
habituelles (1"^% 2s 3%....) répond à peu près h celles que
prendrait une même étoile de l'*^ grandeur, transportée suc-
cessivement aux distances 1,2,3, ...., et l'on sait que, dans
ce cas, l'intensité de la lumière serait représentée par la
série 1,1/^, 1/9, IjiQ, .... {Voyage au Cap, 1^. 371,372; Out-
lines, p. 521 , 522). Toutefois, si l'on veut perfectionner cette
remarquable concordance des deux séries, il faut augmenter nos
-^ 105 ~
évaluations habituelles d'environ 4/2 grandeur, ou plus exacte-
ment de 0,41. Dans ce système, une étoile estimée actuellement
de 2^ grandeur devient de la grandeur 2,Zil ; une autre de
2,5 grandeur devient de 2,91 , etc.... C'est \kV échelle photomé-
trique que Sir John Herschel propose de substituer à l'échelle ac-
tuelle des grandeurs {Foyage au Cap, p. 372; Outlines, p. 522),
et assurément cette proposition mérite bien d'être accueillie.
D'un côté , en effet , la différence entre les deux échelles est à
peine sensible (would hardly be Mi, "Foyage au Cap, p. 372) ;
d'autre part, la table des Outlines (p. 645 et suiv.) , peut déjà
servir de base jusqu'à la U^ grandeur, en sorte qu'on peut dès
aujourd'hui appliquer complètement aux étoiles la règle qu'on a
suivie jusqu'ici d'une manière instinctive, et qui consiste en ce que
les intensités relatives à la r% la 2^^ la 3% la 4% .... grandeur
sont proportionnelles aux nombres 1, 1/4, 1/9, 1/16, etc....
Sir John Herschel a choisi a du Centaure comme étoile normale
de première grandeur pour l'échelle photométrique , et comme
unité pour la quantité de lumière (Outlines, p. 523 ; Foyage
au Cap,^. 372). D'après cela, si Ton élève au carré le nombre
qui représente la grandeur photométrique d'une étoile , on
obtient l'inverse du rapport de la quantité de lumière à celle
de a du Centaure. Par exemple , x d'Orion ayant 3 pour gran-
deur photométrique , émet 9 fois moins de lumière que a du
Centaure ; et en même temps , ce nombre 3 indique que
X d'Orion doit être 3 fois plus éloigné de nous que a du Centaure,
si ces deux étoiles sont des astres d'égale grandeur linéaire et
d'égal éclat. Si l'on eût fait choix d'une autre étoile, de Sirius,
par exemple , qui est 4 fois plus brillant, pour servir d'unité à
cette échelle dont les nombres indiquent à la fois léclat et la
distance , la régularité dont il vient d'être question ne se serait
pas présentée avec la même simplicité. En outre, deux particu-
larités désignaient assez a du Centaure ; sa distance est connue
avec un certain degré de probabilité , et cette distance est la
plus petite de toutes celles que l'on a mesurées jusqu'ici.
» L'auteur des Outlines montre dans ce dernier ouvrage ,
— 106 —
p. 521 , que l'échelle pli otora étriqué , ordonnée suivant les
carrés 1 , 1/4, 1/9, 1/16, .... est préférable à toute autre série ,
telle que les progressions géométriques 1, 1/2, 1/4, 1/8, .... ou
i , 1/3, 1/9, 1/27, .... Pendant votre voyage en Amérique, vous
aviez adopté une progression arithmétique pour coordonner les
observations que vous fîtes sous l'équateur; mais vos séries,
ainsi que les précédentes , ne s'adaptent pas aussi bien à l'échelle
ordinaire des grandeurs stellaires (vulgar scale ) que la pro-
gression des carrés adoptée par Herschel (Humboldt, Recueil
d^Observ. aslron. , t. I , p. Lxxi, et Âi^tron. Nachrichten,
n**374). Dans la table suivante, les 190 étoiles des OutUnes sont
ordonnées d'après l'ordre des grandeurs seulement, et non
d'après leurs décHnaisons boréales ou australes. »
CATALOGUE
de 100 étoiles^ depuis la ï'^ jusquà la ^"^ grandeur , rangées,
d'après les dékrminations de Sir John Herschel , dans V ordre
de leurs grandeurs estimées photométriquement, et dans celui
de leurs grandeurs ordinaires, d'après les données les plus
exactes,
ÉTOILES DE 1" GRANDEUR.
NOMS
DES ÉTOILES.
es
3 .
W -
Q —
Z "C
< '-
X. "'
0,08
0,49
NOMS
DES ÉTOILES.
GRANDEUR
onlin.
i E
Q C
Z ~
< i;
an —
O —
1,4:
Sirius.
a Orion.
1,0:
Tf) Argo (var.).
»
»
a Eridan.
1,09
1,50
Canopus.
0,29
0,70
Aldébaran.
1,1:
1,5:
a Centaure.
0,59
1.00
^Centaure.
1,17
1,58
Arcturus.
0,77
1,18
a Croix.
1,2
1,6
Rigel.
0,82
1,23
Antarès.
1.2
1,6
La Chèvre.
1,0:
1,4:
a Aigle.
1,28
1,69
a Lyre.
1,0:
1,4:
L'Épi.
1,38
1,79
Procyon.
1,0:
1,4:
— 107 —
ÉTOILES DE 2' GRAÎVDEUR.
NOMS
s .
c •-
ce .
5 ^
NOMS
a
s .
- .E
es .
il
DES ÉTOILES.
z 1^
1,54
II
1,95
DES ÉTOILES.
es ^
2,23
< ^
2,64
Fomalhaut.
a Triangle austral.
P Croix.
1,57
1,98
£ Sagittaire.
2,26
2,67
Pollux.
1,6:
2,0-
p Taureau.
2,28
2,69
Regulus.
1,6:
2,0:
La Polaire.
2,28
2,69
a Grue.
1,66
2,07
6 Scorpion.
2,29
2,70
Y Croix.
1,73
2,14
a Hydre.
2,30
2,7l'
s Orion.
1,84
2,25
0 Chien.
2^32
2,73
2,74
£ Chien.
1,86
2,27
a Paon.
2,33
X Scorpion.
1,87
2,28
Y Lion.
2,34
2,75;
a Cygne.
1,90
2,31
? Grue.
2,36
2,77 j
Castor.
1,94
2,35
a Bélier.
2,40
2,81
£ Ourse (var).
1,95
2,36
a Sagittaire.
2,41
2,82
a Ourse (var).
1,96
2,37
8 Argo.
2,42
2,83
^ Orion.
2,01
2,42
Ç Ourse.
2,43
2,84
1
pArgo.
2,03
2,44
p Andromède.
2,45
2,86 1
a Persée.
2,07
2,^8
p Baleine.
2,46
2,87:
YArgo.
2,08
2,49
1 Argo.
2,46
2,87 1
£ Argo.
2,18
2,59
p Cocher.
2,48
2,89 1
Tf] Ourse (var).
2,18
2,59
Y Andromède.
2,50
2,91
7 Orion.
2,18
2,59
— 108 -^
ÉTOILES DE 3* GRAÎXDEUR.
NOMS
ce
3 «
w c
« 1
o o
NOMS
ce
"1
§ 1
DES ÉTOILES.
o
2,52
2,93
DES ÉTOILES.
2,85
^ 2
3,26
Y Cassiopée.
P Verseau.
a Andromède.
2,5Zi
2,95
ô Scorpion.
2,86
3,27
6 Centaure.
2,54
2,95
£ Cygne.
2,88
3,29
a Cassiopée.
2,57
2,98
Tj Orphiucus.
2,89
3,30
(3 Chien.
2,58
2,99
Y Corbeau.
2,90
3,31
X Orion
2,59
3,00
a Céphée.
2,90
3,31
Y Gémeaux.
2,59
3,00
V] Centaure.
2,91
3,32
8 Orion.
2,61
3,02
a Serpent.
2,92
3,33
Algol (var).
2,6^2
3,03
0 Lion.
2,94
3,35
£ Pégase.
2,62
3,03
X Argo.
2,94
3,35
Y Dragon.
2,62
3,03
P Corbeau.
2,95
3,36
P Lion.
2,63
3,04
p Scorpion.
2,96
3,37
a Ophiucus.
2,63
3,04
^ Centaure.
2,96
3,37
P Cassiopée .
2,63
3,04
l Ophiucus.
2,97
3,38
Y Cygne.
2,63
3,04
a Verseau.
2,97
3,38
a Pégase.
2,65
3,06
TT Argo.
2,98
3,39
p Pégase.
2,65
3,06
Y Aigle.
2,98
3,39
Y Centaure.
2,68
3,09
0 Cassiopée.
2,99
3,40
a Couronne.
2,69
3,10
8 Centaure.
2,99
3,40
Y Ourse.
2,71
3,12
a Lièvre.
3,00
3,41
e Scorpion.
2,71
3,12
0 Ophiucus.
3,00
3,41
^ Argo.
2,72
3,13
C Sagittaire.
3,01
3,42
p Ourse.
2,77
3,18
ri Bouvier.
3,01
3,42
a Phénix.
•2,78
3,19
t] Dragon.
3,02
3,43
i Argo.
2,80
3,21
71 Ophiucus.
3,05
3,^6
£ Bouvier.
2,80
3,21
p Dragon.
3,06
3,47
a Loup.
2,82
3,23
p Balance.
3,07
3,48
£ Centaure.
2,82
3,23
Y Vierge.
3,08
3,49
fi Chien.
2,85
3,26
(i. Argo.
3,08
3,49
— 109 —
ÉTOILES DE 3' GRANDEUR {suite).
NOMS
c;
o —
es .
" i
NOMS
c:
B .
" 1
Q S
DES ÉTOILES.
o
3,09
3,50
DES ÉTOILES.
3,32
% 2
3,73
(3 Bélier.
|3 Capricorne.
Y Pégase.
3,11
3,52
p Argo.
3,32
3,73
ô Sagittaire.
3,11
3,52
Ç Aigle.
3,32
3,73
a Balance.
3,12
3,53
? Cygne.
3,33
3,74
X Sagittaire.
3,13
3,54
Y Persée.
3,34
3,75
B Loup.
3,14
3,55
\x. Ourse.
3,35
3,76
£ Vierge ?
S,U
«>,5d
(3 Triangle boréal.
3,35
3,76
a Colombe.
3,15
3,56
T. Scorpion.
3,35
3,76
0 Cocher.
3,17
.3,58
? Lièvre.
3,35
3,76
J3 Hercule.
3,18
3,59
Y Loup.
3,36
3,77
'. Centaure.
3,20
3,61
0 Persée.
3,36
3,77
0 Capricorne.
3,20
3,61
'^ Ourse.
3,36
3,77
ô Corbeau.
3,22
3,63
e Cocher (var.).
3,37
3,78
a Chiens de chasse.
3,22
3,63
0 Scorpion.
3,37
3,78
(3 Ophiucus.
3,23
3,64
t Orion.
3,37
3,78
0 Cygne.
3,24
3,65
Y Lynx.
3,39
3,80
£ Persée.
3,26
3,67
Ç Dragon.
3,40
3,81
7) Taureau ?
3,26
3 67
a Autel.
3,40
3,81
p Eridan.
3,26
3,67
Ti Sagittaire.
3,40
3,81
6 Argo.
3,26
3,67
TT Hercule.
3,41
3,82
P Hydre.
3,27
3,68
!3 Petit Chien ?
3,41
3,82'
C Persée.
3,27
3,68
^ Taureau.
3,42
3,83
Ç Hercule.
3,28
3,69
0 Dragon.
3,42
3,83
e Corbeau.
3,28
3,69
|j. Gémeaux.
3,42
3,83
i Cocher.
3,29
3,70
Y Bouvier.
3,43
3,84
yPtitite Ourse.
3,30
3,71
£ Gémeaux.
3,Z|3
3,84
vj Pégase.
3,31
3,72
a 3Iouche.
3,43
3,84
P Autel.
3,31
3,72
a Hydre ?
3,44
3,85
a Toucan.
3,32
3,73
t: Scorpion.
3,44
3,85
— 110 -
ÉTOILES DE o« GRAÎVDEUR [^uxtè).
NOMS
DEUR
in.
NOMS
fcj c
=• G 8
MCI
O O j
DES ÉTOILES.
z -
3,44
5 =>
3,85
DES ÉTOILES.
2^. r'
G
3,46
< 2
G «^ i
3,87
0 Hercule.
T) Cocher.
ô Gémeaux.
3,44
3,85
Y Lyre.
3,47
3,88
qOrion.
3,45
3,86
T) Gémeaux.
3,48
3,891
p Céphée.
3,45
3,86
Y Céphée.
3,48
3,89
6 Ourse.
3,45
3,86
X Ourse.
3,49
3,90
^ Hydre.
3,45
3,86
£ Cassiopée.
3,49
3,90
Y Hydre.
3,46
3,87
e Aigle.
3,50
3,91
p Triangle austral.
3,46
3,87
a Scorpion.
3,50
3,91
i Ourse.
3,46
3,87
T Argo.
3,50
3,91
« Le petit tableau suivant peut encore offrir de l'intérêt :
les nombres désignent les quantités de lumière de 17 étoiles de
1" grandeur, telles qu'elles résultent des grandeurs photomé-
triques :
Sirius. ...... 4,165
Tj Argo —
Canopus 2,041
a Centaure 1,000
Arcturus 0,718
Rigel 0,661
La Chèvre 0,510
a Lyre 0,510
Procyon 0,510
a Orion 0,489
a Eridan 0,444
Aldébaran , 0,444
p Centaure 0,401
a Croix 0,391
Antarès 0,391
a Aigle 0,350
L'Épi 0,312
__ 111 __
» Voici, de plus, les quantités de lumière des étoiles qui sont
juste de 1*^% de 2% de 3^ grandeur, etc. :
Grandeur Quantité
d'après l'échelle ordinaire. de lumière.
1,00 0,500
2,00 0,172
3,00 0,086
^,00 0,051
5,00 0,034
6,00 0,024
» Partout la quantité de lumière de a du Centaure est prise
pour unité. »
— 112 —
ill
NOMBRE , DISTRIBUTION ET COULEURS DES ÉTOILES. — AMAS
STELLAIRES. ~ VOIE LACTÉE PARSEMÉE DE RARES NÉBULEUSES.
Dans la première partie de ces fragments d'astro-
gnosie , j'ai rappelé une conception originale d'Ol-
bers (67) : Si la voûte du ciel était entièrement
tapissée de points stellaires qui correspondraient à
d'innombrables couches d'étoiles, placées les unes
derrière les autres dans toutes les directions possi-
bles ; si, de plus, la lumière traversait l'espace sans y
subir d'extinction; alors le fond du ciel présenterait
un éclat uniforme , insupportable ; aucune constel-
lation ne pourrait être distinguée ; le Soleil ne serait
reconnaissable que par ses taches, et la Lune, par
un disque obscur. Cette singulière hypothèse re-
porte mon esprit vers un phénomène diamétrale-
ment opposé , quant à l'apparence , identique , au
fond, pour l'obstacle qu'il opposerait au développe-
ment de la science^ si la nature ne l'eût circonscrit
aux plaines du Pérou. Là , entre les côtes de la mer
du Sud et la chaîne des Andes , un brouillard épais
masque le firmament pendant des mois entiers. C'est
la saison qu'on nomme el îiempo de la garua. Im-
possible alors de distinguer une seule planète, une
I
seule de ces belles étoiles de l'hémisphère austral ,
Canopus, la Croix du Sud , ou les pieds du Centaure.
A peine si l'on parvient à deviner parfois le lieu
qu'occupe la Lune. Le jour, quand il arrive par ha-
sard que les contours du Soleil soient reconnaissa-
bles, son disque apparaît sans rayons, comme s'il
était vu à travers un verre noir; sa couleur est
jaune rougcatre, quelquefois blanche, plus rarement
d'un bleu verdàtre. Le navigateur, entraîné dans ces
parages par le courant froid qui règne sur les côtes
du Pérou , ne peut reconnaître le rivage ; sans moyens
pour déterminer sa latitude, il dépasse souvent le
port où il se proposait d'arriver. Heureusement la
configuration locale des courbes magnétiques lui
offre une dernière ressource; j'ai montré ailleurs
comment l'aiguille d'inclinaison peut encore le gui-
der, quand les astres lui font défaut (68).
Longtemps avant moi , Bouguer et son collabora-
teur Don Jorge Juan, se sont plaints « du ciel si peu
astronomique du Pérou. » Mais une considération
plus grave encore se rattache à ce phénomène d'une
couche atmosphérique imperméable à la lumière ,
incapable de retenir l'électricité, où jamais un orage
ne se forme, et d'où s'élancent vers des régions plus
pures les hauts plateaux des Cordillères , avec leurs
sommets couverts de neiges éternelles. D'après les
idées que la Géologie moderne s'est formées de l'état
de l'atmosphère, dans les temps primitifs, il est à
présumer que l'air, alors plus opaque et mélangé de
vapeurs épaisses, devait être peu propre à trans-
III. 8
- 114 —
mettre les rayons lumineux. Si donc on réfléchit
aux actions complexes qui ont déterminé , dans le
monde primitif, la séparation des éléments solides,
liquides et gazeux , et qui ont constitué finalement
l'écorce terrestre avec ses enveloppes actuelles,
il sera impossible de se soustraire à Tidée que
l'humanité a couru le danger de vivre dans une
atmosphère opaque , favorable encore , il est vrai ,
à plusieurs espèces végétales, mais qui aurait voilé
à nos regards les merveilles du firmament. La struc-
ture des Gieux aurait échappé à l'esprit d'analyse ;
hors la Terre , rien n'existerait pour nous dans la
création, si ce n'est peut-être le Soleil et la Lune;
l'espace semblerait uniquement fait pour ces trois
corps. Privé de ses notions les plus élevées sur le
Cosmos , l'homme aurait manqué de ces incitations
qui le lancent depuis des siècles à la poursuite de
la vérité, et qui posent incessamment de nouveaux
problèmes, dont les difficultés ont exercé tant d'in-
fluence sur l'admirable essor des sciences mathé-
matiques. Il est bien permis de considérer un in-
stant cette possibilité funeste, avant cTénumérer ici
les conquêtes de l'esprit humain , conquêtes que le
plus simple obstacle eût suffi , on le voit , à étouffer
en germe.
Quand il s'agit du nombre des astres qui rem-
plissent les espaces célestes, on doit distinguer trois
questions difl'érentes. Combien d'étoiles peut-on voir
à l'œil nu ? Combien nos catalogues en contiennent-
ils, c'est-à-dire, quel est le nombre de celles dont la
— 115 —
position est exactement connue ? Combien y a-t-il
d'étoiles comprises dans les divers ordres d'éclat ,
depuis la 1" jusqu'à la 9' et à la 10' grandeur?
On peut actuellement répondre à ces trois ques-
tions, au moins d'une manière approximative;
la science possède pour cela des matériaux suffi-
sants. Il en est autrement de ces recherches pu-
rement conjecturales qu'on a voulu baser sur les
jauges stellaires de certaines parties isolées de la
Voie lactée, afin d'arriver à résoudre théoriquement
cette question : Combien d'étoiles peut-on discerner
sur la voûte entière du ciel , à l'aide du télescope de
20 pieds d'Herschel? Problème qui doit roaiprendro
les astres dont la lumière emploie , dit on , 2000 ans
à venir jusqu'à nous (69).
Les résultats numériques que je publie ici sur ce
sujet sont dus, en grande partie, aux recherches
de mon honorable ami Argelander, directeur de
l'Observatoire de Bonn. J'avais prié l'auteur de la
Révision du Ciel boréal, de soumettre les don-
nées actuelles de nos catalogues à un nouvel exa-
men. Pour la dernière classe de grandeur, il y a
quelque incertitude provenant des divergences de
l'appréciation individuelle ; ces divergences se font
sentir surtout vers les limites de la visibilité à l'œil
nu, quand il faut séparer les étoiles de 6' à 1° gran-
deur des étoiles de 6" grandeur. Argelander a trouvé,
en moyenne, par un grand nombre de combinaisons,
que le nombre des étoiles visibles à l'œil nu, dans
tout le ciel, est de 5000 à 5800, et que les étoiles
— 116 —
comprises dans chaque classe forment à peu près la
série des nombressuivants, en allant jusqu'à la 9' gran-
deur (70) ;
1" grandeur.
20
étoiles.
2' —
65
y —
190
U' ~
^25
—
5« -
1100
6«
3200
—
V —
13000
8^ —
60000
—
9«
162000
Le nombre des étoiles que l'on peut nettement dis-
tinguer à la vue simple, en un lieu donné, parait au
premier coup d'œil extrêmement foible : on en voit
11/1.6 dans la portion du ciel visible sur l'horizon de
Paris, et /i638 à Alexandrie (71). Le rayon moyen du
disque de la Lune étant de 15' 33",5 , il faut 195291
aires égales au disque de cet astre pour couvrir la
surface entière du ciel. En admettant donc que les
200000 étoiles (en nombre rond), comprises entre la
1" et la 9' grandeur, soient réparties uniformément ,
il n'y aurait qu'une étoile pour chacune de ces aires
égales au disque entier de la Lune ; et comme cet
astre emploie 41" 30* pour décrire sur le ciel une
aire égale à celle de son propre disque, il ne sau-
rait rencontrer plus d'une étoile, en moyenne, dans
ce même laps de temps. Si donc on voulait étendre
jusqu'aux étoiles de 9' grandeur l'annonce calculée
des occultations d'étoiles par la Lune, on trouverait
- 117 —
qu'un phénomène de ce genre doit se reproduire,
en moyenne, à chaque intervalle de 41'" 30*. On
comprend , d'après cela , comment il se fait que la
Lune occulte si peu d'étoiles visibles à l'œil nu, dans
sa marche à travers les constellations.
11 n'est pas sans intérêt de comparer les énumé-
rations des anciens avec celles des modernes. Or
Pline, qui connaissait certainement le catalogue
d'Hipparquo, et le nommait une entreprise auda-
cieuse, disant que c Hipparque avait voulu léguer le
ciel à la postérité, » Pline ne comptait que 1600 étoiles
visibles sur le beau ciel de l'Italie (72)! Il avait pour-
tant fait entrer largement les étoiles de 5' grandeur
dans son énumération. Un demi-siècle plus tard , le
cataloguede Ptolémée indique seulement 1025 étoiles,
jusqu'à la 6' grandeur.
Depuis qu'on ne se borne plus à classer les étoiles
d'après les diverses parties qu'elles occupent dansleurs
constellations respectives, mnis d'après leur position
par rapporta l'équateur ou à l'écliptique, les progrès
de cette branche de la science se sont réglés constam-
ment sur ceux des instruments de mesure. Aucun
catalogue ne nous est parvenu de l'époque d'Aristille
et de Timocharis (283 ans avant J. C). Leurs obser-
vations étaient faites grossièrement {-ndyu oXoaxepw;),
d'après un fragment d'Hipparque sur la Longuciii"
de l'Année, cité dans le T livre de TAlmageste
(cap. III, pag. 15, éd. Halma); cependant il parait
certain qu'ils ont déterminé les déclinaisons d'un
nombre d'étoiles considérable, près de 150 ans avant
— 118 —
l'époque du catalogue stellaire d'Hipparque. On sait
comment l'apparition d'une étoile nouvelle engagea
Hipparque à faire une révision complète des étoiles;
mais nous n'avons sur ce point d'autre témoignage
que celui de Pline, témoignage accusé plus d'une
fois de n'être que l'écho d'un bruit inventé après
coup (73). Ptolémée n'en parle point. Toujours est-
il que le grand catalogue de Tycho a précisément
cette origine. Comme Hipparque, Tycho fut déter-
miné à entreprendre son catalogue par l'apparition
subite d'une étoile brillante dans Cassiopée , vers le
mois de novembre 1572. Sir John Herschel pense
qu'une étoile nouvelle, vue dans le Scorpion 131 ans
avant notre ère , pourrait bien être celle dont Pline
a parlé (74). D'après les annales chinoises , elle pa-
rut au mois de juillet, sous le règne de Vou-ti , de la
dynastie des Han , six années avant l'époque à la-
quelle les recherches d'Ideler fixent l'élaboration du
catalogue d'Hipparque. C'est Edouard Biot, dont
les sciences regrettent la perte prématurée, qui
a découvert la mention de ce curieux phénomène
dans la célèbre collection de Ma-tuan-lin, où sont
rapportées toutes les apparitions de comètes et d'é-
toiles singulières qui ont eu lieu entre l'an 613 avant
J. C. et l'an 1222 de l'ère chrétienne.
Le poème didactique d'Aratus, auquel nous de-
vons le seul écrit d'Hipparque qui nous soit par-
venu, remonte aux temps d'Ératosthène , de Timo-
charis et d'Aristille (75). La partie astronomique
de ce poëme, qui contient aussi une partie mé-
— 119 —
téorologique , est basée sur la sphère d'Eudoxe de
Cnide. Le catalogue d'Hipparque ne nous a point été
conservé , quoiqu'il fît partie , d'après Ideler , et
même partie essentielle de l'œuvre citée par Suidas
sur la Distribution des Étoiles et des Astres (76). Cette
table renfermait les positions de 1080 étoiles pour
l'an 128 avant notre ère. Les positions données par
Hipparque, dans son Commentaire sur Aratus, ont
été déterminées, sans doute, à l'aide de l'armille
équatoriale , non avec l'astrolabe ; car elles sont
toutes rapportées à l'équateur d'après la déclinaison
et l'ascension droite. Au contraire , le catalogue de
Ptolémée, où l'on trouve 1025 positions d'étoiles et
h stellœ nebulosœ, est rapporté à l'écliptique (77), et
ne contient que les latitudes et les longitudes {Aima-
geste, éd. Halma , t. II, p. 83\ On croit que c'est
une simple reproduction du catalogue d'Hipparque
transformé par le calcul. Voici comment ces étoiles
sont réparties entre les différentes classes de gran-
deurs :
!'• grandeur,
15 étoiles.
2«
as —
3« —
208 —
^e —
txllx —
5« —
217 —
6« —
^9
On devait s'attendre à trouver des nombres beau-
coup trop faibles pour la 5' et la 6*^ classe; mais la
richesse de la 3" et de la 4" est remarquable. Toute
autre comparaison plus détaillée entre ce vieux ca-
talogiie et les catalogues modernes serait d'ailleurs
nécessairement illusoire , à cause du vague qui alïecte
toujours Testimation des grandeurs.
Nous avons vu que le catalogue stellaire, dit de
Ptolémée, contient seulement le quart des étoiles
visibles à Toeil nu sur l'horizon de Rhodes ou
d'Alexandrie : il faut ajouter que, par suite des ré-
ductions basées sur une fausse valeur de la préces-
sion, les positions d'étoiles qu'on y trouve pa-
raîtraient avoir été observées, non à l'époque
d'Hipparque, mais vers l'an 63 de notre ère. Dans
les seize siècles suivants , nous ne trouvons plus que
trois catalogues complets et fondés sur des observa-
tions originales ; celui d'Oulough Beg, en 1437; celui
de Tycho, en 1600, et celui d'Hevelius, en 1660.
Au milieu des ravages de la guerre et des plus sau-
vages bouleversements , c'est à peine si les sciences
purent mettre à profit de rares intervalles de repos,
entre le ix' siècle et le milieu du xv^ ; mais ce furent
là des époques de splendeur pour l'astronomie obser-
vatrice. Elle fut brillamment cultivée parmi les
Arabes, les Persans, les Mogols, depuis Al-Mamoun,
fils de Haraoun Al Raschid , jusqu'au fils du Scliah
Rokh,leTimouride Mohammed TaraghiOulough Beg.
Les tables astronomiques d'Ebn-Jounis, composées
en 1007 et nommées tables hakémitiques en l'hon-
neur du calife fatimite Aziz Ben-Hakem Biamrilla,
ainsi que les tables ilkhaniennes (78) de Nasir-Eddin
Tousi, fondateur du grand observatoire de Meragha,
qui datent de 1259, nous montrent assez quels
progrès avait faits la connaissance des mouvements
planétaires, et combien on avait su perfectionner
les instruments de mesure et les méthodes de Ptolé-
mée. Déjà même les oscillations du pendule étaient
employées pour la mesure du temps, concurremment
avec les clepsydres (79). Il faut reconnaître aux
Arabes le grand mérite d'avoir montré comment on
peut perfectionner les tables astronomiques, en les
comparant assidûment aux observations. Le cata-
logue d'Oulough Beg, primitivement écrit en persan,
est basé sur les observations originales du gymnase
de Samarcande, sauf quelques étoiles australes in-
visibles sous la latitude de 39° 52' (?) et empruntées
à Ptolémée (80). 11 ne contient aussi que 1019 posi-
tions d'étoiles réduites à l'an 1437. Un commentaire
subséquent contient 300 étoiles de plus, dont les po-
sitions ont été déterminées en 1533 par Abou-Bekri
Altizini. Nous arrivons ainsi, par les Arabes, les
Persans et les Mogols, à la grande époque de Co-
pernic et presqu'à celle de Tycho.
Dès le commencement du xvi* siècle, les progrès
de la navigation , entre les tropiques et sous les hautes
latitudes australes, contribuèrent puissamment à
l'extension incessante de nos connaissances sur le
ciel étoile, bien moins pourtant que ne fit, un siècle
plus tard, l'invention des lunettes. Ces deux conquêtes
donnaient accès à de nouvelles régions, à des espaces
auparavant inconnus dans le ciel. J'ai dit ailleurs ce
que nous devons, pour le ciel austral, aux premiers
navigateurs, à Amerigo Vespucci, puis à Pigafetta,
— 122 —
compagnon de Magellan et d'Elcano. Vicente Yanez
Pinzon et Acosta nous firent connaître, les premiers,
ces taches noires du ciel austral surnommées Sacs à
Charbon; Angbiera et Andréa Corsali décrivirent les
Nuées de Magellan (81). Là encore l'astronomie des-
criptive précéda Tastronomie des mesures. Il y eiît
aussi des exagérations : l'ingénieux Cardan affir-
mait que dans les régions célestes, voisines du pôle
austral , si pauvre en étoiles comme on sait , Ame-
rigo Vespucci en avait compté 10000 à l'œil nu (82).
Après avoir décrit , on commença enfin à mesurer.
Frédéric Houtman et Pierre Theodori van Emden
ou Dirkz Keyser, car Olbers croit que ces deux noms
s'appliquent à la même personne, mesurèrent, à
Java et à Sumatra , les distances angulaires des
étoiles. Grâce à ces observations, les étoiles australes
purent être inscrites dans les cartes célestes de Bartsch,
deHondius et de Bayer; Kepler en ajouta les positions
au catalogue de Tycho, dans les Tables Rudolphines.
Un demi-siècle à peine s'est écoulé depuis le
voyage de Magellan autour du monde , et Tycho
commence ses travaux sur le ciel étoile , travaux
admirables dont l'exactitude surpasse tout ce que
l'astronomie pratique avait produit jusqu'alors ,
même sans en excepter les observations du Land-
grave Guillaume IV, à Cassel. Cependant le cata-
logue de Tycho , calculé et édité par Kepler, ne
comprend encore que 1000 étoiles dont le quart
tout au plus se compose d'étoiles de 6' gran-
deur. Ce catalogue et celui d'Hevelius , qui est
— 125 —
beaucoup moins employé et contient 1561 positions
pour Tan 1660, sont les derniers produits de Tob-
servation à l'œil nu, dont le règne a été prolongé par
Tobstination d'Hevelius, qui repoussa constamment
l'application des lunettes aux instruments de mesures.
Cette application permit enfin d'étendre au delà de
la 6'' grandeur la détermination des lieux des étoiles.
De ce moment les astronomes sont entrés, pour
ainsi dire , en possession de l'univers sidéral. Mais si
l'étude des étoiles télescopiques , la détermination
de leur nombre et de leurs positions ont étendu le
champ de nos idées sur l'univers, ce n'est pas là l'uni-
que avantage qu'on en ait tiré. Cette étude a exercé, ce
qui est d'une bien autre importance, une influence
essentielle sur la connaissance de notre propre
monde , en amenant la découverte de planètes nou-
velles , et en donnant aux calculateurs les moyens
de déterminer plus promptement leurs orbites.
Lorsque William Herschel eut conçu l'heureuse
idée de sonder les profondeurs de l'espace et de
compter, dans ses jauges à différentes distances
de la Voie lactée (83), les étoiles qui traversaient
le champ de ses grands télescopes, il devint possible
de saisir la loi suivant laquelle les étoiles s'accumu-
lent dans les diverses régions. Cette loi fit naître , à
son tour, les conceptions grandioses par lesquelles
on se représente la Voie lactée, avec ses divisions
multiples, comme la perspective d'une série d'im-
menses anneaux stellaires concentriques et contenant
des millions d'étoiles. D'un autre côté, l'étude mi-
— 124 -
luitieuse des plus petites étoiles et de leurs positions
relatives a singulièrement aidé à la découverte des
planètes qui voyagent au milieu d'elles, comme les
eaux d'un fleuve entre des rives immobiles. Vovez, en
effet, avec quelle facilité Galle a pu trouver Neptune,
sur la première indication de Le Verrier, et combien
de petites planètes ont été découvertes, grâce à la
connaissance approfondie du ciel, jusque dans ses
moindres détails. Mais on va sentir encore mieux
toute l'importance que peuvent acquérir des cata-
logues aussi complets que possible. Dès qu'une
nouvelle planète a été découverte au ciel , les as-
tronomes s'efforcent aussitôt de la découvrir une
seconde fois, pour ainsi dire, dans les anciens ca-
talogues. Si cet astre a été pris autrefois pour
une étoile ordinaire , s'il a été observé et inscrit à
ce titre dans un catalogue, ce document rétrospectif
sera souvent plus utile pour déterminer une orbite
dont la forme se dessine avec lenteur, que ne se-
raient plusieurs années d'observations postérieures.
C'est ainsi que le n^ 964 du catalogue de Tobie
Mayer a joué un grand rôle dans la théorie d'Ura-
nus , et le n° 26266 de Lalande dans celle de Nep-
tune (84). Avant qu'on n'y eût reconnu une planète ,
Uranus avait été observé 21 fois : 7 fois par Flani-
steed , 1 fois par Tobie Mayer, 1 fois par Bradley,
12 fois par Le Mon nier. L'espérance de voir aug-
menter encore le nombre des astres de notre monde
planétaire ne repose pas seulement sur la puis-
sance actuelle de nos lunettes; il faut peut-être
— 1^25 —
compter encore plus sur Tétendue de nos catalogues
et le soin des observateurs. Quand on découvritHébé,
cette planète était de 8' à 9' grandeur (juillet 1847);
lorsqu'on la revit en mai 1849, elle n'était plus que
de 11' grandeur.
Le premier catalogue qui ait paru , depuis l'épo-
que où Morin et Gascoigne enseignèrent à réunir les
lunettes aux instruments de mesure , c'est le cata-
logue des étoiles australes dont Halley avait déter-
miné la position , pendant le court séjour qu'il fit
à Sainte-Hélène , en 1677 et 1678. Il est assez
étrange que ce catalogue ne contienne point d'é-
toiles au-dessous de la 6' grandeur (85). Flamsteed
avait entrepris longtemps auparavant la construc-
tion de son grand Atlas céleste ; mais l'œuvre de ce
célèbre astronome parut seulement en 1712. Puis
vinrent les travaux de Bradley qui conduisirent à la
découverte de l'aberration et de la nutation , et sa
belle série d'observations, faites de 1750 à 1762, dont
Bessel a fait connaître toute la valeur, en 1818, par
ses Fiindamenta Astronomiœ (86). Enfin parurent
les catalogues de Lacaille et de Tobie Mayer, ceux
de Gagnoli, de Piazzi, de Zach, de Pond, de ïaylor,
et de Groombridge, ceux d'Argelander, d'Airy, de
Brisbane et de Rûmker.
Choisissons , parmi tant de travaux remarqua-
bles, les catalogues qui se recommandent par leur
grande étendue, et qui comprennent une bonne
part des étoiles de la T à la 10' grandeur. Nous
rencontrons d'abord V Histoire céleste française de
— 126 —
Jérôme de Lalande^ à laquelle on vient de rendre
une tardive mais éclatante justice. Ce catalogue est
fondé sur des observations faites de 1789 à 1800,
par Le Français de Lalande et Burckhardt. Calculé
et réduit soigneusement , par ordre de V Association
Britannique pour C Avancement des Sciences, et sous la
direction de Francis Baily, il contient 47390 étoiles;
beaucoup sont de 9' grandeur, quelques-unes sont
plus faibles encore. Harding , auquel on doit la dé-
couverte de Junon , a consigné , dans son Atlas en
27 cartes, plus de 50000 positions d'étoiles tirées de
la vaste collection française. Les zones de Bessel, con-
tenant 75000 observations, depuis le parallèle céleste
de — 15^ j usqu à celui de + 45^, ont exigé huit années
de labeur. Commencé en 1825, ce grand travail a
été terminé en 1833. De 1841 à 1843, Argelander a
continué ces zones jusqu'au parallèle de 80*^, et a
fixé, avec une admirable exactitude, les lieux de
22000 étoiles (87). Enfm les zones de Bessel ont été
réduites et calculées, en grande partie, par les soins
de TAcadémie de Saint-Pétersbourg : Weisse, direc-
teur de l'Observatoire de Cracovie, chargé de ce
travail, a calculé, pour 1825, les positions de 31895
étoiles dont 19738 seulement sont de 9® grandeur (88).
Il me reste à mentionner les Cartes de l'Académie
de Berlin. Pour parler dignement de cette œuvre im-
mense, je ne crois pas pouvoir mieux faire que d'em-
prunter le passage suivant à l'éloge de Bessel, pro-
noncé par Encke (89) : « On sait que Harding a
puisé, dans V Histoire Céleste de Lalande, les éléments
— 127 —
de son Atlas, où le ciel étoile se trouve si admira-
blement représenté. De même Bessel , après avoir
terminé, en iS^lli, la première partie de ses zones ,
proposa de baser des cartes célestes encore plus
détaillées sur ces nouvelles observations. D'après
le plan de Bessel , il ne s'agissait pas de retracer
seulement les lieux observés; il fallait encore
rendre ces cartes assez complètes pour qu'en les
comparant plus tard avec le ciel , il fût possible de
reconnaître immédiatement les planètes les plus
faibles, et de les distinguer au milieu des étoiles
fixes, sans avoir besoin d'attendre un changement
de position, toujours long et difficile à constater. Le
projet de Bessel n'a pas encore été exécuté dans toute
son étendue, et déjà cependant les Cartes de l'Aca-
démie de Berlin ont réalisé , de la manière la plus
brillante , les espérances du promoteur de cette en-
treprise. Ce sont ces cartes , en effet, qui ont amené
ou du moins facilité la découverte récente de sept
nouvelles planètes (1850). » Des !2i cartes qui doi-
vent représenter une zone comprise entre les paral-
lèles de 15% de chaque côté de l'équateur, l'Académie
de Berlin en a déjà publié 16 , où l'on s'est astreint
à représenter, autant que possible , toutes les étoiles
comprises dans les 9 premiers ordres de grandeur,
et même une partie des étoiles de lO'' grandeur.
C'est ici le lieu de rappeler les tentatives qu'on a
faites pour estimer le nombre des étoiles rendues vi-
sibles , dans tout le ciel , par les puissants instru-
ments optiques dont l'astronomie dispose aujour-
— 128 —
d'hiii. Strnve admet que le célèbre télescope de
20 pieds, employé par W. Plerschel dans ses jauges
{[jauges, sweeps) avec un grossissement de 180 fois,
fait voir 5 800 000 étoiles dans les deux zones qui
s'étendent à 30° au nord et au sud de Téquateur, et
20 374000 dans le ciel entier. Avec un instrument
encore plus puissant, le télescope de 40 pieds, Sir
William Herschel portait à 18 000 000 le nombre des
étoiles contenues dans la seule Voie lactée (90).
Bornons-nous ici aux énumérations basées sur les
observations effectives et sur les catalogues actuels ,
tant pour les étoiles visibles à l'œil nu , que pour les
étoiles télescopiques , et voyons maintenant de quelle
manière ces astres sont disséminés ou groupés sur
la voûte céleste. Nous avons vu déjà que les étoiles
peuvent servir de points de repère dans l'immensité
de l'espace ; malgré les petits mouvements appa-
rents ou réels dont elles sont animées , l'astronome
rapporte à ces points fixes tout ce qui se meut plus
rapidement dans le ciel, les comètes, par exemple, ou
les planètes de notre système. Au premier coup d'œil
jeté sur le firmament, ce sont les étoiles qui, par
leur multitude et la prépondérance de leurs masses ,
saisissent d'abord notre intérêt ; elles sont la source
des sentiments d'admiration ou d'étonnement que
l'aspect du ciel fait naître en nous. Mais les mouve-
ments des astres errants répondent mieux à la nature
scrutatrice de la raison , car là est l'origine et le but
de ces difficiles problèmes dont la solution provoque
incessamment l'essor de la science.
— Iî29 ~-
Au milieu de celte multitude d'astres grands et
petits, dont la voûte céleste est semée comme par ha-
sard, le regard s'arrête spontanément sur des groupes
d'étoiles brillantes , associées en apparence par une
proximité frappante, ou bien sur des étoiles remar-
quables par leur éclat et par un certain isolement
dans la région qu'elles occupent. Ces groupes natu-
rels font pressentir obscurément un lien , une dé-
pendance quelconque entre les parties et l'ensemble.
Ils ont été remarqués à toutes les époques , même par
les races d'hom mes les plus grossières. Les recherches
que l'on a faites, dans ces derniers temps, sur les
langues de plusieurs tribus dites sauvages, en font
foi ; on retrouve même presque toujours, d'une race
à l'autre , des groupes identiques sous des noms dif-
férents, et ces noms, empruntés d'ordinaire au
règne organique, donnent une vie fantastique à la
solitude et au silence des cieux. Ainsi furent distin-
guées de bonne heure les 7 étoiles des Pléiades ou
la Poussinière, les 7 étoiles du Grand Chariot,
celles du Baudrier d'Orion (bâton de Jacob), de
Cassiopée^ du Cygne, du Scorpion, de la Croix du
Sud , si remarquable par son changement de direc-
tion au lever et au coucher, de la Couronne australe,
des Pieds du Centaure , qui forment une espèce de
constellation des Gémeaux dans Thémisphère aus-
tral , etc. Quant au Petit Chariot, c'est une constel-
lation moins ancienne, qui ne doit son origine qu'à
une répétition frappante de la forme dn Grand
Chariot.
ai. 9
— 130 —
Là où des steppes , de vastes prairies ou des déserts
de sable présentent un large horizon, le lever et le
coucher des constellations , variant sans cesse avec
les saisons , les Iravaux de l'agriculture et les occu-
pations des peuples pasteurs, ont été, dès les premiers
âges, l'objet d'une étude attentive et d'une associa-
tion d'idées symboliques. C'est ain^i que l'astrono-
mie contemplative, non pas celle qui a pour objet
les mesures et les calculs, a commencé à se dé-
velopper. Outre le mouvement diurne, commun à
tous les coi'ps célestes , on reconnut bientôt au
Soleil un autre mouvement beaucoup moins rapide,
qui s'accomplit dans une direction opposée. Les étoiles
que l'on voit le soir à l'occident se rapprochent du
Soleil et finissent par se perdre dans ses rayons, pen-
dant le crépuscule, tandis que les étoiles qui brillent
au ciel avant l'aurore s'écartent du Soleil , et le de-
vancent de plus en plus. Le spectacle mouvant du
ciel olTre sans cesse à nos yeux de nouvelles constel-
lations. Mais, avec un peu d'attention, il fut facile de
reconnaître que les étoiles du matin étaient les mêmes
étoiles qu'on avait vues auparavant disparaître dans
l'ouest, et que les constellations, d'abord voisines
du Soleil, se retrouvaient six mois après à l'oppo-
site, se couchant quand le Soleil se lève, et se levant
à l'heure de son coucher. D'Hésiode à Eudoxe,d'Eu-
doxe à Aratus , la littérature des Grecs est remplie
d'allUvSionsà ces phénomènes annuels du lever et du
coucher héliaque des étoiles. C'est dans l'observa-
tion exacte de ces phénomènes que furent puisés les
~ 131 —
premiers éléments de Fart de mesurer le temps :
éléments que déjà la science naissante exprimait
froidement par des nombres , tandis que Fimagina-
tion sombre ou riante des peuples livrait les espaces
célestes aux caprices de la mythologie.
Les Grecs enrichirent peu à peu leur sphère pri-
mitive de constellations nouvelles , bien avant de
songer à les coordonner d'une manière quelconque
avec récliptique. On voit que j'adopte encore ici,
comme dans V Histoire de l'Étude du Monde physique,
les vues de mon célèbre et regrettable ami Le-
tronne (91). Ainsi Homère et Hésiode connaissaient
déjà certaines constellations et nommaient certaines
étoiles. Homère cite la Grande Ourse qu'on appelait
déjà le chariot céleste et qui « ne se baigne pas dans
les eaux de l'Océan » ; il parle du Bouvier et du Chien
d'Orion. Hésiode nomme Sirius et Arcturus. Homère
et Hésiode connaissaient les Pléiades, les Hyades et
la constellation d'Orion (92). Si le premier dit, à
deux reprises , que l'Ourse seule ne se plonge jamais
dans la mer, il s'ensuit uniquement qu'on n'avait pas
encore formé , à cette époque , les constellations du
Dragon , de Céphée et de la Petite Ourse qui ne se
couchent pas davantage. C'étaient les aslérismes,
non les étoiles dont ils se composent, qu'on igno-
rait alors. Un long passage de Strabon, souvent mal
interprété (Strabo, lib. I, p. 3; éd. Casaubon), établit
compléleraent la thèse capitale dont il s'agit ici, à
savoir : l'introduction successive des constellations
dans la sphère grecque. « C'est à tort, dit Strabon,
~ 132 —
que l'on accuse Homère d'ignorance, parce qu'il n'a
parlé que d'une des deux Ourses célestes. Probable-
ment la seconde constellation n'avait point encore été
formée à son époque. Ce sont les Phéniciens qui la
formèrent les premiers et s'en servirent pour navi-
guer; elle vint plus tard chez les Grecs. » Tous les
Scoliastes d'Homère, Hygin et Diogène de Laërte
attribuent à Thaïes l'introduction de cette constel-
lation. Le Pseudo-Eratosthène nomme la Petite
Ourse Ooivi/.-/;, pour indiquer qu'elle servait de guide
aux Phéniciens. Un siècle plus tard, vers la 71'' Olym-
piade , Cléostrate, de Ténédos, enrichit la sphère du
Sagittaire, To^^r/;;, et du Bélier, l^iptô;.
C'est de cette époque, c'est-à-dire de la tyrannie des
Pisistratides,queLetronne fait dater l'introduction du
zodiaque dans l'ancienne sphère des Grecs. Eudémus,
de Rhodes, un des élèves les plus distingués du Sta-
girite et auteur d'une Histoire de l'Astronomie, at-
tribue l'introduction de la zone zodiacale {i roû Çw^i^-
xoû ^t:/Zwc?tç, ou ^^lato; //j;'.Xo;) à OEnopide , de Chio,
contemporain d'Anaxagore (93). L'idée de rapporter
les lieux des planètes et des étoiles à l'orbite solaire,
la division de l'écliptique en douze parties égales (do-
décatémories) , appartient à l'antiquité chaldéenne,
d'où elle parvint directement aux Grecs, sans passer,
comme on l'a cru , par la vallée du Nil. La date de
cette transmission ne remonte même pas au delà du
commencement du v'' ou du vi= siècle avant notre
ère (9i). Les Grecs se bornèrent à subdiviser, dans
leur sphère primitive , les constellations qui se rap-
— 133 —
prochaienl le plus de l'écliptique et qui pouvaient
servir de constellations zodiacales. La preuve en est
simple : si les Grecs avaient pris à un peuple étranger
un zodiaque complet, au lieu de borner leurs em-
prunts à ridée de partager Técliptique en dodécaté-
mories, on ne retrouverait point chez eux onze
constellations seulement dans le zodiaque , une d'en-
tre elles , le Scorpion , ayant été partagée en deux
pour compléter le nombre nécessaire. Leurs divisions
zodiacales auraient été plus régulières ; elles n'auraient
point embrassé des espaces de 35 à 48 degrés, comme
le Taureau , le Lion, les Poissons et la Vierge, tandis
que le Cancer, le Bélier et le Capricorne en compren-
nent de 19 à 23 seulement. Leurs constellations n'au-
raient point été disposées irrégulièrement au nord
et au sud de l'écliptique , tantôt occupant sur ce
cercle de grands intervalles, tantôt resserrées, au
contraire, et empiétant Tune sur l'autre, comme le
Taureau et le Bélier, le Verseau et le Capricorne.
Preuves évidentes que les Grecs ont fait les signes du
zodiaque avec leurs anciennes constellations.
D'après Letronne, le signe de la Balance a été in-
troduit du temps d'Hipparque, et peut-être par Hip-
parque lui même. Eudoxe, Archimède, Autolycus
n'en font pas mention. Hipparque lui-même n'en
parle point dans le peu qui nous reste de lui, excepté
dans un seul passage qui a été falsifié probablement
par un copiste (95). 11 est question pour la première
fois de ce nouveau signe, dans les écrits de Geminus
et de Varron , un demi-siècle à peine avant notre ère :
- 134 ^
et comme la passion de l'astrologie fit irruption dans
le monde romain, entre le règne d'Auguste et celui
d'Antonin, il arriva aussi que les constellations « si-
tuées sur le chemin céleste du Soleil » acquirent une
importance démesurée , chimérique. C'est à la pre-
mière moitié de cette période de la domination ro-
maine qu'appartiennent les représentations zodiacales
des temples de Dendéra et d'Esné, celles des propylônes
de Panopolis et des enveloppes de plusieurs momies.
Ajoutons que ces vérités désormais acquises avaient été
déjà soutenues par Visconti et Testa, avant môme que
les preuves décisives eussent été rassemblées , dans
un temps où l'on donnait cours aux plus singulières
théories sur la signification symbolique des représen-
tations zodiacales et sur leurs prétendus rapports
avec la précession des équinoxes. Quant à la haute
antiquité que A. W. de Schlegel attribuait aux zodia-
ques indiens , en se fondant sur quelques passages
des Lois de Manou , du Ramayana de Yalmiki ou du
dictionnaire d'Amarasinba, c'est un point devenu
bien douteux depuis les ingénieuses recherches
d'Adolphe Holtzmann (96).
Ces constellations formées au hasard, dans le cours
des siècles, sans but déterminé, la grandeur incom-
mode, l'indétermination de leurs contours, les dési-
gnations compliquées des étoiles composantes pour
lesquelles il a fallu parfois épuiser des alphabets en-
tiers, témoin le Navire Argo, le peu de goût avec
lequel on a introduit dans le ciel austral la froide
nomenclature d'instruments usités dans les sciences,
>- 135 -
tels que la Pendule ou le Fourneau de Chimie , à
côté des allégories mythologiques , tous ces dé-
fauts accumulés ont déjà suggéré plusieurs fois
des plans de réforme pour les divisions stellaires et
le projet d'en bannir toute configuration. Il faut
l'avouer, la tentative a dû paraître moins hasardée
pour l'hémisphère austral que pour le nôtre; car,
dans le premier, le Scorpion , le Sagittaire, le Cen-
taure , le Navire et l'Éridan sont les seules con-
stellations auxquelles la poésie ait donné droit de
cité (97).
Ces mots de voûte étoilée (prbis inerrans d'Apulée)
ou d'étoiles fixes ( astra fixa de Manilius) sont autant
d'expressions impropres qui rappellent, avons-nous
dit (98), que l'on a réuni, ou plutôt confondu, deux
idées différentes. Quand Aristote emploie l'expression
de £v(5£(5£a£y«:aatpa (astres fixés)pour désigner les étoiles;
quand Ptolémée les nomme Tipo^Treq-u-AÔTe; (adhérents) ,
il est bien évident que ces désignations se rapportent
à la sphère cristalline d'Anaximène. Le mouvement
diurne qui entraine tous ces astres de l'est à l'ouest,
sans changer leurs distances mutuelles, avait dû con-
duire tout d'abord à des idées ou à des hypothèses
de ce genre : « Les étoiles {àrly-vri ar^x^y.) appartien-
nent aux régions supérieures ; elles y sont fixées et
comme clouées sur une sphère de cristal ; les planètes
{àoToy. i{ko(.vû)u.vjy OU TrXavYiTa) , qui ont un autre mouve-
ment en sens inverse , appartiennent à des régions in-
férieures et plus voisines de nous (99). » Si dès les pre-
miers temps de l'ère des Césars, on trouve, dans
— 136 —
Manilius , le tenue de Stella fixa au lieu de infixa ou
affixa, il est à croire qu'on s'en était tenu d'abord ,
dans l'école romaine , au sens primitif dont nous ve-
nons de parler, mais qu'à la longue, le mot fîxus
emportant avec lui le sens d'immotus et d'immobilis,
il s'est fait peu à peu , dans la croyance popu-
laire , ou plutôt dans le langage même, une confu-
sion où l'idée d'immobilité a dû prévaloir ; de telle
sorte que les étoiles sont devenues fixes (steWad fixœ),
indépendamment de la sphère à laquelle on conce-
vait autrefois qu'elles étaient attachées. Voilà com-
ment Sénèquea pu dire, du monde des étoiles, fixum
et immobilem populum.
Si nous prenons pour guides Stobée et le collecteur
des « Opinions des Philosophes » , et que nous sui-
vions la trace de cette idée d'une sphère de cristal
jusqu'à l'époque antique d'Anaximène , nous la re-
trouvons encore plus nettement formulée par Empé-
docle. Ce philosophe considère la sphère des fixes
comme une masse solide, formée d'une partie de
l'éther que l'élément igné aurait converti en cris-
tal (100). La Lune est , à ses yeux, une matière que
la puissance du feu a coagulée en forme de grêlon
et qui reçoit sa lumière du Soleil. Dans la physique
des anciens et d'après leur manière de concevoir le
passage de l'état fluide à Tétat solide, les conceptions
précédentes n'étaient point en relation nécessaire
avec les idées de refroidissement et de congéla-
tion ; mais l'affinité du mot y.pvaxûàloç avec /puo; et
zpu-îTaiVw , et un rapprochement naturel avec la ma-
^ 137 -
tière qui sert vulgairement de type pour la transpa-
rence, ont donné corps à des idées d'abord moins pré-
cises (i) ; on en est venu à voir, dans la voûte céleste,
une sphère de glace , ou de verre , et Lactance a pu
dire : Cœliun aé'rem glaciatum esse, et ailleurs : Fi-
treum cœliim. Sans doute Empédocle n'a point songé
au verre, invention phénicienne, mais bien à Tair
que l'éther igné aurait transformé en un corps solide
éminemment translucide. Au reste, quand il s'agis-
sait de cette glace (xpuaraX^oç) , on sent bien que l'idée
de transparence était l'idée dominante ; on écartait
celle du froid pour ne songer qu'à un corps devenu
solide, tout en restant transparent. Le poète em-
ployait le mot de cristal ; mais le prosateur disait
seulement zpi>aTa).Xo£t^r;; , semblable au cristal , té-
moin ce passage d'Achille Tatius , le commentateur
d'Aratus , que j'ai rapporté dans Favant-dernière
note. De même , le mot Tzy.yoç, ( de 7irr/vvaBc/.L , se so-
lidifier) veut bien dire aussi un morceau de glace ,
mais il faut se borner ici au sens relatif à la soli-
dification.
Ce sont les Pères de l'Église qui ont transmis au
moyen âge l'idée d'une voûte de cristal. Ils l'avaient
prise au pied de la lettre , et , renchérissant encore
sur l'idée primitive, ils imaginaient un ciel de verre
formé de huit à dix couches superposées à peu près
comme les peaux d'un oignon. Cette conception sin-
gulière se serait même perpétuée dans certains cloî-
tres de l'Europe méridionale, si j'ai bien compris le
propos que me tenait un vénérable prince de l'Église,
- 138 —
au sujet du fameux aérolitlie d'Aigle, dont on était
alors vivement préoccupe. Cette prétendue pierre
météorique, recouverte d'une croûte vitrifiée, n'é-
tait point la pierre elle-même, disait-il, à ma grande
surprise , mais un simple fragment du ciel de cristal
qu'elle avait dû briser en tombant. Kepler s'était
vanté, deux siècles et demi auparavant, d'avoir brisé
les 77 sphères homocentriques du célèbre Girolamo
Fracastoro et tous les épicycles des anciens, en dé-
montrant que les comètes coupent et traversent en
tous sens les orbites planétaires (2). Quant à savoir
si de grands esprits, tels qu'Eudoxe, Ménechme ,
Aristote et Apollonius de Perge , ont cru à la réalité
de ces sphères emboîtées l'une dans l'autre et con-
duisant les planètes , ou si cette conception n'était
pas plutôt pour eux une combinaison fictive, servant
à simplifier les calculs et à guider l'esprit à travers
les difficiles détails du problème des planètes, c'est un
point que j'ai traité ailleurs et dont il est impossible
de méconnaître l'importance, lorsqu'on veut recher-
cher dans l'histoire de l'astronomie les phases suc-
cessives du développement de l'esprit humain (3).
Laissons désormais Fantique, mais artificielle di-
vision des étoiles en constellations zodiacales, et la
sphère solide à laquelle on les croyait fixées. Mais
avant de passer à l'étude des groupes naturels qu'elles
forment en réalité et aux lois de leur distribution
dans l'espace , arrêtons-nous un instant à quelques
phénomènes particuliers , tels que les rayons para-
sites, les diamètres factices et les couleurs variées des
— 139 —
étoiles. J'ai déjà mentionné, à propos des lunes de Ju-
piter (4), les rayons qui paraissent, à l'œil nu , éma-
ner des étoiles brillantes, sortes de queues dont le
nombre , la position et la longueur varient, au reste,
pour chaque observateur. La vision indistincte est
due à plusieurs causes de nature organique ; elle dé-,
pend de l'aberration de sphéricité de l'œil, de la
diffraction qui se produit aux bords de la pupille ou
des cils, et de la manière irrégulière dont l'irritabi-
lité de la rétine propage, autour de chaque point,
l'impression directement reçue (5). Je vois très-ré-
gulièrement huit rayons, inclinés l'un sur l'autre
de ù5", autour des étoiles de 1'^% 2^ et 3^ grandeur.
D'après la théorie d'Hassenfratz, ces queues sont les
caustiques du cristallin formées par l'intersection
mutuelle des rayons réfractés ; elles suivent donc
les mouvements de la tête, et s'inclinent avec elle à
droite ou à gauche (6) . Quelques astronomes de mes
amis voient au-dessus des étoiles trois ou quatre
rayons, et n'en voient point au-dessous. 11 m'a tou-
jours paru bien remarquable que les anciens Égyp-
tiens aient donné constamment aux étoiles cinq
rayons disposés à 72" d'intervalle; d'après Horapollo,
l'image d'une étoile signifie le nombre 5 dans le lan-
gage hiéroglyphique (7).
Les queues des étoiles disparaissent, quand on les
regarde à travers un très-pelit trou percé dans une
carte avec une aiguille; j'ai fait souvent cette épreuve
sur Sirius et sur Canopus. 11 en est de même lors-
qu'on emploie des lunettes armées de grossissements
— 140 —
notables ; alors les étoiles apparaissent comme des
points d'un éclat très-intense, ou plutôt comme des
disques excessivement petits. Ces détails ne sont
point sans intérêt ; les effets dont il s'agit concourent
à la magnificence de la voûte étoilée. Peut-être la
vision indistincte favorise-t-elle cet effet ; car la faible
scintillation et l'absence complète de ces rayons stel-
laires, sous le ciel des Tropiques, m'ont toujours paru
augmenter le calme de la nuit et dépeupler en quel-
que sorte la voûte étoilée. Yoici encore, à ce sujet,
une question qu'Arago a soulevée depuis bien long-
temps : pourquoi ne peut-on pas voir les étoiles de
première grandeur à leur lever malgré leur vif éclat ,
tandis qu'on voit le premier bord de la Lune, dès qu'il
atteint l'horizon (8)?
Les instruments optiques les plus parfaits , munis
des plus forts grossissements, donnent aux étoiles
des diamètres factices (spurious disks), lesquels de-
viennent d'autant plus petits, d'après la remarque de
Sir John Herschel , que l'ouverture de la lunette est
elle-même plus grande (9). Les occultations d'étoiles
par la Lune, sont exemptes de cette cause d'er-
reur, aussi l'immersion et l'émersion se font-elles
instantanément ; il est impossible d'assigner une
fraction quelconque de seconde pour la durée de ce
phénomène. Si l'étoile occultée a paru quelquefois
empiéter sur le disque lunaire, c'est là un fait de
diffraction ou d'inflexion des rayons de lumière dont
on ne saurait rien conclure, quant aux diamètres réels
desétoiles. Nousavons eu, ailleurs, occasion de rappeler
— 1/ll —
que Sir WillitïnïHerscliel trouvait un diamètre de C, 36
à Véga de la Lyre, en employant un grossissement de
6500. Une autre fois, Arcturus étant vu à travers un
brouillard épais, son disque se trouvait réduit à moins
de 0'^2. Ce sont les rayons parasites qui faisaient attri-
buer des diamètres si considérables aux étoiles, avant
l'invention des lunettes : Tycho et Kepler assignaient,
par exemple, à Sirius, un diamètre de 4' et de 2' 20"(10).
Les anneaux alternativement lumineux et obscurs
qui entourent les faux disques stellaires, quand on
emploie des grossissements de 200 à 300 fois , et qui
deviennent irisés lorsqu'on recouvre l'objectif avec
des diaphragmes de différentes formes, sont des phé-
nomènes d'interférence et de diffraction : c'est un
point désormais établi par les travaux d'Arago et
d'Airy. Lorsque les étoiles sont extrêmement faibles,
ces anneaux disparaissent; leurs images se réduisent
à de simples points lumineux dont on peut se servir
pour éprouver la perfection et la puissance optique
des grandes lunettes ou des télescopes réflecteurs.
Telles sont les composantes d'une étoile deux fois
double, £ de la Lyre, ou la 5' et la 6' étoile qui fu-
rent découvertes par Struve, en 1826, et par Sir John
Herschel, en 1832, dans le trapèze de la grande né-
buleuse d'Orion , trapèze qui constitue l'étoile mul-
tiple B d'Orion (11).
On a remarqué depuis longtemps que les étoiles et
même les planètes présentent des différences de colo-
ration assez tranchées; mais cet ordre de faits n'a
pris toute son extension et son importance qu'a par-
— 142 —
tir de l'époque où il a pu être étudié à l'aide des téles-
copes, surtout depuis qu'on a donné aux étoiles
doubles une attention si vive et si soutenue. Il n'est
pas question ici des changements de couleur déjà
décrits plus haut , dont la scintillation est accompa-
gnée , même dans les étoiles du blanc le plus pur. Il
s'agit encore moins de la coloration passagère en
rouge que la lumière slellaire éprouve à l'horizon ,
par suite des propriétés spéciales du milieu atmosphé-
rique. Je veux seulement parler de la couleur propre,
essentielle , de la lumière stellaire , couleur qui varie
d'une étoile à l'autre > en vertu des lois particulières
au développement de la lumière dans chaque corps ,
et suivant la nature de la surface dont elle émane.
Les astronomes grecs ne connaissaient que des étoiles
blanches et rouges : aujourd'hui la vision télesco-
pique a permis de retrouver dans les espaces célestes,
comme dans les corolles des phanérogames ou les
oxydes métalliques, presque toutes les nuances que
le spectre présente entre les limites extrêmes de la
réfrangibilité , depuis les rayons rouges jusqu'aux
rayons violets. Ptolémée cite , dans son catalogue,
6 étoiles couleur de feu , vr.ôxip^ot (12) , à savoir :
Arcturus, Aldébaran, Pollux, Antarès, a d'Orion (l'é-
paule droite), et Sirius. Cléomède compare même
la couleur rouge d'Antarès à celle de Mars (15;, au-
quel on donnait tantôt Tépithète de Tiuppo:, tantôt
celle de 7:uoocidV<;.
Des 6 étoiles que nous venons de citer , 5 ont en-
core aujourd'hui une lumière rouge ou du moins
— 143 —
roiigeâtre. On range encore Pollux au nombre des
étoiles rougeàtres, mais Castor est vert-pâle (li).
Sirius offre donc Tunique exemple d'un changement
de couleur constaté historiquement, car la lumière
de Sirius est aujourd'hui d'une blancheur parfaite.
11 n'y a qu'une grande révolution , soit à la surface,
soit dans la photosphère de cette étoile , de ce soleil
éloigné, suivant l'antique expression d'Aristarque de
Samos , qui ait pu produire ce changement de cou-
leur, en troublant l'action des causes auxquelles était
due la prédominance des rayons rouges. Cette prédo-
minance elle-même peut être attribuée à ce que les
rayons complémentaires des rayons rouges étaient
absorbés par la photosphère même de l'étoile, ou par
des nuages cosmiques qui se transporteraient lente-
ment d'un point à l'autre de l'espace (15). Comme les
rapides progrès de l'optique moderne donnent un vif
intérêt à cette question, il serait à désirer que 1 épo-
que de ce grand événement, signalé par la disparition
de la couleur rouge de Sirius, pvit être déterminée
entre certaines limites. Du temps de Tycho, Sirius
était déjà bien certainement de couleur blanche ; car
lorsqu'on vit avec surprise la nouvelle étoile qui ap-
parut en 1572, dans la constellation de Cassiopée ,
avec une lumière d'une blancheur éblouissante, pas-
ser au rouge dans le mois de mars 1573, et redeve-
nir blanche en janvier 1574 , on la comparait
bien , pendant la seconde période , avec Mars et Al-
débaran, mais jamais avec Sirius. Peut-être Sé-
dillot, ou d'autres savants philologues, versés dans
rnstronomie des Arabes et des Perses, réiissiraienl-
ils à découvrir quelque témoignage ancien sur la
couleur de Sirius, s'ils voulaient diriger leurs recher-
ches vers l'époque comprise entre El-Batani ( Alba-
tegnius) ou El-Fergani (Alfraganus) et Abdurrahman
Soufi ou Ebn-Jounis , c'est-à-dire de 880 è 1007. Ils
pourraient prolonger au besoin leurs investigations
jusqu'au temps de Nassir-Eddin et d'Oulough Beg.
Mohammed Ebn-Kethir El-Fergani, qui observait à
Rakka ( Aracte ) , sur le^^ bords de l'Euphrate , vers le
milieu du x* siècle, signale comme rouges [stellœ rufœ,
dit la vieille traduction latine de 1590) Aldébaran et
même la Chèvre dont la couleur est aujourd'hui jaune
ou tout au plus jaunerougeâtre (16); il ne parle
point de Sirius. En tout cas, si Sirius avait déjà perdu
sa couleur rouge avant cette époque, il serait bien
singulier que El-Fergani, qui suit fidèlement Ptolé-
mée en toutes choses, eut négligé d'indiquer le chan-
gement de couleur d'une étoile si célèbre. Les preuves
négatives sont, à la vérité, rarement suffisantes ; d'ail-
leurs Béteigeuze (a d'Orion) , qui est rouge aujour-
d'hui comme du temps de Ptolémée, a été passée sous
silence, dans le même endroit du livre d'El-Fergani,
On s'est toujours accordé à donner, au point de vue
historique, le premier rang parmi les étoiles brillantes
à Sirius, à cause du rôle capital qu'il a joué long-
temps dans la chronologie , et de sa liaison intime
avec les premiers développements de la civilisation
sur les bords du Nil. D'après les récentes recherches
de Lepsius (17), la période sothiaque et les levers
— 1/|5 -—
liéliaquesdeSotliis(Sirius), sur lesquels BioL a publié
une excellente dissertation, ont réglé complètement
l'institution du calendrier égyptien, à partir d'une
époque que Ton peut faire remonter à près de 33
siècles avant notre ère , « époque h laquelle le lever
héliaque de Sirius coïncidait avec le solstice d'été ,
et où , par suite, le débordement du Nil commençait
avec le premier du mois de Pachon (le mois de l'inon-
dation).» J'ai réuni, dans une note, des recher-
ches très-récentes et encore inédites sur Sothis ou
Sirius ; elles reposent sur les relations étymologiques
du copte, du zend, du sanscrit et du grec; mais
elles s'adressent uniquement aux personnes qui ai-
ment les origines de l'astronomie, et qui, dans les
affinités des langues, retrouvent de précieux vestiges
des connaissances de l'antiquité (18).
Outre Sirius, on compte aujourd'hui comme
étoiles blanches Yéga, Déneb, Régulus et l'Épi de
la Vierge. Parmi les petites étoiles doubles , Struve
a trouvé 300 couples dont les deux composantes sont
blanches (19). La couleur jaune ou jaunâtre se re-
marque dans Procyon , Ataïr, la Polaire et surtout
dans (3 de la petite Ourse. Nous avons déjà dit que
Béteigeuse , Arcturus , Aldébaran , Antarès et Pollux
sont rouges ou rougeâtres. Rûmker a trouvé y de la
Croix d'une couleur rouge décidée; et mon ami le capi-
taine Bérard, excellent observateur, écrivait en 1847,
de Madagascar, qu'il voyait la couleur de a de la Croix
passer aussi au rouge depuis plusieurs années. Une
étoile du Navire, n d'Argo , que les observations de
IL 10
— 146 —
Sir John Herschel ont rendue célèbre , varie non-
seulement d'éclat, mais encore de couleur; il en sera
parlé plus loin d'une manière plus détaillée. En 1843,
M. Mackay trouvait, à Calcutta, que cette étoile
avait précisément la couleur d'Arcturus, c'est-à-dire
qu'elle était d'un jaune rougiàtre (20). Depuis, des
lettres du lieutenant Gilliss, écrites de Santiago
(Chili) en 1850, nous apprennent que sa couleur est
devenue encore plus foncée que celle de Mars. A la
suite du Voyage au Cap, Sir John Herschel a donné un
petit catalogue de 76 étoiles comprises entre la 7* et
la 9' grandeur; toutes ces étoiles sont d'un rouge
de rubis (ruby coloured). Quelques-unes paraissent
vermeilles comme de petites gouttes de sang. Au delà
de la 9^ ou 10' grandeur, il devient réellement im-
possible^ dit Struve, de distinguer les couleurs des
étoiles. La plupart des descriptions d'étoiles variables
leur assignent une couleur rouge ou du moins rou-
geâtre (21). Mira de la Baleine, la première étoile
changeante que l'on ait découverte (22), est d'une
teinte rougeàtre très-prononcée. Mais la coloration
en rouge n'est point nécessairement liée au phéno-
mène de la variabilité d'éclat; car, sans parler d'un
grand nombre d'étoiles rouges qui ne sont pas va-
riables, on peut citer plusieurs étoiles variables qui
sont entièrement blanches ; par exemple : Algol,
dans la tête de Méduse, (3 de la Lyre, e du Cocher...
Quant aux étoiles bleues , dont l'existence a été si-
gnalée , pour la première fois , par Mariette dans son
Traiié des Couleurs (23) , on peut en citer plusieurs
— Ii7 —
types remarquables : r; de la Lyre est bleuâtre ; Dun-
lop a découvert, dans rhémisphère austral , un petit
amas de 3' 1/2 de diamètre, dont toutes les étoiles
sont bleues. Il y a beaucoup de systèmes binaires où
rétoile principale est blanche et le compagnon bleu ;
dans d'autres, les deux étoiles sont bleues à la fois (24),
comme par exemple, d du Serpent, la 59' d'Andro-
mède.... Lacailie avait trouvé , près de y, de la Croix
du Sud , un amas d'étoiles auquel ses faibles instru-
ments donnaient l'aspect d'une nébuleuse. Avec de
puissants télescopes, on y a trouvé plus de cent
étoiles diversement colorées, rouges, vertes, bleues,
bleu verdàtre. Ces étoiles sont si rapprochées, qu'on
dirait un écrin de pierres précieuses polychromes
(like a superb pièce of fancy jewellery ) (25).
Les anciens ont cru reconnaître une symétrie re-
marquable dans les positions relatives de certaines
étoiles de l'" grandeur. Ils avaient distingué sur-
tout quatre étoiles diamétralement opposées dans la
sphère, Aldébaran et Antarès, Régulus et Fomalhaut,
auxquelles on avait donné le nom d'étoiles royales. Un
écrivain de l'époque de Constantin, Julius Firmicus
Maternus (26), fournit des détails curieux sur cette
disposition régulière dont j'ai parlé ailleurs (27).
Les différences d'ascension droite des étoiles royales,
(stellœ regales) sont 11^ 57"° et 12'' 49™. L'importance
qu'on leur attribuait venait sans aucun doute des
traditions de l'Orient qui pénétrèrent, sous les
Césars, dans le monde romain, où elles inspirèrent un
goût si vif pour l'astrologie. On retrouve, jusque dans
- l/j8 -
le livre de Job, des traces de cette habitude anti-
(jue de désigner les quatre régions du ciel par quatre
conslellauons opposées: un passage obscur du 9*^ cha-
pitre (verset 9) oppose, « aux chambres de l'Orient, »
la Cuisse, c'est à-dire la constellation boréale de la
Grande Ourse, cette même Cuisse de taureau que l'on
a tant remarquée dans le zodiaque de Dendera et dans
les papyrus mortuaires des Égyptiens (28).
Un siècle avant l'invention du télescope , on
commençait h s'occuper du ciel austral , dont une
grande et belle partie, commençant au 53^ degré
de déclinaison , était restée comme voilée pour
l'antiquité et même jusque vers la fin du moyen
cige. Du temps de Ptolémée, on voyait sur l'ho-
rizon d'Alexandrie : l'Autel ; les Pieds du Cen-
taure ; la Croix du Sud , comprise alors dans le Cen-
taure et nommée aussi plus tard , Cœsaris Tlironus ,
en rhonneur d'Auguste , ainsi que le témoigne
Pline (29); enfin Canopus, dans le Navire, que le
Scoliaste de Germanicus appelle Ptolemœon (oO).
On trouve encore, dans le catalogue de l'Alma-
geste, une étoile de 1" grandeur, Achernar (en
arabe, Acliir el-nahr), la dernière du fleuve Éridan,
bien que cette étoile soit située 9" au-dessous de
l'horizon d'Alexandrie. Ptolémée doit donc la con-
naissance de cette étoile aux relations des naviga-
teurs qui fréquentaient la partie australe de la mer
Rouge, ou la mer d'Arabie, entre Ocelis et Muziris,
une des échelles du Malabar (31). Les progrès crois-
sants de l'art nautique permirent aux modernes de
pousser leurs recherches bien au delà de Téquateur,
en suivant les côles occidentales de l'Afrique. En
1484 , Diego Cani accompagné de Martin Behaini ;
en 1487, Barthélémy Diaz ; en 1497, Vasco de Gama
atteignirent le parallèle de 35" de latitude sud, dans
leurs expéditions vers les Indes orientales. Mais c'est
à l'époque de Vincent Yanez Pinzon , d'Anierigo
Vespucci et d'Andréa Corsali, entre 1500 et 1515,
que revient l'honneur des premières études qui
aient été faites sur le ciel austral , les Nuées de Ma-
gellan , les Sacs de Charbon ; c'est alors que l'Europe
put connaître « les merveilles d'un ciel qu'on ne
voit pas sur la Méditerranée. » Les mesures stel-
laires proprement dites commencèrent beaucoup
plus tard , vers la fin du xvr siècle et le commence-
ment du xvn*' (32).
S'il est possible , aujourd'hui , de reconnaître
certaines lois dans la distribution des étoiles et
dans leurs divers degrés de condensation , c'est
à une heureuse inspiration de Sir William Hers-
chel que nous en sommes redevables. En 1785,
Herschel appliqua , à l'étude du ciel , sa méthode
des jauges (en anglais, process of gauging the
heavens, star-gauges) dont il a été plus d'une fois
question dans cet ouvrage. Cette laborieuse méthode
consistait à diriger successivement vers différentes
régions du ciel un télescope de 20 pieds (6 mètres), et
à compter minutieusement les étoiles qui se trouvent
comprises dans le champ. Le diamètre du champ de
vision sous-tendant un angle de 15', le télescope em-
— 150 —
brassait chaque fois 1/833000 seulement de la sur-
face du ciel ; aussi ces jauges auraient-elles exigé
83 ans de travaux continus , d'après une remarque
de Struve , s'il avait fallu les étendre à la sphère en-
tière (33), Dans les recherches de ce genre où il
s'agit d'étudier le mode de distribution des étoiles ,
il est nécessaire de tenir compte des ordres de
grandeur photomélrique auxquels ces étoiles ap-
partiennent. Si on se borne aux étoiles brillantes
des 3 ou 1 premiers ordres, on trouve, en gé-
néral , qu'elles sont réparties avec assez d'uni-
formité (3i). Elles paraissent toutefois plus con-
densées localement dans l'hémisphère austral ,
depuis £ d'Orion jusqu'à a. de la Croix. Là elles for-
ment une zone resplendissante, qui suit la direction
d'un grand cercle de la sphère. Les voyageurs s'ac-
cordent peu dans les jugements qu'ils portent sur
la beauté relative du ciel austral et du ciel boréal ;
leurs divergences tiennent le plus souvent , selon
moi , à ce que plusieurs observateurs ont visité les
régions du sud pendant une saison où les plus belles
constellations culminent de jour. Il résulte des
jauges exécutées par les deux Herschel, sur la voûte
entière du ciel , que les étoiles comprises entre la
5" et la 10" ou même la 15" grandeur, étoiles pour la
plupart télescopiques, paraissent d'autant plus con-
densées que Ton se rapproche davantage de la Voie
lactée (6 '^yly.liyc, zv/.Ào;). Il y aurait donc sur la
sphère un équateur de richesse stellaire, et des pôles
de pauvreté stellaire, si Ton peut s'exprimer ainsi.
-- 151 —
Le premier coïncidant avec la direction générale de
la Voie lactée, l'intensité de la lumière stellaire est
à son minimum vers les pôles du cercle galactique ;
elle croit rapidement à partir de ces pôles, et dans
tous les sens, à mesure que la distance polaire galac-
tique va elle-même en augmentant.
Struve a soumis à une discussion approfondie
les matériaux fournis par les jauges actuellement
connues. Il trouve, pour résultat définitif de son tra-
vail , qu'il y a , en moyenne , dans la Voie lactée ,
30 fois plus d'étoiles (plus exactement 29,4 fois) que
dans les régions des pôles galactiques. Pour des dis-
tances au pôle nord de la Voie lactée, exprimées par
0% 30% 60% 1^' et 90% la richesse en étoiles est re-
présentée par 6,15; 6,52; 17,68; 30,30; 122,00.
Ces nombres indiquent aussi combien d'étoiles un
télescope de 20 pieds, dont le champ aurait 15' de
diamètre, ferait voir dans ces diverses régions. Des
deux côtés de la Voie lactée , la distribution des
étoiles paraît suivre à peu près les mêmes lois ; ce-
pendant la richesse stellaire absolue est un peu plus
grande du côté du sud (35); sons ce ra|)port, le ciel
austral l'emporte encore sur la région opposée.
J'avais prie le capitaine (hi génie Schvvinck d'exa-
miner comment les 121i8 étoiles (de la 1'" à la
T grandeur) dont il a retracé les positions sur sa
Mappa cœlestis , se distribuent entre les différentes
heures d'ascension droite ; voici les résultats qui
m'ont été communiqués :
— 152 —
De 3^ 20'" à 9^ 20"" d'Asc. dr., nombre des étoiles 3147
9*^20" à 15^" 20'» — — — 2627
i5^ 20"" à 21*» 20"^ _^ __ — 3523
21*' 20"^ à 3»^ 20^ — — — 2851
Ces quatre groupes s'accordent avec les résultats en-
core plus exacts des Études Stellaires de Struve.
D'après Struve, les maxima tombent, pour les étoiles
de la 1" et la 9' grandeur, par 6^ 40"^ et 18*^ 40"^; les
minima, par 1*^30™ et 13^30™ d'ascension droite (36).
Si l'on veut se faire une idée de la structure de
l'univers et de la position ou de l'épaisseur des cou-
ches stellaires , il est essentiel de distinguer , parmi
les astres innombrables qui brillent au firmament ,
les étoiles qui sont sporadiquement disséminées , de
celles qui forment des groupes indépendants où leur
condensation suit des lois particulières. Ces groupes
sont des amas stellaires ; ils contiennent souvent des
milliers d'étoiles télescopiques, reliées entre elles par
une dépendance évidente, et ils apparaissent à l'œil
nu sous forme de nébuleuses arrondies, d'une lueur
et d'un aspect cométaire. Ce sont là les étoiles né-
buleuses d'Ératosthène (37) et de Ptolémée, les ne-
bulosœ des Tables Alphonsines de 1252, et celles qui,
suivant Galilée , « sicut areolse sparsim per œthera
subfulgent. »
Ces amas d'étoiles, à leur tour, peuvent être iso-
lés dans le ciel , ou rassemblés et comme entassés
dans certaines régions , telles que la Voie lactée ou
les Nuées de Magellan. La région la plus riche en
amas globulaires {globular clusters)^ appartient à la
— 153 —
Voie lactée ; elle en forme même la partie la plus
importante. Elle se trouve dans le ciel austral (38),
entre la Couronne australe, le Sagittaire, la queue
du Scorpion, et TAutel, c'est-à dire entre 16*' 45"™ et
19^ d'ascension droite. Mais les amas qui se trouvent
à l'intérieur ou dans le voisinage de la Voie lactée
ne sont pas tous ronds ou sphériques. On en trouve
beaucoup dont les contours sont irréguliers ; ils ren-
ferment alors moins d'étoiles, et leur condensation
centrale est moins marquée. Dans un grand nombre
d'amas globulaires, les étoiles sont toutes d'égale
grandeur; dans d'autres, elles sont fort inégales.
Quelquefois il y a, au centre, une belle étoile
rouge (59), comme dans l'amas situé par ^^ 10"" d'as-
cension droite, et 56" 21' de déclinaison boréale.
Comment ces systèmes isolés peuvent-ils se mainte-
nir? comment les soleils qui fourmillent àl'intérieur
de ces mondes peuvent-ils accomplir leurs révolu-
tions librement et sans chocs? c'est assurément un
des plus difficiles problèmes que la dynamique puisse
aborder. Les nébuleuses ne se distinguent plus guère
des amas stellaires , puisqu'on les regarde mainte-
nant comme étant formées, elles aussi , d'étoiles,
mais d'étoiles plus petites ou beaucoup plus éloi-
gnées de nous. Cependant les nébuleuses paraissent
suivre, dans leur distribution , des lois particulières.
La connaissance de ces lois aura surtout pour effet
de modifier profondément nos idées sur ce que l'on
nomme, avec tant de hardiesse, la structure de l'u-
nivers. Citons seulement ici un fait bien remarquable:
~ 154 —
à parité de grossissement et d'ouverture du téles-
cope , les nébuleuses rondes sont plus facilement ré-
solubles en étoiles que les nébuleuses ovales (40).
Nous signalerons maintenant quelques-uns de ces
amas stellaires qui forment des systèmes isolés, vé-
ritables îles dans Tocéan des mondes.
Les Pléiades : Connues dès la plus haute antiquité et des
peuples les plus grossiers. C'était la constellation des naviga-
gateurs : Pleias, à-o xoîi t.1i~^ , comme dit Vancien scoliaste
d'Aratus. Cette étymologie est bien plus juste que celle des
écrivains plus modernes, qui la déduisent de itXioç , pluralité.
Dans la Méditerranée, la navigation durait depuis mai jusqu'au
commencement de novembre , c'est-à-dire depuis le lever hé-
liaque jusqu'au coucher héliaque des Pléiades.
La Crèche, dans TÉcrevisse ; Nubecula quam Praesepia vo-
cant inter Asellos , comme disait Pline ; un v£.pi)aov d'Erato-
sthène.
L'amas qui se trouve dans la poignée de Pépée de Persée ;
les astronomes grecs en ont souvent fait menUon.
La Chevelure de Bérénice : visible à la simple vue , ainsi que
les trois amas précédents.
Un amas situé près d'Arcturus (N" 1663) , par 13*> 3^°* 12*
d'asc. dr. et 29^> U' de décl., il contient plus d'un millier de
petites étoiles de 10^ à 12'' grandeur.
Amas placé entre -ri et ^ d'Hercule : visible à l'œil nu pendant
les belles nuits; un magnifique objet, vu àPaide d'un télescope
puissant (N^> 1968); il est frangés sur les bords, de prolonge-
ment, assez singuliers. AU. 16" 35'» 37' décl. + 36° ^7'-, décrit
pour la première fois en 171^ . par Halley.
Amas situé près de œ du Centaure : dérrit par Halley dès
1677; paraissant à l'œil nu comme une tache ronde d'aspect
cométaire; presque aussi brillant qu'une étoile de li'' à 5" gran-
deur. A Paide de télescopes puissants, on le décompose en
— 155 —
petites étoiles de 13« à 15* grandeur, assez fortement conden-
sées vers le centre; AR. 13'' 16'" 38% Décl. — Zi6" 35'; c'est le
no 350^ du Catalogue des nébuleuses du ciel austral de Sir
John Herschel; il a 15' de diamètre {Foyage au Cap, p. 21
et 105 ; Ont Unes of Af^lr., p. 595).
Amas voisin de x de la Croix du Sud (N" 3/i35) : Composé
d'étoiles multicolores de 12^ à 16*^ grandeur. Ces étoiles sont
distribuées sur une aire de 1/^8 de degré carré. C'est une né-
buleuse de Lacaille ; elle a été si complètement résolue par
Sir John Herschel, qu'il ne restait plus de traces de nébulosité.
L'étoile centrale est absolument rouge (Foyage au Cap, p. 17
et 102, pi. I, fig. 2).
L'amas hl du Toucan, de Bode; N'' 2322 du Catalogue de
Sir John Herschel ; un des plus merveilleux objets du ciel austral.
Lorsque je vins au Pérou , pour la première fois , et que je vis
cet amas plus élevé au-dessus de l'horizon , je le pris d'abord
pour une comète. Il a 15 ou 20' de diamètre, et quoiqu'il soit
situé près de la petite Nuée de iMagellan, sa visibilité ù l'œil nu
est singulièrement favorisée par sa situation dans un espace
entièrement vide d'étoiles. Il est intérieurement coloré en rose
pâle, entouré d'une bordure blanche concentrique, et formé
d'étoiles égales de W à 16^ grandeur. Il présente d'ailleurs
tous les signes caractéristiques de la forme globulaire ou sphé-
rique (^1).
La Nébulevse d' Andromède , près de v de cette constellation.
La résolution en étoiles de cette célèbre nébuleuse est une des
plus remarquables découvertes qu'on ait faites, à notre époque,
dans l'aslronomie sidérale. Celte découvcrle est due à Georges
Bond (^2s adjoint de l'observatoire de Cambridge, aux États-
Unis, et fut faite en marsl8/i8; elle montre toute la puissance op-
tique delà lunel te ('c cet établissement (son objectif est de 38 cen-
timètres de diamètre); car un excellent téles(ope, dont le miroir
n'avait pas moins de ^9 centimètres de diamètre, « ne laissait
pas même soupçonner la présence d'une seule étoile dans cette
nébuleuse » {hZ). Or la lunette de Cambridge en fait distinguer
— 156 —
plus de 1500. Peut-être l'amas stellaire d'Andromède a-t-il été
connu , dès la fin du x^ siècle, comme une nébuleuse de forme
ovale ; il est certain du moins que Simon Marins ou xMayer^ de
Guntzenhausen, auquel on doit la remarque des changements de
couleur qui accompagnent la scintillation [hk], a signalé cet amas
le 15 décembre 1612, comme un nouvel astre singulier, dé-
pourvu d'étoiles et inconnu à Tycho; c'est lui aussi qui en a donné
la première description détaillée. Cinquante ans plus tard ,
Bouillaud , l'auteur de Y Astronomia Philolaica, s'est occupé
du même sujet. Ce qui donne à cet amas, dont la longueur est
de 2" 1/2 et la largeur de plus de 1% un caractère tout particu-
lier, ce sont deux bandes noires très-étroites qui traversent,
comme des fissures, la figure entière, parallèlement à son grand
axe. Cette configuration , observée par Bond , rappelle la sin-
gulière fissure longitudinale qui traverse également une nébu-
leuse non résolue de l'hémisphère austral, le N° 3501, dont
Herschel a donné la description et le dessin, dans son Foyagç
au Cap^ p. 20 et 105 , pi. IV, fig. 2.
J'omets à dessein la grande nébuleuse d'Orion
dans ce choix d'amas stellaires remarquables, mal-
gré les découvertes importantes que Lord Rosse, aidé
de son télescope gigantesque , a faites sur cette né-
buleuse. Il m'a paru plus convenable de renvoyer
au chapitre des nébuleuses la description des parties
actuellement résolues dans la constellation d'Orion.
La plus grande accumulation d'amas d'étoiles ,
mais non de nébuleuses, se trouve dans la Voie lac-
tée (15), {Galaxias, le Fleuve céleste des Arabes) (Û6),
qui forme presque un grand cercle de la sphère in-
cliné à l'équateur sous un angle de 63o. Le pôle nord
de la Voie lactée se trouve par 12'' hT" d'asc. dr.
et 27" de décl. boréale, et son pôle sud par 0'' 47*"
— 157 —
d'asc. droite et 27" de décl. australe. On voit que le
pôle boréal de la Voie lactée est situé près de la Che-
velure de Bérénice, et que son pôle austral tombe
entre le Phénix et la Baleine. S'il est naturel de rap-
porter les lieux des planètes à Técliptique, c'est-à-
dire au grand cercle de la sphère que le Soleil décrit
dans sa course annuelle, il ne Test pas moins de rap-
porter l'ensemble des configurations stellaires au
grand cercle de la Voie lactée , surtout quand il s'a-
git de rechercher le mode suivant lequel les étoiles
se groupent et s'accumulent dans les diverses ré-
gions de la voûte céleste. En ce sens , la Voie lactée
a le môme rôle, dans l'univers sidéral, que l'éclip-
tique dans notre monde planétaire. Elle coupe l'é-
quateur en deux points : le premier est situé entre
Procyon et Sirius , par 6'' 54™ d'asc. dr. ; le second
point se trouve vers la main gauche d'Antinous, par
19M5" d'asc. dr. (en 1800). La Voie lactée divise
donc la sphère céleste en deux parties un peu iné-
gales, dont les surfaces sont dans le rapport de 8
à 9. C'est dans la plus petite que se trouve le point
équinoxial du printemps. La largeur de la Voie lactée
est très-variable (47). La partie la plus étroite et aussi
la plus brillante a seulement 3" ou 4" de large; elle
se trouve entre la proue du Navire et la Croix.
Ailleurs, sa largeur va à 16** et même à 22% par
exemple entre le Serpentaire et Antinous ; il est vrai
que cette partie est divisée en deux branches (48).
W. Herschel a remarqué qu'en plusieurs endroits la
Voie lactée est plus large de 6° ou 7% d'après ses jau-
— 158 ^-
ges, qu'elle ne le paraît à Toeil nu, quand on en juge
seulement par l'effet de sa lueur stellaire (19).
La blancheur lactescente de cette zone a été attri-
TDuée longtemps à la présence d'une nébulosité gé-
nérale non résoluble. Iluyghens avait été conduit à
cette idée dès 1656, en étudiant la Voie lactée avec
une lunette de 7™, 5. Mais on est parvenu plus tard,
en employant toute la puissance optique des plus
grands télescopes, à démontrer que cette lueur gé-
nérale ne devait pas être attribuée à la présence de
quelques rares nébuleuses , mais bien à des strates
d'étoiles accumulées dans la même région. C'est la jus-
tification des idées que Démocrite et Manilius s'étaient
formées autrefois sur « la Voie suivie parPhaéton. »
Là où la Voie lactée a été décomposée en étoiles, on
a vu ces étoiles» se projeter sur un fond noir entière-
ment dégagé de toute nébulosité : » or, la lueur gé-
nérale de la Voie lactée est partout la même (50).
C'est un caractère général et très-remarquable de
la Voie lactée que les amas globulaires et les nébu-
leuses ovales de forme régulière s'y trouvent si clair-
semées (51), tandis qu'on les rencontre en si grand
nombre à de grandes distances de la Voie lactée, et
même dans les Nuées de Magellan. Dans ces Nuées,
les étoiles isolées, les amas globulaires à tous les états
possibles de condensation intérieure , et les taches
nébuleuses ovales ou irrégulières sont abondamment
mêlées les unes aux autres. Toutefois une partie de
la Voie lactée fait exception sous ce rapport; on
trouve des amas nombreux de forme sphérique dans
— 159 —
la région comprise entre 16^ iô"" et 18*" l\h^ d'asc. dr.,
c'est-à-dire entre l'Autel, la Couronne australe, la
lêLe et le corps du Sagittaire, et la queue du Scor-
pion. On voit même, entre s et G du Scorpion , une
de ces nébuleuses annulaires, si rares dans le ciel
austral (52). Dans le champ de vision des grands té-
lescopes (et il faut se rappeler ici que les télescopes
d'Herschel de 20 pieds et de 40 pieds pénétraient
dans l'espace jusqu'à 900 et 2800 fois la distance de
Sirius à la Terre), la Voie lactée se montrait aussi
variée, quant à sa constitiUion sidérale, qu'elle est
peu régulière à l'œil nu , dans ses limites toujours mal
accusées. Si quelques régions présentent de grands
espaces où la lumière est uniformément répartie, il
vient immédiatement après d'autres régions où des
espaces brillants du plus vif éclat alternent avec des
espaces pauvres en étoiles, et dessinent sur le ciel
des réseaux irrégulièrement lumineux (53). On trouve
même, jusque dans l'intérieur de la Voie lactée,
des espaces obscurs où il est impossible de découvrir
une seule étoile, fut-elle de 18' ou de 20' grandeur.
A l'aspect de ces régions absolument vides, on ne
saurait se défendre de l'idée que le rayon visuel a
pénétré réellement dans l'espace, en traversant l'é-
paisseur entière de la couche stellaire qui nous envi-
ronne. Les mêmes irrégularités se manifestent dans
les jauges : quand celles-ci présentent une moyenne
de 40 à 50 étoiles pour l'étendue d'un champ de
vision de 15' en diamètre, les jauges suivantes en
comprennent souvent dix fois plus. Quelquefois, des
— 160 —
étoiles d'un éclat supérieur brillent au milieu de la
plus line poussière stellaire, et les ordres de gran-
deur intermédiaires manquent totalement. Il faut
pourtant remarquer ici que les étoiles dites d'ordre
inférieur ne sont pas nécessairement les plus éloi-
gnées; il est possible qu'elles soient d'un volume
plus faible , ou que la lumière s'y développe avec une
moindre intensité.
Pour bien saisir le contraste que présentent les di-
verses parties de la Voie lactée , quant à l'éclat et à
l'accumulation des étoiles, il faut comparer des ré-
gions très-éloignées l'une de l'autre. Le maximum de
richesse et d'éclat stellaire se trouve entre la proue
du Navire et le Sagittaire, ou , pour parler plus exac-
tement , entre l'Autel , la queue du Scorpion , la main
et l'arc du Sagittaire , et le pied droit du Serpentaire.
« Aucune région du ciel ne présente autant d'éclat et
de variété par la richesse et le nombre des objets qui
s'y trouvent réunis » (54). La région de notre ciel bo-
réal qui s'en rapproche le plus est située dans l'Aigle
et dans le Cygne , vers le point de partage de la Voie
lactée. Le minimum d'éclat se trouve dans les envi-
rons de la Licorne et de Persée, et le minimum de
largeur sous le pied de la Croix.
Une circonstance digne de remarque augmente en*
core la magnificence de la Voie lactée, dans l'hémi-
sphère austral : c'est qu'elle est coupée sous un angle
d'environ 20% entre les parallèles de 59° et de 60%
par la zone stellaire où se trouvent les étoiles les plus
brillantes et sans doute aussi les plus voisines de
— 161 —
nous, zone à laquelle appartiennent Orion, le Gia.» -
Chien, le Scorpion, le Centaure et la Croix. Un arc
de grand cercle, passant par s d'Orion et le pied de
la Croix , dessine ass; z bien la direction de cette zone
remarquable, dont l'intersection avec la Voie lactée
tonibe entre a de la Croix et r^ d'Argo, devenue si
célèbre par sa variabilité. J.'effet vraiment pittores-
que de la Voie lactée est encore augmenté par les di-
verses ramifications qu'elle présente sur les o/5 de
son trajet. La bifurcation principale a lieu près de «
du Centaure, suivant Sir John Herschel (55), et non
près de (3 du Centaure, comme l'indiquent nos cartes
célestes, ni près de l'Autel, comme le veut Ptolé-
mée (56). Les deux grandes branches se réunissent
dans la constellation du Cygne.
Pour embrasser dans son ensemble le cours en-
tier de la Voie lactée et de ses ramifications, nous
ferons ici une revue rapide de ses diverses parties,
en suivant l'ordre des ascensions droites. Elle passe
par y et e de Cassiopée, envoie au sud, vers z de
Persée, un rameau qui se perd près des Pléiades et des
Hyades; elle traverse, faible encore et peu brillante,
les Chevreaux (Ilœdi) dans la main du Cocher, les
pieds des Gémeaux , les cornes du Taureau , coupe
Pécliptique au point solsticial d'été , couvre la massue
d'Orion ettraversel'équateurvers le col de la Licorne
par 6'* 54"^ d'ascension droite (en 1800). A partir de
ce point son éclat augmente notablement. A l'arrière
du Navire, elle émet un rameau vers le sud jusqu'à
y d'Argo, 011 ce rameau disparaît brusquement. La
m. 11
— 162 —
branche principale continue jusqu'à 33° de décli-
naison australe; là elle s'éteud en éventail sur 20° de
large, puis elle s'interrompt encore et laisse un large
espace vide , suivant la ligne qui joint y et ). d' Argo.
Elle reprend ensuite, avec la même largeur ; mais elle
va en se rétrécissant vers les pieds de derrière du
Centaure. Dans la Croix du Sud, où elle atteint son mi-
nimum de largeur, elle n'a plus que 3° ou 4°. Un peu
plus loin , elle s'étend de nouveau , et se transforme
en une masse plus brillante où (5 du Centaure , a et
P de la Croix se trouvent compris, ainsi que l'espace
obscur en forme de poire, qu'on nomme Sac de
Charbon et dont j'aurai à parler bientôt dans le
VIP chapitre. C'est vers cette région remarquable,
un peu au-dessous du Sac de Charbon , que la Voie
lactée se rapproche le plus du pôle austral.
Elle se divise près de a du Centaure , comme je
raidit plus haut, et sa bifurcat'on se maintient, sui-
vant les anciennes descriptions, jusque dans la con-
stellation du Cygne. D'abord, en partant de a du Cen-
taure , on voit un rameau étroit se diriger au nord
et se perdre vers le Loup. Puis une division se
montre dans le Compas, près de y de la Règle. Le
rameau septentrional présente des formes irrégu-
lières jusque vers les pieds du Serpentaire; là il
s'évanouit tout à fait. Le rameau méridional de-
vient alors la branche principale, traverse l'Au-
tel et la queue du Scorpion, en se dirigeant vers
l'arc du Sagittaire et coupe l'écliptique par 276° de
longitude. On le reconnaît plus loin courant à tra-
— 163 —
vers TAigle , la Flèche et le Renard jusqu'au Cygne,
mais sous une forme accidentée, interrompue çà et là.
En cet endroit commence une région extrêmement ir-
régulière; on y voit entrée, a. et y du Cygne, une large
place obscure que Sir John Herscliel compare au
Sac de charbon de la Croix du Sud (57), et qui forme
une espèce de centre d'où divergent trois courants
partiels. Le plus brillant est facile à suivre, si on re-
monte par de là (3 du Cygne et s de l'Aigle; mais il
ne se réunit point avec le rameau mentionné plus
haut, lequel s'étend jusqu'au pied d'Ophiucus. Une
partie plus considérable de la Voie lactée s'étend en
outre à partir de la tête de Céphée, c'est-à-dire près
de Cassiopée, point de départ de toute cette descrip-
tion, et se dirige vers la Petite Ourse ou le pôle nord.
Les progrès extraordinaires dont l'étude de la
Voie lactée est redevable à l'emploi des grands té-
lescopes, ont fait succéder, à l'étude purement des-
criptive ou optique de cette partie du ciel, des
aperçus plus ou moins heureux sur sa constitution
physique. Thomas Wright (58), Kant , Lambert et
William Herschel lui-même ne voyaient dans cette
immense accumulation d'étoiles que la simple per-
spective d'une strate stellaire aplatie et plus ou moins
régulière, au sein de laquelle notre système solaire
serait placé. Quant à l'Iiypothèse opposée, celle de
l'égale grandeur des étoiles et de leur uniforme dis-
tribution dans l'espace, tout concourt aujourd'hui à
l'ébranler. Cependant William Herschel a fini, dans
ses derniers travaux , par modifier lui-même sa pre-
— 164 —
uiière idée : au lieu d'une immense couche d'étoiles,
cet habile et hardi scrutateur des cieux a préféré ad-
mettre enfin l'hypothèse d'un vaste anneau stellaire,
qu'il avait pourtant combattue dans son beau Mé-
moire de 1781 (59). Les dernières observations pa-
raissent décider en faveur d'un système d'anneaux
concentriques, d'épaisseurs très-inégales, et dont les
diverses couches, plus ou moins lumineuses pour
nous, seraient placées à des profondeurs diverses
dans l'espace. Maisl'éclatrelatif de ces petites étoiles,
comprises entre la 10^ et la IG^ grandeur, ne saurait ici
nous donner la mesure de leur distance; il est impos-
sible d'en rien conclure de satisfaisant, quant à l'éva-
luation numérique du rayon des sphères auxquelles
ces étoiles appartiennent ^60).
Dans beaucoup de régions de la Voie lactée, la puis-
sance de pénétration de nos instruments optiques
suffit pour résoudre les nuées stellaires dans toute
leur étendue, et faire voir les points lumineux sur le
fond vide et noir des espaces sans fin. On peut dire
alors que la vue pénètre librement dans l'espace. « It
leads us, » dit Sir John Herschel, « irresistibly to the
conclusion, that in thèse régions we see fairly through
the slarry stratum (61). » Dans certaines régions, la
Voie lactée livre elle-même un passage par ses hiatus
ou ses fissures. Ailleurs elle est restée impénétrable
(fathomless, insondable), même pour le célèbre té-
lescope de 40 pieds (62j.
La théorie actuelle du système des anneaux galac-
tiques et la détermination de que l'on appelle har-
— 165 —
diment « le lieu du Soleil dans ce système, » sont
dues , en grande partie , aux récents travaux de Sir
John Herschel dans l'hémisphère austral. Pour obte-
nir ces résultats dont on ne peut contester la vrai-
semblance et surtout l'intérêt, John Herschel a étu-
dié la distribution de la lumière stellaire dans les
diverses régions de la Voie lactée , et les ordres de
grandeur des étoiles qui s'accumulent de plus en
plus à partir des pôles galactiques, accumulation
qui a été constatée, dans un espace de 30% de
chaque côté de la Voie lactée, pour les étoiles
inférieures à la 11* grandeur (63), par consé-
quent pour les 16/17 de la totalité des étoiles.
Le lieu que Ton est ainsi conduit à assigner au Soleil
est excentrique : on le place sur la ligne d'intersec-
tion de l'une des couches secondaires avec le plan de
l'anneau principal (6/i), dans une des régions les plus
vides, plus près de la Croix du Sud que de la région
cil se trouve le nœud opposé de la Voie lactée (65).
« La profondeur à laquelle notre système solaire
est placé, dans la couche d'éloiles qui forme la
Voie lactée , doit donc être égale à la distance des
étoiles de 9* à 10'' grandeur, et non point à celle des
étoiles de 11' grandeur; cette profondeur étant d'ail-
leurs comptée à partir de la surface méridionale de la
strate stellaire (66), » Mais là où les mesures di-
rectes deviennent impossibles, par la nature mênie
du problème, l'esprit humain, tout en pressentant la
vérité, ne parvient cependant qu'à saisir une lueur
incertaine.
— 166 —
IT
ÉTOILES NOUVELLES. — ÉTOILES CHANGEANTES A PÉRIODES
CONSTATÉES — ASTRES DONT L'ÉCLAT SUBIT DES VARIATIONS,
MAIS DONT LA PÉRIODICITÉ N'A POINT ENCORE ÉTÉ RECONNUE.
*
Étoiles nouvelles. — L'apparition d'une étoile nou-
velle a toujours excité l'étonnement, surtout quand
le phénomène a été subit, quand l'étoile était de
première grandeur et fortement scintillante. C'est
là, en effet, ce que l'on pourrait nommer à bon
droit un événement dans l'univers. Ce qui était
resté, jusque-là, caché à nos regards, devient vi-
sible et révèle tout à coup son existence. La sur-
prise, d'ailleurs, est d'autant plus vive, que de pa-
reils événements se présentent plus rarement dans la
nature. Du xvi" au xix^ siècle, les habitants de l'hé-
misphère boréal ont aperçu , à l'œil nu , 42 comètes ,
soit 14 comètes en moyenne par siècle ; tandis qu'ils
n'ont été témoins que de 8 apparitions d'étoiles
nouvelles, dans le même laps de temps. Leur rareté
devif'ut bien plus frappante , si on embrasse des pé-
riodes plus longues. Depuis l'époque, importante
dans l'histoire de l'astronomie, où les Tables Alphon-
sines furent achevées, jusqu'à celle de William
Herschel, de 1252 à 1800, on a compté environ
6B comètes non télescopiques, et seulement 9 étoiles
— 167 —
nouvelles. Dans cette période donc, où la civilisa-
tion européenne permet de compter sur une atten-
tion scientifique suffisamment soutenue, le rapport
des étoiles nouvelles aux comètes visibles est celui
de 1 à 7. Nous ferons voir bientôt que, si on distingue
avec soin, dans le catalogue chinois de Ma-tuan-lin,
les étoiles nouvelles des comètes dépourvues de
queues, et si Ton remonte, à l'aide de cette pré-
cieuse colfection, jusqu'à l'année 150 avant notre ère,
on trouve encore à peine, en 2000 ans, 20 à 22 ap-
paritions d'étoiles dont on puisse garantir là réalité.
Avant de passer aux considérations générales, il
nous parait bon de tious arrêter, un moment, à
un cas particulier, et d'étudier, dans les écrits d'un
témoin oculaire , la vive impression que peut causer
l'aspect inattendu d'un phénomène de ce genre.
« Lorsque je quittai l'Allemagne pour retourfiel'
dans les îles danoises , dit Tycho Brahé , je m'arrêtai
(ut aulicee vilœ fastidium lenirem) dans l'ancien cloître
admirablement situé d'Herritzwaldt, appartenant à
mon oncle Sténon Bille, et j'y pris l'habitude de rester
dans mon laboratoire de chimie jusqu'à la nuit tom-
bante. Un soir que je considérais, comme à l'ordi-
naire, la voûte céleste dont l'aspect m'est si familier,
je vis avec un étonncment indicible, près du zénith,
dans Cassiopée, une étoile radieuse d'une grandeur
extraordinaire, frappé de surprise, je ne savais si j'en
devais croire mes yeux. Pour nie convaincre qu'il
n'y avait point d'illusion , et pour recueillir le té-
moignage d'autres personnes, je fis sortir les ou-
— 168 —
vriers occupés dans mon laboratoire, et je leur
demandai, ainsi qu'à tous les passants, s'ils voyaient,
comme moi, l'éloile qui venait d'apparaître tout à
coup. J'appris plus tard qu'en Allemagne des voilu-
riers et d'autres gens du peuple avaient prévenu les
astronomes d'une grande apparition dans le ciel, ce
qui a fourni l'occasion de renouveler les railleries
accoutuniées contre les hommes de science (comme
pour les comètes dont la venue n'avait point été
prédite).
« L'étoile nouvelle », continue Tycho, « était dé-
pourvue de queue ; aucune nébulosité ne l'entourait;
elle ressemblait de tout point aux autres étoiles;
seulement elle scintillait encore plus que les étoiles
de première grandeur. Son éclat surpassait celui de
Sirius, de la Lyre et de Jupiter. On ne pouvait le
comparer qu'à celui de Vénus, quand elle est le plus
près possible de la Terre (alors un quart seulement
de sa surface est éclairé pour nous). Des personnes
pourvues d'une bonne vue pouvaient distinguer cette
étoile pendant le jour, même en plein midi, quand
le ciel était pur. La nuit, par un ciel couvert, lors-
que toutes les autres étoiles étaient voilées, l'étoile
nouvelle est restée plusieurs fois visible à travers des
nuages assez épais (nubes non adniodum densas).
Les distances de cette étoile à d'autres étoiles de Cas-
siopée, que je mesurai l'année suivante avec le plus
grand soin, m'ont convaincu de sa complète immobi-
lité. A partir du mois de décembre 1572, son éclat
commença à diminuer ; elle était alors égale à Jupiter.
— 109 —
En janvier 1573 elle devint moins brillante que Ju-
piter. Voici les résultais de mes comparaisons photo-
métriques : en février et mars, éj^alité avec les
étoiles du premier ordre (stelhirum affixarum primi
honoris ; Tycho paraît n'avoir jamais voulu employer
Texpression de Manilius, stellœ fixée); en avril et
mai, éclat des étoiles de 2'' grandeur; en juillet et
août, de 3"; en octobre et novembre, de 4*' grandeur.
Vers le mois de novembre , l'étoile nouvelle ne sur-
passait pas la il' étoile dans le bas du ôossier du
trône de Cassiopée. Le passage de la 5* à la 6' gran-
deur eut lieu de décembre 1573 à février 1574. Le
mois suivant, l'étoile nouvelle disparut, sans laisser
de trace visible à la simple vue, après avoir brillé
17 mois. » Le télescope a été inventé 37 ans plus
tard.
Ainsi rétoile perdit son éclat d'une manière suc-
cessive et parfaitement régulière, sans présenter des
périodes de recrudescence, comme l'a fait de nos
jours-/; d'Argo, étoile qu'on ne peut assurément ap-
peler nouvelle. La couleur ch ngeait aussi bien
que l'éclat, ce qui donna lieu, plus tard, à une
foule de conjectures erronées sur la vitesse de pro-
pagation des divers rayons colorés. Dans les premiers
temps de son apparition , lors(|u'elle égalait en éclat
Vénus et Jupiter, elle resta blanche pendant deux
mois; elle passa ensuite au jaune, puis au rouge.
Pendant l'hiver de 1573 , Tycho la compare à Mars ;
puis il la trouve presque semblable à l'épaule droite
d'Orion (Beteigeuze). 11 lui trouvait surtout de l'ana-
— 170 —
logie avec la couleur rouge d'Aldébaran. Au prin-
temps de 1573, principalement vers le mois de mai,
la couleur blanchâtre reparut: «albedinemquamdam
sublividam induebat, qualis Saturni stellae subesse
videtur » . Elle resta ainsi, en janvier i57à, de 5' gran-
deur et blanche , mais d'une blancheur moins pure;
elle scintillait avec une vivacité extraordinaire pour
sa grandeur; enfin elle conserva les mêmes appa-
rences jusqu'à sa disparition totale en mars 1574.
Ces détails circonstanciés (67) montrent l'influence
qu'un tel phénomène devait exercer sur les esprits,
à une époque si brillante pour l'astronomie , et l'im-
portance qu'on attachait déjà aux problèmes qu'il
soulevait. Comme, malgré la rareté des étoiles nou-
velles , des phénomènes' de ce genre se reproduisi-
rent 3 fois en 32 ans, sous les yeux des astronomes
européens , ces événements extraordinaires et réi-
térés excitèrent au plus haut degré l'intérêt uni-
versel. On reconnut de plus en plus l'importance
des catalogues stellaires, qui seuls peuvent donner
le moyen de contrôler la nouveauté de l'étoile. On
discuta leur périodicité possible (68), c'est-à-dire
leur réapparition après plusieurs siècles. Tycho
avança même hardiment une théorie sur la ma-
nière dont les étoiles se forment aux dépens de la
matière cosmique , et sa théorie présente beaucoup
d'analogie avec celle de William Ilerschel. 11 croit
que cette matière céleste est d'abord à l'état de né-
bulosité ; qu'elle devient lumineuse par sa conden-
sation ; qu'elle s'agglomère enfin en formant des
— 171 —
étoiles : « Cœli materiam temiissimam, ubiqiie nostro
visui et Planelarum circiiitibiis perviam , in iinurn
globum condensatam, stellam effîngere ». Cette ma-
tière cosmique, universellement répandue, aurait
acquis déjà un certain degré de condensation dans
la Voie lactée, où elle brille d'une douce lueur ar-
gentée. C'est pourquoi l'étoile nouvelle se trouvait ,
comme celles qui parurent en 9/i5 et 1264, au bord
même de la Voie lactée « quo factum est quod nova
Stella in ipso Galaxiee margine constiterit ; et même
on reconnaît encore la place (le hiatus) que la ma-
tière de la Voie lactée a laissée vide en se conden-
sant (69). Ces aperçus rappellent des théories qui
eurent cours au commencement du xix^ siècle, la
transformation de la matière nébuleuse en amas
stellaires, la force de concentration qui condense
peu à peu cette matière, en donnant naissance à une
étoile centrale , et toutes ces hypothèses sur la
marche que suit la matière nébuleuse, pour former
des globes solides. Ces idées ont régné un instant;
aujourd'hui elles sont rejetées comme douteuses. Tel
est le sort des hypothèses, dans l'éternelle fluctuation
des opinions et des systèmes.
Je rassemble ici toutes les apparitions des étoiles
nouvelles temporaires sur la certitude desquelles on
peut compter jusqu'à un certain point:
(a) 13^ avant J. C. dans le Scorpion.
(6) 123 après J. C. dans Ophiucus.
(c) 173 dans le Centaure.
(d) 369 ?
— 172 —
(e) 386 dans le Sagittaire.
(/•) 389 dans l'Aigle.
[g) 393 dans le Scorpion.
{h) 827 ? dans le Scorpion.
[i) 9^5 entre Cépliée et Cassiopée.
[h) 1012 dnns le Bélier.
(/) 1203 dans le Scorpion.
[m) 1230 dans Ophiucus.
(n) 126^ entre CépIiée et Cassiopée.
(o) 1572 dans Cassiopée.
[p) 1578.
{q) 158^ dans le Scorpion.
(r) 1600 dans le Cygne.
(s) 160i dans Ophiucus.
(0 1609.
(m) 1670 dans le Renard.
iv) 18^8 dans Ophiucus.
Éclaircissements.
(a) Première apparition, entre p et p du Scorpion , en juillet
de l'an 134 av. J.-C. ; extrait de la Collection chinoise de
Wa-tuan-lin , traduite et coordonnée par le savant linguiste
Edouard Biot [Connaii^^ance des tempHf pour l'an 18/i6, p. 61).
On trouve , dans ce catalogue , la description des étoiles ex-
traordinaires , d'un aspect étranger, que les Chinois nommaient
étoiles hôtes (Ke-sing , étrangers d'une physionomie singulière).
Ces étoiles sont distinguées , par les observateurs eux-mêmes ,
des comètes pourvues de queue; mais les étoiles nouvelles im-
mobiles sont mêlées d'un certain nombre de comètes sans
queue et changeant de position. Cependant on peut trouver un
critérium important, sinon infaillible, pour les distinguer,
dans l'indication d'un mouvement ( Ke-sing de 1092, 1181 et
1 A58) ou dans l'absence de toute indication de ce genre, comme
dans la formule : « le Ke-sing s'est dissous » et a disparu. On
— 173 —
peut rappeler encore que la tête des comètes , avec ou sans
queue, brille toujours d'une lumière faible et douce, et ne scin-
tille jamais, tandis que l'éclat des étoiles extraordinaires, signa-
lées par les Chinois, est comparé à celui de Vénus, ce qui ne
saurait convenir aux comètes en général , et encore moins aux
comètes sans queue. L'étoile qui parut en 134 avant J.-G , sous
1 antique dynastie des Han, pourrait être, suivant Sir John
Herschcl, l étoile nouvelle dont parle Pline, celle qui aurait
déterminé Nipparque à entreprendre son catalogue. Le dire de
Pline a été traité d'historiette par Delambre {Hiiit de l*^str.
anc^ t. I , p. 290 et Hist. de l'/fsfr. mod. , t. I, p. 186). Mais
comme Ptoléméealîirme expressément (^/wfl^. 711, 2, p. 13, éd.
Halma) que le catalogue d'Hipparque est rolalif h. l'an 128 avant
notre ère, et comme Hipparque observait à Rhodes et peut-être
aussi à Alexandrie, entre les années 162 et 127 avant J. C, ainsi
que je l'ai déjà dit d ms un autre endroit, il n'y a rien à opposer
h l'assertion de Pline , ou à la conjecture d'Herschel On peut
bien croire, en effet, que le grand astronome de iNicée a observé
longtemps avant l'époque où il se détermina à construire un
catalogue d'étoiles. L'expression de Pline « suo aevo genita » se
rapporte évidemment à la vie entiîre d'Hipparque. Lorsque
l'étoile de 1572 apparut (celle de Tycho), on disputa longtemps
sur la question de savoir si l'étoile d'Hipparque était bien une
étoile nouvelle ou une comète sans queue. Tycho avait adopté
la première opinion [Progymn., p. 319-325). Les mots « ejus-
que moiu ad dubitationem adiluctus » pourraient faire penser
qu'il s'agissait d'une comète faible ou sans queue ; mais le lan-
gage un peu factice de Pline s'accommode de toute espèce
d'ambiguïté dans l'expression.
[h) Apparition signalée par les Chinois, en décembre de
l'année 'i23 après notre ère, entre a d'Hercule et a d'Ophiucus;
collection de Ma-tuan-lin, daprès Ed. Biol (Il par;îîlrail qu'il y
aurait eu encore une autre apparition d'étoile nouvelle sous
Adrien , vers l'an 130).
(c) Étoile singulière et très-grande , tirée de Ma-tuan-lin ,
— 174 —
ainsi que les trois suivantes. Elle parut, le 10 décembre 173,
entre a et [B du Centaure, et disparut huit mois plus tard, après
avoir montré les cinq couleurs Vune après l'autre. Edouard Biot
dit successivement y dans sa traduction: On pourmit conclure de
cette expression que cette étoile a présenté, à diverses époques,
une série de couleurs analogues à celles de Tétoile de ïyclio;
mais Sir John Herschel croit qu'il s'agit seulement d'une scin-
tillation colorée {Outlines, p. 563); c'est la même interpréta-
tion qu'Arago a donnée dune expression presque identique
dont Kepler s'était servi , pour l'étoile nouvelle de 1604 dans
le Serpentaire (^/inf maire pour 18/i2 , p. 3Zi7).
(d) Elle brilla depuis le mois de mars jusqu'au mois d'août
de Tan 369.
{e} Entre X et
^ 50"' 59" d'Asc. dr. et 12° 39' 16" de
Décl. australe (pour 18^8). Pour aucune autre étoile nouvelle,
la nouveauté de l'apparition ou l'invariabilité de position n'ont
été constatées avec autant de soin et d'exactitude. Elle est au-
jourd'hui (1850) de 11^ grandeur à peine; d'après les observa-
tions assidues de Lichtenberger, il est probable qu'elle va
bientôt disparaître totalement ( Notices of the Jsir, Soc. ,
t. VIII, p. 1/16 et 155-158).
Ce tableau des étoiles nouvelles qui ont paru et
disparu depuis 2000 ans , est peut-être un peu plus
complet que les tableaux du même genre publiés
jusqu'à ce jour. Il nous suggère les remarques sui-
vantes. On doit distinguer trois classes de phéno-
mènes : les étoiles qui apparaissent subitement et
disparaissent au bout d'un temps plus ou moins long ;
celles dont l'éclat est soumis à des variations pério-
diques déterminées dès à présent; et celles qui,
comme n d'Argo, augmentent tout d'un coup d'éclat,
et présentent ensuite des variations dont la loi nous
échappe. L'étoile nouvelle de Fan 1600 (dans le
Cygne), qui disparut tout à fait, mais seulement sans
doute pour l'œil nu , et reparaissant ensuite , resta
définitivement à l'état d'étoile de 6' grandeur, nous
montre bien l'aflinité des phénomènes des deux pre-
mières classes. On croyait déjà, du temps de Tycho,
que l'étoile nouvelle de 1572 (dans Cassiopée) pour-
rait bien être la même que celles de 945 et de 1264.
^ 181 —
Comme les intervalles, peut-être un peu incertains,
sont de 319 et de 308 ans , Goodricke soupçonna une
période de trois siècles ; Keill et Pigott la réduisirent
de moitié et en firent une période de 150 ans. Mais
Arago a montré que l'étoile de 1572 ne saurait être
rangée, avec vraisemblance, au nombre des étoiles
périodiquement variables (71). Rien , jusqu'ici, n'au-
torise à considérer toutes les étoiles nouvelles comme
de simples étoiles variables à longue période , qui
nous seraient restées inconnues , à cause de la lon-
gueur même de leur période. Si, par exemple, la lu-
mière propre de tous les soleils du firmament résulte
du jeu des actions électro-magnétiques dans leurs
photosphères , il n'est pas nécessaire de recourir à
une condensation locale et temporaire de l'éther, ou
à l'interposition momentanée de prétendus nuages
cosmiques, pour expliquer les variations de cette lu-
mière, que ces variations soient d'ailleurs régulières
ou non , qu'elles se reproduisent à des époques mar-
quées, ou qu'elles aient lieu une seule fois. Les phé-
nomènes de lumière qui naissent des actions élec-
triques à la surface de notre propre globe , les éclairs,
par exemple, ou les aurores polaires, ne montrent-
ils pas, au milieu de nombreuses irrégularités ap-
parentes, une certaine périodicité dépendant des
saisons ou même des heures du jour? On peut en
dire autant des petits nuages qui se forment sou-
vent, plusieurs jours de suite, par un ciel serein,
et toujours aux mêmes places; témoin les anomalies
persistantes qu'on retrouve ensuite dans les observa-
— 182 —
lions astronomiques instituées dans de pareilles cir-
constances.
Une des particularités les plus intéressantes à mes
yeux , dans ces phénomènes , c'est que les étoiles
nouvelles apparaissent presque toutes avec le plus vif
éclat : elles surpassent, de prime abord, les étoiles
de première grandeur, et pour la vivacité de la lu-
mière et pour celle de la scintillation; en un mot,
on ne les voit pas, du moins à Fœil nu, atteindre par
degrés leur maximum d'éclat. Kepler attachait tant
d'importance à cette espèce de critérium (72) , qu'il
s'en faisait un argument contre les assertions du Po-
litien. Ce dernier prétendait avoir découvert l'étoile
nouvelle du Serpentaire (en 1604) longtemps avant
Brunowski; sa réclamation, contestée par Kepler,
était conçue en ces termes : « Apparuit nova
slella parva , et postea de die in diem crescendo ap-
paruit lumine non multo inferior Venere , supe-
rior Jove. » Trois étoiles seulement font exception à
la règle , et ont présenté une augmentation d'éclat
progressive ; ce sont : l'étoile de 3' grandeur de 1600
(dans le Cygne), celle de 1670 (dans le 'Renard), et l'é-
toile nouvelle de Hind dans le Serpentaire (en 1848).
Il est bien à regretter que ces phénomènes soient
devenus si rares, depuis 178 ans. Ils ne se sont pré-
sentés en effet que deux fois pendant ce long inter-
valle, tandis qu'ils s'étaient concentrés , pour ainsi
dire, dans les siècles précédents : 4 en 24 ans , vers
la un du iV siècle; 3 en 61 ans, au xni'; et 6 en
37 ans, vers l'époque de Tycho et de Kepler, entre
— 183 —
la fin du xvr et le commencement du xvn* siècle.
Je compte ici , bien entendu , les étoiles extraordi-
naires observées par les Chinois , car, au dire des
juges compétents, la majeure partie de ces observa-
tions est digne de confiance. A la vérité , les étoiles
vues en Europe n'ont point toujours été consi-
gnées dans la collection de Matuan-lin ; celle de
Tycho (1572) ne s'y trouve point; peut-être même
celle de Kepler (1604) ne saurait-elle être identifiée
avec aucune des étoiles observées en Chine. La
raison de ces discordances m'échappe; il est tout
aussi difficile d'en rendre compte, que d'expliquer
comment le grand phénomène lumineux , observé
en Chine au mois de février 1570, n'a point été aperçu
et mentionné par les Européens. Dans tous les cas ,
ce n'est pas la différence des longitudes des deux
pays (114°) qui pourrait expliquer ces contradictions.
Mais les personnes habituées à ce genre de recherches
savent que l'absence de toute mention historique, en
fait d'événements politiques ou célestes , ne prouve
rien contre leur existence. Que l'on compare d'ail-
leurs entre eux les trois catalogues compris dans la
collection de Ma-tuan-lin , et l'on trouvera dans l'un
d'eux des apparitions de comètes, par exemple celles
de 1385 et de 1495, qui ne sont point rapportées
dans les autres ou dans l'un des autres.
Les anciens et les modernes, Tycho et Kepler,
comme Sir John Herschel et Hind, ont fait remar-
quer que la plupart des étoiles nouvelles {.parurent
dans l'intérieur ou sur les bords de la Voie lactée.
— 181 —
Les 4/5 de ces étoiles observées en Europe ou en
Chine sont dans ce cas. La Voie lactée est-elle un
simple agrégat d'étoiles télescopiques, dont la réu-
nion en strates annulaires nous offre l'apparence
d'une douce lumière nébuleuse? Alors l'idée de
Tycho porte complètement à faux ; il n'est plus permis
de se représenter les étoiles nouvelles comme de
simples formations opérées sous nos yeux aux dépens
de la matière cosmique. Sans doute la gravitation
générale s'exerce aussi dans ces couches stellaires ,
dans ces amas d'étoiles plus ou moins condensées ;
on peut même concevoir un mouvement de rotation
autour d'un centre commun ; mais on ne saurait aller
plus loin sans tomber dans le domaine de l'indéter-
mination et des mythes astrognosiques. Parmi les
21 étoiles nouvelles citées dans la liste précédente,
5 appartiennent au Scorpion (131, 393, 827, 1203,
1584); 3 à Cassiopée et à Céphée (945, 1264 , 1572);
4 au Serpentaire (123, 1230, 1604, 1848). Celle
de 1012, l'étoile du moine de Saint-Gall, a paru
dans une région très-éloignée de la Voie lactée, dans
le Bélier. Kepler a même cité , comme une seconde
exception à la règle générale , l'étoile de la Baleine
qui passait alors pour nouvelle, parce que Fabricius,
après l'avoir découverte en 1596, l'avait vue dispa-
raître au mois d'octobre de la même année (Kepler,
de Stella nova Serp., p. 112). Toujours est-il que la
fréquence de ces apparitions dans les mêmes constel-
lations, c'est-à-dire dans de certaines directions dé-
terminées par les étoiles du Scorpion , par exemple,
«- 185 —
ou celles de Cassiopée , peut porter à croire que la
production de ces phénomènes est favorisée par des
causes tout à fait locales.
La plus courte durée de l'incandescence des étoiles
nouvelles s'est présentée dans les apparitions des an-
nées 389, 827 et 1012. La première a brillé 3 semai-
nes , la seconde, 1 mois, et la troisième s'est éteinte
au bout de 3 mois. L'étoile de Tycho, au contraire,
a duré 17 mois; celle de Kepler (en 1600, dans le
Cygne) est restée visible pendant 21 années en-
tières. Elle reparut en 1655, de 3" grandeur comme la
première fois, mais pour se fixer ensuite à la 6° gran-
deur. Cependant Argelander n'a pas cru devoir la pla-
cer dans la classe des étoiles périodiquement variables.
Étoiles disparues, — L'étude et Fénumération
exacte de ces étoiles sont importantes pour la re-
cherche des petites planètes, qui existent proba-
blement en si grand nombre dans certaines ré-
gions de notre système planétaire ; mais malgré
l'exactitude avec laquelle les positions d'une mul-
titude d'étoiles télescopiques ont été enregistrées
dans les catalogues et les cartes modernes, il est
souvent difficile de constater d'une manière irré-
cusable, qu'une étoile manque au ciel depuis une
époque déterminée. Les meilleurs catalogues sont
souvent entachés de fautes provenant de l'observa-
tion, des calculs de réduction et surtout de l'im-
pression (73). D'ailleurs ce fait qu'un astre disparait
de la place où il a été vu une première fois, peut
tenir tout aussi bien à un mouvement propre qu'à
— 186 —
un affaiblissement réel de sa lumière. Ce que nous
ne voyons plus n'a donc pas nécessairement disparu.
L'idée d'une destruction , d'une combustion réelle
des étoiles devenues invisibles, appartient à l'époque
de Tycho. Pline lui-même pose cette question , dans
un beau passage sur Hipparque : « stellœ an obirent
nascerenturve. » L'éternel jeu des créations et des
destructions apparentes ne conclut point à un anéan-
tissement de la matière ; c'est une pure transition
vers de nouvelles formes, déterminées par l'action de
forces nouvelles. Des astres devenus obscurs , peu-
vent redevenir subitement lumineux par le jeu re-
nouvelé des mêmes actions qui y avaient primitive-
ment développé la lumière.
Etoiles périodiquement variables, — Puisque tout
est en mouvement sur la voûte céleste, puisque tout
change dans le temps et dans l'espace, l'analogie nous
conduit à admettre que si les étoiles, prises dans leur
ensemble , possèdent des mouvements réels , et non
point de simples mouvements apparents , de même
leurs surfaces ou leurs photosphères peuvent être le
siège de variations réelles de lumière. Pour le plus
grand nombre des étoiles , ces variations se repro-
duisent périodiquement , mais par périodes excessive-
ment longues, qui n'ont pu être encore déterminées,
et sont peut-être même à jamais indéterminables.
Pour le petit nombre, ces variations non périodiques
se produisent pendant un temps plus ou moins court,
comme par une révolution subite. Je n'ai point à
m'occuper ici de cette dernière classe de phéno-
— 187 —
mènes, dont une belle étoile du Navire nous a offert
récemment un remarquable exemple : je ne veux
parler que des étoiles changeantes dont les périodes
ont été déjà reconnues et mesurées. Il était essentiel,
avant tout , de distinguer soigneusement entre trois
grands phénomènes de la nature sidérale, dont on n'a
pu encore saisir la connexité, à savoir : la périodicité
constatée de certaines étoiles variables; l'apparition
des étoiles nouvelles; les changements subits d'éclat
que présentent d'autres étoiles, connues depuis long-
temps pour avoir toujours conservé jusque-là le
même éclat uniforme. C'est uniquement, ai-je dit,
de la première classe de variations que nous aurons
à nous occuper ici. Mira Geti , étoile située dans le
col de la Baleine , en a offert le premier exemple ,
exactement observé (1638). Un pasteur protestant
de la Frise orientale, David Fabricius, père de l'as-
tronome auquel on doit la découverte des taches du
Soleil, avait déjà remarqué cette étoile en 1596; le
13 août, elle lui paraissait être de 3* grandeur, et il
la vit disparaître dans le mois d'octobre de la même
année. Mais ce fut un professeur de Franeker, Jean
Phocylides Holwarda , qui découvrit , 42 ans plus
tard , les alternatives d'éclat et d'extinction , en un
mot la variabilité de cette étoile. Cette découverte
fut suivie, dans le même siècle, de celle de deux
autres variables : (3 de Persée (1669), décrite par
Montanari, et ^ du Cygne (1687), par Kirch.
Les irrégularités singulières qu'on ne tarda point
à remarquer dans les périodes, et le nombre crois-
-=- 188 —
sant des étoiles variables , ont appelé le plus vif
intérêt sur cette étude , dès le commencement du
xix^ siècle. Considérant la difficulté du sujet , animé
d'ailleurs du désir de présenter, dans cette partie de
mon ouvrage , les éléments numériques de la varia-
bilité, avec toute Texactitude requise par l'état actuel
de la science, je me suis déterminé à invoquer le se-
cours amical de l'astronome qui s'est le plus occupé
de cette question et dont les brillants travaux ont fait
faire tant de progrès à l'étude des étoiles périodique-
ment variables. Les questions et les doutes, auxquels
mon propre travail a pu donner lieu , ont été soumis
avec confiance à mon excellent ami Argelander, di-
recteur de l'observatoire de Bonn ; c'est à ses com-
munications, encore entièrement inédites, que je dois
ce qui suit.
Les étoiles variables sont, pour la plupart, tout à
fait rouges ou rougeâtres; mais toutes ne le sont
pas. Par exemple, (3 de Persée (Algol dans la Tète
de Méduse) , ,3 de la Lyre et i du Cocher sont des
étoiles blanches; -n de l'Aigle est un peu jaunâtre;
t, des Gémeaux l'est aussi , mais moins. On a affirmé
autrefois , sans preuves bien réelles , que certaines
étoiles variables, particulièrement Mira de la Ba-
leine, sont plus rouges, lorsque leur éclat va en
décroissant, que dans la période inverse. Dans l'é-
toile double a d'Hercule, la composante principale,
rouge suivant Sir William Herschel, jaune suivant
Struve, est une étoile variable ; elle a pour compagnon
une étoile d'un bleu foncé que l'on a crue également
— 189 —
variable , parce que les estimations de sa grandeur
présentaient de notables divergences ( de la 5" à la
T grandeur) ; mais cette opinion paraît très-problé-
matique. Struve lui-même dit seulement : Suspicor
minorem esse variabilem (7à). La variabilité n'est
nullement liée à la teinte rouge. Il y a beaucoup
d'étoiles rougeâtres et même fortement teintes en
rouge, comme Arcturus et Aldébaran, dans lesquelles
on n'a pu découvrir le moindre changement d'éclat.
Il est encore fort douteux qu'on doive ranger parmi
les variables une étoile de Céphée, à laquelle W. Her-
schel donnait, en 1782, le nom d'étoile grenat, à cause
de sa couleur d'un rouge extrêmement vif. C'est le
n° 7582 du Catalogue de l'Association Britannique.
Il est difficile d'assigner exactement le nombre des
étoiles périodiques, parce que les périodes actuelle-
ment déterminées ne méritent pas toutes une égale
confiance. Par exemple, les deux variables de Pégase,
a de l'Hydre, g du Cocher, a de Cassiopée n'oflfrent
pas la même certitude que Mira de la Baleine, Algol
et à de Céphée. Si donc il s'agit de former un tableau
des étoiles périodiques, la première chose à faire est
de fixer le degré d'exactitude dont on veut se con-
tenter. Argelander porte à 24 seulement le nombre
des périodes actuellement connues avec une précision
satisfaisante (75). Tel est aussi le nombre des étoiles
inscrites dans la liste qu'on trouvera plus loin.
De même que le phénomène de la variabilité se
retrouve à la fois dans des étoiles rouges et dans des
étoiles blanches , de même il paraît afTecter indiffé-
— 190 —
remment divers ordres de grandeur. Par exemple',
a d'Orion est de 1/' grandeur ; Mira de la Baleine est
de ^% comme a de l'Hydre, a de Cassiopée et j3 de
Pégase; p de Persée est de 2° à 3' grandeur; •/; de
l'Aigle et |3 de la Lyre , de 3" à 4*. 11 y a aussi des va-
riables parmi les étoiles comprises entre la 6* et la
9' grandeur, et même elles sont là beaucoup plus
nombreuses. Telles sont les variables de la Couronne,
de la Vierge, de l'Écrevisse et du Verseau. L'étoile x
du Cygne présente en outre de grandes oscillations
d'éclat à son maximum.
Que les périodes des étoiles variables soient très-
irrégulières, c'est ce qu'on avait reconnu depuis long-
temps; mais que ces irrégularités mêmes soient sou-
mises à certaines lois fixes, c'est ce qu' Argelander a su
établir de la manière la plus irrécusable : il se propose
d'en donner les preuves dans un Mémoire détaillé
qu'il prépare en ce moment. Pour -^ du Cygne , il
admet aujourd'hui deux perturbations dans la pé-
riode, l'une de 100, l'autre de 8 1/2 périodes élé-
mentaires; ces deux perturbations lui paraissent plus
probables qu'une seule de 108 périodes. A quelle
cause faut-il rapporter ces perturbations? Faut-il
chercher cette cause dans l'atmosphère propre de
l'étoile même , ou dans la révolution d'un satellite
circulant autour de -^ du Cygne , comme autour d'un
soleil , et agissant par attraction sur sa photosphère?
Ce sont là des questions auxquelles il est encore im-
possible de répondre.
L'étoile qui présente les irrégularités les plus for-
— 191 —
tes , dans ses changements d'éclat, est assurément la
variable de FÉcu de Sobieski, car cette étoile descend
parfois de la 5. 4^ grandeur à la 9'. Elle a même
disparu complètement , au dire de Pigott, vers la fm
du dernier siècle. A d'autres époques , ses oscilla-
tions se sont restreintes entre la 6. 5^ et la 6' gran-
deur. Le maximum d'éclat de -^ du Cygne varie entre
la 6. 7^ et la h"" grandeur ; celui de Mira entre la h^ et
la 2. 1^ grandeur.
La variable 3 de Céphée présente dans ses périodes
une régularité frappante ; elle surpasse, à cet égard,
toutes les autres étoiles changeantes, comme le
prouvent les observations de 87 minima , qui ont eu
lieu entre le 10 octobre 1840 et le 8 janvier 1848.
Pour £ du Cocher, un infatigable observateur, M . Ileis,
à Aix-la-Chapelle, trouve que les variations du maxi-
mum d'éclat sont comprises entre la 3, 4* grandeur
et la 4. 5%
Mira ou o de la Baleine présente de grandes diffé-
rences, aux époques du maximum d'éclat. Le 6 no-
vembre 1779, par exemple , Mira était à peine infé-
rieure à Aldébaran ; plus d'une fois elle a dépassé la
2^ grandeur. Mais, à d'autres époques, elle n'a même
pas atteint l'éclat de ^ de la Baleine (4' gr.). Sa gran-
deur moyenne est égale à celle de y de la Baleine
[?)"■ gr.). Si l'on désigne par 0 Téclat des dernières
étoiles visibles à l'œil nu , et celui d' Aldébaran par 50,
on peut dire que Mira oscille, vers son maximum,
entre 20 et 47. Son éclat probable peut être repré-
senté par 30 ; mais elle est plus souvent au-dessous
— 192 —
qu'au-dessus de cette limite. Ces derniers écarts sont ,
du reste, les plus frappants. On n'a pu, jusqu'à pré-
sent, rattacher les oscillations de Mira à aucune pé-
riode bien nette ; il y a seulement quelque raison de
soupçonner une période de 10 ans et une seconde
période de 160 ans.
D'une étoile à l'autre, les durées des changements
d'éclat varient beaucoup : les extrêmes sont dans le
rapport de 1 à 250. La plus courte période est, sans
contredit, celle de (3 de Persée, dont la durée est de
68 heures 49 minutes; à moins pourtant qu'une pé-
riode plus courte (moins de 2 jours), attribuée à la
Polaire, ne se confirme. Après (3 de Persée, viennent
a de Céphée (5 jours 8»^ 49'"), vi de l'Aigle (7J 4^ n™),
et l des Gémeaux (lOJ Z^ SS'"). Les plus longues pé-
riodes sont celles de 3o de l'Hydre d'Hevelius (495^),
de / du Cygne (406 J), de la variable du Verseau
(388 J), de S du Serpent (367J), et enfm de Mira ou
0 de la Baleine (332 J). Pour plusieurs variables, il est
parfaitement établi que l'éclat augmente plus rapi-
dement qu'il ne décroit, phénomène dont a de Cé-
phée présente l'exemple le plus remarquable. Pour
d'autres étoiles, par exemple (3 de la Lyre, ces deux
phases sont d'égale durée. Quelquefois ces rapports
présentent eux-mêmes des anomalies dans la même
étoile , mais à des époques différentes de leurs varia-
tions. En général. Mira augmente, comme ^ de Cé-
phée, plus rapidement qu'elle ne décroît; mais on a
pu aussi observer l'inverse dans la même étoile.
Pour ce qui est des périodes de périodes , on peut
— 193 —
citer Algol, Mira, 6 de la Lyre et très-probablement
-^ du Cygne, qui en présentent plusieurs avec beau-
coup de netteté. On ne doute plus aujourd'hui de la
décroissance progressive des périodes d'Algol. Good-
ricke ne s'en était pas aperçu ; mais elle ne pouvait
échapper à Argelander qui avait rassemblé, en 1842 ,
plus de 100 bonnes observations dont les extrêmes
embrassaient 58 années, c'est-à-dire 7600 périodes
(Schumacher's Astron, Nadir,, n°* 472 et 624). La
décroissance de la durée devient actuellement de
plus en plus sensible (77). Quant à la période des
maxima d'éclat de Mira , Argelander a discuté
toutes les observations, y compris le maximum ob-
servé en 1596 par Fabricius, et il en a déduit une
formule par laquelle tous les maxima sont repré-
sentés avec une erreur probable de 7 jours (sur une
longue période de 331 J 8^). Cette erreur probable
serait de 15 jours, si on adoptait une période con-
stante (78).
Le double maximum et le double minimum , qui
ont lieu à chaque période de (3 de la Lyre (près
de 13J), avaient été déjà signalés par Goodricke, à qui
nous devons la découverte de cette étoile variable;
les observations récentes ont fait disparaître tous les
doutes à cet égard (79). Il est bien remarquable que
l'étoile atteigne le même éclat dans ses deux maxima,
tandis que , vers le minimum principal, elle est d'une
demi-grandeur plus faible qu'au second minimum.
Depuis la découverte de la variabilité de (3 de la Lyre,
la période dans la période est devenue probablement
ni. U
- 19i —
de plus en plus longue. D'abord les changements
étaient plus rapides ; puis ils se ralentirent de plus
en plus jusque vers réporjue comprise entre 1840
et 1844 ; alors cessa Taccroissement de la durée qui
devint sensiblement constante. Aujourd'hui elle com-
mence certainement à décroître. La variable è de Cé-
phée présente quelque chose d'analogue au double
maximum de (3 de la Lyre; car la décroissance de
l'éclat ne suit point un cours uniforme. Après avoir
été d'abord assez rapide, elle offre ensuite un temps
d'arrêt, ou du moins une vitesse bien plus faible,
jusqu'à un certain moment à partir duquel la dé-
croissance reprend son cours avec rapidité. Les phé-
nomènes, se présentent en effet, pour certaines étoi-
les, comme si une cause quelconque empêchait la
lumière de s'élever librement à un deuxième maxi-
mum d'intensité. Quanta/ du Cygne, il y a très-pro-
bablement deux périodes de variabilité : une longue
période formée de iOO périodes secondaires et une
autre de 8 1/2 périodes.
Il est difficile de dire, même d'une manière gé-
nérale , si les étoiles variables à courtes périodes
présentent plus de régularité que les étoiles à lentes
variations. Les déviations relatives à une période
constante ne peuvent être raisonnablement présen-
tées en nombres absolus; il faut les évaluer en parties
de la période même. Commençons par les étoiles
à longues périodes, telles que / du Cygne, Mira de
la Baleine et 30 de l'Hydre. Pour y^ du Cygne, la
période la plus probable est de 406J,0634, en sui-
— 195 —
vant Thypothèso d'une variation unifornie ; les écarts
vont alors à 39,4 jours. En faisant la part des er-
reurs d'observation , les écarts s'élèvent encore à 29
ou 30 jours, c'est à-dire à 1/14 de la période en-
tière. Pour Mira de la Baleine (^0), une période con-
stante de 331^,340 donne des écarts de 55^,5, mênie
en laissant de côté l'observation do David Fabricius.
Veut-on réduire ces écarts à 40 jours, afin de tenir
compte des erreurs inévitables de l'observation? les
erreurs iront encore à 1/8 de la périod;% c'est-à-dire au
double, en proportion, des écarts relatifs à y du Cygne.
Enfin, pour 30 de l'Hydre, dont la période est de
495 jours, les écarts sont encore plus considérables ;
ils vont peut être à 1/5. C'est depuis 1840 seulement
que les étoiles variables à périodes très courtes ont
été observées d'une manière continue et avec toute
l'exactitude requise. Le problème que nous agitons
ici devient donc plus difficile, quand il s'agit de
cette classe d'étoiles, où cependant les écarts sem-
blent être réellement moins considérables. Pour yj
de l'Aigle, dont la période est de 7 jours 4 heures,
ils ne sont que de 1/16 ou 1/17 de la période en-
tière; dans (3 de la Lyre (période ^:^ 12 J 21''), ils des-
cendent à ly27 ou même à 1/30. Mais ces recherches
sont encore exposées à bien des incertitudes. On a
observé de. 1700 à 1800 périodes de |3 de la Lyre,
279 de Mira, 145 seulement de y^ du Cygne.
On demandera si les étoiles , qui ont procédé long-
temps par périodes régulières dans leurs variations,
peuvent cesser d'être variables; la réponse paraît
— 196 —
devoir être négative. De même qu'il existe des étoiles
dont les variations sont tantôt faibles, tantôt plus
marquées, par exemple, la variable de TÉcu de So-
bieski, de même il paraît y avoir des étoiles dont les
variations sont par moments si faibles, qu'elles échap-
pent à nos moyens bornés d'investigation. On peut
compter, parmi ces dernières, la variable de la Cou-
ronne boréale (n° 5236 du Catalogue de l'Association
britannique), que Pigott a découverte et observée
quelque temps. Pendant l'hiver de 1795 à 1796,
cette étoile était restée complètement invisible ;
plus tard , elle reparut ; ses variations furent alors
observées par Koch. En 1817, Harding et West-
pbal lui trouvaient une lumière presque constante ;
en 1824, Olbers put observer de nouveau ses chan-
gements d'éclat. Les variations ont cessé encore une
fois . et cette nouvelle phase a été étudiée avec soin
par Argelander, depuis le mois d'août 18i3 jusqu'en
septembre 1845. A la fin de septembre , l'étoile re-
commença à diminuer; en octobre, elle n'était plus
visible dans un chercheur de comètes; elle repa-
rut en février 1846, et atteignit sa grandeur or-
dinaire (la 6' gr.) vers le commencement de juin.
Depuis cette époque, elle a conservé le même éclat,
sauf de petites oscillations dont on ne peut être bien
certain. La variable du Verseau appartient à cette
classe mystérieuse d'étoiles variables; peut-être en
est-il de môme de l'étoile de Janson et de Kepler
(dans le Cygne, en 1600), dont nous avons déjà
parlé, quand il était question des étoiles nouvelles.
— 197 —
LISTE DES ÉTOILES VARIABLES,
PAR Fr. argelander.
N°*
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
iU
15
16
17
18
19
20
21
22
23
H 24
NOMS
DES ÉTOILES.
0 Baleine.
[3 Persée .
y Cygne. .
30 Hydre (Hev
LionR, 420
7) Aigle. .
P Lyre. . .
ô céphée.
a Hercule.
Couronne R
ÉcuR. . .
Vierge R.
Verseau R.
Serpent R.
Serpent S.
Écrevisse R
a Cassiopée.
a Orion. . .
a Hydre. . .
£ Cocher. .
Ç Gémeaux.
p Pégase . .
Pégase R.
Écrevisse S.
M
DURÉE
(le la
PÉRIODE.
jours heur. min.
331
20 —
2 20 Zi9
406
1 30
495
312
18 —
7
4 14
12
21 45
5
8 49
66
8 —
323
71
17 —
145
21 —
388
13 —
359
367
5 —
380
79
3 —
196
0 —
55
?
10
3 35
40 23 -
350
?
ECLAT
AU
MAXIMUM.
grandeur.
4 à 2.1
2.3
6.7 à 4
5 à 4
5
3.4
3.4
4.3
3
6
6.5 à 5.4
7 à 6.7
9 à 6.7
6.7
8 à 7.8
7
2
1
2
3.4
4.3
2
8
7.8
MINIMUM.
grandeur.
0
4
0
0
0
5.4
4.5
5.4
3.4
0
9 à
6
0
0
0
0
0
3.2
1.2
2.3
4.5
5.4
2.3
0
0
I I iinmiiaB
INOM DE L'AUTEUR
et date
DE LA DÉCOUVERTE.
Holvvarda 1639
Montanari 1669
Gottfr.Kirch 1687
Maraldi 1704
Koch
E. Pigott
1782
1784
1784
1784
Goodricke
Goodricke
W. Herschel 1795
E. Pigott 1795
E. Pigott
Hardi ng
Harding
Harding
Harding
Schvverd
Birt
1795
1809
1810
1826
1828
1829
1831
J. Herschel 1836
J. Herschel 1837
Heis 1846
Schmidt 1847
Schmidt 18û8
Hind 1848
Hind 1848
— 198 —
Remarques sur le tableau précédent.
Le 0 placé dnns la colonne du minimum signifie que rétoile
est, à cette époque, au-dessous de la 10^ grandeur. Pour
désigner d'une manière simple et commode h la fois les petites
étoiles variables qui n'ont point encore reçu de nom ni de
signe, je me suis permis de leur donner des lettres tirées du
grand nlplinbel, les lettres grecques et les minuscules latines
ayant été déjà épuisées en grande partie par Bayer.
Outre les variables inscrites dans le tableau, il y a encore
presque autant d'étoiles que Ton soupçonne de variabilité, parce
que divers observateurs leur ont assigné des grandeurs diflTé-
rentes. Mais comme ces estimations purement occasionnelles
ne sauraient prétendre à une grande exactitude, et comme
les astronomes ont chacun leur manière particulière d'apprécier
les grandeurs, il m'a paru plus sûr de ne pas tenir compte de
cette classe d étoiles, tant qu'un même observateur n'en aura
pas constaté les variations par une élude directe, faite à des
époques différentes. Toutes les étoiles du tableau sont dans ce
dernier cas; l'existence de leurs variations périodiques est cer-
taine, même lorsque la période n'a pas pu être déterminée.
Les périodes indiquées dans le tableau reposent, presque
toutes , sur tes recherches auxquelles j'ai soumis l'ensemble des
anciennes observations et les observations encore inédites que
j'ai faites pendant les dix dernières années. Les exceptions
seront indiquées dans les notes suivantes, où chaque étoile est
considérée isolément.
Les positions données dans ces notes sont exprimées en as-
censions droites et en déclinaisons pour 1850. L'expression
souvent employée de df^gré désigne des différences d'éclat
encore sensibles, avec quelque certitude, soit à l'œil nu, soit
à lœil armé d'une lunette de Fraunholér dont la longueur fo-
cale égale 65 centimètres, lorsqu'il s'agit d'étoiles invisibles à
la vue simple. Pour les étoiles au dessus de laf/ grandeur, un
degré forme à peu près un dixième de la différence d'éclat entre
^ 199 —
deux ordres de grandeur consécutifs; mais pour les étoiles plus
faibles , les intervc.lles des grandeurs ordinaires sont sensible-
ment plus pelits.
(1 ) 0 de la Baleine , AR. 32" 57' Décl. — y 60'; nommée aussi
Mira à cause des singulières variations de sa lumière, les
premières qui aient été remarquées. La périodicité de cette
étoile a été reconnue pendant la seconde moitié du xvii^ siècle ;
BouUiaud portait à 333 jours la durée de sa période. On
trouva en même temps que cette durée est tantôt plus longue ,
tantôt plus courte, et que l'étoile n'a pas toujours le même
éclat, au moment de son maximum d'intensité. Ces remarques
ont éîé complètement confirmées par les observations faites
depuis cette époque, mais on »'a pu décider si l'étoile devient
complètement invisible à son mininum d'éclat. On l'a vue quel-
quefois descendre à la 11^ ou 12'' grandeur; quelquefois aussi
on n'a pas réussi à la voir avec des lunettes de 1"' à 1"',3. Ce
qui est certain , c'est qu'elle reste longtemps au-dessous de la
10* grandeur. On n'a guère observé par delà cette limite;
le plus souvent on s'est borné à attendre que l'étoile redevînt
visible à l'œil nu (de ô'^gr.) pour recommencer les observa-
tions. A partir de la 6^ grandeur, sa lumière augmente rapide-
ment d'abord, ensuite avec plus de lenteur, puis d'une ma-
nière à peine sensible. Elle décroît ensuite, d'abord lentement,
puis avec rapidité. En moyenne, l'éclat augmente à partir de
la 6" grandeur, pendant 50 jours; il diminue jusqu'à la G"" gran-
deur, pendant 69 jours ; ce qui donne k mois environ pour la
durée totale de la visibilité à la simple vue. Mais cette durée
est seulement une moyenne ; la durée eflTective a été quelque -
fois de 5 mois; à d'autres époques, elle n'a point dépassé
3 mois. De même, les durées de l'accroissement et de la dimi-
nution de l'éclat présentent de grandes oscillations, et la pre-
mière a été parfois plus longue que l'autre C'est ce qui a eu
lieu en 18/jO : l'étoile a mis 62 jours à atteindre son maximum
d'éclat, et 69 jours à redescendre au point d'invisibilité pour
l'œil nu. La plus courte période ascendante a été de 30 jours
— 200 —
en 1679 ; la plus longue, de 67 jours, en 1709. La plus longue
période descendante eut lieu en 1839, où elle fut de 91 jours;
la plus courte, en 1660, où elle dura 52 jours. Quelquefois
l'étoile change à peine pendant un mois, vers lépoque de son
plus grand éclat; d'autres fois un intervalle de peu de jours
suffit pour rendre ses variations sensibles. En 1678 et en 18^7,
on a remarqué un temps d'arrêt au milieu de la période descen-
dante, ou du moins un temps pendant lequel la lumière a
diminué d'une manière à peine perceptible.
L'éclat n'est pas toujours le même, avons-nous dit, à l'époque
du maximum. En désignant par 0 léclat des plus faibles étoiles
encore visibles à l'œil nu, et celui d'Aldébaran (l'^gr.) par 50,
on peut dire que Mira oscille entre 20 et Ul vers son maximum,
c'est-à dire entre la U^ et la 1-2^ grandeur ; son éclat moyen est
représenté par 28, c'est-à-dire égal à celui de l'étoile y de la Ba-
leine. La durée de la période ne s'est pas montrée moins irrégu-
lière. Elle est en moyenne de 331 jours 20 heures, mais ses oscil-
lations vont à un mois entier ; car la plus courte période comprise
entre deux maxima consécutifs a été de 306 jours, et la plus
longue de 367 jours. Ces irrégularités deviennent encore plus
frappantes, quand on compare les époques des n)axima observés
avec les époques calculées dans l'hypothèse d'une période inva-
riable. Les différences entre le calcul et l'observation vont alors à
50 jours, et même ces écarts conservent à peu près la même
grandeur et le même sens plusieurs années de suite. C'est une
preuve manifeste qu'il existe une perturbation à longue période
dans les changements de lumière de cette étoile; seulement un
calcul plus exact montre qu'une perturbation unique ne suffit
pas, et qu'il faui en admettre plusieurs , engendrées sans doute
par la même cause. Une de ces perturbations revient à chaque
intervalle de 11 périodes élémentaires; la durée de la 2" com-
prend 88 de ces périodes; celle de la 3% 176, et celle de la k%
26/1. C'est l'ensemble de ces inégalités périodiques que repré-
sente la formule de sinus rapportée dans a note 78, formule
avec laquelle les observations des maxima s'accordent très-bien.
— 201 —
quoiqu'elle laisse encore subsister des écarts dont les erreurs
d'observation ne peuvent rendre compte.
(2) [3 de Persée, Algol; AR. Ixk' 36', Décl. + ^0° 22'. Gemi-
niano Montanari a remarqué le premier, en 1667, la variabilité
de cette étoile dont Maraldi s'est aussi occupé; mais c'est
Goodricke qui a reconnu, en 1782, la périodicité de ses varia-
tions. La raison en est, sans doute, que cette étoile ne change
pas d'éclat peu h peu, comme la plupart des étoiles variables,
mais qu'elle reste constamment de 2-3^ grandeur pendant
2 jours et 13 heures , tandis qu'elle emploie seulement 7 à
8 heures pour décroître et descendre à la 4^ grandeur. Les
changements d'éclat ne sont pas tout à fait réguliers ; ils sont
plus rapides à l'époque du minimum ; aussi peut-on en déter-
miner l'instant, à 10 ou 15 minutes près. Il est encore bien
digne de remarque que cette étoile, après avoir commencé à
croître en lumière pendant une heure environ, s'arrête et
conserve la même clarté pendant l'heure suivante ; elle reprend
ensuite son mouvement ascendant d'une manière marquée. On
avait regardé jusqu'ici la durée de la période comme absolument
constante , et AVurm représentait bien les observations par une
période de 2 jours 21 heures US minutes 58 secondes et demie.
Mais des calculs plus exacts, basés sur un intervalle de temps
deux fois plus grand que celui dont Wurm avait pu se servir,
ont montré que la période se raccourcit de plus en plus. Elle
était en 1784, de 2J 20'^ 48'" 59^,4, et en 1842, de 2J 20^ 48™
55%2 seulement. Il résulte encore, avec vraisemblance, des
observations les plus récentes, que cette diminution de la pé-
riode est plus rapide aujourd'hui qu'autrefois, en sorte qu'il
faudra ici , tôt ou tard , une formule de sinus pour représenter
ces perturbations delà période principale. Au reste, la diminu-
tion actuelle de la période s'expliquerait, en supposant qu' Algol
se rapproche de nous h raison de 371 myriamètres par an, ou ,
ce qui revient au même, qu'il s'éloigne de nous avec une vitesse
décroissant dans le même rapport Dans l'un et l'autre cas, la lu-
mière nous parviendrait chaque année un peu plus tôt qu'elle ne
— 202 —
le ferait dans l'hypothèse d'une position constante, et cette avance,
d'environ 12 millièmes de seconde, suffirait pour rendre compte
de la diminution observée. Si telle est l'explication véritable,
une formule de sinus deviendra nécessaire dans quelque temps.
(3) y clu Cygne, AR. 296M2', Décl. + 32" 32'. Cette étoile
présente h peu près les mêmes irrégularités que Mira ; les écarts
des maxima que Ton a observés, comparés à ceux qui résultent
du cahul fait dons Ihypothèse d'une période uniforme , vont à
UO jours; mais ils se réduisent considérablement, quand on in-
troduit une perturbation de 8 1 '2 périodes élémentaires et une
autre de lOO périodes. A son maximum, l'étoile atteint l'éclat
des étoiles faibles de 5*" grandeur, c'est-^-dire un degré de plus
que la 17^ du Cygne. Les oscillations de Téclat maximum sont
aussi très-notables; elles varient de 13 degrés au-dessous à
10 degrés au-dessus de l'éclat moyen. Lorsque l'étoile avait son
éclat maximum le plus faible, elle était totalement invisible à
l'œil nu, en 1847, au contraire, on put la voir sans lunette,
pendant 97 jours entiers. La durée moyenne de sa visibilité est
de 52 jours, dont 20 appartiennent, en moyenne, à la phase
ascendante, et 32 à la phase de diminution.
iU) 30 de l'Hydre d'Hevelius, AR. 200^ 23'. Décl. — 22*» 30'.
Cette étoile n'est visible que pendant peu de temps chaque
année, à cause de sa position très-australe; tout ce qu'on peut
en dire , c'est que sa période et son éclat maximum présentent
de grandes irrégularités.
(5) R du Lion, ou 420 de Mayer; AR. U4°52', DécL + 12»
7'. On la confond souvent avec des étoiles voisires 18 et 19 da
Lion); aussi a-t-elle été fort peu observée. Elle l'a été assez,
cependant, pour montrer que sa période n'est pas très-régu-
lière. Son éclatmaximum paraît varier aussi de quelques degrén,
(6) Tj de l'Aigle ou r, d'Antinous; AR. 296M2', Décl. -f-0"37',
La période assez constante de cette étoile est de 7' 4^13"»
53^ Toutefois les observations décèlent de petites oscillations
de 20 secondes qui se manifestent au bout d'un temps suffisam-
mcDt long. Quant aux variations d'éclat, elles sont très-régo-
— 203 —
lières; les écarts ne dépassent point les limites de ce qu'on peut
imputer aux erreurs d'obscrvalion. A son minimum , elle est
d'un degré au-dessous de i de l'Aigle. Son éclat augmente
d'abord lentement, puis avec rapidité, ensuite avec plus de
lenteur, et 2 jours 9 heures après l'instant du minimum, elle
atteint son plus grand éclat. Elle est alors près de 3 degrés au-
dessus de p et 2 degrés au-dessous de S de l'Aigle. A partir du
maximum, la lumière ne décroît pas aussi régulièrement, car
vers le moment où elle atteint l'éclat de p (1 jour 10 heures
après le maximum , elle varie avec plus de lenteur que dans
les heures précédentes ou suivantes.
(7) p de la Lyre, AR. 28r 8', Décl. + 33" 11'; cette étoile
est remarquable par ses deux maxima et ses deux minima.
Après avoir été d un tiers de degré au-dessous de ^ de la Lyre,
à l'époque du plus faible éclat, elle met 3i 5'^ à atteindre son
premier maximum où elle est de 3//i de degré plus faible que y
de la Lyre. 3 jours et 3 heures après, elle arrive à son second
minimum qui dépasse C de la Lyre de 5 degrés. Après un nouvel
intervalle de 3J 2'', elle atteint, à son deuxième maximum, le
même éclat qu'au premier; enfin elle met 3J 12^ à revenir à
son plus faible éclat. L'ensemble de ces phases comprend donc
12J 21'' 46'n ^0^ Mais cette durée de la période ne peut compter
que pour les années ISUQ-i^UU; antérieurement, elle était plus
courte de 2 1/2 heures en 178^, de plus d'une heure en 1817
et 1818, et aujourd'hui elle paraît subir de nouveau une dimi-
nution. Il n'y a donc pas à douter que la formule de sa période
ne doive être aussi une fonction de sinus.
(8) ô de Céphée , AR. 335'^ 5^', Décl. -\- 51' 39'. C'est de toutes
les étoiles connues la plus régulière sous tous les rapports. Une
période de 5J 8'» Ul"^ 39^5 représente toutes les observations,
depuis 178^ jusqu'il ce moment, avec la précision des obser-
vations elles-mêmes; les petites dilférences qui se présentent
dans la marche des variations de lumière peuvent être attri-
buées aux erreurs ordinaires de l'observation. A son mini-
mum , l'étoile est 3/4 de degré au-dessus de « de Céphée ; elle
— 204 —
égale, à son maximum, l'étoile -. de la même constellation.
Pour passer du minimum au maximum , elle emploie IJ 15^', et
plus du double de ce temps, c'est-à-dire 3J 18^, pour revenir au
minimum. Mais dans cette dernière phase, elle reste 8'' presque
sans varier; pendant un jour entier ses changements sont très-
peu notables.
(9) a d'Hercule , AR. 256° 57', Décl. -j- \U° 3V. Étoile double
très-rouge, dont les variations sont très-irrégulières, quant à la
période et quant à l'éclat. Souvent sa lumière reste invariable
des mois entiers. A d'autres époques, son maximum dépasse
son minimum de 5 degrés; aussi sa période est-elle très-
incertaine. "\V. Herschel lui supposait une durée de 63 jours; je
la portais moi-même à 95 jours, jusqu'à ce que la discussion
de mes propres observations , continuées pendant 7 ans , m'eût
conduit à la période consignée dans le tableau précédent. Heis
croit pouvoir représenter les observations par une période
de 18/4,9 jours comprenant deux maxima et deux minima.
(10) R de la Couronne, AR. 235 36', Déch -f 28° 37'. Cette
étoile n'est variable que d'une manière purement temporaire.
La période a été calculée par Koch d'après ses propres obser-
vations, qui sont malheureusement perdues.
(11) Rde rÉcudeSobieski, AR. 279*^52', Décl. — 5*51'. Les
oscillations de l'éclat de cette étoile sont souvent restreintes à
un petit nombre de degrés; mais aussi, en d'autres temps, elle
descend de la 5*" à la 9' grandeur. Elle a encore été trop peu
observée jusqu'ici pour qu'on puisse décider si ces alternatives
suivent ou non une marche régulière. De même la durée de la
période présente de notables fluctuations.
(12) R de la Vierge , AR. 187" ^3', Décl. -f- 7° U9'. La période
et l'éclat maximum sont assez constants; il y a pourtant des
écarts trop considérables , à mon gré, pour pouvoir être attri-
bués uniquement aux erreurs d'observation.
(13) R du Verseau, AR. 35/i° 11', Décl. — 16° 6'.
(U) R du Serpent, AR. 235'^57',Décl. -f 15" 36'.
(15) S du Serpent, AR. 228° 60', Décl. +\U'5-Ï.
— ^205 —
(16 R de rÉcrevisse , AR. 122'> 6', Décl. + 12° 9'.
Il n'y a -rien de plus à dire, sur ces quatre étoiles, que ce
que donne le tableau.
(17) a de Gassiopée, AR. 8" 0', Décl. + 55" 43'. Éloile très-
difficile à observer ; la différence entre le maximum et le mi-
nimum n'est que d'un petit nombre de degrés; d'ailleurs cette
différence est aussi variable que la durée de la période. Ces
difficultés expliquent le peu d'accord des résultats obtenus. La
période indiquée dans le tableau représente d'une manière
3alisfaisante les observations de 1782 à 18/i9 ; elle me paraît
être la plus vraisemblable.
(18) a d'Orion, AR. 86" 46' Décl. +7'' 22'. Encore une étoile
dont la variation d'éclat n'est que de U degrés , du minimum au
maximum. Elle augmente d'éclat pendant 91 1/2 jours; elle
décroît pendant 104 1/2 jours, sur lesquels elle reste 50 jours
sans changer (du 20® au 70^ jour). Quelquefois ses variations
sont encore plus faibles et h peine sensibles. Elle est très-rouge.
(19) a de l'Hydre, AR. 140° 3', Décl. --8°1'. C'est la plus
difficile à observer, et sa période est encore tout à fait incer-
taine. Sir John Herschel lui donne de 29 à 30 jours
(20) E du Cocher, AR. 72° 48', Décl. ~\- 43» 36'. Les change-
ments d'éclat de cette étoile sont très -variables, ou bien il y a
plusieurs maxima et minima pendant une période de quelques
années. Il faut attendre bien des années encore avant de pou-
voir trancher la question.
(21) C des Gémeaux, AR. 103° 48', Décl. + 20° 47'. Cette étoile
s'est montrée jusqu'ici très-régulière dans ses changements
d'éclat. A son minimum, elle tient le milieu entre v et u des
Gémeaux; à son maximum , elle n'atteint pas tout à fait l'éclat
de X. La phase ascendante dure 4J 21'» et la phase descen-
dante 5J 6''.
(22) p de Pégase, AR. 344o 7', Décl. + 27° 16'. La période est
assez bien déterminée ; mais il est encore impossible de rien
dire sur la marche de ses variations d'éclat.
— 206 —
(23) R de Pégase, AR. ZUli'Ur, Décl. + 9* U^' .
i^U) s de lÉci evisse , AR. V2S' 50 , Décl. + 19» 3V.
Il n'y a encore rien à dire sur ces deux dernières étoiles.
A Bonn, août 1850.
Fr. Argelander.
Variations dont les périodes restent encore inconnues,
— Quand il s'agit de soumettre à Tanalyse scienti-
fique des faits importants par le rôle qu'ils jouent
dans le Cosmos, que ces faits appartiennent d'ailleurs
au règne lellurique ou à la sphèi^e sidérale, une ré-
serve nous est imposée, c'est de ne pas chercher pré-
maturément à relier entre eux des phénomènes dont
les causes immédiates sont encore entourées d'ob-
scurité. Aussi nous plaisons-nous à établir une ligne
de démarcation entre les étoiles nouvelles qui ont
complètement disparu (celle de 1572, dans Cassio-
pée) et les étoiles nouvelles qui sont restées au ciel
(dans le Cygne, en 1600). Nous distinguerons en-
core les étoiles variables à périodes déterminées (Mira,
Algol) de celles dont Téclat change, sans qu'on ait pu
découvrir la loi de leurs variations (r/d'Argo). Il
n'est pas invraisemblable , mais aussi il n'est nulle-
ment nécessaire , que ces quatre classes de phéno-
mènes (81) aient même origine ; peut-être dépendent-
ils de la nature des surfaces, ou des photosphères de
ces soleils éloignés.
Pour décrire les étoiles nouvelles, nous avons
commencé par le phénomène le plus frappant de cet
ordre, la subite apparition de l'étoile de ïycho; pour
les mêmes raisons, nous présenterons ici, comme
— 207 —
type des variations non périodiques de la lumière
stellaire , celles d'une éloile remarquable , y, d'Argo ,
dont les phases durent encore de nos jours. Cette
étoile est située dans la grande et brillante constel-
lation du Navire, c la joie du ciel austral. » Dès 1677,
Halley, à son retour de Tîle de Sainte-Hélène, émet-
tait des doutes nombreux sur la constance d'éclat
des étoiles du Navire Argo ; il avait surtout en vue
celles qui se trouvent sur le bouclier de la proue et sur
le tiliac {àcTïLch/.r, et zaraorpcoua ) , donl Ptolémée a
indiqué les grandeurs (8*2). Mais l'incertitude des dési-
gnations anciennes, les nombreuses variantes des ma-
Duscrits de l'Almageste, et surtout la difficulté d'ob-
tenir des évaluations exactes sur l'éclat des étoiles,
ne permirent point à Halley de transformer ses
soupçons en certitude. En 1677 , Halley rangeait y]
d'Argo parmi les étoiles de 4^ grandeur; en 1751,
Lacaille la trouvait déjà de 2^ grandeur. Plustard, elle
reprit son faible éclat primitif, puisque Burchell la vit
de 4' grandeur, pendant son séjour dans le sud de
l'Afrique (de 1811 à 1815). Depuis 1822 jusqu'en
1826 , elle fut de 2' grandeur pour T'allows et Bris-
bane; Burchell, qui se trouvait en 1827 à San Paulo,
au Brésil, la trouva de 1'" grandeur et presque égale
à a de la Croix. Un an plus tard, elle était revenue à
la 2' grandeur. C'est a cette classe qu'elle apparte-
nait, quand Burchell l'observait à Goyaz, le 29 février
1828; c'est sous celte grandeur que Johnson etTaylor
l'inscrivirent dans leurs catalogues de 1829 à 1833;
et quand Sir John Herschel vint observer au Gap de
Bonne-Espérance, il la plaça constamment, de 18âi
à 1837, entre la 2' et la 1'" grandeur.
JMais, le 16 décembre 1837, pendant que cet il-
lustre astronome s'apprêtait à mesurer l'intensité de
la lumière émise par Tinnombrable quantité de pe-
tites étoiles de 11*' à 16' grandeur qui forment au-
tour de 7; d'Argo une magnifique nébuleuse, son atten-
tion fut attirée par un phénomène étrange; r, d'Argo,
qu'il avait si souvent observée auparavant, avait aug-
menté d'éclat avec tant de rapidité, qu'elle était de-
venue égale à a du Centaure ; elle surpassait d'ailleurs
toutes les autres étoiles de ]'" grandeur, sauf Cano-
pus et Sirius. Cette fois, elle atteignit son maximum
vers le 2 janvier 1838. Bientôt elle s'affaiblit; elle
devint inférieure à Arcturus, tout en restant encore,
vers le milieu d'avril 1838 , plus brillante qu'Aldéba-
ran. Elle continua à décroître jusqu'en mars 1843,
sans tomber cependant au-dessous de la 1'^ grandeur ;
puis elle augmenta de nouveau, surtout en avril 1843,
et avec une rapidité telle, que, d'après les observa-
tions de Mackay, à Calcutta , et celles de Maclear , au
Cap , Y. d'Argo surpassait Canopus et devint presque
égaleàSirius(83). L'étoile a conservé cet éclat extra-
ordinaire jusqu'au commencement de l'année précé-
dente. Un observateur distingué, le lieutenant Gilliss,
chef de l'expédition astronomique que les États-Unis
ont envoyée au Chili, écrivait de Santiago, en février
1850 : « aujourd'hui y; d'Argo, avec sa couleur d'un
rouge jaunâtre, plus sombre que celle de Mars, se rap-
proche extrêmement de Canopus pour l'éclat ; elle est
— 209 —
plus brillante que la lumière réunie des deux com-
posantes de a du Centaure (84). » Depuis l'apparition
de 1604, dans le Serpentaire, aucun phénomène stel-
laire ne s'est produit avec tant d'intensité; aucun
non plus n'a présenté une si longue durée, car ce-
lui-ci dure depuis 7 ans. Dans les 173 années (167 7-
1850) pendant lesquelles nous avons eu des rensei-
gnements plus ou moins suivis sur l'éclat de la belle
étoile du Navire , ses variations de lumière nous ont
offert 8 ou 9 alternatives d'affaiblissement et de re-
crudescence. Par un hasard heureux , où les astro-
nomes ne manqueront pas de puiser un nouveau
motif de persévérer dans des recherches si déli-
cates , l'apparition de ces brillants phénomènes a
coïncidé avec l'époque de la célèbre expédition de
Sir John Herschel au Cap de Bonne-Espérance.
On a remarqué des variations analogues, dont la
périodicité nous échappe également, dans d'autres
étoiles isolées et dans les couples stellaires observés
par Struve [Stellarum compos, Mensurœ microm.^
p. Lxxi-Lxxin). Les exemples dont nous nous con-
tenterons ici sont basés sur les évaluations photo-
métriques que le même astronome a faites à des
époques différentes , et non sur l'ordre des lettres
de rUranométrie de Bayer. Dans un court traité
de fide Uranometriœ Bayerianœ (1842, p. 15), Ar-
gelander a prouvé , sans réplique , que Bayer ne
s'est nullement astreint à désigner les plus belles
étoiles par les premières lettres de l'alphabet, mais
qu'il s'est laissé guider habituellement par la posi-
m. 14
— 210 —
tion des étoiles. Il leur assignait les lettres suc-
cessives de l'alphabet, en suivant la figure de la
constellation depuis la tête jusqu'aux pieds. C'est
pourtant la distribution des lettres dans l'Uranomé-
trie de Bayer qui a fait croire si longtemps qu'un
changement d'éclat avait eu lieu dans plusieurs belles
étoiles, telles que a de l'Aigle, Castor et Alphard,
ou a de l'Hydre.
Struve, en 1838, et Sir John Herschel ont vu la
Chèvre augmenter d'éclat. Le dernier trouve actuel-
lement la Chèvre un peu plus brillante que Véga ;
il la trouvait plus faible autrefois (85). Galle et Heis
ont comparé récemment ces deux étoiles et par-
tagent cette opinion. Heis trouve Véga plus faible
de 5 à 6 degrés; c'est plus d'une demi-grandeur de
différence.
Les variations de lumière des étoiles qui forment
la Grande et la Petite Ourse méritent une attention
particulière. «L'étoile yi de la Grande Ourse, dit Sir
John Herschel, est certainement aujourd'hui la plus
brillante des 7 belles étoiles de cette constellation ,
tandis qu'en 1837, e avait le premier rang. » Cette
remarque m'a engagé à consulter M. Heis, qui ob-
serve avec tant de soin et d'ardeur les variations de
la lumière stellaire. « D'après la moyenne de toutes
les observations que j'ai faites à Aix-la-Chapelle ,
depuis 1842 jusqu'en 1850, écrit M. Heis, je trouve
la série suivante : 1** e de la Grande Ourse, ou Alioth ;
2^ a ou Dubhé ; 3'' n ou Benetnadj ; 4° ^ ou Mizar ;
5" (3 ; 6** 7 ; 7'' (5. Les trois étoiles g , « et y? sont si près
— 211 —
d'être égales , que le moindre trouble dans Tatmo-
sphère pourrait rendre l'ordre des grandeurs diffi-
cile à reconnaître; ^ est décidément inférieur aux
trois précédentes. Les étoiles f3 et y, toutes deux re-
marquablement plus faibles que j;, sont presque
égales entre elles; enfin d, que les anciennes cartes
font égale à (3 et y, est au-dessous de ces étoiles de
plus d'une grandeur. L'étoile e est positivement va-
riable. Quoique z soit d'ordinaire plus brillante que a,
je l'ai vue cependant, 5 fois en 3 ans, décidément
plus faible que a. Je considère aussi (3 de la Grande
Ourse comme variable , sans pouvoir en assigner la
période. Sir John Herschel trouvait (3 de la Petite
Ourse beaucoup plus brillante que la Polaire, en 1840
et 1841 ; le contraire a été observé par lui en 1846,
Il soupçonne une variabilité pour (3 (86). Depuis 1843,
j'ai trouvé ordinairement la Polaire inférieure à p
de la Petite Ourse-, mais depuis octobre 1843 jus-
qu'en juillet 1849, la Polaire a été, d'après mes
notes, 1,4 fois plus brillante que |3. J'ai d'ailleurs
eu de fréquentes occasions de m'assurer que la cou-
leur rougâtre de cette dernière n'est pas toujours
constante ; elle tire parfois plus ou moins sur le jaune ;
d'autres fois elle est d'un rouge tranché » (87).
Cette laborieuse étude de l'éclat relatif des astres
est condamnée à rester un peu incertaine , tant que
l'estime pure et simple , opérée à l'œil nu , n'aura
pas fait place à des procédés de mesure basés sur
les récents progrès de l'optique (88). La possibi-
lité de parvenir à un pareil résultat ne devrait pas
— 212 —
être mise en doute par les astronomes et les physi-
cie ns.
Une grande analogie doit vraisemblablement
exister, quant au mode de génération de la lumière,
entre tous les astres brillant de leur propre éclat, et
par suite entre le corps central de notre système
planétaire et les soleils étrangers, c'est-à-dire les
étoiles. Cette analogie a fait pressentir depuis long-
temps qu'il existe aussi une liaison entre les varia-
tions, périodiques ou non, de la lumière stellaire
ou solaire et l'histoire météorologique de notre
planète (89). On comprend toute l'importance de
ces phénomènes , quand on considère que les va-
riations de la quantité de chaleur que notre pla-
nète reçoit du Soleil , dans le cours des siècles ,
ont dû régler le développement de la vie organi-
que et sa distribution suivant les divers degrés de
latitude. L'étoile variable du col de la Baleine
(Mira Ceti) varie de la 2" à la 11' grandeur, et va
même jusqu'à disparaître; n du Navire Argo oscille
entre la 4" et la 1" grandeur; elle atteint même
l'éclat de Canopus et presque celui de Sirius. Si
notre Soleil a éprouvé des variations semblables , ou
seulement une faible partie des changements d'in-
tensité dont nous venons de donner le tableau ( et
pourquoi serait-il différent des autres soleils?), de
pareilles alternatives d'affaiblissement et de recru-
descence , dans l'émission de la lumière et de la cha-
leur, peuvent avoir eu les conséquences les plus
graves, les plus formidables même, pour notre pla-
— 213 —
nète; elles suffiraient amplement à expliquer les an-
ciennes révolutions du globe et les plus grands phé-
nomènes géologiques. William Herschel et Laplace
ont, les premiers, agité cette question. Si j'expose
ici de tels aperçus, ce n'est pas que je prétende y
trouver la solution complète du problème des varia-
lions de chaleur à la surface du globe. Non, la haute
température primitive de notre planète a résulté de
sa formation même et de la condensation progressive
de sa matière ; les couches profondes ont rayonné
leur chaleur à travers les crevasses du sol et les failles
restées béantes ; le jeu des courants électriques ,
l'inégale distribution des mers et des continents
peuvent avoir rendu , dans les temps primitifs , la
distribution de la chaleur totalement indépendante
de la latitude, c'est-à-dire de la position relative
d'un corps central. Les considérations cosmiques ne
doivent pas être envisagées sous une seule face ; il
faut se garder de les restreindre à de pures spécula-
tions astrognostiques. %
211
MOUVEMENTS PROPRES DES ÉTOILES. — EXISTENCE PROBLÉMATIQUE
d'astres OBSCURS. — PARALLAXES, DISTANCES DE QUELQUES
ÉTOILES. ~ DOUTES SUR L'EXISTENCE D'UN CORPS CENTRAL
DANS l'univers STELLAIRE.
Dans les étoiles, ce n'est pas seulement la couleur
ou l'éclat qui varie : en dépit de leur antique dénomi-
nation de fixes , elles changent de position dans l'es-
pace absolu; chaque étoile est isolément animée d'un
perpétuel mouvement de progression. Où trouver,
dans l'univers, un point absolument fixe? et si on
ose s'élever jusqu'à la conception d'un système gé-
néral, comment démêler les conditions de stabilité
au milieu de cette infinie variété de mouvements et
de vitesses? De toutes les étoiles brillantes qu'ont
observées les anciens, pas une n'occupe aujourd'hui
la même place au firmament. J'ai dit ailleurs qu'Arc-
turus, li. de Cassiopée et la 61*^ du Cygne s'étaient
déplacées , depuis 20 siècles, de quantités angulaire-
ment équivalentes à 2 1/2, 3 1/2 et 6 fois le diamètre
du disque de la Lune. Une autre étoile, dont l'éclat
atteint presque l'extrême limite de la visibilité à
l'œil nu , la 1830' du catalogue de Groom-
bridge (6-7' ou T gr.) marche, avec encore plus
de vitesse , droit sur l'amas d'étoiles de 5* et de
— 215 —
6' grandeur qui forme la Chevelure de Bérénice. Si
celte étoile conserve pendant 71 siècles la vitesse
et la direction actuelle de son mouvement, elle
quittera la Grande Ourse, décrira un arc égal à
près de 27 fois le diamètre de la Lune , et viendra
se projeter juste au milieu de l'amas si clairsemé
de la Chevelure. Dans le même laps de temps,
vingt étoiles se seront déplacées de plus de deux de-
grés (90). Or comme les mouvements propres , déjà
connus et mesurés, varient de 0",05 à 7", 7, c'est-à-
dire dans le rapport de 1 à 151, il est évident que
les distances muti\elles des étoiles doivent s'altérer à
la longue, et que la figure actuelle des constella-
tions ne peut toujours durer. La Croix du Sud, par
exemple , ne conservera pas toujours sa forme carac-
téristique , car ses quatre étoiles marchent en sens
différent, et avec des vitesses inégales. On ne saurait
calculer aujourd'hui combien de myriades d'années
doivent s'écouler jusqu'à son entière dislocation ;
qu'importe? ni pour l'espace, ni pour le temps il
n'existe de termes absolus de grandeur ou de peti-
tesse.
Veut-on embrasser, d'une manière générale, les
changements qui s'opèrent au ciel et qui doivent im-
primer, dans le cours des siècles, une autre physio-
nomie à l'aspect du firmament? Alors il faut procé-
der par énumération et distinguer parmi les causes
qui président à ces variations : 1** la précession des
équinoxes , dont l'effet est de faire monter de nou-
velles étoiles sur l'horizon et d'en rendre d'autres
._ 216 —
pour longtemps invisibles ; 2" le changement d'éclat ,
périodique ou non périodique, d'un grand nombre
d'étoiles ; 3° l'apparition subite d'étoiles nouvelles dont
plusieurs sont restées au ciel; h° la révolution des
étoiles binaires autour de leur centre de gravité
commun. Au milieu de ces étoiles prétendues fixes,
qui changent à la fois d'éclat, de couleur et de
position , nous pouvons suivre les mouvements bien
autrement rapides des 20 planètes principales de
notre monde solaire et de leur 20 satellites (le
nombre des astres secondaires de notre système est
actuellement de quarante ; à l'époque de Copernic
et de Tycho, le restaurateur de l'astronomie pra-
tique, on n'en connaissait que sept). On pourrait
encore ranger parmi les corps planétaires prè!> de
200 comètes calculées , dont 5 sont à courtes pé-
riodes. Celles-ci doivent être nommées comètes inté-
rieures^ puisque leurs trajectoires sont comprises dans
les orbites des planètes. Lorsque ces astres devien-
nent visibles à l'œil nu , pendant la durée presque
toujours très-courte de leurs apparitions, ils con-
tribuent comme les planètes proprement dites, et
comme les étoiles nouvelles qui apparaissent subi-
tement avec un vif éclat , à augmenter l'attrait du
tableau déjà si brillant, j'ai presque dit si pittores-
que, de la voûte étoilée.
L'étude des mouvements propres des étoiles se
rattache d'une manière intime , dans l'histoire des
sciences astronomiques, aux progrès des instruments
et des méthodes d'observation. Cette étude ne pou-
— 217 —
vait d'ailleurs être tentée avec fruit, que depuis
l'époque où l'on appliqua les lunettes aux instru-
ments destinés à mesurer les angles : pas décisif,
qu'il fallait franchir, avant de pouvoir faire succéder
la précision d'une seconde, ou même d'une fraction
de seconde d'arc, à la précision d'une minute, qu'au
prix des plus grands efforts , Tycho avait su , le pre-
mier, donner à ses observations. Sans cet immense
progrès, nous n'aurions, aujourd'hui encore, qu'un
moyen de trancher la question des mouvements pro-
pres : ce serait de comparer entre elles des observa-
tions séparées par une longue série de siècles. Telle
fut, en effet, la marche suivie par Halley en 1717.
Il rapprocha les positions modernes des positions du
catalogue d'Hipparque , et par les différences qu'il
trouva de cette manière, il se crut fondé à attribuer
des mouvements propres à trois étoiles principales ,
Sirius, Arcturus et Aldébaran. L'intervalle de temps
compris entre ces observations était de 1844 ans (91).
Mais, plus tard, la précision des travaux de Rœmer
et la haute idée qu'on s'était faite de la valeur
des ascensions droites conservées dans le Triduum
de l'astronome danois déterminèrent successivement
Tobie Mayer en 1756, Maskelyne en 1770, et Piazzi
en 1800, à se contenter du faible intervalle compris
entre leur époque et celle de Rœmer, et à comparer
leurs observations aux siennes (92). C'est ainsi que
le phénomène des mouvements propres des étoiles a
pu être reconnu, dans sa généralité, dès le milieu
du dernier siècle. Mais les premières déterminations
— 218 —
numériquement exactes datent seulement de 1783
et sont dues à W. Herschel, qui prit pour base les
observations de Flamsteed (93) ; elles sont dues sur-
tout aux admirables travaux de Bessel et d'Argelan-
der, qui ont comparé leurs propres catalogues avec
les positions observées par Bradley, vers 1755.
Cette découverte des mouvements propres des
étoiles est de la plus haute importance pour l'astro-
nomie physique ; elle a fait connaître le mouve-
ment qui emporte notre propre système solaire à
travers les espaces célestes , et même la direction
dans laquelle cette translation s'accomplit. Jamais
nous n'aurions rien su d'un tel phénomène , si le
mouvement progressif des étoiles avait échappé à
nos mesures par sa petitesse même. Il y a plus ; les
efforts inouïs qui ont été tentés pour déterminer ce
mouvement en grandeur et en direction , pour me-
surer la parallaxe des étoiles ou leurs distances , ont
eu cette conséquence immédiate de porter l'art d'ob-
server au plus haut degré de perfection , et de l'y
maintenir, surtout depuis 1830 , soit par les progrès
incessamment stimulés des appareils micrométriques,
soit par l'emploi de plus en plus intelligent des grands
cercles méridiens , des grands héliomètres et des
grandes lunettes montées parallactiquement.
Nous avons vu , au début de ce chapitre , que les
mouvements propres des étoiles varient , de l'une à
l'autre, depuis 1/20 de seconde jusqu'à près de 8".
Mais ce ne sont point les étoiles les plus brillantes
qui possèdent les plus forts mouvements; ce sont des
— 219 —
étoiles de 5% de 6° et même de 7" grandeur (94). Voici
les plus remarquables sous ce rapport : Arcturus ,
l"gr., mouvement propre ==2", 25 ; a du Centaure,
1" gr. 3",58 (95); /^. de Cassiopée, 6« gr. 3",74;
rétoile double è de l'Éridan , 5-4^ gr. 4",08; l'étoile
double 61 du Cygne, 5-6' gr. 5", 123 (son mouve-
ment a été reconnu par Bessel , en 1812, sur les
observations de Bradley, comparées avec celles de
Pia7zi) ; une étoile située sur la limite qui sépare les
Chiens de Chasse de la Grande Ourse (96), et portant
le n" 1830 dans le Catalogue des étoiles circumpo-
laires de Groombridge, 7^ gr. 6", 974, d'après Arge-
lander; e de l'Indien 7", 74, d'après d'Arrest (97) ;
2151 de la Poupe du Navire, 6' gr. 7", 871. Oppo-
sons à ces résultats exceptionnels une donnée plus
générale : en prenant la moyenne arithmétique des
mouvements propres stellaires, pour toutes les ré-
gions du ciel où ces mouvements sont actuel-
lement bien constatés , Meedler n'a trouvé que
0",102 (98).
Par suite de ses recherches sur « la variabilité des
mouvements propres de Sirius et de Procyon, »
Bessel , le plus grand astronome de notre époque ,
est arrivé , en 1844, à des conséquences bien remar-
quables. Il était convaincu , peu de temps avant la
douloureuse maladie qui a causé sa mort, « que les
étoiles dont les mouvements propres présentent des
variations sensibles, appartiennent à des systèmes
qui occupent des espaces assez faibles relativement
aux énormes distances mutuelles des étoiles. » La
— 2^20 —
croyance de Bessel à l'existence de couples stellaires
où l'un des astres composants serait privé de lumière
était si ferme, comme le prouverait au besoin sa
longue correspondance avec moi, qu'elle réussit à
éveiller l'attention universelle , indépendamment de
l'intérêt qui s'attache naturellement à toute concep-
tion capable d'élargir le cercle de nos connaissances
sur l'univers sidéral. « Le corps attirant, dit le cé-
lèbre observateur, doit être ou très-près de l'étoile
dont le mouvement propre présente des variations
sensibles, ou très-près de notre propre Soleil. Or,
comme la présence d'un corps attirant, doué d'une
masse considérable et placé à très-petite distance du
Soleil, n'est nullement accusée par les mouvements
de notre système planétaire , on se trouve ramené à
l'autre alternative ; il faut admettre que le corps at-
tirant est placé très-près de l'étoile elle-même. C'est
là la seule explication admissible des variations que
le mouvement propre de Sirius a subies dans le cours
d'un siècle (99). » Bessel m'écrivait, en juillet 1844:
«... Je n'en persiste pas»moins à croire que Sirius et
Procyon sont de véritables étoiles doubles , composées
chacune d'une étoile visible et d'une étoile invisible. »
Et comme j'avais exprimé , en plaisantant, quelques
scrupules au sujet de ce monde fantastique que l'on
allait peupler d'astres obscurs, il ajoutait : « Il n'y a
aucune raison de considérer la faculté d'émettre la
lumière comme une propriété essentielle des corps.
De ce que des étoiles sans nombre sont visibles , il
ne résulte évidemment aucune preuve contre l'exis-
- 2H —
tence d'étoiles invisibles , également innombrables.
La difficulté principale , celle d'expliquer physique-
ment la variabilité d'un mouvement propre, sera
levée d'une manière satisfaisante , en supposant qu'il
existe des astres obscurs. On ne peut rien objecter
à cette simple hypothèse : des variations de vitesse
ne peuvent résulter que de l'action de certaines
forces , et ces forces doivent agir d'après les lois de
Newton. »
Un an après la mort de Bessel , Fuss entreprit ,
sur l'invitation de Struve, de rechercher, de son
côté , la cause des anomalies présentées par Sirius
et Procyon. 11 employa dans ce but de nouvelles
observations faites à Poulkova , à l'aide de la lu-
nette méridienne d'Ertel , et compara les résultats
ainsi obtenus avec d'anciennes observations conve-
nablement réduites. La conclusion de Struve et de
Fuss est contraire à la pensée de Bessel (100). Mais
un grand travail que Péters vient de terminer à
Kœnigsberg, et des recherches analogues entreprises
par Schubert, calculateur du Naiitical Almanacli des
États-Unis, ont donné gain de cause à cette hypo-
thèse.
La croyance aux étoiles dépourvues de lumière
s'était déjà répandue dans l'antiquité grecque, et
surtout dans les premiers temps du christianisme.
On admettait « qu'au milieu des étoiles brillantes ,
dont les vapeurs alimentent la combustion, se meu-
vent encore d'autres corps de nature terrestre , qui
restent invisibles pour nous (1). » Plus tard , l'ex-
— 222 —
tinction complète des étoiles nouvelles, surtout de
celles que Tycho et Kepler observèrent avec tant de
soin dans Cassiopée et le Serpentaire , parut devoir
donner une base plus assurée à cette croyance.
Comme on pensait, dès cette époque, que la première
étoile avait déjà paru deux fois, à 300 ans de dis-
tance, ridée d'un anéantissement réel , d'une des-
truction complète ne pouvait se présenter à l'esprit.
L'immortel auteur de la Mécanique Céleste croyait
aussi à l'existence de masses non lumineuses dans
l'univers ; il basait sa conjecture sur les appari-
tions de 1572 et de 1604. « Ces astres devenus invi-
sibles , après avoir surpassé l'éclat de Jupiter même,
n'ont point changé de place pendant leur apparition
( ils ont seulement cessé d'émettre de la lumière).
Il existe donc, dans l'espace céleste, des corps opa-
ques aussi considérables et peut-être en aussi grand
nombre que les étoiles (2).» De môme Moedler dit,
dans ses Recherches sur le Système sidéral (3) : « Un
corps obscur pourrait être corps central ; il pour-
rait être entouré de corps obscurs , de même que le
Soleil n'est entouré immédiatement que de planètes
dépourvues de toute lumière propre. Les mouve-
ments de Sirius et de Procyon , signalés par Bessel ,
conduisent d'ailleurs nécessairement (?) à admettre
des cas où certains astres brillants seraient de sim-
ples satellites, subordonnés à des masses obscures. »
Quelques partisans de la théorie de l'émission admet-
tent que de telles masses peuvent rayonner de la
lumière, tout en restant invisibles pour nous; il
— 22S —
suffît que leurs dimensions ou leurs masses soient
telles, que les atomes de lumière qu'ils émettent
soient retenus ou ramenés vers le centre par la force
d'attraction de la masse , et cela, à partir d'une cer-
taine limite que les molécules lumineuses ne sau-
raient dépasser (4). S'il existe, comme on peut le
croire , des corps obscurs ou invisibles dans l'uni-
vers, des corps où la lumière ne se développe point,
toujours est-il qu'ils ne sauraient se trouver près
de notre système de planètes et de comètes , à moins
que leur masse ne soit extrêmement fciible , sans
quoi leur présence se serait déjà trahie par des per-
turbations sensibles.
La recherche des mouvements stellaires, qu'ils
soient réels ou seulement apparents et produits
par le simple déplacement de l'observateur; la me-
sure de la distance des étoiles par celle de leurs
parallaxes; la détermination du sens et de la vitesse
du mouvement de translation de notre système pla-
nétaire , sont trois importants problèmes , intime-
ment liés par leur nature même et par les moyens
que Ton peut employer pour obtenir leur solution
plus ou moins complète. Nul progrès dans les mé-
thodes , nul perfectionnement dans les appareils
de mesure , n'ont été réalisés en vue d'attaquer un
de ces difficiles problèmes , sans produire aussitôt,
pour la solution des deux autres , d'inestimables
résultats. Je commencerai de préférence par la ques-
tion des parallaxes ou des distances de certaines
étoiles choisies, afin de compléter l'exposition des
— 224 ~
notions acquises sur les étoiles prises isolément.
Galilée proposait, dès le commencement du
xvn' siècle, de « mesurer les distances, sans doute
fort inégales , qui séparent les étoiles de notre sys-
tème solaire. » Il avait même pressenti , avec une ad-
mirable sagacité, qu'on trouverait le meilleur moyen
ûe déterminer la parallaxe , non dans la mesure
des distances angulaires au pôle ou au zénith, mais
« dans la comparaison faite avec soin des positions
respectives de deux étoiles très-voisines. » C'était ,
en termes généraux , l'indication formelle des mé-
thodes micrométriques qui furent appliquées plus
tard parW. Herschel en 1781, puis par Struve et par
Bessel. » Perché io non credo, dit Galilée» (5) dans sa
Giornata terza , che tutte le stelle siano sparse in
una sferica superficie ^^^/«/m^/^?^ distante da uncentro;
ma stimo che le loro lontananze da noi siano tal-
mente varie , che alcune ve ne possano esser 2 e
3 volte più remote di alcune altre ; talchè quando si
trovasse col Telescopio quakhe picciolissima Stella
vicinissima ad alcuna délie 7naggiori ^ e che pero
quella ïws^iQ, (i\û^^\m'à , potrebbe accadere ^ clie qualche
sensibil miitazione succedesse ira di loro» » Le système
de Copernic posait en effet ce problème ; en l'a-
doptant, on se trouvait entraîné à rechercher dans
les changements de position des étoiles Içi démons-
tration du mouvement annuel de la Terre autour
du Soleil. Aussi lorsque Kepler eut prouvé , parles
observations de Tycho , que les positions apparentes
des étoiles ne manifestaient aucune trace sensible
— 225 —
de déplacement parallacliqiie, du moins si l'on s'en
tient à la précision d'une minute d'arc (tel était le
degré d'exactitude que Tycho lui-même attribuait à
ses mesures de distance), les coperniciens durent
conclure que le diamètre de l'orbite terrestre, malgré
ses 306 millions de kilomètres, est une base géomé-
trique beaucoup trop faible, relativement à l'énorme
distance des étoiles fixes.
L'espoir d'arriver jamais à déterminer ces dis-
tances devait donc uniquement reposer sur les pro-
grès futurs des appareils optiques et des instruments
de mesure, c'est à-dire sur la possibilité d'évaluer
avec précision de très-petits angles. Aussi longtemps
qu'on ne put répondre de cette précision qu'à une
minute près, l'absence de parallaxe sensible prouvait
seulement que la distance des étoiles fixes surpasse
3/108 rayons de l'orbite terrestre , c'est-à-dire 3138
fois la distance de la Terre au Soleil (6). A mesure
que l'exactitude des observations a été en crois-
sant, cette limite s'est élevée dans le même rap-
port. Les observations de Bradiey, exactes à 1" près,
rejetaient les étoiles les plus proches à 200265 fois la
distance de la Terre au Soleil. Depuis l'époque bril-
lante où Fraunhofer construisit ses admirables instru-
ments, la précision des mesures a été portée à 0",1 ;
le rayon de l'orbite terrestre n'est plus insuffisant
que pour des étoiles dont la distance surpasserait
20G2G48 fois la longueur de cette base géométrique.
L'ingénieux appareil zénithal consfrijit, en 1G69,
par Robert Hooke, contemporain de Newton, ne put
ni. 15
— 226 —
conduire au but proposé. Picard, Horrebow (le cal-
culateur des seules observations de Rœmer qui aient
été sauvées), et Flamsteed croyaient avoir trouvé des
parallaxes de plusieurs secondes, parce qu'ils con-
fondaient certains déplacements apparents des étoi-
les avec reflet parallactique du mouvement an-
nuel. John Michell, au contraire (Philos. Trans.,
4 767, t. LVII, p. 23/1-264), attribuait aux étoiles les
plus proches une parallaxe de moins de G", 02,
« qu'on ne pourrait reconnaître à moins d'employer
un grossissement de 12000 fois. » L'opinion très-
répandue que la supériorité d'éclat d'une étoile est
un indice assuré de proximité, engagea Calandrelli
et le célèbre Piazzi (1805) dans une série de recher-
ches peu heureuses sur les parallaxes de Véga,
d'Aldébaran, de Sirius et de Procyon. Il faut en dire
autant des recherches de Brinkley (1815): Pond d'a-
bord et ensuite Airy les ont victorieusement combat-
tues. Les premières notions satisfaisantes sur les
parallaxes ont été obtenues par la voie des mesures
micrométriques ; mais elles ne commencèrent à se
produire qu'à dater de 1832.
Dans un important mémoire sur la distance des
étoiles (7), Péters évalue à 33 le nombre des pa-
rallaxes déjà déterminées. Nous n'en citerons que 9;
ce sont celles qui méritent le plus de confiance, en-
core ne la méritent-elles pas toutes au même degré.
Nous suivrons d'ailleurs l'ordre chronologique.
L'étoile devenue si célèbre par les travaux de Bes-
sel , la 61" du Cygne , doit avoir ici le premier rang.
— 227 —
Dès 1812, rastronome de Kœnigsberg avait décou-
vert le mouvement propre considérable de cette étoile
double, dont les composantes sont au dessous de
la 6*^ grandeur; mais ce ne fut qu'en 1838 qu'il en
détermina la parallaxe à l'aide de son héliomètre.
Mes amis Arago et Mathieu avaient observé la dis-
tance zénithcile de la 61* du Cygne, depuis le mois
d'août 1812 jusqu'au mois de novembre de Tannée
suivante, afin d'en mesurer la parallaxe absolue. Ils
tirèrent de leurs observations la conséquence très-
juste que la parallaxe de cette étoile est au-dessous
d'une demi-seconde (8). En 1815 et en 1816, Bessel
n'avait encore pu obtenir aucun résultat admissi-
ble (ce sont ses propres termes) (9) ; mais les obser-
vations instituées à l'aide du grand héliomètre de
Fraunhofer, depuis le mois d'août 1837 jusqu'en
octobre 1838, lui donnèrent enfin une parallaxe de
0",3/i83, c'est-à-dire une distance égale à 592200 fois
celle de la Terre au Soleil. La lumière emploie 9 ans
et 1/4 à parcourir cet espace. Les observations faites
en 18Ù2 par Péters ont confirmé ce résultat, puis-
qu'elles ont donné 0",3490. Le même astronome a
modifié plus tard le résultat de Bessel, en y introdui-
sant une petite correction relative aux variations de
température; il a trouvé ainsi 0",374û (10).
La parallaxe de la plus belle étoile double du ciel
austral, a du Centaure, a été déterminée, en 1832,
par les observations de Henderson au Cap de Bonne-
Espérance, et par celles de Maclear en 1839. Le
résultat est 0',9128 (11). C'est donc l'étoile la plus
--- 228 —
voisine de nous , parmi celles dont a mesuré la dis-
tance ; elle est trois fois plus rapprochée que la 61* du
Cygne.
W. Struve s'est longtemps occupé de la parallaxe
de a de la Lyre. Ses premières observations datent
de 1836; elles donnaient un résultat compris entre
0",07 et 0M8 (12). Plus tard il obtint , pour valeur
délinitive, le nombre 0",2613, qui correspond à
771400 rayons de Torbite terrestre, distance par-
courue en 12 ans par la lumière (13). Pélers a trouvé
seulement 0",103. Ainsi la plus brillante étoile du
ciel boréal serait encore plus éloignée qu'une petite
étoile de G* grandeur, la 61^ du Cygne, que l'œil
distingue avec quelque peine sur la voûte céleste.
La parallaxe de l'étoile polaire a été déduite, par
Péters , d'observations continuées pendant vingt ans
à Dorpat, de 1818 à 1838. Péters a trouvé O'.lOô,
résultat d'autant plus satisfaisant que les observa-
tions dont il procède assignent, en même temps, à
la constante de l'aberration une valeur de 20", 455,
presqu'identiqne à celle de W. Struve (14).
L'étoile 1830 du catalogue de Groombridge,à la-
quelle Argelander a reconnu le plus fort mouvement
propre de tout le ciel boréal, a pour parallaxe 0",226
d'ciprès une série de 48 distances zénithales très-
exactes que Péters a observées à Poulkova en 1842
et 1843. Paye avait cru devoir assigner à cette étoile
une parallaxe 5 fois plus forte (1", 08), supérieure par
conséquent à celle de a du Centaure. Afin de lever les
doutes qui pouvaient rester encore sur la distance de
la 1830" de Groombridge, Otto Struve entreprit d'en
déterminer la parallaxe , au moyen du grand équa-
torial de Poulkova. Ses recherches amenèrent un
résultat inattendu; il fut conduit, par la discus-
sion d'une des plus belles séries d'observations qui
aient jamais été ûiites, à afiirmer que la parallaxe de
cette étoile devait être au-dessous d'un dixiènje de
seconde. Bessel avait résolu, en 18^2, d'appliquer à
celte étoile la méthode et Finslrument qui avaient si
bien réussi pour la Gl^du Cygne. Les observations
faites par Schlûter, et calculées par Wichiriann, à
Kœnigsberg. ont donné une parallaxe intermédiaire
entre celles de Péiers et de 0. Struve. Ces trois me-
sures s'accordent donc à établir que la parallaxe de
la 1830' de Groombrid^je ne saurait dépasser une
assez petite fraction de la seconde d'arc (15).
ÉTOILES.
a du Centaure.
■<
<
PS
<
a.
ERREUR
probable.
NOMS
DES OBSERVATEURS.
0",913
O'',070
Henderson et Maclear.
6^ du Cygne.
0 ,^l[ih
0 ,020
Bessel.
Sirius.
0 ,230
»
Henderson.
1830 Groombridge.
0 ,226
0 ,UI
Pélers
»
0 ,1825
0 ,0185
Schlutcr et Wichniann .
»
0 ,03/i
0 .029
OUo Struve.
i de la Grande Ourse.
0 ,133
0 ,106
Pélers.
Arcturus.
0 ,127
0 ,073
Péters.
a de la Lyre.
0 ,207
0 ,038
Struve et Péters.
La Polaire.
0 ,106
0 ,012
Pctcrs.
La Chèvre.
0 ,0Zi6
0 ,200
Péters.
— 230 —
En général, les résultats obtenus jusqu'ici n'éta-
blissent nullement que les étoiles les plus brillantes
soient aussi les plus proches. Si la parallaxe de « du
Centaure est la plus grande de toutes, on voit en même
temps que celles de « de la Lyre, d'Arcturus et de la
Chèvre surtout sont bien inférieures à la parallaxe
d'une étoile de 6' grandeur, la 61' du Cygne. 11 en est
de même des mouvements propres. Après la 2151* de
la Poupe et i de l'Indien, les étoiles douées du mouve-
ment le plus rapide sont la 61^ du Cygne (5'', 123 par
an ) et le n° 1830 de Groombridge , appelé aussi , en
France, étoile d'Argelander (6",974par an . Ces étoiles
sont 3 à ù fois ) lus éloignées que a du Centaure
dont le mouvement propre ne dépasse point 3", 58. Le
volume, la masse, l'éclat, le mouvement propre et
la distance ont sans doute entre eux des relations
fort complexes (16), et s'il est à présumer que les
étoiles les plus brillantes sont aussi, en thèse gé-
nérale , les plus rapprochées de nous, il peut y avoir
également de petites étoiles très-éloignées , dont la
photosphère ou la surface soit capable d'émettre
une lumière très-vive. Les étoiles classées dans le
1" ordre de grandeur, à cause de leur éclat, pour-
raient donc être situées plus loin que des étoiles de
4* ou même de 6' grandeur. Si nous quittons l'im-
mense couche stellaire dont notre système fait par-
tie, pour descendre, degré par degré, jusqu'à notre
monde planétaire ou plus bas encore, jusqu'aux
mondes inférieurs de Saturne et de Jupiter, nous
voyons constamment un corps central entouré de
— 231 -
masses subordonnées , dont la grandeur et Téclat
ne paraissent guère dépendre des distances. Rien ne
saurait donner autant d'attrait à Tétude encore si peu
avancée des distances steliairesque la relation étroite
qui rattache nécessairement la connaissance des pa-
rallaxes à celle de la structure générale de l'univers.
Le génie humain a su tirer parti, pour ce genre
de recherches, de la propagation successive de la lu-
mière , et y trouver une ressource nouvelle , bien
diflerente des moyens dont j'ai parlé plus haut. Cette
ingénieuse conception mérite assurément de trouver
place ici. Savary, qui a été sitôt ravi aux sciences,
a montré comment certains effets de l'aberration,
particuliers aux étoiles doubles, pourraient servir
à déterminer leurs parallaxes. Si le plan de l'orbite
décrite par le satellite autour de l'étoile centrale n'est
point perpendiculaire au rayon visuel dirigé de la
Terre vers l'étoile , si ce plan se trouve placé à peu
près dans la direction du rayon visuel, le satellite
paraîtra décrire une orbite presque rectiligne. Or son
orbite réelle peut être alors idéalement décomposée
en deux parties, dans le sens du rayon visuel : l'une,
où le satellite se rapproche constamment de la
Terre; l'autre, où il s'en éloigne constanmient. Dans
le premier cas , l'espace que la lumière doit parcoiu'ir
pour arriver jusqu'à nous va en diminuant ; cet espace
va en croissant, dans le second cas. Il en résulte que
le satellite emploiera des temps différents, non pas en
réalité mais en apparence , à décrire ces deux moi-
tiés de son orbite, que je supposerai circulaire, pour
-- 232 -^
plus de simplicité. Si donc la grandeur de ce! te orbite
est telle que la lumière ail besoin de plusieurs jours
ou de plusieurs semaines pour la traverser, la demi-
différence des durées apparentes des deux deuii-révo-
lulions donnera la mesure du temps que la lumière
emploie à parcourir Téteudue de l'orbile, dans le sens
de noire rayon visuel; tandis que la somme de ces
durées apparentes indiquera la durée réelle de la ré-
volution entière. Or, on connaît la vitesse absolue de
la lumière; elle parcourt 2663 millions de myriamè-
tresen 24 heures. Il s'ensuit qu'une des dimensions
absolues de l'orbite peut être calculée en myriamè-
tres; après quoi la simple détermination micromé-
Irique de l'angle sous lequel cette ligne est vue par
l'observateur fournit immédiatement la parallaxe
ou la distance de l'étoile principale (17).
De même que la détermination des parallaxes nous
enseigne les distances mutuelles des étoiles et leur
vrai lieu dans l'univers; de môme l'étude des mou-
vements propres, en grandeur et en direction, peut
nous conduire à la solution de deux nouveaux pro-
blèmes , savoir : le mouvement de translation du
système solaire dans l'espace (18), et la position du
centre de gravité de l'univers sidéral tout entier. Hâ-
tons-nous de dire qu'en pareille matière toute no-
tion irréductible à de simples relations de nombres
est, par cela même, impropre à manifester, avec la
clarté nécessaire, la connexion des causes et des
effets. Des deux problèmes dont il vient d'être parlé,
le premier est donc le seul qui n'offre point le carac-
tère d'une indétermination absolue. On peut citer,
comme preuve à Tappui, les excellentes recher-
chrs d'Argelaiider. Qnant au second problème, re-
latif à la structure même de Tunivers, Tesprit ne
saurait s'élever à la conception nette et claire du jeu
des forces innombrables qu'il devrait comprendre. La
solution manque d'ailleurs, d'après l'aveu même de
Meedler qui a fait tant d'efforts ingénieux pour l'ob-
tenir, de l'évidence indispensable à toute démonstra-
tion réellement scientifique (19).
Lorsqu'on a tenu un compte exact des effets dus à
la précession des équinoxes, à la nulation de l'axe
terrestre, à l'aberration de la lumière et aux chan-
gements parallacliques, engendrés par le mouvement
annuel de la Terre autour du Soleil, les mouvements
apparents des étoiles contiennent encore, outre les
déplacements qui leur appartiennent en réalité, une
trace quelconque du mouvement de translation gé-
nérale du système solaire. Dans son beau Mémoire
sur la nutation (1748), Bradley a entrevu, le pre-
mier, le mouvement propre du Soleil; il a même in-
diqué la meilleure marche à suivre pour contrôler
cette hypothèse (20). « Si l'on vient à reconnaîlre, dit
Bradley, que notre système planétaire cliange de place
dans Cespace absolu , ou devra pouvoir observer, dans
la suite des temps, une variation apparente dans les
distances angulaires des étoiles; et comme les étoiles
voisines en seront affectées plus que les étoiles éloi-
gnées , il résulte de là que les positions de ces deux
classes d'étoiles paraîtront changer, les unes relati-
— 23/1 —
vement aux autres, quoiqu'elles soient restées im-
mobiles en réalité. Si, au contraire, notre soleil est
en repos et que ce soient les étoiles qui se meuvent ,
alors leurs positions apparentes changeront encore;
ces variations seront d'autant plus sensibles, que
les étoiles se trouveront plus près de la Terre et plus
favorablement placées par rapport à nous. Les chan-
gements de position des étoiles peuvent, d'ailleurs,
dépendre d'un si grand nombre de causes , qu'il fau-
dra peut-être attendre bien des siècles avant d'en
pouvoir reconnaître les lois. »
Depuis Bradley, Tobie Mayer, Lambert et Lalande
ont discuté, dans leurs écrits, tantôt la possibilité,
tantôt la vraisemblance du mouvement de translation
du système solaire. William Herschel est le premier
qui ait tenté, dans ses Mémoires de 1783, 1805 et
1806, d'établir cette conjecture sur des faits observés.
11 trouva (ce qui a été confirmé depuis par un grand
nombre de travaux plus exacts) que notre système
solaire se dirige vers un point situé dans la constella-
tion d'Hercule , par 260° 44' d'ascension droite et
26" 16' de déclinaison boréale (pour 1800). En com-
parant les positions qu'un grand nombre d'étoiles
ont occupées dans le ciel, à diverses époques, Ar-
gelander a trouvé , pour la position de ce point :
en 1800, AR. 257° 5.V,1 Décl. -|- 28°Z!9',2,
et pour 1850, 258 23,5 + 28 ^5,6;
Otto Struve a déduit de 392 étoiles :
en 1800, AR. 261° 26',9 Décl. + 37o 35',5,
et pour 1850, 261 52,6 + 37 33,0.
— 235 —
D'après Ganss (21), le point cherché se trouve dans
un quadrilatère dont les sommets ont pour positions:
AR. 258° ^0' Décl. -f 30" ^0'
258 ^2 30 57
259 13 31 9
260 U 30 32
Il restait encore à examiner ce que donneraient les
étoiles de l'hémisphère austral , invisibles dans nos
climats. Galloway s'est occupé de ces calculs avec un
zèle tout particulier (22) ; il a comparé des observa-
tions très-récentes , faites par Johnson à Sainte-
Hélène 5 et par Henderson au Cap de Bonne-Es-
pérance (1830\ avec les anciennes déterminations de
Lacaille et de Bradley (1750 et 1757). Le résultat a été :
pour 1790, AR. 260° 0' Décl. + 3^-23';
ainsi , pour 1800 , 260 5 + 3^ 22 ,
et pour 1850, 260 33 + 34 20.
L'accord de ce résultat avec ce que les étoiles bo-
réales avaient déjà donné , est extrêmement satisfai-
sant,
La direction du mouvement progressif de notre
système solaire étant ainsi déterminée, avec un cer-
tain degré d'approximation , une question se présente
naturellement, à savoir : l'univers sidéral est-il une
simple aggrégation fortuite de systèmes partiels ,
indépendants les uns des autres, ou est-il lui-même
un système plus vaste, dans lequel tous les astres
tourneraient ensemble autour du centre de gravité
général? On peut même demander si le centre de Tu-
nivers tombe dans le vicie, ou s'il doit être matériel-
lement représenté par un corps central d'une masse
pré|)ondérante. Ici nous entrons dans le domaine des
pures conjectures. On peut , il est vrai , leur donner
des dehors scientifiques; mais rinsuflisance radicale
des données fournies par Tobservalion ou par l'ana-
logie ne permettra jamais d'élever ces hypothèses au
degré de consistance et de netteté que l'on trouve
dans d'autres branches de la science. Vouloir traiter à
fond un pareil problème, prétendre appliquer là les
ressources de l'analyse mathématique , c'est oublier
que les mouvements propres d'un nombre infini de
petites étoiles (de la 10^ à la li^ grandeur) nous res-
tent inconnus, et que ce sont précisément de telles
étoiles qui constituent la partie la plus considéra-
ble des anneaux ou des couches stellaires de la Voie
lactée. L'élude de notre propre monde planétaire,
où l'on remonte successivement des petits systèmes
partiels de Jupiter, de Saturne et d'Uranus à la con-
ception du système solaire qui les comprend tous,
a pu offrir, pour l'étude de l'univers, la tentation
d'une analogie facile. De là l'idée d'un monde slel-
laire, où des groupes partiels, nombreux, situés à
des intervalles immenses les uns des autres , seraient
coordonnés mutuellement par un lien d'ordre supé-
rieur, tel que l'attraction prépondérante d'un grand
corps central, espèce de Soleil de runivcrs (23}.
Mais les faits acquis contredisent ces conjectures uni-
quement basées sur la vague analogie qu'elles ten-
dent à établir entre l'univers sidéral et notre svstème
— 237 —
solaire. Dans les étoiles inuliiples, par exemple, est-ce
que des astres lumineux par eux-mêmes, des soleils,
en un mot, ne tournent pas autour d'un centre dé
gravité, placé bien loin d'eux dans l'espace? VA même,
dans notre propre monde , le centre du Soleil est-il
donc le véritable centre des mouvements planétaires?
Non : le centre des mouvements, c'est le centre de
gravité général de toutes les masses qui composent
le système. Tantôt le centre de gravité tombe, en
vertu des positions respectives des planètes pré-
pondérantes (Jupiter et Saturne), à l'intérieur du
Soleil; tantôt, et c'est le cas le plus fréquent, il
tombe hors du Soleil (24). Pour les étoiles doubles,
le centre de gravité est placé dans le vide. Dans notre
système solaire , ce point se trouve tantôt dans le
vide, tantôt dans un lieu occupé par la matière.
On pourrait même imaginer, pour plier à l'analogie
les étoiles binaires ou multiples, qii'il existe au
centre de leurs mouvements un corps obscur ou fai-
blement éclairé d'une lumière étrangère ; mais ce se-
rait s'engager beaucoup trop avant dans le domaine
des mythes et des hypothèses gratuites.
Voici cependant une considération plus digne d'at-
tention. Si les mouvements propres des étoiles diver-
sement éloignées et du Soleil lui-même s'accomplis-
saient dans d'immenses cercles concentriques , le
centre de ces mouvements devrait se trouver à 90** du
point vers lequel notre système solaire se dii'ige ("25).
Dans cet ordre d'idées, il devient important d'étudier
de quelle manière les mouvements propres, lents ou
— 238 —
rapides des étoiles se répartissent sur le ciel. Arge-
lander a examiné, avec sa réserve et sa sagacité ha-
bituelles , jusqu'à quel degré de vraisemblance on
pouvait chercher le centre général des gravitations de
notre strate stellaire dans la constellation de Per-
sée (26). Mœdler se prononce pour le groupe des
Pléiades. Il va plus loin, et tout en rejetant l'idée
d'un corps central doué d'une masse prépondérante,
il place le centre de gravité général dans Alcyone
(•/) du Taureau), la plus belle des Pléiades (27). Je
n'ai point à discuter ici une pareille conjecture,
ni à examiner si elle est fondée ou seulement vrai-
semblable (28). On peut la repousser ; on accor-
dera , du moins , à l'actif directeur de l'Obser-
vatoire de Dorpat, que ses recherches ne seront
point inutiles pour quelques parties de l'astronomie
physique. Il lui restera surtout le mérite d'avoir
péniblement réduit et discuté les positions et les
mouvements propres de plus de 800 étoiles.
— 239
VI
ÉTOILES DOUBLES ET MULTIPLES. — LEUR NOMBRE ET LEURS
DISTANCES MUTUELLES.— DURÉES DE LA RÉVOLUTION DE DEUX
SOLEILS AUTOUR DE LEUR CENTRE DE GRAVITÉ COMMUN.
Puisque le système général de l'univers a été plu-
tôt soupçonné qu'entrevu, laissons là les considéra-
tions d'ensemble , pour descendre aux systèmes par-
tiels. Ici, nous retrouvons un sol plus ferme, des
phénomènes plus accessibles à l'observateur. Les
étoiles doubles , ou plus généralement encore , les
étoiles multiples sont des systèmes composés d'un
très-petit nombre d'astres lumineux par eux-mêmes ,
véritables soleils que réunit le lien d'une gravitation
réciproque, et qui exécutent leurs mouvements dans
des courbes fermées. Avant que l'observation n'eût
révélé leur existence, on ne connaissait de pareils
mouvements que dans notre système solaire , où les
planètes accomplissent aussi leurs révolutions dans
des trajectoires limitées (29). Mais cette analogie,
purement apparente, a longtemps conduit à des idées
fausses. On appliquait le nom d'étoile double à tout
couple d'étoiles dont le rapprochement ne permet-
tait pas à l'œil désarmé d'opérer la séparation (Cas-
tor, a de la Lyre, p d'Orion , « du Centaure); tandis
qu'il aurait fallu distinguer deux classes fort diffé-
— 240 —
renies de couples steîlaires: ceux qui paraissent tels,
à cause de la situation particulière de l'observateur,
quoique les étoiles , en apparence réunies , aj)partien-
nent en réalité à des régions ou à des couches tout
à fait dilTerentes ; et ceux qui sont formés d'étoiles
réellement voisines, d'étoiles placées, dès lors, sous
l'influence de leur gravitation réciproque. Ceux-ci
sont de vrais systèmes partiels. On donne à ces
deux classes les noms d'étoiles doubles optiques et
d'étoiles doubles physiques. Lorsque la distance est
grande et le mouvement très-lent, ces dernières
peuvent être aisément confondues avec les couples
purement optiques. Alcor , petite étoile dont les
astronomes arabes ont souvent parlé, parce qu'elle
est visible à l'œil nu , quand l'air est pur et la vua
très-perçante , constitue avec ^ de la queue de la
Grande Ourse un couple optique dans toute l'éten-
due du mot, je veux dire un couple d'étoiles physi-
quement indépendantes. J'ai rappelé ailleurs com-
bien une grande proximité , apparente ou réelle ,
peut apporter d'obstacles à la séparation optique des
étoiles formant couple , surtout si l'une des deux
possède un éclat prépondérant. Les queues steîlaires
et d'autres illusions d'origine organique qui pro-
duisent la vision indistincte, ont été aussi discutées
en leur lieu (30).
Sans avoir jamais fait, des étoiles doubles, un but
spécial de recherches lélescopiqiies, Galilée, dont
les lu!ielte.^ étaient d'ailleurs beaucoup trop faibles
pour un pareil sujet, avait remarqué cependant
-^ 241 —
l'existence des couples optiques. Dans un passage
célèbre de sa Giornata terza, il indique aux astro-
nomes le parti qu'ils pourraient tirer de ces étoiles,
pour en déterminer la parallaxe (quando si trovasse
nel telescopio qualche picciolissima Stella, vicinis-
simaadalcuna délie mag'giori)(oi). C'est à peine si
l'on comptait 20 étoiles doubles, vers le milieu du
siècle passé, en excluant celles dont la distance sur-
passe 3*2". Aujourd'hui, on en connaît 6000 dans les
deux hémisphères, grâce aux immenses travaux de
William Herschel, de John llerschel et de Slruve.
Parmi les plus anciens couples connus on peut citer :
Ç de la Grande Ourse, signalée, en 1700, par Gotlfried
Kirch; a du Centaure, en 1709 par le Père Teuillée ;
y de la Vierge, en 1718; a des Gémeaux, en 1719;
la 6l« du Cygne, en 1753 ; (ces trois derniers ont été
observés par Bradley qui en a déterminé les angles
de position et les distances); p d'Ophiucus; j; de
rÉcrevisse.... (32). Peu à peu, leur nombre est allé
en augmentant, depuis Flamsteed qui se servait déjà
d'un micromètre, jusqu'à Tobie Mayer dont le ca-
talogue parut en 1756. Deux profonds penseurs,
Lambert [Pliolometria, 1760; Lellres cosmologiqiies sur
la Structure de l'Univers, 1761) et John Michell (1767)
n'ont point observé eux-mêmes les étoiles doubles;
mais ils ont publié les premières notions exactes
sur les rapports d'attraction mutuelle qui doivent
exister entre les composantes de ces systèmes par-
tiels. Lambert pensait, avec Kepler, que les soleils
éloignés doivent être entourés, comme notre propre
m. 16
— 242 —
Soleil , d'un cortège d'astres obscurs , semblables à
nos planètes et à nos comètes. Quant aux étoiles
très rapprochées l'une de l'autre, il croyait, tout en
paraissant pencher pour l'hypothèse d'un corps cen-
tral obscur, que ces étoiles devaient tourner autour
de leur centre de gravité commun , et accomplir leur
révolution dans un espace de temps assez res-
treint (33). Michell, qui ne connaissait point les
idées émises par Kant et par Lambert, suivit une
autre voie. Il appliqua le calcul des probabilités à
l'étude des groupes stellaires et surtout aux étoiles
multiples, binaires ou quaternaires (34). Il prouva
qu'il y avait 500000 à parier contre 1 , que la réu-
nion des 6 étoiles principales des Pléiades ne pouvait
être l'effet du hasard , et qu'une cause quelconque
avait dû en déterminer le rapprochement. 11 se
montre si persuadé de l'existence d'étoiles tournant
l'une autour de l'autre, qu'il propose l'étude de ces
systèmes partiels comme un moyen de résoudre cer-
tains problèmes astronomiques (35).
Christian Mayer, astronome de Manheim, a le
grand mérite d'avoir, le premier, sérieusement ob-
servé les étoiles doubles (en 1778). La désignation peu
convenable de satellites et surtout l'application qu'il
avait cru devoir en faire à des étoiles qu'il rattachait
à Arcturus, quoiqu'elles en fussent éloignées de 2" 30'
et de 2° 55', l'exposèrent aux railleries de ses con-
temporains et à la critique par trop amère d'un cé-
lèbre géomètre, Nicolas Fuss. Était-il vraisemblable,
en effet, que des corps planétaires pussent être visi-
— 245 —
blés pour nous, s'ils empruntaient leur lumière à des
sources si doignées? On rejeta donc les idées systé-
matiques de Mayer : on se crut même le droit de re-
jeter aussi ses observations. 11 disait pourtant, en
propres termes, dans sa réponse aux critiques du
Père Maximilien Ilell, directeur de l'observatoire
impérial de Vienne : « ou bien les petites étoiles qui
sont placées si près des grandes sont sans lumière
propre et simplement éclairées comme des planètes;
ou bien l'étoile centrale et son satellite sont deux
soleils, brillant de leur propre éclat, qui tournent
l'un autour de l'autre. » Ce qu'il y a de capital dans
les travaux de Christian Mayer a été dignement re-
connu, longtemps après sa mort, par Struve et par
Mœdler, qui ont fait valoir ses droits à la reconnais-
sance des astronomes. Dans ses deux traités : Dé-
fense des nouvelles Observations sur les Satellites cT Ë-
toiles (en allemand, 1778), ei Dissert, de novis in
Cœlo sidereo Pliœnomenis (1779), on trouve la des-
cription de 80 étoiles doubles qu'il avait observées;
parmi ces couples, 67 ont une distance moindre
que 32". La plupart avaient été découverts par
C. Mayer, à l'aide de l'excellente lunette de 2'", G de
longueur focale, dont le quart de cercle mural de
Manheim était pourvu. « Quelques-uns sont encore
comptés, aujourd'hui, parmi les objets les plus
difficiles, que des instruments puissants peuvent
seuls faire distinguer: tels sont p et 71 d'Hercule,
la 5^ de la Lyre et w des Poissons. » A la vérité ,
Mayer observait seulement, à l'aide des instruments
- 244 -
méridiens (comme on Ta fait d'ailleurs longtemps
encore après lui), les différences d'ascension droite
ou de déclinaison ; mais quand il voulut comparer
ses résultats aux observations anciennes, pour mettre
en évidence les changements de position , il ne sut
pas toujours très-bien démêler ce qui provenait seu-
lement de certains mouvements propres (;^6).
Ces faibles mais mémorables débuts furent suivis
des travaux gigantesques de W. Herschel , compre-
nant une longue période de plus de 25 années.
Quoique son premier Catalogue d'étoiles doubles
soit postérieur de quatre ans au traité que C. Mayer
avait publié sur le même sujet , il n'en est pas moins
vrai que ses observations remontent à l'an 1779, et
même à 1776, si l'on tient compte de ses recherches
sur le trapèze de la grande nébuleuse d'Orion. Pres-
que tout ce que nous savons aujourd'hui sur les étoiles
doubles a sa racine dans les travaux de \V. Herschel.
Non-seulement Herschel a publié des Catalogues en
1782, 1783 et 1804 qui contiennent 846 couples
stellaires , presque tous découverts et mesurés par
lui (37); mais, ce qui importe bien plus que l'aug-
mentation du nombre, Herschel a exercé son génie
d'observation et sa sagacité sur tout ce qui a rapport
aux orbites, à la durée présumée des révolutions,
à l'éclat de la lumière, au contraste des couleurs, à
la classification des divers couples d'après les dis-
tances mutuelles des étoiles composantes. Doué de la
plus vive imagination , et malgré cela procédant tou-
jours avec une extrême réserve , ce ne fut qu'en
179iqu'Herschel osa exprimer ses idées sur la na-
ture des relations qui peuvent exister entre Téloile
principale et le compagnon , et établir enfin une dis-
tinction profonde entre les étoiles doubles physiques
et les étoiles doubles optiques. Neuf ans plus tard , il
développa la connexité générale de ces phénomènes,
dans le 93^ volume des P/dlosopItical Transactions,
La science était désormais en possession d'une
théorie complète de ces systèmes partiels, où nous
voyons des soleils tourner aulour de leur centre de
gravité commun. On sut alors que la force d'at-
traction qui gouverne notre système , qui s'étend du
Soleil h Neptune et même 28 fois plus loin , puisque
l'attraction solaire agit encore, à 131000 millions
de kilomètres, sur la grande comète de 1680, la
retient dans son orbite et la force à revenir, on apprit,
dis-je , que cette force règne aussi dans les autres
mondes et gouverne les systèmes stellaires les plus
éloignés. Mais quoique W. Ilerschel eût reconnu,
avec une netteté parfaite , la connexité générale de
ces phénomènes, il faut avouer que les observations
étaient encore bien incomplètes au commencement
du xix** siècle. Les angles de position qu'il avait me-
surés, joints à ceux qu'on pouvait déduire d'obser-
vations plus anciennes, ne comprenaient pas un
intervalle suffisant pour permettre de calculer, avec
certitude, la durée des révolutions et les autres élé-
ments des orbites stellaires. De tels calculs de-
vaient conduire à des erreurs; Sir John Ilerschel
lui-même rappelle les périodes de 2>2>k ans qu'on assi
— 2i6 —
gnait alors à Castor, au lieu de 520 ans (38) ; de
708 ans à y de la Vierge , au lieu de 169 , et celle de
1200 ans qu'on donnait à y du Lion (la 1424' du grand
Catalogue de Struve , magnifique étoile double , dont
les couleurs sont le jaune d'or et le vert rougeâLre).
Après William Herschel , W. Slruve, de 1813
à 184*2, et Sir John Herschel , de 1819 à 1838 , ont
mis au service de cette importante branche de
l'astronomie une activité non moins admirable et
des instruments plus parfaits, surtout pour les appa-
reils micrométriques. En 1820, Struve publia, à
Dorpat , son premier Catalogue contenant 79G étoiles
doubles. Un deuxième Catalogue parut en 1824 ; il
contenait 3112 étoiles doubles, toutes au-dessus de
la 9' grandeur et ayant moins de 32" de distance.
Les 5/6 de cette collection se composaient d'étoiles
doubles jusqu'alors inconnues; Struve les avait dé-
couvertes à l'aide de la grande lunette de Fraunhofer,
en soumettant plus de 120000 étoiles à une révision
minutieuse. Le troisième Catalogue de Struve est de
1837 ; il constitue l'œuvre capitale intitulée : Slellariim
comjwsitariim Mensiirœ micrometricœ (39). Ce livre
contient seulement 2787 étoiles doubles, attendu que
certains objets observés d'une manière incomplète
en ont été soigneusement exclus.
Ce nombre déjà si considérable a été encore
augmenté , grâce à des travaux qui feront époque
dans l'histoire astronomique de l'hémisphère austral.
Pendant un séjour de quatre ans au Cap de Bonne-
Espérance, à Feldhausen , J. Herschel a observé plus
- m —
de 2100 étoiles doubles, dont quelques-unes seule-
ment étaient déjà connues (40). Toutes ces observa-
tions africaines ont été faites à l'aide d'un télescope
de 20 pieds (6 mètres) , calculées et réduites à 1830 ,
et coordonnées de manière à faire suite à six cata-
logues antérieurs que Sir John Herschel avait déjà
publiés dans la 6^ et la 9' partie de la riche collection
des Memoirs of the R, Astronomical Society (11). Les
six catalogues européens contenaient déjà 33/|6 étoiles
doubles , dont 380 ont été observées en commun par
Sir John Herschel et Sir James South , en 1825.
La série historique de ces travaux montre comment
la science s'est élevée successivement , dans le cours
d'un demi-siècle, à la connaissance approfondie des
systèmes stellaires partiels et surtout des systèmes bi-
naires. On peut aujourd'hui, avec quelque certitude,
porter à 6000 le nombre des étoiles doubles, en tenant
compte de celles qui ont été découvertes par Bessel
avec son magnifique héliomètre de Fraunhofer; par
Argelander, à Abo, de 1827 à 1835 (42); par Encke et
Galle, à Berlin , de 1836 à 1839; par Preuss et Otto
Struve à Poulkova (depuis le grand catalogue de 1837);
par Msedler à Dorpat, et par Mitchell à Cincinnati, où il
emploie une lunette de Munich de 5"", 5 de longueur.
Parmi ces 6000 couples dont les étoiles composantes
paraissent si rapprochées, même pour l'œil muni des
plus puissants télescopes, combien y a-t-il d'étoiles
doubles purement optiques et combien de couples
où les deux étoiles , soumises aux lois d'une attrac-
tion mutuelle , circulent dans des courbes fermées et
— 2/i8 —
constituent un système véritable? C'est assurément
là une question capitale, mais il est malaisé d'y ré-
pondre aujourd'hui. En fait, le nombre des couples où
l'on peut prouver que le satellite se meut autour de
l'étoile centrale va toujours en augmentant. Des mou-
vements d'une lenteur extrême, une position défa-
vorable de l'orbile peuvent faire méconnaître long-
temps le caractère d'un couple stellaire, et le faire
ranger à lort parmi les étoiles optiquemeni doubles.
Cependant la constatation de mouvements relatifs
n'est pas le seul critérium. Si les deux étoiles d'un
même couple sont animées du même mouvement de
translation , si elles marchent ensemble dans l'espace
absolu, de même que Jupiter, Saturne, Uranus, Nep-
tune entraînent avec eux leurs cortèges de satellites,
et sont entraînés eux-mêmes, avec tout le système so-
laire, dans une même direction, alors on peut pronon-
cer sur la nature de ce couple; ses étoiles composantes
sont reliées physiquement ; elles appartiennent à un
même système. Les travaux de Bessel et d'Argelander
sur les mouvements propres des étoiles ont conduit
ainsi à reconnaître un certain nombre de véritables
systèmes stellaires. Nous devons à Mœdler la remar-
que suivante. Jusqu'en 1836, on ne connaissait, sur
2640 étoiles doubles cataloguées, que 58 couples dans
lesquels des changements de position relative avaient
été constatés, et 105 où Texistence de tels change-
ments pouvaient paraître plus ou moins vraisembla-
bles. Aujourd'hui le rapport numérique des étoiles
physiquement doubles à celles qui le sont optique-
— 2Û9 —
ment a bien changé. D'après un tableau publié en
1819 , sur 6000 couples , on en a trouvé 650 dont les
composantes ont changé manifestement de position
relative (43). Autrefois on ne connaissait qu'un couple
physique, sur 16 étoiles doubles; aujourd'hui leur
rapport est celui de 1 à 9.
Quant à la distribution des étoiles doubles , soit
dans Tespace absolu, soit même, plus simple-
ment, sur la voûte apparente des cieux , on est en-
core bien peu avancé, et il est difficile d'assigner
des nombres exacts. On sait, par exemple, dans
quelle région se trouve la majeure partie des étoiles
doubles : c'est celle des constella lions d'Andromède,
du Bouvier, de la Grande-Ourse, du Lynx et d'Orion,
pour l'héniisphère boréal. Pour le ciel austral. Sir
John lïerschel a remarqué « que dans la partie extra-
tropicale de cet hémisphère, le nombre des étoi-
les multiples est beaucoup plus faible que dans la
partie correspondante de la zone opposée. » Malgré
ce que ce résultat peut avoir d'inattendu , il n'en
mérite pas moins toute confiance, car les belles ré-
gions du ciel austral ont été explorées sous les con-
ditions atmosphériques les plus favorables , et par
un observateur des plus habiles, à l'aide d'un puis-
sant télescope de 6 mètres de longueur focale qui
séparait des couples d'étoiles de 8' grandeur, même
lorsque des distances ne dépassaient point 3/4 de
seconde (44).
Un des caractères les plus remarquables des étoiles
doubles , c'est le contraste de couleur qu'elles pré-
— 250 —
sentent dans une foule de cas. Struve a examiné ,
dans son j^rand ouvrage de 1837 (45), les couleurs
de 600 étoiles doubles, choisies parmi les plus bril-
lantes; voici les résultats de sa discussion. Dans o75
couples stellaires, les deux étoiles ont la môme cou-
leur, au même degré d'intensité. Dans 101 couples,
les étoiles sont aussi de même teinte; mais on remar-
que une différence quant à l'intensité de leurs colo-
rations respectives. Struve en a trouvé 120, c'est-à-
dire 1/5 du nombre total, où les couleurs diffèrent
complètement. Les couples où l'étoile princii)ale et le
compagnon ont môme couleur, sont donc 4 fois plus
nombreux. Les étoiles blanches forment près de la
moitié de ces 600 couples. Parmi les étoiles doubles
à deux couleurs, on rencontre souvent l'association
du jaune et du bleu, comme dans i de rÉcrevisse,ou
de l'orangé et du vert, comme dans l'étoile triple y
d'Andromède (46).
Arago a fait remarquer, en 1825 , que les étoiles
doubles bicolores présentent souvent deux couleurs
complémentaires, c'est-à-dire deux couleurs dont la
réunion forme du blanc (47). On sait, en optique,
qu'un objet faiblement éclairé paraîtra vert, par un
effet de contraste, si on le place à côté de quelque
autre objet d'un rouge éclatant; il paraîtra bleu, si
l'objet voisin brille d'une vive lumière jaune. Mais ,
en faisant cette remarque, Arago a prudemment rap-
pelé que si la teinte verte ou bleue du compagnon
pouvait s'expliquer par un effet de contraste, lors-
que l'étoile centrale est elle-même teinte de rouge
— 251 —
ou de jaune, il faudrait se garder, cependant, de
généraliser ce mode d'explication au point de nier,
par exemple , l'existence d'éloiles réellement vertes
ou bleues (48). Il cite, en effet, plusieurs couples
dans lesquels une étoile brillante et blanche a pour
compagnon une petite étoile bleue (15*27 du Lion,
1768 des Chiens de Chasse); il cite encore ^ du
Serpent, dont les composantes sont bleues toutes
deux (l\9}; il propose enfin de vérifier si les teintes
complémentaires sont réellement un effet de con-
traste, en couvrant l'étoile principale avec un fil ou
un diaphragme , lorsque la distance des deux étoiles
le permet. Ordinairement, c'est la petite étoile seule
qui est bleue ; cependant on voit le contraire dans la
23' d'Orion (G96 du Catalogue de Struve, p. lxxx),
dont l'étoile principale est bleuâtre , tandis que le
compagnon est d'un blanc parfait. Si les soleils, dont
ces systèmes multiples se composent , sont entourés
de planètes invisibles pour nous , ces planètes doi-
vent avoir leurs jours blancs, bleus, rouges et verts {^{)),
Il faut, pour plus d'un motif, se garder de géné-
raliser trop tôt en pareilles maiières. Nous avons
vu (51) que toutes les étoiles colorées ne sont pas
nécessairement des étoiles variables; de même les
étoiles doubles d'une ou de plusieurs couleurs ne
sont pas toujours des étoiles physiquement doubles.
De ce que certaines coïncidences se reproduisent sou-
vent sous nos yeux, il n'en faudrait pas toujours con-
clure que ces coïncidences sont des faits nécessaires,
surlout quand il s'agit d'étoiles périodiquement
— 252 —
variables, ou d'étoiles tournant dans des systèmes
partiels autour d'un centre de gravité commun. En
notant avec soin les couleurs des étoiles doubles jus-
qu'à la 9*" grandeur, c'est-à-dire jusqu'à la limite où
la coloration cesse d'être perceptible.^ on y a retrouvé
toutes les nuances du spectre solaire; mais ces teintes
ne se répartissent pas indifféremment entre les deux
composantes. Quand l'étoile principale n'est pas
blanche, sa couleur se rapproche, en général, de
l'extrémité rouge du spectre, c'est-à-dire de celle
des rayons les moins réfrangibles; tandis que la cou-
leur du satellite tire sur le violet, et correspond ainsi
aux rayons les plus réfrangibles. Les étoiles rougea-
tres sont deux fois plus nombreuses que les étoiles
bleues ou bleuâtres ; les blanches sont 2 1 /2 fois plus
nombreuses que las étoiles plus ou moins rouges. Il
est encore digne de remarque qu'une grande dif-
férence de coloration se rencontre d'ordinaire avec
une grande inégalité d'éclat. Deux couples que leur
vive lumière permet d'observer en plein jour, t, du
Bouvier et y du Lion, se composent, l'un de deux
étoiles blanches de 3' et de 4' grandeur, l'autre d'une
étoile principale de 2^ grandeur et d'un satellite de
3%5 grandeur. Celle-ci, y du Lion, est la plus belle
étoile double du ciel boréal , de même que a du Cen-
taure (52) et a de la Croix sont les plus belles de
l'hémisphère austral. Quant à 'C, du Bouvier, il pré-
sente, avec a du Centaure et y de la Vierge, une
assez rare particularité, à savoir, la réunion de deux
grandes étoiles d'un éclat peu différent.
Il règne encore bien des incertitudes et des désac-
cords sur la question de la variabilité d^éclat, consi-
dérée par rapport aux étoiles doubles, surtout quand
il s'agit du compagnon. J'ai déjà dit (53) que l'étoile
principale de a d'Hercule offre assez peu de régularité
dans ses variations. Struve a observé des change-
ments d'éclat dans les deux étoiles de y de la Vierge
qui sont à peu près de la même couleur jaunâtre et
du même éclat (3' gr), et dans le n** 2718 de son
grand Catalogue. Peut-être ces changements provien-
nent-ils du mouvement de rotation de ces soleils
autour de leurs axes (54). Après les changements
d'éclat, disons un mot des changements de couleur.
On a soupçonné des variations de ce genre dans y du
Lion et y du Dauphin; mais la question reste encore
indécise. On n'a pas réussi à constater que des étoiles
blanches soient devenues colorées, ou que des étoiles
colorées soient devenues blanches, comme cela paraît
avoir eu lieu pour une étoile isolée , pour Sirius (55).
S'il s'agit de simples variations de nuances , la dis-
cussion doit tenir compte de nombreuses causes
d'erreur, parmi lesquelles il faut mettre , au premier
rang , l'individualité organique de chaque observa-
teur et même les propriétés optiques de chaque ins-
trument. On sait, par exemple, que les miroirs des
télescopes ont pour effet de teindre plus ou moins
en rouge tous les rayons lumineux qu'ils réflé-
chissent.
Parmi les étoiles multiples, on trouve : des étoiles
triples, comme l de la Balance, 'q de l'Écrevisse, la
— 254 —
12*^ du Lynx, la il' de la Licorne; des étoiles qua-
druples , telles que les n"^ 102 et 2C81 du catalogue
de Struve, a d'Andromède et s de la Lyre; enfin une
étoile sextuple, 9 d'Orion , qui forme le célèbre tra-
pèze de la grande nébuleuse d'Orion. Très-probable-
ment cette étoile sextuple constitue un véritable
système, car les 5 petites étoiles de 6%o grandeur,
de 7% de 8% de 11%3 et de 12' grandeur partagent le
mouvement propre de l'étoile principale (4%7 gr.).
Toutefois on n'y a pas encore remarqué le moindre
déplacement relatif (56). Dans les étoiles triples l de la
Balance et l, de i'Écrevisse , au contraire , les mouve-
ments révolutifs de tous les satellites ont été parfai-
tement constatés. La dernière se compose de 3 étoi-
les de 3^ grandeur, d'un éclat peu différent, et le
satellite le plus voisin de l'étoile centrale paraît
avoir un mouvement 10 fois plus rapide que le plus
éloigné.
Le nombre des étoiles doubles dont les orbites
ont pu être calculées monte aujourd'hui à 4; il y
en a encore 10 ou 12 dont les éléments seront pro-
bablement bientôt connus avec un degré suffisant
d'approximation (57). Parmi ces étoiles, î; d'Hercule
a déjà accompli, sous nos yeux, deux révolutions
entières; il a offert deux fois, en 1802 et en 1831,
le curieux spectacle d'une étoile occultée par une
autre étoile (58).
C'est à Savary que l'on doit les premiers calculs
relatifs à la détermination des éléments de l'orbite
d'une étoile double; il avait choisi l de la Grande-
— 255 —
Ourse pour sujet de ses recherches. Puis vinrent
les méthodes et les calculs d'Encke et de Sir John
Herschel ; plus lard encore, les travaux de Bessel,
de Struve, de Mœdler, de Hind, de Smyth, du capitaine
Jacob et d'YvonVillarceau. Les méthodes deSavaryet
d'Encke exigent 4 observations complètes, correspon-
dant à des époques suffisamment éloignées l'une de
l'autre. Celles de Sir John Herschel et d'Yvon Yillar-
ceau sont destinées à utiliser immédiatement l'en-
semble des observations. Les plus courtes durées des
révolutions, dans les étoiles doubles, sont de 36^ 61 ,
66 et 77 ans ; elles sont donc intermédiaires entre
celle de Saturne et celle d'Uranus. La plus longue
révolution , parmi celles dont la durée a pu être dé-
terminée avec quelque apparence de succès , est de
500 ans, c'est-à-dire triple du temps de la révolution
du Neptune de Le Yerriier. L'excentricité des ellipses
stellaires est très-considérable, à en juger d'après
les faits actuellement connus. Par exemple, celle
des ellipses de y de la Yierge (0,87) et de « du Cen-
taure (0,95 ou 0,72) en font des orbites véritablement
cométaires; et même, la comète intérieure de Paye,
comète dont l'orbite, il est vrai, s'éloigne le moins
de la forme circulaire , a une excentricité (0,55) plus
faible que ces deux étoiles doubles. Les orbites des
autres étoiles sont comparativement peu excentri-
ques.
Si, dans un couple stellaire , on considère l'une
des deux étoiles, la plus brillante, par exemple,
comme étant en repos, et qu'on la prenne pour centre
— 256 —
du mouvement de la seconde étoile , on peut con-
clure des observations et des calculs actuels que la
courbe décrite par le compagnon autour de l'étoile
centrale est une ellipse, dans laquelle le rayon vec-
teur décrit des aires égales en temps égaux. C'est
ainsi qu'en multipliant les mesures d'angle de posi-
tion et de distance , on a pu s'assurer que les soleils
de ces divers systèmes obéissent aux mêmes lois de
gravitation que les planètes de notre propre monde.
Il a fallu un demi-siècle d'efforts pour asseoir enfin
ce grand résultat sur des bases solides ; mais aussi ce
demi-siècle comptera comme une grande époque
dans l'histoire des sciences qui s'élèvent jusqu'au
point de vue cosmique. Des astres auxquels une
vieille habitude a conservé le nom de fixes, quoi-
qu'ils ne soient ni fixés ^ ni même immobiles sur la
voûte céleste^ se sont mutuellement occultés sous
nos yeux. La connaissance de ces systèmes par-
tiels, où des mouvements s'accomplissent ainsi en
dehors de toute influence extérieure, ouvre à la pen-
sée un champ d'autant plus large , que déjà ces sys-
tèmes apparaissent, à leur tour, comme de simples
détails, dans le vaste ensemble des mouvements qui
animent les espaces célestes.
— 257 —
ÉLÉMENTS DES ORBITES DES ÉTOILES DOUBLES.
NOMS
ET GRANDEURS
DES ÉTOILES.
DEMI
GRAND AXE.
EÎCESTRIClfÉ.
DURÉE
de la
RÉVOLUTION.
NOMS
DES CALCDLATECBS.
l Grande-Ourse
k* et 5' gr.
3", 857
3 ,278
2 ,295
2 ,439
0,4164
0,3777
0,4037
0,4315
ans
58 ,262
60 ,720
61 ,300
61 ,576
Savary 1830
J. Ilerschel (1849)
Mœdler 1847
Y. Villarceau 1848
p d'Ophiucus
II'' et 6' gr.
4", 328
4 ,966
4 ,8
0,4300
0,4445
0,4781
73 ,862
92 ,338
92
Encke 1832
Y. Villarceau 1849
IMaedler 184'i
11, d'Hercule
3"= et 6%5 gr.
1",208
1 ,254
0,4320
0,4482
30 ,22
36 ,357
Msedler 1847
Y. Villarceau 1847
7j Couronne
5%5 et 6-= gr.
0",902
1 ,012
1 ,lli
0,2891
0,4744
0,4695
42 ,50
42 ,501
66 ,257
IMaedler 1847
Y. Villarceau 1847
Id. 2' solution.
Castor
2%7 et 3%7 gr.
8", 086
5 ,692
6 ,300
0,7582
0,2194
0,2405
252 ,66
519 ,77
632 ,27
J. Ilerschel (1849)
Mœdler 1847
Ilind 1849
Y de la Vierge
3*^ et 3" gr.
3", 580
3 ,863
3 ,446
»
0,8795
0,8806
0,8699
— 0,0016/'
-f- 0,0426^
182 ,12
169 ,44
153 ,787
— 0 ,081/'
+69 ,4 g
J. Ilerschel (1849)
Msedler 1847
Y. Villarceau 1848
/•>-! et <+l
ry>— 0,42 et <+0,15
^ de rÉcrevisse
5e et 6" gr.
0",934
0 ,892
0,3662
0,4438
58 ,59
58 ,27
Y. Villarceau 1849
Msedler (1849)
a du Centaure
1^' et 2« gr.
15 ",500
12 ,128
0,9500
0,7187
77 ,00
78 ,486
Capit. Jacob 1848
Y. Villarceau 1848
1
III.
17
— 258 —
Remarques sur le tableau 'précédent.
Les orbites des k premières étoiles doubles paraissent être
assez bien déterminées aujourd'hui. Il n'en est pas de même
des k dernières : pour celles-là , les observations actuelles ne
fournissent pas assez de données réellement distinctes pour
qu'on puisse en déduire les 7 éléments de l'orbite.
Il était impossible de ne pas rappeler, dans ce tableau,
les calculs de Savary et d'Encke sur k de la Grande Ourse et
p d'Ophiucus. Ces calculs ont , en effet , une valeur historique,
parce que ce sont les premières applications des méthodes de
calcul que ces deux astronomes éminents ont proposées. Mais
comme en 1830 et en 1832 les données de l'observation étaient
encore insuffisantes , il ne faut pas s'étonner des discordances
que l'on ne manquera pas de remarquer entre les éléments
d'Encke ou de Savary et ceux de J. Herschel, de iMaedler ou
d'Yvon Yillarceau. Les déterminations récentes relatives aux
Ix premières étoiles s'accordent beaucoup mieux, et tout fait
espérer que les éléments consignés dans ce tableau n'auront
plus à subir désormais de très- graves modifications.
Cependant tj de la Couronne présente une singulière ano-
malie. Tous les astronomes qui se sont occupés de cette étoile,
jusqu'en 18^7, lui assignaient une révolution de /i3 ans. Villar-
ceau a trouvé, en 18/i7, que le problème était susceptible de
recevoir deux solutions entièrement distinctes , dont l'une con-
clut à ^3 ans et l'autre à 66 ans de révolution. A l'époque où
ces derniers calculs furent exécutés , il n'y avait aucun motif
décisif d'adopter une de ces orbites de préférence à l'autre ;
mais les observations récentes de O. Struve paraissent décider
en faveur de la seconde solution, celle de 66 ans, dont les cal-
culateurs précédents ne s'étaient point avisés.
Comme les nombres du tableau ne donneraient pas une idée
complète de ces deux solutions, je mets ici en regard, pour
chacune d'elles, les 7 éléments fondamentaux de l'orbite :
^re .^I.,.:«„ 2» solution
1- solution. p,„^ probable.
Temps de la révolution A2«"%501 66'*"%257
Demi-grand axe 1",012 1",111
Excentricité 0" ykllik 0%^695
Inclinaison 65°39',2 58" 3',3
Longitude du nœud 10°26',6 Zi°20',7
Longitude du périhélie 237«36',1 198°57',5
( 1805,666 1780,12!^
Temps du passage au périhélie vrai. | ^^^^^^^^ ^^^^^33^
La cause de cette singulière anomalie est elle-même digne
d'intérêt. Dans les mesures d'étoiles doubles, c'est la plus belle
des deux étoiles d'un même couple que l'on prend pour centre;
on la considère comme relativement fixe, et on lui rapporte le^
positions occupées par la seconde étoile, considérée dès lors
comme un satellite. Cela posé , lorsque les deux étoiles sont à
peu près égales et de même couleur, et que les observations
sont séparées par un grand nombre d'années, comme cela eut
lieu effectivement à l'époque des grands travaux d'Herschel, on
risque de se tromper d'étoile et de prendre pour fixe celle qui
était d'abord considérée comme mobile. D'ordinaire la confu-
sion ne saurait être de longue durée ; elle n'a d'ailleurs d'autre
inconvénient que de changer de 180° les angles observés, et il est
facile de réparer l'erreur. Mais, pour ï) de la Couronne, un con-
cours fortuit de circonstances laisse subsister en entier une am-
biguïté de ce genre, dans l'interprétation des angles de position
mesurés par AV. Herschel. Malgré la plus minutieuse discussion
de toutes les circonstances propres à guider le choix du calcu-
lateur, Villarccau n'a pu qu'indiquer des probabilités en faveur
de l'orbite de 66 ans , et il a dû présenter la double solution à
laquelle les données actuelles le conduisaient, tout en fixant
à 1853 l'époque où il ne sera plus possible d'hésiter entre les
deux orbites. Je viens de dire que les dernières observations
de Poulkova décident déjà en faveur de l'orbite de 66 ans (59) .
Les discordances des éléments qui ont été assignées aux k der-
nières étoiles, par différents calculateurs, montrent assez Fin-
— 260 —
suffisance des données actuelles de l'observation. Villarceau
s'est même vu forcé de laisser subsister deux indéterminées g elf
dans l'expression des éléments de y de la Vierge , une dans
celle de t de l'Écrevisse et deux dans celles de a du Centaure
(le tableau ne contient que les indéterminées de la première).
Ici l'incertitude est d'une tout autre nature que pour tq de la
Couronne. Il ne s'agit plus d'opter entre deux orbites différentes
qui seules peuvent satisfaire aux observations, mais de choisir
parmi un nombre infini d'orbites, comprises entre des limites
données. Ainsi on sait seulement, pour y de la Vierge, que la
durée de la révolution est comprise entre 125 et 16/i ans, d'après
les indéterminées du tableau, ou , plus exactement, entre 128
et 166 ans, toutes les valeurs intermédiaires étant à peu près
également admissibles.
Les éléments de y de la Vierge, de ^ de l'Écrevisse et de a du
Centaure, calculés par Y. Villarceau, n'ont encore été publiés
nulle part; j'en dois la communication à l'obligeance de cet
excellent astronome.
NOTES.
On a supprimé le chiffre des centaines dans l'indication des
notes; celte suppression n'occasionnera point d'incertitude, attendu
qu'au numéro du renvoi est toujours joint celui de la page corres-
pondante.
NOTES.
(1) [page 2]. Cosmos, t. I, p. 58-62 et 152.
(2) [page 5]. Cosmos , t. I, p. U-Q ; t. Il, p. 9-11 et 104.
(3) [page 5], Cosmos, t. II, p. 27-33 et 48-53.
(4) [page 5]. Cosmos, 1. 1, p. 428-432 et t. II, p. 128-132.
(5) [page 6]. M. von Olfers, Ueberreste vorweltlicher Rie-
senthiere in Beziehung auf ostasiadsche Sagen , dans les Mémoires
de l'académie de Berlin, 1839, p. 51. Sur l'opinion d'Empé-
docle au sujet de la disparition des anciennes formes animales
on peut voir Hegel, Geschichte der Philosophie, t. II , p. 344.
(6) [page 6] . Voyez, sur l'Arbre du Monde (Yggdrasil) et sur
la source retentissante de Hvergelmir, Jacob Grimm , deutsche
Mythologie, 1844, p. 530 et 756 et Mallet, Monuments de la
Mythol. et de la poésie des Celtes, 1756, p. 110.
(7) [page 8]. Cosmos, t. I, p. 34-37 et 66-76.
(8) [page 9]. Cosmos, p. 574.
(9) [page 9]. En établissant d'une manière gén;5rale , dans
les considérations qui servent d'introduction au Cosmos, t. I,
p. 37, que le dernier but des sciences expérimentales est de
découvrir les lois des phénomènes, peut-être aurais-je dû me
borner à dire, afin d'éviter toute fausse interprétation , qu'il en
est ainsi en effet pour beaucoup de classes de pliénomènes. La
— 264 —
netteté avec laquelle je me suis exprimé , dans le second volume
(p. 375 et [i2Q), sur la relation que l'on peut établir entre le rôle
de Newton et celui de Kepler, prouve assez, j'espère, que je
ne confonds pas la découverte des lois naturelles avec leur inter-
prétation, c'est-à-dire avec l'explication des phénomènes, et
répondait d'avance aux objections que l'on a pu me faire. Je
disais à propos de Kepler : « Le riche fonds d'observations
précises fournies par Tycho donna les moyens de découvrir les
lois éternelles du monde planétaire qui répandirent plus tard sur
le nom de Kepler un éclat impérissable , et qui , interprétées
par Newton , démontrées par lui théoriquement et comme un ré-
sultat nécessaire, ont été transportées dans la sphère lumineuse
de la pensée, et ont fondé la connaissance rationnelle de la na-
ture. » Et au sujet de Newton :« Nous terminons en faisant voir
comment la connaissance de la forme de la Terre est sortie, par
voie de déduction, de raisonnements théoriques. Newton s'éleva
à l'explication du système du monde, parce qu'il eut le bonheur
de découvrir la force dont les lois de Kepler ne sont que les
conséquences inévitables. » On peut consulter sur ce point,
c'est-à-dire sur la différence qui existe entre la recherche des
lois et celle des causes, les excellentes remarques contenues
dans le livre de Sir John Herschel , /4ddress for the flfieenth
Meeting of the Britan, Assoc. at Cambridge^ 18/i5, p. XLII et
Edinburgh Review , t. 87, 1848, p. 180-183.
(10) [page 10]. Dans le remarquable passage (Metaph, XII,
8, p. 1074, éd. Bekker) où Aristote fait mention des restes de
la sagesse primitive qui a disparu de la terre , il est parlé claire-
ment et librement du culte des forces naturelles et de divinités
semblables aux hommes : « Beaucoup d'autres mythes , dit Aris-
tote, ont été ajoutés, pour convaincre la foule, pour servir
d'appui aux lois, et en vue d'autres buts non moins utiles. »
(11) [p^'^ge 10], Cette distinction importante des deux direc-
lions suivies par la philosophie de la nature (xporoi) est nette-
ment indiquée dans les Physicœ AuscuUationes d'Aristote (1,4,
— 265 —
p. 187, éd. Bekker). Voyez aussi Brandis, dans le Rheinisches
Muséum fur Philologie , 3* année, p. 113.
(12) [page 11]. Cosmos, t. I, p. lZi9 et Zi76, n. 87; t. II,
p. 371 et 593, n. 27. Un remarquable passage de Siniplicius
(p. ^91) oppose très-nettement la force centripète à la force
centrifuge. 11 y est fait mention de l'équilibre des corps célestes,
tant que la force centrifuge contre-balancera la pesanteur qui
attire les corps vers les régions inférieures. C'est par la même
raison que dans le Traité de Plutarque, de Facie in orbe Lunœ,
p. 923, la Lune suspendue au-dessus de la Terre est comparée à
une pierre dans une fronde. Sur le sens propre de la TTôpiycopTiai;
d'Anaxagore, voyez le recueil des fragments de ce philosophe,
publié par Schaubach, 1827, p. 107-109.
(13) [page 11]. Schaubach, ihid., p. 151-156 et 185-189. Sur
les plantes considérées comme animées aussi par l'esprit (voù;),
Voyez Aristote, de Plantis, I, 1, p. 815, éd. Bekker.
(1^) [page 12). Sur cette partie de la physique mathéma-
tique de Platon, voyez Boeckh, de Platonico syslem. cœlcslium
globorum^ 1810 et 1811; H. Martin, iiYarfes sur le Timée^ t. II,
p. 23/i-2Z(2, et Brandis, Geschichte der Griechisch-Rœmischen
Philosophie, 2® part.,sect 1, ISkU, p. 375.
(15) [page 13], Cosmos, t. II, p. 394 et 616, n. U; Comp.
Gruppe, ueber die Fragmente des Ârchylas^ 1840, p. 33.
(16) [page 13]. Aristote, Po/i7. VII, h, p. 1326; Meta-
phys. XII, 7, p. 1072, et XII, 10, p. 1074, éd. Bekker. Le
traité du Pseudo-Aristote , de Mundo , qu'Osann attribue à
Chrysippe {Cosmos, t. II, p. 14), contient aussi, au chap. 6,
p. 397, un passage éloquent sur l'ordonnateur et le conserva-
teur du monde.
(17) [page 13). Les preuves à l'appui sont rassemblées dans
H. Ritter, Histoire de la philosophie , trad. par Tissot, t. III,
p. 155-160.
~ 266 —
(18) [page 12]. Voyez Aristote, de Jnima, II, 7, p. ^19. Dans
ce passage, l'analogie de la vue avec l'ouïe est très-clairement
exprimée ; mais dans d'autres, Aristote a modifié diversement sa
théorie de la vision. Ainsi, on lit dans le Traité de Insomniis (c. 2,
p. Zt59, éd. Bekker) : « Il est évident que la vue est non-seulement
passive, mais active; qu'elle ne se borne pas à recevoir l'action
de l'air, mais qu'elle réagit sur le milieu dans lequel s'opère
la vision. » Aristote cite comme preuve que, en certaines circon-
stances, un miroir de métal très-pur garde à sa surface, dès
qu'une femme y a jeté les yeux , une trace nuageuse difficile à
effacer. Comp. Martin, Études sur le Timée de Platon, t. II,
p. 159-163.
(19) [page iU]. Aristote, de Partibus Animalium, IV, 5,
p. 681,1. 12, éd. Bekker.
(20) [page U]. Aristote , 7//5^or. Animal., IX, 1, p. 588,
éd. Bekker. Si, dans le règne animal, il manque sur la terre
quelques représentants des quatre éléments, ceux, par exemple,
qui correspondent au feu le plus pur, il n'est pas impossible
que ces degrés intermédiaires existent dans la lune. (Biese,
die Philosophie des Aristoteles , t. II, p. 186.) Il est assez sin-
gulier qu'Aristote cherche dans la Lune les anneaux de la chaîne
que nous recomposons tout entière avec les formes évanouies
des animaux ou des plantes.
(21) [page ly. Aristote, Metaphys. , XUl , 3, p. 1090, 1. 20,
éd. Bekker.
(22) [page 15]. L'àvxiTrspiffraaiç d'Aristote joue particulière-
ment un grand rôle dans toutes les explications des phénomènes
météorologiques. Voyez les Traités de Gêner atione et Interitu,
II, 3, p. 330, les lUeteorologica,!, 12, et III, 3, p 372, et les
Problemata, XIV, 3, VIII, n- 9, p. 888, et XIV, n*^ 3, p. 909,
Traités qui, s'ils ne sont pas d'Aristote, sont du moins compo-
sés d'après les principes aristotéliques. Dans l'ancienne hypo-
thèse de la polarité (xax 'àvxtTrspiaxaaiv), les conditions analogues
— 267 —
s'attirent et les conditions opposées se repoussent (-f et — ).
Voyez Ideler, MeteoroL veter. Grœcorum et Romanorum , 1832,
p. 10. Les conditions opposées, au lieu de se neutraliser en se
combinant, augmentent plutôt la tension : Le ïroïô. (tluypov) l'em-
porte sur le chaud (^zp\k6v). C'est le contraire de ce qui arrive
« dans la formation de la grêle , lorsque les nuages s'abaissent
dans des couches d'air plus chaudes, et que la chaleur du mi-
lieu ambiant accélère le refroidissement des particules déjà
froides. » Aristole explique par son àvciTTcptaxaaK;, c'est-à-dire
par une espèce de polarité de la chaleur, ce que la physique
moderne explique par la conductibilité, le rayonnement, la con-
densation et les changements produits dans la capacité des corps
pour la chaleur. Voyez les ingénieuses considérations de Taul
Erman, dans les Mémoires de l'Académie de Berlin, 1815,
p. 128,
(23) [page 15]. « C'est au mouvement de la sphère céleste
que doivent être rapportées toutes les modifications des corps
et tous les phénomènes terrestres. » Aristote, MeteoroL, I,
2, p. 339, et de Generatione et Interitu, II, 10, p. 336, éd.
Bekker.
(2U) [page 15]. Aristote, de Cϕo, I, 9, p. 279; II, 3,
p. 286, et 13, p. 292, éd. Bekker. Comp. Biese, t. I, p. 352-357.
(25) [page 16]. Aristote, Physicœ Auscultationes ^ II, 8,
p. 199; de Anima ^ III, 12, p. ^3i; de Animalium Genera-
tione y V, 1, p. 778, éd. Bekker.
(26) [page 16]. Voyez Aristote, MeteoroL, XU, 8, p. 107^,
passage dont il existe une remarquable explication dans le com-
mentaire d'Alexandre d'Aphrodisie. Les astres ne sont pas des
corps inanimés, ils doivent être considérés plutôt comme des
êtres agissants et vivants ; ils sont la partie divine des phéno-
mènes, Ta SrsioTîpa twv çavcpwv (Aristote, de Cœlo, I, 9, p. 278;
II, 1, p. 28/i, et 12, p. 292}. Dans le petit Traité deMundo faus-
sement attribué à Aristote, et où respire souvent une dispo-
^ 268 —
sition religieuse ^ particulièrement lorsque l'auteur dépeint la
toute-puissance du Dieu qui conserve le monde (c. 6, p. /^OO),
le haut éllier est appelé divin (c. 2, p 392). Ce que Kepler,
guidé par sa riche imagination , nomme , dans son Mysterium
cosmograpfiicum (c. 20, p. 71), des esprits moteurs (animœ mo-
trices) , n'est autre chose que la force (virtus) qui a son siège
principal dans le Soleil (anima muudi) , force qui varie avec la
dislance , en suivant les mêmes lois que l'intensité de la lu-
mière, et qui retient les planètes dans leurs orbites elliptiques.
Voyez Apelt, Epochen der Geschichte der 3Ien$cheit, t. I,
p. 27/i.
(27) [page 16]. Cosmos, t. II, p. 295-307.
(28) [page 17]. Voyez une ingénieuse et savante analyse des
écrits du philosophe de Nola^dans le livre de M. Christian
Barlholmèss, Jordano Bruno, t. Il, ISUl, p. 129, 149 et 201.
(29) [page 18]. Il fut brûlé à Rome en vertu de cette sen-
tence : ut quam clementissime et citra sanguinis elTusionem pu-
niretur. Bruno avait été enfermé pendant six ans sous les plombs
de Venise, et pendant deux ans dans les cachots de l'inquisition,
à Rome. Lorsque l'arrêt de mort lui fut annoncé, cet homme,
que rien ce pouvait faire fléchir, prononça ces belles et coura-
geuses paroles : Majori forsitan cum timoré sententiam in me
fertis quam ego accipiam. Après qu'il se fut enfui de l'Italie
en 1580, il professa à Genève, à Lyon, à Toulouse, à Paris,
à Oxford, à Marburg, à AVittenberg qu'il nomme l'Athènes de
l'Allemagne, à Prague, à Helmsted où il acheva l'éducation
scientifique du duc Jules de Brunswick-AYolfcnblittel, et enfin
en 1592 à Padoue. (Bartholmèss, t. I, p. 167-178).
(30) [page 18]. Bartholmèss, t. II, p. 219, 232 et 370.
Bruno rassembla soigneusement les diverses observations aux-
quelles donna lieu ce grand événement céleste d'une nouvelle
étoile apparaissant, en 1572, dans Cassiopée. On a souvent,
de nos jours, examiné le lien qui rattache la philosophie
— 269 —
naturelle de Bruno à celle de deux de ses compatriotes , Ber-
nardino Telesio et Thomas Campanella, ainsi qu'à celle d'un
cardinal platonicien, Nicolas Krebs, de Cusa (Cosmos, t. II,
p. 595).
(31) [page 19]. « Si duo lapides in aliquo loco Mundi collo-
carentur propinqui invicem , extra orbem virtutis tertii cognati
corporis; illi lapides ad similitudinem duorum Magneticorum
corporum coirent loco intermedio, quilibet accedcns ad alte-
rum tanto intervallo , quanta est alterius moles in compara-
tionc. Si Luna et Terra non retinerentur vi animali (!) aut alla
aliqua aequipollente, quœlibet in suo circuitu, Terra adscen-
deret ad Lunam quinquagesima quarta parte intervalli, Luna
descenderet ad Terram quinquaginta tribus circiter partibus
intervalli ; ibi jungerentur, posito tamen quod substantia
utriusque sit unius et ejusdem densitatis. » (Kepler, A$lronomia
nova, seu Physica cœlestis de Motibus Stellœ Marlis, 1609,
Introd. fol. 5.) Sur les idées que l'on se faisait plus ancienne-
ment de la gravitation. Voyez Cosmos , t. II, p. 371, 593
et 59/i.
(32) [page 19]. « Si terra cessaret attrahere ad se aquas
suas, aquas marinas omnes elevarentur et in corpus Lunae in-
fluèrent. Orbis virtutis tractoriae , quae est in Luna , porrigitur
usque ad terras , et prolectat aquas quacunque in verticem loci
incidit sub Zonam torridam, quippe in occursum suum quacun-
que in verticem loci incidit, insensibiliter in maribus inclusis,
sensibiliter ibi ubi sunt latissimi alvei Oceani propinqui, aquis-
que spaciosa reciprocationis libertas. » (Kepler, ibid.) « Undas
a Luna trahi ut ferrum a Magnete » (Kepler, Harmonices
Mundi libri quinque, 1619, 1. IV, c. 7, p. 162). Ce livre qui
renferme tant d'admirables choses et, entre autres, le fondement
de la troisième loi de Kepler, en vertu de laquelle les carrés
des temps de la révolution des planètes sont entre eux comme
les cubes des distances moyennes, est défiguré par les plus
étranges fantaisies sur la respiration , la nourriture et la cha-
— 270 —
leur de la Terre considérée comme un animal vivant, sur l'âme
de cet animal , sa mémoire .^memoria animas terrse), et jusque sur
son imagination créatrice (animae telluris imaginatio). Ce grand
homme tenait si fermement à ces rêveries qu'elles fournirent
matière à une contestation sérieuse de priorité avec Robert
Fludd , d'Oxford , l'auteur mytliique du /IJacrocosmos , qui paraît
n'avoir pas été étranger à l'invention du thermomètre (Har-
mojiice Mundi, p. 252). — L'attraction des masses est souvent
confondue, dans les écrits de Kepler, avec l'attraction magné-
tique : « Corpus Solis esse magneticum. Yirtutem quœ pla-
netas movet residere in corpore Solis {Stella Martis, 3* part.
c. 32 et 36) ; il suppose à chaque planète un axe magnétique
qui est toujours invariablement dirigé vers la même région
du ciel (Apelt, Joh, Kepplefs astronom. TVdtanskht , 1869,
p. 73).
(33) [page 20]. Cosmos, i. II, p. 390 et 607, n. 55.
(36) [page 20]. Baillet, la rie de M. Des-Cartes, 1691,
1'* part., p. 197, et OEuvres de Descartes, publiées par Victor
Cousin, t. I, 1826. p. 101.
(35) [page 21] . Voyez les lettres de Descartes au P. Mer-
senne, en date du 19 nov. 1633 et du 5 janv. 1636, dans la Vie
de Descartes par Baillet, T' part., p. 266-267.
(36) [page 21]. La traduction latine est intitulée : 3/wn-
dus sive disscrtatio de Lumine ut et de aliis Sensuum Objectis
primariis. Voyez R. Descartes, Opuscula posthuma physica et
malhematica , Amst., 1706.
(37) [page 22]. « Lunam aquis carere et aère : marium simi-
litudinem in luna nullam reperio. Nam regiones planas quae
monlosis multo obscuriores sunt, quasque vulgo pro maribus
haberi video et oceanorum nominibus insigniri, in bis ipsis,
longiore telescopio inspectis, cavitates exiguas inesse comperio
rotundas, umbris intus cadentibus; quod maris superficiel con-
— 271 —
venire nequit : liim ipsi campi illi latiores non prorsus œquabi-
lem superficiein preferunt, cuin diligentius eos intucmur. Quod-
circa maria esse non possunt, sed materia constare debent
minus candicante quam quœ est partibus asperioribus, in quibus
nirsus quœdam viridiori lumine cœteras praecellunt. » (Hugenii
Cosmotheoros ^ éd. ait. 1699, 1. II, p. llZi). Huyghens suppose
cependant qu'il y a dans Jupiter de nombreux orages, et qu'il
y pleut abondamment. « Ventorum flatus ex illa nubium Jovia-
lium mutabili facie cognoscitur (1. I, p. 69). » Les rêveries de
Huygbens sur les habitants des planètes lointaines, rêveries
indignes d'un aussi grand géomètre , ont malheureusement
été reproduites par Euimanuel Kant dans un ouvrage excellent
d'ailleurs : AllgemeineNaturgeschichteund Théorie des Him7nels,
1751, p. 173-192.
(38) [page 22]. Laplace, des Oscillations de l'Atmosphère, du
Flux solaire et lunaire, dans la Mécanique céleste, 1. IV, et dans
V Exposition du Système duMonde^ 1824, p. 291-296.
(39) [page 23] . Adjicere jam licet de spiritu quodem subtilis-
simo corpora crassa pervadente et in iisdem latente , cujus vi et
actionibus parliculae corporum ad minimas distantias se mutuo
attrahunt et contiguae factae cohaerent. ( Newton , Principia
Philos, naiur., éd. Le Seur et Jacquier, 1760, Schol. gen., t. III,
p. 676.) Voyez aussi du même auteur, Opticks, 1718, Prop. 31,
p. 305 et 353, 367 et 372 ; Laplace, ^i/s/ème du Monde^ p. 384;
Cosmos, t. I, p. 59 et 445.
(40) [page 24]. Hactenus phaenomena cœlorum et maris
nostri per vim gravitatis exposui, sed causam gravitatis nondum
assignavi. Oritur utique hœc vis a causa aliqua, quœ pénétrât
ad usque centra solis et planetarum , sine virtutis diminutione;
quaeque agit non pro quantitate superficierum particularum, in
quas agit ( ut soient causœ mechanicae ) , sed pro quantitate ma-
teriae soliJae. — Ralionem harum gravitatis proprietatum ex
phaenomenis nondum potui deducere et hypothèses non fingo.
— 272 —
Satis est quod gravitas rêvera existât et agat secundum leges a
nobis expositas (Newton, Principia Philos, natur. , p. 676). —
To tell us that every species of Ihings is endow'd wilh an occult
specifick quality by which it acts and produces manifest efTects,
is to tell us nothing : but to dérive two or tliree gênerai prin-
ciples, of motion from phœnomena, and afterwards to tell us
how the properties and actions of ail corporeal things foUow
from those manifest principles, would be a very great step in
Pbilosopby, thougli the causes of those principles were not yet
discovered : and therefore I scruple not to propose the princi-
ples of motion and leave their causes to be found out. (Newton,
Optickfi, p. 377). Plus haut (Prop. 31, p. 351), il avait déjà dit :
Bodies act oneupon another by the attraction of gravity, ma-
gnetism and eleclricity, and it isnot improbable that ihere may
be more attractive powers than thèse. How thèse attractions
may be performed, I do not hère consider. What I call at-
traction, may be performed by impulse or bysome othermeans
unknown to me. I use that word hère to signify only in gênerai
any force by which bodies tend towards one another, whatsoever
be the cause.
(41) [page 2/4]. « I suppose the rarer aether within bodies
and the denser withoutthem, » dit Newton (Opéra, IV, éd. Sa-
muel Horsley, 1782, p. 386). A propos de la diffraction décou-
verte par Grimaldi , on lit à la fin d'une lettre de Newton à Robert
Boyle , en date du mois de février 1678 (p. 394) : I shall set
down one conjecture more which came into my mind : it is about
the cause of gravity Des lettres écrites à Oldenburg, en dé-
cembre 1675 , prouvent qu'à cette époque Newton n'était pas
encore revenu sur l'hypothèse de l'éther; il croyait alors que
l'impulsion de la lumière matérielle mettait l'éther en vibration,
et que les vibrations de cet éther, assez semblable à un fluide
nerveux , ne pouvaient pas elles-mêmes produire la lumière.
Voyez au sujet des débats de Newton avec Hooke , Horsley,
t. IV, p. 576-380.
— 273 —
(^2) [page 1/t]. Brewster, Life of Sir Isaac Newton, p. 303-
305.
(^3) [page 2^]. Cette déclaration qu'il ne prenait pas la gra-
vitation for an essential properly ofhodies, déclaration faite par
Newton dans son Second Adverlisement , ne s accorde pas avec
l'existence des forces attractives et répulsives qu'il attribue à
toutes les molécules, afin d'expliquer, conformément à la théo-
rie de l'émission, les phénomènes de la réfraction et de la ré-
flexion des rayons lumineux ( Newton , Oplicln, 1. Il, Prop. 8,
p. 241 ; Brewster, Life ofSir Isaac Newton , p. 301). Diaprés Kant
{ Metaphysische ^nfangsgrûnde der Naturwissenschafl , 1800,
p. 28) on ne saurait comprendre l'existence de la matière,
sans ces forces attractives et répulsives. Selon lui , tous les
phénomènes physiques sont produits par le conflit de ces deux
forces fondamentales, ainsi que l'avait dit déjà Goodwin Knight
[Philos. Transacl,, 1748, p. 264). Les systèmes atomisliques,
diamétralement opposés aux théories dynamiques de Kant,
attribuent la force attractive aux molécules solides et indivi-
sibles dont tous les corps sont composés, et la force répul-
sive aux atmosphères de calorique qui entourent ces molé-
cules. Dans cette hypothèse , d'après laquelle le calorique
est considéré comme une matière en état d'expansion con-
tinuelle , on admet deux mat. ères , c'est-à-dire deux sub-
stances élémentaires, comme dans le mythe des deux éthers
(Newton , Optuks^ Prop. 28, p. 339j. Mais alors il reste à de-
mander ce qui produit l'expansion de la matière même du ca-
lorique. Si l'on veut , toujours d après les hypothèses atomis-
liques , comparer la densité des molécules avec celle des
corps qu'elles composent , on est conduit à ce résultat , que
les intervalles des molécules sont beaucoup plus grands que
leurs diamètres.
(44) [page 26]. Cosmos, t. I, p. 102-107.
(45) [page 26]. Coi^mos, t. I, p. 46 et 49-58.
lu. 18
— 27il —
[U^) [page Zi6j . Guillaume de Humboldt, Gesammette Werke,
t. I,p. 23.
(kl) [page 28] . Cosmos, t. I, p. 81 et 85.
(48) [page 29] . Cosmos, t. I, p. 51.
(Zi9) [page 30]. Halley, dans les Philos. TransacL for 1717,
t. XXX. page 736.
(50) [page 30]. Pseudo-Plutarque , de Placids Philosoph. II,
15-16; SLobée Eclog. phys. p. 582; Platon, l^imée, p. 40.
(51) [page 31]. Macrobe, Somnium Scipionis,l, 9-10. Ci-
céron , de Naiura Deorum, III , 21 , emploie l'expression de
Stellae inerrantes.
(52) [page 31]. Le passage décisif pour l'expression technique
de èvSsSsiJ-iva aaxpa est dans Aristote, de Cœlo, II, 8, p. 289 lin. 34,
p. 290 lin 19, éd. Bekker. Ces désignations différentes avaient
déjà attiré mon attention lors de mes reclierches sur l'Optique de
Ptolémée. M le professeur Franz, dont j'aime à meltre souvent
l'érudition philologique à profit, remarque que Ptolémée dit
aussi, en parlant des étoiles {Syntax. VII, 1) : wa^rsp 7rpo(T7r£.pu-
x(5t£:, comme si elles étaient adhérentes. Quant à l'expression de
acpoTpa aTrXavr'ç [orbis inerrans) , Ptolémée fait la critique suivante :
« en tant que les étoiles conservent invariablement leurs dis-
tances mutuelles , c'est à bon droit que nous les nommons
àTzloLviiç ; mais s'il s'agit de la sphère entière où elles sont at-
tachées ^ la désignation de àTîXavr^c; est impropre, puisque cette
sphère possède un mouvement particulier. »
(53) [page 31]. Cicéron, de iVa^. Deor.y 1, 13; Pline, II, 6 et
24; Manilius, II, 35.
(54) [page 33]. Cosmos, t. I, p. 93. Voyez aussi les excel-
lentes considérations de Encke, Ueber die Anordiiung des
Sternsystems y 1844, p. 7.
1
I
- 275 —
(55) [page 34]. Cosmos, t. I, p. 176.
(56) [page 3/i]. Aristote, de Cœlo, I, 7, p. 276, éd. Bekker.
(57) [page 35]. Sir John Herschel, OutUnes of Adronomy,
1849, § 803, p. 541.
(58) [page 35]. Bessel, dans le Schumacher's /o/tr^wc/i fur
1839, p. 50.
(59) [page 36]. Ehrenberg dans les Mémoires de V /académie
de Berlin, 1838, p. 59, et dans les Infusionslhieren, p. 170.
(60) [p:ige 36]. Déjà Aristote prouve, contre Leucippe et
Démocrite , qu'il ne peut exister dans le monde d'espace inoc-
cupé par la matière, de vide, en un mot [Phys. Auscult., IV,
6-10, p. 213-217, Bekker).
(61) [page 37], « Ahâ'sa est, d'après le dictionnaire sans-
crit de AVilson : the subtle and aetlierial fluid , supposed to fill
and pervade the Universe, and to be the peculiar vehicle of
life and sound. Le mot âkâ'sa (brillant, lumineux) a pour ra-
cine kits, briller, uni à la préposition à. Le règne des cinq
éléments se dit pantschafâ ou pantschatra, et la mort se trouve
désignée par cette singulière périphrase prâpta-panfschaira ,
ayant obtenu le règne des cinq, c'est-à-dire, qui s'est dissous
dans les cinq éléments L'expression se trouve dans le texte de
YAmarakocha, dictionnaire d'Amarasinha. » (Bopp). — Il est
question des cinq éléments dans l'excellent traite de Colebrooke
sur la philosophie sânkUya ( Tranmct. ofthe /Isiat. Soc, t I;
Lond., 1827, p. 31). Strabon parle aussi, d'après Mégasthène
(XV, § 59, p. 713, éd. Gasaubon), du cinquième élément des
Hindous, lequel a tout formé; mais il n'en dit pas le nom.
(62) [page 37] Empédocle, v. 216, appelle l'élher rajjLcpa-
vcjtov, radieux, c'est-à-dire, lumineux par lui-même.
(63^ [page 37]. Platon, Cratyfe, 410 B, où se trouve le mot
i£iO£>ip. ArisLot {de Cœlo, l, 3, p. 270, Bekk.) dit, contrairement
— 276 —
à l'opinion d'Anaxagore : alôépa 'jTpoffa)v(5[jLaaav tov àviOTàxti)
T^TOVj àTTO Toû 6eTv àzl tov àiotov ^p6vov Sréjjievo'. rriv Êrovu[j.(av auxû),
Ava^ayopaç Se xaTaxsyprjTai tÔ) ôvo'JLaTt xouxtj) ou xaXû);* ôvofjià^si ^^tp
aîÔÉpa àvûi Tupo*; On trouve plus de détails encore dans Aristote,!,
3, p. 339, lin 21-3A, Bekk. : « Ce que l'on nomme éther a une
signification primitive qu'Anaxagore paraît confondre avec le
feu ; car la région supérieure est remplie de feu , et Anaxagore
parle de cette région , comme s'il la prenait pour celle de l'éther
lui-même ; en cela il a raison, car les anciens ont considéré le
corps qui se meut d'un mouvement éternel comme participant
de la nature divine , et , pour cette raison , ils l'ont nommé
éther^ afin d'indiquer que cette substance n'a pas d'analogue
parmi nous Quant à ceux qui considèrent comme étant de
feu l'espace environnant, ainsi que les corps qui s'y meuvent,
et qui pensent que le reste de l'espace compris entre les as-
tres et la Terre est plein d'air, ils ne tarderaient pas à aban-
donner une idée aussi puérile , s'ils voulaient tenir un compte
exact des recherches les plus récentes des mathématiciens. »
La même étymologie, qui fait remonter à l'idée de divinité
celle de rotation perpétuelle , a été reproduite par l'aristoté-
licien ou le stoïcien , auteur du livre de Mundo (c. 2 , p. 392 ,
Bekk.). Voici, à ce sujet, une remarque fort juste du professeur
Franz : « Le jeu de mots fondé sur la ressemblance de StôTov, di-
vin, avec le Sriov du aâ)|j.a àsl Sréov, corps emporté par un mouve-
ment perpétuel^ et dont il est question dans les Meteoroiogica, est
une indication bien frappante de la prépondérance que l'imagi-
nation exerçait chez les anciens; c'est une preuve de plus de leur
peu d'aptitude à saisir nettement les véritables étymologies. »
— Le professeur Buschmann signale un mot sanscrit, âschtra,
qui signifie éther ou atmosphère , et dont la ressemblance avec
le mot grec atôr^p est très-grande ; Vans Kennedy avait déjà rap-
proché ces deux mots [Researche^ info ihe Origin and Afjïnity of
thc principal Languagesof Asia and Europe, 1828, p. 279). On
peut encore citer, pour le même mot, la racine as, asch, à la-
quelle les Hindous attachaient le sens de briller ou d'éclairer.
— 277 —
(64) [page 38]. Aristote de Cœlo, IV, 1 et 'à-k, p. 308 et
311-312, Bekk. Si le Stagirite refuse à l'éther le nom de cin-
quième élément, ce que nient, il est vrai, H. Rilter {Histoire de
la Philosophie, t. III, p. 216) et H. Martin (Etudes sur le Timée de
Platon, T. II, p. 150), sa seule raison consiste à dire que l'éther,
pris pour un état de la matière, manque de terme correspon-
dant (Biese, Philosophie des Aristoteles^ t. II, p. 66). Les
pythagoriciens considéraient l'éther comme un cinquième élé-
ment et le représentaient, dans leur système géométrique, par
le cinquième corps régulier, le dodécaèdre, composé de 12 pen-
tagones. (H. Martin, i6irf. t. II, p. 245-250).
(65) [page 38]. Voyez les preuves rassemblées par Biese,
t. II, p. 93.
(66) [page 39]. Cosmos, 1. 1, p. 173,486, n. 18.
(67) [page 39] .Voyez le beau passage sur l'influence des rayons
solaires , dans J. Herschel , Outlines of Jslron, p. 237 : « By the
vivifying action of the sun's rays vegetables are enabled to draw
support from inorganic matter and become, in their turn, the
support of animais and of man, and the sources of those ^rea^
deposits of dynamical efficiency which are laid up for human
use in our coal slrata. By them the waters of the sea are made
to circulate in vapour through the air, and irrigate the land,
producing springs and rivers. By Ihem are produced ail distur-
bances of ihe chemical equilibrium of the éléments of nature,
which, by a séries of compositions and décompositions, give
rise to new products, and originate a transfer of materials ....»
(68) [page 40]. Philos. Transact. for 1795, t. LXXXV,
p. 318; John Herschel, Outlines of Astron. , p. 238; Cosmos ,
t. I,p. 212 et 509, n. 63.
(69) [page 40]. Bessel, dans les Schumacher's Astron.
Nachr., t. XIII, 1836 , n" 300, p. 201.
(70) [page 40]. Bessel , t6jW. p. 186-192 et 229.
— 278 —
(71) [page li\]. Foiirier, Théorie analytique de la Chaleur^
1822 , p> IX {Jnvale^ de Chimie et de Phyaique^t III, 1816,
p. 350; t. IV, 1817, p. 128; t. VI, 1817, p. 259 ; t. XIÏI, 1820,
p. 418). — Poisson a tenté d'évaluer numériquement la perte
que la chaleur stellaire éprouve clans l'espace, en traversant
l'éther. [Théorie mathématique de la Chaleur, $ 196, p. 436;
§200, p. 447, et §228, p. 521).
(72) [page 41]. Sur la chaleur émise par les étoiles , voyez
Aristote, Meteor.,1,^, p. 340, lin. 58; et sur la hauteur des
couches atmosphériques qui possèdent le maximum de chaleur,
Sénèque, Natar. Quœi^t. II, 10 :«Superiora enim aeriscalorem
vicinorum siderura senliunt »
(73) [page 41]. Pseudo-Plutarque de placitis Philosoph.,
II, 13.
(74) [page 42]. Arago , sur la température du pôle et des
espaces célestes , dans V Annuaire du Bur. des Longit. pour
1825, p. 189, et pour 1834, p. 192; Saigey, Physique du Globe,
1832, p. 60-78. Kn se fondant sur des discussions relatives à la
réfraction, Svanberg trouve , pour la température de l'espace,
— 50% 3 ( Berzélius, Jahresbericht fur 1830, p. 54) ; Arago, d'a-
près des observaions faites près des pôles, — 56%7;Péclet, — 60'';
Saigey, s'appuyant sur le décroissement de la chaleur, dans l'at-
mosphère, déduit de 367 observations, faites par moi sur la chaîne
dos Andes et de Mexico, — 65"; le même, d'après des observations
Iheni ométriques faites sur le Mont-Blanc et dans l'ascension aé-
rostatique de Gay-Lussac, — 77° ; .>ir John Herschel {/ïdinburgh
Jievicw,t 87, 18^8, p. 223i, — 132" F., c'est à dire— 91°cent.
Poisson admet que la température de l'espace doit surpasser celle
des couches extrêmes de ratmosphère(§ 227, p. 520); or, comme
la température moyenne des îles IMelville, par 74° 47' de lati-
tude, est de — 18", 7, Poisson assigne à l'espace une température
de — 1 3» seulement ; taudis que Pouillet lui donne — 142% d'a-
près des recherches actinomélriques (Tomp/es rendus de UAcad,
— 279 —
des Sciences, t. VII, 1838, p. 25-65). Ces énormes discordances
sont bien de nature à faire naître des doutes sur l'efficacité des
moyens auquels on a eu recours jusqu'à présent.
(75) [page 43] . Poisson , Théorie maihém, de la Chaleur,
p. 429 et A 38. D'après lui, la solidification des couches terrestres
aurait commencé par le centre, et se serait avancée peu à peu
jusqu'à la surface. Voyez aussi Cosmos, 1. 1 , p. 199.
(76) [page 43] . Cosmos, t. I, p. 88 et 162.
(77) [page 44.]. « 'Were no atmosphère, a thcrmometer,
freely exposed (at sunset) to the heating influence of the earth's
radiation, and the cooling power of its own into space , would
indicate a médium température between that of ihe celestial
spaces ( — 132'* Fahr. = — 91^ cent.) and that of the earth's
surface below it (82' F. = 27% 7 cent, at the equator,— 3% 5 F.
= — 19° 5 cent, in the Polar Sea). Under the cqualor, then,
U would stand, on the average, at— 25° F. = — 31° 9 cent.,
and in the Polar Sea at — 68''F. = — 55° 5 cent. The pré-
sence of the atmosphère tends to prevent the thermometer so
exposed from attaining thèse extrême low températures : first,
by imparting heat by conduction ; secondly by impecling radia-
tion outwards. » Sir John Herschel dans V EdiiiburL,h Review ,
t. 87, 1848, p 223. — «Si la chaleur des espaces planétaires
n'existait point , notre atmosphère éprouverait un refroidisse-
ment dont on ne peul fixer la limite. Probablement la vie des
plantes et des animaux serait impossible à la surface du globe,
ou reléguée dans une étroite zone de cette surface. » Saigey,,
Physique du Globe, p. 11.
(78) [page 45]. Traité de la Comète de \7 43, avec une Ad-
dition sur la force de la Lumière et sa Propagation dans l'éther,
et sur la dislance des étoiles fixes, par Loys de Chéseaux (1764).
Sur la transparence des espaces , voyez Olbers dans le Bode's
Jahrhuchim 1826, p. 110-121 ; Struve, Études d'Jstron. stel-
-- 280 —
laire , 1847, p. 83-93 et note 95 ; Sir John Herschel, Outlines
ofAslron., § 798, et Cosmos, 1. 1, p. 172.
(79) [page 45], Halley, on the infinity of the Sphère of fix'd
Stars, dans les Philos, Transact., t. XXXI, for the year 1720,
p. 22.-26.
(80) [page 45] . Cosmos , t. I. p. 95.
(81) [page 46]. « Throughout by far the larger portion of
the extent of the IMilky AVay in both hémisphères, the gênerai
blackness of the ground of the heavens , on which its stars are
projected, etc In those régions where that zone is clearly
resolved into stars well separated and seen projected on a black
ground, and where we look oui beyond Ihem into space »
(Sir John Herschel , Outlines, p. 537 et 539.)
(82) [page 46]. Cosmos, t. I, p. 92 , 120 et 458, note 53 ;
Laplace, Essai philosophique sur les Probabilités, 1825, p. 133;
Arago dans Y Annuaire du Bur, des Longil. pour 1832, p. 188,
pour 1836, p. 216; John Herschel, Outlines ofAstron>, § 577.
(83) [page 46] . Le mouvement oscillatoire des effluves lumi-
neuses qui ont paru sortir de la tête de certaines comètes, de
celle de 1744, par exemple, et de celle de Halley, en 1835,
effluves qui ont été observées, du 12 au 22 octobre 1835, par
Bessel, (Astron, Nachr. n°* 300-302, p. 185-232), «peutinfluer,
dans quelques cas particuliers, sur les mouvements de transla-
tion et de rotation de certaines comètes. Ces effluves font même
présumer (p. 201 et 229; qu'il se produit alors une force polaire
différente de la force d'attraction ordinaire du Soleil. » Mais la
diminution de la période de 3 ans 1/2 de la comète d'Encke suit
une marche trop régulière, depuis 63 ans, pour pouvoir être
attribuée à l'effet accumulé d'une série d'effluves, dont l'émis-
sion ne saurait être qu'accidentelle. Cf. sur cette discussion,
importante au point de vue cosmique , Bessel, dans les Astron.
Nachr, de Schumacher, n"* 289, p. 6, et n" 310, p. 345-350,
— 281 —
îivec le traité d'Encke, sur l'hypothèse d'un milieu résistant,
ibid., n° 305, p. 265-27^.
(SU) [page 46]. Olbers, dans les ^s/row. Nachr,, n^ 268,
p. 58.
(85) [page Ul]. Outlines ofAsiron,, § 556 et 597.
(86) [page hl]. « En assimilant la matière très-rare qui rem-
plit les espaces célestes, quant à ses propriétés réfringentes,
aux gaz terrestres , la densité de cette matière ne saurait dé-
passer une certaine limite , dont les observations des étoiles
changeantes, p. ex. celles d' Algol ou de ^ de Persée, peuvent
assigner la valeur. » (Arago, dans VAnnaaire pour 1846,
p. 336-345.)
(87) [page 48]. Wollaston , dans les Philos, transact. for
1822, p. 89 ; Sir John Herschel, Outlines, § 34 et 36.
(88) [page 48]. Newton, Princ. ma^/iem., t. III, 1760, p. 671:
«Vapores, qui ex sole et stellis fixis et candis cometarum
oriuntur, incidere possunt in atmosphœrasplanetarum... »
(89) [page 48]. Cosmos, t. I, p. 138 et 152.
(90) [page 49]. Cosmos, t. II, p. 380-400, et 600-610.
(91) [page 49]. Delambre , Hisi. de rjstron. mod., t. II,
p. 255, 269 et 272. Morin dit lui même dans sa Scientia longi-
tudinum, publiée en 1634: «Applicatio tubi optici ad alhida-
dam pro stellis fixis prompte et accurate mensurandis a me
excogitata est. » Picard ne se servait point encore de lunette,
en 1657 , pour son quart de cercle ; et Hevelius , lorsque Halley
lui rendit visite, en 1679, pour juger de l'exactitude de ses
mesures de hauteur, observait à l'aide de dioptres ou de pin-
nules perfectionnées (Baily, Calai, of Stars, p. 38).
(92) [page 50]. L'infortuné Gascoigne , dont le mérite est
resté longtemps méconnu, périt, âgé de vingt -trois ans à
— 282 -^
peine , à la bataille de Marston Moor, que Cromwell livra aux
troupes royales. Voyez Derhara clans les Philos, Transact. ,
t. XXX, for 1717-1719, p. 603-610. C'est à lui qu'appar-
tient une invention que l'on a longtemps attribuée à Picard et à
Auzout, et qui a donné une puissante impulsion à l'astronomie
d'oi3servalion , c est-à dire à l'astronomie dont le but principal
est de déterminer les positions des astres.
(93) [page 50]. Cosmos, t. II, p. 210.
(94) [page 51]. Le passage où Strabon (lib. III, p. 138,
Casaub.) cherche à combattre l'opinion de Posidonius, est
ainsi conçu , d'après les manuscrits : « L'image du Soleil paraît
agrandie , sur la mer, à son lever aussi bien qu'à son coucher,
parce que les vapeurs montent en plus grande quantité de l'é-
lément humide; car l'œil qui regarde à travers les vapeurs re-
çoit j comme lorsquil n garde à travers un tuyau, des rayons
brisés qui forment une image de forme plus grande ; et la même
chose arrive, lorsqu'il aperçoit, à travers un nuage sec et mince,
le Soleil ou la Lune à leur coucher ; dans ce dt^rnier cas, l'astre
paraît aussi rougeâtre. «On a cru, encore tout récemment, que
ce passage avait été altéré (Kramer, dans son édition de Strabon
18^4^,1. 1,p. 211), et qu'au lieu de IC aùXwv, il fallait lijeoi'oâXwv,
à travers des globes de verre i Schneider, Eclog. phys.^ t. II,
p 273) . La puissance amplifiante du globe de verre rempli d'eau
(Sénèque, Natur. Quœst. 1, 6) était aussi bien connue des anciens
que les effets des verres ou des cristaux ardents (Aristophane,
Nuhes^ V. 765) et de l'éméraude de Néron (Pline , XXX vu , 5) ;
mais ces globes ne pouvaient en rien servir aux instruments as-
tronomiques ^Cf. Cosmos, t. II . p. 552 , note kk). Les hauteurs
du Soleil, mesurées à travers des nuages légers et peu épais, ou
même à travers des vapeurs volcaniques, ne présentent aucune
trace d'anomalies dans la réfraction ordinaire des rayons de
lumière (Humboldt, Recueil d'Observ. astron., t. I, p 123).
Le colonel Baeyer a trouvé que des couches de brouillard , ou
des vapeurs interposées à dessein , ne produisaient aucune
— 283 —
déviation angulaire dans la lumière des signaux hcliotropi-
queSjCe qui confirme d'ailleurs les résultais d'Arago Péters
a comparé, à Poulkova, des hauteurs d'étoiles observées soit
par un ciel serein, soit par un ciel couvert de légers nuages,
et n'a point trouvé de différence qui atteignît O'',017. {Re-
cherches sur la Parallaxe des étoiles, 18Zi8, p. 80 et l/iO-H3;
Struve, Études stellaires, p. 98). — Sur les tuyaux employés,
par les Arabes, dans leurs instruments astronomiques, voyez
Jourdain, Sur robservafoire de Meragah^ p. '11, et A. Sé-
dillot, I\Jém. sur les [a> p. 184. Voyez aussi
Arago dans Y Annuaire pour 18/i2, p. 360-374.
(8 ■ [page 62] . Ilumboldt, Relation hist. du Voyage ou^x Ré-
gions équinox., t. I, p. 92-97, et Bouguer, Traité d'Optique,
p. 360 et 365. Voyez aussi le cap. Beechey dans le Manual of
scientific Enquiry for the use of the R. JSavy, 1849, p. 71).
— 292 —
(9) [page 62]. Le passage d'Aristote, cité par Buffon, se
trouve dans un livre où on ne se serait guère avisé de le chercher,
le livre de General. Animal., V. i, p. 780, Bekker. En voici la
traduction exacte : « Voir bien , c'est d'une part , voir de loin ,
d'autre part , c'est distinguer nettement les différences des ob-
jets perçus. Ces deux facultés ne se trouvent pas toujours
réunies dans le même individu. Car celui qui met sa main au-
dessus de ses yeux , ou qui regarde à travers un tuyau , n'est
ni plus ni moins pour cela en état de démêler les différences de
couleurs, et cependant, il pourra voir des objets situés à de
plus grandes distances. De là vient aussi que les personnes placées
dans des cavernes et des citernes voient quelquefois des étoiles. »
dpuYfxaTa et surtout cppsaxa sont des citernes souterralDes ou des
espèces de silos naturels creusés par des sources. Or, en
Grèce, d'après le témoignage oculaire de M. le professeur
Franz , ces cavités communiquent avec l'air et la lumière par
un puits vertical , et ce puits s'élargit par en bas comme le
goulot d'une bouteille. Pline dit (1. II, c. 1/i) : « Altitudo
cogit minores videri stellas; affixas cœlo Solis fulgor interdiu
non cerni, quum aeque ac noctu luceant : idque manifestum
fidii defectu Solis et prœaltis puteis.» Cléomède {Cycl. Theor.,
p. 83, Bake), ne parle point d'étoiles vues en plein jour, mais
il suppose « que le soleil , vu du fond de citernes profondes ,
paraît agrandi, à cause de l'obscurité et de l'humidité de
l'air. »
(10) [page 63]. «We hâve ourselves heard it stated by a
celebrated Optician, that the earliest circumstance which drew
bis attention to astronomy, was the regular appearance, at a
certain hour, for several successive days, of a considérable
star, through the shaft of a chimney. » John Herschel, Outlines
of Astron., § 61. Les ramoneurs que j'ai interrogés à ce sujet,
se sont presque tous accordés à dire qu'ils n'avaient jamais vu
d'étoile en plein jour, mais que, pendant la nuit, ils voyaient
la voûte du ciel tout à fait proche, et que les étoiles leur pa-
— 293 —
raissaient comme agrandies. Je m'abstiens de toute apprécia-
tion sur la connexité de ces deux illusions.
(11) [page 63]. Saussure, f^oy âge dans les Alpes , Neuf-
châtel, 1779, U% t. IV, § 2007, p. 199.
(12) [page 6^. Humboldt, Essai sur la Géographie des
Plantes , p. 103; et f^oyage aux Régions équinox., t. I, p. 1^3
et 248.
(13) [page 65]. Humboldt dans la il/ona^/ic/icr Correspondent
zur Erd-und Himmels-Kunde du baron de Zach, t. I, 1800,
p. 396; et dans le Fbyageaux Régions équinox., 1. 1, page 125 :
« On croyait voir de petites fusées lancées dans l'air. Des points
lumineux, élevés de 7 à 8 degrés , paraissaient d'abord se mou-
voir dans le sens vertical ; puis leur mouvement se convertissait
en une véritable oscillation horizontale. Ces points lumineux
étaient des images de plusieurs étoiles agrandies (en appa-
rence ) par les vapeurs , et revenant au même point d'où elles
étaient parties. »
(1^ [page 66]. Le prince Adalbert de Prusse, Aus meinem
Tagebuche, 1847, p. 213. Le phénomène dont il s'agit ici, au-
rait-il quelque rapport avec les oscillations de la Polaire,
de 10" à 12" d'amplitude, que Garlini a remarquées plusieurs
fois, lorsqu'il observait les passages de la Polaire à l'aide de
la lunette méridienne à fort grossissement de l'observatoire
de Milan? Voyez Zach, Correspondance astronom. et géogr.,
t. II, 1819, p. 64. Brandes ramène cette apparence à un
effet de mirage {Gehlef s umgearb. phys. TVôrlerhuch,t.\y ,
p. 549). Un excellent observateur, le colonel Baeyer, a vu
aussi la lumière héliotropique présenter des oscillations hori-
zontales.
(15) [page 70]. Dans ces derniers temps, Uytenbrock a fait
connaître les services éminents de Constantin Huyghens et ses
talents comme constructeur d'instruments optiques , dans son
— 294 —
Oratio de frafrihvs Chri^finno afque Consfantino Hugenîo, artis
diopfricœ culioribua, 1838. Voyez aussi le savant directeur de
l'observatoire de Leyde, le professeur Kaiser, dans les Schu-
maclier's Aslron. Nachr,, n° 592, p. 2^6.
(16) [page 70J. Arago dans r^rtnwaire pour 184^, p. 381.
(17) [page 70]. «Nous avons placé ces grands verres, dit
Dominique Cassini , tantôt sur un grand mât , tantôt sur la four
de bois venue de Marly, enfin nous les avons mis dans un tuyau
monté sur un support en forme d'échelle à trois faces, ce qui
a eu (dans la découverte des satellites de Saturne le succès que
nous en avions espéré. » (Delambre , Hi>l. de lyéatron. moderne,
t. II, p. 785 ) La longUL^ur excessive de ces instruments d'oplique
rappelle les inslrumeists des Arabes, les quarts de cercle de
58 mètres de rayon : l'arc divisé recevait l'image du Soleil
dont la lumière pénétrait par un petit trou rond, à 1 instar des
gnomons. Un quart de cercle de ce genre avait été érigé à Sa-
marcande ; c'était probablement une imitation amplifiée du sex-
tant de 18'",5 de hauteur d'Al-Chokandi. Voyez Sédillot, Prolé-
gomènes des Tables d'Olough Beigh. iSUl, p. Lvii etcxxix.
(18) [page 71]. Delambre, Hist. de l'Aviron, tnod.yt II,
p. 59^. Un capucin , Schyrle van Rheita, écrivain mystique,
mais très-versé dans les matières d'optique, avaii déjà pnrlé,
dans son Oculus Enoch et Eliœ (Anlverp., 1645), de la pro-
chaine possibililé de construire des lunettes portant un grossis-
sement de 4000 fois ; il voulait s'en servir pour exécuter des
cartes très-exactes de la Lune. Voyez aussi Cosmos, t. II, p. 605,
note US,
(19) [page 71]. Edinb. Encyclopœdia, t. XX, p. 479.
(20) [page 72], Struve, Études d'A^tron. stellaire. 1847,
noie 59, p. 2^ Quoique j'aie adopté partout les mesures fran-
çaises, j'ai conservé dans le texte les désignations de 40, 20 et
7 pieds anglais pour les longueurs des télescopes d'Herschel,
~ 295 —
Non-seulement ces désignations sont plus commodes, mais en-
core elles ont reçu une espèce de consécration historique par
les grands travaux du père et du fils, en Angleterre et à Feld-
hausen, au Cap de Bonne-Espérance.
(21) [page 73]. Schumacher's^ éd. Sturz; Eusèbe,
Prœp. evang., XV, 30, col. 1688. p. 839. Il est difficile de com-
prendre comment Platon (mais non Aristote) peut attribuer un
mouvement de rotation aux étoiles, tout en les supposant fixées
à un orbe solide (Timée^ p. 40 B).
(3) [page 138]. Cosmos, t. II, p. 376 et 599.
(U) [page 1391. Cosmos, t III, p. 57 et 289.
— 331 -
(5) [page 139]. « Les principales causes de la vue indistincte
sont : aberration de sphéricité de l'œil , diffraction sur les bords
de la pupille, communication d'irritabilité à des points voisins
sur la rétine. La vue confuse est celle où le foyer ne tombe pas
exactement sur la rétine, mais tombe ou devant ou derrière fti
rétine Les queues des étoiles sont l'effet de la vision indistincte,
autant qu'elle dépend de la constitution du cristallin. D'après
un très-ancien mémoire de Hassenfratz (1809) « les queues au
nombre de /i ou 8 qu'offrent les étoiles ou une bougie vue à
25 mètres de distance , sont les caustiques du cristallin formées
par l'intersection des rayons réfractés. » Ces caustiques se meu-
vent à mesure que nous inclinons la tête. — La propriété de la
lunette de terminer l'image fait qu'elle concentre dans un petit
espace la lumière qui sans cela en aurait occupé un plus grand.
Cela est vrai pour les étoiles fixes et pour les disques des pla-
nètes. La lumière des étoiles qui n'ont pas de disques réels ,
conserve la même intensité, quel que soit le grossissement. Le
fond de l'air, duquel se détache l'étoile dans la lunette, devient
plus noir par le grossissement qui dilate les molécules de l'air
qu'embrasse le champ de la lunette. Les planètes à vrais dis-
ques deviennent elles-mêmes plus pâles par cet effet de dilata-
tion,— Quand la peinture focale est nette , quand les rayons
partis d'tm point de l'objet se sont concentrés en un seul point
dans l'image, l'oculaire donne des résultats satisfaisants. Si au
contraire les rayons émanés d'un point ne se réunissent pas au
foyer en un seul point , s'ils y forment un petit cercle , les images
de deux points conligus de l'objet empiètent nécessairement
l'une sur l'autre ; leurs rayons se confondent. Cette confusion
la lentille oculaire ne saurait la faire disparaître. L'office qu'elle
remplit exclusivement , c'est de grossir ; elle grossit tout ce qui
est dans Timage, les défauts comme le reste. Les étoiles n'ayant
pas de diamètres angulaires sensibles, ceux qu'elles conservent
toujours tiennent pour la plus grande partie au manque de
perfection des instruments ( à la courbure moins régulière
donnée aux deux faces de la lentille objective ) et à quelques
— 3â:> —
défauts et aberrations de notre œil. Plus une étoile semble pe-
tite, tout étant égal quant au diamètre de l'objectif, au gros-
sissement employé et à l'éclat de l'étoile observée , et plus la
lunette a de perfection. Or le meilleur moyen de juger si les
étoiles sont très-petites , si des points sont représentés au foyer
par de simples points , c'est évidemment de viser à des étoiles
excessivement rapprochées entre elles et de voir si dans les
étoiles doubles connues les images se confondent , si elles em-
piètent lune sur lautre , ou bien si on les aperçoit bien nette-
ment séparées. » (x\rago. Manuscrits de 183/; et de iSUl.)
(6) [page 139]. Hassenfratz , sur les rayons divergents des
étoiles, dans Delamétherie, Journal de Physique, t. LXIX, 1809,
p. Z2U.
(7) [page 139]. Horapollinis Xiloi Hieroglyphica , éd. Conr.
Leemans, 1835, c. 13, p. 20. Le savant éditeur rappelle
(p. 19Zi), en combattant l'opinion de Jomard {Descript. de CE-
gypte , t. VII , p. /i23), qu'on n'a point encore rencontré l'étoile
comme symbole du nombre 5 , ni sur les monuments , ni dans
les papyrus.
(8) [page 140]. Lorsque je naviguais sur la mer du Sud, à
bord de vaisseaux espagnols , j'ai trouvé , chez les matelots , la
croyance que, pour déterminer lâge de la Lune avant le premier
quartier, il suffisait de la regarder à travers un tissu de soie et
de compter les images multiples que l'on perçoit ainsi. — Ce
serait là un phénomène de diflTraclion réticulaire.
(9) [page l/iO]. Outline?, § 816. Arago a fait croître le faux
disque d'Aldébaran depuis 4" jusqu'à 15", en rétrécissant de
plus en plus l'ouverture de l'objectif.
(10) [page 141]. Delambre , Hist. de rJsfron. mod., t. I,
p. 193 ; Arago , Annuaire pour 1842 , p. 366.
(11) [page 141]. «Minute and very close compauions, ihe
severest tests uhich can be applied to a télescope; » OutUncs^
§837, Cf. aussi Sir John Herschel, Foyage au Cap, p. 29 et Arago
— 333 —
dans VAnmiaire pour 183/i, p. 302-305. Voici les satellites
qui peuvent servir d'épreuves pour les instruments optiques à
grossissements considérables: le l"»" et le k^ satellite d'Uranus,
revus, en 1847, par Lnssell et Otto Struve ; le 1«% le T et
le 7" satellite de Saturne ( Mimas , Encelade et Hypérion
découvert par Bond ) ; le satellite de Neptune découvert par
Lassell. Cette idée de pénétrer dans les profondeurs des cieux
a conduit Bacon , dans un passage où il adresse à Galilée d'élo-
quentes louanges, tout en lui attribuant à tort l'invention des
lunettes, à prendre, pour terme de comparaison, les vaisseaux
qui portent les navigateurs sur un Océan inconnu , « ut propiora
exercere possint cum cœlestibus commercia ; » JVorks of Francis
Bacon, 1740, t. I. Novum Organon, p. 361.
(12) [page 142]. «L'expression ôwappV.dontPtoléméese sert
dans son catalogue et qu'il applique uniformément aux 6 étoiles
qu'il cite pour leur couleur, indique un faible degré de colora-
tion intermédiaire entre le jaune et le rouge de feu. Elle signifie
exactement une nuance faible du rouge de feu. Quant aux au-
tres étoiles, Ptolémée paraît leur attribuer d'une manière géné-
rale, l'épithète de ^av6oc;, blond ardent [yilmag., YIII , 3, éd.
Halma, t. II, p. 94). D'après Gallen [Meth. med,, 12) xtppo<;
signifie une couleur rouge de feu pâle, tirant sur le jaune.
Aulu-Gelle compare ce mot à mclinus dont le sens est, suivant
Servius, identique à celui de gilvus et de fulvus. Sirius est cité
par Séuèque [Nalur. Quœst., I, 1) comme étant plus rouge
que Mars; cette étoile est d'ailleurs du nombre de celles que
l'Alaingeste nomme ÔTiûxippot. On ne saurait donc douter que ce
dernier mot n'indique la prédominance ou , du moins , une cer-
taine proportion de rayons rouges dans la lumière de cette
étoile. On a dit que Cicéron avait traduit par rutilas l'adjectif
TTotxiXo; qu'Aratus a appliqué à Sirius (v. 327); mais cette as-
sertion est erronée. Cicéron dit , v. 348 :
Namqne peîles subter riitilo cum luniine claret
Fervidus ille Canis slollainm luce refulcrens ;
— 5âà ^
maïs rûtilo eum luminc n'est point la traduction du mot ttoixiXo^;
c'est simplement une addition du traducleur. » (Extrait de let-
tres du professeur Franz\ « Si en substituant ruliluUyiWi Arago,
au terme grec d'Aratus , l'orateur romain renonce à dessein à
la fidélité, il faut supposer que lui-même avait reconnu les pro-
priétés rutilantes de la lumière de Sirius. » ( Annuaire pour
1842, p. 351).
(13) [page U2]. Cléomède. Cycl Theor., I, 11 , p. 59.
(U) [page U3]. Masdler, Jslron , 1849, p. 391.
(15) [page 143]. Sir John Herscliel dans VFdinh. Review,
t. 87, 1848, p. 189, et dans les Astron Nachr. de Schumacher,
1839, n° 372 : « It seems much more likely that in Sirius a red
colour should be the effect of a médium interfered , than that
in the short space of 2000 years so vast a body should hâve
aclually undergone such a material change in its physical con-
stitution It may be supposed the existence of some sort of
cosmical cloudness, subject to internai movements, depending
on causes of which we are ignorant. » ( Cf. Arago dans V An-
nuaire pour 1842, p. 350-353.)
(16) [page 144]. Dans les Muhamedis Alfragani chronologica
et astronomica elementa, éd. Jacobus Christmannus , 1590,
c. 22, p. 97, on trouve: «Stella ruffa in Tauro Aldebaran;
Stella ruffa in Geminis quae appellatur Najok , hoc est Capra. »
Or Alfiajoc, Aijuk sont les désignations habituelles de la Chèvre,
dans les traductions arabes de l'Almageste et même dans les
traductions latines faites sur des textes arabes. A ce sujet,
Argelander remarque avec raison que Ptolémée , dans un ou-
vrage astrologique (TsTpà^i^^^oc auvra^n;) dont le style et les plus
anciens témoignages établissent l'authenticité , a comparé les
étoiles aux planètes par rapport à la coloration , et qu'il rap-
proche ainsi la Chèvre, Aurigœ Stella, de la Mar lis ste lia, qudi
urit sicut congruit igneo ipsius colori. Cf. Ptolémée, Quadripart.
~ 335 —
construct. libri IV, Basil. 1551 , p. 383. De même Riccioli range
la Chèvre parmi les étoiles rouges, à côlé d'Antarès, d'Alde-
baraii et d'Arcturus. {Almagestum novum, éd. 1650, t. I,
pars 1, 1. 6, G. 2, p. 39/i.)
(17) [pagel/i^. Yoyez Chronologie der ^gypter i^dLYlWchiXYd
Lepsius, 1. 1, 18/i9, p. 190-195 et 213. Le calendrier égyptien,
avec l'ensemble de ses dispositions, a été établi 3285 avant
notre ère, c'est-à-dire un siècle et demi environ après l'érec-
tion de la grande pyramide de Chéops-Choufou, et 9/iO ans avant
la date ordinairement assignée au déluge i^Cf. Cosmos^ t. II,
p. Ull). On sait , par les mesures du colonel AVyse , que la
galerie souterraine très étroite qui donne accès dans l'intérieur
de la pyramide est inclinée presque exactement de 26° 15', et
que la direction de cette galerie répondait ainsi à la hauteur
que a du Dragon , l'étoile polaire du temps de Chéops, avait
alors à Gizeh, lors de sa culmination inférieure. Mais les cal-
culs relatifs à cette circonstance supposent, pour l'époque de
la construction de la pyramide , l'année 3970 avant J. C.
(Oullines of Ai^lron.^ § 319) , et non pas 3430 , comme nous
l'avions admis dans le Cosmos, d'après Lepsius. Au reste,
cette différence de 540 années s'oppose d'autant moins à ce
que a du Dragon ait pu être prise pour étoile polaire , que sa
distance au pôle, en l'année 3970, n'était encore que de >kk\
(18) [page 144]. J'extrais ce qui suit de la correspondance
amicale du professeur Lepsius (février 1850): « Le nom égyp-
tien de Sirius est Solhis^ il se trouve ainsi désigné comme un
astre femelle. De là vient le grec r^ Swô-.c, identique avec la
déesse Sote (plus souvent SU dans la langue hiéroglyphique) ,
et avec Isis-Sothis, dans le temple de Ramsès le Grand, à
Thèbes( Lepsius, Chronol. der JEgypler, t. I, p. 119 et 136).
La signification de la racine se retrouve dans la langue copte
qui offre une nombreuse famille de mots de même origine,
dont les divers membres présentent à la vérité beaucoup de
divergences , mais que l'on peut réunir cependant et coordonner
— 336 —
comme il suit. Par une triple dérivation du sens primitif de
projeter, projicere (sagittam, telum\, on trouve : 1" ensemencer,
seminare ; puis , extendere , étendre , bander , tendre une
corde ; enfin , ce qui est plus important ici , rayonner la lu-
mière et briller, comme les étoiles et le feu. On peut faire
rentrer, dans la même série d'idées, les noms des divinités :
Satis (qui lance des traits) , Sothis (qui rayonne) et Seth (qui
brûle). On peut déduire encore des hiéroglyphes : sit ou seti,
la flèche et aussi le rayon; seta, filer; setu, semences répan-
dues. Solhis désigne principalement l'astre radieux qui règle
les saisons et les périodes de temps. Le petit triangle , tou-
jours peint en jaune, qui est un signe symbolique de Sothis,
prend une signification remarquable, lorsqu'il se trouve repro-
duit plusieurs fois dans un certain ordre (sur trois lignes émer-
geant du bas du disque solaire) ; c'est alors la représentation
du soleil rayonnant. Seth est le dieu du feu, le destructeur.
11 contraste avec Satis , déesse femelle , symbole du Nil fé-
condant, qui imprègne d'une chaude humidité les semences.
Satis est la déesse des Cataractes, parce que c'est à l'époque
de l'apparition de Sothis dans le ciel, vers le solstice d'été,
que les eaux du Nil commencent à l'enfler. Vettius Valens
nomme l'étoile même Sr^ô au lieu de Sothis; toujours est-il qu'il
est impossible d'identifier, comme le fait Ideler {Handbuch der
Chronol., t. I, p 126) , Thoth avec Seth ou Sothis; il n'y a
aucune analogie entre ces noms, ni pour le fond, ni pour la
forme ( Lepsius, t I , p. 136).
Après ces origines égyptiennes, voici les étymologies tirées du
grec, du zend et du sanscrit. « Ss-p, le Soleil, dit le professeur
Franz, est un radical fort ancien qui ne difi'ère que par la pro-
nonciation de 27£p, Srépo^, la chaleur, Vètê, dans lesquels une al-
tération a eu lieu , comme dans le passage de TsTpo? à xâpc; ou
TÉpa;. Pour démontrer la justesse du rapport qui vient d'être in-
diqué entre les radicaux ml^ et ^ip, Sripoc, nous pouvons citer
non-seulement l'épithète de B^ôpstxaTo; dans Aratus, v. U9 (Ideler,
Slernnamen, p. 241) mais encore l'emploi de dérivations pos-
— 337 —
térieures du radical aslp , à savoir les formes astpôs;, a£(pio<;,
ff£ipiv6<;, chaud, hrulanU II est en effet bien signidcatif que asipivà
IjjiàTia soit aussi usité que Srspivà i[j.âTia, légers habillements d'été.
Mais la forme asip.o; devait devenir prédominante ; elle a formé
l'adjectif appliqué à tous les astres auxquels on attribuait de
l'influence sur la chaleur estivale. C'est ainsi que le poète Ar-
chiloque nomme le Soleil cretpio; àaTr^p, et qu'Ibycus désigne les
astres par la désignation générale de astpia, les brillants. Il est
impossible, par exemple, de douter qu'il s'agisse du Soleil
dans ce vers d'Archiloque : r.oXkoh^ [àv aùxoû asipio^ xaxavavsT
6^ù; èXXàjjt-Ticov D'après Hésychius et Suidas, le terme Sî(ptoç
désigne à la fois le Soleil et Sirius. Il n'en est plus de même,
suivant Tzetzès et Proclus, d'un passage d'Hésiode {Opéra et
Dies , V. 417) où le Soleil se trouve désigné , mais non l'étoile
du Chien; je partage entièrement, sur ce point, l'opinion du
récent éditeur de ïhéon de Smyrne, M. H. Martin. De l'adjectif
aîtptoç, qui s'est établi comme une sorte d'epitheton perpeiuum
pour l'étoile du Chien, vient le verbe asiptâv que l'on peut
traduire par scintiller. Aratus, v. 331, dit de Sirius : à^ia.
ffsipiàsi, i7 scintille vivement. Le mot SîipTjv, Sirène, a une étymo-
logie tout à fait différente; et vous avez eu parfaitement raison
de penser qu'il n'a pas d'autre analogie qu'une ressemblance
de son fortuite avec le nom de l'étoile du Chien. L'erreur est
du côté de ceux qui veulent, d'après Théon de Smyrne {Liber
de Astronomia, 1850, p. 202), faire dériver Ssip^jv de aeipià^siv;
ce dernier mot ne serait du reste qu'une forme invraisemblable
du verbe asipiâv. Tandis que asiptoç exprime la chaleur et la lu-
mière en mouvement, le mot Ssipvjv est dérivé d'une racine qui
se rapporte aux sons continus , au murmure produit par cer-
tains phénomènes naturels. Je crois en effet que Ssipvjv se rattache
à ÊÎ'psiv (Platon, Cratyl. 398 D. to ^àp ei'psiv Xsys'.v lo'zi) dont l'as-
piration, forte d'abord, aurait été remplacée par le sifflement
du s. » (Extrait des lettres du prof. Franz, janvier 1850).
a Le grec Ssfp, le Soleil, se déduit aisément, d'après Bopp,
du mot sanscrit svar qui , 'i la vérité, ne désigne pas le Soleil,
m. 22
— 338 ~-
mais bien le ciel, en raison de son éclat. La désignation or-
dinaire du Soleil, en sanscrit, est sùrya, forme contractée de
l'inusité svârya. Le radical svar signifie , en général, briller,
éclairer. Le nom zend du Soleil est hvare , avec un /i à la
place de Vs. Quant aux formes grecques ^ip , Srépo^ et ^ip\i.6^ ,
elles viennent du sanscrit ghanna (nom. gharmas), chaleur. »
Le savant éditeur du Rigveda , Max Muller, fait remarquer
que « le nom astronomique de l'étoile du Chien, chez les Hin-
dous, est Luhdhaka, le chasseur. Or, le voisinage d'Orion donne
à penser que, pour les peuples ariens, ces deux constellations
devaient avoir originairement mie relation mutuelle. » Au reste,
Millier fait dériver « S-(pio; du mot sira des Védas (d'où l'adjectif
sairya) et de la racine sri, aller, marcher; de la sorte, le Soleil
et Sirius auraient été nommés primitivement étoiles errantes. »
(Cf. aussi Pott, Elymologische Forschungen y 1833, p. 130).
(19) [page 1^5]. Struve, Slellarum compositarum Mensurœ
micrometricœ , 1837, p. Lxxiv et lxxxiiï.
(20) [page l/i6]. Sir John Herschel. Voyage au Cap, p. 3/i.
(21) [page ikG]. Udèùler, Astronomie, p. ^36.
(22) [page U6]. Cosmos, t. II, p. 395 et 608, n" 63.
(23) [page 146]. Arago, Annuaire pour 1842, p. 348.
(24) [page 147]. SixmQ,Stellar.comp. p. lxxxii.
(25) [page 147]. Sir John Herschel, Voyage au Cap, p. 17.
et 102 [Nehulœ and Clusters , n° 3435).
(26) [page 147]. HumhoW, P^ue des Cordillères et Monuments
des peuples indigènes de V Amérique, t. II, p. 55.
(27) [page 147]. Julii Firmici Materni Astron. libri VIII,
Basil. 1551 , lib. VI, cap. 1 , p. 150.
(28) [page 148]. Lepsius, Chronol. der^gypter, t. I, p. 143.
« Le texte hébreu cite : Asch, le géant (Orion?) , la constella-
lion aux nombreuses étoiles ( es Pléiades?) et les Chambres
— 339 —
du Sud. Les Septante traduisent : 6 itoiwv llXsiàca /aî Éa-cpov
xai ApxTO'jpov xai fx^kz.ioL votou. »
(29) [page \US]. lô.e\ei% S temnamen, p. 295.
(30) [page U8j. Martianus Capella change le Ptolemaeon en
Ptolemaeus ; ces deux noms avaient été imaginés par les flatteurs
de la cour d'Egypte. Amerigo Vespucci croyait avoir vu trois
Canopus, dont un était entièrement obscur (fosco) ; Canopus
ingens et niger, dit la traduction latine. Il s'agissait sans doute
d'un des Sacs h. Charbon (Humboldt, Examen crit. de la Géogr,
t. V, p. 227-229). Dans l'ouvrage cité ci-dessus, Elem. Chronol.
et Astron. de El-Fergani (p. 100), on lit que les pèlerins chré-
tiens avaient l'habitude de donner au Sohel des Arabes (Cano-
pus) le nom ^'étoile de Sainte Catherine , parce qu'ils étaient
joyeux de la voir et de se guider sur elle^ pour aller de Gaza au
mont Sinaï. D'après la plus ancienne épopée de l'antiquité hin-
doue, le Ramayana, les étoiles voisines du pôle austral seraient
d'une création plus récente que les étoiles du nord. Un magni-
fique épisode de ce vieux poëme en donne une raison assez
étrange. Lorsque les Hindous brahmaniques pénétrèrent dans la
presqu'île du Gange, en quittant les régions situées par 30" de
latitude nord, pour envahir, en marchant vers le sud-est, les
contrées tropicales dont ils firent la conquête , ils virent de
nouveaux astres s'élever à l'horizon, ti mesure qu'ils avançaient
vers l'île de Ceylan. De ces astres ils firent, d'après leurs an-
ciennes coutumes, des constellations nouvelles ; mais plus tard,
la tradition transforma hardiment ces constellations en une
création nouvelle de Yisvamitra « qui voulut surpasser dans son
œuvre la splendeur du ciel boréal. » (A. G. de Schlegel dans la
Zeitschrift fur die Kunde des Morgenlandes , t. T, p. 2ZiO).
Evidemment ce vieux mythe a été inspiré par la surprise que
les peuples ont dû éprouver dans leurs migrations , en voyant
des régions célestes toutes nouvelles pour eux. Mais l'aspect
des cieux ne varie pas seulement pour les voyageurs , dont un
célèbre poëte espagnol, Garcilaso de la Vega, disait : mudan
— 340 —
de pays y de estrellas, ils changent à la fols de pays et d'étoiles.
Si les traditions locales de certains peuples fixés au sol pou-
vaient remonter assez haut, nul doute qu'elles ne conservassent
quelque trace de variations d'un autre genre. Les étoiles vien-
nent à nous et s'éloignent ensuite , en vertu de la précession ;
peu à peu les constellations disparaissent, tandis qu'on voit
s'élever lentement au-dessus de l'horizon, des étoiles brillantes
auparavant invisibles, telles que celles des pieds du Centaure,
de la Croix du Sud, de l'Eridan ou du Navire. J'ai rappelé
ailleurs que, 2900 ans avant notre ère, la Croix du Sud brillait
sur l'horizon de Berlin et s'élevait alors à 7" de hauteur. Ces
29 siècles ne nous reportent pas à une époque historiquement
bien reculée, car les grandes pyramides existaient déjà 5 siècles
auparavant (Cf. Cosmos, t. I, p. 167 ; t. II, p. 35^). Mais jamais
Canopus n'a été visible à Berlin, parce que sa distance au pôle
de i'éciiptique ne dépasse pas l/i*»; il faudrait 1° de plus, pour
que cette étoile eût pu atteindre notre horizon.
(31) [page 148]. Cosmos, t. II, p. 203.
(32) [page U9]. Olbers dans le Jahrbuch fUr 1840 de Schu-
macher, p. 249 et Cosmos f t. III, p. 121.
(33) [page 150]. Struve, Études d'Aslron, slellaire, note 74 ,
p. 31.
(34) [page 150]. OutlinesofJstron., § 785.
(35,1 [page 151]. Outlines of Asiron., §795 et 796; Struve,
Éludes d'Astron. stellaire, p. 66-73 et note 75.
(36) [page 152]. Struve,p. 59. Schwinck trouve dans ses
cartes :
de 0« à 90o d'AR. 2858 étoiles,
de 90 à 180 3011
de 180 à 270 2688
de 270 l\ 360 3591
La somme est 12148 étoiles jusqu'il la T grandeur.
— 341 —
(37) [page 152] . Voyez, sur le Cercle nébuleux qui se trouve
dans la poignée de l'épée de Persée , Ëratostliène , Cataster.
c. 22, p. 51 , éd. Scliaubaclî.
(38) [page 153], John Herschel, Foyage au Cap y § 105,
p. 156.
(39) [page 153]. Outlines, § 864-869, p. 591-596; iMaedler,
ylstron. p. 764.
(40) [page 154]. Foyage au Cap, § 29, p. 19.
(41) [page 155]. « A stupendous object, a most magnificent
glohular clxxsiQX , dit Sir John Herschel, completely insulated,
upon a ground of the sky perfectly black throughout the whole
breadth of the sweep. » ( Foyage au Cap , p. 18 et 51 , PI. IH ,
fig. I; Outlines, § 895, p. 615.)
(42) [page 155]. Bond, dans les Memoirs of the American
Academy of Arts and Sciences, new séries, t. III, p. 75.
(43) [page 155]. Oti^/mes, § 874, p. 601.
(44) [page 156]. Delambre, ^ts/. de VAstron, moderne, 1. 1,
p. 697.
(45) [page 156]. C'est à Sir John Herschel que nous devons
la première description complète de la Voie lactée dans les deux
hémisphères. Voyez les §§ 316-335 de l'ouvrage que nous avons
partout nommé Foyage au Cap, et dont le véritable titre est :
Results of Astronomical Observations made during the years
1834-1838, at the Cape of Good Hope, Voyez encore l'ouvrage
plus récent de J. Herschel, Outlines of Afifronomy , § 787-799.
J'aurais pu tirer parti des observations que j'ai faites, pendant
mon long séjour dans l'hémisphère austral, sur l'éclat si inégal
des diverses régions de la Voie lactée, etc.. ; mais je n'avais à
ma disposition que des instruments d'une faiblesse optique ex-
trême en comparaison de ceux de Sir John Herschel; aussi,
pour éviter de mêler le certain à l'incertain, ai-je pris le parti
de m'en tenir exclusivement aux travaux de cet éminent astro-
nome. Cf. aussi Sirme , Études d'Astron. stellaire,^, 35-79,
Maedler, ^s/ro/i., 18^9, §213; Cosmos, 1. 1, p.ll5, 169 et 352.
(^6) [page 156]. En assimilant la Voie lactée à un fleuve cé-
leste , les Arabes furent conduits à donner à une partie de la
constellation du Sagittaire, dont l'arc se trouve dans une région
brillante de celte zone, le nom de V animal qui va s abreuver^
et cet animal était précisément l'Autruche , qui éprouve si peu
la sensation de la soif. (Ideler, Untersuch, iiber den Ursprung
und die Bedcutung der Stemnameri;]). 78, 183 et 187; Niebuhr,
Beschreihung von Jrabien, p. 112.)
(47) [page 157]. OutlineSy p. 529; Schubert, Astron. ^
3 part., p. 71.
(48) [page 157]. Struve, Études d'Astron, stellaire, p. 41.
(49) [page 158]. Cosmos^ 1. 1, p. 169 et 495, n. 9.
(50) [page 158]. « Stars standing on a clear black ground
{Foyage au Cap, p. 391). This remarkable belt (the milky way,
when examined through powerful télescopes) is found (won-
derful to relate!) to consist entirely of stars scattered by mil-
lions, like glittering dust, on the black ground of the gênerai
heavens. » {Outlines, p. 182, 537 et 539.)
(51) [page 158]. « Globular clusters , except in one région
of small extent (between 16^ 45" and 19*" in RA.), and nebulœ
of regular elliptic forms are comparatively rare in the Milky
AVay, and are found congregated in the greatest abundance in
a part of the heavens the most remote possible from that cir-
cle. » {Outlines, p. 614.) Huyghens avait remarqué, dès 1656,
combien la Voie lactée était pauvre en nébuleuses. Dans le
même passage où il signale et décrit la grande nébuleuse
d'Oriou, qu'il découvrit en 1656 à l'aide d'une lunette de
9 mètres, il dit (ainsi que je l'ai déjà fait remarquer dans le se-
cond volume du Cosmos, p. 605):Viam lacteam perspicillis
inspectam nullas habere nebulas; il ajoute que la Voie lactée
— 343 —
est, comme toutes les nébuleuses, un grand amas d'étoiles. Ce
passage se trouve dans Hugenii Opéra varia, 172/i , p. 593.
(52) [page 159], Foyage au Cap, § 105, 107 et 328. Sur
l'anneau nébuleux, n° 3686, voyez p. \\k.
(53) [page 159]. « Intervais absolutely dark and completely
void of any star of the smallest telescopic magnitude. »
{OutHnes, p. 536.)
(5i) [page 160]. « No région of the heavens is fuUer of
objects, beautiful and remarkable in themselves, and rendered
still mor so by their mode of association and by the peculiar
features assumed by the Milky Way, which are without a pa-
rallel in any other part of its course. » {Foyage au Cap ,
p. 386.) Ces expressions si vives de Sir John Herschel répon-
dent parfaitement à l'impression que j'ai moi-même éprouvée.
Le capitaine Jacob (Bombay Engineers) dépeint avec une
vérité frappante l'éclat de la Voie lactée dans le voisinage de la
Croix du Sud : « Such is the gênerai blaze of star-light near the
Cross from that part of the sky, that a persou is immediately
made aware of its having risen above the horizon, though he
should not be at the time looking at the heavens , by the in-
crease of gênerai illumination of the atmosphère, resembling
the elîect of the young moon. Voyez Piazzi Smyth, on the Orbit
of a Cent, dans les Transact. of the Royal Soc. of Edinburgh ,
t. XVI, p. Ulx5.
(55) [page 161]. Outlines^ $ 789 et 791; Foyage au Cap,
§325.
(56) [page 161]. Almageste, 1. VIII, c. 2 (t. II, p. 84 et 90,
éd. Halma). La description de Ptolémée est excellente par
endroits; elle est surtout bien supérieure à celle d'Aristote,
Meteorol, 1. I, p. 29 et Zk, éd. d'Ideler.
(57) [page 163]. Outlines , p. 531. il y a aussi une tache
sombre entre a et 7 de Cassiopée. L'o])scurité de cet espace
doit être attribuée à un effet de contraste produit par l'éclat des
régions environnantes. Cf. Struve, Éludes stellaires . n. 58.
(58) [page 163]. Morgan a donné, dans le Philos. Magazine,
sér. III, n. 32, p. 2^1 , un extrait de l'ouvrage extrêmement
rare de Thomas AYright, de Durham, Theory ofthe Univeme ,
London, 1750. Tliomas Wriglit, dont le livre a acquis tant d'in-
térêt pour les astronomes, par suite des ingénieuses spécula-
tions de Kant et de William Hersclielsurla forme de notre né-
buleuse, n'observait lui-même qu'avec un télescope de 32 cen-
timètres de foyer.
(59) [page 16^]. Pfaff, dans les sàmmtî. Schriften de W. Her-
schel, t. I (1826), p. 78-81; Struve, Études stell,]), 35-4^.
(60) [page 16/;]. Encke, dans les Astron. Nachr. de Schu-
macher, n° 622 (18/i7) p. ZUl-ZkQ.
(61) [page 164]. Outlines, p. 536. A la page suivante , on
trouve sur le même sujet : « In such cases it is equally impos-
sible not to perceive that \ve are looking through a sheet of
stars of no great thickness compared with the distance which
séparâtes them from us. »
^ (62) [page 164]. Struve, Études stell. p. 63. Quelquefois les
plus grands télescopes rencontrent, dans la Voie lactée, de ces
places où l'existence de la couche stellaire n'est plus annoncée
par d'innombrables points lumineux, mais par une nébulosité
vague, d'apparence mouchetée ou pointillée (by an uniform
dotting or stippling ofthe field of view). Voyez, dans le Foyage
au Cap , p. 390 , le paragraphe « on some indications of very
remote telescopic branches ofthe Milky Way, or of an indepen-
dent sidereal System, or Systems, bearing a resemblance to
such branches. »
(63) [page 165]. Foyage au Cap ^ $ Z\U,
m) [page 165]. Sir ^Villiaal Herschel dans les Philos,
Tramact, for 1785 , p. 21 ; Sir John Herschel, Foy. au Cap,
§293. Cf. aussi Struve, Descr. de l* Observatoire de Poulkova,
18^5, p. 267-271.
(65) page 165]. «I think, dit Sir Jolin Hersdiel, it is im-
possible to view tiiis splendid zone from a Centauri to llie Cross
witliout an impression amounting almost to conviction, tliat Ihe
milky way is not a mère stratum , but annular ; or at least that
our System is placed witliin one of llie poorer or almost vacant
parts of its gênerai mass , and that eccentrically, so as to be
much nearer to the région about the Cross than to that diame-
trically opposite to it. » (Mary Somerville , on the connexion
of the physical Sciences, 18Zi6, p. Ui9.)
(66) [page 165]. Foyage au Cap, § 315.
(67) [page 170]. De admiranda Nova Stella, anno 1572
exorla, in Tychonis Brahe Astronomiœ instauratœ Progymnas-
mata, 1603 , p. 298-304 et 578. J'ai fidèlement suivi, dans le
texte, la narration de Tycho lui-même. Je n'ai donc pas dû
faire mention d'une assertion fort peu importante en elle-même,
bien qu'on la retrouve dans beaucoup d'ouvrages astrono-
miques : Tycho aurait été averti, dit-on, de l'apparition de l'é-
toile nouvelle , par un grand concours de gens du pays.
(68) [page 170]. Dans une discussion avec Tycho, Cardan
remonta jusqu'à l'étoile des Mages, pour l'identifier avec celle
de 1572. En se fondant sur des calculs relatifs aux conjonctions
de Saturne et de Jupiter, et d'après des conjectures analogues à
celle que Kepler avait émises sur l'étoile nouvelle qui parut ,
en 1604, dans le Serpentaire , Ideler croit que V étoile des Sages
de l'Orient n'était pas une étoile isolée, mais un simple aspect,
une conjonction de deux planètes brillantes, qui se seraient
rapprochées l'une de l'autre ci une distance moindre que le dia-
mètre de la Lune. La fréquente confusion des deux mots àa-cr^p
et aa-cpov donne quelque appui à cette interprétation. Cf. Ty-
chonis Progymnasmata, p. 324-330, avec Ideler, Handbuch der
mathematisChen und (echnischen Chronologie, t. II, p. 399-407.
— 3Ù6 —
(69) [page 171]. Progymn. p. 324-330. Tycho, pour appuyer
sa théorie des étoiles nouvelles, formées aux dépens de la
nébulosité cosmique de la Foie lactée , invoque les passages
remarquables où Aristote expose ses idées sur les rapports de
la Voie lactée avec les queues des comètes (nébulosités émises
par les noyaux cométaires). Cf. Cosmos, t. I, p. 116 et 456,
n. 48.
(70) [page 174]. D'autres renseignements placent l'apparition
en 388 ou 398; voyez Jacques Câssini^ Éléments d'astronomie,
1740, (Etoiles nouvelles) p. 59.
(71) [page 181]. Arago, y^nnuatre pour 1842, p. 332.
(72) [page 182]. Kepler, de Stella nova in pede Serp., p. 3.
(73) [page 185]. Voyez, sur les étoiles qui n'ont pas disparu,
Argelander dans les Jstron. Nachr, de Schumacher, n° 624 ,
p. 371. Pour prendre aussi un exemple dans l'antiquité, il suffit
de rappeler la négligence avec laquelle Aratus a écrit son
poëme astronomique : ses oublis ont donné lieu de se demander
si Véga de la Lyre ne serait pas une étoile nouvelle , ou bien
une étoile variable à longue période. Aratus dit, en effet, que
la constellation de la Lyre ne renferme que de petites étoiles.
Il est bien étrange, cependant, qu'Hipparque n'ait point signalé
cette erreur dans son Commentaire , tandis qu'il ne manque
pas de relever une autre erreur sur l'éclat relatif des étoiles de
Cassiopée et du Serpentaire. Mais ce sont là des omissions for-
tuites qui ne prouvent rien ; car Aratus n'ayant attribué au
Cygne que des étoiles « d'un éclat moyen , » Hipparque signale
expressément cette erreur (1, 14 ) , et ajoute que la brillante du
Cygne (Deneb) est à peine inférieure à celle de la Lyre (Véga).
Ptolémée range celle-ci parmi les étoiles de 1" grandeur. Dans
les Catastérismes d'Ératosthène, Véga est nommée Xeuxov xal
Xa[j.7:p6v. Est-il possible de décider, sur le seul témoignage d'un
poëte qui n'observait pas lui-même les étoiles et qui s'est ex-
posé ainsi à plus d'une erreur, que Véga de la Lyre (la Fidicula
— 547 -
de Pline, XVIH, 25) n'était pas une étoile de 1'* grandeur, h
l'époque d'Aratus, et qu'elle n'a atteint son éclat actuel qu'entre
Aratus et Hipparque , c'est-à-dire de 272 à 127 avant notre ère?
{lU) [page 189]. Cf. Mœdler, Aslron., p. ^38, note 12, avec
Struve, Slellarum composit. Mensurœ microm., p. 97 et 98,
étoile 21^0. a Je crois, dit Argelander, qu'il est extrêmement
difficile d'estimer avec justesse l'éclat d'étoiles aussi différentes
que les deux composantes de a d'Hercule. Mes observations
sont décidément contraires à l'hypothèse de la variabilité du
satellite. En effet, a d'Hercule ne m'a jamais paru simple dans
les nombreuses observations que j'ai faites , de jour, aux cer-
cles méridiens d'Abo, d'Helsingfors et de Bonn; or cela n'au-
rait pas eu lieu si le compagnon eût été de 7^ grandeur, dans
son minimum d'éclat. Je persiste à le croire invariable et à le
ranger dans la 5*= ou la 5-6° grandeur.
(75J [page 189]. La table de Mœdler [Astron., p. Zi35) con-
tient 18 étoiles avec des éléments numériques très-différents.
Sir John Herschel compte plus de ^5 étoiles variables, y com-
pris celles qui sont indiquées dans le iQ\iQ [Outlines, § 819-826),
(76) [page 191]. Argelander dans les Astron. Nachr. de
Schumacher, t. XXVI (18A8), n'^ 62/t, p. 369.
(77) [page 193]. «En prenant, dit Argelander, pour époque
initiale celle du minimum d'éclat d' Algol en 1800, janvier 1 , à
18^ 1"' de temps moyen de Paris, j'obtiens les durées suivantes
de la période pour :
--1987 .
. 2i20n8"'59%/il6 .,
. zb0%316
— U06
58,737
ziz 0 ,09Zi
— 825
58,393
zh 0,175
-t- 751
58 ,U^k
±0,039
-t-2328
58,193
d= 0 ,096
+ 3885
57,971
±: 0 ,045
-{-^UkX
55 ,182
=t 0 ,3Zj8
— 348 —
Voici la signification des nombres de ce tableau : Si l'on prend
l'époque du minimum au 1" janvier 1800 pour zéro, celle du
minimum précédent sera — 1 , celle du minimum suivant sera
-f 1 ? etc Alors la durée de la période entre lesminima dé-
signés par —1987 et —1986 sera exactement 2J 20^ 48"' 59%/il6 ;
la durée entre -f 5^41 et +5^12 sera 2^ 20»>/i8'"55%182. La
première durée répond à l'an il SU et la seconde à l'an 18^2.
Les nombres précédés du signe zb sont les erreurs probables.
Ces nombres montrent bien que la période devient de plus en
plus courte, résultat confirmé d'ailleurs par toutes les obser-
vations que j'ai faites depuis 1847. »
(78) [page 193]. La formule par laquelle Argelander a
cherché à représenter toutes les observations des maxima de
Mira de la Baleine , est :
1751 sept. 9,76 + 331,3363 E + 10,5 sin (^rr-E + 86° 23' j
+ 18,2sin^-^ E + 231°i^2''\ + 33,9 sin (^ E+170°19'^
+ 65,3 sin (-|^ E + 6°37');
.11
dans laquelle E désigne le nombre des maxima qui ont eu lieu
depuis le 9 septembre 1751 ; dans les coefficients numériques,
l'unité est le jour moyen. D'après cette formule, le maximum
de l'année actuelle aura lieu en
1751 sept. 9,76 + 364Zi6,99 + 10,48 — 11,24 + 19,60
-(-25,92 = 1851 août 8,51.
Ce qui paraît parler le plus en faveur de cette formule, c'est
qu'elle représente aussi l'observation du maximum de 1595
( Cosmos , t. II , p. 394) ; or cette observation discorderait de
plus de 100 jours dans l'hypothèse d'une période uniforme.
Cependant la loi des variations d'éclat de cette étoile paraît
être très-comphquée , car les écarts de la formule vont encore
à près de 25 jours dans certains cas, par exemple pour le
maximum très-exactement observé de l'an 1840. »
— 349 —
(79) [page 193]. Cf. Argelander, de Stella p Lyrœ variabili,
(80) [page 195]. Une des première lentatives sérieuses qui
aient été faites , pour déterminer la durée moyenne de la pé-
riode de Mira de la Baleine, est due à Jacques Cassini, Élé-
ments d'Astronomie^ 17/tO, p. 66-69.
(81) [page 206], Newton {Philos. Nat. Principia mathem.f
éd. Le Seur et Jacquier, 1760, t. III, p. 671) ne distingue
que deux classes dans ces phénomènes sidéraux : « Stellae
fixae quae per vices apparent et evanescunt, quaeque paulatim
crescunt, videntur revolvendo partem lucidam et partem ob-
scuram per vices ostendere. » Riccioli avait déjà proposé cette
explication pour les variations d'éclat des étoiles. Quant à la
réserve que l'on doit mettre à prononcer sur la périodicité de
ces variations, voyez les importantes considérations de Sir John
Herschel, dans le Foyage au Cap, § 261.
(82) [page 207]. Delambre, Hist, de VAslron. ancienne, t. II,
p. 280 et Hisl, de VAstron, au 18® siècle, p. 119.
(83) [page 208]. Sir John Herschel, Foyage au Cap, § 71 -78,
et Outlines of Astron., § 830. Cf. Cosmos^ t. I, p. \1U et k^^).
(84) [page 209]. Lettre manuscrite du lieutenant Gilliss,
astronome de 1 Observatoire de Washington, au docteur Flligel,
consul des États-Unis de l'Amérique du Nord à Leipzig. A San-
tiago de Chili , le ciel reste pendant 8 mois si pur, et l'atmo-
sphère si transparente, que le lieutenant Gilliss distinguait par-
faitement la 6^ étoile du trapèze d'Orion avec une lunette
de O'^jHd d'ouverture, construite par Henry Fitz, de New-Tork,
et William Young, de Philadelphie.
(85) [page 210]. Sir John Herschel, Foyageau Cap, p. 334,
350, note 1, et UUO. (Sur les anciennes observations delà
Chèvre et de Véga, cf. William Herschel dans les Philos.
Transact., 1797, p. 307; 1799, p. 121, et dans le Jahrhuch
— S50 —
de Bode pour 1810 , p. 1^8.) Au contraire Argelander met en
doute la variabilité de la Chèvre et des étoiles de la Grande
Ourse.
(86) [page 211]. ^oyageau Cap ^ $ 259, n'' 2^0.
(87) [page 21 IJ. Heis, dans ses notices mo.nuscrites de mai
1850. Cf. aussi le Foyage au Cap , p. 325, et P. de Bogus-
lawski , Uranus fur 18/i8, p. 186. La variabilité supposée de n ,
a et 0 de la Grande-Ourse est aussi confirmée dans les Oullines^
p. 559. Sur les étoiles qui indiqueront successivement le pôle
nord, jusqu'à Véga de la Lyre , la plus belle de toutes , laquelle
prendra, dans 12000 ans, la place de 1 étoile polaire actuelle ,
cf. Maedler, Asiron., p. /i32.
(88) [page 211]. Cosmos, i III, p.
(89) [page 212]. AVilliam Herschel, on tlie Changes that hap-
pen to the Fixed Stars, dans les Phil. TratisGct. for 1796, p. 186.
Voyez aussi Sir John Herschel, Foyage au Cap, p. 350-352,
et l'excellent écrit de Mary Somerville : Connexion of the
Physical Sciences , 1846, p. UOl.
(90) [page 215]. Encke, Belrachlungen iïber die Anordnung
des S ter nsy stems y \^kU, p. 12 {Cosmos, t. III, p 30) ; Mœdler,
Astron.. p. kh5 ; Faye, Comptes rendus t. XXVI, p. 76.
(91) [page 217]. Halley dans les Philos. Transact. for 1717-
1719, t. XXX, p. 736. Ses considérations ne portaient du reste
que sur les variations en latitude ; ce fut Jacques Cassini qui
s'occupa, le premier, des variations en longitude (Arago, dans
y Annuaire pour 1842, p. 387),
(92) [page 217]. Delambre, Ilist. de V Astron. moderne, t. II,
p. 658 et Hist. de V Astron. au 18^ siècle, p. 448.
(93) [page 218]. Philos. Transact., t. LXXIII, p. 138.
(94) [page 219]. Bessel, dans le Jahrbuch de Schumacher
pour 1839, p. 38; Arago, Annuaire pour 1842, p. 389.
— 351 —
(95) [page 219J. Sur a du Centaure , cf. Henderson et Mac-
lear clans les Memoirs oflhe Adron. Soc. t. XI, p. 61, et Piazzi
Smytlî dans les Edinb. yYansacl.,i.Wl^ p. 4^7. Le mouve-
ment propre d'Arcturus est de 2",25, suivant Baily [Memoirs of
the Astron. Soc. t. V, p. 165) ; il est considérable par rapport aux
mouvements propres d'autres étoiles très-brillantes ; car celui
d'Aldébaran n'est que de 0'V185 (Maedler, Centr abonne, p. 11),
et celui de Véga de 0'',400. Parmi les étoiles de première gran-
deur, a du Centaure fait une très-remarquable exception ; son
mouvement propre, 3",58, surpasse beaucoup celui d'Arcturus
Le mouvement propre de l'étoile double du Cygne est de S'^/lâS
par an, d'après Bessel {Schum. Astron. Nadir., t. XYI, p. 6).
(96) [page 219]. Astron. Nachr. de Schumacher, n" 455.
(97) [page 219]. Même ouv., n° 618,p. 276. D'Arrest a basé
son calcul sur la comparaison des observations de La Caille
(1750) avec celles de Brlsbane (1825) et de Taylor (1835). L'é-
toile 2151 de la Poupe du Navire a un mouvement propre
de 7",87l; elle est de 6^ grandeur. (Maclear dans ô^laedler,
Untersuch. ûberdie Fixstern- Système , t. II, p. 5.)
(98) [page 219]. Astron. Nachr., n°661, page 201.
(99) [page 220]. Même ouv., n«* 514-516.
(100) [page 221]. Struve, Études d' Astron. stellaire , texte ,
p. 47., notes, p. 26 et 51-57; Sir John Herschel, Outlines ,
§ 859 et 860.
(1) [page 221]. Origène, dans le Thésaurus ûe Gronovius,
t. X, p. 271.
(2) [page 222]. Laplace , Expos, du Syst. du Monde, 1824,
p. 395. Dans ses Lettres cosmologiques , Lambert montre beau-
coup de penchant pour l'hypothèse des corps obscurs.
(3) [page 222]. Maedler, Unters. ilber die Fixs(ern-3ysteme ,
t. II (1848), p. â, et Astron., p. 416.
— 352 —
(4) [page 223]. Cf. Cosmos, t. III, p. 93 ; Laplace, dans les
Allgem, geogr. Ephem, de Zach,t. IV, p. 1; Maedler, Aslron.y
p. 393.
(5) [page 22/^. Opère di Galileo Galilei, t. XII, Milano, 1811,
p. 206. Ce passage remarquable , qui indique la possibilité et
même le projet d'une mesure, a été signalé par Arago , An-
nuaire pour 1842, p. 382.
(6) [page 225]. Bessel, dans le Jahrbuch fur 1839 de Schu-
macher, p. 5 et 11.
(7) [page 226]. Struve, Aslron.stell., p. 104.
(8) [page 227]. Arago, dans la Connaissance des temps pour
1834, p. 281 : « Nous observâmes avec beaucoup de soin,
M. iMathieu et moi, pendant le mois d'août 1812 et pendant
le mois de novembre suivant, la hauteur angulaire de l'étoile
au-dessus de l'horizon de Paris. Cette hauteur, à la seconde
époque, ne surpasse la hauteur angulaire à la première que
de 0",66. Une parallaxe absolue d'une seule seconde aurait né-
cessairement amené entre ces deux hauteurs une différence
de r',2. Nos observations n'indiquent donc pas que le rayon de
l'orbite terrestre, que 39 millions de lieues soient vus de la 61*
du Cygne sous un angle de plus û'une demi-seconde. Mais une
base vue perpendiculairement soutend un angle d'une demir
seconde, quand on en est éloigné de 412 mille fois sa longueur.
Donc la 61*= du Cygne est au moins à une distance de la Terre
égale à 412 mille fois 39 millions de lieues. »
(9). [page 227]. Bessel publia d'abord, dans le Jahrbuch. de
Schumacher, p. 39-49, et dans les Astron. Nachr., n. 366, le
nombre 0",3136 à titre de première approximation. Son résul-
tat définitif est 0",3483 [Astron. Nachr., n. 402, t. XVII,
p. 274). Péters trouva, par ses propres observations, un nombre
presque identique, 0',3490 (Struve, Astron. stell.^ p. 99).
Quant îi la modification que Péters a fait subir au nombre de
Bessel, elle provient de ce que Bessel avait promis^ avant sa
— 353 -
mort [Astron. Nachr.,t. XVII, p. 267), de soumettre à un
nouvel examen l'influence de la température sur les mesures
héliométriques. Il avait même réalisé en partie cette promesse
dans le l^*" volume de ses Astronomische Untersuchungen, mais
sans faire d'application à ses observations de parallaxe. Cette
application a été faite par Péters {Ergànzungsheft zu den
Astron. Nachr., \SU9 , p. 56), et cet astronome distingué a
trouvé ainsi 0",37Zi^ au lieu de 0",3483.
(10) [page 227]. Cette parallaxe de 0"^37/iZi donne, pour la
distance de la 61® du Cygne, 550900 fois la distance de la
Terre au Soleil, ou 8455000 millions de myriamètres. La lu-
mière emploie 3177 jours moyens pour parcourir cette distance.
Les trois valeurs qui ont été successivement attribuées à cette
parallaxe ont rapproché de nous (en apparence, bien entendu)
la célèbre étoile double du Cygne, dans le rapport des nombres
10, 9 i|^ et 8 7/10, qui expriment, en années, le temps dont la
lumière a besoin pour franchir l'espace qui nous en sépare.
(11) [page 227]. Sir John Herschel, Outlines, -p. 5li5 et 551.
Mœdler [Aslron., p. k25) donne 0",9213, et non 0",9128, pour
la parallaxe de a du Centaure.
(12) [page 228]. Struve, Stell. compos. Mensurœ microm.,
p. CLxix-CLxxii. Airy attribue à a de la Lyre une parallaxe in-
férieure à 0",1, ou plutôt il admet que cette parallaxe est trop
faible pour pouvoir être déterminée avec les instruments dont
il disposait à l'époque de ses observations {Mem. of the Royal
Astron, Soc, t. X, p. 270.)
(13) [page 228]. Struve , sur les mesures micrométriques qui
ont été faites à l'aide de la grande lunette de l'Observatoire de
Dorpat (oct. 1839), dans les Astron, Nachr, de Schumacher^
n. 396, p. 178.
(\ti) [page 228]. Péters, dans Struve, Astron. stell., p. 100.
(15) [page 229]. Péters, dans Struve, Astr. stell. , p. 101 ;
III. 23
— 354 —
\VîchmaDn, W. Struve, Otto Struve et Faye dans les Comptes
rendus, t. XXVI, p. 64, 69, et t. XXX, p. 68 et 78.
Les parallaxes rapportées dans le texte donnent le moyen de
transformer les mouvements propres (angulaires) des étoiles en
mouvements linéaires et d'évaluer ainsi leurs vitesses en myria-
mètres ou en lieues (de 4000'"). On verra, par le tableau suivant,
avec quelle rapidité se meuvent la plupart de ces prétendues
fixes j il est curieux que ce soit parmi elles qu'il faille chercher
les exemples des plus grandes vitesses dont la matière ait paru
animée jusqu'ici.
ÉTOILES.
PARALLAXES.
MODVEMENTâ
fcSPACEs Parcourus
*—-'■'•— - ■
propres.
par seconde.
a du Centaure.
0",913
3", 580
5 lieues.
61* du Cygne.
0 ,3744
5 ,123
16
Sirius.
0 ,230
1 ,234
6
1830 Groombridge.
0 ,226
6 ,974
37
»
0 ,1825
»
46
>
0 .034
»
249
t de la Grande- Ourse.
0 ,133
0 ,746
7
Arcturus.
0 ,127
2 ,250
22
a de la Lyre.
0 ,207
0 ,364
2
La Polaire.
0 ,106
0 ,035
1/2
La Chèvre.
0 ,046
0 ,461
12
Il resterait à défalquer, des nombres contenus dans les deux
dernières colonnes, l'effet produit par la translation de notre
propre système. Cette réduction est devenue possible depuis
que les travaux combinés d'Argelander, de O. Struve et de
Péters nous ont appris, d'une part, la direction dans laquelle
se meut notre Soleil, de l'autre, sa vitesse absolue dans l'es-
pace. D'après 0. Struve, un observateur, placé à la distance
moyenne des étoiles de 2' grandeur, verrait le Soleil se mou-
voir avec une vitesse angulaire annuelle de 0",3.'i9!2. D'après
— S55 —
Pèters, à cette distance correspond une parallaxe de 0",209.
Ainsi la vitesse absolue du Soleil et de tout son cortège de pla-
nètes serait de ^ lîéues par seconde. ÎMais on n*â point tenii
compte de ce résultat dans le tableau précédent et, par suite,
les nombres de lieues indiqués mesurent seulement les dépla-
cements relatifs du Soleil et de ciiaque étoile pendant 1\ Il est
bon d'ajouter aussi que ces nombres n'expriment que les pro-
jections. peut-être fort accourcies, des vitesses stellaires sur les
plans perpendiculaires aux rayons visuels, car rien ne nous
indique la direction absolue de ces mouvements dans l'espace.
Les vitesses réelles peuvent donc être encore plus grandes que
celles du tableau.
(16) [page 230]. Cf. sur le rapport entre les mouvements
propres et la distance, pour les étoiles les plus brillantes, Struve,
Stell. comp. Mens, microm, , p. CLXiv.
(17) [page 232]. Savary dans la Connaissance des temps pour
1830, p. 56-69 et p, 163-171. Cette brillante conception de
Savary a été discutée par Struve au point de vue pratique
{Mensurœ microm. p. CLxiv). D'après Struve, les étoiles doul)les
actuellement connues ne se prêtent point à une application
avantageuse de , cette méthode. Si les parallaxes ne sont pas
inférieures à 0",1, il vaut mieux en tenter la détermination
directe que de recourir à l'inégalité signalée par Savary.
Toutefois cette inégalité pourrait devenir sensible, avec le
temps, dans les étoiles à longues périodes , et permettre alors
d'obtenir des parallaxes qui auraient échappé aux mesures
directes. De plus, pour que l'idée de Savary reste parfaite-
ment juste au point de vue théorique, il faut y introduire
cette condition que la masse du satellite puisse être considérée
comme nulle , vis-à-vis de la masse de Tétoile centrale. Si les
masses étaient égales, les durées des demi-révolutions, dont il
est parlé dans le texte, le seraient aussi; l'effet d'aberration
dont il s'agit de déduire la parallaxe s'évanouirait. (]ette re-
marque est due
(Cf. Cosmos, t. III, p. 300).
(36) [page 244]. Struve, dans le Recueil des Actes de la
Séance publique de VAcad. Imp, des Sciences de St-Pélershourq,
le 29 déc. 1832, p. 48-50 ; Maedler, Jstron,, p. 478
(37) [page 244]. Philos. Transact. for the year 1782,
— 360 —
p. 60-126, for 1783, p. 112-124, for 180/t, p. 87. Cf. iMaedler,
dans le Schiimachefs Jahrbuch fur 1839, p. 59, et les Vn-
ters. uber die Fix stem- Système^ 1'"'' part., 1847, p. 7.
(38) [page 246]. Mœdler, même ouvr., 1'" part., p. 255. On
a , pour Castor , deux anciennes observations de Bradiey ,
datant de 1719 et de 1759, la première faite en commun avec
Pound, la deuxième avec Maskelyne, et deux observations de
W. Herschel , de 1779 et 1803.
(39) [page 246]. Struve, Mensurœ 7nicrom.,-p. XL et p. 234-
248. Il y a en tout 2641 -|- 146 = 2787 couples observés
(Mgedler, ^S'c/mm. Jahrb., 1839, p. 64).
(40) [page 247] . Sir John Herschel , Foyage au Cap, c'est-
à-dire Aslron. ohserv. ai the Cape of Good Hope, p. 165-303.
(41) [page 247]. Même ouvr., p. 167 et 242.
(42) [page 247] . Argelander, dans son travail sur les mou-
vements propres des étoiles. Cf. son écrit : DLX stellarum fixa-
rum positiones mediœ ineunte anno 1830, ex ohserv. Ahoœ
habitîs (Helsingforsiœ 1825). Maedler évalue à 600 le nombre
des étoiles multiples qui ont été découvertes à Poulkova de-
puis 1837 (Astron., p. 625).
(43) [page 249] . Il est permis de supposer que toutes les
étoiles ont un mouvement propre ; mais le nombre de celles dont
le mouvement a pu être constaté dépasse à peine le nombre des
étoiles doubles dans lesquelles on a reconnu un déplacement
relatif des composantes. (Maedler, Astron., p. 394, 490 et 520-
540) . Struve a discuté ces relations numériques dans les Mens,
microm., p. xciv, en traitant séparément les couples où la
distance est de 0" à 1", de 2" à 8", et de 16" à 32". Il est bon de
rappeler ici que si les distances inférieures à 0",8 ont été simple-
ment estimées, des recherches instituées à l'aide d'étoiles dou-
bles artificielles ont donné l'assurance que ces évaluations sont
— 861 —
sûres à 0", 1 près. Struve, ûber Doppelsterne nach Dorpatcr
Beobacht,,^, 29.
(UU) [page 2^9]. John Herschel, Foyageau Cap, p. 166.
{U5) [page 250]. Struve, 3Iens. microm., p. lxxvii-lxxxiv.
(46) [page 250]. John Herschel, OutlinesofJslron.,]). 579.
{kl) [page 250], Pour regarder le Soleil à travers une lunette,
on emploie des verres obscurcissant , teints de deux couleurs
foncées, mais complémentaires; on obtient ainsi des images
blanches du disque solaire. Pendant mon long séjour à l'Obser-
vatoire de Paris, Arago se servait déjà de verres semblables,
pour observer les éclipses ou les taches du Soleil. On combine
ainsi deux verres dont l'un est rouge et l'autre vert, ou l'un
jaune et l'autre bleu, ou encore une nuance de vert avec le vio-
let. « Lorsqu'une lumière forte se trouve auprès d'une lumière
faible, la dernière prend la teinte complémentaire de la pre-
mière. C'est là le contraste j mais comme le rouge n'est presque
jamais pur, on peut tout aussi bien dire que le rouge est complé-
mentaire du bleu. Les couleurs voisines du spectre solaire
se substituent. » (Arago, Manuscrit de iSUl.)
{US) [page 251]. Arago, dans la Connaissance des Temps pour
1828, p. 299-300; dans V Annuaire pour 183Z^, p. 246-250;
pour 1842, p. 347-350. « Les exceptions que je cite , prouvent
quej'avaisbienraisonenl825 de n'introduire la notion physique
du contraste dans la question des étoiles doubles qu'avec la plus
grande réserve. Le bleu est la couleur réelle de certaines étoiles.
Il résulte des observations recueillies jusqu'ici que le firmament
est non-seulement parsemé de soleils rouges et jaunes, comme
le savaient les anciens , mais encore de soleils bleus et verts.
C'est au temps et à des observations futures à nous apprendre si
les étoiles vertes et bleues ne sont pas des soleils déjà en voie de
décroissance ; si les différentes nuances de ces astres n'indiquent
pas que la combustion s'y opère à différents degrés ; si la teinte,
avec excès de rayons les plus réfrangibles, que présente souvent
-^ S62 —
la petite étoile , ne tiendrait pas à la force absorbante d'une at-
mosphère que développerait l'action de l'étoile, ordinairement
beaucoup plus brillante, qu'elle accompagne » (Arago dans
VJnnuaire pour 183^, p. 295-301.)
[U9) [page 251]. Struve^ ûber Doppelsterne nach Dorpater
Èeobachtungen, 1837, p. 33-36 et Mensurœ microm., p. lxxxiii ;
il compte 63 couples dont les deux étoiles sont bleues ou bleuâ-
tres, et où, par conséquent, la coloration ne saurait être un effet
de contraste. Quand on en vient à comparer les appréciations
de différents observateurs , sur les couleurs du même couple ^
on est frappé des divergences que l'on rencontre. Par exemple,
un observateur trouve que le compagnon de telle étoile rouge
ou orangée est 6/ew , tandis qu'un autre observateur lui attri-
buera la couleur verte.
(50) [page 251]. Arago, (X?i\\sV Annuaire pour 183^, p. 302.
(51) [page 251]. Cosmos , t. III, p. ik\-\U^.
(52) [page 252]. «This superb double star (a du Centaure),
is beyond ail comparison the most striking objectof tbe kind in
the beavens, and consists of two individuals, both of a bigh
ruddy or orange colour, though that of tbe smaller is of a
somewhat more sombre and brownish cast. » Sir John Herschelj
Foyage au Cap, p. 300. Mais d'après les belles observations du
capitaine Jacob (Bombay Engineers) en 1846, 1847 et 1848,
l'étoile principale est de 1" grandeur et le compagnon serait
seulement de 2%5 ou de 3^ grandeur (Transact, of the Royal
Soc. ofEdinb., t. XYI, 1849, p. 451).
(53) [page 253]. Cosmos, t. III, p. 188, 204 et 346.
(54) [page 253], Struve, ûber Doppelst. nach Dorp. Beo-
bacht.,]) 33.
(55) [page 253]. Même ouvrage, p. 36.
(56) [page 254]. Mœdler, Astron., p. 517; J. Herschel, Oul-
lines of Astronomy, p. 568.
— 363 —
(57) [page 254]. Cf. Maiùler, Untersuch. ûber die Fixstern-
Systeme, l'^^part., p. 225-275; 2' part., p. 235-240; le même
dans Astron,, p. 541; J. Herschel, Outlines ^ p. 573.
(58) [page 254]. L'occultation n'a été qu'apparente : elle est
due aux disques factices que les étoiles conservent dans les meil-
leures lunettes [Cosmos, t. III, p. 140). D'après les calculs de
Villarceau, la distance apparente des centres des deux étoiles
de t, d'Hercule n'a jamais été au-dessous de 0",5 (en 1793 et
en 1830) ; or les disques réels des plus belles étoiles sont pro-
bablement beaucoup plus faibles que la moitié de cette distance
Mais, dans ^ d'Hercule, l'étoile principale est de 3^ grandeur
et le satellite est de 6^ à 7' grandeur ; ce dernier a donc pu
disparaître dans les rayons de la plus grande , c'est-à-dire dans
son disque factice, à l'époque du plus petit périhélie apparent.
Pour t] de la Couronne , au contraire , la distance des 2 étoiles
a été de 0",4 en 1784 et vers la fin de 1850 , et pourtant il n'y
a pas eu d'occultation. C'est que ces 2 étoiles sont beaucoup
plus faibles que ^ d'Hercule ; leurs disques factices sont moins
grands; l'un d'eux n'empiète jamais complètement sur l'autre,
malgré une moindre distance apparente au périhélie.
(59) [page 259] . Voyez, pour $ de la Grande Ourse , p d'O-
phiucus, t d'Hercule et r^ de la Couronne, Yvon Villarceau
dans les Additions à la Connaissance des Temps pour 1851,
et les Comptes rendus de VAcad, des Sciences, t. XXXII , p. 50.
FIN DE LA 1'* PARTIE DU 3* VOLUME.
PARIS. — IMPRIMÉ PAR G. THDNOT ET C, BUE RACINE, 26.
-
365 —
VU
LES NÉBULEUSES. — NÉBULEUSES RÉDUCTIBLES ET NÉBULEUSES
IRRÉDUCTIBLES. — NUÉES DE MAGELLAN. — TACHES NOIRES
OU SACS DE CHAR^N.
Outre les mondes visibles qui remplissent les es-
paces célestes, parmi les corps qui brillent de la lu-
mière stellaire, et par là je comprends les corps qui ont
une lumière propre et ceux qui empruntent leur lu-
mière au Soleil, ceux qui sont isolés et ceux qui,
diversement accouplés, tournent autour d'un centre
de gravité commun ; parmi ces corps , dis-je , il
existe des masses qui jettent une lueur pâle et
douce, semblable à une nébulosité (1). Quelques-unes
font Teffet de petits nuages lumineux aux contours
arrondis et tranchés, d'autres sans forme précise s'é-
tendent sur de vastes espaces. Toutes, vues à travers
le télescope, semblent au premier abord complète-
ment différentes des corps célestes dont nous avons
traité dans les quatre précédents chapitres. De même
que l'on est porté à conclure du mouvement observé,
mais non expliqué jusqu'à ce jour, des étoiles visibles
à l'existence d'étoiles invisibles (2), de même les ex-
périences récentes, qui ont constaté la possibilité de
réduire un nombre considérable de nébuleuses, ont
conduit à nier l'existence des nébuleuses et plus
Hf. 24
— 366 —
absolument de toute la matière cosmique répandue
dans le monde. Que d'ailleurs ces nébuleuses arrêtées
dans leurs contours soient une matière diffuse et lu-
mineuse par elle-même, ou qu'elles soient des amas
sphériques d'étoiles pressées , elles n'en sont pas
moins d'une grande importance pour la connaissance
de la structure du monde , en ce qui concerne les
espaces célestes.
Le nombre des nébuleuses dont le lieu a été dé-
terminé en ascension droite et en déclinaison dé-
passe déjà 3G00. Quelques-unes de celles qui n'ont
point de forme précise ont une largeur égale à huit
fois le diamètre de la Lune. D'après une estimation de
William Herschel , remontant à l'année 1811 , les né-
buleuses couvrent au moins 1/270 de tout le firma-
ment visible. Le regard qui les contemple h l'aide du
télescope pénètre dans des régions d'où les rayons
lumineux , d'après des calculs qui ne sont point dé-
pourvus de vraisemblance , mettent des millions
d'années à venir jusqu'à nous, et franchit des inter-
valles dpnt on pourrait à peine se faire une idée, en
prenant pour unité les distances que nous fournit
la couche d'étoiles la plus voisine du système solaire,
c'est-à-dire les distances qui nous séparent de Sirius
ou des étoiles doubles du Cygne et du Centaure. Si
les nébuleuses sont des amas d'étoiles de forme ellip-
tique ou globulaire, leur conglomération rappelle les
efTets mystérieux des forces de la gravitation ; si
elles sont des masses de vapeur avec un ou plusieurs
noyaux , les différents degrés de leur condensa-
tion prouveraient que la matière cosmique peut,
par une concentration successive , arriver à former
des étoiles. L'astronomie, j'entends celle qui est un
objet de contemplation plutôt que de calcul, ne
fournit pas un autre spectacle qui soit autant de na-
ture à s'emparer de l'imagination ; et cela non pas
seulement parce que les nébuleuses peuvent être
prises pour un symbole de l'infini , piais parce que la
recherche des différents états par lesquels ont passé
ces corps célestes et le lien qu'il est permis de
soupçonner entre leurs transformations successives ,
peut nous donner l'espérance de démêler à travers
les phénomènes la loi de leur développement (3).
L'histoire des notions que nous possé4ons actuelle-
ment sur les nébuleuses nous apprend que sur ce
point, comme en général pour tout ce qui touche à
l'histoire des sciences naturelles, les mêmes opinions
opposées qui comptent aujourd'hui de nombreux
partisans ont été soutenues il y a beaucoup d'années,
bien qu'avec des raisons moins concluantes. Depuis
que le télescope est devenu d'un usage général , nous
voyons Galilée , Dominique Cassini et un autre ob-
servateur pénétrant, John Michell, considérer toutes
les nébuleuses comme des amas d'étoiles reculées
dans l'espace, tandis que Halley, Derham, La Caille,
Kant et Lambert affirmaient qu'elles étaient dépour-
vues d'étoiles. Kepler était un adhérent zélé de la
théorie d'après laquelle les étoiles seraient formées
d'une nébulosité cosmique, c'est-à-dire d'une vapeur
céleste qui s'agglomère et s'épaissit. C'était aussi
— 368 —
l'opinion de Tycho Brahé, avant l'invention du téles-
cope. Kepler pensait , pour me servir de ses propres
expressions : « Cœli materiam tenuissimam in unum
globum condensatam stellam eflingere ; » il entendait
par cette matière ténue , la vapeur qui , dans la Voie
lactée, brille d'un éclat semblable à la lumière adoucie
des étoiles. Son opinion était fondée non pas sur la
condensation que l'on remarque dans les nébuleuses
de forme arrondie, puisqu'il ne connaissait point ces
nébuleuses, mais sur les étoiles qui s'allument sou^
dainement aux bords de la Voie lactée.
A proprement parler, c'est avec William Herschel
que commence l'histoire des nébuleuses, aussi bien
que celle des étoiles doubles , s'il est vrai que l'on
doive surtout considérer le nombre des objets décou-
verts , l'exactitude et la solidité des observations té-
lescopiques, et la généralité des vues auxquelles elles
ont servi de point de départ. Jusqu'à lui, et en tenant
compte des louables efforts de Messier, on ne con-
naissait pas , dans les deux hémisphères , plus de
120 nébuleuses irréductibles, et, en 1786, le grand
astronome de Slough publiait un premier catalogue
qui en contenait 1000. J'ai déjà rappelé plus haut,
d'une manière circonstanciée, que les masses dési-
gnées sous le nom d'étoiles nébuleuses {yz^^zlotmiç)
par Hipparque et par Géminus , dans les Catastérismes
du Pseudo-Eratosthène et dans YAlmageste de Ptolé-
mée, sont des amas d'étoiles qui offrent , à l'œil nu ,
l'apparence d'une matière vaporeuse (4). Cette dé-
nomination, traduite en latin par le mot Nebnlosœ^
— S69 -■
passa , au milieu du xnr siècle , dans les Tables Al-
phonsines , grâce vraisemblablement à l'influence
prépondérante de l'astronome juif Isaac Aben Sid
Hassan , président de la riche synagogue de Tolède.
Ce fut cependant à Venise que furent imprimées les
Tables Alphonsines, en 1483.
Ces singuliers agrégats de véritables nébuleu-
ses, réunies en quantité innombrable et mêlées
avec des essaims d'étoiles , se trouvent mentionnés
pour la première fois chez un astronome arabe du
milieu du x" siècle , chez Abdourrahman Soufi ,
natif de l'Irak persan. Le Bœuf blanc qu'il vit briller
d'une lueur pâle et blanchâtre beaucoup au-des-
sous de Canopus, était sans doute la plus grande des
deux nuées de Magellan qui, avec une étendue ap-
parente égale environ à 12 fois le diamètre de la Lune,
couvre en réalité dans le Ciel un espace de 42 degrés
carrés, et que les voyageurs européens ne commen-
cèrent à signaler que dans la première partie du
xvi" siècle, bien que déjà, 200 ans auparavant, les
Normands se fussent avancés sur les côtes occidentales
de l'Afrique jusqu'à Sierra Leone , par 8* 1/2 de lati-
tude septentrionale (5). Il semble qu'une masse né-
buleuse d'une aussi grande étendue et clairement vi-
sible à l'œil nu eût dû attirer plus tôt l'attention (6).
La première nébuleuse isolée qui fut signalée , à
l'aide du télescope, comme complètement dépourvue
d'étoiles, et dans laquelle on reconnut un objet d'une
nature particulière, fut la nébuleuse placée près de y
d'Andromède, et visible même à l'œil nu. Simon Ma-
— 370 —
riUs, dont le vrai nom était Mayër, de Guntzenhausen
en Franconie , qui, après avoir été musicien , fut at-
taché eri qualité de mathématicien à la cour d'un
margrave de Culmbach, le même (Jui vit, neuf jours
avant Galilée, les satellites de Jupiter (7), a aussi le
mérite d'avoir décrit le premier et décrit très-exacte-
ment une nébuleuse. Dans la préface de son Mundus
Jovialis (8) , il raconte que, le 15 décembre 1612, il re-
connut une étoile fixe d'un aspect tel, qu'il n'en avait
jamais vu de semblable. Elle était située près de la
3' étoile, c'est-à-dire près de l'étoile boréale de la
Ceinture d'Andromède. Vue à l'œil nu , elle avait l'ap-
parence d'un simple ntiage, et en s'aidant du téles-
cope , Mayer avait trouvé que ce phénomène n'avait
rien de stellaire , ce qui le distinguait des étoiles
nébuleuses de l'Écrevisse et d'autres amas nébuleux.
Tout ce que l'on pouvait reconnaître, c'était une
apparence blanchâtre qui, plus brillante au centre,
s'afifaiblissait vers les bords. Cette masse occupait
l/h de degré et ressemblait dans son ensemble à la
lumière d'une charidelle vue de loin à travers une
feuille de corne « similis fere splendor apparet, si a
longinquo candela ardens per cornu pellucidum de
noctu cernatur. » Simon Marins se demande si cette
singulière étoile a pris naissance récemment , et il
n'ose le décider; mais il s'étonne beaucoup que
Tycho , qui a compté toutes les étoiles de la Ceinture
d'Andromède, n'ait point fait mention de celle-là.
Ainsi dans le M undiis Jovialis, publié potir la première
fois en 1614, est établie, comrtie j'ai eu déjà l'occasion
— 371 ~
de le remarquer ailleurs (9) , la différence entre les
nébuleuses irréductibles aux télescopes dont on dispo-
sait à cette époque, et les amas stellaires, nommés par
les Allemands Sternhaufen , par les Anglais Clusters ,
auxquels le rapprochement d'un nombre infini dé
petites étoiles invisibles à l'œil nu donne une appa-
rence nébuleuse. Malgré le perfectionnement consi-
dérable des instruments d'optique, le nuage d'An-
dromède a été tenu pendant trois siècles et demi pour
complètement vide d'étoiles , comme dans le temps
où il fut découvert. Il n'y a pas plus de trois ans que
de l'autre côté de l'océan Atlantique , à Cambridge,
Georges Bond a reconnu 1500 petites étoiles « within
the limits of the nebula. » Bien que le noyau de cette
prétendue nébuleuse n'ait pu être réduit encore, je
n'ai point hésité à la ranger parmi les amas stel-
laires (10).
Il ne faut attribuer qu'à un hasard surprenant ce
fait, que Galilée qui, dès avant l'année 1610, époque
à laquelle parut le Sidereus Nuncins, s'était occupé
plusieurs fois de la con:tellation d'Orion , plus tard
dans son Saggialore ^ lorsque depuis longtemps il
pouvait connaître par le Mundus Jovialis la décou-
verte d'une nébuleuse sans étoiles dans Andromède ,
ne signale dans tout le firmament d'autres nébulosités
que celles qui peuvent se résoudre en artias stellaires,
à l'aide des faibles instruments dont il se servait. Les
objets qu'il nomme «nebulose del Orione 6 delPresepe»
ne sont pour lui que des agglomérations (coacerva-
zioni) de petites étoiles en quantité innombrable (11).
— 372 —
Il représente successivement, sous les noms inexacts
de Nebulosee Capitis, Cinguli et Ensis Orionis, des
amas slellaires dans lesquels il s'applaudit d'avoir
trouvé, sur un espace de 1 ou 2 degrés, 400 étoiles qui
n'avaient point été comptées j usque-là. Quant aux né-
buleuses irréductibles il n'en est nulle part question.
Comment la grande nébuleuse de l'Épée d'Orion
a-t-elle échappé à son attention, ou s'il l'a remarquée,
comment ne s'y est-il pas arrêté? Mais, selon toute
vraisemblance , bien que cet observateur éminent
n'ait jamais vu ni les contours irréguliers du nuage
d'Orion, ni la forme arrondie des nébulosités réputées
irréductibles, ses considérations générales sur la na-
ture intérieure des nébuleuses ressemblaient beau-
coup à celles vers lesquelles penche aujourd'hui la
majeure partie des astronomes (12). Pas plus que
Galilée, Hévélius qui, bien que s'obstinant à déter-
miner les positions des étoiles sans le secours du té-
lescope, n'en fut pas moins un observateur très-dis-
tingué (13), ne fait mention dans ses écrits du grand
nuage d'Orion. Son catalogue ne contient guère plus
de 16 nébuleuses dont la position soit déterminée.
Enfin , en 1656, Huygens découvrit la nébuleuse de
l'Épée d'Orion (14) qui devait acquérir une si grande
importance par son étendue, par sa forme, par le
nombre et la célébrité des astronomes qui l'obser-
vèrent dans la suite, et qui fournit à Picard l'occasion
de s'en occuper activement vingt ans après. En 1677,
Edmond Halley, durant son séjour à Sainte-Hélène,
détermina les premières nébuleuses qui aient été ob-
— 373 —
servées dans les régions de l'hémisphère austral ,
invisibles en Europe. L'amour que Jeau Dominique
Cassini portait à toutes les parties de l'astronomie
contemplative l'engagea, vers la fin du x vu* siècle, à
étudier plus attentivement les nuages d'Andromède
et d'Orion. Il pensait que , depuis les observations
de Huygens, le dernier de ces nuages avait changé
de forme , et croyait avoir reconnu dans celui d'An-
dromède des étoiles qu'il était impossible d'aperce-
voir avec des lunettes communes. Pour le change-
ment de forme , il n'était sans doute qu'une illusion;
mais il n'est plus permis , depuis les remarquables
observations de Georges Bond, de nier d'une ma-
nière absolue l'existence d'étoiles dans la nébuleuse
d'Andromède. Cassini, guidé par des considérations
théoriques , avait déjà pressenti ce résultat , lors-
que se mettant en opposition ouverte avec Halley
et Derham, il déclarait que toutes les nébuleuses
sont des essaims d'étoiles très-éloignées (15). Il
convenait que la lueur douce et pâle que répand
le nuage d'Andromède est analogue à la lumière
zodiacale , mais il prétendait que cette lumière est
formée par un nombre infini de petits corps plané-
taires, pressés les uns contre les autres (16). Le séjour
que fit La Caille, de 1750 à 1752, dans l'hémisphère
du sud , au cap de Bonne-Espérance, à l'île de France
et à Bourbon , accrut dans une telle proportion le
nombre des nébuleuses que , suivant la remarque de
Struve , on connut mieux à cette époque les nébu-
leuses du Ciel austral que celles qui sont visibles en
— 374 -
Europe. La Caille tenta aussi avec succès de classer
les nébuleuses suivant leur forme apparente. Il fut en-
core le premier, mais en cela ses efforts furent moins
heureux, qui essaya d'analyser la substance si hété-
rogène des deux nuées de Magellan (Nubecula major
et minor. Si des autres nébuleuses isolées que La
Caille observa, au nombre de 42, dans Thémisphère
austral , on en retranche 14 qui, même avec des té-
lescopes d'un faible grossissement, ont été reconnues
pour être de véritables amas stellaires, il n'en reste
plus que 28 non résolues , tandis que Sir John Hers-
chel , muni d'instruments plus puissants et appor-
tant d'ailleurs à ses observations plus d'expérience
encore et d'habileté, est parvenu , sous la même zone,
et sans y comprendre non plus les amas d'étoiles
ou Clusters, à découvrir 1500 nébuleuses.
Dénués de connaissances suffisantes et d'observa-
tions personnelles, mais guidés par leur imagination
à peu près dans les mêmes voies, sans qu'il y ait eu
concert entre eux, Lambert à partir de l'année
1749 et Kant depuis 1755, raisonnèrent avec une
merveilleuse pénétration sur les voies lactées dis-
tinctes, sur les nébuleuses et les groupes stellaires
jetés comme des îles sporadiques au milieu des es-
paces célestes (17). Tous deux inclinaient vers la
théorie de la matière diffuse (nebular Hypothesis)
vers l'idée d'un travail de production incessant dans
le monde sidéral et la transformation de la nébulo-
sité cosmique en étoiles. De 1760 à 1769, l'ingénieux
Le Gentil, longtemps avant de se mettre en route,
— 575 —
dans Tespérance, démentie malheureusement deux
fois de suite, d'observer les passages de Vénus sur
le Soleil, donna une impulsion nouvelle à l'étude
des nébuleuses par ses observations sur les con-
stellations d'Andromède , du Sagittaire et d'Orion.
11 employa un objectif de Campani de 34 pieds de
longueur focale ; cet instrument est un de ceux qui
existent à l'Observatoire de Paris. Complètement
opposé aux idées de Halley et de La Caille, de Kant et
de Lambert, l'ingénieux John Michell déclara, comme
Galilée et Dominique Cassini, que toutes les nébu-
leuses sont des amas stellaires, des agrégats d'é-
toiles télescopiques très-petites ou très-éloignées ,
dont l'existence ne peut manquer d'être démontrée
un jour à l'aide d'instruments plus parfaits (18). La
connaissance des nébuleuses doit aux travaux opi-
niâtres de Messier un accroissement rapide , si on
le compare aux lents progrès que nous avons re-
tracés jusqu'ici. Son catalogue daté de 1771 contenait
66 nébuleuses nouvelles, en défalquant celles qui
avaient été déjà découvertes par La Caille et par Mé-
chain. Ainsi, à force de persévérance, il put dans
un observatoire assez pauvrement monté, dans l'Ob-
servatoire de la Marine établi à l'hôtel de Cluny,
doubler le nombre des nébuleuses connues jusque-là
dans les deux hémisphères (19).
Ces faibles commencements furent suivis de l'é-
poque brillante, signalée par les découvertes de Wil-
liam Herschel et de son fils. W. Herschel le premier
entreprit, dès Tannée 1779, de passer méthodique-
— 376 —
ment en revue, à l'aide d'un réflecteur de 7 pieds,
toutes les parties du ciel riches en nébuleuses. En
1787, son télescope gigantesque long de 40 pieds
était terminé , et dans les trois catalogues qu'il pu-
blia successivement en 1786, 1789 et 1802, il con-
stata la position de 2500 nébuleuses réductibles ou
irréductibles (20). Jusqu'en 1785 et presque jus-
qu'en 1791, ce grand observateur parut disposé,
comme l'avaient été Michell et Cassini , comme l'est
aujourd'hui Lord Rosse , à voir dans les nébuleuses
qu'il n'avait pu parvenir à résoudre des groupes
d'étoiles très-éloignés. Mais à force de s'occuper
de ce sujet, il fut ramené entre 1799 et 1802 aux
idées de Halley et de La Caille, c'est-à-dire à la
théorie de la matière diffuse, et admit même, avec
Tycho et Kepler, l'hypothèse de la formation des
étoiles par la condensation successive de la nébu-
losité cosmique. Ces deux théories ne sont point
cependant nécessairement liées l'une à l'autre (21).
Les nébuleuses et les groupes d'étoiles qu'avait ob-
servés Sir William Herschel ont été soumis à un nou-
vel examen par son fils, de 1825 à 1833. Sir John a
enrichi les anciennes Tables de 500 objets nouveaux ,
et a publié dans les Philosopldcal Transactions pour
l'année 1833 (p. 365-481) un catalogue complet de
nébuleuses et d'amas stellaires , au nombre de 2307.
Ce grand travail comprend tout ce qui avait pu être
découvert dans l'Europe centrale ; et durant les 5 an-
nées qui suivent immédiatement, de 1834 à 1838,
nous voyons Sir John établi au cap de Bonne-Espérance
— 377 —
avec un réflecteur de 20 pieds , sonder toute la partie
du ciel qu'il peut embrasser, et ajouter au catalogue
de son père un supplément de 1708 nébuleuses (22).
Des 629 nébuleuses et amas stellaires observés par
Dunlop à Paramatta, de 1825 à 1827, avec un réflec-
teur de 9 pieds dont le miroir avait 9 pouces de
diamètre, un tiers seulement a passé dans le travail
de Sir John Herschel (23).
Si l'on veut suivre l'histoire des découvertes dont
ces corps mystérieux ont été l'objet, on peut dire
qu'une troisième époque a commencé avec l'admi-
rable télescope de 50 pieds construit sous la direc-
tion du Comte de Rosse, à Parsonstown (24).
Toutes les hypothèses qui , dans l'état d'incertitude
où flottèrent longtemps les opinions , avaient pu être
mises en avant, à chacune des phases par lesquelles
avait passé la science , furent agitées de nouveau
et avec une grande vivacité, à propos de la lutte
entre la théorie de la matière diffuse et celle de la
résolution. D'après tout ce que j'ai pu recueillir
de rapports , émanant d'astronomes familiarisés de-
puis longtemps avec les nébuleuses , il est constant
que, dans un grand nombre d'objets, choisis au hasard
et parmi toutes les classes, sur le catalogue de 1833,
presque tous ont été complètement résolus (25). Le
docteur Robinson , directeur de l'Observatoire d'Ar-
magh, en a résolu à lui seul plus de 40. Sir John
Herschel s'exprime à ce sujet de la même manière
dans le discours prononcé à Cambridge, en 1845,
à l'ouverture de la Brilish Association^ et dans ses
— 378 —
Outlines ofastronomy, publiés en 18û9. «Le réflecteur
de Lord Rosse, dit-il, a réduit un nombre considé-
rable de nébuleuses qui avaient défié jusqu'ici la
force pénétrante d'instruments plus faibles, ou a
prouvé du moins qu'elles étaient réductibles. S'il y
a encore des nébuleuses qui aient complètement
résisté à ce puissant télescope dont l'ouverture n'a
pas moins de 6 pieds anglais (i"',8o) , il est permis
cependant de conclure par analogie qu'il n'existe en
réalité aucune différence entre les nébuleuses et les
amas d'étoiles (26). »
Le constructeur du puissant appareil de Parsons-
town , Lord Rosse , tout en distinguant soigneuse-
ment le résultat d'observations positives de ce qui
n'est encore qu'un motif légitime d'espérance, s'ex-
prime avec une grande confiance sur la nébuleuse
d'Orion, dans une lettre adressée au professeur Nichol
de Glasgow, en date du 19 mars 1846 (27). « D'après
les observations- auxquelles nous nous sommes livrés
sur cette célèbre nébuleuse , je puis vous affirmer en
toute sûreté que si la réductibilité demeure encore
l'objet d'un doute, ce doute est bien faible. Nous
n'avons pu , à cause de l'état de fatmosphère , ap-
pliquer que la moitié du grossissement que le
miroir comporte , et cependant nous avons reconnu
que toute la partie du nuage qui avoisine le trapèze
se compose d'une masse d'étoiles. L'autre partie
du nuage est également riche en étoiles, et pré-
sente tous les caractères de la réductibilité. » Plus
tard néanmoins, en 1848, Lord Rosse n'était point
~ 379 —
encore en mesure d'annoncer la résolution com-
plète et effective de la nébuleuse d'Orion , et se
bornait toujours à témoigner l'espérance prochaine
du succès.
Si dans le débat qui s'est engagé tout récemment
au sujet de la non-existence à travers les espaces cé-
lestes d'une matière nébuleuse, douée d'une lumière
propre , on veut séparer ce qui est acquis à la science
et ce qui n'est encore que la conséquence probable
d'une induction, on peut sans beaucoup d'efforts se
convaincre que, la force visuelle des télescopes allant
toujours en croissant, le nombre des nébuleuses irré-
duclibles diminue dans une proportion rapide, sans
toutefois pouvoir jamais être épuisé par cette diminu-
tion. A mesure qu'augmente la puissance des téles-
copes, le dernier venu résoud ce que n'avait pu ré-
soudre celui qui l'avait précédé. Mais en même temps,
il est vrai de dire, au moins jusqu'à un certain point,
que ces télescopes pénétrant plus avant dans l'espace,
remplacent les nébuleuses qu'ils ont réduites par
d'autres qu'on n'avait pu atteindre jusque-là (28).
Ainsi résolution des anciennes nébuleuses, et décou-
verte de nébuleuses nouvelles, qui exigent à leur tour
un nouvel accroissement de puissance optique, tel est
le cercle dans lequel les choses se succèdent d'une
manière indéfinie. Et pourrait-il en être autre-
ment? Il me semble qu'il faudrait dans le cas con-
traire de deux choses l'une : ou représenter comme
limité le monde rempli par les corps célestes, ou
considérer les îles qui le parsèment, et dont l'une
— S80 —
nous sert de séjour, comme tellement distantes les
unes des autres qu'aucun des télescopes qui restent
à découvrir ne puisse atteindre la rive opposée, et
que nos dernières nébuleuses se résolvent en amas
d'étoiles qui, comme celles de la voie lactée, se
projettent sur un fond noir dégagé de toute nébulo-
sité (29). Est-il vraisemblable que telle soit en effet
la structure du monde , et peut-on compter que les
instruments d'optique acquièrent jamais assez de
puissance pour ne plus laisser à découvrir aucune
nébuleuse dans l'immensité du firmament?
L'hypothèse d'un fluide doué d'une lumière propre,
qui se présente sous la forme de nébuleuses rondes
ou ovales , aux contours nettement dessinés , ne doit
point être confondue avec la supposition non moins
hypothétique d'un éther qui remplirait tout l'espace,
et qui , sans être lumineux en lui-même , propagerait
par ses ondulations la lumière, la chaleur rayonnante
etrélectro-magnétisme(30). Les courants qui partent
du noyau des coaiètes, et en forment les queues, rem-
plissent souvent des espaces immenses, en coupant
les orbites des planètes qui composent notre système
solaire , et répandent à travers ces orbites leur ma-
tière inconnue ; mais cette matière, séparée du noyau
qui la produit, cesse d'être perceptible pour nous.
Déjà Newton admettait que des vapeurs émanées du
Soleil, des étoiles fixes, et de la queue des comètes
pouvaient se mêler avec l'atmosphère terrestre (31).
Dans l'anneau aplati et nébuleux que l'on appelle la
lumière zodiacale, aucun télescope n'a pu découvrir
— 381 —
encore rien qui ressemble à des étoiles. On n'a pas non
plus décidé jusqu'à ce jour si les particules dont cet
anneau se compose reflètent la lumière du Soleil, ou
si elles sont lumineuses par elles-mêmes, comme cela
arrive quelquefois dans les brouillards terrestres (32).
Dominique Cassini pensait que la lumière zodiacale
est formée d'un nombre infini de petits corps pla-
nétaires (3o). C'est une sorte de besoin pour Thomme
de chercher dans toutes les matières fluides des par-
ties moléculaires distinctes, comme les petites bulles
vides ou pleines dont paraissentformés les nuages(34).
En suivant la progression décroissante qui dans notre
système solaire représente la densité des planètes, de-
puis Mercure jusqu'à Saturne et à Neptune, et qui , si
l'on prend pour unité la densité de la Terre, descend
de 1,12 à 0,14, on est conduit aux comètes qui laissent
apercevoir une étoile d'un faible éclat à travers leurs
couches extérieures; et de là même on est amené, par
une pente insensible, à ces parties distinctes encore
et cependant si peu denses , qu'il est presque im-
possible, quelles qu'en soient les dimensions, d'en
déterminer les limites. Ce sont précisément ces
considérations sur l'apparence nébuleuse de la lu-
mière zodiacale qui, longtemps avant la découverte
des petites planètes télescopiques comprises entre
Mars et Jupiter, et avant les conjectures sur les asté-
roïdes météoriques , avaient inspiré à Cassini la
pensée qu'il y a des corps célestes de toutes les di-
mensions et de toutes les densités. Nous touchons
ici , pour ainsi dire sans le vouloir, à l'antique débat
m. 25
soulevé par la philosophie naturaliste sur l'existence
d'un fluide primitif et de molécules distinctes. C'est
là un problème qui serait beaucoup plutôt du res-
sort des sciences mathématiques; aussi nous em-
pressons-nous de retourner au côté purement ob-
jectif des phénomènes.
Sur 3926 positions déterminées, 2i51 qui sont indi-
quées dans les trois catalogues publiés par Sir William
Herschel , de 1786 à 1802 , et dans le grand tableau
que son fils a fait insérer aux Pkilosopliicai Transac-
tions pour l'année 1853 , appartiennent à la partie de
firmament visible à Slough, que pour abréger nous
nommerons l'hémisphère septentrional; les autres,
iu nombre de 1475, appartiennent à la partie de
l'hémisphère méridional visible au cap de Bonne-
Espérance, et sont consignés dans les catalogues
dressés en Afrique par Sir John Herschel. Dans ces
nombres, les nébuleuses et les amas stellaires sont
mêlés indistinctement. Quelle que soit l'analogie qui
existe entre ces objets, j'ai cru cependant devoir
les distinguer, afin de mieux préciser l'état de nos
Connaissances actuelles. Je trouve dans le cata-
logue de l'hémisphère boréal 2299 nébuleuses et
152 amas stellaires ; dans le catalogue du Cap ,
4239 nébuleuses et 236 amas stellaires (35). Ainsi ,
d'après ces catalogues, la somme des nébuleuses non
résolues encore en étoiles est de 3538, nombre qui
peut être porté à 4000, si l'on fait entrer en ligne
de compte 300 à 400 nébuleuses vues par William
Herschel , et dont la position n'a pas été déter-
— 383 —
minée de nouveau (36), ainsi que celles qui, obser-
vées à Sumatra par Dunlop avec un réflecteur New-
tonien de 9 pouces, n'ont point trouvé place dans
le catalogue de Sir John Herschel, et qui sont au
nombre de 423 (37). Tout récemment, Bond etMaedler
ont fait connaître un résultat semblable. On en peut
conclure que dans Tétat actuel de la science , le
nombre des nébuleuses est à celui des étoiles doubles
à peu près comme 2 est à 3. Mais il ne faut pas ou-
blier que sous cette dénomination d'étoiles doubles
ne sont pas compris les couples purement optiques,
et que jusqu'à ce jour les étoiles doubles dans les-
quelles on a remarqué un changement de position
relative sont au nombre total comme 1 est à 9, ou
tout au plus peut-être comme 1 est à 8 (38).
Les nombres indiqués plus haut , à savoir : 2299 né-
buleuses et 152 amas stellaires dans le catalogue du
Nord , 1239 nébuleuses et 236 amas stellaires dans le
catalogue du Sud, prouvent qu'il y a dans l'hémi-
sphère austral un plus grand nombre d'amas stellaires
sur un moins grand nombre de nébuleuses. Si l'on
admet que toutes les nébuleuses soient de nature
également réductible, c'est-à-dire qu'elles ne soient
autre chose que des amas stellaires plus reculés dans
l'espace, ou des groupes formés de corps célestes plus
petits, moins pressés et doués d'une lumière propre ,
cette opposition apparente dont Sir John Herschel
a dû d'autant plus signaler l'importance qu'il s'était
servi, dans les deux hémisphères, de réflecteurs éga-
lement puissants , cette opposition, dis-je, prouve
du moins une différence frappante dans la nature
des nébuleuses et dans leur distribution a travers les
espaces célestes, c'est-à-dire dans les directions sui-
vant lesquelles les nébuleuses des deux hémisphères
se présentent aux habitants du globe terrestre (39).
r/est encore à Sir John Herschel , que Ton doit
les premières notions exactes et les premiers aperçus
généraux sur la distribution des nébuleuses et des
amas stellaires dans tou te l'étendue de la voûte céleste.
Afin de bien examiner leur situation , leur abondance
relative dans les différents lieux , la probabilité ou la
non-probabilité de leur succession en certains groupes
ou suivant des lignes déterminées , il inscrivit entre
trois et quatre mille objets sur une sorte de canevas
graphique , dans des réseaux dont les côtés mesurent
3" de déclinaison et 15' d'ascension droite. La plus
grande accumulation de nébuleuses se trouve dans
l'hémisphère boréal. Elles sont répandues à travers le
grand et le petit Lion ; le corps, la queue et les pieds
de derrière de la grande Ourse ; le nez de la Giraffe ;
la queue du Dragon ; les deux Chiens de chasse; la
chevelure de Bérénice , prés de laquelle est situé le
pôle boréal de la Voie lactée; le pied droit du Bou-
vier, et surtout à travers la tête, les ailes et les
épaules de la Vierge. Cette zone , que l'on a nommée
la région nébuleuse de la Vierge, renferme, ainsi
que nous l'avons remarqué déjà, dans un espace qui
représente la huitième partie de la sphère céleste,
un tiers de la somme totale des nébuleuses (40).
Elle dépasse de peu l'équateur ; seulement elle s'é-
— 385 —
tend à partir de l'aile méridionale de la Vierge jus-
qu'à l'extrémité de l'Hydre et à la tête du Centaure,
dont elle n'atteint pas les pieds, non plus que la
Croix du Sud. Le ciel boréal contient encore une
agglomération de nébuleuses qui , bien que moins
considérable, s'étend plus avant que la précédente
dans l'hémisphère austral; elle est appelée par Sir
John Herschel la région nébuleuse des Poissons , et
forme une zone qui , partant d'Andromède, qu'elle
remplit presque en entier, se dirige vers le poitrail
et les ailes de Pégase, vers la bande qui unit les deux
Poissons , vers le pôle austral de la Voie lactée et
Fomalhaut. Ces régions si pleines forment un con-
traste frappant avec les espaces complètement vides
de nébuleuses , et pour ainsi dire déserts , qui com-
prennent, d'une part, Persée, le Bélier, le Taureau,
la tête et la partie inférieure du corps d'Orion, de
l'autre, Hercule, l'Aigle, et toute la constellation
de la Lyre (41). Si, en se guidant sur le tableau
général des nébuleuses et des amas stellaires de
l'hémisphère méridional, c'est-à-dire de la partie
du ciel visible à Slough, que Sir John Herschel a
dressé d'après les heures d'ascension droite, on
divise le tout en six groupes de quatre heures chacun,
voici le résultat qu'on obtient :
Asc. droite 0^ à k^ 311
(là 8 179
8 à 12 606
12 à 16 850
16 à 20 121
20 à 0 239
— 386 —
Si Ton veut faire une division plus exacte , fondée
sur la déclinaison septentrionale et méridionale , on
trouve que dans les six heures d'ascension droite, de
9*" à 15^, rtiémisphère boréal contient seul 1111 né-
buleuses ou amas d'étoiles , répartis comme il
suit (12) :
De 9*» à 10*» 90
10 à 11 150
41 à 12 251
12 à 13 309
13 h iU 181
la à 15 130
Ainsi le véritable maximum , pour l'hémisphère
boréal, est entre l'i'^ et 13*^, c'est-à-dire très-voisin
du pôle nord de la Voie lactée. Plus loin, entre
15^ et 16^, en face d'Hercule, la décroissance est si
brusque , que de 130 on tombe immédiatement
à àO.
Dans l'hémisphère austral , le nombre des nébu-
leuses est moins considérable et la répartition est
beaucoup plus uniforme. Des espaces où l'on ne dé-
couvre point de traces de ces phénomènes y alternent
souvent avec des nuages sporadiques. Il faut excep-
ter une agglomération locale, plus pressée encore
que ne l'est, dans le ciel boréal , la région nébuleuse
de la Vierge; je veux parler des nuées de Magellan,
dont la plus grande contient à elle seule 300 nébu-
leuses. La région qui avoisine les pôles est, dans les
deux hémisphères, vide de nébuleuses, et, jusqu'à la
distance de 15% le pôle sud en est plus dépourvu en-
— 387 —
core que le pôle nord, dans la proportion de 7 à 4.
Il existe près du pôle nord actuel une petite nébu-
leuse qui n'en est distante que de 5'. Une nébuleuse
semblable , inscrite dans le catalogue du Cap de Sir
John Herschel sous le numéro 3170, et nommée
par lui avec raison Nebula polarissima anstralis (asc.
droite 9'' 27'56", dist. au pôle Nord 179'' 34' 14") est en-
core à 25' du pôle sud. Cette solitude du pôle austral,
l'absence même d'une étoile polaire visible à l'œil
nu, était déjà pour Amerigo Vespucci et Vicente
Yanez Pinzon le sujet de plaintes anières, lorsque vers
la fin du xv^ siècle , ils pénétrèrent fort au delà de
réquateur, jusqu'au promontoire Saint Augustin , et
que Vespucci supposa faussement que ce beau pas-
sage du Dante u lo mi volsi a man destra e posi
mente..., » et cet autre sur les quatre étoiles « non
viste mai fuor ch' alla prima gente , » se rappor-
taient aux étoiles polaires antarctiques (43).
Nous avons considéré jusqu'ici dans les nébuleuses
leur nombre et leur distribution sur ce que l'on ap-
pelle le firmament; distribution purement apparente,
qui ne doit point être confondue avec leur réparti-
tion réelle à travers les espaces célestes. Cet exa-
men achevé, nous passons aux différences singu-
lières que présentent leurs formes individuelles.
Tantôt ces formes sont régulières , et dans ce cas
elles sont sphéri(]ues, elliptiques à différents degrés,
annulaires, planétaires ou semblables à la photo-
sphère qui enveloppe une étoile ; tantôt elles sont ir-
régulières et non moins difiiciles à classer que celles
— 388 —
des nuages aqueux qui errent dans notre atmosphère.
La forme normale des nébuleuses est la forme ellip-
tique qu'on peut appeler sphéroïdale (14). A parité de
grossissement, plus les nébuleuses se rapprochent
de la forme sphérique, plus elles sont facilement ré-
solubles en étoiles. Lorsqu'au contraire elles sont
très-comprimées dans un sens et allongées dans l'au-
tre, la résolution est d'autant plus difficile (45).
Souvent on a l'occasion de reconnaître que la forme
ronde des nébuleuses se change graduellement
en une ellipse allongée (46). La condensation de
la nébulosité laiteuse s'opère toujours autour d'un
point central ; quelquefois même il y a plusieurs
centres ou noyaux. On ne connaît de nébuleuses
doubles que parmi les nébuleuses rondes ou ovales.
Comme on ne peut percevoir aucun changement
relatif de position entre les individus qui forment ces
couples, attendu que ce changement ou n'existe pas
ou est extraordinairement lent , il s'ensuit que l'on
n'a pas de critérium à l'aide duquel on puisse con-
stater la réalité de cette relation réciproque, comme
on distingue les étoiles doubles physiquement de
celles qui ne le sont qu'optiquement. Il existe des
représentations d'étoiles doubles dans les P/iiloso-
phical Transactions pour l'année 1833 (fig. 68-71). On
peut consulter aussi à ce sujet les ouvrages d'Her-
schel , Outlines of astronomy (§ 878), et Observations
at the Cape of Good H ope (§ 120).
Les nébuleuses perforées sont une des curiosités
les plus rares. D'après lord Rosse, on en connaît
— 389 —
actuellement 7 dans rhémisphère boréal. La plus
Cfjlèbre de ces nébuleuses annulaires , qui porte le
n" 57 sur le catalogue de Messier , le n" 3023 sur
celui de Sir John Herschel , est situé entre 6 et y de
la Lyre; elle a élé découverte en 1779, à Toulouse,
par Darquier, au moment où la comète signalée par
Bode s'approcha de la région qu'elle occupe. Elle a
environ la grandeur apparente du disque de Jupiter,
et forme une ellipse dont les deux diamètres sont
dans le rapport de 4 à 5. L'intérieur de l'anneau ,
est non point noir, mais faiblement éclairé. Déjà Sir
William Herschel avait distingué quelques étoiles
dans l'anneau ; Lord Rosse et Bond l'ont résolu en-
tièrement (47). La partie vide de l'anneau est au
contraire d'un noir très-foncé dans les belles nébu-
leuses perforées de l'hémisphère austral, qui por-
tent les numéros 3680 et 3686. De plus, la dernière
présente non pas la forme d'une ellipse , mais celle
d'un cercle parfait (48). Toutes sont vraisemblable-
ment des amas d'étoiles en forme d'anneau. A me-
sure qu'augmente la puissance des instruments , les
contours des nébuleuses elliptiques , aussi bien que
des nébuleuses annulaires, paraissent en général
moins nettement terminés. Dans le télescope gigan-
tesque de Lord Rosse, l'anneau de la nébuleuse de la
Lyre présente une ellipse simple , avec des appen-
dices nébuleux qui ressemblent à des fils et suivent
des directions très-divergentes. Un fait particulière-
ment remarquable, c'est la transformotion d'une
nébuleuse qui , vue à travers des instruments plus
— 590 —
faibles, était simplement elliptique, et qui s'est
changée, grâce au télescope de Lord Rosse, en une
nébuleuse à forme d'écrevisse (Crab-Nebula).
Les nébuleuses planétaires , découvertes pour la
première fois par Herschel le père , et qui doivent
être rangées parmi les plus merveilleux d'entre les
phénomènes célestes, sont moins rares que les né-
buleuses perforées. Cependant , d'après Sir John
Herschel , il nen existe pas plus de 25 , dont les 3/i
appartiennent à l'hémisphère austral. Elles offrent
une ressemblance surprenante avec les disques des
planètes. Elles sont pour la plupart rondes ou un peu
ovales. Tantôt les contours sont nettement accusés,
tantôt ils sont fondus dans un brouillard vaporeux.
Les disques de plusieurs d'entre elles ont un éclat
doux parfaitement uniforme; d'autres sont comme
mouchetées ou nuancées de marbrures légères
(mottled or of a peculiar texture, as if cardled) ; jamais
on ne remarque aucune augmentation d'intensité vers
les centres. Lord Rosse a constaté que cinq de ces né-
buleuses planétaires sont des nébuleuses perforées
avec une ou deux étoiles au milieu. La plus grande
nébuleuse planétaire découverte par Méchain , en
1781 , est située près de g de la Grande-Ourse. Son
disque a un diamètre de 2' W (i9). La nébuleuse pla-
nétaire de la Croix-du-Sud, qui porte, dans le Voyage
au Cap de Sir John Herschel, le numéro 3365, a l'éclat
d'une étoile de 6' ou de T grandeur, bien que son
diamètre soit à peine de 12", Sa lumière est couleur
d'indigo, couleur qui se retrouve quoiqu'avec une
— 591 —
moindre intensité dans trois autres objets de la
même forme (50). Cette apparence de quelques nébu-
leuses planétaires ne prouve pas qu'elles ne soient
pas composées de petites étoiles ; car non-seulement
nous connaissons des systèmes binaires dont l'étoile
principale et le compagnon sont bleus; mais encore
il existe des amas stellaires composés uniquement
d'étoiles bleues, ou dans lesquels ces étoiles sont
mêlées à des étoiles rouges et jaunes (51).
La question de savoir si les nébuleuses planétaires
sont des étoiles nébuleuses très-éloignées , pour les-
quelles la différence d'éclat entre l'étoile centrale et
l'atmosphère environnante ne pourrait être perçue
par les instruments dont nous disposons, a été tran-
chée déjà dans le premier volume de cet ouvrage (52).
Puisse le télescope gigantesque de Lord Rosse nous
fournir les moyens d'approfondir la nature surpre-
nante de ces nébulosités planétaires. S'il est déjà si
difficile de se faire une idée nette des conditions dyna-
miques d'après lesquelles, dans un amas d'étoiles de
forme sphérique ou sphéroïdale , les soleils tournant
en cercle et pressés les uns contre les autres de telle
façon , que les plus rapprochés du centre sont aussi
les plus denses spécifiquement, peuvent former un
système en équilibre (53), la difficulté augmente en-
core pour ces nébuleuses planétaires de forme circu-
laire et nettement délimitée , dont toutes les parties
offrent une clarté uniforme, sans aucune augmen-
tation d'intensité vers le centre. Un tel état de choses
est plus difficile à concilier avec la forme globu^
— 392 —
laire, qui suppose l'agglomération de plusieurs mil-
liers de petites étoiles, qu'avec Thypothèse d'une pho-
tosphère gazeuse que l'on croit couverte , dans notre
Soleil, d'une couche de vapeur peu épaisse, non trans-
parente ou du moins très- faiblement éclairée. Il est
impossible d'admettre que , dans les nébuleuses pla-
nétaires , la clarté ne paraisse ainsi uniformément
répandue que parce que la différence entre le centre
et les bords s'évanouirait en raison del'éloignement?
Les étoiles nébuleuses de William Herschel (Nebu-
lous Stars) forment la quatrième et dernière classe
de nébuleuses à forme régulière. Ce sont de vérita-
bles étoiles entourées d'une nébulosité laiteuse qui
très-vraisemblablement se rattache au Soleil central
et en dépend. Cette nébulosité qui , suivant Lord
Rosse et M. Stoney, offre exactement , en certains
cas, l'apparence d'un anneau, a-t-elle une lumière
propre et forme t elle une photosphère comme dans
notre soleil, ou , ce qui est beaucoup moins vrai-
semblable , emprunte-t-elle sa lumière au Soleil cen-
tral? 11 existe sur ces questions des opinions très-
difiérentes. Derham et jusqu'à un certain point
aussi La Caille , qui a découvert beaucoup de né-
buleuses au cap de Bonne - Espérance , croyaient
que les étoiles sont à une grande distance des
nébuleuses et se projettent sur elles. Mairan pa-
raît avoir le premier exprimé cette opinion que les
étoiles nébuleuses sont entourées d'une atmosphère
brillante qui leur appartient en propre (54) . On trouve
même de plus grandes étoiles et, par exemple, des
— 393 —
étoiles de 7' grandeur, comme le numéro 675 du Ca-
talogue de 1833, dont la photosphère a un diamètre
de 2 à 3 minutes (55).
Les grandes masses nébuleuses de forme irré-
gulière doivent être mises tout à fait à part des
nébuleuses décrites jusqu'ici, qui toutes ont des
figures régulières ou du moins des contours plus ou
moins nettement indiqués. Ces masses présentent
les formes les plus variées et les moins symétriques ;
leurs contours sont indéterminés et confus. Ce sont
des phénomènes mystérieux que Ton peut appeler
sui generis , et qui plus que tous les autres ont donné
naissance à l'hypothèse d'après laquelle les espaces
célestes seraient remplis d'une matière cosmique,
brillante par elle-même et semblable au substra-
tum de la lumière zodiacale. Ces nébuleuses in-
formes, qui couvrent dans la voûte du Ciel des
espaces de plusieurs degrés carrés, forment un
contraste frappant avec une nébuleuse de forme
ovale, la plus petite de toutes les nébuleuses isolées,
qui a l'éclat d'une étoile télescopique de 14* gran-
deur, et se trouve entre les constellations de l'Autel
et du Paon (56 . On ne peut trouver deux nébuleuses
irréguiières qui se ressemblent (57). Cependant Sir
John Herschel, après des observations de plusieurs
années, leur reconnaît ce caractère commun que
toutes sont situées sur les bords ou à très-peu de
distance de la voie lactée , et peuvent en être consi-
dérées comme des émanations ou comme des frag-
ments détachés. Au contraire , les petites nébuleuses
qui ont une forme régulière et des contours géné-
ralement arrêtés , sont ou répandues sur toute la
surface du Ciel, ou rassemblées très-loin de la Voie
lactée dans des régions particulières, comme, par
exemple , dans l'hémisphère austral , près de la
Vierge et des Poissons. A la vérité il n'y a pas moins
de 15** de distance entre la grande nébuleuse irré-
gulière de rÉpée d'Orion et les bords visibles de
la Voie lactée; mais peut-être cette masse diffuse
appartient-elle au prolongement de la branche de
la Voie lactée qui , partant de a et de s de Persée ,
va se perdre vers Aldébaran et vers les Hyades,
et dont il a déjà été question plus haut. Les plus
belles étoiles de la constellation d'Orion , celles qui
lui ont valu sa vieille célébrité, font partie de la
zone qui comprend les étoiles les plus grandes et
probablement aussi les plus voisines de nous , et dont
un arc de grand cercle, passant par e d'Orion et « de
la Croix, dans l'hémisphère austral, peut indiquer
le prolongement (58).
L'opinion beaucoup plus ancienne et très -répan-
due, d'après laquelle une voie lactée de nébuleuses
couperait presque à angle droit la voie lactée des étoi-
les (59), n'a nullement été confirmée par des observa-
lions nouvelles et plus exactes sur la répartition des
nébuleuses régulières à travers le firmament (60).
Il y a sans doute, comme je l'ai remarqué déjà, des
agglomérations de nébuleuses vers le pôle nord de la
voie lactée ; il en existe aussi un grand nombre vers
le pôle Sud , près des Poissons ; mais de nombreuses
— â95 —
interruptions ne permettent point de dire qu'une zone
de nébuleuses formant un grand cercle de la sphère
relie ensemble ces deux pôles. En 1784, William
Herschel avait exposé cette conjecture à la fin de son
premier Traité sur la Structure du Ciel ; mais il avait
eu soin de la présenter comme douteuse , et avec la
réserve qui convenait à un si grand observateur.
Parmi les nébuleuses irrégulières, les unes, telles
que celles de TÉpée d'Orion , de n d'Argo, du Sagittaire
et du Cygne, sont remarquables par leurs dimensions
extraordinaires; d'autres, celles, par exemple, qui
portent les numéros 27 et 51 dans le catalogue de
Messier, le sont par la bizarrerie de leur forme.
En ce qui concerne la grande nébuleuse de l'Épée
d'Orion , j'ai déjà fait observer que Galilée , qui s'est
si longtemps occupé des étoiles comprises entre le
Baudrier et l'Épée, et qui a même dressé une carte de
cette région , ne la mentionne pas (61). La nébuleuse
qu'il appelle Nebulosa Orionis et qu'il a représentée
avec la Nebulosa Preesepe, est, suivant sa déclaration
expresse, un amas de petites étoiles pressées(stellarum
constipatarum), situé dans la Tête d'Orion. Sur le
dessin qu'il a donné dans son Sidereus nuncius (§ 20)
et qui embrasse l'espace compris entre le Baudrier et
le commencement de l'Épaule droite (« d'Orion), je
reconnais, au-dessus de l'étoile i, Tétoile multiple 3-.
La force amplifiante des instruments employés par
Galilée variait de 8 fois à 30 fois. Comme la nébuleuse
de l'Épée d'Orion n'est point isolée, et que vue à
travers des télescopes insuflîsants ou par une atmo-
— 396 —
sphère trop peu transparente , elle forme nne espèce
d'auréole autour de l'étoile 3-, il n'est point étonnant
que sa forme et son existence individuelle aient
échappé au grand observateur florentin : il croyait
peu d'ailleurs aux nébuleuses (62). Ce fut 24 ans après
la mort de Galilée, en 1656 , que Huygens découvrit
la nébuleuse d'Orion. Il en donna une image gros-
sière dans son Systema Saturmum , publié en 1659:
«Lorsque j'observais, dit ce grand homme, à travers un
réfracteur de 23 pieds de longueur focale, les bandes
variables de Jupiter, la tache sombre qui avoisine
l'équateur de Mars et quelques autres détails peu visi-
bles particuliers à cette planète, je remarquai dans les
étoiles fixes un phénomène qui , à ma connaissance ,
n'avait encore été signalé par personne, et ne pouvait
être reconnu exactement qu'à l'aide des grands té-
lescopes dont je me sers. Les astronomes ont compté
dans l'Épée d'Orion trois étoiles très -voisines l'une
de l'autre. Lorsque , en 1656 , j'observai par hasard
celle de ces étoiles qui occupe le centre du groupe ,
au lieu d'une j'en découvris 12, résultat que d'ailleurs
il n'est point rare d'obtenir avec les télescopes. De ces
étoiles il y en avait 3 qui , comme les premières , se
touchaient presque , et 4 autres semblaient briller à
travers un nuage , de telle façon que l'espace qui les
environnait paraissait beaucoup plus lumineux que le
reste du Ciel , qui était serein et entièrement noir. On
eût cru volontiers qu'il y avait une ouverture dans le
Ciel qui donnait jour sur une région plus brillante.
Depuis et jusqu'à ce jour, j'ai revu le même phéno-
-^ o97 —
mène sans aucun changement; de sorte que ce pro-
dige, quel qu'il soit, paraît être fixé là pour toujours.
Jamais je n'ai rien vu de semblable dans les autres
étoiles fixes. » Ainsi, Huygens ne connaissait pas non
plus la nébuleuse d'Andromède, découverte 54 ans au-
paravant par Simon Marins , ou n'y avait pris que peu
d'intérêt. «Les prétendues nébuleuses, ajoute encore
Huygens, et la voie lactée elle-même, vues à travers
le télescope, ne montrent aucune trace de nébulosité
et ne sont pas autre chose que des amas d'étoiles
pressées (63). » Cette première description si vive
prouve la force et la fraîcheur de l'impression qu'a-
vait reçue Huygens. Mais quelle différence entre la
représentation graphique qu'il donna de ce phéno-
mène , au milieu du xvii' siècle , ou les figures déjà
un peu moins imparfaites, il est vrai, de Picard, de
Le Gentil et de Messier, et les admirables dessins
publiés, en 1837, par Sir John Herschel et, en 1848,
par William Granch Bond , directeur de l'Observa-
toire de Cambridge , aux États-Unis (64).
Sir John Herschel eut ce précieux avantage ,
que, muni d'un réflecteur de 20 pieds, il observa
depuis l'année j 834 la nébuleuse d'Orion , au cap
de Bonne- Espérance, à une altitude de 60^(65),
et put corriger encore le dessin qu'il avait fait de
1824 à 1826 (66). En même temps il détermina ,
près de ^d'Orion, la position de 150 étoiles, comprises
pour la plupart entre la 15^ et la 18' grandeur. Le
célèbre trapèze qui n'est entouré d'aucune nébulosité
est formé par 4 étoiles de 4% de 6% de 7' et de 8' gran-
111. '2(\
— 398 —
deur. La 4* étoile avait été découverte à Bologne
par Dominique Cassini, en 1666, suivant l'opi-
nion commune (67) ; la 5* (y') le fut en 1826 par
Struve; la 6^ (a'), de 13" grandeur, en 1832 par Sir
John Herschel. Le directeur de FObservatoire du
Collegio romano , de Vico , a déclaré avoir reconnu ,
à l'aide de son grand réfracteur de Cauchoix, 3 au-
tres étoiles dans l'intérieur même du trapèze, au coni-
mencement de 1839. Ces étoiles n'ont été vues ni par
Herschel fils ni par William Bond. La partie nébu-
leuse la plus voisine du trapèze qui n'offre par lui-
même presque aucune trace de nébulosité, la Regio
Huygeniana formant la partie antérieure de la tête,
au-dessus de la gueule , est tachetée , de texture
granulaire, et a été résolue en amas stellaire par le
télescope de Lord Rosse, aussi bien que par le grand
réfracteur de Cambridge, aux États-Unis (68). Parmi
les observateurs modernes , Lamont à Munich, Cooper
et Lassell en Angleterre , ont aussi déterminé dans
cette nébuleuse la position de beaucoup de petites
étoiles. Lamont a employé à cet usage un pouvoir
grossissant de 1200 fois. William Herschel croyait
avoir acquis la certitude, en comparant entre elles
les observations qu'il avait faites de 1783 à 1811 ,
toujours avec les mêmes instruments , que l'éclat et
les contours de la grande nébuleuse d'Orion étaient
sujets à des changements (69). Bouillaud et Le Gentil
avaient exprimé la même opinion touchant la nébu-
leuse d'Andromède. Les expériences approfondies de
Sir John Herschel ont rendu au moins extrêmement
— 399 —
douteux ces changements cosmiques que l'on tenait
pour certains.
Grande nébuleuse de n d'Jrgo, — Elle est située dans
cette région de la Voie lactée si remarquable par son
magnifique éclat, qui, partant des pieds du Centaure,
traverse la Croix du Sud, et s'étend jusqu'au milieu
du Navire. L'éclat de cette région céleste est telle-
ment extraordinaire qu'un observateur exact, na-
turalisé dans les contrées tropicales de l'Inde, le
capitaine Jacob, fait la remarque, d'ailleurs par-
faitement d'accord avec les résultats auxquels je
suis arrivé moi-même après une expérience de
quatre années , que sans lever les yeux vers le
ciel , on est averti par un accroissement subit de la
lumière que la Croix se lève à Fhorizon , et avec elle
la zone qui l'accompagne (70). La nébuleuse au mi-
lieu de laquelle se trouve n d'Argo, rendue si célèbre
par les changements d'intensité de sa lumière, couvre
sur la voûte céleste plus de 4/7 d'un degré carré (71).
Partagée en plusieurs masses irrégulières et jetant
une lumière inégale, la nébuleuse ne présente jamais
cette apparence tachetée et granulaire qui pourrait
la faire croire réductible. Elle enferme un espace vide,
de forme ovale , sur lequel est répandue une lueur
très-faible. Sir John Herschel, après deux mois passés
à prendre des mesures, a donné, dans son Voyage au
Cap, un beau dessin du phénomène entier (72). Il a dé-
terminé dans la nébuleuse de y; d'Argo jusqu'à 1216
positions d'étoiles , comprises pour la plupart entre
la 14' et la 16' grandeur. Ces étoiles forment une série
-- /lOO —
qui, dépassant de beaucoup la nébulosité, va rejoindre
la Voie lactée , dans laquelle elles se projettent et
se détachent sur le fond absolument noir du Ciel.
Elles n'ont par conséquent aucune relation avec la
nébuleuse elle-même et en sont vraisemblablement
fort éloignées. Toute la partie avoisinante de la Voie
lactée est d'ailleurs tellement riche , non pas en amas
stellaires mais en étoiles, qu'entre 9*^50' et 11^34'
d'ascension droite , on a trouvé, en jaugeant le Ciel,
à l'aide du télescope (Star-gauges) , une moyenne
de 3138 étoiles par chaque degré carré. Ce nombre,
pour 11^34' d'ascension droite, s'élève jusqu'à 5093.
Cela fait plus d'étoiles, pour un seul degré, que l'on
n'en peut apercevoir à l'œil nu, dans l'horizon de
Paris ou dans celui d'Alexandrie (73).
Nébuleuse du Sagittaire, — Cette nébuleuse, d'une
étendue considérable, semble formée de quatre mas-
ses distinctes (asc. droite 17^53', dist. au pôle Nord
114" 21'). L'une de ces masses se divise à son tour en
trois parties. Toutes sont interrompues par des places
dépourvues de nébulosité. L'ensemble de la nébu-
leuse avait été vu déjà, mais d'une manière impar-
faite , par Messier (74).
Nébuleuse du Cygne, — Elle est composée de plu-
sieurs masses irrégulières dont l'une forme une
bande fort étroite, traversant l'étoile double r, du
Cygne. Mason a reconnu le premier la connexion
qu'établit entre ces masses inégales leur singulière
texture, assez semblable à des cellules (75).
Nébuleuse du Renard, — Elle a été vue imparfaite-
— aoi —
nient par Messier, qui Ta fait entrer dans son ca-
talogue sous le numéro 27. Elle fut découverte par
occasion , pendant que Ton observait la comète de
Bode, de 1779. La détermination exacte de la position
(asc. droite 19^ 52', dist. au pôle Nord 67° 43') et le
premier dessin qui en ait été fait sont dus à Sir John
Herschel. Cette nébuleuse de forme régulière reçut
d'abord le nom de Dumb-bell qui lui fut donné à cause
de l'aspect qu'elle présentait, vue à travers un réflec-
teur de 18 pouces d'ouverture. On appelle Dumb-
bell, en Angleterre, des masses de fer plombées
et revêtues de cuir, dont on se sert pour donner
aux muscles plus de force et d'élasticité. Un réflec-
teur de 3 pieds de Lord Rosse a fait évanouir cette ap-
parence (76). La nébuleuse du Renard a été résolue
par le même instrument en un grand nombre d'é-
toiles ; mais ces étoiles sont toujours restées mêlées
de matière nébuleuse. On peut voir une reproduc-
tion récente et très-curieuse de la nébuleuse du
Renard dans les Philosophical Transactions pour
Tannée 1850 (pL XXXVIII, fig. 17).
Nébuleuse en spirale du Chien de chasse septentrion
w^/.— Cette nébuleuse, signalée par Messier le 13 oc-
tobre 1773, à l'occasion de la comète qu'il avait dé-
couverte, est située dans l'oreille gauche d'Astérion,
très-près de -n (Benetnasch) qui fait partie de la queue
de la Grande-Ourse. Elle porte le n*' 51 dans la liste
de Messier, le n° 1622 dans le grand catalogue des
Philosophical Transactions (1833, p. 496, fig. 25).
Elle est un des phénomènes les plus remarquables
— ao2 —
que présente le firmament , en raison de sa configura-
tion singulière, et de la métamorphose que lui a fait
subir le télescope de 6 pieds anglais de Lord Rosse.
Dans le réflecteur de 18 pouces de Sir John Herschel
cette nébuleuse paraissait de forme sphérique et en-
tourée à distance d'un anneau isolé, de manière à
représenter notre amas lenticulaire d'étoiles et l'an-
neau formé par la Voie lactée (77). Le grand télescope
de Parsonstown a changé tout cela en une espèce de
limaçon , en une spirale brillante , aux replis iné-
gaux et dont les deux extrémités, c'est-à-dire le
centre et la partie extérieure, sont terminées par des
nœuds épais, granulaires et arrondis. Le docteur
Nichol a publié un dessin de cette nébuleuse , qui a
été présenté par Lord Rosse au congrès scientifique
de Cambridge, en 1845 (78); mais le portrait le plus
exact est celui qu'en a donné M. Johnstone Stoney
dans les Philosophical Transactions pour l'année 1850
(1^- part., pi. XXXV, fig. i). Le n^99 de Messier pré-
sente aussi l'image d'une spirale, avec cette diffé-
rence qu'il n'a qu'un seul nœud au centre. La même
forme se retrouve encore dans d'autres nébuleuses
de l'hémisphère boréal.
Il me reste à traiter plus en détail que je ne l'ai pu
faire en traçant le Tableau de la Nature (79) , d'un
objet unique dans le monde des phénomènes célestes,
et qui ajoute encore au charme pittoresque de l'hémi-
sphère austral, je dirais presque à la grâce du paysage.
Les deux Nuages de Magellan, qui vraisemblablement
reçurent d'abord de pilotes portugais, puis des Hol-
landais et des Danois le nom de Nuages du Cap (80) ,
captivent l'attention du voyageur, ainsi que je l'ai
éprouvé moi-même, par leur éclat, par l'isolement
qui les fait ressortir davantage et par l'orbiie qu'ils
décrivent de concert autour du pôle Sud, bien qu'à
des dislances inégales. Que leur nom actuel, qui a
évidemment pour origine le voyage de Magellan , ne
soit pas le premier sous lequel on les ait désignés,
c'est ce qui résulte de la mention expresse et de la
description qu'ont faite de la translation circulaire
de ces nuages lumineux , le Florentin Andréa Corsali,
dans son Voyage à Gochin , et le secrétaire de Fer-
dinand d'Aragon, Pierre Martyr de Anghiera, dans
son livre de Rébus Oceanicis et Orbe Novo (dec. I,
lib. IX, p. 96) (81). Ces deux indications sont de
l'année 1515, et ce n'est que dix ans plus tard que
le compagnon de Magellan, Pigafetta, parle des
nebbiette dans son Journal de voyage , au moment où
le vaisseau Victoria sortait du détroit de Patagonie
povir entrer dans la mçr du Sud. L'ancien nom de
Nuages du Cap ne peut veuir de la constellation du
Mont de la Table, qui est voisine de ces nuages et
plus rapprochée encore du pôle , puisque la dénomi-
nation de Mont de la Table fut introduite pour la pre-
mière fois par La Caille. Il viendrait plutôt de la vé-
ritable montagne de la Table et du petit nuage qui
en domine le faîte, et fut longtemps regardé avec
effroi par les matelots comme une annonce de tem-
pête. Nous verrons bientôt que les deux Nuées de
Magellan , longtemps remarquées dans l'hémisphère
— m —
du Sud avant de recevoir un nom, en recurent suc-
cessivement plusieurs, empruntés aux routes qu'avait
adoptées le commerce, à mesure que la navigation
s'étendit, et qu'il régna sur ces routes une plus
grande activité.
Le mouvement de la navigation sur la mer de
l'Inde, qui baigne les côtes occidentales de l'Afri-
que , familiarisa de très-bonne heure les marins
avec les constellations voisines du pôle Antarctique ,
particulièrement à partir du règne des Lagides, et
depuis que l'on eut appris à se régler sur les mous-
sons. Dès le milieu du x' siècle , on trouve chez les
Arabes, ainsi que je l'ai remarqué plus haut, un nom
servant à désigner la plus grande des Nuées magella-
niques, dont Ideler a démontré l'identité avec le Bœuf
blanc (el-Bakar) du célèbre derviche Abdourrhaman
Soufi, de Raï , ville de l'Irak persan. Dans l'introduc-
tion du livre intitulé «Connaissance du Ciel étoile,»
Abdourrahman s'exprime en ces termes : « Aux pieds
du Suhel , il existe une tache blanche que l'on n'aper-
çoit ni dans l'Irak, c'est-à-dire dans la contrée de
Bagdad , ni dans le Nedschs (Nedjed), la partie la plus
septentrionale et la plus montagneuse de l'Arabie,
mais qui est visible dans le Tchama méridional , entre
la Mecque et la pointe de l'Yemen , le long des côtés
de la mer Rouge (82). » Il est question expressément
dans ce passage du Suhel de Ptolémée, c'est-à-dire de
Canopus , bien que les astronomes arabes nomment
également Suhel plusieurs grandes étoiles du Navire
I el-Sefina]. La position du Bœuf blanc relativement
à Canopus est indiquée ici aussi exactement qu'on
j)ouvait le faire à l'œil nu , car l'ascension droite
de Canopus est de 6'' 20', et celle du bord oriental de
la grande nuée magellanique 6*'0'. La visibilité de la
Nubecula major dans les latitudes septentrionales n'a
pu être sensiblement modifiée, depuis le x^ siècle, par
la précession des équinoxes , puisque dans les neuf
siècles qui ont suivi elle a atteint le maximum de
sa distance au pôle Nord. Si Ton admet la nouvelle
détermination de lieu de la grande Nuée de Magellan
par Sir John Herschel, il en faut conclure qu'au
temps d'Abdourrhaman Soufi elle était visible en
totalité jusqu'à 17" de latitude Nord ; elle l'est aujour-
d'hui jusqu'à environ 18°. Les Nuages du Sud pou-
vaient être vus par conséquent dans toute la partie
sud-ouest de l'Arabie et dans l'Hadhramaut, le pays
de l'encens, de même que dans l'iemen, où floris-
sait la civilisation de Saba et qui reçut l'antique im-
migration des Yoctanides. La formation de plusieurs
établissements arabes sur les côtes orientales de
l'Afrique , dans les régions intertropicales au nord
et au sud de l'équateur, dut servir aussi à répandre
des notions plus exactes sur les constellations du
ciel austral.
Les premiers pilotes civilisés qui visitèrent les côtes
occidentales de l'Afrique, au delà de la ligne, furent
des Européens, particulièrement des Catalans et des
Portugais. Des documents incontestables tels que le
planisphère de Marino Sanuto Torsello (1306), l'ou-
vrage génois conmi sous le non^ de Portulano rne^
— 406 —
diceo (1351), le Planisferio de la Palatina (1417) et
le Mappamondo di fra Mauro Camaldolese (de 1457
à 1459) prouvent que 178 ans avant la prétendue
découverte du Cabo Tormentoso ou cap de Bonne-
Espérance, faite par Bartholomé Diaz au mois de
mai 1487, Ton connaissait déjà la configuration trian?
gulaire de l'extrémité méridionale du continent afrir
cain (83). Si l'on songe à l'importance nouvelle et
toujours croissante que prit cette route commerciale
par suite de l'expédition de Gama et au but commun
de tous les voyages accomplis le long des côtes de
l'Afrique , il paraît naturel que les pilotes aient
donné le nom de Nuages d%i Cap aux deux nébulo?
sites qui , dans chaque voyage au Gap , les frapr
paient comme de remarquables phénomènes.
Les efforts persévérants tentés pour dépasser l'équa-
teur le long des côtes orientales de l'Amérique , et pé-
nétrer jusqu'à la pointe méridionale du continent,
depuis l'expédition de Alonso de Hojeda et de Amerigo
Vespucci en 1455, jusqu'à celle de Magellan et de Se-
bastien del Gano en 1 521 , et à celle de Garcia de Loaysa
et de Francisco de Hoces en 1525 (84), avaient attiré
sans interruption l'attention des navigateurs sur les
constellations du Sud. D'après les Journaux de voyages
que nous possédons et qui sont confirmés par les té-
inoignages historiques d'Anghiera, cela fut vrai sur-
tout pour le voyage d' Amerigo Vespucci et de Vicente
Yanez Pinzon , qui amena la découverte du cap Saint-
Augustin, par 8° 20' de latitude australe. Vespucci se
vante d'avoir vu 3 Canopi dont un obscur, Canopo
— 407 —
fosco , et 2 Canopi risplendenti. L'ingénieux auteur
des ouvrages sur les Noms des Étoiles et sur la Chro-
nologie, Ideler, s'est efforcé d'éclaircir la description
très-confuse faite par Amerigo Yespucci dans sa Lettre
à Lorenzo Pierfrancesco de Medici ; il en résulte que
Vespucci a employé le mot Canopus dans un sens
aussi indéterminé que les astronomes arabes avaient
coutume d'employer le mot SuheL Ideler démontre
que le Canopo fosco nella via lattea n'est pas autre
chose que la tache noire ou le grand sac de Charbon
de la Croix du Sud , et que la position assignée par
Vespucci à 3 étoiles resplendissantes, dans lesquelles
on croit reconnaître «, ê et y de la petite Hydre, rend
très-vraisemblable cette opinion que le Canopo ris-
plendente di notabile grandezza est la Nubecula
major, et l'autre Canopo risplendente , la Nubecula
minor (85). Il y a toujours lieu de s'étonner que
Vespucci n'ait point comparé ces nouveaux phéno-
mènes célestes à des nuages, comme le firent à pre-
mière vue tous les autres observateurs. On serait
tenté de croire que cette comparaison dut s'offrir
irrésistiblement à l'esprit. Pierre Martyr Anghiera ,
qui connaissait personnellement tous les grands na-
vigateurs de cette époque, et dont les lettres sont
écrites sous l'impression toute vivante encore de
leurs récits , retrace , de manière à ce qu'on ne
puisse s'y méprendre, l'éclat doux , mais inégal , des
Nubeculee : « Assecuti sunt Porlugalenses alterius
poli gradum quinquagesimum amplius, ubi punctum
(Polum?) circumeuntes quasdam nubeculas lieet iu-
— 408 —
tueri veluti in lactea via sparsos fulgores per universi
cœli globum inlra ejus spatii latitudinem (86). » Le
renom brillant et la durée de la circumnavigation de
Magellan qui, commencée au mois d'août 1519, ne
fut achevée qu'au mois de septembre 1522 , le long
séjour fait par un nombreux équipage sous le ciel
austral, obscurcit le souvenir de toutes les observa-
tions antérieures , et le nom de Nuées de Magellan se
répandit chez toutes les nations maritimes qui peu-
plent les côtes de la mer Méditerranée.
J'ai montré par un seul exemple comment l'élar-
gissement de l'horizon géographique vers les contrées
du sud avait ouvert un nouveau champ à l'astronomie
d'observation. Quatre objets surtout durent exciter
sous ce nouveau ciel la curiosité des pilotes : la re-
cherche d'une étoile polaire australe; la forme de la
Croix du Sud, qui occupe une position perpendicu-
laire, lorsqu'elle passe par le méridien du lieu où est
placé l'observateur ; les Sacs de charbon et les nuages
lumineux qui circulent autour du pôle. Nous
lisons dans VArte de navegar de Pedro de Médina
(lib. V, cap. 11) , qui, publié pour la première fois
l'an 1545, a été traduit en plusieurs langues, que
dès le milieu du xvi^ siècle , on faisait servir à la dé-
termination de la latitude les hauteurs méridiennes
du Cruzero, Après s'être contenté d'observer ces phé-
nomènes , on se mit vite en devoir de les mesurer.
Le premier calcul sur la position des étoiles voisines
du pôle antarctique fut fait à l'aide de distances an-
gulaires, prises à i)arlir d'étoiles connues, dont la
place avait été déterminée par Tycho, dans les Tables
Rudolphines. Ce premier travail appartient, comme
je l'ai remarqué déjà (87) , à Petrus Theodori de
Emden et au Hollandais Frédéric Houtman , qui ,
vers Tan i59i, naviguait sur la merde l'Inde. Les
résultats de leurs mesures trouvèrent place bientôt
dans les catalogues d'étoiles et dans les globes cé-
lestes de Blaeuw (1601), de Bayer (1603) et de
Paul Mérula (1605). Tels sont, jusqu'à Halley (1677)
et jusqu'aux grands travaux astronomiques des jé-
suites Jean de Fontaney, Michaud et Noël, les faibles
débuts qui servirent de fondements à la topographie
du Ciel austral. Ainsi l'histoire de l'astronomie et
l'histoire de la géographie, unies entre elles par
des liens étroits , nous retracent conjointement les
époques mémorables qui, depuis 250 ans à peine, ont
préparé ce résultat, de pouvoir reproduire d'une
manière exacte et complète l'image cosmique du fir-
mament, aussi bien que les contours des continents
terrestres.
Les Nuées de Magellan , dont la plus grande
couvre 42 degrés, la plus petite 10 degrés carrés
de la voûte céleste, produisent à l'œil nu et au pre-
mier abord la même impression que produiraient
deux portions détachées et d'égale grandeur de la Voie
lactée. Par un beau clair de Lune le petit nuage
disparaît entièrement, l'autre perd seulement une
partie considérable de son éclat. Le dessin qu'a
donné de ces nuages Sir John Herschel est excellent
et s'accorde à merveille avec les souvenirs les plus
— 410 -
vivants que j'aie gardés de mon séjour au Pérou. C'est
aux laborieuses observations faites en 1837 par cet
observateur au cap de Bonne-Espérance que l'astro-
nomie doit la première analyse exacte de ce singulier
aggrégat des éléments les plus divers (88). Sir Joha
Herschel y a reconnu un grand nombre d'étoiles
isolées , des essaims d'étoiles et des amas stellaires
de forme sphérique , ainsi que des nébuleuses ré-
gulières ou irrégulières, et plus pressées qu'elles ne le
sont dans la zone de la Vierge et dans la chevelure
de Bérénice. La multiplicité de ces éléments ne
permet pas de considérer les Nubeculse , ainsi qu'on
l'a fait trop souvent, comme des nébuleuses d'une
dimension extraordinaire, non plus que comme des
parties détachées de la Voie lactée. Les amas globu-
laires et surtout les nébuleuses ovales sont très-clair-
semées dans la Voie lactée , à l'exception d'une petite
zone comprise entre l'Autel et la queue du Scor-
pion (89).
Les Nuées de Magellan ne se rattachent ni entfe
elles ni avec la Voie lactée par aucune nébulosité per-
ceptible* A part le voisinage de l'amas stellaire du
Toucan (90), la plus petite est située dans une espèce
de désert. L'espace occupé par l'autre est moins com-
plètement vide d'étoiles. La structure et la configu-
ration intérieure de la Nubecula major sont compli-
quées de telle façon que l'on y trouve, comme dans
le n° 2878 du catalogue d'Herschel , des masses repro-
duisant exactement l'état d'aggrégation et la forme
de la nuée entière. La conjecture du savant Horner
— Ml —
que les Nuées de Magellan auraient fait autrefois partie
de la Voie lactée, où même, disait- il, on peut recon-
naître encore la place qu'elles occupaient , est une rê^
verie, aussi bien que cette autre hypothèse d'après la-
quelle ces nuées auraient, depuis le temps de LaCaille,
changé de position et fait un mouvement en avant.
Leur position avait été d'abord fixée d'une manière
inexacte, à cause du peu de netteté de leurs contours
vus à travers des télescopes de petite ouverture. Sir
John Herschel fait remarquer que, sur tous les globes
célestes et sur toutes les cartes sidérales, la Nubecula
rainor n'est point à sa place , et que l'erreur est de
prèsd'une heure d'asc. droite. D'après lui la Nubecula
minor est située entre les méridiens de 0*^28' et i'^lS',
et entre 162" et 165" de distance au pôle Nord ; la
Nubecula major entre 1*^40^ et 6*^0' d'asc. droite,
entre 156° et 162" de distance au pôle Nord. Dans la
première il n'a pas déterminé en ascension droite et
en déclinaison moins de 919 objets distincts, étoiles,
nébuleuses et amas stellaires. Il en a déterminé 2i4
dans la seconde. Ces objets doivent être répartis
comme il suit :
Nubec. maj. 582 étoiles, 291 nébuleuses, 46 amas stellaires.
Nubec. min. 200 — 37 — 7 —
L'infériorité numérique des nébuleuses dans le
petit nuage est frappante. Elles sont , relativement
aux nébuleuses du grand nuage, dans le rapport de
1 à 8, tandis que les étoiles isolées sont comme 1 est
à 3. Ces étoiles, cataloguées au nombre de près de 800,
-- 412 --^
sont pour la plupart de 7^ et de 8' grandeur; quel*
ques-unes sont de 9' et même de 10% Au milieu du
grand nuage , existe une nébuleuse signalée déjà par
La Caille (n'* 30 de la Dorade , Bode ; n° 2941 de Sir
John Herschel), et qui n'a point d'égale sur toute la
surface du ciel. Cette nébuleuse occupe à peine 1/500
de Taire du nuage , et déjà Sir John Herschel a dé-
terminé dans cet espace la position de 105 étoiles
de 14% de 15' et de 16*^ grandeur, projetées sur un
fond nébuleux dont rien n'altère l'éclat uniforme,
et qui a résisté jusqu'ici aux plus puissants téles-
copes (91).
Près des Nuées de Magellan, mais à une plus grande
distance du pôle Sud, sont situées les taches noires
qui de bonne heure , vers la fin du xv^ siècle et au
commencement du xvi% attirèrent l'attention des
pilotes portugais et espagnols. Elles sont vrai-
semblablement comprises, comme on l'a dit déjà ,
parmi les trois Canopi dont parle Vespucci, dans
la Relation de son troisième voyage. Je trouve la
première indication de ces taches dans l'ouvrage
d'Anghiera, de Rébus oceanicis (Dec, 1, lib. 9, p.. 20,
b. éd. 1533) : « Interrogati a me nautae qui Vicen-
tium Agnem Pinzonum fuerant comitati (1499) an
antarcticum viderint polum : stellam se nullam huic
arcticae similem, quœ discerni circa punctum (po-
lum?) possit, cognovisse inquiunt. Stellariim tamen
aliam aiunt se prospexisse faciem densamque
quamdam ab horizonte vaporosam caliginem, quae
oculos fere obtenebraret. » Le mot Stella est pris ici
— /il 3 —
dans le sens général de phénomène céleste , et d'ail-
leurs il est possible que les matelots interrogés par
Anghiera ne se soient pas exprimés bien nettement
sur cette obscurité (caligo) qui semblait frapper d'a-
veuglement. Le Père Joseph Acosta de Médina del
Campo a signalé en termes plus satisfaisants les
taches noires et la cause de ce phénomène, dans son
Historia natural de las Indias (lib. 1, cap. 2); il les
compare , sous le rapport de la forme et de la
couleur, à la partie obscure du disque de la lune.
« De même , dit-il , que la Voie lactée est plus bril-
lante , parce qu'elle est composée d'une matière
céleste plus dense, d'où , pour cette raison , rayonne
plus de lumière , de même les taches noires que l'on
ne peut apercevoir en Europe sont complètement
dépourvues de lumière , parce qu'elles forment dans
le ciel une région vide, c'est-à-dire composée d'une
matière très-subtile et très-transparente. »Un célèbre
astronome a cru reconnaître dans cette description
les taches solaires (92) ; cela n'est pas assurément
moins étrange que de voir, en 1689, le missionnaire
Richaud prendre les manchas negras d' Acosta pour
les nuées lumineuses de Magellan (93),
Richaud d'ailleurs, comme les premiers pilotes
qui ont fait mention de ces objets, parle des Sacs à
charbon {cOiA-bdi^s) au pluriel. 11 en cite deux, le plus
grand dans la Croix , et un autre dans Robur Caroli ,
que certains observateurs ont divisé en deux taches
distinctes. Feuillée, dans les premières années du
xvju* siècle, et Borner, en 1804, dans une lettre
m. 27
- 414 —
adressée du Brésil à Olbers , oQt représenté ces deux
taches du Robur Caroli comme offrant une forme in-
décise et des contours mal arrêtés (94). Je n'ai pu , du-
rant mon séjour au Pérou , arriver à fixer mes doutes
sur les Sacs à charbon du Robur Caroli , et comme
j'étais tenté d'attribuer ce manque de succès au
peu de hauteur de la constellation , je voulus m'é-
clairer auprès de Sir John Herschel et du directeur
de l'Observatoire de Hambourg, M. Rumker, qui
avaient été sous des latitudes beaucoup plus méri-
dionales que moi. En dépit de leurs efforts , ils n'ont
pas mieux réussi à déterminer la forme des contours
ni l'intensité lumineuse de ces deux taches. Ils n'ont
pu approcher, sous ce rapport, des résultats ob-
tenus pour les Sacs à charbon de la Croix. Sir John
estime qu'il n'y a pas lieu de distinguer plusieurs
Sacs à charbon, à moins que l'on ne veuille désigner
ainsi toutes les places obscures du ciel qui ne sont
point délimitées, telles que celles qui se trouvent
entre a du Centaure d'une part, 6 et y du Triangle
de l'autre (95) , entre y: et ^ d'Argo , et surtout dans
l'hémisphère boréal, à l'endroit où la Voie lactée
laisse un espace vide entre s, « et y du Cygne (96).
La tache noire de la Croix du Sud , la plus frappante
et celle qui fut connue la première, est située à Test de
la constellation ; elle présente la forme d'une poire et
occupe 8' en longueur et 5** en largeur. Dans ce vaste
espace se trouve une seule étoile visible à l'œil nu,
entre la 6' et la 7' grandeur, et une quantité considé-
rable d'étoiles télescopiques de 11% 12' et 13" gran-
— ai5 —
deur. Un petit groupe de 40 étoiles est situé à peu
près au milieu (97). On a supposé que l'absence des
étoiles et le contraste formé par Téclat du ciel environ-
nant sont les causes qui font paraître cet espace si
sombre , et cette explication a généralement prévalu
depuis La Caille (98). Elle est surtout confirmée par
les jaugeages d'étoiles (gauges and sweeps) que
Ton a pratiqués autour de la région dans laquelle
la Voie lactée semble couverte d'un nuage noir.
Dans le coal-bog , ces opérations sans donner un
vide complet, ce que l'on appelle blank fields , n'ont
pas donné plus de 7 à 9 étoiles télescopiques, tan-
dis qu'avec des lunettes de même champ on en
découvrait 120 et jusqu'à 200 sur les bords. Tant
que je demeurai dans l'hémisphère austral , sous
l'impression de cette voûte étoilée qui s'était si vi-
vement emparée de moi , l'effet de contraste ne me
parut pas rendre suffisamment raison de ce phéno-
mène ; sans doute je me trompais. Les considéra-
tions de William Herschel sur les espaces complète-
ment vides d'étoiles dans le Scorpion et dans Ophiu-
chus , qu'il appelle des ouvertures dans les cieux
(openings in the Heavens), m'avaient conduit à
penser que, dans ces régions , les couches d'étoiles
superposées peuvent être moins épaisses ou tout à
fait interrompues ; que les dernières échappent à nos
instruments optiques , et que ces régions vides sont
de véritables trous par lesquels nos regards plongent
dans les espaces les plus reculés de l'univers. J'ai déjà
fait mention ailleurs de ces ouvertures (99), de ces
— 416 ---
brèches des couches sidérales , et les effets de pers-
pective qu'elles nous découvrent sont devenus tout
récemment Tobjet de sérieuses considérations (100).
Les couches d'astres les plus lointaines , la dis-
tance des nébuleuses, tous les objets que nous avons
résumés dans ce chapitre irritent la curiosité de
rhomme et remplissent son esprit d'images du temps
ou de l'espace qui excèdent sa faculté de conce-
voir. Si merveilleux que soient les perfectionne-
ments apportés aux instruments d'optique depuis
environ 60 ans , on est devenu en même temps assez
familier avec les difficultés que présente leur con-
struction pour apprécier plus justement les progrès
qui restent à accomplir, et ne point se laisser aller
aux espérances fantastiques dont l'ingénieux Hooke
était sérieusement préoccupé de 1663 à 1665 (1).
Ici comme toujours , la circonspection et la mesure
conduisent plus sûrement au but. Chacune des gé-
nérations humaines qui se sont succédé a droit
de s^applaudir des grandes et nobles conquêtes aux-
quelles elle s'est élevée par la libre force de son intel-
ligence, et dont témoignent les progrès des arts. Sans
exprimer en nombres précis la puissance avec la-
quelle les télescopes pénètrent déjà dans l'espace, sans
même attacher une grande confiance à ces chiffres ,
la vérité est que nous devons aux instruments d'opti-
que de connaître la vitesse de la lumière, et de savoir
que celle qui de la surface des astres les plus reculés
vient frapper nos regards, est le plus ancien té-
moignage sensible de l'existence de la matière (^).
— 417 —
SYSTÈME SOLAIRE.
LES PLANÈTES ET LEURS SATELLITES, LES COMÈTES, LA LUMIÈRE
ZODIACALE ET LES ASTÉROÏDES MÉTÉORIQUES.
Quitter, dans la partie céleste de cette description
de l'univers , le firmament et les étoiles fixes , pour
redescendre au système dont le soleil est le centre,
c'est passer de l'universel au particulier, d'un objet
immense à un objet petit relativement. Le domaine
du Soleil est celui d'une seule étoile fixe, parmi les
millions d'étoiles fixes que le télescope nous découvre
dans le firmament; c'est l'étendue limitée dans la-
quelle des mondes très-différents entre eux obéissent à
l'attraction directe d'un corps central, et soit qu'ils
poursuivent seuls leur marche solitaire, ou qu'ils
soient entourés eux-mêmes de corps de la même na-
ture, décrivent autour de ce point central des orbites
d'inégale grandeur. En essayant de disposer en ordre,
dans la partie sidérale de cette Uranologie, les prin-
cipales classes d'étoiles, j'ai eu l'occasion de signaler,
parmi les innombrables étoiles télescopiques, la classe
des étoiles doubles, qui forme elle-même des sys-
tèmes isolés , binaires ou diversement composés ;
mais malgré l'analogie des forces qui les dirigent ,
m. 27'
n
— 418 —
ces systèmes difTèrent essentiellement de notre sys-
tème solaire. On y voit des étoiles douées d'un éclat
propre se mouvoir autour d'un centre de gravité
commun, qui n'est point occupé par la matière vi-
sible : dans notre système , au contraire , des astres
obscurs circulent autour d'un corps lumineux, ou
pour parler plus exactement , autour d'un centre de
gravité commun, placé tantôt à l'intérieur, tantôt
en dehors du corps central. * La grande ellipse
que la terre décrit autour du Soleil se reflète, pour
ainsi dire, dans une autre petite courbe toute sem-
blable, sur laquelle se meut le centre du Soleil,
tournant autour du centre de gravité commun du
Soleil et de la Terre. » Quant à savoir si les astres
planétaires , parmi lesquels on doit compter les co-
mètes intérieures et extérieures, ne sont point capa-
bles, dans quelque partie du moins de leur surface,
de produire, outre la lumière que leur envoie le
corps central , une lumière qui leur soit propre ,
c'est une question qui ne saurait encore trouver
place au milieu de ces considérations générales.
On n'a pu établir jusqu'ici par des preuves directes
l'existence de corps planétaires obscurs, gravitant
autour d'une étoile fixe. Le peu d'intensité de la
lumière réfléchie ne nous permettrait pas d'aperce-
voir de telles planètes, dont longtemps déjà avant
Lambert, Kepler soupçonnait que chaque étoile de-
vait être accompagnée. En prenant pour distance de
rétoile la plus voisine, a du Centaure, 226 000 rayons
de l'orbite terrestre, ou 7523 fois la distance de
— 419 —
Neptune au Soleil , une comète à très-grande excur-
sion , celle de 1680 , à laquelle on attribue , d'après
des données très-incertaines, il est vrai, une révolu-
tion de 8800 ans, étant, à l'aphélie, éloignée de
notre Soleil de 28 distances de Neptune, l'éloigne-
ment de l'étoile m du Centaure sera encore 270 fois
plus grand que le rayon de notre système solaire,
mesuré jusqu'à Taphélie de cette comète. Nous aper-
cevons la lumière réfléchie de Neptune à 30 rayons de
l'orbite terrestre. Quand même , dans l'avenir, de
nouveaux télescopes plus puissants nous permet-
traient de reconnaître trois autres planètes succes-
sives, jusqu'à la distance, je suppose, de 100 rayons de
l'orbite terrestre, une telle distance n'atteindrait pas
encore la 8"" partie de la distance de la comète à son
aphélie, pas 1/2200 de celle à laquelle il nous faudrait
percevoir la lumière réfléchie d'un satellite tournant
autour de « du Centaure (3). Est-il néanmoins absolu-
ment nécessaire d'admettre l'existence de satellites au-
près des étoiles fixes? Si nous jetons un regard sur les
systèmes inférieurs qui rentrent dans notre grand sys-
tème planétaire, nous rencontrons, à côté des analo-
gies que peuvent ofl"rir les planètes entourées de nom-
breux satellites, d'autres planètes : Mercure, Vénus,
Mars, qui en sont privées. Faisant donc abstraction
de ce qui est simplement possible pour nous borner
aux faits réels et indubitables, nous nous sentons vive-
ment pénétrés de cette idée : que le système solaire,
surtout avec les complications que les derniers temps
nous ont révélées , offre l'image la plus riche des re-
— 4-20 —
lations directes et facilement reconnaissables , qui
rattachent un grand nombre de corps célestes à un
seul d'entre eux.
Notre système planétaire, en raison même de Tes-
pace plus restreint qu'il occupe, offre, pour la sûreté
et l'évidence des résultats que cherche l'astronomie
mathématique, des avantages incontestables sur l'en-
semble du firmament. L'étude du monde sidéral, en
ce qui concerne surtout les amas stellaires et les né-
buleuses, comme aussi pour le classement photomé-
trique des étoiles, travail d'ailleurs trop peu certain,
appartient en grande partie au domaine de l'astro-
nomie contemplative. La partie la plus exacte et la
plus brillante de l'astronomie, celle qui a reçu de nos
jours le plus d'accroissement , est la détermination
des positions d'étoiles en ascension droite et en dé-
clinaison. Qu'il s'agisse d'étoiles isolées ou doubles,
d'amas stellaires ou de nébuleuses, le mouvement
propre des étoiles, les éléments d'où l'on déduit
leur parallaxe , la distribution des mondes dans l'es-
pace révélée par les jaugeages télescopiques du Ciel,
les périodes des étoiles à éclat changeant ou la révo-
lution lente des étoiles doubles , sont autant d'objets
susceptibles d'être mesurés avec une plus ou moins
grande exactitude, bien que ces opérations ne soient
pas sans difficulté. Il y en a d'autres au contraire qui
par leur nature échappent à toute espèce de calcul :
de ce nombre sont la position relative et la forme
des couches stellaires ou des nébuleuses perforées ,
l'ordonnance générale de l'univers , et l'action vio-
lente des forces naturelles en vertu desquelles appa-
raissent ou disparaissent les étoiles, phénomènes qui
nous affectent d'autant plus profondément qu'ils tou-
chent aux régions vaporeuses de l'imagination et de
la fantaisie (4).
Nous nous abstenons à dessein, dans les pages sui-
vantes, de toute considération sur la liaison de notre
système solaire avec les systèmes des autres étoiles
fixes; nous ne revenons plus sur ces questions, qui
s'imposent à notre intelligence, de la subordination
et de la dépendance des systèmes. Nous n'avons plus
à nous demander si le Soleil , notre astre central ,
n'est pas lui-même à l'état de planète dans un autre
système plus vaste, et non pas même peut-être à
l'état de planète principale, mais à l'état de satellite
d'une planète, comme les lunes de Jupiter. Limités
à un domaine plus familier, au domaine même du
Soleil , nous avons à nous féliciter de cet avantage,
que presque tous les résultats de l'observation,
excepté ce qui se rattache à l'aspect des surfaces,
à l'atmosphère gazeuse des globes planétaires, à
la queue simple ou multiple des comètes, à la lu-
mière zodiacale ou à l'apparition énigmatique des
étoiles filantes, peuvent être ramenés à des rap-
ports numériques , et se présentent comme les
conséquences d'hypothèses susceptibles d'une dé-
monstration rigoureuse. Cette démonstration n'entre
point dans le plan d'une description physique de l'u-
nivers; tout ce qu'un pareil plan comporte, c'est de
lecueillir méthodiquement les résultats numériques:
— 422 —
héritage que chaque siècle transmet agrandi au siècle
suivant. Une table renfermant la distance moyenne
qui sépare les planètes du Soleil , la durée de leur ré-
volution sidérale, l'excentricité de leur orbite, l'incli-
naison de ces orbites sur l'écliptique, le diamètre, la
masse et la densité , peut offrir aujourd'hui , sous un
bien petit espace, Tétat des conquêtes intellectuelles
qui sont l'honneur de notre époque. Qu'on se trans-
porte un instant dans l'antiquité, qu'on se repré-
sente le maître de Platon, le pythagoricien Philolaûs,
Aristarque de Samos ou bien Hipparque, en pos-
session de cette feuille déchiffres ou d'une descrip-
tion graphique des orbites de toutes les planètes, tels
qu'il s'en trouve dans nos ouvrages élémentaires :
on ne pourrait comparer l'étonnement et l'admi-
ration de ces hommes , les héros de la science
naissante , qu'à la surprise dont seraient frappés
Ératosthène, Strabon , Claude Ptolémée, si on leur
présentait une de nos mappemondes dressées sur
une carte de quelques pouces carrés, d'après les
projections de Mercator.
Les comètes que l'attraction centrale force à re-
venir sur elles-mêmes, en décrivant une ellipse fer-
mée, marquent la limite du domaine solaire. Mais
comme on ne peut être certain qu'il ne se présentera
point un jour quelque autre comète, dont le grand
axe dépasserait en longueur ceux des comètes con-
nues jusqu'à ce jour et dont les éléments ont été cal-
culés, la distance des aphélies de ces comètes ne
nous donne qii'une limite inférieure de l'espace sub-
— 423 —
ordonné au Soleil. Ainsi le domaine solaire est ca-
ractérisé par les effets visibles et mesurables des
forces centrales qui émanent du Soleil, et par les corps
planétaires qui décrivent des orbites fermées autour
de lui, sans pouvoir rompre les liens qui les y retien-
nent attachées. L'attraction qu'exerce cet astre sur
d'autres étoiles fixes ou soleils, dans des espaces plus
vastes, par delà les orbites de ces corps célestes, ne
doit point trouver place parmi les considérations
dont nous nous occupons ici.
D'après l'état de nos connaissances à la fin de
cette première moitié du xix* siècle (1851), le sys-
tème solaire comprend les éléments suivants, en
rangeant les planètes d'après la distance qui les
sépare du corps central :
1" 22 planètes principales : Mercure, Vénus, La
Terre, Mars; Flore ^ Victoria^ Vesta, Iris, Métis,
Hédé , Parthénope, Irène, Astrée, Êgérie , Junon ,
Cérès, Pallas, Hygie, Jupiter, Saturne, Uranus ,
Neptune.
De ces 22 planètes , 6 seulement étaient connues
au 17 mars 1781. — Nous avons distingué par des
caractères typographiques différents les 8 grandes
planètes des 14 petites, appelées quelquefois aussi
astéroïdes, dont les orbites entrelacées sont com-
prises entre Mars et Jupiter.
2" 21 satellites : 1 pour la terre, 4 pour Jupiter.
8 pour Saturne, 6 pour Uranus, 2 pour Neptune.
3° 197 comètes, dont l'orbite est calculée. Parmi
ces comètes, 0 sont intérieures, c'est-à-dire que
leur aphélie est en deçà de l'orbite planétaire la plus
éloignée, celle de Neptune.
Selon toute probabilité , le système solaire ren-
ferme encore la lumière zodiacale , qui s'étend beau-
coup au delà de l'orbite de Vénus et atteint peut-être
celui de Mars.
De nombreux observateurs sont aussi d'avis d'y
joindre les essaims d'astéroïdes météoriques qui cou-
pent l'orbite de la terre , surtout en des points dé-
terminés.
Les événements récents qui méritent d'être men-
tionnés dans l'histoire des découvertes planétaires ,
sont : la découverte d'Uranus, la première planète
trouvée au delà de l'ellipse de Saturne , qui fut si-
gnalée à Bath le 13 mars 1781 par Herschel; la dé-
couverte de Cérès , la première des petites planètes,
observée par Piazzi à Palerme, le l^'' janvier 1801 ;
la reconnaissance de la première comète inté-
rieure, faite par Encke à Gotha, au mois d'août
1819; enfin l'annonce de l'existence de Neptune,
prouvée au moyen du calcul des perturbations pla-
nétaires, par Leverrier, à Paris, dans le mois d'août
1816, et vérifiée par Galle le 23 septembre 1846, à
Berlin. Ces découvertes considérables n'ont pas eu
seulement pour résultat d'étendre et d'enrichir d'au-
tant notre système solaire ; chacune d'elles a été le
principe d'un grand nombre d'autres découvertes :
c'est à elles que l'on doit la connaissance de 5 autres
comètes intérieures, signalées de 1826 à 1851 par
Biéla, Faye, de Yico, Brorsen et d'Arrest, et celle
— /r25 ^
de 13 petites planètes, dont 3 (Pallas, Junon et
Vesta) ont été trouvées de 1801 à 1807, et dont,
après 38 ans d'interruption, 9 autres ont été obser-
vées successivement par Hencke , Hind , Graham et
de Gasparis. A partir de la découverte d'Astrée, due
aux observations heureuses et aux habiles combinai-
sons de Hencke, c'est-à-dire depuis le 8 décembre
1865 jusqu'au milieu de l'année 1851, le monde des
comètes est devenu aussi l'objet d'observations
tellement attentives, qu'on est parvenu, dans les
11 dernières années , à calculer les orbites de
33 nouvelles comètes. C'est à peu près tout ce qu'on
avait pu faire en 40 ans , depuis le commencement
du XIX' siècle.
426
LE SOLEIL
CONSIDÉRÉ COMME CORPS CENTRAL.
Le flambeau (Lucerna Mundi), comme l'appelle Co-
pernic (5), qui trône au centre du monde, est le cœur
de l'univers, suivant Texpression de Tlîéon deSmyrne,
et vivifie tout par ses battements (6) ; il est la source
de la lumière et de la chaleur rayonnante ; il est sur
la terre le principe d'un grand nombre de phéno-
mènes électro -magnétiques. C'est à lui surtout que
doit être rapportée l'activité vitale des êtres organi-
sés qui peuplent notre planète , et particulièrement
celle des végétaux. Pour donner l'idée la plus gé-
nérale des actions extérieures par lesquelles se ma-
nifeste la puissance du soleil, on peut ramener à
deux causes principales les changements qu'il pro-
duit à la surface du globe. D'un côté, il agit par
l'attraction inhérente à sa masse, comme dans le
flux et le reflux de l'Océan, phénomène pour le-
quel il convient toutefois de réserver le résultat
partiel dû à la force attractive de la lune ; de l'au-
tre, par les ondulations ou vibrations transver-
sales de l'éther, principes de la chaleur et de Ja lu-
— 427 —
mière, qui , entre autres phénomènes, déterminent ,
en vaporisant les eaux dans les mers, les lacs et
les fleuves, le mélange fertilisateur des couches li-
quides et gazeuses dont notre planète est envelop-
pée. C'est aussi dans l'influence du Soleil qu'il faut
chercher l'origine des courants aériens , produits
par des diflerences de température, ainsi que celle
des courants pélagiques , dus à la même cause ,
et qui n'ont point cessé depuis des milliers d'an-
nées , quoique à un moindre degré , d'entasser ou
d'entraîner des couches sédimentaires, et de changer
ainsi la constitution superficielle du sol submergé. Le
Soleil fait encore naître et entretient l'activité électro-
magnétique de la croûte terrestre et celle de l'oxygène
contenu dans l'air. Tantôt enfin il se manifeste tran-
quillement et en silence par des affinités chimi-
ques , et détermine les divers phénomènes de la
vie , chez les végétaux , dans l'endosmose des parois
cellulaires , chez les animaux , dans le tissu des
fibres musculaires ou nerveuses ; tantôt il fait éclater
dans l'atmosphère , le tonnerre , les ouragans et les
trombes d'eau.
Nous avons essayé ici de tracer le tableau des in-
fluences solaires, à l'exception de celles qui agissent
sur l'axe du globe ou sur son orbite. En exposant le
lien qui unit entre eux de grands phénomènes, dont à
première vue on ne soupçonnerait point le rapport,
nous nous sommes proposé de rendre saisissante cette
vérité que , dans un livre sur le Cosmos , il est parfai-
tement légitime de représenter la nature physique
— /r28 —
comme un corps animé, vivant en vertu de forces
intérieures qui souvent se font équilibre. Cependant
les ondes lumineuses n'agissent pas seulement sur
le monde des corps, et ne se bornent pas à décompo-
ser et à recomposer les substances ; elles n'ont pas
pour unique effet d'attirer hors du sein de la terre les
germes délicats des plantes , de développer dans les
feuilles la matière verte ou chlorophylle , de teindre
les fleurs odorantes, ou de répéter mille et mille fois
l'image du Soleil , au milieu du choc gracieux des
vagues , et sur les tiges légères de la prairie courbées
par le souffle du vent ; la lumière du ciel , suivant
les différents degrés de sa durée et de son éclat , est
aussi en relations mystérieuses avec l'intérieur de
l'homme, avec l'excitation plus ou moins vive de ses
facultés, avec la disposition gaie ou mélancolique de
son humeur ; c'est ce que Pline l'Ancien a exprimé
par ces paroles (lib. 11 , cap. 6) : « Cœli tristitiam
discutit Sol , et humani nubila animi serenat. »
Dans la description des planètes, je placerai les
données numériques avant les détails qu'il me sera
possible de fournir sur leur constitution physique, à
l'exception de la Terre que je réserve pour plus tard.
L'ordre adopté pour ces nombres sera à peu près le
même que celui qu'a suivi Hansen, dans son excellent
Aperçu du Système solaire ( Uebersicht des Sonnen-
Systems), toutefois avec des changements et des
additions, puisque depuis 1837, époque où l'écri-
vait l'auteur, on a découvert onze planètes et trois
satellites (7).
— 129 —
La distance moyenne du centre du Soleil à la Terre
est, d'après la correction additionnelle de Encke
pour la parallaxe du Soleil, que l'on peut voir dans
les Mémoires de l'Académie de Berlin (1835, p. 309),
de 20 682 000 milles géographiques, de 15 au degré
de l'équateur terrestre, chacun de ces milles valant
exactement , d'après les recherches faites par Bessel
sur dix mesures de degré, 3807^,23 ou 7420",/!3
[Cosmos, t. I, p. 491 , n. 30).
La lumière, suivant les observations de Struve sur
la constante de l'aberration, met pour venir du So-
leil à la Terre , en supposant la planète à distance
moyenne du corps central, c'est-à dire pour parcou-
rir le demi-diamètre de l'orbite terrestre, 8' 17", 78
[Cosmos, t. m, p. 87 et 306), d'où il suit que la
position vraie du Soleil est à 20'', /ils en avant de sa
position apparente.
Le diamètre apparent du Soleil , à une distance
moyenne de la Terre, est de 32' 1", 8; par consé-
quent il ne dépasse que de 54", 8 celui de la Lune,
vue également à une distance moyenne. Au périhélie,
c'est à-dire au moment de l'hiver où la Terre est le
plus près du Soleil, le diamètre apparent de cet astre
augmente jusqu'à 32' 34", 6; à l'aphélie, en été, lors-
que nous sommes au contraire le plus loin possible
du Soleil, ce diamètre n'est plus que de 3r30",l.
Le vrai diamètre du Soleil est de 192 700 milles
géographiques, ou 146 600 myriamètres, c'est-à-dire
qu'il est plus de 112 fois plus grand que le diamètre
de la Terre.
m. 28
— 430 —
La masse du Soleil , d'après les calculs d'Encke sur
la formule que Sabine a donnée du pendule , est égale
à 359551 fois la masse de la Terre , ou à 355499 fois
les masses réunies de la Terre et de la Lune (4' Mé-
moire sur la comète de Pons, dans le recueil des
Mémoires de l'Académie de Berlin, 1842, p. 5).
Il en résulte que la densité du Soleil n'est qu'en-
viron 1/4, ou plus exactement 0,252 de celle de la
Terre.
Le volume du Soleil est 600 fois plus grand , et sa
masse, d'après Galle, est 738 fois plus grande que
le volume et la masse de toutes les planètes réunies.
Pour donner une image sensible de la grandeur du
globe solaire, on a remarqué que si l'on se repré-
sente ce globe creux et la Terre placée au centre ,
il y aurait encore de l'espace pour l'orbite lunaire,
en supposant le rayon de cette orbite prolongé de
plus de 40 000 milles géographiques.
Le Soleil tourne autour de son axe en 25 jours 1/2.
L'équateur est incliné sur l'écliptique de T 1/2. D'a-
près les observations très-exactes de Laugier [Comptes
rendus de l'Académie des Sciences, t. XV, 1842 ^
p. 94i), la durée de la rotation est de 25^8^9' et
l'inclinaison de l'équateur de T 9'.
Les conjectures, auxquelles est peu à peu arrivée
l'astronomie moderne touchant la constitution phy-
sique de la surface du Soleil, reposent sur l'obser-
vation attentive et prolongée des changements qui
s'opèrent dans son disque lumineux. La manière
dont se suivent et se rattachent entre elles ces mo-
— 4Sî -
dificalions, telles que la naissance des taches, le
déplacement relatif des noyaux noirs et du bord
cendré ou pénombre , a conduit à l'opinion suivante :
que le corps du Soleil lui-même est presque en-
tièrement obscur, mais entouré à une grande dis-
tance d'une atmosphère lumineuse; que des courants
ascendants forment dans cfette atmosphère des ou-
vertures à bords évasés, et que le centre noir des
taches n'est autre chose qu'une portion même
du corps obscur du Soleil, vu à travers ces ouver-
tures. Pour que cette hypothèse, que nous indiquons
ici légèrement et d'une manière générale, puisse
rendre raison de toutes les particularités qui se pro-
duisent à la surface du Soleil, on admet autour de
ce globe obscur l'existence de trois enveloppes diffé-
rentes : d'abord une première enveloppe intérieure,
de matière vaporeuse et semblable à des nuages ; puis
une enveloppe lumineuse ou photosphère, recou-
verte elle-même, comme cela parait surtout établi
par l'éclipsé totale du 8 juillet 18i2, d'une autre
atmosphère extérieure dans laquelle flottent des
nuages (8;.
Il arrive quelquefois qUe d'heureux pressehti-
ments ou des jeux de l'imagination contiennent,
longtemps avant toute observation réelle , le germe
d'opinions véritables. L'antiquité grecque est rem-
plie de pareilles rêveries, qui plus tard se sont réa-
lisées. De même, au xv' siècle, nous trouvons déjà
clairement exprimée dans les écrits du cardinal Ni-
colas de Cusa, au IP livre du traité de docta Iguo-
— Iib'2 —
rantia, cette conjecture que le corps du Soleil est
en lui-même un noyau terreux, entouré d'une enve-
loppe légère formée par une sphère lumineuse ; qu'au
milieu, c'est-à-dire vraisemblablement entre le globe
obscur et l'atmosphère éclatante, se trouve un air
transparent mêlé de nuages humides et semblables à
notre atmosphère. Il ajoutait que la propriété de
rayonner la lumière qui revêt la Terre de végétaux
n'appartient pas au noyau terreux du Soleil , mais à la
sphère lumineuse qui l'enveloppe. Cet aperçu , que
l'on n'a pas assez signalé jusqu'à ce jour dans l'his-
toire de l'astronomie, offre une grande ressemblance
avec les idées actuellement dominantes (9).
Ainsi que je l'ai dit déjà , en passant en revue les
phases principales entre lesquelles se divise l'histoire
de la Contemplation du Monde (10), les taches du
soleil ne furent reconnues ni par Galilée, ni par
Scheiner, ni par Harriot, mais par Jean Fabricius,
de la Frise orientale , qui le premier les observa et
en fit imprimer la description. Jean Fabricius, aussi
bien que Galilée, savaient déjà que ces taches appar-
tiennent au globe solaire lui-même : on peut s'en
assurer en lisant la lettre de Galilée au prince Cési,
datée du 25 mai 1612. Cependant, dix ans après,
Jean Tarde, chanoine de Sarlat, et dix ans plus tard
encore , un jésuite belge , prétendirent presqu'en
même temps que les taches étaient causées par le
passage de petites planètes , que le premier nomma
Sidéra Borbonia, le second Sidéra Austriaca (11). Ce
fut Scheiner qui le premier employa, pour observer
— /|33 —
le Soleil, les verres préservatifs verts ou bleus,
proposés 70 ans auparavant dans V A stronomicum
Cœsareum par Apian , autrement appelé Bienewitz ,
et dont les pilotes hollandais se servaient déjà de-
puis longtemps (12). Ce fut en grande partie pour
n'avoir pas fait usage de ces verres que Galilée perdit
la vue.
C'est chez le grand Dominique Cassini que se
trouve le témoignage le plus précis sur la nécessité
de se représenter le globe solaire comme un corps
obscur, entouré d'une photosphère. Cette conclusion,
appuyée sur des observations positives , date environ
de l'an 1671; c'est-à-dire qu'elle est postérieure
d'une soixantaine d'années à la découverte des taches
solaires. D'après Dominique Cassini, la surface vi-
sible du Soleil est « un océan de lumière qui enveloppe
le noyau solide et obscur du Soleil; de grands mou-
vements et comme des bouillonnements se produi-
sent dans cette sphère lumineuse, et de temps à autre
nous laissent apercevoir les sommets des montagnes
dont le Soleil est hérissé ; ce sont là les noyaux noirs
qu'on distingue au centre des taches. » Les pénom-
bres cendrées qui bordent ces noyaux restaient en-
core sans explication.
Une observation ingénieuse et souvent vérifiée de-
puis, que l'astronome de Glasgow, Alexandre Wilson ,
fit sur une grande tache solaife le 22 novembre 1769,
le conduisit à expliquer la nature des pénombres.
Wilson observa qu'à mesure qu'une tache s'approche
du bord du Soleil, la pénombre la plus rapprochée du
centre de l'astre diminue de plus en plus de grandeur
relativement à la pénombre opposée. De là, Wilson
conclut très-judicieusement, en 1774, que le noyau
de la tache , c'est-à-dire la portion du globe solaire
devenue visible par l'entonnoir ouvert dans l'enve-
loppe lumineuse, est située sur un plan plus reculé
que la pénombre , et que la pénombre est formée
par les talus de l'excavation. Cette explication toute-
fois ne répondait pas encore à la question de savoir
pourquoi la pénombre est plus brillante auprès du
noyau.
Sans connaître le Mémoire de Wilson , un astro-
nome de Berlin, Bode, dans son livre sur la nature du
Soleil et sur l'origine des taches (Gedanken ueber die
Natur der Sonne und die Entslelmng ihrer Flecken), a
développé desidées toutes semblables, avec cette clarté
qui le rendait si propre à populariser la science. 11 a
facilité encore l'explication des pénombres, en admet-
tant , presque comme dans l'hypothèse du cardinal
Nicolas de Gusa, une couche nuageuse placée entre la
photosphère et le globe obscur du Soleil. Cette suppo-
sition de deux couches distinctes conduit aux déduc-
tions suivantes : Si une ouverture se forme , ce qui
arrive rarement, dans la photosphère seule, sans se
prolonger dans la couche de vapeurs située au-des-
sous et éclairée imparfaitement par l'atmosphère lu-
mineuse, cette couche intérieure renvoie à l'habitant
de la terre une lueur très-pâle, et l'on voit une
pénombre grise, une tache, mais point de noyau.
Si , au contraire , sous l'influence des phénomènes
— 435 —
météorologiques qui s'agitent violemment à la sur-
face du Soleil, l'ouverlure pénètre à travers l'enve-
loppe de lumière et l'enveloppe de nuages , il se dé-
tache au milieu de la pénombre cendrée un noyau
qui semble plus ou moins sombre, selon que cette
ouverture correspond, sur le globe solaire, à des terres
rocheuses ou sablonneuses ou bien à des mers (13). »
L'espace gris qui entoure le noyau est , comme dans
l'hypothèse précédente, une portion de la surface ex-
térieure de la région nuageuse ; et comme, à cause
de la forme évasée de l'excavation, l'ouverture est
moindre dans cette couche que dans la photosphère, la
direction des rayons qui partant des bords de l'ouver-
ture viennent frapper l'œil de l'observateur, explique
la différence que Wilson observa le premier dans la
largeur de la pénombre aux deux côtés opposés ,
différence qui augmente à mesure que la tache s'é-
loigne du centre du disque solaire. Lorsque la pé-
nombre s'étend sur toute la tache et fait disparaître
le noyau, ainsi que Laugier l'a remarqué plusieurs
fois, cela tient à ce que, non pas la photosphère, mais
la couche de brouillards inférieure s'est refermée.
Une tache visible à l'œil nu qui apparut à la sur-
face du Soleil, en 1779, attira par bonheur sur
le sujet qui nous occupe les facultés d'observation
et d'invention qui distinguaient au même degré
William Herschel. Nous possédons les résultats du
grand travail auquel il se livra dans le recueil
des Pliilosopldcai Transactions (1795 et 1801) ; il y
examine en détail les ca§ les plus particuliers, d'à-
— hm —
près une nomenclature très-précise qu'il établit lui-
même. Gomme d'habitude, ce grand homme suit sa
propre voie ; une seule fois il nomme Alexandre
Wilson. L'ensemble de ses vues est identique à celles
de Bode ; la construction à l'aide de laquelle il ex-
plique l'aspect du noyau et de la pénombre [Philoso-
phical Transactions, 1801, p. 270 et 318, tab. XVIII,
fig. 2) est fondée sur l'hypothèse de la déchirure des
deux enveloppes. Mais, entre la couche de brouillards
et le globe obscur du Soleil, il place une atmosphère
claire et transparente (p. 302), dans laquelle des
nuages sombres , ou ne brillant du moins que
d'une lumière réfléchie , sont supendus à une hau-
teur de 50 ou 60 myriamètres. A vrai dire, Herschel
semble disposé à ne considérer aussi la photosphère
que comme une couche de nuages lumineux, indé-
pendants les uns des autres, et offrant des surfaces
très-inégales. Il lui semble qu'un fluide élastique de
nature inconnue s'élève de l'écorce ou de la surface
du globe obscur, et produise dans les régions supé-
rieures , s'il agit faiblement, un pointillé noir sur un
fond lumineux , si au contraire il se déchaîne avec
violence , de larges ouvertures qui laissent voir des
noyaux entourés de pénombres.
Rarement arrondis et offrant presque toujours
des lignes brisées et des angles rentrants , les noyaux
obscurs sont souvent entourés de pénombres qui ré-
pètent la même figure sur de plus grandes dimen-
sions. On ne remarque aucune transition d'éclat
entre le noyau et la pénombre, ou entre la pénombre
— 437 -
qui quelquefois est filiforme el la photosphère. Ca-
pocci ainsi qu'un autre observateur très-diligent,
PastorfT, ont dessiné avec beaucoup d'exactitude les
formes anguleuses des taches (Schumacher's Astro-
nomiscke Naclirichten, n° 115, p. 316 ; n" 133, p. 291,
et n" 14i, p, 471). W. Herschel et Schwabe virent
les noyaux traversés par des veines éclatantes, ou par
des espèces de ponts lumineux (luminous bridges).
Ces phénomènes de nature nuageuse proviennent
de la deuxième couche , qui donne naissance aux
pénombres. D'après l'astronome de Slough , ces
aspects singuliers , dus probablement à des cou-
rants ascendants, la formation tumultueuse des
taches, des facules, des sillons et des crêtes, pro-
duites par les ondes lumineuses, indiqueraient un
dégagement énergique de lumière; et, au contraire,
« l'absence de taches et des phénomènes qui les ac-
compagnent , ferait supposer un affaiblissement dans
la combustion, et par suite une influence moins
puissante et moins salutaire sur la température de
notre planète et le développement de notre végéta-
tion. » Ces hypothèses conduisirent Herschel à étudier
le prix du blé et la nature des récoltes, dans les an-
nées où l'on a remarqué l'absence de taches au Soleil :
de 1676 à 1684 (d'après les données de Flamsteed) ,
de 1686 à 1688 (d'après celles de Dominique Cassini),
de 1695 à 1700 et de 1795 à 1800. Malheureusement
on manquera toujours des éléments numériques
qui seuls pourraient mener à une solution même
douteuse d'un pareil problème; non pas seulement,
— 438 —
ainsi que le remarque lui-même Herschel avec sa
prudence habituelle, parce que le cours des cé-
réales dans une portion de l'Europe ne saurait don-
ner la mesure de la végétation sur le continent
tout entier, mais surtout parce que, lors même que
rabaissement de la température moyenne se se-
rait fait sentir durant une année dans toute l'Eu-
rope, on ne peut en aucune façon en conclure que,
dans le même laps de temps , le corps terrestre ait
reçu du Soleil une moindre quantité de chaleur. Il
ressort des recherches de Dove sur les variations non
périodiques de la température, qu'il y a toujours con-
traste entre les conditions climatologiques de con-
trées situées presque sou^ les mêmes latitudes, des
deux côtés de l'Atlantique. Cette opposition semble
se produire régulièrement entre notre continent el la
partie moyenne de l'Amérique du Nord. Lorsque nous
subissons ici un hiver rigoureux , il est là-bas fort
doux , et réciproquement. En raison de l'influence
incontestable que la quantité moyenne de chaleur
estivale exerce sur le cycle de végétation et par suite
sur l'abondance des céréales, ces compensatiops
dans la répartition de la chaleur ont les plus heu-
reuses conséquences pour les peuples entre lesquels
la mer établit des communications rapides.
Sir William Herschel attribuait à l'activité d\i
corps central , manifestée par les phénomènes dont
les taches solaires sont la conséquence, une aug-
mentation de chaleur sur la terre. Environ deux siè-
cles et demi plus tôt, Batista Baliani, dans unç
— a;^9 —
lettre à Galilée , avait au contraire considéré les ta-
ches comme des causes de refroidissement (là). C'est
aussi la conclusion à laquelle semblerait aboutir la
tentative que fit à Genève le savant astronome Gau-
tier, en comparant quatre périodes remarquables
par le grand nombre ou la rareté des taches solaires
(de 1827 à 1848), avec la température moyenne de
33 stations européennes et de 27 stations amé-
ricaines, sous des latitudes semblables. Cette compa-
raison fait ressortir de nouveau , par des diffé-
rences positives ou négatives, les contrastes que
présentent les saisons sur les côtes opposés de l'At-
lanlique. Quant a Tinfluence réfrigérante des taches
solaires , les résultats définitifs du rapprochement
tenté par Gautier donneraient à peine 0°,/i2 centigr. ;
fraction qui peut d'ailleurs, en raison de son peu
d'importance, être attribuée tout aussi bien à des
erreurs d'observation ou à la direction des vents.
Il reste à parler d'une troisième enveloppe du So-
leil , dont il a été fait mention plus haut. C'est la plus
extérieure de toutes; elle recouvre la photosphère,
est nuageuse et imparfaitement transparente. Des
apparences extraordinaires, de couleur rouge, et res-
semblant à des montagnes ou à des flammes, furent
aperçues durant l'éclipsé totale du 8 juillet 18/i2,
sinon pour la première fois, au moins d'une façon
beaucoup plus nette ; et cette observation fut faite si-
multanément par plusieurs des observateurs les plus
exercés. C'est ce qui a conduit à reconnaître l'exis-
tence d'une troisième enveloppe. Après une discus-
— /4/|0 -
sion approfondie de toutes les observations, Arago a
énuméré avec une rare sagacité, dans un Mémoire
spécial (15), les motifs qui rendent celte hypothèse
nécessaire. Il a fait voir en même temps que depuis
1706 on a décrit huit fois, dans des éclipses de Soleil
ou totales ou annulaires, des éminences marginales
rougeâtres, semblables à celles de 1842 (16).
Le 8 juillet 1842, lorsque le disque lunaire, plus
grand en apparence que celui du Soleil, l'eût couvert
entièrement, on ne vit pas seulement une lueur blan-
châtre entourer la Lune en forme d'auréole ou de
couronne lumineuse; on vit encore deux ou trois pro-
tubérances qui semblaient enracinées sur les bords
et que, parmi les astronomes qui les observèrent,
les uns comparèrent à des montagnes rougeâtres et
anguleuses, d'autres à des masses de glace colorées
en rouge, d'autres encore à des langues de flammes
immobiles. Malgré la grande diversité des lunettes
dont on fit usage , Arago, Laugier et Mauvais, à Per-
pignan ; Petit, à Montpellier; Airy, sur les hauteurs
de la Superga , près de Turin ; Schumacher, à Vienne,
et beaucoup d'autres astronomes, s'accordèrent com-
plètement sur les traits principaux qu'offrait l'en-
semble du phénomène. Les protubérances ne furent
pas visibles simultanément sur tous les points ; dans
quelques endroits on put les apercevoir même à l'œil
nu. L'angle sous-tendu par leur hauteur fut diver-
sement estimé. L'appréciation la plus certaine pa-
rait être celle de Petit , directeur de l'Observa-
toire de Toulouse. Elle est de r45"; ce qui , dans le
— /j/il -
cas où ces apparences seraient réellement des mon-
tagnes, leur assignerait une élévation de plus de
7000 niyriamètres. C'est presque sept fois le diamètre
de la Terre, qui est contenu 112 fois dans celui du
Soleil. L'ensemble de tous les phénomènes observés
a conduit à conjecturer avec beaucoup de vraisem-
blance que ces apparences rouges sont des ondu-
lations de la troisième atmosphère, des masses nua-
geuses éclairées et colorées par la photosphère (17).
Arago, en développant cette idée, exprime la conjec-
ture que l'azur profond du ciel, que j'ai eu moi-même
l'occasion de mesurer sur les plus hauts sommets des
Cordillères, avec des instruments aujourd'hui encore
bien imparfaits, pourrait fournir un moyen facile d'ob-
server les nuages en forme de montagnes de la troi-
sième enveloppe solaire (18).
Ce qui frappe au premier abord, quand on cherche
à déterminer dans quelle zone du Soleil se montrent
habituellement les taches, c'est qu'elles sont rares
vers l'équateur solaire, entre 3° de latitude boréale et
»S°de latitude australe, et qu'elles manquent complète-
ment dans les régions polaires. A deux époques seule-
ment de Tannée, le 8 juin et le 9 décembre, les taches
ne décrivent plus des courbes concaves ou convexes,
mais tracent des lignes droites parallèles entre elles,
et à l'équateur. La zone où les taches sont le plus fré-
quentes est comprise entre 11° et 15° de latitude Nord.
En général on peut aflirmer qu'elles se rencontrent en
plus grand nombre dans l'hémisphère septentrional,
et , comme le dit Sœmmering , qu'elles se prolongent
- m -
plus loin en dehors de Téquateur vers le Nord que vers
le Sud [Outlines, g 393, Voyage au Cap, p. 433) . Galilée
déjà avait donné 29" comme limite extrême dans les
deux hémisphères. John Herschel recula celte limite
jusqu'à 35°; c'est aussi ce qu'a fait Schwabe (Schuma-
cher's Astron, Nachr. , n°473). Quelques taches isolées
ont été vues par Laugier sous 41^ [Comptes rendus,
t. XV, p. 94i), par Schwabe jusque sous 50' de lati-
tude. Une tache décrite par La Hire sous 70° de la-
titude Nord peut être mise au rang des plus grandes
raretés.
La distribution des taches sur le disque du Soleil,
telle que nous venons de l'indiquer, leur rareté sous
l'équateur et dans les régions polaires, leur disposi-
tion parallèle à l'équateur, ont fait supposer à Sir
John Herschel que les obstacles que la troisième en-
veloppe extérieure peut en certains endroits opposer
à l'émission de la chaleur, font naître dans l'atmo-
sphère du Soleil des courants dirigés du pôle vers
l'équateur, courants analogues à ceux qui, causés sur
la Terre par la vitesse de la rotation, différente sous
chaque parallèle, produisent les vents alises et les cal-
mes qui régnent surtout dans le voisinage de l'équa-
teur. Quelques taches se montrent si permanentes
qu'on les voit reparaître six mois entiers, comme cela
est arrivé pour la grande tache de 1779. Schwabe a
pu , en 1840, retrouver un même groupe huit fois de
suite. En mesurant exactement un noyau obscur re-
présenté dans l'ouvrage d'Herschel, auquel j'ai fait de
si nombreux emprunts , le Voyage au Cap , on s'est
- 445 ~
assuré qu'il est d'une telle grandeur que le globe ter-
restre, lancé à travers l'ouverture de la photosphère,
aurait laissé encore de chaque côté un espace de plus
de 170 myriamètres. Sœmmering remarque qu'il y a
sur le Soleil certains méridiens dans lesquels, pendant
de longues années, il n'a pas vu apparaître une seule
tache (Thilo , de Solis maculis a Sœmmeringio obser-
vatis, 18:28, p. 22). Les résultats si différents trouvés
pour la durée de la rotation du Soleil ne doivent pas
être attribués seulement à l'inexactitude des obser-
vations; ces différences proviennent de la propriété
qu'ont certaines taches de changer de place sur la
surface du Soleil. Laugier a consacré à cet objet des
recherches spéciales, et a observé des taches qui,
prises isolément, auraient donné pour la rotation
une durée tantôt de 24^28, tantôt de 26*, 46. Le seul
procédé propre à faire connaître la durée de la rota-
tion solaire est donc de prendre une moyenne entre
un grand nombre de taches , qui par la permanence
de leur forme et la distance qui les sépare d'autres
taches visibles en même temps , garantissent contre
les chances d'erreur.
Quoiqu'il arrive plus souvent qu'on ne le croit en
général de distinguer nettement à l'œil nu des taches
sur la surface du Soleil , pourvu que l'on dirige ses
observations dans ce sens, c'est à peine si, du commen-
cement du IX' siècle au commencement du xvij% l'on
peut retrouver l'indication de deux ou trois phéno-
mènes qui méritent confiance. Tels sont la prétendue
station que, d'après les Annales des rois francs,
- 444 —
allribuées d'abord à un astronome bénédictin, puis à
Eginhard , Mercure aurait faite durant huit jours sur
le disque du Soleil, en 807; le passage de Vénus sur le
Soleil en 91 jours, sous le règne du calife Al-Motassem,
dans l'année 840, et les signa in Sole observés en 1096,
d'après le Staindelii Clironicon, La mention faite par
les historiens d'obcurcissements survenus dans le So-
leil, ou, pour parler avec plus d'exactitude, d'un affai-
blissement plus ou moins long de la lumière solaire,
m'a conduit, depuis un grand nombre d'années, à faire
des recherches spéciales sur la nature météorologique
et peut-être cosmique de ces phénomènes (19) . Gomme
les grandes accumulations de taches, telle que celle,
par exemple, qu'Hévélius observa le 20 juillet 16/|3,
et qui couvrit un tiers du Soleil, sont toujours accom-
pagnées d'une multitude de facules, je suis porté à
attribuer aux noyaux obscurs ces assombrissements,
durant lesquels des étoiles devinrent visibles quelque
temps, comme dans les éclipses totales.
Un calcul de Du Séjour nous apprend qu'une éclipse
totale ne peut durer, pour un point de l'équateur ter-
restre, plus de 7' 58", et pour la latitude de Paris plus
de 6' 10". Les obscurcissements rapportés par les an-
nalistes eurent une durée beaucoup plus longue, et je
serais tenté, pour cette raison, de les rapporter à trois
causes différentes : l** à la perturbation apportée dans
le développement de la lumière du Soleil ou à une
intensité moins grande de la photosphère; 2" à des
obstacles, tels que des couches de nuages plus éten-
dues et plus épaisses, opposées au rayonnement de la
- 445 —
lumière et de la chaleur, par Tatmosphère extérieure,
imparfaitement transparente, qui recouvre la sphère
lumineuse; 3** à des mélanges qui troubleraient l'air
qui nous entoure , comme les poussières , générale-
ment de nature organique, que transportent les vents
alises , et les prétendues pluies d'encre , ou les pluies
de sable dont Macgowan rapporte qu'elles tombent
en Chine durant plusieurs jours. Les deux dernières
explications n'exigent aucun affaiblissement dans la
production peut-être électro-magnétique de la lu-
mière, hypothèse d'après laquelle la lumière serait
une aurore boréale perpétuelle (20) ; mais la troi-
sième exclut la visibilité des étoiles en plein midi ,
dont il est si souvent question , lors de ces obscurcis-
sements mystérieux, décrits avec trop peu de détails.
Ce n'est pas seulement l'hypothèse d'une troisième
et dernière enveloppe du Soleil, ce sont aussi les
conjectures sur toute la constitution physique du
corps central de notre système planétaire , qui sont
confirmées par la découverte , due à Arago, de la po-
larisation colorée. Un rayon de lumière qui , partant
des régions les plus reculées du Ciel, vient frapper
notre œil , après avoir parcouru un grand nombre
de millions de lieues , indique comme de lui-
même, dans le polariscope d' Arago, s'il est ré-
fléchi ou réfracté, s'il émane d'un corps solide, li-
quide ou gazeux [Cosmos, 1. 1, p. 41; t. II, p. 397)e
Il est essentiel de distinger la lumière naturelk
rayonnant directement du Soleil, des étoiles i
des flammes, qui n'est polarisée qu'à la conditia
m. :?9
— 446 —
d'être réfléchie par un plan de glace, sous un angle
de 35° 25' , et la lumière polarisée qui émane
spontanément des corps solides ou liquides incan-
descents. La lumière polarisée vient très-probable-
rîient de l'intérieur de ces corps. Passant d'un mi-
lieu plus dense dans la couche d'air environnante,
elle est réfractée à la surface ; une partie du rayon
est renvoyée vers l'intérieur et devient de la lu-
mière polarisée par réflexion, tandis que l'autre
partie offre les caractères de la lumière polarisée
par réfraction. Le polariscope chromatique dis-
tingue ces deux lumières l'une de l'autre, d'après les
situations opposées qu'occupent les images colorées
complémentaires. A l'aide d'expériences très- déli-
cates qui remontent au delà de 1820 , Arago a dé-
montré qu'un corps solide incandescent , par exemple
un boulet de fer chauffé au rouge, ou bien un métal
fondu à l'état liquide et lumineux, n'émet dans
une direction perpendiculaire à sa surface que de
la lumière naturelle ; mais que les rayons qui , par-
tant des bords, forment pour arriver jusqu'à nous un
angle d'émergence très-incliné sur la surface, sont
polarisés. Si l'on voulait appliquer à des flammes
gazeuses ce même appareil qui sépare si nettement
les deux sortes de lumière, on ne pourrait découvrir
de traces de polarisation, quelque petit que fût l'angle
sous lequel seraient émanés les rayons. Bien que,
même pour les gaz , la lumière prenne naissance à
l'intérieur du corps incandescent, dans ce cas cepen-
Jant, en raison de la faible densité des couches ga-
— 447 —
zeuses, la longueur de la route que les rayons ont
à traverser et l'obliquité de leur direction ne pa-
raissent pas diminuer leur intensité ni leur nombre,
et l'émergence de ces rayons, leur passage dans
un autre milieu , ne produit point de polarisation.
Or le Soleil ne montre pas trace de polarisation,
lorsqu'on étudie au polariscope la lumière qui part
de ses bords sous des angles extrêmement petits;
il résulte de cette importante comparaison que ce
qui brille dans le .^oleil ne provient pas du corps
solaire, ni d'une substance liquide, mais d'une en-
veloppe gazeuse et douée d'une lumière propre.
Ceci peut s'appeler une analyse physique de la pho-
tosphère.
Le même instrument optique a aussi donné la
preuve que l'intensité de la lumière n'est pas plus
grande au centre que sur les contours du disque
solaire. Lorsque deux images complémentaires du
Soleil, Tune rouge, l'autre d'un bleu verdàtre , sont
projetées l'une sur l'autre, de façon que le bord de la
première tombe sur le centre de la seconde , la partie
commune devient parfaitement blanche. Si l'inten-
sité lumineuse du Soleil était différente en ses divers
points, plus grande, par exemple, au centre qu'à la
circonférence, on obtiendrait aux bords du segment
commun, en réunissant partiellement les deux images
colorées, d'un côté du rouge, de l'autre côté du
bleu; cela tient à ce que du côté de l'image rouge
les rayons bleus ne pourraient neutraliser qu'en
partie les rayons rouges provenant du centre qui
sont plus nombreux. Rappelons-nous maintenant
que dans une atmosphère gazeuse, les bords doi-
vent paraître plus lumineux que le centre, et que,
dans un globe solide , les bords et le centre doi-
vent avoir la même intensité. Il s'en suit que la
photosphère , formant pour nous le disque appa-
rent du Soleil , devrait paraître plus éclatante à
la circonférence qu'au centre, résultat contredit
par le polariscope , qui indique une égale in-
tensité de lumière au centre et sur les bords.
Si cette opposition n'a pas lieu , on doit l'attri-
buer à l'enveloppe de vapeurs qui entoure la pho-
tosphère, et éteint moins la lumière du centre
que celle des rayons qui , partant des bords, ont à
franchir à travers ces nuages une plus longue dis-
tance, pour arriver à l'œil de l'observateur (21). Des
physiciens et des astronomes célèbres, Bouguer et
Laplace, Airyet Sir John Herschel, sont opposés à
ces vues d'Arago; ils tiennent l'intensité des bords
pour inférieure à celle du centre, et le dernier nommé
de ces illustres savants rappelle « que d'après les lois
de l'équilibre, cette atmosphère extérieure devrait
avoir une forme sphéroïdale plus aplatie que les enve-
loppes qu'elle recouvre, et que la densité plus grande
qui en résulterait vers Téquateur devrait déterminer
une différence dans l'intensité de la lumière rayon-
nante (22). » Arago s'occupe actuellement de sou-
mettre son opinion à de nouvelles épreuves , et de
ramener le résultat de ses observations à des rap-
ports numériques précis.
— 449 -
La comparaison de la lumière solaire avec les deux
lumières artificielles les plus puissantes qu'on ait
pu jusqu'à présent produire sur la terre, donne,
dans l'état encore si imparfait de la photométrie,
les rapports suivants : Dans les ingénieuses expé-
riences de Fizeau et de Foucault, la lumière de
Drummond , produite par la flamme d'hydrogène
et d'oxygène dirigée sur de la craie, est relative-
ment au disque solaire comme 1 est à 146. On a
reconnu que le courant lumineux obtenu entre deux
charbons , dans l'expérience de Davy, par l'action
d'une pile de Bunsen , est au Soleil, sous l'influence
de 46 éléments, dans le rapport de 1 à 4,2; et en em-
ployant de très-grands éléments , comme 1 à 2,5 ;
il n'est donc pas trois fois plus faible que la lumière
solaire (23). Si aujourd'hui encore on n'apprend
point sans étonnement que l'éclat éblouissant de la
lumière de Drummond , projeté sur le disque du
Soleil, a l'apparence d'une tache noire, on doit
admirer doublement la sagacité de Galilée , qui
dès l'année 1612 , par une suite de déductions sur
la dislance à laquelle Vénus doit être du Soleil pour
être visible à l'œil privé d'instruments , conclut
que le noyau le plus sombre des taches solaires est
plus brillant que la portion la plus éclatante de la
pleine Lune (24).
William Herschel, exprimant par le nombre 1000
l'intensité générale de la lumière du Soleil, estimait en
moyenne celle des pénombres des taches à 469, celle
du noyau obscur à 7. D'après ces données, sans doute
— 450 —
bien conjecturales, si l'on estime, civecBouguer , que le
Soleil est 300 000 fois plus éclatant que la pleine Lune,
la pleine Lune posséderait 2000 fois moins de lumière
que le noyau noir des taches du Soleil. Certains pas-
sages de Mercure ont manifesté d'une manière remar-
quable l'intensité lumineuse de cette portion centrale
des taches, qui n'est autre chose que le corps obscur
du Soleil , éclairé par le reflet des parois ouvertes de
la photosphère, et celui de l'atmosphère nuageuse qui
forme les pénombres , ainsi que par la lumière des
couches d'air terrestres , interposées entre le soleil
et l'observateur. Comparés à la planète dont l'hémi-
sphère non éclairé était alors tourné vers la Terre, les
noyaux sombres des taches voisines semblaient d'un
gris clair (25). Lors du passage de Mercure, le 5 mai
1832, un excellent observateur, le Conseiller Schwabe,
de Dessau , a examiné attentivement la différence
d'obscurité entre les noyaux et la planète. J'ai mal-
heureusement perdu l'occasion de faire moi-même
ce rapprochement, lors du passage du 9 novem-
bre 1802 que j'observai au Pérou, bien que Mercure
touchât presque plusieurs noyaux. Trop préoc-
cupé de déterminer la position de la planète par
rapport aux fils du télescope, je négligeai cette
comparaison. En Amérique, le professeur Henry
démontra, dès 1815, à Princeton, que les taches
du Soleil émettent beaucoup moins de chaleur que
les portions du disque qui n'ont point de taches.
L'image du Soleil et celle d'une grande tache fu-
rent projetées sur un écran , et l'on mesura à Taide
- 451 —
du thermo-multiplicateur les différences de tempé-
rature (26).
Que les rayons calorifiques se distinguent des
rayons lumineux par des longueurs différentes dans
les ondulations transversales de l'éther, ou qu'il y ait
identité entre eux , et que les rayons calorifiques
produisent en nous la sensation de lumière par une
certaine vitesse de vibration , propre à de très-hautes
températures , toujours est-il que le Soleil , sourcp
de la lumière et de la chaleur, peut faire naître çt
entretenir des forces magnétiques sur notre planète
et surtout dans l'atmosphère qui l'enveloppe. JLa
connaissance déjà ancienne de phénomènes thermo-
électriques dans certains cristaux , tels que la tour-
maline, la boracite, la topaze, et d'autre part la grande
découverte d'OErsted (1820) , d'après laquelle tout
conducteur traversé par l'éjectricité exerce , pendant
la durée du courant, des i influences déterminées sur
l'aiguille aimantée, rendirent sensible la relation in-
time qui existe entre Igi chaleur, l'électricité et le
magnétisme. Appuyé sur cette sorte de parenté, l'in-
génieux Ampère , qui attribuait toute espèce de
magnétisme à des courants électriques, agissant dans
un plan perpendiculaire à l'axe de l'aiguille aiman-
tée , proposa cette hypothèse que la tension magné-
tique du globe est produite par des courants élec-
triques , circulant autour de notre planète de l'Est
à l'Ouest, et que, par suite, les variations horaires de
la déclinaison magnétique dépendent de la chaleur,
source des courants , qui varie elle-même suivant la
— 452 —
position du Soleil. Les recherches thermo-magnéti-
ques (le Seebeck, d'où il résulte que les variations de
température dans les soudures d'un circuit de bis-
muth et de cuivre, ou d'autres métaux dissemblables,
déterminent une déviation de l'aiguille aimantée,
confirmèrent les vues d'Ampère.
Une brillante découverte de Faraday, que l'auteur
vient de soumettre à un nouvel examen, presqu'au
moment où l'on imprime ces feuilles, jette un jour
inattendu sur cette importante question. Des travaux
antérieurs de ce grand physicien avaient déjà dé-
montré que tous les gaz sont diamagnétiques ^ c'est-
à-dire se placent dans la direction de l'Est à TOuest,
comme le bismuth et le phosphore, avec cette cir-
constance toutefois que l'oxygène jouit de cette pro-
priété à un degré moindre que tous les autres gaz.
Ses dernières recherches, dont le commencement re-
monte à 1847, prouvent que l'oxygène seul parmi
tous les gaz , tend , comme le fer, à une position
Nord-Sud, mais que par la dilatation et l'élévation
de température il perd de cette force paramagné-
tique. Gomme la tendance diamagnétique des autres
éléments de l'atmosphère, de l'azote et de l'acide
carbonique, n'est modifiée ni par l'augmentation de
volume ni par l'élévation de température , on n'a à
considérer que l'enveloppe d'oxygène qui entoure le
globe comme une sphère de tôle immense, et en subit
l'influence magnétique. L'hémisphère tourné vers le
Soleil sera donc moins paramagnétique que l'hémi-
sphère opposé ; et comme les limites qui séparent ces
— 453 —
deux moitiés changent constamment par la rotation
du globe et sa révolution autour du Soleil, Faraday
est porté à voir dans ces rapports de température la
cause d'une partie des variations du magnétisme ter-
restre à la surface du globe. L'assimilation, fondée sur
une série d'expériences, d'un gaz unique, l'oxygène,
avec le fer, est une des découvertes considéra-
bles de notre époque, d'autant plus que probable-
ment l'oxygène équivaut environ à la moitié de
toutes les substances pondérables, répandues dans
les parties accessibles du globe (27). Ainsi, sans
qu'il soit nécessaire de supposer des pôles ma-
gnétiques dans le Soleil, non plus que des forces
magnétiques particulières dans les rayons qui en
émanent, le corps central de notre système plané-
taire peut, en raison de sa puissance comme source
de chaleur, exciter sur le globe terrestre une activité
magnétique.
On a essayé de démontrer, au moyen d'observa-
tions météorologiques, embrassant plusieurs années,
mais bornées à quelques stations, qu'une face du
Soleil, celle par exemple qui était tournée vers la
Terre le 1'' janvier 1846, possède une plus grande
puissance de calorique que la face opposée (28), Les
résultats auxquels on est arrivé n'ont pas offert plus
de certitude que les conclusions à l'aide desquelles on
a prétendu déduire des anciennes observations de
Maskelyne, à Greenwich , une diminution du dia-
mètre solaire. La périodicité des taches du Soleil, ra-
menée par le Conseiller Schwabe , de Dessau , à des
— 454 —
formules numériques, paraît mieux fondée. Aucun
autre astronome vivant n'a pu consacrer à cet objet
une attention aussi persévérante. Durant ^24 an-
nées consécutives, Schwabe a souvent passé plus de
300 journées par an à explorer le disque du Soleil.
Ses observations de 1844 à 1850 n'étant pas encore
publiées , j'ai dû recourir à son amitié pour en avoir
communication; il a en outre répondu à un certain
nombre de questions que je lui avais posées. Je ter-
mine le chapitre de la Constitution Physique du
Soleil , par l'extrait dont cet observateur éminent a
bien voulu enrichir mon livre.
0 Les nombres contenus dans la table suivante ne
laissent aucun doute, au moins pour l'époque com-
prise entre 1826 et 1850, que les variations dans le
nombre des taches solaires se reproduisent par pé-
riode de 10 ans environ, de sorte que le maximum
tombe dans les années 1828, 1837, 18/i8, le minimum
en 1833 et 1843. Je n'ai point eu l'occasion (il ne faut
point oublier que c'est Schwabe qui parle) de re-
cueillir une suite continue d'observations plus an-
ciennes ; cependant je ne serais pas éloigné d'ad-
mettre que la durée de cette période puisse subir
elle-même des variations (29).
— 455 —
ANNÉES.
GROUPES
JOURS
sans
NOMBRE
des jours
DE TACHES.
TACHES VISIBLES.
d'observation.
i
1826
118
22
277
1827
161
2
273
1828
225
0
282
1829
199
0
264
1830
190
1
217
1831
149
s
239
1832
84
49
270
1835
33
139
267
1834
51
120
273
1835
173
18
244
1836
272
0
200
1837
333
0
168
1838
282
0
202
1839
162
0
205
1840
152
3
263
1841
102
15
283
1842
68
64
307
1843
34
149
312
1844
52
111
321
18Zi5
114
29
332
1846
157
1
314
1847
257
0
276
1848
330
0
278
1849
238
0
285
1850
186
2
308
» J'ai pu observer de grandes taches , visibles à
l'œil nu, presque dans toutes les années où ne tom-
— 456 —
bail pas le minimuQi; les principales parurent en
1828, 1829, 1831, 1836, 1837, 1838, 1839, 1817,
1848. Je considère ici comme grandes taches celles
qui embrassent au moins 50"; c'est seulement à cette
limite qu'elles commencent à devenir visibles pour
de bons yeux , sans le secours du télescope.
» Il n'est point douteux qu'il n'y ait d'étroits rap-
ports entre les taches et la formation des facules.
Souvent je vois apparaître des facules ou des lucules
à l'endroit où une tache a disparu , comme aussi se
développer de nouvelles taches dans les facules.
Chaque tache est entourée de nuages plus ou moins
lumineux. Je ne crois pas que les taches aient une
influence quelconque sur la température annuelle.
Je note trois fois par jour la hauteur du baromètre
et celle du thermomètre ; les moyennes annuelles
qui résultent de ces observations , ne laissent jusqu'à
présent soupçonner aucun rapport sensible entre le
climat et le nombre des taches. En admettant qu'en
quelques cas cetle coïncidence vint à se montrer,
elle n'aurait d'importance qu'à la condition de se
reproduire sur beaucoup d'autres points de la terre.
Si réellement il y avait lieu d'attribuer aux taches
du Soleil la moindre influence sur l'état de notre
atmosphère, il faudrait tout au plus conclure de
mes tables que les années où les taches abondent
comptent moins de jours sereins que les années
où elles sont rares. (Schumacher's Astron, Nachr,^
n'^ 638, p. 221.)
» William Herbchel donnait le nom de facules aux
— 657 --
sillons lumineux qui n'apparaissent qu'auprès des
bords du Soleil et celui de lucules aux rides visibles
seulement vers le centre {Astron. Nadir, ^ n° 350,
p. 243). Je me suis convaincu que facules et lucules
viennent des mêmes nuages lumineux pelotonnés, qui
paraissent plus brillants vers les bords du Soleil , et
sont au contraire, vers le milieu , moins éclatants que
la surface générale. Je préfère donc donner à tous les
endroits particulièrement brillants du disque solaire,
le nom de nuages lumineux, en les divisant d'après
leur forme, en nuages pelotonnés ou cumuliformes,
et en nuages allongés ou cirriformes. Cette matière lu-
mineuse est irrégulièrement distribuée sur le Soleil ,
et donne quelquefois à sa surface un aspect marbré. La
même apparence se voit fréquemment sur les bords,
et quelquefois jusqu'aux pôles. Cependant c'est tou-
jours sur les deux zones de taches qu'elle se montre
avec le plus d'intensité, aux époques mêmes où il
n'existe point de taches; alors les deux zones, plus
brillantes, ressemblent d'une manière frappante aux
bandes de Jupiter.
» Les sillons obscurs qui se rencontrent entre les
nuages lumineux de forme allongée sont les espaces
mats, appartenant à la surface générale du Soleil,
dont l'aspect ressemble à un sable formé de grains
égaux. Sur cette surface chagrinée on voit quel-
quefois de fort petits points gris, non pas noirs;
ce sont les pores , qui eux-mêmes sont sillonnés de
petites rides sombres extrêmement fines {Astron,
Nachr., n" 473, p. 286). Ces pores, lorsqu'ils sont
— /|58 —
groupés par masses , forment des espaces gris et né-
buleux et en particulier les pénombres des taches
solaires. Dans ces pénombres on voit des pores et
des points noirs qui le plus souvent semblent rayonner
du noyau jusqu'aux limites de la pénombre; c'est
ce qui produit la similitude souvent si frappante
que l'on remarque entre la forme des pénombres et
celle des noyaux. »
L'explication et le rapprochement de ces phéno-
mènes si variables n'auront acquis pour l'observation
de la nature toute leur importance, que lorsque,
sous les tropiques où le ciel demeure sans nuages
pendant plusieurs mois , on aura pu , à l'aide d'un
appareil photographique mû par une horloge, ob-
tenir une suite non interrompue d'images des ta-
ches solaires (30). Les phénomènes météorologi-
ques , qui se produisent dans les atmosphères dont
le corps obscur du Soleil est enveloppé, déterminent
les apparitions que nous appelons taches et facules.
Probablement là aussi, comme dans la météorologie
terrestre , les perturbations sont d'une nature si di-
verse et si compliquée , si générale à la fois et si lo-
cale, que des observations patientes et complètes
pourront seules résoudre une partie des problèmes
sur lesquels de nos jours encore il reste une grande
obscurité.
459 —
II
LES PLANÈTES.
Il est nécessaire de faire précéder par quelques
considérations générales sur les corps célestes la
description de chaque corps céleste en particulier.
Ces considérations d'ailleurs n'embrassent que les
22 planètes principales et les 21 lunes, planètes
inférieures, ou satellites découverts jusqu'à ce jour.
Elles ne s'étendent point à tous les corps célestes
planétaires, parmi lesquels les comètes à elles seules
présenteraient déjà un total dix fois plus considé-
rable. En général la scintillation des planètes est
faible, parce qu'elles ne font que réfléchir la lumière
du Soleil , et aussi à cause de la grandeur apparente
de leur disque (Voyez Cosmos, t. III, p. 81). Dans la
lumière cendrée de la Lune, comme dans la lumière
rouge qu'elle présente durant les éclipses et qui
paraît beaucoup plus intense sous les tropiques, la
lumière du Soleil a subi pour l'observateur placé
sur la Terre un double changement de direction. J'ai
eu déjà l'occasion de remarquer que la Terre est
susceptible d'émettre une faible quantité de lumière
propre, faculté commune d'ailleurs à d'autres pla-
nètes, ainsi que le prouvent certains phénomènes
— 460 -^
remarquables, observés de temps à autre sur la partie
de Vénus non éclairée par le Soleil (31).
Nous considérerons les planètes sous le rapport de
leur nombre , de l'ordre dans lequel elles ont été dé-
couvertes , de leur volume en lui-même et relative-
ment à leur distance au Soleil , de leur densité , de
leur masse, de la durée de leur rotation, de Tin-
clinaison de leur axe , de leur excentricité et de leurs
différences caractéristiques, suivant qu'elles sont pla-
cées au delà ou en deçà de la zone des petites planètes.
Pour tous ces objets, la nature de cet ouvrage nous
fait un devoir d'attacher un soin particulier aux ré-
sultats numériques, et de choisir toujours ceux qui
sont considérés, au moment même de la publica-
tion de ce volume, comme provenant des recher-
ches les plus récentes et les plus dignes de confiance.
0
PLANÈTES PRINCIPALES.
1° Nombre des planètes principales et époque de leur
découverte,— VdLvmi les sept corps célestes qui, en rai-
son des changements continuels apportés dans leurs
distances relatives, ont été, dès la plus haute antiquité,
distingués des étoiles scintillantes et conservant tou-
jours sur le firmament leur place et leurs distances
(orbis inerrans), cinq seulement : Mercure, Vénus,
Mars, Jupiter et Saturne offrent l'apparence d'é-
toiles (quinque stellee errantes). Le Soleil et la Lune
furent toujours mis à part en raison de la grandeur
de leur disque et par suite de l'importance qui
— 461 —
leur était attribuée dans les conceptions mythologi-
ques (32). Ainsi d'après Diodore de Sicile (lib. II,
cap. 30), les Ghaldéens ne connaissaient que cinq pla-
nètes, et Platon, dans le seul passage du Timée t)ii
il soit question de ces corps errants, dit en ternies
exprès : «Autour de la Terre, qui repose au centre
du monde, se meuvent la Lune, le Soleil et cinq au-
tres astres auxquels on donne le nom de Planètes ;
cela fait en tout sept mouvements circulaires » (33).
Dans la structure du Ciel imaginée jadis par Pytha-
gore et décrite par Philolaùs, parmi les dix sphères
célestes qui font leur révolution autour du feu cen-
tral ou foyer du monde (eaua), immédiatement au
dessous du Ciel des étoiles fixes , sont nommées les
cinq planètes (34), suivies du Soleil, de la Lune, de la
Terre et de l'antipode de la terre (avrt^Swv). Ptolémée
lui-même ne parle jamais que de cinq planètes. Les
sept planètes distribuées par Julius Firmicus entre
les génies ou Décans (35), telles qu'on peut les voir
dans le zodiaque de Bianchini , qui date vraisembla-
blement du ni' siècle de notre ère (36), et dans les
monuments égyptiens contemporains des Césars,
n'appartiennent point à l'histoire de l'astronomie an-
cienne, mais à ces époques plus récentes où les rêve-
ries astrologiques s'étaient répandues partout (37).
Il n'y a pas lieu de s'étonner que la Lune ait été
rangée parmi les sept planètes , car chez les anciens ,
si l'on excepte quelques vues remarquables d'Anaxa-
gore sur les forces attractives (Co^mo^, t. II , p. 371
et 59;^), il n'est presque jamais fait allusion à la dé-
ni BO
— 462 —
pendance plus directe de la Lune vis-à-vis de la
Terre. En revanche, d'après une hypothèse citée par
Vitruve (38) et Martien Capella (39) , mais sans indi-
cation d'auteur, Vénus et Mercure, que nous appelons
des planètes inférieures , sont présentés comme des
satellites du Soleil, que l'on fait tourner autour de la
Terre. Un pareil système ne peut pas plus être ap-
pelé égyptien qu'il ne peut être confondu avec les
épicycles de Ptolémée ou avec les idées de Tycho sur
la structure du monde (40).
Les dénominations sous lesquelles les cinq pla-
nètes stellaires sont désignées chez les anciens peu-
ples sont ou des noms de divinités ou des épithètes
distinctives , choisies d'après leur aspect. 11 est d'au-
tant plus difficile, sans autres sources que celles aux-
quelles nous avons pu puiser jusqu'à ce jour, de dé-
terminer ce qui, dans ces dénominations, appartient
originairement à la Chaldée ou à l'Egypte , que les
écrivains grecs ne nous ont pas transmis fidèlement
les noms primitifs en usage chez d'autres peuples ,
mais les ont traduits dans leur langue, ou se sont con-
tentés d'équivalents pris un peu au hasard, selon leurs
vues particulières. Quant à décider si les Chaldéens
n'ont été que les disciples heureux des Égyptiens, et
à déterminer les découvertes pour lesquelles ils ont
été devancés par eux (41) , ce sont là des points qui
touchent aux importants mais obscurs problèmes de
la civilisation naissante , au premier développement
scientifique de la pensée sur les bords du Nil ou
de TEuphrate. On connaît les noms égyptiens des
— 465 —
36 Décans; mais, pour ceux des planètes, un ou
deux seulement nous sont parvenus (42).
Il est surprenant que Platon et Aristote ne dési-
gnent jamais les planètes que sous des noms mytho-
logiques , qui sont aussi ceux dont se sert Diodore ,
tandis que plus tard , c'est-à-dire dans le traité
du Monde, faussement attribué à Aristote , on trouve
un mélange des deux dénominations : ainsi , OatVoûv
pour Saturne , IxCX^wj pour Mercure , Ilupoetc pour
Mars (43). Des passages de Simplicius, dans son com-
mentaire sur le IV" livre du traité du Ciel par Aristote,
d'autres tirés de Hygin ^ de Diodore , de Théon de
Smyrne prouvent, chose assez singulière! que Sa-
turne , la plus reculée des planètes connues à cette
époque , avait reçu le nom de Soleil. Ce fut sans
doute sa situation et l'étendue de son orbite qui lui
valurent d'être érigé en dominateur des autres pla-
nètes. Les dénominations descriptives , bien que
très-anciennes et en partie d'origine chaldéenne ,
ne devinrent guère d'un usage fréquent chez les
écrivains grecs et romains que sous le règne des Cé-
sars, et lorsque l'astrologie commença à exercer son
influence. Les signes des planètes, si Ton excepte le
disque du Soleil et le croissant de la Lune gravés sur
les monuments égyptiens, sont d'origine très-récente.
D'après les recherches de Letronne, ils ne remontent
pas au delà du x* siècle (44). On ne les trouve même
pas sur les pierres revêtues d'inscriptions gnostiques.
Des copistes les ont plus tard ajoutés à des manuscrits
gnostiques et traitant d'alchimie, mais il est très-
- 464 -^
rare qu'iis aieul fait cette surcharge sur irs anciens
manuscrits des astronomes grecs, de Ptolémée, de
ïhéon ou de Cléomède. Les premiers signes pla-
nétaires, qui pour Jupiter et Mars étaient formés de
caractères alphabétiques , ainsi que l'a prouvé Sau-
maise avec sa pénétration ordinaire, étaient très-diffé-
rents des nôtres. Les figures actuelles remontent à
peine au delà du xv^ siècle. Une citation empruntée par
Olympiodore à Proclus (ad Timœiim, p. 14, édit. de
Bâle) et un passage du Scoliaste de Pindare (Isthmica,
carm. V, v. 2) établissent d'une manière incontes-
table que la coutume de consacrer certains métaux
aux planètes faisait déjà partie du système des repré-
sentations symboliques en usage au v*" siècle, chez les
Néoplatoniciens d'Alexandrie. On peut lire à ce sujet
le commentaire d'Olympiodore sur la Météorologie
d'Aristote (lib. III, cap. 7, t. II, p. 163 dans l'édition
de la Météorologie, publiée par Ideler. On peut con-
sulter aussi deux passages du tome I, p. 199 et 251).
Si le nombre des planètes connues des anciens
fut borné d'abord à cinq , ce qui fit sept plus tard,
quand on y joignit les grands disques du Soleil et
de la Lune , on conjecturait dès lors que , en dehors
de ces planètes visibles, il y en avait d'autres moins
lumineuses et que pour cette raison on ne pouvait
apercevoir. Cette supposition est rapportée par Sim-
plicius comme venant d'Aristote. « Il est vraisem-
blable, dit-il , que d'autres corps obscurs, se mouvant
autour du centre commun, doivent, aussi bien que la
Terre, occasionner des éclipses de Lune. » Artémidore
— 465 —
d'Éphèse, que Strabon cite souvent comme un géogra-
phe, croyait à Texistence d'une quantité innombra-
ble de ces corps obscurs, tournant autour du Soleil.
L'ancienne conception idéale des Pythagoriciens,
TaW/^wv, reste en dehors de ces conjectures. La
Terre et le pendant de la Terre ont un mouvement
parallèle et concentrique. Cette «Wx^wv, imaginée
pour épargner à la Terre son mouvement de rotation
sur elle-même, n'est, à vrai dire, que la moitié de la
Terre, l'hémisphère opposé à celui que nous habi-
tons (45).
Si du nombre total des planètes et des satellites
connus aujourd'hui , nombre six fois égal à celui des
corps planétaires connus dans l'antiquité, on met à
part les 36 objets découverts depuis l'invention du
télescope, pour les ranger d'après l'ordre de leur
découverte, on trouve que le xvn* siècle en a fourni 9 ;
le xvin% 9 également; la première moitié du xix%
18 à elle seule.
Table chronologique des corps planétaires découverts depuis
Vinvention du télescope, en 1608.
XVII* SIÈCLE.
Quatre satellites de Jupiter, découverts par Simon Marius à
Ansbach, le 29 décembre 1609; par Galilée, à Padoue, le
7 janvier 1610.
Triplicité de Saturne , signalée par Galilée en novembre 1610;
les deux anses reconnues par Uévélius en 1656; découverte
définitive de la véritable forme de l'Anneau, par Huygens,
le 17 décembre 1657.
— 466 —
6" satellite de Saturne (Titan), Huygcns, 25 mars 1655.
8* satellite de Saturne (Japhet), Dominique Cassini, octobre
1671.
5" satellite de Saturne (Rhéa), Cassini, 23 décembre 1672.
8* et 4" satellite de Saturne (Téthys et Dioné), Cassini, fin de
mars 1684.
XVIir SIÈCLE.
Uranus, W. Herschel, à Bath, 13 mars 1781.
2« et 4" satellite d'Uranus, W. Herschel, 11 janvier 1787.
l»"^ satellite de Saturne (Mimas), W. Herschel, 28 août 1789.
2« satellite de Saturne (Encélade), W. Herschel, 17 septembre
1789.
!«' satellite d'Uranus, W. Herschel, 18 janvier 1790.
5^ satellite d'Uranus, AV. Herschel, 9 février 1790.
6« satellite d'Uranus, W. Herschel, 28 février 1794.
y satellite d'Uranus, W. Herschel, 26 mars 1794.
XIX* SIÈCLE.
CÉRÈs *, Piazzi, à Palerme, l^"" janvier 1801.
Pallas *, Olbers, à Brème, 28 mars 1802.
JuNON *, Harding, à Lilienthal , 1" septembre 1804.
Vesta *, Olbers, à Brème, 29 mars 1807.
(Un intervalle de 38 années s'écoule sans amener aucune dé-
couverte de planètes ni de satellites.)
ASTRÉE *, Hencke, à Driesen, 8 décembre 1845.
Neptune, Galle, à Berlin, sur les indications de Leverrier,
23 septembre 1846.
4" satellite de Neptune, W. Lassell, à Starfield, près de Liver-
pool, novembre 1846 ; Bond, à Cambridge (États-Unis).
HÉBÉ % Hencke, à Driesen, 1" juillet 1847.
Iris*, Hind, à Londres, 13 août 1847.
Flore *, Hind, à Londres, 18 octobre 1847.
MÉTIS *, Graham, à Markrée-Castle, 25 avril 1848.
7' satellite de Saturne (Hypérion), Bond, à Cambridge (États-
— /|67 —
Unis), du 16 au 19 septembre 18Zi8; Lassell, à Liverpool,
du 19 au 20 septembre 18^8.
Hygie *, de Gasparis, à Naples, 11 mai 1850.
2*^ satellite de Neptune , Lassell, à Liverpool, 1^ août 1850.
Victoria*, Hind, à Londres, 13 septembre 1850.
Égérie *, de Gasparis, à Naples, 2 novembre 1850.
Irène *, Hind, à Londres, 19 mai 1851; de Gasparis, à Na-
ples, 23 mai 1851. ^
On a distingué, dans ce tableau , les planètes prin-
cipales des satellites par des lettres majuscules (46).
On a marqué aussi d'un astérisque les planètes ha-
bituellement désignées sous le nom de petites pla-
nètes , de planètes télescopiques ou d'astéroïdes ,
qui forment un groupe particulier et comme une
chaîne immense de 25 millions de myriamètres entre
Mars et Jupiter. De ces planètes , quatre ont été
découvertes dans les sept premières années de ce
siècle, dix dans les six années qui viennent de s'é-
couler; ce qui doit être moins attribué à la perfec-
tion des instruments qu'à l'habileté des observateurs,
et surtout à l'excellence des cartes célestes, enrichies
des étoiles fixes de 9' et de 10* grandeur. Tous les
corps immobiles dont la place est marquée ren-
dent d'autant plus facile aujourd'hui de reconnaître
les corps mobiles (Voyez plus haut, p. 126). Aussi
le nombre des planètes a-t-il doublé, depuis que le
premier volume du Cosmos a paru (17); tant les
découvertes se sont succédé rapidement , tant la to-
pographie de notre système planétaire s'est agrandie
et perfectionnée.
— 468 —
2" Division des planètes en deux groupes. — Si roii
considère la région des petites planètes, situées entre
les orbites de Mars et de Jupiter, mais plus rappro-
chées en général de celle de Mars que de celle de
Jupiter, comme un groupe intermédiaire et une zone
de séparation, les planètes les plus voisines du So-
leil, et que l'on peut appeler intérieures, c'est-à-
dire Mercure , Vénus , la Terre et Mars , offrent entre
elles des rapports de ressemblance qui forment au-
tant de contrastes avec les planètes extérieures ,
ou situées au delà de la zone de séparation : Ju-
piter, Saturne, Uranus et Neptune. Le groupe
intermédiaire des petites planètes remplit à peine la
moitié de la distance entre l'orbite de Mars et celle
de Jupiter. Dans l'espace qui sépare ces deux pla-
nètes, la partie la plus voisine de Mars est celle qui
jusqu'à ce jour a été trouvée le plus remplie. Si en
effet on considère les deux points extrêmes, Flore
et Hygie, la distance de Jupiter à Hygie est plus que
triple de celle qui sépare Mars de Flore. Ce groupe
intermédiaire se distingue nettement par l'excentri-
cité et l'inclinaison de ses orbites, entrelacées les unes
dans les autres, et par la petitesse des corps plané-
taires qui le composent. L'inclinaison de l'orbite sur
le plan de l'écliptique est dans Junon de 13° 3', dans
Hébé de 1/^47', dans Égérie de 16** 33'; elle s'élève
dans Pallas jusqu'à 34'' 37', mais redescend, il est
vrai, dans Astrée à 5° 19', dans Parthénope à 4° 37', et
dans Hygie à 3° 47'. Les planètes dans lesquelles l'in-
clinaison sur l'écliptique est moindre de T sont par
— 469 —
ordre de grandeur, en commençant par les plus
grandes, Flore, Métis, Iris, Astrée, Parthénope et
Ilygie. Il n'est pas une de ces planètes cependant dont
l'inclinaison égale en petitesse celle de Vénus, de Sa-
turne, de Mars, de Neptune, de Jupiter et d'Uranus.
Dans quelques-unes des petites planètes , Texcentri-
cité de Tellipse dépasse celle de Mercure (0,206) :
telles sont Junon (0,255), Pallas (0,239), Iris (0,232)
et Victoria (0,218). Dans quelques autres, au con-
traire, Texcentricité est moindre que celle de Mars
(0,093), sans que cependant leur orbite atteigne le
cercle presque parfait de Jupiter, de Saturne et d'U-
ranus : de ce nombre sont Cérès (0,076), Égérie
(0,086) et Vesta (0,089). Le diamètre des planètes
télescopiques échappe presque à toute mesure par sa
petitesse. D'après les observations de Lamont à Mu-
nich , et celles que Maedler a faites avec le réfracteur
de Dorpat, il est vraisemblable que le diamètre de
la plus grande d'entre elles atteint à peine 107 my-
riamètres; c'est 1/5 du diamètre de Mercure et la
moitié de celui de la Terre.
Les quatre planètes intérieures, que nous nom-
mons ainsi parce qu'elles sont situées plus près du
Soleil et en deçà de la zone des astéroïdes, sont toutes
de grandeur moyenne ; elles sont relativement plus
denses; leur mouvement de rotation est à peu près
uniforme, et ne dure pas moins de 24 heures; elles
sont moins aplaties, et, à l'exception de la Terre,
sont dépourvues de satellites. Au contraire , les
quatre planètes extérieures, situées entre la zone des
— 470 —
astéroïdes et les extrémités encore incoîinues du
domaine solaire, Jupiter, Saturne, Uranus et Nep-
tune, sont beaucoup plus grandes et cinq fois moins
denses ; leur mouvement de rotation sur elles-mêmes
est beaucoup plus rapide, leur aplatissement plus
sensible ; elles ont vingt satellites. Les planètes in-
térieures sont toutes plus petites que la Terre; le
diamètre de Mars est égal à l/'2 , celui de Mercure
à 2/5 seulement de celui de la Terre; tandis que,
dans les planètes extérieures, le rapport des diamè-
tres à celui de la Terre s'élève de 4,2 à 11,2. La
densité de Vénus et celle de Mars égalent celle de la
Terre, à moins de 1/10 près; celle de Mercure est
un peu supérieure. Au contraire, la densité d'aucune
des planètes extérieures ne dépasse 1/4 de celle de la
Terre ; celle de Saturne peut être représentée par 1/7;
ce n'est guère que la moitié de la densité des autres
planètes extérieures et de celle du Soleil. En outre
les planètes extérieures présentent des atmosphères
qui, par le caractère particulier de leur conden-
sation , nous apparaissent variables , et produisent
même quelquefois sur la surface de Saturne des
bandes interrompues. Enfin c'est parmi ces pla-
nètes que se rencontre le phénomène , unique dans
tout le système solaire, d'un anneau solide entou-
rant, sans y adhérer, la plus considérable d'entre
elles.
Bien qu'en général, dans cette importante division
des planètes extérieures et des planètes intérieures,
la grandeur absolue , la densité, l'aplatissement, la
4
— 471 -
vitesse de la rotation, l'existence et la non-existence
de satellites semblent dépendre de leur distance au
Soleil, ou, en d'autres termes, du demi-grand axe
de leur orbite , on n'est point en droit d'affirmer
cette dépendance pour chacun des membres particu-
liers qui composent ces groupes. Nous ne connais-
sons jusqu'ici, ainsi que je l'ai déjà fait remarquer,
aucun mécanisme intérieur, aucune loi naturelle,
semblable, par exemple, à la belle loi en vertu de
laquelle les carrés des révolutions sont entre eux
comme les cubes des grands axes, qui fasse dé-
pendre pour toute la série des planètes la densité,
le volume , etc. , de leur distance au Soleil. Il
est vrai que la planète la plus voisine du Soleil,
Mercure , est en même temps la plus dense , puis-
qu'elle l'est six ou huit fois plus que toutes les autres
planètes extérieures , Jupiter, Saturne , Uranus et
Neptune ; mais Vénus, la Terre et Mars, d'une part,
de l'autre, Jupiter, Saturne et Uranus sont loin de se
suivre régulièrement dans l'ordre de leur densité.
En général aussi , les grandeurs absolues croissent
avec les distances, ainsi que le remarquait déjà
Kepler [Harmonice Mundi, lib. V, cap. 4, p. 194 ; voyez
aussi le Cosmos , t. I , p. 453 ) ; cela cependant cesse
d'être vrai, dès que l'on considère chaque planète en
particulier. Mars est plus petit que la Terre, Uranus
plus petit que Saturne, Saturne plus petit que Jupiter,
et Jupiter lui-même est précédé par un essaim de
planètes que leur petitesse permet à peine de mesurer.
La durée de la rotation croît également, pour le plus
— 472 -
grand nombre des planètes , en raison de leur dis-
tance an Soleil ; cependant ce mouvement est plus
rapide dans la Terre que dans Mars, dans Jupiter
que dans Saturne.
Il ne faut , je le répète, considérer la constitution et
les formes des corps , en déterminant leur situation
relative dans Tespace, que comme des faits ayant une
existence réelle, non comme les conséquences de rai-
sonnements abstraits ou comme une série d'effets
dont les causes seraient connues à Tavance. On n'a pas
plus découvert de loi générale applicable aux espaces
célestes que Ton n'en a trouvé pour déterminer, sur
la terre, la situation géographique des points culmi-
nants dans les chaînes de montagnes, ou les contours
de chaque continent. Ce sont là des faits de Tordre
naturel , produits par le conflit de forces tangentielles
et attractives , qui s'exercent sous des conditions
multiples et inconnues. Nous entrons ici , avec une
curiosité mal satisfaite , dans le domaine obscur
des questions de formation et de développement. Il
s'agit, pour prendre dans leur sens propre ces mots
trop souvent mal appliqués, d'événements cosmiques
accomplis durant des périodes de temps dont la
mesure nous échappe. Les planètes ont-elles été
formées par des anneaux errants de matière vapo-
reuse , dans ce cas , la matière en s'agglomérant
autour de certains points où l'attraction était plus
puissante , dut traverser une suite indéfinie d'états
divers, pour arriver à former des orbites simples et
des orbites entrelacées, à produire des planètes si
— 473 —
diflérenles par leur volume , leur aplatissement et
leur densité, pour donner aux unes un grand nombre
de satellites, tandis que les autres en sont dépour-
vues, et pour unir même ces satellites en un an-
neau solide. La forme actuelle des objets et la dé-
termination exacte de leurs rapports n'ont pu nous
révéler jusqu'ici les états par lesquels ils ont dû
passer, non plus que les conditions sous lesquelles
ils ont pris naissance. Ce n'est point une raison
pour appeler ces conditions fortuites, mot que les
hommes prodiguent trop volontiers, à propos de
toutes les choses dont ils ne peuvent encore s'expli-
quer clairement l'origine.
3° Grandeur absolue et grandeur apparente ^ configu-
ration,— Le diamètre de la plus grande de toutes les
planètes, de Jupiter, est 30 fois plus grand que celui de
Mercure, la plus petite de celles dont on peut sûre-
ment déterminer le disque. 11 est près de 11 fois égal
au diamètre de la Terre; ce rapport est à peu près
celui qui existe entre le Soleil et Jupiter, dont les
deux diamètres sont entre eux comme 10 est à 1,
D'après un calcul dont on ne peut garantir l'exacti-
tude, la différence de volume entre les pierres mé-
téoriques, que l'on est tenté de prendre pour de
petits corps planétaires, et Vesta, dont le diamètre,
suivant les mesures de Mœdler , est de 49 myria-
mètres et en a par conséquent 59 de moins que
celui de Pallas, d'après Lamont, ne serait pas plus
considérable que la différence de volume entre Vesta
et le Soleil. 11 faudrait, pour que ce rapport fût vrai,
-- /i7/i —
que certaines pierres météoriques eussent 517 pieds
de diamètre. Il est vrai que l'on a vu des météores
ignés, dont le diamètre, avant l'explosion, n'en
avait pas moins de 2600.
Si Ton compare la Terre avec les planètes exté-
rieures, Jupiter et Saturne, on est frappé de la
dépendance qui se manifeste entre l'aplatissement
des pôles et la vitesse de la rotation. Le mouvement
de rotation de la Terre s'accomplit en 23^ 56', l'apla-
tissement est de 1/300. La rotation de Jupiter s'ac-
complit en 9''55', l'aplatissement est de 1/17 d'après
Arago, de 1/15 d'après John Herschel. La rotation
de Saturne s'accomplit en 10^29', l'aplatissement
est de 1/10. Mais bien que Mars mette 41 minutes
de plus que la Terre à tourner sur lui-même, son
aplatissement , même en adoptant un résultat beau-
coup plus faible que celui auquel est arrivé William
Herschel , reste vraisemblablement beaucoup plus
considérable. La raison de cette infraction à la loi,
en vertu de laquelle la configuration superficielle
d'un sphéroïde elliptique dépend de la vitesse de
la rotation, tient-elle à la différence de la loi qui,
dans les deux planètes, règle l'ordre des densités,
en allant de la surface au centre ^ ou à cette cir-
constance que la surface liquide de quelques planètes
s'est solidifiée, avant qu'elles aient pu prendre une
forme en harmonie avec la vitesse de leur rotation?
De l'aplatissement de notre planète dépendent, ainsi
que le démontre l'astronomie théorique, la rétro-
gradation des points équinoxiaux, la nutation ou
— 475 --
libration de l'axe terrestre et le changement d'obli-
quité de récliptique.
La grandeur absolue , c'est-à-dire la grandeur
vraie des planètes, et leur distance à la Terre,
déterminent leur diamètre apparent. Le tableau
suivant présente les planètes rangées d'après leur
grandeur vraie , en commençant par les plus pe-
tites :
1" Groupe de petites planètes à orbites
entrelacées, dont les plus grandes
paraissent être Pallas et Vesta.
2° Mercure.
3** Mars.
4° Vénus.
5° La Terre.
6« Neptune.
1° Uranus.
8° Saturne.
9" Jupiter.
A une distance moyenne de la Terre, Jupiter a
un diamètre équatorial apparent de 38", 1 ; dans
les mêmes circonstances , le diamètre de Vénus ,
qui égale à peu près la Terre en grosseur, n'est
que de 16", 9; celui de Mars est de 5", 8. Mais dans
la conjonction inférieure , le diamètre apparent
de Vénus augmente jusqu à 62", tandis que celui
de Jupiter ne s'élève pas, en opposition, au delà
de 46", 11 est nécessaire de rappeler ici que le lieu
de l'orbite de Vénus où cette planète paraît le
plus brillante , tombe entre la conjonction infé-
rieure et la plus grande digression. En moyenne,,
476 -
Vénus paraît le plus brillante , au point de ré-
pandre de Tombre en Tabsence du Soleil , lorsqu'elle
est à /iQo à l'Est ou à l'Ouest du corps central.
Dans cette position , son diamètre apparent n'est
que de 40'', et la plus grande largeur de la phase
éclairée est à peine de 10".
Diamètre apparent des sept grandes planètes.
Mercure à distance moyenne 6", 7 (oscille de ti",U à 12")
Vénus — — 16",9 (oscille de 9",5 à 62 ")
Mars — — 5",8 (oscille de 3",3 à 23")
Jupiter — — ZS'\U (oscille de 30" à 46")
Saturne — — 17",1 (oscille de 15" à 20")
Uranus — — Z",9
Neptune — — 2",7
Folume des planètes comparé à celui de la Terre.
Mercure
comme
1 ;
16,7
Vénus
1 :
1,05
La Terre
—
1 :
Mars
—
1 :
IM
Jupiter
—
UU :
Saturne
—
735 :
Uranus
—
82 :
Neptune
—
108 :
Le volume du Soleil est à celui de la Terre comme
1407100 : 1.
Toutes les erreurs qui peuvent se glisser dans
la mesure des diamètres se retrouvent élevées
au cube dans les chiffres qui représentent les vo-
lumes.
— 477 —
Les planètes dont le mouvement répand de la va-
riété et de la vie sur l'aspect du ciel étoile agissent
en même temps sur nous par la grandeur de leur
disque et par leur proximité , par la couleur de leur
lumière, par la scintillation qui, en certains cas,
n'est pas étrangère à quelques-unes d'entre elles, par
la façon particulière dont leurs diverses surfaces
reflètent la lumière du Soleil. Quant à savoir si la
nature et l'intensité de cette lumière peuvent être
modifiées par le dégagement d'une faible quantité
de lumière propre , c'est là un problème qui reste
encore à résoudre.
[i° Ordre des planètes d"" après la distance qui les sé^
pare du Soleil. — Afin que l'on puisse embrasser dans
son ensemble tout ce que l'on connaît actuellement
de notre système planétaire, et se représenter les
distances moyennes qui séparent les différentes pla-
nètes du Soleil, j'ai tracé le tableau suivant, dans
lequel , ainsi que cela est consacré en astronomie, j'ai
pris pour unité la distance moyenne de la Terre au
Soleil, qui est de 15347 000myriamètres. J'ajouterai
plus tard, lorsque je traiterai plus en détail de chacune
des planètes, leurs distances à l'aphélie et au péri-
hélie, c'est-à-dire aux deux moments où ces planètes,
en décrivant l'ellipse dont le Soleil occupe le foyer,
se trouvent , sur la ligne des apsides, au point le plus
éloigné et au point le plus voisin du foyer. Parla dis-
tance moyenne , la seule dont il s'agisse actuellement ,
il faut entendre une moyenne entre la plus grande et
la plus petite distance, c'est-à-dire le demi grand
III. 31
— 478 —
axe de l'orbite planétaire. Les résultats numéri-
ques , ici , comme dans ce qui précède et dans ce
qui suit , sont empruntés pour la plupart au relevé
publié par Hansen , dans V Annuaire de Schumacher
pour 1837. Lorsqu'il s'agit de résultats suscepti-
bles de varier avec le temps , il faut se référer ,
pour les grandes planètes, à l'année 1800, excepté
pour Neptune, où il est nécessaire de redescendre
jusqu'en 1851. J'ai même mis à profit V Annuaire
astronomique de Berlin pour 1853. Je dois les détails
concernant les petites planètes à l'amitié du doc-
teur Galle ; tous sont relatifs à des époques très-
récentes.
Distances des planètes au Soleil.
Mercure 0,38709
Vénus 0,72333
La Terre 1,00000
Mars 1,52369
Petites planètes.
flore 2,202
Victoria 2,335
Vesta 2,362
Iris 2,385
Métis 2,386
Hébé 2,425
Parthénope .... 2,448
Irène 2,553
Astrée 2,577
Égérie 2,579
Junon 2,669
— 479 —
Cérès 2,768
Pallas 2,773
Hygie 3,151
Jupiter. 5,20277
Saturne 9,53885
Uranus 19,18239
Neptune 30,03628
Le seul fait de la diminution rapide qui, de Sa-
turne et de Jupiter à Mars et à Vénus , se fait sentir
dans la durée des révolutions, fit conjecturer de
bonne heure, lorsqu'on adopta l'hypothèse de sphères
mobiles auxquelles étaient fixées les planètes , que
ces sphères devaient être situées à distance les unes
des autres. Mais comme on ne saurait trouver chez
les Grecs aucune trace d'observations ni de mesures
méthodiques avant Aristarque de Samos et l'établis-
sement du musée d'Alexandrie , il s'ensuit qu'il dut
y avoir de grandes divergences dans les hypothèses
sur l'ordre des planètes etl eurs distances relatives,
soit que l'on calculât ces distances à partir de la Terre
Immobile au milieu des planètes , suivant l'opinion
dominante, soit qu'avec les Pythagoriciens on prît
pour point fixe le Soleil, foyer dp paonde (éaiia).
On avait surtout des doutes sur la position relgi-
tive du Soleil vis-à-vis des planètes inférieures et de
la Lune (48). Les Pythagoriciens, pour lesquels les
nombres étaient la source de toute connaissance et
l'essence môme des choses, appliquaient la théorie
universelle des proportions numériques à la considé-
ration géométrique des cinq corps réguliers dont on
— 480 —
avait de bonne heure découvert les propriétés, aux
intervalles musicaux des tons qui forment les accords
d'où nait l'harmonie , et même à la structure de
l'univers. Ils pensaient que les planètes mettent en
mouvement par leurs vibrations les ondulations so-
nores, selon les rapports harmonieux des intervalles
qui les séparent, et produisent ce qu'ils appelaient
la musique des sphères, t Cette musique, ajoutaient-
ils, serait perceptible aux oreilles des hommes, si
elle ne leur échappait en raison de sa perpétuité
même, et parce que les hommes y sont habitués
dès l'enfance (49). » La partie harmonieuse de la
théorie pythagoricienne des nombres se rattachait
ainsi à la représentation figurée du Cosmos , comme
on peut le voir, en lisant l'exposition fidèle qu'en
fait Platon dans le Timée; car la cosmogonie est, aux
yeux de Platon, l'œuvre des principes opposés de la
nature , réconciliés par l'harmonie (50). Platon, dans
un tableau plein de grâce, tente de rendre sensible le
concert harmonieux du monde, en plaçant sur les cer-
cles planétaires autant de Sirènes qui , accompagnées
par les trois Parques , filles de la Nécessité , entre-
tiennent l'éternel mouvement du fuseau céleste (51).
Cette représentation des Sirènes, dont les Muses
prennent quelquefois la place dans le concert divin,
se retrouve sur beaucoup de monuments antiques,
particulièrement sur des pierres gravées. Dans l'an-
tiquité chrétienne comme dans le moyen âge, depuis
saint Basile jusqu'à saint Thomas d'Aquin et à Pierre
d'Ailly, il est souvent fait allusion à l'harmonie des
— 481 —
sphères , mais le plus ordinairement en termes qui
marquent le dissentiment de Técrivain (52).
A la fin du xvi'' siècle , les vues de Pythagore et de
Platon sur la structure du monde se réveillèrent
dans la vive imagination de Kepler. Comme eux il
appela à son aide la géométrie et la musique, et con-
struisit le système planétaire, d'abord dans son Mys-
terium cosmographicum, en prenant pour base les cinq
corps réguliers qui peuvent être circonscrits aux
sphères des planètes, puis dans YHarmonice mundi,
d'après les intervalles des notes musicales (5.*^). Con-
vaincu que les distances relatives des planètes sont
soumises à une loi, il comptait résoudre le problème
par la combinaison de ses premières vues avec celles
qu'il avait adoptées plus tard. Il est assez singulier
que Tycho, que l'on voit toujours d'ailleurs si ferme-
ment attaché au principe de l'observation réelle , ait
déjà , avant Kepler, exprimé cette opinion , contre
laquelle protesta Rothmann , que l'air du ciel , ce
que nous appelons le milieu résistant, ébranlé par
le mouvement des corps célestes, produit des sons
harmonieux (5i). Au reste, les analogies entre les
rapports des sons et les distances des planètes, dont
Kepler suivit si longtemps et si laborieusement la
trace, ne me paraissent pas avoir jamais été, pour ce
grand esprit, autre chose que des abstractions. A la
vérité , il se réjouit, pour la plus grande gloire du Créa-
teur, d'avoir découvert dans les relations de l'espace
des relations numériques. Comme entraîné par une
sorte d'enthousiasme poétique, il fait jouer Vénus
— 482 —
avec la Terre en majeur (Dur) à l'aphélie, en mineur
(Moll) au périhélie ; il dit que les tons les plus élevés de
Jupiter et de Vénus doivent , en s'unissant , former
un accord en mineur. Mais ces expressions , malgré
leur retour fréquent, ne doivent être prises que dans
un sens figuré , et elles n'empêchent pas Kepler de
dire expressément : « Jam soni in cœlo nulli existant,
nec tam turbulentus est motus , ut ex attritu aurœ
cœlestis eliciatur stridor » (Harmonice mundi , lib. V,
cap. 4). Dans ce passage , comme dans ceux auxquels
nous avons fait allusion plus haut , il est bien réelle-
ment question de Pair subtil et serein qui remplit
le monde ( aura cœlestis).
La comparaison des intervalles qui séparent les
planètes avec les corps réguliers qui doivent remplir
ces intervalles, avait encouragé Kepler à étendre ses
hypothèses au ciel des étoiles fixes (55). Lors de la dé-
couverte de Cérès et des autres planètes , les combi-
naisons pythagoriciennes de Kepler se représentèrent
vivement à la mémoire. On se rappela surtout ce
passage, à peu près oublié jusque-là, où il annonce
comme vraisemblable l'existence d'une planète en-
core inconnue dans le vaste espace qui sépare Mars
de Jupiter: «Motus semper distantiam suam sequi
videtur; atque ubi magnus hiatus erat inter orbes,
erat et inter motus. » « Je suis devenu plus hardi, écrit
Kepler dans son Introduction au Mysterium cosmo-
graphicum^ et je place entre Jupiter et Mars une nou-
velle planète, comme j'en place une autre entre
Vénus et Mercure. » Cette seconde supposition était
- 483 —
moins heureuse et est demeurée longtemps ina-
perçue (56). « Il est vraisemblable, ajoute Kepler, que
Tune et Tautre de ces planètes ont échappé à Tobser-
vation, à cause de leur petitesse (57). » Plus tard
Kepler trouva qu'il n'avait pas besoin de ces nouvelles
planètes pour composer le système solaire d'après les
propriétés de ses cinq polyèdres réguliers; il se con-
tenta de faire un peu violence aux distances des
anciennes planètes : « Non reperies novos et incog-
nitos Planetas , ut paulo antea interpositos , non ea
mihi probatur audacia ; sed illos veteres parum ad-
modum luxatos » {Mysterium cosmograpliicum, p. 10).
Les tendances spéculatives de Kepler avaient tant
d'analogie avec celles de Pythagore et plus encore
avec les vues développées dans le Timée de Platon,
qu'à l'exemple de ce philosophe, qui trouvait dans les
sept sphères planétaires les différences des couleurs
aussi bien que celles des sons{Cratyle, p. 409), Kepler
fit aussi des expériences pour reproduire sur une
table diversement éclairée les couleurs des planètes.
{Astron. OpL, cap. 6, p. 26.) Au reste Newton, ce
grand esprit toujours si rigoureux dans ses raison-
nements , n'était pas éloigné , ainsi que l'a déjà re-
marqué Prévost (Mémoires de r Académie de Berlin
pour 1802 , p. 77 et 95), de ramener à l'échelle dia-
tonique la dimension des sept couleurs du spectre
solaire (58).
Ces hypothèses, touchant des parties encore incon-
nues de notre système planétaire , me remettent en
mémoire cette opinion de l'antiquité grecque : qu'il
— 484 —
existait plus de cinq planètes ; que l'on n'en avait pas,
à la vérité , observé davantage , mais que beaucoup
d'autres étaient restées invisibles à cause de leur si-
tuation et du peu d'éclat de leur lumière. Cette conjec-
ture était surtout attribuée à Artémidore d'Éphèse (59).
Une autre croyance qui prit aussi naissance dans
l'ancienne Grèce, peut-être même en Egypte, c'est
que tous les corps célestes actuellement visibles ne
l'ont pas toujours été. A cette légende physique ou
plutôt historique se rattache la forme particulière
sous laquelle certaines races exprimaient la préten-
tion de remonter à une haute antiquité. Ainsi les
Pelages, qui habitaient TArcadie avant les Hellènes,
s'appelaient Upoailr,voL, parce qu'ils se vantaient d'a-
voir pris possession de leur pays , avant que la Lune
n'escortât la Terre. Être antérieur aux Hellènes,
c'était être antérieur à la Lune. L'apparition d'un
astre nouveau était décrite comme un événement cé-
leste , de même que le déluge de Deucalion était un
événement terrestre. Apulée étendait cette inondation
jusqu'aux montagnes de la Gétulie, dans le Nord de
l'Afrique (Jpologia, t. II, p. 494. Voyez aussi le Cos-
mos, t. II, p. 522, note 53). Chez Apollonius de
Rhodes (lib. IV, v. 264), qui, suivant la mode des
Alexandrins, remontait volontiers aux antiques tradi-
tions , il est question de l'établissement des Égyp-
tiens dans la vallée du Nil : « Alors, dit-il , tous les
astres ne décrivaient pas encore leur orbite dans le
ciel. On n'avait pas encore entendu parler de la
race sacrée de Danaûs (60). » Ce curieux passage
— 485 —
aide à mieux comprendre les prétentions des Arca-
diens-Pélages.
Je termine ces considérations sur l'ordre et les
dislances des planètes, en énonçant une loi qui , à la
vérité, ne mérite pas ce nom, que Lalande et De-
lambre appellent un jeu de chiffres, que d'autres
nomment un expédient de mnémonique. Quelle
qu'elle soit, elle a beaucoup occupé notre savant
astronome Bode , surtout à l'époque ou Piazzi dé-
couvrit la petite planète Cérès, découverte à la-
quelle d'ailleurs Piazzi ne fut nullement conduit
par cette loi , mais qui fut bien plutôt occasionnée
par une faute typographique dans le catalogue d'é-
toiles de Wollaston. Si l'on voulait considérer cette
découverte comme l'accomplissement d'une prédic-
tion , il ne faudrait pas oublier que la prédiction ,
ainsi qu'on l'a remarqué déjà , remonte jusqu'à
Kepler, c'est-à-dire un siècle et demi au delà de
Titius et de Bode. Bien que Bode , dans la seconde
édition de l'ouvrage si utile et si populaire , intitulé :
Introduction à la connaissance du ciel étoile , ait dé-
claré très-expressément qu'il empruntait la loi des
distances à une traduction de la Contemplation de la
Nature diO, Bonnet, publiée àWittenberg par le profes-
seur Titius, cette loi cependant a été citée le plus sou-
vent sous son nom et rarement sous celui de Titius.
Elle est formulée dans une note jointe par Titius au
chapitre de Bonnet sur la structure du monde. Après
l'énoncé de la loi , on lit (61) : « Si l'on suppose divisée
en 100 parties la distance du Soleil à Saturne, 4 de
— 486 —
ces parties seront comprises entre Mercure et le So-
leil , la distance de Vénus au Soleil en comprendra
44-3=7, celle de la Terre 44-6=10, celle de Mars
4 4-^2=16. Mais de Mars à Jupiter-cette progression
si exacte est troublée. Si Ton compte à partir de Mars
44-24=:28 de ces parties, on ne trouve ni planète
principale ni satellite. Le Créateur aurait-il donc laissé
un espace vide? 11 n'est point douteux que cet espace
n'appartienne aux satellites de Mars , que l'on n'a
point encore découverts, à moins que Jupiter n'ait
lui-même un plus grand nombre de satellites que
le télescope n'en a révélé jusqu'à ce jour. En fran-
chissant cet espace inconnu quant aux corps qui le
remplissent, on trouve, progression admirable! que
la distance de Jupiter au Soleil peut être représen-
tée par 4 4-48 = 52, et enfin celle de Saturne par
4 4- 96=: 100. » Ainsi Titius était disposé à remplir
l'espace qui s'étend entre Mars et Jupiter, non pas
avec un seul corps céleste , mais avec plusieurs ,
comme cela est en effet dans la réalité ; seulement
il supposait que ces corps étaient des satellites et non
des planètes.
Nulle part le traducteur et commentateur de
Bonnet n'a pris soin de dire ce qui l'a conduit au
chiffre 4 pour l'orbite de Mercure. Peut-être n'a-t-il
fait ce choix qu'afîo d'avoir exactement pour Sa-
turne , réputé alors la plus éloignée de toutes les
planètes et dont la distance est de 9,5, par con-
séquent très-près de 10,0, le nombre 100, en com-
binant le chiffre 4 avec les nombres 96, 48, 24 , etc.,
— 487 —
qui forment une progression régulière. Cela est
plus vraisemblable que de supposer qu'il ait établi
la série en commençant par les planètes les plus
rapprochées. Déjà dans le xviii* siècle, on ne pou-
vait plus espérer de concilier avec les distances
connues une semblable progression en prenant pour
point de départ non pas même le Soleil , mais seu-
lement Mercure ; les notions étaient déjà trop pré-
cises. En réalité, les distances qui séparent Jupiter,
Saturne et Uranus , sont à très -peu de chose près
d'accord avec cette proportion , mais la décou-
verte de Neptune , beaucoup trop rapprochée d'U-
ranus , est venue de nouveau lui donner un grave
démenti (62).
La loi qui porte le nom du vicaire Wurrn de Léon-
berg, et que l'on distingue quelquefois de la loi de
Titius et de Bode, est une simple correction apportée
à la distance solaire de Mercure et à la différence
des distances de Mercure et de Vénus. Wurm, plus
voisin en cela de la vérité , exprime la distance
solaire de Mercure par 387, celle de Vénus par 680 ,
celle de la Terre par 1000 (63). A l'occasion de la
découverte de Pallas, Gauss, dans une lettre adressée
à Zach, au mois d'octobre 1802, fait justice de
la prétendue loi des distances. Voici en quels termes
il s'exprime : « Contrairement à toutes les vérités ab-
solues qui seules méritent le nom de loi , la loi de
Titius ne s'applique à la plupart des planètes que
d'une manière très-superficielle et très- vague, et,
ce que l'on ne parait pas encore avoir remarqué ,
~ 688 —
elle ne s'applique en aucune façon à Mercure. Il
est clair que la série des nombres 4 , i 4- 3 ,
4 + 6, 44-12, 4+- 24, 4 + 48, 4 + 96, 4-f-192
qui sont censés exprimer les distances solaires ne
forment pas le moins du monde une progression
continue. Pour cela il faudrait que le terme qui
précède 4 -H 3 fût non pas 4, c'est-à-dire 4 + 0,
mais 4 -^ 1 1/2. Il n'y a point de mal d'ailleurs à
chercher dans la nature ces rapports approximatifs.
De tout temps les plus grands hommes se sont
laissé prendre à ces jeux d'esprit. »
ô*' Masses des planètes, — Les masses des planètes
ont été déterminées à l'aide de leurs satellites,
lorsqu'elles en ont , d'après leurs perturbations
réciproques, ou d'après les effets soufferts ou pro-
duits par les comètes à courte période. C'est ainsi
qu'en 1841 Encke détermina , en se guidant sur
les perturbations subies par la comète qui porte son
nom, la masse, inconnue jusque-là, de Mercure.
La même comète fait espérer dans l'avenir des cor-
rections à la masse de Vénus. De même les pertur-
bations de Vesta sont mises à profit pour Jupiter.
Le tableau suivant offre les masses des planètes d'a-
près Encke , en prenant pour unité celle du Soleil
(Voyez le 4* Mémoire de Pons sur les comètes, dans
les Mémoires de l'Académie des Sciences de Berlin,
pour l'année 1842, p. 5):
Mercure 1/^865751
Vénus 1/Zi01839
La Terre 1/359551
— 489 —
La Terre et la Lune ensemble. . 1/355Zi99
Mars 1/2680337
Jupiter avec ses satellites. . . . 1/1047,879
Saturne 1/3501,6
Uranus 1/24605
Neptune 1/14446
La masse à laquelle Leverrier était arrivé pour
Neptune, avant la vérification de sa découverte par
Galle ( 1/9322 ) , était encore plus considérable ,
quoique remarquablement près de la vérité. Il ré-
sulte de ce qui précède que les planètes , à l'ex-
ception des petites, doivent être rangées ainsi qu'il
suit, d'après Tordre de leur masse, en commen-
çant par celles dont la masse est le moins consi-
dérable :
1° Mercure. 5" Uranus.
2° Mars. 6« Neptune.
3« Vénus. T Saturne.
4'» La Terre. 8° Jupiter.
Ainsi Tordre des masses non plus que celui des vo-
lumes et des densités n'a rien de commun avec Tordre
des distances solaires.
6" Densité des planètes, — En combinant les résul-
tats précédemment indiqués pour les volumes et les
masses , et en prenant successivement pour unité la
densité de la Terre et celle de Teau , on arrive aux
rapports numériques suivants :
490 —
PLANÈTES.
DENSITÉ DES PLANÈTES
comparée
A CELLE DE LA TERRE.
DENSITÉ DES PLANÈTES
comparée
A CELLE DE L'EAU.
Mercure. . . .
Vénus
La Terre. . . .
Mars
Jupiter
Saturne. . . .
Uranus
Neptune. . . .
1,234
0,940
1,000
0,958
0,243
0,140
0,178
0,230
6,71
5,11
5,44
5,21
1,32
0,76
0,97
1,25
En comparant, dans le tableau qui précède, la den-
sité des différentes planètes avec celle de Feau , on a
pris pour base la densité de la Terre. Les expériences
faites par Reich , à Freiberg , avec la balance de tor-
sion ont donné 5,4383. Cavendish, à la suite d'expé-
riences analogues, était arrivé, d'après les calculs
très-exacts de Francis Baily, à 5,/l.i8. Ces deux résul-
tats, on le voit, diffèrent de bien peu. Bailly lui-même
et pour son propre compte avait trouvé 5,660. On voit
dans le tableau ci-dessus que, d'après les détermina-
tions de Encke, Mercure est, sous le rapport de la den-
sité , très-voisin des planètes de moyenne grandeur.
Ce tableau des densités rappelle la division des pla-
nètes en deux groupes séparés l'un de l'autre par la
zone des petites planètes. Mars, Vénus, la Terre et
même Mercure offrent peu de différences de densité ;
de même les planètes plus éloignées du Soleil, Jupiter,
— 491 —
Neptune, Uranus et Saturne, bien que de quatre à
sept fois moins denses que le premier groupe , ont,
sous ce rapport, beaucoup d'analogies entre elles. La
densité du Soleil , en prenant celle de la Terre pour
unité, est 0,252 , elle est par conséquent à celle de
Teau, comme 1,37 est à 1, c'est-à-dire un peu plus
grande que la densité de Jupiter et celle de Neptune.
Le Soleil et les planètes peuvent donc être rangées
ainsi, suivant Tordre de leur densité (64) :
1° Saturne. S** Le Soleil.
2® Uranus. 6^ Vénus.
S° Neptune. 7° Mars.
U'' Jupiter. 8** La Terre.
9« Mercure.
On le voit, bien qu'en général les planètes les plus
denses soient les plus voisines du Soleil , on n'est
nullement fondé à dire , en les considérant séparé-
ment , que leur densité est en raison inverse des dis-
tances, ainsi que Newton inclinait à le penser (65).
T Durée de la révolution sidérale des planètes et de
leur rotation, — Nous nous contentons ici de donner
les révolutions sidérales , c'est-à-dire la durée vraie
des révolutions , en prenant pour point de répère les
étoiles fixes ou quelque autre point déterminé du
Ciel. Pendant le cours d'une semblable révolution ,
les planètes accomplissent autour du Soleil une orbite
complète de o60 degrés. Il faut bien se garder de con-
fondre les révolutions sidérales avec les révolutions
tropiques ou les révolutions synodiques. La durée de
— /|92 —
la révolution tropique est l'intervalle que le soleil met
à revenir à l'équinoxe du printemps; la durée de
la révolution synodique est l'intervalle qui sépare
deux conjonctions ou deux oppositions consécutives.
PLANÈTES
DURÉE
de la
RÉVOLUTION SIDÉR.\LE.
ROTATIOxN.
Mercure
Vénus
La Terre
x^Jars
Jupiter
Saturne
Uranus
>'eptune
SV ,96928
22^ ,70078
365 ,25637
686 ,9796^
Zi332 ,58/;80
10759 ,21981
30686 ,82051
60126 ,7
OJ 23»^ 56' k"
1 0 37' 20"
0 9 55' 27"
0 10 29 17"
On peut présenter ces différentes périodes sous
une forme plus facilement appréciable :
Mercure 87J 23*» 15' 66"
Vénus 22Zi 16 U9' 1"
La Terre 365 6 9' 10",7496
(D'où l'on déduit que la révolution tropique de la Terre ou
la durée de l'année solaire est de 365^,26222, c'est-à-dire
365J èH8'67'',809l. Enl00ans,les irrégularités dans la rétro-
gradation des équinoxes abrègent l'année solaire de 0",595.)
Mars
1^ 321J
I7h
30'
61"
Jupiter
11 3U
20
2'
7"
Saturne
29 166
23
16'
32"
Uranus
84 5
19
61'
36"
Neptune
166 225
17
— 493 ~-
Les grandes planètes extérieures qui mettent le
plus de temps à opérer leur révolution sont celles
qui tournent le plus rapidement sur elles-mêmes.
Les petites planètes intérieures, plus voisines du
Soleil , sont au contraire celles dont la rotation
s'accomplit le plus lentement. Les périodes de révo-
lution des astéroïdes compris entre Mars et Jupiter
offrent de grandes différences; il en sera fait mention
lorsque nous traiterons brièvement de chacun d'eux
en particulier; il suffit ici de remarquer que la révo-
lution la plus longue est celle d'Hygie, la plus courte
celle de Flore.
8° Inclinaison des orbites planétaires et des axes
de rotation, — Après les masses des planètes , l'in-
clinaison et l'excentricité de leurs orbites sont les
éléments les plus importants d'où dépendent les
perturbations. La comparaison de ces éléments dans
les trois groupes successifs, de Mercure à Mars,
de Flore à Hygie , de Jupiter à Neptune , offre des
ressemblances et des contrastes qui conduisent à des
considérations intéressantes sur la formation de ces
corps célestes et les changements qu'ils ont pu subir,
durant de longues périodes de temps. Les planètes
qui décrivent autour du Soleil des ellipses si diverses
sont aussi situées sur des plans différents. Afin de
rendre possible une comparaison numérique, on les
ramène toutes à un plan fondamental fixe ou qui
se meuve d'après une loi déterminée. Le plan qui
se prête le mieux à cet usage est ou l'écliptique ,
c'est-à-dire le plan dans lequel se meut la Terre,
III. 12
ou réquateur du sphéroïde terrestre. Dans le tableau
suivant , nous joignons aux inclinaisons des orbites
des planètes sur Fécliptique et sur l'équateur ter-
restre les inclinaisons de leurs axes de rotation sur
le plan même de leurs orbites , toutes les fois que
ces inclinaisons ont pu être déterminées avec quelque
Certitude.
PLANÈTES.
INXLINAISON
DES ORBITES
DES PLANÈTES
sur
l'écliptique.
INCLINAISON
DES ORBITES DES PLANÈTES
sur
l'Equateur terrestre.
INCLINAISON
DE l'axe des planètes
sur le plan
de leurs orbites.
Mercure.
Vénus . .
La Terre.
Mars. . .
Jupiter. .
Saturne .
Uranus. .
Neptune.
r 0' 5",9
3° 23' 28",5
0° 0' 0"
1° 51' 6'',2
1° 18' 51",6
2° 29' 35",9
0° ^6' 28%0
1° kT
28°Zi5' 8"
2Zi° 33' 21"
23° 27' SV'^S
2^° kk' 2k"
23° 18' 28"
22° 38' kk"
23° kl' 2k"
22° 21'
66° 32'
61° 18'
86° 5k'
Nous avons négligé les petites planètes, parce
qu'elles forment un groupe distinct, sur lequel nous
reviendrons plus tard. Si l'on excepte la planète la
plus voisine du Soleil , Mercure , dont l'orbite est in-
clinée sur récliptique d'une quantité (7° 0'5",9) très-
voisine de celle qui mesure l'inclinaison de l'équateur
solaire (7''30'), on remarque que l'inclinaison des sept
autres planètes est comprise entre 0*3/4 et 3°i/2.
Pour l'inclinaison de l'axe de rotation sur le plan de
— /|95 —
l'orbite, c'est Jupiter qui se rapproche le plus de la
perpendiculaire. DansUranus, au contraire , Taxe de
rotation , à en juger par l'inclinaison des orbites des
satellites, coïncide presque avec le plan de l'orbite.
Comme de l'inclinaison de l'axe de la Terre sur le
plan de son orbite, c'est-à-dire de l'obliquité de
l'écliptique, ou en d'autres termes encore , de l'angle
que fait l'orbite apparente du Soleil au point où elle
coupe l'équateur, dépendent la division et la durée
des saisons , les hauteurs du Soleil sous différentes
latitudes et la longueur du jour, cet élément est
d'une extrême importance pour déterminer les cli-
mats astronomiques , c'est-à-dire la température de
la Terre, en tant qu'elle est produite par la hauteur
méridienne du Soleil et par la durée de sa présence
au-dessus de l'horizon. En supposant considérable l'o-
bliquité de l'écliptique, dans le cas par exemple où l'é-
quateur de la Terre serait perpendiculaire au plan de
son orbite, chaque point de la Terre , même sous les
pôles, aurait une fois dans l'année le Soleil au zénith ,
et ne le verrait pas se lever, pendant un laps de temps
plus ou moins long. Sous chaque latitude, le con-
traste entre l'hiver et l'été serait porté au maximum ,
pour la température comme pour la durée du jour.
Partout les climats seraient extrêmes , et ne pour-
raient être un peu tempérés que par une complica-
tion infinie de courants d'air qui varieraient à chaque
instant. Si l'on suppose nulle au contraire l'obliquité
de l'écliptique , c'est-à-dire si l'on se représente l'é-
cliptique coïncidant avec l'équateur terrestre, partout
-^ 496 —
cesseraient les différences de saison , et la durée du
jour serait partout la même, parce que le cours appa-
rent du Soleil suivrait incessamment Téquateur. Les
habitants des pôles verraient toujours le Soleil à Tho-
rizon. La température moyenne annuelle, sur chaque
point de la surface terrestre, serait celle de chacun
des jours de l'année au même lieu (66). On a com-
paré cet état à celui d'un printemps perpétuel ; la
comparaison ne serait justifiée que par l'égalité con-
stante qui s'établirait entre la durée des jours et celle
des nuits. Privées cependant de la chaleur estivale
qui féconde la végétation, un grand nombre des
régions dont se compose la zone tempérée jouiraient
en effet de ce climat invariable et peu souhaitable du
printemps , qui règne sous l'équateur dans la chaîne
des Andes, et dont j'ai personnellement beaucoup
souffert sur les plateaux déserts ou Faramos , situés
près des neiges éternelles, à 10 000 ou 12 000 pieds
de hauteur (67). Dans ces régions la température
de l'air, durant le jour, oscille toujours entre /r 'J/2
et 9' Réaumur.
Les Grecs s'occupèrent beaucoup de l'obliquité de
l'écliptique. Ils la mesurèrent grossièrement, et se
livrèrent à différentes conjectures sur les variations
auxquelles elle pouvait être sujette , et sur les effets
qui devaient résulter de l'inclinaison de l'axe terrestre
pour les climats et le développement de la nature
organique. Ces spéculations furent surtout le fait
d'Anaxagore, de l'école pythagoricienne, etd'OEno-
pide de Ghio. Les passages qui peuvent nous rensei-
— /|97 —
gner à ce sujet sont insuffisants et trop peu décisifs ;
cependant ils permettent de reconnaître que l'on
faisait remonter le développement de la vie orga-
nique et la formation des animaux à l'époque où
commença rinclinaison de l'axe terrestre. D'après un
témoignage de Vluitirque {des Opinions des Philosophes,
liv. II, chap. 8), Anaxagore croyait que le monde,
lorsqu'il fut constitué et qu'il eût fait sortir de son
sein les êtres animés , s'inclina de lui-même vers le
midi. Diogène Laerce (liv. II, chap. 3, § 9) fait
aussi parler Anaxagore dans le même sens. « Selon
ce philosophe, dit-^il, les astres se mouvaient tous
au commencement, comme s'ils eussent été attachés à
une voûte, de sorte que le pôle paraissait toujours
être sur une ligne verticale; mais plus tard ils
})rirent une position inclinée. » On se représentait
l'inclinaison de l'écliptique comme un fait accompli
soudainement dans l'histoire du Monde; il n'était
point question de changement progressif ni subsé-
quent.
Les deux situations extrêmes dont Jupiter et Ura-
nus se rapprochent le plus ramènent naturellement
la pensée à l'influence qu'une augmentation et une
diminution dans l'obliquité de l'écliptique pourraient
exercer sur les relations météorologiques de notre
planète et sur le développement de la vie organique,
si celte différence n'était pas restreinte dans des li-
mites étroites. La connaissance de ces limites, objet
des grands travaux de Léonard Euler, de Lagrange
et de Laplace peut être considérée comme une des
— 498 —
plus brillantes conquêtes de l'astronomie théorique,
et qui marque le mieux le perfectionnement de la
hau le analyse. Laplace affirme, dans son Exposition du
Système du monde (p. 303 , édit. de 1824), que l'obli-
quité de l'écliptique n'oscille pas de plus de 1" 1/2 des
deux côtés de sa position moyenne. C'est donc aussi
dans cette limite de 3° que la zone tropicale ou le tro-
pique du Cancer, qui en est l'extrémité septentrio-
nale, peut se rapprocher des contrées que nous habi-
tons (68). C'est comme si, en mettant à part tant
d'autres causes de perturbations météorologiques,
Berlin se trouvait insensiblement transporté de la
ligne isotherme qu'il occupe aujourd'hui à celle de
Prague ; la température moyenne annuelle monterait
à peine d'un degré centigrade (69). Biot estime aussi
que les variations dans l'obliquité de l'écliptique res-
tent renfermées entre des limites très-étroites, mais
il juge plus prudent de ne point exprimer ces limites
en chiffres. « La diminution lente et séculaire de l'o-
bliquité de l'écliptique, dit-il, offre des états alterna-
tifs qui produisent une oscillation éternelle, comprise
entre des limites fixes. La théorie n'a pas encore pu
parvenir à déterminer ces limites ; mais , d'après la
constitution du système planétaire, elle a démontré
qu'elles existent et qu'elles sont très-peu étendues.
Ainsi, à ne considérer que le seul effet des causes
constantes qui agissent actuellement sur le système
du monde , on peut affirmer que le plan de l'éclip-
tique n'a jamais coïnciflé et ne coïncidera jamais
avec le plan de Téquateur , phénomène qui, s'il
— 499 —
arrivait, produirait le printemps perpétuel. » {Traité
d'Astronomie physique^ t. IV, p. 91, édit. de 1817.)
Tandis que la nutation de l'axe terrestre , dé-
couverte par Bradley, dépend uniquement de Tin-
fluence qu'exercent le Soleil et la Lune sur l'apla-
tissement polaire de notre planète , les variations
dans l'obliquité de l'écliptique résultent du dé-
placement de toutes les orbites planétaires. Actuel-
lement les orbites sont distribuées de telle façon ,
que leur action combinée produit une diminution
dans l'obliquité. Cette diminution est aujourd'hui,
suivant Bessel , de 0", 457 par année. Dans quelques
milliers d'années, la position des orbites planétaires,
par rapport au plan de l'orbite terrestre , aura telle-
ment varié que la partie de la précession due aux
planètes changera de sens , et qu'il en résultera un
accroissement dans l'obliquité de l'écliptique. La
théorie nous apprend que ces périodes croissantes ou
décroissantes sont de très-inégale durée. Les plus
anciennes observations astronomiques qui nous aient
été transmises avec des données numériques exactes,
remontent à l'année 1104 avant l'ère chrétienne,
et témoignent du grand âge de la civilisation chi-
noise. Les monuments littéraires de cette nation
sont à peine plus jeunes d'un siècle. Il existe même
une chronologie régulière qui s'étend , d'après
Edouard Biot, jusqu'à 2700 avant Jésus-Christ (70).
Sous le règne de Tscheou-Koung, frère de Wou-Waug,
l'ombre du Soleil à midi fut mesurée dans les deux sol-
stices d'hiver et d'été, avec un gnomon de huit pieds.
— 500 —
Ces expériences, qui eurent lieu à Lo-jang (aujour-
d'hui Ho-nan-fou de la province de Ho-nan , au sud du
fleuve Jaune), par 3/l° 46' de latitude, donnèrent , pour
l'obliquité de l'écliptique, 23° 54', c'est-à-dire 27' de
plus que Ton n'a trouvé en 1850 (71). Les obser-
vations de Pythéas et d'Ératoslhène, à Marseille et à
Alexandrie, sont postérieures de six ou sept cents ans.
Nous possédons les résultats de quatre expériences
de ce genre antérieures à l'ère chrétienne, et de sept
autres faites entre la naissance de Jésus-Christ et les
observations d'Ouloiigh-Beg à l'observatoire de Samar-
cande. La théorie de Laplace s'accorde merveilleuse-
ment avec ces résultats , pour un laps de temps de
près de trente siècles, sauf quelques différences
insignifiantes, tantôt en plus, tantôt en moins. Il y
a d'autant plus lieu de s'applaudir de ce que la me-
sure de la longueur des ombres sous Tscheou-Koung
est parvenue jusqu'à nous, que l'on ne sait par
quel hasard l'écrit qui la contient a échappé à
ia destruction générale des livres ordonnée, l'an
246 avant Jésus - Christ , par l'empereur Schi-
Hoang-Ti, de la dynastie des Tsin. D'après les re-
cherches de Lepsius, la IV® dynastie égyptienne com-
mence avec les constructeurs des pyramides Chou-
fou , Schafra et Menkera , vingt-trois siècles avant les
observations faites à Lo-jang. 11 est , d'après cela ,
bien vraisemblable, si l'on considère le haut degré de
civilisation auquel était déjà parvenue la nation égyp-
tienne et l'antiquité de son calendrier, que, avant les
mesures de Lo-jang, des mesures semblables avaient
— 501 —
été exécutées dans la vallée du Nil. Les Péruviens
eux-mêmes, bien que moins au fait que les Mexicains
et les Muyscas, qui habitent les montagnes de la
Nouvelle-Grenade , des rectifications de calendrier et
des intercalations , avaient des gnomons formés d'un
cercle tracé autour d'une aiguille, sur une surface très-
unie. Il y avait de ces gnomons au milieu du grand
temple du Soleil à Cuzco , et dans plusieurs autres
lieux. Celui de Quito , situé presque sous Féquateur,
était tenu en plus grand honneur que les autres ; on
avait coutume de le couronner de fleurs, aux fêtes de
l'équinoxe (72).
9° Excentricité des orbites planétaires. — La forme
d'une ellipse est déterminée par la longueur du grand
axe et la distance des deux foyers. Pour les orbites
des planètes, cette distance que l'on nomme excen-
tricité, comparée au demi-grand axe de l'orbite,
varie depuis 0,006, comme dans l'orbite de Vénus
qui se rapproche beaucoup de la forme circulaire ,
jusqu'à 0,205 dans l'orbite de Mercure, et à 0,255,
dans celle de Junon. Les planètes dont l'orbite
est le moins excentrique , sont après Vénus et Nep-
tune, la Terre, dont l'excentricité diminue de
0,000 042 99 en cent ans , le petit axe augmentant
dans la même proportion, puis Uranus, Jupiter, Sa-
turne, Gérés, Égérie, Vesta et Mars. Les orbites les
plus excentri([ues sont celles de Junon (0,255), de
Pallas (0,259) , d'iris (0,232), de Victoria (0,217),
de Mercure (0,205) et d'Hébé (0,202). Il y a des pla-
nètes dont l'excentricité va croissant: de ce nombre
— 50^2 —
sont Mercure, Mars et Jupiter. Dans d'autres, au
contraire, elle décroît: telles sont Vénus, la Terre,
Saturne et Uranus. Le tableau suivant indique les
excentricités des grandes planètes d'après Hansen ,
pour l'année 1800. On trouvera plus loin les excentri-
cités des petites planètes avec les autres éléments de
leurs orbites.
Mercure 0,2056163
Vénus. ....... 0,0068618
La Terre 0,0167922
Mars 0,0932168
Jupiter 0,0^81621
Saturne 0,0561505
Uranus 0,0^^66108
Neptune 0,00871966
Le mouvement du grand axe , qui déplace le
périhélie des planètes , s'accomplit progressive-
ment , d'une manière incessante et suivant une di-
rection unique. Les lignes des apsides ainsi dépla-
cées auraient besoin de plus de cent mille ans
pour accomplir leur cycle. 11 est essentiel de dis-
tinguer ce changement de ceux que subit la forme
elliptique des orbites. On a agite la question de
savoir si l'importance croissante de ces éléments
pourrait, dans la suite d'un grand nombre de siè-
cles, modifier considérablement la température de
la Terre , et influer sur la somme totale et la dis-
tribution de la chaleur dans les différentes parties
du jour et de l'année; si ces causes astronomi-
ques, agissant régulièrement d'après des lois éter-
— 503 —
nelles, ne pourraientpoint faciliter lasolution du grand
problème géologique , relatif aux plantes et aux ani-
maux des tropiques que Ton a trouvés ensevelis dans la
zone glaciale. Certains raisonnements mathématiques
ont paru de nature à alarmer les esprits touchant la po-
sition des apsides et la forme des orbites , selon que
ces orbites se rapprochent davantage de la forme cir-
culaire ou de Texcenlricité des comètes , touchant
l'inclinaison des axes , le changement dans l'obli-
quité de l'écliptique, et l'influence que la précession
des équinoxes peut exercer sur la durée de Tannée ;
mais ces mêmes raisonnements , soumis à une ana-
lyse plus sévère , fournissent aussi pour l'avenir du
monde des motifs de sécurité. Les grands axes et
les masses ne changent pas. La loi du retour pério-
dique prévient l'accroissement indéfini de certaines
perturbations. Les excentricités, peu sensibles déjà
en elles-mêmes, des deux plus puissantes planètes,
de Jupiter et de Saturne, reçoivent, grâce à des in-
fluences réciproques dont les eflèts se compensent,
des augmentations et des diminutions alternatives,
contenues dans des limites étroites et déterminées.
Par suite du déplacement que subit la ligne des
apsides , le point de l'orbite terrestre le plus rap-
proché du Soleil arrive graduellement à tomber
dans des saisons opposées (73). Si actuellement
l'astre passe au périhélie dans les premiers jours de
janvier, et à l'aphélie six mois plus tard, dans les
premiers jours de juillet, le mouvement progressif de
la ligne des apsides ou grand axe de l'orbite terrestre
— 504 —
peut faire que le maximum de la distance tombe en
hiver, le minimum en été, de telle façon que la dis-
tance de la Terre au Soleil soit plus grande au mois
de janvier que dans Tété de 520 000 myriamètres ,
c'est-à-dire 1/30 de la distance moyenne. Au premier
coup d'œil , on serait tenté de croire que le déplace-
ment du périhélie de l'hiver à l'été devrait amener
de grands changements dans les climats , et cepen-
dant tout se réduirait à ceci que le Soleil , dans cette
hypothèse , ne prolongerait plus de sept jours sa pré-
sence dans l'hémisphère septentrional , c'est-à-dire
qu'il ne mettrait plus pour parcourir la moitié de
son orbite, depuis l'équinoxe du printemps jusqu'à
celui de l'automne, une semaine de plus qu'à par-
courir l'autre moitié , depuis l'équinoxe d'automne
jusqu'à celui du printemps. La différence de tem-
pérature , en n'entendant par là que les climats as-
tronomiques , et sans considérer le rapport de l'élé-
ment liquide à l'élément solide sur la surface de la
Terre, la dijfférence de température , dis-je , que l'on
pourrait redouter comme conséquence du mouve-
ment de la ligne qui joint les apsides , se trouve
neutralisée presque entièrement par cette circon-
stance que le point où notre planète est le plus
proche du Soleil est toujours celui où sa course est
le plus rapide (74). Le beau théorème dû à Lambert,
d'après lequel la quantité de chaleur que la Terre
reçoit du Soleil dans chaque partie de l'année, est
proportionnelle à l'angle décrit, durant le même
laps de temps, par le rayon vecteur dn soleil, con-
— 505 —
tient jusqu'à un certain point la solution tranquilli-
sante de ce problème (75).
Ainsi le changement de direction dans la ligne
des apsides ne saurait exercer qu'une faible in-
fluence sur la température de la Terre ; d'autre
part, les limites des changements qui peuvent s'ac-
complir avec vraisemblance dans l'ellipse de l'or-
bite terrestre sont très- resserrées (76). Cette cause
elle - même , d'après Arago et Poisson , ne peut
modifier les climats que d'une manière très-peu
sensible et si lente , que les changements ne se-
raient point appréciables avant de longues périodes
de temps. Bien que l'on ne soit pas encore parvenu
par l'analyse à déterminer exactement ces limites,
on est au moins sûr que jamais l'excentricité de la
Terre ne peut atteindre celle de Junon, de Pallas
et de Victoria.
10'' Intensité de la lumière solaire sur les différentes
planètes, — En prenant pour unité l'intensité de la
lumière solaire sur notre planète, on arrive aux ré-
sultats suivants :
Mercure 6,674
Vénus 1,911
Mars 0,431
Pallas 0,130
Jupiter 0,036
Saturne 0,011
Uranus 0,003
Neptune 0,001
L'exc(:ntricité considérable des trois planètes qui
— 506 —
suivent, influe sur l'intensité de ia lumière, au péri-
hélie et à l'aphélie :
Mercure au périhélie 10,58 à l'aphélie ^,59
Mars — 0,52 — 0,36
Junon — 0,25 — 0,09
En raison du peu d'excentricité de la Terre, l'inten-
îiité de la lumière ne varie pour cette planète, du pé-
rihélie à l'aphélie, que de 1 ,034 à 0,967. Si la lumière
est 7 fois plus intense à la surface de Mercure qu'à
la surface de la Terre , elle doit l'être 368 fois moins
à la surface d'Uranus. îl n'est point fait mention ici
de la chaleur, parce que c'est un phénomène compli-
qué, qui dépend de l'existence ou de la non-existence
des atmosphères , de leur hauteur et de leur com-
position spéciale. Je rappellerai seulement ici la
conjecture de Sir John Herschel sur la température
qui doit régner à la surface de la Lune ; il est possible,
suivant lui , qu'elle dépasse de beaucoup la tempéra-
ture de Teau bouillante (77).
PLAISÈTES SECONDAIRES OU SATELLITES.
Les considérations générales auxquelles peut don-
ner lieu la comparaison des planètes secondaires ont
été exposées déjà assez en détail dans le Tableau de la
Nature qui remplit le premier volume du Cosmos
(p. 103-109 . A l'époque où ce volume parut, on ne
connaissait encore que il planètes principales et
18 planètes secondaires. Parmi les astéroïdes ou
petites planètes télescopiques , k seulement avaient
- 507 —
été signalées : Cévès , Pallas , Junon et Vesta. Au-
jourd'hui, au mois d'août 1851, nous connaissons
22 planètes principales et 21 satellites. Après une in-
terruption de t^8 ans dans les découvertes des planètes,
depuis l'année 1807 jusqu'au mois de décembre 1845,
commence avec l'Astrée d'Hencke une série d'obser-
vations heureuses qui révèlent l'existence de 10 pe-
tites planètes. Dans ce nombre, 2 ont été vues pour la
première fois àDriesen, par Hencke(Astrée et Hébé);
4 à Londres, par Hind (Iris, Flore, Victoria et Irène) ;
1 àMarkree Castle, parGraham (Métis), et 3 à Naples,
par de Gaspai'is ( Hygie , Parthénope et Égérie) . La
plus éloignée de toutes les grandes planètes, Neptune,
signalée par Leverrier à Paris et reconnue à Berlin
par Galle , suivit Astrée à dix mois d'intervalle. En
ce moment les découvertes se multiplient avec une
telle rapidité, qu'après un laps de quelques années,
la topographie du système solaire semble avoir au-
tant vieilli que les statistiques géographiques.
Des 21 satellites aujourd'hui connus, 1 appartient
à la Terre, 4 appartiennent à Jupiter, 8 à Saturne,
parmi lesquels le dernier découvert, Hypérion, est
le 7' dans l'ordre des distances ; Uranus en a 6, dont
le 2^ et le 4^ sont déterminés surtout avec une grande
certitude ; Neptune en a 2.
Les satellites tournant autour des planètes princi-
pales, forment des systèmes subordonnés, dans les-
quels ces planètes jouent le rôle de corps central, et
constituent des systèmes particuliers de dimensions
très-diiTérentes, qui reproduisent en petit l'image
— 508 —
du système solaire. Dans l'étal actuel de nos con-
naissances, le domaine de Jupiter a, en diamètre,
380 000 myriamètres; celui de Saturne en a 780 000.
Ces analogies entre les systèmes subordonnés et le
système solaire ont contribué, au temps de Galilée,
où l'expression de Monde de Jupiter (Mundus Jovialis)
devint d'un usage fréquent , à répandre d'une manière
plus générale et plus rapide la théorie de Copernic.
Elles rappellent ces ressemblances de forme et de
position que la nature organique se plaît aussi à ré-
péter souvent à des degrés inférieurs de la création.
La répartition des satellites dans le système so-
laire est tellement inégale , que , bien que les pla-
nètes principales accompagnées de satellites soient
à celles qui en sont dépourvues dans le rapport de 5
à 3, les premières, à l'exception de la Terre, font
toutes partie du groupe extérieur, situé au delà des
astéroïdes aux orbites entrelacées. Le seul satellite
qui se trouve dans le groupe intérieur, la Lune, offre
cette particularité que son diamètre est d'une gran-
deur excessive relativement à celui de la Terre.
Ce rapport est de 1/3,8 , tandis que dans le plus
grand des satellites de Saturne , le 6^ par ordre de
position, dans Titan, le diamètre n'est guère que
1/15,5 de celui de la planète principale, et que
dans le plus grand des satellites de Jupiter, qui est
le 3' par ordre de position, ce rapport n'est que
de 1/25,8. Cette grandeur toute relative doit être,
du reste , distinguée avec soin de la grandeur ab-
solue. Le diamètre proportionellement si large de la
— 509 —
Lune n*a en définitive que /t5i milles géographiques,
et le cède par conséquent en grandeur absolue aux
diamètres des quatre satellites de Jupiter, qui en ont
respectivement 776, 664, 529 et 475. 11 s'en faut de
très-peu que le diamètre du 6' satellite de Saturne
n'atteigne le diamètre de Mars, qui a 89*2 milles
géographiques (78). Si les résultats fournis par le
télescope dépendaient uniquement du diamètre du
satellite et n'étaient point subordonnés au voisinage
de la planète principale , à l'éloignement et à la
constitution de la surface qui réfléchit la lumière,
on serait autorisé à considérer les deux premiers
satellites de Saturne, Mimas et Encélade, ainsi que
le 2' et le 4' des satellites d'Uranus, comme les plus
petites de toutes les planètes secondaires. Mais il est
plus sûr de les désigner seulement comme les plus
petits points lumineux. Un fait qui parait acquis
à la science, c'est que l'on doit chercher parmi
les petites planètes, et non parmi les satellites, les
plus petits de tous les corps planétaires (79).
Il n'est nullement exact de dire que la densité des
satellites soit toujours moindre que celle des planètes
principales, comme cela est le cas pour la Lune, dont
la densité est à celle de la Terre dans le rapport de
0,619 à 1 , ainsi que pour le 4^ satellite de Jupiter.
Dans le système de Jupiter, le 3' satellite , qui est
le plus grand, a la même densité que la planète; le
2' est plus dense. Il n'est pas vrai non plus que les
masses augmentent avec les distances. Si l'on sup-
pose que les planètes furent formées d'anneaux se
m. 33
— 510 —
mouvant en cercle dans l'espace, il faut que des
causes, qui resteront peut-être éternellement un
mystère, aient déterminé autour de tel ou tel noyau
des agglomérations de grandeurs différentes , et di-
versement condensées.
Les orbites de satellites appartenant au même
groupe ont des excentricités très-différentes. Dans
le système de Jupiter, les deux premiers satellites
décrivent presque des cercles parfaits; l'excentricité
dans les deux suivants s'élève à 0,0013 et 0,0072.
Dans le système de Saturne , l'orbite du satellite le
plus rapproché, de Mimas, est déjà beaucoup plus
excentrique que celle d'Encélade et celle de Titan , si
nettement déterminé par Bessel, et qui est à la fois
le plus grand et le plus anciennement découvert des
satellites de Saturne. L'excentricité de Titan n'est,
à la vérité, que de 0,02922. D'après ces données,
qui méritent confiance , Mimas seul est plus excen-
trique que la Lune, dont l'excentricité, égale à
0,05484, a cela de particulier qu'elle est la plus
grande excentricité connue , relativement à celle de
la planète principale autour de laquelle elle fait sa
révolution. Ainsi l'excentricité de Mimas est à celle de
Saturne comme 0,068 est à 0,056; celle de la Lune
est à celle de la Terre comme 0,054 est à 0,016.
Sur les distances des satellites aux planètes, on peut
voir le premier volume du Cosmos (p. 106). La dis-
tance de Mimas à Saturne n'est plus évaluée aujour-
d'hui à 14 857 myriamètres, mais à 18 995, en partant
du centre de la planète, ou à 12 946, en partant de
— 511 —
la surface; d'où il résulte que la distance de ce satel-
lite à Tanneau de Saturne est de plus de 5000 niyria-
mètres, en défalquant 3109 myriamètres pour l'in-
tervalle entre la planète et l'anneau , et 4486 pour la
largeur même de l'anneau (80). Le système de Jupiter
présente aussi, avec une certaine harmonie générale,
des anomalies singulières dans les orbites de ses sa-
tellites, qui se meuvent tous à une faible distance et
dans le plan de l'équateur de la planète. Parmi les
satellites de Saturne, 7 font leur révolution à très-
peu près dans le plan de l'anneau ; le 8' et dernier,
Japhet, est incliné sur ce plan de 12^14'.
Dans ces considérations générales sur les orbites
planétaires , nous sommes descendu du système so-
laire, le plus vaste des systèmes connus, mais qui
vraisemblablement n'est pas encore la manifestation
suprême de l'attraction céleste, aux systèmes partiels
et subordonnés de Jupiter, de Saturne, de Neptune,
d'Uranus (81). Si, d'un côté , il y a dans la pensée et
dans l'imagination de l'homme une tendance innée à
la généralisation , un besoin insatiable d'agrandir en-
core le monde par ses pressentiments, et de chercher
dans le mouvement de translation qui emporte notre
système solaire l'idée d'une coordination plus vaste
et plus élevée (82), on a conjecturé , d'autre part , que
les satellites de Jupiter pouvaient être autant de cen-
tres autour desquels tournaient des corps célestes que
leur petitesse dérobe à la vue. D'après cette hypothèse,
chacun des membres dont se composent les systèmes
partiels qui ont leur siège principal dans le groupe des
— 51:2 —
planètes extérieures aurait au-dessons de lui d'au-
tres systèmes analogues et subordonnés. L'esprit
symétrique de l'homme se complaît dans la repro-
duction successive des mêmes formes, alors même
qu'il est forcé , pour se satisfaire , d'inventer des
analogies ; mais un examen sérieux ne permet point
de confondre le monde idéal avec le monde réel ,
les hypothèses simplement probables avec les résul-
tats fondés sur des observations certaines.
— 513 —
KOTIONS PARTICULIERES
SUR LES PLANÈTES ET LES SATELLITES
Une description physique de l'univers a pour objet
spécial, ainsi que je l'ai rappelé déjà plusieurs fois,
de réunir les résultats numériques les plus importants
et les plus sûrs, que l'on a pu obtenir dans le domaine
sidéral , aussi bien que dans le domaine terrestre ,
jusqu'au milieu du xix^ siècle. Les formes et les mou-
vements des corps doivent y être retracés , au triple
point de vue de leur création , de leur existence , de
leur mesure. Les bases sur lesquelles reposent ces ré-
sultats, les conjectures cosmogoniques qui, suivant
les progrès et les alternatives de nos connaissances ,
se sont produites depuis des millions d'années tou-
chant la formation et le développement du monde
physique, ne rentrent point, à vrai dire, dans le
cercle de ces recherches expérimentales. On peut voir
à ce sujet le tome I" du Cosmos, p. 32-36, 67 et 89.
LE SOLEIL.
Dans les pages qui précèdent {Cosmos^ t. III,
p. 426 458), j'ai indiqué les dimensions du Soleil et
exposé les vues généralement admises aujourd'hui
sur la constitution physique du corps qui forme
— 514 -
le centre de notre système. Il suffira d'ajouter,
d'après les observations les plus récentes , quelques
remarques supplémentaires au sujet des formes rou-
geâtres dont il est fait mention plus haut {Ibid,,
p. 440). Les importants phénomènes offerts, dans
FEst de l'Europe, lors de l'éclipsé totale du 28 juil-
let 1851, ont renforcé encore l'opinion, exprimée
par Arago en 1846, que les éminences rougeâtres,
semblables à des montagnes ou à des nuages , qui ,
dans les éclipses, se remarquent sur les bords du
disque obscurci du Soleil, appartiennent à l'atmo-
sphère gazeuse , c'est-à-dire à la plus extérieure des
atmosphères dont le corps central est entouré (83).
Ces éminences étaient découvertes graduellement à
l'Ouest par la retraite de la Lune , et disparaissaient
du côlé opposé, à mesure que la Lune poursuivait sa
course vers l'Orient. (Annuaire du Bureau des Longi-
tudes pour 1846, p. 457.)
Ces projections marginales avaient une telle inten-
sité de lumière , qu'on a pu les reconnaître avec le
télescope, à travers les légers nuages qui les voi-
laient, et même les apercevoir à l'œil nu dans l'inté-
rieur de la couronne.
Quelques-unes de ces éminences, offrant la couleur
du rubis ou de la fleur de pêcher, subirent dans
leurs contours une rapide et sensible altération, pen-
dant la durée de l'éclipsé totale. Une d'elles semblait
recourbée à son extrémité, et plusieurs observateurs
croyaient voir comme une colonne de fumée ar-
rondie, vers le sommet de laquelle, flottait un nuage
— 515 —
librement suspendu (81). La hauteur des protubé-
rances fut évaluée en général à 1 ou 2 minutes. Il
y a même un point sur lequel elles semblent avoir
dépassé cette limite. Indépendamment de ces jets lu-
mineux, au nombre de 3 à 5, on vit aussi des bandes
rouges, étroites et souvent dentelées, qui parais-
saient adhérer aux bords de la Lune (85).
On a pu voir de nouveau , et très-distinctement ,
surtout à l'entrée , la partie du bord de la Lune qui
ne se projetait point sur le disque du Soleil (86).
A quelques minutes des bords du Soleil , près de
la plus grande des éminences rouges et recourbées
que nous venons de signaler, on apercevait un groupe
de taches solaires. Une tache était également visible
près du bord opposé ; la distance qui l'eii séparait ne
permettait guère de croire que la matière rouge et
gazeuse de ces exhalaisons sortît des ouvertures en
forme d'entonnoir qui constituent les taches. Mais
comme avec uii fort grossissement on voit distinc-
tement des pores sur toute la surface du Soleil, la
conjecture la plus probable est que ces émanations
de gaz et de vapeurs, qui s'élevant du corps solaire
forment les entonnoirs , se répandent à travers ces
ouvertures ou à travers des pores plus petits, et
offrent à nos regards, dans la troisième enveloppe
solaire, les colonnes de vapeur rouges et les nuages
diversement configurés dont nous avons donné la
description (87).
516 —
MERCURE.
Si Ton se rappelle combien , depuis les temps les
plus reculés , les Égyptiens s'occupèrent de Mercure
sous les noms de Set ou d'Horus (88), et les Indiens
sous celui de Boudlia (89); comment les Asedites,
habitués à contempler le ciel transparent de l'Arabie
occidentale , firent de cette planète , entre toutes les
autres, l'objet privilégié de leur culte (90); comment
enfin Ptolémée put mettre à profit, dans le ix' livre
de VAlmageste, 14 observations de Mercure remon-
tant jusqu'à l'année 261 avant notre ère , et qui
viennent en partie des Chaldéens (91) , on ne peut
entendre sans étonnement Copernic se plaindre sur
son lit de mort, à l'âge de 70 ans, de n'avoir pu,
malgré ses efforts, apercevoir Mercure. Cependant les
Grecs , frappés de l'intensité si vive quelquefois de
sa lumière, caractérisaient cette planète par l'épi-
thète de scintillante (a-tXêcov) (92). Ainsi que Vénus,
Mercure nous offre des phases, c'est-à-dire que sa
partie éclairée subit des variations de forme; de
même encore elle nous apparaît quelquefois comme
étoile du matin et quelquefois comme étoile du soir.
La distance moyenne de Mercure au Soleil est d'un
peu plus de 8 millions de milles géographiques de
15 au degré, environ 6 millions de myriamètres;
cela fait 0,387 093 8 de la distance moyenne de la
Terre au Soleil. En raison de l'excentricité considé-
rable de son orbite, qui est de 0,205 616 3,1a distance
de Mercure au Soleil n'est au périhélie que de 6 mil
— 517 —
lions 1/4 de milles géographiques , elle est à Taphélie
de 10 millions. Cette planète accomplit sa révolution
autour du Soleil en 87 de nos jours moyens, plus
23 heures, 15 minutes et 46 secondes. Des observa-
tions trop peu certaines sur la forme de la corne
méridionale de son croissant, et la découverte d'une
bande obscure qui, vers l'Est, est absolument noire,
ont amené Schrœter et Harding à fixer comme durée
de sa rotai ion l'espace de 24 heures et 5 minutes.
D'après les déterminations de Bessel , faites à l'occa-
sion du passage de Mercure, du 5 mai 1832, le vrai
diamètre de cette planète est de 497 myriamètres,
c'est-à-dire 0,391 du diamètre terrestre (93).
La masse de Mercure avait été évaluée par La-
grange , d'après des suppositions très-hasardeuses
sur les rapports réciproques des densités et des dis-
tances. La comète à courte période d'Encke fournit
un premier moyen de corriger ce calcul. Suivant
Encke, la masse de Mercure est 1/4 865 751 de la
masse du Soleil, ce qui fait à peu près 1/13,7 de la
masse terrestre. Laplace a évalué, d'après Lagrange,
la masse de Mercure à 1/2 025 810 (94), mais elle ne
dépasse guère en réalité les 5/12 de ce chiffre. Cette
correction contredit l'hypothèse de l'accroissement
rapide des densités, suivant que les planètes sont plus
rapprochées du Soleil. Si l'on admet avec Hansen
que le volume de Mercure égale les 6/100 de celui
de la Terre , il en résulte que la densité de Mercure
n'est que 1,22. «Au reste, dit Encke, ces déter-
minations n(^ doivent encore être considérées que
— 518 —
comme un premier essai pour approcher de la vérité
plus que ne l'avait fait Laplace. » On croyait , il
n'y a pas plus de dix ans , que la densité de Mercure
était presque triple de celle de la Terre; on l'éva-
luait alors, en prenant pour unité celle de la Terre,
à 2,56 ou 2,94.
VÉNUS.
La distance moyenne de Vénus au Soleil égale
0,723331 7 de celle de la Terre , c'est-à-dire qu'elle
est de 15 millions de milles géographiques ou de
11 millions de myriamètres. La durée de la révolu-
tion sidérale de Vénus est de 221 jours , 16 heures,
49 minutes et 7 secondes. Aucune autre planète
principale ne vient aussi près de la Terre. Elle s'en
approche en effet à une distance de 3 900 000 myria-
mètres, mais elle s'en éloigne aussi jusqu'à 26 000 000
myriamètres. De là les variations considérables de
son diamètre apparent que l'on ne saurait déterminer
uniquement d'après l'intensité de la lumière (95).
L'excentricité de l'orbite de Vénus n'est que de
0,00686182, en prenant comme toujours le demi-
grand axe pour mesure. Le diamètre de cette planète
est de 1694 milles géographiques ou 1256 myria-
mètres, sa masse de 1/4018 391 de celle du Soleil,
son volume de 0,957, sa densité de 0,94, relative-
ment au volume et à la densité de la Terre.
Des deux passages de planètes inférieures qui
furent annoncés pour la première fois par Kepler,
dans ses Tables Rudolphines, celui de Vénus est
— 519 —
d'une importance essentielle pour la théorie de tout
le système planétaire, en ce qu'il peut servir à déter-
rniner la parallaxe du Soleil, et comme conséquence
la distance de la Terre au corps central. D'après les
recherches approfondies auxquelles s'est livré Encke
sur le passage de Vénus de 1769, et dont il a consigné
les résultats dans l'Annuaire de Berlin ( Berliner
Jahrbucli fur 1852, p. 3!23), la parallaxe du Soleil est
de 8", 571 16. Depuis l'année 1847, la parallaxe du
Soleil est l'objet d'un nouveau travail, entrepris sur
la proposition d'un mathématicien distingué, le pro-
fesseur Gerling, de Marburg, et par l'ordre du gou-
vernement des États-Unis. Il s'agit de déterminer
cette parallaxe à l'aide d'observations de Vénus, près
de son élongation orientale et occidentale , et en
mesurant micrométriquement les différences en as-
cension droite et en déclinaison, sous des latitudes et
des longitudes très-diverses, d'étoiles dont la position
soit bien fixée. Cette expédition astronomique , s'est
dirigée, sous les ordres d'un officier fort instruit,
le lieutenant Gilliss, vers Santiago de Chile. On
peut voir à ce sujet les Nouvelles astronomiques de
Schumacher {Astronomische Nachrichten) , n" 599,
p. 363 et ir 613 , p. 193.
On a eu longtemps des doutes sur la durée de la
rotation de Vénus. Dominique Cassini , en 1669, et
Jacques Cassini, en 1732, l'évaluaient à 23'' 20',
tandis que Bianchini , à Rome, adoptait la longue
période de 2/j. jours 1/3 (96). Vico, à la suite d'obser-
vations plus exactes , faites de 1840 à 18/j2 , a déduit
— 520 -
d'un grand nombre de taches de Vénus, le chiffre
de 23^ 21' 21 ",93.
Ces taches qui , lorsque Venus offre la forme d'un
croissant, sont près de la limite de l'ombre et de la
lumière, sont faibles , rarement visibles et très-chan-
geantes ; d'où les deux Herschel ont conclu qu'elles ap-
partiennenl à une atmosphère de Vénus, plutôt qu'à
la surface solide de la planète (97). La Hire, Schrœter
et Meedler ont mis à profit les formes changeantes des
cornes du croissant, surtout de la corne méridionale,
pour évaluer la hauteur des montagnes , mais prin-
cipalement pour déterminer la durée de la rotation.
Il n'est pas nécessaire , pour expliquer ces change-
ments, d'admettre, comme l'a prétendu Schrœter à
Lilienthal, des pics de montagnes hauts de 5 milles
géographiques ou de plus de 3 myriamètres ; il suflit
d'élévations telles que nous en offre notre planète,
dans les deux continents (98). D'après le peu que nous
savons sur la surface et la constitution physique des
planètes les plus voisines du Soleil, Mercure et Vénus,
le phénomène d'une lueur cendrée et d'un dégage-
ment de lumière propre à ces planètes, phénomène
observé plusieurs fois dans la partie obscure de Vénus
par Christian Mayer, William Herschel et Harding,
demeure toujours très-énigmatique (99). Il n'est pas
vraisemblable qu'à une si grande distance la lumière
réfléchie par la Terre puisse produire une lueur cen-
drée sur Vénus, comme sur la Lune. — On n'a re-
marqué jusqu'ici aucun aplatissement dans les deux
planètes inférieures, Mercure et Vénus.
5^21 —
LA TERRE.
La distance moyenne de la Terre au Soleil est
12 032 fois plus grande que le diamètre de notre
globe. Elle est donc de 20 682 000 milles géographi-
ques ou de 15346 000 myriamètres à 66 000 myria-
mètres, c'est-à-dire à 1/230 près.
La révolution sidérale de la Terre autour du Soleil
s'accomplit en 365J 6*^ 9' 10",7496. L'excentricité de
son orbite est de 0,01679226; sa masse de 1/359 551;
sa densité , par rapport à l'eau , de 5,41. Bessel, à
la suite de ses recherches sur dix mesures de degré,
évalue l'aplatissement de la Terre à 1/299,153; le
diamètre équatorial est de 1718,9 milles géographi-
ques ou 1276 myriamètres, le diamètre polaire de
1713,1 milles géographiques, soit 1271,7 myriamè-
tres {Cosmos, t. I, p. 491 , n. 30). Nous nous con-
tentons de mentionner ici les évaluations numéri-
ques qui ont trait à la forme et au mouvement de
la Terre; tout ce qui concerne la constitution phy-
sique de cette planète étant réservé pour la dernière
partie du Cosmos, consacrée tout entière au domaine
terrestre.
LA LIISE.
Distance moyenne de la Lune à la Terre :
51 800 milles géographiques ou 38 400 myriamètres ;
révolution sidérale : 27J 7'' 43' 11", 5; excentricité de
l'orbite lunaire : 0,054844 2; diamètre de la Lune ;
— 522 --»
â36 myriamètres , environ 1/4 du diamètre de la
Terre; volume : 1/54 du volume terrestre; masse
de la Lune, d'après Lindenau : 1/87, 7o, d'après
Peters et Schidlofifsky : 1/81 de la masse de la Terre;
densité : 0,619, à peu près les 3/5 de celle de la
Terre. La Lune n'a pas d'aplatissement sensible ;
mais la théorie a déterminé un allongement très-
faible , dans la direction de la Terre. La rotation de
la Lune sur son axe a lieu exactement , et il est pro-
bable qu'il en est de même pour tous les autres
satellites, dans le même temps qu'elle met à ac-
complir sa révolution autour de la Terre.
La lumière solaire réfléchie par la surface de la
Lune est , sous toutes les latitudes, inférieure à celle
qu'un nuage blanc renvoie durant le jour. Lorsque,
pour déterminer des longitudes géographiques, on
est forcé de mesurer fréquemment des distances de
la Lune au Soleil, on a souvent peine à découvrir le
disque lunaire, entouré d'un amas de nuages plus
éclatants. Je pouvais plus facilement distinguer la
Lune sur des sommets hauts de douze à seize mille
pieds, où l'on ne voit dans le ciel, à travers l'at-
mosphère limpide des montagnes , que de légers
cirrus , dont les traînées légères renvoient une
lumière très-faible ; les rayons de la Lune , traver-
sant des couches d'air moins denses , perdent alors
une moins grande partie de leur intensité. Le rap-
port entre l'éclat du Soleil et celui de la pleine
Lune exige de nouvelles évaluations , puisque la me-
sure donnée par Bougi;^»', et généralement admise
(1/500 000), est si peu d'iiccord avec celle de Wol-
laston (1/800 000), qui, à* vrai dire, est moins pro-
bable (100).
La lumière jaune de la Lune nous paraît blanche
le jour, parce qu'elle emprunte aux couches bleues
de l'air qu'elle traverse , la couleur complémentaire
du jaune (1). D'après les nombreuses observations
qu'a faites Arago avec son polariscope , il y a dans
la lumière de la Lune de la lumière polarisée ,
surtout dans les quartiers et dans les taches gri-
sâtres du disque lunaire, par exemple dans le grand
cirque obscur et quelquefois verdâtre , qui a reçu
le nom de Mare Crisium. La teinte sombre de la
région environnante ajoute un effet de contraste ,
qui rend le phénomène plus remarquable encore.
Quant à la montagne brillante qui occupe le centre
du groupe Aiistarque , et sur laquelle on a cru
plusieurs fois observer des signes d'activité volca-
nique, elle n'a point fourni plus de lumière pola-
risée que les autres parties du disque lunaire. On
ne voit dans la pleine Lune aucun mélange de lu-
mière polarisée ; mais durant l'éclipsé totale du
M mai 1848 , Arago a trouvé des indices certains
de polarisation dans le disque rougi de la Lune. On
peut voir sur ce phénomène, auquel nous revien-
drons plus bas, les Comptes rendus de f Académie des
Sciences, l, XV III, p, 1119.
La Lune émet de la chaleur ; c'est là une décou-
verte qui, comme tant d'autres, dues à mon illustre
ami Melloni, doit être rangée parmi les plus impor-
~ 52/1 -
tantes et les plus extraordinaires de ce siècle. Après
bien des essais infructueux , depuis ceux de La Hire,
jusqu'à ceux de l'ingénieux Forbes (2) , Melloni a
trouvé moyen, avec une lentille à échelons de trois
pieds de diamètre , destinée à l'Institut météorolo-
gique du Vésuve, d'observer de la façon la plus nette
les élévations de température subordonnées aux
différentes phases de la Lune. Mossotti et Belli, pro-
fesseurs aux universités de Pise et de Pavie , furent
témoins de ces expériences, dont les résultats variè-
rent d'après l'âge et la hauteur de la Lune. Mais à
cette époque, dans l'été de l'année 18i6, on n'avait
pas encore déterminé à quelle fraction d'un thermo-
mètre centigrade correspond l'élévation de tem-
pérature observée dans la pile thermoscopique de
Melloni (3).
La lumière cendrée qui se montre sur une partie
du disque lunaire , lorsque peu de jours avant ou
après son renouvellement, elle ne nous présente
plus qu'un étroit croissant éclairé par le Soleil , n'est
autre chose que de la lumière terrestre qui va frapper
la Lune, c'est-à-dire «le reflet d'un reflet. » Moins
la Lune nous paraît éclairée , plus notre globe est
lumineux pour elle. La lumière que la Terre renvoie
à la Lune est d'ailleurs 13 fois et demie plus intense
que celle qu'elle en reçoit ; elle est telle qu'après une
seconde réflexion , nous pouvons encore l'apprécier.
Cette lumière cendrée permet de reconnaître au
télescope les taches principales et les sommets de
montagnes qui brillent dans les paysages de la Lune,
— 555 ~
comme autant de points lumineux. On distingue
même encore une lueur grise lorsque la Lune est
déjà plus qu'à moitié sortie de l'ombre (1). Vus dans
les régions tropicales, sur les hauts plateaux de Quito
et de Mexico , ces phénomènes produisent une im-
pression particulière. L'opinion s'est généralement
répandue, depuis Lambert et Schrœter, que les
différences dans l'intensité de la lumière cendrée
dépendent de la force plus ou moins grande avec
laquelle est réfléchie la lumière solaire qui frappe la
surface de notre globe, suivant qu'elle est renvoyée
par des masses continentales couvertes de sables ,
de prairies , de forêts tropicales et de roches arides
ou bien par les vastes plaines de l'Océan. Le 14 fé-
vrier 1774, Lambert remarqua avec une lunette,
nommée chercheur, que la lumière cendrée se chan-
geait en une teinte olive tirant sur le jaune. « La
Lune, dit Lambert au sujet de cette remarquable ob-
servation , se trouvait alors verticalement au-dessus
de l'océan Atlantique, et recevait sur son hémisphère
d'ombre la lumière verte de la Terre, réfléchie sous
un ciel serein par les régions boisées de l'Amérique
méridionale (5). i>
L'état météorologique de notre atmosphère modifie
l'intensité de la lumière terrestre qui accomplit le
double trajet de la Terre à la Lune et de la Lune à
notre œil. Aussi serait-il possible dès aujourd'hui,
comme le remarque Arago (6) , avec les instru-
ments dont on dispose, de lire en quelque sorte
clans la Lune l'état moyen de transparence de notre
m. U
— 526 —
atmosphère. Kepler, dans l'ouvrage intitulé : ad
Vitellionem Paralipomena , quibiis Astronomiœ pars
optica traditur (1604, p. 254), attribue les premières
notions exactes sur la nature de la lumière cen-
drée à son maître vénéré Maestlin , qui présenta
cette explication dans des thèses soutenues publi-
quement à Tubingen, en 1596. Galilée parlait dans
son Sidereus Nuncius (p. 26) de cette réflexion de
la lumière terrestre, comme d'un fait qu'il avait
découvert lui-même, il y avait plusieurs années;
mais déjà 100 ans avant Maestlin et Galilée, l'ex-
plication du reflet visible de la lumière terrestre
sur la Lune n'avait pas échappé au génie universel
de Léonard de Vinci, ainsi qu'en font foi ses ma-
nuscrits longtemps oubliés (7).
Il est rare que dans les éclipses totales de Lune
la Lune disparaisse complètement. D'après la plus
ancienne observation de Kepler (8), il en fut ainsi le
9 décembre 1601 , et à une époque plus rapprochée
de nous, à Londres, le 10 juin 1816. On ne put même
apercevoir la Lune au télescope. La cause de ce phé-
nomène singulier doit tenir à l'état imparfaitement
connu, dans lequel se trouvaient, sous le rapport de la
diaphanéité , quelques-unes des couches de notre at-
mosphère. Hévélius remarque expressément que, dans
l'éclipsé totale du 25 avril 1642 , le ciel parfaitement
pur était couvert d'étoiles scintillantes, et cependant
bien qu'il ait employé des grossissements très-divers,
le disque hmaire resta toujours invisible. Dans d'au-
tres cas aussi très-rares , de certaines parties de la
— 5^27 -
Lune sont seules visibles et ne le sont que faiblement.
Il est ordinaire , dans une éclipse totale , de voir la
Lune rougir, en passant par tous les degrés d'inten-
sité , et arriver même au rouge de feu , lorsqu'elle est
éloignée de la Terre. Il y a un demi-siècle, le 29 mars
1801 , pendant que nous étions mouillés à l'île Baru,
non loin de Cartagena de Indias, j'étais vivement
frappé , en observant une éclipse, de voir combien ,
sous le ciel des tropiques, le disque de la Lune pa-
raissait plus rouge que dans ma patrie (9). On sait
que ce phénomène est un effet de la réfraction , les
rayons solaires étant infléchis lors de leur passage à
travers l'atmosphère terrestre (10), et rejetés dans le
cône d'ombre, ainsi que le dit fort justement Kepler
dans ses Paralipomena ad Vitellionem ( pars optica ,
p. 893). Du reste, le disque rouge ou ardent n'est
jamais également coloré : quelques endroits restent
obscurs , et passent par des teintes de plus en plus
sombres. Les Grecs s'étaient fait une théorie fort
extraordinaire touchant les couleurs diverses que
devait montrer le disque lunaire, d'après l'heure du
jour où l'éclipsé se produisait (11).
La longue discussion sur l'existence vraisemblable
ou invraisemblable d'une enveloppe atmosphérique
au globe lunaire , a eu pour résultat de prouver, par
des observations précises d'occultations d'étoiles ,
qu'il n'y a point de réfraction des rayons lumineux
sur les bords de la Lune. Ainsi se trouvent renver-
sées les hypothèses de Schrœter sur une atmosphère
et un crépuscule lunaires (12). « La comparaison
-- 528 —
des deux valeurs du diamètre de la Lune , dont l'une
s'obtient directement, dit Bessel, et dont l'autre
est déduite du temps que dure l'occultation d'une
étoile , nous apprend que la lumière stellaire , en
rasant le bord de la Lune ne dévie point sensible-
ment du droit chemin. Si une réfraction avait lieu ,
la deuxième valeur du diamètre serait moindre
que la première , et des mesures réitérées ont
donné , au contraire , des déterminations si concor-
dantes qu'il n'a jamais été possible d'y découvrir une
différence décisive (13). » L'immersion des étoiles
qui s'aperçoit d'une manière distincte, surtout au
bord obscur, s'opère instantanément et sans dimi-
nution progressive d'éclat; il en est de même pour
l'émersion ou la réapparition.
Puisque donc notre satellite est privé d'enve-
loppe aériforme , les astres , en l'absence de toute
lumière diffuse , se lèvent pour lui sur un ciel
presque noir, même durant le jour (ii). Là, au-
cune onde aérienne ne peut transmettre le bruit,
le chant ou la parole. Pour notre imagination , qui
aime à se plonger dans des régions inaccessibles,
l'astre des nuits n'est qu'un désert silencieux et
muet.
Le phénomène de l'arrêt ou adhérence , que pré-
sente quelquefois , au bord de la Lune , l'étoile im-
mergée, ne peut guère être considéré comme un effet
d'irradiation, bien qu'à la vérité, en raison de la
différence d'éclat qui distingue nettement la partie
éclairée directement par le Soleil et la lumière cen-
— 5!29 —
drée, l'irradiation, dans un croissant étroit, fasse pa-
raître la première comme enchâssant la seconde (15).
Arago , dans une éclipse totale, a vu une étoile ad-
hérer distinctement, durant la conjonction, au disque
sombre de la Lune. Faut-il attribuer surtout ces ap-
parences h quelque effet de sensation et à des causes
physiologiques (16), ou bien aux aberrations de ré-
frangibilité et de sphéricité de Toeil (17) ? Ce point est
resté un sujet de débat entre Arago et Plateau. Pour
les cas dans lesquels des observateurs ont affirmé
avoir vu l'étoile reparaître après sa disparition , puis
disparaître de nouveau , on peut conclure que l'étoile
avait rencontré accidentellement un bord de la Lune
hérissé de montagnes ou ébréché par des précipices
profonds.
L'intensité très-inégale de la lumière réfléchie,
dans les diverses régions du disque lunaire, et sur-
tout le peu de netteté du bord intérieur, durant les
phases, ont. dès les premiers temps, fait naître
quelques conjectures raisonnables sur les aspérités
que présente la surface de notre satellite. Dans le petit
mais curieux ouvrage de la Face gui paraît dans le
disque de la Lune, Plutarque dit expressément : « que
les taches pourraient faire soupçonner des gorges ou
des vallées, et des pics de montagnes qui jettent de
grandes ombres, comme le mont Athos, dont l'ombre
atteint l'île de Lemnos (18). » Les taches couvrent
environ 'i/5 du disque entier. Lorsque l'astre est
placé favorablement , on peut distinguer à l'œil nu ,
par une atmosphère sereine, les crêtes des régions
— 530 —
montagneuses des Apennins, l'eticeinle obscure ap-
pelée Grinialdi, le bassin connu sous le nom de
Mare Crisium , enfin le groupe de Tycho, encaissé
entre un grand nombre de montagnes et de cra-
tères (19). Suivant une supposition qui semble fon-
dée , ce serait surtout l'aspect de la chaîne des
Apennins qui aurait conduit les Grecs à expliquer
les taches de la Lune par des montagnes, et les
aurait fait songer au mont Athos dont l'ombre
couvrait la vache d'airain de Lemnos , aux sol-
stices. Une autre opinion, purement imaginaire,
sur les taches de la Lune , était celle d'Agésianax ,
que combattait Plutarque , et d'après laquelle le
disque de la Lune nous renvoyait par réflexion ,
comme un miroir, l'image de nos propres conti-
nents et de la mer Atlantique. Une croyance toute
semblable paraît s'être conservée encore , à l'état
de préjugé populaire , dans quelques contrées de
l'Asie (20).
En employant avec soin de grandes lunettes, on est
arrivé insensiblement à tracer une topographie de la
Lune, fondée sur des observations réelles; et comme,
en opposition , un de ses hémisphères tout entier
s'offre à nos regards , nous connaissons la liaison gé-
nérale des montagnes de la Lune et leur configura-
tion superficielle beaucoup mieux que nous ne con-
naissons l'horographie de l'hémisphère terrestre, qui
comprend l'intérieur de l'Afrique et de l'Asie. Géné-
ralement , les parties les plus obscures du disque lu-
naire sont les plus unies et les plus basses ; les parties
— 6M —
éclatantes sont les régions élevées et montagneuses.
Mais l'ancienne division que faisait Kepler en mers
et en continents est depuis longtemps abandonnée;
et déjà Hévélius, bien qu'il ait propagé l'usage de
termes analogues, en révoquait en doute l'exactilude,
et avait des scrupules sur cette opposition des deux
éléments. On s'appuie surtout, pour combattre l'hy-
pothèse des plaines liquides, sur cette circonstance,
constatée par des observations attentives et faites à
des degrés de lumière très- différents, que dans les
prétendues mers de la Lune il n'y a point d'espaces
unis, si petits qu'ils soient, que tous présentent un
grand nombre de surfaces qui se croisent. Ara go a
infirmé les motifs tirés des inégalités de surface, en
faisant remarquer que , malgré leurs aspérités , quel-
ques-unes de ces plaines pourraient encore former
le lit de mers peu profondes , puisque sur notre globe
le fond accidenté et couvert de récifs de l'Océan,
peut être vu distinctement à une grande hauteur,
grâce à la supériorité d'éclat de la lumière qui s'élève
des profondeurs sur celle que réfléchit la surface
( Annuaire du Bureau des Longitudes pour 1836 ,
p. 339-343). Dans le Traité d'Astronomie et de Pho-
tométrie qu'il va bientôt faire paraître , Arago se
propose de conclure d'autres raisons empruntées à
l'optique , et qui ne sauraient trouver place ici , à
l'absence probable de l'eau sur notre satellite. Les
plus grandes de ces plaines basses se trouvent dans
les régions du Nord et de l'Est. Le bassin mal déli-
mité de rOceanus Procellarum est probablemenl de
— 55^2 —
tous celui qui a le plus d'étendue, il n'a pas moins
de 50 000 myriamètres carrés. Cette partie sombre
de la Lune , située dans l'hémisphère oriental , qui
enferme des montagnes groupées en forme d'îles,
telles que les monts Riphées , le mont Kepler, le
mont Copernic et les Carpathes, et à laquelle se rat-
tachent le Mare Imbrium qui couvre une surface de
9000 myriamètres carrés , le Mare Nubium et même ,
dans une certaine mesure, le Mare Ilumorum, forme
le contraste le plus frappant avec la région lumi-
neuse du Sud-Ouest, dans laquelle les montagnes
sont accumulées (21). Au Nord-Ouest, on voit deux
bassins plus isolés et fermés plus hermétiquement :
le Mare Crisium qui s'étend sur un espace de plus de
1600 myriamètres carrés, et le Mare Tranquillitatis
dont la surface est de 3100.
La couleur de ces prétendues mers n'est pas tou-
jours grise. Le Mare Crisium est d'un gris mêlé de
vert sombre, le Mare Serenitatis et le Mare Hu-
morum sont également verts. Ailleurs, près des
monts Hercyniens , Tenceinte isolée , désignée sous
le nom de Lichtenberg , offre une teinte rougeâtre.
Il en est de même pour le Palus Somnii. Les plaines
circulaires dont le centre n'est point occupé par des
montagnes sont la plupart d'un gris foncé, tirant sur
le bleu , et qui ressemble à l'éclat de l'acier. Les
causes de ces tons différents sur un sol formé de ro-
chers ou couvert de substances meubles sont tout à
fait inconnues. De même qu'au Nord de la chaîne
des Alpes , le vaste cirque de Platon , nommé par
— 533 —
Hévéliiis Lacus niger major, et plus encore Grimaldi,
vers l'équaleur, et Endymion , à l'extrémité Nord-
Ouest du disque, sont réputés les trois endroits les
plus obscurs de la Lune; au contraire, le point le
plus éclatant est Aristarque, dont les sommets bril-
lent quelquefois, dans l'ombre, d'un éclat presque
stellaire. Toutes ces nuances d'ombre et de lumière
alïectent une plaque enduite d'iode , et, à l'aide de
forts grossissements, se fixent au daguerréotype
avec une fidélité merveilleuse. J'ai en ma possession
une image de la Lune , obtenue de cette manière
par un artiste distingué , M. Whipple, de Boston;
bien qu'elle n'ait pas plus de deux pouces de dia-
mètre, on y reconnaît distinctement ce que l'on
est convenu d'appeler des mers , ainsi que les en-
ceintes de montagnes.
La forme circulaire qui frappe déjà les regards
dans quelques-unes des mers, en particulier dans le
Mare Crisium , le Mare Serenitatis et le Mare Humo-
rum, se retrouve bien plus souvent encore et d'une
manière générale dans les parties montagneuses de
la Lune, surtout parmi les immenses groupes de
montagnes qui couvrent l'hémisphère méridional du
pôle à réquateur, où ils se terminent en pointe. Un
grand nombre de ces éminences annulaires et de ces
circonvallations, dont les plus grandes ont , d'après
Lohrmann, plus de 500 myriamètres carrés, for-
ment des chaînes continues, parallèles au méridien,
entre 5" et 40" de latitude australe (22). La région po-
laire boréale ne renferme proportionnellement qu'un
— 53i —
très-petit nombre de ces enceintes de montagnes ;
elles forment au contraire un groupe non inter-
rompu sur le bord occidental de l'hémisphère du
Nord, entre 20" et 50° de latitude. Cependant le
Mare Frigoris est à quelques degrés seulement du
pôle boréal, qui, n'offrant comme toute la région
plane du Nord-Est, que quelques cratères isolés,
Platon, Mairan, Aristarque, Copernic et Kepler,
forme un contraste complet avec le pôle austral,
tout hérissé de montagnes. Autour du pôle austral
brillent des pics élevés, plongés durant des lu-
naisons entières dans une lumière perpétuelle; ce
sont de véritables îles de lumière que l'on peut
reconnaître avec des lunettes d'un faible grossis-
sement (23).
Comme exceptions à ce type, si répandu sur la
surface de la Lune , d'enceintes circulaires , il existe
aussi de véritables chaînes de montagnes situées
presqu'au milieu de l'hémisphère septentrional :
tels sont les Apennins , le Caucase et les Alpes. Ces
chaînes se dirigent du Sud au Nord , formant un
arc incliné un peu vers 1 Ouest, et couvrent envi-
ron 32 degrés de latitude. Dans cet espace, sont ac-
cumulés des dos de montagnes et des pics quelquefois
fort aigus, auxquels se mêlent encore un petit nombre
de cirques et de dépressions en forme de cratères
( Conon , Bradley, Callippe), mais dont l'ensemble
se rapproche davantage de nos chaînes de montagnes.
Les Alpes lunaires qui le cèdent en hauteur au Cau-
case et aux Apennins , j'entends le Caucase et les
^
— 555 —
Apennins de la Lune, présentent une vallée trans-
versale remarquablement large, qui coupe la chaîne
dans la direction du Sud-Est au Nord-Ouest. Cette
vallée est bordée de sommités dépassant en hauteur
le pic de Ténériffe.
Si dans la Lune et sur la Terre on compare les
hauteurs des montagnes aux diamètres de ces deux
corps célestes, on arrive à ce résultat remarquable :
que les montagnes lunaires, dont les plus hautes sont
inférieures de 600 toises seulement à celles du globe
terrestre, atteignent l//i54 du diamètre de la Lune ,
tandis que celles de la Terre, quatre fois plus grandes,
ne dépassent pas 1/1481 de son diamètre (21). Parmi
les 1095 altitudes mesurées sur la Lune , j'en trouve
39 supérieures à celle du mont Blanc, haut de
2462 toises, et 6 qui en ont plus de 6000. Ces mesures
s'obtiennent soit par les rayons tangents , en déter-
minant la distance des sommets, qui restent éclairés
dans la partie de l'ombre , à la limite d'ombre et de
lumière, soit d'après la longueur des ombres por-
tées. Galilée appliquait déjà la première de ces
méthodes , comme on le voit dans sa lettre au Père
Grienberger sur la Montuosità délia Luna.
Suivant Maedler, qui a mesuré soigneusement les
montagnes de la Lune d'après les longueurs des
ombres portées , les points culminants sont par ordre
de grandeur décroissante : au bord méridional, très-
près du pôle, Doerfel et Leibnitz, 3800 toises; la
montagne circulaire de Newton , dont l'excavation
est telle que jamais le fond n'en est éclairé ni par
— 536 —
la Terre ni par le Soleil , 3727 toises ; Casatus à FEst
de Newton 3569 toises; Callippus dans la chaîne du
Caucase 3190 toises ; les Apennins , de 2800 à 3000
toises. Il faut remarquer ici que dans l'absence d'une
surface générale de niveau , comme celle que nous
fournit la mer, également distante dans toutes ses
parties du centre du globe terrestre, les altitudes ab-
solues ne sont pas rigoureusement comparables entre
elles , et que les nombres ci-dessus indiquent seule-
ment, à vrai dire, les différences d'élévation entre les
sommets et les plaines ou les dépressions les plus
voisines (25). Il est assez surprenant que Galilée ait
assigné aussi à ces hauteurs « incirca miglia quattro,»
c'est-à-dire environ un mille géographique ou 3800
toises, ce qui, dans l'état de ses connaissances hypso-
métriques, les lui faisait regarder comme plus élevées
que toutes les montagnes du globe terrestre.
La surface de notre satellite nous présente une
apparence très-singulière et très-mystérieuse, qui
provient d'un effet optique de réflexion , et non
d'accidents hypsométriques : ce sont des bandes lu-
mineuses, disparaissant sous un jour oblique , et qui,
à l'inverse des taches , deviennent plus visibles lors
de la pleine Lune , et semblent autant de systèmes
rayonnants. Ces bandes ne sont pas des contre-forts
de montagnes ; elles ne jettent aucune ombre , et
courent avec une égale intensité de lumière sur les
plaines et les éminences , jusqu'à des hauteurs de
12000 pieds. Le plus étendu de ces systèmes rayon-
nants part du mont Tycho, sur lequel l'on peut dis-
— 5,^7 —
tinguer plus de cent bandes lumineuses , générale-
ment lurges de plusieurs milles. Des systèmes ana-
logues entourent les monts Aristarque, Kepler, Co-
pernic et les Carpathes, et sont presque tous reliés les
uns aux autres. 11 est difficile d'imaginer par analogie
ou par induction, quelle altération particulière du sol
peut déterminer la présence de ces rubans lumineux,
rayonnant de certaines montagnes annulaires.
Le type arrondi dont nous avons fait mention
plusieurs fois , et qui presque partout est dominant
sur le disque de la Lune, soit dans les vallées, en-
tourées de circonvallations dont le centre est sou-
vent occupé par des montagnes, soit dans les grandes
montagnes circulaires et dans leurs cratères, dont
on compte 22 dans Bayer et 33 dans Albategnius, de-
vait de bonne heure conduire un profond penseur, tel
que Robert Hooke, à en chercher l'explication dans
la réaction de l'intérieur de la Lune contre sa partie
extérieure. Il attribua donc ce phénomène à l'eflet
de feux souterrains et à l'irruption de vapeurs élas-
tiques , ou même à un bouillonnement dégageant des
bulles qui viennent crever à la surface. Des expé-
riences faites avec des boues calcaires en ébullition
lui parurent confirmer ses vues; et dès lors on com-
para les circonvallations et leurs montagnes cen-
trales aux formes de l'Etna, du pic de Ténériffe ,
de l'Hécla et des volcans de Mexico, décrits par
Gage (26).
En voyant une des vallées circulaires de la Lune,
Galilée, frappé sans doute de ses dimensions, se
- 538 —
rétait représentée, ainsi que lui-inême le raconte,
comme une vaste étendue de terre enfermée entre
des montagnes. J'ai retrouvé un passage (27) , dans
lequel il compare ces bassins circulaires au grand
bassin fermé de la Bohême. Plusieurs des vallées
circulaires de la Lune ne sont point en effet très-
inférieures en étendue à cette contrée ; car elles ont
un diamètre de 25 à 30 milles géographiques (28).
Au contraire les montagnes annulaires , proprement
dites, n'ont guère plus de 2 ou o milles de diamètre.
Conon dans les Apennins en a 2 ; et un cratère qui
appartient à la région lumineuse d'Aristarque n'a
que 400 toises de largeur ; c'est la moitié du cratère
du Rucu-Pichincha , situé sur les hauts plateaux de
Quito, et que j'ai mesuré moi-même trigonométri-
quement.
En comparant, sous le rapport de leur nature et
de leurs dimensions, les phénomènes de la Lune
et les phénomènes bien connus de la Terre , il est
nécessaire de remarquer que la plupart des circon-
vallations et des montagnes annulaires de la Lune
doivent être considérées comme des cratères de
soulèvement à éruptions intermittentes, dans le
sens où l'entend Léopold de Buch , mais infiniment
plus vastes que les nôtres. Les cratères de soulève-
ment de Piocca Monfina , de Palma , de Ténériffe et
de Santorin. que nous nommons grands, relative-
ment aux dimensions qui nous sont familières en
Europe , disparaissent en présence de Ptolémée ,
d'Hipparque et de beaucoup d'autres cratères de la
— 589 —
Lune. Palnia n'a pas plus de 3800 toises de diamètre,
Santorin d'après la nouvelle mesure du capitaine
Graves en a 5200, Ténériffe 7600 tout au plus : ce n'est
que 1/8 ou 1/6 des diamètres de Ptolémée ou d'Hip-
parque. A la distance de la Lune , les petits cratères
du pic de Ténériffe et du Vésuve, qui ont trois à
quatre cent pieds de diamètre, seraient à peine vi-
sibles au télescope. La grande majorité des cirques de
la Lune n'ont point de montagne centrale , et là où il
s'en trouve, ces montagnes se présentent, Hévéliuset
Macrobius entre autres , sous la forme d'un dôme ou
d'un plateau , non point comme un cône d'éruption,
muni d'une ouverture (29). Quant aux volcans ignés
que l'on prétend avoir vus, le 4 mai 1783, dans l'hé-
misphère obscur de la Lune, et aux points lumineux
observés sur le mont Platon par Bianchini, le 16 août
1725, et par Short , le 22 avril 1751 , nous n'en par-
lons ici qu'à un point de vue purement historique.
Depuis longtemps, en effet, on a déterminé les causes
de ces illusions produites par des reflets plus vifs de la
lumière terrestre, qui de certains points de notre globe
vont frapper la partie obscure de la Lune (30).
Plusieurs fois déjà , on a fait cette remarque judi-
cieuse que, en raison du manque d'eau sur la surface
de la Lune, car les espèces de crevasses sans largeur
et généralement en ligne droite, auxquelles on donne
le nom de rigoles , ne sont nullement des fleuves (31),
on peut se figurer notre satellite à peu près tel que
dut être la Terre dans son état primitif, avant d'être
couverte de couches sédimentaires riches en coquilles,
— 540 —
de graviers el de terrains de transport, dus à Taction
continue des marées ou des courants. A peine peut-
on admettre qu'il existe dans la Lune quelques cou-
ches légères de conglomérats et de détritus formés
par le frottement. Dans nos chaînes de montagnes ,
soulevées au-dessus des crevasses dont le globe ter-
restre est sillonné, on commence à reconnaître cà et
là des groupes partiels d'éminences, qui représentent
des espèces de bassins ovales. Combien la Terre ne
nous paraîtrait-elle pas différente d'elle-même, si
nous la voyions dépouillée des formations tertiaires
et sédimentaires, ainsi que des terrains de transport!
Sous toutes les zones, et plus que toutes les autres
planètes , la Lune anime et décore l'aspect du firma-
ment par la diversité de ses phases et par son rapide
passage à travers les constellations. Sa lumière ré-
jouit le cœur de l'homme et jusqu'aux animaux sau-
vages , surtout dans les forêts primitives des régions
intertropicales (32). La Lune, grâce à TattracLion
qu'elle exerce en commun avec le Soleil, met en
mouvement l'Océan, déplace l'élément liquide sur la
Terre , et par le gonflement périodique des mers et
les effets destructifs des marées, change peu à peu les
contours des côtes , favorise ou contrarie le travail
de l'homme, et fournit la plus grande partie des ma-
tériaux dont se forment les grès et les conglomérats,
recouverts à leur tour par les fragments arrondis et
sans cohésion des terrains de transport (33). Ainsi la
Lune agit sans cesse, comme source de mouvement,
sur les conditions géologiques de notre planète.
— 541 —
L'influence incontestable de ce satellite sur la
pression atmosphérique, sur la formation des brouil-
lards et la dispersion des nuages , sera traitée dans
la quatrième et dernière partie , du Cosmos , consa-
crée tout entière au domaine terrestre (34).
MARS.
Le diamètre de cette planète, malgré la dis-
tance déjà plus considérable qui la sépare du Soleil ,
n'est que de 0,519 du diamètre de la Terre , ou de
641 myriamètres. L'excentricité de son orbite est
de 0,093 216 8 : ainsi, après Mercure, Mars est, de
de toutes les planètes anciennement connues , celle
qui a la plus grande excentricité. Cette raison et
aussi la proximité de la Terre , rendaient Mars parti-
culièrement propre à mettre Kepler sur la voie de ses
immortelles lois des mouvements elliptiques. La ro-
tation de Mars , d'après Msedler et Wilhelm Béer, est
de 24''37'23"(35). Sa révolution sidérale s'accomplit
en 1^ 321J 17'^ 30' 41". L'inclinaison de son orbite sur
l'équateur terrestre est de 24** 44' 24"; sa masse est
de 1/2 680 337, sa densité par rapport à celle de la
Terre de 0,958. De même que l'on a mis à profit la
faible distance à laquelle la comète d'Encke s'est ap-
prochée de Mercure, pour mieux connaître la masse
de cette planète , de même , quelque jour, celle de
Mars pourra être rectifiée , au moyen des perturba-
tions qu'elle apportera dans les mouvements de la
comète de Vico.
m. 35
~ 542 —
L'aplatissement de Mars , dont , chose singulière ,
l'astronome de Koenigsberg persista à douter, a été
reconnu pour la première fois par William Herschel,
en 1784; mais une longue incertitude a régné quant
à la valeur numérique de cette dépression. Elle
était , suivant William Herschel , de i/16. Arago l'a
mesurée plus exactement, à deux reprises différentes,
avec une lunette prismatique de Rochon ; il n'a trouvé
dans une première expérience, en 1824, que le rap-
port de 189 à 194, c'est-à-dire 1/38,8, et plus ré-
cemment, en 1847, 1/32; il est cependant disposé
à croire l'aplatissement de Mars un peu plus consi-
dérable (36).
Si la surface de la Lune présente avec la Terre un
grand nombre de relations géologiques , Mars n'offre
avec notre planète que des analogies météorologiques.
A part les taches obscures, dont les unes sont noi-
râtres, dont d'autres, en beaucoup plus petit nombre,
sont d'un rouge jaune (37), et se détachent sur les
régions verdâtres auxquelles on a donné le nom de
mers (38), on observe encore alternativement sur le
disque de Mars, soit aux pôles de rotation , soit aux
pôles de température, deux taches d'un blanc de
neige (2>9). Elles furent constatées dès 1716 par
Philippe Maraldi ; mais leur rapport avec les va-
riations du climat , ne fut signalé que plus tard par
William Herschel, dans les P/ulosophical Transactions
pour 1784. Ces taches blanches grandissent ou dimi-
nuent alternativement, selon que le pôle qu'elles cou-
vrent s'approche de sa saison d'hiver ou d'été. Arago
— 543 —
a mesuré avec la lunette de Rochon l'intensité de
la lumière réfléchie par ces régions neigeuses , et Ta
trouvée double de celle que renvoient toutes les autres
parties du disque. Dans l'ouvrage intitulé Physika-
liscli-astronomisclie Beitraege de Maedler et Béer , on
trouve d'excellents dessins de l'hémisphère boréal et
de l'hémisphère austral de Mars (40), et ce phénomène
singulier, unique dans tout le système planétaire,
est déterminé à l'aide d'indications numériques ,
portant sur tous les changements de température
dus aux diverses saisons , et sur tous les degrés de
fusion par lesquels l'été fait passer ces neiges po-
laires. Une suite d'observations poursuivies avec soin
pendant dix années ont montré aussi que les ta-
ches obscures de Mars conservent exactement leur
forme et leur position relative. L'apparition pério-
dique de ces dépôts de neiges , effet météorologique
subordonné aux changements de la température, et
quelques phénomènes optiques que présentent les ta-
ches sombres, dès que, par la rotation de la planète ,
elles sont transportées vers les extrémités du disque,
rendent plus que probable l'existence d'une atmos-
phère enveloppant la planète de Mars.
LES PETITES PLANETES.
Nous avons déjà présenté dans nos considérations
générales sur les corps planétaires (41) , les petites
planètes, nommées aussi astéroïdes, planètes télesco-
piques ou ultra-zodiacales , comme un groupe inter-
^ 544 -
médiaire , formant une zone de séparation entre les
4 planètes intérieures, Mercure, Vénus, la Terre et
Mars, et les 4 planètes extérieures, Jupiter, Saturne,
TJranus et Neptune, L'inclinaison considérable et
l'excentricité excessive de ses orbites entrelacées,
ainsi que la petitesse extraordinaire des astres qui
le composent, donnent à ce groupe le plus sin-
gulier caractère. Le diamètre de Vesta même ne pa-
raît pas atteindre 1/4 de celui de Mercure. Au mo-
ment où fut publié, en 1845, le premier volume
de Cosmos, on ne connaissait encore que quatre de
ces petites planètes : Gérés , Pallas , Junon et Vesta ,
découvertes par Piazzi , Olbers et Harding , du
1' janvier 1801 au 29 mars 1807; actuellement,
au mois de juillet 1851 , leur nombre s'est accru jus-
qu'à 14 ; c'est le tiers de tous les corps planétaires
connus , y compris les satellites.
Si pendant longtemps les astronomes se sont
appliqués à multiplier les membres des systèmes
subordonnés , c'est-à-dire des satellites qui gra-
vitent autour des planètes, ou ont dirigé leurs re-
cherches vers les planètes situées dans les régions
les plus reculées, au delà de Saturne et d'Uranus, au-
jourd'hui, depuis la découverte accidentelle de Gérés
par Piazzi, et celle d'Astrée, due aux recherches
de Hencke, on peut dire aussi depuis les perfec-
tionnements apportés aux cartes célestes (42), par-
ticulièrement à celles de l'Académie de Berlin qui
renferment toutes les étoiles de 9' grandeur, et en
partie celles de lO'^ grandeur, une zone plus rap-
— 545 —
prochée de nous offre un champ peut-être inépuisable
à l'activité des astronomes. C'est un mérite spécial
de VJnnuaire astronomique, publié par le directeur
de l'Observatoire de Berlin , Encke , et par le doc-
teur Wolfers , de donner, avec les détails les plus
circonstanciés, les éphémérides du groupe toujours
croissant des petites planètes. Jusqu'à présent l'es-
pace plus rapproché de l'orbite de Mars semble le
plus riche en astéroïdes ; mais déjà il résulte des
mesures prises que la largeur de cette zone , « en
embrassant la différence des rayons vecteurs entre la
distance périhélie la plus petite , qui est celle de
Victoria, et la distance aphélie la plus grande, qui est
celle d'Hygie^ dépasse la distance de Mars au So-
leil (43). «
J'ai déjà relevé plus haut les excentricités des
orbites, qui atteignent leur maximum dans Gérés,
Égérie et Vesta, dont Jnnon , Pallas et Iris, offrent
au contraire le minimum (44) , ainsi que les in-
clinaisons sur l'écliptique, qui vont décroissant à
partir de Pallas (34'^ 37') et d'Égérie (16° 33') , jus-
qu'à Hygie (3** 47'). J'insère ici la table générale
des éléments concernant toutes les petites planètes,
que je dois à l'obligeance de mon ami , le docteur
Galle.
516 —
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li^\M ; le diamètre intérieur de 26",67.
L'intervalle qui sépare le second anneau de la sur-
face de la planète serait, d'après Struve, de /i'',3/i.
La largeur totale de ces deux anneaux réunis est de
3700 milles géographiques , la distance de l'anneau
à la surface de Saturne d'environ 5000. Le vide
qui sépare le premier anneau du second , et qu'in-
dique le trait noir aperçu par Cassini , n'est que de
390 milles. On ne croit pas que l'épaisseur de ces
anneaux dépasse 20 milles; leur masse est, d'après
Bessel, 1/118 de la masse de Saturne. Ils offrent
quelques inégalités de surface et quelques émi-
nences, au moyen desquelles on a déterminé, d'une
manière approximative , la durée de leur rotation ,
absolument égale à celle de la planète (63). Les ir-
régularités de leur forme se manifestent lors de la
disparition de l'anneau, dont généralement une anse
devient invisible avant l'autre.
Un phénomène très-remarquable est la position
excentrique de Saturne , découverte par Schwabe à
Dessau, en septembre 1827. Le globe de la planète
n'est pas concentrique avec l'anneau, mais incline
un peu vers l'ouest. Cette observation a été vérifiée,
en partie à l'aide de mesures micrométriques, par
Harding, Struve (04), John Herschel et South. De
petites différences constatées dans la valeur de
l'excentricité, à la suite d'une série d'observations
— 559 —
faites concurremment par Schwabe , Harding et de
Vico, différences qui paraissent périodiques, ont
peut-être pour cause une oscillation du centre de gra-
vité de l'anneau autour du point central de Saturne.
C'est un fait curieux que, dès la fm du xyii** siècle ,
un ecclésiastique d'Avignon , nommé G allât , ait
cherché vainement à fixer l'attention des astronomes
sur la position excentrique de cette planète (65). Il est
difficile, d'après la densité de Saturne , égale à peine
aux 3/5 de celle de l'eau , et qui décroît encore vers
la surface, de se représenter son état moléculaire et
sa constitution matérielle , ou seulement de décider
si le corps de la planète est à l'état fluide, qui est
celui où les molécules ont le moins d'adhérence
entre elles , ou à l'état solide , comme permettent de
le croire les analogies souvent citées du bois de sapin,
du liège, de la pierre ponce, ou d'un liquide soli-
difié, la glace. L'astronome attaché à l'expédition de
Krusenstern, Horner, est d'avis que l'anneau de Sa-
turne est une ceinture de nuages, et prétend que
les montagnes de la planète sont formées par des
masses de vapeurs et de brouillards vésiculaires (66).
L'astronomie conjecturale a ici le champ libre, mais
les spéculations de deux astronomes américains ,
Bond et Peirce , sur les conditions de stabilité de
l'anneau, ont une tout autre portée (67). C'est en
partant de l'observation et de l'analyse mathéma-
tique que tous deux s'accordent à admettre la fluidité
de l'anneau , ainsi ([ue des variations continues dans
la forme et la divisibilité de l'anneau extérieur. Si
— 56{) —
cet ensemble se conserve tel qii'ii est, cela tient,
suivant Peirce, à la position des satellites : sans
cette influence conservatrice, l'équilibre ne pourrait
se maintenir, malgré les inégalités de l'anneau.
SA.TELLITES DE SVTURNK.
Les cinq plus anciens satellites de Saturne furent
découverts entre les années 1655 et 1681 , à savoir :
Titan, le 6" dans l'ordre des distances, par Huygens ;
Japhet le plus extérieur de tous, Rhéa, Téthys et Dioné,
par Cassini. Ces découvertes furent suivies, en 1789,
par une autre , due à William Herschel , qui révéla
l'existence des deux satellites les plus voisins de
la planète , Mimas et Encélade ; enfin le septième sa-
tellite, l'avant dernier dans Tordre des distances,
Hypérion , fut découvert presque simultanément par
Bond à Cambridge, dans les États-Unis, et par Lassell,
à Liverpool, en septembre 1848. Nous avons déjà
indiqué plus haut (^Cosmos, t. I , p. 105 et t. III,
p. 510) les volumes de ces satellites et leurs distances
relatives à la planète principale. Je joins ici le tableau
de leurs révolutions, et de leurs distances moyennes,
exprimées en fractions du rayon équatorial de Sa-
turne , d'après les observations faites par Sir John
Herschel au cap de Bonne-Espérance, de d8e35 à
1837 (68) :
— 501 —
SATELLITES
dans l'ordre
de leurs distances
A LA PLANÈTE.
ORDRE
de leur
DÉCOUVERTE.
DURÉE
de
LEUR RÉVOLUTION.
DISTANCE
MOYENNE.
1
Mimas. . ,
6
0^ 22^ 37' 22 ',9
3,3607
2
Encélade. .
7
1 8 53 6,7
4,3125
3
Téthys. . .
5
1 21 18 25,7
5,3396
4
Dioné. . . .
U
2 17 41 8,9
6,8398
5
Rhéa. . . .
3
U 12 25 10,8
9,5528
6
Titan. . . .
1
15 22 Ul 25,2
22,l/i50
7
HypérioR. .
8
22 12 ?
28,0000?
8
Japliet. . .
2
79 7 53 40,4
64.-3590
Il existe un singulier rapport entre les révolutions
des quatre premiers satellites les plus proches de Sa-
turne. La durée de la révolution du troisième satellite
(Téthys) est double de celle du premier (Mimas); et
la durée de la révolution du quatrième (Dioné) est
double de celle du second (Encélade). Ces résultats
sont calculés à 1/800 près de la plus longue période.
Je dois la communication de ce rapprochement cu-
rieux à une lettre que m'a écrite Sir John Iîerschel,au
mois de novembre 1845. Les distances respectives des
quatre lunes de Jupiter présentent aussi une certaine
régularité ; elles forment assez exacte ment la série o, 6,
12. La distance de la seconde à la première , évaluée
en diamètres de Jupiter, est de 3, 6; celle de la troi-
— 562 —
sième à la seconde de 5, 7; celle de la quatrième à
la troisième de 11,6. Pries et Challis ont renchéri
sur Titius , en cherchant à étendre sa loi à tous les
systèmes de satellites , même à ceux d'Uranus (69).
URANUS.
La grande conquête de William Herschel, la
découverte d'Uranus , n'a point seulement accru le
nombre des six planètes principales connues depuis
des milliers d'années , et plus que doublé le diamètre
du système solaire ; elle a encore , 65 ans plus tard ,
par les perturbations mystérieuses auxquelles elle
était soumise , conduit à la découverte de Neptune.
Occupé , le 13 mars 1781 , à observer un petit groupe
d'étoiles situé dans les Gémeaux , Herschel reconnut
la nature planétaire d Uranus à la petitesse de son
disque, qui grossissait, sous des amplifications de
460 et 93*2 fois, beaucoup plus que les étoiles voi-
sines. Familier avec tous les phénomènes optiques ,
le grand astronome remarqua que, sous un fort gros-
sissement, l'intensité lumineuse du nouvel astre di-
minuait d'une manière sensible , tandis qu'elle res-
tait la même dans les étoiles fixes de même éclat ,
c'est-à-dire comprises entre la 6' et la T grandeur.
Herschel , lorsqu'il annonça pour la première fois
l'existence d'Uranus, le présenta comme une comète
(70); et ce furent seulement les travaux réunis de
Saron , de Lexell , de Laplace et de Méchain , rendus
grands axes ressemblent à ceux des petites planètes;
aussi s'est-ou demandé si ce groupe de comètes inté-
rieures ne composait pas originairement un seul corps
céleste , comme Olbers l'a conjecturé i)our les petites
planètes ; si cette grande comète n'aurait pas été divi-
sée en plusieurs par l'action de Mars, ainsi que cela
est arrivé à la comète intérieure de Biéla, qui, lors
de sa dernière apparition, en 1846, s'est séparée en
deux, sous les yeux, pour ainsi dire, de l'observa-
teur. De certaines ressemblances entre les éléments
des petites planètes et ceux des comètes ont conduit
le professeur Stephen Alexander, du collège de New-
Jersey, à -rechercher la possibilité d'une origine
commune à ces astéroïdes et aux comètes, ou du
moins à quelques-unes d'entre elles (84). D'après
toutes les observations récentes, il n'y a pas lieu
de s'appuyer sur l'analogie tirée des atmosphères
nébuleuses des astéroïdes. Si d'ailleurs les orbites de
ces petites planètes sont contenues dans des plans
divers , si même celle de Pallas offre l'exemple d'une
extrême inclinaison, aucune d'elles néanmoins ne
coupe , comme les comètes , les orbites des autres
grandes planètes. Cette condition essentielle, quelle
que soit l'hypothèse à laquelle on s'arrête sur la direc-
tion et la vitesse primitives de ces corps célestes , ne
permet guère de leur attribuer une origine commune,
à part même la différence de constitution qui distingue
les comètes intérieures et les petites planètes, com-
plètement dépourvues de nébulosité. Aussi Laplace.
dans sa théorie de la formation des planètes par des
- 573 —
anneaux de matière vaporeuse, circulant autour du
Soleil, a-t-il cru devoir séparer complètement les
comètes des planètes : « Dans l'hypothèse des zones
de vapeurs, dit-il, et d'un noyau s'accroissant par la
condensation de l'atmosphère qui l'environne , les
comètes sont étrangères au système planétaire (85). »
En esquissant le Tableau de la Nature dans le pre-
mier volume du Cosmos (86) , nous avons déjà fait re-
marquer que les comètes sont les corps qui, avec la
plus faible masse , occupent le plus d'espace dans le
domaine solaire, et qu'elles dépassent en nombre
toutes les autres planètes. En effet, le calcul des pro-
babilités fondé sur ce que l'on sait jusqu'à ce jour de
l'étendue de leurs orbites , de leurs distances aphélies
ou périhélies, et du temps durant lequel ces astres
peuvent rester invisibles , révèle l'existence de plu-
sieurs milliers de comètes. Il faut cependant excepter
de cette comparaison les aérolithes ou astéroïdes mé-
téoriques, dont la nature est demeurée jusqu'ici en-
veloppée de beaucoup de ténèbres. Parmi les comètes,
il y a lieu de distinguer celles dont on a calculé l'orbite
et celles pour lesquelles il n'existe que des obser-
vations imparfaites, ou seulement des indications
recueillies dans les chroniques. D'après larécente énu-
mération de Galle, le nombre exact des comètes dé-
terminées était, en 1847, de 178; en y joignant celles
dont l'existence seule a été signalée , le total ne s'é-
lève pas àmoinsde sixou sept cents. Lorsque la comète
de 1682 reparut en 1759 , ainsi que l'avait annoncé
Halley, on considéra comme très-singulière l'appari-
m. 37
— 574 —
lion de trois comètes dans la même année. Mais au-
jourd'hui , telle est l'activité avec laquelle la voûte
céleste est explorée simultanément, sur tant de points
différents du globe terrestre , que , dans chacune des
années 1819, 1825 et 1840, on en a aperçu et calculé
quatre ; on en avait observé cinq en 1826 ; ce nombre
s'éleva jusqu'à huit en 1846.
Les derniers temps ont été plus riches que la fin
du siècle précédent en comètes visibles à l'œil nu ;
cependant celles dont la tête et la queue sont écla-
tantes restent toujours un phénomène rare et remar-
quable. Il n'est point sans intérêt de rechercher
combien de comètes visibles à l'œil nu se sont mon-
trées en Europe, durant les derniers siècles (87).
L'époque la plus riche a été le xvi' siècle, qui en a
fourni 23. Le xvir en compta 12 , dont 2 seulement
dans les cinquante premières années. Au xviir siècle,
il n'en parut que 8 , tandis que , dans la première
moitié du xix% on en compte déjà 9, parmi lesquelles
les plus belles sont celles de 1807, 1811, 1819, 1835
et 1843. Dans les temps antérieurs, il s'est sou-
vent écoulé un intervalle de 40 à 50 ans , sans que
ce spectacle se soit présenté une seule fois. Il est pos-
sible , au reste , que , dans les années qui semblent
pauvres en comètes , il y ait eu beaucoup de grandes
comètes à longue excursion , dont le périhélie est
situé au delà des orbites de Jupiter et de Saturne.
Quant aux comètes télescopiques , on en découvre en
moyenne 2 ou 3 chaque année. Dans l'année 1840, en
trois mois consécutifs , Galle a signalé trois nouvelles
— 575 —
comètes; Messier en a trouvé 12, de 1764 à 1798;
Pons en a découvert 27, dans Tintervalle de 1801 à
1807. Ainsi semble se vérifier la comparaison de
Kepler : ut pisces in Oceano,
Le dénombrement exact des comètes observées en
Chine, qu'Edouard Biot a extrait du Recueil de Ma-
tuan-lin, n'a pas une moindre importance. Cette liste
remonte plus haut que l'école Ionienne de Thaïes,
et le règne du roi Alyattes de Lydie. Divisée en deux
sections , elle comprend , dans la première , la posi-
tion de toutes les comètes, depuis l'an 613 avant Jésus-
Christ jusqu'à l'an 1222 de l'ère chrétienne, et,
dans la seconde, les comètes qui ont paru depuis
1222 jusqu'en 16ii, période remplie par la dynastie
des Ming. Je répète ici ce que j'ai fait remarquer
déjà dans le premier volume du Cosmos (p. 454,
note 42) , que , pour les comètes comprises entre le
milieu du ni* siècle et la fin du xiv% les calculs repo-
sent uniquement sur les renseignements des Chinois,
et que la comète de 1456, une des apparitions de celle
de Halley, est la première dont les éléments aient
été déterminés d'après les seules observations euro-
péennes. Ces observations, dues à Regiomontanus ,
furent suivies par d'autres fort exactes, que fit
Apian à Ingolstadt, au mois d'août 1531, lors d'une
réapparition de la comète de Halley. Dans l'inter-
valle, au mois de mai 1500, se place une comète
d'un grand éclat, la grande Asta , que le peuple , en
Italie, appelait Signor Astone, et dont le souvenir se
rattache à des voyages de découverte en Afrique et
— 570 —
au Brésil (88). Guidé par la ressemblance des élé-
ments , Laugier a retrouvé dans les indications
chinoises une septième apparition de la comète de
Halley, qui eut lieu en 1378 (89); de même que
la troisième comète de 1810 , découverte par Galle
le 6 mars (90), paraît identique à celle de 1097. Les
Mexicains avaient aussi l'habitude de rattacher, dans
leurs annales , les événements considérables aux co-
mètes et à d'autres phénomènes célestes. Ce n'est,
chose singulière , que dans le catalogue chinois ,
où elle est rapportée au mois de décembre, que j'ai
pu reconnaître la comète de 1490, dont j'ai trouvé
le signalement dans le manuscrit mexicain de Le
Tellier, et dont j'ai fait joindre un dessin à mes Mo-
numents des peuples indigènes de l'Amérique (91).
Les Mexicains avaient enregistré cette comète 28 ans
avant le premier débarquement de Gortez sur les
côtes de Veracruz ( Ghalchiuhcuecan ).
J'ai traité en détail dans le premier volume du
Cosmos (p. 110-120), d'après l'autorité de Hein-
sius (1744), de Bessel, de Struve et de Sir William
Herschel , tout ce qui a trait à la forme des comètes ,
à leurs variations d'éclat, de couleur et de figure,
aux effluves de leur tête qui se recourbent en arrière
pour former la queue (92). La magnifique comète de
1843(93), que Bowring put voir, semblable à un
petit nuage blanc , à Chihuahua, depuis neuf heures
du matin jusqu'au coucher du soleil , et qui fut ob-
servée en plein midi, à Parme, par Amici, à 1" 23' à
l'Est du Soleil (94), n'est point la seule qui ait été
— 577 -
aperçue dans ces circonstances plus récemment en-
core , la première comète de 1817 , découverte par
Hind prés de la Chèvre, a été visible également
à Londres , dans le voisinage du Soleil , au moment
même de son périhélie.
Afin d'éclaircir ce que nous avons dit plus haut de
la remarque faite par les astronomes chinois, à l'occa-
sion de la comète qui parut au mois de mars 837, sous
la dynastie Thang , j'insère ici la traduction d'un pas-
sage extrait de Ma-tuan-lin , dans lequel est exprimée
la loi qui règle la direction de la queue des comètes :
« En général, pour une comète placée à l'Est du So-
leil, la queue, à partir du noyau, se dirige vers l'Est;
si la comète au contraire paraît à l'Ouest du Soleil,
la queue se tourne vers l'Ouest » (95). Fracaslor et
Apian disent avec plus de précision et de justesse :
« Qu'une ligne menée suivant l'axe de la queue et
prolongée au delà de la tête, va passer par le centre
du Soleil. » Ces mots de Sénèque : « Les queues des
comètes fuient devant les rayons du Soleil » ( Ques-
tions naturelles, liv. y II, chap. 20) sont également ca-
ractéristiques. Parmi les planètes et les comètes ac-
tuellement connues , les temps des révolutions
sidérales, dépendant du demi-grand axe, offrent les
rapports suivants : pour les planètes, les révolutions
les plus courtes sont aux plus longues comme i à
683 , elles sont , parmi les comètes , comme 1 est à
2670. On a comparé , pour établir ce calcul, d'une
part, Mercure qui fait sa révolution en 87 jours
97/100, avec Neptune qui accomplit la sienne en
— 578 —
60126 jours 7/10, d'autre part, la comète d'Encke
dont la période est de 3 années 3/10, avec celle de
1680 , observée par Gottfried Kirch, à Cobourg, par
Halley et par Newton, et qui ne met pas à décrire son
ellipse moins de 8814 ans. J'ai déjà indiqué, d'après un
excellent Mémoire d'Encke {Cosmos, t. I, p. 124, et
t. III, p. 417 419) la distance entre l'étoile fixe la plus
rapprochée de nous, « du Centaure, et l'aphélie de la
comète de 1680. J'ai signalé la lenteur avec laquelle
cette comète se meut dans la portion extrême de son
orbite, parcourant à peine 3 mètres par seconde; j'ai
rappelé la distance, égale à peine à 6 fois la distance
de la Lune , à laquelle la comète de Lexell s'est appro-
chée de la Terre en 1770 , et la distance moins con-
sidérable encore où se sont trouvées, relativement au
Soleil, la comète de 1680 et surtout celle de 1843.
D'après les éléments de la seconde comète de 1819,
dont le volume énorme apparut subitement en Eu-
rope, se dégageant des rayons du Soleil, on conclut
qu'elle passa le 26 juin d tvant le disque solaire (96) ;
malheureusement elle resta inaperçue. La même
chose a dû arriver pour la comète de 1823, qui,
outre la queue ordinaire opposée au Soleil , en
offrait une autre dirigée vers cet astre. Si les queues
des deux comètes étaient longues , elles ont dû
mêler à notre atmosphère quelques portions de leur
substance nébuleuse , comme cela a certainement
eu lieu plus d'une fois. On s'est même demandé
si les singuliers brouillards de 1783 et de 1831
qui couvraient une grande partie du continent eu-
— 579 —
ropéen, n'étaient point la conséquence d'un pareil
accident (97).
Tandis que d'un côté l'on compare la quantité de
chaleur reçue par les comètes de 1680 et de 1843, dans
leur périhélie , à la température focale d'un miroir
ardent de 32 pouces (98), un astronome éminent, au-
quel je suis uni par une vieille amitié (99), Lindenau,
veut que, en raison de leur excessive légèreté spécifi-
que, toutes les comètes sans noyau solide ne reçoivent
aucune chaleur du Soleil , et se maintiennent à la
température des espaces environnants (100). Si l'on
considère les nombreuses et frappantes analogies des
phénomènes que présentent , d'après Melloni et For-
bes , les sources sombres ou brillantes de la chaleur ,
il semble difficile, eu égard à l'état actuel de nos
connaissances physiques et au lien qui les unit entre
elles , de ne pas admettre la présence dans le Soleil
de causes produisant simultanément, par les vibra-
tions de l'éther , c'est-à-dire par des ondulations de
longueurs difierentes , le rayonnement de la lumière
et celui de la chaleur. Pendant longtemps, on a
rappelé dans les écrits astronomiques une prétendue
éclipse de la Lune par une comète, en 1454. Le
premier traducteur du Byzantin George Phranza, le
jésuite Pontanus , avait cru en trouver l'indication
dans un manuscrit , à Munich. Ce passage d'une co-
mète entre la Lune et la Terre est aussi peu véri-
table que celui de la comète de 1770 , dont s'était
porté garant Lichtenberg. La première publication
complète de la Chronique de Phranza eut lieu à
— 580 —
Vienne en 1796 ; on y lit textuellement : Que Fan du
monde 6962, durant une éclipse de lune, une comète
semblable à un nuage léger, et décrivant une orbite
à la manière des corps célestes , apparut et s'appro-
cha du disque lunaire. La date indiquée , qui répond
à Tan de notre ère 1450, est inexacte, puisque
Phranza dit positivement que le phénomène est
postérieur à la prise de Constantinople , qui eut lieu
le 19 mai 1453 ; et en effet il y eut une éclipse de lune
le 12 mai 1454. On peut voir à ce sujet Jacobs, dans
la Correspondance mensuelle de Zach, t. XXIII , 1811,
p. 196-202.
Leverrier a étudié avec soin les rapports de dis-
tance qui ont pu exister entre les satellites de Jupiter
et la comète de Lexell , et les perturbations que cette
remarquable comète a éprouvées par leur influence,
sans réagir sur la durée de leur révolution. Messier,
lorsqu'il la découvrit, le 14 juin 1770, la prit pour
une faible nébulosité dans le Sagittaire ; et huit
jours après, le noyau brillait déjà comme une étoile
de deuxième grandeur. Avant que la comète n'ar-
rivât au périhélie , on ne voyait aucun vestige de
queue ; lorsqu'elle eut dépassé ce point, il s'en dé-
veloppa une qui avait à peine un degré de longueur.
Lexell reconnut que cette comète décrivait une or-
bite elliptique , et opérait sa révolution en 5 années
585/1000, ce qui fut confirmé par Burckardt, dans un
excellent Mémoire publié en 1806. D'après Glausen, la
comète de Lexell s'est approchée de la Terre, le 1" juil-
let 1770, à une distance de 363 rayons terrestres,
— 581 —
c'est-à-dire 231 000 myriamètres , ou 6 fois la dis-
tance de la Terre à la Lune. La raison pour laquelle
cette comète ne fut aperçue ni plus tôt , au mois de
mars 1776, ni plus tard, au mois d'octobre 1781 ,
est établie à l'aide de l'analyse, par Laplace, dans le
iv° tome de la Mécanique céleste. Conformément aux
conjectures de Lexell, Laplace a démontré que ce fait
était dû à des influences perturbatrices , qui se sont
exercées à l'approche de la comète, en 1767 et en
1779, dans les portions de l'espace occupées par le
système de Jupiter. Leverrier a trouvé que, suivant
une première hypothèse sur l'orbite de la comète de
Lexell , cette comète aurait traversé en 1779 les
orbites des satellites de Jupiter, et que d'après une
autre hypothèse, elle serait restée fort loin en dehors
de l'orbite du quatrième satellite (1).
Il est extrêmement difficile de déterminer l'état
moléculaire des différentes parties d'une comète, de
la tête ou du noyau , qui ont si rarement des contours
arrêtés , aussi bien que de la queue. Cela tient à ce
que le noyau même n'occasionne aucune réfraction
des rayons lumineux , et que , d'après l'importante
découverte d'Arago [Cosmos, 1. 1, p. 116 et 456, notes
49-51), il existe dans la lumière des comètes une
portion de lumière déjà polarisée , c'est-à-dire de lu-
mière solaire réfléchie. Bien que les moindres étoiles
restent visibles sans diminution d'éclat , à travers
les émanations brumeuses qui forment la queue des
comètes, et presque à travers le centre du noyau
ou du moins fort près du centre , comme le disait
— 582 —
déjà Sénèque : (per Cometem non aliter quam per
nubem ulteriora cernuntur, QiiœsU Natur,, lib. VII,
cap. 18 ) , cependant Arago a démontré , dans des
expériences dont j'ai été témoin , que ces enveloppes
nébuleuses , malgré leur rareté , sont susceptibles de
réfléchir une lumière étrangère (2) , de sorte que les
comètes n'ont « qu'une diaphanéité imparfaite (3) ,
puisque la lumière ne les traverse pas sans ob-
stacle. » L'intensité d'éclat que présentent quelque-
fois des nébulosités si légères , comme cela est arrivé
pour la comète de 1813 , ou l'aspect stellaire du noyau,
excitent l'étounement , parce qu'on est tenté de tout
rapporter à la réflexion des rayons solaires. Mais ne
se peut-il pas que, outre cette lumière empruntée, les
comètes dégagent elles-mêmes une lumière propre ?
De la queue des comètes, longue de plusieurs
millions de lieues, et épanouie le plus souvent en
éventail, se détachent, par l'émanation ou l'éva-
poration , des particules qui se répandent dans les
espaces. Là elles forment peut-être elles-mêmes ce
milieu résistant qui resserre peu à peu l'orbite de la
comète d'Encke(4); peut-être aussi se mêlent-elles à
la matière cosmique qui ne s'est point condensée en
corps célestes et n'a pas servi à former la lumière
zodiacale. Des parties matérielles disparaissent pres-
que sous nos yeux, et nous soupçonnons à peine la
portion de l'espace où elles s'agrègent de nouveau.
Bien qu'aujourd'hui il paraisse très-probable que
la densité du fluide gazeux répandu à travers les
espaces augmente dans le voisinage du Soleil , on ne
— 583 -
peut cependant pas , pour expliquer F amoindrisse-
ment que le noyau des comètes éprouve , selon Walz,
auprès du Soleil , se représenter ce fluide condensé
comme agissant par la compression sur une enveloppe
vésiculaire (5). Généralement , les contours des ef-
fluves cométaires sont fort indécis, et Ton ne peut
savoir au juste où finit la nébulosité qui réfléchit la
lumière. Il n'en est que plus remarquable et plus in-
structif, quant à la constitution de certaines comètes,
de voir, en quelques occasions, dans la portion anté»
rieure parabolique de Fastre, une netteté de contours
à peine égalée par les groupes de nuages de notre
atmosphère. C'est ce qui est arrivé pour la comète de
Halle, au cap de Bonne-Espérance, vers la fin du mois
de janvier 1836. Sir John Herschel comparait cette
apparence inusitée , qui témoignait de l'intensité de
l'attraction mutuelle exercée par les molécules, à
l'aspect d'un vase d'albâtre vivement éclairé à l'inté-
rieur (ô).
Depuis la publication du premier volume du
Cosmos , il s'est produit dans le monde des comètes
un événement dont on avait à peine auparavant soup-
çonné la possibilité. La comète intérieure et à courte
période de Biéla , qui accomplit son ellipse en 6 ans
1/2 , s'est partagée en deux comètes de même forme,
mais de grandeur différente , chacune d'elles ayant
une tête et une queue. Aussi longtemps qu'on a pu
les observer, elles ne se sont point réunies, et ont
cheminé presque parallèlement. Le 19 décembre
1845, Hind avait déjà remarqué , dans la comète en-
— 584 —
core intacte, une sorte de protubérance vers le Nord ;
mais le 21 , d'après l'observation d'Encke à Berlin , on
n'apercevait aucun indice de séparation. La division
déjà effectuée fut reconnue pour la première fois le
29 du même mois, dans l'Amérique septentrionale, et
en Europe, vers le milieu et à la fin du mois de janvier
1846. Le nouvel astre, le plus petit des deux, précédait
le plus grand dans la direction du Nord. La distance de
l'un à l'autre fut d'abord de 3'; plus tard, le 20 février,
elle était de 6', d'après l'intéressant dessin d'Otto
Struve (7). L'éclat de chacune d'elles était chan-
geant ; de sorte que le second astre augmentant peu
à peu d'intensité , surpassa quelque temps en lumière
la comète principale. Les enveloppes nébuleuses qui
entouraient chaque noyau , n'avaient aucun contour
déterminé : celle qui entourait la plus grande comète
offrait un gonflement peu lumineux vers le Sud-Sud-
Ouest , mais la partie du ciel qui les séparait fut no-
tée à Poulkowa comme libre de toute nébulosité (8)r
Quelques jours plus tard , le lieutenant Maury aper-
çut à Washington , avec un instrument dioptrique de
Munich , de 9 pouces de diamètre , des rayons que
l'ancienne comète envoyait vers la nouvelle, de sorte
que pendant quelque temps il y eut une sorte de
pont jeté de l'une à l'autre^ Le 24 mars , la petite
comète diminuant insensiblement d'éclat n'était déjà
presque plus reconnaissable. On vit encore la plus
grande jusque vers le 16 ou le 20 avril, où elle dis-
parut à son tour. J'ai décrit le développement de ce
phépopiène extraordinaire avec tous les détails que
— 585 —
Ton a pu constater (9). 11 est à regretter que le
fait même de la séparation et l'état qui Ta précédée
aient échappé aux observateurs. La comète formée
aux dépens de la première est-elle devenue invisible
par suite de l'éloignement et de la faiblesse de la lu-
mière, ou s'est-elle dissoute? reparaîtra-t-elle ac-
compagnant la planète principale , et la comète de
Biéla offrira-t-elle encore , lors de ses retours suc-
cessifs, de semblables anomalies?
La naissance d'un nouveau corps planétaire par
voie de disjonction soulève naturellement la ques-
tion de savoir : si dans la multitude des comètes cir-
culant autour du Soleil , il n'en est pas plusieurs qui
aient été engendrées de cette manière , si ce phéno-
mène ne se reproduit pas encore tous les jours , si
enfin, soit par l'inégale vitesse de leur révolution, soit
parce qu'elles ne subissent pas au même degré l'in-
fluence des perturbations , les comètes ainsi décom-
posées ne sont point lancées sur des orbitesdifférentes?
Stephen Alexander, dans un Mémoire déjà cité, a
cherché à expliquer la génération de toutes les co-
mètes intérieures par une hypothèse de ce genre, mais
sans fournir de raisons assez concluantes. Il paraît
que de semblables événements se sont produits dans
l'antiquité ; malheureusement ils n'ont pas été dé-
crits avec assez de détails. Sénèque rapportant d'a-
près un témoin, qu'il déclare lui-même peu digne
de confiance , que la comète à laquelle on attribua
la destruction des villes de Hélice et de Bura, se
divisa en deux parties, ajoute ironiquement : « Pour
— 586 —
quoi personne n'a-t-il jamais vu deux comètes se réunir
en une seule (10) ? » Les astronomes chinois parlent
de trois comètes accouplées qui parurent en Tan 896,
et parcoururent leur orbite de conserve (il).
Dans le grand nombre de comètes dont les élé-
ments ont été calculés jusqu'à ce jour, nous en
connaissons huit dont la révolution s'accomplit en
moins de temps que celle de Neptune. Parmi elles six
sont intérieures, c'est-à-dire que leur aphélie se trouve
en deçà de l'orbite de cette planète ; ce sont : les co-
mètes d'Encke (aphélie 4,09), de Vico (5,02) , de
Brorsen (5,64), de Paye (5,95) , de Biéla (6,19) et de
d'Arrest (6,44). Ces six comètes intérieures ont toutes
leur aphélie compris entre celui d'Hygie (3,15) et
une limite extrême située par delà l'aphélie de Jupiter
(5,20), à une fois et 1/4 la distance de la Terre au
Soleil. Les deux autres comètes qui accomplissent
leur révolution en moins de temps que Neptune, sont
la comète de 74 ans d'Olbers, et la comète de 76 ans
de Halley. Jusqu'en 1819, époque à laquelle Encke
reconnut le preuiier l'existence d'une comète inté-
rieure, les deux comètes d'Olbers et de Halley res-
tèrent , entre toutes les comètes dont on avait calculé
les éléments, celles dont le retour était le plus
prompt. La comète d'Olbers de 1815, et celle de Halley
atteignent, à leur aphélie, une distance qui dé-
passe seulement de 4 rayons de l'orbite terrestre pour
l'une, de 5 rayons et 2/5 pour l'autre, la limite en
deçà de laquelle , depuis la découverte de Neptune ,
elles seraient considérées comme intérieures. Bien
— 587 -
que celte limite soit variable, et que la dénomination
de comète intérieure puisse recevoir des applications
nouvelles , par la découverte de planètes situées au
delà de Neptune , elle a cependant sur la dénomi-
nation d'astre à courte période , cet avantage qu'elle
dépend au moins de quelque chose de déterminé ,
durant chaque phase de nos connaissances. Les
périodes des six comètes intérieures , actuellement
calculées avec précision , ne varient , il est vrai , que
de 3 ans 3/10 à 7 ans 4/10; mais si la 6' comète de
1846, découverte à Naples par Péters , le 26 juin,
dont le demi-grand axe est de 6,32 revient réellement
après un intervalle de 16 années (12) , on peut prévoir
que peu à peu on trouvera des comètes intermédiai-
res, quant à la durée des révolutions , entre celle de
Paye et celle d'Olbers. Il serait donc , dans Tavenir,
difficile de déterminer une ligne de démarcation
entre les comètes à longue et à courte période. Nous
insérons ici la table dans laquelle le docteur Galle a
réuni les éléments des six comètes intérieures.
— 588 —
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— 589 -
Il résulte de l'aperçu qui précède que 32 ans à
peine se sont écoulés entre le moment où la comète
d'Encke a été reconnue être une comète intérieure
et celui où a été découverte la comète également
intérieure de d'Arrest (13). Yvon Villarceau a donné
aussi , dans les Nouvelles astronomiques de Schuma-
cher, les éléments elliptiques de la comète de d'Ar-
rest. Il a présenté, conjointement avec Yalz , quel-
ques hypothèses sur l'identité de cette comète avec
celle de 1678, observée par La Hire et calculée par
Douwes. Deux autres comètes, la 3' de 1819, décou-
verte par Pons et calculée par Encke , et la 4' de la
même année, découverte par Blanpain , et identique,
d'après Clausen, avec la première de 1743, parais-
sent aussi accomplir leur révolution en cinq ou six
ans; mais ces deux astres ne peuvent encore être
cités à côté de ceux dont les éléments, grâce à des
observations répétées et précises, ont été calculés
avec plus de certitude et de perfection.
L'inclinaison des orbites des comètes intérieures
sur l'écliptique est généralement faible et comprise
entre 3* et 13°; celle de la comète de Brorsen est
seule considérable et ne va pas à moins de 31". Toutes
les comètes intérieures découvertes jusqu'à ce jour
ont , comme toutes les planètes et les satellites de
notre système solaire, un mouvement direct de
l'Ouest à l'Est. Sir John Herschel a signalé à l'atten-
tion le phénomène très-particulier d'une marche ré-
trograde parmi les comètes faiblement inclinées sur
l'écliptique (14V Ce mouvement inverse , qui ne se
UI. S8
— 590 —
rencontre que dans une classe spéciale de corps
planétaires, est d'une grande importance, en ce
qu'elle peut éclairer l'opinion régnante sur l'origine
des membres d'un même système, sur la force et sur
la direction de l'impulsion première. Gela nous fait
voir que le rrionde des comètes , bien que les im-
menses distances qui l'en séparent ne puissent le
soustraire à l'influence du corps central, a cependant
son individualité propre, et jouit d'une indépendance
relative. Cette considération a conduit à l'hypothèse
que les comètes sont les plus anciens de tous les corps
planétaires , qu'elles forment pour ainsi dire le type
originel de la matière diffuse qui remplit les espaces
célestes (15). On se demande subsidiairement si, mal-
gré l'immense intervalle qui sépare encore l'étoile la
plus rapprochée dont nous connaissions la parallaxe
et l'aphélie de la comète de 1680 , quelques-uns des
astres cométaires qui font des apparitions au firma-
ment ne traverseraient pas notre système en simples
passagers , voyageant de soleil en soleil.
A la suite du groupe des comètes, je place , comme
se rattachant très-probablement au système solaire ,
la lumière zodiacale ; et en dernier lieu j'arrive a ces
essaims d'astéroïdes météoriques qui tombent de
temps à autre sur la surface de notre globe , et dont
quelques astronomes contestent l'existence , en tant
que corps célestes. Comme , à l'exemple de Chladni,
d'Olbers , de Laplace, d'Arago, de John Herschel et
de Bessel, je tiens positivement les aérolithes pour
des corps étrangers à la terre et d'origine cosmique ,
— .39 1 --
je puis bien , à la fin d'un chapitre consacré aux
astres errants, exprimer la confiance dont je suis
pénétré, que l'opinion contraire disparaîtra un jour,
à l'aide d'observations plus précises sur les aéroli-
tlies, les bolides €t les étoiles filantes, comme a dis-
paru depuis longtemps l'opinion universelle qui, jus-
qu'au xvf siècle, attribuait aux comètes une origine
météorique. Déjà cependant ces astres étaient pour
la corporation des prêtres Chaldéens de Babylone,
pour une grande partie de l'école pythagoricienne et
pour Apollonius le Myndien , des corps célestes , qui
revenaient à des époques déterminées , en décri-
vant de vastes orbites ; au contraire, la grande école
antipythagoricienne d'Aristote , et Épigène , pris à
partie sur ce point par Sénèque, ne voyaient dans les
comètes que des phénomènes météorologiques qui
ne dépassaient point notre atmosphère (16). Heu-
reusement ces fluctuations des esprits entre des hy-
pothèses opposées , qui nous ramènent des espaces
infinis à notre atmosphère terrestre , doivent avec le
temps aboutir à la véritable interprétation des phé-
nomènes naturels.
m. 38*
— 592 —
IV
LUMIERE ZODIACALE.
On a reconnu , dans l'espace de deux siècles et
demi, et à de longs intervalles, l'existence, la place
et )a configuration de beaucoup de mondes distincts,
qui ont successivement ajouté à la richesse de notre
système solaire. D'abord l'attention a été appelée sur
les systèmes subordonnés, analogues au système prin-
cipal, dans lesquels des corps célestes de moindre
dimensions circulent autour de corps plus vastes. On
a observé ensuite les anneaux excentriques qui en-
tourent une planète extérieure, Tune des moins denses
entre toutes les planètes et la plus abondamment
pourvue de satellites ; puis Ton a constaté l'existence
de la lumière zodiacale , lueur douce , bien que
facilement visible à l'œil nu, qui se détache en
forme de pyramide , et on l'a rapportée à la cause
matérielle qui vraisemblablement la produit. Plus
tard on a démêlé les orbites entrelacées des petites
planètes ou astéroïdes, renfermées entre les limites de
deux vastes planètes , et situées en dehors de la zone
zodiacale. Enfin on a étudié le groupe merveilleux
des comètes intérieures, dont l'aphélie reste en deçà
de l'aphélie de Saturne, d'Uranus ou de Neptune. 11
— 593 —
est nécessaire, dans une description des espaces
célestes , de bien faire ressortir la diversité des
mondes dont se compose le système solaire , diver-
sité qui d'ailleurs n'exclut nullement la communauté
d'origine ni la dépendance permanente des forces
motrices.
Quels que soient les doutes qui subsistent encore
sur la cause matérielle de la lumière zodiacale , il
semble, en partant de ce fait mathématiquement
démontré , à savoir que l'atmosphère solaire ne peut
point dépasser les 9/20 de la distance de Mercure au
Soleil, il semble, dis-je, que, dans l'état actuel et mal-
heureusement très-incomplet de nos connaissances ,
l'opinion la plus satisfaisante doive être celle qui se
recommande des noms de Laplace, de Schubert,
d'Arago et de Biot , d'après laquelle la lumière zodia-
cale rayonne d'un anneau nébuleux, aplati , et cir-
culant librement dans l'espace compris entre les
orbites de Vénus et de Mars. La limite extrême de
l'atmosphère , pour le Soleil , comme pour les pla-
nètes, centres de systèmes subordonnés, ne peut pas
s'étendre au delà du point où l'attraction du corps
central fait exactement équilibre à la force cen-
trifuge. Les portions d'atmosphère qui ont dépassé
cette limite ont dû s'échapper parla tangente et don-
ner naissance , en s'agglomérant , à des planètes et
à des satellites, ou, si elles ne se sont point conden-
sées en globes sphériques, continuer leur course
sous la forme d'anneaux vaporeux ou solides. D'après
ces vues , la lumière zodiacale rentre dans la caté-
— 594 —
gorie des corps planétaires, et doit être soumise aux
lois générales de leur formation.
Les progrès faits dans la voie de l'observation par
cette partie délaissée de nos connaissances astrono-
miques se réduisent à si peu de chose , que je ne
puis guère ajouter à ce que j'ai déjà dit , en m' aidant
de mon expérience propre et de l'expérience des
autres, dans le Tableau de la Nature placé en tête
de cet ouvrage (Voyez t. I, p. 477-485 ^ et 154-161;
t. III, p. 381). Vingt-deux ans avant la naissance
de Dominique Cassini , auquel on fait honneur
communément d'avoir le premier signalé la lumière
zodiacale, le chapelain de lord Henri Somerset,
Childrey, avait, dans sa Britannia Baconica , publiée
en 1661 , appelé l'attention des astronomes sur la lu-
mière zodiacale , comme sur un phénomène qui n'a-
vait pas encore été décrit, et dont il avait été témoin
durant plusieurs années , au mois de février et au
commencement de mars. La justice m'oblige aussi à
mentionner une lettre de Rothmann à Tycho, signalée
par Olbers , d'où il résulte que dès la fin du xvi* siècle,
Tycho avait vu la lumière zodiacale , et l'avait prise
pour l'apparition anomale d'une aurore boréale au
printemps. L'intensité lumineuse beaucoup plus
grande que ce phénomène présente en Espagne , sur
les côtes de Valence et dans les plaines de la Nouvelle-
Castille, m'avait engagé déjà, avant que je quittasse
l'Europe, à lobserver assidûment. L'éclat de cette
lumière , je pourrais dire de cette illumination ,
augmenta encore d'une manière surprenante , à me-
— 595 —
sare que je m'approchai de l'équateur, sur le con-
tinent américain ou sur la mer du Sud. A travers
l'atmosphère toujours sèche et transparente de Cu-
mana, dans les plaines d'herbes ou Llanosde Caracas,
sur les plateaux de Quito et sur les lacs du Mexique ,
particulièrement à des hauteurs de huit à douze mille
pieds, où je pouvais séjourner plus longtemps, je
vis la lumière zodiacale surpasser quelquefois en
éclat les plus belles parties de la voie lactée , com-
prises entre la proue du Navire et le Sagittaire , ou
pour citer des régions du ciel visibles dans notre
hémisphère , entre l'Aigle et le Cygne.
En général cependant l'éclat de la lumière zodia-
cale m'a paru ne pas augmenter sensiblement avec la
hauteur du lieu d'où on lobserve , mais dépendre
surtout de changements auxquels le phénomène lui-
même est soumis, et de sa plus ou moins grande in-
tensité lumineuse; c'est du moins ce que m'auto-
risent à croire les observations que j'ai faites sur la
mer du Sud , dans lesquelles j'ai remarqué un reflet
semblable à celui que produit le coucher du soleil.
J'ai soin de dire surtout^ car je ne nie point d'une
manière absolue que l'état des hautes couches de
l'atmosphère, leur plus ou moins grande diapha-
néité, n'aient pu exercer aussi quelque influence,
alors même que , dans les couches inférieures , mes
instruments n'indiquaient aucune variation hygro-
métrique, ou que les changements indiqués sem-
blaient devoir produire un tout autre elïet. C'est
surtout des régions tropicales , où les phénomène»
— 596 —
météorologiques montrent dans leurs variations le
plus d'uniformité et de régularité, qu'il est permis
d'attendre des éclaircissements sur la nature de la
lumière zodiacale. Là l'apparition est perpétuelle,
et, en comparant soigneusement les observations
faites à diverses hauteurs et dans des circon-
stances locales différentes , on peut espérer de dis-
tinguer, à l'aide du calcul des probabilités, ce qui
tient à la nature même de ce phénomène lumineux
et ce qui doit être rapporté à des influences météoro-
logiques.
On a souvent répété qu'en Europe , durant plu-
sieurs années consécutives, on n'avait aperçu pres-
que aucune trace de lumière zodiacale , ou que ce
phénomène s'était borné à une très-faible apparence.
Un affaiblissement proportionnel se faisait-il sentir
en même temps sous la zone équinoxiale ? Pour se
livrer avec succès à une semblable recherche , il ne
faut pas considérer seulement la configuration de
la région lumineuse, soit d'après des mesures di-
rectes , soit en se réglant sur la distance des phéno-
mènes à des étoiles connues ; on doit aussi s'attacher
à l'intensité de la lumière, à son uniformité ou à son
intermittence, lorsque quelquefois elle pâlit et se
ravive alternativement, et aux résultats du polari-
scope. Déjà Arago , dans Y Annuaire du Bureau des
Longitudes pour 1836 (p. 298), a signalé ce résultat
probable des observations comparées de Dominique
Cassini : « Que la supposition des intermittences
de la diaphanéité atmosphérique ne saurait suffire
— 597 —
à Texplication des variations signalées par cet astro-
nome. »
Immédiatement après les premières observations
faites à Paris par Dominique Cassini et par son ami,
Fatio de Duillier, des Français qui voyageaient dans
les Indes, les Pères Noël , de Bèze et Duhalde, se sen-
tirent attirés vers le même objet; mais des Rapports
isolés , dans lesquels les auteurs se contentent de dé-
crire le plaisir que leur a causé ce spectacle nouveau ,
ne peuvent servir de base à une discussion approfon-
die des causes qui produisent les variations de la lu-
mière zodiacale. Ainsi que Pont encore prouvé depuis
les efforts du laborieux Horner, ce ne sont pas des
excursions rapides , et ce que Pon est convenu d'ap-
peler des voyages de circumnavigation qui peuvent
réellement conduire à un pareil but ( voyez la Cor-
respondance mensuelle de Zach, t. XV, p. 357-340).
Ce n'est que par un séjour de plusieurs années
dans quelque contrée tropicale que l'on peut arriver
à résoudre le problème des variations que subissent
la configuration et Pintensité de la lumière zodiacale.
Pour l'objet qui nous occupe en ce moment, et en
général pour toute la Météorologie , il faut ajourner
nos espérances jusqu'au moment où la culture scien-
tifique se sera définitivement répandue sur la zone
équinoxiale de PAmérique espagnole, dans ces con-
trées où il existe , entre 10700 et 12500 pieds au-
dessus du niveau de la mer, des villes grandes et
populeuses, telles que Guzco, la Paz, Potosi. Les
résultats numériques auxquels est parvenu Houzeau,
— 598 -
résultats qui reposent , il est vrai , sur un trop petit
nombre d'observations , sont de nature à faire croire
que le grand axe de la lumière zodiacale ne coïncide
pas avec le plan de l'équateur solaire , pas plus que la
masse vaporeusedeTanneau, dont nousignoronsTétat
moléculaire , ne traverse l'orbite terrestre. (Voyez
les Nouvelles astronomiques de Schumacher, n° 492.)
599
V
ÉTOILES FILANTES , BOLIDES ET PIERRES MÉTÉORIQUES.
Depuis Tannée 1845 où parut, dans le premier
volume du Cosmos, un tableau général des phéno-
mènes célestes, les résultats de l'observation, en ce qui
concerne la chute des aérolithes et les pluies périodi-
ques d'étoiles filantes , désignées en allemand sous le
nom trop expressif de Sternschnuppen , mouchures
d'étoiles , ont été considérablement agrandis et recti-
fiés. Beaucoup de faits ont été soumis à une critique
plus attentive et plus sévère. On a cru devoir surtout ,
pour jeter du jour sur ce phénomène mystérieux,
étudier la loi de convergence , c'est-à-dire déter-
miner les points d'où partent les étoiles filantes , aux
époques où elles reparaissent avec une abondance
inusitée. Des observations récentes, dont les ré-
sultats ont atteint un haut degré de vraisemblance ,
ont accru aussi le nombre de ces époques , parmi
lesquelles on n'avait signalé jusqu'ici que le mois
d'août et le mois de novembre. Les louables efforts
de Brandes, de Benzenberg, d'Olbers et de Bessel ,
plus tard ceux d'Erman, de Boguslawski, de Qué-
telet, de Feldt, de Saigey, d'Edouard Heis et de
Jules Schmidt , ont introduit l'usage de mesures cor-
respondantes plus exactes, et en même temps le
— 600 —
sentiment plus général de la rigueur mathématique
a prévenu le danger d'accommoder des observations
douteuses à des théorèmes préconçus.
Les progrès dans l'étude des météores ignés seront
d'autant plus rapides , que l'on se défendra mieux de
tout parti pris, que Ton séparera soigneusement les
faits des hypothèses, et que l'on mettra chaque phé-
nomène à l'épreuve, sans rejeter pour cela comme
fausses ou douteuses les choses dont on n'a point en-
core l'explication. 11 me paraît surtout important
de ne point confondre avec les relations physiques
les relations numériques et géométriques, géné-
ralement plus faciles à vérifier : telles sont la hau-
teur, la vitesse, l'unité ou la pluralité des points
de départ bien constatés, le nombre moyen, dans
un temps donné, des météores isolés ou périodi-
ques , enfin la grandeur et la forme des appari-
tions, suivant les saisons ou les heures de la nuit
où elles se produisent. Avec le temps d'ailleurs,
l'étude de ces deux classes de circonstances ou de
relations physiques et géométriques doit nécessai-
rement conduire au même but ; à des considéra-
tions vraies sur la génération et la nature de ces
phénomènes.
J'ai déjà fait voir ailleurs que nous ne sommes en
communication avec les espaces célestes et les corps
dont ils sont remplis que par des rayons lumineux et
calorifiques , et par les attractions mystérieuses que
les masses lointaines exercent, en raison de leur masse,
sur notre globe , sur nos mers et sur l'atmosphère
— 601 —
qui nous enveloppe ; les rayons lumineux qui , par-
lant des plus petites étoiles télescopiques dont se
compose une nébuleuse réductible, viennent frapper
notre œil, sont, ainsi que le prouve mathématique-
ment la notion exacte de la vitesse etde l'aberration de
la matière, le plus ancien témoignage de l'existence
de la lumière (17). Une impression lumineuse, partie
des profondeurs de la voûte céleste , nous reporte ,
par une simple association d'idées , dans les profon-
deurs du passé, par delà des myriades de siècles. Les
mêmes impressions, produites parles pluies d'étoiles
filantes , par les bolides d'où sont lancés les aéro-
lithes , et par les autres météores ignés , sont d'une
nature toute différente. Si , à la vérité , les aérolithes
qui tombent sur la surface de la terre ne commen-
cent à s'enflammer que lorsqu'ils sont parvenus dans
l'atmosphère terrestre, ils n'en sont pas moins pour
nous les uniques occasions d'un contact matériel avec
des corps étrangers à notre planète. Nous nous éton-
nons de pouvoir toucher, peser, décomposer chi-
miquement ces masses de terre et de métaux qui
nous viennent des espaces célestes, et appartiennent
à un monde différent du nôtre, d'y trouver des mi-
néraux natifs qui rendent très-vraisemblable cette
supposition de Newton , que les substances apparte-
nant au même groupe de corps célestes, c'est-à-dire
au même système planétaire , sont en grande partie
identiques (18).
Nous devons à la diligence des Chinois , qui n'ont
laissé passer aucun phénomène sans l'enregistrer, la
— ()02 —
connaissance des plus anciens aérolithes dont on ait
déterminé la date précise. Leurs renseignements re-
montent, à cet égard, jusqu'à l'an 644 avant notre
ère, c'est-à-dire jusqu'au temps de Tyrtée et de la
seconde guerre de Messénie. L'immense masse mé-
téorique qui tomba en Thrace, près d'iEgos-Potamos ,
au lieu qui plus tard devait être rendu plus célèbre
encore par la victoire de Lysandre , est postérieure
de 176 ans. Edouard Biot a trouvé dans le Recueil de
Ma-tuan-lin , qui contient des passages empruntés à
la section astronomique des plus anciennes annales
de l'Empire, 16 chutes d'aérolithes , pour l'inter-
valle compris entre le milieu du vir siècle avant
J.-C. et l'an 333 de l'ère chrétienne, tandis que les
écrivains grecs et romains ne citent, dans le même
laps de temps , que 4 phénomènes du même genre.
Il est remarquable que l'École ionienne, d'accord
avec le sentiment des modernes, ait admis déjà l'ori-
gine cosmique des pierres météoriques. L'émotion
que l'imposant phénomène d'.Egos-Potamos pro-
duisit dans toutes les populations helléniques , dut
exercer sur la direction et le développement de la
physique ionienne une influence décisive , dont on
n'a point tenu assez de compte (19). Anaxagore de
Clazomène pouvait avoir 32 ans, lorsque cet évé-
nement arriva. Son opinion est que les étoiles sont
des fragments de rochers détachés de la terre par
la force du mouvement gyratoire , que le ciel tout
entier est formé de pierres. (Voyez Plutarque , des
Opinions des Philosophes, liv. lïl , ch. 13, et Platon,
— 605 —
des Lois, liv. XII , p. 967.) Ces corps pierreux sont
rendus incandescents par Téther ambiant qui est de
natureignée, et font rayonner la lumière que cet éther
leur communique. Anaxagore dit encore , au rapport
de Théophraste , qu'au-dessous de la Lune , entre ce
corps et la Terre , se meuvent d'autres corps obscurs ,
capables de produire des éclipses de Lune. (Voyez
Stobée, Eclogaphysica, lib. I, p. 560 ; Diogène Laerce,
lib. II, cap. 12; Origène , Phi losophumena , cap. 8.)
Diogène d'ApoUonie, qui, sans être le disciple d'Ana-
ximène, appartient vraisemblablement à une époque
intermédiaire entre Anaxagore et Démocrite, exprime
plus clairement encore sa pensée sur la structure du
monde, et paraît avoir reçu une impression plus
vive de l'événement naturel qui arriva en Thrace,
dans la xxvui' Olympiade (20). D'après lui, ainsi
que je l'ai déjà dit ailleurs (Cosmos, t. I, p. 150),
avec les étoiles visibles , se meuvent aussi des masses
d'étoiles invisibles, auxquelles on n'a pu par consé-
quent donner de noms. Ces étoiles tombent quelque-
fois sur la terre et s'éteignent, comme cela est arrivé
pour V étoile de pierre qui tomba près d'^Egos-Potamos
(Stobée, Ecloga physica , lib. I , p. 508) (21).
L'opinion de quelques philosophes naturalistes sur
les météores ignés, tels que les étoiles filantes et les
aérolithes, que Plutarque expose en détail dans la
Vie de Lysandre (chap. 12) est exactement celle de
Diogène de Crète. Il est dit dans ce passage que « les
étoiles filantes ne sont pas des parties du feu éthéré
qui en découlent ou s'en détachent, et s'éteignent
-- 604 —
aussitôt après s'être enflammées, en entrant dans
notre atmosphère; que ce sont plutôt des corps cé-
lestes qui, soustraits au mouvement de rotation gé-
nérale, sont précipités vers la Terre (22). : De Thaïes
et d'Hippon jusqu'à Empédocle, on ne retrouve plus
chez les philosophes de l'École ionienne l'hypothèse
de corps célestes obscurs , ni rien qui rappelle ces
vues cosmographiques de leurs devanciers(23). L'effet
produit par l'aérolithe d'iEgos-Potamos était pour
beaucoup dans les spéculations auxquelles on se livre
relativement à la chute des corps obscurs. Un écri-
vain postérieur, le Pseudo-Plutarque, se borne à dire
(des Opinions des Philosophes, liv. II , chap. 13), que
Thaïes de Milet considérait tous les astres comme des
corps enflammés, bien que terrestres (yewa-/; -mll^z^j^y).
La première École ionienne se proposait pour but de
découvrir l'origine des choses, et cette origine, elle
l'expliquait par le mélange, par des changements
graduels et par la transformation des substances ;
elle croyait à la génération progressive des corps par
la condensation et la raréfaction. Le mouvement de
révolution de la sphère céleste, qui maintient la terre
au point central, est déjà cependant mentionné par
Empédocle, comme une force cosmique réellement
agissante. Dans les premiers tâtonnements qui prépa-
rent les théories physiques de l'éther, l'air igné et le
feu lui-même représentent la force expansive de la cha-
leur ; de même on rattachait à cette haute région de
l'éther l'idée du mouvement gyratoire qui entraînait
tout avec lui, et arrachait violemment les rochers du
— 605 —
sol de la Terre. C'est pour cela qu'Aristote {Météoro-
logiques, lib. I, p. 339, éd. Bekker) nomme Téther
a le corps animé d'un mouvement éternel » comme
l'on dirait le substratum immédiat du mouvement,
et à l'appui de cette définition , il cherche des raisons
étymologiques (2/i). Par le même motif encore ,
Plutarque dit, dans la Vie de Lysandre, que la ces-
sation du mouvement gyratoire détermine la chute
des corps célestes, et, dans un autre passage qui
fait évidemment allusion aux opinions d'Anaxagore
et de Diogène d'Apollonie {de la Face qui paraît
dans le disque de la Lune y p. 923), il afiirme que
la Lune, si son mouvement de rotation venait à
cesser, tomberait à terre, comme une pierre lancée
par une fronde (25). Cette comparaison nous mon-
tre l'idée de la force centripète se faisant jour peu
à peu, pour balancer la force centrifuge , par laquelle
Empédocle expliquait le mouvement apparent de la
sphère céleste. La force centripète est signalée plus
clairement encore par le plus pénétrant de tous les
commentateurs d'Aristote, par Simplicius (p. 491, éd.
Brandis). Simplicius explique l'équilibre des corps cé-
lestes par cette raison que la force du mouvement gy-
ratoire l'emporte sur la force qui les sollicite à tomber.
Tels sont les premiers pressentiments qui se firent jour
au sujet des forces centrales. Un disciple d' Ammonius
Herméas, l'alexandrin Jean Philopon , qui vivait vrai-
semblablement au vr siècle, va plus loin : comme s'il
reconnaissait l'inertie de la matière, il explique par
la révolution des planètes une impulsion primitive
Hl. 39
— 606 —
qu'il rattache ingénieusement à l'idée de la chute des
corps , à la tendance qui attire vers la Terre tous les
corps lourds ou légers (de la Création du Monde, liv. I,
chap. 12). J'ai essayé de montrer comment un grand
phénomène naturel , la chute d'un aérolithe à ^Egos-
Potamos, et l'explication purement cosmique à l'aide
de laquelle on chercha tout d'abord à en rendre
compte , développèrent peu à peu dans l'antiquité
grecque les germes qui , fécondés par le travail des
siècles suivants, et réunis entre eux par un lien ma-
thématique , conduisirent aux lois du mouvement
circulaire que découvrit et formula Huygens.
En abordant les rapports géométriques qui règlent
la chute des étoiles filantes , j'entends les étoiles fi-
lantes périodiques, et non celles qui tombent rares et
isolées , il convient surtout d'examiner les résultats
des observations récentes sur le rayonnement ou les
points de départ des météores, et sur leur vitesse toute
planétaire. Ce double caractère , le rayonnement et
la vitesse , témoignent , avec un haut degré de vrai-
semblance, que les étoiles filantes sont des corps lu-
mineux indépendants du mouvement de rotation de
la Terre, qu'ils viennent du dehors, et passent des
espaces célestes dans notre atmosphère. Lors des
observations faites, dans l'Amérique du Nord, sur la
période de novembre, en 1833, 1834 et 1837, on
avait marqué , comme point de départ , l'étoile y
du Lion. On a reconnu, en 1839, pour la période
d'août, que le point de départ était Algol, dans
Persée, ou un point intermédiaire entre Persée et le
— 607 —
Taureau. Ces centres de rayonnement étaient à peu
près les constellations vers lesquelles la Terre se diri-
geait à la même époque (26) . Saigey , qui a soumis les
observations de 1833 à une analyse très scrupuleuse,
remarque que le rayonnement fixe , partant de la
constellation du Lion , n'a été constaté réellement
qu'après minuit, dans les trois ou quatre heures qui
ont précédé l'aurore , et que des dix-hui t observateurs
placés entre la ville de Mexico et le lac des Hurons ,
dix seulement ont reconnu le point de départ général
indiqué par Denison Olmsted , professeur de mathé-
matiques à New-Haven, dans l'État de Massachu-
setts (27).
L'excellent écrit publié par Edouard Heis, résumé
très-succinct d'observations fort exactes , poursui-
vies pendant dix ans à Aix-la-Chapelle.; sur les
étoiles filantes périodiques , renferme , au sujet
du rayonnement, des résultats d'autant plus pré-
cieux que l'observateur les a discutés avec une rigueur
mathématique. D'après lui, la période de novembre
se distingue en ce que les trajectoires sont beau-
coup plus dispersées que dans la période d'août (28).
Dans chacune de ces deux périodes, l'observateur a
distingué simultanément plusieurs points de départ,
qui n'étaient point toujours situés dans la même
constellation, comme on s'est trop pressé de le croire,
depuis 1833. Durant la période d'août des années
1839, 1841, 1842, 1843, 1844, 1847 et 1848, Heis,
outre le centre principal d' Algol , dans la constellation
de Persée , en a trouvé deux autres dans le Dragon
— 608 —
et dans le pôle Nord (29). « Afin, dit-il, d'obtenir
des résultats exacts sur les points d'où rayonnaient
les trajectoires des étoiles filantes, durant la période
de novembre, pour les années 1839, 1841, 1846
et 1847, j'ai tracé sur un globe céleste de 30 pouces
les trajectoires moyennes appartenant à chacun des
quatre points : Persée , le Lion , Cassiopée et la tête
du Dragon , et j'ai marqué chaque fois la situation
du point d'où partaient le plus grand nombre de
trajectoires. De cet examen il est résulté que, sur
407 étoiles filantes, 171 vinrent d'un point de Per-
sée, voisin de l'étoile yj , dans la tête de Méduse, que
83 partirent du Lion , 35 de la partie de Cassiopée
voisine de l'étoile variable a, 40 de la tête du Dragon
et 78 de points indéterminés. Ainsi , le nombre des
étoiles filantes rayonnant de Persée, était plus que
double du nombre de celles qui avaient leur point
de convergence dans la constellation du Lion (30). »
11 résulte de là que, dans les deux périodes, la
constellation de Persée a joué un très-grand rôle. Un
observateur sagace, qui a consacré huit ou dix ans
à l'étude des phénomènes météorologiques, M. Jules
Schmidt, adjoint à l'Observatoire de Bonn, s'ex-
prime très-nettement sur ce sujet, dans une lettre
qu'il m'a adressée au mois de juillet 1851 : « Si l'on
met à part les grands flux d'étoiles filantes qui se
sont produits au mois de novembre des années 1833
et 1834, ainsi que quelques autres du môme genre,
dans lesquels la constellation du Lion envoyait de
véritables essaims de météores, je suis aujourd'hui
— 609 ^
disposé à considérer le point de convergence placé
dans Persée comme celui qui fournit, non-seulement
au mois d'août, mais durant toute l'année, le plus
grand nombre de météores. En prenant pour base
de nos calculs les résultats des 478 observations de
Heis, je trouve que ce point est situé par 50%3 d'as-
cension droite et 51%5 de déclinaison. Ceci s'ap-
plique aux années 1841-1846. Au mois de no-
vembre 1849, du 7 au 14, j'ai vu 200 étoiles filantes
environ de plus que je n'en avais remarqué à la
même époque depuis 1841. Parmi ces étoiles, quel-
ques-unes seulement venaient du Lion ; le plus
grand nombre de beaucoup appartenait à la constella-
tion de Persée. Il en résulte , à ce qu'il me semble ,
que le brillant phénomène qui se produisit au mois
de novembre des années 1799 et 1811 n'a pas reparu
depuis. Olbers soupçonnait aussi que ces grandes
apparitions ne devaient revenir qu'après une période
de 34 ans. [Cosmos, t. I, p. 141.) Si l'on veut consi-
dérer les apparitions périodiques de ces météores et
les complications de leurs trajectoires, on peut dire
que certains points de rayonnement sont toujours les
mêmes, mais qu'il en existe aussi d'autres qui sont
variables et sporadiques. »
Quanta la question desavoir si les difîérents points
de départ changent avec les années, ce qui, en ad-
mettant l'hypothèse des anneaux fermés , supposerait
un déplacement des anneaux dans lesquels se meuvent
les météores, c'est une question que les observations
faites jusqu'à ce jour ne permettent pas encore de
— 610 —
trancher avec certitude. Une belle série d'observa-
tions poursuivies par Houzeau, depuis 1839 jusqu*en
1842, semblent réfuter l'hypothèse d'un changement
progressif (31). Edouard Heis remarque très-juste-
ment que déjà, dans l'antiquité grecque et latine,
l'attention avait été appelée sur la direction uniforme
que semblaient prendre, dans un temps donné, les
étoiles filantes qui sillonnaient la voûte du ciel (32).
On regardait alors cette direction comme le résultat
d'un vent qui commençait à souffler dans les hautes
régions de l'air, et les navigateurs y voyaient l'an-
nonce d'un courant qui, de ces régions, allait bientôt
descendre dans les couches inférieures.
Ainsi les étoiles filantes périodiques se distinguent
déjà des étoiles sporadiques ou isolées par le parallé-
lisme habituel de leurs trajectoires , qui semblent
rayonner d'un même centre ou de plusieurs centres
déterminés. Mais il existe encore un autre critérium :
c'est le nombre de météores qui, dans l'un et dans
l'autre phénomène, brillent durant le même laps de
temps. La distinction des chutes d'étoiles filantes or-
dinaires et extraordinaires est un problème dont la
solution a été fort débattue. Deux excellents obser-
vateurs, Olbers et Quételet, ont cherché le nombre
moyen des météores qui, aux jours ordinaires, peu-
vent être aperçus en une heure dans le cercle em-
brassé par une même personne ; Olbers en compte 5
ou 6; Quételet porte ce nombre jusqu'à 8 (33). On
ne peut jeter du jour sur une question si importante
pour la connaissance des lois qui règlent le mouve-
— 611 —
ment et la direction des étoiles filantes, sans être a
même de discuter un très-grand nombre d'observa-
tions. Je me suis adressé avec confiance à un obser-
vateur dont j'ai déjà cité le nom, à M. Jules Schmidt,
de Bonn , qui , habitué de longue main à l'exactitude
astronomique, a en outre embrassé avec toute l'ar-
deur qui lui est' propre l'ensemble des phénomènes
météoriques , dont la formation et la chute des aéro-
lithes n'est qu'une phase particulière, la plus rare
de toutes, et non par conséquent la plus impor-
tante. Je joins ici les résultats principaux des com-
munications que je dois à son obligeance (31).
«A la suite d'un grand nombre d'observations,
répétées pendant un laps de temps qui varie de 3 à
8 années , la moyenne des étoiles filantes sporadi-
ques se trouve être de 4 à 5 par heure. Cela est
l'état habituel, en dehors des phénomènes périodi-
ques. Les moyennes sont ainsi réparties pour chaque
mois en particulier :
Janvier Z^U ; février (?) ; mars ^,9 ; avril 2,^ ; mai 3,9 ;
juin 5,3; juillet U,5; août 5,3; septembre 4.7; oc-
tobre 4,5; novembre 5,3; décembre 4,0.
» Quant aux étoiles filantes périodiques, la moyenne
est au moins de 13 à 15 par heure. Pour la période
d'août ou la pluie de Saint-Laurent , en remontant
un peu plus haut , et en allant des étoiles sporadi-
ques aux étoiles périodiques, j'ai trouvé, à l'aide
d'observations poursuivies, comme je l'ai dit déjà,
pendant un intervalle de 3 à 8 années , que les
moyennes croissaient progressivement, ainsi qu'il
suit :
Indication
des jours.
6 août . .
Nombre des météores
par heure.
6 . . . .
Nombre des années
d'observation.
.... 1
7 — . .
11 . . . .
.... 3
8 — . .
15 . . . .
. , . , U
9 — . .
29 . . . .
.... 8
10 — . .
31 . . . .
.... 6
11 — . .
19 . . . .
.... 5
12 — . .
7 . . . .
.... 3
» L'année 1851, considérée isolément, a donné les
résultats suivants, malgré le clair de lune :
7 août 3 météores.
8— 8 —
9 — 16 —
10 — 18 —
11 — 3 —
12 — 1 —
» D'après Edouard Heis, on a observé le 10 août
dans l'espace d'une heure :
En 1839 160 météores.
En ISM ^3 —
En 18^8 50 —
» Dans le flux météorique du mois d'août 18i2, il
tomba en 10 minutes, au moment du maximum ,
o4 étoiles filantes. Tous ces nombres s'appliquent
aux météores visibles dans le champ visuel d'un seul
observateur. Depuis l'année 1838 , les phénomènes
de novembre ont été moins brillants. Cependant, le
12 novembre 1839 , Heis voyait encore de 22 à 35
météores par heure, et le 13 novembre 18/i6, la
moyenne était comprise entre 27 et 33. Ainsi l'abon-
dance des flux périodiques varie suivant les années ;
mais toujours le nombre des météores est beaucoup
plus considérable aux époques déterminées que du-
rant les nuits ordinaires, où l'on ne peut voir par
heure plus de 4 ou 5 étoiles filantes. C'est à partir
du /i janvier, dans le mois de février et dans le mois
de mars , que les météores sont le plus rares (35).
r> Bien que les périodes d'août et de novembre soient
à bon droit les plus célèbres, on en a reconnu plu-
sieurs autres, dans ces derniers temps, depuis que
l'on a observé avec plus d'exactitude le nombre et
la direction des météores :
Janvier
Avril
Mai :
Juillet
Du 1^' au 3. Il reste quelques doutes sur le ré-
sultat de cette observation.
Le 18 ou le 20? Arago avait déjà soupçonné cette
période. Il y a eu en outre de grandes pluies
d'aérolithes le 25 avril 1095, le 22 avril 1800 et
le 20 avril 1803. Voyez le Cosmos , t. I, p. 1x12,
note Ik, et \ Annuaire du Bureau des Longitudes
pour 1836, p. 297.
Le 26?
Depuis le 26 jusqu'au 30, d'après les observations
de Quételet. Le maximum proprement dit eut
lieu entre le 27 et le 29. Le très-regrettable
Edouard Biot a trouvé parmi les plus anciennes
observations chinoises un maximum général ,
compris entre le 18 et le 27 juillet.
— 614 -
Août : Avant l'apparition de la Saint-Laurent, particulière-
ment du 2 au 5. On ne remarque habituellement
du 26 juillet au 1 0 août aucun accroissement ré-
gulier. — Lap/wte de Saint-Laurent. Cette appa-
rition fut signalée pour la première fois par
Musschenbroek, puis par Brendes {Cosmos, i. I,
p. 139et471).Le maximum, observé depuis plu-
sieurs années, tombe décidément le 10 août. D'a-
près une ancienne tradition répandue en Thessalie,
dans les contrées montagneuses qui entourent le
Pélion, le ciel s'entr'ouvre dans la nuit du 6 août,
fête de la Transfiguration, et des flambeaux
apparaissent à travers cette ouverture. Voyez
Herrick, dans V American Journal de Silliman,
t XXXVII, 1839 , p. 337, et Ouételet, dans les
Nouveaux Mémoires de V Académie de Bruxelles,
t. XV, p.. 9.
Octobre : Le 19 et aux environs du 26. Cette apparition a
été décrite par Ouételet , par Boguslawski, dans
le Recueil intitulé : Arheiten der Schles. Gesell-
schaft fur Faterlànd. Cultur, 1843, p. 178,
et par Heis, dans l'écrit cité plus haut, p. 33.
Heis a réuni les observations du 21 octobre 1766 ,
du 18 oct. 1838, du 17 oct. 1841 , du 24 oct. 1845,
des 11-12 oct. 1847 et des 20-26 oct. 1848.
Voyez sur trois apparitions qui se produisirent
au mois d'octobre, dans les années 902, 1202
et 1366 , le 1" tome du Cosmos , p. 143 et 465 ,
note 66. Les nombreuses expériences faites de
1838 à 1848 ont enlevé beaucoup de son impor-
tance à la conjecture de Boguslawski , d'après
laquelle les essaims de météores observés en
Chine du 18 au 27 juillet, et la pluie d'étoiles
filantes du 21 octobre 1366 (ancien style), ne
seraient autres que les phénomènes périodiques
— 615 -^
d'août et de novembre, avancés de nos jours par
l'effet de la précession (36).
Novembre: Du 12 au 1^. Le phénomène se produit aussi, mais
très-rarement, le 8 ou le 10. Le souvenir de la
grande pluie d'étoiles filantes que Bonpland et moi
nous observâmes à Cumana, dans la nuit du 11 au
12 novembre 1799, revenant en mémoire, lors de
l'apparition analogue qui eut lieu en 1833 , dans
la nuit du 12 au 13, furent une des raisons qui
disposèrent à admettre le retour périodique de
ces phénomènes, à certains jours déterminés (37).
Décembre: Du 9 au 12. En 1798 cependant, le phénomène se
manifesta , suivant Brandes , dans la nuit du 6
au 7. En 1838, Herrick le vit aussi à New-Hawen,
dans la nuit du 7 au 8. Heis l'a observé en 1847,
le 8 et le 10.
» Ces pluies périodiques de météores , parmi les-
quelles les cinq dernières sont les plus certaines,
méritent de fixer l'attention des observateurs. Ce ne
sont pas seulement les pluies des différents mois qui
varient entre elles , la richesse et l'éclat de chacun
des phénomènes varie aussi suivant les années.
» La limite supérieure des étoiles filantes ne saurait
être déterminée avec certitude , et Olbers tenait déjà
pour très-douteuses toutes les déterminations de
hauteur qui dépassent 22 myriamètres. La limite in-
férieure , que l'on évaluait précédemment à 3 myria-
mètres (91000 pieds), doit être de beaucoup réduite
[Cosmos, t. I,p. 135). On s'est assuré, par des mesures
prises avec soin , que des étoiles filantes descendent
presque jusqu'aux sommets du Ghimboraço et de
l'Aconcagua, à 8000 mètres au-dessus de la surface
— 616 —
de la mer. D'autre part, Heis remarque qu'une étoile
filante, vue simultanément à Berlin et h Breslau, dans
la nuit du 10 juillet 1837, était , d'après des mesures
exactes, à 16 myriamètres de hauteur, au moment
où elle s'enflamma, et à 31, lorsqu'elle s'éteignit.
D'autres, durant la même nuit, s'évanouirent à une
hauteur de 10 myriamètres. Il résulte d'un travail
fait antérieurement par Brandes, en 1823 , que sur
100 étoiles filantes mesurées avec soin à deux sta-
tions dififérentes, 4 étaient hautes seulement de 1 ou
2 myriamètres ; 15 étaient comprises entre 2 et 4 ;
22 entre 4 et 7 ; 35, près d'un tiers par conséquent,
entre 7 et 11 ; 13 entre 11 et 15; 11 seulement,
c'est-à-dire moins d'un dixième, étaient au-dessus
de 15 myriamètres , mais aussi la hauteur de ces
11 météores variait de 33 à 44 myriamètres. Il ré-
sulte de 4000 observations réunies dans l'espace de
9 années , en vue de déterminer la couleur des étoiles
filantes, que, sur ce nombre, les 2/3 étaient blan-
ches, 1/7 jaunes, 1/17 d'un jaune rouge, et que
1/37 seulement étaient vertes. »
Olbers remarque que durant le flux de météores
qui signala la nuit du 12 au 13 novembre 1838, il
parut à Brème une belle aurore boréale , qui colora
d'un rouge de sang une grande étendue du ciel. Rien
n'altéra néanmoins la couleur blanche des étoiles
filantes qui sillonnèrent cette région , d'où l'on a
conclu que les rayons de l'aurore boréale étaient
beaucoup plus éloignés de la surface de la terre
que les étoiles filantes , au moment où en tombant
— 017 ~
elles devenaient invisibles (Voyez les Nouvelles A slro-
nomiqiies de Schumaclief , ir 372, p. 178). D'après
les observations faites jusqu'à ce jour, la vitesse re--
lative des étoiles filantes est de 3,3 à 7 myriamètres
par seconde , la vitesse de translation de la terre
étant de 3 myriamètres seulement {Cosmos, t. I,
p. 136 et 467 , note 68). Les observations corres-
pondantes faites en 1849 par Jules Schmidt , à Bonn,
et par Heis, à Aix-la-Chapelle, n'ont donné en réa-
lité que 26 kilomètres, comme minimum de la vitesse
d'une étoile filante qui, placée verticalement au-
dessus du Saint-Goar, à une hauteur de 9 myria-
mètres, se dirigea vers le Lachersee. D'après d'au-
tres comparaisons, faites par les mêmes observateurs
et par Houzeau , à Mons , les étoiles filantes se sont
mues avec une vitesse comprise entre 8,5 et 17,5 my-
riamètres par seconde, c'est-à-dire de deux à cinq
fois plus grande que la vitesse planétaire du globe ter-
restre. Ce résultat confirme d'une manière éclatante
l'origine chimique de ces phénomènes et la fixité
d'un ou plusieurs points de divergence ; en d'autres
termes, il prouve que les étoiles filantes périodiques
sont indépendantes de la rotation de la terre , et que
durant plusieurs heures elles partent d'une même
étoile, alors même que cette étoile n'est pas celle
vers laquelle la Terre se dirige au même moment^
En général, les globes enflammés paraissent, autant
qu'on a pu l'observer jusqu'à ce jour, se mouvoir plus
lentement que les étoiles filantes. Si les pierres météo-
riques s'échappent de ces globes, on est embarrassé
-- 618 —
d'expliquer comment elles entrent si peu avant dans
le sol de la terre. La masse pesant 276 livres, qui
tomba à Ensisheim , en Alsace , le 7 novembre 1492,
s'enfonça seulement de 3 pieds, et l'aérolithe de
Braunau, du 14 juillet 1847, ne pénétra pas plus
avant. Je ne connais que deux pierres météoriques
qui , tombant sur un sol peu consistant , aient en-
tamé la terre à une profondeur beaucoup plus con-
sidérable , l'une à 6 , l'autre à 18 pieds : ce sont l'aéro-
lithe de Castrovillari , dans les Abruzzes , à la date
du 9 février 1583, et celui qui fut précipité à Hrads-
china, dans le Comitat d'Agram, le 26 mai 1751.
La question de savoir si les étoiles filantes laissent
tomber quelque matière, a été résolue dans les deux
sens opposés. Les toits de chaume de la commune
de Beimont , dans le département de l'Ain , qui fu-
rent enflammés par un météore , pendant la nuit du
13 novembre 1835, à l'époque par conséquent d'une
apparition périodique d'étoiles filantes, furent in-
cendiés, à ce qu'il paraît , non par la chute d'une
étoile filante , mais par l'explosion d'un globe en-
flammé , qui , d'après le récit de Millet d'Aubenton ,
lança des aérolithes , dont , à la vérité , l'existence
est demeurée problématique. Un incendie analogue,
causé par un globe enflammé, éclata le 22 mars 1846,
vers 3 heures , dans la commune de Saint-Paul ,
près de Bagnères-de-Luchon. D'autre part, la pierre
qui tomba à Angers, le 9 juin 1822 , fut attribuée à
une belle étoile filante que l'on avait vue à Poitiers.
Ce phénomène, décrit avec trop peu de détails, mé-
— 619 —
rite la plus grande attention. L'étoile filante fit ab-
solument l'effet d'une chandelle romaine dans un feu
d'artifice; elle laissa un sillon en droite ligne, très-
étroit en haut , très-large en bas, dont l'éclat brillant
se conserva pendant 10 ou 12 minutes. A 28 lieues
au Nord de Poitiers , un aérolithe tomba avec une
violente détonation.
Toute la matière contenue dans les étoiles filantes
brûle-t-elle toujours dans les couches extérieures de
l'atmosphère , dont la lumière crépusculaire atteste
le pouvoir réfléchissant? Les couleurs si variées,
qui frappent les regards durant le phénomène de la
combustion, supposent de la variété dans la com-
position chimique de ces météores. Leurs formes
sont aussi extrêmement diverses. Les uns tracent
seulement des lignes phosphorescentes, si déliées
et en tel nombre que Forster, dans l'hiver de 1832,
vit comme une lueur légère répandue sur la voûte
céleste (38) ; beaucoup d'autres se meuvent comme
des points lumineux , et ne laissent aucun sillon
derrière elles. Ce fait de la combustion , durant le
temps plus ou moins rapide que mettent à dispa-
raître les queues des étoiles filantes, longues ordi-
nairement de plusieurs milles , est un fait d'autant
plus remarquable, que parfois la queue enflammée
se bifurque et ne parcourt que peu d'espace droit
devant elle. Le bolide dont l'amiral Krusenstern et
ses compagnons virent briller la queue pendant une
heure, dans leur voyage autour du monde, rappelle
cette longue illumination des nuages» d'où s'échappa
— 620 —
le grand aérolithe d'^gos-Potamos , d'après le récit ,
à la vérité un peu suspect, de Daimachus {Cosmos,
t. I, p. 461 et 476).
Il existe des étoiles filantes de grandeurs très-diffé-
rentes ; quelques-unes ont un diamètre égal au dia-
mètre apparent de Jupiter ou de Vénus. Dans la pluie
d'étoiles filantes qui tomba à Toulouse , le 10 avril
1812, et lors de l'apparition d'un globe enflammé,
à Utrecht , le 23 août de la même année , on vit
ces météores poindre , éclater en étoiles et atteindre
la grandeur apparente du disque lunaire. Durant
les grandes pluies d'étoiles, telles que celles de
1799 et de 1833 , beaucoup de bolides ont été incon-
testablement mêlés à des milliers d'étoiles filantes ;
mais cela ne démontre en aucune façon l'identité de
ces deux espèces de météores : l'affinité n'est point
l'identité. Il reste encore beaucoup de points à appro-
fondir sur les relations physiques de ces phénomènes,
sur la part que les étoiles filantes peuvent avoir au dé-
veloppement des aurores boréales, ainsi que l'amiral
Wrangel a cru le reconnaître, en longeant les côtes de
la mer Glaciale (39) , enfin sur les nombreux phéno-
mènes lumineux, qui précédent la formation de quel-
ques bolides, et qu'il ne faut pas se hâter de nier, parce
qu'ils ont été décrits jusqu'à ce jour d'une manière
insuffisante. La plupart des bolides ne paraissent
point accompagnés d'étoiles filantes, et rien ne fait
supposer qu'ils reviennent périodiquement. Ce que
nous savons des points déterminés, d'où rayonnent les
étoiles filantes , ne peut aussi jusqu'à ce jour s'appli-
,— 621 —
quer qu'avec beaucoup de circonspection aux bolides.
11 peut arriver, bien que cela se présente rarement,
que des pierres météoriques tombent par un ciel par-
faitement pur, et avec mi craquement effroyable,
sans être annoncées par aucun nuage météorique,
et sans dégager de lumière, comme cela a eu lieu
le 16 septembre 1843, à Klein-Wenden, près de
Mulhouse; ou bien, et cela est déjà plus fréquent,
elles sont lancées du milieu d'un nuage noir qui se
forme tout à coup , toujours sans lumière et avec
accompagnement de phénomènes acoustiques; ou
enfin , le cas le plus habituel est qu'elles sont en com-
munication avec des bolides enflammés. Cette com-
munication est constatée par des exemples qui ne
peuvent être révoqués en doute, et sur lesquels nous
possédons des détails très-complets. A Barbotan , dans
le département des Landes, des aérolithes tombèrent,
le 24 juillet 1790 , d'un petit nuage blanc météorique,
en même temps qu'apparaissait un bolide rouge (40).
Il en fut de même des pierres qui tombèrent à Benarès,
dans l'Hindostan , le 13 décembre 1798 , et à l'Aigle,
dans le département de l'Orne, le 26 avril 1803. Ce
dernier phénomène, celui de tous qui, grâce à Biot,
a été le mieux examiné et le mieux décrit , a enfin ,
29 siècles après la chute de la grande pierre d'^gos-
Potamos, et 300 ans après qu'un Religieux eut été tué
à Créma par un aérolithe, mis un terme au scepti-
cisme endémique des Académies (41). Lors du phéno-
mène de 1803, un grand bolide, se mouvant du Sud-
Est au Nord-Ouest, fut vu à Alençon , à Falaise et à
ni. kO
— 622 —
Gaen , par un ciel très-pur, vers une heure de l'après-
midi. Quelques moments après, on entendit à l'Aigle,
durant cinq à zix minutes, une explosion partant
d'un petit nuage noir presque immobile, qui fut sui-
vie de trois ou quatre coups de canon et d'un bruit
que Ion eût pu croire produit par des décharges de
mousqueterie, auxquelles se mêlait le son d'un
grand nombre de tambours. Chaque détonation déta-
chait du nuage noir une partie des vapeurs qui le
formaient. On ne remarqua en cet endroit aucun phé-
nomène lumineux. Beaucoup de pierres météoriques,
dont la plus grande ne pesait pas plus de 17 livres et
demie, tombèrent à la fois sur une surface elliptique,
dont le grand axe, dirigé du Sud-Est au Nord-Ouest,
avait 11 kilomètres de longueur. Ces pierres étaient
brûlantes sans être enflammées, elles fumaient, et,
chose singulière ! elles étaient plus faciles à briser
quelques jours après leur chute que plus tard(42). J'ai
insisté à dessein sur ce phénomène , afin de pouvoir
le comparer avec un autre du 13 septembre 1768. A
quatre heures et demie de l'après-midi, on vit dans
ie village de Luce , situé à 2 lieues de Chartres,
vers l'Ouest, un nuage sombre, dans lequel on en-
tendit comme une canonnade, suivie d'un sifflement
produit par la chute d'une pierre noire qui décrivit
une ligne courbe. Cette pierre , qui s'enfonça à moitié
dans le sol de la terre, pesait 7 livres et demie, et
était tellement brûlante que l'on ne pouvait la tou-
cher. Elle fut très-incomplétement analysée par La-
voisier, par Fougerouxet par Cadet. On n'aperçut
— 623 —
pendant toute la durée du phénomène aucun dégage-
ment de lumière.
Aussitôt que l'on commença à observer les pluies
périodiques d'étoiles filantes , et à épier leur appa-
rition, dans les nuits où elles étaient attendues, on
remarqua que le nombre des météores augmentait ,
à mesure que la nuit avançait , et qu'ils tombaient
en plus grande abondance entre deux et cinq heures
du matin. Déjà , lors du grand phénomène que
nous observâmes à Cumana, dans la nuit du 11 au
12 novembre 1799, ce fut entre deux heures et demie
et quatre heures que M. Bonpland vit affluer le
plus grand nombre de météores. Un observateur qui
a rendu des services signalés à cette partie de la
science, Coulvier-Gravier, a présenté à l'Institut de
France, en 1845, un Mémoire important sur la
Variation horaire des Étoiles filantes. Il est difficile de
deviner quelle influence peut exercer sur ces phéno-
mènes une heure plus avancée de la nuit. S'il était
établi que, sous les difl*érents méridiens, les étoiles
filantes commencent surtout à être visibles à une
heure déterminée, il faudrait, tout en maintenant
l'origine cosmique de ces phénomènes, admettre cette
conjecture, d'ailleurs peu vraisemblable, que cer-
taines heures de la nuit, ou plutôt du malin, sont plus
favorables à l'inflammation des étoiles filantes, et que
celles qui tombent avant ce moment restent le plus
souvent invisibles. Mais, pour avoir le droit de tirer
des conclusions certaines, il faut continuer pendant
longtemps encore à recueillir des observations.
— 6-24 —
Je crois avoir exposé assez complètement , dans
le premier volume du Cosmos (p. 143-148), eu égard
à l'état de la science en 1845 , les caractères prin-
cipaux des divers bolides qui tombent du haut
des airs , leur composition chimique et leur tissu
granulaire , étudié surtout par Gustave Rose. Les
travaux successifs de Hov^ard, Klaprolh, Thénard,
Vauquelin, Proust, Berzélius, Stromeyer, Laugier,
Dufresnoy, Gustave et Henri Rose, Boussingault ,
Rammelsberg et Shépard , ont fourni déjà de ri-
ches matériaux , bien que vraisemblablement les
deux tiers des pierres météoriques soient soustraites
à nos regards dans les profondeurs de la terre (43).
S'il est manifeste que sous toutes les zones, dans
le Groenland , à Mexico et dans l'Amérique du
Sud , en Europe , dans la Sibérie et dans l'Hin-
dostan , les aérolithes ont tous une certaine res-
semblance de physionomie , on s'aperçoit , en y re-
gardant de plus près, qu'ils présentent aussi des
oppositions très-marquées. Un grand nombre de
pierres météoriques contiennent 0,96 de fer; on en
trouve à peine 0,02 dans les aérolithes de Sienne.
Presque tous ont une surface mince , noire, brillante
et quelquefois veinée ; cette croûte manque complète-
ment à la pierre de Chantonnay. La pesanteur spéci-
fique de quelques aérolithes s'élève jusqu'à 4,28 ; elle
n'est que de 1,94 dans l'aèrolithe carbonisé et com-
posé de petites lames friables , qui a été trouvé à
Alais. Quelques-uns, comme celui de Juvenas, sont
formés d'un tissu semblable à de la dolérite, dans
— 025 —
lequel on distingue deFolivine, de l'augite et de l'a-
nortite , déjà séparées en cristaux ; d'autres, tels que
la niasse découverte en Sibérie parPallas, ne présen-
tent que du fer mêlé de nickel, et de l'olivine ; d'autres
enfin, autant que l'on peut distinguer les élémenls
qui les composent, sont des combinaisons de horn-
blende et d'albite , comme celui de Château-Renard ,
ou de hornblende et de labrador, comme ceux de
Blansko et de Chantonnay.
Si l'on embrasse dans leur ensemble les travaux
d'un chimiste très-distingué , le professeur Ram-
melsberg , qui récemment s'est voué sans interrup-
tion , et avec autant de bonheur que d'activité , à
l'analyse des aérolithes et à la recherche des corps
simples qui les composent , on' obtient ce résultat :
a que la distinction des masses tombées de l'atmo-
sphère en fers météoriques et en pierres météoriques,
ne doit pas être prise à la rigueur. On trouve , bien
que rarement, des fers météoriques avec un mélange
de silicates. Ainsi la masse de fer météorique de Pal-
las qui pèse 1270 livres russes, d'après la nouvelle
expérience de Hess , renferme des grains d'olivine ;
et réciproquement beaucoup de pierres météoriques
sont mêlées de fer métallique. »
« 1^ Toutes les masses de fer météorique , celles
dont la chute a pu être observée par des témoins ocu-
laires, comme à Hradschina, dans le Comitat d'Agram,
le 26 mai 1751 , et à Braunau , le 1/j juillet 1847, et
celles, en beaucoup plus grand nombre, qui gisent de-
puis longtemps à la surface de la terre, possèdent eu
— 626 — .
général à très-peu près les mêmes propriétés physiques
et chimiques. Presque toujours elles contiennent des
parcelles plus ou moins grosses de sulfure de fer, qui
pourtant ne paraît point être de la pyrite de fer ou de
la pyrite magnétique, mais du protosulfure defer(li).
La masse principale n'est point non plus du fer mé-
tallique pur; elle est mêlée d'un dixième de nickel,
en moyenne, un peu plus ou un peu moins, et ce
métal s'y retrouve d'une manière si constante, qu'il
est un excellent critérium pour reconnaître l'origine
météorique de la masse entière. C'est là d'ailleurs un
simple mélange de deux métaux isomorphiques; il
n'y a point combinaison dans des proportions déter-
minées. On trouve aussi en moindre quantité le co-
balt, le manganèse, Me magnésium, l'étain, le cuivre
et le carbone. Cette dernière substance est en partie
mêlée à la masse par une action mécanique, comme
du graphite de difficile combustion, en partie com-
binée chimiquement avec le fer, de manière a former
un ensemble analogue à une grande quantité de fer
en barres. Ainsi , toute masse de fer météorique con-
tient une combinaison particulière de phosphore ,
de cuivre et de nickel, combinaison qui, lorsqu'on
vient à dissoudre le fer par l'action de l'acide hydro-
chlorique, subsiste sous la forme de cristaux formés
d'aiguilles et de lamelles microscopiques, blanches
comme l'argent. »
«f 2** On a coutume de diviser les pierres météo-
riques proprement dites en deux classes, d'après
leur aspect extérieur. Les unes contienneikt dans leur
— 627 —
masse , en apparence homogène , des grains et des
paillettes de fer météorique, attirables a l'aimant,
et qui présentent absolument les mêmes caractères
que les aérolithes de la même substance. A cette
classe appartiennent les pierres de Blansko , de Lissa,
de l'Aigle, d Ensisheim, deChantonnay, de Kleinwen-
den prèsde Nordhausen, d'Erxleben, de Château-
Renard et d'Utrecht. La seconde classe est pure de
tout alliage métallique et se présente plutôt sous
l'aspect d'un mélange cristallin de diverses substances
minérales : telles sont par exemple les pierres de
Juvenas, de Lontalar et de Stannern. »
« Après les premières analyses chimiques des
pierres météoriques, faites par Howard, Klaproth et
Vauquelin , on fut longtemps 'Sans songer que ces
corps pouvaient être formés par l'assemblage de com-
binaisons dijDférentes. On se bornait à chercher en
général les éléments qui les composaient, à extraire
à l'aide d'un aimant le fer métallique qu'elles pou-
vaient contenir. Lorsque Mohs eut appelé l'attention
sur l'analogie que présentaient quelques aérolithes
avec certaines pierres telluriques, Nordenskjôld entre-
prit de prouver que l'aérolithe de Lantalar , en Fin-
lande, était un composé d'olivine, de leucite et de fer
magnétique ; mais c'est à Gustave Rose que l'on doit
d'avoir démontré par ses belles observations, que
la pierre de Juvenas est formée de pyrite magné-
tique, d'augite et d'un feldspath très-semblable au la-
brador. Guidé par ces résultats, et appliquant, comme
Gustave Rose , l'analyse chimique , Berzélius, dans un
— 628 —
travail plus étendu , inséré aux KongL Vetenskaps-
Jcademiens Hendlingar for 183/i, rechercha la com-
position minérale de diverses combinaisons que pré-
sentent les aérolithes de Blansko , de Chantonnay et
d'Alais. Depuis , beaucoup de savants ont suivi la
route heureusement frayée par Berzélius. »
« Dans la première classe des pierres météoriques
proprement dites , qui est aussi la plus nombreuse ,
dans celle qui contient des parties de fer métallique,
ce métal existe , tantôt en parcelles semées çà et là ,
tantôt en masses plus considérables, qui offrent
quelquefois l'aspect d'un squelette de fer, et forment
up.e transition entre les aérolithes purs de tout
mélange métallique et les masses de fer météorique,
dans lesquelles, ainsi qu'on le voit dans la masse de
Pallas , les autres éléments disparaissent. Les pierres
météoriques de la seconde classe sont, par l'effet de la
présence de l'olivine. riches en magnésie; l'olivineest
l'élément qui est décomposé, lorsque ces pierres sont
traitées par les acides. Comme l'olivine ordinaire,
l'olivine météorique est un silicate de magnésie et de
protoxyde de fer. La partie qui résiste à l'action des
acides est un mélange de substances feldspathiques
et augitiques dont on ne peut déterminer la nature
qu'en calculant les éléments qui le composent, et
qui sont : le labrador, l'hornblende, l'augite etl'oli-
goclase. »
« La seconde classe , beaucoup moins nombreuse ,
a été aussi moins étudiée. Parmi les aérolithes qui la
composent, les uns contiennent du fer magnétique,
— 629 —
de l'olivine et un peu de substances feldspathiques
et augitiques; les autres sont formés uniquement de
ces deux derniers minéraux simples , et le feldspath
y est représenté par Tanortite (45). Le chromate de
fer, produit par la combinaison du protoxyde de fer
et de l'acide chromique, se trouve, en moindre
quantité, dans presque toutes les pierres météori-
ques. L'acide phosphorique et l'acide titanique , que
Rammelsberg a découverts dans la pierre si remar-
quable de Juvenas , peuvent faire soupçonner la pré-
sence de l'apatite et de la titanite. »
« Les corps simples, dont on a jusqu'ici reconnu
l'existence dans les pierres météoriques, sont les sui-
vants : l'oxygène, le soufre, le phosphore, le carbone,
la silice, l'alumine, la magnéslCj^la chaux, la potasse,
la soude, le fer, le nickel, le cobalt, le chrome,
le manganèse, le cuivre, l'étain et le titane ; somme
totale : dix-huit (46). Les éléments les plus immédiats
sont , — parmi les métaux : le fer mêlé de nickel ,
un mélange de phosphore avec du fer et du nickel, du
sulfure de fer et des pyrites magnétiques ; — parmi
les substances oxydées : le fer magnétique et le
chromate de fer ; — parmi les silicates : l'olivine ,
l'anortite , le labrador et l'augite. »
Il me resterait, pour rassembler ici le plus grand
nombre possible de faits importants, dûment constatés
par des observations positives , à exposer les diverses
analogies que certaines pierres météoriques pré-
sentent, en tant que roches, avec les anciens agglo-
mérats, tels que les dolérites, lesdiorites et les mêla-
— 630 —
phyres, avec les basaltes et avec les laves d'origine
plus moderne. Ces analogies sont d'autant plus frap-
pantes que jusqu'ici les minéraux telluriques n'ont
jamais offert cet alliage métallique de nickel et de fer
que l'on retrouve constamment dans certains aéro-
lithes. Mais le chimiste distingué dont j'ai mis à profit ,
dans ces pages, les communications obligeantes,
a composé sur cet objet un Mémoire spécial , dont
les résultats seront mieux à leur place dans la partie
géologique du Cosmos (47).
— 631 —
CONCLUSION.
En achevant la partie uranologique de la Descrip-
tion physique du monde, et en jetant un dernier
regard sur l'œuvre que j'ai entreprise , je n'ose
dire accomplie, je crois devoir rappeler qu'un aussi
diflicile travail n'était possible que sous les condi-
tions déterminées dans l'introduction du troisième
volume du Cosmos, 11 s'agissait, en effet, de tracer
le tableau des espaces célestes et des corps qui les
remplissent, soit que ces corps aient été arrondis
en sphéroïdes , soit qu'ils restent à l'état de matière
diffuse. Par là cet ouvrage se distingue essentielle-
ment des Traités d'Astronomie que possèdent au-
jourd'hui toutes les littératures, et dont la matière
est plus variée. L'astronomie, le triomphe, en tant
que science, des théories mathématiques, est fondée
sur la base solide de la gravitation et sur le per-
fectionnement de la haute analyse ; elle traite des
mouvements réels ou apparents, mesurés dans le
temps et dans l'espace ; de la position des corps
célestes, dans les continuels changements de leurs
relations respectives ; de la mobilité des formes .
— 632 —
comme dans les comètes à queue; des variations de
la lumière, qui naît et s'éteint dans les lointains
soleils. La quantité de matière répandue dans l'uni-
vers demeure constamment la même ; mais d'après
ce que nous savons jusqu'à ce jour des lois phy-
siques qui régnent sur la sphère terrestre , nous
voyons la matière passer par des combinaisons qu'on
ne peut ni nombrer ni définir, et s'agiter, sans jamais
se satisfaire , dans le cercle perpétuel de ses trans-
formations. Ce jeu incessant des forces de la matière
a pour cause l'hétérogénéité au moins apparente de
ses molécules, qui, entretenant le mouvement dans
des portions de l'espace que leur petitesse dérobe à
toute mesure , complique à l'infini tous les phéno-
mènes terrestres, v
Les problèmes astronomiques sont d'une nature
plus simple. Libre jusqu'à ce jour de ces compli-
cations, la mécanique céleste, appliquée à considé-
rer la quantité de matière pondérable qui entre dans
la masse des corps, et les ondulations d'où naissent
la chaleur et la lumière, est, en raison même de
cette simplicité qui ramène tout au mouvement,
accessible dans toutes ses parties au calcul mathéma-
tique. Cet avantage donne aux Traités d'Astronomie
théorique un grand charme qui n'appartient qu'à
eux. On y voit se réfléchir les résultats que l'activité
intellectuelle des derniers siècles a obtenus par la
méthode analytique : comment les formes des corps
et leurs orbites ont été déterminées; comment se
concilient avec les mouvements des planètes les fai-
blés oscillations qui jamais n'en troublent l'équilibre ;
comment la structure intérieure du système plané-
taire et les perturbations qu'il subit, deviennent,
en se balançant mutuellement , une garantie de pré-
servation et de durée.
Ni la recherche des méthodes à l'aide desquelles
on a embrassé l'ensemble du monde, ni la com-
plication des phénomènes célestes , ne rentrent dans
le plan de cet ouvrage. L'objet d'une descrip-
tion physique du monde est de raconter ce qui
remplit l'espace et répand le mouvement de la vie
organique dans les deux sphères du Ciel et de la
Terre , de s'arrêter aux lois naturelles dont le se-
cret a été dévoilé, et de les présenter comme des
faits acquis, comme les conséquences immédiates de
l'induction fondée sur l'expérience. Il ne fallait pas,
si l'on voulait retenir un ouvrage tel que le Cosmos
dans ses limites naturelles , et ne point le laisser s'é-
tendre outre mesure, essayer d'établir entre les phé-
nomènes un lien théorique. Décidé à ne point excéder
ces bornes , j'ai dû apporter d'autant plus de soin ,
dans la partie astronomique de ce livre , à présenter
sous leur vrai jour les faits particuliers et à les ranger
suivant l'ordre qui convient. Après avoir considéré
les espaces célestes, leur température et le milieu
résistant dont ils sont remplis , je suis redescendu
aux lois de la vision naturelle et télescopique , aux
limites de la visibilité , à la mesure malheureu-
sement incomplète de l'intensité lumineuse , aux
moyens nouveaux que fournit l'optique pour dis-
_ 634 —
cerner la lumière directe de la lumière réfléchie.
Puis viennent: le Ciel des étoiles fixes; le nombre
et la distribution probable des Soleils brillant par
eux-mêmes, autant du moins que l'on a pu déter-
miner leur position ; les étoiles variables qui re-
viennent après des périodes dont on a calculé exacte-
ment la durée; le mouvement particulier aux étoiles
fixes; rhypothèse des corps obscurs et leur influence
sur le mouvement des étoiles doubles ; enfin les né-
buleuses que le télescope n'a pu réduire en essaims
d'étoiles pressées.
Passer de la partie sidérale de l'uranologie, ou du
ciel des étoiles fixes à notre système solaire , ce n'est
que passer du général au particulier. Dans la classe
des étoiles doublée , des corps doués d'une lumière
propre se meuvent autour d'un centre de gravité
commun ; dans notre système solaire, composé d'élé-
ments très-hétérogènes , des corps obscurs gravitent
autour d'un corps lumineux , ou plutôt même autour
d'un centre de gravité commun, qui se trouve tantôt
en dedans, tantôt en dehors du corps central. Les
divers membres de notre système sont de nature plus
différente que pendant plusieurs siècles on ne fut au-
torisé à le croire. Le domaine solaire se compose de
planètes secondaires et de planètes principales, parmi
lesquelles un groupe se distingue par ses orbites
entrelacées, de comètes en nombre indéterminé, de
la lumière zodiacale et très-vraisemblablement aussi
d'astéorides météoriques qui reparaissent périodi-
quement.
— 635 —
11 nous reste encore à énoncer textuellement , en
raison des rapports directs qu'elles ont avec l'objet
de ce livre , les trois grandes lois des mouvements
planétaires, découvertes par Kepler. Première loi :
Les courbes décrites parles planètes sont des ellipses
dont le Soleil occupe un foyer. — Deuxième loi:
Chaque corps planétaire se meut autour du Soleil
dans une orbite plane, où le rayon vecteur décrit des
aires égales en des temps égaux. — Troisième loi :
Les carrés des temps employés parles planètes à faire
leur révolution autour du Soleil sont entre eux comme
les cubes des distances moyennes. La seconde loi est
quelquefois appelée la première parce qu'elle est la
preuiière qui ait été découverte (48). Les deux pre-
mières lois recevraient leur appliciition, même quand
il n'existerait qu'une seule planète. La troisième et
la plus importante, qui ne fut découverte que dix-
neuf ans plus tard, suppose nécessairement le mou-
vement de deux corps planétaires. Le manuscrit de
VHarmonice Mundi, publié en 1619, était achevé
dès le 27 mai 1618.
Si les lois des mouvements planétaires furent dé-
couvertes au commencement du xvii^ siècle, si Newton
révéla le premier la force dont les lois de Kepler
étaient la conséquence immédiate, à la fm du
xvnr siècle revient l'honneur d'avoir démontré la
stabilité du système planétaire, grâce aux ressources
nouvelles que nous fournissait pour la recherche
des vérités astronomiques le perfectionnement du
calcul infinitésimal. Les principaux éléments de
— 636 -^
cette stabilité sont : l'invariabilité du grand axe
des orbites planétaires, démontrée par Laplace, par
Lagrange et par Poisson ; les lentes et périodiques
variations que subit , dans d'étroites limites , Fex-
centricité de deux planètes puissantes et très-éloi-
gnées du Soleil, Jupiter et Saturne; la distribution
des masses , réparties de telle façon que la masse de
Jupiter n'excède pas 1/1048 de celle du corps central
auquel sont subordonnés tous les autres; enfin, cet
arrangement en vertu duquel toutes les planètes,
conformément à leur origine et au plan primordial
de la création , accomplissent, dans une direction
unique , leur double mouvement de rotation et de
révolution , décrivent des orbites dont F excentricité
peu considérable e^t soumise à de faibles change-
ments, se meuvent dans des plans à peu près égale-
ment inclinés, et accomplissent leur révolution en des
temps qui n'ont point entre eux de commune mesure.
Ces motifs de stabilité qui sont la sauvegarde des
planètes dépendent d'une action réciproque, s'exer-
cant à l'intérieur d'un cercle circonscrit. Si cette con-
dition venait à être troublée par l'arrivée d'un corps
céleste venu du dehors et étranger à notre système,
soit qu'il déterminât un choc , soit qu'il introduisît
de nouvelles forces attractives , ce trouble pourrait
être fatal à l'ensemble des choses actuellement exis-
tantes, jusqu'à ce qu'enfin, après un long conflit, il
s'établît un nouvel équilibre (i9). Mais l'arrivée pos-
sible d'une comète, décrivant à travers des espaces
immenses son orbite hyperbolique, ne saurait, bien
— 637 —
que l'excessive vitesse puisse suppléer à rinsuflisance
de la masse, inquiéter qu'une imagination rebelle
aux considérations consolantes du calcul des proba-
bilités. Les nuages voyageurs des comètes à courte
période n'offrent pas plus de dangers pour l'avenir de
notre système solaire que les grandes inclinaisons
des orbites, décrites par les petites planètes com-
prises entre Mars et Jupiter. Ce qui ne peut être
signalé que comme une possibilité doit rester en
dehorè d'une Description physique du monde ; il
n'est point permis à la science d'aller se perdre
dans les régions nébuleuses des rêveries cosmolo-
giques.
ITT. i\\.
m.
xNOTES.
l
On a supprimé le chiffre des centaines dans l'indication des
notes ; cette suppression ^occasionnera point d'incertitude, attendu
qu'au numéro de renvoi est toujours joint celui de la page corres-
pondante.
NOTES.
(1) [page 365]. Cosmos, t. I, p. 88-92, 96 et 170; t. II,
p. 396; t. m, p. /43-ii8, 152, 170 et 183.
(2) [page 365]. Cosmos, t. III, p. 219-221.
(3) [page 367]. Cosmos, t. I, p. 88.
(Zi) [page 368]. Cosmos, t. III, p. 96^152, 310 (note 51) et
341 (note 37).
(5) [page 369]. En 1471, avant l'expédition de Alvaro Be-
cerra, les Portugais s'avanc( rent jusqu'au delà de l'équateur.
Voyez Humboldt , Examen critique de Vhistoire de la Géogra-
phie du nouveau Continent, t. I, p. 290-292. Mais déjà, sous
les Lagides, les anciens, à la faveur de la mousson du Sud-
Ouest , nommée alors Hippalus , s'étaient frayé une route
commerciale à traviTs l'océan Indien, depuis Ocelis, sur le
détroit de Bab-el-Mandeb, jusqu'au grand entrepôt de Muziris,
sur la côte de Malabar, et à Ceylan {Cosmos, t. II, p. 203).
Dans tous ces voyages maritimes, on vit, mais sans les décrire,
les nuées Magellaniques.
(6) [page 369]. Sir John Herschel, Observations at the Cape
ofGood Hope, § 132.
(7) [page 370]. Cosmos, t. H, p. 381 et 602. Galilée, qui
cherche à expliquer l'intervalle des deux découvertes, du 29 dé-
— 612 --
cembre 1609 au 7 Janvier 1610, par la ditrérence des calendriers,
prétend avoir vu les satellites de Jupiter un jour avant Simon
Marins ; il s'emporte avec sa fougue habituelle contre ce qu'il
appelle « Bugia del impostore eretico Guntzenhusano » et va
jusqu'à dire : « che molto probabilmente il eretico Simon Mario,
non ha osservato giammai 1 Pianetî Medicei. » Voyez Opère di
Galileo Ga/i7ei,Padova, ildU, t. II, p. 235-237, et Nelli, rita
e Commercio letterario di Galilei, 1793, t. I, p- 2ZiO-2^6.
VEretico s'était cependant exprimé lui-même avec beaucoup
de simplicité et de modestie sur la portée de sa découverte.
J'affirme seulement , dit-il , dans son introduction au Mundus
Jovialia : « Haec Sidéra (Brandenburgica) a nulio mortalium mihi
uUa ratione commonstrata, sed propria indagine sub ipsissimum
fere tempus vel aliquanto citius quo Galilaeus in Italia eaprimum
vidit a me in Germania adinventa et observata fuisse. Merito
igitur Galilaeo tribuitur et manet laus primae inventionis horum
siderum apud Italos. An autem inter meos Germanos quispiam
ante me ea invenerit ef Viderit, hactenus intelligere non potui. »
(8) [page 370]. Mundus Jovialis anno 1609 detectus ope
perspicilli BeJgici, Noribergae, 1614.
(9) [page 371]. Cosmos, t. II, p. 395.
(10) [page 3711 Cosmos, t III, p. 155.
(11) [page 371]. « Galilei notô che le Nebulose di Orione
nuir altro erano che mucchi e coacervazioni d'innumerabili
Stelle » Nelli, ^i^a rfi Ga/i/ei, t. I, p. 208. ""
(12) [page 372]. «In primo integram Orionis Constellationem
pingere decreveram ; vero, ab ingenti stellarum copia , temporis
vero inopia obrutus , aggressionem hanc in aliam occasionem
distuli. — Gum non tantum in Galaxia lacteus ille candor veluti
albicantis nubis spectetur , sed complures consimilis coloris
areolœ sparsim per œthera sub fui géant, si in illarum quamlibet
Specillumconvertas, Stellarum constipatarum coetum offendes.
\mplius ; quod magis mirabile) Stellae , ab Astronomis singulis
— (543 -
in liane usque dieni Nebulosœ appellatae, Stellarum niiruni in nio-
dum consilarum grep^es sunt : ex quarum radiorum commixtione,
dum unaquaque ob exilitatem , seu maximam a nobis remo-
tionem, oculorum aciem fugit, candor ille consurgit, qui den-
sior pars cœli, Stellarum aut Solis radios retorqucre valens ,
hucusque creditus est. » Opère di Galileo Galilci, Padova,
17^/;, t. II , p. 14 et 15 ; Sidereus Nuntius, p. 13, 15 et 35.
(13) [page 372]. Voyez le Cosmos, t. III, p. 281, note 91.
Je dois rappeler à ce sujet la vignette qui termine l'introduc-
tion d'Hévélius à son Firmamentum Sobescianum , publié en
1687. On y voit représentés trois génies dont deux regardent
le ciel avec le Sextant d'Hévélius , et répondent au troisième
qui porte un télescope , et semble le leur offrir : Praestat nudo
oculo !
(Ml) [page 372]. Huygens, ^t/5^ema Saturnium , dans ses
Opéra varia, Lugd. Batav. 1724, t. II, p. 523 et 593.
(15) [page 373]. « Dans les deux nébuleuses d'Andromède et
d'Orion , dit Dominique Cassini, j'ai vu des étoiles qu'on n'aper-
çoit pas avec les lunettes communes. Nous ne savons pas si l'on
ne pourrait pas avoir des lunettes assez grandes pour que toute
la nébulosité pût se résoudre en de plus petites étoiles, comme
il arrive à celles du Cancer et du Sagittaire.» (Delambre,
Histoire de V astronomie moderne, t. II, p. 700 et 744.)
(16) [page 373]. Cosmos, t. I, p. 481, note 96.
(17) [page 374] Sur les ressemblances et les dissemblances
des idées de Lambert et de Kant, et sur les époques de leurs
publications respectives, voyez Struve, Études d' Astronomie
Stellaire , p. 11, 13 et 21 , notes 7. 15 et 33. L'ouvrage de
Kant, intitulé Allgemeine Naturgeschichte und Théorie des
Himmels, fut publié en 1755, sans nom d'auteur, et dédié au
grand Frédéric. La Photometria de Lambert parut seulement
en 1760, ainsi qu'on l'a déjà remarqué plus haut, et fut suivie en
1761 de ses Lettres cosmologiques sur la structure du monde.
^ 644 -
(18) [page 375]. « Those Nebulae, dit John Michell, dans
les Philosophical Transactions for 1767 (t. LVII, p. 251),
in wliicli we can discover either none, or only a few stars even
with Ihe assistance of Ihe best télescopes, are probably Sys-
tems, that are still more distant than the rest. »
(19) [page 375] . Messier, dans les Mémoires de V Académie des
Sciences, 1771 , p. ù35, et dans la Connaissance des temps pour
1783 et 178^. Le catalogue contient 103 objets.
(20) [page 376]. Philos. Transact. , \. LXXYI , LXXIX et
XGII.
(21) [page 376]. «The Nebular hypothesis , as it has been
termed , and the theory of sidereal aggregation stand in fact
quite independent of each othcr. » (Sir John Herschel, Outlines
vf Astronomy f p. 599.)
(22) [page 377]. Les objets dont je parle dans ce passage sont
ceux qui portent les n°*^-2307 dans le Catalogue européen ou
Catalogue du Nord , publié en 1833 , et les n°^ 2308-Zt015 dans
le Catalogue africain ou Catalogue du Sud. Voyez Sir John
Herschel, Cape Observations , p. 51-128.
(23) [page 377]. James Dunlop, dans \es Philos. Transact,
for 1828, p. 113-150.
(2h) [page 377]. Voyez le Cosmos, t. m,p. 75 et 295,
note 23.
(25) [page 377]. Voyez An Account of the Earl of Rosses
grcat Télescope, p. 1^-17, où est citée la liste des nébuleuses
résolues au mois de mars 18^5, parle D' Robinson et Sir James
South. « D"" Robinson couldt nol leave this part of bis subject
without calling attention to the fact, that no real nebula seemed
to exist among so many of thèse objects chosen without any
bias : ail appeared to be clusters of stars, and every additional
one which shall be resolved will be an additional argument
against the existence of any such» Voyez Schumacher's Aslro-
nomische Nachrichten , n"" 536. On lit dans la Notice sur les
>- 045 —
grands télescopes de lord Oxmantown, aujourd'hui Comte de
Rosse (Bibliothèque universelle de Genève, t. LVII, 18^5,
p. 3Zt2-357) : « Sir James South rappelle que jamais il n'a vu de
représentations sidérales aussi magnifiques que celle que lui
offrait l'instrument de Parsonstown; qu'une bonne partie des
nébuleuses se présentaient comme des amas ou groupes d'é-
toiles, tandis que quelques autres^ à ses yeux du moins, n'of-
fraient aucune apparence de résolution en étoiles. »
(26) [page 378]. Report ofthe fifteenth Meeting ofthe Briiish
Association , held at Cambridge in June 18/^5, p. 36, et Outlines
of Astron. ^ p. 597 et 598. « By far the major part, dit Sir
John Herschel, probably at least nine-tenlhs ofthe nebulous
contents of the heavens consist of nebulas of spherical or ellip-
tical forms, presenting every variety of elongalion and central
condensation. Of thèse a great number hâve been resolved into
distant stars (by the Reflector of the Earl of Rosse) , and a vast
number more hâve been found to possess that mottled ap-
pearance , which renders it almost a matter of certainty that an
increase of optical power would show them to be similarly com-
posed. A not unnatural or unfair induction would therefore seen
to be, that those which resist such resolution, do so only in consé-
quence of the smallness and closeness ofthe stars of which they
consist ; that, in short, they are only optically and not physi-
cally nebulous. — Although nebulae do exist which even in this
powerful télescope (of Lord Rosse) appearas nebulae, without
any sign of resolution, it may very reasonably be doubted
whether there be really any essential physical distinction be-
tween nebulae and clusters of stars. »
(27) [page 378]. LeD'"Nichol, professeur d'Astronomie à Glas-
gow, a publié cette lettre , datée du château de Parsonstown,
dans ses Thoughts of some important points relating to the
System of the Jï^orld , 18^6, p. 55 : «In accordance with
my promise of comraunicating to you the resuit of our exami-
nation of Orion , I tliink I may safely say, that there can be
— 646 —
liltle, if any doubt as lo the resolvability of tlie Nebula. Since
you left us^ there was not a single night when, in the absence of
the moon, the air was fine enough to admit of our using more
Ihan half the magnifying power the spéculum bears : still we
could plainly see that ail aboutthe trapezium is a mass of stars;
the rest of the nebula also abounding with stars, and exhibiting
the characteristics of resolvability strongly marked. »
(28) [page 379] Voyez Edinburgh Review , t. LXXXVII,
1848, p. 186.
(29^ [page 380]. Cosmos, t. III, p. 158 et 3^2, note 50.
(30) [page 380]. Cosmos, t. III, p. 39.
(31) [page 380]. Newton, Philolosophiœ naturalis Principia
mathematica, 1760, t. III, p. 671.
(32) [page 381]. Cosmos, t. I, p. 158.
(33) [page 381]. Cosmos, t. I, p 481, note 96
(34) [page 381]. Sir John Herschel, Cape Observations,
S 109-111.
(35) [page 382], Quelques éclaircissements sont nécessaires,
afin que l'on sache sur quels fondements reposent ces énumé-
rations. Les trois catalogues de William Herschel contiennent
2500 objets, à savoir : 2303 nébuleuses et 197 amas d'étoiles
(3Iaedler, Astronomie , p. 448) ; ces nombres sont changés dans
le recensement postérieur et beaucoup plus exact de Sir John
Herschel (Observations of nebulœ and Clusters of stars, made at
Slough, with a twenty-feet Reflector, between the years 1825
and 1833, insérées dans les Pkilosophical Transactions for the
yearl833, p. 365-481). Dix-huit cents objets étaient identiques
avec d'autres contenus dans les trois premiers catalogues , trois
ou quatre cents furent provisoirement exclus et remplacés par
plus de cinq cents autres nouvellement découverts, dont on dé-
termina l'ascension droite et la déclinaison (Struve, Astronomie
stetlaire^ p. 48). Le Catalogue du Nord comprend 152 amas
— 647 —
stellaires ; par conséquent les nébuleuses y sont au nombre de
2307 — 152= 2155. Sur les 1708 objets compris dans le Catalo-
gue du Sud (/4 01 5— 2307), et parmi lesquels on compte 236 amas
d'étoiles, il faut défalquer 233 nébuleuses (89 -f 135 + 9),
comme appartenant déjà au Catalogue du Nord, et ayant été
observées, à Slougii par "William Herschel et Sir John, à Paris par
Messier. Voyez Cape Obsiervations , p. 3 , §§ 6 et 7, et p. 128.
Il reste donc pour le Catalogue du Sud un total de 1708 — 233
= \U15 objets, qui se décomposent en 1239 nébuleuses et
236 amas d'étoiles. Il faut au contraire ajouter aux 2307 objets
du Catalogue de Slough 135 + 9 = UZt, ce qui forme un
ensemble de 2451 objets distincts, sur lesquels, en retran-
chant 152 clusters, il reste 2299 nébuleuses. Il est vrai de
dire que, pour ces nombres, l'on ne s'est pas renfermé d'une
manière bien rigoureuse dans les limites de l'horizon visible à
Slough. L'auteur de ce livre est tellement persuadé de l'in-
térêt que présentent , dans la topographie du firmament , les
rapports numériques des deux hémisphères , qu'il ne croit pas
même devoir négliger les nombres sujets à changer, sui-
vant la différence des époques et les progrès de l'observation.
Il entre nécessairement dans le plan d'un livre sur le Cosmos
de représenter l'ensemble des connaissances humaines à une
époque déterminée.
(36) [page 383]. On lit dans les Cape Observations , p. 134,
« There are between 300 and 400 nebulae of Sir William
Herschel's Catalogue still unobserved by me, for the most part
very faint obj ects »
(37) [page 383] . Cape Observ., § 7. Voyez aussi le Catalogue
of Nebulœ and Clusters of the Southern Hémisphère parDunlop,
dans les Philosophical Transactions for 1828, p. 114-l/i6.
(38) [page 383]. Cosmos, t. III, p. 248
(39) [page 384]. Cape Observations , $$ 105-107.
(40) [page 384]. In this Région of Firgo , occupying about
- 648 —
one-eigth of the whole surface ofthe sphère, one-third of the
entire nebulous contents of the heavens are congregated {Out-
lines of Astronomy , ^. 596).
(k\) [page 385] . Voyez sur cette région stérile (barren ré-
gion). Cape Observations, § 101, p. 135.
(kl) [page 386]. Ces données numériques sont fondées sur le
total des chiffres fournis par la projection de l'hémisphère sep-
tentrional. Voyez Cape Observations , pi XI.
(^3) [page 387]. Humboldt, Examen critique de V histoire
de la Géographie du nouveau continent, t IV, p. 319. Dans la
longue série de voyages maritimes que , grâce à l'influence de
l'Infant Don Henrique , les Portugais entreprirent le long des
côtes occidentales de l'Afrique , pour pénétrer jusqu'à l'équa-
teur, le Vénitien Cadamosto, dont le vrai nom était Alvise da
Ca da 3Iosto, est le premier qui, après sa réunion avec Anto-
niotto Usodimare, à l'embouchure du Sénégal, en lZi5i, se
soit occupé à chercher une étoile polaire australe. «Puisque
j'aperçois encore l'étoile polaire boréale , disait-il au moment
où il se trouvait vers le 13» de latitude Nord, je ne puis pas
voir la polaire du Sud ; la constellation que je vois dans cette
direction est le Carro del ostro (le Chariot du Sud). » Voyez
Aloysii Cadamosto Navigazione , cap. 43, p. 32; Ramusio ,
délie Navigazioni et riaggi , t. I, p. 107. Cadamosto s'était-il
donc composé un Chariot avec quelques grandes étoiles du
Navire. L'idée que les deux pôles avaient chacun un Chariot
paraît avoir été si répandue à cette époque que , dans Vltine-
rarium Portugallense, publié en 1500 (fol. 23, b) , et dans le
Novus Orbisde Grynaeus (1532, p. 58), on a représenté, comme
ayant été observée par Cadamosto, une constellation en tout
semblable à la Petite-Ourse, et à la place de laquelle est figurée
tout aussi capricieusement la Croix du Sud , dans les Naviga-
zioni de Ramusio (t. I, p. 19) etdans la nouvelle collection de/W
ticiaspara a hist. e geogr, dos A'afôesf///rawîarma.s(Lisboa,1812,
t. II, cap. 39, p. 57). Voyez Humboldt, Examen critique, etc.,
— 6à9 —
t. Y, p. 286. Comme il était d'usnge au moyen âge , probable-
ment afin de replacer dans le Petit-Chariot les deux danseurs
d'Hygln , yopEuxai , les mêmes que les Ludentes du Scholiaste
de Germanicus ou les Custodes de Végèce, de considérer les
étoiles p et Y de la Petite-Ourse comme les Gardiens (le due
Guardie, the Guards) du pôle Nord, autour duquel elles décrivent
un mouvement circulaire , et que cette dénomination, ainsi que
l'habitude de faire servir les deux Gardiens à déterminer la
hauteur du pôle Nord, s'étaient répandues dans les mers sep-
tentrionales, chez les pilotes de toutes les nations européennes;
on fut conduit par de fausses analogies à reconnaître dans
l'hémisphère austral ce que l'on y cherchait depuis longtemps
(Pedro de 31edina, Artede Navegar, 15^5, lib.V, cap. 1-7, p. 183-
195). Ce fut pendant le second voyage d'Amerigo Vespucci, ac-
compli dans l'intervalle du mois de mai 1499 au mois de sep-
tembre 1500, lorsque ce navigateur et Vicente Yanez Pinzon,
dont le voyage est peut-être identique avec le sien, parvinrent
dans l'hémisphère austral jusqu'au cap Saint-Augustin, qu'ils
s'appliquèrent pour la première fois et sans résultat à chercher
une étoile visible dans le voisinage immédiat du pôle Sud. Voyez
Bandini, Fita e Lettere di Jmerigo f^espucci, 1745, p. 70; An-
glîiera, Oceanica, 1510, dec. I, lib. 9, p. 96; Humboldt, Exa-
men critique, etc., t. IV, p. 205, 319 et 325. Le pôle Sud était
situé alors dans la constellation de l'Oclante , de sorte que |3 de
la Petite-Iîydre , si l'on fait la réduction d'après le Catalogue
de Brisbane, était encore à 80° 5' de déclinaison australe.
« Tandis que j étais tout entier aux merveilles du ciel austral et
que j'y cherchais vainement une étoile polaire , dit Vespucci
dans sa lettre à Pietro Francesco de' 3Iedici , je me rappelai
les paroles de notre Dante , lorsque , dans le premier livre du
Purgatoire , Mgwdini de passer d'un hémisphère à l'autre, il
veut décrire le pôle antarctique , et dit :
lo mi volsi a man destra. ...
Mon st^nliment est que , dans c.t^.^ vers , le pO'.Ue a voulu dé-
— 650 —
signer par ses quatre étoiles (Don viste mai fuor ch' aile prima
gente) , le pôle de l'autre firmament. J'en suis d'autant plus
certain que j'ai vu, en eflfet, quatre étoiles , formant ensemble
une espèce de mandorla. et animées d'un mouvement peu sen-
sible » Vespucci pense que la Croix du Sud est la Croce mara-
vigliosa d'Andréa Corsali, dont il ne connaissait pas encore le
nom , mais qui plus tard fut mise à profit par tous les pilotes ,
pour la recherche du pôle Sud et pour les déterminations de
latitude, comme au pôle Nord, p et y de la Petite-Ourse. Voyez
une lettre de Cochin, en date du 6 janvier 1515, insérée dans le
recueil de Ramusio, t. ï, p. lll?; les Mémoires de V Académie des
5'dewces(del666 àî699), t. VII, 2«part. Paris, 1729, p. 58; Pedro
de IMedina, Arte de Navegar , 1545, lib. V, cap. 11 , p. 204, et
comparez l'analyse que j'ai donnée du célèbre passage du Dante,
dans V Examen critique, etc., t. IV, p. 319-334. J'ai fait re-
marquer dans ce passage que a de la Croix du Sud, dont
Dunlop en 1826, et Rlïwker en 1836, se sont occupés à Para-
matta , est au nombre des étoiles qui , les premières, ont été re-
connues comme systèmes multiples, par les jésuites Fontaney,
Noël et Richaud (1781 et 1787). Voyez V Histoire de V Académie
(de 1686 à 1699), t. II, Paris, 1733, p. 19; Mémoires de
V Académie (de 1666 à 1699), t. VII, 2« part., Paris, 1729,
p. 206; Lettres Édifiantes, rec. VII, 1703, p. 79. Cette dé-
couverte si précoce d'étoiles binaires, longtemps avant que
l'on eut reconnu comme telle ^ de la Grande-Ourse, est
d'autant plus remarquable que 70 ans plus tard, La Caille dé-
crit a de la Croix sans mentionner sa qualité d'étoile double ,
probablement, ainsi que le conjecture RUmker, parce que
l'étoile principale et le compagnon se trouvaient alors trop peu
distants l'un de l'autre. Voyez Sir John Herschei, Cape Ob-
servations, §§ 183-185 ; Cosmos, t III, p. 241. Presque dans le
même temps où l'on constatait le caractère double de a de la
Croix, Richaud enregistrait aussi parmi les étoiles doubles a du
Centaure ; c'était 19 ans avant le voyage de Feuillée, auquel Hen-
derson attribue par erreur cette découverte. Richaud fait obser-
— 651 —
verque , lorsque parut la comète de 1689, les deux étoiles dont se
compose a de la Croix étaient fort éloignées l'une de l'autre ;
mais que, dans un réfracteur de 12 pieds , les deux parties de
a du Centaure , bien que très-faciles à reconnaître , semblaient
presque se toucher.
{Jxk) [page 388]. Cape Observations, §§ kk et lOZi.
(45) [page 388], Voyez le Cosmos, X, III, p. 154. Cependant,
ainsi que nous l'avons déjà remarqué , en traitant des amas
stellaires {ihid., 156), M. Bond a trouvé moyen aux États-Unis
de résoudre complètement, grâce à la force pénétrante de son
réfracteur, la nébulosité elliptique et très-allongée d'Andro-
mède qui, d'après Bouillaud, avait été déjà décrite avant
Simon Marins , en 985 et en 1428, et qui présente une lueur
rougeâtre. Dans le voisinage de cette célèbre nébuleuse , s'en
trouve une autre non résolue jusqu'ici , bien qu'elle soit par sa
configuration très-analogue à celle d'Midromède, et qui a été
découverte le 27 août 1783 par Miss Carolina Herschel, morte
dans un âge très-avancé , au milieu du respect de tous. Voyez
les Philosophical Transactions , iSZZ, n° 61 du Catalogue des
Nébuleuses, fig. 52.
(46) [page 388]. Philosophical Transactions ,iSZZ,]^. Ii9li,
pi. IX, fig. 19-24.
(47) [page 389]. Ces nébuleuses sont appelées Annular ne-
bulœ, par Sir John Herschel (Cape Observations,^. 53; Out-
Unes of Astron,, p. 602) , et Nébuleuses perforées par Arago
{Annuaire pour 1842, p. 423). Voyez aussi Bond, dans les
Astronom, Nachrichten de Schumacher, n° 611,
(48) [page 389]. Cape Observations, p. 114, pi. VI, fig. 3
et 4. Voyez aussi len» 2072 dans les Philosoph. Transactions for
1833, p. 466. Les dessins qu'a faits Lord Rosse de la nébuleuse
perforée de la Lyre , et de la singulière nébulosité à laquelle il
a donné le nom de Crab-nebula, se trouvent dans l'ouvrage de
— 65t2 —
Niclîol : Thoughts on the System of the ITorld^ p. 'il , pi. IV,
et p. 22, pi. I, fig. 5.
(^9) [page 390]. Si Ton considère la nébuleuse planétaire
de la Grande-Ourse comme une sphère , et « si on la sup-
pose, dit Sir John Herschel , éloignée de la Terre d'une dis-
tance égale à celle de 61 du Cygne , son diamètre appa-
rent , qui est de 2' ^0' , implique un diamètre réel sept fois
plus grand que l'orbite de Neptune. » (Outlines of Jstron.,
§876).
(50) [page 391]. Outlines , ibid. ; Cape Observations , $ Ixl.
Une étoile de 8^ grandeur, d'un rouge orangé , existe dans le
voisinage du n° 3365; mais la nébulosité planétaire n en con-
serve pas moins la couleur foncée de l'indigo, lorsque l'étoile
rouge n'est pas dans le champ du télescope. La couleur de la
nébuleuse n'est donc pas l'effet du contraste.
(51) [page 391]. Cosmos, t. III, p. U7, 250 et 361. L'étoile
principale et le compagnon sont bleus ou bleuâtres dans plus
de 63 étoiles doubles. De petites étoiles de la couleur de
l'indigo sont mêlées au magnifique amas stellaire , nuancé de
diverses couleurs, qui porte le n° 3^35 dans le Catalogue du Cap,
et le n° 301 dans celui de Dunlop. Il existe dans l'hémisphère
austral , sous le n» 573 du Catalogue de Dunlop , sous le
n° 3370 de celui de John Herschel, un amas stellaire d'un
bleu uniforme , qui n'a pas moins de 3' 1/2 de diamètre , avec
des projections longues de 8'. Les étoiles qui le composent
sont comprises entre la W et la 16® grandeur (Cape Observa-
tions,"^. 119).
(52) [page 391]. Cosmos, t. I, p. 90. Voyez aussi Outlines of
Astron., § 877.
(53) [page 391]. Sur la complication des rapports dyna-
miques dans les attractions partielles qui s'exercent à l'intérieur
d'un amas d'étoiles sphérique , lequel, vu à travers de faibles
— 653 —
télescopes , semble être une nébuleuse arrondie et plus con-
densée vers le centre, voyez John Herschel, Outlines ofAstron.^
§§ 866 et 872 , et Cape Observations, §§ kk et 111-113 ; Phi-
losophical Transactions, for 1833, p. 501; .^dress of the Pré-
sident, dans le Report of the fifteenth Meeting of the British
Association, 18/i5, p. XXXVII.
(5^ [page 392]. Mairan, Traité de V Aurore boréale, p. 263 ;
Arago, (l^nsV Annuaire pour 18Zi2 , p. ^03-413.
(55) [page 393]. Tous les autres exemples d'étoiles nébu-
leuses sont compris entre la S^ et la 9'' grandeur. Tels sont les
D"^ 311 et U50 du Catalogue de 1833 (fig. 31), dont les photo-
sphères ont un diamètre de l'30". Voyez Outlines of Astron.,
S 879.
(56) [page 393]. Cape Observations ,p. 117, n*' 3727, pi. VI,
fig. 16.
(57) [page 393]. Les formes les plus remarquables de nébu-
leuses irrégulières sont : r une nébuleuse en forme d'oméga ,
dont on peut voir le dessin dans les Cape Observations , pi. II,
fig. 1, n°2008, et qui a été aussi étudiée et décrite parLamont,
ainsi que par un jeune astronome de l'Amérique septentrio-
nale, enlevé trop tôt à la science , M. Mason, dans les Memoirs
of the Americ, Philosoph. Society, t. VII, p. 177; 2» une
nébuleuse dans laquelle on compte de 6 à 8 noyaux {Cape Ob-
servât., p. 19, pi. III, fig. h)\ 3° les nébuleuses semblables à
des comètes et présentant la forme de buissons, d'où les rayons
nébuleux émanent quelquefois comme d'une étoile de 9* gran-
deur (ibid. , pi. VI, fig. 18 , n" 253Zt et 3688) ; k'' une nébuleuse
figurant une silhouette (pi. IV, fig. k, n" 3075); 5" une nébu-
leuse filiforme , renfermée dans une crevasse (pi. IV, fig. 2 ,
n" 3501). Voyez aussi Cape Observât., § 121 ; Outlines of As-
tron., § 883.
(58) [page 39/i)- Cosmos, t. TU, p. 161; Outlines of Astron.,
$ 785.
.111. 42
— 654 —
(59) [page 394] Cosmos, t. I , p. 170 et 485, note 13.
Voyez aussi la 1'^ édition du Treatise on Astronomy , de Sir
John Herschel, publié en 1833, dans le Cabinet Cyclopœdia
de Lardner, et traduit en français par M. Cournot (§ 616) ,
et Littrow, Theoretische astronomie, 1834, 2^ part., § 234.
(60) [page 394]. Voyez Edinburgh Review, janvier 1848,
p. 187, et Cape Observations, §§ 96 et 107. « A zone of nebulae,
dit Sir John Herschel, encircling the heavens, has so many
interruptions, and is so faintly marked out through by far the
greater part of the circumference , that its existence as such
can be hardly more ihan suspected. »
(61) [page 395]. « Il n'y a point de doute , écrit le D"" Galle ,
que dans le dessin de Galilée que vous m'avez communiqué
( Opère di Galilel ^ Padova, 1744, t. II, p. 14, n» 20), soient
compris le Baudrier et l'Épée d'Orion, et par suite l'Étoile 2r,
Mais les objets y sont représentés d'une manière si inexacte
que l'on a peine à trouver les trois petites étoiles de l'Épée,
dont 2r occupe le centre , et qui, à l'œil nu, semblent rangées
en ligne droite. Je pense que vous avez bien tracé l'étoile t, et
que l'étoile brillante, qui est placée à droite, ou celle qui est
immédiatement au-dessus , est 2r. Galilée dit expressément :
a In primo integram Orionis Constellationem pingere decreve-
ram; verum ab ingenti stellarum copia, temporis vero inopia
obrutus, aggressionem hanc in aliam occasionem distuli, »
Les observations de Galilée sur la constellation d'Orion sont
d'autant plus dignes d'intérêt, que les 400 étoiles, répandues
sur 10 degrés de latitude, qu'il croyait distinguer entre le
Baudrier et l'Épée, ont conduit plus tard Lambert à son calcul
erroné de 1 650 000 étoiles, dans toute l'étendue du firmament.
Voyez Nelli, Fita di Galilei, t. I, p. 208; Lambert, Cosmo-
logische Briefe, 1760, p. 155 j Struve, Astronomie stellaire ,
p. 14 et note 16.
(62) [page 396]. Cosmos, t. II, p. 396.
(63) [page 397], « Ex his autem très illae pêne inter se con-
— 655 —
tiguae stellae , cumque lus aliœ quatuor , velut trans nebulam
lucebant : ita ut spatium circa ipsas, qua forma liic conspicitur,
multo illuslrius appareret reliquo omni cœlo; quod cum ap-
prime serenum esset ac cerneretur nigerrimum , velut hiatu
quodam interruptum videbatur, per quem in plagam magis
lucidam esset prospectus. Idem vero in liane usque diem nihil
inmutata facie saepius atque eodem loco conspexi ; adeo ut per-
petuam illic sedem habere credibile sit hoc quidquid est por-
tenti : cui certe simile aliud uusquam apud reliquas fixas potui
animadvertere. Nam ceterae nebulosae olim existimatae, atque
ipsa via lactea, perspicillo inspecta, nullas nebulas habere com-
periuntur, neque aliud esse quam plurium stellarum congeries
et frequentia» (Christiani Hugenii Opéra varia, Lugd. Batav.,
\11k, p. 540 et 541). Le grossissement que Huygens appliqua
dans son réfracteur de 23 pieds n'était , suivant sa propre esti-
mation, que de 100 fois {ihid., p. 538). Les '(quatuor stellae
trans nebulam lucentes » sont-elles les étoiles du Trapèze?
Le petit dessin, très-grossièrement fait, que l'auteur a joint
à son livre (tab XLVII, fig. Zi, phaenomenon in Orione novum),
représente seulement un groupe de ces étoiles; on y voit
aussi , à la vérité, une échancrure que l'on peut prendre pour
le Sinus magnus ; peut-être n'a-t-on voulu indiquer que les
trois étoiles du Trapèze qui sont comprises entre la 4*" et la
7*^ grandeur. Dominique Gassini se vantait d'avoir vu le pre-
mier la 4*^ étoile.
(64) [page 397]. William Granch Bond, dans les Transac-
tions of the American Academy of Arls and Sciences , nouvelle
série, t. m, p. 87-96.
(65) [page 397]. Cape Observations, $$ 54-69, pi. VIII;
Outlines of Astronomy, $$ 837 et 885 , pi. IV, fig. 1.
(66) [page 397]. Sir John Ilerschcl, dans les Memoirs of the
Astronom. Society, t. II, 1824, p. 487-495, pi. VII et VIIL
Le second dessin indique la nomenclature des diverses régions
— 656 —
enlro If^squelles peut se diviser la nébulosité d'Orion, observée
successivement par un si grand nombre d'astronomes.
(67) [page 398]. Delambre, Histoire de l'astronomie moderne,
t. II, p. 700. Cassini rangeait l'apparition de cette k^ étoile,
« aggiunta délia quarta Stella aile tre contigue , » parmi les
changements qu'avait subis de son vivant la nébulosité d'Orion.
(68) [page 398]. « It is remarkable that within the area of
the Trapezium no nebula exisls. The brighter portion of the ne-
bula immediately adjacent to the Trapezium, forming the square
front of the head , is shown with 18-inch reflsctor broken up
into masses, whose motlled and curdling light evidently indi-
cates by a sort of granular texture its consisting of stars ; and
when examined under the great light of Lord Rosse's reflector
or the exquisite defining power of the great achromatic at Cam-
bridge, U. S., is evidently perceived to consist of clustering
stars. There can therefoi'e be little doubt as to the whole con-
sisting of stars , too minute to be discerned individually even
with the powerful aids, but which become visible as points of
light when closely adjacent in the morecrowded parts. » {Oailmes
ofAstron. p. 609. William C. Bond, qui employait un réfracteur
de 23 pieds, muni d'un objectif de ik pouces, dit : « There is
a great diminution of light in the interior of the Trapezium,
but no suspicion of a star. » [Memoirs of the Jmeric. Academy^
Nouvelle série , t. III, p. 93).
(69) [page 398]. Philosophical Transactions for the year
1811, t. CI, p. 32Zt.
(70) [page 399]. « Such is the gênerai blaze from that part
of the sky, dit le capitaine Jacob, that a person is imme-
diately made aware of its having risen above the horizon ,
though he should not be at the time looking at the heavens,
by the increase of gênerai illumination of the atmosphère, re-
sembling the effect of the young moon. » Transact. of the
Royal Society of Edimburg , t. XVI, 1849, 6* part., p. Zi45.
— 657 —
(71) [page 399]. Cosmos, t. III, p. 206-209.
(72) [page 399], Cape Observations, §§ 70-90, pi. IX ; Ou^
lin es of Aslronony, § 887, pi. IV, fig. 2.
(73) [page ^00]. Cosmos, t. II, p. ISZi.
{Ih) [page AOO]. Cape Observations, § 2Zi, pi. I, fig. 1,
n"" 3721 du Catalogue ; Outlines of Âsironomy, § 888.
(75) [page 600]. La déterminaison partielle de la nébuleuse
du Cygne est : Asc dr. 20^ U9', Décl. du pôle Nord, 58° 27' [Out-
lines of Astron., § 891). Voyez aussi le Catalogue de 1833,
n° 2092, pi. XI, fig. 36.
(76) [page 601]. Comparez le dessin de la planche II, fig. 2,
avec ceux de la pi. V, dans les Thoughts on some important
points relating to the System of the ff^orld, par le D'' INichol,
professeur d'astronomie à Glasgow, î>ê66, p. 22» « Lord Rosse ,
dit Sir John Herschel , dans les Outlines of Astron. (p. 607),
describes and figures this nebula as resolved into numerous
stars with intermixed nebula. »
(77) [page 602]. Cosmos, 1. 1, p. 170 et 685, note 11.
(78) [page 602]. Voyez Report of the fifteenth Meeting of the
British Association for the advancement of Science, Notices,
p. 6 , et Nichol , Thoughts on some important points , etc., en
ayant soin de comparer la planche II, fig. 1, avec la planche VI.
On lit dans les Outlines of Astron. § 882 : « The whole, if not
clearly resolved into stars , has a resolvable character, which
evidently indicates its composition. »
(79) [page 602]. Cosmos, t. I , p. 90 et 651.
(80) [page 603]. Voyez La Caille, dans les Mémoires de l'A-
cadémie des Sciences, année 1755, p. 195. Ce n'est que par
une confusion regrettable que l'on peut appliquer aux Sac:^
— 658 —
à charbon le nom de Taches Magellaniques ou de Nuages du
Cap, comme l'ont fait Horner et Littrow.
(81) [page/i03]. Cosmos, i.U, p. 350 et 576.
(82) [page 40^]. Ideler, Untersuchungen iiber den Ursprung
und die Bedeutung der Sternnamen , 1809, p. XLIX et 262.
Le nom de Abdourrhaman Soufi, ainsi abrégé par Ouloug Beg,
était primitivement Abdourrahman Ebn-Omar Ebn-Mohammed
Ebn-Sahl Abou'l Hassan el-Soufi el-Razi. Ouloug Beg qui,
comme Nassir-eddin, rectifia, en 1^37, les positions d'étoiles
de Ptoléniée, par ses observations personnelles, reconnaît avoir
emprunté à Abdourrahman Soufi 27 positions d'étoiles méri-
dionales, qui n'étaient pas visibles à Samarcande.
(83) [page /i06]. Voyez mes recherches sur la découverte de
la pointe méridionale de l'Afrique et sur les assertions du car-
dinal Zurla et du comte Baldelli, dans Y Examen critique de
V Histoire de la Géographie du nouveau Continent, i. I, p. 229-
3/i8. Diaz, chose singulière! découvrit le cap de Bonne -Espé-
rance , appelé par Martin Behaim Terra fragosa et non point
Cabo tormentoso, en venant par l'Est, au moment où il sortait
de la baie d'xilgoa , située par 33° 47' de latitude méridionale ,
plus de 7M8' à l'Est de la baie de la Table. Voyez Lichten-
stein , dans le Faterlandisches Muséum, Hambourg, 1810,
p. 372-389.
(84) [page 406]. La découverte importante et trop peu ap-
préciée de l'extrémité méridionale du nouveau continent que
le Journal d'Ourdaneta désigne par ces mots caractéristiques
« Acabamiento de Tierra» le lieu où expire la terre, appar-
tient à Francisco de Hoces qui commandait l'un des vaisseaux
de l'expédition dirigée en 1525 par Loaysa. H vit vraisembla-
blement une partie de la Terre de Feu à l'Ouest de l'île des
États; car le cap Horn est situé, selon Fitz Roy, par 55" 58' 41".
Voyez aussi Navarrète, Fiages y descubrimentos de los Espa^
noies, t. V, p. 28 et 404.
— 659 —
(85) [page ^07]. Humboldt, Examen critique^ etc., t. IV,
p. 205 et 295-316; t. V, p. 225-229 et 325. Comp. Ideler,
Uher die Sternnamen , p. 346.
(86) [page 408]. Pierre Martyr Anghiera, Oceanica, dec. III,
lib. i) p. 217. Je suis en mesure d'établir, d'après les résultats
numériques donnés par Anghiera (dec. II, lib. 10, p. 20U et
L»ec. III, lib. 10, p. 232), que la partie des Oceanica , dans la-
quelle il est question des Nuées de Magellan, fut écrite en \Mk
et 1416, par conséquent immédiatement après l'expédition de
Juan Diaz de Solis au Rio de la Plata, nommé à cette époque
Rio de Solis (una mar dulce). La latitude qu'indique Anghiera
et beaucoup trop haute.
(87) [page 409]. Cosmos, t. II, p. 350 ; t III , p. 122 et 149.
(88) [page 410]. Cosmos, t. I, p. 90 et 451. Voyez aussi dans
les Cape Observations (p 143-164), lesudeux^'uees de Magellan,
telles qu'elles paraissent à l'œil nu (pi. VII), l'analyse télesco-
pique de la Nubecula major (pi. X), et le dessin particulier de la
Nébuleuse du Dorado (pi. II , fig. 4) , et comp. Outlines of As-
tron., §§ 892-896, pi. V, fig 1, et James Dunlop , dans les
Philosoph. 7^ra?isach'o7?,.s for 1828, l""*^ part., p. 147-151. — Les
vues des premiers observateurs étaient tellement erronées que
le jésuite Fontaney, dont Dominique Cassini faisait beaucoup de
cas , et qui a enrichi la Science d'un grand nombre d'observa-
tions importantes , dans l'Inde et en Chine , écrivait encore en
1685 : « Le grand et le petit Nuage sont deux choses singulières.
Ils ne paroissent aucunement un amas d'étoiles, comme Praesepe
Cancri, ni même une lueur sombre, comme la nébuleuse d'An-
dromède. On n'y voit presque rien avec de très-grandes lu-
nettes , quoique sans ce secours on les voye fort blancs , parti-
culièrement le grand Nuage » (Lettre du Père de Fontaney au
Père de la Chaize, confesseur du Roi , dans les Lettres édifiantes;
Rec. VII, 1703, p. 78, et dans l'Histoire de l'Académie des
Sciences (de 1686 à 1699), t. II , Paris, 1733, p. 19. Je me
— 660 -—
suis référé uniquement pour la description des Nuées Magella-
niques au travail de Sir John Herscliel.
(89) [page MO], Cosmos, t. III, p. 158 et 3^2, note 51.
(90) [page 410). Cosmos, t. III , p. 155 et SZil, note Ui.
(91) [page 412]. Voyez dans les Cape Observations , §§ 20-
23 et 133, le beau dessin de la pi. II, fig. k, et une petite carte
spéciale , jointe à l'analyse géographique , pi. X. Voyez aussi
Outlines of Astronomy , § 896, pi. V, fig. 1.
(92) [page 413]. Cosmos, t. II, p. 349.
(93) [page 413]. Mémoires de V académie des Sciences (de
1666 à 1699), t. VII , 2" part. Paris , 1729 , p. 206.
(94) [page 414]. Lettre adressée de Sainte-Catherine à Olbers,
au mois de janvier 1804, dans le Recueil de Zach, intitulé
Monatliche Correspondent z zur Befordniss der Erd-und Him-
meh'Kunde, t. X, p. 240. Voyez aussi sur l'observation de
Feuillée et sur le dessin grossier du Sac à charbon de la Croix,
la même collection, t. XV, 1807, p. 338-391.
(95) [page 414]. Cape Observations , pi. XIII.
,96) [page 414]. Outlines of Astronomy, ^. 531.
(97j [page 415]. Cape Observations, p. 384, n" 3407 du
Catalogue des Nébuleuses et des amas stellaires. Voyez aussi
une notice de Dunlop, dans les Philosophical Transactions for
1828, p 149, et le n" 272 de son Catalogue.
(98) [page 415]. « Cette apparence d'un noir foncé dans la
partie orientale de la Croix du Sud, qui frappe la vue de tous
ceux qui regardent le Ciel austral , est causée par la vivacité de
la blancheur de la Voie lactée, qui renferme l'espace noir et
'entoure de tous côtés » (La Caille, dans les Mémoires de VAca^
demie des Sciences , année 1755. Paris, 1761, p. 199).
— 661 —
(99) [page M5]. Cosmos, i. 1, p. 172 et ^86, note 17.
(100) [page ^il6]. « When we see, dit Sir John Herschel, in
the Coal-Sack (near a Crucis) a sharply definecl oval space free
from stars, it would seeni much less probable tliat aconical or
tubular hollow traverses tlie whole of a starry stratum, conti-
nuously extonded from tlie eye outwards , tlian that a distant
mass of comparatively moderate thickness should be simply
perforated from side to side {Outlines of Astronomy, § 792 ,
p. 532).
(1) [page Zil6]. Lettre de M. Hooke à M. Auzout, dans les
Mémoires de V Académie (de 1666 à 1699), t. VII, 2« part., p. 30
et 73.
(2) [page M6]. Cosmos, t. I, p. Mh.
(3) [page ^19]. Voyez un passage du premier volume du
Cosmos, (t. I, p. 123 et 166), où je comptais par distances
d'Uranus, celte planète étant alors la limite connue du sys-
tème planétaire. Si l'on prend pour terme de comparaison
la distance de Neptune au Soleil, égale à 30,0^ rayons de
l'orbite terrestre, la distance de Tétoile a du Centaure au
Soleil est encore de 7523 distances de Neptune , en supposant
la parallaxe de 0",91 {Cosmos, t. III, p. 227); et cependant
la distance de l'étoile 61 du Cygne est presque 2 fois 1/2 plus
grande que celle de a du Centaure. Celle de Sirius, pour une
parallaxe de 0"23 , l'est quatre fois plus. La distance de Neptune
est d'environ 460 millions de myriamètres : celle d'Uranus est
d'après Hansen, de 29i millions. La distance de Sirius, calculée
par Galle sur la parallaxe d'Henderson, égale 896 800 rayons de
l'orbite terrestre, ou 13 762 000 millions de myriamètres, dis-
tance que la lumière met 14 ans à parcourir. La comète de 1680
est, à l'aphélie, éloignée du Soleil de kU distances d'Uranus ou
de 28 distances de Neptune. Suivant ces données, la distance de
l'étoile a du Centaure au Soleil est à peu près 270 fois plus
grande que ce rayon aphélique,que l'on peut considérer comme
- 662 —
représentant au minimum le rayon du système solaire ( Cosmos,
t. III, p. 2/i5). L'indication de ces résultats numériques offre
du moins l'avantage de montrer comment . en prenant pour
unité des étendues immenses, on peut mesurer l'espace sans
employer des séries de chiffres qui échappent à l'appréciation.
{^) [page 421]. Sur l'apparition soudaine et la disparition
de nouvelles étoiles, voyez le Cosmos, t. III, p. 166-186.
(5; [page 426]. J'ai déjà inséré dans le premier volume du
Cosmos (t. II, p. 371 et 592, note 25), le passage du Traité De
Revolut. lib. I, cap. 10), qui rappelle le Songe de Scipion,
(6) [page 426] Tf,? Ejj,<^u^(a<; [xsaov zo rept tov TjXiov, olovtt
xapoiav ovxa toû -ravToç , oôsv cspouaiv auToû xat ttjv ^^uy^Tjv àp^ajxÉvTjv
8'.à Travro; t,xe'.v to-j acL)|jLaTO<; T£Ta[xivT,v aTTO Ttov Tispàttov TheOUÎS
Smyrnaei Platonici Liber de Asironomia, éd. H. Martin, 1849,
p. 182 et 298); publicatj^/n remarquable en ce qu'elle complète
diverses opinions péripatéticiennes d'Adraste , et beaucoup
d'idées platoniciennes de Dercylides
(7) [page 428]. Hansen , dans le 7fl/ir6Mc/i de Schumacher
pour 1837, p. 65-141.
(8) [page 431]. « D'après l'état actuel de nos connaissances
astronomiques, le Soleil se compose : 1° d'un globe central à
peu près obscur ; 2° d'une immense couche de nuages suspendue
à une certaine distance de ce globe et qui l'enveloppe de toutes
parts ; 3" d'une photosphère ou, en d'autres termes, d'une sphère
resplendissante qui enveloppe la couche nuageuse, comme
cette couche , à son tour, enveloppe le noyau obscur. L'éclipsé
totale du 8 juillet 1842 nous a mis sur la trace d'une troisième
enveloppe, située au-dessus de la photosphère , et formée de
nuages obscurs ou faiblement lumineux. — Ce sont les nuages
de la troisième enveloppe solaire, situés en apparence, pen-
dant réclipse totale, sur le contour de l'astre ou un peu en
dehors, qui ont donné lieu à ces singulières proéminences rou-
— 663 —
geàtres qui , en 1 Sli2, ont si vivement excité l'attention du monde
savant. » Arago , dans Y Annuaire du Bureau des Longitudes
pour l'an 1846, p. k^k et 471. Sir Jolin Herscliel, dans ses
Outlines of Astronomy, publiés en 1849, admet aussi: « above
the luminous surface of the Sun, and the région in which the
spots réside , the existence of a gaseous atmosphère having a
somewhat imperfect transparency. »
(9) [page 432] . Il me paraît à propos de citer textuellement
les passages auxquels j'ai fait allusion plus haut, et sur lesquels
mon attention a été appelée par un Mémoire instructif dii
D"" Clemens , intitulé : Giordano Bruno und Nicolaus von Cusa
(1847, p. 101).
Le cardinal Nicolas de Cusa, né à Cues, sur la Moselle, et
dont le nom de famille était Khrypffs, c'est-à-dire Krebs (écre-
visse), dit, dans le Traité si célèbre de son temps de docta
Ignorantia (lib. II, cap. 12, p. 39 «âes OEuvres complètes,
éd. Basil, 1565) : « Neque color nigredinis est argumentum
vilitatis Terrae ; nam in Sole si quis esset , non appareret illa
claritas quae nobis; considerato enim corpore solis , tune habet
quamdam quasi terram centraliorem , et quamdam luciditatem
quasi ignilem circumferentialem^ et in medio quasi aqueam
nubem et aërem clariorem , quemadmodum terra ista sua
elementa. » A la marge on lit les mots paradoxa et hypni ,
dont le dernier, comme le premier, exprime, sans contredit,
des vues hasardées (uttvoi, songes). Dans l'écrit de longue
haleine qui a pour titre : Exercitationes ex sermonibus Car-
dinalis {ibid., p. 579) se trouve cette comparaison : « Sicut in
sole considerari potest natura corporalis, et illa de se non est
magnae virtutis (l'auteur s'exprime ainsi, nonobstant la gravi-
tation ! ) , et non potest virtutem suam aliis corporibus coramuni-
care, quia non estradiosa, et alla natura lucida illi unita,ita
quod Sol ex unione utriusque naturœ habet virtutem, quae suf-
licit huic sensibili mundo ad vitam innovandam in vegetabi-
libus et animalibus, in démentis et mincralibus, per suam
— 661 ~
intlueutiam radiosani; sic de Christo qui est Sol justitiae.... »
Le D*" Glemens croit que tout ceci est plus qu'un presseuti-
ment lieureux ; il lui paraît de toute impossibilité que sans une
observation suffisamment exacte des taches solaires, des parties
noires et des demi-teintes, Cusa ait osé s'appuyer sur l'expé-
rience, dans les passages que je viens de citer (Considerato
corpore Solis.. .; in Sole considerari potest.. .)• H suppose « que
la pénétration des philosophes de la science moderne a été pré-
venue sur quelques points, et que les idées du Cardinal de Cusa
ont pu lui être inspirées par des découvertes auxquelles on at-
tribue faussement une origine plus récente. » Il est , en effet, non-
seulement possible, mais très-probable que dans des contrées
où l'éclat du Soleil est voilé pendant plusieurs mois , comme
cela arrive sur les côtes du Pérou, tant que règne la garua ,
des peuples même sans culture aient aperçu à l'œil nu des ta-
ches sur le Soleil ; mais que ces taches aient sérieusement at-
tiré leur attention , qu'elles aient joué un rôle dans les mythes
religieux des adorateurs du Soleil , c'est ce dont jusqu'à présent
aucun voyageur n'a pu nous donner de nouvelles La seule ap-
parition , d'ailleurs si rare , d'une tache visible à l'œil nu sur le
disque du Soleil, abaissé à l'horizon ou voilé de vapeurs légères, et
offrant une apparence blanche, rouge, peut-être même verdâtre,
n'aurait jamais conduit des penseurs, si exercés quils fussent, à
l'hypothèse de plusieurs atmosphères servant d'enveloppes au
globe obscur du Soleil. Si le cardinal Cusa avait su quelque
chose des taches du Soleil, avec la tendance qu'il n'a que trop
à établir des comparaisons entre les choses physiques et les
choses intellectuelles, il n'eût certainement pas manqué de
faire allusion aux maculœ Sol s. Qu'on se rappelle seulement
la sensation que produisirent au commencement du xvir siècle,
aussitôt après l'invention des lunettes , les découvertes de Jean
Fabricius et de Galilée, et les débats violents qu'elles soulevè-
rent. J'ai déjà, dans le second volume du Cosmos (t. II, p. 595,
note 33j parlé des théories astronomiques énoncées en termes
fort obscurs par le Cardinal, qui mourut en 146^i, neuf ans
\
— 665 —
avant la naissance de (lopernic. — Le passage remarquable :
« Jani nobis manifestum est terram in veritate moveri» se trouve
dans le Traité de docta Ignorantia (lib. II, cap. 12). D'après
Cusa , tout est en mouvement dans les espaces célestes ; pas
une étoile qui ne décrive un cercle. « Terra non potest esse
fixa, sed movetur ut aliae stellae. » La Terre cependant ne tourne
pas autour du Soleil , tous deux ensemble gravitent autour des
« pôles éternellement changeants de l'univers. » Cusa n'a donc
rien de commun avec Copernic, ainsi que le démontre le pas-
sage dont le D' Clemens a trouvé, à l'hôpital de Cues, le texte
écrit delà main de Cusa, en 14^Zi.
(10) [page Zi32]. Cosmos, t. II, p. 385-388 et 606, 607,
notes Zi9-53.
(11) [page ^32]. Borhonia Sidéra, id est planetae qui Solis
lumina circumvolitant motu proprio et regulari , falso hactenus
ab helioscopis Maculae Solis nuncupati, ex novis observalio-
nibus Joannis Tarde, WIO. — ^ustriaca Sidéra, heliocyclica as-
tronomicis hypothesibus illigata opéra Caroli Malapertii Belgae
xMontensis e Societate Jesu, 1633. Ce dernier écrit a du moins
le mérite de donner une suite d'observations sur les taches so-
laires qui se sont succédé de 1618 à 1626. Ce sont, au reste,
les mêmes années pour lesquelles Scheiner a publié ses pro-
pres observations , à Rome , dans sa Rosa Ursina. Le cha-
noine Tarde croit au passage de petites planètes sur le disque
du Soleil , parce que , dit-il , « l'œil du monde ne peut avoir
des ophthalmies. » On s'étonnera avec raison que, 20 ans
après Tarde et ses satellites Bourboniens, Gascoigne , qui a fait
faire tant de progrès à l'art d observer [Cosmos, t. III, p. 69),
attribue encore les taches à la conjonction d'un grand nombre
de corps planétaires, presque transparents, qui font leur révo-
lution autour du Soleil . et très-près do lui. Suivant Gascoigne,
plusieurs de ces corps accuamlés produisent k\s ombres noires
que l'on désigne sous le nom de taches solaires. Voyez dans
les Philosophical rransar!ion1U) a cru trouver des descriptions de taches so-
laires, indiquent seulement: Que le disque du Soleil, quand
il présage le beau temps , n'offre aucune différence sur toute sa
surface , rien qu'il soit possible de signaler {{t-rfii -ci afj}j.a ciiépoO,
mais présente une apparence uniforme. Les ar^ixaTa, autrement
dit, les taches qui altèrent la surface du Soleil, sont expressément
— 669 —
attribuées à un nuage léger, à l'état de l'atmosphère terrestre;
le scoliaste d'xVratus dit : à l'épaississement do l'air. Aussi
a-t-on toujours soin de distinguer le Soleil du matin et le Soleil
du soir ; car le disque solaire , indépendamment de toute véri-
table tache , fait l'office de diaphanouiètre, et, d'après une
vieille croyance qu'il ne faut pas mépriser, annonce encore au-
jourd'hui au laboureur et au marin les changements de temps
qui se préparent. On peut, en effet, conclure de l'apparence
que présente le Soleil à l'horizon l'état des couches atmo-
sphériques voisint's de la Terre. En ce qui concerne les
grandes taches, visibles à l'œil nu, que l'on prit, en 807 et en
8/i0, pour des passages de Mercure e! de Vénus, la première est
mentionnée dans le grand Recueil historique des Feteres Script
tores publié par Justus Reuberus, en 1726 (voyez la partie
intitulée : Annales Regum Francorum Pipini , Karoli Magni et
Ludoiici a quodam ejus œtatis Astronomo , LUdovici régis do-
mestico, conscnpti , p. 58). Ce fut (^bord un Bénédictin qui
passa pour l'auteur de ces Annales (p. 28); plus tard, on re-
connut qu'elles étaient du célèbre Eginhard ou Einhard , se-
crétaire privé de Charlemague. Voyez Annales Einhardi dans
les Monumenta Germaniœ historica, publiés par Pertz (Script.,
t. I, p. 19Zi). Voici la mention faite par Eginhard des taches du
Soleil : « DGCCVII. Stella Mercurii XVI kal. April. visa est in
Sole qualis parva macula uigra, paululum superius medio centro
ejusdem sideris , quœ a nobis octo dies conspicata est ; sed
quando primum intravit vel exivit , nubibus impedientibus, mi-
nime notare potuimus. » — Simon Assemanus, dans l'introduction
au Globus cœlestis Cufico-Arabiciis Feli terni Musei Borgiani,
1790, p. XXXVIII, mentionne le prétendu passage de Vénus,
rapporté par les astronomes arabes : « Anno Hegyrae 225 ré-
gnante Almootascmo Chalifa , visa est in Sole prope médium
nigra quaedam macula, idque feriu tertia die décima noua
Mensis Regebi » On prit cette tache pour Vénus, et on crut
voir la planète peiulant 91 jours , avec des interruptions
de 12 à 13 jours , il est vrai. Peu de temps après mourut
m. U?>
— 670 —
Motassem.— Parmi les nombreux exemples que j'ai recueillis de
récits historiques ou de traditions populaires mentionnant des
diminutions subites dans l'éclat du jour^ je citerai les suivants,
au nombre de 17 :
A. 45 av. J.-C. Lors de la mort de Jules César, après la-
quelle le Soleil resta, pendant une année entière, pâle et
moins chaud que d'habitude. L'air était épais, froid et sombre;
les fruits ne purent venir à maturité (voyez Plutarque , Jules
César, chap. 87; Dion Cassius, iiv. XLIV; Virgile., Géorgiques,
liv. I, V. 466.
A. 33 ap. J.-C. Année de la mort du Sauveur. « A partir de la
sixième heure, une obscurité se répandit sur tout le pays jusqu'à
la neuvième heure» {Évang. selon saint Matthieu, chap, 27,
V. 45). D'après V Évang, selon saint Luc (chap. 23, v. 45) :«Le
soleil perdit son éclat. » Eusèbe, cite à l'appui de cette indica-
tion une éclipse de Soleil, arrivée dans la CCIF olympiade, dont
avait fait mention un clr.roniqueur , Phlégon de Tralles , (Ide-
1er, Handbuch der Mathem. Chronologie, t. II, p. 417). Mais
Wurm a démontré que cette éclipse , visible dans toute l'Asie
Mineure, avait eu lieu dès l'année 29 après la naissance du
Christ, le 24 novembre, trois ou quatre ans par conséquent
avant sa mort. Le jour de la Passion tomba le 14 du mois de
Msan , jour de la Pâque des Juifs (Ideler, ibid,, t. I, p. 515,
520) ; or la Pâque était toujours célébrée à l'époque de la
pleine Lune. Le Soleil ne peut donc pas avoir été éclipsé par
la Lune durant trois heures. Le jésuite Scheiner croyait pou-
voir attribuer la diminution d'éclat du Soleil à un groupe de
taches, couvrant une vaste étendue du disque solaire.
A. 358. Le 22 août : obscurcissement avant-coureur du ter-
rible tremblement de terre de Nicomédie , qui détruisit aussi
beaucoup d'autres villes, en 3Iacédoine et dans le Pont. L'ob-
scurité dura 2 ou 3 heures : « Nec contigua vel adposita cerne-
ban tur» , dit Ammien Marcellin (lib. XYII, cap. 7).
A. 360. Les ténèbres s'étendirent , depuis le matin jusqu'à
midi, dans toutes les provinces orientales de l'Empire romain :
— 671 ~
« Per Eoos tractus, caligo a primo aurorae exortu adusque
meridiem » (Ammien Marcellin, lib. XX, cap. 3 ). Les étoiles
étaient visibles; ainsi ce phénomène n'était point dû à une
pluie de cendres, et sa durée ne permit pas de l'attribuer,
comme fait l'historien , à une éclipse totale, « Cum lux cœlestis
operiretur, e mundi conspectu penitus luce abrepta , defecisse
diutius solem pavidae mentes hominum œstimabant : primo at-
tenuatum in lunae corniculantis effigiem, deinde in speciem
auctum semenstrem, posteaque in integrum restitutum. Quod
alias non evenit ita perspicue, nisi cum post inaequales cursus
intermenstruum lunae ad idem revocatur. » La description s'ap-
plique bien à une éclipse de Soleil ; mais que penser de sa
longue durée et de ces ténèbres répandues dans toutes les
provinces orientales de l'empire?
A. ^09. Lorsqu'Alaric parut devant Rome. L'obscurcisse-
ment permit d'apercevoir des étoiles qb plein jour. (Schnurrer,
Chronik der Seuchen, 1" part., p. 113.)
A. 536. Justinianus I Caesar imperavit annos triginta octo
(527-565.) Anno imperii nono, deliquium lucis passus est Sol,
quod annum integrum et duos amplius menses duravit, adeo ut
parum admodum de luce ipsius appareret ; dixeruntque homi-
nesSoli aliquid accidisse, quod nunquam ab eorecederet (Gre-
' gorius Abu'l-Faragius , Supplementum Historiœ Dynastiarum ,
éd. Edw. Pocock, 1663, p. 9^). Ce phénomène a dû être fort
semblable à celui de 1783. On a bien adopté en Allemagne
un nom particulier ( Hœhenrauch , brouillard sec) , pour dé-
signer ces affaiblissements dans l'intensité du Soleil ^ mais les
explications que l'on a tenté d'en donner sont loin de s'ap-
pliquer à tous les cas.
A. 567. Justinus II annos 13 imperavit (565-578). Anno im-
perii ipsius secundo, apparuit in cœlo ignis flammans juxta po-
lum arcticum , qui annum integrum permansit ; obtexeruntque
tenebrae mundum ab hora diei nona noctem usque , adeo ut
nemo quidquam videret; deciditque ex aëre quoddam pulveri
miûuto et cineri simile. (Abu'l-Faragius, Suppîem, HiMor.
— 672 —
Dynast,, p. 95). Ainsi il semble que ce phénomène apparut
d'abord comme un orage magnétique, comme une auréole bo-
réale perpétuelle, qui dura toute une année, et à laquelle suc-
cédèrent les ténèbres et une pluie de cendres.
A. 626. Toujours d'après Abu'l - Faragius {ibid. , p. %
et 99) , la moitié du disque solaire resta obscurcie pendant huit
mois.
A. 733. Une année après que les Arabes eurent été rejetés
au delà des Pyrénées, à la suite de la bataille de Tours. Le
Soleil fut obscurci, le 19 août, de manière à causer de l'eftroi
(Schnurrer, Chronik der Seuchen , 1" part, p. 16/i).
A. 807. On vit sur la surface du Soleil une tache qui fut prise
pour Mercure (Reuberus, FeteresScriptores, p. 58. ) Voyez plus
haut, p. 669.
A. 8^0. Du 28 mai au 26 août, on observa le prétendu
passage de Vénus sur le^^oleil. Voyez plus haut, p. i\lxU et 669.
Suivant Assemanus , ce phénomène aurait commencé au mois
de mai 839. De 83^ à 8^1 , régna le calife Al-Motassem , qui
fut le huitième calife, et eut pour successeur Haroun-el-
Watek.
A. 93/i. Dans la curieuse Histoire du Portugal , de Faria y
Souza (1730, p. 1^7;, je trouve ces mots : « En Portugal se viô
sin luz la Tierra por dos meses. Avia el Sol perdido su splen-
dor. » Alors le ciel s'ouvrit por fractura avec beaucoup d'é-
clairs , et le Soleil recouvra subitement tout son éclat.
A. 1091. Le 21 septembre, le Soleil subit un obscurcisse-
ment de trois heures, après lequel il conserva une couleur
particulière. « Fuit eclipsis Solis 11 kal. octob. fere treshoras :
Sol circa meridiem dire nigrescebat. » (Martin Crusius, annales
Suevici, Francof. 1795, t I, p. 279. Voyez aussi Schnurrer,
Chronik der Seuchen, 1'^ part., p. 219. )
A. 1096. Le 3 mars, on reconnut à l'œil nu des taches sur le
Soleil: «signum in Sole apparuit V. Non. Martii feria secunda
incipienlis quadragesimae. » ( Joh. Staindelii, presbyteri Pata-
— 673 —
viensis , Chronicon générale, dans les Herum Boicarum Scrip-
tores d'Oefelius, t. I, 1763, p. ^85.)
A. 1206. D'après Joaquin de Villalba { Epidemiologia es-
panola, Madrid, 1803 , t. I, p. 30), il survint, le dernier jour
de février, une obscurité complète qui dura six heures : « el dia
ultimo del mes de Febrero hubo un éclipse de Sol que durô
sels horas con tanta obscuridad como si fuera média noche.
Siguiéron à este fenomeno abundantes y continuas lluvias. » — Un
phénomène presque semblable est cité par Schnurrer, comme
s'étant produit au mois de juin 1191. Voyez Chronik der Seu-
chen, l^'^ part., p 258 et 265.
A. 12/il. Cinq mois après le combat des Mongols, près de
Liegnitz, « obscuratus est Sol (in quibusdam locis)? et factae
sunt tenebrae , ita ut stellae viderentur in cœlo , circa festum
S. Michaelis, hora nona » ( Chronicon Claustro-Neoburgense ,
du cloître de Neubourg , près de Vienne) . Cette chronique , qui
embrasse l'espace compris entre l'an 218 après J.-C. et l'an
13^8, fait partie du Recueil de Fez^Scriptores rerum Austria-
carum, Lipsiae, 1721 , t. I, p. ^58.
A. 15ii7. Les 23, 2k et 25 avril, c'est-à-dire la veille, le
jour et le lendemain de la bataille de Muhlbach, dans laquelle
l'électeur Jean Frédéric fut fait prisonnier. Kepler dit , à ce
sujet , dans les Paralipom. ad Fitellium , quitus Astronomiœ
pars optica traditur (160/i, p. 259 } : « refert Gemma, pater et
filius , anno 15ii7, ante conflictum Caroli V cum Saxoniae Duce,
Solem per très dies ceu sanguine perfusum comparuisse, ut
etiam stellae pleraeque in meridie conspicerentur. » Voyez encore
Kepler, de Stella nova in Serpentario , p. 113. Il ne sait quelle
cause assigner à ce phénomène : « Solis lumen ob causas quas-
dam sublimes hebetari... » Il suppose que cet effet put être
produit par une « materia cometica lalius sparsa » , et affirme
seulement que la cause devait être placée en dehors de notre
atmosphère , puisque l'on voyait des étoiles en plein midi. >
Schnurrer (C/iromA; der Seuchen, 2^ part, p. 93), prétend,
malgré la visibilité des étoiles, que ce phénomène fut causé
— 674 —
par UD brouillard sec , attendu que Tempereur Charles-Quint
se plaignait avant la bataille , « semper se nebulae densitate
infestari, quoties sibi cum hoste pugnandum sit. * (Lambertus
EoTteusmSf de Bello G ermanico, Basil., 1560, lib. VI, p. 182.)
(20) [page ^^5]. Déjà Horrebow {Basis Astronomiœ , 1735,
§226) se sert de la même expression. La lumière solaire est,
selon lui , « une aurore boréale perpétuelle , produite dans
l'atmosphère du Soleil par l'action contraire des forces magné-
tiques. » Voyez Hanow, dans Joh. Dan. Titius , gemeinnûtzige
Ahhandlungen ûber natûrliche Dinge^ 1768, p. 102.
(21) [page UUS]» Voyez Arago dans les Mémoires des Sciences
mathènr. et phys. de V Institut de France^ année 1811, l'^part.,
p 118; Mathieu, dans Delambre, Histoire de V Astronomie au
xviif siècle, p. 351 et 652 ; Fourier, Éloge de William Herschel,
dans les TV/moîVes de r Institut, i, VI, année 1823 (Paris, 1827),
p. LXXII. L'expérience ingénieuse , faite par Forbes, en 1836,
durant une éclipse de Sol^A, est aussi un fait remarquable, et
qui prouve une grande homogénéité dans la nature de la lu-
mière , qu'elle émane du centre ou des bords. Il fit voir qu'un
spectre solaire exclusivement formé de rayons partant des
bords de l'astre, est identique, pour le nombre et la position
des lignes sombres ou raies qui le croisent , avec celui qui pro-
vient du disque entier. Si , dans la lumière solaire , il manque
des rayons d'une certaine réfrangibilité , ce n'est donc pas,
ainsi que le suppose Sir David Brewster, parce que ces rayons
se sont perdus dans l'atmosphère du Soleil, puisque les rayons
des bords qui ont traversé des couches beaucoup plus épaisses
produisent les mêmes lignes obscures (Forbes, dans les Comptes
rendus de V Académie des Sciences, t. II, 1836, p. 576). Je
réunis à la fin de cette note tout ce que j'ai recueilli en 1847,
dans les manuscrits d' Arago :
« Des phénomènes de la Polarisation colorée donnent la
certitude que le bord du Soleil a la même intensité de lu-
mière que le centre ; car en plaçant dans le Polariscope un
— 675 —
segment du bord sur un segment du centre , j'obtiens (comme
effet complémentaire du rouge et du bleu) un blanc pur.
Dans un corps solide (dans une boule de fer chauffée au rouge)
le même angle de vision embrasse une plus grande étendue au
bord qu'au centre, selon la proportion du Cosinus de l'angle :
mais dans la même proportion aussi, le plus grand nombre
de points matériels émettent une lumière plus faible en raison
de leur obliquité. Le rapport de l'angle est naturellement le
même pour une sphère gazeuse; mais l'obliquité ne produi-
sant pas dans les gaz le même effet de diminution que dans
les corps solides, le bord de la sphère gazeuse serait plus
lumineux que le centre. Ce que nous appelons le disque lumi-
neux du Soleil , est la Photosphère gazeuze , comme je l'ai
prouvé par le manque absolu de traces de polarisation sur le
bord du disque. Pour expliquer donc V égalité d'intensité du
bord et du centre indiquée par le Polariscope, il faut admettre
une enveloppe extérieure qui diminue (éteint) moins la lumière
qui vient du centre que les rayons qurViennent sur le long trajet
du bord à l'œil. Cette enveloppe extérieure forme la couronne
blanchâtre dans les éclipses totales du Soleil. — La lumière qui
émane des corps solides et liquides incandescents , est partielle-
ment polarisée quand les rayons observés forment avec la surface
de sortie un angle d'un petit nombre de degrés; mais il n'y a
aucune trace sensible de polarisation lorsqu'on regarde de la
même manière dans le Polariscope des gaz enflammés. Cette
expérience démontre que la lumière solaire ne sort pas d'une
masse solide ou liquide incandescente. La lumière ne s'engendre
pas uniquement à la surface des corps ; une portion naît dans
leur substance même, cette substance fût -elle du platine.
Ce n'est donc pas la décomposition de l'oxygène ambiant qui
donne la lumière. L'émission de lumière polarisée par le fer
liquide est un effet de réfraction au passage vers un milieu
d'une moindre densité. Partout où il y a réfraction , il y a pro-
duction d'un peu de lumière polarisée. Les gaz n'en donnent
pas, parce que leurs couches n'ont pas assez de densité. — La
— 676 —
Lune, suivie pendant le cours d'une lunaison entière, offre des
effets de polarisation , excepté à l'époque de la pleine lune et
des jours qui en approchent beaucoup. La lumière solaire
trouve, surtout dans les premiers et les derniers quartiers, à
la surface inégale (montagneuse) de notre satellite des inclinai-
sons de plans convenables pour produire la polarisation par
réflexion. »
(22) [page 6/i8] . Sir John Herschel , Cape Observations ,
§ ^25, p. k^lx; Outlines of Jstronomxjy § 395, p. 23^. Voyez
aussi Fizeau et Foucault, dans les Comptes rendus de V Académie
des Sciences, t. XVIII, 184^, p. 860. Il est assez remarquable
que Giordano Bruno , qui mouta sur le bûcher huit ans avant
l'invention du télescope et onze ans avant la découverte des
taches solaires, crut à la rotation du Soleil autour de son axe. En
revanche, il pensait que le centre de cet astre était moins éclatant
que ses bords. Trompé par quelque effet d'optique , il croyait
voir tourner le disque ^'i Soleil et les bords tourbillonnants
s'étendre et se contracter Voyez Christian Bartholmèss, Jordano
Bruno, t. II, 4847, p. 367.
(23) [page 449]. Fizeau et Foucault , Recherches sur l'inten-
sité de la lumière émise par le Charbon dans l'expérience de
Davy , dans les Comptes rendus de l'Académie des Sciences ,
t. XVIII , 1844 , p. 753. — «The most intensely ignited solids
(ignited quicklime in lieutenant Drummond's oxy-hydrogen
lamp ) appear only as black spots on the dise of the sun when
held between it and the eye ( Outlines of Astron. , p. 236).
Voyez aussi Cosmos, t. II, p. 387.
(24) [page 449J. Consultez le Commentaire d'Arago sur les
lettres de Galilée à Marcus "NVelser, et, dans l'Annuaire du
Bureau des Longitudes pour 1842, p. 482-487, ses explications
sur l'influence de la lumière solaire , réfléchie par les couches
atmosphériques, qui semble envelopper d'un voile lumineux
les objets célestes, vus dans le champ d'un télescope.
— 677 -
(25) [page ^50]. Maedler, Astronomie , p. 81.
(26) [page ^51]. Voyez Philosoph. Magazine, sér. III,
t. XXVIII, p. 230; et Poggendorff's Annalen der Physik,
t. LXVIII , p. 101.
(27) [page 453] . Voyez Faraday , sur le Magnétisme
atmosphérique , dans les Experim. Researches on Electricity,
sér. XXV et XXVI ( Philosoph. Transact. for 1851 , l»-* part.) ,
§§ 211 U, 2780, 2881, 2892-2968, et pour l'historique de
cette question, § 2847.
(28) [page 453) Voyez Nervander, d'Helsingfors, dans le
Bulletin de la classe physico-mathématique de V Académie de
Saint-Pétersbourg , t. TU, 1845, p. 30-32, et Buys-Ballot,
d'Utrecht, dans Poggendorifs Annalen der Physik, t. LXVIII,
1846, p. 205-213.
(29) [page 454]. J'ai indiqué par des guillemets, de la
page 454 à la page 458, les emprunts faits aux manuscrits
de Schwabe. Les Observations de 1826 à 1843 ont été seules
publiées dans les Astronom. Nachrichten de Schumacher,
n<'495, t. XXI, 1844, p. 235.
(30) [page 458], Sir John Herschel, Cape Observations,
p. 434.
(31) [page 460]. Cosmos, t. I, p. 224 et 517, note 79.
(32) [page 461]. Gesenius, dans le Recueil intitulé //a// Lsc/ie
Litteratur-Zeitung y 1822, n. 101 et 102 {Erganzungshlatt,
p. 801-812). Chez les Chaldéens, le Soleil et la Lune étaient les
deux divinités principales; aux cinq planètes étaient préposés
de simples génies.
(33) [page 461]. Platon, Timéc, p. 38, éd. Henri Estienne j
1. 1, p. 105 de la traduction de M. H. Martin. Voyez aussi 1. 11^
p» 64.
~ 678 —
(3/i) [page 461]. Boeckh, de Platonico systemate cœlestium
globorum et de vera indole astronomiœ Philolaicœ ^ p. XVII,
et Philolaus, 1819 , p. 99.
(35) [page k6i]. Julius Firmicus Maternus, Astronomiœ H-
bri nil (éd. Pruckner. Basil., 1551, lib. II, cap. U); l'auteur
était contemporain de Constantin le Grand.
(36) [pageZi61]. Humboldt, Monuments des peuples indi-
gènes de r Amérique, t. II, p. /i2-49. Dès l'année 1812, j'ai
signalé les analogies du zodiaque de Bianchini avec celui de
Dendérah. Voyez aussi Letronne , Observations critiques sur les
représentations zodiacales ^ p. 97, et Lepsius , Chronologie der
jEgypter, 18Zi9, p. 80.
(37) [page 461]. Letronne , i'wr Vorigine du Zodiaque grec^
p. 29; Lepsius, Chronologie der jEgypter ^ p. 83. Letronne
conteste , à cause du nombre 7 , l'origine chaldéenne de la se-
maine planétaire.
(38) [page 462]. Vitruve, de Architectural lib. IX, cap. h
Ni Vitruve ni Martian Capella ne prétendent que les Égyptiens
soient les auteurs du système où iMercure et Vénus sont consi-
dérés comme des satellites du Soleil , tournant lui-même autour
de la Terre. On lit dans le premier: « Mercurii autem et Ve-
neris stellae circum Solis radios, Solem ipsum, uti centrum, iti-
neribus coronantes, regressus retrorsum et retardationes fa-
ciunt. »
(39) [page 462]. Martianus Mineus Félix Capella, deNuptiis
philologiœ et Mercurii, lib. VIII, éd. Grotius, 1599, p. 289 :
« Nam Venus Mercuriusque, licet ortus occasusque quotidianos
ostendant, tamen eorum circuli Terras omnino non ambiunt,
sed circa Solem laxiore ambitu circulantur. Denique circulorum
suorum centron in Sole conslituunt, ita ut supra ipsum ali-
quando... » Ce passage, qui est placé sous le titre: « Quod
Tellus non sit centrum omnibus planetis, » a pu, sans doute,
ainsi que l'affirme Gassendi, influer sur les premiers aperçus
— 679 —
de Copernic, plus que les textes attribués au grand géomètre
Apollonius de Perge. Cependant Copernic se borne à dire :
« Minime contemnendum arbitror , quod Martianus Capella
scripsit, existimans quod Venus et Mercurius circumerrant So-
lem in medio existentem. » Voyez le Cosmos , t. II, p. 37/t et
569 (note 34).
(40) [page 462]. Henri Martin (Études sur le Timée de Pla^
ton, t. II, p. 129-133), me semble avoir parfaitement expliqué
le passage de Macrobe au sujet du système des Chaldéens, qui
avait induit en erreur un philologue éminent, Ideler. Voyez
le Mémoire d'Ideler sur Eudoxe (p. 48} et le Muséum der Aller-
thumS'TVissenschaft de Wolf et Buttmann (t. II, p. 443). Ma-
crobe, in Somnium Scipionis, lib. I, cap. 19, et lib. II, cap. 3,
Biponti, 1788, p. 91et 129), ne sait rien du système de Vitruve
et de Martian Capella, d'après lequel Mercure et Vénus seraient
des satellites du Soleil, se mouvant lui-même comme les autres
planètes autour de la Terre immobilq.^Il indique seulement,
en se référant à Cicéron , les différentes opinions sur l'ordre des
orbites décrites par le Soleil, Vénus, Mercure et la Lune, a Ci-
ceroni Archimedes et Chaldaeorum ratio consentit, PlatOiEgyp-
tios secutus est. » Quand Cicéron , dans cette description du
système planétaire (Somnium Scipionis, cap. 4), s'écrie : « Hune
(Solem) ut comités consequuntur , Veneris alter, alter Mercurii
cursus,» il a énuméré précédemment les orbites de Saturne, de
Jupiter et de Mars, et veut seulement faire allusion à la proximité
des orbites du Soleil et des deux planètes inférieures, Vénus et
Mercure. Tous les corps célestes circulent, selon lui, autour de
la Terre , comme autour d'un point fixe. L'orbile d'un satellite
ne peut pas enfermer celle de la planète principale , et cepen-
dant Macrobe dit sans hésitation : «^gypliorum ratio talis est :
circulus, per quem sol discurrit, a Mercurii circulo ut inferior
ambitur, illum quoque superior circulus Veneris includit. » Il
entend donc parler d'orbites parallèles qui s'enveloppent les
unes les autres.
— 680 --
(61) [page 462]. Lepsïixs, Chronologie derj£gypter,V*Tpw^i.,
p. 207.
(42) [page Zi63]. Le nom mutilé de la planète Mars, dans
Vettius ValcDS et dans Cedrenus, correspond probablement au
nom Her-tosch, comme Seb à Saturne. Voyez Lepsius, Chro-
nologie der ALgypter, p. 90 et 93.
(63) [page 663]. On ne peut comparer Aristote [Metaph.,
lib. XII, cap. 8, p. 1073, éd. Bekker), avec le Pseudo-x\ristote,
{de Mundo, cap. 2, p. 392), sans être frappé du contraste qu ils
présentent. Dans le traité de Mundo, on trouve déjà les noms
des planètes Phaéthon» Pyrois, Hercule, Stilbon et Junon, ce qui
indique l'époque d'Apulée et des Antonins, où déjà l'astrologie
chaldéenne était répandue par tout l'empire romain, et où l'on
mêlait des dénominations empruntées à différents peuples.
(Voyez le Cosmos, t. II, p. 16 et 662). Diodore de Sicile dit po-
sitivement que les Chaldéens, dès le principe, nommèrent les
planètes d'après leurs divinités babyloniennes, et que ces noms
passèrent de la sorte chez les Grecs. Ideler [Eudoxe^ p. 68)
attribue, au contraire, ces noms aux Égyptiens, et se fonde sur
l'antique existence d'une semaine planétaire de sept jours
sur les bords du Nil (Handbuch der Chronologie, t. I, p. 180),
hypothèse complètement réfutée par Lepsius [Chronologie der
jEgypter, \.^^ part., p. 131). Je rassemble ici, d'après Ératos-
thène, d'après l'auteur de l'Épinomis, probablement Philippus
Opuntius, d'après Géminus, Pline, Théon de Smyrne, Cléomède,
Achille Tatius, Jules Firmicus et Simplicius, tous les noms sous
lesquels ont été désignées les cinq anciennes planètes, et dont
nous devons surtout la conservation à la manie des rêveries
astrologiques:
Saturne : oaivcov, Némésis; cette planète est aussi désignée
comme un soleil par cinq auteurs. (Voyez Théon de Smyrne,
p. 87 et 165, éd. de Henri Martin) ;
Jupiter : faiôtov, Osiris;
Mars : ûoposiç , Hercule ;
— 681 —
Vénus : luiCT
droit où le Rio de Funzha forme aujourd'hui la célèbre cas-
cade de Tequendama. La vallée inondée fut ainsi mise à sec.
— Ce roman géologique se répète en divers lieux; notamment
dans la vallée alpestre de Cachemire , où le génie puissant qui
chassa les eaux se nomme Kasyapa.
(61) [page ^85] . Charles Bonnet, Contemplation de la Nature,
— 699 —
traduction allemande par Titius, 2^ édition, 1772, p. 1, note 2
(la première édition était de 1766]. Dans l'ouvrage original de
Bonnet , il n'est nullement question de cette loi des distances.
Voyez aussi Bode, Anleilung zur Kenntniss des c/estirnten Him-
meh, 2«édit. 1772, p. ^62.
(62) [page 487]. Si, avec THius , l'on divise en cent parties
la distance du Soleil à Saturne, réputé à cette époque la planète
la plus reculée, et si l'on fixe les distances des autres planètes
ainsi qu'il suit, d'après la prétendue progression U, 4+3,
4 + 6,4 + 12, 4+24, 4+48:
Mercure Vénus 'a Terre Mars Pet. Plan. Jupiter
4/100 7/100 10/100 16/100 28/100 52/100;
on peut , en évaluant la distance de Saturne à 197,3 millions
de milles géographiques, dresser le tableau suivant, qui permet
de juger des erreurs qu'entraîne la loi de Titius :
T
DISTANCES AU SOLEIL
en milles géogr. de 15 au degré
d'après titius.
Mercure 7,9 millions.
Vénus 13,8
La Terre 19,7
Mars 31,5
Les petites planètes 55,2
Jupiter 102,6
Saturne 197,3
Uranus 386,7
Neptune 765,5
DISTANCES VRAIES
en milles géogr. de 15 au degré
8,0 millions.
15,0
20,7
31,5
55,2
107,5
197,3
396,7
621,2
(63) [page 487 J. Voyez Wurm , dans Bode's Asiron. Jahrbuch
fur 1790, p. 168, et Bode , von dem neuen zwischen Mars und
Jupiter entdeckten achlen Bauplplaneten des Sonnensystcms ,
— 700 —
p. Zi5. En adoptant la correction de Wurm, on trouve, pour les
distances des diverses planètes au Soleil, les résultats suivants :
Mercure 387 parties.
Vénus 387 + 293 = 680
La Terre 387 -f 2 X 293 = 973
Mars 387 + /t x 293 = 1559
Les petites planètes. 387 + 8 x 293 = 2731
Jupiter 387 + 16 x 293 = 5075
Saturne 387 + 32 x 293 = 9763
Uranus 387 + 64 x 293 = 19139
Neptune 387 + 128 x 293 = 37891
Afin que l'on puisse apprécier l'exactitude de ces résultats,
j'indique, dans la table ci-dessous, les véritalMes distances
moyennes des planètes, telles qu'elles sont admises aujourd'hui,
en y joignant les chiffres que Kepler regardait comme vrais, il y
a deux siècles et demi, cV^iprès les observations de Tycho. J'em-
prunte ces' nombres à l'ouvrage de Newton, de Mundi Syste-
mate {Opusc. mathem. philos, et philol., \lliU , t. II, p. 11);
PLANÈTES.
VÉRITABLES
DISTANCES.
RÉSULTATS
de
KEPLER.
Mercure
Vénus
0,38709
0,72333
1,00000
1,52369
2,66870
5,20277
9,53885
19,18239
30,03628
0,38806
0,72400
1,00000
1,52350
5,19650
9,51000
*
• » • • •
La Terre
Mars
Junon
Jupiter
Saturne
Uranus
Neptune.
— - 701 —
(6^) Lp. ^91]. Kepler qui, sans doute, par enthousiasme
pour les « divines découvertes » de son contemporain, d'ailleurs
justement célèbre, William Gilbert, regardait le Soleil comme
un corps magnétique, et affirmait que cet astre se mouvait dans
le même sens que les planètes, avant même que les taches
eussent été découvertes, Kepler déclare, dans le Commenta-
riusde molibus Stellœ Marîis (cap. 23), et dans son Astrono-
miœ pars optica (cap. 6) , « que le Soleil est le plus dense de
tous les corps célestes , parce qu'il met en mouvement tous
ceux qui appartiennent à son système. »
(65) [p. 491]. Newton, de Mundi Systemate [Opuscula ,
t. II, p. 17) : «Corpora Veneris et Mercurii majore Solis calore
magis concocta et coagulata sunt. Planetœ ulteriores, defectu
caloris , carent substantiis illis metidlicis et mineris ponderosis
quibus Terra referta est. Densiora corpora quae Soli propiora :
ea ratione constabit optime pondéra Planetarum omnium esse
inter se ut vires. » ^
(66) [p. 496]. Maedler, Astronomie, § 193.
(67) [p. 496] . Humboldt, de Distributione Geographica Plan-
tarum, p. 104, et Tableaux de la Nature, 1. 1, p. 125-127 de
la traduct. franc., publiée par MM. Gide et Baudry, 1851.
(68) [p. 498]. « L'étendue entière de cette variation serait
d'environ 12 degrés, mais l'action du Soleil et de la Lune la ré-
duit à peu près à 3 degrés (centésimaux). » (Laplace, Exposi-
tion du Système du Monde, p. 303. )
(69) [p. 498]. J'ai fait voir ailleurs, par la comparaison de
nombreuses moyennes de température annuelle, que, en Eu-
rope, du Cap Nord jusqu'à Palerme, la différence est à très-
peu près de 0%5 du thermomètre centigrade, par chaque
degré de latitude, tandis que dans ie système de tempé-
rature qui règne sur les côtes d'Amérique entre Boston
et Charlestown , à chaque degré de latitude correspond une
différence de 0%9, Voyez Humboldt, Asie ventrale, t. III, p. 229.
IIL 45
-— 702 —
170) [p. Zt99]. Cosmos, t. II, p. 477 (note 6).
(71) [p. 500]. Voyez Laplace, Exposition du Système du
Monde, 5^ édit. , p. 303, 3Zt5, 403 , 406 et 408, et dans la Con-
naissance des temps pour 1811, p. 386. Voy. aussi Biot, Traité
élémentaire d' Astronomie physique , t. I, p. 61; t. ÏV, p. 90-99
et 614-623.
(72) [p. 501]. Garcilaso, Commentarios Reaies, parte I,
lib. II, cap. 22-26; Prescott, History of Ihe Conquest of Peru,
t. I, p. 126. Les Mexicains , parmi les 20 signes hiéroglyphiques
à l'aide desquels ils désignaient les parties du jour, en avaient
un, nommé OUin-tonatiuh, c'est-à-dire «le signe des quatre mou-
vements du Soleil », pour lequel ils professaient une vénération
singulière. Ce signe présidait au grand cycle ou période
de 52 ans (52 = 4 X 13), et représentait la marche du Soleil
à travers les solstices et les équinoxes, que l'on avait coutume de
figurer en caractères hiéroglyphiques par des traces de pas.
Dans le manuscrit aztèque , peint avec un grand soin, qui était
autrefois conservé dans la Villa du cardinal Borgia, à Vélétri , et
auquel j'ai fait beaucoup d'emprunts importants, on rencontre
avec étonnement un signe astrologique, formé d'une croix, au-
près de laquelle sont placés des signes représentant les parties
du jour , et qui auraient figuré parfaitement les passages du So-
leil au zénith de Mexico (Tenochtitlan), à l'équateur et aux sols-
tices, si les points ou disques ronds que l'on y a joints, afin de
marquer les retours périodiques, étaient complets pour ces
trois passages. {Eumholdi, f^ues des Cordillères, ])\. XXXVII,
n°8,p. 164, 189 et 237). Le roi de Tezcuco,Nezahualpilli, passion-
nément adonné à l'observation des astres, et appelé fils du jeûne,
parce que son père s'était soumis au jeûne longtemps avant la
naissance du fils qu'il appelait de tous ses vœux, avait élevé un
édifice que Torquemada nomme un peu complaisamment un
observatoire, et dont il vit encore les ruines {Munarquia In-
diana, lib. II, cap. 64). Dans la Raccolta di Mendoza, nous
voyons représenté un prêtre qui observe les étoiles : cette oc-
— 703 —
cupation est indiquée par une ligue ponctuée qui va de l'étoile à
rœil de l'observateur {Fucs des Cordillères ^ pi LVIII , n° 8,
p. 289.)
(73) [p 503J Voyez John Herschel, on the astronomical
Causes which may influence geolocjical Phœnomena , dans les
Transactions of the Geological Society of London, 2^ série, t. III,
1'' part., p. 298, et Traité d' astronomie, traduit par M. Cour-
not, § 315.
(7Zi) [ p. 50Zt). Arago, dans VJnnuaire du bureau des Longi-
tudes ^qvlï 183Zi, p. 199.
(75) [p. 505]. « Il suit du théorème dû à Lambert, que la
quantité de chaleur envoyée par le Soleil à la Terre est la même
en allant de l'équinoxe du printemps à l'équinoxe d'automne
qu'en revenant de celui-ci au premier. Le temps plus long que
le Soleil emploie dans le premier trajet est exactement com-
pensé par son éloignement aussi plus grand ; et les quantités de
chaleur qu'il envoie à la Terre , sont les mêmes pendant qu'il
se trouve dans l'un ou l'autre hémisphère , boréal ou austral.»
(Poisson, sur la stabilité du Système planétaire^ dans la Connais-
sance des temps \)om 1836, p. 5^ )
(76) [p. 505]. Voyez Arago, dans V Annuaire pour 183^,
p. 200-20/4. -^ L'excentricité, dit Poisson {Connaissance des temps
pour 1836, p. 38 et 52), ayant toujours été et devant toujours de-
meurer très-petite , l'influence des variations séculaires de la
quantité de chaleur solaire reçue par la Terre sur la tempéra-
ture moyenne paraît aussi devoir être très- limitée. On ne sau-
rait admettre que l'excentricité de la Terre , qui est actuelle -
ment environ un soixantième, ait jamais été ou devienne jamais
un quart, comme celle de Junon ou de Pallas. »
(77) [p. 506]. Outiines of Astron. , $ 1x^2.
(78) [p. 509]. Ow^/mes , § 5Zi8.
(79) [p. 509]. Voyez, dans Y Astronomie de Maedler, p. 218,
- 704 —
la tentative faite par cet astrouonie pour déterminer avec un
grossissement de 1000 fois, lediamètre de Vesta, qu'il évalue
environ à UO rayriamètres.
(80) [p. 511]. J'avais pris pour base des calculs que j'ai
donnés dans le premier volume du Cosmos (p. 106), le demi
diamètre équatorial de Saturne.
(81) [p. 511], Voyez le Cosmos, t. III, p. 236.
(82) [p. 511]. J'ai exposé en détail, dans le Tableau de la
Nature placé en tête du Cosmos (t. I, p. 161-163) , tout ce qui
est relatif au mouvement de translation du Soleil ; voyez aussi
t. III, p. 218.
(83) [p. 5U]. Cosmos, t. III, p. a^O.
(8/i) [p. 515]. Voyez les observations faites par le mathéma-
ticien suédois , Bigerus Va^senius , à Golhenbourg , pendant
l'éclipsé totale du 2 mai 1733, et le commentaire qu'en a donné
Arago dans l'Annuaire du Bureau des Longitudes pour 18^6,
p. ^^1 et /i62. Le D' Galle, qui observait à Frauenbourg le
28 juillet 1851, vit « que de petits nuages flottant librement
étaient rattachés par trois filaments déliés, ou davantage, h la
gibbosité crochue. »
(85) [p. 515] Voyez daus le même ydu disque de la planète.»
{Manuscrits de 1847.)
(98) [page 520], Wilhelm Béer et Maedler, Beitrœge zurphysis-
chen Kenntniss der himmlischen Kœrper, p. 148. Le prétendu
satellite de Vénus, que Fontana, Dominique Cassini et Short
prétendirent avoir découvert, pour lequel Lambert calcula des
tables , et que l'on dit avoir vu à Creefeld au milieu du disque
solaire , trois heures au moins après l'immersion de Vénus {Ber-
linerJahrbuch,lllS, p. 186), est une de ces fables astronomiques
nées à une époque où la critique avait encore fait peu de pro-
grès.
(99)[page 520]. Philosophical Transactions, M 9o, t. LXXXVI,
p. 214.
(100) [page 523]. Cosmos, t. III, p. 101 et 313 (note 62).
(1) [page 523]. «La lumière de la Lune est jaune, tandis que
celle de Vénus est blanche. Pendant le jour la Lune paraît blan-
che, parce qu'à la lumière du disque lunaire se mêle la lumière
— 708 —
bleue de cette partie de l'atmosphère que la lumière jaune de
la Lune traverse. » ( Arago, Manuscrits de 1847). Les couleurs
les plus réfrangibles du spectre solaire, comprises entre le
bleu et le violet , peuvent former du blanc, lorsqu'elles sont
combinées avec les couleurs moins réfrangibles, comprises
entre le rouge et le vert. Voyez le Cosmos^ t. III, p. 361
(note 47) .
(2) [page 524]. Forbes, on the Re fraction and Polarisation of
Beat, dans les Transactions ofthc Royal Society of Edinhurgh,
t. XIII, 1836, p. 131.
(3) [page 524] . Lettre de M. Melloni à M. Arago sur la puissance
calorifique de la lumière de la Lune dans les Comptes rendus ,
t. XXII, 1846, p. 541-544. Voyez aussi, pour les données
historiques, le Jahresbericht der physikalischen Gesellschaft zu
Berlin,i. II, p. 272t — Il m'a toujours semblé digne de remarque
que dans les temps les plijs reculés, où la chaleur ne se recon-
naissait qu'à l'impression qu'elle produisait sur les sens, la Lune
ait la première fait naître l'idée que l'on pouvait rencontrer
séparément la lumière et la chaleur. En sanscrit, la Lune, hono-
rée chez les Hindous comme la reine des étoiles , se nomme
Vastre froid { 'sîtala , hima}, ou bien encore Vastre d'où le froid
rayonne (himân' su), tandis que le Soleil, représenté avec des
rayons de lumière qui tombent de ses mains, est appelé le
créateur de la chaleur (nidâghakara). Les taches de la Lune
dans lesquelles les peuples occidentaux croient reconnaître un
visage , représentent, d'après les idées indiennes , un chevreuil
ou un lièvre ; d'où viennent au Soleil les noms de porteur de
chevreuil (mrigadhara) ou de porteur de lièvre (sa'sabhrit).
Voyez Schiitz, five Cantos ofthe Bhatli-Kâvya,lSZl, p. 19-23. —
On s'est plaint, chez les Grecs, de ce que «la lumière solaire, ré-
fléchie par la Lune , perdait toute sa chaleur, et qu'il ne nous
arrivait qu'un faible reste de son éclat. » (Plutarque, de Fa-
de quœ in orbe Lunœ apparet^ éd. Wyttenbach, t. IV, Oxon. ,
1797, p. 793). On lit dans Macrobe [Comment, in SomniumSci-
— 709 —
pionis, lib. 1, cap. 19, Biponti, 1788, 1. 1, p. 93 et9a) : « Luna
speculi instar lucem qua illustratur.... rursus emittit; imllum
tamen ad nos perferentem sensum caloris : quia lucis radius ,
cum ad nos de origine sua, id est de Sole, pervenit, naturam
secum ignis de quo nascltur devehit -, cum vero in LunaB corpus
infunditur et inde respiendet, solam refundit claritateui, non
caloreni. » Comp. Macrobe, Saturnal. , lib. VII, cap. 16 , Bi-
ponti, t. II, p. 277.
{h) [page 525]. JMaedler, Aslronomie ^ § 112.
(5) [page 525]. Voyez Lambert, sur la lumière cendrée de la
Lune, dans les Mémoires de VJcadémie de Berlin^ année 1773,
p. /i6 : « La Terre vue des planètes pourra paraître d'une lu-
mière verdâtre , à peu près comme IMars nous paraît d'une cou-
leur rougeâtre. » Nous ne pouvons cependant pas adhérer à l'hy-
pothèse proposée par ce savant ingénieux, que la planète Mars
est couverte d'une végétation rouge^^^emblable aux buissons du
Bougainvillaea(Humboldt, Tableaux de la Nature, t. II, p. 323,
de la traduct. franc. , publiée par MM. Gide et Baudry, 1851) . —
«Quand, dans l'Europe centrale, la Lune, peu avant son renou-
vellement , est placée le matin à l'Orient , elle reçoit la lumière
terrestre principalement des grands plateaux de l'Asie et de l'A-
frique. Lorsque, le soir, la nouvelle Lune est au contraire placée
à l'Ouest, elle ne peut recevoir qu'uu reflet moins intense de la
lumière terrestre , qui lui est envoyée par le continent améri-
cain, moins étendu que l'autre, et surtout par l'Océan. » (Wiihelm
Béer et Maedler, der Mond nach seinen cosmischen Ferhœltnis-
sen, $ 106, p. 152).
(6) [page 525] . Séance de V Académie des Sciences, \e 5 août
1833 : « M. Arago signale la comparaison de l'intensité lumineuse
de la portion de la Lune que les rayons solaires éclairent direc-
tement, avec celle de la partie du même astre qui reçoit seule-
ment les rayons réfléchis par la Terre. Il croit, d'après les
expériences qu'il a déjà tentées k cet égard, qu'on pourra,
— 710 —
avec des instruments perfectionnés, saisir dans la lumière cen-
drée les différences de l'éclat plus ou moins nuageux de l'at-
mosphère de notre globe. Il n'est donc pas impossible ,, malgré
tout ce qu'un pareil résultat exciterait de surprise au premier
coup d'oeil , qu'un jour les météorologistes aillent puiser dans
l'aspect de la Lune des notions précieuses sur l'état moyen de
diaphanéité de l'atmosphère terrestre, dans les hémisphères
qui successivement concourent à la reproduction de la lumière
cendrée. »
(7) [page 526]. Venturi, Essai sur les ouvrages de Léonard
de Finci, 1797, p. 11.
(8) [page 526]. Kepler, Paralipomena vel Astronomiœ pars
optica, 160Zi, p. 297.
(9) [page 527]. «On conçoit que la vivacité de la lumière
rouge ne dépend pas uniquement de l'état de l'atmosphère, qui
réfracte , plus ou moins affaiblis , les rayons solaires , en les
infléchissant dans le cône d'ombre, mais qu'elle est modifiée
surtout par la transparence variable de la partie de l'atmo-
sphère à travers laquelle nous apercevons la Lune éclipsée. Sous
les Tropiques, une grande sérénité du Ciel, une dissémination
uniforme des vapeurs^ diminuent l'extinction de la lumière que
le disque lunaire nous renvoie. » (Humboldt, Foyage aux Ré-
gions équinoxiales,X. III, p. oUUy et Recueil d' Observât astrono-
miques, t. II, p. l/i5.) On lit dans Y Annuaire pour 18Z|.2, p. 528,
celte remarque d'Arago: «Les rayons solaires arrivent à notre
satellite par l'effet d'une réfraction et à la suite d'une absorption
dans les couches les plus basses de l'atmosphère terrestre;
pourraient-ils avoir une autre teinte que le rouge ? »
(10) [page 527]. Babineî, dans une Notice sur les différentes
proportions des lumières blanche, bleue ou rouge, qui se pro-
duisent lors de l'inflexion des rayons, présente cette coloration
rouge comme une conséquence de la diffraction ; voyez le
Répertoire d'Optique moderne de Moigno , 1850, t. IV, p. 1656.
— 711 —
« La lumière diffractée , dit Babinet , qui pénètre dans l'ombre
de la Terre , prédomine toujours et même a été seule sensible.
Elle est d'autant plus rouge ou orangée qu'elle se trouve plus
près du centre de l'ombre géométrique ; car ce sont les rayons
les moins réfrangibles qui se propagent le plus abondamment
par diffraction, à mesure qu'on s'éloigne de la propagation
en ligne droite. » D'après les ingénieuses recherches aux-
quelles s'est livré Magnus , à l'occasion d'une discussion entre
Airy et Faraday ^ les phénomènes de la diffraction ont aussi
lieu dans le vide. Voyez sur les explications par la diffrac-
tion, Arago, dans V Annuaire du Bureau des Longitudes pour
1846, p. /i52-a55.
(11) [page 527]. On lit dans Plutarque ( de Fade in orbe
Lujiœ, éd. Wyttenbach, t. IV, p. 780-783) que «le changement
de couleur de la Lune qui, ainsi que l'affirment les mathémati-
ciens, passe du noir au rouge et à une^ teinte bleuâtre, suivant
l'heure où se produit l'éclipsé , ]irouve suffisamment que
l'aspect enflammé ( àvOpaxwoEç ) qu'elle présente , lorsqu'elle est
éclipsée vers minuit ;, ne peut être considéré comme une pro-
priété inhérente au sol de la planète. » Dion Gassius , qui s'est
beaucoup occupé des éclipses de Lune et des remarquables édits
dans lesquels l'empereur Claude annonçait d'avance les dimen-
sions de la partie éclipsée, appelle l'attention sur la couleur de
la Lune, si différente d'elle-même, durant la conjonction.
« L'éclipsé qui eut lieu cette nuit, dit-il (lib. LXV, cap. 11 ;
cf. lib. LX , cap. 26) , jeta le trouble dans le camp de Vitellius;
mais ce qui alarma surtout les esprits, ce fut moins l'obscurité,
qui eût pu déjà paraître de triste présage, que la couleur rouge,
noire, et toutes les teintes lugubres par lesquelles la Lune passa
successivement. »
(12) [page 527]. Schvœter,Selenotopographische Fragmente,
l>«part., 1791, p. 668; 2« part ,1802, p. 52,
(13) [page 528]. hessel, ueber eine angenommene Almosphœre
- 712 —
des Mondes , dans les Aslronomische Nachrichten de Schuma-
cher, n° 263 , p. lxiÇf'lx20. Voyez aussi Béer et Maedler, der
i)fond,etc.,§83etl07, p. 133 et 153, et Arago,dansr ^/znwaire
pour 18^6, p. 3^6-353. On a souvent présenté comme preuve
de l'existence d'une atmosphère le plus ou moins de netteté
avec laquelle on aperçoit quelques accidents de la surface de la
Lune , et les « brouillards qui paraissent traverser ses vallées. »
C'est de toutes les raisons la moins soutenable , à cause des
variations continuelles qui modifient la transparence des cou-
ches supérieures de notre propre atmosphère. Herschel le père
s'était déjà prononcé pour la négative , d'après des considéra-
tions tirées de la forme que présentait l'une des pointes du
croissant lunaire, dans Téclipse de Soleil du 5 septembre 1793
{Philosoph. Tramact., t. LXXXIV, p. 167).
(14) [page 528]. Maedler, dans le Jahrbuch de Schumacher,
pour 1840, p. 188. -^.
(15) [page 529]. Sir John Herschel (Ow^/mes, p. 247) ap-
pelle l'attention des astronomes sur l'immersion des étoiles
doubles , dans le cas où la proximité des astres accouplés qui
forment chaque système ne permet pas au télescope de les sé-
parer.
(16) [page 529]. Plateau, sur V Irradiation, dans les Mé-
moires de V Académie royale des Sciences et Belles- Lettres de
Bruxelles^ t. Xï, p. 142 , et Ergànzungsband zu Poggendorff's
Annalen, 1842, p. 79-128, 193-232 et 405-443. La cause
probable de l'irradiation est une excitation produite par la lu-
mière sur la rétine, et qui s'étend un peu au delà des contours
de l'image.
(17) [page 529]. Voyez l'opinion d'Arago, dans les Comptes
rendus, t. VIII, 1839, p. 713 et 883 : « Les phénomènes d'ir-
radiation signalés par M. Plateau sont regardés par M. Arago
comme les effets des aberrations de réfrangibilité et de sphéri-
cité de l'œil, combinés avec l'indistinction de la vision , con-
séquence des circonstances dans lesquelles les observateurs se
sont placés. Des mesures exactes prises sur des disques noirs
à fond blanc et des disques blancs à fond noir, qui étaient pla-
cés au Palais du Luxembourg, visibles à l'Observatoire, n'ont
pas indiqué les effets de l'irradiation. »
(18) [page 529J. Plutarque , de Facie in orbe Lunœ , éd.
Wyttenbach, t. IV, p. 786-789. L'ombre du mont Athos,
qu'a vue aussi le voyageur Pierre Belon (Observations de Singu-
larités trouvées en Grèce, Asie, etc., 155^, liv. I, chap. 25) ,
atteignait la vache d'airain élevée sur la place de la ville de
Myrine , dans l'île de Lemnos.
(19) [page 530]. Pour les témoignages de la visibilité de ces
quatre régions , voyez Béer et Maedler , der Moud nach seinen
Kosmischen Ferhœltnissen, p. 191, 1h\, 290 et 338. Il esta peine
utile de rappeler que j'ai tiré tout ce qui a rapport à la topogra-
phie lunaire, de l'excellent ouvrage de mes deux amis, dont l'un,
AVilhelm Béer , a été malheureusement'finlevé à la science par
une mort prématurée. — Afin de s'orienter plus facilement, il est
bon de consulter la belle carte synoptique que Maedler a don-
née en 1837, 3 ans après la grande carte lunaire qu'il a publiée
en quatre feuilles séparées.
(20) [page 530]. Plutarque, de Facie in orbe Lunœ , p. 726-
729, Wyttenb. Ce passage n'est pas non plus sans intérêt pour
la géographie ancienne. Voyez Humboldt, Examen critique de
l'hist. de la Géographie^ t. I , p. 1^5. Quant aux autres opinions
proposées par les anciens, on peut voir celles d'Anaxagore et de
Démocrite dans Plutarque, de Placitis Philosoph. , lib. II, cap 25,
et celle de Parménide dans Stobée, p. /il9, Zi53, 516 et 563,
éd. Heeren. Comp. Schneider, Eclogœ physicœ , 1. 1, p. 433-4^3.
D'après un passage fort remarquable de Plutarque , dans la
Yie de Nicias (chap. 23), Anaxagore lui-même, qui appelle la
Lune une autre Terre , aurait fait un dessin du disque lunaire.
Voyez aussi Origène , Philosophunœna, cap. 8, éd. Miller,
1851, p. ik. Je fus fort étonné un jour, lorsque montrant les
— 7ia —
taches de la Lune dans un grand télescope à un Persan natif
dlspahan, qui bien que fort éclairé, n'avait certainement jamais
lu un livre grec , je lui entendis énoncer l'opinion d'Agésianax,
comme très-répandue dans son pays. «Ce que nousvoyonslàdans
la Lune, disait-il, c'est nous-mêmes, c'est la carte delà Terre.»
Un des interlocuteurs du Traité de Plutarque , sur la Face de
la Lune, ne se fût pas exprimé autrement. S'il était possible de
supposer des hommes habitant sur notre satellite sans air et
sans eau, la Terre tournant sur elle-même avec ses taches, dans
un ciel presque noir même en plein jour, leur présenterait une
surface quatorze fois plus grande que n'est pour nous la pleine
Lune et leur ferait l'effet d'une mappemonde fixée toujours au
même point du firmament; mais sans doute les obscurcissements,
produits sans cesse par les variations de notre atmosphère, effa-
ceraient les contours des continents et entraveraient un peu
les études géographiques. Voyez Mœdler, astronomie , p. 169,
et J. Herschel , Outlines of Astron. , § Zi36.
(21) [page 532]. Béer et Mœdler, der Moud, p. 273.
(22) [page 533]. Schumachers Jahrbuch fiir 18Zil , p. 270.
(23) [page 534]. Maedler, ^5^ro?iomie, p. 166.
{2h) [page 535]. Le plus haut sommet de l'Himalaya et
jusqu'à présent de toute la Terre , le Kinchinjinga , a , d'après
les mesures récentes de Waugh, 6406 toises de haut, ou
8587 mètres. Le plus haut sommet des montagnes de la Lune ,
a d'après Maedler, 3800 toises^ or comme le diamètre de la Lune
est de 337 myriamètres, et celui de la Terre de 1274, il en ré-
sulte que la hauteur des montagnes lunaires est au diamètre
delà Lune comme 1 esta 454, celle des montagnes de la Terre
au diamètre terrestre comme 1 est à 1481.
(25) [page 536]. Consultez , au sujet des six altitudes dé-
passant 3000 toises, Béer et Maedler, der Mond, p. 99, 125^
234, 242, 330 et 331.
(26) [page 537]. Robert Hooke, Micrographia , 1667,
— 715 —
obs. LX , p. 2^2-2/i6. « Thèse seem to me to hâve been the
effects of sorae motions within the body of the Moon , analo-
gous to our Earthquakes , by the éruption of which , as it has
thrown up a brim or ridge round about, higher than the ambient
surface of the Moon , so has it left a hole or Répression in the
middle, proportionably lower. » Hooke s'exprime ainsi au sujet
de ses expériences sur le bouillonnement produit par l'albâtre :
« Presently ceasing to boyl, the whole surface will appear ail
over covered with small pits, exactiy shaped like thèse of the
Moon. — The carthy part of the Moon has been undermined or
heaved up by éruptions of vapours , and thrown into the same
kind of figured holes as the powder of alabaster. It is not im-
probable also , that there may be generated , within the body
of the Moon , divers such kind of internai fires and beats , as
may produce exhalations. »
(27) [page 538]. Cosmos, t. II, p. 602 (note /a3. )
(28) [page 538]. Béer etMaedler, deï: Mond, p. 126. Ptolémée
a 2Zimillesde diamètre, Alphonse et Hipparque en ont 19.
(29) [page 539]. On signale comme exceptions Arzachel et
Hercule, dont le premier a un cratère au sommet, et le second
un cratère latéral. Ces points , intéressants pour la géognosie ,
méritent d'être étudiés de nouveau avec des instruments plus
parfaits {SchYceier, S elenotopographische Fragmente, 2® part.,
pi. Uk et 68, fig. 23). On n'a jusqu'ici rien observé d'analogue
aux coulées de laves qui s'amoncellent dans nos vallées. Les
rayons qui partent de l'Aristote , suivant trois directions diflfé-
rentes, sont des chaînes de collines (Béer et Maedler, der Mond,
p. 236).
(30) [page 539]. Béer et Mœdler der Mond, p. 151; Arago dans
V Annuaire pour 18^2, p. 526; voyez aussi Emmanuel Kant,
Sçhriftender Physischen Géographie, 1839, p. 393-Zi02. D'après
des recherches nouvelles et plus approfondies , Thypothèse des
changements temporaires produits dans le relief de la Lune, tels
que la formation de nouveaux pics centraux ou de cratères dans
— 7U) —
le Mare crisium , dans Hévélius et dans Cléomède, est Tefifet
d'une illusion semblable à celle par laquelle on s'est figuré voir
des éruptions volcaniques dans la Lune. Voyez Schrœter, Seleno-
topograph. Fragmente, l'^part., p. ^12-523; 2'' part. ^ p. 268-
272. -- Il est généralement difficile de résoudre la question
de savoir quels sont les plus petits objets dont la hauteur ou
l'étendue puisse être mesurée dans l'état actuel des instruments.
D'après le jugement du D' Robinson sur le superbe réflecteur
de Lord Rosse , on peut , à l'aide de ce télescope , distinguer
avec beaucoup de netteté un espace de 220 pieds. Maedler a
mesuré dans ses observations des ombres de 3 secondes;
ce qui, d'après certaines hypothèses sur la position de la mon-
tagne et la hauteur du Soleil, correspondrait à une élévation de
120 pieds seulement. Mais en même temps Maedler fait remar-
quer que l'ombre doit avoir une certaine largeur pour
être visible et mesurable. L'ombre projetée par la grande
pyramide de Chéops auf ait à peine , en raison des dimensions
connues du monument, un neuvième de seconde de largeur,
même dans la partie la plus large ; elle serait donc invisible
pour nous; voyez Mœdler, dans le Jahrbuch de Schumacher
pour 18^1 , p. 26Zi. Arago rappelle qu'au moyen d'un gros-
sissement de 6000 fois , qui à la vérité ne pourrait être ap-
phqué à la Lune avec un résultat proportionné à sa puissance,
les montagnes lunaires nous feraient à peu près l'efl'et du
mont Blanc, vu à l'œil nu du lac de Genève.
(31) [page 539]. Les sillons ou rigoles sont en petit nombre,
et ne dépassent jamais une longueur de 22 myriamètres. Ces
sillons sont quelquefois bifurques : c'est le cas de Gassendi.
Quelquefois aussi, mais moins souvent, ils ont l'apparence de
veines , comme Triesnecker. Us sont toujours lumineux ; ils
n'enjambent pas sur les montagnes et ne courent qu'a tra-
vers les plaines ; leurs extrémités n'ofi'rent rien de particulier,
et n'ont ni plus ni moins de largeur que la parlie intermé-
diaire (Béer et Maedler, der Movd, p, 131 , 225 et 2^9).
— 717 —
(32) [page 540]. Voyez mon /i^sai aur la vie nocturne dea
animaux , dam les forêts du IVouveau Monde ( Tableaux de la
Nature, t. I, p. 319 de la traduct. franc., publiée par MM. Gide
etBaudry). Les spéculations de Laplace ,car ce ne furentjamais
des idées arrêtées) au sujet d'un clair de Lune perpétuel (£^x/9osi-
tion du système du Monde ^ 1824, p. 232), ont été contredites
dansun Mémoire de Liouville, sur un cas particulier du problème
des trois corps. « Quelques partisans des causes finales , dit
Laplace , ont imaginé que la Lune a été donnée à la Terre pour
l'éclairer pendant les nuits; dans ce cas, la nature n'aurait
point atteint le but qu'elle se serait proposé, puisque nous
sommes souvent privés à la fois de la lumière du Soleil et de celle
de la Lune. Pour y parvenir, il eût suffi de mettre à l'origine
la Lune en opposition avec le Soleil dans le plan même de
l'écliptique, à une distance égale à la centième partie de la
distance de la Terre au Soleil, et de donner à la Lune et à la
Terre des vitesses parallèles et proportionnelles à leurs distances
à cet astre. Alors la Lune , sans ce^se en opposition au Soleil,
eût décrit autour de lui une ellipse semblable à celle de la
Terre ; ces deux astres se seraient succédé l'un à l'autre sur
l'horizon ; et comme à cette distance la Lune n'eût point été
éclipsée, sa lumière aurait certainement remplacé celle du So-
leil. » Liouville trouve au contraire « que, si la Lune avait oc-
cupé à l'origine la position particulière que 1 illustre auteur de
la Mécanique céleste lui assigne , elle n'aurait pu s'y maintenir
que pendant un temps très-court. »
(33) [page 540]. Voyez, sur le transport des terrains par le.s
marées, Sir Henry de la Bêche, Geological Manual , 1833,
p. 111.
(34) [page 541]. A.rago, sur la question de savoir si la
Lune exerce sur notre atmosphère une infl'uence appréciable ,
dans V Annuaire pour 1833 , p. 157-206. Les principales auto-
rités citées sont : Scheibler ( Uatersuchungen ûber Kinjluss des
Mondes auf die Ferdnderungen in unserer Atmosphdre , 1830,
TIT. 46
— 718 —
p. 20:, Flaugergues {Fingt années d'observations à Fiviers ,
dans la Bibliothèque universelle, Sciences et Arts, t. XL, 1829;
p. 265-28S , et dans le Recueil de Kastner : ArcUv fur die ge-
sammte Natmiehre, t. XVII, 1829, p. 32-50), etEisenlohr, dans
les Poggendorffs Annalen der Physik, t. XXXV, 1835, p. 1^1-
160 et 309-329. — Sir John Herschel croit très-probable «qu'il
règne sur la Lune une très-haute température, fort au-dessus de
l'ébullition de l'eau , parce que la surface de cet astre est ex-
posée à l'action du Soleil , durant quatorze jours , sans inter-
ruption et sans rien qui l'adoucisse. La Lune doit donc , en
opposition ou peu de jours après, devenir, à quelque degré
que ce soit (in some small degree), une source de chaleur
pour la Terre ; mais cette chaleur émanant d'un corps dont la
température est encore bien loin de l'incandescence (below the
température of ignition), ne peut atteindre la surface de la
Terre, attendu qu'elle est absorbée dans notre atmosphère, où
elle transforme les vapeurs vésiculaires et visibles en vapeurs
transparentes. » Sir John Herschel considère le phénomène
de la dissolution rapide des nuages sous l'influence de la
pleine Lune , quand le Ciel n'est point trop couvert ,
comme un fait météorologique, « confirmé, ajoute-t-il, par
les expériences de Humboldt , aussi bien que par la croyance
très-générale des navigateurs espagnols dans les mers tropi-
cales, j) Voyez Report of the fifteenth Meeting of the Brilish
Association for the advancement of Science, 1846, Notices,,
p. 5 , et Outlines of Astronomy, p. 261.
(55) [page 5/il] . Béer et Maedler , Beitrœge zur physischen
Kenntniss des Sonnensystems, 1841, p. 113; les chiffres indiqués
résultent d'observations faites en 1830 et en 1832. Voyez aussi
Maedler, Astronomie, 1849, p. 206. La première et importante
correction , apportée à la durée de la rotation de Mars , qui
avait été évaluée par Dominique Cassini à 24** 40', est due aux la-
borieuses observations poursuivies par William Herschel de 1777
à 1781; ces observations donnèrent pour résultat 24** 39' 21",7.
— 719 —
Kmiowsky, enl821, avait trouvé 24*" 36'^0", résultat très-voisin
de celui qu'a obtenu Mœdler. La première observation faite par
Cassini sur la rotation d'une tache de Mars , paraît avoir eu lieu
peu de temps après l'année 1670 (Delambre, Histoire de V As-
tronomie moderne^ t. Il, p. 69^); mais dans le Mémoire fort rare
de Kern , de Scintillatione Stellarum, Wittenberg^ 1686 , § 8,
je trouve mentionnés comme ayant découvert la rotation de Mars
et celle de Jupiter : « Salvator Serra et le Père Égidius Franciscus
de Cottignez^ astronomes du Collège romain. »
(36) [page 5^2]. Laplace , Exposition du Système du Monde,
p. 36. Les mesures très-imparfaites de Schrœter sur le diamètre
de Mars attribuent à cette planète un aplatissement de 1/80
seulement.
(37) [page 5^2]. Béer et Maedler, Beitrœge, etc., p. 111.
(38) [page 542 J. Sir John Hers^el, Outlines of Astron,,
§ 510. ''
(39) [page 542]. Béer et Maedler, Beitrœge, etc., p. 117-125.
(40) [page 543]. Maedler, dans les Astronom, Nachrichten
de Schumacher^ n° 192.
(41) [page 543]. Cosmos, t. III, p. 468 et 469. Voyez aussi
sur l'ordre chronologique dans lequel se sont succédé les dé-
couvertes des petites planètes, ibid, p. 466 et 507; sur leur
grandeur relativement à celle des astéroïdes météoriques ou
aérolithes, p. 473; enfin sur l'hypothèse d'après laquelle Ke-
pler comblait à l'aide d'une planète la grande lacune qui sépare
Mars de Jupiter , hypothèse qui n'a d'ailleurs en aucune façon
contribué à amener la découverte de la première petite
planète, de Cérès, p. 482-488 et 698-700 (notes 6 «-63). Je
ne crois pas juste le reproche sévère adressé à un illustre
philosophe, parce qu'ignorant la découverte de Piazzi,àune
époque où elle pouvait, il est vrai, lui être connue depuis cinq
mois, il contestait non pas la probabilité mais bien la nécessité
-» 720 —
(Tune planète existant entre Mars et Jupiter. Hogel , en effet ,
(tans la Dissertation de Orhîtis Planetarum , qu'il écrivit durant
le printemps et Tété de 1801 , traite des idées des anciens sur
les distances respectives des Planètes ; et citant la série des
nombres dont parle Platon dans le Timée (p. 35, Estienne) :
1.2.3. /1.9.8.27.... (Voyez Cosmos t. lïl, p. 692, note 51),
il conteste qu'il faille nécessairement admettre une lacune.
Il dit simplement : « Ouae séries si verior naturœ ordo sit ,
quam arithmetica progressio , inter quartum et quintum locum
niagnum esse spatium , neque ibi planetam desiderari apparet. »
(Hegel's ff'erke, t. X\I, i83/i, p. 28^ voyez aussi Rosenkranz,
HegeV^Leben, 18/iZi, p. 154). Kant, dans le spirituel écrit inti-
tulé: Naturgeschichte des Himmels , 1755 , se borne à dire que
lors de la formation des Planètes , Mars devait sa petitesse à
l'immense puissance attractive de Jupiter. Il ne fait allusion
qu'une fois et très-vaguement aux «membres du système so-
laire, qui sont fort disianls" les uns des autres, et entre lesquels
on n'a pas encore trouvé les intermédiaires qui les séparent. »
{ Emmanuel Kant , Sdmmlliche ÏVerke , 6^ part., 1839, p. 37 ,
110 et 196.)
(42) [page 544]. Voyez, au sujet de l'influence que le perfec-
tionnement des cartes célestes peut avoir sur la découverte des
petites planètes, le Cosmos, t. III, p. 126 et 127.
(43) [page 545]. D'Arrest , ueber das System der Kleinen
Planeten zwischen Mars und Jupiter, 1851 , p. 8.
(44) [page 545]. Cosmos , t. III, p. 468 et 502.
(45) [page 547]. Benjamin Abthorp Gould (aujourd'hui i\
Cambridge, dans l'État de Massachusetts), Untersuchungen ueber
die gegenseitige Lage der Bahnen zwischen Mars und Jupiter^
1848, p. 9-12.
(46) [page 547]. D'Arrest , ueber das System der Kleinen
Planeten, p. 30.
— 721 —
(M) [page 5/i8]. Zach, Monatliche Correspondenz , l. YI ,
p. 88.
(Zi8) [page 5^8]. Gauss, dans le même Recueil, t. XXVI,
p. 299.
(U9) [page 5^9]. M. Daniel Kirkwood, de l'Académie de
Pottsville , a cru pouvoir tenter de reconstituer la planète bri-
sée, au moyen des fragments qui en restent , comme on recom-
pose les animaux antédiluviens. Il est arrivé ainsi à lui assigner
un diamètre dépassant celui de Mars de plus de 1800 myriamè-
Ires , et la rotation la plus lente de toutes les planètes princi-
pales, le jour ne durant pas moins de 57 heures 1/2. (Report of
thc British J^sociation , 1850 , p. XXXV.)
(50) [page 549]. Béer et Maedler, Beitrœge zur physischcn
Kenntniss der himmlischen Kœrper , p. 104-106. Les observa-
tions plus anciennes mais moins sûres de Hussey donnaient
jusqu'à 1/24. Laplace (Système au Monde^ p. 266) a trouvé
tliéoriquement , en supposant croissante la densité des couches.,
une valeur comprise entre 1/24 et 5/48.
(51) [page 550]. L'immortel ouvrage de Newton , Philoso-
phiœ naturalis Principia Mathematica , parut en mai 1687, et
les Mémoires de l'Académie de Paris ne donnent la mesure de
l'aplatissement déterminé par Cassini (1/15) qu'en 1691, de
sorte que Newton qui certainement pouvait connaître les expé-
riences faites sur le pendule à Gayenne par Richer, d'après la
Relation de son voyage imprimée en 1679, dut recevoir le pre-
mier avis de la figure de Jupiter par des rapports verbaux, et par
les correspondances écrites, si actives à cette époque. Voyez à
ce sujet et sur l'époque où Huygens eut connaissance des obser-
vations de Richer sur le pendule, le Cosmos ^ t. I, p. 491
(note 29j , et t. II , p. 616 , (note 2) .
(52) [page 550]. Airy, dans les Memoirs ofthe royal Astron.
Society, t. IX, p. 7; t. X, p. 43.
— 722 —
(53) [page 550]. On s'en tenait encore à cette évaluation
en 182Zi. Voyez Laplace, Système du Monde , p. 207.
{^k) [page 550]. Del ambre , Histoire de V Astronomie mo-
derne, t. 11^ p. 754.
(55) [page 552] . « On sait qu'il existe au-dessus et au-dessous
de l'équateur de Jupiter deux bandes moins brillantes que la
surface générale. Si on les examine avec une lunette , elles
paraissent moins distinctes à mesure qu'elles s'éloignent du
centre, et même elles deviennent tout à fait invisibles près des
bords de la planète. Toutes ces apparences s'expliquent en ad-
mettant l'existence d'une atmosphère de nuages interrompue
aux environs de Téquatcur par une zone diaphane, produite
peut-être par les vents alises. L'atmosphère de nuages réflé-
chissant plus de lumière que le corps solide de Jupiter, les
parties de ce corps que l'on verra à travers la zone diaphane ,
auront moins d'éclat que le reste et formeront les bandes ob-
scures. A mesure qu'on s'éloignera du centre, le rayon visuel
de l'observateur traversera des épaisseurs de plus en plus
grandes de la zone diaphane, en sorte qu'à la lumière réfléchie
par le corps solide de la planète s'ajoutera la lumière réfléchie
par cette zone plus épaisse. Les bandes seront par cette raison
moins obscures en s'éloignant du centre. Enfin aux bords mêmes
la lumière réfléchie par la zone vue dans la plus grande épais-
seur pourra faire disparaître la différence d'intensité qui existe
entre les quantités de lumière réfléchie par la planète et par
l'atmosphère de nuages ; on cessera alors d'apercevoir les
bandes qui n'existent qu'en vertu de cette différence. — On
observe dans les pays de montagnes quelque chose d'analogue :
quand on se trouve près d'une forêt de sapins, elle paraît noire;
mais à mesure qu'on s'en éloigne , les couches d'atmosphère
interposées deviennent de plus en plus épaisses et réfléchissent
delà lumière. La différence de teinte entre la forêt et les objets
voisins diminue de plus en plus: elle finit par se confondre avpc
1
— 723 —
eux, si Ton s'en éloigne cFune distance convenable. » (Extrait
des Leçons d'Astronomie d'Arago , 18^1.)
(56) [page 553]. Cosmos, t. IT, p. 382-38^ et 603 (note UU.)
(57) [page 554]. Sir John Herschel, Outlines of Jatron. ,
(58) [pages 555]. Les premières observations de William
Herschel, faites en novembre 1793 , donnèrent pour la rotation
de Saturne 10^ 16' kU". C'est à tort qu'on a fait honneur au
grand philosophe Emmanuel Kant d'avoir deviné par des con-
sidérations purement théoriques et consigné dans le brillant
ouvrage intitulé : y^Ugemeine Naturqeschichte dea Himmels, qua-
rante ans avant Herschel . la véritable durée de la rotation de
Saturne. Le nombre qu'il indique est 6** 23' 53' H considère cette
valeur « comme la détermination mathématique du mouvement
encore inconnu d'un corps céleste, prédiction unique peut-être
en son genre , et qui ne peut être vérifiée que par les observa-
lions des siècles futurs. » L'attente n'a point été remplie ; les
observations postérieures ont révélé une erreur de 6 heures ,
c'est-à-dire des 3/5. On trouve dans le même ouvrage , au sujet
de l'Anneau de Saturne , que « dans l'amas de particules dont
il se compose , les unes situées à l'intérieur du côté de la pla-
nète accomplissent leur rotation en 10 heures, et que les autres,
qui forment la partie extérieure, mettent 15 heures à opérer le
même mouvement. » Le premier de ces deux nombres se
rapproche par hasard de la vitesse angulaire de la planète
(10»» 29' 17"). Voyez Kant, Sœmmtliche IVerke, 6« part., 1839,
p. 135 et 140.
(59) [page 556]. Laplace [Exposition du Système du Monde,
p. 43) évalue l'aplatissement de Saturne à 1/11. Bessel n'a point
confirmé mais a au contraire déclaré inexacte cette singulière
dépression d'aprps laquelle William Herschel, à la suite d'une
série d'observations laborieuses , faites avec des télescopes très-
divers, trouva que le grand axe de la planète était situé non pas
- 7^24 —
dans le plan de sou équateur, mais dans un plan formant avec
celui do l'équateur un angle d'environ ^5°.
(60) [page 556] Arago, dans V annuaire ])ouy 18^2, p. 555.
(61) [page 557]. Dominique Cassini avait signalé aussi cette
dififérence d'éclat des deux anneaux. Voyez Mémoires de V aca-
démie des Sciences f année 1715, p. 13.
(62) [page 557], Cosmos, t. II , p. 385. Ce ne fut que quatre
ans plus tard, en 1659, que la découverte ou plutôt l'explica-
tion complète des apparences que présentent Saturne et son
anneau fut publiée dans le Systema Saturnium.
(63) [page 558]. Tout récemment de semblables éminences
ont été aperçues de nouveau par Lassell, àLiverpool, avec
un réflecteur de 20 pieds de longueur focale , que lui-même
avait construit. Voyez Report of the British Association , 1850,
p. XXXV. ^
(6/i) [p. 558]. \0} ez ERVÙm^, Kleine Ephemeriden iur ISZd,
p. 100, et Struve dans les Astronom, Nachrichlen de Schuma-
cher, nM39, p. 389.
(65) [page 559]. On lit dans les Acta Eruditorum pro anno
168Zi, p. k2kf le passage suivant, extrait de l'ouvrage intitulé
Systema phœnomenorum Saturni , autore Galletio, prœposito
eccles, Avenionensis : «Nonnunquam corpus Saturni non exacte
annuli médium obtinere visum fuit. Hinc evenit, ut, quum
planeta orientalis est , centrum ejus extremitati orientali annuli
propius videatur, et major pars ab occidentali latere sit cum
ampliore obscuritate. »
(66) [page 559] . Horner, dans le Neues Physik. TVœrterhuch
de Gehier, t. VIII , 1836 , p. 17^.
(07) [page 559J. Benjamin Peirce, on the Constxlulion of
Saturn's Ring , dans V Astronomical Journal de Gould, 1851 ,
t. II, p. 16 : « The ring consists of a stream or of streams of a
— 7:25 —
fluid ralher deiiser Ihan water flowing aroimd Ihe piimary. »
Voyez aussi Sillinian's American Journal , 2** série , t. XII ,
1851, p. 99, et sur les inégalités de l'anneau ou les actions
perturbatrices et par cela même conservatrices des satellites,
John Herschel, Outlines of Astronomy , p. 320.
(68) [page 560]. Jolin Herschel, Caipe Observations,
p. 4U-430, et Outlines , p, 650. Voyez aussi sur la loi des
distances, ibid., p. 337, § 550.
(69) [page 562]. Fries , Forlesungen ueber die Sternkunde ,
1833, p. 325; Challis dans les Transactions of the Cambridge
Philosophical Society, t. III, p. 171.
(70) [page 562] . William Herschel , Account of a Cornet ,
dans les Philoi^ophical Transactions for 1781 , t. LXXI, p. ^92.
(71) [page 563]. Cosmos, t. III , p. ^90.
(72) [page 563]. Maedler, dans ^es Astronom. Nachrichten
de Schumacher, n°Zi93. Voyez aussi sur l'aplatissement d'Uranus,
Arago dans ï Annuaire pour 18Zi2 , p. 577-579.
(73) [page 565]. Voyez, pour les observations de Lassell à
Starfield (Liverpool) et celles d'Otto Struve, les Monthly Notices
of the royal Astronomical Society, t. VIJI , 18/i8, p. ^3-^7 ,
135-139, et les Astronom. Nachrichten de Schumacher,
n» 623 , p. 365.
{llx) [page 566]. Bernhard von Lindenau, Beitrag zur Ge-
schichte dcr Neptun's Entdeckung , dans le supplément des
Astronom. Nachrichten de Schumacher, 18/i9, p. 17.
(75) [page 566] . Astronom. Nachrichten , n'' 580.
(76) [page 566]. Leverrier, Recherches sur les mouvements
de la planète Herschel, 18/i6, dans la Connaissance des Temps
pour 18/i9 , p. 25Zi.
(77) [page 567] L'élément très-important de la masse de
Neptune a reçu beaucoup d'accroissements successifs. Estimé
d'abord 1/20897 par Adams, il a été évalué à 1/19840 par
— 726 —
Peirce, à 1/19^00 par Bonrl, à 1/18780 par John Herschel ,
à l/15Zi80 par LasseJl, enfin à i/MiUkQ par Otto et Auguste Struve
à Poulkova. C'est ce dernier résultat que nous avons adopté
dans le texte.
(78) [page 568]. Airy, dans les Monthly Notices of the royal
Jstronomkal Society, t. VII , n° 9 (novembre 18/16^, p. 121-1 52 ;
Bernhard von Lindenau , Beitrag zur Geschichfe der NepturCs
Entdeckung , p. 1-32 et 235-238. — Leverrier , sur l'invitation
d'Arago, commença dans l'été de 18Zi5 à s'occuper de la théorie
d'Uranus. Il présenta à l'Institut les résultats de ses recherches,
le 10 novembre 1845, le 1" juin, le 3 août et le 5 octobre ; 846,
et les publia aussitôt. Le plus grand et le plus important travail
de Leverrier, celui qui contient la soli^tion complète du pro-
blème, parut dans la Connaissance des Tcmp- pour 1849.
Adaras fit part de ses premiers résultats, mais sans rien confier
à l'impression, au profj^sseur Challis. en septembre 1845,
et avec quelques changements à l'Astronome royal, dans le mois
d'octobre de la même année, toujours sans en rien publier.
L'Astronome royal eut communication des résultats définitifs
d'Adams , corrigés de nouveau dans le sens d'une diminution
de la distance, au commencement du mois de septembre 1846.
Le jeune géomètre de Cambridge s'exprime sur ces travaux
successifs , tous dirigés vers le même but , avec autant de
modestie que d'abnégation : « I mention thèse earlier dates
merely to show, that my results were arrived atindependently
and previously to the publication of iM. Leverrier, and not with
the intention of interfering with hisjust daims to the honors of the
discovery; for there is no doubt that his researches were first
published to the world, and led to the actual discovery of the
planet by Dr. Galle; so that the facts stated above cannot detract,
in the slightest degree, from the crédit due to M. Leverrier. »
Comme , dans l'Histoire de la découverte de Neptune , on a
souvent répété que l'illustre astronome de Kœnigsbcrg avait
partagé l'espérance exprimée déjci en 1834 par Alexis Bouvard .
— 7^27 —
l'auteur des Tables d'Uranus , « que les perturbations d'Uranus
devaient être causées par une planète encore inconnue, » j'ai
pensé qu'il pourrait être intéressant pour les lecteurs du Cos-
mos de trouver ici une partie de la lettre que m'écrivit Bessel, à
la date du 8 mai 18^0, deux ans, par conséquent, avant sa
conversation avec Sir John Herschel, lors de sa visite à Col-
lingwood : « Vous me demandez des nouvelles de la planète
située au delà d'Uranus. Je pourrais vous adresser à quelques-
uns de mes amis de Kœnigsberg qui croient en savoir plus que
moi-même sur ce point. J'avais choisi pour texte d'une leçon
publique, le 28 février 18^0, l'exposé des rapports qui exis-
tent entre les observations astronomiques et l'astronomie elle-
même. Le public ne fait pas de diflfércnce entre ces deux
objets ; il y avait donc lieu de redresser son opinion. La part
de l'observation dans le développement des connaissances astro-
nomiques me conduisait naturellement à remarquer que nous
ne pouvons être certains d'expliquer jDar notre théorie tous les
mouvements des planètes. Je citai comme preuve Uranus; les
anciennes observations dont cette planète a été l'objet ne
s'accordent nullement avec les éléments déduits des observa-
tions plus récentes, faites de 1783 à 1820. Je crois vous avoir
déjà dit que j'ai beaucoup étudié cette question ; mais tout ce
que j'ai retiré de mes efforts, c'est la certitude que la théorie
actuelle ou plutôt l'application que l'on en fait au système so-
laire , tel que nous le connaissons aujourd'hui , ne suffit point
à résoudre le mystère d'Uranus. Ce n'est pas , à mon sens , une
raison pour désespérer du succès. Il nous faut d'abord connaî-
tre exactement et d'une manière complète tout ce qui a été
observé sur Uranus. J'ai chargé un de mes jeunes auditeurs,
Flemming, de réduire et comparer toutes les observations , et
maintenant j'ai là réunis sous la main tous les faits constatés. Si
les anciennes déterminations ne conviennent déjà point à la
théorie, celles d'aujourd'hui s'en écartent plus encore; car
actuellement l'erreur est d'une minute entière , et elle s'ac-
croît de 7 à 8 secondes par an , de sorte qu'elle sera bientôt
— 7^28 —
beaucoup plus considérable. J'ai eu l'idée d'après cela qu'un mo-
ment viendrait où la solution du problème serait peut-être bien
fournie par une nouvelle planète, dont les éléments seraient
reconnus d'après son action sur Uranus et vérifiés d'après celle
qu'elle exercerait sur Saturne. Je me suis d'ailleurs bien
gardé de dire que ce temps fût arrivé; je me borne à chercher
jusqu'où peuvent conduire les faits actuellement connus. C'est
là un travail dont la pensée me suit depuis tant d'années, et au
sujet duquel j'ai passé par tant d'opinions différentes, que j'as-
pire à en voir la fin , et que je ne négligerai rien pour arriver à
ce résultat aussitôt qu'il sera possible. J'ai grande confiance en
Flemming , qui , à Danlzig où il est appelé , continuera pour
Saturne et pour Jupiter la réduction des observations qu'il a
faites pour Uranus. Je m'applaudis , sous ce rapport , qu'il n'ait
pour l'instant aucun moyen d'observation et qu'il n'ait point
de cours à faire. Un jour viendra aussi pour lui, où il devra se
livrer à des observatioBt^ dirigées vers un but déterminé ; alors,
sans doute , les facilités matérielles ne lui manqueront pas plus
que dès à présent l'habileté ne lui manque. »
(79) [page 568]. La première lettre dans laquelle Lassell
annonça sa découverte était du 6 août 1847. Voyez Schu-
macher's Astronom. Nachrichten , n° 611 , p. 165.
(80) [page 568] . Otto Struve, dans les Astronom. Nachrichten ^
n" 629. C'est d'après les observations faites à Poulkowa qu'Au-
guste Struve a calculé à Dorpat l'orbite du premier satellite de
Neptune.
(81) [page 568]. W. C. Bond, dans les Proceedings of the
American Academy of Arts and Sciences, t. II , p. 137 et 140.
(82) [page 569] Schumacher's Astronom. Nachrichten,
D^ 729, p. 143.
(83) [page 571]. «On reconnaîtra un jour , dit Kant, que les
dernières planètes, qui parla suite seront découvertes au delà
de Saturne , forment une série de membres intermédiaires qui
— 729 ~~
se rapprochent de plus en plus de la nature des comètes ^ et
ménagent la transition entre ces deux espèces de corps plané-
taires. La loi, d'après laquelle l'excentricité des orbites décri-
tes par les planètes est en raison de leur distance au Soleil,
vient à l'appui de cette conjecture. Il en résulte, en effet , qu'à
mesure que cette distance augmente , les planètes répondent
de plus en plus à la définition des comètes. Rien n'empêclie
que l'on ne considère à la fois comme la dernière planète et la
première comète le corps céleste qui coupe au périhélie l'or-
bite de la planète la plus voisine, peut-être bien celle de Saturne,
Le volume des corps planétaires, croissant de même avec leur
distance au Soleil , démontre encore clairement la vérité de
notre théorie sur la mécanique céleste. » ( Naturgeschichte des
Himmch^ 1755, 6^ part., p. 88 et 195, de la collection des
Œuvres complètes.) Au commencement de la 5^ partie il est
question de T ancienne nature cométaire que Saturne est sup-
posé avoir perdue. ^ v
(SZi) [page 572]. Steplien Alexander, on the similaritij of
arrangement ofthe Asteroids and the Cornets of short period, and
the possibilitij of their common origin y dans V Astronomie al
Journal de Gould , n° 19, p. 147 et n" 20, p. 181. L'auteur,
d'accord avec Hind (Schumacher's Astronom. Nachrichten ,
n" 12k) , distingue « the comets of short period , whose semi-
axes are ail nearly the same with those of the small planets
between Mars and Jupiter ; and the other class, including the
comets whose mean distance or semi-axis is somewhat less than
Ihat of Uranus. » Il termine le premier de ses deux Mémoires
par cette conclusion : « Différent facts and coïncidences
agrée in indicatiug a ncar appulse if not an actual collision of
Mars with a large cornet in 1315 or 1316 , that the comet was
thereby Lroken into three parts whose orbits ( it may be
presumed) received even then their présent form : viz. ihai
still presented by the comets of 1812, 1815 and 18/i6 which
are fragments of the dissevered comet. »
— 730
[^5) [page 573], Ldip\3ice, Exposition du Système du Monde ^
édit. del82Zi, p. U\U.
(86) [page 573]. Cosmos, t. I, p. 110-127 et 45Zi-459
(notes 42-57).
(87) [pages 574]. En trois siècles et demi, de 1500 à 1850,
il a paru en Europe 52 comètes visibles à l'œil nu. En les ré-
partissant par périodes de 50 années , on obtient le tableau
suivant ;
1500 — 1550
1600 — 1650
1500
1505
1506
1607
1618
1512
1514
2 comètes.
1516
1518
1650 ^ 1700
1521 -*
1652
1522
1664
1530
1665
1531
1532
1533
1668
1672
1680
13 comètes.
1682
1550 — 1600
1556
1558
1686
1689
1696
1569
1577
10 comètes.
1580
1582
1700 — 1750
1585
1590
1593
1596
1702
1744
17^8 (2)
10 comètes.
4 comètes.
— 731 —
1750 — 1800 1«11
1819
1823
1830
1835
1843
k comètes. >IS45
1847
1800 — 1850
1759
17G6
1769
1781
1807 9 comètes.
Des 23 comètes observées au xvf siècle, le siècle d'Apian, de
Girolomo Fracastro , du landgrave Guillaume IV de Hesse , de
Maestlin et de Tycho , les 10 premières ont été décrites par
Pingre.
(88) [page 576]. C'est la comète « de mauvais augure » à
laquelle fut attribuée la tempête qui causa la mort du célèbre
navigateur portugais Bartholomé Diaz, au moment où il faisait,
avec Cabrai, la traversée du Brésil aii Cap de Bonne-Espérance.
Voyez Humboldt , Examen critique de r histoire de la Géogra-
phie du nouveau Continent, t. I , p. 296; t. V, p. 80, et
Souza , ^sia Portugal., t. 1 , 1^*^ part., cap. 5 , p. 45.
(89} [page 576]. Laugier, dans la Connaissance des Temps
pour 1846 , p. 99. Voyez aussi Edouard Biot , Recherches
sur les anciennes apparitions chinoises de la Comète de Halleij
antérieures à l'année 1378, dans le même volume du même
Recueil, p. 70-84.
(90) [page 576]. Sur la comète découverte par Galle au
mois de mars 1840, voyez les Astronomische Nachrichten de
Schumacher, t. XVII, p. 188.
(91) [page 576]. Humboldt, Kue^des Cordillères {é&.m-ioWo),
pi. LV, [ig. 8, p. 281. Les Mexicains se faisaient aussi une idée
fort juste de la cause qui produit les éclipses de Soleil. Le même
manuscrit mexicain dont il est parlé dans le texte , et qui re-
monte au moins à 25 ans avant l'arrivée des Espagnols , repré-
sente le Soleil presque complètement couvert par le disque de
la Lune , et les étoiles brillant tout autour.
(92) [page 576]. Newton et Wintlirop avaient déjà deviné
la formation de la queue des comètes par les effluves de la
partie antérieure , problème dont s'est tant occupé Bessel.
Voyez les Principia philosoph. natural. de Newton, p. 511, et les
Philosoph Transactions for 1767, t. LVII, p. ikO , fig. 5.
Suivant Newton, c'est près du Soleil que la queue a le plus de
force et d'étendue , parce que l'air cosmique, ce que j'appelle,
avec Encke , le milieu résistant, a dans ces régions son maxi-
mum de densité, et que les particules de la queue, très-écbauf-
fées par le voisinage du Soleil , montent plus aisément au mi-
lieu d'un air plus dense. Winthrop est d'avis que l'effet principal
se produit un peu après le périhélie, parce que, en vertu
de la loi posée par Newton {Principia, de, p. ^i2^et/;66),
les maxima ont toujours* une tendance à retarder l'époque de
leur apparition.
(93) [page 576]. Arago, dans V Annuaire pour 18^^, p. 395.
L'observation est d'Amici fils.
(9^) [page 5761. Sir John Herschel dans ses Outlines (§ 589-
597), et Peirce dans V American Journal for 18^^ (p. h1) ont
recueilli tous les détails concernant la comète du mois de
mars 18^3, qui brilla dans le Nord de l'Europe , près d'Orion,
d'un éclat extraordinaire, etqui est, de toutes les comètes obser-
vées et calculées^ celle qui s'est approchée le plus près du Soleil .
Certaines ressemblances de physionomie, genre de preuve dont,
au reste, Sénèque avait déjà démontré le peu de certitude {Quœa-
tiones natur., lib. VII, cap. 11 et 17), firent considérer d'abord
cette comète comme identique avec celle de 1668 et de 1689.
Voyez le Cosmos,i. I,p. 156 etZi78 (note 92), et Galle, dans les
Olbers Cometenbahnen , n"' kl et 50. Boguslawski croit d'autre
part (Schumacher's^.s^ rowom. NachriclUen, n° 5^5, p. 272) que
— 733 -
la période de la comète de 18^i3 est de U7 ans , et qiie ses ap-
paritions antérieures eurent lieu en 1695, 15^8, 1/i01 , etc. Il
remonte ainsi jusqu'à l'année 371 avant l'ère chrétienne, et d'ac-
cord en cela avec le célèbre helléniste Thiersch , de Munich , il
considère cette comète comme identique avec celle dont il est
fait mention dans les Météorologiques d'Aristote (liv. I, chap. 6)
et la désigne sous le nom de comète d'Aristote. iMais d'abord
je rappellerai que cette dénomination est vague et peut s'ap-
pliquer à plusieurs objets. Veut-on parler delà comète qu'Aris-
tote fait disparaître dans la constellation d'Orion et qu'il rattache
au tremblement de terre de l' Achaïe ; dans ce cas , il ne faut point
oublier que cette comète qui , d'après le philosophe de Stagire,
se montra simultanément avec le tremblement de terre , fut
antérieure à cet événement, suivant Callisthène , et postérieure,
suivant Diodore. Le 6" et le 8^ chapitre des Météorologiques
traitent de k comètes désignées par le nom des archontes
d'Athènes sous lesquels elles apparij^ent, et par les événements
désastreux auxquels on les rapporte. Aristote mentionne suc-
cessivement la comète occidentale qui fut observée lors du
tremblement de terre et des inondations de l'Achaïe (chap. 6, 8),
puis celle qui marque l'archontat d'Euclès^ fds de Molon. Il
revient ensuite à la comète occidentale, et nomme à cette oc-
casion l'archonte Asteius, qui esL devenu dans des leçons vicieuses
Aristeus, et que Pingre par suite a confondu^ dans sa Cométo-
yraphie , avec Aristhène ou Alcisthène. L'éclat de la comète
d'Asteius se répandit sur plus d'un tiers de la voûte céleste. La
queue, que l'on désignait sous le nom de ooôç , chemin , avait
60° de longueur, et s'étendait jusque dans la région d'Orion ,
où elle se dissolvait. Aristote cite encore (chap. 7, 9) la comète
dont l'apparition comcida avec la chute de l'aérolithc d' Egos-
Potamos , et qu'il ne faut point confondre avec le nuage météo-
rique qui, suivant le récit de Daimachus, brilla pendant 70 jours,
et lança des étoiles filantes. Enfin Aristote (chap. 7,10) mentionne
une comète que l'on observa sous l'archontat de Nicomaque. et
à laquelle fut attribué un violent orage qui éclata près de Co-
in. /,7
— 78à —
rintlie. Ces quatre comètes remplissent la longue période de
32 olympiades. La première en date, celle qui coïncide avec
l'aérolithe d'.Egos Potamos, se montra, d'après les marbres de
Paros, la P^ année de la LXX VHP Olympiade (avant J.-C. /468),
sous l'arcliontat de Théagénldès; la comète d'Euclès, nommé
à tort Euclides par Diodore (liv. XII, chap. 53), fut observée
dans la 2^ année de l'Olymp. LXXXVIII (av. J.-G. Zi27), comme
le prouve aussi le commentaire de Jean Philopon; celle d'As-
teius, dans la U^ année de l'Olymp. CI (av. J.-C. 373); enfin
celle de Nicomaque, dans la U^ année de l'Olymp. CIX (av. J. C.
3/il). Pline (liv. II, chap. 25) rapporte à la CVtlP plymp. la
transformation de cette comète qui, après avoir présenté l'aspect
d'une crinière, prit la forme d'une lance (jubae effigies mutata in
hastam). Sénèque crut aussi à une liaison directe entre la co-
mète d'Asteius et le tremblement de terre qui ébranla l'AcIiaïe. Il
dit, en rapportant la destruction des villes d'Hélice et de Bura ,
qui ne sont pas expressément nommées par Aristote: «Effigiem
ignis longi fuisse Callisthenes tradit, antequam Burin et Helicen
mare absconderet. Aristoteles ait non trabem illam sed Cometam
fuisse (Quœst. natur., lib. VII, cap. 5).» Strabon (liv. VIII,
p. 384, éd. Casaubon) place la ruine de ces deux villes deux
ans avant la bataille de Leuctres, ce qui donne bien la W année
de la CP Olympiade. Diodore de Sicile après avoir décrit en
détail le tremblement de terre du Péloponèse et les inondations
qui suivirent, comme des événements accomplis sous l'archontat
d'Asteius (lib. XV, cap. k^ et 69) , rejette à l'année suivante,
sous l'archontat d'Alcisthène (Olymp. CII, I), l'apparition de
la brillante comète qui produisait de l'ombre comme la lune ,
et dans laquelle il vit un présage de la déchéance des Lacédé-
moniens. iMais Diodore, qui écrivait longtemps après les événe-
ments qu'il raconte, ne se fait pas faute souvent de les reporter
d'une année à l'autre, et l'on peut invoquer en faveur de l'opi-
nion qui place la comète sous l'archontat d'Asteius , antérieur
d'une année à celui d'Alcisthène, les témoignages les plus an-
ciens et les plus sûrs , ceux d' Aristote et de la Chronique de
— 735 —
Paros. Pour revenir maintenant au point de départ, comme
Boguslawski en attribuant à la comète de 1843 une révolution
de 147 ans 3/4, est remonté successivement aux années 1695,
1548, 1401, 1106, et enfin à l'année 371 avant notre ère,
cette dernière apparition coïncide avec la comète qui accom-
pagna le tremblement de terre du Péloponèse, à deux années
près suivant Aristote , à une seule année près suivant Diodore,
écart qui , si l'on pouvait constater la ressemblance des or-
bites , serait de très-peu de conséquence , eu égard surtout aux
perturbations vraisemblables dans un intervalle de 2214 ans.
Si Pingre {Cométographie , t. I, p. 259-262), tout en substi-
tuant, d'après Diodore, Tarchontat d'Alcistbène à celui d'Asteius,
et en rapportant la comète qui disparut dans la constellation
d'Orion à la 1'"'' année de la GIF Olympiade , lui assigne néan-
moins pour date les premiers jours du mois de juillet 371 et non
372 , la raison en est que, à l'exemple de quelques historiens,
il marque d'un zéro la première armée de l'ère clirétienne. Il
est important de remarquer, en terminant, que Sir John Hers-
chel adopte pour la révolution de la brillante comète, qui fut
vue près du soleil en 843 , une période de 175 ans, ce qui re-
porte aux années 1668, 1493 et 1318 (comp. Outlines, p. 370-
372, avec Galle, dans les Olbers Cometenhahnen, p. 208, et avec
le Cosmos, t. I, p. 156). D'autres combinaisons de Peirce et de
Glausen donnent des périodes de 21 ans 4/5 ou de 7 ans 1/5 ,
et prouvent combien il est hasardé de déclarer la comète de
1843 identique avec celle de l'archonte Asteius. Grâce à la
mention faite ûslus les Météorologiques d'Ansloie (liv. I, cap. 7,
10), d'une comète qui apparut sous l'archontat de Nicomaque,
nous savons que le philosophe de Stagire était âgé au moins de
44 ans, lorsqu'il composa cet ouvrage. Il m'a toujours paru
surprenant qu'Aristote qui, à l'époque du tremblement de
terre du Péloponèse et de la grande comète qui couvrait de sa
queue un espace de 60% avait déjà quatorze ans, parle avec
autant d'indiflérence d'un pareil phénomène, et se borne à le
ranger parmi les comètes observées jusqu'à lui. L'étonnement
augmente encore, lorsqu'on Ht dans le même chapitre qu'Aris*
tote a vu de ses propres yeux autour d'une étoile fixe dans la
cuisse du Chien , peut-être bien autour de Procyon dans le
Petit-Chien, une apparence nébuleuse représentant une cri-
nière. Aristote dit aussi (liv. I, chap. 6, 9) avoir observé
dans les Gémeaux l'occultation d'une étoile par le disque de
Jupiter. La crinière de vapeur ou l'enveloppe nébuleuse de
Procyon me rappelle un phénomène dont il est souvent ques-
tion dans les Annales de l'ancien empire mexicain , d'après le
Codex Tellerianus ; «Cette année, y est-il dit, on vit de nouveau
fumer Citlalcholoa, » c'est-à-dire la planète Vénus nommée aussi
ïlazoteotl, dans la langue des Aztèques. (Humboldt, Fues des
Cordillères ,{. II , p. 303). Probablement sous le ciel du Mexique
comme sous celui de la Grèce, on vit de petits halos formés
autour des étoiles par la réfraction de leurs rayons.
(95) [page 577] Edouard Biot, dans les Comptes rendus de
l'académie des Sciences , t. XVI, 1843, p. 751.
(96) [page 578]. Galle, dans l'appendice de l'ouvrage inti-
tulé Olbers Cometenbafmen, p. 221 , n" 130. Sur le passage pro-
bable de la comète à double queue de 1823, voyez Edinburgh
Revitw, 1848, n° 175, p. 193. Le Mémoire d'Encke, cité un peu
plus haut dans le texte, et qui contient les véritables éléments
de la comète de 1680, renverse les fantaisies de Halley, d'après
lesquelles cette même comète , accomplissant sa révolution en
575 ans, aurait apparu à toutes les époques critiques de This-
toire de l'huûianité : à l'époque du déluge , d'après les tradi-
tions hébraïques; à celles d'Ogygès, d'après les légendes grec-
ques; durant la guerre de Troie; lors de la destruction de
Ninive; à la mort de Jules César, et ainsi de suite. La durée de
la révolution de cette planète est , suivant les calculs d'Encke,
de 8814 ans. Au périhélie, le 17 décembre 1680, elle n'était
éloignée du Soleil que de 23000 myriamètres; c'est 15000
myriamètres de moins que la distance de la Lune à la Terre.
— 737 —
Son aphélie est de 853 , 3 distances de la Terre au Soleil. Le
rapport de l'aphélie au périhélie est de 1/iO 000 à 1.
(97) [page 579]. Arago, dans V Annuaire du Bureau des Lon-
gitudes pour 1832, p. 236-255.
(98) page 579]. Sir John Herschel, Outlines of Aslronomy ^
$ 592.
(99) [page 579]. Bernard de Lindenau, dans les Astronomische
Nachrichlen de Schumacher, n° 698, p. 25.
(100) [page 579]. Cosmos, t. III, p. hl-kk.
(1) [page 581]. Leverrier, dans les Comptes rendus de l'A-
cadémie des Sciences, t. XIX, 18^^, p. 982-993.
(2) [page 582]. Newton n'attribuait l'éclat des comètes les
plus brillantes qu'au reflet de la lumière solaire : « splendcut
coraetae luce solis a se reflexa » {Principia mathemat. éd. Le
Seur et Jacquier, 1760, t. 111, p. 577).
(3) Bessel, Schumacher's Jahr^uch fiir 1837, p. 169.
(U) [page 582]. Cosmos, t. I, p. 120, et t. III, p. Uo.
(5) [page 582]. Valz, Essai sur la détermination de la densité
deVÉlhtr dans Vespace planétaire, 1830, p. 2, et Cosmos,
t. I, p. 119. L'accroissement du noyau des comètes, à mesure
qu'augmente leur distance au Soleil, avait déjà attiré l'attention
d'un observateur très-soigneux et exempt de toute prévention ,
d'Hévélius. Voyez Pingre, Cométographie , t. II, p. 193. C'est
un travail très-délicat, lorsqu'on veut y apporter de l'exactitude,
que de déterminer les diamètres de la comète d'Encke, à son
périhélie. Cette comète est une masse nébuleuse dans laquelle
le centre ou une partie du centre se détache par l'éclat de sa
lumière. A partir de cette région, qui n'a nullement la forme
d'un disque, et ne peut être appelée la tête de la comète, l'in-
tensité de la lumière diminue rapidement tout autour. La nébu-
losité oirre dans un sens un prolongement qui a l'apparence
d'une queue. Les mesures indiquées dans le texte se rappor-
— 738 —
tent à cette matière nébuleuse, dont la circonférence, sans être
bien arrêtée, se resserre au périhélie.
(6) [page 583]. Sir John Herschel , Cape Observations, 18^7,
§366, pi. XV et XVI.
(7) [page 583]. Bien que plus tard , le 5 mars, on vit croître
jusqu'à la distance de 9° 19' l'intervalle qui séparait les deux
comètes , cette augmentation , ainsi que l'a prouvé Plantamour,
n'était qu'apparente, et tenait à ce que l'astre s'était rapproché
de la terre. Depuis le mois de février jusqu'au 10 mars, les
deux parties de la double comète restèrent à la même distance
l'une de l'autre.
(8) [page 584] . Le 19 février 1846 , on aperçoit le fond noir
du ciel qui sépare les deux comètes (0. Struve, dans le Bullelin
physico-mathématique de V Académie des Sciences de Saint-Pé-
tersbourg, t. VI, n° U).
(9) [page 585]. Voyez Oùtlines of Astron. , § 580-583, et
Galle, Olbers Cometenbahnen , p. 232.
(10) [page 586]. <'• Ephorus non religiosissimae fidei, saepe
decipitur, saepe decipit. Sicut hic Cometem qui omnium morta-
lium oculis custoditus est, quia ingentis rei traxit eventus ,
cum Helicen et Burin ortusuo merserit, ait illum discessisse in
duas stellas : quod prœter illum nemo tradidit. Quis enim posset
observare illud momentum quo comètes solutus et in duas
partes redactus est? Quomodo autem, si est qui viderit come-
tem in duas dirimi, nemo vidit fieri ex duabus? (Sénèque,
Quœstiones naturales, lib. VII, cap. 16.)
(11) [page 586]. Edouard Biot, Recherches sur les comètes de
la collection de Ma-tuan-lin , dans les Comptes rendus de V Aca-
démie des sciences^ t. XX, 1845, p. 334.
(12) [page 587]. Galle, dans les Olbers Cometenbahnen ,
p. 232, n° 174. Les comètes de Colla et de Brémiker, qui ont
— 739 —
fait leur apparition dans les années 18/i5 et 18/iO, décrivent
leur orbite elliptique en un temps assez court, si on les com-
pare aux comètes de 1811 et de 1680, qui n'emploient pas moins
de 3000 et de 8800 ans. Les périodes des deux comètes de
Colla et de Brémiker ne paraissent être que de 21x9 et de ZkU
ans. Voyez Galle , ibid. , p. 229 et 231.
(13) [page 589]. La courte période de 120/i jours fut constatée
par Encke, lors de la réapparition de sa comète , en 1819. Les
éléments de l'orbite elliptique de cette comète, se trouvent cal-
culés pour la première fois dans le Berlin, astronom. Jahrbuch
fur 1822, p. 193. Voyez aussi pour la constante du milieu ré-
sistant, considérée comme moyen d'expliquer la rapidité dé la
révolution, le li^ Mémoire d'Encke, dans le Recueil de l'Académie
de Berlin, année ISkU, et comparez à ce sujet Arago, Annuaire
pour 1832, p. 181, et Lettre à M. Alexandre de Hamholdt, 1840,
p. 12, ainsi que Galle dans les Olbers Comelenbahnen , p. 221.
Pour compléter, en remontant aussfloin que possible, l'histoire
de la comète d'Encke, il est bon de rappeler qu'elle fut vue
pour la première fois par Méchain du 17 au 19 janvier 1786,
puis par miss Carolina Herschel du 7 au 27 novembre 1795,
par Bouvard, Pons et Huth du 20 octobre au 19 novembre 1805,
enfin par Pons du 26 novembre 1818 au 12 janvier 1819, lors
de sa dixièQie réapparition depuis la découverte de Méchain.
Le premier retour calculé à l'avance par Encke fut observé par
Rumker à Paramatta; voyez Galle, ibid., p. 215, 217, 221 et
222. — La comète intérieure de Biéla , ou comme on a aussi
coutume de dire, la comète de Biéla et de Gambart, obser-
vée pour la première fois le 8 mars 1772 par Montaigne, fut
vue ensuite successivement par Pons, le 10 novembre 1805, par
Biéla, à Josephstadt, en Bohême, le 27 février 1826, et par
Gambart à Marseille, Je 9 mars de la même année. C'est cer-
tainement Biéla qui, le premier, a découvert de nouveau la
comète de 1772, mais en revanche Gambart en a déterminé Ifes
éléments elliptique^ plus tôt que Biéla . et presque en même
— 740 —
temps que Clausen. Le premier retour de la comète de Biéla,
déterminé malhématiquement , a été observé par Hendersoii
au Cap de Bonne-Esperance , durant les mois d'octobre et de
décembre 1832. Le merveilleux dédoublement de la comète de
Biéla, dont il a été question dans le texte, eut lieu lors de sa
onzième réapparition depuis l'année 1772, vers la fin de
18^5. Voyez Galle , dans les Olbers Cometenbahnen ^ p. 2H,
218, 22i, 227 et 232.
{\U) [page 589]. Sir John Herschel , Outlines of A sir on. ^
S 601.
(15) [page 590]. Laplace, Exposition du Système du Monde,
p. 396 et /iH. Les vues particulières de Laplace sur les comètes,
qu'il considère comme de petites nébuleuses errant de systèmes
en systèmes, sont contredites par la résolution d'un grand
nombre de nébuleuses, opérée depuis la mort de ce grand
homme. ^,
(16) [page 591]. Il y avait des divergences d'opinions à Baby-
lone dans le collège des astrologues chaldéens, aussi bien que
chez les Pythagoriciens et dans toutes les anciennes écoles. Sé-
nèque (Quœst. natur. lib. VII. cap. 3) cite les sentiments oppo-
sés d'Apollonius le Myndien et d'Épigène. Bien qu'Épigène soit
rarement cité, Pline (lib. VII, cap. 57) l'appelle « gravis auctor
in primis. » Son nom se retrouve aussi, mais sans qualification,
dans Censorinus {de Die natali, cap. 17), et dans Stobée (Ecloga
physica, lib. I, cap. 29, p. 586, éd. Heeren). Voyez aussi Lobeck,
Aglaophamus^ p. 3^1. Diodore de Sicile (lib. XV, cap. 50)
croit que l'opinion générale et dominante chez les astrologues
de Babylone était que les comètes, après des intervalles de
temps invariables, rentraient dans des orbites déterminés. Le
dissentiment qui divisait les Pythagoriciens sur la nature plané-
taire des comètes , et que mentionnent Aristote et le Pseudo-
Plutarque [Meteorologica^ lib. I, cap. 6, 1; de Placitis Pkilo-
soph. lib. III , cap. 2) s'étendait d'après le Stagirite [I\IeltoroL,
— 711 —
lib. ï, cap. 8, 2) à la nature de la voie Lactée, qui marquait la
voie abandonnée par le soleil et celle d'où avait été précipité
Phaéthon. Voyez Letronne, dans les Mémoires de fJcadémie des
Inscriptions, 1839, t. XII, p. 108. Aristote cite encore cette opi-
nion de quelques Pythagoriciens, que les comètes appartiennent
à la classe de planètes qui, comme Mercure, ne deviennent
visibles qu'en s'élevant, après un long temps, au-dessus de l'ho-
rizon. Dans le Traité du Pseudo-Plutarque, dont malheureuse-
ment les indications sont toujours tronquées, il est dit que les
comètes se lèvent à l'horizon à des époques déterminées, après
leur révolution accomplie. Beaucoup de renseignements sur la
nature des comètes contenus dans les écrits d' Arrien, que Stobée
put mettre à profit, et dans ceux de Charimander, dont le nom
seul a été conservé par Sénèque et par Pappus, sont perdus pour
nous {Ecloga, lib. I, cap. 25, p. 61, éd. Plantin). Slobée cite,
comme appartenant aux Chaldéens, l'opinion que les comètes
sont si rarement visibles parce que , dans leur longue excursion,
elles vont se cacher dans les profondeurs de l'éther, comme les
poissons dans l'Océan. L'explication la plus séduisante et en
même temps la plus sérieuse , malgré ce qui s'y mêle de rhéto-
torique, celle qui est le plus d'accord avec les opinions récentes,
est l'explication qu'a donnée Sénèque : « Non enim existimo co-
metem subitaneum ignem , sed inter aeterna opéra naturae. —
Quid enim miramur cometas tam rarum mundi spectaculum,
nondum teneri legibus certis ? nec initia illorum fmesque pa-
tescere , quorum ex ingentibus intervallis recursus est? Non-
dum sunt anni quingenti ex quo Graecia
Stellis numéros et nomina fecit ,
multaeque hodie sunt gentes quae tantum iacie noverint cœ-
lum; quae nondum sciant, cum luna deficiat, quare obum-
bretur. Hoc apud nos quoque nuper ratio ad certum per-
duxit. Veniet tcmpus quo ista quae nunc latent in lucem dies
cxtrahatet longioris œvi diligentia.— Veniet tempus quoposteri
nostri tam aperta nos nescisse mirentur. — Eleusis servat quod
— 742 —
ostendat revisentibus. Rerum natura sacra sua non siniul tradit :
initiatos nos credimus; in vestibulo ejus haeieraus; illa arcana
non promiscue nec omnibus patent, reducta et in interiore
sacrario clausa sunt. Ex quibus aliud liaec aetas , aliud quoe post
nos subibit, despiciet. Tarde magna proveniunt » {Çuœs-
liones naturales , lib. VII, cap. 22, 25 et 31),
(17) [page 601]. L'aspect du firmament nous offre des ob-
jets qiii ne coexistent point simultanément. Beaucoup sont
évanouis longtemps avant que la lumière qui en émane soit
parvenue jusqu'à nous; quelques-uns occupent des placés
différentes de celles où nous les apercevons. Voyez le Cosmos,
t. I, p. 175-^86; t. III, p. 86-303 et fcoinp. Bacon, Novum
Organum, Lond., 1733, p 371, et William Herschel, dans
les Philosophical Transactions for 1802 , p. Zi98.
(18) [page 601]. Cosmos, t. 1, p. U7,153 et M5 (note 35.)
(19) [page 602] . Voye^^les opinions des Grecs sur les chutes
de pierres météoriques, dans le Cosmos, t. I, p. 1^7, 150, Zi61,
Zi63, 469 et UIQ (notes 61, 62, 69, 87, 88 et 89), t. II, p. 593
(note 27).
(20) [page 603]. Voyez dans Brandis, Geschichfe der Grie-
chisch-rœmischen Philosophie (l'^part., p. 272-277), un passage
où est réfutée l'opinion émise par Schleiermacher, dans le Re-
cueil de l'Académie de Berlin, années 180Zt-1811. (Berlin, 1815),
p. 79-12ZI.
(21) [page 623]. Stobée, dans le passage cité [Ecloga phy-
sica, p. 508), attribue à Diogène d'Apollonie d'avoir appelé
les étoiles des corps ponceux ou poreux. Cette idée peut bien
avoir été fournie par la croyance si répandue dans l'antiquité
que les corps célestes se nourrissaient d'évaporations humides.
«Le Soleil rend les substances qu'il a pompées » (Aristote, Mc-
teorologicayéû. Ideler, t. I, p. 509; Sénèque, Quœslioncs natu-
rales, lib. IV, cap. 2). Les corps célestes, semblables h la pierre
pohfce. étaient Supposés avoir aussi leurs exhalaisons propres.
— 743 —
« Ces exhalaisons , qui ne peuvent être vues, tant quelles errent
dans les espaces célestes, ne sont autres que des pierres qui
s'enflamment et s'éteignent en tombant sur la terre. » (Plutar-
que, c/e Placitis Philosophorum , lib. II, cap. 13 . Pline (lib. II,
cap. 59) croit que les chutes de pierres météoriques sont des
accidents qui se renouvellent fréquemment : « Decidere tamen
crebro non erit dubium. » Il dit aussi (lib. II, cap. ^3) que,
lorsque le ciel est serein, la chute de ces pierres détermine
une détonation. Un passage de Sénèque ( QuœH. natur, ,
lib. II cap. 17), dans lequel il est question d'Anaximène, et qui
paraît exprimer une pensée analogue, n'a trait vraisemblable-
ment qu'au grondement de la foudre dans une nuée orageuse.
(22) [page 604]. Je cite ici le remarquable passage de la Vie
de Lysandre , traduit littéralement : « Quelques physiciens ont
émis une opinion plus vraisemblable: suivant eux, les étoiles
filantes ne découlent ni ne se détachent du feu éthéré qui s'é-
teint dans l'air aussitôt après s'être enflammé, et ne sont pas
davantage produites par l'ignition et la combustion de Tair
que la condensation force à s'élever dans les régions supérieu-
res; ce sont des corps célestes qui, lancés sur la terre par la
cessation du mouvement gyratoire , ne tombent pas toujours
dans les espaces habités , mais le plus souvent dans la mer, où
ils restent cachés à nos regards. »
^23) [page 604]. Sur les astres complètement obscurs ou qui
cessent , peut-être périodiquement, d'émettre de la lumière ,
sur les opinions des modernes à ce sujet , en particulier y siir
les opinions de Laplace et de Bessel, et sur l'observation de
Bessel relative à un changement survenu dans le mouvement
propre de Procyon , observation confirmée par Peters à Kœ-
nigsberg, voyez le Cosmos^ t. III, p. 2 2 0-22 3,
(24) [page. 605]. Voyez le Cosmos, t. III, p. 37-46 et 273
(note 33.)
(25) [page 605]. U y a littéralement dans le passage dfe
Plutarque (de Fade in orbe Lunœ, J). 923) : » Ha lune a pour-
— 744 -
tant un secours contre la force qui la sollicite à tomber:
c'est son mouvement même et la rapidité de sa révolution,
comme les objets placés dans une fronde ne peuvent tomber,
grâce au mouvement gyratoire qui les entraîne. »
(26) [page 607]. Cosmos, t. I, p. 135.
(27) [page 607]. Coulvier-Gravier et Saigey, Recherches sur
les Étoiles filantes, 18Zi7, p. 69-86.
(28) [page 607]. Edouard Heis, die periodischen Sternschnup-
pen und die Resultate der Erscheinungen , \SU9, p. 7 et 26-30.
(29) [page 608]. La désignation du pôle Nord comme point
de départ d'un grand nombre d'étoiles filantes, dans la période
d'août, ne repose que sur les observations de l'année 1839. Un
voyageur qui a parcouru l'Orient, le D^ Asahel Grant, écrit de
Mardin, en iMésopotamie , que vers minuit le ciel était comme
hérissé d'étoiles filantes i qui toutes partaient de la région de
l'étoile polaire. Voyez dans Heis ( die periodischen Stems-
chnvppen , etc. , p. 28), un passage rédigé d'après une lettre
d'Herrick à Quételet et le Journal de Grant.
(30) [page 608]. La prédominance de Persée sur le Lion ,
comme point de départ d'un plus grand nombre d'étoiles
filantes, ne s'était point encore manifestée lors des observations
faites à Brème, pendant la nuit du 13 au ik novembre 1838>
Un observateur fort exercé , Roswinkel , a vu , dans une pluie
d'étoile très-abondante , presque toutes les trajectoires partir
du Lion et de la partie méridionale de la Grande-Ourse , tan-
dis que dans la nuit du 12 au 13 novembre, par une pluie
d'étoiles à la vérité fort peu considérable, il ne vit que quatre
trajectoires partir de la constellation du Lion. Olbers re-
marque à ce sujet, dans les A^trononmchc Nachrichten de
Schumacher, n" 372, que, durant cette nuit, « les trajectoires
n'étaient nullement parallèles entre elles, que rien ne sem-
— 7ft5 —
hlait les rattacher à la constellation du Lion, et que ce dé-
faut de parallélisme les faisait ressembler à des étoiles filantes
isolées beaucoup plus qu'ti des flux périodiques. Il est vrai
que le phénomène de novembre fut loin de pouvoir être com-
paré en 1838 à ceuK des années 1799, 1832 et 1833. »
(31) [page 610]. Saigey, Recherches sur les étoiles filantes^
p. 151. Voyez aussi sur la détermination faite par Erman des
points de convergence , diamétralement opposés aux points de
départ, le même ouvrage, p. 125-129.
(32} [page 610]. Heis, periodische Sternschnuppen,ip. 6. Comp.
Aristote, Problemata, XXVI, 23, et Sénèque , Qaœstiones na-
tarâtes, lib. I, cap. IZi: «Ventum significat stellarum discurren-
tium lapsus et quidem ab ea parte qua erumpit. » J'ai admis
moi-même, particulièrement pendant mon séjour à Marseille, à
l'époque de l'expédition d'Egypte , l'influence des vents sur la
direction des étoiles filantes. ^
(33j [page 610]. Cosmos, t. I, p. kQi (note 60).
{ZU) [page 611]. Tout ce qui, dans le texte, est renfermé
entre guillemets, est dû aux communications obligeantes de
M. Jules Schmidt, adjoint à l'observatoire de Bonn. On peut
voir sur ses travaux antérieurs accomplis, de 18^2 à 18^^,
Saigey, Recherches sur les étoiles filantes^ p. 159
(35) [page 613]. J'ai cependant observé moi-même dans la
Mer du Sud, par ]3° 1/2 de latitude Nord, une pluie très-consi-
dérable d'étoiles filantes, le 13 mars 1803. L'an 687 avant l'ère
chrétienne, on remarqua aussi dans le mois de mars deux flux
de météores.
(36) [page 615]. Une pluie d'étoiles filantes tout à fait sem-
blable à celle du 21 octobre 1366 ^ancien style), dont Bogus-
lawski fils a trouvé l'indication dans le Chronicon Ecclesiœ Pra-
(jensis de Benesse de Ilorovic {Coamos, t. I, j). 1^3), a été
décrite en détail, dans le célèbre ouvrage historique de Dnarle
Nunez do Liàp ( Chronicas dos Reis de Portugal reformadas ,
parte I, Lisb., 1600, fol. 187) ; mais elle est reportée à lanuit du
22 au 23 octobre. Faut-il admiettre deux flux diltérents, dont l'un
avait été vu en Bohême , et l'autre sur les bords du Tage , ou
l'un des deux clironiqueius s'est-il trompé d'un jour? Je cite le
passage de l'historien portugais: «Yindo o annode 1366, sendo
andados XXII dias do mes de Octubro , très meses antes do
fallecimento del Rei D. Pedro (de Portugal), se fez no ceo
hum movimento de estrellas, quai os homêes nào virào nem
ouvirào. E foi que desda mea noite por diante correrào todalas
strellas do Levante para o Ponente , e acabado de serem juntas
começarào a correr humas para huma parte e outras para ou-
tra. E despois descerào do ceo tantas e tam spessas , que tanto
que forâo baxas no ar, pareciao grandes fogiieiras, e que o ceo
e 0 ar ardiào, e que a mesma terra queria arder. O ceo pare-
cia partido em muitas partes, alli onde strellas nâo stavào. E
isto durou per muito spa^o Os que isto viào , houverào tam
grande medo e pavor, que stavào como attonitos, e cuidavào
todos de ser mortos , e que era vinda a fim do mundo » .
(37) [page 615]. On eût pu citer des points de comparaison
plus récents, s'ils eussent été connus à cette époque : par
exemple les flux météoriques observés par Klœden à Postdam,
dans la nuit du 12 au 13 novembre 1823, par Bérard sur les
côtes d'Espagne, du 12 au 13 novembre 1831, et par le comte
Souchteln à Orenbourg, du 12 au 13 novembre 1832. Voyez le
Cosmos, t. I, p. 138, et Schumacher's ^>^ro«om/5c/ie iV«c/?n-
chtcn, n° 303, p, 2^2. Le grand phénomène que Bonpland et
moi nous observâmes du 11 au 12 novembre 1799 {royage aux
Régions équinoxiales , liv. ÏV, chap. 10, t. l\ , p. 3Zi-55, éd.
in-8°) dura depuis 2 heures jusqu'à Zi heures du matin. Pendant
tout le voyage que nous fîmes à travers la région boisée de
rOrénoque, jusqu'au Rio Négro, nous trouvâmes que cet
immense flux météorique avait été remarqué par les mission-
naires, et noté par plusieurs d'entre eux sur leur rituel.
— 747 —
Dans le Labrador et dans le Groenland, les Esquimaux en
avaient été frappés d'étonnement jusqu'il Lichtenau et iNew-
Herrnhut, par 6Zi° \U' de latitude. A Ilterstedt, près de AVeimar,
le pasteur Zeising vit ce que l'on voyait en même temps en
Amérique , sous l'équateur et près du cercle polaire boréal.
Le retour périodique du phénomène de la Saint-Laurent attira
l'attention beaucoup plus tard que le phénomène de novem-
bre. J'ai recueilli avec soin les indications relatives aux pluies
considérables d'étoiles filantes qui, à ma connaissance, ont
été exactement observées dans la nuit du 12 au 13 novembre,
jusqu'à I8/46. On en peut compter 15, qui se sont produites en
1799, 1818, 1822, 1823, dans les années comprises entre
1831 et 1839, en 1841 et 18/i6. J'exclus de ce calcul toutes les
chutes de météores qui s'écartent de la date fixée de plus d'un
jour ou deux, notamment celle du 10 novembre 1787 et du
8 novembre 1813. Ce retour périodique presque à jour fixe est
d'autant plus étonnant que des corp^d'aussi peu de masse sont
exposés à un grand nombre de perturbations, et que la longueur
de l'anneau dans lequel on suppose les météores enfermés peut
embrasser plusieurs jours delà révolution de la terre autour dn
soleil. C'est enl799, 1831,1833 et 183/i que les fiux météoriques
de novembre ont été le plus éclatants. Ce peut être ici le lieu
de faire remarquer qu'il y a eu erreur dans la description que
j'ai donnée des météores de 1799 , et qu'au lieu d'égaler le dia-
mètre des plus grands bolides à 1" ou 1° 1/Zi, il eût fallu dire
que ce diamètre était égal à 1 ou 1 l//i du diamètre de la Lune.
Je n'achèverai pas cette note sans faire mention du globe en-
flammé que le directeur de l'observatoire de Toulouse, M. Pe-
tit, a observé avec une attention toute spéciale, et dont il a cal-
culé la révolution autour de la Terre. Voyez les Comptes rendm
de V Académie des Sciencef^, 9 août 1817, et Schumacher's Aslro-
nomische Nachrichten , n" 701 , p. 71.
(08) [page 619]. Forster, Mémoires mr lesjtoiles filantes,
p. 31.
~ 7/i8 -"
(39) [page620|. Comos, t. I , p, I/4O et 673.
{UO) [page 6211. Kœmtz, Lehrhuch der Météorologie^ t. ÏII ,
p. 277.
{Ui) LP3g6 62 Ij. La chute des aérolithes qui tombèrent à
Crema et sur les bords de l'Adda, a été décrite avec une vivacité
singulière, mais malheureusement d'une manière obscure et non
sans quelque mélange de déclamation , par le célèbre xAlarlyr
Anghiera {Opus Epistolarum, Amst 1670, n° CCCCLXV, p. 265
et 266). La chute des pierres fut précédée d'un obscurcissement
qui voila presque complètement le Soleil, le 6 septembre 1511,
à midi : «Fama est Pavouem immensum in aërea Cremensi plaga
fuisse visum. Pavo visus in pyramidem converti, adeoque céleri
ab Occidente in Orientem raptari cursu , ut in horae momento
magnam hemisphaerii partem doctorum inspectantiimi sentenlia
pervolasse credatur. Ex nubium illico densitate tenebras ferunt
surrexisse, quales viventiû^ai nuUus unquam se cognovisse fatea-
tur. Per eam noctis faciem, cum formidolosis fulguribus. in-
audita tonitrua regionem circumsepserunt. » Les éclairs étaient
si intenses que , tout autour de Bergame , les habitants purent
voir la plaine entière de Crema au milieu même de l'obscurité
qui la couvrait. L'écrivain ajoute : « Ex horrendo illo fragore
quid irata natura in eam regionem pepererit percunctaberis.
Saxa demisit in Cremensi planitie (ubi nuUus unquam aequans
ovum lapis visus fuit) immensae magnitudinis, ponderisegregii.
Decem fuisse reperta centilibralia saxa ferunt. s II est dit encore
que des oiseaux, des moutons, des poissons perdirent la vie.
Parmi ces exagérations, il faut bien reconnaître que le nuage
météorique d'où tombèrent les pierres devait être d une noir-
ceur et d'une densité inaccoutumées. Ce qu'Anghiera appelle
Pavo était sans doute un bolide alougé et pourvu d'une large
queue. A la manière dont l'auteur retrace le bruit eiîroyable
qui retentit ±im le nuage météorique, il semble qu il ait voulu
décrire des coups de tonnerre accompagnant les éclairs. Anghiera
se procura en Espagne un fragment de ces aérolithes gros comme
— 749 —
le poing, et le montra au roi Ferdinand le Gatliolique, en présence
du célèbre capitaine Gonzalve de Cordoue. La lettre dans la-
quelle il raconte ce fait, adressée de Burgos à Fagiardus, se
termine par ces mots : « xMira super liisce prodigiis conscripta
fanatice, pliysice, theologice ad nos missa sunt ex Italia Quid
portendant quomodoque gignantur^tibi utraque servo, si ali-
quando ad nos veneris.)) Cardan, entrant dans des détails plus
précis {Opéra, Lugd. 1663, t. III, lib. XY, cap. 72, p. 279),
affirme qu'il est tombé 1200 aérolithes, parmi lesquels il y en
avait un, noir comme le fer et très-dense, qui pesait 120
livres. Selon Cardan, le bruit se prolongea pendant deux heures :
« Ut mirum sit tantam molem in aère sustineri poluisse. » Il re-
garde le bolide à queue comme une comète, et se trompe d'une
année dans l'indication de la date, qu il fixe à l'année 1510. A
l'époque où ce phénomène se produisit, Cardan était âgé de
neuf à dix ans.
{U2) [page 622]. Récemment le&"aéroHlhes qui tombèrent à
Braunau,le l^juillet 18^7, étaient si chauds encore , six heures
après leur chute, que l'on ne pouvait les toucher sans se brû-
ler. — J'ai déjà signalé dans VAaie centrale (t. I , p. /i08) l'ana-
logie que présente avec une chute d'aérolithes le mythe de
Vor sacré répandu chez les races scythiques. Je joins ici le pas-
sage d'Hérodote, dans lequel est racontée cette légende (liv. V,
chap 5 et 7) : « Targitaus eut trois fils dont l'aîné s'appelait
Leipoxais, le second Arpoxais, et le plus jeune Colaxais. Sous
leur règne , il tomba du ciel dans la Scylhie , des instruments
d'or: une charrue , un joug, une hache et une coupe. L'aîné,
qui les aperçut le premier, s'étant approché pour les prendre,
l'or s'enflamma aussitôt. Arpoxais vint à son tour, et il en fut
de même; les deux frères repoussèrent donc cet or; mais quand
le troisième fils, Colaxais, se présenta, l'or s'éteignit et il
put le transporter dans sa maison. Ses frères comprenant le
sens de ce prodige, lui abandonnèrent tous leurs droits à la
royauté. »
m. ^8
- 750 —
Peut-être aussi le mythe de l'or sacré n'est-il qu'un mythe
ethnographique , une allusion aux trois fils du roi qui auraient
fondé chacun une des tribus dont se composaient les popula-
tions scythiques, et à la prédominance qu'obtint la tribu fondée
parle plus jeune, celle des Paralates. Voyez Brandstaeter, Scy-
thica, deaurea Caterva^ 1837 , p. 69 et 81.
(43) [page 623]. Parmi les métaux dont on a découvert la
présence dans les pierres météoriques , Howard a reconnu le
nickel , Stromayer le cobalt , Laugier le cuivre et le chrome ,
Berzélius Tétain.
(44) [page 616]. Rammelsberg, dans \es Annalen de Pog-
gendorff ,t. LXXIV, 1849, p. 442.
(45) [page 629]. Rammelsberg, PoggendorfiTs Annalen,
t IXXIII, 1848, p. 585; Shepard , dans V American Journal
of Sciences et Arts de Silliman, 2^ série , t. II , 1846 , p. 377.
(46) [page 629]. Voyez le Cosmos , t. I, p. 145.
(47) [page 630]. Zeitschrift der deutschen geologischen
Cesellschaft f t. I, p. 232. Tout ce qui, dans le texte, delà
page 614 à la page 617, est placé entre guillemets, est em-
prunté à des manuscrits du professeur Rammelsberg, portant
la date du mois de mai 1851.
(48) [page 635]. M oyez Kéi^lev^ Astronomica nova seu Phy-
sica cœlestis, tradita commentariis de motibus stellœ Martis , ex
ohservationibus Tychonis Brahi elahorata, 1609, cap. XLetLIX.
(49) [page 636]. 'L^'çii'àCQ , Exposition du Système du Monde,
p. 309 et 391.
(V
751 —
ADDITIONS GT CORRECTIONS.
Page ^0, ligne 15.
Depuis que j'ai dit, dans le Cosmos^ que rien jus-
qu'ici n'avait démontré l'influence des positions di-
verses du Soleil sur le magnétisme terrestre, les
excellents travaux de Faraday^ont constaté cette in-
fluence. De longues séries d'observations magnéti-
ques dans les deux hémisphères, à Toronto dans le
Canada, et à Hobart-Town dans la Terre de Yan-
Diemen, prouvent que le magnétisme terrestre est
soumis à une variation annuelle , dépendant de la
situation relative du Soleil et de la Terre.
Page 65, ligne 11.
Le singulier phénomène de la fluctuation des
étoiles a été observé tout récemment, à Trêves, par
des témoins très-dignes de foi. Le 20 janvier 1851 ,
entre 7 et 8 heures du soir, Sirius, qui était alors
placé très-près de l'horizon , parut agité d'un mou-
vement oscillatoire. Voyez la Lettre du professeur
— 752 —
Flesch dans le Recueil de Jahn , Unterhaltungen fur
Freunde der Astronomie.
Pages ilxk, ligne 6, et 334 (note 16).
Le vœu que j'émettais, de voir rechercher l'époque
à laquelle disparut la couleur rouge de Sirius, vient
d'être rempli , grâce à l'activité d'un jeune savant ,
M. Wopcke , qui à un grand savoir en mathémati-
ques joint une connaissance approfondie des langues
orientales. M. Wopcke, traducteur et commentateur
de l'Algèbre d'Omar Alkhayyami, m'a écrit de Paris,
dans le mois d'août 1851 : « L'espérance que vous
exprimiez, dans la partie astronomique du Cosmos,
m'a donné Tidée d'exacKf.inerles quatre manuscrits de
l'Uranographie de Abdurrahman al Ssufi que pos-
sède la Bibliothèque royale. J'y ai trouvé que a du
Bouvier, a du Taureau, a du Scorpion et a d'Orion
étaient désignés collectivement comme rouges, et
que rien de semblable n'était dit de Sirius. Bien plus,
le passage qui a trait à cette étoile , et qui est le
même dans les quatre manuscrits, est conçu en ces
termes : La première des étoiles dont est formé le
Grand Chien est la brillante étoile de la Gueule,
qui est marquée sur l'Astrolabe et porte le nom de
Al-je-maanijah. » Ne résulte-t-il j)<îs de cet examen
et du passage d'Alfragani que j'ai cité moi-même ,
que le changement de couleur de Sirius tombe vrai-
semblablement entre l'époque de Ptolémée et celle
des astronomes arabes ?
Page 5/^6.
[Depuis que cette partie du Cosmos a été publiée
en Allemagne, l'activité scientifique, tant de fois si-
gnalée par M. de Humboldt (voyez surtout p. 507) ,
ne s'est point ralentie. Aux quatorze petites planètes
dont il a donné le tableau , M. de Humboldt avait
déjà pu, en terminant, en ajouter une quinzième,
Eunoraie, découverte par M. de Gasparis , le 19 juillet
1851. Depuis, sept nouvelles planètes ont été dé-
couvertes : Psyché par M. de Gasparis, le 17 mars
1852; Thétis par M. Luther, le 17 avril; Melpomène
et Fortuna par M. Hind, le 24 juin et le 22 août;
Massalia par M. de Gasparis T le 19 septembre, et
par M. Chacornac , le 20 du même mois ; Lutetia par
M. Goldsmidt, le 15 novembre; enfin une planète
signalée par M. Hind, le 16 novembre, et qui n'a
point encore reçu de nom.
Nous donnons ici , d'après les Astronomische Nach-
richten , et en suivant l'ordre adopté dans le ta-
bleau de la page 546 , les éléments approchés des
six nouvelles planètes qui n'ont pu y être comprises;
on n'a point encore calculé les éléments de Lutetia ,
non plus que ceux de la dernière planète découverte
par M. Hind. ]
— 754
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— 755 —
Page 56Zt, ligne 18.
D'après une communication , datée du 8 novembre
1851 , que je dois à l'amitié de Sir John Herschel ,
M. Lassell a observé distinctement , les 2/i , 28 ,
30 octobre et 2 novembre de cette même année ,
deux satellites d'Uranus, situés plus près encore de
la planète principale que le premier satellite de
William Herschel , auquel cet astronome attribuait
une révolution d'environ 5 jours et 21 heures, mais
qui n'a pas été revu depuis. Les révolutions des deux
satellites que vient de reconnaîire Lassell sont éva-
luées approximativement à 4 jours et à 2 jours 1/2.
TABLEAU ANALYTIQUE
DES MATIÈRES
CONTENUES DANS LE TOME III
DU COSMOS.
IWTBODI'CTIOM 9
pages 1-12, et 263-27/i (notes 1-46).
Coup d'œil jeté en arrière sur -^f.s matières contenues dans les précédents
volumes. — La nature considérée sous deux points de vue différents: sous son
aspect extérieur et purement objectif, et dans son image reflétée à l'intérieur
de l'homme. — Comment une disposition intelligente des phénomènes permet
déjà d'en saisir le lien générateur. — Impossibilité de faire entrer dans un ouvrage
de ce genre une énuméralion complète des phénomènes particuliers. — Monde
idéal et intérieur , existant à côté du monde réel , et peuplé de mythes symbo-
liques, qui troublent la perception claire de la nature. — Impossibilité absolue
d'arriver jamais à une connaissance complète de tous les phénomènes cosmiques .
Découvertes des lois empiriques; recherches des causes qui relient entre eux
tous les phénomènes ; description et explication du monde. Comment l'obser-
vation des choses existantes peut révéler en partie la loi de leur formation et
de leur développement. — Différentes phases de l'explication du monde.
Efforts tentés pour comprendre l'ordonnance de la nature. — Premiers prin-
cipes appliqués par la race Hellénique à la contemplation du monde. Fan-
taisies physiologiques de l'École Ionienne; double direction de cette École:
hypothèse des principes concrets et matériels; hypothèse de la raréfaction
et de la condensation. Force centrifuge. Théorie des Tourbillons. — Pythagori-
ciens; philosophie de la mesure et de l'harmonie; première application des
mathématiques aux phénomènes physiques, — Ordonnance et gouvernement
du monde, d'après les principes physiques d'Aristote. L'impulsion considérée
oomme le fondemt4r: de tous les phénomèmes. Aristote peu préoccupé de la di-
versité des substances. — La théorie aristotélique reproduite au moyen âge dans
— 757 —
sa forme et dans ses idées fondamentales. Roger Bacon ; le Miroir de la
nature de Vincent de Beauvais; le Liber cosmographicus d'Albert le Grand,
V Imago Mundi du cardinal Pierre d'Ailly, — Prosjrès accompli par Gior-
dano-Bruno et par Telesio. — La gravitation ou l'attraction des masses claire-
ment exposée par Copernic. — Première application des mathémathiques à
la Ih 'oric de la gravitation dans les écrits de Kepler. — Cosmos ou Traité
du Monde, de Descartes; cette grande entreprise n'aboutit qu'à la publication
de quelques fragments, longtemps après sa mort. Le Cosmotheoros de Huy-
gens , indigne du grand nom de son auteur. — Newton et les Philosophiœ
naturalis Principia mathematica. — Effort fait pour embrasser l'ensemble
du monde. Peut-on bien fonder une science universelle de la nature , et
tout ramener à un seul principe, depuis les lois de la pesanteur jusqu'à la
force créatrice qui préside aux phénomènes de l'organisme et de la vie? Im-
possibilité d'épuiser par la perception le champ des phénomènes perceptibles.
L'insuffisance de nos connaissances expérimentales ne permet pas d'expliquer
par les forces de la matière les variations qu'elle subit, et réduit cette question
à l'état de problème indéterminé.
PARTIE IJHAHOIiOOIQVK »K ÏÏ^Jk DESCRIPTION PHYSIQUE
»IT inOMOE 9
I. ASTRONOMIE glDÉRALE ,
pages 29-416.
Chapitre L Espaces célestes. — Conjectures sur la matière qui parait
REMPLIR ces espaces, p. 33-48 et notes correspondantes , p. 27Zi-281 : — Des
parties isolées de l'espace sont seules susceptibles d'être mesurées, p. 34. —
Milieu résistant, matière cosmique, éiher universel , p. 36 et 275 (notes 61-
64). — Rayonnement calorifique des étoiles , p. 41 et 278 (n. 72). — Tempé-
rature de l'espace, p. 41-44 et 278 (n. 74-77). - Transparence imparfaite de
l'espace, p. 45.— Diminulion régulière dans la durée de la révolution décrite
par la comète d'Encke, p. 46 et 280 (n. 83). Limites de l'atmosphère, p. 48.
Chapitre II Vision naturelle et télescopique.— Scintillation des étoiles. —
Vitesse DE LA LUMIÈRE.— RÉSULTATS DES mesures photométriques, p. 49-111 et
notes correspondantes, p. 281-316 : — La lumière, de quelque source qu'elle
émane , obéit de la même manière aux lois de la réfraction , p. 51 . — Position
des raies de Wollaston, p. 52. — l.ffet des tubes, p. 51 et 282-284 ( n. 89). —
Moyens fournis par l'optique pour distinguer la lumière directe de la lumière
réfléchie, et importance de ces moyens pour l'astronomie physique, p. 54 et 284-
286 (n. 98-2). Limites de la force visuelle ordinaire, p. 54. Imperfection de
l'organe de la vuej diamètre factice des étoiles, p. 57 et'l87-290 (n. 4 et 6 ). —
— 758 --
Influence de la forme des objets sur le plus petit angle visuel ; différence d'éclat
de 1/60 nécessaire pour la visibilité; vision négativ • et vision positive, p. 58-
62. — Visibilité des étoiles à l'œil nu et en plein jour , du fond des puits ou sur
le sommet des hautes montagnes, p. 62 -Gd et 292 (n. 10). — Effet produit par
une lumière plus forte auprès d'une autre plus fai'ile , p. 287 (n. U). — Queues
et rayons divergents, p. 57 et 138-lûl. — De la visibilité des satellites de Ju-
piter à l'œil nu , p. 50 et 288 (n. 5). - Fluctuation des étoiles, p. 65 et 293
(n. 13). — Commencements delà vision télescopique et application des
lunettes aux instruments de mesure, p. 66-69 et 76— Réfracteurs de grande di-
mension , p. 69 et 293-294 (n. 15-17).— Réflecteurs, p. 71-73 et 294-595 ( n. 19-
23). — Observation en plein jour; comment de forts grossissements peuvent fa-
ciliter, durant le jour, la découverte des étoiles, p. 77, 78 et 296 (n. 27). — De
la scintillation des étoiles, p. 79-86 et 300-303 (n. 29-36 ). — Vitesse de la lu-
mière , p. 86-90 et 303-310 (n. 37-50). — Ordre de grandeur des étoiles; rap-
ports photoraéiriqueset difl"érentes méthodes de mesure, p. 98-103 et 311-316
(n. 56-66). Gyanomètre , p. 315. — Série photométrique des étoiles,
p. 104-111.
Chapitre III. Nombrk , distribdtion et codledr des étoiles. — Amas stel-
LAiRES. — Voie LACTÉE PARSEMÉE DE RARES NÉBDLEDSES, p. 112-165, et notes Cor-
respondantes, p. 316-345: — différents états du ciel qui favorisent ou
rendent impossible les observations astronomiques, p. 112-114. — Nombre
des étoiles; combien l'on en peut voir à l'œil nu, p. 111-116. — Nombre des
étoiles dont la position a été déterminée , et qui figurent sur les cartes célestes,
p. 116-127 et 316-324 (n. 70-89).— Tentatives pour évaluer le nombre des
étoiles rendues visibles dans toute la voûte du ciel par les télescopes dont on
dispose aujourd'hui, p. 127 et 128. — Astronomie contemplative chez les races
les moins civilisées, p. 129-131. — Sphère céleste des Grecs, p. 131-137 et
327-330 (n. 94-100).— Ciel de cristal, p. 136-138 et 330-332 (n. 1-5). —
Diamètres factices des étoiles vues à travers les télescopes , p. 138-140. —
Objets célestes propres par leurs dimensions à éprouver la puissance des lunettes
p. 141 et 332 ( n. 11 ). — Différences et variations dans la coloration des étoi-
les , p. 141-145 , et 333-338 ( n. 12-18 ). Sirius ( Sothis ) , p. 143-145 et 335-338
( n. 18). — Les quatre étoiles royales, p. 147. — Progrès accomplis successive-
ment dans la connaissance du ciel austral , p. 148, 149 et 389 (n. 30). - Lois
qui règlent la distribution des étoiles et les divers degrés de leur condensa-
tion ; jaugeage du ciel, p. 149-152. —Amas stellaires, p. 152-156. — Voie lac-
tée , p. 156-165 et 341-345 ( n. 45-66).
Chapitre IV. Étoiles nouvelles. — Étoiles changeantes a périodes con-
statées.— Astres dont l'éclat subit des variations, mais dont la périodicité
n'a point encore été reconnue , p. 166-213 , et notes correspondantes, p. 345-
350 : — Apparition d'étoiles nouvelles dans l'intervalle de 2000 ans, p. 166-
— 759 —
186 et345-3/i7 (n. 67-73). Étoiles périodiquement variables, p. 186-190 ;
lois des irrégularités apparentes; différences considérables d'éclat; périodes
de périodes, p. 190-196. — Table des étoiles variables dressée par Argelander,
avec un commentaire, p. 197-206 et 347 (n. 75-78). Étoiles variables à périodes
encore inconnues (ti d'argo, la Chèvre, étoiles de la Grande et de la Petite Ourse),
p. 206-212. — Liaison entre les variations de la lumière stellaire ou solaire,
et l'état météorologique de la Terre, p. 212 et 213.
Chapitre V. Mouvements propres des étoiles. — Existence problématique
d'astres obscurs. — Parallaxes , distances de quelques étoiles. — doutes sur
l'existence d'un corps central dans l'univers stellaire , p. 214-238, et notes
correspondantes , p. 350-357 : — Changements produits dans la physionomie
du firmament parle mouvement propre des étoiles , p. 214-219. — Preuves
qui rendent vraisemblable l'existence d'astres obscurs, p. 220-223. — Parallaxe
et mesure de.s distances qui séparent quelques étoiles fixes de notre système so-
laire,p. 223-231 et352-355(n. 5-16). Comment on peut faire servir l'observation
de la lumière, dans les étoiles doubles, à la détermination de leurs parallaxes,
p. 231. — Mouvement de translation du système solaire dans l'espace , et di-
rection de ce mouvement, p. 218 et 232-235. Centre de gravité de l'univers
sidéral; impossibilité de résoudre ce problème, p. 232, 235-238 et 256 ( n. 27
et 28). r'
Chapitre VI. Étoiles doubles et multiples. — leur nombre et leurs distan-
ces mutuelles. — Durées de la révolution de deux soleils autour de leur
centre de gravité commun, p. 239-260, et notes correspondantes, p. 358-363 :
— Étoiles doubles optiques et physiques, p. 240. Nombre des étoiles dou-
bles connues , p. 240-249. — Contraste de couleur dans les étoiles accou-
plées , p. 249-252. — Variabilité d'éclat , p. 253. — Étoiles triples , qua-
druples, quintuples et sextuples, p. 253 et 25û — Étoiles doubles dont les
orbites ont été calculées , p. 254-256. — Éléments des orbites des étoiles dou-
bles , p. 257. — Piemarques de M. Faye sur ce sujet , p. 258-260.
Chapitre VII. Nébuleuses. — Nébuleuses réductibles et nébuleuses irréduc-
tibles.— Nuées de Magellan. — Taches noires ou sacs de charbon, p. 365-416,
et notes correspondantes, p. 641-661 : — Résolution des nébuleuses. — Toutes
les nébuleuses sont-elles des amas d'étoiles pressées, p. 365-366 et 644-645
(n. 25 et 26 ). — Détails historiques sur l'observation des nébuleuses , p. 366-
382 et 648 ( n. 43) — Nombre des nébuleuses dont la position est déterminée,
p. 382, 383 , 646 et 647 (n. 35 et 36 ). — Distribution des nébuleuses et des
amasstcllaires dans l'hémisphère boréal et dans l'hémisphère austral , p. 383.
—Rareté et accumulation des nébuleuses dans certaines régions du ciel, p. 384-
387. — Formes diverses des nébuleuses; nébuleuses sphéroïdales , nébuleuses
perforées, nébuleuses planétaires , étoiles nébuleuses, nébuleuses irrégulières,
— 760 ~
p. 387-39^. — Nébuleuse réductible ou amas stcllaire d'Andromède, p. 155,
369-371 et 651 (n. 45). Nébuleuse de l'Épéc d'Orion. p. 372, 373 395-399,
642 , 645 , 654-656 ( n. 12,27,61, 63 , 67 et 68 ). — Grande nébuleuse de r,
d'Argo, p. 399 et 400. — Nébuleuse du Sagittaire, p. 400. — Nébuleuses du
Cygne et du Renard, p. 400 et 401. — Nébuleuse en spirale du Chien de chasse
septentrional, p. 401.— Les deux nuées de Magellan, p. 402-412 et 659 (n. 88).
— Taches noires ou sacs à charbon, p. 412-416 et 660-661 (n. 98-100).
II. SYSTEME SOLAIRE.
PLANÈTES ET SATELLITES. — COMÈTES. — LUMIÈRE ZODIACALE. —
ESSAIMS d'astéroïdes MÉTÉORIQUES,
pages 417-637 et 691.
Chapitre I. Le soleil considéré comme corps central, p. 426-458, et notes
correspondantes, p. 661 : — Données numériques, p. 428 430. — Constitution
physique du soleil; couches diverses servant d'enveloppe au disque obscur du
soleil; taches du soleil; facules, p. 430-443 et 662-668 (n. 8-18 ). —Affaiblis-
sements de la lumière solaire mentionnés par les annalistes; obscurcissements
problématiques, p. 444 et 668 6'/ 4 ( n. 19 ). — Intensité de la lumière au cen-
tre et sur les bords du disque solaire , p. 445-448 et 676-676 (n.21 et 22). —
Rapports entre la lumière, la chaleur, l'électricité et le magnétisme: Seebeck,
Ampère, Faraday, p. 451-453. — Influence des taches du soleil sur la tempé-
rature de notre atmosphère , p. 453-458.
Chapitre II. Les planètes , p. 459-569, et notes correspondantes, p. 677-
728.
I. Considérations générales, p. 459-512, et notes correspondantes, p. 677-
704.
Planètes principales:
1° Nombre des planètes principales, et époque de leur découverte , p. 460-
468. — Noms divers des planètes ; jours et heures consacrés aux planètes, p. 680-
691 (n. 43 et 44).
2° Division des planètes en deux groupes, séparés par la zone des petites pla-
nètes, p. 468-473.
30 Grandeur absolue et grandeur apparente des planètes; leur configuration
p. 473-477.
4° Ordre des planètes d'après leur distance au soleil ; prétendue loi de
Titius ; croyance répandue dans l'antiquité que tous les corps célestes actuel-
lement visibles ne ront pas toujours été. — Prosélènes, p. 477-488 et 692-700
(n. 48-63).
— 761 —
5° Masses des planètes, p. 488 el iS'J.
6*» Densité des planètes, p. 489-491.
7° Durée de la révolution sidérale et de la rotation des planètes, p. /i91-A93.
8° Inclinaison des orbites planétaires et des axes de rotation ; influence de
l'obliquité de l'écliplique sur les climats, p. /i95-501 et 702 ( n. 72).
9° Excentricité des orbites planétaires , p. 501-505.
10° Intensité de la lumière solaire sur les difl'érentes planètes, p. 505 et 506.
Planètes secondaires ou satellites, p. 506-511.
II. Notions particdlières sdr les planètes et les satellites. — Énuméra-
TION des diverses PLANÈTES ET LEURS RAPPORTS AVEC LE SOLEIL, CONSIDÉRÉ COMME
CORPS CENTRAL, p. 513-569 , et notcs Correspondantes, p. 70^-728:
1" Le Soleil, p. 513-515.
2° Mercure, p. 516-518.
3° Vénus; taches de Vénus, p. 518-520.
4° La Terre, simples données numériques, p. 521.
La Lime. La Lune source de lumière et de chaleur. Lumière cendrée ou lu-
mière terrestre dans la Lune; taches; surface de la Lune ; montagnes et plai-
nes ; altitudes mesurées; la forme circulaire, type dominant à la surface de
la Lune; cratères de soulèvement à éruptions intermittentes; anciennes tra-
ces de la réaction de l'intérieur contre l'extérieur. — Absence d'élément
liquide, et par suite absence de marées et des effets dus aux courants. — Con-
séquences géologiques à tirer de cet état de choses, p. 521-541 et 707-718
(n. 100, 134).
Mars; aplatissement; aspect de la surface variant avec les saisons, p. 5/jl-
543.
Groupes des petites planètes: Flora , Victoria , Vesta , Iris, Métis, Hébé,
Parthénope, Astrée , Égérie, Irène, Junon, Cérès, Pallas et Hygie, p. 5/i3-
5/j9, 753 et 754.
Jupiter : rotaiion , taches et bandes , p. 549-552.
Satellites de Jupiter, p. 552-555.
Saturne: bandes, anneau , position excentrique , p. 555-560.
Satellites de Saturne , p. 560-562.
UranuSjp. 562 el 563.
Satellites d'Uranus, p. 563-565.
Neptune: découverte et éléments de cette planète, p. 565-568.
Satellites de Neptune, p. 568 et 569.
Chapitre III. Les comètes, p. 570-591, et notes correspondantes, p. 728-742: —
Conjectures sur l'origine des comètes, p. 570-573. — Les comètes sont les
corps célestes qui, avec la plus faible masse, remplissent le^Uis d'espace dans
— 762 —
le système solaire, p. 573. — Nombre des comètes dont les éléments sont dé-
terminés; nombre des comètes visibles à l'œil nu en Europe, dans les derniers
siècles; nombre des comètes observées en Chine, depuis l'an 613 avant Jésus-
Christ jusqu'en 1644 , p. 573-576.— Formes des comètes, variations d'éclat , de
couleur et de figure; direction des parties qui les composent; durée de leurs
révolutions , p. 576-579. — Difficulté de constater l'état moléculaire des difi'é-
rentes parties des comètes, p. 581. — Séparation en deux parties de la comète
de Biéla, p. 583-586. — Comètes intérieures ou à courte excursion, p. 586-
590. — Éléments des six comètes intérieures exactement calculées , p. 588.
Chapitre IV. De la ldmière zodiacale, p. 592-598 : — Détails historiques,
p. 592-594. — Double intermittence annuelle et horaire, p. 596. — Nécessité
de distinguer ce qui , dans la lumière zodiacale , appartient au phénomène
lui-même, etce qui dépend de la transparence variable de l'atmosphère, p. 575.
— Séries d'observations correspondantes établies à des hauteurs diverses, sous
les tropiques, seul moyen de bien connaître la configuration et l'intensité de
la lumière zodiacale, p. 595 et 597. — Reflet de la lumière zodiacale semblable
à celui que produit le coucher du soleil , p. 595. — Comparaison de la lumière
zodiacale avec les plus brillantes parties de la voie lactée, p. 595. — Question
de savoir si le grand axe de la lumière zodiacale coïncide avec le plan de l'é-
quateur solaire, p. 598.
Chapitre V. Étoiles filantes, bolides et pierres météoriques, p. 599, et
notes correspondantes, p. 742-750. — Considérations générales: les aérolithes
sont pour nous les seules occasions d'un contact immédiat avec des corps
étrangers à noire planète , p. 600 et 601. — Premières chutes d'aérolilhes
dont la date ait été déterminée; aérolithe d'^gos-Potamos ; influence qu'il
exerça sur l'explication cosmique de ce genre de phénomènes, et sur les théo-
ries d'Anaxagore et de Diogène d'Apollonie. — Force centrifuge opposée à la
pesanteur, p. 601-606 et 742-744. (n. 21-25).— Météores isolés et météores pé-
riodiques; relations numériques et physiques de ces phénomènes; rayonne-
ment des étoiles filantes; nombre moyen des étoiles filantes sporadiques et pé-
riodiques dans un temps donné, suivant la dififérence des mois, p. 606-613 et
744-745. (n. 29-35). — Pluies périodiques d'étoiles filantes, autres que la
pluie de Saint-Laurent et celle du mois de novembre, qui semble actuellement
s'affaiblir , p. 613-615 et 744-746. (n. 36 et 37). — Hauteur et vitesse des mé-
téores, p. 615-617. —Couleur, forme et grandeur des étoiles filantes; com-
bustion; incendies causés par ces météores, p. 617-620. — Pierres météori-
ques; chutes d'aérolithes par un ciel serein, ou après la formation d'un nuage
noir météorique, p. 621-623 et 748-750 (n. 41 et 42 ).— Variation lunaire des
étoiles filantes dans les pluies périodiques, p. 623. — Composition chimique
des aérolithes ; analogies de ces pierres avec les roches telluriques, p. 624-630
et 750 (n. 43-47). A»
— 763 -
Conclusion : Regard jeté en arrière. - L'imites dans lesquelles doit être ren-
fermée une description générale du monde. — Relations réciproques des corps
célestes. — Lois de Kepler sur les mouvements des planètes.— Simplicité des
problèmes uranologiques , opposés à la complication que produisent , dans les
problèmes telluriques, la diversité et les transformations de la matière. Éléments
de stabilité du système planétaire, p. 631-637.
Notes, p. 641-750.
Additions ET CORRECTIONS , p. 751-755.
FIN DE LA SECONDE PARTIE DU 3^ VOLUME.
PARIS.— IMPRIMIÉ PAR E. THUNOT ET C% RUE RAji^NE, 26.
TABLK DES MATIÈRES
DE LA
2« PARTIE DU III- VOLUME.
Patres
Avertissement du traducteur vu
VII. Nébuleuses : nébuleuses réductibles et nébuleuses irré-
ductibles. Nuées de Magellan. Taches noires ou Sacs
à charbon 365
SYSTÈME SOLAIRE.
Système solaire : planètes et satellites , comètes , lumière
ZODIACALE et ASTÉROÏDES MÉTÉORIQUES Ui7
I. Le Soleil considéré comme corps central A26
IL Planètes : 1" Considérations générales Ù59
2" Notions particulières 513
IIL Comètes 570
IV. Lumière zodiacale 592
V. Étoiles filantes, bolides et pierres météoriques 599
Notes 6/il
Additions et corrections 751
Analyse des matières 756
-1
VI
TABLES NUMERIQUES.
Pages
Table des nébuleuses 399
Table des corps planétaires découverts depuis l'invention
du télescope z|65
Table des distances des diamètres apparents des sept
GRANDES PLANÈTES Ill6
Table des volumes des planètes Zi76
Table des distances des planètes au soleil Zi78
Table des masses des planètes Zi88
Table des densités des planètes 690
Table des révolutions des planètes 692
Table des inclinaisons des ORBiTfis planétaires et des axes
DE rotation , il9U
Table des excentricités des ojrbites planétaires 502
Table des divers degrés d'intensité de la lumière solame
sur les différentes planètes 505
Table des éléments des petites planètes 566
Table supplémentaire 756
Satellites de jupiter 553
Satellites de saturne 561
Éléments des six comètes intérieures 588
Périodes d'étoiles filantes 613
Table historique des obscurcissements du soleil , 670
AVERTISSEMENT DU TRADUCTEUR.
De nouvelles fonctions , entraînant avec elles des
devoirs impérieux , n'ont pas permis à M. Faye d'a-
chever la traduction de ce volume ; j'ai dû prendre
sa place, quoiqu'il m'en coûtât de me charger d'un
travail auquel mes études antérieures ne m'avaient
pas suffisamment préparé. J'ai tâché, à force de
soins, de suppléer à ce qui me manquait d'ailleurs.
Une garantie plus rassurante pour l'Auteur et pour
les lecteurs de ce livre est la révision attentive que
M. Arago a bien voulu faire de toutes les épreuves.
G. G,
ff^
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■^■a.'
•«M^
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p*
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La BÀ^bLLothèque.
Université d'Ottawa
Echéance
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Uni vers ity of Ottawa
Date Due
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