■■^'^japH.^sè^*'' B. ^^iM^ ■ P%^-oJ f.t^ '■■f*ZJiA JiJL z^ I9n DICTIONNAIRE DE PHYSIOLOGIE TOME VII DICTIONNAIRE DE PHYSIOLOGIE PAR CHARLES RICHET PROl''ESSEt;R DE P H YSIOI.OGIF. A LA FACULTÉ DR MÉDECINE DE PARIS AVEC LA COLLABORATION IVIIVI. E. ABELOUS (Toulouse) — ANDRÉ ^Paris) — S. ARLOING (Lyon) - ATHANASIU (Bukarest) BARDIER (Toulouse) — R. DU BOIS-REYMOND (Berlin) — G. BONNIER (Paris) — F. BOTTAZZI (Florence) E. BOURQUELOT (Paris) — A. BRANCA (Paris) — ANDRÉ BROCA (Paris) — J. CARVALLO (Paris) CHARRIN (Paris)— A. CHASSEVANT (Pans) — CORIN (Liège) — CYON (Paris) — A. DASTRE (Paris) R. DUBOIS (Lyon) — W. ENGELMANN (Berlin) — G. FANO (Florence) — X. FRANCOTTE (Liège) L. FREDERICa (Liège) — J. GAD (Leipzig) — GELLÉ (Paris) — E. GLEY (Paris) — L. GUINARD (Lyon) H. J. HAMBURGER (Groningen) — M. HANRIOT (Paris) — HÉDON (Montpellier) — P. HÉGER (Bruxelles) F. HEIM (Paris) — P. HENRIJEAN (Liège) — J. HÉRICOURT (Paris) — F. HEYIVIANS (Gand) J. lOTEYKO (Bruxelles) — H. KRONECKER (Berne) - P. JANET (Paris) — LAHOUSSE (Gand) LAMBERT (Nancy ) — E. LAMBLING (Lille) — LAUNOIS (Paris) — P. LANGLOIS (Paris) — L. LAPICQUE (Paris) R, LÉPINE(Lyon) — CH. LIVON (Marseille) — E. MACÉ (Nancy — GR. MANCA (Padoue) — MANOUVRIER (Paris) M. MENDELSSOHN (Pétersbourgj — E. MEYER (Nancy) — MISLAWSKI (Kazan) — J.-P. MORAT (Lyon) A. MOSSO ^Turin) — NEVEU-LEMAIRE (Lyon) — M. NICLOUX (Paris) — J.-P. NUEL (Liège) AUG. PERRET (Paris) — E. PFLUGER Bonn) — A. PINARD (Paris) — F. PLATEAU (Gand) — M. POMPILIAN (Paris) G. POUCHET (Paris) — E. RETTERER (Paris) — J. ROUX (Paris) — P. SÉBILEAU (Paris) C. SCHÉPILOFF(Genfeve)— J. SOURY (Paris) — W. STIRLING (Manchester) — J. TARCHANOFF (Pétersbourg) TIGERSTEDT (Helsingfors) — TRIBOULET (Paris) — E. TROUESSART (Paris) — H. DE VARIGNY (Paris) N. VASCHIDE (Paris) — M. VERWORN (Gôttingen) — E. VIDAL (Paris) — G. WEISS (Paris) E. WERTHEIMER (Lille) TOME VII G AVEC 159 GRAVURES DANS LE TEXTE PARIS FÉLIX ALCAN, ÉDITEUR ANCIENNE LIBRAIRIE GERMER BAILLIÈRE ET C' 108, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 108 1907 TABLE DES MATIÈRES DU SEPTIÈME VOLUME Pages. Galvanotasie. Gaulthérinc . M. Mendelssohn. E. Bourquelot. . NiCLOUX 1 Gaz Geissosperniiiifi - - 28 4-^ Gélatine . . . A. Perret. . . . 4:? Gélose. . . . fi? Gelsémine. . fi"? Génération. . E. Retterer. . . Charles Richet. E. Bolrquelot. . E. Bourquelot. . E. Bourquelot. . M. Mendelssohn. H. Ricôme . . . Ed. Griffon. . . tîfi Génération sp Genlianosc. . ontance. 73 SI Gentiopici'ine Gentisine . . Géotropisme maux . . . des ani- 84 8o Sfi Géotropisme des végé- taux Germination Gérontine 93 101 119 Gestation . . A. Pinard . . . i'>n Giacosa (P.K 188 Glairine . . . A. I'erret . . . 190 Glandes Ch. Livon. Gley (A.) Globulines A. Peiullt . . . Glossopharyngicnfnerfj E. Werthei.mer . Glycogènc E. Pfllger . . . Découverte du glycogènc Analyse Extension dans le rogne animal. . . Origines Destruction Lo diabèlc fjlycolysc R. Lkpine. . . . Glycoses A. Perret . . . Glycosides. ..... H. Hérisse y . . Glycérine M. Nicloux . . . Goitre (V. Thyroïde Gommes Goût N. Vasciiide. . . Graisses Launois et Mi:n.- Pages. . 191 . 20» . 206 213 228 228 23.=; 29.". 317 417 450 499 .316 539 555 569 569 570 Gra])hiqu(' 'métliodc . M. Pompiijan 709 7U ,q u^ PARIS. — TYP. PU. RE^"OUARD, li*. RUE I) K .S S A I N T .S - 1' K R E .S. SIMMONS COLLEGE, BOSTON, MÂSS. DICTIONNAIRE DE PHYSIOLOGIE GALVANOTAXIE (GALVANOTROPISME). — On désigne sous ce nom la propriété que possèdent certains organismes, uni- ou pluricellulaires, de se mouvoir activement dans un sens ou dans l'autre sous l'intluence du courant galva- nique. L'orientation tactique des organismes n'est pas l'apanage exclusif du courant galvanique; elle s'observe aussi très nettement sous l'influence du courant faradiqne. Il s'agit donc d'un effet propre à l'action de tout courant électrique, et il serait peut-être plus correct de donner à ce phénomène la dénomination générale d'électrota.vie (élec- lrotropisme)dont la galvanotaxie ne serait qu'une manifestation particulière. Il convient cependant de conserver le titre de galvanotaxie consacré par l'usage, par suite des très nombreux travaux faits avec le courant galvanique, tandis que les travaux entrepris sur l'action du courant faradique font presque exception. Nous décrirons ici les phénomènes d'orientation locomotrice produits aussi bien par le courant galvanique que parle courant faradique; nous ferons également mention des phénomènes tactiques qui résultent de l'action d'autres formes d'énergie électrique qui sont encore relativement peu étudiées. Avant d'aborder le sujet, il importe de remarquer que le mot galvanotropisme, qui avait été employé par les premiers auteurs, est actuellement remplacé par le mot galva- notaxie. Du reste, jusqu'à ces derniers temps, tous les phénomènes d'orientation des mouvements des êtres unicellulaires ont été désignés par le mot tropisme, nom impropre qui sert en botanique à désigner l'accroissement dans une direction donnée de cer- taines plantes sous l'influence des irritants. Le mot tactisme ou taxie, qui est générale- ment employé aujourd'hui en physiologie, est mieux fait pour exprimer le déplacement d'un organisme dans une direction imprimée par l'action d'un irritant. Historique. — Observée d'abord par les botanistes chez les végétaux, découverte par Hermann sur les larves de grenouilles et les embryons de poissons, et étudiée métho- diquement chez les organismes unicellulaires à vie libre par Verworn et d'autres encore, enfin étendue tout récemment par M. Mendelssohn aux leucocytes, la galvanotaxie est re- connue aujourd'hui comme un phénomène de portée générale pour les organismes simples ou pluricellulaires soumis à l'action du courant électrique. Grâce à de nombreux travaux publiés sur ce sujet dans les quinze dernières années, les actions directrices du courant galvanique sont peut-être les mieux connus de tous les mouvements tactiques produits par d'autres excitants. C'est que, parmi tous les excitants qui agissent sur la matière vivante, l'énergie électrique permet bien de déterminer avec une parfaite précision la mise en axe et l'orientation directrice des mouvements des organismes à vie libre. Non seulement nous pouvons graduer l'intensité du courant électrique d'une manière absolument exacte, mais nous pouvons aussi varier la direction à volonté et presque instantanément, ce qui permet de produire et d'observer les phénomènes galvanotac- tiques avec une précision indiscutable. On connaît déjà depuis longtemps les phénomènes de galvanotropisme chez les végé- DICT. t)IC PHYSIOLOGIE. — TOME VU. 1 2 CALVANOTAXIE. taux. Les radicelles de certaines plantes soumises à l'action prolongée d'un courant galvanique s'incurvent vers la cathode. Hermann (1885) découvrit le premier les phénomènes galvanotactiques chez les ani- maux. Il fit passer un courant galvanique à travers un vase qui contenait des larves de grenouilles et des embryons de poissons, et constata alors que ces animaux, soumis ainsi à l'action du courant constant, se placent à la fermeture suivant leur grand axe dans le sens du courant. La plupart ont la tète dirigée vers l'anode, et la queue vers la cathode; ils restent dans cette position absolument immobiles, tandis que ceux qui conservent une position inverse présentent une instabilité très caractéristique. Hermann a désigné ce phénomène sous le nom de galvanotropisme. Plusieurs physiologistes ont confirmé les faits signalés par Hermann. On a même observé le galvanotropisme chez les tout petits poissons (Neubauer). En 1889, Verworn décrivit les phénomènes galvanotactiques chez les organismes uni- cellulaires à vie libre, et il donna à l'étude de cette question un essor considérable, aussi bien par ses recherches personnelles que par les travaux inspirés par lui. Les organismes unicellulaires, tels que rhizopodes, infusoires et autres, contenus dans une masse de liquide à travers lequel il était facile de faire passer un courant, sont un réactif parfait pour obtenir des effets galvanotactiques nets, précis et plus simples que les effets complexes observés chez les animaux supérieurs pourvus d'un sys- tème nerveux. Verworn étudia les mouvements galvanotactiques chez un grand nombre de rhizopodes, d'infusoires ciliés et flagellés. Il a pu s'assurer ainsi que, lorsqu'on fait passer un courant à travers un vase qui contient des infusoires, ces derniers à la ferme- ture du courant s'orientent, se mettent en axe et se dirigent -.les uns vers la cathode, les autres vers l'anode. Suivant que les organismes se rassemblent au voisinage de la cathode ou de l'anode, la galvanotaxie est cathodique ou anodique. Anioeba Umax se dirige également vers la cathode en émettant dans cette direction un pseudopode. Les recherches de Verworn ont été complétées et étendues sur un grand nombre d'organismes unicellulaires, par Ludloff, Putter, Pearl, Carlgren,Wallengren, Birukoff et d'autres. Ce dernier a étudié l'action du courant faradique sur les mouvemen ts d'orientation des organismes unicellulaires. Joseph et Prowazek ont même observé chez les infusoires l'action tactique des rayons de Roentgen. D'autre part, les anciennes expériences d'HERMANN surla galvanotaxie chez les animaux pi uricellulaires invertébrés, et même chez les vertébrés inférieurs, ont été reprises par Nagel, Blasius et Schweizer, Loeb, Ewald et Hermann lui- même. LoRTET a vu les phénomènes électrotactiques chez les bactéries. Il a constaté que ces dernières réagissent à l'action des courants conduits par une orientation immédiate dans le sens du courant. Il considère ce phénomène comme vital,d'ordreprotoplasmique; carlesbactéries mortes nemanifestentaucune faculté d'orientation. Enfin, tout récemment, Mendelssohn a observé les phénomènes galvanotactiques chez les leucocytes. La descrip- tion des faits a été suivie de la construction des théories et des hypothèses tendant à déterminer la nature du phénomène galvano tactique. En définitive, aujourd'hui la gal- vanotaxie est le mieux connu de tous les phénomènes tactiques. Description du phénomène. Diverses formes de galvanotaxie. — Si l'étude de la galvanotaxie chez les organismes pluricellulaires et les animaux supérieurs est assez simple et se fait par les moyens généralement usités en électrophysiologie, il n'en est pas de même pour l'observation des phénomènes galvanotactiques chez les organismes unicellulaires qui ne peuvent pas être vus à l'œil nu. Leur élude devrait être faite sous le microscope, ce qui demande un agencement spécial. Le dispositif indi- qué par Verworn est le plus approprié à ce genre d'expériences. Sur un porte-objet ordinaire se trouve une petite auge rectangulaire remplie d'eau qui contient les orga- nismes unicellulaires. Cette auge est constituée par deux bandes parallèles d'argile poreuse qui sont reliées à leurs extrémités par un petit rempart de ciment isolant. On obtient ainsi un véritable micro-aquarium auquel le courant est amené au moyen de deux électrodes impolarisables dont les pinceaux sont appliqués sur les deux bandes d'argile ou bien au moyen de deux électrodes impolarisables constituées par une pointe d'argile calcinée qui plonge directement dans le liquide. Dans les deux cas les électrodes sont disposées de façon à faire traverser les objets microscopiques par un courant à peu près parallèle, On peut, dans ces conditions, observer très nettement les phénomènes GALVANOTAXIE. 3 de galvanotaxie cliez les différents organismes unicellulaires et particulièrement chez les paramécies. Au moment de la fermeture du courant, ces dernières se tournent par leur pôle antérieur vers la cathode et s'y rendent en colonnes serrées. En quelques secondes l'eau dans la région anodique est dépourvue de paramécies, qui toutes se sont accumulées en amas dans la partie cathodique de la cupule. Il suffit de renverser le courant pour que l'amas formé'dans la région cathodique se dissipe rapidement, et pour que toutes les paramécies se dirigent en bloc du côté opposé vers la nouvelle cathode, se trouvant à la place de l'ancienne anode et y formant une accumulation très dense. En répétant souvent cette expérience, c'est-à-dire en renversant à plusieurs reprises le courant, on verra chaque fois les paramécies aflluer avec une précision absolue vers la cathode et y former un amas épais. Les paramécies se rendent vers la cathode, lorsque celle-ci se trouve à l'extrémité de la goutte d'eau, comme cela a lieu dans la cupule placée sur le porte-objet: mais, lorsque les pointes des électrodes sont plongées dans la goutte d'eau même et entourées de tous les côtés par le liquide qui renferme les paramécies, on voit ces organismes se placer àla fermeture suivant les lignesdu courant dans la direction de la cathode au delà de laquelle elles forment l'amas. En déplaçant la cathode dans la goutte d'eau, on déplace l'amas de paramécies qui sont dirigées et attirées parlacathode aux différents points du liquide comme les poissons de fer-blanc nageant dans l'eau sont attirés par l'aimant. Le phénomène galvanotactique n'est pas, du reste, sans présenter quelque analogie avec l'action de l'aimant sur la limaille de fer. Tous ces phénomènes disparaissent à l'ouver- ture du courant; l'amas se désagrège et toutes les paramécies se dispersent plus ou moins uniformément dans tout le liquide. 11 est intéressant de noter que le phénomène galvanotactique se traduit avec une telle régularité et avec une si grande précision qu'il peut servir à éliminer les infusoires d'une partie du vase, et à les concentrer à l'autre bout du liquide où ils nagent. C'est ainsi que Mesnil et Mouton, dans leurs expériences sur une iliastase protéolytique des infusoires ciliés, ont tiré parti des propriétés galvano- tactiques des infusoires pour les isoler de leur milieu de culture chargé de bactéries, ce qui leur a permis d'extraire la diastase protéolytique. Les paramécies qui se dirigent sous l'action du courant galvanique toujours vers la cathode, présentent comme la plupart des infusoires ciliés, une galvanotaxie cathodique, tandis que plusieurs flagellés manifestent plutôt une galvanotaxie anodique. Cette der- nière s'observe très bien sur un flagellé oviforme nomuié Polytoma uvella, et pourvu à son extrémité antérieure de deux flagella. Si l'on fait passer un courant à travers une goutte d'eau contenant un certain nombre de ces infusoires, et si l'on ferme le courant, on voit que tous ces organismes dirigent leur extrémité antérieure vers l'anode, et se rendent en colonnes serrées vers le pôle positif où ils forment un amas plus ou moins dense. Les deux flagella qui, au repos, se trouvent pour ainsi dire dans un état de relâ- chement le long du corps, se dressent d'emblée, à la fermeture du courant, dans le sens opposé sur l'extrémité antérieure du corps qu'ils entraînent vers l'anode. Ces infusoires sont doués évidemment d'une galvanotaxie anodique. Après l'ouverture du courant la colonne de ces flagellés se disperse; tous les organismes nagent dans les différentes directions et se répartissent plus ou moins uniformément dans la goutte d'eau. Lorsqu'on fait passer un courant constant à travers un liquide contenant des infu- soires à galvanotaxie anodique et d'autres infusoires galvanotaxie cathodique, on voit, à la fermeture du courant, les deux espèces mélangées se séparer et se rassem- bler chacune à son pôle respectif. Les flagellés s'accumulent à la cathode, les ciliés à l'anode, tandis que le milieu du liquide est complètement dépourvu d'organismes. Il suffit de renverser le courant pour voir ces deux espèces se diriger dans un sens opposé les uns aux autres, s'entre-croiser au milieu de la goutte et s'accumuler de nou- veau à leurs pôles respectifs qui se trouvent maintenant aux extrémités opposées. Verworn, auquel on doit cette intéressante expérience, dit avec raison qu'il y a peu d'expériences physiologi({ues aussi élégantes que cette danse galvanotactique des infusoires. VEuwoRNa décritencoreunetroisièmeformedegalvanotaxie qu'il adésignéesousie nom de transversale, Yiar opposition à la galvanotaxie anodique et cathodique qui sont longi- tudi7iales. Tandis que, dans ces deux dernières formes de galvanotaxie, la mise en axe des infusoires a lieu suivant les lignes du courant, dans la galvanotaxie transversale l'animal 4 GALVANOTAXIE. dispose son axe longitudinal perpendiculairement à la direction du courant. C'est uninfu- soire cilié, Spirostomum ambiguum, qm présente le mieux le phénomène caractéristique de galvanotaxie transversale. A la fermeture du courant constant cet organisme ne se dirige guère vers un des pôles, mais il tourne lentement pour se placer avec son axe longitu- dinal perpendiculairement à la direction du courant. Une fois fixé dans cette position, l'infasoire s'y maintient pendant toute la durée du passage du courant : il l'abandonne aussitôt que le courant est ouvert. Verworn n'a observé la galvanotaxie transversale que chez le Spirostomum ambiguum,ma.\s Putter a décrit tout récemment le même phénomène chez plusieurs autres protistes {Spirostomum teres, CoJpidium colpoda, Chilodon cucul- lus, Bursaria truncatella, Stylonychia mylilus, Urostyla grandis). Il est vrai que Putter ne considère pas la galvanotaxie transversale comme un effet direct de l'action du cou- rant, mais comme un phénomène d'interférence entre la galvanotaxie et la thigmotaxie. La galvanotaxie transversale n'ayant été observée jusqu'à présent que sur un petit nombre d'infusoires, force est d'admettre que la plupart de protozoaires, et probablement certains protophytes, manifestent principalement la galvanotaxie ou le galvanolropisme anodique ou cathodique. Il serait superflu de décrire ici la réaction galvanotactique chez différents pro- tistes, d'autant plus que cette réaction est plus ou moins analogue à celle que l'on observe chez les paramécies, réaction qui devrait être considérée comme l'expérience fondamentale pour l'étude des phénomènes galvanotactiques chez la plupart des pro- istes. Du reste, en discutant plus loin la nature et les théories du phénomène galvano- tactique, nous aurons l'occasion de revenir sur les formes variées de galvanotaxie chez divers animaux. Notons seulement ici que les différentes espèces d'amibes, Amœftrt Umax, Amœba proteus, Amœba irrrucosa et Amœba diffluens réagissent très éner- ^quemenl à l'action directrice du courant constant et manifestent une galvanotaxie cathodique (Verworn). Un Amœba proteus avec ses nombreux pseudopodes, surpris par le courant constant, à la fermeture, émet vers la cathode un pseudopode dans lequel afflue toute la masse protoplasmique; le corps prend alors une forme allongée et rampe vers le pôle négatif. Si l'on renverse le courant, l'amibe change de direction et se dirige dans le sens opposé vers la nouvelle cathode. Le même phénomène s'observe, quoique moins nettement, chez le leucocyte qui est négativement galvanotactique (Mendelssoh.\). Le courant galvanique n'est pas le seul à produire des effets galvanotactiques. Le courant induit produit également une orientation locomotrice des infusoires. Déjà Verworn, au début de ses études sur les protistes, a vu les organismes tétanisés avec le courant induit se mouvoir dans un sens déterminé. Nagel a fait aussi quelques obser- vations analogues chez les organismes pluricellulaires. Mais c'est surtout Birukoff qui a fait des recherches très étendues sur l'action directrice du courant induit et a observé plusieurs phénomènes électrotactiques sous l'influence de ce dernier. Les rayons de Rœntgen produisent aussi chez les organismes inférieurs des phéno- mènes d'orientation analogues aux phénomènes galvanotactiques. Il résulte des recherches de Joseph et Prowazek que les paramécies et les daphnies accusent un lac- tisme négatif sous l'action des rayons de Rœntgen, qui exercent en même temps une action très prononcée sur la fonction protoplasmique de ces organismes. Le rapport de la galvanotaxie avec la nutrition et la fonction protoplasmique de l'infusoire n'est pas encore bien connu. Wallengren a étudié la galvanotaxie dans l'ina- nition chez les paramécies. Il résulte de ses recherches qu'il n'existe à cet égard aucune différence quantitative entre les organismes normaux et ceux qui se trouvent à l'état d'inanition. La diminution de l'excitabilité électrique et galvanotactique que l'on observe souvent chez les paramécies dans l'inanition n'est qu'apparente et dépend des modifications survenues dans les cils en rapport avec l'amaigrissement provenant de l'inanition. Les paramécies affamées, placées dans l'eau distillée, deviennent plus excitables, probablement à la suite de la perte de sels de sodium. Il suffit d'ajouter à l'eau distillée une faible quantité de chlorure de sodium pour voir l'excitabilité g-alvanotactique des infusoires baisser considérablement et redevenir normale. Il est certain qu'il doit exister un rapport entre le métabolisme du protoplasraa cellu- laire et l'intensité de la réaction galvanotactique. Mais, quant à présent, ce rapport est encore inconnu. Les recherches de Wallengren n'éclaircissent qu'un point de la question. GALVANOTAXIE. 5 Interférence de la galvanotaxie avec d'autres tactismes. — Lorsqu'un cou- rant électrique traverse un liquide qui contient différents infusoiros, son action sur ces organismes est presque toujours modifiée par l'action combinée d'autres irritants. Le liquide où vivent les protozoaires présente un milieu très hétérogène où différents irritants (chimiques, thermiques, lumineux, etc.) exercent sur les organismes uni- cellulaires leurs actions variéas,dont les effets combinés se surajoutent à l'action direc- trice du courant électrique, et inlluencent notablement la production et la marche du phénomène galvanotactique. Pour se bien rendre compte du mécanisme et de la nature de ce dernier, on devrait, dans toute expérience, éliminer autant que pos- sible les phénomènes lactiques provenant de l'action d'autres irritants, ce qui est chose très difficile, sinon impossible, lorsqu'on a affaire à un milieu aussi hétéro- gène que celui où vivent les infusoires. Ne pouvant pas être éliminées, ces actions doivent entrer en ligne de compte dans l'appréciation des phénomènes complexes que présente la galvanotaxie combinée à d'autres tactismes. Pour préciser l'action direc- trice du courant électrique sur les infusoires, il faut donc déterminer exactement la part qui revient dans le phénomène observé à l'action du courant électrique et celle qui revient à l'action combinée d'autres tactismes. Autrement dit, il faut déterminer les actions interférentes de différents irritants pour en dégager l'étendue et la valeur du phénomène galvanotactique. On sait que pour les actions d'interférence les effets varient suivant qu'il y a sommation ou soustraction des irritations. On obtient ainsi dans le premier cas un renforcement, dans le second cas une atténuation de l'effet provoqué par un des irritants. L'effet final de l'interférence de deux irritants dépend non seulement de leur intensité, mais aussi du sens de leur action. Deux irritants de même intensité ou d'in- tensité variable agissant l'un et l'autre dans le même sens, s'additionnent pour pro- duire un effet total qui est plus grand que celui que l'on obtient avec chacun des deux irritants pris isolément. Si, au contraire, les deux irritants d'intensité variable exercent tous deux leur action en sens opposé, il y a soustraction des actions des irritants, et l'effet produit est moindre que celui qui résulterait de l'action isolée de l'irritant plus fort ou bien de l'irritant qui agit dans la direction la plus favorable pour obtenir le maximum d'effet. De cette façon une excitation peut empêcher et même supprimer l'effet de l'autre, ce qui arrive surtout lorsque les deux irritants, différents comme nature et comme mode d'action, agissent dans deux sens contraires l'un à l'autre. Les deux actions antagonistes s'interférant l'une l'autre peuvent même s'annuler réciproquement et ne produire aucun effet extérieur. Ces données, valables pour toutes les actions d'interférence, se rapportent également aux interférences que présente la galvanotaxie avec les autres phénomènes tactiques, et particulièrement avec la chimiotaxie, thigmo- taxie et Ihermotaxie. Déjà Jennings a attiré l'attention sur les phénomènes d'interférence de la gaWaiio- taxie avec chimio-et thigmotaxie chez certains infusoires ciliés et notamment chez les paramécies. Il résulte de ses recherches que, suivant l'intensité du courant, l'effet gal- vanotactique l'emporte sur d'autres tactismes ou bien est supprimé par ces derniers. Les intensités du courant qui provoquent un effet galvanotactique appréciable chez les paramécies nageant librement ne provoquent aucun effet chez les paramécies thigmo- tactiques fixées sur une surface solide. Si l'on augmente l'intensité du courant, on cons- tate que plusieurs individus impressionnés par ce dernier se détachent de la surface solide et se dirigent vers la cathode comme des organismes libres. Dans le premier cas c'est la thigmotaxie qui l'emporte; alors un courant d'une batterie de 20 éléments à acide chromique ne produit encore aucun effet galvanotactique visible; dans le second cas, c'est la galvanotaxie qui l'emporte sur la thigmotaxie, mais avec une intensité du courant qui est celle d'une batterie de 30-40 éléments à acide chromique. Le batte- ment de cils provoqué par l'action du courant électrique est le même chez l'animal thigmotactique et chez l'animal nageant librement. Le courant produit toujours une excitation de contraction dans les cils du côté de l'anode, et une excitation d'expansion dans ceux du côté de la cathode. Ces faits ont été confirmés par Putïer, dont les recherches étendues à un grand nombre d'organismes présentent beaucoup d'intérêt au point de vue du mécanisme des 6 GALVANOTAXIE. actions d'interférences et au point de vue de leur rôle dans la production de différentes altitudes et des mouvements tactiques. Pltter a surtout étudié les actions d'interfé- rence de la galvanolaxie avec la thigmotaxie, et il a trouvé ce fait curieux que les diverses attitudes de l'animal thigmolactique, soumis à l'action d'un courant électrique insuffi- sant à faire prévaloir l'action galvanotactique, sont dus à l'excitation électrique (excitation de contraction) des parties de l'animal qui , généralement, ne sont pas impressionnées par l'excitation thigmotactique. Ainsi, de tous les cils d'une paramécie, ceux du péristome sont les seuls qui ne réagissent jamais à l'excitation de contact et ne jouent aucun rôle actif dans la fixation de l'animal sur un corps solide; par conséquent, ils ne prennent aucune part dans la production du phénomène thigmotactique. Or, si l'on fait agir un courant faible sur une paramécie soumise en même temps à l'exci- tation thigmotactique, et si l'on provoque ainsi une action d'interférence dans laquelle la thigmotaxie l'emporte sur la galvanotaxie, seuls les cils du péristome sont atteints par le courant, qui provoque dans cette région une excitation de contraction anodique, le péristome de l'animal étant tourné vers l'anode. A la suite de cette excitation du péristome, qui se trouve seulement d'un côté du corps cellulaire, dans lequel il occupe, par conséquent, une position asymétrique, l'animal subit un mouve- ment rotatoire, auquel les cils excités thigmolactiquement ne présentent aucune résistance, tandis qu'ils s'opposent au mouvement progressif de l'animal vers la cathode. L'infusoire ne se déplace pas, mais s'oriente transversalement, le péristome tourné vers la cathode. En général, tout infusoire cilié thigmotactique chez lequel le courant électrique ne produit pas d'excitation de contraction du péristome peut présenter deux attitudes différentes par rapport à la direction du courant. L'animal peut être placé perpendiculairement au sens du courant, position qui a été considérée jusqu'à présent comme l'effet de l'action spécifique du courant galvanique, ou bien l'animal peut se trouver dans le sens du courant avec le péristome tourné vers la cathode. Entre ces deux positions principales, il existe toute une série d'attitudes intermédiaires qui, toutes, résultent de la tendance que les actions d'interférence ont à soustraire le péristome à l'action excitante de l'anode. La position axiale transversale des infusoires thigmotactiques n'est qu'une attitude limite, que ces organismes prennent sans que le péristome soit excité. Du reste, comme il a été déjà dit plus haut, la position transversale n'est pas, d'après Putter, un effet simple de l'action du courant galvanique, une simple galvanotaxie transversale : elle constitue plutôt un phénomène d'intei'férence de la galvanotaxie (cathodique ou anodique) avec la thigmotaxie résul- tant de l'excitabilité variable des cils. On peut facilement s'assurer sur le Spirostomum ou sur d'autres infusoires ciliés, que ceux-ci, lorsqu'ils nagent librement à l'éfat de galvanotaxie cathodique, peuvent tout aussi facilement présenter le phénomène de galvanotaxie transversale que celui de thigmotaxie, et, dans ce dernier cas, ils peuvent, en interrompant leur marche, adhérer à une surface solide. PiiTTEa considère ce fait comme preuve à l'appui de la nature complexe de la galvanotaxie transversale. On verra plus loin que Wallengren a émis à ce sujet une opinion un peu différente de celle de Putter. INombreux sont les phénomènes provoqués par les actions d'interférence de la galvanotaxie avec la chimiotaxie. Vu le grand nombre de substances chimiques contenues dans le liquide où vivent les paramécies, toute expérience de galvanotaxie se complique forcément par des actions chimiotactiques qui ne se laissent pas toujours déterminer avec précision. Mais on peut très bien étudier ces actions d'interférence en ajoutant au liquide traversé par le courant électrique des substances chimiques à action chimiotaclique manifeste. C'est ainsi que S. Jennings a étudié l'effet chimio- tactique de plusieurs substances chimiques et alcalines et a pu observer des phéno- mènes d'interférence provenant de l'action simultanée de l'irritant chimique et de l'ir- ritant galvanique sur les infusoires. Il a constaté que, lorsqu'on introduit une goutte de substance chimique à action tactique dans le liquide contenant des paramécies et traversé par un courant galvanique, les organismes se déplacent vers la cathode jusqu'à ce qu'ils parviennent au bord de la goutte du liquide pour lequel ils sont chimiotac- tiques. Ils ne dépassent point cette limite, à moins que le courant ne soit très intense et de longue durée. Les actions d'interférence de la galvanotaxie avec la chimiotaxie CALVANOTAXIE. 7 sont subordonnées à l'intensité du courant et à la durée de son action. Plus le courant est intense, et plus la durée de son action est longue, plus la galvanotaxie l'emporte sur la chimiotaxie. C'est le contraire lorsque le courant est faible et de courte durée. La chimiotaxie l'emporte alors sur la galvanotaxie; les paramécies arrêtées par l'action cliimiotactique ne réagissent pjus à l'irritant électrique, et ne se rendent pas vers la cathode au moment du passage du courant. Il serait superflu de multiplier ici les exemples des phénomènes d'interférence qui résultent de l'action combinée de la gal- vanotaxie et de la chimiotaxie. Il importe cependant de remarquer que l'action d'inter- férence de l'iiTitant chimique avec l'irritant galvanique se manifeste non seulement par la prévalence d'un de ces irritants, mais aussi par le changement de signe de la galvanotaxie, suivant la nature de la substance chimique. La galvanotaxie anodique peut devenir alors cathodique, et réciproquement. Dale a démontré que, pour une même espèce, la galvanotaxie change de signe suivant que la solution salée est neutre, alcalinisée ou acidifiée. Si, en deçà d'un certain degré d'acidité, un infusoire se dirige vers l'anode, au delà il nagera vers la cathode. Un autre infusoire peut présenter dans les mêmes conditions une réaction inverse. Il résulte, du reste, des recherches de Dale faites sur les cinq espèces d'infusoires-parasites de l'intestin de la grenouille {Opaline, Balantidium, etc.), que, dans le cas où les infusoires sont placés dans des solu- tions contenant des éleclrolytes en proportion variable, il existe un parallélisme com- plet entre la galvanotaxie et la chimiotaxie. Chaque changement de signe dans le phénomène galvanotactique est toujours accompagné d'une variation équivalente dans la chimiotaxie des infusoires placés dans les mêmes conditions. Ainsi la galvanotaxie anodique correspond toujours au déplacement de l'infusoire vers l'acide, tandis que la galvanotaxie cathodique correspond à un déplacement de l'animal vers la région qui contient la solution alcaline. Il est donc difficile, dans ces conditions, de préciser la part qui revient à chaque tactisnie dans le déplacement de l'infusoire. Il est probable que ce déplacement est l'effet d'une action d'interférence qui résulte de l'addition de deux excitations, galvano- et chimiotactiques, agissant dans le même sens. Cependant Dale croit que, dans le cas donné, la chimiotaxie l'emporte complètement sur la galva- notaxie, et annule cette dernière. Aussi conclut-il que, dans le cas où les infusoires nagent dans l'eau contenant des électrolytes et particulièrement dans de l'eau salée (solution de NaCl à 0,6 p. 100), traversée par un courant galvanique, leur galvanotaxie n'est que de la simple chimiotaxie. Il n'en est pas ainsi lorsque les infusoires sont placés dans une eau à peu près pure. La galvanotaxie ne se confond plus avec la chimiotaxie, et il n'y a plus parallélisme entre les phénomènes galvanotactiques et chimiotactiques. Du reste Ualè, tout en rejetant l'idée du transport cataphorique des infusoires dans les phénomènes tactiques, attribue à la rhéotaxie le rôle principal dans les mouvements d'orientation des organismes quand l'eau est à peu près pure et ne contient pas d'élec- trolytes. Les actions d'interférence de la galvanotaxie avec la thermotaxie sont particulière- ment intéressantes. Au cours de mes recherches sur la thermotaxie des infusoires j'ai eu l'occasion d'observer plusieurs faits relatifs à l'action combinée des irritants galva- nique et thermique sur les mouvements d'orientation des organismes unicellulaires. Il résulte de ces recherches que l'interférence de l'excitation galvanotactique et de l'exci- tation thermotactique dépend non seulement de l'intensité et du sens du courant, par rapport à celui de la thermotaxie, qui peut être positive et négative, mais qu'elle se trouve aussi, du moins chez les paramécies, en rapport direct avec la localisation de la cathode, et varie suivant que celle-ci est placée à l'endroit même de l'optimum thermo- tactique ou bien en avant ou en arrière de ce dernier. On sait que l'optimum thermo- tactique, qui varie suivant l'espèce et suivant différentes conditions vitales, représente la température favorable (24°, 28°), vers laquelle les organismes unicellulaires se diri- gent en partant des endroits à température, soit plus basse, soit plus élevée. Or, si un courant d'intensité moyenne traverse le liquide contenant des paramécies dans le sens de l'action thermotactique positive, c'est-à-dire si l'anode est placée à la température infé- rieure, et la cathode à la température plus élevée, l'effet obtenu diffère suivant l'endroit où est placée la cathode. Dans le cas où la cathode est placée au point môme de l'opti- mum, l'action thermotactique est renforcée : toutes les paramécies se rendent plus rapi- 8 GALVANOTAXIE. dément et avec plus d'énergie à l'optimum. Lorsque la cathode se trouve en-deçà de l'optimum, par exemple à l'endroit où la température est de 20°, les paramécies s'arrêtent à cet endroit, y restent quelque temps et continuent avec une certaine hésitation leur chemin vers l'optimum, où elles s'accumulent définitivement. Enfin, si la cathode est placée au delà de l'optimum, par exemple à l'endroit chauffé à une température de 36° à 38°, les paramécies restent amassées à leur optimum thermotactique et ne conti- nuent pas leur chemin vers la cathode. Ces trois cas présentent trois types caractéris- tiques des interférences des irritants thermiques avec les irritants électriques. Dans le premier cas l'action thermotactique est renforcée par l'action galvanotactique. Dans le second cas la première est ralentie, et plus ou moins enrayée par la seconde; dans le troisième cas la thermotaxie l'emporte sur la galvanotaxie. Ces trois cas se rappor- tent à l'action des courants faibles ou moyens. Lorsque le courant galvanique est de très grande intensité et exerce une action de longue durée, la galvanotaxie l'emporte toujours sur la thermotaxie, quelle que soit la position de la cathode par rapport à l'optimum thermotactique. Les actions d'interférence de la galvanotaxie avec d'autres tactismes (photo- géo- et rhéotaxie) n'ont pas fait l'objet d'études spéciales : il n'en est pas moins probable, sinon certain, qu'elles se produisent chez les organismes unicellulaires dans différentes condi- tions vitales et expérimentales. Déjà dans toute expérience galvanotactique ou a affaire à l'action du courant électrique combinée à celle d'autres agents irritants exerçant leur action constante dans le liquide où se trouvent les infusoires. Dans toute manifestation de la vie les réactions de la matière vivante résultent de la multiplicité des influences qui interviennent dans les phénomènes vitaux. Il est même infiniment probable que toutes les fonctions organiques des organismes unicellulaires et de la plupart des orga- nismes supérieurs sont uniquement une résultante de l'action simultanée de différents irritants qui s'interfèrent les uns les autres. Nous sommes même portés à croire que les mouvements désordonnés qu'une paramécie paraît exécuter au gré du hasaid sans direction déterminée relèvent de l'action simultanée des différents irritants agissant dans des sens divers, et que c'est à l'action combinée de différents tactismes qu'il faut attribuer les irrégularités qui surviennent dans la marche d'une expérience tactique. C'est aussi à ce fait que nous avons cru devoir rapporter, dans nos recherches sur la thermotaxie, l'intensité variable de la progression thermotactique des paramécies dans différentes expériences dont les conditions restent les mêmes. Tous ces faits, et bien d'autres qu'il serait superflu de citer ici, prouvent que les actions d'interférence jouent un grand rôle dans la vie des organismes unicellulaires. Mais, si intéressants que soient les phénomènes d'interférence de la galvanotaxie avec d'autres tactismes, ils ne paraissent pas avoir une grande importance dans la vie normale des organismes élémentaires. L'électricité, dont le rôle hiologique n'est pas encore suffisamment connu, n'a certainement pas pour la vie l'importance qu'ont d'au- tres agents physiques, comme par exemple la chaleur et la lumière, qui représentent les conditions primordiales et indispensables de toute vie organique. Il est infiniment probable, disions-nous dans notre travail sur la thermotaxie, « que le milieu liquide dans lequel vivent les protozoaires est le siège de diverses l'éactions électrochimiques qui ne sont pas indifférentes pour la vie de l'individu; mais, quant à présent, ces réac- tions sont encore très peu connues et ne fournissent aucun élément pour une théorie générale relative au rôle de la galvanotaxie dans la vie de l'être unicellulaire ». Il serait donc peut-être trop hasardé de prétendre que l'orientation galvanotactique est un phé- nomène naturel dans la vie des organismes, malgré l'hypothèse émise par quelques biologistes qui font dépendre l'orientation dans la migration des animaux des courants telluriques électro-magnétiques. Cette hypothèse n'est nullement fondée, et n'est basée sur aucun fait réel. Tout au plus aurait-on le droit d'affirmer, en se basant sur les considérations précédentes, que la galvanotaxie est une propriété générale de la matière vivante. Son rôle biologique, quant à présent, est inconnu. Nature et mécanisme du phénomène galvanotactique. DifiFérentes théories. — Vu la précision, la netteté et la régularité avec lesquelles se produit le phénomène galvanotactique, il n'est guère surprenant que tous les expérimentateurs qui se sont occupés de la question ont cherché à étudier le mécanisme du phénomène, à Tinter- CALVANOTAXIE. 9 prêter et à en donner une théorie générale. Aussi sont-elles nombreuses, les hypothèses qui ont été émises pour expliquer l'action directrice du courant galvanique sur les mou- vements des organismes. L'histoire de ces théories est pour ainsi dire l'histoire de la galvanotaxie elle-même. Lors de la découverte du phénomène galvanotactique,HEaMANN a cherché à l'expliquer par une action difïérente du courant suivant sa direction. Le courant ascendant étant irritant, douloureux même pour des intensités fortes, les organismes, instinctivement ou par action réflexe, cherchent à s'orienter de manière à éviter les sensations doulou- reuses provenant des excitations exagérées, et tendent à se placer dans le sens du cou- rant descendant, qui est plutôt calmant. En effet, dans l'expérience d'HERMANN, les larves de gi'enouilles et les embryons de poissons soumis au courant constant ascendant évitent l'action irritante de ce dernier et se placent toujours dans le sens du courant avec la tête dirigée vers l'anode. Cette théorie psycho-physiologique d'HERMANN, admise avec quelques modifications par Ewald, donnait une interprétation assez satisfaisante du phénomène galvanolactique chez les animaux pourvus d'un système nerveux, mais ne pouvait nullement expliquer l'action directrice du courant galvanique sur les mouve- ments des organismes unicellulaires dépourvus de tout élément nerveux. II était évident que l'on ne pouvait tirer sur la nature et le mécanisme de la galvanotaxie aucune indi- cation précise d'après expériences faites sur des animaux à structure compliquée, comme les embryons des vertébrés. Quelques biologistes, dominés par les idées anthro- pomorphistes, accusaient même une tendance à voir uu élément psychique dans les divers tactisraes et parlaient volontiers d'une « attraction » ou d'une répulsion et même d'une « préférence » des organismes unicellulaires pour une certaine substance chimique, pour une certaine température, etc. Cette manière de voir ne pouvait séduire les biolo- gistes qui cherchent l'interprétation des phénomènes biologiques dans les processus physico-chimiques de la vie. On a bien vite abandonné l'hypothèse des actions mysté- rieuses que l'on attribuait aux phénomènes tactiques, et l'on a cherché l'explication de ces derniers dans une action directe des agents physiques sur les éléments contractiles et sur les organes locomoteurs des organismes élémentaires. Au point de vue des phénomènes galvanotactiques, les données électrophysiologi- ques relatives à l'action intime du courant sur la matière vivante, ont fourni des élé- ments importants à une théorie de l'action directrice du courant galvanique chez les protozoaires. Dans l'étude des phénomènes galvanotactiques, on devait forcément penser à l'action du courant sur le protoplasma. De là à établir un rapport entre la galvanotaxie et l'excitation polaire du courant il n'y avait qu'un pas qui a été franchi par Verworn. Ce physiologiste a le mérile d'avoir analysé le premier cette question complexe et d'avoir attiré l'attention des physiologistes sur le rôle de l'action polaire du courant galvanique dans l'orientation des mouvements chez les organismes unicellu- laires. C'est une propriété caractéristique du courant galvanique de provoquer dans les muscles et dans les nerfs des phénomènes d'excitation polaire. Il s'agissait donc de savoir si le courant galvanique produit également des phénomènes d'excitation polaire chez les organismes unicellulaires et dans les cellules à vie libre. Rien n'était plus facile alors que de chercher dans cette catégorie de phénomènes l'explication du mode d'action du courant galvanique sur la direction des mouvements chez les organismes unicellu- laires. Les expériences de Verworn et de ses élèves l'ont démontré d'une manière défi- nitive. Quoique l'excitation électrique ait été appliquée presque exclusivement à l'étude de la fonction de la fibre nerveuse et musculaire, cependant, bien avant la découverte de la galvanotaxie, la physiologie comparée avait enregistré un certain nombre de faits plaidant en faveur de l'action du courant électrique sur les cellules végétales et sur les organismes unicellulaires. En 1864 KiiHNE, étudiant l'action du courant éieclviqae sur Actinosphaerium E/cMornJ, découvrit que ce rhizopode obéit à une loi d'excitation polaire qui s'écarte no- tablement de celle des nerfs et des muscles (v. Électrotonus, v, 411). Ce protozoaire se contracte lors de la fermeture du courant, non pas à la cathode, mais bien à l'anode. Verworn, ayant repris ces expériences, a confirmé et complété les faits constatés par Kt'HNE.IIrésultede ses recherches, faites surun grandnombre d'organismes unicellulaires, que, lorsqu'on excite un Actinosphœrium, on constate qu'au moment de la fermeture du 10 GALVANOTAXIE. courant les pseudopodes, qui au repos sont étendus tout droit, se contractent, et que leur protoplasnia afflue dans le corps cellulaire. En étudiant le phénomène de plus près, on peut s'assurer qu'à la fermeture du courant l'excitation se produit chez Actinosphaerium, aussi bien à l'anode qu'à la cathode, tandis qu'à l'ouverture du courant elle a lieu seule- ment à la cathode. L'excitation de l'anode est toujours plus forte que celle de la cathode. Mais, ce qui est tout à fait surprenant et en désaccord avec la loi d'excitation polaire dans les muscles et les nerfs, c'est que VActinosphœrium est excité non seule- ment à la fermeture et à l'ouverture du courant, mais aussi pendant toute la durée de son passage. La désintégration du protoplasma commence toujours à l'anode, et se pro- page graduellement vers la cathode pendant tout le temps de la fermeture du courant; elle ne cesse qu'au moment de l'ouverture. Le degré de la destruction est en rapport direct avec l'intensité du courant et la durée de son action, Verworn a étudié l'action du courant électrique sur plusieurs autres infusoires, et notamment sur de grands Rhizopodes à mouvements lents de la mer Rouge. Les faits qu'il a constatés présentent un très grand intérêt au point de vue de l'action polaire du courant électrique sur la matière vivante. Aussi sera-t-il utile de les rapporter ici en détail. Un grand rhiiOTpode, Orbitolites complanatus,ré3Lgil à l'action polaire du courant gal- vanique d'une manière à peu près analogue à celle d' Actinosphaermm.Vn courant d'in- tensité moyenne produit à la fermeture une excitation de contraction aussi bien à la cathode qu'à l'anode, mais celle de l'anode est plus forte que celle de la cathode. L'excita- tion de contraction chez ce rhizopode se manifeste par une rétraction des pseudopodes et par un écoulement du protoplasma dans une direction centripète vers le corps cellulaire, contrairement h ce qui se passe lors de l'excitation d'expansion dans laquelle le courant protoplasmique est centrifuge et se dirige vers les pseudopodes qui s'étalent. L'excitation contractile a lieu pendant toute la durée du passage du courant et ne cesse qu'à son ouverture. Les pseudopodes s'étalent alors de nouveau, soit à la suite d'une excitation expansive produite par l'ouverture du courant, soit grâce à différentes causes internes indépendantes de l'ouverture du coura.nL Chez VOrbito lit es l'ouverture du courant ne pro- duit donc pas, comme chez Actinospfiœrium, une excitation de contraction à la cathode. D'autres rhizopodes réagissent également à l'action polaire du courant, mais il y a assez de différences de l'un à l'autre pour démontrer la notable variabilité des effets obtenus pour diverses espèces avec l'irritant galvanique. Amphistegina Lessonii et Pere- noplis pertusus se comportent comme Orbitolites vis-à-vis l'action polaire du courant. Toutefois leur réaction est plus énergique; car leur excitabilité est plus grande, et les sphères protoplasmiques qui se forment tout le long du pseudopode pendant l'excitation de contraction apparaissent aussi bien à l'anode qu'à la cathode, tandis que chez Orbi- tolites ils ne sont visibles que dans la région anodique et nécessitent pour se produire une forte intensité du courant. Chez Hyalopus Dujardinii, la fermeture du courant produit une excitabilité de con- traction à la cathode et rien à l'anode. On ne constate aucune excitation à l'ouverture du courant. La même réaction s'observe chez Wdzoplasma Kaiscri, rhizopode géant découvert par Verworn dans la Mer Rouge et mesurant plusieurs centimètres de diamè- tre. Il présente à la fermeture du courant une excitation de contraction à l'anode, et rien à la cathode; à l'ouverture une faible excitation contractile se produit à la cathode, et rien à l'anode. Pelomyxa est excité et se contracte à l'anode lors de la fermeture, à la cathode lors de l'ouverture du courant. Mais c'est surtout chez Amoeba proteus que Ver- worn a étudié les actions polaires du courant électrique et précisé l'influence de ces dernières sur les mouvements de ce protozoaire. On sait que le corps de cette amibe est pourvue de nombreux pseudopodes étalés comme des rayons dans toutes les directions, différant en cela de VAmœba Umax, dont le corps allongé ne possède qu'un seul pseudo- pode grand et épais. Si l'on ferme un courant constant traversant le corps de VAmœba proteus au moment où l'amibe a ses prolongements dirigés dans tous les sens, on con- state qu'à la cathode il se forme un pseudopode essentiellement hyalin qui s'allonge de plus en plus, et vers lequel atfluent toutes les granulations du corps; les pseudopodes dans la région anodique disparaissent. Le corps étiré en long prend la forme allongée de V Amoeba Umax. Le grand axe de cette longue et grosse bande est dirigé suivant le GALVANOTAXIE. 11 sens du courant, et il s'y établit un courant protoplasniique de l'anode vers la cathode. La partie tournée vers l'anode se contracte, le protoplasma dans la région anodique se rétracte, tandis que la partie cathodique au contraire s'étale et présente une forme large et arrondie. L'organisme se déplace d'ailleurs vers la cathode, sans jamais émettre des pseudopodes secondaires dans d'autres directions. D'après VERW0RN,les deux extrémités de l'amibe sont excitées par le courant galvanique à la fermeture : il se produit une excitation de contraction à l'anode, et une excitation d'expansion à la cathode. La rétrac- tion des pseudopodes chez l'amibe est l'effet d'une excitation de contraction, tandis que l'émission des pseudopodes serait l'effet de l'excitation d'expansion. Du reste, la con- ti-action à l'anode et l'expansion à la cathode sont deux phénomènes qui agissent iden- tiquement au point de vue du mécanisme du transport de l'amibe ; tous deux tendent à déplacer l'organisme vers la cathode. Tous ces faits ont conduit Verworn à reconnaître que le courant électrique exerce indubitablement une action polaire sur les organismes unicellulaires, quoique, vu la grande variabilité des phénomènes observés chez diverses espèces, il ne soit guère pos- sible d'établir une loi générale d'excitation polaire de la matière vivante. Chez les infusoires ciliés, notamnient chez les paramécies, les phénomènes d'excita- tion polaire ont été également observés par Verworn et étudiés avec grand soin par Ludloff dans un travail fait sous la direction de Verworn. Lorsqu'on fait passer le courant gal- vanique à travers un liquide contenant des paramécies, on constate qu'à la fermeture du courant le corps des paramécies se contracte à l'anode ; toute la partie anodique de l'animal se rétracte en une pointe entourée de filaments provenant du liquide que les trichocystes expulsent au moment de l'excitation. Tout infusoire change déforme : son bout postérieur s'effile, et présente un prolongement caudiforme, tandis que le bout antérieur devient plus arrondi et émoussé. Les cils vibratiles s'incurvent à Tanode plus fortement vers l'extrémité postérieure du corps; à la cathode ils se dirigent vers son extrémité antérieure, et cela d'ailleurs, quelle que soit la position du corps par rap- port à la direction du courant. Il est évident qu'aux deux pôles du corps les cils sont excités en sens inverse. L'excitation produite à l'anode est envisagée par Ludloff comme une excitation de contraction, vu que les cils situés du côté de ce pôle battent plus fortement à l'extrémité postérieure du corps, tandis que l'excitation cathodique est considérée par cet auteur comme une excitation d'expansion, le battement des cils étant plus fort à l'extrémité antérieure du corps. Les faits observés par Ludloff ont été confirmés par Pearl, qui a étudié d'une manière très approfondie les modifications polaires du mouvement des cils chez un grand nombre d'infusoires ciliés. Il importe de remarquer que l'action polaire du courant électrique sur les cils a été déjà indiquée par Engelmann et étudiée plus récemment parKRAPFT. Dans des recherches faites sur la muqueuse pharyngienne de la grenouille, Engelmann a constaté que les mouvements vibratils des cils sont fortement influencés par le courant électrique; ils s'accélèrent ou se ralentissent suivant la durée, l'intensité et le mode de l'excitation électrique. Le courant appliqué à la muqueuse pharyngienne exerce son action sur les cils, non seulement dans l'espace intrapolaire,mais aussi dans les régions extrapolaires en se propageant de cellule en cellule. Le courant galvanique agit surtout à la ferme- ture, mais aussi, quoique plus faiblement, à l'ouverture. Les effets d'excitation se pro- duisent également pendant toute la durée du passage du courant. D'après Krafft, les deux pôles du courant constant exercent leur action excitante sur les cils chez les animaux vertébrés. A la fermeture du courant le mouvement vibratil des cils s'accélère, aussi bien à l'anode qu'à la cathode. Quoique la réaction des cils au courant électrique chez les vertébrés soit, d'après Engelma.n.x, un peu différente de celle que l'on observe dans les mêmes conditions chez les animaux inférieurs, il n'en est pas moins vrai que ces organes moteurs présentent dans toute la série animale des phénomènes polaires très nets. Un fait caractéristique de l'action polaire du courant galvanique a été décrit par LoEB chez Amblyostoma, batracien urodèle d'Amérique. La peau de cet animal ren- ferme des glandes qui sécrètent un mucus blanc très bien visible sur le fond noir de l'animal. Ces glandes sont excitées à la fermeture du courant toujours à l'anode, quelle 12 GALVANOTAXIE. que soit la direction du courant qui traverse le corps. Ainsi, lorsqu'un courant descen- dant traverse l'animal, ce sont les glandes de la partie antérieure du corps qui sont excitées. Lorsque le courant se dirige en sens inverse, ce sont les glandes de la partie caudale qui entrent en activité. Enfin, dans le cas où le courant agit dans le sens trans- versal, seules les glandes placées dans la partie du corps tournée vers l'anode réagissent à l'action du courant et sécrètent. L'excitation anodique des glandes à la fermeture peut être aussi démontrée sur des fragments d'un animal coupé que l'on fait traverser successivemeut par des courants ascendants et descendants. La réaction électrique des glandes d'Amblyostoma ne concorde donc pas avec la loi d'excitation polaire de Pfluger. Les effets d'excitation polaire chez les organismes unicellulaires s'observent, non seulement à la suite de l'action du courant galvanique, mais aussi sous celle du courant induit. Déjà Kuhne (1804), E.ngelmaxn (1869) et Verworx (1889), ont constaté l'action du courant induit sur les phénomènes de contraction chez les différents rhizopodes. Sche- viAKOFF a observé chez Stentor des contractions provoquées par des chocs d'induction. Ces contractions étaient plus fortes du côté de la cathode à la fermeture, et du côté de l'anode à l'ouverture du courant. Mais c'est surtout Roesle (1902) qui a fait sur ce sujet des recherches aussi nombreuses que détaillées. Il en résulte que, suivant l'espèce, l'ex- citation par le courant induit se fait tantôt à l'anode, tantôt à la cathode, et que le phé- nomène produit chez les infusoires par un choc d'induction est l'effet de l'excitation indirecte des organes moteui's. Ces faits se rapprochent de ceux que l'on observe à la suite de l'action du courant galvanique et affirment la valabilité générale de l'action polaire du courant électrique sur les organismes unicellulaires. Statkevitch a appliqué tout récemment les chocs d'induction à l'étude de l'irritabilité des infusoires ciliés, et il a constaté des faits qui ne s'accordent non plus avec la loi de l'excitation polaire [de Pfluger. Les modifications produites par le courant galvanique dans l'œuf et dans cer- tains éléments embryonnaires sont également attribuées par Roux à l'action polaire du courant; mais cette manière de voir n'est guère partagée par Verworn. 11 nous paraît supertlu de multiplier encore les exemples d'action polaire du courant galvanique chez les organismes élémentaires. Les expériences que nous venons de relater établissent d'une façon certaine le caractère polaire de l'action du courant électrique chez ces êtres, mais elles démontrent en même temps que, pour les organismes uni- cellulaires, la loi d'excitation polaire s'écarte notablement de celle des njuscles et des nerfs. Suivant l'espèce, les organismes élémentaires réagissent soit à l'excitation catho- dique, soit à l'excitation anodique, soit à l'excitation simultanée des deux pôles. Un fait caractéristique pour certains protozoaires qui vient heurter notre concep- tion d'une loi d'excitation polaire, considérée comme loi générale, c'est que chez cer- tains organismes le courant constant excerce son action excitante pendant toute la durée de son passage à travers le corps excité. Aussi Verworn, en se basant sur les faits observés et sur la variabilité des résultats obtenus chez diverses espèces, croit-il pouvoir conclure que, « les effets primaires du courant constant sont localisés au point d'entrée « (anode) et au point de sortie (cathode) de la substance vivante, mais que la nature « des actions d'excitation est très variable pour les dilférentes formes de la substance « vivante à la cathode et à l'anode, lors de la fermeture et de l'ouverture du courant, « et que par conséquent on ne peut formuler aucune loi d'excitation polaire ayant une « portée générale sur tonte la matière vivante. » Et c'est la vérité. Il suffit de savoir que le courant galvanique exerce en général sur les organismes unicellulaires une action polaire, qui n'est pas toujours identique à celle qu'il exerce sur les muscles et les nerfs. Les effets opposés d'excitation polaire provoqués chez différents protozoaires et parti- culièrement chez l'amibe et chez la paramécie, ont conduit Verworn à émettre une nou- velle théorie de l'excitation, dont la connaissance est indispensable à la compréhension du mode d'action d'orientation du courant galvanique. D'après Verworn, l'excitation galvanique de la substance vivante peut produire un effet double : une contraction et une expansion. Les deux phases de l'action excitante du courant sont liées à des processus physico-chimiques différents ; mais elles sont toutes les deux l'expression d'un renforce- ment de certains processus vitaux. L'expansion (le relâchement) ne doit, dans aucun cas, être considérée comme un phénomène de paralysie. L'expansion provoquée à l'extrémité GALVANOTAXIE. 13 cathodique de l'amibe est tout aussi bien l'effet de l'excitation polaire que la rétraction de la pointe à l'extrémité anodique. Cette manière de voir est fortement corroborée par certains faits observés par BiEDERMANN. Ce physiologiste a constaté qu'un courant galvanique au moment de sa fermeture produit dans un muscle une contraction à la cathode et une expansion (un relâchement) à l'anode. I.e phénomène d'expansion s'observe aussi bien sur les muscles lisses que sur les muscles striés, à la condition que le muscle ne soit pas trop distendu, et qu'il se trouve à l'état de contraction partielle. Sur le muscle cardiaque, Biedermann a vu, à l'ouverture du courant, non seulement une contraction à l'anode, mais aussi une expansion à la cathode. Ces faits démontrent qu'au moment de la fermeture les pro- cessus opposés se produisent à la cathode et à l'anode, et qu'au moment de l'ouverture ces processus ont lieu aux deux pôles opposés à ceux de la fermeture. Du reste, PfiXger a déjà observé aux deux pôles d'un nert électrotonisé les effets opposés de l'action du courant à la fermeture et à l'ouverture. Tous ces faits viennent à l'appui de la théorie de Verworn sur l'effet double de l'excitation électrique de la substance vivante. Cette théorie, qui a été adoptée par la plupart des physiologistes, est fortement combattue par ScHENCK, dont les conceptions sur les mouvements des organes moteurs et sur le mécanisme de la contraction du protoplasma chez les protozoaires, sont absolument opposées à relies de Vervvorx. Du reste, Verworn lui-même est loin de considérer sa théorie comme générale. Il résulte même de ses recherches que, chez certains organismes, la fermeture du courant ne produit pas du tout des effets opposés aux deux pôles et ne provoque qu'une seule excitation contractile, soit à l'anode soit à la cathode, soit aux deux pôles simultanément. Le fait que la loi d'excitation polaire chez les organismes unicellulaires n'est pas identiquement la même que celle des muscles et des nerfs et s'écarte sensiblement de la loi d'excitation de Pfluger, considérée jusqu'à présent comme générale et propre à toute substance vivante, a suscité parmi les biologistes de très vives controverses. Quel- ques physiologistes (J. Loeb et Maxwell, Sçhenck) ont cherché à mettre d'accord les deux lois. Ainsi J. Loeb et Maxwell prétendent que, dans les expe'riences de Kuhne sur Acti- 7iosphœrium, les modifications protoplasmiques à l'anode ne sont nullement l'effet d'une excitation de contraction, mais résultent d'un empoisonnement qui provient de l'action chimique du courant. D'après VERWORNjcette idée n'est pas admissible; car, si le courant est suffisamment faible, on constate à l'anode tous les phénomènes d'excitation repré- sentés par la contraction du protoplasma (rétraction des pseudopodes) sans destruction ultérieure de celui-ci. De plus, ces faits se produisent alors même que l'on se sert d'électrodes impolarisables. Dans un travail ultérieur, fait en collaboration avec Budgett, sur la théorie du galvanotropisme, Loeb cherche à démontrer que toutes les exceptions à la loi d'excitation de Pfluger sont dues à la mise en liberté d'ions électro-positifs dans la partie du corps protoplasmique tournée vers l'anode. Du reste, Loeb et Budgett attribuent l'action du courant exclusivement aux ions mis en liberté par ce dernier, aussi bien à l'extérieur que dans l'intérieur du protoplasma. Ce sont les variations survenant dans l'électrolyse du milieu extérieur qui détermineraient les exceptions à la loi de Pfluger constatées chez les organismes unicellulaires. L'électrolyse externe n'existerait pas dans le muscle et dans le nerf à cause de l'épaisse gaine de sarco- lemme et de nevrilemme qui isolent la substance contractile du muscle et le cylin- draxe du nerf du milieu ambiant. Dans la fibre musculaire nerveuse l'électrolyse interne seule serait mise en jeu par le courant. Aussi la loi de Pfluger est-elle constante dans les nerfs et dans les muscles. A l'appui de leur hypothèse, Loeb et Budgett citent des expériences qui démontrent qu'en plongeant les organismes dans une solution diluée de Na OH, on voit qu'en touchant un organisme avec la substance qui se forme par voie électrolytique à l'anode, on produit les mêmes déformations et les mêmes modifications protoplasmiques que l'on observe dans la région anodique à la fermeture du courant. Ainsi chez l'Amblyostome le contact de NaOlI produit une sécrétion des glandes cutanées analogue à celle qui se fait à l'anode, tandis qu'une solution de HCl (corps formé à la cathode) ne provoque aucune sécrétion. De même différents proto- zoaires {Paramœcium, Oxytricha) présentent au contact de NaOH la même pointe proto- plasmique que celle qui se forme à l'anode lors du passage du courant. Si intéressants ii GALVANOTAXIE. que soient ces faits, ils ne suffisent pas pour appuyer l'iiypothèse de Loeb et Budgett. Déjà Verworn a attiré l'attention sur la différence qui existe entre la modification pro- toplasmique (pointe) produite par l'excitant chimique ou thermique et celle qui résulte d'une excitation électrique. D'autre part, Carlgren fait remarquer que la défor- mation protoplasmique se produit toujours à la partie postérieure de l'infusoire plongé dans une solution de NaOH, tandis que, par l'action du courant, elle peut se former aussi bien à l'extrémité antérieure qu'à l'extrémité postérieure, suivant que l'une ou l'autre est dirigée vers l'anode. Du reste, Jennings a pu s'assurer que les paramécies placées dans de l'eau distillée, donc à l'abri de toute action électrolytique, présentent également des phénomènes électrolytiques très nets. Enfin H. Mouton a pu s'assurer par une expérience directe que dans la galvanotaxie le courant agit par son passage à travers le liquide, et non pas par l'intermédiaire de produits diffusibles formés au voisi- nage des électrodes. Par un dispositif spécial qui permet de protéger certaines para- mécies contre les lignes de force du courant. Mouton a constaté qu'alors elles ne prennent pas une orientation définie, tandis que celles qui se trouvent dans la partie de l'appareil où le courant exerce son action sont orientées et dirigées. Cette orientation galvanotactique n'est pas due à l'action électrolytique de produits diffusibles qui se diffuseraient avec égale facilité dans toutes les parties de l'appareil. Biedermanx croit cependant que, si les modifications anodiques du corps cellulaire ne sont pas tout à fait l'effet des actions électrolytiques décrites par Loeb et Budgett, il est très probable que l'électrolyse prend une large part à la production des phénomènes que l'on observe du côté de l'anode lors du passage du courant. En se reportant aux recherches de Carlgren, Biedermann est même très porté à admettre la nature purement physique de toutes les modifications polaires qui se produisent chez les prolistes à la suite de l'action du courant de grande intensité. La valabilité générale de la loi d'excitation polaire de Pfluger a trouvé aussi un défenseur fervent dans la personne de Sghenck:, lequel, se basant sur ses recherches personnelles et sur celles de Loeb et Budgett, croit que les contradictions de la loi d'excitation chez les protistes avec la loi de Pfluger ne sont pas réelles, et résultent d'une fausse interprétation des faits. Il attaque en tous points la théorie de Verworn et arrive dans son travail à des conclusions diamétralement opposées aux idées de ce der- nier, 11 considère, contrairement à l'opinion de Verworn, la rétraction des pseudopodes comme un acte survenant au repos, tandis que l'émission des pseudopodes est un phé- nomène d'excitation. La forme globuleuse de l'amibe n'est pas, comme l'admet Verworn, l'effet d'un état d'excitation et une sorte de contraction, puisque l'amibe peut accuser cette forme aussi bien au repos qu'à la suite d'une excitation maximale. Il est évident que, dans ces conditions, Schengr. voit une excitation cathodique là où Verworn voit une excitation anodique et considère la loi de Pfluger parfaitement valable pour les phénomènes d'excitation chez les protistes. 11 importe de remarquer que tout récem- ment ScHEViAKOFF a VU quc myonèmes des Radiolaires réagissent à l'action polaire du courant galvanique à peu près comme les muscles et les nerfs chez les vertébrés. A la fermeture d'un courant de forte intensité, ces cellules se contractent du côté de la cathode, tandis qu'à l'ouverture la contraction a lieu à l'anode. Chez la même radio- laire l'excitation des pseudopodes n'est pas soumise à la loi polaire d'excitation, et provoque une réaction analogue à celle que Kuhne et Verworn ont constaté chez Acti- nosphaerium. Schevl\koff conclut de ses très intéressantes recherches qu'en général la loi d'excitation polaire de Pfluger n'est valable que pour les éléments contractiles différenciés (muscles chez les métazoaires et myonèmes chez les protozoaires) et ne s'applique guère à l'action du courant sur le protoplasma non différencié (pseu- dopodes). Les considérations de Sghenck et les recherches de Lœb et de ses élèves ne nous paraissent pas suffisantes pour soutenir la généralisation de la loi de Pfluger à toute substance vivante. 11 faut donc jusqu'à plus ample informé adopter l'opinion de Verworn, à savoir qu'on ne peut formuler aucune loi d'excitation polaire ayant une portée générale- Du reste le fait est sans importance pour la théorie de la galvanotaxie. Pour se rendre compte du mécanisme du phénomène galvanotactique, il importe surtout de savoir que les organismes unicellulaires réagissent en général à l'action polaire du courant galvanique, GALVANOTAXIE. 15 et que les phénomènes consécutifs à une excitation anodique diffèrent pour la plupart de ceux qui sont produits par l'excitation cathodique. Quelle que soit la portée géjiérale de la loi d'excitation chez les organismes unicellu- laires elle fournit des éléments importants pour l'interprétation du mécanisme et de la nature du phénomène galvanotaclique chez les protozoaires. L'excitation unilatérale d'un des pôles du courant, ou bien une excitation bipolaire, différente, ce sont là les éléments nécessaires pour produire une orientation galvanotactique. D'après Verwokn, le mécanisme de tous les phénomènes tactiques, et par conséquent du mouvement gal- vanotactique, repose sur les différences « polaires dans le biotonus et découle avec une nécessité inéluctable du mode de mouvement spécial à chaque forme cellulaire». Pour les organismes qui se meuvent dans la direction de leur axe longitudinal, Verworn admet que, cette position axiale une fois acquise, le mode ordinaire de locomotion de l'organisme doit produire un mouvement qui le rapproche ou l'éloigné de la source de l'irritant. La raison principale de toute action directrice se trouve donc dans la position axiale du corps cellulaire, et toutes les positions axiales sont déterminées par une exci- tation ou par une paralysie de la contraction ou de l'expansion portant sur un des pôles du corps. De cette manière, par excitation de contraction ou par paralysie d'expansion d'un côté, le pôle antérieur du corps se détourne de la source excitante, tandis que, par paralysie de contraction ou excitation d'expansion d un côté, le pôle antérieur du corps se tourne vers la source excitante. Ainsi les phénomènes des différents tactismes appa- raissent simplement « comme le résultat mécanique nécessaire, des différences qui se « produisent dans les biotonus aux deux pôles d'une cellule, sous l'action des excitants ». Ces principes sont applicables à tous les tactismes, et peuvent servir de base à une théorie générale des phénomènes tactiques. On observe très bien ce mode d'action des irritants chez les amibes chez lesquelles l'excitant galvanique bilatéral produit d'un côté une contraction, de l'autre une expan- sion. Du côté excité par expansion, l'amibe se rapproche; de la source excitante du côté excité par contraction, il s'éloigne : c'est ce qu'on constate effectivement dans la galva- notaxie des amibes (Verworn) et des leucocytes (Mendelssohn). Quant aux infusoires qui se déplacent dans l'eau à l'aide des battements rythmiques des cils et des fouets vibratils, Verworn cherche à expliquer le mécanisme de leurs phénomènes tactiques en établissant très ingénieusement une analogie entre le mouvement de ces organismes dans l'eau et le mouvement d'un bateau mû par les rames. « L'analogie, dit-il, est complète, et la com- paraison peut être poursuivie jusque dans les plus petits détails. Les infusoires qui se meuvent à l'aide d'un ou de deux flagella ou bien à l'aide d'un grand nombre de cils se trouvent absolument dans les mêmes conditions qu'un bateau mû par une seule ou par plusieurs rames. La différence dans l'énergie fonctionnelle des organoïdes du mouvement (cils, fouets) aux deux pôles du corps produit une mise en axe déterminée, de telle sorte que le corps se dirige par sa partie antérieure du côté de l'excitant qui produit l'expan- sion et s'éloigne du côté de l'excitant qui produit la contraction. Le mouvement en avant ou en arrière et même l'arrêt complet dépendent du rapport qui existe entre la phase de contraction et la phase d'expansion. » Cette ingénieuse théorie de Verworn s'applique à la plupart des tactismes et est conforme aux faits observés par d'autres expérimen- tateurs pour la géotaxie (Jensen), pour la galvanotaxie (Ludloff) et pour la thermotaxie (Mendelssohn). Quant à la galvanotaxie, Verworn la considère comme un eifet de l'action polaire du courant galvanique. La galvanotaxie cathodique (chez l'amibe, la paramécie) résulte d'une excitation contractile à l'anode. De même la galvanotaxie anodique (chez l'opalina et plusieurs flagellés) est produite par une excitation contractile à la cathode qu'un courant suffisamment intense met facilement en évidence. La galvanotaxie transversale, que l'on observe chez Spirostomum ambigaum, est déterminée par une excitation bila- térale du courant. Après la fermeture du courant l'infusoire se contracte, exécute dif- férents mouvements, et par des flexions et courbures spéciales est ramené à la direction perpendiculaire à celle du courant. En se plaçant au point de vue de la théorie de Verworn, Luoloff a cherché à déter- miner le rôle de l'action polaire du courant galvanique sur les mouvements d'orientation des paramécies. En plongeant les paramécies dans une solution de gélatine (méthode 16 GALVANOTAXIE. de JENSEiN) et en immobilisant ainsi jusqu'à un certain degré ces infusoires, il a pu observer avec grande précision les mouvements des cils sous l'influence du courant galvanique. Au repos tous les cils sont à peu près perpendiculaires au corps de la para- mécie. Si l'on fait passer à travers le corps de cet infusoire un courant galvanique de 0, 06 M. A, on voit à la fermeture les cils de toute la région cathodique du corps battre fortement, tandis que les cils de la région anodique restent complètement au repos. Si le courant traverse le corps d'avant en arrière, les cils s'incurvent du côté du pôle antérieur du corps. A mesure que l'on augmente l'intensité du courant, le mouvement des cils devient de plus en plus énergique. A une intensité de courant de 0,18 M. A., les cils exécutent des mouvements aussi bien du côté de la cathode que du côté de l'anode, mais les cils de la région cathodique s'incurvent dans un sens opposé à ceux de la région anodique. A une intensité de courant encore plus grande (1,2 M. A.), la partie anodique se rétracte et produit une pointe qu'il faut considérer comme une contraction locale provoquée par l'excitation polaire du courant galvanique. On n'observe pas ce phéno- mène sur une paramécie placée perpendiculairement au sens du courant. Dans ce cas la contraction provoquée par l'excitation anodique produit une incurvation concave du corps tout entier, qui prend la forme semi-lunaire. La conclusion d'ensemble qui se dégage de toutes ces expériences est que le courant galvanique détermine une exci- tation de contraction à l'anode et une excitation d'expansion à la cathode. De celte façon les mouvements des cils aux deux pôles sont intluencés, quoique d'une manière diffé- rente, par la fermeture du courant galvanique. L'effet locomoteur des cils à l'extrémité antérieure est nécessairement opposé à celui de l'extrémité postérieure. Il est évident que cette modification de l'activité des cils sous l'influence de l'action polaire du courant galvanique doit forcément retentir sur la locomotion de l'infusoire et déterminer son orientation galvanotactique. Ludloff admet que la mise en axe caractéristique (extré- mité antérieure du côté de la cathode et extrémité postérieure du côté de l'anode) peut être l'effet aussi bien de l'excitation d'expansion des cils à la cathode que de l'excitation de contraction à l'anode. A la suite de l'excitation anodique le corps cellulaire se dirige avec sa partie antérieure vers la cathode, ce qui a lieu dans la galvanotaxie cathodique provoquée par des courants faibles et moyens. Les courants forts renversent le sens du phénomène galvanotactique et provoquent une galvanotaxie anodique; les para- mécies, à la suite d'une excitation de contraction du côté de la cathode, se dirigent vers l'anode. Dans les deux cas la mise en axe est la même. Les faits observés par Ludloff ont été confirmés par Pearl et par d'autres obser- vateurs. Ils ont mis hors de doute le rôle de l'action polaire du courant dans l'orientation galvanotactique des infusoires ciliés, et ont fourni des documents importants pour l'in- terprétation non seulement de la galvanotaxie cathodique des paramécies, mais aussi de la galvanotaxie anodique d'autres infusoires. En effet Yerworn, qui dans ses pre- mières recherches a rapporté la galvanotaxie anodique à une excitation contractile à la cathode, a obtenu dans ses recherches ultérieures avec un courant suffisamment intense une contraction à la cathode chez Opalina, infusoire parasite doué d'une galvano- taxie anodique. Kôlsch a tout récemment confirmé les faits constatés par Vervvorn chez Opalina; mais il a observé chez cet infusoire, lorsqu'il se trouve en position axiale, une disposition des cils analogue à celle des paramécies. Il faut donc conclure de ce qui précède que toute galvanotaxie, qu'elle soit cathodique ou anodique, est l'effet de l'exci- tation de contraction à un des deux pôles : à l'anode dans la galvanotaxie négative, et à la cathode dans la galvanotaxie positive. Il est intéressant de relever ce fait que, d'après celte théorie, dans tous les cas de galvanotaxie anodique, la loi d'excitation de Pfluger serait valable chez les protozoaires, puisque l'on obtient dans ce cas chez ces derniers une contraction cathodique à la fermeture du courant. Wallengren cherche dans un travail récent à préciser le mécanisme de la galvano- taxie anodique et émet une hypothèse déduite des faits qu'il a observés dans ses nom- breuses recherches, d'après laquelle le caractère de la galvanotaxie, anodique ou cathodi- que, dépend entièrement du mécanisme des cils qui produisent la rotation de l'organisme. Si les battements des cils rotatoires sont ceux d'expansion, l'infusoire est forcé de se déplacer dans la direction de l'anode ; si au contraire ces cils exécutent des mouvements de contraction, l'infusoire nage dans la direction de la cathode. Il n'est donc pas néces GALVANOTAXIE. 17 saire d'admetlre une excitation polaire différente dans les cas de galvanotaxie anodique et cathodique. La même excitation polaire qui détermine le déplacement de la para- mécie vers la cathode force VOpalina à se rendre à l'anode. Les deu.K galvanolaxies, anodique et cathodique, ne sont pas, d'après Wallengren, deux formes difTérentes de l'action galvanotactique du courant; elles sont toutes les deux produites par deux modes différents de l'action du nrécanisme rotatoire des cils et représentent la même réaction à une seule et unique action polaire du courant galvanique. La galvanotaxie transversale s'explique également par un mode d'action spécial du mécanisme rotatoire des cils et ne représente guère, d'après Walle.ngren, une forme spéciale de l'action galvanotactique du courant. La loi d'excitation polaire est la même t^ouv Spirostomum, qui manifeste une galvanotaxie transversale, que pour la paramécie qui est négative- ment, ou bien pour Opalina qui est positivement galvanotactique. La mise en axe trans- versale de Splrostomum résulte uniquement de l'action du mécanisme rotatoire des cils, et n'est nullement occasionnée par les dimensions et la flexibilité de l'inl'usoire, comme l'admet Kôlsch. Le mouvement des cils ne cesse pas dans la position transversale de l'animal, comme le croit Pearl; mais au contraire il est mis en jeu par l'excitation polaire du courant. L'excitation expansive des cils empêche l'animal de se déplacer dans la direction de l'anode ou de la cathode et le retient dans la position axiale trans- versale. Vu la disposition asymétrique des cils des deux côtés du corps, le Spirostomum ne peut jamais rester complètement au repos, et il est obligé d'exécuter toujours cer- tains mouvements dans la direction transversale et homodrome. Les considérations précédentes ainsi que les faits exposés plus haut établissent d'une façon certaine le rôle de l'action polaire du courant dans la production du phénomène galvanotactique chez les organismes unicellulaires. Actuellement la théorie polaire de la galvanotaxie est adoptée par la majorité des physiologistes, et même, comme nous le verrons plus loin, elle a été appliquée à l'interprétation des phénomènes galvanotactiques chez les vertébrés. Il n'en est pas moins vrai que, malgré l'importance des travaux expé- rimentaux qui parlent en faveur de cette théorie, celle-ci est loin d'être admise par tous les physiologistes, et suscite même parmi ces derniers de très vives controverses. Certains d'entre eux ont cherché à la remplacer par d'autres théories ou hypothèses plus ou moins ingénieuses, quoique souvent difficiles à défendre. J. Lœb s'est beaucoup appliqué à approfondir la nature et le mécanisme du phénomène galvanotactique, et il a exposé ses conceptions à ce sujet dans cinq communications faites pour la plupart en collaboration avec ses élèves, et intitulées: Contribution à la théorie du galvanoiropisme. Il a étudié surtout la galvanotaxie des organismes supérieurs pourvus d'un système nerveux et musculaire. Malgré la complexité des phénomènes galvanotac- tiques observés chez les animaux supérieurs, Lœb croit pouvoir étendre ses conceptions théoriques sur les actions galvanotactiques à tout le règne animal et les appliquer éga- lement à l'interprétation du mécanisme des mouvements d'orientation galvanotactique chez les organismes unicellulaires. D'après Lœb, c'est l'état électrotonique spécial de chacun des éléments traversé par le courant qui produit le phénomène galvanotactique et oriente l'organisme dans un sens déterminé. Lors du passage du courant, chaque fibrille des organoïdes moteurs placée dans le sens du courant serait divisée, d'après Lœb et Maxwell, en une région catélectrotonique et anélectrotonique. Suivant que le point excitable de la fibrille (qui correspondrait aux cellules nerveuses chez les animaux supérieurs) se trouve dans l'une ou dans l'autre région, l'énergie du mouvement des cils augmente ou diminue. En parlant plus loin de la galvanotaxie des organismes pluricellulaires, nous analyserons d'une manière plus approfondie la théorie galvano- tactique de Lœb. Il importe seulement de faire remarquer ici que cette théorie, déjà trop complexe pour les animaux supérieurs, ne rend pas suffisamment compte du mécanisme et de la nature intime du phénomène galvanotactique chez les organismes unicellulaires. Les actions électrolytiques invoquées par Lœb et Budgett pour interpréter l'action polaire du courant pourraient sans doute fournir une base solide à une théorie élec- trolytique de lo galvanotaxie, si celte hypothèse pouvait être accepte'e sans réserve. En admettant dans tout organisme unicellulaire des moditîcations de l'excitabilité dues à une réaction acide à l'anode et à une réaction alcaline à la cathode, on réduit forcé- DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 2 18 GALVANOTAXIE. ment le phénomène galvanotactique à une simple réaction de chiraiotaxie. Or il a été déjà dit plus haut que certains faits parlent contre l'hypothèse de Lœb et Budgett, d'une action purement chimique du courant galvanique. Pûtter a fait valoir des argu- ments très probants contre la théorie électrolytique de la galvanotaxie. Il s'élève sur- tout contre une expérience de Lœb que ce dernier interprète en faveur de sa théorie de l'excitation galvanique. Lœb, plaçant les paramécies dans une solution physiologique de chlorure de sodium traversée par un courant galvanique, a vu que les infusoires ne se dirigent plus en avant vers la cathode, comme cela a lieu dans toute expérience de galvanotaxie, mais qu'elles nagent toutes en arrière vers l'anode. Le même phéno- mène s'observe lorsque les paramécies se trouvent dans une solution physiologique de chlorure de sodium sans être soumises à l'action du courant. Lœb croit que cette expérience parle en faveur de l'action électrolytique du courant. Ce n'est pas l'avis de Pûtter, d'après lequel le déplacement rétrograde des infusoires dans une solution de chlorure de sodium résulte tout simplement d'une modification du ballement des cils à la suite d'une irritation chimique qui s'exerce sur toutes les parties du corps. Lorsque les animaux s'adaptent à ce nouveau milieu, ils ne manifestent plus cette réaction rétro- grade et se dirigent sous l'inlluence du courant galvanique en avant vers la cathode aussi nettement que lorsqu'ils se trouvent dans leur milieu habituel. L'opinion de Lœb, d'après laquelle la galvanotaxie anodique de l'opaline serait l'effet du milieu salé dans lequel cet infusoire parasite doit être étudié, n'est pas non plus admise par Pûtter qui a vu dans le même milieu, sous l'inlluence du courant, Opalina se rendre à l'anode et Balanthidhim à la cathoile. Cette expérience prouve bien que la constitution du milieu n'est pas le facteur déterminant du phénomène galvanotactique. Pûtter, en se basant sur les faits précédents et sur ceux qu'ont établis Verworn, Ludlokf et Pearl, conclut que la théorie de Lœb n'est pas admissible, que la galvanotaxie n'est pas l'effet des actions électrolytiques du courant, et qu'elle résulte de l'action directe de ce dernier sur l'irritabilité propre du protoplasma. Quelques physiologistes se sont appliqués tout récemment à interpréter les mouve- ments d'orientation galvanotactique des organismes unicellulaires nageant dans de l'eau par les actions cataphoriques du courant qui traverse le liquide. Une théorie cata- phorique de la galvanotaxie est soutenue surtout par Birukoff. Déjà Carlgren a cherché à expliquer par un phénomène cataphorique les actions polaires du courant chez les organismes unicellulaires nageant dans l'eau. Ses expériences sont très instructives à cet égard, et paraissent ne laisser aucun doute sur la possibilité de produire à l'aide du cou- rant galvanique certaines modifications protoplasmiques absolument identiques chez l'animal vivant ou mort. Carlgren a vu, chez les colonies de Volvox aureus placées dans une solution de gélatine et soumises à l'action d'un courant fort, les changements de forme et le transport de Parthenogonite vers l'anode s'effectuer aussi bien pendant la vie qu'après la mort. De même il a pu observer chez les paramécies et chez les amibes après la mort des modifications protoplasmiques provoquées par la fermeture du courant, analogues à celles que l'on a décrites chez ces organismes vivants. De là il conclut que tous les phénonlènes que l'on observe dans le corps cellulaire des protistes lors du passage d'un courant, sont de nature physique, et dues à l'action cataphorique de ce dernier, action qui se traduit par la propriété que possède le courant de transporter le liquide d'un pôle à l'autre. C'est dans cette catégorie de phénomènes physiques que Carlgren range la plupart des faits observés par Verworx à la suite de l'action polaire du courant. Cependant il garde une certaine réserve vis-à-vis de quelques phénomènes, comme la contraction anodique chez la paramécie, l'expulsion des masses granuleuses du côté de l'anode chez Pelomijxa, et d'autres faits du même ordre, qu'il hésite à attri- buer exclusivement à l'action cataphorique du courant, et qu'il croit devoir ranger plutôt dans la catégorie des phénomènes produits par la contraction anodique. Birukoff est moins hésitant : il se prononce catégoriquement en faveur de la nature cataphorique du phénomène galvanotactique chez les organismes unicellulaires. Cet expérimentateur s'est servi du courant faradique pour étudier les phénomènes électro- tactiques chez les paramécies : il a constaté que les infusoires se meuvent toujours dans la partie du liquide où l'intensité du courant est la plus faible et se disposent à la sur- face des électrodes de manière à laisser libre les parties où la densité du courant est la GALVANOTAXIE. 19 plus grande. Les particules inertes de carmin d'amidon ou de lycopode se comportent d'une façon tout à fait contraire. Ces particules se meuvent sous l'influence du courant induit toujours dans les parties liquides oîi l'intensité du courant est plus forte et occu- pent les points de l'électrode oîi la densité du courant est maximale; elles restent absolument immobiles là où le courant est faible. De ces faits et d'autres encore qu'il est trop long de relater ici, Birukoff croit pouvoir conclure que l'action cataphorique du courant et l'excitabilité générale des infusoires sont les conditions essentielles de la production du phénomène galvanotactique. Si intéressantes que soient les expériences de Birukoff, elles ne sont pas exemptes de causes d'erreurs et ne nous paraissent pas établir d'une façon certaine le rôle des courants cataphoriques dans le mouvement galvanotactique des protistes. Les faits constatés par Birukoff peuvent encore être interprétés autrement. Aussi son hypothèse ne peut-elle pas être admise sans conteste. Déjà Verworn a fait observer que dans cer- tains cas le courant cataphorique dans un liquide est de sens contraire à la direction du mouvement galvanotactique des infusoires placés dans ce liquide. Ce fait parle avec évidence contre la nature cataphorique de la galvanotaxie. Putter, à l'opinion duquel se rallie BiedermaNiN, rejette complètement l'hypothèse de Birukoff, et croit que l'inter- vention de l'action cataphorique du courant dans la production du phénomène galvano- tactique est absolument inadmissible après les recherches très probantes de Verworn, de Ludloff et de Pearl, qui ont établi d'une façon certaine l'inlluence de l'action polaire du courant sur les mouvements des organes moteurs chez les organismes unicel- lulaires. C'est aussi notre avis. Certes les effets cataphoriques du courant traversant un liquide qui contient des infusoires sont indéniables; mais de là à conclure à la nature cataphorique du phénomène galvanotactique il y a loin. Dans l'état actuel de nos connaissances il ne subsiste aucun doute sur le rôle actif des organes locomoteurs dans le mouvement galvanotactique des infusoires. Le mouvement d'orientation des organismes sous l'action du courant est un mouvement actif, par conséquent physiolo- gique. Sans doute les mouvements actifs de tout être vivant, et surtout des organismes nageant dans l'eau, dépendent à un degré variable des conditions physiques du milieu, de sa température, de sa densité et du frottement interne de l'eau (W. Ostwald); mais il ne faut pas oublier qu'ils relèvent également de l'irritabilité et de l'activité fonction- nelle du protoplasma. En général, dans l'étude de tout phénomène biologique et par- ticulièrement dans celle des phénomènes électrobiologiques, il ne faut pas confondre les actions physiques avec les effets physiologiques. Au contraire, il faut chercher à séparer la partie physique du phénomène de l'excitation physiologique qui détermine la réac- tion de l'organisme. Certains physiologistes ont tort de croire que le problème biolo- gique perd tout intérêt lorsqu'il ne peut être suivi sur le terrain physique. Alors en effet toute une partie du problème échappe à l'analyse, de sorte que, si on ne l'aborde pas par son coté physiologique, on laisse souvent le problème sans le résoudre. Cela s'applique aux tentatives faites par quelques physiologistes pour interpréter les phéno- mènes galvanotactiques par un mécanisme purement physique et notamment par l'action des courants cataphoriques. La galvanotaxie est un phénomène biologique provoqué par l'action du courant; c'est une réaction vitale du protoplasma à l'excitant électrique. Cette réaction est soumise à la loi d'excitation polaire, quelle que soit son expression dans chaque cas particulier. C'est là la conclusion générale qui se dégage de tous les faits relatifs à l'action directe du courant électrique sur les mouvements d'orientation des organismes unicellulaires. Galvanotaxie des organismes pluricellulaires. — Les théories émises sur la nature et le mécanisme de la galvanotaxie chez les organismes pluricellulaires, aussi bien chez les animaux vertébrés que chez les invertébrés supérieurs, sont encore bien plus complexes que celles qui ont été soutenues à propos de la galvanotaxie des orga- nismes unicellulaires. Il est facile de concevoir que le problème se complique à mesure que le nombre des facteurs qui le compose augmente, comme cela a lieu dans les phé- nomènes galvanotactiques des animaux supérieurs pourvus d'un système nerveux, lequel doit nécessairement jouer un certain rôle dans les mouvements d'orientation des animaux La première théorie de la galvanotaxie chez les animaux vertébrés fut émise par Hermanx (1885), qui du reste fut le premier à décrire ce phénomène dans le règne ani- 20 CALVANOTAXIE. mal. Comme il a été déjà dit plus haut, Hermann attribuait le phénomène galvanotac- tique au fait que les organismes s'orientent de manière à éviter l'action par trop irritante du courant ascendant et se placent dans le sens du courant descendant, la tête tournée vers l'anode. Ewald, qui a repris et complété les expériences d'HERMANN, se range à l'opinion de ce dernier pour l'interprétation des phénomènes galvanotactiques et fait remarquer que le sens du phénomène galvanotactique chez les larves de grenouilles est en rapport avec l'intensité du courant. Lorsque les courants sont faibles, les larves se déplacent vers la cathode, tandis qu'elles se rendent vers l'anode, lorsque le courant est fort. Les grenouilles adultes et les tritons ne présentent pas du tout des phénomènes de galvanotaxie. La position normale des larves de grenouilles soumises à l'action du courant galvanique serait, d'après Ewald, homodrome, et non pas antidrome (avec la tête tournée vers l'anode). 11 admet que les deux moitiés de la moelle épinière se compor- tent différemment vis-à-vis de l'action du courant galvanique; la partie antérieure de la moelle est excitée par le courant descendant, tandis que la partie postérieure est exci- tée par le courant ascendant. L'action excitante du courant ascendant ne s'exerce que dans les conditions anormales lorsque la moitié antérieure de la moelle est lésée. Aussi l'orientation antidrome ne se produit-elle que chez des animaux épuisés ou bien avec des courants de grande intensité. Dans des recherches ultérieures faites en collaboration avec Mathias suivant des conditions expérimentales très précises, Hermann, tout en confirmant les faits principaux observés par Ewald, les envisage comme un phénomène anormal se produisant exceptionnellement dans certaines conditions déterminées. Il maintient sa première opinion, d'après laquelle la position antidrome est la position nor- male des larves de grenouilles dans la galvanotaxie. Non seulement les larves entières se calment dans la position antidrome; mais les parties sectionnées manifestent sépa- rément une réaction analogue. La queue séparée du tronc et traversée par un courant exécute des mouvements désordonnés dans la position homodrome, et ne se calme que lorsqu'elle se place dans le sens antidrome du courant. Si l'on divise la queue en deux moitiés, antérieure et postérieure, la première seule est atteinte par le courant et se place dans la position antidrome, tandis que la seconde, qui ne contient plus de moelle épinière, ne réagit nullement à l'action du courant. Herminx conclut de cette expérience que la réaction galvanotactique n'est pas de nature musculaire, mais d'origine cen- trale. Elle est intimement liée à la présence de la moelle épinière, et n'est nullement influencée par le cerveau. Il importe de remarquer que les expériences d'HERMANN ont été complètement, et sans exception", confirmées par Biedermann. Les faits observés tout récemment sur des poissons [Gobio fluviat'dis) par Breuer parlent également en faveur de l'intervention directe de la moelle épinière dans la production du phénomène galvanotactique, qui ne paraît nullement être influencé par le cerveau et le labyrinthe. W. Nagel (1891) a vu de petits crustacés (Copépodes) soumis à l'action du courant galvanique se tourner toujours vers l'anode, tandis que certains mollusques [Limnœus stagnalis, Planorbis corneus, P. marginatus) s'éloignent de l'anode à la fermeture du cou- rant. Dans ses recherches ultérieures, faites sur des poissons, des amphibies, des anné- lides et des mollusques, Nagel a constaté, suivant l'espèce, tantôt une galvanotaxie positive, tantôt une galvanotaxie négative, mais plus souvent cette dernière. Chez AseUiis aqiiaticus il a vu la galvanotaxie anodique se produire même après la décapitation de l'animal. Quoique Nagel attribue à l'excitation polaire un rôle important dans la production du phénomène galvanotactique, il admet cependant, avec Hermanx, que les animaux, dont le système nerveux (central chez les vertébrés inférieurs, ou périphérique chez les invertébrés) est excité par le courant, cherchent à éviter les excitations doulou- reuses ou les sensations désagréables provoquées par une direction déterminée du cou- rant et à se placer dans le sens du courant qui est le moins irritant. Blasius et ScHWEizER ont étudié le phénomène galvanotactique chez un grand nombre d'animaux vertébrés (poissons, amphibies, rats, souris) et chez certains invertébrés supérieurs. Les conceptions théoriques qu'ils ont déduites de leurs nombreuses recherches présentent un grand intérêt au point de vue de la théorie des mouvements d'orientation, chez les animaux pourvus d'un système nerveux. Ils ont constaté chez un grand nombre de poissons, chez lesécrevisses et chez les larves de salamandres, une mise en axe anodique (la tête vers l'anode); tandis que chez la sangsue ^et chez quelques GALVANOTAXIE. 21 autres Vers ils ont vu une orientation cathodique (la tête vers la cathode). Un courant de faible intensité oriente les poissons (particulièrement les truites) vers l'anode. Si l'on augmente l'intensité du courant ascendant, on voit qu'il se produit chez ces animaux un état analogue à celui de la narcose, état que Blasius et ScHWErzER ont désigné sous le nom de galvanonarcose. Les animaux, dans un état de dépression complète, restent immobiles, respirent faiblement ou à peine, et ne réagissent à aucune excitation. Si, dans ces conditions, on diminue lentement et graduellement l'intensité du courant, les pois- sons continuent à rester dans cet état de narcose, mais ils deviennent hyperexcitables. Ils présentent alors un état analogue à l'hypnose provoquée chez les poulets, chez les grenouilles et chez les écrevisses. Chez la grenouille on n'observe pas une mise en axe déterminée sous l'action du courant; mais on constate une réaction caractéristique de l'animal suivant la direction du courant. L'écrevisse {Asiacus fluviatilis) reste immobile par l'action du courant descendant et réagit au courant ascendant par une galvanotaxie anodique. Ce qui est caractéristique chez ce crustacé, c'est qu'il nage avec la partie postérieure de son corps tournée vers l'anode. Les poissons électriques ne sont pas galvano- tactiques. Il serait superflu de citer ici tous les faits si nombreux observés par Blasius et ScHWEizER. Bornons-nous à exposer brièvement les conclusions qui s'en dégagent et qui ont été formulées par ces deux expérimentateurs. Il résulte de leurs recherches que l'électrotaxie existe chez im grand nombre d'ani- maux et peut être mise en évidence avec grande facilité chez les poissons. Quoique les effets polaires locaux du courant jouent un certain rôle, c'est surtout le sens du courant qui a une action effective. Chez les vertébrés et chez quelques animaux infé- rieurs, le courant descendant exerce une action calmante, tandis que le courant ascen- dant produit une action excitante. L'électrotaxie et d'autres phénomènes analogues (la galvanonarcose, le vertige galvanique) résultent de l'action prolongée du courant et non pas de la fermeture momentanée de ce dernier. Quelle que soit l'action du courant galvanique : calmante, excitante ou bien directrice, elle s'exerce avant tout sur le sys- tème nerveux central. Il est certain que l'électrotaxie positive est provoquée par l'aclion excitante du courant ascendant, quoiqu'il ne soit pas possible de déterminer auquel des trois facteurs : sensations douloureuses dans la peau, excitation des organes des sens, ou action directe du cerveau, incombe le rôle principal dans la production du phénomène- Blasius et Schv/eizer ne croient pas pouvoir déduire de leurs recherches une théorie générale et définitive des phénomènes électrotactiques; mais ils se croient autorisés à émettre une hypothèse conforme aux faits observés et tendant à expliquer le méca- nisme de l'excitation galvanotactique. Voici comment il faut, d'après ces auteurs, interpréter la production de la galvano- taxie anodique : on peut se représenter un animal, par exemple un poisson, traversé par un courant ascendant, comme divisé en deux parties : une partie antérieure anélectro- tonique, et une partie postérieure catélectrotonique. Dans la première partie l'excita- bilité est diminuée; dans la seconde, elle est augmentée. De cette manière, le courant descendant provoque dans le cerveau et dans la partie supérieure de la moelle épi- nière un état anélectrotonique dont l'effet direct est la diminution de l'excitabilité dans ces parties de l'axe cérébro-spinal. On observe un effet contraire, lorsque l'animal est parcouru par un courant ascendant; le cerveau se trouve alors en catélectrotonus. Il est évident que dans ces conditions le courant descendant paralyse la fonction du cerveau et interrompt l'arc réflexe, tandis que le courant ascendant renforce la fonction cérébrale et rend plus facile la transmission des réflexes. Ces faits avaient d'ailleurs été déjà en partie constatés et décrits par Nobili, Uspensky, Onimus et Legros. D'après ces derniers, « le courant ascendant excite la moelle et augmente les actions réflexes, tandis que le courant descendant empêche les actions réflexes et diminue l'excitabilité de la moelle ». C'est par ces effets électrotoniques sur les centres nerveux que Blasius et ScHWEizER expliquent le mécanisme du phénomène électrotactique chez les animaux pourvus d'un système nerveux. Herman.n trouve cette hypothèse peu acceptable, vu que dans ce genre d'expérience il s'agit non pas des pôles extérieurs du courant, mais de l'endroit de son entrée et de sa sortie dans les tissus et les organes : autrement dit, il faut prendre en considération surtout les électrodes physiologiques. Or il est difficile, sinon impossible, de déterminer la position et la diffusion de ces dernières dans un 22 GAL VANOTAXIE. organisme qui tout entier est traversé par un courant électrique. On ne sait pas au juste où est l'anode et oii la cathode dans le système nerveux central, et à quel degré le pôles du courant pénètrent dans le corps cellulaire lui-même ou bien s'arrêtent à sa surface. On voit, rien que d'après la discussion soulevée entre Hermanx d'une part et Blasius et Scnvi^EizER d'autre part, combien le problème est complexe et loin d'être résolu. J. Lœb, à son tour, a cherché à déterminer le rôle des différents facteurs dans la pro- duction du phénomène galvanotactique chez les animaux pourvus d'un système nerveux. Il rejette l'opinion qui attribue une action calmante ou paralysante au courant descen- dant et une action excitante ou même douloureuse au courant ascendant. Il a pu s'assurer, par des expériences faites avec Maxwell chez des crustacés (palémons et écrevisses), qu'un courant d'intensité moyenne, quelle que soit sa direction, modifie de la même façon la tension, autrement dit le travail mécanique de différents groupes de muscles associés, et que ces modifications de la tension amènent, si l'intensité du courant est suffisante, des attitudes forcées caractéristiques aussi bien des extrémités qvxe de l'animal tout entier. Avec un courant d'intensité moyenne, les modifications de la tension musculaire sont telles que l'animal se déplace plus aisément vers l'anode que vers la cathode. C'est pourquoi les crustacés se dirigent alors vers l'anode, sans qu'il y ait lieu de faire intervenir une action galvanotactique. Le phénomène est d'ordre pure- ment mécanique. Un courant de grande intensité provoque un véritable tétanos dans les muscles et empêche toute progression de l'animal. Ce dernier est immobilisé par la contracture de groupes musculaires associés. En général, l'action du courant sur les crustacés engendre des conditions mécaniques qui déterminent l'orientation de l'animal. Lors du passage du courant, quelle que soit sa direction, les extrémités tournées vers l'anode sont en flexion, tandis que celles qui sont dirigées vers la cathode sont en extension. Cette exagération diti'érente de l'in- tensité du travail dans les fléchisseurs et dans les extenseurs des membres a pour résultat de diriger les animaux vers l'anode. La différence d'action dans les groupes musculaires différents au point de vue fonctionnel, proviendrait de ce que, dans la chaîne nerveuse centrale, les nerfs qui se rendent aux muscles fléchisseurs ne sont point entre-croisés, tandis que les nerfs des muscles extenseurs le sont. Tous ces phé- nomènes sont attribués par Lœu et Maxwell aux modifications électrotoniques de l'exci- tabilité de certains neurones et pour ainsi dire de chaque cellule nerveuse prise isolément. La galvanotaxie, chez les crustacés, est due à l'état électrotonique spécial de chacun des éléments nerveux et aux modifications énergétiques de certains groupes de muscles associés. Cette théorie électro-mécanique de la galvanotaxie chez les crustacés peut, d'après Lœb, être généralisée et appliquée également au mécanisme du phénomène galvano- tactique chez les protozoaires et chez les vertébrés. Dans un travail ultérieur, Lœb a communiqué, en collaboration avec Gerry, les résultats d'expériences faites sur les vertébrés, notamment sur les larves d'amblyostome, résultats pleinement confirmatifs de ce qu'il avait vu précédemment sur les crustacés. Le courant descendant produit chez la larve une forte contraction des muscles longitudinaux ventraux, d'où résulte une incurvation ventrale concave du corps et un refoulement des pattes en arrière et en haut. L'animal se dirige et se déplace vers l'anode. C'est le contraire que l'on observe lorsque le courant est ascendant. Ce sont les muscles dorsaux qui se contractent alors ; le corps est concave vers le haut, en opisthotonos; les membres sont dirigés en avant, et l'animal se dirige en arrière vers l'anode. Si le courant passe à travers le corps dans le sens transversal, il se produ4t, à la suite de la contraction de différents groupes musculaires, une concavité qui est tournée vers l'anode; l'animal tout entier roule ou tombe également dans la direction de l'anode. Ces attitudes différentes sont dues, d'après Lœb et Gerrv, aux actions électrotoniques du courant sur les centres nerveux. Suivant la direction du courant, des niveaux différents de la moelle se trouvent en caté- lectrotonus ou en anélectrotonus. De là les différences dans les réactions. Si l'on coupe une larve par deux moitiés en arrière des pattes antérieures, la partie postérieure, c'est- à-dire celle qui se trouve en arrière de la section et qui est séparée des centres, ne réagit pas à l'action du courant, tandis que la partie antérieure de l'animal se comporte CALVANOTAXIE. 23 vis-à-vis du courant comme le fait l'animal normal. Bref, toutes les attitudes et les mouvements des larves d'amblyostome parcourues par un courant galvanique sont dues aux modifications de la valeur énergétique de certains groupes de muscles associés, modifications survenant sous l'influence de l'état éjectrotonique des éléments nerveux. Les phénomènes galvanotactiques observés chez les larves de grenouilles par Her- MANN et chez beaucoup d'autres animaux par Blasius et Schweizer rentrent, d'après Lœb et Gerry, dans la même catégorie de faits et relèvent également de l'action électroto- nique du courant sur les éléments du système nerveux central. Cependant Statkevitch, dans ses expériences faites tout récemment sur des crustacés et sur des poissons, a vu la contraction anodiqueàla fermeture se produire aussi bien chez l'animal intact que dans un segment de l'écrevisse, ayant conservé son ganglion avec les nerfs et les muscles. Tout en généralisant sa théorie électro-énergétique de la galvanotaxie et en cher- chant à l'appliquer à tout le règne animal, Lœb trouve lui-même quelques faits contra- dictoires pour la localisation des actions électrotoniques dans le système nerveux chez les crustacés et chez l'amblyostome. Ayant constaté, dans ses expériences sur la sécré- tion des glandes de l'amblyostome sous l'influence du courant, que les courants longi- tudinaux, après la destruction de la moelle, n'ont aucune action sur les glandes qui réagissent encore très bien à l'action du courant transversal, Lœb a conclu que les glandes sont excitées non seulement par l'intermédiaire du système nerveux, mais aussi par l'action directe du courant sur les terminaisons nerveuses. Le courant longitudinal exerce son action sur le système nerveux central et produit une excitation anodique à la fermeture, tandis que le courant transversal agit directement sur les terminaisons nerveuses. Les courants longitudinaux exercent sur le système nerveux central une action en masse, en provoquant des états électrotoniques différents dans les deux extré- mités de la moelle. Le mécanisme de l'excitation électrique, pour l'effet électrotonique, serait donc différent chez l'amblyostome et chez les crustacés, pour lesquels chacun des éléments nerveux présente un état électrotonique particulier. Lœb croit cependant qu'il est parfaitement possible d'expliquer par deux mécanismes différents la galvano- taxie chez les crustacés et l'excitabilité électrique chez l'amblyostome, et il invoque, à l'appui de sa manière de voir, les expériences de Roux, d'après lesquelles des Morula ou des Blastula présentent, soit des réactions totales, soit des réactions cellulaires indi- viduelles, dès que leur excitabilité est modifiée. Il est facile de se convaincre que les faits observés par Roux sont essentiellement différents de ceux qu'a observés Lœb : par conséquent, ils ne peuvent ni confirme)-, ni infirmer l'hypothèse de ce dernier. Il a été utile, cependant, de relever des faits contra- dictoires dans l'hypothèse de Lœb pour montrer que cette hypothèse, difficilement accep- table dans des cas particuliers, ne peut être soutenue lorsqu'il s'agit de la généraliser aux phénomènes galvanotactiques chez tous les animaux. Verworn, dans la critique adressée au travail de Lœb et Maxwell, a déjà démontré l'insuffisance de leur hypothèse, et a indiqué les contradictions qui existent entre leurs différentes conceptions des phé- nomènes galvanotactiques. Herma.nn fait observer qu'il ne peut pas être question d'un catélectrotonus ou d'un anélectrotonus pour une seule cellule ganglionnaire, comme l'admet l'hypothèse de Lœb, puisque une cellule traversée par le courant possède tou- jours ses anode et cathode physiologiques. Biedermann partage celte manière de voir et se prononce également contre l'hypothèse de Lœb, en ajoutant que les considérations anatomiques s'opposent à l'hypothèse d'un état électroionique particulier de différentes cellules ganglionnaires. La disposition anatomique de ces dernières est trop complexe pour permettre de préciser leur réaction individuelle à un courant qui traverse le sys- tème nerveux central tout entier. Du reste, les conceptions théoriques de Lœb se sont notablement modifiées plus tard, à la suite des recherches faites avec Budgett, dont il a été question plus haut. En abandonnant peu à peu le terrain sur lequel il a construit, avec Maxwell et Gerrv, l'hypothèse électro-mécanique de la galvanotaxie, Lœb trouve dans ses recherches faites avec Budgett des éléments nécessaires pour soutenir une théorie électrolytique du phénomène galvanotactique. 11 admet que chez un animal intact le courant pro- duit des actions électrolytiques dans le liquide cérébro-spinal qui enveloppe de tous côtés le système nerveux central. La formation des ions électro-positifs au point anodique n GALVANOTAXIE. du système nerveux central et leur action excitante ne constituent pas la cause directe du mouvement g-alvanotactique. La direction des lignes de force du courant par rap- port aux parties symétriques joue aussi un rôle important dans l'orientation galvano- tactique de l'animal. La nouvelle théorie de Lœb, théorie électrolytique, n'est pour ainsi dire qu'une modiQcatioii de sa première hypothèse électro-énergétique. Dans la nou- velle théorie, ce n'est plus l'état électrotonique des éléments nerveux qui produit les modifications de la tension musculaire, et, en dernier lieu, l'orientation galvanotac- lique, mais ce sont les excitations provoquées par des processus électrolytiques qui engendrent certaines modifications énergétiques du muscle et orientent l'animal dans un sens déterminé. 11 convient de se réserver pour juger cette théorie; car les objections formulées plus haut à la théorie électrolytique de Faction polaire du courant ne sont pas de nature à faire admettre également la nouvelle théorie galvanolactique de Lœb. Conclusions. Considérations générales. — Arrivé au terme de cet exposé des théories de la galvanolaxie, nous devons reconnaître que le problème est loin d'être résolu, et qu'il suscite encore parmi les physiologistes les plus vives controverses. Entre toutes ces théories, celle qui nous paraît être la plus vraisemblable, la plus conforme aux faits observés, et qui pourrait être admise sans conteste, c'est la théorie polaire de galvanolaxie émise par Verworn et soutenue par ses élèves et plusieurs autres physiolo- gistes. L'action du courant sur les organismes se manifeste par des phénomènes d'exci- tation provoqués à un de ses pôles ou aux deux pôles simultanément. Cette action du courant s'exerçant sur le protoplasma chez les organismes unicellulaires, sur la chaîne ganglionnaire et sur des terminaisons périphériques des nerfs sensitifs chez les inver- tébrés supérieurs, ou bien sur la moelle épinière chez les vertébrés, provoque, par ses effets d'excitation polaire, des mouvements d'orientation chez les animaux. Un fait se dégage de tout ce qui a été dit plus haut, c'est la nature biologique du phénomène galvanotactique, phénomène vital qui relève de l'irritabilité propre du pro- toplasma vivant. La galvanotaxie est une forme spéciale de l'irritabilité du protoplasma, lequel réagit par des phénomènes d'orientation locomotrice à l'influence de l'irritant électrique. Tout fait croire que la galvanotaxie, qui est si répandue dans le monde organique, est une propriété générale de la matière vivante. Dans l'état actuel de nos connaissances, il n'est guère possible de déterminer le rôle de la galvanotaxie dans les manifestations de la vie. Peut-être même le phénomène galvanotactique ne se produit-il guère dans les conditions normales de la vie. On est encore loin de connaître le rôle biologique des minimes différences de potentiel de l'électricité atmosphérique, dont l'action sur l'organisme vivant est indéniable; on connaît encore bien moins les nombreuses réactions électro-chimiques dont l'organisme animal est le siège et qui ne doivent pas être indifférentes dans la vie de l'individu. C'est donc l'insuffisance de nos connaissances électrobiologiques qui nous empêche de pénétrer plus profondément dans l'analyse du rôle biologique de la galvanotaxie. Il est cependant permis de prévoir, dès maintenant, que, lorsque l'action du courant élec- trique sur les mouvements d'orientation des éléments mobiles de l'organisme humain sera mieux connu, on trouvera peut-être dans les phénomènes galvanotactiques l'ex- plication de différents effets électro-thérapeutiques dont la raison d'être échappe pour le moment à toute analyse scientifique. Bibliographie. — 1. Diedermann (W.). Elektrophysiologie, 1895. — 2. Biedermann (W.). Elektrophysiologie {ErQebnisse der Physiologie, i, 1902, 2<' partie, 169-196). — 3. BiRU- KOFF (B.). Untersuchiingen ûber Galvanotaxis {A. g. P., Lxwn, 1899). — 4. Birukoff (B.). Sur les mouvements d'orientation des infusoires sous Vitifluence du courant galvanique {Trav. de Vinstitut physiol. de ^Université de Moscou, vi, 1902 (en russe). — 5. 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GALVANOTROPISME. Voyez GALVANOTAXIE. GAULTHÉRINE ET GAULTHÉRASE. — La gaulthérine est un glucoside découvert, en 1844, par Procter (1), dans l'écorce de Betula lenta Willd, arbre du Canada et de la Caroline. Elle doit son nom à ce fait que le produit principal de son dédoublement hydrolytique, le salicylate de met hy le, vennit d'être signalé par Cahours (2), comme constituant la presque totalité de l'essence de Gaidlheria procumbens L. Procter l'avait séparée sous forme d'une masse gommeuse; c'est seulement cinquante ans plus tard, en 1894, que Schneegans et Gerock (3) parvinrent à l'obtenir à l'état pur et cristallisé. Préparation de la gaulthérine — La préparation de la gaulthérine présente d'ailleurs des difficultés particulières, ce glucoside étant accompagné, dans l'écorce de Betula lenta, d'un ferment soluble qui le dédouble, même en solution alcoolique. Pour réussir, il faut suivre le procédé qui a été donné par les deux chimistes alle- mands. On épuise l'écorce de Betula lenta, grossièrement pulvérisée, avec de l'alcool fort contenant de l'acétate de plomb (15 p. 100 du poids de l'écorce employée), La présence du sel de plomb dans l'alcool paralyse et précipite le ferment. On débarrasse la teinture verdâtre ainsi obtenue de l'excès de plomb qu'elle renferme, par l'hydrogène sulfuré; on distille pour retirer l'alcool; on reprend le résidu sirupeux par un peu d'alcool absolu, ce qui amène la séparation d'un produit brun; on décante la liqueur claire, et on l'additionne de plusieurs volumes d'éther.U se produit un abondant précipité qui se rassemble en une masse jaunâtre, plastique, visqueuse. Cette masse est redissoute dans l'alcool fort, et la solution alcoolique abandonnée à l'évaporation spontanée. La gaulthérine se sépare peu à peu sous forme de cristaux prismatiques groupés en étoiles que l'on essore à la trompe, et que l'on purifie par deux ou trois nouvelles cris- tallisations, en décolorant la solution alcoolique à l'aide du noir animal. On obtient finalement des aiguilles parfaitement incolores. Propriétés de la gaulthérine. — La gaulthérine est amère. Elle est très soluble dans l'eau, mais s'y dissout lentement quand elle est à l'état cristallisé; elle se dissout facilement et rapidement dans l'alcool ; elle est soluble également, sans se décomposer, dans l'acide acétique concentré; elle est presque insoluble dans l'éther, le chloroforme, l'acétone, le benzol. Chaufï'ée, elle commence déjà à se décomposer un peu au-dessus de 100» en répandant l'odeur de salicylate de méthyle; à 120°, elle brunit et se décompose complètement, sans qu'on puisse observer une véritable fusion. La gaulthérine est lévogyre. La solution aqueuse préparée fraîchement n'est attaquée ni à froid, ni à chaud par les persels de fer; elle n'agit pas à froid sur la liqueur cupro- potassique, mais la réduit à l'ébullition. L'eau de baryte décompose la gaulthérine déjà à la température ordinaire. Sa composition élémentaire répond à la formule C'^'H-oO^, ou, plus exactement, à Q14H1808 + H-0; car elle renferme une molécule d'eau de cristallisation. Traitée à chaud par les acides minéraux étendus, la gaulthérine se dédouble en donnant du glucose et du salicylate de méthyle : <0H C00CH3 GAULTHERINE ET GAULTHERASE. 27 Présence très fréquente de la gaulthérine chez les végétaux. — La gaulthé- rineoii desglucosides analogues paraissent jouer un rôle importantdans le règne végétal, car. dans ces dernières années, on a retiré du salicylate de méthyle d'un grand nombre de plantes, et cela dans des conditions telles que l'on doit admettre que cet éther s'y trouve à l'état de glucoside. Dans plusieurs de ces plantes, la preuve de l'existence d'un tel glucoside a été établie. De l'une d'elles même, le Monotropa Hypopitys L., espèce qui vit en parasite sur la racine d'arbres divers et dont la tige fraîche écrasée exhale, au bout de quelques instants, l'odeur du salicylate de méthyle, j'ai pu retirer ce glucoside à l'état impur (4). Pour cela, j'ai eu recours au procédé de Schneegans et Gerock, après avoir, toutefois, détruit d'abord le ferment du glucoside que renferme la plante, par l'immersion de celle-ci dans de l'alcool à 9o° porté à l'ébullition. Le produit obtenu était sous forme de masse poisseuse que des essais répétés n'ont pu amener à l'état cristallisé. Mais son action sur la lumière polarisée, qu'il dévie à gauche, comme la gaulthérine; son dédoublement par les acides étendus et par le ferment, dont il sera question plus loin, ne laissent aucun doute sur sa qualité de glucoside de l'éther méthyl- salicylique. La présence de la gaulthérine ou d'un glucoside analogue a été également constatée dans la racine de Spirœa Filipendula, L. (4). Au surplus, voici la liste des plantes desquelles on a pu retirer du salicylate de méthyle, et dont on a toutes raisons de penser qu'elles renferment un glucoside de cet éther. FAMILLE. ESPÈCES. OBSERVATEURS. BÉTULiNBEs . . . Betula lenta h., écovcc Procter (1). Lauracées. . , . Lindera Bcnzoiîi Meissn., écoTce Schimmel (5). MoNOTROPÉES . . Monotropa Ilypopilhys h., tige Bourquelot (6). Ericacées . . . . Gaultheria procumbens L., feuille. . . . Cahours (2). — — frarjrantissima Wall., feuille. Broughton (7). — — leucocarpa 'QXame , iQwiWe . . . Kôliler (8). — — orfora/aWilld (9), feuille. . . — — serpyUifolia Puvsh (9), feuille. Rosacées. . . . Fragaria w,îca L., fruit Portes et Desmoulières (10). — Spirœa Ulmaria L., rhizome Nietski (11). — — Filipendula, L., racine Bourquelot (4). — — palmata Thunb., racine Beijerinck (12). — — Camtschitaca Pall., racine. . . . Beijerinck (12). Erythroxylées. Erythroxylum Coca Lam., feuille .... van Romburgh (1.3). — — Bolivianum Brck, feuille, van Romburgh (13). PoLYGALÉE.s. . . PoUjgala Senega L., racine Langbeck (14). — — Baldwini Nuttal, plante. . . . Maisch (15). — variabilis H. B. et K., racine. . van Romburgh (13). — — oleifera Heckel, racine van Romburgh (13). — — javana D.C., racine van Romburgh (13). — — depressa Wend, racine .... Bourquelot (6). — — calcarea F. Schultz, racine. . . Bourquelot (6). — — vulgaris L., racine Bourquelot (6). — — nemorivaga Pomel, racine. . . Bourquelot (4). Gaulthérase. — On a vu plus haut que la gaulthérine est accompagnée, dans l'écorce de Betula lenta, d'un ferment soluble possédant la propriété de l'hydrolyser. Ce fait, dont l'observation est due à Procter, m'a amené à penser que ce ferment devait exister dans toutes les plantes susceptibles de fournir du salicylate de méthyle et peut-être même dans des plantes voisines de ces dernières. Les recherches que j'ai faites sur ce point sont venues confirmer mes prévisions. Elles ont établi, en outre, que ce ferment est un ferment spécial. Je lui ai donné le nom de gaulthérase, qui, étant données les règles delà terminologie de Duclaux, généralement adoptée, me paraît préférable à celui de bétulase qui lui avait été donné par Sgiineegans (16). La gaulthérase agit sur la gaulthérine comme le font les acides minéraux étendus, en donnant du glucose et du salicylate de méthyle. Voici la liste des plantes dans lesquelles j'ai constaté sa présence. L'astérisque qui accompagne le nom de certaines s» GAZ. d'entre elles indique que le salicylate de mélhyle n a jamais été signalé dans ces plantes. Monotropa Hypopithys L. Plante entière (4). Gaultheria'procumhens L., feuille et baie (4). * Azalea. Plusieurs variétés, feuille et pétale (4). Spirxa Ulmaria L., rhizome (4). — Filipendula L., racine (4). * • — sallcifoUa, rhizome (4). Erythroxylum Coca Lam., feuille (observation inédite). Polygola Senega L., racine (4). — calcarea, racine (4). — vulgaris, racine (4). Il faut ajouter à celte liste les deux espèces suivantes, dans lesquelles Beuerinck a démontré l'existence de la gaulthérase. Spirsa palmata Tlinmb., racine (12). — Camtschatica Pall., racine (12) Bibliographie. — 1. Procter (Wm.). Observations on the volatile ail o/" Betula lenta and on Gaiiltherin, a substance tvich by its décomposition yields thaï oit {A. J. of Fharyn., XV, 241, 1884). — 2. Cahours (Aug.). S?N'iLL contenant l'iode à l'état d'iodure et peut-être d'hypoiodite peu stable est introduite dans une éprouvette de 100 ce. d'assez petit diamètre et bouchée à l'émeri. On amène, après lavage à l'eau distillée, le volume à 40 ou oO ce; on ajoute de l'acide sulfurique étendu, de manière à rendre la solution franchement acide, 8 ce. de sulfure de car- bone pur, et quelques centigrammes d'azotite de soude; on agite fortement, l'iode mis en liberté se dissout dans le sulfure de carbone en lui communiquant une teinte rose. On répète la même réaction dans une seconde éprouvette, de même volume et de même diamètre (40 centimètres cubes d'eau, solution de potasse ou de soude pure, acide sulfurique, 5 centimètres cubes de sulfure de carbone, quelques centigrammes d'azotite de soude), mais en ajoutant cette fois un volume connu d'une solution à O^sr^i d'iodure de potassium par centimètre cube. On agite fortement; on compare les teintes. Si la teinte est plus claire, on ajoute de l'iodure jusqu'à ce que l'on obtienne l'égalité des teintes; ce qui s'obtient d'ailleurs après quelques tâtonnements, avec la précision énoncée précédemment. Si la teinte est trop intense (teinte obtenue avec O^sr^o d'iode par exemple), on dilue, en ajoutant 5 ce. de sulfure de carbone contenant l'iode en dissolution, un volume connu de ce liquide (o ou 10 ce). L'égalité de teinte obtenue, on en conclut qu'il y a dans le liquide à doser une quan- tité d'iode égale à celle qui correspond au volume d'iodure de potassium employé, et indiqué par une burette graduée. Connaissant la quantité d'iode, on connaîtra la quan- tité de CO d'après la réaction : 5 CO + 2 IQiH = H^O + 5C02 + 12, qui montre que 70 de CO donnent 127 d'iode. Le volume en centimètres cubes à 0 et à 760 est obtenu en divisant le poids de CO exprimé en milligrammes par 1,254. Si l'on emploie une solution à 0'"s^l de Kt par centimètre cube, on exprimera le chiffre indiqué par la burette en milligrammes, et le volume de CO à 0° et à 760, exprimé en centimètres cubes, sera donné par la formule '21 70 1 Kl CO = Kl X , X — X = (127 + 37) 127 1,254 2,97 et pratiquement, CO = Kl T Pour vérifier l'exactitude de cette méthode, l'auteur a fait toute une série de dosages d'oxyde de carbone dans l'air n'en renfermant que de 1/1000<^ à l/oOOOO«. On retrouve la quantité d'iode théorique, aux erreurs d'expérience près. 2 à .3 litres suffisent pour le mélange à 1 /oOOOO. Voici le détail d'une opération faite avec le mélange à 1/10 00Û« : ou donnera plus loin les résultais numériques des autres expériences faites avec les mélanges à 1/1 000% 1/5 000% 1/7 500% 1/20 000% l/oOOOO^ Mélange à 1/10000«. — Ou commence par préparer exactement de l'oxyde de carbone à 1 p. 100. A cet effet on mesure dans une cloche de petit diamètre, pour laquelle on apprécie très facilement le 1/20'= de centimètre cube, 10 centimètres cubes d'oxyde de car- bone pur' et l'on fait 100 centimètres cubes, le mélange est donc à 1 p. 100. On opère sur une cuve à eau à température constante-. De ce mélange à 1 p. JOO on prend 10", 05 ; on note la température et la pression ; on trouve H = 760, 1 = 6" 'la. tension f de la vapeur d'eau à cette température est de 7 millimètres (nous aurons besoin de ces données ultérieurement). 1. Pratiquement, on fait l'analyse, par le chlorui-e cuivi-eux, d'un gaz renferniatU 97 à 98 p. 100 de CO pur, et l'on prend de ce gaz la quantité correspondant à 10 centimètres cubes de COpur 2. Les on-eurs provenant des manipulations sur l'eau, aux lieu et place du mercure, sont certai- nement d'ordre inférieur à celles du dosage. GAZ. 37 Le gaz, additionné de 200 à 300 ce. d'air est introduit dans un aspirateur gradué' : on amène à 1 litre le volume dans l'aspirateur : le mélange est donc praliquement à l/iOOOO'", puisque l'on a 0",i OO'ô de CO pur dans 1 litre d'air. On relie alors l'aspirateur au tube à potasse de l'appareil décrit précédemment; le bain d'huile étant à liiO", on commence l'aspiration, le gaz ayant entièrement circulé dans l'appareil, on balaye les dernières traces par une aspiialion d'air pur. Durée totale de l'opération : deux heures. Le liquide du tube de Will est introduit dans une des éprouvettes bouchées à l'émeri,* on amène après lavage le volume à 80 centimètres cubes, on ajoute et l'on prélève la moitié seulement, soit 40 centimètres cubes. On ajoute, comme il a été dit, 5 cen- timètres cubes de sulfure de carbone, acide sult'urique, nitrite de soude. On agile fortement. Le sulfure de carbone se teint en rose. On répète la réaction dans une seconde e'prouvette avec 30 centimètres cubes d'eau, 5 centimètres cubes de sulfure de carbone, 2",o de soude; acide sulfurique et 1 centi- mètre cube, soit 9™sm, d'une solution d'iodure de potasssium à 0'""%1 par centimètre cube : on agite fortement. Teinte rose nettement plus claire que la précédente. On ajoute successivement à cette seconde éprouvette dixième par dixième de centi- mètre cube de la solution d'iodure, on agite entre chaque addition, et l'on compare à chaque fois avec la teinte de la première éprouvette. On a avec : 100 , .,,. , , ., n mi! Il ( Teinte rose, phis claire que Ja teinte rose — de miUigr. de plus, soit 0,"'e.ll , , ' !, . ' 1 " ^ ( de la première éprouvette. _ _ n™ si 2 i Teinte rose, plus claire que la teinte rose ' i de la première éprouvette. ,„ ,„ ( Teinte rose, plus claire que la teinte rose ' I de la première éprouvette. — -^ — — 0™s,13 I Égalité de teinte dans les deux éprouvettes. nm-i'" i l'^i"^^ ^^^^ pl"^ foncée dans la seconde ' ' I éprouvette. Calculons la quantité diode correspondant à 0'"si4 de KL quantité qui a donné l'éga- lité des teintes. On trouve, en remarquant que le rapport p-r ^== 0,765 : 0,14 X 0,765 = 1,107, et, comme l'essai a été fait sur la moitié du liquide on auraj Quantité d'iode trouvé 0'"s,214 Or, le poids de CO contenu dans 10"0H de gaz humide à 1 p. 100 de CO pur est donné par la formule y, X (H - / 1,254 (1 + Oit) 760 dans laquelle nous ferons V = 0. 105 H = 760. f ==~, t = (j, on trouve : P = 0"s,1.52 auquel correspond en iode : Omg 122 X 127 Qunntité d'iode théorique. — = 0™», 221 D'ailleurs, en appliquant la formule indiquée plus haut 2,97 1. Un petit sac de caoutchouc, d'un volume de 2 litres environ, convient aussi bien que l'aspi- rateur. QUANTITÉ d'iode théorique trouvée milligr. milligr. 1,81 1,77 0,223 0,230 0,29 0,298 0,221 0,21i 0,109 0,114 0,123 0,129 38 GAZ. 0,28 CO = -^— = Û",094 2,97 or le volume à 0" et à 760, de 0, 1005 de gaz humide à la température et à la pression indiquée est, tout calcul fait : CO = 0",096 La technique exposée, voici le tahleau des résultats obtenus avec des mélanges plus concentrés ou plus dilués ; ijoins DK CO à la température QUANTITÉ DK CO EN voLUMR et à la pressioii de l'expérience. ^- ^- milligr. 8,5 de gaz à 10 p. 100 de CO pur 1 1,01 9,9 — 1 — — 2 0 123 13,05 — — _ _ .3 o,'l6 10,05 ——__.'.. 0 122 4,8 — — _ _ ;, o'o6 ^,i — — — — <■' 0,0675 L'examen de ce tableau montre que les erreurs influent à peine sur les chiffres des centièmes de milligramme d'iode lorsque les déterminations portent sur 1/10 à 1/20 de milligramme de CO. L'erreur relative maximum sera donc de 10 p. iOO; quant à l'erreur absolue, comme on a : 00 = - elle sera inférieure au 1/2 centième de centimètre cube. D'autre part, les quantités de gaz à faire circuler sont relativement petites, 2 à 3 litres au maximun. Remarques — 1° Il est nécessaire de faire marcher l'appareil cà blanc au début, h cause des traces de matières organiques qui peuvent avoir été entraînées dans l'acide iodique au moment du montage de l'appareil, et qui par leur oxydation donnent de l'iode libre ; 2® Ni l'hydrogène, ni le méthane ne donnent, dans les mêmes conditions, de réduction analogue. Cette méthode simple et rapide permet de doser, avec une précision relativement grande, l'oxyde de carbone contenu dans l'air dans des proportions variant de 1/1000" à l/o0000«. On pourrait cependant objecter une réduction possible de l'acide iodique par des vapeurs organiques pouvant être contenues dans l'air : mais cette circonstance est par- ticulièrement rare : il sera néanmoins très aisé de comple'ter la recherche, si on le désire, en employant la méthode physiologique et chimique de Gréhant, Méthode physiologique et chimique. — Si l'on fait respirer à un chien pendant une • lemi-heure un mélange d'oxyde de carbone et d'air à 1/1 000% on trouve, en extrayant les gaz du sang à l'aide de la pompe à mercure, que 100 centimètres cubes de sang ontabsorbé 5,5 d'oxyde de carbone, si le mélange respiré est à 1/10000% et la quantité d'oxyde de carbone 0", 55, il y a donc proportionnalité entre le volume d'oxyde de car- bone fixé par le sang et le volume de ce gaz qui existe dans l'air. Technique. — On fait respirer à l'animal pendant une demi-heure le gaz suspect contenu dans un grand sac de caoutchouc de 300 litres. Après une demi-heure une 1. Ces 8f°,5 ont été dilués dans 850" d'air (mélange à 1/1000=). 2. Ces 9",9 ont été dilués dans 500" d'air (mélange à 1/5 000»), 3. Ces 13", 5 ont été dilués dans 1075" d'air (mélange à 1/7500"). 4. Ces 10", 5 ont été dilués dans 1''' d'air (mélange à 1/10 000"). 5. Ces 4", 8 ont été dilués dans 970" d'air (mélange à 1/20 000"). 6. Ces 5", 4 ont été dilués dans 2''', 700 d'air (mélange à 1/50 000'), 7. Air pris au Jardin des Plantes. 1 heure 2 heures 1,6 3.3 » 1,63 0,59 1,18 0,44 0.88 0,22 0,4o GAZ. 39 canule étant placée dans un vaisseau artériel, on fait une prise de sangdonton extrait les gaz en présence de l'acide phosphorique. Les gaz sont ensuite analysés sur la cuve pro- fonde en dosant successivement l'acide carbonique, l'oxygène et l'oxyde de carbone par le grisoniètre. Soit » le nombre de centimètres cubes trouvés. Pour 100 centimètres cubes de sang, l'application de la loi d'absorption donne : S^.S d'oxyde de carbone correspondent à 1/1000' n — — — à 1 /,r d'oii 5..^3 X 1000 X = Pour les proportions d'oxyde de carbone plus petites que 1/10000", on fera respirer l'animal pendant une heure ou deux heures dans l'air suspect; l'analyse des gaz du sang per-mettra de déterminer la proportion d'oxyde de carbone dans l'air |)ar l'inter- polation selon les données réunies dans le tableau suivant. MÉLANGE d'aIK et d'oxj'de de carbone 100 cent, cdbes de s.\ng ont absorbé en 1/ 6 000» 1/12000' 1/15 000' 1/30 000' 1/60 000' La détermination de la quantité d'oxyde de carbone, quand le sang en renferme de très petites quantités, se fera avantageusement parla méthode à l'acide iodique. § II. — Extraction des gaz. L'extraction des gaz du sang ou de certains liquides de l'organisme ne présente pas de difficultés spéciales. La pompe à mercure est l'appareil qui permettra leur extrac- tion facile et complète, à condition de prendre quelques précautions qui seront signa- lées en temps utile. Deux séries d'appareils résolvent le problème des gaz du sang. Les uns sont des appareils simples dont la manipulation est relativement facile; l'exactitude des résultats est tout à fait satisfaisante, surtout si l'on tient compte que l'erreur relative dans les manipulations post-opératoires de l'analyse des gaz extraits (sans laquelle l'extraction n'a pas de raison d'être) est souvent de même ordre; les autres constituent au contraire une instrunienlation compliquée : la technique est très délicate, la précision beaucoup plus grande, justifiée d'ailleurs par l'emploi lors de l'analyse d'instruments dans lesquels l'erreur relative est réduite au minimum. Il est évident, en effet, que, si à un moment quelconque une cause d'erreur relative autre que celle qui est régulièrement prévue affectait la méthode, la précision des résultats deviendrait illu- soire. Nous passerons successivement ces appareils en revue. a)Méthode d'extraction ordinaire. — La technique qui va être exposée est en grande partie due k Gréhant : c'est celle qui est employée au laboratoire de physiologie géné- lale du Muséum d'Histoire Naturelle. La pompe à mercure est^du modèle indiqué depuis fort longtemps déjà par GnÉHANT. Une ampoule fixe, à laquelle est soudée à la partie inférieure un tube de verre de 0'",80 environ, est en communication au moyen d'un long tube de caoutchouc à parois épaisses avec une ampoule mobile contenant le mercure. A la partie supérieure de l'ampoule fixe est soudé un robinet à .3 voies unique entouré d'une garniture de fonte permettant de faire autour du robinet une fermeture hydraulique. Au-dessus du robinet se trouve le tube de sortie des gaz. Le tube latéral du robinet permettra la mise en communication de la pompe avec le ballon dans lequel sera introduit le sang. 40 GAZ. Voici comment celui-ci est monté. Un ballon ordinaire à long col est muni d'un bou- chon de caoutchouc à deux trous. L'un des trous traversé par un robinet de cuivre se termine par un tube de verre de petit diamètre arrivant jusqu'à la partie inférieure du ballon, il permet l'introduction du sang; le second trou est traversé également par un tube de verre de petite longueur auquel on adapte un assez long tube de caoutchouc d'iode sur lequel on place une pince de Mohr. (Perfectionnement de L. Camus). Le tube de caoutchouc est en communication avec le tube latéral de la pompe à mercure. Des fermetures hydrauliques constituées simplement par des manchons de caoutchouc empêchent les entrées d'air parlout où elles pourraient se produire. Le ballon, d'un volume de 230 à 500 ce, plongé dans de l'eau à 60-80°, est vidé de la plus gi-ande partie de l'air qu'il contient, tout d'abord à l'aide d'une trompe à eau. On termine l'extraction à l'aide de la pompe. Le vide obtenu, le sang est aspiré du vais- seau dans une seringue spéciale parfaitement cylindrique, grâce à un rodage parfait, puis introduit dans le ballon. On extrait les gaz en ayant soin de donner le premier coup de pompe après quelques minutes d'attente qui permettent à la mousse, d'abord abondante, de se dissiper. L'extraction doit durer au moins une demi-heure, de préférence trois quarts d'heure. Entre chaque coup de pompe le tube de caoutchouc est fermé par la pince de Mohr ; on évite ainsi une distillation de la vapeur d'eau dont la condensation dans l'ampoule delà pompe fournirait une certaine quantité d'eau pouvant influer sur les résultats de l'analyse. Le vide de nouveau obtenu, les gaz réunis dans la cloche, on procède à l'analyse, comme il a été décrit plus haut. Si l'extraction des gaz du sang est faite en vue de l'oxyde de carbone, le vide est préalablement fait sur de Tacide phosphorique à 45° B, en volume égal à celui du sang, (au volume de sang présumé); l'extraction est conduite d'une façon absolument iden- tique; et l'analyse faite suivant a p. Si du môme coup on veut déterminer l'oxygène et l'oxyde de carbone dans un même e'chantillon de sang, on fera d'abord le vide à 10°. Les gaz extraits renfermeront les gaz du sang à l'exception de l'oxyde de carbone : ils seront analysés comme il a été dit p. 32. On introduira, l'extraction finie, de l'acide phosphorique à 43° B (volume égal à celui du sang, et on portera la température du bain-marie à 100°. La seconde extraction fournira de l'acide carbonique (acide carbonique combiné) et de l'oxyde de carbone, l'analyse sera faite suivant a (p. 32). b) Extraction des gaz du sang par la méthode et la pompe double à mercure de Chauveau. — Cette méthode consiste : 1° A extraire simultanément, avec la même rapidité, sans interrompre le cours du sang dans le vaisseau, un volume connu de sang artériel et de sang veineux; 2° A extraire les gaz du sang artériel et du sang veineux, simultanément, d'une manière absolument identique, et dans le vide le plus parfait dont nous puissions disposer, le vide barométrique. Il est inutile d'insister sur les avantages évidents qu'il y a à ne pas interrompre le cours du sang dans les vaisseaux pendant la prise de sang, ni sur l'exactitude plus par- faite des résultats, si les deux sangs, artériel et veineux, ont subi un traitement parfai- tement identique. Les explications qui suivent montreront que les manœuvres eiïectuées sur le sang veineux sont absolument Identiques pendant toute la durée de l'expérience, et que les résultats obtenus de cette manière sont parfaitement comparables. Avant d'exposer le manuel opératoire, je parlerai des instruments employés : 1° Les seringues ; 2° La pompe douljle à mercure de Chauveau. Les seringues employées sont, soit la seringue de Paul Bert modifiée*, soit la seringue décrite plus haut (p. .39). 1. La niocUfication consiste dans la position latéralf donnée au tnbe qui sert à l'introdurlion des liquides dans la seringue. GAZ. 41 Le sang peut être mesuré soit en volume, soit en poids. Dans ce dernier cas, la seringue, quelle qu'elle soit, contenant 5 ce. de mercure et environ 12 ou 13 ce. de solution saturée et bouillie de sulfate de soude, est pesée avant et après la prise de sang; la différence de poids donne le poids de sang retiré; on prend approximative- ment 25 ce. de sang. Ce procédé de mesure est le plus exact, la quantité de sang retirée pouvant être facilement connue, à 1 milligramme près. La pompe double à mercure est formée de deux pompes à mercure placées côte à côte et fonctionnant simultanément à l'aide du même réservoir. Il n'y a rien de spécial à dire sur ces parties qui sont construites comme dans une pompe à mercure ordi- naire, avec une ampoule, un robinet à trois voies et une cuvette à mercure placée sur le tube destiné à l'expulsion des gaz. Les extrémités inférieures des deux tubes sont réunies à un réservoir unique par un tube en Y. Les deux ampoules destinées à recevoir le sang sont surmontées d'un tube ayant un diamètre de 3 centimètres environ et une hauteur de 5o centimètres. Cette longueur est suffisante pour que la mousse produite pendant l'extraclion des gaz ne risque jamais d'atteindre le robinet. A chaque pompe sont joints deux systèmes : l'un, destiné à échauffer l'ampoule; l'autre, à refroidir le tube pour condenser les vapeurs qui s'y engagent, et empêcher la mousse produite par le sang de monter. L'eau des réservoirs a été au préalable chauffée à une température de 6S° ou 70°. On peut faire monter cette température à 7."i» ou 80°, dans les premiers moments, lorsque le sang vient d'être introduit dans la pompe, et cela dans le but de faciliter le dégage- ment des gaz. Mais au bout de vingt minutes ou une demi-heure, il est bon de revenir à 65°. Après une demi-heure de chauffage, on donne un premier coup de pompe, qui donne la presque totalité des gaz, puis un second, cinq minutes après; cinq ou six coups de pompe suffisent pour extraire la totalité des gaz. Il n'y a pas intérêt à pousser plus loin l'extraction ; car on risque d'extraire de l'eau et de commettre par ce fait une erreur plus grande que celle que l'on voulait éviter. Il est, en effet, bien difficile de tenir compte exactement de la quantité de gaz dissoute par l'eau. On doit avoir soin, pendant toute la durée du chauffage du sang, de maintenir le cylindre complètement rempli de glace. Les deux pompes étant actionnées par le même réservoir, l'extraction des gaz est faite d'une manière absolument comparable pour les deux sangs, artériel et veineux. Le chauffage des deux sangs a été fait à la môme température et pendant le même temps. Si l'on considère aussi la manière dont le sang a été extrait dans les deux cas, on en arrive à conclure que cette méthode donne évidemment des résultats aussi parfaits que possible, autant au point de vue de l'exactitude absolue pour chaque quantité de sang qu'au point de vue de la comparaison entre les deux sangs. Extraction des gaz des différents liquides de l'organisme. — La technique est absolument la même que celle indiquée pour le sang. Détermination de l'acide carbonique des tissus. — On traite le muscle ou tissu par l'eau de baryte, à saturation en volume, égal à celui du tissu. On abandonne le tout pendant plusieurs heures. La matière albuminoïde se dissout. L'acide carbonique passe à l'état de carbonate. Une partie du liquide est alors traitée par le vide, puis addition d'acide chlorhydrique bouilli, comme il a été dit plus haut. L'analyse se ter- mine suivant la technique exposée. Extraction de l'oxyde de carbone du sang coagulé. — Ce cas peut se pré- senter en médecine légale. Voici comment il convient d'opérer : Le sérum, s'il est coloré, est mis à part ; le caillot est placé dans un verre à expé- rience, dilacéré grossièrement avec des ciseaux. On enlève aux ciseaux toute trace de caillot qui pouvait y être fixé. Le tout est jeté sur un petit carré de toile de Un, de 20 centimètres de côté environ, placé sur un entonnoir. Un liquide s'écoule; on le recueille. Cela fait, on prend les bords de la toile, on les réunit dans la main gauche et on effectue avec la main droite, qui tient une pince de bois saisissant le linge, une torsion qui force l'écoulement (grâce à la pression progressive développée), d'abord du liquide en excès, puis des globules mélangés d'un peu de fibrine : finalement, il ne reste plus sur la toile que la plus 42 GELATINE. grande partie de la fibrine. On lave et on tord de nouveau, et cela jusqu'à ce que la toile et le liquide de lavage soient incolores ou à peine colorés en rose. Le tout : sérum, liquide d'expression, 'eaux de lavage, sont réunis et introduits dans le ballon vide conte- nant l'acide phosphorique (volume égal à celui du sang). L'extraction est faite d'après la technique exposée plus haut. Les résultats très satisfaisants donnés par cette méthode ont été exposés par Nicloux. L'e.Ttraction de Voxyde de enrhone du sang coagulé [B. B., 190.3). Bibliographie. — Voir, outre les Traités généraux de Chimie biologique. Ogier Analyse d"sgaz [Enc. chim. de Frémy). — Gkéhaxt. Les gaz du sang [Enc. Léauté) — Grk- HANT. Hygiène expérimentale. L'oxyde de carbone. {Enc. Léauté.) — Traité de Physique Biologique, par d'ARsoNVAL, Chauveau, Cartel, Marey et Wetss, 1901). NICLOUX. GEISSOSPERMINE (V. Péreirine). G E L AT I N E . — La gélatine ou glutine est le produit que l'on obtient lorsque l'on soumet à la coction les substances collagènes. Les colles à base de gélatine sont connues depuis la plus haute antiquité. Plixe parle des colles de peau et des colles de pois- son; mais c'est àPAPiNque l'on doit la colle d'os obtenue en traitant ces organes par l'eau, en vase clos, à une température supérieure à 100". La gélatine a été proposée comme aliment azoté, et nous verrons plus loin quels sont les arguments et les expériences que l'on a présentés pour justifier la valeur alimen- taire ou non alimentaire de la gélatine. La gélatine dérive des substances collagènes, substances fondamentales des fibres blanches des tissus connectifs; c'est ausssi la substance albuminoïde essentielle des os; elle est désignée dans ce cas sous le nom d'osséine. Enfin on rencontre encore des matières collagènes dans les cartilages, où elles portent alors le nom de chondrine.Pav ébuUition avec l'eau, et mieux encore avec l'eau légèrement acide, ces substances sont transformées en gélatine. Hofmeister considère les substances collagènes comme les anhydrides de la gélatine; on peut approximativement représenter cette relation par la formule suivante : C102 Hi49 As^i 028 ^ H-^0 = C102 um As^' O^^ Substance collagène. Gélatine. Lorsque l'on chauffe la gélatine à 130°, on donne de nouveau naissance k une sub- stance collagène. Les substances collagènes se rencontrent dans un grand nombre de tissus et,' en particulier, dans la peau et les éléments dermiques, les tendons elles cartilages, le tissu préosseux de la corne des ruminants, les os, etc. Les proportions de gélatine contenue dans les différents organes sont : Organes glandiilaii^es. . . 3.37 p. 100 (V. Bibra). Reins 0,996 à 1,849 (Gottwalt). Muscles humains 1,99 en moyenne. Os décalcifiés 11,4 (Hoppe Seyler). Rétine 13 à 17 p. 100 (Cahn). La transformation que subit la matière collagène a pour effet de faire passer la matière albuminoïde de l'état insoluble à l'état soluble. C'est ainsi que la peau, soumise à l'action prolongée de l'eau bouillante, se gonfle et se dissout à la longue dans ces conditions. La vitesse de dissolution varie d'ailleurs avec la nature de la peau, l'âge des animaux, la température de coction. La peau des jeunes animaux est plus rapidement solubilisée que la peau des animaux âgés. La peau des poissons se dissoul déjà à la température de 20 ou 2o». On rencontre des substances collagènes chez tous les animaux vertébrés. Hoppe-Sevler avait cru devoir faire une exception pour VAmphioxus laneeolatus, dont le corps, traité par GELATINE. i3 l'eau bouillante, lie lui avait pas semblé donner de gélatine. Cette exception a été rejetée à la suite des observations de Krukexberg qui a montré que même les tissus de ce verté- bré élémentaire renfermaient des substances collagènes. Parmi les invertébrés, les uns, traités par coction avec l'eau bouillante, donnent de la gélatine; tels sont les Céphalo- podes : les autres, de la mucine. Les gélatines du commerce sont d'origines diverses. La vessie de certains poissons, en particulier les Esturgeons : Acipenser sturio, A.stellatm, A.huso,A. ruteniis,Sihtrus glanis, de la Volga et des fleuves russes du bassin de la Mer Noire et de la Caspienne fournissent par simple dessiccation l'ichtyocolle, isinglass des Anglais, Haitsenblafc des Allemands, renfermant 90 p. 100 environ de géla- tine pure. Les intestins de la morue sont aussi l'origine d'une certaine variété d'ichtyo- colle; on en obtient enfin dans certains pays, en Moldavie en particulier, un produit inférieur par ébullition avec la tète, la peau, l'estomac et les intestins de poissons. La colle de peau ou colle forte a pour origine ce que l'on appelle les colles matières, dont les plus importantes sont la camaise, résidu des tanneries et des mégisseries, le rennicelle qui comprend, réduit à l'état de fines lanières, toutes les peaux d'animaux non employées sous cette forme, lapins, lièvres, chats, rats, les débris de la peau de gants et les vieux gants; les patins et les nerfs, résidus de boucherie, les premiers étant les gros tendons des jambes de bœuf, les auti^es des matières tendineuses quelconques. Il y a encore un certain nombre de déchets qui donnent naissance à de la gélatine : tels sont les têtes de veau, les brochettes, lanières de peau restant attachées aux fragments de chair que l'on enlève des matières premières de la tannerie; les rognures de "peau épaisse, provenant de l'emballage des surons d'indigo; les rognures de parchemins, etc. Les proportions de gélatine fournies par ces différentes substances sont les suivantes D'après Dumas. D'après Malepeyre. Rognures de parchemins 62 » — de cuirs de l'Amérique du Sud (dési- gnées souvent sous le nom de Buenos- Ayres). 06-60 60-66 Peau de tête de ve?.u 44-48 60 Surons d'indigo.. . o0-5o .lO-.'iri Brochettes 44-45 43-50 Rognures de tannerie 38-42 36-40 Patins 35 36 Nerfs 15-18 » L'aspect de la gélatine varie suivant son origine même. Les carmisses de veau et de chevreau donnent des gélatines fines, alimentaires, transparentes, de couleur jaune blond. Les carnasscs de bœufs et de moutons donnent des gélatines jaune rougeâtre; les carnasses de cheval donnent un produit opaque brun rouge, de qualité très inférieure. La colle d'os répond plus spécialement au nom de gélatine : les matières premières que l'on emploie sont les os des animaux domestiques, les os des bœufs avec lesquels on prépare les gélatines alimentaires, les têtes de cheval et de mouton, les déchets de boucheries, etc. La préparation de la gélatine est une opération industrielle qui s'effectue en grand dans la préparation des colles fortes et colles animales. Il est évident qu'une telle étude sort tout à fait du cadre de ce dictionnaire. La gélatine du commerce n'est pas un produit pur. Loin de là : elle renferme des matières albuminoïdes et des cendres. Neumeister débarrasse la gélatine du commerce de l'albumine qu'elle renferme toujours, en la laissant en contact avec de l'eau, puis en la lavant soigneusement avec de l'eau salée. Mais la gélatine ainsi obtenue renfermerait encore, d'après Krukexberg, des traces d'albumine et pour obtenir un produit complète- ment pur, il faudrait laisser macérer du tissu conjonctif pendant longtemps à la tem- pérature ordinaire dans une solution de soude à 5 ou 10 p. 100. Ce produit bien lavé donne naissance par ébullition avec l'eau à une gélatine complètement privée de matières albuminoïdes. L'élimination des matières minérales peut se faire aussi par lavage à l'acide chlorhydrique à 1 p. 1 000, mais il faut ensuite se débarrasser de l'acide, et cette opération nécessite des lavages longs et répétés, terminés finalement par une neutralisation avec de l'eau légèrement ammoniacale. L'épuisement par l'eau pure 44 GÉLATINE. semble donner de meilleurs résultais (0. Nasse). Hofmeister enfin prépare la gélatine à l'état de pureté en laissant en contact la gélatine commerciale ordinaire avec de l'eau froide pendant plusieurs jours. On obtient ainsi une séparation assez avancée des sels et parties minérales qui diffusent par osmose; on dissout alors la substance restante dans l'eau bouillante, on filtre à chaud en recevant le liquide clair dans l'alcool à 90 p. 100. La gélatine précipite, et on la soumet deux ou trois fois au même traitement. Elle ne contient plus ainsi que 0,6 p. 100 de matière minérale formée surtout de phos- phate de chaux. Propriétés. — La gélatine sèche et pure du commerce se présente sous la forme.de lames amorphes, transparentes et à peu près incolores, élastiques et cependant cas- santes. La gélatine est neutre aux réactifs. Elle est insipide, et présente une odeur fade, quelquefois très faible et même nulle. La gélatine est lévogyre, et son pouvoir rotatoire est de : à 25° [a]D = — 130» à 40° [a]r, = - 123° Les alcalis ou les acides faibles la font baisser à : [a]r, = - 132° La gélatine ne présente pas spectroscopiquement la bande d'absorption delà lyrosine (A. Wynter Blyth). Action de Teau. — Gélification. — La gélatine en présence de l'eau manifeste des pro- priétés particulières. A froid elle se ramollit et se gonfle, surtout si l'on élève légèrement la température. Elle augmente alors de volume en absorbant environ quarante fois son poids d'eau. Chauffée à une température plus élevée, elle se dissout. Par refroidis- sement, la solution se prend en une masse solide, élastique, molle, éminemment friable, transparente et qui occupe la totalité du volume de la solution si la concentration est suffisante:! p. 100 suffit pour faire gelée. Cette propriété que présente la solution de géla- tine de se prendre en gelée par refroidissement s'appelle la gélification. La gélification ou gélatinisation des solutions est une des propriétés les plus caracté- ristiques de la gélatine, et elle a donné lieu à un certain nombre de travaux se rappor- tant tant aux conditions physiques qui l'accompagnent ou la déterminent qu'aux réac- tions chimiques qui la modifient. U.\sTRE et Floresco ont établi la durée de la prise en gelée des solutions de gélatine laissées quelque temps à l'étuve à 40° dans des circonstances identiques, puis aban- données à 22°. Cette durée sera : Pour une solution à 1 p. 100 60 minutes. ' — à 2,ÎJ — 43 — MuLDERa montré qu'une solution de gélatine chauffée en tube scellé et portée pendant quelques instants à la température de 140° perd la faculté de se gélifier par refroidis- sement. Si on la porte à 110° pendant vingt heures en répétant plusieurs fois l'opé- ration, on arrive encore à une diminution considérable du pouvoir gélifiant. Hofmeister a montré que l'on observe encore un abaissement de cette faculté par la simple ébul- lilion, maintenue pendant vingt-quatre heures à la pression ordinaire. Maintenue pendant une heure, de 110° à 120°, la gélatine ne subit pas de changement quant à la gélification elle-même; mais il se produit néanmoins des modifications dans quelques circonstances du phénomène. Il en est de même quand on soumet à l'ébullition une solution de gélatine. Uastre et Floresco ont pu montrer ces variations en prenant une solution à 5 p. ^100 que l'on divise en 4 fractions identiques. La première sert de témoin; elle est portée à la tempé- rature de fusion, puis abandonnée librement. La deuxième est portée à l'ébullition pendant cinq minutes. La troisième fraction est étendue d'un égal volume d'eau, puis soumise à l'ébullition jusqu'à être amenée à son volume primitif. La quatrième enfin est portée à l'autoclave à 120° pendant une heure. Dans les quatre on a noté le point GELATINE. de gélification, la daiée du phénomène (en partant de ce même point», enfin la consistance. Point Point Durée de fusion, de géliflcation. de la gélification. Consistance. 1° Gélatine à 3 p. 100 31° 21''8o 20 minutes. Solide. 2° Gélatine à 5 p. 100 portée 5 mi- nutes à rébullition » 21°ij0 2o — moins solide. 3° Gélatine à 3 p. 100 diluée au dou- ble de son volume et ramenée au volume primitif par ébuUi- tion prolongée » 21° 3o — moins solide. 4° Gélatine à op. 100 portée pendant une heure à l'autoclave à 120". » 20° 43 — moins solide encore. ï^a gélatine éprouve donc, par l'action plus ou moins prolongée de l'eau à haute tem- pérature, une modification qui se traduit par la diminution ou la perte totale de la faculté de gélification. Dastre et Floresco ont reconnu que le produit de transformation obtenu dans ce cas était surtout formé par des gélatoses; en particulier, par la proto- gélatose de Chittenden et Salley, corps défini par les caractères suivants : absence de la faculté de gélification, absence de précipitation par NaCl à saturation, circonstances de sa production par processus d'hydratation ou par l'action des ferments digestifs. Ce sont des corps analogues aux protéoses fournies par les autres albuminoïdes. Par l'action des iodures et chlorurées alcalins à 40" pendant 24 à 48 heures, on obtient une réaction analogue (Voir plus loin Action des sels. — Digestion saline de la gélatine). C'est aussi le même corps que Ton obtient dans les premiers stades des digestions pep- tique ou pancréatique, ou au début de l'action des microbes liquéfacteurs (voir Diges- tion de Valbumine). La faculté de se gélifier est d'ailleurs variable avec la constitution même des géla- tines. Nasse a prétendu que le pouvoir de gélification diminuait avec la richesse en cendres, (opinion discutée d'ailleurs et contestée par C.Th. Môrner). Avec 3,1 p. 100 de cendres, proportion que renferme la gélatine ordinaire du commerce, la gélification est sen- sible à 27° avec un taux de 1,7 p. 100 de gélatine. Pour une gélatine à 0,62 p. 100 de cendres, au contraire, la gélification n'apparaît plus que pour une proportion de 3,7 p. 100 de gélatine. Cette même gélatine, à 0,62 p. 100 de cendres, ne serait précipitée par le tannin, d'après Weiske, qu'en présence d'un sel dans la solution, dont une trace d'ailleurs suffirait (Ca SO*, Ca CO*). D'autre part la présence d'un certain nombre de sels retarde la coagulation, ou gélification des solutions de gélatine. LÉVITES, Pauly et P. Rona ont montré que les corps qui ralentissent la gélatinisation abaissent aussi la température à laquelle se produit ce phénomène. Réciproquement ceu.x qui l'accélèrent élèvent le point de fusion de la substance gélatineuse. S. Lévites assimile les phénomènes de gélatinisation à ceux de cristallisation : la matière col- loïde se sépare de sa dissolution et reste imprégnée du solvant en formant une masse gélatineuse. La présence d'un corps étranger augmente la solubilité et ralentit la vitesse de gélatinisation: la gélatine, soluble à froid dans des solutions moyennement concen- trées de sulfocyanate, de salicylate de Na, dans les solutions concentrées diodures de potassium, d'ammonium, etc., ne s'y solidifie pas à la température ordinaire. Les sels suivants retardent en général la gélatinisation (les expériences de l'auteur ont porté non seulement sur la gélatine, mais aussi sur l'agar agar' : KCI, NaCl. Az H*C1, CaC12, BaCP, MgCl-^, CuCl^ CoCP, CdCl^ Na Br, Na Br 0^ K Br 0^ Kl, Na I, AzH'^ L Br03 K, AzO* Na, AzO^ AzH', ikiO'-'f Mg, (AzO^)^ Ba, KG Az; sulfocyanales de K, AzH' et Ba, acétates et formiates alcalino-terreux, benzoates, salicylatcs, propionalcs, buty- rates, valérianates alcalins. Au contraire, les sulfates de K, Na, AzH*, Mg, Cu, Zn, Co; K-CO^ et Na-^CO^^ ; les phosphates de AzH% K, Na ; AsO* Na^; les oxalates de K, AzH^, Na; les succinates de Az H*^ et Na, les tartrates, les citrates, etc., accélèrent la gélatinisation. Il semble d'après cela que les sels des acides monobasiques, à part les formiates et les acétates, ralentissent la vitesse de gélatinisation, tandis que les sels des acides polybasiques l'accélèrent. Parmi les alcools en C°H^+'OH, Talcool méthylique accélère un peu la gélatinisa- tion ; les autres, jusques et y compris l'alcool butylique, ont l'effet contraire. {6 GELATINE. W. Pauli et P. llOxNA ont établi les mêmes faits pour les mêmes sels. Pour eux aussi l'alcool abaisse le point de gélification ; il en est de même de l'urée; la glycérine et le glucose rélèvent au contraire. Ils n'ont déterminé aucune relation entre cette action particulière de certains sels métalliques et leurs propriétés précipitantes vis-à-vis de la gélatine. En outre, en solution salée ou non, les points de gélification s'élèvent avec la concentration en gélatine, et les points de liquéfaction s'abaissent. Si plusieurs sels sont employés simultanément, leurs actions s'ajoutent, et, étant donnés les sens contraires dans les([uels elles peuvent agir, on peut obtenir des mélanges inactifs. Action de ralcool. — La gélatine est insoluble dans l'alcool, et l'alcool précipite les solutions cbaudes de gélatine. Mais la liqueur précipitante doit être neutre (et non acide), et son titre alcoolique définitif doit être de 70 p. 100, pour que la gélatine ne se dissolve plus (A. Gautier). Dans de semblables milieux, où la gélatine, l'eau et l'alcool se trouvent en présence, les phénomènes de gélification sont accompagnés de circonstances spéciales intéressantes. C'est ainsi que Hardy a étudié le mécanisme de la gélification de ce système ter- naire formé par un mélange de gélatine, d'eau, et d'alcool. Ce mélange, homogène cà chaud, donne à froid deux liquides superposés d'indices de réfraction très différents. La température où l'homogénéité cesse est assez variable; elle s'élève avec la propor- tion de gélatine et d'alcool et s'abaisse quand la quantité d'eau augmente. Si la tempé- rature s'abaisse davantage, une des deux masses devient solide. La surface de séparation en est sinueuse et discontinue d'autant plus que les deux luassos [se sont formées rapi- dement. Quand le mélange contient peu de gélatine, la masse solide se forme du côté concave; au contraire, elle se forme du côté convexe quand la proportion de gélatine est forte. De là, deux constitutions différentes de l'bydrogel : ou bien c'est une masse solide contenant de petites gouttelettes liquides, ou bien c'est une masse liquide contenant de petites particuhis solides. Dans le premier cas la substance est élastique et solide ; dans le second cas, elle tend toujours à se rétracter par suite de la réunion des masses solides en suspension dans la masse liquide. Liquéfaction réversible. — Ce phénomène, qui a élé trouvé par Tsvett, répond a des propriétés toutes spéciales des matières colloïdes. Si l'on place un fragment de gélatine hydratée, à y ou 10 p. 100, dans une faible quantité d'une solution de résorcine contenant de 50 à 100 parties de matière cristallisée pour 100 parties d'eau, on voit aussitôt apparaître sur la gélatine un voile blanchâtre, sorte de mucosité dont le volume s'accroît rapidement. La gélatine paraît fondre dans le liquide, et, s'il y a un excès de liquide, la gélatine est dissoute complètement. Exa- minée au microscope, la mucosité paraît former une émulsion plus ou moins fine, constituée par une masse diaphane très réfringenle qui se présente en gouttelettes menues ou en masses contenant des vacuoles, dans un liquide de densité optique inférieure. Parmi ces gouttelettes, les plus fines sont sphériques, les plus volumineuses sont de formes irréfiulières. Certaines actions mécaniques peuvent les fusionner ou les fragmenter. Ces agrégats, nettement différenciés d'avec le liquide qui les environne, ont avec celui- ci uu rapport analogue à celui d'un liquide avec sa vapeur saturée. Si l'on ajoute une faible quantité d'eau à la solution, dans les agrégats se forment des vacuoles, et la ma- tière réfringente devient opaque; si l'on augmente la quantité d'eau, la substance devient filante et presque solide. Pour ramener les choses en leur état primitif, il suffit d'ajouter à nouveau de la résorcine. Afin d'étudier l'action des acides et des alcalis, Tsvett emploie une chambre à gaz micrographique où passe un courant de vapeur, soit acétique, soit ammoniacale. Toutes les deux ont la môme action. D'abord la préparation paraît s'éclaircir et la substance réfringente semble devenir homogène; siàl'une des deux actions on fait immédiatement succéder l'autre, le phénomène inverse se produit. L'émulsion primitive reparait, animée de mouvements qui rappellent ceux des am'ibes ou des préparations de Dr tsculi. Si l'on élève la température, l'action produite est la même que par l'adjonction d'alcali ou d'acide. Dans certaines conditions, la gélatine est iluidiliée. On peut aussi mettre un morceau de gélatine sèche dans une solution moyennement concentrée de résorcine; la gélatine gontle, devient limpide et finit par se dissoudre gélatine; à complètement, après agitation du mélange. Si la solution de lésorcine n'est pas d'une concentration supérieure à 80 p. 100, à la température ordinaire, il y a une limite à la dissolution de gélatine, dont l'excès se gonfle en formant une masse limpide se rappro- chant plus ou moins de l'état liquide. La matière forme alors deux couches super- posées, parfaitement délimitées, dont la plus dense est la plus réfringente. Leur mélange forme une émulsion de globules, analogue à celle qui a été précédemment décrite. Il faut d'autant plus de gélatine que la solution de résorcine est plus concentrée. 100 parties derésorcine à 80 p. 100 dissolvent en premier lieu 3 ou 4 parties de gélatine à lo". Une solution de concentration supérieure à 100 p. 100 ne peut plus être saturée. Quelque quantité de gélatine que l'on emploie, il se forme un liquide homogène épais. D'autre part, la température agit sur la solubilité de la gélatine dans la résorcine; l'élévation de température agit comme une élévation de concentration de la solution. Probablement, grâce à une dépolymérisation des molécules albuminoïdes, la solubilité de la gélatine augmente. Si l'on étudie la composition des deux couches liquides que nous avons citées, on voit que le liquide supérieur est exclusivement formé d'eau, de résorcine et de géla- tine; pour s'en assurer, on précipite par l'eau ou par l'alcool, ou bien on dialyse avec de l'eau alcoolisée. Dans ce dernier cas, on obtient, après quelques jours, une sub- stance cornée et transparente qui possède les propriétés delà gélatine primitive.il s'agit soit de gélatine pure, soit de ses premiers produits d'hydrolyse. Le liquide inférieur est un liquide épais qui forme goutte à l'extrémité de la pipette. Il est formé d'eau, de résorcine et surtout de gélatine. Si l'on y ajoute encore de la gélatine, elle s'y mélange en formant un liquide homogène de plus en plus épais. Ce liquide inférieur est donc en réalité une solution de résorcine aqueuse dans la gélatine. Les solutions d'hydrate de chloral agissent sur la gélatine exactement comme le font celles de résorcine. Elles dissolvent la gélatine et s'y dissolvent elles-mêmes après l'avoir liquéfiée. La seule différence est la plus grande activité de l'hydrate de chloral. D'après ce qui précède, on voit que les trois substances en présence se dissolvent réciproquement en formant deux solutions. Selon les proportions des substances réagissantes, il peut se présenter les cas suivants : Q 7= Quantité relative de matière albuminoïde. K = Coefficient de solubilité de cette matière dans la résorcine aqueuse. K' = Coefficient de solubilité de la résorcine aqueuse dans la matière protéique. Ces coefficients constituent des variables qui dépendent de la concentration de la résorcine et de dilTérents autres facteurs. On peut supposer : K =: — - ou K y-p' Q:x'K. La quantité relative d'albuminoïde inférieure ou égale au coefficient de solu- bilité permet à celle-ci de se dissoudre entièrement, après gonflement de la matière; le résultat est une solution homogène saturée ou non. Q'^^K. La totalité de la matière protéique ne pouvant être dissoute, le coefficient K apparaît. On peut avoir : <'■ Q= -' : K' indiquant la proportion dans laquelle la résorcine aqueuse se dissout dans la substance protéique, -, donne la proportion dans laquelle cette dernière se ^8 GELATINE. combine en même temps avec la lésorcine. On peut obtenir une solution saturée de résorcine aqueuse dansj'albuminoïde, liquide ou solide. 1 Q^— . Il y a trop de matière protéique; on obtient une solution non saturée de résorcine aqueuse dans l'albuminoïde. Q^— ,. La matière protéique manque, K et K' interviennent, et l'on est en présence de deux cas : K /J- et K -- K<; — ,. C'est la liquéfaction réversible typique. II se forme deux solutions de compo- sition et de densité différentes, qui sont en équilibre osmotique et chimique. K := _,• Les deux solutions, étant identiques, n'en forment plus qu'une, homogène. \ La concentration de la résorcine pour laquelle K = — à une température donnée peut s'appeler concentration critique, et la température dans ce cas, température critique. Action des acides. — La gélatine se dissout dans les acides acétique ou sulfu- rique. La dissolution de la gélatine dans l'acide sulfurique concentré, étant étendue d'eau et maintenue pendant quelques temps à rébuliition, donne naissance à de la leucine et du glycocoUe. Sauf le tanin, l'acide trichloracétique et l'acide métaphosphorique, les acides étendus ne précipitent pas la gélatine. L'ébullition avec l'acide sulfurique étendu don- nerait naissance à du sulfate d'ammoniaque e( à un sucre fermentescible (Gebhardt). L'acide azotique attaque à chaud la gélatine en donnant naissance à de l'acide oxa- lique. Les acides biliaires précipitent quantitativement la gélatine. Action des alcalis. — La gélatine peut être laissée sans altération pendant plu- sieurs semaines à la température ordinaire avec des solutions de potasse à 0,2 — 0,D p, 100. Elle a conservé dans ces -conditions la faculté de se gélifier (G, Th. Môrner). L'ébullition avec une solution concentrée de potasse ou de soude donne surtout naissance à de la leucine et à du gljcocoUe, Les solutions de gélatine dissolvent une grande quantité de chaux, et Nasse a pu montrer que la gélatine semblait se combiner aussi à la baryte. C'est ainsi que les solu- tions d'eau de baryte et de gélatine précipitent très incomplètement par l'acide carbo- nique. Action des oxydants. — Le mélange chromique ou le mélange manganique donnent les mêmes produits que lorsqu'ils agissent sur l'albumine ordinaire. Cependant Maly a signalé parmi les produits de l'action du permanganate de po- tasse sur la gélatine, avec fusion subséquente dans la potasse, la formation d'acide benzoïque. Un courant de chlore précipite la gélatine de ses solutions sous la forme de llocons blanchâtres, insolubles dans l'eau et dans l'alcool, renfermant une certaine proportion de chlore (7 à 8 p. 100). Les gélatines présentent, au point de vue de la formation des métaux à l'état colloï- dal un intérêt tout particulier; c'est ainsi que les sels de cuivre sont réduits par les matières organiques, et le métal prend une forme colloïdale soluble. Lidof a pu mon- trer qu'une spirale de cuivre bien décapée plongée dans une solution de loO grammes d'eau, 13 gr. (3 de gélatine et J4 grammes de KOH, perd en 48 jours, 3,54 p. 100 de son poids. Le liquide était déjà violet dès le second jour, et devenait avec le temps de plus en plus foncé. Action des sels. Digestion saline. — Le phénomène de la digestion saline de la gélatine a été découvert et étudié par Dastre et Floresco. La gélatine, bien débarrassée des sels qu'elle peut contenir, mélangée à des solutions de chlorures, iodures, fluorures alcalins ou alcalino-terreux, se gélifie à la température ordinaire, et reste ainsi indé- finiment. Quand on la porte à l'autoclave à 120'', la présence du sel ne change pas les conditions GELATINE. 49 d'altérations. Au contraire, maintenues à l'étuveà 40" pendaiil un ou plusieurs Jours, les solutions salées ne se prennent plus en gele'e et présentent les caractères de la protogéla- tosr. Si la proportion de sel est assez élevée, 10 p. 100, la liquéfaction est déliiiitivc; la (ransforniation de la gélatine eu gélatose est totale, et cela, quelle que soit la propor- tion do 'ébullition très prolongée ou une température très élevée conduisent encore à la gélatine peptone ou à un corps très voisin, la deutérogélatose. La digestion saline de la gélatine a été contestée par C.-Th. Morneh, qui a prétendu que la présence des sels neutres empêchaient, à la vérité, la gélification, mais que la digestion avec les sels ne modifie nullement la gélatine. Réactions de la gélatine. — Les diflérents réactifs des albuminoïdes agissent sur la gélatine de la façon suivante. Nous avons vu que les acides ne précipitent pas la gélatine, sauf le tanin, l'acide trichloracétique, l'acide métaphosphoriqne, l'acide phos- photungstique, l'acide phosphomolybdique, l'acide picrique. Les précipités sont solubles dans un excès de réactif. L'acide métaphosphorique donne dans les solutions de géla- tine ou de gélatose, produit d'hydratation de la gélatine, un précipité renfermant de 0 à 8 p. 100 d'anhydride phosphorique (Lohe,\z). La précipitation par l'acide trichloracé- tique est plus complète que par l'acide métaphosphorique (Obermayer). Enfin le pré- cipité par le tanin renferme environ 34 p. 100 de tanin, et, si l'on a affaire à du tanin d'écorce de chêne, la proportion de substance précipitante s'élève à 42,7 p. 100 (Bottinger). Un certain nombre de sels précipitent la gélatine. La précipitation de la gélatine par les sels est un phénomène tout différent de la gélification. Elle est retardée ou même suspendue par la présence de corps organiques tels que le glucose, le saccharose et surtout l'urée. Parmi les sels qui la précipitent se trouvent lechlorure de platine, le sublimé eh solution chlorhydrique, l'iodomercurate de potassium, l'iodure ioduré de potassium, le sous-acétate de plomb ammoniacal; ces précipités se font suivant les réactions des alcaloïdes et des peptones; ils sont solubles dans un excès de gélatine. Un certain nombre de sels (chlorures de sodium et d'ammonium, azotate de potasse) ou les acides étendus font perdre à la gélatine, en solution aqueuse et tiède, la propriété de se gélifier par refroidissement. Le bichromate de potasse donne à la gélatine une combinaison insoluble consécutive à une oxydation lente. Namias, puis Lumière et Seyewetz ont montré que l'acidité de l'alun de chrome atténue l'action insolubilisante que cette substance exerce sur la gélatine. Le sulfate d'ammoniaque précipite la gélatine, mais la précipitation exige une proportion de sels variable suivant que l'on a affaire à des gélatines plus ou moins chauffées. La gélatine ordinaire précipite avec 12,4 p. 100 de sel. La [gélatine, chauffée jusqu'à perte de sa faculté de gélification, précipite avec 16,9 p. 100, et enfin la gélatine chauffée pendant plusieurs jours exige 19 et 19,8 p. 100 de sulfate d'ammo- niaque pour sa précipitation. L'alun et le sulfate de fer ne donnent de précipité qu'en présence d'alcali et avec formation consécutive d'un sel basique. Le ferrocyanure de po- tassium, le nitrate d'argent, le sulfate de cuivre ne donneraient pas de précipité. Néan- moins le ferrocyanure de K, acétique, précipiterait la gélatine, d'après C. -Tu. Môrxer. Mais ce précipité est soluble dans un excès de réactif, et ia précipitation est d'autant plus facile que les solutions sont moins concentrées. La précipitation peut être diminuée ou em- pêchée par une élévation de température (30°) et la présence des sels neutres. En présence de potasse, la gélatine donne des réactions particulières avec les sels de mercure, d'argent et de cuivre. La gélatine réduit le chlorure mercurique en pré- DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME Vit. ^ 50 GELATINE. sence de potasse avec formation de mercure métallique, lentement à froid et l'apide- ment à chaud. Lidok a obtenu, en chauffant légèrement une solution de gélatine (de même que les autres matières albuminoïdes) avec de l'azotate d'argent et un léger excès de potasse, une coloration brunâtre qui augmente d'intensité jusqu'à ce que le liquide prenne finalement une teinte cannelle foncée. La coloration est d'autant plus intense que le précipité d'oxyde d'ai'gent produit par la potasse est plus faible. L'oxyde d'ar- gent se trouve doue réduit peu à peu à l'état d'argent métallique qui reste dissous. La coloration ne se produit que lorsque la solution de gélatine est conservée dans l'obscu- rité. Des faits analogues se présentent avec le cuivre. Les sels de cuivre réagissent sur une solution alcaline de gélatine, donnent une coloration violette qui disparaît quand on élève la température sous pression dans l'appareil de Lintner en même temps qu'il se dépose du cuivre métallique. A froid, en présence de formaldéhyde, la même réaction se produit, mais demande alors 10 à 15 heures. Le cuivre ainsi précipité n'est pas pur; il renferme environ 92 p. 100 de métal pour 8 p. 100 de matières organiques. C'est un phénomène analogue qui doit se passer dans la réaction du biuret. La réaction du biuret est positive avec la gélatine : on additionne les solutions de son volume environ de potasse, et on y ajoute une goutte d'une solution étendue de sulfate de cuivre. Il se produit une coloration mauve rosâtre qui passe au rouge clair par une ébullition prolongée. Le réactif de Millon précipite la gélatine, mais le précipité ne se colore qu'à peine ou pas du tout à l'ébullition. Étant donné, d'ailleurs, la difficulté que l'on éprouve à obtenir des gélatines complè- tement privées d'albumine, il est fort difficile de savoir exactement quelles sont les réactions particulières de cette gélatine. C'est ainsi que, d'après Krukenberg, la gélatine, obtenue par ébullition d'un tissu conjonctif abandonné depuis longtemps à une macé- ration dans une lessive de soude à 10 p. 100, ne donnerait ni la réaction de Millon, ni la réaction d'ADAiiKiEwicz, ni la réaction à l'acide chlorhydrique. La gélatine et les colles à la dose de 0,00o à 0,1 milligramme s'opposent au virage au bleu, par une solution de NaCl à 1 p. 100, d'une solution colloïdale de chlorure d'or. Composition de la gélatine. — La gélatine renferme une proportion moindre de carbone que les matières albuminoïdes ordinaires. En moyenne sa composition est : Carbone. . , Hydrogène. , Azote , 50 6,6 18,3 Soufre. . . . 0,14 Oxygène. . . 24,96 D'après P. Schutzenberger] et Bourgeois, la formule empirique serait C'^H'^^Az-'^O-^, formule très voisine de celle de l'osséine. La gélatine ne serait qu'un produit d'hydra- tation de la matière collagène. Schutzenberger admet que le soufre que l'on y a trouvé provient d'un certain nombre de substances albuminoïdes qui y sont mélangées. Ham- MARSTEN a prétendu que le soufre faisait partie intégrante de la molécule dans la proportion de 0,06 p. 100. D'après C. Th. Mornek, la quantité de soufre qui a été trouvée, le plus généralement voisine de 0,30 p. 100, serait souvent voisine de 0,25, et il en a conclu qu'il existait des gélatines à un et à deux atomes de soufre. ScHLTZENBERGEii a appliqué sa méthode de l'hydratation par la baryte pour déterminer la constitution des matières collagènes et de la gélatine. Il a pu ainsi déterminer la nature des composés amidés ou imidés moins hydrogénés que les homologues du glyco- colle qui pouvaient se trouver dans ces substances. L'osséine. dédoublée par l'hydrate de baryte à 200°, dégage, sous la forme d'ammo- niaque, le cinquième de l'azote total. Il se forme par la même réaction de l'acide car- bonique et de l'acide oxalique; ces corps, avec l'ammoniaque dégagée, se trouvent dans les rapports de décomposition de l'urée et de l'oxamide. Le liquide, une fois débarrassé de l'ammoniaque libre, par ébullition et par flltration du dépôt d'oxalate et de carbonate de baryte, privé de l'excès de baryte par précipitation avec l'acide sulfurique, retient seulement les principes amidés, fixes ou solubles. Leur ensemble, séché à 120°, soumis GELATINE. 51 ù l'analyse élémentaire, amène à une formule C°H^"Az-0'% n égalant 7,2. Le résidu fixe se laisse diviser par les dissolvants neutres, alcools plus ou moins concentrés, eau, mé- langes d'alcool et d'éther, 1° En acides amidés de la forme G^H-^ + AzU-; ce sont : le glycocoUe C-H'A/(l-, l'aia- nine, C-'H"AzO- (d'après les recherches de Si;h( tze.nberheu, il est probable que la géla- tine fournit les deux moditications de l'alanine), l'acide amido-butyrique C'^H'WzO-, et la leucine ou acide amidocaproïque C^H^'^AzO-. 2° En composés acides homologues, de la forme C"H-"Az'-()', n ayant une valeur comprise entre 8 et 10. D'après les travaux 'anciens et récents de P. SghCtzenberger, la gélatine, ou plutôt l'osséine, est constituée par l'association des composés suivants avec perte d'eau : 1° Une molécule d'urée ou d'oxamide. 2" Deux groupes de la forme C"H2"Az-0''. 3° Quatre groupes C"H-"4-'AzO- (», étant = à 2. 3, 4 et 6 avec une valeur moyenne de 3,5). Si l'osséine est considérée comme un mélange de principes immédiats, dont l'un donne par dédoublement les éléments de l'urée C02+2ÂzH^ et l'autre, ceux de l'oxamide, C-H-0''^+2AzH% on peut représenter la formule de ce corps de la façon suivante : C-^0-(AzH-^)^ + i <-^'H'*A;20=. ) j2(C-H'A;0-.j _ C35H«^A;»«Oi'^ ^ ' ^ |C">H--^«A:;20'\j ^ | 2(C'^H^A;0-.) La formule de l'osséine, déduite du dédoublement, s'accorde d'une manière satisfai- sante avec les résultats analytiques fournis par l'expérience. Les acides de la forme C"H-°AzO' (n = 8, 9, 10) constituent une part importante du produit total du dédoublement. Un les obtient difficilement à l'état pur; il faut pour cela utiliser leur solubilité dans l'alcool absolu froid et dans l'eau; l'opération est fort longue. Ils deviennent par dessiccation des anhydrides de la forme suivante : G" H-^°-2 A:;-0'^ et C-° H'*"-- A^'^O-. L'acide acétique anhydre ne donne [)as à Tébullition de dérivé acétylé; la solution évaporée à 125" donne un résidu de couleur foncée, de poids égal à celui du composé initial. Avec l'iodure d'éthyle en présence d'un alcali, on obtient des dérivés diéthylés, amers, sirupeux, s(dubles dans l'eau et l'alcool. (^haufïés à 33° avec de la poudre de zinc en excès, dans un courant d'hydrogène, ils dégagent un liquide volatil, non oxygéné, mais azoté, d'une odeur spéciale rappelant celle de l'huile animale de Du'Pel. Les caractères de ces produits ont conduit ScHi tzenberger à les considérer comme des bases hydropyroliques (C^HUz,C-^H»Az). On n'en obtient pas trace en traitant de la même manière le glycocolle, la leucine, etc. Il est fort probable que les acides C"H°Az-0^ renferment l'azote sous forme d'imide AzH. P. ScHurzENBERGER Ics cousidèrc comme des anhydrides d'oxyacides plus simples, de la forme G'"H-"'+'AzO\ 2 (G'" H^-^+i A;0-) — H-0 = C-^"» 11'"" Az-0\ Les groupes qui sont liés à l'oxamide en liaison d'amides sont de la forme (^"'H-'"Az20'' (m — 8 à 8,5). Ge sont les glucoprotéines incristallisables que l'on obtient avec la baryte à 100" seulement. Les groupes G'^H^^Az^O'- se scindent à 200" sous l'in- tluence de la baryte, d'après les équations. Cm H2m A--'03 + H^O = G" H'^u+'A^O^ + Cp H^p4-' A;03 (ou u +p==m). et : 2 (Gp R^v+i Ai03) — H-^0 = G'^P H'^p A;^ Q'K La formule de constitution la plus probable pour une glycoprotéine est représentée par l'expression générale : GO-H. G"H-". A;H X G-" H^'". A;ll. Gp I1-p. GU-H. 52 GÉL'ATINE. Elle serait fixée à l'urée ou ii Toxamide par l'un de ses groupes carboxyles CO^H. A 200° le partage se fait par addition d'eau (H, OH) au point marqué par une croix x . CO^H. C"H-». AzH X C"' H-"". AsH. Ci'H^p, CO-H. + H. OH. = C02H. C°H2° AzW- -H OH. C^H^m. A:H. CpH^p CO-^H. Lors de la production des bases hydropyroliques, on aurait : OH. C"»H'-'"A;H.CpH2pC02H = H^O + CO^ + H-' + C'^-i'H^'" r^p-^ A;.H. La constitution de la gélatine ou de l'osséine serait : /A; : (CO. G°H2% A^H C-^H^". A;H. CpH^p. CO^Hr-. ^ ^'\A; : (00. OH2", A;H. C^H^-". A-H.[GpH^p. CO^H)^. D'après Haussman.n entin, l'azote de la gélatine comme celui de toutes les matières albuminoïdes, peut être dédoublé par l'acide chlorbydrique bouillant en trois fractions de grandeurs variables. L'azote amidé ou azote ammoniacal; l'azote des bases précipitables par l'acide phosphoLungstique ou diaminoazole; l'azote fortement combiné, ne se sépa- rant pas sous la forme de produit basique ou monoaminoazote. Les proportions de ces trois variétés d'azote est la suivante pour la gélatine : Azote amidé. . . .Diaminoazole . . ftronoaiainoazote. 1,01 :«,83 G2,56 Produits d'hydratation de la gélatine. — L'bydralation par l'eau donne nais- sance à la gélatine peptone. L'ébullition avec l'eau détermine d'après Hofmeister une peptonisation du produit avec formation de deux gélatines peptones incristalisables distinctes, VhémicoUine et la sémiglatine analogues aux peptones. L'hémicolline est plus soluble dans l'alcool que la sémigluline. Celle-ci précipite par le chlorure de platine, tandis que l'hémicolline ne précipite pas. L'hydrolyse de la gélatine par les alcalis est particulièrement intéressante. Car ainsi que nous l'avons vu, elle donne naissance à des produits dont l'étude éclaire d'une façon toute spéciale la constitution même de la gélatine. P. ScHLTZENBERGER et A. BOURGEOIS ont hydrolysé la gélatine au moyen de l'hydrate de baryte sous pression. Les expériences ont porté sur l'ichtyocolle, l'osséine, la géla- tine, la chondrine des cartilages costaux du veau. En appliquant la méthode générale d'hydrolyse par la baryte à ces cartilages dégraissés à l'éther, on a trouvé les résultats suivants : Nature du dosage. Ichtyocolle. Osséine. Gélatine. Chondrine. Azote de l'ammoniaque dégagée. . 3,47-3,49 3,3.j 2,8 2,88 Acide oxalique 4,1 3,62 3,3 4,2 Acide carbonique 2,5-2,9 3,1 2,12 • 2,4:i Acide acétique 1,5-1,5-1,9 1,44 l,a 4,69 Analyse, /Carbone 44,83 46,26-46,1 45,16 46,9-46,4 élémentaire ) Hydrogène 7,37 7,31-7,6 7,36 70,4-7,10 du mélange j Azote 14,44 14,10 14,30 11,7-11,6 amidé. ( Oxygène 33,36 32.23 33,18 34,36-34,9 Formule déduite de l'analyse : C3.o-u'.'"ijo-.»-- i:^.»» ip.-» iio- c-'.iîOHV.ioijos.oa (;i,076 n^.io jio'.in On peut en conclure que : 1° L'azote dégagé sous forme d'ammoniaque d'une part, et les acides carbonique et oxalique, d'autre part, sont dans des rapports tels que la production simultanée de ces trois corps peut être considérée comme liée à l'hydratation de l'urée et de l'oxamide. — Pour la gélatine et la chondrine, l'accord est presque complet. 2" L'analyse élémentaire du mélange amidé montre que pour la gélatine, l'ichtyo- colle et l'osséine, la composition de ce mélange est à peu près la même. Le rapport d'atomes entre l'azote et l'oxygène est très voisin de 1 : 2; on doit donc s'attendre à n'y trouver que les termes des deux séries C"H-"+'AzO- et GiH-"+*AzO-. GELATINE. 53 Le rapport d'atomes du carbone et de l'hydrogène est presque 1 : 2 : l'azote se partage donc à peu près exactement entre les termes C"H-°+AzO- et ceux C"H-"— 'AzO-. Pour la gélatine, richtyocolle et l'osséine, on a trouvé comme constituants du mélange aniidé : 1° GlvcocoUe C^H3Az02 20-25 p. 100. 2° Alânine C^IH^AzO^. 3° Acide amido-butyrique C^ H» AzO^. 4" Traces d'acide glutamique. 5° Termes de h\ série C" H2"-i AzO- avec n = 4,5 et 6, plus de tiO p. 100. En tenant compte de l'ensemble des résultats trouvés et de la composition initiale de richtyocolle, de l'osséine et de la gélatine, la réaction provoquée par la baryte peut se formuler approximativement, avec de légères variantes quantitatives d'un corps à l'autre, par l'expression suivante : C7GH114 Az2+02!i + i8H^o = C2 H2 0^ + C02 + 0,3 (C2 Hi02; + 4 AzH-i + C^s H'^^^ Az20 O^o. Acide oxalique. Acide acétique. Mélange aniidé. Le mélange aniidé se décompose ainsi : CT2H111 Az20 Oio = 6 (C2H^ Az02| +2C3H' Az02 + 2 (C^H-'AzO^) Glycocolle. Alaniiie. Acide amidobutyrique. + 6 (C* W Az02 + 2 (C3 W Az02 + 2 (G» H'i Az02) Termes de la série amylii|ue. L'hydratation par les acides n'éclaire pas autant la formule de constitution de la gélatine, et Padl est arrivé à des résultats analogues à ceux que donne l'hydratation simple par l'eau, par une hydratation au moyen de l'acide chlorhydrique ; et, en employant la méthode de Raoult, il a trouvé pour les gélatines peptones un poids moléculaire de 152,^tandis que la gélatine répondrait à un poids moléculaire compris entre 878 et 960. L'hydrolyse de la gélatine (Fisher, Leve.ne et Aders) par l'acide chlorhydrique donne naissance à un certain nombre de produits amidés : glycocolle, alanine, leucine, acide aspartique, acide glutamique, phénylalanine, etc. Les proportions obtenues sont : Pour 100 de gélatine sèche : Glycocolle 16.5 Alanine 0,8 Acide pyrrolidonecarbonique. 5,2 Leucine 2,1 Acide glutamique 0,88 Acide aspartique 0.56 Phénylalaniue 0,4 Les acides minéraux en solution étendue donnent naissance avec la gélatine ordi- naire à une lijsine fondant à 192°-i93'', sur la préparation de laquelle nous ne nous éten- drons point ici. Par l'acide chlorhydrique bouillant et l'addition de chlorure stanneux, la gélatine donne naissance à deux bases précipitables par l'acide phosphotungstique, la /i/smeC^H^-'^Az^O- et la h/sUinine C«H"Az30ou C^H'^Az-^O- ; cette dernière, traitée par l'eau de baryte à chaud, fournit par dédoublement de l'urée (Drechsel). Dans leurs recherches sur les groupements hexoniques renfermés dans les diverses matières albuminoïdes, Kossel et Kutsgher ont déterminé de quelle façon semblait se dédoubler la gélatine. La méthode employée consistait, comme pour les matières albu- minoïdes en général, à décomposer de 25 à oO grammes de gélatine par 3 fois son poids d'acide sulfurique concentré et 6 fois son poids d'eau pendant 14 heures à l'ébullition avec réfrigérant à reflux. L'acide sulfurique et les substarjces humiques sont précipités par la baryte ; l'azote humique est déterminé ; l'ammoniaque est éliminée par la magnésie et dosée. L'argynine et l'histidine sont déterminées à l'état de combinaison argentique; il reste enfin la lysine que l'on dose. 54 GELATINE. Les proportions trouvées ont été pour la gélatine : Sur 100 parties d'azote total : Dans riiistidine non déterminé. Dans l'argynine 16,6 Dans la lysine non déterminé. Dans l'ammoniaque.. . 1,4 100 parties de gélatine fmu'nissent : Histidine. peu Argynine 9,3 Lysine 3.6 Ammoniaque U,3 Ces chiffres sont assez suggestifs, à un autre point de vue que celui de SchCtzf.n- BF.RGER, pour permettre de concevoir la nature même de la gélatine. Distillation sèche de la gélatine. — Par distillation sèche, la gélatine donne naissance à des produits analogues à ceux qui se forment lors de la distillation de toutes les substances animales : eau, sels ammoniacaux : carbonates, sulfates et cyaii- hydrates, ammoniaques composées, de la série grasse et de la série aromatique. Au début, ce sont les sels ammoniacaux qui passent, puis des ammoniaques composées avec une certaine proportion d'eau, enfin un liquide oléagineux, l'huile animale de DipPEL, renfermant un certain nombre de dérivés aromatiques, pyridine, lutidine, pico- line, etc., de l'homopyrrol et du méthylpyrrol, enfin du gaz combustible, de l'ammo- niaque et du cyanure d'ammonium. On voit apparaître à la fin de la réaction une masse jaune, épaisse, qui se condense dans les parties froides de l'appareil et qui est formée par un mélange de carbonate et de cyanhydrate d'ammoniaque avec un corps spécial, le pjjrucoHe, qui est un produit de condensation interne de l'acide pyrrol-carbonique et qui se présente sous la forme de petites lamelles brillantes. Putréfaction de la gélatine. — La gélatine est putrescible lorsqu'elle est humide et abandonnée au contact de l'air. La réaction, d'abord acide, devient ensuite alcaline. Les produits sont analogues à ceux qui se forment dans la décomposition bactérienne des albuminoïdes. Signalons en particulier la présence d'une coUidine isolée par Ne.xcki dans les produits delà putréfaction pancréatique de la gélatine. C'est une base, la phé- nyléthylamine C*H*^Az, dont l'existence a été d'ailleurs vérifiée par Spiro, qui, en traitant par l'azotite de sodium les produits d'hydrolyse de la gélatine par l'acide chlor- hydrique, obtient des acides chlorés qu'il transforme en acides libres à l'aide du sodium. On isole ainsi entre autres de l'acide cinnamique dérivant de la phénylalanine par l'intermédiaire probable de l'acide phénylchloropropionique. D'autre part, la phényl- ('■thylamine de Nencki provient aussi de la phénylalanine par perte de C0-. Ces deux faits viennent donc manifestement démontrer la présence d'un groupe de phényla- lanine dans la gélatine. La phényléthylamine accompagne les produits habituels de la digestion pancréatique : acides gras, butyrique, valérianique, etc. Il ne se forme ni indol, ni scatol dans celte putréfaction. Digestion de la gélatine. — La gélatine soumise à l'action des ferments solubles digestifs se transforme rapidement en peptone. A. Fernb.vch et L. Hubert ont montré que l'extrait de malt solubilise la gélatine grâce à la diastase protéolytique qu'il ren- ferme. Mais c'est surtout la digestion pancréatique de la gélatine qui a été étudiée. Il y a tout d'abord une rapide transformation de la substance en gélatine peptone, puis il y a par hydratation avancée de la gélatine formation d'ammoniaque, de gaz carbonique, d'acides gras volatils, d'acides amidés, tels que leucine et glycocolle. La digestion de la gélatine par le suc pancréatique donne ainsi naissance à ce der- nier produit avec un l'endement de 10 pour 100 environ. Ce résultat a été un peu contredit, car Kûh.ne a indiqué que la digestion de la gélatine par la trypsine ne donne naissance ni à de la leucine, ni à de la tyrosine : cependant il a admis que la digestion par les acides, les alcalis, les microrganismes, dédouble la gélatine en donnant naissance à des acides amidés. Enfin Reich-Herzberge a montré que la digestion de la gélatine parla trypsine, pen- GELATINE. Sri daiit 16 à 90 jours, donne naissance à de petites quantités de leurine; la tyrosine faisait toujours défaut. Ce résultat concorde avec ce que nous savons de l'absence complète du groupe tyrosinique dans la molécule de gélatine. La pepsine et le suc gastrique artificiel à 40° dissolvent presque complètement la gélatine. Il ne reste qu'un résidu très faible représentant environ 5,6 p. 100 du produit total, que F. Klug a désigné sous le nom d'apogêlatine, et que Chittenden et Solley ont rangé dans le groupe des antialbumides. La constitution est la suivante : Carbone 48,39 Hydrogène T,50 Azote 14,20 Oxygène et soufre. . 30,09 Cendres 7,2 105,38 Les produits de la digestion sont des gélatoses précipitables par le sulfate d'ammo- niaque et mélangées d'un peu de gélatine peptone non précipitable. Chitïexden et Solley ont en outre séparé les gélatoses en protogélatose qui précipite par saturation par NaCI et l'acide acétique et deutérogélatose non précipitable. Les gélatoses elles-mêmes sont attaquées par la pepsine. P. A. Levene a étudié les quantités de glycocoUe qui prennent naissance par hydro- lyse, avec HCl concentré des gélatoses venant de la digestion. Il a obtenu pour cette substance 16,43 et 16,34, tandis que, pour les protopeptogé- latose, prototryptogélatose et protopapaïogélatose, les nombres ont été respectivement 1S,3G; 17,07; 20,29. Les gélatoses fournissent donc plus de glycocolle que la gélatine. Victor Hexrv et Larguier des Bancels ont recherché quelle était la loi de l'action de la trypsine sur la gélatine et quelle était l'action même des produits de la digestion, et cela par la méthode de V. Henry, par lavaiiation des conductibilités électriques. Pour étudier cette loi il y avait plusieurs questions à se poser : 1° La méthode des conductibilités électriques est-elle suffisamment précise pour per- mettre la comparaison des séries faites à plusieurs heures et jours différents? Les expériences suivantes montrent que la constance des résultats est parfaite. Durée en minutes. 10 20^ 3040 55 12 juin 10 ce. gélatine 5 p. 100 + 1 ce. suc. pane. + 1 ce. kinase 27 46 53 58 6ti 15 — — — — — — .... 28 44 55 60 66 17 — — — — — — .... 27 42 51 .58 65 12 — 10 ce. gélatine 5 p. 100 + 0,5 ec. suc. pane. + 0,5 kinase + 1 ce. eau 19 34 42 49 55 15 juin 10 ce. gélatine 5 p. 100 + 0,5 ce, sue. pane. + 0,5 kinase + 1 ec. eau 22 37 45 53 .59 17 juin 10 ce. gélatine "i p. 100 + 0,5 ce. suc. pane. + 0,5 kinase -|- 1 ce. eau 21 34 44 51 5.5 Les nombres précédents représentent, multipliées par iO'', les variations des conduc- tibilités spécifiques des solutions . La solution de gélatine à o p. 100 a été préparée chaque fois ; le suc pancréatique de chien (suc de sécrétion) a été recueilli le 11 juin et conservé à la glacière. La solution (le kinase a été faite chaque fois avec un extrait sec de muqueuse intestinale -,2 grammes de ce produit sont agités pendant deux heures, avec 100 ce. d'eau distillée et filtrés plu- sieurs fois. Les expériences ont été faites à 44''3. 2° L'activité du ferment reste-l-elle la même pendant toute la durée de l'expérience? L'expérience montre qu'après une heure elle n'a pas changé. Ainsi, si l'on met à digérer 10 ce. de gélatine à 5 p. 100 -|- 1 ce, de suc pancréatique + i ce. de kinase, une heure après on retire de ce mélange 6 ce. et ou ajoute 5 ce. de gélatine à o p. 100 et 1 ce. d'eau; à partir de ce moment, on suit la vitesse de la digestion; on trouve après 10 minutes une variation de la conductibilité de 22. D'autre part, on met à digérer 10 ce. 56 GÉLATINE. de gélatine à îi p. 100 + 0",4 de suc pancréatique + O^.o de kinase + 1 ce. d'eau, on ti'ouve, après dix minutes, une variation de 21. Dans un autre cas identique, les varia- tions ont été 20 et 19. 3° Les produits de la digestion ralentissent la réaction. C'est ainsi que 10 fc. de géla- tine + 1 ce. de suc pancréatique + 1 ce. de kinase sont mis à digérer pendant 4 h. .10; puis on porte à 100° pendant 10 minutes, et on ramène à 44''R. On met en train deux séries. 1°6 ce. du mélange précédent + ."> ce. de gélatine à 5 p. 100 + 0",5 de suc pancréa- tique- -h 0",5 de kinase. 2° 10 ce. de gélatine à o p. 100 + 0'=%"j de suc pancréatique 4- 0<"^,o de kinase + 1 ce. d'un mélange à volume égal de suc pancréatique et de kinase, porté à 100° pendant 10 minutes. Au boutde 10 minutes, la conductibilité spécifique varie, dans la première série, de lo ; dans la deuxième série, de 19. Les mêmes expériences faites trois Jours plus tard, don- nent 16 et 22. Les auteurs ont alors reclierché quelle est la marche de la variation de conductibi- lité qui mesure la digestion. Leurs résultats les ont amenés à rapprocher l'action de la trypsine sur la gélatine de l'action des ferments sur les hydrates de carbone. Ils ont par suite cherché la loi logarithmique du résultat de leurs expériences. Si l'on représente par t la durée, para? la variation de conductibilité électrique au bout du temps ^, par a une constante correspondant à la quantité de gélatine qui se trouve au début, on a une expression dans laquelle k est une constante. La valeur de a a été déduite de plusieurs séries d'expériences; elle est pour 10 ce. de gélatine à 5 p. 100 -f 2 ce. du mélange de suc pancréatique et de kinase = à 70 environ. En posant donc «^=70, nous trouvons pour k les valeurs suivantes : 1» 2" 10 ce. gélatine -\- 1 ce. suc. pane. 10 ce, gélat. + 0,5 ec. suc. pane. + 1 ce. kinase. + 0,5 kinase + 1 ce. eau. A- 0,0137 0,0139 0,0133 0,0131 0,0161 0,0164 0,0148 0,0iri5 Par conséquent : 1° La métliode de conductibilité électrique permet de suivre quan- titativement, avec précision, l'action de la trypsine sur la gélatine. 2° L'activité du ferment reste constante pendant une digestion d'une heure. 3° Les produits de la digestion ralentissent la vitesse de la réaction. 4° La variation de conductibilité électrique pendant la première heure peut être représentée par une loi logarithmique. Enfin un certain nombre de microbes attaquent et digèrent la gélatine par l'inter- médiaire des ferments solubles qu'ils sécrètent. Tels sont les spirilles du fromage, le bacille de Koch, le Tricitoplujton tomiirans, le Micrococcus prodigiosus, le Bactllus pyo- cyaneuSfle Bacillus fluorescens liquefaciens. Ce dernier, par exemple, agit sur la gélatine, à 37°, en donnant d'abord naissance à des albumoses et à des peptones, de la méthyla- mine et de la triméthylamine , de la choline, de la bétaïne, mais sans production de diamine, de phénol, de scatol, d'indol, d'hydrogène sulfuré ou d'autres produits carac- téristiques de la putréfaction: 25 p. 100 au moins de l'azote albuminoïde se transfor- ment en ammoniaque. Action de la gélatine en injection intraveineuse. — Action coagulante de la 12 juin. Durée. 10 ce. gélf + :c 10 min. . . . 27 20 — . . . 46 30 — . . . 53 40 — . . . .■18 15 juin. 10 min. . . . 28 20 — . . . 44 30 — . . . 5.J 40 — . . . 60 /.: .j; 0,021.5 19 0,0223 34 0,0200 42 0,0188 49 0,0222 22 0.0216 37 0,0227 4.J 0,0213 m GELATINE. 57 gélatine sur le sang. — La gélatine injectée dissoute dans un sérum artificiel est éli- minée en nature en grande partie par les urines qui peuvent ainsi acquérir même la propriété de se gélifier par refroidissement (Dastre et Floresco). Le sang des animaux ainsi traités a acquis la propriété remarquable de se coaguler presque instantanémenl. La gélatine exerce son action dans un sens contraire à celui de la peptone et de la pro- peptone. Ces deux substances sont antagonistes, et s'équivalent dans la proportion de 2 de peptone pour 1 de gélatine. Cet efïet coagulant ne semble pas se produire dans le système circulatoire, et l'on ne voit jamais apparaître d'accidents conséculifs à la for- mation de thrombus. Le caillot une fois formé se rétracte bien et laisse exsuder un sérum. Ce sérum peut ensuite, si la quantité de gélatine injectée a été suffisante, se prendre en masse par géli- fication consécutive. Enfin la gélatine exerce son action non seulement in vivo, mais encore in vitro. Les explications que l'on a données de cette propriété coagulante ont été variables suivant les auteurs. Pour Dastre et Floresco, cette action serait due à une propriété spécifique de la gélatine. Camus et Gley admettent que la coagulation du sang par la gélatine est déterminée par l'acidité même de la gélatine, acidité qui serait environ de 0,674 d'HCl p. 100. La gélatine neutralisée par le carbonate de soude a perdu son pou- voir. D'ailleurs Dastre et Floresco ont parfaitement conclu aussi que l'acidité légère de la gélatine pouvait avoir une certaine influence sur le phénomène. Mais, même avec des solutions de gélatine longtemps dialysées et bien débarrassées ainsi de toutes traces d'acide libre, Floresco a obtenu encore des effets coagulants. Zibele, d'autre part, ayant montré que les gélatines commerciales renferment toujours des proportions notables de chaux. Ainsi 100 ce. d'une solution de gélatine à 5 p. 100 renferment 3 centigrammes de calcium sous une forme éminemment absorbable. Cette étude, reprise par Gley et Ri- chaud, a montré que la gélatine neutralisée et décalcifiée ne possède plus aucun pou- voir coagulant, et semble, au contraire, être légèrement anticoagulante. D'après Gley et RiCHAUD, l'action coagulante de la gélatine n'appartient pas en propre à cette substance; mais elle serait toute d'emprunt, due à la fonction acide de la gélatine elle-même et au calcium qu'elle contient. Il n'en reste pourtant pas moins vrai que la gélatine, même acide, injectée dans le sang doit y être neutralisée par le milieu alcalin dans lequel elle se trouve. D'autre part, Dastre et Floresco avaient montré que le sang oxalaté n'est pas coagulé par addition de gélatine ; il est donc bien difficile d'admettre l'action unique de l'acidité et de la , chaux. Carnot, d'autre part, a vu que l'injection de gélatine ne déterminait pas dans le sérum exsudé du caillot une quantité plus grande de Ihrombase. On peut cependant admettre qu'étant donnée la plus grande rapidité de la coagulation du sang gélatine cette thrombase est plus rapidement excrétée par les globules blancs. La gélatine en efl'et exerce une action énergique sur les leucocytes. Metghnikoff a établi que, lorsqu'on injecte quelques centimètres cubes d'une solution de gélatine à 10 p. 100 dans le péri- toine d'un animal, on provoque une forte leucocytose du liquide péritonéal. D'après Carnot, la gélatine détermine une leucocytose intense qui est peut-être accompagnée de phénomènes sécrétoires rapides de thrombase. On a appliqué à la thérapeutique cette propriété coagulante de la gélatine pour provoquer l'hémostase. En Chine et au Japon, cet hémostatique serait employé depuis fort longtemps contre l'épistaxis et les hémonliagies. Hecker, en 1838, et Prlvnder, en 1877, sont les premiers qui appliquèrent en Europe les propriétés hémostatiques de la gélatine. Carnot, en 1896, formula nettement son emploi dans les hémorrhagies rebelles, épistaxisou métrorrhagies, et depuis un certain nombre de cliniciens l'ont appliqué, soit comme hémostatique local (Jayle, Dalché, Laffond, Grellety, Bkrtino, Bar et Keuss, etc.), soit comme hémostatique général (Carnot, Arckhaxgeli, Hevmans). Enfin Lancereaux et Paulesco l'ont appliqué à la cure des anévrismes de l'aorte pour déterminer la forma- tion d'un caillot dans la poche anévrismale. Cette méthode a été appliquée et préconisée par Huchard, etc., et combattue par Dabrokotow, Boinel, Waldo, qui ont constaté l'ap- parition de convulsions tétaniformes. Mais ces accidents sont dus à la présence du bacille de NicoLAÏKR et sont tout à fait indépendantes de l'action physiologique de la gélatine. 58 GELATINE. Celle-ci ne pourrait guère amener que des emliolies capillaires dans les centres ner- veux (Groves). Valeur nutritive de la gélatine. — Denis Papin, le premier, en 1681, soumet les os à l'action de l'eau dans un digesteur afin de les ramollir et de les utiliser pour l'ali- mentation; mais sa tentative échoua grâce aux intrigues de quelques courtisans et la stupide insouciance de Charles II. Hérissant, en 1738, détermina la constitution des os en effectuant une séparation par l'acide azotique et établit la présence d'un [corps albu- mineux, la gélatine. Chauquks, en 177o, montra que la poudre d'os soumise à l'action de l'eau bouillante donne naissance à une gelée savoureuse. Proust, en 1791, a déter- miné la quantité de gelée que pouvait fournir un poids déterminé d'os de différentes origines, et quelles étaient les proportions d'eau les plus favorables à employer suivant les cas. En 1803, Séguin prétendit avoir guéri les lièvres intermittentes par l'emploi de la gélatine des os : une commission nommée par l'Académie des sciences et formée de Berthollet, Desessart, Deyeux, Fourcroy, Halle et Portal, fut chargée de vérifier ces résultats. Ceux-ci au point de vue thérapeutique furent à peu près nuls; mais Halle, dans son rapport, sembla conclure que la gélatine donnée à la dose de six onces (soit 185 grammes) par jour, ne pouvait être regardée comme une nourriture et comme devenant une partie du régime alimentaire. Elle n'avait produit d'ailleurs, même à hautes doses, aucun effet défavorable au point de vue sanitaire. D'Arget, en 1816, rechercha l'action des acides et notamment de l'acide chlorhydrique sur les os. Il arriva aux mêmes résultats qu'HÉRissANT, mais en outre il obtint dans un appareil spécial la préparation pratique de la gélatiue. En 1812, d'ARCEX établit une usine pour l'extraction de la gélatine des os par son procédé et proposa une associa- tion charitable, la Société philanthropique, qui distribuait dans Paris un certain nombre de soupes, de lui vendre cette gélatine pour la faire entrer dans la composition de ces soupes. En 1814, une commission formée de Leroux, Dubois, Pelletan, Duméril et Vau- quelin, nommée par la Faculté de médecine, rechercha si l'on pouvait appliquer la gélatine des os à l'alimentation ainsi que le proposait d'ARCET. Cette commission conclut avec certitude que non seulement la gélatine est nourissante, facile à digérer, mais encore qu'elle est très salubre et ne peut produire par son usage aucun mauvais effet sur l'organisme. La gélatine desséchée et coupée renferme sous un petit volume une grande quantité de matière nutritive. Mise à l'état de tablettes avec une certaine quan- tité de jus de viande et de racines, elle était susceptible de fournir un excellent aliment. D'Arget fils, pendant plus de trente, ans poursuivit ces recherches dans [le but de faire pénétrer plus avant cette notion de la nutribilité par la gélatiue; il fut soutenu parGiRARDiN, Arago, etc. Dans un certain nombre d'hôpitaux et quelques ateliers, comme ceux de la Monnaie, étaient institués des appareils pour la fabrication de la gélatine. L'Académie, de nouveau, nomma une deuxième commission de la gélatine formée par TiiKNARD, d'ARCET, Dumas, Flourens, Serres, Hresghet et Magendie.Co rapport, s'appujant sur des expériences de Donné, Ganxal, Edwards et Balzac, sur celle de la commission elle-même et sur les données antérieures, concluait que la gélatine ne pouvait tenir lieu de viande, qu'elle ne pouvait alimenter les animaux que pendant un temps très court en excitant souvent un dégoût insurmontable. Et lorsque l'on pense la rendre plus agréable par un assaisonnement méthodique, elle ne parvient pas à alimenter. Des conclusions analogues furent données par une commission nommée par la pre- mière classe de l'Institut royal des Pays-Bas et formée par Vrolik, Swart et Von Breda. Enfin, dans une étude entreprise par une dernière commission formée par Chevalier, GiRERT et Bérard, rapporteur, nommé par l'Académie de médecine pour e'clairer les pou- voirs publics dans cette question d'hygiène, le rapporteur Bérard conclut à la valeur très faiblement nutritive de cette substance et ne conseille pas de favoriser le dévelop- pement de cette alimentation. En fait, la labrication de la gélatine alimentaire fut aban- donnée. Et cependant, dès 1832, W. Edwards et Balzac, dans des expériences fort bien faites sur des chiens, avaient montré que la gélatine, insuffisante peut-être pour entre- tenir seule la vie et pour aider au développement des animaux, pouvait néanmoins servir d'aliment pendant un certain temps. D'autre part, les recherches faites dans de bonnes conditions sur l'homme par des expérimentateurs comme Donné et Gannal, ainsi que la GELATINE. 59 pratique de chaque jour où la gélatine est employée comme aliment, avaient montré que la gélatine possède de réelles propriétés nutritives. En 1870, lors du siège de Paris, quel- ques personnes atténuèrent l'horreur de la famine par l'emploi de la gélatine, et Gukrard, en 1871, publiait un travail récapitulant les faits antérieurs et apportant un certain nombre d'observations nouvelles favorables à l'emploi de la gélatine comme aliment. Ce sont enfin les expériences de Bischoff et Voit, et celles de Voit, qui ont montré la valeur nutritive réelle de la gélatine. D'après Voit, elles constituent une substance nutritive {nâhrenci), mais non nourrissante {nahrhaft). En résumé, la gélatine ne peut pas rempla- cer entièrement l'albumine de l'alimentation quelle que soit la quantité de gélatine absorbée. L'élimination d'urée est de plus en plus élevée, mais l'animal perd néanmoins encore une certaine quantité d'albumine propre. Pourtant, associée à l'albumine, elle peut suppléer à cette dernière dans une grande porportion. Voit avait pris par exemple un chien de 32 kilos que l'on avait maintenu aussi exac- tement que possible en équilibre azoté au moyen d'une alimentation formée de 'iOO grammes de viande. Si l'on remplace 100 grammes de cet aliment par 200 grammes de gélatine, on obtient un bénéfice de 44 grammes de muscle. Si au contraire on remplace les 100 grammes de viande par 200 grammes de graisse ou 2o0 grammes d'amidon, on constate une perte d'azote représentant une diminution du poids des muscles de oO et de 39 grammes. Un certain nombre d'autres expériences de Voit viennent encore confirmer le même fait. Si l'on donne à un chien les quantités suivantes de viande et de gélatine, on constate aussi les pertes ou les augmentations de poids suivants : Expt'rionoos. 1 i Alimentation en vianilo. 500 .'IOO 2 000 2 000 200 200 200 0 Alimentation Perte (-) en ou augmentation (+) gélatine. (le poids. 0 22 200 + •■A 0 + 30 200 +:n;i 200 — 118 300 — 82 200 4- 25 200 —lis Dans la première expérience, on voit par exemple qu'un chien qui reçoit en 24 heures 500 grammes de viande en détruit :i22 ; il perd donc 22 grammes; mais, si à ces 500 grammes de viande on incorpore 200 grammes de gélatine, il n'y a plus qu'une des- truction de 440 grammes, soit un bénéfice de 54 grammes. La gélatine provoque donc l'épargne de l'albumine. Ces résultats ont e'té encore confirmés par Munk. Il en résulte que dans les calculs de thermogénèse la gélatine doit être comptée comme albumine ordinaire et peut pra- tiquement en remplacer une partie. Bibliographie. ^ Anderson. P/esence of tétanos; in commercial gélatine. 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Payem (1859) l'a extraite d'abord de l'algue de Java {Gehelium cor- neum L.), puis d'une algue de l'ile Mauiice [Phearia lichcnoïdes) ; on l'extrait quelquefois d'une algue qu'on trouve dans l'Atlantique [Chondrus crispus Lyngb.).Ce dernier produit, connu sous le nom de mousse d'Irlande, est employé à la confection des gelées com- merciales. MiQUEL a eu, le premier, l'idée d'employer cette substance à la préparation des cultures microbiennes sur milieux solides [Annuaire de l'Observât, de Mont- souris, 188o, 467). Mais, le plus souvent, le produit que l'on emploie en bactériologie, c'est la gélose de l'algue de ia.y a. [Gehelium corneum, ouGelidium spiniforme Lamx), connue dans le com- merce sous lenomd'AgarAgar, et préparée à l'état de pureté relative d'abord parPAYE.N. La gélose, préparée par dissolution dans l'eau bouillante, se prend, par le refroidis- sement, en une gelée qui solidifie environ cinq cents fois son poids d'eau pure, dix fois plus qu'une gelée animale. Elle est insoluble dans les acides, dans l'eau froide, dans l'éther. (C = 42. 77. H = 5. 77. 0 = 51.45.) Chauffée en solution légèrement acide à l'ébuUition, elle ne se prend plus en gelée par refroidissement. Chauffée à lo0°-160o avec de l'eau, elle donne un produit lévogyre à pouvoir réducteur (Porumbaru, 1880). D'après Baueu, l'agar-agar chauffé avec l'acide sulfurique étendu donne du galactose. Voici comment Macé a indiqué le mode de préparation de la gélose pour cultures microbiennes [Ann. de l'Institut Pasteur, 1887, 1, 1889). « 10 grammes du produit commer- cial sont mis, après avoir été coupés en petits fragments, à macérer dans un demi-litre d'eau acidulée d'acide chlorhydri(jue à 6 p. 100. On laisse en contact vingt-quatre heures ; en agitant. On lave à grande eau, pour enlever toute trace d'acide. L'algue, déjà gonflée, est alors mise dans de l'eau (500 ce.) additionnée de 5 p. 100 d'ammoniaque; et, au bout de vingt-quatre heures, on la retire. Alors on met les fragments gonflés dans 450 grammes d'eau distillée, et on fait bouillir à feu nu. L'algue se dissout entièrement. On a soin que le liquide soit exactement neutralisé. On filtre à chaud, et le liquide, par refroidissement, se prend en une gelée transparente. » C'est cette gelée qu'on utilise pour les cultures. Si l'on veut avoir une culture nutri- tive, on incorpore au liquide 2 à 3 grammes p. 100 de peptone pure. L'addition de glycérine en proportions variant entre 1 et 5 p. 100 donne à celle gelée des propriétés nutritives très marquées. Nocard et Roux ont montré que cette gélose glycérinée était spécialement favorable à la culture des bacilles tuberculeux. On ajoute parfois un peu dégomme arabique, pour permettre à la gelée d'adhérer aux parois du vase. La gélose (sans glycéiine) commence à fondre vers 70° et 75°. A 80°, elle est visqueuse, et ne devient franchement liquide qu'à 85" et 90". Par refroidissement, elle se solidifie vers 90" (Macé). GELSÉMINE. GELSÉMININE. — Préparation. Propriétés chimiques. — Nous réunirons dans la même étude l'histoire de ces deux alcaloïdes, très voisins. Quant à l'acide gelséminique, il est probable qu'il est identique à l'esculine (So.nnenschein). Le Gelsemium sempervirens Ait. ou jasmin sauvage, a été employé en Amérique depuis pRŒTER (1852), pour la guérison de diverses maladies, et notamment des névralgies faciales. En 1870, Wormley put, dans l'extrait aqueux de la racine de celte plante, isoler GELSEMINE. G ELS E M I N I N E. «3 im alcaloïilo qu'il appela geiséniine. Il employait à cet ell'et la méthode elassi(|iie de l'extraction par l'éther en solution alcaline. Fredic.re put extraire ainsi 0,40 p. 100 de gelséinine des racines de la plante. SoNNENSGHEiN (D. chem. Gea., 1876, 1182) prépara la gelsémine de la manière sui- vante : élimination de l'esculine par l'acétate de plomb ; puis addition de potasse qui donne un précipité. Ce précipité, redissous dans l'acide chlorhydrique, est de nouveau précipité par la potasse en présence de chloroforme, qui dissout l'alcaloïde. Le chlorhy- drate, d'après Sonnenschein, aurait pour formule (C"H'''AzO-) -IICI. Mais c'est surtout (ierrard qui prépara à l'état de pureté la gelsémine (1883). La racine est épuisée par l'alcool; le liquide se sépare en deux couches qu'on acidilie après que les matières résineuses ont été précipitées par l'eau. L'addition d'ammoniaque et d'éther fait que l'alcaloïde mis en liberté se dissout dans l'éther. La dissolution éthérée, tluorescente, est traite'e par l'acide chlorhydrique qui précipite l'esculine. Le chlorhydrate de gelsémine, après évaporalion de l'éther, est repris par l'alcool bouillant, qui le dissout, et dans lequel il cristalline par refroidissement. Les sels de gelsémine, ainsi obtenus, précipitent par l'acide picrique en petits cristaux verdàtres. Avec l'acide sulfurique et le bichromate de potasse ils donnent une belle couleur rouge qui passe au vert. Il y a des chlorures doubles d'or et de platine. La formule serait, d'après Gerrard, C*^H'''-AzO'-. Thompson, en 1887 (cité par Gushny), reprit la préparation et l'analyse de la gelsémine, et donna la formule C-'''^H'''JAz*0'- (HCl)^. Il put vérifier par des preuves chimiques l'bypo- thèse formulée déjà en 1876 par Ringer et Murrell, qu'il y a deux alcaloïdes dans le Gelsemium, une gelsémine brute, et une gelsémine cristallisée, qu'on sépare par des dis- solutions fractionnées dans l'éther. CusHNY et Spiegel ont repris cette étude ; et nous conviendrons d'appeler, avec Cush.nv, gelsémine, la base qui cristallise facilement, et gelséminine la base amoi'phe, plus ou moins identique à l'alcaloïde décrit par Gerrard et Thompson. La gelsémine aurait pour formule G''''He\\z^O»^ (HCI)-; et la gelséminine G^H'^'Az'O'* (HClPtCF). 11 convient de dire que, d'après Spiegel (cité par Burker, Dtct. W., 2Suppl., iv, 671), la gelséminine, qu'il n'a pas obtenu cristallisée plus que Gushny, autrement qu'à l'état de chloroplatinate, aurait pour formule G^sH^^Az^O^ ou G^^H^^Az^O''. Au point de vue chimique, la différence essentielle entre la gelsémine et la gelséminine, c'est que la gelsémine cristallise dans l'eau très facilement, en cristaux fusibles à 45°, qu'elle donne un chloroplatinate et un sulfate cristallisables, alors que la gelséminine est amorphe, et que son sulfate comme son chloroplatinate sont incristallisables. D'ailleurs la plupart des auteurs qui ont précédé Gushny ont expérimenté avec un n)élauge des deux alcaloïdes qui n'avaient pas été séparés. Effets physiologiques des deux alcaloïdes, gelsémine et gelséminine. — l. Action sur les centres nerveux. — L'elfet caractéristique de la gelsémine est de produire un tétanos qui ressemble au tétanos strychnique. Les grenouilles, les lapins, les chiens (Houch) sont pris de convulsions tétaniques. An milieu de ces convulsions, moins fortes que les convulsions strycbniques, le cœur est à peu près indemne, et la mort sui vient par arrêt respiratoire. 11 semble donc que, par certains côtés, le tableau soit celui de l'intoxication curarique ; par d'autres, celui de l'intoxication strychnique. Aussi les expérimentateurs ont ils comparé, tantôt au type curarique, tantôt au type strychnique l'empoisonnement par la gelsémine. On conçoit la difficulté de cette étude; car, malgré d'apparentes différences très écla- tantes, au fond le curare et la strychnine se ressemblent beaucoup dans leurs effets physiologiques. Le curare à très faible dose produit de petites convulsions fibrillaires qui se généralisent. La strychnine à très forte dose agit comme un curarisant sur les gre- nouilles (Martin Magron), et sur les animaux à sang chaud (Gh. Richet, 1882). 11 paraît probable, d'après la lecture des travaux, un peu confus, qui ont été écrits avant le mémoire de Gushny, qu'à dose modérée il n'y a pas d'àction paralysante sur les terminaisons motrices. Les nerfs ont gardé leur excitabilité; les muscles naturellement ne sont pas atteints par le poison, de sorte que les phénomènes paralytiques qui sur- viennent alors doivent être attribués à la paralysie du système nerveux central qui ordonne les mouvements musculaires (Rouch). (U GELSEMINE. G ELSEM I N I N E. Cette paralysie centrale, admise imr Ri.ncer et Murrell, Ott, Berger, Putzeys et KoMiÉE, n'est aucunement en contradiction avec le fait qu'il y a des convulsions. C'est le propre de toute substance convulsive, de produire, après la convulsion, ou quand la dose est plus forte, des phénomènes de paralysie. La paralysie des centres nerveux est la cause de la moit; car dès le début la res- piration est atteinte dans son rythme et son amplitude. Finalement elle se ralentit, devient insuffisante, et l'animal meurt asphyxié (Putzeys et Romiée). Aussi la respiration artificielle prolonge-t-elle la vie des animaux empoisonnés (chien et lapin), même après qu'on a donné d'énormes doses (Berger). D'après Moritz, le poison agirait d'abord sur les fonctions sensitives conductrices de la moelle. Les réflexes ne sont d'abord exaltés qu'en apparence; car, si les excitations provoquent des phénomènes à demi convulsifs, il faut remarquer que ces excitations, pour être efficaces, doivent être plus intenses que sur l'animal normal. Berger a appelé l'attention sur les phénomènes psychiques qui surviennent dès le début. L'animal (grenouille) est paresseux, peu sensible; plus lent à se mouvoir, inca- pable même, dit-il, de se mettre spontanément en mouvement. Les lapins, après avoir reçu de 0,08 à 0,3 d'extrait, ont une courte période d'irritabilité excito-motrice accrue; ils ont des tremblements, du frisson; des mouvements cloniques des extrémités anté- rieures; puis la tête retombe presque paralysée, et ils sont dans un état d'inertie com- plète. Ce n'est que plus tard que la respiration se modifie et devient dyspnéique. Ainsi il ressort de ces faits que la gelsémine est beaucoup moins convulsivante que la strychnine. En injectant de la strychnine à dose convenable, l'effet convulsivant est primitif; la convulsion est violente et prolongée; et elle recommence, si l'asphyxie n'a pas amené la mort du cœur. Avec la gelsémine la convulsion est courte, et, quelle que soit la dose, suivie d'une période de paralysie. On peut presque dire que, par ses effets excitants, puis déprimants, la gelsémine est un poison placé à égale distance de la strychnine et du curare, constituant le poison de transition entre ces deux poisons types. Quant à l'excitabilité musculaire directe, la plupart des auteurs pensent qu'elle n'est pas modifiée. Bufalini cependant estime qu'elle diminue notablement; mais il est diffi- cile de séparer dans cette expérience la part des terminaisons motrices nerveuses intra- musculaires et celle des fibres musculaires proprement dites. Action sur le cœur et la pression artérielle. — La gelsémine fait baisser la pression artérielle. Tous les auteurs sont d'accord sur le fait. Rouch dit que le cœur du chien devient tellement faible qu'il donne des tracés hémométriques comparables à ceux que donne le cœur du lapin. Il a vu de grands abaissements de pression presque à zéro, suivis bientôt de relèvements considérables, mais toujours inférieurs au niveau de la pression normale. Il dit aussi que, dans ce cas, les courbes de Traube Bering sont très manifestes. Quant à l'action du pneumogastrique sur le cœur. Berger et Ott ont constaté que ce nerf est excité, ce qui fait que le cœur se ralentit. Pourtant Rouch a noté, après une période extrêmement passagère de ralentissement, une accélération considérable. D'après lui, le pneumogastrique est paralysé ou épuisé dans ses plaques terminales des ganglions modérateurs. Pltzeys et Romiée ont aussi admis que la gelsénine porte son action sur les terminaisons du nerf vague dans le cœur. D'après Rouch, „chez le lapin ou le chien empoisonné par le gelsémine, on ne produit jamais l'arrêt du cœur, par l'exci- tation électrique du bout périphérique du nerf vague. « Au moment de la période as- phyxique, l'action électrique, môme des plus forts courants, est à peu près nulle sur le nerf modérateur. Chez le lapin même, j'ai pu voir l'inexcitabilité complète dix minutes après le début de l'injection. » Si plus tard le cœur se ralentit, c'est que les ganglions excito-moteurs sont, eux aussi, paralysés à leur tour, après pai'alysie des ganglions modérateurs. En même temps que cette dépression artérielle, on observe toujours un abaissement, plus ou moins marqué, de la température. Enfin il faut noter un effet mydriatique très net qu'on observe même en instillant dans l'œil quelques gouttes d'une solution diluée de gelsémine. Dose toxique. — Mokitz h étudié avec soin la dose toxique de la gelsémine^ Seule- GELSEMINE. GELSEMININE. 65 ment, comme il expérimentait avec le mélange de gelsémine et de gelséminine, ses chiffres ne méritent pas d'être retenus, après les expériences ^lus précises de CusHiNy. Voici les doses toxiques qu'il donne pour 1 000 grammes de lapin (en chlorhydrate de gelsémine). 'oids de clilorhydrate Début Fin Durée en milligrammes. des accidents. des accidents. de la survii 0,35 13' 47' oo 0,238 il' 37' oo 0,175 9' 43' oo 0,238 4' 35' oo 0,-238 5' 38' oo 0,375 8' 49' oo 0,500 7' 132' oo 0,600 8' .. 85' 0,750 10' » 41' 1,630 8' » 21' 2,000 2' » 13' 3,720 3' » 15' 8,150 6' » 20' Action différenciée de la gelsémine et de la gelséminine. — C'est à Cushny, qui le premier a bien distingué ces deux alcaloïdes, que nous emprunterons tous les détails qui vont suivre. La gelsémine (cristallisable) est peu active : il faut injecter jusque à 0,01 à une gre- nouille pour observer un effet quelconque. Cet effet est toujours une augmentation d'excitabilité rétlexe de la moelle. A cette faible dose l'animal ne meurt pas. Si la dose est plus forte, on observe tous les symptômes de l'empoisonnement curarique; mais cette paralysie est précédée d'une période convulsive strychnique. Dans l'ensemble, la plupart des phénomènes observés par les auteurs précédents peuvent assez exactement s'appliquer à la gelsémine. La gelséminine (base incristallisable) est beaucoup plus toxique. A 0,001, sur la gre- nouille, on voit un état de narcotisation générale avec tremblement de la tête et du tronc, et modification du rythme respiratoire. A 0,002 ou 0,003, la narcose est plus profonde; l'animal ne peut pas faire des mouvements spontanés. Le cœur continue à battre. Mais parfois des doses de 0,002 peuvent amener la mort. Des doses de 0,005 sont toujours mortelles. Chez les homéothermes, la gelséminine est encore plus toxique. Un lapin de 2 kilo- grammes est tué par une dose de 0,001. On observe le curieux phénomène, déjà con- staté par les autres expérimentateurs, de la tête qui tremble et tombe en s'affaissant sur la poitrine. Les respirations sont profondément modifiées et présentent le type de la respiration périodique, dite de Cheyxe Stokes. Finalement les respirations s'arrêtent, et la mort survient par une graduelle asphyxie due à l'insuffisance respiratoire pro- gressive. Aussi la respiration artificielle permet-elle de prolonger la vie des animaux. La pupille est dilatée, et il y a une paralysie de l'accommodation qui dure longtemps, voire même plusieurs jours, après l'instillation de gelséminine dans la conjonctive. L'absorption par cette voie est tellement rapide que souvent (sur le lapin) la mort arrive avant qu'on n'ait pu observer la dilatation pupillaire. Cushny admet que la gelséminine ressemble beaucoup, comme action physiologique, à la couine, tandis que l'action de la gelsémine ressemblerait à celle de la strychnine. Applications médicales. — Etant données ces propriétés physiologiques, il est assez difficile de voir quelles pourraient être les applications médicales du G. sempervirens et de ses alcaloïdes. On a proposé de l'employer contre les névralgies; mais il ne semble pas qu'on ait pu en constater d'une manière régulière les bons effets. C'est un mydria- tique trop lent à agir pour qu'il puisse remplacer la belladone. Et quant aux effets antipyrétiques, rien n'autorise à les supposer. D'ailleurs, la gelsémine est assez toxique pour n'être employée qu'à doses faibles. Fronm^ller (cité par Spiegel) a vu, après 0,6 de chlorhydrate, de la mydriase et de la céphalalgie. On donna alors encore 0,3; et il survint des accidents graves : arrêts respi- DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. •^ 66 GENERATION. ratoires, trismus, état syncopal, perte de conscience. Il fallut faire la respiration arti- ficielle pour prévenir une terminaison fatale. Dans d'autres cas, moins graves, il y eut des vomissements, de la salivation, un état semi-comateux, avec vertiges, diplopie, troubles prolongés de l'accommodation. Tout compte fait, ni la gelsémine, ni la gelséminine ne paraissent devoir être employées en thérapeutique. Bibliographie. — Bufalini. Sop7'a iina modificacione del ritmo cardiaco per l'azione délia gehemina {Boll. d. Soc. tr. L cuit. d. se. med. Siena, 1884, ii, 62). — Bufalini. Decorso dell'eccibilita muscolare in alcuni awelenamenti acutissiml [Boll. d. Soc. tra i cuit. d. se. med. Siena, in, fasc. 5, tir. à p., 9-11, 1885). — Cushny. Die wirksamen Bes- tandtheile des Gelsemium sempervirens (A, P. P., 1892, xxxi, 49-68). — Bobo. Empoison- nement par le G. sempervirens {N. Y. med. Joiirn., 1899, 752. V. aussi Jepson. Brit. med. Journ., (2), 1891, 644; Nankiwell. Lancet, (1), 1897, 1663). — Jiirasz (A.). G. sem- pervirens als antineuralgisches Miltel. (C. W., 187o, 513-515). — Lapon (Ph.). De la toxi- cologie en Allemagne et en Russie [Arch. des Miss, scient, et litt., (3), xui, 1885, 20-22). — MoRiTz (M.). Ueber einige Pràparate des G. sempervirens (A. A. P., xi, 1879, 299-308 et D. Zeitsch. f. pract. Med., 1878, 11 et 12). — Pradel. Étude sur le G. sempervirens au point de vue botanique, chimique, physiologique et thérapeutique {Diss., Montpellier, 1884). — PuTZEYS et RoMiÉE (H.). Action physiol. de la gelsémine [Mém-. de VAcad. de Belgique, xxviii, 1878, 1-80). — Rehfuss. G. and its reputed antidotes icith experiments and collection of cases of poisoning [Ther. Gaz., 1885, 655-666). — RoucH. De l'action physiologique du G. sempervirens {B. B., 1882, 770-786). — Ruth (P.). Ueber die Wirkung einiger Gelse- mium-Verbindungen auf Kaltbluter [D. Berlin, 1896). — Schwarz. Die forensische Chemie. Nachiveiss des Gelsemins (D. Dorpat, 1882). — Spiegel. Gelsemium [Enc. der Thérapie, 1898, 11, 445-446). — TwEEDY. On the mydriatic and other topical effects of the application of gelsemina to the human eye {Lancet, 1877, (1), n° 23). — Witehead. A study of the action of G. upon the nuclei of the motor cérébral nerves [N. Y. med. Journ., 1900, lxxii, 267). — Berger (0.). Zur physiologischen und therapeutischen Wûrdigung des G. sempervirens (C. W., 1875, 721-725; 737-739). GLOBULES. — Voyez Hématies. GÉNÉRATION (generatiO; yévsaiç). — Production d'un élément ana tomique, d'une cellule ou d'un organisme. Pendant longtemps, on admettait que cette production pouvait se faire de toutes pièces dans un milieu organique ou inorganique. (Voir Génération spontanée, p. 73.) Aujourd'hui, on sait que toute génération s'effectue aux dépens d'une cellule ou d'un organisme préexistants. Tous les êtres vivants naissent, s'accroissent, acquièrent une forme et une taille déterminées (état adulte), qu'ils conservent un temps variable; puis ils déclinent et meurent. De tout temps, on s'est préoccupé du mode de formation des êtres jeunes qui rem- placent ceux qui sont sur le point de disparaître. Il est d'observation vulgaire que, chez les êtres les plus perfectionnés, le concours de deux organismes de sexe différent est nécessaire pour le développement d'un nouvel individu, et, malgré les mystères qui entouraient le processus, on le désignait sous le nom de génération sexuelle. (Voir Fécondation.) Donc, chez les êtres à organisation élevée, un nouvel individu ne peut prendre nais- sance que dans les conditions suivantes : deux cellules ou fractions de cellules de pro- venance distincte se réunissent et constituent une masse protoplasmique pour ainsi dire renforcée ou rajeunie. Dans son développement ultérieur, cette masse ou élément fécondée se divise et produit des milliers de cellules qui, par leurs différenciations et leurs élaborations, constituent les tissus et les organes du nouvel être. Or il existe de nombreux organismes, animaux et végétaux, qui non seulement s'accroissent par divi- sion cellulaire, mais qui ont la faculté de produire des masses cellulaires ou bourgeons capables de se transformer chacun en un être semblable à celui dont il procède. C'est là la génération agame ou asexuée qui, comme on le voit, n'est que l'exagération GENERATION. 67 locale de l'hyperplasie cellulaire, suivie de la différenciation des éléments qui sont capables de constituer un individu distinct. Il convient, par conséquent, de commencer par la génération des cellules et des tissus et d'examiner, en second lieu, les divers modes de multiplication des individus par voie agame ou asexuée. I. Génération des éléments anatomiques et des tissus. — Avant l'avènement de la théorie cellulaire, on avait émis toutes sortes d'hypothèses en ce qui concerne le développement des tissus. Pour les uns (Ruysch), c'était le tube qui produisait tous les organes; pour les autres, c'était la fibre pleine (Haller); pour d'autres, c'était le globule; pour d'autres encore, la vésicule, etc. ScHvvANN démontra le premier, vers 1838, l'unité de composition des animaux et des végétau.x, qui sont, à l'origine, formés par des parties élémentaires, ou cellides. A partir de cette époque, on songea à rechercher la filiation des éléments anatomiques et le mode de génération des cellules, des fibres et des substances fondamentales ou amorphes. Les premiers résultais ne furent guère satisfaisants, ce qui n'étonnera guère ceux qui songent aux moyens d'investigation dont disposaient alors les micrographes. On examinait à l'état frais, après dissociation, et on n'employait guère que la glycérine, l'acide acétique ou la potasse pour rendre les objets transparents. Les cellules paraissaient réunies entre elles par une substance organisée (cytoblastème, blastème, pXâ(Txr)[jLa, bour- geon). En étudiant les tissus en voie d'accroissement, on croyait voir apparaître dans ce brastème des granulations (nucléoles); le nucléole lui-même s'entourait d'un corps sphé- rique ou lenticulaire (noyau), et, autour du noyau, le blastème, d'abord commun, finis- sait par se partager en autant de corps cellulaires qu'il existait de noyaux. Telle est la théorie de la formation libre ou genèse des cellules aux dépens d'une substance organisable, produite par une sorte d'excrétion des cellules ou des éléments préexistants. Les recherches embryologiques semblaient plaider en faveur de cette doc- trine. Dès que la tête du spermatozoïde avait pénétré dans l'œuf, le noyau de l'œuf et la tête du spermatozoïde disparaissaient à la vue ; ils semblaient se dissoudre, et, aux dépens de cette nouvelle substance, serait né, par formation libre, le premier noyau du nouvel être (noyau vitellin). Un phénomène moléculaire spécial aurait présidé à la genèse du nouveau noyau, dont la substance ne procédait pas directement des noyaux maternel ou paternel. La dissolution ou disparition du noyau ovulaire et de la tête du spermatozoïde n'est qu'une appai-ence; en réalité (voir Fécondation, v, 242), si l'on fixe et colore les œufs fécondés, on peut suivre toutes les phases du rapprochement et de la jonction du noyau ovulaire et du noyau mâle ou tête du spermatozoïde. La cellule fécondée résulte, par conséquent, de l'union des deux fractions de cellules qui dérivent directement de la substance maternelle et paternelle. Les autres exemples qu'on a invoqués en faveur de la genèse sont passibles du même reproche. Je me borne à citer les suivants : 1" développement des premières cellules dans l'œuf fécondé des insectes (Wkiss.mann, 1864); 2° apparition de noyaux, par forma- tion libre, dans le sac embryonnaire des Phanérogames ou dans le développement des spores (Sachs, 1874); 3° formation du tissu cicatriciel dans un blastème amorphe (Arnold, 1869). Grâce aux moyens d'observation dont nous disposons, nous pouvons aujourd'hui, d'autre part, affirmer que tout noyau procède d'un noyau préexistant, et que toute nouvelle cellule descend d'une cellule antérieure (Voir Cellule, ii, p. 523). La génération des éléments figurés ou amorphes aux dépens de la cellule compi'end les divers modes de sécrétion, d! élahoration ou de différenciation qu'on observe dans le corps cellulaire, ou cytoplasina. Dans le cytoplasma des cellules glandulaires apparaissent des granulations ou des substances liquides qui contribuent à former les produits de sécrétion. Ailleurs, le protoplasma uniformément granuleux se dispose en lames ou fila- ments anastomosés entre lesquels se produit un protoplasma transparent. Les uns regardent ce protoplasma transparent comme un produit extracellulaire, une excrétion ou substance amorphe; les autres le considèrent comme faisant partie du corps cellu- laire au même titre que le protoplasma ^^^ranuleux. Mais, quel que soit le nom qu'on 6S GENERATION. impose à ce protoplasma transparent {hyaJoplasma, hyalome ou substance fondamentale), on le voit évoluer : tantôt il se fluidifie, tantôt sa consistance augmente, ou il y apparaît des fibres dont la forme et les réactions varient avec l'âge, le tissu ou l'animal. En un mot, il convient d'admettre, an point de vue de la génération des éléments anatomiques : 1° la formation des cellules nouvelles par division du protoplasma des cellules préexistantes; 2° la production d'éle'ments amorphes ou figurés aux dépens du protoplasma transformé ou ailoplasma. (Voir Cellule, ii, p. 537 et suivantes.) C'est donc par division cellulaire que prennent naissance les jeunes cellules; mais, chez les organismes supérieurs, un grand nombre de cellules ne persistent pas sous cette forme, pour ainsi dire, primitive. Le protoplasma de nombre de cellules se transforme en produits soit amorphes, soit figurés, contribuant à l'accroissement, à la consolidation ou à la mobilité de l'organisme. II. Génération des individus ou organismes entiers. — La génération des indi- vidus se fait par voie sexuée [amphigonie) (voir Fécondation) ou par voie asexuée {mono- Qonie). On distingue les modes suivants de génération asexuée ou monogonie : 1° division simple ou scission; 2° segmentation ; 3" bourgeonnement ; 4" scissiparité ou fissiparité ; 5" alternance régidière de générations sexuée et asexuée. Quelques exemples choisis dans divers groupes végétaux et animaux montreront en quoi consistent ces modes de reproduction et permettront de juger de la valeur qu'il faut accorder aux subdivisions sus-mentionnées. A. Végétaux. — On observe chez les algues et les champignons, à côté de la repro- duction sexuée, de nombreux faits de génération agame (multiplication par spores). Dans les Bactériacées, certaines cellules concentrent leur matière protoplasmique, puis l'enveloppent d'une membrane; c'est la spore qui germe au bout d'un temps variable. Chez les Floridées, il se forme des spores dont chacune germe et produit directement une nouvelle plante. « Tous les champignons produisent des spores, c'est-à-dire des boutures, ordinairement unicellulaires, parfois cloisonnées, qui, en germant, reconstituent directement un nou- veau thalle sporifère » (Belzung, loc. cit., p. 1143). Souvent, chez les algues et les champignons, on observe une alternance de généra- tions dont l'une se reproduit par spores, et l'autre, par des œufs fécondés. La fougère adulte produit à la face inférieure de ses feuilles des amas de cellules ou spoi'es qui, à la maturité, sont disséminées sur le sol. Après une période de repos, chaque spore germe, c'est-à-dire se divise et produit une petite lame verte, cordiforme ou réni- forme, d'environ un demi-centimètre de longueur, fixée à la terre par des poils absor- bants. On donne à cette lame verte, munie de ses poils absorbants, le nom de prothalle. A sa face inférieure se produisent des cellules, les unes ciliées et mobiles {anthérozoïdes], les autres fixes {oosphère). Quand les anthérozoïdes parviennent au contact de l'oosphère, il en est un qui y pénètre et constitue, avec l'oosphère, Vœuf fécondé. Cet œuf se développe en une nouvelle fougère végétative. Donc, dans les conditions ordinaires, les fougères présentent deux générations qui se succèdent et alternent régulièrement : l'une est végétative asexuée, et l'autre sexuée. Cependant, quand les conditions ambiantes sont défavorables, le prothalle asexué ne produit ni anthérozoïdes, ni oosphère; il se met à s'accroître par bourgeonnement local et se transforme directement en une fougère végétative (Belzung). Les spores qu'émet la fougère adulte ne sont, en somme, que des boutures unicellu- laires. En germant, chaque bouture produit un être transitoire et indépendant, qui engendre les éléments sexuels donnant, parleur union, naissance à une nouvelle fougère. Ce procédé de multiplication végétale se retrouve sous une autre forme chez certains Phanérogames. Une branche de Saule pourvue de bourgeons ou une feuille de Bégonia plantée dans l'eau et la terre humide poussent des racines, s'accroissent et reconsti- tuent un végétal entier. Ces tronçons de végétal deviennent des plantes dont les carac- tères sont les mêmes que ceux des plantes dont ils procèdent. Citons encore les bulbes de Lis, les tubercules de Pommes de terre, qui ne sont que des boutures naturelles, au même litre que les spores des Cryptogames, qui représentent, en somme, des boutures unicellulaires. GÉNÉRATION. 69^ B. Animaux. — Les animaux nous offrent des phénomènes de génération analogues, sinon identiques. 1° Protozoaires. — Chez les Amibes, par exemple, l'organisme (unicellulaire) se partage en deux moitiés qui se séparent, et chacune vit d'une façon indépendante {(jénération par division ou scission). D'autres Protozoaires, tels que VActinosphser lum, .^'entourent d'une capsule, puis l'être (unicellulaire) se divise en un grand nombre de cellules, qui restent pendant quelque temps réunies en colonie. On croirait assister à la segmentation d'un œuf fécondé (Voir Fécondation, v, 2o3-257). Mais à l'encontre de ce qui se passe chez les Métazoaires, les cellules qui résultent de la segmentation ne restent pas associées chez les Protozoaires; elles se disjoignent et chacune reproduit un organisme unicellulaire. Remarquons encore que, chez les Protozoaires, l'être repro- ducteur disparaît tout entier, puisque ses diverses parties constituent la substance même des nouvelles générations. En un mot, la reproduction agame des Protozoaires se fait par simple division cellulaire. Cependant, ce mode de géne'ration ne se continue pas indéfiniment, puis- que, après un certain nombre de générations asexuées, deux individus de tous points semblables se recherchent, s'accolent et, après l'échange de certaines substances, qui semble constituer une sorte de fécondation, ils se séparent de nouveau pour recom- mencer chacun à se multiplier par voie agame. (Voir Fécondation, 260.) 2° Spongiaires. — Dans les Spongiaires, la génération asexuée joue, à côté de la repr"oduction sexuée, un rôle considérable. A la surface externe ou à l'intérieur du corps des Spongiaires se développent des amas cellulaires ou bourgeons qui acquièrent la constitution de l'animal producteur. Ces bourgeons peuvent rester unis à l'individu mère, d'où la formation de colonies, souvent fort compliquées. D'autres fois, après avoir pris un certain accroissement, ces bourgeons se séparent de la colonie, devien- nent libres et continuent ailleurs leur évolution. 3° Cœlentérés. — Dans les Cœlentérés, le bourgeonnement est également très répandu. Sur les parois du corps, (hydre d'eau douce), essentiellement constituées par des assises épithéliales, apparaissent des saillies sous la forme d'excroissances, qui s'allongent. Leur extrémité libre s'entoure de mamelons qui se transforment en tenta- cules. Le jeune individu peut finalement se détacher de l'individu producteur et vivre indépendamment, ou bien il reste uni à l'individu producteur, ainsi qu'à d'autres qui se sont formés de la même manière, ce qui amène la production de colonies revêtant les formes les plus diverses. Un bourgeonnement analogue s'effectue chez la plupart des autres Cœlentérés. Sur le corps des Anthozoaires ou Coralliaires, par exemple, apparaissent par prolifération locale de nombreux mamelons, qui grandissent et se transforment chacun en un indi- vidu qui reste réuni à l'animal souche. Père, fils, petits-fils constituent ainsi des colonies de plusieurs centaines et même milliers d'individualités. Un tissu commun (cœnosarque ou cœnenchyme), parcouru d'un système ramifié de canalicules, assure l'union et la nutrition de la communauté. 4° Vers plats. — A. Chez certains Tiirbellarics (Vers plats, à corps inarticulé), le Stenostomiim, par exemple, l'organisme s'accroît, s'allonge et se sépare plus tard en plusieurs tronçons dont chacun refait un individu entier. A cet effet, le tronçon ou zooide postérieur acquiert une nouvelle tête et de nouveaux ganglions nerveux. La génération asexuée constitue en réalité une régénération physiologique. B. Dans les Vers rubanés ou Cestodes, le plus souvent annelés à l'état adulte, l'organisme jeune habite un hôte et un milieu différents de l'organisme adulte. Le Ver adulte et sexué vit pour l'ordinaire dans le tube digestif d'un Carnivore, d'un insecti- vore ou d'un omnivore. Le corps du Ver s'allonge, se segmente, et dans les anneaux ou proglottis se développent les œufs fécondés. Les anneaux se détachent, sortent avec les fèces et sont disséminés sur la terre, sur l'herbe ou dans l'eau, et, de là, passent dans l'estomac d'un herbivore. Les anneaux sont digérés, tandis que les œufs y com- mencent leur développement et s'y transforment en embryons munis de crochets, qui traversent les tuniques du tube digestif de l'herbivore. Parvenus dans le système circu- laire du second hôte, ils sont dirigés dans les organes où ils se fixent et se transforment en une grande vésicule à contenu liquide. Cette vésicule, ou cysticerque, représente 70 GENERATION. l'embryon, dont la tête s'est invaginée dans l'extrémité postérieure dilatée. Elle conserve cette forme enkystée jusqu'au moment où elle parvient dans le tube digestif d'un Carnivore, et s'y accroît et pousse des anneaux ou proglottis dans lesquels se développent les organes sexuels. Dans l'exemple précédent, il ne s'agit nullement de génération alternante : c'est toujours le même être, dont le scolex, ou forme asexuée, vit sur un premier hôte, et dont la forme adulte ou sexuée se développe dans le tube digestif d'un second hôte. Il est cependant des Tsenias qui offrent les phénomènes de la génération agame. Tel est le cas du Tsenia cœnurus. Le ver adulte et sexué vit dans l'intestin du chien, qui dissémine les œufs fécondés sur l'herbe. Le mouton les avale avec l'herbe. Dans le tube digestif du mouton, les œufs se transforment en embryons qui arrivent comme précé- demment dans les organes et de préférence dans le cerveau. L'embryon s'y enkyste et s'y transforme en une vésicule. Fait spécial pour le Tsenia cœnurus, c'est que la vésicule ou cysticerque bourgeonne, c'est-à-dire prolifère en divers points, et chaque amas cellulaire prend la forme d'une tête de tsenia ou scolex, d'où la formation d'une ou de plusieurs centaines de scolex dans la vésicule. Autrement dit, l'embryon qui arrive dans le cerveau se transforme en un cysticerque, mais les parois kystiques du Cœnurus cerebralis ont la faculté de produire par génération agame d'autres scolex. C'est le bourgeonnement d'un seul et même organisme. Ici de nombreux individus nés par voie asexuée s'intercalent régulièrement entre l'embryon ou scolex et le tsenia adulte. Des groupes d'animaux, tels que les Bryozoaires, les Timiciers,\es Annélides, pourvus de tube digestif, de systèmes circulatoire et nerveux se multiplient également par génération agame, ou bourgeonnement ; d'où formation de nombreux individus qui restent réunis en colonies ou vivent chacun séparément. Parmi les Tuniciers, les Salpes, par exemple, animaux pélagiques flottant librement sur l'eau, se multiplient alternativement par voie sexuée et asexuée. Le premier mode donne naissance à des Salpes solitaires, le second à des Salpes agrégées ou chaînes de Salpes. Les individus qui continuent les chaînes de Salpes sont seuls sexués et ne forment jamais de stolon; les Salpes solitaires ne se reproduisent, au contraire, que par voie agamogénétique, par bourgeonnement, sur un stolon. Et comme ces deux formes, qui diffèrent aussi bien par la taille et la configuration générale que par la disposition des rubans musculaires et par diverses particularités offertes par les branchies et les viscères, alternent régulièrement dans le cycle vital d'une même espèce, il en résulte que le développement présente les phénomènes de la génération alternante. (Claus, p. 1134.) Chez les Annélides, telles que les Naïs, Scyllis, Myrianides, le bourgeonnement détermine le développement de nouveaux individus. C'est ordinairement entre le dernier anneau caudal et l'avant -dernier qu'apparaît un segment ou bourgeon qui s'allonge ; ensuite il se segmente, en même temps que se forment des yeux, une bouche et les divers organes céphaliques sur l'extrémité antérieure du nouvel individu qui se sépare de l'individu producteur. Le plus souvent, cette génération agame porte sur des individus qui n'ont pas d'organes sexuels. Chez certaines espèces, telles que Scyllis ramosa, il se produit des bourgeons latéraux qui restent réunis quelque temps à l'indi- vidu producteur; d'où la formation d'une colonie d' Annélides. Les phénomènes de génération agame dont nous parlons se produisent en apparence spontanément. Par division mécanique, on détermine une reproduction asexuée qui procède de même et aboutit à des résultats identiques. Bien des hypothèses ont été émises pour expliquer les divers modes de génération agame. On a invoqué l'état de fixation permanente où vivent les hydres et les polypes, la forme allongée et éminemment fragile ou vulnérable des vers pour soutenir que, ne pouvant se soustraire aux injures extérieures, ces divers êtres réagissent par la proli- fération d'abord et souvent parla fissiparité, contre la destruction de l'espèce. La repro- duction agame rentrerait, en somme, dans la catégorie des régénérations. Cependant, comme le fait remarquer fort judicieusement Eue. ScHULTz,le bourgeonnement, qui est le phénomène initial de toute génération asexuée, se fait en des régions spéciales du corps, tandis que la régénération a lieu uniquement aux points lésés. Cet auteur se fonde sur ce fait pour admettre l'existence de cellules spécifiques, ou atypiques, qui con- GENERATION. 71 tribueraient par leur multiplication à constituer le bourgeon. Ces cellules conserve- raient toujours les caractères des éléments parthénogénétiques. Chez les êtres unicellulaires (Protozoaires) oîi les organismes pluricellulaires, qui sont composés essentiellement de cellules juxtaposées en forme d'épithélium, il est tout naturel que la multiplication porte sur les éléments cellulaires. Ici la génération d'un nouvel individu comprend deux phases : division cellulaire, puis groupement des élé- ments de façon à constituer deux individualités semblables. Quand, par contre, la géné- ration agame se fait sur des organismes composés, outre le revêtement épithélial des tégu- ments externe et interne, de tissu conjonctif, de fibres musculaires, d'éléments nerveux, d'organes circulatoires et excrétoires, il est intéressant de connaître le tissu par lequel débute le processus du bourgeonnement et la façon dont les jeunes générations cellu- laires complètent les individus qui ont pris naissence par voie agame. Nous possédons, grâce aux recherches de V. Bock et H. Wetzel, des renseignements circonstanciés sur une annélide, voisine du ver de terre, le Chaetogaster diaphaniis. C'est surtout en automne et en hiver que le Chaetogaster se reproduit par génération agame ou asexuée. Cependant ce mode de reproduction s'effectue également à toutes les époques de l'année, car les animaux pourvus d'organes sexuels sont très rares. Le premier phénomène qui annonce le développement par voie agame d'un nouvel individu consiste dans un accroissement ou bourgeonnement qui se fait sur la partie ter- minale du corps. Ensuite surviennent l'étranglement et la séparation complète des anneaux produits. Aux points où se fera l'étranglement, l'épiderme se multiplie et forme une saillie cir- culaire; puis, de part et d'autre du futur plan de séparation, l'épiderme s'enfonce dans le corps de l'animal, comme si on l'avait serré à l'aide d'un fil. Tout autour de l'étran- glement, l'épiderme continue à s'épaissir, ce qui fait paraître l'étranglement d'autantplus profond. D'abord accolés, les bords de l'étranglement s'écartent plus tard et limitent une large fente. A mesure que l'étranglement progresse de l'extérieur vers l'intérieur, il divise les organes internes, c'est-à-dire l'intestin, les cordons nerveux et les vaisseaux du système circulatoire. Les cellules épidermiques fournissent les éléments formateurs du système nerveux céphalique ou caudal. Quant au nouveau pharynx, il se développe grâce à la multiplica- tion que subissent les cellules épithéliales de l'intestin. Au total, les phénomènes d'histogenèse sont, dans la génération agame, les mêmes que dans la régénération expérimentale. Michel, Hepke et d'autres (Voir mon Mémoire sur la cicatrisation des plaies de la cornée), ont montré que, lorsqu'on divise le corps des Annélides, le bourgeon qui fournira les nouveaux tissus est essentiellement constitué par la prolifération des cellules épithéliales de l'épiderme. Chez les larves de Lépidoptères, dont Van Hirpchler a enlevé les derniers segments abdominaux, c'est également l'épithé- lium (hypodernie et revêtement épithélial) du tégument externe qui produit le tissu de régénération. Un seul point reste obscur : dans la régénération expérimentale, nous pouvons invo- quer la lésion mécanique comme point de départ de la multiplication cellulaire. Mais, quand nous voyons un protozoaire se diviser spontanément, une hydre ou une anné- lide se mettre à proliférer spontanément pour faire un nouvel être, il ne nous reste pour toute explication que l'hypothèse des propriétés spécifiques, embryonnaires ou parthéno- génétiques du protoplasma proliférant. L'observation nous montre que les organismes jeunes, ou ceux qui restent toujours composés de cellules, offrent ce mode de multiplication asexuée. Quant aux organismes âgés ou occupant un rang élevé dans l'échelle des êtres, leurs cellules somatiques ont perdu cette propriété. Pour donner naissance à un nouvel être, il faut le concours de deux cellules spéciales, dites sexuelles. Cependant nous retrouvons chez les êtres supérieurs, à tissus hautement différenciés, des vestiges de cette faculté de multiplication agame dans les cellules somatiques. Dans les pertes accidentelles de substance que subit l'organisme, les éléments qui concourent à les réparer sont fournis exclusivement par les cellules, c'est-à-dire par les masses protoplasmiques nucléées. Et parmi les cellules qui y prennent la plus grande part, il faut citer les éléments épithé- liaux dont le corps reste toujours à l'état protoplasmique. Les portions protoplasmiques 72 GÉNÉRATION. qui se sont transformées en fibres conjonctives, nerveuses ou musculaires {alloplasma) ont perdu cette activité proliférative et régénératrice. Si nous ignorons les causes de la génération sexuée ou asexuée, nous savons que les cellules sexuelles des organismes supérieurs sont des éléments qui apparaissent de, bonne heure, s'isolent et se distinguent aisément des autres cellules embryonnaires. Durant toute la période d'accroissement du corps, les cellules qui fourniront les éléments sexuels restent au repos. Après une longue période de somnolence, les cellules sexuelles entrent en action et préparent, par division, les ovules ou les spermatozoïdes. Il est indubitable, d'autre part, que les cellules sexuelles descendent de l'œuf fécondé, et sont à l'origine constituées des mêmes substances que les cellules somatiques. L'union de deux cellules ou fractions de cellules passe pour un rajeunissement du protoplasma, destiné à prévenir le dépérissement et l'extinction de l'espèce. Cependant on connaît des organismes élevés dont la reproduction se fait exclusivement par voie agame,et dont les descendants ne présentent nulle marque de décrépitude. Depuis deux siècles, on n'a pas rencontré en Europe de pieds mâles dans l'espèce de saule, dite Salix babylonien, ou japonica. C'est par boutures seules que ce végétal se propage, sans qu'on ait remarqué sur les descendants un signe quelconque de dégénérescence. Le climat d'Europe permet à cette espèce végétale de se reproduire par voie asexuée et assure à une série interminable de générations l'ensemble des propriétés originelles. Nous nous fondons sur les phénomènes morphologiques et sur les résultats pour interpréter les faits; malheureusement nos explications se contredisent. Maupas et R. Hertwig ont constaté une diminution du noyau, une réduction chromatique dans les générations d'infusoires qui avaient pris naissance par voie agame.Pour eux, la copula- tion aurait pour effet de rajeimir ou de réorganiser le protoplasma ou matière vivante. Chez les organismes supérieurs, l'ovule est, au contraire, une cellule énorme dont la richesse chromatique est considérable. Nous ne pouvons donc invoquer ici un appau- vrissement chromatique pour expliquer la nécessité de la fécondation. Comme cet ovule expulse, sous forme de globules polaires, les trois quarts de sa chromatine, nous admet- tons qu'il met sa quantité de chromatine en équivalence avec celle qu'apporte la petite tête du spermatozoïde. Pourquoi le noyau de l'ovule s'accroît-il d'une façon démesurée avant de subir la réduction chromatique qui serait la condition indispensable de l'acte fécondateur? Avouons franchement notre ignorance, et attendons les résultats de nouvelles observa- tions et d'expériences plus décisives. Si nous récapitulons les faits connus aujourd'hui, nous dirons que, chez les organismes supérieurs, la fécondation est nécessaire pour la production d'un nouvel individu. Sur nombre d'êtres multicellulaires (Annélides, Tuniciers, Coelentérés) apparaissent au contraire, par division des cellules somatiques, des amas cellulaires ou bourgeons qui s'accroissent et se transforment en individus semblables à l'être producteur (bourgeon- nement, llssiparité). Sur d'autres organismes encore (Fougères, Salpes, Protozoaires), les générations agames alternent régulièrement avec les générations sexuées. Les modes de reproduction sexuée ou asexuée ne dépendent pas de la nature du protoplasma originel. En effet, comme nous l'avons montré (Fécondation, p. 261 et sui- vantes), Klebs est parvenu à provoquer, dans une seule et même espèce d'algues et de champignons, la génération, soit sexuée, soit asexuée, 11 suffit, à cet effet, de cultiver ces végétaux dans des milieux pauvres ou riches en matériaux nutritifs, de les soumettre à une température ou à une lumière d'intensité variable. En un mot, les influences exté- rieures et les conditions de nutrition semblent déterminer l'un ou l'autre mode de géné- ration. Il est bien entendu qu'il faut faire abstraction des organismes supérieurs, chez lesquels la sélection et l'hérédité ont depuis des siècles effacé et exclu, en dehors de la génération sexuée, tout autre mode de reproduction. Bibliographie sommaire. — BelzUiNG (Er.). Anatomie et Physiologie végétales, 1900. — V. Bock (Max). Ueber die Knospung von Chaetogaster diaphanus Gruith {Icnaische Zeits. f. Naturwissenschaft, xxxi, 1898,103). — Child (M. Cn.). Fission and régulation in Stenostoma {Arch. f. Entwich.,x\, 1902). — Claus (C). Traité de Zoologie, [2], trad. par Mogum- Tandon. — DuvAL (Mathias). Article Génération dans le Nouveau Dictionnaire de méd. et de chir. pratiques. — Hertwig (R.). Lehrbnch der Zoologie, 1893. — Hertwig (R.). GÉNÉRATION SPONTANEE. 73 Veber Wesen und Bcdcuiunu der Befruchlung {Silz. Math. Phys. CL Bay. Acnd. Wiss., XXXII, i902). — KoRSCHELT et Heider. Lchrbiich der verçjlcichenden Eniwicklun(js(jeschiclitc der wirbellosen Thiere. — Lang (Arnold). Lehrbuch der veryleichenden Anatomie, 1888. LoNGET. Traité de Physiologie, m, 1873. — Milne Edwards (H.), Physiologie et ana- tomie comparées, vui. — Perrier (Éd.). 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Toutefois, il y a quelque utilité à passer rapidement en revue les idées des biolo- gistes du passé sur la génération spontanée des êtres vivants. Plus qu'en tout autre sujet d'étude, nous apprendrons là à quel point l'opinion commune — et même l'opinion des savants, — abusée par des apparences et se contentant de documents insuffisants, peut profondément errer. Mais, avant d'entrer dans le court résumé historique de la question, il faut bien s'en- tendre sur la signification précise du mot « génération spontanée ». D'une part, génération spontanée peut s'appliquer à la génération d'êtres nés aux dépens de particules organisées, c'est-à-dire provenant d'une matière vivante, mais d'une matière vivante ayant d'autres caractères spécifiques. Par exemple, quand on dit qu'un taureau mort donne naissance à un essaim d'abeilles, c'est Yhétérogénie, c'est-à-dire la naissance d'un être A, non pas aux dépens de la matière inerte, mais bien aux dépens d'un être vivant B, complètement différent de lui. A côté de l'hétérogénie, il y a la génération spontanée proprement dite, création d'êtres vivants aux dépens de la matière inorganique ou inorganisée, comme par exemple si, en présence de l'air, aux dépens de l'eau, de l'acide carbonique et des sels minéraux, un être organisé, d'espèce déterminée, venait à apparaître. C'est là la génération spon- tanée proprement dite. De fait, génération spontanée et hétérogénie sont aujourd'hui également impossibles à accepter. Il n'y a du reste qu'une nuance entre ces deux hypothèses : et il est tout aussi absurde d'admettre que le sang d'un poisson donne naissance à ÏOidiwn albicans, que de supposer que dans l'eau de mer, aux dépens exclusifs des matières minérales, il naîtra uu Oïdium albicans. On verra pourtant que, si l'hypothèse de la génération spontanée proprement dite a été bientôt à peu près complètement abandonnée, l'hypothèse de l'hétérogénie, jusqu'en des temps très récents, a eu de nombreux défenseurs. Des Anciens à Redi, Harvey et SAvammerdam. — Les auteurs anciens rap- portent quantité de fables relatives à la naissance d'êtres procréés sans germes préa- lables, prolem sine matre crcatam. Impuissants à expliquer le mode de génération des divers êtres, ils supposent que ces organismes naissent des matières en décomposition. Aristote disait que tout corps sec qui devient humide produit des animaux, pourvu qu'il soit susceptible de les nourrir [Hist. des animaux, 1783, 1, 313). Les poissons viennent du sable; les vers, des chairs corrompues; les chenilles naissent des feuilles; les poux naissent de la chair, et les puces proviennent de la fermentation des ordures. Virgile raconte que les abeilles naissent du cadavre d'un bœuf, et ce n'est pas une fiction poé- tique qu'a imaginée le chantre des Géorgiques; c'est presque une aflirmation scienti- fique, puisque aussi bien toute l'antiquité et tout le moyen âge ont accepté la légende du pasteur Aiislée. Même Va» Helmont, plus crédule, s'il est possible, qu'AnisTOTE et Virgile, admettait 74 GÉNÉRATION SPONTANÉE. la génération spontanée des souris, et il donne la curieuse recelte de la procréation des souris. « Les odeurs qui s'élèvent du fond des marais produisent des grenouilles, des limaces, des sangsues, des herbes. Si l'on enferme une chemise sale dans l'orifice d'un vase ren- fermant des graines de froment, le ferment sorti de la chemise sale, modifié par l'odeur du grain, donne lieu à la transmutation du bié en souris après vingt et un jours environ. Les souris sont adultes: il en est de mâles et de femelles, et elles peuvent reproduire l'espèce en s'accouplant. » (Cité par Pasteur, Rev. des cours scient., 1864, 258.) Le père Kircher, au milieu du xvii« siècle, croyait que la chair des serpents, dessé- chée et réduite en poudre, peut donner naissance à des vers qui deviennent serpents. Mais voici enfin la méthode expérimentale; et tout de suite un peu de clarté apparaît. En 1638, Fr. Redi fait une expérience très précise {Expérimenta circa generationem insectorum, Amsterdam, 1686)... « Je commençais, dit-il, à soupçonner que tous les vers qui naissent dans les chairs y sont produits par des mouches et non par ces chairs mêmes, etje me confirmais d'autant plus dans cette idée que... j'avais toujours vu des mouches voltiger et s'arrêter sur les chairs, avant qu'il y parût de vers... Sed vana fuisset nullo expérimenta firmata duhitatio. C'est pourquoi, au mois de juillet, je mis dans quatre bouteilles un serpent, quatre petites anguilles et un morceau de veau. Je bouchai exactement ces bouteilles avec du papier que j'arrêtai sur le goulot en le serrant avec une ficelle; après quoi je mis les mêmes objets dans autant de bouteilles que je laissai ouvertes. Or, peu de temps après, les poissons et les chairs des bouteilles ouvertes se remplirent de vers; etje voyais les mouches y entrer et en sortir librement; mais je n'ai pas aperçu un seul ver dans les bouteilles bouchées, quoiqu'il se fût écoulé plusieurs mois... Dans d'autres expériences, il me fut prouvé qu'il ne se formait jamais de vers dans les chairs enfouies sous la terre, quoiqu'il s'en formât sur toutes les chairs sur les- quelles les mouches s'étaient posées. » En même temps que Redi faisait cette démonstration expérimentale, Harvey, dans son livre sur la génération des animaux [Exercit. de generatione animalium), formulait le grand principe : Omne vivum ex ovo. Mais, ne connaissant que d'une manière impar- faite le système de génération des insectes et des invertébrés, il n'applique le mot ovum qu'à l'œuf des mammifères, de sorte que le Omne vivum ex ovo signifie seulement qu'il y a chez les mammifères, comme chez les oiseaux, une ponte ovulaire ; ce qui est déjà en soit une admirable découverte, quoiqu'elle ne s'applique pas à l'hypothèse de la généra- tion spontanée. Il semble même donner au mot ovum une acception beaucoup plus large que celle que nous lui attribuons aujourd'hui. « Id commune est ut ex principio vivente gignuntur, adeo ut omnibus viventibus primordium insit ex qiio et a quo provenient... Omnés generationes animalium moti in hoc uno conveniunt quod a primordio vegetali tanquam e materia efficiente virtute dotata, oriantur : differunt autem, quod primordium hoc vel sponte et casu erumpat,vel ab alio prxcxistente tanquam fructus proveniat. » [Exerc. de générât, ani- mai, p. 270.) Cette doctrine est, à vrai dire, celle de l'hétérogénie; naissance d'êtres vivants aux dépens de matière vivante provenant d'autres êtres qu'eux. Harvey n'a pas été formel- lement explicite sur l'axiome : Omne vivum ex ovo, et ce n'est pas sans quelque raison que Valentin et Burdach se refusent à le compter parmi les adversaires de la généra- tion spontanée. Au contraire, Swammerdam (1669) s'est très nettement prononcé. Il n'a pas de peine à prouver que les abeilles ne naissent pas des produits en décomposition. « Quoique ce soit, dit-il, le comble de l'absurdité d'imaginer que la pourriture soit capable d'engen- drer des animaux aussi bien organisés que le sont les abeilles, c'est cependant l'opinion de la plus grande partie des hommes, parce que l'on juge sans vouloir rien examiner. » RÉAUMUR s'élève, lui aussi, contre l'opinion de l'origine spontanée des larves des galles. « Nous n'avons plus besoin, disait-il en 1737, de combattre le sentiment absurde dans lequel on a été pendant si longtemps sur l'origine des insectes des galles. Il n'est plus de philosophe qui osât soutenir avec les anciens, peut-être même n'en est-il plus de capable de penser, que quelques parties d'une plante peuvent, en se pourrissant, devenir un ver, une mouche, en un mot un insecte, qui est un assemblage de tant d'admirables parties. » GÉNÉRATION SPONTANÉE. 75 Ainsi, au milieu du xviii^ siècle, l'hypothèse de la génération spontanée, grâce à Redi, Swammerdam, Vallisnieri et Réaumur, était complètement abandonnée pour les insectes et les parasites, et il est probable, dit H. Milne-Edwards, qui a fait une excel- lente étude, à laquelle nous avons beaucoup emprunté, de toute cette histoire [Leç. sur l'anat. et la physiol. comparées, 1863, viii, 245), que ces faits auraient suffi pour faire justice de l'hypothèse des générations spontanées, si le microscope, découvert par Leeu- WENHOEK, n'eût fait naître d'autres difficultés, pour l'explication desquelles on eut de nou- veau recours à des suppositions analogues à celles dont la fausseté venait d'être recon- nue pour les animaux non microscopiques. De Needham et Buffon à, Pasteur. — Aujourd'hui que, grâce à Pasteur, nous savons que les germes sont répandus partout, il ne nous est pas difficile de comprendre qu'une infusion de foin, de la colle de pâte, du sang, du lait ou de l'urine qu'on aban- donne à l'air libre, sans avoir pris aucune précaution de stérilisation, se remplissent rapidement d'infusoires, de champignons, de bactéries et d'organismes divers. Mais cette donnée élémentaire manquait alors. Ce qui nous paraît si simple et si évident était absolument inconnu. On ignorait qu'il y avait des germes partout, et alors, en voyant au bout de quelques heures une infusion de foin fourmiller d'infusoires, on en concluait que ces organismes s'y étaient développés spontanément. Les anguillules de Needham furent célèbres pendant tout le xviii'' siècle, et, malgré les railleries de Voltaire, dont la perspicacité scientifique fut ce jour-là vraiment remarquable, elles passèrent pour une preuve éclatante de la génération spontanée. « Un jésuite irlandais, nommé Needham, qui voyageait en Europe en habit séculier, fit des expériences à l'aide de plusieurs microscopes. Il crut apercevoir dans de la farine de blé ergoté, cuite au four et laissée dans un vase purgé d'air et bien bouché, il crut apercevoir, dis-je, des anguilles qui accouchaient bientôt d'autres anguilles. II imagina voir le même phénomène dans du jus de mouton bouilli. Aussitôt plusieurs philo- sophes s'efforcèrent de crier merveille et de dire qu'il n'y a point de germes; tout se fait, tout se régénère par une force vive de la nature. De bons physiciens furent trompés par un jésuite. M. SPALLANZANia montré que Needham n'avait pas pris toutes les précautions nécessaires pour détruire les germes qui auraient pu se produire dans les infusions, et que, quand on prend ces précautions, on ne trouve pas d'animaux. » (Voltaire, Dict. philosojyh., art. Anguilles.) Malgré Voltaire, Buffon se rattacha complètement à cette doctrine. Il admit l'exis- tence de mulécides organiques pouvant se reproduire par un assemblage fortuit. « Plus on observera la Nature, dit-il, plus on reconnaîtra qu'il se produit, en petit, beaucoup plus d'êtres de cette façon que de toute autre. On s'assurera de même que cette manière de génération est non seulement la plus fréquente et la plus générale, mais lapins ancienne, c'est-à-dire la première et la plus universelle... Ces molécules organiques se trouvent en liberté dans la matière des corps morts et décomposés; elles remuent la matière putréfiée et forment, par leur réunion, une multitude de petits corps organisés dont les uns, comme les vers de terre, les champignons, paraissent être des végétaux ou des animaux assez grands, mais dont les autres, en nombre presque infini, ne se voient qu'au micro- scope. Tous ces corps n'existent que par une génération spontanée... tous les prétendus animaux microscopiques ne sont que des formes différentes que prend d'elle-même, et suivant les circonstances, cette matière toujours active et qui ne tend qu'à l'organi- sation. » Ainsi, selon cette grandiose et logique théorie, il existerait une matière organique composée de molécules, et ces molécules tendraient constamment à se différencier sous les aspects les plus divers et à revêtir des formes vivantes variées, par des transmuta- tions et transformations perpétuelles. Mais il ne faut juger des théories, ni d'après leur ingéniosité, ni d'après la grandeur de leurs conséquences; il s'agit seulement de savoir si elles sont vraies. Or, quoique Frémy ait tenté de réhabiliter cette fantaisiste conception, la théorie des molécules organiques indifférentes est absolument erronée. Rien ne l'appuie, et tout l'infirme. Elle n'a pas cessé cependant d'être soutenue, et, jusqu'à ces derniers temps, elle a encore trouvé des défenseurs. Des expériences mal faites, hâtivement élaborées, et maladroitement conduites, ont été la cause de cette longue erreur. 76 GÉNÉRATION SPONTANÉE. Nous allons exposer ces raisons, à notre sens détestables, que les partisans de la génération spontanée ou de l'hétérogénie ont fait valoir; et si, à l'heure présente, beau- coup de ces arguments nous paraissent enfantins et ridicules, c'est que les vérités acquises sont devenues tellement élémentaires à nos yeux que nous n'arrivons pas à nous imaginer l'état d'esprit des hommes qui ne connaissent pas ces vérités. D'autant plus que de soi-disant expéi^iences étaient invoquées. Wiegmaivn (cité par Adelon, Physiologie de l'homme, 1831, iv, 3) met dans un vase du corail et de l'eau distillée. Au bout de quinze jours, il voit se former de la matière verte, puis des con- ferves, puis des Cyprides dctextœ. Plus tard, il se forme des Daphnies. Fray (1817), dans un Essai sur Vorigine des corps inorganisés et organises, prétend qu'il se forme des infusoires sous l'influence de l'hydrogène et de l'azote, dans des flacons remplis d'eau distillée : il va même jusqu'à y admettre la naissance de vers de terre et de limaçons. Gleichen (1799) dit que, pour le développement des infusoires aux dépens de l'eau, l'eau de rosée est particulièrement féconde. Wrisberg, qui créa le nom d'infusoire (1763), insiste sur l'importance de l'oxygène pour la génération de ces animaux; car une couche d'huile empêche le développement. ïreviranus (1822) croit à la puissance du chlorure de sodium, et du nitrate de potasse. Gruithuisen dit que, si Ton fait infuser du granit dans l'eau pure (!), il se développe des infusoires. L'insolubilité absolue du granit n'empêche pas Burdach d'admettre l'authenticité de cette étrange expérience. D'ailleurs Burdach. quoique son grand ouvrage de physiologie date de 1837, est d'une crédulité extraordinaire. 11 admet que la formation des infusoires dépend de trois éléments : air, eau et substances solides. Selon la nature de ces substances, les infusoires sont différents, comme aussi selon les proportions d'air et d'eau. Les objections de Ehrenberg et de J. Miller ne l'embarrassent pas. Ehrenberg, qui fut un admirable observateur, dit que les germes des infusoires préexistent dans l'eau. Or, dit Burdach, on ne voit pas ces germes : donc ils n'existent pas; et même, s'il y a des germes, c'est tout comme s'il n'y en avait pas; car l'ébuUition n'empêche pas le déve- loppement des infusoires. Suit alors cette affirmation erronée, tant de fois reproduite par les défenseurs de l'hétérogénie. u Qu'on fasse bouillir une substance (solide orga- nique) aussi longtemps qu'on voudra, qu'on la mette, chaude encore, dans des flacons préalablement échauffés, et que sur le champ on bouche ceux-ci d'une manière hermé- tique, il se produit cependant des infusoires. » (p. 23.) Burdach répète les expériences de Gruithuisen et autres. « J'ai tait avec Hensche et Baer des expériences décisives sur des matières dont aucune ne pouvait contenir d'œufs susceptibles de se développer : de la terre fraîche qui n'exhalait point d'odeur, et dans laquelle on n'apercevait rien d'étranger, fut bouillie pendant longtemps avec une grande quantité d'eau, et la liqueur réduite fut mise avec de l'eau récemment distillée et du gaz oxygène, dans des ballons bouchés à l'émeri, et on obtint des matières vertes de Priestley... Des morceaux de granit qui viennent d'être détachés du milieu du bloc, furent enfermés avec de l'eau distillée et du gaz oxygène, et ils donnèrent au soleil de la matière verte avec des filaments coufervoïdes. » Et comme J. Muller, dont l'esprit pénétrant ne se laissait pas abuser par les appa- rences, objecte (1833) que les instruments employés eussent du être débarrassés de toutes les particules organiques susceptibles d'y adhérer, Burdach, dans son aveugle- ment, dit: « Je ne vois là qu'un parti pris de nier la possibilité d'une expérience décisive plutôt que de renoncer à une hypothèse favorite. » Hélas! il ne faudrait presque jamais dire, en fait de science, qu'on tient une expérience décisive. Pour ce qui est de la génération spontanée, Burdach admet tout. 11 dit que les entozoaires se forment dans l'intestin. Tout ce qui affaiblit l'activité vitale, dit-il, contribue à la formation des entozoaires : par exemple les émotions morales, comme la frayeur, contribuent à la naissance de nombreux entozoaires. 11 y a des entozoaires dans le cristallin, dans les œufs, dans les embryons, dans les fœtus : comment expliquer leur genèse, sinon par une génération sans germes? Burdach étend cette conception de la génération sans germes jusqu'à des êtres très compliqués et très parfaits. Il n'ose pas affirmer que, si, après un incendie de forêt, des plantes nouvelles apparaissent, c'a été sans germes préalables de ces plantes; mais on voit bien qu'il penche vers celte opinion absurde. GENERATION SPONTANEE. 77 Il nous paraît inutile de réfuter de telles hypothèses. Aussi Lien, de 18i0 à 1804, l'effort des partisans de la génération spontanée ne porte-t-il plus que sur la génération des organismes microscopiques. Les découvertes de Siebold, Leuckhart, Kûchenmeister, Van Beneden, prouvèrent la migration des œufs des entozoaires; les observations de Darwin et des autres biologistes établissent la prodigieuse dissémination des grains dans les eaux, les terres et les airs, partant la possibilité de générations en apparence spontanées. Au contraire, pour les organismes microscopiques, la démonstration était plus difficile à faire. Expériences de Pasteur. — • Actuellement, grâce à Pasteur, grâce à ses disciples, qui furent innombrables, et dont le premier en date, et non le moins illustre, fut probable- ment Tyndall, la lumière est faite ; mais, de 1860 à 1884, on peut citer divers mémoires où il est admis que des organismes vivants peuvent naître sans germes préalables dans des liqueurs organiques. Nous nous contenterons de citer les titres de quelques-uns de ces travaux, en rappelant qu'ils n'ont plus guère aujourd'hui qu'an intérêt documen- taire, JoLY et Musset. Réfutation de Vune des expériences capitales de M. Pasteur, suivies d'études physioloffiques sur l'Iiétéroi/énie [Monit. scientif., 1862, iv, p. 733-759), — Schaaf- FHAusEN. Recherches sur la (jénération spontanée [Cosmos, 1863, p. 632). — Bastian. On some heterogenetic modes of origin of flagellated monads, fungus germs and ciiiuted infusoria [Proc. Roy. Soc., London, xx, .1871, p. 239-204). — Wyman. Experiments on the formation of infusoria in boiled solutions of organic matter iu hermetically sea- led ivessels and supplied tcith pure air [Americ. Journ. of Science, 1862, xx, xiv). — Musset, Nouvelles recherches expérimentales sur l'hétérogénie [Th.. de doct. es sciences, Toulouse, 1862). Le mémoire le plus complet et le plus sérieux qui ait été entrepris sur la question est celui de F. -A. Pouchet, Nouvelles expériences sur la génération spon- tanée et sur la résistance vitale. 1 vol. in-8°, 268 p., Paris, Masson, 1864. Si nous nous sommes permis de dire que la question n'avait plus d'intérêt scienti- fique, c'est qu'il est maintenant démontré que tous les organismes qu'on voit se déve- lopper dans les liquides organiques y ont été introduits ou bien y préexistaient, soit â l'état d'organismes adultes, soit à l'état de germes. Il est prouvé par des milliers et des milliers d'expériences, qui se répètent chaque jour avec des résultats identiques et constants, que, si l'on empêche les germes exté- rieurs de pénétrer dans un liquide chauffé à 120° pendant dix minutes, jamais il ne s'y développe un seul organisme. Pouchet a beau dire : « Ingenhousz, Mantegazza, Joly, Musset, Jodin, Wyman fermaient sévèrement l'accès aux germes de l'air «; qous savons aujourd'hui que cette sévérité n'était qu'apparente; car, depuis que Pasteur a montré que les germes sont partout, on sait leur fermer la voie ; et la conviction des innombrables expérimentateurs qui ont fait, depuis 1863, des ensemencements dans des ballons stériles, est tellement forte que, si nous voyons un ballon de culture soigneusement stérilisé qui se trouble, pas une minute nous n'hésitons h conclure qu'il a été commis une faute de technique. De fait, chaque fois qu'on évite les fautes de technique, le ballon reste stérile. La discussion poursuivie par Pasteur, dans une série d'expériences mémorables, porte donc principalement sur la technique; et il est facile de résumer en quelques proposi- tions les points principaux qu'il a si bien mis en lumière. 1° Si l'on prend, dans des conditions qui excluent rigoureusement l'introduction de germes étrangers, un liquide organique comme le sang, le lait, l'urine (dans des con- ditions non pathologiques) , et si l'on empêche l'accès de l'air chargé de germes, le liquide organique ne s'altère pas. Or celte expérience a été si souvent répétée depuis qu'elle est aujourd'hui une des bases de la biologie. On peut recueillir aseptiquement de l'urine, du lait, du sang, et introduire ces liquides, à l'abri de l'air sporifère, dans des ballons stérilisés, sans qu'il se développe de microrganismes, même au bout d'un très long temps. Rien n'est plus instructif que cette fondamentale expérience : car on pourrait supposer, au cas même où il se développerait des germes, que des germes y étaient au préalable contenus. J'ai pu prouver, en collaboration avec L. Olivier, que, dans les chairs de poissons, prises aseptiquement, il se développe presque toujours des organismes micro- biens, des coccusqui prolifèrent; mais nous n'avions aucun droit de supposer, — et nous 78 GENERATION SPONTANEE. n'y avons pas d'ailleurs songé un seul instant — qu'il y eût là génération spontanée. Nous avons implicitement admis que ces germes apportés avec la circulation lymphatique (qui est ouverte, chez les poissons) préexistaient dans les chairs recueillies (B. B., 1882, 669, et 1883, 588-o94). Aussi, lorsqu'on voit du sérum recueilli aseptiquement rester stérile, peut-on en conclure, avec une rigueur absolue, d'abord qu'il ne contenait pas de germes capables de se développer; ensuite que, dans un liquide organique, qui ne contient pas de germes et dans lequel on n'introduit pas de germes, aucun organisme ne se développe. Que l'on vienne à prouver que le lait, l'urine, le sang, recueillis aseptiquement, don- nent des cultures, cela ne prouvera nullement qu'il y a eu génération spontanée ; on n'aura pas le droit de conclure à autre chose qu'à la présence préalable de germes dans ces liquides, hypothèse presque nécessaire, puisque ce développement de germes n'est qu'accidentel et non constant. On voit que, loin d'appuyer l'hypothèse d'une génération spontanée, l'altération en apparence spontanée des liquides organiques, qui s'observe quelquefois, contribue à infirmer la conception d'une naissance spontanée des germes. 2° Les liquides organiques ainsi conservés stériles ne sont stériles que parce que les germes n'y ont pas pénétré. Car il suffît d'y introduire de l'air non tamisé par le coton, ou non stérilisé par la chaleur, pour voir aussitôt la puUulation des organismes s'y faire avec une intensité extraordinaire. L'expérience de Pasteur est à cet effet d'une simplicité élégante et admirable. Dans un ballon contenant un liquide stérile, on fait passer de l'air plus ou moins impur, mais qui est filtré sur du coton. Le coton retient toutes les particules solides, et le liquide reste indéfiniment stérile. Mais, qu'on vienne à faire tomber une parcelle de ce coton chargé de germes dans le liquide, et aussitôt de nombreux organismes y apparaissent. Donc on n'a nullement altéré l'aptitude du liquide à servir au développement des microrganismes; on a tout simplement éliminé l'introduction de germes. On introduit un germe, et il pullule, toutes conditions restant égales pour la température, l'air, et l'état chimique du liquide. Donc, s'il n'y avait pas de développement, c'était à cause de l'absence de germes. 3" La température de 100° ne suffit pas à détruire les germes. Ce fut là probablement une des essentielles erreurs des hétérogénistes. Même, ScHWANN, d'abord, puis Pasteur, au début de ses recherches, avaient pensé que l'ébulli- tion est suffisante. Mais aujourd'hui nous savons qu'il est des germes résistant à une ébullition de 100" longtemps prolongée; dans certains cas pour les spores du B. subtilis, par exemple, il est probable que la chaleur sèche de 100» ne détermine jamais, fût-ce au bout de plusieurs heures, la perte de germination de ces spores. Du lait chauffé à 100", même pendant quatre ou six heures, n'est pas stérilisé. De si nombreuses expé- riences, rapportées par tous les physiologistes et les hygiénistes, établissent si nettement le fait qu'on ne peut le révoquer en doute. Par conséquent doivent être considérées comme non avenues, et entachées d'une énorme faute de technique, toutes les expériences de Joly, Musset, Pouchet, Sghaaf- HAUSEN, Bastian, Wyman, daus lesquelles on s'est contenté de faire bouillir des liquides, en s'imaginant que par ce procédé on les avait stérilisés. Que dire alors de l'affirmation de Pouchet, qui déclare (p. 33) que les spores et les œufs meurent tous à 80" ! ! L'objection que le liquide chauffé à HO" n'est plus cultivable est absurde; car on arrive sans peine à faire pousser dans ce liquide les mêmes organismes qui s'étaient développés soi-disant spontanément dans le liquide non chauffé et non stérilisé. Nous pourrions insister sur les détails des inébranlables preuves qu'a données Pas- teur, dans la série de discussions qu'il a soutenues avec une énergie juvénile, à l'aide d'expériences ingénieuses sans cesse renouvelées, contre Wyman et Pouchet, Joly et Bastian. Mais il nous semble que ce serait peine superflue; car aussi bien aujourd'hui (1904) il n'est plus un seul physiologiste qui ose soutenir l'idée de la génération spon- tanée ou de l'hétérogénie. Ajoutons enfin que, si grand que soit le mérite de Pasteur, il n'a pas été le premier à instituer de belles expériences à cet effet. Spallanzani, dont le nom, dit H. Milne- Edwards, revient toutes les fois qu'il s'agit d'élucider une des grandes questions de la GENERATION SPONTANEE. 79 physiologie générale, avait, en 1763, montré qu'une infusion chauffée dans un ballon fermé par un tampon de coton, reste stérile, alors que des infusions chauffées de même, mais que ne protégeait pas un tampon filtre de coton, fourmillent d'animalcules. Les expériences de Spallazani sont extraordinaires de simplicité et de netteté. Voici des paroles presque prophétiques : « Il ne me paraît pas possible d'attribuer la naissance des animalcules à d'autres choses qu'à des petits œufs ou à des semences ou des cor- puscules préorganisés que je veux appeler, et que j'appellerai, du nom générique de germes. » Cagniard Latour (1828), Schultze (1835), Schwann (1837), H. Milne-Edwards (1839), avaient publié des expériences analogues; Van Brœk, en 1860 (cité par Straus, De la génération spontanée, Arch. de méd. exp., i, 1889, 341), avait annoncé que du jus de raisin frais, du sang artériel, de la bile et de l'urine, si on les recueille à l'abri de l'air, se maintiennent sans putréfaction presque indéfiniment. Mais ces expériences laissaient toutes quelque place à la critique, tandis que celles de Pasteur sont inattaquables, et, de fait, depuis 1865, par tous les expérimentateurs, elles ont été confirmées dans tous leurs détails. (Voir pour les travaux de Pasteur, les Comptes rendus de l'Académie des sciences, notamment de 1860 à 1866, passim.) — Mémoire sur les corpuscules organisés qui existent dans l'atmosphère. Examen de la doctrine des générations spontanées. (Ann. de Chim. et de Phys., (3), lxiv, 1862, 110 p.) — Voy. aussi pour l'historique, Chamberland, Rech. sur l'origine et le développement des organismes microscopiques. Thèse de la Faculté des Sciences, Paris, 1879. — Tyndall, Les microbes, 1882. La théorie de la génération spontanée après Pasteur. — ■ Si, après des démonstrations aussi éclatantes que celles de Pasteur, quelques affirmations isolées ont apparu, ce sont encore des fautes de techniques qu'il faut accuser. Onimus, puis Legros et Onimus, ont placé des œufs de poule à membrane intacte dans des liquides en fermentation, et ils ont vu se développer des phénomènes de fermentation dans l'œuf. Onimus, Exp. sur la genèse des leucocytes et sur la génération spontanée (J. de l'an, et de la phys., 1867, iv, 47-70, et C. R., 1874, lxxix, 173-176). — Legros et Onimus, Exp. sur la génération spontanée {J. de l'an, et de la physiol., 1872, viii, 241-245). Mais d'abord ils n'ont pas tenu compte de ce fait maintenant démontré, notamment par GAYON(Rec/i. sur les altérations spontanées des œufs. Ann. scient, de l'École normale super., 1875, iv, 204-303), que l'oviducte de la poule n'est pas stérile et contient (ou peut contenir) des germes; ensuite que des spores peuvent parfaitement traverser des membranes animales. On sait que les filtres poreux, très serrés, plus imperméables peut-être que les membranes animales, laissent passer les germes au bout d'un certain temps; car ceux-ci s'insinuent dans les interstices de la membrane poreuse. Et que dire de cette expérience d'ONiMus qui prend une membrane de baudruche, mise dans l'étuve sèche à 100^, puis retirée pour recueillir du sang? II y a là des causes de contamination par les germes extérieurs telles qu'une pareille expérience ne prouvera jamais rien. Les objections de Bastian ne sont pas plus valables {The beginnings of lifc being some account of the nature, modes of origin, and transformations of lower organisms. 2 vol. in-8", London, 1872, et Lancet, 1876, (1), 206-208; Brit. med. Journ., 1876, (1), 157-159; 222; et (2), 39; 73. Pasteur a répondu à Bastian (iVo^e sur l'altération de l'urine à propos d'une communication du 1)'' Bastian, C. R., 1876, Lxxxiii, 176-180) en démontrant que la potasse diluée employée pour neutraliser l'urine devait être stérilisée, et que les précautions contre la contamination n'avaient pas été prises avec une rigueur suffisante; car l'altération de l'urine n'a jamais lieu quand elle a été recueillie aseptiquement, dans des ballons bien stérilisés, sur des in- dividus normaux. Les tentatives de Huizinga {Zur Abiogenesis Frage; A. g. P., 1873, vu, 549; 1874, vni, 180; 551, 1875, x, 62) sont restées sans écho, et avec raison. Les hypothèses indé- montrées de Béchamp, encore qu'il ait écrit un gros livre sur les microzymas {Les Micro- zymas, Paris, J.-B. Baillière, 1883), ne méritent pas plus de créance. Il suffira, brevitatis causa, d'indiquer son expérience sur le lait (p. 169). — « J'ai fait arriver le lait d'une vache, au moment où on la trayait à l'heure accoutumée, dans un appareil très propre, contenant un peu d'eau créosotée, plein d'acide carbonique, et traversé par un courant de ce gaz pendant qu'on le remplissait. Le lait coulait dans l'appareil à l'aide d'un entonnoir muni d'un linge fin, préalablement lavé à l'eau bouillante et créosotée. L'appa- reil ayant été transporté au laboratoire... et mis à l'étuve, le surlendemain ce lait était 80 GENERATION SPONTANEE. caillé. » Ce qu'il y aurait de surprenant dans une expérience conduite ainsi, c'est qu'au bout de vingt-quatre lieures il ne se fût pas produit de coagulation et de fermentation du lait recueilli dans ces conditions défectueuses. Il est vrai que, d'après A. Bkchamp, les microzymas sont détruits par la chaleur. Mais alors quelle différence existe-t-il entre les microzymas de Bkchamp et les germes de Pasteur? D'autant plus que pour Béchamp les microzymas ont leur spécificité. 11 y a des microzymas pour la fermentation lactique, d'autres pour la fermentation alcoolique, d'autres pour les maladies. De sorte que, tout compte fait, à la bien considérer, la théorie des microzymas ne dilTère de la théorie des germes qu'en ce qu'elle est fondée sur des expériences imparfaites, au lieu que la théorie des germes s'appuie sur des expériences irréprochables. Les publications plus l'écentes de A. P. Fokker présentent de notables points de ressemblance avec la théorie des microzymas de Béchamp (Fokker, Untersiichunrjen ùber Hcterogencse. 1. Protoplasma Wirkiingen. 8°. Groningen, 1887. IV. Die Granula der Mileh, H", Noordhofî, Groningen, 1901, 102 p.). Le fondement principal de l'opinion de Fokreb, c'est la discordance entre le nombre des microbes qu'on constate dans un liquide et le nombre des colonies de ce microbe qu'on réussit à cultiver artiOciellement. On conçoit combien ces considérations sont fragiles, à cause de l'inexactitude efTrayante des méthodes de numération : elles sont donc par conséquent impuissantes à modifier toute, l'imposante doctrine de la spécificité des organismes. Nous ne parlerons ici que pour mémoire de la théorie de Liebig sur le mouvement communiqué, et de celle de Frkmy, proche parente de la théorie de Liebig, sur les hémi- organismes : car elles sont tombées l'une et l'autre dans un oubli mérité. Quand elles ne sont pas de la théorie pure, elles ne reposent que sur un petit nombre d'expériences imparfaites. On peut, dans une certaine mesure, rattacher à la théorie des générations spontanées la théorie du blastème défendue par Ch. Roiîin. (V. entre autres art. Blastème et Géné- ration du Dicl. encxjcl. des se. méd., (4), vu, 1881, .397-403.) A la rigueur la formation d'un blastème n'est pas tout à fait de la génération spon- tanée; car le protoplasma est matière vivante, et, quoique les cytologistes tendent au- jourd'hui à considérer que le protoplasma amorphe sans noyau est infécond, nous pou- vons concevoir un état, amorphe en apparence, de la matière organisée, qui n'est amorphe qu'en apparence, par suite de l'imperfection de nos procédés optiques. Nocard et Roux n'ont-ils pas décrit une bactérie tellement petite qu'elle est à la limite de la perception visuelle? Il ne serait donc pas impossible que la cellule, sans noyau et sans membrane, réduite à son seul protoplasma ayant alors forme d'un liquide, fût capable de segmentation. Mais Ch. Robin va plus loin : il dit même : « De la genèse des éléments anato- miques à l'hétérogénie, il n'y a qu'un pas, et réciproquement (p. 397). » Donc il tend à admettre l'hétérogénie comme il admet la production de cellules dans un liquide orga- nique sans noyau. Il reproduit les observations de Trégul {Réflexions concernant l'hété- rogénie, C. R., 1872, Lxxiv, 153), et, tout en reconnaissant que les preuves de l'hétéro- génie sont faibles, il la considère comme vraisemblable et probable, une accumulation de probabilités sans apport de faits convaincants, c'est-à-dire vériflables par épreuve et contre épreuve. En réalité les examens microscopiques n'ont, dans l'espèce, aucune valeur. Même en supposant — ce que contestent les micrographes les plus experts — que ces examens soient irréprochables, ils ne pourront jamais entrahier la conviction. Ce n'est pas par l'examen anatomique qu'on pourra montrer dans tel ou tel tissu l'absence de germe : et je ne vois pas bien encore par quel détour de discussion on renversera ce fait fon- damental : Recueillis dans des conditions rigoureusement aseptiques, les liquides organiques ne s'altèrent jamais; alors que, pris dans des conditions d'asepsie non rigoureuse, ils s'al- tèrent toujours. Conclusions. — De ce court exposé, il résulte en toute évidence, sinon que la géné- ration spontanée (ou hétérogénie) est impossible partout et toujours, au moins qu'elle n'a pas pu être démontrée. Toutes les prétendues démonstrations qu'on a cru en faire avaient pour point de départ une erreur de technique. Erreur grave ou légère, peu GENTIANOSE. 81 importe ; c'en est assez pour que tout l'édifice s'écroule. Au contraire, pour prouver qu'il n'y a pas de génération spontanée, des expériences incessantes, contrôlées dans les laboratoires divers du monde entier par tous les observateurs, établissent que les liquides organiques, même les plus altérables, ne s'altèrent jamais, ne donnent jamais naissance à des êtres vivants, si des 1,'ermes de ces êtres n'y sont pas parvenus. Dès qu'on y introduit des germes, la vie y pullule; mais jamais sans que les germes n'y aient pénétré. Il n'est peut-être pas de fait plus rigoureusement établi dans toute la science biolo- gique que celte stérilité persistante des liquides ou tissus organiques privés de germes, ou dont les germes ont été détruits par la chaleur. Aussi bien serais-je tenté de supposer, dépassant quelque peu en cela les données expérimentales, que la génération spontanée est impossible. Omnc vivum ex ovo reste la loi générale de la vie, et une loi qui n'a pas d'exception. Et en eflet, n'est-il pas aussi difficile de supposer la création de toutes pièces d'une monade avec ses cils vibratiles et ses organes différenciés, que la création d'une souris adulte, comme le croyait naïvement Van Heuiont? Le problème est le même, et une créa- tion spontanée, sans germe spécifique préalable, me paraît tout aussi absurde dans un cas que dans l'autre. Pourtant il faut s'arrêter dans cette voie de la négation; car l'histoire des sciences tend à rendre sage; et les idées marchent si vite que ce qui nous parait absurde aujourd'hui sera peut-être démontré par les savants des siècles à venir. En tout cas, actuellement, on doit dire qu'il n'y a pas de génération spontanée dans les conditions expérimentales connues. 11 n'est même pas besoin de supposer, pour expliquer les origines de la vie terrestre, qu'une génération spontanée a été nécessaire. Cet argument, presque métaphysique, qui a été longtemps l'arme suprême des hétéro- génistes, ne peut plus être valablement invoqué. On sait en effet que les bolides portent avec eux de la matière organique, et que la température à laquelle sont parfois soumis ces bolides n'est pas toujours suffisante pour en détruire tous les germes. Pourquoi ne pas admettre alors, sans le secours d'une génération spontanée terrestre, l'ensemence- ment de notre globe par ces météorites portant avec eux des poussières cosmiques et des germes d'êtres vivants venus d'autres mondes, où il y avait la vie? CHARLES RIGHET. GENTIANOSE. — Le gentianose est un hexotriose, C'^H^^Qie^ retiré de la racine fraîche de gentiane jaune {Gentiana lutea L.) Il a été découvert, en 1881, par Arthur Meyer qui lui a attribué des propriétés telles qu'on doit supposer qu'il a eu entre les mains surtout du sucre de canne (i). La preuve de l'existence réelle d'un sucre par- ticulier dans la gentiane, le mode de préparation de ce sucre, ses propriétés chimiques et biologiques, sa constitution ont été données par Bourquelot et Hérissey (2). Préparation du gentianose. — Pour obtenir le gentianose, il faut s'adresser à la racine fraîche de gentiane récemment récoltée (3), et non à la racine desséchée du com- merce dans laquelle ce sucre a, en grande partie, sinon totalement, disparu (4). La racine raîche paraitd'ailleurs en renfermer des quantités variables suivant lesépoques de l'année, et il s'y trouve accompagné de sucre de canne (5) et d'un glucoside particulier, la gen- tiopicrine (voyez ce mot), qui peuvent être isolés au cours des opérations que nécessite sa préparation. Dans un ballon de 3 litres de capacité, on introduit 2 litres d'alcool à Oo** et l'on chaulfe au bain-marie jusqu'à l'ébullition. On découpe la racine en menus morceaux que l'on fait tomber au fur et à mesure dans l'alcool bouillant; après quoi, on relie le ballon à un réfrigérant à reflux et l'on continue l'ébullition pendant une demi-heure. Après refroidissement, on décante, on exprime fortement la racine à la presse, on réunit les solutions et l'on filtre. On obtient ainsi 2300 à 2400 centimètres cubes de liquide que l'on distille pour en retirer l'alcool. On sature le résidu avec du carbonate de calcium précipité, on filtre, on évapore à consistance sirupeuse (poids du sirop : 120 grammes), et on l'abandonne à la température du laboratoire. Très lentement, l'extrait sirupeux se remplit de cristaux de gentiopicriiio, dont il y a intérêt, lorsqu'on le peut, à accélérer la production en amorçant avec de la gentiopi- DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 6 82 GENTIANOSE. crine antérieurement obtenue. Quand la masse est devenue presque solide, par suite de la formation de ces cristaux, on sépare ceux-ci en les essorant à la trompe sur un enton- noir de BiJGHNER. Ce sont de longues aiguilles enchevêtrées, se distinguant facilement des cristaux de gentianose, qui sont massifs. Quand à celui-ci, il reste en solution dans les liqueurs mères, Ces liqueurs, qui présentent la consistance d'un sirop épais, sont versées dans un ilacon de capacité convenable et additionnées d'alcool à 95". On agite et on laisse reposer. Le mélange ne tarde pas à se séparer en deux portions : l'une, de consistance d'ex- trait, fortement colorée, occupe le fond du vase; l'autre, liquide, limpide et cà peine moins foncée que la précédente, occupe la partie supérieure. On décante celle-ci, on la distille pour retirer l'alcool et l'on concentre le résidu au bain-marie jusqu'à consistance d'extrait mou. 1 kilogramme de racine fraîche de gentiane en fouinit de 50 grammes à 60 grammes. On reprend cet extrait à l'ébuUition à reflux par de l'alcool à 95° : une pre- mière fois par 300 centimètres cubes, une seconde fois par 100 centimètres cubes de cet alcool pour 100 grammes d'extrait. On filtre les liqueurs alcooliques, on les laisse repo- ser quelques jours, on les sépare, par décantation, du vernis qui s'est fixé aux parois du vase et on les abandonne dans un flacon bien bouché. La cristallisation est très lente et peut durer plusieurs mois. Bourquelot et Hérissey ont ainsi obtenu, dans cette première opération, en partant de 21 kilogrammes de racine fraîche de gentiane, 50 grammes de cristaux constitués par du gentianose presque pur. Ce n'est pas là la totalité du gentianose que renferme l'extrait ; car, en soumettant les résidus à divers traitements, les auteurs ont pu en obtenir encore de 140 à 150 gram- mes, en même temps qu'une cinquantaine de grammes de sucre de canne qu'il leur a été possible de séparer à l'état de pureté. Propriétés du gentianose. — Propriétés physiques. — Le gentianose cristallise à l'état anhydre. On peut l'obtenir cristallisé, non seulement à l'aide de l'alcool, mais encore à l'aide de l'eau, par évaporation dans le vide de sa solution aqueuse. Dans ce dernier cas, il se présente en lamelles carrées ou rectangulaires. C'est un corps très stable à l'air, ne prenant pas l'humidité. 11 possède une saveur très peu sucrée. Il est dextrogj're, sans présenter de phénomène de muUirotation. Son pouvoir rota- toire, à 15« — 20° est: a D = -}-31°,50. Le gentianose est très soluble dans l'eau, presque insoluble dans l'alcool à 95°, lors- qu'il est pur; soluble dans l'alcool dilué et d'autant plus soluble que celui-ci renferme plus d'eau. Le gentianose fond à 207°-209° (chiffre corrigé). Propriétés chimiques et physiologiques. — 1° Action hydrolysante de l'acide suJfurique dilué sur le gentianose. Le gentianose ne réduit pas la liqueur cupro-potassique; mais il la réduit après action des acides minéi'aux dilués. L'action hydrolysante de l'acide sulfurique dilué est différente, suivant qu'on emploie de l'acide à 30 p. 1000 ou de l'acide à 2 p. 1 000. Dans le premier cas, l'hydrolyse est complète, et l'on obtient, pour une molécule de gentianose, i molécule de lévulose et 2 molécules de dextrose. C18 H32 0»6 -^ 2 H2 0= C« H'2 06 + C6 H12 06 + C« H»2 06 Gentianose Lévulose Dextrose Dextrose Dans le second, l'hydrolyse est incomplète : il y a dédoublement du gentianose en une molécule de lévulose et une molécule d'un sucre nouveau, le gentiobiose, qui est un hexobiose. C18 H32 0»6 + H^O = C6 H12 06 + C'^ H" 0" Gentianose Lévulose Gentiobiose 2° Action hydrolysante des ferments soluhles sur le gentianose {&). — On obtient éga- lement des résultats différents suivant qu'on emploie le liquide fermentaire de VAspcr- gillus niger, liquide qui, comme l'on sait, renferme en dissolution plusieurs ferments, ou la solution d'invertin«. CENTIANOSE. 83 Avec le liquide d'Aspergillus on aboutit à une hydrolyse complète, comme avec l'acide sulfurique à 30 p. 1 000. Avec l'invertine (invertine provenant de levure haute) on obtient, comme avec l'acide sulfurique à 2 p. 1000, du lévulose et du gentiobiose. Gentiobiose, sa préparation, ses propriétés (7).— On vient de voir dans quelles conditions se forme le gentiobose. Pour l'obtenir à l'état de pureté et cristallisé, on peut opérer comme il suit : On fait d'abord une solution composée de: Gentianose 10 gr. Acide sulfurique à 2 p. 1000, Q. s. pour faire lOO"»^ On chauffe cette solution au bain-marie bouillant pendant 30 minutes; on laisse re- froidir; on neutralise par addition de carbonate de calcium précipité, on filtre et on dislille le liquide filtré dans le vide partiel. On reprend le résidu à l'ébuUition et à reflux, une première fois par 50'=°^'^ d'alcool absolu, puis une deuxième et une troisième fois par 50'=™^ d'alcool à 93". Le lévulose étant ainsi enlevé complètement, on reprend par 50cui3 d'alcool à 90° bouillant. On laisse refroidir et reposer quelques heures, puis on décante. La cristallisation sponlanée se fait très lentement; mais, quand on possède déjà du produit cristallisé, on s'en sert pour amorcer ; et alors il suffit de 3 ou 4 jours pour qu'elle soit terminée. On purifie par une nouvelle cristallisation dans ralco( 1 à 90°. Le gentiobiose ainsi obtenu se présente en longs prismes, souvent pointus aux deux bouts. Il fond vers 190-195°, le point de fusion étant assez difficile à saisir exactement. Il est très soluble dans l'eau et possède une saveur arnère, fait assez curieux pour un sucre. Il est dextrogyre et présente le phénomène de mullirotation. La rotation est plus faible au moment de la dissolution. Elle est même gauche au début. C'est ainsi que le pouvoir rotatoire a été trouvé : a D =: — 5°, 87 après 6 minutes de dissolution, pour une solution à 3°'", 1186 pour 100<=™^ Il devient, lorsque les variations ont cessé ; a D ^ + 9°,82. Le gentiobiose réduit la liqueur cupro-potassique. Pour décolorer lO'^™^ ^q cette li- queur, c'est-à-dire pour équivaloir à 08^'",0a de sucre interverti, il faut 06'^,081 de gentio- biose. Le quantité de maltose qui donne le même résultat en est si rapprochée (0S'',079), qu'on pourrait presque supposer que ces deux sucres ont le même pouvoir réducteur. Le gentiobiose est susceptible de se combiner avec l'alcool méthylique. Lorsqu'on le fait cristalliser dans ce véhicule, les cristaux que l'on obtient renferment 2 molécules d'alcool méthylique, de sorte que leur formule est la suivante : C'2 H22 OH +2 CH^O). Le gentiobiose méthylique est blanc,très hygroscopique;il possède une saveur amère. Chauffé graduellement, il fond d'abord à 8o°-86° (dans l'alcool méthylique de cristallisa- tion), puis se boursoufie, brunit légèrement, diminue de poids, redevient solide et fond de nouveau vers 189"-19o°, qui est la température de fusion du gentiobiose vrai. Naturellement, le gentiobiose méthylique agit sur le plan de la lumière polarisée comme le gentiobiose vrai, c'est-à-dire que son pouvoir rotatoire, calculé d'après la quan- tité réelle de gentiobiose, est a D ^^ + 9°, 8. Mais, fait curieux, sa multirotation se présente en sens inverse de celle du gentiobiose cristallisé dans l'alcool éthylique. Son pouvoir rotatoire est, en effet, plus élevé au moment où on le dissout, pour descendre peu à peu jusqu'à sa valeur définitive. Ainsi, pour une solution à 3,3984 de gentiobiose réel p. 100, ce pouvoir rotatoire, 6 minutes après dissolution, est: a I) + = i9°,l. Le gentiobiose est dédoublé à l'ébuUilion par l'acide sulfurique à 30 p. i 000 : il y a production de 2 molécules de dextrose. Dans les mêmes conditions, l'acide sulfurique à 2 p. 1 000 et l'acide acétique à 50 p. 1 000 sont ;i peu près sans action sur lui. L'invertine n'agit pas sur le gentiobiose, et celui-ci ne fermente pas en présence de la levure de bière ; mais le liquide fermentaire de VAfipenjillus et le produit retiré des amandes sous le nom d'émiilsine en déterminent l'hydrolyse complète. 84 GENTIOPICRINE. Constitution du gentianose(8). Mécanisme de son hydrolyse par les ferments. — De ce qui précède et, en particulier, de l'action des feiments sur le gentiobiose et sur le gentianose découle la constitution de ce dernier sucre. C'est bien un hexotriose dont la molécule résulte de l'union de trois molécules de sucre simple; deux molécules de dextrose et une molécule de lévulose, avec élimination de deux molécules d'eau. Pour déterminer son hydrolyse complète, il faut faire intervenir deux ferments, Vinvertine et la gentiobiase, ferment qui existe dans le produit appelé émulsine. Si le li((uide fer mentaire de VAspergillus, employé seul, conduit au même résultat, c'est qu'il renferme ces deux ferments. Ce n'est pas tout : les actions des deux ferments ne sont pas et ne peuvent être simul- tanées; l'action de l'invertine doit précéder celle de la gentiobiase (émulsine) puisque celle-ci, qui hydrolyse le gentiobiose, est sans action ou presque sans action sur le gentianose. On peut, en quelque sorte, comparer cet hexotriose à un appartement composé de deux pièces dont la deuxième n'est accessible qu'après qu'on a pénétré dans la première. Le gentianose est le premier exemple d'un hydrate de carbone dans lequel on ait pu obsei'ver nettement ces actions successives de ferments différents (9). Le gentianose est, au même titre que le sucre de canne qui l'accompagne, un aliment de réserve. Peut-être même est-il en même temps, comme ce dernier, un aliment circu- lant. Quoi qu'il en soit, pour être utilisé par la plante, il doit être d'abord hydrolyse, et cette hydrolyse est provoquée par des ferments qui interviennent à des époques et dans des conditions déterminées. L'existence de tels ferments dans la plante est démontrée par ce fait, que le gentianose disparaît pendant la dessiccation, de telle sorte que la racine sèche ne renferme plus que ses produits d'hydrolyse complète : lévulose et dextrose, ou partielle : lévulose et gentiobiose (10). La présence simultanée de gentianose et de sucre de canne dans la gentiane appelle encore une réflexion. Le premier, qui ne diffère du second que par une molécule de dextrose en plus, ne pourrait-il être considéré comme du sucre de canne combiné à du dextrose? L'action de l'invertine sur les deux sucres est un argument à l'appui de cette hypothèse. Cela conduirait à penser que le sucre de canne est vraisemblablement, des deux sucres, le premier formé. Bibliographie. — 1. Meyer (Arth.). Ueber Gentianose (Z. p. C, vi, 13o, 1882). — 2. BouRQUELOT (Em.) et HÉRissEY {E.) . Rechcrches sur le gentianose {A. C. P., [7J, xxvh, novembre 1902). — 3. Bourquelot (Em.) et Nardin (L.). Sur la préparation du gentianose (C. R., cxxvi, 280, 1898). —4. Bourquelot (Em.). Sur quelques données nouvelles relatives à la préparation des principes actifs des végétaux {Congrès intern. de Médecine de 1900. Section de Thérapeutique, 520). — 5. Bourquklot (Em.) et Hérissey [U.\ Sur la présence simultanée du saccharose et du gentianose dans la racine fraîche de gentiane {€. R., cxxxi, 750, 1900), — -6. Bourquelot (Em.). Sur la physiologie du gentianose ; son dédoublement par les ferments solubles (J. de Pharm. et de Chim., [6], vn, 369, 1898). — 7. Bourquelot (Em.) et Hérissey (H.). Sur le gentiobiose. Préparation et propriétés du gentiobiose cristallisé [C. R., cxxxv, 290, 1902); Sur le gentiobiose cristallisé (J. de Pharm. et de Chim., [6], xvi, 417, 1902), — 8. Bourquelot (Em.) et Hérissey (H.). Sur la constitution du gentianose [C. R., cxxxii, 571, 1901). — 9. Bourquelot (Em.). Sur VhydroUjse des polgsaccharides par les ferments solubles (J. de Pharm. et de Chim., [6], xvi, 578, 1902). — 10. Bourquelot (Em.) et HÉRISSEY (H.). Les sucres de lapoudre et de l'extrait de gentiane (J. de Pharm. et de Chim., [6], XVI, 513, 1902). EMILE BOURQUELOT. GENTIOPICRINE. — La gentiopicrine est un glucoside qui fut retiré pour la première fois, en 1862, par Kromayer, de la racine fraîche de gentiane. {Ueber das Enzianbitter. Arch. de Pharm., [2], ex, 27, 1862.) Ce chimiste, en suivant un procédé très laborieux, en avait retiré seulement 4 grammes de 3 kilogrammes de racine de gentiane. Depuis Kromayer jusqu'aux recherches récentes de Bourquelot et Hérissey, il ne paraît pas qu'on ait réussi à isoler de nouveau ce glucoside. Mais ces derniers expérimentateurs ont donné un procédé qui permet de l'obtenir assez facilement et en quantités notables. GENTISIN. 85 Préparation de la gentiopicrine. — Bourquelot (Em.) et Hkrissey (H.). Sur la préparation de la gentiopicrine, glucoside de la racine fraîche de gentiane [Journ. de Pharm. et de Chim., [6], xii, 421, 1900). La gentiopicrine est obtenue, à l'état impur dans les premières opérations de la préparation du gentianose (voyez ce mot). Une première purification est faite en dissolvant à chaud les longues aiguilles recueillies sur l'enton- noir de Bi CHNER, dans un mélange à volumes égaux d'alcool à 9^" et de chloroforme, et en provoquant la cristallisation par addition d'éther. On emploie, pour 50 grammes de gentiopicrine brute, 125 ce. d'alcool et. autant de chloroforme. Après vingt-quatre heures de repos, on filtre dans un vase étroit, et, à l'aide d'une pipette, ou fait tomber l'éther de telle sorte qu'il ne se mélange pas au liquide sous-jacent. Le vase bien bouché est placé dans un lieu frais, et bientôt la gentiopicrine cristallise. Les cristaux ainsi obtenus sont encore colorés. On répète sur eux l'opération précédente, en ajoutant, cette fois, du noir animal à la solution chloroformo-alcoo- lique. Propriétés de la gentiopicrine. — La gentiopicrine cristallise en aiguilles pris- matiques pouvant atteindre 6 à 8 centimètres de longueur. Elle est très soluble dans l'eau et l'alcool; ù peine soluble dans l'éther. Elle est fortement lévogyre : aD=: — 196". Elle présente une saveur très amère. Bourquelot et Hérissey ont constaté que la gen- tiopicrine est dédoublée par l'émulsine en donnant du dextrose et un principe qu'ils ont obtenu cristallisé : la gentiogcnine, mais qui n'a pas encore été étudié. Pendant la dessiccation de la racine de gentiane, la gentiopicrine disparaît. On trouve alors un prin- cipe particulier, cristallisable, le gentisin, dont les relations avec la gentiopicrine sont encore inconnues. EMILE BOURQUELOT. GENTISIN. — Syn : Gentianin, gentisine, acide gentianiqiœ. Principe cristal- lisé retiré de la racine de gentiane jaune desséchée {Gentiana lutea L.). Henry et Caventou ont, les premiers, en 1821, retiré un produit cristallisé de la gen- tiane desséchée, et lui ont donné le nom de gentianin (1). Ils le considéraient comme étant le principe auquel ce médicament doit son amertume. Mais il a été démontré en 1837, et presque en même temps, par H. Trommsdorff (2) et Cl. Leconte (3), que le gen- tianin, tel que l'avaient obtenu Henry et Caventou, était un produit insuffisamment purifié et dont l'amertume était due à une impureté. En conséquence, Leconte a jugé qu'il y avait lieu de créer un nouveau nom pour désigner le produit pur qui, lui, est insipide : il a proposé le nom de gentisin qui a été généralement adopté. Préparation. — On se base, pour extraire le gentisin, sur sa solubilité dans l'alcool et sur son insolubilité dans l'eau. D'après Leconte, on peut opérer comme il suit : On fait macérer la poudre de gentiane dans de l'alcool fort; on sépare la teinture obtenue que l'on distille, on achève au bain-marie l'élimination de l'alcool et, au résidu, on ajoute de l'eau qui dissout la matière amère, l'acide libre et le sucre, laissant, sous forme de flocons, la matière grasse et le gentisin. On recueille le précipité, on le lave, on le fait sécher et on le reprend à chaud par de l'alcool à 80° qui dissout le gentisin et seulement des traces de matière grasse. Par refroidissement et par évaporation spontanée, le gen- tisin cristallise. On le lave avec un peu d'éther, et on le fait cristalliser de nouveau dans de l'alcool à 80°. D'après Leconte, 1 kilogramme de poudre de gentiane ne donne pas plus de 1 gramme de gentisin. Propriétés. — Le gentisin se présente sous forme de longues aiguilles jaune pâle, ne renfermant pas d'eau de cristallisation, et qui se volatilisent, en se décomposant en partie, à une température supérieure à 300°. Il est très peu soluble dans l'eau qui, à la température ordinaire, n'en dissout que 1/5000 de son poids environ (Leconte). Il est plus soluble dans l'alcool, surtout bouillant, L'éther n'en dissout que 1/2000 de son poids (Leconte). Le gentisin se conduit comme un acide, ou du moins, forme avec les alcalis, des sels cristallisables qui ont été étudiés par Leconte (3), M. Baumert (4), H. Hlasiwetz et J. Habermanx (5). Aussi la présence d'alcali augmente-t-elle sa solubilité dans l'eau. On a pu préparer, à l'état cristallisé, les sels de potassium et de sodium. En dissolution 86 GÉOTROPISME DES ANIMAUX. aqueuse, ces sels sont, d'après Leconte, décomposés par un courant d'acide carbonique. Constitution du gentisin. — La formule brute du gentisin est C'^H*<'0\ Traité à chaud par un alcali caustique, il fournit, d'après Hlasiwetz et Habermann, de l'acide acétique, de la phloroglucine, et un acide que ces auteurs avaient appelé acide gentisique, mais qui est de l'acide hydroquinone carbonique, C'H^O^. V, KosTANECKi ayant établi (6) qu'en traitant le gentisin par l'acide iodhydrique on lui enlève CH^ en produisant un composé C'^H^O^ qu'il a appelé (jentiséine, il s'ensuit que le gentisin est l'éther mélhylique de la gentiséine : C'*H'0\ CH^ Or la gentiséine a été obtenue synthétiquement par V. Kostaxecki et Tambor (7) en distillant en présence d'anhydride acétique, un mélange équimoléculaire d'acide hydro- quinone carbonique et de phloroglucine : CHfiOi + C6H603 = H20 + C13H803. Comme enfin on peut passer, par méthylation, de la gentiséine au geatisin (8), on voit que la synthèse totale de ce dernier corps a été réalisée. Propriétés thérapeutiques. — Le gentisin ne possède pas de propriétés thérapeu- tiques. Si les préparations de gentianin ont paru autrefois présenter quelque activité, celle-ci doit être rapportée à la matière amère qui accompagnait ce produit impur. Bibliographie. — 1. Hexry et Caventou. Sur le principe qui cause l'amertume dans la racine de gentiane (Gentiana lutea L.) (/. de Pharm., vu, 173, 1821). — 2. Trom.ms- DORFF (H.). Ueber den krystallinischen Bestandtheil der gentianwurzel {Ann. d. Pharm., xxi, 134, 1837). — 3. Leconte (Cl.) Faits pour servir à Vhistoire chimique de la racine de gen- tiane (J. de Pharm., xxm, 465, 1837, Thèse). — 4. Baumert (M.). Ueber die Zusammenset- zung des Gentianins [Ann. d. Ch. und Pharm., lxii, 106, 1847). — 5. Hlasiwetz {R.) und Habermann (H.). Ueber das Gentisin {Ann. d. Chem., clxxv, 62, 1873). — 6. Vos Kostanecki. Ueber das Gentisin [Monatsh. f. Chem., xii, 203, 1891). — Von Kostanecki et Schmidt (E.). Ueber das Gentisin. [Monatsh. f. Chem., xii, 318, 1891). — Von Kostanecki et Tambor (.).). Synthèse des Gentisins [ibid., xv, 1, 1894; Ueber einen xoeiteren synthetischen Versuche in der Gentisinreihe (ibid., xvi, 919, 1895). EM. BOURQUELOT. GÉOTROPISME (Géotaxie) des animaux. — Historique et description du phénomène. — Les phénomènes de géotropisme connus depuis long- temps chez les végétaux ont été également étudiés chez les animaux dans ces vingt dernières années, sous le nom de géotaxie^. Verworn définit la géotaxie comme «le phénomène d'après lequel certains organismes se placent et se meuvent de manière à diriger leur grand axe dans un sens parfaitement déterminé par rapport au centre de la terre ». L'animal est positivement 'géotactique lorsqu'il se dirige dans le sens où il est sollicité par la gravitation; il est négativement géotactique lorsqu'il se dirige en sens inverse et par conséquent s'éloigne du centre de la terre. C'est en vertu des pro- priétés géotactiques que les organismes unicellulaires placés dans un tube de verre tenu verticalement et rempli d'eau, descendent et s'accumulent au fond du vase, ou bien s'élèvent et se dirigent vers la surface du liquide. Schwarz (1884) fut le premier à indiquer l'action de la pesanteur sur les organismes unicellulaires. Il a observé la géotaxie négative chez les Euglénes et les Chlamydomonades, et a vu ces organismes s'accumuler toujours aux parties supérieures du vase qui les contient. Si on les place dans les tubes duclinostat — appareil formé d'une caisse cubique qui tourne autour d'un axe — et qu'on les soumette à une rotation prolongée en les sous- trayant ainsi à l'action directrice de la gravitation, ces protozoaires se dirigent généra- 1. L'orientation des mouvements des êtres unicellulaices a toujours été désignée par le mot tropisme qui sert en botanique à désigner l'effet d'accroissement dans une direction donnée de certaines plantes sous l'influence des irritants. Aujourd'hui on emploie en zoologie le m.o\, tactisme pour exprimer le déplacement de la cellule dans une direction imprimée par un irritant. Les tropismes peuvent du reste être considérés comme des formes spéciales de tactisme. GÉOTROPISME DES ANIMAUX. 87 lenient vers le centre du clinostat. Ces faits ont été confirmés par Aderhold (1886) et d'autres physiologistes. Verworn (1889), qui a également observé ces phénomènes chez différents protozoaires rapporte l'orientation géotactique négative chez les flagellés à des causes purement physiques, mais non aune action spéciale de la pesanteur; il n'admet pas que l'action de la pesanteur paisse être identifiée avec celle d'un irritant. La montée on la chute des organismes à poids spécifique assez grand peut très bien être l'effet de l'activité ou du repos do leurs organes locomoteurs, comme cela s'observe facilement chez les infusoires ciliés. Pour Verworn, le phénomène géotactique résulte d'une excitation produite par les minimes diflerences de pression qui existent dans l'eau comme dans l'air en des points de hauteur différents. Il importe de remarquer que, d'après Verworn, la géotaxie n'est qu'une forme spéciale de la Barotaxie. Sous ce nom Verworn désigne les phénomènes qui sont provoqués par une action des différences de pression en deux points différents du corps d'un organisme. Suivant que l'organisme se dirige du côté de la pression, la plus élevée ou la plus basse, la barotaxie sera positive ou négative. On peut distinguer plusieurs sortes de barotaxie d'après la nature de la pression. La Thigmotaxie présente une forme de barotaxie qui résulte du contact plus ou moins fort de la matière vivante avec des corps solides, comme la Rhéotaxie présente une autre forme due à la pression produite par un faible courant d'eau, de sorte que les organismes se tournent du côté où s'exerce la pression et se meuvent en sens inverse du courant de l'eau. Enfin, la Géotaxie, dans laquelle l'excitation est fournie par des dilTérences de pression hydrostatique, doit être considérée comme une troisième forme de barotaxie. Massart a étudié la géotaxie chez les spirilles, les flagellés (Polytoma iivella et Chla- mydomonas piilviscullus) et les infusoires ciliés {Anophrys sarcophaga). Il a vu, que ces organismes placés dans des tubes en verre capillaires s'accumulent tantôt à la partie supérieure, tantôt à la partie inférieure du tube. Il critique la conception physique de la géotaxie émise par Verworn et considère les mouvements géotactiques des organismes comme des transports actifs dus à l'irritabilité spéciale de la cellule mise en jeu par la gravitation. Les protozaires morts perdent leur géotaxie négative, et tombent au fond du tube avec le flagellum dirigé en haut ou bien sans mise en axe déterminée. Beaucoup d'espèces de bactéries, d'après Massart, manifestent une géotaxie positive et se rassem- blent d'habitude à l'extrémité inférieure du tube. C'est Jensen (1892) qui a étudié la géotaxie chez les organismes unicellulaires avec le plus de rigueur et de précision. Il a observé les phénomènes géotactiques chez de nombreux protozoaires, aussi'bien que chez les flagellés : Ewjlena viridis et Chlamydomonas pidvisculus que chez les infusoires ciliés : Paramœcium aiirelia, Urostyla grandis. Spiros- omum ambiguum. Paramœcium bursaria, Colpoda cncullus, Colpidiiim colpoda,Ophryoglena flava et Coleps hirtiis. Placés dans des tubes bouchés aune de leurs extrémités, la plupart de ces organismes présentent une géotaxie négative et se dirigent vers l'extrémité supé- rieure du tube, même lorsque celui-ci n'a pas une position tout à fait verticale, mais qu'il incline vers la surface horizontale avec laquelle il forme un angle plus ou moins prononcé. Dans ce dernier cas, les mouvements géotactiques, quoique très nets, sont plus ou moins ralentis, en rapport avec le degré d'inclinaison du tube. Ce phénomène s'observe avec beaucoup de netteté chez la paramécie et chez l'euglène. Certains protistes, comme Colpoda ciicullus et Coleps, présentent une géotaxie positive, tandis que VOphryoglena ne paraît manifester aucune orientation géotactique. Jensen conclut de ses nombreuses expériences que c'est la mise en axe qui présente l'élément fondamental du phéno- mène géotactique et provoque l'orientation directrice du mouvement. Cette mise en axe résulte de l'action de la pression hydrostatique sur les mouvements vibratoires des cils. Dans tout ce qui précède il n'a été question que des organismes élémentaires. La géotaxie n'est pourtant pas l'apanage exclusif des cellules à vie libre, et s'observe égale- ment chez les organismes pluricellulaires, quoique sous une forme bien plus complexe. J. LoEB (1881-1891) a décrit les phénomènes géotactiques chez les actinies, chez les étoiles de mer et même chez les arthropodes et les crustacés. Une actinie (Cerianthus) placée dans un vase dans de différentes positions tend toujours à orienter son corps de manière que la tête soit tournée en haut et le pied en bas dans le sens de la gravitation. 88 GEOTROPISME DES ANIMAUX. Cette orientation est due, d'après Loeb, à la géotaxie positive dont sont douées les actinies et qui leur permet d'avoir toujours le pied tourné vers le centre de la terre. Le pied prend cette direction même lorsqu'il est séparé du reste du corps; il possède donc une irritabilité géotropique propre. Certains échinodermes, comme par exemple Cucumaria cucumis et Asterinn gibbosa, présentent une géotaxie négative, grâce à laquelle ces organismes remontent vers la surface de l'eau sans toutefois la dépasser complè- tement. Placés sur une plaque en verre verticale que l'on fait tourner autour d'un axe horizontal, ils accusent une tendance à grimper en haut chaque fois que le plateau fait un tour de 90°. Loeb croit qu'il s'agit là de l'action de la gravitation dans le sens ver- tical et rapproche ce phénomène géotaclique d'un phénomène analogue observé chez quelques insectes. D'après Loeb, c'est en vertu de la géotaxie négative que les papillons quittent leur enveloppe et rampent en haut le long d'une paroi verticale avec la tête tournée en haut jusqu'au moment où leurs ailes se déplient complètement et détermi- nent une nouvelle série de mouvements propres au vol. Certains crustacés, comme par exemple Astacus fluvialis, placés sur le dos, exécutent une série de mouvements pour se retourner et se mettre de nouveau sur le ventre. Ce phénomène s'observe aussi bien chez les animaux normaux que chez les animaux privés de leur cerveau. D'après Loeb, ces mouvements sont dus à l'action de deux espèces d'irritants : irritants géotropiques et stéréotropiques. Quelques polypes Hydrozoaires manifestent également des propriétés géotactiques (Loeb etDaiEscH). Davenport et Perkins (1897) ont fait des expériences très intéressantes sur la géotaxie du Limax maximus. Ils ont mesuré la réaction géotactique de la limace par l'orientation de l'axe du corps dans le sens vertical sur des plaques inclinées à divers degrés. Les influences lumineuses et thermiques avaient été éliminées autant que possible. Ils ont constaté ainsi que la précision de l'orientation géotactique augmente à mesure que la plaque verticale s'éloigne de sa position horizontale; elle est presque directement pro- portionnelle au sinus de l'angle d'inclinaison, autrement dit à la valeur de la compo- sante efficace de la pesanteur. La pression minimum capable de provoquer une réaction géotactique atteint Os^^lS. La rapidité avec laquelle se produit le phénomène de géotac- tisme chez la limace n'est pas influencée, du moins dans de très larges limites, par l'inten- sité de l'irritant, c'est-à-dire par la valeur de la composante de la pesanteur. Suivant que le segment antérieur de l'animal se tourne en bas ou en haut la limace présente un géotactisme positif ou négatif. Il est difficile de préciser la cause qui détermine la position variable du segment antérieur de l'animal lors de ses réactions géotactiques. Il s'agit ici probablement de causes multiples, soit internes, soit externes, peu délinies et d'ailleurs très instables. Frandse.n (1901) a poursuivi ces études sur les réactions du Limax maximus aux excitations directrices et a également constaté chez la limace une géotaxie tantôt positive tantôt négative. La géotaxie chez la limace est soumise à des influences multiples et variées; elle varie suivant l'individu, suivant l'état de nutrition, et même suivant les jours et les différentes heures de la journée. Elle est modifiée éga- lement par la quantité etla qualité du mucus sécrété, ainsi que par le rapport entre la lon- gueur de la partie antérieure du corps et la partie postérieure, celle-ci, suivant son poids, pouvant se placer à un niveau inférieur ou supérieur à celui de la tête. Wheeler (1899) a observé chez les différents insectes la géotaxie combinée à d'autres tactismes. Il croit même que certains instincts chez les insectes pourraient être ramenés à des tactismes. D'autres expérimentateurs, au cours de leurs recherches d'ordre spécial, ont également observé des phénomènes de géotaxie chez divers animaux, ou du moins ont cherché à ramener certains faits observés à des actions géotactiques. Tout ce que nous venons de dire indique combien les phénomènes géotactiques sont répandus dans le règne animal, du moins dans les cellules à vie libre et chez un grand nombre d'invertébrés. Ces réactions persistent-elles chez les vertébrés et chez l'homme ? Il est difficile de répondre catégoriquement à cette question d'ordre très complexe. Mais il est probable que les animaux supérieurs sont également soumis à des actions géotactiques. Les phénomènes qui en résultent présentent une grande complexité par suite de la par- ticipation du système nerveux et ils ne peuvent pas être observés avec la même netteté que le phénomène de l'orientation géotaclique dans une cellule à vie libre. L'orientation générale du corps d'un animal supérieur, provenant du mouvement des muscles, ne pré- GEOTROPISME DES ANIMAUX. 89 sente pas une réaction directe de même ordre que celle du mouvement géolaclique d'un organisme unicellulaire. Le mécanisme du phénomène géotaclique est par conséquent bien plus compliqué chez l'homme et chez les animaux vertébrés que chez les organismes élémentaires. 11 est admis actuellement en physiologie que l'orientation géotactique chez les animaux supérieurs se fait dans un organe spécial qui est situé dans les canaux semi- circulaires de l'appareil auditif et qui exerce une action sur l'équilibration du corps par rapport à la gravitation. Quoi qu'il en soit de cette hypothèse basée sur de nombreux faits expérimentaux, il n'en est pas moins vrai que, chez les organismes supérieurs, les diffe'rents mouvements complexes, et particulièrement les mouvements locomoteurs, sont orientés par les actions géotactiques. Il résulte des faits exposés plus haut que la géotaxie est une propriété générale des animaux et se manifeste chez ces derniers dans un sens ou dans l'autre suivant les condi- tions physiques et biologiques de la vie de l'individu. Interférence de la géotaxie avec d'autres tactismes. — Dans les manifesta- tions normales de la vie des organismes on a rarement affaire à l'action isolée de la géotaxie. Les réactions des protoplasmas vivants sont généralement complexes et sotit dues à l'action combinée et simultanée des différents irritants. Aussi l'effet géotactique est-il souvent contrecarré, masqué et même annulé par un autre tactisme agissant dans le même sens ou bien dans le sens contraire. Grâce à l'interférence des différents tac- tismes avec la géotaxie, cette dernière peut changer de caractère et d'intensité chez le même individu, suivant les conditions physiques du milieu. C'est aux actions d'interfé- rence des divers tactismes qu'il faut attribuer souvent la marche irrégulière d'une expé- rience géotactique, et peut-être même les résultats discordants obtenus par les divers observateurs. Sosnowski (1899) a étudié avec beaucoup de soin les actions d'interfé- rence de la géotaxie avec d'autres tactismes chez le Paramxcium. Il a constaté que, dans certaines cultures, ces infusoires, qui sont d'habitude négativement géotactiques, deviennent positivement géotactiques à la suite des secousses imprimées au milieu qui les contient; dans certains aquariums le sens de la géotaxie peut être changé, soit par une élévation de température, soit par l'addition de petites quantités d'alcalis ou d'acides. L'irritant thermique influence notablement le sens de l'action géotactique. Dans mes expériences sur la thermotaxie des organismes unicellulaires, j'ai eu l'occasion de constater maintes fois la perversion du sens de l'orientation géotactique et môme l'annulation de l'effet géotactique sous linlluence de la thermotaxie. D'autre part, l'irritant thermique peut parfois donner lieu à la production simultanée des phénomènes thermotactique et géotactique. Ainsi, par exemple, une plasmodie d' Aetlialiiim septicmn, qui passe d'un vase chaud dans un vase froid, présente, sous l'influence de la différence de température, non seulement un phénomène de thermotaxie positive, mais aussi celui de géotaxie négative et positive. L'irritant thermique excite l'organisme non seulement par les diffé- rences de température, mais aussi par les modifications des différences de pression hydro- statique qu'il produit. Chez les ciliés et les flagellés, les réactions mixtes résultent de la combinaison des effets de la géotaxie avec différents tactismes sont très fréquentes (Je.nsen). Chez l'euglène, par exemple, la phototaxie l'emporte toujours sur la géotaxie; dans l'obscurité, c'est l'effet de l'oxygénolaxie et de la thermotaxie qui contrebalance celui de la géotaxie. L'oxygénotaxie est un facteur très important dans les actions d'interférence auxquelles est soumis le phénomène géotactique. Il est souvent difficile de déterminer la part qui revient à la géotaxie négative ou à l'oxygénotaxie positive dans le mouvement d'orientation qui dirige, par exemple, une euglène de bas en haut vers la surface de l'eau contenue dans un tube. L'oxygène exerce une action directrice manifeste sur le protoplasma, et la distribution variable de l'oxygène, dans un milieu contenant des protozoaires influence, non seulement l'orientation, mais aussi la nature et l'intensité des mouvements de ces derniers. En supprimant l'oxygène on peut arrêter complètement les mouvements des protozoaires dans l'eau; les mouvements réapparais- sent aussitôt que l'oxygène est restitué au milieu qui contient ces organismes (VF.RWonN). D'autres irritants interviennent encore dans les phénomènes d'interférence et influen- cent les réactions géotactiques chez les différents organismes. Il y a'souvent lutte entre les actions de la géotaxie et celles des thigmo-, rhéo- et chimiotaxies. Le milieu dans lequel vivent les protistes contient trop de substances chimiques pour que les actions 90 GEOTROPISME DES ANIMAUX. chimiotactiques, qui eu résultent, n'influencent notablement la nature et la marche du phénomène géotactique. Jennings a bien étudié les réactions produites chez Paramoe- ciiim aiirelia par l'action combinée des différents tactismes. Il croit que l'activité nor- male du Paramœciiim résulte de l'action mixte de géo-, thygmo- et chimiotaxies, et que c'est en vertu de la géotaxie négative que l'infusoire se tient à la partie supérieure de l'eau. Ces faits démontrent que les actions d'interférence jouent un très grand rôle dans les manifestations géotactiques des animaux, et que l'étude des phénomènes de géotaxie comporte une analyse rigoureuse de toutes les réactions mixtes qui inlluent sur l'orien- tation directrice des mouvements de l'animal. Nature et mécanisme du phénomène géotactique. Différentes théories. — Toute théorie de la géotaxie devrait avant tout répondre à la question de savoir quel est le rôle de la pesanteur dans la production du phénomène géotactique, et si l'on peut considérer la pesanteur comme un irritant de la matière vivante. Aderhold, cherchant à se renseigner sur la nature de la cause de l'orientation chez les cellules à vie libre, posa le premier la question de la nature physique du phénomène géotactique. Il se demandait avec raison si, dans le mouvement ascensionnel del'euglène» il ne s'agit pas d'un simple effet de la pesanteur qui produit la mise en axe de cet orga- nisme dont le poids spécifique est plus grand que celui de l'eau et dont le centre de gra vite est placé dans la partie postérieure du corps. Dans ces conditions l'euglène se tour- nerait natui'ellement toujours avec l'extrémité postérieure du corps en bas, tandis que l'extrémité antérieure, pourvue du flagellum dirigé en haut, déterminerait la direction du mouvement vers la surface de l'eau. Cette conception logique ne paraît pas cepen- dant à Aderhold suffisante pour fournir une interprétation générale de la nature du phé- nomène géotactique, et il conclut que dans la production de la géotaxie d'autres facteurs devraient être encore pris en considération. Massart rejette toute théorie purement phy- sique de ce phénomène et considère la géotaxie comme un effet d'irritabilité spéciale du protoplasma mise en jeu par la gravitation. La pesanteur serait donc un vrai irritant de la matière vivante et interviendrait comme cause déterminante du phénomène géo- tactique. Déjà, en 1889, Verworn s'est élevé contre la manière de concevoir la pesanteur comme un irritant et a cherché à donner à la géotaxie une interprétation déduite de sa théorie générale des actions directrices produites par des excitations unilatérales. D'après Ver- worn, pour que les phénomènes tactiques se produisent chez les organismes se mouvant en liberté, il est indispensable qu'il existe des différences dans l'excitation aux différents points du corps. Seule une excitation inégale peut commander une direction de mouve- ment. Les phénomènes des différents tactismes se produisent par la mise en activité d'éléments moteurs contractiles à la suite d'une excitation unilatérale ou bien à la suite d'une excitation d'une intensité inégale en deux endroits de la cellule à vie libre. La rai- son principale de toute action directrice se trouve dans la position axiale du corps cellu- laire et toutes les positions axiales sont déterminées par une excitation portée sur un des pôles du corps. Le mécanisme des phénomènes tactiques découle nécessairement de la mise en axe et du mode de mouvement spécial à chaque organisme. Ainsi tous les organismes qui, à l'état normal se meuvent dans la direction de leur axe longitudinal doivent, sous l'influence de l'excitation, acquérir celte position axiale avant d'orienter leurs mouvements dans un sens déterminé. C'est l'activité des éléments moteurs, cils et fouets vibratiles, qui détermine le mécanisme de la mise en axe et par conséquent l'orientation des mouvements des organismes élémentaires sous l'action des irritants. Verworn abien précisé les conditions spéciales du mouvement d'orientation pour les différentes formes d'organismes qui se meuvent dans l'eau au moyen d'un seul flagellum, de deux flagella, ou bien au moyen d'un grand nombre de cils. Nous ne pouvons pas entrer ici dans les détails de tous les faits qui ont servi à Verworn de base à une théorie générale des phénomènes tactiques chez les organismes unicellulaires. Mais ce sont les conceptions générales de Verworn qui ont servi de point de départ à Jensen pour formuler une théorie de la géotaxie qui serre de beaucoup plus près le phénomène et sa cause déter- minante. D'après Jensen, la réaction géotactique des organismes contenus dans un tube de verre GEOTROPISME DES ANIMAUX. 91 vertical rempli d'eau est déterminée par les différences de pression en des points de hauteurs différentes. L'excitation est produite par les différences de la pression hydro- statique qui, dans une colonne d'eau, va en diminuant de bas en haut. Certains organismes excités ainsi accusent une tendance à se transporter vers les endroits à faible pression etàs'éloiguer des endroits où la pression hydrostatique est plus élevée : d'autres au con- traire s'écartent des endroits à haute pression et cherchent à rejoindre des endroits à pression moindre. Dans le premier cas on a affaire à un phénomène de géotaxie négative, dans le second, c'est le phénomène de géotaxie positive qui se produit. Dans les deux cas il ne s'agit nullement de la position que le centre de gravitation de l'animal occupe dans l'extrémité postérieure ou antérieure de son corps, mais le phénomène est dû uniquement à une translation active à la suite d'une mise en axe déterminée. Cette mise en axe est toujours l'effet de l'excitation plus forte qui, suivant la nature de la géotaxie, peut être produite aussi bien par les pressions plus élevées que par les pressions moins élevées. Les organismes négativement géotactiques sont plus fortement excités par les hautes pressions hydrostatiques, tandis que les organismes positivement géotactiques sont plus fortement excités par les pressions basses. En général, les protistes accusent une grande sensibilité pour les différences de pression hydrostatique. Déjà une diffé- rence de pression égale à une colonne d'eau de 1 centimètre excite Teuglène et provoque chez cet organisme un effet géotactique très manifeste. Jensen a institué une série de recherches très ingénieuses qui fournissent des preuves à l'appui de sa théorie. Pour s'assurer que l'accumulation géotactique des paramécies à la partie supérieure du tube de verre est due aux différences de pression hydrostatique et non à la pesanteur, il cherche à modifier cette pression dans un tube de verre placé horizontalement, où par conséquent normalement il ne pouvait exister aucun rassemblement géotactique des paramécies. A cet effet, il éleva la pression par la centrifugation dans la direction de l'extrémité périphérique et créa dans le tube en verre tenu horizontalement des condi- tions de la pesanteur analogues à celles qui existent dans un tube placé verticalement. Or, dans ces conditioiis, les paramécies ne suivent pas du tout les lois de la pesanteur, mais s'accumulent toujours à l'endroit de la pression la plus faible qui se trouve à l'extrémité centrale du tube. Pour que cette expérience réussisse, il faut que la vitesse de rotation du disque centrifugeur soit faible ou moyenne; lorsqu'elle est trop rapide, les infusoires, plus denses que l'eau, sont entraînés vers la périphérie. Le phénomène d'après lequel les paramécies se rangent à l'extrémité centrale du tube centrifugé est désigné par Jensen sous le nom de centrotaxie. 11 est certain que la théorie de Jensen explique très bien les phénomènes de géotaxie chez les organismes qui vivent dans l'e au mais elle est difficilement applicable aux animaux qui vivent sur terre, et encore moins aux vertébrés et à l'homme. Il est vrai que les phénomènes géotactiques chez ces derniers sont très complexes et échappent à une interprétation simple. Néanmoins quelques tentatives ont été faites dans cette voie et ont fourni des résultats qui méritent d'être mentionnés ici, J. LoEB a formulé une conception énergétique de la géotaxie en admettant un parallélisme entre les phénomènes géotactiques et ceux qui résultent de l'action de la tension sur le muscle. La gravitation, comme d'autres agents physiques, exerce chez les êtres vivants une action manifeste sur la tonicité du protoplasma. Tous les tropismes et tous les tactismes (et d'après Loeb il n'y a pas de différence réelle entre ces deux ordres de phénomènes) se rapportent ainsi à des différences de tonicité cellulaire dues à l'action des excitations extérieures. Les modifications de la tonicité de la cellule expli- quent aussi bien le mécanisme des courbures chez les végétaux que les mouvements d'orientation chez les animaux. La géotaxie est ainsi l'effet de l'action de la pesanteur sur la tonicité des organismes. Quant aux animaux supérieurs pourvus d'un système nerveux perfectionné, Loeb croit que la pesanteur exerce une action directe sur les cellules ganglionnaires du cerveau et les oriente dans un sens déterminé. Radl, en cher- chant à appliquer sa théorie de phototropisme aux phénomènes géotactiques, reprend l'idée de Loeb relative à l'action tonique delà pesanteur, et lui fait jouer un rôle impor- tant dans l'interprétation des phénomènes géotactiques chez les animaux supérieurs. La géotaxie chez ces derniers serait l'effet de l'action de deux forces (la pesanteur et la tension musculaire) sur l'organisme labyrinthique,comme chez les organismes inférieurs 92 GÉOTROPISME DES ANIMAUX. la géotaxie résulterait de l'action de deux autres forces : la pesanteur, et une force intérieure qui produit le mouvement. C'est toujours une paire de forces qui produit l'orientation directrice en général et par conséquent celle de la géotaxie également. Cette interprétation est purement hypothétique, et dépasse quelque peu la valeur des faits observés. Malgré les faits si démonstratifs de Verworn et Jensen relatifs à la nature de la géo- taxie, l'idée de l'action de la pesanteur comme irritant géotactique n'est pas tout à fait abandonnée dans la science. Tout récemment encore, Daventort a vu dans le mécanisme du mouvement géotactique de bas en haut une action directe de la pesanteur sur l'orga- nisme qui réagit négativement. La géotaxie de toute cellule, dont le poids spécifique est plus grand que celui de l'eau, dépend de la résistance plus ou moins grande que la cellule doit vaincre, suivant qu'elle nage en haut ou en bas. Platt, qui a cherché à vérifier ces faits en déterminant le poids spécifique de Spirostomum , Paramaecium et du têtard dans ses rapports avec le problème de la géotaxie, est arrivé à la conclusion que d'une manière générale la pesanteur n'a pas d'action directe sur l'ensemble des organismes, mais qu'elle agit sur quelque organe interne du corps cellulaire et exerce ainsi indirectement son action géotactique. Cet organe, analogue aux canaux semi-cir- culaires chez les animaux supérieurs et aux otolithes chez les animaux inférieurs, n'est pas influencé par la densité du milieu et subit l'action géotactique de la pesanteur indépendamment du poids spécifique de l'animal. Wolfgaxg Ostwald a déduit de sa conception physique des mouvements directeurs des organismes inférieurs une nouvelle théorie de la géotaxie basée sur le principe du frottement interne de l'eau qui contient les infusoires. Tout phénomène tactique est dominé par deux facteurs : par le frotte- ment interne de l'eau qui influence l'étendue des mouvements natatoires et par les variations continuelles que subit ce frottement sous l'influence des mouvements produits parles irritants tactiques. Ces principes s'appliquent aussi au mécanisme de la géotaxie. L'intensité variable du frottement interne de l'eau à des hauteurs différentes rendrait plus ou moins faciles les mouvements natatoires des organismes excités géotactiquement. Si ingénieuse qu'elle soit, la manière de voir d'OsxwALD n'est qu'une conception hypothé- tique, à laquelle manque encore l'appui de faits expérimentaux. Il importe de remarquer que déjà en 1889 Verworn avait attiré l'attention sur le rôle possible du frotlementdes par- ticules d'eau avecie corps des infusoires dans la production des mouvements géotactiques. Ce frottement agirait comme un faible irritant mécanique, ainsi que cela a lieu dans la rhéotaxie. Plus tard, Verworx abandonna cette manière de voir, la théorie des diffé- rences de la pression hydrostatique lui ayant paru plus conforme aux faits observés et expliquant mieux le mécanisme du phénomène géotactique. Quoi qu'il en soit de toutes ces théories, il est certain que la pesanteur n'agit qu'in- directement sur la mise en axe des organismes et sur leur orientation géotaclique et n'est pas un irritant direct du protoplasma cellulaire. Chez les animaux qui vivent dans l'eau, les différences de pression hydrostatique expliquent d'une façon très satisfaisante et très complète la nature et le mécanisme des phénomènes de géotaxie. Il est probable que cette interprétation, du moins dans ses principes fondamentaux, s'applique égaleinentàla géo- taxie de certains animaux vivants sur terre ou dans l'eau, les différences de pression d'air pouvant exercer sur les organismes des actions excitantes analogues à celles de la pression hydrostatique. Quant à la géotaxie des animaux supérieurs pourvus d'un système nerveux, il a été déjà dit plus haut que les réactions géotactiques chez ces animaux sont très com- plexes et très probablement liées à des organes spéciaux d'orientation dont nous n'avons pas à nous occuper ici et pour lesquels nous renvoyons à l'article Orientation de ce Dic- tionnaire. Rôle biologique de la géotaxie. — Il n'est pas douteux que la géotaxie, seule ou com- binée à d'autres tactismes, prend une part considérable aux diverses manifestations de la vie. Elle intervient d'une manière très active dans plusieurs phe'nomènes vitaux qui contribuent à la conservation de l'espèce. C'est un moyen de conservation, et en même temps un moyen de défense, qui permet à l'animal d'évité/ les actions nocives et de se placer dans des conditions favorables à son existence et à son alimentation. Un grand nombre de phénomènes très importants de la vie en général, et de la vie élé- mentaire en particulier, trouvent leur explication dans les réactions géotactiques. Mais GEOTROPISME DES VEGETAUX. 03 l'action de la géotaxie étant le plus souvent, sinon toujours, liée à celle d'autres tactismcs, il est difficile dans une fonction complexe de l'organisme de dégager nettement le rôle qui revient à la force géotactique au milieu de toutes les autres inlluences directrices qui agissent sur un organisme donné. Nous avons indiqué déjà plus haut qu'un iniu- soire qui exécute dans un tube un mouvement ascensionnel vers la surface de l'eau peut être orienté dans cette direction non seulement par une géotaxie négative, mais aussi par une phototaxie ou une oxygénotaxie positive et même par des actions chimiotac- tiques de sens divers, la chimiotaxie devant forcément se manifester dans un milieu aussi riche en substances chimiques que celui qui contient les infusoires. Il n'en est pas moins vrai que les organismes qui vivent dans l'eau sont constamment soumis à des excitations provenant des différences minimesde pression hydrostatique, et ce sont sur- tout ces excitations donnant lieu à des phénomènes géolactiques qui jouent un rôle pré- pondérant dans les manifestations vitales de ces animaux. D'après Franusen, la limace, qui a l'habitude de mener un genre de vie nocturne et de chercher pendant le jour des trous pour se cacher, se meut vers la terre en vertu de ses propriétés géotactiques. C'est encore grâce à la géotaxie combinée à la phototaxie que, d'après Bo&danoff, les mouches se rassemblent dans l'intérieur des habitations. Plusieurs autres phénomènes de la nature vivante, comme la migration périodique des animaux marins dans les profondeurs de l'eau ou bien leur accumulation dans une région située en dessous de la surface de l'eau, et même l'enfoncement de certains animaux dans la terre sont dus à l'action de la géotaxie seule ou combinée à d'autres tactismes. On pourrait multiplier ces exemples; mais tout ce que venons de dire plus haut suffit déjà pour démontrer le rôle considérable de la géotaxie dans les manifestations de la vie. Bibliographie. — Aderhold. Beitray zur Kenntniss richtender Krdftc bci der Bcwe- gung niederer Organismen. [Jenaischc Zeitsch.f. Natiirwiss., xxu, 1888.) — E. A. Bogdanoff. Zur Biologie der Coprophaga [Allg. Zeitschr. f. Entom., vi, 35-41). — Davenport et Per- KiNs. A contribution lo the Study of geotaxis in the higher animais (J. P., xxu, 99-111). — Driesch (H.). Heliotropismus der Hijdroidpolypen {Zool. Jahrb., v, 1890). Die organischen Regulationen. 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Du Hamel montra, par de nombreuses expériences, qu'il ne faut pas chercher la cause du phénomène dans l'intluence de l'air, du sol, de l'humi- dité, de la lumière. Mais c'est Knight qui, le premier, en 1806, se proposa d'établir qu'il s'agit là d'un effet de la pesanteur. Il fixait des germinations de haricot sur une roue tournant rapidement autour de son axe (loO tours à la minute). Quand la roue est horizontale, la racine se dirige obliquement vers le bas, suivant la résultante de la pesan- teur et de la force centrifuge produite par la rotation ; la tige suit la direction inverse. Quand la roue est verticale, les organes se disposent suivant le rayon, comme s'ils étaient sollicités uniquement par la force centrifuge; la racine s'oriente vers l'extérieur, la tige vers l'axe de rotation. L'action de la pesanteur ne doit pas se manifester dans ce second cas, chaque face du végétal occupant successivement et alternativement deux positions contraires par rapport à la verticale. Le clinostat, appareil de Knight, perfectionné par Sachs, permet d'égaliser l'action de la pesanteur sans développer de force centrifuge sensible. Ces conditions sont réali- sées quand le disque, placé verticalement, effectue seulement trois tours à l'heure par exemple. La racine et la tige s'accroissent alors en ligne droite dans la direction qu'on leur a imposée au début. A vrai dire, les expériences de Knight, pas plus que les autres faits connus, ne nous renseignent sur la nature de la cause de l'orientation. Elles révèlent seulement l'inter- vention d'un facteur extérieur à la plante et agissant verticalement. Cependant, comme la pesanteur est le seul facteur connu qui réponde aux conditions ci-dessus, on s'accorde à rapporter à l'attraction terrestre le phénomène qui nous occupe. Ainsi, la force à laquelle Newton attribue le poids des corps se manifesterait en outre, chez les végétaux, dans l'orientation des membres de l'organisme. Les manifestations les plus nettes du phénomène étant les courbures, on lui a donné le nom de géotropisme (yr), terre; tpsttoj, je tourne). Le géotropisme est d'il positif dans la racine qui prend la même direction que la force; il est dit négatif dans la tige qui prend la direction contraire. Les cas d'orientation dont il vient d'être question, sont liés à la croissance longitu- dinale. Mais l'inégalité de la croissance transversale peut aussi déterminer des courbures. Il peut même y avoir antagonisme entre les deux modes d'accroissement. Une tige à géotropisme vertical peut devenir inclinée ou même horizontale, lorsque les tissus se développent plus rapidement sur une face que sur les autres. La face privilégiée devient ici la face supérieure {éinnastie de Schimper, épitrophie de Wiesner). Dans d'autres circon- stances, c'est le côté inférieur qui prédomine [hyponastie, hypotrophie). La cause de ces déformations est assez obscure; dans quelques cas cependant, c'est un effet de la pesanteur, d'après HoFMEisTEfi, Kraus, etc.. Czapek a fixé la terminologie des réactions de l'organisme à l'influence de la gravitation (1898). Voir aussi sur ce sujet l'Essai de classification des réflexes non nerveux, de Massa rt {Ann. de l'Institut Pasteur, 1902). I. — Manifestations extérieures du géotropisme. — Examinons les manifesta- tions extérieures du géotropisme avant d'analyser la nature du phénomène. § I. — Manifestations habituelles. — La racine principale, qu'elle soit terminale ou née sur le flanc d'une tige, se dirige verticalement vers le bas {géotropisme positif, prosgéotropisme de Rothert, catagéotropisme de Massart). Les racines de premier ordre s'orientent obliquement et font avec la verticale un angle, d'ailleurs décroissant de 60" par exemple pour celles de la base du pivot, de 40" pour les plus voisines du sommet- Ce n'est pas là une simple question d'insertion, puisqu'un changement d'orientation de la plante provoque l'inflexion des radicelles vers leur direction primitive. Les racines d'ordre élevé sont indifférentes à l'action de la gravitation. Les tiges présentent des différences analogues. Le géotropisme négatif [apogéotro- pisme de Darwin, anagéotropisme de Massart) est vertical dans l'axe principal. Mais les rameaux ont une direction oblique et les rainuscules une direction quelconque. On a coutume de dire que le géotropisme s'affaiblit dans les ramifications. Les recherches de Baranetzki sur les rameaux des arbres permettent d'envisager autrement les faits. L'auteur a remarqué que, sur le clinostat, chaque incurvation s'accompagne d'oscillations alternatives de la croissance sur les côtés opposés de la lige, dans Le plan de la courbure. GÉOTROPISME DES VEGETAUX. 95 Il en conclut que la structure du rameau oppose à l'inflexion une résistance, et qu'il se pi'oduit une contre-incurvation. Tantôt les rameaux sont tous négativement géotropiques comme l'axe principal, mais leur orientation est modifiée par la contre-incurvation d'abord, par le poids de la branche et l'allongement des éléments ligneux de la face supé- rieure ensuite {Érable). Tantôt les rameaux sont, au début, fortement épinastiques et le géotropisme négatif ne se révèle que plus tard (Ti7/eîroduirait même des acides phénylamidapropionique et amidovalérianique (Schulze et Barbieri); chez le Haricot, il y aurait en outre, peut-être, de la brucine, de la xanthine et de l'hy- poxanthine {Chem. Centralhl., 1888, 377). Selon Prianichnikow [Land. Vers. Stat., lu, 137), il y a corrélation -entre la grande intensité respiratoire, la destruction des matières albuminoïdes et la formation d'asparagine. Green {Philosoph. Trans., clxxviii,, 1887, 84) a montré que la diaslase présente un maximum d'activité vers 40", que le milieu le plus favorable est un milieu faiblement acide; cette diastase serait contenue dans la graine au repos à l'état de zymogène passant grâce au milieu acide à l'état de trypsine qui solubilise les matières azotées. La quantité absolue d'asparagine formée dans les graines aleurifères au moment de la germination est, d'après Robert Sachsse et Waller [Land. Vers., 1874, 88), la même à la lumière et à l'obscurité; mais, comme les plantes élevées à l'obscurité n'augmen- tent pas de poids, elles contiennent relativement plus d'asparagine que celles qui ont été élevées à la lumière. Cette asparagine se conserve à l'obscurité et ne peut retourner à l'état d'albumine (Pfeffer, Bot, Zeit., 1874, p. 241 et Ann. Sc.nat., (5), xix, 391). Selon Schulze et Flechsig [Land. Vers., xxxn, 2, 188o, 137) près de 40 p. 100 de la matière albuminoïde primitive du Lupin est transformée en amides, alors que les céréales semblent conserver leur matière albuminoïde intacte. On peut facilement faire cristalliser la leucine et l'asparagine en plongeant les coupes faites dans les cotylédons par exemple, dans la glycérine pure. Ces grains d'aleurone une fois détruits, on voit se former de l'amidon transitoire dans les leucites; mais cet amidon est résorbé au cours du verdissement. Nous avons dit plus haut que le lupin renferme aussi de la cellulose de réserve. Cette cellulose est solubilisée et transformée en glucose par la cellulase on cytase. Cette diastase a été extraite par Green des noyaux de datte [Ann. of Bot., 1888-1893). Il en est de même de l'amyloïde que contiennent certaines graines comme celle du Tamarinier, à la place de cellulose. Dans le Haricot et le Pois, les réserves sont constituées par de l'aleurone sous forme de très petits grains et par de l'amidon. Cet amidon est digéré en deux temps : dans le premier, l'analyse le transforme en raaitose; dans le second, le maltose est transformé en glucose. On rencontre très peu d'amidon dans les grains en germination ; cela tient à leur pauvreté originelle en albuminoïdes de réserve, et aussi à ce fait que les sucres provenant de la digestion se combinent à ces amides pour reconstituer des principes al- buminoïdes. On trouve toutefois dans le Pois chiche un alcaloïde assimilable; la a;anf/(me (C^H^Az^O^), corps qui est voisin de l'acide urique (C»H*Az''^0-) ; il est bon de remarquer, en passant, que l'acide urique, qui est un produit essentiel de décomposition des matières albumi- noïdes dans l'organisme animal, ne se rencontre jamais chez les plantes. Dans l'Amandier, le Pêcher, il y a aussi de l'aleurone, de l'huile, qui est dédoublée en acides gras et en glycérine. Quant kramygdaline,el\e n'est pas transformée; c'est que l'émulsine, qui est distincte delà. saponase, se trouve dans des cellules différentes de celles qui contiennent le glucoside. On sait, comme l'a montré Guignard (Jo»r/r«/ de pharmacie et de chimie, 1890), que, si l'on brise les cotylédons, le ferment et le glucoside se trou- vent en présence, et il se produit de l'acide cyanhydrique,de l'essence d'amandes amères et du glucose. Tailleur (C.R. cxxxii, 123o) a constaté la présence dans des plantules de Hêtre d'un glucoside et d'un ferment qui réagissent l'un sur l'autre en engendrant du glucose et de l'éther méthylsalicyhque (essence de Wintergreen). GERMINATION. 115 Dans le Colza les cotylédons sont très riches en huile. Sachs croyait que les matières grasses se transformaient en amidon, puis en sucre. Muntz (Ann. de Ch. et de Phys., (4), XXII, 472) qui a fait une étude très approfondie de la germination des graines oléagi- neuses, a bien constaté la mise en liberté, par saponification, d'acides gras; mais il n'a pas pu déceler la présence de la glycérine, ce tîorps servant probablement à la produc- tion d'hydrates de carbone. Leclergdu Sablon {Revue générale de Botanique, ISO.'i et 1897) a observé que chez le Colza, l'Amandier, l'Arachide, il y a bien formation aussi d'acides gras ainsi que d'une certaine proportion de sucres non réducteurs du groupe des saccha- roses; ces sucres se transformeraient ensuite en glucose directement assimilable. 2" Digestion dans les graines albuminées. — Chez les graines albuminées, les sub- stances de réserve sont digérées en partie par des diastases intracellulaires, en partie par des diastases qui proviennent des cotylédons de l'embryon. De plus, il semble bien que les cellules de l'albumen soient incapables de solubiliser leurs membranes et que l'embryon seul secrète la cytase. Les botanistes distinguent généralement des albumens charnus comme dans le Ricin, des endospermes oléagineux comme dans le Pin, des albumens farineux comme dans les Graminées, des albumens cornés comme dans le Dattier, ou mucilagineux comme dans le Mélilot. Dans le Ricin il y a disparition de l'huile et des grains d'aleurone sous Taction de deux ferments solubles (Green, Proc. of the Roy. Soc, xlviii, 1890). Ces ferments seraient à l'état de zymogène au repos, la glycérine se transformerait en sucre et les acides gras en d'autres acides végétaux. L'embryon joue un rôle dans la dissolution des membranes de l'albumen et du protoplasma; mais les cellules de ce tissu digèrent réellement leurs propres réserve?, comme le prouvent les essais de germination indépendante; cela est conforme aux observations antérieures de Van Tieghem (Si^2 GESTATION. chez les reptiles et les oiseaux, s'en différencie au moment où une partie des enveloppes fœtales se met en rapport avec l'organisme maternel et se transforme en un organe plus ou moins simple et rudimentaire, plus ou moins compliqué, dont le rôle sera de fixer et de nourrir l'embryon. Avec O.HERTwiGon peut dire que: selon la manière dont la surface de la vésicule blas- todermique se met en relation avec l'organisme maternel, il y a lieu de distinguer trois modifications principales, à chacune desquelles correspond un groupe de mammifères : Dans un premier groupe, la séreuse de von Baer conserve à peu près sa struclure simple primitive; dans le deuxième groupe, elle se transforme en un chorion; enfin, dans un troisième groupe, il se développe un placenta, aux dépens d'une ou de plusieurs parties du chorion. Mais, entre les mammifères du premier groupe et ceux du second, de même qu'entre les Placentariés [Placentalia) et les Iniplacentariés {împlacentalia) il n'y a pas de ligne de démarcation bien tranchée. La transformation se montre progressivement et d'une façon presque insensible dans la série animale. Si le mode de placentation, propre aux mammifères supérieurs, n'existe chez les Didelphes qu'à l'état rudimentaire, on peut affirmer aujourd'hui qu'il existe dans l'œuf de ces animaux un organe de nutrition. A. Dastre, dans ses « Recherches sur Vallantoïde et le chorion de quelques mammi- fères », a eu bien raison de faire remarquer que, si les Didelphes, Marsupiaux et Mono- tremes, étaient considérés comme ne possédant point d'appareils placentaires, un com- plément d'études semblait nécessaire pour statuer définitivement sur cette question. Si OwEN et Chapman ont décrit l'œuf des Marsupiaux comme enveloppé d'un chorion sans villosités et sans aucune adhérence avec les parois de l'utérus, H. F. Osborne a démontré que, comme l'avait déjà entrevu ou pressenti E. Geoffroy Saint-Hilaire en 1824, il existe un rudiment de placenta dans l'œuf des Didelphes. Mais ce placenta est formé par la vésicule ombilicale, et non par l'allantoïde, comme chez les mammifères supérieurs. Il est donc permis de supposer que tous les intermédiaires entre ces deux modes de gestation ont existé, ou existent peut-être encore, chez certains types du groupe des Didelphes qui n'ont pas encore été étudiés sous ce rapport. (Trouessart.) Nous ne nous occuperons ici que de la gestation des mammifères supérieurs. Ayant ainsi limité et précisé autant que possible notre sujet, n'ayant pas d'autre part à envisager ce qui concerne le fœtus et l'œuf (voir l'article Fœtus, t. VI), nous allons exposer, autant que le permet l'état actuel de nos connaissances, les chapitres concernant : 1° La durée de la gestation; 2° Les modifications fonctionnelles de l'orqanisme maternel pendant la gestation. Un paragraphe sera ensuite consacré à la gestation multiple, c'est-à-dire à la gestation caractérisée par le développement simultané de deux ou plusieurs fœtus dans l'utérus des femelles qui sont normalement unipares : la femme, la jument, la vache, la brebis, etc. PREMIÈRE PARTIE Durée de la Gestation. § I. - DURÉE DE LA GESTATION CHEZ LES ANIMAUX. Le temps que dure la gestation mesure la première vie de l'individu après la vie latente ou ralentie, généralement très brève chez les mammifères. Les lois qui prési- dent à la durée de cette vie intérieure et parasitaire sont-elles connues? Hélas! non. On commence à peine à les entrevoir. Les expériences rêvées par François Bacon au commencement du xvn« siècle {Nova Atlantis) et précisées par Condorcet à la fin du xviii'^ (Fragment de l'Atlantide, p. 4ol in Tableau historique des progrès de Vesprit humain, édition Steinheil, 1900) qui u déterminent jusqu'à quel point, dans les diffé- rentes espèces vivipares, le temps de la gestation est variable ou constant; quelles GESTATION. 123 sont les causes de ces variations; la possibilité et les moyens de faire agir ces causes à volonté; les effets qui en résultent pour l'individu dont la naissance est accélérée ou retardée », n'ont point encore été réalisées. Elles sont à peine commencées à l'heure actuelle. Il en est de même, du reste, de l'incubation. 10 Durée de rincubation. — Les recherches entreprises par Réaumur (1735) n'ont point été poursuivies, et c'est à peine si l'on connaît aujourd'hui la variabilité de la durée de l'incubation et les causes qui peuvent la prolonger ou la rendre plus courte. Si Harvey [Exei'citationes de gcneratione animalium, in-4'',(16o4)a montré que des œufs, que l'on met en incubation dans les mêmes conditions, ne se développent jamais avec la même rapidité et présentent toujours des inégalités plus ou moins grandes dans leur évolution, il faut reconnaître que nos connaissances sur ce point n'ont pas beaucoup progressé. Nous savons depuis Réacmur que la durée de l'incubation n'est pas la même pour des degrés difTérents de température, qu'elle est plus courte par des températures élevées, plus longue par les températures basses; mais nos connaissances ne sont nullement précises sur le rapport qui existe entre la température pendant l'incubation et la durée de cette incubation. Bonnet, cité par Spallanzani, dit également : « On peut à volonté accélérer ou retarder l'éclosion des poulets en augmentant ou en diminuant le degré de chaleur; mais cette possibilité est renfermée dans certaines limites que l'expérience n'a pas encore déter- minées. » Et de nos jours, Dareste s'exprime ainsi : « J'ai souvent observé des faits analogues. Bien que je n'aie pas cherché à faire éclore les œufs et que je les aie ouverts au bout de quelques jours, j'ai pu constater un fait intéressant. Ainsi, vers 41° et 42°, l'évolution est très rapide, et l'embryon atteint en vingt-quatre ou trente heures le degré qu'il n'atteint, dans l'incubation naturelle, qu'après trois jours d'incubation. Au contraire, vers 30", il n'arrive à ce développement qu'en sept ou huit jours d'incubation. «D'autre part il ajoute : « Toutes les expériences que j'ai faites, concernant l'influence des basses températures sur l'évolution, montrent que ce phénomène peut commencer à des tem- pératures notablement plus basses que la température de l'évolution normale ; mais qu'à de certains moments il exige, pour pouvoir se continuer et s'achever, des tem- pératures toujours croissantes, et que par conséquent, pour déterminer la somme des températures nécessaires à l'évolution complète, il faut tenir compte de la tem- pérature minima nécessaire à chaque période de la vie embryonnaire. « En tenant compte de tous ces faits, on arrivera incontestablement, à l'aide d'expériences pro- longées, à constater les éléments nécessaires pour la détermination des sommes de tem- pérature, et pour voir comment l'augmentation ou l'abaissement de la température agissent pour avancer ou retarder l'éclosion. Mais il y a encore ici une condition dont il faut tenir grand compte, comme dans tous les phénomènes physiologiques, c'est ï individualité. » Dareste se demande ensuite si les poulets qui éclosent avant les autres ne seraient pas plus petits que les autres, si le nanisme ne tiendrait pas à la prédominance des faits de développement sur les faits de simple accroissement sous l'influence d'une tem- pérature élevée, s'il n'existerait pas des faits inverses, et il réclame des expériences longtemps répétées, et dans les conditions les plus diverses, qui seules pourront nous renseigner sur toutes ces questions. Or ces expériences, ou n'ont pas encore été faites, ou ne sont point parvenues à notre connaissance. Nous ne possédons comme document important et sérieux que le mémoire de Tessier {Recherches sur la durée de la gestation et de l'incubation dans les femelles de lolu- sieurs quadrupèdes et oiseaux domestiques, Acad. Royale des sciences, 12 mai 1817). Dans ce travail, sur lequel nous reviendrons, Tessier, s'occupant principalement de rechercher quelle peut être la durée de la gestation chez un certain nombre d'animaux, considère que des recherches sur la durée de l'incubation pourraient fournir des données intéressantes sur la question. /< Bien que l'incubation des oiseaux, dit-il, ne puisse être assimilée à la gestation des quadrupèdes, qui s'opère d'une autre manière, cependant, je n'ai pas regardé comme indifférent d'étudier ce qui se passe dans cette fonction, quant à la latitude des éclosements. Il m'a paru utile dem'assurer, si, à l'égard 42^ GESTATION. de cette classe d'animaux, la nature avait des termes toujours fixes, ou quelquefois des écarts. » Et il donne les tableaux ci-dessous : TABLEAU I Dindes ayant couvé des œufs de poule (d'après Tessiiîr\ o QUANTITÉS DURÉE INTERVALLE DE TEMPS NOMBRE d'œufs OBSERVATIONS ■a Z d'œufs couvés . DE LA couvaison. les premiers et les derniers nés. non fécondés. ET RÉSUMÉ. jours. jours. 1 3U 20 3 12 1» Durée des couvaisons : 17 à 27 jours. 2 20 19 1 0 2° Latitude : 5 jours. 3 20 17 l 9 3= Intervalle de temps entre les premiers et les derniers : nés 3 jours. 4 20 22 1 10 4° Le nombre des oeufs non fécondés est à celui des œufs couvés comme 1 est 5 10 2T 1 4 à 4. a. Ce tte dinde cou\ ait en même temps 10 œufs do dinde ; tou s ces derniers se sont trouvés clairs. TABLEAU II Dindes ayant couvé des œufs de cane (d'après Tessier). 1NTERV.\LLE NOMBRE o QUANTITÉS DURÉE entre d'œufs OBSERVATIONS •a DŒUFS DE LA. les premiers non ET RÉSUMÉ. ;3 couvés. couvaison. et les fécondes. derniers nés. jours. jours. 1 20 26 1 0 1° Durée de la couvaison : 27 jours. 2 20 26 1 4 2" Latitude : 1 jour. 3 20 21 2 15 3° Intervalle entre la naissance des pe- tits : 2 jours. 4° Le nombre des œufs non fécondés a été celui des œufs couvés comme 1 est à 3. TABLEAU III Dindes ayant couvé des œufs de dinde (d'après Tessikr) c/j o ce 13 QUANTITÉS d'œufs couvés. DURÉE de la COUVAISON. INTERVALLE DE TEMPS entre les premiers et les derniers nés. NOMBRE d'œdfs non fécondés. OBSERVATIONS ET RÉSUMÉ. jours jours 1 20 26 1 5 1° Durée de la couvaison : 26 à 29 jours. 0 20 26 2 4 2" Latitude: 3 jours. 3 20 27 1 5 3° Intervalle do temps entre les premiers , 20 20 20 27 28 29 1 1 1 6 ^0 12 et les derniers nés : 3 jours. 4» Le nombre des œufs fécondés est à 6 celui des œufs couvés comme 1 est à 2. 1 20 29 1 12 8 15 28. 29, 30 2 5 9 12 » 1 3 GESTATION. 125 TABLEAU IV Poules ayant couvé des œufs de cane (d'après Tessier) C QUANTITÉS d'œdfs couvés. DURÉE de la COUVAISOX. IXTERVALLE DE TEMPS entre les premiers et les derniers nés. NOMBRE d'œufs non fécondés. OBSERVATIONS ET RÉSUMÉ. 1 2 3 4 5 6 1 8 9 12 12 13 12 12 14 10 15 1 jours 26 26 26 26 26 27 26 28 34 jours 1 1 1 1 1 1 1 1 1 0 2 2 1 6 8 7 6 1" Durée de la couvaison : 26 à 34 jours. 2° Latitude : 8 jours. 3° Intervalle de temps entre les premiers et les derniers nés : 8 jours. 4" Le nombre des œufs non fécondés a été à celui des œufs couvés comme 1 est à 3. De 3 poules couvant des œufs de cane de Barbarie, 2 ont été 33 jours et 1, 34 jours. Une cane de Barbarie a couvé 36 jours : sur 13 œuts, 10 sont venus à bien ; 3 étaient morts dans la coquille. TABLEAU V Poules ayant couvé des œufs de poule (d'après Tessier). 5 "S z QUANTITÉS d'œufs couvés. DURÉE de la COUVAISON". INTERVALLE DE TEMPS entre les premiers et les derniers nés. NOMBRE d'œufs non fécondés. OBSERVATIONS ET RÉSUMÉ. 1 2 3 4 6 1 8 9 10 11 12 13 14 12 12 12 12 12 13 13 13 13 13 13 13 15 15 jours. 20 20 24 18 2i 19 20 20 21 24 21 20 24 19 et 20 jours. 1 1 1 2 1 1 1 1 1 1 0 0 2 1 2 ■ 3 0 0 4 6 6 11 5 2 6 4 1° Durée de la couvaison : 19 à 24 jours. 2» Latitude : 5 jours. 3» Intervalle de temps entre les premiers et les derniers nés : 2 jours. 4" Le nombre des œufs non fécondés a été à celui des œufs couvés comme 1 est à 3. Une poule (à Chatou) a fait, en 1 année, 3 couvées dont 1 a commencé le 10 dé- cembre, sans que ses œufs soient re- froidis; 4 sont éclos le 30 décembre; 4 le 31, et 4 le V janvier; 2 ont été écra- sés et 1 non fécondé. L'incubation a été de 20, 21 et 22 jours. On n'a pu élever de ces poulets que 4 ; le froid a fait périr les autres. Chez la même personne qui m'a communiqué ce fait, sur 10 poules couveuses : 8 incubations ont été 21 jours, et 2 de 19 et 20 jours. Xota. — On amis sous une même poule, le 12 juin, 13 œufs. Le 1" juillet, il en est éclos 1 à midi ; le 2 au matin, 8 étaient éclos ; les autres se sont trouvés clairs. 11 y a eu 12 heures do dirtërence du l" au 8'. La pintade, qui pond jusqu'à 112 œufs, couve ordinairement 30 jours. On a vu des pintadeaux a'liq)tés par une poule. Quelquefois, dans les œufs qui no réussissent pas à la couvaison, les germes, cependant, paraissent fécondés; on les trouve à divers degrés de développement, ce qui suppose que quelque accident les a fait périr. Dans un de ces œufs, le petit était entièrement formé. Une poule avait, dans son intérieur, un œuf dont la coquille était telle qu'elle est hors du corps. 126 GESTATION. TABLEAU VI Canes ayant couvé des œufs de cane commune (d'après Tessier). et o ai ■a P z QUANTITÉS d'œufs couvés. DURÉE de la COUVAISON. INTERVALLE DE TKMPS entre les premiers et les derniers nés. NOMBRE d'œufs uon fécondés. OBSERVATIONS ET RÉSUMÉ. jours. jours. 1 15 32 2 2 1" Durée do la couvaison : 28 à 32 jours. 2 11 28 et 29 1 1 2» Latitude : 3 jours. 3« Intervalle entre la naissance des petits : 1 jour. 4° Le nombre des œufs non fécondés a été à celui des œufs couvés comme 11 est à 10. Noti i. — On a vu { ilus haut que 1 es œufs de cane de Barbarie éclosaient aux 35"^ et 36'' jours, c'est-à- dire 4 j i 6 jours plus tard que ceuN de la cane commune. Une cane commun e. dans la basse-cour du haras du Pin, pondait, tous les jours, un œuf bien condi- tionné; elle s'est mise ensuite à faire, tous les 2 jours, 2 œufs hardelés, c'est-à-dire sans coquille; si elle n'en po ndait qu'un, i 1 était gros comme celui d'une dinde, et avait deux jaunes. TABLEAU VII Oie commune ayant couvé des œufs d'oie (d'après Tessier). a' o ci •a p QUANTITÉS d'œufs couvés. DURÉE de la COUVAISON. INTERVALLE DE TEMPS entre les premiers et les derniers nés. NOMBRE d'œufs uon fécondés. OBSERVATIONS ET RÉSUMÉ. 1 2 3 4 12 12 12 13 jours. 30,31 29 31, 32 3t, 32. 33 jours. 1 0 1 2 2 3 2 1» Durée de la couvaison : 29 à 32 jours. 2° Latitude : 4 jours. 3° Intervalle entre la naissance des petits : 2 jours. 4" Le nombre des œufs non fécondés est aux fécondés comme 15 est à 13. Nota. — De 15 œufs donnés à 1 oie, 9 sont éclos ; 2 petits sont morts avant d'éclore; 1 n'a pas été fécondé. De 12 autres, 7 sont éclos, 2 morts dans la coquille et 2 non fécondés. Dans ces deux cas. on n'a point noté la durée de l'incubation. GESTATION. 127 TABLEAU VIII Pigeonnes (d'après Tessier). QUANTITES d'œuks couvés. DUREE de la CODVAISON. jours. n, 18 20 INTERVALLE DE TEMPS entre les premiers et les derniers nés. jours. 1 Quelques heures. NOMBRE d'œufs non fécondés. OBSERVATIONS ET RÉSUxMÉ. 1» Durée de la couvaison : 17 à 20 jours. 2° Latitude : de 2 «à 3 jours. 3° Intervalle : un jour ou quelques heures. 4» Tous les œufs ont été fécondés. Nola. — Les femelles du pigeon pondent ordinairement 2 œufs, dont 1 mâle et l'autre femelle; quel- quefois les deux sont du même sexe. On a vu deux sœurs femelles faire ensemble 4 couvées dans le même nid, aj'ant été couvertes par deux mâles dont chacun avait, en outre, sa femelle. Elles couvaient tour à tour; ensuite, elles se sont séparées, ayant trouvé dans la volière un mâle pour chacune à part. (Fait arrivé à Chatou.) Quelquefois les pigeons changent de femelles, M. de Vanieville, qui avait à Paris une volière d'expériences, qu'il observait avec la plus grande atten- tion, a remarqué ce qui suit : Eu 20 ans, il n'a vu qu'une pigeonne pondre 3 œufs; quelquefois, elle n'en pond qu'un seul, soit par indisposition, soit au renouvellement de la grappe, c'est-à-dire de l'ovaire. Elle met 1 jour d'intervalle entre les 2 œufs. La ponte se fait ordinairement de midi à 4 heures, vers les 2 heures le plus souvent. Dans la journée, le mâle et la femelle couvent alternativement ; le mâle de 10 heures à 2 heures ; la nuit, c'est la femelle seide ; les vieu.x mâles la relayent plus souvent que les jeunes. L'incubation est de 18 jours, à dater de la ponte du 2"= œuf, quelquefois de moins ou de plus. Les pi- geons se mettent bien sur le premier œuf pondu, mais pour le garder; ils ne s'appesantissent pas des- sus. La couvaison ne commence qu'après la ponte du 2' œuf: le 2"^ œuf s'ouvre presque en même temps que le premier. TABLEAU IX Couvaison de différentes femelles d'oiseaux du Jardin du Roi, à Paris. Durée d'incubation dans 24 individus (d après F. Cuvier). OISEAUX. JOURS. OISEAU-\. •JOURS. Oie commune 31 30 30 31 30 31 32 30 32 30 31 33 33 et 34 33 29 26 25 26 25 22 24 22 22 22 Oie commune (2 ans) Oie commune (2 ans) Oie commune (2 ans) Oie Commune (2 ans) Oie de Hollande Canard ;'i bec courbe Canard à bec courbe Canard polonais Canard de la Caroline Canard de la Caroline Cygne (de 6 ans) Cvfirne Paon Paon Faisan argenté (de iansi. . . Faisan argenté ' . Faisan argenté Faisan doré Faisan doré Faisan doré Faisan doré Poule de soie NoT.\. — Une serine verte a pondu un leuf un jour et un le lendemain; un petit est écdos un jour, et un le lendemain. Dans une seconde couvée d'un seul œuf, le petit est venu le M' jour. On voit, par ce dernier tableau, que les femelles d'oiseaux de même genre, telles que celles des canards, des oies, des cognes, des faisans, des paons, de races communes ou étrangères, ont aussi pré- senté quelques variations dans leurs incubations. On ne peut méconnaître, dans les résultats de toutes ces reclierches, un accord de la nature, pour ne rien établir de fixe dans la durée des incubations, comme dans celle des gestations. 128 GESTATION. Tessier fait précéder ce dernier tableau des explications suivantes : « M. Frédéric Cdvier a bien voulu me faire passer des notes, qui, n'étant pas aussi complètes que les miennes, ne peuvent être rangées de la même manière. Le point principal a été omis; savoir, l'intervalle entre les éclosements des œufs de chaque couvée. M. Frédéric Cuvier convient qu'on n'examinait au Jardin du Roi les œufs que le jour oi^i l'on pensait qu'ils éclosaient. Au reste, l'exposé qui va suivre, apprendra, au moins, que dans la couvaison des mêmes espèces d'oiseaux, il y a plus ou moins de prolongation; ce qui confirme, en partie, les observations précédentes, faites avec exactitude et détails. » On peut rapprocher du tableau de Cuvier, celui de Brehm. On verra que, sauf pour le cygne, la durée moyenne de l'incubation indiquée est sensiblement la même pour chaque espèce. TABLEAU X Durée de l'incubation des oiseaux domestiques (d'après Brehm). Oiseaux Pigeons de vo' lière. . . 10 à 12 jours. 16 à 18 — 3 'semaines. 3" — 23 jours. 2i à 28 jours. Pintade. . . . Paonne. . . . Dinde Oie . . . 28 à 30 — . . . 30 jours. . . . 30 — . . . 30 — Perdrix. Poule. Faisan. Canard. Cygne . . . 5 à 6 semaines Dans chaque couvaison, sauf pour le pigeon, le moment de l'éclosion n'est pas le même pour tous les petits. Mais la durée moyenne de l'incubalion a été calculée d'après le nombre de jours qui s'est écoulé entre le début de l'incubation et celui de l'éclosion. On n'a pas recherché si les différences dans le moment de l'éclosion résultaient d'une vie latente plus ou moins longue. Par vie latente, nous entendons la vie qui s'est écoulée entre le moment où l'œuf a été pondu et le moment où l'incubation a commencé. Nous ne faisons que signaler ici ce fait important, sur lequel nous reviendrons avec plus de détails à propos de la durée de la gestation. Enfin on peut constater que la durée moyenne de l'incubation n'est pas rigoureu- sement en rapport avec la taille de l'animal, puisque, pour ne ciler qu'un exemple, il a été constaté que la durée de l'incubation est la même chez la perdrix et chez la poule. De tout ce qui précède, il résulte que des variations dans le moment de l'éclosement sont observées, aussi bien dans l'incubation naturelle que dans l'incubation artificielle. La chaleur n'est donc pas le seul facteur ayant de l'influence sur la durée de l'incuba- tion. Il y en a d'autres que nous allons essayer de déterminer dans l'étude de la durée de la gestation. 2" Durée de la gestation chez les mammifères. — Si nos connaissances relatives aux causes qui peuvent faire varier la durée de l'incubation sont aussi incomplètes et imprécises, ou peut dire que les conditions qui déterminent les variations de durée de la gestation chpz les mammifères, sont aussi peu que mal connues. Pendant fort longtemps, les naturalistes et les biologistes se sont contentés, pour admettre comme durée moyenne de la gestation chez les différentes espèces de mammi- fères, des résultats fournis par une observation plus ou moins attentive, mais en tout cas presque toujours de seconde main, et, par cela même, le plus souvent insuffisante. Nous en sommes encore, pour nombre d'espèces, au temps d'ARisTOXE, ainsi que le prouve ce passage extrait d'une communication de CHAriiAN. « Appelé près d'un élé- phant femelle, afin de savoir si elle était en état de gestation, j'ai cherché des rensei- gnements bibliographiques, mais la littérature est sur ce sujet bien pauvre, excepté dans Aristote {Historia animalinm) et dans Harvey (De Generationc animalium) qui ont écrit que la durée de la gestation était de 22 mois. » BuFFON [Histoire naturelle, 1779, table des matières, page 2b8) s'exprime ainsi à propos de la gestation : « Le temps de la gestation dans la jument est de onze à douze mois; dans les femmes, les vaches et les biches, de neuf mois ; dans les renards et les louves, de cinq mois; dans les chiennes, de neuf semaines; dans les chattes, de six semaines; dans les lapins de trente et un jours. Les femelles de tous les animaux qui n'ont'point de menstrues mettent bas toujours au même terme ou a peu près, et il n'y GESTATION. 129 a qu'une très légère variation dans la durée de la gestation. » Et ailleurs, à propos de la grossesse, il dit : « La durée de la grossesse est, pour l'ordinaire, d'environ neuf mois, c'est-à-dire de deux cent soixante et quatorze ou de deux cent soixante et quinze jours... Il nait beaucoup d'enfants à sept et huit mois et il en naît quelques-uns plus tard que le neuvième mois; mais en général, les accouchements qui précèdent le terme de neuf mois sont plus communs que ceux qui le passent. » TABLEAU XI Vaches (d'après Tessier). NOMBRE DURÉE DE LA GE.STATION NOMBRE DURÉE DE LA GESTATION de VACHES. do VACHES. MOIS. JOURS. MOIS. JOURS. ^Termes les plus (Termes les plus faibles.) ordinaires.) 1 8 240 Hep. 280 1 8 4 244 22 9 13 283 1 8 7 247 32 9 14 284 1 8 13 253 22 9 15 283 1 8 17 257 35 9 16 286 3 8 18 258 24 9 17 287 1 .8 19 239 23 9 18 288 1 8 20 260 19 9 19 289 2 8 21 261 .19 9 20 290 1 8 22 262 14 9 21 291 1 8 23 263 12 9 22 292 3 8 26 266 9 9 23 293 1 8 27 267 9 9 24 294 2 8 28 268 8 9 25 293 1 9 269 3 3 9 26 9 27 296 297 21 6 9 28 298 4 9 29 299 2o9 1/2 (Termes les plus ordinaires.) 344 282 11/17 12 7 9 9 1 270 271 (Termes les plus 18 9 2 272 forts.) 10 9 3 273 1 10 300 18 9 4 274 2 10 1 301 12 9 5 273 1 10 2 302 20 9 6 276 1 10 4 304 33 9 7 277 2 10 6 .306 27 9 . 8 278 1 10 7 307 29 9 9 279 1 10 9 309 27 9 10 280 1 10 21 321 38 9 11 281 29 9 12 282 10 .4/'e/j.280 306 Aussi CoNDORCET était-il autorisé, dans un de ses Éloges, à s'exprimer ainsi : « La nature a-t-elle renfermé le temps de la gestation dans des limites précises? Il semble qu'il eût fallu décider celte question d'après des observations exactes sur le temps de la gestation dans différentes espèces d'animaux; observations dans le.squelles on aurait eu égard à Vdge, à la constitution des individus, au régime différent auquel on les aurait assujettis. Les conséquences qu'on en eût tirées pour l'espèce humaine n'auraient ét»- 9 DICT. DE PHysiOLOGIE. TOME VII. 130 GESTATION. fondées que sur l'analogie; et dès lors elles auraient perdu de leur force; mais on aurait été exposé encore bien moins à l'erreur, qu'en se servant d'observations directes, sur lesquelles il resterait toujours un nuage, vu l'inexactitude de l'instant de la concep- tion et celle des signes de la grossesse. Ces observations sur les animaux n'existent pas. » C'est alors que Tessier essaya de combler cette lacune « en employant le moyen indique' par M. de Condorcet ». a J'aurais pu, dit-il, ne suivre que les gestations des femelles d'une seule ou de deux espèces d'animaux domestiques; mais j'ai désiré porter mon examen sur plusieurs, pour avoir des objets de comparaison, et donner aux n'sul- tats plus de poids et d'intérêt. » Les résultats enregistrés par Tessier ?ont consignés dans les tableaux XI, p. 129 et sui- vants, trop clairs pour qu'une explication soit nécessaire. TABLEAU XII Juments saillies une seule fois (d'après Tessier). NOMBRE DURÉE DE LA GESTATION NOMBRE DL'RKE DE L A GEST.VTION de ^- ..,. — de — • - JUMENTS. JUMENTS. MOIS. JOURS. MOIS. JOURS. (Termesles plus (Termes les plus faibles.) 1 0 17 287 ordinaires.) Rep. 181 1 10 4 304 5 li 17 347 2 10 13 315 6 11 18 318 1 10 17 317 7 11 19 349 1 10 20 320 5 11 20 350 1 10 21 321 2 11 21 351 o 10 23 323 7 11 22 352 1 10 24 324 4 11 23 353 1 in 25 325 1 11 24 354 2 10 26 326 5 1 1 25 355 4 10 27 327 1 11 26 356 2 10 28 328 7 U 27 357 4 10 29 329 2 3 11 28 11 29 358 359 23 226 322 346 1/3 (Termes les plu s ordinaires.) (Termes les plus 5 11 330 forts.) 8 11 1 331 4 12 1 361 ~l 11 2 332 4 12 3 363 12 11 3 333 3 12 4 364 12 11 4 334 3 12 5 365 Vi 1 1 335 4 12 7 367 9 11 6 336 1 12 9 369 7 H 7 337 1 12 13 373 10 11 8 338 1 12 17 377 11 1 1 9 339 1 12 22 382 11 11 10 340 1 12 25 385 9 11 11 341 2 12 2S 388 9 11 12 342 1 13 1 391 1 11 13 343 1 13 18 408 9 11 14 344 1 13 29 419 8 1 1 1 :\ 345 346 22 11 16 28 4repA8[ 372 4/7 GESTATION. 131 Quant aux juments qui ont été saillies iJhmeurs fois, sur 170, 28 ont fait leur poulain avant le 330^ jour, ou le 11« mois. Terme mo3'en de ce nombre : 321 jours. 128 ont porté de 330 jours compris, ou 11 mois, à 339 compris, ou il mois 9 jours. Six seulement ont mis bas le 330« jour, ou 11 mois juste. Terme moyen de ce nombre : 341 jours 2/3 ou 11 mois 11 jours 2/3. La gestation de quatorze a été, du 362*^ jour compris, ou 12 mois 2 jours, à 377 compris, ou 12 mois 17 jours. Terme moyen de ce nombre : 370 jours 3/4 ou 12 mois, 10 jours 3/4. De la plus courte à la plus longue gestation, c'est-à-dire du 290" jour compris au 377% 87 jours; et du 330« jour, ou 11« mois, 47 jours de prolongation. Dans cette seconde série de juments (saillies plusieurs fois), aucune n'a porté jusqu'à 13 mois, tandis que dans la première il y en a deux dont une a approché du 14'' mois; et cette dernière n'offre aucune équivoque, car elle est du relevé du haras de Ghivasso. D'où vient cette différence? Est-ce parce que, dans la première partie, il y a eu plus de gestations et par conséquent plus de chances pour les prolongations, 277 contre 170? Ou bien, est-ce parce que plusieurs des gestations ont commencé à la suite de quelques- unes des premières saillies? L'une et l'autre causes me paraissent possibles. En réunissant les gestations des deux séries, c'est-à-dire des juments qui n'ont été sail- lies qu'une fois, et de celles qui l'ont été plusieurs fois; ne comptant toujours i»our celles- ci que sur la dernière, on voit que sur 447 gestations, 42 ont passé 360 jours ou 12 mois, et qu'une même s'est élevée à 419 jours. Les prolongations ont été plus nombreuses que dans les vaches. TABLEAU XIll Brebis (d'après Tessier). NOMBRE de BREBIS. DURÉE DE LA GESTATION. TOTAL des JOURS. Mois. Jours. 2 4 26 146 292 15 4 27 147 2 205 36 4 28 148 5 32S 87 4 29 149 12963 142 0 » 150 21300 175 5 1 151 26 425 183 5 2 152 27 816 176 5 3 153 26 928 60 5 4 154 9 240 24 3 5 155 3 720 7 5 6 156 1092 5 5 7 157 785 912 138 094 151 1/2 Durée de la gestation chez la truie. — Vingt-cinq truies ont fait leurs petits après des gestations de 109 à 133 jours, ou 4 mois et 13 jours. Il y en a eu o au 113% Terme moyen : 115 1/2 ou 3 mois 25 jours 1/2. Nous possédons sur ce sujet de nombreux et précieux documents, que nous regret- tons de ne pouvoir publier ici. M. Eugène Thival en particulier, nous a fourni les résultats enregistrés dans sa ferme modèle de Pinceloup (S.-et-O.) et nous ne saurions assez le remercier. Dans ce magnifique établissement, pour toutes les brebis se fait la lutte en main. Avec l'âge des reproducteurs, sont notés soigneusement la date et presque l'heure de la saillie, la date de la mise bas et le sexe du produit. Les documents qui nous ont été remis concordent à tous les points de vue avec ceux consignés par 132 GESTATION. Tessier. Ils ne viendraient que grossir le nombre des observations publiées depuis celte époque, et qui sont résumées dans les traités d'obstétrique vétérinaire. D'autre part, M. Ferrouillat, directeur de l'École d'agriculture de Montpellier, nous a communiqué, el. nous l'en remercions vivement, sur la durée de la gestation chez la truie, des documents plus complets que ceux publiés jusqu'à ce jour. Aussi croyons- nous devoir les faire connaître. TABLEAU XIV Durée de la gestation chez des truies métis anglaises de 1 à 2 ans et du poids de 150 à 200 kilos (d'après Ferrouillat). DATES DES SAILLIES. 8 janvier. 20 juillet. 19 juin. \ 29 septembre. ( 13 mars. 1 !11 décembre. 29 avril. 2.J octobre. •n / 17 juin. I 10 décembre, f 10 août. / 29 septembre. 26 février. I 20 août. / 10 juin. I 8 janvier. I 8 juin. !G juillet. 2 décembre. 23 juin. DES NAISSANCES. H 1 22 septembre. / 13 septembre. I ) 19 janvier. ) 25 avril. 30 avril. 8 novembre. 12 octobre. n janvier. 4 juillet. 3 avril. 10 octobre. 10 décembre. 25 janvier. 12 décembre. 29 septembre. 1'^'' mai. l" octobre. 8 octobre. 24 mars. 24 octobre. 20 janvier. 8 janvier. 14 mai. 18 août. DURÉE de la GESTATION. JOUl-S. 112 m 115 110 113 113 lis 116 118 » H4 111 113 115 94 112 123 120 117 115 115 NOMBRE des GORETS. 12 13 11 11 OBSERVATIONS. 10 7 11 Afin de montrer la valeur des recherches de Tessier, nous allons emprunter au Traité de V. Saint-Cyr le résumé des chapitres ayant trait à la question que nous exposons. « a) Durée de la gestation chez la vache. — On estime communément que la vache porte neuf mois, comme la femme; mais ce n'est encore 'là qu'une moyenne, qui même n'est pas des plus exactes, en deçà comme au delà de laquelle on constate des variations fréquentes et assez étendues. « C'est ce que démontre le tableau suivant, où nous avons groupé les observations recueillies par Delabère-Blaine, Tessier, Grille, et consignées par Rainard dans son Traité de la Partiirition (I, p. 235 et suiv.), auxquelles nous avons ajouté celles qu'a bien voulu nous fournir M. Lœuilliet, directeur de la ci-devant École d'agriculture de la Saulsaie, et celles de Furste.nberg, déjà consignées par Lanzillotti dans son Manuele di ostetricia veterinaria. )> GESTATION. 133 TABLEAU XV Durée de la gestation chez la vache. DURÉE de la GESTATION. D'après Delabère- Blaine. D'après Tessier. D'après Grille. A L'ÉCOLE de la Saclsaie. D'après FURSTENBERU. TOTAL des observations. Moins de 241 jours. « « 15 >) » 13 de 241 à 270 17 21 6 2 6 52 — 271 à 280 30 ,, 34 2 33 119 — 271 à 300 ,, •j44 » „ » 544 — 281 à 290 68 » 71 9 82 230 — 290 à .300 29 » 22 4 13 70 de plus de 301 Totaux. . . S 10 12 1 4 32 169 37.5 160 18 140 1 062 L'inspection de ce tableau démontre que, chez la vache, les naissances sont fort rares avant le 241*= jour, un peu moins rares après le .300« ; qu'elles deviennent de'jà assez communes du 240^ au 270^ ; mais que le plus grand nombre correspond à la période qui s'étend du 280'= au 290'- jour, ce qui tixe entre ces deux derniers termes la durée moyenne de la gestation chez cette femelle. Et en effet, en opérant sur les chiffres de ce tableau comme nous l'avons fait pour ceux du précédent relatif à la jument, nous trouvons que la durée moyenne de la gestation our ces 1062 vaches a été de 283 jours environ. Ces résultats sont conformes à ceux qu'ont obtenus d'autres auteurs. Ainsi Dietrighs fixe la durée la plus courte de la gestation chez la vache du 210« au 266« jour; la plus longue, entre 326 et 335 jours, et la moyenne, à 286 jours (Lanzillotti). Bauueister et Rueff donnent, pour la plus courte, 240 jours; pour la plus longue, 330 jours, et pour la plus régulière, 285 jours. Lord Spencer, d'après des observations faites en Angleterre sur 764 vaches, établit qu'aucun veau vivant n'est venu aumonde avant le 220^ jour, ni après le 313', et quil a été impossible cl' en élever aucun né avant le 242^.11 estime que toutes les naissances qui ont lieu avant le260« jour sont décidément prématurées, et il considère aussi comme irrégu- lière toute gestation qui dure au delà de 300 jours. 11 a constaté, en outre, que 314 vaches ont mis bas avant le 284® jour, 66 ce jour-là, 74 le 28o^, et 31 après cette époque; d'où il conclut que le terme ordinaire et moyen de la gestation chez cette femelle est 284 à 285 jours. On a cherché quelle influence pouvaient avoir sur l'irrégularité de la gestation le sexe du produit, l'âge de la mère, sa race, la manière dont elle est nourrie, etc. ; mais ces influences sont encore trop mal connues pour que nous nous y arrêtions ici. Disons seulement, que, suivant une opinion fort accréditée parmi les éleveurs, la gestation serait en général un peu plus longue pour un veau mâle que pour une génisse. b) Durée de la gestation chez la jument. — On admet généralement que la durée ordinaire de la gestation est de onze mois, mais qu'elle peut varier entre dix et douze mois. Bon nombre d'observateurs, entre autres Simon Winter en Angleterre, Brugnone en Italie, Tessier, Grille, Gayot en France, un correspondant anonyme d'un journal agricole en Belgique, ont essayé de déterminer la durée de cette fonction chez la femelle qui nous occupe. Nous résumons dans le tableau p. 134 les résultats obtenus par les quatre pre- miers observateurs, tels qu'ils sont consignés dans l'ouvrage déjà souvent cité de Rainard. Des chiffres inscrits au tableau suivant, il résulte que la durée la plus courte de la gestation chez la jument serait, de 307 jours, la plus longue, de 394. En outre, en divi- sant par 284, nombre des juments sur lesquelles a porté l'observation, 98 284, nombre total des jours pendant lesquels ces mêmes juments ont porté, on obtient 346 jours comme exprimant la durée moyenne de la gestation chez ces mêmes juments. iU GESTATION. TABLEAU XVI Durée de la gestation chez la jument. DURÉE D'après D'après D'après D'après TOTAL de la TOTAUX. des S. WiNTER. Brugnone. Tessier. Grille. GESTATION. OBSERVATIONS. Jours. de 307 » 1 „ >, 1 Lo terme le do 3H à 320 „ » 12 7 19 plus court a — 321 à 330 >, 3 4 5 12 été de 307 - 331 à 340 8 18 » » 26 jours, le plus lono- de 393 — 341 à 3.50 7 23 45 » 75 et 394. Diffé- — 331 à 3.j0 » » » 47 47 rence : 86 — 351 à 360 » 8 25 » 33 jours. — 361 à 370 » 1 21 ). 22 — 351 à 370 » » )) 44 44 — 371 à 380 » ., » » » — 381 à 390 » 1 » 2 3 — 393 à 394 Totaux. . . » » 1 1 2 15 55 108 106 284 Le correspondant anonyme du Journal d'économie rurale belge, année 1829 (cité par Rainard) a trouvé, de son côté, comme minimum, 322 jours ; comme maximum, 419, et comme moyenne, 347 jours. Gayot a voulu étudier, lui aussi, cette question. Ses observations ont porté sur 25 poulains nés au haras du Pin en 1842. Le dépouillement du tableau dressé par lui, au fur et à mesure de la naissance des produits, lui a donné les résultats suivants : « Les 25 juments ont porté leurs produits, — ensemble, — pendant 8 390 jours; moyenne, 343 jours et demi. Le terme le plus faible a été de 324 jours; le terme moyen a été de 343 jours; le terme le plus fort a été de 367 jours. Que si nous entrons plus avant dans les détails, nous trouvons, par exemple : « 1° Que 16 produits sont nés dans les limites de moyen terme au plus fort, et 9 dans les limites du moyen terme au plus faible; 2° Que la moyenne pour chacune des deux catégories se fixe de la manière suivante : 16 produits sont nés au bout de 349 jours; 9 produits sont nés au bout de 333 jours (en moyenne); 3° Que, parmi les 16 produits nés dans le plus long terme, il y avait 9 mâles et 7 femelles; et parmi les 9 autres, nés dans le délai le plus court, il y avait 7 femelles et 2 mâles. » De tout ce qui précède, nous pouvons donc conclure que : 1° Chez la jument, la durée normale de la gestation peut être fixée entre 340 et 350 jours; c'est dans ce délai que naissent la plupart des poulains; 2" Quelques-uns peuvent naître viables du 300« au 310^ jour, mais cela est rare, 3" Les naissances sont déjà fréquentes entre le 325° et le 340«; 4° Elles ne sont pas rares non plus du 330" au 365*= jour, mais elles le deviennent beaucoup après cette dernière date; 5» On peut considérer 300 et 400 jours comme les limites extrêmes entre lesquelles oscille la gestation normale chez la jument, en deçà et au delà desquelles elle cesse d'être naturelle et véritablement physiolog-ique. 6° Enfin, d'après les recherches de Gayot, la gestation serait souvent un peu plus longue pour un poulain que pour une pouliche. Bien que cette dernière conclusion ne repose pas encore sur un assez grand nombre d'observations, elle acquiert cependant un certain degré de probabilité par le fait de sa conformité avec ce qui a lieu pour l'espèce bovine. On admet également, peut-être sans preuves bien suffisantes, que la gestation est géné- ralement un peu plus longue chez l'ànesse que chez la jument; plus longue aussi pour cette dernière, quand elle a été couverte par le baudet, que lorsqu'elle l'a été par l'étalon. GESTATION. 135 c) Durée de la (/estation chez la chèvre et la brebis. — La chèvre et la brebis portent environ 5 mois. Sur 429 brebis, observées dans le troupeau de l'École d'Alfort, dans l'espace de huit années, et dont le jour de la lutte a été exactement noté, Magne a trouvé que la durée de la gestation a été : 2 fois de 143 jours. .j7 fois de 150 jours. 15 — 144 — 49 — 131 — 22 — 145 — 23 — 152 — 30 — 146 — 13 _ 153 _ 55 — 147 — 7 — 154 — 68 — 148 — 7 — 155 — 80 — 149 — 3 — 156 — Comme on le voit, la gestation la plus courte a été de 143 jours; la plus longue de 1S6 : différence 13 jours. Mais la plus grande majorité des naissances sont venues du 147« au 1S1« jour; d'où il suit que la durée moyenne de la gestation se trouve un peu inférieure à o mois. Magne fixe cette moyenne à 148 jours 1/2; en refaisant les calculs, nous avons trouvé 149, ou plus exactement, 148,8. D'après cet auteur, la gestation aurait été sensiblement plus longue pour les femelles que pour les mâles; et il explique cette différence par le plus grand développement, le poids plus considérable que prennent ces derniers, et la gène plus grande qu'ils causent à la mère. — Nous avons vu que c'est le contraire qui a liou pour l'espèce bovine. Chez la chèvre, la gestation se prolonge, en général, un peu plus que chez la brebis ; elle est de 5 mois et quelques jours en moyenne, suivant l'ancien directeur d'Alfort. d) Durée de la gestation chez la truie. — Il est généralement admis que la truie porte 4 mois, ou suivant d'autres, 3 mois, 3 semaines et 3 jours; Magne dit : du 113" au 114^ jour, rarement moins de 109 ou plus de 120. D'après un relevé portant sur 65 de ces femelles, Rainard a trouvé que la gestation a été : de 104 jours pour 2 — ^110 à 115 jours pour 10 — 116 à 120 — 23 — 121 à 123 — 27 — 126 jours pour 2 — 127 — 1 Totaux "ëi" D'après ces chiffres, la durée moyenne de la gestation chez ces femelles serait de 1 19 jours et la distance entre la plus longue et la plus courte, de 23 jours. On n'a pas fait de relevés semblables pour la chienne et la chatte ; mais tout le monde sait que la première de ces deux femelles porte environ deux mois, ou, plus exactement, de 58 à 63 jours; en moyenne, 63 jours ou neuf semaines. Pour la chatte, la durée de la gestation est de .50 à 55 jours, quelquefois de 60, 62 et même 64 jours. Enfin pour la lapine, à laquelle nous donnons place ici en raison de son utilisation si fréquente dans les expériences de physiologie normale ou pathologique, la durée de la gestation varie entre 27 et 34 jours. En résumé, de tout ce qui précède, il résulte qu'on peut fixer comme limites les plus ordinaires de la gestation normale, régulière : 340 à 3611 jours, ou environ 11 mois i/2 pour la jument. 275 à 290 — — 9 — 1/2 — vache. 147 à 131 — — 5 — — brebis. 116 à 123 — _ 4 — _ truie. 58 à 65 — — 2 — — chienne. 30 à 60 — — 2 — — chatte. 27à3i — — 1 — — lapine. » Il est facile de voir, en parcourant ces tableaux, que la durée moyenne delà gestation établie par Tessier chez un certain nombre d'animaux, a été reconnue exacte par la plu- part des auteurs. De même presque toutes ses remarques importantes ont été confirmées. Mais ses 136 GESTATION. recherches, comme celles des auteurs qui l'ont suivi, n'ont porté que sur des unités. Aussi bien des points ne peuvent-ils être élucidés d'après ces travaux. Ainsi Vindividua- lité, déjà notée à propos de l'incubation, ne peut se faire jour, ne peut être étudiée par conséquent, dans les statistiques précédentes. Jusque dans ces dernières années» les statistiques familiales manquaient. Quelques statistiques, publiées récemment ou inédites, vont nous permettre de com- bler partiellement cette lacune. La statistique de l'Université agricole de Cornell, publiée par HexN'ry H. Wixg {Cornell University Agriciiltural Expcrimentatlon, Ithaca. ^'.-Y. Bulle- tin 162. Février 1899) est, au point de vue qui nous occupe, tellement documentée et suggestive que nous n'hésitons pas à la reproduire en grande partie. Depuis 1889 des observations sur la durée de la période de gestation ont été régulièrement faites sur toutes les vaches du troupeau de l'Université, lequel était composé dans les proportions suivantes : deux tiers de sang Holstein et un tiers de sang Jersey, avec quelques vaches du pays mélangées et croisées dans le troupeau. Presque tous ces animaux provenaient de l'élevage de la ferme et de parents élevés de même. De sorte que les observations furent prises sur un seul troupeau et ses descendants. TABLEAU XVII DURÉE NOMBRE VEA.UX YE.\UX de la de FEMELLES. MALE.S. JUMEAUX. GESTATION. VACHES. .Jours. 264 1 1 ,1 _, 267 1 . 1 2 j, 26R 3 1 3 ,, 271 4 1 1 ,, 272 1 „ 2 2 273 .5 1 6 1 274 M 4 6 27;; 10 4 9 „ 276 13 4 5 1 277 15 9 5 1 278 9 3 4 279 15 11 5 „ 280 15 10 1 y 281 7 6 5 „ 282 10 5 7 ,j 283 16 9 9 j, 284 11 2 5 II 28o 9 4. 5 y 286 8 3 S ,1 287 7 2 1 „ 288 3 2 1 „ 289 2 1 1 „ 290 ] II 1 „ 293 2 1 1 „ 294 2 1 „ „ 296 1 1 » " 182 87 90 "^ En tout, 194 observations ont été faites, parmi lesquelles on a noté : 9 veaux mort-nés ayant moins de 253. jours de gestation et 3 observations douteuses, en sorte que 12 d'entre elles n'ont pas été prises en considération, et que le calcul a été fait seulement sur 182 naissances pouvant être considérées comme normales. Le nombre de jours requis pour la gestation dans chacun de ces cas et le sexe du descendant est exposé au tableau XVII. A propos de ces résultats, Henry H. Wing ajoute : GESTATION. 137 « Nous pouvons dire que la moyenne de la période de gestation est à peu près de 280 jours, et la même, quel que soit le sexe du sujet produit, ce qui est contraire cà la croyance générale, laquelle semble prétendre, en se basant sur les tableaux du comte Spencer, que le mâle est porté 2 ou 3 jours de plus que la femelle. « Une étude sérieuse du tableau XVII montrera que la grande majorité des naissances a lieu du 274'= au 287!= jour inclusivement, et que pendant cette période les naissances sont nettement réparties. Il semblerait donc qu'il y a une période d'environ 2 semaines et 1 jour, pendant laquelle les chances de naissance sont approximativement égales. La grande importance pratique de la connaissance de la période de gestation est de savoir quand elle est vraisemblablement terminée, afin que l'animal puisse recevoir les soins et attentions qui lui sont nécessaires. En étudiant les rapports des différents indi- vidus, nous avons noté à cet égard que, dans beaucoup de cas, cela paraissait être une caractéristique particulière de l'animal, et aussi de la période de gestation. Nous avons remarqué également que, cbez certains animaux, la période de gestation est beaucoup plus longue ou beaucoup plus courte que la moyenne. Chez d'autres, nous avons constaté que ces règles présentaient une exception pour une seule naissance, laquelle différait beaucoup des autres provenant du même animal. Pour d'autres animaux, la période de gestation varie beaucoup avec les différentes naissances. Cela nous a semblé si" intéressant que nous aVons donné dans le tableau ci-dessous les détails de la gestation de 21 vaches, chaque vache ayant donné 4 veaux ou plus. A. — Vaches dont la \période de gestation était très .uniforme et habituellement beaucoup plus longue ou courte que la moyenne. Vache n" 1, née le 23 septembre 1889. 25 septembre 1891. 10 — 1892. 3 — 1893. 14 octobre 1894. 11 septembre 1895. 24. octobre 1896. 14 septembre 1897. 9 ,— 1898. Sexe. Veau femelle. Veau mâle. . Veau femelle. Veau "mâle. . Veau femelle. Veau mâle.. , Veau femelle. Veau — Moyenne. de Période gestation. Jours. M 285 281 283 285 28 i 280 294 "285 Vache n° 2, née le 20 septembre 1890. 2 février 1893. 5 mai 1894. 25 août 1895. 9 septembre 1896; 22 août 1897. 7 septembre 1898. Sexe. Veau femelle. Veau mâle. , Veau femelle. Veau mâle.. . Veau mâle. . Veau femelle. Moyenne. , Période gestation. Jours. 284 280 279 282 279 282 281 Vache n° 3, née le 10 septembre 11 5 août 1890, 1" septembre 1891 16 — 1892 3 1893, 21 ^oùt 1894 11 mai 1896 23 mars 1897 Période de gestation. Sexe. Jours. Veau femelle. . . . 267 Veau — ... 274 Veau mâle., . . . 279 Veau. — . . 280 Veau mâle, veau femelle . . » Veau mâle. . . . . 278 Veau femelle. . . . . 278 Moyenne. 276 27 août 1893 30 — 1894 5 septembre 1893 20 novembre 1896 25 décembre 1897 2 — 1898 138 GESTATION. Vache n° 4, née le 1" septembre 1801. Période de gestation. Sexe. Jours. Veau mâle 268 Veau femelle 278 Veau mâle 274 Veau femelle 274 Veau mâle 273 Veau — 275 Moyenne 274 B, — Vaches dont la période de gestation ressemble à celle du groupe A, excepté pour une ou deux d'entre elles dont la période de gestation a été plus longue ou plus courte. Vache n° 3, née le 6 octobre 1891. Période de gestation. Sexe. Jours. 18 septembre 1893 Veau mâle 283 24 octobre 1894 Veau — 284 12 — 1895 Veau femelle 293 10 septembre 1896 Veau — 280 10 octobre 1897 Veau mâle 288 24 septembre 1898 Veau — 286 Moyenne 286 Vache n° 6, née le 4 octobre 1893. Période de gestation. Sexe. Jours. 18 septembre 1895 Veau femelle 277 22 — 1896 Veau mâle 290 9 — 1897 Veau — 283 17 octobre 1898 Veau — 294 Moyenne 286 Vache n" 7, née le 21 septembre 1893. Période de gestation. Sexe. Jours. 18 septembre 1895 Veau mâle 283 18 — 1896 Veau — 284 28 octobre 1897 Veau — 287 12 décembre 1988 Veau femelle 279 Moyenne 283 Vache n° 8, née le 28 août 1885. Période de gestation. Sexe. Jours. 1887 » 1888 4 septembre 1889 Veau mâle 287 18 — 1890 Veau femelle 287 6 octobre 1891 Veau — 288 15 septembre 1892 Veau — 283 23 août 1893 Veau mâle, veau femelle. . . 273 28 — 1894 Veau mâle 274 Moyenne 282 GESTATION. 139 Vache n° 9, née le 14 septembre 1885. Sexe. » 1887 » 1888 20 août 1889 20 septembre 1890 2 mars 1892 9 avril 1893 11 — 1894 15 juin 1895 de Période gestation. .Jours. Veau mâle 285 Veau femelle 283 Veau — » Veau mâle, veau femelle.. . 273 Veau femelle 285 Veau — 283 Moyenne 282 Vache n° 10, âge inconnu. 14 février 1890. 11 — 1891. 15 janvier 1892. 9 novembre 1892. 21 septembre 1893. 11 — 1894. 22 — 1895. Période de gestation. Sexe. Jours. Veau mâle 270 Veau femelle 277 Veau mâle 276 Veau — 278 Veau femelle 279 Veau mâle 287 Veau femelle 280 Moyenne 279 Vache n° 11, née le 25 janvier li 6 septembre 1890, 8 février 1892. !•' décembre 1892. 25 "octobre 1893. 24 septembre 1894. 27 août 1895. Période de gestation. Sexe. Jours. Veau mâle 275 Veau femelle 278 Veau — 275 Veau mâle 277 Veau — 286 Veau femelle.. 279 Moyenne 278 Vache /i» 12, 26 mars 1890 11 — 1891 16 janvier 1892 31 décembre 1892 15 — 1893 âge inconnu. Période de gestation. Sexe. Jours. Veau femelle 277 Veau mâle 277 Veau femelle. 275 Veau mâl(! 279 Veau — 283 Moyenne 278 Vache n" 13, née le 26 mars 1890. 20 septembre 1891. 22 — 1892. 13 — 1893. 12 — 1894. 21 — 1895. Période de gestation. Sexe. Jours. Veau femelle » Veau mâle 274 Veau — 275 Veau femelle . 277 Veau - 282 Moyenne 277 1-40 GESTATION. Vache n'> H, née le 9 octobre 1892. octobre 1894. septembre 1895. — 1896. — 1897. — 1898. Sexe. Veau mâle. . Veau — Veau — Veau ' — Veau femelle. Période de gestation. Jours. Moyenne. Vache n° 15, née le 15 août ii 272 274 276 277 276 17 octobre 1890. 16 septembre 1891. 7 octobre 1892. 30 septembre 1893. 17 — 1894. 30 août 1895. Sexe. Veau mâle. . Veau femelle Veau mâle. . Veau — Veau femelle. Veau mâle. . jMoyenne. Période de gestation. Jours. . 278 . 268 . 273 . 274 . 282 . 276 . 'm Vaches dont la période de gestation a été variable Vache «" 16, née le 2 septembre 1891. 18 août 1893 30 — 1894 31 — 189S 29 — 1896 13 septembre 1897. Période de gestation. Sexe. Jours. Veau femelle avortement. Veau mâle 273 Veau femelle 283 Veau — 276 Veau — 285 Moyenne. 280 21 10 1er mai juin Vache n° H, née le 2 mars 1892. 1894. 1895. 1896. 1897. Période de gestation. Jours. Sexe. Veau mâle 280 Veau — 287 2 veaux femelles 274 Veau femelle 280 Moyenne . 280 Vache n" IS, née le 20 novembre 1892. Période de gestation. Sexe. Jours. 14 septembre 1894 Veau femelle 271 13 — 1895 Veau mâle 279 28 — 1896 Veau femelle 279 11 — 1897 Veau mâle 283 18 octobre 1898 Veau — 284 Moyenne. 279 Vache n" 19, née le 16 septembre 1888. Période de gestation. Sexe. Jours. 6 septembre 1890 Veau femelle 279 11 — 1891. ..... Veau — 280 14 novembre 1892 2 veaux femelles 277 22 février 1894 Veau femelle 283 GESTATION. 141 Vache Ji» 19, née le 16 septembre 1888 {Suite). Période de gestation. Sexe. Jours. 31 janvier 1895 Veau — 286 24 décembre IS'.l.o Veau mâle 283 26 — 1894 Veau femelle 281 20 mars 1898 Veau mâle 282 Moyenne 281 Vache n° 20, née le 4 janvier 1889. Période de gestation. Sexe. Jours. 10 janvier 1891 Veau mâle 268 21 mars 1892 Veau femelle 282 26 janvier 1893 Veau — 214 24 novembre 1893 Veau mâle 276 20 octobre 1984 Veau — 284 l" septembre 1895. . . . . . Veau femelle 283 5 — 1896 Veau mâle 278 16 octobre 1897 Veau — 287 11 décembre 1898 Veau — 283 Moyenne 280 Vache n° 21 , née le 4 septembre 1886. Période de gestation. Sexe. Jours. >) 18S8 » » 8 septembre 1889 Veau mâle 275 14 août 1890 Veau femelle 280 2 octobre 1891 Veau — 286 26 septembre 1892 Veau mâle 278 4 octobre 1893 Veau femelle 279 16 septembre 1894 Veau — 284 Moyenne 280 On remarquera que le plus grand nombre de vaches appartiennent au second groupe, c'est-à-dire cà celui où la période de gestation est uniforme avec une seule e.xception. En comparant ensemble les groupes A et B, il paraîtrait que, dans la grande majorité des cas, lorsqu'une vache a eu 1 ou 2 veaux, il devient possible de prédire la durée de ges- tation ultérieure. Nous avons déjà démontré que, dans les cas de naissances de jumeaux, la gestation est beaucoup plus courte que quand il y a un seul sujet. Ce fait est vérifié non seulement par nos propres observations, mais aussi par celles du comte Spencer. La différence est encore plus marquée si ces gestations de jumeaux sont comparées aux autres gestations du même animal, ainsi qu'il est démontré dans le tableau ci-dessous : TABLEAU XVIII Comparaison de la durée de la période de gestation entre les naissances doubles et simples. Vache n° S, née le 28 août 188b. 4 septembre 1889. 18 — 1890. 6 octobre 1891. 15 septembre 1892. 23 août 1893. 28 — 1894. Période Sexe. Veau mâle .... de gestation. Jours. 287 Veau femelle.. . 287 Veau — . . 288 Veau — . . 283 Veau mâle, veau Veau mâle. . . . femelle. 27;i 274 Moyenne. . 282 H2 GESTATION. Vache n° 9, née le 14 septembre 1885. Période de gestation. Sexe. Jours. 29 septembre 1889 Veau mâle 285 20 — 1890 Veau femelle 283 2 mars 1892 Veau — » 9 avril 1893 Veau mâle, veau femelle. . . 213 12 — 1894 Veau femelle 285 13 juin 1893 Veau — 283 Moyenne 282 Vache n° 49, née le 16 septembre 1888. Période de gestation. Sexe. Jours. 6 septembre 1890 Veau femelle 219 Veau - 280 2 veaux femelles 277 Veau femelle 283 Veau - 2S6 Vean mâle 283 Veau femelle 281 Veau mâle 282 Moyenne 281 Vache n° 47, née le 2 mars 1892. Période de gestation. Sexe. Jours. 21 mars 1894 Veau mâle 280 10 — 1895 Veau — 287 1" mai 1896 2 veaux femelles 274 25 juin 1897 Veau femelle 280 Moyenne 280 Vache n° 14, née le 21 novembre 1892. Période de gestation. Sexe. Jours. Veau mâle 285 Veau femelle 280 Veau mâle, veau femelle. . . 278 Moyenne 281 RÉSUMÉ DU TABLEAU XVIII 11 — 1891 14 novembre 1892, 22 _ 1894 31 janvier 1895. 24 décembre 1893. 26 — 1896. 26 — 1898. 21 octobre 1895 10 mai 1897 ler septembre 1898 Moyenne de la période de gestation Moyenne ! de la période Période de toutes les vaciies de gestation de gestation (jumeaux inclus). (jumeaux exclus). des jumeaux. 282 284 273 282 284 273 281 282 277 280 282 274 281 282 278 Moyenne. . . 281 283 275 RÉSU.MÉ. — Sur 182 naissances, la moyenne de la période de gestation est presque exactement de 280 jours. La plus courte période a été de 264 jours; et la plus longue, de 296. GESTATION. U3 TABLEAU XIX Durée de la gestation chez les vaches soumises au régime de la stabulation permanente, k l'École d'agriculture de Montpellier (d'après Ferrouillat) DATES >^ o OnSKRVATIONS. NOMS. "^-^ 25 3 DES SAU.LIES. DES NAISSANCES. eu VKAUX. VACHES. 13 juin 1888 31 mars 1889 291 kilogr. 49 Lady, 0 sept. 1889 19 juin 1890 287 30 Abattue en dé- l'ace Schwitz, 23 oct. — » i> » > cembre 1895 pour née eu 1879 |14 nov. 1890 3 sept. 1891 293 40 l cause d'iufécon- 600 kiloo-. 'lO — 1891 » » ]) \ due. "^ 13 juil. 1892 4 juin 1893 324 45 Mort-né. 1 1 21 août 1888 7 juin 1889 290 » \ 4 déc. 1889 11 sept. 1890 281 32 1 20 oct. 1890 24 juil. 1S91 277 28 et 29 Deux veaux . J un mâle "et 1 Livrée à la bou- Aiida, une femelle. \ chérie en avril race Tarent., ' 30 — 1891 31 — 1892 274 28 et 32 > 1898 pour cause née çn 1882 560 kilog. 10 déc. 1892 23 sept. 1893 287 38 [ de paralysie du 18 — 1893 » » » \ train postérieur. 13 juin 1894 » )) » j 23 juil. — 14 mai 1893 293 43 2 août 1896 23 — 1897 296 30 1 ■ 7 janv. 1889 „ „ „ 28 mars — 10 janv. 1890 288 44 Roussette, fille de Lady, méti.sse 17 — 1890 1" mai — 10 l'év. 1891 283 48 / Abattue en dé- \ cembre 1895 pour Tareutaise, 30 juin 1891 *> 1) / cause d'infécon- 12 août — 23 mai 1892 284 » \ dite. noe en 1887 570 kilog. 6 — 1892 12 oct. — " 1) » 6 déc. — 30 sept. 1893 288 42 1 '■ Grisette, Scliwitz,1884 560 kilug. 29 juin 1889 21 oct. — 4 août 1890 » 287 » 33 ] Abattuepourcause 1 de fièvre vitu- ) laire. 1 \Parelle, / Abattuepourcause Scli\vitz,1883 6 janv. 1891 20 oct. 1891 287 30 1 de fièvre vitu- "iSO kilog. laire. Fille d'Alidu, Tareu taise, 10 oct. 1894 2 juil. 1893 263 30 / Abattue en juin Mort-né. / 1898 pour cause née en 1893 ' \ d'infécondité. 533 kilog. 1 Fille d'Alida, i 1 métisse ' 12 janv. 189) 28 oct. 1899 289 » Mort-né. f Abattue eu avril Scliwitz,189G 23 déc. — 7 — 1900 288 >i > 1901. oiO kilog. 1 ' Pâquerette, | Bei-noise, 1890' 12 juin 1899 3 avril 1900 297 45 / Abattue en avril 1901. 470 kilog. 1 1 1 Farde, Schwitz, 1892 24 janv. 1898 24 oct. 1898 273 „ 1 f Abattue en ianvier Dcu.v morts-,- 19^,Q 5(i0 kilog. nés. ) Julie, , ) Abattuepourcause Bernoise, 1894 3 juin 1899 26 mars 1900 296 ) de renversement 380 kilog. ( ) de la matrice. 1 Violette, Sclnvilz,1897 21 sept. 1899 2 juil. 1900 284 43 550 kilog. 144 GESTATION. En comparant approximativement le nombre des naissances, on voit qu'elles se pro- duisent du 274'' jour ou 287"= inclusivement. La période de gestation a été la même pour les veaux mâles et femelles. La période de gestation des jumeaux est de 5 jours plus courte que la moyenne générale est 8 jours plus courte que la moyenne d'une naissance simple pour la même vache. Chez certaines vaches présentant un caractère individuel bien marqué, on observe que la période de gestation est plus courte ou plus longue de plu- sieurs jours que la moyenne. Les résultats enregistrés à l'École d'agriculture de Montpellier, et queM. Ferrouillat a bien voulu me communiquer (Tableau XIX, p. 143), confirment les observations de Henry H. \Fing. Envisageant maintenant la question d'une façon générale, peut-on dire avec Troues- SART (art. Mammifères, Gr. Enc, 104o) que la durée de la gestation est en rapport avec la taille de l'animal? Le tableau ci-dessous, donné par A. Larbalétrier et quelque peu modifié, va répondre à cette question, et montrer qu'il en est de la gestation comme de l'incubation. Durée de la gestation. Durée minima moyenne niaxima en jours. en jours. en jours. Souris 1) 24 à 26 » Lapine « 29 à 30 Rat » 29 à 31 » Lièvre » 30 » Taupe ,. 30 à 31 Écureuil .. 30 à 32 Belette » 34 à 33 » Chauve-souris » 31 à 38 » Kangourou » 39 » Hérisson » 42 » Chatte » 48 à 30 » Chienne » 55 à 60 » Putois » 60 à 62 » Renard » 60 à 63 » Loutre » 62 à 64 » Panthère » 63 » Lj'nx d'Europe » "0 » Martre » 89 à 02 » Louve » 91 à 98 » Jaguar » 103 » Lionne » 108 à 110 » Truie 100 120 133 Tapir .. 120 Ourse » 120 » Chamois » 140 » Chèvre 145 130 162 Brebis 143 laO 162 Gazelle 150 » 180 Renne » 210 » Phoque » 240 Élan . .. 252 à 280 » Morse » 270 » Bison d'Europe » 270 « Biche » 280 à 287 Vache 240 285 321 Lama » 300 à 330 » Chamelle » 310 à 330 » Anesse 300 360 400 Jument 330 340 419 Girafe » 431 à 444 Rhinocéros » 321 à 540 >> Éléphant » 660 à 690 Nous avons vu à propos de l'incubation que la couvaison avait la même durée chez la perdrix et chez la poule, de même nous voyons ici la durée moyenne de la gestation GESTATION. U5 être la même, sinon plus longue chez la chauve-souris que chez la belette, chez le putois que chez la chienne, chez le chamois que chez l'ourse, etc. D'autres causes que la taille de l'animal agissent, par conséquent, sur la durée de la gestation de l'animal . s II. - DE LA GESTATION DITE RETARDÉE. Par ces termes : gestation retardée, nous n'entendons parler que des gestations retar- dées physiologiquement. Nous laissons de côté, bien entendu, toutes les causes patholo- giques qui peuvent retarder ou empêcher l'expulsion du produit de conception. Nous ne voulons parler ici que de certaines causes physiologiques, pouvant retarder la période de développement dû à la gestation proprement dite. Nos connaissances sur ce sujet sont de date assez récente. Déjà, Mathias Duval avait observé chez le cochon d'Inde que l'état de mère nourrice exerce, sui' le développement des embryons, une influence qui en retarde le développement. Mais c'est Lataste qui eut le grand mérite, après avoir réuni, selon l'expression de M. Duval, une collection incom- parable d'organes de souris aux diverses périodes de la gestation, d'établir la réalité du fait, et de le préciser scientifiquement. Cette découverte , dont l'importance ne peut échapper aux biologistes, a été résumée par l'auteur lui-même dans sa communication, lue le 18 septembre 1889, dans la deuxième session du Congrès màlicalda Chili(Santiago), et publiée dans les Mémoires de la Société de Biologie, 1801. Nous allons en repro- duire les parties principales: « 1. Observations et expériences relatives à, la gestation normale. — Chez les femelles des Muridés en état physiologique et n'allaitant pas de petits, qu'elles aient été fécondées à une époque de parturition ou à toute autre, la durée de la ges- tation est d'une vingtaine de jours environ. Voici, résumées en un tableau, 33 observations, fournies par des sujets de cinq espèces différentes et dans lesquelles cette durée n'a varié que de 10 à 22 jours : Nombre Durée eu jours Nom de l'espèce. des observations. de la gestation. Dachywromys Dufrasi 7 De 20 à 22 Dipodillus Simoni 11 De 20 à 21 Meriones Shavi * 2 20 1/2 Meriones longifrons 3 Constamment 21 Mus muscidus 3 De 19 à 20 et 21 Mus decumanus 7 Constammenl, 22 Total ii" 2. Observations et expériences relatives à la gestation retardée des nour- rices. — a) Dipodillus Simoni Lataste. — Remarque 'préalable. — Dans 23 observations, le j 1 7 nombre, par portée, des petits de cette espèce a varié de 1 à 7 ; il a été, en moyenne, de -r— o = 5 + ^; et, d'après 19 observations, le nombre moyen des petits élevés, par portée, aétéde 2^ = 4 + -^ tableau des observations Nombre Date Durée en Désignation Date de la première Date du coït des do la deuxième jours de la du sujet. parturition. fécondateur. nourrissons. parturition. gestation. P X 4 août 1882 2 » 3 3 septembre 30 P X 3 septembre 1882 » 2 2 octobre 29 PB 16 octobre — » 4 15 novembre 30 PB 15 novembre — » 4 19 décembre 34 P ? 8 août — 8 août 4 10 septembre 33 P ? 10 septembre — » 4 16 octobre 36 1. D'après les observations de Charles Mailles iBull. Soc. Acclim. fr., 1887, p. 289.) 2. Il Le plus souvent, le coït n'a pas été directement observé ; mais je suis en mesure d'établir DICT. DE physiologie. — TOME VII. 10 ne GESTATION. Conclmion. — Ainsi, chez cette espèce, quand une femelle pleine a allaité le temps normal un nombre normal de petits, la gestation, au lieu de 20 à 21 jours, a duré de 29 h 34 jours; c'est-à-dire qu'elle a subi un retard égal à la moitié ou même aux trois quarts de sa durée normale. b) Meriones Shaivi Duvernoy. — Remarque préalable. — Dans 11 observations, le nombre des petits de cette espèce a varié de 2 à 7 par portée, et il a été en moyenne 54 1 de -r- = o — — -; et, d'après 8 observations, le nombre des petits élevés par portée a Il 11 41 1. varié de 2 à 7 et il a été en moyenne de — := 5 + - ■^ 8 8 TABLEAU DKS OBSERVATIONS Nombre Date Durée en Désignation Date de la première Date du coït dos de la deuxième jours de la du sujet. parturitioii. fécondateur. nourrissons. parturition. gestation. P V 5 décembre 1882 » 3 6 janvier 32 P XI 29 septembre 1882 29 septembre 6 30 octobre 31 P XIII 13 — » 4 15 — 32 P X 24 juin 1884 » 1 24 juillet 30 Concluaioii. — Ainsi, chez cette espèce, par suite de l'allaitement, le temps normal d'une portée de .3 à 7 petits, la gestation, au lieu de 20 à 21, peut durer 30 à 32 jours, c'est-à-dire être prolongée de la moitié de sa durée normale. c) Meriones longifrons Lataste. — Remarque préalable. — Dans 7 observations, le 34 1 nombre moyen, par portée, des petits de cette espèce a été de — = 5 — -, et celui des 26 1 petits élevés a été de -^ = 4 -f -. 0 à observation unique Nombre Date Durée en des de la deuxième jours do la nourrissons. parturition. gestation. 3 21 août 31 Conclusion. — Comme la précédente et dans les mêmes conditions, cette espèce a vu sa gestation, au lieu de 20 à 21, durer 31 jours, c'est-à-dire subir un retard égal en- viron à la moitié de sa durée normale. d) Mus Musculiis Linné. — Remarque préalable. — Dans b observations, le nombre, 29 1 par portée, des naissances a été de -rr =6 — -; et, dans 2 observations, celui des petits 0 o 14 élevés a été de -^ = 7. observation unique Désignation Date de la première Date du coït du sujet. parturition. fécondateur. P B 27 juillet 1883 27 juillet Nombre Date Durée en Désignation Date de la première Date du coït des de la deuxième jours de la du sujet. parturition. fécondateur. nourrissons. parturition. gestation. P A 3 juin 1882 3 juin 8 4 juillet 31 Conclusion. — Ainsi, sous Tinlluence de l'allaitemenL, la gestation de cette espèce, au lieu de 19 à 21, a duré 31 jours; c'est-à-dire qu'elle a subi un retard égal à la moitié de sa durée normale. e) Mus decumanus Pallas. — Remarque préalable. — Dans 8 observations, le nombre 84 1 moyen, par portée, des naissances a été de -3- = 10 + i^; et, dans 3 observations, celui 28 1 des petits élevés a été de ^ = 9 + --. que, dans ce cas, il n'a pu avoir lieu qu'à l'époque même de la parturition, soit le même jour, soit tout auplus le lendemain. » GESTATION. 147 OBSERVATION UNIQUE Désignation du sujet. P ■'• Date de la première parturition. 1 avril 188.D Date du coït fécondateur. 8 avril Nombre des nourrissons. 3' Date de la deuxième parturition. 30 avril Durée en jours de la gestation. 92 Conclusion. — Dans ce cas, la gestation n'a subi aucun retard appréciable. Il en faut conclure que, pour provoquer un retard dans la gestation, le travail physiologique de la lactation doit avoir une intensité suffisante : l'allaitement de trois nourrissons reste sans effet, dans le cas d'une espèce qui, normalement, en allaite une dizaine. Cette interprétation sera, plus loin, pleinement confirmée. f) Cavia porcellus Linné. — Mathias Duval a eu l'occasion de constater, chez les embryon? du Cochon d'Inde, et suivant que la femelle qui fournissait ceux-ci était ou non nourrice, des différences de développement telles qu'un produit de 16 jours, par exemple, dans le premier cas, n'était pas plus avancé qu'un produit de 8 jours dans le second. Mes observations sur la gestation retardée par l'influence de la lactation se trouvent donc, non seulement confirmées par celles de l'éminent embryologiste, mais encore éten- dues au delà de la famille des Muridés et de la tribu des Myoniorphes, au moins jusqu'à l'espèce du Cochon d'Inde, dans la tribu des Hystricomorphes. 3. "Variations de la durée de la gestation, suivant le nombre des petits allaités et suivant l'allaitement. — a) Suivant le nombre des petits allaités. — Ayant observé, dans le cas du Surmulot, qui, normalement, en allaite une dizaine, que l'allaitement de trois petits reste sans influence sur la durée delà gestation, j'ai recherché la loi des variations de cette durée d'après le nombre des nourrissons. J'ai pris la souris pour sujet de mes observations. Voici celles-ci, résumées en un tableau : Nombre Durée en Désignation Date de la première Date du coït des Date de la jours de la du sujet. parturition. fécondateur. nourrissons. parturition. gestation. P B 27 septembre 1882 27 septembre 0 18 octobre 21 P II 3 octobre 1888 4 octobre 1 26 — 22 P IX 24 - - 24 — 2 16 novembre 23 P XXI 14 février 1889 14 février 3 8 mars 22 p XXVIII 30 janvier — 30 janvier 4 24 février 25 p VIII 23 décembre 1888 23 décembre 5 18 janvier 26 p XXIX 11 février 1889 11 février 6 8 mars 23 p XXI 15 janvier — 16 janvier 7 14 février 30 p A 3 juin 1882 3 juin 8 4 juillet 31 On voit que, d'une façon générale et sauf perturbations accidentelles, le retard de la gestation, dans une même espèce, est proportionnel au nombre des petits allaités ; un nouveau jour de retard correspond à un nourrisson de plus. b) Suivant la durée de l'allaitement. — J'ai recherché aussi la loi des variations de la gestation, en fonction delà durée de l'allaitement. Je ne pouvais pas prolonger celle-ci, mais il m'était loisible, en supprimant les nourrissons, de lui donner toutes les valeurs inférieures à la normale. J'ai pris encore la souris pour sujet de mes observations. Je résume celles-ci dans le tableau suivant : Durée Date Durée tie de la de la l'allaitement, parturition. gestaiioii. 9 10 Date Date de la Date Nombre de la Désignation première du coït des suppression du sujet. parturition. fécondateur. nourrissons. des petits. P 3 déc. 1888 3 déc. 4 5 déc. P I 7 sept. — — 3 10 — P XII bis 24 oct. — 24 oct. 6 29 oct. P VIII 15 — — — 4 23 — P VIII . S nov. — 8 nov. 7 17 nov. P IX 16 — — 16 — 6 26 — 23 déc. 2(1 29 — 22 14 nov. 21 8 — 24 3 déc. 2.-; 11 — 25 148 GESTATION. Quoique peu nombreuses (elles seront, plus bas, complétées par d'autres), ces obser- vations nous laissent|suffisamment voir que, durant les 5 premiers jours, l'état de lacta- tion n'exerce aucune influence sur ladurée de la grossesse, mais qu'il en esttout autrement ensuite. Un même sujet (p VIII), allaitant un nourrisson de plus, porte un jour de plus. Ailleurs, nous voyons qu'une gestation de 23 jours correspond à 9 et à tO jours d'allaitement, tandis que, dans la même espèce (voir plus haut), une gestation de 30 à 31 jours correspond à la durée normale, soit à une quinzaine de jours d'allaitement : c'est-à-dire que le retard de la gestation comprend un nombre de jours approximative- ment égal au nombre de jours que dure l'allaitement à partir du sixième. Théorie de la gestation retardée. — a) Première période. — Ainsi, pendant les 4 à 6 premiers jours, l'état de la lactation de la femelle pleine reste sans influence sur la durée de la gestation, c'est-à-dire sur le développement des ovules. Or, comme on ne conçoit guère que l'état de l'organisme maternel puisse réagir sur le premier dévelop- pement des ovules, autrement que par l'intermédiaire des matériaux de nutrition que ceux-ci doivent puiser dans l'utérus, il paraît vraisemblable que les ovules se suffisent à eux-mêmes durant les 4 à 6 premiers jours de leur développement; d'où, en se lais- sant guider par une nouvelle induction fondée sur l'harmonie généralement observée chez les êtres vivants, entre les diverses fonctions qui concourent au même résultat, on tire quelque raison de supposer que, chez les Mûries, les ovules n'arrivent dans l'utérus que du 4^ au 6"^ jour après la fécondation. Celte induction s'est trouvée confirmée par l'observation. Dans des expériences , d'ailleurs instituées pour un autre but et dont j'aurai à reparler plus bas, j'ai pratiqué, d'un seul côté, chez des femelles de souins fécondées, la section tubo-utérine, successivement aux 2^, 3", 4^, 5" et 6*^ jours après le coït; un temps suffisant après l'opération, j'ai sacrifié chacun des sujets; et je n'ai retenu, de ces expériences, que celles dans lesquelles l'utérus non opéré s'est montré gravide. Or, les utérus opérés aux5« et 6^ jours se sont montrés gravides : c'est-à-dire que, sauf exception ou variation, les ovules n'ont pas encore, au 4" jour, tandis qu'au 5'= ils ont déjà gagné l'utérus. b) Stade d'arrêt. — Ainsi, la lactation n'influence les ovules qu'après qu'ils sont des- cendus dans les utérus; mais comment agit cette influence. Provoque-t-elle un arrêt provisoire ou un ralentissement du développement des produits de la conception? Les indications de l'analyse tendent à rejeter a priori la deuxième hypothèse. Après la naissance, en effet, j'en ai fait l'expérience, l'inanition n'empêche pas le développe- ment des petits de suivre son cours régulier : ceux d'entre eux, par exemple, qui survi- vent assez longtemps ouvrent les yeux à l'époque normale. Or, il y a lieu de croire que les choses se passent de la même façon, sous ce rapport, avant comme après la naissance. Jours Date de la Date de d'âge de État des utérus. Semblable à des utérus non gravides. Semblable aux utérus des 8'-10« jours. Des taches pigmentaires, chacune au milieu d'une petite masse ovoïde claire, le tout dans l'épaisseur de ]a paroi utérine, mais faisant relief du côté du mésomètre : chaque renflement bien plus petit qu'un grain de millet. Idem. Comme aux 7% 8' et toujours. Renflements utérins un peu plus gros que des grains de millet, plus petits qu'au 7" (P XLIX), mais plus gros qu'au 8= jour (P XII) de la gestation normale. D'ailleurs, j'ai pu résoudre la question par l'observation directe. Dans la gestation retardée, en effet, l'utérus subit quelques modifications au moment des ovules (chez la Désignation du sujet. P XXI Date de la fécondation. 8 mars 1889 Date de mort. 13 mars Jours d'âge de la gestation, 6« P XXXV 1" — — 7 — 1' p XXVIII 24 fév. — 3 — 8= P XXXIV 24 p XXXVI 26 p XXX 14 S — 10' 10 — 13' 27 fév. 14' GESTATION. 149 souris, ceux-ci s'enkystent dans la paroi utérine, et l'utérus prend aussitôt une appa- rence qui permet de le distinguer de l'utérus non gravide); et ensuite il demeure sta- tionnaire durant un nombre de jours qui correspond assez exactement au nombre des jours de retard de la gestation. Dans les observations résumées dans le tableau ci-des- sus, le nombre des petits allaités par les femelles pleines a été constamment de o; celles-ci devaient donc avoir des gestations de 26 jours environ, c'est-à-dire retardées de 5 à 8 jours; or, à partir du 7*= et jusqu'au 13'= jour, c'est-à-dire pendant sept jours, les utérus et les produits de conception se sont montrés stationnaires. Ainsi la gestation, quand elle est retardée, subit, aussitôt api'ès l'arrivée des ovules dans les utérus, un arrêt dont la durée cojrespond au retard dont elle est affectée. c) Troisième période. — Puis elle reprend son cours; et elle évolue alors avec une vitesse normale, puisque les fœtus doivent venir au monde avec un développement nor- mal, et qu'ils doivent achever leur évolution dans le temps ordinaire. En somme, au moment de son arrivée dans l'utérus, l'ovule du mammifère est, sous un certain aspect, comparable à l'œuf fécondé de l'oiseau avant l'incubation, ou même à une graine avant la germination. L'œuf de l'oiseau a sa provision de nourriture, mais il lui manque un certain degré de chaleur; la graine possède ses matériaux solides de nutrition, mais il lui faut une certaine dose d'humidité et une certaine température; l'ovule dn mammifère se trouve dans un milieu qui ne peut être insuffisant qu'au point de vue nutritif : parvenus à ce point de leur évolution, l'œuf, la graine , l'ovule peuvent attendre, un certain temps, la réalisation de l'ensemble des conditions nécessaires à leur développement ultérieur; mais, dés qu'ils ont dépassé ce point, ils doivent conti- nuer à se développer, ou périr. J'ai admis par induction que, dans la gestation retardée, la suspension du dévelop- pement des ovules est due à ce que, l'activité de l'organisme maternel étant détournée au profit de la lactation, les ovules ne trouvent pas dans l'utérus les conditions d'ali- mentation dont ils ont besoin. Il est possible de vérifier cette induction. Si elle est exacte, en effet, il est évident que toute autre cause également susceptible de provoquer une dépense d'activité organique, qu'un traumatisme, par exemple, pratiqué en temps opportun, aura le même effet que la lactation. Or l'observation est absolument d'accord avec la théorie. Une série d'expériences, d'ailleurs instituées pour un autre but, est résumée dans le tableau suivant : Jours Désignation Date Date du depuis Date do Jours de retard du sujet. du coït. traumatisme. lo coït. la mort. de la gestation. P XXII 28 déc. 1888 29 déc. 2* 3 janv. (Stadt ', d'arrêt.) P XXVII 24 jaav. 1889 23 janv. 2" 6 fév. 0 p XLIV 15 mars — 16 mars 2" 31 mars l P XXVI 2.5 janv. — 27 janv. 3= 9 févr. 8 p XXXII 27 — — 30 — 4e 12 — 10 p XLVI 13 mars — 17 nov. 5= 27 nov. 0 P XXXIII 6 fév. - H fév. 6' 21 fév. 0 p LX 28 avril — 30 avril. 3= 17 naai 5 Le premier sujet (9 XXII) avait eu les deux utérus liés vers l'extrémité' vaginale, et le dernier (9 LX) avait reçu dans l'abdomen un utérus étranger gravide; tous les autres avaient subi, d'un seul côté, la section tubo-utérine. A l'exception du pre- mier, mort des suites de l'opération, tous ont été sacrifiés après guérison, et quand la gestation avait déjà dépassé le stade d'arrêt. Pour chaque sujet, le retard de la ges- tation a été apprécié en recherchant dans une série d'utérus à tous les jours de la ges- tation normale, celui qui se trouvait au même stade que l'utérus du sujet en question, et en prenant la différence d'âge de gestation des deux. Nous voyons d'abord que, lorsque le traumatisme est venu trop tard, soit aux 6° et 5'= jours, la gestation n'a pas subi de retard. Cette observation est bien d'accord avec la théorie : une fois passé le stade d'arrêt, l'ovule doit suivre le cours de son évolution normale. En second lieu, quand le traumatisme a été pratiqué avant le stade d'arrêt, la gesta- 150 GESTATION. tion a été généralement retardée; et pour un même traumatisme, elle l'a été d'autant plus que celui-ci a eu lieu plus tard. La théorie rend également bien compte de cette observation : l'ovule ne peut subir l'efTet du traumatisme maternel que lorsqu'il atteint son stade d'arrêt, et cet effet se trouve d'autant plus faible, à cette époque, que le trau- matisme est alors plus ancien et plus avancé dans la voie de la guérison.Dans un cas (9 XX VII), le traumatisme ayant été pratiqué dès le lendemain du coït, la gestation n'a subi aucun retard: or, cette fois, à l'autopsie, j'ai trouvé, du côté opéré, la trompe et l'utérus soudés bout à bout, et il y avait des fœtus dans l'un et l'autre utérus; ou bien j'avais manqué la section tubo-utérine, ou bien, à l'époque du passage des ovules dans l'utérus, la réparation avait été parfaite, au point de rétablir la communication entre la trompe et l'utérus : dans tous les cas, la cause ayant disparu, n'a pu avoir d'effet au moment opportun. Il est clair qu'en pratiquant, à propos, sur une femelle fécondée, une série de trau- matisnies, on, pourra accumuler leurs effets sur la gestation, et que ces effets eux- mêmes pourront être ajoutés à ceux de la lactation. Encore ici, l'observation a confirmé la théorie. Voici, pour terminer, le résumé d'une expérience de ce genre. 5 XXIX a mis bas et a été fécondée le 8 mars 1889. Je lui laisse cinq nourrissons. Le 18 mars, c'est-à-dire au 11^ jour et par conséquent pendant le stade d'arrêt de sa gestation de nourrice, je lui fais une large brûlure sur une cuisse, et je lui laisse encore quatre nourrissons. Le lendemain, je la brûle de nouveau sur la plaie de la veille et je lui laisse encore trois nourrissons. Enfin, le 22 mars, soit au IS* jour de sa gestation, je la brûle pour la troisième fois sur la même plaie, et je lui supprime son dernier nourrisson; un de ceux-ci lui avait été retiré la veille et l'autre l'avant- veille. Le 18 août, au 42® jour de la gestation, je sacrifie le sujet. Je trouve alors ses utérus au même degré que ceux du 10'= jour de la gestation normale! Ainsi, dans ce cas, la ges- tation avait été retardée de 32 jours! Si je l'avais laissée venir à terme, au lieu de 20, elle aurait duré 52 jours! » § IM. —DURÉE DE LA GESTATION CHEZ LA FEMME. Si, à propos de la durée de la gestation chez les animaux, nous avons pu dire que nos connaissances sur ce point n'étaient guère plus précises qu'au temps d'ARisToiE, Varnier a pu, avec non moins de raison, écrire dans son beau livre {La pratique des accouchements, obstétrique journalière, Paris, Steinheil, 1900) cette phrase concernant la durée de la gestation ou grossesse chez la femme: « Nous sommes aussi peu fixés sur la durée normale de la grossesse qu'à l'époque où Harvey la calculait d'après le temps pendant lequel (( le Christ, le plus parfait des hommes, resta dans le sein de sa mère », c'est-à-dire, en comptant de l'Annonciation jusqu'à Noël, une période de 275 jours. » Sans vouloir faire ici l'historique de la question, il nous parait nécessaire d'indiquer les étapes de cette marche si lente vers un commencement de vérité. HippoGRATE pensait qu'un enfant naissant à sept mois avait toutes les conditions requises de forces et de santé. Pour lui, la grossesse pouvait donc ne durer que sept mois. Cette opinion traversa bien des siècles, et arriva jusqu'à Mauriceau (xvir siècle), sans avoir été à peine ébranlée. C'était l'époque où l'on croyait que l'enfant lui-même était l'agent actif de son expulsion. Mauriceau, le premier, s'éleva contre cette manière de voir, et s'efforça de démontrer que, si un enfant expulsé au 7"= mois de la grossesse est viable, celui qui est expulsé à huit mois l'est plus encore ; et qu'enfin l'enfant consi- déré comme né à terme présente seul au maximum les conditions de viabilité. Ce qui veut dire que les naissances dites précoces ne sont pas le résultat d'une grossesse ayant eu une durée normale. Depuis Mauriceau, les accoucheurs, tout en reconnaissant que les limites de la durée normale de la grossesse sont difficiles à préciser, ont recherché quel était le laps de temps écoulé le plus souvent soit entre la copulation et la naissance, soit entre la der- nière menstruation et le moment de l'accouchement. Des résultats constatés, de la loi de fréquence observée, ils ont conclu à une durée moi/enne de la grossesse. Seul, et sans preuves à l'appui de son affirmation, Depaul a écrit : « La durée nor- male de la grossesse est de deux cent soixante-dix jours, ou neuf mois solaires. » Il est GESTATION. 151 vrai qu'il se hâte d'ajouter : « Cependant, les observations recueillies par des hommes dignes de foi permettent (au moins pour certains cas) d'assigner à l'accouchement un terme moins absolu. » {Clinique obstétricale, 1872.) Voici les principaux résultats auxquels sont arrivés les observateurs, en prenant comme point de repère pour arriver à connaître approximativement le terme de la grossesse, c'est-à-dire la date probable de l'accouchement, soit le coït fécondant, soit la dernièie menstruation. Fixation du terme de la grossesse, calculé d'après la date du coït fécondant. — Reid a recueilli, soit dans sa clientèle, soit dans celle de ses confrères, l'histoire de bO cas dans lesquels la fécondation aurait été le résultat d'un seul coït dont la date était exac- tement connue. Il a constaté que le terme le plus fréquent oscilla entre 274 et 280 jours, et que les limites extrêmes oscillèrent entre 260 et 294 jours. D'après Tarnier et Chantreuil, Ravn a réuni 31 cas où le jour du coït fécondant a pu être fixé : l'accouchement a eu lieu en moyenne 272,3 jours après cette époque. Stadfelt a réuni 34 cas semblables : le chiffre moyen fut 271,4 jours. Schwegel a trouvé, en moyenne, 260 à 280 jours; Sghrœder, 271,44 jours; Ahlfeld, 269,91 jours à partir du jour de la copulation. Nous avons nous-mêmes réuni 60 cas où il n'y avait eu qu'un seul coït. Ces cas étant relatifs soit à des filles n'ayant eu qu'un seul rapprochement, soit à des femmes mariées dont les maris étaient restés absents depuis la dernière copulation, et la durée moyenne fut de 262 jours. Désormeaux raconte le fait suivant : « Une dame, mère de trois enfants, et tombée en démence, avait épuisé vainement toutes les ressources de la thérapeutique. Un médecin pensa qu'une nouvelle grossesse rétablirait peut-être ses facultés intellectuelles. Le mari consentit à noter sur un registre le jour de chaque union sexuelle; les rappro- chements n'eurent lieu que tous les trois mois, afin de ne pas troubler une conception encore mal définie. Or cette dame, dit Désormeaux, gardée par ses domestiques, douée en outre de principes de religion et de morale excessivement sévères, n'accoucha qu'à neuf mois et demi. » En examinant les chiffres donnés par les différents observateurs, on constate que la durée la plus longue après une copulation soi-disant unique a été de 294 jours. Fixation du terme de la grossesse d'après la dernière apparition des règles. — Devilliers a noté le dernier jour des règles et le jour de l'accouchement dans 103 cas. Voici le résultat de ses observations : Jours. Jours. 8 grossesses se sont terminées du 250" au 260° 10 — 260» — 270" 39 — 270-= — 280» 31 — 280= — 290" 10 — 290" — 300" 5 — 300' — 310" Simpson, en résumant les séries d'observations recueillies par Merriman, Murphy et Reid, a constaté que le plus grand nombre d'accouchements se produit au 270® ou 280"^ jour après la cessation des dernières règles. Schrader et Matthews Dungan éva- luent à 278 jours d'intervalle le temps en question. Gaston, dans sa thèse, à la rédac- tion de laquelle nous avons participé, a trouvé que le plus grand nombre d'accou- chements se produit le 272^ jour après la cessation 'des règles. Enfin Varnier {lac. cit.), après avoir observé 1 000 femmes, dont la date des dernières règles avait été parfaite- ment connue, a donné le graphique suivant. (V. page 132.) Causes qui d'après les auteurs classiques font varier la durée de la gros- sesse. — a) Influences héréditaires. — De La Motte, dans sa 89"^ observation, raconte l'histoire d'une dame accouchant régulièrement à sept mois d'enfants viables et bien constitués ; et afin, dit-il, « de ne rien laisser en doute de cette histoire, c'est que les filles de cette dame accouchent de môme à sept mois ». Par contre, Simpson raconte avoir été informé par Retzius (de Stockholm) « d'un exemple qu'il a rencontré dans sa pratique d'une prolongation excessive de la grossesse, non comme particularité indi-' 152 GESTATION. viduelle, ni comme un fait accidentel pour une seule grossesse, mais comme une par- ticularité héréditaire chez une mère et ses deux filles. On verra plus loin ce qu'il faut penser de ces observations, lorsque nous étudierons l'influence de l'individualité, h) Age des parents. — Dans l'article Grosses^se du Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales, nous disions : « Des recherches n'ont pas encoi'e eu lieu à ce sujet. Cependant nous ne pensons pas que l'âge des parents puisse avoir une influence notable sur l'âge de la grossesse. Nous avons observé un certain nombre de grossesses aux deux extrémités de la vie génésique chez les femmes, et la durée ne nous a paru ni diminuée, ni accrue. Nous avons accouché une fille de 12 ans et une femme primipare "" ■*] M ! : T 1 1 1 ' n —] ■ 1 ■■ 1 1 \ *tO / f 1 r" / / ■S"! 1 / / \ / j ,/ 1 "30 1 / A o 1 / A ! 1 1 1 \ ! c 1 1 ' \ 1 3 Ut 1 1 w25 1 1: / 1 , 1 ! 1 y f 1 l w / 1 i k x: 1 "'>0 y 1 o \ S o \ flS l •O \ «J 15 \ 1 Si \ 1 1 1 £ 1 , o 1 / i ! 1 1 / \ 1 10 1 1 1 1 \ 1 i 1 / \ i i ' 1 1 ! 1 [ [ 7V 1 5 \ \. j\ 1 \ ^W\ 1 1 \ ^\/^ 1 ^ / \ S - - 1 1 i\ / îie 5 2" 0 21 5 2£ 0 M 0 Tlt 28Î de V ou 2£ PS 0 a pr es 1 2; BS )5 c er ^n èr 3C es 0 r èc le s 3C )5 3 0 3 .... 5 / \ 32 Tableau graphique de la durée de la grossesse comptée à partir de la fin des dernières règles ; résumé de 1 000 observations (Varnierj. de 52 ans; la première 264 jours, et la seconde 269 jours après la cessation des règles. I-es recherches de Gasto.n l'ont conduit à formuler la même appréciation. » Georges Picard, étudiant ce sujet d'après les archives de la clinique Baudelocque, a confirmé cette appréciation, en constatant que chez 38 femmes âgées au moins de 16 ans, la grossesse a évolué normalement 29 fois. La cause de l'interruption de la grossesse chez les 9 autres a pu être déterminée en dehors de la maternité précoce {De la puerpéralité chez les femmes âgées de moins de 16 ans, Thèse de Paris, 1903). Nous aurons cependant à revenir sur ce point, en exposant les causes qui peuvent empêcher la durée normale de la grossesse. c) Durée des règles. — Sghrœder pense que, chez les femmes qui ont de longues époques menstruelles, la grossesse dure beaucoup plus longtemps; et, pour lui, une longue durée des règles et une longue durée de la grossesse seraient l'une et l'autre la conséquence GESTATION. 153 d'une même cause, une faible irritabilité des nerfs de l'utérus et de l'ovaire. Nous dirons avec WiiXCKEL que la question de savoir si le type de la menstruation exerce une influence sur la durée de la gestation n'a pas encore été complètement élucidée. d) État de primiparité et de multiparité. — Dans l'article '( Grossesse », déjà cité, nous disions : « Les reclierches de Gaston et les nôtres nous paraissent démontrer d'une façon bien nette l'influence de la multiparité sur la prolongation de la durée de la grossesse. » Winckel dit à ce sujet : « La durée de la gestation augmente de 3 1 /2 à 5 jours avec le nombre des grossesses. Il est également certain que jusqu'à 35 ans cette augmentation est de 4 à 5 jours, mais qu'à partir de cet âge cette augmentation ne s'observe plus. » Nous reviendrons plus loin sur ce point. e) Sexe des fœtus. — Dans le tableau publié par Murphy, concernant la durée de la grossesse chez 184 femmes, le sexe de l'enfant est noté dans chaque cas à peu d'excep- tion près. Sur 90 cas, dans lesquels les femmes n'accouchèrent qu'après le 280"^ jour qui suivit la menstruation, 57 p. 100 eurent des garçons et 49 p. 100 des filles. Gaston nie l'influence des sexes sur la durée de la grossesse, car sa statistique donne à peu près autant de filles que de garçons, pour les grossesses les plus longues aussi bien que pour les plus courtes. Nous avons vu que Henry H. Wing [Period of gestation in Cotvs), contrairement à d'autres éleveurs, partage la même opinion et nie l'influence du sexe des veaux sur la durée de la gestation. f) Constitution et habitas. — D'après Issmer, cité par Winckel, la constitution et l'ha- bitus semblent exercer une certaine influence. Cet auteur a observé chez les femmes vigoureuses une durée moyenne de 278,6 jours et chez les femmes faibles une durée moyenne de 276,8 jours. D'autres causes peuvent avoir une influence sur la durée de la gestation, comme par exemple le lieu d'insertion du placenta, mais elles sont d'ordre pathologique et nous ne devons pas nous en occuper ici. Influence du surmenage sur la durée de la grossesse. — a) Surmenage. — Cette cause, mise en évidence depuis moins de dix ans, a une importance telle à tous les points de vue, qu'il nous paraît nécessaire de l'exposer avec l'ampleur qu'elle comporte. D'autant plus que cette cause, qui n'est point contestée, qui même a été reconnue exacte par nombres d'auteurs, est pour la plupart, sinon par tous, encore aujourd'hui mal interprétée. C'est ainsi que Winckel écrit : « 11 est un facteur qui prolonge nette- ment la durée de la grossesse : c'est le repos. Son influence a été démontrée par A. Pinard d'une manière évidente. « Et il ajoute cette remarque au moins curieuse : « C'est probablement à l'influence de ce facteur qu'est due la différence observée entre les grossesses d'hiver (279,5 jours) et les grossesses d'été (277,2 jours en moyenne). Nous n'avons jamais voulu dire que le repos prolongeât la grossesse. Nous avons tou- jours voulu montrer par nos recherches que le repos permet à la grossesse d'évoluer d'une façon physiologique en l'empêchant d'être interrompue avant son terme normal. Toutes choses égales d'ailleurs, avons-nous dit, nous voulons simplement démontrer que « la grossesse a d'autant plus de chance d'évoluer normalement, et le fœtus de se développer d'une façon plus naturelle et plus complète, que la femme se trouve placée pendant la gesta- tion dans des conditions particulières; et d'autre part, que toute femme enceinte surmenée est exposée à accoucher avant terme » {Clinique obstétricale, Paris, Steinheil, éd. 1899, p. 53). Enfin, après avoir démontré que le poids de l'enfant d'une femme -qui s'est re- posée pendant deux ou trois mois, est supérieur d'au moins 300 grammes à celui d'une femme qui a travaillé debout jusqu'à l'accouchement, nous avons écrit : les enfants des reposées sont plus développés, parce que chez elles la grossesse a eu une durée normale, tandis que les enfants des surmenées sont moins développés parce que la durée de la grossesse a été interrompue. La première note concernant l'influence du repos sur la marche de la grossesse et le développement de l'enfant fut communiquée en 1895 à l'Académie de médecine (m Bulletin, 26 novembre) et à la Société de médecine publique et d'hygiène professionnelle. Cela dit, nous allons exposer maintenant les preuves de l'influence du repos sur la durée de la grossesse. 1. Preuves démontrant l'influence du repos pendant la grossesse sur le poids des enfants ; 15i GESTATION. A — Nous avons calculé le poids moyen des enfants nés à la Clinique Baudelocque de mères ayant travaillé jusqu'à leur accouchement — s'étant reposées dix jours au refuge de l'avenue du Maine; — s'étant reposées plus de dix jours au dortoir de la clinique. Voici le résultat de cette statistique : 500 enfants nés de mères ayant travaillé jusqu'à leur accouchement ont donné un poids total de 1505000 grammes; par enfant, 3 010 grammes. 500 enfants nés de femmes ayant séjourné au moins dix jours au refuge de l'avenue du Maine ont donné un poids total de 1 645 000 grammes; par enfant, 3 229 grammes. 500 enfants nés de mères ayant séjourné au dortoir de la Clinique Baudelocque ont donné un poids total de 1 683 000 grammes; par enfant 3 866 grammes. jB. — D'après nos conseils et nos indications, Fr. G. Bachimont {Documents pour servir à l'histoire de la puériculture intra-utérine, Thèse de Paris 1898) a recherché quel est le poids moyen des enfants chez les femmes : 1° Ayant travaillé pendant toute la durée de la grossesse; 2" Ayant travaillé pendant toute la durée de la grossesse dans la station debout ; 3° Ayant travaillé pendant toute la grossesse dans la station assise; 4° Ayant travaillé pendant toute la durée de la grossesse assises, mais en faisant mouvoir les jambes; 5° Ayant eu une période de repos pendant deux à trois mois ; 6° Ayant eu une période de repos dépassant trois mois. Les tableaux ci-dessous donnent le résumé de ces recherches faites à la Clinique Baudelocque et à la Maternité de Tourcoing : PRIMIPARES 355 primipares ayant travaillé debout jusqu'à l'accouchement. . . 144 — ouvrières de tilature ayant travaillé debout jusqu'à l'accouchement 54 primipares, ménagères, couturières 219 primipares ayant travaillé assises jusqu'à l'accouchement. . . 22 — machinistes ayant travaille assises jusqu'à l'accou- chement 298 primipares s'étant reposées de 2 à 3 mois 199 — s'étant reposées plus de 3 mois MULTIPARES 523 multipares ayant travaillé debout jusqu'à l'accouchement. . . . 80 — ouvrières de filature ayant travaillé debout jusqu'à l'accouchement 70 multipares ménagères, couturières etc. 388 — ayant travaillé assises jusqu'à l'accouchement. . . . 55 — mécaniciennes ayant travaillé assises jusqu'à l'accou- chement , 301 multipares s'étant reposées 2 à 3 mois 534 multipares s'étant reposées plus de 3 mois Ce tableau récapitulatif, qui porte sur 4,455 observations, démontre, il nous semble, ayec une rigueur mathématique l'influence du repos ou de la fatigue pendant la gros- sesse, sur le poids du produit de conception, puisqu'il fait savoir que : le poids de Ven- fant d'une femme qui s'est reposée deux à trois mois est supérieur d'au moins 300 grammes à celui de l'enfant d'une femme qui a travaillé debout jusqu'à l'accouchement. C. — Dans un travail fait à notre instigation à la Clinique Baudelocque par Letour- NEUR, sur l'influence delà profession de la mère (De l'influence de la profession de la mère sur le poids de l'enfant, Thèse de Paris 1897), nous trouvons les chiffres ci-dessous : Age moyen années. Poids moyen kilogr. 25,67 2,931 20,53 21,58 22,54 2,988 3,030 3,097 24,59 22,58 22,70 2,950 3,291 3,255 Age moyen années. 28,83 Poids moyen kilogr. 3,116 25,34 27,32 29,67 3,114 3,323 3,303 28,80 26,90 26,11 3,201 3,457 3,457 GESTATION. 155 a) Influence des professions sur le poids moyen des enfants. I pares II — III — IV - V — Totaux Par enfant I pares II — III — IV — V — Totaux Par enfant SANS REPOS Professions Professions fatigantes. non fatigantes gr. gr- . . 2 930,95 2 946,82 . . 3 126,27 3 212,50 . . 2 977,33 3 118,94 . . 2 898,75 3 169,16 . . 3 456,25 3 202,50 . . 15 409,55 15 650,00 . . .3 081,91 3 130,00 AVEC REPOS Professions Professions fatigantes. non fatigantes gr. gr. . . 3198,38 3142,05 . . 3 338,19 3 349,88 . . 3 205,33 3 294,06 . . 3 240,00 3 329,05 . . 3 616,66 3 475,38 . . 16 598,56 16 590,87 , . 3 319,71 3 218,17 P) Influence du repos sur le poids moyen des enfants. PROFESSIONS FATIGANTES Sans repos, gr. I pares 2 950,93 ' II — 3 126,27 m — 2 977,33 IV — 2 898,75 V — 3 456,25 Totaux 13 4 09,-55 Par enfant 3 081,91 Avec repos, gr. 3198,38 3 338,19 3 205,33 3 240,00 3 616,66 16 398,56 3 319,71 PROFESSIONS NON FATIGANTES Sans repos, gr. 1 pares 2 946,82 II — 3 212,58 III — 3 118,94 IV — 3 139,16 V — 3 202,50 Totaux 13 630,00 Par enfant 3 130,00 Avec repos gr- 3 142,05 3 349,88 3 294,06 3 329,50 3 475,38 16.590,87 3 318,17 L'auteur termine son travail par ces conclusions ^ : 1" Les femmes qui ont une profession fatigante mettent au monde des enfants moins gros que celles qui ont une profession non fatigante. Il y a une différence moyenne de 50 grammes au profit des enfants de ces dernières; 2° Quelle que soit leur profession, les femmes qui se reposent pendant leur grossesse 1. L'influence du repos sur les femmes ayant des grossesses gémellaires se montre avec plus d'évidence encore que chez les femmes ayant une grossesse simple, ainsi qu'en témoignent les recherches de A. Bachimont, dont on trouvera les résultats plus loin au paragraphe : Gros- sesses multiples. 156 GESTATION. mettent au monde des enfants d'un poids sensiblement égal, mais qui dépasse en moyenne de 200 grammes celui des enfants des mêmes femmes ne se reposant pas. D. — A. Baghimont a établi, d'après nos indications et des documents recueillis à la Clinique Baudelocgue {De la puériculture intra-utérine au cours des grossesses gémellaires. Thèse Paris, 1899), l'influence du repos sur le poids des enfants dans les grossesses gémellaires. Sa statistique porte sur 225 grossesses gémellaires. En voici les résultats : 1° Enfants des femmes qui se sont reposées. Chez ces femmes, le poids moyen des enfants a été : A la naissance. A la sortie de Baudelocgue. Gr. Gr. 1" enfant 2500 l"enfant 2 640 2= — 2 480 2= — 2 380 2° Enfants des femmes qui ne sont pas reposées : Chez ces femmes le poids moyen a été : A la naissance. A la sortie de Baudelocgue. Gr. Gr. 1" enfant 1 93S 1" enfant 2 030 2« — 1 900 2" — 2 025 3" Enfants des femmes qui n'ont pas donné de renseignements : Chez ces femmes le poids moyen a été : A la naissance. A la sortie de Baudelocgue. Gr. Gr. l" enfant 2180 1" enfant 2175 2» — 2150 2= — 2180 Chez les femmes qui se sont reposées, le poids moyen au moment de la naissance a été : Pour le 1" enfant 2 500 A la sortie de Baudelocgue . .....;...... 2640 Pour le 2= enfant 2 480 A la sortie de Baudelocque 2 580 Chez les femmes qui ne sont pas reposées, le poids moyen au moment de la nais- sance a été : . . Gr. Pour le 1" enfant 1 935 A ]3i, sortie de Baudelocque 2 030 Pour le 2» enfant 1900 A la sortie de Baudelocque 2 025 Nos recherches ont été continuées par d'autres ^tuteurs Sarraute-Lourié, Bernson, Vaccari, etc. (Voir Annales de Gynécologie et d'Obstétrique, juin 1903, p. 406), qui n'ont fait que confirmer nos constatations, ainsi qu'on 'va le voir. ' 2. — Preuves démontrant l'influence du repos sur la durée de la grossesse. — La durée exacte de la grossesse étant jusqu'à présent impossible à préciser, j'ai recherché, chez les femmes s'étant reposées et chez les femmes privées de repos, le laps de temps écoulé entre la dernière menstruation et l'accouchement. Ces deux points de repère bien établis, et les causes d'erreur étant les mêmes chez les unes et chez les autres, une comparaison significative peut s'en suivre. A. — Le dépouillement de nos observations de la Clinique Baudelocque nous adonné la proportion ci-dessous (Pinard, Clinique obstétricale, 1899, p. 51) : Chez 1000 femmes ayant travaillé jusqu'au moment de l'accouchement, le temps qui s'est écoulé entre les dernières règles et l'accouchement a été : Fois. De 280 jours et plus 482 De 270 — à 280 279 Au-dessous de 270 239 GESTATION. 157 Chez 1000 femmes ayant séjourne' au refuge ou au dortoir, le temps qui s'est écoulé entre les dernières règles et l'accouchement a été : De 280 jours et plus. De 270 — à 280. . Au-dessous de 2"0. . Fois. 660 214 126 B. — M™« LivcH.\ Sarr.\ute-Lourié a fait des recherches analogues à la Maternité de Lariboisière et à l'asile Michelet, qui est un refuge municipal pour les femmes enceintes. Prenant comme point de départ le 15^ jour après la dernière menstruation, elle a obtenu les résultats ci-après [De Vinfluence du repos sur la gestation. Étude statistique. D. Paris, 1899, pp. 66, 67 et 68). Première série. — En comparant la durée de la gestation de 1 000 femmes qui se sont reposées à l'asile Michelet et celle de 1 000 femmes qui ont accouché à l'hôpital Lariboi- sière sans repos préalable, on trouve que la durée moyenne de la gestation est : .\SILE MICHELET Primigestes, reposées. 544 primigestes se répartissent de la façon suivante : a) Pour 423 primigestes admises enceintes de 7 à 8 mois et demi, la moyenne de la durée de gestation est de 271 jours 83. Primigestes. reposées. 6) Pour 114 primigestes admises enceintes de plus de 8 mois et demi, la moyenne de la gestation est de 273 jours 43. (■) Pour 17 primigestes admises enceintes de moins de 7 mois, la durée moyenne de la ges- tation est de 268 jours 66. Mogenne totale : Pour 544 primigestes, la durée moyenne de la gestation est de 272 jours 08. Pluripares, reposées. 324 pluripares se répartissent de la façon suivante : a) Pour 263 pluripares admises enceintes de 7 mois à 8 mois et demi, la durée de la gesta- tion est de 269 jours 38. b) Pour 44 pluripares admises enceintes de plus de 8 mois et demi, la durée de la gesta- tion est de 269 jours 28. c) Pour 17 pluripares admises enceintes de moins de 7 mois, la moyenne de la durée de la gestation est de 270 jours. Moyenne totale. Pour 324 pluripares, la durée moyenne de la gestation est de 269 jours 39. HÔPITAL LARIBOISIÈRE Primigestes, non reposées. Pour 384 primigestes, la durée moyenne de la gestation est de 246 jours 48. Primigestes, non reposées. la Pluripares, non reposées. Pour 420 pluripares, la durée moyenne de gestation est de 247 jours 92. Deuxième série. — La même comparaison faite sur une série de 530 femmes pour l'asile Michelet et de 550 femmes pour l'hôpital Lariboisière a' donné à peu près les mêmes résultats : ASILE MICHELET Multipares reposées. 102 multipares se répartissent de la façon suivante : a) Pour 87 multipares admises enceintes de 7 à 8 mois et demi, la durée moyenne de la grossesse est de 269 jours 35. HOPITAL LARIBOISIERE Multipares non reposées. Pour 196 multipares, la durée moyenne delà gestation est de 248 jours 32. 158 GESTATION. ASILE MIGHELET Multipares reposées [suite), b) Pour 13 multipares admises enceintes de plus de 8 mois et demi, la durée moyenne de la grossesse est de 274 jours 53. Moyenne totale. Pour 102 multipares, la durée moyenne de la gestation est de 270 jours 28. Primigestes, reposées. a) Pour 2S9 primigestes admises, enceintes de 7 à 8 mois et demi, la durée moyenne de la gestation est de 265 jours 57. b) Pour 36 primigestes admises, enceintes de plus de 8 mois et demi, la durée moyenne de la gestation est de 271 jours 55. Moyenne totale. Pour 203 primigestes, la durée moyenne de la grossesse est de 266 jours 29. Pluripares, reposées. a) Pour 173 pluripares admises, enceintes de 7 à 8 mois et demi, la durée moyenne de la gestation est de 263 jours 40. b) Pour 14 pluripares admises, enceintes de plus de 8 mois et demi, la durée moyenne de la gestation est de 272 jours 17. Moyenne totale. Pour 1 89 pluripares, la durée moyenne de la gestation est'de 263 jours 90. Multipares, reposées. Pour 66 multipares admises enceintes, de 7 à 8 mois et demi, la durée moyenne de la gesta- tion est de 263 jours 51 . HÔPITAL LARIBOISIÈRE Multipares non reposées [suite). Primigestes, non reposées. Pour 295 primigestes, la durée moyenne de la gestation est de 245 jours 50. Pluripares, non reposées. Pour 227 pluripares, la durée moyenne de la gestation est de 243 jours 82. Multipares, non reposées. Pour 118 multipares, la durée moyenne de la gestation est de 248 jours 88. Les conclusions du travail de l'auteur sont les suivantes : (' Nous voyons donc que pour les 1 bOO femmes de la Maternité, de Lariboisière et les 1 550 femmes de l'asile Michelet, la différence de la durée de la gestation est consi- dérable : 20 jours et plus. » C. — Dans un travail auquel j'ai déjà fait allusion, A. Bachuiont a donné un tableau concernant la durée de la grossesse chez les 225 femmes ayant une grossesse gémellaire 1° Pour les femmes qui se sont, reposées pendant les derniers mois ou les dernières semaines de leur grossesse, il s'est écoulé, entre le dernier jour de leurs dernières règles et le jour de l'accouchement en moyenne 269 jours; 2° Pour les femmes qui ne sont pas reposées, on a obtenu une moyenne de 247 jours; 3° Enfin pour les femmes sur lesquelles on n'avait pas de renseignements, la moyenne a été de 250 jours environ. D. — Enfin, dans une statistique toute récente, faite à la Clinique Baudelocque, sur 4 000 femmes enceintes reposées dont la date des règles a pu être précisée, la durée de temps écoulé entre cette date et le jour de l'accouchement a été : Jours. Dans 11 cas de moins de 200 — 85 — 230 — 239 - 272 — 665 cas de plus de 275 Nous n'avons pas besoin d'insister sur la concordance, la valeur et l'éloquence de tous ces chiffres; il nous semble que la démonstration est suffisante pour démontrer l'influence du surmenage. Nous devons maintenant faire voir dans quelle mesure il agit. GESTATION. 159 A cet effet, nous avons recherché le poids de tous les enfants nés h la Maternité depuis 1822,— année où on a commencé à peser les enfants au moment de leur naissance, ^ jusqu'en 1899 et de tous les enfants nés à la Clinique Baudelocque. Sur 168 656 enfants nés à la Maternité et 19 548 enfants nés à la Clinique Baudelocque, soit un total de 188 204 entants, nous avons constaté le résultat suivant • Enfants pesant : P. 100. 4 000 gr. et plus 9 236, soit environ 5,00 De 3 500 — à 4000 gr 35 124, — 17,00 De 3200 — à 3500 — .... 31255, — 15,00 De 3 000 — à 3200 — ... . 39963, — 20,00 De 2 800 — à 3 000 — . . . . 18 536, — 10,50 De 2 500 — à 2800 — . . . . 25 019, — 15,00 2 500 — et au-dessous. . . 29011, — 16,00 Pesaient moins de 3 000 grammes 54,090 Ainsi, sur 188 204 enfants : étaient des prématurés ou débiles pesant 2 500 grammes et au-dessous . 29,071 On peut objecter que le poids de l'enfant n'est pas toujours en rapport direct avec la durée de la vie intra-utérine, et que la taille des parents a une influence capitale. Nous ne nions point cette influence, et nous reconnaissons que les gros enfants, ceux dont le poids atteint ou dépasse 4000 grammes sont le plus souvent des enfants issus de parents de grande taille, présentant eux-mêmes un développement exceptionnel. Mais la différence de taille observée chez les parents est insuffisante à expliquer la différence de poids observée chez les enfants. Ce n'est pas parce que les parents étaient de petite taille que 72 620 enfants, sur 188 204, pesaient au moment de leur naissance moins de 3 000 grammes. La taille des parents peut expliquer le plus, elle ne peut expliquer le moins. Du reste, si au point de vue du développement de l'enfant pendant la vie intra- utérine, la taille des parents avait cette influence prépondérante, les femmes petites devraient donner naissance à des enfants petits. Or les résultats observés chaque jour sont en opposition avec cette manière de voir. En voici la preuve la plus démonstrative. Nous avons cherché quel était le poids moyen des enfants chez 100 femmes symphy- séotomisées, c'est-à-dire chez 100 femmes ayant presque toutes une taille au-dessous de la moyenne, et dont quelques-unes sont de véritables naines. Or le poids moyen de ces 100 enfants est de 3 kil. 330 gr. Olshausen a fait la même constatation au Congrès de Moscou, à propos des femmes chez lesquelles il avait été obligé de pratiquer l'opération césarienne. 3. — Quelles raisons peut-on invoquer pour expliquer l'influence du surmenage sur la marche de la grossesse ? — Sans vouloir ici étudier spécialement les causes de l'accouche- ment, question qui sera envisagée plus loin, il nous parait nécessaire de rechercher quelles peuvent être les causes de l'interruption de la grossesse, c'est-à-dire de l'expul- sion prématurée du produit de la génératton, chez les femmes surmenées. Nous pensons, quant à nous, que tout surmenage chez la femme enceinte a pour effet de faire descendre l'utérus dans la cavité pelvienne et de dilater le segment inférieur. Ainsi agissent : les longues stations debout, tout travail excessif, nécessitant l'action constante ou l'effort des muscles dans la paroi abdominale. Depuis longtemps on a dit : la fécondation est pelvienne, la grossesse est abdo- minale. Nous allons essayer de prouver la véracité de cette assertion, en démontrant que chez les femmes qui ont un bassin vicié et chez qui, par conséquent, l'utérus reste plus ou moins fatalement dans la cavité abdominale, la durée de la grossesse est plus souvent normale que chez les femmes qui ont un bassin bien conformé. Ce point a été déjà étudié par F. La Torre [Du développement du fœtus chez les femmes à bassin vicié, Paris, 1887). Réfutant l'opinion de Fasola, cet auteur démontre, en s'appuyant sur la statistique de Rigaud et sur la sienne, que l'accouchement prématuré est moins fréquent dans les bassins mal conformés que dans les bassins normaux, et il est évident, dit-il, « que le bassin rétréci, loin de favoriser l'expulsion prématurée de l'œuf, semblerait éloigner au contraire plusieurs facteurs pathogéniques ». 160 GESTATION. Et il ajoute plus loin : « Le poids moyen des fœtus à terme conçus dans les bassins rétrécis doit, non seulement être considéré comme égal à celui des fœtus à terme con- çus dans les bassins normaux, mais assez souvent il est supérieur. >i Et après avoir fait ces constatations, il formule les constatations suivantes : (( 1» Les sténoses pelviennes, sous quelque point de vue qu'on les envisage, n'accusent aucune influence sur la durée de la gestation. Il semblerait au contraire qu'elles éloi- gnent certaines conditions favorables à l'expulsion prématurée de l'œnf ; 2° L'accouche- ment avant terme spontané est en général plus fre'quent cliez les sujets bien confor- més que chez ceux atteints de malformation pelvienne; 3" Le produit de la conception acquiert le même développement en poids et en volume dans les bassins viciés et dans les bassins bien conformés. » La Torre a entrevu une partie de la vérité, mais non la vérité entière. Il faut dire : Le poids moyen des enfants conçus dans les bassins rétrécis est supérieur à celui des fœtus conçus dans les bassins normaux. La preuve de cette assertion se trouve dans le tableau ci-dessous qui contient le poids des enfants de cent femmes ayant un bassin assez vicié pour avoir nécessité la symphyséotomie. On peut dire, après l'avoir examiné, que chez ces cent femmes symphyséotomisées le poids moyen des enfants est de 3,350, à une fraction infinitésimale près. Ce poids est supérieur au poids moyen, je n'ai pas à le rappeler ici. Poids des enfants de cent femmes symphyséotomisées- NUMÉROS. KllOGRAMMES. NUMÉROS. KILOGRAMMES. NUMEROS. RILOGR.VMHES. NUMÉROS. KILOGRAMMES. 1. 3,350 26. 3,220 51. 1,900 76. 3,110 2. 4,630 27. 3,820 52. 3,770 77. 3,580 3. 2,730 28. 2,830 53. 3,030 78. 3,210 4. 3,110 29. 3,570 54. 3,613 79. 3,650 5. 3,300 30. 3,080 33. 2,480 80. 3,230 6. 4,000 31. 3,400 .36. 3,830 81. 3,300 7. 3,200 32. 3,590 57. 2,950 82. 4,070 8. 3,220 33. 3,380 38. 3,020 83. 3,380 9. 3,750 34. 2,920 39. 3,200 84. 3,480 10. 3,650 33. 3,660 60. 3,160 83. 3,000 H. 3,300 36. 2.870 61. 4,960 86. 3,250 12. 3,180 37. 3,320 62. 3,440 87. 3,823 13. 2,800 38. 2,950 63. 3,980 88. 4,750 14. 3,390 39. 3,340 64. 3,120 89. 4,370 15. 2,950 40. 2,810 65. 3,400 90. 3,060 16. 3,900 41. 3,580 66. 3,720 91. 4,180 17. 3,730 42. 3,590 67. 3,070 92. 3,400 18. 3,700 43. 2,590 68. 3,680 93. 3,710 19. 1,700 44. 3,120 69. 3,480 94. 3,060 20. 3,260 45. 3,170 70. 3,960 95. 3,020 21. 3,770 46. 2,230 71. 2,945 96. 2,400 22. 3,730 47. 2,310 72. 3,200 97. 3,620 23. 2,520 48. 3,070 73. 3,300 98. 4,030 24. 3,170 49. 3,260 74. 4,430 99. 3,200 25. 3,020 30. 3,660 73. 2,940 100. 3,030 Cette statistique comp rend : 193 f emmes symphyséotomisées à la Clinique Baudelocque et 7 femmes symphyséotomisées par L EPAGE dans son service. — Il nous semble qu'on ne peut guère nous objecter l'influence de la taille de la mère, car, comme nous l'avons déjà dit plus haut, presque toutes ces femmes ont une taille au-dessous de la moyenne, et, si quelques-unes de ces femmes se sont reposées pendant leur grossesse, il en est beaucoup qui ont travaillé jusqu'au moment de l'accouchement. GESTATION. 161 Donc nous pensons qu'il est difficile de posséder une preuve plus démonstrative de la nécessité pour l'utérus de rester dans la cavité abdominale pendant toute la grossesse, afin que la durée de cette dernière soit physiologique, c'est-à-dire ait la durée nor- male typique. Ainsi se trouve expliquée l'influence du repos ou du surmenage, pendant la gros- sesse, sur la durée de cette dernière et par elle-même sur le développement du produit de génération. b) Copulation. — Il est une autre cause qui, avec le surmenage, les longues stations debout, provoque très fréquemment l'accouchement prématuré et l'avortement : c'est la copulation. Depuis longtemps nous enseignons que : tout rapport sexuel doit cesser pen- dant toute la durée de la grossesse, rajeunissant cet aphorisme de Soranus d'Éphèse. « Les rapprochements sexuels sont nuisibles aux femmes enceintes dans tous les temps. » Sur nos indications, Brenot a mis en relief, avec preuves à l'appui, l'influence nocive de la copulation pendant la grossesse {De l'influence de la copulation pendant la grossesse. Brenot, D. Paris, 1903). La station bipède et la copulation pendant la grossesse chez la femme expliquent le nombre beaucoup plus considérable d'accouchements prématurés observés chez la femme que chez les animaux. S'il est établi que le surmenage et le traumatisme interviennent comme facteurs d'interruption de la grossesse, s'il est prouvé qu'ils sont agents provocateurs de l'accou- chement prématuré, pouvons-nous au point de vue physiologique, serrant la question de plus près, préciser la cause déterminante de la mise en jeu des puissances expulsives? La réponse à cette question sera donnée à l'article Parturition. § IV. — CONCLUSION. DE LA DURÉE DE LA GESTATION AU POINT DE VUE PHYSIOLOGIQUE. Pour préciser la durée de cet état fonctionnel particulier appelé état de gestation, il faut d'abord établir quand il commence et quand il finit physiologiquement. Nous devons donc poser ces deux questions: Quand commence la gestation? Quand finit la gestation ? et essayer d'y répondre. Quand commence physiologiquement la gestation? — Aujourd'hui l'on sait que agestationdoit être précédés tle phénomi3n es physiologiques successifs, phénomènes que dans l'état de nos connaissances, il nous est possible d'exposer avec quelque précision. Après la copulation de deux individus multicellulaires, nous savons qu'une deuxième copu- lation unicellulaire est nécessaire (rencontre du spermatozoïde et de l'ovule : voyez Fécon- dation], et qu'elle est suivie d'une troisième copulation [copulation intra-cellulaire) . Alors seulement il y a fécondation. Mais entre la fécondation et la gestation quel temps va s'écouler? Quelle va être la durée de la vie latente du nouvel être? Pendant combien de temps va-t-il vivre exclusivement aux dépens des matériaux nutritifs ovu- laires? A quel moment va-t-il demander à l'organisme maternel les matériaux néces- saires à son développement? C'est-à-dire, quand commencera véritablement la gesta- tion, et est-il possible chez un animal quelconque de préciser ce moment? Assurément non. Nos connaissances actuellesjne peuvent que rendre plus imprécis le début de la gestation. Ce que nous savons déjà de l'enchaînement successif des phénomènes qui suivent la copulation pour arriver à la gestation, chez la chauve-souris, le chevreuil, la souris, en est la preuve. La constatation si importante faite par Lataste, concernant ce qu'il a appelle improprement la gestation retardée de la souris, pourrait-elle être faite chez d'autres mammifères ? Cette vie latente prolongée, par le fait de la lactation, peut- elle être observée chez d'autres animaux que la souris? Peut-elle exister, en parti- culier, chez la femme qui est fécondée pendant l'allaitement? L'absence de menstrua- tion, on le sait, n'empêche pas la fécondation chez la femme ; ce qui, entre parenthèse, montre bien que l'ovulation et la menstruation sont deux choses essentiellement et absolument différentes, mais ce qui également ne permet pas pour le moment une réponse affirmative à la question posée. D'après ce qui précède, il est impossible de savoir exactement quand commence la gestation. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 11 162 GESTATION. Quand finit physiologiquement la gestation? — 11 est impossible présentement de répondre à cette question. Il n'existe chez aucun animal noiiveau-né un caractère pathognomonique, un critérium de maturité. Aucune des constatations faites sur un animal nouveau-né ne permet de conclure à une durée exacte de sou séjour dans l'utérus. Les auteurs qui se sont appuyés sur un poids anormal d'un nouveau-né pour en conclure à une gestation prolongée sont dans l'erreur. L'observation suivante authentique en est la preuve. Le mercredi 21 janvier 1903, est né à Saint-Jean-de-Lu7. un enfant pesant neuf kilogrammes, neuf cents yrammes. Cet enfant mesurait soixante et un centimètres, sept millimètres. Poids et mesures prises par le D'' Delcamps, contrôlées par différentes personnes et par la photographie que nous possédons. Or la durée de la grossesse a été de neuf mois moins quelques jours après la dernière menstruation. Ce que nous savons, c'est qu'il n'y a point de gestation prolongée. Il peut y avoir rétention prolongée, mais non gestation prolongée. Quand un fœtus se développe dans un kyste fœtal, nous savons que, si le kyste fœtal n'est pas ouvert, à un moment donné le fœtus meurt, au moment où son évolution physiologique est accomplie. Il ne croît pas indéfiniment. Si nous comprenons, si nous savons pourquoi le traumatisme provoque son expul- sion prématurée, nous sommes moins renseignés concernant la cause de son expulsion tempestive. Cependant des travaux récents permettent d'entrevoir la vérité. Pendant longtemps, on pensa que l'utérus seul était en jeu dans les deux cas. Aujourd'hui, et surtout d'après les travaux de John Brard et de L. Fb.enkel, le point de départ de la mise enjeu des forces expulsives ne serait pas dans l'utérus, mais dans l'ovaire. D'après J. Beard {The span of gestation and the cause of birth, lena, 1897), chez les mammifères, le développement utérin, du commencement à la fin de la gestation, la naissance, l'ovulation et dans beaucoup de cas la lactation, obéissent à un rythme dont la direction est dans l'ovaire. Pour J. Beard, la menstruation doit être considérée comme un avortement antérieur à une nouvelle ovulation et elle n'est autre chose qu'un avortement d'une decidua préparée pour un œuf ayant échappé à la fertilisation. Tout s'enchaîne, d'après cet auteur, dans le rythme de la reproduction chez tous les mammi- fères; et le même cycle se reproduit sans cesse pendaut toute la vie génésique : ovula- tion, fécondation, gestation, lactation. D'autre part, L. Fr.exkel a fait connaître, dès 1901, ses expériences relatives à la onction du corps jaune. En 1903 {Archiv fur Gynàkologie, Lxviii, p. 438 à 545), il publie l'ensemble et le résultat de ses dernières recherches. D'après ses travaux, il semble résulter que le corps jaune est une glande ayant pour fonction de rendre possible l'insertion des œufs fécondés et d'assurer la suite de leur développement : en un mot, c'est la glande qui préside au développement de l'œuf fécondé. C'est la glande qui, chez la femme, constitue le corps jaune toutes les quatre semaines, et chez les animaux à des intervalles déterminés. Elle a toujours la même fonction : produire d'une façon pério- dique une excitation ovulatrice de l'utérus qui l'empêche de revenir au stade infantile, ou à marcher prématurément vers l'atrophie sénile. Les travaux de J. Beard, de L. Fr^enrel, de Lataste, doivent attirer l'attention de tous les physiologistes. En résumé, la gestation a une durée typique pour chaque espèce; cette durée est variable pour chaque espèce; elle est même variable pour chaque individu, mais ici avec une différence infiniment moindre. Enfin son évolution physiologique exige, pour être complète, des conditions hygiéniques particulières. GESTATION. 163 DEUXIÈME PARTIE Des modifications fonctionnelles de l'organisme maternel pendant la grossesse. Si l'organisme est profondément modifié pendant la gestation, si la science enre- gistre chaque jour de nouveaux faits, qui font supposer que chez la gestante il n'y a peut-être pas une seule cellule qui n'éprouve quelque modification, il faut bien dire que la gestation constitue un état physiologique par excellence. Ne devant envisager ici ces phénomènes qu'au point de vue physiologicjue, nous étu- dierons successivement les modifications des différents appareils et fonctions, laissant de côté, pour l'appareil génital, ce qui est purement obstétrical. SI.— MODIFICATIONS FONCTIONNELLES DES DIFFÉRENTS APPAREILS. A. — Modifications fonctionnelles de l'ovaire et de l'utérus pendant la gestation. — L'organe gestateur, l'utérus, subit pendant le cours de la gestation des modifications aussi nombreuses que profondes, qui paraissent être sous la dépendance absolue des ovaires. John Beard [loc. cit.) a insisté le premier sur le rôle du corps jaune pendant la gesta- tion. Empêchant Voviilation pendant la gestation, il serait cause, d'après cet auteur, de l'expulsion du contenu de l'utérus, lorsque sa propre évolution serait terminée. Mais c'est surtout L. Fr.enkel {loc. cit.), qui, reprenant l'hypothèse de son maître, l'embryologiste Gustave Born, de Breslau, d'après laquelle le corps jaune de la gros- sesse serait, par sa structure et son développement, une glande à sécrétion interne, ayant pour fonction de permettre la fixation et le développement de l'œuf fécondé dans l'utérus, s'efforça d'établir, par ses expériences, la véritable fonction du corps jaune. « Au cours de mes travaux, dit-il, j'ai reconnu que le corps jaune a une signification encore bien plus étendue que ne le pensait Gustave Bor.\. Le fait qu'il préside à l'inser- tion et au premier développement de l'œuf n'est qu'un phénomène accessoire d'une loi plus générale: le corps jaune provoque la nutrition plus active de l'utérus pendant la vie génitale. Le volume et la turgescence plus marqués de l'utérus pendant toute cette période, ainsi que son hyperhémie revenant toutes les quatre semaines, sont des effets de la sécrétion interne du corps jaune. Son activité sécrétoire continue provoque, d'une part, l'insertion et le développement de l'œuf, et, d'autre part, lorsque l'œuf n'a pas été fécondé, la menstruation. « Si les corps jaunes font défaut, l'utérus devient atrophique et la menstruation n'a pas lieu. L'état oia se trouve l'utérus chez la vierge non nubile et chez la femme après la ménopause est dû à l'absence de corps jaune. » Dans son dernier travail (4903), Fr.enkel a cherché à accumuler les preuves théo- riques et expérimentales qui semblent militer en faveur de son assertioi). Nous ne pou- vons que renvoyer le lecteur à cet important travail. Les expériences de Ribbert et de Knauer, celles plus récentes de Liman [Bulletin de la Société de 6to/of/ , ^„^-, , ^ ( 1 098 pluripares. Il a constaté que sur ces 2 000 femmes : „ , . • j ., . ,,, ( 478 primipares, remmes n ayant pas vomi pendant la grossesse 1 144 „„, , . •^ ' '■ "^ (666 pluripares. 41b primipares. 428 pluripares. „ , , ,o ( 9 pi'imipares Cas douteux 13 , , . ' * ( 4 pluripares. D'oîi cette conclusion: 42,15 p. 100 des femmes enceintes vomissent. 57, 2 p. 100 des femmes enceintes ne vomissent pas. 168 GESTATION. De plus : les vomissements au cours de la grossesse sont plus fréquents chez les pri- mipares que chez les pluiipares. Quant à l'époque d'apparition, on peut dire en s'appuyant sur les tableaux de Gerst, qu'ils se montrent surtout un mois après les dernières règles, et deviennent très rares après le 4« mois. Chez les animaux, les modifications observées présentent une phy- sionomie pour ainsi dire opposée. « On n'observe pas, chez nos femelles domestiques, ces troubles digestifs si fréquents qui signalent le début de la grossesse chez la femme : au contraire, immédiatement après la conception, sans doute par l'effet du calme qui succède aux chaleurs, l'appéLit se développe, la digestion se fait mieux, tous les phénomènes de plasticité semblent acquérir une activité plus grande, la femelle utilise mieux la nourriture qu'elle prend, et elle a une tendance marquée à s'engraisser, tendance qui se maintient en s'accen- tuant jusqu'à une époque assez avancée de la gestation. Cette tendance à prendre de la graisse disparaît vers la fui de la gestation. » (Saint-Cyr.) Tous les vétérinaires et les éle- veurs ont fait cette constatation. D'autre part, d'après les recherches de Hecker et de Gassner, la nutrition serait telle chez la femme pendant la dernière période de la gros- sesse, qu'elle déterminerait une augmentation de poids qui serait en moyenne de 2 400 grammes dans le 7^ mois, de 1 691 dans le 8% et de 1 540 dans le 9<=. Ainsi chez la femme, la gestation produit des troubles de nutrition dans près de la moitié des cas, et cela dans la première moitié de la grossesse, tandis que, chez les animaux, cette même période de la gestation est caractérisée généralement par une activité plus grande de la digestion et de la nutrition. Nous nous contentons ici de constater ce fait, sans vouloir en chercher l'explication. En ce qui concerne l'intestin, sauf des phénomènes de compression déterminant des symptômes de rétention, l'appareil digestif n'offre de modifications intéressantes qu'au niveau du foie. Signalé déjà par Laennec, l'état graisseux du foie a été étudié par Tarnier, 1857, et plus tard par de Sinéty (1872). De nouvelles recherches sont nécessaires pour élucider complètement ce point d'anatomie et de physiologie, aussi bien chez la femme que chez les autres animaux. Sans vouloir affirmer que les modifications du foie soient la cause et la cause unique de la pigmentation survenant chez un grand nombre de femmes pendant la grossesse, nous croyons devoir entrer ici dans quelques détails à ce sujet. Chez nombre de femmes, pendant la grossesse, se produit une pigmentation, surtout épidermique, dont les lieux d'élection sont : le visage, les seins (aréole vraie, tachetée, mouchetée), le milieu de la paroi abdominale (ligne brune abdominale). Cette question a été étudiée à notre instigation par Raoul Lehmann {De la ligne brune abdominale, Thèse de Paris, 1901). Voici le résumé de ce travail. Dans l'état de puerpéralité, chez les primipares, c'est vers le troisième ou quatrième mois de la gestation que la ligne blanche commence à se pigmenter. La ligne peut apparaître plus tardivement chez les blondes. Dans le cours de la grossesse, la ligne brune passe par toute une gamme de teintes dont les principales sont : jaunâtre, jaune roussàtre, fauve, sépia, brun foncé, marron, chocolat, couleur de la peau de nègre. Ces dernières teintes s'observent surtout chez les femmes brunes. A mesure qu'elle brunit, la ligne s'accroît en largeur. Elle atteint géné- ralement chez les primipares de 4 à 5 millimètres, quelquefois davantage. Chez les plu- ripares, le début de la ligne brune est plus tardif que les primipares. Chez les grandes pluripares (8^, 10"=, 14^ grossesse) la ligne brune n'existe pas ou est extrêmement peu marquée. Les femmes très grasses n'ont pas de ligne buune. Pour Lehman.x, il n'y a pas corrélation entre la pigmentation de la ligne blanche et celle des seins. L'une peut exister, alors que l'autre fait défaut. Il y aurait, pour cet auteur, une indépendance absolue entre ces deux stigmates. Enfin Lehmann pense que la ligne brune paraît due à une hyperhémie favorisant la stase sanguine dans les capillaires die la peau de la paroi abdominale ^ 1. Nous croyons bon de signaler que, dès 1838, Rokitansky a constaté que plus de la moitié des femmes enceintes présentent entre la face interne des os du crâne et la face externe de la GESTATION. 169 § II. — DE L'ASSIMILATION ET DES ÉCHANGES NUTRITIFS PENDANT LA GESTATION. L'étude des échanges nutritifs pendant la gestation, inaugurée par le mémoire d'ÀNDR.^L et G.\v.\RRET (1843), ne saurait à l'heure actuelle être présentée d'une façon synthétique et définitive. Les nombreuses expériences poursuivies dans des conditions techniques très dissemblables, soit sur la femme, soit sur les animaux, ont mis en évi- dence des faits intéressants qui doivent être considérés comme l'amorce des recherches ultérieures et ne peuvent encore être groupés en un corps de doctrine. Nous suivrons pour les exposer le plan adopté par Veb Eecke (de Gand) dans son remarquable mémoire : Échanges matériels dans leurs rapports avec la phase de la vie sexuelle. (Bruxelles, Hayez, éd. 1900.) I. Hydrates de carbone et graisse. — A. Les échanges respiratoires pendant la gestation. — Le premier mémoire sur cette question est celui d'ANDRAL et Gavarret {Recherches sur la quantité d'acide carbonique exhalé par le poumon dans l'espèce humaine, C. R. des Séances de l'Acad. des Se, 16 janvier 1843, A. C. P., juin 1843, (3), viii, 129- 150). Ils mesurèrent la quantité d'acide carbonique exhalé en un temps déterminé (1 heure) dans des circonstances autant que possible identiques, chez la jeune fille, la femme adulte, la femme après la ménopause, et la femme enceinte. Leurs recherches au point de vue qui nous occupe ont porté sur 4 femmes enceintes à diverses périodes de la grossesse. Le tableau ci-joint en donne le résumé. ÉPOQUE DE LA GROSSESSE AGE DU SUJET SYSTÈME MUSCULAIRE CARBONE COMBURÉ en uuc heure. 3 mois f> mois 7 mois 1/2 8 mois 1/2 42 ans 32 - 18 — 22 Bien développé id. Faible Bien développé 1er, 8 7s^3 8e^4 Comparant ces résultats à ceux qu'ils avaient obtenus chez la femme non gravide, ils ont conclu : « Chez le femme, l'exhalation de l'acide carbonique, qui augmente pendant toute la durée de la seconde enfance, s'arrête dans son accroissement au moment de la puberté en même temps que la menstruation apparaît et reste stationnaire tant que les époques menstruelles se conservent dans leur intégrité. Au moment de la ^suppression des règles, l'exhalation de l'acide carbonique par le poumon augmente tout à coup d'une manière très notable, puis elle décroit à mesure que la femme avance vers l'extrême vieillesse. « Pendant toute la durée de la grossesse, l'exhalation de l'acide carbonique s'élève momentanément au chiffre fourni par les femmes parvenues à l'époque de retour. » Ces conclusions, acceptées par les physiologistes et les accoucheurs, ont été confirmées par les recherches plus récentes d'OoDi et ViCARb'XLi {Influence de la grossesse sur l'ensemble de l'échange respiratoire. A. i. B., 1891, xv, 367-375). Oddi et Vicarelli ont expérimenté sur le rat {Uus musculus) en suivant ces données avec plus de rigueur, la même technique qu'A.NDRAL et Gavarret, sur la femme. Ils déterminaient la quantité d'O- absorbé et de CO- émis pendant 6 heures consécutives par des femelles à diverses périodes de gestation et soumises à une diète constante. Ces expériences montrèrent l'augmenta- dure-mcre, des dépôts d'une substance ressemblant à du tissu osseux, et qu'il désigne sous le nom de néoplasmes osseux ou à'ostéophytes. DucREST les éludia le premier en France; il croit, comme Rokitansky, que ces pro'luctions sont liées à l'état de gestation et indépendantes de tout état patFiologique. A. Moreau a confirmé, par ses recherches, les faits avancés par Rokitansky et Ducrest. 170 GESTATION. tion graduelle et progressive de la quantité d'oxygène consommé et de CO^ exhalé pen- dant le cours de la gestation. Le quotient respiratoire -^ serait toujours très supérieur pendant la gestation aux moyennes établies à l'état de vacuité. Les auteurs en déduisent que la gestation est caractérisée par une prévalence de la consommation des substances hydrocarbonées et l'épargne des aliments azotés. Ces conclusions sont en corrélation avec celles deCoHN- HEiM et ZuMTz (1884), de Luciani et Piotti (1887) qui établissent que chez le fœtus du mouton et l'œuf du Bombyx mori, la consommation de l'oxygène est très faible et que le quotient respiratoire va croissant progressivement. Par contre, les conclusions d'Ars'DRAL et Gavarret, reprises par Oddi et Vigarelli, ont été battues en brèche par Repreff (De l'influence de la gestation sur les échanges nutritifs chez les animaux, Wratsch, 1888, n" 16). Repreff expérimenta sur divers animaux, 3 lapines, 1 cobaye, 1 chienne; et il constata un ralentissement de l'absorption de l'oxy- gène, un ralentissement plus sensible encore de l'exhalation de l'acide carbonique, un abaissement du quotient respiratoire. Ces conclusions sont donc en opposition formelle avec la doctrine classique. Il n'y a donc pas actuellement, en l'absence de tout nouveau travail de contrôle, de solution satisfaisante à la question, entourée d'ailleurs de difficultés techniques considérables, du chimisme respiratoire pendant la gestation. B. Lactosurie et glycosurie. — En 1856, Hippolyte Blot lut à l'Académie des sciences un travail qui fait encore autorité, sur la glycosurie des femmes grosses, accouchées et nourrices. Au point de vue chimique, il appuyait sur l'autorité de Réveil et de Berthelot ses conclusions, que nous rapportons m extenso : « Il existe une glycosurie physiologique chez toutes les femmes en couches, toutes les nouri'ices, et la moitié environ des femmes enceintes. <( Ce fait intéressant est démontré par : la réduction de la liqueur cupropotassique, la coloration brune des solutions alcalines caustiques de potasse de chaux; par la fermen- tation qui donne, d'une part, de l'alcool, et de l'autre, de l'acide carbonique; enfin, par la déviation à droite du plan de polarisation. « Cette espèce de fonction nouvelle est en rapport évident avec la sécrétion lactée. Elle diminue considérablement, cesse même complètement, dès qu'apparaît un état morbide. Elle i-eparaîl avec le retour à la santé, et le rétablissement de la lactation. « La glycosurie physiologique indiquée plus haut existe non seulement chez la femme, mais chez la vache. La glycosurie existait 4o fois sur 45 chez les femmes en couches, et dans la moitié environ des cas chez les femmes enceintes, à tout âge de la grossesse. « Les quantités observées atteignaient 12 grammes pour 1 000 d'urine. Elles oscillaient entre 1, 2 et 8 grammes. La proportion la plus forte était atteinte au moment où s'éta- blissait la sécrétion lactée. » Cette découverte de Blot, passagèrement contestée par Legonte, a été pleinement confirmée par une série d'observateurs, Kirsten, Iwanoff, de Sinéty, Heupel, Gubler, Johannowski, etc. Le seul fait nouveau a été l'identification du sucre constaté dans les urines non pas avec le glycose, mais avec le sucre de lait. Cette notion de la lactosurie pressentie par de Sinéty {Société de Biologie, 1872), ainsi qu'en témoigne la phrase suivante : (( Il serait intéressant de savoir si le sucre est du glucose, ou du sucre de lait », a été résolue par les recherches d'HoFMEiSTER {Ueber Lactosurie, Zeitschrift f. phys. Chemie, i, 104, 1877), de KALTEr,-BACH {Lactosurie der Wôchnerinnen, Zeitschrift f. Gyn. und Geburtsh. iv, 161, 1879), en Allemagne; de Mac Cann et Turner (1892), en Angle- terre ; recherches confirmées par les travaux plus récents d'un de nos élèves, Léon Leduc {Recherches sur les sucres urinaires physiologigues des femmes en état gravido- puerpéral, P. Paris, 1899, G. Steinheil éd.), et de Brocard. C'est ainsi que Léon Ledug, dont les expériences ont été faites dans notre service et dans le laboratoire de Dastre, cà la Sorbonne, a, sur 20 femmes enceintes, obtenu les résultats suivants : « I. — Pendant la grossesse, le pouvoir réducteur de l'urine s'abaisse ; et ce fait est en rapport avec la diminution des matériaux solides de l'urine coïncidant avec l'aug- mentation de la quantité d'eau. GESTATION. 171 « II, — Cette diminution de la teneur en matériaux réducteurs ne peut être com- pensée par la présence de petites quantités de sucre. <( III. — Il existe, en effet, une lactosurie chez les femmes dont les seins contiennent une grande quantité de colostrum durant la gestation. « Cette lactosurie peut coïncider avec une glycosurie, ou lui succéder. Toutes deux sont très légères et, dans ces conditions, sont physiologiques. « IV. — Dans 60 p. 100 des cas, nous n'avons pu déceler aucun sucre dans l'urine des femmes grosses. « V. — L'urine des albuminuriques ne nous paraît contenir ni plus ni moins de sucre que celles des femmes saines. » Le mécanisme de cette lactosurie, pressentie par Blot, a été confirmé par les recherches de tous ceux qui depuis ont étudié la question. Cette lactosurie est en rap- port clinique évident avec la sécrétion lactée, et la lactosurie de la grossesse s'observe chez les femmes dont les seins contiennent une grande quantité de colostrum. Elle résulte du passage dans le sang du sucre de laii en excès dans la mamelle, passage démontré par les expériences de de Sinéty (1873): Or le sucre de lait est directement inassimilable. Dastre a en effet démontré en 1890 {Transformation de la lactose dans l'organisme, A. d. P., janvier 1890, n" 1), qu'il peut être décelé en totalité dans l'urine quatre heures après injection dans le péritoine d'une solution de 20 grammes de lactose dans 200 ce. de sérum artificiel. Le foie lui-même n'a aucune action transformatrice sur ce sucre, puisque, injecté dans les veines intestinales, il passe en nature dans les urines. Ces constatations ont été confirmées par les recherches ultérieures de C. Voit (1897). D'autre part, Charrln et Guillemo.xat ont établi par leurs recherches que le glycogène augmente pendant la grossesse, et cela d'une façon sensiblement croissante jusqu'au terme (Acad. des Sciences, Société de Biologie, 1900). II. Albumine. — A. Les échanges azotés pendant la gestation. — Les première recherches sur la désassimilation azotée pendant la gestation ont été faites par Winckel, en 1865 {Studien ùber den Stoffwechsel bei der Geburt und in Wochenbetle im Ansciduss an Harnanalysen bei Schivangeren, Gebàrenden und Wôchnerinnen, Rostock, 1865). Ces recherches faites sur la femme étaient assez rudimentaires. Winckel se bornait à établir l'excrétion de l'urée par la méthode de Liebig, sans tenir compte ni de l'azote ingéré, ni de celui qui était contenu dans les fèces. Il calcule que l'élimination de l'urée (moyenne, 28«^l ; minimum, 18^?'", 2 ; maximum, 435'', 8 pro die) ne subissait pas de modi- fication sensible pendant la grossesse, tandis qu'elle présentait une certaine augmen- tation pendant la parturition, et une légère diminution pendant les suites de couches. La question fut reprise, en 1866, par Heinrichsen, qui, chez des femmes sédentaires soumises à une diète pauvre en substances azotées, trouva sensiblement la même moyenne que Winckel (26ë%6). Plus récemment, A. V. Zacharyewsky [Ueber den Stickstoffwechsel ivâhrend der letzen Tage der Sclnvangerschaft und der ersten Tage des Wochebettes, Z. B., 1894, 368-438) a, toujours chez les femmes, poursuivi les mêmes recherches avec une rigueur plus grande. Sans imposer aux 9 femmes enceintes en expérience une ration déterminée, il a fixé la valeur azotée de leurs ingesta, de leurs urines et de leurs fèces. Il est arrivé à conclure que, pendant la grossesse, une quantité considérable de l'azote absorbé est épargnée. Cette épargne varie avec l'alimentation et d'autres circonstances : les pluri- pares épargneraient plus que les primipares. Il y aurait donc, pendant la grossesse, accroissement de l'assimilation, et ralentissement de la désassimilation. Enfin, en 1901, Keller a publié {La nutrition dans l'état puerpéral. Annales de gyné- cologie et d'obstétrique, mai 1901) le résultat de recherches poursuivies sur 12 femmes enceintes de notre service pendant les années 1898, 1899 et 1900. La durée de l'observa- vation a varié de 20 à 27 jours, temps pendant lequel Keller mesurait la quantité totale des urines par 24 heures, leur densité, l'azote total et l'urée. Les tableaux A et B résument les calculs de Keller pour les 12 cas étudiés, et éta- blissent la comparaison avec le mouvement de la nutrition en dehors de la gestation chez la femme, déjà étudié par lui en 1897 {Archives générales de médecine). 172 GESTATION. w 0) bc s câ ,4 o o ai =^ ^^ s.>coixvAaasao s. c K i o 2 j- ,— c o o o o o — — o o o . IT. 0-. c c Irt saiOcî t Cl in »;; 7^ o 00 c* ■^ 1-. (N C-) ^ îi ^- -f c-> — ce ^■ " Oi ^ Hnano.vcoT ■S if- t^ x ï? o Cl - -y. £ :^ i^ 5 j.NvjNa^'i aa i 6 a o o C c c o c c o o o o o axas rt := ■= es c: 03 îS '^C fe O O C [I- li. c C o ^ z ^ ^ c% ■T.. c: ■M => « •i i Ci « 0=. ce 00 C! ■Xj > > t> ;> p- > > ^^ > s o 05 o o o o a (N > X ^ a S-i c^ C-i ^ w rt o _^ " O S O rt - 3 _« 3 S^ ;; g § ■S, ■ o 3 J H 5 S 'te ■a o o a H c ^ « -H tf J. i pI-' J. o 3 >-> i ■£ o H ai ci 33 O _ 00 3 t, C.:: 2 a S 3 3 M O O ■^ m -^ K t. 3 m m m o 3 S .2 o .5 o 3 j 5-3 K-P ^ ^ — '-^ ■" " S ,_, H- ;> r- ?> ^ ^ > s t> iKawaHonoDov,-! 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O < H 0) bO s ai j:i o ■01 (6 a o u s « H H cO O z ;= O s 1 ■^ "^ u -r* r-_^ •H =_ ci- d t>\ o fc 5 viT -* o" an fO~ oo 00 OO ro l^ OO oc s. o -m" ^ H rt o 1 1 o 1 1 o o o <=> ûa j .•th •r- «H ^^ 5^) CT> ^4 H m " o O .,-4 .^ ^H 5> •v^ s a + " = ■ H ^ S r: sn co ^ - 1— (O lO o co co îO c^ CO " ^ *r- > « 1 1 aj en tn tr Vi C!3 C C ci o cô o • rt ■tS 3 s • rt 73 -a â o lO • s o a:) 3 ?-. >-l s >> sd:^ tbi^ 5^â >. o O o —^ o 3 —1 3 ^-^ c m s S S < >* «^ «.^ 0 *n t^ ce CI r^ t~ 10 ^- apoT.iaj 00 r- co OD ôé 00 00 co co oc 00 co ' Cl _^ r- CO r- _, ^ Cl (^ 0 co ce •juiJBdjsod 00 co 1^ r- CO 00 ^ ^4' co Cl ^ Cl co 0 opoijoj 0 ci ^ Cl 05 co 0 co oè 00 ^ ^ = ■^ ^ ■^ ^^ ^^ *^ ■^ "^ "^ ^ 00 co Cl ^-, 00 co ~* -<* CC' ce f- g ■ jn5.iB .^^ •jn:)JBd9jd 02 (M 0; f^ Cl JO 00 — Cl --»■ 00 co îO CT5 r- -* •~ = ~^ co -^ 00 jO 9P0!-'?d 0 ai ^' ^ ci _' ci 0 co co' co co ^^ "^ ^^ ' ^ ^~' "^ "^ ^^ "^ "^ "" 1 co co -* œ i~- t- Cl _ -.•*• ^^ co Cl •jTHJ^disod ce 00 j— co î-O 00 co 00 0 co co co Cl Cl ce CD !0 ce' ce apoijçj 05 C-.' 0 co 0 0 0 00 0 ^' ^' ^' 1 "^ "^ "^ ^^ ^^ "^ "^ MIllJBdlSOd ^ CO !T> Cl __, 1 co r; _ ,r- C-. 02 ai lO 0 C~j ■co a ce CO <=> apoi.i.pd 0 ^ ^' Cl 00 ^ 00 co r- «J 0 ^' Cl Cl Cl "^ ci ^ ■^ "^ Cl Cl 1 •jiil.iBd CO co 0 00 Cl ^^ -^ -* ._- ce ce 0 .§ fO co 0 00 ô ■^ t^ 0 '^ 00 — epouaj C5 00 CI co 00 00 Cl ce 00 Cl ci ce ?\ •Jtijj'Bdp.id r— ^ iO CO „ Cl r- co ** co f- Cl :o lO -* co Cl 0 co -* ■^_ r- CD ^. ^ ■ ^ os ci ci co oc -^ -* 3(0 '^ apouaj -^ C-l Cl Cl CI Cl ^~* ci Cl d Cl co CI Cl _ j_ .„ t~ 0 0 _ ■= _ Mnjjudjsod co 0 0 00 :0 --■t r— în ^ ce t^ Cl Cl Cl opouoj 0 CD 0 c=) = ce co 0 0 0 0 ■w ^ ^ ^^ ^^ "" ■" ■^^ "^ ~' ^ '^ \ Tl _ ._ CI 0 co; f— 0 0 _ 0 0 0 0 0 0 Q ' '~* "^ ■^ ^^ ■" -^ ^ f C5 Cl Cl ._ <=> iO Cl t^ 1- — 0 0 MnjJBda.id i-O 0 t— ^^" -* (~ ^ -* ^^' ^ „■ CI Cl Cl Cl gpoupj ^ 0 0 CD ^ ^ 0 — 0 0 o> 0 "^ ' — '^ ^ "^ "" ■^ "" 1 -jrnJBdisod 1- =J 0 00 cS 0 Cl Cl î-- ce s co Cl H l ^ co C5 Cl Cl ■ — 1 ~ ; " ~ ce 5/^ 1 opouisj ^ "^ "" ■" "^ ~ ~ 1 MiuaGd (O d !0 r^ CO t^ l~ !0 .^ 0 g; .- t^ r- r- co CTj 0 00 OC ">* ce to ci — / -* cô CO ce r- CO co r- iO -^ Dû \ opoia9,î CI "^ ■^ "^ "■ "^ ■^ ■^ 1 MnîaBdaad co lO 0 CD iO = co Cl iC ce Cl H ^ ^ 1 G-I ci Cl CD ôô ce 0 ^- — ci ■w ^ j 9pOU8£ Cl "^ '^ Cl ~" "^ cl ^^ , i^OU-AKClK ' ' ^ p~] >■ > > > ^ >< y. P5 ?i 176 GESTATION. « 4» Le ralentissement de la nutrition est plus marqué chez les multipares que chez les primipares. » Toutes les recherches qui viennent d'être analysées peuvent être critiquées. La plu- part des expérimentateurs ont fait leurs observations sur des femmes soumises à des régimes très différents, variables pour une même femme, sans que d'ailleurs les auteurs aient cherché à fixer la valeur quotidienne des ingesta. D'autre part, les observations n'ont été faites que pendant un temps souvent court, et seulement pendant les der- nières semaines de la gestation. Pour se placer dans des conditions d'étude plus rigoureuses, il faut faire appel à l'expérimentation sur les animaux. Repreff le premier en 1888 {loc. cit.) a dressé le bilan de l'azote chez diverses femelles en gestation (lapines, cobaye, chienne) dont la quantité d'azote ingéré était connue. Il conclut que pendant la gestation l'assimilation croit et que la désassimilation diminue. L'élimination de l'azote par les urines diminue. Il y a ralentissement progressif de la nutrition azotée. En 1891, Ose. Hagemann a publié dans sa thèse inaugurale (Deitrag ziir Kenntniss des Eiioeissumsatzes im thierischen Organismus, Berlin) les observations de deux chiennes soumises à une ration de luxe, sensiblement invariable, dont la valeur en azote et en calories étaient connues. Il dosa la teneur en azote des urines et des fèces avant et pen- dant la gestation ainsi que pendant la période de lactation. Une seule des observations a été menée à bien. La chienne mit bas à terme deux jeunes chiens bien portants. Les résultats de l'expérience furent les suivants. En voici le résumé d'après Ver Eecke {loc. cit.) : « La mère qui pendant la période préparatoire, grâce à une ration riche en azote, augmentait de poids et retenait environ Os^,^l d'Az. pro die, aussitôt que fécondée, assi- mila encore une légère quantité d'albumine, mais assez rapidement se produisit une accélération telle de ses échanges qu'elle perdit par les urines Qs^^SlQ d'Az. pro die en plus qu'elle n'en ingérait avec sa ration. L'organisme maternel s'appauvrissait donc d'une manière absolue à cause de l'augmentation de ses dépenses, et aussi relativement par suite du développement du fruit. De là, la désassimilation azotée diminua progressi- vement jusque vers le milieu de la gestation. Alors le bilan de l'azote devint positif, et vers la fin de la gestation, — surtout pendant la dernière semaine, quand, outre le déve- loppement des jeunes, s'établit encore une hypertrophie considérable des glandes mam- maires, — l'animal retint d'importantes quantités d'azote, voire jusqu'à 1^'",617 p?'o die. Sans avoir dosé la quantité d'azote contenue dans les produits de conception (jeunes et annexes) l'auteur a cherché à l'établir approximativement, en se basant sur le poids des jeunes et les données générales fixées par Bischoff et Volkxiann. Comparant les chiffres ainsi obtenus à la quantité d'azote épargnée par la chienne pendant la durée entière de la gestation il trouve que, malgré son alimentation riche, l'organisme maternel a conçu en partie aux dépens de sa propre chair. » C'est là une expérience qui, pour être unique, a été conduite avec tant de rigueur qu'il faut lui attribuer une importance considérable. Charrin et ses élèves Guillemonat et LEVXD\ri{Modificationsprovoquéesdansrorganisme par la gestation. Société de Biologie, 1899, séance du 3 juin, p. 475), expérimentant sur des lapines et des cobayes, aboutissent comme conclusion d'une série de cinquante-six observations à constater la variabilité des résultats. Ver Eecke enfin, dans le travail que nous avons déjà cité (1900), a repris la question chez les lapines. Les lapines mises pendant une période de préparation à un régime spécial (200 grammes de carottes et oO grammes d'avoine) sont placées en observation lorsqu'elles ont atteint un état voisin de l'équilibre nutritif. L'observation comprend pour chaque lapine une période de repos sexuel, une période de gestation et une période post partum. Les observations complètes sont au nombre de 19. Elles sont rap- portées avec détails et ont été conduites avec une méthode et une rigueur remarquables. Seule l'unique expérience de Hagemann peut à cet égard leur être comparée. Voici d'ailleurs la façon dont Ver Eecke pose la question : « Dans sa vie de nutrition, l'organisme normal dépense avec mesure et cherche à économiser le plus possible ses substances azotées qui représentent les matériaux les plus essentiels à la vie et qui ont aussi la plus grande valeur financière. Si les manifestations vitales exigent une combus- GESTATION. 177 m s •S o 1. Ces courbes comparatives ont été obtenues, en additionnant, d'une part, les moyennes relevées pendant 10 périodes de 4 jours chez 3 femmes enceintes, et, d'autre part, les moyennes relevées pendant 8 périodes de 4 jours chez 4 femmes non enceintes. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 12 178 GESTATION. tion continuelle des substances protéiques du corps, lesquelles, aussi bien que toutes les autres, doivent se renouveler sans cesse, du moins dans les conditions ordinaires, leur juste emploi est réglé. 11 est, par exemple, assez bien établi aujourd'hui, que l'activité musculaire ne les entame guère, que la calorillcation est surtout assurée par l'oxydation des hydrates de carbone et de la graisse, et que l'organisme ne livre sa chair que poussé dans ses derniers retranchements par l'inanition ou par des causes morbides. D'autre part, on sait que les pertes azotées se réparent avec difficulté et lenteur. La gestation, cependant, est un impôt, progressif avec le temps, établi sur le capital de la mère, et la parturition est, en définitive, une soustraction de chair. Le fruit étant formé à l'image de l'organisme mère, on y retrouve les mêmes matériaux, à peu de chose près, dans les mêmes rapports. Si l'on s'en réfère aux moyennes fournies par Bisghoff et Volkmann pour l'animal adulte on peut admettre, avec Hagemann, que le fruit renferme 14 p. 100 d'albumine et de substances coUagènes. Ainsi, au service de la conservation de l'espèce, l'économie femelle sacrifie d'importantes quantités d'azote. Un intérêt majeur s'attache, par conséquent, à l'étude des échanges des matériaux azotés pendant la gestation. Il est à prévoir que les lois de la nutrition, pendant cette phase de la vie sexuelle, doivent être profondément modifiées, sinon dans leur essence, du moins dans leurs rap- ports; deux vies superposées, celle de la mère .et celle du fruit; l'une prenant sa source et ses aliments dans l'autre, et toutes deux restant emboîtées jusqu'au moment de la parturition; ce qui complique singulièrement le mécanisme de la vie végétative du tout. Une question primordiale s'impose, à laquelle se rattachent toutes les autres : La mère forme-t-elle le fruit mi.c dépens de sa propre chair, on tire-t-elle de V alimentation tous les matériaux qu'elle lui cède, ou bien encore conçoit-elle, en partie à ses propres dépens, en partie aux dépens de ses imports? dans quelles proportions, quelles conditions et par quel mécanisme ? » De ses recherches minutieuses, dans le détail desquelles nous ne pouvons entrer et qui établissent le bilan de l'azote pendant la gestation en tenant compte du capital azoté de la mère au moment de la fécondation, de l'azote renfermé dans les produits de conception (jeunes et annexes), de l'azote contenu dans la ration journalière, de l'azote éliminé par les fèces et excrété par les urines, de la durée de la gestation, Ver Eegke conclut à la réalisation de trois éventualités différentes : 1» La mère a conçu avec gain d'azote pour elle-même; c'est l'optimum. 2° La mère a conservé intégral son capital azoté : cette intégrité organique n'est que relative. L'équilibre organique est rompu; car il y a eu transport des substances azotées vers les glandes mammaires et la matrice hypertrophiées aux dépens des autres organes. 3" La mère a perdu de l'azote, elle a formé des produits de conception en partie aux dépens de sa propre chair. Ces éventualités sont, dans une certaine mesure, en relation avec son alimentation, et Ver Eegke conclut : i° La mère forme le fruit aux dépens de sa propre chair, du moment que son alimen- tation se rapproche de la ration d'équilibre ; 2° Elle le forme le plus souvent, en partie aux dépens de sa propre chair, en partie aux dépens de ses ingesta, même quand elle jouit d'une alimentation relativement luxueuse ; 3" Elle ne peut tirer de son alimentation tous les matériaux qu'elle cède au fruit que pour autant que cette alimentation soit riche. « Règle générale pendant la gestation, la désassimilation de l'azote est plus considé- rable que pendant le repos sexuel prégravidique. Cette accélératien des combustions organiques est, toutes choses égales, fonction du développement du fruit. » La gravidité place donc l'organisme dans des conditions de nutrition défavorables; en effet, les dépenses sont accrues, et les recettes nettes tendent à diminuer; quelque éner- gique que soit la réaction, son efficacité est éphémère, et le plus souvent contre-balancée même outre mesure. La gestation constitue donc le plus souvent un sacrifice de l'indi- vidu en faveur de l'espèce. Elle peut gravement compromettre la nutrition de la mère, et des gestations répétées et onéreuses peuvent diminuer les résistances aux infections. GESTATION. 179 Quelque considérable cependant que soit l'impôt prélevé par la gestation, et quelque profond que soit le trouble de l'équilibre organique, après la parturition, l'économie peut réparer l'apidement ses pertes; en effet, après la parturition, les épargnes sont favorisées par le ralentissement des combustions azotées, et la stimulation des fonctions digestives proportionnée aux besoins. Quant au fruit, il est d'autant plus riche en azote que la nutrition de la mère est plus favorable; mais ce rapport est loin d'être constant. Les recherches de B. H. Jagerroos faites dans le laboratoire de Hëinrigius {Étude sur les mutations de l'albumine, du j^hosphore et des chlorures pendant la gestation, Archiv f. GyndkoL, 1902, lxvit, o17) et portant sur les chiennes, ne sont pas assez nombreuses pour permettre d'esquisser une conclusion générale. Les conclusions de Ver Eecke, comme d'ailleurs celles de Hagemanx, ne concordent pas avec les résultats obtenus chez la femme par tous les observateurs dont nous avons résumé les travaux. Ces derniers, en etfet, admettent que, pendant la gestation, la désassimilation des matériaux azotés est ralentie. Les recherches de Hagemann et Ver Eecke, poursuivies chez les animaux avec une rigueur et une précision plus grandes, aboutissent à une conclusion absolument opposée. in. — Matériaux inorganiques, — A. Phosphore. — Pendant la gestation, l'ex- crétion des phosphates subit des modifications correspondant à celles de la désassi- milation de l'azote. Les recherches de Repreff, d'HAGEMAXN, de Ver Eecke démontrent que vers la fin de la gravidité chez la lapine, la cobaye, la chienne, on assiste inva- riablement à une diminution relative et absolue très considérable de l'acide phospho- rique. Cette diminution reconnaîtrait pour cause, d'après Ver Eecke, une résorption intestinale défectueuse, et accessoirement une épargne probable de P"-0-\ B. Chlore. — Chez la femme, l'élimination du chlore pendant la grossesse ne présente aucune modification, d'après Winckel {lac. cit.). Chez les animaux (lapine, cobaye, chienne), Repreff {lac. cit.) a constaté une élimination un peu plus considérable pendant la gestation que pendant les phases de repos sexuel. Quant à Ver Eecke, il conclut de ses patientes recherches sur la lapine : c 11 apparaît clairement que la nutrition de l'eau et du chlore pendant la gravidité et le post partum, est en relation étroite avec l'état général de la nutrition azotée de l'organisme. Celui-ci manifeste une tendance à accumuler de l'eau et des chlorures aussitôt que le quotient organique s'inÛéchit ou que l'équilibre organique azoté se rompt. Réciproquement l'excrétion des chlorures et la diurèse sont accélérées quand la nutrition de l'azote évolue de manière à maintenir ou à améliorer l'équilibre organique. Après le part, l'organisme se débarrasse proniptement de l'eau et des chlorures de rétention, et ce d'autant plus rapidement que la réparation des pertes azotées est plus active. C. Calcium. — Les recherches anciennes de Donné [C. R., 24 mai 1841) concluaient à une diminution de l'excrétion du phosphate de chaux par l'urine. Ce fait semblait en relation avec la formation du tissu osseux du fœtus. Il ne serait d'ailleurs pas constant d'après Lehmann {Physiologische Chernie, 1850, II, 397) et n'aurait aucune signi- fication pour Van Noorden [Lehrbuch der Pathologie des Stoffivechsels, Berlin, 1893, 137), car les reins ne sont qu'un émonctoire secondaire pour le calcium, dont l'élimina- tion se fait surtout par la muqueuse intestinale. D. Fer. — En 1879. Bunge a montré que dans le foie des nouveau-nés de chienne, de chatte, de lapine existait une réserve considérable de fer [Ueber Aufnahme des Eisens in den Organismics des Saûglings, Z. p. C, 1889, xni, 399-406), que Bunge et Zaleski ont estimé 4 à 9 fois plus grande chez le chien nouveau-né que chez le chien adulte. Bunge suppose que ce fer cédé au fœtus pendant la gestation était en réserve dans quelque organe maternel depuis l'époque de la puberté. Ce serait même peut-être la cause de la chlorose si fréquente à cette période de la vie féminine. D'autre part, Bunge [Der Kalinatron und Chlorgehalt der Milch verglichen mit dem der anderer Nahrungsmittebi und des Gesanrmtorganismus der Saùgethiere, Z. B., 1874, x, 295), puis Mendes de Léon [Archiv f. Hygietie, 1886, vu, 286) ont établi que le lait n'est qu'un aliment relativement pauvre en fer (six fois moins que le fruit par unité de poids). Bunge en déduit que cette réserve accumulée dans le foie fœtal assure pour le dévelop- 180 GESTATION. peinent du nouveau-né une quantité de fer que l'absorption intestinale serait impuis- sante à lui fournir, étant donnée la difficulté de l'absorption des composés organiques du fer. Les recherches d'ABOERHALDEN {Die Beziehungen der Zusamrncnsetzung der Asche des Saùglings zu derjenigen der Asche der Milch beim Meerschweinchen, Z.p.C, 1899, xxvn, 356-367) ne lui ont pas permis de retrouver chez le cobaye nouveau-né la réserve hépatique de fer que Bunge avait trouvée chez le chien, le chat et le lapin. Les conclu- sions de Bunge ont, par contre, été vérifiées par Lapicque. L'appauvrissement en fer de l'organisme maternel a été, d'autre part, établi par les recherches de Charrlx et GaiLLËMONAT [Rôle de l'hyperglijcémie et de la déminéralisation dans la genèse des prédisposi- tions morbides de la période puerpérale, B. B., 18 mars, 1899, 212). Dans quinze séries d'expériences, ces auteurs ont dosé, d'une part, chez des cobayes pleines, d'autre part, chez des cobayes non pleines et le fer du foie et celui de la rate. La moyenne pour le foie a été (rapportée à 1 000) de 0,20 dans les cas de grossesse, pendant que, dans l'état de vacuité, elle atteignait 0,24. « Ces différences assez faibles sont à peine au delà des limites de l'erreur possible. » En revanche, pour la rate les résultats sont plus nets. Les moyennes sont, pour les femelles gravides, de 1,01, et, pour les femelles à l'état de vacuité, de 1,40. Il y a d'ailleurs des variations en rapport avec l'âge de la grossesse, l'alimen- tation et peut-être avec le nombre des foetus ; « à ce dernier point de vue, la femelle la plus pauvre en fer portait cinq fœtus, celle qui avait subi la plus légère diminution n'en portait qu'un. » TROISIÈME PARTIE. De la gestation multiple. Les femelles des Mammifères sont suivant les espèces unipares ou multipares, c'est- à-dire que normalement la gestation chez les premières ne comporte qu'un seu/ produit de la génération, tandis qu'elle en comporte plusieurs chez les secondes. Chez ces der- nières, d'après A. Larbalétrier, « le nombre des petits mis au monde à chaque portée est très variable avec les espèces; là encore, dit-il, on peut admettre d'une manière très générale, et sauf toutefois quelques exceptions, que le nombre des petits est inversement proportionnel à la taille de l'animal ». Il en est ici du rôle de la taille, comme pour la durée de la gestation, ainsi que nous l'avons vu plus haut. Quoi qu'il en soit, chez certaines femelles normalement unipares, on peut constater des gestations pendant lesquelles se développent, simidtanément, plusieurs produits de la génération. On dit alors que la gestation est gémellaire ou double, triple ou quadruple, etc. Ces faits sont-ils du ressort de la physiologie ou de la pathologie? Nous ne discute- rons pas ici ce point qui nous paraît être surtout en rapport avec l'évolution, et nous donnerons un résumé de nos connaissances sur ce sujet que nous considérerons, jusqu'à plus ample informé, comme un sujet de physiologie spéciale. Nous ne pouvons étudier ici la différence profonde qu'il y a entre les diverses gesta- tions multiples, en un mot les variétés des gestations multiples. Nous ne devons que signaler ce fait, à savoir qu'on ne doit confondre à aucun point de vue une gestation multiple dans laquelle plusieurs œufs se développent en même temps, mais n'ayant entre eux que des rapports de contiguïté ; et une gestation multiple, dans laquelle les œufs ont des rapports de continuité. Dans la première .variété, chaque produit résulte d'un œuf; dans la seconde, c'est un seul œuf pourvu de plusieurs germes, qui a été l'ori- gine de plusieurs produits. De là, les dénominations de gestation multi-ovulaire quand chaque produit possède un chorion propre, et de gestation uni-ovulaire quand il n'y a qu'un chorion commun pour des produits multiples. Si l'unité de la masse placentaire dans les gestations multiples était déjà connue dans l'antiquité, l'unité du chorion dans certains cas de gémellité a été indiquée pour la première fois par Levret {Art des accouchements, p. 68, 1761), et Fr. Geoffroy Saint- GESTATION. ISt HiLAiRE fut le premier physiologiste qui tenta de faire l'application de cette notion au mode de formation des monstres doubles [Traité de tératologie, III, 520). Ne voulant entrer dans l'étude, cependant si attrayante, du mécanisme physiologique intime qui procède à la formation de la gestation multiple uni-ovulaire, nous dirons que les gestations multiples bi-ovulaires chez les femelles unipares, et en particulier chez la femme, étaient bien connues des anciens, ainsi que nous le verrons plus loin (p, 188) à propos de l'évolution de ces grossesses. Nous allons exposer rapidement ce que l'on connaît sur les causes qui favorisent la formation des grossesses multiples. i" Causes qui favorisent les grossesses multiples. —Parmi les causes qui favo- risent les grossesses multiples, on a cité ; la latitude, la race, l'hérédité, la pluriparité, l'âge, le développement plus considérable des ovaires, etc., etc. Disons de suite que l'influence de la latitude n'est rien moins que démontrée. La race a une influence non douteuse. Les recherches de Bertillon [Bulletin de la Société d'Anthropologie, 1877, et art. Natalité du. Dict.Encyclop. des se. médicales) en donnent la de'monstration mathématique pour l'espèce humaine. Tghouriloff, tout en confirmant les recherches de BertillOiN, a reconnu que la taille est, parmi les caractères de la race, celui qui aurait l'influence la plus manifeste : « la taille et la gémellité semblent décroître ensemble », dit cet auteur. Cet aphorisme retrouvera plus tard son explication probable. L'hérédité a une influence des plus considérables sur la production des gestations multiples, et cela tout aussi bien dans l'espèce humaine que dans les autres espèces animales. (Voyez Sue, Gardien, Velpeau, Leroy, Thèse de Paris, 1869.) Nous reviendrons plus loin sur ce point, mais nous tenons à signaler ce fait intéres- sant, et jusqu'à présent assez inexplicable, à savoir que des observations consciencieu- sement faites mettent en lumière l'influence de l'hérédité paternelle, chez l'homme comme chez les animaux. La pluriparité paraît jouer un certain rôle dans les grossesses multiples. Lebel a trouvé 89 pluripares et 51 primipares sur 150 observations de grossesses doubles prises à la clinique d'accouchements de Paris. Cullins constata que, sur 240 cas de grossesses doubles observées à l'hôpital de Dublin, 168 appartenaient à des pluripares, 172 à des primipares. Puech a constaté que les grossesses triples se rencontrent huit fois plus souvent chez les multipares que chez les primipares. Vdge semble également présenter une influence sur la production des gestations multiples. D'après la statistique de Lebel, c'est de 21 à 28 ans que le nombre des gestations multiples est le plus considérable. D'après une statistique faite par nous-mème, et qui porte sur 150 cas, nous avons fait la même constatation, et nous avons noté : De 18 à 20 ans 1 cas 20 à 25 — 51 — 25 à 30 — 53 — 30 à 35 — 30 — 35 à 40 — 14 — 40 à 50 — 1 — Selon Puech, c'est de 25 à 33 ans qu'on rencontre le maximum d'accouchements gémellaires. Voici, du reste, un tableau indiquant les résultats auxquels il est arrivé : Pour 100 De 25 à 30 ans 41.06 30 à 35 — 29.91 20 à 25 — 15.22 35 à 40 — 11.67 17 à 20 — 2.12 Le développement plus considérable des avalises paraît, d'après Puech [Des naissances multiples, 1872), avoir un rapport marqué sur la production des grossesses multiples, car la 14« conclusion de son travail est ainsi conçue : « La répétition des grossesses 182 GESTATION. multiples chez la même femme paraît due à l'existence d'ovaires démesurément déve- loppés, à fonctions plus énergiques. » De quelle façon l'énergie de cette fonction peut-elle se montrer? Soit en produisant plusieurs œufs arrivant au même moment ou à peu près à maturité, et présentant tous une aptitude à la fécondation; soit en produisant des œuts à plusieurs germes. La première hypothèse est prouvée par les exemples si nombreux d'une seule saillie déter- minant plusieurs produits de conception. SaIiNT-Gyr pense que chez les juments les faits les plus nombreux de gestation double se rapportent à ceux qui reconnaissent pour cause deux fécondations successives, ou une superfécondation. Voici maintenant les faits qui démontrent péremptoirement la possibilité de l'exis- tence de la superfécondation, ou mieux des fécondations successives, aussi bien dans les espèces animales que dans l'espèce humaine. Ganahl a rassemblé dans sa thèse, si remarquable, la plupart des faits de nature à éclairer le sujet qui nous occupe. Quelques- uns d'entre eux ont été donnés par leurs auteurs comme des cas de superfétation, mais il est facile de voir qu'il ne s'agit pas de superfécondation. 1° Du Pineau, chanoine, communiqua à l'Académie des sciences le cas d'une jument qui aurait produit d'une même portée un poulain et une mule. [Mémoires de l'Acad. des sciences, 1753.) 2° En 1878, Tillet communique à l'Académie des sciences un fait absolument iden- tique. [Mém. de l'Acad., 1768.) 3° En 1809, le Nouveau Bulletin des séances de la Société Philomathique de Paris, t. Il, 3® année, a publié une observation dans laquelle il est dit qu'une jument a donné nais- sance, le lo mai 1809, à midi, à une mule, et à midi et demi à une pouliche. La jument avait été saillie par un baudet, et 8 jours après par un cheval ; 4° En 1826, Gastex, vétérinaire à Toulouse, publie une observation recueillie avec le plus grand soin. Jument saillie par un baudet, puis immédiatement après par un cheval, et mettant bas une mule, et, peu d'instants après, une pouliche. (Journal pratique de médecine vétérinaire. Paris, 1826.) 5° En 1850, dans un cas rapporté par Lévrier, une jument saillie, à lo jours d'inter- valle, par un âne et un cheval donne naissance à un mulet et à un poulain. [Recueil de médecine vétérinaire pratique, 1850, xxviii.) 6" Eu 1854, Lessona fait connaître l'observation d'une jument qui, ayant été saillie, à 16 jours d'intervalle, d'abord par un baudet, puis par un cheval, avorta au bout de 6 mois, expulsant un poulain d'abord et, 2 heures plus tard, un petit mulet. [Giornale di veterinaria, iv, 1855.) 7" En 1858, Bisso.xi rapporte le cas d'une jument qui, après avoir été saillie 4 fois par le même cheval, accepta encore un âne que son propriétaire lui fit présenter 1 heure après la dernière de ces saillies, et qui, étant arrivée au terme de la gestation, devint mère de deux petits, l'un cheval, l'autre mulet. [Giorn. velerinario, pubblicato dal dott. L. Corvini, 1858.) 8° En 1859, cas de Pujas, vétérinaire à l'Ile-Jourdain,' d'après lequel une jument mit bas le même jour une pouliche et une mule. [Journ. des vétérinaires du Midi, 1859.) 9° En 1859, le D' Chabaud cite ce fait d'une jument qui, livrée d'abord au baudet, puis 15 jours après à un étalon, mit bas à terme un poulain, et 10 minutes après une mule, 1851. 10° En 1864, Gilis, vétérinaire, a publié une observation dans laquelle une jument, saillie le même jour par l'étalon et le baudet, mit bas une mule et une pouliche, [Journ. des vétérinaires du Midi, 1864.) 11° Cas de Caillier, vétérinaire à Mouhon. Il concerne une jument qui, couverte par un baudet et un cheval dans l'espace d'une demi-heure, mit bas, à 1 lieure d'intervalle, un poulain et un mulet. [Recueil de médecine vétérinaire pratique, 1830.) 12" Cas de Vaublanc, dans lequel une jument, saillie le même jour par un baudet et un cheval, mit bas un poulain et un mulet. [Recueil de médecine vétérinaire pratique 1834, XI.) Geoffroy Saint-Hilaire, Collin, Goubaux, Saint-Cyr rapportent des faits qui établissent ■de la façon la plus nette que les produits de la même portée peuvent avoir plusieurs GESTATION. 183 pères de différentes espèces ou de diverses races, et qui, pour ces auteurs, sont bien des exemples des fécondations successives opérées dans une même période de rut. Ce qui prouve, contrairement à l'opinion de Rischoff et de Baer, que chez les femelles qui font plusieurs petits à chaque portée tous les ovules ne quittent pas l'ovaire à la fois. Du reste, Pouchet a rencontré chez des femelles en chaleur des vésicules de de Guaaf déchirées, tandis que d'autres étaient seulement à la veille de se rompre. Collin, en pratiquant la castration sur une truie, a également trouvé à la surface de l'un des ovaires deux vésicules de de Graaf ouvertes et saignantes, et près d'elles deux autres pleines de sang, et non encore déchirées. Dans l'espèce humaine, on a publié un certain nombre d'observations concernant soit des négresses ayant eu à court intervalle des rapports avec un blanc et un nègre, et accouchant de deux enfants, dont l'un nègre et l'autre mulâtre; soit des femmes blanches, ayant, dans les mêmes conditions, eu des rapports avec un nègre et un blanc, et accouchant d'un enfant mulâtre et d'un enfant blanc. BuFFON rapporte le cas d'une femm^i de Charlestown, qui accoucha, en 1714, de de deux jumeaux, l'un mulâtre et l'autre blanc, ce qui, ajoute-t-ou, surprit beaucoup les assistants. Cette femme avoua avoir eu commerce avec un nègre immédiatement après avoir été quittée par sou mari. Une négresse de la Guadeloupe, ayant reçu dans la même soirée les embrassements d'un noir et ceux d'un blanc, mit au monde deux enfants mâles à terme, l'un nègre et l'autre mulâtre. {Bull, de la Sociélc de méde- cine, 1821.) Une autre négresse accoucha de trois enfants, dont un mulâtre, le second noir, le troisième cabre. [Bull, de la Société de médecine, 1821.) Un auteur américain, P. Dewees, dit avoir eu l'occasion de voir deux enfants, une fille blanche et un garçon nègre, qui étaient nés de la même couche. La mère, servant chez une femme qui avait assisté à l'accouchement et qui garantissait toute erreur, parais- sait avoir eu rapport en même temps avec un nègre et un domestique blanc. (Cassan,. Recherches anatomiques et physiologiques sur les cas dhUérus double et de superfétation.) Si les constatations de Puech se vérifiaient par la généralisation, elles pourraient expliquer le rôle de l'individualité physiologique, constatée chez un grand nombre d'animaux par tous les observateurs, dans la production deS gestations multiples, ainsi que le rôle de l'hérédité. Dans son chapitre sur les Origines dé la monstruosité double et la gémellité, Dareste écrit : « Un fait curieux de l'histoire des œufs à deux jaunes, c'est qu'ils sont fréquemment pondus par la même poule. C'est un remarquable exemple du Tôle physiologique de l'individualité. » Tout le monde, dit Saint-Cyr, connaît ce fait de fécondité extraordinaire, dont la com- munication est due à de Blainville, et relatif à une vache qui mit bas neuf veaux en trois portées successives, pendant les années 1817, 1818 et 1819. Et cet autre fait de Gellé relatant l'histoire de cette vache qui met au monde trois ■veaux en 1838, deux en iS39, deux en 1840, et quatre, dont trois mâles, en 1841, ainsi que ceux de Ferrari (14 veaux en 4 portées) et de Mac Gfuvray (23 veaux en 8 portées effec- tuées en sept ans). Les mêmes faits ont été observés dans l'espèce humaine. Brittain communique à la Société obstétricale d'Edimbourg l'observation de mistress G... qui, à l'âge de 47 ans, avait mis au monde 2.5 enfants en 14 accouchements {Edimburg med. J., nov. 1862). William Wood accoucha une femme le 22 octobre 1857 de 1 garçon et de 2 filles, et le 19 octobre suivant, c'est-à-dire 11 mois 22 jours plus tard, cette même femme mettait au monde 2 garçons. Voici maintenant des faits qui plaident en faveur de l'individualité physiologique du mâle. C'est un fait d'observation courante que les vaches couvertes par un taureau jumeau donnent souvent des jumeaux. On lit dans Sue : « Mé.vage nous apprend qu'un petit bourgeois de Paris, nommé Brunet, eut de sa femme 21 enfants en sept années de suite; on doutait lequel des deux contribuait le plus à cette espèce de prodige, mais il abusa d'une jeune servante qu'il avait, laquelle au bout de neuf mois accoucha de trois enfants mâles. » Tous les auteurs rapportent l'histoire du paysan russe Wassilieff, dont la première 184 GESTATION. femme eut 4 couches de 4 enfants, 7 de 3, et 16 de 2 et dont la seconde femme eut encore 2 grossesses triples et 6 grossesses doubles. Un autre paysan, Kiiilow, présenté à l'impératrice Catherine en 1753, avait eu de deux femmes 72 enfants vivants répartis de la manière suivante : 4 fois 4 enfants à la fois, 7 fois sur 3 et 10 fois deux jumeaux, en tout 57 de la première; quanta la seconde, elle avait eu 1 grossesse triple et 6 grossesses doubles. (Puech.) En résumé, la race et V individualité physiologique se transmettant plus ou moins par Vhérédité, paraissent jouer le plus grand rôle, posséder l'influence la plus manifeste, sur la production des gestations multiples. 2" Fréquence des gestations multiples. — Il est impossible, on le comprend, de savoir quelle peut être la fréquence des gestations multiples chez les femelles qui vivent à l'état sauvage. Les documents que nous possédons se rapportent tous, soit aux femelles à l'état de domestication, soit surtout à la femme. a) Chez les femelles domestiques. — Jument. — Saint-Cyr aftirmait que la jument est, de toutes les femelles unipares, celle chez laquelle la gestation multiple est la plus rare. Nous commencerons par exposer ce que l'on sait de la fréquence des grossesses multiples chez cet animal. Tout en admettant la rareté des gestations multiples chez la jument, les auteurs sont loin de s'accorder sur la proportion. On rencontre d'après Baldassare, chez la jument, moins de une gestation double sur 100 simples (0,09 p. 100); une sur 230 d'après Rueff; une sur 1000 selon Cornevin. La gestation triple est si rarement observée qu'aucune statistique n'est possible. Vache. — Les cas de gestation multiple sont incomparablement plus fréquents que chez la jument et sont observés à peu près dans les mêmes proportions que chez la femme. D'après Cornevin, il y aurait une gestation double sur 80 uniques; selon Baldassare, il y en aurait 3 ou 4 sur 100. La gestation triple n'est pas rare chez cette femelle. La vache donne parfois quatre produits, cinq produits. Mac Gilivray, Bosetti Antonio, Delamare ont même observé des cas de gestation sextuple, et Kuïdo, au dire de Hurtrel d'Arboval, a rencontré une vache ayant rejeté sept fœtus. Le même fait a été observé récemment par Pasetti (1897) (Bournay, Obstétrique vétérinaire, 1900). Brebis. — Chez la brebis, les gestations doubles sont si fréquentes qu'on dit commu- nément que dans un troupeau bien tenu il doit y avoir autant d'agneaux que de brebis portières, les parts doubles compensant les pertes par non-fécondation, avortements, mort-nés, etc. (Saint-Cyr.) La multiparité est même presque constante, chez certaines races de brebis; les produits sont au nombre de 2, 3, même 4. Des exemples fréquents de gestation quintuple ou sextuple ont été signalés (J. Bournay). Chèvre. — La chèvre présente pour la multiparité des aptitudes analogues à celles que l'on remarque chez la brebis (J. Bournay). b) Chez la femme. — D'après Dubois (in Gaz. des hôpitaux, 1843) sur 484 350 accouche- ments dont les observations ont été recueillies en Allemagne, en Angleterre et en France, on a trouvé 6 330 accouchements multiples se décomposant ainsi : Accouchements doubles 6.248 — triples 78 — quadruples 4 ce qui donne la proportion suivante : 1 accouchement multiple pour 76 accouchements simples 1 — double — 78 — — 1 — triple — 6.209 — - 1 — quadruple — 121.082 — — Veit {Monatsschr. fiir Geburtsh., vi, 127, 1823), sur un nombre de 13360557 accou- chements, a constaté : Grossesses gémellaires 149.964 — triples 1.689 — quadruples 36 GESTATION. 185 ce qui donne la proportion de : 1 i^rossesse gémellaire pour 89 simples 1 " — triple — 7.910 — 1 — quadruple — 371.126 La fréquence des i?rossesses multiples est loin d'être la même pour tous les pays. D'après Dubois on trouve pour la France : Pour la France 1 grossesse double sur 92 simples — l'Allemagne 1 — — — 84 — — la Grande-Bretagne 1 — — — 63 — Bertillon, dans le tableau qu'il a dressé à l'article Natalité, page 481, donne les pro- portions suivantes : Sur 1 000 grossesses générales, on rencontre : Grossesses doubles. n France. . . 9.9 Belgique . . 9.70 1 Italie. . . . 11.4 Autriche. . 11.9 Norvège. . 12.5 Prusse. . . . 12.5 Hollande. . 13.1 Danemark. . 14.20 Suède 14.50 En France, la gémellité varie suivant les départements, ainsi que le montrent les chiffres suivants. (Voy. Bertillon, art. France, Dict. encycl. des Se. med.) Départements où la gémellité est au minimum. ttrossesses doubles sur 1000 grossesses générales Gironde. 6.77 Haute-Garonne. . . 7.03 Corrèze 7.06 Charente 7,16 Ain 7.33 Ardèche 7.37 Lozère 7.48 Gers 7.59 Cantal 7.59 Puy-de-Dôme. . . 7 95 Dordogne Départements où la gémellité est au maximum. Grossesses doubles sur I 000 grossesses générales. Finistère 11.36 Jura 11.37 Morbihan 11.40 Nord 11.43 Mayenne 11.44 Cher 11.47 Vaucluse 11.75 Vosges 11.94 Vendée 12.34 Moselle 12.41 Savoie 12.80 Haute-Savoie ... 12.90 1. Les chiffres donnés par Bertillon relativement à la Belgique sont en désaccord avec ceux que fournit Constant Leroy dans sa thèse inaugurale sur la Grossesse gémellaire, Paris, 1872. Cet auteur a trouvé en Belgique, sur 39 508 grossesses simple^ , 650 grossesses doubles. 186 GESTATION. Nous arrêterons là ce qui concerne la fréquence des gestations multiples chez les femelles unipares. Sans vouloir entrer ici dans des considérations générales, nous ne pouvons cependant nous empêcher de faire remarquer qu'entre les femelles dites unipares et celles dites multipares, il n'y a aucune ligne de démarcation bien tranchée. Là encore se montre l'encliaînement de l'évolution. Et c'est pour cette raison que nous avons considéré que les gestations multiples chez les femelles unipares devaient rentrer dans l'étude de la gestation au point de vue physiologique. 3° Durée des gestations multiples chez les femelles ordinairement unipares. — L'observation attentive des faits permet de faire cette constatation : La durée de la grossesse multiple survenant chez la femelle ordinairement unipare est moindre que celle de la grossesse unique. Ce fait observé dans toutes les espèces démontre que l'expulsion est provoquée ici par une cause d'ordre physique ou mécanique. L'expulsion a lieu parce que le logement est trop étroit. Si la question nourriture est capitale pendant la gestation, la question logement n'est pas moins importante. Si les premières gestations ont en général une durée plus courte que les suivantes, s'il en est de même desgestations multiples par rapport aux grossesses uniques, c'estsousl'in- iluence du même facteur. Le contenu devient trop volumineux par rapport au contestant. On comprend alors comment et pourquoi, chez la femme en particulier, la durée de la grossesse multiple en général est jusqu'à un certain point sous la dépendance de ces deux facteurs : l'état de parité, et la taille. Les faits enregistrés prouvent en effet que, toutes choses égales d'ailleurs, la durée des grossesses multiples est plus courte dans la première gestation, et plus courte également chez les femmes de petite taille i. Dans ces conditions, il est facile de comprendre que la durée de la gestation multiple aura d'autant plus de chance d'être plus courte que le nombre des produits de la même génération sera plus considérable. C'est ainsi que le plus souvent les gestations triples ont une durée moindre que les gestations doubles, que les gestations quadruples ont une durée plus courte que les gestations triples, etc. Cela est si vrai que, dans les ges- tations triples, il n'est pas commun de voir les produits s'élever et que le fait est abso- lument exceptionnel dans les gestations quadruples. Nous retrouvons là ce qui est observé dans certains cas de gestation unique, mais anormale. Ainsi le chapitre Durée de la Gestation de Y Handbuch der thierarztlichen Geburtshilfe de L, Franck (4" édition, par Albrecht et Gœring, 1901) dit que la durée normale de la gestation paraît être, comme dans les gestations multiples, un peu abrégée pour les produits d'une grandeur anormale. Les veaux hydropiques, qui sont en général très gras, sont en général expulsés plus tôt que les veaux normalement conformés. Les mêmes auteurs donnent de ce fait l'explication suivante : « La raison de ce fait réside probablement dans r excitation plus forte de l'utérus. Par suite de la forte dilata- tion qu'il subit, il devient plus excitable, et le degré d'excitation qui d'ordinaire déter- mine la parturition typique produit dans ce cas une excitation réflexe plus tôt que dans des circonstances habituelles. C'est pour des raisons analogues que chez les juments soumises au travail, d'après la remaïque de Matthusius, « la parturition a lieu plus tôt que chez les juments au repos. Chez les premières, le travail développe des facteurs (accumulation d'acide carbonique et forte dépense d'oxygène) qui exercent une action irritante sur l'utérus. Ces facteurs déterminent, comme l'on sait, l'avorte- ment chez les juments soumises à un travail excessif. » Sans vouloir discuter ici la valeur de celte explication, n'ayant pas à étudier ici le mécanisme intime des causes de la naissance, nous ne retenons que cette constatation faite par tous les observateurs, à savoir que la distension anormale de l'utérus déter- mine l'expulsion de son contenu. Il résulte de ce qui vient d'être dit que, dans les gestations multiples, l'expulsion 1. Cela n'est pas en contradiction avec ce que dit J. Bournay : « Plus la taille des femelles domestiques est grande, plus il semble que la multiparité soit proportionnelle. » GESTATION. 187 précoce, n'étant point la conséquence d'une maluralion hàlive, n'est et ne peut être qu'une expulsion prématurée. Cette expulsion est d'autant plus prématurée que la gros- sesse multiple se produit chez les femelles plus communément unipares. Il nous semble que cette notion capitale ne peut être contestée aujourd'hui. Elle est établie sur des bases absolument scientifiques. Chez les femelles domestiques, dans une espèce donnée, la durée de la grossesse multiple est généralement la même chez tous les individus faisant partie du même troupeau, c'est-à-dire se trouvant dans les mêmes conditions. C'est ainsi que Trasbot avait remarqué que la durée de la gestation esfen général plus longue chez les vaches en état de stabulation permanente. Il n'en est pas de même chez la femme, car les conditions de vie varient pour ainsi dire avec chaque individu. Cependant, laissant de côté les particularités anatomiques qui la caractérisent et cette autre condition non moins importante, la station bipède, il est facile de démontrer chez elle l'influence des conditions hygiéniques dans lesquelles elle se trouve sur la durée des grossesses multiples et agissant chez elle comme dans les cas de gestation unique. A notre instigation et sous uotre direction A. Baghimont a recherché dans 235 cas de grossesses gémellaires observées à la Clinique Baudelocque {loc. cit.), quels avaient été le poids des enfants et la durée moyenne et approximative de la grossesse, chez les femmes qui s'étaient reposées et chez les femmes qui ne s'étaient pas reposées pendant la grossesse. Il obtint les résultats ci-dessous : ^° Enfants des femmes qui se sont reposées : Chez ces femmes, le poids moyen des enfants a été : A la naissance. A la sortie de Baudelocque. l" enfant 2,500 grammes. 1" enfant 2,640 grammes. 2= — 2,480 — 2« — 2,380 — 2° Enfants des femmes qui ne se sont pas reposées : Chez ces femmes, le poids moyen des enfants a été : A la naissance. A la sortie de Baudelocque. 1" enfant 1,933 grammes. l'"' enfant 2,030 grammes. 2" — 1,900 — 2" — 2,023 — Au point de vue de la durée moyenne et approximative de la grossesse, il a fait les constatations suivantes : 1° Pour les femmes qui se sont reposées pendant les derniers mois ou pendant les dernières semaines de leur grossesse, il s'est écoulé entre le dernier jour de leurs dernières règles et le jour de l'accouchement : en moyenne 269 jours ; 2° Pour les femmes qui ne se sont pas reposées, il s'est écoulé entre le dernier jour de leurs dernières règles et le jour de l'accouchement : en moyenne 247 jours. Il est donc permis, non pas de prolonger la durée des grossesses multiples, mais de faire en sorte qu'elles se rapprochent le plus possible de la durée typique. En résumé, les gestations survenant chez les femelles communément unipares ont une durée moindre que les gestations uniques. Des influences puissamment modifica- trices mettent en lumière l'importance des conditions dans lesquelles vivent ces femelles en état de gestation. 4*" Évolution des gestations multiples. — Chez les femelles communément uni- pares, lorsque survient une gestation multiple, on observe pendant la durée de cette gestation une symptomatologie physiologique excessive. Il y a une suractivité fonctionnelle dont l'intensité est telle que souvent apparaît l'état dit de maladie. C'est ainsi que l'albu- minurie, et des troubles des appareils circulatoire, respiratoire, etc., sont observés. Bien que n'ayant pas à nous occuper ici de l'histoire des produits et que nous 188 GIACOSA. laissions de côté les cas de monstruosité observés dans les cas de f^estation multiple, uni-ovulaire, nous devons cependant dire quelque mots sur les particularités pouvant se produire pendant l'évolution de ces gestations. Assez souvent les jumeaux offrent un développement inégal, que l'on a rapporté à tort pendant longtemps à la superfétation. ^oas savons aujourd'hui ce que l'on doit penser de cette question. On sait que le développement inégal des jumeaux tient le plus sou- vent aux rapports des annexes de l'œuf ou des œufs. Il arrive que pendant la gestation l'un des fœtus meurt, l'autre ou les autres conti- nuant à se développer. Celui qui meurt se momifie le plus souvent. Enfin on peut voir dans les cas de grossesse double un fœtus expulsé au cours de la grossesse et l'autre se développer jusqu'à terme. Il est bien entendu que ce fait ne peut s'observer que dans le cas de grossesse muUi-ovulaire, c'est-à-dire dans le cas où les œufs n'ont entre eux dans l'utérus que des rapports de contiguïté. Les anciens con- naissaient bien ce fait dont beaucoup d'exemples sont rapportés par les fauteurs. Nous devons à notre éminent ami L. Havet, professeur au Collège de France, une notice inté- ressante sur ce sujet'. Enfin, pour en finir avec les particularités pouvant être observées chez les produits résultant de gestation multiple chez des femelles communément unipares, nous disons que, dans l'espèce bovine tout au moins, les yétt/sses yi03 II. — PHYSIOLOGIE DES GLANDES. SÉCRÉTIONS Dosage de l'azote total des urines par l'hypobromite de sodium titré (avec Ch. Righet) (B. B., 1885, 136). — Expériences sur. la courbe horaire de l'urée et le dosage de l'azote total de Vurine (avec Ch. Righet) [Ibid., 1887, 377). — Sur les relations qui existent entre l'aci~ dite de l'urine et la digestion stomacale (avec E. Lambling) {Revue biol. du Nord de la France, I, cet. 1888). — Sur les conditions dans lesquelles se manifestent les propriétés antiseptiques de la bile (avec E. Lambling) {Ibid., i, oct. 1888). —Sur les troubles consécutifs à la destruc- tion du pancréas [C. R., 6 avril 1891, 752 et B. B., 1891, 225). — Dédoublement du salol dans r intestin des chiens privés de pancréas {Ibid., 1892, 298). — Action du foie sur la cocaïne {Ibid., 1891, 560 et 639). — Note sur quelques effets de la destruction lente du pancréas. Importance de la fonction digestive du pancréas {Ibid., 1892, 841-840). — De la non-absorption de l'eau par l'estomac (avec P. Rondeau) {Ibid., 1893, 516). — La réaction des parois et du contenu de lintestin grêle chez Vhomme (avec E. Lambling) {Ibid., 1894, 185). — Propriétés d'un liquide considéré comme provenant d'une fistule pancréatique chez Vhomme (avec ¥,. Bourquelot) (Ibid., 1895, 238). — Sur la toxicité de la sueur (avec L. Capitan) {Ibid., 1896, IHO). — Action des injections intra-veineuses de propeptone sur les sécrétions en général {Bull, du Muséum d'hist. natur., 1897, 244). — Procédé facile d'extirpation complète du thymus chez le lapin {Ibid., 1898, 308). — Influence des injections de propeptone sur la fonction glycogénique du foie {Ibid., 1899, 392). — Sur le mode d'action des substances anticoagulantes du groupe de la propeptone. Action de ces substances sur les sécrétions (in Cinquantenaire de la Soc. de Biol., Paris, 1899, 701-713). Sécrétion pancréatique (en collaboration avec L. Camus). — Sur la sécrétion pancréa- tique des chiens à jeun {B. B., 1901, 194). — Sécrétion pancréatique active et sécrétion inac- tive {Ibid., 1902, 241). — A propos de l'influence des macérations d'intestin sur l'action protéolytique du suc pancréatique {Ibid., 1902, 434).— Action de V atropine sur la sécrétion pancréatique provoquée par les injections de propeptone ou d'extrait intestinal {Ibid., 1902, 465). — Action de l'extrait acide de muqueuse stomacale sur la sécrétion pancréatique [Ibid., 1902, 648). — De la sécrétion d'un suc protéoUjtique sous l'influence des injections de sécrétine {Ibid., 1902, 649). — Sur la sécrétion pancréatique active [Ibid., 1902,895). Fonction anticoagulante du foie (en collaboration avec V. Pachox). — Du rôle du foie dans l'action anticoagulante de la peptone{C. il., 26 août 1895,383). — Influence des variations de la circulation lymphatique intra-hépatique sur l'action anticoagulante de la peplone (A. de P., 1895, 711-718). — Influence de l'extirpation du foie sur l'action anticoagulante de la peptone {B.B., 1895,741). — Recherches concernant l'influence du foie sur l'action anticoagu- lante des injections intra-veineuses de propeptone {A. de P., 1896, 715-723). Autres notes publiées par Gley sur la même question : Du rôle du foie dans l'action anticoagulante de la peptone (Bull, du Muséum d'hist. natur., 1800, 199). — A propos de l'effet de la ligature des lymphatiques du foie sur l'action anticoagulante de la propeptone {B. B., 1890, 663). — A propos du rôle du foie dans la production d'une substance anticoa- gulante { Hydrogène. ... 7,10 Azoté. 14,31 Soufre 1.72 La globuline totale a pour composition : Carbone .^1,93 Hydrogène. . . . 7,04 Azote la, 17 Soufre 1,99 La globuline donne toutes les réactions des matières albuminoïdes, et fournit par l'hydrolyse en présence d'HCl 11 p. 100 de glucosamine, sous la forme d'un dérivé pen- tabenzoylé. J. ScHULTz a montré que la diastase protéolytique de la levure agit sur l'eugiobuline et la pseudoglobuline, mais d'une manière moins accentuée que sur la levure elle- même, où elle provoque des phénomènes d'autolyse. 212 GLOBULINES. T.a vitelline du jaune de l'œuf se rapproche par certains côtés des globulines, mais l'ensemble de ses propriétés et sa composition, (présence d'une certaine proportion de lécilhine) l'en éloigne tout à fait (voir Vitelline). Cristalline. — La cristalline constitue la globuline du cristallin. On l'obtient en broyant des cristallins de bœuf dans des solutions salines étendues : les globulines se dissolvent. Môrner a pu dans ces conditions en distinguer deux : une cristalline a. repré- sentant 68 p. 1000 de la substance fraîche, renfermant 16,68 p. 100 d'azote et 0,56 de soufre coagulable à 72°; une cristalline [3 représentant 110 p. 1000 de la substance fraîche renfermant 17,04 p. 100 d'azote et 1,27 p. 100 de soufre coagulable à 63°. Toutes deux ne sont pas précipitées par le sel marin à saturation; mais elles précipitent par le sulfate de soude et le sulfate de magnésie. MOrner admet que la cristalline a serait plus abondante dans les courbes extérieures de l'organe. Globulines diverses. — On a trouvé des globulines dans un très grand nombre d'organes. C'est ainsi que l'on trouve des globulines dans le lait en particulier. W. Ellenberger a trouvé par l'analyse des matières protéiques dans le lait d'ânesse une globuline ainsi composée : Carbone, o3,4 ; Hydrogène, 7,31; Azote, lo, 79; Soufre, 0,47 On en rencontre dans les urines, et A. Herlant a trouvé une urine renfermant de la niucine, de la serine, de la globuline, des albumoses et des peptones : il séparait la serine de la globuline au moyen du sulfate de magnésie. Dans le corps thyroïde on a pu trouver des globulines iodées. D'après A. Ostwald, abstraction faite de la richesse en iode, qui est variable, la thyréoglobuline a, dans ■chaque espèce animale, une composition constante. Chez l'homme la thyréoglobuline est plus riche eu iode lorsque les glandes sont -dégénérées. A. Ostwald a trouvé que la proportion d'iode est directement liée à la pro- portion de colloïde; les préparations ne sont actives qu'en raison de l'iode qu'elles contiennent. Tout se passe comme si la glande contenait un mélange d'une thyréoglobu- 'Jine iodée avec une globuline non iodée. Globulines végétales. — Les globulines végétales, bien que jouissant de toutes les propriétés générales des globulines, sont toutefois légèrement solubles dans l'eau. Elles possèdent la remarquable propriété de pouvoir cristalliser, et leur étude est par suite du plus grand intérêt. L'édestine en est le type (voir Édestine), mais à côté d'elles viennent se placer quelques autres substances non moins intéressantes, et qui possèdent aussi les jnêmes propriétés cristallines. Les globulines de la noix de Para sont des corps bien cristallisés (Maschke), pouvant 'donner des combinaisons définies et bien cristallisées avec la magnésie (Schuiedererg, Drechsel) ou la soude. Le point de coagulation oscille autour de 75°. Les globulines des semences de courge sont encore des variétés cristallines solubles dans les solutions de chlorure de sodium, coagulables par la chaleur à 95° dans une solution salée à 1 p. 3; à 78° dans une solution salée ai p. 12. La composition de ces cristaux ne semble pas varier avec la nature de la solution au sein de laquelle ils se sont ■déposés. Cristaux formés dans une solution. Carbone Hydrogène. . . . Azote Soufre Oxygène Cendres Ces chiffres montrent bien la constance et l'identité de la substance. On connaît une combinaison cristallisée de cette globuline et de magnésie, renfer- mant 0.45 de magnésie; ce qui donne pour formule C"0H"-"Az-'5"O''^2S^Mg'. La globuline aurait ainsi pour formule C^s^hw'AzSoOS'S- (Grubler, Bunge). Signalons encore les globulines du semis de chanvre (Ritthausen), de Pmniaof/iciaaiis, du lupin bleu, du froment, etc. i ^ Chlorhydr ate Sulfate Sel marin. •i d'ammoniaque. de magnésie. 33.21 Î53.35 53.29 7.22 7.31 6.99 19.22 19.17 18.9!) 1.07 1.16 1.13 19.10 18.70 19.47 0.18 0.11 0.13 GLOSSO-PHARYNGIEN (NERF). 213 Propriétés ferments de certaines globulines. — Les globulines semblent jouir dans certains cas de propriétés feimentescibles énergiques. Certaines globulines agissent sur les albuminoïdes. Ainsi E. Fuld et K. Simro ont étudié l'action de l'euglobuline et de la pseiidoglobuline sur le lait. La première coagule nettement le lait; une addition de chlorure de calcium ou d'un alcali en accélère l'action, et la chaleur de G5''-70° la supprime définitivement; ainsi que l'addition d'un acide. La pseudoglobuline peut passer pour un antilab : le séjour dans des dissolutions acides ou alcalines, ou l'addition de chlorure de calcium diminuent l'action : le chauf- fage à 70° la supprime. Hammarstkn avait montré que la caséification se fait en deux phases : 1° production de paracaséine; •2" sa précipitation sous forme de combinaison calcique. La pseudoglo- buline n'agit dans cette dernière phase que par soustraction de chaux. Certaines globulines végétales jouissent d'une toxicité manifeste. Telles sont les glo- bulines du jequirity trouvé par M. S. Martin. Le pouvoir bactéricide du sang a même été attribué aux globulines. On a pu extraire des leucocytes une cytoglobuline possé- dant un pouvoir bactéricide des plus marqués. Enfin Abelous et Hiaknès ont montré l'existence de globulines jouant le rôle d'oxy- dases (Voir Oxydase); les globulines des invertébrés de Griffiths possèdent des pro- priétés analogues. On voit par là quel doit être le rôle physiologique des globulines, rôle encore peu connu qui doit être des plus importants, essentiellement variable d'ail- leurs avec chaque globuline. Bibliographie. — Abelous et Biarnès [B. B., 1897, 576). — Atkinson (J. of exp. med., 1900. v, 67). — Blum (Z. p. C, 1899, xxviii, 288). — Bramwell {Atlas of clin, med., 1891, I, 170). — CiiiTTENDEN et Mendel (J. p., 1894, xvn, 48). — Chittenden et Kûhne (Z. B., 1886, X, 409). — Csalary (D. Arch. f. klin. Med., xLVii, 139). — Danilewsky {Trav.physiol. de Danileivsky {en russe), 1891, ii, 167). — Ellenberger {Arch. f. Phys., 1902, Supp., 313). — Freund (F.) et Joachim (J.) (Z. p. C.,'l902, xxxvi, 407). - Iid. (C P., 1902, XVI, 297). — Fuhrmann (F.) {Beitr. ch. Phys. u. Path., 1903, in, 417). — Fuld {Beitr. z. ch. Phys. u. Path., 1902, ii, 155. — Voir Fuld et Spiro). — Griffiths (C. R., 1892, cxiv, 840, — 1892, cxv, 239, — 1892, cxv, 474, — 1892, cxv, 738). — Grund (Z. p. C, 1902, XXXV, m). — Hammarsten {Ibid., viii, 467). — Harlaut {Bull. Ass. belge chim., 1901, xv, n» 8 et 9). — Hausma.xn (Z.p. C, 1900, xxix, 136). — Jolles (A). {Ibid.), 1901, xxxii, 371. — Launtein {Beitr. ch. Phys. u. Path., 1901, i, 83). — Liaof (J. Soc. phys. chim. II., 1899, XXXI, 781). — Marcus (Z. p. C, 1894, xxviii, 539). — Mikhaïlow (/. Soc. phys. chim. II., 1883, 348). — Ostwald (A.) {Beitr. ch. Phys. u. Path., 1902, u, 545). — Paskovici (F.) et Ulzer (F.) (D. ch. G., 1903, xxxvi, 209). — Pigk {Beitr. ch. Phys., i, 7). — Reale (E.) {Riv. clin, e Terap., 1889, xi, 63). — Remezoff {Trudi fisiol. lab. imp. Moskow Univ., 1890, u, 253). — Rey {Dissertation, Strasbourg-, 1898). — Sghultz (J.) {Beitr. ch. Phys. u Path., 1903, m, 433). — Sghultz et Zsimondy {Beitr. ch. Phys. u. Path., 1903, m, 137). — Seug (Z. p. C, XXXI, 313). — Spiro (K.) {Beitr. ch. Phys. u. Path., 1901, i, 78). — Spiro (K.) et Fuld (Z. p. C, 1900, xxxi, 132). — Spiro (K.) et Porges (0.) {Beitr. ch. Phys. u. Path., 1902, III, 277). — Stabke (Z. B., xxii, 425). — Thomas (B.) Osborne {Am. J. Soc, 1902,1, 28). — ViGLEGio{A.)(fify. clin.di Bologna, 1887, vu, 673). —Vincent {Z.p.C, 1902, xxxiv, 417). — Weyl(I6*V/., 1877, i, 72). — Wroblewski (A.) {J. f.prakt. Ch., 1901, lxiv, 1). — ZuNz (E.)(Bet7r. ch. Phys. u. Path., 1902, ii, 435; — Z. p. C. xviii, 132). AUG. PERRET. GLOSSO-PHARYNGIEN (NERF). - Le nerf glosso -pharyngien est-il purement sensitif ou mixte dès son origine? Telle est la question que pendant long- temps se sont posée les physiologistes. Tandis que Longet, Valentin, Biffi et Morganti soutenaient la première opinion, J. Muller, Volkmann, Hein se prononçaient pour la seconde. En outre, alors que Longet reconnaissait que le nerf devient moteur a sa sortie du trou déchiré postérieur par suite de ses anastomoses, John Reid, Biffi et Morganti, Panizza prétendaient qu'il reste exclusivement sensitif sur toute sa longueur. 214 GLOSSO-PHARYNGIEN (NERF). Mais l'expérimentation ainsi que l'anatomie ont montré que le nerf de la IX'^ paire crânienne'apparlient à la catégorie des nerfs mixtes. Le glosso-pharyngien donne la sensibilité : 1° à la muqueuse du tiers postérieur de la langue, y compris le V lingual; 2° à celle qui recouvre l'amygdale et les piliers du voile du palais; 3° à une partie de la muqueuse du pharynx; 4° à la muqueuse delà paroi interne de la caisse, des fenêtres ronde et ovale, de la trompe d'EusTACHE jusqu'à son orifice pharyngien. Ses filets moteurs sont destinés à certains muscles du pharynx. 11 renferme également des fibres sécrétoires et vaso-motrices. Notions anatomiques. — 1° Noyaux bulbaires du glosso-pharyngien (fig. 3). En tant que nerf mixte, le glosso-pharyngien a deux espèces de racines; des racines sensi- tives et des racines motrices. Les racines sensitives ont, selon la règle, leurs cellules d'origine, et, par consé- quent, leur centre trophique en dehors de l'axe cérébro-spinal. Mais ces cellules, au lieu d'être groupées en un amas unique, ''^■^ * sont réparties en deux ganglions, dont l'in- férieur est le ganglion d'ÂNDERSCH ou gan- glion pétreux; et le supérieur le ganglion d'EHRENRiTTER OU ganglion jugulaire. Comme les ganglions spinaux, ils sont formés de cellules unipolaires dont la branche unique se bifurque bientôt en T et donne naissance à mi prolongement périphérique et à un prolongement central. Le prolongementpéri- phérique va se distribuer aux muqueuses auxquelles le nerf donne sa sensibilité ; le prolongement central devient le cylindre- axe d'une fibre radiculaire, pénétre dans le bulbe par le sillon collatéral postérieur et se bifurque, comme le font les racines sen- sitives, en une branche ascendante et une branche descendante. La première, la plus courte, a une direction presque horizontale et aboutit à la partie supérieure du noyau de substance grise connu sous le nom d'aile grise du plancher du i" ventricule ou trigone du glosso-pharyngien et du pneu- mogastrique ; la branche descendante , beau- coup plus longne, pénètre dans le faisceau solitaire du bulbe, bandelette longitudinale constituée par un mélange de substance grise et de substance blanche. Cette substance grise est une colonne détachée de la substance gélatineuse de Rolando dont la partie la plus volumineuse est affectée à la racine descendante du trijumeau; elle occupe ordinairement la face interne du faisceau solitaire, quelquefois elle l'entoure en anneau. Ainsi les fibres radiculaires sensitives de la IX'= paire vont aboutir à deux noyaux terminaux, à l'aile grise d'une part, à la substance grise ^du faisceau longitudinal, d'autre part, qui sont aussi les noyaux terminaux du pneumogastrique. Mais, tandis que le noyau de l'aile grise représente la terminaison principale du nerf de la X'^ paire, et ne se met en rapport avec les racines de la IX^ que par sa partie supé- rieure, le faisceau solitaire ne reçoit au contraire que quelques fibres du nerf vague et absorbe la grande majorité de celles de la IX"'. Les prolongements cylindre-axiles de ces noyaux gris s'entre-croisent ensuite sur la ligne médiane pour se mêler au faisceau sensitif ou ruban de Reil, c'est-à-dire à la voie cérébrale consciente qui les relie au centre cortical de la gustation (voy. ce mot). Les fibres motrices ont leur cellule d'origine dans la partie supérieure du noyau ambigu, qui représente un prolongement du groupe externe de la corne antérieure de la moelle et qui est situé profondément dans l'épaisseur du bulbe, en arrière de l'olive; d'après Cajal, ces fibres radiculaires subissent une décussation partielle. Fig. 3. — Origines du nerf glosso-pharyngien. 1, glosso-pharyngien avec 2 son noyau moteur ou noyau ambigu ; — 3, son noyau sensitif ou noyau de l'aile grise; — 4, faisceau solitaire; — 5, grand hypoglosse avec 5', son noyau d'origine; — 7, pé- doncule cérébelleux inférieur; — 8, racine des- cendante du trijumeau. GLOSSO-PHARYNCIEN (NERF). 215 Elles se constituent en un faisceau qui se dirige en arrière vers le plancher du 4« ventri- cule, puis se recourbent en genou pour se joindre aux libres sensitives et se porter avec elles d'arrière en avant vers le sillon collatéral. Telles sont les données classiques sur les noyaux du glosso-pharyngien. Mais, d'après les recherches récentes de van Gehuchte.v, le nucleus am630 GLYCOGÈNE. Dans cette même communication du 2i septembre 1853, Claude Bernard met encore en lumière un fait du plus grand intérêt qui a été plein de conséquences dans l'iiistoire de la découverte du glycogène, c'est qu'après la mort de l'animal, dans les conditions convenables d'humidité et de chaleur, la formation du sucre continue pendant longtemps. Mais, comme après la mort il n'y a plus de circulation de sang pour enlever le sucre qui continue toujours à se former, alors le sucre s'accumule dans le foie : par consé- quent, un jour après la mort, il y a dans le foie plus de sucre qu'il n'y en a immédia- tement après la mort. C'est un fait important qu'il faut avoir présent à l'esprit toutes les fois qu'on fait l'analyse du sucre hépatique. Insistons beaucoup sur ce fait que déjà en 18o5 Claude Bernard savait qu'il y a dans le foie une substance, qu'il appelle une espèce de fécule animale, qui donne du sucre par un processus de fermentation. Comme on conteste de différents côtés à Claude Bernard la découverte du glycogène, il est juste d'établir qu'en 1855 il avait déjà découvert le glycogène, sans l'avoir isolé d'ailleurs, à une époque oii aucun de ceux à qui on a de- puis attribué la découverte du glycogène indépendamment de Claude Bernard n'avait la moindre idée de l'existence de ce corps. 11 est clair cependant que le véritable auteur delà découverte du glycogène est celui qui a réussi à l'isoler et à indiquer les méthodes qui permettent de le préparer à l'état de pureté chimique. De même que Claude Bernard a fait tout seul tous les progrès dans la connaissance de ces phénomènes, malgré les nombreuses recherches d'investigateurs habiles sur le niême sujet, de même il a eu aussi le mérite d'avoir couronné l'édifice. — C'est lui qui a le premier indiqué la méthode qui permet la préparation du glycogène chimiquement pur . Dans sa leçon du 18 mars 1857, et dans la séance de l'Académie des Sciences du 2.3 mars 1857, il indique le procédé de préparation du glycogène. Tous les faits essentiels qu'il établit alors sont encore vrais aujourd'hui, et demeurent la pierre angulaire sur laquelle on a édifié d'autres faits plus tard. Il est donc juste de reproduire ici les paroles mêmes du maître : « On prend le foie encore chaud et saignant chez l'animal bien nourri et bien portant, aussitôt après qu'il a été sacrifié. On peut employer le foie d'un animal quelconque, soumis aux alimentations les plus diverses. Mais pour simplifier la question sur ce point, je dirai qu'il ne s'agit ici que d'expériences faites avec des foies de chiens nourris exclusivement avec de la viande. On divise le tissu du foie en lanières très minces qu'on jette aussitôt dans de l'eau maintenue constamment bouillante, afin que le tissu de l'organe soit subitement coagulé et que la matière glycogène qui se trouve en contact avec son ferment n'ait pas le temps de se changer en sucre, sous l'inlluence d'une tem- jiérature qui s'élèverait trop lentement. On broie ensuite les morceaux de foie coagulé aans un mortier; puis on laisse cette espèce de bouillie hépatique cuire pendant environ un quart d'heure, ou même moins, dans une quantité d'eau suffisante seulement pour baigner le tissu, afin d'obtenir de cette façon dans la décoction concentrée une plus grande quantité de la matière susceptible de se changer en sucre. On exprime ensuite dans un linge ou sous une presse le tissu du foie cuit, on y ajoute un peu de noir animal, qui précipite une partie des matières organiques, et aussi une petite quantité de matière glycogène, et l'on jette sur un filtre le liquide de décoction qui passe avec une teinte opaline. Ce liquide est aussitôt additionné de 4 ou 5 fois son volume d'alcool à 38 ou 40 degrés, et on voit se former sous son influence un précipité abondant floconneux d'un blanc jaunâtre ou laiteux, qui est constitué par la matière glycogène elle-même, retenant encore du sucre, de la bile et d'autres produits azotés indéterminés. Tout le précipité, recueilli sur un filtre, est alors lavé plusieurs fois à l'alcool, de manière à le dépouiller le plus possible du sucre et des matériaux biliaires solubles. A cet état ce pi^écipité desséché revêt l'apparence d'une substance grisâtre, quelquefois comme gom- meuse, à laquelle on pourrait donner le nom de m&tière glycogène brute. Elle possède la propriété de se redissoudre dans l'eau, à laquelle elle communique toujours une teinte fortement opaline, et d'où elle est entièrement précipi table par l'alcool concentré *. 1". '( La dissolution aqueuse de cette matière glycogène brute, et avant d'avoir été traitée par la potasse, se colore par l'iode, ne réduit pas les sels de cuivre dissous dans la potasse, ne fei-mentc GLYCOCÈNE. 231 « Pour purifier celte matière glycogène et la débarrasser des matières azotées, ainsi que des moindres traces de glycose qu'elle aurait pu encore retenir, on la fait bouillir dans une dissolution de potasse caustique très concentrée pendant un quart d'heure ou une demi-heure, opération qui ne l'altère pas et n'en change pas les propriétés fondamen- tales, puis on filtre en ajoutant un peu d'eau et toute la dissolution est précipitée de nouveau par l'addition de 4 ou !> fois son volume d'alcool à 38 ou 40 degrés. Agitant alors avec une baguette de verre, la matière précipitée se divise, ayant d'abord une grande tendance à adhérer aux vases. Par des lavages répétés avec de grandes quantités d'alcool, on enlève autant que possible la potasse; la matière glycogène se présente alors sous forme d'une substance comme grenue, presque pulvérulente. Toutefois cette matière ainsi préparée retient toujours avec elle une certaine quantité de carbonate de potasse, qu'on ne peut pas enlever par les simples lavages a. l'alcool; il faut pour cela redis- soudre la matière dans l'eau, saturer le carbonate de potasse par l'acide acétique et traiter de nouveau par l'alcool, qui précipite la matière et le sépare de l'acétale de potasse qui reste soluble dans la liqueur. La matière glycogène perd alors sa forme grenue pour revêtir l'aspect d'une poudre blanche très finement tomenteuse, lors- qu'elle est en suspension dans l'alcool, pulvérulente et comme farineuse quand elle est desséchée. « Ainsi préparée, cette matière hépatique glycogène possède un ensemble de caractères qui la rendent tout à fait analogue à de l'amidon hydraté ayant déjà subi un commen- cement d'altération. C'est une matière neutre, sans odeur, sans saveur, donnant sur la langue la sensation de l'amidon. Elle se dissout, on peut-être, plus exactement, se met en suspension dans l'eau à laquelle elle communique une teinte fortement opaline. L'exa- men microscopique n'y montre rien de caractéristique. L'iode y développe une coloration très nettement bleue. Quand on chauffe jusqu'au rouge avec de la chaux sodée, cette ma- tière hépatique ne dégage pas d'ammoniaque, ce qui indiqne qu'elle ne renferme pas d'azote'. La matière glycogène brute traitée de la même matière dégage très nette- ment des vapeurs ammoniacales. Elle ne réduit pas les sels de cuivre dissous dans la potasse, ne subit pas la fermentation alcoolique sous l'intluence de la levure de bière, est entièrement insoluble dans l'alcool fort, et précipitable de sa solution aqueuse par le sous-acétate de ploml), le charbon animal en excès. « Mais la propriété de la matière hépatique qui nous intéresse le plus est celle qui est relative à son changement en sucre. C'est là que les analogies physiologiques de cette substance avec l'amidon hydraté se montrent dans tout leur jour. On voit en effet que toutes les influences, sans en excepter une, qui transforment l'amidon végétal en dextrine et en glycose, peuvent également changer la matière glycogène du foie en sucre en passant par un intermédiaire analogue à celui de la dextrine. C'est ainsi que l'ébulli- tion prolongée avec les acides minéraux étendus d'eau, l'action de la diastase végétale et celle de tous les ferments animaux analogues, tel que le suc ou le tissu pancréatique, la salive, le sang, etc., transforment très facilement la matière glycogène en sucre. Au moment où cette transformation graduelle s'opère, la dissolution de la matière glyco- gène, d'opaline qu'elle était, devient peu à peu transparente, et perd en même temps la faculté d'être colorée par l'iode. « Mais bientôt après, et seulement quand le change- ment di'finitif en sucre a été effectué, la dissolution acquiert les propriétés de réduire pas avec la levure de bière. Cependant, abandonnée pendant longtemps à elle-même, cette substance m'a paru dans quelques cas pouvoir se changer partiellement en sucre; c'est sans doute quand elle reste mêlée encore à des matières étrangères. » 1. «Lorsqu'on broie le tissu du foie frais et qu'on coagule la pulpe hépatique par une quantité suffisante d'alcool ;'i 38 ou 40 degrés, on précipite la matière glycogène avec son ferjnent. Après avoir, par des lavages à l'alcool répétés, enlevé le sucre, et fait sécher la matière, qui se réduit à une sorte de poudre du tissu du foie, si on la replace dans l'eau froide on obtient une dissolution opaline qui contient la matière glycogène hépatique et son ferment. Ce qui le prouve, c'est que cette dissolution abandonnée à elle-même se charge de sucre très rapidement. Quand la transfor- mation en sucre est achevée, on peut précipiter par l'alcool le ferment qu'on sépare du sucre et qu'on obtient alors isolé. Mais, quand on ajoute de l'alcool à la dissolution avant que le sucre apparaisse, on précipite la matière glycogène avec son ferment. Quand on fait liouillir la matière ainsi obtenue avec de la potasse caustique, il y a un dégagement évident d'ammoniaque qui provient de la destruction de la matière azotée du ferment mélangé à la matière glycogène. » 032 GLYCOGÈNE. les sels de cuivre dissous dans la potasse, de fermenter sous Tinfluence de la levure de bière en donnant de l'alcool et de l'acide carbonique. J'ajouterai que l'action des fer- ments diastasiques opère cette transformation en sucre en quelques minutes, quand on a le soin de maintenir les liquides à une température voisine de celle du corps, entre 35 et4o degrés. La dissolution aqueuse de la matière glycogène hépatique ne se change pas spontanément en sucre; elle ne s'altère que très] difficilement quand elle est aban- donnée à elle-même, et résiste en partie à la putréfaction du tissu du foie cuit. « La torréfaction, l'action limitée des ferments et des acides minéraux changent la matière glycogène en un corps qui offre des caractères tout à fait semblables à ceux de la dextrine. « Cette substance est insoluble dans l'alcool concentré, se dissout dans l'eau en don- nant une dissolution transparente : elle ne se colore plus sensiblement par l'iode, ne réduit pas les sels de cuivre dissous dans la potasse, ne fermente pas avec la levure de bière et dévie à droite le plan de polarisation.» Ces citations prouvent que Claude Bernard avait oldenu une solution qui renferme, en même temps que le glycogène, de Valbumine et d'autres substances faisant partie de la composition chimique des organes, et que cette solution, chauffée avec une solution de potasse, donne le glycogène, par précipitation au moyen de l'alcool. Pour doser le glycogène, Claude Bernard a modifié un peu cette méthode, et il l'a communiquée à l'Académie, le 4 avril 1859. Elle est imprimée dans le Journal de Phy- siologie, II, 329. Voici les paroles textuelles de Claude Bernard : u La matière glycogène est en effet insoluble dans l'alcool potassé, tandis que la plu- part des matières albuminoïdes s'y dissolvent ou se désagrègent. Il en résulte qu'on peut, à l'aide de ce liquide, isoler la matière glycogène, et rendre ses caractères sensibles aux réactifs, quand il se trouve naturellement masqué par les matières étrangères. Voici comment je prépare la solution alcoolique de potasse : je mets dans un tlacon, qui bouche à l'émeri, de l'alcool à 38 ou 40 degrés, puis j'introduis dans ce flacon de la po- tasse caustique à la chaux, concassée en petits fragments. J'en ajoute suffisamment pour qu'il y en ait un excès, et que l'alcool soit saturé de potasse. Celte dissolution s'altère et se colore en brun plus tard, mais elle peut cependant être conservée pendant quelque temps dans un flacon bien bouché. Pour désagréger les divers tissus qui renferment de la matière glycogène, voici comment on agit : on place dans un tube fermé par un bout quelques fragments du tissu à examiner et on verse ensuite dans ce tube un très grand excès de dissolution potassique (15 à 20 fois le volume du tissu). Ensuite on bouche exactement le tube, on le laisse à la température ambiante en l'agitant de temps a autre. Au bout de 24 heures, ou plus ou moins, le tissu se trouve désagrégé et la matière gly- cogène tombe au fond du tube sous forme d'une matière grenue. A l'aide d'une pipette, on prend de ce dépôt, qu'on examine au miscrocope en ajoutant toutefois de l'acide acé- tique pour saturer l'excès de potasse. « On peut en séparer le dépôt, le faire dissoudre dans l'eau, et constater alors tous les caractères de la matière glycogène en dissolution. » Ces citations suffisent pour montrer que Claude Bernard a découvert que dans une solution alcaline Valcool précipite le glycogène, et que ce glycogène peut être purifié par une redissolution par tapotasse et une nouvelle précipitation par l'alcool. Remarquons en passant que Claude Bernard a aussi dosé le glycogène en analysant le sucre résultant de l'inversion de ce même glycogène. D'ailleurs, la preuve que le corps préparé par Claude Bernard était réellement du glycogène résulte de ce fait que la substance obtenue par lui ne contenait pas d'azote, et qu'avec les ferments et les acides elle donnait du sucre : par conséquent ce ne pou- vait être qu'un glycoside ou un mélange de diverses substances, parmi lesquelles se trou- vait le glycogène. L'analyse élémentaire n'a d'ailleurs pas été faite. Que Claude Bernard fût en droit d'appeler cette substance une génératrice du sucre, cela résulte clairement des recherches faites peu de temps après par le grand chimiste Auguste Kekule. Un an après la découverte du glycogène, il prépara le glycogène chimi- quement pur sans azote et sans cendres, et cela d'après les indications mêmes de Claude Bernard. [Pharmaceutisches Centralblatt, 1858, 300). Voici comment Kekule s'ex- prime : GLYCOCÈNE. 233 ((En faisant bouillii'Ie foie pendant une demi-heure avec une solution assez concentrée de potasse, on sépare complètement le glycogèue des substances azotées, si bien qu'on ne peut plus y déceler d'azote. Par conséquent la crainte de Lehmann que la coction du glycogène brut avec la potasse n'élimine pas complètement les substances albuminoïdes est injustifiée. » Le glycogène, préparé d'après la méthode de Claude Bernard, retient encore énergi- quementdes sels de chaux. Mais, dit Kekule, en le redissolvant à plusieurs reprises dans les acides, acide acétique fort ou acide azotique dilué, et en le précipitant ensuite par l'alcool, on peut diminuer beaucoup la teneur en cendres. Le collègue de Kekule, Moos {Avch. f. loiss. Heilkunde, iv, 73), affirme que Kekl'le a préparé 0,8 gr. de glycogène extrait du foie d'un lapin, et il ajoute que, dès que le corps préparé par Kekule sera débarrassé de ses cendres, il doit en faire la combustion. Le glycogène séché à 100° a donné pour 0,2262 de glycogène, 0,3090 de C0- + 0,1322 de H-0. «ALCULÉ. TROUVE. C6 44,44 44,49 Hio G, 17 6,49 0^' 49,:]9 Ainsi Claude Bernard a indubitablement donné le premier la méthode qui permet de préparer du glycogène chimiquement pur. Cependant on trouve souvent dans les écrits des physiologistes les noms de Maurice Sckiff et Victor Hensen comme ayant découvert le glycogène indépendamment de Claude Bernard, et en même temps que lui. ScHiFF,dans les Comptes rendus de l'Acad.des Sciences de Paris de 18o9 (xlviu, 880), déclare qu'il a publié la découverte du glycogène dans les ArcJùv fur physiologische Heilkunde du 18 mars 1837, c'est-à-dire avant Claude Bernard. 11 prétend avoir dit qu'il y a dans les cellules hépatiques une substance qui se colore en brun par l'iode, qui, traitée par les ferments, donne du sucre, et qui est solide avant l'action des ferments ; c'est pourquoi il l'appelle amidon animal. Claude Bernard a répondu que la communication de Schiff avait été antidatée. Le mémoire de Schiff se trouve dans le fascicule double n°^ 1 et 2 des Archic far physiologische Heilkunde de 1857. On peut s'assurer qu'il s'agit d'un fascicule double, en voyant sur la couverture jaune les mots Jahryang 1857. Erstes und Zwciles Heft : sur le verso de cette couverture jaune on voit cette note de la rédaction : « Le changement d'éditeur a retardé Vapparilion du premier fascicule : aussi est-il donne deux fascicules en même temps. » La couverture consiste en deux feuilles; l'une, antérieure, et l'autre, postérieure. Sur le verso de la feuille postérieure de cette couverture jaune se trouve la table des mémoires contenus dans le fascicule double : il y a en tout dix-neuf mémoires. Le mémoire XVI est de Schiff. Le mémoire XLX contient des lettres de la haute Egypte envoyées par le docteur Uhle, et la dernière communication de Uhle est datée du Caire, avril 1857. Par conséquent le fascicule où se trouve la communication de Schiff n'a certainement pas pu paraître en mars, mais tout au plus au milieu d'avril 1857. Or Claude Bernard a communiqué sa découverte à l'Académie des Sciences au 23 mars : donc la priorité de Claude Bernard est indiscutable. D'ailleurs Schiff a fourni lui-même d'autres preuves en faveur de cette priorité de Bernard, car il commence son mémoire, ce mémoire sur lequel d'après lui se fonde sa découverte, par ces paroles : « Dans le Cosmos de Moigno, je lis que Claude Bernard, à U7ie des dernières séances de l'Académie des Sciences — (on voit qu'il ne savait pas dans quelle séance Claude Bernard avait communiqué ses découvertes) — a fait une communication sur la préparation d'un corps qu'il a trouvé dans le foie, et qui forme du sucre. Je me suis occupé aussi de la question, et je présente un des résultats principaux de mes recherches entreprises avant le compte rendu donné par Moigno des séances de l'Académie; car elles concordent avec quelques-uns des résultats obtenus par le dis- tingué physiologiste français, de sorte qu'on ne pourra m'accuser de plagiat. » La séance de l'Académie, dans laquelle Claude Bernard a publié sa découverte, est du 23 mars 1857, et le compte rendu donné par le Cosmos est certainement postérieur au 23 mats. Or Schiff, après avoir lu, comme il l'avoue lui-même, le compte rendu du Cos- 23* CLYCOGÈNE. mos, a repris son mémoire et l'a daté : « Berne, 18 mars 1837. » Claude Bernard était donc en droit de formuler l'accusation suivante (C. R., xlvui, 883) : « La communication du 18 mars 1837 de M. Schiff aux Archives de Tubimien est sans doute anti-datée et postérieure à la mienne; ce qui explique comment cet auteur peut y rappeler mes expériences, qui n'ont été lues à l'Académie que le 23 mars 1857. )> Mais, même si réellement le fascicule des Archives de Tuhimjen avait paru avant le 23 mars 1837, Claude Bernard serait encore l'auteur de la découverte du glycogène; car il l'a préparé à l'état de pureté chimique, tandis que Schiff n'a fait que supposer l'exis- tence de ce corps d'après des réactions douteuses. En pareil cas, il me semble que les réclamations de priorité ne sont valables que si l'on peut donner la preuve de la date même à laquelle le mémoire imprimé a été publié ! Beaucoup d'auteurs ont l'habitude de corriger notablement les feuilles d'épreuves qui leur sont envoyées, et d'y mettre des développements qu'on ne trouve aucunement dans le manuscrit qu'ils ont d'abord envoyé à l'imprimerie. A côté de Schiff on trouve souvent dans la littérature allemande mentionné le nom de Victor Hensen, comme d'un auteur ayant découvert le glycogène, en même temps que Claude Bernard, et indépendamment de lui. Dans le Canstatt's Jahre^bericht ûber die Leistunyen in deu physioloQischenWissenschaf- ten pour 1835, le professeur Scherer rend compte avec détail des travaux de Claude Bernard sur le sucre du foie. Par conséquent, dans ce recueil, avant la découverte du gly- cogène, est mentionné ce fait fondamental découvert par Claude Bernard qu'un foie privé de sucre par le lavage peut produire du sucre quand il est abandonné à lui-même, et que cette formation de sucre n'a plus lieu quand le foie a été soumis à la coction; ce qui prouve qu'il y a dans le foie une substance précédant le sucre, que Bernard nomme une fécule animale, et qui, par fermentation, donne du sucre. Le professeur Scherer a été alors naturellement conduit, comme il le dit expressément dans son Jahresbericht pour 1836, à conseiller à Victor Hensen, étudiant en médecine, qui travaillait dans son laboratoire, de poursuivre les recherches de Bernard. Dans ce même recueil, en effet (p. 161), le professeur Scherer s'exprime ainsi : « Sur mes conseils, et dans mon laboratoire, Hensen a institué quelques recherches sur cette formation j^ost mortem du sucre dans le foie, et il a confirmé les données de Claude Bernard. Comme ces recher- ches le conduisirent à cette conclusion que daus le foie il existe une substance inso- luble dans l'eau qui par un ferment se change en sucre, Henseîs' a essayé d'agir avec d'autres ferments, comme ceux de la salive et du pancréas : tous deux ont produit au bout de douze heures une abondante formation de sucre. » Suit la description de diverses expériences de fermentation. Les recherches de Victor Hensen ont donc été instituées pour continuer et contrôler les importantes découvertes publiées par Claude Bernard en 1853. Ces contrôles et con- firmations ont paru en 1836. H est donc impossible d'admettre que les travaux de Victor Hensen ont été indépendants de ceux de Claude Bernard. De fait ils ont été provoqués par eux. En outre, quand la nouvelle grande découverte de Claude Bernard de 1837, sur la préparation du glycogène, fut publiée le 23 mars, R. Virchow en eut connaissance, et communiqua ce fait nouveau à Victor Hensen qui était alors à Berlin. V. Hensen se hâta alors de réiiuir les faits qu'il avait établis sur le glycogène dans une petite notice qu'il déclare lui-même avoir confiée à Virchow le 13 avril 1837 pour être publiée. Cette notice parut dans le fascicule d'avril du tome XI des Archives de Virchow. La cause pour laquelle on attribue généralement en Allemagne la découverte du glycogène à V. Hensen, c'est sans doute parce que le 11 décembre 1856, dans la réunion scientifique des étudiants et le i*"" avril (évidemment 1857), c'est-à-dire après la publication de Claude Bernard, il a montré ce corps aux élèves de l'Institut pathologique de Virchow, avec ses propriétés caractéristiques. « Les professeurs Dittrich et Gkrlach, d'ËrIangen, qui se trouvaient alors par hasard à l'Institut, ainsi que Fick, de Marburg, et Funke, de Leipzig, ont vu cette expé- rience et ont pu en contrôler l'exactitude. » Il n'a pas dit quelles étaient ses propriétés caractéristiques : il ne pouvait être question, en effet, que de la formation de sucre par l'action des ferments et des acides, tant que la preuve n'était pas donnée, que la substance en question n'était pas un mélange. GLYCOGENE. 235 Hensen purifiait l'extrait aqueux du foie en précipitant les albuminoïdes solubles par un excès d'acide acétique; mais cela ne prouve pas que par ce procédé on éliminait les impuretés. Voilà pourquoi sans doute Scherer, le maître de Hensen, et qui avait provoqué les travaux de ce dernier, dans le Canstatt's Jahresb. de 1857, s'étend avec beaucoup de détails sur la découverte du glycogène par Claude Bernard, tandis qu'il ne consacre pas un mot au travail d'IlE.xsEX, J'ai préparé le glycogène exactement d'après les procédés de Hensen; mais la solution de ce glycogène ainsi préparé précipite avec le réactif de BrCcke : c'est par conséquent un mélange, et la méthode d'HEXsEX ne le débarrasse pas de ses impuretés. D'autre part Kekule a pu se servir du glycogène préparé par la méthode de Claude Ber- nard pour en faire une analyse élémentaire, et par conséquent il est prouvé que le mode de préparation de Bernard est préférable au mode de préparation de Hensen. Nous arrivons donc à cette conclusion, que c'est vraiment Claude Bernard, et lui seul, qui a découvert le glycogène, et qui en a établi exactement les propriétés chimiques essen- tielles. § II. - ANALYSE QUALITATIVE ET QUANTITATIVE DU GLYCOGENE. Beaucoup de problèmes physiologiques se rapportent à la question de savoir si un organe contient du glycogène, et combien il en contient; par conséquent le jugement qu'on peut porter de ces recherches dépend de l'exactitude des méthodes qui ont servi à doser le glycogène. Il ne s'agit pas seulement de savoir les limites des causes d'er- reurs de la méthode, mais encore si l'on peut mesurer ces causes d'erreurs et déterminer l'étendue de leurs variations. On pense généralement que les données fournies par une mauvaise méthode ont encore quelque valeur lorsqu'on les compare entre elles; mais c'est \à une grave erreur dont, je le crains bien, on ne pourra guérir le monde médical. On suppose trop faci- lement que la différence des conditions expérimentales dans les expériences qu'on veut comparer n'exerce aucune intluence, médiate ou immédiate, sur l'étendue des causes d'erreur, et par conséquent ne les modifie pas. Mais, dans la plupart des cas, sinon dans tous, c'est là une supposition impossible à prouver. Chimie du glycogène. — Avant d'indiquer les méthodes analytiques de dosage, nous devons décrire brièvement les propriétés chimiques du glycogène. o 3 ORIGINE o ce du AUTEURS. << s GLVCOGEMC. 6 r-i Calcule. 44,44 6,17 1 44,49 6,49 Foie de lapin. Kekl-le. P/utrm. CenfralbUiff, 1838, 300. 2 KlinivSieck 'Goiifi- Bbsanez, Liebif/n Annaloi, 1861, 44,50 6,38 ? cxvni, 227). 3 IIaudex et AV. Yorxc, Trausact. of the chem. Soc, 1902, 44.41 6,24 Lapin. I.XXXI. 4 44,20 6,20 Id. Ibicl. 5 44,06 6,30 Huitre. lIAd. 6 44,30 6,2:j Id. lljld. 7 44,13 6,34 Levure. Ibid. 8 44,35 6.30 Id. Ibid. 9 44,34 6,66 Viande de cheval. Nerkixg, a. f/. ['., 1901, Lxxxv, 322. 10 44,33 6,47 Id. Ibid. IJ 44,34 » Id. Ibid. 12. 44,33 6,17 Foie de chien. M°"= Gatin GRUZE\V!iKA,.4. r/. p.. 1904, en. 13 4i,45 6,14 Id. TnoDE (Cité par M"'« Gatix Gruzew.ska), Ibid., 1904, cii. 14 44,33 6,21 Id. Ibid. 236 GLYCOGENE. Comme dans la litléralufe contemporaine on indique inexactement la composition chimique élémentaire du glycogène (Hammarsten, Lehrb. dcr phijslol. Chemie, 5" édit. 1904, 243), je donne ici toutes les analyses dont on a le droit d'admettre qu'elles ont été faites avec du glycogène chimiquement pur. Le glycogène est une poudre fine, blanche, amorphe, sans goût et sans odeur, d'une phosphorescence intense à — 180" (Dewar, Chemical News, lxx, 252). La chaleur de combustion du glycogène pour i gramme de substance est égale à 4190. 6 calories; sa chaleur de combustion moléculaire est donc de 678.9 calories, à pression constante (??) (AcH.MA^'N. Journ. f. pmlit. Chemie, n, 4, 587). Le glycogène dévie à droite le plan de polarisation. L'étude de son pouvoir rola- toire a été entreprise par beaucoup d'auteurs; mais les chitl'res trouvés ont été très différents, allant de 127, 27 (Luchslnger A. g. P., 1874, vni, 294) jusqu'à 226,7 (Bohm et Hoffmann {A. P. P., 1877, vu, 489), ce qui tient probablement à ce que le glycogène dont on se servait n'était pas une préparation pure. Ce qui le prouve, c'est que les chiffres trouvés dans les analyses donnent une valeur beaucoup trop petite pour le carbone ; d'autres savants ont donné des chiffres trop forts, ce qui est dû à un emploi inexact de l'appareil polarimétrique et à d'autres inexactitudes. ^I'"<^ Catin Gruzewksa, {A. il. P., cii) a préparé du glycogène absolument pur, et a examiné le pouvoir rola- toire de ce glycogène au moyen de l'appareil de Landolt : le dextrose donnant dans cet appareil, à une lempérature de 20", la déviation de 52°, 8, il a été trouvé pour le glycogène 196°, 57'. Huppert ((Z. p. C, 1893, xvni, 137) avait déjà d'ailleurs trouvé le même nombre, mais c'avait été, comme l'a montré M"^ Gatix-Gruzewska, en compen- sant les différents nombres inexacts de manière à en faire la moyenne, et l'on peut d'autant moins avoir confiance dans les chiffres de Huppert qu'il employait des solu- tions impures de glycogène, dont il appréciait la teneur par le dosage du sucre après interversion. Pour le dosage du glycogène, on se sert de la réaction de l'iode décou- verte par Claude Bernard. Mais il faut d'abord se souvenir qu'il s'agit là d'une série de couleurs très difierentes, dont le ton dépend de la concentration de la solution, ton commençant par une couleur jaune brun pour aller jusqu'au brun rouge, de manière à devenir ensuite d'un beau rouge foncé. En couche mince, cette solution concentrée tend vers le brun, surtout lorsqu'il s'agit du glycogène hépatique. La réaction est surtout sensible lorsqu'il n'y a ni acide libre, ni alcali, ni alcool. Si la solution d'iode, en l'absence de glycogène, donne une couleur brune à un liquide incolore, il faut toujours contrôler la réaction iodo- glycogénique, comme je l'ai montré précédemment {A. y. P., 1899, lxxv, 198). Il vaut beaucoup mieux, comme Ta trouvé yi^" Gatin-Gruzewsra dans mon laboratoire, prendre deux verres à expérience de même calibre, dont l'un est rempli d'eau, et dont l'autre est rempli du même volume de la solution glycogénique. Alors, dans chaque verre, on laisse tomber par la burette le même volume de la solution très concentrée de l'iode d'environ 3 pour 100. Or, si l'on chauffe simultanément et également les deux verres, on observe ce fait important que les grandes différences que l'on avait vues d'abord entre les ditférentes colorations de l'un et l'autre vase finissent par disparaître complètement quand on fait bouillir la solution iodo-glycogénique: il se produit donc finalement la même couleur, comme s'il n'y avait pas eu de glycogène. Par conséquent cette couleur est due à la mise en liberté de l'iode. Ce qui prouve que la combinaison de l'iode avec le glycogène se détruit complètement quand on la chauffe, c'est qu'elle reparait quand la liqueur se refroidit. Il s'agit donc d'une reconstitution chimique. La réaction de l'iodo-glycogène doit par conséquent être considérée comme une combinaison lâche et dissociable. Cela explique ce fait qu'une solution chauffée de glycogène reste plus fortement colorée, s'il y a un certain excès d'iode, ce qui prouve d'ailleurs qu'à 100° la recombi- naison de l'iode avec le glycogène n'est pas complètement entravée. Le chiffre élevé des molécules d'iode rend possible, malgré la rapidité du processus de dissociation due à l'élévation thermique, qu'un certain nombre de molécules de glycogène se combinent encore à l'iode. Les faits ont été observés avec du glycogène chimiquement pur, extrait de la viande de cheval ou du foie des chiens et des lapins. GLYCOGÈNE. 237 Si maintenant nous étudions la réaction de l'iode sui' des extraits d'organes à réac- tions neutres, nous voyons suivant les conditions apparaître de remarquables diffé- rences. Je décrirai d'abord une série de faits inattendus, et de manière à en rendre la com- préhension facile aux lecteurs. J'ai observé qu'une goutte de la solution iodée, versée dans un extrait hépatique, amène une forte couleur brune qui, si l'on abandonne la solu- tion à elle-même à froid, disparaît complètement en quelques heures, ce qu'on n'observe jamais avec du glycogène pur. Si cette solution se décolore par la chaleur, alors elle reparait d'elle-même quand la liqueur se refroidit. La rapidité avec laquelle la couleur de la solution de glycogène hépatique dispa- raît quand on la laisse au froid, est très différente : parfois la coloration bruna reparaît lorsqu'on ajoute quelques gouttes de la solution d'iode, pour disparaître de nouveau quand on agite le liquide. Il arrive aussi que, malgré la présence du glycogène, une goutte de la solution d'iode n'amène aucun changement de couleur dans la solution. Ces faits prouvent que, dans les extraits ainsi étudiés, il y a une substance qui forme avec l'iode une combinaison chimique stable. Il n'est donc pas surprenant que la réaction de l'iode avec le glycogène disparaisse très rapidement, quand on chauffe jusqu'à ce que la liqueur se décolore; et on com- prend bien qu'alors le refroidissement ne fasse pas revenir la coloration que la cha- leur avait fait disparaître. Mais, si l'on verse une seconde goutte de la solution concen- trée d'iode, alors la couleur rouge foncée disparaît de nouveau quand on chauffe, mais ne reparaît plus par le refroidissement. Comme cette expérience peut se répéter sis ou dix fois, et même davantage, cela prouve que le corps qui fixe de l'iode d'une manière stable, en fixe des quantités notables avant d'être saturé. A mesure que cette combi- naison iodée est plus saturée, la combinaison se fait de plus en plus lentement, et il faut attendre toujours plus longtemps avant d'arriver à la décoloration complète. Il y a donc quelques difficultés à déterminer exactement le point de saturation. Mais si enfin on a pu arriver à saturer complètement d'iode ce corps qui en est avide, on finit par obtenir une solulion hépatique, qui se comporte vis-à-vis de l'iode, tout à fait comme les solutions de glycogène pur. Une goutte de la solution d'iode donne la même coloration que la solution de con- trôle quand on la chauffe; c'est-à-dire qu'en chauffant cette solution glycogénique, la décoloration n'est plus complète, et que, par le refroidissement, la forte coloration rouge du début reparaît. Il paraît au premier abord surpi'enant que cette combinaison dissociable d'iode avec le glycogène puisse se produii'e en présence d'une substance qui fixe fortement l'iode. Si la masse de la substance qui fixe l'iode est considérable, on voit tout de suite apparaître la décoloration de l'iode qu'on a ajouté; mais, si le glycogène se trouve en relativement grande proportion, alors la coloration de l'iode se manifeste, de même qu'une goutte de solution de nitrate d'argent rougit le mélange d'une solution de chro- mai e et de chlorure, quoique la décoloration finalement se produise, parce que les affinités fortes du chlore pour l'argent se satisfont aux dépens des affinités plus faibles du chromate pour ce métal. Peut-être aussi faut-il faire intervenir, pour expliquer ce trouble ap|)orLé à la réaction de l'iode avec le glycogène, des combinaisons chimiques avec l'iode plus complexes, de sorte qu'il se produit alors des réactions secondaires. On peut maintenant se proposer de séparer le glycojiène de cette substance qui se combine à l'iode. On prend 100 ce. d'une solution glycogéni(iue additionnée de 3 p. 100 de KOH. et de 10 p. 100 de IK. On ajoute 50 ce. d'alcool à OG'^; on filtre sur papier suédois; on lave le précipité avec un mélange d'une solution contenant un volume d'une solution aqueuse de 3 p. 100 de KOH. et de 10 p. 100 de IK avec un demi-volume d'alcool à 90, puis on lave plusieurs fois avec l'ah^ool à 90, puis enfin avec l'alcool à 99,8. Après dépai't de l'alcool, on dissout le précipité dans l'eau, on chasse l'alcool au bain, marie et, par l'acide acétique, on neutralise la solution refroidie. Alors le corps qui se combine à l'iode a complèlemont disparu; et la solution iodo-glycogénique ne peut plus se décolorer complètement, même par une longue et 238 GLYCOGENE. répétée ébullition; autrement dit, la réaction iodo-glycogénique se comporte comme toute solution glycogénique pure. On peut aussi employer le procédé de purification de Brlgke-KClz : on traite la solution de glycogène par l'acide chlorhydrique et Tiodo-mercurate de potassium, on filtre sur le filtre suédois, et, par les méthodes ordinaires, on extrait le glycogène du précipité. Je ne dois pas oublier de faire remarquer que, pour purifier ce glycogène par l'emploi de ces deux méthodes, il ne faut jamais manquer de laver avec de l'alcool à 66°, pour se débarrasser de l'iodure de potassium, de fiodo-mercurate de potassium et de l'acide chlorhydrique. Quant à la décoloration que produit dans les solutions de glycogène le corps qui se combine -à l'iode, remarquons encore qu'elle est d'autant moins complète dans le sens rigoureux du mot, que l'on a employé de plus grandes quantités d'iode, de manière à approcher du point de saturation. Par des ébullitions répétées la solution prend de légères teintes virant au rouge, devant un fond de coloration blanche, ressemblant à une faible coloration iodo-glycogénique. Mais il ne s'agit pas ici de cette réaction du glyco- gène; car, quand la solution a été refroidie, il n'y a plus aucun retour de la coloration rouge, et une nouvelle chauffe ne la décolore pas. L'addition d'une trace d'iode fait reparaître immédiatement la coloration rouge foncé, laquelle ne disparait pas de nouveau complètement par l'ébullition, mais redonne la même teinte jaune rouge. Par refroidissement, la teinte rouge foncé reparaît de nouveau. Par conséquent le corps qui se combine à l'iode a, lui aussi, une couleur rouge; ce qui fait qu'on peut croire à tort qu'il y a du glycogène dans des extraits d'organes qui n'en contiennent pas, ou qui n'en contiennent que des traces. Il faut que des expériences de contrôle éta- blissent que la couleur rouge, tout en diminuant par l'ébullition, reparaît par le refroi- dissement. Il est donc à désirer que le glycogène soit toujours purifié par la méthode de l'iodure de potassium et de la potasse, ou qu'on sature d'iode ce corps qui peut le fixer avant de faire la réaction définitive de l'iode avec le glycogène. D'après Claude Bernard {Leçons sur le diabète, 1877, 553), les muscles qui sont restés longtemps inactifs contiennent un glycogène qui se colore en bleu comme l'amidon, avec l'iode. AxENFELD [Cheiiiisches Centvalblatt, 1886,383) a décrit une autre réaction colorée du glycogène. Quelques gouttes d'une solution concentrée d'acide formique avec quelques gouttes d'une solution de chlorure d'or à 0,001 p. 100 produisent dans les solutions de glycogène une teinte dichroïque rouge avec des reflets bleus. Quant à la solubilité du glycogène, on admet en général qu'il se dissout dans l'eau, qu'il rend opalescente. Cependant M™'- GATlN-GRuzE^YSliA {A. g. P., en, 1904) a remarqué qu'en laissant reposer des solutions assez concentrées de glycogène, il se fait peu à peu un dépôt qui, lorsqu'on agite la liqueur, donne des couches qui paraissent être plus réfringentes. Elle a cherché à déterminer plus exactement ce degré de solubi- lité en mettant dans des tubes fermés qu'on laisse reposer des solutions glycogéniques de concentration différente, variant de 0.480 à 7.724 p. 100. Or, même pour les solutions diluées, les couches supérieures étaient toujours moins concentrées que les couches infé- rieures. Le tableau p. 239 indique le phénomène d'une manière plus précise. Ces changements de concentration donnent l'impression de ce fait, déjà soupçonné, que le glycogène n'est pas en réalité dissous dans les solutions aqueuses. Une découverte d'un étonnant intérêt, c'est celle qu'a faite Baehlmann (Zeitschrift fur artzliche Fortbildung 1904, n° 5) qui a pu voir dans une solution de glycogène les particules microscopiques de ce corps; et, si l'on n'avait pu les observer jusqu'à présent, cela ne tient pas à ce qu'on n'avait pas encore atteint des grossissements assez grands. De même que dans l'air les poussières n'apparaissent que lorsqu'elles sont éclairées par la lumière du soleil dans une chambre obscure, de même on ne peut voir les particules de glycogène dans une solution qu'en les éclairant par une lumière, dont la direction est perpendiculaire à l'axe optique du microscope : alors on voit des granulations de même dimension, qui n'ont pas plus de 0,000005 de diamètre, et qui disparaissent graduellement lorsqu'on ajoute de la diastase à leur solution. Ces faits merveilleux parlent donc en faveur de l'hy- pothèse que le glycogène n'est pas dissous dans l'eau. Il convient cependant de faire quelques réserves, car il s'agit là d'un corps ayant un poids moléculaire extrêmement GLYCOGÊNE. 239 Olevé; de sorte que les parties visibles représentent peut-être la véritable molécule. Eu effet, M™'= Gatin-Gi.\zewsk.\. ', dans le laboratoire du professeur Ner.nst à Gottingen, a constaté que le poids moléculaire du glycogène ne peut pas être fixé. Si le glycogène est un peu soluble dans l'eau, le poids moléculaire serait plus grand que 140000. Donc les chiffres de Sabanegew, correspondant à (CeHioOsjio, sont faux. {Journal (1er russichen Ge^ellschaft, 1889, et Deutsche Chem. Gesclls., xxiii, 87, Ref.'^. 11 était donc important d'étu- dier la diffusibilité des solutions aqueuses de glycogène. w ( OUCHES OOUCHK ^ m su l'ERIEDRES. CJ INFKRIEURK s. z s -a (X y, a Solution de glycogène on gr. Poids sec en gr. 6 •y o tjj o o 1-^ y. . a =■ Jh - 22 s !f O Poids sec en gr. S i i s ^ y, c Glycogène dessé- 1 5,1523 0,398 7,724 0,406 5,1595 0,il95 8,130 100: 105 ché dans le vide . 2 5, ni 0,3075 5,942 0,545 27 5,1865 0,3365 0,487 100; 109 Glycogène chaiiflé plusieurs fois à 100° et desséché. 1 3 ' 4 5,03.37 5.005 0,1165 0,020 2,314 0,519 0,017 0,001 28 48 5,0185 4,899 0,117 0,0255 2,331 0,520 100:100,7 100:100,19 0 5,0125 0,0455 0,907 0,384 48 5,032 0,065 1,291 100:142 Glycogène dessé- \ ^ 5.047 0,095 1,882 0,033 24 5,0117 0,096 1,915 100:101,7 ché dans le vide ) 7 5,033 0,095 1,887 0,040 96 4,9035 0.095 1,937 100:102 sur le chlorure 1 8 4,982 0,0915 1,830 0,108 120 5,0655 0,0975 1,944 100:105 de calcium. . . ' 9 4,998 0,024 0,480 0,032 24 4,9785 0,0255 0,512 100: 100, G 10 4,975 0,024 0,482 0,026 120 5,0165 0,0255 0,508 100:105,3 M"** Gatin-Gruzewska [A. g. P., 190i, en) a fait sur ce point des expériences très soigneuses. «Si, dit-elle, on place le glycogène dans des dialyseurs, ou peut se convaincre qu'au bout de quelques jours le glycogène a diffusé dans l'eau. Douze dialyseurs, dont l'imper- méabilité avait été contrôlée, et à la périphérie desquels on avait pris soin de mettre de la paraffine, furent remplis jusqu'à la moitié de leur contenance par des solutions glyco- géniques de concentration différente. Ces vases furent ensuite placés sur des verres qui contenaient de l'eau arrivant au même niveau. Dans chaque solution glycogénique fut placé un petit cristal de thymol; au bout de 4 à 5 jours l'eau de chaque verre, ramenée par évaporation à 2 ou 3 ce, fut place'e dans un verre à expérience, et dans un autre verre on mit exactement autant d'eau. «Je traitai les deux verres par une solution concentrée d'iode versée goutte à goutte. La réaction iodée était faible, mais toujours visible. Alors on remplit le verre avec de l'alcool, et on vit se former le lendemain un fin précipité de glycogène. « Ces 12 expériences, comme une autre dans laquelle de grandes quantités de glyco- gène furent placées dans une membrane de parchemin, ne donnèrent jamais que des traces de glycogène, lesquelles avaient dû passer par le parchemin. On peut expliquer ces deux résultats de deux manières ; ou bien le glycogène n'est que partiellement soluble dans l'eau, et alors il ne diffuse qu'en minuscule quantité; ou bien il existe dans le parchemin des pores plus grands qui peuvent se laisser traverser par des particules de glycogène que l'eau a rendues molles. » Il était aussi très important de voir comment se comportent les soi-disant dissolu- tions aqueuses de glycogène en présence de l'alcool que l'on emploie si souvent pour la précipitation de ce corps. M'"<= Gati.n-Gruzewska a fait cette recherche avec des solu- tions de glycogène absolument pures, et elle conclut ainsi : « Si, à une solution glycogénique de concentration quelconque, on ajoute de l'alcool jusqu'à ce que le premier louche apparaisse, puis que l'on ajoute quelques gouttes 1. M"== Gatin-Gruzewska (.1. fj. P., cm, 282. 1904}. 240 CLYCOGENE. d'eau jusqu'à faire disparaître ce louche, et qu'enfin on ajoute encore un léger excès d'eau, alors cette solution peut rester pendant plusieurs jours au laboratoire sans se troubler. Mais, si l'on place cette solution à 0°, on voit alors au bout de peu de temps apparaître un trouble laiteux, et il se forme un précipité qui peu à peu se dépose. Replacée à la température de la chambre, la solution redevient bientôt limpide, et le précipité se redissout. Si l'on place une solution quelconque de glycogène dans un verre à expérience et qu'on y verse goutte à goutte de l'alcool à 96, il arrive un moment où la solution présente un trouble laiteux, et on voit le glycogène se précipiter distinctement sous la forme de flocons. En faisant passer la solution sur la flamme d'un bec Bunsen, ou même seulement en la tenant dans la main, on voit le précipité et le trouble dispa- raître, de sorte que la solution devient limpide. En versant de l'eau froide, on voit se reformer momentanément le précipité blanc. Le phénomène est très caractéristique quand la solution est très concentrée. Alors il se forme un précipité épais de glyco- gène qui disparaît momentanément à la flamme de la lampe ou au bain-marie. » « J'ai aussi cherché à déterminer le rapport entre la concentration de la solution de glycogène et la quantité d'alcool nécessaire pour le précipiter complètement. Comme critérium pour la précipitation totale du glycogène, j'ai pris le temps nécessaire pour que tout le précipité se forme, et qu'il disparaisse momentanément par la chaleur. « Je donnerai quelques chiffres qui permettront mieux de juger du phénomène. <• Mes expériences ont été faites avec du glycogène tout à fait pur et à une tempéra- ture de 20°. Naturellement, avec du glycogène impur et pour d'autres températures, d'autres proportions d'alcool sont nécessaires. « Les solutions de glycogène étaient mesurées dans une petite éprouvelte graduée, et on y ajoutait goutte à goutte de l'alcool à 96 qu'on versait par une burette. .3 ce. de chaque solution furent employés. (' Solution à 2i, 8 p. 100, exigeant 1,7"°^ d'alcool à 96». « Solution à 12, 4 p. 100, exigeant 2,2 d'alcool à 96". (. Solution à 6, 2 p, 100, exigeant 2,7 d'alcool à 96°. « Solution à 1 p. 100, exigeant environ 3,3 d'alcool à 96°. « On voit maintenant que, pour précipiter le glycogène par l'alcool, la quantité d'al- cool nécessaire ne dépend pas seulement de la pureté de la préparation, mais encore de la concentration et de la température. » EDOUARD KiiLzavait déjà trouvé {BcrI. Chem. Ge>i., 1882, xv, 1300, et Z. B. 1886, xxii, 161) que la précipitation du glycogène par l'alcool en solution aqueuse est influencée d'une manière très efficace et remarquable par les sels. Plus la solution de glycogène est pure, plus il faut employer d'alcool poui; le précipiter. KiJLz dit que des solutions de glycogène chimiquement pur ne sont pas précipitées même par 4 ou 5 volumes d'alcool absolu. Il suffisait d'ajouter quelques milligrammes de chlorure de sodium pour rendre la précipitation possible. Les solutions aqueuses de glycogène sont précipitées par un grand excès d'acides acétique, propionique, butyrique, de tanin, d'acide pliosphomolybdique, de plombate et de zingate de soude, de sulfate de magnésium et d'ammonium (Nasse, A. g. P., XXXVII, 582, et lx, 10:i). L'acétate de plomb ammoniacal donne, d'après Bizio, un sel de plomb {Bull, de la Soc. chlm., (2), viii, 442) ; des solutions saturées de baryte donnent des précipités répondant à des combinaisons de baryum ou de calcium avec le glycogène (Nasse, A. g. P., xxxvii, o82). Le perchlorure de fer concentré donne, d'après Nasse, par addition d'un alcali, une combinaison d'oxyde de fer avec le glycogène. Schutzenberger {Liebig's Annalen der Chemie, clx, 80) a préparé un triacélate. Panormoff {Chcmischcs Centralblatt, 1891, ir, 854), un dibenzoate, comme Wedensri, un benzoate (D. Chem. Gcs., 1880, xiii, 122). Il y a aussi des combinaisons nitreuses (Lustgarten, Monatsh. fiir Chemie, ii, 626) et des combinaisons sulfoniques cristallisées (Anderlini, Chemisches Centralblatt, 1888, 451). D'après Pelouze [C. H., xliv, 1321), l'acide azotique dilué oxyde le glycogène en acide oxalique, et d'après Ciiittenden {Liebig'!< Annalen, clxxxii, 206), le brome oxyde le glycogène en acide gluconique. Le glycogène ne réduit pas la liqueur de Fehling; il ne donne pas d'osazone, ne fermente pas par la levure, et l'invertine de la levure est sans action sur lui. GLYCOGÈNE. 241 Les solutions aqueuses du glycogène ordinaire, quand il n'est pas tout à fait pur, préci- pitent par l'alcool en masses et flocons amorphes; mais, quand on a du glycogène d'une pureté chimique absolue, alors, comme l'a montré ^M'"^ GATi.x-fiutizEwsKA, la précipita- tion de ces solutions par l'alcool a des caractères tout à fait particuliers. On voit se former des baguettes et petits corpuscules sphériques avec une surface à contours brillants. M™« (iAti.n-Gruzewska rappelle à ce propos que BCtsciili {Untersuchuw/cn iiber Stnickturen, 1S97) avait déjà observé cette forme caractéristique des précipités qu'on produit dans des solutions très diluées de certaines substances colloïdales. Il s'agit, dans les expériences de Butschli, de gouttelettes qui se réunissent de manière à former une sorte de réseau filamenteux. Parmi les formes de précipités qu'a obtenues M"^*^ Gatin-Gruzewska, il se trouve aussi des prismes qui ont tout à fait l'apparence de cristaux, comme J'ai pu m'en assurer moi-même; mais jusqu'à présent il n'a pas été possible de préparer ces cristaux eu assez grande quantité pour les analyser, de sorte qu'on ne peut encore se prononcer sur leur véritable nature. Le glycogène peut être soumis à la coction avec de la potasse à 30 p. 100 sans se détruire (Pfluger, A. g. P., 1902, xcii, 81) et il est remarquable de voirie glycogène attaqué par une solution diluée de potasse (Pi-lùger, A. g. P., xciii, 77, 1902). Le glyco- gène est très sensible à l'action des acides : l'acide chlorbydrique le transforme en glycose, les conditions les plus favorables sont l'ébullition avec l'acide chlorbydrique à 2 p. 100 pendant trois heures; on n'obtient alors que 97 p. 100 de la quantité théorique de sucre; il faut donc nuiltiplier le chiffre de sucre obtenu par 0,027 pour obtenir le chiffre exact du glycogène (Nerking, A. g. P., 1901, lxxxv, .'529). Si l'on a traité quelque temps le glycogène par des acides minéraux dilués, on lui a fait perdre la propriété de se colorer par l'iode (achrooglycogène) et en même temps la solubilité dans l'alcool a notablement augmenté (CHRisxiiNE Tebb, J. P., 1897-1898, xxu, 423). Ainsi, d'après Christine Tebb, le glycogène est précipité totalement par de l'eau con- tenant ijîi p. 100 d'alcool, tandis qu'il faut 90 p. 100 d'alcool pour précipiter complète- ment l'achrooglycogène;ces substances dérivant de l'action des acides dilués sur le gly- cogène précipitent par l'alcool et répondent toujours assez bien 'à la formule C^H'^Ou-. Ce sont des dextrines dérivées du glycogène. Par l'action plus prolongée des acides dilués, on obtient des corps qui ne pi^écipitent plus par l'alcool : maltose et isomaltose, et, aux dépens de ceux-ci, dextrose. On admet que toutes ces transformations sont des phénomènes d'hydrolyse. Par l'action du fer- ment hépatique ou du ferment du sang le glycogène est pareillement hydrolyse jusqu'à son produit final, qui est la dextrose. La diastase du malt, ainsi que le ferment diasla- sique de la salive ou du suc pancréatique, ne vont que jusqu'à la maltose ou à l'iso- maltose, et il ne se produit que peu de dextrose (Claude Ber.nard, C. /?., 1877, lxxxv, 519); — MuscuLUs et V. Mering (Z. p. C, 1870, ii, 403); — E. Kulz [A. g. P., 1881, xxiv, 57); — BiAL {ibid., 1892, lu, 137); — SeegExX {ibid., 1879, xix, 106); — R. A. Young (J. P., XXI et XXII, 1899-1898, 401); — Chr. Tebb (ibid., 1897-1898, xxii, 423). Le passage du glycogène en dextrine se produit déjà par l'action d'acides très dilués, comme l'acide lactique à 1 p. 100, à l'ébullition et même quand on soumet à l'ébullition avec l'eau simple une solution de glycogène pendant plusieurs semaines (Nerking, A. g. P., 1901, Lxxxvin, 1), ce dont on peut se rendre compte en observant que, malgré la présence de chlorure de sodium, le glycogène est devenu plus soluble dans l'alcool. Mais dans ces conditions la proportion de sucre qu'on obtient par l'inversion ne s'est pas modifiée. Le glycogène est, comme l'amidon, changé en dextrine par l'acide citrique ; mais non inverti, quoique l'acide citrique intervertisse le sucre de canne (Pavv, Physio- loyy ofthe carbohyd rates, 1894, 93; — Nerking, A. g. P., 1901, lxxxv, 327). Ces dextrines-glycogènes sont devenues attaquables par la potasse et transformables par elle, comme Pavy l'a reconnu le premier IPhysiol. of the carbohydrates, 1894, ÎJl ; — Pfluger, a. g. P., 1902, xciii, 77; — Vintschgau et Uietl, ibid., 1870, xiii, 253, et 1878, xvii, 154);— Rien. Kulz (Z. B., 1886, xxii, 161). Le glycogène préparé par la méthode de Bkucke-Kulz se détruit par la potasse, parce que c'est manifestement une dextrine ou parce (ju'il contient de la dextrine. Les dextrines voisines du sucre réduisent la liqueur de Feiillng. Les recherches de DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 16 242 GLYCOGÈNE. MusGULUS et Merlxg (Z. p. C, 1878-1879, ii, 403) établissent avec certitude que l'amidon et le glycogène, après action des ferments digestifs, donnent des dextrines dont les solu- tions ne fermentent pas par la levure, mais réduisent énergiquement la liqueur de Feii- lixg; on peut dire en général « que la dextrine réduit d'autant plus fortement la liqueur de Fehling, que la transformation de l'amidon par le ferment a été poussée plus loin ». MuscuLus et Merixg, Scheuîler et MrnELMEiER [Berichte (1er D. chem. Ges., 1890, xxiii, 3068) ont montré que les dextrines réductrices peuvent donner des combinaisons avec la phénylhydrazine, lesquelles précipitent par l'alcool et donnent par la chaleur des osazones. Préparation du glycogène. — Comme Aigiste Kekule n'a pas indiqué exactement les procédés de purilicalion, pour la préparation qui lui a servi dans son analyse élémen- taire, nous devons nous en tenir aux procédés indiqués par Nerking, encore qu'ils eus- sent pu, je suppose, être moins compliqués. Nerking a donné par ses analyses élémentaires la preuve de la pureté du glycogène qu'il a obtenu (A. g. P., 1901, lxxxv, 321). La pulpe de viande de cheval est bouillie pendant six heures avec de l'eau. Le liquide est filtré, concentré, refroidi, filtré de nouveau, additionné de 3 p. 100 de KOH et de iO p. 100 de Kl, et précipité par la moitié de son volume d'alcool; après deux heures le glycogène précipité est filtré avec une solution qui contient 3 p. 100 de KOH; 10 p. 100 de KL et la moitié de son volume d'alcool à 96, puis le précipité est lavé par de l'eau contenant 66 p. 100 d'alcool contenant une petite quantité de chlorure de sodium. Ensuite on dissout le glycogène dans une solution 3 p. 100 de KOH et 10 p. 100 de KL et on précipite par la moitié de son volume d'alcool. Cette opération est répétée quatre fois. La cinquième fois !e glycogène est simplement précipité de sa solution aqueuse par l'alcool. Le précipité est de nouveau filtré, puis lavé, d'abord par une solution alcaline et alcoolique d'iodure de potassium, puis par l'eau mélangée à 66 p. 100 d'alcool conte- nant du chlorure de sodium, puis à diverses reprises avec l'alcool absolu, puis à diverses reprises encore avec de l'éther bien purifié. Pour se débarrasser des substances minérales qui lui sont encore adhérentes, on redissout le glycogène dans l'eau; on ajoute de l'acide acétique et on précipite par l'alcool ; solution et pi'écipitation qu'on répète plu- sieurs fois. Le glycogène qu'on obtient alors ne contient plus de cendres; cependant il y a encore une trace d'azote. Le produit de Nerking contenait encore 0,026 p. 100 d'azote; mais Nerking ne pou- vait guère obtenir de produit plus pur. Les chifTres de combustion concordent avec ceux qu'a donnés Auguste Kekule et répondent à la formule (C^HioO:;)??. M™*" Gatix-Gruzewska a perfectionné encore les méthodes, et elle a pu obtenir un glycogène absolument pur. Le procédé est laborieux et coûteux; mais nous n'en con- naissons actuellement pas de meilleur. Il faut d'abord remarquer que, d'après B. SchoiNDORfI' {A. y. P., xcix, 201, 1903), on peut engraisser les chiens de manière que leur foie contienne (en matières solides) 66 p. 100 de glycogène. On fait donc la première extraction dans des tissus qui contien- nent relativement peu de substances autres que le glycogène. Cet enrichissement de l'animal en glycogène s'obtient en donnant à des chiens (à jeun depuis huit jours) d'abord, pendant trois jours, une alimentation quotidienne de 200 grammes de viande, 100 grammes de riz, et 100 grammes de pommes de terre; puis, pendant quatre jours, on ajoute à cette ration ibO à 200 grammes de sucre de canne, et le soir du jour où on doit le sacrifier, on lui donne encore cette même abondante alimentation. Pour extraire le glycogène du foie de ces chiens ainsi alimentés, on broie le tissu hépatique, et on traite 100 grammes de cette bouillie demi-liquide dans des ballons contenant 200 centimètres cubes d'eau; on chauffe pendant cinq à six heures au bain- marie; puis on filtre le liquide refroidi, d'abord sur du coton de verre, puis sur papier. Le liquide transparent est alors traité suivant la méthode de PiLitiER-NERKiNO {A. g. /'., Lxxvi, 531, 1899) par une solution contenant pour 800 c. c. du liquide : 80 graniines de Ivl iO ce. de KOH à 60 \). 100 400 ce. d'alcool à' 9(1 — GLYCOGÈNE. 243 Après que le glycogène s'est précipité, on décante le liquide limpide, et ou lilUe sur un filtre suédois qu'on lave soigneusement deux fois avec la solution suivante : Eau 1000 ce. Kl 100 gi\ KOH à 60 p. 100. 30 ce. Alcool à 96 — 500 ce. On lave ensuite deux fois le glycogène avec de l'alcool à 66 p. 100, puis avec de l'alcool à 96 p. 100. Alors on reprend le glycogène resté sur le filtre qu'on traite par l'eau bouillante, pour le dissoudre; puis on le précipite de nouveau par la même solution que plus haut. Pour le débarrasser de l'iodure de potassium et de la potasse, on le redissout de nouveau dans l'eau, on précipite par un volume d'alcool à 96 p. 100; puis on lave par l'alcool à 66 p. 100 et à 96 p. 100. Lorsque le glycogène est dans cet état, il ne se trouble plus par l'addition d'iodo- mercurate de potassium et d'acide chlorhydrique. Mais, comme Nerklng (.1. g. P., Lxxxv, 1901, 320), en employant ce procédé de purification, a encore trouvé 0.026 p. 100 d'azote, on traite le glycogène obtenu par de la potasse, suivant le procédé de Claude Bernard. En effet, dans ces conditions, comme l'a montré Aug. Kekule, on élimine toute substance azotée. Pour cette opération on traite le glycogène par de petites quantités de potasse à 30 p. 100 (la meilleure marque étant de Merck 1''') pendant une heure dans un ballon au bain-marie à l'ébullition. Après refroidissement, la liqueur est traitée par son volume d'eau, de sorte que le litre en potasse devient de lii p. 100, et on précipite par son volume d'alcool à 96 p. 100. Après fillration sur un filtre bien lavé, le précipité est lavé par un mélange à parties égales d'alcool à 96 p. 100, et d'une solution de potasse à 1.") p. 100. On lave deux fois par l'alcool à 66, puis à 96'', et linaleaient par l'alcool absolu et l'éther. On procède alors à une série de cinq ou six précipitations par de l'alcool (deux volumes au plus pour un volume de la solution), afin de se débarrasser de toute trace de potasse. Par quelques gouttes de phénolphtaléine, ou mieux de rosaniline, on s'assure qu'il ne reste plus de potasse dans l'alcool de lavage. Pour enlever les substances minérales adhérentes au glycogène, on traite la solu- tion aqueuse par une petite quantité d'acide acétique; et ensuite on précipite par un volume d'alcool à 96 p. 100 : on décante, on filtre, et on lave le précipité par l'alcool, ainsi qu'il a été dit plus haut. On fait trois fois ce traitement par l'acide acétique. Pour enlever l'acide acétique, on précipite encore deux ou trois fois par l'alcool, et la der- nière fois par de l'alcool absolu, ne contenant pas trace d'acide. Comme le glycogène, à mesure qu'il est plus pur, est précipité de plus en plus difficilement par l'alcool, les solutions aqueuses diluées ne conviennent plus. Naturellement on ne peut employer les solutions de chlorure de sodium. Alors on ajoute un peu d'éther à l'alcool. Après ces seize à dix-huit précipitations, le glycogène, sous forme d'une préparation blanche comme neige, est mis pendant deux jours en contact avec de l'alcool absolu. On verse alors le tout sur un filtre placé sur un entonnoir à robinet, et après deux heures on laisse l'alcool s'écouler. On fait un nouveau lavage pendant trois jours avec de l'éther, de la même manière, jusqu'à ce que le glycogène se précipite sur le filtre en forme de llocons. Puis on le place dans la cloche à vide, en présence de chlorure de calcium ou d'anhydride phosphorique. Le glycogène ainsi préparé peut, d'après M""^ Gati.\-Gruze\vska, se conserver pendant plusieurs mois. Si on le soumet à la température de 100», il arrive, au bout de deux jours au plus, à atteindre un poids constant. On peut ainsi le laisser pendant des semaines à 100° dans le vide, sans qu'il perde sa couleur blanche; toutefois la réaction colorée par l'iode devient plus faible, et les solutions aqueuses ont une moindre opalescence. Il est remarquable, ainsi que l'a noté M™* Gati.n-Gruzewska, qu'on ne peut dessécher le glycogène, sous la cloche à vide, en présence d'acide sulfurique; car il se réduit vite en poussière, et de petites particules tombent sur l'acide sulfurique, de quoi il résulte de l'acide sulfureux. Ce gaz, arrivant au contact du glycogène, détermine des altéra- tions, et le produit est moins pur, comme M™^ Gatin-Ghuzewska l'a remarqué avec raison, Ui CLYCOGENE. Nous allons maintenant étudier les différentes méthodes par lesquelles jusqu'à pré- sent on a déterminé le glycogène. A. Extraction du glijcoyène des organes par Veau bouUlante. Si avec de l'eau bouillante l'on extrait le glycogène des organes réduits en pulpe, et que l'on répète cette opération à plusieurs reprises, on obtient finalement des extraits aqueux qui ne semblent plus contenir de trace de glycogène. Cependant la pulpe des organes en contient encore des quantités considérables, et on peut les extraire quand on dissout cette pulpe dans une solution de potasse à l'ébullition et quand ensuite, on la traite par les méthodes que nous décrirons plus loin. On en a donc conclu qu'il y a deux sortes de glycogènes : l'un qu'on peut extraire par l'eau bouillante seule; l'autre, qu'on ne peut pas exlraire'par l'eau bouillante. Richard Kùlz (Z. B., xxn, 1886, 194) a montré en 1886 qu'après l'épuisement répété des muscles par l'eau bouillante il restait encore dans la chair musculaire 2a p. 100 du glycogène total, primitif, et que ce résidu ne pouvait être obtenu qu'après coction avec la potasse. Mais R. KûLz n'a pas prouvé l'existence de deux sortes de glycogènes ; car il n'a pas montré que la prolongation de l'épuisement par l'eai^ est inefficace pour augmenter la proportion de glycogène extrait. L'hypothèse d'ailleurs qu'une partie du glycogène ne peut pas être extraite par l'eau bouillante, mais seulement par la potasse, se rencontre assez souvent dans les auteurs. Pavy (Phil. Trans., '1884 ; Phystology ofthe carhohydrates, 1894, 122); Panormov {Gazeta Lekarska, 1887, n"^ 12 à 19); Cavazzani [A. de P., 1898, 541) CusTiN (.4. A. P., 1897, CL, I8.j). Mais c'est J. Nerking surtout qui a étudié la question avec détail. Il a pris 745 grammes d'un foie de veau broyé, et il l'a fait bouillir 18 fois en vingt-quatre heures avec des masses d'eau toujours renouvelée : après chaque coction la masse était exprimée à la presse, et épuisée par une nouvelle quantité d'eau. Le dix-huitième extrait, après élimi- nation des albumines par le réactif de Brùcre, était traité par deux fois son volume d'alcool à 96 p. 100 et ne donnait plus traces de trouble, même au bout de trois jours de contact. Cependant la poudre, exprimée, puis séchée au bainmarie, fut soumise à la coction avec 1 litre d'eau dans une capsule de porcelaine pendant trois quarts d'heure, et rien ne fut dissous. Alors on la sécha de nouveau au bain-marie, et on la fit dissoudre dans une solution de potasse à 1 p. 100 en la chauffant pendant deux heures. Dans cette solution on put précipiter des masses notables de glycogène que l'on transforma en sucre par l'ébullition avec l'acide chlorhydrique dilué. Le dosage de ce sucre montra que 24,9 p. 100 du glycogène total primitif ne pouvait pas être extrait par l'eau, mais seulement par la solution de potasse. Ces 24,9 p. 100 représentaient 1er, 8572 ^g glycogène. Dans une autre série de recherches faites avec la même méthode, et encore avec du foie de veau (A. g. P., lxxxi, 1900, 638), on obtint par le traitement avec la potasse 76,4 p. 100 du glycogène, que l'eau ne pouvait pas extraire. Ainsi la décoction avec l'eau ne donnait «jue le quart de glycogène contenu dans le foie. Il y a donc des cas dans les- quels, malgré une pulvérisation très soigneuse et l'ébullition avec l'eau, on obtient non pas un faible résidu, mais un résidu considérable de glycogène que Nerking ne pouvait pas extraire. Voici les résultats des expériences faites par Nerking surle lissu musculaire (A. g. P., 1901, Lxxxv, 318). QUANTITE on irraiiimes. OLYCOGENE extrait jiar l'eau en grammes. GLYCOGÈNE extrait par la potasse eu grammes. GLYCOGIiNE total p. 100. Viande de veau Viande de veau. ....... 1000 1 000 200 3,8800 2,6535 0,5100 1,4688 1,3122 0,1014 0,5349 0,3966 0,3057 Cœur de mouton GLYCOGENE. 2i5 II C.I.YCOGENK solulile dans l'eau. P. 100. (.LYIOGÉNK Cédé à la potasse. 1'. 100. PROl'ORTION- du glycogéne soluble dans l'eau au glycogèno total. PROrORTrON du glycogfene potassique au glycogèno total. 0,3880 0,26.j4 0,2:i.j0 0,1469 0,1312 o.oyo7 72,:)3 66,02 83,42 27,47 33,08 16, .''.8 Viande de veau Cœur de mouton Par conséquent il est prouvé que toutes les recherches dans lesquelles on a dosé le glycogéne par la simple extraction à l'eau bouillante n'ont aucune valeur. Même la com- paraison de ces recherches ne peut donner que des résultats trompeurs, car, deux foies peuvent avoir la même quantité de glycogéne et cependant en céder à l'eau bouillante des quantités très différentes. Reste alors la question importante de savoir si la coction avec l'eau seule a quelque influence. J'ai montré que l'ébullition, prolongée pendant deux ou trois jours, d'une solution aqueuse de glycogéne dans des vases qui ne donnent pas d'alcali, ne produit qu'une petite perte, en moyenne de 1 p. 100 de glycogéne, quand on dose le glycogéne par la précipitation avec deux fois son volume d'alcool à 96 p. 100 (A. g. P., lxxv, 1899, 187). J. Nerking {A. 'erki.\g (A. (j. P., Lxxxi, 26, 29, :^3, 1900) est arrivé à cette opinion que, dans le foie tout au moins, une partie notable du glycogène se trouve sous la forme d'une combi- naison chimique, telle qu'il ne peut plus être extrait par une longue ëbullition avec l'eau. J'ai étudié la question avec Herman.v Lœschcre {A. g. P., eu). J'ai mélangé des solu- tions de glycogène avec du sérum sanguin ou de l'albumine d'œuf, puis, après coagula- lion du mélange par la chaleur, j'ai fait bouillir le tout, pendant toute une journée. Au bout' de 24 heures, j'ai décanté l'eau, et la masse albuminoïde, finement broyée, a été reprise de nouveau par l'eau bouillante pendant 24 heures. Chaque jour l'extrait aqueux a été examiné au point de vue de sa teneur en glycogène. Pour cela le filtrat, d'un litre environ, était amené, par évaporation, à un volume de 100 à 200 ce, et, après refroidissement, précipité par l'iodomercurate de potassium en solution chlorhydrique. Le filtrat était traité par 2 vol. d'alcool ù 96 p. 100 qu'on laissait en contact toute la nuit. Puis on filtrait, et le précipité était lavé à l'alcool, puis redissous dans Teau. Alors l'alcool e'tait chassé par évaporation au bain-raarie, et le liquide était traité par l'iode, comme il a été dit plus haut. Dans une expérience je pus encore constater du glycogène dans l'extrait aqueux après 9 jours d'ébuUition. Au 13^ jour, après que l'albumine dissoute eût été précipitée par le réactif de Brlgke, le filtrat ne donna plus de précipité par ^l'alcool. Mais je voulus alors procéder comme dans une analyse ordi- naire de glycogène, en traitant l'albumine par une solution forte de potasse. Alors le liquide fut précipité par un volume d'alcool. Le précipité fut filtré, repris par l'eau; l'alcool fut évaporé, et la liqueur fut neutralisée et filtrée de nouveau. La réaction de l'iode était encore très forte, et incontestable. Cette expérience prouve qu'il ne s'agit pas là d'un glycogène chimiquement combiné, contenu clans Valhumine, mais cVun glycogène incorporé à l'albumine coagulée, et présentant à l'extraction totale par l'eau les mêmes résistances que le glycogène contenu dans les organes. J'ai répété cette expérience en cherchant à extraire par une ébullition prolongée la totalité du glycogène mélangé à l'albumine et au sérum. Avec l'albumine d'œuf il fallut 13 jours; quant au sérum, je mélangeai 2 000 ce. de sérum de cheval avec 300 ce. d'une solution concentrée de glycogène, que je coagulai dans une capsule de porcelaine. Jusqu'au 15* jour il y eut encore du glycogène dans l'extrait aqueux. Toutefois je fis encore tous les jours, jusqu'au 21'"- jour, l'extrait à l'eau bouillante. Le résidu albumi- noïde après expression pesait 81 grammes. Alors on le traita comme pour un dosage de glycogène; et finalement on n'y trouva plus trace de glycogène. Nous arrivons maintenant aux tissus employés par Nerking, c'est-à-dire au foie de veau. Pour nous placer dans les conditions les plus favorables, nous employâmes pour l'extraction une bien plus grande quantité d'eau que Nerking : c'est-à-dire, pour 100 grammes de foie, un litre d'eau bouillante. Chaque jour le liquide était filtré, concentré et analysé. La pulpe de l'organe était broyée finement avec la njênie pous- sière de quartz, puis de nouveau ti'aitée par l'eau bouillante pendant 24 heures. L'extrait donnait du glycogène jusqu'au 16" jour, et les extractions furent continuées jusqu'au 21* jour. La masse organique fut alors traitée par une solution forte de potasse, à l'ébullition, et le glycogène fut cherché par les procédés ordinaires dans le liquide, mais on n'y trouva pas de traces de glycogène, quoique au début le foie contînt du glycogène. L'expérience fut faite avec trois foies de veau de la même manière. Toutes les précautions furent prises pour éliminer l'action des ferments capables de détruire le glycogène. Jamais le glycogène ne fut mis en contact avec l'eau froide, et c'est toujours de l'eau bouillante qu'on employa. Dans la pulvérisation on ne prit que le temps strictement nécessaire, et après avoir fait bouillir le tout, de sorte que la masse peut être regardée comme ayant été stérilisée. Par conséquent, il est certain que le glycogène peut être extrait par l'eau bouillante, difficilement, mais complètement, si le temps est suffisant, c'est-à-dire après une ébullition de 21 jours, laquelle permet d'extraire les dernières traces de ce corps. Jusqu'au dernier jour il se dissout toujours de l'albumine, ce dont on peut facilement s'assurer par l'emploi du réactif deBRucKE. Quoique au 21'^^ jour la pulpe organique représentât encore GLYCOGÈNE. 251 un volume notable, cependant tout le glycogène avait été cédé à l'eau bouillante. Parla .se trouvent élimine'es les raisons principales qu'on peut invoquer en faveur de l'hypo- thèse d'une combinaison chimique du glycogène. Nerking avait encore invoqué d'autres raisons. 11 dit, en eflet, que l'extraction du glycogène du foie par la potasse très diluée donne d'autant plus de glycogène que la coction est plus prolongée. H. Lœschcke a prouvé le fait, en traitant, comme Nerking, le foie par de la potasse très diluée, puis en précipitant par la méthode de >;erking et de PrLLGEB, et en cherchant le glycogène dans le filtrat. En effet, si, par une ébullilion prolongée, ce glycogène combiné est mis en liberté, d'après Nerking, on doit le retrouver dans le filtrat, soit par une ébuUition prolongée avec la potasse diluée, soit par une courte ébullition avec la potasse concentrée, tandis que dans le filtrat, après précipi- tation du glycogène, il ne doit plus se trouver de glycogène. Contrairement à cette opinion de Nerking, Lœschcke a montré qu'en prolongeant la coction du foie dans la potasse diluée, le glycogène est obtenu en moindre quantité : ce qui tient non seulement à ce que le glycogène dans ces conditions devient plus soluble dans l'alcool, mais encore à ce que la potasse diluée le détruit. Le fait a été établi par PflCger pour les solutions de glycogène pur, alors que la potasse à 30 p. 100 ne les attaque pas. Pflûger a pensé que la potasse concentrée agit comme déshydratant, et par conséquent empêche peut-être l'hydratation du glycogène que peut produire la potasse diluée. On doit se demander pourquoi Nerking a été ainsi induit en erreur. 11 s'agit là d'un fait très important pour l'analyse quantitative du glycogène. Cela tient à ce que la soi- disant dissolution des organes dans la potasse n'est pas une véritable dissolution. On peut les faire bouillir pendant longtemps, sans voir complètement disparaître les nombreux petits fiocons qui se forment. Les filtres, même les meilleurs, sur lesquels on verse cette soi-disant dissolution donnent au début un filtrat plus ou moins trouble, dû au passage de ces petites portions insolubles. La flltration, d'abord rapide, se ralentit peu à peu, et cela certainement à cause de l'oblitération, par ces particules, des pores du filtre. A mesure que la liltration se ralentit, le filtrat devient de plus en plus clair et transparent. On observe alors que le premier filtrat, très trouble, est bien plus riche en glycogène que les dernières portions, tout à fait limpides. Ces différences en glycogène sont extrêmement grandes, et nous montrent donc qu'une partie considérable du glyco- gène est retenue sur le filtre. H. Lœschgre a alors ajouté à un extrait hépatique, conte- nant une quantité connue de glycogène, une autre quantité connue de glycogène, et, après l'avoir filtré, de riianière à avoir un filtrat clair, il a trouvé, après dosage, que le filtre retenait plus de glycogène que le glycogène qui avait été ajouté. Nerking, dans ses recherches, avait supposé que ces diverses portions d'un filtrat de la même solution contenaient toutes la même quantité de glycogène, et, pour le dosage comparatif, il n'a pas pris la même portion pour la partager en deux parties, mais il en a prélevé di- verses portions, qui étaient par conséquent très différentes. Aussi rapporte-t-il un fait qui, à première vue, est très surprenant {A. g. P., lxxxi, .31, Exp. XIV); la première fraction, très trouble, est celle qu'il a prise pour la faire bouillir longtemps, et elle parait contenir plus de glycogène ; tandis que les parties qui passent les dernières sur le filtre, et qu'il ne soumettait pas à une coction prolongée, sont moins riches en glycogène. Mais cette différence existait déjà avant la coction. Le plus souvent Nerking faisait bouillir pendant un temps variable les diverses por- tions de l'extrait hépatique, ce qui exerce une inlluence sur les conditions de la liltra- tion: car des solutions soumises à une longue ébullition filtrent bien plus vite; et même les premières portions du filtrat ne présentent qu'un trouble peu accentué. Cette plus rapide liltration montre que les pores du filtre ne s'oblitèrent plus autant, et retiennent par conséquent moins de glycogène. Mais comme, par une longue ébullition avec la potasse diluée, le rendement devient toujours plus faible, on voit que la plus ou moins grande quantité de glycogène qu'on trouve dépend des conditions de l'expérience. Nerking ne savait rien des différences en glycogène que présentent les diverses fractions du filtrat; il ne savait pas davantage qu'en comparant la première fraction du filtrat (d'un foie bouilli pendant peu de temps) avec la dernière fraction du filtrat (d'un foie bouilli longtemps), les rapports sont tout autres qu'entre la première fraction d'un filtrat de 252 GLYCOGENE. foie bouilli longtemps, et la dernière fraction d'un filtrat de foie bouilli peu de temps. L'inconstance de ses résultats s'explique donc sans peine. Ces faits restent importants à connaître pour tous ceux qui s'occupent de l'analyse du glycogène. Il n'y a donc pas lieu d'admettre qu'il existe dans les organes un glycogène combiné. L'insolubilité ou la faible solubilité du glycogène, ainsi que sa très faible diffusibilité, expliquent les phénomènes observés. D'autre part, on doit cependant accorder que le glycogène peut être en combinaison chimique, car une combinaison peut exister, comme celle de l'hémoglobine, dissociable par l'action de l'eau bouillante ou des réactifs que nous employons pour la préparation. La méthode de Kulz et l'emploi du réactif de BrOgre attaquent le glycogène de manière à diminue)' le rendement à l'analyse. Pavy avait déjà fait remarquer que le réactif de BnicKE attaque le glycogène, ce qui s'explique, en partie au moins, par l'action de la potasse. Pavv a observé des pertes de 19,4 p. 100, et même plus, et Pflugeu a confirmé ces données de Pavy ; c'est là une cause d'erreur qui est considérable dans la méthode de Brucke et Kulz, erreur que beaucoup de recherches, entreprises par Pfluger et Weidenbaum, ont rendue très vraisemblable. Pour démontrer avec précision cette cause d'erreur de la méthode de Brùckk et KûLZ, on a fait à froid une solution alcaline (solution de 1 à 2 p. 100 de potasse) de chaii' musculaire sans glycogène '. Ony ajouta une quantité exactement connue de glycogène, et, sans chauffer, on en lit l'analyse d'après les indications de Kulz. Dans une partie on fit l'analyse après coction, comme s'il s'agissait d'une analyse réelle du glycogène des tissus, et ensuite on procéda exactement d'après les indications de Kulz. Pour bien montrer dans quelle limite une certaine quantité de glycogène dissous dans l'eau peut être retrouvée par la précipitation par deux volumes d'alcool, on a cons- tamment fait l'analyse des préparations de glycogène que l'on ajoutait à la chair mus- culaire dépourvue de glycogène. Ce glycogène était extrait par l'eau bouillante d'une bouillie hépatique provenant d'un chien qu'on venait de sacrifier, et il était purifié par la méthode de Richard Kulz. Dans ces conditions, comme les chiffres mêmes de Kulz l'indiquent, la perte en glycogène par la précipitation avec deux volumes d"alcool ne comporte pas une perte de plus de 2,2 p. 100. Le tableau ci-contre donne le résultat de ces analyses (p. 253 . Les chiffres de glycogène donnés dans ce tableau ont été obtenus par pesées, suivant la méthode de Brucke-Kulz, et on en a déduit le poids des cendres trouvées. Mais, comme cette méthode ne donne jamais un produit débarrassé des impuretés organiques, il est nécessaire, pour obtenir des chiffres plus précis, de transformer le glycogène en sucre, et de doser ce sucre par la méthode de Pfluger à l'oxydule de cuivre. Voici commentées recherches ont été faites: D'abord, l'extraction du glycogène du foie de ce chien fut faite par l'eau bouillante. Le glycogène obtenu fut purifié par la méthode de Brucke-Kulz, séché, pesé, et le poids des cendres déterminé. 100 grammes de ce glycogène contenaient 96,76 p. 100 de glycogène dépourvu de cendres. Avec ce glycogène on fît les recherches suivantes. ExpÉRiRxcE VI. — 20 grammes de la chair musculaire pulvérisée d'un chien à jeun, contenant 0,0182 de glycogène, furent chauffés pendant quatre heures quinze minutes avec 200 ce. de la solution potassique à 2 p. 100, et jusqu'à ce que les particules fussent dissoutes; puis on laissa refroidir la liqueur. 0&'',669a de glycogène répondant à 0,6411 de C^H'^O', furent dissous dans 200 ce. d'eau stérilisée, puis on mélangea les deux liqueurs, et on en analysa le glycogène par la méthode de Brucke-Kulz. Le précipité albuminoïde fut, d'après ma méthode, quatre fois dissous et précipité. Le filtrat de la quatrième précipitation ne donnant plus aucun trouble par l'alcool, la masse des liquides contenant le glycogène fut ramenée à un volume de 2 litres et demi, et bien mélangée. Ces 2300 ce. servirent à deux analyses. 1. De fait cette chaii* musculaii-e contenait pour cent parties Qb^OIS de {,dycogène. Il s'agissait des muscles d'un chien à jeun depuis 38 jours. CLYCOGENE. t>o3 Tableau général. \CMBItO VIANDE GLYCOGÉNE .S.\NS CENDRKS PERTE eu SOLUTION ORIGINE NATURE lie SKCHE eu gr. gljcogeiio «HAUKFÉK EXI'ÉliniEMATElIt. du du i.'exp. en gr. inti-ndiiit. retrouvé. p. 100. OU non chauffée. GLYGOC.ÈNE. TRAITEMENT. Il •'.,97 0,8753 0,8154 6,8 Non chauffée. Pfu'oer. Foie de chien. Méih. de KlLZ. I2 5,97 0,8753 0.8018 8,4 Id. Id. Id. Id. I3 5,97 0,4810 0,4550 5 , ■) Ici. Id. Id. Id. u 5,97 0,4816 0,4345 9.8 Id. Id. ki. Id. I;; 2,985 0,4816 0,4407 8,4 Id. M. Id. Id. le, 2,985 0,4816 0,4378 9,1 Id. Id. Id. kl. IIi 10,00 0,491 0,4130 15,9 Id. Id. Foie de bœuf. Méth. de Pfi.ûger. II2 10,00 0,491 0.412i 16,1 Id. Id. kl. Id. • II3 5,00 0,491 0,4196 14,5 Id. Id. Id. kl. II.I 5,00 0,491 0,4222 14,2 Id. Id. Id. Id. II.; 10,00 0,491 0,3847 21,7 Chauffée 6 h. kl. Id. Méih. de IIg 10,00 0,491 0,3914 Kl'LZ. A' 1,089 20,3 Id- Id. Id. Id. 1,013 6,98 Chauffée 3 h. Weidenb.vum. Foie de chien. Id. A-, 10,00 1,041 0.888 14.7 Cliaufféc 9 h. Id. kl. Id. A:, 10,00 1,121 0,888 20,7 Id. Id. Id. Id. A,v 10,00 1,144 0,934 18,4 Id. Id. Id. Id. Bi 10,(10 2,033 1 ,665 18,1 ■ Id. kl. kl. kl. Bo 10,00 1,337 1,169 12,5 Id. Id. Id. Id. B3 10,00 1,775 1,429 20,1 Id. Id. Id. kl. Bi 10,00 1,870 1,536 16,8 Id. kl. Id. Id. Les expériences I', I-. F. etc., signifient les > expériences de la première série. tandis que II4, lU, etc., signifie Ht les expériences de la série II. A sont les expériences que Weidenbaum a instituées pour || résoudr e la question. Analyse A. — 500 ce. sont précipités par l litre d'alcool à 96 p. 100 : on trouva 0,1233 de glycogène brut. Analyse B. — Exactement comme A. On trouva 0,1217 de glycogène brut. Donc en moyenne 0,1226 de glycogène. La quantité qu'on aurait dû trouver étant de 0,1365, la perte absolue a été de 0,0130 de glycogène, soit une perte de 10,2 p. 100. H était donc nécessaire d'établir exactement la cause de cette perte, tout à fait indé- pendante des impuretés du glycogène. Pour cela, je pris sur les filtres le glycogène qui avait été obtenu. Il fut séché à 98", et inverti. 0,1226 donnèrent 0,1209 de sucre, répondant par conséquent pour 2 'lOO ce. à 0K'',6045 de sucre, c'est-à-tlire à 0s'",544l de glycogène. Or, comme on avait incorporé à la liqueur 0,6593 de glycogène, et qu'on n'en a retrouvé que 0,5441, la perte absolue a été de 0*'''",1152, soit une perte centésimale de 17,5. Par là apparaît bien, que, si l'on ne fait pas l'analyse en transformant le glycogène en sucre, on obtient des chilfres plus favorables qu'ils ne sont en réalité, et la perte vraie est très grande; car le glycogène qu'on retrouve et qu'on dose est chargé d'impuretés. En répétant cette expérience on retrouve toujours le même résultat (.1. g. P., 1899, Lxxv, 288). Le glycogène, préparé d'après les indications de Brlcke-Ki lz, que l'on ajoute à une solution alcaline (1 ou 2 p. 100 de potasse) de chair musculaire sans glycogène, ne peut donc être retrouvé par la méthode de BrCcke, même sans qu'on ait chauffé la liqueur, 254 GLYCOGÈNE. qu'avec une très foi'te erreur. H y a donc lieu de supposer que le précipité d'albumine contient une certaine quantité de glycogène. Si maintenant on reprend le glycogène qui a servi à cette expérience, et qu'on le mélange à froid avec une solution de muscles sans glycogène dans la potasse à 3 p. 100, après addition d'iodure de potassium, puis qu'on le précipite par un demi-volume d'alcool, l'on obtient tout le glycogène sans perte (E. PflCger, E.-J. Nerkixg, A. g. P.,lx.\.vi, 1890). Ce glycogène est transformé en sucre et dosé par la méthode de Pfluger. Il sera par conséquent certain pour tout le monde qu'il existe des cas dans lesquels le glycogène précipité de la solution musculaire alcaline ne peut pas être décelé par la méthode de Bai CK.E-KLLZ, même si l'on procède avec le perfectionnement introduit par Pfliger. Pour la compréhension de ce fait important, voici l'expérience instituée par PflCger. Que l'on prenne de la chair musculaire dissoute dans une solution de potasse à 2 p. 100, et qu'on institue des expériences comparatives [A. y. P., lxxvi, 506), on verra que la précipitation du glycogène de la solution alcaline donne presque les mémos chiffres que la méthode de Iulz ; bien entendu, à condition que l'on introduise dans la méthode les perfectionnements indiqués par Pfliger. Par conséquent dans ces con- ditions la méthode de BrOgke-Iu'lz donne des résultats relativement exacts. Mais, pour expliquer cette contradiction, il faut remarquer que les deux méthodes ne donnent de résultats différents que si une certaine quantité du glycogène préparé par la méthode de BrCgive-Kulz est purifiée de différentes manières. Le glycogène est soumis à beaucoup d'opérations chimiques, qui, d'après KiLz,sont nécessaires pour qu'on l'obtienne à l'état de pureté : il subit alors des altérations diverses. D'ailleurs, il n'est pas douteux que le glycogène employé dans ces expériences n'est pas du glycogène pur et normal; car, si on l'ajoute à une solution musculaire alcaline, et si on le soumet à la coction, on ne peut le retrouver par précipitation avec un demi-volume d'alcool qu'avec une perle de 10 p. 100. Donc, en le précipitant d'une solution alcaline, on obtient tout le glycogène qu'on y a mis, s'il n'y a pas eu coction; mais avec une perte de 10 p. 100, s'il y a eu coction [A. y. P., lxxvi). J'ai montré récemment qu'une solution potassique concentrée n'attaque pas du tout le glycogène normal, qu'une solution diluée l'attaque d'une manière insignifiante, mais que, si le glycogène a été préparé par la méthode de BrCgke-Kllz, alors il est attaqué par la potasse. Eu comparant la méthode de Brlgke-Kclz avec la méthode de la préci- pitation dans une solution alcaline, il a été prouvé, comme on devait s'y attendre, que, dans le dosage du glycogène de la chair musculaire, même avec les perfectionnements que j'ai introduits dans la méthode, il y avait toujours une petite perte : cette perte allait jusqu'à 4,8 p. 100. Donc, comme il peut se faire que l'on doive employer la méthode de KClz pour l'analyse quantitative du glycogène des tissus, il est nécessaire de décrire avec détails cette méthode avec les perfectionnements introduits par Pfluger. Analyse du ylycogèiœ d'après la méthode de KClz-PflCger : A. — Réactifs. I. — Solution de potasse, telle que 100 ce. contiennent 2 grammes de KOH. Il faut s'assurer par titrage de la teneur de cette solution en potasse. II. — Acide chlorhydrique, d'une densité de 1,114. On verse dans un vase gradué ;:iOO ce. d'eau, et on ramène à 1 litre par addition d'acide chlorhydrique de 1,19 de densité. m. — Solution de BrCcke : on dissout dans 1 litre d'eau 100 grammes d'iodure de potassium; on chauffe et on y ajoute autant de biiodure de mercure qu'il peut s'en dis- soudre. Après refroidissement on décante la liqueur des cristaux rouges qui se sont formés, et on ajoute encore quelques cristaux d'iodure de potassium. IV. — Alcool à 96 p. 100 et à 99«8 p. 100. V. _ Alcool à 66 p. 100 qu'onprépare en mélangeant 1 litre d'eau à 2 litres d'alcool à 96 p. 100; on ajoute au mélange 0k'',25 de chlorure de sodium. VI. — Éther sulfurique (oxyde d'éthyle distillé sur le sodium). VII. — Filtres suédois, lavés trois fois à l'eau, à l'alcool et à l'éther. J'emploie des filtres de 12 centimètres de diamètre. Si l'on veut intervertir le glycogène, ce qui est indispensable pour avoir des chiffres exacts, on doit employer encore : CLYCOGENE. 255 VIII. — Solution crÂLLiHN. On chautïe 200 ce. d'eau, on y ajoute 173 grammes de sel de Seigxette cristallisé, et, si la solution n'est pas parfaitement limpide, ou la liltre sur un petit filtre bien lavé dans un ballon de 500 ce. Dans un llacon bien fermé est une solution de potasse qui contient pour 100 ce, 70 à 7o grammes de KOH, ce dont on s'assure par titration. On calcule combien il faut de cette solution concentre'e pour avoir 12o grammes de KOH, et on mélange ce volume à la solution préparée du sel deSEiGXETTK. On réunit toutes les liqueurs, on y ajoute de l'eau chaude jusqu'à ce que le volume total soit de iiOO ce, et, après refroidissement, on ajoute encore la quantité d'eau nécessaire pour que le volume soit bien de '600 ce, et on mélange. Cette solution, comme je l'ai constaté, se conserve sans altération pendant longtemps. IX. — Une solution cuivrique, qui contient par litre (39s'",2 de sulfate de cuivre (SO^Gu + 5H-0). Le sulfate de cuivre chimiquement imr da commerce est mis à cristalliser une fois dans l'acide nitrique dilué et j trois fois dans l'eau. On remarquera que la dissolution de ce sel et l'évaporation de la solution ne doivent se faire qu'à une chaleur modérée. X. — Filtre d'amiante, dont j'ai donné la description exacte {A. g. P., lxix, 437). Ces filtres, pour ma méthode de dosage du sucre par l'oxydule de cuivre, donnent des résultats rapides et exacts. Si l'on n'a pas de filtres d'amiante, on prend des entonnoirs- filtres que j'ai décrits (A. g. P., lxix, 471), et avec lesquels on déterminera l'oxydule de cuivre par la méthode de Volhard. B. — Marche de l'analyse. — Je suppose d'abord qu'on emploie 100 grammes de tissus. Si l'on veut en prendre moins, ou si l'on ne dispose pas d'une pareille quantité, il faudra diminuer notablement tous les chiffres que je donne ici. On mélange dans un vase de 1 litre environ 200 ce. de la solution potassique à 2 p. 100, et on fait une marque sur le verre pour déterminer la hauteur de la colonne liquide, qu'on doit mesurer au millimètre. Puis on ajoute 200 grammes d'eau; on chauffe et on fait bouillir. L'animal est tué rapidement. On prend ses muscles et son foie qu'on met en pulpe avec un hachoir ou avec une machine à saucisse. Sur une balance, qui pèse au déci- gramme, on pèse 100 grammes, et, avec une pince ou une cuiller, on la met par petites portions en agitant continuellement, de manière à la dissoudre et à la laisser toujours eu contact avec le liquide bouillant. On chauffe ainsi pendant dix minutes, puis on porte le vase, supporté par un anneau, dans le bain-marie bouillant, et on le recouvre d'un verre de montre. Dès qu'on remarque qu'il ne reste plus à flotter dans le liquide que quelques rares flocons qui au bout d'une demi-heure ne dimiiment plus, alors on filtre tout le liquide sur du coton de verre, et le plus souvent on constate que ces flocons repré- sentent à peine 1 p. 100 de toute la masse. Alors on reprend la liqueur filtrée que l'on remet daiis le vase, et on lave avec de l'eau ce qui est resté sur le coton de verre et sur l'entonnoir, ainsi que les résidus adhérents au second vase. Puis la solution musculaire est chauffée et concentrée jusqu'à ne plus faire qu'un volume de 200 ce, ce qu'on reconnaît en voyant la marque faite préalablement pour mesurer la quantité de liquide potassique primitif. Presque tous les muscles sont dissous, quoique toujours on puisse, en regardant de près, voir des flocons et des particules qui ne diminuent pas, même si la coction est prolongée. La rapidité de cette dissolution des organes dans la potasse est très variable. Le corps des grenoiiilles se dissout en un quart d'heure, tandis qu'il faut souvent plusieurs heures pour les tissus des oiseaux et des mammifères. Parfois, pour dissoudre les organes de mammifères très vieux, il faut chaufl"er pendant plus de 12 heures avant d'obtenir la complète dissolution. Dès que la solution musculaire s'est refroidie, on verse 12 ce d'acide chlorhydrique de densité 1,114 dans un cylindre gradué au demi-centimètre cube. On remue avec un agitateur jusqu'à ce que la bouillie du tissu soit devenue tout à fait liquide, et on ajoute encore 4 ce : puis on agite; on verse 50 ce du liquide de BrCcke, et alors on agite fréquemment jusqu'à ce que tout soit devenu homogène. En agitant, on voit que finalement la solution d'iodo-mercurate de potassium ne produit plus qu'une légère lactescence quand on l'ajoute au mélange. Puis on ajoute 1 ce d'acide chlorhydrique, en cherchant à voir s'il se produit quelque trouble dans la liqueur, ce qui n'est presque lot) CLYCOGENE. jamais le cas. De nouveau on ajoute de riodomercurale de potassium jusqu'au moment où il ne détermine plus de précipité, ce qu'on reconnaît en abandonnant la liqueur à elle-même pendant quelques minutes. Le précipité s'amasse au fond de l'éprouvette, surmonté par un liquide transparent et peu trouble. Si alors on laisse couler douce- ment l'iodo-mercurate de potassium sur les parois, on distingue nettement, aux points où il' se mélange à la solution, s'il y a ou non un précipité qui se forme. S'il ne s'en forme pas, on cherche à voir si l'acide chlorhydrique a le même effet. En procédant ainsi, on évite l'inconvénient sérieux de produire une liqueur laiteuse, ce qui, contrairement à l'opinion de Kulz, ne dépend pas d'un excès d'acide, mais d'une acidité trop faible. Mais, si certaines substances, comme les albumoses ou les peptones, sont en trop grande quantité, il se fait encore un trouble lactescent assez considérable. Si tel est le cas, on doit laisser le mélange à lui même pendant 24 heures : alors presque toujours, malgré sa forte lactescence, il peut être facilement filtré. Mais, si tel n'est pas le cas, alors on reprend le filtre avec son précipité : on le remet dans le vase, et l'on ajoute 2 vol. d'aloool à 96 p. 100; ce qui détermine la dissolution des substances qui donnaient le trouble. Après les avoir laissé se déposer, on filtre le précipité, on l'égoutte bien, et on met le filtre et le précipité dans le premier vase conte- nant 200 ce. d'une solution de 2 p. 100 KOH. On le traite et on le précipite de nouveau d'après les méthodes indiquées plus haut, et alors on n'observe plus de trouble lactescent. Il faut remarquer que, dans tous les cas, et même en employant les meilleurs filtres, le filtrat d'un précipité albumineux donne toujours une légère opalescence, même lors- qu'il n'y a pas de glycogène, opalescence qui diminue ou disparaît par l'addition d'un peu d'alcool, et qui par conséquent est certainement due à une combinaison mercu- rique. Comme cette opalescence de tous les filtrats est due à cette combinaison, il est évident que le précipité jaunâtre qui se forme pt'U à peu en est la cause. Ce précipité s'amasse sur les parois de l'éprouvette, et il est soluble dans l'alcool. A mesure que le précipité augmente, l'opalescence de la liqueur diminue. Si l'on attend que les albumines soient précipitées, elles se rassemblent au fond du vase sous la forme d'un magma solide et adhérent, si bien que tout le liquide passe rapi- dement à travers le filtre, alors que le précipité reste encore dans le vase. Appelons ce vase N° 1, et appelons N" 2 le vase qui contient le filtrat. On verse ce filtrat N° 2 dans une éprouvette graduée de 2 litres, et on remet de nouveau le >'° 2 sous l'entonnoir. Alors, on verse 200 ce. de la solution de potasse à 2 p. 100 dans le vase n" 1, et on agite jusqu'à ce que tout le précipité albuminoïde soit redissous. Dès que la disso- lution est achevée, on étend de 200 ce. d'eau, on agite, on neutralise avec 12 ce. d'acide chlorhydrique, on agite, puis on ajoute 4 ce. d'acide chlorhydrique : on agite encore, et on essaye avec quelques gouttes du réactif de BrCcke pour voir s'il se produit encore, un précipité. S'il en est ainsi, on recommence, comme il a été dit plus haut, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de précipité. Une très petite quantité du réactif de Brucke est néces- saire : quelquefois même il n'en est pas besoin. Alors on filtre la liqueur sur le l'^' filtre, et on la sépare ainsi de son précipité. Même on réussit souvent à garder la plus grande partie du précipité dans le vase n° 1, et à en séparer presque tout le liquide du vase n» 2. Le filtrat n" 2 est ajouté au filtrat n'^l. C'est là le traitement 1 du précipité albuminoïde. Pour le traitement 2, on verse le filtrat avec son précipité dans le vase n"l, on ajoute 200 ce. de potasse à 2 p. 100, comme pour le traitement n" 1, et on filtre avec un nouveau filtre dans le vase n" 2 : le filtrat est remis alors dans la grande éprouvette. Le traitement 3 comporte une petite modification, parce qu'elle doit être probable- blement la dernière, c'est-à-dire qu'il n'y a plus de glycogène. Le précipité avec le filtre est remis dans le vase n°l,et traité encore par 200 ce. de potasse à 2 p. 100. Il se dissout; alors on reprend le tout avec les papiers des deux filtres qu'on met sur un entonnoir avec du coton de verre, et on verse la solution alcaline avec les papiers sur le coton de verre; on lave ensuite à l'eau, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de réaction alcaline. Alors on verse la solution musculaire alcaline dans le n° 1, et on reprend le n° 2 avec de l'eau. On précipite par 10 ce. d'acide chlorhydrique. On met sur un nouveau filtre, et on essaye de voir s'il y a encore un précipité par addition de 2 à 3 volumes d'alcool à 96p. 100. S'il y a encore un trouble, il faut faire un4« traitement, et ainsi de suite jusqu'à ce que le filtrat ne se trouble plus par l'alcool. GLYCOGENE. 257 Le nombre de ces traitements dépend évidemment de la quantité du glycogène et de lar nature du précipité. Quant à la dilution de la solution musculaire, remarquons qu'après la première dis- solution du précipité d'albumine par 2(»0 ce. de potasse et 200 grammes d'eau, je n'ai procédé aux autres dilutions que si je m'attendais à trouver beaucoup de glycogène. Mais, si après la première dissolution il n'y avait qu'un trouble faible, on peut pour le traitement n° 2 ne pas diluer, car il y a avantage à ne pas trop diluer la solution de gly- cogène. En effet, dans ce cas, la précipitation par l'alcool ne se fait qu'après un très long temps. Si l'on a réuni tous les filtrats dans une grande éprouvetle, on lit le volume total. Je suppose qu'on trouve 1800 ce. ; on prend alors un flacon de 2 litres, on y verse toute la liqueur, et on remplit en ajoutant de l'eau jusqu'à faire 2 litres exactement. Si l'on n'a pas mes flacons à figure en biscuit, alors, on les verse dans un grand verre, on agite, et on met dans un flacon bien fermé. De cette liqueur on prend une quantité qu'on mesure, et on en prend d'autant moins qu'elle est plus riche en glycogène. Si par exemple il y a en solution 10 grammes de glycogène, alors, pour éviter les difficultés de la dessiccation, on ne prend pour l'analyse que 200 ce. ; mais, s'il y a moins de glycogène, il faut prendre un volume du liquide plus considérable. Ce qui facilite l'analyse et diminue les causes d'erreurs, c'est de prélever une partie du liquide uniquement pour savoir si le précipité obtenu par l'alcool donne avec le réactif de Brucke encore quelque trace d'albumine. Les solutions de glycogène sont alors traitées par deux fois leurs volumes d'alcool à 96 p. 100, et on laisse les liqueurs, recouvertes d'une plaque de verre, se reposer jusqu'à ce que toute trace d'opalescence ait disparu. Après que le liquide a passé à travers le filtre qui doit servir au dosage quantitatif du glycogène, il faut distinguer deux cas avant de mettre le glycogène sur le filtre pour la pesée. Si, comme c'est le cas en général dans l'analyse du glycogène des organes, on a affaire à du glycogène normal, qui est opalescent, qui n'adhère pas au vase et se dissout très facilement, alors il est facile de le placer sur le filtre : il suffit de le verser sur le filtre avec un agitateur à l'extrémité duquel on a placé un peu de gomme élastique. Pour se débarrasser des dernières traces de glycogène qui restent dans le vase, on les lave avec le liquide qui a filtré. Mais assez souvent on a affaire à un glycogène qui se précipite par l'alcool, non en flocons, mais en particules transparentes, qui ne se déposent que peu à peu au fond du vase, et qui adhèrent aux parois comme une résine ou un vernis transparent. Pour le mettre sur le filtre il y a deux procédés. Après qu'on a versé tout le liquide, on lave les parois du vase avec de l'alcool salé à 66 p. 100, ce qui enlève le glycogène adhérent, et on met cet alcool de lavage sur le filtre. Ensuite avecune pipetteon lave les paroisdu vase avec del'eau demanièreà dissoudre tout le glycogène, et il convient de le faire quand la couche de glycogène est encore humide et imprégnée d'alcool, car alors elle se dissout rapidement et complètement. Mais, si l'alcool s'est évaporé et que le glycogène ait déjà séché en partie, la solution s'en fait beaucoup plus difficilement. La solution aqueuse, qu'on met alors dans un petit vase, est traitée par trois ou quatre fois son volume d'alcool absolu, et additionnée de deux gouttes d'une solution concentrée de chlorure de sodium. S'il se forme au bout de quel- ques heures le dépôt d'un précipité qui n'adhère pas au vase, alors on peut filtrer. Mais assez souvent l'alcool produit une forte opalescence, sans déterminer cependant de préci- pité floconneux : il faut attendre un ou plusieurs jours pour que le liquide soit devenu clair, et que le glycogène adhère aux parois du vase, comme une couche transparente. Alors on filtre l'alcool limpide, on remplit le vase d'alcool à 96 p. 100, et on laisse reposer vingt-quatre heures. Au bout de ce temps, et quelquefois longtemps auparavant, le gly- cogène transparent est devenu opaque et blanc, et a quitté la paroi du verre. Avec l'agita- teur, on peut le placer sur le filtre: cependant les dernières parties sont fortement adhé- rentes au verre, de sorte qu'il faut beaucoup de temps et de soins pour les détacher et les transporter sur le filtre. Si c'est dans un verre fort petit que l'on a mis le glycogène transparent et adhérent, DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VU. 1~ 258 GLYCOGENE. on peut quelquefois le mettre sur le filtre sans le redissoudre dans l'eau, après avoir fait passer sur le verre dont les parois sont enduites de glycogène de l'alcool à 96 p. 100 : et, dès que le glycogène a quitté la paroi en devenant blanc et opaque, on le met sur le filtre. Dans certains cas, une partie du glycogène se précipite normalement en flocons, tan- dis qu'une autre partie forme un précipité gomraeux, transparent, adhérent au verre : alors, selon les proportions relatives de ces deux sortes de glycogène, on dirige l'expé- rience dans tel ou tel sens. Après que tout le glycogène a été mis sur le filtre, on le lave trois fois avec de l'alcool à 66 p. 100 contenant du chlorure de sodium; ce glycogène plus ou moins coloré par l'iode n'est pas devenu blanc, et, même après des lavages prolongés à l'alcool, il reste coloré : alors on verse de l'eau bouillante sur le filtre, on dissout ainsi tout le glycogène, on lave bien le filtre, et on le dessèche. Le filtrat aqueux est de nouveau précipité par l'alcool et quelques gouttes de la solution de chlorure de sodium : il se précipite alors sous la forme d'une poudre incolore ou peu colorée, et on peut le mettre sur le filtre. Souvent j'ai pu facilement décolorer le glycogène rouge simplement en ajoutant à l'alcool de lavage à 66 p. 100 beaucoup d'iodure de potassium. Je recommanderais volontiers cette pratique si simple si j'avais établi par des expériences positives que l'iodure de potas- sium n'aurait pas d'autres désavantages, ce qui est d'ailleurs très invraisemblable. On continue alors l'analyse comme d'après la méthode de KtiLz, c'est-à-dire en lavant trois fois avec l'alcool à 96 p. 100, trois fois avec l'éther, trois fois avecl'alcool absolu; puis on place l'entonnoir avec le filtre dans une étuve de 60 à 80° jusqu'à ce que toute odeur d'alcool ait disparu: on place le filtre sur des verres de montre destinés à la pesée, on les met dans une étuve sèche à 100°, et on ne l'ouvre qu'au bout de trois fois vingt-quatre heures; la pesée donne alors le poids de glycogène sec. On pèse ensuite toutes les vingt- quatre heures jusqu'à ce que le poids ne diminue pas : bien entendu la quantité ne doit pas être supérieure à 1 gramme de glycogène déposé sur le filtre: elle peut être bien moindre. Mais nous avons vu que ce glycogène est plus ou moins chargé d'impuretés, et que l'analyse des cendres ne donne pas de notions exactes sur les impuretés qui y sont con- tenues. Par conséquent, pour des recherches exactes, il faut déterminer la quantité de sucre répondant à ce glycogène. Pour cela on prend le filtre avec une pincette, et on fait tomber une partie de ce glycogène dans un autre vase taré : on le pèse, on le dissout dans l'acide chlorhydrique à 2 p. 100, et on le/hauffe au bain-marie avec 100 à 200 ce. de cet acide chlorhydrique dilué, puis on dose le sucre par le procédé que j'ai indiqué. Quant au dosage des cendres, pour savoir à peu près la quantité de substances orga- niques qui constituaient les impuretés mêlées au glycogène, on prend le filtre avec le glycogène contenu, et on le calcine ; mais cette opération n'est guère nécessaire quand on a fait le dosage du sucre, ce qui permet de préciser les conditions de l'analyse. Méthode de Pavy pour le dosage quantitatif du glycogène {The Phijsiology of the Carbohi/drates, p. 64. London, 1894). — Pavy s'est servi pour l'analyse quantitative du glycogène des données fournies par Claude Bernard sur la préparation du glycogène. D'abord il chauffe les organes avec une solution de potasse à 10 p. 100, précipite le glycogène par l'alcool, transforme le glycogène en glucose, et dose ce glucose par une solution cuivrique. Voici comment il décrit son procédé : « Le procédé consiste à dissoudre d'abord les tissus qu'on veut examiner et à en éli- miner les albuminoïdes de manière à empêcher qu'ils ne soient précipités par l'alcool. Si l'on n'a pas pris cette précaution, il reste des matières albuminoïdes, qui, après l'inver- sion du glycogène par l'acide sulfurique, donnent la réaction du biuret, et troublent le dosage du sucre par la solution cupro-ammoniacale. i( Il est nécessaire de pulvériser complètement les organes pour obtenir une dissolution complète dans la potasse: on fait d'abord l'extraction par l'alcool, et alors on broie faci- lement la substance dans un mortier. Si la pulvérisation a été bien faite, il suffit, comme je l'ai montré dans mes recherches sur les glucosides contenus dans les matières pro- téiques, d'une quantité de potasse plus petite et d'une durée de coction moindre que GLYCOGÈNE. 259 celles que j'avais indiquées antérieurement. Si la substance n'a pas été d'abord soumise à l'action de l'alcool, elle n'est que lentement pénétrée par la potasse, et c'(;st ce qui explique comment les divers physiologistes n'ont obtenu de solution complète qu'au bout de très long temps. Je noterai un autre point important. On se sert généralement de vases ouverts; c'est ainsi que j'ai procédé pendant longtemps; mais j'ai eu des résultats contradictoires, ce qui prouve qu'il y avait une faute expérimentale. Cela m'a conduit à employer des réfrigérants à retlux, et je tiens ce changement pour une condition essen- tielle au succès de l'expérience. <' Pour montrer que dans ma méthode il n'y a pas de destruction appréciable de glycogène, je décrirai brièvement l'expérience suivante : « Une certaine quantité de glycogène fut extraite par la potasse d'un foie de lapin: on pouvait donc la considérer comme ne contenant pas de dextrine. Après dissolution dans l'eau, on versa 40 ce. de la solution dans 500 ce. d'alcool méthylique pour précipiter le glycogène; on prit ensuite delà môme solution 40 ce, qu'on traita par de la potasse, de manière que la solution fût de 10 p. 100 de potasse. Après une demi-heure de coction, on précipita par l'alcool, et on neutralisa par l'acide acétique. Le précipité des 40 pre- miers cc.se sépara rapidement eu flocons, au-dessus desquels surnagea une liqueur pai^- faitement claire. Le précipité des autres 40 ce, comme cela se passe après coction avec la potasse, se précipite au contraire en flocons très Ans et ne se dépose que lentement. Au bout de trois jours, la liqueur était limpide : on rassemble le précipité, on le transfor- me par l'acide sulfurique en sucre qu'on dose. Le glycogène déterminé ainsi pesa, dans la première expérience, 0s%lC6; et, dans la deuxième, 0fi'',162.La coction avec la potasse n'a donc occasionné qu'une perte de 4 milligrammes, qui répond à 2,4 p. 100. <( Dans une autre expérience analogue, la solution avec coction dans la potasse a donné 0 er^liO. Avant la coction on a eu 0 g^^^l2. La perte a donc été de 1,8 p. 100. « Ainsi que je l'ai remarqué dans mon livre (p. 152) les dextrines ne résistent pas à l'action de la potasse autant que le glycogène et les amidons, de sorte que, si ces deux dernières substances étaient altérées par la coction avec la potasse, on devrait constater des pertes plus ou moins considérables. D'ailleurs, le glycogène qu'on a employé dans cette expérience avait été obtenu par l'action de la potasse sur le foie. i' Il est essentiel (loc. cit., p. 63), que le tissu soit pulvérisé à l'état de poudre aussi fine que possible, pour que les matières azotées soient complètement transformées parla potasse à 10 p. 100, et assez pour que le dosage ultérieur du sucre avec la solution cui- vrique ne soit pas troublé par la réaction du biuret. « Quelques grammes du foie pulvérisé et séché sont mis dans un vase avec SO ce. d'une solution de potasse à 10 p. 100. Il est bon de laisser le mélange vingt-quatre heures au froid, ce qui suffit pour obtenir ensuite la dissolution complète après coction pendant une demi-heure. « Pour éviter la concentration de la solution potassique par l'évaporation, et pour empêcher l'action de la coction sur les hydrates de carbone, on dispose un réfrigérant à reflux, et on fait la réaction dans un vase assez grand pour n'être pas gêné par la mousse de l'ébullition. » On verse les 50 ce. dans 500 ce. environ d'alcool méthylique pour séparer et précipi- ter les hydrates de carbone ; s'il y a moins d'alcool, on peut craindre que la précipitation ne soit pas complète. Le vase est mis de côté jusqu'au jour suivant: la séparation du précipité s'est faite alors complètement, ce qui rend la filtration ultérieure plus facile. « Pour cette filtration il y a avantage à se servir de coton de verre ; car le papier à filtre contient souvent avec sa cellulose quelques matières amylacées, et l'on peut ainsi, en même temps que le glycogène, entiaîner des substances qui donnent du glucose quand on fait le lavage du filtre. « Le précipité est alors soigneusement lavé avec de l'alcool : le tampon de coton de verre est mis dans un vase, et l'entonnoir est lavé avec un peu d'eau chaude. Si l'on a dû employer beaucoup d'eau, il faut en concentrer le volume jusqu'à 50 ce. environ. En- suite on place le tout dans un flacon, on y ajoute de l'acide sulfurique, assez pour que le titre devienne de 2 p. 100: on chauffe, et on obtient une liqueur réduisant l'oxyde de cuivre. K Généi'alement, on observe la formation d'un corps qui se précipite sous forme de 260 GLYCOGENE. matière foncée, et il ftuit l'éliminer par filtration avant de neutraliser le tout, car ce corps se dissout dans la potasse et gênerait le dosage du sucre en colorant les liqueurs. Le filtre doit être assez petit pour qu'on puisse le laver facilement sans augmenter nota- blement le volume du liquide. On neutralise exactement l'acide avec delà potasse, ce qui provoque encore la formation d'un précipité fortement coloré, lequel est quelquefois en assez grande proportion. On le sépare sur filtration par un filtre sec, et on ramène le volume de la liqueur à un volume déterminé. « Alors, on titre le glucose par la réaction cupro-amraoniacale, et le résultat s'ex- prime en glucose ou en glycogène; l'équivalent du glucose et des amidons étant res- pectivement de 180 et de 162, le rapport est de 0,9, de sorte que, pour changer le chiffre de glucose en chiffre de glycogène, il suffira de multiplier le poids de glucose obtenu par ce rapport 0,9. » Dosage quantitatif du sucre par le réactif cupro-ammoniacal de Pavy (W. Pavy. {Journ. ofthechcm. Soc, xxxvii, ol2, 1880. — Lancet, mars 1884. — The Phy- siology of the Carbohydratcs, 58, 1894). — 0. Hehner. [Chem. Centralbl., 1879, 406. — Zeitsch. f. anal. Chem., x:x, 100. — The Analyst, vi, 218. — Zeitsch. f. anal. Chem., xxii, 447, 1883.) — Pavy décrit sa méthode d'une manière si diffuse et si obscure que c'est peut-être la raison pour laquelle elle a été si peu employée. — Nous allons cependant essayer de l'exposer aussi fidèlement que possible. L'action de la solution ammoniacale d'oxyde de cuivre consiste essentiellement en ceci : que l'oxydule de cuivre obtenu par l'action réductrice du sucre ne se précipite pas sous la "forme d'une poudre rouge, mais reste dans la solution incolore, et, comme la réduction s'accompagne de la décoloration de la liqueur, il n'y a aucune dilficulté à constater la fin de la réaction. L'ammoniaque n'a aucune action perturbatrice : elle a l'avantage de rendre la réaction plus sensible en rendant plus intense la couleur bleue de la solution cuivrique; et, ce qui est fort important, la présence de cette ammoniaque rend la solution plus stable, car au contact de l'air le cuivre passe à l'état de peroxyde, et le précipité d'oxydule ne se forme plus bien. Voici la composition de la solution cupro-ammoniacale de Pavy : gr. Sulfate de cuivre en cristaux 4,158 Tarlratc de sodium et de potassium 20,400 KOH 20,400 Solution ammoniacale de 0,880 comme poids spécifique 300", 00 Le tout est ramené à un litre par addition d'eau distillée. Pour préparer ce réactif, on dissout dans un vase la potasse, et le tartrate et le sul- fate de cuivre dans un autre vase. Cette dernière solution ne se fait qu'à chaud : quand elle est complète, on mélanure les deux liqueurs, et, quand elles sont refroidies, on ajoute la solution ammoniacale pour compléter ensuite le volume à un litre avec de l'eau distillée. 10 ce. de cette solution cuivrique répondent à Os^005 de glycose. Pavy veut que pour les recherches physiologiques le titre de la solution soit chaiiue fois déterminé par le dosage d'une certaine quantité de sucre pondéralement déterminée. Pour cela, il dissout 0''',250 de sucre de canne dans 50 ce. d'une solution d'acide citrique à 2 p. 100, on chauffe, on invertit le sucre de canne, et, après refroidiss^-ment, on neutralise par la potasse, et on ajoute de l'eau distillée jusqu'à un volume de 250 ce. Les quantités nécessaires de cette solution pour faire la réaction sont de 10 ce. ou de 5 ce. En étendant les liqueurs, on obtient des résultats aussi exacts que si l'on employait une plus grande quantité de rénctif et une solution plus concentiée de sucre. L'appareil nécessaire pour le dosage consiste en un flacon d'environ 150 ce. Le bou- chon de ce flacon est à 2 tubulures : l'une de celles-ci est traversée par l'extrénnté d'une burette de Mohr, et l'autre donne issue aux gaz et à la vapeur qui se dégagent par la coction du liquide dans le ballon. Pavy emploie une pince à pression pour régula- riser l'écoulement de la liqueur sucrée dans le flacon. On a placé dans ce même ballon 10 ou 5 ce. de la solution cuivrique avec 20 ce. d'eau distillée. Un brûleur de Bunsen GLYCOGENE. 261 chauffe ce liquide dans le ballon. Dès que l'ébullitioii a commencé, on laisse tomber la solution sucrée de la burette avec une rapidité de 60 à 100 gouttes par minute, d'après les changements de teintes qui se produisent, pour déterminer exactement le moment précis de la décoloration, : on place le ballon devant une plaque de porcelaine blanche, et on arrête l'écoulement du liquide sucré dès que la liqueur est décolorée. Une lecture de la burette indique la quantité de liquide sucré qui a été nécessaire pour la décoloration. L'expérience doit être plusieurs fois répétée. Pavy décrit encore diverses précautions à prendre dans la conduite de cette analyse; mais nous ne pouvons entrer dans ces détails. 11 est difficile de porter un jugement précis sur l'emploi méthodique du procédé de Pavy; car assurément il n'a pas connu les recherches fondamentales de F. Soxhlet rela- tives à l'action des divers sucres sur les solutions alcalines de cuivre et de mercure {Journ. f. prakt. Chem., (2), xxi). Soxhlet a prouvé que la concentration du sucre, et beaucoup d'autres conditions, modifient le dosage dans des proportions notables, et Pavy semble ignorer ces faits. Ce n'est que dans des cas particuliers qu'il a contrôlé l'exac- titude de son procédé de dosage, lequel ne semble pas comporter une application générale. Analyse quantitative du glycogène d'après Pfliiger. — Toutes les méthodes précédentes reposent sur cette croyance invétérée que la potasse, qui sert à dissoudre les tissus préalablement à la recherche du glycogène, détruit de plus ou moins grandes proportions de cette substance. Pavy lui-même croyait à cette action, et il tâchait d'éli- miner cette soi-disant action destructive de la potasse en rendant les organes facilement solubles par une pulvérisation aussi complète que possible. Comme d'ailleurs le seul procédé applicable au dosage du glycogène était la dissolution par la potasse, j'ai voulu étudier à fond celte action, et je suis arrivé à constater que la potasse, môme concentrée, n'attaque nullement le glycogène des organes : j'ai trouvé que l'on ne peut obtenir avec précision le glycogène normal que si l'on n'a pas fait usage du réactif de Brûcke, car la supposition erronée que le- glycogène est détruit par la potasse tient à ce que le réactif de Brùcke a modifié le glycogène. Le fait que le glycogène normal n'est pas attaqué par la potasse concentrée est d'une si fondamentale importance qu'il est nécessaire d'exposer avec détails les recherches qui en donnent la preuve et qui entraîneront toutes les convictions. Rappelons, pour bien faire comprendre ces expériences, qu'avec J. Nebki.ng j'ai indi- qué la méthode qui permet de précipiter dans une solution alcaline des organes tout le glycogène sans azote, c'est-à-dire presque pur [A. g. P., 1899, lxxvi, Îi3l). En effet, quand une solution musculaire contient 3 p. 100 de potasse, et 10 p. 100 de Kl, par l'ad- dition d'un demi-volume d'alcool à 96 p. 100, tout le glycogène est précipité, sans qu'il y ait de l'albumine dans le précipité. Déjà Claude Bernard dissolvait les organes dans la potasse, et précipitait le glycogène par l'alcool : il pensait en effet que la potasse même concentrée n'altère pas notablement le glycogène. Il ne contestait pas qu'il y eût une légère altération; mais il n'a pas fait de recherches quantitatives pour démontrer la résistance du glycogène à l'action de la potasse à chaud; et ni lui, ni les autres physiologistes n'ont étudié à fond la question. Brucke, de Vienne, pensait, lui aussi, que le glycogène n'est pas attaqué par la potasse à chaud, mais il ajoutait que la preuve n'en était point donnée {Ak. W.,(2), 1871, lxui). Sachant que le glycogène précipité de la solution alcaline d'après la méthode de Claude Bernard est toujours plus ou moins accompagné de diverses matières étrangères, et principalement de matières albuminoïdes, il trouva dans l'iodo-mercurate de potas- sium additionné d'acide chlorhydrique un moyen de débarrasser le glycogène de toutes ces impuretés, et c'est à partir de ce moment qu'on a approfondi les propriétés du glycogène ainsi purifié. Alors, en effet, les recherches de Vintschgau et Dietl [A. fj.P., xui, 2^3, 1876j, confir- mées par KuLz (Z. B., 1886, xxu, 161) et Pfllger (A. g. P., 1899, lxxv, 164), prouvèrent que la potasse, même diluée à 1 ou 2 p. 100, attaque le glycogène. S'il en était ainsi, la solution des organes dans la potasse à chaud ne peut évidemment pas donner de 262 GLYCOGENE. chiflïes exacts pour la teneur de ces orf,'anes en glycogène, et tous les chiffres obtenus doivent conduire à des valeurs trop faibles. Pour connaître les causes et l'étendue de cette erreur, j'ai prié Joseph Nerking, chimiste de mon laboratoire, de rechercher l'influence de la concentration d'une dissolution potassique agissant d'une manière plus ou moins prolongée sur le glycogène. 11 a vu qu'on ne doit pas employer la potasse, parce que tantôt elle augmente, tantôt elle diminue le rendement en glycogène (A. g. P., Lxxxi,39). D'après Nerking l'action de la potasse s'exerce de deux manières : « tantôt elle dégage du glycogène qui était combiné aux organes, tantôt elle détruit le glycogène déjà en solution. Selon que l'un ou l'autre processus l'empoite, on obtient plus ou moins de glycogène. » Si cette observation de Nerking est exacte, toutes les analyses de glycogène faites par cette méthode de la potasse doivent être considérées comme sans valeur, et pourtant, de fait, presque toutes les analyses données par les auteurs ont été entreprises par cette méthode. En effet, Richard Kûlz avait déjà fait remarquer que le glycogène, après précipita- tion des albumines par le réactif de Brixke, se sépare sous forme de poudre, et n'a que peu de tendance à adhérer au verre, tandis que le glycogène préparé et purifié par la méthode de Brucke-Kijltz, puis chauffé dans une solution de potasse à 2 p. 100, n'est plus précipité par l'alcool sous forme de flocons, mais se dépose sur les parois du verre comme une résine transparente, ce qui semble montrer que l'action répétée du réactif de Brûcke employé pour purifier le glycogène en réalité l'altère. Par conséquent, la question se posait de savoir si le glycogène des organes ne con- tient pas une autre substance que le glycogène de Brucke, et s'il n'est pas alors inatta- quable par la potasse, tandis que le glycogène, modifié par les réactifs de Brucke, est devenu attaquable. Preuves que le glycogène n'est pas attaqué par la potasse concentrée par une ébuUition prolongée. — J'ai dû alors étudier le glycogène préparé sans qu'il y ait eu action des réactifs de Brucke. Série I. — Glycogène musculaire prépare ,s«»,s les acides de la viande, sans cocfion avec la potasse, sans action du réactif de Brucke. 700 grammes de viande de cheval, fraîche, sont mis en poudre, broyés avec du car- bonate de chaux et placés dans un ballon de 1 500 ce. de capacité, contenant 700 ce. d'eau bouillante. On chauffe vingt-quatre heures au bain-marie, on verse sur un filtre, et le filtrat clair est précipité par l'oxalate de potasse, puis filtré. A 830 ce. de ce filtrat, on ajoute 83 grammes de Kl, et 50 ce. de potasse à 72 p. 100. La solution contient donc environ 4,1 p. 100 de KOH. On précipite par 420 ce. d'alcool à 96 p. 100 : il se sépare une matière pulvérulente très fine qui passe à travers tous les filtres. Le précipité est lavé par une solution contenant 66 grammes de Kl; 666 ce. de potasse à 4 p. 100; 333 ce. d'alcool à 96 p. 100. Ce glycogène, lavé ainsi et redissous dans l'eau, ne se trouble plus par l'action du réactif de Brucke, Pour éliminer la potasse fixée au glycogène, on le lave sur le filtre avec d.e l'alcool à 90 p. 100, et, comme ce lavage ne suffit pas, on le redissout à froid dans l'eau stéri- lisée, et on le précipite par l'alcool : il se sépare en fiocons. Le lendemain on le filtre, on le lave à l'alcool à 86 p. 100 jusqu'à disparition de toute réaction alcaline. On le redissout dans l'eau stérilisée, et on porte le volume de la solu- tion à i litre. On prélève alors de cette solution 100 ce. plusieurs fois pour effectuer les recherches suivantes : Expérience I. — Pour connaître la quantité de glycogène contenue dans 100 ce, on prend 100 ce. de celte solution de glycogène qu'on met dans un ballon gradué de 500 ce; on ajoute 100 ce. de HCl à 4,4 p. 100 et une solution de HCl à 2,2 p. 100 en quantité suffisante. Après ébuUition pendant trois heures, on obtient : Analyse I. : 0,1417 de Cu'^O. Analyse II : 0,1425 de Cu'^O. En moyenne 0,1421; répondant à 0,1262 de Cu et à 0,0376 de sucre. Le contrôle Car la métliode de Volhard donne 0,12S4 de Cu et 0,0572 de sucre; par pesée, 0,1262 de pu et 0,0576 de sucre. GLYCOGÈNE. 263 Donc 100 ce. de la solution primitive de glycogène contenaient, d'après la méthode VoLHARD, 0,3518 de sucre. Expérience II. — L'expérience I devait être modifiée de telle sorte que le glycogène fût précipité avant l'inversion exactement par les mêmes procédés que les procédés employés pour le dosage même du glycogène des organes. On met dans un flacon 100 ce. d'eau avec 50 grammes de Kl, 100 ec, de potasse à 71,48 p. 100; 200 ec. d'eau, oOO ce. d'alcool et 100 ce. d'une solution de glycogène. Le glycogène se sépare en petits flocons qui nagent dans un liquide limpide : on filtre rapi- dement et facilement sur un filtre suédois. Le glycogène est lavé sur le filtre avec de l'alcool à 80 p. 100, jusqu'à disparition de la réaction alcaline. On le redissout dans de l'acide chlorhydrique à 2,2 p. 100; on met dans un ballon de 500 ce, on fdtre et on invertit, 81,3 ce. de cette solution donnent. Analyse I : 0,1407 de Cu^O, soit 0,125 de Cu. — Analyse II, 0,1408 de Cu-0. Contrôle d'après Volhard. — 0,1249 de Cu répondant à 0,0569 de sucre. Contrôle par pesées. — 0,1250 de Cu. Par conséquent 100 ce. de la solution primitive de glycogène contiennent 0,3500 de sucre. Or l'expérience I, dans laquelle le glycogène n'avait [pas été précipité, et par consé- quent où il ne pouvait plus y avoir de pertes, a donné : 0,3518 de sucre. alors que la solution alcaline de glycogène à 14,03 de KOH p. 100, précipitée par son volume d'alcool, a donné pour la même quantité de liqueur glyeogénique : 0,3500 de sucre. Cette expérience prouve donc que par ce procédé le glycogène est précipité sans perte. Expérience III. — 100 ce. de la solution glyeogénique sont mélangés à 100 ce. de la solution potassique à 71 ,9 p. 100, et chauffés deux heures et demie au bain-marie. Après refroidissement on verse la liqueur dans un vase ; on ajoute 300 ce. d'eau de lavage avec 50 grammes de Kl. On dissout, on précipite par 500 ce. d'alcool à 96° : il se fait un pré- cipité pulvérulent qui n'adhère pas au verre. Après lavage avec une solution de KOH, de même titre et d'alcool, le glycogène est dissous dans de l'acide chlorhydrique à 2,2 p. 100 : on intervertit et on ramène au volume de 500 centimètres cubes en ajoutant de l'acide chlorhydrique à 2,2 p. 100, 81,3 de cette solution sucrée donnent : Analyse 1. —0,1385 deCu^O. Analyse II. — 0,1392 de Cu^O. Le contrôle par la méthode de Volhard donne : 0,1238 de Cu répondant à 0,0564 de sucre. Contrôle par pesée : 0,1232 de Cu. Par conséquent d'après Volhard, 100 ce. de la solution glyeogénique contiennent 0,3469 de sucre. Expérience IV. — Identique à l'expérience III, à cela près que la eoction dure vingt- deux heures. On obtient par pesées : Analyse I. — 0.1380 de Cu^ 0. AnalyseIL — 0,1385 de Cu- 0. En moyenne : 0,1383 de Cu* 0. répondant à 0,1228 de Cu. Le contrôle d'après Volhard donne : 0,1245 de Cu. 264 GLYGOGENE. soit 0,0367 de sucre. Par conséquent, d'après Volhard, 100 ce. de la solution glycogénique contiennent 0,3490 de sucre. Cette expérience prouve que le glycogène du muscle qui n'a pas encore été chauffé avec la potasse n'est pas attaqué par la coction avec la potasse même très concentrée. On ne peut donc pas dire que la potasse sépare le glycogène des organes en deux parties; une partie que la potasse attaque, et une autre qu'elle n'attaque pas. Il ne reste plus que celte possibilité qu'il se fasse dans les organes une sorle deglyco- gène-dextrine soluble dans l'alcool, et par conséquent échappant à la précipitation. La partie essentielle de cette première série de recherches peut se résumer dans le tableau suivant : TABLEAU I Glycogène de la pulpe de viande neutralisée qui n'a été en contact ni avec la potasse chaude, ni avec les réactifs de Brûcke. 100 ce. DE SOLUTION 100 ce. -DE SOLUTION glycogénique. 100 ce. à l'ébullition 100 ce. à l'ébullition sans précipitation Précipitation pendant 2 h. 1/2 pendant 22 h. du glycogène d'une solution avec KOH à 71,9 avec KOH à 71,9 et immédiatement fortement alcaline p. 100 (100 ce.) p. 100 (100 ce). invertis, par son volume ont donné, ont donné. ont donné en sucre. d'alcool, ont donné préc. par l'alcool, préc. par l'alcool, en grammes. en sucre, eu sucre. en sucre. en grammes. en grammes. en grammes. I. ..... . 0,3.j18 0,3.500 0,3469 1 » II III IV. » » 0,3490 1. Ce chiffre plus faible tient à ce que les tubes munis de filtres d'amiante 8 et 9 étaient altérés, et pour cela on a cessé de les employer. Série IL — Extraction du glycogène de la pulpe de viande neutralisée. Précipitation par l'alcool. Chauffage avec la potasse concentrée. 1 kilogramme de viande de cheval fraîche réduite en pulpe est mis dans un litre d'eau bouillante dans une capsule de porcelaine : on neutralise par la soude et on chauffe dans un flacon pendant 24 heures au bain-marie ; 500 ce. du filtiat sont précipités par 1 000 ce. d'alcool à 96 p. 100 : on filtre : le précipité est broyé dans l'alcool absolu : on filtre, on mélange avec de l'éther dans un flacon fermé, après filtration on obtient une poudre fine. Après évaporation de l'éther, cette poudre est agitée dans un flacon d'un litre avec de l'eau chaude privée d'acide carbonique; après refroidissement on filtre, et sans autre purification on dissout ce glycogène. Il n'a été au contact ni avec les acides, ni avec la potasse : il est donc mélangé à des impuretés. Nous éliminerons de ces expériences les expériences I et II, qui sont défectueuses, et nous ne prendrons que celles qui portent sur les tubes IV et III. Tube 4. Expérience I. — 200 ce. de la solution glycogénique sont amenés à un vo- lume de SOO ce. par addition d'acide chlorhydrique dilué, de telle sorle que l'acidité réponde à 2,2 p. 100 de HCl. On invertit, et après inversion on trouve que 81,3 de la solution répondent à 0,1172 de Cu (soit 0,132 de Cu^ 0), d'après Volh.\rd à 0,10818 de Cu, soit : 0,0487 de sucre. Par conséquent la solution glycogénique contient, pour 100 ce, 0,150 de sucre. Expérience II. — Exactement comme l'expérience I : la pesée donne 0,H7 de Cu; GLYCOGENE. 563 d après VoLiiARD, 0,1073 de Ca, soit 0,0i8i de sucre. Donc 100 ce. de la solution glyco- génique contenaient 0,140 de sucre. Expérience III. — 200 ce. de la solution glycogénique sont additionnés de 100 ce. de potasse à 71,96 p. 100. On chauffe au bain-marie pendant 17 heures, après refroidisse- ment on ajoute de l'eau, de manière à faire 500 ce. Ou précipite par 500 ce. d'alcool à 96 p. 100 ; au bout de 2 heures on filtre sur un filtre suédois, presque tout le glycogène en forme de flocons reste dans le verre; on lave à l'eau qui passe par le filtre dans le même verre : on redissout le glyeogène, on neutralise par l'acide chlorhydrique, et ou ajoute peu à peu du volume égale d'acide chlorhydrique à 4 p. 100. Le tout est ramené à avec addition de HCl, à 2,2 p. 100. On invertit, et on trouve pour 81,3 ce. de la solution oOOcc. 0,1217 de Cu2 0 = 0, 108 Cu et d'après Volhard 0,10937 de Cu, soit 0,0493 de sucre. Par conséquent 100 ce. de la solution glycogénique contiennent 0,1516 de sucre. Expérience IV. — Comme l'expérience 111. 81,3 ce. de la solution glycogénique don- nent par pesée 0,1239 de Cu-0, soit 0,11002 de Cu, d'après Volhard 0,10918 de Cu, soit 0,0492 de sucre. Par conséquent 100 ce. de la solution de glyeogène contiennent 0,1513 de sucre. Expériences avec le tube III. Expérience V, — Comme l'expérience I, 81,3 donnent par pesée 0,1273 de Cu-0, ou 0,113 de Cu; soit, d'après Volhard, 0,1050 de Cu et 0,0472 de sucre. Par conséquent 100 ce. de la solution glycogénique donnent 0,1451 de sucre. Expérience VI. — Exactement comme la précédente. 81,3 de la solution suere'e don- nent par pesée 0,1283 de Cu- 0, ou 0,1139 de Cu, soit, d'après Volhabd, 0,1050 de Cu, soit 0,0472 de sucre. Par conséquent 100 ce. de la solution glycogénique contiennent 0,1451 de sucre. Expérience VII. — Comme l'expérience III. 81,3 de la solution sucrée donnent par pesée, 0,1221 de Cu^ 0, ou 0,1084 de Cu, soit, d'après Volhard, 0,1075 de Cu, soil 0,0484 de sucre. Donc 100 ce. de la solution glycogénique contiennent 0,1488 de sucre. Expérience VIII. — Comme l'expérience VII. 81,3 ce. de la solution sucrée donnent par pesée 0,1106 de Cu; d'après Voluard 0,1192 de Cu, soit 0,0492 de sucre. Donc 100 ce. de la solution glycogénique donnent 0,1513 de sucre. Les faits principaux sont mis en évidence dans le tableau suivant : TABLEAU II Pulpe musculaire traitée par Teau bouillante sans acide, glyeogène précipité par Talcool, sans que ses propriétés aient pu être modifiées par l'action dé ia potasse ou du réactif de Bri ( ke. SOLUTION DE GLYCOGENE IMMÉDIATEMENT TRAITÉE TAR HCl, ET INVERTIE. 100 ce. ont donné en sucre, en o;rammes. SOLUTION DE GLYCOGENE CHAUFFEE 17 HEURttS au bain-marie avec une solution de potasse à 3R p. 100. Précipitation du glyeogène par son volume d'alcool. 100 ce. de la solution glycogénique ont donné en sucre, en grammes. il 0.1500 0,1490 0,1451 0,1451 1) » 0,1520 0,1521 0,1488 0,1513 ^. . . 1 II berie A. ( „, (IV V „, . „ VI berie B. < .„. ( VIII Moyenne 0,1473 0,151 266 GLYCOGÈNE. La coction avec la potasse concentrée a donc augmenté le glycogène de 2,5 p. 100. Quelques autres explications sont encore nécessaires. 1° Le dosage du sucre par la pesée de l'oxydule de cuivre donne des résultats tout à fait concordants avec le procédé de Volhard, quand le glycogène a été avant l'interver- sion chauffé avec la solution concentrée de potasse; mais, quand la solution glycogéni- que a été invertie sans avoir été au préalable traitée par la potasse, la pesée de l'oxy- dule de cuivre a toujours donné des chiffres notablement plus forts que ceux de la méthode de Volhard. Il est évident que c'est parce que les albuminoïdes ont été modifiés par la coction avec la potasse, de telle sorte qu'alors ils ne sont plus après inversion précipités par la solution cupro-alcaline. 2° A première vue il semble que la coction du glycogène avec la potasse concentrée ne diminue pas, mais augmente le rendement. A vrai dire, les différences de chiffres sont assez faibles pour qu'on puisse peut-être les attribuer à des erreurs d'analyses, impos- sible à éviter, car la destruction du sucre dans le dosage ne peut pas être rigoureuse- ment identique dans toutes les conditions, de sorte que peut-être les impuretés qui n'ont pas été éliminées par le traitement avec la potasse peuvent modifier les conditions d'oxy- dation du sucre. 3° Ces expériences prouvent qu'en précipitant l'extrait musculaire neutralisé par deux fois son volume d'alcool il ne se précipite pas de glycogène que la potasse à chaud décompose. 4° Mais on peut supposer que dans l'extrait musculaire il y a des dextrines qui ne sont précipitées que par de grandes quantités d'alcool, ou même qui sont solubles dans l'alcool. Série III. — On a préparé une solution de glycogène extrait de la viande de cheval, sans avoir fait agir sur lui le réactif de BrI cke. Dans un flacon de 1 230 ce. on mélange 250 grammes de pulpe musculaire de cheval fraîche avec 500 ce. d'eau et 500 ce. de potasse contenant 70,5 de KOH. La liqueur contient donc environ 5,6 p. 100 de KOH, si l'on ne tient pas compte de la contraction, et si l'on suppose que 250 grammes de viande correspondent à 250 ce. Une coction de une heure un quart au bain-marie suffit pour tout dissoudre. Après refroidissement on précipite par 1 litre d'alcool à 96 p. 100; on filtre; on égoutte le filtre, et, pour éliminer la potasse, on lave le glycogène avec de l'alcool ; on dissout dans l'eau bouillante : on précipite la solution par trois fois son volume d'alcool. Une poudre blanche, neigeuse, se précipite. On filtre sur un filtre suédois, on lave à l'alcool, et on dissout dans l'eau. On prélève trois portions de cette solution dans trois flacons de 200 ce. de capacité ; on verse 100 ce. de la solution susdite de glycogène dans chaque flacon; on introduit 100 ce. d'une solution qui contient 71,79 de KOH. Par conséquent, à cause d'une contraction notable, la solution contient un peu plus que 35,89 p. 100 de KOH. Alors on dispose l'expérience suivante avec les trois flacons. Flacon I. ^- Dans un vase on met 150 ce. d'eau avec 50 grammes de Kl : dans le bal- lon on met 200 ce. de la solution glycogénique, le ballon est lavé avec 150 ce. d'eau, on ajoute un demi-litre d'alcool à 96 p. 100; le glycogène, précipité par l'alcool à 96 p. 100, est lavé jusqu'à disparition de la réaction] alcaline : on invertit dans un ballon de 300 ce; et on trouve qu'il contient pour 81,3 ce. ^« analyse : 0,1537 de Cu^O. 2« analyse : 0,1457 de Cu-^O. Soit, d'après Volhard, 0,1291 et 130,1 de Cu répondant par conséquent pour 300 ce, à Osr21845 de sucre. Flacon II. — Exactement traité comme le précédent à cela près qu'il a été d'abord chauffé 12 heures au bain-marie. On trouve pour 81'='", 3, 0,159 de Gu'^ 0 répondant à 0,141 de Cu, et, d'après Volhard, 0,133 et 0,1317 de Cu, en moyenne 0,1324 de Cu ; soit, pour 300 ce. de la solution, 0,2236 de sucre. Flacon III. — Chauffé 62 heures au bain-marie, traité comme le flacon n" 2. On trouve pour 81,3 ce. de la solution 0,1528 de Cu (0,1721 de Cu^ 0) et, d'après Volhard, 0,1331 et 0,1331 de Cu, ce qui répond à 0,0609 de sucre et à 0,22472 de sucre pour 300 ce. de la solution. Par conséquent ces trois expériences montrent en toute évidence qu'il y a dans les GLYCOGENE. 267 organes des animaux un glycogène qui peut être traité par une solution potassique concentrée sans s'altérer, je devrais dire, sans qu'on constate ultérieurement une diffé- rence dans le pouvoir réducteur de la liqueur de P'ehling. TABLEAU III Glycogène préparé sans action du réactif de Briicke. TROIS BALLONS DE 200 CC. SONT REMPLIS DE 100 CC . DE LA SOLUTION GLVCOGÉNIQUB et de 100 ce. d'une solution de KOH à 71,79 p. 100. Après coction on dilue, ou précipite par le volume d'alcool, et on invertit le glycogène. La durée de coction a été I heures 0 » heures )) 12 heures » » 62 II m LE SUCRE TROUVÉ A ÉTÉ, EN GRAMMES I 0,2184 0,2236 0,2247 II III Comme, dans toutes mes recherches, je précipitais le glycogène de l'extrait aqueux des organes par l'alcool, on peut admettre comme possible que l'alcool n'ait pas précipité une sorte de dextrine glycogène qui existe dans les organes; mais la question n'est pas certaine, et l'avenir en jugera. B. — Dosage du glycogène contenu dans les organes. J'ai montré que le glycogène isolé n'est pas détruit par la potasse concentrée. On peut donc se demander si le glycogène contenu dans les tissus se comporte à ce point de vue comme le glycogène isolé, et s'il n'est pas partiellement détruit par la potasse à chaud. RicH.\RD Ki'Lz, après avoir montré que le glycogène soigneusement purifié par lui était rapidement altéré par la potasse diluée, arriva cependant à cette conclusion que les ana- lyses du glycogène des organes traités par la potasse diluée lui montraient pour des rai- sons inconnues que le glycogène n'avait pas été altéré. Mais j'ai établi par d'autres recherches que les expériences mêmes de KOlz ne prouvent pas du tout les conclusions qu'il adopte. Je suis arrivé aux mêmes résultats expérimentaux que KrLz;j'ai comparé le rende- ment en glycogène, en traitant d'après le procédé de KClz une portion de la pulpe des organes par la potasse diluée d'une part et d'autre part une portion d'abord par l'eau, qui extrait une grande partie du glycogène, et enfin j'ai dissous dans la potasse le préci- pité insoluble qui reste alors. Or les deux méthodes m'ont fourni à peu près les mêmes quantités de glycogène, quoique dans l'une des méthodes l'on ne puisse invoquer l'ac- tion de la potasse. Par conséquent l'idée la plus simple est que le glycogène des organes n'est pas attaqué par la potasse. Comme les analyses de ViiNTscHG.\u et Dietl, de Kï'lz et de moi ont montré que le glycogène, purifié soigneusement parla méthode de Brucke KiJLz, est attaqué par la même solution de potasse,j'en ai déduit cette conclusion que la potasse qu'on emploie dans le procédé de KClz forme des albuminates de potasse, de sorte que c'est cette albumine qui, en se combinant à la potasse, empêche l'altéra- tion du glycogène. Il y a peut-être quelque vérité dans cette assertion. Mais, ayant prouvé qu'on peut isoler le glycogène des organes dans un état tel qu'il n'est pas attaqué par la potasse forte, qu'il est précipité par l'alcool en flocons non 268 GLYCOGENE. adhérents au vase, tout comme dans l'analyse directe des organes, il est probable que la méthode de purification par le proce'dé de BrOcke-Kuhz altère le glycogène, et que cette altération apparaît quand on précipite le glycogène par l'alcool ; car alors le pré- cipité n'est plus pulvérulent; mais adhère comme une résine aux parois de verre : c'est un point que Kllz a d'ailleurs établi (Z. B., xxu, 173). Il est donc prudent de ne pas conclure du glycogène isolé au glycogène des organes sans une étude préalable. Il était donc nécessaire de savoir si, en chaufîant longtemps les organes avec la potasse, on leur fait perdre du glycogène. Les expériences suivantes décident la question. Série IV. — On mélange 500 ce. d'eau avec 500 ce. de potasse contenant 72,5 p. 100 de KOH et 264 grammes de pulpe musculaire de cheval fraîche : par conséquent 1200 ce. de la solution contiennent 262,3 grammes de KOH, ou 30,2 p. 100. Dans ces conditions, au bain marie, la chair musculaire se dissout en une demi heure : on filtre. Expérience I. — 100 ce. du filtrat servent aux dosages du glycogène par la méthode de PfLÛGER-NERKiNG ; le glycogène est inverti : on y détermine le sucre par ma méthode de l'oxydule de cuivre. La quantité de glycogène a été, après une demi-heure de coction avec la potasse h 2 p. 100, de 1,882 p, 100. Expérience II. — 500 ce. du même filtrat primitif sont chauffés au bain marie pendant 42 heures; après refroidissement on ramène le volume au volume primitif, et on déter- mine la quantité du glycogène par la même méthode : on trouve 1,864 p. 100. La perte n'est donc pas tout à fait de 1 p. 100, c'est-à-dire qu'elle est dans les limites de l'er- reur expérimentale. Série V. — Expérience I. — Dans un flacon de 1 250 ce. on met 100 ce. d'eau avec 50 ce. de potasse à 72,5 p. 100. On ajoute par portions 200 grammes de pulpe de viande de cheval ; le titre de la solution est donc d'environ de 12 p. iOO de KOH. En quelques minutes toute la viande est dissoute. On ramène le volume à 1 230 ce, ce qui ne peut être fait exactement; car le liquide était surmonté d'une couche fine de graisse qui rendait difficile la mesure exacte. On filtre : on précipite par 120 grammes d'iodure de potassium + 600 ce. d'alcool : le glycogène est séché et lavé avec la solution suivante : 1000 ce. d'eau, 100 grammes de Kl, 500 ce. d'alcool a 96 p. 100, 50 ce. de potasse à 72,5 p. 100. Puis on lave trois fois à l'alcool à^6G p. 100 contenant un peu de chlorure de sodium. Tout le précipité est alors dissous dans 300 ce. d'eau. On en prélève 100 ce. : on précipite par la méthode de Pflûger-Nerking, on lave, on invertit et on ramène à 500 ce. Pour 81,3 de la solution pure, on trouve 0,2040 de Cu-0 (tube 3) et 0,2043 de Cu-0 (tube 4), soit 0,0847 de sucre. Par conséquent dans les 500 ce. de la solution sucrée il y avait 0,3210 de sucre résultant de 100 ce. de la solution glycogénique, ce qui correspond par conséquent pour 200 grammes de viande à 2,605; et, pour 100 gr., à 1,303 de sucre (Petite perte dans l'analyse). Expérience II. — On prend, comme dans l'expérience I, 200 grammes de la même pulpe musculaire, qu'on traite par 100 ce. d'eau additionnée de 50 ce. dépotasse à 72 p. 100. Le titre de la solution en potasse est donc environ 12 p. 100, si l'on admet que 200 grammes de viande répondent à environ 150 grammes d'eau. Pendant vingt-huit fois vingt-quatre heures le mélange est chauffé au bain-marie dans un ballon dont on empêche l'évaporation en le recouvrant d'un verre de montre. On ramène alors la solution devenue épaisse à un volume de 1 230 ce. On filtre : 500 ce. du filtrat correspondant à 80 gr. de viande : on précipite par 500 ce. d'alcool con- tenant 50 gr. de Kl. Le précipité est lavé par une solution contenant lOCOcc. d'alcool à 96 p. 100, 1 000 ce. de potasse à3 p, 100 et 100 grammes de Kl : puis le glycogène est lavé dans l'eau, précipité par 4 lois son volume d'alcool; il se forme de beaux flocons blancs; on filtre, on lave dans l'alcool à 86 p. 100. On invertit par HClà2,2 p. 100.81,3 de la solution sucrée donnent Os^ogS? de sucre, et, d'après Volhard, Os%0972 de sucre. Par conséquent 500 ce. du filtrat contiennent 1,1956 de sucre, soit 2,0989 pour les 1250 ce. du filtrat. Comme ces 1250 ce. répondaient à 200 de ^viande, il s'ensuit que le glyco- gène de 100 grammes de viande a donné 1,4945 de sucre. GLYCOGÈNE. ^269 Expérience lll. — 200 gi-amnies de cette même pulpe musculaire sont traités comme dans l'expérience II, mais chauffés pendant oO fois vingt-quatre heures, au lieu de 28 fois, au bain marie, en recouvrant d'un verre de montre l'orifice du flacon. On verse dans un ballon de 1 250 ce, après avoir par de l'eau exactement ramené la liqueur au volume de 1250 ce. Alors on prélève 500 ce. du filtratqu'on précipite par 500 ce. d'alcool à 96°: le filtrat est limpide. On lave le précipité avec un mélange de 1 litre d'alcool à 96 p. 100 et un litre de potasse à 14 p. 100. On lave ensuite avec de l'alcool à 66 p. 100 pour éliminer l'alcali, et, si cela ne réussit pas, on détache le précipité du filtre, on met le filtre dans l'eau, on neutralise, on fait bouilUir et on filtre. Le précipité broyé est neu- tralisé, bouilli avec l'eau et filtré. Les extraits aqueux réunis sont traités par un volume égal d'acide chlorhydrique à 4,4 p. 100. On ramène au volume de 1000 ce. L'analyse donne pour 81",3; 0 2315 de Cu^O (tube 3); et 0,2328; soit 0,2067 de Cu. D'après Vol- HARD 0,2020 de Cu, soit 0,095 de sucre. Donc les 1250 ce. répondant à 200 grammes de viande ont donné 1,1685 de sucre. Par conséquent 100 grammes de viande contenaient une quantité de glycogène qui a fourni ie''4606 de sucre. Je réunis ces données dans le tableau suivant: TABLEAU V Glycogène du muscle au début 1,303 + A Glycogène après coction pemiant 28 jours avec de l;i potasse à 10 p. 100. 1,494 Glycogène après coction pendant 50 jours avec de la j^otasse à 10 p. 100. 1,461 Je remarquerai aussi que ce glycogène soumis à la coction pendant 50 jours avec de la potasse à 10 p. 100 donnait encore une très belle réaction par l'iode, et précipitait en flocons qui se réunissaient facilement sous la forme d'une masse mucilagineuse. Ainsi il est prouvé que le glycogène peut être chauffé pendant très longtemps à 100° avec une solution très forte de potasse sans être décomposé. Maintenant il faut établir qu'une solution diluée de potasse ne peut pas déterminer l'altération du glycogène; c'est une conclusion qui n'est pas absolument certaine, car les reciierches qui avaient semblé montrer que le glycogène est altéré par la potasse portaient sur la potasse diluée. J'ai fait à ce sujet un grand nombre d'analyses qui m'ont conduit à des résultats tout à fait particuliers. Le glycogène préparé d'après la méthode de Brûcke-Kûlz est le plus souvent en partie décomposé. La perte est d'environ 6 p. 100 en hydrate de carbone, perte mesurée par la réduc- tion de l'oxyde de cuivre. Si l'on précipite le glycogène par deux volumes d'alcool à 96 p, 100, comme c'est le procédé ordinaire, on trouve alors que cette perte s'élève à environ 12 p. 100. Ainsi la coction avec la potasse n'a pas altéré le glycogène autrement qu'en le ren- dant soluble dans l'alcool, prohablement en le transformant en dextrine, au moins pour une partie, tandis que l'autre partie a été détruite plus profondément, et que tout hydrate de carbone a disparu; d'ailleurs la quantité de glycogène détiuite n'a pas changé, que la solution fût chauffée six ou vingt-quatre heures avec la potasse à 2 p. 100. Ainsi, dans Ja solution chautîée, une partie du glycogène est restée intacte, tandis qu'une autre partie a été modifiée par la potasse à 2 p. 100. L'explication la plus simple consisterait à admettre que la préparation contient un mélange de deux corps, un glycogène vrai, qui n'est pas attaqué par la potasse diluée, et un glycogène dextrine. Mais il y a un autre fait très important, c'est que ce glycogène, qui est décomposé par la potasse diluée, résiste pendant quarante heures à la potasse à 36 p. 100 sans être attaqué par la potasse concentrée à chaud. Il seinhle aussi que le glycogène dextrine n'est pas attaqué, à chaud, même par la potasse concentrée. Action de la potasse diluée (1 à 2 p. 100) sur le glycogène. — J'ai donc dû chercher à savoir si le glycogène normal chauffé à 100° avec la potasse à 1 ou 2 p. 100 est attaqué, et je donne ici mes expériences avec quelques légères modifications. 270 CLYCOGENE. D'abord, pour plus de certitude, j'ai voulu éliminer, pour préparer le glycogène, l'action des acides ainsi que celle des réactifs de Brïcke. En premier lieu, il fallait chercher si mon papier à filtre contenait des hydrates de carbone. Or mon papier à filtre suédois, provenant de la fabrique de Munkïell, d'un diamètre de 15 centimètres, résiste à des solutions alcalines très concentrées. Je pris 400 ce. de la solution de potasse à 15 p. 100, avec 400 ce. d'alcool à 96 p. 100, mélange que j'emploie souvent pour la filtration du glycogène, et je fis passer 800 cc.de cette solution parfaitement claire à travers le filtre. La filtration fut longue, et prit plusieurs heures. Quand elle fut terminée, je bouchai l'entonnoir, et je versai au-dessus 100 ce. de la solution de HCl à 2,2 p. 100 : le filtrat était très acide. Je lavai de nouveau le filtre avec la même solution de HCl, et je chaulTai pendant trois heures au bain-raarie pour l'inversion. Pas de traces de réaction sucrée : le sucre étant recherché par la méthode de Pfluger, il n'y eut aucune formation d'oxyde de cuivre, quoique la liqueur bleue restât vingt-quatre heures en observation; par conséquent, il n'y a aucun inconvénient à se servir des filtres suédois. Quand la pulpe des organes a été dissoute à 100° par une solution de potasse à 30 p. 100, je dilue en ajoutant son volume d'eau, et j'obtiens un liquide contenant 15 p. 100 de potasse qu'il faut filtrer parce qu'il s'y forme des tlocons.Les meilleurs filtres sont les filtres résistants de Schleicher et ScHLLL,n° 575, de 32 centimètres de diamètre. Mais, comme le glycogène dissout passe dans le filtrat, on peut se demander si la solution alcaline a pris dans le papier quelques traces d'un hydrate de carbone. Alors je pris 400 ce. d'une solution de potasse à 15 p. 100, je la filtrai trois fois, et je précipitai le filtrat parfaitement clair par 400 ce. d'alcool à 96°. Au bout de plusieurs heures, il s'était formé quelques rares flocons transparents, légers et incolores. Au bout de vingt-quatre heures, je les filtrai au filtre suédois, puis après avoir laissé égoutter le filtre, je le remplis comme précédemment avec de l'acide chlorhydrique à 2,2 p. 100, et je laissai le filtrat acide s'écouler dans le flacon après ébullition pour l'inversion. La solution cuivrique d'ALLHiN ne montra pas de réaction réductrice immé- diatement, mais, après avoir laissé reposer la liqueur pendant vingt-quatre heures, il se déposa au fond du vase une fine matière pulvérulente, qui, après décantation de la liqueur bleue, se présenta comme une poudre rouge en très petite quantité, telle que quelquefois le réactif en donne lorsqu'il est longtemps abandonné à lui-même. Si donc on veut éliminer complètement les causes d'erreurs dues à l'emploi de ces filtres résis- tants d'ailleurs si avantageux il faut pour la filtration des liqueurs alcalines se servir d'amiante ou de coton de verre; car il s'agit de doser les différences très petites et la question est d'une importance fondamentale. Série I. — 250 grammes de pulpe musculaire de viande de cheval sont mis dans un vase d'Iéna de 500 ce. et additionnés de 250 ce. d'une solution de potasse à 60 p. 100 de KOH. La meilleure potasse est celle de Kahlbaum, marquée comme kalium hydrat l'^ (Merck) à 0 marks 60 le kilo. La durée de la coction fut de seize heures. Après refroidissement, on mit dans un ballon gradué d'un litre 500 ce. d'eau sans acide carbonique, qu'on chauffa, et auquel on ajouta la solution musculaire alcaline à chaud; après filtration sur l'amiante, qui ne fut termmée que le lendemain matin, j'obtins 420 ce. d'une solution rouge très limpide ; je précipitai avec 420 ce. d'alcool à 96°, et, au bout de quelques heures, je décantai le glycogène qui s'était précipité. Ce précipité fut mis sur un filtre d'amiante, et, après que le filtre fut égoutté, je lavai plusieurs fois avec un liquide contenant autant d'alcool et de potasse que la solution primitive. Puis le glycogène fut dissous dans l'eau chaude, et le volume ramené à 650 ce. On prit 100 ce. pour diverses expériences : 1" 100 ce. de cette solution sont neutralisés par 2 ce. de HCl à 4,4 p. 100. Expérience I. — Dosage du glycogène, 100 ce. de la solution glycogénique sont addi- tionnés de 2 ce. de HCl à 4,4 p. 100, pour neutraliser l'alcalinité de la liqueur; puis de 100 ce. de HCl à 4,4 p. 100; puis de HCl à 2 p. 100 en quantité' suffisante pour faire 300 ce. On invertit. Après inversion, la liqueur est troublée par une fine poussière; on refroidit et on ramène à 300 ce. avec la solution chlorhydrique à 2 p. 100. Après filtration à travers un filtre suédois, le filtrat est clair et incolore. GLYCOGÈNE. 271 81 centimètres cubes de cette solution sucrée contiennent : analyse I, 0,1826 deCu^O, (tube 4) soit 0,1621 de Cu; analyse II, 0,1816 de Cu^O; (tube 10); soit, d'après VoLHARD, 0,1597 de Cu, soit 0,074 de sucre (tube 4). Par conséquent, 100 ce. de la solution glycogénique répondent à 0,274 de sucre. Expérience II. — Dosage du glycogène précipité par l'alcool avant l'inversion. 100 ce. de cette même solution glycogénique sont alcalinisés par la potasse, de sorte que le titre soit de 2 p. 100 de KOH ; on précipite par 200 ce. d'alcool à 96°. Le glycogène est filtré sur un filtre suédois, mis après neutralisation dans un ballon de 400 ce. et additionné de HCl de telle sorte que la solution contienne 2,2 p. 100 de HCl. Après inversion, on trouve que 81 ce. de la solution sucrée contiennent : analyse I, 0,1773 de Cu-0 (tube 3) (0,lo74 de Cu) ; analyse II, 0,1779 de Cu-^0 (tube 12); d'après VoLHARD, 0,lo91 de Cu, soit 0,07363 de sucre. Donc 100 ce. de la solution glycogénique contiennent 0,273 de sucre. Cette expérience prouve encore que le glycogène dissoua dans une solution de jiotasse à 2 p. 100 est totalement 'précipite par 2 volumes d'alcool à 56°. Expérience III, — 100 ce. de la solution glycogénique additionnés de 4 grammes de KOH et d'eau en quantité suffisante pour faire un volume de 200 ce, sont chauffés pendant vingt heures. Après refroidissement, on neutralise exactement par HCl, on verse avec les eaux de lavage dans un ballon de 300 ce, on invertit par HCl, et, après inversion et filtration, on trouve pour 81 ce. de la solution sucrée. Analyse I : 0,1850 de Cu'-O, (tube 3) soit 0,1642 de Cu; analyse II : 0,1854 de Cu'-O (tube 12). D'après Volhard, pour le, tube 3, 0,1591 de Cu, soit 0,0737 de sucre. Par conséquent 100 ce. de la solution glycogénique répondent à 0,273 de sucre. Expérience IV. — Elle fut faite exactement dans les conditions de l'expérience III, à cela près que le glycogène a été, avant l'inversion, précipité par l'alcool. Le liquide du llacon de 200 ce. a été réuni aux eaux de lavages, le volume ramené à 300 ce, et de la potasse a été ajoutée de manière que le titre répondit à 3 p. 100 de KOH. On préci- pite par 300 ce. d'alcool à 96°; le glycogène est filtré et interverti. 81 ce. donnent : Analyse I, 0,1797 de Cu^O, soit 0,1598 de Cu (tube 4); analyse II, 0,1784 de Cu^O (tube 10); soit d'après Volhard, 0,1553 de Cu(tube 4), répondant à 0,0718 de sucre. Par conséquent, 100 ce. de la solution glycogénique répondent à 0,266 de sucre. RÉSULTATS DE LA SÉRIE I : En comparant ces expériences nous trouvons : Expérience I. — Teneur de la solution glycogénique avant la coction avec la potasse : 0,274 de sucre p. 100. Expérience II. — Teneur de la solution glycogénique avant coction avec la potasse, mais précipitation du glycogène par l'alcool : 0,273 p. 100 de sucre. Expérience III. — Teneur de la solution glycogénique après vingt heures de coction avec la potasse à 2 p. 100 ^0,273 de sucre p. 100. Perte = 0,4 p. 100 Expérience IV. — Teneur de la solution glycogénique après coction de vingt-quatre heures avec la potasse, mais précipitation du glycogène par l'alcool =0,266 p. 100 de sucre. Perte = 2,6 p. 100. Avant d'apprécier les résultats de cette expérience, il faut donner ceux de la série II. Série II. — 250 grammes de la pulpe musculaire fraîche sont mis dans des vases d'Iéna de 500 ce. On ajoute 250 ce. de potasse à 60 p. 100, on chauffe au bain-marie le ballon recouvert d'un verre de montre pendant seize heures. Dans un llacon d'un litre on fait bouillir 500 ce. d'eau : on y verse la solution mus- culaire encore chaude, on filtre à la pompe sur du coton de verre : le filtrat est trouble. On mélange 800 ce, de ce filtrat à 800 ce. d'alcool à 96°. Après que le précipité s'est déposé, on verse la liqueur parfaitement claire, et on filtre le précipité sur du coton de verre; le filtrat, d'abord trouble, devient parfaitement limpide après une deuxième filtration. On lave à l'alcool, et on dissout les flocons de glycogène dans l'eau bouillante. Le filtrat trouble est additionné d'eau stérilisée jusqu'à un volume de 500 ce. et filtré sur du papier suédois. Le liquide qui filtre est opalescent, et il y a dépôt vert sur le papier. 272 GLYCOCENE. 500 ce. de ce filtrat sont additionnés de 15 grammes de KOH, c'est-à-dire amenés au titre de 3 p. 100 de KOll, et précipités par 500 ce. d'alcool à 90". Le glycogène se préci- pite sous forme d'une poudre Uoconneuse blanche. Au bout de plusieurs jours le liquide est parfaitement limpide et se décante très facilement, tout le glycogène restant au fond du vase, on l'égoutte et on le dissout dans l'eau stérilisée, on amène le volume à 550 ce. qui vont servir aux expériences suivantes : Expérience I. — Dosage du glycogène par l'inversion immédiate sans précipitation préalable du glycogène par l'alcool. 100 ce. de la solution glyeogénique sont additionnés de HCl et d'eau, de telle sorte que la solution soit d'un volume de 300 ce. avec une acidité de 2,2 de HCl p. 100. Après inversion, 81 ce. de la solution de sucre contiennentt 0,2f)08 de Gu-0, soit 0,2317 de Cu (tube 4) et, d'après Volhard, 0,2319 de Cu, soit 0.1099 de sucre. Donc 100 ce. de la solution glyeogénique répondent à 0,407 de sucre. Cette expérience avec un autre filtre d'amiante a donné, d'après Volhard, 0,2315 de Cu, soit 0,1097 de sucre; ou, pour 100 ce. de la solution glyeogénique, 0,4052 de sucre, ce qui fait en moyenne 0,406 de sucre pour 100 ce. de la solution glyeogénique. Expérience H. — L'expérience précédente a donné la teneur en hydrates de carbone pour 100 ec. de la solution. Il s'agit de savoir si tout le glycogène peut être précipité de sa solution par un volume égal d'alcool à 96° en présence de 4 p. 100 de KOH. 100 ce. de la solution glyeogénique sont additionnés de 6,0 ce. de potasse à 60 p. 100 et 110 ce. d'alcool à 96°. Après vingt-quatre heures on filtre sur un filtre suédois; presque tout le glycogène resté dans le vase; après décantation de la liqueur alcoolique, on met le vase contenant le glycogène sous l'entonnoir, et on remplit d'eau celui-ci, si bien que l'eau, en s'écouiant, dissout le glycogène du filtre aussi bien que le glycogène resté dans le vase. Alors, dans la liqueur, on place un petit papier de tournesol, et on laisse couler de l'acide chlorhydrique de densité 1,19, jusqu'à ce que le liquide soit neutre. Il a fallu 0 ce. 35 de HCl. Alors la solution neutralisée est placée dans un ballon de 300 ce. et on ajoute 6 gr. 6 de HCl, puis on ramène au volume de 300 ce, après avoir d'abord constaté que rien n'est jdIus resté sur le filtre, car l'alcool ne précipite plus rien du fil- trat. Après inversion on trouve pour 81 ce., 0,232 de Cu, soit 0,110 de sucre, et, d'après Volhard, 0,2311 de Cu, ce qui fait 0,1095 de sucre. Par conséquent, 100 ce. de la solu- tion glyeogénique répondent à 0,4056 de sucre. Ces recherches sont de grande importance : car elles prouvent que, si une solution glyeogénique est précipitée par son volume d'alcool datis une liqueur répondant à i p. iOO de KUH, tout le glycogène est précipité. Expérience III. — 100 ce. de la solution glyeogénique sont amenés au volume de 200 ce. et additionnés de potasse, de sorte que le titre de la solution répond à peu près à 2 p. 100 de KOH. On chauffe dix-neuf heures et demie au bain-marie, on refroidit, on neuti'alise par HCl de densité 1,19, en notant le moment de la neutralisation avec le papier de tournesol. On verse dans un ballon de 300 ce; on ajoute 15 ec. de HCl à 1,19, et ou ramène au volume de 300 ec. par addition d'eau. Après inversion, on trouve que la solution sucrée contient pour 81 ce. 0,2585 de Cu-O, soit 0,2296 de Cu. D'après Volhard (tube 10) 0,2286 de Cu, répondant à 0,1082 de sucre. Une seconde analyse donne (tube 4) 0.2595 de Cu-O, soit 0,2304 de Cu, et, d'après Volhard, 0,228(). Par conséquent, 81 ce. de la solution glyeogénique répondent à 0,10823 de sucre et 100 ce. de la solution glyeogénique primitive à 0,401 de sucre. Expérience IV. — Elle a été conduite exactement comme la précédente, à cela près que la solution glyeogénique a été chauffée dix-neuf heures et demie dans la potasse à 2 p. 100 au bain-marie. On précipite d'abord le glycogène par l'alcool : la solution contient 4 grammes de KOH : on amène à 300 ce. après avoir ajouté de la potasse de manière que le titre total soit 4 p. 100. On précipite par 300 ce. d'alcool à 96°. Le précipité n'est pas floconneux. C'est une fine poussière blanche qui donne l'apparence du lait : le glycogène se pré- cipite lentement sous forme d'une masse blanche, molle et Uoconneuse. Une partie reste adhérente au verre, mais, au bout de vingt-quatre heures, la limpidité est complète, le liquide passe absolument limpide à travers le filtre suédois, et presque tout le glyco- gène reste dans le vase après décantation du liquide. Pour éviter les pertes, je procède GLYCOGENE. 573 comme dans l'expérience II. Le glycogène est chauffé au bain-marie dans une solution de HCl à 2,2 p. 100. 81 ce. donnent 0,2554 de Cu-0, soit 0,22G9 de Cu, soit, d'après Volhakd, 0, 22C6I de Cu, soit 0,1072 de sucre. Donc 100 ce. de la solution glycogénique répondent à 0,307 de sucre. Si nous comparons les expériences dans lesquelles le glycogène n'a pas été avant l'inversion précipité par l'alcool, de telle sorte qu'il n'a pu y avoir perte d'hydrate de carbone, nous avons pour les solutions de glycogène : Expérience I. — Sans coction avec la potasse, 0,406 p. 100 de sucre. ExPKKiENCE III. — Après coction avec 2 p. 100 de potasse, 0,401 p. 100 de sucre. Perte 1,2 p. 100. En comparant les deux expériences dans lesquelles le glycogène a été précipité par l'alcool avant l'inversion, nous avons : Expérience II. — Sans coction avec la potasse, 0, 40.^6 p. 100 de sucre. Expérience IV. — Après coction avec la potasse à 2 p. 100, 0,.3970 p. 100 de sucre. Perte 2,1 p. 100. TABLEAi: D'ENSEMBLE. GLYCOGÈNE P R É P RÉ SANS LES ACIDES E ï SANS LE RÉACTIF DE B R U C K K . Le glycogène dans 100 ce. de solution est indiqué en grammes par la quantité de sucre qu'il représente. AVANT COCTION | APRÈS COCTION AVEC LA POTASSE AVEC LA L^OTASSE. DE 2 P. 10 0. O •O ^^ ion p. 1 ogèue versio précipi cool. ogène versioi ^cipité cool. Durée de la ogène versioi écipilé cool. Durée do la art» o — Q M^-^ 9 .s •aT^S ^■c ^^ 2 S ^ Le g vant pas par Le g vant a été par Le gl ant pasc par coction. Le g vaut a été par coction. s .^ ci 5.«i ci ■" lieures. lieures. Série 1. 1 0.2"! 4 „ II „ n „ „ ■t ,, U.273 „ ,) » » " :j „ ,, 0,273 20 » '> (t,;n 4 ■■ " '> » 0,26(i 20 2,:i(i Série 2. 1 a U,407 „ » ,, " n » 1 b 0,lO(i ., » » » " '• 2 » o,40o(; „ „ » " " 3 „ „ O.iOll) 19,5 " » 1,2 4 " " " " U.397 19,.'i 2,1 Série m. — Les expériences indiquées plus haut ont été pratiquées avec de la pulpe musculaire mise à froid dans la solution potassique froide et chaulïée ensuite au bain- marie. Il était donc possible que la lente élévation de la température eût amené quelque altération du glycogène, changé en glycogène dextrine. Pavy a dit que la dextrine est attaquée par la potasse : aussi ai-je institué la série suivante d'expériences. oOO ce. de potasse à 60 p. 100 (marque L' de Mekgk) sont chauffés à 100" dans un ballon d'un litre, et on y introduit successivement 500 grammes de pulpe musculaire fraîche : on agite pour que le mélange se fasse intimement, et, comme on chauffe sur la toile métallique au-dessus d'un brûleur à gaz, on peut empêcher l'abaissement de la température ; d'ailleurs je l'ai contrôlée avec le thermomètre, et j'ai trouvé qu'elle ne variait que de 92 à 110°. Au moment où l'on introduit les dernières portions de la pulpe D!CT. DE PHYSIOI.OGIK. — lOME VU. '^ 274 GLYCOGÈNE. musculaire, presque tout était dissous, j'ai cependant continué de chaufîer au bain- marie pendant deux lieures. Dans un ballon de 2 litres je fis bouillir 300 ce. d'eau, je versai la solution muscu- laire et je lavai avec 200 ce. d'eau bouillante, qui furent aussi introduits dans le ballon de 2 litres. On refroidit, on introduit de l'eau distillée jusqu'à former un volume de 2 litres, et on verse dans un grand verre à expérience. La solution est un peu trouble. Le filtrat passant à travers le coton de verre était d'abord légèrement trouble. En cohobant on finit par l'avoir parfaitement clair : la filtration fut lente, de sorte qu'au bout de dix heures j'avais 300 ce. que je précipitai avec 300 ce. d'alcool à 90». Le pre'ci- pité floconneux se dépose rapidement. Deux heures et demie après la précipitation je décante presque sans perte, et peu importe dans le cas présent, puisqu'il ne s'agit pas d'une analyse quantitative. Le glycogène précipité est filtré sur du papier suédois, la filtration est rapide, le filtrat rouge est parfaitement clair, on égoutte, et le glycogène est lavé avec un liquide contenant autant de potasse et d'alcool que la liqueur précipitée. Le lavage se fait vite. Après que le filtre est bien égoutlé, on ferme l'entonnoir avec une pince sur un petit tube de caoutchouc, puis, on verse sur l'entonnoir de l'eau stérilisée froide. Au bout d'une heure tout le glycogène est dissous. Alors la solution glycogénique est versée dans un ballon de 500 ce, simplement en ouvrant la pince qui ferme l'entonnoir. On verse à nouveau de l'eau stérilisée sur le iiltre : il ne reste sur le papier que des traces d'un enduit verdâtre. Le filtrat ne précipite plus à la fin par l'alcool. La solution glycogénique a une forte opalescence; on acidifie dans un vase, et dans un autre vase on verse le réactif de BkCcke. ISi dans Vun ni dans l'autre il ne se fait le moindre trouble. On ne peut voir aucune différence, quoique l'un eût été traité parle réactif de BrCcke, et l'autre non; mais, comme dans ces recherches il s'agit d'apprécier des quantités très petites, j'ai dû prendre quelques précautions sur lesquelles je dois donner quelques indications. 1° Dans chaque expérience on prend 100 ce de la solution glycogénique qu'on mesure dans la même burette et au même moment. 2° Après qu'on a mesuré les 200 ce. de la solution glycogénique, on les invertit immédiatement par HCl, et on détermine immédiatement leur teneur en sucre. Quand on précipite les 100 ce. de la solution glycogénique par l'alcool, qu'on filtre le glycogène, qu'on le redissout, qu'on l'invertit, et qu'on y dose le sucre, il se pro- duit des pertes que l'on ne peut éviter; ces pertes sont dues à des traces de glycogène qui passent à travers les meilleurs filtres; car tout le glycogène n'est pas précipité par l'alcool : en outre, à côté du glycogène, il y a sans doute un peu de glycogène dextrine, et enfin on ne peut pas irréprochablement laver le filtre et les vases. En procédant avec le plus grand soin on ne dépasse guère une perte d'un milligramme, quand on a afi'aire à du glycogène normal. En tout cas, on ne peut contrôler que les expériences dans lesquelles la précipitation par l'alcool a été faite dans les mêmes conditions. 3° Si l'on intervertit la solution glycogénique par de l'acide chlorydrique à 2,2 p. 100, la durée de la coction a une intluence sur la quantité d'oxydule de cuivre précipité par l'action ultérieure de la liqueur cuivrique, car une coction qui dure plus de trois à cinq heures diminue le rendement en sucre; l'élévation de la température a sans doute une infiuence. Aussi, toutes les fois que cela me fut possible, ai-je inverti les solutions gtyco- géniques que j'avais à comparer au même bain-marie, pendant une durée de trois heures. 4° Dans le dosage du sucre i)ar la méthode gravimétrique, on doit supposer que la quantité d'oxydule de cuivre précipité dépend de la durée de réchauffement et du degré d'élévation de la température. Or la température n'est pas toujours la même dans les différents bains-marie. Aussi ai-je l'habitude de placer les deux solutions sucrées qui doivent être comparées dans le même bain-marie aussi longtemps l'une que l'autre. En procédant ainsi, on perd l'avantage de pouvoir chauffer en même temps la même solution sucrée dans le même bain-marie et dans deux vases difl'érents, ce qui permet alors de faiie deux analyses qui doivent donner le même résultat; en même temps qu'on renonce au bénéfice de cette même analyse, on doit ne se servir pour recueillir l'oxydule de cuivre que de filtres d'amiante dont la bonne qualité a été reconnue. L'expérience m'a GLYCOGÈNE. 273 appris que ces filtres ne peuvent jamais être absolument irréprochables; mais que cha- cun, même le meilleur, n'est pas tout à fait imperméable. Pour éviter l'erreur, comme il s'agit toujours de très petites diiférences absolues, dans la première le sucre de la solu- tion a passe par le filtre A, la solution sucrée fi passe par le filtre B, puis je fais passer la solution [i dans le filtre A, la solution sucrée a dans le filtre B; la moyenne me donne le chiffre exact. Je n'ai jamais manqué dans ces expériences de contrôler par la méthode de Volhard : elle est nécessaire quand il s'agit de petites quantités absolues. Expérience I. — Dosage de la solution glycog&nique. 100 ce. de cette solution sont mesurés dans un tlacon de 300 ce. On neutralise avec de l'acide chlorhydrique, soit 0,6 ce. de 1,19 de densité; on ajoute lo ce. de HCl, de densité 1.19 , et de l'eau en quantité suffisante pour que les .300 ce. exactement mesurés contiennent 2,2 p. 100 de HGl. Après interversion la liqueur est légèrement trouble; après refroidissement on ramène exactementà300 ce. On filtre; le filtrat est clair et inco- lore : 81 ce. de la solution sucrée ont donné 0,1977 de Cu^O, soit 0,1736 de Cu, (tube 4) et, d'après Volhard, 0,1753 de Cu. Il y a donc accord complet entre la méthode gravimétrHque et la méthode par titration. Donc 100cc.de glycogène donnent 0,3026 de sucre. En répé- tant cette expérience, on trouve exactement les mômes chiffres 0,1 979 de Cu-O(tubelO), soit 0,17.^7 de Cu, soit, d'après Volhard, 0,1753 de Cu. Donc les filtres 4 et 10 sont bons. Donc la solution glycogénique répond à 0,3026 p. 100 de sucre. ExpÉRiKXCE II. — Même solution glycogénique, chauffée quinze heures dans de la potasse à 2 p. 100. 100 ce. de potasse à 3,6 p. 100 sont rais dans un ballon de 200 ce. On ajoute 100 ce. de la solution glycogénique, et, comme cette solution contenait déjà de la potasse, le titre de la solution totale est d'environ 2 p. 100 de potasse; on chauffe 15 heures au bain-marie, on neutralise avec l'acide chlorhydrique de densité 1,19; on ajoute 15 ce. de HCl de 1,19 de densité; on ramène par l'eau à 300 ce., de sorte que le titre acide de la solution est de 2,2. On intervertit, on refroidit, on filtre à travers un filtre suédois; le filtrat est limpide et incolore; on trouve pour 81 ce. de la solution sucrée 0,1986 de Cu-0, soit 0,1763 de Cu (tube 10), et, d'après Volhard, 0,1742; par conséquent pour 100 ce. de la solution glycogénique, 0,3006 de sucre. En répétant cette expérience, on trouve 0,1993 de Cu^O, soit 0,1709 de Cu (tube 4) et, d'après Vollard, 0,1731. Nous avons : Analyse I. . . . 0,1742 de Cu. Analyse II. . . . 0,1731 de Cu. Moyenne 0,1736 de Cu, répondant à 0,0809 de sucre. Ce qui nous donne pour la solution glycogénique, en moyenne, 0,2096 de sucre. Par conséquent, la solution glycogénique avant la coction avec la potasse a donné 0,3026 de sucre, et, après coction avec la potasse à 2 p. 100,0,2996. La perte absolue a donc été de 0,0030 de sucre, soit 0,99 p. 100. Expérience III. — Précipitation du glycogène par l'alcool. 100 ce. de la solution glycogénique sont mis dans un verre avec 200 ce. d'eau et 19'"=,3 de potasse à 60 p. 100. La solution contient donc à peu près 4 p. 100 de KOH : on précipite par 320 ce. d'alcool à 96°. Le précipité n'est pas floconneux, mais tout le liquide est devenu lactescent. Peu à peu des flocons blancs, mous, se précipitent, ils adhèrent peu au vase; au bout de deux jours tout le liquide s'est clarifié et filtre limpide; après interversion dans un llaeon de 300 ce. avec CIH de 2,2 p. 100 on filtre 81 ce; on trouve 0,1964 de Cu^O, soit 0,1744 de Cu (tube 3) et 0,1723 de Cu d'après Volhard. Et dans une nouvelle expérience (tube 12), 0,1948 de Cu-0, et 0,173 de Cu, 0,1727 d'après Volhard; ce qui fait : Analyse I.. . . 0,1723 Analyse II.. . . 0,1727 Moyenne 0,1725, soit 0,0803 de sucre. par conséquent, pour 100 ce. de la solution glycogénique, 0,2974 de sucre. 276 GLYCOGENE. Expérience IV, — 100 ce. de la solution fiçlycogénique sont additionnés de 100 ce. d'eau et de potasse, de telle sorte que la solution soit de 200 ce. avec un titre de 2 p. 100 de potasse; on chauffe pendant quinze heures, puis on ajoute assez de potasse pour que le titre soit de 4 p. 100, on précipite par un même volume d'alcool, on intervertit et on trouve pour 81 ce. de la solution sucrée 0,1916 de Cu-0 (tube 11) 0,1703 de Cu, et, d'après Volu-^rd, 0,1691 de Cu. L'expérience, répétée, donne 0,1908 de Cu^O, soit 0,1694 de Cu (tube 3) et, d'après Volhard, 0,1696 de Cu, ce qui fait : Analyse I. Analyse II. jMoyenne. . 0,1691 Cu. 0,1696 Cu. 0,1693 Cu,soit0,0787desucre. Soit pour 100 ce. de la solution gljcogénique 0,2915 de sucre. Par conséquent, en compa- rant l'expérience III et l'expérience IV, nous avons : expérience III, avant coction avec la potasse, 0,2974 de sucre; après coction avec la potasse à 2p. 100, 0,2915 de sucre. Perle absolue 0,0059 d.e sucre. Perte pour 100 1,98 — La série III a donc essentiellement donné les mêmes résultats que les séries I et II. Dosage du glycogène. GLYCOGENE PREPARE SANS LES ACIDES ET SANS LES REACTIFS DE BRUCKE. Le glycogène dans 100 cc^de solution est indiqué en grammes par la quantité de sucre qu'il représente. APRÈS COCîTTON AVANT 20CTI0N DE J2 HEURES AVEC LA POTASSE AVEC LA POTASSE. à 2 p . 100. •o tù o a c .3i SD •«^ ^ one rsion cipit ol. ene rsion pité ol. ène rsion écipit ol. ène rsion pité ol. Tij o o os Moyenne. tdl o t-. ° t!) o -^ O M " fc, ° te p '5 ° 2 t- o > c,ii O > -o B o > .o " rt ^ o "S; ~ -o t, '^'Z-^'Z ta'Z -(D ■- s ji o s "S ta "^ > ci Le avan n'apa pa o 1 0,3026 „ „ „ „ „ 0,3026 » » i> 0 >> 2 » 0,2974 0,2974 0,3006 0,2985 0.2911 0,66 1,3.") 2.12 î 1,0 1,97 4 1 » " 0,2912 1,82 On peut résumer ces données en disant que la coction prolongée pendant plusieurs heures d'une solution glycogénique avec la potasse diluée change à peine la teneur en hydrates de carbone; car les partes oscillent de 0,37 à 1,35 p. 100. Si l'on compare le glycogène précipité par l'alcool avant ou après le traitement par la potasse, on trouve que la perle monte de 1,98 à 2,o6 p. 100. Ces différences dans des analyses ordinaires de glycogène sont tout à fait dans les limites des erreurs expéri- mentales; mais, dans les dosages pratiqués de cette manière, elles suffisent pour établir ce fait que la coction avec une solution de potasse à 2 1/2 p. 100 modifie un peu le glycogène en le rendant plus soluble dans l'alcool, et probablement en détruisant ainsi une petite quantité de substance. Déjà Pavy avait montré que l'amylodextrine peut être détruite par la potasse, et il croit que le glycogène dextrine se comporte de la même GLYCOGENE. 477 manière. Les recherches seraient donc tout à fait probantes, s'il était prouvé qu'on ne provoquait pas la formation d'une petite quantité de dextrine. J'ai pris toutes les précautions possibles pour empêcher cette formation de dextrine avant la coction ".je n'ai pas mis d'acide au contact de mon glycogène, l'eau était stéri- lisée,et le coton de verre soumis à rébullition avant son emploi; ce que je ne pouvais pas empêcher, c'est la prolongation de la flltration pendant toute la nuit à travers le coton de verre. Donc, malgré l'alcalinité (15 p. 100 de potasse), il pouvait, dans ce liquide riche en matières albiiminoïdes, se produire quelques fermentations, et je ne puis pas affirmer en toute certitude qu'il n'y a eu aucune action fermentative. D'ailleurs, Pavv a étudié la même question avant moi, et il a aussi constaté des pertes de même grandeur, en faisant bouillir le glycogène dans de la potasse à 10 p. 100 pendant une demi-heure : il a vu des pertes de 1,8 à 2,4 p. 100. Ce glycogène avait été extrait du foie par des solutions potassiques (The Physiolof/j/ of t.hc carbohydraten. An epicriticism, 38. London, 1895). Malgré tout, il semble prouvé que le glycogène normal des organes n'est pas attaqué par la solution diluée de potasse de 1 à 2 p. 100. Quant à ce qui est de l'action des solutions potassiques diluées de glycogène, il est clair que les erreurs qui résultent de l'emploi de celte méthode sont très petites, en comparaison de celles qu'on observe dans la méthode de Brucke KOlz. Vintsgau et Dietl [A. g. P., XHi, 1876, 261) ont trouvé qu'en chauffant le glycogène pendant longtemps, c'est-à-dire trois heures, avec de la potasse de 1 à 3 p. 100, la perte peut s'élever à 11,7 p. 100. Kl Lz (Z.B.,1886,xxn,173)a chauffé le glycogène dans une solution de potasse à 1 p. 100 pendant une ou deux heures, et il a eu des pertes de 4,88 à 10,52 p. 100; il précipitait la solution neutralisée par l'alcool et pesait le glycogène, en faisant déduction du poids des cendres. Pavy s'est aussi préoccupé de la ([uestion, et il arrive à cette conclusion, que le glyco- gène de Brucke a subi une altération telle qu'alors il ne résiste plus à l'action de la potasse. Il a, en effet, observé des pertes de 19,4 p. 100, et plus encore {loc. cit., p. 38). Moi-même {A. g. P., lxxv, 163), en répétant les expériences de ces auteurs par leurs procédés mêmes, mais en prolongeant beaucoup plus l'action de la potasse, c'est- à-dire pendant une durée de vingt-quatre heures, j'ai vu les pertes monter à 45 p. 100. Après coction, j'avais neutralisé avec l'acide chlorhydrique dilué et traité par 2 volumes et demi d'alcool a 96°. Récemment, j'ai répété ces expériences avec ma nouvelle méthode qui élimine les erreurs dues aux impuretés. La coction prolongée du glycogène de BrOcke Kulz, dans une solution dépotasse à 2 p. 100, provoque uneperte de 6 p. 100 d'hydrate de carbone, comme l'indique le dosage direct par la solution cuivrique; mais, si je procédais en préci- pitant d'abord le glycogène par l'alcool, la perte s'élevait à 12 p. 100 environ. Par consé- quent, la coction du glycogène avec la potasse en rend une partie soluble dans Valcool, pro- bablement en le changeant en dextrine, et d'autre part une autre partie du glycogène est détruit en tant qu'hydrate de carbone. {Pfl\j<^er.; A. g. P.,xcii, 100). Ces faits semblent prouver que, pour l'analyse quantitative du glycogène, il faut se servir, non d'une solution diluée de potasse, mais d'une solution concentrée contenant environ 30 p. 100 de KOH. Après avoir établi solidement le point fondamental sur lequel reposent mes analyses de glycogène, j'arrive maintenant à la description de ma méthode (Pfluger, A. g. P., xcni, 163). Méthode d'analyse du glycogène, d'après Pfluger. A. — Dans la première partie A, je décrirai la marche exacte de l'analyse du glycogène, d'après les procédés qui me paraissent le plus exacts. Dans la deuxième partie B,je donnerai les motifs pour lesquels j'ai indiqué tel ou tel procédé de préparation décrit dans les quatre paragraphes de la première partie, et, comme dans mes recherches précédentes je n'avais pas de résultat absolument certain, j'en indique ici de nouveaux que je communique pour la première fois. Le présent tra- vail n'est donc pas le simple résumé de mes recherches antérieures. 278 GLYCOGÈNE. § I. Extraction du glycogène des organes. — 100 grammes de pulpe musculaire sont mis dans un ballon de 200 ce. avec une solution de KOH à 60 p. 100. (Je recommande l'hydrate de potasse I'^ de Merck) ; on détermine le titre alcalin avec l'acide chlorhydrique normal. Avant de mettre le ballon au bain-marie, on l'agite énergiquement pour obtenir un mélange homogène, et on répète cette agitation aussi souvent que possible : on la recommence après que le ballon a été chauffé un quart d'heure ou une demi-heure. Quand la chaleur ne détermine plus de dilatation, on ferme l'orifice du flacon avec un bouchon de caoutchouc. Après deux heures de coction, on place tout le liquide dans un autre ballon de 400 ce. on ajoute les eaux de lavages, et, après refroidissement, on amène à 400cc. et on verse le tout dans un verre : il s'est produit un petit précipité qui doit être filtré; on prend un entonnoir d'environ un demi-litre de capacité, et on y introduit du coton de verre au moyen d'un agitateur qui presse le coton jusqu'à lui donner la consistance nécessaire; on verse la liqueur rougeâtre et trouble, et l'on obtient un filtrat qui n'est pas limpide. § II. Précipitation et isolement du glycogène. — On mesure par une burette 100 ce. de la solution musculaire filtrée, qu'on fait tomber dans un verre d'environ 200 ce, on verse 100 ce. d'alcool à 96° et on mélange avec un agitateur; il se forme un précipité qui se dépose très vite et qu'on peut filtrer au bout d'un quart d'heure, mais il est pré- férable d'attendre plusieurs heures, même toute une nuit, avant de filtrer. On prend un filtre suédois de 15 cent., de la fabrique de Munktell, qu'on met sur un grand filtre, et on y verse d'abord la liqueur limpide, puis à la fin le précipité glycogénique qui s'est déposé. La solution rouge passe tout à fait limpide à travers le filtre; on recouvre, et, quand la liqueur s'est égouttée, on lave le glycogène avec une solution qui contient un volume de potasse à 15 p. 100 et deux volumes d'alcool à 96». On fait tomber les eaux de lavage dans le verre où l'on avait précipité le glycogène, et on les verse sur le filtre. On égoutte, puis on verse de l'alcool à 96° sur le filtre, de manière à déterminer le ratatinement et la cohésion du glycogène qui s'y trouvait déposé. Après que l'alcool s'est égoutté, on adapte un tube de caoutchouc au bec de l'enton- noir et on le ferme avec une pince, on place l'entonnoir ainsi disposé au-dessus du verre à expérience vide dans lequel a été faite la précipitation du glycogène. D'où l'inconvénient qu'il reste un peu de glycogène adhérent aux parois. Alors, on remplit presque la tota- lité du filtre avec de l'eau froide stérilisée ; au bout d'une demi-heure à une heure, presque tout le glycogène s'est totalement dissous. On ouvre la pince, et on laisse s'écouler dans le verre à expérience le liquide contenu dans l'entonnoir, puis on referme le tube, on verse de nouveau de l'eau sur le filtre, et on attend que tout se soit dissout : on ouvre de nouveau la pince, et on laisse s'égoutter tout le liquide; puis on referme la pince; on rem- plit à demi l'entonnoir avec de l'eau, et avec un fin pinceau ou détache du papier la poudre verdàtre qui s'y est déposée de manière à la faire nager dans le liquide. Cette poudre est d'ailleurs insoluble dans l'eau. Puis on laisse de nouveau, en ouvrant la pince, le liquide filtrer. Alors on met un papier de tournesol dans le filtrat, et on laisse goutte à goutte y couler de l'acide chlorhydrique de densité 1,19 en agitant avec un agitateur jusqu'à neutralisation exacte. Ensuite on verse toute la solution glycogénique dans un bal- lon de bOO ce. avec toutes les précautions analytiques nécessaires; on mélange au liquide 25 ce. d'une solution chlorhydrique de 1,19 p. 100. Au moyen d'un enton- noir on verse de l'eau dans le verre qu'on fait couler sur le filti^e pour entraîner les dernières traces de glycogène, et on ajoute cette eau de lavage au ballon de 500 ce. En procédant ainsi par une série de lavages successifs, on arrive à amener presque jusqu'à oOO ce. le volume total de la liqueur. On prélève alors 1 ce. du filtrat qu'on additionne d'alcool, et il ne doit pas se pro- duire de précipité. On ferme le ballon par un bouchon de caoutchouc, et on agite de manière à rendre le mélange homogène : ce mélange doit avoir une acidité d'environ 2 p. 100 de HCl. Ce procédé doit être modifié : 1" Si la quantité de glycogène est trop faible pour qu'on ne puisse plus faire une GLYCOGÈNE. 279 autre analyse exacte. Alors, on précipite le glycogène de la solution musculaire, non pas de 100 ce, mais de 200 ou de MO ce. pour son volume d'alcool, et pour le reste on procède comme il a été dit; 2" Quand le glycogène à doser est extrait d'un très petit organe, comme, par exemple quand il s'est agi d'un foie de poulet; ce foie, réduit en poudre, pesait 10 grammes, (jui furent mis dans un petit ballon, et additionnés de 10 ce. de potasse à 60 p. 100; on cliaulfe deux heures au bain-marie; on ramène à 40 ce, on filtre sur le coton de verre, et on précipite 25 à 30 ce. par un volume égal d'alcool à 96". La filtration se fait sur un filtre suédois aussi petit que possible, et pour le lavage et les autres opérations on procède exactement d'après toutes les indications qui ont été données plus haut. On remarquera qu'alors la dissolution de ce glycogène qui se trouve sur le filtre ne doit pas comporter un volume supérieur à 100 ce, après que la solution a été acidifiée par l'acide chlorhydrique. .^ III. Dosage du glycogène par la transformation en sucre. — Le ballon contenant la solution glycogénique est placé au bain-marie, puis fermé par un bouchon de caout- chouc, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de dilatation par la chaleur. On chauffe pendant trois heures, on laisse la liqueur se refroidir, et on ramène par de l'eau au volume initial, puis on verse dans un verre à expérience, et on place sur un ballon de 500 ce. un eiilon- noir garni d'un filtre suédois à travers lequel filtrera la solution sucrée. Il convient pour cette analyse d'employer les réactifs et les appareils que j'ai décrits en détail dans mon mémoire sur l'analyse quantitative du glycose; pour la commodité du lecteur, je rappellerai ici les données essentielles, avec les légères modifications que j'ai cru devoir employer. 1° Une solution qui contient pour 300 ce. 348'', 639 de sulfate de cuivre avec 5 molé- cules d'eau. On a fait cristalliser le sulfate de cuivre une fois dans l'acide nitrique et trois fois dans l'eau. La masse de sel, confusément cristallisé, est exprimée dans du papier buvard, puis étendue sur du papier buvard pendant vingt-quatre heures, et laissée ainsi vingt-quatre heures. Il contient alors l'eau de cristallisation théorique; 2° Une solution qui, pour 500 centimètres cubes contient 173 grammes de sel de Seignette et 125 grammes de KOH. On fait cristalliser trois fois le sel de Seignette dans l'eau et ou prend le meilleur hydrate de potassium (celui de Merck). Dans un vase, on chauffe à l'ébullition 150 ce. d'eau; on y verse les 173 grammes de sel de Seignette, et on dissout en agitant. Après refroidissement, on verse par un entonnoir la solution dans un ballon de 500 ce. et on y ajoute 208 ce. de potasse à 60 p. 100. Le ballon n'est alors pas rempli, et on achève de le remplir en y ajoutant les eaux de lavage; si l'on n'a pas pris la précaution de n'employer d'abord qu'une quantité d'eau insuffisante, par suite de l'addition du sel de Seignette le volume a augmenté, et on a dépassé le volume de 500 ce. Quand la liqueur s'est refroidie, on ramène exactement au volume de 500 ce. et on la filtre sur du coton de verre dans un ballon. Comme la solution cuivrique demeure longtemps inaltérée, il convient de préparer toujours d'assez grandes masses de licj^uide. 3° Voici comment on prépare les filtres d'amiante. Un tube de verre, de 10 centimètres de longueur et de 1,7 centimètres de diamètre, est rétréci pour donner un reiitlemeiit ovalaire, et disposé de manière à avoir un resserrement au-dessus du tube elférentT Le petit renflement contient seul l'amiante, et on lui donne les dimensions d'un gros haricot. Pour que l'amiante soit préparé convenablement, voici ce qu'il faut faire. On laisse pendant plusieurs jours de l'amiante à longs filaments, en contact avec de l'acide nitrique fumant; puis on le lave avec de l'eau distillée jusqu'à ce que l'eau s'écoule parfaitement limpide (sans poussière d'amiante). On dessèche les filaments, et on choisit les plus mous et les plus longs, puis on les étale sur un verre avec des aiguil- les, de manière à choisir les fils isolés les plus minces. Alors on les réunit, et on en fait une masse qu'on introduit avec des pinces dans le grand orifice de l'entonnoir. On presse alors l'amiante dans le renflement en tâchant que les plus minces filaments y pénè- trent. Car, si l'on presse trop fortement l'amiante, il devient alors si épais qu'il ne peut plus filtrer même à pression. D'autre part, comme l'oxydule de cuivre passe 280 GLYCOGÈNE. facilement rnùme à travers de tiès bons filtres, il faut que l'amianle ait une certaine épaisseur. Avant l'expérience on fait l'épreuve du petit filtre d'amiante. On filtre par l'extré- mité supérieure la solution cuivrique chaude d'ALLiHN, après l'avoir diluée de son volume d'eau froide, et en la faisant passer par la trompe aspirante; puis on lave avec 100 ce. d'eau, et on verse de l'acide nitrique à 1,4 de densité, de manière à le laisser passer len- tement sur l'amiante. On lave l'amiante avec de l'eau, puis avec de l'alcool et de l'éther absolu. Après dessiccation à 100", le filtre ne doit pas avoir perdu plus de 0,2 à 0,3 mil- ligrammes. Pour s'assurer que le filtre est imperméable, on fait simultanément deux expériences identiques : les deux tubes doivent donner l'un et l'autre le même chiffre. Voici maintenant comment il faut procéder pour la véritable analj'se. D'abord on commence par l'expérience d'épreuve. 30 ce. de la solution d'ÀLLinx du sel de Seignetïe sont versés par une burette dans un vase de 300 ce. environ. Puis on mesure 30 ce. de la solution cuivrique préparée comme il 'a été indiqué plus haut, et qu'on mesure dans une autre burette. On ajoute 4 ce. d'une solution de KOH à'68 p. 100 pour neutraliser l'acide chlorhydrique qui est avec la solution sucrée, et on ajoute 81 ce. de la solution sucrée qui contient 2,2 p. 100 deHCL. Le volume total de la liqueur est alors de 14ij ce, volume qu'il faut avoir pour toutes les expériences. On place le vase sur une toile métallique, et on chauffe pendant deux minutes. Puis on y verse 130 ce. d'eau, et on attend un peu que tout l'oxydule de cuivre se soit déposé. Si la liqueur est restée manifestement bleue, alors on peut faire l'analyse ; mais, si elle est décolorée, alors il faut recommencer en mettant deux fois moins de la solution sucrée, et ainsi de suite. Mais le plus souvent on sait d'avance si ces épreuves sont nécessaires ou non. Quand on veut commencer l'analyse proprement dite, on prend deux anneaux sup- ports de cuivre, adaptés à une tige. Le diamètre de ces anneaux est tel que les deux vases employés s'y adaptent exactement. Les vases sont remplis du liquide à examiner. On les recouvre d'un verre de montre, et on les plonge, par l'intermédiaire du support, dans un bain-marie, en pleine ébullition. Comme il ne sont remplis qu'à moitié de leur volume, on peut les plonger dans l'eau bouillante assez pour que toute la partie corres- pondante au liquide soit immergée dans l'eau. Après exactement une demj-heure de séjour au bain-marie, on les retire en même temps, on enlève les verres de montre qui les reeouvi'ent, et on verse dans chaque vase 130 ce. d'eau froide. Auparavant on a adapté un tube filtre d'amiante à chacun de deux llacons d'aspi- ration par un caoutchouc; ces tubes sont en rapport avec la pompe aspirante. Alors, quand on ferme un des robinets, et quand on laisse l'autre ouvert, on peut faire le vide dans l'un, et laisser l'air pénétrer dans l'autre. Pour ne pas agiter le précipité d'oxydule de cuivre qui s'est amassé au fond des vases, on remplit le lube filtre d'amiante avec la liqueur bleue, en la versant par un entonnoir tixé à un support, et alors on fait manœuvrer la pompe. Puis, quand on a fait filtrer presque toute la liqueur bleue, on verse 100 ce. dans le vase. Pour ne pas agiter l'oxy- dule de cuivre déposé, ce qui gêne notablement la filtration, j'ai trouvé ce fait étonnant que l'eau, coulant le long d'un agitateur placé sur la paroi du vase, peut s'écouler rapi- dement, sans déranger l'oxydule de cuivre qui reste tranquillement dans le fond, sur- monté par un liquide clair et incolore. On filtre encore sur l'amiante ces 100 ce. d'eau, et alors le précipité d'oxydule de cuivre peut être mis sur le filtre. Pour cela j'emploie un ballon de lavage (Spntzflasche) qui a deux petits tubes de caoutchouc de '60 centimètres de long adaptés aux deux tubes de verre du ballon. Le caoutchouc par lequel l'eau de lavage doit passer porte à son extrémité un petit tube avec un ajutage terminal en verre, de sorte qu'en le dirigeant avec la main on peut donner telle direction qu'on voudra. On met l'autre tube dans la bouche, pour donner la pression nécessaire. Le ballon de lavage est sur la table, et on n'a besoin que d'une main, la droite, pour diriger le courant d'eau, tandis que la main gauche renverse le vase où s'est déposé l'oxydule de cuivre au dessus de l'entonnoir qui surmonte le filtre d'amiante. Alors on verse tout cet oxydule de cuivre sur le filtre. On lave avec quelques gouttes d'eau, et avec un fin pinceau on détache les petites particules d'oxydule de GLYCOGÈNE. 281 cuivre qui auraient pu adhérer au vase, jusqu'à ce qu'elles se soient détachées, et qu'il n'en reste plus de traces dans le vase. Quant tout a été filtré, on verse à plusieurs reprises de l'alcool absolu, et on lave ensuite deux fois avec de l'éther absolu. Il est très important de diriger la fîltration de telle sorte quejainais une couche de liquide ne manque sur le filtre d'amiante; car son imperméabilité est alors modifiée. Alors on porte les deux filtres d'amiante dans l'étuve sèche, de iOO à 120°. Au bout d'une heure la dessiccation est complète, et on peut, après refroidissement, les peser. Puis on les fixe sur deux flacons d'ERLENiiEVER, et on les remplit presque complète- ment d'acide nitrique fort. Quand tout l'acide s'est écoulé, on les remplit d'eau, puis on laisse couler cette eau dans le ballon, qui contient alors tout le cuivre déposé sur l'amiante. On prend ensuite les tubes qu'on lave à la pompe deux fois avec l'alcool absolu, et deux fois avec l'éther absolu. On sèche ; on pèse : on doit retrouver presque le même poids qu'avant l'expérience; et ils sont alors prêts pour servir h de nouvelles analyses. § IV. Contrôle cVaprès Volhard. — En conduisant ainsi cette analyse quantitative du sucre, on obtient par la pesée des chiffres satisfaisants. Mais, si l'on emploie la potasse du commerce, potasse à l'alcool, qui contient des terres et de la silice, comme impuretés, ou si les organes n'ont pas été complètement débarrassés des matières albuminoïdes,on obtient seulement des chiifres un peu trop forts, parce que ces impuretés se déposent avec l'oxydule de cuivre. Aussi, pour des déterminations exactes, est-il nécessaire de doser le cuivre correspondant à l'oxydule de cuivre déposé. Pour cela on verse dans une capsule de porcelaine le liquide cuivrique qui a été versé dans les ballons d'ERLENMEVER, et on détermine combien il faut d'acide sulfurique normal pour changer les nitrates en sulfates; on met un léger excès, et on chauffe au bain-marie jusqu'à siccité. Pour titrer le cuivre, les solutions suivantes sont nécessaires : 1" Une solution^de nitrate d'argent, décinormale ; 2° Une solution de sulfocyanate d'ammonium, décinormale; 3° Une solution saturée à froid d'acide sulfureux dans l'eau ; 4° De l'acide nitrique, dépourvu d'acide nitreux, et de densité do 1, 2. D'après Volhard, voici comment se fait la titration du cuivre. Les cristaux bleus de la capsule de porcelaine sont dissous dans un peu d'eau, et, par un entonnoir, versés dans un ballon de 300 ce. auquel on ajoute peu à peu, et par gouttes, une solution de soude, jusqu'à ce qu'il apparaisse un trouble dans la liqueur. Puis on remplit la capsule avec 50 ce. de la solution d'acide sulfureux qu'on verse dans le ballon, ce qui rend de nouveau limpide la solution cuivrique : puis on chauffe sur une toile métallique pendant une minute à l'ébullition. Alors, pendant qu'elle est à l'ébul- litiou,on place la liqueur sous une burette remplie de la solution de sulfocyanate d'am- monium, et on ajoute immédiatement environ 5 ce. de plus qu'il n'en faut pour la pré- cipitation du cuivre. (On sait, en effet, par les analyses antérieures et la méthode de la pesée, à peu près combien on doit trouver de cuivre; 1 ce. de la solution du sulfocyanate répond à 6,36 milligrammes de cuivre.) Quand le liquide s'est refroidi complètement, on remplit d'eau jusqu'à l'index; on ferme le flacon, on agite, et on filtre sur un filtre suédois sec. On cohobe le filtrat d'abord trouble, de sorte que finalement il devient parfaitement limpide. Alors on en prélève 100 ce. qu'on mesure dans un ballon bien jaugé; ces 100 ce. sont versés dans un vase. Puis on remplit d'eau le ballon jaugé, et on ajoute cette eau de lavage au liquide. Alors on met 50 ce, d'acide nitrique de 1,2 de densité, auquel on ajoute 10 ce, d'une solution saturée d'alun ferri-ammoniacal (S0v)-2FeNH',. + aq). Cette solution, forte- ment colorée en rouge, est placée sous la burette du nitrate .d'argent, dont on laisse écouler le liquide goutte à goutte, en agitant jusqu'à ce que toute teinte rouge ait dis- paru. On ajoute un léger excès, de 1 ce, environ, pour avoir un chiffre rond de nitrate d'argent, facile à calculer. De nouveau on veise dans le vase, par la burette, du sulfo- cyanate, et on laisse couler jusqu'à ce que la couleur rouge, déterminée par le .suifo- 282 GLYCOGENE. Tableau des chiffres respectifs de sucre, de cuivre et d'oxydule de cuivre. (Les chiffres sont des milligrammes.) 12 13 14 15 16 n 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38. 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 Pour OXÏIICI.E Pour 0,1 Pour OXÏKULE Pour 0,1 ClilTRE. 0,1 de DE SUCRE ClITRE. 0,1 de DR SUCRE DE SUCRE Oxydule DE SUCRE Oxydnle Cuivre. CUIVRE. de cuivre. 0? Cuivre. CUIVRE. de cuivre 32,8 0,21064 36,8 0,23088 71 153,6 0,204 173,0 0,22976 34,9 0,21064 39,2 0,23688 72 155,7 0,204 175,3 0,22976 37,0 0,21064 41,6 0,23688 73 157,7 0,204 177,6 0,22976 39,1 0,21064 43,9 0,23688 74 1.59.8 0,204 179,9 0,22976 41,2 0,21064 46,3 0,23688 75 '61,8 0,204 182,2 0,22976 43,3 0,21064 48,7 0,2.3688 76 163,8 0,202 184,5 0,2272 45,4 0,21064 51,0 0,23688 77 165,8 0,202 186,7 0,2272 47,5 0,21064 53,4 0,23688 78 167,9 0,202 189,0 0,2272 49,6 0,21064 55,8 0,23688 79 169,9 0,202 191,3 0,2272 51,7 0,21064 58,1 0,23688 80 171,9 0,202 193,6 0,2272 53,8 0,21064 60,5 0,23688 81 173,9 0,202 . 195,8 0,2272 55,9 0.21064 62,9 0,23688 82 175,9 0,202 198,1 0,2272 58,0 0,21064 65,2 0,23688 83 178,0 0,202 200,4 0,2272 60,1 0,21064 67,2 0,23688 84 180,0 0,202 202,6 0,2272 62,1 0,2028 69,9 0,2288 85 182,0 0,202 204,9 0,2272 64,2 0,2028 72 2 0,2288 86 184,0 0,202 207,2 0,2272 66,2 0,2028 74,5 0,2288 87 186,0 0,202 209,5 0,2272 68,2 0,2028 76,8 0,2288 88 188,1 0,202 211,7 0,2272 70,2 0,2028 79,1 0,2288 89 190,1 0,202 214,0 0,2272 72,3 0,2028 81,3 0,2288 90 192,1 0,202 216,3 0,2272 74,3 0,2028 83,6 0,2288 91 194,1 0,202 218,6 0,2272 76,3 0,2028 85,9 0,2288 92 196,1 0,202 220,8 0,2272 78,4 0,2028 88,2 0,2288 93 198,2 0,202 223,1 0,2272 80,4 0,2028 90,5 0,2288 94 200,2 0,202 225,4 0,2272 82,4 0,2028 92,8 0,2288 95 202,2 0,202 227,6 0,2272 84,4 0,2028 95,1 0,2288 96 204,2 0,202 229,9 0,2272 86,5 0,2028 97,4 0,2288 97 206,2 0,202 232 2 0,2272 88,5 0,2028 99,7 0,2288 98 208,3 0,202 234^5 0,2272 90,5 0,2028 101,9 0,2288 99 210,3 0,202 236,7 0,2272 92,6 0,2028 104,2 0.2283 100 212,3 0,202 239,0 0,2272 94,6 0,2028 106,5 0.2288 101 214,3 0,198 241,2 0,2232 96,6 0,2028 108.8 0,2288 102 216,3 0,198 243,5 0,2232 98,6 0,2028 111,1 0,2288 103 218,2 0,198 245,7 0,2232 100,7 0,2028 113,4 0,2288 104 220,2 0,198 247,9 0,2232 102,7 0,2028 115,7 0,2288 105 222,2 0,198 250,2 0,2232 104,7 0,2028 118,0 0,2288 106 224,2 0,198 252,4 0,2232 106,7 0,2028 120,2 0,2288 107 226,2 0,198 254,6 0,2232 108,8 0,2028 122,5 0,2288 108 228,1 0,198 256,8 0,2232 110.8 0,2028 124,8 0,2288 109 230,1 0,198 259,1 0,2232 112,8 0,204 127,1 0,22976 110 232,1 0,198 261,3 0,2232 114.9 0,204 129,4 0,22976 111 234,1 0,198 263,6 0,2232 116,9 0,204 131,7 0,22976 112 236,1 0,198 265,8 0,2232 119,0 0,204 134,0 0,22976 113 238,0 0,198 268,0 0,2232 121,0 0,204 136,3 0,22976 114 240,0 0,198 270,2 0,2232 123,0 0,204 138,6 0,22976 115 242,0 0,198 272,5 0,2232 125,1 0,204 140,9 0,22976 116 244,0 0,198 274,7 0,2232 127,1 0,204 143,2 0,22976 117 246,0 0,198 276,9 0,2232 129,2 0,204 145,5 0,22976 118 248,0 0,198 279,2 0,2232 131,2 0,204 147,8 0,22976 119 250,0 0,198 28), 4 0,2232 133,2 0,204 150,1 0.22976 120 252,0 0,198 283,6 0,2232 135,3 0,204 152,4 0,22976 121 253,9 0,198 285,9 0,2232 137,3 0,204 154,7 0,22976 122 255,9 0,198 288,1 0,2232 139,4 0,204 157,0 0,22976 123 257,8 0,198 290,3 0,2232 141,4 0,204 159,3 0,22976 124 259,8 0,198 292,6 0,2232 143,4 0,204 161,6 0,22976 125 261,8 0,198 294,8 0,2232 145,5 0,204 163,9 0,22976 126 263,7 0,1884 296,9 0,212 147,5 0,204 166,2 0,22976 127 265,6 0,1884 299,0 0,212 149,6 0,204 168,5 0,22976 128 267,5 0,1884 301,2 0,212 151,6 0,204 170,8 0,22976 129 269,3 0,1884 303,3 0,212 GLYCOGENE. 288 u Pour OXÏDIiLK POUR 0,1 a POUR OITDïU POUR 0,1 ai CCITRB. 0,1 de DE SUCRE K ClITRE. 0,1 de DE SUCRB o DE SUCRE Oxydule o DR SUCRE Oxydule Cuivre. CUIVRE. de cuivre. u. Cuivre. CUIVRE. de cuivre. 130 271,2 0,1884 305,4 0,212 191 379,5 0,1664 427,4 0,1874 131 273,1 0,1884 307,3 0,212 192 381.2 0,1664 429,3 0,1874 132 275,0 0,1884 309,6 0,212 193 382,9 0,1664 431,2 0,1874 133 276,9 0,1884 311,8 0,212 194 384,5 0.1664 433,1 0,1874 134 278,8 0,1884 313,9 0,212 19;; 386.2 0,1064 434,9 0,1874 135 280,6 0,1884 316,0 0,212 196 387.8 0,1664 436,8 0,1874 136 282,5 0,1884 318,1 0,212 197 389,5 0,1664 438,7 0,1874 137 284,4 0,1884 320,2 0,212 198 391,2 0,1664 440,6 0,1874 138 286,3 0,1884 322,4 0,212 199 392,8 0,1664 442,4 0.1874 139 288,2 0,1884 324,0 0,212 200 39i,3 0,1664 444,3 0,1874 140 290,1 0,1884 326,6 0,212 201 396,1 0,1372 446,1 0,178 141 291,9 0,1884 328,7 0,212 202 397,6 0,1372 447,9 0,178 142 293,8 0,1884 330,8 0,212 203 399,2 0,1572 449,6 0,178 143 - 295,7 0,1884 333.0 0,212 204 400,8 0,1572 451,4 0,178 144 297,6 0,1884 335,1 0,212 205 402,4 0,1572 433,2 0,178 145 299,5 0,1884 337,2 0,212 206 403,9 0,1572 435,0 0,178 146 301,4 0,1884 339,3 0,212 207 405,3 0,1372 456,8 0,178 147 303,2 0,1884 341 ,4 0,212 208 407,1 0,1572 458,5 0,178 148 305,1 0,1884 343,6 0,212 209 408,6 0,1572 460,3 0,178 149 307,0 0,1884 345,7 0,213 210 410,2 0,1372 462,1 0,178 150 308,9 0,1884 347,8 0,212 211 411,8 0,1372 463,9 0,178 151 310,7 0,176 349,8 0,1986 212 413,4 0,1572 463,7 0,178 152 312,4 0,176 351,8 0,1986 213 414,9 0,1572 467,4 0,178 153 314,2 0,176 553,8 0,1986 214 416,5 0,1572 469,2 0,178 154 315,9 0,176 355.7 0,1986 215 418,1 0,1572 471,0 0,178 155 317,7 0,176 357,7 0,1986 216 419,7 0,1572 472,8 0,178 156 319,5 0,176 359,7 0,1986 217 421,2 0,1372 474,6 0,178 157 321,2 0,176 361,7 0,1986 218 422,8 0,1372 476,3 0,178 158 323,0 0,176 363,7 0,1986 219 424,4 0,1372 478,1 0,178 159 324,7 0,176 365,7 0,1986 220 423,9 0,1572 479,9 0,178 160 326,5 0,176 367,7 0,1986 221 427,5 0,1572 481,7 0.178 161 328.3 0,176 369,6 0,1986 222 429,1 0,1572 483,5, 0,178 162 330,0 0,176 371,6 0.1986 223 430,7 0,1372 485.2 0,178 163 331,8 0,176 373,6 0,1986 224 432,2 0,1572 487,0 0,178 164 333.5 0,176 375,6 0,1986 223 433,8 0,1572 488,8 0,178 165 335,3 0,176 377,6 0,1986 226 435,3 0,146 490,4 0,1636 166 337,1 0,176 379,6 0,1986 227 436,7 0,146 492,1 0,16.36 167 338,8 0,176 381,6 0,1980 228 438.1 0,146 493,7 0,1636 168 340,6 0,176 383,5 0.1986 229 439,6 0,146 495.3 0,1636 169 342,3 0,176 385,5 0.1986 230 411,1 0,146 497,0 0,1636 170 344,1 0,176 387,5 0,1986 231 442,6 0,146 498,6 0,1636 m 345,9 0,176 389,5 0,1986 232 444,0 0,146 • 500.3 0,1636 172 347,6 0,176 391,5 0,1986 233 445,5 0,146 501,9 0,1636 173 349,4 0,176 393,5 0,1986 234 446,9 0,146 503,5 0,1636 174 351,1 0.176 395,5 0,1986 235 448,4 0,146 505,2 0,1636 175 352,9 0,176 397,5 0.1986 236 449,9 0,146 506,8 0,1636 176 354,6 0,1664 399,3 0,1874 237 431.3 0,146 508,4 0,1636 177 356,2 0,1664 401,2 0,)874 238 432,8 0,146 510,1 0,1636 178 357,9 0,1664 403,1 0,1874 239 454,2 0,146 511.7 0,1636 179 359,6 0,1664 404,9 0,1874 240 455,7 0,146 513,3 0,1636 180 361,2 0,1664 406,8 0,1874 241 457,2 0,146 515,0 0.1636 181 362,9 0,1664 408,7 0,1874 242 458,6 0,146 516,6 0,1636 182 .364,5 0,1664 410,6 0,1874 243 460,1 0,146 518,2 0.1636 183 366,2 0,1664 412,4 0,1874 244 461,5 0,146 519,9 0.1636 184 367,9 0,1664 414,3 0,1874 245 463,0 0,146 521,5 0,1636 185 369,5 0,1664 416,2 0,1874 246 464,5 0,146 523,6 0,1636 186 371,2 0,1664 418,1 0,1874 247 465,9 0,146 524,8 0,16.36 187 372,9 0,1664 419,9 0,1874 248 467,4 0,146 526,4 0,1636 188 374,5 0,1664 421,8 0.1874 249 468,8 0,146 528.1 0.1636 189 376,2 0.16Ô4 423,7 0,1874 250 470,3 0,146 329,7 0,1636 190 377,9 0,1664 425,6 0,1874 284 GLYCOGÈNE. cyanate, disparaisse. On ne s'arrête que lorsque le liquide est devenu nettement rosé, avec une teinte rosée permanente. + Si l'on appelle Kli, la quantité de sulfocyanate qu'on a versée p la solution de sulfocyanatee, et i la solution de nitrate d'argent qu'on a employée pour 100 ce. de la liqueur : la quantité de cuivre est Cuivrer (h/, + 3,_3,) X 6.36 Pour la commodité du lecteur je reproduis le tableau que j'ai donné antérieurement, où est indiquée la relation entre les poids de cuivre réduit et de sucre (p. 283 et 284). B. — Justification des prescriptions indiquées dans la première partie A. 1. Traitement des organes par la potasse. — Jusqu'à présent, les procédés employés en Allemagne pour le dosage du glycogène consistaient à traiter les organes contenant du glycogène par une solution diluée de potasse, à faire bouillir, à traiter la solution des organes par le réactif de BrOgre, qui précipite l'albumine dissoute, et à précipiter le filtrat par l'alcool, qui précipite le glycogène. Or, après avoir établi que l'emploi du réactif de Brûcke introduit des causes d'erreur notables, j'ai proposé une méthode qui élimine cette cause d'erreur, en supprimant l'emploi du réactif de Brijcre. La partie essentielle de ma méthode consiste en ceci : que les organes sont traités à chaud si longtemps avec la potasse concentrée que l'albumine est transformée de manière à ne plus précipiter par l'alcool. Mais, comme généralement, en Allemagne, d'après les analyses quantitatives de ViNTscHGAU et DiETL, de UiCHARD KuLz et de moi-même, on admettait que le glycogène est attaqué par la potasse à chaud, on n'a pu recommander l'emploi de la potasse à chaud qu'après avoir montré que cette opinion, d'après laquelle le glycogène est attaqué par la potasse à chaud, est une opinion erronée. J'ai prouvé nettement qu'il en est ainsi [A. (/. P., xcii, 81), et j'ai établi que le glycogène extrait des organes sans le réactif de Brucke, peut être, sans transformation, chauffé 60 heures avec de la potasse à .36 p. 100; car la solution de glycogène, étant intervertie, donne les mêmes quantités de sucre avant et après la coction avec la potasse. Même la précipitation du glycogène par l'alcool n'est pas changée par le traite- ment avec la solution potassique. Pour montrer que le glycogène des organes, non isolé, se comporte comme le glycogène isolé, j'ai du établir qu'on obtient toujours avec ma méthode, pour le glyco- gène musculaire, les mômes chiffres, que la potasse à 36 p. 100 ait agi sur lui pendant une demi-heure ou pendant 42 heures. Après coction d'une demi-laeiire. . . 1.882 p. dOO de glycogène. — de 42 heures 1.8(34 — — Dans une autre expérience faite avec de la potasse à 10 p. 100, j'ai trouvé dans la chair musculaire : Apt-ès 28 joui-s 1.494 p. 100 _ 50 — 1.461 — Par cette chauffe prolongée, la potasse s'est peu à peu concentrée graduellement. Les différences observées sont dans les limites de l'erreur expérimentale, sans que je les regarde comme des erreurs d'observation. Mais en pratique, les pertes sont sans importance. Si j'ai recommandé pour le traitement des organes la potasse fortement concentrée, c'est pour deux raisons. 1" Ainsi que je l'ai établi, la potasse diluée, à 2 p. 100, agit sur le glycogène pré- paré sans l'emploi du réactif de BrOcke, de sorte que la longue ébuUition finit par l'altérer. H s'agit de pertes qui atteignent 1 et 2 p. 100. F. W. Pavy, qui a fait les mêmes recherches, a observé des pertes de même ordre, encore qu'il employât de la potasse à 10 p. 100. Gomme la formation de dextrine est liée sans doute à un phéno- GLYCOGENE. 285 mène d'hydratation, on peut supposai- que la potasse concentrée a^it moins bien que la solution diluée pour provo(|uer l'hydratation du glycogène. 2° Il y a un intérêt considérable à éviter autant que possible, quand on précipite le glycogène par l'alcool, de précipiter en même temps l'albumine. Or, comme l'ont montré Gl.vude Bernard et Pavv, une longue chauffe des organes avec la potasse forte modifie les aihuminoïdes de telle sorte que même l'alcool très fort ne précipite plus que de petites quantités de substances azotées. Remarques relatives au § 2, : prccipitation du giycoijcne par l'alcool dans la solution potassique et isolement du glycogène. — Supposons que la solution des organes soit faite dans de la potasse k 15 p. 100. Il faut savoir la quantité d'alcool nécessaire pour précipiter tout le glycogène. C'est une recherche que j'ai faite rigoureusement, et j'ai trouvé que dans une telle solution il faut un volume d'alcool égal au volume de la solu- tion glycogénique. On dose le glycogène par inversion (voir pour plus de détails mon mémoire, A. g. P., xvii, 81). Mais comme, dans ce travail, nos recherches portaient sur le glycogène isolé, et que la solubilité du glycogène, quand il est accompagné de diverses substances qui sont dans les organes, pevit être modifiée par ces substances mêmes, j'ai voulu étudier spécialement cette question. Dans une série de diverses expériences, j'ai précipité la solution organique. 1° Par un demi-volume d'alcool à 96°. i" — volume égal — o" — — double — 4° — — décuple — Le résultat a été qa'un demi-volum". d'alcool précipite complètement le glycogène, de sorte qu'il n'y a pas d'augmentation du rendement en employant volume égal ou volume double d'alcool. L'emploi d'un volume décuple d'alcool augmenle quelque peu la quantité des hydrates de carbone précipités. Il s'agit maintenant d'expliquer pourquoi je lave toujours le glycogène mis sur le filtre suédois avec la même solution, 2 volumes d'ab:ool et un volume de KOH à l.'J p. 100, et celu dans tous les cas, que la solution des organes ait été précipitée par un demi- volume, ou volume ou deux volumes d'alcool. Si, après précipitation du glycogène, on fait la filtration sur un filtre suédois, la liqueur rouge, épaisse, filtre avec une rapidité relativement grande. Supposons que la précipitation ait été faite par uu demi-volume d'alcool, et que la filtration soit presque achevée, assez pour permettre le lavage du précipité, si l'on prend alors pour le lavage une solution qui contient autant de KOH et d'alcool que le liquide primitif, on verra ce fait singulier que la filtration s'arrête presque, ou du moins se fait avec une extrême lenteur; car le glycogène s'amasse lentement en formant une masse compacte. Ainsi, quand il n'y a plus d'albumine en solution, la iiltration cesse d'être facile; mais on évite cet inconvénient si l'on prend, pour le lavage du précipité, la solution plus riche en alcool que j'ai indiquée. Le même inconvénient d'ailleurs se rencontre aussi, quoique à un moindre degré, quand on lave le précipité avec une solution contenant oO p. 100 d'alcool, de sorte qu'il convient d'employer celle qui contient 66 p. !00 d'alcool, Voici enfin la raison pour laquelle je recommande pour la précipitation un volume d'alcool, quoique le demi volume soit suffisant. Si l'on place la liqueur sur le filtre suédois, naturellement peu à peu l'alcool s'évapore. Dans une pareille liqueur, laissée à l'air libre, de jour en jour on voit diminuer le précipité de glycogène, parce qu'il se dissout au fur et à mesure qne l'alcool s'évapore. Ce fait se produit aussi, quoique à un moindre degré, pendant la simple filtration, et cela d'autant plus que la filtration dure plus longtemps. Aussi faut-il prendre des précautions toutes spéciales pour établir qu'un demi-volume d'alcool précipite la totalité du glycogène, dans des solutions à l;i p. 100 de KOH. Il faut empêcher l'évaporation de l'alcool, et commencer le lavage du précipité avec la solution alcoolique de lavage, longtemps avant que toute la solution rouge des organes ait achevé de filtrer. Alors la filtration devient plus lente, ce qui est une condition favorable à l'évaporation de l'alcool. Il faut donc précipiter le glycogène par un volume d'alcool, ce qui empêche toute perte en glycogène par évaporation de 286 GLYCOGÈNE. l'alcool. Les impuretés qui se précipitent alors sont insignifiantes, et l'inconvénient qui en résulte est bien moins i^rand que celui d'une redissolution du glycogène dans une solution dont l'alcool s'est peu à peu évaporé. Quand Feau de lavage filtre presque incolore, et qu'il n'en reste plus sur le filtre, je verse sur le filtre de l'alcool à 96°; et voici pour quelle raison. Si l'on verse immédiate- ment de l'eau sur le glycogène, il se rassemble en une masse mucilagineuse qui se l'edissout avec peine, de sorte que la filtration est très lente. On ne peut employer d'eau chaude, à cause de l'action de la solution alcaline chaude sur le papier du filtre. Mais, si l'on verse de l'alcool sur le glycogène, on détermine sa rétraction. En outre l'alcool en filtrant enlève une grande partie de la potasse. Il suffit d'un lavage, au plus de deux lavages avec l'alcool. Quand il s'est complètement égoutté, on met un tube de caout- chouc au bec de l'entonnoir, qu'on ferme avec une pince : on verse sur le filtre de l'eau stérilisée; le glycogène absorbe rapidement l'eau, et se dissout complètement. Je donne maintenant les résultats des analyses. Série L — 500 grammes de pulpe musculaire (viande de cheval) sont additionnés de 500 ce. de potasse KOH à 60 p. 100 (hydrate de potassium 1 a de Merck). La solution est faite à froid dans un ballon d'un litre, et plongée dans un bain-marie à l'ébuUition. Au bout d'une demi-heure on agite, et on voil que toute la puipe musculaire s'est dissoute. On la remet dans le bain-marie. En tout on a chauffé pendant deux heures. Alors on verse le tout dans un litre d'eau bouillante. On attend que la liqueur se soit refroidie, et on filtre sur du coton de verre. Expérience L — 100 ce. de la solution musculaire sont additionnés de 50 ce. d'alcool à 96»; dans un vase recouvert d'un verre de montre. On filtre au bout de 24 heures ; on lave avec la solution de lavage indiquée plus haut, et cela avant que la liqueur rouge ait achevé de passer à travers le filtre; on lave tro'is fois. Le glycogène est légèrement jaunâtre. Après que la filtration a pris fin, on lave avec de l'alcool à 96". On redissout le gly- cogène dans l'eau froide ; on neutralise avec HGl; on met dans^un ballon de 500 ce. On ajoute 25 ce. de HCl à 1,19 de densité; on lave bien le filtre avec de l'eau, qu'on remet dans le ballon de 500 ce. On ramène au volume de 500 ce. Après inversion complète et refroidissement, on filtre pour séparer quelques petits rares fins flocons. 81 ce. de cette solution sucrée ont donné 0.2018 Cu^O = 0.17113 Cu. Le contrôle, d'après Volhard, donne 0.1780 Cu. 0.118 Cu = 0.083 de sucre. Donc 100 ce. de la solution des organes ont donné 0.512 de sucre provenant du gly- cogène. Expérience IL — 100 ce. de la solution musculaire et 100 ce. d'alcool à 96°. Filtration au bout de 24 heures. On lave deux fois avec la solution de lavage; puis avec l'alcool à 96°, comme dans l'expérience 11, et on procède exactement de même pour toutes les autres opérations. 81 ce. de la solution sucrée donnent 0.2041 de Cu20 = 0.1813 de Cu. ' Le contrôle, d'après Volh.\rd, donne 0.1803 de Cu =0.841 de sucre. Donc 100 ce. de la solution musculaire ont donné 0.519 de sucre. Expérience III. — 100 ce. de la solution musculaire et 200 ce. d'alcool à 96°. Filtration au bout de 24 heures. Mêmes opérations que pour les expériences I et IL 81 ce. de la solution sucrée ont donné 0.2057 de Cu20 = 0.1827 de Cu Le contrôle, d'après Voliiard, donne 0.1803 de Cu — 0.0841 de sucre GLYCOGÈNE. 287 Donc 100 ce. de la solution musculaire ont donné 0..'jl9 de sucre. Expérience IV. — 100 ce. de la solution musculaire mise dans un litre d'alcool à 96», contenant 7 p. 100 de KOH. Filtration après 24 heures. Précipitation à peu près identique à celle qu'on avait obtenue avec moins d'alcool. On lave avec une solution ainsi préparée : 100 ce. de solution de K0H15 p. 100, et 1000 ce. d'alcool à 96® avec 7 p. 100 de KOH. Après filtration, on ne lave pas le préci- pité à l'alcool, mais on le dissout immédiatement par l'eau. On neutralise, et on opère comme plus haut. 81 ce. de la solution sucrée ont donné 0,2112 de Cu^O = 0.1877 de Cu. Le contrôle, d'après Volhard, donne = 0.1821 de Cu, soit 0.085 de sucre. Par conséquent 100 ce. de la solution musculaire ont donné O.b2o de sucre. L'emploi d'une grande quantité d'alcool a augmenté le rendement de 1,1 p. 100. Série II. — 500 grammes de viande de cheval fraîche sont mélangés à froid avec 500 ce. de potasse à 60 p. 100 (Merck), dans un ballon d'un litre, qu'on met au bain- marie bouillant, et on procède exactement comme dans la série I. Expérience I. — 100 ce. de la solution musculaire filtrée sont additionnés de 100 ce. d'alcool à 96". On filtre, on invertit, et on procède exactement comme dans l'expérience parallèle de la première série. 81 ce. de la solution sucrée ont donné 0.14(50 de Cu20 = 0.1296 de Cu. Le contrôle, d'après Volhard, donne = 0.1292 de Cu, soit 0.0590 de sucre. Donc 100 ce. de la solution =0.3642 de sucre. Expérience 11. — 100 ce. delà solution sucrée avec 200 ce. d'alcool à 96°. Même série d'opérations que dans l'expérience précédente. 81 ce, de la solution sucrée ont donné 0.146.5 de Cu20 = 0.1300 de Cu. Le contrôle, d'après Volhard, donne 0.1290 de Cu, soit 0.05890 de sucre. Donc 100 ce. de la solution musculaire =0.3636 de sucre. Expérience 111. — 100 ce. de la solution des organes sont précipités par 1000 ce. d'alcool à 96°. Les autres opérations comme pour les expériences précédentes. La solu- tion de lavage est 100 ce. d'une solution de potasse à 15 p. 100, avec 1000 ce. d'alcool à 96». Les autres opérations sont identiques aux précédentes. A. 81 ce. de la solution sucrée ont donné ■ 0.134 de Cu^O =0.1367 de Cu (tube 10). Le contrôle, d'après Volhard, a donné 0,1314 de Cu, c'est-à-dire 0.0601 de sucre. Donc 100 ce. de la solution musculaire =0.3709 de sucre. B. En répétant cette expérience avec le tube 4, on trouve 0,1523 de Cu20 =:0.13.">3 de Cu. Le contrôle, d'après Volhard, donne 0,1302 de Cu, soit 0.0595 de sucre, Donc 100 ce. de la solution musculaire =: 0.3673 de sucre A = 0.3709 B = 0.3673. Moyenne : 0.3691 pour 100 ce. de la solution musculaire. Ainsi la précipitation par une grande quantité d'alcool a augmenté le rendement de 1,4 p. 100. 288 GLYCOGENE. TABLEAU D'ENSEMBLE. Dosage du glycogène. Précipitation des hydrates de carbone par l'alcool dans une solution d'organes qui contient 15 p. 100 de potasse. DANS 100 ce. DE LA SOLUTION ALCALINE. TATION DRATES rbone cipitation volumes ool. COMBIEN DE GLYCOGENE (exprimé en grammes de sucre) précipité par l'alcool à 96» AUGME^ EN HY de ca par la pré avec 10 dalc par 50 ce. par 100 ce. par 200 ce. par 1000 ce. Série 1 1 0,512 „ „ „ „ o ,1 0..519 ,, ,, » 3 ., .) 0,519 » » 4 » » » 0,525 1,1 p. 100 Série 2 1 » » » » » 0 » 0,3642 » 1) » 3 » " 0,3636 .. » 4 " *' ** 0.3691 1,4 p. lOO Ce tableau montre : 1» Que si un volume de la solution musculaire est précipité par un volume d'alcool à 96°, c'est assez pour que tout le (.jlycogène se trouve dans le précipité. Pour montrer à quel point le contrôle par la méthode de Volhard est nécessaire, il faut se reporter au tableau suivant : POIDS DE CUIVRE EN GRAMMES. Pesée. Méthode de Volhard. Différence. Série 1. Expérience 1. 1/2 volume d'alcool — 11. 1 — — — III. 2 - - — IV. 10 - - Série 2. Expérience 1. 1 volume d'alcool — II. 2 — — _ III. 10 — — — I 0,1793 0,1813 0,1827 0,1877 0,1296 0,1300 0,1367 0,1353 0,1780 0,1803 0,1803 0,1821 0,1292 0,1290 0,1314 0,1302 milligrammes. + 1,3 + 1,0 + 2,0 + 5,6 + 0,4 + 1,0 + 0,3 -L 5,1 Par conséquent la méthode de dosage par pesée donne le chiffre exact, si l'on em- ploie pour précipiter le glycogène un volume d'alcooL Cependant il ne faut pas craindre de faire l'expérience de contrôle (méthode de Volhard); ne fût-ce que pour s'assurer de la pureté des réactifs qu'on emploie. 2° La précipitation par un volume décuple d'alcool donne un résultat nouveau; car alors on voit le rendement en hydrates de carbone qui augmente de plus de 1 p. 100. Mais l'augmentation est faible, et ne dépasse pas les limites de l'erreur expérimentale. GLYCOGÈNE. 289 Cependant mes méthodes sont tellement exactes, et le parallélisme est si complet entre les deux séries d'expérience faites avecles muscles de deux chevaux différents, qu'il est très probable qu'il ne s'agit pas là d'une faute d'observation. On peut se demander quel est Thydrate de carbone qui ne se précipite que par une telle quantité d'alcool. Il est vraisemblable qu'il s'agit d'un glycogène dextrine, constaté ainsi pour la première fois dans l'organisme animal. J'ai d'ailleurs antérieurement (.1. g. P., lxxv, 207) appelé l'attention sur la présence des dextrines dans le foie frais traité par l'alcool à 70 p. 100. Après élimination de l'alcool, concentration et précipitation par les réactifs de Bri gke, la liqueur ne précipi- tait plus par dix fois son volume d'alcool. Peut-être la précipitation des albumines a-t-elle entraîné en même temps celle de traces de dextrine. Naturellement on n'aura le droit d'affirmer la présence de la dextrine que quand on l'aura extraite des organes. C'est une étude que j'entreprends en ce moment. Il n'en reste pas moins ce fait impor- tant que les hydrates de carbone supérieurs, qu'on ne retrouve pas dans l'analyse du glycogène, ne sont qu'en très faible proportion. Évidemment nous supposons que dans les organes il n'y a pas de dextrine, laquelle serait, comme le sucre, détruite à chaud par la potasse. Enfin, pour conclure, je ferai une dernière remarque. J'ai toujours supposé que l'hydrate de carbone précipité par l'alcool, et donnant du sucre après interversion, était du glycogène. Mais il est possible que des pentosanes soient mêlés au glycogène, qui à l'interversion donneraient des pentoses, sucres rédui- sant la liqueur de Fehli.xg. 11 faudra donc rechercher s'il y a une erreur provenant de ce fait, ce qui rendrait nécessaire de faire le dosage des pentosanes, et de corriger les chiffres donnés pour le glycogène. Cette méthode de l'analyse quantitative du glycogène repose sur des expériences faites principalement avec de la viande de cheval, laquelle est, comme on sait, très pauvre en graisse. Mais on a observé dans certains cas des conditions qui rendent la conduite de l'analyse bien plus difficile. En analysant des organes très riches en graisses, le liquide potassique oîi ils ont été dissous, se prend quelquefois, par suite de la formation abondante de savons, en une masse gélatineuse. Dans ce cas, pour faciliter l'analyse, on peut ajouter à la solution organique de l'alcool absolu et de l'éther qui enlèvent une bonne partie des graisses. Beaucoup d'organes, comme le foie et d'autres glandes, donnent en se refroidissant de la solution potassique chaude, un coagulum épais, probablement un albuminate de potassium, qui redevient liquide par l'alcool et peut alors subir les autres opérations analytiques. Ce sont là des difficultés spéciales qui exigent des soins particuliers pour pouvoir être surmontées. Analyse quantitative du glycogène, d'après Austl\. — Désirant remplacer par une méthode meilleure la méthode défectueuse de KtiLz, Austin a, avec les conseils et la direction de E. Salkowski, indiqué un nouveau procédé de dosage du glycogène. Ueher die quantitative Bestimmiimj des Glijkogenes in der Leber ans dem chein. Lahoraloriam . des patfiolog. Instituts zu Berlin; A. A. P., 1897, cl, 18'). Le but de Salkowski était d'abord d'empêcher la soi-disant action destructive que la potasse exerce sur le glycogène, et en même temps de se débarrasser du précipité consi- dérable d'albumine qui entraîne mécaniquement le glycogène. Austin a donc d'abord traité les organes avec de l'eau bouillante, et ti'aité le résidu insoluble contenant encore du glycogène par la pepsine, qui digère l'albumine et libère le glycogène. « J'emploie, dit-il, 2 grammes de la pepsine de Fi.nzelberg, lavée soigneusement à l'eau pour enlever toute trace de sucre de lait, cette pepsine est mise ensuite dans 990 ce. d'eau additionnée de 10 ce. d'acide chlorhydrique à 25 p. 100 de HCl. On intro- duit dans le ballon contenant ce liquide le précipité albumineux insoluble, qu'on sup- pose contenir du glycogène. On agite à diverses reprises, et on chauffe à 40° jusqu'à ce que tout soit à peu près dissous, c'est-à-dire en général au bout de deux jours. On reprend le liquide, on le neutralise, on le concentre à 200 ce. par évaporation. Ou ajoute encore de l'acide chlorhydrique. Le liquide filtre limpide. Alors le filtrat, qui est assez coloré, est précipité par deux fois son volume d'alcool. On le laisse vingt-quatre heures se déposer; puis on le met sur un filtre. On le lave avec de raicoul à 02 p. 100. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 1^ 290 CLYCOGENE. Avant que l'alcool du lavage se soit évapore', on reprend le filtre avec le précipité, et on le chauffe au bain-marie avec un peu d'eau ; ce qui suffît pour tout dissoudre, sauf une petite partie : puis on sépare par filtration. On traite alors ce précipité par la méthode de KiJLz, et, quant au filtrat, additionné des eaux de lavage, on le précipite par le réactif de Brucke, etc. >■ Ainsi, en résumé, le procédé d'AusTiN consiste à extraire le glycogèrie par trois méthodes successives, différentes, que nous appellerons A, B, C. A donne le glycogène que l'ébullition avec l'eau sépare de la pulpe des organes. On précipite les albumines par le réactif de Brucke. Le précipité est loin d'être aussi consi- dérable que dans l'expérience de KClz. B donne le gLycogène que l'ébullition avec l'eau n'a pas dissous, mais que l'on peut extraire par la digestion des matières albuminoïdes que l'ébullition a précipitées. Alors ce glycogène, qui est en solution avec l'albumine digérée, est précipité sans albumine, si la concentration de la solution n'est pas supérieure à celle qu'indique Austin, et si, pour un volume de la solution acide, on n'emploie que deux volumes d'alcool. Austin n'indique pas qu'il s'agit d'alcool absolu : c'est sans doute de l'alcool à 96 p. 100. D'ailleurs, comme le glycogène qu'on obtient ainsi par digestion, contient toujours un peu d'albumine, l'emploi du réactif de Brucke est encore nécessaire. C donne le glycogène qui est resté enfermé dans la masse des matières albuminoïdes demeurées indissoutes par la pepsine. Aussi faut-il traiter cette masse par la potasse, et la dissoudre d'après les indications de Kulz. Les tableaux suivants donnent le résumé des résultats de Austin {loc. cit., 193). Dosage du glycogène (Austin). I. C La méthode 1 A B GLYCOGÈNE de la dijïestion ' a'donné par rapport POIDS EXTRAIT GLYCOGÈNE DU RKSIDU SOMME CONTROLE AQUEUX DU RÉSIDU après de A, B (méthode de à la mothode DD POIK. de après digestion et C. KuLzV de Kulz en glycogène. glycoçc&ne. digestion. (méthode de "', '"' KfLZ). Plus. Moins. 1 2o,6 0,558 0,4445 0,0195 1,0220 0.991 0,031 >. 1 2 22,5 0,3128 0,250 0,009 0,5118 0,561 0,108 » 3 42,0 2,0835 0,735 0,0(i5 2,8825 2,9414 » 0,058 i 20,5 0,0105 0,022 traces. 0,0325 0,0374 » 0,049 .') 19,25 0,258 0,3295 traces. 0,5875 0,535 0,0525 1) 6 31 0,598 0,552 0,0115 1,1615 1,233 „ 0,0715 1 30,45 0,9065 0,619 0,017 1,5425 1,486 0,0565 " Pour comprendre la signification de ces chiffres, il faut ajouter un autre tableau, dressé d'après les chiffres mêmes de Austin, où est calculée l'erreur centésimale, en. admettant que les analyses par la méthode de Kùlz soient exactes. D'après les données fournies par Austin, on ne peut pas voir avec certitude si dans ses analyses il a été tenu compte des cendres. Il semble cependant que non; car, lorsqu'il y a eu analyse de cendres, il l'indique expressément, ajoutant qu'il n'a pas fait toujours l'analyse des cendres, parce qu'il s'agit de chiffres trop faibles. Ki'Lz considérait de telles analyses comme sans valeur : mais l'analyse du glycogène quand elle est faite par la méthode de Ki'Lz, est si inexacte, et comporte tant d'erreurs que, dans un tra- vail d'ailleurs très soigneux, il y a de plus fortes causes d'erreurs que celles qui sont dues à l'absence de dosage des matières minérales. Aussi peut-on excuser cette simplifi- cation d'un travail si laborieux et qui coûta tant de peine. Dans ce tableau II, on voit ce fait peu satisfaisant que la méthode de la digestion a donné tantôt 1,97 p. 100 en moins, tantôt 19,25 p. 100 en plus de glycogène que la méthode de KClz. Comme j'ai montré que celle-ci est entachée de causes d'erreurs nom- breuses et variables, on ne peut pas, en comparant ces deux méthodes, attribuer l'erreur uniquement à la défectuosité de la méthode de digestion (A. g. P., lxxv, 120). GLYCOGÈNE. Dosage du glycogéne (Austin). II. 291 LA MÉTHODK DE LA DIGESTION A DONNÉ EN GLYCOGÈNE PAR RAPPORT A LA MECTHODK DK KÛLZ CONTROLE Chiffres al)>;olus. Chiffres centésimaux. Plus. Moins. Phis. Moins. 1 0,991 0,031 „ 3,13 1, 2 0,561 0,108 » 19,23 1) 3 2,9414 » 0,038 » 1,97 4 0,0374 » 0,0049 ,, 13,10 5 0,533 0,0325 " 9,8 .. 6 1,233 1) 0,0715 ,. 5,8 7 1,486 0,0563 " 3,8 » Moyenne générale. . . +2,16 Il est important de constater que la méthode de la digestion donne en moyenne à peu près les mêmes chiffres que la méthode de Kulz. Les chiffres sont plus élevés de 2,10 p. 100 pour la méthode de la digestion. Or, comme j'ai montré qu'avec la mé- thode de KûLz les chiffres sont beaucoup trop petits, il s'ensuit que cette obser- vation reste vraie pour les chiffres obtenus par la méthode de la digestion {Ibid., 12,1). Cependant j'ai cru devoir examiner d'une manière plus précise la méthode d'AuSTIN. Quand on se propose de déterminer combien il y a d'azote, de graisse et de glycogéne dans un groupe de 20 grenouilles, on se heurte d'abord à la difficulté, peut-être à l'impos- sibilité, de réduire les corps de ces divers animaux en une bouillie homogène, de sorte qu'on ne peut prendre une fraction de la masse, puis une autre, puis une autre encore, pour y doser dans une première l'azote, dans une autre la graisse, dans une troisième le glycogéne. On ne peut guère non plus placer ces vingt grenouilles dans la potasse bouillante qui les dissout rapidement; car il se fait de l'ammoniaque, et la graisse est transformée en savon. Par conséquent, la méthode de Kûlz n'est pas recevable. Mais, si l'on dissout les vingt grenouilles dans un flacon contenant de l'acide chlorhydrique addi- tionné de pepsine, on obtient une solution homogène, dans laquelle tous les corps des animaux, à l'exception des os et d'un faible résidu, se trouvent en dissolution et con- tiennent tout l'azote et toute la graisse, en même temps qu'elle peut servir au dosage du glycogéne, d'après Austin. Athanasiu s'est servi de cette méthode pour étudier la dégénérescence graisseuse des matières albuminoïdes dans l'intoxication phosphorée (A. g. P., 1898, Lxxi, 318). Mon premier soin a donc dû être de rechercher si la pepsine de Finzelberg est préci- pitée en totalité par le réactif de Brûcke, ou si l'alcool, en précipitant le glycogéne, ne précipite pas aussi une partie de la pepsine de Finzelberg. J'instituai ces expériences avec quatre préparations de cette pepsine, lesquelles ne se comportèrent pas tout à fait identiquement, et, par conséquent, provenaient d'origine différente. De ces expériences, il résulte que la pepsine de Finzelberg contient des corps qui ne précipitent pas par l'acide chlorhydrique et le réactif de Brucke, mais qui, comme le glycogéne, précipitent par l'alcool. Par conséquent, dans les analyses d'AusTiN, ces substances doivent augmenter le poids du glycogéne qu'on veut déterminer. Cette cause d'erreur est de grandeur variable, et dépend de la présence dans la pepsine de glyco- géne ou d'érythrodextrine substances qui se forment, d'après Brûcke, dans la digestion stomacale de l'amidon. Par conséquent, le réactif pepsique pris par Austin pour déterminer le poids du glycogéne contient lui-même des quantités très variables de glycogéne ou d'un polysac- charide analogue. La pepsine de Flnzelbeug modifie-t-elle le glycogéne de manière à diminuer son aptitude à être précipitée par l'alcool ? 292 GLYCOGÈNE. C'est là une question que naturellement Austi.n s'est posée ; et il a cherché à savoir si la pepsine agit sur le glycogène de manière à rendre l'analyse quantitative impossible. AusTiN a pensé que la pepsine de Finzelberg ne transforme pas le g-ly(iogène en sucre. J'ai répété cette expérience, et j'ai prolongé la digestion pendant trois jours sans pouvoir constater qu'il y avait formation de sucre; mais cela ne suffit pas; et il faudrait prouver que la digestion pepsique ne transforme pas le glycogène, par exemple, en donnant des dextrines légèrement solubles dans l'alcool, ce qui rendrait défectueuse l'analyse quantitative. Pour décider la question, j'ai fait digérer du glj'cogène par la pepsine, puis j'ai procédé comme Austin dans la pesée du glycogène, et j'ai toujours constaté alors de grandes pertes. Le glycogène obtenu par la méthode (/'Austin contient encore de Vazote, contrairement à Vaffirmation f/'Ausxix. — L'affirmation souvent reproduite, depuis la découverte du glycogène, que le glycogène préparé par la méthode de Brûcke ne contient pas d'azote, est due à ce que la sensibilité des réactions qui décèlent l'azote n'est pas très grande. Ainsi que moi et mes élèves nous l'avons montré, l'analyse quantitative de l'azote par la méthode de Kieldahl est jusque à présent le seul procédé satisfaisant; on dose l'azote en titrant l'ammoniaque formée par une solution titrée d'acide sulfurique telle que i ce. réponde à 1 ou 2 milligrammes d'azote; la solution de potasse étant équivalente à la solution d'acide. Naturellement, il faut s'assurer d'abord par des épreuves préliminaires que les réactifs employés ne contiennent pas d'azote, de même que les vases et appareils de veri'e qui servent à la distillation ne donnent pas de potasse ou de soude. Naturellement aussi, il faut s'assurer de l'exactitude des solutions titrées en dosant l'azole de l'urée pure, et en retrouvant le chifl're théorique. Si, dans l'analyse (au point de vue de l'azote) du glycogène préparé par la méthode Brugke-Kijlz, on n'a précipité qu'une seule fois les albumines par l'acide chlorhydrique et l'iodo-mercurate de potassium, on n'obtiendra qu'un glycogène, très riche encore en impuretés, contenant de l'azote. D'après mes recherches, cette proportion de l'azote oscille entre 0,1 et 0,5 p. 100. Et même, dans les préparations les plus soigneuses, on n'évite pas cet azote. La cause de cette défectuosité, c'est que les substances qui pré- cipitent par le réactif de Rrl'cke sont quelque peu solubles dans un excès du réactif. KiJLZ savait, sans aucun doute, qu'en précipitant une première fois par le réactif de Rrucke, il n'obtenait d'abord qu'un produit impur : car il recommande de répéter la purification, en redissolvant dans l'eau le glycogène obtenu, et en le précipitant à nouveau par l'acide chlorhydrique et l'iodo-mercurate de potassium. Pour ma part, j'ai cherché à maintes reprises à obtenir ainsi un glycogène pur et dépourvu d'azote. Mais je n'ai jamais réussi. Quelquefois cependant il m'est arrivé d'abaisser la proportion d'azote au-dessous de 0,1 p. 100; mais toujours les proportions étaient notablement supérieures à 0,01 p. 100. J'ai indiqué cela avant le travail d'AusTi.N. (Pfluger, a. g. p., lxvi, 636.) Analyse quantitative du glycogène par la colorimélric. — Gûldsteln {Verh. d. pJiysik. med. Gesellsch. in Wùrzburg, N. F., vu) a proposé le dosage colorimétrique du glyco- gène, et il l'a employé à résoudre diverses questions. Mais Luchslnger, dans sa disser- tation inaugurale (Zurich, 1875, p. 10), a prouvé que la méthode de Goldstein est sans valeur. Voici pour quelles raisons : 1° Le glycogène du muscle et celui du foie se comportent chez les divers animaux d'une manière différente vis-à-vis de l'iode; 2° D'après Brùcke, la coloration du glycogène par l'iode est différente, selon qu'il est préparé récemment, ou desséché; .3^ La présence de substances diverses, albumine, gélatine, alcool, chlorure de sodium, iodure de potassium, carbonate et phosphate de sodium, modifie la coloration de la combinaison du glycogène avec l'iode. D'après Eduard Kûlz (A. g. P., 1881, xxiv, 91), la méthode colorimétrique donne quelquefois certains résultats satisfaisants, si l'on veut déterminer le glycogène chez chien, lapin, poule, dans le foie ou les muscles, en partant du glycogène normal, de même origine, en se servant d'un glycogène pur et sans cendres, préparé par la méthode de Brucke, et en n'employant pour la réaction colorante que des solutions récemment Mùthode Diiférence do la pesée. centésimale. 1.613 + 2.23 0.0705 + 0.9!) 0.016.5 — 3.03 GLYCOGÈNE. 293 préparées d'iodure de potassium, lesquelles ont toujours la même concentration. Mais alors de tels procédés analytiques, comme le dit Kllz avec raison, réellement, n'ont aucun avantage. Plus récemment, Paul Jensen (Z. p. €., xxxv, 525) a fait de nouvelles études sur les réactions colorimétriques. A l'appui de cette méthode, il donne trois analyses dans lesquelles il a contrôlé le procédé colorimétrique par le dosage avec la méthode BrCcke KuLz, employée d'ailleurs sans les perfectionnements introduits par Pi'Lùger. Le tableau suivant donne la comparaison de ces deux méthodes : Métliode Provenance du glycogéno. colorimétrique. Foie 1.577 Muscles des membres 0.0698 Cœur 0.0170 Mais, comme Jensen, ainsi qu'il le dit lui-même, n'a pas suivi, dans sa préparation par la méthode de Brijcke-Kulz, les perfectionnements de PflOger, il s'ensuit que les chiffres obtenus par pesée doivent être trop faibles. Et puis, il faut se demander si Jensen a fait le dosage des cendres. Comme il n'est pas question d'un tel dosage, on doit admettre que le poids des cendres n'a pas été déterminé, ce qui indique à quel point il s'agissait d'un glycocène impur. Donc les chiffres ne peuvent guère être comparés. Pour l'analyse colorimétrique, Jense.\ emploie des solutions de glycogène pur, qu'il appelle solutions normales, et dont il connaît exactement les proportions centésimales. Il les compare à des solutions de glycogène contenant des impuretés. Le glycogène de la solution normale a été préparé par la méthode de Brucke-Kulz, au moyen de préci- pitations répétées par le réactif de Brucke. Mais Pavy et Pfluger ont montré que, dans ces conditions, le glycogène s'est altéré, de sorte qu'on n'a plus le droit de l'appeler glycogène normal. Que la réaction colorante de l'iode sur le glycogène soit alors très affaiblie, c'est ce qu'on sait fort bien, et BrOcke a montré que la simple dessiccation du glycogène suffit à cela. Pfluger a fait remarquer que le glycogène, préparé par la méthode Brucke-Kllz, et desséché, perd de plus en plus, au fur et à mesure de la dessiccation, l'aptitude à se colorer par l'iode. La concordance des trois analyses de Jensen ne peut s'expliquer que par des erreurs agissant dans des sens différents, et se compensant l'une par l'autre. Et, d'ailleurs, comme Jensen ne nous donne que trois analyses, on ne peut savoir combien il a fait d'analyses qui ne concordent pas. C'est seulement ainsi qu'on peut s'expliquer le jugement que Jensen lui-même porte sur sa méthode (p. 529). « S'il s'agit d'organes volumineux, et contenant de grandes quantités de glycogène, l'erreur absolue se multiplie, de sorte que les données fournies par la titration colori- métrique ne doivent plus être considérées comme satisfaisantes. » Mais, dans les trois analyses indiquées par lui, l'erreur absolue est faible, et môme aussi l'erreur centésimale. De sorte que, si réellement elles représentaient bien toutes les expériences, elles ne justifieraient pas les reproches graves que Jensen a adressé lui- même à sa méthode. D'après mes nouvelles recherches, la difficulté de l'emploi d'une méthode colorimé- trique dépend de la raison suivante : 1" la coloration de la même solution glycogé- nique se modifie avec la niasse de l'iode qu'on ajoute à la solution depuis le jaune clair jusqu'au rouge de sang; pour atteindre ce maximum de coloration il faut mettre un excès d'iode; mais, si l'on dépasse cet excès nécessaire, la teinte de la solution iodée s'ajoute à la teinte de l'iodoglycogène; 2° le glycogène saturé d'iode ne donne la cou- leur rouge sang qu'en solution concentrée : en solution diluée, on observe toutes les étapes jusqu'à la coloration jaune brun; 3° si par une même solution d'iode on traite une solution dans laquelle le glycogène est à doser et une autre qui contient des quan- tités connues de glycogène, il faut se rappeler que les solutions d'organe contiennent des substances qui fixent l'iode, de sorte que toutes les solutions de glycogène qu'on a à analyseront à coup sûr une coloration moindre que celle qui serait due au glycogène pur. 11 est vrai que ces impuretés du glycogène, lesquelles se combinent à l'iode, peuvent 94 GLYCOGÈNE. être séparées, mais seulement par de longs procès de purification, ce qui rend toute ana- lyse quantitative du glycogène très longue à cause des longs et difficiles procédés de purification nécessaires pour avoir le glycogène chimiquement pur; 4° il faudrait enfin savoir si le glycogène du foie et celui des autres organes donnent la même intensité de coloration avec l'iode. Ainsi Harden et W. Young [Transactions of the chemical Society, 1892, lxxxi) ont montré dans un excellent travail que le glycogène du lapin est plus fortement coloré par l'iode que celui de la levure. Ces deux sortes de glycogène réagissent plus à l'iode que le glycogène des huîtres. D'après Clautriau {Études chimiques du glycogène, mémoire couronne de VAc. Royale Belgique, 1895, 53,) le glycogène de la levure se colore plus fortement que celui des champignons ou des lapins. Harden et Young ont prouvé par l'analyse élémentaire de leurs produits qu'ils avaient employé pour leurs recherches du glycogène pur. Naunyn (A. P. P., m, 97] avait déjà fait remarquer que chez les poules le glycogène musculaire se colore en violet par l'iode, tandis que le glycogène du foie se colore en brun. Claude Bernard a découvert que les muscles paralysés ou contraints à un long repos, chez le lapin, se chargent d'un glycogène qui donne avec l'iode une couleur bleue comme l'iodure d'amidon ; or je puis affirmer par mon expérience personnelle ((ue Claude Bernard était un observateur d'une exactitude extrême. La génialité de son esprit ne nuisait pas à l'exactitude de ses recherches, mais au contraire le conduisait par une sorte de divination vers la vérité. On doit donc tenir compte de ce fait que le glycogène des divers organes n'exerce pas la même action colorante sur l'iode; par conséquent la recherche d'une méthode colorimétrique suppose la préalable solution de cette question par une recherche systé- matique. Même si cette recherche avait été faite, une analyse exacte présenterait encore tant de difficultés et des conditions si spéciales qu'on ne voit pas quel bénéfice de temps et de certitude cette méthode pourrait apporter. Analyse quantitative du glycogène par la mesure de la déviation polarimétrique. — Eduard Kulz (A. g. P., xxiv, 92) a fait, le premier, des expériences à l'effet de doser le glycogène par les mesures optiques. D'abord, il a déterminé l'angle de déviation du glycogène, purifié par sa méthode, et il a trouvé un chiffre moyen de 211°. Deux autres observateurs habiles, Bôhm et Hoffmann, avaient trouvé 226,7". Kulz a comparé les chiffres obtenus par la mesuie de polarisation avec ceux que doime la méthode de Brûcre-Kûlz; mais ce fut à une époque |où Pflùger n'avait pu encore perfectionner la méthode de préparation. C'est ce qui explique peut-être pour- quoi la méthode Brucke-Kulz a donné des chiffres plus forts. E. KtJLZ a alors présenté, dans un tableau, 9 expériences qui prouveraient, d'après lui, que la méthode optique donne des résultats satisfaisants. Mais, si l'on étudie l'écart centésimal de ses chiffres, on constate un écart : Pour rexpérience 2 — 4 — 5 — 6 — 9 de 6 p. 100 de 8 — de 9 — de 17 — de 13 — Il est difficile de trouver que ces chiffres sont concordants et satisfaisants. De fait, les différences considérables que divers observateurs ont constatées dans le pouvoir rotatoire spécifique du glycogène, prouvent que cette méthode de mesure ne peut être encore appliquée à l'analyse quantitative du glycogène. Analyse quantitative abrégée du glycogène d'après Pfluger. — Par les méthodes employées pour l'analyse du glycogène d'après Brûcke-Kulz, une durée de trois ou quatre jours à une semaine, et plus, était nécessaire pour déterminer la quantité de glycogène. Diverses recheiches ont été enti:,eprises pour procéder plus rapidement; mais aucune ne réussit. Aussi puis-je recommander une marche de l'analyse telle qu'on peut l'achever en un jour et même eu quelques heures : GLYCOGÈNE. 295 1» On prend 100 grammes de la pulpe des organes qu'on chauffe pendant 2 heuresà l'ébuUition dans 100 ce. de potasse à 60 p. 100. 2° Après refroidissement on verse dans un vase; on ajoute 200 ce. d'eau stérilisée, on mélange et on précipite par 400 ce. d'alcool à 96 p. 100, cela sans filtration préalable. 3" Après que le précipité s'est déposé, on filtre sur un filtre suédois delà centimètres de diamètre; on lave d'abord avec une solution de un volume dépotasse à 15 p. 100, addi- tionné de 2 volumes d'alcool à 96; puis on lave avec l'alcool à 66 p. 100. 40 Le précipité est redissous par l'eau bouillante avec le filtre et les portions inso- lubles. 5° On neutralise la solution, on ne filtre que s'il se forme un précipité albumiuoïde notable, et on fait bouillir le précipité insoluble. Le plus souvent cette seconde filtration peut être épargnée. 6° On ajoute de l'acide chlorhydrique pour amener l'acidité à 2,2 p. 100, et on invertit par une ébullition de 3 heures. 7° Après refroidissement, neutralisation, filtration, on dose le sucre par l'appareil polarimétrique. Le chiffre de sucre trouvé, multiplié par 0,927, donne la quantité cher- chée de glycogène. CHAPITRE III Glycogène dans le régne animaU La présence du glycogène dans les tissus de tout le règne animal, et même du règne végétal jusqu'aux champignons, indique déjà l'importance extrême de cette substance dans la nutrition des êtres vivants. De même, la teneur différente en glycogène des dif- férents tissus peut prêter à d'importantes considérations sur la fonction de ces tissus. Bien entendu, c'est l'analyse chimique du glycogène qui est notre principal moyen d'observation. Mais, comme il s'agit de savoir exactement dans quelles parties|des organes, c'est-à-dire dans quelles cellules, et même dans quelles parties de la cellule vient se former le glycogène, nous devons avoir recours aussi à l'analyse microscopique. Dans cette étude, je me reporterai à une monographie soigneuse et tout à fait recomman- dable de Dietrich Barfurth: Vergleichende histochemische Untersiichungen iiber das Glyco- gen {Arch. far mikr. Anatomte, 1885, xxv, 259), à laquelle je ferai de nombreux emprunts. D'après Barfurth (p. 260), voici comment on peut faire la recherche micro-chimique du glycogène. De petits fragments du tissu qu'on veut étudier sont durcis dans de l'alcool absolu. La coupe est placée sous le microscope en contact avec une solution d'iode recouverte d'une lamelle. On emploie trois solutions : 1» une solution contenant 6 grammes d'iodure de potassium et 2 grammes d'iode dans 1 litre d'eau. 2" cette solution est traitée par son demi-volume de glycérine : c'est la glycérine iodée. 3° solution gomraeuse d'iode d'après Ehrlich : une solution étendue d'iode et d'iodure de potassium est mélangée avec la gomme arabique en quantité suffisante à former un liquide sirupeux. Comme l'a remarqué Claude Bernard, la couleur de Tiodure de glycogène n'est pas toujours identique. Barfurth a trouvé, comme Claude Bernard (C. H., 23 mars 18571, NaunyxN [A. p. p., ,in, 97), Nasse {A. g. P., 1877, xiv, 479), Bôhm et Hoffmann (.4. P. P., X, 17) et KiJLz {A. g. P., 1881, xxtv, 64), que c'est surtout entre le glycogène du muscle et celui du foie qu'existent les plus grandes différences : dans le muscle, c'est une belle couleur violette, tandis que dans le foie c'est une couleur bleu marron foncé. La colora- tion disparait quand on chauffe; elle revient^quand on refroidit, si tout l'iode n'a pas été expulsé. La présence du glycogène peut être affirmée avec une certitude suffisante, si la solu- tion iodée donne la coloration rouge brun; mais, bien entendu, il faut qu'on puisse extraire de ce tissu le glycogène, et qu'on élimine la matière amyloïde, substance inso- luble dans l'eau et les acides dilués; mais qui par l'iode se colore également en brun, 29(i GLYCOGENE. avec cette différence qu'après l'action de l'acide sulfurique elle devient violette ou bleue (Barfurth, p. 262). Foie. — Les uutevirs qui ont étudié le glycogène du foie sont en première ligne : ■a K H -S 3 © S 3 ■« f ■ Fpithéliums cylin- driques des conduits excréteurs des verté- brés, des embryons de vertébrés et des invertébrés. Ei)ilhéliums cylin- driques du canal in- testinal des embryons de vertébrés et des invertébrés. Estomac et intestin de la grenouille. ÉPITHÉLIUMS Stratifiés. Peau et téguments. Epitliéliums strati- (ics de la peau, de la langue et du vagin des vertébrés. Gaines pileuses des poils en voie d'ac- croissement des ver- tébrés et des em- In-yons de vertébrés. Téguments des em- bryons de vertébrés. Corne, bec, plumes. O z o o o m y. H 1 CELLULES conjoiiriivos des invertébrés. Cellules plasma- tiques. Cellules con- jonctives et fibrilles de la substance conjonctive des gastéropodes. SAN» et glaudes sanguines. Globules blancs des vertébrés. Rate. Globules san- guins des crusta- cés. 73 U J H « Cartilages liya- lins et fibro-carti- lages embryon- naires. Chorde dorsale. CELLULES ANIMALES. 1 i y: 03 a Cellules gan- glionnaires des gastéropodes (tra- ces). Cerveau des vei'- tébrés (d'à près Pavy). • o u Muscles striés des vertébrés et de leurs embryons. Muscles des vers, des mollus- iiues, des arthro- podes. Fibres muscu- laires lisses des vertéljrés. y? « Q <5 -< C Foie des vertébrés, des embi-yons de ver- tébrés, des mollus- ques, des arthro- podes. Relus des verté- brés, des embryons de vertébrés, des mollusques. Glandes vertes des écrevisses. Glandes salivaires des embryons de ver- tébrés et des gasté- ropodes. Poumons testicules et ovaires des vertébrés et des embryons de verté- brés. Glandes de l'eslu- mac de la grenouille- Glandes hermaphro- dites, glandes albu- mineuses, glandes du manteau et du pied des gastéropodes. 310 GLYCOGENE. III. Glycogène des foies de lapin. a. 0,2359 ont donné 0,4167 de C02 et 0,1462H2O. C = 44,41, H = 6,34 b. 0,2611 — 0,4232 de C02 et 0,1458H2O. C = 44,20, H = 6,30 : Dans C6 RIO 05 théoriquement C = 44,44. H = 6,17 ' Ces résultats n'ont pas de nombres différentiels qui dépassent les limites de l'erreur expérimentale : ils concordent avec la formule donnée par A.Kerule, C^H^^Os; et prouvent que le glycogène extrait de la levure est le même corps que le glycogène animal. Le pouvoir rotatoire spécifique du glycogène spécifique de la levure a été en moyenne da [a}D + 16, 5° + 198,3"; chifTres qui concordent, dans les limites de l'erreur expérimen- tale, avec les pouvoirs rotatoires du glycogène des huîtres et du foie des lapins. Harden et YouNG ont confirmé l'observation de CLAUTRiAu.que les solutions aqueuses du glycogène de la levure ont une moindre opalescence que du glycogène des huîtres et des foies de lapins. Ces divers glycogènes ne se comportent pas de la même manière vis-à-vis de la solu- tion iodée. Le glycogène des lapins est plus profondément coloré par l'iode que le glyco- gène de la levure, et le glycogène des huîtres est beaucoup moins coloré que les deux autres. Notons qu'en comparant deux échantillons de glycogène de la levure obtenus par des préparations différentes, dans un cas, la profondeur de la coloration était de 2;) p. 100 plus grande que dans l'autre. Harden et Young n'ont pas [pu confirmer l'ob- servation de Clautriau que le glycogène de la levure se colore plus fortement que [celui des champignons et du lapin. Harden et Young ont enfin comparé l'action de l'acide chlorhydrique dilué (hydrata- tion et formation de sucre) sur les trois variétés de glycogène. Ils n'ont pas pu trouver de différences essentielles. En faisant bouillir une solution de glycogène avec de l'acide chlorhydrique dilué à 1,82 p. 100, le maximum de la formation de sucre n'a été obtenu qu'au bout de six à huit heures, quoique au^bout de quatre heures la limite ait été presque atteinte. Conclusion. — Dans les deux tableaux suivants, dus à Barfurth, on pourra voir en son ensemble la répartition du glycogène dans les organismes vivants : Glycogène des animaux et des champignons (Barkurth). VERTÉBRÉS. MOLLUSQUES. ARTHROPODES. VERS. Mammifères *. Oiseaux*. Reptiles'. Amphibies *. Poissons *. Céphalopodes '. Gastéropodes*. Lamellibranches*. Tuniciers*. » Arachnides *. Insectes *. Myriapodes*. Crustacés*. Plathelminthcs *. Némathelminthes *. Annélides *. Rotifères *. » ÉCHINODERMES. CŒLENTÉRÉS. PROTOZOAIRES. CHAMPIGNONS. Crinoïdes. Astéroïdes *. Échinides *. Holothuries*. Éponges *. Anthozoaires *. Méduses*. Ctenophores*. Rhizopodes*. Infusoires*. Grégarines*. » » Myxomycètes*. ■» Remarques. — Ce tableau a été construit d'après les données de Krukenberg [Physiol. Stu- dien an den Kûsten der Adria, 2' part., Heidelberg, 1880, 62-63). L'astérisque indique que du glycogène a été constaté directement dans tel ou tel groupe animal. Dans les autres groupes, GLYCOGENE. 3M cette recherche n"a pas été faite encore. Si j'accorde du glycogène aux éponges et aux échino- dermes, c'est d'après les données de Picard. Mais, comme Krukenberu n'en a trouvé chez ces êtres que peu ou pas du tout, il faut mettre un point d'interrogation. En fait de champignons, on n'a mentionné encore que les myxomycètes comme contenant du glycogène. Il faut réunir dans un même groupe les crinoïdes, les astéroïdes et les échinides ; car Pic.vr.d ne parle que des échino- dermes et des holothuries en général. Distribution du glycogène dans les divers organes du même individu. — A divers points de vue, il est important de savoir si la teneur des divers muscles en glyco- gène chez le même individu est identique ou non. Otto Nasse {A. g. P., 1877, xiv, 481) avait déjà pensé, en s'appuyant d'ailleurs sur des méthodes peu exactes, qu'il y a de notables dilférences; mais de meilleures méthodes ont montré que ces difl'érences sont quelquefois étonnamment fortes, ainsi qu'il résulte des analyses que Gustave Aldehoff a données (Z. B., 147, xxv). Glycogène des muscles de cheval (Aldehoff). EXPÉRIENCES. ORCxANES. CHEVAL 1. Glycogène p. 100. CHEVAL 2. Glycogène p. JOO. I II III JV V VI Foie . . 0,4212 0,8196 2,4386 1,2887 1,7069 1,4705 0,2081 0,5754 0.9875 1,3439 0,6839 1,0299 Cœur ... M. Glulaeus maximus M. lalissinnis dorsi M. ohliquus ahdom. e.rt M. bice\is brachii Un vieux cheval de vingt-huit ans en bon état d'alimentation (cheval de l'expérience I du tableau) fut mis à jeûner pendant neuf jours, puis sacrifie' par piqûres du cœur. Dans l'eau bouillante, on plaça le foie quinze minutes, le cœur trente minutes, les autres muscles environ une heure après la mort de l'animal. Pour chacune de ces recherches, on employa chaque fois 100 grammes de tissus, de sorte que les quantités de glycogène donnent la proportion centésimale de ce corps. La méthode employée fut celle de Brucke-Kulz, et les résultats sont indiqués dans le tableau. Quant au cheval de l'expérience II, les indications manquent. Aldehoff a contrôlé ces analyses faites d'après la méthode de Brucke-Kûlz, à l'aide de la méthode polarimétrique, de sorte qu'on ne peut douter de leur exactitude, ce qui est important, car il s'agit de différences considérables. Le muscle oblique de l'abdomen sur le cheval de l'expérience II ne contient pas en glycogène pour 100 grammes, la moitié de ce que contient le muscle latissimus dorsi, la même différence se retrouve pour le cheval n" 1, entre le muscle latissimus dorsi et le muscle glutaeus maximus, même en admettant que la méthode de Brugke-Kùlz est très défectueuse, on ne peut cependant pas la rendre responsable de ces grandes divergences. D'ailleurs, un an auparavant, Auguste Cramer (Z. B., xxiv, 78), qui travaillait aussi dans le laboratoire de Kùlz, avait déjà constaté ce fait important de la grande différence de teneur en glycogène pour les muscles du même animal (par la méthode de Brùcke- Kûlz). Je reproduis les chiffres trouvés par Cramer dans le tableau page 312. Puisqu'il est prouvé qu'il y a de très considérables différences dans les proportions de glycogène pour les divers muscles du même individu, il faut donc, lorsqu'on veut con- naître la proportion du glycogène musculaire, ne pas se contenter du dosage de quelques échantillons pris çà et là : il faut doser ce glycogène dans la totalité des muscles. 312 GLYCOGENE. Glycogène des muscles (A. Cramer). EXPÉRIENCES. MUSCLES COMPARÉS. POIDS du muscle en grammes. GLYCOGÉNK sans cendres en grammes. GLYCOGENE p. 100. Chien I. — II. — 11. — III. — III. Lapin I. — I. Biceps brachii Quadriceps femoris Biceps brachii Quadriceps fe7noris Muscle du dos 23,8 M 9,3 18,2 148,8 100,0 100,0 90,0 100,0 0,0444 0,6369 0,0461 0,4760 0,1346 0,0768 0,3733 0,4438 0,17 0,33 0,25 0,32 0,133 0,077 0,417 0,444 Adducteurs du membre poster. Muscles du dos Adducteurs du membre poster. Pour éviter celte recherche longue et laborieuse, on s'est demandé si les parties symétriques de droite et de gauche étaient comparables au point de vue de la quantité de glycogène contenu. Auguste Cramer (Z. 6., 1888, xxiv, 70) a fait cette recherche dans le laboratoire de E. Kulz, par la méthode de Brûcke-Kûlz, sur des grenouilles, des pigeons, des chiens, des poules, des lapins et des enfants nouveau-nés. Voici ses prin- cipaux résultats, présentés dans le tableau suivant : Comparaison des extrémités droite et gauche (teneur en glycogène), d'après A. Cr.'^mer. l'OIDS DU TISSU en grammes. roiDS du glycogène des muscles (sans cendres). ^ , ( Moitié gauche 108,7 111,0 146,3 147,7 153,0 152.1 163,8 162,9 277,0 270,0 42,9 42,3 51,5 52,8 279,5 275,0 234,0 233,0 0,30 0,49 0,46 0,49 0,03 0,02 0,00 0,00 0,18 0,23 0,24 0,21 0,07 0,08 0.32 0,32 0,26 0,29 1- P'^"^^ 1 - droite - _ . — gauche 2- Lapm _ -^^.^^ S — tjrauche "'• \ — droite ( — gauche ( — droite 3. Chien 5 , 1 — droite n 1 — gauclie '■"''' 1 — droite - l — gauche f — droite Q ( — gauche 1 — droite q \ — gauche / — droite On voit qu'en général les diiférences entre le côté droit et le côté gauche sont faibles, et au maximum de 7,7 à 14,3 p. 100. Comme les plus grandes différences s'observent surtout sur les animaux de petite taille, et par conséquent pour de petites quantités de tissu analysé, il est probable, quoique'cela ne puisse être affirmé en toute certitude, qu'il s'agit là d'erreurs expérimentales. En tout cas, comme cette méthode de l'examen d'un seul des côtés du corps est employée dans le laboratoire de Kùlz, et qu'elle a servi à GLYCOGENE. 313 résoudre maintes questions impoi^tanles, il faudra toujours admettre qu'elle n'est pas rigoureusement exacte. Cramer a aussi étudié la composition en glycogène des parties symétriques du corps sur des poules, des lapins et des chiens. Voici, disposés en forme de tableau, les résultats qu'il a obtenus : Glycogène des parties symétriques (muscles), d'après A. Cramer. (Z. B., XXIV, p. 71, 72, 74.) POIDS EN GRAMMES du tissu. r.LYCOGiCNE sans cendres p. 100. 1. Grenouille. . . 2. 3. — 4. — ... .5. — ... 6. Pigeon. . . • 7. - 8. — 9. Poule 10. — 11. Lupin 12. Enfant 13. — 14. — \ Moiiii! "uuchd , G9,3 69,:i 85,0 8.5,7 79,6 81,0 71,0 72,1 8U,0 80,2 m,i 83,4 86,0 8:i,0 7o,0 7.ï,l 79,5 78,5 89,5 89,.^ 576,5 589,5 772,0 762,0 467,0 461,0 458,0 473,0 0,37 0,35 0,46 0,44 0,43 0,41 n,31 0,35 0,34 0,28 0,38 0,38 0,21 0,20 0,99 0,91 0,22 0,22 0,22 0,24 0,14 0,13 1,81 1 ,89 0,87 0,87 1,24 1,20 — droite — ffauche k — gauche ' — droite / — droite ( — droite \ — gauche / — droite ( — gauche ( — droite ( — gauche j — droite ( — gauche ( — droite ( — gauche ' — droite j — gauche . . i — droite — gauche ( — - droite l — i;auche j — droite \ — gauclie / — droite En chiffres absolus, les ditTérences sont faibles, mais elles deviennent importantes quand on prend les proportions centésimales. En elfet, chez le lapin, la différence est de 6,0 à 50 p. 100; chez le chien, de 0 à 14,3 et même de 27,7 p. 100 (Expérience S-7, 8). Au point de vue de la recherche physiologique, il serait bon de savoir si les muscles symétriques d'un même animal sont également riches en glycogène. A. Cramer, par la méthode de Brucre-Kulz, a cherché à résoudre la question. Je donne ici, dans le tableau page 314, les résultats qu'il a obtenus (Z. B., 1877, xxiv, 77). Cramer conclut que d'une manière générale on peut considérer les muscles symé- riques comme ayant la même quantité de glycogène. Ce n'est pourtant pas en réa- lité tout à fait le cas; car on voit, dans l'expérience I, une différence centésimale de 1.^,1 p. 100, et, dans l'expérience II, de 39 p. 100. Certes il est possible que les différences réelles soient moins grandes, et que les écarts trouvés par Cramer dans ses analyses dépendent souvent des imperfections de la méthode de Kulz, mais cependant nous n'avons pas le droit de tenir pour négligeables de pareilles différences. D'ailleurs nous reviendrons plus tard sur cette question; car Kllz a établi beaucoup d'affirmations importantes en" supposant que les" muscles symétriques contiennent les mêmes quan- tités de glycogène. 3ti GLYCOGENE. Ci z » ti ^ « f^I C5 Oi îO »» «j- o ^. ^. ^. co ^. 1 C-IO-H'S^OOÇS' ' ■ o' o 1 a ix =• — ' •^" o" o o o" i! o" o' H -; c5 •a z H 71 • 6 ^ ^ a> M o '" 1 « 2 3 s § s SM ■< b; OOŒOOVCOtOoî '-i" ira COOOOOsoi— — a; f— C5 ce > o »-»■ -o ■= o (O o rt CM '^^ ^ 13 o û. >- S to -^ O « J ci 13 O 50 01 Z ce il a, Q K z 1 -* R. '=î, '= '^^ "^^ '= '-^^ "=1 ^„ "=1 '-''^ lo' co io" -* •«'" ctT o" ro' r-^ cd" r~~ "'^^ «th 1 ira o r^ -^ !^ 02 CM ^ a. « ^fi oo co •* o G O H œ: z 1 o ■" „• (M oc -^ ~* I-- ,3 -* es -TH m ^. 5-, <=> . 1 OOC-1-^0<000' ooo^ 1 a !- '^ C3-^<0000 lOiOOO H ►J o •a K S z ÏI K s 3 * g a 1— Ti 00 co oo «o co o f^ Pi (M05îO<=>ira-CT 0«3~* o o -^ S " 2 -* o_ o^ o_ '=^ co o^ o^ r- -^ =r o" o" o" o" o" "= o ctT O Z II iw 11, G « ^^ ë i-l 01 < - O T3 tS 2 r- o o o . 1 înoo-3,_,._.vi> 03 CL, Bi fcC oo co co O H t Su Pi z Z " 2 00 jQ ^^ ^^ ^^ o^ - - - " - - - - 1 ■^'' G^ o" o" o" H -^ o ■a z b « M M Z ? O ^ 4 ^ -H -ë S Q _ o p c " -S o S S O o " t. ÎO -* CO V). OO ;ra ^ X o «<1 (M -^ co a O / -.-» îo r^ (M CO . . (M oo 03 <= 1= ■=> c- ■,«■•«-• '^^ S'- c-- c- "" Oi^ ira" 1 «r-C>)C0>*in!0r^00a5O«r<(?]C0 o ^ ^ ^ ^ GLYCOGÈNE. 315 Comparaison des muscles symétriques du cliien (teneur en g^lycogène), d'après A. Cramer. POIDS du MDSCLE (en grammes). CtLYCOGÈNE (sans cendres) DD MUSCLU p. 100. NOM du MUSCLK. Moitié gauche. . . . Moitié droite .... „ ( Moitié gauche. . . . ( Moitié droite .... „ j Moitié gauche. . . . * ( Moitié droite .... 113,3 119,3 18,2 n,2 2o,5 25,8 0,61 0,53 0,23 0,18 0,16 ' 0,17 Quadriceps femoris. Biceps hrach'n. Biceps brachli. Parmi les muscles, le muscle cardiaque mérite une mention spéciale. S. Weiss [Ah. W., 1871, (1), Lxiv) a préparé par la méthode de BrOcre de notables quantités de glycof^'ène qu'il a extrait du cœur du chien. A. Cramer a confirmé ces recherches de "Weiss, et préparé du glycogène avec les cœurs de veau et d'enfants nouveau-nés (Z. B., xxrv, 88). Dans le cœur des veaux il a trouvé de 0,03 à 0,16 p. 100; chez l'enfant, de 0,002 à 0,12 et 0,25 p. 100. Aldehoff a, dans le cœur du cheval, trouvé des quantités considérables de glycogène : 0,573 à 0,8196 p. 100 (Z. B., xxv, 147). Ce dernier chiffre, très élevé, est d'autant plus important qu'il a été observé sur un cheval qui pendan, neuf jours était resté à jeun. Il est remarquable d'ailleurs que, chez ce cheval, le glyco- gène du cœur était, en proportion centésimale, le double de ce qu'il était dans le foiet mais que la proportion était moindre que dans les autres muscles du corps. A. Cramer a fait encore un autre dosage très important sur l'enfant nouveau-né par la méthode de Brugke-Kïlz. Quoique cette méthode ait ses imperfections et donne des chiffres certainement trop faibles, elle peut cependant fournir des résultats approchés, et les analyses de Cramer, résumées dans le tableau page 314, nous indiquent bien la répar- tition du glycogène dans les divers tissus de l'enfant nouveau-né. Ainsi, pour 1 kilogramme du poids du corps, il y a : 1" nouveau-né : 8,68 de glycogène; 2" nouveau-né : 4,50 de glycogène; 3'" nouveau-né : 5,28 de glycogène. Comme, dans l'expérience I, les os et les cartilages, ainsi que la peau, n'ont pas été analysés, on peut leur attribuer la quantité de glycogène trouvée pour la peau sur le nouveau-né n" 2, soit 0,51 par kilogramme. Chez mon chien, qui avait jeûné vingt-huit jours, les os et les cartilages contenaient environ un neuvième de tout le glycogène contenu dans le corps. Nous pouvons donc en conclure que le nouveau-né n° 1 contenait par kilogramme : 8,68 +0,51 + (8,68 + 0,51 9 lOs^lO de glycogène). Autrement dit, le glycogène représentait un centième du poids du corps. J'ai trouvé cette même proportion, très forte, de glycogène dans le corps des grenouilles. 100 grammes deilana fusca m'ont donné, par la méthode de Brùcke-KOlz perfectionnée, et par l'inversion du glycogène obtenu, 0,922. J'ai employé pour cette recherche 10 gre- nouilles pesant 391 grammes: l'expérience a été faite en mars, et les animaux expérimentés sortaient du sommeil hivernal. Quant à la répartition de ce glycogène dans le corps des grenouilles, Athanasiu a fait un grand nombre de déterminations à l'aide de ma méthode : 30 grenouilles femelles [Rana fusca), pesant 705 grammes, ont donné le 28 mars : 316 GLYCOGENE. Glycogéne des grenouilles (Athanasio). POIDS DU TISSU en grammes. TISSUS. GLYCOGÉNE ( EN grammes) absolu. pour 100. 25 223 175 2.5 50 Foie . . 2,27 2 25 o,'oo 0,001 0,55 8,73 1,00 0,00 0,07 1,1 Muscles Téguments Système nerveux central. ... Ovaires Total. 477,5 5,071 0,72 Par conséquent le kilogramme de grenouilles a donné 7,2 de glycogéne. Pour les grenouilles mâles, aux différents temps de l'année, Ath.\nasiu a donné le tableau suivant {ibicL, p. 566) : Glycogéne des grenouilles (Athanasiu). NOMBRE GLYCOGÉNE. TOTAL GLÏCOCÉSE DATE. ESPÈCE. de POIDS " p 100 du P. 100 grenouilles. total. du corps. .lu FOIE. dans le foie. gljcogfne. du corps. 17 juillet. R. fusca. . . . 15 533 1,289 0,443 2,77 1,732 0,324 25 - — .... 20 640 1,62 0,87 4,35 2,49 0,390 27 sept. . R. escidenta. . 10 256 0,87 1,24 8,26 2,11 0,820 7 oct. . . — 12 449 1,88 1,56 8,21 3,44 0,760 11 nov. . R. fusca. . . . 12 624 1,13 1,88 7,52 3,01 0,482 J'ai étudié la répartition du glycogéne chez les animaux en inanition, et le tableau suivant présente l'ensemble des résultats {A. g. P., 1902, xci, 121} : Glycogéne des tissus d'un chien à jeun depuis 28 jours (33. 6 lîil. de poids au 28'^ jour (Pfluger). Tisses. poids de l'organe en kg. GLYCOGÉNE (ÉVj absolu (en gr.). iLUÉ EN sucre) p. 100. Foie 0,507 13,130 5,100 2,083 2,693 24,260 20,750 5,89S 1,402 0,194 traces 4,785 0,158 0,027 0,009 traces Muscles Os et tis Peau. . ■;us similaires Sang: Intestin. ToT.VL 23,513 52,504 » GLYCOGÈNE. Si- Ainsi, chez l'animal ùjeiin, i kilogramme ne contient que l,r) de glycogrne, tandis que 1 kilogramme d'enfant nouveau-né ou de grenouille à la fin de l'hibernation en contient environ 10 grammes. CHAPITRE IV Origines du glycogène. 1" État de la question. — On est d'accord pour admettre que le glycogène se forme dans l'organisme par voie de synthèse, et, comme les processus de synthèse sont d'une importance fondamentale en physiologie générale, on a cherché par de très nom- breuses expériences à approfondir celte fonction synthétique du foie. Beaucoup d'ex- périmentateurs estiment que le foie fait du glycogène non seulement avec le sucre, mais encore avec l'albumine, la graisse et d'autres substances. S'il était vrai que le foie fabrique du glycogène avec des molécules chimiques qui n'ont aucune relation avec la molécule du glycogène, ce serait assurément lui attribuer de bien étonnantes propriétés synthétiques. II y a quelques années il semblait nécessaire d'admettre ce phénomène physiologique véritablement exceptionnel que non seulement le sucre, mais encore l'albumine, est l'origine du glycogène hépatique. Je montrais en effet (A. g. P,., 1888, xlu, 144) qu'au- cun des produits de désagrégalion des substances albuminoïdes ne prouve qu'il y ait une molécule d'hydrate de carbone contenu dans la molécule albuniinoïde. ïollens a pu obtenir de l'acide lévulinique avec les glycosides et tous les hydrates de carbone, mais dans aucun cas il n'en a pu obtenir avec la molécule albumine, et, aujourd'hui encore, il semble que dans la molécule d'albumine il n'y ait aucun hydrate de carbone. Les découvertes décisives de P.wy [The Physiology of the car bohy cirâtes, London, 1894) ont établi que beaucoup de substances que l'on considérait comme des albumines véri- tables sont des combinaisons de sucres, ou même de polyglycosides unis à l'albu- mine; ces combinaisons donnent par hydratation du sucre d'un côté et de l'albumine de l'autre. On peut alors se demander si, dans les cas oîi le glycogène paraît formé aux dépens de l'albumine, on ne peut pas expliquer le fait en supposant qu'il s'agit d'une glyco- protéine : le glycogène viendrait du sucre que contient cette molécule de glycopro- téine. Si cette hypothèse se justifiait, on aurait alors expliqué le phénomène, inexpliqué jusqu'à présent, de la formation du glycogène, et les hydrates de carbone du foie ne déri- veraient que des hydrates de carbone de la nutrition. Naturellement toutes les autres doimées, d'après lesquelles le glycogène viendrait de la graisse ou des acides organiques, ne pourraient être considérées que comme des illusions. Des méthodes défectueuses et des expériences peu exactes ont fait qu'aujourd'hui tout le monde admet, comme un article de foi, que toutes les substances qui contiennent du carbone peuvent se transformer dans le foie en glycogène ; il faut mettre quelque clarté dans ce domaine si obscur. Et cela ne peut être fait que si nous analysons très méthodiquement les conditions de l'origine du glycogène. J'espère prouver qu'il n'y a aucime raison pour accorder au foie une puissance de synthèse si étrange. Gomme, dans le corps des animaux, il existe de nombreuses réserves d'hydrates de carbone, on n'a pas le droit de supposer que le sucre éliminé par les diabétiques dérive d'une autre source que de ces réserves. C'est seulement après qu'on est parvenu à prouver que ces réserves ne sont pas suffisantes que l'on doit rechercher quelle est l'origine inconnue du sucre. Quand le célèbre chimiste Berzklius a émis cette pi^oposition, que jamais ne pourrait être synthétiquement produite une des substances que la vie fabrique dans les organismes des animaux et des plantes, la science n'était pas encore assez avancée pour réfuter cette grave erreur. Il en est ainsi pour beaucoup de questions contestées de notre époque; et on n'a pas encore bien compris que la solution rigoureuse de certains problèmes n'est pas possible dans l'état actuel de la science. 318 GLYCOGÈNE. C'est un problème de cet ordre que nous avons à traiter ici. De quelle substance alimentaire dérive le glycogène? Et aussitôt voici un fait qui se présente ; c'est que, lorsqu'on ajoute à notre alimentation des substances comme l'urée et l'ammoniaque, desquelles assurément ne peut se former de glycogène, cependant on voit augmenter considérabletuent le glycogène hépatique. Mais on peut expliquer de différentes manières ce phénomène singulier; d'abord, on peut supposer que les cellules hépatiques qui forment du glycogène avec une substance encore inconnue sont excitées à cette formation par l'ammoniaque, qui agit à la manière d'un stimulant : on peut aussi supposer que, dans le foie, ce n'est pas seulement de nou- velles quantités de glycogène qui sont formées, mais encore que la quantité finale de glycogène dépend de la consommation du glycogène qui est déjà formé. Si l'on admet alors que l'ammoniaque ralentit la consommation du glycogène sans diminuer sa for- mation, on voit que par l'ammoniaque la quantité de glycogène trouvée dans le foie peut paraître augmentée. Donc cet exemple nous prouve au moins ceci : c'est qu'il peut y avoir un accroissement dans la teneur des tissus en glycogène, dû seulement à l'action indirecte de substances desquelles certainement ne dérive pas le glycogène. Mais il est aussi des cas oiî cette action indirecte existe, sans cependant qu'il soit possible d'établir que la substance ingérée ne forme pas elle-même de glycogène. Par exemple, supposons pour un instant, comme nous le verrons plus tard avec détails, que les albuminoïdes, qui ne sont pas des glycosides,sont incapables déformer du glycogène, quoique ces substances, introduites dans l'alimentation, augmentent le glycogène de l'or- ganisme. Si nous introduisons de l'albumine dans notre alimentation, nécessairement aussitôt vont diminuer les (juantités de graisses et d'hydrates de carbone détruites par l'échange interstitiel, et elles dimiiuieront dans des proportions isodynamiques à l'excès d'albumine ingéré. Donc l'introduction d'albumine va produire une épargne de glycogè- ne, et, si l'organisme continue à fournir du glycogène aux dépens de substances inconnues encore, cette introduction d'albumine paraîtra augmenter la teneur en glycogène. et par conséquent tendra à nous l'aire supposer que le glycogène vient de l'albumine. Ainsi, de ce que telle substance peut augmenter le glycogène du corps, on ne peut conclure avec certitude que cette substance a contribué à sa formation. Il y a en réalité un moyen pour en décider : c'est le même moyen qui a été employé pour savoir l'ori- gine de l'acide hippurique et de l'urée. Si l'on introduit de l'acide benzoïque, il devient de l'acide hippurique dans l'organisme, et est éliminé par l'urine sous cette forme, de même que l'ammoniaque se change en urée et est éliminée sous cette forme. Pareille- ment l'acide chlorobenzoïque et l'acide amidobenzoïque deviennent de l'acide chloro- hippurique et de l'acide amido-hippurique. De même l'éthylamine devient de l'éthy- lurée. On a essayé d'étudier la formation du glycogène de cette manière, mais sans succès : il est assez probable pourtant qu'un jour cette méthode réussira. Par conséquent, même s'il était prouvé que telle substance déterminée, introduite dansie corps, augmente le glycogène, cela ne prouverait pas encore qu'elle contribue à la formation du glycogène. Mais il y a plus; car la preuve décisive de l'augmentation même de glycogène comporte bien des difficultés et des incertitudes. Si l'on nourrit un animal avec une substance déterminée, comme du sucre, par exemple, et si au bout de quelques heures on le sacrifie pour doser le glycogène de son foie et de ses muscles, il est impossible de savoir combien, avant cette alimentation spéciale, exis- tait de glycogène dans son corps. Pour éviter cette difficulté, on le laisse d'abord jeûner quelque temps pour que son organisme cesse de contenir du glycogène; mais cela ne réussit jamais complètement, et ce qu'il y a de plus grave, c'est que des animaux d'organisation sensiblement identique, dans des conditions qui paraissent identiques, après un jeûne également prolongé, renferment encore des quantités de glycogène très considérables, et très différentes d'un animal à l'autre. Et cependant souvent on se contente d'une seule expérience de contrôle. Un exemple va prouver ce que j'avance. Mering (A. g. P.^ XIV, 282) a voulu prouver qu'une nutrition albuminoïde augmente chez le chien le glycogène du foie. « Un chien vigoureux, dit-il, reçoit après vingt et un jours de jeûne, pendant quatre jours, 4 à oOO grammes de fibrine de bœuf bien lavée et 4 grammes d'extrait de viande. Six heures après son dernier repas, il est sacrifié. Son poids est de 17,520 grammes; son foie, de o40 grammes, contient 16,3 de glycogène. GLYCOGÈNE. 319 Un autre chien servant de contrôle, et qui était de même taille, n'avait plus au 21 « jour de jeûne que 0,48 grammes de glycogène. » Mais, si Mering avait pris comme animal de contrôle le chien sur qui j'ai expérimenté et que j'avais laissé jeûner, non pas vingt et un jours, mais vingt-huit jours, il efit trouvé dans le foie.au lieu de 0,48,1a proportion considérable de 22,5 de glycogène {A. g. P., xci, 119). Ce chien avait dans son foie 47 fois plus de glycogène que le chien de Merin(;, quoique il eût jeûné huit jours de plus. En considérant que mon chien pesait une fois plus que le chien de Mering, on voit que le foie de mon chien contenait proportionnelle- ment 23 fois plus de glycogène; et il y a certainement des chiens dont le foie, malgré un jeûne prolongé, est encore plus riche en glycogène que n'a été le mien. Pour j uger ces recherches, il est de grande importance de bien connaître les différences dans les proportions de glycogène que contiennent des animaux de même espèce, selon les conditions physiologiques qui paraissent identiques. Les recherches systématiques de Kûlz sont très instructives à cet égard [loc. cit., 18, 1891). 11 expérimentait sur des pigeons, qui pendant huit jours recevaient 2 fois par jour des quantités d'orge considérables ; au S" jour on les sacrifiait, 3 heures et demie après le dernier repas. Le tableau suivant montre les chiffres obtenus : Glycogène du foie (d'après E. KiiLz) (Tableau VIIj. POIDS GLYCOGÈNE DU FOIE. DD PIGEON au moment POIDS du (sans cendres). de la mort. FOIE. absolu p. UKI. (en grammes). en grammes. 1 . . . 390 4,5 0,0464 1,03 2 . . . 371 4,7 0,0557 1,19 3 . . . 463 5,4 0,0716 1,33 4 . . . 362 5.2 0,1113 2,14 5 . . . 437 10,5 0,1378 1,31 6 . . . 436 6,9 0,1590 2,30 7 . . . 361 5,7 0,0874 1,53 8 , . . 453 6,3 0,0477 0,76 9 . . . 318 6,9 0,0318 0,46 10 . . . 288 7,1 0,631 8,89 11 . . . 270 6,95 0,063 0,91 12 . . . 250 9,2 0,639 6,95 13 . . . 367 8,4 0,519 6,18 14 . . . 388 5,25 0,130 2,48 15 , . . 355 5,15 0.00 0,00 16. , . 291 4,2 0.00 0,00 « Les animaux des expériences 10 à 14 étaient nourris pendant six jours très abondam- ment avec du pain et du froment, et ensuite sacrifiés en pleine digestion : la teneur du foie en glycogène avarié entre 0,91 et 8,89 p. 100; par conséquent avec de grandes diver- gences, quoiqu'ils provinssent tous d'une même couvée, et qu'ils eussent été pendant six jours nourris exactement de la même manière. » En tout cas, on voit facilement que les différences sont énormes. Par conséquent, on ne peut rien conclure sans prendre pour contrôle des animaux très nombreux, de manière à juger dans quelles limites oscillent les variations normales des quantités de glycogène. Or, dans beaucoup de recherches expérimentales, on ne s'est pas préoccupé de cette condition essentielle. Il existe encore une autre notable cause d'erreur. Un animal nourri par une substance déterminée est sacrifié, et on dose son glycogène hépatique; si le glycogène est en plus grande quantité que celui de l'animal de contrôle, on va généralement en déduire que c'est la substance alimentaire introduite qui a produit cet excès de 320 GLYCOGÈNE. glycogèiie; mais on ne pense pas à chercher si dans le reste du corps, lequel contient autant de glycogène que le foie, et souvent même davantage, il n'y a pas eu accumula- tion de glycogène par suite de la migration de cette substance du foie vers les tissus. Aussi toutes les recherches dans lesquelles on n'a dosé que le glycogène hépatique sans faire le dosage du glycogène des autres parties du corps, ne peuvent-elles être consi- dérées comme satisfaisantes. Après avoir établi l'incertitude de nos conclusions sur l'origine du glycogène, il con- vient maintenant de traiter quelques-unes des questions qui s'y rattachent, formation aux dépens des hydrates de carbone, des graisses, de l'albumine. Nous pourrons alors nous faire une opinion sur les faits qu'on a invoqués et discuter le degré de probabilité des conclusions que l'on a voulu en déduire. Formation du glycogène aux dépens des hydrates de carbone. — Claude Bernard avait trouvé que le foie continue à faire du sucre, même lorsque le |chien ne reçoit pendant plusieurs mois que de la viande comme aliment. Ne pouvant trouver dans la viande, ni sucre, ni substances capables de donner du sucre, il en conclut que le sucre provient de l'albumine. Figuier ayant fait remarquer que cette expérience de Bernard n'est pas conclusive, Sanson fit des expériences qui changèrent l'aspect de la question (C. /i., ISÎiT, xliv, 1159 et 1323; xlv, 27 juillet; xlvi, 7 septembre). En effet, il montra qu'il existe du glycogène, non seulement dans le muscle, mais encore dans les autres tissus de l'organisme. 11 dit « que la ptyaline fait passer d'abord les principes amyloïdes à l'état de dextrine, puis à celui de giycose. Une grande partie de ces mêmes principes est absorbée par le système veineux abdominal à l'état de dextrine, laquelle va ensuite accomplir sa métamorphose complète dans la trame des tissus où elle est portée par la circulation. Les faits prouvent que la dextrine du sang a sa source chez les animaux herbivores dans l'action de la ptyaline sur les principes amyloïdes des aliments et chez les carnivores dans la viande dont ils se nourrissent. Enfin, que le foie ne sécrète dans aucun cas ni sucre ni matière glycogène, et qu'il se borne à servir, comme la trame de tous les autres organes, à établir le contact de la dextrine avec la diastase, lequel contact est seulement ici plus prolongé en raison du ralentissement de la circulation dans le tissu hépatique <> (C. R., 1857, xliv, 1323-1325). Rouget [Joiirn. de la PhysioL, ii, 83), et Colin (C. R., xlix, 1859, 981) ont confirmé ces recherches. En cherchant à extraire ce qu'il y a d'essentiel dans cette observation de Sanson, et de plus exact, on voit qu'il en résulte cette proposition que les Itydrates de carbone de l'organiame dérioent tous des hydrates de carbone de la ration. C'est une proposition que F. W. Pavy le premier a démontrée par d'importantes expé- riences pour le glycogène du foie; sa découverte a été publiée en 1860 dans les Philo- sophical Transactions (p. 579) (voir aussi Researches on Ihe nature and treatment of Diabètes, London, 1862). On trouve un extrait de ce mémoire dans l'œuvre de Pavy [Physiology of the carbohydrates, 1894, p. 113). Les expériences fondamentales de Pavy se fondent sur 11 chiens normaux nourris de viande, sacrifiés en pleine santé, et dont le poids du foie est comparé à celui du corps: il y avait 1 gramme de foie pour 30 grammes du poids du corps. Par conséquent le foie représente 3,3 p. 100 du poids total entre 1/33 et 1/21 ; en moyenne, le foie contenait 7,29 p. 100 de glycogène. Sur 5 chiens, nourris avec des aliments végétaux, riches en hydrates de carbone, le rapport était de 1 à 15, autrement dit le foie représentait 6,6 du poids du corps, variant entre 1/10.5 à 1/22.5: Il y eut même des cas oîi le poids du foie atteignit le chiffre énorme de! dixième du poids du corps, et où la quantité moyenne de glycogène a été de 17,23 p. 100. Pavy a répété ses recherches en donnant aux animaux un mélange de nourriture animale et de sucre, et ses résultats concordent aussi avec les précédents. Or, comme nous l'avons vu dans le chapitre qui précède, l'accroissement du foie dépend essentiellement de l'accroissement du volume des cellules hépatiques, et non d'une augmentation du nombre de celles-ci. Pavy décrit le foie des chiens nourris de viande comme un foie rouge foncé et de consistance telle qu'il peut supporter la pression des doigts sans se rompre; au con- traire, chez des chiens nourris avec du sucre, le foie est blanc rosé, pâle, et si mou qu'il se déchire facilement sous les plus faibles pressions. Je puis confirmer ces obser valions de Pavy par mon expérience personnelle. GLYCOGÈNE. 321 P.vvY a répété ses recherches chez des lapins, dont les uns étaient à Jeun, dont les autres recevaient de l'albumine et du sucre; et les résultats sont sensiblement iden- tiques à ceux qu'il a obtenus chez les chiens {loc. cit., 1894, p. 116 et suiv.). On ne peut contester que cette augmentation du glycogène du foie ne soit due à l'introduction d'hydrates de carbone dans l'alimentation, mais on peut douter que ces hydrates de carbone de l'alimentation soient l'origine même du glycogène. Les premiers chiffres de Pavy étaient basés sur des dosages de glycogène brut plus ou moins purifié; mais ses dosages ultéi leurs ont été plus exacts. Or, dans ceux-ci, il a vu que le foie des chiens alimentés avec des hydrates de carbone contenait 12 à 12,6 p. 100 de glycogène. Ces chiffres sont certains; car le dosage a été fait par l'inversion du glycogène, dosé ensuite sous forme de sucre {ibid., p. 127). Des expériences ulté- rieures ont d'ailleurs confirmé ce fait, que c'est par l'introduction du sucre dans la ration qu'on peut observer les teneurs raaxima en glycogène hépatique. Tscherinokf (A. A. P., 1869, xLvii, 113), ayant nourri des poulets avec du sucre de canne et du glu- cose, a trouvé 14,7 p. 100 de glycogène dans le foie. Salomon (C. W., 1874, 740 et A. A. P,, 1874, Lxi, 3S0 et 364), nourrissant des lapins avec des pommes de terre et du sucre de canne, a trouvé 8 grammes de glycogène dans le foie de ces lapins de 1 300 grammes. Erwin Voit (Z. B., 1888, xxv, 546) a vu 10,51 p. 100 de glycogène dans le foie d'oies nourries avec du riz. Hergenhahn (Z. B., 1890, xxvii, 215), H, 8 dans le foie de poules nourries avec du sucre de canne; Praussnitz (Z. B., 1890, xxvf, 389) 7,8 dans le foie de poules nourries aussi avec du sucre de canne. Sur des poules nourries avec du sucre, Edouard Kulz a trouvé 10 p. 100 [Beitrùge zur Kenntniss des Crlycogenes, 1891, 104); Otto, 15,3 p. 100, et chez les lapins 16,85 p. 100 (C. Voit; Z. B., 1891, xxviii, 253). B. Schôndorkf, 18,69 p. 100 chez les chiens (A. g. P., xcix, 1903, 221). Rien n'est moins douteux, par conséquent, que cette accumulation de glycogène dans le foie, après introduction alimentaire d'hydrates de carbone chez des animaux qui n'avaient d'abord que très peu d'hydrates de carbone dans leurs tissus. Aucun autre aliment n'est, autant que l'hydrate de carbone, capable de déterminer de pareilles accumulations de glycogène hépatique. Mais cependant les travaux des physiologistes contemporains n'ont pas pu démontrer que tout ce glycogène dérive des hydrates de carbone de la nutrition. Maydl {Z.p. C, 1889, m, 186) a observé que, quelle que fût la constitution chimique du sucre ingéré, glycose ou lévulose, c'est toujours le même glycogène qui se forme. Si le glycose est une aldose,et le lévulose une kétose, le glycogène est toujours un glycose condensé. 11 semblerait donc plus juste d'admettre que la cellule hépatique fabrique toujours le glycogène avec la même substance, c'est-à-dire l'albumine, et qu'elle con- tinue à la fabriquer de même, alors que le sucre introduit dans l'alimentation n'a d'autre rôle que de diminuer la destruction du glycogène formé, parce qu'il est plus facilement oxydable et le protège contre la combustion. Ainsi le glycogène n'augmente- rait que parce que le sucre introduit épargne la combustion du glycogène, lequel conti- nuerait à être constamment formé par la cellule hépatique aux dépens de l'albumine. On doit aussi en faveur de Pavy tenir compte de ce fait que toute ingestion d'albu- mine alimentaire diminue la combustion de quantités isodynamiques de graisses et d'hydrates de carbone. Autrement dit toute augmentation de la ration alimentaire albu- minoïde épargne la combustion des graisses et des hydrates de carbone : par conséquent, quelle que soit la substance qui dans l'organisme donne naissance au glycogène, cette introduction d'albumine va épargner la consommation du glycogène. A fortiori, si l'albumine était la substance dont provient le glycogène, tout accroissement de l'alimen- tation albuminoïde augmenterait les quantités de glycogène. Mais tel n'est pas le cas, car le maximum de la formation glycogénique n'est déterminé que par les hydrates de carbone, et l'introduction des hydrates de carbone dans la ration va diminuer la consom- mation d'albumine. Mais celte diminution est très faible, en comparaison de l'effet inverse, c'est-à-dire de l'épargne que provoque, dans la consommation des hydrates de carbone, l'introduction d'aliments azotés. On n'a donc pas le droit d'attribuer l'accumulation considérable de glycogène dans le foie après ingestion d'hydrates de carbone à une diminution dans la combustion de ces hydrates de carbone : car l'albumine, manifestement qui diminue beaucoup la con- DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. '"'■ 322 GLYCOGÈNE. sommation des hydrates de carbone, ne peut probablement pas augmenter la quantité de glycogène. Nous établirons ce fait plus loin. Par conséquent, les recherches de Pavy ne prouvent pas autre chose que ce qu'il a lui-même établi, si l'on ne veut pas se livrer à d'invraisemblables hypothèses. Recherches de Jacob Otto et des autres élèves de Voit. — Jacob Otto, de Christiania, a fait des recherches sur l'origine du glycogène en cherchant à savoir s'il peut provenir de l'albumine. Il a travaillé dans le laboratoire de physiologie de Munich de 1885 à 1887; mais il mourut de phtisie pulmonaire au 1«'' juin 1888 avant d'avoir achevé ses travaux, et Carl Voit a publié ses recherches en leur donnant le développe- ment nécessaire (Z. B., 1891, xxviH, 243). Voici quel a été le plan de Voit. Si un animal est nourri avec du sucre, et si le glyco- gène augmente dans son foie, il s'ensuit que ce glycogène vient du sucre ou de l'albu- mine qui se trouvait dans le corps. Acceptons provisoirement cette opinion de Voit que la graisse est incapable de faire du glycogène : nous verrons plus loin ce qu'il faut en penser. Si l'albumine est l'origine du glycogène, il est facile de déterminer la quantité d'albumine consommée pendant un temps donné dans l'organisme, et un calcul simple montre quel poids de carbone répondait à cette albumine consommée. Si alors de tout ce carbone de l'albumine détruite on déduit le carbone éliminé par l'urine et les fèces, on trouve la quantité de carbone qui a pu contribuer à la formation du glycogène, car on ne peut supposer que toute la masse du carbone alimentaire a été employée à cette formation. Si en outre on admet que tout le carbone de l'albumine comburée, bien entendu après déduction du carbone des excréta, ne suffit pas à expliquer les grandes quantités de glycogène qu'a produites l'ingestion de sucre, alors la preuve est faite que ce n'est pas l'albumine, mais bien le sucre qui est l'origine du glycogène. Voici quelle a été l'expérience : des lapins et des poules à l'inanition, et par consé- quent pauvres en glycogène, reçurent de grandes quantités de sucre, et furent sacrifiés huit heures après. Alors on dosa le glycogène du foie et celui du reste du corps; puis Otto calcula, par la quantité d'azote excrété dans ces huit heures, la quantité d'albu- mine comburée pendant ce temps, et par conséquent la quantité maximum de glyco- gène pouvant se former ainsi. Voici d'autres développements donnés par Voit à ses recherches. Pour déterminer l'azote, les poules furent placées dans un filet, et les excréments qu'elles rendaient furent rassemblés exactement. A l'autopsie, on recueillit le contenu intestinal, qui fut séché, et l'azote fut dosé par la méthode Will-Varre.\trapp. Quant aux lapins, immé- diatement après l'ingestion de sucre, ils furent sondés; l'urine sécrétée fut réunie, et immédiatement avant la mort on les sonda encore, de sorte qu'on obtint ainsi toute l'urine sécrétée depuis l'injection de sucre jusqu'à la mort de l'animal; l'azote fut dosé dans cette urine par la méthode de Sghneider-Seegen. Voit donne ensuite ses procédés de calcul. (Je n'insiste pas sur quelques inexactitudes de dftail qui ne changent rien aux faits essentiels.) « On peut maintenant voir, dit Voit, le maximum de la quantité de glycogène que peut donner l'albumine comburée en huit heures. Dans l'albumine musculaire, il y a, pour 1 gramme d'azote, 3e'",295 de carbone. Dans l'urine des lapins en inanition, d'après Rubnkr, il y a 1 gramme d'azote pour 0*î'',79o6 de carbone; dans les excréments des poules en inanition, d'après Rïbner, il y a 1 gramme d'azote pour le", 208 de carbone. « Or 1 gramme d'azote de l'albumine comburée chez le lapin, répondant à 2e>',4994 de carbone, peut donner un maximum en glycogène de 5e%7236, 1 gramme d'azote répond à 6''''',02 d'albumine, soit 5s'",7226 de glycogène. 1 gramme d'azote correspond à 6,102 grammes d'albumine == 5,7235 de glycogène. Autrement. dit, Igramme d'albu- mine peut donner au maximum Os'',9507 de glycogène. Chez le poulet 2S'-,087 de carbone peuvent donner un maximum de 48'", 7792 de glycogène, 1 gramme d'azote, répondant à ()e>-,02 d'albumine, donnera 4s'',7792 de glycogène. Autrement dit, 1 gramme d'albumine pourra donner au maximum 0e%7940 de glycogène. » Dans son calcul Otto suppose que le foie contient à peu près autant de glycogène que le leste du corps. Cette supposition se fonde sur divers dosages, mais elle ne s'applique qu'à ses expériences et non aux autres. En général en effet, ses animaux étaient tués GLYCOGÈNE. 323 huil heures après l'alimentation, et il les nourrissait avec du sucre. Pour déterminer la quantité de sucre contenu dans l'urine et dans l'intestin, il faisait un extrait alcoolique, lequel après neutralisation était concentré par l'évaporation ou dissous dans l'eau, et dans la solution le sucre était dosé. Quant aux animaux de contrôle, voici ce qu'en dit Otto {loc. cit., 249) : « Chez un coq vigoureux de 1 327 grammes, après quatre jours de jeune, le foie qui pesait 26 grammes ne contenait pas de glycogène, et le reste du corps non plus. Une poule de 1 161 grammes, après quatre jours de jeûne, n'avait plus dans le foie que des traces impondérables de glycogène : dans le reste du corps, il y avait 0«'',063 de glycogène. Un lapin de 1 718 grammes, après quatre jours de jeûne, ne contenait plus, ni dans le foie, ni dans le reste du corps, que des traces impondérables de glycogène. » Et ce sont là toutes les expériences de contrôle d'OTTo. Il est vrai qu'il se réfère aux recherches d'autres physiologistes. Mais celles-ci ne peuvent pas lui servir; car le glycogène était dosé par d'autres méthodes. S'il n'a pas trouvé de glycogène dans le corps de ces animaux en inanition, c'est qu'il ne faisait que l'extraction par l'eau, sans em- ployer la potasse; et l'extrait aqueux était débarrassé de l'albumine par le réactif de Brucre. Ainsi, d'après Otto, ses animaux de contrôle contenaient de si petites quantités de glycogène qu'on peut les considérer comme nulles, par rapport à celles qu'il a trouvées chez les animaux nourris avec du sucre. Je crois aussi que la défectuosité des méthodes analytiques peut être éliminée; car Otto a employé la même méthode de dosage pour ses animaux nourris avec du sucre, et malgré cela il a pu constater de grandes quantités de glycogène. L'importance de cette expérience exige une étude plus détaillée. Expériences d'Otto sur la nutrition avec du glycose. — Un coq de 1 728 grammes reçoit, après cinq jours de jeûne, 50 grammes de glycose chimiquement pur, préparé d'après la méthode de Soxhlet. Nul trouble de la santé ; l'animal est tué au bout de sept heures et demie. Cherchons d'abord combien il pouvait y avoir de glyco- gène dans le corps de l'anilnal au o" jour de jeûne. Otto a trouvé chez un coq témoin, de 1 327 grammes, qu'au bout de quatre jours de jeûne il n'y avait plus de glycogène, et que, chez une poule de 1 101 grammes, il n'y avait que 08'',0683 de glycogène dans tout le corps. Les expériences très détaillées d'ÉDOUARD KùLz nous apprennent combien il reste de glycogène dans le corps d'une poule après quatre ou six jours d'inanition. Or, dans les expériences 13 et 14, KClz a trouvé, au 3'^' jour de jeûne, chez «eux poules de 1 161 et 1 807 grammes, dans tout le corps, en glycogène, 0,7988 et 0, 407; ce qui fait en moyenne 0,49 de glycogène par kilogramme du poids initial; par conséquent l'animal d'OiTO de 1729 grammes pouvait contenir 0,6o de glycogène. En outre, Kilz (expériences 15, 16, 20, 21, 22, 23, 24 du tableau) a vu chez des poules, au 6^ jour de jeûne, que la teneur moyenne du glycogène était pour tout le corps, y compris le foie, de 0«'',836, pour un poids moyen de l'animal de 1 227 grammes. Par conséquent, au 3" jour de jeûne, il y avait, pour 1 kilogramme, 08'",490 de glyco- gène; et au 6'' jour de jeûne, pour 1 kilogramme, 0?"^, 681, en moyenne 0«'",58d. Ce qui, si l'on ne tient pas compte de l'erreur expérimentale, fait que la teneur en glycogène est à peu près la même au 3* jour et au 6" jour de jeûne. Comme chiffre maximum, KClz trouve (expérience 24) au 6« jour de jeûne, pour 1 kilogramme, lK^60o de glycogène. Comme le coq d'OTTo pesait 1 327 grammes, le reste du glycogène était au maximum de 2,130. Acceptons ce chiffre pour donner plus de certitude à la démonstration d'OîTO. Dans le foie de son coq, foie qui pesait 35 grammes, il a trouvé jusqu'à 5,368 de glycogène, c'est-à-dire 15,34 p. 100, et, dans le reste du corps, 4t''",982, par conséquent en tout 10^^'', 35 de glycogène. Maintenant cela peut-il s'expliquer par la destruction de l'albumine ? Dans les excré- ments pesant à l'état sec 88'', 203, il y avait 0,724 d'azote, qui, si nous multiplions ce poids par le facteur 6,25, représente 4k'",52 d'albumine; mais, comme, d'après Rubxkr, 1 gramme d'azote des excréta, chez les poules en inanition, répond à 1«S208 de carbone, il faut prendre 0e'',875 du carbone des excréta pour les retrancher du carbone qui se trouve dans 4s'",52 d'albumine. D'après le calcul d'OTTO, 4i'''',52 de l'albumine contien- 354 GLYCOGÈNE. nent, pour 1 gramme d'azote, 3'''%29o de carbone. Il reste par conséquent 25'', 385 de carbone, dont il faut retrancher 0,87o (carbone des excréta), ce qui ne laisse plus que 15f,5l pour le carbone du glycogène. Or, si l'on admet que tout ce carbone a servi à faire du glycogène (G^H'"0^), ce n'a pu être que pour former Se^SO?. Par conséquent, en admettant qu'il restait dans le corps 2,130 de glycogène, nous n'arrivons qu'à un chiffre total de 5K^527. Or on a trouvé par l'analyse lOe^SS ; par conséquent il y a au moins 4e'', 823 de glycogène qui ne peuvent provenir de l'albumine. Remarquons ici que la méthode d'OiTO pour le dosage du glycogène était celle de Brucke, qui ne donne jamais la totalité du glycogène. Même la méthode de Brucke- KuLz comporte souvent un déficit important. On peut penser que les animaux en inanition contenaient dans le corps beaucoup plus de glycogène qu'on ne l'admettait jusqu'à présent. Si c'était le cas, les preuves d'Oiio ne seraient plus démonstratives. Or, par mes nouvelles méthodes, emploi de très fortes solutions de potasse, j'ai contrôlé les chiffres de Kulz pour des poules en inanition, et je n'ai pas trouvé des quantités plus considérables de glycogène que lui. Je ferai plus loin un autre reproche encore à la méthode de Otto. Dans ses recherches, il a dosé non seulement le glycogène du foie, mais encore celui de tout le corps; souvent il s'est contenté de faire le dosage direct uniquement du glycogène hépatique, et de sup- poser que le reste du corps en contient juste autant que le foie, les variations du glyco- gène du corps étant parallèles à celles du glycogène hépatique. Mais il est important d'établir que tel n'est pas toujours le cas, quoique souvent les choses se passent ainsi, et, pour le prouver, il me suflîra de me reporter aux recherches détaillées d'ÉDOUARo Kulz et au tableau VIII qu'il donne {Beitrdge zur Kenntniss des Glycogenes, p. 20, 1891, Mar- burg). 11 s'agit de poules qui ont jeûné pendant des temps variables, et chez lesquelles on a dosé à la fois le glycogène du foie et celui des muscles. Glycogène du foie et des muscles chez des poules à jeun (d'après Ed. Kciz) POIDS POIDS POIDS TENEUR TOTAL INITIAL FINAL POIDS POIDS EN GLYCOGÈNE du NUMÉROS. du corps du corps DURÉE DU FOIE DU GLYCOGENE sans cendres glycogène de l'animal de l'animal DU JEUNE. en hépatique des de l'animal en en grammes. sans cendres. deux parties à la fin grammes. grammes. du corps. du jeûne en grammes. 13 1 161 1 03o 3 jours 13,8 0,0000 0,7988 0,7988 14 1807 1618 3 — 24,0 0,0427 0,5980 0,6407 15 1112 792 6 — 16.0 0,000 0.7010 0,7010 16 1068 948 0 — 10,4 0,026 0,5173 0.5433 20 1029 798 G — 18,0 0,000 0,0125 0,0425 21 1415 1172 6 — 17,0 0,0106 0,3226 0,3332 22 1534 1368 G — 16,0 0,1314 1,2625 1,3939 23 1337 1[216 6 — 12,6 0,1193 0,9.595 1,0788 24 1097 1055 G — 14,0 0,0596 1,7011 1,7607 27 1 020 792 7 — 12,5 0,000 0,3075 0,3075 28 1268 1091 7 — 14,0 0,113 1,7006 1,8136 31 1342 1085 8 — 16.5 0,000 0.5368 0,5368 32 1110 857 10 — 13,0 Total. . 0,000 0,5191 0,5191 0,530 9,967 Ce tableau montre que, chez les poules à jeun, pendant 3, 6 jours et davantage, le glycogène du corps dépasse celui du foie, et est 20 fois plus considérable. D'autre part, en dosant sur le cheval le glycogène du foie et celui des muscles, on voit parfois que la proportion centésimale est moindre dans le foie que dans les muscles, que, par conséquent, la quantité totale de glycogène musculaire dépasse énormément celle du glycogène hépatique. Il est certain que dans une alimentation abondante il y a CLYCOGÈNE. 325 plus de glycogène dans le corps qu'il n'y en a dans le foie seul, et cependant il peut arriver, après une alimentation riche en hydrates de carbone et succédant à une période de jeune, que le glycogène du foie est en proportion plus grande que le glycogène du reste du corps. Examinons encore quelques-unes des expériences d'OiTO. Expérience 2. — Un lapin de 2 320 grammes, après 4 jours de jeûne, reçoit 80 grammes de glycose. Nul trouble toxique; l'animal est sacrifié au bout de 8 heures et demie. Combien de glycogène peut-il contenir"? Les expériences de Kulz vont nous servir de contrôle {loc. cit., p. 32). Otto a laissé un lapin témoin, de 1 718 grammes, jeûner pendant 4 jours; son foie et son corps ne contenaient que des quantités impondérables de glycogène. (Voit, Z. B., xxvni, 249). D'après Kllz, au 6" jour de jeûne, sur 13 lapins, il y avait 0,123 de glyco- gène par kil. dans le foie, et au maximum 0,186. Comme le lapin d'ÛTTo pesait 2 320 grammes, son foie pourrait contenir 0,431 de glycogène : par conséquent, quand Otto parle d'un animal témoin, qui, au 4« jour de jeûne, n'a plus de glycogène, il s'agit là d'un lapin tout à fait exceptionnel, puisque les nombreuses expériences de Kulz donnent des résultats tout différents. Mais si, pour avoir un contrôle meilleur, nous prenons les expériences mêmes de Kïlz, nous voyons que, chez les lapins en inanition, il n'a dosé que le glycogène du foie sans doser le glycogène du reste du corps; par conséquent, il reste une incertitude pour le glycogène total de l'animal témoin. Nous devons donc nous contenter du glycogène hépatique, et dire que, d'après les recherches d'OfTO, après une alimentation sucrée, l'accroissement du glycogène hépatique coïncide avec un accroissement du glycogène du corps. Admettons donc que le glycogène qui reste dans le foie est de 0^',431 ; or Otto trouve dans le foie 9s'', 269, dans le corps 8s^972, ce qui fait une somme de 185r,241. L'albumine n'a pu en donner que 4,8, par conséquent, le sucre a dû former 18,241 moins 4,8 =: 13,441 — X (0,431). Il faut déduire de ce chiffre la quantité de glycogène préexistante, qui est inconnue. Il est vraisemblable que la différence est positive. Recherches d'Otto avec le sucre de canne. — Chez les poules et les lapins le sucre de canne provoque des diarrhées intenses, de sorte que beaucoup d'expériences ne réussissent pas. Chez un coq de 1 6o3 grammes, qui reçut au 4* jour de jeûne 60 grammes de sucre de canne, il n'y eut aucun trouble morbide ; le foie de 37 grammes contenait 4S'',940 de glycogène, soit 13,33 p. 100. Le reste du corps contenait 4s'',253; par consé- quent le glycogène total était de 9s%19o; il en préexistait au maximum 2,6j3, et l'albu- mine n'a pu en produire que 2,572, soit au total 5 225. En retranchant ce nombre de la quantité de glycogène trouvé, on a 9,193 — 5,225 = 3,970, quantité de glycogène qui provient du saccharose. Les expériences sur les lapins ne sont pas probantes; car, sur les animaux témoins, la quantité du glycogène du corps n'a pas été suffisamment déterminée au 4*= jour de jeûue. Les points essentiels du travail de Jacob Otto ont été complètement confirmés par les recherches qu'a faites Hergenhahx en 1888 dans le laboratoire d'ÉoouARD Kulz à Marburg. Otto s'était servi pour doser le glycogène de la méthode de Brucke, extraction par l'eau bouillante, tandis que Hergenhahx employait la méthode de Kulz, extraction par une solution diluée de potasse (Z. B., 1890, xxvii, 218 et suiv.). En outre, il a dosé le glyco- gène du corps aussi bien que le glycogène du foie. Il a trouvé sur 7 lapins témoins que le glycogène du corps au 6^ jour de jeûne a été au maximum, pour 1 kilogramme du poids du corps, de 1S'',639. Cette proportion a augmenté, après injection de 30 grammes de saccharose, jusqu'à atteindre 5 ou 8 grammes de glycogène, si l'animal était tué 20 heurei après l'injection de sucre. Admettons donc qu'il y ait eu, par l'albumine, formation en 8 heures de 25',14 de glycogène et 5,33 en 20 heures, mais trouvé 3 à 8 grammes de glycogène. Ainsi ont été confirmées les recherches d'OTTO. Recherches d'Otto avec le lévulose. — Un coq de 1 627 grammes reçoit, au 4« jour de jeûne, 130 ce. d'une solution contenant 54^'', 8 de lévulose qui sont injectés dans l'estomac. Nul trouble : l'animal est sacrifié après huit heures. Le foie, qui pèse 38 grammes, contient 3,922 de glycogène ou 10,5 p. 100; l'autre corps 3K>-,56i8, ce qui 326 GLYCOGENE. fait en tout 7^'",554 de glj-cogène. L'albumine en a pu former 3^^294 : il en préexistait au maximum 2e%6ii : par conséquent, il y a au maximum 5e'',90o de glycogène qui peuvent ne pas provenir du sucre. Glycogène total : 7S'',b54. Par conséquent, la différence, soit 18'",649, ne peut provenir que du sucre. En outre, il faut remarquer que les extractions ne sont certainement pas complètes, et que cependant les résultats sont positifs. Le saccharose, le glycose, le lévulose peuvent-ils être transformés direc- tement en glycogène par le foie, ou bien doivent-ils subir une transformation préalable? — Les expériences d'OTTO ont prouvé que le saccharose, le dextrose el le lévulose sont substances aux dépens desquelles le sucre fait du glycogène. Mais nous devons chercher si ces divers sucres subissent des transformations dans l'appareil digestif ou dans le sang, avant de pénétrer dans le foie. Le sucre de canne est hydrolyse dans l'estomac et dans l'intestin, et transformé en dextrose et en lévulose. Claude Bernard a étudié la question avec beaucoup de détails (Leçons sur le Diabète, p. 249, 1877). Il a vu que le saccharose est transformé par des ferments solubles dans l'appareil digestif. En effet, il a montré qu'une solution de sac- charose par l'ébuUilion avec la potasse ne jaunit pas, ne réduit pas la liqueur de Fehling, et ne fermente pas par la levure, tous phénomènes que donnent le dextrose et le lévu- lose. Le glycose dévie de 52° à droite le plan de polarisation ; le lévulose, de 100° à gauche. Aussi une solution de saccharose, qui dévie à droite, dévie-t-elle à gauche après hydra- tation. Quoique le saccharose soit très soluble et facilement absorbable, cependant il ne passe pas comme tel dans le sang, à moins que l'on n'en introduise de trop grandes masses à la fois dans l'appareil digestif. Claude Bernard a montré déjà dans sa thèse inaugurale que le saccharose, introduit directement dans le sang par injection intra-veineuse, ou injecté sous la peau, passe dans l'urine, même quand la dose injectée a été ti'ès faible. Mais les résultats sont tout différents quand il a subi au préalable l'action des sucs digestifs. Alors, en effet, il n'est plus éliminé par les reins. Claude Bernard en conclut que le saccharose est modifié dans l'appareil digestif; qu'il est inverti, c'est-à-dire transformé en quantités égales de glycose et de lévulose. Pour le prouver il injecte à un lapin 5 ce. sous la peau d'une solution qui contient 2 grammes de saccharose, et il examine l'urine 2 heures après. Si le saccharose passe inaltéré dans l'urine, il n'y aura pas réduction de la liqueur de Fehlixg; mais, si l'on fait bouillir l'urine avec un peu d'acide sulfurique, le saccharose sera inverti, et cette urine neutralisée réduira la liqueur de Febling. S'il n'y a pas de réduction dans ce cas, c'est que le saccharose n'aura pas passé dans l'urine, et l'expé- rience prouve que l'urine ne réduit pas d'abord, mais qu'elle réduit après ébuUition avec l'acide sulfurique. Ainsi il est établi que le saccharose, introduit dans l'organisme sans avoir subi l'action des tubes digestifs, passe inaltéré dans l'urine et, par conséquent, ne peut pas servir à la nutrition. Pour prouver l'exactitude de son hypothèse, Claude Bernard a fait l'expérience sous une autre forme. Il a injecté sous la peau 5 ce. d'une solution de 2 grammes de glycose au lieu de 2 grammes de saccharose : alors l'urine ne contenait pas de traces de sucre; par conséquent le glycose avait été consommé par l'organisme. Pour déterminer le rôle du saccharose, non plus injecté dans le sang ou sous la peau, mais introduit directement dans l'appareil digestif, voici l'expérience qui a été faite On injecte à un lapin 5 grammes de sucre de canne dans l'estomac; l'urine ne contient pas de sucre, ce qui prouve, non que le sucre n'a pas été absorbé, mais bien qu'il a été modifié. Le suc gastrique agit à peine sur lui. La bile, le suc pancréatique, la salive, et même le sang, n'ont pas d'action sur le saccharose; même après un contact de plusieurs jours avec le sang, le saccharose n'est pas inverti. Les extraits aqueux des glandes sali- vaires, du pancréas, des glandes lymphatiques, des muqueuses de la bouche, de l'œso- phage, de l'estomac, du gros intestin, de la vessie, n'ont aucune action inversive ; mais il en est autrement pour la muqueuse du petit intestin, depuis le pylore jusqu'au caecum. Le suc intestinal a une action inversive très nette, il suffit d'un petit fragment de la muqueuse intestinale ou d'un extrait aqueux de cette muqueuse pour transformer très rapidement, presque immédiatement, le saccharose en dextrose et lévulose. La liqueur de Fehling, qui ne réduisait pas d'abord, réduit aussitôt; et le plan de pola- GLYCOGENE. 327 risation, qui était à droite, passe rapidement à gauche. Claude Bernard a vu aussi que le suc intestinal obtenu par la méthode de Thiry invertit rapidement le saccharose. Pour montrer que le ferment inversif ne se trouve pas dans le gros intestin, mais dans le petit intestin, Claude Bernard a injecté des solutions de saccharose dans des anses du gros et du petit intestin, et, après avoir laissé séjourner pendant quelque temps la solu- tion, il étudiait la nature des sucres produits. 11 a vu alors qu'il n'y a inversion que dans les solutions introduites dans les anses du petit intestin, tandis qu'il n'y a rien de sem- blable dans les solutions laissées au contact du gros intestin. Il a montré aussi que ce ferment inversif possède toutes les propriétés générales des ferments. Il est soluble dans l'eau, précipite par l'alcool sans perdre ses propriétés, et peut être conservé sans alté- ration dans une solution aqueuse de phénol. Les recherches de Claude Bernard ont été confirmées par maints physiologistes. I.EHMANN {Lehrb. d. phys. Chemie, 1853, III, 255) et Becker {Zeitsch. f. loiss. ZooL, v, 132) i(ui ont vu l'inversion dans l'intestin; Rôbner, Disquisitiones de Sacchavi cannae in tractu cibario mutationibus. Diss. in. Breslau, 1839; Leube {Centr. f. klin. Med., 1882, n» 25), Brown et Héron {Liebig's Ann., 1880, cciv, 228) et Bourquelot {Journ. de FAn. et de la physiol., 1886, xxii, 161). LusK a fait une bonne étude bien détaillée de l'inversion du saccharose dans rap[>a- reil digestif. Un lapin de 1 897 grammes reçoit 30 grammes de saccharose : 6 heures et demie après il est sacrifié, et on examine les proportions de différents sucres qui sont localisées dans les diverses parties de l'appareil digestif. Pour cela, on fait la ligature de l'estomac, de l'intestin grêle, du cœcum, du gros intestin, et on traite le contenu de ces organes par un excès d'alcool; puis on filtre; on obtient une solution plus ou moins brune qui, après exacte neutralisation, est concentrée par évaporation. Le résidu est dissous dans l'eau : une partie sert à déterminer la quantité de sucre inverti d'après la méthode d'AuLiHN. Dans une seconde partie, on intervertit le saccharose par l'ébuUi- tion dans une solution d'acide chlorhydrique à 1 p. 1000. Dans une troisième partie, on ajoute 10 p. 100 d'acide chlorhydrique, et on fait bouillir, ce qui détruit tout le lévulose, et ne laisse que le glycose; par conséquent, cette solution d'acide chlorhy- drique à 10 p. 100 a détruit aussi bien le lévulose préexistant que le lévulose résultant de l'inversion du saccharose. Voici les quantités de sucre trouvées ainsi par Lusk dans, les différents segments du tube digestif. Ceut parties de sucre se répartissent en Sucre Sucre interverti. interverti. Saccliarose. Glycose. Lévulose. Total. Saccharose. Glycose. Lévulose. Total. Estomac . . . 0,269 1,498 0.858 2,356 10 33 57 90 Intestin. . . . 0,002 0,000 0.000 0,005 24 » » 78 Cœcum. . . . 0,000 0,846 1,321 2,167 » 61 39 100 Gros intestin. 0,000 0,000 0,000 0,102 » » » 100 Ou voit par là que dans l'estomac il y a inversion d'une certaine quantité de saccha- rose, mais que dans les autres parties de l'intestin on ne trouve plus que peu de saccha- rose, à côté de beaucoup de sucres invertis. Dans le caecum et dans l'intestin grêle il n'y a plus de saccharose : il a été complètement inverti. Fr. Voit [Munch. med. Woch., 1896, 717. D. Arch. f. kliiu Med., 1897, lvhi, 523) a confirmé essentiellement les faits de Claude Bernard, en montrant par des analyses quantitatives que le saccharose injecté sous la peau est presque en totalité éliminé par l'urine. Par conséquent, le foie ne peut pas assimiler le disaccharide saccharose, et il ne le peut pas plus que tout autre organe. Or, comme le sucre de canne de l'alimentation amène une notable accumulation de glycogène dans le foie, celui-ci ne peut être d'à qu'au sucre inverti, résultant de l'action de l'intestin sur le sucre de canne. Ce fait con- corde avec l'opinion de Bernard sur l'inversion intestinale du saccharose, et sur l'assiniila- tioh complète du glycose injecté dans le sang. Les autres expériences de Ber.nard ont été aussi confirmées par les recherches quan- itatives de Fr. Voit; car Fr. Voit a prouvé qu'une solution de lévulose injectée sous la peau ne reparaît pas dans l'urine, et, par conséquent, est assimilée par l'organisme. La 328 CLYCOGÈNE. conclusion de ces recherches est donc que le foie ne peut pas faire du glycogène avec le sucre de canne, mais qu'il peut en faire avec le dextrose et le lévulose, produits de transformation du saccharose par les ferments digestifs. Il est remarquable que Claude Bernard avait conçu cette loi très nettement, et l'avait généralisée, en indiquant que le saccharose n'est pas assimilable par les organismes animaux ou végétaux, mais qu'il doit être inverti pour devenir assimilable. Recherches d'Otto sur le maltose. — Un coq de 1772 grammes, après 4 jours de jeune, reçoit en injection dans l'œsophage une solution de 60 grammes de maltose, préparée chimiquement pure par Soxhlet. L'animal est sacrifié au bout de 8 heures. Son foie, qui pèse 39 grammes, contient 4e',068, soit 10,43 p. 100 de glycogène; le reste du corps, 3S'", 876; ce qui fait en tout 7e'", 944. La quantité de glycogène restant dans le corps au moment où Je sucre a été donné, étant de isi",160o par kilogramme, soit pour tout le corps de 2e'',844. L'albumine a pu en produire 28^'', 080, ce qui fait un chiffre total de 46'', 924 de glycogène non formé par le maltose. Or, comme la quantité trouvée a été de 78'",944, il s'ensuit que la quantité de sucre due au maltose est nécessairement de 38^'', 020. Le foie peut-il faire directement du glycogène avec le maltose, ou le maltose doit-il être au préalable transformé? Muscultis et Mering avaient établi que l'amidan et le glyco- gène sont transformés par la diastase, la salive et le suc pancréatique en achroo-dextrine et maltose, et qu'il se fait une petite quantité de glycose (Z. p. C, 1879, ii, 419). Brown et Heron [Liebig's Annalen, 1880, cciv, 228) ont confirmé et étendu le fait. Ils ont étudié l'action de différents ferments sur le maltose, et constaté que l'hydratation de ce sucre produit deux molécules de glycose aux dépens d'une molécule de maltose. Pour faire cette constatation, ils ont mis à profit ce fait que le pouvoir rotatoire diminue par les progrès de l'hydratation du maltose à mesure qu'augmente son pouvoir réducteur. Le suc pancréatique, mais surtout la muqueuse intestinale ou l'extrait aqueux des glandes de Peyer agissent énergiquement sur le maltose, et il paraît que cette action est plus énergique que l'action inversive sur le saccharose. Ces faits de Brown et Heron ont été confirmés par Bourquelot [Joiirn. de l'An, et de la PhysioL, 1886, xxii, 161), qui a vu qu'après une injection intra-veineuse de maltose il n'apparaît pas de sucre dans l'urine. Quant à savoir si le maltose, qui passe directement de l'intestin dans le sang, y trouve un ferment qui le transforme, c'est une question importante. Magendie (C. R., 1846, xxm, 189) savait déjà que le sang transformait l'amidon en sucre, et le phénomène s'observe aussi bien dans le sang in vitro que dans le sang du corps après une injection intra-veineuse. Cette découverte a été confirmée par Cladde Bernard (C. R., xli, 461), Hensen (A. A. P., 1857, xi.397), Schiff {Unters. ùbcr die Zuckerbildiing in der Leber, 16, Wûrzburg, 18o9), Wittich {A. g. P., m, 339), Seegen (C. W., 1887, 356), Bôhm et Hoff- mann (A. path. Pharm., x, 12), Léplne et Barral (C. R., cxii, 1414; et cxin, 729 et 1014, 1891). Rôhmann (in Bial, A. g. P., 1892, lu, 139) a montré que le sang artériel d'un chien mis aseptiquement au contact de deux solutions d'amidon ou de glycogène transforme ces corps en sucre. Bial {A. g. P., lu, Ibl), dans le laboratoire de Rôhmann, a vu qu'avec toutes les précautions d'asepsie nécessaire, les solutions de maltose sont trans- formées par le sérum du sang, si bien que finalement tout le maltose est transformé en glycose, ce qu'on constate en voyant le pouvoir rotatoire diminuer à mesure qu'aug- mente le pouvoir réducteur. L'action de cette enzyme (maltase) donna autant de sucre (glycose) qu'on pourrait en obtenir par l'ébullition avec l'acide chlorhydrique. Ce mal- tose se trouve dans le sérum du sang et de la lymphe, mais il n'est pas contenu dans les globules. Par conséquent, il y a une série de phénomènes qui assurent la transfor- mation complète des amylacés en glycose. En effet les amylacés constituent le plus important des hydrates de carbone pour l'alimentation de l'homme et des animaux. Les dérivés de l'amidon, qui dans le canal intestinal se changent en glycose et sont absorbés sous la forme d'amidon soluble, dex- trine ou maltose, rencontrent dans le sang des enzymes, amylo-maltase ou malto-glycase, qui les transforment en glycose. Cet effort de la nature pour donner aux cellules vivantes les hydrates de carbone sous la forme de glycose rend vraisemblable que le disaccharide maltose n'est pas plus assimilé par les organes que le saccharose. Une expérience de Fr. Voit nous montre quelles quantités de maltose peuvent passer de l'intestin dans CLYCOCENE. 329 le sang et être transformées en glycose; car, si l'on injecte sous la peau de grandes quan- tités de solutions de maltose, on voit, comme après les injections de glycose, qu'il ne ^asse ni maltose, ni glycose dans l'urine {Munch. med. Woch., 189G, 717). Toutes ces expériences prouvent donc ({ue le saccharose, l'amidon, la dextrine,le dex- trose, le lévulose, le maltose sont assimilés par les cellules vivantes comme dextrose ou lévulose. Ces deux derniers sucres peuvent former du glycogène.et le fait ne doit pas nous surprendre; car le dextrose et le lévulose donnent avec la phénylhydrazine la même glucosazone. Expériences d'Otto avec le lactose. — Un coq de 2 545 grammes reçoit, après 4 jours de jeûne, 2 injections, chacune de 100 ce, où il y a 10 p. 100 de lactose. Nul trouble: l'animal est sacrifié 9 heures après la première injection. Le foie, qui pèse 61 grammes, a donné 0^', 116 de glycogène, soit 0,19 p. 100, et le reste du corps 0e%1221, ce qui fait en tout Os'',238 de glycogène. Or, d'après les expériences de Kulz (expé- rience 24 du tableau VIIl), l'animal pouvait contenir avant l'injection du sucre 4si',085 de glycogène, il s'ensuit que le lactose et l'albumine n'ont pas fourni de glycogène. Rapportons encore d'autres expériences d'ÛTTO sur les lapins. A un lapin de 2 360 grammes, au i" jour de jeune, on injecte en trois fois, dans l'estomac, 100 ce. d'une solution de lactose à 16 p. 100, soit en tout 48 grammes de lac- tose. ISul trouble morbide : l'animal est sacrifié huit heures après la première injection. Le foie, qui pèse 51 grammes, contient OS', 8678 de glycogène, soit 1,7 p. 100; et le reste du corps, 0S'',8896, soit en tout ls^7o74. Or, d'après Kulz (exp. n» 6, p. 35, tableau XVI, 1891), il pouvait être resté à la fin du jeûne au maximum en glycogène 0,4399. Comme on ignore la teneur en glycogène du reste du corps, il est très possible que la différence, ie'',7o74 moins 0*'''',4399, égale à ie'",317o représente cette quantité restée à la fin du jeûne dans le corps. Un lapin de 2005 grammes reçoit au 5" jour de jeûne en deux fois 200 ce. d'une solution contenant 16 p. 100 de lactose, par conséquent 32 grammes en tout. Nul trouble morbide : l'animal est sacrifié 8 heures 1/2 après la première injection; le foie, qui pèse 34 grammes, contient 0S'',1357 de glycogène, soit 0,40 p. 100; le reste du corps en contient 08% 1268, ce qui fait en tout 0e'-,2625 de glycogène. Mais, d'après Kulz, il pouvait y avoir dans le corps de l'animal et dans son foie, 0,3729. Par conséquent, il ne s'est sûrement pas formé de glycogène au dépens du lactose et de l'albumine. Expériences de Lûsk, Grenier, Kausch et Socin. — LiJSK a continué les recherchesd'OTTodans le laboratoire de physiologie de Munich. Un lapin de 2 913 grammes reçoit, au 5*^ jour de jeûne, 50 grammes de lactose, qui lui sont injectés dans l'estomac. L'animal est sacrifié après 8 heures; le foie, qui pèse 60»'', 12, contient 2ff'',716, soit 3s'", 61 p. 100 de glycogène. Le glycogène du corps n'a pas été déterminé. Comme, d'après Kulz, le maximum du glycogène contenu dans le foie au 4'^ jour de jeûne peut être de 0,1864 par kilo, cela fait, pour un lapin de 2 913 grammes, un maximum de 0f?'",543. Or le foie contenait 2s'', 716. Il est vrai que nous n'avons pas les chiffres relatifs au glyco- gène du reste du corps, ce qui nous interdit une conclusion formelle. Pour les mêmes raisons, les expériences de Cremer (Z. B., 1892, xxix, 520), sur des -lapins nourris avec du lactose, ne peuvent pas être invoquées. Dans l'ensemble, il est important d'établir que l'exactitude des recherches d'OiTO a été confirmée par tous les expérimentateurs qui ont repris cet ordre de recherches. Kausch et Socin (A. A. P., 1893, xxsi, 398) ont nourri des lapins avec du lactose, et ils ont obtenu les mêmes résultats négatifs que Otto; mais les résultats ont été positifs chez le chien. Max Cremer rapporte les chiffres relatifs à un chien de 32 kil.,qui, après 10 jours déjeune, reçut une grande quantité de lactose. Le foie contenait 28,698 grammes de glycogène. Mais, comme, sur un chien de poids sensiblement égal, après un jeûne trois fois plus long, le foie contenait encore 22^''", 489 de glycogène, l'expérience de Cremer n'est pas probante : c'est ce que d'ailleurs établit pour d'autres raisons Cremer lui-même, et E. Weinland rapporte quelques expériences faites sur des chiens nourris avec du sucre de lait {Beitrdge zw F rage nach dein Verhalten des Milchzuckers iin Kôrper, besonders im Darm. Mûnchen, 1899, 35). Au i" jour de jeûne, un de ces foies, pesant 86e'', 09, contenait 4s'',04. Un autre foie, de 160s'-,9, contenait 8s%12 de glycogène. Weinland pense que par 330 GLYCOGÈNE. là est prouvée la formation du giycogène aux dépens du lactose; mais cette conclusion n'est point exacte. Souvent des chiens, après un jeûne de plus de 4 jours, contiennent encore dans le foie des quantités considérables de glycogène. J'ai rapporté le cas d'un chien qui était, non plus au 4«, mais au 28'= jour de jeûne. Son foie, de 307 grammes, contenait encore 4s^'',436 p. 100 de glycogène; par conséquent en tout 22S'",489. Expériences d'Otto avec le galactose. — Comme le dédoublement du sucre de lait produit du dextrose et du galactose, il convient de voir ce que produit cette sub- stance. Un coq de 1918 grammes reçoit au 4^ jour de jeûne 120 ce. d'une solution con- tenant 55 grammes de galactose. Nul trouble; l'animal est sacrifié 8 heures après. Le foie contient 0S'',6716 de glycogène, soit ls'',29 p. 100; le reste du corps, 08^'",6178, ce qui fait en tout lff'',289 de glycogène. Or le glycogène, d'après Kûlz, (Exp. 24, tableau VIII, p. 20) pouvait à la fin de l'inanition être de 3«'",087. L'albumine a pu en produire 2=', 420, ce qui fait en tout 5S'',498, dont on peut expliquer la formation en dehors de l'alimentation par le galactose. Cette expérience est particulièrement inté- ressante, parce qu'elle parait prouver que ni le galactose, ni l'albumine ne contribuent à la formation du glycogène. L'expérience que Otto a instituée sur le lapin peut aussi servir à cette démonstration. Un lapin, de 2 751 grammes, reçoit au 5" jour déjeune dans l'estomac 140 ce. d'une solution contenant 688'',2 de galactose. Nul trouble morbide; l'animal est sacrifié 8 heures après. Le foie, de 57 grammes, contient O^"", 871 2 de glycogène, soit 18'',53 p. 100; le reste du corps, Ok'',6486; ce qui fait en tout 16r,5198. D'après les recherches de KiLz, sur 13 lapins au même jour de jeûne le maximum du glycogène restant dans le foie peut être OS', 1864 par kilogramme (Expérience n° 6, tableau XVI). Par conséquent le foie de ce lapin de 2751 grammes pouvait avoir encore 0,5128 de glycogène, mais la quantité de glycogène contenue dans le reste du corps n'est pas déterminée : toutefois on peut supposer qu'elle est inférieure à la dilTérence entre 1^'",5198 et 0î''",ol28. Quant aux expériences de Max Cremer (Z. B., 1892, xxix, 521) sur le galactose chez le lapin, elles ne sont pas probantes. Le sucre de lait peut-il être employé par le foie à former du glycogène? Les expériences de nutrition avec le sucre de lait ont donc conduit à ce résultat que ce sucre ne produit pas de glycogène, au moins pour les poules et les lapins. Mais, comme l'hydratation du lactose donne non seulement du galactose, mais encore du glycose, il s'ensuit que le sucre de lait doit entraîner la formation de glycogène, quand il a subi l'action des ferments digestifs chez les poules et les lapins. Dastre avait déjà observé que le sucre de lait injecté dans le sang ne peut pas servir immédiatement à la nutrition des tissus. (A. d. P., 1891, xxi, 718. — B. B., 1889, 145. — A. d. P., 1892, XXII, 103.) Car, si on l'injecte dans le sang, il est, tout comme le saccharose, éliminé par l'urine en totalité. Mais si, avant de l'injecter dans les veines, on l'a interverti par ébuUition avec un acide, alors il est assimilé. D'ailleurs Dastre a montré que ni l'extrait pancréatique, ni l'extrait intestinal, ne peuvent déterminer cette hydrolyse. Droop RiCHMOND [Analyst, 1892, xvn, 222) a montré aussi que ni le lab, ni la pepsine, ni la trypsine, ne transforment le sucre de lait; ce qui a été établi par l'étude de la polarisa- tion rotatoire et du pouvoir réducteur. Abbot a vu aussi que le suc gastrique artificiel- n'agit pas sur le lactose dans une solution chlorhydrique à 3 p. 1000, même au bout d'un très long temps. (Z. B., xxviii, 279.) Ernst Weinland a repris la question, et l'a étudiée avec beaucoup de détails dans sa thèse inaugurale {loc. cit., Miinchen, 1899). La recherche lui a été très facilitée par ce fait qu'il existe une levure, Saccharomyces apiculatus, qui ne fait pas fermenter le lactose, mais seulement ses produits de dédoublement. Les animaux dont l'alimentation normale ne contient pas de sucre de lait ne possèdent pas dans leur système digestif d'enzyme capable de dédoubler ce sucre. Cette enzyme, que Weinland appelle laclase, serait donc inutile aux poules et aux lapins: aussi leur organisme ne le contient-il point. La kictase serait donc utile aux jeunes mammifères et à l'enfant nouveau-né; et, de fait, Weinland a trouvé sans excep- tion dans toutes les parties de l'intestin de ces jeunes animaux un ferment soluble dans l'eau et qui dédouble le sucre de lait. La lactase se trouve aussi chez les omni- vores : le porc adulte et le chien. GLYCOGÈNE. 331 Comme le chien est essentiellement Carnivore, Weinlaxd essaye d'expliquer la pré- sence de la lactase dans son organisme d'après l'adaptation des ferments digestifs à la nature de l'alimentation. Il a pu observer, chez les lapins soumis à une alimentation iaclée prolongée, la continuation de la production de lactase, quoique en réalité, chez des lapins qui ne s'allaitent plus, il n'y ait plus production de cette enzyme. La même expérience réussit chez un poulet, qui reçut pendant longtemps du lait mélangé à sa nourriture. Ainsi s'explique la présence de ce ferment chez le chien, qui est en réalité omnivore. Cependant il arrive quelquefois que l'on trouve de la lactase dans l'intestin des vieux chevaux, quoiqu'elle fasse complètement défaut chez le bœuf, le mouton, le lapin et le poulet adulte. Wei.nland dit aussi'que le sucre de lait est transformé dans l'intestin, grâce aux bac- téries, qui en général produisent des acides. Dans d'autres recherches il a introduit des solutions de lactose dans des portions isolées d'intestin de lapin, et il a vu que l'absorp- tion en est beaucoup plus difficile que celle du glycose. Un autre fait important, c'est la confirmation, donnée par Fb. Voit {Miinch. med. Woch., 1896, 717), des expériences de Dastre, qu'après des injections sous-cutanées d'une solution de lactose on peut retrouver la presque totalité de cette substance dans l'urine. Le disaccharide lactose ne peut donc pas être assimilé par les cellules vivantes, lesquelles peuvent au contraire assimiler les produits de dédoublement du lactose, dextrose et galactose. Que le galactose soit assimilé par l'organisme, c'est un point qui a priori ne saurait être mis en doute ; car la nature l'a destiné à la nutrition des jeunes mammifères ou de l'enfant à la mamelle. Aussi bien Fr. Voit a-t-il montré que des so- lutions de galactose injectées sous la peau se comportent comme le glycose, c'est-à-dire qu'elles sont assimilées et ne passent pas dans l'urine. Cela ne prouve point d'ailleurs que le foie peut transformer le galactose en glycogèue, et les expériences ci-dessus rapportées ne peuvent fournir celte preuve en toute certitude. Expériences d'Edouard Kiilz. — Il faut reprendre de nouveau les travaux de KuLz, qui a traité avec beaucoup de développement la question qui nous occupe ici, par des expériences sur les poules et les lapins. Mais les conditions étaient loin d'être aussi bonnes que dans les expériences d'OïTO. En effet, il opérait sur de trop faibles quantités, ce qui ne lui donnait que de légères augmentations de glycogène, et, comme souvent les expériences de contrôle n'étaient pas faites, les résultats sont vraiment assez incer- tains. Elles l'ont conduit à des conclusions qui seraient, si elles étaient démontrées exactes, d'une importance fondamentale. Selon lui, en effet, ce ne sont pas seulement les hydrates de carbone vrais, dans le sens étroit de ce mot, qui peuvent donner du glyco- gène; mais encore ce sont toutes les substances voisines {loc. cit., 1891, 35) : amidon, dextrine, dextrose, inuline, lévulose, inosite, sorbine, galactose, raffinose, saccharose, lactose, lactose inverti, éthylène glycol, propylène glycol, glycérine, érylhrite, quercite, dulcite, mannite, saccharine, iso-saccharine, anhydride glycuronique, dextrinate de cal- cium, acide saccharique, acide mucique. Les recherches de KOlz sont devenues classiques: elles ont passé dans les traités de physiologie et de chimie physiologique (Hammarsten, Lehrb. der physiol. Chemie, 1899, 2lo) et on les considère volontiers comme faits de sciences positives. Mais, pour ma part, je ne puis me déclarer satisfait; car nombre des affirmations de Kulz manquent de preuves suffisantes. Je voudrais en donner ici la démonstration aux physiologistes, ce qui ne peut se faire en peu de mots, car ce seront toujours les chiffres et les analyses qui seront les bases de la discussion. C'est là un travail de dissection qui est pénible et laborieux; mais je ne sache point qu'il existe d'autres méthodes pour approfondir le sujet. Aussi demanderai-je au lecteur toute sa patience. Et tout d'abord, je ferai remarquer, ce qu'on n'a jamais fait encore, une défectuosité étonnante, c'est que Edouard Kulz, se fondant sur des différences qui sont absolument dans les limites de l'erreur expérimentale, a établi des conclusions de la plus haute im- portance. Ces preuves reposent sur la différence entre des animaux pris comme témoins et d'autres animaux nourris avec telle ou telle substance ; mais lui-même rapporte dos analyses, d'après lesquelles des pigeons d'une même portée, nourris pendant 6 jours de la même manière, contiennent des quantités de glycogène dans le foie qui varient de 0,91 à 8,89 p. 100 (Tableau VII, p. 18). 332 GLYCOGÈNE. GùRBER {Sitzb. d. phys. med. Ges. zu Wih'tzburg, 1895, 17) a montré qu'en été les la- pins contiennent beaucoup moins de glycogène qu'en hiver, et le fait se voit en toute évi- dence chez les grenouilles, comme l'a montré Athanasiu (A. g. P., 1899, lxxiv, 561). Si donc en été on analyse au point de vue du glycogène des lapins qui ont jeûné pen- dant 6 jours, et qu'ensuite on étudie en hiver l'influence de l'alimentation sur des lapins au sixième jour de jeûne, on doit trouver toujours que ces derniers ont plus de glyco- gène, quel que soit l'aliment qui leur a été donné. Dans le tableau XVIII de la page 36 il est dit que 124 expériences d'alimentations diverses ont été entreprises sur des poules dans les temps les plus froids, de 1888 et 1889. Pourtant quelques-unes de ces recherches ont été entreprises dans le mois d'août et terminées à la fin d'août. Les 62 expériences d'alimentation sur des lapins ont été presque toutes entreprises pendant les temps froids de l'année (tableau XV, p. 30) à l'exception des recherches sur la saccharine et le tartrate de soude, recherches qui d'ailleurs ont été négatives. La première de toutes les conditions expérimentales est donc de prendre des animaux de contrôle aux mêmes saisons de l'année que les ani- maux expérimentés. Mais E. KiJLz n'a pas satisfait à cette condition, et en voici la preuve irréfutable. 124 expériences ont été par Kulz poursuivies sur les poulets, et 62 sur les lapins : or, dans toutes ces expériences, la date, donnant le jour, le mois et l'année, est exactement consignée, tandis que dans aucune des expériences de contrôle ne se trouve cette indica- tion. Je donnerai plus loin quelques détails à ce sujet, spécialement pour les poules. Dans le tableau VIII Kûlz donne 32 expériences de contrôle sur des poules à jeun; c'est seulement dans 13 de ces expériences que le glycogène des muscles a été déter- miné, comme le glycogène du foie. Ces 13 expériences constituent la partie fondamen- tale du travail. 5 d'entre elles sont empruntées au travail de Aldehoff {Ueber den Ein- fliiss der Carenz auf den Glycogenbestand von Muskel und Leber Z. B., 1889, xxv, 137), et 7 au travail de Hergeahahn {Ueber den ZeltUchen Verlauf der Bildiing resp. Anhâiifung des Glycogenes, in der Leber und den loillkûrlichen Muskeln. Z. B., 1890, xxvii, 215). Le tableau VI, d'ALDEHOFF, p. 154, contient 5 expériences, qui sont les expériences 13-14-15-27-32 du tableau VIII de Kulz. Le tableau I, de Hergenhahn, p. 218, contient 7 expériences : ce sont les expériences 15-16-20-21-22-23-24 du tableau VIII de Kulz. Il est intéressant de remarquer que ce n° 15 du tableau VIII de Kulz est en même temps l'expérience de contrôle du tableau I, p. 218, de Hergenhahn, et du tableau VI de Aldehoff, p. 154. Voilà donc une expérience de contrôle qui sert à trois expérimentateurs différents. Kulz ne cite pas comme collaborateurs Hergenhahn et Aldehoff; mais, à la fin de son travail (p. 53), il cite ses assistants: R. Kulz, Sandmeyer et Blome, qui l'ont aidé dans ses recherches. Rien n'indique que les recherches d'ALOEHOFF et de Hergenhahn ont été faites à la même époque que les expériences d'alimentation de E. Kûlz. Le mémoire d'Au- dehoff étant au tome xxv, et celui de Hergenhahn au tome xxvii der Zeilschrift fin- Biologie, cela n'est pas vraisemblable. Claude Bernard {Leçons sur le diabète, 1877, Leçon XXI) était arrivé à reconnaître que la teneur en glycogène du foie de deux animaux qui paraissent être dans le même état, et qui sont tués au même moment de la même alimentation, peut présenter de si énormes différences que les comparaisons faites avec des animaux de contrôle ne four- nissent que des données très incertaines. Aussi, comme procédé de contrôle, prenait-il d'abord, à l'animal qui devait servir à l'alimentation, un fragment de foie, lequel servait à doser le glycogène. Par conséquent Kulz, d'après le genre de ses expériences, est forcé de renoncer à toute analogie rationnelle entre les animaux qu'il veut comparer. Il introduit dans ses tableaux des analyses faites tantôt par Edouard Kulz, tantôt par Sandmeyer, tantôt par Blome, tantôt par Richard Kuilz, tantôt par Aldehoff, tantôt par Hergenhahn, sur des animaux de difTérentes races, et observés a des saisons différentes : il a donc introduit des conditions d'après lesquelles les plus grandes divergences se doivent rencontrer, et cela explique un résultat bien singulier qui se dégage des chiffres donnés par lui au tableau VIII sur le glycogène des animaux de contrôle 'et à jeun. Si l'on déduit les 27 analyses où la teneur en glycogène a été déterminée, et qui n'ont pas été exécutées par Aldehoff, on n'en trouve que 3, où il y ait eu absence de glyco- GLYCOGENE. 333 gène, tandis que dans les 5 analyses dues à Aldehofp le glycogène a fait complètement défaut 4 fois. Par conséquent, d'après Aldehoff, le glycof^ène fait défaut dans le foie pour 80 p. 100 des cas, tandis que, d'après Herge.nhahn et Kulz, il ne fait défaut que dans 11 p. 100, dans les mêmes condilious, bien entendu. En outre, le poids le plus faible de glycogène du corps chez le poulet, au troisième jour d'inanition, se trouve dans les analyses de Aldehoff, et le poids le plus élevé de glycogène au sixième jour d'inanition est dîi aux analyses de Hergemiahm. Ainsi, avec Aldehoff, les chiffres sont toujours plus faibles ; Onne peut donc pas douter que le poids très faible de ylycogcne assigné au foie des animaux de contrôle est dû principalement aux analyses c^'Aldehoff. Les analyses des animaux alimentés, pour lesquelles la date exacte a été donnée, ont été pratiquées par E. Kulz, et ses assistants, R. Kulz, Sandmeyer, Blome, qui travaillaient avec plus d'exactitude, et qui par suite ont trouvé des poids plus élevés de glycogène. C'est pourquoi on devait trouver des chiffres plus élevés de glyco- gène pour les expériences d'alimentation, même si aucune substance formatrice de glyco- gène n'avait élé donnée, surtout si l'on pense qu'il s'agit là de chétives différences qui tombent tout à fait dans les limites des erreurs d'analyse. Ce n'est pas une tâche facile que de déterminer exactement la minime quantité de glycogène qui se trouve dans un organe aussi petit que le foie d'un poulet à jeun. Les analyses faites par ma méthode et la méthode de Kulz ont montré presque toutes que, quand la proportion de glycogène est faible dans le corps, on en trouve encore moins dans le foie que dans le reste du corps, même au cas où la teneur en glycogène serait la même pour le foie et pour le corps. Les muscles contiennent alors centésimalement très peu de glycogène; mais comme on peut, pour l'analyse, prendre une très grande quantité de muscles, le dosage porte sur une forte proportion de tissus, et les^ pertes deviennent alors négligeables. Au contraire, pour doser les traces de glyco- gène qui se trouvent dans de très petits foies de poulet, il faut beaucoup de soins et d'habitude. Souvent alors en effet l'addition d'alcool ne produit aucun trouble dans la liqueur pauvre en glycogène, et on est amené à penser qu'elle ne contient pas de gly- cogène, si bien qu'on est d'abord tenté de jeter le liquide ; mais au bout d'une demi-heure le liquide s'est troublé, et en douze heures le glycogène s'est précipité au fond du vase. Une autre mauvaise condition pour ces recherches, c'est de laisser un long inter- valle de temps entre les expériences de contrôle et les expériences d'alimentation. Les conditions d'achat des animaux ne sont pas les mêmes. Les races peuvent être différentes, comme aussi les moments de l'année, toutes circonstances rendant l'état de nutrition des animaux extrêmement différent. On peut prouver qu'elles exercent une influence notablesur les résultats, en prenant comme exemples les expériences de KûLzlui-même. On voit dans le tableau VIII que le jeune des poulets a eu pour conséquence, dans les trois premiers jours, une période de diminution de glycogène qui a été suivie d'une période d'augmentation. Je vais d'abord essayer d'établir les faits. Pour ce qui concerne le foie seul, il n'y a pas moins de 30 expériences faites sur les poulets. Je les divise en 2 groupes : le groupe 1 comprend les poulets où le temps de jeûne a été de 2 à 3 jours : le groupe 2, ceux dans lesquels il a été de 6 à 10 jours. Le tableau suivant, que j'ai établi d'après les chiffres de Kulz, est facile k com- prendre. GROUrEMENTS. Nombre des animaux (poules). Poids initial moyen en grammes. DURÉE du jeune, en jours. TENEUR MOYENNE DU KOIE EN GLYCOGJiNE. en poids absolu pour 1 kil. de l'animal 1 2 14 18 Ia53 I3:ji 2 à 3 jours, i '>■ 10 joui's. (grammes). 0.059 0.074 (grammes). 0,038 o.oo;i Par conséquent, en comparant le glycogène de la période du deuxième et troisième 334 GLYCOGENE. jour de jeûne, et celui de la période du sixième au dixième jour, on voit que par la pro- longation du jeune il aurait augmenté de 44 p. 100. Comme il s'agit d'un nombre considérable d'expériences, et que la durée de l'inanition est tout à fait différente, il semble d'abord qu'on pourrait considérer comme prouvé que la quantité de glycogène contenue dans le foie va en augmentant à mesure que se prolonge le jeûne. Cependant la conclusion qu'on déduirait de ce tableau serait fausse, comme le prou- vent les faits suivants : 1" Kulz a donné une nombreuse série d'expériences (tableau VI) faites sur 17 pigeons, soumis à l'inanition de 2 à 8 jours. Chez tous le glycogène du foie fut dosé. Chez 12 d'entre eux, le glycogène des muscles de l'organisme fut dosé aussi. Je construis, avec le tableau V de Kulz, deux nouveaux tableaux que j'appelle A et R. TABLEAU A Glycogène du foie des pigeons (Kûlz). NOMBRE des animaux. POIDS INITIAL moyen en grammes. DDRÉE du jeûne en jours. POIDS MOYEN du glj'cogène hépatique (sans cendres) en grammes. POIDS MOYEN du glycogène hépatique pour 1 kil. de poids initial de l'animal. (en grammes.) 11 6 336 363 2-4 o-S 0,006 0,000 0,018 0,000 TABLEAU B Glycogène du foie et des muscles des pigeons (KiLz) POIDS MOYEN NOMBRE POIDS INITIAL DURÉE DU JEÛNE POIDS MOYEN du glycogène du foie du glycogène du foie et des muscles. des ani- moyen en et des muscles, sans cendres. OBSERVATIONS. maux. grammes. en jours (sans cendres) en grammes. en grammes, pour 1 kil. du poids initial de l'animal. 6 338 3-4 0,327 0,967 Exp.6, 7, 8,9, 10, 11. 6 363 5-8 0,260 0,716 Exp. 12,13,14,15,16,17. Le tableau A donne le glycogène du foie ; le tableau B donne celui du corps. Ainsi ces expériences faites sur les pigeons prouvent que dans l'inanition prolongée le glycogène du foie continue à diminuer dans le foie aussi bien que dans les muscles. 2° J'ai déterminé aussi le glycogène des poulets d'après la méthode de Brucke- KuLz (A. g. P., Lxxvi, 1899); ces animaux ayant jeûné de 3 à 6 jours, j'ai constaté que la quantité de glycogène va constamment en diminuant du troisième au sixième jour de jeûne. Il faut donc se demander quelle peut être l'explication de la grave erreur d'après laquelle, selon le tableau VIII de Kulz, le glycogène augmente chez les poules en inanition. Il est évident que, parmi les animaux qui ont jeûné longtemps, le hasard a pu en donnerqui étaient particulièrement riches en glycogène. De faitj'ai constaté que, parmi ces poules soumises à l'inanition, beaucoup étaient d'un poids élevé; donc en bon état de nutrition. Par conséquent leurs tissus étaient particulièrement riches en glycogène, en quantitésabsolue ou centésimale. Les faits que nous venons d indiquer auront sans doute persuadé le lecteur que, faute de choisir avec le plus grand soin les animaux témoins, on s'expose à de très graves erreurs, même en sacrifiant un très grand nombre d'animaux. Quoiqu'il semble bien, après tout ce que nous venons d'indiquer, qu'on puisse GLYCOGÈNE. 335 porter un jugement sur les expériences de Kilz et considérer ses conclusions comme tout à fait incertaines, il faut cependant faire remarquer que Carl Voit et que toute l'école physiologique de Miinicli considèrent les travaux de Kulz comme un modèle classique d'investigation physiologique. C. Voit a maintenu son opinion, même après qu'il fut prouvé que les recherches de E. Kulz manquaient de preuves sérieuses, d'après les faits établis par Voit lui-même. En effet, C. Voit demande que, dans toute expérience d'alimentation avec du sucre, on élimine, par des déterminations spéciales, la possibilité de la formation de glycogène aux dépens de l'albumine. Or je choisis comme exemple les expériences S et 6 de KClz {loc. cit., Tabl. XVIII, p. 36). Deux poules après injection de 10 grammes de glycose dissous dans 30 ce. d'eau, ont donné, 12 heures après, dans le foie en moyenne 1,071 de glycogène. En calculant, d'après les chiffres de Orro, et en admettant que le corps contient autant de glycogène que le foie, cela fait pour le glycogène total la quautité de 2,142. Comme le poids moyen est de 1 ObO grammes, 1 kilogramme d'animal con- tiendrait alors 2,040 grammes de glycogène. Or, d'après les recherches de Kulz, il peut y avoir, par kilogramme du poids initial, au neuvième jour de jeûne, dans tout le corps, en glycogène 0,681 grammes en moyenne, et 1,605 au maximum. D'après Otto et C. Voit (Z. B., xxviii, 262), 1 kilogramme de poule peut former en glycogène (en 8 heures), en moyenne 1,71 aux dépens de l'albumine; ce qui fait en 12 heures 28'', 365. On peut donc expliquer qu'il y a eu 0,681 + 2,565; soit, au total, 3,246 de glycogène, dont la présence peut s'expliquer sans formation de sucre. Et on a trouvé 2,040! L'expérience ne prouve donc rien, encore que pour le glycogène résidual nous n'ayions pas pris le chiffre maximal. Mais le même raisonnement peut s'appliquer aux expériences que Kulz a instituées avec amidon, dextrine, inuline, lévulose, inosite, sorbine, galactose, raffinose, saccharose, lactose, éthylène-glycol, propylène-gJycol, glycérine, érylhrite, quercite, dulcite, mannite, saccharine, isosaccharine, anhydride glycuronique, dextrinate de calcium, tartrate et citrate de sodium, gomme arabique. Maintenant il est juste de dire que les recherches d'OTTO établissent presque avec certitude qu'il se forme du glycogène aux dépens du sucre. Mais on n'a pas le droit d'éliminer cette valeur hypothétique du glycogène ainsi formé ;car Otto, en nourrissant ses animaux avec du galactose, n'a pas pu constater qu'il se formait du nouveau glycogène. Naturellement on peut dire que l'albumine ne se comporte pas de la même manière dans toutes les conditions. Car, d'après la célèbre proposition de C. Voit, l'albumine se dissocie tantôt eu urée et en graisse, tantôt en urée et en glycogène. Alors on peut se demander si les recherches de E. Kulz sont valables, en supposant, d'une part, qu'il ne se fait pas de glycogène aux dépens de l'albumine chez des animaux nourris avec du sucre, et, d'autre part, en ne tenant pas compte des défectuosités indiquées par moi plus haut, relatives au choix des animaux témoins. Pour prouver que le sucre introduit dans l'organisme se change en glycogène, il faut en première ligne établir que la masse du glycogène contenu dans l'organisme a augmenté. Or on trouve le glycogène non seulement dans le foie, mais encore dans les muscles, les cartilages, et, dans beaucoup d'autres tissus. Otto, qui a reconnu cela, a dû se livrer à une recherche extraordinairement laborieuse; et il a dosé non seule- ment le glycogène du foie, mais encore celui des autres parties du corps. Mais Ed. Kïlz s'est contenté, dans les 124 expériences sur les oiseaux qu'il nous donne ici, de faire l'analyse quantitative du glycogène hépatique, et il a abandonné le dosage du glyco- gène du reste du corps. Il a supposé que, si ce glycogène hépatique augmente, le glycogène du reste du corps augmente également. De fait, les nombreuses analyses qu'OTTo a faites sur des lapins et des poulets, ont montré que la quantité absolue de glycogène qu'on trouve dans le foie est presque égale à celle qui se trouve dans le reste du corps. Il est remarquable que cette loi, qui résulte des analyses de Otto, ne change pas, quel que soit le chiffre absolu du glycogène. Chez un gros chien qui avait jeûné 28 jours, j'ai pu confirmer que cette loi était relativement exacte. Le foie a donné 24e',260 de sucre (dosé par inversion du glycogène), et le reste du corps, 28e'-, 24 {A. g. P., 1902, xci, 121). Il ne faut pas oublier que, dans toutes les recherches d'OTTo, l'animal pauvre en 386 GLYCOGÈNE. glycogène était toujours nourri avec du sucre, et sacrifié huit heures après. Et c'est là probablement le moment précis oii la teneur du foie en glycogène égale la teneur du reste du corps en glycogène. Otto n'a pas indiqué quel est le rapport entre la quantité du glycogène hépatique et la quantité du glycogène du corps, trois heures ou vingt- quatre heures après l'ingestion de sucre. De même, il n'y a pas d'expériences pour sa- voir si ce rapport se modifie suivant la nature des substances alimentaires capables ou non de former du glycogène. E. Hergenhahn (Z. B., 1890, xxvn, 222) a fait sur ce point, dans le laboratoire de E. KûLz lui-même, une recherche très intéressante. 11 a nourri des poulets, qui avaient jeûné 6 jours, avec des quantités dilférentes de saccharose (10, 20, 30 grammes) et il a suivi l'augmentation graduelle du glycogène hépatique, aussi bien que celle du glyco- gène corporel. Les courbes données par Hergeauahn prouvent qu'en général la teneur du foie en glycogène, et celle des autres organes croissent en même temps, pour atteindre un maximum au bout de 12 à 20 heures, pour ensuite descendre en même temps. Toutefois il peut arriver souvent qu'une des courbes monte, tandis que l'autre descend, ce qui est dû peut-être à des erreurs d'observation qui paraissent irrémé- diables; car chaque courbe est la totalisation d'expériences faites sur plusieurs animaux.. Il semble donc que l'augmentation du glycogène du foie entraaie une augmentation du glycogène dans le corps. On ne doit cependant pas oublier qu'il s'agit toujours, dans ces expériences, d'alimentation avec le sucre. Reste à savoir si dans certaines conditions le foie ne cède pas du glycogène ou du sucre aux autres organes, et si, inversement, dans d'autres conditions, il ne leur en em- prunte pas. Nous savons, d'après les recherches d'ATHANAsiu {A. g. P., 1889, lxxiv, 511), que, dans l'empoisonnement parle phosphore, les graisses du foie augmentent, non parce qu'il se produit de la graisse dans le foie, mais parce que les graisses du reste du corps viennent se fixer dans le foie. Il est un fait qui semble indiquer que, dans certaines conditions, le glycogène des cartilages et des autres organes vient se fixer dans le foie dépourvu de glycogène. Si d'après Frentzel (A. g. P., 1894, lvi, 273), on fait perdre à un lapin son glycogène, en l'empoisonnant par la sti'ychnine, puis qu'on le plonge par l'uréthane dans un sommeil prolongé, alors, au bout de 20 à 28 heures, le glycogène s'accumule de nouveau dans le foie. La convulsion tétanique des muscles, due à la strychnine, a épuisé le glycogène musculaire, et le foie a lutté pour réparer cette destruction, en versant du glycogène dans le sang, jusqu'à en être à la fin dépourvu. Les autres régions où il y a du glycogène déversent lentement du glycogène et du sucre dans le sang, pour que le foie en profite. Par conséquent on peut en conclure qu'il n'y a pas de loi pour déterminer un rapport quelconque entre le glycogène hépatique et le glycogène du reste du corps. Ici se placent les recherches d'Eo. Kûlz, qu'il faut maintenant examiner. KClz, pour ses expériences de contrôle, a laissé jeûner pendant longtemps 32 poules ; 8 de ces poules, pendant 2 jours; 6, pendant 3 jours; 12, pendant 6 jours; 4, pendant 7 jours; 1, pen- dants jours; 1, pendant 10 jours. Chez toutes, le glycogène du foie fut dosé; chez 13 de ces poules il détermina en outre la quantité de glycogène de tout le corps; et cela pour 2 poules au 3" jour de jeûne; pour 7, au 6« jour de jeûne ; pour 2, au 7« jour; pour 2, aux 8«^ et 10'' jours. Comme Kulz ne prenait pour ses expériences d'alimen- tation que des poules ayant jeûné 6 jours, on ne peut leur comparer que les 7 poules ayant jeûné 6 jours; et chez lesquelles la quantité de glycogène avait été déterminée non seulement dans le foie, mais encore dans le reste du corps. Si l'on fait la somme de tout le glycogène contenu dans le foie de ces 6 animaux; et si l'on compare ce chiffre au glycogène de tout le reste du corps, on voit qu'il y a dans le corps 20 fois plus de gly- cogène que dans le foie. Le fait, que les animaux témoins ont dans le corps 20 fois plus de glycogène que dans le foie, est d'autant plus extraordinaire que, d'après les recherches de Otto sur les poules et les lapins, les quantités du glycogène du foie, et du glycogène du corps sont à peu près les mêmes. Ici il est nécessaire de faire remarquer qu'on peut observer le fait contraire. Aussi J. Frentzel, dans un travail fait sous la direction de N. Zuntz, trouve que chez des lapins dépourvus de glycogène par la strychnisation, l'alimenlation par le glycose accroît d'à- GLYCOCÈNE. 337 bord énormément le giycogène du foie, et plus tard seulement celui des muscles. Le tableau suivant résume les recherches de Frentzel; Salkowski (Z. p. C, xxxii, 393) a trouvé tout à fait les mêmes relations en nourrissant avec de l'arabinose des lapins et Lapins sans glycogêne, nourris avec dextrose (Frentzel). POIDS GLYCOGENE GLYCOGÊNE TUÉS COMBIEN d'heures DOSE DU LAPIN DU FOIE DU RESTE DU CORPS après DE DEXTROSt-; en grainnies. en grammes. en grammes. l'alimentation ? en grammes. 1. 1920 2,020 0,0 11,5 10 £) 1760 1,000 0,0 11,0 10 3. 1 MO 2,062 0,0 10,0 . 10 4. 1 020 0,880 0,0 8 10 5. 2 170 3,415 0,75 12 11 6. 1920 2,376 1,79 11 10 7. 2 500 2,775 2'33 M 11 des poules pauvres en giycogène. Souvent les muscles ne contenaient pas de giycogène, tandis que le foie en contenait de quantités notables. Ainsi nous trouvons, dans les recherches de Otto, qu'il y avait toujours autant de giycogène dans le foie que dans le corps. Dans les recherches de Kulz, le corps contenait 20 fois plus de giycogène que le foie. Dans les recherches de Frentzel et de Salkowski, le foie contenait beaucoup plus de giycogène que lereste du corps; et c'est seulement lorsqu'après une alimentation sucrée le foie a formé une quantité notable de giycogène que commence à croitie, d'après Frentzel, la teneur en giycogène du reste du corps, de manière à se rapprocher du chiflVe total du giycogène hépatique. Une expérience entreprise d'après les meilleures méthodes analytiques, et les plus récentes, par Schondorff [A. g. P., xclx, 721, 1903) sur sept chiens nourris avec de la viande, du riz et du sucre a donné pour 100 grammes de giycogène hépatique, des chiffres variant de 76,17 à 398 grammes pour le giycogène des autres parties du corps. Ces faits prouvent que l'on ne peut conclure avec certitude, d'après la quantité de giycogène du foie, sur la quantité de i^lycogène du corps. Pour montrer au lecteur sur quelles minimes ditîérences Kulz a pris ces conclusions, je citerai seulement quelques exemples. « D'après douze expériences, dit-il (voir tableau VIII), la teneur du foie en giycogène chez des poulets vigoureux, au 6" jour de jeûne, atteint au maximum 0S'',1788. On a alors le droit de considérer comme positif le résultat des expériences du tableau XVIII — il s'agit des expériences où les animaux ont été alimentés avec différentes substances — dans lesquelles, après ingestion d'une substance déterminée, la teneur en giycogène du foie a dépassé dans la plupart des cas cette limite maximum, et de conclure que la substance ingérée a augmenté la for- mation du giycogène. » Parmi les substances qui 'déterminent en toute certitude une augmentation de giycogène dans le foie des chiens, d'après les expériences faites sur les poules, KiLz mentionne l'inuline. Or KiiLz a fait 8 expériences d'alimentation des poules avec l'inuline; leurs foies contenaient en moyenne 0s'",178 de giycogène, ce qui est plus que 0e'",1788! et ce qui prouverait, d'après Ki'LZ, que le giycogène a été provoqué par l'inuline. Est-ce là la preuve que l'inuline a provoqué la formation du giycogène? Si l'on rai- sonne autrement, et mieux, que Kllz, on doit dire : chez 12 poules au 6" jour de jeûne, la quantité maximum du giycogène du foie a été de 0^'",1064 pour 1 kilogramme du poids initial (Tableau VIII, expériences 15 à 36, page 20); tandis qu'après alimentation avec l'inuline ce maximum a été de 0,1329. C'est une augmentation de 25 p. 100; mais j'a montré plus haut que KClz, par ses méthodes, a obtenu des augmentations de 44 p. 100, là où certainement il y avait des diminutions. En tous cas, l'augmentation soi-disant due à l'inuline est, en chiffres absolus, tellement faible qu'elle est dans les limites de l'erreur. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. -- 338 GLYCOGÈNE. Plus loin, Ki Lz croil que l'élhylène f^lycol augmente le glycogène du foie chez le poulet. Pourquoi"? parce que sans éthylène glycol la quantité de glycogène est par kilogramme de 0,1064, tandis que chez les animaux alimentés avec l'éthylène glycol cette quantité est de 0,176. C'est une différence qui, comme dans les cas précédents, est tout à fait dans les limites de l'erreur expérimentale. Partout où KOlz a fait des essais d'alimentation avec d'autres substances que des hydrates de carbone, il n'a jamais constaté dans les proportions du glycogène hépatique que des différences dans les premières décimales, différences qui ne prouvent rien. Nous ne voulons pas dire que ce qu'il a affirmé est erroné : nous disons seulement que ce n'est pas prouvé. il me semble alors qu'on peut tirer profit du grand tableau XVIII de Kllz, où sont consignées les expériences d'alimentation avec le sucre, lequel, d'après Otto, augmente le glycogène, et conclure que, 12 heures après l'injection de sucre, les animaux contien- nent probablement dans leur foie à peu près autant de glycogène que dans le reste du corps. J'ai calculé ces chiffres à cet effet, et je les ai réunis dans le tableau ci-joint. On verra que les hydrates de carbone seuls ont déterminé une accumulation de glycogène. Si l'on déduit de cette quantité la quantité de glycogène qui, d'après Voir, peut dériver de l'albumine, on verra que les hydrates de carbone n'augmenteraient pas la formation de glycogène. Cela prouve que la soustraction de Voit n'est pas justifiée. En faveur de Kulz on peut dire qu'il a encore publié deux importantes séries d'expé- riences sur les lapins qui l'ont conduit essentiellement aux mêmes résultats que les expériences faites sur les poules (tableau XV et XVI). Dans les 62 expériences du tableau XV, avec essais d'alimentation variée, on trouve pour chaque expérience, l'indication exacte de la date et de l'année; mais cette indication manque dans les 13 expériences de contrôle. C'est la même défectuosité que nous avons constatée pour les recherches faites sur les poules. Et pour les mêmes raisons, que j'ai développées en faisant la critique, ces expériences de Kïlz sur les lapins ne sont pas probantes. On ne comprend absolument pas comment Kllz, qui paraît un bon observateur, n'indique nulle part quelles précautions sont nécessaires pour qu'une expérience ait quelque valeur. Lorsque, dans ses expériences d'alimentation, il indique toujours la date, sans aucune exception, et que dans les expériences de contrôle il ne les indique jamais, il donne à penser qu'il a voulu dissimuler dans quelles conditions ont été faites les e.vpériences de contrôle, conditions probablement toutes différentes des expériences d'alimentation, ce qui enlèverait naturellement toute valeur à ces dernières. Il me semble que KïiLz, en faisant un grand nombre d'expériences, a cherché une confirmation à ses recherches sans réfléchir qu' un contrôle certain est toujours nécessaire. Ainsi, par exemple, si les expériences de contrôle ont été faites en été, et les expériences d'ali- mentation en hiver, il y a là une cause d'erreur qui persiste, quel que soit le nombre des expériences. Le nombre des expériences que Kulz a faites sur l'alimentation par les hydrates de carbone et leurs dérivés est aussi considérable que sont incertaines ses conclusions. Et alors on comprend que souvent d'autres expérimentateurs ne soient pas arrivés aux mêmes résultats que Kulz. D'après Voit (Z. B., xxvui, 262), chez une poule, en 8 heures, l'albumine peut donner en moyenne 1,710 de glycogène, et au maximum 4,280. Or, comme Kulz ne tuait ses poules que 12 heures après l'alimentation, il faut, par kilogramme du poids du corps, en moyenne 2,56, et au maximum 0,42 pour le glycogène qui peut être formé par l'albumine. Or le chiffre le plus fort qu'il ait trouvé pour le glycogène nouvellement formé, a été, dans les conditions de calcul les plus favorables, de 2,17 de glycogène, et ainsi disparait toute la certitude de ces recherches. D'après les recherches de Mering (A. (j. P., xiv, 274), contrairement à l'opinion de Kulz, l'inuline, l'inosite, l'érythrite, la quercite ne peuvent pas être rangées parmi les les substances qui forment du glycogène. Les expériences d'alimentation faites avec les pentoses sont du plus grand intérêt, pour savoir si ces sucres véritables peuvent être considérés comme des formateurs du glycogène. Si tel était le cas, il s'ensuivrait que la formation du glycogène ne peut pas être consi- GLYCOGENE. 339 GLYCOGÈNE UVELLEMENT FORMÉ ire excès du glycogène ouvé sur le reste gène pour 1 kil. d'animal, en grammes. f— 00 05 J.O CO 1^ CD CD :-o 0 r- 0 -* (M 05 iO 00 rî 00 r~ 1.0 0 0 ce ;.o -* n- CD LO — — a3t^(M^OO -*^co^«N(?lcooco^co.cocoooooooo.^ i + ll + l + M + !lllll + IM.I + h 30 => 20 ro "M (M t— 05fM-^^ocD!v0^c^îOO'].^a3**^'toa-Go-.rHoo:î^ COl^tO-!l\ 00 (M 0 0 CO CD 00 CDO-*CD-*ClCD(M-*-*CNOOCIOOO-*CDCICl-DOO :-oooooiot— o>t^-*CM05a50ioof^-*LOO=>cooco:.o cot— cor-^cDicoO!JO-r--*!nco05to-*-*i~(Nci Inuline. Lactose interverti. Lactose. Lactose. Galactose. Inosite. Sorbine. Raffinose. Ethylène glycol. Pro])ylène glycol. Krythrite. Quercite. Dulcite. Mannite. Saccharine. Isosaccharine. Anhydride d'acide glycuroniquc. Dextrioate de calcium. Tartrate de Na. Citrate de Na. Gomme arabique. Glycérine. POIUS INITIAL en grammes. C-: -* co -* !0 0 00 0 05 — CI r- co !!0 co -* :o 30 0 f~ — t~ 00 00 c; Cl — . 1— co 0 co Cl CD ~r -* co r^ 1^ GO CI Cl :o 00 :.o 00 co CD — ' -•*• Cl Cl Cl co Cl d co Cl «.-»• -* Cl -* -* co :.o CD ^i- i-o lo :-: -■•r -.•* co ~- ci •sa^.^J:■^Iaa.Ixn_a M H e KO. M r>\ Cl ffl Cl c^ 30 ~t Cl --i" co ~j> co Cl co co -* co 1.0 0 co -* Cl CD 0 oe t~ ■* 340 CLYCOGÈNE. dérée comme une déshydratation ; car la chaîne des atomes de carbone est de six atomes dansleglycogène, et seulement de cinq dans les pentoses. La question a été étudiée par E. Salkowski (C. W., n° 11, 1893), et par M. Cremer (Z. B., XXIX, p. 484, 1891-1892). Salkowski, a expérimenté avec 7 lapins et i poulet nourri avec l'arabinose; les animaux étaient tués 14 heures et demie à 19 heures après l'in- gestion de la dernière quantité d'arabinose, et on trouva des quantités de glycogène variant entre 0,59o et 2,038. Mais, comme les données nous manquent sur les condi- tions de l'expérience, on ne peut en juger la valeur. Cremer admet qu'après nutrition de l'animal avec les pentoses il faut laisser assez de temps s'écouler pour qu'il ne puisse y avoir possibilité d'une formation de glycogène aux dépens de l'albumine. Cremer conclut de ses recherches que les pentoses déterminent une augmentation non douteuse du glycogène de l'organisme. Après une introduction mathématique et philosophique très détaillée qui, d'après lui, est nécessaire pour les fondements théoriques et les méthodes à observer, il expose ses expériences, qui sont tellement défectueuses, qu'elles n'ont aucune valeur démonstrative. Mais, comme néanmoins elles ont passé dans les meilleurs traités classiques, il faut que je justifie mon jugement. 1° Cremer n'a pas fait d'expérience de contrôle pour les lapins et les poulets au point de vue de la durée du jeûne. Il travaillait à Munich, et il veut s'appuyer sur les recher- ches de KClz, ce qui établit déjà une grande incertitude. Mais cette incertitude dépend surtout de ce que les chiffres de Kulz se rapportent au glycogène dépourvu de cendres. <( Je remarque, dit-il {loc. cit., 50o), qu'il est tout à fait inutile pour mes recherches de déterminer le poids des cendres du glycogène; car tous mes chiffres se rapportent au glycogène avec cendres. » KfLz lui-même a rejeté les analy- ses de glycogène dans lesquelles les cendres n'avaient pas été dosées ; car on ne peut pas alors prévoir avec certitude quelle sera l'erreur due aux cendres. En outre, l'analyse des cendres permet jusqu'à un certain point d'apprécier le degré d'impureté du glycogène, impureté qui ne manquera jamais dans le glycogène préparé par les méthodes de Brucke-Kulz. Mais l'analyse des cendres était d'ailleurs nécessaire, parce que Cremer a formulé des conclusions très graves conclusions qu'il fondait sur de toutes petites différences dans les proportions du glycogène hépatique. 2° Cremer a toujours dosé le glycogène du foie, mais jamais celui du reste du corps. Otto ne s'était jamais permis de se priver de cette recherche nécessaire, et il faut tou- jours penser que, dans certaines conditions, le glycogène peut passer des organes dans le foie. 3° Cremer n'a pas envisagé comme, possible que son glycogène nouvellement formé pouvait provenir de l'albumine. Pour faciliter la critique de ces expériences de Cremer, je les ai réunies dans le tableau suivant, et j'ai calculé, d'après les données de Voit, combien de glycogène pouvait, pendant l'expérience s'être formé aux dépens de l'albumine. Au bénéfice de Cremer, j'ai supposé que la quantité de glycogène des organes, quantité non déterminée par lui, était identi- que à celle du foie, comme cela a été établi par les expériences de Otto avec différentes hexoses. Pour calculer le glycogène formé aux dépens de l'albumine, je n'ai pas pris le chiffre maximum de Voit, mais bien le chiffre moyen qu'il donne (voir tableau p. 341). Si l'on examine dans ce tableau la colonne où est indiquée la teneur du foie en gly- cogène, après alimentation avec les pentoses, on voit que partout, excepté dans l'expé- rience VIII, la teneur du foie en glycogène est inférieure à 1 gramme, tandis que, d'après les expériences de Otto, chez le poulet, cette quantité est de 5,37, et, chez le lapin, de 9,27. Les nombres trouvés par M.\x Cremer, pour le glycogène du foie des animaux ali- mentés avec des pentoses, sont si petits, qu'ils eussent été peut-être observés, même si Cremer n'avait pas donné de pentoses à ces animaux. Le temps du jeûne est aussi un temps très limité, car deux fois la durée de l'inanition n'a été que de 2 jours et demi. Même l'expérience VIII, dans laquelle un chiffre très élevé de glycogène a été trouvé (3,102) ne prouve rien; car, chez ce lapin, le foie contenait 4,1 p. 100 de glycogène après 4 jours de jeûne. Or, pour ma part, j'ai trouvé chez un chien, après 28 jours déjeune, sans hexoses, ni pentoses, que le foie contenait encore 4,4 p. 100 de glyco- GLYCOGÈNE. 341 gène. Certes on ne peut prendre un chien comme expérience de contrôle, pour une expérience sur un lapin. Encore cela est-il préférable à l'absence de contrôle, comme c'est le cas pour les expériences de Cremer. Recherches de M. Cremer sur l'alimentation avec des pentoses. — z a o H ? s a X .s rri o < j '■fi ■- a z a a. ^ f: a-^'iï < z r/3 2 Q a a SUCRE INGÉRÉ •a » g o a a < O £, (en grammes) t " •a i^ .=« Si-" ;3 =4 .,0 a- H eu < 'Z Si a -3 O 1 Poule. 1089 1002 12 Xylose. . . 10,16 0,843 1,282 2 1/2 543 =) 1 146 12 Arabinose. 9,88 0,278 1,469 2 1/2 544 3 Lapin. 2 836 12 Arabinosc. 30.0 0,928 4,186 4 544 4 Poule. 1 04:j 12 Rhamnose. 9,973 0,376 1,340 4 550 5 882 12 Rhamnose. 15,0 0,208 1,131 6 550 6 Lapin. 2211 irj Rhamnose. 30,0 0,420 4,078 5 550 7 — 2 67.0 16 Rhamnose. 30,0 0,426 5,264 4 550 8 — 2 470 24 Rhamnose . 30,0 3,102 7,291 4 551 Pour juger ces expériences, un fait important est encore à signaler. Cremer reproche aux expériences de S.\lkowsk[ sur les pentoses, que, par suite de la longue durée de l'ex- périence, on peut admettre qu'il s'est formé du sucre aux dépens des albumines. Or, d'après mes calculs, consignés dans le tableau ci-joint, ce reproche peut parfaitement s'appliquer aussi aux expériences de Cremer. Cremer, en résumant ses recherches, dit que le xylose agit d'une manière positive dans le sens donné par Ki:lz à ce mot sur la formation de glycogène. Mais sa conclusion flnale est moins obscure. « Mes résultats, dit-il, ne peuvent pas nous permettre d'affirmer que la nutrition avec les pentoses pro- duit du glycogène. ■> (Z. B., xxix, 552.) Nous sommes donc complètement d'accord. Que les pentoses n'agissent pas sur la formation de glycogène, soit directement, soit indirectement, c'est un fait qui a été démontré par J. Frentzel, sous la direction de iN. Zdntz, d'une manière tout à fait décisive. Frentzel a institué des expériences sur des lapins dont il faisait disparaître le glycogène par la strychnisation ; il examinait non seulement le foie, mais encore les muscles, employant pour la recherche du glyco- gène la méthode de Fra.n'kel, combinée à celle de Bkûcke-KOlz. Frentzel dit qu'il nourrissait pendant au moms .3 jours ses lapins avec du lait, et les faisait jeûner 24 heures avant l'expérience. La strychnine était injectée sous la forme d'azotate dans une solution contenant 0,1 p. 100 de strychnine. L'injection faite sous la peau provo- quait de vigoureuses convulsions. Dans ces conditions, on peut être sur que tout le gly- cogène de l'animal reste complètement disparu. On doit maintenir l'état de convulsion de l'animal au moins pendant o heures. S'il y a imminence de mort, on fait la respiration artificielle; puis on donne aux ani- maux qui ont ainsi perdu leur glycogène, de l'hydrate de chloral ou de l'uréthane, subs- tances qui provoquent un sommeil qui ne dure pas plus de 12 heures, et, au bout de ce temps, tout le glycogène a disparu. Comme le travail de Frentzel est d'une importance fondamentale et que cependant toutes les précautions nécessaires ne paraissent pas avoir été prises pour affirmer l'absence absolue du glycogène, je priai le professeur ZuNTz, sous la direction de qui le travail avait été fait, de me donner des détails plus exacts : « On doit, m'écrit-il, ne jamais quitter des yeux, pendant 5 heures, l'animal qui a des convulsions, et il faut faire la respiration artificielle par la compression du thorax, dès qu'on voit s'arrêter les mouvements respiratoires. Quelquefois l'intoxication stry- 342 GLYCOGÈNE. chnique doit être poussée si loin, que la respiration arlificielle est nécessaire. Cepen- dant, même alors, Frentzel a perdu plus de la moitié de ses animaux, parce qu'ils ne pouvaient plus être rappelés à la vie, après une violente convulsion. On fera bien de donner la strychnine simultanément à trois animaux, et de faire l'excitation de l'ani- mal par le pincement de ses orteils, ce qui réussit à provoquer des convulsions, même quand l'animal a reçu peu de strychnine. Il faut en outre qu'avant l'expérience les animaux reçoivent, au moins pendants jours, une alimentation avec du lait, et que, pendant 1 ou 2 jours ils soient à l'inanition avec intestins vides. Les recherches ont été pratiquées par l'ancienne méthode de KiiLz. » {Lettre inédite de N. Zuntz du 15 janvier 1903.) Pour appuyer les affirmations de Frentzel, j'ai fait remarquer qu'en 1879 F. Rosen- BAUM, qui travaillait sous la direction de R. Bôhm, avait fait disparaître par l'intoxication strychnique le glycogène du foie et des muscles (Diss. Dorpat, 1889). Plus lard, Her- OEMHAHN, sous la direction de Kulz, a fait des recherches de ce genre sur les grenouilles ^t les lapins, et il a réussi à faire disparaître complètement le glycogène du foie et des •muscles. Pour le dosage il se servait de la méthode de BRiicKE-KiiLz. « L'empoisonne- ment par la strychnine, dit Kilz [loc.cit., p. 53), est le seul moyen qu'on possède jusqu'cà ce jour pour faire disparaître chez des lapins, en peu d'heures, le glycogène hépatique et le glycogène musculaire. Et cette méthode convient, à cause de la rapide dispa- rition du glycogène, et aussi parce que la strychnine n'amène pas des changements anatonio-pathologiques compliqués du foie, comme le phosphore, le chloroforme et l'arsenic. » Comme Frentzel communique une série de recherches dans lesquelles les lapins -slrychnisés étaient absolument dépourvus de glycogène, il faut admettre qu'il a pris les précautions nécessaires pour être maître de son expérience. Puis il a montré que ces animaux sans glycogène forment du glycogène quand on leur donne du glycose, et il a trouvé, pour ce glycogène, des valeurs de 4,166; 4,166; H, 100 (A. g. P., Lvn, 28o). Gomme ce glycogène, d'après les recherches d'Oiro, est dû au sucre ingéré, on voit que la strychnine n'a pas paralysé le travail synthétique de la cellule hépatique, et alors on ne comprendrait pas pourquoi les pentoses, s'ils sont formateurs de glycogène, ne donneraient pas, dans ces conditions, du glycogène à l'animal strychnisé. Or le xylose, donné k des animaux sans glycogène, n'a provoqué, ni dans le foie n! ■dans les muscles, de dépôt de glycogène. Frentzel croit donc avoir démontré » que le xylose n'est pas capable de produire du glycogène dans le corps des lapins ou même d'un corps analogue au glycogène et possédant les mêmes réactions caractéristiques » (p. 288). Il conclut avec raison que le xylose n'est pas d'une manière positive en état de déterminer l'accumulation de glycogène dans le corps, ni même de provoquer la for- mation de glycogène, en diminuant l'oxydation des substances mêmes qui forment le -glycogène, par exemple, de l'albumine. Les recherches de Frentzel sont d'autant plus intéressantes, qu'il s'agit du xylose, c'est-à-dire d'un sucre véritable, très peu différent du glycose par sa constitution chi- mique, et cependant ne pouvant pas être transformé en glycogène par le foie. Après Frentzel, Salkowski a repris la question du rôle des pentoses, dans la forma- tion de glycogène, et il croit avoir constaté que l'alimentation avec l'arabinose a aug- menté légèrement le glycogène du foie. Mais son travail manque d'expériences de contrôle; car il se contente d'admettre qu'une poule, après 4 jours de jeûne, et qu'un lapin, après 5 ou 6 jours de jeûne, ne contiennent plus que des traces de glycogène. Or, d'apiès les analyses de E. KiiLz, le foie d'un lapin, au sixième jour déjeune, contient ■encore, au minimum, 0,1026, et au maximum, 0,3291 de glycogène. Da plus, des animaux soumis à des conditions d'existence différente ne se comportent 43as de la même manière. C'est doue tout à fait arbitrairement que Salkowski prétend que la nutrition par les pentoses augmente le glycogène du foie. Il reconnaît, à la vérité, que cette légère augmentation ai glycogène peut être attribuée à la désassimi- lation de l'albumine; car il croit avoir montré que la plus grande partie de l'arabinose ingéré a été employée par l'organisme, de telle sorte qu'il y a eu une épargne dans la ■consommation du glycogène hépatique. glyCogène du foie DE l'animal témoin poiir 1 kil. du poids du corps à la fin de l'expérience, En grammes. 1 O.HOO 2 0.1725 3 0.2530 4 0.0540 5 0.0540 GLYCOGÈNE. 343 En tout cas, Cremer, Frentzel et Salkowski s'accordent à reconnaître que les peiitoses ne forment pas de glycof^ène. Aux substances que l'on peut considérer comme formant du glycogène, à cause de leurs groupements atomiques H C 0 H., appartient la glycérine, qui, hors de l'orga- nisme, peut être transformé, par une oxydation partielle, en sucre véritable et parti- culièrement en hexose. Van Deen a, le premier en 1861, essayé d'établir que la glycérine est formatrice de glycogène (Arch. f. die hôllandischen Beitrâge, m, 2"> et 61, et Tydschrift voor Genceskundf , 1861, 67); mais G. Meissner a montré clairement la défectuosité de ces recherches, et il est inutile d'y revenir {Henle Meissner' s Jnhreshericht fur 1861, 289, et 1862, .319). Mais en 1873, Sigmund Weiss (AA;. W., lxvii, (3), 1873, 5) a fait sur ce point des recherches de plus grande importance. Il a expérimenté sur des poules qui, par une alimentation appropriée, ou l'inanition, étaient réduits à un minimum de glycogène. Puis il les a nourries avec la glycérine, et, après la mort, a déterminé la quantité du glyco- gène hépatique. A chaque expérience d'alimentation, il a joint une expérience de contrôle. Le résultat de ses expériences est présenté dans le tableau suivant. GLYCOGÈNE DU FOIE DE l'animal ' nourri à la glj'cériue pour 1 kil. du poids du corps à la fin de l'expérience. En grammes. 0.9804 1.3G30 1.2540 1.9730 0.5750 Ainsi, dans le foie des animaux nourris avec de la glycérine, on trouve cinq à six fois plus de glycogène que dans le foie des animaux de contrôle. JLuchsinger a confirmé les résultats de Weiss. Il apporta quelques expériences rela- tives aux poulets et aux lapins, en comparant le glycogène des muscles et celui du foie, Mais il a trouvé moins de glycogène dans le foie. Les analyses de Weiss et de Lughsinger parlent donc en faveur de cette opinion que la glycérine augmente le glycogène du foie. Weiss et Lughsinger ont extrait le glycogène par l'eau bouillante, et l'ont dosé en se servant comme indicateur, de la cessation de la réaction glycogénique. Or les recher- ches de Pavy {the Phijsiol. of the carbohydrates, 1894, pp. 123 et 125), de KOlz (Z. B., 1886, xxii, 194) et de Nerking {A. y. P., lxxxi, 29 et 33; lxxxv, 318; 1900-1901) ont montré que, par ce procédé, on n'obtient qu'une partie du glycogène. Si donc la glycérine exerce quelque intluence sur le ciiimisme du foie, il n'est pas impossible qu'elle facilite l'extraction du glycogène par l'eau. En outre ces expérimentateurs ne dosaient que le glycogène hépatique, et laissaient de côté celui du reste du corps. Il est assurément vraisemblable que dans ce cas l'augmentation du glycogène hépa- tique ne soit pas dû au départ du glycogène du reste du corps. Mais ce n'est pas une certitude; et par conséquent les expériences ne sont pas démonstratives. Enfin, il faut tenir compte de la correction de Voit. Comme une poule en huit heures peut faire, dans le foie, aux dépens de l'albumine, 0,855 de glycogène; et qu'il y a un intervalle de 25 heures entre le moment d'ingestion de la glycérine et le moment où l'animal a été sacrifié, il peut s'être formé 2,465 de glycogène dans l'expérience de W^Eiss, sans qu'il soit nécessaire de les attribuer à la glycérine. Cela suffit pour enlever toute valeur démonstrative à toutes ces recherches. D'après Seegen (A. y. P., xxxix, 138 et suiv.), la teneur en sucre d'une bouillie hépa- tique augmente quand on lui ajoute de la glycérine. Seege.n en conclut que c'est la glycérine qui s'est changée en sucre, mais il n'établit pas que le sucre ne peut pas pro- venir d'une autre origine. KOlz a aussi cherché à connaître à quel point la glycérine est 344 GLYCOGÈNE. capable d'agir sur la formation de glycogène, et il donne 4 expériences sur des poules, an sixième jour de jeûne. Le poids moyen de ces poules est de 1 220 grammes. La teneur moyenne en glycogène de ces 4 foies, est, 12 heures après l'injection de glycé- rine, de 1,075. Par conséquent, tm kil. de poule contient 0,881 de glycogène. Or, d'après Voit, en 12 heures, l'albumine peut en former 1,282. Et encore ne prenons-nous point le glycogène du reste du corps, et calculons-nous le glycogène pouvant provenir de l'albumine d'après les chiffres moyens, et non d'après les chiffres maxima de Voit. Mais, si l'on se dit que la correction de Voit est certainement injustifiée, le fait restera assez probable que la glycérine est une des origines du glycogène; car, par une oxydation modérée et formation d'aldéhyde, il peut y avoir, sans déshydratation, formation d'une molécule de dextrose aux dépens de 2 molécules d'aldéhyde. M. Gremer [Ergebn. der Physiol., i, 889 (1903) et H. Lùthye {Deutschei^ Arch. klin. Med. lxxx, 98 (1904) ont prouvé que la glycérine augmente le sucre chez les chiens diabétiques dans une proportion extraordinaire. — J'en parlerai plus tard. Formation de glycogène aux dépens de Talbumine. — Ainsi on s'accorde à reconnaître que ce sont avant tout les hydrates de carbone qui donnent naissance au glycogène, et cependant ce ne sont pas toutes les sortes d'hydrates de carbone qui peuvent être par le foie transformés en glycogène, puisque des sucres véritables, comme le saccharose, le lactose et les pentoses, ne donnent pas de glycogène. Si donc la cellule hépatique ne peut pas faire du glycogène avec de véritables hydrates de carbone, il serait assez extraordinaire que des substances dont la constitution chimique est absolument différente de celle des hydrates de carbone puissent donner du glycogène. Nous savons aujourd'hui que certaines matières albuminoïdes, comme la caséine, ne contiennent pas d'hydrate de carbone dans leur molécule, pendant que d'autres subs- tances, qui sont dites aussi albuminoïdes, contiennent des hydrates de carbone qui leur sont combinés. Ces substances, qu'on appelle les glyco-proléines, peuvent donc être envisagées comme formatrices de glycogène; car elles sont capables de fournir par leur dédoublement plus ou moins de sucre. Nous aurons donc à rechercher s'il est des cas dans lesquels l'élimination du sucre dans la glycosurie est due aux glycoprotéines. C'est d'ailleurs la même question qu'il faut se poser pour toutes les substances qui parais- sent produire du glycogène, Claude Bernard, qui a découvert le glycogène, pensait qu'il provenait de l'albumine. Il a montré que le foie d'un chien, nourri longtemps avec de la viande, contenait beau- coup de glycogène, et il croyait que, dans cette viande servant à l'alimentation, il )i'y avait ni sucre ni glycogène. D'ailleurs, d'après lui, dans l'alimentation carnée, il n'y a pas de sucre dans le sang de la veine porte, mais seulement dans le sang des veines hépatiques, et il en est ainsi chez les animaux en inanition. Mais nous savons aujourd'hui qu'il y a du glycogène dans toutes les viandes. Par conséquent l'opinion sur laquelle se fondait Claude Bernard n'était pas exacte et son expérience, ainsi que l'a démontré KiJLz, n'était pas démonstrative {Beit)'. zur Kenntniss des Glykogenes, 1891, 9). Plus tard, Claude Bernard nourrissant des larves de mouches avec de l'albumine cuite et de la viande lavée, a montré qu'elles fournissent de grandes quantités de glycogène (Leç. sur le diabète, 1877, 464). Or je rappellerai d'abord les faits suivants : c'est que l'albumine de l'œuf d'oiseau contient du sucre. Finn donne, comme moyenne de 25 ana- lyses pour l'albumine de l'oeuf de poule, de 0,08 à 0,09 de glycose {Exp. Beitràge zur Glykogen und Zuckerhildung in der Leber. Diss. Wurzburg, 1877, p. 22). Meissner {Zeitsch. f. rat. Med., (3), vu, 12) donne 0,23. Lehmann, {Lehrb. d. physiol. Chemic, 1853, i, 271), Salkowski (C. W., 1893, n» 30), Barreswill {Journ. f. prakt. Chemie, L, 134) sont arrivés aux mêmes résultats. KiiLz a examiné avec soin la question et repris les expériences de Bernard, 72 grammes d'oeufs de Musca vomitoria furent partagés en deux parties égales. Dans une portion, on rechercha le glycogène par la méthode de Brucke, et le résultat fut négatif. Quant à l'autre portion, Kulz la laissa plusieurs jours dans un verre avec du blanc d'œuf cuit et divisé en petits fragments. Il ne réussit pas à obtenir ainsi des proportions pondérables d'une substance chimique pure ayant les propriétés du glycogène. En répétant plusieurs GLYCOGÈNE. 345 fois l'expérience avec des quantités plus considérables, il n'arriva à obtenir qu'une petite quantité de glycogène impur. Pour savoir si les larves de mouches contiennent du glycogène, Kïilz a recherché le glycogène, d'après la méthode de Brucke, sur 239 grammes de ces larves, nourries sur de la viande de cheval. Les larves furent bouillies avec de la potasse. Le précipité par l'alcool, lavé et séché, fut dissous, filtré, et le filtrat fut précipité de nouveau par le réactif de Brucke; puis toute l'opération fut recommencée. Dans ces conditions, Kulz a obtenu 0,42 grammes de glycogène à peu près pur, et ces expériences furent recom- mencées en nourrissant' les larves sur de la viande. Le glycogène chimiquement pur obtenu alors servit à l'analyse élémentaire et à la détermination du pouvoir rotatoire spécifique. Par conséquent, Kulz a confirmé les recherches de Bernard; mais il faut remarquer que la viande contient des hydrates de carbone, et spécialement du glycogène, lequel ne peut pas être éliminé complètement par le lavage, quoi qu'en ait supposé Claude Berxard. En effet Bôhm, et surtout Richard Kulz, ont prouvé que, ni le lavage, ni même l'ébul- lition ne pouvaient enleser complètement le glycogène des organes. Si donc les larves ont du glycogène qui s'accumule dans leur organisme, cela peu s'expliquer parce qu'elles empruntent ce glycogène à la viande : il n'y a donc pas de raison de supposer que l'albuminoïde de la viande est l'origine de ce glycogène. Kulz a répété encore ses recherches en faisant vivre oO grammes d'œufs de mouches sur de l'albumine; celles-ci se développèrent lentement et irrégulièrement, et finalement on obtint Os"',03 de glycogène. Mais comme avec le blanc d'œuf il y avait du sucre, il n'y a pas de raison pour supposer que la petite quantité de glycogène trouvée ne provient pas du sucre et des hydrates de carbone contenus dans l'albumine. Pour pousser plus loin l'étude de cette influence de l'albumine et de l'amidon sur la formation du glycogène, Claude Bernard (9 décembre 1858) a nourri deux chiens de races différentes qui avaient été soumis à 8 jours de jeiine, un chien-loup avec de la fibrine, et un chien de chasse avec de l'amidon. Le chien-loup augmenta de poids, tandis que le chien de chasse diminua {Leç. sur le diabète, 1877, 541). Mais, quand un animal comme le chien-loup est soumis à une alimentation albuminoïde (fibrine) assez abon- dante pour qu'il augmente de poids, l'échange interstitiel n'est plus certainement déter- miné que par l'albumine, et toutes les graisses et hydrates de carbone du corps ou de l'alimentation cessent d'être consommés. Si donc le chien loup, au 8*^ jour de jeûne, quand on a commencé à le nourrir avec de la fibrine, avait encore du glycogène dans son foie, c'est que le glycogène était resté dans son foie sans avoir été consommé. Et en effet il est probable qu'il y avait encore du glycogène dans le foie ; car chez un gros chien, au 28^ jour de jeûne, i'ai pu encore extraire 22 grammes de glycogène du foie. On trouve dans la littérature maints exemples qui montrent que le foie d'un chien, au Séjour de jeûne, non seulement n'est pas dépourvu de glycogène, mais encore qu'il en contient des quantités considérables. Il n'est donc pas surprenant que ce chien-loup, après alimentation avec de la fibrine, ait encore du glycogène dans le foie. On peut même concevoir non seulement qu'il ne s'est pas formé de nouveau glycogène; mais encore qu'il y a eu une notable diminution du glycogène existant. Quant au chien de chasse, son poids avait diminué, et par conséquent il avait vécu aux dépens de ses propres tissus. Or, dans ce cas, les combustions organiques se font aux dépens de la graisse et des hydrates de carbone, et, si l'amidon introduit produit du glycogène dans le foie, ce glycogène a dû être immédiatement consommé. En faisant l'extrait atiueux du foie de ces deux chiens, Claude Bernard a vu que chez le chien-loup il y avait du glycogène, tandis qu'il n'y en avait pas chez le chien de chasse; car, dit-il, 'extrait hépatique du chien nourri avec de la fibrine avait une forte opalescence, tandis que l'extrait hépatique du chien nourri à l'amidon n'avait qu'une opalescence faible. Il est possible que Bernard ne se soit pas trompé. Il est cependant certain qu'après des décoctions répétées le foie finit souvent par donner des extraits qui ne contiennent presque plus de glycogène et qui cependant ont encore une forte opalescence. Il est remarquable de voir que c'est en 1877 que Bernard communique cette expérience faite 3i6 CLYCOGÈNE. en 1858 : il ajoute : « Ce résultat semble indiquer que l'organisme animal ne peut pas former du glycogène avec un corps ternaire seul, mais qu'il le peut avec des substances plus complexes comme la fibrine. » Il a donc maintenu son opinion première, mais il est dans l'incertitude; car dans le même ouvrage il dit : « La matière sucrée sortant de l'intestin est en partie retenue dans le foie sous forme de glycogène. Nous reviendrons sur cette sorte de métamor- phose régressive parce que c'est là un des phénomènes les plus intéressants pour la physiologie générale, en ce sens qu'il rapproche la nutrition chez les animaux de la nutrition chez les végétaux. Il explique pourquoi on trouve chez les animaux nourris avec des féculents une plus grande porportion de glycogène que chez les animaux nourris exclusivement à la viande. » Quoique cette déclaration ne laisse aucun doute sur l'opinion de Claude Bernard que le sucre est une des origines du glycogène, cependant, en d'autres endroits de sou livre, il s'exprime en des termes qui montrent bien l'hésitation de son opinion [Leçons sur le dia- bète, 1877, p. 424). « Dans l'état physiologique cependant nous avons constaté que le sucre favorise la formation de la matière glycogène, soit en se fixant directement dans le foie après déshydratation, soit indirectement, par une sorte de théorie d'épargne, admise par certains auteurs, d'après laquelle l'organisme recevant du sucre garderait en réserve le glycogène qu'il forme dans le tissu hépatique. « Nous arrivons maintenant aux expériences de Stokvis {Bijdragen tôt de Kennis van zuckervorming in de lever. Diss. in., Amsterdam, 1856). Il a nourri un chien avec de la viande de cheval, et recherché ensuite le sucre du foie. Mais, comme la viande de cheval est riche en glycogène, cela suffit pour expliquer d'une manière très simple la présence du sucre dans le foie. Stokvis n'avait pas pu constater de sucre dans la viande, et il croyait, par conséquent, qu'il n'y avait pas d'hydrates de carbone dans la viande; ce qui est excusable; car, lorsqu'il faisait ses recherches, le glycogène musculaire n'avail pas été découvert encore. TscHERiNOW [Ak. W., (1 et 2), li, 186o, 412; et A. A. P., 1869, xlvii, 102) a fait des expériences dans le laboratoire de Bruckïï, à Vienne, sur quatre poules qui avaient jeûné 2 jours, et dont les unes furent nourries avec de la fibrine et de la graisse; les autres avec de la viande. Chez les animaux nourris à la fibrine, il trouva dans le foie 0,14 et 0,38 de glycogène. Mais, comme KiJLz {Beitràge zur Kenntniss des Glykogenes, 1891, 9) a trouvé chez les poules, au 6^ jour de jeune, 0,95 p. 100 de glycogène, on voit que ces expériences ne prouvent pas que ce glycogène trouvé par Tscherinow [provienne de l'albumine. Chez les poules nourries avec de la viande, Tscherinow a trouvé de 1,06 à 1,71 p. 100 de glycogène, par conséquent un peu plus qu'au G'' jour de jeune. Mais, comme la viande servant à l'alimentation contenait certainement du glycogène, on peut facilement comprendre pourquoi, dans ce cas, le glycogène du foie a légèrement augmenté. D'ailleurs, Tscherinow ne s'explique pas nettement sur le rapport entre l'ali- mentation albuminoïde et la formation du glycogène. Aussi bien Schôndorff {A. g. P., Lxxxii, 65) a insisté sur l'imperfection des méthodes qui ont servi à Tscherinow pour doser le glycogène, et il n'est pas intéressant d'y revenir. KuLZ a cité les expériences faites par Sigmund Weiss [Ak. W., (3), li, 5) sur des poules, dans le laboratoire de Bruke, comme prouvant que le glycogène provient de l'albumine. Weiss a nourri pendant 10 jours ses poules avec de la viande de veau, de telle sorte que chaque poulet recevait de 250 à 330 grammes. Comme il faut supposer que cette viande contenait du glycogène, de grandes masses de ce glycogène devaient s'accumuler dans le foie, car toutes les combustions des substances autres que l'albu- mine disparaissent quand la matière albuminoïde est donnée en excès. Après cette nutri- tion avec la viande, Weiss nourrit ses poulets pendant 5 jours avec de la fibrine. Or, si la quantité avait été suffisante pour couvrir les besoins de l'organisme, le glycogène amassé dans le foie à la suite de l'alimentation précédente par la viande devait rester sans diminution. Mais comme, par l'alimentation avec fibrine, les poules diminuèrent de poids, du glycogène a dû être consommé, si bien que, dans 6 expériences, 5 jours après l'alimentation avec la fibrine, on ne put trouver dans le foie que de petites quantités de glycogène. Les maxima furent 0,214, et, une fois, 0,301 (p. 12). C'e'tait sans doute le glycogène résiduel déposé pendant la période de l'alimentation abondante avec GLYCOGENE. 347 la viande. Pourtant, d'après KiiLZ {loc. cit., p. 20, tabl. VIII), les poules au 6* jour d'ina- nition ont encore 0,1788 de glycogène dans le foie. F. W. Dock (A. g. P., v, 576) rapporte que, chez des lapins, au 2<= jour de jeûne, aprrs ingestion de 90 grammes de blanc d'œuf, il n'y avait plus trace de glycogène hépa- tique, quand l'animal était sacrifié 6 heures après la dernière ingestion. Ki'Lz a trouvé chez 10 lapins, au 6'' jour de jeûne, que le foie contenait toujours de 0,33 à 0,90 p. 100 de glycogène, ce qui répond au chiffre absolu de 0,1026 à 0,3283. Nouvelles preuves pour établir les grandes différences individuelles dans les proportions du glycogène hépa- tique. D'ailleurs on ne peut par une expérience unique décider de questions si impor- tantes. LucHsiNGER (A. g. P., VIII, 292) fit jeûner une poule un jour et demi. Le poids tomba à 1235 grammes; alors il fit ingérer à l'animal pendant 2 jours de la viande de veau finement hachée avec une quantité de 2.")0 grammes par jour. Le poids monta à 1280 grammes, puis l'animal reçut pendant 5 jours 125 grammes de fibrine précipitée, lavée par le chlorure de sodium. Le poids de l'animal tomba à 1 200 grammes, ce qui prouve que la nutrition était insuffisante, et ce qui explique pourquoi la petite quantité de glycogène qui était restée dans le foie a pu disparaître. On n'en trouva, en effet, que des traces impondérables : quelques cellules seulement donnèrent la réaction de l'iode- On ne peut donc pas prendre ceite expérience pour prouver que l'albumine ne fait pas du glycogène; elle ne prouve rien. Naunyn (A. P. P., 1875, m, 93), chez des poules nourries avec de la viande cuite, mais qui, auparavant, n'avaient pas, par l'inanition, été rendues pauvres en glycogène, a trouvé dans le foie et dans les muscles les mêmes quantités de glycogène qu'on doit trouver chez les poules qui sont traitées sans alimentation pendant C jours. Or KOlz et Frerichs [loc. cit., 1891, 10) ont prouvé que la viande dont se servait Nau.nyx pour alimenter ses poules n'était pas privée de glycogène, comme celui-ci l'avait admis. Naunyn avait fait bouillir la viande pendant 14 jours; et montré qu'une coction même plus prolongée ne suffit pas pour enlever le glycogène (A. g. P., 1900, lxxxi, 636). Ainsi que Kulz le fait remarquer, il n'y a dans les recherches de Naunyn qu'une seule expérience dans laquelle la teneur du foie en glycogène, teneur qui est de 3,5 p. 100, dépasse celle du foie des animaux en inanition. Kulz considère cette expérience comme décisive : ce que je conteste; car, parmi les poules qui n'avaient été soumises à aucune privation d'aliments avant l'alimentation par la viande, quelques-unes avaient peut-être un foie contenant 10 p. 100 de glycogène. Une fois nourries avec la viande, es poules doivent avoir des combustions qui se font complètement aux dépens de l'al- bumine, de sorte que le glycogène accumulé et la graisse n'étaient pas attaqués. Or, précisément, cette poule qui avait 3,5 p. 100 de glycogène dans son foie fut gavée avec de la viande. Donc, si même une des poules de Naunyng, au moment où ou la sacrifia, avait eu 10 p. 100. de glycogène dans son foie, cela ne prouverait pas que le glycogène vient de l'albumine. Je ne crois pas nécessaire d'indiquer encore d'autres défectuosités des recherches de Naunyn, sur lesquelles KOlz a attiré avec raison l'attention. Sous la direction de C. Voit, S. Wolffberg a essayé de prouver qu'une alimentation alhuminoïde accumule le glycogène dans le foie. Comme ce travail a reçu dans le public médical un accueil particulièrement favorable, je suis doublement forcé de mettre en lumière ses défectuosités et de justifier mon jugement. 1° WoLi-FBERG a nourri avec de la viande des poules qui avaient jeûné 2 jours, et qu'il estimait être alors dépourvues de glycogène (Z. B., 1876, xn, 277). '< On prend, dit-il, de la viande de cheval, maigre et rigide, que l'on découpe en tranches, et dont on élimine avec soin toutes les parties non charnues : les tranches sont séchées à l'étuve, puis broyées dans un mortier, de manière à former une poudre fine. Nous savons que cette poudre, à cause de sa réaction fortement acide pendant la dessic- cation, ne contient pas d'hydrates de carbone. Voit a souvent employé une poudre ainsi préparée pour ces recherches. » Or j'ai souvent fait des analyses de -la viande de cheval acide, et j'y ai trouvé de 1 à 2 p. 100 de glycogène. Kûlz (Beitr., etc., p. 13) a, dans des recherches spéciales, prouvé que la viande traitée suivant les indications de' Wolffberg contient toujours encore du glycogène. Son observation est d'autant plus 348 GLYGOGÈNE. importante qu'il a employé pour cette contre-épreuve de la viande de bœuf, et une fois seulement de la viande de cheval. Or la viande de cheval est caractérisée par son extrême richesse en glycogène. Kulz [Beitr., Z. Kenntniss des Glijcogenes, 13, tabl. IV, 1901) a donné, dans le tableau suivant, le résumé des expériences qu'il a faites pour contrôler les expériences de Wolffberg. ORIGINE ET PRÉPARATION POIDS TENEUR EN GLYCOGÈNE ^g Ig^ de la (sans cendres) POUDRE DE VIAXDE de ta En grammes. poudre de viande P. 100. POUDRE DE VIANDE 1 . Poudre de viande de cheval préparée à l'In- stitut lîhjsiologique et traitée exactement suivant les indications de Wolffberg. . . 50 0,097 2. Viande maigre (de vache), hroyée par la ma- chine à viande, étalée au soleil séchée et pulvérisée 30 0.055 3, Viande du même animal coupée en fines tranches, séchée au soleil (comme dans l'esp. Il) et hroyée au mortier 30 0.134 4, Viande de bœuf sans tendons et sans graisse, coupée en petits fragments, séchée au soleil et broyée au mortier 32 0.302 Comme Wolffberg donnait une viande contenant du glycogène en quantité suffisante pour faire augmenter le poids de ses animaux, et que, d'ailleurs, les quantités de glyco- gène trouvées étaient faibles, ne dépassant pas ce qu'on peut trouver chez des animaux en inanition, on peut bien en conclure que le glycogène du foie ne provenait pas do l'albumine de l'alimentation, mais du glycogène qui se trouvait dans leur alimentation. KiiLz a, chez des poules à jeun depuis 6 jours, trouvé 1 p. 100 de glycogène dans le foie. Les poules de Wolffberg avaient en glycogène hépatique une fois de 1,56 1,43'p. 100 (Z. B., XII, 278); mais elles n'avaient jeûné que 2 jours avant l'alimentation carnée, et, par conséquent, elles devaient avoir plus de glycogène encore que les poules de Kulz, toutes réserves faites sur le glj'cogène introduit par l'alimentation carnée. 2° Dans les recherches de AVolffberg, on ne trouve pas d'expériences pour établir combien il y a de glycogène dans le corps des poules après 2 jours de jeiÀne, dans les conditions de son expérimentation. Cependant un contrôle est toujours nécessaire, quand l'alimentation dont on étudie l'influence n'accumule pas de très grandes quan- tités de glycogène. 3° Une plus grave cause d'erreur dépend de la méthode que Wolffberg a employée pour doser le glycogène (Z. D., xii, 277). Les reproches que KiiLz (E. Kulz Jubllac- iimschrift, 14) lui a adressés sont justifiés; mais ils ne suffisent pas; car il ne fait pas remarquer que Wolffberg s'est contenté, pour obtenir ses extraits glycogéniques, de faire bouillir le foie et les muscles jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'opalescence. En procédant ainsi, Wolffberg perdait une grande partie de glycogène, car la potasse est nécessaire pour extraire la totalité du glycogène des organes. Les chiffres analytiques de Wolffberg sont donc absolument inexacts. 4° Wolffberg (Z. B., xii, 301) a essayé de donner une preuve directe en partant de ce fait, démontré rigoureusement (?), dit-il, par Pettenkofer et Voit, que les hydrates de carbone dans l'organisme ne se transforment pas en graisse. D'après Voit et Wolffberg, ils empêchent la combustion de la graisse ou des hydrates de carbone dérivés de l'albu- mine. A cet effet, Wolffberg a nourri des poulets après 2 jours d'inanition avec du blanc d'œuf et du sucre. Dans la première série d'expériences, chaque jour la même quantité d'albumine d'œuf était donnée, mais les quantités de sucre ingéré allaient croissant. Il a trouvé alors que le foie contenait d'autant plus de glycogène que l'animal avait reçu plus de sucre. Mais cela ne prouve pas que le glycogène doive avoir eu l'albumine pour origine. L'expérience même n'est valable que si elle est disposée en séries. D'après tout ce que nous savons, cette série d'expériences prouve que le glycogène vient du sucre et non GLYCOGÈNE. 349 de Valbumine. Dans le 2* groupe d'expériences, les poules sont nourries avec la même quantité de sucre, mais avec des quantités d'albumine allant en croissant. Or, dans ces conditions, la quantité du glycogène hépatique, allait aussi en croissant légèrement. Or, comme les échanges portent sur l'albumine d'autant plus qu'on en a ingéré davan- tage, il est clair que la combustion du sucre est diminuée d'autant plus qu'il y a eu plus d'albumine ingérée, et ce sucre peut servir à l'accumulation du glycogène dans le l'oie. D'ailleurs, en augmentant l'ingestion de viande, on introduit avec la viande de plus en plus de glycogène. Ainsi le glycogène du foie dérive certainement du siic7'e, et non de Valbumine. Mering a, comme Claude Bernard, laissé les chiens jeûner pendant longtemps, et ensuite il les a nourris plusieurs semaines, et même plusieurs mois, avec de la viande de cheval, [A. g. P., 1877, xiv, 274). Au moment où on les a sacrifiés, leur foie était très riche en glycogène. Mais, comme un kilo de viande de cheval contient de 10 à 20 grammes de glycogène, et comme cette alimentation carnée entraîne la prépondérante combus- tion des albumines, il s'ensuit qu'il y a épargne des graisses et des hydrates de carbone qui peuvent alors se tixer dans le foie, ce qui explique les résultats de Mering, et ne prouve rien pour l'origine albuminoïde du glycogène. Mering, au IS*^ jour de jeûne, a nourri un chien avec le blanc d'oeuf de 20 oeufs, additionnés de 3 grammes d'extrait de viande. Le foie contenait 4,96 de glycogène. Or j'ai montré qu'au 28'' jour de jeûne un chien peut avoir encore 22,5 grammes de glycogène dans son foie {A. g. P., 1902, xci, 119). En outre, aujourd'hui, nous savons que l'albumine des œufs contient du sucre libre et du sucre combiné et que l'extrait musculaire contient du glycogène. Enfin Mering {A. g. P., xiv, 274) donne une expérience qui, à première vue, est écla- tante. Au 21* jour de jeûne, un chien reçoit par jour 4 à 500 grammes de fibrine de bœuf, avec 4 grammes d'extrait de viande. Le poids du corps du chien est de 17, 520 grammes. Le foie pesant 540 grammes contenait 16, 3 grammes de glycogène, soit 3,02 pour 100. Un animal servant de contrôle, et de poids à peu près égal, n'avait, au 21« jour de jeûne, que 0,48 de glycogène hépatique. KûLz reproche au travail de Mering qu'il ne soit pas dit si le glycogène obtenu a été redissous après dessiccation et si le poids des cendres a été déterminé. En outre, mes recherches ont montré que le glycogène précipité par la méthode de Brucke contient encore de grandes masses d'albumine, ce qui est une grave cause d'erreur. Enfin, si l'on ne prend qu'une petite portion du foie, les calculs qu'on fait ensuite multiplient l'erreur, de sorte qu'on conclut à de grandes masses de glycogène, alors qu'en réalité on n'en a obtenu que peu. 11 est regrettable que Mering n'ait pas répondu à ce desideratum par des analyses plus exactes. En tout cas, on doit remarquer que la lîbrine est peut-être un glycoside, et qu'elle retient mécaniquement du glycogène. KuLz reproche encore à Mering l'incertitude qui résulte du petit nombre d'animaux de contrôle servant d'expériences, alors qu'il aurait dû expérimenter sur un bien plus grand nombre. Le chien de Mering, au 21® jour de jeûne, n'avait dans son foie que la 34* partie du glycogène que contenait le foie de l'animal nourri à l'albumine. Mais, sur un chien de Pflùger qui avait jeûné plus longtemps, c'est-à-dire 28 jours, et qui pesait 33,6 kilogrammes, le foie contenait 22,5 grammes de glycogène répondant à 4,43 p. 100, c'est-à-dire beaucoup plus que le chien de Mering [A. g. P., 1902, xci, 119). Donc, puisque au bout d'un long jeûne il y a encore de si grandes différences dans les proportions de glycogène d'un animal à l'autre, on ne peut que trouver absolument justifié le reproche que Kulz fait à Mering. Dans une autre expérience, Mering a donné à un lapin, pendant 36 heures, 24 grammes de peptone, et il a trouvé dans le foie 0,56 grammes de glycogène. Mais ce qui est extraordinaire, c'est que nous ne trouvons pas indiqué combien de temps, avant cette ingestion de peptone, l'animal avait été soumis au jeûne. Par conséquent, cette expérience est sans valeur. Pourtant Mering conclut ainsi (A. g, P., 1877, xiv, 282) : « Il ne peut y avoir de doute qu'après l'alimentation avec des alburainoïdes le glycogène s'accumule dans le foie, comme cela avait été prouvé il y a vingt ans, par Claude Bernard et Stokvis. » 350 GLYCOGÈNE. Mais pour les raisons que nous avons développées, les recherches de Mering n'ont aucune valeur démonstrative. B. FiXN [Verh. d. phys. nied. Ges. zu WUrzburg. N. F., xi) a nourri des chiens et des lapins avec de l'albumine d'œuf,et il est arrivé à cette conclusion que celte alimentation entraîne la formation de glycogène dans le foie. Quoique Kulz ait soumis à une critiqua incisive, et que je trouve justifiée, le travail de Finn, je tiens à mettre en lumière quel- ques points importants sur lesquels KiiLz n'a pas porté son attention. Fin.\ dit (/oc. cit., 98) : « Le glycogène a été préparé et dosé par la méthode de Brùcke. Le foie, soumis à l'action plusieurs fois avec de l'eau et le glycogène pesé. » KiiLz remarque que, dans les travaux de Nau.\y.\, Wolffberg, Mering et Finn, on ne voit pas si le glycogène obtenu finalement par eux avait été redissous après dessiccation, et si le poids des cendres avait été déterminé. Mais la chose est plus grave que ne l'admet KtiLz. En effet, Fi.\n a cherché si les glycogènes formés dans le foie, après ingestion d'albumine, de glycérine et de glycose, sont des corps différents, et pour cela il les a intervertis avec l'acide chlorhydrique ou la salive. Après interversion avec l'acide chlorhydrique, il a trouvé que 0,342 grammes de glycogène albumine ont donné 0,19S de sucre (51, 3 p. 100); 0,43 de glycogène glycérine ont donné 0,27 grammes^de sucre (56, 3 p. 100); 0,513 de glyco- gène glycose ont donné 0,26 de sucre (45,6 p. 100). Le dosage de sucre se faisait par la liqueur de Fehling. En faisant des'expériences de contrôle avec l'amidon, Finn a eu des expériences manifestement satisfaisantes. Car il dit que le glycogène se distingue de l'amidon, en ce qu'il est étonnamment lent à se saccharifier. Il ne suppose cependant pas que, si son glycogène ne donne que peu de sucre, c'est précisément parce que la plus grande paitie de son glycogène n'est pas du glycogène. Par l'inversion avec la salive, il a obtenu des chiffres plus élevés avec son glycogène albumine, et il a trouvé 68,6 à 74,4 pour 100 de la quantité théorique. Et les quantités qu'il a trouvées pour le sucre obtenu par l'interversion de son glycogène albumine, varie entre 44.4 et 74, 4 pour 100 du chiffre théorique. Le pouvoir rotatoire spécifique, que M™^ Gatin-Gruzewska {A. g. P., en, 569) adonne comme égal à 196,57° a été par Finn trouvé égal à 163, ce qui dénote de grosses impu- retés. Tous ceux qui ont précipité l'albumine dans une solution de glycogène par l;i méthode de Brucre, savent combien il est difficile de déterminer la fin de la réaction. KiïLZ, qui a assurément la très grande pratique de cette méthode, veut que le glycogène obtenu soit redissous de nouveau, et de nouveau traité par le réactif de Brucre, '"pour être certain que la précipitation de l'albumine a été totale. Quand on ne connaît pas parfaitement les détails de cette méthode, on n'arrive qu'à des préparations qui sont extrêmement impures, comme cela a été le cas dans les expériences de Finn. C'est donc en pesant du glycogène impur que Finn est arrivé à cette conclusion qu'il se forme du glycogène aux dépens de l'albumine. Ses analyses de glycogène n'ont donc absolument aucune valeur. D'ailleurs, même si ses chitTres étaient exacts, ils ne prouveraient rien encore, pour des raisons que Kulz a déjà développées. En effet, Finn a supposé que le temps d'inani- tion adopté par lui était suffisant pour priver de glycogène le foie de ses lapins et de ses chiens. Les lapins qui devaient être nourris avec de la fibrine ou de l'albumine d'oeuf étaient laissés à l'inanition pendant 4 heures et demie ou 6 jours {loc. cit., 106 et 187) ; puis, il les alimentait pendant quelques jours, et trouvait alors dans le foie de très petites quantités de glycogène. Après alimentation avec fibrine, il n'y avait plus que des traces de glycogène dans le foie. Le chiffre le plus fort fut trouvé après alimentation avec albumine d'œuf : et il fut de 0,482 pour tout le foie, dont d'ailleurs le poids n'a pas été donné. Or KiiLz dans un grand nombre d'expériences a déterminé le poids du glycogène hépatique chez les lapins au 6^ jour de jeûne, et, dans une série de 10 expériences, il a montré que le foie de ces animaux à jeun contient en moyenne 0,2316, et au maximum 0,329, chitîres qui égalent et même qui dépassent les chiffres donnés par Finn. D'ailleurs il faut remarquer que le glycogène de KOlz était certaine- nient plus pur que celui de Finn; car KïiLz a redissous le glycogène précipité, et en a dosé les cendres. Or nous avons vu que souvent plus de la moitié du glycogène de Finn n'est pas du glycogène. Les expériences de KiLZ sont données dans son tableau XVI {loc. cit., 32). . GLYCOGENE. 351 Pour les recherches sur les chiens, Fin.n (p. 108) a supposé qu'après 13 ou 14 jours de jeune, le foie ne contient plus de glycogène, en se référant au.x recherches de Golds- TEi.x et Strokowsky et autres. Or Mering a montré qu'au 18'= jour de jeûne un chien a encore 0,48 de glycogène; un autre, au 21« jour, avait encore 0,48. J'ai remarqué, comme il a été dit plus haut, que le foie d'un chien, au 28'' jour de jeûne, contient encore 22,5 de glycogène. Les chiens de Fixn, qui n'avaient jeûné que 13 ou 14 jours, pouvaient donc très bien avoir plus de glycogène encore dans leur foie. Finn donne des chiffres très élevés pour ces 3 expériences ; 12,23 : 11,842; 8,o71. Mais, comme son glycogène n'est en grande partie aucunement du glycogène, il est impossible de dire de combien ces chiffres sont trop forts. Enfin, ce qui est extraordinaire, c'est que nous n'avons pas de données sur le poids de ces chiens, ce qui rend non pas seulement difficile, mais im- possible toute signification. D'ailleurs, comme Finn donnait de grandes quantités de fibrine pendant plusieurs jours, il est possible que les combustions alors ne portaient plus que sur l'albumine, ce qui rend admissible l'accumulation dans le foie du glyco- gène contenu dans la fibrine. TABLEAU V (E. KiLz, loc. cit., 10). à ■Il POIDS INITIAL en grammes. POIDS FINAL on grammes. DURÉE DU JEUNE en jours '. POIDS DU FOIE en grammes. GLYCOGÈNE SANS CENDRES DU FOIE en grammes. (iLYCOGÈNE TOTAL SANS CENDRES DE LA musculature en grammes. W c GLYCOGENE TOTAL PAR KIL. du poids initial. I 344 317 2 3,7 0 2 362 327 2 3,7 0 „ 3 325 299 2 4,5 0,00093 » 4 300 268 2 3,7 0 ,, 5 333 298 2 4,4 0,0509 ,, 6 7 335 331 283 279 2 2 3,5 4,0 0 0 0,3386 0.3238 8 9 346 297 313 258 3 3 4,2 4,1 0,0041 0 0,4316 1 0,4105 / 0,32 0,946 10 363 293 4 3,3 0 0.1164 \ H 339 251 4 3,0 0 0.2897 Mo Y. 339 12 349 236 5 3,0 0 0,4934 13 344 238 6 3,4 0 0,2783 1 14 i:; 392 348 267 236 7 7 4,2 4,0 0 0 0,1723 1 0.1570 i 0,26 0,716 16 365 277 7 3.0 0 0,1833 ' n 380 263 8 3,0 0 0.2451 Mo Y. 363 1. Di vers animai IX n'ont ét( ; mis au ^ eûne qu'aj rés que leur jabo t a été vidé. FiNN nous donne encore deux expériences sur des chats nourris avec de la fibrine après 13 jours de jeûne : « Comme ces animaux, dit-il, étaient bien nourris et en bon état de santé, cela rend plus vraisemblable que chez eux le glycogène hépatique a dû dispa- raître plus rapidement que chez les chiens ». Et c'est avec ce facile raisonnement que FiNN se débarrasse des expériences de contrôle qui lui auraient été absolument néces- saires pour juger. Il eût été plus exact de dire : « Les chats qui, au début de l'inani- tion, étaient dans un bon état de santé, devaient, au 13® jour de jeûne, garder un peu de glycogène dans leur foie. » Quand donc on les nourrit abondamment avec une ration quotidienne de 400 à 600 grammes de fibrine, contenant 78,87 p. 100 de substances 352 GLYCOGÈNE. sèches, les combustions devaient porter uniquement sur l'albumine, et le ijlycogène qui restait, joint au glycogène contenu dans la fibrine de l'alimentation, pouvait ne pas dis- paraître du foie. Il n'est donc nullement surprenant qu'on ait trouvé dans un foie 1,684, et dans l'autre 1,913 de glycogène. Expériences de Kûlz sur l'origine albuminoïde du glycogène. — 1" Expé- riences sur les pigeons. — Le premier fait à établir était de déterminer la durée de l'ina- nition nécessaire pour faire disparaître le glycogène. Kùlz a donné les chiffres dans son tableau V, que j'ai reproduit ci-dessus {Beitr. zur K. der Glykogenes, Marburg, 1891). Le résultat de ce tableau est le suivant : 1° Quand les pigeons jeûnent de 4 à 8 jours, leur foie ne contient plus de glycogène; 2° Après 2 ou 4 jours de jeûne, la quantité moyenne du glycogène du foie et des muscles est, pour 1 kilogramme du poids initial, de 0,946. Le poids maximum (expér. XVIII) a été de 1,239 pour 1 kilogramme du poids initial; 3" Après 3 ou 8 jours de jeune, le poids moyen du glycogène, du foie et des muscles est de 0,716. . Le poids maximum (expér. XII) a été de 1,414 pour 1 kilogramme du poids initial. Pour expliquer ces chiffres négatifs, Kûlz a déterminé le poids du glycogène chez des pigeons vigoureux et bien nourris (tableau VII), et le résultat principal de cette expé- rience a été que la teneur du foie en glycogène varie dans des limites considérables, quoiqu'il s'agisse d'animaux d'une même couvée, et nourris pendant 6 jours de la même manière. TABLEAU VII (KClz, loc. cit., li NUMÉRO POIDS POIDS POIDS TENEUR au DD FOIE EN GLYCOGÈNE DU FOIE de DU FOIE MOMENT DE LA MORT (sans cendres) en glycogène l'expérience. en grammes. eu grammes. en grammes. p. 100. 1 390 4,5 0,0464 1,03 2 371 4,7 0,0557 1,19 3 463 5,4 0,0710 1,33 4 362 5,2 0,1113 2,14 Ij 437 10,5 0,1378 1,31 6 436 6,9 0,1590 2,30 1 361 5,7 0,0874 1,53 8 453 6,3 0,0477 0,76 9 318 6,9 0,0318 0,46 10 288 7,1 0,631 8,89 H 270 6,95 0,063 0,91 12 250 9,2 0,639 6,95 ]-.] 367 8,i 0,519 6,18 li 388 .'i,25 0,130 2,48 15 355 5,15 0 n 16 291 4,2 0 0 La quantité de glycogène pour 100 grammes de foie a varié, en éliminant les expé- riences 15 et 16, entre 0,46 et 8,89, c'est-à-dire dans le rapport de 1 à 19. La quantité absolue du glycogène hépatique a varié, d'un animal à l'autre, de 0,0318 à 0,S19, c'est-à- dire de 1 à 16. Si l'on compare le tableau V, dans lequel les chiffres se rapportent à la fois au glyco- gène hépatique et au glycogène musculaire, on voit qu'il y a encore des variations consi- dérables d'un animal à l'autre, mais qu'elles sont beaucoup moins considérables que celles du foie, fait qui, jusqu'ici, n'a malheureusement pas été suffisamment étudié. Or, après ce travail préparatoire, si détaillé, qui comprend 33 expériences, Kùlz s'est contenté, pour prouver que l'albumine forme du glycogène, ce qui est l'objet même de ses recherches, de deux expériences seulement, et cependant il avait vu lui-même les GLYCOGÈNE. 35 S colossales variations des proportions de glycogène dans l'organisme normal, de sorte qu'il aurait dû éviter les iniluences du liasard en faisant un très grand nombre d'expériences. (Il ne dit pas d'ailleurs pourquoi il ne les a pas continuées.) Le tableau suivant donne ces 2 expériences : L'expérience I ne compte pas, puisqu'il s'agit d'un animal qui n'était pas à jeun. Dans les expériences II et III, 2 pigeons reçurent de la poudre de viande sans glycogène, après 3 et 7 jours de jeûne. Le glycogène total du foie et des muscles a été en moyenne, pour 1 kilogramme du poids initial, de 2,03, pendant que les animaux de contrôle, ayant jeûné de 3 à 4 jours ou de 5 à 8 jours, avaient 0,946 et 0,716. Mais, si l'on considère que chez les animaux de contrôle on a eu, au 5" jour de jeune (N» 12), 1,414 de glycogène pour 1 kilogramme, et que d'ailleurs KiiLz n'a pas jugé nécessaire de faire de très nombreuses expériences de contrôle, on ne peut rien fonder sur ces 2 expériences. KiJLz lui-même ne leur a donné aucune valeur, pour d'autres raisons que celles qui ont été indiquées ici. Remarquons encore que les deux pigeons de cette expérience n'ont pas reçu, en 13 et 25 jours, moins de 383 + 675 = 1058 de poudre de viande sèche et sans cendre, quantité qui répond à environ 5 kilogrammes de viande fraîche. Si l'on calcule comme pour de la viande fraîche, il ne faudrait que 0,02 p. 100 de glycogène pour expliquer l'excès de glycogène trouvé dans le foie de ces animaux. Or il n'est pas facile de doser 0,02 p. 100 de glycogène. TABLEAU Yl (E. Kclz, loc. cit.) (Pigeons). ^ ii) . c5 'd ■^• T3 a ci ' "5 5 — là M O O 'S GLYCOGÈNE ■- o 5 a. o .5 s a ~ -3 3 o "3 O o -a ■5 s >T3 og 13 o i: 3 ■« 3 !« 3 1= 3 's -6 " 5 .3 C3 s ;3 si o 3 -3 O ^ S du t'oie. o 3 S M s'" 2ë o S 3 2 'S 0- o ■o 3 Q •a 3 o — o ~ .5 o « 3 O » S ° il te 3 » .S 3 o S -"S O t3 — 'S w S- '5 Oh c o o S •O te o o o.t: 3. H (B (« 3 -3 fr,0 Z S S O O o S o a, = ci ic ^ o 3 gr. j- g'-- j- gr. gr. Ea 2j.,3U gr. chaquej.En 16 U-.25gr!Eulj.,; 1 20 gr. en deux 15 janv. h. m. gr. i 1 300 0 19 410 423,5 1 parties égales, ' l'une le matin et l'autre le soir. ( 30 gr. en 3 ' 1887 364 2 30 H,0 0,0210 0,192 0,5608 22 359 3 288 lo 425 383,0 pai-ts, matin, 27 janv. 1887 349 3 0,0113 0,115 0,8504 midi et soir. 2,03 3 3 350 7 257 25 730 675,8 30 gr. en 3 parts, matin, midi et soir. lOmirs 1887 360 2 36 16,4 Ira ces 0,01 0 0,5780 1. Animal très bieu portant jusqu'au dernier jou r. 2. Animal très bien portant tout le temps. 3. Au septième jour de jeiine, animal un peu fail le ; mais il se reine t ensu ite, et est bien portant )US- qu'à la fin. Expériences sur les poules. — Dans ces recherches, KiiLz a d'abord déterminé le poids du glycogène, du foie et des muscles après un long jeûne, sur les poules. On trouve ces expériences de contrôle dans le tableau suivant, qui facilitera la lecture. DICT. BE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 23 354 GLYCOGÈNE t TABLEAU VIll H FOIE. -^- MUSCLES. w 1 c/: O c m CL, A K m' ë o 2 O < Z a o M £ o 00 J iJ 5 % 1 O H ce K S s: o z d o 3 ^ S ■^2 2 "5 ,_L, •a . 5 ï os 1=1 Q < a: 5 a S £ S * a s 2 Q z O " •a r. T. T. .« O u - :2 -o 5 .t: >. te JI, a o '5 5 >- c o o 'o ci- c a O o o "&■■*• G D "* K- i5 J,"^"^ .5 bJ 0. o -5 1 1813 1520 2 jours. 25 0,0422 0,17 „ ,. 2 1690 1470 2 23 0,0745 0,32 ■■ » 3 1338 1217 2 23 0,0721 0,31 >■ " 4 1744 1595 2 27,5 0,0879 0,32 » " 5 1316 1251 2 20 0,1377 0,69 " " 6 1508 1352 2 25,5 0 0 '. » 7 1211 1148 2 21 0,0520 0,25 '■ " 8 1225 1134 2 . 19,5 0,0206 0,10 " » 9 1751 1533 3 — 21 0,0843 0,40 » " 10 1754 1576 3 — 22,5 0,0485 0,22 » » 11 1556 1254 3 — 19 0,0775 0,41 » ■> 12 1866 1640 3 — 22 0,0889 0,40 .. ■> ■ A. 13 (1) 1161 1035 3 — 13,8 0 0 23 't, 4 237 A. 14 (2) 1807 1618 3 — 24 0,0427 0,18 422 417 H. 15 (1) 1112 792 6 — 16 0 0 221,5 221,5 H. 16 (2) 1)68 948 6 — 10,4 0,0260 0,25 241,5 233 17 1168 1027 6 — 15 0,0459 0,31 .. " 18 1680 1309 6 — 26 0,1788 0,69 .. » 19 1452 1203 6 — 17,5 0,1165 0,67 » » H. 20 (3) 1029 798 6 — 18,5 0 0 176 176,5 H. 21 (4) 1415 1172 6 — 17,0 0,0106 0,06 326 318,5 H. 22 (5; 1534 1368 6 — 16 0,1314 0,82 341 340 H. 23 (6) 1337 1216 6 — 12,6 0,1193 0,95 347 351 H. 24 (7) 1097 1055 6 — 14 0,0596 0,43 279 284 25 1776 1527 6 — 21,5 0,1060 0,49 » » 26 1370 1230 6 — 14,7 0,1325 0,90 .. » A. 27 (4) 1020 792 7 -^ 12,5 0 0 220 219 28 1268 1091 7 — 14 0,1130 0,81 290 2U0 29 1652 1 450 7 — 13,8 0,1332 0,97 » >' 30 1953 1620 7 — 21,0 0,1605 0,76 » -' 31 1342 1085 8 — 16,5 0 0 269 271 A. 32 (5) 1110 857 10 — 13 0 0 234 232,5 GLYCOGENE. 3o5 (E. KuLz, loc. rit. ~ MUSCLES. GLYCOGK.NK HÉPATIQUE POUR 1 KILOG. DU POIDS INITIAL. y; ô â t o ^ o ^ >- o a ^ ■à o ^ 5 -^ X s « g H = -a s S g >• o o a ■g 1 2 2 GLYCOGÈNE TOTAL PAR KILOGR. du poids initial. MOITIE DROITE DU CORPS. Glycoyéne (sans cendres) en grammes. ë S o S g 5b X 5 o ^-' •3 3- O O 1 f >• ° o -3 6 „ „ 0.02S „ >. " » 0,051 » " " 0,059 » .. .. " 8,035 » 1, .. .. 0,110 .. „ „ 0 De 1 à 12 gljcogènc inusciilaire „ ,j ,, 0,045 non déterminé. „ .. .. 0,018 .. M .. 0,055 » .. " '> 0,031 " „ " " 0,062 » n " " 0,054 ! l),:!972 0,4016 0,7988 0 0,688 0,772 0,7988 0,49 0,. 30(18 0,2972 0,5980 0,026 0,331 0,370 0,6407 o.;i.ju."i 0,3503 0,7010 0 0,630 0,885 0,7010 0,57 1 0,2:; 40 0,2540 0,5173 0,027 0,484 0,546 0,5433 „ „ 0,045 •> » » 0,137 0,097 Dans 17, 18, 19 glycogrne des muscles non déterminé. / 0.656 0,U212 0,0213 0,0425 0 0,041 0,053 0,0423 0.1632 0,1594 0,3226 0,009 0,228 0,275 0,3332 0,(j:^22 0,6303 1,2625 0,096 0,823 0,923 1,3939 > 0,69 0,4170 0,4825 0,9595 0,098 0.718 0,789 1,0788 0,8430 0,8581 1,7011 0,057 1,351 1,602 1,7607 „ .. .. 0.069 De 25 à 26, glycogcne musculaire » « 0,108 non déterminé. 0,1511 0,1534 0,3075 0 0,301 0,389 0,3073 o,s;iu:i 0,8503 1,7006 0,1036 1.341 1,559 1,8136 .. » „ 0,092 1 Dans 29 et 30 glycogène des .. .. ,, 0,099 ) muscles non déterminé. } 0,67 0,2074 0,2694 0,5368 0 0.400 0,495 0,5368 0,2604 0,2587 0,5)91 (» 0,468 0,600 0,5191 :^o6 GLYCOGÈNE. On peut en résumer les résultats en peu de mots. Après un jeune de 6 à 7 jours, chez les poules, le poids total du glycogène, du foie et des muscles a été, pour 1 kilogramme du poids initial, de 0,636 grammes. Le poids maximum (exp. XXIV) a été de Is^^eOS par kilogramme. KiJLz a nourri ses poules, après 3 jours de jeûne, avec de la poudre de viande sans glycogène, pendant une durée de 8 à 43 jours ; mais il a vu alors un tel accroissement du poids de ses animaux qu'au moment où on les sacrifiait ils pesaient plus qu'avant le début de l'inanition. Les chiffres sont indiqués dans le tableau ci-joint (p, 557) : Le poids moyen de tout le glycogène du foie et des muscles a été de 1,634, chiffre qui concorde avec le chiffre maximum sur les animaux de contrôle (1,605), dépassant la moyenne de 0,636. Et ainsi tombe en réalité la valeur démonstrative de ces expériences. Pour le prouver, je dois entrer dans quelques détails qui montreront que les con- clusions de KiiLZ ne sont pas justifiées. 11 est presque incroyable de voir les fautes graves de ces recherches, pourtant si estimées par Karl Voit et toute l'école de Munich. Dans le tableau VIII, KiiLz a estimé combien une poule, après 6 ou 7 jours de jeûne, peut encore contenir de glycogène dans son organisme. Après le 6^ jour, d'après 7 expériences, il y eut en moyenne 0,656 de glycogène total; du 7« au 10« jour, d'après 4 expériences, 0,67 de glycogène total; pour le Séjour, d'après 2 expériences, 0,49 de glycogène total. Mais, comme ces 2 expériences de contrôle donnaient pour le 3"= jour de jeûne un chiffre beaucoup plus petit que les 7 expériences de contrôle au 6"^ jour de jeûne, et même que les 4 expériences de contrôle pour le 7^ et le 10*^ jour de jeûne, il est clair que ces 2 expériences (du 3'' jour) donnent un chiffre trop faible, comme je l'ai déjà montré plus haut avec détail. Le chiffre des expériences de contrôle pour le 3" jour de jeûne devait être plus grand que le chiffre correspondant pour le 6^ et le 10^ jour de jeûne. Par conséquent, on doit au moins introduire dans les expériences de contrôle les chiffres qui se rapportent au ô'' et 10' jour de jeûne. Et alors Kulz commet cette erreur incompréhensible de ne laisser jeûner que troi5 jours les animaux qui servent à ces expériences d'alimentation. Troia jours seulement! quoiqu'il sache uniquement, en fait de proportion de glycogène, celle qu'ils auront du 6'= au 10^ jour. C'est précisément dans les premiers jours de jeûne que diminue rapidement la teneur du corps en glycogène; plus tard, elle ne diminue que lentement. Il est donc, par consé- quent, certain qu'après 3 jours de jeûne, il y a, en moyenne, beaucoup plus de glycogène dans le corps qu'après 6 jours de jeûne. KûLz a nourri ses poules pendant 8 à 43 jours avec de la poudre de viande soi-disant privée de glycogène, et l'alimenlation était si abondante que les animaux ont eu un étonnant accroissement de poids. Expérience I. — II. — III. — IV. — V. — VI. Par conséquent, la poudre de viande a été donnée en quantité surabondante, ce qui fait que la poule ne vivait plus alors qu'aux dépens de l'albumine, de sorte que toutes les parcelles de glycogène incorporées à la poudre de viande qu'on lui donnait comme aliment, pouvaient s'accumuler dans le foie avec le glycogène résidual restant encore dans l'organisme, au 8" jour d'inanition. Reste à savoir si, dans la poudre de viande donnée en aliment, ne se tiouvaient pas encore de minimes quantités de glycogène. Pour en juger, Kûlz a laissé se putréfier la viande finement hachée jusqu'à ce qu'il ne puisse plus par sa méthode trouver de glycogène dans cette viande. Or, il y a là une faute qui suffit à elle seule pour enlever toute valeur à ces recherches ; car la putréfaction change le glycogène en dextrine.et celle-ci ne peut plus être décelée par la méthode de Brûcke-Kûlz. Par conséquent, KiiLz a commis une erreur en prétendant que sa poudre de viande ne contenait plus d'hydrates de carbone. C'est un point sur lequel je dois insister avec détail, car, jusqu'à présent, il n'a pas de 1188 à 1 329 gi-ammes de 906 à 1188 — de 105i à 1322 — de 1 161 à 1582 — de 1267 à 1220 — de 1 180 à 1551 CLYCOGENE. 357 ■[BijiDi spiod np •TiM X anod •sapsnui sop ^i.iivj.oj. va SMva ■QOI 'J aïoj aa 3KaoOOA10 ■jS U3 '0I0| O] SUBp 'aNîaooOAio aïod: na saiod aaaiNHaa vi aaj,N'5i aiaoDa SJdKax iVKia saiod •[Tjiuure.j op laoK VT aa INaiVOK Ci ^ ° I I I I I I I I I I I ! I I CO !.0 a: ^ ÎO tM 00 (M OO .-T fO Cl 00 (M 05 o -* C— (M aaNViA aa ananod aa ssnnvHS aa marni (.apuBiA. 9p ojpnod j^d MoiivxicaKnv a sanof aa Kaiawoo •saïuinBjS U9 7VNM saiod aMQMf aa aanna •SOinWBJS U9 IVIXINl saiod •aa.s:aiaadxa,T aa onaKaN 358 GLYCOGENE. encore été étudié. Eq 1880, R. Bœhm et A. Hoffmann (A. g. P., xxiii, 212) publièrent un travail sur la formation du sucre dans le foie, après la mort. Ils observèrent que, si l'on prend deux fragments de foie fraicliement extrait, et si l'on examine un de ses frag- ments immédiatement; l'autre, 24 heures après, on ne trouve jamais de dextrine dans le fragment frais; mais que, dans l'autre fragment, on en trouve toujours, en même temps que ses phénomènes de putréfaction se sont manifestés. « Les ditTérentesdextrines, disent B. et H., qui proviennent du glycogène, dévient à droite 3 ou 4 fois plus que le glycose. » Les extraits aqueux du foie, débarrassés d'albumine par l'acide acétique, furent concentrés fortement et traités à chaud par de l'alcool à 96 p. 100. Le filtrat fut par évaporation débarrassé de l'alcool, traité par Féther qui enleva les graisses, filtré de nouveau, et le liquide fut examiné à la fois au point de vue de la déviation polari- métrique et de sa teneur en sucre par dosage avec la liqueur de Fehling, « Si des quantités considérables de dextrine avaient passé dans la solution alcoolique, on aurait dû trouver une différence entre le chiffre donné par la polarimétrie et le chiffre donné par le dosage du sucre. Or, en retranchant le chiffre centésimal donné par la titration du sucre, du chiffre donné par la mesure polarimétrique, on obtient précisément le chiffre polarimétrique de la dextrine,ce qui permet de calculer approximativement la quan- tité de dextrine de la solution. » Comme il s'agissait de quantités pouvant être isolées, on prit la solution aqueuse que l'on concentra jusqu'à consistance sirupeuse épaisse, et on précipita, par beaucoup d'alcool, une masse ténue, mucoïde, adhérant aux parois du vase. Après concentration nouvelle du liquide, et nouvelle précipitation par beaucoup d'alcool, on obtint finalement une masse assez considérable d'une substance ayant les caractères de la dextrine. Cette substance est soluble dans l'eau : elle dissout l'oxyde de cuivre en liqueur alcaline, mais ne réduit pas par l'ébullition, dévie le plan de pola- risation 3 cà 5 fois plus que le glycose, ne se colore pas par l'iode, mais jaunit par ébul- lition avec la potasse. « Or ce sont là exactement les propriétés de la substance qui apparaît dans l'urine, après injection de glycogène dans le sang, substance que nous avons préparée chimiquement pure, et déterminée comme acliroodextrine. Il n'y a donc pas lieu de douter que, dans ce fragment de foie, abandonné à lui-même pendant 24 heures (et devenu acide), il s'était formé de l'achroodextrine. » Moi-même, plus récemment, j'ai montré que, dans les solutions alcalines de viande fraîche, on trouve un hydrate de carbone soluble dans l'alcool, qui n'est pas du sucre, et qui, par conséquent, est très vraisemblablement de la dextrine {A. g. P., 1902, xciu, 183). On peut encore objecter à la prétention de Kulz qui croyait détruire le glycogène par la putréfaction de la viande, que Pavy a montré que le glycogène et l'amidon sont à peine attaqués parla potasse, mais qu'il n'en est pas ainsi, lorsqu'ils ont été par des ferments transformés en dextrine {The Physiology of the Carbohydrates, 1894, loi). Or mes propres expériences confirment les données de Pavy (A. g. P., 1902, xciii,77). Dans le dosage du glycogène par la méthode de Brucke-Kulz, on fait bouillir les organes dans une solution diluée de potasse, et on les dissout. Dans ces conditions, la potasse détruit la dextrine. Enfin, après précipitation des albumines par le réactif de Brûgke, et filtration de la solution glycogénique, on précipite par 2 ou 3 volumes d'alcool à 96 p. 100. Comme Bœhm et Hoffua.w l'ont montré, la glycogène-dextrine n'est alors pas précipitée. Donc il est clair que Kulz a pu, en donnant de la poudre de viande à ses animaux, leur donner en mèmetemps de la glycogène-dextrine en quantités notables, sans que sa méthode permette d'en démontrer la présence. Revenons maintenant aux recherches de Kulz qui nourrissait ses poules avec de grandes quantités de viande. Si le glycogène provient de l'albumine, il doit alors se dépo- ser en masse dans le foie, puisque l'alimentation est continuée pendant plusieurs jours et même plusieurs semaines. Or qu'est-il arrivé ? Les animaux nourris de poudre de viande, après 3 jours de jeûne, avaient en moyenne, comme glycogène total, pour i kilogr.de poids initial, 1,634 de glycogène. Les animaux qui avaient jeûné 6 à 10 jours avaient en moyenne 0,670, et au maximum, 1,602. Et voilà les recherches que, dans le monde physiologique, on déclare classiques, servant à établir que le glycogène vient de l'albumine. Il est au contraire tout à fait évident que c'est la preuve du contraire que ces expériences établissent. Malgré V engraissement énorme dû à Valbumint, il n'y a pas eu d'augmentation du glycogène. GLYCOGENE. 358 Examinons maintenant les recherches entreprises par KiiLz d'après le même type que les expériences précédentes, soit sur des poules nourries en partie avec de la fibrine, en partie avec de la caséine. KiiLz a résumé ses recherches dans un tableau que je donne ici (p. 360 et 361). C'est dans la dernière colonne que l'on trouve les résultats les plus intéressants sur lechitfre du glycogène total rapporté à un jkilogramnie du poids du corps. Or, après alimentation avec la fibrine donnée pendant cinq à six jours après un jeûne quiavait duré trois jours, le glycogène total, pour un kilogramme du poids initial , était de 1,122; mais, chez les animaux de contrôle du sixième et du septième jour de jeûne, la moyenne a été pour le glycogène total de 0,6o6 et de 1,603 au maximum. Par conséquent le chifîre observé après alimentation par la fibrine est entre les limites des chiffres trouvés sur les témoins non alimentés par la fibrine. Si l'on objecte que, chez les animaux nourris par la fibrine, le poids moyen est plus fort que le poids moyen des animaux de contrôle, je ferai remarquer ceci : les expé- riences ne prouvent rien, car chez les animaux de contrôle le dosage du glycogène a été fait après un jeûne de six à sept jours, tandis que Kulz a alimenté ses poules au troisième jour de jeûne : or on ne comprend pas pourquoi un expérimentateur, qui veut comparer deux expériences, lesquelles doivent donner des chiffres comparables, prend de propos délibéré des dispositions qui donneront de toute nécessité un excédent à une des deux séries. Cela est incompréhensible, et pourtant c'est ce qui a été pratiqué par KiiLZ. Remarquons en outre que la fibrine contient du glycogène, et qu'elle est peut-être un f^lycoprotéide. Les expériences VI, VU, VIII, où de la caséine a été donnée, montrent que le glycogène total a été de 0,797, c'est-à-dire moindre qu'après alimentation avec la fibrine. Elles ne prouvent donc rien, et on peutjleur adresser les mêmes objections qu'aux expériences faites avec la fibrine. Seulement il n'y a pas d'hydrate de carbone dans la caséine. Si ces expériences indiquées dans le tableau XII ne prouvent rien et ne nous forcent pas à admettre que l'albumine de l'alimentation produit du glycogène, cela pourrait tenir à ce que dans ces expériences les poules pendant l'alimentation ont fortement diminué de poids. Or chaque physiologiste sait que, pendant le jeune, ce sont surtout les graisses et le glycogène qui sont consommés. Si donc, après alimentation avec telle ou telle substance, on voit le poids de l'animal continuer à baisser, sans qu'il y ait accumulation de glycogène, on ne peut évidemment pas en conclure que cette substance ne contribue en rien à la formation de glycogène. Il est assez singulier, et difficile à comprendre, que cette erreur se perpétue dans toute l'histoire scientifique du glycogène. Six expériences de Kulz (page 26 du volume jubilaire), indiquées dans le tableau suivant (p. 360), ne comportent pas pareille erreur. Cette série d'expériences (tableau XIII) a l'avantage de permettre une comparaison entre les animaux de contrôle et les animaux alimentés; car les uns et les autres subirent une inanition de même durée et pendant l'alimentation le poids du corps, en général, augmenta. On voit par ce tableau XIII que, chez les animaux nourris avec de la caséine, le glycogène total a été, pour un kilogramme de poids initial, de 0,90, tandis que les ani- maux de contrôle (tableau VIII) ont donné, après six ou sept jours de jeûne, pour un kilogramme du poids initial, en moyenne 0,656, et au maximum 1,603 de glycogène total. Par conséquent le chiffre obtenu après alimentation avec la caséine est compris dans les limites des chiffres observés sur des animaux non alimentés. Les autres expériences d'alimentation avec la fibrine, la serine et l'albumine d'oeuf n'ont en réalité donné, quoique ces aliments continssent des hydrates de carbone, pas beaucoup plus de glycogène que l'alimentation avec la caséine, soit en moyenne 1,2 de glycogène total, de sorte qu'on n'a pas le droit de supposer une formation quel- conque de glycogène aux dépens de ces matières albuminoïdes. Ainsi les recherches de Kïilz sur le glycogène dans l'afimentation avec les matières azotées sont trop défectueuses pour qu'on puisse en déduire rigoureusement quoi que ce soit. Elles semblent cependant parler nettement en faveur de cette opinion que dans l'alimentation azotée, il ne se fait pas de glycot/ène aux dépens des matières azotées. Je ne peux pas abandonner ces expériences de Kulz, qui devaient prouver que le gly- cogène provient de l'albumine, sans faire expressément remarquer au lecteur que les animaux de contrôle servant aux expériences d'alimentation avec l'albumine sont les 860 GLYCOGENE. X < < •(Biliui spiod np CM (— aiAiKVHOO'IIX HVd ~ iviox aNaoooA^o ■^— o a) p s ^ <à o 7J ^3 2 S ï c c 0) 1 = o ci c .«^ a, g ." Ci «i " 4, ai ai 3 ci ■^ o o a c o o o a t3 .S .^ o G5 s w c o o »! S> o es ai se .^ co ^^ ■^ oo co es CD rM r- o ^-f co cj r~ Jrt 05 00 o — -^ :^ 2 co \n •sauiiuBaS lia CO co o> -* :o c; CM co OO 'XO saiDsniï saa saaa.^aj skvs ^^ 02 C-l LO •■•^ l~ o aNaoooAqo o <= -" o _r o o" sT o" •001 'd ;'ioJ na .- — . co CO -.-»< Ci C3 ^o o ;.o no ax'aoooAio ^„ OC ^ co co CD__ lO " ■^ "^ ■^ ■S9inuiB.iS ua - -t" — co co 00 CM (saiiaKiao s>cvs) co !-0 ce o ce C3 CM CO CM oo co 03 CM aïojî na aN:-T£)O0Aao o O tS s> o > o ~* -* co >-ï XfCaWOK ce o ^ C) f- s oo (M oo CM t^ S MES jour ? ai c 'S 1 1 »; -^ 1 1 a •2 1 1 O "S ai S O co ^ l ce o o to O c o % l 1 s -S •12 -a 1 S =- ^ CO CO CM SCS l'L u o r. o sj oi a> S S a •5 ^ 1 ^ 60 1 1 o o oj •' co CM I *-> J =« o o co o o o Ph S o 6C f^ 1 « g- co 00 a: •— co oo 05 co ■? 1 1 - — - lO 3 1 1 o =■ c=> 8 g co -* ^ co co (r> jL 1 I Si =; o eu co o •-- o co co -* ;, ino} ao , >, ^^ C^l CO ^ iO co t^ oo g s'oa:;ircn.v r^ GLYCOGENE. 361 E=3 •(unini siiiocl n\) LO o CO 'O o co :-0 1^ AKKvnoouyi av.i CD_ t^ ^l o; -?- .^- CM nvxox aK^ooDA'io — ' = —" -- =' __J- --' - o " ^ o Ç .. 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Comme il s'agit de lapins d'assez grande taille, dont le poids final n'est pas donné, cette quantité de glycogène de nou- velle formation est au dessous, en général, de 0.1 p. 100 du poids total du corps. Mais il n'a pas été établi avec certitude que les animaux pris comme témoins 366 GLYCOGÈNE. n'avaient plus de glycogène. Car, dans le protocole des expériences, on ne parle que du glycogène absolu du foie et des muscles. Or, d"après une remarque de sou dernier travail, Rolly {loc. cit., 1905, 121) a dissous les os et les muscles dans la potasse, et déterminé aussi le glycogène des os. Dans son travail sur la piqûre cérébrale hyperthermisante {loc. cit., 1903, 252), il parle de sa méthode de recherches du glycogène avec plus de détails. « Voici comment je dosais le glyco- gène des muscles. Immédiatement après la mort, j'enlevais les viscères de l'ani- mal, à l'exception du foie. Puis la peau était enlevée, et le corps séparé en deux parties dont une partie servant à l'analyse. » Rolly n'a donc pas dosé le glycogène des viscères et de la peau. Or, ainsi que je l'ai dit, il y a 4.49 p. 100 de glycogène dans la peau, d'après Schôndorff, et 3.81 dans les viscères (le foie non compris, bien entendu). On ne peut donc pas conclure des recherches de Rolly si la strychnine fait disparaître ce glycogène. Donc on ne sait pas si ces animaux témoins étaient complètement libres de glycogène; et, pour le glyco- gène de nouvelle formation, il ne s'agil que de traces. L'incertitude est d'autant plus grande que, d'après des expériences répétées, il y avait un peu de glycogène dans le coips, quoique l'animal eût été sacrifié peu de jours après l'intoxication strychnique. Dans la série II [loc. cit., 1905, III), trois jours après la strychnine. Dans l'expérience XIV (loc. cit., 1903, 385) et dans l'expérience XV, deux jours après la strychnine. Par conséquent, le glycogène n'a pas complètement disparu, même peu de temps après le tétanos strychnique. Une autre notable incertitude dépend des procédés analytiques de Rolly. L'addition d'alcool, dit-il, ne produit qu'un léger trouble; mais l'inversion ne donne rien. Or, il s'agit dans l'espèce de très faibles quantités de glycogène. Et j'ai fait souvent remar- quer que le trouble déterminé par l'alcool, quoique très faible au début, finit pnr donner un assez fort précipité de glycogène qui se dépose en quantité non négligeable. Dans l'expérience de Rolly, il s'agit de tout le demi corps d'un lapin, ce qui a nécessiti' un volume dissolvant considérable. Il eût peut-être mieux valu ne prendre pour l'ana- lyse qu'une partie de ce liquide. L'idée de Rolly que cette petite quantité de glycogène ne peut pas être déterminée par l'inversion n'est pas valable; car j'ai indiqué qu'on arrive à faire le dosage (différentiel) en ajoutant une quantité connue de sucre. Quoique les travaux de Lûthje, de G. Embden et Salomon aient établi que l'organisme animal peut faire des hydrates de carbone avec des substances qui ne sont pas des hydrates de carbone, le fait (dont Rolly ne donne pas la preuve) que des animaux h jeun, et sans glycogène, font en quelques jours du glycogène, serait de grande impor- tance. Dans le même sens parlent d'autres faits encore; la formation de glycogène dans la chrysalide du ver à soie, la persistance du glycogène chez les grenouilles d'hiver, la non-disparition du glycogène (dans le foie et les muscles) après un long jeûne. Supposons que l'expérience de Rolly soit répétée d'une manière irréprochable et donne, ce qui est fort possible, un résultat positif, cela ne prouverait en rien que le glycogène nouvellement formé dérive de l'albumine. Rolly, ayant constaté chez ses lapins à jeun, après tétanos strychnique, une augmentation dans l'excrétion d'azote, croit que cela prouve la vraie origine du glycogèue nouvellement formé. « Même en admettant, dit-il, (loc. cit., 1905, 124) que la mutation des graisses en hydrates de carbone soit possible, on ne saurait faire cette supposition pour nos animaux qui sont très pauvres en graisses, et alors ont une désassimilation azotée plus intense. » (Voit). Comme divers auteurs et moi-même l'ont établi, tout travail musculaire énergique amène un accroissement de la désassimilation azotée qui se prolonge pendant plusieurs jours après le travail. Or, je me suis persuadé que tel est encore le cas, quand il s'agit d'un animal qui engraisse et augmente de poids, pendant qu'il continue à travailler. Comme l'animal privé de glycogène est soumis au jeûne, la graisse est plus énergi- quement attaquée encore que l'albumine, ainsi que dans le cas d'inanition. Tout ce que dit Rolly sur le rôle de l'albumine dans la formation du nouveau glycogène est GLYCOGÈNE. 367 plus valable encore pour la graisse; car la graisse disparaît la première, avant que soient consommées les matières azotées, et, dans le cas présent, il n'y a pas de glyco- gènepour êti^e consommé h sa place. Enfin, en disant qu'il n'y a plus assez de graisse pour former des hydrates de car- bone, RoLLY ne pense pas aux animaux pancréato-diabétiques de Sa.ndmeyer, devenus maigres comme des squelettes et contenant encore, ainsi que Sandmeyer et moi {A. g. P., 1905, cviii, 163) nous l'avons montré, 0.5 à 2.6 p. 400 dégraisse. Chez des animaux morts d'inanition, la teneur eu graisse est de 0.8 à 2.4 p. 100 du poids du corps, comme je l'ai établi en rappelant les recherches de Hofma.^n, Kumagava, N. Schulz, Pfeiffer, H. SoiiôNDORFF. Les petites quantités de glycogène que trouve Rolly chez ses lapins pourraient, même si elles étaient bien plus considérables, être expliquées par la trans- formation des graisses. Par conséquent, Rolly ne donne nulle preuve pour la formation de glycogène par l'albumine. S'il me représente comme l'adversaire de la formation du glycogène aux dépens de la graisse, c'est qu'il n'a pas bien lu ma monographie sur le glycogène et qu'il ne connaît pas la récente littérature physiologique de la question. Formation de glycogène aux dépens de Talbumine dans le diabète. — Exa- minons maintenant les faits relatifs au diabète, lesquels ont semblé prouver que les albumines peuvent produire des hydrates de carbone. En première ligne, il faut citer les recherches de Mering (Z. klin. Med., 18S9, xvr, 437) qui a donné de la phloridzine à des chiens à jeun, et a vu alors une glycosurie si intense que ce sucre paraissait ne pouvoir provenir que des matières albuminoïdes. Or, si l'on donne à un chien soumis à l'inanition des doses répétées de phloridzine, et si l'on dose les quantités de sucre qu'il rend dans l'urine, les conclusions qu'on va tirer de cette expérience dépendent essentiellement de la quantité de glycogène qui se trouve dans le corps de ce chien avant l'injection de phloridzine. Eh bien! le fait surprenant, c'est qu'il n'y a pas encore une seule analyse qui nous permette de savoir combien il peut y avoir de glycogène dans le corps de chiens bien nourris. Mering s'est appuyé sur des dosages de Boehm et Hofmann (A. P. P., viii, 271 et suiv., 375 et suiv.) qui ont trouvé, pour le glycogène total du corps, chez le chat, des chiffres variant entre 1,5 et 8,5 par kilo. Mais il ne fait pas attention à ceci : c'est que les expériences de Boehm et Hofmaavn ont été faites en 1878, et que le glycogène n'avait été extrait des organes que par l'eau bouillante. Or on obtient ainsi, comme Ki'iLz l'a montré (Z. B., 1886, xxn, 194), les 3/4 du glycogène; le reste du glycogène ne peut être extrait que par des solutions potassiques bouillantes. 11 faut donc, au lieu du chiffre maximum 8,5, adopter le chiffre de 11,3 par kilo d'animal comme maximum du gly- cogène. C'est ainsi que je m'exprimais dans la première édition de cette monographie. Depuis lors, B. ScHONDORFF {A. (/. P., xcix, 191, 1903) a dans mon laboratoire étudié à fond la question de la quantité maximale de glycogène chez sept chiens. Ces animaux, de 6 à 9 kilogrammes, après être restés huit jours sans aliments, recevaient une alimentation de 200 grammes de viande, 100 à 150 grammes de riz ; et 150 à 200 grammes de sucre de canne, pendant une durée de huit jours, pour être alors sacrifiés. Un de ces chiens pesait au début 53 kilogrammes, et il augmenta de poids jusqu'à atteindre 63'^'', 250. ScHÔNDORFF a dosé le glycogène d'après nos méthodes ; c'est-à-dire que tout l'animal (la moitié du corps) était dissous dans une solution de KOH à 10 p. 100 : puis dans cette solution le glycogène était précipité par l'alcool. Les résultats principaux ont été, pour un kilogramme d'animal : SUCRE GLYCOGENE :xI>ÉRIE^'CEs en grammes. en grammes. 1 6,23 5.78 2 7.75 7,18 3 32,49 30,07 4 40,897 37,8 5 37,64 34,89 G 19,72 18,2 1 8,19 7,5 368 GLYCOGÈNE. Ainsi un kilogramme de chien peut contenir au maximum STe^S? de glycogène, correspondant à 40,897 de sucre. La valeur varie de 8«'',19 de sucre (7,39 de glycogène) à 40,897 de sucre (37,87 de glycogène), c'est-à-dire dans le rapport de 1 à 5, même avec une alimentation identique. Sur 100 grammes de glycogène hépatique, il peut y avoir, dans le reste du corps, de 76,17 à 398 grammes. La teneur maximum du foie répond à 20,17 p. 100 de sucre (soit 18, G9 p. 100 de glycogène). Le minimum a été de 4,607 de sucre p. 100 (soit 4,334 p. 1 00 de glycogène. Le glycogène était également réparti dans toutes les portions du foie. Le poids du foie a varié entre 2,49 et 12,40 p. 100 par rapport au poids du corps. Les muscles contenaient de 0,78 p. 100 de sucre (0,72 de glycogène) à 4,01 p. 100 de sncre (3,72 de glycogène). En outre, tous les organes contenaient aussi du glycogène. Dans les os, la teneur du glycogène a varié de 0,197 à 1,9024 p. 100, Dans les intestins, de 0,0264 à 1,8428 p. 100; dans la peau, de 0,0927 à 1.6801 ; dans le cœur, de 0,1074 à 1,3204 p. 100; dans le cerveau, de 0,0469 à 0,287 p. 100; dans le sang, de 0,0016 à à 0,0066 p. 100. Ainsi il est un fait certain, c'est que 1 lulogr. de chien peut tournir un maximum de 41 grammes de sucre par la conversion en sucre de son glycogène. Je prie maintenant le lecteur de bien considérer ce fait important. Mering admettait comme quantité maximale de glycogène pour un chien 8e'', 3 par kilogramme; Pflùger, en 1903, a trouvé H grammes; et maintenant, en 1904, le vrai chiffre maximal trouvé est de 41 grammes. Or c'est de ce chiiîre que dépend la question de savoir si le sucre éliminé dans le diabète peut provenir, ou non, des hydrates de carbone préformés dans l'organisme. Mering a, en 1886, nettement posé la base de ces recherches {Verh. des 3 Congresses f. innere Medicin, 1886). '< Diverses expériences, dit-il, ont établi qu'après un jeûne de trois semaines les chiens n'ont plus de glycogène, ni dans le foie ni dans les muscles. » Mais il a évidemment oublié que, neuf années auparavant (^4. g. P., xiv, 281 et 282), il avait communiqué des expériences (1877), d'après lesquelles des chiens, du 18* au 21" jour de jeûne, avaient encore 0,48 de glycogène dans le foie. Bien entendu, ce gly- cogène n'était dosé que par la coction avec l'eau et sans potasse, de sorte que les chiffres sont trop faibles. J'ai trouvé, pour ma part, que le foie d'un chien au 28'" jour de jeûne contenait encore 22,5 de glycogène et les muscles 19,23. Même il y a certainement des chiffres plus forts encore chez les animaux soumis à l'inanition (A. g. P., 1902, xci, 121). Examinons de près maintenant les expériences principales de Mering. 1° Un chien de 8 800 grammes, qui avait été longtemps nourri uniquement avec de la viande, fut rendu diabétique par la phloridzine, et laissé au jeûne jusqu'au 31 mai 1888. Au 4 juin, on lui injecte de la phloridzine (9 grammes), et on le laisse jeûner pendant 20 jours à partir du 31 mai, en répétant les injections de phloridzine. Au 21"= jour d«> jeûne, l'animal est mourant. On réussit à le faire vivre en lui donnant des aliments. Or, dans ces 20 jours d'inanition, le chien élimina 67,76 grammes de sucre. Comme 100 grammes de phloridzine donnent 38,1 grammes de sucre, et que le chien a reçu en tout 23 grammes 3 de phloridzine, il faut en retrancher 9 grammes, ce qui fait 38,76 grammes de sucre. Mais, puisque le chien pesait 8'^", 8 au début de l'expérience, on peut lui accorder qu'il avait au début 3328'", 4 de glycogène répondant à 360='', 8 de sucre. Mering dit que longtemps avant l'expérience le chien n'avait reçu en fait d'alimenta- tion que de la viande, comme si c'était là une condition défavorable pour que l'animal contînt du glycogène. Mais, comme il s'agit de viande de cheval, on n'a pu savoir exactement la quantité de glycogène qu'il a reçue, et'cette quantité doit être considérable, car l'animal recevait des quantités de viande suffisant complètement aux besoins de sa nutrition. Si la viande est donnée en quantité suffisante, les graisses et le glycogène s'accumulent pour faire engraisser l'animal. D'après Mering, « cette expérience prouve qu'un animal dépourvu d'hydrates de car- bone peut donner une grande quantité de sucre que la phloridzine fait passer sans changement dans l'urine. Comme, chez les chiens à jeun depuis 18 à 20 jours, la teneur GLYCOGENE. 369 en glycogène du foie et des muscles s'est abaissée, il faut admettre que, dans le cas pré- sent, un Jeune de 20 jours a pareillement fait disparaître le glycogène. Ce qui devient tout à fait certain, si l'on considère que pendant ce jeûne de 20 jours l'animal a pu éli- miner encore 67 grammes de sucre ». Mering pense donc qu'un chien qui n'a pas reçu de phloridzine aui-ait consommé tout son glycogène. S'il a reçu de la phloridzine, il consommera non seulement ce même glycogène, mais encore tout celui que le diabète lui aura donné. Or, si l'on songe que le diabète consiste en un défaut dans l'utilisation des hydrates de carbone par l'orga- nisme, on doit supposer que dans cette affection la consommation des hydrates de car- bone est troublée ou complètement entravée. Puisque la phloridzine produit le diabète, peut-être empêche-t-elle la combustion et la destruction des hydrates de carbone. On peut donc penser que l'ingestion de phloridzine arrête la désassimilation des hydrates de carbone dans l'organisme, si bien que l'on n'a pas le droit d'admettre qu'outre la perte de sucre par l'urine il y a une autre perte de sucre due aux oxydations intra- organiques. Et de plus l'hypothèse de Mering, qu'un chien au 28^ jour de jeûne ne contient plus d'hydrates de carbone, est, ainsi que je l'ai montré, une opinion absolu- ment inexacte. Par conséquent, l'affirmation de Merixg, qu'un chien sans hydrates de carbone peut, après avoir reçu de la phloridzine, produire de grandes quantités de sucre, n'a nullement été^établie par son expérience. Expérience ir(Expérience LX de Mering). — Elle porte sur un chien de 26*^'', 200. L'ani- mal a été longtemps nourri avec de la viande; il est soumis à l'inanition pendant 2 jours; puis, sans qu'il reçoive d'aliment, on lui donne pendant 11 jours de la phlo- ridzine à dose répétée : et alors il élimine en tout 275 grammes de sucre, dont il faut déduire 228'', 9 de sucre, dérivant des 60 grammes de phloridzine ingérée. Par consé- quent, 2d25'',1 de sucre ont été éliminés. Or, d'après notre calcul, ce chien pouvait, au commencement de l'expérience, avoir 99oS'",6 de glycogène ou 1 0745"", 2 de sucre dans son corps. Et il n'a donné que 2oOs^'",l de sucre! Cette expérience doit être jugée comme la précédente, et, quoi qu'en dise Mering, elle ne prouve pas qu'un chien sans hydrates de carbone puisse fabriquer du sucre. Expérience III (Expérience LXI de Mering, loc. cit., 438). — Un caniche de 6'''', 200, après 2 jours de jeûne, reçoit des doses répétées de phloridzine sans être alimenté. En 14 jours, il élimine 81 grammes de sucre, dont 6s^5 de sucre peuvent provenir des 17 grammes de phloridzine. Ce qui fait 74e'", 3 de sucre. Or il pouvait contenir, au début de l'expérience, 23b8'',6 de glycogène, répondant à 2o0sr,6 de sucre. Expérience IV (Expérience LXII de ;Mering, loc. cit., 438). — Un chien de 8'*'', 500 éli- mine, après injection répétée de phloridzine, en 19 jours de jeûne, injsfj de sucre. Comme Mering n'a pas donné les chiffres indiquant la quantité de phloridzine injectée, nous sommes forcés de nous en rapporter à l'expérience I, dans laquelle un chien de même poids a été soumis pendant le même temps à l'injection de phloridzine. Admet- tons donc 9 grammes de sucre dérivant de la phloridzine. Alors si l'on fait la déduction de ces 9 grammes, on n'a plus que 106,7 de sucre. Au début de l'expérience, le chien pouvait contenir 323 grammes de glycogène, ce qui représente 3588'", 5 de sucre. Par conséquent le sucre éliminé peut être représenté par la quantité de glycogène contenue dans le corps. Mering dit aussi {loc. cit., 439) : « Comme ces quatre expériences portent sur des animaux qui sont dépourvus d'hydrates de carbone et dont le corps ne contient plus que de l'albumine et du sucre, on voit que l'influence de la phloridzine lui a fait rendre des quantités notables 'de sucre, si bien que le sucre de l'urine rendue pendant le jeûne ne peut venir que de la viande ou de la graisse. Or, selon moi, le sucre ne dépend pas de la transformation de la graisse, mais seulement de celle de l'albumine. » Le calcul de Mering est que, lorsque l'albumine se détruit, tout le carbone du résidu non azoté, à part une certaine quantité de carbonate d'ammoniaque, sert à former du sucre. Un gramme d'azote répondrait donc à 8 grammes de sucre : autrement dit, 1 gramme d'urée répondrait à 4 grammes de sucre. En faveur de l'opinion de Mering, on peut prétendre que, dans les chilïres qu'il nous donne, les quantités de sucre éliminé ne sont représentées par les hydrates de car- bone de l'organisme, que parce que les hydrates de carbone sont évalués à leur quantité DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VU. ^^ 370 GLYCOGÈNE. maximale. Je répondrai que Mering a fait plus d'expériences qu'il ne nous en commu- nique, et que celles qu'il nous donne sont évidemment superflues et destinées surtout à prouver autre chose. Car il dit : « Ces quatre expériences, et de nombreuses aulres — comme on peut le penser, — sont concordantes pour prouver, etc. « Naturellement, il ne résulte de nos calculs d'autre conclusion, sinon que la preuve formelle n'est pas donnée qu'un animal sans hydrates de carbone peut fournir des quantités abondantes de sucre, et il n'est pas prouvé que ce processus est impossible. Au temps où Merlng faisait ses expériences, on ne savait pas encore que beaucoup de substances de l'organisme, qui jusqu'alors étaient considérées comme de véritables albuminoïdes, contiennent en réalité un hydrate de carbone, étant des ;^'lycosides. Alors il est plus facile d'admettre que, dans certaines conditions, ces glycosides donnent du sucre, que d'attribuer à l'albumine, qui ne contient pas d'hydrates de carbone, le pou- voir de faire du sucre. Quant aux proportions de ces hydrates de carbone combinés, on les ignore. On doit remarquer toutefois que l'opinion de Mering est justifiée, si l'on sup- pose que ce n'est pas l'albumine proprement dite, mais les combinaisons glycosiques, éthers de l'albumine, qui fournissent, dans le diabète, ces quantités de sucre que l'on ne peut suftîsamment expliquer par l'hydratation du glycogène existant. Prausnitz a repris les expériences de Mering dans deux séries de recherches (Z. B,, 1892, XXIX., 168); il a pris deux animaux aussi semblables que possible, et, au lieu de les mettre à l'inanition, il les alimentait de la môme manière pendant quatre à sept jours avec de la viande et du lard. Puis il sacrifiait l'animal de contrôle, et donnait à l'autre de la phloridzine en dosant la quantité de sucre éliminé . Mais je ne tiens pas ces expé- riences pour probantes: car, quand on prend deux animaux, même aussi semblables que possible, et quand on les nourrit pendant quatre ou sept jours, comme l'a fait Prausnitz, ils peuvent contenir des quantités de glycogè ne très différentes. KiiLz (loc. cit., 1891, 18) a nourri des pigeons abondamment avec de la farine et du pain, et il les a sacrifiés lorsqu'ils étaient en pleine dig estion. La teneur du foie en gly- cogène variait entre 0,91 et 8,89 p. 100. Et cependant, di t-il, les animaux provenaient de la même couvée, et ils avaient été peudant 6 jours nourris de la même manière. Par con- séquent, après six jours d'une alimentation identique, il y a eu dans un cas dix fois plus de glycogène que dans l'autre. Dans la série I, Prausnitz indique, ce qui aggrave l'erreur, que, des deux animaux pesant le même poids et nourris de la même manière pendant sept jours, l'un a dimi- nué de 23,35 à 22, 8o kilogrammes, par conséquent de 50 0 grammes, tandis que l'autre a diminué de 23,50 à ii2,5o, par conséquent de 950 grammes. D'où il s'ensuit que, mal- gré l'identité de l'alimentation, un animal peut diminuer deux fois plus qu'un autre, ce qui probablement dépend d'une plus grande activité dans les combustions pour l'animal de la seconde expérience. Et il est vraisemblable que cette alimentation insuffi- sante a fait qu'il a employé davantage de sa provision de glycogène. En tous cas, ces différences dans les diminutions du poids prouvent que Ton ne pouvait se servir de l'un de ces animaux pour contrôle de l'autre. Or précisément Prausnitz a pris comme témoin l'animal que l'on pouvait par avance considérer comme contenant le moins de glycogène. Dans sa seconde série d'expériences, Prausnitz a encore pris pour animal témoin celui qui avait diminué de poids, et il a fait son expérience sur l'autre animal, celui qui avait augmenté de poids. Une autre défectuosité des expériences de Prausnitz, c'est que, au lieu de rechercher la teneur en glycogène de la totalité des muscles, il s'est contenté de prendre quelques échantillons des muscles des membres, du thorax et du tronc. Or les variations de chaque muscle en glycogène sont assez grandes pour qu'il soit nécessaire de réunir tous les muscles et de faire l'analyse de la masse totale. Les expériences de Prausnitz comportent les mêmes observations que celles de Mering. Dans la première série, un chien de 23''e:f,3;i^ après 92 grammes de phloridzine, éli- mina 286s^7 de sucre. 35 dérivaient de la phloridzine : il reste donc 251,7 de sucre. Or, dans ce chien, on pouvait admettre qu'il existait 889es2 de glycogène, par conséquent 9598%6 de sucre. Dans l'expérience II, un chien élimina 115,3 de sucre, dont 9,6 peuvent être dus à laphloridzine (25.25); ce qui fait 105,7 de sucre. Or ce chien, de 7850 gr. au début de l'expérience, pouvait avoir au maximum 296s'', 4 de glycogène, soit 3i9s'-,8 de CLYCOCÈNE. 371 sucre. Donc Prausnitz n'a pas prouvé que le sucre éliminé ne dérive pas de la provision de glycogène contenu dans le corps. Mais elles peuvent volontiers, servir à des consta- tations statistiques et remis à l'appui d'autres expériences. Des recherches doivent être rapportées ici, entreprises sous la direction de Rumpi'' parGRUNOwf, Hartogh et 0. Schumm {A. P. P., xlv. M). Le but de la recherclie a été de voir le maximum de ce que peut produire la phlorid- zine en sucre, chez des animaux ayant un minimum de consouimation d'albumine. I 1,46 96,7 22 — 7 210 oOQ 1,76 126,9 23 — 5 230 240 1,65 86,6 Total 441,9 Dans cette série de recherches, tout ce temps-là, le malade fut surveillé pendant cinq jours et cinq nuits. Mais quant aux aliments qu'il avait reçus auparavant, lorsqu'il n'était soumis à aucune surveillance, nous devons nous en rapporter à sa bonne foi et à son affirmation, faite à Kûlz, qu'il n'avait pris comme aliment aucun hydrate de carbone. Kulz lui-même déclare d'ailleurs que sans une surveillance comme celle à laquelle il a été soumis pendant qu'on l'alimentait avec la caséine, ou ne peut rien affirmer avec cer- titude. Par conséquent, on peut admettre que, pendant le temps qui a précédé la période d'alimentation avec la caséine, le patient a pu ingérer de grandes quantités d'hydrates de carbone, et alors il devient facilement explicable qu'en cinq jours il puisse rendre 44l«%9 de sucre, car un homme adulte de tiO kil. peut avoir dans le corps 2 kil. de gly- cogène et davantage. On doit remarquer, en effet, que, jusqu'à présent, il n'y a pas une seule expérience pour nous indiquer quel est chez un homme bien nourri la quantité de glycogène con- tenu dans le corps. On a admis que dans le diabète du chien le sucre éliminé n'était pas représenté par la quantité de glycogène du corps, quoique cette quantité demeurât tout à fait inconnue, et on a fait un raisonnement tout aussi défectueux pour les expé- riences de Kulz. 378 GLYCOGÈNE. Il est bon de noter que, très nettement, rélimination du sucre croît avec la quantité de caséine qui est ingérée, de sorte qu'on est facilement conduit à croire à une relation directe. Mais on peut imaginer que, dans ce cas, le diabétique, lorsqu'il ne prend pas de la caséine, peut faire du sucre aux dépens d'une substance inconnue — et nous supposei^ons que c'est le glycogène — et l'oxyde; mais que, dès qu'on lui donne de la caséine, il ne se fait plus d'oxydation du sucre, lequel est alors ménagé et, par suite, éliminé en plus grande quantité. L'opinion que l'augmentation dans l'élimination du sucre dépend de la caséine est en contradiction avec un fait très significatif que Naunyn {Diabètes, p. 136-304, 1900; décrit de la manière suivante : Dans le diabète grave ce n'est pas seulement la privation complète d'aliments, mais encore l'alimentation avec des matières albuminoïdes et de la graisse, c'est-à-dire avec des substances qui ne contiennent pas d'hydrates de car- bone, qui détermine pendant quelques jours l'arrêt de la glycosurie. Si l'alimentation par l'albumine supprime l'élimination du sucre, c'est une preuve que le sucre éliminé ne provient pas de l'albumine, mais bien des hydrates de carbone. Ce qui est très signi- ficatif, c'est que l'alimentation azotée ne fait pas disparaître immédiatement la gly- cosurie, mais qu'il faut plusieurs jours pour atteindre ce résultat. D'ailleurs, ce n'est pas dans tous les cas que disparaît ainsi la glycosurie. Mais, après l'institution d'un régime tel que celui qui a été indiqué par Naixyx [Nothnagers Path.n. Thcr, vu, 131, 1900), la glycosurie est fortement diminuée. On peut donc se demander si, dans ces cas, à l'insu du médecin, il n'y a pas eu quelques aliments hydrates de carbone dont le patient ait pu se nourrir, malgré la défense qui lui en a été faite. Le pain est le lahsal des diabétiques, dit B. Naunyn, {Ibid., p. 367). Les malades qui se trouvent soumis à une surveillance étroite reçoivent cependant quotidiennement la visite du médecin et de tout le personnel médical, et l'occasion peut leur être donnée de se procurer quelques petits pains. Mering {Deutsche Zeitschrift f. praktische Medizin, 1876, 432) dit que chez un diabé- tique qui, depuis quatorze jours, n'avait qu'une nourriture animale, il y avait encore o9 grammes de sucre dans l'urine. Kratschmer {Ak. W., lxvi, (3), 265, 1872) a trouvé 112 grammes chez un malade qui depuisdix-sept jours ne prenait que de la viande. Au contraire, Naunyn (/oc. c/<., 131) dit: Chez des malades soumis pendant huit jours à une alimentation absolument dépourvue d'hydrate de carbone, même dans les cas les plus graves, même en donnant jusqu'à 1 300 gr.de viande, je n'ai jamais pu constater une diminution de plus de 100 gr. de sucre. La limitation de la glycosurie par la suppression des aliments hydro-carbonés et par une alimentation albuminoïde ne peut s'expliquer que s'il y a une réserve d'hydrate de car- bone, réserve qui s'épuise progressivement si elle n'est pas renouvelée par de nouveaux apports d'aliments de cette nature. A cet ordre de faits, il faut rattacher les périodes diabétiques que Naunyn {loc. cit., 13o) a provoquées chez ses malades. A des malades atteints de diabète grave, il a donné du lactose, lequel, d'après Kûlz, peut être complètement assimilé. Après que ses malades furent rendus non glycosuriques par un régime convenable, on put leur faire prendre par jour 100 à ISO grammes de lactose sans provoquer d'élimination du sucre. Au contraire, il y avait presque toujours élimination de dextrose, en quantités de 20 gr. et plus par jour s'ils prenaient pendant cinq ou six jours des hydrates de carbone lévo- gyres. Il s'est trouvé que l'élimination de sucre augmentait de jour en jour, dépassant de beaucoup le nombre de jours pendant lesquels avaient été ingérés des hydrates do carbone. « Le fait est vrai, continue Nauxyx, pour le sucre de lait, qui, même à des doses de loO grammes, est supporté par les diabétiques atteints de diabète grave, à la condition qu'ils n'aient antérieurement pas rendu de sucre, sans que cela entraîne la glycosu- rie ; mais cependant l'absence de sucre ne se maintient pas, et le sucre éliminé con- tinue à croître et même à dépasser la dose de sucre ingérée. Ces faits rendent très vraisemblable que l'apport d'hydrates de carbone détermine une accumulation de ces substances dans l'organisme pour leur permettre d'être éliminés sous la forme de sucre diabétique quand il n'y a plus d'alimentation en GLYCOGÈNE. 379 29-:u oct. 31-1"' iiov 1-2 — 2-3 — 3-4 — 4-5 — 5-6 — 6-7 — 7-8 — K-9 - 9-10 — 10-11 — 11-12 — 12-13 — 13-14 — 14-15 — 15-16 — 16-17 — 17-18 — 18-19 — 19-20 — 20-21 — 2\-22 22-23 — 23-24 — ALIMENTATION. environ 150 gr. nutrose -|- 1 000 ccni. sérum. environ 70 gr. nutrose -1- 500 ccm. sérum. 100 gr. nutrose -\- 500 ccm. sérum. 125 gr. nutrose + 600 ccm. sérum. 125 gr. nutrose -|- 600 ccm. sérum. 140 gr. nutrose + 500 ccm. sérum. 150 gr. nutrose -t- 400 ccm. sérum. 200 gr. nutrosee. 150 " 150 — 150 . — 150 200 200 — 200 — 200 — 200 — 200 200 — 200 — 175 gr. caséine H + 15 gr. beurre. 175 gr. caséine H + 10 gr. beurre. (240 gr. caséine H' -f- 68 gr. beurre-. 90 gr. caséine H + 10 gr. beurre. 900 1500 690 1000 800 1000 950 1000 1100 Tsôô 1000 Tsoo 1190 1500 1200 1500 1490 2 000 1000 ICOO 1120 1600 1200 1700 1290 2 000 1460 2 000 1480 2 000 2 020 2 300 1700 2 000 1680 2 000 1940 2 200 1980 2 200 1700 2 200 1300 2 000 900 1500 600 1000 1120 2 000 15,7 10,1 12.3 15,2 16,4 17,2 18,5 22,8 20,6 21,2 17,9 19,0 21,8 25,5 25,9 27,6 24,3 55,8 25,5 27,1 26,3 24,2 18,2 12,4 16.0 0,90 0,85 1,45 3,20 2,24 2,70 2,40 3,35 1,60 2.35 2,40 2,40 2,90 3,00 3,10 3,25 3,00 2,95 3.00 2.55 3,00 3,00 4,45 2,10 0,25 0,35 0.30 0,20 0,30 0,55 0.35 0,40 0,25 14,5 32,0 33,0 40.5 36,0 50,3 32,0 37.6 38,4 to,s 58.0 60,0 02,0 80,5 67,0 05,0 64.9 72,0 62,0 (17,0 51.0 47.0 42,0 176. 1,07 0,93 1,45 3,06 ?,35 2,94 2,56 3,46 1,6C 2,30 2.37 2,50 3,02 3,01 3,25 3,72 3.58 3,45 3.00 3.60 3,53 3,38 3,37 4,56 2,47 ^ 'S. K a 16,1 9,3 14,5 30,6 35,3 44,1 38,4 51,9 33,2 36,8 37,9 42,5 60,4 60,2 65,0 85,6 71,6 69,0 60,0 79,2 70,6 67,6 50,6 45.6 49,4 1,0 0,9 1,2 2,0 2 2 2,6 2.0 2,3 1,6 1,' 2,4 2,5 3.1 3,0 2,7 1231,4 2,8 3.7 3,1 5 000 1, Toute la masse des excréments, desséchée, depuis le 1" jusqu'au 22 novembre, pesait 205 grammes. D'après deux analyses, il y avait 9,73 p. 100 et 9,81 p. 100 d'azote. 2. Au 21-22 novembre, la quantité d'aliments pesée ne fut ingérée qu'en partie, et ce qui restait fut ajouté le 22-23 novembre à une nouvelle quantité qui fut pesée. Toutefois, de ces deux portions réunies, le chien n'ingéra encore qu'une partie. Alors toute la masse fut reprise, desséchée, et extraite par l'éther, ce qui permit d'établir les quantités qui avaient été ingérées par le chien dans l'ensemble de ces deux jours. 380 GLYCOGÈNE. hydrates de carbone, et cela jusqu'à ce que toute f:;lycosurie ait fini par disparaître. Les observations de Kulz, de Mering, de Kratschmer et de Nauxyx s'expliquent faci- lement si l'on admet que chez un homme de 60 kgs, il peut y avoir aux dépens du g^lyco- gène contenu dans son corps élimination de 2800 grammes de sucre, ce qui fait par jour pendant trois semaines et demie une élimination quotidienne de 100. gr de sucre. Tel était l'état de la science il y a quelques mois. En d'autres termes, il n'existait pas d'autres preuves pour établir qu'il se fait du glycogène au dépens de l'albumine, et que le sucre éliminé dans le diabète ne provient pas des hydrates de carbone préformés. En 1904 parurent les travaux de Hugo Luthje, qui donnèrent à la question une direc- tion toute nouvelle en montrant que chez les chiens dépancréatisésle sucre qui est éli- miné ne peut pas provenir des hydrates de carbone préexistants. Et ce n'est pas, dans les expériences de Luthje, d'une petite différence qu'il s'agit, comme dans les travaux anté- rieurs oîi de faibles dilférences, dues peut-être à des erreurs expérimentales, ne pou- vant conduire qu'à des conclusions douteuses. Dans les expériences de Luthje, il s'agit de chiffres considérables, dont la signification ne comporte aucun doute. Le premier travail résumé de Luthje {Deutsches Archiv. f. klin. Med., lxxix, 499, 1904) a été complété par un autre, qui corrige certaines défectuosités du premier (A. g. P., cvi, 160, 1904). Ce travail de Luthje constitue un élément fondamental dans nos connaissances à ce sujet. Je dois donc donner textuellement ses paroles. « Les recherches expérimentales que j'ai faites sur des chiens privés de pancréas ont été poursuivies en satisfaisant à toutes les exigences de la critique de PplOger. La mesure de la déviation polarimétrique de l'urine a été prise avant et après fermenta- tion par un excellent appareil polarimétrique dont j'ai souvent constaté l'exactitude. En outre, chaque spécimen d'urine a été analysé par la méthode d'ALL[HN (Voir plus haut, p. 379, les tableaux analytiques). La nutrose qui servait à l'alimentation était, chaque fois, bouillie avec de l'eau. Le filtrat était examiné de manière à voir s'il ne contenait pas de substances réductrices, et le résultat a toujours été négatif. En outre, une partie de cette nutrose était mise à bouillir avec HGI ; dans le filtrat rendu alcalin on recher- chait aussi les substances réductrices, et cela toujours avec le même résultat négatif. « Pour contrôler la valeur de cette recherche, on a ajouté à la nutrose 1 p. 100 de farine, de lactose ou de saccharose, puis on l'a amené à un même degré de concentra- tion, et on l'a fait bouillir autant de temps (avec HCl) que les échantillons de nutrose préalablement employés ; alors l'épreuve de la réduction fut tout à fait positive. « Comme au début le chien ne voulait pas ingérer la nutrose pure, on dut d'abord la mélanger avec du sérum de veau. Plus tard, comme il est indiqué dans le tableau, on n'y ajouta que de l'eau et 20 ce. d'extrait de viande par jour. «Cet extrait de viande ne réduisait pas, et il donnait, pour 20 grammes, 2 grammes d'extrait sec. Cet extrait sec, bouilli avec HCl, donne ensuite la réaction des pentoses de ToLLE.Ns avec la liqueur de Trommer, mais la minime quantité d'hydrate de carbone qui est ingérée ainsi dans ces 2 grammes d'extrait sec n'est pas plus considérable que les hydrates de carbone contenus dans le sérum de veau des premiers jours, et ne peut jouer qu'un rôle insignifiant dans l'élimination du sucre chez le chien. « A partir du 19 novembre, le chien reçut, au lieu de nutrose, de la caséine pure qui fut préparée dans la fabrique de Merck, d'après la méthode d'HAMMARSTEN. « Si j'ai voulu remplacer la nutrose par des quantités équivalentes de caséine, c'est parce que le chien ne voulait plus la prendre, comme on le voit dans le tableau ci-joint. Même il ne prenait pas la caséine pure (probablement à cause de sa saveur acide), si l'on n'y ajoutait pas une petite quantité de beurre, ainsi qu'on peut le voir sur le tableau (voir page 379). « Au 23 novembre, on inlerrompitl'alimentation avec l'albumine ; parce que je voulais introduire dans l'expérience pendant quelques jours une alimentation avec glycérine. Le chien était en excellent état, et n'avait pas subi de réelle diminution de poids. Par malheur, j'ai été assez imprudent pour donner à ce petit chien en une seule fois 100 grammes de glycérine mélangée à du sérum. Au bout d'un quartd'heure, il se pro- duisit de violentes convulsions générales, et l'animal périt, malgré le lavage de l'estomac, des injections de sel, etc. GLYCOGÈNE. 381 « J'ai encore, à propos de ce chien, à noter ceci. Après deux jours de jeune, il fut opéré par moi le 24 octobre à o heures. Immédiatement avant l'opération, il pesait ;>800gr. C'est toujours moi qui ai préparé sa nourriture. « Au tableau ci-contre (p. 379), on peut voir les difl'érents détails cjui s'y rapportent. « Dans la colonne 3, le chiffre inférieur indique le degré de dilution de l'urine. Presque toujours l'urine était extraite par cathétérisme ; l'urine qui était rendue directement était recueillie dans sa cage. « Pour les calculs qui vont suivre, je prendrai pour base les chifTres trouvés par la mesure polarimétrique; car ils donnent les quantités les plus faibles. (c Pendant toute la durée de l'expérience, du 29 octobre au 23 novembre, le chien a éliminé en fait de sucre 1 176 grammes. « Gomme son poids immédiatement avant l'opération était de o 800 grammes, il s'en- suit, d'après les données de Pflûger sur le chiffre maximum de glycogène, gue sa teneur maximale en glycogène était de 5,8 x 40 = 232 grammes. Ces 232 grammes répondent à 257 grammes de sucre. « D'ailleurs, il m'a semblé qu'il y avait un parallélisme entre la quantité de sucre éli- miné et l'intensité de la consommation d'azote ; assez pour porter à croire à une rela- tion génétique de ces deux phénomènes. — Nous croyons que chaque fois qu'il y a plus d'albumine détruite, la quantité de sucre éliminé augmente. » Quoique je fusse persuadé de la certitude des faits annoncés par Luthje, il m'a semblé nécessaire de répéter cette expérience, d'importance extrême. Je résolus donc d'expérimenter sur un chien ayant subi l'extirpation, non pas totale, mais partielle, du pancréas. Comme Sandmeyer l'a montré, après cette opération, les chiens restent assez longtemps sans glycosurie ; de sorte que la plaie guérit, et qu'il n'y a pas à tenir compte des complications dues à des abcès. Le résidu du pancréas dégénère peu à peu, et il se produit alors un diabète bien caractérisé qui dure longtemps. Je veux donner ici les principaux faits relatifs à ces expériences. Pour le détail on se reportera au travail que j'ai publié à ce sujet (A. g. P., 1905, cviii, 115). La première grande difficulté fut de trouver un aliment albuminoïde non seulement dépourvu de graisse et d'hydrate de carbone, mais encore de nature à pouvoir être pris sans répugnance par les chiens et sans dommage pour leur digestions. D'abord, la préparation que nous avons employée fut la nulrose qui, même à forte dose, est facilement assimilable. Mais à cause de sa désagréable odeur, elle est repoussée par la plupart des chiens et n'est ingérée par eux que s'ils ont grand'faim ou si l'on ajoute un condiment qui en améliore le goût. J'ai fait toutes sortes d'essais à cet égard et constaté que les chiens qui, pendant un certain temps, avaient pris de la nutrose avec condiments, refusaient ensuite d'en ingérer davantage. Je fis alors cette découverte qu'il y a une viande que les chiens prennent volontiers, qui ne contient pas de glycogène et presque pas de graisse. J'ai trouvé, en effet, ce fait remarquable que, pendant tout l'hiver et même une partie du printemps, la viande cuite du cabillaud est complètement dé- pourvue de glycogène. J'ai fait sur cette viande, que je donnais comme aliment métho- diquement, la recherche du glycogène et je n'en ai trouvé aucune trace, ni par l'iode ni par la précipitation par l'alcool. Deux fois seulement l'iode m'a donné la coloration, et la précipitation par l'alcool m'a montré qu'il s'agissait seulement de 0,01 p. 100 de glyco- gène. D'ailleurs, il est possible que, au printemps et en été, par suite d'une alimentation plus abondante, cette chair du cabillaud puisse conteifir du glycogène. II est bon de remarquer que de gros moi"ceaux de cabillaud coupés au couteau furent mis à l'ébulli- tion dans de l'eau, de sorte que toute la viande se détachait facilement des os et qu'on pouvait la séparer de toutes les arêtes. Travail pénible, mais qui est nécessaire, et ■qui réussit, tandis qu'avec la viande de la morue, c'est plus difficile encore et presque impossible. Cette viande bouillie ne donne pas la réaction de sucre, tandis que l'extrait aqueux la donne. La recherche des glycosides dans cette viande de cabillaud bouillie n'a donné, d'après la méthode de P.vvv, que des résultats négatifs, cette recherche a été faite par mon assis- tant de physiologie Grube, qui ayant travaillé chez Pavy, a eu l'occasion de connaître exactement ses méthodes. Il n'a pu trouver aucun glycoside; de même mon assistant de chimie, Meckel, n'a pu discerner aucun glycoprotéide. 382 GLYCOGÈNE. Quant à la teneur en graisse de cette viande, le chiffre maximal a été de 0,55 p. 100, tandis que Konig {Nahrungs und Genussmittel, 2^ édit., II, 1904, 1447) donne comme moyenne de la chair de cabillaud cuite ou bouillie 0,5 p. 100, nous avons constamment enlevé avec soin les couches graisseuses sous-jacentes à la peau. Ce tissu forme une masse brune, molle, pulpeuse, qui se distingue facilement de la chair musculaire blan- che qu'elle recouvre. Du 18 janvier au 25 février, le chien de l'expérience 1 a rendu 1628 grammes de matière fécales sèches avec 123"'", 39 de graisse brute, par consé- quent 3ë'",2 de graisse par jour. Dans le même temps, la quantité totale de graisse con- tenue dans la viande de cabillaud et la nutrose était de 85,3, de sorte que l'ingestion a été de 3^''',2 parjour, et l'excrétion de 3s'',2 : ce sont des chiffres qui, dans ce genre de recherches, ne sont pas suffisants pour qu'on en tienne compte. La quantité sèche de cette viande a été en moyenne de 25,5 p. 100, chiffre très voisin de ceux que donne Konig. Il y a cependant des écarts de plus de 1 p. 100 que nous mentionnerons quand nous ferons les calculs. La substance sèche de celte viande de cabillaud cuite contenait de 15,2 à 15,4 p. 100 d'azote, et 4,24 p. 100 de cendres. On pouvait laisser cette viande dans la glacière et elle se conservait bien pendant 3 ou 4 jours. Avant de la donner aux animaux, on la réduisait en pulpe par une machine broyant très fin. Il est avantageux de mélanger la nutrose au cabillaud, car de cette manière on fait ingérer plus d'albumine. Si l'on mélange ces deux aliments dans une proportion telle que la quantité d'azote soit la même pour chacun d'eux, les chiens prennent volontiers ce mélange surtout quand la nutrose ne contient pas trop de savon, ce qui est souvent le cas. Cependant, dans le cours de cette expérience, au bout d'un temps plus ou moins long, il arrive que les chiens refusent presque toujours cette nourriture ; je fus donc forcé de leur donner uniquement du cabillaud. Voici comment ils étaient alimentés. Pour un chien de 8 000 grammes, on versait 500 ce d'eau froide et on ajoutait, en agitant, 100 grammes de nutrose par petites portions, en évitant qu'il y ait des grumeaux, et de manière à avoir une soupe uniformément épaisse. Je dois l'indication de cette préparation de nutrose à Luthje; j'ai essayé inutile- ment de faire prendre de la nutrose aux chiens d'une autre manière. Je suis très reconnaissant à Luthje de l'indication qu'il m'a donnée; cependant ce procédé à un grave inconvénient: c'est de faire ingérer aux chiens de grandes quantités d'eau; car, chose extraordinaire, ils ont l'habitude de boire beaucoup après avoir mangé, de sorte qu'ils prennent en somme de grandes quantités d'eau. C'est peut-être pour cette raison qu'augmente tellement la proportion d'eau de leurs tissus. Ce n'est point là une théorie, car, dans certaines analyses, il y a une augmentation vraiment surprenante de la quantité d'eau des muscles et du foie. J'ai observé jusqu'à 83 p. 100 d'eau dans le muscle frais; et cette condition rend fort difficile l'appréciation des changements de poids de l'animai. Dans la soupe de nutrose, on introduit, par petites portions, de la chair de cabillaud finement réduite en pulpe, et ou en fait une bouillie homogène. Mais tout cela ne suffit pas pour faire vivre le chien longtemps et en bonne santé. A la seule inspection des matières fécales jaunes et rendues plusieurs fois par jour en trop grande quantité, on voit tout de suite qu'elles consistent essentiellement en viande non digérée. La recherche microscopique montre beaucoup de fibres musculaires striées. La recherche de l'azote sur ces matières desséchées (après épuisement par l'alcool pour enlever les acides biliaires et "les graisses), donne une teneur en azote de 14,7 p. 100. Une fois, mon assistant Meckel a trouvé dans ces matières fécales desséchées, puis traitées par l'alcool bouillant, 15,263 d'azote. Sur les matières séchéesen présence d'un peu d'acide sulfurique et après épuisement par l'alcool, nous avons trouvé presque toujours des chiffres voisins de 14 p. 100 d'azote. Il est donc certain que les excré-" ments contiennent beaucoup de viande non digérée et qu'il ne doit se former que très peu d'ammoniaque par la décomposition de son albumine. Ceci prouve un fait qui, à ma connaissance, n'avait jamais été observé encore, qu'après l'extirpation du pancréas, la fonction de l'estomac est profondément troublée. J'ai anté- rieurement montré {A. g. P. 1899, lxxvii, 438"! que, chez des chats nourris avec de la viande et sacrifiés au bout d'un temps variable, on trouve cette viande dans l'estomac pendant vingt-quatre heures, et même plus longtemps, jusqu'à ce qu'elle soit complè- GLYCOGÈNE. 383 tement dissoute, tandis que dans l'intestin on ne trouve presque plus d'éléments orga- nisés. Mais ici on voit une très légère couche qui tapisse la surface de la muqueuse. J'ai fait récemment encore cette recherche avec Grube, sur des chiens nourris avec de la viande bouillie, et sacrifiés quelques heures après. Or on voit chez eux la même chose que chez les chats. Avec une différence cependant : la surface entière de la mu- queuse intestinale est tapissée d'une fine bouillie colorée en brun par de la bile demi- transparente et pour ainsi dire adhérente à la muqueuse. On y dislingue de petits amas à demi translucides que l'on reconnaît au microscope comme étant des fragments de muscles striés. Ces flocons, tout en diminuant à mesure qu'on descend dans l'intestin et que la couche adhérente à la muqueuse devent plus brune, indique le commencement de l'inflammation des matières fécales. Le chien diabétique vide son estomac dans l'in- testin par grandes masses avant que le produit alimentaire ait été préparé parla diges- tion gastrique. Et toute la masse demeure ainsi jusqu'au rectum sans qu'il y ait pour ainsi dire de digestion. Or Sandmeyer a prouvé que l'ingestion de pancréas crus introduits dans l'alimenta- tion améliore notablement l'assimilation de la viande. Le pancréas ne contient pas de glycogène ; mais il est très riche en graisse. Il me fallut donc prendre un chemin détourné pour en faire usage. Je pris du pancréas frais de bœuf finement haché, placé pendant quatre à six heures à l'étuve en présence de la solution physiologique du chlorure de sodium. Le liquide fut filtré sur du coton de verre, et, après refroidissement, filtré dans la glacière à plusieurs reprises, sur du papier dur, ce qui élimine toute la graisse ; on a alors une solution claire, presque dépourvue de graisse, qu'on conserve dans la glacière. J'ai dû déterminer, pour les introduire dans mes calculs, les proportions, trouvées dans les matières sèches, d'extrait éthéré et d'azote. Cet extrait pancréatique, mêlé à l'alimentation, a notablement favorisé l'assimila- tion de la viande. Cependant, au déljut, peu de temps après l'opération, malgré l'addition du suc pancre'atique à l'aliment, il y avait encore d'assez notables portions de viande qui passaient dans l'intestin sans avoir été digéi^ées, et cela môme alors (jue la blessure opératoire avait été entièrement guérie. Puis peu à peu ta quantité en diminuait dans les matières fécales, qui devenaient de plus en plus brunes, témoignant ainsi d'une meilleure assimilation de la viande. Alors je remarquai que des animaux se portaient fort bien par ce mode d'alimen- tation et augmentaient de poids jusqu'à l'apparition d'un diabète intense. Malgré une alimentation abondante et en dépit de tous nos soins, il se produisait une déca- dence rapide et générale dont on pouvait se rendre compte par la fonte des tissus adipeux et musculaires. J'ai souvent supposé que c'est au moment où le résidu de pan- créas reste dans l'abdomen non dégénéré encore, versant sa sécrétion dans la cavité abdominale ouïes vaisseaux, est atteint à son tour par la digestion intestinale, alors que le sang apporte au foie les zymases pancréatiques déversées avec la bile dans le duodénum. En effet, le foie a la propriété particulière de fixer les substances étrangères et de les éliminer avec la bile. Comme on connaît aujourd'hui d'extraordinaires exemples de l'accommodation de l'organisme aux conditions les plus étranges, mon hypothèse n'est pas indigne de considération. De telles accommodations ne peuvent se comprendre que d'après une mécanique qui n'est pas nécessairement liée à la conscience: elles agissent ainsi que la '^'jyji, laquelle ne se comporte pas comme paraissent l'exiger les excitations immédiates, mais comme l'ont déterminé les nombreuses excitations antécédentes. Ce qui confirme ma supposition, c'est le fait constaté par Glrber et Hallauer (Z. B., 1904, xlv, 372) que la caséine injectée dans le sang est éliminée par la bile dans l'intestin. Les chiens n'ont pas été sondés, car l'expérience devait durer plusieurs mois, et toute lésion dans les organismes diabétiques met la vie en péril. Comme ces animaux ne vident pas leur vessie complètement, les quantités quotidiennes de sucre et d'azote éliminées varient plus ou moins, mais, comme je prenais la moyenne des chiffres obte- nus pendant plusieurs jours, cela n'introduit aucune erreur dans mes conclusions finales. La mesure quantitative du sucre se faisait avant et après fermentation, par l'appareil polarimétrique de Landol 384 CLYCOGENE. Souvent, des analyses de contrôle furent faites avec la liqueur de Fehling, par la méthode de Soxhlet. Tout ce que j'ai constaté, c'est que le titrage donne un chiffre plus fort que la polarisation, de sorte que l'on doit considérer l'absence du glycogène par cela même comme établi. La durée de fermentation était de deux fois vingt-quatre heures. Quand il y avait de l'albumine dans l'urine, on l'éliminait par l'ébullition en présence d'une trace d'acide acétique. Le chien I eut constamment, jusqu'à sa mort, de petites quantités d'albumine. Les chiens II et III n'en eurent point. Quand le diabète fut plus intense, la réaction par le perchlorure de fer fut positive, et l'urine toujours acide. Les matières fécales étaient desséchées en présence d'une petite quantité d'acide sulfurique dilué, et l'azote dosé dans l'urine et les fèces, par la méthode de Kjeldahl. Expérience du 14 décembre 490i. Un chien bien nourri et gras, de 12 kilogrammes, à jeun depuis trente-six heures, fut opéré sur fna demande par mon collègue le profes- seur Oscar Wetzel, lequel fit l'extirpation partielle du pancréas. L'expérience fut faite sur l'animal anesthésié par la morphine et l'éther. La partie gastrosplénique et la tête du pancréas furent enlevées avec les portions adhérentes au duodénum, à l'endroit où débouche le canal de Wirsung. Ce canal fut plusieurs fois coupé et lié. On laissa dans la cavité péritonéale la partie gauche du pancréas placée entre l'orifice du canal de Wirsung et le duodénum. Les premiers jours après l'opération, vomissements fréquents, mais urine sans sucre. Au troisième jour, l'animal prend 100 grammes de viande de bœuf haché, 200 grammes le 17 septembre, 200 grammes le 20 septembre, et le 21 septembre 200 grammes avec 50 grammes de glucose, sans que cependant l'urine contienne de sucre. 24 septembre, 300 grammes de viande et 100 grammes de dextrose, l'urine contient ce jour-là 0,63 p. 100 de dextrose et 0,07 p. 100 le 25 septembre. Le 26 septembre, il n'y a plus de sucre, quoique l'animal prenne 300 grammes de viande et 50 grammes d'amidon. Le 27 septembre, 500 grammes de viande et 50 grammes de sucre : pas de glucosurie. On le nourrit avec de la viande et du pancréas cru. Peu d'appétit, pas de glycosurie, mais diminution de poids : il pèse 9*^,6 le 6 octobre. Le 5 octobre, il prend 450 grammes de viande, du pancréas et 500 grammes de lait, 0,18 p. 100 de sucre de l'urine. Par l'ingestion de viande, de pancréas et de lait, on fait apparaître d'une manière continuelle de petites quantités de sucre dans l'urine. Mais le poids augmente : n oct.. . . 14' gr. de glycogène, caractérisé par la très nette réaction de l'iode, glycogène qui fut dosé quantativement par l'inversion en glycose. Comme, d'après Bidder et Schmidt, un animal de 1 kilogr. contient 35 grammes d'azote, au début, ce chien (de 10 kil. 3), contenait donc 3605 grammes d'azote, repré sentant 2 253 grammes d'albumine. Par conséquent, le poids total de l'albumine de sou corps était inférieur à la quantité de sucre qu'il a produite. Cela prouve nettement que le sucre éliminé ne dérive pas du glycogène préexistant dans l'organisme, non plus que des glycosides qui se décomposent dans la désassimilation. Ce sucre éliminé provient donc ou de l'albumine de l'alimentation ou de la graisse qui préexiste dans le corps. Dans le diabète pancréatique apparaît un fait que l'on n'a jamais auparavant observé. Nous avons vu, en analysant tous les travaux antérieurs, qu'on n'était pas arrivé à provoquer la formation de glycogène par une alimentation azotée; autrement dit, qu'on n'avait pas pu augmenter la teneur du corps en hydrates de carbone. C'est le mérite de Luthje d'avoir établi que, dans le diabète pancréatique, l'alimentation azotée augmente l'élimination du sucre, même lorsqu'il n'y a pas d'hydrates de carbone dans la ration, même lorsqu'on ne peut pas faire entrer en ligne de compte les réserves orga- niques. J'ai pu constater ce phénomène, et même le rendre plus net encore que dans les recherches de Lcthje, en donnant, pendant plusieurs mois, une alimentation azotée sans hydrates de carbone, et en faisant croître énormément la production de sucre. Après l'extirpation partielle du pancréas par la méthode de Saxdmeyer, en laissant s'écouler un certain temps depuis le moment où il n'y a pas de sucre dans l'urine jus- qu'au moment où la glycosurie augmente graduellement, j'ai souvent observé que, si l'animal est laissé au jeune, quoique d'abord il produise du sucre, quand on lui donne de l'albumine, alors ce sucre disparaît complètement en quelques jours par le fait même du jeûne. On comprend bien maintenant une observation, jusqu'alors inex- pliquée, faite par les cliniciens. Chez beaucoup de diabétiques, la glycosurie disparait quand on les alimente avec des matières azotées sans hydrates de carbone, tandis que, chez d'autres malades, cette même alimentation augmente la glycosurie : les hydrates de carbone d'une part, et la graisse ou l'albumine, d'autre part. LuTiiJE dit que, dans le diabète pancréatique, le sucre produit vient de l'albumine l't non de la graisse. Je ne puis dire que cette affirmalion soit fausse. Toutefois elle n'est pas prouvée; encore. Dans l'état actuel de nos connaissances, il est plus probable que c'est la graisse; qui est l'origine du sucre. Luthje indique, pour appuyer son opinion, que ce n'est pas- une alimentation grasse, mais une alimentation azotée qui détermine la plus forte! élimination de sucre. C'est un fait que je lui accorde. Mais l'ingestion de phloridzine ne produit-elle pas une très forte glycosurie, quoique personne ne prétende que la phloridzine est une des sources du sucre? , ■ Comme Richardson {Médical Times and Gazette, 1862, I, 234) l'a découvert, comme Claude Bernard, Hesse, Friedberg et d'autres auteurs ont pu le ronstati-r (Schruder.;' D. in., Wùrtzburg, 1892; Graf Juan. D. in., Wùrtzbury, 1895), l'inhalation d'oxyde de; carbone détermine un diabète caractérisé qui dure plusieurs jours, et dans lequel il peut y avoir jusqu'à 4 p. 100 de sucre dans l'urine, sans que cependant il soit possible que l'oxyde de carbone soit l'origine directe du sucre. Même des poisons minéraux déterminent la glycosurie, comme, par exemple, les sels d'uranium (Cartier. Glycosunefi toxiques. Paris, 1891) ou le bichlorure de mercure. ' On peut donner encore beaucoup d'exemples pour prouver que diverses subslaiices,|| de constitution chimique très différente, peuvent provoquer la glycosurie sans cepen-' dant produire directement du sucre. Toutcela rend bien évident qu'on ne peut pa's dire, que l'aliment azoté est l'origine du sucre, parce que, chez un chien diabétique, cet aliment produit ou augmente la glycosurie. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. '2'Ù 386 GLYCOGENE. Quelle est donc la raison pour laquelle Luthie conclut de ses expériences que l'albu- mine est la substance mère du sucre des diabétiques? " Il me semble, dit-il, que le parallélisme entre la quotité du sucre éliminé et la quotité de l'azote désassimilé prouve qu'il s'agit d'une relation génétique entre ces deux phénomènes. Toujours le sucre va en augmentant à mesure que la désassimilation de l'azote va en augmentant. » Mais, à ces conclusions de Luthje on peut répondre que les poisons ont une action d'autant plus intense qu'ils sont introduits en plus grande quantité. Si l'albumine de l'alimenta- tion exerce, par ses produits de dédoublement, une action spécifique sur la production de sucre, il n'y a pas de surprise à constater que cette action augmente avec la quantité de la substance active. C'est seulement lorsqu'on aura établi une proportionnalité rigou- reuse entre la production du sucre et les échanges de l'azote que l'on pourra affirmer cette proposition fondamentale. Or cette proportionnalité n'a pas encore été établie en général, mais seulement pour une période déterminée du diabète pancréatique. Mi.\- KOwsKi a pensé que le quotient —, c'est-à-dire le rapport entre la quantité de sucre (D) et la quantité d'azote urinaire éliminé en même temps (N), est un chiffre constant, voisin de 2,8. « Il se trouve, ditMiNKOwsKi (A. A. P., xxxi, 1892, 97), qu'en supprimant les hydrates de carbone de la ration, le sucre continue à être éliminé par l'urine en restant dans le même rapport avec la quantité d'azote éliminé aussi par l'urine, de sorte que la quantité de sucre dépend de la destruction des albumines de l'organisme. >' Ce rapport, d'après Minkowski, varié de 2,62 à 3,05. 11 dit cependant lui-même qu'il existe de grands écarts dans ce chiffre, de 0,41 à 7,71 [loc. cit., p. 100). L'opinion de Minkowski se fonde sur l'extirpation totale du pancréas, laquelle amène toujours la mort de l'animal dans l'espace de deux ou trois semaines ou plus, parce que, dans ce cas, les abcès qui se produisent ne tendent pas à la guérison ; mais, si l'on pratique l'opération d'après la méthode de Saisdmeyer, ce qui évite la complication des abcès, et ce qui ne détermine la mort qu'au bout d'un très long temps, même de plusieurs mois, alors on peut observer, après une alimentation exclusivement azotée, sans hydrates de cai'bone et sans graisse, que le quotient ^ est inférieur à \, au début, DATE. 14 au n janv . . . 18 — 30 — . . 31 janv. -15 févr. . 16 — 20 — . 21 févr. 26 — . 27 — 4 mars. 25 févr. au 8 mars 10 mars — 20 — 21 — — 25 — 26 — — 3 avril 4 avril — 6 — 15-20 déc, 21-25 — 26-30 — nOHBRE DE JOURS de la période. 13 11 10 3 POIDS MOYEN du chien en gr. INCESTIOli d'azote par jour en gr. ELIMINATION d'azote par jour (en gr.)'. Urines. I Fèces. CHIEN 10 (moyenne) CHIEN 16 (moyenne) 4 025 3 675 3 350 3 156 3 086 20,58 22,20 24,00 20,7 15,1 17,6 19,5 17,4 9,1 CHIEN H (moyenne) 6 300 22,8 21,5 5 900 27,0 23,7 5 270 27,3 24,5 4,7 3,7 4,3 3,6 3,3 5,4 3,4 (5,*) SUCRE EXCRÉTÉ par jour en gr. 27,5 37,4 28.0 16,1 10,4 35,5 32,4 33,8 BILAN DE l'azote. — 4,1 — 2,1 (— 2,6) 4 8 580 15,2 13,2 4,2 27,8 — 2,2 2,10 13 8 350 27,9 24,6 2,5 55,9 + 0,8 2,27 16 8 300 36,1 30,8 4,1 69,8 + 1,2 2,26 5 8 200 36,8 31,1 6,3 71,2 — 0,6 2,29 6 8150 39,1 31,0 6,3 47,3 + 1,8 1,52 6 7 070 88 16,2 4,5 33,3 + 11,9 2,20 + 0,78 + 0,90 + 0,30 + 0,30 7 1,8 2,1 1,5 0,9 1,1 1,65 1,36 1,40 GLYCOGÈNE. 387 pendant la période dans laquelle il n'y a pas de sucre urinaire; tandis que, plus tard, ce chiffre croît, monte à 2,3, pour tomber ensuite au-dessous de 2, et même se rapprocher de 1 . Ce notable abaissement du quotient se remarque quand la graisse a déjà notable- ment disparu, et même quand la désassimilation azotée continue avec la même intensité. Les chiffres du tableau ci-dessus (page 38G) extraits de mon grand travail sur le diabète pancréatique, prouvent que, par une alimentation albuminoïde et absolu- ment exempte de tout hydrate de carbone, le quotient - n'est pas constant, et qu'il est bien inférieur à ce qu'indique Mixkowski. On trouvera dans mon mémoire [A. g. P., cvni, 136, 174, 182), tous les détails nécessaires. Mais il y a aussi des faits qui prouvent que, malgré l'absence totale d'hydrate de. carbone dans la ration, le quotient — est tellement plus fort que le chiffre 2.8 donné par- MiNKowsKi, que cela contredit absolument l'hypothèse que l'albumine est la source du- sucre. D'après Stiles et Lusk [Am. J. of Pfiys., x), quand un animal n'a pas d'hydrates de carbone dans sa ration, le quotient est entre 3.40 et 3.89, que l'animal soit à jeun ou qu'on le nourrisse avec de la viande, de la caséine, de la gélatine ou de la graisse. Ici, il faut mettre en première ligne une expérience importante de Rumpf, Hartogh et ScHUM (A. A. P., XLv, 17). A un gros chien de 60 kilos, qui fut mis au travail forcé et sounùs à une alimentation convenable, de manière qu'il contînt le moins possible de glycogène, pendant 23 jours, on injecta de la phloridzine assez pour lui donner un diabète très intense, et on le nourrit avec très peu d'albumine et beaucoup de sucre, de telle sorte que l'échange d'azote restât très faible. Période du l" au 4" jour : Quotient — 2,3 — 5'' au 9" — — 4,4 — 10» au 14" — — 6,1 — 15° au 19« — — 9,1 — 20° au 23"' — — 4,1 Même, à un certain jour, le quotient a été de 13. Si l'on admet que tout le carbone de l'albumine détruite, abstraction faite de l'urée éliminée, a été transformé en sucre, on voit que 100 grammes d'albumine ont donné 112,0 gr. de sucre; mais cela ne ferait monter le quotient que jusqu'à 7, et non à 9 ou 13, parce que, dans cette expérience, le quotient est d'autant plus élevé que le diabète est établi depuis plus longtemps et que les quantités de sucre éliminées sont plus grandes. Cela rend difficile d'admettre que le croît de ce quotient est lié à une des- truction croissante de glycogène. En effet, Mkri.n'g [Zeitsch. f. klhi. Med., 1889, xvi, 435} a prouvé que, sous l'action de la phloridzine, chez un chien à jeun, le glycogène du foie diminue plus que dans le jeune ordinaire. Mais, lorsque l'alimentation est abondante, d'après Mering, la teneur du foie en glycogène diminue aussi notablement par le fait de l'ingestion de phloridzine. Une expérience de Luïhje; donne un exemple classique de ce même fait. Chez un chien piivé de pancréas, l'alimentation avec de la glycérine et du sérum sanguin provoqua une si intense excré- tion de sucre que le quotient T. monta à 10, et même à 14, 6, et cela à un moment de l'expérience où l'on ne pouvait plus trouver de glycogène dans le corps. Je reviendrai plus tard sur certains détails de cette expérience. Les cliniciens ont aussi souvent signalé des cas dans lesquels des diabétiques nourris pendant longtemps uniquement avec de l'albumine et de la graisse ont un quotient i^ qui atteint 10 et plus. Théodore Rumpf {Berl. klin. Woch, 1899, n° 9j signale des cas très intéressants de ce genre. Malheureusement, pour affirmer qu'il n'y a pas d'aliments hydrocarbonés dans la ration des diabétiques, il faut admettre que le médecin n'a pas été trompé; maison ne peut avoir là de certitude scientifique. Donc il est certain que, dans le diabète, même en l'absence prolongée de tout hydrate de carbone alimentaire, il ne 388 GLYCOGENE. D peut être question de la constance du quotient -. Ces grands changements dans le quo- tient — (expériences de Rumpf avec la graisse, de Luthje avec la glycérine, de moi avec l'albumine) autorisent à en chercher l'explication dans les nombreuses origines possibles du sucre, d'autant plus qu'il est prouvé aujourd'hui que ces origines sont multiples. On ne doit donc pas dire albumine ou graisse, mais peut-être albumine et graisse, de sorte que, selon les conditions, c'est tantôt un de ces éléments, tantôt l'autre, tantôt tous les deux qui entrent enjeu. Hugo Luthje donne encore une autre raison pour indiquer que le sucre des diabé- tiques vient de l'albumine; c'est que, dans le diabète pancréatique, la quantité de sucre éliminé est telle qu'elle ne peut pas provenir de la graisse, mais bien de l'albumine. Si cela était exact, nous aurions ici la solution du problème. J'ai déjà montré plus haut que 100 grammes de graisse peuvent produire au maximum 100 grammes de sucre. Un chien très gras de 10 kilogrammes, contenant 48, 8 p. 100 de graisse, pourrait donc, avec la graisse de son corps, produire 8 790 grammes de sucre, c'est-à-dire à peu près autant que son propre poids. Mais, jusqu'à présent, dans aucune expérience, on n'a observé une élimination aussi élevée de sucre après une alimentation sans hydrates de carbone et sans graisse. Dans la célèbre expérience de Luthje, un chien de 5 800 grammes a produit 919 grammes de sucre, que l'on ne peut, d'après Luthje, attribuer aux hydrates de carbone. D'après les calculs faits plus haut, il aurait pu, avec sa graisse, produire, au maximum, 5 104 grammes de sucre; par conséquent, cinq fois davantage qu'il n'en a produit. Mon chien diabétique de 10,3 kilogrammes a produit .3 091 grammes de sucre; il aurait pu produire au maximum 9 064 grammes, c'est-à-dire trois fois davantage. La teneur en graisse de 45,8 p. 100 du poids du corps que j'ai [adoptée se fonde sur les tableaux de Kôxig {Nahrungs und Genussmittel, 4" éd., 1903, i). Récemment mon assistant, K. Môgkel (A. y. P., 1905, cviii), a déterminé la quantité de graisse d'un chien moyennement gras, et il a trouvé 26 p. 100 du poids du corps. On peut objecter à mon expérience que le sucre produit dans l'organisme dépasse la quantité de sucre qui est éliminée par l'urine, parce qu'une partie de ce sucre est oxy- dée. Mais on ne sait pas si tel est le cas dans le diabète pancréatique grave; et on ne peut dire si la suppression d'une alimentation azotée diminue la formation de sucre ou en augmente la destruction par oxydation. Par conséquent ce reproche n'est guère valable. Il faut remarquer que, dans mon expérience, 200 grammes des savons de l'ali- mentation n'entrent pas en ligne de compte, car on ne peut savoir quelle est l'étendue de la résorption dans ce cas. Le chien de Sandmeyer (Z. B., xxxi, 50) de 8 470 grammes avait produit 4 190 grammes de sucre, mais il aurait pu en produire 7 433 gr. 5 ; par conséquent le double. Dans cette expérience, on voit que les hydrates de carbone et les graisses qui entraient dans l'alimentation de ce chien peuvent suffire, d'après mes calculs, pour expliquer toute la quantité de sucre éliminé. Jusqu'à présent, je n'ai pas encore pu réussir à déterminer, chez des chiens privés de pancréas et abondamment nourris d'albumine, une élimination de sucre assez abon- dante pour qu'il ne soit plus possible de l'attribuer à la graisse. Plus tard, je reviendrai sur ce point. Je n'ai pas encore traité a question de savoir comment on peut, dans le diabète pan- créatique, expliquer comment l'élimination en sucre croît avec l'alimentation azotée, mais on doit supposer possible que la désassiinilation des matières azotées facilite la transformation de la graisse en sucre, en permettant à l'oxygène de se fixer sur la graisse. Une autre explication peut être adoptée. Dans une alimentation mixte, toute inges- tion d'albumine détermine nécessairement une économie dans la consommation de la graisse et des hydrates de carbone; et par conséquent elle diminue l'oxydation des hydrates de carbone. Peut-être, chez des diabétiques, l'excitation exagérée des centres nerveux glycoso-formateurs amène-t-elle la production de plus de sucre qu'il ne peut en être oxydé ; mais, dans ce cas, l'on introduit une plus grande quantité d'albumine qu'auparavant; l'oxydation du sucre est diminuée, et, comme la production resterait la même, l'élimination irait en croissant. L'engraissement des animaux et l'augmenta- Sucre le jour de Sucre l'alimentation aux jours spéciale. suivants. 29,3 19,3 19,5 3,6 8,48 2,45 10,05 2,45 3,26 7,00 7,9 3,00 18,9 6,2 CLYCOGÈNE. 389 tion de la graisse et des hydrates de carbone de leur corps, telle qu'en détermine une augmentation dans la ration azotée, dépend, comme je l'ai montré, non de ce que l'albu- mine se change en graisse et en hydrates de carbone, mais de ce qu'elle épargne la con- sommation de ces aliments ; elle est oxydée en leurs lieu et place et, par conséquent, les protège contre la destruction. Récemment, G. Embden et H. Salomon ont publié, sur ce point, des travaux d'extrême importance {Zeitsch. f. die gesammte Biochemie, v, 507, 1904 et vi, 63, 1904). Ces physio- logistes ont, pour la première fois, prouvé, d'une manière irréprochable, que des chiens privés de pancréas, recevant dans leur alimentation des acides amidés, avaient alors une élimination de sucre énormément plus considérable. Ils ont employé à cet elîet l'ala- nine, l'asparagine et le glycocolle, comme le montre le tableau suivant. Sucre avant l'alimentation. spéciale en grammes Substances. par jour. Alanine 16,000 Id 6,2 Asparagine 1,7 Glycocolle 1,79 Id 2,45 Id 2,45 Alaninc 2,o0 Neuberg, Laxgstecn, Rodolphe Gohn et Frédéric Kraus ont montré que les acides amidés pouvaient être l'origine des hydrates de carbone de l'organisme, mais j'ai con- testé dans une discussion détaillée la valeur des preuves qu'ils invoquent à cet effet {A. çi . P. 1903, cm, 41). Il est remarquable de voir les produits azotés du dédoublement des matières protéiques, diminuer la glycosurie autant que le font les matières protéi- ques elles-mêmes. Cela rend bien vraisemblable que, dans les deux cas, le processus est analogue. Mais la principale signification de la découverte de Embden et Salomon est la sui- vante : Quand nous donuons de la nutrose, c'est-à-dire de la caséine, nous supposons que cette substance ne contient aucun groupe hydrate de carbone, parce que toutes les méthodes analytiques n'ont donné à cet égard que des résultats négatifs. Cependant il est certain qu'une partie de l'albumine donne par hydratation des produits dont l'ori- gine chimique nous est inconnue. Qu'on se réfère aux travaux de Emil Fischer et Abder- H.\LDEN (Z. p. C, 1901, XXXIII, 151; 1904, xxlii, 541; 1905, xun, 23); de Skraup (Z. p. C, 1904, xLii, 273) et de Abderhaldex et P. Ro.\a (Z. p. C, 1905, xliv, 204). Il est de fait que, dans les divers glycoprotéides, les hydrates de carbone combinés à la molécule d'albumine résistent à l'hydrolyse d'une manière très différente. On peut donc supposer qu'il y a dans la caséine un petit groupe hydrocarboné qui se détruit complètement quand la caséine est dédoublée. Ce qui confirme cette supposition, c'est que, d'après mes recherches, l'albumine peut donner deux fois plus de sucre que, d'après Minrowski, on ne le supposait. 100 grammes d'albumine donnent 24 grammes de sucre. Si le groupe (donnant du sucre) qui se trouve dans la caséine, n'est pas un hydrate de carbone, mais un hydrocarbure, alors il n'y aurait que 12 p. 100 de la caséine qui pourrait participer à la formation de sucre. Quoique ce soit là un chiffre faible, on peut toutefois admettre que, malgré toutes les analyses de caséine, il y existe un composé pouvant donner du sucre, et par conséquent pouvant expliquer la glycosurie. Après que Embden et Salomon ont éliminé de la molécule d'albumine les composés (acides amidés) qui produisent la glycosurie, sans qu'il puisse y avoir le moindre doute sur la constitution chimique de ces substances, toute hésitation a été supprimée. Il a été prouvé que les groupements moléculaires dont est formée l'albumine peuvent, sans être des hydrates de carbone, et sans en contenir, déterminer l'élimination de grandes quantités de sucre, comme l'albumine elle-même. L'hypothèse que la cellule animale emploie les acides amidés, comme le glycocolle, 390 CLYCOGÈNE. pour fabriquer avec eux du sucre, indiquerait une puissance synthétique extraordinaire, qui ne pourrait être admise que si nous avions des preuves formelles, meilleures que toutes celles que nous possédons jusqu'ici. De la désamidation des acides amide's ■devraient résulter des acides oxy-amidés contenant le i^roupe oxy-méthylène, qu'il fau- drait alors regarder comme l'élément fondamental et le noyau des hydrates de carbone. Ainsi la cellule transformerait ces substances pour en faire du sucre. Certes, ce n'est pas impossible, mais ce n'est guère vraisemblable, parce que les groupements oxy-méthy- ièniques, qui se trouvent dans certains hydrates de carbone, soit le sucre de canne, le sucre de lait et les pentoses, ne peuvent pas être assimilés par la cellule animale. 11 faudrait alors admettre que, par exception, les groupements oxy-méthyléniques, prove- nant de la transformation et de la substitution des méthylamines de la molécule pro- téique, ont une manière d'êtr>; à part, et peuvent former le noyau de l'hydrate de car- bone. Il y a seulement cette difficulté que dans l'albunine, l'azote, en majeure partie, ne se trouve pas à l'état d'amide, mais sous une autre forme. Mais il faut encore, pour expliquer le croît de la glycosurie par une alimentation «xclusivement azotée, tenir compte du fait suivant. Dans toute alimentation mixte, l'ingestion d'albumine a pour premier effet d'épargner la combustion des graisses et des hydrates de carbone. Peut-être chez le diabétique, à la suite de l'excitation des centres nerveux, se forme-t-il alors plus de sucre qu'il ne peut en être oxydé. En faisant ingérer plus d'albumine, on diminue l'oxydation de ce sucre, et alors évidemment l'élimination de sucre augmente. Si l'on fait engraisser un animal et qu'on augmente ses hydrates de carbone, en lui donnant plus de matières azotées, ce n'est pas, ainsi que je l'ai montré, parce que l'albumine se change en graisses et hydrates de carbone, mais bien parce qu'elle brûle en leur place, et alors les protège contre l'oxydation. Résumons maintenant les raisons principales qui semblent s'opposer à cette hypo- thèse que l'albumine sans hydrates de carbone peut être l'origine du sucre. 1° J'ai donné l'analyse technique et critique des travaux qui ont paru jusqu'ici, et j'ai montré que nulle part ne se trouve un fait établissant que le sucre vient de l'albumine. Il n'y a que dans le domaine du diabète pancréatique que se trouvent des faits récemment établis qui pourraient nous faire croire que l'albumine donne des produits de dédou- blement qui fournissent du sucre ; 2" Si, dans le diabète pancréatique, l'ingestion d'albu- mine ou des acides amidés augmente l'élimination du sucre, d'autre part, beaucoup de substances ont la même action, sans pouvoir prendre part directement à la formation. Cela est prouvé rigoureusement par le fait que certaines substances qui produisent la glycosurie ne contiennent pas d'azote, comme, par exemple, le bichlorure de mercure, le chlorure de sodium, les sels d'uranium, etc. Gela est prouvé aussi, parce que la quantité de sucre produit est beaucoup plus considérable que ne peut l'expliquer la quantité de carbone contenue dans ces substances mêmes, et parce qu'enfin il s'agit ^ans doute d'une action sur le système nerveux qui augmente l'élimination du sucre. Quand donc une substance, chez un diabétique, augmente l'excrétion sucrée, il faut •savoir si c'est une action directe ou indirecte. Cette proposition s'applique évidemment -aussi à l'albumine et aux acides amidés ; 3° 0. Minkowski a énoncé ce fait que, dans le diabète, l'azote et le sucre sont éliminés dans un rapport constant; mais j'ai pu obtenir des diabètes pancréatiques qui duraient bien plus longtemps que ceux de Mi.nrowski, et j'ai pu prouver que cette proportionnalité alors n'existe plus, môme dans le diabète pancréatique, celui sur lequel cependant Minkowski se fonde pour établir sa propo- sition. Par conséquent, laraison fondamentale manque, qui pourrait nous faire admettre que l'albumine est la véritable origine du sucre dans le diabète; 4° Luthje pense que dans le diabète la quantité de sucre éliminé en l'absence d'une alimentation hydrocar- bonée est trop grande pour qu'on puisse l'attribuer à la graisse ; et que, par consé- quent, le sucre provient de l'albumine. Mais, en me fondant sur les travaux de Sand- MEYER et sur une longue recherche personnelle, que je n'ai pas publiée encore, j'ai prouvé qu'on n'a pu arriver jusqu'ici à faire éliminer des quantités de sucre plus grandes que ne pourrait l'expliquer la quantité dégraisse contenue dans le corps; 5" Si les acides amidés, et notamment les acides acéto-amidés agissent réellement par leur propre molécule pour faire croître l'élimination du sucre, il faudrait d'abord admettre une pre- iinière transformation : CLYCOGÈNE. 391 H H I I H — C — CO.OH + H^O = H — C - GO.OH + AiII-i I I A3H2 OH le groupe C H 0 H contenu dans l'acide glycolique (acide oxy-acétique) et le groupe oxy-méthylique pourraient, en se polymérisaut, se transformer en glycose. L'acide lycolique, par la fixation d'un atome d'oxygène, deviendrait de l'oxy-méthylène C0 2 + OH 2. Ce même processus aurait lieu, dans les acides amidés homologues, de la même manière; mais nous avons des preuves très nettes, données à nous par les transforma- tions organiques, que la cellule ne peut pas employer les groupes oxy-méthylèniques qu'on lui donne pour en faire du glycose. Le sucre de canne et le sucre de lait, lorsqu'on les injecte dans le sang, passent en totalité dans l'urine; les pentoses ne peuvent pas se transmuter en glycogène, ainsi que les hydrates de carbone bien définis qui contiennent le groupe oxy-méthylène. Il serait donc bien invraisemblable que cette transformation put se faire pour les acides oxy-amidés ; c'est une forte présomption contre l'hypothèse que l'albumine est une des origines du sucre ; 6" On voit que toutes les raisons ci-dessus suffisent à prouver que la production du sucre dans le diabète aux dépens de l'albumine n'est pas prouvée. J'accorde cependant que ces expériences ne prouvent pas le contraire. Les nouvelles recherches de la sérothérapie doivent nous donner à réfléchir, parce qu'elles prouvent que la cellule vivante, dans certaines condi- tions, produit des substances, et fait des opérations chimiques qu'elle n'avait jamais produites encore. Pour se protéger contre des différentes toxines, l'organisme produit des antitoxines différentes. C'est donc un motif excellent pour nous mettre dans l'état d'esprit ']*u-/^t) nutr.z^y.ri d'ÂRisTOTE. Par l'extirpation du pancréas, on produit des troubles spéciaux dans l'organisme, et il est possible que l'organisme réagisse par de nouvelles réactions, car c'est seulement dans le diabète pancréatique qu'on observe des faits qui, jusqu'alors, n'avaient pas été vus dans l'histoire des transformations des hydrates de carbone. Mais les physiologistes n'étudieront la question à ce point de vue que lorsqu'ils n'auront pas d'autres moyens à leur disposition. Après avoir montré toutes les raisons qu'on peut donner contre l'hypothèse que l'albumine est l'origine du sucre des diabétiques et les avoir réfutées, je vais donner les raisons pour lesquelles on peut montrer que la graisse est l'origine de ce sucre. Formation du sucre aux dépens de la graisse. — Examinons donc, puisque aucun fait n'établit que le sucre provient de l'albumine, s'il ne proviendrait pas du sucre. Comme, dans aucun cas, l'apport de'graisses à l'alimentation n'augmente la glyco- surie, même dans les diabètes graves, tandis qu'au contraire, en des conditions très diverses, une alimentation azotée fait aussitôt croître la glycosurie, on a considéré comme très simple de conclure que le sucre vient de l'albumine et non de la graisse. Mais c'est là une conclusion erronée, et il importe d'éclaircir les faits et de faire disparaître les difficultés qui jusqu'ici nous ont empêché d'admettre que la graisse est l'origine du sucre. Je dois d'abord rappeler certains principes fondamentaux de l'échange matériel dans les tissus vivants. Le corps vivant ne peut pas être comparé à un vaste foyer qui brûle d'autant plus qu'on lui fournit plus de matériaux de combustion.il oxyde, quelle que soit la quantité des matériaux qu'on lui apporte, uniquement la quantité qui lui est nécessaire pour le fonctionnement des organes. Les matériaux de combustion, s'ils lui sont donnés en trop grande quantité, demeurent inutilisés, et servent à l'engraissement. Par consé- quent, ce qui détermine la quantité du travail de nos organes, ce n'est pas la quantité des matériaux qu'apporte l'alimentation, mais la quantité des matériaux qui sont utilisés. Nous devons d'abord penser à la découverte importante de Karl Voit, que j'ai constatée et développée; c'est que l'échange des graisses s'arrête si une quantité suffi- sante d'albumine est introduite dans la ration. Alors l'animal ne vit que d'albumine, et cela aussi longtemps qu'on le veut. Or cette condition i\e se rencontre que chez les. 392 CLYCOGENE. carnivores, et encore seulement dans certaines circonstances spéciales, tandis que jamais elle n'apparaît chez les omnivores et chez les herbivores. La quantité d'albumine que les omnivores prennent dans leurs aliments ne suffit jamais à satisfaire tous les besoins de leur organisme; elle ne peut pas suffire, parce que chez eux, les puissances digestives ne sont pas suffisantes à transformer toute l'albumine qui serait alors néces- saire. Aussi les échanges, chez les omnivores, se font-ils toujours aussi aux dépens des graisses ou des hydrates de carbone. Mais, ici encore, les proportions consommées sont très différentes, car la graisse et les hydrates de carbone ne sont détruits que dans la proportion nécessaire à la nutrition, c'est-à-dire pour être le complément de la ration alimentaire indispensable, que l'albumine à elle seule ne peut représenter. Or, comme les aliments et, par conséquent, l'albumine ingérée, varient chaque jour, les quantités consommées de graisse et d'hydrates de carbone sont chaque jour très différentes. Par conséquent, l'échange des graisses et des hydrates de carbone dépend, en première ligne, de la quantité d'albumine que nous ingérons, et elle leur est inversement propor- tionnelle. Nous pouvons donc dire : La grandeur de l'échange d'albumine est déterminée par la grandeur de l'ingestion d'albumine, tandis que la grandeur de l'échange des graisses est absolument indépendante de la grandeur de l'ingestion des graisses. Ces considérations expliquent certaines particularités dont on ne pouvait se rendre compte quand on n'admettait pas qu'il se formait du sucre aux dépens de la graisse. Si la graisse ne modifie pas la quautité du sucre éliminée par le diabétique, c'est que la quantité de graisse qui est employée par l'organisme ne peut pas dépasser une certaine limite, et que nous ingérons toujours plus dégraisse que cela nous serait nécessaire pour atteindre cette limite. Comme l'ingestion de graisse n'a pas d'autre effet que d'augmenter la réserve des quantités de graisse non employées, les quantités de giaisse que l'organisme diabétique transforme en sucre ne dépendent aucunement de la quantité de graisse ingérée ou tenue en réserve. Il est d'abord essentiel d'établir que, chez les plantes, la formation du sucre aux dépens de la graisse est chose prouvée. Comme il s'agit là d'un phénomène général d'oxydation, d'après la constitution chimique de la graisse, et que les lois générales de la vie des animaux et des plantes sont les mêmes, c'est déjà une très forte induction en faveur de cette opinion que les animaux peuvent faire du sucre avec leur graisse. Le 30 mai 1859, Julius Sachs {Ueber das Auftreten der Stcirke bei der Kcimung idhaltiger Samen. Bot. Zeitung, 1859, 177-185) a publié deux mémoires importants, dans lesquels il réunit tous les faits de physiologie végétale qui démontrent la transformation de la graisse en amidon, en sucre et en cellulose. Les données de Sachs sont aujourd'hui uni- versellement acceptées. Seegen {A. g. P., 1886, xxxix, 140) raconte que le professeur WiESNER, directeur de l'Institut botanique de Vienne, lui a fait connaître une expérience fondamentale qui montre la transformation de la graisse dans les graines, riches en graisse, de certaines plantes. Si l'on fait germer des graines contenant de l'amidon dans un tube fermé sur le mercure, le volume du gaz ne change pas, tandis que, si l'on met des graines oléagineuses, le mercure monte dans le tube, ce qui indique que le volume du gaz a diminué. Ce phénomène est dû à une absorption d'oxygène, lequel est nécessaire à la transformation de la graisse en amidon. La graisse de la graine finit par disparaître complètement, et l'amidon s'accumule dans les cotylédons. Dans l'obscurité, les graines oléagineuses germent encore, mais les cotylédons meurent et sont colorés en bleu. Cette expérience a été montrée par le professeur Wiesner à Seegen. Peters {Landesversuchs Stat., 1861, 111), Boussingaulï (C. R., 1864, lvhi) et d'autres ont donné diverses expériences confirmatives. Comme les phénomènes des échanges organiques, si l'on ne tient pas compte des phénomènes de synthèse que provoque la lumière solaire, sont les mêmes chez les ani- maux et chez les plantes, d'une manière générale, et, comme, pour le passage de la graisse en sucre, il s'agit d'un phénomène non de réduction, mais d'oxydation, il devient probable que le travail chimique de la cellule animale peut oxyder et transfor- mer en hydrates de carbone, non seulement la glycérine, mais encore les acideg gras. Donc je répondrai à Luthje que la formation du sucre aux dépens de l'albumine n'a encore été prouvée ni chez les animaux, ni chez les plantes, tandis que la transformation de la graisse en sucre a été démontrée. GLYCOGÈNE. 393 D'ailleurs on connaît quelques faits qui prouvent que, dans le règne animai aussi, il peut y avoir transformation de la graisse en hydrates de carbone. D'après Couvreur {B. B., xlviii), chez les chenilles, au moment de la transformation de la chrysalide, du glycogène se forme aux dépens de la graisse. C'est ainsi que pour- rait s'expliquer le fait caractéristique établi par Maria de Linde.x {Ueber die Athmung der Scfmietterlingsgruppen [Sitzungsber. Ges. f. Nat. u. Heilkiinde in Bonn, 6 févr. 1905]), que, pendant la période d'hibermation de la chrysalide du Papilio podalirius, le quo- tient respiratoire tombe à 0. Là, en effet, comme dans les graines oléagineuses qui ger- ment, il y a absorption d'oxygène sans production d'acide carbonique. Chez un chien très gras que j'ai laissé jeûner pendant 28 jours, il y avait dans le foie encore 4,785 p. 100 de glycogène, calculé comme sucre. Le foie, qui pesait 307 grammes, contenait donc 24,26 grammes de glycogène, calculé en sucre. Or, comme ce chien, après un jeûne de 28 jours, contenait encore dans ses muscles 19,97 p. 100 dégraisse, il est vraisem- blable que ces deux exceptions reconnaissent la même relation causale. Peut-être faut-il rappeler ici le fait établi par xVthanasiu et moi (A. g. P., lxxi, 1898, 318 et Lxxiv, 561) que, chez les grenouilles en hibernation, le glycogène reste à peu près inattaqué, tandis que la graisse disparait. J'ai donné ces différents faits qui, en eux- mêmes, ne sont pas contradictoires; car ils semblent nous montrer la voie dans la- quelle il faut probablement marcher pour faire des expériences qui réussiront à donner une démonstration normale. En effet les recherches faites jusqu'ici pour montrer que le sucre a la graisse pour origine n'ont pas réussi, parce que les expérimentateurs n'avaient pas pris les précautions nécessaires. Nous devons donc nous demander com- ment de la graisse totale du corps peut provenir le sucre. Or, dans l'organisme, il y a souvent des processus cycliques. Dans l'intestin, la graisse neutre se transforme eu acides gras et en glycérine, et, dans la cellule épithé- liale, elle retourne à sa constitution initiale aux dépens de ses produits de dédouble- ment, car l'hydrolyse et l'éthérification sont deux phénomènes qui se succèdent. Dans le foie, nous voyons le sucre redevenir du glycogène, alors que la même cellule trans- forme de nouveau le glycogène en sucre. La cellule pancréatique hydrolyse ou éthérifie, selon les conditions. Ne s'agit-il pas là de lois générales? Est-ce qu'on ne peut pas dire qu'à côté de la transformation du sucre en graisse neutre, il y a la transformation de la graisse neutre en sucre? Ici, il n'est pas question de simple hydrolyse ou de simple éthèrification. Comme l'ont montré les expériences de Max Bleibtreu (A. g. P., lvi, 464,1894; et lxxxv, 345, 1901), la formation de graisse aux dépens du sucre est un processus analogue à celui de la fermentation alcoolique. Une partie de la molécule est oxydée en formant de l'acide carbonique, l'autre partie est réduite. Il s'agit essentielle- ment d'un transport intra-moléculaire des atomes d'hydrogène et d'oxygène qui amè- nent la destruction de la molécule sucrée par une oxydation et une réduction simulta- nées. Dans la formation des graisses aux dépens du sucre, il y aune oxydation, puisqu'il se forme de l'acide carbonique; il y a une réduction, qui est la formation de graisse. H est important d'étudier la mécanique de cette formation du sucre, pour pouvoir conclure, par analogie, au mécanisme chimique de sa formation dans l'organisme. La molécule d'un acide gras est une chaîne de carbone qui contient 18 atomes, et peut-être davantage encore, tandis que la molécule de sucre ne contient que 6 atomes. Donc cette longue chaîne de 18 atomes de carbone doit se diviser en des chaînes plus petites, à 6 atomes seulement. Nous avons, pour la dislocation de cette chaîne, un bon exemple dans la fermentation alcoolique, oîi une chaîne de 0 atomes de carbone se partage en quatre parties, par l'oxydation de 2 atomes de C qui deviennent C0-. Le schéma suivant rend clair ce mécanisme de la fermentation alcoolique : H rf H U f %H II I 1 M I V I I H — c — c— c — C — c — C*»^ I I M I V I II ^ 0H0/0 0\0 C I II \^ H H H H 394 GLYCOGÈNE. Les flèches indiquent la direction que prennent les divers atomes dans la fermenta- tion. On a alors : H H H H Il II H — C — C — H C02 C02 H - C — C — H Il II OH H H OH alcool. 2 mol. alcool, d'acide carbonique. Ces migrations des atomes qui divisent la molécule de sucre en quatre fragments sont, suivant moi, l'œuvre de l'activité vitale de la cellule de la levure. Le .suc qu'on extrait de la levure par la presse contient encore des portions de substance vivante, même si les cellules ne sont pas tout à fait intactes. La soi-disant zymase contenue dans la levure est certainement formée par de petites particules du corps cellulaire, encore vivantes. Toute la physiologie générale des nerfs repose sur des expériences faites avec de petits fragments nerveux sectionnés, qui sont constitués par des substances cellulaires. Car ce cylindre-axe n'est qu'une partie de la substance nerveuse cellulaire qui garde sa puissance vitale, malgré bien des mutila- tions, pendant plusieurs heures et même pendant plusieurs jours. Et, si cette comparaison ne suffisait pas, il faudrait prouver qu'il n'y a pas dans la zymase'de combinaisons éthyliques capables de donner de l'alcool par leur dédoublement ou qu'il n'y a pas de bactéries qu'on n'a pas décelées dans les solutions fermenlescibles. Toute cette histoire merveilleuse des zymases est encore trop énigmatique pour qu'on puisse l'admettre tout entière. De même que la molécule de sucre est brisée par l'oxydation de C qui devient CO-, de même est brisée la longue chaîne d'atome de carbone des acides gras. Voici comment nous pouvons comprendre la formation de radicaux alcooliques par l'hydrolyse et l'oxydation. J'ai prouvé que cette fixation de CH se produit dans l'orga- nisme, en voyant que la bouillie hépatique, mêlée au sang, transforme le phénol en pyrocatéchine : je me représente les deux atomes d'hydrogène, voisins des oxhydriles du phénol, comme oxydés et donnant de l'eau, de manière à mettre en liberté deux atomi- cités des deux atomes de carbone : H H I I C = C H H / \ Il H — C C — H C=^C ^ ^ ^^^ / \ C— C +o=H— c C-+OH I I ^ // 0 H C — C — + OH I I H 0 Phénol + oxygène. | H H H I I C= C / \ H — C C — H Pyrocatéchine. ^ // C— C I I 0 o ^ i Nous allons voir encore un autre exemple intéressant de la fixation de CH sur un carbure d'hydrogène. Voici la chaîne de carbone contenue dans un acide gras : H H H H H H H H C-C- 1 1 -C — C- 1 1 -C- 1 _C-C-C— 1 1 1 À il i k A  il i 1 2 3 4 0 C 7 8 GLYCOGÈNE. 395 Al(irs un atome d'oxygène emporte l'hydrogène de 1 et 2 de manière à faire de l'eau, et les atomicités de 1 et 2 deviennent libres, dans le stade 11. n HHHHHHHH H — C — C — C — C — G — C — C — C — o H H H II H H II H 1 2 3 4 d 6 1 8 0 0 0 H H H 1 2 3 L'hydrogène des groupes 2 et 3 est fixé alors par l'oxygène, et les atomicités devenues libres sont saturées par OH, comme on voit dans le stade III. III ■ HHHHHHHH H — C — C — C — C — C — C — C — C — I I I I I I I I OOHHHHHH H H 1 2 3 4 5 6 7 8 Les choses se passent de même pour le stade IV, l'hydrogène des groupes 3 et 4 est pris par l'oxygène, et les atomicités correspondantes du carbone saturées par les élé- ments OH. a b IV. HHHHHHHH H_C — C — C — C — C — C — C — C — I I I I I I I I H H H H H 4 5 6 7 8 c Si nous supposons que la fixation de OH va jusqu'à l'atome 5 de carbone, inclusive- ment, nous arrivons aux atomes 6 et 7 où l'oxydation se fait autrement. Les deux atomes d'hydrogène a et fe, les atomes 6 et 7 de carbone sont fixés par l'oxygène, et un second atome de carbone s'unit à l'atome 6 de carbone, de manière que la molécule de sucre ainsi formée constitue uu corps saturé, à fonction aldéhydique. L'atome 7 de carbone s'unit à 0 pour former de l'acide carbonique, et l'hydi'ogène C de l'atome 7 se combine à l'atome 8 de carbone, de sorte qu'un nouveau processus peut continuer à s'établir pouc former de même une nouvelle molécule de sucre. C'est pourquoi une molécule d'acide stéarique (ou d'acide oléique) qui forme une chaîne de 18 atomes de carbone donne deux molécules de glycose, deux molécules d'acide carbonique et une molécule d'acide butyrique, laquelle donnera ensuite l'acide B oxybutyrique. Une molécule d'acide palmitique, qui est une chaîne à 16 atomes de C, donnera deux molécules de glycose, deux molécules d'acide carbonique, et une molécule d'acide acétique. Peut-on dire maintenant que je n'avais pas le droit de nier la formation de sucre aux dépens des acides amidés, qui sont une partie de la molécule d'albumine ? Après la désamidation des acides moaoaminés nous avons un acide gras. D'après Baumanx (Z. p. C, IV, 304 et Berl. Ber., xii, 145, et xiii, 279), la désamidation dans l'organisme se pro- duit de la manière suivante : La tyrosine i 0^ ; C«H4 G2H3C02H devient acide hydroparacumarique G6H* et de l'acide oxyphénylacétique G»iH^ AzH^ OH G^H^CO^H OH GH2G02H 290 GLYCOGÈNE. Et, si le H de la chaîne latérale est remplacé par AzH-, elle devient de Talanine. Il s'agit donc d'une réduction. D'après les recherches de Ble>!dermann (Z. p. C. vi, 256)., la tyrosine donne de l'acide oxyphényllactique et de l'acide oxyhydroparacumarique ( OH C6H* I C2H3C02H OH. Ici la désamidation se fait par l'hydrolyse'; comme aussi, d'après Baumann, pour l'acide oxyamygdalique C6HI ^ ^^ " ( CHC02H I OH. Neuberg et Langstein (A. P., 1903, Suppl. 514) ont donné à des lapins à jeun de l'alanine et ont pu observer dans l'urine la présence de grandes quantités d'acide lacti- que dérivant vraisemblablement de l'hydrolyse et de la désamidation de l'alanine due sans doute aux phénomènes de putréfaction qui se passent dans l'intestin. Je ne fais aucune objection à cette hypothèse, car, dans la putréfaction, il s'agit encore de l'ac- tion de substances vivantes. P. Maver (Z. p. C, 1904, xlii, 59) a encore, pour prouver l'hypothèse de la formation de sucre par l'albumine, fait à trois lapins des injections sous-cutanées d'acide diaminopropionique, et constaté dans l'urine la présence d'une petite quantité d'acine glycérique. Ainsi l'hydrolyse avait produit une double désamida- tion. Mais l'expérience de Meyer n'est pas démonstrative; car il n'a fait qu'une seule analyse du glycérate obtenu, et il n'est pas prouvé qu'il n'y a pas dans l'urine normale des traces d'acide glycérique. On a fait beaucoup de recherches avec les acides aniidés pour prouver qu'ils peuvent, dans l'organisme, se transformer en hydrates de carbone. Si l'on examine sans préjugé la question, on voit que, certainement, il ne se produit pas d'hydrates de carbone aux dépens des acides amidés, qui constituent un des éléments de la molécule d'albumine. C'est ainsi qu'il faut juger les expériences de Frédéric Muller, actuellement professeur de clinique à Munich, lequel a dit que la leucine (acide amido-caproique) était un des premiers éléments formateurs du sucre. La critique de ces expériences est importante, car on peut se demander si les mêmes réactions se produisent dans l'alimentation nor- male que dans le diabète pancréatique. C'est là une question que je n"ai point encore traitée. Rodolphe Cohn (Z. p. C, xxviii, 1898, 211-218), en donnant de la leucine à des lapins, a toujours vu qu'il se formait alors une grande quantité de glycogène dans leur foie, et l'augmentation est parfois de 400 p. 100. Glycogène du foie 0/0 : 1,16; 1,80, chez l'animal témoin. — ; 4,60; 2,3, (?), 2,1 ; 2, 8; (chez l'animal ayant reçu de la leucine). On devrait en conclure que la formation de sucre aux dépens de la leucine est, par ce fait, prouvée d'une manière éclatante. Mais ce serait une grave erreur; car, dans des conditions qui paraissent identiques, les quantités de glycogène contenues dans le foie varient en des proportions considérables, et il ne suffit pas de faire deux expériences de contrôle, comme l'a fait R. Cohn. En outre, R. Cohn n'a pas dosé le glycogène du corps: or, comme l'a montré Athanasiu, [A. g. P., lxxiv, 1899, 511), dans l'empoison- nement par le phosphore, la graisse du foie s'accroît beaucoup, tandis que la quantité de graisse du reste du corps ne change pas. L'expérience de R. Cohn ne prouve donc rien. Qu'il en soit vraiment ainsi, c'est ce que prouve un travail fait par Oscar Smox {Z.p. C, XXXV, 315, 1902) dans le laboratoire de N. Zuntz. Il a fait disparaître le glyco- gène chez des lapins en les empoisonnant par la strychnine; puis il leur a donné, par la sonde, de 15 à 18 giamnies de leucine. Or, en cherchant le glycogène par la méthode de Ffluger, il n'en a trouvé ni dans les muscles, ni dans le foie. Frédéric Kraus [Berl. klin. Woch., 1901, n° 1, p. 7) a répété et confirmé sur le chat cette expérience de 0. Simon et J. T. Halsey [Americ. J. of Phys., x, 229, et C. P., 1904, 251) en donnant de GLYCOGÈNE. 397 grandes quantités de leucine à des chiens rendus diabétiques par laphloridziiie : il a vu qu'il ne se produisait pas de sucre. La question a été renouvelée par la conception de Fischer, lequel a admis que les acides amidés forment peut-être une chaîne à trois atomes de carbone, très analogue à la chaîne des hydrates de carbone. Un élément constant de la molécule d'albumine est de fait i'alanine CHs— CH— AzH-— CO-H. Neuberg et Langstein {A. P., 1903, :H4) ont alors entrepris de donner de I'alanine à des lapins à jeun. Ils disent avoir obtenu ce résultat surprenant qu'il se fait une accumulation de 1 ou 2 grammes de glycogène dans le foie, « sans tenir compte du glycogène des muscles ». Mais cette accumulation n'est cependant pas aussi considérable que l'accumulation consécutive à l'ingestion de leucine dans l'exemple de Cohn, puisqu'alors on trouve de 2,3 à 4,6. Cependant cette donnée, surprenante, d'après Neiiberg et Langstein, a été constatée aussi par Oscar Simon et Frédéric Kraus; et elle devrait paraître bien plus surprenante encore. En réalité, que veut dire celte accumulation de 1 à 2 gr. de glycogène dans le foie, lorsqu'on sait qu'il peut y en avoir jusqu'à 19 p. 100, et que, dans des conditions sem- blables, les variations individuelles peuvent être énormes? On ne peut s'appuyer sur deux expériences d'animaux pris comme témoins, parce que le hasard joue là un très grand rôle, et je ne puis comprendre comment on publie de pareilles recherches dans un journal scientifique. On n'a donné ni le poids de l'animal, ni celui du foie. Le poids des lapins sur lequel on expérimente varie de \^«,'} à 4 kilogrammes, de sorte que, si le poids du foie représente 3 p. 100 du poids du corps, il pèse de 45 à 120 grammes. Si le foie ne pèse que 46 grammes, il contiendrait 2,2 à 4,4 p. 100 de glycogène, et seule- ment 0,8 p. 100 s'il pèse 120 grammes. Ainsi un foie qui contient de 0,8 à 4,4 p. 100 de glycogène serait un foie où du glycogène s'est accumulé; et même, s'il s'agit de lapins de grande taille, le foie avec accumulation de glycogène aurait 0,8 p. 100 de glycogène. On sait cependant que le foie peut en contenir vingt fois davantage. D'ailleurs Neuberg et Langstein ne semblent pas avoir fait d'expériences de contrôle, car ils ne parlent pas de la quantité de glycogène contenue chez les animaux témoins. Ils n'ont pas dosé non plus le glycogène du corps. Par conséquent, la défectuosité de leur expérience est complète. Frédéric Kraus, un des auteurs qui ont soutenu le plus énergiquement l'opinion que le sucre provient de l'albumine, a récemment étudié la question de savoir si I'alanine introduite dans l'organisme peut produire du glycogène. Il a pris deux groupes de chats qu'il a nourris de la même manière, il a sacrifié les animaux du premier groupe et dosé le glycogène de tout le corps. Les animaux du deuxième groupe ne recevaient pas de nourriture. Il leur donna de la phloridzine, et pendant quelques jours de I'alanine et de la leucine. Le tableau suivant donne les résultats de Kraus, en grammes de glycogène (calculé en glycose), pour 100 grammes du poids du corps. ANIMAUX DE CONTRÔLE sacrifiés au début de l'expérience. CONTENANCE en GLYCOGÈNE. ANIMAUX RECEVANT de la phlorétine, et à jeun. QUANTITÉS DE SUCRE ÉLIMINÉES DANS l'uRINE en glycogène du corps. DURÉE de l'expérience en jours. 1 2 3 4 5 0,2637 0,3793 0,2414 0,4900 0,1983 1 2 3 4 5 0,5887 1,2282 ) .. ,, , . 0^7724 ) •-•gi'-flalaninepai-jour. 0,3272 1 gr. deleucine par jour. 0,4356 8 6 5 5 0 Si l'on compare les animaux ayant reçu de I'alanine (2 et 3), on voit qu'il y a chez eux un léger accroissement du glycogène qui peut, vraisemblablement, êlre dû au hasard. Si ce n'était pas le hasard, on pourrait supposer que, sur les animaux de 398 GLYCOGENE. contrôle, on ne connaît que le glycogène, non la masse totale des hydrates de carbone, et penser que le sucre provient de la glycérine ou d'une autre substance. Les expériences de Cohn avec la leucine donnent de plus grandes différences, mais qui peuvent être encore 'fortuites. Sans leucine : 1,16; 1,80. Avec leucine : 4,60; 2,30; 2,1 ; 2,8, pour le glycogène du foie. Kraus {Berl. Mm. Woch., 1904, n° l, p. 8) a fait encore une autre expérience avec l'alanine sur un chat, mais il reconnaît qu'ellejlui a donné un résultat négatif, et cepen- dant il cherche à éliminer ce résultat manifestement négatif à l'aide de raisonnements particuliers. Il dit, en etFet, en relatant cette expérience négative : « Mon résultat a été négatif, sans que je puisse me l'expliquer, mais cela tient peut-être à ce que je n'ai pas employé l'alanine active, préparée avec la soie; cependant je tiens les deux expé- riences précédentes pour positives. » D'ailleurs Kraus donne des raisons pour montrer que, dans les expériences néga- tives faites avec la leucine; il s'agissait d'une nutrition défectueuse de la cellule. « Ces expériences apprennent, dit-il, qu'il n'est pas absurde au point de vue biologique et au point de vue chimique de chercher les constituants de l'albumine ^ qui produisent le sucre normalement ou pathologiquement — dans les produits amidés de dédoublement, qui n'ont pas par eux-mêmes la constitution des hydrates de carbone. 11 est vraisemblable que cela nous fournira des données non seulement sur les stades préparatoires de la formation du sucre, mais encore sur la manière dont la cellule de l'organisme élabore telle ou telle partie de la chaîne du carbone, sur le mécanisme du dédoublement de la molécule, ainsi que sur les produits intermédiaires de sa destruction (énantiomorphie). Aussi les divers monosaccharides présentent-ils de notables différences dans leurs pro- cessus de fermentation. Seuls les triases, les hexoses, les nonoses, fermentent rapide- ment, mais les pentoses, non. Parmi les nombreux hexoses, tous ne sont pas fermen- lescibles. Il y a une différence notable entre le glycose cl, le fructose d et leur antipode optique, mais les microrganismes savent bien, sit venia ver6o, distinguer entre ces formes énantiomorphes. On voit de telles séparations se faire entre les acides tartriques d'acti- vité optique différente; par exemple, le Penicilium glaucum respecte l'acide tartrique gauche et s'accroît aux dépens de l'acide tartrique droit. Certaines cellules, par exemple, les cellules secrétoires du rein des animaux supérieurs, éliminent plus facilement la forme racénique que les corps qui en dérivent. Comme l'a montré Brion, après introduction de glucose, l'urine est, en général, optiquement négative, quoique ses composés ne soient pas, avec la même facilité, détruits dans l'organisme. Nous pouvons donc, au point de vue de la stéréophysiologie, continuer ces recherches sur la transformation des acides amidés chez les diabétiques, parce que cela nous permettra d'aller plus loin, de faire dériver les hydrates de carbone des hydrates de carbone et des hydrates de carbone seuls ; mais en donnant à la conception de l'hydrate de carbone une forme toute différente, et ici disparaît toute la difficulté de concevoir que la glycérine et l'alanine forment du glycogène, mais que les pentoses ne peuvent en produire. » On voit par cette citation que, pour expliquer les résultats négatifs des expériences faites avec la leucine, Frédéric Kraus a atteint les régions les plus élevées. La leucine qu'il donna n'avait pas la constitution convenable de la leucine; et les cellules animales savent, comme nous l'appi-end Frédéric Kraus, distinguer entre la bonne et la mau- vaise configuration de la leucine. Malheureusement, c'est le hasard qui fait qu'on leur attribue l'une ou l'autre forme. Mais Kraus n'a oublié qu'un point : la formation de sucre aux dépens de la leucine devi-ait prouver qu'il se forme de la leucine aux dépens de l'albumine ; et la caséine, qui contient oO p. 100 de leucine, devrait avoir la structure chimique convenable à la for- mation du sucre, mais les expériences décisives de SchOndori'f, qui a nourri des grenouilles avec de la caséine, ont prouvé, en toute certitude, qu'alors il ne se produit pas d'hydrates de carbone dans le corps. Blumknth\l et Wohlgemuth ont confirmé le fait. Il s'agit ici d'animaux à sang froid, ce que je ne regarde point comme constituant une «liff'érence essentielle. Mais il y a des expériences sur les animaux homéothermes, faites parE. KuLz et d'autres auteurs, dans lesquelles la nutrition avec la caséine n'a provoqué GLYCOGENE. 399 aucune formation de glycogène. J'ai montré plus haut (A. g. P., 1903, xcvu, 227) que nul ne peut parler dans ce cas de glycogène formé aux dépens de la caséine, et cepen- dant les acides amidés doivent avoir leur bonne structure chimique dans les matières alburainoïdes alimentaires. Il est donc certain que les acides amidés ne fournissent pas de sucre. Les expérimentateurs que j'ai cités plus haut sont arrivés à cette conclusion que les acides amidés doivent être désamidés pour se transformer en sucre. Alors le sucre pro- viendrait des acides gras; la leucine donnerait de l'acide caproique; l'alanine, d.i l'acide propionique. Se formerait-il du sucre, si à la place de la leucine, on donnait de l'acide caproique; à la place d'alanine, de l'acide propionique? Ces recherches, et d'autres, analogues, ont été faites, en 1903, par Leo Schwartz. Un point essentiel dans cette étude, c'est que, si l'on introduit des acides gras dans l'alimentation diabétique, ils apparaissent alors sous la forme d'acétones dans l'urine. Geelmuyden a réuni sous le nom de corps acétoniques l'acide oxy-butyrique, l'acide acéto-acétique et l'acétone [Z. p. C, 1897, xxxu, 431). S'appuyant sur les recherches de Welntraud (A. P. P., XXXIV, 169), de Rosenfeld {Centralbl. f. innere Med., 189o, 51), de HiRSCHFELD {Zeitsch . f. klin. Med., 189ô, xxxiii, 176), et de Geelmuyden (Z. p. C, 1897, xxin, 473), on peut dire que la présence de corps acétoniques dans l'urine est notablement diminuée ou même supprimée quand, à côté des acides gras, on introduit dans la ration beaucoup d'hydrates de carbone ou beaucoup d'albumines; toutes condi- tions qui diminuent l'échange des matières grasses. Un fait qui concorde avec cette opinion, c'est qu'en supprimant les hydrates de carbone et les matières azotées, et en donnant seulement des acides gras comme aliments, on fait croître, même chez les individus normaux, la production de l'acétone dans l'urine. Ainsi il est prouvé que les acides gras sont l'origine des corps acétoniques, et, lorsque ces corps se produisent en abondance, cela montre que les échanges se produisent surtout aux dépens de la graisse. Comme cela a été prouvé par les recherches de Leo Schwartz [loc. cit., 252), ce sont surtout les acides gras à poids moléculaire peu élevé qui sont les origines des corps acétoniques: à savoir l'acide caproique, surtout l'acide valérianique et l'acide butyrique, mais jamais l'acide propionique. Déjà, en 1898, Thkodore Rumpf [Bcrl. klin. Woch,, 1899, n° 9, Comm. du 27 octobre 1898) a montré que, chez un diabétique dont l'urine ne contenait pas d'acide oxy-butyrique, il suffisait de donner par jour 50 grammes de butyrate de soude pour voir apparaître aussitôt l'acide oxybutyrique dans l'urine, acide que Rumpf considère comme un des produits d'oxydation du butyrate ingéré. Au con- traire, les acides gras à poids moléculaire élevé, comme l'acide stéarique, l'acide palmi- tique, l'acide oléique, ont une action si faible qu'il est bien douteux qu'ils aient quelque relation avec la formation de corps acétoniques. Les nouvelles recherches de Leo Schwartz semblent montrer cependant que, dans certaines conditions, ces substances peuvent exercer encore une petite intluence sur la formation d'acétones. Le mécanisme de cette transformation des acides gras en acétones est du plus grand intérêt. Aussi faut-il insister un instant sur ce point. HHHO HHHO I I I II I I I II H — C — C — C — C— OH-f-0 = H — C — C — C— C — OH I I I I I ' I H H H H 0 H Acide Ijutvrique. | H Acide oxy butyrique. Nous avons ici une excellente preuve pour montrer comment se peut faire par la vie chimique des cellules une oxydation dans des groupes de la chaîne de carbone. J'ai déjà parlé plus haut d'un processus analogue pour un corps de la série aromatique; transformation du phénol en pyrocatéchine. Je pense que c'est une réaction chimique analogue que l'on doit supposer ici; ce qui donnera une base solide à l'histoire de la transformation des acides gras supérieurs en sucre. 400 GLYCOGENE. Le passage de l'acide p-oxybutyrique en acide acétique se l'ait essentiellement - comme l'oxydation de la glycérine. HHHO HOHO I I I II I II I II H — C — G — C — C — OH + 0 = H — C — C — C — C — OH + 0H2 III II H 0 H H H Acide acéto-acétique. Le passage de l'acide acéto-acétique en acétone s'accompagne de formation de CO'-. H Acide j3-oxybutyrique. HOHO H 0 H I II I II I II I H — C — C — C — C — OH = H — C — C — C — H + C02 II II H H H H C'est un pi^ocessus tout à fait analogue à la destruction de la tyrosine dans l'intestin; l'acide hydroparacuminique donne du parétliylephénol; l'acide paroxybenzoïque donne du phénol. En examinant avec soin les expériences de Léo Schwarz, j'ai pu constater que nulle part il n'y a augmentation du sucre urinaire après ingestion de ces acides gras. Chez un malade atteint de diabète grave, l'ingestion d'acide propionique a donné les résultats suivants : Jours de Sucre l'observation. Ingestion de en gr. 1 » 98 2 100 gr. d'acide oléique 86 3 30 — — propionique. 101 La toute petite augmentation de sucre qu'on a constatée ainsi est tout à fait dans la limite des erreurs expérimentales. Quant aux corps acétoniques, ils ont monté dans de telles proportions que l'on ne peut pas penser que le sucre dérive des acides gras infé- rieurs. Plus haut, j'ai déjà indiqué que ce sont seulement les chaînes de carbone contenant au moins six ou sept groupes méthyliques qui peuvent être transformées en sucre. On peut d'ailleurs penser qu'il en est de même pour la caséine de Skraup, et pour les acides diamino-trioxy-dodécaniques de Fischer et Abderhaldex. Ma conception de la formation du sucre aux dépens de la graisse est celle d'une réaction chimique qui, se produisant à peu près toujours de la même manière, permet de comprendre que de grandes quantités de sucre peuvent dériver de la graisse. Au contraire, dans l'hypothèse de la formation du sucre aux dépens de l'albumine, on ne peut pas admettre que les divers groupements atomiques de l'albumine organisée puis- sent devenir du sucre. Celte hypothèse est en contradiction avec tous les faits expéri- mentaux bien obsei'vés, qui démontrent que, dans l'organisme vivant, les matières pro- téiques ne peuvent pas. être changées en hydrates de carbone. Aussi dois-je considérer que, du moment que les hydrates de carbone préformés ne suffisent pas à expliquer la formation du sucre dans le diabète, il s'ensuit nécessairement que le sucre est formé par la graisse. En faveur de mon hypothèse sur la formation du sucre aux dépens de la graisse, on peut invoquer aussi la facilité qu'on trouve alors à expliquer la formation des corps acétoniques. Il est juste de rappeler encore que Théodore Rcmpf (Hartogh et 0. Sghumm. .4, P. P., XLV, M) se fondant sur son importante expérience du diabète par la phloridzine, a déjà admis que le sucre dérivait de la graisse, et non de l'albumine. Il faut répondre encore à une objection que l'on pourrait faire. Dans les recherches de L. ScHWARTz, l'ingestion de substances grasses augmente les phénomènes d'oxydation chez les diabétiques, tandis que, comme je l'ai montré plus haut, les aliments gras ne GLYCOGÈNE. 401 changeutpas les pliénofhènes d'oxydation cellulaire. A vrai dire, on doit penser que les subs- tances grasses qu'a employées Léo Schwartz ne sont pas de la graisse, mais des produits d'oxydation et de dédoublement, ainsi que la glycérine. Ils sont oxydables comme la glycérine, tandis que les graisses ne le sont pas. Il est donc de grande importance de constater que les acides gras supérieurs introduits dans l'alimentation, acides gras qui constituent la partie principale des graisses, ne jouent, d'après Leo Schwartz, aucun rôle dans les pbénomènes d'échange chez les diabétiques. S'ils agissent à un faible degré, c'est que la non-oxydation des graisses introduites dans les aliments ne doit pas être considérée comme une loi absolument rigoureuse, car Karl Voit a prouvé que, si l'on introduit de la graisse dans la ration avec l'albumine, cette graisse épargne quelque peu la consommation de l'albumine. C'est là un fait assez extraordinaire. Lorsque la graisse, dans le cours normal des échanges organiques, abandonne les tissus où elle se trouve pour passer dans le sang et de là arriver aux organes où elle doit se transformer, on peut supposer que la très fine émulsion des graisses alimentaires absorbées dépasse un peu la quantité dégraisse qui à l'état normal va dans les organes, et que, par conséquent, cet apport détermine une légère augmentation de l'oxydation de la graisse. C'est ainsi que je crois pouvoir répondre à l'objection. Il n'y a pas de fait pour établir qu'il se fait du sucre aux dépens des acides gras à poids moléculaire peu élevé. G. Embden et Salomon ont prouvé que, chez les chiens dépancréatisés, le sucre aug- mentait après ingestion d'acides amidés à poids moléculaire peu élevé. Mais j'ai déjà indiqué plus haut que cela ne prouve rien en faveur de l'origine du sucre aux dépens des acides amidés. Je peux retourner la proposition. La formation de sucre par la graisse est, comme je l'ai montré, un dédoublement avec oxydation, une destruction qui ne peut donc por- ter que sur les acides à poids moléculaire élevé qui ne se trouvent pas dans l'albumine. Mais on peut dire que les acides gras qui viennent de l'albumine peuvent être des sources du sucre, et qu'il est légitime de leur attribuer un rôle dans la formation du sucre. On doit répondre que les acides gras venant de la graisse sont des acides gras oxydés : comme l'a montré Th. Rumpf, pour la transformation de l'acide butyrique en acide oxybutyrique. D'ailleurs, aujourd'hui, on admet que l'acide oxybutyrique vient des graisses par fixation de OH sur les groupes CH (Satta, Zeits. f. d. ges. Biochemie, \i, 24 et 276, 1904 et 1905). Mon hypothèse sur la formation des sucres par la graisse n'explique pas seulement la formation des sucres, mais encore celle des acétones. Il est très important de constater que, d'après les dernières recherches, il se forme des acétones dès que la destruction des graisses devient maximale, même quand il n'y a pas de diabète. Or, dans le diabète pancréatique, il s'agit d'une destruction intense de la graisse, plus intense qu'elle ne peut être ailleurs observée. Quand, dans le diabète, on voit apparaître dans l'urine nombre de substances anor- males, c'est assurément que la plupart d'entre elles dérivent de la graisse, et il est alors bien vraisemblable que le sucre a la même origine que ces divers corps. Ce n'est pas une preuve rigoureuse; cependant, cela me paraît d'importance majeure. Et si le sucre vient de l'albumine et non de la graisse, les acétones venant de la graisse et non de l'albumine, on ne voit pas pourquoi le sucre n'exercerait pas son action inhibante, bien connue, sur la formation des corps acétoniques. Au contraire, la formation du sucre et des acétones va en augmentant simultanément : ce qui se comprend si la graisse est l'origine du sucre. Dans le récent travail, déjà cité, de G. Satta, de bonnes expé- riences ont établi qu'une alimentation riche en hydrates de carbone diminue la produc- tion d'acétone. Il compte aussi, comme substances inhibantes, celles qui contiennent dans leur molécule un groupe OH alcoolique uni au C aliphatique. Satta attache trop d'importance à de petites différences, qui sont dans les limites de l'erreur expérimen- tale. Car l'albumine a, comme on sait, le pouvoir de diminuer l'élimination des acétones, quoiqu'elle n'ait pas de OH alcoolique; même la serine. Probablement l'explication rationnelle est que ces substances inhibantes sont facilement oxydables, et alors diminuent l'oxydation des graisses. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 26 ^02 - CLYCOGÈNE. On pourrait objecter encore ceci contre la formation de sucre par la graisse. J'ob- serve un chien qui depuis longtemps est atteint de diabète pancréatique (extirpation parla méthode de Sandmeyer). On ne peut expliquer chez lui la formation du sucre par ses réserves en hydrates de carbone; depuis plusieurs mois, en effet, il est nourri avec de l'albumine, sans recevoir de graisses ni d'hydrates de carbones; or, pendant cette longue période, l'élimination du sucre et celle de l'azote sont exactement proportion- nelles. Le rapport- égale 2,2, et est constant. Si l'on suppose que l'origine de ce sucre est l'albumine, on peut expliquer cette réaction chimique, qui forme le sucre, par la transformation des acides amidés, par exemple du glycocolle : AzH2 — CH2 + H20 + 0 = AzH3 + HO — C — H + C03 + H^O I CO —OH. La désamidation accompagne l'oxydation et l'hydrolyse d'un atome d'azote; et il s'agirait d'une molécule de l'hydrate de carbone élémentaire : HCOH_30_,.^_D Az "'14~'^'^^-N. Nous pouvons imaginer que, dans le diabète pancréatique, l'albumine, à la suite d'oxydations et d'hydrolyses, malgré les différents groupements dans lesquels l'azote est engagé, ne donne comme combinaison entre le carbone et l'azote que des composés de la forme H I I A: — C — H Alors on a le rapport— = 2,15. Cette coïncidence remarquable ne prouve rien pour l'albumine. Si l'on suppose que, dans le diabète pancréatique, au moment de l'oxyda- tion de l'albumine, chaque atome d'azote transporte un atome d'oxygène sur le grou- pement CH^ de la graisse pour donner HCOH, alors la quantité de sucre croit propor- tionnellement aux transformations de l'albumine, et le rapport— doit être égal à 2,Io. Je dois encore étudier un des arguments de Fréd. Kraus {Berl. klin. Woch., 1904, 8), contre la formation du sucre aux dépens de la graisse et pour sa formation aux dépens de l'albumine. « Chez les individus, dit-il, qui sont atteints de diabète grave, souvent les graisses de l'organisme diminuent tant, que le fait de rendre de grandes quantités de sucre, quand l'alimentation est uniquement azotée, rend très probable que ce sucre provient immédiatement de l'albumine. Nous sommes donc amenés à comparer la valeur d'un phénomène naturel, une réalité complexe que la Nature nous donne sans que nous l'ayions provoquée, à la valeur d'une démonstration expérimentale. » Je puis montrer que cette estimation faite par Fr. Kraus l'a conduit à des conclusions •erronées. Le tableau suivant donne la quantité de graisse des chiens ayant atteint le maximum de maigreur. Observateurs. HOFMANN (Z. B., 1872, VIII, lOo) KuMAGAVA(iVi«/i. Fac. Med. Tokio, 1895, m, i). N. ScHULZ [A. q. P., 1897, lxvi, H8) . . . . Pfeiffer (Z. s., 1887, xxiii, 358) N. ScHULz {loc. cil.) B. ScHÔNDORFF (.4. ç. P., 189-7, Lxvni, 538). . Graisse. Poids Diminution , . du corps centésimale absolue p. 100, en gr. du poids. en gr. 4,989 47,5 39,0 0,8 7,350 36,36 145,5 1,9 23,200 » 1408,0 5,8 » .) » 9,4 23,300 44,0 226,0 1,0 25,008 45,6 283,9 1,8 CLYCOGENE. 403 Georges Rosenfeld {Zeitsch. f. klin. Med., 1899, xxxvi, 237), observateur impartial, et un des plus compétents en la matière, s'exprime ainsi : « Des chiens qui paraissent maigres au toucher et à la vue sont cependant, en général, beaucoup plus gras qu'on ne pourrait d'abord le supposer. Des chiens d'un âge moyen perdent difflcilemenL leur graisse, et beaucoup moins que les jeunes animaux. Si à un chien gras on faitj perdre 35 p. 100 du poids de son corps, on n'est pas du tout certain que l'animal ait perdu toute sa graisse; aussi ne peut-on jamais supposer qu'on a pu faire perdrejà un chien toute la graisse de ses tissus. 11 n'y a pas plus d'animal sans graisse qu'il n'y a d'animal sans hydrates de carbone, ou d'animal sans albumines. On ne peut faire perdre la graisse d'un chien que jusqu'à une certaine limite, et il lui reste toujours une certaine quantité de graisse qui, quoique minimale, ne doit pas être négligée. » Les analyses faites sur la quantité de graisse des chiens qui sont morts après un diabète pancréatique prolongé sont plus probantes encore. Je puis confirmer complè- tement les recherches de Sandmeyer (Z. B., 189"j, xxxi, 46), que j'ai répétées. Il y a des animaux réduits tellement à l'état de squelette qu'il est impossible d'en observer de plus maigres ; cependant les muscles ont encore un peu de graisse, et le foie même en contient plus de 1 p. 100. De pareils animaux semblent réellement être des ossements de chiens recouverts de peau, et, quand on ne les a pas vus, on ne peut vraiment savoir ce qu'est la maigreur véritable. Sandmeyer donne comme teneur en graisse de ces ani- maux squelettiformes : Numéros. 1 2 .ns le foie, p. 100. Muscles de la hanche. p. 100. Muscles de la nuque, p. 100. 2,361 3,019 0,339 0,673 0,425 A ce point de vue je puis confirmer les expériences de Saxdmeyer. Voici les chilfres que j'ai obtenus en dosant la graisse de chiens devenus squelettiformes par le fait du diabète. Graisse p. 100 Chien I (10). Chien II (il) Chien III (16) dans les organes frais. Graisse p. 100 de substance Foie. Muscles. Os. sèche 2,688 1,19 1,38 Foie. 11,20 (^tibia et Muscles 6,08 (fémuf 1,711 0,385 4,619 dans 0,545 dans 5,755 » tout l'ensemble dans tout le foie, ( les muscles. le squelette. 1,638 0,661 » Foie Muscles 7,079 3,860 Or ces analyses portent sur des chiens morts du diabète; par conséquent, pendantla vie, la quantité de graisse devait être plus considérable que celle qu'on trouve après leur mort. Pour expliquer l'illusion de Fr. KRAUs,je dois dire que dès la première semaine après l'ablation totale du pancréas, on voit chez ces chiens saillir les côtes, les iléons, elles apophyses vertébrales, par suite de la disparition immédiate de tout le pannicule adipeux sous-cutané. On n'observe de tels amaigrissements que chez les chiens qui ont déjà, depuis plusieurs semaines, été soumis à l'inanition. Chez l'animal diabétique, cela peut assurément s'expliquer par la migration complète de la graisse du corps dans le foie, qui contient alors d'énormes quantités de graisse. Fk. Kraus n'a jugé que par l'apparence extérieure; il ne se rendait pas compte qu'alors qu'il n'y a plus de graisse sous la peau, il y en a encore dans le foie. Je dois pourtant reconnaître que cette explication que je donne du rapide amaigrissement ne me satisfait pas pleinement. Il semble que les humeurs du tissu conjonctif disparaissent, de sorte que l'état des tissus est tout le contraire de tissus très hydratés; ce ijui est peut-être compatible avec une proportion d'eau réellement très forte dans les tissus. 404 GLYCOGENE. Ainsi se trouve réfutée l'objeclion de Fr. Kraus à la théorie de la formation du sucre aux dépens de la graisse. Quant à la raison alléguée, pour admettre l'origine albuminoïde du sucre, que le quotient respiratoire diminue beaucoup, je l'ai réfutée dans un travail spécial (A. g. P., 1904, cm, 32) en montrant que peut-être la graisse en se changeant en sucre est tota- lement oxydée. On comprend alors que le quotient respiratoire ne s'abaissera pas seu- lement dans le cas où l'albumine serait transformée en sucre, mais encore quand, en fixant de l'oxygène, la graisse se transforme en sucre, qui s'élimine par l'urine, en supposant, bien entendu, que le sucre ne dérive pas des groupes aminés de l'albumine. Après avoir traité la question théorique, je vais donner les expériences pour lesquelles je crois à la transformation immédiate de la graisse en sucre. En premier lieu, il faut mentionner les expériences faites avec le tissu hépatique lui-même. Seegen (A. g. P., 1886, xxxix, 137 et 138) a fait passer pendant 6 heures de l'air dans une bouillie hépatique fraîche, additionnée de graisse, ou d'acides gras, ou de savons, ou de glycérine, et il a toujours trouvé, dans ses nombreuses recherches, que le sucre avait augmenté, comparativement à ce qui se passait dans les autres llacons non addi- tionnés de graisse. Seegen pense avoir observé là une augmentation non seulement du gljcose, mais encore de tous les hydrates de carbone, et notamment du glycogène. L'expérience de Seegen a été, par Weiss (Z. p. C, xxiv, 342), nettement réfutée dans des expériences faites au laboratoire de Bunge : il a institué en effet une expérience de contrôle importante : le sang et le sérum seuls, sans addition de bouillie hépatique, lorsqu'ils sont traversés par un courant d'air, montrent une augmentation de sucre, avec ou sans addition de graisse. Or, dans ces recherches, il n'est pas tenu compte de deux conditions très impor- tantes. Quand de l'air atmosphérique passe à travers une bouillie hépatique, le sucre continue à se former ayx dépens du glycogène, et on peut se demander si l'addition d'une graisse émulsionnée favorise celte transformation. Seegen n'a pas répondu à cette objection; car il voyait, par l'addition de graisse, croître la totalité des hydrates de carbone et non du sucre seulement (A. g. P., xxxix, 139). Mais, comme, pour doser le glycogène, il se servait d'eau bouillante dans l'épuisement, il n'a pas pu déterminer le chifl're total des hydrates de carbone. Il est remarquable que Seegen, dans le livre qui parut quatre ans après sur la formation du sucre dans le corps [Die Ziickerbildung im Thierkorper, Berlin, 1890, 151), a passé sous silence ces recherches sur la totalité des hydrates de carbone qu'augmente l'addition de graisse. Un autre point qui, jusqu'ici, a été passé sous silence, concerne la destruction continue du sucre dans les liqueurs où il se trouve. Or il s'agirait de savoir si, vraiment, une émulsion graisseuse ne diminue pas la rapidité de la destruction du sucre. Ceux qui ont lu les travaux de 0. Cohnheim (Z. p. C, 1903, xxxix, 336), et de R. Hirsch {Beitr. zur chem. Physiol. u. Path., iv, 530, 1903) sur la glycolyse, et la critique qu'en ont faite G. Embden et Claus [Zeitsch. f. die ges. Biochemie, 1905, 215 et 343) comprendront la valeur fondamentale de mon objection. Les recherches de Seegen et de Weiss ont été répétées récemment par Abderhalden et RoNA, mais sans être confirmées (Z. p. C, 1904, xli, 303 et 530). Toutefois ils ont reconnu que les résultats négatifs de leur expérimentation ne pouvaient naturelle- ment autoriser aucune conclusion sur la manière dont les choses se passent dans l'orga- nisme vivant. Enfin Hesse a répété l'expérience de Weiss avec les acides gras et la glycérine, mais il croit que les minimes différences obtenues par lui dans ses cinq expé- riences sont tout à fait dans les limites de l'erreur expérimentale {Zeitsch. f. exp. Ther., T. Tir. à part, n. 1-4). Nous devons considérer comme très importante pour le développement de la ques- tion, une recherche récente de Hildesheim et Leathes (J. P., 1904, xxxi, I). En faisant passer de l'air à travers une bouillie hépatique ils ont vu du glycogène se former aux dépens de la graisse. En même temps se produisaient d'autres phénomènes chimiques d'ordre inverse. Mais le côté défectueux de ces recherches, c'est qu'on doit supposer que le foie réduit en pulpe continue, pendant quelques heures, à exécuter les opérations chimiques GLYCOGÈNE. 405 de synthèse qu'il fait pendant la vie. Toutes les expériences à cet égard ne doivent donner que peu d'espoir, comme le montre le travail de Karl Grubk (J. P., 1903, xxin, 276. Brodie, ibid., 1903, 266. — K. Grure, A. g. P., 1905, cvii, 483) qui a réussi à auj,'- menter la production de glycogène dans le foie, en faisant passer par le foie, après la mort, du sang chargé de sucre. Immédiatement après la mort, chez un chien ou un chat, on faisait passer du sang par une branche de la veine-porte, par conséquent dans des conditions bien meilleures que lorsque on a réduit le foie en pulpe. Cependant, K. Grube, sur le foie des chiens, n'a pu constater alors que de faibles différences, qui sont tout à fait dans les limites de l'erreur expérimentale. Sur le foie des chats, les résultats ont été meilleurs. Enfin, nous devons remarquer que la transformation de la graisse en sucre ne se fait peut-être pas uniquement dans le foie, mais aussi dans les muscles et d'autres tissus; l'innervation joue sans doute aussi un rôle, puisqu'il s'agit d'une destruction de la graisse par oxydation. Plus importantes sont les recherches qui établissent que, dans l'organisme, un des éléments essentiels de la graisse, la glycérine, se transforme très problablement eu sucre. Déjcà, en parlant des hydrates de carbone comme origine du glycogène, j'ai indiqué les expériences prouvant que l'ingestion de glycérine augmente le glycogène du foie. Mais il ne s'agit là que de faibles quantités. Le premier, E. Cre-mer [Sitzb. d. Ges. f. Morph. u. Phys. in Mïmchen, 27 mai 1902) a réussi à produire une augmentation consi- dérable de sucre par le diabète de la phloridzine. L'expérience dura ri jours trois quarts, et l'accroissement moyen de sucre fut par jour de 50 gr. : ce qui donne en tout une augmentation de 26o gr. de sucre. Or, comme, d'après B. Schondorff, son corps conte- nait environ 758 gr. de sucre, et qu'il n'avait jeûné que 2 jours avant l'expérience, il est fort possible que l'excès de sucre éliminé dérive du glycogène qui était dans son organisme, glycogène dont la quantité est trois fois plus grande que celle du sucre. En outre, Cremer, pendant l'expérience, l'a nourri avec de la viande, et avec des quan- tités de viande dont il ne donne pas le poids. Même si ce chien de 18^^,5 ne recevait que I k. de viande par jour, cela ferait encore par jour environ 20 gr. de glycogène. Le quotient — s'éleva finalement à 8. Donc, Cremer se trompe sil croit avoir prouvé ainsi que la glycérine peut être l'ori- gine d'une dextrose, ou de glycogène. Il a annoncé un compte rendu détaillé de son expérience; mais c'est en vain que j'ai cherché ce travail dans la littérature physiologique récente. L'expérience la plus importante qu'on trouve à cet égard dans toute la littérature est l'expérience 4 de Luthje : jamais auparavant on n'avait observé une si énorme excrétion de sucre après ingestion de glycérine. Je donne ici textuellement cette observation (D. Arch. f. klin. Med., lxxx, 101). (* Il s'agit d'un grand chien de berger, dont le poids initial était de 1 o'<''200 grammes : à jeun, depuis le jeudi 28 janvier 1904. Il fut opéré par le professeur Kûttner le 30 janvier; et on fit l'extirpation totale du pancréas. On ne lui donne rien à manger d'abord. L'urine n'est pas obtenue par cathétérisme, car on peut vider la vessie par pression, de sorte que l'on pouvait ainsi avoir exactement les quantités d'urine quotidiennement sécrétées. « Le tableau suivant donne les résultats v^oy. p. 406). <( Dans ce tableau, on doit remarquer que l'élimination de sucre pendant les premiers jours de jeûne a été peu considérable, et même, au septième jour, a été nulle. (L'autopsie du chien a montré qu'il ne restait plus de trace macroscopique du pancréas. II n'y avait pas eu de prolifération dans la cicatrice, de sorte que les rapports étaient restés très nets; on n'a pas fait l'examen microscopique.) Les jours suivants, l'inges- tion de nutrose détermina une élimination rapide et abondante de sucre. Le neuvième et le dixième jour, on donna 500 grammes de sérum de veau qui fut bu avidement. A partir du 11 février, on ajouta chaque jour au sérum de grandes quantités de glycé- rine, jusqu'à 360 grammes par jour. La glycérine mélangée au sérum fut ingérée très volontiers, sans jamais provoquer d'effet toxique. Notre intention était de la continuer usqu'à provoquer une éVimination de sucre telle qu'on ne puisse l'expliquer par les 406 GLYCOGÈNE. TABLEAU de Lï tiue. URINE 8UCRE AZOTE POIDS FÉVRIER 1904. ALIMENTATION. et DILUTION. en GRAMMES. en GRAMMES. CORPS en kil. REMARQLES. Jusqu'au !""■, soir. , . . „ 680 1 000 16,00 20,16 15,2 Poids initial. — 3. 5 h. 30, soir. » 460 1000 5,00 9,74 " Acétone 0. — '.'), 11 h. mat. » 520 1000 1,50 7,30 » id. — 6, 4 h. soir. » 420 600 » 3,14 11,500 — 7, 5 h. — . 100 gr. nutrose et eau. 1 190 2 000 24,00 14.56 » — 8, 5 h. — . 100 gr. nutrose et eau. 1450 35,70 18, H » 2 100 — 9, 5 h. — . ."300 ce. sérum. 150 500 3,50 4,40 " Sérum III. — 10, 5 h. — . 500 oc. sérum. 300 700 5,10 " — III. — ll,4h.30. — . 500 ce. sérum et 60 ce. glycérine. 1 350 6,00 5,30 13,00 — m. 1500 — 12, — - . 500 ce. sérum et 80 ce. glycérine. 1650 2 000 39,00 6,60 " - III. — 13. — - . 500 ce. sérum et 100 ce. glycérine. 2150 2 300 41,40 6,00 -> - IV. Acétone 0. — 14, — — . 500 oc. sérum et 100 ce. glycérine. 2 400 2 500 57,50 6,73 » Sérum IV. — 15, — — . 850 ce. sérum et 170 ce. glycérine. 3 750 3 800 89,30 11,28 » - VI. — 16, — — . 1 000 ce. sérum et 250 ce. glycérine. 5 180 5 200 114,40 7,85 12,500 - VI. - 17, - - . 1 000 ce. sérum et 300 ce. glycérine. 5 890 5 900 141,60 10,56 » — VI. Acétone 0. - 18, - - . 1 200 ce. sérum et 300 ce. glycérine. 6 900 158,70 12,35 •- Sérum VI. — 19, — — . 1 000 ce. sérum et 320 ce. glycérine. 6 050 6 100 134,20 9,88 » Acétone 0. — 20. — — . 1 200 ce. sérum et 270 ce. glycérine. 6 300 126,00 9,89 12,300 — 21, — — . 1 200 ce. sérum et 240 ce. glycérine. 4 920 5 000 125,00 10,90 " — 0. — 22, — — . 900 ce. sérum et 160 ce. glycérine. 4 000 70,00 10,32 ' — 23, — — . 1 200 ce. sérum et 240 ce. glycérine. 5 800 104,40 10,09 » - 0. - 24, - - . 1 200 ce. sérum et 240 ce. glycérine. 4 760 7 800 115,20 9,41 12,200 CLYCOGENE. 407 hydrates de carbone de l'organisme. Or la diurèse, sous l'influence de la glycérine, augmenta énormément, et la quantité d'urine éliminée par jour atteignit, dans certains cas, jusqu'à la moitié du poids du corps (Nous nous proposons de rechercher à notre clinique jusqu'à quel point l'usage de la glycérine paut produire un effet diurétique utile dans certaines affections.) Les quantités de sucre éliminé sont considérables, comme on peut le voir dans le tableau (voir le tableau p. 406). Elles varient nettement avec la quantité de glycérine ingérée ; au total, la quantité de sucre éliminé jusqu'au 24 féviier 1904, fut de 1 408,4 grammes de sucre. La chienne pesait au début 15 kilos, on chiffres ronds, ce qui, en supposant une quantité de glycogène de H p. 100, corres- pond à 165 grammes de glycogène total, soit 183 grammes de sucre. Si l'on admet la teneur maximum en glycogène de 40 p. 100, cela fait 600 grammes de glycogène ou 664 grammes de sucre en chiffies ronds. Dans le premier cas, il y a eu un excès de 1 408 — 183 = 1 225 de sucre ; dans le deuxième cas, un excès de 1 408 — 664 := 744 de suci'e. c< On doit se demander si le sucre provient de l'albumine de l'alimentation ou de la , glycérine, les petites quantités de sucre contenues dans le sérum ne jouant aucun rôle. L'animal a éliminé, pendant tout le temps de cette expérience, 209,8 grammes d'azote. Si nous supposons que 1 gramme d'albumine produit 3 grammes de sucre, alors l'albu- mine peut donner raison de 630 grammes de sucre, mais il faudrait savoir d'ofi pro- viennent les 595 grammes de sucre (soit 51'5 grammes dont l'origine reste à déterminer, en supposant 11 p. 100 de glycogène préalable) ou 114 grammes de sucre (en suppo- sant 40 p. 100 de glycogène préalable). « Cette quantité ne peut provenir que de la glycérine. « Ainsi, même en faisant les suppositions les plus défavorables, il reste du sucre qui ne peut provenir que de la glycérine. Or, d'abord, il est invraisemblable que ces hypothèses défavorables puissent s'appliquer à ce chien. En effet : i" Au début de l'expé- rience, l'animal était mal nourri, de sorte qu'alors il avait probablement consommé beaucoup de glycogène et ne pouvait alors avoir 40 p. 100 de glycogène ; 2° Puisque, chez un chien sans pancréas, une partie du sucre est encore consommée, en réalité la production de sucre est plus grande que celle qu'on suppose en jugeant seulement la quantité de sucre éliminé. Nous voyons, d'ailleurs, qu'avant l'ingestion de glycérine, l'ingestion de 500 centimètres cubes de sérum n'a pas produit d'excrétion sucrée. Par conséquent nous devons admettre que le sucre éliminé provient totalement de la glycé- rine ingérée. « Je crois bien qu'après cette expérience on ne peut plus douter que la glycérine ne forme du sucre. « Le dosage de l'azote contenu dans le sérum qui servait à l'alimentation a donné : Sérum 3 : 1,109 p. 100 d'azote. — 4 : 1,U8 — — — 6 : 1,105 — — (( L'animal qui a servi à celle dernière expérience a vécu encore plusieurs jours, mais, à partir du 25 février, il fut soumis à d'autres conditions expérimentales. » Comme ce chien pesait au début 15'<,2, il pouvait donner en glycogène au maximum 615 gr. de sucre. (LihHJE a fait à son détriment une faute de calcul.) En tout, il a pro- duit 1408 gr. de sucre. Restent par conséquent 793 grammes dont on ne peut expliquer l'origine par le glycogène. Comme ce chien, pendant toute l'expérience, a éliminé 209^'", 8 d'azote répondant à 13118', 25 d'albumine, d'après Minkowski, cette quantité d'albumine détruite ne pouvait produire que629ë^''4 de sucre, de sorte qu'il reste encore 793 moins 629.4; c'est-à-dire 163,6 dont l'oiigine n'est plus expliquée. De fait, le calcul est plus favorable encore, car d'après mes recherches, dans le diabète pancréatique, ce rapport ^ est bien plus petit que 3. Pourtant, ce sucre en excès n'est pas en assez grand® quantité pour qu'on puisse être absolument assuré qu'il ne provient pas des glycosides. Le chien pesait 15 k. : il contenait donc, à raison de 35 gr. d'azote par kilog., 3281 gr. d'albumine. Pour que cette albumine donnât 163.5 de sucre, il faudiait supposer seule- ment qu'elle fournisse 5 p. 100 de son poids. On ne peut donc pas, en toute certitude, 408 GLYCOGÈNE. éliminer l'hypothèse qu'une telle quantité de glycosides ait été dissimulée dans l'albu- mine. L'expérience a encore un autre côté défectueux, Luthje veut prouver que la glycérine augmente la glycosurie. Mais il.ne nourrit pas ses chiens seulement avec la glycérine. Il leur donne aussi 1 000 à 1 200 ce. de sérum, soit 80 à 100 gr. d'albumine par jour, quoi- qu'il semble prouver que l'albumine ne produit pas de sucre, et que, dans cette exp6- l'ience, il est établi que l'albumine (de la nutrose) même sans glycérine provoque une glycosurie intense, qui n'existait pas auparavant. 11 avait, il est vrai, donné 500 ce. de sérum, après l'opération, mais à un moment où le diabète ne s'était pas produit encore, et constaté que ces 500 ce. de sérum ne produisaient pas de glycosurie; d'où il conclut que l'albumine du sérum ne donne pas de glycosurie, même avec l'ingestion d'une dose de 1280 ce. de sérum. Cependant l'expérience n'a été vraiment instituée qu'à partir du moment où le diabète pancréatique a apparu, et il n'y a pas d'expérience pour établir que dans cette période l'albumine du sérum ne provoque pas la glycosurie, tout comme la glycérine. Il n'est pas douteux d'ailleurs que ce n'est pas la glycérine seule qui, après une alimentation en glycérine, provoque ces intenses glycosuries. Toutefois, pour montrer que l'albumine, dans cette expérience, n'est pas en cause, i'ai calculé de la manière suivante le quotient ^ : 11 février. . . 1,1 12 — . . 6,0 13 — . . 6,9 14 — . . 8,3 15 — . . 7,8 16 — . . 14,6 n — . . 13,4 18 — . . 12,8 19 — . . 13,6 20 — . . 12,7 21 — . . 11,3 22 — . . 6,8 23 — . . 10,3 24 — . . 12,2 L'élévation considérable du quotient - , qui atteint parfois jusqu'à 14,6, prouve que les grandes quantités de sucre éliminé ne peuvent provenir de l'albumine. Comme le chien pesaitau début ib'^s^o, \\ pouvait donneren glycogène, au maximum, 615 grammes de sucre. Restent par conséquent 793 grammes dont on ne peut expliquer l'origine par le glycogène. Mais, comme ce chien contenait .3 281 d'albumine; il devait y avoir encore 24,3 p. 100 de sucre dissimulé sous la forme de glycosides, ce qui est contraire à tout ce que nous savons. Donc, si le sucre ne provient ni des glycosides ni de l'albumine, il doit être produit par la glycérine ou la graisse du corps. Comme Emile Fischer a montré que l'oxydation de la glycérine peut produire du sucre, il n'y a plus aucune difficulté pour les physiologistes à admettre que, dans les échanges organiques, le sucre provient de la glycérine. Reste le problème de savoir pourquoi l'ingestion de grandes quantités de sucre ne fait pas croître la quantité de sucre éliminé dans le diabète, quoique certainement, dans l'intestin, les graisses se transforment en glycérine et en acides gras. Mais on doit admettre que, dans la cellule épithéliale de l'intestin, la glycérine se combine avec les acides gras pour former de la graisse, tandis que l'ingestion de grandes quantités de glycérine sans acides gras détermine nécessairement l'oxydation de la glycérine. Cependant la preuve rigoureuse n'a pas été donnée que, dans l'expérience de Luthje, le sucre éliminé provient de la glycérine. Ce n'est pas par des hypothèses que l'on peut admettre qu'une substance est l'origine du sucre, et il ne suffit pas d'avoir établi que son ingestion augmente l'excrétion sucrée. Il est possible que la glycérine introduite agisse comme excitant, et que le sucre provienne des graisses neutres; mais, après tout, il paraît vraisemblable que, dans l'organisme animal, la glycérine est une GLYCOGÈNE. 409 des sources du sucre, quoique la quantité centésimale de la ylycérine dans les ^a^aisses soit trop faible pour expliquer dans le diabète ces grandes éliminations de sucre que ne peuvent produire ni les hydrates de carbone, ni l'albumine. Nous devons donc revenir à la graisse, et nous demander comment de la graisse totale du corps peut provenir le sucre. Gomme tous les moyens employés jusqu'ici n'avaient pas abouti d'une manière définitive, j'ai entrepris un plan nouveau d'expériences pour décider la question de l'origine du sucre; graisse ou albumine. La physiologie nous apprend qu'un chien peut être aussi longtemps qu'on veut maintenu en vie avec un régime d'albumine seule sans hydrates de carbone ni graisses. Or, comme les chiens atteints du diabète de Sandjieyer peuvent vivre plusieurs mois, il semble qu'en leur donnant une alimentation exclusivement azotée, si tout le sucre éliminé provient de la graisse, on puisse linalement avoir des animaux absolument dépourvus dégraisse. Si alors la glycosurie continue, on aurait prouvé par là qu'il pro- vient de l'albumine. Mais si le sucre ne se produit pas chez l'animal qui n'a plus de graisse, pour reparaître quand on lui rend de la graisse, alors on devra admettre que la graisse est l'origine du sucre. J'ai fait à cet effet trois grandes expériences, que j'ai publiées {A, g. P., 1905, viii, llo). Mais mon attente n'a pas été satisfaite. Car ces trois chiens succombèrent, mal- gré une alimentation abondante en albumine (qui était bien absorbée), dès que la graisse de leur corps eut complètement disparu. Ce qui rend vraisemblable l'opinion que le sucre vient de la graisse, c'est qu'aucun des tissus de l'organisme n'a autant perdu de poids, au moment de la mort, que le tissu graisseux. Macroscopiquement, on ne peut plus en voir nulle part, même dans les régions où la graisse existe ordinairement toujours. En outre, le quotient — se met à baisser rapidement dès que la graisse a disparu; et, dans les derniers moments de la vie, l'ingestion de graisse fait monter le quotient — quelquefois au-dessous de 2. Je ferai remarquer aussi que, de nos 3 chiens, c'est le plus gros qui a vécu le plus longtemps et qui a, de beaucoup, éliminé le plus de sucre. Il est naturel d'ailleurs que ce sucre éliminé ne pourra pas en quantité dépasser la quantité de graisse qui est sans doute son origine. Quant à la perte de poids des tissus, ni le cerveau, ni le cœur, ni le foie (!) n'ont perdu de poids, et à peine les reins. C'est surtout le tissu musculaire qui a diminué; on peut donc penser que l'alimenta- tion était insuffisante. Mais on wi saurait dire si la moi-t est due à la disparition de ia graisse ou aux lésions de certains organes riches en albumine. En tout cas, les chiens meurent avec les symptômes de paralysies musculaires, plus ou moins complètes, en même temps que dans une sorte de coma. Je dois maintenant mentionner un travail tout récent, qui paraît fort important. A. Magnus Levy [lelts. f. klln, Med., 1905, lvi, 83) a cherché par des études sur le quotient respiratoire, à déterminer quelle est l'origine du sucre des diabétiques. Il est arrivé à ce résultat que le quotient respiratoire, chez un malade atteint de dia- bète grave qui ne se nourrit que d'albumine et de graisse, doit être entre 0.613 et 0.707, si le sucre provient de l'albumine. Si le sucre provenait de la graisse, on verrait des quotients respiratoires plus bas, ce qui n'est pas le cas. La démonstration de Mag.xus Levy est entachée de deux grosses erreurs qui annulent ses résultats. Magnus Levy dit : « Dans 60 gr. de glycose, qui, d'après les données actuelles, doi- vent provenir au maximum de 100 gr. d'albumine, il y a plus d'oxygène que 100 gr. d'albumine. Car on trouve (en tenant compte des produits de l'albumine éliminés dans l'urine et les matières locales) : C H 0 100 grammes d'albumine =38,6 4,24 !},'24 60 — de sucre 24,0 4,0 32,0 Différence + 14,6 + 0,24 — 22,8 Par conséquent, pour former le sucre, il faut qu'il y ait fixation dans les poumons de 410 GLYCOGÈNE. grandes quantités d'oxygène (22.8) qui n'apparaitroiil pas sous forme de C0^ et par con- séquent le quotient respiratoire va être abaissé. Pour le diabétique, après qu'on a calculé ce que les albumines sans hydrates de car- bone consomment pour être transformées en sucre, on trouve pour le quotient res- piratoire : 0 (litres). CO- (litres). Q. R. 89,2 forment 72,0 0,808 44,8 — 44,8 1.000 dOO gr. d'albumine consommant. 60 gr. de sucre — . DilTérenco. Albumine moins sucre = ... 44,4 — 27,2 0,613 Le quotient respiratoire est donc alors de 0,613. Mais comme le diabétique entretient sa vie par la graisse et l'albumine sans hydrates de carbone, alors son quotient respira- toire doit être entre 0,613 et 0,707, et probablement plus voisin de ce dernier chiffre; car, dans une alimentation rationnelle, c'est la graisse surtout qui produit, chez le diabé- tique, la chaleur normale et le CO- excrété, de sorte que c'est elle surtout qui déter- mine la valeur du quotient respiratoire. Première erreur de Magnus-Levy. — Magnus-Levy affirme que, d'après les données actuelles, il y a un maximum de 60 grammes de sucre pouvant être donné par 100 grammes d'albumine. En faisant les calculs, je trouve que Magnus-Levy s'est servi des chifîres donnés par Stohmann etLANOBEiN pour la viande privée de cendre et dégraisse, chiffres dont j'ai constaté l'exactitude dans mon laboratoire {.T. f. pract. Chimie, xliv (2j, 364). L'albumine contient 16,36 p. 100 d'azote. Par conséquent, d'après Magnus-Levy, le quotient^ pour 60 grammes de sucre serait — -— —3,67. i> Ib.oo Mais l'opinion que ce chiffre est conforme aux données actuelles est tout à fait arbi- traire. Car, d'après Minkowsri, qui l'a établi le premier, le quotient typique est 2,8 [Unters. uber den Diabètes Mellitus. Leipzig, Vogel, 1893. A. P. P., xxxi). Pour dire que son chiffre de 3,67 répond aux opinions actuelles, Magnus Levy aurait dû au moins consulter ce que dit à cet égard le plus récent auteur qui se soit occupé avec succès des transformations des hydrates de carbone dans le diabète, à savoir Hugo Luthije, qui donne pour le quotient-, en chitfres ronds, 3,07, non 3,67. Je n'ai, d'ailleurs, qu'à faire remarquer que, d'après nos recherches sur le diabète pancréatique, non seulement la constante typique de Minkowski, 2,8, est fausse et beau- coup trop forte, mais encore qu'il n'y a pas de constante (A. g. P., 1905, cvni, 115). En étudiant les chiens dépancréatisés et sans glycogène; nourris d'albumine seule pen- dant plusieurs semaines, j'ai trouvé dans trois grandes série d'expériences : Durée. Mo y. do — Série 1 38 jours 2,22 Série 2 29 — 1,86 Série 3 16 — 1,48 Pour calculer la moyenne, je n'ai pas introduit les chiffres de la dernière semaine, qui précède la mort; car ils sont en général beaucoup trop faibles. Quant à la raison pour laquelle ce quotient, dans nos expériences, a été si faible, c'est, je crois, parce que la nourriture était absolument dépourvue d'hydrates de carbone, et que l'animal n'avait plus de glycogène dans son corps. Jamais, avant moi, le quotient - n'avait pu être établi par un aussi grand nombre d'expériences, et dans des conditions aussi précises. Donc 100 parties d'albumine doivent fournir au maximum 36s'', 4 de sucre, (et non 60) et au minimum 24,2. C'est avec ces chiffres modifiés que nous calculerons les résultats obterms par Magnus-Levy. Mais nous allons examiner d'abord sa seconde erreur. Deuxième erreur de Magnus-Levy. — M.ujnus-Levy, dans tous ses calculs, suppose que tout l'oxygène qui sert à oxyder l'albumine, et à former du sucre aux dépens d'icelle, GLYCOGENE. 411 vient de l'atmosphère. Il ne s'est pas fait une notion claire de la mécanique des réactions qui entrent enjeu, et il ne connaît pas les plus récents travaux de chimie physiologique. Dans de nouvelles et nombreuses recherches, on a cherché ta trouver dans les acides amidés les éléments de la molécule d'albumine qui concourent à la formation du sucre. L'importante découverte de Embden et H. Salomon donne un fort appui à cette opinion {Zeitsch. f. Bioch., 1903 et 1904, v, 507 ; vi, 63). Pour comprendre comment un acide amidé qui ne contient pas d'hydrate de carbone peut faire du sucre, on a cherché quelles sont les transformations des hydrates de car- bone dans l'organisme. Nfuberg et Langstei.n [A. P., SuppL, 1903, .^14) ont nourri des lapins avec de l'alanine; et ils pensent qu'il apparaît de l'acide lactique dans l'urine formée aux dépens de cette alanine. H H 1 ! CH3 — C — C02H + 0H2 = CH3 — C — C02H + AzR^ I I AzH2 0 H Alanine. Acide lactique. Ainsi, la fixation de H'-O a produit de l'acide lactique qui contient un hydrate de car- bone, notamment le groupe oxyméthylique H I — C — I OH Paul Mayer (Z. p. C, 1904; xlii, 59) a ensuite, dans le laboratoire de Salkowski, étudié à ce point de vue l'acide diamino-propionique qu'il faisait ingérer à des lapins, et il retrouvait de l'acide glycérique dans l'urine (encore n'a-t-il fait qu'une seule analyse). Il donne de cette réaction l'équation suivante : CH2 — AzH2 CH2 — OH + AzH' I I CH — Az H2 + 2H20 = CH — OH + AzH3 I 1 CO = OH CO — OH L'action de deux molécules d'eau a donné deux groupements d'hydrates de carbone. Par conséquent, l'oxygène de ces hydrates de carbone ne provient pas, comme le pense Magnus-Levy, de l'atmosphère, mais de l'eau. Outre ces recherches, dont il ne tient pas compte, Magnus-Levy n'a pas pensé que l'azote dans l'albumine ne peut être combiné qu'au C ou à l'H. D'après les recherches de Paal, il y a en général plus d'un atome d'Az. uni au carbone. Mais, comme tout l'azote de l'albumine, au moment de sa destruction, devient AzH', il faut donc que l'eau lui donne une partie de l'H qui est nécessaire; ce qui met 0 en liberté et aide à l'oxydation. C'est ainsi que se comprendra de quelle manière remarquable il détruit le molécule d'albu- mine. Une partie s'oxyde; lautre se réduit. Car l'azote ne s'unit pas à l'oxygène, lequel ne se combine qu'à l'hydrogène et au carbone. Ainsi l'hydrogène combiné à l'azote est préservé de l'oxydation. Que les groupes amides des acides amidés, et les atomes d'azote fortement combinés au carbone subissent alors une sorte de dédoublement par hydrolyse, on le comprendra bien, si l'on se représente que l'oxydation décompose le molécule d'albu- mine, et que les atomes d'azote, à l'état naissant, se saturent par hydrolyse. L'acide amido-acétique augmente, comme l'albumine, l'élimination de sucre chez les diabétiques, et l'équation suivante rend la chose très claire : H H I I H — C — CO. OH + H20 = H — C — CO. OH + AzH^ 1 I AzH2 OH 412 GLYCOGÈNE. L'opinion de P. Mayer (Z. p. C, 1903, xxxviii et 1904, xlii, 64), que l'acide obtenu donne par réduction de laldéhyde glycolique, laquelle, en se polymérisant, donnerait du sucre, est inadmissible; car alors - serait égal à 4,3. Il ne peut être question d'une polymérisation des groupes oxyméthyléniques. Si, d'après P. Mayer, l'aldéhyde glyco- lique dans l'organisme se transforme en sucre, il faudrait d'abord prouver que l'acide glycolique se transforme par réduction en aldéhyde. Calcul des données de Magnus-Levy corrigées. — Je fais d'abord la supposition la plus favorable à Magnus-Levy, en posant le quotient le plus fort que j'aie obtenu, soit 2,22. Par conséquent, 100 grammes d'albumine donnent 36,4 de sucre. Comme nous l'avons prouvé, l'oxygène de ce sucre vient de l'oxygène de l'eau; et un atome de C fixe aussi un atome de H venant de l'eau, un atome de H venant de l'albumine. Alors : I Az H^ — CH + H20 = Az H' + HO — CH I Le calcul suivant doit être fait : c. H o 100 gr. d'albumine . . . = 38,52 4,17 9,21 36 — sucre = 14,o0 1,21 » Différence 24,02 2,96 9,21 Or : 24,02 de C répondent à 64,032 de 0 2,96 de H — — 2;j,680 de 0 Total 87,732 de 0 Dont il faut retrancher 9,210 Reste 78,322 de 0 64,032 Le quotient respiratoire est donc de = 0,816 ^ ^ 78,522 et il a augmenté quelque peu, puisque le quotient respiratoire de l'albumine sans for- mation de sucre := 0,809. Mais, comme le diabétique ne vit que d'albumine et de graisse, le quotient respira- toire de la graisse étant 0.7, son quotient respiratoire doit être entre 0,816 et 0,7. Or son quotient respiratoire est descendu à 0,63, et la cause doit en être dans la trans- formation de la graisse en sucre ; car pour cela il a fixé de l'oxygène emprunté à l'air atmosphérique, et qui ne se retrouvera plus sous forme de C0-. Après avoir calculé ces chiffres pour le chiffre -, le plus élevé, je vais faire le même calcul en adoptant le chiffre le plus faible; 1,48, qui répond à 24,2 de sucre pour 100 grammes d'albumine. Il faut dans ce cas admettre qu'il y a moins de groupes AzH^, lesquels, dans la molécule d'albumine, participent à la formation du sucre. Pour un atome de G da sucre, il est pris un atome de H à la molécule d'a!J)umine : c H O 100 gr. d'albumine. . . . = 38,52 4,17 9,21 24,2 — de sucre = 9,68 0,807 » Différence = 28,84 3,363 9,21 >r : 28,84 de C répondent à . . . 76,9 de 0 3,363 de H — — . . . 26,9 de 0 Total . . . . 103,8 de 0 ncher 9,21 Reste . . . 94,6 de 0 -,e quotient respiratoire est donc . . . ^^'^-0,812 94,6 Cela prouve que, chez les diabétiques, le quotient respiratoire ne changerait point, dans le cas où le sucre proviendrait de l'albumine, quel que fût le quotient j;^ (dans les GLYCOGÈNE. 413 limites que nous avons indiquées); peut-être avec une légère augmentation du quotient respiratoire, quand — s'élève. Cela nous conduit à faire la remarque suivante : Nous avons supposé que 1 atome d'Az n'est combiné qu'à un atome de G. Mais, dans la molécule d'albumine, beaucoup d'atomes d'azote sont unis à des groupes contenant 2 et 3 C. Pour que, dans ce cas, il puisse se former de l'ammoniaque, il faut que l'eau donne une plus grande quantité d'hydrogène, ce qui met en liberté une plus grande quantité d'oxygène. Et comme cet oxygène dépasse la quantité nécessaire à la forma- tion du sucre, alors il se forme probablement de l'acide carbonique, dans lequel l'oxy- gène constituant ne provient pas de l'atmosphère. Le véritable quotient respiratoire du diabétique devrait donc être intermédiaire entre le quotient respiratoire de l'albumine + A et celui de la graisse (0,7) si le sucre venait de l'albumine. Il peut aussi être très bas, inférieur à celui de la graisse. Si l'on admet, comme cela est l'opinion générale, que les groupes AzH^ de l'albumine sont aptes à fournir du sucre, alors il n'y a plus de doute. C'est la graisse qui est l'ori- gine du sucre des diabétiques. On ne peut pas réfuter complètement la théorie d'après laquelle l'albumine ne jouerait aucun rôle dans la formation du sucre. Mais, comme tous les faits s'expliquent bien sans cette hypothèse, et que toutes les recherches pré- cises sont contre elle, alors il paraît décidément bien vraisemblable que l'albumine n'a rien à faire avec la formation du sucre. Si l'on veut cependant continuer à soutenir que le sucre des diabétiques ne provient pas de la graisse, mais de l'albumine, alors ou peut espérer prouver qu'il y a dans les albumines, notamment dans la caséine, des groupements hydrates de carbone. Mais ce n'est guère vraisemblable, ou bien il faudra supposer que, dans certaines régions non azotées de la molécule d'albumine, il puisse par oxydation se faire du sucre. Ce serait là d'ailleurs un processus bien analogue à la formation de sucre par la graisse. Mais, dans les deux cas, formation de sucre par des acides amidés, ou par une alimentation albumi- noïde, la glycosurie diabétique aurait une origine très différente. Pour maintenir la théorie de la formation de sucre par l'albumine (et non parla graisse), on serait vraiment forcé de faire des hypothèses que personne ne pourrait admettre. Augmentation du glycogène du foie après injection de substances dont ne peut pro- venir le glycogène. — S'il est vrai, comme, par exemple, quand on donne à des animaux de l'ammoniaque, qu'on augmente leur glycogène hépatique — et c'est un fait établi sans que nous sachions rien davantage sur la nature du phénomène, — il est possible que cette augmentation de glycogène soit due à une migration des hydrates de carbone venant des autres parties du corps, de même qu'après l'empoisonnement par le phos- phore il se fait une migration des graisses allant des divers éléments de l'organisme dans le foie. Mais on peut encore faire d'autres hypothèses, comme nous le prouvent les expériences de Rohjiann {A. g. P., 1886, xxxix, 21). RôHMANN a nourri deux lapins avec l'aliment de Weiske, 50 grammes d'huile d'olive, 820 grammes d'amidon, 100 grammes de sucre et 30 grammes de cendres (cendre de pois et de foin avec chlorure de sodium). On fait du tout une sorte de gâteau qu'on coupe entranches minces, puis qu'on réduit en petits fragments après l'avoir desséché à 4.^°. Un des deux lapins servant de témoin recevait cet aliment, tandis que l'autre recevait en outre de l'asparagine, du glycocolle, et du carbonate d'amoniaque. RoHMANN a fait un assez grand nombred'expériences sur de tels couples de lapins et observé que le foie des animaux, ayant reçu cette addition des matières azotées à leur alimentation, était plus riche en glycogène. Malheureusement, Rohmann n'a pas dosé le glycogène du corps, mais seulement celui du foie, de sorte qu'il n'a pas éliminé l'hypo- thèse d'une migration des hydrates de carbone. En examinant de plus près les expériences dans lesquelles le poids des lapins a été donné, on voit qu'ils ont diminué plus ou moins de poids. Ils ont donc vécu dans des conditions qui entraînaient une plus rapide consommation de leur glycogène. Les dérivés ammoniacaux que Rohmann ajoutait aux aliments agissent certainement sur le foie, et augmentent la formation d'urée, et il n'est pas sans importance de noter que cette formation d'urée se produit dans un organe qui reçoit par la veine porte le sang 41i GLYCOGENE. dépourvu d'oxygène. Si la formation d'urée correspond à une diminntion dans les pro- cessus d'oxydation de la cellule, on peut penser que, réciproquement, avec l'augmen- tation de la formation d'urée il y a diminution des processus d'oxydation dans le foie, de sorte que moins de glycogène est détruit dans le foie. On pourrait aussi supposer que les sels d'ammoniaque ajoutés au foie diminuent la puissance d'oxydation du foie. Edouard Ki'lz a, pour le même effet, nourri avec de l'urée des poules et des lapins après 6 jours de jeûne {Beitr. z. Kenntniss des Glycogencs, 1891, 27). Ses recherches lui ont fait conclure que l'urée augmente certainement la teneur du foie en glycogène. Dans trois recherches sur les poules, le glycogène du corps n'est pas déterminé; le glycogène du foie, dosé 24 heures après l'élimination d'urée, comportait par kilo- gramme du poids initial en moyenne : 0,449. Chez les poules de contrôle, la teneur maximale du foie en glycogène était, au 6« jour de jeûne, de 0,1788 pour un poids initial de 1680 grammes; par conséquent, de 0,115 pour 1 kilogramme de poids initiai. L'alimentation avec l'urée a donc déterminé une augmentation notable de glyco- gène. Toutefois l'expérience ne peut être considérée comme démonstrative pour les raisons que j'ai données plus haut : 1° parce que les expériences de contrôle n'ont pas été faites par le même auteur et à la même époque; 2° parce qu'on n'a pas répondu à l'objection d'une migration possible du glycogène. KûLz a encore fait deux expériences sur les lapins. Les animaux nourris avec de l'urée après 6 jours de jeûne avaient pour un kilo de poids initial en moyenne 0,237 de glycogène hépatique. Or, chez les animaux témoins (p. 32), la proportion de glyco- gène hépatique pour un kilogramme de poids initial était, en moyenne, de 0,123 avec un maximum de 0,329. Par conséquent, ces expériences ne prouvent pas l'aug- mentation de glycogène après l'injection d'urée. Embden et Salomon, chez des chiens dépancréatisés, dans des conditions où la produc- tion de sucre est très facilitée, n'ont pu obtenir aucune glycosurie, mais seulement de la polyurie, en leur donnant de l'urée. L'hypothèse deKûLzest donc bien difficile à admettre. Dans le laboratoire d'ÉnouARD KrLz, Nebelthau a repris ces expériences (Z. B., xxvni, 138) et très fortement critiqué les conclusions de Rohmann. Nebelthau, d'abord, croit prouver qu'une poule, après 6 jours de jeûne, présente une augmentation di; glycogène si on lui injecte de l'hydrate de chloral. A l'appui, Nebelthau apporte trois expériences {loc. cit., 140) dans lesquelles il a dosé non seulement le glycogène du foie, mais encore tout celui du reste du corps. Comme animaux témoins, il dit formellement qu'il prend ceux qui ont été étudiés par Hergenhahn et Aldehoff après plusieurs jours de jeûne; cependant deux animaux, qui se trouvent dans des conditions biologiques diflërentes, ne peuvent pas être pris comme contrôle l'un de l'autre. Cette faute de méthode enlève toute valeur démonstrative aux expériences de Nebelthau, d'autant plus que ses conclusions s'appuient presque toujours sur de minimes différences. Je puis le prouver pour les expériences faites avec de l'hydrate de chloral : dans trois expé- riences où le glycogène total a été déterminé, il a trouvé au 6*^ jour de jeûne, pour un kilogramme du poids initial, 1,261 ; 1,736 ; 2,567 de glycogène, tandis que sur les animaux de contrôle, (d'après Kûlz, loc. cit., 1891, 20) la somme totale de glycogène au 6* jour de jeûne varie, pour un kilogramme du poids initial, entre 0,041 et 1,608. Les premiers chiffres de Nebelthau, relatifs à l'influence du chloral, sont donc tout à fait dans les limites des chiffres qu'on observe sans le chloral; et, quant au troisième chifTre, il dépasse tellement le premier qu'on peut l'attribuer au hasard. Pour éliminer ce hasard, trois expériences ne suffisent pas; les conclusions'de Nebelthau ne sontdoncpas démontrées. Nebelthau a encore fait des recherches analogues avec la chloralamide, la paraldé- hyde, le chloroforme, l'éther, l'alcool, le sulfonal; mais il n'a dosé que le glycogène du foie, et non celui du corps : en outre il ne fait pas d'expériences de contrôle, se contentant de calculer comme il a été dit plus haut. Tout aussi peu démonstratives sont ses expériences avec l'ammoniaque, l'asparagine, les citrate, formiate et lactate d'ammoniaque, la benzamide, la formiamide. Il s'agit toujours de petites différences, de sorte que, pour les raisons données plus haut, ses expériences ne prouvent rien. Du lieu de formation du glycogène. — En voyant chez les animaux rendus pauvres en glycogène par un long jeûne que l'administration d'hydrates de carbone fait croître d'abord le glycogène du foie, et n'accroît que plus tard celui des muscles, et GLYCOGENE. 415 en constatant que nulle part il ne s'accumule autant de glycogène que dans la cellule hépatique, alors on ne peut plus douter que c'est la cellule hépatique qui l'orme synthé- tiquement le glycogène. C'est là assurément l'opinion générale ; mais il faut reconnaître qu'elle n'est pas démontrée; car, après ingestion de viande, dans aucun organe il ne s'accumule autant d'urée que dans le rein, alors qu'il s'en amasse peu dans le foie : et cependant ce n'est pas le rein, mais le foie, qui forme l'urée. T. G, Brodie et K. Grube (/. P., 1903, xxix, 270 et 266) ont eu le grand mérite de donner de ce fait une démonstration rigoureuse. Immédiatement après la mort (chez un chat), ils prenaient un fragment de foie dont ils faisaient l'analyse, puis ils faisaient passer pendant deux heures ou deux heures et demie du sang chargé de 1 p. 100 de sucre à travers le foie, à une pression de 20 à 30 millimètres de mercure. Voici les résultats obtenus : HYDRATES DE CARBONE II Numéros. SUCRt p. 100. AI'EÈS GLYCOGÈNE p. 100. P- 100. APRÈS AVANT AVANT A PRÈS AVANT le passage le passage le passage le passage le passage le passage du sang. du sang. du sang. du sang. du sang. du sang. 1 . . . 0,89 0.80 1,58 2,38 2,47 3,18 2 . . . 1,04 1,19 2,01 2,78 3,11 3,91 3 . . . 1,23 1,44 0,46 1,73 1,69 3,17 4 . . . 1,89 1,40 0,74 2,04 2,63 3,44 Gomme les analyses ont été faites par la méthode de Pavy, on peut regarder les résultats comme valables. Plus tard Grube (A. g. P., 1903, cvii, 490) a repris cette expé- rience sur le chien, et l'a confirmée, à quelques nuances près. Ces résultats sont d'au- tant plus précieux que cette méthode, absolument irréprochable, donne une preuve de plus que le sucre est la source du glycogène. On eût pu objecter aux recherches de K. Grube qu'il suppose le glycogène égale- ment réparti dans toutes les parties du foie. Mais, dans un travail ultérieur, comme il s'agissait d'un fait d'extrême importance, il a pu répondre à celte objection. On peut se demander maintenant si le foie a seul cette propriété de faire du glyco- gène, et si le glycogène formé par lui est lentement cédé aux autres organes, étant au fur et à mesure de sa formation emporté par le courant sanguin. Après qu'on a, par l'inanition, privé à peu près complètement un animal de glyco- gène, si alors on le nourrit avec des hydrates de carbone en abondance, on voit d'abord le foie se charger de glycogène ; c'est plus tard seulement que les autres organes se chargent de glycogène, pour arriver finalement à dépasser la quantité totale qui se trouve dans le foie. Si au contraire on fait jeûner un animal riche en glycogène, alors diminue la teneur du foie en glycogène, et il devient bientôt plus pauvre en glycogène que les muscles. Au moins telle est la règle ; mais il y a des exceptions. Chez un chien extraordinairement gras, qui avait jeCiné vingt-huit jours, j'ai trouvé, après la mort, dans son foie, 4,78.j p. 100 de glycogène (exprimé en sucre) et 0,158 p. 100 dans les muscles. D'abord ce n'est pas le foie seul qui a la propriété de faire du glycogène dans la nature, puisque on la trouve dans les champignons, par exemple, dans le protoplasma de l'Aethalium septicum, ainsi que dans la levure, d'après la découverte de L. Erkkr.v. Nous avons vu plus haut que le glycogène a été découvert chez les animaux inférieurs qui n'ont pas de foie, chez les embryons d'oiseau, alors qu'ils n'ont pas encore de foie : l'œuf avant son développement ne contient pas de glycogène. (?) Barfurth a montré que chez les céphalopodes, qui après l'inanition n'ont pas de glycogène ou en ont très peu; le glycogène, dès qu'ils sont alimentés, apparaît d'abord dans les cellules du tissu conjonctif, et plus tard seulement dans les cellules ëpithéliales du foie. Si l'opinion généralement reçue est vraie, que le glycogène n'est pas dissous 416 CLYCOGENE. dans le plasma du sang, mais se trouve dans les leucocytes du sang, il faudrait admet- tre que les muscles ont, tout comme le foie, le pouvoir de faire du glycogène avec du sucre. Cette opinion pourrait s'appuyer sur l'observation de Naunyn {A. P., P., m, 97) que chez les poules le glycogène musculaire se colore en violet par l'iode, tandis que le glycogène du foie se colore en brun. Il y aune observation de Claude Bernard bien importante, et qui, chose étonnante, a passé inaperçue ; c'est que les muscles paralysés ou restés longtemps en repos, chez le lapin, se chargent de glycogène [Leçons sur le diabète, 1877,553). Dans ces cas le glyco- gène donne avec l'iode une couleur tout à fait bleue, comme celle de l'amidon. KiiLza injecte' du suore à des grenouilles privées de foie, pour savoir si dans ces conditions le glycogène du muscle augmentait (A. g. P., 1881, xxiv, 69). La teneur en glycogène a été Animaux témoins. Animaux injecté.s, p. 100. l>. 100. 0,6299 0,7977 0,6350 >' 0,5441 0,5371 KiiLz semble considérer ce résultat comme positif. Cela est possible; mais en tout cas la différence est dans les limites de l'erreur expérimentale, quand on emploie pour le dosage du glycogène l'ancienne méthode de Briicke. KiiLz,en 1890, reprit la même expérience, en l'instituant autrement. On prend du sang additionné de sucre, et on le fait circuler à travers l'extrémité postérieure gauche d'un chien immédiatement après la mort, tandis que l'extrémité postérieure droite est immédiatement analysée au point de vue de sa teneur en glycogène (Z. B., 1890, xxvii, 237). Il s'agissait donc de savoir si dans l'extrémité gauche, qui recevait du sang chargé de sucre, le glycogène avait augmenté. Mais naturellement la question se pose tout d'abord de savoir si l'extrémité droite et l'extrémité gauche contiennent la même quan- tité de glycogène. A. Cramer a fait cettfe recherche sous la direction de Kùlz, et KiiLz en a conclu que dans les conditions noi'males il y a, d'une manière tout à fait satisfai- sante, la même teneur en glycogène, non seulement dans les deux extrémités du corps, mais encore dans les deux moitiés du corps. Pourtant le tableau de KiiLz et de Cramer, que nous avons donné plus haut, .si on le regarde avec attention, montre dans les expé- riences comparables des différences, pour le numéro l,de 23,2 p. J 00; pour le numéro 2, de 16, 1 p. 100; pour le numéro 3, de 19, p. 100; pour le numéro 4, de 2 p. 100; pour le numéro 5, de 11,1 p. 100. Par conséquent le membre traversé par un courant chargé de sucre pouvait fort bien garder la même quantité de glycogène, et cependant en donner tantôt plus, tantôt moins, que l'autre membre pris comme témoin. Dans 11 expériences il s'en trouva 3 où il y eut augmentation, 11 où il y eut diminution de glycogène. Des 3 expériences qu'il considère comme positives, il en est une que Kùlz lui-même regarde comme incertaine (numéro 1). Quant aux deux autres, on constate une fois une augmentation de 47,7 p. 100; et une autre fois, de 12, 9 p. 100. Les autres expériences, négatives, ont donné des différences qui allaient jusqu'à 125 p. 100. Donc assurément le laborieux travail de Kùlz n'a pas donné de résultats certains. Mais, comme KuLZ conclut des deux résultats positifs qu'il a obtenus, que le muscle est capable de faire du glycogène, je devais examiner la question d'une manière approfondie. Au sur- plus, on voit bien que Kulz, dans ses conclusions, n'est pas tout à fait certain de la force démonstrative de ses expériences. En voyant, dans l'expérience de Brodie et K. Grube, que la transfusion de sang sucré à travers le foie après la mort chez un animal à sang chaud, a fait croître la quantité de glycogène hépatique, et en se rappelant que Kulz, chez des grenouilles sans foie, n'a pas pu faire, par des injections de sucre, croître le glycogène musculaire, que de même le passage du sang sucré à travers les muscles d'un chien n'a donné que des résultats presque négatifs, on doit regarder comme très douteux que la fibre musculaire puisse faire du glycogène. Mais naturellement il ne faut jamais regarder comme cer- taines des expériences négatives : et les propriétés si différentes du glycogène muscu- laire et du glycogène hépatique, notamment vis-à-vis de l'iode, exigent beaucoup de prudence dans toute conclusion. GLYCOGÈNE. 417 CHAPITRE V DESTRUCTION DU GLYCOGÈNE. Parmi les nombreux constituants des cellules animales, il y a deux substances qui se distinguent de toutes les autres par une propriété commune; à savoir, que, pendantque toutes les autres substances se trouvent dans la cellule en proportions déterminées et peu variables, le glycogène et la graisse peuvent au contraire exister dans une cellule, et spécialement dans la cellule hépatique, en des proportions qui varient énormément. Une autre propriété du glycogène et de la graisse, c'est qu'aucune autre substance constituante de la cellule hépatique ou de la cellule musculaire n'est capable de dimi- nuer ou d'augmenter avec tant de rapidité et dans des proportions si considérables. Un excès d'alimentation accumule le glycogène ; un travail musculaire éneigique ou une oxydation plus intense le font disparaître : d'où il suit que le glycogène et la graisse ne peuvent pas être considérés comme éléments essentiels de la cellule vivante, mais bien comme aliments de ces cellules. Le glycogène est du sucre condensé ; il sert à la nutrition en devenant du sucre. Les conditions de la transformation du glycogène en sucre ont été déjà bien établies par Claude Bernard. Il a montré que, par l'ébullition avec les acides minéraux ou par les ferments, comme la diastase, la salive et le suc hépatique, le glycogène se trans- forme en sucre, tout comme l'amidon végétal. II s'agit d'abord de savoir la nature du sucre ainsi formé. MuscuLUs et Mehlng ont les premiers démontré rigoureusement qu'il s'agit de gly- cose (Z. p. C, II, 416). Du foie fraîchement enlevé d'un chien ils ont pu extraire plu- sieurs grammes de glycose, qu'ils ont chimiquement déterminé par ses propriétés op- tiques, sa puissance réductrice et sa fermentation. Plus tard ils ont pu constater avec certitude l'existence de maltose. Pavy a aussi montré que, entre le glycogène et le glycose, les substances intermédiaires, dextrine et maltose, peuvent se trouver dans le foie; car le sucre du foie a une puissance réductrice moindre que le glycose, et même moindre que le maltose. Pavy conclut à l'existence de dextrine {loc. cit., 1894, 125 et 132). E. KiJLz a repris la question. Il a préparé du glycoseavec le foie d'un chien en rigi- dité cadavérique. « Une solution fraîche de ce glycose ainsi préparé donnait la double polarisation. Des quantités déterminées en furent prises, pesées et séchées sur l'acide sulfurique et dissoutes dans l'eau. Dans trois solutions différentes on fit la titration et on prit la déviation polarimétrique : les résultats en furent aussi satisfaisants qu'on pouvait l'espérer. Comme preuve particulièrement démonstrative, il faut noter ce fait qu'on a pu préparer des quantités notables de la combinaison du chlorure de sodium avec le glycose. » Kîjlz insiste sur les erreurs qui ont été commises dans l'étude de cette question, mais il est inutile de reproduire ici cette critique. Avec VoGEL, KiiLz a réussi à préparer avec le foie de veau les osazones du maltose et de l'isomaltose (C. W., 1894, n» 14; et Z. B , 1894, xxxi, 108). Immédiatement après la mort de l'animal, le glycogène du foie se transforme en sucre. Mais ce phénomène chimique ne se produit avec grande intensité que pendant les premières minutes : au bout de quelque temps il marche avec une telle lenteur que pendant plusieurs jours on peut encore trouver dans le foie des quantités considérables de glycogène. On doit alors se demander si cette formation de sucre dans le foie est un phénomène physiologique dépendant de l'activité du protoplasma musculaire ou un phénomène de fermentation. En 1873, WiTTicH {A. g. P., 1873, vu, 28), par l'étude du ferment du foie, a apporté des preuves indiscutables pour établir que la formation de sucre dans le foie n'est pas le résultat de l'activité vitale de la cellule hépatique. Il fit passer pendant plusieurs heures un courant d'eau à travers le foie enlevé du corps, en continuant jusqu'à ce que l'eau s'écoule incolore et sans contenir de sucre : puis 1p foie fut traité par l'alcool absolu, desséché et broyé dans un mortier avec de la glycérine; 24 heures après, la glycérine contenait déjà des ferments. Pour s'en assurer, on plaça deux échantillons UICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VU. 27 418 GLYCOGÈNE. glycérines du foie dans 2 vases. A l'un de ces vases on ajouta 2'\ ce. d'eau distillée; à l'autre, une quantité égale d'empois d'araidoii, et dans un troisième vase on mit de l'empois d'amidon sans extrait hépatique. Quatre heures après on essaya les trois liquides avec la liqueur de Fehling. L'amidon pur ne donna point de réaction. Dans 10 ce. du mélange de l'extrait glycérique avec l'eau, il n'y avait que des traces de sucre, tandis que dans la liqueur constituée par l'extrait hépatique glycérine et l'ami- don, il y eut décoloration de la liqueur de Fehling et abondante précipitation d'oxydule de cuivre. WiTTiGH en conclut que le foie complètement lavé et privé de sang contient un ferment diastasique évident, lequel peut être, par la glycérine, extrait du foie durci par l'alcool. Comme Wittich a trouvé aussi ce ferment diastasique dans la bile et dans le foie lavé à maintes reprises, et que, malgré le lavage, il a pu toujours en extraire du ferment, il conclut que ce ferment ne vient pas du sang, mais de la cellule hépatique. Pavy a aussi, d'une manière démonstrative et en concordance avec Claude Bernard, prouvé que la formation de sucre qui se produit dans le foie immédiatement après la mort est un phénomène de fermentation, et qu'elle se produit indépendamment de l'ac- tivité du protoplasma vivant. D'après Pavy {loc, cit., 144), le foie normal vivant ne con- tient que de très faibles quantités de sucre; 1 à 4 pour mille. Deux minutes après la mort de l'animal, la proportion de sucre augmente rapidement, jusqu'à être de 12 à 15 pour mille, et 18 à 24 heures après on trouve communément de 20 à 35 pour mille. En com- parant la quantité de sucre, deux minutes après la mort et celle qui se produit plusieurs heures après, on voit que la formation du sucre est beaucoup plus rapide au début que plus lard {loc. cit., p. 136, 1894). Pavy s'élève contre l'opinion de Poster [Text book of physiology. Appendix by Sheridan Lea, 58, 98) et de Paton [Hepatic glycogenesis. Tram, of the Roy. Soc, 1894) d'après lesquels la formation de sucre aux dépens du glycogène serait un processus vital de la cellule hépatique, et il donne de très belles et décisives expériences. « On sait, dit-il, que les ferments peuvent être précipités par l'alcool sans perdre leur activité : le foie traité par l'alcool et desséché donne un produit que l'on peut indéfiniment conserver {loc. cit. An Epicriticism, 1895, 73). Si l'on prend la poudre do ce foie desséché et qu'on la mette à macérer dans de l'eau à une température convenable, tout le glycogène se change en sucre en six ou sept heures, et la moitié même de cette transformation s'effectue en une demi-heure. . Noël Paton a objecté à F. Pavy que la transformation du glycogène en sucre est due à l'activité vitale des cellules {Hepatic glycogenesis. Philos., Trans., glxxxv, 1894). Paton a broyé le tissu hépatique frais avec du sable, de manière à abolir la vie des cellules par la destruction de leur organisation morphologique. Si la formation de sucre est due à un enzyme, elle doit continuer après le broiement des cellules; mais, si elle est un processus vital, elle doit être suspendue. Or Paton semble conclure de ses recherches qu'il s'agit d'un processus vital; mais Pavy a démontré, par de nombreuses expériences, que l'opinion de Paton était sans fondement {loc. cit., 74). On a aussi objecté à l'hypothèse d'une transformation du sucre par un ferment que, dans la plupart des recherches, l'action des microbes n'avait pas été suffisamment éli- minée, et que les enzymes connus de l'organisme ne peuvent transformer le glycogène qu'en dextrine et maltose, alors que dans le foie il se forme du glycose. Dastre {A. d. P., 1888) a cherché alors à empêcher l'activité vitale des cellules, en chauffant le foie à 50°, ou en le refroidissant, supposant qu'en opérant ainsi on n'altère pas les enzymes. Or, comme les extraits hépatiques traités de cette manière ne fournissent pas de sucre, Dastre en conclut que la formation de sucre est un processus vital. Mais il n'a pas démontré ceci, qui est hypothétique, que le ferment inconnu du foie n'est pas détruit parla tempé- rature de 50». D'ailleurs, la question a été abordée par des méthodes plus décisives, et elle a conduit plutôt à l'hypothèse d'une transformation du sucre par un ferment. Salkowski (D. med. Woch., 1888, n° 16 et A. P., 1890, 554) a fait remarquer que le chloroforme en solution aqueuse est un moyen précieux pour séparer l'action des ferments solubles de l'action des ferments organisés, car le chloroforme suspend les opérations dues au protoplasma vivant, tandis qu'il laisse intacte l'action des enzymes et dos ferments GLYCOGENE. A\9 solubles. Déjà, en 1889, E. Salkowski (C. W., 1880, n» 13,' 228) et Otto Nasse {Roslocker Zeituiuj, 1889, n» lOIJ) avaient montré que la formation de sucre se continue dans l'eau chloroformée, et dépend d'un ferment soluble. L'expérience fondamentale de Salkowski est la^suivante : On donne à un lapin dans l'estomac 10 grammes de sucre de canne en dissolution dans l'eau, puis, dix- sept heures après, on le sacrifie ; on lui prend le foie, en enlevant la vésicule biliaire et les princi- paux conduits biliaires; après l'avoir haché et broyé, on sépare ce foie en deux parties de 23 grammes chaque ; l'une est mise dans un flacon avec 400 ce. d'eau chloroformée (tlacon A). L'autre (flacon B) est portée à l'ébullition, pour être stérilisée, et placée ensuite dans un flacon avec 400 ce. d'eau chloroformée. On laisse digérer les deux flacons pendant 68 heures, on filtre et on épuise par l'eau. L'extrait  est jaune clair, limpide, tandis que l'extrait B est fortement opalescent. Les deux extraits sont concentrés, et ramenés à 500 ce. ; puis filtrés sur des filtres secs. On trouve alors que le flacon A con- tient beaucoup de sucre, mais pas de glycogène; tandis que l'extrait B, qui ne contient que des traces de sucre, contient beaucoup de glycogène. En dosant ce sucre et en le ramenant à 1000 grammes de tissu hépatique, on trouve qu'il y a dans le flacon A 48ë'-,28 de sucre, et dans le flacon B, 38^'',65. Ces recherches ont été confirmées par Arthus et Huber {A. cl. P., 1892, 651). Ces savants ont établi que des solutions contenant i p. 100 de fluorure de sodium abolissent toute activité cellulaire, et n'altèrent pas l'activité des ferments solubles. Les fragments d'un foie lavé mis dans cette solution de fluorure de sodium ont conservé intacte la puissance de faire du sucre; et, ce qui est plus important, des extraits hépatiques dans des solutions de fluorure de sodium avaient conservé, après des semaines et des mois, leur aptitude à transformer le glycogène en sucre. Enfin, les recherches de Rôhmann et Bial ont pu résoudre une difficulté qui avait embarrassé quelques physiologistes, à savoir que le ferment du foie se distingue des autres diastases connues, par ce fait qu'il transforme le glycogène non seulement en maltose, mais encore en glycose. Or^M. Bial a trouvé qu'iljexiste, dans le sérum du sang, et non dans les globules, un ferment qui transforme le glycogène et l'amidon en glycose. Si l'on précipite le sérum du sang avec dix fois son volume d'alcool additionné d'éther, et qu'on dessèche le précipité d'albumine à l'air, on obtient une poudre qui, traitée par la glycérine, abandonne son principe sacchariflant (A. rj. P., 1892, lu, 149). Cette puissance de saccharification disparaît par la coction du sérum; quant à la for- mation de sucre, au début elle est très active, mais elle se ralentit peu à peu, à mesure que s'accumulent les produits de fermentation" ce qui est un caractère générique. Après action du sérum du sang sur l'amidon, on trouve un chiffre de réduction dont le maximum répond au chiffre qu'on obtient en faisant bouillir l'amidon avec l'acide chlorhydrique. Cent parties d'amidon sec ont donné par l'ébullition avec l'acide chlorhydrique dilué 86 p. 100 de sucre, tandis que le ferment diastasique du sérum a donné 85, 87 et 88 p. 100. Dans les mêmes conditions, le ferment du pancréas a donné des chiffres de réduction d'environ 50 p. 100. En outre, on peut dire que ce sucre est formé par le sérum du sang et du glycose; car, après qu'on en a séparé l'albumine, on obtient des chiffres de polarisation qui sont identiques aux chiffres de réduction, en supposant, bien entendu, qu'il s'agit dans les deux cas de dextrose. Rùhmann [D. Chem. Ges., 1892, XXV, 3654) a combiné le sucre obtenu par le ferment du sang au chlorure de sodium, ce qui donne une combinaison cristallisée qu'on peut chimiquement déter- miner par l'analyse élémentaire, la teneur en chlore, la puissance de réduction, la fermentation, le point de fusion de son ozazone, M. Bial a établi, en outre, que le ferment du sérum ne transforme pas directement l'amidon en glycose, et il a pu mon- trer qu'il existe probablement un corps intermédiaire, qui serait le maltose [A. g. P., 1893, Liv, 73). Il n'y a donc pas lieu de douter du ferment soluble transformant le glycogène en sucre, puisque le glycogène peut être transformé en glucose. Bial considère le ferment diastasique du foie comme un ferment du sang ayant pénétré dans la cellule hépatique. L'explication la plus simple et la plus naturelle qu'on puisse donner pour le mécanisme de la formation de sucre dans le foie des êtres vivants est aussi celle qui nous montre une transformation du glycogène par un enzyme contenu dans le sang et dans 420 GLYCOGÈNE. la lymphe, et c'est une hypothèse qui s'applique à tout ce qu'on sait sur les phénomènes chimiques qui se passent dans le foie après Ja mort (A. P., i901, 255). Mais cela n'est point fondé. Le fait qu'il y a dans le sérum un ferment agissant d'une manière ana- logue au ferment hépatique, ne nous permet pas de conclure que le ferment du foie soit dû à la migration du ferment du sang. Il pourrait tout aussi bien se faire que ce ferment puissant fût dû à la migration du ferment hépatique ; car les cellules vivante?, et notamment les cellules glandulaires, sont les organes où se forment les enzymes, et, de même que nous savons que les diastases de la salive et du suc pancréatique se forment dans les cellules des glandes salivaires et pancréatiques, de même nous pou- vons considérer la diastase hépatique^^comme un produit de la cellule hépatique. Ainsi c'est un fait positif que le glycogène du foie est transformé en glycose par un ferment. Pourtant Seegen a prétendu que le sucre formé ne provient pas seulement du glyco- gène, mais encore d'autres substances : peptone et graisse. Mais les méthodes de Seegen pour le dosage du glycogène, et même du sucre, sont d'une exactitude qui laisse beau- coup à désirer, et on comprend qu'il est difficile de résoudre le problème posé. D'ail- leurs d'habiles expérimentateurs ont tenté de contrôler les faits indiqués par Seegen (Seegen et Kratschmer, A. g. P., xxii, 1880) et ils n'ont pu les confirmer. Us ont vu que le sucre qu'on trouve dans le foie quelque temps après la mort correspond sensi- blement à la quantité de glycogène qui a disparu pendant le même temps. On doit mentionner ici les travaux de R. Bôhm et F. Hoffmann {A. g. P., xxin, 1880, 205\ H. Girard (A. g. P., xli, 1887, 294), N. Zuntz et Cavazza.ni (A. P., 1898, 539). Action du système nerveux sur la formation du sucre dans le foie. — Tout aussi importante que la découverte du glycogène est la découverte de ce fait que le système nerveux exerce une influence puissante sur la transformation du glycogène en sucre. Le grand honneur de ces deux découvertes est dû à Claude Bernard seul. Voici comment, avant d'avoir isolé le glycogène, Claude Bernard décrit le fait pour la première fois (Leç. de Physiol. Expérimentale, 1855, I, 299) : « Si l'on pique un certain point de la moelle allongée d'un animal Carnivore ou herbivore, le sucre, après un certain temps, se répand dans l'organisme en si grande abondance qu'il en apparaît dans les urines. Voici l'instrument dont nous nous servons pour pratiquer cette piqûre (Fig. 14, p. 298). Il se compose d'une tige aplatie par une de ses extrémités, amincie et tranchante comme un petit ciseau. Au milieu de la lame et dans l'axe de l'instru- ment la tige se prolonge parune petite pointe très aiguë, longue de 1 millimètre environ. Vous comprendrez l'usage de cet instrument quand je vous aurai indiqué le point où il faut le porter. » L'expérience a d'abord été faite sur des lapins. Il s'agit de piquer le plan- cher du quatrième ventricule. Le point qu'il s'agit de toucher peut être limité en haut par une ligne transversale qui unit les deux tubercules de \Venzel (origine des nerfs acoustiques). En bas, par une ligne qui va d'une origine d'un pneumogastrique à l'autre. On saisit fortement la tête du lapin de la main gauche pendant qu'un aide tient solidement les quatre pattes, pour empêcher l'animal de faire aucun mouvement. Puis, on plante la pointe de l'instrument sur la ligne médiane, dans le tissu spongieux de l'os occipital, exactement en avant de la bosse occipitale supérieure. Alors on presse d'une manière continue en faisant exécuter de légers mouvements de latéralité pour faire enfoncer les parties tranchantes de l'instrument, et on tâche de lui faire croiser sur la ligne médiane une ligne qui s'étendrait d'un conduit auriculaire à l'autre. On dirige l'instrument avec beaucoup de précautions dans cette direction jusqu'à ce qu'on atteigne l'os basilaire. Alors l'on retire l'instrument, et on a ainsi traversé le crâne, le cervelet, les couches postérieures et moyennes de la moelle allongée, mais la partie large et tranchante de l'instrument n'aura pas lésé d'une manière sensible la couche antérieure de la moelle qui aura seulement été traversée par la pointe de l'instrument. On a évité ainsi une lésion grave et on comprend maintenant la raison de la présence de cette pointe. Si l'on a réussi à atteindre exactement la ligne médiane du plancher du quatrième ventricule, on ne remarque pas d'abord qu'il y ait après cette piqûre de troubles quelconques. Une ou deux heures après la piqûre, le sucre apparaît dans l'urine. Or ce diabète artificiel ne dure pas longtemps, mais disparaît quelquefois; cependant, il persiste chez les lapins de cinq ou six heures, rarement de vingt-quatre GLYCOGENE. 421 heures. Chez les chiens atteints de diabète artificiel, les effets de la piqûre du bulbe durent plus longtemps. Bernard a observé un cas dans lequel rélimination du sucre a duré sept heures {Loc. cit., 412). La quantité de sucre qui est alors élimine' par l'urine n'est jamais considérable : elle ne dépasse pas, comme le remarque Hédo.n, 2 à 3 p. lOi). Claude Bernard dit s'être assuré qu'après cette piqûre bulbaire la teneur en sucre du sang et du foie a augmenté. Or, comme beaucoup d'expérimentateurs divers ont établi que si, pour une cause quelconque, la teneur du foie en sucre dépasse 0,3 p. 100, alors le sucre passe dans l'urine. On ne peut pas douter que cette piqûre bulbaire n'augmente la teneur du sang en sucre. Bock et Hoffmann {Exper. Studien ûber Diabètes, Berlin, Oli- ven, 1874). Bock et Hoffmann, dans des recherches très détaillées, ont montré qu'après la piqûre bulbaire le sucre du sang augmente de 0,1 à 0,4 p. 100, mais les méthodes analytiques employées par eux ne donnent pas de certitude absolue. La piqûre du bulbe produit aussi de la glycosurie chez les oiseaux, d'après M. Bern- hardt(A. a. p., 1874, ijx, 407) et chez les grenouilles, d'après M. Schiff [Unters. ilber (lié Zuckerbildung, etc., Wiirzburg. 1859). Plus tard, Claude Bernard {Leçons sur le diabète, 1877, p. 380) a montré que la piqûre bulbaire réussit mal, ou ne réussit pas, quand les animaux sont restés longtemps sans prendre de nourriture, et des expériences importantes confirmatives de cette opi- nion de Claude Bernard ont été faites par F. Dock, sous la direction de L. Hermann (A. g. P., 1872, V, 571). Quand Dock piquait le bulbe de lapins ayant jeûné depuis quatre ou cinq jours, on n'observait pas de glycosurie. Des expériences de contrôle montraient qu'après une pareille période de jeûne les lapins n'avaient plus de glycogène dans le foie, ou n'en avaient plus que des traces. Essentiellement les expériences de Dock ont été confirmées parNAUNYN (A. P. P., ui, 85). Mais Naunyn n'a pas eu des résultats aussi net- tement négatifs. Cela se comprend sans peine, car l'absence totale de glycogène dans le foie d'un lapin après quatre ou cinq jours de jeûne dépend en grande partie de l'état de sa nutrition au moment où commence la période d'inanition. Ces expériences prouvent que l'origine du sucre après la piqûre du bulbe est bien le glycogène, mais il ne s'ensuit pas nécessairement que le glycogène des muscles ne joue aucun rôle. Il s'agit maintenant de savoir quelles relations la piqûre de la moelle allongée peut avoir avec la transformation du glycogène en sucre. Et cela a été aussi expliqué par Claude Bernard : il a prouvé que la lésion bulbaire agit sur le foie par l'intermédiaire de la moelle et des nerfs splanchniques. Nous avons d'abord à rappeler la découverte de Claude Bernard, d'après laquelle les nerfs vagues excitent le centre glycosoformateur de la moelle allongée. Voici comment il décrit l'expérience {Leçons de physiologie expérimentale, 1895, i, p. 333). « Si l'on fait la piqûre bulbaire après la section des deux nerfs vagues au cou, les effets sont les mêmes que si les nerfs vagues n'avaient pas été coupés. Par consé- quent ce n'est pas par la voie de ces nerfs qu'est conduite l'excitation qui se transmet du centre glycosoformateur au reste de l'organisme. » Voilà pourquoi, si l'on excite le bout périphérique du nerf vague sectionné, on n'ob- serve pas de glycosurie, tandis que, si l'on excite le bout central, lequel est encore en relation avec la moelle allongée, on observe la glycosurie aussi bien qu'après la piqûre de bulbe. Claude Bernard donne à ce sujet l'exemple suivant.» Chez un chien en pleine digestion il excite fortement les deux bouts centraux des nerfs vagues pendant six à dix minutes, et après un repos d'une heure on les électrise de nouveau. L'excitation du nerf vague de droite provoqua l'expulsion des aliments par le vomissement et l'arrêt respiratoire, tandis que l'excitation du pneumogastrique gauche ne produisit pas de vomissements, et n'amena pas si facilement l'arrêt des respirations. Une heure après on fit encore l'électrisation, et l'on prit aussitôt après ses urines en le sondant. Les urines étaient devenues alcalines, d'acides qu'elles étaient avant l'opération, et elles con- tenaient très manifestement du sucre. Le lendemain l'animal n'était pas mort, ses urines étaient toujours alcalines, mais elles ne renfermaient plus de sucre. Le jour suivant, ce chien étant mort, on fit son autopsie, et ni son foie ni aucun tissu ou liquide du corps ne contenaient de sucre. L'expérience fut répétée sur un autre chien également en diges- tion : on galvanisa de la même manière que précédemment les bouts centraux des nerfs i22 GLYCOGÈNE. vagues, et l'on obtint le passage du sucre dans les urines, qui devinrent alcalines. Alors on sacrifia l'animal par la section du bulbe rachidieii, eL l'on trouva le sucre répandu partout; dans le sang de la veine porte, dans le sang des veines bépaliques, dans le sang du cœur droit et dans le sang du cœur gauche. Toutefois le sang des veines hépatiques fut celui qui contenait le plus de sucre. 11 existait dans le péricarde un épanchement de sérosité qui était très sucrée. Le tissu du foie dosé donna lg'-,41o p. 100 de sucre. » Ici nous devons indiquer l'autre découverte de Claude Bernard que la section des nerfs vagues au cou arrête la pi'oduction de sucre dans le foie. Il en conclut que le centre diabétique de la moelle allongée a besoin pour produire du sucre de l'excitation per- manente qui lui vient des nerfs vagues, et par conséquent, comme il le dit avec raison, la production de sucre après l'excitation des nerfs vagues est un processus réflexe. Il croit en outre que ce sont les rameaux intrapulmonaires des nerfs vagues qui contien- nent ces fibres agissant sur le centre glycosoformateur du bulbe. En effet, si l'on coupe les nerfs vagues au-dessus du foie et au-dessous des branches qu'ils envoient aux pou- mons, on voit que la formation de .sucre dans le foie n'est pas arrêtée. Par une très ingénieuse expérience {Leçom de physiologie expérimentale, 1855, i, 338 : voyez aussi p. 41 2), il fait la section des nerfs vagues dans la cavité tlioiacique, sacrifie l'animal le jour suivant, et montre que le foie contient autant de sucre que de coutume. Ce point sera d'ailleurs exposé avec détails plus tard. E. Kulz {A. g. P. xxiv, 1881, 100) a pris le nerf vague après son passage à travers le diaphragme et pense que, en ce point, il n'a pas, au point de vue de la formation du sucre, des effets différents des nerfs vagues au cou. Mais il n'y a pas d'autres détails sur ce point, si bien que nous ne savons guère jugera quel point est justifiée celte contradiction avec Claude Bernard. L'importante découverte de Claude Bernard relative à la fonction réflexe du nerf vague comme excitateur de la production de sucre a été reprise avec détail par Ecrhardt. D'abord Eckhardt {Bellnige zur Anat. und PhysioL, viii, 1879, 77) établit que la simple section d'un seul des nerfs vagues provoque une glycosurie de courte durée, à condition que l'expérience soit faite sur un animal en bon état de nutrition. Evidem- ment il faut supposer que l'expérience ne réussit que s'il y a du glycogène amassé dans le foie en quantité suflisante. Une belle et instructive expérience d'EcKHAROT est la sui- vante. On prend l'urine d'un lapin sain et vigoureux, et on constate qu'il n'y a pas de sucre. Alors on coupe le pneumogastrique gauche, et au bout d'une heure on retire 17 ce. d'une urine riche en sucre. Deux heures après l'urine ne contient que des traces de sucre. Alors on excite le bout central du nerf vague pendant trois quarts d'heure avec des intervalles de cinq à six minutes entre chaque excitation, laquelle dure une minute et demie. Quand ces excitations sont terminées, on retire 14 ce. d'urine et, par la liqueur de Fehllng on constate que cette urine contient beaucoup plus de sucre qu'il n'en avait été produit dans l'urine précédente par le fait de l'excitation qu'avait déter- minée la section du vague. Dans les trois heures qui suivirent, l'urine éliminée était chargée de sucre. On fit alors la suture de la plaie, et l'animal fut abandonné à lui-même; or, le lendemain matin, l'urine recueillie ne contenait plus de sucre. Alors, comme le jour précédent, on recommença de nouveau l'excitation électrique pendant trois quai ts d'heure, et de nouveau le diabète reparut, pour durer plusieurs heures. Cette expérience fut répétée par Eckhardt pendant plusieurs jours consécutifs. Le matin l'urine ne conte- nait pas de sucre; mais le sucre reparaissait après l'excitation, et la glycosurie durait plusieurs heures. On a là par conséquent la preuve que le diabète peut être déterminé par l'excitation du bout central du nerf vague agissant par voie réflexe, et Ecrhardt remarque avec raison que le diabète observé après une section unilatérale du pneumo- gastrique, diabète très passager, doit être considéré comme étant d'origine réflexe. L'excitation des centres diabétiques pourrait agir sur toutes les parties du corps qui contiennent du glycogène ou d'autres hydrates de carbone. Claude Bernard a montré que ce centre n'agit que sur le foie et qu'il n'agit que par l'intermédiaire du système nerveux, et il en a fait la preuve en coupant la moelle à différentes hauteurs au-dessous de la moelle allongée; ce qui, suivant le siège de la section, arrête ou laisse persister l'activité du centre diabétique bulbaire [Leçons, etc., 1834, 330). Les voies conductrices de l'excitation résident dans les parties supérieures de la moelle; car la section de cet organe au-dessous de la première vertèbre dorsale suspend GLYCOGÈNE. 423 l'action du centre bulbaire sur la formation de sucre. J'ai traduit cette phrase comme je la comprends, car Claude Bernard s'exprime d'une manière qui n'est pas très claire. « Les régions supérieures de la moelle, dit-il, pouvaient seules être mises en cause, car en dépassant la première vertèbre dorsale je ne produisais plus le phénomène {Leçons sur le diabète, 1877, 371). L'excitation efficace se transmet donc par la moelle jusqu'à la hauteur de la première paire rachidienne, et à partir de ce point elle suit la seule route qui conduise au foie, le grand et le petit splanchnique, branche du sympathique. L'ac- tion nerveuse est donc toujours transmise finalement au tissu hépatique. » F. W. V^xv Y {Diabètes mellitus, 1864) a montré, eu concordance avec Claude Bernard, que l'excitation de la moelle au niveau du renflement brachial peut amener la glycosurie. EcKHAUDT a confirme d'une manière extrêmement intéressante l'opinion de Claude Bernard {Beitràge zurAnat. iind PhysioL, iv, 138). Il a prouvé d'une manière positive que la piqûre bulbaire produit du sucre, même après la section des nerfs vagues et des nerfs sympathiques, mais qu'elle est sans effet après qu'on a coupé les nerfs splanchniques- Comme dans cette expérience le système nerveux central peut agir sur tout l'orga- nisme, puisque les seules parties innervées par les splam-huiques sont soustraites à cette action bulbaire, il est prouvé par là rigoureusement que le glycogène existant dans l'organisme en d'autres régions que dans le foie n'est pas touché par la piqûre du bulbe. Par conséquent, la piqûre du bidbe n'agit que dans les organes innervés jHir les splanch- niques, c'est-à-dire uniquement sur le foie. C'est là une proposition trop importante pour que nous ne tentions pas n'en donner encore une preuve. Si l'on coupe les nerfs splanchniques et qu'ensuite on constate que la piqûre du bulbe est sans effet au point de vue de la glycosurie, cela peut avoir pour cause soit qu'on n'a pas touché le point spécial du plancher du quatrième ventricule, soit qu'on n'a pas réussi à faire convenablement la section des nerfs splanchniques. Les deux cas ont été observés par Claude Bernard, qui les expose avec détail. {Leçons sur la physiol. et la pathol. système nerveux, n, o28. Piqûre du bulbe n'ayant pas réussi, p. 528. Section des splanchniques n'ayant pas réussi, p. 439.) Aussi Egkhardt a-t-ii institué une nouvelle expérience qui lui permet de faire sur le lapin la piqûre du bulbe avec un succès certain. Il met à nu le plancher du quatrième ventricule, en enlevant la mem- brane occipitale, qui s'étend de l'occipital à l'atlas, si bien qu'il peut voir à découvert la région qu'il s'agit de piquer [Beitràge zur Anat. nnd Physiol., iv, 1869, 11, et vni, 77, 1879). Dans ces conditions il n'y a plus un seul insuccès. Quant aux nerfs splanch- niques, il les coupe au-dessus du diaphragme et en dehors du péritoine, en opérant à découvert sur ces nerfs. Or, après une section faite dans ces conditions, la piqûre du bulbe, sans exception, n'a pas amené de glycosurie. Egkhardt avait trouvé, au point de vue de l'action excito-réflexe des nerfs vagues sur le foie, que la section simple 'suffit pour amener une glycosurie de courte durée, qu'on peut considérer comme un diabète dû à une excitation réflexe. Or, d'après Gr.efe (Krause, Annotationes ad diabetem, Halis Saxonum, 1863) et V. Hensen (Eckhardt's Bei- tràge, etc., IV, 1869, 7), c'est le cas aussi après la section des nerfs splanchniques; mais EcRHARD dit qu'il a une centaine de fois fait la section des nerfs splanchniques, et que jamais il n'a observé de glycosurie consécutive. D'autre part, Eckhardt {loco citato, IV, 10) a excité électriquement les nerfs splanchniques, et, ce qui est difficile à concevoir, il n'a jamais vu survenir de glycosurie. Par conséquent, le nerf qui, après piqûre du bulbe, transmet l'excitation au foie, et le provoque à former du sucre, ne peut pas pro- duiie cet effet après une excitation électrique. Eckhard {loco citato, iv, 11 et suiv.) expliqua en partie ces contradictions par une découverte qui serait de grande importance pour la physiologie générale des nerfs. Par des méthodes opératoires très habilement ménagées, il a mis à nu les ganglions thora- ciques et le ganglion cervical inférieur du sympathique. Alors, en coupant les voies ner- veuses unissant ces ganglions l'un à l'autre, il n'a jamais obtenu de glycosurie. Mais, en sectionnant le ganglion cervical inférieur, il observait un diabète tout aussi intense que celui qu'on peut constater après la piqûre du bulbe. Ce diabète atteint son maximum daas les deux premières heures qui suivent l'opération, diminue pendant les quatre ou cinq heures suivantes; puis reste encore pendant quelque temps à l'état de traces, si bien qu'on peut encore, au bout de vingt-quatre heure?, en constater quelques vestiges. La 424 GLYCOGENE. section des premier et second ganglions thoraciques avait le même effet, encore que plus faible. Quant aux autres ganglions, on ne peut faire cette même opération, car on ne peut guère les atteindre directement. Eckhard a alors coupé les rameaux communi- quants du ganglion cervical inférieur et du premier ganglion tlioracique, et, à la suite de cette opération, il a vu survenir, quoique irrégulièrement, de la glycosurie. Ce fait énigmatique, que l'excitation hépatique produisant du sucre n'est pas due aux nerfs splanchniques eux-mêmes, mais aux ganglions dont ils partent, n'est pas sans pré- senter quelques analogies avec des faits connus. On sait qu'après guérison de certaines paralysies motrices, chez l'homme, il se produit parfois des altérations nerveuses telles que le tronc nerveux ne peut plus être excité directement par l'électricité, tandis que la volonté peut encore mettre en jeu l'action nerveuse et déterminer par conséquent des contractions musculaires. Or l'excitation nerveuse qui a son point de départ dans la cellule ganglionnaire paraît être un mouvement moléculaire spécial qui excite les fibres nerveuses, plus facilement que toute autre excitation extérieure. Marc Laffont [Journal de VAnatomie et de Physiologie, xvi, 347) a donné une expérience qui confirme ces faits. Il a montré que la piqîire du bulbe devient inefficace à produire la glycosurie, quand on a coupé les trois premières paires dorsales. Ce qui est intéressant aussi, c'est de voir la glycosurie, provoquée au préalable par la piqûre du bulbe, s'arrêter après la section de ces trois troncs nerveux. L'expérience prouve donc qu'il y a dans le bulbe un centre qui, pour provoquer la glycosurie, envoie ses excitations au foie par la voie des nerfs splanchniques. Nous devojis àC. Eckhard [Beitràge, etc., 1879, viii, 87) des expériences importantes qui montrent bien le rôle de la moelle dans ces phénomènes. Après section de la moelle au niveau des 9« et 11" vertèbres (soit 2^ et 4^ cervicale) la piqûre du bulbe provoque encore la glycosurie. (Ailleurs, p. 89, Eckhard dit que la piqûre bulbaire est inefficace, quand est faite la section de la moelle au niveau des 10*= et 11^ vertèbres, soit .3*= et 4® cervicale.) A la région inférieure du cou, ou dans les parties supérieures de la moelle dorsale, il existe donc beaucoup de fibres nerveuses allant au foie par les nerfs splan- niques, lesquels suffisent pour conduire l'excitation des centres au foie. Mais, comme d'autres faisceaux vont aux régions inférieures de la moelle pour donner naissance aux splanchniques, on comprend que la section de ces parties inférieures de moelle excitent d'une manière passagère ces filets du splanchnique, de manière à provoquer une glyco- surie de courte durée. Eckhard a remarqué qu'après section de la moelle au niveau des 11" à 16"^ vertèbres (4^ à 9" dorsale), il se produit souvent, mais non toujours, une glycosurie qui dure peu de temps. Nous devons mentionner aussi que, d'après E. Cavaz- zANi(A. g. P., 1894, Lvii), par l'excitation des plexus cœliaques il se fait du sucre dans le foie aux dépens du glycogène qu'il contient. C'est ici le lieu d'indiquer une expérience de Claude Bernard (Leçons de Physio- logie expérimentale, i, 1835, 363). Il s'agit d'un animal dont la moelle avait été coupée au-dessous de l'origine des nerfs phréniques et au-dessus du renflement brachial, et dont le foie ne contenait pas de sucre. Cette expérience jette peut-être quelque lumière sur la disparition du sucre du foie après section des nerfs vagues au cou. Pour que l'expérience réussisse, il faut ne sacrifier l'animal que 8 ou 10 heures après qu'on a fait la section de la moelle. Si l'on extrait rapidement le foie, on voit qu'il ne contient plus de sucre. Mais, comme la température, à la suite de la section médullaire, s'est fortement abaissée, il est possible que cet abaissement thermique soit la cause pour laquelle le ferment diastasique n'agit point. Et de fait le sucre augmente beaucoup, si l'on expose le foie à des températures de 40 à 30°. Quoique dans ce cas le bulbe soit resté plu- sieurs heures sans agir sur le foie, le foie contient encore du ferment. Avant de laisser l'étude de l'influence nerveuse sur la formation du sucre dans le foie, nous devons faire remarquer que le diabète ordinairement provoqué par la mor- phine ou par l'injection dans les vaisseaux d'une solution de chlorure de sodium au 100*^ ne se produit plus, si l'on a au préalable fait la section des nerfs splanchniques. C'est probablement parce que la morphine et le chlorure de sodium exercent une excitation sur le centre glycoso-formateur de la moelle allongée. Les expériences rela- tives au diabète morphinique sont dues à G. Eckhard [Beitràge, etc., 1879, vni, 77). Les expériences sur le diabète par le chlorure de sodium sont dues à E. Kolz [Eckhard's GLYCOGÈNE. 425 Beitràge, etc., 1872, vi, 117). Le diabète chloruro-sodique a été provoqué sur le lapin par l'injection intraveineuse d'une solution à 1 p. 100 de chlorure de sodium. Il est assez remarquable que la même injection, àl p. 100 de bromure ou d'iodure de sodium, détermine bien de la polyurie, mais ne produit plus de diabète. D'autre part, l'acétate de sodium agit comme le chlorure et détermine de la glycosurie, mais celle-ci cesse d'avoir lieu lorsqu'on a fait la section des nerfs splanchniques. Chez le chien, l'acétate de sodium, et non plus le chlorure de sodium, produit de la glycosurie. Chez le lapin, on obtient aussi de la glycosurie par injection intra-veineuse de carbonates et de valé- rianate de sodium (Kulz, Eckhard's Beitmge, 1871, vi, 140). Ces expériences rendent très probable que, si certains sels et certains poisons produisent la glycosurie, c'est parce qu'ils agissent comme stimulants du centre de la moelle allongée; car ils demeurent sans effet si les nerfs splanchniques ont été coupés. Le diabète produit par la strychnine relève aussi des diabètes d'origine nerveuse. 0. Langendorff, dans un travail fait avec son e'iève Fr. Gurtler [A. P... SuppL, 1886, 280; et Gûrtler {Der Strychnin Diabètes, Diss. in., Konigsberg, 188G) a très bien montré que la strychnine ne produit pas de diabète si la moelle a été enlevée de manière à respecter les parties supérieures bulbaires. C'est l'excitation du foie qui produit la glycosurie : car, chez des grenouilles à foie enlevé, la strychnine ne provoque pas le diabète; et d'ailleurs le diabète est d'autant plus intense que le foie est plus riche en glycogène, ce qu'on voit en comparant le poids moyen du foie chez les grenouilles normales et les grenouilles diabétiques. Langendorff a remarqué que le poids du foie va en croissant en même temps que la proportion de glycogène. Voici quelle a été la proportion du foie pour 100 gr. du poids du corps, chez des grenouilles d'hiver, pour 100. Normales. Diabétiques. 3,4 3,7 3,6 2,5 8,6 5,1 Moyenne Minimum .... Maximum .... Langendorff a aussi montré que les contractions tétaniques musculaires ne sont en rien la cause du diabète. Car, si l'animal est empoisonné par de fortes doses de stry- chnine, on sait, depuis les travaux de H. Rœber (A. P., 1870, 615) et de P. Bongers {A. P., 1884, 331) qu'il y a paralysie des nerfs moteurs, mais sans tétanos. Cependant la glycosurie est plus intense, ce qui tient, comme le remarque Langendorff avec raison, à ce que les contractions musculaires brûlent une partie du sucre. Les gre- nouilles paralysées par le curare, et non diabétiques, deviennent, d'après Langendorff {A. P., 1884,273), diabétiques, quoiqu'il n'y ait pas trace de contractions musculaires; mais l'expérience n'est pas tout à fait probante ; car le curare seul sans strychnine est capable de provoquer la glycosurie. Ces faits établissent donc que la piqûre de bulbe, comme d'autres excitations ner- veuses, produisent la glycosurie, parce que par là est activée la formation de sucre dans le foie. Or Moos {Aixh. fur iviss. Heilk., iv, 37) a montré qu'il s'agit bien du foie; car la piqûre bulbaire est sans effet, quand les vaisseaux du foie ont été liés. Ce fait important a été encore confirmé par les recherches que Maurice Sghiff a instituées en 1839 sur des grenouilles et des crapauds {Untersucliungen ûber die Zucherbildung in der Leber, Wûrzburg, 1859, 76). 8 grosses grenouilles de même taille et 8 Pelophylax sont rendus diabétiques par la piqûre du bulbe : chez tous ces animaux, il fut constaté, au bout de 2 à 4 heures 45, qu'il y avait du sucre dans l'urine. Alors on mit le foie à nu, et on le fit par une incision sortir du péritoine, puis on lia par un même fil les vais- seaux du foie et les conduits biliaires. Chez 4 individus de chaque espèce, on enleva ce fil immédiatement après la ligature. Chez les 4 auti'es de chaque espèce on laissa les fils en place. Puis le foie fut remis dans l'abdomen, et la plaie soigneusement suturée. Sur les individus à foie lié, on vit diminuer notablement le sucre urinaire, et aucun de ces animaux n'en présentait plus au bout de 3 heures. D'ailleurs ils étaient gais, parais- saient bien portants et tous survécurent longtemps, à l'exception d'une Pelophylax femelle. Chez les autres animaux auxquels on avait enlevé les fils de la suture, la sécrétion sucrée resta normale, sans modification, jusqu'au quatrième jour. Ainsi ce n'est pas l'opération sanglante, mais bien la destruction du foie, qui a fait cesser le 426 GLYCOGÈNE. diabète des animaux à ligature hépatique, et le diabète a pris fin, quand trois heures après la ligature, le sang ne contenait plus de sucre. 11 est ainsi prouvé, ce qu'avait soupçonné Bernard, que dans le diabète artificiel le sucre ne vient que du foie. Quelle était donc l'opinion de Claude Bernard sur la nature du diabète artificiel provoqué par la piqûre du bulbe? «Je résumerai donc, dit-il, mon opinion, eu disant : le diabète artificiel est produit par une excitation, et non par une paralysie. » {L'xons sur le Diabète, 1879, 397). 11 n'est pas douteux que ce ne soit exact; car l'effet de la piqûre est passager. Le sucre disparaît dans l'espace de quelques heures, en très peu de t«mps, le temps qn'il faut pour que la plaie puisse se guérir, et, après qu'a disparu la glycosurie pro- duite par la piqûre, on peut sur le même animal faire reparaître le diabète par une seconde piqûre au même endroit, et même une troisième fois, et davantage encore. Donc c'est l'excitation du nerf vague, et non la paralysie qui provoque le diabète. Tous ces faits ne nous permettent point de douter qu'il ne s'agisse là d'une excitation véri- table. Une autre expérience de Schiff parle encore dans le même sens [Untersiichungen ùber die Zuckerbildung in der Lcber, 1859, Wurzbm-g, 101). C'est que la piqûre n'est plus efficace quand on fait l'opération sur un animal endormi par l'élher, car naturel- lement la cellule nerveuse, paralysée par l'anesthésie, ne peut plus être excitée. Si l'on fait la piqûre bulbaire sur des grenouilles ou des crapauds éthérisés, la glycosurie apparaît à mesure que disparaît l'anesthésie. On ne peut donc point douter que le dia- bète artificiel produit par la piqûre du bulbe ne soit la conséquence d'une excitation nerveuse du foie. Claude Bernard pensait que les nerfs activent la circulation du sang dans le foie, dilatent les vaisseaux, élèvent la température, et par conséquent augmentent l'action du ferment sur le glycogène. « L'influence, dit-il {Leçons sur le diabète, 1877, 388j, du curare, de la morphine, comme celle de la piqûre, reviendrait en définitive à une action sur les vaisseaux. Cette action n'est pas directe, elle s'exerce par l'intermédiaire du système nerveux au moyen des nerfs vaso-moteurs ou autres. La piqûre porterait précisément dans le bulbe rachidien sur un centre des nerfs vaso-moteurs. La conséquence de cet état de choses serait l'augmentation de la circulation dans les organes viscéraux, l'ac- croissement des sécrétions glandulaires, de la matière sucrée dans le foie, de l'infiltration urinaire dans le rein. De là, glycosurie et polyurie, c'est-à-dire diabète. En résumé, c'est dans le foie que se trouverait le secret des diabètes artificiels provoqués parle curare et par la piqûre; le mécanisme de la production consisterait dans un accroissement de la circulation de l'organe, entraînant un accroissement dans la formation du sucre ». Claude Bernard se fonde ici sur les effets produits simultanément par l'excitation de la corde du tympan, à savoir un accroissement de la sécrétion salivaire et une circulation plus active dans la glande sous-maxillaire. Mais nous savons aujourd'hui, grâce à un remarquable travail de R. Heidenhain {A. g. P., 1872, v, 309 et 1874, ix, 335), qu'nprès empoisonnement par l'atropine, l'excitation du nerf sympathique cervical piovoque la sécrétion de la glande sous-maxillaire, quoique la circulation du sang y ait notablement diminué. Nous savons que, dans ce cas, l'excitation de la corde du tympan active la circulation dans la glande, mais ne provoque plus sa sécrétion. Il est certain qu'il existe dans les différentes glandes des nerfs sécréteurs spécifiques, actifs par eux-mêmes et seulement aidés dans leur action par des changements appropriés de la circulation du sang dans la glande. Par analogie, nous pouvons donc dire que, dans les nerfs splanchniques, il n'existe pas seulement des vaso-moteurs hépatiques, mais encore des filets nerveux ayant une activité spécifique pour produira du sucre dans le foie; cette production de sucre étant déterminée par l'action du ferment diastasique. Ainsi le nerf, agissant comme tous les nerfs en dédoublant les molécules chimiques, agirait sur la substance cellulaire en produisant un ferment, lequel serait un produit de décomposition du proto- plasma cellulaire. Claude Bernard a pensé que l'action nerveuse mettait en contact avec le glycogène un ferment préexistant, ce qui naturellement doit conduire à la production de sucre; mais je crois que mon hypothèse répond mieux à la nature même des excita- lions nerveuses. D'ailleurs Langendorff [A. P., 1886, SuppL, 211) avait déjà, en se fondant sur la nature des excitations glycosoformatrices. émis des idées analogues. Cette hypothèse fait comprendre pourquoi les convulsions violentes qui se produi- GLYCOCÈNE. 427 sent au moment de la mort d'un animal, convulsions qui sont liées à une forte excita- tion du foie, s'accompagnent d'une production abondante de ferment, et nécessairement alors de la formation d'une grande quantité de sucre. Quand le foie meurt, la formation de ferment cesse. Donc, au lieu de supposer que cette diastase ne se détruit pas, ce qui cependant est encore possible, il vaut mieux admettre que, comme dans toutes les fermentations, à mesure que s'accumulent les pro- duits de cette fermentation, l'activité des phénomènes chimiques va en diminuant gra- duellement. Ainsi la formation de sucre dans le foie serait due à un véritable processus vital; car c'est ce processus vital même qui produirait le ferment. Cette hypothèse expliquerait d'une manière satisfaisante le fait annoncé par Claude Bernard qu'après la section des nerfs vagues au cou le sucre disparaît. Bernard suppo- sait que les rameaux pulmonaires du nerf vague envoyaient continuellement des excita- tions à la moelle allongée, excitations transmises au foie par voie réflexe. Quand l'inner- vation est supprimée, la formation de ferment s'arrête, et alors, après la mort de l'animal, il ne se fait plus de sucre aux dépens du glycogène préexistant, à cause de l'absence ou de la rareté du ferment. Mais la section des nerfs vagues au côu est accom- pagnée de tant de troubles divers, qu'on ne peut considérer cette explication (jue comme 1res hypothétique. Après que nous avons ainsi établi les conditions de la production du sucre par le système nerveux, on comprendra que d'autres régions nerveuses doivent être étudiées encore au point de vue de l'action qu'elles exercent sur la formation du sucre; car de toutes les parties de l'organisme arrivent des excitations qui se transmettent à la moelle allongée pour exciter divers centres, et quelques-unes de ces relations ne se manifestent pas dans toutes les conditions, ce qui explique comment il peut y avoir des contradic- tions dans l'opinion des divers auteurs. Il faut aussi remarquer que, d'après les observations importantes de J. P. Pawlow, dePétersbourg(D/e Ar6eî^(ier Verdauungsdrûsen, Wiesbaden, 1898), certaines excitations psychiques peuvent déterminer des réactions nerveuses puissantes, alors que des excita- tions artificielles du nerf restent sans aucun résultat: quoiqu'elles eussent dû être effi- caces, si le système nerveux s'était trouvé dans des conditions normales. Combien do fois les physiologistes ont-ils voulu provoquer la sécrétion du suc gastrique par l'exci- tation du nerf vague, et cela sans jamais obtenir de résultat? Mais Pawlow a obtenu des résultats positifs, et il nous a fait connaître les précautions qu'il convient de prendre pour que l'expérience réussisse. Résumons maintenant les relations principales des nerfs sensibles avec le centre glycosoforniateur du bulbe. D'abord, d'après la découverte de E. Cyon et Aladoff {Bull. Ac. imp. de Pétersbourg, 1872), l'extirpation du ganglion cervicai inférieur et des i"' et 2« "ganglions thoraciques, ainsi que la section de l'anneau de Vieussens, produit de la glycosurie. Filehne(C. W., 1878, 321) a découvert que l'excitation du bout central du nerf dépresseur produit la glycosurie. L\¥FO:iT [Recherches sw' la vascularisation du foie et des viscères abdominaux, au point de vue de la production du diabètepar influence nerveuse, Progrès Médical, 1880, n° 10); E. Kûlz (A. g. P., 1881, xxiv, 101) et Eckhard {Commu- nication orale à KOlz. A. g. P. 1881, xxiv, 101) ont confirmé le fait. E. Kulz {loc. cit., 109), a établi, qu'après section du sympathique au cou l'excitation électrique du bout céphalique de ce nerf amène parfois la glycosurie chez le lapin. M. Schiff {Journal de VAnatomie et de la Physiologie, 1866, m, 354) a annoncé qu'après section du sciatique droit ou du sciatique gauche, on observe une glycosurie passagère. Bôhm et Hoffmann (A. P. P., vai, 302) ont vu chez les chats survenir la glycosurie après la section du nerf ischiatique, non pas toujours, mais souvent, et d'une manière évidente. J. Ryndsjun [Diabètes meUitus bci Ischias imd Ischiaticus Verletzung, Diss. léna, 1877) a placé sur le nerf sciatique du lapin un fil trempé dans l'huile de crotone » et dans 2 cas il a vu une glycosurie passagère. Le plus souvent, quand il excitait le nerf sciatique avec l'huile de croton ou la solution de Fowler, il ne voyait pas survenir la glycosurie. F. Froning {Versuche zum Diabètes mellitus bei Ischias. Diss. in., Gottingen, 1879) coupait le nerf scia- tique et excitait le bout central de ce nerf par une ligature permanente, ou par le phénol, le bichromate de potasse, la solution de Fowler, chez des lapins, des cobayes, des chats, des chiens, et il observait une glycosurie passagère qui durait plusieurs jours. 428 GLYCOGÈNE. Dans un travail détaillé, E. Kllz (A. g. P. xxiv, 108) a confirmé les expériences de ScHiFF sur les rapports entre le nerf sciatique et la glycosurie. Le sucre apparaît dans l'urine une à deux heures après la section du nerf, et la glycosurie pendant deux ou trois heures. En excitant électriquement le bout central du nerf sciatique coupé, on obtient une glycosurie plus forte qu'après la simple section nerveuse. Il s'agit donc bien d'un phénomène d'excitation; et, si la glycosurie n'apparaît pas en même temps que l'excitation, c'est parce que les nerfs produisent bien immédiatement le ferment, mais que le ferment ne peut produire que peu à peu du sucre : d'ailleurs le sucre du sang ne peut apparaître dans l'urine que s'il est déjà en quantité notable dans le sang. Après avoir prouvé que les graisses sont la source du sucre, on doit se demander quelles sont les relations de cette action chimique avec l'activité nerveuse. Je me suis souvent demandé ]>ourquoi, lorsque, par suite d'une quantité insuffisante d'albumine alimentaire, la cellule vivante doit se consumer elle-même, il se fait aussitôt une consommation aussi intense des graisses et des hydrates de carbone, alors que cependant la substance vivante, quoique ayant un moindre pouvoir de résistance, est protégée. D'après la loi que j'ai établie sur la mécanique téléologique de la nature {A. g. P., 1887, XV, 57), il me semble que la substance qui pàtit se défend elle-même. Le besoin d'oxygène des tissus, et l'excès de CO^ sont des stimulants respiratoires. Quand la cellule a besoin d'aliments, les nerfs sont excités et provoquent la faim ; le besoin d'eau provoque la soif ; et alors la réparation se fait par l'ingestion d'eau et d'aliments. Quand donc il y a déficit d'albumiue dans la cellule, les nerfs des tissus qui souffrent de ce défaut d'albumine doivent être excités, et par voie réflexe stimulent les organes aptes à remédier à ce défaut d'albumine. Cela n'est pas une hypothèse pour les hydrates de carbone, puisqu'on a pu expérimentalement prouver cette formation de sucre dans le foie par voie réflexe. Je n'ai fait que donner, le premier, l'explication du phénomène. Mais n'est-il pas rationnel d'admettre que cette formation de sucre, d'origine réflexe, ne porte pas seulement sur le foie et le glycogène, mais encore sur tous les organes qui produisent du sucre? Donc on peut fort bien supposer que les cellules qui changent la graisse en sucre, ou organes lipotrophiques, sont sous la dépen- dance du système nerveux. On doit cependant se bien figurer que le centre nerveux ne doit pas être le même pour les organes lipotrophiques et les organes glycogénotrophiques. Le foie pourrait ùlre l'organe capable de faire du sucre, non seulement avec le glycogène, mais encore avec la graisse. Les actions que peut effectuer le foie sont multiples. C'est comme un clavier capable déjouer beaucoup de mélodies. 11 peut très bien y avoir des nerfs qui changent la graisse en sucre, et d'autres nerfs qui changent le glycogène en sucre. Remarque importante : la piqûre du bulbe n'amène la glycosurie que s'il y a du glycogène dans le foie. Elle n'agit nullement sur la graisse. La multiplicité des fonctions de la cellule hépatique n'est qu'une faible partie des différences qui séparent cette cellule hépatique des autres cellules de l'organisme, autant que nos connaissances actuelles nous permettent de le dire. En effet la cellule hépatique fait : Du glycogène avec le dextrose ; Du glycogène avec le lévulose ; Une diastase (glycogénoglucose, d'après v. Lippmann) ; Des acides glycocholique et taurocholique ; La bilirubine ; De l'urée avec des acides organiques et de l'ammoniaque ; De l'acide urique avec des acides organiques et de lammoniaque De la pyrocatéchine avec le phénol ; Des éthers sulfophényliqaes avec les divers phénols ; Du sucre avec la graisse (probablement) ; De l'albumine de constitution avec l'albumine alimentaire ; La sécrétion biliaire, etc. Toutes ces actions diverses sont produites par une seule cellule. Pourtant Aristoth dans son livre sur la Politique, parlant de la division du travail dans les organismes, vivants, s'exprims ainsi : Pour qu'un instrument soit parfait, il ne doit servir qu'à une fin GLYCOGENE. 429 unique. L'exception que nous offre la cellule hépatique est très instructive ; car elle semble en contradiction avec la sage parole (I'Aristote. Mais il n'y a pas d'exception dans les lois de la nature : elles ne paraissent telles que parce que certaines propriétés communes à toutes les cellules sont plus marquées chez les unes, et plus marquées chez les autres. Aussi les difficultés que soulève la théorie, admise dans toute sa rigueur, de l'énergie spécifique des nerfs, dans l'optique et l'acoustique physiologiques, seront-elles peut-être résolues si l'on admet que la loi de l'énergie spécifique n'est pas aussi absolue qu'on le croit. Nous avous vu les conditions physiologiques de l'excitation nerveuse. Il sera utile d'examiner maintenant ce que nous apprend la pathologie. D'autre part, les cliniciens nous rapportent différents cas de diabète ayant pour cause des lésions périphériques des nerfs. Je donnerai ici quelques cas très instructifs empruntés à l'ouvrage de Frerichs sur le Diabète. i. Névralgie du trijumeau. Diabète. Arrêt du diabète. Hyperesthésie persistante. — V. B. âgé de 58 ans, subit une grave opération oculaire, après laquelle il fut atteint d'une névralgie du trijumeau accompagnée d'une hyperesthésie des nerfs de la peau. Peu après les douleurs de la face, il fut atteint de diabète : sa soif était inextinguible ; il rendait 8 à 10 litres d'urine par Jour avec 5 p. 100 de sucre. En même temps le cœur était accéléré, avec 120 pulsations à la minute. Une saison à Carlsbad améliora son état; puis on lui donna de la créosote, et, huit semaines après le début de son diabète, tout le sucre dispa- rut de l'urine pour ne plus reparaître. L'urine n'avait d'autre altération que d'être très riche en urates. Je revis ce malade huit ans après sa maladie, et, en analysant l'urine à diverses reprises, je ne pus y trouver trace de sucre, ce qui prouve que son diabète avait été guéri définitivement. Cependant l'hyperesthésie cutanée persistait encore, et nécessita divers traitements par le bromure de potassium, la quinine et la morphine. 2. Paralysie faciale gauche. Ptosis de la paupière droite. — Immobilité de l'œil droit. — Soif ardente. — Guérison progressive de la paralysie faciale. — Amélioration de la para- lysie de V oculo-moteur , en même temps amaigrissement progressif et urination abondante avec albumine et à 2 p. 100 de sucre. Amélioration par les eaux de Carlsbad et l'opium; puis guérison [hémorragie dans le plancher du quatrième ventricule). J. V., âgé de 70 ans, vigoureusement constitué, et d'embonpoint notable, a mené une vie très active, et jadis il a été atteint plusieurs fois de congestions du poumon; à l'âge de 40 et 50 ans, il a eu une paralysie faciale qui ne semble pas avoir laissé de trace, [)lus tard il a souffert de dépôts urinaires, contre lesquels il a employé avec quelques succès les bains de Pfafer. Au commencement de mai 1871, il a eu un refroidissement grave, ayant été forcé de voyager pendant plusieurs heures dans une voiture ouverte, et exposé à un vent du iNord violent et froid. Pendant deux ou trois jours, il put encore sortir le matin, mais pendant la nuit il se sentait malade avec des chaleurs et de l'insomnie. C'est seulement lorsque un de ses amis l'avertit que sa lèvre tombait et était rétractée à droite, qu'il s'adressa à un médecin, lequel ordonna des purgatifs et, pour combattre le vertige et les chaleurs dans la tête, des saignées locales. En dépit de ce traitement, son état s'aggrava, et à la paralysie de la face à gauche vint se joindre le ptosis de la paupière supérieure droite avec paralysie et immobilité du bulbe oculaire correspondant, paralysie complète et dans tous les sens. C'est à cette époque qu'il commença à souffrir de la soif : il buvait jusqu'à trois carafes d'eau par jour. En quatre semaines la paralysie faciale disparut presque complètement, mais l'œil droit resta immobile. On lui fit alors des injections sous-cutanées de strychnine, et, pour combattre l'intlammation, des injections de nitrate d'argent. Quatre semaines après il avait encore une diplopie pénible; mais il ne pouvail sortir et se remettait lentement, tout en restant pâle et maigre, souffrant du manque d'appétit et d'une soif intense. Une saison balnéaire à Pfafer fut sans résultat; au contraire, la soif et l'épuisement augmentèrent; dans l'urine qui, jusqu'alors, n'avait pas été examinée, on trouva de l'albumine et du sucre en proportion de 1 à 2 p. 100, avec élimination quotidienne de 2 litres ; on prescrivit un régime sévère : d'abord de l'eau de Vichy, puis, pendant six semaines, les eaux de Carlsbad, avec 0,5 de teinture d'opium par jour. Le résultat de ce 430 GLYCOGENE. traitement fui si favorable, que le malade n'eut plus ses douleurs, et se croyait complè- tement rétabli. Il rendait moins de 1 500 ce. d'urine par jour. Cependant le poids spéci- fique de l'urine du soir ne descendait pas au-dessous de 1028, et celle qui s'amassait pendant la nuit 1022. Celle-ci contenait toujours du sucre et de l'albumine. En décembre, on cessa l'eau de Garlsbad, et on n'employa plus que l'opium. L'élat du malade fut fort bon jusqu'au nouvel an, époque à laquelle il recommença à se plaindre à nouveau de la soif. L'urine du soir contenait beaucoup de sucre : l'urine de la nuit était plutôt de densité faible, contenant moins d'albumine et de sucre, mais elle était en assez grande quantité : de 1300 ce. environ. Quant à la quantité de l'urine de la journée, on ne peut guère la déterminer, car le malade restait toute la journée dehors. On peut penser cependant qu'elle n'était guère plus abondante que l'urine de la nuit. Après le nouvel an, on suspendit toute médication, et le régime fut moins sévère, ce qui fut probablement la cause de l'aggravation momentanée qui survint. D'ailleurs, cette aggravation cessa bientôt, puisque au commencement de février il n'y avait plus que des traces de sucre dans l'urine; et quant à l'albumine, elle disparaît rapidement, quoiqu'il y en eût encore 0,1 à 0,2 p. 100. D'ailleurs l'état du patient est excellent, et il n'y a plus aucun symptôme cérébral. Je pense donc, eu égard au début et à la marche de la mala- die, avoir le droit d'admettre que la cause de tous ces troubles est une hémorrhagie au plancher du quatrième ventricule (observation due à mon collègue Nau.nyn et au fils du malade). 3. Apoplexie. — Troubles de la parole. — Parésie du nerf facial. — Diabète. — Guérisoii du diabète. — Mort ultérieure par hémorrhagie cérébrale. Barth, propriétaire, âgé de 54 ans, est subitement atteint de troubles de la parole, de parésie droite du facial, et de soif intense. Je trouve dans son urine (o à 6 litres pai' jour) 3 p. 100 de sucre. On prescrit un régime sévère et des purgatifs salins, avec repos absolu et compresses froides sur la tète. Peu à peu, disparaissent la paralysie faciale, ainsi que les troubles de la parole, de sorte que trois, mois après il n'y avait plus de sucre dans l'urine, quoique le malade n'observât aucun régime. Trois ans après, la santé du malade était bonne, l'urine ne contenait plus de sucre. Alors survint une hémor- rhagie cérébrale qui détermina la mort. V. G., âgé de 60 ans, rendit pendant trois ans une urine contenant 2 à 3 p. 100 de sucre. Il se retira des affaires, et, peu à peu, par un régime régulier et l'usage d'eaux alcalines, le sucre disparut complètement. Trois ans plus tard, il fut atteint d'artério-sclé- rose, avec une hémorragie cérébrale qui se termina, en vingt-quatre heures, par la mort. Pour le système nerveux périphérique, nous avons nombre de cas bien observés et très instructifs. Ainsi on indique que souvent la glycosurie accompagne la sciatique (Braun, Balneo- Iherapic, 1868, 411, 3^ édition, cité par Kvlz, A. g. P., xxiv, 106. — Eulenburg et Gutt- T.\iA.\x, Die Pathologie des Syinpathicus auf physiologischer Grundlage, 1873, 194. — Erb Ziemssen's Handbuch der spec. Pathol. und Thérapie, xiv, (1), 134,1876, etc.). — Frerichs {Ueber den Diabètes, Berlin, 1884, 215) rapporte un cas remarquable. J., libraire, âgé de o2 ans, souffre de diabète depuis 1873. Il a 6 p. 100 de sucre dans l'urine; mais, à la suite d'un régime sévère, le sucre disparaît, et il n'y en a plus que des traces. En même temps, il est atteint d'une double névralgie sciatique qui disparaît parfois pendant des semaines et des mois, pour revenir ensuite. Chaque fois que la névral- gie cesse, le sucre disparaît de l'urine, pour revenir quand les douleurs névralgiques reparaissent. La maladie a duré ainsi pendant trois ans, jusqu'au moment où l'albu- minurie se produit avec hydropisie. Dans la littérature du diabète on trouve des cas où les autopsies faites sur les diabé- tiques ont montré des altérations anatomo-pathologiques de la moelle allongée, de la protubérance, du cervelet, plus rarement du cerveau et de la moelle. Frerichs {loc. cit., 135) indique une tumeur de la circoiivolution droite et de la cir- convolution gauche, un abcès gros comme une lentille de la pyramide droite, et un GLYCOGÈNE. 431 autre, plus petit, sur l'autre pyramide; sclérose du plancher du quatrième ventricule, tumeur calcaire et pachyméningite des circonvolutions occipitales gauches; cysticerques du cervelet. Dans Frerichs [loc. cit., 135), je trouve encore le recueil remarquable des faits suivants : Rose.xthal {Klin. der Nervenkrankheiten, Stuttgart, 1875, 188), sarcome gros comme une noix dans l'hypophyse; Regklinghausen {A. A. P., sxx), tumeur fibrineuse dans les plexus choroïdes du quatrième ventricule; tumeur qui aurait été la cause du diabète; Mosleh {D.Arch. f. klin. Mal., xv) indique, dans le nucleus dcntatus de l'hémisphère gauche du cervelet, une tumeur ramollie, grosse à peu près comme un œuf de pigeon ; Pérotof [Th. de Paris, 1839), tumeur colloïde du quatrième ventricule ; H. LiouviLLE [Yer^on, Étude sur les tumeurs du quatrième ventricule, D. Paris, 1874), tumeur du plexus choroïde de ce même ventricule, et un petit fibrome dans le quatrième ven- tricule, près du calamus scriptorius : Reimer (Ja/i?'6. fiir Kinderheilkunde] , un grand gliome dans le plancher du quatrième ventricule; Weichselbaum [Wien. med. Woch., 1880), scléroses multiples du cerveau et de la moelle, spécialement des faisceaux postérieurs; DoMBLiNG [Neederl. Arch. f. Geneeskunde, 1861, iv, 179), sarcome gros comme une noi- sette dans la partie supérieure de la moitié droite de la moelle allongée, avec atrophie du nerf glosso-pharyngien et du nerf vague; De Jo.nge {Arch. f. Psychiatrie, 1882), tuberculose de la moelle allongée; Grossmann [Berl. klin. Woch., 1879), tumeur sarco- mateuse à la base du cerveau, allant jusqu'à la protubérance; W. Muller {Beitrag zur pathol. Anat. und Phtjsiol. des Rûckenmarks, Leipzig, 1871), abcès de la substance grise à la 'base des cornes antérieures; Silver et Irvine {Trans. of the pathol. Society, xxix, 25), deux ramollissements delà moelle dorsale, au niveau de la troisième et de la cin- quième cervicale, au niveau aussi de la deuxième et septième dorsale. On trouve encore dans la littérature du diabète des cas signalés par Anger, Percy, Heurat, dans lesquels on constata, à l'autopsie, le nerf vague dégénéré. Dans le cas d'AiNGER (Lôschner's Beitr. zur Balneologie, 1863, 1), l'autopsie montra une concrétion calcaire grosse comme une amande qui comprimait le nerf vague, à côté de tubercules pulmonaires disséminés. Percy, Senator [Ziemssen's Handb. d. spec. Pathol. und Thérapie 1876, xiii, (2), 140) a trouvé le ganglion semi-lunaire et les nerfs splanchiques, ainsi que le nerf vague, épaissis et durs comme des caitilages. Dans le cas de Heurat [Diabète. Tumeur sur le trajet du pneumogastrique. Gaz. hebd., 1875), l'autopsie a donné une tnmeur grosse comme une noisette, placée sur le trajet du nerf vague droit, à l'endroit oîi il croise le hile du poumon. Sa surface était rugueuse ; il était entouré d'une écorce épaisse 011 se trouvaient des granulations semblables à du sable et une sorte de sub- stance caséeuse. Le tronc nerveux se perdait complètement à la surface de cette tumeur, et partait d'elle avec un volume très diminué; mais, quelques centimètres au-dessous, il était revenu à ses dimensions normales. Frerichs [Ucber den Diabètes, Berlin, 1884, 92) a signalé une tumeur grosse comme une lentille sur le trajet du vague droit, allant jusqu'au plancher du quatrième ventricule. Par conséquent, il est certain que le diabète peut être produit par l'excitation ner- veuse, et même par des excitations nerveuses provenant des régions les plus différentes. Si donc l'on considère combien de nei'fs peuvent être capables par leur excita- tion de produire de la glycosurie, on peut souhaiter, au point de vue de la cause du dia- bète sucré, qu'il soit fait des recherches dans ce sens; mais le physiologiste ne peut pas étudier cette question : il se demande quelle eu serait l'utilité. Si un muscle se meta tiavailler avec force et que ses provisions alimentaires com- mencent à disparaître, il doit être en état d'envoyer un ordre télégraphique à l'appareil préparatoire de ses ressources nutritives, pour que celui-ci lui envoie la substance qui lui sera utile. Lorsque la contraction musculaire excite les nerfs sensibles intramuscu- laires, cela suffit pour que, par voie réflexe, le foie donne aussitôt du sucre. Si nous produisons la glycosurie par l'excitation du nerf sciatique, c'est qu'alors nous excitons certains nerfs sensibles des muscles. Quand, par l'excitation du bout céphalique du nerf vague, nous provoquons le foie à abandonner du sucre au sang, nous pouvons penser que nous excitons alors des nerfs sensibles qui viennent du cœur; car le cœur doit être capable, par son excitation sensible, d'appeler à son secours rapidement le sucre du foie. Par conséquent, dans cette adaptation admirable, nous voyons le développement de la loi que j'ai établie sur la régulation automatique. Le processus que nous appelons 432 GLYCOGÈNE. contraclioti musculaire qui produit un besoin de l'organisme, permet, en même temps, à ce besoin de se satisfaire. W. Seitz, dans mon laboratoire, par des recherches qui ne sont pas publiées encore, a montré que le foie est comme une étape pour l'évolution des matières azotées, qui dans l'inanition, brûlent ainsi que le glycogène. Gela permet de supposer que lorsque le foie, par voie réflexe, se décharge de sucre, il se fait en même temps une décharge d'albumine, de sorte que la glycosurie est liée à une excrétion d'azote plus abondante. Échange des hydrates de carbone entre le foie et le sang. — Le fait établi dans nos études précédentes que de grandes quantités de sucre passent du foie dans le sang n'est peut-être pas cependant un processus tout à fait normal; et, de fait, un des expérimentateurs qui ont le mieux étudié cette question, à savoir Pavy, élève de Claude Bernard, conteste qu'à l'état normal le foie abandonne du sucre au sang. C'est là un vieux et difficile problème; on a été amené à le résoudre en comparant la quantité du sucre du sang de la veine porte et celle du sang des veines hépatiques; car il est très difficile de prendre en même temps des quantités notables de ces deux sortes de sang, sans, par cela même, amener un trouble de la circulation et de l'état normal du foie. Si l'on élimine ces troubles, alors les difTérences entre le sucre du sang qui arrive au foie et le sucre du sang qui en sort, sont si petites que, par suite de la défectuosité des méthodes analytiques, on ne peut pas avoir de certitude suffisante pour en déduire une conclusion. Il paraît donc plus sage de prendre la question à un autre point de vue afin de la juger. 1° Il faut d'abord remarquer que, parmi les innombrables substances chimiques qui sont les éléments des cellules vivantes, il n'y en a que deux qui se distinguent essen- tiellement de toutes les autres à un autre point de vue. Ces deux substances sont le gly- cogène et la graisse. La teneur centésimale des cellules en ces deux substances varie, comme il a été montré plus haut, dans de très larges limites; depuis le zéro jusqu'à des nombres très élevés. Pour toutes les autres substances constitutives de la cellule, la variation de la teneur centésimale, la graisse et le glycogène exceptés, se produit dans des limites très faibles, limites que, généralement, la chimie n'est pas en état de déterminer. Mais microscopiquement, ces deux substances, graisse et glycogène, difTèrent des autres éléments cellulaires. La graisse, si l'on ne tient pas compte do quelques traces de graisse dissoute, forme des gouttes plus ou moins grosses dans le protoplasraa cellulaire, et il est difficile qu'elles soient en un autre état, chimique ou physique, dans l'intérieur de la cellule, comme en dehors de la cellule même. En un mot, la graisse n'est pas une partie essentielle du protoplasma vivant, mais un aliment incorporé dans la cellule vivante, et comme une substance morte. De même le glyco- gène distribué dans les mailles du protoplasma, quoiqu'il ne se distingue pas aussi bien que la graisse des autres parties de la cellule, peut cependant former des masses et des fragments qui constituent une substance tout à fait particulière, ne faisant pas partie de la constitution même de la cellule. C'est par là que la graisse et le glycogène peuvent être considérés comme des réserves. Après une alimentation abondante, ils s'accumulent en grandes masses dans le foie, de telle sorte qu'ils se distinguent des autres parties par les étonnantes variations absolues du poids de cet organe. Le chien qui avait jeûné vingt-huit jours, et dont j'ai parlé plus haut, pesait ;13'''',6; le foie, 507 grammes. Par conséquent, le foie représentait i,.'l p. 100 du poids. Pavy a étudié avec détail ces rapports du poids du foie chez le chien. Il nourrissait onze chiens avec une nourriture exclusivement animale, et il trouvait, comme poids moyen du foie, 3,3 p. 100 du poids du corps; le minimum étant de 3, le maximum étant de 4. Il a nourri o chiens en hydrates de carbone, et il a trouvé pour leur foie : NM. . . G, 9 p. Il N" 2. . . 6,9 — N° ;}. . . 4,8 — N° 4. . . 9,5 — N° 5. . . 4,0 — Ainsi, après une nourriture riche en hydrates de carbone, le poids du foie était, en CLYCOGENE. 433" moyenne, de 6,4 p. 100 du poids du corps, deux fois plus qu'après une nourriture ani- male, et trois fois plus au maximum. B. ScHô.NDORFF a lécemmeut confirmé ces données de Pavy. D'exactes expériences lui ont montré que, chez les chiens, par ingestion de grandes quantité d'hydrates de carbone, on peut accroître le poids du foie jusqu'à lui faire atteindre 12,43 du poids du corps, avec 18,09 p. 100 de glycogène. Le poids moyen trouvé par Schôndorff est de 6,34 p. 190, et par conséquent il coïncide absolument avec le chiffre donné par Pavy. M™« Gati.n Gruzewska, dans les mêmes conditions d'alimentation, a trouvé chez le chien 18,44 de glycogène dans le foie, au maximum. E. KùLz a donné une intéressante série d'expériences où il a montré que des mou- vements musculaires intenses faisaient disparaître tout le glycogène du foie, de sorte que le poids de cet organe devenait aussi faible que chez les animaux en inanition {A. g. P., 1881, XXIV, 43). lia nourri 5 chiens pendant 8 jours avec une nourriture abon- dante, indiquée dans le tableau ci-joint. Pendant l'expérience qui commençait à huit heures du matin, les chiens devaient traîner une lourde voiture. L'animal en expérience était comparé à deux autres chiens qui depuis deux ans étaient attelés ensemble, habitués à traîner la voiture et habiles à courir. Nourriture quoti dienne Poids Poids en grammes Durée Poids du foie Glycogène du chien ^i^ .-~— .- • du du foie p. 100 du foie Date. en 1 grammes. Pain. Viande. travail. gr. du corps. en grammes. 1. 1- ' février 1879. lOOoO 250 200 3 h. 1/2 253 2,5 traces 2. 5 — — 22 800 250 230 3 h. 530 2,4 traces 3. 6 mars — 11720 230 300 3 h. 240 2,0 0,8 4. 9 — — 15 430 230 330 6 h. 257 1,7 traces 5. 18 — — 39 320 300 1000 Moyenne. 7 h. 835 2,1 . 2.1 traces Par conséquent, le poids absolu ou centésimal varie pour le foie plus que pour tout autre organe du corps ; et, ce qui est bien remarquable, c'est qu'avec un travail muscu- laire énergique, un foie volumineux devient, en cinq ou six heures, un foie de petit volume tel qu'on ne peut guère en observer de tel qu'après un jeûne absolu prolongé pendant quatre semaines. On ne peut donc pas douter que le foie ne soit un appareil de réserve, mais on doit se demander si ces réserves sont destinées au foie seul ou à tout le corps. 2° Un travail musculaire énergique fait disparaître, comme nous l'avons déjà vu, dans l'espace de cinq ou six heures, les réserves de glycogène qui se trouvent dans le foie, mais, pour comprendre ce phénomène, il faut se rappeler que, dans le muscle qui travaille énergiquement,les processus d'oxydation atteignent une intensité maximate. On sait de source certaine que le sang qui passe dans un muscle travaillant énergiquement donne presque tout son oxygène et prend une quantité correspondante d'acide carbonique. On sait en outre que cette oxydation est due au tissu musculaire; car on a comparé les gaz du sang dans l'artère et la veine du muscle pendant le travail et pendant le repos. Pen- dant le repos, la consommation d'oxygène et la production d'acide carbonique dimi- nuent notablement. C'est donc pendant le travail que le glycogène du muscle disparaît; et on ne peut douter qu'il n'ait été employé au travail musculaire. Or le foie contient, en général, autant de glycogène que tous les muscles du corps; mais comme, pendant un travail énergique, ce n'est pas seulement le glycogène des muscles, mais encore celui du foie qui disparaît, on doit supposer que, pendant le travail musculaire, le foie oxyde autant de glycogène que n'en oxydent les muscles, ou bien, d'après Pavy, qu'il se trans- forme en graisse, et en glycoprotéides, si l'on ne veut pas admettre que ce glycogène hépatique émigré dans les muscles à l'état de glycogène ou de sucre. Par conséquent, au moment même où les muscles ont besoin de glycogène pour exécuter leur travail, le foie, qui n'a pas besoin de ce glycogène, leur en envoie pour satisfaire à leurs besoins. Depuis Charles Darwin, ce point de vue téléologique n'a rien de contraire à la science. En tout cas il est de fait que dans la vie des êtres il n'existe jamais de grave défaut d'adaptation dans la fonction des organes. niCT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 28 434 GLYCOGENE. On comprend que toute subite augmentation dans les échanges va aussitôt amener une disposition du glycogène hépatique, sans qu'une alimentation plus abondante puisse compenser cette consommation du glycogène. Laxgendorff (A. P., 1886., Suppl., 281) admet que, sur 100 grammes du corps, il y a chez les Igrenouilles d'hiver 3B:r,4 d(ï foie. Mais, après un séjour de douze à vingt-huit jours dans un endroit chauffé, les pro- portions du poids du foie étaient : N» 1 2,8 p. 100 N° 2 3,2 p. 100 N° 3 3,4 p. 100 En moyenne. . . 3,1 p. 100 On sait, par les recherchesibien connues et très exactes de Hugo Schulz l'A. g. P., 1877, XIV, 78), que chez la grenouille les échanges croissent avec la température à ce point qu'à 3.3" et 35°, ils atteignent le niveau des échanges chez l'homme. Si l'on accepte que le foie donne son hydrate de carbone quand l'organisme en a besoin, il n'y a aucune difficulté à admettre que, pendant le repos ou le jeûne, le foie satisfait encore, quoique avec une intensité moindre, aux besoins du reste du reste du corps en glycogène. 3" Claude Bernard a déjà montré que le sang artériel est plus riche en sucre que le sang veineux. Par conséquent, la consommation des organes en sucre est une consom- mation qui se poursuit perpétuellement. De même Claude BeRxNard a montré que la teneur du sang en sucre pendant le jeûne, et même pendant un très long jeûne, persiste sans modifications. Il s'ensuit qu'il doit y avoir quelque part une source de glycogène qui répare perpétuellement les pertes en glycogène que peut faire le sang. Comme les grosses veines qui viennent des extrémités contiennent moins de sucre que les artères correspondantes, il est évident que ce n'est pas le glycogène des muscles qui peut être cette source inconnue que nous cherchons. Il ne reste donc plus que le foie, et, pour le démontrer, il me suffira de présenter le tableau de Claude Bernard, p. 397. Comme les chiffres se rapportent à 1000 parties de sang, les dilTérences dans les pro- portions de sucre des diverses variétés de sang sont, en réalité, très faibles. Pavy {Ioc. cit., 1894, 170) tient pour erronées ces affirmations de Bernard. Par une étude très minutieuse, il est arrivé à constater que le sang de toutes les parties du]corps contient partout à peu près la même quantité de sucre. La moyenne des analyses de Pavy nous donne, pour 1000 parties de sang, dans le sang artériel : 0,941 de sucre, et, dans le sang veineux : 0,938 de sucre, de sorte que la différence sur 1000 parties de sang n'est que de 0,003. Comment expliquer ces contradictions? Pavy estime que les chiffres de Bernard sont erronés; mais, pour moi, je pense que les cliiffies donnés par ces deux observateurs sont exacts, quoique au fond ce soit Bkrnard qui ait raison. Certes, les méthodes d'analyse du sucre comportent, pour les expériences de Bernard comme pour celles de Pavy, de notables réserves, car ces deux expérimentateurs n'ont pas pu prendre toutes les précautions qui n'ont été données que plus tard par Soxhlet; mais, en réalité, il ne s'agit pas de l'exactitude absolue des chiffres, puisqu'il n'est question que de comparer le sucre du sang artériel et le sucre du sang veineux. Or c'est cela qu'ont cherché les deux observateurs ; ils ont d'ailleurs travaillé l'un et l'autre dans des conditions différentes. Pavy a toujours cherché, avec le plus grand soin, à n'expérimenter que sur des ani- maux qui, après une opération, s'étaient complètement remis, et il leur faisait des sai- gnées dans un état de tranquillité aussi grande que possible, au risque même de voir diminuer la proportion du sang en sucre. On sait, en effet, que les grands mouvements de l'animal et les douleurs qu'il éprouve augmentent le sucre du sang, parce que, dans ces conditions, le foie déverse beaucoup de sucre dans le sang, et on peut penser que la consommation de chaque organe en sucre croît à mesure qu'augmente la proportion centésimale du sang en sucre. De même, il faut admettre que les muscles, lorsqu'ils sont en repos absolu, consomment moins de sucre que dans leurs contractions. Merinc. {A. P., 1877, 89) se range à l'opinion de Pavy; mais, si l'on prend la moyenne des quatre expériences qu'il a faites, on voit que le sérum de l'artère carotide contient plus de sucre que celui de la veine jugulaire, encore que la différence soit faible. Jacob Otto GLYCOCÈNE. 435 [A. g. P., 188.1, XXXV, 495), par une méthode très exacte, a bien établi ce fait que le sang artériel est plus riche en glycose que le sang veineux. Chauveau et Kaufmann (C. R., LUI, 10o7) ont prouvé que, pendant le travail musculaire, la différence entre les pro- poitions de sucre dans le sang artériel et dans le sang veineux va en croissant. Enfin, depuis longtemps, il a été établi que les muscles consomment des hydrates de carbone ; il est donc certain que les artères musculaires apportent des hydrates de carbone à la substance musculaire, ce qui explique pourquoi, dans le sang veineux qui vient des muscles, il y a moins d'hydrates de carbone. Peut-être la différence de la teneur en sucre entre le sang artériel et le sang veineux est-elle en moyenne moindre que celle qu'a indiquée Cladde Bernard; il n'en est pas moins certain qu'il y aune différence notable. Sucre dans^2 000 grammes de sang. (Claude Berxard, Leçons sur le diabcte, 1877, 234.'» ARTÈRE VEINE ARTÈRE VEINE VENTillCllE VEINE CAVE CRURALE. CRURALE. CAROTIDE. .TUÛULAIRE. DROIT. inférieure. gr. &■•• o''- gr- gr. gr. A. Chien en diges- tion de viande. . 1.45 1,32 0,73 " » » » B. Chien en diges- tion de viande. . l,2o 0,99 0,67 1,36 1,28 [3. Chien en diges- tion de pommes de terre 1,53 " » 1,17 » 1,38 G. Chien en diges- tion de viande. . 11 « 1,10 0,91 1,2.5 » D. Chien, digestion de viande et de l.:il » » » » » sucre candi , . . ] E. Chien à jeun . . 1 1,17 *' " 1) 1,81 » Par conséquent, nous devons penser que l'animal à jeun, au moment où il reçoit une nourriture riche en hydrate de carbone, tout de suite accumule une grande quan- ti Lé de cet hydrate de carbone dans son foie et, alors, dans ce cas, il n'est pas douteux qu'il y a dans le sang de la veine porte plus de sucre que dans le sang des veines hépa- tiques venant du foie. Mais, dès qu'il se fait un travail musculaire énergique qui déter- mine la migration des hydrates de carbone du foie, alors, assurément, il y a plus d'hy- drate de carbone dans le sang des veines sus-hépatiques venant du foie que dans le sang de la veine porte allant au foie. Probablement, il y a aussi d'autres conditions de nu- trition dans lesquelles la teneur du sang en sucre est la même dans ces deux sangs. Par exemple, il doit en être ainsi quand, cà la suite d'une alimentation riche en albuminoïdes chez les carnivores, les besoins de l'organisme sont complètement couverts par la con- somniation des albumines, sans qu'une consommation d'hydrates de carbone soit néces- saire. On n'a peut-ètie pas suffisamment songé à ces relations variables lorsqu'on a voulu, avec des appareils, d'ailleurs fort ingénieux, savoir s'il y a plus de sucre dans le sang de la veine porte ou dans le sang des veines hépatiques. Glycogéne des muscles. — Comme le glycogène des muscles a été, par beaucoup (lo cliniciens contemporains et par quelques physiologistes, considéré comme l'élément piincipal et unique de .l'origine du travail musculaire, il est nécessaire de rappeler d'abord les travaux de Pette.nkoffer et Voit, lesquels ont montré que, si l'on fournit à un organisme des quantités d'albumine suffisantes, la consommation organique se fait exclusivement aux dépens de cet organisme. Les hydrates de carbone et les graisses in- Iroduites simultanément avec celte albumine dans l'alimentation sont économisés par l'organisme qui les met alors en réserve pour l'engraissement du corps. Par conséquent. i36 GLYCOGÈNE. dans une alimentation exclusivement albuminoïde, toutes les fonctions des organes ne sont exécutées que par la dépense des énergies latentes dans l'albumine, comme par exemple, le travail du cœur, les mouvements respiratoires, etc. Donc, si l'on ne fait pas travailler un animal d'une manière spéciale, il effectue cependant encore d'assez no- tables travaux musculaires. Pour comba'.tre le préjugé enraciné, et difficile, à ce qu'il semble, à renverser, à savoir que la graisse et le glycogène sont l'unique source de la force musculaire, j'ai nourri pendant près des trois quarts d'une année un chien très maigre, pesant à peu près 30 kilos, avec une viande préparée de telle sorte qu'elle ne contenait pas assez de graisse et d'hydrate de carbone pour suffire au seul travail du cœur. J'ai analysé toute cette viande au point de vue de sa teneur en azote, en graisse, en hydrates de carbone, et j'ai chaque jour dosé l'azote de l'urine et des excréments. J'obtenais ainsi le bilan quotidien de l'azote, et je comparais mes chiffres au poids quotidien de l'animal. Les périodes de travail pour ce chien duraient quelques jours; j'ai eu des périodes de 14,35, et même 41 jours pendant lesquelles ce chien était soumis à de très rudes travaux allant dans un seul jour jusqu'à oO 117 à 109 G08 kilogrammètres. J'ai montré qu'un chien qui doit, par jour, taire un travail de 109608 kilogram- mètres a besoin, alors, pour être en équilibre nutritif, de recevoir 496,5 grammes de viande, laquelle ne contient que de l'albumine comme aliment. Au bout de trois quarts d'anuée d'une semblable alimentation, et malgré un travail considérable accompli, le chien était encore parfaitement en état de travailler. Or l'homme et les herbivores ne peuvent pas digérer autant d'albumine qu'il leur en faudrait pour satisfaire à tous les besoins de leur organisme; par conséquent, il faut qu'une partie de leur alimentation consiste en graisses et hydrates de carbone. Cette proposition est vraie pour les carni- vores qui sont soumis à une alimentation mixte, dans laquelle l'albumine ne suffit pas à tous les besoins de l'organisme. Les travaux de Zuntz et de ses élèves confirment le fait que ce ne sont pas seulement les graisses et les hydrates de carbone, mais encore les albumines qu'il faut considérer comme source de la force musculaire. Cependant, malgré tout, on trouve, même dans les travaux les plus récents et spécialement ceux des cliniciens, exprimée cette opinion que ce n'est pas, comme on le croyait autre- fois, la graisse, mais bien le glycogène qui est la source unique des travaux musculaires. Pour mieux justifier mon opinion, je donne ici les résultats de deux longues périodes de travail, expériences entreprises en 1890, mais que je n'avais pas publiées. Je les ai indiqués dans les deux grands tableaux ci-joints, où tous ceux qui s'intéressent à la question pourront trouver tous les renseignements nécessaires (voir les tableaux pp. 438- 442). Je ferai aussi remarquer que j'ai fait seul toutes ces analyses, que la récolte de l'urine et des excréments a toujours été faite sous ma direction ou celle de mon assis- tant. Dans la petite voiture que traînait le chien, il y avait une inscription graphique permettant de lire la grandeur du travail accompli. L'expression: « plein travail, » in- diquée dans le tableau signifie 109 600 kilogrammètres. Si l'on se rappelle les conclusions de Naunyn, Minkowski, et autres auteurs, d'après lesquels le glycogène est la seule origine du travail musculaire, on verra, en regardant les périodes de travail de la saison d'été, que le chien a eu par jour de 0,6, à 3,2 de gly- cogène comme aliment et que, dans cette période, il a fourni 35 jours de travail. Si nous supposons que la valeur dynamique du glycogène est de 4 calories, on voit qu'au maximum il y a eu : 3,2 x 4 = 12,8 calories dues au glycogène pour son travail quoti- dien, et si nous supposons que 33,3 p. 100 de la puissance dynamique de ce glycogène se transforment en travail mécanique, il s'ensuit un travail de 1823 kilogrammètres. Ce- pendant le chien en a fait 109 G08; donc, le glycogène n'a été que pour 1,7 p. 100 dans le travail accompli. Pendant la seconde période de travail, celle du printemps, je n'ai pas pu me procurer de viande aussi pauvre en glycogène que pendant l'été. Alors, l'alimentation quotidienne était en glycogène de 7,5 à 16,3 grammes par jour, ce qui représente au maximum 9 158 kilogrammètres. Or le travail accompli a été de 109 608 kilogrammètres; donc le gly- cogène ne peut représenter que 8,4 p. 100 du travail total qui a été exécuté. Par consé- quent, il faut définitivement rompre avec cette légende que le glycogène est l'origine de la force musculaire. GLYCOGENE. 437 Même si l'on introduit dans le calcul non plus le glycogène seul, mais la graisse et le glycogène, cela ne peut pas suffire davantage à donner la raison du travail mus- culaire. Or, comme certainement pendant longtemps, une grande somme de travail muscu- laire peut être exécutée sans que l'albumine de l'alimentation paraisse y contiibuer, on doit supposer que l'origine de la force musculaire peut être aussi bien dans l'albumine que dans la graisse et les hydrates de carbone. Il est cependant évident que les divers individus peuvent exécuter également du travail musculaire malgré des difTérences con- sidérables dans la nature de leur alimentation, et cette proposition reste vraie pour le travail que les muscles ont à donner. C'est la nature de l'alimentation qui détermine la substance qui va être employée par le travail musculaire; s'il s'agit d'omnivores ou d'her- bivores, alors, c'est la substance non azotée qui devient la principale source du travail, mais le problème est tout différent si l'on considère la substance irritable capable de contraction au point de vue de sa composition chimique, il m'a toujours semblé que cette substance devait avoir la même structure moléculaire. J'ai montré que tout tra- vail musculaire, malgré une alimentation très abondante en graisse, assez forte pour déterminer l'engraissement, détermine constamment une augmentation dans l'excré- tion d'azote. Par conséquent, la substance contractile doit contenir de l'azote, autre- ment dit, doit être un dérivé de l'albumine. J'ai prouvé que cette substance peut se pro- duire aux dépens de l'albumine seule, mais je n'ai jamais nié que les graisses et les hydrates de carbone ne puissent contiibuer à sa synthèse. Pour comprendre la physiologie du glycogène hépatique et les autres questions qui s'y rattachent, ainsi que ses rapports avec le glycogène musculaire, il nous reste à rendre compte d'autres expériences. Le premier auteur qui ait vu une relation entre le glycogène et le travail du muscle a été Claude Berxard : en 1859, deux ans après avoir découvert le glycogène, il s'ex- prime ainsi : « Chez les animaux en sommeil hibernal examinés pendant la saison d'hiver, on trouve accumulé beaucoup de glycogène dans le foie et spécialement dans les cellules hépatiques. En outre, on ti'ouve encore du glycogène non organisé, mais infiltré dans le tissu musculaire et dans les poumons. Dès que l'animal s'éveille, s'agite et respire avec plus de fréquence; ce glycogène est détruit et disparaît de ses tissus, mais il continue à s'en former dans le foie. » Quand j'ai des mammifères et des oiseaux bien nourris, les muscles sont en repos, que ce soit normalement, que ce soit artificiel- lement à la suite de la section des nerfs, on voit s'accumuler le glycogène dans les muscles inactifs pour disparaître ensuite au moment de leur activité, mais Cl. Bernard ne semble pas avoir fait sur ce point d'expériences systématiques. De telles recherches ont été faites, d'abord par Weiss. Il a pris les deux extrémités postérieures d'une gre- nouille, dont l'une servait de contrôle et l'autre était tétanisée jusqu'à épuisement. Le glycogène a été dosé par la méthode de Brcure et les muscles mis à bouillir avec la solution de potasse. Le résultat a été que le glycogène dans les muscles actifs diminuait dans les proportions de 2-4,27 à 50,427 p. 100. Ensuite, Chaxdelon, confirmant les données fournies par Cl. Bernard et Weiss, a montré que, sur les lapins, la section des nerfs sciatiques et cruraux déterminait en deux à cinq jours une augmentation notable de glycogène de o, 51 à 172, 4 p. 100 dans les muscles paralysés. Chandelon a comparé, en dosant le glycogène par la méthode de Brugke, la teneur en glycogène des muscles paralysés avec celle des muscles homo- logues non paralysés de l'autre côté. Si le glycogène paraît augmenter dans les muscles inactifs et paralysés, ce n'est peut-être qu'une apparence, due à ce que le glycogène diminue beaucoup dans le membre paralysé pris comme terme de comparaison. C'est un point sur lequel Manche a insisté dans un travail spécial. Marcuse a confirmé les recherches de Weiss en expérimentant sur les muscles de grenouille. Le tableau suivant indique les résultats qu'il a obtenus (v. plus loin, p. 443). On voit que,- pour l'activité des muscles, le glycogène diminue de 33,9 p. 100. Manche a, dans le laboratoire de Kûlz, confirmé le fait en comparant le glycogène de muscles de grenouille au repos et de mus- cles tétanisés. Dans les muscles tétanisés, le glycogène diminuait de 12,76 à 13,44 p. 100. Ces recherches ont été confirmées et développées par un excellent travail de Kulz [Deitr. z. Kennt. des Glyhoi/enes, 1891, 41). 438 GLYCOCENE. "iiVAvaj. aa sanof saa anaKov «O t— OO Cî «5 ■'H fN socjaH aa sanof saa anan'OM 3X0ZV.1 aa ao\!VHoa Cl o o" n o *l r— "^ cf o 00 c-f cT + + + + + 1 1 1 1 1 + 1 1 1 1 1 -* oo o os ^•u ^ r- Cl r- 00 (M -* co ^ 00 oc ce ÎC --0 o S C". 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TEMPÉRATURE. 1 - TEMPÉRATURE. ^ ë K K E DATE m^-^^.^. — Piô DATE .. .^-^ — . — ^- i èo Bss 1890, Uailmuni. Minimum. UojeDoe. g |.:,i E|ë 1890. Maiimum. MiDimum. Moyenno . i|.=. Juillet. Octobre. 1 2.3-24 19,6 16,7 18,1 752,7 0,3 13-16 15,1 3,6 10,3 744,7 8,8 24-25 20,6 13,2 16,9 733,5 2,4 16-17 12,1 5,8 8,9 747,1 3.1 23-26 20,1 9,3 14,7 7.38,9 0,0 17-18 9,4 7,6 8,3 746,4 10,5 26-27 20,3 10,2 13,2 757,6 0,0 18-19 10,6 7,6 9,1 752,1 7,6 21-28 22,7 13,2 17,9 733,4 0,0 19-20 11.0 3,9 7,4 739,0 3,4 28-29 26,3 15,8 21,0 736,8 0,2 20-21 7,3 0,3 3,8 764,8 0,0 29-30 21,6 11,8 16,7 736,7 0,0 21-22 7.0 — 0,7 3,1 768,4 0,0 30-3! 24,7 13,7 19,2 737,4 0,0 22-23 6.6 4,0 5,3 763,3 0,9 31 juillet au l^aoùt. 27,8 15,4 21,6 734,9 0,0 23-24 24-25 8,8 11.6 7,3 9,0 8,0 10,3 759,3 730,3 3,3 0,1 Août. 25-26 12.4 6,5 9,4 739,8 9,3 1- 2 29,7 17,8 23,7 7.34,3 3,3 26-27 10.8 3,4 7,2 747,8 2,3 2- 3 22,1 14,8 18, i 738,2 16,3 27-28 6,2 1,3 3,7 755,9 0,2 3- 4 19,9 12,9 16,4 761.0 2,6 28-29 5.3 1,0 3.2 757,9 1,0 4- 5 21,9 14,1 18,0 738,0 0,1 29-30 9,1 3,2 7,1 754,8 1,6 5- 6 23,9 16,5 20,2 735,1 0,0 30-3 1 7,6 6,3 6,9 730,6 0,3 6- 1 1- 8 23,0 22,4 17,0 15,2 21,0 18,8 736,4 756,0 1,0 0,0 31 cet. au 1*' nov. 9,1 6.8 7,9 746,1 1,9 8- 9 20,9 14,9 17,9 734.6 0,0 Novembre. 9-10 23,0 16,4 20,7 7.52,6 0,0 1- 2 12,3 7,3 9,9 744,2 0,7 10-11 26,3 16,2 21,3 731,9 6,5 2- 3 i2;o 6,4 9,2 746,3 17,7 n-12 24,4 16,0 20,2 751,6 4,4 3- 4 11,5 6.3 9,0 740,7 0,9 12-13 22,1 13,8 18,9 749,4 0,6 4- 5 12.1 5,7 8,9 741,8 8,1 13-14 23,1 15,2 19,2 751.0 3,6 3- 6 11.5 6.3 8,9 750.1 2,9 14-lo 20,8 14,0 17,4 733,6; 0,0 6- 7 9,3 4,9 7,2 739,7 0.7 15-16 22,3 18,0 20,1 733,9 0,0 7- 8 7,6 4,7 6,1 747,0 0,0 16-n 23,9 13,4 19,6 733,1 0,0 8- 9 8,3 6,2 7,2 744,2 0,0 17-18 24,4 17,3 20,8 730,4 3,4 9-10 9,3 5.3 1,'i 750,4 1,4 18-19 27,5 19,3 23,4 731,5 0,4 10-11 8,4 1,3 4,9 749,0 0,1 19-20 27,4 15,0 21,2 733,4 0,0 M -12 7.6 1,3 4,4 754,3 0,0 20-21 24,5 13,3 18,9 758,3 0,0 12-13 7,0 1.5 4,2 738,8 0,0 21-22 22,1 14,3 18,2 757,3 6,2 13-14 9.4 5.0 7.2 757.6 6,3 22-23 19,1 11,8 15,4 752,2 0,0 14-13 8,1 4,6 6,3 760,8 0.1 23-24 23,7 14,7 19,2 748,1 6,6 13-16 11,6 6,3 8,9 762,6 0,1 _ 24-23 18,8 9,8 14,3 747,6 0,2 16-17 11,8 8,6 10,2 764,3 2,2 25-26 16,9 9,1 13,0 746,5 0,2 17-18 11.3 6,1 8,8 766,6 0.0 26-27 17,3 14,2 13,7 745,0 2,0 18-19 9.8 7,6 8,7 767,1 4.0 27-28 18,0 9,6 13,8 751,6 20,1 19-20 10.3 4.0 7,7 763,0 0.8 28-29 18,8 10.8 14,8 733;5 5,1 20-21 11.0 9,7 10,3 760.9 6,:i 29-30 18,2 9,4 13,8 753,8 1,0 21-22 11.3 6.8 9.0 737,1 0,7 30-31 16,7 9,3 13,1 7.56,8 0,4 22-23 9,4 6,0 7.7 741.5 19,3 31 août au 16,4 7,6 12,0 761,3 0 0 23-24 14,2 6,7 10.4 731.3 13,0 l" sept. 24-23 10,4 2 2 6,3 743,2 1,6 Septembre. 23-26 3,7 -- 5^0 — 0,6 733.4 0,0 1- 2 16,2 6,1 11,1 763,3 0,1 26-27 — 2.3 — 12,0 — 7,4 733,1 0,3 2- 3 13,6 5,2 10,4 762,5 0,1 27-28 — 6.9 — 11,3 — 9,1 736,4 0,0 3- 4 18,5 10.8 14,6 7G2,1 0,0 28-29 — 6.7 — 7,3 — 7,0 736,2 1,0 4- 5 20,6 12,2 16,4 763,3 0.0 29-30 — 3,7 - 6,8 — 6,2 766,8 8,1 5- 6 6- 7 20,5 20,4 14.9 12,9 17,4 16,6 764,0 763,5 0,1 0,0 30 nov. au l^déc. — 1,0 - 6,9 — 3,4 738,7 0,0 7- 8 17,1 11,0 14,0 765.2 0,0 Décembre. 8- 9 18,4 10,0 14,2 763,8 0.0 1-2 — 0.3 8.5 — 4,5 732,0 0,0 9-10 18,4 11,0 14,7 760,4 0,0 2-3 -f 1,3 1,6 0,0 7 45,1 0,0 10 11 22,7 13,3 18,0 757,9 0,0 3-4 + 0,1 1,0 — 0,4 730,1 0,6 Octobre. 4-3 + 2,4 3,7 — 0,6 752,7 0,0 11-12 15,6 3,3 10,4 766,6 0,2 3-6 + 2,7 'r 0,2 + 1,4 754,9 0,0 12-13 16,9 5,8 11,3 765,2 0,2 6-7 + 2,3 - 6,2 — 1,K 758,8 0,0 13 14 19,7 6,8 13.2 760,1 0,2 7-8 + 0,0 — 6,4 — 2,7 757,2 0,0 14-15 20,5 9,2 14,8 731.3 0,0 8-9 + 0.7 — 6.2 — 3,4 759,9 0,0 GLYCOCÈNE. 443 Expérience. I . II . III. IV. V. Moyenne Glycogèno -- --- î «« CLYCOGENE. 445 Les recherches entreprises avec les muscles de chat ont donné les mêmes résultats. Des muscles de grenouille placés dans la glace ont passé en 30 heures de 0,53 à 0,11 de glycogène {Loc. cit., 81). E. \ivLz{A.g. P., 1881, xxiv, 57) nous a fourni sur la rapidité avec laquelle disparait le glycogène des données qui sont de la plus haute importance pour l'analyse du glyco- gène. Sur un chien, 50 grammes de muscle du côté gauche, analysés immédiatement, ont donné 0,278 de glycogène : oO grammes du côté droit des muscles correspondants, analysés 30 minutes plus tard, ont donné 0,2463. Par conséquent en une demi-heure la proportion de glycogène a diminué de 0,556 à 0,492 : autrement dit, de 11,5 p. 100. Toutefois KiLza pu, d'un foie de chien qu'il avait laissé huit jours dans le laboratoire et qui pesait 58 grammes, extraire encore 4e'', 2 de glycogène. Je puis conhrmer le fait pour la viande du cheval avec laquelle j'ai souvent fait une expérience analogue. Par conséquent, pour les muscles comme pour le foie, immédiatement après la mort, le glycogène disparaît très vite; mais ensuite le phénomène est très lent, comme si la dias- tase qui hydrolyse le glycogène s'était épuisée, de sorte qu'alors le glycogène ne diminue presque plus. KuLz a d'ailleurs fait étudier spécialement la question par son élève Auguste Cramer (Z. D., XXIV, 79). Cramer a montré que le glycogène des muscles disparait après la mort, d'autant plus lentement que la température de 40° suffit pour faire disparaître en 4 heures la plus grande partie du glycogène musculaire. En comparant des muscles de droite et de gauche, en analysant immédiatement les muscles du côté gauche, et en exposant pendant quatre heures les muscles de droite à la température de 40°, il a trouvé que réchauffement à 40° pendant quatre heures avait diminué de 88,8 p. 100 la proportion de glycogène. Glycogène p. 100 des muscles au froid et au chaud. Muscles de droite Muscles frais exposés à la température, de gauche. de 40°. 1 j P, . \ 0,135 0,044 2 j 1 0,077 0,023 3 ) . . ( 0,417 0,025 4 ! ^^P^" (_M4_4 0,029 Moyenne . . . 0,208 0,030 Assurément cette rapide destruction du glycogène ne s'observe pas constamment. J'ai déjà fait remarquer que l'oi^igine de la force musculaire dépend certainement de diverses substances, et que le muscle suivant son état de nutrition produit telle ou telle substance. Si la combustion ne porte que sur les matières albuminoides, alors le glycogène reste inattaqué dans le tissu musculaire. On doit se rappeler que deux excellents observateurs, BoEHM et Hoffmann, ont vu que la rigidité musculaire se produisait sans qu'il y eût dis- parition du glycogène. R. Boehm (A. g. P., 1880, xxiii, 52) a même communiqué cette expérience extraordinaire : il a comparé pour leur teneur en glycogène les muscles im- médiatement après la mort, et après une ou deux heures. Sur un chat tué par strangu- lation, les muscles d'un côté du corps ont été aussi rapidement que possible préparés pour l'analyse du glycogène. Les muscles de l'autre côté ne furent sectionnés et pré- parés que une ou deux heures après. Dans l'intervalle, le corps de l'animal fut laissé sur la table dans une chambre assez chaude. Le traitement chimique fut exactement le même dans lesdeux cas. Glycogène musculaire (Bœhm). Temps écoulé Glycogène (sans cendres) Glycogène (sans cendres) entre la mort et lanalysc dans les muscles p. 100 immédiatement de la seconde partie de la seconde partie après la mort. du corps. du corps p. 100. 1 0,13 1 h. 10' 0,16 II 0,iO 1 h. 55' 0,15 III 0,39 2 h. » 0,34 IV 0,33 2 h. 15' 0,38 446 CLYCOGÈNE. RûEHM répéta cette expérience avec le même résultat en laissant le cadavre pendant vingt-quatre heures dans un lieu froid. Si pendant le même temps le cadavre était laissé dans une chambre chaude, on constatait la disparition du glycogène. Or, comme dans les cas oîi il n'y avait pas de disparition du glycogène, on voyait cependant survenir la rigidité cadavérique avec acidification du muscle, Bcehm en a conclu que ce n'est pas le glycogène qui est l'origine de l'acide lactique {Loc. cit., 55). Il a donné des analyses quantitatives montrant que l'accroissement de l'acide lactique se produit dans la rigi- dité cadavérique sans qu'il y ait de changement dans la proportion de glycogène {loc. cit., 59). Jusqu'à présent on n'a pas encore pu établir avec certitude la relation qui existe entre le glycogène (outre le sunre qui en provient) et l'acide lactique. En tout cas, cette hydratation post-mortelle du glycogène se fait suivant les condi- tions diverses avec une intensité extrêmement difféi-ente,et nous ne savons rien sur l'ac- tivité du phénomène dans les premiers moments qui suivent la mort. Il s'ensuit que même les meilleures méthodes analytiques doivent toujours donner un chilfre de glyco- gène trop faible, sans que nous puissions savoir la limite de l'erreur. Il semble qu'il y ait une sorte d'entente tacite pour ne pas admettre cette erreur et considérer la chose comme insignifiante. Nous devons cependant avoir conscience qu'il y a là une lacune grave, sur laquelle il n'est pas permis de faire le silence. Etudions maintenant, au point de vue chimique, avec plus de précision, la transfor- mation du glycogène musculaire. A. Panormof (Z. p. C, 1894, xviii, 596) a essayé de montrer que parmi les sucres du muscle il y a du glycose. Des muscles frais de chiens furent traités par l'eau bouillante : le liquide, filtré ; le filtrat; concentré et précipité par l'alcool. Dans ce filtrat alcoolique, il put avec la phénylhydrazine obtenir un osazone qu'il put transformer en glycozoïie et de nouveau en osazone, lequel corps possédait la composition et les propriétés du gly- cosazone.Il trouva que la composition élémentaire du corps analysé coïncidait avec la composition calcuiée du glycosazone, mais il trouva un point de fusion de 195°, pendant que, d'après Fischer, ce point de fusion est 205° {Ber. d. d. chem, Ges., 1890, xxui, 2119). Il a aussi trouvé ce glycosazone dans les muscles d'autres animaux. Dans les mus- cles du brochet il trouva des cristaux fondant à 165°, dont il prépara, par la méthode de Baumann un peu modifiée, une benzoyl-dextrose. Panormof croit donc avoir le droit de dire qu'il s'agissait d'une dextrose. Il ne put pas obtenir de maltosazone. Plus ré- cemment la question a de nouveau été étudiée par William Osbor.ne et S. Zobel (J. P., 1903, XXIX, 1) et par E. Pavy et Siau (J. P., 1901, xxvi, 282) qui ont confirmé les expé- riences de Panormoff. Il s'agissait de savoir si la transformation du glycogène en dex- trose donnait du maltose. Comme produit intermédiaire, Osborne et Zobel ont d'abord cherché à savoir quels sont les produits de dédoublement d'une solution de glycogène, traitée par la salive mixte, le suc pancréatique, dans des conditions d'asepsie rigou- reuse. Ils ont trouvé que par hydrolyse du glycogène il se forme de la soi-disant iso- maltose, substance, qui, d'après Brown et Morris, n'existerait pas, et ne serait que du maltose impur {Trans. Chem. Soc, 1895, 702). En traitant une solution de glycogène par du suc pancréatique on obtint une osazone fondant à 153°. Mais cette substance appelée isomaltose n'est pas une substance définie. En la précipitant à diverses reprises par de l'alcool de plus en plus fort, et en préci- pitant les filtrats par la phénylhydrazine, on voyait constamment s'élever le point de fusion de l'osazone. En précipitant par de l'alcool à 66°, le point de fusion était à 156°; par de l'alcool à 85°, le point de fusion était de 185°; par de l'alcool à 94°, le point de fusion était de 204°. Or le maltose pur donne une maltosazone fondant à 205°. Si le maltosazone obtenu dans le filtrat de l'alcool à 66° était redissous de nouveau, ou ne pouvait plus le précipiter, et on n'obtenait plus que des osazones à point de fusion plus bas, soit des isomaltoses. Par conséquent les impuretés empêchent de préparer le maltosazone avec ses propriétés caractéristiques. Pour la recherche des autres sucres musculaires, la pulpe des muscles de chat, de chien, de lapin était épuisée par l'eau bouillante. Le filtrat était concentré dans le vide, et traité par trois fois son volume d'alcool. Alors le filtrat, concentré de nouveau dans le vide jusqu'à consistance sirupeuse, était traité par la phénylhydrazine, laquelle don- GLYCOGÈNE. 447 nait un mélange de glucosazone, d'isomallosazone et d'autres combinaisons dont l'étude ne fut pas poursuivie. Les osazones solubles dans l'eau chaude étaient beaucoup plus abondantes que les osazones insolubles. Le point de fusion de l'osazone soluble était autre. Par une méthode de fractionnement, analogue à la méthode employée plus haut, le point de fusion de l'osazone obtenu s'éleva à 150° et 162°. Mais on ne put pas atteindre le point de fusion du maltosazone ; et même, en ajoutant du maltosazone chimiquement pur à l'extrait musculaire, il ne fut pas possible d'obtenir de nouveau des cristaux de mal- tosazone. On n'obtint que de l'isomaltose en plus grande quantité. Osborxe et Zobel ont alors fait remarquer la ressemblance entre l'isomaltose qu'ils préparaient avec l'extrait musculaire et le produit similaire qu'ils obtenaient en hydratantle glycogène. En outre, ils ont vu, ainsi que Pavy l'avait déjà constaté, qu'en faisant bouillir l'isomaltose avec les acides, on a des substances qui réduisent de plus en plus la liqueur de Fehling. Aussi ne doutent-ils pas que daiis le muscle, à côté du glycogène, il y a de la dextrine. du maltose et de la dextrose. Assurément cela peut être, mais la démonstration n'est point faite. En effet, É. Fischer (D.C/iem. Ges., 1895, xxviii,3024), sans combattre positivement les conclusions de Brown et Morris, maintient ses conclusions sur le disaccharide obtenu par synthèse, qu'il appelle isomaltose, dont l'osazone fond à 158°. Cet isomaltose se distingue du maltose par sa solubilité, et parce qu'il ne peut pas fermenter. L'analyse élémentaire donne une formule qui répond assez bien à C'^^H'^Az^^O', d'où Fischer conclut que le produit préparé par lui est mélangé à une autre substance, plus pauvre en azote. Notons encore une autre expérience d'OsBORNE et Zobel. En préparant un extrait musculaire frais et privé de sang avec une solution de fluorure de sodium à 2 p. 100, ils ont vu que ce liquide filtré, si l'on y ajoute du glycogène, donne des cristaux avec la phéiiylhydrazine, des osazones, du dextrose et de l'isomaltose; mais cette expérience comporte des significations multiples. Les hydrates de carbone du sang. — Le sucre du sang. — C'est probablement TiEDEMA.N.x et Gmelin {Vevdauung nach Versuchen, i, 184, 1826) qui ont, les premiers, prouvé par la méthode de la fermentation qu'il y avait du sucre dans le sang, et cela chez des chiens nourris aussi bien avec de la viande qu'avec des hydrates de carbone. Thomson {Philosoph. Magaz., xxvi, 1845) a confirmé le fait: il a déterminé par fermen- tation la teneur du sang en sucre et a trouvé chez des poules de 0,03 à 0,06 p. 100, Magendie (C. R., xxiii, 189, 1846) a trouvé du glycose dans le sang d'uu chien nourri avec du lard et des pommes de terre, et il a aussi obtenu une substance insoluble dans l'alcool, qu'il considéra comme de la dextrine. Th. Frerighs [Wagners Handivôrt. d. Phy- siologie, m, (1), 803, {note), 1846) a fait la même constatation pour le sang de la veine jugulaire d'un chien. Il a obtenu un extrait alcoolique qui, concentré et repris par l'eau, a donné la réaction du sucre avec le liquide de Tromuer et le liquide de Moore. Claude Bernard (B. B., 1849, i, 121) a trouvé, d'une manière certaine, du sucre dans le sang, et ce fut le point de départ de ses grandes découvertes. C. Schmidt {Chorakt. d. ep. Choiera, Dorpat et Mitau, 161, 1850) et beaucoup d'autres expérimentateurs ont aussi constaté la présence de sucre. D'après Mering {A. P., 379, 1877), Bleile [A. P., 59, 1879) et J. Otto (A. g. P., xxxv, 495, 1875), le sucre est dans le plasma et non dans les globules. Il était nécessaire de préciser la nature de ce sucre. Seegen {A. g. P., xxxiv, 1884, 393), après précipitation des albuminoïdes, a dosé dans le filtrat le sucre par la liqueur de Fehling, par la déviation polarimétrique et la fermentation. Les chiffies concordent avec ceux qu'on eût obtenus, si ce sucre était du glycose. E. Kixz, avec son élève K. Miura en 1887, a extrait, du sang de veau, un sucre donnant un phénylglycosazoue fondant à 204° et 205°, ce qui est la caractéristique du glycose. Max Pickhardt (Z. p. C, xvii, 217, 1891) a fait toutefois remarquer que le sucre du sang qui réduit les sels d'oxyde de cuivre en solution alcaline, dévie à droite la lumière pola- risée et fermente avec la levure, ne peut cependant pas être absolument identifié poui- cela avec le glycose. Aussi a-t-il alors, suivant l'indication d'ABELEs (Z. p. C, xv, 495, 1891), précipité par des sels de zinc l'albumine du sang des veaux et des chiens et constaté dans le filtrat les trois propriétés principales du glycose (réduction, polarisa- 448 GLYCOGÈNE. lion, fermentation par la levure). Alors une partie du filtrat, concentrée, a été traitée, d'après la méthode de E. Fischer, par l'acétate de soude et le chlorhydrate de phényl- hydrazine. Dans la liqueur refroidie il se forma des cristaux ayant la structure cristalline du glycosazone et fondant à 204° et 20b<'. K. Miura (Z. B., xxxii, 280, 1893), sous la direction de Kûlz, a préparé le glycosazone. Il a précipité le sérum avec S volumes d'alcool. Le filtrat a été ramené à un petit volume, filtré et chauffé avec de l'acétate de soude et du chlorhydrate de phénylhydrazine. Il se précipita des flocons qu'on sépara par filtration. Alors du filtrat chauffé se précipita du glycosazone, qui, après plusieurs cristallisations, donna comme point de fusion 204° à 205°. On ne peut donc point douter qu'il n'y ait du glycose dans le sang; mais il s'agit de savoir si toutes les substances réductrices du sang sont du glycose. Jacob G. Otto (A. g. P. XXXV, 1885, 467) a pensé que, parmi les substances réductrices du sang, il y en a une qui peut fermenter et une qui ne peut pas fermenter. Seegex [A. g. P., xxxvii, 1885, 369), ayant repris cette étude, admet que la soi-disant partie non fermentescible ne dépend que d'une fermentation non achevée. Fr. Schenck (A. g. P., lvii, 1894, 567) contredit les résultats d'Orro et rapporte les recherches de Gurber, lequel, après que le sucre du sang a fermenté, ne peut plus y trouver trace d'une substance réductrice. Cependant, plus récemment, Valdemar Hexriques (Z. p. C, xxni, 244, 1897) a essayé de prouver que le sucre est dans le sang sous deux formes différentes, comme glycose libre et comme 'glycose combiné. Drechsel (J. f. pract. Chem., xxx, 425, 1886 et Z. B., xxxni, 85, 1896) a extrait du foie par l'alcool une substance remarquable qui contient du soufre et du phosphore, qui fermente par la levure, réduit la liqueur de Fehli.ng el, chauffée avec les acides minéraux, donne du sucre. Celte substance, que Drechsel a nommée jécorine, n'existe pas seulement, d'après Baldi (A. P., Suppl., 1897, 100), dans le foie, mais encore dans tout l'organisme, les muscles, le sang et le cerveau. V. Henriques pense que le sucre du sang provient en niajeure partie de la jécorine, car celle-ci est facilement dédoublée en sucre. R. Kolisch et R. de Stejskal (Wien. klin. Woch., 1897, 1101) ont confirmé les faits établis par Henriques pour le sang de l'homme. Pour doser la jécorine du sang, Henriques fait d'abord l'extrait alcoolique; puis il enlève la jécorine avec l'éther aqueux, et il suppose alors que l'éther ne prend pas le glycose non combiné. Mais il ne donne pas de preuves suffisantes pour établir la valeur de ce procédé de séparation. Bing (C. P., xii, 209, 1898) a fait la recherche suivante : « On dissout d'î la lécithine et du glycose dans l'alcool ; on redissout le résidu dans l'éther, et on voit alors que la substance dissoute est analogue à la jécorine et en donne toutes les réactions. Par conséquent, la jécorine est une sorte de lécithine- glycose... Il y a encore d'autres combinaisons analogues avec la lécithine, pour l'arahi- nose, le lévulose, le galactose et le saccharose. » Bing a trouvé, comme Kolisch et Stejskal, que, si l'on broie du sang desséché avec du sable et qu'on le maintienne dans le vide sur l'acide sulfurique, la jécorine alors ne se dissout plus dans l'éther; il suppose donc qu'il y a une combinaison de glycose lécithine avec la globuline et que le glycose lécithine ne se dissout dans l'éther que s'il a été séparé par l'alcool de sa combinaison avec la globuline. Bi.\g dit aussi que, si l'on ajoute du sucre à du sérum ou à l'extrait alcoolique du sang, on obtient une combi- naison avec la jécorine. Mais il semble, d'après l'opinion de tous les chimistes dont je viens de citer les noms, que la question n'est pas jugée encore. La combinaison du sucre avec la léci- thine serait une combinaison instable et dissociable. L'autre question est de savoir si, dans les conditions normales, il y a dans le sang d'autres hydrates de carbone que le glycose. Déjà Magendie (C. R., xxiii, 189, 1846) avait vu qu'après 'une nourriture amylacée, il y avait dans le sang non seulement du sucre, mais encore de la dextrine. Figuier (C. R., xlv, 4, 27 juillet 1857) et Sanson (C. R., xliv, 26, 29 juin et xlv, 343, 7 sept. 1857) ont montré que dans le sang de la veine porte il y a une substance qui n'est pas fermentiscible, mais qui devient fermentiscible quand on l'a fait bouillir avec des acides. P. David {Ein Beitrag ziir Frage ûber die Gerinnung des Lebervenenblalcs und die Bildung von BliUkôrperchen in der Leber ; D. in., Dorpat, 1866) a vu qu'après une alimentation mixte on peut extraire du sang de la veine-porte des substances qui. GLYCOGÈNE. 44{)> par l'ébullition avec l'acide sulfurique dilué deviennent réductrices et solubles dans l'alcool. Naunyn (A. P. P., m, 85, 1874) dit que dans le sang de la veine-porte, chez les chiens nourris avec des matières amylacées, il y a de la doxtrine que la salive trans- foime en sucre. Pourtant S. J. Philips [Over Maltose en Rare overgehling tôt glycose binnen het dierlijk organismus. Akad. droefschrift. Amsterdam, 1881), après nourriture amylacée, a trouvé du maltose dans l'intestin, mais non dans le sang de la veine- porte qui ne contenait que du glycose. Or, comme nous l'avons vu plus haut, le glycogène est un des éléments du sang, en quantité faible, quoique réelle, de sorte que (dans la veine-porte) la présence de ces substances qui, par les acides, donnent des corps réducteurs, rend la recherche du glycogène plus difficile. Tous les sucres solubles. quand ils sont en excès, passent dans l'urine, et il est bien probable que, dans certaines conditions, la dextiine soluble est absorbée et passe dans le sang de la veine-porte. Plus récemment G. Embden {Zeits. f. d. ges. Biochemie,\i, 44, 1904), en faisant passer du sang dans un foie dépourvu de glycogène, a vu, après cette circulation artificielle, qu'il y avait dans le sang des substances préparatoires du sucre, dont on ne peut déduire la quantité d'après la teneur du sang en glycogène. Embden dépouillait le foie de glycogène par l'intoxication strychnique, amenant des convulsions. Souvent alors, après le passage du sang à travers ce foie sans glycogène, on constatait une augmen- tation dans la teneur du foie en sucre; et il en était de même quand on faisait passer dans ce foie du sang chargé de sucre. Cette quantité croît jusqu'à un maximum, et demeure constante tant que la circulation du sang y continue. Si l'on fait alors passer du sang frais dans le foie, le sucre y augmente, comme précédemment, pour atteindre de nouveau un maximum. Mais, si l'on reprend ce même sang pour le faire passer dans un foie sans glycogène, alors l'augmentation de sucre n'est plus qu'insignifiante. Il y a donc dans le foie des sources de sucre qu'on peut constater en l'absence de tout glycogène, de sorte que la question mériterait d'être reprise. Transformations chimiques du sucre dans les échanges organiques. — • Je supposerai d'abord que les phénomènes d'oxydation se passent presque exclusivement dans la cellule, et non dans le sang. En effet, les globules rouges, chez les animaux supé- rieurs, ont perdu leur carartère cellulaire essentiel, et ne consomment que des traces- d'oxygène. Quant aux globules blancs, ils sont en trop faible proportion pour que leur oxydation ait quelque importance par i^apport à l'échange moléculaire total. En un mot la cellule extra-vasculaire est l'officine qui prépare les aliments, et notamment les hydrates de carbone, à leur oxydation en CO- et en eau. Si le sucre n'est pas oxydé, ce sont les cellules des tissus qui en sont responsables. Et, si l'on suppose que ce sucre doit subir quelque modification avant d'être oxydé, alors on peut répondre que dans le sang, à côté du glycogène, il n'y a que du glycose, sans qu'on puisse soupçonner qu'il existe des substances intermédiaires et de transition, autrement qu'à l'état de trace. Rappelons ici que Claude Bernard {Leç. sur le diabète, 208, 1877) a montré que dans le sang il se fait une lente consommation du sucre. Lépine [C. R., ex, 742, 1890) et LÉpiNE et Barral (C. R., ex, 1314 et cxii, 113, 120) l'ont appelée glycolyse du sucre. D'après ces expérimentateurs, auxquels se rallie Arthus (B. B., xliii, 1891, 65), il ne s'agit pas là de micro-organismes, mais d'une enzyme glycolylique, qui est détruite à 34°. Mais Arthus a montré que cette zymase n'est pas contenue dans le sang vivant [B. B., XLiii, 1891, 65). En effet, si l'on traite du sang délibriné par du fluorure de sodium à 0.02 et O.Oo p. 100, il n'y a pas de zymase. Or le fluorure de sodium ne détruit pas la substance qui consomme le sucre, et à 1 p. 100 le fluorure de sodium arrête,, d'après Arthus {A. d. P., xxiv, 1893, 337), tout développement microbien. Spitzer (A. g. P., Lx, 189o, 303), travaillant sous la direction de Ruhmann, a prouvé qu'il n'y a de glyco- lyse que dans le sang oxygéné. Kraus {Zeitsch. f. klin. Med., xxi, 313, 1892) avait déjà montré que du sang additionné de sucre, et dans lequel on fait passer de l'air sans CD-, abandonne plus de CO^ qu'il n'en contenait primitivement. Lépine avait pensé que chez les diabétiques le pouvoir de glycolyse du sang a notablement diminué, et il a cherché à expliquer ainsi la cause du diabète. Mais Kraus s'est assuré qu'il n'y avait pas, à ce point de vue, de différence notable entre le sang normal et le sang diabétique. Toutefois, DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME Vil. 29 450 GLYCOGENE. même si l'on admet que cette glycolyse est un processus physiologique, il serait diffi- cile d'expliquer ainsi la destruction de la grande quantité des hydrates de carbone qui sont brûlés chaque jour. Du sang normal, additionné de 1 p. 100 de sucre et stérilisé par le thymol, fut laissé pendant une heure à 41" (Lépine et Barral, C. R., ex, 1314). Le sucre ne diminua que dans la proportion de 4 à 6 p. 100. Supposons alors chez l'adulte une quantité de 4 kilos de sang contenant 4 grammes de sucre. Si le sang ne détruit en une heure que 6 p. 100 du sucre qu'il contient, cela fait pour une heure 0e'',24 en tout, et 3^'',1Q pour vingt-quatre heures. Or en réalité la destruction du sucre, chez un individu normal est de 500 à 600 grammes par jour. Par conséquent la glycolyse de Lépine ne rend pas compte de la destruction du sucre dans l'organisme. La glycolyse avec la pulpe des organes broyés a été aussi l'objet de mainte récente controverse, par suite des erreurs liées à la présence possible de microbes. Comme les microbes et leurs spores sont parfois beaucoup trop petits pour atteindre la visibilité microscopique, puisque ceux de la variole, de la scarlatine, de la syphilis, des oreillons, n'ont pas, malgré toutes les recherches, pu être observés encore, il faut reconnaître qu'il existe peut-être des organismes vivants qui dépassent la limite de la visibilité au microscope. De plus il n'est pas douteux que la résistance des microbes aux antiseptiques est très diverse. Le fait qu'on a éliminé par des agents antiseptiques, dans les liquides qu'on examine, tout microbe vivant, est une hypothèse non prouvée, qui souvent repose sur une erreur. Aussi toutes les recherches sur la glycolyse, les auto- lyses elles zymases, etc., sont-elles sujettes à une profonde incertitude. § IM. — LE DIABÈTE La découverte glycogénique du foie a certainement donné la première base sur laquelle s'édifiera la théorie rationnelle de cette maladie {diubèle). Ce qu'il faut aujourd'hui, c'est une critique expérimentale sévère, car c'est la physiologie qui doit y éclairer la pathologie (Claude Bernard, Leçons sur le diabète, 1879, p. 475). Quoique nous ayions dans les chapitres précédents parlé souvent du diabète et de sa dépendance du système nerveux, il nous reste cependant une série de faits à établir, important pour l'histoire des hydrates de carbone et exigeant alors une discussion spéciale. Je parlerai d'abord en général, et j'examinerai ensuite les différentes variétés du diabète. Quand le sucre apparaît dans l'urine, on dit qu'il y a glycosurie ou diabète. Tou- tefois, si chez des individus bien portants, l'injection de grandes quantités de sucre ou l'empoisonnement par la phloridzine, l'adrénaline, etc., déterminent une excrétion de sucre passagère, on dit plutôt qu'il y a glycosurie, en réservant le nom de diabète pour une maladie interne provoquant la glycosurie. Mais comme d'une part les intoxications diverses, et même l'injection d'une grande quantité de sucre, troublent certainement la fonction normale d'un ou de plusieurs organes, comme d'autre part certains diabètes caractérisés sont guérissables, et par conséquent passagers, on voit que toute démar- cation absolue entre la glycosurie et le diabète n'est pas fondée. La première question à se poser, c'est de savoir quelles sont les causes du diabète. Or parmi les causes immédiates, il faut en distinguer trois : et d'abord la surproduc- tion de sucre. Cette cause est méconnue ou à peine reconnue par la plupart des auteurs, cependant elle est positive, et très souvent, sinon toujours, elle est la cause essentielle de l'élimination du sucre par les reins. Du moment que Cladde Bernard fait en sorte, par la piqûre du bulbe, que le foie transforme rapidement son glycogène en sucre, qu'il produit de l'hyperglycémie et le passage du sucre dans l'urine, alors le diabète par hyper-production du sucre est prouvé, car ce qui devait rester à l'état de glycogène dans le foie, passe à l'état de sucre dans le corps. Toute injection dans le sang qui augmente la teneur du sang en sucre, amène la glycosurie : de même la piqûre du bulbe détermine le diabète par hyperproduction du sucre. Si l'excitation des nerfs vagues ou d'autres nerls amène la glycosurie, nous savons que c'est par une action réflexe agissant sur la moelle allongée d'une manière analogue à la piqûre du bulbe. GLYCOGÈNE. 451 Après une simple piqûre, Claude Bernard a vu sur des chiens des glycosuries qui duraient jusqu'à trois jours dans les maladies de la moelle allongée il y a des étals diabétiques faibles, dont nous avons donné plus haut des exemples très nets. Ces diabètes de cause nerveuse doivent-ils être également expliqués par une hyper- production du sucre? Pour ma part, je le pense. Nous avons admis que les nerfs du foie peuvent déterminer sécrétion abondante d'une diastase qui à son tour, transforme le glycogène en sucre. Quand, par une dégénérescence de la moelle allongée, le centre glycoso-formateur est maintenu dans un état d'irritabilité prolongée, la teneur du foie en ferment se maintient à un niveau élevé. En conséquence, le sucre de l'alimentation qui arrive au foie est bien transformé en glycogène, mais ce glycogène revient aussitôt à l'état de sucre. Ce qui justifie cette supposition, c'est le fait démontré par Minrowski, et vérifié par moi, que dans le diabète pancréatique, jusqu'au moment de la mort, le foie contient toujours des traces de glycogène, encore que l'animal ne puisse plus contenir de réserve de glycogène, puisqu'il est depuis plusieurs semaines nourri avec de l'albu- mine sans hydrate de carbone, et qu'il élimine d'énormes quantités de sucre. Alors le glycogène qui se forme constamment aux dépens du sucre ne s'accumule pas, mais devient aussitôt du sucre, ce qui entraîne l'hyperproduction du sucre. Un certain état physiologique s'établit, dont les conditions extrêmes sont que tout se passe alors comme s'il n'y avait plus de foie. Par là s'explique ce fait curieux que beaucoup d'or- ganes qui normalement sont pauvres en glycogène ou n'en contiennent pas, en contiennent chez les diabétiques, alors que le foie n'en a pas. L'hyperglycémie ne peut pas déterminer l'accumulation de glycogène dans le foie, par suite de la présence d'une diastase, alors que cette diastase manque dans les reins, le cerveau, etc. Le sucre absorbé par l'intestin doit rester dans le sang indépendamment de la quantité qui se distribue aux organes. Si nous supposons qu'un adulte, avec 5000 grammes de sang, ingère et oxyde en vingt-quatre heures 600 grammes de sucre, si ce sucre devait rester dans le sang, alors le sang contiendrait 12 p. 100 de sucre. Si nous répartissons cette alimentation sucrée en 24 repas, cela fera 25 grammes de sucre absorbés par heure. Alors le sang contiendra encore 0, 8 p. 100 de sucre, ce qui détermine encore le passage du sucre dans l'urine. Ou comprend que, si le sucre est oxydé dans les mômes proportions qu'il est absorbé, la teneur du sang en sucre ne variera pas, et il n'y aura pas de glycosurie, même en admettant l'inactivité du foie. Mais nous supposons alors que l'oxydation et l'absorption du sucre sont à chaque moment parallèles, quoique en réalité elles soient indépendantes l'une de l'autre. Que l'individu soit en repos ou qu'il contracte énergiquement ses muscles, l'intensité de l'oxydation est absolument différente. Elle est sujette à des variations considérables, sans que l'absorption se modifie pour cela. Aussi, en général, ne doit-on pas supposer que l'oxydation et l'absorption suivent une marche rigoureusement parallèle. Les choses sont bien différentes, quand l'alimentation est répétée à chaque quart d'heure, soit à raison de 6'?'', 25 d'hydrate de carbone, sous la forme ou non de glycose. Si ces quantités étaient absorbées à chaque quart d'heure, et non oxydées, la teneur du sang en sucre s'élèverait à 0.12. Comme le sang en contient déjà 0.10, le taux du sucre s'élèverait à 0.22, ce qui n'entraîne pas nécessairement la glycosurie. Ces calculs, qui ne peuvent évidemment être que des approximations, montrent que dans l'alimenlalion ordinaire — à supposer qu'elle ne soit pas trop pauvre en hydrates de carbone — il y aurait élimination de sucre par l'urine, s'il n'existait une disposition qui réserve le sucre du sang qui n'est pas oxydé. C'est là l'œuvre du foie, qui pèse 2 kilos chez l'homme. S'il peut réserver 10 ou 20 p. 100 de son poids en glycogène, on voit qu'il peut débarrasser le sang de 200 à 400 grammes d'hydrates de carbone. Tout le reste du corps en réserve à peu près" autant, et môme bien davantage, mais peut- être le foie est-il nécessaire pour permettre au corps cette réserve. Ainsi il n'est pas possible que le sang se charge de sucre. Car presque toute notre alimentation en hydrates de carbone peut être mise en réserve dans les organes, sous forme de glycogène. Comme, même dans les formes graves du diabète, "il se dépose encore de petites quantités de glycogène dans le foie, il est tout naturel alors que le foie des diabétiques ne soit pas complètement dépourvu de glycogène. 452 GLYCOGÈNE. KiJLz [A. g. P., XIII, 1876, 267) a eu l'occasion d'analyser le foie d'un diabétique, atteint de diabète grave, et cela douze heures après la mort. Le malade avait, loiif^'temps avant sa mort, été soumis à une diète carnée rigoureuse, sans aucune alimentation avec hydrates de carbone. L'agonie dura quarante-huit heures, et depuis six heures il n'avait rien mangé, de sorte qu'en réalité sa dernière alimentation remontait à cinquante- quatre heures avant la mort. Environ la dixième partie du foie fut mise à l'ébullition dans l'eau pendant une heure, et l'extrait fut précipité par la méthode de BrCcre par l'acide chlorhydrique et l'iodure mercuro-potassique. Le filtrat fut additionné de trois fois son volume d'alcool, et donna un précipité de 0.683 de glycogène brut, lequel, après purification, donna 0.45 de gly- cogène pur. Ce précipité, qui ne contenait ni azote ni cendres, se dissolvait dans l'eau avec opalescence, ne réduisait pas la liqueur de Fehling, et donnait une réaction carac- téristique par l'iode. La solution aqueuse se saccharifîait par la salive parotidienne, comme par l'ébullition avec l'acide chlorhydiique dilué. Le sucre qui en résultait déviait la lumière polarisée à droite, et fermentait. E. KuLz ajoute qu'il eût fait l'analyse avec plus de soin, s'il s'était douté qu'il y avait dans le foie d'aussi grandes quantités de glycogène. « Tous ceux, dit-il, qui se sont occupés du glycogène hépatique, savent qu'il est difficile d'extraire du foie tout son glycogène. Le tissu hépatique broyé dans un mortier doit être mis à bouillir au moins 8 à 10 fois avec de grandes quantités d'eau. Or, dans le cas actuel, le tissu du foie, coupé avec des ciseaux, n'a été mis à bouillir qu'une seule fois dans l'eau. Aussi pensai-je qu'il y avait au moins 10 à lo grammes de glycogène dans tout le foie examiné... Ainsi de cette observation il résulte que, même dans le diabète grave, et après une alimenta- tion exclusivement cai^née, il y a encore des quantités notables de glycogène dans le foie. Et pendant la vie la teneur en glycogène devait être plus élevée encore, si Ton songe que cet individu était resté cinquante-quatre heures avant sa mort sans prendre de.nourriture, et si l'on admet, ce qui est ceiLainement vrai, que le sucre qui existait abondamment dans la décoction hépatique provenait en totalité ou en partie du glyco- gène du foie. » Frerichs {Ueber den Diabètes, 272, Berlin, 1884) mentionne des expériences dans les- quelles, pendant la vie, des fragments de foie furent pris à des diabétiques, afin d'y rechercher le glycogène. Cela fut fait avec un trocart fin et soigneusement désinfecté qui fut plongé dans le parenchyme du foie. En retirant le stylet, on recueillit dans la cavité du trocart quelques gouttes de sang, et quelques cellules du foie, soit isolées, soit en groupes. Quelquefois un fragment allongé du tissu hépatique fut durci dans l'alcool et soumis à des coupes après avoir été inclus dans la ceiluloïdine. Dans tous les cas observés, les individus sains ou diabétiques avaient fait un repas abondant avec des aliments amjda- cés. La ponction était faite quatre heures et demie ou cinq heures et demie après le repas. Chez les gens sains les cellules hépatiques se coloraient en brun foncé dans tout leur protoplasme par l'iode : seul, le noyau de la cellule n'était pas coloré. Chez une malade diabétique quelques cellules isolées du foie étaient riches en glycogène, lequel, après coloralion par l'iode, se présentait sous la forme d'un anneau coloré en brun foncé qui entourait le noyau. Beaucoup de cellules étaient plus pauvres en glycogène, mais, ce qui est très remarquable, c'est que dans diverses cellules on voyait des accu- mulations de glycogène dans l'intérieur du noyau qui enveloppaient le nucléole. Chez un malade diabétique les cellules du foie étaient pauvres en glycogène. Dans quelques cellules seulement on voyait une coloration brune indiquant des traces de glycogène. Ces divers cas, et notamment celui de KClz, prouvent que, même dans les cas graves du diabète, il y a encore une active formation de glycogène dans le foie. Une transfor- mation active par le ferment diastasique change ce glycogène en sucre, et, si celte trans- formation est plus rapide que la formation du glycogène, alors évidemment le foie paraît dépourvu de glycogène, ainsi qu'on l'a observé dans le foie des individus diabé- tiques. Mais cela ne prouve pas que le foie ne forme pas de glycogène. On ne peut donc parler d'une disparition complète du glycogène, quand parft)is, dans les autopsies des diabétiques, on trouve des quantités considérables de glycogène, tandis que dans d'autres cas le glycogène est très peu abondant, ou même fait com- GLYCOGÈNE. 453 plètement défaut. Ainsi Frerichs (Diabetea, 1884, 271) parle d'une dégénérescence gl3'co- génique dans l'isthme de Henle, et il donne à ce sujet de très beaux dessins (PI. I, fig. 1 et 3). Grohe (C. W., 1874, 870) a signalé la présence du glycogène dans le cerveau des diabétiques. Abeles a fait une étude soigneuse de la question, et nnontré que le glyco- gène peut être, par la méthode de Brucke, extrait des organes des diabétiques et dosé après interversion à l'état de sucre. Il a trouvé dans le cerveau d'une femme diabétique, cerveau pesant 1 012 grammes, 0 628 grammes de sucre provenant du glycogène. Dans un autre cerveau de femme pesant 1 222 grammes, il a trouvé 0 213 grammes de sucre provenant du glycogène. Ces malades étaient mortes dans le coma diabétique. Si l'an- cienne opinion n'est pas tout à fait exacte qu'il n'y a pas de glycogène dans le cerveau, on voit cependant par ces analyses que le diabète peut produire une augmentation notable dans la quantité de glycogène contenue dans le cerveau. Très remarquable est l'observation de Kaufmann que le sang oxalaté d'un chien rendu diabétique contient du glycogène (B. B., xlvii, 316). Cela nous fait comprendre comment chez les diabétiques on a trouvé de la dexlrine dans l'urine, comme l'a noté Reichard [Pharm. Zeitsch.f. Russ- land, xiv, 4;;; in Maly's Jahresb., 1875, 60). De telles augmentations de glycogène ont été encore signalées pour d'autres organes. Ces quantités anormales et si élevées de glycogène dans le cerveau et les reins dépendent sans doute de la grande quantité de sucre que contiennent les liquides de l'organisme, même si l'on n'admet pas que le plasma du sang, riche en glycogène, dépose cette substance dans les divers organes. D'ailleurs, en considérant les divers degrés du diabète, on voit que des quantités très ditîérentes de glycogène peuvent se trouver dans le foie des diabétiques. Mais, comme, dans les cas graves de diabète pancréatique, il n'y a que des traces de glycogène dans le foie, il parait évident, que, d'après Minkowsri, c'est l'ingestion de lévulose, et non de dextrose, qui doit amener une production abondante de glycogène. Les trois expériences qu'il apporte à l'appui ont donné 0,72; 4,13; 8,14 p. 100 de glyco- gène. Le nombre 0,72 est dans la limite de l'erreur expérimentale, et le chiffre de 4,13 p. 100, se rapporte à un chien à qui le pancréas n'avait été que partiellement extirpé [Unters. iiber den Diabètes mellitus, Leipzig, 1894, 81). Minkowski a lui-même donné des expériences qui prouvent qu'après l'extirpation partielle du pancréas il s'amasse encore du glycogène dans le foie. Dans ce cas, un fragment de pancréas avait été greffé sous la peau {loc. cit., 81). Par conséquent ces deux expériences ne sont pas démonstratives. La troisième expérience donne en apparence un résultat positif; mais pour les rai- sons suivantes elle ne prouve rien. Minkowski a d'abord, ce qui est difficile à concevoir, nourri un chien, pendant plu- sieurs jours, avec de grandes quantités de glycose (75 gr. par jour), ce qui a sans doute déterminé une notable accumulation de glycogène dans le foie. Ensuite, pendant trois jours, il lui a donné 650 gr. de viande par jour. Si c'était de la viande de cheval, cela fait encore, en glycogène, environ 20 gr. de sucre. Alors seulement il lui donna 400 gr. de lévulose, en deux jours ; puis l'animal fut sacrifié. Le foie contenait 8,14 p. 100 de glycogène; en tout 46,32, et dans les muscles 0,81 p. 100. Mais peut-on garautir que ce glycogène ne provenait pas des 150 gr. de glycose et de glycogène musculaire donnés dans l'alimentation préalable, et ayant persisté plutôt que la lévulose plus facilement oxydable? car j'ai trouvé chez un chien, qui avait jeûné 28 jours, 4 785 p. 100 de glyco- gène dans le foie, (évalué en sucre); ce qui faisait 24 gr. 26 de glycogène pour tout le foie. Comme, dans cette expéri,ence de Minkowski, le glycogène trouvé dans le foie après ingestion de dextrose et de lévulose était du glycogène normal, on peut supposer que b^ foie de l'animal rendu diabétique par une extirpation pancréatique totale ne peut plus fabriquer d^ glycogène, car il y a alors un état diabétique tout autre qu'après une extirpation incomplète du pancréas. Comme Mi.nkowski a souvent fait des extirpations qu'il supposait complètes, encore qu'elles ne le fussent pas, ainsi que je le montrerai plus loin, il n'était certainement pas suffisant de se contenter d'une seule expérience pour établir un fait aussi important. L'expérience ne prouve donc rien. Remarquons aussi que, d'après W. K.vusch {A. P. P., xxxvii, 274), chez les canards, après l'extirpation pancréatique, le lévulose détermine, comme le dextrose, l'accumu- 454 GLYCOGÈNE. lation de glycogène dans le foie. Mais ce sont des expériences qui ont besoin d'être répétées. 0. MiNKOWsKi {loc. cit., 82) parle aussi de ce fait extrêmement paradoxal que « dans l'organisme des animaux diabétiques un hydrate de carbone lévogyre détermine la pro- duction de glycogène dextrogyre, alors que les hydrates de carbone dextrogyres n'ont pas cet effet ». Mais, comme l'a montré Otto dans des expériences que j'ai rapportées plus haut, chez l'animal sain, le lévulose amasse dans le foie du glycogène dextrogyre, de sorte qu'il n'y a pas là de paradoxe. Nous avons donc vu que la surproduction du sucre est funeste, surtout parce que le foie a perdu le pouvoir de prendre leur sucre aux liqueurs de l'organisme. Parmi les moyens dont les organismes disposent pour se protéger contre un excès de sucre, il y a encore la formation de graisse. On sait que les cliniciens sont disposés à croire que les individus obèses sont des diabétiques. Mais je présume que ces diabétiques étaient malades déjà, avant d'être gras. Aussi bien, chez tous les diabétiques la maladie n'est-elle pas accompagnée d'obésité. Il y a à cet égard de grandes différences individuelles. C. v. Noorden {Die Zuckerkrank~ heit und ihre Behandlung, Berlin, 1901, Î56) a déjà remarqué qu'il y a des gens obèses qui sont déjà en réalité diabétiques, avant d'éliminer du sucre par l'urine. Il note aussi que certains individus obèses, en des familles où l'obésité est héréditaire, peuvent ingérer de grandes quantités d'amidon, sans que cela entraîne la glycosurie , tandis qu'après ingestion de doses relativement faibles de glycose (100 grammes), ils deviennent glyco- suriques. C'est ce que V. Noorden appelle avec raison le diabète maf^qué. On peut supposer qu'après une production plus abondante de sucre, il y a une légère augmentation dans la proportion de sucre du sang, insuffisante pour qu'il y ait produc- tion de graisse. Si le sucre augmente, alors il y a glycosurie. Comme le diabétique, à mesure que la maladie fait des progrès, perd peu à peu sa graisse, il s'ensuit que le pou- voir normal de changer le sucre en graisse est alors, chez le diabétique, ou diminué, ou perdu, ou compensé. Par conséquent le diabétique est dépourvu des deux grands moyens qui permettent au sucre de se déposer dans les tissus sous forme de réserve. D'après ces divers faits, on ne peut contester que les diabètes d'origine nerveuse sont déterminés essentiellement par une surproduction du sucre. Mais, si l'on prend des chiens atteints du diabète de Sandmeyer, et n'ayant alors plus de glycogène, et qu'on les nourrisse avec de l'albumine et des acides amidés, en élimi- nant de leur alimentation la graisse et les hydrates de carbone, on voit augmenter énor- mément leur glycosurie, de sorte qu'on est forcément amené à conclure que la produc- tion du sucre a été augmentée. La piqûre du bulbe, chez des animaux sans pancréas (chez lesquels par conséquent le sucre ne provient pas du glycogène, mais de la graisse) est suivie d'effet. Par consé- quent les nerfs agissent sur la transformation de la graisse en sucre, puisqu'il y a alors hyperproductlon de sucre. Ces expériences ont été faites par E. Hédon (A. d. P., 1894, 269) et Kaufmafn (A. d. P., avril 189S). Il serait désirable de reprendre ces recherches sur des chiens, qui, comme ceux sur lesquels j'expérimentais, avaient le diabète de Sandmeyer, et ne contenaient plus de glycogène, condition qui n'a peut-être pas été réa- lisée complètement dans les expériences de Hkdon et de Kaufmann. Il faut en effet éclair- cir cette contradiction apparente que chez l'animal normal la piqûre du bulbe ne pro- duit de glycosurie que quand le foie contient du glycogène, tandis que chez l'animal sans pancréas elle est efficace, quoique le foie ne contienne pas de glycogène. De nou- velles recherches sont nécessaires. 2. Comme seconde cause du diabète on allègue généralement l'incapacité pour l'or- ganisme d'oxyder le sucre. Et on se tonde sur ce fait que, dans le diabète grave, le sucre ingéré fait croître en mêmes proportions le sucre éliminé. « H résulte au moins de ces recherches, dit Minkowski {Diabètes mellitus nach Pancreasexstirpation, tir. à p. Vogel, Leipzig, 1893, 22), que, lorsque le diabète par ablation du pancréas a atteint son maximum d'intensité, les quantités quelconques de glycose qu'on introduit dans l'organisme ne peuvent plus être assimilées. » Or cette conclusion, comme je le montrerai plus loin, a une double signification. Dans un autre endroit Minkowski {Commun, à la Soc. méd. de GLYCOCÊNE. 455 Strasbourg, 18 déc, et Berl. klin. Woch., 1892, n° 5) nous dit que dans l'état diabétique maximum, le sucre ne peut plus, en aucune proportion, être consommé par l'organisme. Récemment A. Magnus Levy [Zcitsch, f. klin. Med., lvi, 1905, 94) dit que le diabétique vit aux dépens de la graisse et des albuminoïdes sans hydrates de carbone. L'élément essentiel de la combustion des tissus, c'est que la grandeur de cette combiisLioii est déterminée par la vie des organes et non par la quantité des aliments introduits dans l'organisme. Celte proposition est vraie surtout pour les aliments graisse et hydrates de carbone. La petite quantité de sucre qui est dans le sang suffit aux besoins des organes; et, si la proportion du sucre augmente, la consommation n'en augmente pas, de sorte qu'alors le sucre est éliminé par l'urine. Que si nous introdui- sons plus de sucre dans l'alimentation des diabétiques, alors nous faisons croître la quantité du sucre inutilisable qui est dans le sang, de sorte que l'élimination du sucre augmente; et cependant les quantités de sucre brûlées peuvent être très grandes. De même que si l'on verse de l'eau dans un vase plein, et qu'elle déborde toute, on ne peut en conclure que le vase ne peut pas contenir d'eau. De même le sucre qu'on donne à un diabétique n est pas oxydé; et alors évidemment il n'exerce aucune intluence sur le quotient respiratoire. Je vais prouver que la supposition de Minkowski, qne le sucre apparaît dans l'urine du diabétique parce qu'il n'est pas brûlé, est une supposition injustifiée. Rappelons d'abord que souvent il y a plus de sucre éliminé qu'il n'en est introduit dans l'alimentation, de sorte que l'explication n'est pas simple. Th. Rumpf (27 oct. 1898, et Berl. klin. Woch., 1899, n° 9) rapporte des cas de diabète grave, dans lesquels l'ingestion d'aliments amylacés déterminait une élimination de sucre supérieure à la somme de l'amidon ingéré et du sucre éliminé normalement dans l'état déjeune absolu. Par conséquent l'amidon n'épargnait pas la consnminalion des albuminoïdes; il augmentait au contraire la consommation d'azote. Si le sucre introduit dans l'alimentation était simplement éliminé, on ne voit pas bien pourquoi ce sucre augmenterait la combustion de l'azote, puisque le sucre éliminé ne dépend pas d'une plus grande consommation d'azote. Il faut rattachera ces faits les observations de MiNKo\vKsr,qui, après avoir fait ingérer du lévulose, a vu croître l'excrétion du sucre, à savoir l'excrétion du glycose, qui n'avait cependant pas été ingéré. L'expérience de Rujipk prouve aussi qu'après ingestion de glycose il y a élimination de glycose, mais en plus grande quantité qu'il n'en avait été ingéré. Sur ces faits jettent une certaine lumière les recherches qui ont établi la puissance toxique du sucre. JuLics V. KossA a injecté sous la peau différentes solutions de sucre, et spécialemen de sucre de canne; et il croit que tous les genres de sucre se comportent de la même manière. 11 est arrivé à ce résultat que de fortes doses de sucre injectées sous la peau, ou de petites doses, si l'on continue pendant longtemps les injections, déter- minent dans l'organisme des troubles graves, et des altérations que décèle l'examen anatomo-pathologique {A. g. P., 1899, lxxv). L'injection sous-cutanée de sucre de canne à la dose de 1 p. 100 du poids du corps amène chez l'oiseau une cyanose de la crête, un catarrhe bronchique, de l'œdème pulmo- naire, de la diarrhée, une très grande faiblesse musculaire, de la somnolence, de l'inco- ordination, une soif très vive et de la polydipsie. Si les doses sont plus fortes, la somno- lence ressemble au coma qu'on observe dans le diabète. A l'autopsie, on constate la dégé- nérescence des muscles, la congestion des muqueuses, la néphrite et des dépôts uratiques. Dans quelques cas, ce sont les mêmes constatations anatonio-pathologiques essentielles que dans la goutte des oiseaux. Les doses mortelles de dextrose, de lactose et de saccharose concordent entre elles. Pn injectant à des lapins pendant longtemps, durant deux à quatre semaines, des quantités de sucre répondant à 0,5 ou 1 p. 100 du poids du corps, Kossa a vu survenir un amaigrissement rapide, qui, en trois semaines, allait jusqu'à atteindre 21 à 36 p. 100 du poids initial du corps. En différents organes, il se faisait des hémorragies intersti- tielles avec de l'albuminurie et de la néphrite. Un fait à noter, c'est que, chez le chien comme chez le lapin, des injections de sucre, au taux de 0,25 à 0,7 p. 100 du poids du /.56 GLYCOGÈNE. corps, déterminaient une augmentation considérable de l'élimination des matières azotées par l'urine, urée et ammoniaque, et que cette augmentation dans l'élimination d'azote continuait encore quelque temps après qu'on avait cessé les injections de sucre. Déjà, avant Kossa, Albertoni {Ann. di chim. e di farmac, (4), ix, 65, et Ak Bolognn, 1888, in Maly's Jahresbericht 1889, 48) avait fait d'importantes expériences sur la résorption des divers sucres et leurs effets sur l'organisme. L'accumulation de sucre dans le sang amène des troubles fonctionnels dans les organes de la circulation. L'injec- tion de glycose, de maltose, de saccbarose augmente chez le chien la fréquence des battements du cœur, de 15 à 20 par minute, et cette augmentation cesse après la section des deux nerfs vagues, de sorte qu'on peut en conclure que le sucre agit sur les centres de ces nerfs. Chez l'homme, la fréquence du pouls augmente après injection de 100 grammes de sucre de canne, de 6 à 8 par minute. Quelquefois cette augmentation dans la fréquence du pouls est précédée d'une courte période de diminution. La pres- sion artérielle monte, après injection intra-veineuse de glycose, de maltose ou de sac- charose, de 15 à 20 millimètres de Hg, et cette élévation de la pression s'observe encore après section des nerfs vagues et de la moelle. On peut donc attribuer cet effet à une activité plus grande du cœur. En outre, après injection intra-veineuse de ces trois variétés de sucre, on observe une dilatation des capillaires, une augmentation du volume des reins et des extrémités, et une accélération du mouvement circulatoire, ce •qui explique la polyurie qu'on avait déjà constatée. Récemment Lamy et Maver (B. jB., 1904, lvii, 27) ont montré qu'après une injection intra-veineuse de sucre la diurèse est proportionnelle à la concentration du sucre dans le sang. Au point de vue de l'intensité des effets diurétiques on a eu la série suivante descendante : lactose, saccharose, glycose, maltose. L'excrétion d'azote a été plus grande par lactose et saccharose que par glycose et maltose. V. Harley (A. p., SuppL, 1893, 46) a, dans le laboratoire de Ludwig, à Leipzig, étudié la question à un autre point de vue, un peu différent, spécialement pour les change- ments que des injections intra-veineuses de dextrose déterminent dans le chimisme organique de l'animal. Pour obtenir une plus longue action du sucre, Harley faisait à des chiens la ligature des uretères, et leur injectait des solutions de dextrose jusqu'à 1 p. 100 du poids du corps. Il a vu que c'étaient surtout les organes centraux du système nerveux qui étaient atteints. Tremblement des muscles, convulsions, difficulté dans les mouvements, vomissements, accélération respiratoire avec 50 à 80 respirations à la minute, rétrécissement de la pupille, salivation abondante, et finalement mort dans un état comateux. Il a alors recherché si, après injeclion de glycose, il se développe dans le sang de l'acélone, de l'acide acétique et de l'alcool éthylique. L'acide acétique, l'acétone et l'ammoniaque peuveni être obtenus par distillation du sang. Or, en opé- rant sur le sang normal du chien, o.i trouve de l'ammoniaque; mais on n'a ni acétone, ni acide acétique, ni alcool; tandis que le sang de chien ayant reçu une injection de glycose donne à la distillation, à côté de l'ammoniaque, de l'acétone, de l'acide acétique et de l'alcool éthylique. Harley n'a pas négligé de rechercher si, après ligature des uretères, même sans injection de sucre, il se trouve dans le sang de l'acétone, de l'acide -acétique et de l'alcool éthylique ; et il n'a pas pu en trouver. Il n'en a pas trouvé davan- tage quand il attendait plusieurs jours après^la ligature des uretères pour faire la prise du sang à analyser. Ces recherches sont de grande importance : elles prouvent que chez un chien normal le seul fait de la présence du sucre dans le sang suffit pour amener un état du système nerveux tout à fait analogue au coma des diabétiques, en même temps qu'elle détermine la formation d'acétone et d'acide acétique. Harley pense que ces deux substances viennent du sucre, et ce qui confirme son opinion, c'est que les acides du lévulose appartiennent à une série homologue à la série acétique, et qu'on peut les obtenir facilement en partant des hydrates de carbone, mais non en partant de l'albumine. Voici ce qui le prouve : H 0 H 0 I l| I ji = Acide acétique. ^~j^~*-'~l I = Acide acéto-formique. H H 0 -H GLYCOGÈNE. 457 H 0 H H 0 I II I I II = Acide lévulosique. II_C— C — C— C— C = Acide acéto-propionique. I ! I I = Acide acétone acétique. H H H C) — H H 0 I II H H — C — C — C — H=: = Acétone. 1 I H H H 0 H 0 H_C — C — C— C = Acide acétique. III = Acide acéto-formique. H H 0 — H H OH H H O jj Q C — G G ^^ Acide osybutyriquc. III = Acide hydroacétique. H H 0 — H La transformation du sucre en acide acétique, acétone et acide oxybutyrique est un procédé de guérison que la nature emploie pour combattre l'influence nocive du sucre. Les quantités notables d'acide oxybutyrique qui se produisent dans la période terminale du diabète ne sont toxiques que par leur acidité même; car, si Ton neutralise cet acide par des quantités suffisantes de carbonate de soude, on écarte toute action toxique. On admet que l'augmentation de l'élimination d'ammoniaque dans le diabète a pour origine la formation d'acide oxybutyrique. Mais comme, après administration de fortes doses de carbonate de soude, l'élimination d'ammoniaque diminue, tout en restant plus considérable qu'à l'état normal, cela donne à penser que le foie est malade, et qu'une partie de sa fonction consiste à transformer les'^sels ammoniacaux. En tout cas, on doit reconnaître qu'on n'a pas prouvé avec certitude que l'acide oxybutyrique, l'acide acétique et l'acétone proviennent dans le diabète des hydrates de carbone. L'opinion soutenue récemment par des savants éminents que ces corps dérivent des graisses mérite d'être examinée de^près; car de bonnes raisons ont été données à l'appui. Après avoir analysé les désordres que peut produire dans l'organisme le sucre du sang quand il est en trop grande quantité, nous ne pouvons cependant dire exactement quelle iniluence funeste peut avoir cet excès de sucre quand cet excès est prolongé. Tou- tefois nous pouvons considérer le diabète comme une intoxication chronique par le sucre; taudis que, dans la lésion du centre glycoso-formateur de la moelle allongée, l'empoisonnement par le sucre est la conséquence, et non la cause de la maladie. Quand le pancréas est atteint d'un cancer, alors il perd son pouvoir inhibiteur sur la formation du sucre, de sorte que la glycémie n'est que la conséquence de la maladie du pancréas. Ces deux exemples nous montrent deux maladies totalement différentes, mais qui ont toutes deux pour même résultat: un trouble dans la nutrition par le sucre. Nous avons donc all'aire à deux maladies distinctes, et le diabète peut être produit, tantôt par une maladie de l'encéphale, tantôt par une maladie du pancréas. Harley n'a pas tardé à se convaincre qu'après la ligature des uretères on ne trouvait dans le sang ni acétone, ni acide diacétique, ni alcool éthylique, si l'on n'avait pas injecté du sucre. Cela est vrai même dans le cas où l'on attend pour prendre du sang un temps suffisamment prolongé après la ligature des uretères. Ces expériences sont de la plus grande importance. Elles prouvent que, chez l'animal sain, la seule présence du sucre dans le sang amène un état du système nerveux très analogue au coma diabétique, avec même la formation d'acide acétique et d'acétone. D'après Harley, ces deux matières proviennent du sucre. L'opinion de Harley est confirmée par ce fait que les acides lévulosiques appartiennent à la même série que l'acide diacétique, et peuvent être facilement obtenus aux dépens de tous les hydrates de carbone vrais, mais non de l'albumine. 458 GLYCOGÈNE. Par exemple : H 0 H 0 I II I II H — C — C — C C Acide diacétique = acide acétoformique. I I 1 H HO II H 0 H H 0 I II I I II H — C — C — C — C — C Acide lévulique = acide acéto-propionique I III ^^ acide acétone-acétique. H H H 0 H Il faut, en tout cas, avouer qu'on n'a pas prouvé rigoureusement que, dans le diabète, l'acide oxybutyrique, l'acide diacétique et l'acétone provenaient des hydrates de carbone. D'après plusieurs savants très estimés, ces matières proviennent des graisses, opi- nion qui est aujourd'hui généralement reconnue exacte, et à laquelle je m'associe. On peut donc en conclure immédiatement que l'injection du sucre amène une destruc- tion delà graisse, comme c'est le cas dans le diabète. Mais, à mon avis, cette destruction de la graisse chez le diabétique est liée à la formation d» sucre. Le sucre injecté peut donc être considéré comme analogue à un poison à effet glycosurique. Une excitation du foie a lieu, qui provoque synergiquement une augmentation de la formation de l'urée. Comme le foie est un réservoir, non seulement d'hydrates de carbone, mais aussi d'albumine, on peut donc admettre que l'excitation nerveuse du foie a pour con- séquence une décharge à la fois de sucre et d'albumine. On suppose que la production considérable d'ammoniaque dans le diabète a sa cause dans sa combinaison avec l'acide oxybutyrique qui est toxique en tant qu'acide. Mais, comme, même après l'ingestion de grandes quantités de carbonate de sodium, l'excrétion de l'ammoniaque diminue, quoique restant toujours au-dessus de la normale, on pourrait bien supposer que le foie se trouve dans une activité plus intense, et que, par suite de cet état pathologique, sa fonction de transformation de l'ammoniaque est atteinte. Donc, comme le sucre ingéré augmente la formation du sucre avec une intensité inconnue, on ne peut pas conclure avec 0. Minkovv^ski que le sucre introduit n'a pas été entièrement oxydé. On a toutefois quelques données positives sur les processus d'oxydation du sucre chez les diabétiques. Tous les observateurs qui ont fait des expériences de respiration avec des diabé- tiques, sont d'accord avec C. Voit et Pettenkofer {Sitzungsber. (1er bayr. Akad., 1865, 224; Z. jB., ht, 380, 1867; Hermann's Handbuch der Physiologie, lxi, 225, 1881), qu'il n'y a pas de différence essentielle entre la quantité d'oxygène fixée par le diabétique et celle que fixe l'homme sain. Ces expériences de respiration ont été continuées par H. Léo {Zeitschr. fur Min. Med. XIX. Siippl, 101, 1891); Weintraud et Laves (Z. p. C, xix, 603, 1894); Laves (Z. p. C, XIX, 500, 1893); Stuves {Festschr. d. stâdt. Krankenhauses zu Fnmkfurt a. M., 1896; et aussi par Magnus-Levy {Zeitschr. f. klin. Med., lxvi, 83, 1895); Weintraud et Laves [lac. cit., 635) s'expriment ainsi : « Comme moyenne de quatre expériences, l'animal, tant qu'il était sain, consommait par minute, et par kilogramme du poids du corps, 13,35 ccm. de 0- et 12,35 ccm. de CO^; quand il fut rendu diabétique (par l'extirpation du pancréas), 13,41 ccm. de 0- et 12,24 ccm. de C0-. Ces valeurs moyennes correspondent presque exactement à celles que Regnault et Reiset ont trouvées pour de petits chiens. » H ne faut pas oublier que ces expériences ne duraient qu'un temps court et ont été faites dans des conditions défavorables. D'un autre côté, les mêmes savants, en observant un diabétique dans l'appareil respiratoire de Hoppe-Seyler (système J. Regxault), ont obtenu des valeurs très élevées pour la quantité d'oxygène consommé. « En effet, disent Wein- traud et Laves, les valeurs de 6,23, 6,16 et 5,74 ccm. de 0^ par kilogramme et par minute dans l'état de repos complet du corps sont très élevées et dépassent de beau- coup toutes les valeurs trouvées par la détermination directe de l'oxygène chez l'indi- vidu normal et adulte en repos dans les expériences récentes sur les échanges respira- CLYCOGÈNE. 459 toires. » [Katzknsteln {A. g. P., xlix, 330, 1891); Magnus-Levy [A. g. P., lu, 475, 1892; Lv, 7, 1893)] : « La valeur moyenne trouvée pour le diabétique (6,04 cm. de 0^ par minute et par kilogramme) dépasse le maximum observé par Katzenstein de plus de 29 p. 100 {loc. cîf.,613). » Magnus-Levy [Zeitschr, f. klin. Med., lvi, 87, 1905), se basant sur ses expériences de respiration, conclut : u Dans les cas graves, c'est seulement chez la femme mentionnée en y qu'on trouva un échange gazeux correspondant à peu près à celui d'une personne saine. Dans tous les autres cinq cas (sauf, bien entendu, le numéro y qui, vu les causes susdites, doit être exclu), la quantité d'oxygène con- sommée fut presque toujours élevée. » Il faut constater que cette élévation ne convient pas à Magnus-Levy, et il cherche à formuler des objections contre ce fait. Ces expériences m'intéressent particulièrement, parce que j'ai eu, dans mes expé- riences sur des chiens privés de pancréas, la forte impression d'un échange gazeux augmenté, ce qui suppose une plus forte consommation d'oxygène et rend le collapsus rapide plus compréhensible. Pour établir que la force d'oxydation de l'organisme diabétique n'est pas diminuée, on a fait remarquer que des molécules chimiques introduites dans cet organisme malade, même si elles sont difficilement oxydables, s'oxydent aussi bien que chez l'individu sain. De la formation d'acétone, d'acide acétylacétique et d'acide oxybutyrique, il ne faut pas, comme on le fait, conclure que la force d'oxydation de l'organisme diabétique est diminuée, tant qu'on ne connaît pas, par la détermination de la quantité absolue de l'oxygène consommé, la grandeur réelle de la masse oxydée. Si la substance oxydable est en trop grande quantité, la force normale d'oxydation peut devenir insuffisante. Car les diabétiques qui, après une nutrition exempte d'hydrate de carbone, voient cesser leur glycosurie, peuvent prendre pendant un certain nombre de jours de grandes quantités d'hydrate de carbone sans décharger du sucre. Mais le sucre pris excite peu à peu le diabète. Ces faits sont exposés d'une façon satisfaisante par Naunyn {loc. cit., 160). Il faut également mentionner ici l'observation importante de Bourchardat et Trousseau, KûLz, Zimmer, von Mering, Naunyn [loc. cit., 398) qu'un travail modéré et bien dirigé diminue chez le diabétique l'intensité de la glycosurie. Expérimentalement, on a bien démontré que, même dans le diabète pancréatique, le sucre est oxydé. Il paraît qu'il n'y a pas de différence notable avec ce qui se passe à l'état normal. Chauveau et Kaufmann (B. B., 1893; et C. R., 1893, cités d'après Naunyn, Dia- bètes, 92) ont trouvé qu'après l'extirpation du foie le sucre disparaissait aussi rapide- ment du sang des animaux sans pancréas que des animaux sains; la consommation du sucre dans les capillaires ne différait également pas de celle des animaux normaux. Kausch (A. P. P., xxxix) a obtenu les mêmes résultats avec des oiseaux. Après l'extir- pation du foie, le sucre disparaissait du sang des animaux sans pancréas aussi rapi- dement que chez ceux qui ont conservé le pancréas, et même dans le cas où l'on injecte aux premiers, après l'extirpation du foie, une quantité de sucre correspondant à ce qui leur manque alors en fait de glycogène. On ne peut cependant pas nier que le sucre contenu dans les liquides de l'orga- nisme est peu à peu nuisible à toutes les fonctions. Des blessures guérissent difficile- ment ou pas du tout; la force musculaire diminue; la puissance sexuelle s'éteint. On pourrait donc supposer que le travail chimique de la cellule qui préside à l'oxydation du sucre, dans les cas graves de diabète, est altéré d'une façon notable. Il ne s'agit malheureusement ici que d'hypothèses. Il n'y a pas de fait prouvant même la diminution de l'oxydation du sucre, et les multiples preuves de l'utilisation continue et visiblement non diminuée du sucre, même dans le diabète pancréatique, sont difficilement compa- tibles avec l'opinion de 0. Minkowski et A. Magnus-Levy, que le malade fortement diabétique n'utilise plus du sucre. Quelques-uns cherchent la troisième condition de la glycosurie dans ce fait que les reins laissent passer le sucre. Nous eu reparlerons plus loin d'une façon plus détaillée. Abordons maintenant l'étude des différentes sortes de diabète, ce qui nous permettra d'éclaircir les conditions des échanges moléculaires des hydrates de carbone. Je distingue quatre sortes de diabète : I. Diabète par excitation des nerfs; i60 GLYCOGÈNE. II. Diabète par extirpation des glandes; III. Diabète par empoisonnement; IV. Diabète physiologique. Comme le diabète de la première sorte est déjà étudié, je commence immédiatement l'étude du diabète II. Les diabètes occasionnés par l'extirpation des glandes. — J. von Mering et 0. MiNKOwsKi {Diabètes meUitus nach Pcnikreas-exstirpatlon, Leipzig, 1889) découvrirent, en 1889, le diabète pancréatique, c'est-à-dire une forte glycosurie après l'extipartion complète du pancréas. Extirpation partielle du pancréas. — Von Mering et 0. Minkowski pre'tendaient, dès le début, que l'extirpation amenait le diabète seulement dans le cas oii elle était complète. « Von Mering et moi, écrit Minkowski {Untersuchnnyen iXher den Diabètes mellilus, Leipzig, 1893, 26), avons dit qu'il n'y avait pas de diabète après des extirpations par- tielles du pancréas. Nous avons attribué une très haute importance à ce fait. » Mais il faut noter ici ce fait t)'és important qu'on a sans doute bien souvent fait des extirpations très étendues, donc presque complètes, du pancréas, sans qu'une trace de glycosurie ait lieu, mais assez souvent une glycosurie plus ou moins forte survenait. Malgré le nombre extrêmement grand des expériences, la cause de celte différence est inconnue encore aujourd'hui. 0. Minkowski a observé plus tard qu'une extirpation partielle du pancréas pouvait également amener une glycosurie. « En continuant ces expériences, dit Minkowski {Untersuchungen iiber den Diabètes mBllilus, 27, Leipzig, 1893), j'ai constaté que de petites parties de la glande restées dans la cavité abdominale ne suffisaient pas pour remplir intégralement la fonction du pancréas dont il s'agit ici, et que, même après l'extirpation partielle, une sécrétion plus ou moins forte du sucre dans l'urine pouvait avoir lieu. » Dans un autre passage 0. Minkowski {Untersuchunyen ùber den Diabètes mellilus, 27, 28, Leipzig, 1893) s'exprime encore plus nettement. « Dans 2 cas où les parties restées n'étaient que l/12''et 1/15"^ de l'organe, j'ai observé l'apparition d'un diabète sucré des plus graves, comme dans le cas de l'extirpation totale. Il était en effet douteux, d'après le résultat de l'étude anato- mique, que les parties de la glande qu'on avait laissées pouvaient fonctionner encore. » Minkowski généralement n'extirpe pas le pancréas dans une séance, mais dans plu- sieurs opérations plus ou moins séparées. Se basant là-dessus, il explique comment / faut comprendre d'après lui la glycosurie qui apparaît souvent, bien qu'une partie seu- lement du pancréas ait été extirpée. Minkowski explique le diabète qui survient après l'extirpation partielle du pancréas, par ce fait qu'en supprimant une partie de l'organe on supprime une fonction. Mais cette suppression a un effet très positif: le diabète. Minkowski ne suppose pas ici néces- sairement la suppression d'une action d'arrêt exercée par le pancréas, comme l'établit l'explication qu'il donne à un autre endroit de la glycosurie qui succède à l'extirpation partielle. En ce qui concerne les extirpations des parties du pancréas faites par lui dans diffé- rentes séances séparées, 0. Minkowski dit (A. P. P., xxxi, 26 et 31, 1903) : « La sécrétion passagère du sucre immédiatement après la première opération (sur le pancréas) est dans ces cas probablement causée par les lésions des parties non enle- vées du pancréas, lésions inévitables à la suite d'une intervention opératoire. On sait bien qu'on observe ces glycosuries passagères après toutes les opérations chirurgicales prolongées, mais elles semblent particulièrement fréquentes après les opérations faites sur le pancréas ou dans sa proximité. (C'est moi qui ai souligné : PflCger.) Après des opérations analogues (résections partielles, transplantations, ligatures des conduits excréteurs, etc.) et, dans un cas, après la faradisation du canal cholédoque près du pancréas, en tout dans 32 cas, j'ai trouvé jusqu'à quinze fois du sucre passagèrement dans l'urine, et dans quel- ques cas même en proportion considérable jusqu'à 4-") p. 100 (Voir expér., 14 et 15). <( Dans trois autres cas, où l'on avait laissé à peu près 1/18-1/12 de la glande, on cons- tata une espèce de glycosurie alimentaire qu'on peut considérer comme la forme la plus légère du diabète. » Cela prouve que 0. Minkowski explique la glycosurie qui survient après l'extirpation GLYCOGÈNE. 461 partielle du pancréas, non par la disparition d'une fonction du pancréas, mais par l'exci- tation des nerfs du pancréas, donc par un travail très positif. Les autres savants dont le nom fait autorité dans cette question, E. Hédon et J. Thiroloix, se sont joints à cette opinion. Je me joins également à cette conception', parce que c'est elle qui rend le mieux compte de tous les phénomènes multiples. Pourtant j'avoue qu'il n'y a pas encore une preuve irréfutable de cette théorie. Mais mon accord avec 0. Minkowski prend fin, quand il s'agit de la vraie nature de ce diabète nécrogène. Toutes les opérations chirurgicales prolongées, qui atteignent un organe quelconque, amènent une glycosurie, comme c'est le cas pour la résection par- tielle du pancréas, tandis que c'est seulement l'extirpation totale du pancréas qui pro- duit le diabète. Comme l'opinion de Minkowski a une grande importance pour l'enten- dement du diabète expérimental du pancréas, j'ai jugé nécessaire de faire là-dessus une étude détaillée. J'ai prouvé avec mes collaborateurs, 0. Schondorff et F. Wenzel(A. g. P., cv, 121, 1904-), que l'opinion de Minkowski était erronée. Cette erreur est sans doute basée sur l'augmentation des substances réductrices de l'urine, augmentation amenée très sou- vent par des interventions chirurgicales, et qui ne peut être prouvée d'une façon décisive que par l'essai de Trommer, bien qu'il n'y ait pas de sucre. Dans ces cas j'ai toujours démontré avec le polarimètre que l'urine ne contenait pas de matières polarisantes, mais seulement de faibles quantités de substances lévogyres, qui donnaient, dans un tube d'une longueur de 189,7 mm., une déviation de — 0°1, jusqu'à — 0°o. Ces urines, analy- sées par le réactif de Worm-MCller, essai qui est le seul décisif, ne contenaient pas de sucre. Pour bien nous assurer du résultat, nous avons soumis à une étude appro- fondie les méthodes de la recherche qualitative du sucre dans l'urine. On a constaté que l'essai de Trommer donnait de trompeurs résultats, que le procédé, si vanté, de Hammars- ten-Nylander était complètement inutilisable, et que l'essai de la fermentation pouvait donner lieu aux erreurs les plus grossières. Voilà pourquoi toutes les données cliniques qui parlent de l'apparition des glyco- suries sont incertaines tant qu'il ne s'agit que de réactions qualitatives. Dans les cas où l'on a trouvé par la solution de Fehling des quantités de sucre qui dépassent 1 p. 100, on peut en général considérer la présence du sucre comme prouvée. Car je ne connais pas un cas où les matières réductrices de l'urine, qui ne sont pas du sucre, se trouvent, exception faite des cas oil il y a élimination de certains médicaments, en quantité assez grande pour qu'on puisse croire à un volume de sucre supérieur à 1 p. 100. La sûreté de la diagnose est fortifiée si elle est en même temps confirmée par l'analyse polarimétrique et la fermentation. 11 était évident que le dogme clinique de la glycosurie traumatique ne pouvait être réfuté victorieusement que par de très vastes expériences. Grâce à l'obligeance des directeurs de toutes les cliniques chirurgicales et gynécologiques de Bonn, et par l'in- termédiaire de notre collaborateur, médecin chef de la section chirurgicale de l'Hôpital Sainte-Marie, Frédéric Wenzel, nous avons analysé, dans l'été et dans l'automne de l'année 1904, l'urine de tous les opérés jusqu'aux cinquième et sixième jours après l'opé- ration, et dans aucun cas nous n'avons pu trouver de glycosurie consécutive à l'inter- vention chirurgicale, si elle n'existait pas déjà précédemment. Le classement suivant [A. g. P., cv, loo, 1904) pemiet à chacun de se faire une idée de l'étendue des résultats que nous avons obtenus et dont on pourra contrôler l'exactitude en recourant à notre mémoire original. 1. — opérations On a observé 144 cas d'opérations, parmi lesquelles 15 lésions, dont 10 graves : fi-ac- ture de la base du crâne, fracture de l'avant-bras, luxation de la clavicule, luxation du coude, fracture du bassin, hernie crurale, graves lésions des poignets (2 fois), fracture des jambes (2 fois). Les autres 129 cas concernent les opérations chirurgicales les plus diverses. Ils se divisent ainsi pour les différentes régions du corps : 1. Tête : 12 cas, dont 8 trépanations de l'apophyse mastoïde. 4 opérations sur parties molles. 462 GLYCOGENE. 2. Cou : 11 cas, dont 2 strumectomies. 5 extirpations de lymphômes. 1 ligature de la carotide. 3 autres opérations. 3. Poitrine : 7 cas, dont 4 opérations sur mamelles (dont 10 amputations). 2 opérations costales. 1 opération dans le creux axillaire. 4. Ventre (laparotomies) : 25 cas, dont 4 pour l'estomac (gastro-entéro-anastomoses). 4 pour l'intestin. 3 pour la vésicule de la bile (cholécystectomiesi. 1 pour le pancréas. 10 pour les organes génitaux internes de la femme 1 laparocèle. 2 laparotomies d'essai. 5. Région inguinale : 23 cas, dont 15 opérations radicales de hernies. 5 opérations d'ALEXANDER Adams. 2 tumeurs des glandes. 5. Testicules : 2 cas, dont 1 castration. 7. Périnée : 5 cas. 8. Rectum : 2 cas, dont i résection. 9. Colonne vertébrale : i cas (trépanation). 10. Extrémités : 37 cas, dont 10 résections d'articulations. 7 opérations sur les os (5 amputations). 4 opérations sur tendons. 18 opérations sur parties molles. 2. — NARCOSES On a fait usage de différentes sortes de narcoses, à savoir : 1. Anesthésie locale : a) Méthode de Schleich (cocaïne) 2 cas. 6) Cocaïne-eucaïne 6 — c) Cocaïne-eucaïne avec addition d'adrénaline 2 — 2. Anesthésie lombaire [à' auprès Bier), (cocaïne 0,02 ; paranèphrine 0,5). H — 3. Narcoses générales : a) Éther 27 cas. b) Chloroforme 20 — c) Éther-chloroforme 6 — d) Morphine-éther 48 ^ ^ e) Morphine-chloroforme 2 — f) Morphine-éther-chloroforme 9 — 4. Hydrate de chloral 1 — 5. l'as de narcose 7 — En ce qui concerne la quantité des narcotiques employés, on a employé dans la narcose chloroformique plus de 50,0 grammes dans sept cas; la plus grande quantité a été de 75,0 grammes. Les quantités d'éther employé ont été : Dans 9 cas 150,0 gr. — 20 — 200,0 gr. et au-dessus. — 3— 250,0 gr. — 4 — 300,0 gr. La durée de la narcose a été : Dans 19 cas 1 heure. — 11 — 1-2 heures. — 9 — 2 heures et au-dessus. La durée la plus longue a été de 24 heures 1/2. Le résultat de toute cette étude est donc que l'inlervention chirurgicale n'a pas GLYCOGÈNE. 463 amené de glycosurie, malgré l'emploi de la narcose. Nous ne doutons cependant pas que des lésions qui ont pour effet l'excitation du centre cérébral glycoso-formateur peuvent amener une {jjlycosurie. Dans nos 15 cas de lésions, dont 10 étaient graves (par exemple fracture de la base du crâne, fracture du bras, fracture du bassin, fracture de la cuisse, etc.), nous n'avons pu trouver de glycosurie. La narcose, même si elle durait très longtemps, jusqu'à 24 heures 1/2, n'a générale- ment pas donné lieu à une glycosurie. Nous n'avons qu'à mentionner comme exception le cas 8, où l'on s'était servi de cocaïne-eucaïne et d'adrénaline pour anesthésie locale, et où l'on constata une sécrétion de 0,3 p. 100 de sucre. Comme il n'y avait pas de sécré- tion de sucre après l'emploi de cocaïne-eucaïne seulement, et que, d'après les études de F. Blum {Deutsch. Arch. f. klin. Med., lxxi, 1901. A. g. P., xc, 617, 1902), de A. C. Crok- TAN {A. g. P., xc, 28o, 1902) et de Herter et Wackemann {Americ. Journ. ofthe med. Science, janvier 1903, Réf. m Centralblatt f. innere Med., 1903, 15), une injection d'adrénaline produit la glycosurie, il faut dans ce cas rendre responsable, non l'intervention chirur- gicale (qui était ici très légère : extirpation d'un tatouage, et transplantation de Thiersh), mais l'adrénaline. Les faits susdits prouvent que, contrairement à l'opinion de Minkowski, les glycosuries survenant après lésion ou résection partielle du pancréas doivent avoir leur cause dans les fonctions spécifiques de cet organe; car d'analogues interventions chirurgicales, subie par différents organes du corps, ne produisent pas de glycosurie. Avec cela une autre question très importante trouve sa solution. D'après Enrico Reale {X. internat, med. Congr., Berlin, 1890, ii, V, 97; De ReiNzi et Reale, Berliner klin. Wochenschr., 1892, N° 23), l'extirpation des glandes salivaires produit également une gly- cosurie. 0. Minkowski (Urt^ers. ù. d. Diabètes mellitus, 57, Leipzig, 1893) a répété chez un chien les importantes expériences de Reale. 4 fois Minkowski trouva la glycosurie. Une fois seule- ment la glycosurie ne se produisit pas après l'extirpation des glandes salivaires. D'après Minkowski, la glycosurie apparaît généralement après l'extirpation des glandes sali- vaires, même si l'extirpation n'est pas complète. Minkowski trouva ainsi une glyco- surie, bien qu'il n'eût fait qu'à gauche l'extirpation de la parotide, de la sous-maxillaire et de la sublinguale. Dans un cas la glycosurie dura même deux jours. Voilà comment Minkowski conçoit la glycosurie survenant après l'extirpation des glandes salivaires (0. Minkowski Unters. ii. d. Diabètes mellitus. Sonderabdr., 59, 1893) : « Il s'agit évidemment d'une de ces glycosuries passagères, comme on en observe chez des hommes et chez des animaux après les diverses interventions chirurgicales, et qui ne sont guère comparables au long et intense diabète qui survient après l'extirpa- tion du paucréas. La longue durée de la narcose, la lésion inévitable de nombreux nerfs peuvent expliquer le fait que ces glycosuries surviennent assez fréquemment après opérations sur ces glandes salivaires. » Comme j'ai prouvé, avec mes collaborateurs, que le fait d'une opération chirurgicale ne produisait pas de glycosurie, il faut donc conclure que les glandes salivaires delà bouche et leurs nerfs ont également une relation spécifique avec les échanges des hydrates de carbone. Quelle est la nature de cette relation? Est-elle la même que celle du pancréas avec la glycosurie? On ne peut pas le décider au premier abord. 11 faut encore faire remarquer combien les faits se rattachant à cette question, et observés par les différents savants, se contredisent. En 1862, donc avant Reale et Minkowski, Fehr {Uber die Exstirpation sâinmtl. Speicheldrùsen beim Hunde. Inaug.-Dis- sert. (jiessen, 1862) a, dans le laboratoire de C. Eckhard, fait l'extirpation de toutes les huit glandes salivaires chez le chien. Fehr dit expressément que les recherches du sucre et des autres éléments anormaux dans l'urine ont donné des résultats négatifs. Cela ne peut s'expliquer que par ce fait que C. Eckhard, qui est lui-même un observateur très consciencieux, n'a pas suffisamment surveillé son élève Fehr. Comme Fehr dit que les chiens opérés par lui absorbaient plus d'eau, nous voyons donc que la soif de ces chiens a été augmentée, ce qui est probablement la conséquence de l'état diabétique. Il faut enfin citer ici la découverte faite par Falkenberg {Zur Exstirpation der Schild- drùse. Verhandl. des X. Congr. f. inn. Med., Wiesbaden, 1891, 502) et Kulz, à savoir que l'extirpation delà glande thyroïde amène, chez des chiens, assez fréquemment, sinon 464 GLYCOGENE. constamment, des glycosuries qui^durent parfois assez longtemps (18 à 14 jours), même jusqu'au moment de la mort, comme dans le diabète pancréatique. Cette recherche détaillée, faite par E. KuLz,n'a pas suscité l'attention qu'elle mérite. L'extirpation complète de la glande thyroïde produit une série de graves accidents, mortels, qu'on désigne sous le nom de Cachexia strumipriva. Comme il y a bien sou- vent beaucoup de glandes thyroïdes secondaires, dont le nombre et la position sont irréguliers, on comprend que parfois on ne peut pas faire avec certitude l'extirpation complète, de sorte que les résultats obtenus par les différents expérimentateurs ne sont pas toujours identiques. W. F'alke.nberg et E. Kùlz ont expérimenté avec 20 chiens. Chez 13 de ces chiens on trouva du sucre dans l'urine. On a constaté ce phénomène curieux chez H chiens (sur 16 qui sont morts, donc presque chez 70 p. 100), et chez 2 sur 4 qui ont survécu. Le sucre n'apparaissait pas rapidement dans l'urine, mais au bout d'un temps de longueur difTérente; chez un chien, ce fut trois semaines après l'opéra- tion. Il y eut des cas où rien n'était régulier : tantôt il y avait du sucre, tantôt le sucre manquait. Dans les cas mortels le diabète durait jusqu'à la mort, sauf en un cas où le sucre a disparu de rurine avant la mort (Falkenberg, toc. cit., 508, 1891) : particu- larité qui a été observée également dans le diabète pancréatique. On voit donc que ce n'est pas après opérations sur le seul pancréas qu'on voit des glycosuries consécutives à une intervention. Les glandes salivaires et les glandes thy- roïdes possèdent la même propriété. Mes études ont démontré que ces glycosuries ont pour cause une fonction spécifique de ces organes, et qu'il ne faut pas les con- sidérer, ainsi que le croyait Minkowski, comme des réactions traumatiques. Nous comprendrons mieux le diabète pancréatique, si nous analysons un peu les faits qui se produisent à la suite d'une extirpation partielle. Il s'agit là d'un paradoxe extraoïdinaire dont l'explication nous fournira une concep- tion plus nette du diabète. Tandis qu'on a fait des extirpations partielles très étendues qui n'ont pas donné trace de glycosurie, il est non moins certain, et même relaté par 0. Minkowski, comme nous l'avons déjà dit plus haut, qu'on a bien souvent observé un diahète aigu, quoiqu'on n'eût pas fait d'extirpation totale. De Renzi et Reale relatent également ce fait. De Renzi et Reale {(Jber den Diabet. mellit. nach Exstirp. d. Pancréas. Berl. klin. Wochenschr. ,1892, 23. — Maly's Jahresbericht., xxii, 5lo) ont extirpé tout le pancréas, sauf 1 - de la glande, qui fut conservé, et ils ont pu constater cependant un diabète aigu. A o l'autopsie on a étudié microscopiquement ce résidu, qui pesait 2 grammes, et on l'a trouvé histologiquement normal. Il digérait également l'amidon et la fibrine. Il n'est donc pas légitime de le considérer comme incapable de fonctionner. J. Thiroloix {Dia- bète pancréatique, 95, 1892), qui, par ses nombreuses expériences de l'extirpation du pancréas, s'est acquis beaucoup de mérite, observa un diabète pancréatique aigu, dans un cas où il ne s'agissait pas d'une extirpation totale, et bien qu'une moitié de l'or- gane fût restée dans l'abdomen. Quant au cas contraire, où des extirpations partielles très étendues n'ont pas donné trace de glycosurie, je peux en parler d'après ma propre expérience. Mon collègue Oscar Witzel a, sur ma demande, fait à l'Institut physiologique de Bonn, chez beau- coup de chiens, l'extirpation totale du pancréas, qui fut immédiatement suivie de gly- cosurie. Quand il a de nouveau fait l'extirpation, comme si l'on devait enlever tout le pancréas, mais qu'il laissa dans l'abdomen la partie du pancréas qui va du conduit de WiRsuNG en arrière vers le bassin, il n'y avait pas trace de glycosurie, bien que le con- duit excréteur de la glande eût été réséqué. J'ai moi-même étudié constamment l'urine pour voir si l'on y trouvait du sucre. Dans ces expériences on a fait, comme on doit le faire dans l'extirpation totale, la partie la plus difficile de l'opération avec la plus grande précision sans voir apparaître la plus petite trace de glycosurie. On avait pour- tant enlevé la plus grande partie du pancréas. V. Mering et 0. Minkowski ont évidem- ment obtenu les mêmes résultats au début de leurs recherches, et beaucoup d'autres observateurs relatent la même chose. Est-ce que ce sont des parties déterminées du pancréas dont la résection produit plus facilement la glycosurie? V. Mering et 0. Minkowski (Diabet. mellit. nach Exstir- GLYCOGÈNE. 465 pation des Pankreas, Leipzig, 12, 1889) disent : « Nous avons fait des extirpations par- tielles de manière à respecter dans cliaque cas une partie différente du pancréas. Les lésions secondaires, qui pourraient avoir une importance ici, devaient finalement se faire remarquer dans l'une ou dans l'autre de ces expériences. Malgré tout, nous n'avons jamais observé une sécrétion de sucre dans l'urine, durable ou passagère, pas même à l'état de trace. » J. Thiroloix, qui extirpait généralement le pancréas, non en une, mais en plusieurs séances, a presque toujours enlevé dans la première opération la partie duodétiale (c'est- à-dire la partie située derrière le Ductus Wirsungii), et réséqué le Ductiis Wirsimgii et VAccessorius. Généralement une glycosurie apparaît, qui dure plusieurs jours. Il a fait l'analyse quantitative du sucre : il a donc donné une preuve certaine de la présence du sucre. Je donne ici un aperçu sommaire des expériences les plus importantes de Thiroloix. l""*^ Expérience. Thiroloix [Diabète pancréatique, 1892, 30). Ligature des conduits excréteurs et isolement du pancréas d'avec le duodénum sur une longueur de 3 cm. chez un chien. Légère glycosurie de 24 heures. 2" Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 32). Ligature des conduits excréteurs; résection de la pars duodenalis du pancréas. Glycosurie de AS heures avec 4,85 p. 100 de sucre au début. 21^ Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 62). Résection de toute la pars duodenalis avec les conduits sur une longueur d'environ 9 cm. Il s'ensuit une glycosurie qui dure 5 jours avec 0,2 à 3 p. 100 de sucre. 23^ Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 68). Résection des conduits et enlèvement de la pars duodenalis du pancréas. Glycosurie de 4 jours avec un maximum de 4 p. 100 de sucre. Expérience de M. Rkmond [Gaz. des Hôpitaux, 1890, p. 777). Résection de la pars duo- denalis du pancréas avec glycosurie de 48 heures. Thiroloix a fait également un grand nombre d'extirpations, de telle manière que non seulement il réséquait dans la première opération la pars duodenalis et les conduits du pancréas, mais qu'il en amenait l'atrophie par l'injection de particules de charbon mêlées à de l'huile et de la paraffine; et il ne survenait pas de diabète. 4*= Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 44). Injection de vaseline, qui contient de la poussière de charbon, dans le Ductus Wirsungii, de sorte que le pancréas devient tout noir et s'atrophie ensuite. Cette injection ne produit pas de glycosurie. On avait réséqué les conduits. 5* Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 44). Injection d'huile de charbon. Résection des conduits et de la pars duodenalis. Glycosurie 2 jours. 6*= Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 46). Gomme la o" expérience. 9° Expérience. TniROLQw [loc. cit., p. 51). Conditions d'expérience comme dans l'ex- périence n° 5. Glycosurie 2 jours, avec 3,2 et jusqu'à 4,9 p. 100 de sucre. 7« Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 47). Injection d'huile de charbon. Pars duodena- lis non réséquée. Pas de glycosurie. 8® Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 48). Comme l'expérience précédente. 17« Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 56). Injection d'huile de charbon. Résection des conduits et de la pars duodenalis du pancréas. Glycosurie en deux fois 24 heures. 20« Expérience. Thiroloix [loc. cit., p. 61). Injection d'huile de charbon. Résection de la partie verticale du duodénum. Glycosurie 3 jours. 15' et 18» Expériences. Thiroloix [loc. cit., p. 54 et p. 56). Injection de mercure. Résection des conduits et de la pars duodenalis. Pas de glycosurie. i6^ Expérience. Mêmes conditions que .précédemment. Résection des conduits et de la pars duodenalis. Glycosurie. Ce sont 16 expériences qui nous donnent des notions très importantes sur les suites de la résection de la pars duodenalis du pancréas. On désigne sous le nom de pars duode- nalis la partie du pancréas située entre les feuillets du péritoine, à gauche du duodénum, et qui va du conduit de Wirsung en arrière vers le bassin. La terminologie anatomique des différentes parties du pancréas vai-ie malheureusement chez les divers auteurs, de sorte que la partie en question n'est pas toujours désignée exactement. Cela ne s'ap- DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VU. 30 466 GLYCOGÈNE. plique pas aux expériences 4,7 et 8 qui sont des expériences de contrôle, car on a réséqué seulement les conduits, et non la pars duodenalis. Il reste donc 13 expériences. Dans 11 de ces expériences l'extirpation de la pars duodenalis et des conduits a produit une glycosurie qui durait généralement plusieurs jours. W. Sandmeyer {Die Folgen der partiellen Pancreasexstirpation beim Hund. Z. B., xxxi, 74 et 8o, 1894) a confirmé et complété les résultats de Thiroloix. Il a extirpé chez un chien de 15'"'', 27 un morceau du pancréas d'une longueur de 23 centimètres, mais il a laissé dans l'abdomen la partie libre de la portion duodénale, d'une longueur de 12 centimètres. Pendant les deux premiers jours qui ont suivi l'opération, le chien a sécrété jusqu'à 12 grammes de sucre. Il se produisit ensuite une glycosurie légère qui dura plusieurs semaines et enfin disparut. Thiroloix cite également des expériences où l'extirpation non seulement de la partie duodénale, mais de la partie gastro-splénique, eut pour effet de la glycosurie. Cepen- dant il s'agit ici d'animaux dont le pancréas fut atrophié par l'injection de poussière de charbon, sans que cependant le diabète fût survenu. La 6« expérience de Thiroloix {Ioc. cit., p. 46) concerne trois laparotomies faites chez le même chien les 5 juin, 7 juillet, 14 septembre. La première fois on a extirpé la partie verticale, la seconde fois une partie de la partie splénique atrophiée, la troisième fois plusieurs fragments de la partie duodéno-stomacale. Chaque fois l'extirpation partielle fut suivie d'une glycosurie qui dura de un jour et demi à deux jours, mais qui fut passagère. La 9"^ expérience de Thiroloix relate la même chose. Citons également l'expérience importante de Thiroloix (/oc. CïY.,p.62) qu'une chienne dont le pancréas était réséqué à deux endroits eut une glycosurie qui dura jusqu'à la mort. La mort se produisit dans le cours de la 6*^ journée après l'opéi'ation. Très instructif est ce cas [Ioc. cit., p. 62), relaté par Thiroloix : Chien de 13''^,34. Résection du canal de Wirsung et injection de poussière de charbon dans la glande le 14 mai. Pas de glycosurie jusqu'au 2 juillet. 2 juillet. — Seconde laparotomie, avec résection d'une partie du pancréas située dans la région du canal de Wirsung. Il s'ensuit une forte glycosurie qui dure 58 heures et disparaît ensuite. 5 juillet. — Troisième laparotomie. Résection d'un fragment de la portion splénique du pancréas d'une longueur de 2,5 centimètres. Il s'ensuit une forte glycosurie, qui dure jusqu'au iS juillet, donc 2 semaines. La glycosurie disparaît alors; l'animal reprend ses forces : il est tué le 16 septembre, sans avoir eu de glycosurie pendant 2 mois, même lorsque on l'a nourri avec du sucre. La 5^ expérience de Thiroloix {Ioc. cit., p. 44) confirme l'expérience précédente : i^^' juin. — Résection de la portion verticale et des conduits avec injection de pous- sière de charbon. Glycosurie de 48 heures. Le 2 septembre résection de 2 centimètres dans la région de la tête du pancréas. Glycosurie de 48 heures. Tué le 24 septembre. Reste du pancréas == 1/24 du poids normal. Il faut encore mentionner : 6"= expérience de Thiroloix {Ioc. cit., p. 46), Vi juin. — Résection de la portion verticale avec injection de poussière de charbon. Glycosurie de 10 heures. 1 juillet. — Laparotomie II. 3 résections dans la partie duodéno-stomacale. Glyco- surie de plusieurs jours. Ces expériences prouvent que la résection d'une partie quelconque du pancréas produit une glycosurie qui, suivant les circonstances, dure un temps court ou plus long, c'est-à-dire dure un certain nombre de jours, et même de semaines, pour disparaître ensuite. Ces faits sont très précieusement complétés par les recherches de E. IIédon {Travaux de Physioloyie, p. 1-150), qui a fait plus de 200 extirpations du pancréas, et qui a publié ses résultats les plus importants dans une grande monographie. E. HÉDON {Travaux de Physiologie, p. 37 et 70, Octave Doin, Paris, 1898), qui est un GLYCOGENE. ^(57 partisan convaincu des doctrines de Minkowski, avoue que la résection partielle du pan- créas peut produire une glycosurie passagère peu de temps après l'intervention chirurgicale. Le résultat le plus important des nombreuses recherches de E. Hkdon est que l'extir- pation presque complète, mais non absolument complète, du pancréas produit une forme légère du diabète qui peut durer plusieurs jours, mais qui est fortement influencé dans son intensité par le mode et la quantité de la nourriture que l'on donne. La limite d'assimilation pour les hydrates de carbone est plus ou moins notablement abaissée. Si l'on laisse dans l'abdomen des chiens de grandeur moyenne (8-16 kilogrammes) des fragments de pancréas de la grandeur d'un pois, c'est souvent assez pour que le diabète produit soit d'intensité diminuée {Travaux, p. 34, 40, 41, 43. 1898). Il faut citer ici également les expériences de Sandiieyer [Die Folgen dev Pancréas exstirpation beim Hund. Z. B., ix, 26, 1892 et xxxi, 12, 1894). Il constatait que des chiens, auxquels on extirpait une partie du pancréas, n'avaient pas de glycosurie après l'opération, mais jque la glycosurie survenait quelques semaines plus tard. Elle est d'abord faible, mais croît de mois en mois, et devient finalement un fort diabète. Je peux le confirmer jusqu'à un certain point par les deux expériences suivantes : Mon collègue 0. Witzel extirpe le 14 septembre, chez un chien de 12 kilogrammes, tout le pancréas avec les conduits, mais sans la partie duodénale. — Pas de glycosurie. — 16 septembre, essai par la méthode de Worm-Muller, négatif. Polarisation 0,0. — Il septembre, le chien n'a pas uriné. — 18 septembre, l'urine contient de l'albumine. — l^"" octobre, l'essai par la méthode de ^YoRM-MuLLER est positif, et le polarimètre indique 0,15 p. 100 de sucre. Le sucre éliminé varie dans les 4 semaines^ qui suivent entre 0,1 à 0,3 p. 100, et sa quantité quotidienne est à peu près de 1 à 2 grammes. 0. Witzel a fait le 19 septembre, chez un second chien de 10 kilogrammes, la même extirpation partielle, comme dans l'expérience précédente. Pas de glycosurie. Un léger diabète commence le 5 octobre, et varie pendant 4 semaines de 0,1 à 0,4 p. 100 avec une sécrétion quotidienne de 1 à 2 grammes. Voici la conclusion qui se dégage des faits communiqués : Des interventions chirurgicales qui. atteignent une partie quelconque du pancréas pro- duisent, dans certaines conditions, une glycosurie de durée et d'intensité variables. Il n'est donc pas douteux que toute partie du pancréas peut f/ans cernâmes conditions augmenter les proportions du sucre dans le corps, donc avoir un effet glycosurique. Les recherches actuelles ont donc prouvé que le résultat variable de l'intervention chirurgicale n'est nullement fondé sur les propriétés différentes des diverses parties du pancréas. 11 faut donc chercher l'explication dans la méthode opératoire. Très instructive est à ce point de vue la méthode de Thiroloix, avec laquelle l'extir- pation partielle produit presque toujours une glycosurie. Il dit lui-même {Diabète pan- créatique, p. 63, 1892) : « Les résultats qu'avaient produits nos interventions opératoires sur le pancréas étaient tels que nous ne pouvions sûrement pas les attendre en prenant en considération ce que relataient les savants qui avant nous faisaient des recherches sur le pancréas. Tous ou presque tous sont d'avis que l'extirpation partielle, surtout l'en- lèvement de la partie verticale du pancréas, ne p^^oduit jamais de glycosurie. » Si la dernièrejphrase est un peu trop absolue, ce qui est prouvé par ce qui a été dit précédemment au sujet des glycosuries produites par des extirpations partielles, il reste quand même vrai que pour Thiroloix la glycosurie consécutive est la règle, pour tous les autres savants l'exception. On peut donc conclure que les méthodes d'expérimenta- tion de Thiroloix diffèrent plus ou moins de celles des autres savants. Thiroloix {loc. cil., p. 72) se sert parfois des ongles pour séparer le mésentère du pancréas. Si une^ artère s'y déchire et saigne, il pince le vaisseau avec la pincette et lie. Il manque malheureusement dans l'ouvrage de Thiroloix une description plus détaillée de ses méthodes d'opération. E. Hédon {Travaux de physiologie, p. 15, 1898), témoin oculaire defl'extirpation du pancréas par Thiroloix, donne une description et une cri- tique de la méthode. Cette méthode consiste à prendre entre les doigts la portion gastro- spléniqueidc la glande et à V arracher d'un trait continu; de cette façon les vaisseaux san- guins sont tiraillés avant qu'ils ne se déchirent, de sorte que Vhémostase est assurée; on fait la même chose avec la partie descendante de la glande. Comme, dans cette méthode. 468 GLYCOGÈNE. avec les vaisseaux sanguins les nerfs qui les accompagnent sont également déchirés, il est certain qu'une excitation plus grande et plus longue est exercée que si l'on opère la ligature des vaisseaux sanguins et que l'on sépare les nerfs par une incision momen- tanée. C'est un point qui nous fait comprendre le grand effet des résections partielles ■du pancréas faites par Thiroloix. On pourrait trouver une autre cause de cet effet dans la façon dont Thiroloix narco- tisait les chiens. Schiff a, comme on sait, trouvé que la piqûre du bulbe était sans effet si l'animal était narcotisé. Peut-être que, dans cet état, même la lésion des nerfs du ^pancréas n'aurait pas d'effet, l'excitation manquant. Thiroloix ne dit malheureusement pas dans son ouvrage quelles méthodes de narcotisation il employait. Les récentes recherches de Hugo Luthje {Mùnchener med. Wochenschr., 1902, 1601. — Id., Deutsch. Arch. f. klin. Med.. xix, 498, 1904; lxxx, 98, 1904. — Id., A. g. P., cvi, 160, 1905) confirment la conception exposée. Dans des extirpations soi-disant totales il obtenait, lui aussi, du diabète, mais ce diabète disparaissait complètement si l'on privait l'animal de nourriture. Comme ce n'est pas le cas, ainsi que je l'ai prouvé dans une recherche ultérieure, après une réelle extirpation totale, j'ai demandé des rensei- gnements à Luthje, et j'ai appris qu'il ne fallait pas prendre strict issimo sensu le mot extirpation totale employé par lui. Après l'examen microscopique on a trouvé des résidus du pancréas reposant sur le duodénum. On a fait l'extirpation de telle sorte que les lobules glandulaires plus difficiles à enlever, et adhérents au duodénum, et aux vaisseaux sanguins, fussent brûlés avec le thermo-cautère. L'excitation des nerfs pro- duite par l'eschare gangreneuse est sûrement très grande, mais ne garantit pas quand même la destruction absolue de toutes les cellules glandulaires. Le diabète se produisant après cette intervention était, surtout si l'on donnait de la nourriture, d'une intensité extrême. Mais le fait de ce diabète qui survenait après l'opération, même si l'on privait l'animal d'alimenls, et qui disparaissait peu à peu, doit avoir sa cause dans ce que la forte excitation des nerfs diminuait peu à peu, que quelques lobules glandulaires bles- sés se fortifiaient de nouveau et exerçaient leur activité entravant la glyc(»surie. La soif et la faim intenses des animaux opérés par Luthje prouvent l'excitation extraordinaire du système nerveux, qui provient probablement des Iraumatismes de l'abdomen. La disparition temporaire de la glycosurie nous prouve ici également d'une façon irréfutable que des résidus infiniment petits de tissu du pancréas échappés à l'extirpation totale, peuvent encore exercer une influence très grande sur la sécrétion du sucre. Ces expériences me semblent confirmer une expérience d'OscAR Witzel, dans laquelle il a fait l'extirpation partielle du pancréas de telle sorte que la partie postérieure du pancréas allant du conduit de Wirsung au bassin fût seule laissée dans l'abdomen. Tandis que, dans d'autres extirpations partielles, faites par le même chirurgien, il n'y avait pas trace de glycosurie, il y eut dans ce cas un diabète nettement prononcé, et de longue durée, mais qui disparut finalement. Après la laparotomie on constata que l'animal (une chienne) avait eu une péritonite, laquelle avait déterminé beaucoup de solides adhérences ayant rendu l'opération très difficile. C'est la forte excitation très étendue, nécessaire pour dissoudre les adhésions, qui a sans doute produit la glycosurie. J'ai décrit ce cas d'une façon plus détaillée (E. Pfluger, A. g. P., cviii, 166, 1905). On observe les mêmes résultats après l'extirpation du pancréas chez les grenouilles et les oiseaux. Minrowsri {A. P. P., xxxi, 10 du tiré à part) n'a pas pu produire de diabète chez des grenouilles par l'extirpation tolale du pancréas. Il opérait sur six grenouilles Cette description prouve, que, non seulement d'après Sandmeyer et moi, mais aussi d'après Paul Schulz et Georg Zulzer, les extirpations faites par Minkowski n'étaient pas totales dans le sens absolu du mot. Comme je l'ai dit plus haut, la non-totalité des extirpations soi-disant totales faites par Minkowski chez les oiseaux a été prouvée par Kausch. Les recherches les plus fructueuses entreprises en ces dernières années sur le dia- bète pancréatique sont dues à Lûthje, qui était assisté du distingué professeur de chi- rurgie KiJTTNER. LuTHJE regardait ces opérations comme des extirpations totales, et elles furent évidemment considérées comme telles par lui et Kùttner. Mais l'examen microscopique ultérieur prouva que l'extirpation n'avait pas été totale ; car on trouvait des restes du tissu du pancréas sur le duodénum. Pourtant ces résidus minimes ont suffi pour rendre la glycosurie temporaire et pour prolonger exlraordinairement la vie du chien. Ll;thje, en croyant avoir un animal sans pancréas, a donc eu devant lui en somme le diabète de Sandmeyer, et il doit ses succès à cette circonstance non voulue. Il est donc prouvé que beaucoup d'extirpations totales décrites par les spécialistes n'étaient pas totales dans le sens absolu du mot. Paul Schulz et Georg ZClzer croient avoir fourni dans leur communication provi- soire la preuve qu'ils savent extirper totalement le pancréas, parce qu'ils n'ont pas une fois observé, après 28 extirpations totales, la polydipsie, la polyphagie, la polyurie. Ils savent fort bien, toutefois, que très souvent, après des extirpations partielles, la glyco- surie est légère ou nulle, sans polyphagie, polydipsie, polyurie. Ils se sont convaincus, comme moi, qu'on n'observe pas ces phénomènes après des extirpations totales. Poly- phagie et polydipsie prouvent donc la non-totalité de l'extirpation ; mais l'absence de la polyphagie et de la polydipsie ne garantit pas que l'extirpation a été totale. Je crois donc qu'un excellent chirurgien, qui fait toutes les semaines plusieurs lapa- rotomies chez l'homme, donne une plus grande garantie d'un heureux succès que n'importe quel physiologiste. Je devais me défendre contre l'objection qui eût pu m'être présentée, si j'avais tenté moi-même l'extirpation totale, qu'un meilleur chirur- gien que moi aurait peut être mieux réussi à enlever le pancréas à un chien et à pou- voir alors observer l'absence de diabète. Comme 0. Witzel a fourni, par l'examen microscopique et l'étude des animaux opérés, la preuve certaine de l'extirpation absolument totale du pancréas, je suis heu- reux qu'il ait pu donner une description détaillée de son procédé. Voici textuellement les paroles de Witzel {A. g. P., cvi, 173, 1903). Technique de l'extirpation du pancréas chez le chien. — Les opérations sur le pan- créas, que j'ai faites sur le désir de E. Pfluger, pour ses recherches sur le diabète pancréatique chez le chien, étaient des extirpations totales et partielles de l'organe, dans quelques cas avec résection primaire ou secondaire du duodénum. Même pour le chirurgien assisté des hommes du métier, ces opérations offrent de multiples difficultés. Quelques non-réussites seront inévitables pour celui qui se met pour la première fois à la chirurgie expérimentale du pancréas. On a imaginé beau- coup de procédés pour les éviter, surtout pour éviter une nécrose du duodénum dans une extirpation absolument totale de l'organe. La préoccupation de conserver la faculté aie de l'intestin, et par cela, de faire survivre les animaux, a conduit la plupart des GLYCOGÈNE. 473 savants à choisir un procédé qui consiste à laisser au duodénum quelques restes de la glande cautérisés ou liés, qui doivent ensuite disparaître. On ne doit pas considérer ces interventions comme extirpations totales, comme on l'a fait bien souvent, et s'en servir pour d'importantes conclusions. Vu le grand labeur qui incombe au physiologiste après l'intervention, il faut lui donner au point de vue chirurgical la garantie que les prémisses de ses observations et de ses recherches sont consciencieusement remplies. Pour être utile aux collègues qui voudront faire ces interventions opératoires, ces pages sont écrites sur la demande de E. PFLiiGER. Pour les opérations sur le pancréas sont aptes surtout des chiens au-dessous de la taille moyenne, d'un poids de 8-10 kilogrammes. Plusieurs auteurs recommandent de jeunes animaux, chez qui l'union de la tête du pancréas avec la partie pylorico-duodé- nale n'est pas très étroite. L'animal jeûne au moins un jour avant l'opération. L'opération est préparée et exécutée de la même façon que pour une laparotomie chez l'homme. Nous ne devons pas oublier que la moindre faute qui permettra une infection sera complètement pernicieuse; car, à cause du trouble ultérieur de l'échange du sucre, il ne faut pas compter ici sur les moyens naturels de défense et de compen- sation que possède le corps sain à l'égard des lésions opératoires. Le nettoyage de l'animal commence déjà quelques jours avant l'intervention. Il est tondu au ventre et à la poitrine aussi ras que possible, et lavé à différentes reprises dans l'eau chaude avec beaucoup de savon, pour la dernière fois encore quelques heures avant l'opération. Malheureusement on ne peut bien raser la peau que sur un animal narcotisé, attaché à la table. Un lavage abondant avec de l'eau chaude stérilisée doit faire soigneusement disparaître les poils. La préparation de la peau du champ de l'opération, celle des instruments, des fils, des compresses, celle de l'opérateur et de ses aides doivent se faire d'après les règles générales. Pour les opérations sur les animaux nous nous servons également du voile de visage que j'ai recommandé pour protéger la blessure contre les microbes de notre nez et de notre bouche. La chirurgie moderne attache une grande importance à ce qu'aux manipulations des tissus on éloigne tout ce qui peut être nuisible à la faculté vitale des organismes cellulaires. On ne se sert pas d'un antiseptique, car, même superficiellement, il est caustique. On emploie une solution stérilisée de 0,8 p. 100 de sel ordinaire à la tempé- rature du corps. Il faut soigneusement éviter l'évaporation et le refroidissement. On évite de frotter, de tirailler et surtout de broyer les tissus. Pour l'extirpation du pancréas il faut procéder avec un soin particulier, vu le diabète ultérieur de nos animaux. Le plus petit résidu de tissus à vitalité amoindrie deviendra du pus abondant et fétide, et la combinaison du diabète et de la suppuration avec le grave trouble des fonctions de digestion amènerait une lin rapide de l'animal. 11 faut prêter une attention particu- lière aux ligatures et aux piqûres. On emploie de la soie en fils très fins, bien stéri- lisés par l'ébullition et non imprégnés d'un antiseptique qui créerait un foyer de nécrose. Les petits vaisseaux doivent être tordus pour introduire le moins possible de corps étrangers sous forme de ligatures. Il faut aussi veiller à ce qu'il n'y ait pas d'hématomes pendant qu'on pratique la rétraction des vaisseaux saignants, et à ce qu'il ne se produise pas au moment du réveil, par l'agitation des animaux, d'hémorrhagies consécutives, surtout des veines non liées. Ces précautions sont décisives pour le succès de ces expériences ; elles ne sont possibles que si l'on est assisté des hommes du métier. La narcose doit être régulière. Notre narcose par la morphine et l'éther (injection de 0,01 à 0,03 de morphine avant l'opération, puis emploi de l'éther goutte à goutte) a donné également de bons résultats chez les chiens. Toute la technique consiste surtout à éviter la gangrène du duodénum. La tête du pancréas est, surtout chez le chien, étroitement liée avec la première partie du duodénum. Elle forme souvent une gouttière étroite dans laquelle est logé l'intestin par sa concavité. Des prolongements vont des bords de cette gouttière sous la séreuse jusqu'à la convexité de l'intestin. L'extirpation totale du pancréas chez le cbien sans section de l'intestin eût été, chez l'homme, à cause des étroits rapports de ces deux organes, abso- lument impossible, si le duodénum chez le chien n'avait pas été relativement beaucoup 474 GLYCOGÈNE. plus long et plus mobile que chez l'homme. Il possède chez le chien une mobilité à peu près égale à celle de la partie supérieure du jéjunum chez l'homme. Une connaissance anatomique approfondie des vaisseaux est d'une extrême importance pour la réussite de l'opération. Le duodénum et le pancréas sont unis par une artère pancréatico-duodénale supérieure, et une inférieure, qui se rencontrent près des conduits de sortie de la glande, là où la tête de la glande est le plus étroitement liée à l'intestin. Les terminaisons de ces artères, qui reposent sur l'intestin, ne doivent pas être trop for- tement lésées ni doublement liées; autrement l'intestin se gangrène, malgré les anasto- moses qu'on trouve surtout sous la muqueuse. L'artère pancréatico-duodénale inférieure vient de l'artère mésentérique supérieure; elle se divise de bonne heure, de sorte qu'on peut opérer la ligature du rameau pancréatique inférieur allant à la portion descen- dante du duodénum sans troubler la circulation du sang dans le rameau duodénal infé- rieur qui va librement le long du bord du duodénum. Plus difficile et plus irrégulière est la même opération pour l'artère pancréatico-duodénale supérieure qui vient de l'ar- tère gastro-duodénale, généralement entièrement couverte par la tête du pancréas. Quelquefois il se sépare de l'étroite racine commune un rameau pancréatique supérieur, qui alors serait à disséquer entre deux ligatures mises très soigneusement. Généralement un tronc commun formant des branches à droite et à gauche, va d'abord dans le bord postérieur du pancréas, et ensuite dans sa substance après l'embouchure du canal de WiRsuNG. Ce dernier paraît souvent entouré d'un Rete vasculosiim. Conserver ce tronc en bas aussi loin que possible est la tâche difficile dont on est récompensé par ce fait qu'on évite ainsi la gangrène du duodénum. Bien au-dessus du canal de Wirsung la ligature du tronc devient quand même nécessaire. Plus loin en bas on ne réussit généralement pas à dégager les petites branches en ôtant les parties de la glande. Les vaisseaux se déchirent finalement, ou il sont mécaniquement tellement lésés qu'ils doivent se throm- boser. Quand on s'est servi une fois delà sonde de Kocher pour l'isolement des vaisseaux, on ne voudra plus s'en priver pour ce dégagement minutieux. Une extirpation totale du pancréas se composerait donc des opérations suivantes : Ouverture de la cavité abdominale. — Section sur la ligne médiane du processus ensiforme jusqu'au nombril ou en passant à gauche un peu au devant de celui-ci. Elle passe par la peau et le fascia superflcialis entre les saillies des muscles droits, jusqu'à ce qu'apparaisse une couche de graisse grise prépéritonéale. Cette couche graisseuse est ensuite divisée avec la peau du ventre et mise dehors de chaque côté, sur les bords de la blessure, attachée au moyen de crampons aux bords delà toile de la fente. On a ainsi deux lambeaux latéraux qui protègent pendant l'intervention et sont extirpés ensuite avant qu'on referme la plaie. Orientation sur l'état anatomique du pancréas. — On prend la partie pylorique de l'estomac qu'on reconnaît facilement par la marche de ses artères du bord, puis on passe au duodénum qu'on tire de la blessure, et l'on empêche une sortie plus grande de l'intestin en mettant une grande compresse mouillée sous les bords de la section du ventre. Dans la concavité de l'intestin, la tête du pancréas devient visible, jaunâtre, avec ses saillies angulaires. On tire la portion descendante du pancréas, pour reconnaître son rapport avec le duodénum et le mode de division de l'artère pancréatico-duodénale inférieure. Dans les cas rares où la partie descendante du pancréas est aussi étroitement liée avec le duodénum, on ne peut extirper totalement cette glande sans résection de l'intestin. — Dans les cas ordinaires on remet en place les parties inférieures qu'on avait extraites pour les examiner; la partie supérieure du duodénum est tirée à droite, en écartant de plus en plus sur le côté le bord gauche de la plaie; dans la fente qui s'ouvre apparaît toute la tête du pancréas, son corps, et peu à peu la queue de la glande, se dirigeant en arrière vers la rate. Dégagement du pancréas. — Nous devons observer strictement les limites de l'organe, suivre ses bords et éviter tout traumatisme. Nul vaisseau ne doit être réséqué sans isole- ment et ligature préalables. Toute contradiction à cette règle conduit à la formation d'hématomes dans les tissus par hémorrhagie des vaisseaux, ce qui entraînerait la nécessité de saisir de plus grandes parties de tissus et de comprendre dans les ligatures de grands vaisseaux qui sont à ménager. ' Avecla pointe de la sonde de Kocher, ou d'une forte pincette anatomique, nous résé- GLYCOGÈNE. 475 quons, en commençant par la partie extrême de la queue, la couche du tissu conjonctif parallèlement au bord supéTieur du pancréas, mais en passant toujours au-dessus de la substance glandulaire. Les petits lambeaux sautent, les cordes fines ou grosses, condui- sant les vaisseaux, s'isolent, si l'on tire toujours légèrement sur le pancréas, et sont liées avec de la soie très fine. Pour les plus petits vaisseaux la ligature suffit; cependant une ligature double est faite avant la résection; car, si l'on met des pinces sur la glande, le maniement et l'examen deviennent plus difficiles. Souvent une ligature au bord supérieur et une au bord inférieur suffisent au dégagement du pancréas jusqu'à la partie céphalique. Les grands vaisseaux de la rate n'apparaissent généralement pas d'une façon bien nette. Maintenant on attaque la partie descendante du pancréas. Son dégagement n'ofï're aucune difficulté après la ligature du rameau pancréatique inférieur. L'exécution de la dernière partie de l'opération est la plus difficile : c'est l'isole- ment de la tête du pancréas, possible seulement après une claire orientation. Nous reti- rons tout le duodénum et la partie pylorique de l'estomac avec le pancréas devenu libre dans ses parties finales, et nous passons autour de ce que nous avons retiré, mais sans trop forte pression, une grande compresse tiède. On remet la glande avec ses parties à droite, pour pouvoir se rendre compte de la division des vaisseaux à la partie postérieure de la tête. Un rameau pancréatique bien développé est réséqué entre deux fils aussi loin que possible de l'artère gastro-duodénale. Nous suivons le rameau duodénal supérieur, en séparant avec la pointe de la sonde les lambeaux glandulaires des vaisseaux. Le fait de lier on de léser un tronc essentiel près de ce rameau met en question la persis- tance de la circulation intestinale, c'est-à-dire la faculté vitale de l'intestin ! Nous arrivons, en suivant ce rameau artériel, jusqu'à la profondeur de la tête, et nous nous y arrêtons provisoirement. Les bords de la branche pancréatique posés sur l'intestin sont mainte- nant rejetés d'abord en avant, et ensuite en arrière en ménageant toujours les vaisseaux. La tête du pancréas devient toujours plus mobile. Nous lions — parfois sans nous en rendre compte - — la fine corde du conduit secondaire supérieur, et nous arrivons, en enlevant le tout, au Rete vasculare qui entoure le conduit principal. On n'a pas besoin de le ménager en haut; il suffit que la partie d'en bas reste intacte. Le rameau duodénal supérieur est lié doublement; la tige du conduit de Wirsung saisie et liée dans la direc- tin de l'intestin, ensuite réséquée et recousue avec quelques fils très fins, d'après Lembert. — L'intestin, qui a montré par instants une forte injection veineuse, se meut main- tenant librement, vivement péristaltique; il a partout une coloration rose, et est simplement de nouveau remis en place. Le canal cholédoque n'apparaît pas pendant l'opération. Achèvement de l'opération. — On retire la compresse de dégagement, et, après s'être assuré de l'exacte hémostase, on la remplace par la petite compresse chaude qui retient les viscères pendant la suture. Les lambeaux de graisse prépéritonéale mis pour pro- téger la blessure ne doivent pas être inclus dans la suture du ventre. Là où ils se détachent nettement des deux côtés à l'intérieur, ils sont enlevés, tandis qu'on saisit en même temps avec des pincettes la peau du ventre pour l'empêcher de se rétracter. On met 4-5 sutures de fils d'argent qui comprennent les couches intérieures à l'excep- tion de la peau, et qu'on tortille après qu'on a retiré les compresses. Les bouts sont mis soigneusement dans la fente de la blessure. Ensuite on fait la suture continue du fascia superficiel, puis celle de la peau avec un fil d'argent très fin. Une couche d'ouate collodion recouvre la blessure. L'animal, dont il faut éviter le refroidissement après l'opération, est enveloppé dans des couvertures bien chaudes, et mis dans sa caisse. Si l'on suit exactement le procédé que nous venons de décrire, on peut éviter la gangrène du duodénum, tout en enlevant avec certitude toute la glande. Si l'on désire, pour observer les effets de la sécrétion interne, laisser en place une partie de la glande, extirpation partielle, on laissera la partie descendante du pancréas en relation avec ses vaisseaux ; on ne liera donc pas le rameau pancréatique inférieur. Autrement l'extir- pation se fait de la façon décrite. Finalement on fait la séparation en écrasant avec une forte pince le tissu glandulaire dans la ligne de séparation. Le reste du pancréas est replongé dans l'abdomen et devient peu à peu une ronde boule de tissu conjonctif: 76 GLYCOGENE. on le met, avant la fin de l'opération, sous le péritoine pour pouvoir le retirer ensuite facilement et avec certitude. » Résultats de l'extirpation totale. — Tout d'abord il faut faire remarquer que dans nos expériences le diabète survenait toujours dans les premières 24 heures et durait jusqu'à la mort, toujours décroissant sans jamais disparaître, bien qu'on n'eût donné aucune nourriture. On a mis seulement de l'eau à la disposition des chiens. Récemment H. Bierry et M™« Gatin-Gruzewska (B. B., lviii, 902, Séance du 17 mai 1905) ont recherché combien de temps s'écoulait après la fin de l'extirpation totale jusqu'à l'apparition des premières traces du sucre. Dans quatre expériences on trouva : Poids du chien. N°. kgr. Fin de l'opération. Première réduction. 1. 10 1 heure 3 heures 2. 14 4 — 5 heures 35 minutes. 3. 20 (20) 1 — 3 _ 30 _ 4. 14,3 10 heures 30 minutes. 3 — 30 — Dans un cas exceptionnel l'extirpation totale du pancréas a duré, chez un chien de 15, S kilogrammes, trois heures, à cause de la longueur extraordinaire du pancréas qui était de 49 centimètres. Le chien survécut seulement deux jours et demi à l'opération, sans avoir jamais eu trace de sucre dans l'urine. Si le chien avait survécu plus long- temps, la glycosurie serait sûrement survenue. Car d'autres auteurs ont observé un retard encore plus prolongé dans l'apparition de la glycosurie. W. Sandmeyer (Z. B., XIX, 92, 1892) relate un cas où la glycosurie est survenue 68 heures; Thiroloix {Diabète pancréatique, 77, 1892), le septième jour après l'opération. Il est possible que le foie, qui se refroidit après une opération prolongée et qui est toujours quelque peu lésé, subisse une sorte de paralysie, de sorte qu'il ne peut plus produire de sucre ou qu'il a besoin d'un temps prolongé pour reprendre sa fonction glycosopoïétique. Chez nos chiens privés de pancréas il y avait parfois albuminurie; parfois elle manquait complètement. Dans certains cas la réaction avec le perchlorure de fer était positive; dans d'autres, néga- tives; ce qui correspond à ce que dit Sandmeyer. Je donnerai maintenant quelques exemples particulièrement instructifs qui montrent comment, dans tous les cas d'extirpation totale, le diabète s'est manifesté. On a toujours constaté après la mort par des recherches minutieuses la totalité absolue de l'extirpation, et on a reconnu la formation d'abcès purulents comme cause de la mort. En tout cas la blessure de la peau ne guérissait pas. Ce n'est pas l'absence de pancréas, ce n'est pas le fait du diabète qui abrégeaient la vie de l'animal, mais c'est parce que les traumatismes ne peuvent pas alors guérir à cause du sucre contenu dans les liquides de l'organisme. Le diabète de Sandmeyer le prouve sufflsamment. Chien 14. — L'urine du chien avait toujours une réaction acide. Dans la colonne 3 (Voy. le tableau p. 477) les chiffres gras signifient la proportion vraie, les chiffres placés au-dessus indiquent de combien ce volume fut augmenté par l'eau de la cage. Comme la quantité modérée de l'urine prouve l'absence d'une polydipsie considérable, il faut dier que dans la cage il y avait toujours un vase rempli d'eau à la disposition du chien. Les premiers jours après l'opération il y avait chez quelques chiens polydipsie avec vomissement. Dans la colonne 5, les chiffres gras signifient la vraie proportion du sucre dans l'urine. Des deux autres chiffres, le premier, celui qui est au-dessus, signifie le pouvoir rotatoire de l'urine diluée observée avant la fermentation dans un tube long de 189,7 millimètres. Le chiffre qui est au-dessous donne le pouvoir rotatoire corrigé après la fermentation. C'est sur ce chiffre que le calcul est basé, car le titrage est influencé non seulement par le sucre, mais par d'autres subtances également qui ne sont pas du sucre. Le quotient -j^ a été, en moyenne (à l'exception des deux derniers jours avant la mort), 2,17. L'autopsie du chien a été faite par le professeur d'anatomie Maurice NiJssBAUM. La mort fut due à de multiples perforations du duodénum et à des abcès de la muqueuse tout près des perforations. Le foie a présenté ce phénomène curieux, de peser, sans la vésicule biliaire, o30 gram- mes, donc 8,37 p. 100 du poids du corps. Un poids si énorme ne se rencontre que dans le cas d'engraissement avec des hydrates de carbone. Mais ici il y avait privation de GLYCOGENE. 477 *> t- g ■? ■o o. ce 7. ^ s O ^ H M .ts ■« il m t s 5 rfi M fci ^ t. M o 3 3 O "«■^ j^ — Il 1 1 1 1 1 1 . 1 1 1 1 1 1 I :: 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 g z "° t- o ClZ »-i* 'i^ o o o in in__ î-»^ «" »r C«* C-* î'»' c-T ce" o' ■^.^ £ tH Tf 10 CO ■H U5 tH o 05 05_^ ^, œ (» O IC '^' O 05' m" « m' w 'HcTorforcToT^ o' J> « f' d~ g u « « « OJ Ti TK T^ ^ TH Ti tK td Q tf- ô -1 tO C5 o t^ in rt ao 00 Bî o ■£ K t~ — i-_^ in !M_^ in -^_ m °. '^^ x_ U " o. -: co" « 5^"" !^^ ce (m' ci T^ M --T e-r 3 à ." ■= + + + + + + + + + + + c — -2 o -* O ift » S ^i. " ^ Cd -^ C cT o" o o" C •-5 5 - « \ < g 1 i 1 1 H ^ l'r / *" < S. "^ \ . 1 H 5-° 1 c RO en int la ntatio ^, 1 S t- S_ g, 9, ^, "l 5 ^l S5 t. î^. ^, S «l 3 9- S ». 2 ^^ <0 o o <"' 00 •V "-^ •^ CQ "^ 'l.gï'.S s "Igaog'i, ce kO m 'f e^' « ^ n" 05 w CO « CO c^" C5 « ^ «'05 c^T ^ ei ai 05 « 05 i-H .-T ei ^' oj «' ^ oï (>r 05 o' ▼< > î < £ +++++++++++++++++++++++ + + + + + + + + + + + + + + + "= 1 i ce«oi o-*o-*r--)o ■* ' t~ ^ 50 e« Q - T Ot n r^ CO C> M M C>> 3-1 c<5 « « r-l CV) t^ POU SPÉCIF de l'ui ooo oooooooo O O O o o c H B s r. S i g inOîmO-^Oj i'OI'^u3-» «-tvnot~occio r, V. n -* in to ^78 GLYCOGENE. nourriture depuis presque trois semaines, et le chien avait perduen seize jours 38 p. 100 de son poids, tandis que le foie semblait avoir augmenté. Si l'on compare le poids du foie constaté à l'autopsie (530 grammes) et le poids primitif de l'animal (10200 grammes), le foie est toujours 5,2 p. 100 du corps, poids qui est très élevé et d'autant plus remar- quable que le chien n'avait pas reçu d'aliments une semaine avant l'opération. Le foie était fortement marbré en jaune. La quantité de glycogène était nulle; mais le poids de graisse était de 47,5 p. 100, de sorte que, comme le poids de toutes les matières solides était de 58,5 p. 100, il ne reste que 11 p. 100 pour les substances azotées et les sels. — Dans le diabète pancréatique il se fait, après la disparition rapide du glyco- gène, une abondante compensation par l'immigration de graisse dans les muscles, surtout dans le foie. Chien 12. — Poids, 12 kilogrammes. Le prof. Oscar Witzel fait l'extirpation totale du pancréas, le 24 septembre 1904. Le chien ne reçoit pas de nourriture. Il survit à l'opération dix-huitjours et demi. DATE 1904 24-25 sept 1,9 25-26 — 2,4 26-27 — 4,6 27-28 — 5,5 28-29 — 4,05 29-30 — 3,7 30 sept.-^^ oct. ... 5,2 1-2 oct . 4,6 2-3 — 5,6 3-4 — 5,3 4-5 — 3,0 5-6 — 2,9 6-7 — 1,3 7-8 — 1,0 8-9 — 0,8 9-10 — 1,1 10-11 — 4,9 11-12 — 2,2 12-13 — Mort. L'urine dans la vessie abcès purulent. QUANTITE DE SUCRE on 0/0. QUANTITE DE SUCRE de 24 heures en gr. 14,19 11,98 36,66 26,65 26,33 30,36 15,05 21,35 12,56 8,24 6,06 3,63 2,55 1,88 0,98 2,01 5,13 3,36 VOLUME DE l'urine en ce. 750 462 790 480 500 820 290 460 225 155 200 125 190 180 130 185 105 155 contient du sucre. A l'autopsie Comme W. Sandmeyer l'a reconnu le premier, le diabète amené par l'extirpation totale du pancréas n'offre pas des circonstances favorables pour bien comprendre la vraie nature de cette maladie. Les chiens en effet ne vivent alors que quelques jours; dans les cas les plus favorables, deux à trois semaines; car ils meurent par suite de plaies puru- lentes inguérissables. Exempt de cette complication est le diabète survenant après l'extirpation partielle et amené par la mort du résidu de pancréas laissé dans la cavité ventrale. Dans ce diabète de Sandmeyer une glycosurie intense se développe et dure beaucoup plus longtemps qu'on ne peut jamais observer après une extirpation totale. J'ai déjà parlé d'une façon détaillée de ces expériences que j'ai faites (A. g. P., cviii, 115, 1905); je voudrais seulement ajouter, pour faire comprendre la nature du diabète, quelques points qu'on n'a pas encore traités. Analyse chimique des troubles de nutrition observés dans le diabète de Sandmeyer. L'impression que fait sur moi l'autopsie des chiens morts de diabète, c'est la fonte des tissus de l'organisme causée par une alimentation insuffisante, sans qu'un organe quelconque offre une maladie notable. Tout d'abord disparaît le tissu adipeux, qui manque totalement, même à l'œil nu. Quant aux muscles, ils ont diminué de plus en plus. Il est curieux de voir que, de tous les organes, c'est le foie seul qui a augmenté, GLYCOGÈNE. 479 en tout cas il n'a pas diminué. Comme dans tous les cas d'inanition, le cœur, le cerveau et le rein sont intacts, c'est-à-dire non atrophiés. Voici les détails : Le foie pesait 293 grammes; formant donc 4,77 p. 100 du poids du corps; car le cadavre pesait 6,15 kilogrammes. D'après F. W. Pavy [Phil. Trans. for 1860, 579. — Researches of the nature and treatement of Diabètes. London, 1862), le foie des chiens, auxquels on donne une nourri- ture animale, est de 3,3 p. 100 du poids du corps. L'amplitude de l'oscillation physio- logique est de 3.0 à 4,7 p. 100. Mais, après une longue privation de nourriture (28 jours), le foie d'un chien n'est que de 1,5 p. 100 du poids du corps (E. Pfluger, A. g. P., xci, 121,1902). C'est ce rapport qui nous intéresse; car notre chien diabétique présentait tous les symptômes d'une alimentalion insuffisante. Si l'on compare le poids du foie diabé- tique avec le poids primitif du chien (12 kilogrammes), cela fait toujours 2,4 p. 100 du poids du corps, ce qui est donc peu différent du poids normal. Mais il est plus justedecomparer le poids au foie du poids du corps de 10 kilogrammes que l'animal avait au commencement du diabète. Et alors le foie de 293 grammes fait envi- ron 2,9 p. 100, ce qui est une valeur normale. Tandis que l'animal maigrissait de 10 à 6 kilogrammes, donc de 40 p. 100, le foie ne changeait pas de poids : il était donc iden- tique au cerveau. Mais il y a cette différence notable entre l'inanition ordinaire et l'inani- tion du diabète que dans toute inanition, oit il n'y a pas de diabète, le foie maigrit encore plus que le reste du corps. Si dans l'inanition normale le cerveau, le cœur et les nerfs ne participent pas à l'amaigrissement général, c'est qu'ils se nourrissent aux dépens des organes qui maigrissent, et la cause en est dans la force et la durée de leur travail. Car le cœur est un muscle comme les autres muscles. Ceux-ci maigrissent, mais le cœur ne maigrit pas. J'en conclus que, si le foie conserve intégralement dans le diabète son poids, c'est à cause de son travail intense. Il est le foyer principal où se forme le sucre diabétique. C'est, chez le diabétique, l'organe qui est essentiellement atteint. De très grand intérêt était donc l'examen de sa composition chimique. p. 100. Substances sèches du foie frais. | •' ' ' ' t,o'Q7 Graisse du foie 2,688 — des substances sèches 11,200 Eau du foie frais sans la graisse 78,3 Substances sèches du foie frais sans la graisse.. 21,7 Azote du foie frais 3,174 — — sec 13,22 Azote du foie sec saus la graisse 14,90 Ces valeurs sont dans les limites normales. Ce foie contenait 0,0259 grammes de glycogène. J'ai analysé 50 grammes du foie frais avec ma méthode quantitative pour dosage du glycogène. Après inversion du glycogène le filtrat fut ramené à 200 ccm. 81 ccm. don- nèrent 0,0235 grammes de Cu-0 qui correspondent à peu près à 0,006 grammes du sucre {A. g. P., lxix, 446, 1898). Le filtrat donnait nettement avant l'inversion la réac- tion du glycogène avec l'iode, et était précipité par l'alcool, bien qu'exempt d'albumine. Ce fait est de grande importance; car il prouve que le foie, même dans le diabète le plus grave, continue à former du glycogène jusqu'à la mort. Les muscles frais ont donné 18,8 0/0 de substances sèches. — — — ........ 2,831 0/0 d'azote. La substance sèche des muscles a donné.. 15,21 0/0 — Une autre masse musculaire, examinée par K. Mœckel, a donné : Muscle frais ...... 19,56 0/0 de substances sèches. — — 2,831 0/0 d'azote. — —..'.... 1,190 0/0 de graisse. Muscle sec . 6,083 0/0 de graisse. Muscle sec sans graisse. 15,41 0/0 d'azote. — — — — . 5,32 0/0 de cendre. 480 GLYCOGENE. Résultat d'une grande importance. Car la substance sèche du muscle a sa compo- sition normale; donc toutes les théories du diabète tombent, qui supposent une destruc- tion des matières albuminoïdes,des tissus. Pour viande sèche sans graisse en moyenne: I II Azote 15.49 lo,3 Cendres. . . . 5,32 5,2 I. D'après Stohmann t LAiNGBEiN {Journal f. prakt. Chem. N. F., xliv, 364, 1891). II. D'après Argutinsry (A. g. P., lv, 362, 1893). Le seul état anormal des muscles est leur grande proportion d'eau, ce qu'on voit déjà dans le foie, quoique à un moindre degré. Pour bien déterminer la proportion d'eau, il ne faut pas hacher l'organe et peser ensuite une partie de la masse, car trop d'eau s'éva- pore. Immédiatement après la mort de l'animal et l'enlèvement de la peau, on coupe un gros fragment de muscle qui est immédiatement introduit dans un flacon hermé- tiquement clos, et pesé; on y ajoute de l'alcool, on vide le tout dans un vase taré, e on le coupe avec des ciseaux en de très petits morceaux; on met au bain-marie et on dessèche à 100° jusqu'à ce que le poids ne varie plus. Mais chez ce chien on pouvait considérer comme cause de la très forte proportion d'eau des muscles les grandes masses d'eau ingérées avec la nutrose : alors nous avons analysé la chair d'un chien mort 8 jours après l'extirpation totale du pancréas, qui était resté sans nourxnture et n'avait pas eu de polydipsie. Le muscle frais contenait 21,58 0/0 de substances sèches. — — — 1,89 0/0 de graisse. Le muscle frais sans graisse contenait. . 19,692 0/0 de substances sèches. Le muscle frais contenait 2,963 0/0 d'azote. La substance sèche sans graisse 15,05 0/0 — On voit ici également une très forte proportion d'eau. La proportion d'azote, peut-être parce que la matière n'avait pas été suffisamment séchée, est très peu au-dessous de la normale, et ne laisse pas supposer qu'il y a eu destruction de l'albumine. Comme les tissus adipeux ont complètement disparu, d'après l'observation macros- copique au moins, il était très important de savoir si les graisses du cerveau étaient éga- lement ab sentes. La diflérence entre la matière grise et la malièie blanche était bien nette, et dans le cervelet l'arbre de vie se distinguait nettement. D'après l'analyse de Mœckel : Extrait éthéré par rapport à 100 Substances sèches du des substances sèches cerveau en 0/0. du cerveau. Chien normal 23,82 51,82 Chien diabétique 23,24 52,77 Le cerveau est donc évidemment resté tout à fait normal. Cette constatation est plus curieuse encore, si nous examinons la teneur en graisse d'autres tissus où elles ne manquent jamais : Dans les os : On a mis le tibia et le fémur dans un litre d'acide chlorhydrique à 20 p. 100 : on chauffe quelques jours à l'ébullition ; puis, après le refroidissement, on a ramené à 1 litre et traité 200 ccm. avec de l'éther. J'ai obtenu 0,276 grammes d'extrait éthéré : Il y avait donc dans les quatre grands os seulement 1 ,380 grammes de graisse brute. En brisant les os frais on voit une masse rougeâtre, gélatineuse, sans qu'on aperçoive la présence de graisse; car, comme ailleurs, elle a été presque entièrement consommée. Les théories du diabète pancréatique. — 11 faut considérer trois points de vue possibles : Chaque partie-du pancréas peut, d'une façon quelconque : 1" diminuer le sucre des tissus, ou : 2" L'augmenter, ou : 3° Faire Tun et l'autre. Cette fonction du pancréas se manifeste ou par l'intermédiaire des nerfs ou par des sucs particuliers. Si l'extirpation partielle amène une glycosurie, on pourrait supposer, d'après la pre- GLYCOGÈNE. 48« mière théorie que le pancréas sécrète constamment dans le sang une matière ayant la- faculté de diminuer le sucre des tissus. L'intervention opératoire a été nuisible égale- ment à la partie non opérée du pancréas. Le sucre des tissus doit donc augmenter. Mais peu à peu le résidu de pancréas reprend sa fonction normale et fait disparaître l'excé- dent du sucre. L'extirpation totale doit amener naturellement un diabète durable. Au point de vue I, la théorie névrogène suffit également. On peut supposer que de chaque partie du pancréas vont des nerfs centripètes aux centres saccharifiques de l'organe cérébro-spinal, dont ils peuvent diminuer l'activité. Le point de vue II est en harmonie avec les faits, si l'on considère le système nerveux comme élément intermédiaire. 0. MiNKowsKi considérait la glycosurie survenant après l'extirpation partielle du pancréas comme traumatique, causée par l'excitation des nerfs, comme cela peufc arriver après lésion chirurgicale de tout organe. D'après 0. Minkowsri, c'est seule- ment après l'extirpation totale que survient le vrai diabète, qui est une maladie abso- lument différente de la glycosurie traumatique. J'ai déjà prouvé plus haut que la glyco- surie amenée par l'extirpation partielle a un caractère spécifique, et qu'elle est toujours liée à une forme grave de la maladie. Nous avons vu que l'extirpation partielle faite avec le plus de ménagements possible amène une glycosurie qui dure souvent plusieurs jours. Le fait que peu à peu elle disparaît peut être expliqué par la diminution de l'excitation nerveuse. Mais comme, après une extirpation totale, l'excitation doit être plus forte qu'après une extirpation partielle, il faut conclure qu'elle dure plus longtemps. Pourtant, comme l'animal survit très peu de temps à l'extirpation totale, la mort survient avant la fin de la glycosurie. Le caractère durable du diabète survenant après l'extirpation totale n'est donc pas bien établi. Le diabète deSANDMEYER peut être expliqué en admettant qu'après l'extirpation partielle il y a, par suite des multiples blessures et ligatures des nerfs du pancréas et des vaisseaux; une insuffisance d'excitation qui augmente constamment l'ir- ritabilité des centres saccharifiques, comme dans beaucoup de névroses réflexes. Qu'il s'agisse ici de conditions analogues, cela est bien prouvé par ce fait que parfois un chien ne montre pas trace de glycosurie pendant des semaines après l'extirpation partielle, et que cependant la glycosurie survient immédiatement s'il est nourri avec de l'albumine pure. La disposition à la glycosurie a donc atteint son maximum, et la moindre cause suffit pour produire un effet décisif. La nécrose du résidu de pancréas, qu'on observe après l'extirpation partielle, se joint à une irritabilité toujours plus grande des nerfs qui également se nécrosent, ce qui suffit alors à la production de la glycosurie, laquelle, à cause de l'excitation nerveuse continue, dure jusqu'à la mort. Ainsi tout peut être expliqué, sans qu'on suppose des forces d'arrêt. Si, pour réfuter cette observation, on allègue que le diabète survient sans excep- tion après l'extirpation totale, et seulement par exception après l'extirpation partielle, je réponds que ce n'est pas exact. Il est plutôt certain que le vrai diabète sur- vient, si l'on a enlevé une partie suffisamment grande du pancréas. Car, comme je l'ai montré, les extirpations totales relatées par J. V. Mering et 0. Minkowsri étaient certainement non absolues, c'est-à-dire qu'elles étaient des extirpations partielles. La plupart des savants ont interprété le fait, qu'un petit reste du pancréas laissé dans l'abdomen suffisait pour qu'il n'y eût pas de glycosurie, en disant que chaque partie de la glande peut exercer une action d'arrêt. Les mêmes savants ont expliqué la glycosurie survenant après l'extirpation d'une partie quelconque du pancréas par l'exci- tation nerveuse. Nous aurions donc le point de vue III qui prête au pancréas des forces antagonistes. Tout le monde admet la faculté des nerfs du pancréas de produire une glycosurie par excitation. Il s'agit donc de savoir comment on peut expliquer l'effet inhibiteur du pancréas sur la glycosurie, el quelle est la nature de cette action. Après la découverte du diabète pancréatique, V. Mering et Mixkowski {Diabètes mellilus, 16, Leipzig, 1889) ont pensé d'abord que le métabolisme produit une substance toxique qui amène dans le sang une décharge de sucre par le foie, tandis qu'à l'état normal cette substance est détruite par le pancréas. V. Mering et 0. Minkowski ont dirigé le sang d'un chien, rendu diabétique par l'extirpation du pancréas, directe- ment de l'artère crurale dans la veine crurale d'un chien plus petit. Ce chien n'est DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOMK VII. 31 ^82 CLYCOGÈNE. pas devenu diabétique, même passagèrement. On peut, il est vrai, supposer que le pancréas normal a détruit la matière toxique déjà existante. Mais, comme une substance en proportion si infiniment petite exerce déjà une influence, cette expérience paraît digne d'être prise en considération. E. HÉDON {Travaux de physiologie, 130, Paris, 1898) a répété cette expérience en faisant passer le sang d'un chien diabétique dans le sang d'un autre chien auquel il avait extirpé presque tout le pancréas, et qui n'avait qu'une trace de glycosurie. Le résultat fut complètement négatif. Minkowski prétend que cette expérience ingénieuse ne prouve pas grand'chose, Hédon est d'accord avec Minkowski, mais il croit que son expérience laisse très peu de vraisemblance à l'hypothèse de la destruction de la matière toxique. Quant à moi, j'ajouterais une très grande importance à cette expé- rience, s'il s'agissait non d'un seul cas, mais de toute une série de cas ayant donné le même résultat. Ce qui me paraît encore parler contre celte hypothèse, c'est qu'il faut alors admettre que le résidu presque microscopique du pancréas pourrait, après l'extir- pation, détruire complètement le produit toxique. Or, à chaque circulation il ne passe qu' une trace de tout le sang dans ce fragment de glande, presque microsco- pique. On a pensé à un ferment diastasique comme matière nuisible dans le sang diabétique. Comme le dit E. Hédon [Travaux de physiologie, 130, Paris, 1898), on voit, par les travaux de Lkpine {Lyon médical, 86, 1890), et de Kaufmann {B. B., 130, 16 février 1894), qu'on ne peut pas prouver, après l'extirpation du pancréas, qu'il se fait une accumulation dans le sang d'un ferment diastasique (substance diabétogène). Comme Y. Merino et 0. Minkowski [Diabètes Mellitus, 16, Leipzig, 1882), presque tous les savants repoussent l'hypothèse de l'activité anti-toxique du pancréas, et ils pi'éfèrent supposer que cette glande prépare une substance spéciale qu'elle déverse dans le sang, substance qui réglerait la consommation de sucre dans l'organisme. En partant de l'hypothèse que le pancréas sécrète une matière pareille, E. Hédon {Travaux de physiologie, 133, Paris, 1898) a recherché s'il pouvait faire disparaître ou diminuer le diabète, en remplaçant par transfusion le sang d'un chien sans pancréas, par celui d'un chien normal. Le diabète diminuait pour quelques heures, mais si peu, que E. HÉDON n'y ajoute aucune importance. Déjà antérieurement, A. Capparelli [Maly's Jahreshericht fur 1895, xxiii, 369) avait relaté qu'un extrait de pancréas, injecté avec la solution physiologique de sel dans l'abdomen d'un chien, qu'il avait rendu diabétique par l'extirpation du pancréas, amenait souvent la. disparition complète du sucre de l'urine. Celte expérience a été faite presque en même temps, avec le même succès, par L. Vanni [Arch. ital. di Clinica med., 1894, fasc. 2. — Maly's Jahreshericht fiir 1894, 653). On a multiplié ces expériences sous différentes formes, sans obtehir une dimi- nution du diabète. Comme l'a montré Sandmeyer [Die Folgen der partiellen Vankreas estirpation heim Hund. Z. B., xxxi, 28, 1895), si l'on nourrit des chiens diabétiques auxquels on a extirpé le pancréas, avec du pancréas brut, il se produit une forte aug- mentation de la glycosurie. Dans ce cas, les ferments introduits dans l'appareil digestif avec le pancréas donné comme aliment, déterminent une meilleure utilisation des aliments; de sorte que plus de sucre peut se former. E. HÉDON [Travaux de Physiologie, 131, Paris, 1898) dit avec raison que la soi- disant sécrétion interne du pancréas, qui influencerait l'échange des hydrates de carbone, doit être considérée comme hypothèse jusqu'à ce qu'on ait réussi à isoler de la glande une substance dont l'injection peut indubitablement faire disparaître le diabète d'un animal privé de pancréas. E. Hédon a injecté une assez grande quan- tité des extraits soigneusement stérilisés du pancréas, soit sous la peau, soit direc- tement dans le système des vaisseaux sanguins, sans le moindre résultat au point de vue de l'affaiblissement du diabète. E. Hédon croit donc que quelques soi-disant succès de guérison, observés chez l'homme, doivent être mis en doute, parce que ces extraits ne pouvaient sûrement contenir que des quantités minimales de la substance agissante. E. Hédon l^oc. cit., 132 .et 133, Paris, 1898) donne —et il faut lui en savoir gré — toute la bibliographie de ces expériences faites sur l'homme; mais il est inutile d'en parler ici. GLYCOGÈNE. 483 La théorie d'une sécrétion interne du pancréas, par laquelle serait réglé, d'après 0. MiNKOwsKi, l'échange des hydrates de carbone, se base uniquement sur la grofl'e d'un fragment du pancréas placé sous la peau du rhien, avant que les autres parties de cette glande soient complètement enlevées de l'abdomen. D'après Munkowski, ce frag- ment, mis sous la peau, empêche le diabète, qui survient immédiatement si on l'enlève. 0. MiNKOwsKi {Utitersuchimgen ùher den Diabètes mellitus, 35, Leipzig, 1893) séparait d'abord la partie inférieure, facilement isolable, de la partie duodénale du pancréas, de telle façon que cette partie isolée restât en contact avec une longue lame mésentérique dans laquelle vont déboucher les vaisseaux nutritifs. Cette partie de la glande suflisam- ment nourrie est extraite de l'abdomen et mise sous la peau. 0. Minkowski ne fait pas la ligature des restes de la glande restés dans l'abdomen pour ne pas nuire à l'alimentation de l'animal, et afin d'éviter la dégénérescence de la glande. La preuve que ce fragment glandulaire greffe continue à vivre, c'est qu'il saccharifie l'amidon, sécrète du suc et digère de la fibrine. Trois semaines à peu près après la première opération, si l'on peut supposer que la gretfe a réussi, on fait une seconde ouverture de la cavité ventrale, et l'on enlève tout le pancréas qui s'y trouve, sans qu'il y ait régulièrement de diabète. Dans ce stade 0. Minkowski {loc. cit., 38, Leipzig, 1893) a fait une expérience qui est importante. 11 voulait rechercher s'il n'est pas nécessaire que le sang venant du pan- créas passe par la veine porte pour que le diabète soit empêché. « Car il est possible que la fonction normale du pancréas, relative à la consommation de sucre, soit liée à la pénétration dans le foie de certaines matières provenant de cette glande. Pour le décider, dans un cas où la greffe sons-cutanée d'une partie de la glande avait si bien réussi que le diabète était complètement absent (expérience 16, p. 43), j'ai pris le pédicule vasculaire dans lequel j'ai isolé et laissé libre l'artère qui y conduit, mais j'ai fait une double ligature du reste de la lame et réséqué. Après cette intervention, il n'y eut pas de sécrétion de sucre dans l'urine. Le diabète est survenu pourtant, quand on a totalement enlevé la partie glandulaire sous-cutanée. » Bien que cette expérience soit très importante, elle ne démontre pas le point essen- tiel. 0. Minkowski a laissé l'artère allant de la lame mésentérique, c'est-à-dire de la cavité abdomnale, à la glande, et restant en union normale avec le pancréas cicatrisé jusqu'au moment où il a enlevé la glande greffée. Mais, comme l'artère est accom- pagnée de nerfs, ceux-ci furent également réséqués au moment de l'extirpation du pan- créas, et la dernière relation unissant le tissu pancréatique au système nerveux fut détruite. Car, si les nerfs centripètes du pancréas peuvent arrêter l'activité des centres saccharifiques du cerveau ou de la moelle épinière, la résection de ces nerfs d'arrêt aurait pour conséquence une formation augmentée de sucre. E. Hédon, Lance- REAUx et Thiroloix ont, par d'ingénieuses expériences, tenu compte de cette objection. Hédon, quand il estimait suffisante la cicatrisation sous la peau d'une partie du pancréas (celle qui va du canal dans la direction du bassin), enlevait la plus grande partie du pan- créas restée dans la cavité ventrale et faisait la ligature de la lame mésentérique du résidu du pancréas greffé. Ce reste fut donc séparé des vaisseaux sanguins et des nerfs qui le pourvoyaient normalement. La partie greffée était maintenant nourrie par les nouveaux vaisseaux sanguins formés pendant la cicatrisation. Si la théorie de Minkowski est vraie, il ne doit pas y avoir de diabète, parce que la partie grelîée transmet au sang la substance active par sécrétion interne. Or E. HÉDON [Travaux de physiologie, 49, Paris, 1898) dit avoir, sauf pour trois cas exceptionnels, constaté dans toutes ses expériences que la ligature ou la séparation de la lame mésentérique conduisant à la partie gretlee, amènent rapidement son atrophie et le diabète, si l'on a au préalable bien enlevé tout le tissu pancréatique de la cavité abdominale. Ces trois cas exceptionnels sont : Expérience 18 d'Hédon (p. 56) : 15 juin. Transplantation. — 6 juillet (donc après trois semaines), extirpation totale du pancréas intra-abdominal et ligature de la lame mésentérique de la partie greffée. Glycosurie de deux jours. — Sans sucre jusqu'au 13 juillet, donc une semaine. Le la juillet, extirpation de la partie greffée. Fort diabète, de sorte que 66 à 88 grammes de sucre sont sécrétés quotidiennement jusqu'au 21 juil- let ; donc pendant environ une semaine. Le 21 juillet on sacrifie l'animal. 484 GLYCOCENE. Expérience 19 d'Hédon (p. 57) : Transplantation sous-cutanée le 1'^ mars. Après 18 jours, extirpation totale du pancréas intra-abdominal et ligature autour de la lame mésentérique de la partie gretfée. Glycosurie passagère. Elle disparaît au bout de trois jours, et la partie grefîée est extirpée le 23 mars. Glycosurie avec 5,2 p. 100, 3,7 p. 100 jusqu'au 25 mars, et alors est instituée une alimentation avec du sucre de canne, ce qui ne nous intéresse pas ici. Expérience 20 d'Hédon (p. 58) : Transplantation sous-cutanée le 24 mars. Après 19 jours, extirpation totale du pancréas intra-abdominal le 12 avril et résection de la lame mésentérique de la partie greffée entre deux ligatures. Du 13 au 17 avril seule- ment, des traces du sucre dans l'urine. Le 17 avril, extirpation de la partie greffée. Glycosurie considérable qui dure jusqu'au 21 avril, donc quelques jours. Les expériences de E. Hédon [Greffe sous-cutanée du pancréas. C. R. 1" avril 1892. — B. B., 23 juillet 1892. — A. d. P., 1892, 618) furent répétées avec le même succès par Thiroloix [Greffe pancréatique sous-cutanée. Bull. soc. anaf., juillet 1892), Gley et Thiro- LOix (B. B., 23 juillet 1892), Langëreaux et Thiroloix [C. R., 8 août d892). On a conclu de ces expériences qu'une partie du pancréas cicatrisée sous la peau après l'extirpation de tout le pancréas, se trouvant dans la cavité ventrale, empêchait le diabète, bien que la partie greffée ne fût plus unie comme précédemment à la cavité ventrale, ni par ses vaisseaux sanguins, ni par ses nerfs. On a généralement suppos que cet arrêt exercé par la partie grelfée devait être produit par une substance qu'elle transmettait au sang en circulation. En étudiant cette théorie, j'ai conçu quelques doutes. E. Hédon [loc. cit., 129) a déjà, avant moi, exprimé les mêmes doutes. Bien qu'il ne leur attache pas lui-même une grande importance, je veux quand même citer ici textuellement ce passage important : •<■ Une théorie nerveuse du diabète pan- créatique serait jusqu'à un certain point conciliable avec les expériences de transplan- tation sous-cutanée du pancréas, pourrait-on dire en poussant la critique jusqu'aux der- niers limites. L'action exercée par la glande serait indirecte et transmise par ses nerfs centripètes aux centres nerveux qui tiennent sous leur dépendance les phénomènes de la nutrition, 11 n'y aurait aucun produit de sécrétion interne; mais le tissu de la glande serait plutôt le point de départ d'un réflexe régulateur de certains phénomènes chimiques de l'organisme, et ce rétlexe pourrait exercer son action efficace, tant qu'un fragment de glande conserverait encore, par un filet nerveux, ses relations avec les centres. L'objection qui vient immédiatement, c'est que dans certains cas on peut séparer complètement le fragment de glande greffée sous-cutanée de ses connexions abdomi- nales, vasculaires et nerveuses, sans immédiatement produire de glycosurie. Mais on peut répondre que ce résultat provient de ce que le fragment transplanté a contracté dans le tissu cellulaire de nouvelles connexions nerveuses. Assurément cette hypothèse est très difficile à réfuter; elle paraît seulement très invraisemblable. D'autre part, l'énervation du pancréas in situ, qu'il doit être, il est vrai, bien difficile de réaliser d'une manière complète, ne produit pas de glycosurie, d'après Kaufmaisn. » A mon avis cette théorie nerveuse explique d'une façon très satisfaisante tous les phénomènes, et d'autre part toutes les expériences qui ont eu pour but de prouver l'existence d'une matière active dans la sécrétion interne n'ont pas réussi. Il faudrait d'abord considérer ce fait que, dans l'expérience de greffe, non seulement un morceau du pancréas, mais aussi sa lame mésentérique adhère aux tissus voisins. Si l'on a mis un fil autour du pédicule, et si ce pédicule doit être réséqué, il est difficile d'isoler toutes les parties dont il était auparavant constitué. Si un filet nerveux du pédicule reste non réséqué, la partie greffée conserve ses rapports avec les centres nerveux. Cette incertitude, qui est inhérente à l'opération de la séparation de la partie greffée de ses adhérences abdo- minales vasculaires el nerveuses, est très importante; car, comme le dit Hédon expressé- ment, cette séparation produit régulièrement un diabète qui ne manque que dans de rares exceptions. Mais la pensée émise tout d'abord par Hédon que la partie greffée, cicatrisée après la résection de la lame mésentérique, ou même avant, a contracté de nouvelles adhérences non seulement vasculaires, mais aussi nerveuses, n'est pas du tout invraisemblable. Claude Bernard, E. Hédon, J. Thiroloix relatent cette observation très étonnante, qu'après la résection des conduits du pancréas une partie de cette glande laissée dans l'abdomen forme un nouveau canal, qui tend à se diriger et à GLYCOGÈNE. 485 s'ouvrir vers son orifice naturel. Je n'ai jamais vu moi-même un fait analogue. Il faut finalement avouer que la théorie généralement acceptée sur la greffe pancréatique n'est pas un fait : ce n'est qu'une explication des faits basée sur des hypothèses. On prétend que la partie greffée empêche le diabète. Mais beaucoup d'expériences, surtout celles d'HÉooN, nous prouvent que le diabète apparaît quand même, si l'on attend un peu pour faire l'enlèvement de la partie greffée. On dit que, dans ces cas, la partie greffée est morte. Mais on a vu des cas dans lesquels elle sécrète et digère, et n'empêche cependant pas le diabète. E. HÉDON dit que la partie greffée bien cicatrisée et vigoureuse n'empêche pas des glycosuries plus ou moins longues, si le résidu pancréatique de l'abdomen est enlevé, et si l'on a fait la ligature du pédicule mésentérique conduisant à la partie greffée. Il arrive aussi que la partie greffée cicatrisée est sclérosée, que sa sécrétion a cessé, et que cependant le diabète est empêché. 11 existe encore d'autres faits qui sont plus difficiles à mettre d'accord avec la doc- trine de la sécrétion interne du pancréas qu'avec la théorie « nerveuse ». L'inflam- mation aiguë du pancréas peut donner lieu à la destruction étendue de l'organe sans qu'il y ait diabète, comme l'indique D. Hansemann {Die Beziehungen des Pankreas zum Diabètes. Zeitschr. f. klin. Med., xxvi, 193, 1894), qui fonde son opinion sur des recher- ches très détaillées. Il dit que la maladie se développe si vite, amenant si rapidement la mort, qu'il n'y a pas de temps pour le développement du diabète. Car, après l'extirpa- tion expérimentale totale du pancréas, il ne se passe que quelques heures, et avant la mort la glycosurie disparaît. D'après mon expérience, qui se base sur 12 cas d'extir- pation totale du pancréas, la glycosurie apparut dans les premières 24 heures et ne disparut pas avant la mort, bien que les animaux n'eussent aucune nourriture après l'extirpation et lui survécussent jusqu'à 2, même 3 semaines. Dans un cas seulement la glycosurie a disparu quelques heures avant la mort. Dans un 13« cas, après l'extirpation totale, il n'y eut pas trace de diabète, bien que l'animal mourût seulement 3 jours après l'opération. L'exactitude de l'explication de Hansemann est donc douteuse; elle n'ex- plique pas non plus le manque de diabète dans le pancréas complètement détruit par la gangrène. Il s'agit pour Hansemann {loc. cit., 196) des cas dans lesquels tout l'organe est transformé en un tissu cicatriciel. Ici, Hansemann a recours à une autre hypo- thèse. Les cellules cicatricielles hériteraient de la capacité du tissu épithélial sain du pancréas, et régleraient comme celui-là l'échange des hydrates de carbone, bien que la faculté sécrétrice fût complètement perdue. Mais il y a encore d'autres difficultés pour la théorie de la sécrétion interne. E. HÉDON, Gley et J. Thiroloix ont dans beaucoup d'expériences obtenu par l'injec- tion de différentes matières dans la glande une dégénérescence très avancée, micro- scopiquement constatée, et une atrophie de la glande, et cela sans qu'il y eût trace de diabète. On objecte que de petits restes du pancréas échappent toujours à la dégéné- rescence. Bien que cette objection ne puisse pas être réfutée, il est quand même difficilement compréhensible que la substance vivante du pancréas, qui réglerait l'échange des hydrates de carbone, puisse être totalement détruite sans qu'il y ait le moindre trouble dans les échanges des hydi^ates de carbone. Il est donc compréhensible que certains auteurs supposent la substance active non dans les cellules pancréatiques proprement dites, mais dans celles des îlots de Langer- hans. Comme l'a démontré H. Kùster (Arch. mikrosk. Anât., liv, 138, 1904), chez l'em- bryon les cellules de Langerhans prennent leur origine de vraies cellules épithéliales des canaux glandulaires, et bientôt se forment des groupes détachés de ces derniers. V. Diamare [Bollelt. Soc. Nat. Napoli, ix, 1895. — Internat. Monatsschr. f. Anat. und Phys., xvi,7 et 8, 1899. — Anat. Anzeiger, xvi, 1899) a fait l'importante découverte que, chez certaines espèces de poissons, surtout chez Lophius piscatorius et Scorpœna scropha, les groupes cellulaires des îlots de Langerhans sont complètement libres de tout mélange avec les masses pancréatiques et se distinguent bien de celles-ci. Ces îlots de Lan- gerhans apparaissent alors parfois assez grands (jusqu'à "> millimètres de diamètre), et on peut en faire des préparations. Avec un grand nombre de ces préparations, V. Diamare et A. Kuliabko [Centralbl. f. Phijs., 1904, 432) ont fait des observations très intéres- santes. Le résultat le plus important de ces recherches est que les cellules des îlots de 486 GLYCOGÈNE. Langerhaxs sont en effet différentes des cellules éplthéliales du pancréas proprement dites. Car des extraits aqueux des îlots de Langerhans n'ont aucun effet diastasique sur l'amidon, et le contraire est certainement le cas pour les extraits des cellules pancréa- tiques. Des expériences sur la glycolyse n'ont pas donné des résultats décisifs. John Rennie {CF., 1905, 729), qui a répété ces expériences, n'a pu produire aucune glycolyse avec les extraits des îlots de Langerhans. Mais il pense que, si on les donne aux diabé- tiques, ils ont quelque chose à faire avec la régulation de la proportion du sucre dans le sang. Ce qui est en contradiction avec le fait constaté par W. Sandmeyer et moi, que le fait de donner avec les aliments du pancréas brut, augmente étonnamment la sécrétion diabétique du sucre. Les îlots de Langerhans ne donnent donc pour le moment aucun éclaircissement, et je n'insisterai pas sur quelques cas de dégénérescence de ces cellules constatée dans le diabète. En présence de toutes ces difficultés la théorie la plus satisfaisante est celle qui assigne au diabète pancréatique une origine nerveuse. Il est presque certain que le diabète survenant après l'extirpation partielle et pouvant durer plusieurs jours, est d'origine nerveuse : il est également certain qu'entre cette maladie et le diabète sur- venant après l'extirpation totale se trouvent tous les passages possibles. Faut-il dans un cas accepter une origine nerveuse, et dans un autre cas la repousser, parce que la maladie est plus intense? Chauveau et Kaufmann surtout ont essayé de constater par de multiples expériences l'importance du système nerveux pour l'explication du diabète pancréatique. Ils sup- posent deux espèces de centres nerveux dans le cerveau et dans la moelle épinière qui ont des effets antagonistes. Kaufmann remarquait que la résection préalable des nerfs du foie n'empêchait pas que le diabète survînt après l'extirpation totale du pancréas. On a donc conclu — et E. Hédon (Article « Diabète ». Dictionnaire de Physiologie, iv, 847, 1900) le dit également — que les nerfs ne peuvent pas être les intermédiaires entre le pancréas et le foie. Il faudrait supposer que le pancréas produit par sécrétion interne une matière spéciale qu'il verse dans le sang qui circule, ce qui le rend capable d'arrêter la formation de sucre du foie. Mais il n'est pas douteux que les expériences de Chauveau et Kaufmann sont peu concluantes. Dans ces recherches de Kaufmann (C. il., cxxviii, 894), il ne faut pas oublier que chaque vaisseau sanguin qui pénètre dans un organe, contient dans sa paroi les plus abondants plexus nerveux. Si l'on croit avoir détruit les nerfs du foie, ces plexus nerveux restent, qui, dans les parois de l'artère hépatique, de la veine porte, de la veine hépatique, des vaisseaux lymphatiques, du canal cholédoque, etc., unissent l'organe au reste de l'organisme. Si, après la destruction supposée de nerfs hépatiques, la piqûre du sucre ne réussit plus, il faut bien considérer qu'il peut y avoir des fibres nerveuses ■ d'un effet glycosurique plus intense, qui ne répondent pas à l'excitation bulbaire, et arrivent au foie par une voie inconnue. Quand on voit que la corde du tympan est indu- bitablement le nerf de sécrétion de la glande sous-maxillaire, et que, d'après R. Hei- DENHAiN, les nerfs de la corde du tympan agissent sur toutes les cellules de la glande sali- vaire, il ne faut pas en conclure qu'un second système nerveux ne peut pas arriver par une autre voie à la même glande et provenir du sympathique cervical pour influencer absolument les mêmes cellules, ce qui est complètement établi par les expériences de Heidenhain et les recherches microscopiques. Mais, même si l'on pouvait réséquer avec certitude tous les nerfs allant au foie, et si, après l'extirpation du pancréas, le diabète survenait quand même, cela ne prouverait nullement qu'il n'est pas produit par le système nerveux. Car il n'est pas établi que d'autres nerfs également, et non pas seulement ceux du foie, ne provoquent pas dans le diabète pancréatique la formation de sucre dans les autres organes, par exemple dans les muscles, ou qu'ils ne peuvent pas amener une hyperglycémie d'une façon quelconque. Une importante découverte de Kaufmann [A. de P., xxvi, 287, 1896) qu'il faut prendre en considération, c'est qu'après la résection de la moelle épinière au devant de la première vertèbre dorsale, l'extirpation du pancréas ne produit pas le diabète. Si, après l'extirpation du pancréas, le foie jette subitement de grandes quantités de sucre dans le sang, parce qu'il ne reçoit plus de sucs arrestateurs provenant du pancréas, il GLYCOGÈNE. 487 devrait en être de même, ce me semble, après la résection de la moelle épiaière. Il faut en tout cas considérer que la résection de la moelle épinière interrompt une grande partie de l'influence du centre saccharifique sur le foie, ainsi que le réflexe de nombreux nerfs centripètes sur les organes formant du sucre, et que la température baisse. Toutes ces circonstances doivent avoir pour conséquence une forte diminution de la formation normale du sucre. Si ensuite on extirpe le pancréas, il n'y a plus d'arrêt de l'hyperglycémie. Mais il y a peu à arrêter, et voilà pourquoi la glycosurie manque. En tout cas l'expérience n'indique pas de quelle nature est cet arrêt. Les maladies causées par les extirpations du pancréas ont fait supposer que le pan- créas exerce des actions d'arrêt par lesquelles il réglerait le volume de sucre. Mais il ne faut point oublier que l'hypothèse d'un arrêt n'est qu'une explication non prouvée de certains faits. Peut-être rien ne survient-il, parce qu'il n'y a rien à arrêter. Le mot « arrêt » suppose donc un travail non prouvé. Nous avons vu que, d'après les recherches de E. Kulz et Falkenberg {Zur Extirpation der Schilddrûse. Verhandlungen des X. Congresses f. innere Medizin, 502, Wiesbaden, 1891) l'extirpation de la glande thyroïde pouvait amener des glycosuries qui durent 8 à 14 jours, même jusqu'à la mort de l'animal. Pourquoi donc le pancréas n'arrêle-t-il pas la glycosurie qui survient? Il arrive, et Claude Bernard l'a observé, que la piqûre du bulbe amène un diabète durant jusqu'à huit jours, malgré le pancréas resté intact. De même, des maladies de la moelle allongée et des excitations périphériques produisent un diabète de longue durée, qui disparaît après la guérison de la maladie nerveuse. Gomme l'a prouvé 0. Langendorff, on peut obtenir chez des grenouilles un diabète durant plusieurs jours, bien que le pancréas soit intact. Il n'est donc pas légitime de prétendre quand même, avec 0. Minkowski, que le pancréas règle l'échange général des hydrates de carbone. Le fait est que le pancréas semble pouvoir « arrêter » icne glycosurie, seule- ment dans le cas où cet organe est lui-même lésé par des interventions opératoires anté- rieures; donc, dans le cas seulement où le pancréas est la cause de la glycosurie. A mon avis, le diabète survenant après l'extirpation du pancréas est donc une névrose réflexe. Quant à savoir s'il faut supposer, pour expliquer cette névrose, des actions d'arrêt ou une excitation nerveuse ou une sécrétion interne, cela ne peut pas être décidé aujourd'hui avec certitude. On demandera alors ce que signifie une glycosurie survenant après l'extirpation du pancréas, si l'on ne veut pas reconnaître à cet organe une fonction régularisatrice. La réponse est très simple. Que l'excitation des nerfs du pancréas, des glandes salivaires, des glandes thyroïdes ait un rapport spécifique avec la fonction des centres nerveux saccharifiques, cela est indubitable, et il faut considérer ces organes, ainsi que les muscles, comme ayant, dans des conditions normales, une forte consommation de sucre, et par conséquent comme devant être en état de collaborer eux-mêmes à la satisfaction de leur besoin. On ne recon- naît donc pas au pancréas une place exceptionnelle, ce qui serait contraire à tous les faits. Les diabètes toxiques. — Il est remarquable de voir qu'un grand nombre de substances chimiquement très différentes produisent la glycosurie . Des substances organiques et anorganiques, aliphatiques et aromatiques, azotées et non azotées, ont un effet glycosurique. Quand on pense que chaque cellule collabore à l'échange des hydrates de carbone, de sorte que des phénomènes très divers l'influencent et peuvent également amener une hyperglycémie, on commencera à comprendre que des causes si diverses amènent la même maladie, c'est-à-dire la glycosurie, et que l'examen de la nature de l'elfet du poison offre, dans le cas particulier, de grandes difficultés. On a fait peu de recherches sur la glycosurie consécutive à l'absorption de : oxyde de carbone, acides minéraux, acide arsénique, sels uraniques, sublimé, strychnine, caféine, diurétine, chloralamide, chloral, nitrobenzol, acide orthonitrophénylpropio- nique, chloroforme, acétone, éther, extrait de sangsue, corps thyroïde, capsules sur- rénales, matières fécales et urine fermentée diabétique. Dans les extraits organiques il faut savoir si la substance active a déjà existé dans le corps vivant, ou si elle s'est formée plus tard. Il faudrait également encore examiner d'une manière plus approfondie les diabètes par asphyxie et par contention. 188 GLYCOGENE. Diabète de phloridzine. — Obscure est également l'origine du diabète par phlor- idzine découvert par v, Mering (1885) {Verhandl. des 5 Congr , f. inn. Med., 1886; — Verhandl. d. 6 Congr. f. inn. Med., 1887; — C, W., 1887, 53; — Zeitschr. f. klin. Med., XIV, 405, 1888; et xvi, 43, 1889). La phloridzine (G21H24O10) de l'écorce du pommier, du poirier, du cerisier et du prunier donne par l'hydrolyse d'abord dextrose et phlorétine : C2iH2tOio + H20=:CgHi206 (dextrose) + CisHuOs (phlorétine) Cette dernière substance se divise par hydrolyse conformément à l'équation suivante : C15H14OB + H20 = C6HGOa (phloroglucine) + C9H10O3 (ac. phlorétinique) La phloroglucine se comporte comme un phénol trivalent : C6H3(OH)3 ; l'acide phlorétinique semble être acide p- hydrocumarique (acide phénolpropionique) : HO — CeHi — CHo — CH2 — GO2H. Des chiens deviennent diabétiques après l'absorption de 1 à 3 grammes de phloridzine par kilogramme. Pour des chiens à jeun, il suffit, d'après Mcnco Kumagava et Rentaro Hayashi (A. P., 1898, 443) de doses plus faibles; soit, sous la peau, de Oe>-,3 à 2K'-,5 de phloridzine pour un animal de U à 17 kilogrammes. Pour produire avec certitude le diabète par la phloridzine chez des lapins, des poulets et des grenouilles, il faut, d'après Max Cremer (Z. B., xxix, 175, 1893; — Max Cremer et Ritter, ibid., xxviii, 459, 1891), mettre le poison sous la peau. D'après v. Mering la phlorétine produit également la glycosurie, tandis que la phlo- roglucine et l'acide phlorétinique sont sans effet. Sans effet sont également restés d'autres glycosides, comme amygdaline, arbutine, esculine, salicine, conife'rine, quercitine. Dans le diabète par phloridzine on remarque une particularité qu'on n'a observée dans aucune autre espèce de diabète. D'après v. Mering et Minkowski, la proportion du sucre du sang ne dépasse pas la normale, et n'augmente pas après la ligature des uretères. Ces données de v. Mering ont été confirmées par beaucoup d'auteurs. Pour expliquer la glycosurie produite par la phloridzine, on a fait la supposition qu'après l'action de ce poison le rein laisse davantage passer le sucre. On a fait une nouvelle sorte de dia- bète : le diabète rénal. Cette difficulté n'existe pas, d'après F.-W. Pavy (J. P., xx, xix-xxii, 1896). Pavy s'est convaincu que le sang du chat contenait, dans des conditions normales, 1 p. 1000 de sucre. Après injection sous-cutanée d'une solution de phloridzine, cette quantité augmente, et atteint 1,869 p. 1000 et 2,307 p. 1000, si l'extrait alcoolique est inverti par ■l'acide sulfurique. Bien que cette augmentation ne soit pas forte, il est clair que les ■analyses faites par F.-W. Pavy sont absolument dignes de foi. Les travaux de Pavy furent confirmés par S. Leone [Gazz. internaz. di med. prat., m, 21, 295; Maly's Jahres- berlcht fur 1900, 892). Quelques cliniciens ne semblent pas être convaincus par le travail important de F.-W. Pavy, et Naunyn, par exemple, ne cite même pas F.-W. Pavy dans son grand ouvrage sur le diabète, paru 2 ans après F.-W. Pavy. U est vrai que la plupart des auteurs se sont prononcés pour v. Mering contre lui. Mais on ne peut pas voter dans des •questions scientifiques et laisser la décision à la majorité. Il est cependant certain que le non-changement dans la teneur de sang en sucre après la ligature des uretères parle en faveur de la thèse de v. Mering. La cause du désaccord est sans doute dans la petitesse des valeurs à déterminer et dans la précision insuffisante de l'analyse de sucre. Claude I'ernard {Leçons sur le diabète, 234, 1879) donne pour la quantité de sucre dans 1000 parties du sang artériel du chien normal [Arteria cruralis) : A jeun \e',il de sucre. Digestion de viande ls',25 à le', 45 de sucre. Digestion de viande et d'hydrates de carbone. lif^jS! à dB%53 — Pour l'homme, Naunyn {Der Diabètes melUtus, 12, 1898) donne une quantité de sucre généralement de 1 p. 1000. ". Il paraît que, chez les mammifères, dit Naunyn, il y a .glycosurie, quand la proportion de sucre dépasse 2 p. 1000. « GLYCOGÈNE. 489 D'après F.-I. Frerighs, comme nous l'avons déjà dit plus haut, la i)roportion de sucre chez le diabétique varie de 2,8 à 4,4; d'après N.vunyn [loc. cit., 149), de 1,2 à 7,0 sur 1000 parties de sang. Donc, dans les légères glycosuries, la proportion du sucre dans le sang diffère seule- ment très peu, peut-être pas du tout, des proportions maximales de sucre dans le sang des individus sains. Que des différences si minimes suffisent pour amener, dans un cas, sécrétion. de sucre, tandis que, dans l'autre cas, pour des quantités de sucre presque égales, il n'y a pas d'excrétion de sucre, c'est un fait curieux et peu compréhensible. En faveur de l'opinion de v. Mering, on peut encore ajouter que, par la plupart des moyens, qui ont des effets chez les mammifères, on peut, chez les oiseaux, produire l'hyperglycémie, mais non la glycosurie, tandis que par la phloridzine l'urine des oiseaux contient du sucre, sans qu'il y ait hyperglycémie. Andréas Thiel (Beitrdge zur Kenntniss der experime.ntellen Glycosurie, 37; Inaug. -Dissert., Kônigsberg, 1887), avec la collaboration de 0. Minkowski, a communiqué une expérience de ce genre dans sa dis- sertation inaugurale. On a extirpé le foie à une oie après avoir fait la ligature du cloaque, et constaté que l'urine ne contenait pas de sucre. Immédiatement après l'opération l'oie recevait, à l'aide de la sonde œsophagienne, 5 grammes de phloridzine et sécrétait OS'", 759 de sucre en 9 heures environ. Bien que les 3 grammes de phloridzine aient pu donner beaucoup plus de sucre, 1^^9, cela ne détruit pas ce fait que le rein a laissé passer du sucre après l'empoisonnement parla phloridzine. A. Thiel n'obtenait de glyco- surie chez les oiseaux ni par la piqûre bulbaire, ni par l'oxyde de carbone, ni par le gaz d'éclairage, ni parle nitrite d'amyle, ni par l'acide orthonitrophénylpropionique (?), ni par l'acide lactique, qui sont très efficaces chez les mammifères. Mais la phloridzine a, chez les oiseaux, un effet bien moindre que chez les mammifères, et on voit dans toutes les expériences que la quantité de sucre de l'urine est beaucoup plus petite que celle que pourrait donner la phloridzine absorbée, qui est un glycoside. Mais ce qui diminue la valeur des expériences de Thiel, c'est d'abord qu'il n'a pas pu prouver l'existence de sucre dans le sang de l'animal empoisonné avec de la phloridzine, bien qu'il y en eût sûrement. Comme Minkowski a collaboré à cette expérience, il faut n'accepter qu'avec réserve la thèse de Minkowski et v, Mering sur le non-changement du sucre de sang chez les animaux phloridzinés. Une seconde infirmation des résultats des expériences de Thiel est le fait prouvé par Kausch qu'on peut produire la glycosurie, également chez des oiseaux, par extirpation du pancréas, donc sans phloridzine, et ensuite que Thiel n'a pas déterminé les proportions du sucre du sang dans ses nom- breuses expériences avec les autres poisons. 0. Minkowski (A. P. P., xxiii, 142, 1887) a brièvement rendu compte du travail de Thiel. V. Mering a également communiqué deux expériences faites sur des oies : après l'enlè- vement du foie une dose de 4 grammes de phloridzine amena dans un cas une sécrétion de 1S'',3 de sucre, dans l'autre cas, à la même dose, une sécrétion de Osi',735. Mais, comme ces quantités de sucre sont beaucoup plus petites que celles que la phloridzine peut donner elle-même comme glycoside, on ne voit pas bien ce que cette expérience prouve contre l'idée que c'est le foie qui est le producteur du sucre. D'ailleurs ces expériences ont été mal comprises, au moins si l'on en juge par la relation d'ÂNOREAscH {Maly's Jahresbericht fur 1887, p. 299). « Le foie n'est donc pas nécessaire à la production du diabète : il en est autrement pour le diabète strychnique et le diabète par piqûre bul- baire. Le diabète phloridzinique survient également, d'après Mering, chez des grenouilles privées de foie ». Je n'ai pu trouver que v. Mering avait déjà fait à cette époque des expé- riences sur des grenouilles privées de foie. Comme il est d'importance considérable de savoir quelle part prend le foie à la production de telle ou telle forme de diabète, il faut dire qu'ANDREAScH juge tout à fait dans le sens de v. Mering. Car déjà, dans sa première communication sur le diabète phloridzinique découvert par lui, v. Mering dit: «Je me ser- vais donc d'oies privées en partie de leur foie par la ligature des vaisseaux; une fois j'ai extirpé le foie. A ces animaux, après un jeûne de deux ou trois jours, j'ai donné de la phloridzine, et j'ai réussi à obtenir 1 p. 100 de sucre dans l'urine. Cela prouve qu'il est possible de produire la glycosurie non seulement sans qu'il y ait de glycogène dans les muscles et dans le foie, mais même chez des animaux auxquels on a extirpé le foie. » i90 GLYCOGÈNE. Si la phloridzine donnée à l'animal se dissocie dans le sang en sucre et phloridzine, de sorte que la proportion de sucre du sang croît, une légère glycosurie doit se produire. Des propres déclarations de Mering (Verhandl. d. V Congr. f. ina. Med. Tiré à part, p. 4, 1886), il s'ensuit que le sucre sécrété après l'extirpation du foie peut, à cause de sa petite quantité, provenir de la phloridzine injectée. L'expérience ne prouve donc rien. A l'appui de la thèse de V. Mering, il faut citer les expériences de Langendorff (A. P., 1887, 138) qui prétend que le diabète curarique peut survenir également chez des grenouilles privées de leur foie. D'après Langendorff, le glycogène des cellules du foie est diminué par le diabète strychnique, pour lequel l'existence du foie est nécessaire, et tout l'organe devient plus petit. Tel n'est pas le cas pour le diabète curarique. Le foie ne différait guère du foie normal, et contenait beaucoup de glycogène, bien que le diabète eût duré dix jours. Comme Langendorff se servait pour ces expé- riences de grenouilles d'automne, dont le foie et le corps sont, d'après Athanasiu [A. g. P., XXIV, 561, 1899), remplis de glycogène, on s'explique bien le résultat obtenu par Langendorff qu'une fois la période de diabète terminée, il reste encore beaucoup de glycogène dans le foie. Comme Langendorff n'a pas examiné combien de sucre la grenouille avait sécrété pendant ce. diabète, toute base manque pour juger si ce n'est pas le foie qui a fourni le sucre. Ajoutons que, d'après Athanasiu, le glycogène ne diminue presque pas dans le corps des grenouilles pendant tout l'hiver, tandis que la graisse disparaît. U est donc bien possible que le glycogène se forme perpétuellement aux dépens de la graisse. Pour donner de ce fait des preuves plus nettes, 0. Langendorff a produit le diabète curarique chez des grenouilles privées de foie. Cinq grenouilles furent empoisonnées avec de petites quantités de curare. Avant que la paralysie fiit complète, on leur enlevait le foie. Un très petit résidu fut laissé pour ménager la veine cave inférieure et éviter ainsi une anurie de plusieurs jours. Chez toutes les cinq il y eut glycosurie. Tandis que le poison agissait dans le corps et produisait la paralysie, la fonction du foie était encore intacte. Le foie avait donc sùi^ement commencé le diabète, si tant est qu'il est capable de le faire. Et voilà pourquoi le sucre n'avait pas encore besoin d'être, au moment de l'extirpation, en quantité suffisante dans l'urine. Il faudrait faire l'expé- rience, d'abord en enlevant le foie, et ensuite en injectant du curare. Ainsi il n'est pas prouvé que le diabète curarique peut survenir après l'extirpation du foie. Comme le glycogène doit se trouver également dans d'autres organes que le foie, et qu'on ne peut plus douter que la graisse est également une source de sucre, il serait insensé de dire que le foie seul est en jeu dans toutes les espèces de diabète. 11 n'en est donc que plus étonnant qu'après avoir soumis à la critique tous les faits on ne puisse affirmer l'existence d'une seule sorte de diabète pouvant se développer après suppression du foie. Je fais abstraction du diabète par l'oxyde de carbone qui, d'après Eckhard, survient encore après résection des nerfs splanchniques. Ce point méri- terait des recherches détaillées. Quant à la nature du diabète par phloridzine, Mering {Zeilschr. f. klin. Med., xiv, 422, 1888) semble l'attribuer à une production plus forte de sucre, qu'il explique par la décomposition plus active de l'albumine. Mais il parle également d'une utilisation amoindrie de sucre. D'après Minrowski [Zeitschr. f. klin. Med., xiv, 145), il s'agit probablement ici non d'une plus forte production de sucre, mais d'une atténuation de l'utilisation de sucre dans l'organisme ou d'une modification de l'activité sécrétoire des reins. Comme la sécrétion de l'eau dans les reins n'a aucun rapport avec la sécrétion du sucre diabétique, il faut supposer que cette dernière est basée sur un travail spécifique de certains tissus épithéliaux des reins. Tout diabète serait donc une glycosurie rénale, et la phloridzine ne ferait qu'augmenter cette action. Or pareille supposition se com- plique de ceci. Henriques a constaté que le sucre de sang se trouvait sous deux formes : libre, et composé, comme dans la jécorine. Dans l'analyse habituelle du sucre du sang on obtient tout le sucre, parce que la jécorine est alors décomposée et perd son sucre. Il est maintenant très probable que c'est seulement le sucre libre, et non le sucre com- posé, qui est éliminé dans les reins. Il est possible qu'il n'y ait pas de sucre libre dans le sang normal : voilà pourquoi il n'est pas éliminé du sang par les reins. 11 n'y a pas GLYCOGÈNE. 491 jusqu'ici de recherches pour établir a partir de quelle proportion de sucre libre la glycosurie apparaît. Il est clair que, pour un poids égal de sucre trouvé au dosage, les proportions de sucre libre peuvent être très différentes. Nous ne sommes donc pas en mesure de dire que le diabète par phloridzine constitue un état particulier, et oblige à créer une maladie nouvelle, le diabète rénal. N. ZuNTz {A. P., 570, 1895) a essayé de démontrer qu'il fallait chercher dans le rein la cause du diabète par phloridzine. Il injectait directement de la phloridzine dans l'artère rénale, et il voyait alors que le rein ayant reçu de la phloridzine se'crétait plus tôt une urine sucrée que l'autre rein. Mais on ne sait pas si la phloridzine ne s'est pas dissociée elle-même dans le sang en phlorétine et sucre. Car alors le reininjectè de phloridzine doit naturellement sécréter plus tôt du sucre, puisque l'injection de phlorizine est indirec- tement une injeclion de sucre. Il resterait encore à savoir si la phloridzine ne décom- pose pas les glycosides ou la jécorine pour donner du sucre libre qui n'existait pas auparavant. L'hypothèse du diabète rénal n'a donc pas de base certaine. Mais il faut avouer, au point de vue physiologique, qu'en principe on peut admettre qu'il y a un diabète rénal, car on suppose généralement que le rein sain n'est pas abso- lument réfractaire au passage du sucre. On a voulu étalDlir que d'autres matières que la phloridzine produisent le « diabète rénal ». Ainsi Carl Jacobj (A. P. P., xxxv, 213, 1895), premier assistant du pharmacologue Schmiedeberg, dit que les substances apparte- nant au groupe de la caféine {ac. caféosulfonique, caféine, théobromine) amènent chez le lapin, en même temps qu'une plus forte sécrétion d'urine, une sécrétion de sucre dans Vurine, dont la cause n'est qu'une sécrétion plus intense qui doit donc être considérée comme un réel diabète rénal. ^ Bien que Naunyn {Der Diabètes mellitus, 1898, p. 106) adhère à cette opinion, elle est complètement injustifiée. Car, pour qu'on puisse supposer le diabète rénal, il faut que les proportions de sucre du sang n'aient pas augmenté. Jacobj n'a point fait cette détermination. Il est non moins certain qu'une diurèse augmentée n'aura, même dans le cas d'une hyperglycémie, aucune influence sur la glycosurie. 11 faut citer ici comme preuve, que G. Embden et H. Salomon (Zeitschr. f. rf. gesammte Biochem., vi, 66, 1904), dans leurs célèbres recherches avec des acides amidés chez des chiens privés de pancréas, ont obtenu une très forte augmentation de la sécrétion de sucre avec intense diurèse, tandis qu'après ingestion d'urée la diurèse devient quatre fois plus forte, sans la moindre influence sur la quantité du sucre sécrété. A cause de la diurèse plus forte, la proportion de sucre dans l'urine est même diminuée d'un tiers. Quant à la glycosurie produite par la phloridzine, Ludwig Knopf [A. P. P., xlix, 128 et 133, 1903, et Inaug. Dissert., Marburg, 1902) a démontré que la diurèse augmentée n'exerce aucune influence sur l'intensité de la sécrétion de sucre. « Pour observer l'influence de la diurèse, on augmentait la quantité des liquides absorbés, et un chien reçut dans l'estomac, par la sonde œsophagienne, deux fois 500 ce. d'eau. La sécrétioii de sucre resta absolument la même qu'auparavant, bien que la quantité d'urine fût augmentée d'environ 120 à 150 ce, » On constata encore que, si l'on donnait de l'asparagine aux chiens empoisonnés par la phloridzine, il y avait augmentation de la diurèse et de la sécrétion de sucre. Si l'on donne de l'urée, la diurèse est dans les mêmes conditions fortement augmentée, sans que la quantité de sucre excrétée pro die soit changée, La conception de Carl Jacobj que, si la présence de sucre dans le sang détermine une forte diurèse, il y a, par ce fait même, sécrétion de sucre dans l'urine, ne peut donc pas être reconnue juste. Carl Jacobj dit plus loin que d'autres diurétiques que ceux qui appartiennent au groupe de la caféine peuvent, avec l'augmentation de la sécrétion, faire passer le sucre dans l'urine, ainsi que cela est prouvé par les recherches de Bock et Hoffmann (A. P., 1871, 550), qui, après injection intra-veineuse d'une solution de 1 p. 100 de NaCl, ont vu appai'aître une glycosurie qu'ils expliquaient, non par l'activité sécrétoire plus grande du rein, mais d'une autre façon. Naunyn {Der Diabètes mellitus, 1898, p. 32), également, dit en 1898 : « C'est peut-être la forte diurèse qui est la cause de cette glycosurie passagère. » 11 est assez curieux de constater qu'il y a 26 ans (1872), E. KiJLz (C. Eckhard's Bei- trâge, vi, 117) a expliqué la cause du diabète de NaCl par une excitation des centres 492 GLYCOGÈNE. nerveux glycoso-formateurs, car ce diabète ne survient pas après la résection des nerfs splanchniques. Donc actuellement il nous manque la preuve qu'il y a des torraes de diabète ame- nées seulement par des modifications de la fonction du rein. Abstraction faite de cela, les recherches de Jacobj, Knopf, Embden et Salomon prou- vent d'une façon classique que l'intensité de la diurèse, aussi bien dans le diabète par phloridzine que dans le diabète pancréatique, n'a dans de très grandes limites aucune influence sur la sécrétion du sucre. La sécrétion de l'eau et celle du sucre sont évidem- ment deux processus différents qui se passent dans diverses régions du rein. On com- prend donc que le sucre est quand même un diurétique (Lamy et Mayer, B. B., lvh, 27, 1904). Il exerce peut-être une inlluence sur Je centre hydrurique de la moelle allongée. Les recherches de Carl Jacobj et Ludwig Knopf contiennent encore beaucoup d'autres résultats importants. Car, d'après Knopf, le dérivé ammoniacal de l'asparagine augmente fortement la glycosurie dans le diabète par phloridzine, comme cela fut cons- taté également pour le diabète pancréatique, par G. EMBDKNetH. Salomon, non seulement pour ce dérivé, mais dans les dérivés ammoniacaux analogues. D'après F. Jacobj, il y a, dans le diabète par phloridzine, également augmentation de glycosurie par la caféine et la théobromine, qui sont aussi des dérivés ammoniacaux; mais qui se distinguent dans leur structure chimique des acides amidés, employés par Knopf, Embden et Salomon. Car caféine et théobromine ne sont pas des acides amidés, mais des dérivés puri- niques. Si l'on veut considérer l'augmentation de la glycosurie diabétique amenée par les acides amidés comme preuve qu'ils se transforment en sucre, il faudrait consi- dérer également la théobromine et la caféine comme matières donnant du sucre. Au lieu de faire cette supposition aventureuse, il est plus naturel de penser qu'aussi bien les acides amidés que les dérivés puriniques agissent sur le foie, parce qu'ils sont des dérivés de l'ammoniaque, et qu'ils mènent indirectement à une formation plus grande de sucre. Adrénaline, strychnine, curare peuvent aussi être considérés comme des dérivés ammoniacaux. Mais il est plus probable que toutes ces bases produisent l'hyperglycémie par l'intermédiaire du système nerveux. Je sais que ma thèse a un côté faible, car les expériences avec les corps puriniques sont faites sur des animaux empoisonnés avec de la phloridzine, auxquels on a, par la phloridzine, fourni de grandes quantités de sucre : aussi le corps contient-il toujours du glycogène. G. Fichera (m Ziegler's Beitr. z. pathol. Anat., xxxvi, 293, 1904), qui a récemment étudié le diabète par phloridzine, dit qu'en rassemblant ses résultats histo- logiques, il arrive à cette conclusion que, malgré la glycosurie intense, le glycogène n'a pas diminué ni disparu dans les organes où on le trouve habituellement : bien au con- traire, il augmente d'autant plus que l'on injecte des doses de phloridzine toujours plus grandes. Il faudrait donc répéter ces essais d'ingestion de dérivés puriniques sur des chiens sans glycogène privés de pancréas. G. Embden et H. Salomon étaient bien conscients de la nécessité d'une pareille expérience. G. Embden, chef du laboratoire chimique de Francfort, s'est convaincu, comme il a bien voulu me le dire en réponse à une question que je lui avais adressée, par l'analyse du glycogène du corps des chiens privés du pancréas, que le glycogène qui reste ne peut pas servir à expliquer l'augmentation de la glycosurie observée après l'introduction des acides amidés. C'est justement parce que ces expériences ont été faites pour la première fois sur des animaux sans glycogène, que je leur ai attribué une si grande valeur, bien qu'il soit désirable de les répéter sur des chiens opérés comme je l'ai dit plus haut dans mes recherches sur le diabète pancréatique. La théorie du diabète par phloridzine a été élargie par une série de recherches de Georges Rosenfeld, qu'il faut étudier avec un intérêt particulier. Si l'on laisse, d'après G. Rosenfeld {Verhandl. d.Congr.f. inn. Med., 1893, 359), jeûner o jours un chien de 3 à 5 kilogrammes, si l'on donne le G" et le 1" jour journellement 2 à 3 grammes de phloridzine par kilogramme, quand on introduit en même temps des hydrates de carbone dans l'alimentation, et qu'on sacrifie l'animal le 8«jour, on ne trouve pas d'infiltration graisseuse du foie. Mais si le 6' ou le 7'' jour on donne avec de la phlor- GLYCOGÈNE. i93 idzine de la graisse ou rien, l'animal sacrifié le Séjour a un foie graisseux. Tandis que, d'après Rosenfeld, la proportion de graisse du foie par rapport aux substances sèches est chez le chien qui jeûne de 10 p. 100 [Zeitschr. f. klin. Med., xxvm, 264, 1895), il croit qu'alors, après phloridzine, cette proportion de graisse s'élève de 25 à 75 p. 100, tandis que le glycogène disparaît presque complètement. Si l'on donne le 6^ et le 7« jour de la viande à côté de phloridzine, cela rend également plus difficile la formation de graisse dans le foie iloc. cit., 25G, ISO.'i). La graisse du foie disparaît au bout de 2 jours environ lorsqu'on cesse de donner de la phloridzine, plus vite encore si l'on introduit du sucre dans l'alimentation {loc. cit., 263, 1885). L'examen microscopique de la graisse du foie prouve que la graisse se trouve non dans les tissus conjonctifs, mais dans les cellules du foie: elle n'est pas dans les noyaux des cellules, mais garnit les mailles du protoplasme qui autrement sont remplies par du glycogène. L'infiltration se trouve surtout dans les cellules qui sont voisines de la veine centrale : il n'y en a pas à la périphérie des acini. Georges Rosenfeld a, comme nous l'avons déjà dit, prouvé par des expériences ingé- nieuses que la graisse du foie, qui se produit dans l'empoisonnement par phloridzine, est due à l'immigration de la graisse des autres parties du corps; qu'il s'agit donc ici d'une infiltration de graisse. G. Rosenfeld a constaté que cette immigration de graisse a lieu seulement quand le foie est pauvre en glycogène. Dans des expériences que j'ai faites avec le prof. Bernhard Schondorff sur des chiens phloridzinés traités conformément aux prescriptions de G. Rosenfeld, je me suis également convaincu du fait que le foie contenant de la graisse est extrêmement pauvre en hydrates de carbone. Dans des expé- riences que M™^ Gatin-Gruzewska a faites dans mon laboratoire, où elle obtenait, par l'introduction de grandes quantités d'amidon, de sucre et d'un peu de viande, des accu- mulations énormes de glycogène dans le foie, j'ai vu qu'il ne se formait que très peu de graisse. II semble donc que l'organisme, après l'introduction de grandes quantités d'hydrates de carbone, accumule d'abord de grandes quantités de ces matières de réserve avant que commence la transformation du sucre en graisse. Grand avantage, puisque le sucre vient avant la graisse comme source d'énergie. Car le glycogène se transforme en sucre rapidement, facilement et en grande quantité, tandis que la trans- formation de graisse en sucre nécessite un temps beaucoup plus long. Peut-êti-e même la graisse n'est-elle utilisable par l'organisme qu'après s'être d'abord transformée en sucre. Mais comme, après la consommation de la réserve de glycogène, qui est hâtée par l'empoisonnement par la phloridzine, immédiatement la graisse immigrée dans le foie prend la place du glycogène, on peut conclure que cela a pour but de remplacer la fonction du glycogène, c'est-à-dire de former du sucre. N. Zuntz [Berliner klin. Wochenschr, n° 3, 70, 1904) a vu diminuer, dans le diabète par phloridzine, la valeur du quotient respiratoire jusqu'à 0,63. — On voit de même qu'après l'introduction de phloridzine la sécrétion de sucre dans le diabète pancréatique augmente malgré l'absence du glycogène. Cette thèse jette un peu de lumière sur la formation des graisses dans le foie amenée par d'autres interventions. Ainsi il y a, d'après J. Athanasiu {A. g. P., lxxiv, 511, 1899) et Taylor {Journal of expérimental medicine, iv, 399, 1899), dans l'empoisonnement par le phosphore, une infiltration du foie avec de la graisse, et en mèiue temps diminution du glycogène. D'après Lœper et Couzon {B.B., iv, 33, 1452, cités par M. H. Bierry et M™" Z. Gatin- Grdzewska) l'adrénaline augmente le glycogène du foie : d'après Doyon [B. B., iv, 66, 16 janvier 1904), elle le diminue. Noël Paton (B. Drummond et Noël Paton, J. P., xxxi, 1904, 92) avait déjà constaté que le glycogène diminue après l'injection d'adrénaline. Au même résultat sont récemment arrivés M. H. Bierry et M'"'' Z. Gatln-Gruzewska (B. B., Lxai, 902, 27 mai 1905). Les foies contenant de la graisse résultant de l'empoisonnement par l'arsenic et l'antimoine sont, d'après Salkowski (C. W., 186.'j, 353), Rosenraum [S^-Petersburger med. Wochenschr., 1881, n° 28), Léo Mohr {Ueber den Einjïuss darmreinigender Mittel auf den Glykogengehalt (1er Leber. Inaug-Dissert. Wiirzburg, 1904), pauvres en glycogène. Le même phénomène a lieu après la respiration de chloroforme, ce qui est relaté par F. RosEmA.mi [Dissertât. Dorpat. A.P.P., 1879). Le même auteur {S*-Pctcrsburger med. 494 GLYCOGÈNE. Wochenschr, 1 881, n° 28) nous apprend que le glycogène du foie diminue par le phosphore, la strychnine, la morphine. Une méthode pour produire avec certitude un foie grais- seux par l'introduction d'alcool, est communiquée par Rosenfeld [Ergebnisse derPhysiol., I, 1903, 71). Des chiens qui avaient jeûné pendant cinq jours recevaient deux fois par jour 3 et demi à 4 ce. d'alcool par kilogramme de corps sans aucune autre nourriture. S'ils recevaient plus de 4 de ces doses, leur foie contenait toujours de la graisse. Si on leur donnait en même temps du sucre pour former du glycogène, le foie ne deve- nait pas graisseux. Même la quantité de graisse tombait, comme dans le cas d'alimen- tation avec des hydrates de carbone, au-dessous (par rapport aux substances sèches des 10 p. 100 du foie normal, sans que la proportion de la graisse du foie par kilo- gramme du corps tombât au-dessous de la normale. V. Mering et Minkowskt ont vu, après l'extirpation partielle du pancréas, que le foie, riche en graisse, est pauvre en glycogène ; mais il s'agit là d'infiltration de graisse, de sorte que des animaux n'ayant pas des réserves de graisse, n'ont pas de foie graisseux après l'extirpation du pancréas (Rosenfeld, loc. cit., i, 1903, 72). Ces faits furent confirmés par E. Wiersma {Inaug. -Dissert. Groningen, 1886) pour le chloral, par B. Demant (Z. p. C, x, 442, 1886) pour la strychnine elle curare, par Kissel (Inaugi. Dis.ser^ Wiirzburg, 1894) pour le sublimé. En général, ces foies contenant de la graisse sont de nature physiologique, car ils peuvent se réparer rapidement et facilement, sans qu'il y ait lésion des cellules du foie. Il y a cette loi que les foies qui sont très riches en glycogène, sont pauvres en graisse, et que ceux qui sont riches en graisse sont pauvres en glycogène. En général on voit le foie riche en graisse s'il y a privation de nourriture; riche en glycogène s'il y a nour- riture abondante avec des hydrates de carbone. Cependant il se trouve, comme dit G. Rosenfeld [VerhandL d. Cong. f. inn. Med., 1893, 359), certaines conditions de nutri- tion 011 le foie contient de la graisse et du glycogène en quantités égales. Il s'agit peut- être là de certaines formes de passage. La production de ces foies graisseux par des actions toxiques peut s'expliquer par ce fait que les poisons font plus ou moins disparaître d'une façon quelconque le glycogène du foie (trouble de la synthèse glycogénique, transformation augmentée du glycogène en suci'e, sécrétion augmentée de sucre par les reins, innervation, etc.). Le foie n'est alors plus en état de maintenir le taux normal de sucre du sang. Une immi- gration de graisse doit donc avoir lieu, que le foie peut transformer en sucre. Dans le cas d'un jeûne prolongé, qui fait disparaître le glycogène du foie, le foie devient plus riche en graisse par immigration. On a publié là-dessus récemment d'intéressantes recherches de A. Gilbert et J. Jomier [B. B., lvii, 404 et C. P., 1905, 89). Fr. N. Schultz {A. g. P., Lxv, 299, 1897) a, comme je l'ai dit plus haut, démontré que, pendant le jeûne, le sang devient plus riche en graisse. Cela explique également les conditions trouvées par Rose.nfeld, pour l'origine du foie gras après empoisonnement par phloridzine. Le jeûne avant la phloridzine a pour but l'appauvrissement du foie en glycogène; l'injection de phloridzine fait disparaître les derniers restes dfi glycogène. Pour que le foie puisse donner au sang le sucre nécessaire, de la graisse immigre dans ie foie qui la transforme en sucre, et le foie se charge de graisse. Qu'il s'agisse ici de graisse immigrée, on le voit par le fait que des animaux pauvres en graisse ne peuvent pas dans les conditions susdites, avoir un foie gras. Il est clair que la nourriture graisseuse, comme le prouve Rosenfeld, favorise le développement du foie gras. C'est un fait très intéressant que l'alimentation avec du sucre au lieu de graisse, empêche la formation du foie gras. On comprend bien pourquoi une alimentation d'albumine rend impossible, ou au moins plus difficile, chez les ani- maux phloridzinisés le développement du foie gras, car toute viande introduite intro- duit du glycogène, et toute introduction d'albumine a pour conséquence une économie d'hydrates de carbone. Le défaut de sucre est donc moins à craindre. Les faits communiqués ne laissent pas de doute que le sucre sécrété dans le diabète phloridzique provient non seulement du glycogène, mais aussi de la graisse. Cela semble être rigoureusement prouvé par l'augmentation de la glycosurie, glycosurie que l'empoisonnement par phloridzine produit même chez des animaux privés de pancréas, dont le corps ne contient pas de glycogène. Il serait désirable que l'on répétât cette recherche sur des animaux rendus absolument dépourvus de glycogène d'après la méthode GLYCOGÈNE. 495 de LuTHJE et la mienne. Car, comme je l'ai prouvé, le quotient inexact de 2,8, donné par MiNKOwsKi pour — , prouve qu'on a expérimenté avec des chiens qui n'étaient pas abso- lument dépourvus de glycogène. Tout fait croire que dans le diabète par phloridzine le sucre sécrété par un animal, devenu pauvre en glycogène provient aussi essentiellement de la graisse. Gela correspon- drait parfaitement avec la présence relatée par v. Mering de l'acétone et de l'acide oxybutyrique dans l'urine du chien phloridzine. La présence des corps acétoniques a été d'ailleurs constatée, comme celle de l'acide biacétique, dans les expériences d'empoi- sonnement avec la phloridzine, expériences faites sous la direction de Th. Rumpf, par Hartogh et 0. ScHUMu (A. P. P., xlv, ii). Edouard Kûlz et A. E. Wright (Z. JB., xxvii, 181, 1890. — A. E, Wright, On some points connected with the Pathology and treatements of Diabètes. Grocer's research Scholarship lecture London, 1891, 16 et Jahresbericht f. Thierchemie, 1891, 404) avaient déjà trouvé la réaction (le l'acide biacétique dans le diabète par phloridzine, tandis qu'il? n'avaient pu trouver d'acétone ni d'acide oxybutyrique. Il s'ensuit de tous ces faits que, dans le diabète par phloridzine, le sucre provient aussi bien du glycogène que de la graisse, et que, dans le cas d'une alimentation graisseuse suffisante, comme Ta découvert v. Mering et comme l'a confirmé surtout Th. Rumpk, ce diabète n'est nullement accompagné d'une augmentation dans la sécrétion d'azote. Comme la phloridzine amène une si rapide évacuation de glycogène du foie, et qu'ensuite le foie devient graisseux, la part que prend le foie au diabète est doue établie. J'ai déjà dit pourquoi les recherches de v. Mering, de Thiel et de Minkowsri avec des oies phloridzinées privées de foie ne prouvaient rien contre cette conclusion. Les diabètes physiologiques. — Aux diabètes physiologiques appartient d'abord le diabète d'inanition découvert par Hofmeister (A. P. P., xxv, 35S). Des chiens amaigris deviennent diabétiques après une faim prolongée. Si on leur donne 1/3 à 1|4 des quan- tités d'amidon qui normalement ne produisent pas de glycosurie, ils sécrètent du sucre. J'en donne ici l'explication hypothétique suivante. L'animal doit faire son métabolisme par une forte consommation de glycogène et de graisse, et beaucoup de sucre provient de ces deux matières de réserve. Si l'on donne au sang encore plus de sucre dans ses aliments, le foie, devenu, à cause de son activité plus intense, plus riche en ferments, n'est pas en état de faire disparaître l'excédent de sucre dû à l'accumulation de glycogène. Il faut citer également le diabète par contention, observé chez les chats par R. Bôhm et F. A. Hoffmann {A. P. P., viii, 171 et 375). Il se produit même quand il n'y a pas trachéotomie et quand l'animal est bien enveloppé pour être protégé contre le refroidis- sement. Le diabète par contention est un phénomène passager, même si la contention dure : il est causé, à mon avis, par la lésion des nerfs sensitifs de l'animal qui amènent un réflexe sur le foie. L'introduction de la sonde dans la vessie, décrite par Bôhm et Hoffmann, doit causer une vive excitation. D'après une communication verbale que le D"" Grube m'a faite, les chats, sur lesquels il a pratiqué beaucoup d'expériences, réagis- sent facilement, par une glycosurie marquée, à toute intervention. On peut considérer comme une troisième forme de diabète physiologique, le diabète par le froid, décrit également pour la première .fois par Bohm et Hoffmann {loc. cit., p. 271 et 375). Ici il s'agit également d'une si forte excitation réflexe du foie que sou- dainement, comme dans la piqûre bulbaire, de grandes quantités de sucre sont déver- sées dans le sang. Le violent elfet rétlexedu froid, saisissant la peau, se manifeste par le tremblement des muscles. Une quatrième forme du diabète physiologique est la glycosurie alimentaire, dont le mécanisme se comprend sans peine. SOMMAIRE!. — § l. Découverte du glycogène (228). n. Analyse qualitative et quantitative du glycogène (235), — Remarques préliminaires (235). — Chimie du glycogène (235). — Extraction du glycogène des organes par l'eau bouillante 1. Les numéros entre parenthèses se rapportent aux pages du Dictionnaire. 496 CLYCOGÈNE. (244). — Méthode de Brûcke Kulz pour le dosage du glycogène dans les organes (246). — Description de la méthode (246). — La défectuosité essentielle de la méthode de Brucke-Kûlz est dans l'entraînement du glycogène qui se précipite avec l'albumine par le réactif de Brûckk- KiJLz est une préparation impure, et le dosage des cendres ne corrige pas cette erreur (247). — Des recherches récentes semblent établir que le glycogène, au moins celui du foie, est en partie combiné chimiquement à d'autres substances (249). — L'emploi du réactif de Brùcke- KiJLZ, dans la méthode de Ktjlz, diminue le rendement en glycogène, parce qu'il en précipite une partie (252). — Indications pour l'analyse de glycogène par la méthode de Pfluoer (254). — Méthode de F. W. Pavy pour le dosage quanlitatit du glycogène (262). — Ana- lyse quantitative du glycogène d'après Pfluger (261). — Remarques préliminaires (261). — Preuves que le glycogène dissous dans une solution forte de potasse n'est pas attaqué par l'ébullition avec cette solution (262). — Expériences I. Glycogène préparé sans les acides de la viande, sans l'ébullition avec la potasse, sans l'action des réactifs de BrIjoke (262). — Exp. II. Extraits aqueux de la pulpe musculaire neutralisée. Précipitation du glycogène par l'alcool. EbuUition avec une solution forte de potasse (264). — Préparation d'une solution de glycogène sans le réactif de Brûcke avec de la viande de cheval (solution dans une liqueur contenant 5,6 p. 100 do potasse, précipitation par l'alcool et purification) (265). — Etlets de l'ébullition avec la solution forte de potasse (265). — Dosage du glycogène des organes avec emploi d'une solution forte de potasse (265). — Action sur le glycogène d'une solution de potasse diluée de 1 à 2 p. 100 (26lj. — Indications pour le dosage de glycogène d'après la mé- thode de Pflûger (277). — Extraction du glycogène des organes (278). — Précipitation et iso- lement du glycogène (278). — Dosage du glycogène par inversion en glycose (279). — Con- trôle d'après Volhard (281). — Tableau des chifïVes respectifs de cuivre, de sucre et d'oxy- dule de cuivre (282). — Justification des indications données (284). — Précipitation des hydrates de carbone par l'alcool dans une solution des organes avec 15 p. 100 de KOH (285). — Analyse quautitative du glycogène (d'après Austin) (289); par la colorimétrie (292); par le dosage polarimétriquc (294). — Résumé de la méthode d'analyse de Pflijger (294). § III. Extension du glycogène dans le règne animal (295). — Foie (296). — Pancréas (300). — Glandes de l'appareil digestif (300) . — Poumons (300). — Glandes salivaires et autres glandes des vertébrés (300). — Reins (301). — Glandes génitales et leurs annexes (302). — Muscles (303). — Système nerveux (304). — Epithéliums (304). — Tissus conjonctifs (305). — Sang, vaisseaux et lymphatiques (306). — Tableau I, donnant la teneur en glycogène des tissus des verté- brés, des embryons de vertébrés et invertébrés. — Tableau II, donnant la teneur eu glyco- gène des animaux et des champignons. — Glycogène des animaux inférieurs (307). — Tableaux de Barfurth (309). — Distribution du glycogène dans les organes divers du même individu (311. — Teneur en glycogène des muscles de droite et de gauche (312). — Teneur en glycogène des muscles symétrique de la partie droite et de la partie gauche du corps (313). — Glycogène des organes du nouveau-né chez l'homme (314). — Glycogène du corps de la grenouille (315). — Glycogène du corps du chien après quatre semaines d'inanition (316). § IV. Origines du glycogène (317). — Etat actuel de la question (317). — Production du gly- cogène aux dépens des hydrates de carbone (320). — Recherches de Jacob Otto et des autres élèves de Voit (322). — Recherches d'ÛTTO sur l'alimentation avec le glycose (323). — Le saccharose, le glycose, le lévulose peuvent-ils être transformés directement en glycogène par le foie, ou doivent-ils subir une transformation préalable? (326), avec le maltose (328), avec le lactose (329). — Recherches de Lusk, Cremer, Kausch et Socm (329). — Recherches d'ÛTTO avec le galactose (330). — Le lactose peut-il être employé par le foie pour donner du glycogène ? (330). — Recherches d'E. Kùlz (331). — Nutrition avee les pentoses, par Salkowski, m. Cremer, J. Frentzei., C. Neuberg et J. Wohlgemuth (338). — Nutrition avec la glycérine (343). — Production de glycogène aux dépens de l'albumine (344). — Recherches de Cl. Bernard, E. Klilz, Tscherinoff, S. Weiss, Dock, Luchsinger, Naunyn, S. Wolffberg, V. Merikg, FiNN (344). — Recherches de Kïii.z sur les pigeons pour démontrer la formation de glycogène par l'albumine (352). — Recherches de Kulz sur les poules (nutrition avec l'albumine (353). — Recherches de Schôndorff sur la nutrition des grenouilles avec la caséine (352). — Recherches de Blumenthal et de Wohlgemuth sur la nutrition des grenouilles avec de la caséine de l'albumine et de la gélatine (362). — Recherches de Bendix sur la nutrition des animaux à sang chaud avec la caséine et la gélatine (363). — Recherches de RoLLY sur les animaux strychnines (365). — Recherches avec la phloridzine de Mering, de Schôndorff sur le maximum du glycogène (367), de Prausnitz (370), de Rumpf (371). de Kumagava (372), de Hédon (372), sur les animaux sans pancréas. — Combinaisons faibles des sucres et glycosides (374). — Expériences de Kùlz sur l'alimentation des diabétiques avec la caséine, et observations cliniques (376). — Expériences de Liithje sur la nutrition d'animaux sans pancréas par l'albumine (380). — Expériences de Pflijger sur le même sujet (381). — Observations de Pflijger relatives à l'impossibilité de l'hypothèse que le sucre des diabétiques provient de l'albumine (385). — Formation de sucre aux dépens de la graisse (391). — L'ali- mentation grasse n'augmente pas l'élimination du sucre des diabétiques (391). — Formation d'hydrates de carbone par la graisse chez les plantes (392). — Faits établissant la formation GLYCOGÈNE. 497 d'hydrates de carbone par la graisse chez les animaux (E. Bataillon, et E. Couvreur) (393). — Hypothèses sur les processus chimi(iues de la formation du sucre aux dépens de la graisse chez les animaux (393). — Relations des acides amidés avec les hydrates de carbone, d'après Neuberg et Langstein, P. Mayer, Rudolf Cohn, Oscar Slmon, Fried. Kraus (39G). — Désa- midation des acides amidés donnant des acides gras et amenant la glycosurie. Recherches de Léo Schwarz (399). — Relations de l'acide butyrique avec les acétones (309). — Nutrition avec des acides gras, par L. Schwarz (400). — Réponse aux objections de Fr. Kraus, qui dit que les diabétiques n'ont point de graisses (402). — Expériences relatives à la formation de sucre dans un mélange de bouillie hépatique et de graisse, d'après J. Seegen, J. Welss, E. Abderhalden et P. Rona, A. Hesse, Hiluesheim et Leathes, K. Grube (404). — Forma- tion de sucre par la glycérine, d'après M. Cremer et Luthje, avec la glycérine (407). — Valeur très élevée du quotient — que n'explique pas la formation de glycogène (408). — Trois séries d'expériences dans lesquelles, pendant plusieurs semaines, un chien dépancréatisé fut nourri exclusivement avec de l'albumine (409). — Calcul du quotient respiratoire d'après Maonus Levy, et réponses aux objections qu'il fait relatives à l'impossibilité d'admettre la graisse comme origine du sucre (409;. — Augmentation du glycogène dans le foie après injection de substances dont ne peut provenir le glycogène (413). — Lieux de formation du glycogène, d'après T. G. Brodie, K. Grube, L. Errera, Barfurth, Cl. Bernard, E. Klilz, A. Cramer (414). V. Destruction du glycogène (417). — Le glycogène se transforme en glycose dans le foie. Étapes intermédiaires. Dextrine et maltose, d'après Cl. Bernard, Musculus et Mering (417). — Recherches de E. Kulz et J. Vogel sur la formation de maltose, d'isomaltose et de dextrose aux dépens du glycogène hépatique (417). — v. Wittich découvre le ferment diastasique du foie (418). — Remarques de Pavy, Foster, Paton et Dastre (418). — Salkowski démontre par le chloroforme qu'il s'agit bien d'une zymase qui transforme le glycogène du foie en glycose (418). — Rôhmann et Blvl trouvent cette zymase dans le sérum du sang (419). — Action du système nerveux sur la formation du sucre dans le foie (420). — Piqûre du bulbe, d'après Claude Bernard (420;. — Développement de l'expérience de Claude Bernard. Reclierches de Bock et Hoffmann, M. Bernhardt, M. Schiff, W. Dock (421). — Glycosurie après excita- tion du vague (Cl. Bernard) (421). — Expériences d'Eckhardt sur les nerfs qui agissent dans cette glycosurie nerveuse, et recherches de Pavy, v. Graefe, v. Hensen, Marc Laffont, E. Cavazzani (422). — Le diabète provoqué par la morphine et les sels neutres ne se produit plus après section des nerfs splanchniques. Expériences de Eckhard, E. KitLZ. M. H. Fischer (424). — Mêmes résultats pour le diabète strychnique. Expériences de Langendorff et GiJRT- LER, H. Rœber et P. Bongers (425). — L'extirpation du foie et la ligature de ses vaisseaux rend la piqûre bulbaire inefficace. Expériences de Moos et M. Schiff (425). — L'éthérisation des grenouilles empêche l'action de la piqûre bulljaire (426). — Opinion de Claude Bernard sur le mécanisme par lequel la piqûre du bulbe produit la glycosurie (426). — Explication de Pfluger, par analogie avec l'expérience de HEioENHAiNsur l'innervation des glandes salivaires (426). — Des nerfs sensibles divers produisant la glycosurie réflexe. Expériences de Cyon et Aladoff, Filehne, m. Laffont, E. KtJLZ, C. Eckhard, M. Schiff, Bôhm et Hoffmann, J. Ryndsjun, F. Froning (427). — Signification physiologique de la glycosurie réflexe (428). — Observations cliniques sur des malades ayant un diabète d'origine nerveuse (429\ — Glyco- surie réflexe (431). — Échange des hydrates de carbone entre le foie et le sang :)432). — Rap- ports du poids du foie avec sa teneur en glycogène. Expériences de Pavy, B. Schôndorff, Mm« Gatin-Gruzewska, e. Kûlz (432). — Rapports du travaU'inusculaire avec le glycogène hépatique. Recherches de 0. Langendorff et Hugo Schulz (433). — Le sang artériel plus riche en sucre que le sang veineux. Recherches de Claude Bernard, P. Pavy, Mering, Jacob Otto (434). — Le travail musculaire fait croître la diff'érence de sucre entre les sangs veineux et artériel. Expériences de Chauveau et Kauffmann (435). — Glycogène des muscles (435). — Expé- riences de Pfluger pour établir que le travail musculaire n'a pas pour unique origine le glyco- gène (436). — Influence du travail musculaire sur la consommation du glycogène. Expériences de Cl. Bernard, S. Weiss, Th. Chandelon, E. Manche, W. Marcuse, E. KtJLz, J. Ranke, Otto Nasse, G. Meissner (437). — Rapports du travail musculaire avec la formation de sucre dans les muscles, d'après J. Ranke, Otto Nasse, et G. Meissner (444). — Fermentation intra-musculaire et rigidité cadavérique, d'après Magendie, Claude Bernard, Chandelon, M. Werther (444). — Disparition rapide du glycogène dans les muscles après la mort, d'après E. KtJLZ, A. Cramer, Bôhm et Hoffmann (445). — Dérivés du glycose dans les muscles après la mort, d'après Panormopf, W. A. Osborne et S. Zobel, Pavy, Brown et Morris (446). — Les hydrates de carbone du sang. Recherches de Tiedemann et Gmelin, Thomson, Magendie, Frerichs, Claude Bernard, v. Mering, Bleile, J. Otto, J. Seegen, E. Kûlz et K. Miura, M. PicKH\RDT, Abeles, F. ScHENCK, GtJRBER, V. Henriques, Drechsel, Baldt, R. Kolisch et R. V. Stejskal, h. j. Bixg, Figuier, Sanson, P. David, Naunyn, S. J. Philips, G. Embden (447). — Rôle du sucre dans les échanges, d'après Claude Ber.nard, Lépine, Barral, Arthus, DICT. de physiologie. — T0.ME VU. 32 498 GLYCOGENE. Spitzer, Rôhmann, F. Kraus (449). — Incertitude des recherches actuelles sur la glycolyse, l'autolyse et les zymases (450). VI. Le Diabète (450). — De l'hyperproduction de sucre (450). — Hyperproduction provoquée par une transformation plus abondante de glycogène en sucre, ou par une transformation moindre de sucre en glycogène. Expériences de Claude Bernard, E. KtJLZ, Frerichs, Grohe, M. Kauffmann, E. Reichard, 0. Minkowski, W. Kausch, J.-G, Otto (451). — Hyperproduc- tion liée à une transformation plus active de graisse en sucre, ou à une moindre transforma- tion de sucre en graisse. Expériences de V. Noorden, Hédon, Kauffmann (454). — Oxydation du sucre chez les diabétiques, d'après Maonus Lévy, Th. Rumpf, V. Kossa, Albertoni, Lamy et Mayer, V. Harley, Voit et Pettenkoffer, H. Léo, Weintraud et Laves, Laves, Stijve, Katzenstein, Naunyn, Bouchardat, Trousseau, Kûlz, Zimmer, Mering, Chauveau et Kauff- mann, Kausch (455). — Les quatre sortes de diabète (459). — L'extirpation partielle du pan- créas produit un diabète trauraatique. Recherches de Mering et Minkowski (460). — La glycosurie, produite par l'extirpation partielle du pancréas, ne peut pas être considérée comme une glycosurie traumatique. Analyse de l'urine de 144 malades après opérations chirurgicales graves, par E. Pfluger, B. Schôndorff et Fr. Wenzel (461). — Glycosurie provoquée par l'extirpation des glandes salivaires (463). — R.echerches de E, Reale, Renzi et E. Reale, Minkowski, Fehr (464). — Glycosurie après extirpation de la thyroïde, d'après E. Kûlz et Falkenberg (464). — Effets de l'extirpation partielle du pancréas; recherches de Renzi et Reale, Thiroloix, 0. Witzel, Mering et Minkowski (464). — Résultats remar- quables obtenus par Thiroloix (465) et par Sandmeyer et Hédon (460) après extirpation partielle du pancréas. — Diabète survenant tardivement après extirpation partielle du pan- créas. Recherches de Sandmeyer, Pflijger et 0. Witzel (466). — La technique opératoire de Thiroloix entraîne presque nécessairement la glycosurie (467). — Diabètes intenses déter- minés par l'extirpation incomplète du pancréas. Expériences de Lijthje (468). — Diabète déterminé par la rupture des adhésions après extirpation pancréatique partielle. Recherches de E. Pflijger et 0. Witzel (468). — Glycosurie des grenouilles après extirpation du pan- créas. Expériences négatives de Minkowski (468). — Expériences positives de Aldehoff et Marcuse (469). — Raisons de dissidence (469). — D'après Minkowski, l'extirpation du pan- créas ne produit pas de glycosurie chez les oiseaux (469). — D'après Langendorff, Wein- traud et Kausch, l'extirpation chez les oiseaux produit l'hyperglycémie et quelquefois la glycosurie (4'70). — Explication des contradictions, par Kausch (470). — Extirpation totale du pancréas (470). — Recherches de Pfluger et Witzel (470). — P. Schulz et G. Zulzer nient qu'il y ait alors polyphagie, polydipsie, polyurie (471), quoique Mering et Minkowski les aient observées (472). — L'ablation du pancréas dans les expériences de Mering et Minkowski n'a pas été totale (472). — Kausch prouve que chez les oiseaux Minkowski n'a pas fait l'ablation totale du pancréas (472). — Les extirpations totales de Lijthje n'ont été que partielles, en réalité (472). — Les extirpations faites sur les chiens par Witzel ont été, comme le prouve l'examen microscopique, totales, ce qui est établi aussi par l'absence de poly- phagie, de polydipsie et de polyurie (472). — Technique de l'extirpation totale du pancréas d'après 0. Witzel (472). — Résultats obtenus par Pflijger après extirpation totale du pan- créas (476). — Début de la glycosurie après extirpation totale. Expériences de M. H. Bierry et M"" Gatin Gruzewska (476). — Recherches de Sandmeyer et Thiroloix sur la glyco- surie tardive après extirpation du pancréas (477). — Tableaux de Pfluger sur le diabète après extirpation totale du pancréas. Quotient ja (477). — Troubles nutritifs dans le diabète de Sandmeyer (478). — Analyses chimiques du foie (479); des muscles (479); des muscles après extirpation totale (479). — Extrait éthéré du cerveau chez des chiens malades ou diabétiques, d'après Mœckel (480). — Graisse des os chez les chiens diabétiques (480). — Théories du diabète (480). — Trois hypothèses possibles (480). — Critique de l'hypo- thèse de Minkowski , d'après lequel l'extirpation du pancréas détermine deux maladies différentes, selon qu'elle est totale ou partielle (481). — Conciliation entre les résultats divers obtenus par l'ablation totale ou partielle du pancréas. Explication sans faire intervenir des phénomènes d'inhibition dans le diabète de Sandmeyer (481). — Recherches sur 1' hypo- thèse que le pancréas a une action antitoxique, de Mering et Minkowski (481), de Hédon (482). — Recherches de Lépine et Kauffmann sur la non-accumulation d'un ferment diasta- sique dans le sang après extirpation du pancréas (482). — Recherches de Hédon pour guérir par infusion de sang normal des chiens atteints de diabète pancréatique (482). — Recherches de Capparelli et Vanni qui font cesser la glycosurie pancréatique par injection d'extrait pancréatique (482). — D'après Sandmeyer, l'alimentation avec du pancréas cru fait croître la glycosurie (482). — Expériences négatives de Hédon sur des injections d'extrait glandulaire pour guérir la glycosurie pancréatique sur les chiens (482), — sur l'homme (482). — Greffe d'une portion de tissu pancréatique sous la peau, d'après Minkowski (483). — Autres meil- leurs essais de greffe par Hédon, Lancereaux, Thiroloix (483). — D'après Hédon, la greffe est sans effet après section des nerfs mésentériques (484). — Trois exceptions (484). — Recherches de Thiroloix, Glky, Lancereaux (484). — Explication de Hédon, d'après lequel l'expérience de greffe de Minkowski ne prouve pas qu'il y a sécrétion interne CLYCOLYSE. 499 Absence de diabète dans l'inflammation aiguë du pancréas, d'après Hansemann (485). — Absence de diabète dans le cas de cancer total du pancréas et hypothèse de Hansemann (485). — Recherches de Hédon, Gley et Thiroloix sur l'absence de diabète après injection intra-pau- créatique de substances qui ont provoqué la dégénérescence de la glande (485). — Ilôts de Langerhans et leur signification. Observations de H. Kijster, V. Diamare, A. Kuliabko, J. Rennie, Sandmeyer (485). — Expériences de Kauffmann sur la section des nerfs du foie qui est sans influence sur le diabète pancréatique (480). — Objections à ces recherches de Kauffmann (486). — Expériences de Heidenhain sur les glandes salivaires ('t86), — D'après Kauffmann, la section de la moelle au-dessus de la douzième vertèbre dorsale rend l'ablation du pancréas sans eff'et f486). — Pourquoi la fonction inhibante du pancréas sur la glycosurie, ou sur la régulation de la consommation des hydrates de carbone est une donnée insuffisante (496). — Diabète par phloridzine de Mering (488). — Teneur du sang en sucre dans le diabète par phloridzine, d'après Mering» Minkowski, F.-W. Pavy (490). — Diabète par phloridzine chez les oiseaux, d'après A. Thiel, 0. Minkowski, V. Mering, Kausch (489). — Diabète curarique chez des grenouilles à foie enlevé, d'après Langendorff (490). — Opinions de V. Mering et Minkowski sur le diabète par phloridzine (490). — Jécorine et sucre libre ou combiné, d'après les recherches de Henriques et N. Zuntz (490). — Diabète rénal après ingestion de sulfo-caféine , de caféine et de théobromine, d'après C. Jacobj (491). — Recherches d'EMBDEN et Salomon, L. Knopf, Bock et Hoffmann, sur la diurèse et la glyco- surie (492). — La phloridzine, d'après G. Fichera, ne change pas et même augmente la teneur des organes ou glycogène (490). — Formation de foies gras par la phloridzine, d'après les recherches de J. Rosenfeld, B. Schôndorff, M"* Gatin Gruzewska, N. Zuntz (492). — Foies gras et disparition du glycogène après injection d'adrénaline. Recherches de V. Lceper et CouzoN, DoYON, N. Paton, M. -H. Bierry et Mad. Gatin Gruzewska (493). — Efl:"ets de l'intoxication par l'arsenic et l'antimoine, par Salkowski, F. Rosenbaum, L. Mohr (493) ; du phosphore, de la strychnine, de la morphine, d'après Rosenbaum (490) ; de l'alcool, d'après Rosenfeld (494); du chloral, d'après E. Wiersma (494) ; de la strychnine et du curare, d'après B. Demant (494); du sublimé, d'après Kissel (494). — Augmentation de la graisse du foie et du sang dans le jeûne, d'après A. Gilbert et J. Jomier, et Fr. N. Schûlz (494). — Acétones dans le diabète par phloridzine, d'après les recherches de V. Mering, E.KtJLz et A.-E. Wright, Th. IIumpf, Hartogh et Schumm (495). — Les diabètes physiologiques (495). — Diabète de l'inanition, d'après Hofmeister (495). — Diabètes de contention, de froid, d'après Bohm et Hoffmann (495). — Diabète alimentaire (495). — Sommaire (495). E. PFLÛGER. GLYCOLYSE. — Le mot glycolyse, que j'ai proposé en 1890, signifie dispari- tion du sucre. La glycolyse est un processus aussi général et aussi complexe que la glycogénie, et qui est intimement lié à un grand nombre de phénomènes vitaux. Si nous voulions l'envisager dans son ensemble, il nous faudrait faire une incursion dans le domaine de la physiologie botanique; et, rien que pour l'étude de la glycolyse produite par les végétaux inférieurs, transcrire, en quelque sorte, plusieurs chapitres de la Micro- biologie de DucLAUx. Nous nous bornerons à exposer ce qu'on sait de la glycolyse chez l'animal, en limitant d'ailleurs notre sujet; car, chez lui, le sucre disparaît de plusieurs manières. Il peut entrer dans la molécule de certaines matières albuminoïdes; il peut, par anhydrisation, devenir du glycogène; il peut passer à l'état de graisse, comme l'a montré Hanriot. Or ces divers modes de glycolyse sont étudiés dans différents articles de ce Dictionnaire. — C'est seulement de la glycolyse qui se produit pendant le fonctionnement des organes qu'il sera question ici. Encore ne pouvons-nous l'étudier dans la série; car, pour les animaux inférieurs, les documents font totalement défaut. Nous aurons donc seulement en vue les mammi- fères voisins de l'homme. On sait, aujourd'hui, que ces derniers ont besoin de consommer une certaine quantité d'hydrates de carbone et, spécialement, de glucose ^ Les chimistes ont autrefois pensé que la destruction du sucre consistait simplement en une oxydation. Mais, comme on l'a justement remarqué, l'oxygène n'oxyde pas directement la plupart des substances oxydables de l'économie : il lui faut l'aide d'un ferment. — J'ai dit, il y a près de quinze ans, que les faits connus conduisaient à admettre l'existence d'un ferment spécia 1 , 1. Le sucre peut provenir des matières protéiques ainsi que des graisses (Chauveau, Geelmuy- den, etc.); mais, au moins chez certains animaux, parmi lesquels se trouve l'homme, il faut, en outre, qu'une certaine quantité d'hydrates de carbone soit apportée du dehors : l'homme normal doit en ingérer quotidiennement au moins 60 à 80 grammes; sinon, il devient acétonémiqne. — Le chien peut se passer de cet apport. L'addition de graisse aux matières protéiques lui suffit. SOO GLYCOLYSE. (ferment glycoly tique). Mn peu plus tard,',SpiTZER (24 et 24 bis), a supposé que ce ferment était identique avec les oxydases découvertes par Schmiedeberg, Salkowski, Jaquet, Abelous et BiARNÈs, etc., dans les tissus animaux et végétaux. Mais j'ai montré depuis plusieurs années [Semaine médicale, 1897, 277) que cette assimilation n'était pas admis- sible, et ma manière de voir a été généralement acceptée. Il y a des oxydases qui sont glycolytiques ; par exemple celles que Madame Sieber a récemment extraites de la fibrine du sang (63); mais elles restent à l'état d'exception. Le professeur A. Gautier, qui a, le premier, comme on sait, montré l'importance de la vie anaérobie dans nos tissus, admet l'intervention nécessaire d'un processus d'oxy- dation dans la glycolyse; seulement, dit-il, ce n'est qu'ultérieurement, après le premier stade du dédoublement hydrolytique, que les produits, dérivés par hydratation, des albuminoïdes du protoplasma vivant, sont soumis à l'action de l'oxygène du sang, qui oxyde le sucre. — Bourquelot (26) exprime la même opinion. Il considère la glycolyse comme se faisant en deux actes, ainsi que la formation d'aldéhyde salicylique dans le cas suivant : « A une solution étendue de salicine on ajoute quelques centigrammes d'émulsine, puis une petite quantité d'un ferment oxydant. Dès le second jour on peut constater l'odeur de l'aldéhyde salicylique, dont la formation s'explique en supposant que dans une première phase la salicine a été dédoublée par l'émulsine, et que, dans une seconde phase, l'alcool salicylique produit sous l'influence du ferment oxydant s'est transformé en aldéhyde salicylique. » Bach et Battelli (67), qui admettent hypothétiquement une alternance des deux pro- cessus hydrolysant et oxydant, proposent le schéma que voici : « Le glucose est d'abord dédoublé en acide lactique, puis en alcool et anhydride carbonique. L'alcool, à l'état naissant, est oxydé avec une grande facilité en présence de l'oxygène du sang avec le concours d'enzymes oxydantes. « Le produit de l'oxydation de l'alcool est l'acide acétique, qui est à son tour dédoublé en méthane et acide carbonique. Le méthane à l'état naissant est oxydé en acide for- mique, et celui-ci est dédoublé en acide carbonique et hydrogène. Finalement, l'hy- drogène, à l'état naissant se combine avec l'oxygène, pour faire de l'eau. » Ce n'est là bien entendu qu'un schéma, et, si nous le reproduisons, c'est seulement avec les plus expresses réserves. En résumé, d'après plusieurs savants, dont la compétence est indiscutable, la glycolyse débuterait toujours par un processus anaérobie. — Je ne conteste point qu'il en soit ainsi dans beaucoup d'organes, mais je ne puis ra'empêcher de rappeler que si l'on agite avec CO le sang défibriné (Lépine et Barral) , ou si on le laisse sous une couche d'huile, il ne se produit pas, en \ heure, à 38°, de glycolyse appréciable (Lépine et Martz) (34) tandis que dans les mêmes conditions, sauf qu'il est oxygéné, le même sang perdra entre le quart et le tiers de la quantité de sucre qu'il renferme. — Je me garderai, d'ailleurs, de généraliser, car le sang est un milieu spécial, à cause de l'oxyhémoglo- bine, et il se peut — j'ai émis il y deux ans cette hypothèse — que dans les tissus et organes moins pourvus d'oxygène, « suivant les conditions, la dislocation de la molé- cule du sucre se fasse de manières différentes ». {Semaine méd., 1903). Produits de la glycolyse. — Les produits ultimes de la destruction de la molécule du sucre sont, comme on sait, CO^ et H^O. — Quant aux produits intermédiaires, ils sont incomplètement connus, et en tout cas, plus nombreux que ne l'indique le schéma de Bach et Battelli. In vitro, plusieurs expérimentateurs, Blumenthal (35) le premier, ont observé la pro- duction d'une certaine quantité de CO^ dans une solution sucrée additionnée de suc d'organes (obtenu après le broiement de ces organes et l'action d'une presse hydrau- lique puissante). Cette production de CO^ est plus abondante en milieu anaérobie (Blu- menthal), et Stoklasa (64-66) l'a particulièrement étudiée dans ce milieu. Comme il a aussi obtenu de l'alcool, Stoklasa n'hésite pas à considérer la glycolyse dans les tissus comme identique à la fermentation alcoolique'. Mais cette conclusion ne paraît pas t. L'hypothèse que la glycolyse chez l'animal serait une fermentation alcoolique n'est pas nouvelle. D'après Claude Bernard [Leçons sur le diabète, 329) elle a été soutenue par Blondeau •et HuTSON Ford. GLYCOLYSE. 501 admissible; car les quantités d'alcool obtenues dans la fermentation provoquée par les- sucs d'organes sont, par rapport à GO'^, très inférieures à ce qu'on observe dans la fer- mentation alcoolique réalisée par la levure. Battelli (73), Portier (85) et Mazk (85 bis) contestent même qu'on puisse obtenir de l'alcool, in vitro, avec le suc d'organes, saiis Vintervention de m«c/'o6es. Toutefois plusieurs expérimentateurs (Blumenthal, Feinsghmidt) (68) en ont trouvé, bien que le milieu fût stérile. Il semble donc légitime de considérer,, avec Blumenthal, l'alcool comme un produit accessoire de la fermentation in vitro,. provoquée par le suc d'organes. Cette question, malgré son intérêt, est d'ailleurs moins importante que celle de savoir si, chez l'animal vivant, la glycolyse est une fermentation alcoolique; en d'autres termes, si pour 100 grammes de glucose détruit elle entraîne la formation de 50 grammes environ d'alcool. Maquenme (98) le nie formellement, et, a priori, cela paraît bien invrai- semblable; car, s'il en était ainsi, les herbivores, qui absorbent beaucoup de substances amylacées, seraient plus accoutumés à l'alcool que les carnivores, de sorte que l'in- gestion de quelques grammes de cette substance devrait être sans effet chez eux. Or ce n'est pas ce qu'on observe. — On a trouvé de l'alcool dans les organes (J. Béchamp, cité par Duclal'x : Traité de microbiologie, ni, 57) et dans le sang (Joly : C. R. de ÏAcad, des Sciences, 1893, 9 novembre) d'animaux n'ayant jamais ingéré d'alcool'^; mais sa présence (en petite quantité) dans les organes et dans le sang est très explicable, en. admettant — ou bien qu'il s'y trouve comme produit accessoire (ainsi que dans les fermentations in vitro) — ou bien qu'il a été formé dans l'intestin (par fermentation du glucose), puis résorbé. A l'appui de cette opinion ou peut faire valoir le fait que l'alcool n'augmente pas pendant l'autolyse spontanée des tissus (Landsberg : Zeilschrift fur physiolor/. Chemie, 1904, xli, 505). Un certain nombre d'acides organiques se produisent pendant la fermentation du. glucose additionné de suc d'organes ; mais ils n'ont pas été isolés. On sait seulement, par les recherches de Feinsghmidt, etc., que le liquide, après quelques heures de fermenta- tion, est beaucoup plus acide qu'au début. Il est probable que, parmi ces acides figure l'acide lactique \ que C. Ludwig et ses élèves ont trouvé en assez grande abondance- dans le sang ayant circulé plusieurs fois à travers le rein (Dreghsel), les muscles (v. Frey), le poumon (Gaglio), surtout comme l'a vu Berlinerblau, si le sang a été addi- tionné de glucose {Archiv fur exp. Path., 1887, xxiii). D'après Vaughan-Harley, l'acide lactique serait même plus abondant que le sucre dans le sang de chiens à uretères liés quelques heures après l'injection intra-veineuse de 10 grammes de glucose par kilogramma (Archiv fur Physiol., 1893, SuppL). Il n'est pas impossible que, dans certains cas, l'acide lactique soit le premier pro- duit de la dislocation de la molécule du glucose, comme l'admettent Bach et Battelli. On sait qu'on l'obtient dans le laboratoire en traitant à chaud le glucose par la potasse, mais il est certain que tout le glucose ne se dédouble pas en acide lactique; car il est des cas, bien étudiés par P. Mayer chez l'animal vivant, et par Boulud et moi, dans le sang m vitro, où ce sucre a produit de l'acide glycuronique. On sait que cet acide ne diffère du glucose que par COOH à la place de CH-OH. Au point de vue chimique il est difficile d'admettre que le passage du glucose à l'acide- glycuronique consiste seulement en une oxydation; car le radical alcoolique CH^OH. est moins oxydable que le radical aldéhydique COH, situé à l'autre extrémité delà chaîne. Fischer, pour résoudre cette difficulté, imagine une hypothèse assez compliquée (Voir P. Mayer (58). Sans admettre avec Mayer qu'il y a dans ce cas une dérogation aux lois- de la chimie, on peut supposer que le glucose passe à l'état d'acide gluconique *, par oxyda- 1. D'après Portier (8.t) les sucs d'organes (ou leurs précipités) sont incapables de produire une glycolyse appréciable en irois heures. Cet expérimentateur pense que les expériences de Stoklasa ont eu une durée trop longue pour que le milieu soit resté stérile. 2. Plus récemment Maignon (C R. de l'Académie des Sciences, 1905, 20 avril) a de nouveau insisté sur la présence normale d'alcool et d'acétone dans les tissus et liquides de l'organisme. 3. La constatation de l'existence de cet acide, et la détermination de sa proportion dans le mé- lange, présentent quelque intérêt, Aronssohn (57) ayant noté que l'acide lactique, en certaine- proportion, exalte l'action du ferment glycolytique du sang. 4. RuFF a obtenu des pentoses au dépens de l'acide gluconique. 502 GLYCOLYSE. tion de l'aldéhyde, puis que l'acide gluconique passe à l'étal d'acide saccharique. Or une simple réduction de ce dernier conduit à l'acide glycuronique. Remarquons que la transformation du glucose en acide gluconique et celle de ce dernier en acide saccha- rique a été réalisée par P. Mayer {loc. cit.,) chez le lapin*. Chez les mêmes animaux, P. Mayer a trouvé de l'acide oxalique dans le foie et dans l'urine, après l'injection d'une quantité un peu forte de glucose (ou d'acide glycuronique). Ses expériences ont été confirmées par celles d'HiLDKNBRANOT (Z. p. C, 1902, xxxv) : Des lapins, alimentés avec de l'avoine (à laquelle il faut ajouter de la chaux, pour pré- venir les effets pernicieux de l'intoxication acide qu'amènerait l'avoine seule) excrè- tent quelques milligrammes seulement d'acide oxalique par jour. Si on leur donne, en plus, 30 grammes de glucose, ils excrètent dix fois plus d'acide oxalique'. La destruction de la molécule de glucose amène la formation des molécules plus petites et nécessairement en nombre beaucoup plus considérable; aussi n'est-il pas étonnant que le point de congélation d'une solution sucrée s'abaisse pendant la glycolyse. Isolement du ferment glycolytique. — 'Avec Barual j'ai tenté d'isoler le ferment glycolytiquedu sang, en lavant les globules, après centrifugation,dans une solution d'eau salée; puis, après une nouvelle centrifugation, en les faisant macérer également dans l'eau salée. Nous avons ainsi obtenu un liquide très pauvre en matières albuminoïdes, et doué d'un pouvoir glycolytique assez prononcé. Par l'addilion de phosphate de chaux, nous avons produit dans la liqueur un précipité qui possédait aussi un pouvoir glycolytique. Mais toutes nos tentatives pour séparer le ferment d'avec le phosphate tricalcique ont été vaines. La dialyse ne peut être employée ; car le ferment glycolytique du sang ne dialyse pas. Aronssoh^j (56), en se servant du sulfate d'ammoniaque pour saturer une macéra- tion de globules du sang dans l'eau salée, a obtenu, par flltration, un liquide possédant un pouvoir glycolytique, et absolument exempt de matières albuminoïdes. C'est assuré- ment un important résultat. — Malhpureusement il ne paraît pas s'être assuré de la stérilité du liquide. Si elle n'était pas absolue (et l'on sait la difficulté de maintenir un liquide aseptique après plusieurs manipulations) il est possible que des microbes aient été les agents de la glycolyse, et que le liquide n'ait pas renfermé le ferment glyco- lytique du sang. Enzymes de Sieber. — Quoi qu'il en soit, Madame Sieber (63), qui a, sinon isolé, an moins séparé trois enzymes glycolytiques contenues dans la fibrine du sang, a trouvé qu'elles présentaient les réactions des substances albuminoïdes. De ces trois enzymes la première est soluble dans l'eau distillée : il suffit donc d'un simple lavage de la fibrine du sang, surtout d'animaux immunisés contre le bacille de Lœffler et contre le slrepto- et le staphylocoque. La seconde enzyme s'obtient en lavant la fibrine dans une solution de sels neutres, et particulièrement de nitrate de potasse à 8 p. 100, à la température de l'étuve. Elle est précipitée de sa solution par CO^, par l'alcool, et surtout parle sulfate d'ammo- niaque, dont Mad. Sieber a essayé de se débarrasser par la dialyse ^ mais infructueuse- ment; car, après la dialyse, l'enzyme se trouve en partie dans le liquide dialyse. Pour obtenir la troisième enzyme, il faut, d'après Madame Sieber, se servir du liquide filtré, saturé de sulfate d'ammoniaque, qui a servi à l'opération précédente. On le réduit à basse température, dans le vide; et, quand on est arrivé à 100 ce, on ajoute beaucoup d'alcool absolu, pour précipiter les sels. Le liquide filtré est de nouveau évaporé dans le vide, jusqu'à ce qu'il prenne une coloration brune. Celle enzyme difïère de la précédente en ce qu'elle ne colore en bleu la teinture de gaiac qu'en présence de l'eau oxygénée, tandis que l'enzyme précipitée par le sulfate d'ammoniaque ne la colore au contraire qu'en l'absence d'eau oxygénée. La première enzyme (celle qui est soluble dans l'eau distillée, et dont le pouvoir glycolytique est d'ail- 1. On sait qu'il existe d'autres sources possible d'acide glycuronique. 2. AsHER et Jackson (Z. B., xlii, se fondant sur les résultats de circulations artificielles et d'expériences in vivo, contestent que l'acide lactique provienne du glucose. 11 n'en est sans doute pas la seul source, mais l'opinion de ces auteurs parait beaucoup trop exclusive. 3. C'est ce qu'avait déjà fait Aronssohn (p. 40). Mais le ferment s'est détruit pendant la dialyse. GLYCOLYSE. 503 leurs plus faible) bleuit la teinture de gaïac, soit avec, soit sans l'eau oxygénée, mais mieux cependant dans le dernier cas. Des trois enzymes, celle qui est soluble dans les sels neutres et précipitée par le sulfate d'ammoniaque est la plus sensible à la chaleur. Elle est très affaiblie à 65», et détruite au dessus de 70° en deux ou trois minutes. La première enzyme n'est affaiblie que par une exposition de plus de 5 minutes à 70». Quant à la troisième, c'est la plus résistante; elle est simplement affaiblie à 90", et il faut un chauffage de plusieurs minutes à 97° pour la détruire. La deuxième enzyme paraît douée d'un pouvoir glycolytique supérieur aux deux autres (on ne peut d'ailleurs avoir aucune certitude, les enzymes n'ayant pas été ifiolés). En somme, on doit à Madame Sieber la connaissance de deux faits nouveaux. D'abord que le sang ne renferme pas un seul ferment glycolytique, comme je l'avais supposé; en second lieu, que certaines oxydases sontglycolytiques. Gomme les sucs glycolytiques, extraits des organes, produisent une fermentation plus active en milieu anaérobie, (ainsi que l'a constaté Blumenthal), Madame Sieber confirme l'idée que la glycolyse dans le sang in vitro est un processus spécial. Les ferments glycolytiques du sang paraissent plus délicats que ceux des organes. Aussi Blumenthal a-t-il orienté d'une manière très heureuse l'étude de la glycolyse, en s'adressant à un d'eux; et sa technique, calquée sur celle de Buchner, semble irrépro- chable. La voici, telle qu'elle est exposée par son élève, Feinsghmidt : Les organes sont broyés avec du sable, et la pulpe, ainsi obtenue, est soumise à une pression de 300 atmosphères. Pour 1 kilogramme d'organes on peut obtenir jusqu'à 100 ce. de suc. On ajoute de l'alcool absolu; on décante, et on agite le résidu avec l'éther; on filtre et on évapore le précipité dans le vide; puis on le reprend par l'eau distillée, qui est additionnée de glucose et de toluol. La glycolyse est appréciée par le volume d'acide carbonique obtenu après un certain nombre d'heures. L'asepsie de la solution est vérifiée. Arnheim et Rosenbaum (72) à l'exemple de Rapp et Buchner, traitent le suc d'organes par l'acétone et l'éther, l'acétone présentant sur l'alcool quelques avantages. D'après eux, ajouté à une solution de glucose, le suc de foie produirait une glyco- lyse assez énergique; celui des muscles, une glycolyse faible, ainsi que l'avait autrefois noté Lauder Brunton. Quant au suc de pancréas, ses effets seraient inconstants, et, en tous cas, peu intenses. Cohnhelm (61) en employant le suc non desséché de cet organe n'a pas observé de glycolyse. On pouri^ait être tenté d'attribuer ce résultat à une for- mation de sucre (peut-être aux dépens des nucléoprotéïdes du pancréas)', mais cette explication ne paraît pas suffisante ; car l'addition à une solution sucrée d'un mélange de suc de pancréas et de suc de muscles lui a donné une forte glycolyse. Il faut d'ail- leurs savoir que le suc du pancréas n'a, par lui-même, qu'un faible pouvoir glycoly- tique : Blumenthal n'-a obtenu avec lui qu'un dégagement d'acide carbonique assez minime, après 48 heures. Aussi je n'hésite pas à affirmer que l'action incontestable qu'il exerce sur la glycolyse est surtout une action indirecte, favorisante. Telle est l'idée que je soutiens depuis plusieurs années. Je reviendrai tout à l'heure, avec détails, sur cette importante question; mais, pour terminer l'exposé de nos connaissances sur les ferments glycolytiques, j'ai à mentionner les travaux d'HERLiTSKA et Borrino (57) qui ont obtenu une glycolyse assez prononcée dans des solutions sucrées, en les addition- nant, soit d'une nucléo-histone du foie, soit de nucléoprotéïdes extraites du rein ou du thymus, Herlitzka a rénssi également à extraire un nucléohistone de la levure de bière, et a produit, avec elle, une fermentation qui paraît bien avoir été une fermen- tation alcoolique véritable, car l'alcool et l'acide carbonique s'y trouvaient dans le rapport normal. Mais, ainsi que nous l'avons déjà dit, la glycolyse dans les tissus ne peut être considérée comme un processus identique avec celui de la fermentation alcoolique. 1. Il résulte des expériences d'UMBER et de Rahel-Hirsch que, pendant l'autolyse, le pancréas produit une notable quantité de sucre. J'avais déjà observé avec Métroz, que dans ces condi- tions tous les ofganes produisent du sucre fermenlescihle), notamment un pentose. Or, comme le remarque avec raison Blumenthal, ce sucre n'est pas, ou presque pas attaqué par le ferment glycolytique. 504 GLYCOLYSE. Mesure de la glycolyse. — 1° Glycolyse dans le sang circulant. — Chauveau, puis Cl. Bernard, ont vu que le sang artériel renferme plus de sucre que le sang veineux. Mais les chiffres qu'ils ont publiés ne sauraient être tenus pour exacts; car, à l'époque de leurs mémorables travaux, on étaitloin de soupçonner l'existence de certaines causes d'incertitude ou d'erreur. Parmi ces causes d'erreur — ou tout au moins d'incertitude — il faut citer surtout l'acide glycuronique et le sucre virtuel. On sait, depuis une publication de P. Mayer, que l'acide glycuronique peut exister dans le sang, et nos travaux (Lépine et Boulud, C. R. de l'Académie des sciences, 15 juillet, 4 novembre 1901, 17 février, 21 juillet 1902, 12 janvier, 4 mai, 2 novembre 1903, 7 mars 1904) ont prouvé que son existence y est constante, et qu'il s'y trouve souvent en proportion très considérable vis-à-vis des autres matières sucrées. Nous avons surtout établi, par des dosages comparés de sang artériel et de sang veineux recueillis au même moment, que, véritable protée, il peut se former (et se détruire) pendant la traversée des capillaires. Or il y a, comme on sait, des combinaisons de l'acide glycuronique qui ne réduisent pas la liqueur de Fehling, de sorte que la réduction ne donne pas la totalité des matières sucrées ^ Il faut, pour détruire la conjugaison, chauffer, en présence d'un acide une partie de l'extrait de sang. Mais ce chauffage, même pratiqué par un chimiste très expérimenté, ne doiuie pas des résultats entièrement satisfaisants : s'il est trop court, ou trop modéré, la conjugaison n'est pas détruite ; dans le cas inverse, on détruit une certaine quantité de matière sucrée; dans les deux cas on a un chiffre trop faible. Il est donc impossible, dans l'état actuel de l'analyse chimique, de connaître rigoureusement le chiffre des matières sucrées d'un sang renfermant certaines conju- gaisons de l'acide glycuronique. L'erreur, provenant de la production de sucre pendant la traversée des capillaires est encore plus importante. Boulud et moi avons récemment montré (C. /{. deVAcad. des Sciences, 21 septembre et 2 novembre 19011) qu'il existe normalement dans le sang un hydrate de carbone non décelable par nos moyens actuels d'investigation (sucre virtuel), et capable de se transformer en glucose dans les capillaires. Cette transformation de sucre virtuel en sncre décelable par nos méthodes de dosage fait comprendre que des chimistes d'une habileté consommée aient trouvé parfois le même chiffre de matières sucrées dans une veine que dans l'artère, voire même un chiffre plus fort dans la veine. Cela est, à la vérité, exceptionnel, et l'on observe généralement pour le sang veineux un chiffre de matières sucrées sensiblement inférieur à celui du sang artériel. Quelques exemples ne seront pas inutiles. Je les prends dans le registre de mon laboratoire. Tous les dosages ont été faits par Boulud, chef des travaux. Matières sucrées du sang veineux comparées à celles du sang artériel; 1° Sang de lajugidaire. Chien bien portant, à l'inanition depuis plus de vingt-quatre heures. Le sang de l'artère et celui de la veine ont été recueillis simultanément : Pour iOOOs de sang : Pouvoir réducteur Acide exprimé en glucose glycuronique B Numéros après des chauffage. absolu pour 100. chiens (a). (b). (c). (d). i Artci-e 0,64 0,94 0,30 31 '^^'^^ I Jugulaire 0,72 0,84 0,12 14 „,„_ ( Artère 0,50 0,66 0,16 24 ^^^"^ ( Jugulaire 0,42 0,32 0,10 20 Les chiffres de la colonne (c) sont obtenus en soustrayant ceux de la colonne (a) de ceux de la colonne [b); ceux de la colonne (d), en divisant les chiffres de la colonne (c) par ceux de la colonne [b). Les extraits de sang ont été faits par la méthode de Bierky et Portier-. Les chiffres 1. Pour la commodité du langage nous désignons arbitrairement ces combinaisons par la lettre B. 2. BiERRY et Portier, B. B., 1902, 1276. gr- gr. gr- (a). (6). (c). 0,68 0,80 0,12 0,70 0,86 0,16 (c). (d). 0,06 1 0,18 20 GLYCOLYSE. 505 de la colonne b ont été obtenus après chauffage d'une partie de l'extrait, en présence de l'acide tartrique, à 110°. Il n'y a pas toujours une grosse différence entre l'artère et la veine. Il se peut que la glycolyse dans les capillaires, à certains moments, soit très faible. Il se peut aussi que la perte qu'elle entraîne soit compensée par une formation de sucre (aux dépens du sucre virtuel). Parfois même, cette formation produit un excès relatif de sucre dans la jugu- laire. Chez le chien sain et neuf, l'acide glycuronique B se trouve presque toujours dans le sang veineux en moindre proportion que dans le sang artériel; cela prouve que, dans les capillaires, il est détruit de préférence au glucose. 2° Sang de la veine crurale. — Dans le sang de la veine crurale, nous trouvons en général une diminution des matières sucrées par rapport à l'artère. Mais il y a des exceptions à cette règle. En voici une que j'ai observée chez un chien mouton, à jeun depuis plusieurs jours. Les deux sangs ont été recueillis simultanément : {d). Artère 0,68 0,80 0,12 15 Veine crurale 0,70 0,86 0,16 18 Ainsi, dans ce cas, la veine crurale a plus de sucre que l'artère'. D'après Seegen, ce fait ne pourrait s'observer qu'après la faradisation des nerfs du membre inférieur (et non des muscles). On voit que cette assertion est erronée. Ce chien était parfaitement sain; mais l'artère seule possédait du sucre virtuel. En effet, dans ce même sang, fluoré, pour empêcher la glycolyse, on obtenait, après une heure, in vitro, les valeurs suivantes : Déviation polariniotrique gr. gr. gr. {a}. {b'. Artère +0,5 0,84 0,90 Veine crurale +0,1 0,68 0,86 Ainsi, dans l'artère il s'est produit du sucre secondaire : (0,90 — 0,80 :=0,10). Il ne s'en est pas produit dans la veine. Influence de la température de la patte sur les matières sucrées du sang de la veine crurale. — Chez plusieurs chiens nous avons immergé les membres inférieurs, l'un dans de l'eau à plus de 40", et l'autre dans de l'eau à 6" environ. Les nerfs sciatique et crural de l'un et de l'autre côté étaient préalablement sectionnés. Dix minutes après le début de l'immersion, on a pris, simultanément, du sang dans la carotide et dans les deux veines crurales : gr. gr. gr. (a). [b). (c). (d). Sang carotidien +0,3 1 1,05 0,05 5 Sang veineux de la patte chaude. + 0,2 0,82 1,00 0,18 18 Sang veineux de la patte froide. . +0,2 0,81 0,88 0,07 8 Ainsi, par rapport au sang artériel, le sang veineux de la patte chaude a perdu peu de matières sucrées pendant la traversée des capillaires (0,05). Le sang veineux de la patte froide en a perdu davantage (0,17). On remarquera de plus qu'il existe une assez forte proportion d'acide glycuronique non spontanément réducteur dans la patte chaude (1 — 0,82 = 0,18). Chez un autre chien, nous avons trouvé : Sang carotidien +0,3 Sang veineux de la patte chaude. + 0,4 Sang veineux de la patte froide. . + 0,3 Comme chez le chien précédent, les matières sucrées sont moins abondantes dans le sang de la patte froide; mais le sang de la patte chaude en renferme plus que celui de la carotide, ce qui s'explique par une production de sucre aux dépens du sucre virtuel, 1. On remarquera que, contrairement à la règle, chez ce chien d'ailleurs sain, on trouve plus d'acide glycuronique B dans la veine que dans l'artère. gr. gr. gr, 1.02 1,03 0,01 1 1,00 1,06 0,06 6 0,74 0,80 0,06 7 506 GLYCOLYSE. En effet, le sang artériel fluoré, ainsi que le sang des deux veines, donne, après une heure, in vitro, les chiffres suivants : gv. gr. gr. Sang artériel +0,5 1,12 1,18 0,06 5 Sang veineux de la patte chaude.. +0,5 0,93 1,06 0,13 12 Sang veineux de la patte froide . +0,2 0,98 1,09 0,11 10 On voit que le sang artériel possédait une certaine proportion de sucre virtuel (1,18 — 1,03 = 0,15). On n'en trouve plus dans la patte chaude. Chez un autre chien la formation de sucre a été tellement considérable dans la patte froide, que la veine de cette palte renfermait 0S'',20 de sucre de plus que l'artère : gr. gr. gr. Carotidien +0,4 1,44 1,48 0,04 3 Sang veineux de la patte chaude. +0,5 1,16 1,33 0,17 5 Sang veineux de la patte froide . + 0,8 1,61 1,68 0,07 4 3" Sang de la veine pancréatique. — Je possède un grand nombre de dosages du sang de cette veine. Le fait général qui s'en dégage est sa teneur relativement faible en ma- tières sucrées. Voici comme exemple la teneur en sucre de différents vaisseaux chez le même chien. Les prises de sang ont été faites simultanément. L'animal était en digestion de viande : gr. gr. gr. (a). (6). (c). (rf). Carotide 0,78 1,09 0,31 30 Veine pancréatique 0,62 0,62 0 0 — splénique 0,78 0,84 0,06 7 — porte ^ 0,63 0,64 0,03 4 Mais, dans des conditions particulières il n'en est plus de même : Voici les résul- tats du dosage du sucre dans trois veines aussitôt après l'excitation des nerfs du pan- créas : gr. gr. gr. {a). (6). (c). (d). Veine pancréatique 0.88 1,18 0,30 26 — splénique 0,82 1,01 0,19 19 — jugulaire 0,82 0,94 0,12 13 J'explique le chiffre relativement élevé (1,18) du sucre dans la veine pancréatique par l'accélération de la circulation. En effet, pendant et aussitôt après l'excitation des nerfs du pancréas, le sang de la veine pancréatique est rutilant, et coule avec une abon- dance insolite. Les modifications de la circulation sont en effet un des facteurs importants de la perte de sucre dans les capillaires. Il est certain que, toutes choses égales, il se détruit plus de sucre quand la circulation capillaire est lente. Malheureusement il n'est pas facile de déterminer avec quelque rigueur la durée de la circulation capillaire dans un organe à un moment donné. Morat note, avec un métronome, le temps que met- tent 20 ce. de sang veineux à tomber dans le récipient. C'est une mesure très utile; mais on comprend qu'elle n'est pas toujours suffisante. Vu la difficulté d'apprécier, même pendant un temps très court, l'intensité de la glycolyse dans un organe, et Timpossibilité de connaître les variations qu'elle présente à différents moments dans les divers organes, il est puéril d'essayer de calculer, en dosant le sucre du sang artériel et celui du sang d'une veine, la quantité de sucre que détruit l'économie pendant vingt-quatre heures. Influence du travail. — On vient de voir que, consécutivement à l'excitation des nerfs du pancréas, le sang de la veine pancréatique renferme beaucoup de sucre, soit parce qu'il se produit du sucre, sous une influence nerveuse, soit, comme je l'ai dit plus haut, parce que la quantité absolue du sucre détruit dans les capillaires est masquée par la quantité relativement considérable de sang qui les traverse pendant la période d'exci- tation. Dans certains organes, notamment dans les muscles en contraction, la perte absolue du sucre est suffisante pour que, malgré l'accélération de la circulation, il se GLYCOLYSE. 507 produise, ainsi que l'ont vu Chauveau et Kauffmann (3), une diminution notable de la proportion centésimale du sucre dans le sang veineux. 2° Glycolyse dans le sang in vitro. — Depuis plus de quinze ans, avec la collaboration de chimistes compétents (parmi lesquels je puis citer surtout Babral, agrégé de chimie de la Faculté de médecine de Lyon, et Boulud, pharmacien des hôpitaux), je déter- mine le pouvoir glycolytique du sang, au moyen d'une méthode qui, dans certaines limites, donne des résultats importants : On sait que, sorti des vaisseaux, le sang est encore vivant pendant plusieurs heures, même après la défibrination. Il est donc légitime de déterminer dans ces conditions l'intensité de la glycolyse. Voici comment il convient de procéder : On recueille, en même temps, du vaisseau, dans lequel une canule stérilisée a été introduite, deux échantillons de sang. L'un tombe dans du nitrate acide de mercure, et sert à doser les matières sucrées dans l'état où elles se trouvent dans le sang circulant. L'autre est reçu dans un ballon stérilisé, renfermant du sable (la laine de verre cédant de l'alcali au sang est à rejeter), et défibriné par l'agitation. Puis on le met au bain- marie, à une température toujours identique (j'ai adopté 39", qui n'est pas la tempé- rature optimum pour la glycolyse, mais qui a l'avantage de se rapprocher de la tempéra- ture normale du chien, animal sur lequel j'ai exclusivement expérimenté); on l'y laisse une heure. Pendant ce temps, de l'oxygène passe bulle à bulle dans le sang. On pré- vient ainsi la multiplication des microbes, qui peuvent s'y trouver malgré les précautions prises. Au bout d'une heure, le sang retiré du bain-marie est traité exactement comme le précédent. Rien que, dans ces conditions, il se soit, pendant cette heure, produit une certaine quantité de sucre aux dépens de sucre virtuel, on constate une glycolyse assez forte; c'est la glycolyse apparente. Pour connaître la glycolyse réelle, il faudrait déterminer pour ce même sang, la quantité de sucre produit. Cela est assez difficile : on peut recueillir, en même temps que les deux autres un troisième échantillon dans un ballon renfermant du fluorure de sodium; cette substance empêchant, au moins en grande partie, la glycolyse, ainsi que l'a remarqué Arthus (14). Mais il n'est pas certain que, dans le ballon renfermant le fluorure, il se produise autant de sucre que dans l'autre ballon. Dans les conditions normales, le sang artériel d'un chien éprouve en une heure une perte apparente de Oe'',30 p. 1 000. Comme la production de glucose aux dépens du sucre ne dépasse pas, dans ces conditions, O^^iO, on voit que la perte réelle est comprise entre Oe'-,30 et 0^%40. Outre la diminution de la quantité de sucre, il se produit, in vitro, des modifications qualitatives très notables, notamment dans les rapports réciproques du glucose et de l'acide glycuronique (Lépine et Boulud). Si l'on procède de même, non avec du sang mais avec du sérum aseptique d'un chien sain, on ne peut constater de glycolyse. ' (Lépine et Babral). De ce fait, confirmé par Spitzer, Portier, etc., il faut nécessairement conclure que les éléments figurés du sang sont la cause de la glycolyse in vitro. Si l'on centrifuge le sang, on constate que la couche la plus inférieure du sérum (la plus voisine des globules) est souvent moins riche en sucre que la couche supérieure (Lépine et Boulud). — On sait que les globules blancs occupent la partie supérieure de la couche des globules. Or, bien que cette dernière retienne toujours plus de sérum que la couche inférieure, on trouve très souvent celle-ci beaucoup plus sucrée que la couche supérieure 2. Ce fait prouve que l'action glycolytique des globules blancs, pendant la durée de la centrifugation, s'exerce beaucoup plus énergiquement que celle des globules rouges (Lkpine et Boulud). Il est probable que le ferment contenu dans les globules blancs se dégage plus ou moins lentement. En efîet, dans les premières minutes, la glycolyse apparente est nulle; (mais, comme c'est aussi à ce moment que se fait surtout la production du sucre, aux 1. CoHNHEiM (61), p. 346, croit que le sérum renferme un principe antagoniste du ferment gly- colytique, « afin que le sucre ne soit pas détruit dans le sang, où il ne produirait que de la cha- leur et pas de travail ». 2. On sait que 1 000 grammes de scrum renferment plus de sucre que l 000 grammes de glo- bules. 308 CLYCOLYSE. dépens du sucre virtuel, il est fort difficile d'être fixé sur la glycolyse réelle). Après le premier quart d'heure, en général, la glycolyse se fait d'une manière régulière, et proportionnellement au temps. Si le sang est agité avec l'oxyde de carbone (Lépine et Barral), ou maintenu sous une couche d'huile (Lépine et Martz), il ne perd pas de sucre d'une manière bien sen- sible en une heure. Ainsi la glycolyse dans le sang, in vitro, ne peut se faire sans oxy- gène; et, si Croftan (59) affirme le conlraire, c'est qu'il s'est glissé quelque erreur dans ses expériences. Il se fait probablement une ou deux oxydations successives produisant de l'acide gluconique, puis de V acide saccharique, suivies d'une réduction qui aboutit à la formation d'acide glycuronique. L'addition de Huorure de sodium, comme il a été dit précédemment, diminue, et peut même (si la proportion de fluorure de sodium dépasse nolablement celle de 2 p. 100, indiquée par Arthus (14) supprimer complètement la glycolyse. De même, l'addition eu quantité suffisante, d'un antiseptique quelconque, ou simplement d'eau. L'action de l'eau est complexe, suivant l'état du sang et la proportion d'eau intro- duite. Elle agit en modifiant les phénomènes d'osmose, et en altérant les globules. L'intluence favorisante (observée par Akthus et de Meyeh), d'une faible quantité d'eau distillée, s'explique par l'issue plus facile du ferment hors des globules blancs. En tous cas, une très forte proportion d'eau exerce généralement une infiuence très défavo- rable sur la glycolyse. UoYON et Morel (78) disent que 10 parties d'eau distillée l'arrêtent, et que 10 parties d'eau salée à 7 p. 1 000 la laissent intacte. Cette double proposition est trop absolue. J'ai fait remarquer (79) qu'une seule partie d'eau salée à 7 p. i 000 peut diminuer la glycolyse dans certains sangs tout autant que quatre parties d'eau distillée la diminuent dans d'autres sangs ; voir aussi de Meyer (82.) Lépine et Fauchon (34). L'exposition prolongée du sang à l'action des rayons X Lépine et Boulud (77), diminue beaucoup la glycolyse. Je pourrais allonger beaucoup la liste des substances qui l'entravent. Au contraire, l'addition au sang in vitro d'une très faible proportion d'eau distillée d'un sel alcalin, — mais jusqu'à une certaine limite, — d'acide lactique (Arons- SOHN (56), jusqu'à la proportion de Os'-.S environ par litre de sang, d'une trace d'acétate de manganèse (Lépine et Martz), l'exposition du sang pendant peu de minutes à l'action des rayons X (Lépine et Boulud, 76), favorisent la glycolyse m vitro, ie ne parle pas, bien entendu, des microbes qui l'opèrent pour leur compte. D'après de Meyer (82) l'addition à du sang, in vitro, d'un peu de suc de pancréas augmenterait dans ce sang la glycolyse. J'ai répété bien souvent avec Boulud cette expé- rience, en la variant de diiférentes manières, et je dois dire que nous n'avons obtenu un résultat d'une netteté absolue que dans un seul cas. C'était chez un chien hyperglycé- mique par suite de l'ablation du pancréas. Le sang renfermait l^^S de matières sucrées, et, après une heure à 39°, ls'',52. Or, si à 30 grammes de ce sang également maintenu à 39° on ajoutait 1 ce. de macération aqueuse du pancréas filtrée au filtre Ghamberland, il n'en renfermait plus, au bout d'une heure, que |sr^32. 11 faut bien savoir, d'ailleurs, que l'on observe parfois in vitro des résultats difficiles à interpréter. Dans beaucoup de cas, au contraire, les résultats de la glycolyse dans le sang veineux, in vitro, s'expliquent facilement, par exemple quand on observe un balan- cement entre la perte dans les capillaires et la perle in vitro. Chez un chien dont les pattes avaient été immergées, l'une dans l'eau froide, et l'autre dans l'eau chaude, le sang veineux de la patte froide na pas perdu de sucre pendant une heure à 39°; mais, dans les capillaires, la glycolyse avait été énorme (0S'',60). Le pouvoir glycolytique de ce sang était épuisé. En somme, l'étude de la glycolyse in vitro est sujette à diverses causes d'erreurs, et les résultats qu'elle donne ont besoin d'êtie judicieusement interprétés. Ils sont, d'ail- leurs, d'un autre ordre que ceux que l'on obtient par la comparaison du sang artériel et du sang veineux recueillis simultanément. Dans ce dernier cas, nous avons la glyco- lyse telle que l'iniluence des tissus la réalise dans le sang des capillaires. Au contraire, in vitro, nous avons la glycolyse dans le sang privé de l'infiuence des tissus; en d'autres termes, nous apprécions seulement \e pouvoir glycolytique idéal, si l'on peut ainsi dire, du sang. Dans les capillaires la proportion d'acide glycuronique B diminue par rapport à GLYCOLYSE. 509 ensemble des matières sucrées; au contraire, in vitro, à la température de 39°, pendant une heure, elle augmente dans le sang artériel. Passons maintenant en revue quelques états dans lesquels le pouvoir glycolytique du sang artériel, in vitro, s'écarte de la normale. On se rappelle que nous avons précé- demment fixé la perte de ce sang autour de 0'ï'',30 par litre de sang. États dans lesquels le pouvoir glycolytique du sang artériel est diminué. — Asphyxie. — Si l'on asphyxie un chien par l'occlusion incomplète des narines ou de la trachée pen- dant une demi-heure environ, et d'une manière suffisante pour qu'il se produise de petits mouvements convulsifs; si l'on retire deux échantillons de sang d'une artère, et qu'en défibrinant l'un d'eux on l'agite avec de l'oxygène, pour lui rendre sa couleur rutilante, puis qu'on le porte à 39°, et que pendant une heure on le fasse traverser par des bulles d'oxygène; enfin qu'on y dose le surre, on constatera que la glycolyse, pendant une heure y est faible, bien qu'il ait été parfaitement oxygéné à partir de sa sortie du vaisseau'. Du sang d'animaux asphyxiés, nous avons, Boulud et moi, retiré une substance cristallisable qui, mélangée à du sang (défibriné) recueilli chez un chien sain, entrave beaucoup la glycolyse (53-54). Commotion cérébrale. — Un coup de maillet sur le crâne, assez violent pour sus- pendre momentanément la respiration, provoque toujours une hyperglycémie plus ou moins forte (Cl. Bernard), et, le plus souvent, suivie d'une diminution considérable de la glycolyse dans le sang artériel. Si avant l'assommement on a sectionné les nerfs d'un membre, par exemple le scia- tique et le crural du côté droit, et qu'aussitôt après avoir porté le coup on prenne simultanément le sang de la veine fémorale de l'un et de l'autre côté, on peut constater que le sang du côté droit est peu sucré, et qu'il a conservé un pouvoir glycolytique plus ou moins normal, tandis que du côté gauche (où les nerfs sont intacts), le sang est riche en sucre et a perdu plus ou moins complètement son pouvoir glycolytique. Cela montre que ce dernier vient en grande partie des tissus. On en trouvera dans le para- graphe suivant une autre preuve. Influence du chloroforme. — J'ai étudié avec Boulud l'influence du chloroforme sur le pouvoir glycolytique du sang (92). Si la chloroformisation a été suffisamment pro- longée, ce pouvoir est aboli dans le sang artériel; mais il est conservé d'une manière plus ou moins complète dans le sang veineux. Aboli sous l'intluence du toxique inhalé dans le poumon, il est donc récupéré pendant la traversée des capillaires. Ablation du pancréas. — Quelques heures après l'ablation du pancréas, le pouvoir glycolytique du sang est diminué. — Mais cette diminution est, en grande partie, mas- quée par diverses influences dont la principale parait être l'infection du sang. En effet, ainsi que je l'ai remarqué depuis vingt ans, la septicémie augmente beaucoup la glycolyse. Or, malgré l'asepsie avec laquelle est faite l'ablation du pancréas, le chien qui a subi cette opération est toujours, au bout d'un certain temps, atteint de péritonite septique, à un degré variable d'ailleurs, parce que l'ischémie et, le plus souvent, la nécrose du duodénum facilitent le passage dans le péritoine des microbes de l'intestin. On a la preuve de la septicémie en prenant avec une aiguille stérilisée un peu de sang dans une artère dont on a cautérisé la surface, et en portant ce sang dans une solution sucrée stérilisée. Si le sang est emprunté à un chien dépancréaté depuis plus de vingt- quatre heures, la glycolyse dans la solution sucrée (qui fourmille de microbes) est très active. États dans lesquels le pouvoir glycolytique du sang artériel est augmenté. — Excitation du pancréas. — Il y a plusieurs moyens d'exciter le pancréas. Celui que j'ai le plus em- ployé consiste à faradiser les nerfs qui accompagnent l'artère pancrèatico-dnodéuale. La simple section de ces nerfs a une action du même genre, mais bien moins marquée. Quelques heures {au inoins six heures) après l'excitation faradique, le pouvoir glyco- lytique du sang est très augmenté; la perte de sucre dépasse souvent Ok>',oO p. lOOo. Il existe en même temps une hypoglycémie très prononcée. Il résulte de plusieurs expériences personnelles, toutes concordantes, que la ligature du canal thoracique au cou n'empêche pas l'excitation des nerfs du pancréas d'aug- menter le pouvoir glycolytique du sang. Chez un chien qui avait subi une ablation partielle du pancréas, le sang artériel pos- 510 GLYCOLYSE. sédait le lendemain un pouvoir glycolylique supérieur à la normale. Ce résultat me paraît explicable par l'excitation nerveuse de la glande. J'ai aussi observé une augmentation du pouvoir glycolylique du sang, mais à un moindre degré, après le chauffage artificiel du pancréas ectopié (fait avec un appareil que j'ai décrit, 38), et aussi après le simple massage de cette glande mise à nu. La ligature du canal de Wirsung, ainsi que je l'ai montré il y a plus de quinze ans, a la même action, et l'augmentation du pouvoir glycolytique du sang est plus prononcée, si l'on y ajoute, comme je le fais aujourd'hui, l'ingestion d'eau acidulée (76). On sait, depuis les travaux de Pawlov, que l'acidité de l'estomac provoque la sécrétion du suc pancréatique. Vu l'obstruction du canal, une contre-pression s'exerce sur les cellules glandulaires, d'où accroissement de la résorption des produits qu'elles ont élaborés. L'injection dans une veine d'un peu plus d'un centigramme de pancréatine par kilo- gramme de poids vif, amène au bout de quelques heures un accroissement énorme du pouvoir glycolytique du sang. Il est possible que la trypsine agisse en facilitant l'issue du ferment hors des globules blancs. Avec BouLUD j'ai récemment constaté que, même chauffée à une température supé- rieure à 100°, la pancréatine injectée dans la veine d'un chien, à dose, à la vérité, beau- coup plus forte, augmente aussi chez lui, au bout de quelques heures, le pouvoir glycoly- tique de son sang. La macération de pancréas, même portée pendant un quart d'heure à 120" agit d'une manière semblable; mais, dans le cas oîi elle est chauffée, son action est plus faible. J'insiste sur le fait que ce n'est guère que le lendemain que se manifeste l'augmentation du pouvoir glycolytique du sang. Il faut un certain temps pour la pro- duction de la cytase glycolylique*. On peut obtenir cette fermentation également au bout d'un certain nombre d'heures, sans recourir à la pancréatine ou à une macération de pancréas; mais il faut alors injecter dans le sang une grande quantité de liquide, par exemple (15 ou 20 ce. parkil. d'eau salée physiologique (7 ou 8 pour 1000) en quantité suffisante. Influence des îlots de Langerhans sur la glycolyse. — Les faits que je viens de citer (influence de l'excitation du pancréas, de la ligature du canal de Wir- sung, etc.) conduisent à admettre que le pancréas exerce une action très marquée sur la glycolyse. Quand, le premier (12), j'ai parlé de sécrétion interne du pancréas-, j'ai admis que celle-ci provenait des cellules des acini et supposé que ces cellules fournissaient une sécrétion double, comme les cellules du foie. Mais, depuis quelques années, un anato- miste français, Laguesse, a émis une hypothèse qui mérite l'attention: On sait qu'il existe dans le pancréas de petits groupes de cellules (îlots de Laxgerhans) ayant la même origine que les cellules des acini (leur développement le prouve), mais en différant par leur forme et par l'absence de communication apparente avec les canaux excréteurs (une matière à injection poussée par le canal de Wirsung n'y pénètre pas (Schmidt). Ce sont ces cellules qui, d'après Laguesse, seraient les organes de la sécrétion interne. Cette hypothèse est appuyée sur une constatation anatomo-pathologique, à savoir que, dans un certain nombre de cas de diabète (maladie dans laquelle il y a, géné- ralement, une diminution évidente de la glycolyse), ces cellules ont été trouvées en grande partie détruites, celles des acini paraissant, pour la plupart, saines^. Un autre fait, d'ordre expérimental, s'il était rigoureusement établi, apporterait une nouvelle preuve à l'appui de l'idée que les cellules des îlots servent à la glycolyse, c'est 1. La macération d'autres organes que le pancréas, injectés dans le sang, amène aussi, le lendemain, une augmentation considérable du pouvoir glycolytique du sang (Lépine et Boulud). Mais, de tous les organes, c'est le pancréas qui paraît, à cet égard, le plus actif. 2. Quelques auteurs attribuent l'idée de la sécrétion interne du pancréas à v. Mering et Min- KOwsKi, ou à MiNKOwsKi. C'est à tort : ces auteurs n'ont nullement précisé de quelle manière l'ablation du pancréas produit le diabète. Ils sont restés à cet égard dans une réserve absolue. C'est seulement après ma leçon publiée dans la Revue scienlifique (12), et après ses expériences de greffe, que Minkowski a accepté l'idée d'une sécrétion interne. 3. Los plus nets de ces faits appartiennent à Opie. Il y a, d'ailleurs, des cas parfaitement observés de diabète même très grave, où les îlots de Langerhans étaient intacts; mais ils ne sau- raient contredire la théorie de Laguesse; car tous les diabètes n'ont pas une pathogénie pan- créatique. GLYCOLYS^. 5il leur diminution de volume quand l'économie est saturée de sucre. Il est à noter que l'inanition ne semble pas produire cette diminution de vcluine, observée par Ssobolew {A. A. P., cxviii, 107) chez des chiens, et par Jean Lépine chez des cobayes qui avaient reçu une injection de sucre (C. R. de la Société de Biologie, 1903). En somme, un ensemble de faits contribue à appuyer l'hypothèse de Laguesse; mais ils ne donnent pas le droit d'affirmer que les îlots sont les organes exclusifs de la sécré- tion; car il n'est pas prouvé que les cellules des acini ne cèdent rien aux vaisseaux. On a rapporté des cas de diabète dans lesquels les îlots étaient intacts, et les atini plus ou moins envahis par une sclérose. J'ai d'autre part, montré, il y a plus de douze ans, que la ligature du canal de Wirsung est suivie d'une augmentation notable du pouvoir glycolytique du sang — et j'ai récemment, avec Boulud, confirmé ce fait. — Or la liga- ture du canal de Wirsung ne peut guère agir sur les Jlois. Les cellules des acini et des îlots sont de même nature. Il est donc probable que leurs fonctions ne diffèrent pas essentiellement, et qu'au point de vue de la sécrétion interne il n'existe entre elles qu'une différence de degré. L'action exercée par le pancréas sur la glycolyse générale n'est pas directe, mais favori- sante.— Peu après avoir découvert l'influence glycolytique exercée par le pancréas, j'ai été conduit, par les faits, à admettre qu'il n'était pas le seul organe jouissant de cette influence, et j'ai dit, plus tard, d'une manière très explicite « que la sécrétion interne ne produit vraisemblablement pas directement, mais favorise la glycolyse des tissus » (19). J'aurais pu ajouter que cette action favorisante n'est certainement pas due exclu- sivement aune enzyme, car j'avais, dès 1899, constaté avec Martz dans des expériences très précises (37), qu'un fragment bouilli de pancréas, extirpé après l'extirpation des nerfs de cet organe, favorise beaucoup plus la fermentation alcoolique qu'un frag- ment (également bouilli) extirpé avant cette excitation. Voici le résumé d'une de ces expériences; On a pris deux ballons renfermant chacun 200 centimètres cubes de liquide minéral Pasteur, peu sucré, et 1 gramme de levure très exactement pesée. A l'un d'eux, ou a ajouté la pulpe d'un fragment de pancréas, aussitôt après l'avoir extirpé, pesé et fait bouillir pendant 5 minutes (pour détruire la trypsine). Puis on a excité avec un courant faradique assez fort et pendant un quart d'heure, le faisceau de nerfs qui entoure l'artère pancréalico-duodénale. Cinq heures plus tard on a extirpé un fragment de pancréas de même poids (8 grammes), et on l'a traité comme le précédent, en ayant soin que les condi- tions de temps, de température, etc., fussent identiques dans les deux ballons. Après quinze heures de fermentation, on a dosé le sucre restant dans le ballon, et, par pesée, l'acide carbonique dégagé. La solution des deux ballons renfermait au début 4^'",4 de glucose. Dans le premier ballon, il en a disparu 3^^,48; Dans le second, 3e'-,93 ; Du premier, il s'est dégagé 0S'',70 de CO'^; Du second, is^Ol de CO^. On voit que la glycolyse a été bien plus active dans le ballon ayant reçu le pancréas excité. Incidemment je ferai remarquer que, dans le deuxième ballon, nous avons trouvé, pour 1 gramme de glucose disparu, beaucoup plus de CO"^ dégagé (08f%257 au lieu de 0S'',20i). La modification de la fermentation a donc été, non seulement quantitative, mais qualitative. L'expérience suivante montre que la substance favorisante peut être décelée dans le sang de la veine pancréatique : On répartit entre huit ballons 400 centimètres cubes d'eau sucrée à 5 p. 1000, légère- ment thymolée et renfermant un peu de zymase de Hughner. Deux de ces ballons (témoins) reçoivent chacun 5 grammes d'eau salée; Deux autres, chacun 5 grammes de sang de la veine pancréatique d'un chien à jeun; Deux autres, chacun 5 grammes de sang de la même veine, immédiatement après la faradisalion des nerfs du pancréas, pendant dix minutes; Les deux derniers, chacun 5 grammes de sang de la même veine, quatre heures et demie plus tard. 512 GLYCOLYSE. Tous ces ballons, ainsi préparés, sont mis à l'étuve. Chacun y resLe quatre heures. Au bout de ce temps, on dose le sucre dans chaque [ballon. Voici la perte moyenne de chaque série : 1° Ballons témoins 0,09 2° — renfermant le sang avant la faraclisation 0,72 3" Immédiatement après la faradisatiou. . 0,8 i 4° 4 heures après la faradisation 1,05 Ainsi, dans la dernière série, la perte est plus de dix fois supérieure à celle des témoins. Il importe de remarquer que les écarts entre les deux ballons de chaque série étaient fort peu considérables. J'ajoute enfin qu'on a tenu compte de la proportion variable de sucre que renfermaient les trois sangs ajoutés au liquide sucré. La conclusion de cette expérience est que le sang de la veine pancréatique, après la faradisation des nerfs du pancréas, favorise la fermentation alcoolique plus que le sang retiré de la même veine avant la faradisation, et que le sang recueilli quatre heures après la faradisation est beaucoup plus efficace que le sang recueilli aussitôt après. Il y a donc parallélisme entre les effets sur la fermentation et la glycolyse chez l'animai. J'ai fait l'expérience suivante, avec la collaboration de Boulud. Nous faisons fermenter avec un peu de levure de bière un litre environ d'une solu- tion de glucose à 2 p. 100. Quand la fermentation est en train, nous filtrons, à travers un linge (pour avoir un liquide bien homogène); nous dosons le sucre, nous versons dans plusieurs éprouvettes semblables 100 centimètres cubes du liquide en fermentation, et nous ajoutons à chacune d'elles, sauf à celles qui servent de témoins et qui reçoivent o centimètres cubes d'eau salée, le même nombre de centimètres cubes de divers échantillons de lymphe fraîche qui s'écoule d'une canule (placée dans le canal thora- cique d'un gros chien), soit avant, soit après la faradisation des nerfs du pancréas. Au bout de deux heures, nous dosons le sucre dans chaque éprouvette, les conditions de temps, de température, d'acidité, etc., ayant été idenliques. Or nous avons constamment trouvé que c'étaient les éprouvettes témoins qui avaient perdu le moins de sucre, et que c'étaient celles qui avaient reçu la lymphe recueillie après la faradisation qui en avaient perdu le plus. Cette expérience montre nettement que la substance favorisant la fermentation alcoolique est plus abondante dans le canal thoracique après l'excitation du pancréas. Thibaudeau {Presse médicale, 29 septembre 1904,234) se fondant sur des considérations histologiques, a pensé que la sécrétion interne du pancréas doit passer, non seulement par les veines, mais par les lymphatiques. C'est ce que démontrait déjà l'expérience que j'ai publiée en 1890 (5). La substance favorisante issue du pancréas est, d'après Cohxheim (84), soluble dans l'alcool à 96'^, tandis que le ferment glycoly tique des organes est, comme nous l'avons vu, précipité par l'alcool. Elle résiste non seulement à la température de l'ébullition, comme je l'ai montré en 1899, mais à une température plus élevée. En résume, la glycolyse dans le sang est aérobie, contrairement à celle qui se produit dans les organes. Le pouvoir glycolylique du suc de ces derniers paraît, en général, assez faible. Il est notablement renforcé par des produits issus du pancréas et constituent ce qu'on nomme sa sécrétion interne. Ces produits sont décelables dans le sang de la veine pancréatique et dans la lymphe du canal thoracique. L'extrait du pancréas bouilli, sur- tout après l'excitation des nerfs de l'organe, a encore une action favorisante bien marquée. Relations entre les pouvoirs glycolytique et catalytique du sang. — Contrairement à ce qu'a pensé Spitzer, il est exceptionnel de trouver un parallélisme entre le pouvoir glycolytique du sang et la quantité d'oxygène qu'il est capable de dégager de l'eau oxy- génée. Comme preuve, il suffit de dire qu'un sang ayant séjourné une heure à 39» conserve généralement l'intégrité de son pouvoir catalytique, bien qu'il ait perdu une grande partie de son pouvoir glycolytique. Cela n'a rien qui puisse étonner, si l'on admet avec Ville et MorressiEa [B. B., 1903, 1126), que l'action catalytique du sang est une propriété exclusive des globules rouges, et qu'elle tient à une zymase GLYCOLYSE. 513 contenue dans ces globules. Voici cependant une expérience où ce parallélisme a existé. C'était chez un chien vieux, mais bien portant. Le sang de la carotide, de la jugulaire et de la fémorale avait une teneur en sucre normale, un pouvoir glycolytique normal, et 1 ce. de ces divers sangs dégageait, en quinze minutes, avec l'eau oxygénée, de 5 à 7 ce. d'oxygène. Huit heures après la section des nerfs du foie, et la faradisalion des nerfs du pancréas, j'ai trouvé de l'hypoglycémie, une énorme glycolyse, après séjour du sang à 39®, et une grande augmentation du pouvoir catalytique du sang. En effet, avec la même quantité d'eau oxygénée, et dans le même temps, le sang de la jugulaire donnait io ce. d'oxygène; celui de la fémorale, 14 ce; et celui de la carotide, 18 ce. Relation entre le pouvoir glycolytique du sang et sa teneur en globules blancs. — J'ai dit depuis longtemps que le ferment glycolytique du sang est, en grande partie, inclus dans les globules blancs. S'il en est ainsi, on conçoit que des modifications de ces glo- bules influent beaucoup sur le pouvoir glycolytique du sang. M/iIheureusement nos connaissances à cet égard laissent encore beaucoup à désirer. Lœwy et Richteu (32) ont vu coïncider l'hypoleucocytose et la diminution du pouvoir glycolytique du sang. Hahn (28) a trouvé une glycolyse forte avec une hyperleucocytose. Dans l'expérience que je viens de relater, à propos du pouvoir catalytique du sang, et dans un certain nombre d'expériences analogues, j'ai trouvé une remarquable corrélation entre le pouvoir glycolytique et laleucocytose : huit heures après l'excitation du pancréas, le nombre des globules blancs avait triplé, et je me suis assuré par d'autres expériences que l'ouverture de l'abdomen seule ne produisait pas une leucocytose aussi prononcée. Quant à la relation qu'ARTHUs avait cru trouver entre la glycolyse et la coagulation, c'est une erreur sur laquelle il est inutile d'insister. Martin Hahn a montré que le sang rendu incoagulable par une histone possède le même pouvoir glycolytique que le sang normal. Influence de la proportion de glucose dans la solution sucrée. — Avec Métroz (22) j'ai étudié cette influence dans des solutions renfermant de 1 à ;> grammes p. 1000 de glu- cose. Nous avons constaté que dans ces limites la destruction absolue du sucre est plus forte (pour une même proportion de ferment) quand la proportion de sucre est plus considérable. M""* Sieber (90), en employant des solutions beaucoup plus concentrées (de 7,4 à 33 gr. p. 1000), a vu au contraire que la glycolyse est plus forte dans les solu- tions moins sucrées; mais ses expériences ont peu d'intérêt au point de vue biologique; car dans l'économie, il n'existe pas de solutions aussi concentrées. J'ai constaté, il y a longtemps, que, si l'on infuse dans la veine d'un chien un quart de litre environ d'une solution de glucose à 10 p. 100, le pouvoir glycolytique du sang est aboli pendant plu- sieurs heures, et M™'' Sieber a pu constater, dans des expériences in vitro, que le ferment glycolytique est dépourvu de toute activité en solution sucrée très concentrée (90). Glycolyse de différents sucres. — Jusqu'ici nous ne nous sommes occupés que de la glycolyse du glucose. Il n'est pas sans intérêt de savoir comment se produit celle des autres sucres. Portier, le premier, a fait cette recherche (43). Mais ses expériences ont été faites avec le sang d'animaux anesthésiés, ce qui n'est pas le moyen d'obtenir le maximum de la glycolyse; et celle-ci a duré quarante-huit heures, ce qui est un temps bien long. En elfet, au bout de ce temps, le lévulose et le mallose, ajoutés dans la pro- portion de 2 p. 100 de sang, avaient complètement disparu (sauf dans une expérience où la moitié du lévulose a été retrouvée). Quant au saccharose, au lactose et au xylose, ils ont été retrouvés en totalité. Deux ans plus tard. Portier a repris ces expériences (71), en suivant la môme mé- thode. Il a vu que d'autres pentoses que le xylose (l'arabinose et le sorbose) sont égale- ment incapables d'être glycolysés. Il en est de même du lactose, ce qui n'a rien d'extraordinaire, la lactase n'existant pas dans le sang. Il a constaté, de plus, que le galactose et le mannose subissaient la glycolyse. BlumeiNtual, en employant non le sang, mais le suc du pancréas, a trouvé qu'en douze à seize heures il y avait formation abondante d'acide carbonique avec le lactose, le galactose et le lévulose, mais moins abondante, toutefois, qu'avec le glucose. Il a constaté, de plus, que de l'acide carbonique s'était formé aux dépens de Varabinose. J'ai dit précédemment que le ferment glycolytique du sang et celui des organes ne paraissaient pas identiques. Les résultats des expériences que je viens de citer confirment cette opinion. BICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. '•^'•^ 514 GLYCOLYSE. Bibliographie. — 1. Chauveau. Nouvelles recherches sur la question glycogénique (C. R. de l'Acad. des Sciences, 1856, xuii. — 2. Cl. Bernard. Leçons sur le diabète. Paris, 1877. — 3. 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De la glycolyse hématique apparente et réelle, etc. {Ibid., p. 1414). — 9. Ibid. De la glycolyse dans le sang circulant dans les tissus vivants {Ibid., cxui, p. 118). — 10. Ibid. Sur quelques variations du pouvoir glycolytique dii sang {Ibid., p. 729). — 11. Ibid. Sur les variations du pouvoir glycoly- tique, etc. {Ibid., p. 1014). — 12. Lépine. Le ferment glycolytique {Revue scientif., 1891, 28 févr.). — 13. Lépine et Barral. Sur la question du ferment glycolytique {Sécrétion interne) (C. R. de la Société de Biologie, 1891, p. 271). — 14. Arthus. Glycolyse daiis le sang et ferment glycolytique {Archives de Physiologie, 1891, p. 425 et 1892, p. 437). — 15. Hédon. {Ibid., 1892). — 16. Colenbrander. Maly's Jahresbericht fur 1892, p. 137. — 17. F. Kraus. Ueber die Zuckerumsetzung im menschlichen Blute ausserhalb der Gefassystem (Zeitschrift fiir kl. Medicin, 1892, xxi, p. 315). — 18. Sansoni. Il fermento glicolitico Riforma, 1892. — 19. Seegen. Ueber die llmsctzung von Zucker im Elut. {Centralblatt fiir PhysioL, v, 11°^ 25-26). — 20. Jessner. Beriincr kl. Wochensch., 1892, p. 417. — 21. Lépine et Barral. Sur la glycolyse dans une veine fermée à ses deux bouts {Ibid., 1892, p. 220). — 22. Lépine et Métroz. Sur la glycolyse dans le sang normal et dans le sang diabétique {C. R. de l'Acad. des Sciences, 1893, cxviir, p. 154). — 23. Lépine. Étiologie et pathogénie du dia- hète sucré. Voir surtout VAddendum {Revue de Méd., 1894). — 23 bis. Lépine et Lyonnet. Pouvoir glycolytique de cultures fdtrées {Lyon médical, 1896, 26 avril). — 24. Spitzer. Ueber die Zuckerzerstôrende Kraft des Blutes und der Gewebe {Derliner klin. Woch., 1894, n" 42). — 24 6ts. Id., Pflâger's Archiv, 1895, lx, p. 303. — 25. Dastre. Archives de Phy- siologie, 1895, p. 532. — 26. Bourquelot. (C R. de la Société de Biologie, 1896, p. 314). — 27. Spitzer. 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Ibid. (et Gerny). Centralblatt fur Physiol., 1903, 14 févr. — Ibid., 21 nov. - 66. S/macek. Ibid. —67. Bach et Battelli. {C. R. de l'Acad. des Sciences, 1903, 2 juin). — 68. Feinsgumidt. Ueber das Zuckerzerstôrende Ferment {Beitràge zur chem. Phys. u. Pathol., 1903, iv, p. 511). — 69. Rahel lIiRscu. Ibid., p. 535. — 70. Portier. Sur la glycolyse de différents sucres (C. R. de la Société de Biologie, 1903, p. 191). — 71. Ibid. Recherches sur les glycolyses dans les liquides filtrés sur une bougie de porcelaine {Ibid., p. 192). — 72. Arnheim et Rosexbaum. ZurFrage der Zuckerzerstôrung {Hoppe-Seyler's Zeitschrift, 1903, xl, p. 220). — 73. Batelli. La prétendue fermentation alcoolique des tissus animaux {C. R. de l'Acad. des Sciences, 1903,. 14 décembre). — 74. Blumexthal. Ueber das glycolyt. Ferment {Deutsche med. Woch., 1903, n° 51). — 75. I.épixe et Boulud. Augmentation du pouvoir glycolytique du sang- après la ligature du canal de Wirsung {C. 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GLYCOSES (Chimie). — Ou désigne sous le nom générique de glycoses ou hexoses un certain nombre de corps jouissant de propriéte's organoleptiques spé- ciales, en particulier d'une saveur plus ou moins sucrée, de propriétés réductrices vis à vis des solutions alcalines de sels métalliques, de propriétés fermentescibles en présence de levure de bière avec transformation consécutive en alcool et acide carbonique, de propriétés optiques résultant de leur action sur la lumière polarisée. Enfin, leur formule correspond à la fixation des éléments de l'eau sur le carbone; ce sont des sucres, des hydrates de carbone, en un mot, mais répondant à 6 atomes de carbone soudés à 6 molécules d'eau. Leur formule générale est ilonc C^H'-O''. Ces corps peuvent se diviser en deux groupes : \° Les aldoses, qui possèdent cinq fonctions alcoql, dont une primaire et quatre secondaires, et une fonction aldéhydique, de formule générale : CH20H— CHOH— CHOH— CHOH— CHOU— COH 2° les céloses qui possèdent cinq fonctions alcool, deux primaires et trois secondaires, et une fonction cétonique de formule générale : CH20H— CHOH— CHOH— CHOH-CO— CH^OH A ces corps se rattachent des dérivés d'hydratation et d'oxydation qui constituent les alcools hexatomiques correspondants, mannites ou hexites de formule générale CeHiiQfi, ou mieux : CH^OH— CHOH— CHOH- CHOH— CHOH— CH^OH et des acides, acides sacchariqucs ou muciques, possédant deux fonctions acide et uatre fonctions alcool secondaires, CH'^O^ ou : CO^H— CHOH— CHOH— CHOH— CHOH— GO^H Enfin des corps un peu différents doivent être placés à côté des consti uanis de celle série: tels sont par exemple : 1° le rhamnose, qui est une fois aldéhydique, quatre .fois alcool secondaire, et dont le premier groupement CH-* n'est pas substitué; 2° Viso- ylycosamine, qui correspond à une cétose dans laquelle un des groupenienls alcool pri- maire est remplacé par un groupement CH-AzH-; 3° l'acide glucosamique droit, qui cor- respond à une aldose dont le groupement alcool primaire a été oxydé et remplacé parun groupement acide. Tous ces corps appartiennent en somme à la grande famille des monosaccharides, dont les premiers éléments sont les trioses, les tétroses, les penloses, tous de formule générale : CH^OH— (choh)-!^coh dans laquelle n peut aller de 0 à 0. Le nombre de corps correspondant à ces formules est extrêmement grand. Nous nous attacherons, dans cet article, à décrire les plus importants d'entre eux et à montrer seulement pour les autres quelles sont les relations qui existent entre eux et ceux dont nous nous occuperons. Propriétés générales des glycoses. — Les glycoses possèdent un certain nombre de propriétés, qui leur sont communes, d'ailleurs, avec la plupart des hydrates de carbone. ChaufTés, ils se colorent en jaune, puis en brun par les alcalis; ils réduisent les solu- tions alcalines d'hydrate métallique, la liqueur de Fehllng, les solutions argentiques alcalines, le sous-nitrate de bismuth en présence de potasse ou de soude. Ils font tourner le plan de la lumii'i're polarisée, et la rotation est spécifique du GLYCOSES. 517 fjlycose considéré. Ils fermentent en présence de levure de bière en donnant naissance à de l'alcool et à de l'acide carbonique. Par l'action des acides chlorhydrique ou sulfurique à chaud, ils donnent naissance à de l'acide 16vulique,des matières humiques et de l'acide formique. Quelques acides et quelques phénols aromatiques donnent, avec certains glycoses, le dextrose en particulier, quelques réactions colorées. Enfin la phénylhydrazine donne avec les glycoses un précipité cristallisé aciculaire, jaune, presque insoluble dans l'eau. Les proportions pour obtenir cette réaction dans de bonnes conditions sont : une partie d'hydrate de carbone pour un mélange de deux parties de chlorhydrate de phénylhy- drazine, trois parties d'acétate de soude dissoutes dans 20 parties d'eau. Synthèse des glycoses. — Nous n'entrerons pas dans le détail des essais nombreux^ qui ont été faits sur celte question. Howig a cru obtenir un glycose par réduction de l'éther oxalique par l'amalgane de sodium. Mais ce résultat a été contesté par Brunner. On a essayé de condenser l'aldéhyde méthylique un certain nombre de fois; mais c'est Fischer qui a pu obtenir synthétiquement du glycose et les difTérents sucres natu- rels par une voie longue et compliquée qui consiste à obtenir un glycose inactif, l'acide glycosique inactif correspondant. On effectue le dédoublement de cet acide; on élimine l'acide gauche par exemple, et on revient finalement de l'acide au glycose. Nous renvoyons pour plus de détails nos lecteurs aux mémoires originaux de Fischer. Composition et constitution des sucres. — La constitution des sucres et en particulier du glycose a été pour la première fois envisagée par Fittig. Mais ce sont sur- tout les travaux récents de E. Fischer qui ont commencé à jeter un peu de lumière sur cette question très complexe. Nous devons signaler aussi les travaux de Collfz, Tollens, Marchlewski qui ont contribué aussi à éciaircir le problème. Nous allons résumer rapi- dement dans ce qui suit de quelle façon nous pouvons concevoir maintenant la consti- tution du glycose et ses différentes isoméries. Pour pouvoir nous rendre compte de la constitution des glycoses ou hexoses, il faut que nous envisagions la constitution et les propriétés de tous les monosaccharides. • Les monosaccharides sont des corps possédant une ou plusieurs fonctions alcooliques associées à une fonction réductrice aldébydique ou cétonique. Les polysaccharides proviennent de la soudure de deux ou plusieurs monosaccharides avec élimination de une ou plusieurs molécules d'eau. Nous pouvons par exemple prendre pour type de monosacchaiide le glycose ordi- naire ou dextrose, C41'-0'^; et le lévulose C'H'-O'' : le disaccharide, le saccharose, ou sucre de canne, répondra à la formule C'-H--0", et proviendra de la combinaison du glycose et du lévulose avec élimination d'eau. Ainsi que nous le disions plus haut, les monosaccharides répondent à la formule générale GH-OH — (cHOH) — COH dans laquelle on peut aller de zéro à 9. Un très grand nombre de corps répondent à cette formule, d'autant que, pour la même valeur de n et des fonctions chimiques identiques, il peut exister un certain nombre d'isomères. L'isomérie ne vient pas alors d'une disposition différente des atomes constituants entraînant une forme particulière de la molécule, mais uniquement de la situation occupée dans l'espace relativement à la chaîne centrale des carbones, des différents atomes ou groupements fonctionnels d'atomes. Nons pouvons concevoir assez facilement la for- nuation et la constitution de ces différents corps en partant du groupement sucré le plus simple pour aller jusqu'à la formule du glycose et de ses isomères, c'est-à-dire des hexoses. Le sucre le plus simple, l'aldéhyde glycolique, ou biose, de formule CH20H — COH. provenant de l'oxydation limitée du glycol, est un corps qui possède à la fois une fonction alcool primaire et une fonction aldéhyde. Il ne peut exister dans l'espace qu'un seul composé de cette forme. Il n'en est plus de même si nous considérons 518 GLYCOSES. l'homologue supérieur, l'aldéhyde glycérique ou triose : deux fois alcool et une fois aldéhyde : CH20H — CHOH — COH. En effet représentons l'atome de G par un tétraèdre, nous voyons que l'un des atomes de carbone entrant dans la constitution de ce corps ne présente pas de plan de symétrie ; c'est le carbone du milieu autour duquel se trouvent les groupements suivants : H, (OH), (CH20H), (COH). Ce carbone peut donc être représenté de deux façons différentes, image l'une de l'autre, et non superposables. HOHC CH 0»1; Ces deux corps diffèrent donc l'un de l'autre par une disposition particulière des éléments. Ils ont mêmes fonctions, mêmes propriétés chimiques : néanmoins l'un dévie à gauche le plan de polarisation de la lumière; l'autre le dévie à droite; ce sont deux stéréo-isomèi^es. L'un est le glycérose droit, l'autre le glycérose gauche. Pour simplifier davantage l'écriture, nous pouvons représenter les deux corps de la façon suivante : OH Glycérose droit. CH20H — C — COH I H [H Glycérose gauche. CH20H — C — COH I OH A chacun de ces corps correspond un acide jouissant des mêmes ^Dropriétés : L'acide glycérique droit- L'acide glycérique gauche. OH I CH-ïOH — C — C02H. 1 H H CH'^OH — C — C02H. I OH Et tous proviennent de l'oxydation plus ou moins complète d'un alcool trivalent, la glycérine CH90H — CHOH — CH20H qui ne présente pas d'isomères stéréochimiques, étant donnée l'absence de carbone asymétrique, les deux groupes extrêmes étant identiques. On voit donc que les sucres les plus simples proviennent de l'oxydation incomplète d'un alcool et de la transformation d'un des groupements fonctionnels alcool primaire en aldéhyde. L'asymétrie, autour d'un atome de carbone, que cette réaction entraîne, provoque la GLYCOSES. 319 formation de deux composés jouissant de propriétés optiques différentes. Si l'oxydation est poussée plus loin, nous avons deux corps à la fois acide monobasique et alcool divalent présentant les mêmes formules et les mêmes caractères, ou un corps acide bibasique et alcool secondaire, qui correspond exactement à l'alcool primitif, à la glycérine; et qui ne présente pas d'isomères. Le nombre des isomères stéréochimiques va en augmentant au fur et à mesure que l'on s'avance dans la série : ainsi les sucres en C' ou tétroses sont au nombre de 4 répondant à la formule linéaire CH20H — CHOH — CHOH — XOH qui dans l'espace peuvent se présenter sous la forme de quatre stéréo-isomères : H H I I (1) CH20H — G — C — COH OH OH H OH I I (2) CH20H — C — C — COH •| I OH H OH H I I (3) CH20H — C — C — COH I I H OH OH OH I 1 (4) CH20H — C — C — COH H H Ils proviennent de l'oxydation d'un sucre, l'érythrile, qui à son tour présente deux carbones asymétriques CH20H — CHOH — CHOH — CH20H En raison de l'identité des deux groupes terminaux, les isomères correspondant au tétrose (2) sont identiques, et inactifs sur la lumière polarisée, de telle sorte qu'il n'y a là que trois érythrites, une droite, une gauche, et une inactive par compensation non dédoublable racémique. L'association à parties égales de la droite et de la gauche conduit à une inactive par mélange, mais dédoublable. Les nionosaccharides en C' on pentoses forment déjà un groupe plus important. Considérons les alcools primitifs ou pentites C-^H'20'. Ces corps sont au nombre de quatre : les arabiles, droite et gauche, la ribite ou adonite, et la xylite; La ribite a pour formule : H H H I I I CH20H _ C — C — C - CH20H I I I OH OH OH Ce corps est identique avec son symétrique en raison de l'identité des deux noyaux terminaux et de la symétrie du carbone central. OH OH OH I I I CH20H _ C — C — C — CH20H I I I H H H 520 GLYCOSES. Mais par oxydation si l'un de ceux-ci devient aldéliydique, il se forme deux isomères différents, deux pentoses, les riboses droit et gauche. H H H I I I CH20H — C — C — C — COH I I I OH OH OH Ribose droit. OH OH OH I I I CH20H — C — C — C — COH Ribose gauche. I I I H H H Il en est de même pour la xylite, dont les deux formes sont identiques et superposables, en raison de la symétrie du carbone central, OH H OH I I I CH20H — C — C — C — CH20H I I I H OH H Identique avec H OH H I I I CH20H _ C — C - C — CH20H I I I OH H OH mais qui donnent par oxydation deux sucres en C^; les xylo^ei droit et gauche. OH H OH I I I CH20H — C — G — C — COH Xylose droit. I I I H OH H H OH H I I I CH20H _ C — C — C — COH Xylose gauche. I I I OH H OH Au contraire, les arabites sont différentes, le carbone central étant dissymétrique, et nous avons : H H OH III CH20H _ C — C — C — CH20H Arabite droit. III" OH OH OH OH OH OH I I I GH20H — C — C — C — GH20H Arabite gauche. I I I H H OH. Chacune d'elles pourra donner naissance à deux sucres en G''. H H OH III CH20H — C — C — C — COH Arabiuose droit. I I I OH OH H H H OH III COH _ C — C — C — CH20H Lyxose droit. III ^ ■ ' OH OH H GLYCOSES. 521 dérivant tous deux de l'arabite droite et OH OH H I I I CH20H — C — G — C — COH Arabinose gauche. I I I H H OH OH OH H I I i COH — C — C - C - CH^OH Lvxose gauche. III H H OH. dérivant tous deux de l'arabite gauche. On voit donc qu'il existe 8 isomères possibles des sucres en G' ou pentoses, et par suite, par substitution de GO'-H et COH, 8 isomères pour les acides pentoniques. Enfin, si nous considérons les corps en G*^, les glycoses ou hexoses, nous allons arriver à une complication extrême: 10 isomères sont possibles pour les alcools pentavalenls et 16 corps peuvent exister, répondant à la formule générale G^H'-O^ Nous allons résumer dans le tableau ci-dessous la formule de composition de chacun d'eux avec l'alcool dont il dérive, sans entrer de nouveau dans les considérations que nous avons développées à propos des homologues moins élevés. H H H H I I I I I CH20H — C — G — C — C — CH20H Inconnu. I I I I OH OH OH OH donnant naissance à H H H H I I I I 1) • CH-^OH — C — G — C — G — COH Inconnu. I I I I OH OH OH OH OH OH OH OH I I I I 2) CH20H-C-G — C — C-GOH Inconnu. I I I I H H H H H H OH H I I I I GH-OH — G — G — C — C — COH^OH Sorbite droite ou d. sorbiie. I I I I OH OH H OH donnant naissance à H H OH H I I I I CH-OH — G — G — C — G — COH Glycose droit, d. glycose ou dextrjse. Gulosc droit ou d. eulosc. Avec OH OH H OH OH H 1 1 OH OH 1 1 GH^OH 1 1 — G — G 1 1 1 1 - G - C 1 1 -COH 1 1 1 1 H OH H H OH OH 1 1 H OH 1 1 GH20H — 1 1 G — C — 1 1 1 1 G — G — 1 1 CH20H 1 1 H H 1 1 OH H OH OH 1 1 H OH 1 1 CH20H- 1 1 -G-G- 1 1 1 1 - G - C - 1 1 COH i 1 H H i 1 OH H Sorbito gauche ou 1. sorbitc. Glucose gauche ou 1. glucose. 522 GLYCOSES. H OH H H I I I I CH20H _C — C — G — C — COH I I I I OH H OH OH OH H H H I I I I n CH20H — c — c — c — C-CH20H I I I I H OH OH OU donnant naissance à OH H H H I I I I 3) CH20H — C — C — C — C — COH I I I r H OH OH OH OH OH OH H I I I I CH^OH _C — C — G — C — COH I I I I H H H OH H OH OH ,0H I I I I CH20H _G — G — G — C — GH20H I I I I OH H H [H qui donne naissance à H OH OH OH M I I I CH20H _C — C — C — C — COH i I I I OH H H H H H H OH I I I ! CH20H — C — C — C — C — COH. I I I I OH OH OH H H H OH OH I I I I CH'^OH — G-G — G — C — CH20H I I I I OH OH H H Gulose gauche ou 1. gulose. Talite gaucho ou 1. talito. Talose sauche ou 1. talosc. Incoûnu. Talite droite ou d. talito. Talose droit ou d. talose. Inconnu. Mannite droite ou d. mannito. Avec H H OH OH I I I I CH20H _C — C — C — G — COH I I I ! OH OH H H OH OH H H I I I I CH20H — G — G — C — G — GH20H I I I I H H OH OH OH OH H H Mannose droit ou d. manno.so. Mannite gauclie ou 1. mannite. Avec CH20H — G — C — C — C — COH I I I I H H OH OH Mannose"'ffaucl)e ou 1. mannose. H OH OH H I I I I CH20H — C — G — C — C — GH20H I I I I OH H H Ofl Dulcite. GLYCOSES. 523 Avec H OH OH H I I I I CH20H — C — C — C — C — COH Galactose droit ou d. galactose. I I I I OH H H OH OH H H OH I I I I CH^OH — C — C — C — C — COH Galactose gauche ou 1. galactose. I I I I H OH OH H OH H OH H I I I I CH20H _C — C — C — C — CH20H Inconnu. I I I I H OH H OH Avec OH H OH H I I I I CH-^^OH _C — C — C — C — COH IJose droit ou d. idosc. I I I I H OH H OH H OH H OH I I I I CH^OH _C — C — C — C — CH20H Inconnu. I I I I OH H OH H Avec H OH H OH I I I I ^ CH-OH — C — C — C — C — COH Idose gauche ou 1. idose. I I I I OH H OH H| Eu résumé, les corps connus qui rentrent directement dans la catégorie des hexoses ou glycoses et de leurs dérivés sont donc : I.Les aldoses. II. Les alcools correspondants. III. Les acides correspondants. Olycoses droit et gauche. Sorbites droite et gauche. " Acides sacchariques droit et gauche. Mannoses droit et gauche. Mannites droite et gauche. — niannosacchariques droit et gauche. Guloses droit et gauche. Dulcite. Acide uiucique. Galactoses droit et' gauche. Talites droite et gauche. — alloniucique. Taloses droit et gauche. — palomucique droit et gauche. Idoses droit et gauche. — idosaccharique droit et gauc. IV. Les cétoses. — Les fructoses droit et gauche (Lévulose). V. Le Rhamnose, l'isoglycosamine, l'acide glucuroiiiqu(î droit, l'acide oxyglucosique, tous corps à fonctions un peu spéciales. Nous renvoyons, pour l'étude de ces différents corps, aux articles correspondants du dictionnaire (voir Mannose, Galactose, Lévulose, etc.). Nous ne nous occuperons ici que du glycose droit ou glycose proprement dit, à propos duquel nous donnerons les réac- tions les plus générales à tous ces corps. Glycose droit ou glycose proprement dit. — Ce corps a encore été appelé dex- trose, sucre de raisin, sucre d'amidon, sucre en grumeaux, sucre de miel. Historique. — Lowitz en 1792 isola le glycose pour la première fois dans le jus du raisin. Kirchoi-k en 1811 l'obtint par hydratation de l'amidon. Les propriétés chimiques ont été étudiées en particulier par Pkligot et Dubrunkauï, qui mirent en lumière en particulier la faculté qu'il possède de se combiner avec les bases. Berthelot a établi ses fonctions alcool, quatre fois secondaire et une fois primaire. État naturel.— Le glycose se rencontre : 1° dans les organismes végétaux; le plus 524 GLYCOSES. souvent, il est accompagné d'hydrates de carbone différents, d'hexoses, surtout de lévu- lose; on le rencontre ainsi dans un très grand nombre de fruits, de baies : raisin, figues, dattes, prunes. Le glycose peut même cristalliser par concentration du jus des fruits doux. C'est ainsi que, sur les fruits secs, il se de'pose à la surface externe une poudre blanche jaunâtre qui est formée principalement de glycose associé à un peu de lévulose (Tollens), peut-être même à une combinaison moléculaire de ces deux sucres. La quantité de sucre réducteur qui existe dans les fruits est donnée dans le tableau suivant : Raisin (variable) 10-30 p. 100 Cerise 10-11 — Banane mûre 10 — Baie de myrtille 8 — Poire, pomme 7-8 — Groseille à maquereau \ i. i Frumboise, fraise j Prune 2-4 — Abricot 2-3 — Pêche 1-2 -- Or ceci indique non la quantité de glycose, mais bien la quantité totale de sucre réducteur; il faudrait encore y ajouter une certaine quantité de saccharose qui y est fréquemment associée. On rencontre encore le glycose toujours associé au lévulose et à d'autres sucres dms les Heurs d'un très grand nombre de plantes, où il s'accumule dans les nectaires et est l'origine d'un goût sucré plus ou moins marqué. Des fleurs, les sucres passent dans le miel ; on les y retrouve sous la forme de glycose et de lévulose; les quantités sont néan- moins très faibles, puisqu'il faut cinq à six millions de fleurs de trèfle, pour fabriquer I kilog. de miel. Il est cependant difficile de dire si le glycose et le lévulose existent dans les nectaires des fleurs ou s'ils proviennent du dédoublement, sous l'action d'un ferment, soit d'un polysaccharide tel que le saccharose, soit d'un glycoside. On trouve encore le glycose dans les tiges d'un certain nombre de plantes; il est associé au saccharose dans la canne à sucre, à l'amidon dans les tiges de froment et de mais. La feuille de canne à sucre renferme du glycose, mais pas de lévulose (Winter); on rencontre encore le glycose dans les feuilles d'un grand nombre d'espèces, dans les feuilles du pécher, de la betterave (Girard), de la pomme de terre, de la vigne (Neubauer), de la vigne vierge. Ainsi, de 500 grammes de feuilles de vigne fraîches, on peut extraire 3s%5 à 6 grammes de glycose. C'est surtout, en réalité, dans la sève que se trouve le sucre : ainsi, dans la sève de la canne à sucre, se trouve environ 1 p. 100 de glycose; dans celle de la betterave, il en existe de petites quantités; dans celle du sorgho, 1 à 2 p. 100 de glycose associé à 10 à 13 p. 100 de saccharose. La quantité de sucre est d'ailleurs variable avec l'année. Ainsi c'est surtout au prin- temps que l'on en trouve dans la sève des bouleaux. A la suite de piqûres d'in- sectes, il se fait encore à cette époque de l'année des dépôts sucrés sur les feuilles nommées miellées, et qui sont surtout formées de glycose. Le glycose est aussi répandu dans l'organisme animal que dans l'organisme végétal. II existe dans le sang en quantités notables : ce sucre est certainement du glycose dextrogyre; car, dans le sang du bœuf et du cheval, on a pu caractériser ce corps par ses combinaisons (Rickardt). Un certain nombre de facteurs font varier la quantité de sucre dans le sang. Déjà dans le sang normal la proportion de glycose peut varier de 0,2 à 0,12 p. 100 (Seegen). Le chloroforme et la morphine ont pour effet d'augmenter la proportion de glycose et cela par suite de la diminution des combustions. C'est là, en effet, le grand facteur qui intervient pour modifier la quantité de glycose contenu dans le sang. C'est ainsi qu'une diminution d'oxygène dans l'air inspiré, que l'intoxication par l'oxyde de carbone CLYCOSES. 525 augmenleut la propùrtioii de sucre dans le sang et le font apparaître dans les urines : il en est de même d'une réfrigération énergique (Araki). L'empoisonnement par l'acide q'anhydrique provoque encore une augmentation légère du sucre du sang pouvant encore provoquer de la glycosurie. Dans l'urine humaine, il existe normalement de très petites quantités de glycose que l'on peut caractériser par ses combinaisons (Baisch), associé à une gomme et à de l'iso- maltose. La proportion de glycose oscillerait dans une urine normale entre 0,003 et 0,009 p. 100 (Baisch). On a pu même prétendre (Quinquaud) que la proportion de sucre fermentescible contenu dans l'urine normale pouvait atteindre 0e'',4 à OS'-,6. Mais cette assertion a été mise en doute (Tollens). L'urine normale peut contenir de grandes quantités de sucre à la suite d'ingestion copieuse de sucre de canne ou de tout autre polysaccharide, lactose, maltose, etc. : c'est alors une glycosurie alimentaire (Moritz). Il existe des glycosuries toxiques, telles que celle dont nous avons parlé plus haut, empoisonnement par l'oxyde de carbone, par l'acide cyanhydrique, intoxication par le chloroforme et la morphine. La morphine et l'azolite d'amyle administrés même dans un parfait état de santé provo- quent la sécrétion de glycose (Reigoldt). L'ingestion d'un certain nombre de dérivés de la caféine, benzoate de caféine et de sodium, acide caféine-sulfurique, salicylate de théobromine, provoque chez le lapin une forte diurèse accompagnée de glycosurie. L'ex- trait de glande Ihyioïde amène aussi de la glycosurie (James). L'absorption de sels d'uraiie provoque encore la glycosurie (Kobert, Chittenden). La quantité de sucre qui existe dans le sang normal serait variable avec l'endroit même d'où il est extrait. Le sang de la veine hépaticjue serait plus riche que celui de la veine porte ou des artères hépatiques (Abeles). Le sucre disparait dans le sang au fur et à mesure que son séjour hors du corps est plus long (Seegen). Ce fait rentre dans les phénomènes de glycolyse (voir ce mot et Glycogène). On trouve encore le glycose dans un certain nombre de parties du corps, muscle, foie, corps vitré, cristallin. Le sucre réducteur qui se trouve en petite quantité dans le muscle a été caractérisé comme glycose par ses réactions et ses combinaisons (Panormow). On trouve de faibles quantités de glycose dans le corps vitré et l'humeur aqueuse de l'œil (Cl. Bernard, KChne, Pantz), dans les liquides de l'ascite consécutive à la cirrhose du foie (Moscatelli, Hammarsten). Dans le foie, il existe du glycose à côté du glycogène. C'est ainsi que, par digestion dans l'eau de foies de veau frais ou conservés quelques jours au contact delà glace, on extrait une petite quantité de glycose (Seegen, Kratschmer). On trouve encore le glycose dans certains pi'oduits animaux, dans les nids d'hiron- delles comestibles (Green), dans diverses substances hyalines (Krurenberg). Le glycose existe encore dans la nature sous forme de glycosides, c'est-à-dire de com- binaisons avec d'autres groupements hydrocarbonés plus ou moins complexes : tels sont l'amygdaline, la populine, la salicine, etc. Nous n'entrerons pas dans l'étude de ces dif- férents produits, renvoyant le lecteur à l'article spécial qui leur est consacré (Voy. Glyco- sides, p. 539). Préparation. — On peut extraire le glycose de tous les produits qui en contiennent naturellement. Le jus de raisin concentré permet d'obtenir assez facilement du glycose (Behlung). Le glycose peut être extrait du miel de Narbonne qui le renferme à l'état cristallisé englobé dans du lévulose sirupeux : on épuise ce miel par l'alcool froid : le lévulose se dissout et laisse presque intact le glycose; la masse solide encore humectée d'alcool est placée sous une presse afin d'en extraire la totalité de la solution alcoolique de lévu- lose, et le résidu solide est repris par l'alcool bouillant laissant déposer par refroidisse- ment des cristaux de glucose. On peut extraire quelquefois le glycose de l'urine d'un diabétique, lorsque celle-ci en renferme de grandes quantités. Pour cela, il faut évaporer l'urine, la traiter par l'alcool et la déféquer par l'addition de quelques gouttes d'une solution d'acétate de plomb. On filtre, on se débarrasse du plomb par l'hydrogène sulfuré, on filtre encore, et on fait cristalliser en concentrant le sirop (Hunefeld). Le glycose s'obtient encore par dédoui3lement des glycosides. Ces corps, sous 526 GLYCOSES. l'action des acides dilués àrébullition ou de certaine ferments solubles, se dédoublent par hydratation et donnent du glycose, en même temps qu'un certain nombre de corps particuliers. Un grand nombre de polysaccharides en solution dans l'eau à l'ébullitionen présence des acides donnent du glycose ; tels sont le maltose, le mélézitose, le tréhalose, le mycose, 1-e saccharose. Le dédoublement de ce dernier présente un intérêt tout particulier et nous allons revenir en détail sur cette réaction. Les méthodes de préparation les plus pratiques du glycose sont l'hydratation du sucre de canne et celle de l'arnidon. La préparation au moyen du sucre de canne ou saccharose se fait en hydratant ce dernier en présence d'un acide dilué, hydratation qui donne naissance à un mélange de molécules égales de glycose et de lévulose; c'est ce qu'on appelle l'interversion du sac- charose. Cette interversion peut encore se faire sous l'influence d'un ferment soluble, l'invertine. L'interversion une fois produite, on fait cristalliser le glycose, et on le purifie en le redissolvant dans l'eau et en le faisant cristalliser à nouveau. Cette cristallisation est activée par la lumière, ralentie à l'obscurité (Scheibler). ScHWARTZ, Neubauer, Worm-MOller ont donné des indications particulières pour cette préparation. Voici en particulier celle de Soxhlet : on prépare tout d'abord un alcool chlorhydrique en mélangeant, à40''-4S°, 12 litres d'alcool à 90° et 480 ce. d'acide chlorhy- drique fumant. On dissout dans ce mélange quatre kilos de saccharose en poudre en maintenant la température à 43° et en agitant constamment. La dissolution est complète au bout de 2 heures. Le sucre est alors interverti. Le liquide est plus ou moins coloré. On laisse refroidir et, pour provoquer la cristalisation, on ajoute quelques cristaux de glycose anhydre provenant d'une opération antérieure, et, au bout de quelques jours, on décante, on essore à la trompe, on lave à l'alcool faible, et on fait recristalliser dans l'alcool méthylique. ToLLENS redissout au bain-marie le glycose dans la moitié environ de son poids d'eau, additionne cette solution de 2 fois son volume d'alcool à 90°-9o", décolore au noir animal, filtre enfin la solution chaude, en se servant même, s'il est nécessaire, d'un entonnoir à filtration chaude. On amorce encore avec quelques cristaux de glycose, et le corps anhydre se dépose en poudre finement cristalline qu'on arrose et qu'on lave à l'alcool, puis à l'éther. On sèche enfin à l'air, et, dans ces conditions, d'après Tollens, 2 kilos de saccharose donnent 400 grammes de glycose anhydre pur. La préparation par hydratation de l'amidon est la seule employée dans l'industrie; c'est la réaction indiquée par Kirchoff, Payen et autres, hydratation des hydrates de carbone complexes par les acides dilués, qui permet depuis longtemps déjà de préparer le glycose du commerce et, depuis quelque temps, des glycoses purs cristallisés. Les réactions qui se passent sont assez complexes : pour pouvoir les étudier com- plètement, il faut que nous envisagions non seulement ce qui se passe dans l'action d'un acide, mais encore dans celle des ferments solubles, tels que ceux contenus dans le malt. L'amidon est, comme on sait, un hydrate de carbone de formule C'il^^O-' condensé un certain nombre de fois. Payen et Persoz, en 1833, ont les premiers, par l'action de la diastase, obtenu son dédoublement : ils ont constaté qu'il se produisait un sucre réduc- teur et en même temps une dextrine non colorable par l'iode et soluble dans l'alcool dilué. En 1860, MusouLus constata que la dextrine et le sucre étaient formés simultanément. Dix ans plus tard, Griesuayer, O'Sullivan, Brûcre démontraient qu'il se formait au moins deux dextrines, une colorée en brun par l'eau iodée, tandis que l'autre ne donnait aucune coloration sensible. Ces deux corps furent nommés par BrCcke érythrodextrine et achroodextrine. MuscuLUS etGRiJBER, en 1878, poussant plus loin ces recherches, arrivèrent à admettre la production de 3 achroodextrines ; montrant ainsi que la molécule d'amidon était dégradée successivement par hydratation. Tous ces auteurs avaient constaté la formation simultanée d'un sucre particulier, le maltose. Les dextrines obtenues étaient d'un poids moléculaire de plus en plus faible, et à chaque dédoublement correspondait la mise en liberté d'une molécule de maltose. GLYCOSES. 527 En 1879, linowA- et Hkron, à la suite d'ane série de recherches, admettent pour for- mule de l'amidon (C'-H-OO*")'''; l'hydrolyse par la diastase met graduellement en liberté des groupes G^H'^O' qui se combinent avec H-Opour donner du maltose C'-H--0*', tandis qu'il reste des dextrines de poids moléculaire de plus en plus faible : or on voit, d'après la formule précédente, que 8 dextrines sont possibles, correspondant chacune à une hydra- tation partielle. O'SuLLivAN, dans la même année, arrivait à constater l'existence d'une érythrodex- trine et de trois achroodextrines. Vers la même époque, Herzfeld remarqua que les pro- duits d'hydrolyse de l'amidon sont variables, si celle-ci a lieu au-dessus ou au-dessous de 65°. A basse température, il se forme du maltose et des achroodextrines, celle-ci donnant par la suite une maltodextrine et enfin du maltose. A haute température, il se forme au contraire de l'érythrodextrine. D'après Herzkeld, la conversion de l'amidon se fait d'après les étages suivants : ami- don soluble, érythrodextrine, achroodextrine, maltodextrine, maltose. La maltodextrine aurait pour formule (C'H'^O')- C^H'^0'% provenant de la combi- naison d'une hexose avec deux groupes dextriniques. Brown et Morris en 1885, après avoir montré qu'il se forme dans l'hydralalion par la diastase 81 p. 100 de maltose et 19 p. 100 de dextrine, cette dernière portion étant très difficilement hydrolysée, obtiennent aussi une maltodextrine, mais ce corps est différent de celui de Herzfeld, produit qui serait, d'après Browx et Morris, très impur. D'après ces auteurs, les 4/5 de l'amidon seraient tout d'abord convertis en maltose, et la formule de l'amidon serait au moins 5 (C'-H-"0'")^, formés de 5 groupes dextrini- ques. Quatre d'entre eux seraient arrangés symétriquement autour du S*' et seraient facilement hydratabies; le dernier au conti'aire présenterait une très grande résistance, et tendrait à se reformer en dextrine. A chaque attaque, un groupe (C^ H-oQ '")•")* subi- rait l'hydratation donnant naissance à de la maltodextrine G'- H--0^i — (G" H-*'0'**)2. Gette maltodextrine hydratée à fond se décomposerait eniin en maltose par fixation de deux molécules d'eau. Gette maltodextrine peut être séparée du maltose et de la dextrine par dialyse; elle ne donne pas de maltose par l'action de la diastase, et ne fer- mente pas directement sous l'action de la levure. Nœgeli obtint, en 1877, par l'action des acides dilués sur l'amidon, un corps parti- culier, l'amylodextrine. Brown et Morris, en 1889, montrèrent que cette amylodextrine avait une composition analogue à la maltodextrine et la représentèrent par la formule G^^H'-O" — (C'-H2'*O'0)6. Ce corps était transformable directement et complètement par la diastase en maltose. La même année, les mêmes auteurs reprenaient leur théorie de la constitution de l'amidon et de l'action hydrolytique de la diastase. Ainsi que nous le disions plus haut, l'amidon présenterait un noyau central dexirinique, symétriquement rattaché à quatre groupes dextriniques identiques, périphériques. Chacun de ces groupes aurait pour formule (C- H^'^ 0'")'-*', ce qui correspond au poids moléculaire obtenu par la méthode de Baoult. La molécule d'amidon soluble est représentée alors par la formule 5 (C- H-" 0'")-'\ avec un poids moléculaire de 32.400. Quati^e de ces groupes donnent par hydratations successives des maltodextrines et finalement du maltose. Le dernier, au contraire, semble se former sur lui-même et résiste à toute hydratation ultérieure. Les quatre groupes dextriniques périphériques semblent de même valeur. Rappelons enfin les différents faits qui se rattachent à l'isomaltose, disaccharide préparé synthétiquement en 1890, par Emile Fischer. Ge môme sucre fut obtenu en 1891, par LiNTNER, parmi les produits résultant de l'hydratation de l'amidon sous l'influence des diastases. Deux ans plus tard, Li?;tner et Dull critiquent fortement la théorie de Brown et Morris et supposent que les différents produits obtenus par ce dernier sont des mélanges de dextrine et d'isomaltose. Pour eux, l'action de la diastase sur l'amidon donne naissance à cinq composés dif- férents : l'isomaltose, le maltose et trois dextrines, l'amylodextrine, l'érythrodextrine, et l'achroodexlrine. Le plus élevé parmi ceux-ci est l'amylodextrine (C'-H^oQ'^j'S prin- cipal constituant de l'amidonsoluble. Puisvient l'érythrodextrine (C- H^" 0''J)''.C'- H-O''. 528 GLYCOSES. L'achroodextrine (G'-H-"0"')'^C'-H--0*', enfin l'isomaltose et le maltose avec les formules suivantes : (C12H20O10)54 + 3H20 = 3[(Ci2H20Oi0)nci2H22Oii] Amj'lodextrine. Érythrodextrine. 3[(C:-iI20Oi_0)nci2H22Oii] + 6H20 = 9[Ci2H20Oi0)3C>2H22Oii] Érythrodextrine. Achroodextrine. 9[C12H20O10)5C12H22OH] + 4oH20 = 540' 2H2201 1 Achroodextrine. Isonialtose. = 54Ci2H220ii. Maltose. Toutes ces réactions se produisent simultanément. Vers la même époque, en 189.S, ScHUTLER et MiTTELMEYER admirent au contraire l'identité de constitution de l'amidon, des dextrines et des disaccharides. La seule différence serait dans le nombre de résidus de glycose contenu dans la molécule. Dans l'amidon, les résidus de glycose sont reliés par le groupement carbonyle empê- chant par suite la réduction par la liqueur de Fehling. L'hydrolyse par les acides ou la diastase dédouble en deux molécules, chacune contenant un groupement aldéhydiquo. Brown et Morris, en 189o, remarquèrent que le maltose obtenu par l'action de la dias- tase sur l'amidon était dans un état de demi-rotation. Par simple abandon à lui-même, ou en chauffant, le maltose acquerrait le pouvoir rotatoire normal. O'SuLLivAN et Thomson ont observé la même particularité pour le glycose obtenu par inversion du sucre de canne. D'autres auteurs, LiNoet Baker, remarquent que l'isomaltose de Lintner n'est pas du tout identique à celle de Fischer et que, par l'alcool, on peut dédoubler ce corps en maltose et en dextrine. En 1895, Ulrich contlrnie le même fait et montre qu'il ne se forme que du maltose. Jalowetz arrive au même résultat, de même que Ost, en 1896, et PoTTEviN, en 1899. De telles conclusions éliminent complètement la possibilité de la formation d'isomaltose dans ces conditions. En 1893, MiTTELMEYER vit que l'hydratation de l'amidon se fait en deux temps; dans le premier temps, une petite fraction de l'amidon est rapidement transformée en amylo, achroo et érythrodextrine, puis en sucre. Ce sont les dextrines primaires. Dans le second temps, il se formerait des corps analogues, mais non identiques, des dextrines secondaires, qui conduiraient à un métamaltose. Deux ans plus tard, le même auteur supposa que le premier stade de l'hydratation de l'amidon est la formation de quantités égales de deux amylodextrines différentes, dont l'une est beaucoup plus facilement attaquable par la diastase que l'autre. L'une s'arrête au stade érythrodextrine, l'autre va jusqu'au sucre. PoTTEViN, en 1890, chercha à démontrer à son tour que la conversion de l'amidon en maltose se fait en deux temps, la dextrine étant un produit intermédiaire; que les diffé- rentes dextrines ne diffèrent que par leur état physique; enfin que les diverses parties du grain d'amidon sont plus ou moins facilement hydroljsées et transformées en dex- trine et en maltose; sa conversion se fait donc inégalement vite; Pottevin n'admet que trois sortes de dextrines, l'amylodextrine colorée en bleu, ['érythrodextrine en rouge et l'achroode-xtrine non colorable par l'eau iodée. Quant à la maltodexlrine de Brown et Morris, il dit qu'elle n'est qu'un mélange de maltose et de dextrine dédoublable. Brown et Millar, en 1899, reprennent encore la question et l'étude de leur malto- dextrine Ci^H^^on (C- H^oQ'")'-^. Par des procédés laborieux et pénibles, ils purent obtenir ce produit à l'état de pureté. Par oxydation avec HgO ou BaO, ils obtiennent un acide, l'acide maltodextrinique A; par l'hydrolyse avec la diastase, ils obtiennent 40 p. 100 de maltose et 60 p. 100 d'un autre acide, l'acide maltodextrinique B. Enfin, les acides dilués donnent 8, 8 de dextrose et un acide à 5 atomes de carbone complètement diife'rent. Les acides A et B par hydrolyse donnent les mêmes produits; quant à l'acide en C', il paraît être analogue à l'acide xylonique et dériver d'un pentose. Quelle serait donc la constitution de la maltodexlrine? GLYCOSES. 529 La maltodextrine serait formée d'un certain nombre de groupes en C- complète- ment dédoublables en maltose; mais le groupement terminal COH entraînerait des pro- priétés réductrices. L'oxydation poussée plus loin entraîne la transformation du grou- pement COH en un groupe CO^H. Si nous admettons pour le maltose la formule de FiSCllKR. CH^OH - CHOH — CH — (GHOH)-i _ cil - 0 - CH2 - (CHOH)'' — COH. La formule de la maltodextrine peut être représentée comme formée par 3 molé- cules analogues soudées de la façon suivante : CH20H — CHOH — CH - (CH0H^,2 _ CH - 0 - CH^ — CH(OH) - CH — (CH0H)2 — CH CH2 - CHOH — CH - (CH0H)2 _ CH - 0 - CH^ - CHOH - CH(CH0H2> _ CH CH2 — CHOH — CH — (CH0H)2 _ CH _ 0 — CH^ — (CHOH)< — COH. ou plus simplement : C12H21O10 — 0 — CI2H20O9 — 0 — C12H21O10. les groupes en C'2 et les groupes en C' sont rattachés les uns aux autres par des atomes d'O, et c'est en ces points que se produit la fracture de la molécule par hydratation. La différence entre l'hydrolyse par les acides ou la diastase réside dans ce fait que, dans le premier cas seulement, il se forme du glycose. Ce phénomène peut être la con- séquence, soit de relations spéciales entre les groupes en O- voisins, soit dans les di- mensions relatives ou la masse de ces mêmes groupes en C'2 ou des groupes en C*. La constitution de l'acide maltodextrinique A ne peut être expliquée qu'en suppo- sant que le groupe terminal en C'2 de la maltodextrine est, par oxydations successives ou simultanées, transformé en C' H'20'H'"0*^. Ce dernier reste encore rattaché au résidu complexe de la molécule, de telle sorte que la formule sera : C12H21O10 — 0 — C12H20O9 — 0 — C'H^OK Le groupe terminal étant devenu : _ 0 — CH2(CH0H)^ — C02H. L'hydrolyse de l'acide maltodextrinique A peut être exprimée, suivant que l'on a affaire à l'hydrolyse par la diastase ou par les acides, de la façon suivante : Hydratation soux l'influence de la diastase. C12H2101" / 0 C12H21O10 \ci2H20Oi;; + H20 = o/ + C'2H220" G C:iH90^ ^l^\^osH''-0'', ou mieux de 40 molécules de glycose combinées ensemble avec élimination de 39 molécules d'eau. 37 CH20H I CHOH I CH 0 /l I 0< (CH0H)2 CH 1 -CH2 I CHOH I C 0 0< (CH0H)2 CH -CH2 I CHOH I CH 0 '\ (CH0H)2 s 1 CH -CH2 (CHOH'i I COH La constitution de l'acide dextrinique ne diffère de la précédente que par la trans- formation du groupe terminal aldéhydique en un groupe acide avec perte d'un groupe- ment CH OH . _ CH2 — (CH0H)3 — C02H. Ce corps peut être mis en liberté par une hydrolyse plus complète. Les formules sim- plifiées de ces corps seront donc : CGHioQt CCHioQ* / 0 G \ \ (C6HioOi)380-" (C6H10Ol)38O" / / • 0 o \ \ C6H10O4 C^iH^Os. Dextrine. Acide dextrinique. Cette dextrine stable peut définitivement se dédoubler par hydratation en 40 molé- cules de glycose; or la molécule d'amidon ne peut pas être moindre que 100 C'2H2"0"^', correspondant par suite à IJ fois la formule de cette dextrine; mais quatre de ces groupes sont transformables en maltose, une seule est transformable en dextrine pouvant donner naissance directement à du glycose. L'amidon ne jouissant d'aucune propriété réductrice ne présente pas de groupement aldéhydique; on peut donc admettre, pour la formule de l'amidon, la formule suivante dans laquelle 80 groupes maltogènes (fi, fi, fs, (3) réunis par 0 sont soudés par 0 à 40 groupes dextriniques (a). GLYCOSES. 531 0 0 / \ / \ C6H100'- (C6HioOi):i80^' CfiH;"Ot / \ 0 a 0 1 1 / / 0 0 \ \ (Ci2H20O9)i8Oi'' p B (Ci2H-:oO!>)isO'' / / 0 0 \ \ C12H20O9 C12H20O9 I I 0 0 I I C12H20O9 C'2H20O9 / / 0 0 \ \ (C12H20O9)18On p P (C12H2U09)1801' / / 0 0 \ \ C12H20O9 C»2H20O9. Ces différentes conceptions permettent d'envisager quelles s,ont les réactions qui se passent dans l'hydrolyse de l'amidon et la formation consécutive des glycoses. Dans la préparation industrielle de glycose, ces transformations sont faites en bloc et de la façon suivante : On obtient le dextrose le plus souvent à l'aide de la fécule en raison de son bas prix, mais on utilise aussi en Amérique l'amidon de maïs, et celui-ci ferait une concurrence très grande à la fécule, s'il n'était frappé chez nous de droits d'accise assez élevés. On tranforme la fécule en dextrose en la chauffant avec l'acide sulfurique étendu. On commence par chauffer la quantité d'eau nécessaire jusqu'à l'ébuUition : on étend alors l'acide sulfurique de trois fois son poids d'eau, et l'on mélange les deux solutions. On fait de nouveau bouillir, et l'on introduit la fécule délayée dans l'eau en un liquide lai- teux. Il importe d'opérer vivement afin de prévenir la formation de Tempois. Le degré d'acidité le plus convenable est 1/100, agissant à la température de 110 à 115°. On peut alors obtenir une transformation de 90 °/o de la fécule en 3 ou 4 heures. On n'est pas arrivé tout de suite à ce résultat; la fécule passe en effet par les différents stades dextriniques que nous avons étudiés plus haut avant de donner du dextrose, et la seconde transformation n'a lieu, au moins sous la pression ordinaire, que par une longue ébullition. Pour suivre la marche de l'opération, on fait de temps à autre l'épreuve par l'alcool. On prend une partie de la solution sucrée à essayer, et on ajoute G parties d'alcool absolu; il se produit un précipité s'il reste de la dextrine. Les proportions ordinaires de matières premières sont de 100 kilogrammes de fécule, 3 à 400 litres d'eau, 2 kilogrammes d'acide sulfurique, quantité qui peut s'élever jusqu'à 4 kilogrammes. Une fois la transformation en sucre opérée, on neutralise l'acide sulfurique en excès, le plus souvent à l'aide de la chaux On pratique cette opération dans la cuve elle- même, alors qu'elbî est encore en ébullition. L'appréciation de la neutralité est assez délicate, elle se fait au papier tournesol, puis à la teinture de même couleur, qui est beaucoup plus sensible. Cependant, la teinture ne peut plus virer au rouge par le liquide de la cuve, et celui-ci être encore nettement acide après concentration. Aussi faut-il d'ordinaire neutraliser une seconde fois après évaporation à 20° Baume du liquide sucré. On continue lévaporation dans des chaudières plates en cuivre, où le sulfate de chaux formé se dépose, et oui l'on peut, en outre, enlever les écumes. On filtre au noir, et l'on peut livrer tel quel le « sirop » au commerce. Sinon, on l'amène dans de grands réser- voirs qui alimentent un appareil d'évaporation dans le vide ou « triple-effet », analogue 532 GLYCOSES. à celui qu'on emploie pour la cuite du sucre. Ce supplément d'évaporation, qui amène le sirop de 16 à 30° Baume, laisse déposer une nouvelle portion de sulfate de chaux que l'on enlève par décantation. Si enfin l'on veut obtenir dn sucre solide, on évapore le sirop purifié dans des vases plats jusqu'à ce qu'il marque 40-41° Baume, puis on le verse dans des cristallisoirs. Dès qu'on voit les cristaux apparaître, on verse le tout dans des tonneaux où la masse ne tarde pas à devenir extrêmement dure et de texture cristalline. C'est le « glucose en masse ». On peut obtenir un glucose « granulé » en versant le sirop à 32" Baume dans des tonneaux en bois où il est conservé une huitaine de jours. Dès que le glucose commence à former des masses en « choux-fleurs », on retire les faussets dont est muni le fond du tonneau, et l'on fait écouler la mélasse liquide. On sèche le glucose cristallisé sur des plaques de plâtre dans une étuve à 25°, et on le crible pour en égaliser les grains. En été, le séjour dans des tonneaux pouvant amener la fermentation, on ajoute un peu de solution d'acide sulfureux au sirop. Aujourd'hui, la plus grande quantité de la fécule est livrée aux glucoseries à l'état « vert ». La saccharification se fait sous pression, dans des autoclaves contenant environ une tonne et demie de fécule verte. On obtient la conversion complète de l'amidon sous pression à 160°. On emploie dans ce cas une chaudière en forte tôle, double'e de plomb et entourée d'une enveloppe iso- lante, dans laquelle la vapeur arrive par un serpentin, tandis que l'amidon délayé dans l'eau acidulée s'y charge par un trou d'homme ou un tube à robinet. On verse dans ce « convertisseur » 25 kilogrammes d'acide sulfurique étendu de 2.500 kilogrammes d'eau, et l'on chauffe à 100°. Pendant ce temps, on verse dans une cuve en bois pourvue d'un tuyau de vapeur et d'un agitateur, une quantité d'eau et d'acide sulfurique égale, on la porte à 30° seulement, et on y délaie 1.000 kilogrammes d'amidon ou de fécule. On met l'agitateur en marche, et l'on porte la température à 48°. On fait alors passer cette bouillie dans le convertisseur, en ayant soin de maintenir à 100° la température de l'eau acidulée qu'il contient. On ferme alors l'appareil, et l'on continue à donner la vapeur jusqu'à ce que la température atteigne 160°. La vapeur s'échappe à travers un serpentin, entraînant les impuretés. On s'assure, au moyen de l'iode, qu'il ne reste plus d'amidon non saccharifié : la liqueur ne doit pas bleuir. Le silicate de potassé ou l'acétate de plomb ne doivent donner aucun précipité indiquant la présence de dex- trine non convertie en dextrose. Ce résultat est obtenu en un temps qui varie de 2 à 4 heures, suivant la qualité des matières mises en œuvre. On décante alors dans une cuve de « neutralisation », où l'on verse, par petites por- tions, 75 kilogrammes de craie délayée dans 2.500 kilogrammes d'eau. A l'aide d'un agitateur, on mélange le tout et l'on facilite le dégagement de l'acide carbonique. On abandonne alors la liqueur au repos pendant quelques heures, pour laisser déposer le sulfate de chaux provenant de la neutralisation. On décante, et on reçoit la liqueur sucrée dans une bassine en fer, où achève de se déposer le sulfate de chaux. Ce sel, dans un état de division très grand, est toujours difficile à extraire complètement et constitue souvent une impureté du glucose. On favorise son dépôt à l'aide d'un cou- rant de gaz carbonique ou par l'oxalate d'ammoniaque. La liqueur filtrée est transformée, dans une bassine évaporatoire à vapeur, en un sirop marquant 20° à l'aréomètre. Il faut ensuite déféquer ce sirop à l'aide d'un mélange de charbon de bois en poudre sans dessé- cher, puis par un passage sur du noir animal. Il subit enfin la dernière concentration soit simplement à 28° Baume pour l'obtenir en sirop, soit à 38° pour l'obtenir granulé. Les proportions d'acide à employer ont fait l'objet d'un certam nombre de travaux (Payen, Sachsse, Allihn, Salomon, Soxhlet, Behr, etc.). Soxhlët indique pour une saccharification complète pour 1 d'amidon l'emploi de 4,5 de S0*H2 à 0,5 %, en autoclave. Les acides organiques peuvent aussi opérer l'hydratation de l'amidon; il en est de même de l'acide chloihydrique et de l'acide azotique. L'acide azotique a été indiqué en particulier à raison de 0,5 °/o du poids de l'amidon (Seyberlich). L'acide sulfureux à 135° B. a aussi été indiqué. Enfin, nous pouvons en dernier lieu résumer, d'après Krikger, la fabrication à Chicago d'un glycose anhydre, cristallisé pur, que l'on trouve actuellement dans le commerce. On met en suspension dans l'eau de l'amidon de mais dans la proportion de 16,5 d'amidon CLYCOSES. o33 pour 100 d'eau, et on y ajoute 0,23 de SO*H-; le lait d'amidon ainsi obtenu est porté à rautoclave pendant une demi-heure à la terapéiature correspondant à ratmosplière. L'acide est alors saturé par de la craie; on décolore au charbon, on évapore dans le vide et, en maintenant la cuite à 40°, on y ajoute quelques cristaux de glycose anhydre llne- ment divisé. Dans ces conditions, le glycose cristallise, et la masse solide est alors séparée du liquide mère. Le moyen le plus fréquemment employé depuis quelque temps dans tous les cas est l'emjiloi de turbmes essoreuses. De ces glycoses cristallisés du commerce, on peut facilement extraire du glycose pur; pour cela, on le dissout dans le quart environ de son poids d'eau tiède, on y ajoute deux volumes d'alcool à 90°. On filtre chaud et on laisse refroidir; le glycose cristallise après ensemencement par des cristaux provenant d'une opération antérieure. On essore, et, par une seconde cristallisation faite dans les mêmes conditions, on obtient un corps absolument pur. Propriétés physiques. — Le glycose est un produit blanc qui cristallise anhydre dans l'alcool à 9o° en fines aiguilles blanches microscopiques. Dans l'eau, où il se dissout très facilement, il cristallise à saturation en masses sphéroïdales blanches, en grains blancs, voire même en cristaux définis renfermant une molécule d"eau. Soxhlet a fait cristalliser le glycose sans eau de cristallisation dans l'alcool méthylique. Le même résultat a été obtenu dans l'eau par A. Behr, en ayant soin d'amorcer la cristallisation par un cristal de glycose anhydre. La concentration de la liqueur qui convient le mieux est de 12 à 15 parties d'eau pour 88 à 8o parties de glycose. On peut même obtenir la cristallisation sans amorçage préalable, à la condition d'avoir une solution suffisamment concentrée, un glycose suffisamment pur, une température constante de 30° à 3o°. Ces cristaux perdent à 60° l'eau de cristallisation en se transformant en glycose anhydre. Les cristaux de C®H'-0®,H-0 sont des tables à six pans présentant un plan de clivage à 120°. On connait un second hydrate re'pondant à la formule a(C*'Hi2 0®)H"2 0, connu dans le commerce sous le nom de glycose cristallisé pur. La solubilité du glycose dans l'eau est variable suivant la température : A 15°., 100 H20 dissolvent 81,68 dextrose anhydre — — — 97,85 — hydraté (Anthose). Cette solubilité croit rapidement avec la température, elle est presque indéfinie à 100°. 100 parties d'alcool de densité : 1- 1 , , . l 0,837 0,880 0,910 0,930 dissolvent en dextrose , j^„_j. ,^^g„ ^'^^^ ^^^^^ 3,',. anùydre. ( à rébullition 27,7 136,6 » BioT a montré le premier que le dextrose possède la faculté de faire tourner vers la droite le plan de polarisation de la lumière. Son pouvoir rotatoire varie suivant son état physique. Le glycose fondu ou les solu- tions de glycose au bout de quelque temps présentent un pouvoir rotatoire légèrement variable suivant les auteurs. 11 est pour une solution à 18,6211 p. 100 de a = 52°, 2 (Dubrl'Nfaut) — — 53°, 15 (Pasteur) — — 52'>,83 (Soxhlet). ToLLENS a donné comme formule pour le dextrose anhydre : aa = 32°, 50 + 0,018796 p. + 0,00051683 p2. et pour le dextrose hydrate C^H'-O^ + H'-O. oLcl =47°,73 + 0,015534 p. + 0,0003883 p- dans lesquelles p désigne la teneur % des solutions en glycose anhydre et hydraté. Lorsque l'on s'adresse à des solutions de glycose fraîchement préparées, en partant soit du glycose hydraté, soit du glycose anhydre, mais n'ayant pas subi de fusion préa- 534 GLYCOSES. lable, le pouvoir rotatoire est double du précédent; puis il s'abaisse peu à peu jusqu'à la limite indiquée plus haut. Fondu, leglycose n'offre pas ce pliénoniène, et donne tout de suite le pouvoir rotatoire normal. Propriétés chimiques. — Action de la chaleur : Le glycose chauffé même au-dessous de 100° se colore plus ou moins. Il fond à 145°, perd une molécule d'eau à 170° en don- nant de la glycosane C^H'f'O'. Enfin la distillation sèche du glycose se produit au-dessus de 200° et laisse comme lésidu du caramel ou sucre brûlé ou couleur de sucre, etc. Action des acides : Le glycose se dissout à froid sans noircir dans SO'^H^ concentré. L'alcool le précipite de cette solution. SO^H^ étendu, par une longue ébullilion donne entre autres de l'acide lévulique et de l'acide formique. L'acide azotique donne à froid du nitro-glycose, à chaud, et étendu, c'est un mélange d'acide oxalique etoxysaccharique. L'acide chiorhydrique à l'état de gaz donne du diglycose ou dextrine; l'acide chlor- hydrique étendu à l'ébuUition donne de l'acide lévulique. Action des alcalis : La potasse et les alcalis attaquent le glycose avec dégagement de chaleur, formation d'acides lactique, formique, acétique, glucique, etc. La chaux donne naissance à un corps particulier, la saccharine. Le glucose chauffé entre 130° et 160° avec de l'hydrate de baryte donne environ 60 °/o d'acide lactique ordinaire (Schulzenberger). Les alcalis donnent une réaction identique à la température ordinaire (Nencki et Sieber). Oxydation et réduction du glycose. — L'hydrogène naissant donne de la mannite ; avec l'amalgame de sodium, de la sorbite. Par oxydation, il donne, suivant les cas, des acides saccharique, gluconique, lactique. Le glycose peut être oxydé par les oxydes métalliques, en particulier par les oxydes métalliques en solution alcaline, tels que la liqueur de Fehling. Fermentation des glycoses. — Les transformations des glycoses sous l'influence des ferments sont d'une très grande importance. La fermentation la plus anciennement connue est la fermentation alcoolique qui résulte de la combustion du glycose droit ou glycose proprement dit, sous l'influence des levures de bière et de vin. Nous ne reviendrons pas sur ce qui a été déjà dit à ce sujet dans d'autres parties de ce dictionnaire. (Voir Fermentation.) Nous ne ferons que rappeler les faits fondamentaux de l'histoire de la fermentation alcoolique et nous nous étendrons surtout sur les faits récents relatifs à ce phénomène. La connaissance de la fermentation des liquides doux et sucrés sous l'influence des levures remonte à la plus haute antiquité; elle constituait la fabrication du vin, celle de la bière, etc. On en retrouve la première explication, au xV siècle, dans les manuscrits de Basile Valentin. Van Helmonï, au siècle suivant, remarque les analogies entre le gaz qui se dégage et celui que l'on trouve dans les caves et les puits. En f682, Becker étudie les changements qui se passent dans les liquides sucrés et constate que l'alcool est le produit delà réaction, que l'air est nécessaire, le phénomène ressemblant à une combustion. Vingt ans après, Willts remarque que le levain est indis- pensable au phénomène; il l'appelle un ferment^ et ce ferment possède des propriétés par- ticulières en lui-même qu'il communique à la matière fermenlescible. Stahl croit, en outre, que la matière fermenlescible est un mélange instable de sel, huile et teiTc. L'ébranlement en levure provoqué par le ferment entraîne la séparation des différentes particules élémentaires qui se rassemblent à nouveau en d'autres proportions, formant un composé stable. Lavoisier montre quelle est la nature du phénomène : la décomposition du sucre donne naissance à de l'alcool et à de l'acide carbonique. Le corps se sépare en deux parties : l'une est oxygénée aux dépens de l'autre, c'est l'acide carbonique. Il reste de l'alcool avide d'oxygène, combustible. Les analyses de Lavoisier étaient inexactes, et la formule ne répondait pas absolument aux quantités en réaction. Gay-Lussac, Thénard, de Saussure, déterminent la formule du sucre de canne. En 1828, DiMAs et Boullay donnent une formule plus exacte, corrigent encore les résultats de Gay-Lussac, et donnent l'équation véritable de la réaction. En 1832, DuBRUNFAUT montre que le sucre de canne, avant de fermenter, se transforme GLYCOSES. 535 irabord en sucre cristallisable, et Berthelot montre que cette transformation est produite par un ferment soluble. En 1847, ScHMiDT montre qu'il se forme de l'acide succinique. Pasteur, en 1860, étudie complètement la fermentation alcoolique : il se forme de la lilycérine, du sucre et de l'alcool : l'acide acétique, quand il y en a, provient d'une fer- mentation consécutive, tandis que les alcools d'un rang plus élevé se produisent en même temps que l'alcool ordinaire. Nous ne reviendrons pas sur ce qui a été dit sur la nature même de la levure. (Voir Fermentation.) Mais, depuis Pasteur, des travaux importants ont été faits sur la fermentation même du glycose et des monosaccharides. ScHUNCK, en 1834, montra que l'érythrozyme oudiastase de la garance]pouvait provo- quer la fermentation alcoolique. Manassein, en 1871, trouva que la présence des cellules de levure n'était pas indispen- sable à la fermentation. O'SuLLivAN, en 1892, observa que le pouvoir bydrolytique de la levure était analogue à une simple réaction cbimique ; Brown, qu'elle n'était pas directement proportionnelle au poids de levure formée, et à la quantité de sucre fermentant; elle se produisait plus activement en présence d'oxygène : ce qui était sensiblement différent de l'opinion de Pasteur pour lequel la fermentation consistait en une vie anaérobie. Prior et ScHULZE ont fait un certain nombre d'expériences quantitatives sur la fer- mentation d'un mélange de glycose et de lévulose, glycose et maltose, qui ont montré que le phénomène dépend de la diffusion de la solution sucrée à travers la paroi des cellules. La vitesse de la diffusion varie avec les diverses espèces de cellules et avec la pression osmotique. Knecht a trouvé que deux variétés de levures faisaient fermenter plus rapidement le dextrose que le lévulose. Les recherches de Fischer ont conduit enfin à cette idée que, suivant toute probabilité, la différence de structure des divers sucres entraîne naturellement des différences dans la facilité des dédoublements et des combustions par les ferments. Rappelons enfin que Bûchner a trouvé que la levure agit par un ferment soluble, la zymase, obtenue par destruction des parois cellulaires. Le glycose ne fermente pas seulement en présence de levure. Mucor racemosuSy M. circinelloïdes, Oïdium albicans donnent aussi naissance à une fermentation alcoo- lique; certains schizomycètes provoquent les fermentations lactiques ou butyriques, ou citriques. Micrococous oblongus donne des acides gluconique et oxygluconique. Signalons enfin les fermentations mucilagenique, mannitique, dextrinique et cellu- losique. Combinaisons du glycose. — Le glycose se combine : i° avec les bases, en donnant des glycosates de chaux, de baryte, de cuivre, de plomb, de potasse. 2° Avec les acides, en donnant des acides glycosulfuriques, des nitroglycoses, glycose phosphorique, glycose acétique, etc.; enfin, des élhers, véritables glycosides artificiels. 3° Le glycose donne une phénylhydrazone. C*'-H'^Az-0^ est une ozazone, C'^H^^Az^O* fusible à 203° avec la phényihydrazine. 4° Avec le chloral, le glycose donne naissance au chloralose. (Voir ce mot) Enfin, le glycose se combine avec certains sels, en particulier avec le chlorure de sodium. Ce dernier corps donne un composé qui se forme facilement quand on évapore une urine diabétique. Recherches et dosage du glycose. — La recherche qualitative du glycose se fait toujours par l'emploi des réactions générales que nous avons indiquées plus haut. 1° Une solution de glycose chauffée avec une solution alcaline concentrée ou même de la chaux se colore et vire au brun plus ou moins foncé. 2° Le glycose possède des proprités réductrices vis-à-vis des oxydes métalliques en solution alcaline. Imaginée par Becquerel et Trommer en 1841, cette méthode a reçu toute uue série d'améliorations que nous indiquerons très rapidement. Un simple mélange 36 GLYCOSES. de lessive de potasse ou de soude et de sulfate de cuivre eu solution chauffé avec une solution glycosique donne déjà d'excellents résultats. Fehling, puis Barreswill, ont proposé l'addition d'une substance organique telle que l'acide tartrique. La liqueur bleue et limpide ainsi obtenue donne, quand on la chauife avec du glycose, un précipité jaunâtre, virant à l'orange, puis au rouge; la coloration bleue disparaît pendant ce temps. On peut déceler ainsi 0"™, 00833 de glycose dans 1 cmc. (WoRM-MûLLEU et Hagen). D'autres réactifs ont été imaginés : on a ainsi remplacé l'acide tartrique par la glycé- rine ou la mannite; on a proposé aussi l'emploi d'une dissolution de carbonate de cuivre dans une solution aqueuse de bicarbonate de potasse (Réactif de Soldaïni) ; l'emploi d'une solution d'hydrate cuivrique dans du chlorhydrate d'ammoniaque (Pavy) ; enfin, on a employé aussi des solutions cuivriques acides telles que la solution de Bartœd renfermant, pour IT) parties d'eau, une partie d'acétate neutre de cuivre et 0,4 d'acide acétique à 38 p. 100. Ce réactif est caractéristique du glycose qui le précipite seul. Le nialtose, le lactose, la dextrine, le saccbarose ne le précipitent pas. Les propriétés réductrices du glycose sont encore applicables à des solutions alca- lines de mercure, de bismuth, d'argent, même de fer. Le réactif de Knapp est une solution alcaline de mercure donnant à l'ébuliition avec du glycose un précipité jaune verdâtre. La solution d'argent ammoniaco-alcaline de Tollens, mélange d'azotate d'argent et de potasse caustique, avec la quantité d'ammoniaque exactement suffisante pour redis- soudre l'hydrate formé, chauffée avec du dextrose, donne un miroir d'argent. Le chlorure d'or est également réduit en présence d'un alcalin; aussi Agostini a-t-il proposé pour rechercher le glucose, en solution, un réactif fourni de : i° Une solution de chlorure d'or au millième. 2° Une solution de potasse au vingtième. On mélange, d'après l'auteur, 5 gouttes du liquide à essayer, 5 gouttes de solution aurique, 2 gouttes de la solution de potasse dans un tube à essai et on porte à l'ébulii- tion. Par refroidissement il se manifeste une coloration violacée dont l'intensité varie avec la proportion de glucose. Agostini admet que ce réactif permet de déceler un cent- millième de glucose. La coloration violacée est remplacée dans les urines par une colora- tion rouge vineux sensible au millième. Le procédé du bismuth consiste à chauffer la solution de dextrose avec un peu de soude et du nitrate de bismuth ou de l'oxyde de bismuth fraîchement précipité. Ce produit vire au noir. Le réactif île Nylander est une solution alcaline de bismuth renfermant 1 gramme de nitrate de bismuth, 2 grammes de sel de SeiGxNette et 50 grammes de soude à 8 p. 100; il devient foncé à l'ébuliition en présence de 0,0o p. 100 de sucre. L'acide picrique est réduit à l'état d'acide picramique lorsqu'il est chauffé en solu- ion alcaline avec les glycoses ; il se fait une coloration rouge sang. 3" Le glycose donne avec la phénylhydrazine en solution acétique à chaud une glyco- sazone jaunâtre insoluble dans l'eau et fondant à 204°. 4° Enfin le glycose possède certaines réactions colorées. L'acide diazobenzène-sulfurique en présence de soude et d'amalgame de sodium donne avec le glycose une coloration rouge. Un certain nombre de phénols, phénol, thymol, résorcine, donnent en présenee de glycose et d'acide sulfurique des colorations particulières L' a-naphtol donne une colo- ration violette précipitable en bleu violet par l'eau. Le thymol donne une coloration d'un beau rouge. Dosage du glycose. — Le dosage du glycose peut se faire de quatre manières diffé- rentes : 1° Par les méthodes de polarisation ; 2" par réduction des hydrates métalliques ; 3" par fermentation ; 4° par les méthodes pondérales. 1° Emploi dupolarimètre: Dans les polarimètres, un degré de rotation correspond à gramme de glycose dans 100 ce, l étant la longueur de la solution de glycose traversée par le faisceau de lumière polarisée. On a construit des polarimètres donnant par lecture directe la proportion de glycose p. 100. GLYCOSES. 537 2° Emploi des solutions alcalines de cuivre. La formule de préparation de la liqueur de Fehling peut se résumer de la façon suivante : 1° Dissoudre 34s'',6o de sulfate de cuivre cristallisé et pur dans 200 ce. d'eau dis- tillée. 2' Dissoudre 173 grammes de tartrate de sodium et de potassium ou sel de Sei- i.NETTE dans 480 ce. de lessive de soude d'une densité de 1,14. On verse peu à peu la première solution dans la seconde, puis on étend le tout de manière à faire 1 litre à la température normale de 17,3. On amène cette solution à être équivalente exactement à 0S'",0o de glycose ou de sucre ititerverti par 10 ce. Soit un titre de 0,0;J en grammes de glucose pour 10 ce. de Fehling, n le nombre de centimètres cubes de liquide sucré employé pour 10 ce. de 50 la liqueur de Fehling. On a : grammes de sucre par litre — . Mais la liqueur de Fehling absorbe l'oxygène de l'air (Nysten). Elle s'altère quand elle est abandonnée à elle-même et laisse déposer d'abord du sulfate de potasse, puis des cristaux bleus facilement réductibles en présence de l'air humide, des matières orga- niques par l'action de la lumière, par l'ébullition à chaud sans addition d'alcalis. Ils absorbent l'oxygène et l'acide carbonique de l'air (Sonnehat). Violette a modifié ainsi la préparation que nous venons d'iudiquer plus haut. i^ Faire dissoudre 260 grammes de sel de Seignette dans 200 grammes d'eau dis- tillée, ajouter 500 grammes de lessive de soude à 24° Baume. 2° Faire dissoudre 36°'",4o de sulfate de cuivre cristallisé dans 140 grammes d'eau. 3° Mêler les deux solutions en versant la seconde dans la première, agiter et com- pléterun litre à la température de 15°. Cette solution se conserve longtemps dans de petits flacons d'une centaine de grammes bouchés à l'émeri et dont le bouchon est recouvert de paraffine, et qu'on place ensuite dans un endroit obscur. 10 ce. de la liqueur de Violette correspondent à Os^OoO de saccharose (avant l'in- terversion) ou 0^', 05263 de glucose ou de sucre interverti. QuiNQUAUD a modifié dans ce cas le dosage du glucose de la façon suivante. Il pré- pare une solution d'ichtyocolle renfermant Ichtyocolle 2k',50 Lessive des Savonnières 10 ce. (Lessive de soude.) ■et il mélange cette solution au réaciif de Violette dans la proportion de 10 ce. de réactif pour 6 d'ichtyocolle; le mélange est étendu de 250 ce. avec de l'eau distillée : on porte à l'ébullition et on laisse refroidir ; puis on détermine le titre de la solution avec une solution de glucose de teneur connue. Sonnerat indique pour préparer une solution de Fehling en réduisant par la lumière le procédé suivant ; Dissoudre à saturation à froid, dans de l'eau distillée, 3i'?'',639 de SO*Cu pur et cris- tallisé, et à froid encore 173 grammes de tartrate de potasse pur et cristalhsé dans 600 grammes de levure de soude caustique de densité 1.12. A cette solution alcaline ainsi préparée on ajoute à froid la solution cuivrique, et on ramène le volume à 1 litre. Ces opérations, ainsi pratiquées à froid, empêchent la réduc- tion spontanée de la liqueur de Fehling obtenue. Pasteur a indiqué une formule qui donne un liquide inaltérable à la lumière. On fait dissoudre séparément : l.'iO gramines de soude; 105 — d'acide tartrique; 80 — de potasse; 40 — de sulfate de cuivre cristallisé. On mélange et on complète le volume de 1 litre. 538 GLYCOSES. Enfin Boussi.xGAULT a indiqué la formule suivante d'une liqueur inaltérable et ne déposant pas spontanément d'oxydule. 1° Sulfate de cuivre cristallisé 40 grammes. Dissoudre dans 200 ce. 2° Tartrate neutre de potassium 160 grammes. Soude caustique sèche 130 — Dissoudre dans 600 centimètres cubes d'eau; mêler et compléter 1 litre, faire bouillir quelques minutes après la préparation. 10 centimètres cubes de liqueur de Fehling étendue de son volume d'eau sont placés dans un ballon pouvant être chauffé sur un bec de gaz. Ce ballon est fermé par un bouchon à deux trous, dont l'un sert au passage du tube de dégagement des vapeurs et dont l'autre est destiné à permettre l'écoulement du liquide sucré. Ce dernier est placé dans une burette graduée. La teneur approchée en a été déterminée par un dosage approximatif pre'alabie, de telle sorte que le volume du liquide glycosique soit à peu près égal au volume de Fehling. On fait bouillir le liquide du ballon et on laisse couler la solution sucrée goutte à goutte, jusqu'à ce que la couleur bleue ait disparu. Pour faciliter le dépôt de l'oxyde cuivreux et, par suite, la clarification du liquide, on peut, vers la fin du titrage, ajouter quelques gouttes de sulfate d'alumine, de chlorure de zinc ou de chlorure de calcium. On peut aussi dissoudre l'oxyde cuivreux qui se forme par l'addition à la liqueur de Fehling de quelques gouttes de ferrocyanure de potassium. Dans ces conditions, la liqueur, au lieu de se décolorer complètement, de bleu vire au jaune, et l'oxyde cui- vreux ne précipite pas. Méthode par fermentation. — D'après l'équation C'^H'-G'^ — oCO- + 2C-IPO, 100 parties de glucose doivent donner 48,89 parties d'acide carbonique; cependant on n'en obtient jamais que 47, à cause des produits secondaires. On prend environ 3 grammes de sucre, on les dissout dans 4 parties d'eau ou 12 grammes, et on ajoute un peu de levure de bière, dans un petit appareil qui permet de doser l'acide carbonique dégagé, puis on dispose le tout dans un endroit modérément chaud, après l'avoir pesé. Quand le dégagement d'acide carbonique a cessé, ce qui exige plusieurs jours, on aspire de l'air à travers l'appareil et on pèse de nouveau. Le poids d'acide carbonique trouvé en grammes, multiplié par -r:^, donne la quantité de glucose, d'où 4 / se déduit la quantité de sucre de canne correspondante. 11 est bon de vérifier, dans une opération conduite de la même façon, si la levure ne dégage pas par elle-même de l'acide carbonique. Dans le cas où l'on a affaire à des mélanges de glycose et de saccharose, Gayon a indiqué l'emploi du Mucor Circinelloîdes. Ce champignon fait fermenter le dextrose, mais non le saccharose. Méthodes pondérales. — On peut déterminer la quantité de glucose par pesée de l'oxyde cuivicux réduit (Soxhlet, Allih.n, etc.), mais il faut alors se placer dans des conditions toujours identiques, pour avoir des résultats comparables; il faut, en outre, transformer l'oxyde cuivreux en oxyde cuivrique par oxydation, au moyen de l'acide azotique, ou en cuivre par réduction par l'hydrogène. L'oxyde cuivrique ou le cuivre sont pesés. ALLmN a donné une table indiquant en milligrammes la quantité de dextrose corres- pondant à un poids donné de cuivre. (Voir Glycogène, p. 282.) On a proposé enfin la réduction des oxydes do mercure par le glycose et la pesée du mercure correspondant à cet oxyde. L'argent est dans le même cas. Bibliographie. — On trouvera dans Tollens : Les hydrates de carbone, traduction française de Léon Bourgeois, 1903, Paris, Dunod, une bibliographie complète sur la chimie du glycose. Voir aussi Wurtz, Dict. de chimie, 1570. — 1"' SuppL, p 860. — 2« Suppl. p. 727-763. — Fischer, D. chem. Ges., xxii, 2204; xxiii, 930, 2114; xxiv, 521; xxvii, 579. Aug. PERRET. GLYCOSIDES. 539 GLYCOSIDES. — Sommaire. — M- Définition. — § II. Classification des gly- cosides. — Classification en glycosides artificiels et irlycosides naturels. Classification en Lrlyco- sides non azotés et glycosides azotés. Classification liasée sur la nature des sucres qui entrent dans la composition des glycosides. — § III. Préparation des glycosides. Préparat3n des gly- cosides artificiels. Extraction des glycosides naturels. — § IV. Propriétés générales et constitu- tion chimique des glycosides. Décomposition des glycosides par les agents chimiques. Dédou- blement des glycosides parles ferments solubles. Essai de synthèse des glycosides au moyen des ferments solubles. — § V. Méthodes de recherche et de dosage des glycosides dans les végétaux .• 1" Recherches touchant la présence ou l'absence de principes glycosidiques dans une plante déterminée. 2° Dosage des glycosides dans les végétaux. 3° Recherche microchimique des glycosides. — ï? VI. Rôle physiologique des glycosides dans les végétaux. Rôle des glycosides dans la formation de certains principes immédiats qu'on rencontre chez les plantes. — ?; VII. Bibliographie. § I. Définition. — On désigne actuellement sous le nom de glycosides des principes immédiats très répandus dans le monde végétal et encore des composés chimiques arti- ficiels, susceptibles de se décomposer sous des influences déterminées, pour donner naissance d'une part à un sucre, et d'autre part à un ou plusieurs corps pouvant pré- senter les fonctions chimiques les plus diverses ; parmi ces derniers, on trouve surtout des phénols, des alcools, des aldéhydes et des acides. Toutefois, les combinaisons formées de l'union d'un sucre avec un acide seul, rentrent dans le groupe des étliers et ne sont pas, à proprement parler, des glucosides. Le seul caractère commun à tous les glycosides est donc de fournir une matière sucrée parmi leurs produits de décomposition. Par raison d'étymologie, de même qu'on dit glycérine, glycocoUe, etc., il est donc beaucoup plus rationnel d'employer pour ces composés le terme de glycosides (deyXyy.uç, doux), au lieu de g/ucosides longtemps utilisé. Cette dernière expression serait mieux appropriée à la dt^signation exclusive des seuls dérivés du glyoose-d, connus communément sous le nom de glycose. Il convient de remarquer d'ailleurs que le terme de glycosides, adopté à défaut d'un meilleur, ne saurait être pris exclusivement dans son sens littéral de dérivés de glycoses. c'est-à-dire de sucres simples. Beaucoup de glycosides peuvent en effet non seulement dériver des pentosesou des hexoses, mais aussi des saccharoses et des polysaccharides. § II. Classification des glycosides. — On voit, d'après ce qui précède, que les propriétés ou les réactions des glycosides doivent être des plus diverses, puisqu'elles dépendent précisément des propriétés et des réactions des matières unies aux principes sucrés, en même temps que du mode d'agencement de ces composés divers dont l'assemblage forme le glycoside. Il résulte de ce fait qu'il est fort difficile de donner une classification rationnelle des nombreux glycosides connus à l'heure actuelle. Il faut naturellement abandonner dès l'abord toutes les classifications anciennes qui envisa- geaient toujours comme glucose le sucre formé. Classification de Van Rijn. — Van Rijn (2), dans sa récente monographie chimique des glycosides, divise ces derniers en deux grands groupes principaux : 1° Les glycosides artificiels. 2° Les glycosides naturels. Les glycosides artificiels sont rangés suivant un ordre chimique qui conduit des plus simples aux plus complexes, et qui peut évidemment donner place à de nouveaux groupes au fur et à mesure que des méthodes nouvelles permettraient leur création. Les glucosides artificiels connus sont ainsi rangés en : Combinaisons des sucres avec l'alcool méthy- Combinaisons des sucres avec les mcrcaptans lique. plurivalents. Combinaisons des sucres avec l'alcool éthy- Comliinaisons des sucres avec des phénols. lique. Combinaisons des sucres avec la phloroglucine. Combinaisons des sucres avec des alcools riches Combinaisons des sucres avec des aldéhydes. en carbone. Combinaisons des sucres avec des cétones. Combinaisons des sucres avec des alcools plu- Combinaisons des sucres avec des oxyacides. rivalents. Combinaisons des sucres avec des corps azotés. Combinaisons des sucres avec les mcrcaptans. Quant aux glycosides naturels, van Ri,iN les étudie simplement dans l'ordre naturel des familles végétales qui les fournissent, et il donne, comme raison de cette manière 540 GLYCOSIDES. de faire, le manque de connaissances où l'on en est actuellement de la structure chi- mique d'un grand nombre de gl}'cosides végétaux. Une telle méthode n'est pas du reste absolument arbitraire, car on constate en chimie végétale que des végétaux appar- tenant à des groupes botaniques voisins ont, de ce fait même, une composition chimique pr<'sentant une certaine analogie. C'est là un fait remarquable surtout au point de vue des alcaloïdes et sur lequel il n'est pas besoin d'insister. 11 existe certains glycosides artificiels qui sont obtenus en partant de glycosides naturels, sous l'influence d'actions chimiques déterminées ; c'est le cas, par exemple, des dérivés bromes, chlorés ou iodés delà salicine ; ces composés se rattachent tout natu- rellement aux glycosides dont ils dérivent. Classification en glycosides non azotés et glycosides azotés. — C'est là une classifica- tion tout artificielle, mais qui est encore quelquefois suivie. Elle n'envisage d'ailleurs que les glycosides naturels. Nous donnons ci-dessous la liste des principaux glycosides bien caractérisés, rangés d'après cet ordre. Nous ne pouvons évidemment mentionner tous les glycosides innombrables signalés par les divers auteurs, mais cela ne saurait être d'aucune importance dans cet article qui est une vue d'ensemble sur les glycosides et non une monographie de ces derniers. On trouvera du reste dans ce Dictionnaire, à Ja place alphabétique, l'étude spéciale des principaux glycosides importants au point de vue physiologique. GLYCOSIDES NON Adonine Antiarine Apiine Arbutine C24Hi0O9 C27H4-2O10 C27H32016 C12H1601 Atractylate de potasse CsoH^iiSaO'SKS Aucubine Aurantiine Baptisine Boldiae Caïnciue Cerbérine Chicoriine Colocynthine Coniférine Convallamarine Convallarine Convolvuline Coriamyrtine Crocine Cyclamine Daphnine Datiscine Digitoxine Digitonine Digitaline Esculine Franguline Fraxine Fustine Gaulthérine Gentiopicrine Glycogalline Glycyphyllinc Hédcrine Helléboréine Helléborine Hespéridine Amygdalinc Glycotropéoline Glycyrrhizine indican Prulaurasine C13H1608 C21H26011 C2CH3201V C30H52O8 C40H64O18 C27H40O8 C32H34019 C56H84023 C16H2208 C23H44012 C34HC20H C54H96021 C30H36O10 C44H70O28 C20H34O10 CI0HI6O9 C21H24011 C34H540H C27H46014 C3oH^601^ C1SH1609 C21H20O9 C16H18O10 C58H46023 C14H1808 C16H20O9 C13HJ6O10 C21H2409 C32H62O10 C37H3601S C36H42O0 C50H60O27 GLYCOSIDES C20H27NO11 G14H18KNS209 C44H63NOI8 C^2H62N2034 CiiK^NOe AZOTE S Inéine Ipomœine Iridine Isohespéridiae Jalapine Lokaïne Lupinine Ményanthiae Méthylarbutine Méthylesculine Morindine Ononine Ouabaïne Phlorizine Piceine Picrocrocine Polygonine Ponticine Populiue Quercitrin Quinovine Rhéine Rhinanthine Robinine Acide rubérythrique Rutine Salicine Saponines Smilacine Syringine Tampicine Tanghinine Tétrarine Turpéthine Vincétoxine Xanthorhamnine AZOTÉS Sambunigrine Sinalbine Sinigrine Solanéinc Solanine C31H480t2 G78H1»203G C24H2eOi3 C:i0H60O27 C34HS0O16 C42H48027 C23H3201« C30H46O14 C13H1807 C16H1S09 C26H18014 C30H34OI3 C30H46O12 C21H24O»0 C14H1807 C38H60O'" C21H20O10 C21H24O0 C20H22OS C21H22012 C30H48O8 C15H10O6 C29Ho2O20 C25H30O16 C26H28014 C27H320IC C13H180' C?lH2«-8O10 C26H44O10 C17H2409 C34H54014 C27H44O10 C32H32012 C34HÔ6016 C16H1206 C24H32011 CUH11N06 C30H42N2S2Ol^ C10H1GNS2K09 C^2H83N013 C52H93M018 GLYCOSIDES. 541 Uemarquons que les formules attribuées à certains içlycosides ci-dessus mentioiuiés ne doivent pas encore être considérées comme absolument définitives. Il faudrait encore ajouter à cette liste un certain nombre de tanins qui sont eu réalité aussi de véritables glucosides, puisque, traités par. les acides minéraux étendus et bouillants, ils sont susceptibles, en dehors d'autres produits plus ou moins nettement caractérisés, de fournir un sucre réducteur. Cette classification des f^dycosides végétaux eu giycosides azotés et glycosides non azotés est, comme on en peut juger, tout à fait factice. Eu dehors de ce fait qu'elle fait rentrer dans le premier groupe la grande majorité des glycosides connus, les plus variés, elle a le grave inconvénient de ne tenir aucun compte de la structure chimique des composés auxquels elle se rapporte. Classification basée sur la nature des sucres qui entrent dans la compositioii des glycosides. — On tend beaucoup à l'heui^e actuelle (3) à sérier les glycosides, suivant la nature des sucres qu'ils fournissent par décomposition en leurs éléments constituants. La nomenclature correspondaule est pour ainsi dire calquée sur celle usitée pour les hydrates de carbone condensés, dans laquelle les générateurs des sucres sont désignés par le suffixe ane correspondant (xylanes, mannanes, dextranes, galactanes, etc.) ; elle consiste à remplacer la terminaison ose du sucre envisagé, par le suffixe ide ; les gly- cosides fournissant des pentoses prennent ainsi le nom générique de pentosides, ceux qui fourniront des hexoses prendront celui d'hexoside, et ainsi de suite. Chacun des groupes ainsi constitués peut à son tour être divisé en sous-groupes correspondant à un sucre déterminé ; c'est ainsi que le groupe des bexosides sera divisé en dextrosides ou d-glucosidcs, l-glucosides, (jalactomlcs, mannosides, etc. ; le groupe des pentosides comprendra les xylosides, arabinosides, etc. On peut envisager ensuite successivement les combinaisons de chaque sucre déter- miné avec les diverses fonctions principales de la chimie organique et on arrive ainsi a grouper les glycosides suivant leur structure et leurs affinités chimiques. C'est là une des classifications qui paraissent le plus rationnelles. Malheureusement, cette classification nécessite pour son établissement la connaissance chimique appro- fondie des glycosides à classer; et, si elle est facilement applicable aux glycosides obtenus synthétiquement en présence de composés connus, il n'en est plus de même, comme on sait, de beaucoup de glycosides naturels, dont l'étude et même la caractéri- sation sont encore très incomplètes. Remarquons toutefois que, parmi les produits de décomposition des glycosides, les matières sucrées sont, d'une façon générale, les com- posés les plus aisément identifiables et caractérisables ; il est inutile d'ajouter que cette règle soulfre quand même beaucoup d'exceptions, et que le sucre de nombre de glycosides reste encore indéterminé. 11 y a plus; certains glycosides peuvent fournir plusieurs matières sucrées, et il est vraisemblable, d'après les exemples que nous verrons plus loin, que ces divers sucres proviennent d'un polysaccharide unique, plus condensé, qui en serait le générateur ; c'est sur la nature de ce dernier qu'il faudrait rationnellement s'appuyer pour classer les glycosides; de nouvelles difficultés viennent ainsi compliquer le problème. Toutefois, les progrès de la chimie végétale permettent d'espérer que la dernière classification exposée, avec quelque lenteur qu'elle pût être édifiée, est loin dès l'abord d'apparaître comme irréalisable. Les sucres hydrolysables, tels que le saccharose, le maltose, le lactose, se rap- prochent à plus d'un point de vue des glycosides et sont parfois considérés comme de véritables glycosides. Il est certainement préférable de les disjoindre d'un groupe déjà suffisamment complexe, et ils sont suffisamment caractérisés par ce fait que leur décomposition les résout uniquement en sucres, sans mélange de composés apparte- nant aux autres fonctions de la chimie organique. § IIl. Préparation des glycosides. — A vrai dire, il ne s'agit de préparation véritable que pour les glycosides artificiels, parmi lesquels il faut comprendre certains glycosides dérivés par actions chimiques des glycosides naturels. Quant aux glycosides naturels, aucun d'entre eux n'a encore pu être préparé synthétiquement, et on doit se contenter de les extraire tout formés des végétaux qui les contiennent. Glycosides artificiels. — La préparation des glycosides artificiels est toute synthé- 5-42 GLYCOSIDES. tique et relève par conséquent du domaine de la chimie pure. >(Ous nous contenterons ici de quelques indications générales à ce sujet, en renvoyant le lecteur à la bibliogra- phie indiquée par van Rijn pour la nomenclature des principaux mémoires qui se rattachent à cette question. ScHûTZENBERGKR (4) a tenté le premier de réaliser la synthèse d'un glycoside naturel, le salicine, en particulier en chauffant le triacétylglycose avec de la saligénine sodée ; mais la combinaison amorphe obtenue, quoique de nature glycosidique et donnant bien par hydrolyse avec l'acide sulfurique étendu du glucose et de la salirétine, ne pouvait être en aucune façon considérée comme étant de la salicine. A. MicHAEL (5), en faisant agir l'acétochlorhydrose C'^H'OCl (OC-H-^'O)* sur les combi- naisons alcalines des phénols, a obtenu des combinaisons du glycose avec les phénols monovalents, absolument analogues à des glycosides naturels. II est parvenu également à préparer synthétiquement l'hélicine, glycoside qu'on obtient communément par l'oxy- dation ménagée de la salicine au moyen de l'acide nitrique étendu. Les méthodes les plus fécondes ont été celles indiquées par Fjscher (6), qui con- sistent à déterminer la condensation des produits destinés à constituer le glycoside, soit à froid en présence d'acide chlorhydrique gazeux, soit à chaud avec des quantités très faibles de ce même acide. S'agit-il par exemple de préparer les méthylglycosides, la méthode la meilleure consiste à dissoudre du glycose dans cinq fois son poids d'alcool méthylique contenant O»'', 25 pour 100 de HCl et à chauffer pendant 50 heures à 100"; à ce moment, la combinaison est complète car le mélange ne réduit plus la liqueur cupro-potassique. Avec les méthodes de Fischer, on peut condenser presque tous les sucres avec les différents alcools, mercaptans, cétones et phénols plurivalents. Avec les alcools, la réaction se passe la plupart du temps entre une molécule de sucre et une molécule d'alcool, et il se forme ainsi deux combinaisons stéréo-isomères a et p, par exemple, a-méthylglycoside et [î-méthylglycoside de formule CH^'O^OGH*. Dans certains cas, deux molécules d'alcool entrent en réaction avec une molécule de sucre, et il se forme des combinaisons que Fischer ne considère pas comme de vrais glycosides et qu'il range parmi les acétals ; tel est le glycose éthylacétal 0C2H^ C6Hi20s(^ OC2H5 Avec les mercaptans, on n'obtient précisément que de pareils dérivés disubstitués; tel est le glycose éthylmercaptal SC2H: C0H12O y sc2h; Quant à l'acétone, suivant les sucres employés, on obtient tantôt Mes combinaisons de une molécule de sucre avec une seule molécule d'acétone, tantôt des combinaisons de deux molécules d'acétone avec une molécule de sucre. Extraction des glycosides naturels. — Les propriétés des glycosides naturels étant essentiellement variables de l'un à l'autre, on ne saurait indiquer des règles iixes pour leur préparation. Nous donnerons seulement quelques types des méthodes employées, lesquelles d'ailleurs peuvent en somme être classées dans deux grands groupes. Dans les méthodes du premier groupe, le glycoside est extrait au moyen de dissolvants neutres, soit directement, soit après des traitements spéciaux destinés à débarrasser les liqueurs qui les contiennent des éléments étrangers pouvant entraver leur extraction à l'état de pureté ; dans les méthodes du deuxième groupe, le glycoside est engagé dans une combinaison insoluble, convenablement 'choisie, et facile à obtenir dans un assez grand état de pureté, puis cette combinaison est décomposée ensuite par un traitement chimique approprié permettant d'obtenir le glycoside cherché. Nous dirons quelques mots d'une méthode pour ainsi dire intermédiaire, qui consiste à précipiter le glycoside de ses dissolvants, par addition de sels neutres. Extraction des glycosides naturels au moyen des dissolvants neutres. — CLYCOSIDES. 543 Nous prendrons comme premier exemple, parce qu'il constitue pour ainsi dire l'un des plus simples, celui de la préparation de Vamygdaline qui a été découverte par Robiquet et Boutron-Charlard (7) et dont le mode d'obtention a été perfectionné par Wohler et LiEBiG (8). Les amandes amères, débarrassées le plus possible d'huile par une forte expression, sont traitées à deux reprises par l'alcool à 94-9:')° bouillant; on exprime, on passe, à travers une toile et on laisse en repos le liquide trouble qui laisse peu à peu déposer un peu d'huile ; on sépare cette dernière. On filtre la liqueur de façon à l'obte- nir limpide et on l'abandonne à elle-même ; on peut ainsi obtenir directement en quelques jours de l'amygdaline qui se dépose lentement à l'état cristallisé. Il reste d'ailleurs une certaine quantité de ce principe dans les eaux-mères. Pour ne pas perdre de produit, on distille ces dernières jusqu'à un petit volume et on ajoute au résidu un demi-volume d'éther. Toute l'amygdaline est ainsi précipitée. On presse entre des feuilles de papier à filtrer les cristaux qui sont imprégnés d'une petite quantité d'huile, on les lave à l'éther dans lequel l'amygdaline est insoluble, puis on fait recristalliser le tout dans l'alcool bouillant. Dans le traitement primitif des amandes, il importe d'em- ployer de l'alcool à 94-95°, et non de l'alcool plus faible, car ce dernier, d'après les auteurs, entraîne avec l'amygdaline une petite quantité de sucre incristallisable qui est ensuite partiellement précipité dans le traitement par l'éther, et dont il est difficile de débarrasser le glycoside. Beaucoup des glycosides des Convolvulacées, qui sont insolubles dans l'eau, s'ob- tiennent ainsi avec le seul concours des dissolvants neutres. Voici, par exemple, com- ment l'on peut préparer la scammonine (9) : 5 000 grammes de racine sèche de [scammo- née grossièrement pulvérisée sont mis à macérer pendant 3 jours dans 25 litres d'alcool à 90°, à une température modérée. Cette opération est répétée 3 fois, et les liqueurs alcoo- liques sont distillées dans le vide afin de recueillir la plus grande partie de l'alcool. Le résidu liquide est versé dans une grande quantité d'eau froide qui précipite le glyco- side ; on lave ce dernier à l'eau bouillante jusqu'à ce que les eaux de lavage soient neutres au tournesol. On purifie ensuite le produit en dissolvant dans un peu d'alcool à 90°, décolorant au noir, précipitant de nouveau dans l'eau, renouvelant les lavages à l'eau bouillante et séchant ensuite à l'étuve. Enfin la scammonine sèche est lavée à l'éther de pétrole pour la débarrasser de quelques matières grasses entraînées. La convolvuline peut s'obtenir de la racine de jalap par un procédé analogue. En outre, il est recommandé par la plupart des auteurs d'épuiser préalablement la racine de jalap par l'eau qui ne dissout pas le glycoside, et qui entraîne un grand nombre de prin- cipes solubles qui seraient susceptibles de souiller ce dernier au cours des opérations. Il est souvent nécessaire, pour obtenir un glycoside végétal à l'état de pureté, de puri- fier les liqueurs extractives qui le contiennent, en les débarrassant, au moyen de préci- pitants convenables, des matières accessoires qui empêcheraient la cristallisation du principe à extraire. On emploie le plus souvent dans ce but l'acétate de plomb, lorsque ce composé n'est pas lui-même susceptible de donner une combinaison insoluble avec le glycoside envisagé. Pour préparer, par exemple, Varbuflne, d'après Kawalier (10), on fait un décocté aqueux de feuille d' Uva ursi et on ajoute à ce dernier de l'acétate de plomb. La liqueur, séparée par filtration du précipité plombique, est distillée jusqu'à un petite volume, filtrée à nouveau, puis traitée par un courant d'hydrogène sulfuré qui enlève l'excès de plomb. Le liquide filtré, en dehors de l'arbutine, contient, entre autres produits, une petite quantité de sucre qui est susceptible de fermenter par la levure de bière, cette dernière n'exerçant d'ailleurs aucun action sur l'arbutine présente. Quoi qu'il en soit, la liqueur, soumise ou non à la fermentation alcoolique, est évaporée en consistance de sirop. Après plusieurs jours, il se sépare des cristaux d'arbutine et finalement toute la masse se prend en une bouillie cristalline qu'on exprime et qu'on fait recristalliser dans l'eau bouillante en présence du noir animal. Lorsque le glycoside est accompagné dans la plante d'une forte proportion de sucre, glucose ou saccharose par exemple, et qu'il possède en même temps des coefficients de solubilité voisins de ceux de ces derniers, il est absolument indispensable de détruire le sucre qui viendrait souiller le glycoside au cours de la cristallisation. Tel est le cas qui se présente dans l'extraction de Vaucublne de la graine d'Aucuba japonica, qui la contient mélangée à une proportion bien supérieure de saccharose. Pour préparer nu GLYCOSIDES. l'aucubine, d'après Bourquelot et Hérissey qui l'ont découverte (H), les graines fraîches d'Aucuba sont séparées du péricarpe, puis découpées immédiatement dans de l'alcool à 90" bouillant, dans la proportion d'environ 500 grammes pour 2000'^'°'^ d'alcool. On fait bouillir à reflux pendant environ 45 minutes, puis on sépare les liquides alcooliques et on les distille en présence d'une petite quantité de carbonate de calcium, de manière à éviter toute hydrolyse du glycoside, du fait de la légère acidité des liqueurs. L'alcool étant éliminé, le liquide restant est filtré, puis étendu d'eau distillée de façon à ne pas renfermer plus de 12 à 14 p. 100 de sucre de canne. La solution ainsi obtenue est dis- tribuée par portions de bOO'='^>' dans des ballons d'un litre. Après stérilisation à l'ébulition et refroidissement, on ensemence chacun de ces ballons par addition de 10 grammes de levure haute et on laisse la fermentation se continuer à la température du laboratoire jusqu'à disparition complète ou presque complète du sucre (4 à 5 jours). A ce moment, on ajoute un peu de carbonate de calcium, on porte à l'èbullition, on laisse refroidir et on filtre. On procède ensuite à la décoloration des liquides par le noir animal; on filtre de nouveau, on évapore en partie au bain-marie, et on achève l'évaporation dans le vide partiel. Le produit ainsi obtenu présentant l'aspect d'un extrait sec, est traité à rélmllition à reflux par une quantité convenable d'alcool à 95°. Après 12 heures de repos, le liquide filtré dans des flacons à large ouverture ne tarde pas à laisser cris- talliser le glycoside. Au bout de 24 à 48 heures, la cristallisation étant terminée, les cristaux sont essorés à la trompe, lavés à l'alcool à 95» et séchés dans le vide sulfu- rique. On obtient le glycoside très pur en le faisant recristalliser une première fois dans l'eau et une deuxième fois dans l'alcool à 80°. Extraction des glycosides en les engageant dans une combinaison insoluble. — Suivant la nature et les propriétés du glycoside à extraire, la combinaison insoluble dans laquelle on l'engage peut être de nature très variable; le plus souvent, on utilise les combinai- sons susceptibles de se produire avec l'oxyde de plomb ou avec le tanin. Avant de donner un exemple de cette méthode, il faut mentionner une méthode pour ainsi dire intermédiaire entre celle-ci elles méthodes aux dissolvants neutres précédem- ment exposées. On a vu plus haut qu'il était facile, par précipitation au moyen de l'éther, d'extraire toute l'amygdaline contenue dans une solution alcoolique. Cela tient à ce que l'amygdaline est complètement insoluble dans l'éther; mais certains glycosides peuvent être ainsi précipités de leurs dissolutions, non plus par un liquide dans lequel ils seraient insolubles, mais bien par un sel neutre convenablement choisi, comme par exemple le .chlorure de sodium, le sulfate de sodium, le sulfate de magnésie. Il se passe ainsi un phénomène analogue à ce qu'on observe dans la précipitation de certains albuminoïdes par leâ mêmes agents, et cette propriété peut être mise à profit pour l'extraction de certains glycosides, Ainsi Tanret (12) prépare la vincétcxine en lixiviant à l'eau froide la poudre grossière de Dompte-venin, préalablement mélangée d'un léger lait de chaux ; les liqueurs sont saturées de chlorure de sodium, et le précipité qui se forme est recueilli, lavé à l'eau salée, séché et repris par le chloroforme. La solution chloroformique traitée par le noir est distillée; au résidu dissous dans son poids d'alcool, on ajoute de l'élher tant que la liqueur précipite, puis on agite le tout avec son demi-volume d'eau. Ces deux couches de liquide étant séparées, l'inférieure éva- porée à siccité dans la vincétoxine soluble dans l'eau. Quant à la solution éthérée, on l'agite avec de l'eau légèrement alcaline qui en enlève un acide résineux, puis avec de l'acide sulfurique étendu qui s'empare d'un peu d'alcaloïde. Après une nouvelle neutra- lisation, on distille et l'on dessèche le résidu à 100". 11 constitue la vincétoxine insoluble dans l'eau. Ce glycoside est susceptible de se présenter en efîet à l'état soluble et à l'état insoluble sans que ses autres propriétés et sa composition en soient d'ailleurs modifiées. Pour préparer la picéine, glycoside du Pinus picea, Ta.nret (1.3) engage d'abord le glycoside dans une combinaison plombique qu'il décompose par l'acide sulfurique. Des ramilles de sapin épicéa finement hachées sont traitées par de l'eau bouillante addi- tionnée de bicarbonate de soude à raison de 5 grammes par kilogramme de ramilles. Après quelques instants d'ébullilion et une macération de 24 heures, on précipite la liqueur successivement par l'extrait de Saturne et l'acétate de plomb ammoniacal, en ne gardant que le dernier précipité qu'on décompose par l'acide sulfurique ; puis, après filtra- tion et neutralisation exacte par la magnésie, on évapore en consistance de sirop clair. GLYCOSIDES. 545 On dissout dans celui-ci encore chaud le tiers de son poids de sulfate de magnésie, puis on l'épuisé avec de l'étlier acétique. Quand ce dernier, chargé de glycoside, s'est éclairci, soit par un repos suffisant, soit à la suite d'une forte agitation avec du bicarbonate de soude, on le distille, on reprend le résidu par de l'alcool, on l'évaporé de nouveau à siccité pour chasser complètement l'éther, puis on le dissout, ou simplement même on le délaie, selon le cas, dans son poids d'ab^ool absolu chaud. La liqueur ne tarde pas à se prendre en une masse pâteuse qu'on essoie à la trompe et qu'on lave à l'alcool absolu. Celui-ci entraîne en solution un ou plusieurs glycosides amorphes. Quant au résidu laissé par l'alcool, on le redissout dans l'alcool absolu bouillant ou dans l'eau bouillante; par refroidissement la solution abandonne une superbe cristallisation de picéine. § IV. Propriétés générales et constitution chimique des glycosides. — Les glycosides naturels n'ont guère de propriétés communes permettant une description d'ensemble; beaucoup sont cristallisés, mais il en est aussi en grand nombre qui )i'ont pu être obtenus jusqu'à présent qu'à l'état amorphe. Leurs différents caractères de solubilité sont aussi essentiellement variables de l'un à l'autre, les uns, par exemple, étant facilement solubles dans l'eau, les autres étant totalement insolubles dans ce solvant, et par contre facilement solubles dans les solvants organiques comme l'éther et l'alcool. Au point de vue des propriétés générales, le groupe des glycosides artificiels est un peu plus homogène. Ces glycosides, dont un grand nombre a été obtenu à l'état cristallisé, peuvent cependant être amorphes ou même sirupeux; ils possèdent à peu près tous ce caractère commun d'être facilement solubles dans l'eau, difficilement solubles dans l'alcool absolu, insolubles dans l'éther. Ils sont incolores et d'une saveur très variable, sucrée ou ainère; ils sont actifs sur la lumière polarisée. Leurs solutions aqueuses sont neutres aux réactifs ; seules, les combinaisons des sucres avec les oxyacides possèdent un caractère acide à cause d'un groupement carboxylique libre. A l'encontre de quelques rares glycosides naturels, les glycosides artificiels ne réduisent pas la liqueur de Fehling, et ne réagissent pas avec la phénylhydrazine. Ils sont susceptibles de fournir des éthers acétiques et benzoïques. Au point de vue de leur dédoublement en leurs composés constituants, les glyco- sides artificiels, comme nous le verrons plus loin, se comportent d'une façon absolu- ment comparable à celle des glycosides naturels. Le fait capital de la disparition du pouvoir réducteur dans les glycosides indique bien que le groupe aldéhydique du sucre qui entre en combinaison est intéressé, puisque les propriétés de cette fonction ne se retrouvent plus dans le composé. Aussi Fischer (14) pense-t-il devoir attribuer au mélhylglycoside par exemple la formule de constitution suivante, /CH.0.CH3 / I / CHOH \ CHOH \ I \CH I CHOH I CH20H qui correspond tout à fait à la formule oxydique du glycose proposée par Tollens : /CHOH / I / CHOH 0( I \ CHOH \ I \gh I CHOH I CH20H DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 35 546 GLYCOSIDES. Cette formule de Fischkr conduit à admettre pour un même sucre la formation de deux dérivés stéréo-isomériques, et c'est en fait ce que l'expérience confirme. Les dérivés stéréo-isomériques des hexoses par exemple posséderont ainsi la constitution suivante ; H — C — O.R R.O — C — H / CHOH /cHOH o( I 0/ I \ CHOH \ CHOH \l \l ^CH ^CH I I CHOH CHOH « I PI CH20H CH20H Ces glycosides stéréo-isomériques se distinguent l'un de l'autre par leur point de fusion, leur solubilité dans les divers dissolvants, leur pouvoir rotatoire, et spécialement leur résistance difTérente à un même ferment. Des recherches récentes ont établi que ces deux variétés de glycosides correspondent à des états isomérique? différents du sucre qui entre dans leur composition. Prenons comme exemple l'a-méthyl-d-glycoside et le p-méthyl-d-glycoside. D'après les anciennes recherches de Tanret (10), le glycose-d était supposé exister sous trois états isomériques qui avaient été désignés par les lettres a, (3, y, chacun d'entre eux étant caractérisé par un pouvoir rotatoire difTérent : le glycose a dissous rapidement dans l'eau possède un pouvoir rotatoire immédiat aD=+ 110°, qui décroît à chaud ou par addition d'ammo- niaque ou de potasse étendue et devient alors constant pour une même concentration, soit aD= + 52°, .'j pour une solution au dixième. Le glycose y possède un pouvoir rota- toire immédiat aD= + 19° et ce pouvoir rotatoire s'élève peu à peu pour atteindre + 52°, 5. Déjà Armstrong (17) s'était demandé si la forme du glycose considérée comme stable était bien une modification véritable et si elle ne correspondait à un mélange des deux stéréo-isomères a et y, mélange arrivé à son état d'équilibre. Armstrong avait cru devoir énoncer une telle conclusion en s'appuyant sur des expériences de dédoublement des a et p méthyl-(Z-glycosides ; voyant qu'une solution d'ammoniaque diminue la rotation d'une solution de méthylglycoside a traitée par la maltase et aug-mente au contraire celle du méthylglycoside p traitée par l'émulsine, il concluait que l'hydrolyse du méthylglycoside a donne du glycose a et celle du méthylglycoside p du glycose y, et que, par conséquent, ces glycoses sont en relation avec les méthylglycosides d'oîi ils proviennent, puis, qu'à ces deux glycoses, corresfiondent les deux formules lactoniques du glycose, tandis que le glycose arrivé à son pouvoir rotatoire stable (ancien glycose p de Tanret) n'était qu'un mélange des deux stéréo-isomères (anciens glycoses a et y de Tanret). Cette opinion fut soutenue aussi par Behrend et Hoth (-18) qui s'appuyaient sur ce fait qu'ils obtenaient, dans des conditions déterminées d'action, deux acétines diffé- rentes à partir du glycose arrivé à une modification stable, l'une fondant à 130°, l'autre à 110°. Tanret (19), après avoir montré que ces diverses recherches n'étaient pas suflisantes pour légitimer entièrement les conclusions que leurs auteurs en avaient tirées, a repris l'étude de cette question. En s'appuyant sur des expériences précises et décisives, il est arrivé à celte conclusion importante qu'une solution de glycose-d dont le pouvoir rota- toire est devenu stable, contient un mélange des sucres a et y. Il en est de même avec le galactose et le lactose, et vraisemblablement aussi avec tous les sucres à multirotation. L'ancienne forme p des sucres n'est donc pas une modification moléculaire au même titre que les modifications a et y; elle est constituée en solution par un mélange en équilibre de ces modifications. D'après Taxret lui-même, qui propose d'appeler cette modification forme s, il convient d'attribuer la lettre p qui servait à la désigner à l'ancienne forme y. Le glycose y devient donc le glycose p, et ainsi, aux deux glycoses a et p correspondent respectivement les deux méthylglycosides a et p ; il n'y a plus ainsi de confusion possible entre les divers dérivés stéréo-isomériques du glycose. Décomposition des glycosides par les agents chimiques. — Les glycosides soumis, dans des conditions variables d'ailleurs pour chacun d'eux, à l'action des acides ou des bases GLYCOSIDES. 547 dilués, subissent une décomposition dont le processus est tout à fait différent, suivant que le traitement est effectué soit avec un acide, soit avec un alcali. C'est ainsi que l'amygdaline, soumise à l'action des acides minéraux étendus et bouillants, est dédoublée en glycose-d, acide cyanhydrique et aldéhyde benzoïque, suivant l'équation : Ci-2H2iO»o — 0 — CH (CN) — G^U- + 2H20 = 2C6Hi20« + CNH + COH.CeU^i Bouillie avec une solution étendue de potasse ou de baryte, elle donne de l'ammo- niaque et un sel de l'acide amygdalique, la fonction nitrile se trouvant changée en fonction acide C12H21O10 — 0 — CH (CN) — C6HÏ + 2H20 = NH^ + ciaH^iOi» — 0 — CH (COOH) COH^ De même, la picéine (13) se dédouble sous l'iniluence des acides étendus en glycose et picéol ; soumise d'autre part à l'action de l'eau de baryte à 100°, elle donne du picéol et un anhydride gauche du glycose ou lévoglyoosane (20). Les conditions d'action nécessaires au dédoublement des divers glycosides sont très variables suivant le glycoside à dédoubler. Pour certains glycosides, il faut opérer à l'ébullilion, avec des acides minéraux forts, tels que l'acide chlorhydrique ou l'acide sulfurique ; d'autres glycosides, au contraire, comme l'aucubine, peuvent être dédoublés même à froid par des doses faibles d'acides organiques, tels que l'acide tartrique. Il est à remarquer que, toutes les fois qu'on a pu déterminer avec sécurité la formule de dédoublement d'un glycoside par un acide, on a reconnu que ce dédoublement s'effec- tuait avec fixation d'au moins une molécule d'eau; pour certains glycosides, deux et même un plus i;rand nombre de molécules d'eau peuvent entrer en réaction. Dédoublement des glycosides par les ferments soliibles. — Pour beaucoup de glyco- sides connus, le dédoublement peut être provoqué au moyen de ferments solubles ou enzymes. Comme ferments susceptibles de déterminer le dédoublement de principes glycosidiques, nous citerons l'émulsine, la myrosine, l'érythrozyme, la rhamnase, la gaulthérase, la géase (21); il en existe certainement un grand nombre d'autres non encore connus. D'autre part, nous savons, d'après Fischer et ses collaborateurs (22), qu'un grand nombre de glycosides artificiels sont dédoublés par les enzymes de la levure de bière. Nous ne nous arrêterons pas à l'étude des lois d'action des diastases sur les glyco- sides, étude pour laquelle on pourra consulter certains mémoires spéciaux, comme celui de V. Henry (23); et, nous insisterons seulement sur les relations générales qui existent, au point de vue de la constitution chimique, entre les divers glycosides susceptibles d'être dédoublés par un même ferment. On sait, en effet, que certains ferments des glycosides ne limitent pas leur action à un seul glycoside, mais sont capables d'agir sur un grand nombre de ces principes. Il n'y a là du reste aucun argument à tirer contre le principe de l'individualité des diastases, car il est absolument bien démontré aujourd'hui que des glycosides différents sont dédoublés par le même enzyme parce qu'ils possèdent une constitution stéréoisomérique semblable. Cette notion a été fortement mise en lumière par les travaux de Fischer sur les glycosides artificiels (24). Fischer a montré, par exemple, qu'un des deux méthyl-d-gly- cosides, dont nous avons plus haut indiqué la constitution, est dédoublé par les enzymes de la levure et reste inaltéré en présence de l'émulsine des amandes ; au contraire, l'autre méthyl-d-glucoside est inattaqué par les ferments de la levure et se dédouble en présence de l'émulsine des amandes ; comme la même relation se reproduit pour les autres d-glycosides, Fischer les classe en deux séries; la série a, dédoublable par les enzymes de la levure ' ; la série [i, dédoublable par l'émulsine. 1. Nous n'entrerons pas ici dans la discussion de savoir si l'enzyme de la levure qui agit sur le ni(';lhyl-d-p:lycoside a doit être considéré comme l'invertine ou comme la maltase; Fischer, dans ses dernières recherches à ce sujet, a conclu que le dédoublement du métliyl-d-glycoside a devait être le fait de la maltase. La solution particulière de cette question n'intéresse d'ailleurs aucunement l'exposé des résultats généraux qui nous occultent. 548 GLYCOSIDES. BouRQUELOT et HÉRissEY (25) ont fait remarquer, à plusieurs reprises, que l'action de émulsine n'avait été observée jusqu'ici que sur des glycosides lévogyres, donnant du glycose-d par hydrolyse; ainsi, l'amygdaline, l'arbuline, l'aucubine, la coniférine, l'esculine, la gentiopicrine, l'hélicine, la salicine, la picéine, la sambunigrine (32), la prulaurasine (25 bis), la syringine, qui sont dédoublées par l'émulsine, ont un pouvoir rotatoire gauche et donnent du glycose-d dans leur dédoublement; il y a donc lieu de ranger tous ces corps dans la série des glycosides p ; en effet, comme il est bon de le faire remarquer, les glycosides [i artificiels ont précisément, eux aussi, un pouvoir rota- toire gauche ; on peut donc dire que les glycosides sur lesquels l'émulsine exerce son action sont ceux qui dérivent de la forme p (nouvelle notation) du glycose-d. Les recherches de Pottevin (26) ont attesté, elles aussi, l'accord qui existe entre les données qui résultent de la façon dont les glycosides réagissent vis-à-vis des diastases et celles qu'on pouvait induire en faisant appel aux seules considérations théoriques. Quand l'histoire des ferments glycosidiques, autres que l'émulsine, sera aussi bien connue que celle de ce dernier enzyme, on y trouvera certainement matière à des rapprochements du même ordre. Comme nous l'avons l'ait remarquer dans la définition du début de cet article, certains glycosides peuvent être considérés comme des dérivés d'hexobioses ou même de polyoses plus condensés ; de tels glycosides, hydrolyses com-plètement par les acides ou les ferments, fournissent dans leur dédoublement deux ou plusieurs molécules de sucres simples. Les acides et les ferments peuvent être envisagés ensemble, car ils provoquent toujours le dédoublement des glycosides dans le même sens, tandis que les bases, comme on l'a vu, conduisent à des produits de décomposition spéciaux. Il y a cependant une certaine différence à établir entre l'action des acides et celle des ferments, précisément au point de vue des glycosides dérivant des polyoses. Tandis, en effet, que l'action de l'acide — probablement d'ailleurs parce que nous ne savons pas graduer d'une façon suffisamment précise les conditions de cette action, — conduit à l'obtention de sucres simples, il est possible au contraire, au moins pour quelques glycosides, à l'aide d'enzymes convenablement choisis, de ne pas dépasser le terme polyose et de pouvoir isoler ce dernier composé des produits de la réaction. C'est ainsi que C. et G. Taaret (27), faisant agir la rhamnase sur la xanthorhamnine ont obtenu un sucre spécial, le rhamninose, de formule C'^H^^O'*. Sous l'influence des acides étendus, ce sucre s'hydrate à son tour, en donnant deux molécules de rhamnose et une molécule de galactose. Ci8H320iH2H20=2G6H'20s+C6H''^0« On conçoit que l'action des acides appliquée sans ménagement à la xanthorhamnine doive précisément conduire aux produits de dédoublement du rhamninose et non au rhamninose lui-même. Dans certains cas, il peut arriver que le dédoublement partiel du glycoside par un enzyme se produise dans le sein même de la molécule du polyose qui entre dans sa constitution; on obtient ainsi d'une part un sucre et d'autre part un nouveau glycoside contenant le reste du polyose uni aux autres principes constituant le glycoside primitif. C'est ainsi que Fischer (28), faisant agir les enzymes de la levure sur l'amygdaline, a obtenu la séparation d'une molécule de glycose-d et la formation d'un nouveau glyco- side, l'amygdonitrileglycoside : C20H27NO11 + H20 = C6H1206 + CiiRi 'N06 Sous l'influence de l'émulsine, l'amygdonitrile se dédouble à son tour en donnant une nouvelle molécule de glycose, une molécule d'acide cyanhydrique et une molécule d'essence d'amande amère : CHHHNOS + H20=: CCHI20G + CNH + C'H'-'O Comme on le voit, dans l'hydrolyse d'un glycoside complexe par les ferments solubles, la décomposition se fait par actes fermentaires successifs et suivant un ordre déterminé; c'est là un fait qu'on retrouve dans l'hydrolyse des polysaçcharides et sur CLYCOSIDES. 549 lequel BouRQUELOT (20). à plusieurs reprises, a attiré l'attention des expérimentateurs. Essai de synthèse des glycosides au moyen des ferments solubles. — Emmerllxg (liO), qui s'est occupé de l'action réversive et, par là même, synthétique des diaslases, action mise en lumière par les travaux antérieurs de Croft-Htll, a tenté vainement de repro- duire l'amygdaline en mettant en présence d'émulsine des solutions aqueuses concen- trées, contenant en proportion convenable les éléments de ce glycoside, glycose, acide cyanhydrique et essence d'amande ainère. Par contre, en faisant agir, pendant 3 mois, la maltase de la levure sur une solution concentrée d'amygdonitrile et de glycose, mélangés en proportion équimoléculaire, il aurait obtenu la formation d'une très petite quantité d'amygdaline. §. V. Méthodes de recherche et de dosage des glycosides dans les végétaux. 1" Recherches touchant la présence ou l'absence de principes glycosidiques dans une plante déterminée. — Il n'existe pas, comme pour les alcaloïdes, de méthode générale permettant de retrouver facilement les glycosides dans les végétaux: nous ne possédons pas de réactifs généraux, caractéristiques de la présence de ces principes immédiats. En outre, comme les méthodes d'extraction des glycosides sont très variées, ainsi qu'on a pu s'en convaincre plus haut, et comme il serait par suite tout à fait peu praticable de les appliquer toutes successivement au même objet d'étude, il s'ensuit que le résultat de la recherche d'un glycoside dans un végétal déterminé est un peu subor- donné aux hasards, heureux ou malheureux, de l'expérimentation suivie; il est donc bien difficile, même en présence d'un résultat négatif, de conclure à l'absence des prin- cipes cherchés. Un fait qu'il faut bien se garder d'oublier au cours de la recherche est que glycoside et ferment dédoublant du glycoside existent souvent simultanément dans le même tissu, quoique dans des cellules différentes, et qu'on doit par suite éviter avec soin de faire naître, au cours de la recherche, les conditions favorables à la réaction fermentaire qui amènerait la destruction du principe à isoler. Cette coexistence fréquente du glycoside et du ferment doit en outre déterminer l'expé- rimentateur, dans la mesure du possible, à n'opérer que sur des matériaux entiers et frais; d'une part, en etTet, on conçoit que la section ou la contusion déterminant le con- tact des deux principes, il s'ensuivra la production de la réaction fermentaire ; et d'autre part, la dessiccation pourra également, dans certains cas, conduire au même résultat, par suite de la diffusion susceptible de s'opérer d'une cellule à l'autre après la mort du tissu. On obviera à ces graves inconvénients en opérant suivant le procédé de Bourquelot, qui conseille d'une façon générale, dans l'étude des principes immédiats, d'opérer sur des végétaux frais, toutes les fois au moins que cela est possible, et de traiter directe- ment ces végétaux par l'alcool à90°-95" bouillant. On détruit ainsi les ferments solubles contenusdanslaplante, etla recherche peut être poursuivie sans qu'on ait rien à redouter de leur action. T/emploi de l'alcool, dont le pouvoir dissolvant s'exerce facilement sur les principes qui nous occupent a, sur l'emploi de l'eau, le grand avantage d'éliminer, dès l'origine, des liqueurs extractives un grand nombre de substances indifîérentes telles qu'amidon, gomme, mucilages et pectines. Bourquelot(31) a imaginé une méthode biologique de recherche des glycosides qui est susceptible d'une assez grande généralisation, et qui, appliquée rationnellement, a déjà conduit (M et 32) et conduira sûrement encore à la découverte des glycosides dédou- blables par l'émulsine. Il nous faut exposer avec quelques détails cette méthode qui s'applique à la recherche des glycosides dédoublables par ce dernier ferment. Le tissu végétal est divisé en présence d'alcool à 9o° bouillant; si, par exemple, on opère sur une racine, on découpe cette racine, en ayant soin de laisser tomber immédiatement chaque fragment dans l'alcool à l'ébullition ; pour 1000 gr. de végétal frais, il est bon d'employer environ 4000*="^ d'alcool, dans lequel on a introduit préalablement un peu de carbonate de calcium destiné à saturer les acides végétaux susceptibles d'agir sur les glycosides. Le ballon ((ui contient le produit est ensuite relié à un réfiigérant à reflux, et on continue l'ébullition pendant environ 30 minutes. Après refroidissement, on filtre la liqueur, et on l'évaporé en pré- 550 GLYCOSIDES. sence d'un peu de carbonate de calcium; on reprend le résidu par de l'eau thymolée en quantité suffisante et on filtre. On obtient ainsi une liqueur qui doit renfermer tout glycoside soluble dans l'eau originairement contenu dans la plante. On conçoit que, si à une telle liqueur contenant un glycoside susceptible d'être dédoublé par l'émulsine, on ajoute une certaine proportion de ce dernier ferment, il se produira, dans des con- ditions convenables de température, un dédoublement de glycoside accusé par une augmentation du sucre réducteur primitivement contenu dans la solution et aussi par un retour vers la droite de la rotation polarimétrique de cette dernière. En réalité, la liqueur de recherche peut contenir beaucoup d'autres principes que des glycosides, par exemple du saccharose, dont la présence peut être considérée comme absolument générale chez les Phanérogames (33). Aussi, comme l'émulsine qu'on obtient pratique- ment des amandes est un mélange de plusieurs ferments, ainsi que l'ont fait ressortir BouRQUELOT et HÉRissKY (20), et comme en particulier cette émulsine contient assez fréquemment des traces d'invertine qui pourraient agir sur le sucre de canne et donner lieu à des interprétations erronées ou confuses, il est de beaucoup préférable de ne commencer la recherche des glycosides que lorsqu'on a préalablement fait agir l'invertine de la levure sur la liqueur de recherche. Lorsque le dédoublement du saccharose est complet, ce qui est attesté par l'invariabilité des pouvoirs rotatoire et réducteur du liquide examiné après défécation convenable, on porte à 100° les mélanges fermentaires pour détruire l'invertine, et, après refroidissement, on y ajoute de l'émulsine; on les maintient à une température d'environ 30° à 35°, en ayant soin qu'ils soient additionnés d'un excès d'antiseptique convenable, comme le thymol ou le toluène, de façon à empêcher toute intervention des microrganismes; puis on les examine chaque jour au point de vue de leurs pouvoirs réducteur et rotatoire. Gomme on l'a dit précédemment, dans le cas d'un glycoside dédoublable par l'émulsine, on constate un accroissement du pouvoir réducteur, et, conjointement, un retour vers la droite de la déviation polarimé- trique. Les valeurs numériques trouvées sont évidemment en relation avec la quantité de glycoside présente dans la liqueur, de telle sorte que la méthode ne renseigne pas seulement l'expérimentateur sur la présence d'un glycoside; d'après la quantité de sucre réducteur formé elle lui fournit des notions assez précises sur la plus ou moins grande proportion de glycoside contenue dans un poids donné de la plante mise en œuvre; elle prépare ainsi utilement la voie au travail de l'extraction et de l'isolement à l'état pur du glycoside considéré. Le principe de la méthode de Bourquelot est d'ordre tout à fait général, car il suf- firait par exemple de remplacer l'émulsine par un autre ferment pour rendre le procédé applicable à la recherche des principes hydrolyses par cet autre ferment. C'est ainsi que la recherche des glycosides dédoublables par la myrosine pourrait se faire en s'inspirant de la méthode indiquée pour ceux dédoublables par l'émulsine. L'action d'un ferment hydrolysant sur le glycoside qu'il décompose déterminant toujours la production d'un sucre réducteur, il sera facile ds se rendre compte de l'action dédoublante, en utilisant comme réactif la liqueur de Fehling; on pourra d'autre part étayer les résultats ainsi obtenus sur les variations concomitantes qu'on observe en examinant la liqueur au point de vue polarimétrique. La méthode que nous venons d'exposer, qui ne s'applique évidemment qu'à des glycosides solubles dans l'eau, pourrait être largement généralisée, s'il était facile de se procurer à l'état pur, sans aucun mélange d'autres enzymes, les ferments hydrolysants des divers glycosides ou groupes de glycosides ; les difficultés qu'on rencontre à ce point de vue restreignent dans bien des cas son emploi, mais ne sauraient toutefois l'empêcher de rendre les plus grands services à cause de sa simplicité et de sa rapidité d'exécution: en présence d'un résultat négatif avec l'émulsine, par exemple, on sera dès l'abord prévenu qu'il n'y a pas lieu de pousser plus loin l'extraction d'un glycoside rentrant dans le cadre de ceux que dédouble ce ferment. 2° Dosage des glycosides dans les végétaux. — On conçoit aisément, d'après ce qui précède, qu'il n'existe pas de procédé général permettant de doser avec sûreté la teneur d'une plante en élément glycosidique. Les procédés de dosage, souvent bien imparfaits du reste, varieront essentiellement suivant le glycoside considéré et nous ne pouvons guère donner ici sur ce sujet que des indications tout à fait générales. GLYCOSIDES. 351 Dans certains cas, on cherche à déterminer la proportion de glycosides en isohmt ce dernier en nature d'un poids déterminé de plante et en pesant la quantité obtenue; c'est ainsi qu'on procède par exemple pour le dosage de la digi toxine dans les feuilles de digi- tale. On opère aussi d'une façon analogue dans le dosage des glycosides des Convolvulacées. Le plus souvent, on détermine, par un moyen chimique ou biologique approprié, le dédoublement du glycoside dont on veut déterminer la proportion dans la plante et oa pratique le dosage d'un ou de plusieurs des produits de dédoublement obtenus; d'après les chiffres trouvés, on calcule facilement la quantité de glycoside initial. S'agit-il, par exemple de doser un glycoside fournissant de l'acide cyanhydrique, on commence par déterminer le dédoublement total du glycoside au moyen de l'émulsine ou de tout autre ferment susceptible d'effectuer ce dédoublement; le mélange sera soumis à la distillation après avoir été rendu très faiblement acide par l'acide tartrique, s'il était neutre ou alcalin, et, dans le distillât, on pratique le dosage de l'acide cyanhydrique. Sous la réserve que le dédoublement a été complet, — ce dont on peut s'assurer en ne constatant aucune action ultérieure à la suite d'une nouvelle addition de ferment, — on obtiendra facilement le poids de glycoside primitif cherché en multipliant par un coefficient con- venable le chiffre d'acide cyanhydrique trouvé. Un procédé un peu plus générai est celui qui consiste à effectuer le dosage du sucre réducteur mis en liberté dans le dédoublement. Ce dosage peut être effectué soit par les méthodes physiques, au moyen du polarimètre, soit par les méthodes chimiques, au moyen de la liqueur cupro-potassique. Il est bien évident que l'expérimentateur devra se mettre en garde contre les causes d'erreur pouvant provenir de la présence simultanée dans la liqueur de composés actifs sur la lumière polarisée ou encore de composés pos- sédant des propriétés réductrices, comme les sucres qu'il s'agit de doser. Pour certains glycosides solubles dans l'eau, un ou plusieurs des principes formés au cours de l'hydrolyse sont susceptibles de se précipiter sous forme insoluble. Comme la quantité de produit ainsi précipité est, au moins dans des conditions bien déterminées, en rapport constant avec la quantité de glycoside hydrolyse, il suffira de recueillir le précipité, de le laver, de le sécher et de le peser pour arriver facilement à la détermi- nation du poids de glycoside qui l'a fourni. Un tel dosage pourrait s'appliquer par exemple à l'aucubine (il). Si l'on opère dans une liqueur renfermant un mélange com- plexe de principes immédiats, il va sans dire que l'on devra s'assurer qu'aucun de ces derniers n'est susceptible au cours de l'opération, de fournir des précipités étrangers dont le poids viendrait s'ajouter à celui qui doit seul entrer en ligne de compte dans le calcul de glycoside. 3» Recherche microchimique des glycosides. — Les méthodes chimiques ou chimico- biologiques de recherche et de dosage des glycosides dans les végétaux sont donc essentiellement variables suivant le glycoside auquel elles s'appliquent; il en est de même des méthodes microchimiques qui, employées parfois à la recherche et même au dosage des glycosides, ont été plutôt, d'une façon générale, utilisées à l'étude de la répartition et de la localisation de ces derniers dans les tissus végétaux. Il nous est impossible de citer ici tous les auteurs qui se sont occupés de la locali- sation des glycosides dans les végétaux; un travail de Goris (34) donne le résumé des recherches faites sur ce sujet jusqu'à 1903; signalons en outre les recherches de Rus- SELL (36) publiées également en 1903. La recherche microchimique d'un glycoside quelconque suppose nécessairement connues les propriétés chimiques de ce glycoside et en particulier les réactions coloi'antes qu'il est susceptible de fournir avec un certain nombre de réactifs; c'est en effet surtout à l'aide de ces derniers qu'on localise les glycosides dans les parties de plantes. Dans certains cas, on conseille d'effectuer sur place dans la cellule même, au moyen d'agents biologiques ou chimiques convenables, le dédoublement du glycoside cherché. On localise ensuite les produits de dédoublement obtenu; et, de cette localisation, ou conclut à celle du glycoside qui les a fournis. Malgré la multiplicité des faits déjà accumulés, il n'est pas possible de poser une règle fixe relativement à la présence d'éléments glycosidiques dans tel ou tel tissu végétal déterminé. Toutefois ces recherches ont conduit à un certain nombre de résultats décisifs, du plus haut intérêt au point de vue physiologique. 552 GLYCOSIDES. Eu particulier, les recherches classiques de Gdignard (37) ont établi d'une manière déliuitive que, lorsqu'un glycoside existe dans une plante simultanément avec le ferment susceptible d'en effectuer le dédoublement, glycoside et ferment sont contenus dans des cellules séparées, de telle sorte que le broyage des tissus est absolument nécessaire pour déterminer la réaction mutuelle des deux principes considérés. L'exposé des recherches de Guignard montre précisément l'impossibilité dans laquelle l'expérimentateur se trouvera, en l'absence de réactions colorantes, de localiser dans la cellule même certains glycosides, tels par exemple l'amygdaline et la lauro-cérasine; la localisation ne peut alors être effectuée que par des moyens détournés, par exemple en faisant agir l'émulsine sur des fragments de tissu isolés par dissection fine et en constatant chimi- quement, après l'action du ferment, la présence ou l'absence d'acide cyanhydrique. Dans ses recherches sur la racine de raifort, Guignahd (37) a localisé le glycoside en faisant agir une teinture d'orcanette convenablement préparée sur les tissus préala- blement bien dégraissés et soumis à l'action de la myrosine. La présence du glycoside était révélée par une coloration rouge résultant de l'action de l'orcanette sur l'essence sulfurée produite au cours du dédoublement du glycoside. Beaucoup de recherches inspirées des travaux de Guignard, telles que celles de LuTZ (38), n'ont fait que montrer la généralisation de cette loi que glycoside et ferment dédoublant existent toujours dans des cellules séparées, et souvent même dans des portions de tissu absolument distinctes, susceptibles d'être isolées les unes des autres par dissection fine. Une question intéressante, mais qui est loin d'être complètement résolue, est celle de savoir sous quel état les glycosides existent dans les végétaux. Pour certains auteurs ces principes n'existeraient pas à l'élat libre dans les cellules végétales; ils existeraient à l'état de composés plus ou moins facilement dissociables, résultant d'une combinaison avec d'auti'es principes immédiats, avec le tanin par exemple. Goris (34) penche pour cette opinion, relativement du moins à un certain nombre de glycosides. Dans le cas de l'esculine en particulier, le tanin du marronnier se trouvant localisé dans les mêmes cellules que le glycoside, il lui semble naturel de supposer que le véritable principe glycosidique qui existe dans la plante vivante est en réalité une combinaison de l'acide esculitannique avec l'esculine; ce serait de l'esculitannate d'esculine. Les recherches faites par Goris sur la fustine, la salicine, la fraxine, le conduisent à des conclusions analogues. Dans certains cas toutefois, en particulier pour la daphnine, la recherche à conduit a des résultats opposés. D'ailleurs, dans les cas mêmes ou glycoside et tanin se trouvent dans des cellules analogues, il est peut-être prématuré de conclure qu'ils doivent forcément exister sous forme de combinaison eh non à l'état de liberté mutuelle. § VI. Rôle physiologique des glycosides dans les végétaux. Rôle des gly- cosides dans la formation de certains principes immédiats qu'on rencontre chez les plantes. — Comme pour les alcaloïdes, les auteurs ne sont pas d'accord sur la question de savoir si l'on doit considérer les glycosides comme des produits d'excré- tion de la plante, ou au contraire comme des substances de réserve. Jusqu'à présent, la question n'a pas reçu de solution absolument satisfaisante. Ce fait tient surtout à ce que la question n'a guère été abordée jusqu'ici qu'à l'aide des méthodes microchi- miques. Or il importerait surtout, comme on l'a fait déjà pour l'amidon et les hydrates de carbone du genre des sucres, d'étudier, au moyen d'analyses chimiques rigoureuses, les variations pondérales d'un glycoside dans une plante ou dans un organe végétal déterminés aux divers temps de la végétation; on pourrait utiliser dans ce but les méthodes de dosage dont nous avons indiqué plus haut les principes généraux. Les recherches microchimiques prêtent d'ailleurs aux méthodes chimiques une aide de la plus haute importance, en ce sens qu'elles permettent, au moins d'une façon générale, de se rendre compte, sinon de la quantité pondérale des principes glycosidiques, au moins de leurs migrations et de leurs variations dans les diverses parties d'un même végétal aux différentes saisons. A ce point de vue le travail récent de Rdssell (39), sur les migrations des glycosides dans les végétaux, a conduit cet auteur à considérer ces derniers principes comme susceptibles, dans bien des cas, d'être repris par la plante et d'être utilisés pour sa GLYCOSIDES. 553 nutrition. La technique microchiinique suivie a été celle exposée précédemment (30) par l'auteur. Les déplacements qu'éprouvent les principes ^lycosidiques au cours de la végétation, la concentration de ces piincipes pendant le repos hivernal en des organes déterminés, tels que rhizomes, bulbes et racines, ou encore en des re'gions déterminées d'un même organe, leur présence fréquente dans les graines ne permettraient pas de considérer les glycosides comme de simples déchets; ce seraient sinon des matières de réserve proprement dites tout au moins des produits de l'activité cellulaire ulilisables dans une certaine mesure. Russell a tiré en outre de ses recherches deux conclusions intéressantes au point de vue pratique : en premier lieu, selon lui, la teneur en prin- cipes glycosidiques augmente considérablement chez les plantes que l'on soustrait à l'action de la lumière, soit en les faisant végéter à l'obscurité, soit en procédant à l'opération du buttage; en second lieu, le maximum de concentration de ces principes s'observe en hiver dans les parties souterraines. A l'appui de l'opinion qui ne considère pas les glycosides comme de simples déchets de la nutrition, on pourrait invoquer les résultats des recherches de Puriewitch (40), qui a montré que les moisissures sont parfaitement susceptibles d'utiliser certains glycosides pour leur nutrition. Dans certains cas, la moisissure est tuée par certains produits de dédoublement du glycoside, produits de dédoublement toxiques pour les cellules vivantes, comme c'est le cas de l'acide cyanhydrique; mais il est plus vrai- semblable que, dans les plantes vivantes, ces glycosides eux-mêmes, à composants toxiques, subissent des dédoublements tout autres que ceux que nous savons pro- duire in vitro, de manière à pouvoir être utilisés sans dommage par le végétal qui les a produits. A notre avis, les conclusions des auteurs qui s'accordent à considérer les glycosides comme des matières de réserve sont justifiées dans un grand nombre de cas. De là à considérer tous les glycosides comme matériaux de réserve, il y a évidemment un abîme; ces principes, pris individuellement, sont si différents les uns des autres, qu'il est parfaitement rationnel de ne pas leur attribuer à tous le même rôle physiologique; c'est ainsi que dans le cas des glycosides résineux des Convolvulacées, il paraît bien plutôt s'agir de produits d'excrétion que de matériaux utilisables pour la nutrition du végétal. Les glycosides jouent un rôle très important dans la genèse de nombreux principes immédiats qu'on peut isoler chez les végétaux. Ils sont, comme on sait, les générateurs d'un grand nombre d'essences qui ne préexistent pas dans la plante et qui n'apparais- sent que par dédoublement d'un glycoside sous l'influence d'un ferment spécifique; c'est le mode de formation depuis longtemps connu des essences d'amande amère, de moutarde, de cochléaria, de cresson, de gaulthérie, de bouleau d'Amérique, etc. Ce mode de formation des essences est certainement beaucoup plus général qu'on ne le croit généralement (41); Bourquelot et Hérissey (2i), en particulier, ont récemment montré que c'était à un tel mécanisme qu'était due la formation dessence de benoîte, riche en eugénol. En dehors des essences, le dédoublement des glycosides s'elfectuant après la mort de la plante, pendant la dessiccation par exemple, est susceptible de faire apparaître certains principes nouveaux qui sont les produits de dédoublement eux-mêmes, ou des modifications de ces produits de dédoublement sous l'influence de l'air ou de la lumière. Citons l'exemple de la gentiane fraîche qui ne renferme pas de gentisine, mais bien de la gentiopicrine, de la gentiine et de la gentiamarine, tandis que la gen- tiane des officines qui, pendant sa dessiccation, a perdu tout ou partie de ses glyco- side, doit contenir à un état plus ou moins altéré les produits de dédoublement de ces derniers principes (42). Un grand nombre de glycosides sont susceptibles de donner par dédoublement des corps de la série aromatique, facilement oxydables, sous l'intluence des oxydases si répandues dans le monde végétal, pour donner des principes colorés le plus souvent insolubles et susceptibles de se fixer sur les tissus végétaux. Il n'y a aucun doute qu'il faille rattacher à un tel mécanisme la formation de beaucoup de matières colorantes chez les végétaux. L'action physiologique des divers glycosides sur l'homme et les animaux ne saurait être indiquée dans cet exposé général ; l'étude en est d'ailleurs faite dans ce livre au 354 GLYCOSIDES. cours des articles relatifs h chaque }3;lycoside qui présente des applications médicamen- teuses; qu'il suffise de rappeler que, tandis que certains glycosides ne sont aucune- ment toxiques, il en est d'autres au contraire, comme la digitoxine, dont l'action sur l'organisme animal s'exerce à des doses infinitésimales, et égale celle des alcaloïdes les plus énergiques, tels que l'aconitine ou l'atropine. Bibliographie. — 1. B. Dupuy. Glueosldes, 1891. — 2. J. .1. L. va.\ Run. Die Glyko- side, Berlin, 1901. — 3. Wurtz. Dict. d. Chim., 2<= Supplément, iv, 785, 1901. — 4. ScHiiTZENBERGER. Mémoire sur les dérivés acétiques des principes hijdrocarbonés de la man- nite et de ses isomères, et de quelques autres principes immédiats végétaux {A. C, (4), xxi, 23o^ 1870). — 5. A. Michael. 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Mais l'action d'épargne pour la graisse est néanmoins tout à fait nette; le calcul montre qu'elle peut s'élever à lls.89, 8^.12, 11&.03 pour la série I; 5.68, 10.17, 17.87 pour la série II. Il est vrai qu'en même temps il y a, sur 100 parties de glycérine, un excès non utilisé de 22, 41, 55 p. 100 pour la série I; et 57, 20 et 20 p. 100, pour la série II. L'auteur conclut que la valeur de l'aliment glycérine n'a qu'une signification théo- rique. Le fait de l'épargne ou de la non-épargne de l'albumine dans l'organisme ne permet pas de conclure à une action d'épargne de la graisse. De ce qu'une substance organique est détruite et oxydée, ou fournit de la chaleur, on ne peut encore conclure que l'on a affaire à un aliment, car on ne sait pas si cette substance ne possède pas une action connexe qui augmenterait la destruction de l'albumine ou des graisses : comme c'est le cas, par exemple, pour de grandes quantités de glycérine ou d'alcool. MuNK. (1890), après avoir rappelé les travaux de Lewix et de Tschirwinsky, qui ont confirmé les données expérimentales établies par lui douze années auparavant sur l'action d'épargne nulle de la glycérine vis-à-vis des albuminoïdes, rappelle qu'en 1880, contrairement à ce qu'il avait cru pouvoir affir mer en 1878, il admettait pour la glycé- rine une valeur nutritive, mais avec ce correctif « que la glycérine est bien loin d'être un aliment à la façon des hydrates de carbone et des graisses ». 564 GLYCÉRINE. Md.nr répète alors les expériences de Arnschink, el, grâce aux appareils de Zu.ntz, détermine à la fois l'oxygène consommé et l'acide carbonique produit. L'animal (lapin) étant placé à température constante, on commence par déterminer, pendant une heure, divisée en quatre périodes do 15 minutes, à la fois les deux éléments du quotient respiratoire CO- et 0^. Puis on effectue l'injection extrêmement lente de la glycérine à 10 p. 100 dans le système veineux: cette injection dure une heure à deux heures, et pendant ce temps on détermine CO^ et 0- ; puis ensuite, pendant une heure environ, et toujours par période de quinze miiuites, le quotient respiratoire. Voici le résumé de ses expériences. A un lapin curarisé de l'*&,47 maintenu dans un bain à température constante on détermine, par périodes de 15 minutes pendant une heure, la valeur de l'oxygène con- sommé et de l'acide carbonique produit; on trouve : PÉRIODES de 15 minutes depuis le début de l'expérience. O (à 0" et 76"). C0-. Q. R. moyenne. c. c. c. c. 1 186,39 138,32 0,74 \ 2 175,75 121,30 0,70 ( o,72 4 ifdl I -^^'^^ ^^^^ ^ On injecte alors Os'",729 (Os?'',5 par kilogr.) de glycérine pure en solution à 10 p. 100 goutte à goutte par la veine jugulaire externe : l'injection dure 1 h. 13. Pendant ce temps on lait par périodes de 15 minutes les déterminations suivantes : PÉRIODES de 15 minutes depuis le début de l'expérienL'e. O(à0'et76"). C0-. Q. R. moyenne. 5 182,44 134,05 0,74 6 163,78 133,98 0,81 7 188,28 i ,„„ ,„ ,, -, ) 0,76 8 160,79 i -^^'^^ "'^'' 9 185,08 139,55 0,75 L'animal est laissé à lui-même pendant une demi-heure; on trouve : PÉRIODES de 15 minutes depuis la durée de rexpérience, O (à 0° et 7G"). C0-. Q. R. moyenne. c. c. c. o. 10 ni,46 131,55 0,77 H 186,47 121,85 0,65 j ^'''^ En résumé le quotient respiratoire est : Avant l'injection 0,72 Pendant — ....... 0,76 Après — ...'.... 0,71 Les quatre expériences suivantes, conduites d'une façon absolument identique, en faisant varier seulement la quantité de glycérine injectée, donnent pour les différentes valeurs du quotient respiratoire : Pour OS'", 65 de glycérine injectée par kilogramme : Avant l'injection 0,73 Pendant — 0,79 Après — 0,79 Pour 0S'',68 de glycérine injectée par kilogramme : Avant l'injection 0,67 Pendant — 0,72 Après — 0,70 GLYCERINE. 565 Pour 0G'",94 de glycéritie injectée par kilogramme : Avant l'injoction 0,62 Pondant, — 0,69 Après — O.fiO Pour 1 gramme de glycérine injectée par kilogramme : Avant l'injection 0,67 Pendant — 0,72 Après — . 0,69 Considérons maintenant la formule d'oxydation : G3H80' + 0'î=:3C02 + 4H20 GO" 6 On voit que le rapport —— = - = 0,857. Il est de toute évidence que le rapport CO- —^, déduit de l'expérience pendant la période de l'injection, ayant été influencé dans le sens voulu par le calcul, la glycérine a subi une oxydation très manifeste. L'auteur en conclut que des doses moyennes de glycérine introduites dans le torrent circulatoire sont combinées dans l'organisme et par leur oxydation empêchent la des- truction d'une partie des graisses de l'organisme. Ce qui constitue le complément et la confirmation des expériences de Arnschink. H. Léo (1903) reprend la question de l'élimination par l'urine chez l'homme. Pour rechercher la glycérine dans l'urine, l'auteur emploie la méthode suivante : L'urine est évaporée au bain-marie ; le résidu repris par l'alcool à 96". Sans filtrer, on ajoute un égal volume d'éther, et on fiUre le précipité volumineux qui se forme dans ces conditions. Le filtrat est évaporé à sec, et le résidu repris par un peu d'eau; on ajoute alors une solution de nitrate de mercure, puis du bicarbonate de soude en nature et en excès, les matières azotées sont précipitées. On filtre : le liquide clair alcalin est exac- tement neutralisé par l'acide azotique. On évapore à sec, le résidu est repris par l'al- cool, la solution additionnée d'un égal volume d'éther dans lequel l'azotate de soude reste insoluble. On filtre. Après évaporation de la liqueur alcoolique on reprend par l'eau. Ce liquide contient la glycérine. On répète le même traitement par l'alcool, l'éther, l'azotate de mercure, et finale- ment on sépare la glycérine d'après la méthode de von Tœrkng modifiée par Partheil, qui repose sur la distillation dans le vide de la pompe, à 120°. Dans le but de contrôler sa méthode, Léo a fait un mélange d'urine normale et d'un poids connu de glycérine. Après le traitement ci-dessus l'auteur a toujours trouvé des nombres inférieurs à ceux de la glycérine ajoutée; mais il ne donne aucun chiffre. Il en conclut que les résultats de ses analyses, qui seront tous entachés d'une erreur en moins, ne permettront pas de conclure à l'absence de glycérine, alors que l'essai aurait donné un résultat négatif. L'auteur a trouvé que, pour 8s'^,93 de glycérine ingérée, on ne retrouve pas de glycé- rine dans l'urine. Pour i~«'',S6, l'essai est encore négatif; pour 20 grammes, traces; pour 26s'",76, on en retrouve 0^'',^ à 1 gramme. Ainsi donc l'ingestion de 20 grammes de glycérine n'est suivie d'aucune élimination par l'urine (et cette limite est certainement inférieure, puisque la méthode de recherche est susceptible, comme on l'a vu, d'une erreur en moins), elle représente, pour un adulte de 70 kilogrammes, Oî5'',29 par kilo- gramme. D'autre part, elle représente également plus de 200 grammes de graisse dédoublée. C'est là une quantité considérable qui prouve l'impossibilité de retrouver, alors même que les graisses seraient dédoublées, une quantité appréciable de glycérine dans l'urine. Comme on vient de le voir par l'exposé chronologique de l'ensemble des recherches entreprises sur la glycérine, aucun auteur ne s'était préoccupé du dosage de la glycé- rine dans le sang, après l'injection et l'ingestion de glycérine. Toutefois on trouve dans le travail de Gatillon une tentative dans ce sens, mais par 366 GLYCERINE. une méthode toute arbitraire. L'auteur conclut d'ailleurs à l'absence de la glycérine dans le sang après l'ingestion de glycérine. Pour aborder l'étude de cette question, il était nécessaire d'établir une méthode de dosage de la glycérine dans le sang. C'est ce dont s'est occupé M. Nicloux (1903). Voici le résumé de la méthode employée par cet auteur (on consultera, pour tous les détails techniques, la description et le dessin des appareils, les mémoires originaux). 1° Précipitation et séparation des matières aibuminoïdes du sang; 2" Séparation de la glycérine par entraînement par la vapeur d'eau à lOO" dans le vide de la pompe à mercure ; 3° Dosage de la glycérine par l'emploi du bichromate et de l'acide sulfurique. Voici brièvement comment il convient d'opérer. Les matières aibuminoïdes du sang sont précipitées par l'eau bouillante légèrement acidifiée par l'acide acétique (eau ; dix fois le volume du sang; acide acétique à 1 p. 100 en poids, le quart du volume du sang), on filtre. Le liquide est clair et incolore, il con- tient la glycérine. On évapore à sec dans le vide, dans un petit ballon mis en commu- nication par l'intermédiaire d'un réfrigérant avec la pompe à mercure. L'évaporation étant terminée, et le résidu étant absolument sec, on entoure complètement le ballon d'eau bouillante et on fait arriver un courant de vapeur d'eau provenant d'un géné- rateur de vapeur. Celle-ci entraîne la glycérine. Le liquide condensé se réunit dans le réservoir fixe de la pompe à mercure. On le recueille. L'opération est terminée lorsque les dernières portions du liquide distillé ne renferment plus trace de glycérine, ce que l'on reconnaît par un essai au bichromate dont la sensibilité est extrême : la réduc- tion ou la non-réduction indiquent la présence ou l'absence de glycérine. Les liquides d'entraînement sont concentrés par simple évaporation dans un ballon, amenés à un volume déterminé, et la glycérine dosée par la même méthode que Nicloux a fait connaître le premier pour le dosage de petites quantités d'alcool. Cette méthode a sur toutes les méthodes employées précédemment les avantages, suivants : 1" La séparation de la glycérine par une méthode mettant en jeu une de ses pro- priétés physiques tout à fait spéciale : distillation dans le vide à 100° au moyen de la pompe à mercure ; 2° Grâce à une méthode d'analyse organique donnée par le même auteur, qui permet, sur quelques milligrammes de glycérine en solution dans l'eau, de pouvoir déterminer l'oxygène consommé et l'acide carbonique produit, et ainsi d'identifier ou non le corps dosé par le bichromate avec la glycérine elle-même. L'auteur a appliqué cette méthode à une série de recherches qui l'ont conduit à démontrer l'existence de la glycérine dans le sang à l'état normal : la proportion est, pour 100 ce. de sang, d'environ 2 milligrammes à 2™sr^5 dans le sang de chien, de 4 à 5 milligrammes dans le sang du lapin. L'état déjeune ou l'état de digestion d'un repas de graisse n'influe pas ces proportions (expériences faites sur le chien). Le même auteur a entrepris en outre l'étude de la question de savoir comment la glycérine disparaît du sang lorsqu'on l'introduit dans le torrent circulatoire par la voie intra-veineuse, Les expériences ont été entreprises sur le lapin et sur le chien. En voici le résumé : Exp. L — Lapin du poids de 2i^s^,465. Glycérine à 20 p. 100 injectée : 24<='',65. Durée de l'injection : 40 secondes. On trouve : 2 minutes après la fin de l'injeciion. . . 0,37 4 min. 30 sec. — ... 0,27 30 minutes — ... 0,18 Exp. II. — Lapin du poids de2^'',4io. Glycérine à 20 p. 100 injectée : 24"45. Durée de l'injection : 1 min. 40. On trouve : 30 secondes après la tin de l'injeciion. . . 0,53 5 minutes — ... 0,33 40 — — ... 0,15 GLYCERINE. 567 Les expériences sur le chien permettent un plus grand nombre de dosages. Exp. III. ~ Chien du poids de 7 kilogrammes. Glycérine à 20 p. 100 injectée: Durée de l'injection : 2 min. 15. On trouve : 30 secondes après la fin de l'injection. 5 minutes — 30 — — . 1 heure 30 min. — 6 heures — 0,54 0,31 0,21 0,113 0,01 70 ce. Exp. IV. — Chien du poids de O^'^.ToO. Glycérine 20 p. 100 injectée : 97"=°, o. Durée de injection : S minutes. On trouve : 1 minute après la fin de l'injection. 30 — — 2 heures — 3 heures 30 min. — 1 heures 30 min. — 0,38 0,15 0,03 0,008 0,004 Ces expériences, qui pourront être multipliées en faisant varier les conditions expéri- mentales, et particulièrement les quantités de glycérine injectée par kilogramme du poids de l'animal, montrent déjà ce fait intéressant, que la glycérine ne séjourne pas dans le sang. Voilà pourquoi aussi les auteurs qui l'ont recherchée par des méthodes tout à fait insuffisantes, n'ont pu la retrouver. L'injection dans le sang est-elle suivie d'une élimination par l'urine? Nigloux, après avoir établi une méthode de dosage de la glycérine dans l'urine, qui repose sur l'entrait nement, dans l'appareil décrit, de la glycérine contenue dans l'urine, a entrepris l'étude de cette question. Voici le résumé des expériences : Chien de 14 kilogrammes. Glycérine à 20 p. 100 injectée 140 ce. Durée de l'injection ; 6 minutes. TKMPS COMPTÉ depuis la fin do l'injection. De 0 à 15 minutes De 15 m. à 1 h. 30 m. . . . De 1 h. 30 m. à 2 h. 37 m. De 2 h. 37 m. à 3 h. 37 m. VOLUME QUANTITÉ QUANTITÉ de l'urine de glycérine de glycérine recueillie. p. 100 d'urine. éliminée. 0. c. gr- gr. 13 0,86 0,112 144 2,13 3,067 32 2,71 1,409 69 0,23 0,138 Soit élimination en 5 h. 47 : 4S''%746 de glycérine sur 28 grammes injectés: ou 17 p. 100 Chien de 9'«&,750. Glycérine a 20 p. 100 injectée : 97<=%5. Durée de l'injection 5 minutes. TBMPS COMPTÉ depuis la fin de l'injection. VOLUME QUANTITÉ QUANTITÉ de l'urine de glycérine de glycérine recueillie. p. 100 d'\irine. éliminée. c. c. gr- gr- 78 3,18 2,480 46 4,93 2,268 22 2,32 0,310 44 0,23 0,101 103 0,04 0,042 De 0 à 30 minutes De 30 m. a 2 h De 2 h. à 3 h. 30 m . . . . De 3 h. 30 m. à 3 h. 20 m. De 5 h. 20 m. à 7 h. 45 m. Soit élimination en 7 h. 4b : 5S'",401 de glycérine sur igs^oO injectés, ou 27,7 p. 100. La glycérine est donc éliminée par l'urine en proportion qui est loin d'être négli- geable : 17 p. 100, 27,7 p. 100. D'autre part, ainsi qu'il résulte des tableaux relatifs aux dosages dans le sang et dans l'urine faits au même moment, — c'est le cas pour l'animal du poids de 9'"î,7;j0 dont les résultats d'expériences font l'objet de l'avant-dernier et du dernier tableau (les chiffres ont été dissociés pour la compréhension plus facile du texte), — il se fait, au niveau du rein, une sélection de la glycérine, d'une intensité très grande. On voit, par exemole, alors que la teneur du sang oscillait entre 0,38 et 0,15 p. 100, correspondant 56S GLYCERINE. aux 30 premières minutes, l'urine éliminée contenant 3,18 p. 100 de glycérine, soit environ 10 à 20 fois plus; alors que la teneur d» sang oscillait entre Q,15 et 0,03, con-espondant à l'intervalle de temps compris entre 30 minutes et 2 heures, l'urine éliminée contenait 4,93 p. 100, soit 30 à 100 fois plus ; pour l'intervalle de temps suivant, la proportion est encore plus grande. C'est là, à le noter en passant, un fait remarquable qui rapproclie la glycérine de l'urée : l'épithélium rénal fonctionne pour la glycérine du sang, comme il le fait pour l'urée. Des expériences absolument analogues ont été entreprises par Nicloux, pour étudier le passage de la glycérine dans le sang et l'élimination par l'urine après l'ingestion de glycérine. Les tableaux suivants résument ces recherches. Chien de 14 kilogrammes.' Glycérine ingérée : 2 grammes par kilogramme, soit 140 ce. d'une solution à 20 p. 100. On trouve : TEMPS COMPTii GLYCÉRINE GLYCÉRINE depuis la fin p. !0D VOLUME „ . de l'injection. de sang, c. c. de l'urine, c. c. p. 100 d'urine. éliminée 10 minutes après. . . 0,016 — — — 30 — — . . . 0,222 196 . 0,26 0,309 3 h. 17 m. — . . . — 190 3,26 6,194 5 h. 4'] m. — . . . — 98 0,29 0,284 Soit élimination en 5 h. 47 : 68^'^', 987 sur 28 grammes ingérés, ou 24,9 p. 100. Chien de iS^^^i-QO. Glycérine ingérée : 2 grammes par kilogramme, soit 184 ce. d'une solution à 20 p. 100. On trouve : TEMPS COMPTE depuis la fin de l'injection. 16 minutes . . 40 minutes . . 1 h. 13 m. . . 2 h 3 h 5 11 . . . „ „ . GLYCÉRINE p. 100 de sang. VOLUME de l'urine recueillie. GLYCÉRINE p. 100 d'urine. e liminée c. e. c. c. 0,24 30 2,70 1,350 — 66 3,74 2,468 0,15 83 4,29 3,646 0,08 22 5,04 1,109 0,036 46 0,066 0,029 0,00!» 32 0,028 0,009 Soit au total é.xmination : Ss^eil sur 36S''.8 ingérés, ou 23,4 p. 100. Chien de f)i«s,30(). Glycérine ingérée : 2 grammes par kilogramme, soit 53 ce. d'une solution à 20 p. 100. On trouve : TEMPS COMPTÉ dépuis la fin de l'injection. GLYCÉRINE p. 100 de sang. VOLUME de l'urine recueillie. GLYCKRI^•E p. 100 d'urine. éliminée c. c. C. C. 15 minutes . . 0,019 — — — 30 43 — . . 0,038 0,031 3,5 0,6 0,021 6t 1 2 ) h. h. h. h. h. 30 m. . . 0,023 0,018 0,087 0,086 8 i:i 33 26 23 0,23 0,3 2.68 0,29 0,21 0,020 0,039 0,938 3 6 8 30 m. . . 30 m. . . 0,074 0,032 Soit élimination en 8 h. 30 : ls>',l44 sur lOs-'G ingérés, soit 10,7 p. 100. La dernière expérience mise à part, irrégulière par ce fait que la solution de glycé- rine n'a dû pénétrer que tardivement (3 heures après) dans l'intestin oîi s'effectue sans doute l'absorption, on peut, des résultats consignés dans les trois derniers tableaux, tirer les conclusions suivantes : Pour la dose indiquée de 2 grammes de glycérine ingérée par kilogramme. 1» La glycérine passe dans le sang et de là dans l'urine. Comme pour l'injection GOMMES. 569 intraveineuse de celte substance, l'épithélium re'nal exerce une sélection très intense de la glycérine du sang; 2" La proportion éliminée, si l'absorption commence immédiatement après l'inges- tion, est d'environ 2li p. 100. Cette dernière donnée est du même ordre que celle obtenue par Arnschink pour des doses de glyrt'rine ingérée plus élevées. Bibliographie. — 1860. — Scheremetjewsri. Arbeiten ans (1er physiol. Ansialt zu Leipzig, 1869, 194. ■ 1874. — LucESiyiGER [B.). Ziir Glyco(jcnbildung inder Lebev(A.g. P., 1874, vin, 289-305). 1876. — UsTiMOwiTSCH (C). Ueber die angebliche zuckerzcraetzende EigenschafI des (îh/- cerins [A. g. P., 1876, xni, 453-460). 1877. — Du.iardin-Bf,aumetz et Audigé. Sur les propriétés toxiques de la glycérine (Bull, et mém. de la Soc. de thérapeutique pour l'année 1876, 2"^ sér., m, 88-102). — Catillon (A.). 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Ibidem, p. 886, fig. 509]. du palais, de l'autre à la base de la langue en confondant ses fibres d'insertion avec celles du stylo-glosse et du pharyngo-glosse. Son action est la même que celle du stylo-glosse; il attire la base de la langue en haut et en arrière. 574 GOUT. Le pharyngo-glossc s'insère : d'une part au niveau du constricteur supérieur du pha- rynx, d'autre part sur les côtés de la base de la langue. Comme pour les deux muscles précédents, sa contraction porte la base de la langue en arrière et en haut. Ces trois muscles stylo-glosse, palato-glosse et pharyngo-glosse attirent en arrière la base de la langue en la portant en haut ; ceux que nous allons étudier maintenant portent la base de la langue en arrière, mais en l'attirant en bas. Vhyo-glosse s'insère d'une part sur l'os hyoïde et, d'autre part, sur toute l'étendue du Stylo-glosse. Dos de la lan"no. Génio-hyo-glosse. Génio-hyoïdieu. indi Grande Apophyse styloïde. Stylo-hyoïdien. Partie postérieure de la langue. ylo-pharyngien. Hyo-glosse. Ligament thyro-hyoïdien. Cartilage thyroïde. Membrane, ro-hyoïdienne. artilage thyroïde. Faisceau moyen de la membrane crico- thyroïdienne. Cartilage cricoïde. remicr anneau de la trachée, FiG. 9. — Topographie des muscles de la langue vue de profil. (D'après Hensman. Ibidem, p. 887, fig. 511.) septum médian depuis la base de la langue jusqu'à sa pointe. Leur contraction porte en bas et en arrière la base de la langue; c'est un muscle abaisseur et rétracteur de l'organe. Le lingual supérieur est un muscle impair et médian. 11 s'étend transversalement sous ,1a muqueuse linguale s'insérant en avant comme un muscle peaucier à la muqueuse sus-jacente, puis se divisant à la partie postérieure en trois portions, dont une médiane s'insère à la lame fibreuse reliant Tépiglotte à la base de la langue et les deux latérales sur les petites cornes de l'os hyoïde. L'os hyoïde étant fixe, ce muscle en se contractant porte la langue en arrière, et redresse la pointe. Les muscles linguaux inférieurs, pairs et symétriques, s'insèrent d'une part sur les petites cornes de l'os hyoïde, et, renforcés par quelques fibres du pharyngo-glosse, s'insè- rent d'autre part à la muqueuse de la pointe de la langue. En se coniractant ces muscles GOUT. 575 attirent eic di-rière et en bas la pointe de la langue en raccourcissant son diamètre antéro-postérieur et en l'incurvant sur lui-même. D'une façon plus synthétique, ou peut dire que la langue présente des fibres muscu- laires lonfjitialinalcs, transversales et verticales. Les fibres longitudinales proviennent du lingual supérieur, du lingual inférieur, du faisceau externe du stylo-glosse, du pharyiigo-glosse, du glosso-staphylin, d'une partie des muscles hyo-glosse et génio-glosse. Les fibres transversales proviennent du lingual transverse et de l'amygdalo-glosse. Les fibres verticales enfin sont, à la partie médiane, celles des deux tiers postérieurs du génio-glosse, et latéralement celles de la portion ascendante des liyo-glosses. Pour plus de clarté nous pouvons résumer dans le tableau synoptique suivant les muscles de la langue : Muscles Intrinsèques • [ Ti-ansverse de la langue, 2. i" Protracteur do l'organe \ dans son ensemble et ré- / ^ , , , i * , 1 1 • . j } vjcnio-glosse, 2. 1 tracteur de la pointe de l o » Protractcurs <| ^^ j^^^^^_ ) 2° Protracteur de l'organe ) , , , , , ui ■" ! Aniviîdalo-glosse, 2. dans son ensemble. ) -^ '^ ' 1° Portant l'organe en \ Stylo-glosse, 2. I i haut et l'appliquant for- ( Palato-glosse ou giosso- Extrinsèques / [ tement contre le voile du j staphylin, 2. palais. / Pharyngo-glosse, 2. 2° Abaisseurs de l'org-ane ) ., , , II Hvo-glosse, 2. dans son ensemble. j . o > Rétracteurs ', 3''Abaisseur de l'organe dans ) son ensemble et élévateur > Lingual supérieur, 1. de la pointe de la langue. ) 4" Abaisseurs de l'organe \ dans son ensemble et I , . ..... „ , . j , . , ) Lingual inteneur, 2. abaisseurs de la pointe [ ^ de la langue. / II Nous ne dirons rien actuellementdes troncs artériels et veineux, ni de leur situation. Si une telle description intéresse l'anatoraiste et le chirurgien, elle ne peut pas être étu- diée dans une question de physiologie avec laquelle elle n'a rien à faire. Seule, leur description histologique, soit au niveau des organes de la gustation, soit dans toute l'étendue de la langue, peut prêter à des considérations intéressantes; nous y revien- drons plus tard. La question des lymphatiques ne présente, elle non plus, pas grand intérêt pour le physiologiste dans cette question de la gustation. Revenons donc aux parties réellement importantes pour l'intelligence de notre étude. Lorsque nous regardons une langue par sa face supérieure, voici ce que nous voyons. La couleur est généralement rouge ou rose chez les individus bien portants; cette cou- leur change avec la maladie et l'état des voies digestives. Les enduits de couleurs diffé- rentes, qui la recouvrent alors, peuvent abolir ou émousser plus ou moins ses fonctions. Nous remarquons sur cette face supérieure, à la jonction de ses deux tiers antérieurs avec son tiers postérieur, environ au niveau du voile du palais, convergentes l'une vers l'autre à la partie postérieure en forme de V, s'écartant au contraire en un angle ouvert en avant, deux séries ou rangées de petites circonférences adjacentes, au nombre de quatre ou cinq de chaque côté; la plus postérieure, qui forme ia pointe de l'angle, est unique, et plus développée que les autres : elle porte le nom de foramen aecum ou trou borgne de la langue. Tout cet ensemble porte le nom de V lingual. L'aspect de la mu- queuse est différent en avant du V lingual et en arrière, ainsi que sur les bords et à la partie postérieure. La face supérieure en avant du V est rosée, même rouge, après les repas; à jeun elle est plus pâle; dans les cas pathologiques, surtout dans les troubles digestifs, elle est 576 GOUT. blanchâtre, jaunâtre, parfois noirâtre à ce niveau. Lorsqu'on la regarde de près et surtout à l'aide d'une loupe, on observe à sa surface des plis peu profonds analogues à ceux que l'on voit à la paume de la main, mais affectant une direction différente, ici parallèle au V lingual. La partie médiane est traversée, du foramen cœcum à la pointe, par un sillon légèrement sinueux formant une faible dépression. Ce sillon forme une séparation à la pointe de la langue, qui présente de la sorte deux légères saillies à la partie antérieure. Nous remarquons, en outre, que toute la surface est parsemée de fines granulations à peu près équidistantes, surtout visibles à la loupe. Toute cette surface forme la partie oîi la muqueuse de la langue est la plus épaisse et la plus consistante; à la pointe elle est moins résistante. En arrière du V lingual, l'aspect est un peu différent; la coloration est toujours rosée ou rouge; mais la surface ne présente plus les plis parallèles aux branches du V, FiG. 10. — Coupe verticale de la lanaue cuite (D'après Sappey, Tr. d'Anat., t. ii, p. 531). Faisceaux musculaires primitifs et verticaux, dont quelques uns se bifurquent. 1. Épitkélium. — 2. Faisceaux nerveux. — 3. Petit rameau artériel. que nous avons signalés plus haut. Ce que l'on voit à ce niveau, ce sont de petites bosselures irrégulières, sphériques ou oblongues, dessinant, dans leurs intervalles, des sillons irréguliers formant des sortes de mailles oblongues, le sommet de chaque sur- élévation portant un petit orifice central. Sur les bords, on voit renaître les stries analo- gues à celles de la muqueuse située en avant du V. A la partie médiane on remarque l'existence d'un léger sillon antéro-postérieur. Latéralement la muqueuse se relève pour recouvrir d'avant en arrière les piliers antérieurs du voile du palais, les amygdales, les piliers postérieurs; à la partie postérieure la muqueuse se relève sur l'épiglotte, for- mant à ce niveau trois replis glosso-épiglottiques, deux latéraux et un médian. Nous serons plus brefs sur l'aspect de la muqueuse linguale à sa partie inférieure, celle-ci n'étant pas gustative. A la partie médiane, on voit un repli muqueux formant un véritable septum qui, arrivé au niveau du plancher de la bouche, se confond avec la muqueuse adjacente, formant une sorte de faulx tournée en avant : ce repli muqueux est le frein ou filet. C'est lui qui l'etient la langue dans ses mouvements d'expansion au dehors et l'arrête dans sa protraction, qu'elle limite. Sur le tiers externe de l'espace compris entre le septum médian et les bords latéraux de la langue, on voit, dessinant un trajet antéro-postérieur, deux petites veines, qui vont presque jusqu'à la pointe de la langue, en se rapprochant progressivement l'une de l'autre d'arrière en avant; ce sont les veines rcuiines. GOUT, 577 De chaque côté du frein de la langue, à sa partie la plus postérieure, se présentent deux petits orifices, qui -sont l'embouchure des conduits de Wharton, derniers canaux collecteurs de la. glande sous-maxillaire. Un peu plus en avant et plus en dehors du frein, on voit quatre ou cinq petits orifices de chaque côté, embouchures des conduits des glandes sublinguales ; enfin, à la partie antérieure, cinq ou six orifices de chaque côté, conduits excréteurs de la glande de Kûhn. La muqueuse, comprise d'une part entre la base du frein et la pointe de la langue, Fict. 11. — Papilles de la langue (U'aijrès f>APPKY. Traité d'Aiialomie, m, 615), 1, 1. Papilles caliciformes. — 2. Papille caliciforme médiane, occupant le trou borgne qu'elle remplit ici en totalité. — 3,3, 3,3, Papilles fongiformes. — 4, 4. Papilles corolliformes. — 5, 5. Plis et sillons verticaux des bords de la langue. —6, 6, 6, 6. Glandules de la base de la langue. — 7, 7. Amygdales. — 8. Épi- glotte. — 9. Repli glosso-épiglottique médian. d'autre part entre les bords externes des deux veines ranines, est lisse, mince, s'excorie facilement. La muqueuse des bords de la langue, comprise entre le bord externe de la veine ranine et ie bord externe de la face supérieure, présente à sa surface « au lieu d'une surface unie, un système de plis, de crêtes, de bosselures formant par leur ensemble une surface essentiellement raboteuse et comme déchiquetée » (Testut, Traité d'Ana- tomie, III, 4" éd., 1899, 331 et 661). La partie de la langue la plus intéressante pour le physiologiste est, ainsi que nous le verrons plus tard, la partie de la surface supérieure comprise en avant du V lingual et limitée en arrière par le V, sur les côtés par les bords latéraux; en avant elle s'étend jusqu'à la pointe. Pour plus de précision pour l'étude du goût ultérieur, nous croyons utile de subdiviser cette portion ainsi circonscrite en neuf zones, délimitéespar deux traits DICT. Dli PHYSIOLOGIE. — TOME VI [. 37 578 GOUT. antéro-postérieurs équidistants et placés à égale distance des deux bords, et par deux autres traits horizontaux, perpendiculaires aux premiers, équidistants, eux aussi, et placés aussi à égale distance de la pointe de la langue et du foramen caicum ; ces carrés ainsi FiG. 12. — Papilles filiformes d'une langue qui, l'œil nu, paraissait complètement lisse (Sappey , t. Il, p. 461). FiG 13. — Papilles filiformes de la langue avec prolongements capillaires (Sappey, iv, 47). délimités pourront être appelés premier, deuxième, troisième en allant de la pointe au V lingual, et latéral droit ou gauche (par rapport à la langue) et médian. Lorsque l'on regarde la surface de la muqueuse linguale avec un bon éclairage et une lampe un peu forte, on s'aperçoit que sa surface est hérissée de petites suréléva- tions, variables en nombre et en volume, que les aiiatomistes ont désignées du terme général de papillet^. On a eu tort, nous semble-t-il, d'englober sous une même dénomi- k\ I.V 'Il '1 liai , 'aii i ,ii 11 i\m 4 ". ''Il '' li W 1* î''il''*A' imlH% T FiGi. 14. — Papilles filiformes simples du dos de la langue (Sappey, Ibid., v, 46). nation, et d'un même terme générique, toutes ces formations morphologiquement et physiologiquement tout à fait différentes. Quoi qu'il en soit, conformons-nous à l'usage, et décrivons soigneusement ce qu'une étude macroscopique fine nous permet de relever à la surface de la langue. Les plus simples que nous rencontrons sont les papilles hémisphériques; elles sont répandues sur toute la surface de la langue, et jusqu'à la surface de certaines papilles que nous décrirons plus tard. Elles sont simplement constituées par une surélévation du derme muqueux affectant des formes plus ou moins variées, et recouvert par la muqueuse normale. A côté de ces papilles, il en est d'autres moins nombreuses, ainsi constituées : surélé- GOUT. 579 vation marquée du derme muqueux, pénélralion de Ijouquels vasculaires cà l'intérieur ; épaisse assise épilhéliale enveloppante, de la surface de laquelle s'échappe un bouquet plus ou moins riche de prolongements filiformes, en nombre variable (généralement de 15 à 20). Parfois ces prolongements filiformes sont retournés à l'intérieur de la papille comme des festons rentrés <à l'intérieur d'une manche; d'autres fois ils font défaut, et la papille se réduit à une surélévation cylindrique ou conique, présentant à sa surface une série de dentelures ou de dents. Ces papilles portent le nom de filiformes. D'autres surélévations atl'ectant une forme différente sont désignées sous le nom de papilles /V*« 3 t/brmt\s; elles ptésentiînl un col rétréci, leur servant do base d'implantation, et une tète renfiée en forme de massue constituant leiu- extrémité supérieure. Nous avons vu du côté de la région postérieure de la langue, latéralement, les bords se froncer, se plisser, dessinantdo la sorte des plis verticaux parallèles et rapprochés les uns des autres. Ces formations sont désignées sour le nom &q papilles foliées. Enfin on voit la série des corps sphériques, qui composent lo V lingual. Etudions cha- cun de ces corps arrondis, qui sont décrits sous le nom de papilles calici formes. Vus à l'aide d'une forte loupe d'abord par en haut, puis sur une tranche de section latérale. FiG. 15. — Section verticale d'une papille calicifoniu (Sapi'ay, .'Ijidi'ui, ii, 49). voici comment ils se présentent : une surface arrondie légèrement et insensiblement déprimée à son centre, c'est la papille proprement dite; tout autour, un sillon de un mil- limètre environ de profondeur ; tout autour du sillon, un nouveau relèvement de la mu- queuse dont la partie supérieure est au niveau de celle de la papille proprement dite. En raison de cette disposition et du sillon qui sépare la papille du bourrelet muqueux périphérique, ces papilles ont été encore apiielées pupillge circumvallatae. Tel est l'ensemble disparate décrit sous le même nom générique de papilles linguales. Quant à leur topographie à la surface de la langue, les papilles caliciformes forment les deux branches du V lingual, les papilles fongiformes sont irrégulièrement dissé- minées à la surface supérieure de la langue en avant du V lingual; quelques-unes, très rares, immédiatement en arrière du V; les papilles filiformes sont situées en avant du V, et, parleur réunion sous forme de lignes parallèles aux branches du V, elles dessi- nent les stries parallèles, que macroscopiquement nous avons rapprochées plus haut des lignes plus ou moins contournées de la peau de la face palmaire de la main, tout en insistant sur leur direction et leur orientation difîérentes. Nous avons décrit plus haut la situation des papilles foliées sur les bords postérieurs de la langue. Quant aux papilles hémisphériques, elles sont répandues, rapprochées les unes des autres, sur toute l'étendue de la muqueuse linguale et jusqu'à la surface de toutes les autres papilles. Elles doivent être considérées comme faisant partie de la constitution de la muqueuse de la langue et se rencontrant alors sur tous les points revêtus et recouverts par cette muqueuse. 580 GOUT. II. — INNERVATION DE LA LANGUE. Lorsqu'on étudie niacroscopiquement les nerfs qui se rendent à la langue, on voit qu'ils proviennent de quatre troncs nerveux. Au point de vue de leur topographie et de leur distribution, deux, sont pins externes. Le premier est le grand hypoglosse ; c'est le plus facile à atteindre; et les points de repère qu'il présente sont nets et précis. Il est situé en dehors du large muscle mylo-hyoidien, en dedans duquel chemine l'artère linguale à peu près parallèlement au nerf; le tronc de l'hypoglosse accompagne la veine linguale; une dissection minutieuse montre que les ramuscules et les filets de ce nerf se rendent uniquement aux t'aisceau.x musculaires. Le second abordi% lui aussi, la langue en dehors du muscle mylo-hyoidien ; c'est \c lingual, branche du trijumeau. Près du bord postérieur du mylo-hyoidien, ce tronc nerveux [)résente un ganglion, le ganglion sous-maxillaire; puis il se divise alors en un bouquet de rameaux terminaux, qui vont se ramifier dans toute l'étendue des deux tiers antérieurs de la muqueuse linguale, dans toute la portion de cette muqueuse située en avant du V lingual. Le lingual et l'hypoglosse, immédiatement avant de se diviser en leurs branches de ramifications, s'envoient deux ou trois anastomoses, qui forment ainsi deux ou trois arcades jetées sur le mylo-hyoïdien d'un tronc nerveux à l'autre, dont la concavité regarde en arrière. Plus interne et plus postérieur, en dehors du muscle mylo-hyoidien et dépassant à peine le bord postérieur de ce muscle, nous voyons le tronc du glosso-pharygien profon- dement situé, qui aborde la partie postérieure de la langue. Si nous suivons minutieuse- ment ses branches et ramuscules de terminaison, nous voyons qu'ils se rendent au tiers postérieur delà muqueuse linguale sur le V lingual y compris, et dans toute la portion de la muqueuse située en arrière du V, à l'exception d'une zone peu étendue qui va de l'épiglotte à la portion de muqueuse qui dépasse un peu en avant et latéralement la partie antérieure des replis glosso-épiglottiques; dans cet espace ainsi circonscrit, la muqueuse ne semble pas recevoir de filets du glosso-phaiygien. Le nerf qui innerve cette région est un filet qui vient du laryngé supérieur, branche du pneumogastrique; il innerve l'épiglotte, ainsi que toute la portion de muqueuse comprise dans l'étendue cir- conscrite par un peu plus de toute la hauteur des trois replis glosso-épiglottiques. En résumé, les nerfs qui fournissent à la muqueuse linguale sont : pour le tiers posté- rieur une branche du laryngé supérieur et le g losso-pharyng ien ; pour les deux tiers anté- rieurs, le lingual; enfin pour la nombreuse musculature de la langue, le grand hypoglosse. Les nerfs qui se rendent à la langue sont donc les suivants : 4° A la partie postérieure, se distribuant à une faible portion de la muqueuse linguale, on voit quelques ramuscules nerveux venantdes filets antérieurs du rameau supérieur du nerf laryngé supérieur, branche du pneumogastrique cervical. Leur importance physio- logique n'est pas telle qu'il soit nécessaire d'insister plus longuement sur leur descrip- tion anatomique. 2" Toujours à la partie postérieure, un tronc nerveux se distribue pour sa plus grande part à la langue : c'est le nerf g losso-pharyng ien. Nous ne voulons pas revenir ici sur sa topographie dans l'intérieur de la langue; mais nous voudrions dire quelques mots du parcours du tronc nerveux. Sorti de la base du crâne par le trou déchiré postérieur, et affectant un trajet descendant, il ne tarde pas à présenter un ganglion (ganglion d'ANDERscH), contourne l'artère carotide interne en passant sur son côté externe, tout en restant en dedans de la veine jugulaire, puis se dirige d'arrière en avant et de bas en haut, formant une courbe à concavité dirigée en haut et en avant, et pénètre dans l'inté- rieur de la langue, cheminant entre les muscles stylo-glosse et stylo-pharyngien. Nous insistons avec intention sur son trajet et sur quelques-uns de ses principaux rapports, afin de bien montrer sa situation profonde. Les physiologistes, en expérimentant sur les animaux, ont tous insisté sur^la difficulté de le découvrir et la délicatesse de l'opération, lorsque l'on veut pratiquer sa section. L'erreur la plus facile à commettre est colle qui consiste à confondre ce nerf avec le nerf pharyngien, qui est tantôt simple, tantôt double ou triple, et passe, lui aussi, sur le côté externe de la carotide interne, tout en restant en dedans de la veine jugulaire, puis, situé sur les côtés du pharynx, envoie des ramifications COUT. 581 au plexus pharyngien qui reçoit également des rameaux du glosso-pharyngien et du grand sympathique. Debhou {Thèse inaugurale, Paris, août, 1841, cité par Longet, Traité de phi/siologie, m, 468) a décrit des filets du glosso-pharyngien, qui iraient à la portion horizontale du voile du palais et exerceraient ainsi une fonction guslative. 3° A la partie antérieure arrive à la langue le nerf lingual, (\m se détache du nerf maxillaire inférieur, branche du trijumeau, à peu de distance du trou ovale. Situé en avant du glosso-pharyngien, il affecte une direction sensiblement analogue et décrit une courbe à concavité dirigée dans le même sens. Certains de ses filets se distribuent à la muqueuse linguale vers la partie antérieure, d'autres aux régions avoisinantes (voile du palais, amygdales, gencives, plancher de la bouche); enfin d'autres se rendent aux deux FiG. 16. — Trajet, rapports et distribution de l'hypoglosse (Sappey, Ibid., III, 369). Portion ganglionnaire du trijumeau. — 2. Ganglion de Gasser. — 3. Branche ophtalmique de Willis. — 4. Nerf maxillaire supérieur. — 5. Nerf maxillaire inférieur. — 6. Nerf lingual ou petit hj'poglosse. — 7. Filet que ce nerf reçoit du dentaire inférieur. — 8. Corde du tympan. — 9. Nerf dentaire inférieur. — 10. Divisions terminales du lingual. — 11. Ganglion sous-maxillaire. — 12. Rameau mylo-liyoïdien. — 13. Ventre antérieur du digastrique recevant un ramascule du mylo-hyoïdien. — 14. Muscle mylo- hyoïdien dans lequel se rend un autre ramuscule du même nerf. — 15. Nerf glosso-pharyngien. — 16 Ganglion d'ANDERSCH. — 17. Filets que donne le glosso-pharyngien aux muscles styloglosse et stylo-pha ryngien. — 18. Ce même nerf se réfléchissant pour remonter sur la base de la langue. — 19, 19. Tronc du pneumo-gastrique. — 20. Son ganglion supérieur. — 21. Son ganglion inférieur. — 22, 22. Nerf laryngé supérieur. — 23. Nerf spinal. — 24. Nerf grand hypoglosse. — 25. Sa branche descendante. — 20. Rameau du muscle Ihyro-hyoïdien. — 27. Ses divisions terminales. — 28. Ramuscule du même tronc nerveux se divisant en deux filets, dont l'un pénètre dans le génio-glosse et l'autre dans le génio-hyoïdien. ganglions sous-maxillaire et sublingual. Ces deux ganglions fournissent des rameaux; le premier à la glande sous-maxillaire, le second à la sublinguale. 4° Le nerf grand-hypoglosse à sa sortie du trou condylien est situé en arrière et en dehors du glosso-pharyngien. Lui aussi décrit une courbe analogue, qui semble embras- ser dans sa concavité le tronc du glosso-pharygien, dont il rappelle la forme. Plus exté- rieur, le XII passe en dehors de la carotide externe comme le glosso-pharyngien et en dehors de la jugulaire interne, contrairement à ce dernier nerf qui est situé on dedans; il chemine sur la face externe du muscle mylo-hyoïdien, envoie deu.x ou trois rameaux 58-2 GOUT. au nerf lingual, qui, rejoignant ce nerf, forment des arcades à concavité regardant en arrière; enfin il s'épanouit en ramuscules plus ou moins ténus, qui se distribuent aux diffé- rents muscles de la langue. Jusqu'ici les nerfs que nous avons décrits se distribuaient uniquement à la muqueuse; celui-ci innerve uniquement les muscles lingaux. Dans la description des nerfs, que nous venons de faire, il est une partie que nous avons laissée à dessein dans l'ombre pour éviter des redites, nous réservant d'y revenir dans un paragraphe spécial, et dont voici le moment de parler: c'est la question des anas- tomoses de ces nerfs soit entre eux, soit avec les autres troncs nerveux importants, dans ce qu'ils peuvent présenter d'intéressant pour l'intelligence de la physiologie du goût. Il est nécessaire pour cela de dire quelques mots d'un nerf crânien, qui ne se rend pas à la langue, mais qui, par l'importance de l'anastomose qu'il envoie au lingual, et l'impor- tance qu'il a dans la fonction du goût, mérite d'être étudié comme un nerf se rendant à G. n. pétr. sup. Petit nerf peti sup. G, ffénicul G. sphéno- palat. N. dent, inf. N glo&su pharyngien. - N corde tymp. N. lingual. FiG. 17. — Rameaux profonds du facial (D'après Morat. Traité de Physiologie, t. ii, .p, 182) la langue, nous voulons parler de la corde du tympan et du tronc nerveux du facial. A sa sortie de la fossette sus-olivaire, le facial se dirige vers le conduit auditif interne, le parcourt dans toute son étendue. Embrassé dans la concavité formée par l'accolement des deux branches du VIII^, entre le VIP situé en haut et les branches du VHP placées en bas, on voit, occupant une position intermédiaire, le nerf de Wrisberg. Arrivé à la partie externe du conduit auditif interne, le facial, accompagné de l'intermédiaire de Wrisberg, s'engage dans la première portion de l'aqueduc de Fallope, qu'il parcourt jusqu'à son premier coude situé en regard de l'hiatus de Fallope, A ce niveau, le facial fait un coude pour prendre une direction de dedans en dehors; ce coude est coiffé d'un ganglion nerveux, le ganglion géniculé, de forme triangulaire, présentant un angle interne, un externe, un antérieur. L'intermédiaire de Wrisberg vient se jeter dans le ganglion géniculé au niveau de l'angle intei^ne. Puis le tronc du facial arrive à un second coude, et, prenant alors une direction verticale, se dirige en bas pour venir sortir par le trou stylo-mastoïdien et se diviser peu après sa sortie du crâne en deux branches, temporo-faciale et cervico- faciale. Durant son trajet intrapétreux, le facial a abandonné des anastomoses importantes pour l'étude du goût, et dont nous allons dire quelques mots. C'est d'abord le grand ne// pétreux superficiel, qui se détache de la pointe anté- GOUT. î>83 rieure du ganglion géniculé et s'engage dans l'hiatus de Fallope. A sa sortie du rocher, il reçoit une branche du glosso-pharyngien {grand nerf pétr eux profond) issue du rameau de Jacobson qui se détache du glosso-pharyngien au niveau du ganglion d'ANOERscii. Ces deux filets réunis continuent une direction horizontale antérieure, puis, recevant un rameau du plexus carolidien, portent à partir de ce point le nom de nerf vidien. Le nerf vidien continue encore son trajet en avant, et vient en fin de compte aboutir au ganglion sphéno- palatin, qui est situé sur le trajet du nerf maxillaire supérieur, branche du triju- meau, au niveau de la fosse ptérygo-maxillaire. De l'angle externe du ganglion géniculé, s'échappe un filet nerveux qui se dirige un peu en dessous du grand pétreux superficiel, c'est le nerf petit pétreux superficiel. Ce filet ne tarde pas à recevoir, lui aussi, une- anas- tomose du glosso-pharyngien par le nerf petit pétreux profond, branche du rameau de Jacobson, issu lui-même du glosso-pharyngien au niveau du ganglion d'ÂNDERScH. Ces deux filets réunis continuent leur direction antérieure et '^^ ■'^{'^-'■^'■^ viennent se jeter immédiate- ^^^^??r^ ment au-dessous du trou ovale ^^^i/mMlf^ dans le gaiigliou otique rat- ^^ 'm^É'^ ';%^. . __.^ .,„\ ..... taché au tronc du maxillaire N.md -^^^--•.. ^p' fjUiMf^ inférieur, branche du triju- c. n. pét. sup. ■ jBfc-.:.^_Jjv^(M meau, à sa sortie du ganglion p. „_ p^g ^„^ :^iË^^^i-3/'**^ÉiCi^_^^^^^'*® de Gasser. G.ot.._.é_^. - _/Kr^!^^!É^»r^^°''^ La norde du tympan se se- , I ""^^r^ Wm/m h 1 r • 1 ■• j !■ Corde tump. H ^ W/l'il/i!h. 8 pare du facial a peu de dis- * ' " "l" ".^j^'^'^i®**»»»», /wMfK tance du trou stylo-mastoï- i\'. JacobY ...m..^^. 1 . ^^\JM/9k dien; suivant alors une '^^"ss'm-- --W- --^-A/ 1^ / ^^i^hs. direction de bas en haut et \ 1 J&y F 1 \m^K d'arrière en avant, elle s'en- y .Jl^Sj A._-/ w^^k gage dans le canal postérieur ^"*"'"° ^J*3 ,''-<:^ \ «'. '■- To^iy à^^' ;-5i. V _ I <>A ^6< V- ^ I ' S / y / Fio. 23. ^ Coupe d'une papille foliée de la langue du lapin, avec les bourgeons du goût. (D'après Prenant, Bonin et Maillard, Ouv. cité, p. 342.) s, sillon de la papille sur les parois desquels sont disposés les bourgeons du goût; — bg-ep, épithélium stra- tifié indifférent; — gl, glandes séreuses ou d'EBNRR; — v, vaisseaux sanguins. tffj ,:3qT3-. o a •Q-S, u« _2 "< -^ ^ • - .„ M . --^-TJ rt a §1-2 1 o fco o — . ■ a s<" = ^-2-a|^5;S M.,-; a 5:^: -3 ^ « ^ ÈP ^ M a > 3 jj-O a. a - 2 ^i- to o a - ^ '^C;»:' o vV,i .--^=5 = 5 s'a 3="^>a^5 . „ o-o a ■^° o'^ — om^o-pao ~ "i^ o i. — -^ "> 3 o .^ « ' O ii O ■ - ï_ aJ-3 "^ i O »3 S S ^s^s • a-« s a o «-o"^ ^• = 5 2 l! >>"' o .y,-a a a o ■C§o23^S'éSS?c2:2 S-a.o a^£j5°>-2og,-, S o g 2* iija ^.--o s, I al ?f»Ss2 = gggir « o S— ^ — -^B ^ ,^ ^ — >>t-^ 3^ '3 =3 — -3_ — M '- Ï'a^3.^2rt~.2a--< fc ^a(DO>^~=^3gS ;:ir a 3 -w o > t:^ .™ -3 rt ^ Tr, !« a I i; >• a — 3^ o -^ i ■" ' 73 X «o"^ - mK a ' •- M o CS a O "3 -liir © 590 GOUT. abstraction faite, dans ces dernières, de la région du fossé, les fibres nerveuses cessent avant d'atteindre l'épithélium, soit librement, soit avec un petit renflement; ou bien elles entrent dans l'épithélium comme dans les papilles filiformes. Bien plus important est le mode de se comporter des éléments nerveux dans la région du fossé qui entoure la papille caliciforme et dans les lamelles de la papille feuilletée (flg. 24-13). Dans l'une et l'autre localité, arrivent des rameaux nerveux provenant de diverses parties : quelques-uns, des faisceaux centraux de la papille; d'autres, des fais- ceaux qui courent dans la couche profonde de la muqueuse; d'autres, plus gros, des troncs qui se trouvent plus profondément entre les fibres musculaires. Les divers rameaux, à mesure qu'ils s'approchent de la région gustative, deviennent toujours plus riches de fibres pâles et de cellules ganglionnaires, et, sous l'épithélium, les libres pâles forment un plexus très développé et très enchevêtré. Immédiatement au- dessous de l'épithélium, dans ce qu'on appelle la région nucléaire, le plexus est composé de fibrilles variqueuses qui courent, en bonne partie, par faisceaux, parallèlement à la direction de la couche épithéliale. De toutes les parties du plexus se détachent des fila- ments qui pénètrent dans l'épithélium. Les filaments les plus robustes vont se mettre en rapport, ou se continuent, avec l'extrémité profonde des cellules gustatives, dont on remarque tant les formes à pointe que les formes en bâton {Stiftchen et Stabzellen de Schwalbe). Souvent l'extrémité pro- fonde des cellules mentionnées présente des divisions latérales qui vont se continuer avec d'autres filaments du plexus nerveux (fig. 24-13 g). Dans les bulbes bourgeons gustatifs entrent, en outre, par le plexus situé au-dessous, d'autres filaments nerveux (fig. 24 B, n), lesquels ne vont se mettre en rapport avec aucune cellule, mais, courant entre les cellules de recouvrement, se terminent à l'extré- mité libre du bulbe, et en proximité de celle-ci, par un petit boulon. Beaucoup d'autres filaments vont, au contraire, se mettre en rapport indirect avec les cellules recouvrantes, donnant lieu, sur les surfaces concaves de celles-ci, à une arbo- risation fort compliquée, chaque lilamenl se divisant et se subdivisant plusieurs fois (fig. 24-6). Une autre particularité non moins importante se remarque en dehors des bulbes gustatifs. En effet, à l'extérieur, chaque bulbe est entouré par un réseau régulier de filaments nerveux, à mailles serrées, qui dessine nettement la forme du bulbe. Ce réseau, lui aussi, est formé par la subdivision de fibres nerveuses provenant du plexus de la région des granules (fig. 24-13 /, m). (Fusari et Panasci. Les terminaisons des nerfs dans la muqueuse et dans les glandes séreuses de la langue des mammifères, A. i. B., 1898, xiv, 240-247.) Par leur base, les cellules qui composent le bourgeon, reposent sur une vitrée. A quelques distances au-dessous de la vitrée, on remarque l'existence d'un véritable bou- quet ou arborescence de fibrilles nerveuses amyéliniques plus ou moins ténues avec de petits ganglions sur leur trajet, formant le plexus sous-gemmal (Jacques). Lorsque la crête est gonflée parle sang veineux, le filet nerveux générateur de cette touffe nerveuse arborescente « petit tronc nerveux, occupant la base de la crête veineuse, et courant parallèlement à celle-ci tout du long » (Renaut), entre en tension légère sous l'influence de ce gonflement général de toute la crête. De ces fibrilles s'échappent des ramifications plus ténues, qui se dirigent droit vers la partie profonde du bourgeon gustatif pour le pénétrer directement. Ces fibrilles toutes amyéliniques sont divisées, d'après les remar- quables travaux de Jacques, en raison de la position qu'elles occupent par rapport aux bourgeons du goût, en fibres périgemmales (Jacques) ou péribidbaires (Retzius) et en fibres intragemmales ou intrabulbaires, sur lesquelles nous allons revenir. Enfin, il est un troisième groupe de fibres qui ne se rendent pas au bourgeon gustatif, mais qui vont à l'épithélium avoisinant, au niveau des crêtes gustatives, dans les intervalles des bour- geons gustatifs; ce sont les fibres intergemmales. Celles-ci s'engagent dans l'épithé- lium et s'y terminent par des extrémités libres, qui se perdent dans le corps muqueux de Malpighi après un trajet horizontal plus ou moins long, ou bien sont retournées sur elles-mêmes en crochet avant leur terminaison définitive. Les fd)res j^érigemmales se portent à la périphérie du bourgeon ; elles s'appliquent GOUT. 891 sur la surface convexe des cellules en côtes de melon, au niveau desquelles elles dessinent un réseau à mailles plus ou moins régulières. Les fibres intragemmales pénètrent dans l'intérieur du bourgeon gustatif, et vont se terminer en s'enroulant autour des cellules fusiformes hautement différenciées pour leur fonction physiologique; et cet enroulement, cette fusion sont tellement intimes que l'on a pu croire que la cellule fusiforme se continuait directement par la librille ner- veuse. C'est ce que semblait prouver par exemple la méthode au chlorure d'or, qui yy^'f FiG. 25. — Terminaisons nerveuses dans l'organe du goût {papille foliée) du lapin (D'après Retzius, reproduit in Traité de Prenant, Bonin et Maillard, op. cit., p. 344). Méthode de GoLGi ; — /"ji, fibres gustatives, venues des cellules ganglionnaires du nerf gustatif (glosso- pliaryngien) ; — psc, plexus sous-épithélial formé par ces libres ; —cyn, une cellule gustative imprégnée par le procédé; — est, une cellule de soutien; — pig, plexus intra-gemmal fourni à l'intérieur d'un bourgeon du goût dont les fibres ne se continuent pas avec les cellules gustatives. colorait également les cellules gustatives elles fibres nerveuses. Mais la méthode au bleu de méthylène, caractéristique pour la détermination des éléments nerveux à l'état vivant, montre qu'il n'en est rien, en colorant les fibrilles nerveuses et en laissant inco- lores les cellules gustatives. Il s'agit donc là de deux tissus chimiquement différents. Par la méthode du bleu de méthylène en injection à des lapins, ARNSTEiN(Dje Nervenen- digungen in den Schmeckbecliern derSaùger. Arch. f. mikrosc, Ana^., xli, 1893, 2, 19.5-219) a montré que dans les papilles foliées « les cellules de recouvrement, aussi bien que les cellules axiales, sont entourées de fines fibrilles nerveuses variqueuses, qui se terminent librement au niveau du pore gustatif, qu'elles ne dépassent pas. » Ces fibres sont appli- quées à la surface des cellules et ne les pénètrent pas : « jamais non plus elles ne se continuent avec le prolongement central des cellules sensorielles; elles lui sont simple- ment accolées, le suivent dans leur ascension le long des éléments axiaux et se ter- minent par des extrémités libres, mousses ou renflées en un petit boulon ». L'erreur des auteurs, qui avaient pensé que le prolongement des cellules gustatives se continuait 592 GOUT. par une fibre nerveuse, s'explique par « l'insuffisance ou l'imperfection des méthodes. Pour ce qui est de la méthode de Golgi, qu'ont employée Fusari et Panasci, les images qu'elle fournit ne répondent pas à la réalité; elle a coloré la cellule et les fibrilles ner- veuses qui lui sont accolées, de sorte qu'on a cru à tort que celles-ci étaient en conti- nuité avec celle-là ». Chez le lapin les cellules fusiformes seules présentent un cil à leur extrémité péri- phérique; les cellules en côtes de melon n'en ont pas. La différenciation physiologique est ici plus marquée que chez les têtards d'anoures. Il y a un rapport étroit entre les filets nerveux et les cellules gustatives, rapport déjà établi par l'étude du développement embryologique dans les recherches de Rknaut et G. Roux (lac. cit.) et démontré par la section du IX", qui se rend aux bourgeons du goût. Cette section provoque (Vi.ntsghgau et Hœnigschmied, Beobacht.ûber d. Veràndeningen der Schmeckbechen, etc. A. g. P., xxni, 1880, cité par Remaut, loc. cit., 1894) la dégéné- rescence cellulaire d'abord, puis la disparition complète et rapide des éléments et du bourgeon lui-même, qui est détruit et remplacé par du tissu épithélial ordinaire. Comment s'effectue cette disparition des éléments cellulaires? Il est probable qu'elle est due à l'in- tervention des cellules migratrices (globules blancs): car on trouve, dans l'intérieur des éléments cellulaires, des trous, de véritables thèques dues à la présence de globules blancs, frayant leur voie dans l'intérieur des bourgeons. Lorsque les bourgeons marchent à leur extinction après la section du IX*', les cellules rondes n'augmentent pas notable- ment de nombre. Tel est l'aspect des bourgeons du goût, tels qu'on les observe réunis sous fotme d'un organe différencié chez certains animaux comme le lapin, le cheval, etc. Mais chez d'au- tres, comme chez l'homme par exemple, ils ne sont pas groupés, mais au contraire répandus sur toute l'e'tendue de la surface linguale, sur le voile de palais, la partie supé- rieure de l'épiglotte. Comme nous l'avons décrit en anatomie descriptive, la langue présente plusieurs sortes de papilles, sur lesquelles nous n'avons pas à revenir ici. A part quelques rares bourgeons gustatifs disséminés dans les papilles fongiformes, leurs véritables lieux d'élections sont les papilles caliciformes, qui forment le V lingual. Ces papilles sont, à leur pourtour, creusées d'un fossé ; les bourgeons du goût sont situés sur la pente pa- pillaire, étages les uns au-dessus des autres, sur toute la circonférence de la papille; la pente opposée n'en contient pas; au fond du sillon s'ouvrent les orifices glandu- laires. Nous n'avons rien d'autre à ajouter.sur la structure et la constitution anatomique fine de ces bourgeons, qui n'ait déjà été dit à propos de l'organe folié du lapin; la topographie seule présentait des différences. Comme au niveau de la crête papillaire de l'organe folié, le plateau supérieur de la papille ne renferme jamais de bourgeons gustatifs. Ici les glandes sont encore des glandes séreuses, en grappe, sur le type de la parotide ou de la lacrymale. Après une étude comparative des papilles foliées et des papilles vallées, Gmelin {Zur Morphologie der Papilla vallata und foliata. Arch. f.mihrosc. Anat.,xt., i) examine «■ la dis- position des glandes de la base de la langue, et les rapports de leurs conduits excré- teurs avec les cavités des follicules clos de la langue et de l'amygdale. Il montre qu'il y a des formes de passage entre les sillons de ces follicules et les sillons gustatifs des papilles, ce qui l'amène à conclure que la forme fondamentale de l'organe du goût n'est pas la papille. Cette forme est déterminée par le sillon, qui, lui, estlapartie morphologi- quement la plus importante, résulte de la fusion des conduits excréteurs de glandes séreuses, pourvu d'un épithéliumà bourgeons sensoriels, et délimite un certain territoire de la muqueuse linguale pouvant acquérir chez les mammifères supérieurs l'apparence d'une papille », La description histologique des cellules gustatives, soit fonctionnelles à proprement parler, soit remplissant un rôle de soutien, ainsi que des distributions nerveuses, pré- sente la même disposition chez l'homme et les animaux similaires. Nous avons indiqué la différence de la répartition topograpJnqr i des bourgeons du goût. Au lieu d'être groupés comme au niveau d'un lieu unique et limité, tel que l'organe folié, ils sont répartis sur les papilles, circumvallées, qui s'étendent en deux séries linéaires venant opérer leur jonction au niveau du foramen cœcum, et constituant les deux branches du V lingual. GOUT. 593 F. KiEsow, dans le laboratoire d'A. Mosso, de Turin, a étudié récemment la présence de boutons guslatifs à la surface linguale de l'épiglotte humaine et à ce pro- pos il fait quelques réllexions sur les tnêmes organes qui se trouvent dans la muqueuse du larynx {A. i. B., 1902, 334-337). L'objet de ses recherches élait de pouvoir résoudre la question de l'origine des organes gustatifs qui se trouvent dans les diverses parties de la muqueuse des voies respiratoires. 11 a étudié les épiglottes des fœtus humains, et l'épiglotte d'un enfant né à terme qui avait vécu cinquante-quatre jours, et celle d'un adulte âgé de dix-neuf ans. « Comme résultat général, dit-il, dans les fœtus humains des derniers mois de vie intra-utérine, on trouve aussi, sinon avec une régularité absolue, du moins dans la très grande majorité des cas à la surface linguale de l'épiglotte, des boutons gustatifs qui, dans leurs aspect général, ne diffèrent en rien des mêmes organes qu'on rencontre dans les autres parties de la muqueuse de la bouche et des voies respiratoires. Ces boutons se trouvent très fréquemment sur des proé- minences papilliformes de la muqueuse. J'ajoute que, à la face laryngienne de l'épiglotte du fœtus et du nouveau, né, j'ai trouvé aussi les organes susdits, lesquels, dans certains cas, et peut-être plus souvent que chez l'adulte^ sont situés sur des papilles. Rabl (Anat. Anzeiger, xi, 1896, 153) a déjà observé que, à la surface laryngienne de l'épi- glotte de l'adulte, les boutons gustatifs se trouvent quel- quefois sur des papilles. J'ai observé le même fait dans l'épiglotte d'un lapin adulte. Je mentionne cette particu- larité, qui me semble d'une certaine importance relati- vement au développement des surfaces gustatives de l'homme et de la fonction des organes en question. « Sur la face linguale de l'épiglotte du petit enfant né à terme, dont j'ai parlé, je n'ai plus rencontré les boutons gustatifs. De l'épiglotte de la jeune fille de dix-neuf ans, j'ai fait des coupes longitudinales en série de toute la moitié gauche; et je n'ai trouvé en tout (dans 400 coupes environ) que trois boutons à la surface linguale, tandis que, sur la surface laryngienne, ces organes se trouvaient en très grande abondance. « D'après ces observations, je crois pouvoir con- clure que les boutons gustatifs, à la partie linguale, dis- paraissent graduellement après la naissance, bien qu'il puisse s'en conserver quelques-uns dans des cas indivi- , , ^ ,, j. ... , ,., , ,, , -, , ., FiG. 26. — Schéma de l organe du goût. duels. Cette disparition s accomplit probablementa la suite (Daprôs Prenant, Bonin et Mail- de l'accroissement de l'organe, lequel fait passer les lard, op. cit., 345.) boutons de la partie linguale à la partie interne. Il n'est cgu, cellule gustative; est, cellule de d'ailleurs pas exclu que quelque phénomène dégénératif soutien; — cg, cellule ganglion- , , ,. . .. ,. .,. ^ naire; — fn, fibre du nerf glosso- puisse aussi concourir a déterminer cette disparition. pharyngien, prolongement périphé- « Que les boutons qui se trouvent dans la face interne rique dune cellule ganglionnaire. du larynx soient véritablement des organes gustatifs, c'est ce que j'ai déjà pu établir expérimentalement depuis un certain temps, en confir- mant et en étendant les recherches de Mighelso.n (A. A. P., cxxni, 1891, 389), Suivant mon opinion, ils se sont conservés ici, parce qu'ils sont en relation avec le mécanisme des mouvements réflexes (voir mon travail avec Hahn : Zeitsch. fur Psychologie und Physiologie der Sinnesorgane, xxvii, 1901, 80 et ma Communication au V* Congrès international des Physiologistes; A. i. B., xxxvi, 1901, 94), et non parce qu'ils ont quel- que rapport avec les goûts consécutifs, comme le suppose Krause {Allg. u. microscop. Anatomie, 1876, 198). Il peut se faire cependant — mais, de cela, je n'en suis pas encore absolument certain — qu'ils soient aussi dans un certain rapport avec ce qu'on appelle le goût nasal. DICT. DP. PHYSIOLOGIE. — TOMS VII. 38 594 COUT. « Déjà, dans mes premiers travaux sur les sensations gustatives, j'ai soutenu que l'ex- tension plus grande des surfaces gustatives, dans la cavité orale du petit enfant, doit être considérée en partie comme une répétition ontogénétique du développement phylo- génétiqae. La preuve anatomique de cette assertion a été donnée récemment par Stahr {Zeitschr. fiïr Morphologie und Anthropologie, iv, 1902, 199), lequel a trouvé, dans ie centre de la langue des enfants, des papilles gustatives, qui disparaissent complè- tement plus tard. Dans un travail pre'cédent, j'ai dit que les boutons gustatifs du larynx et de l'épiglotte sont, eux aussi, un résidu phylogénélique. Or cette manière de voir reçoit une confirmation, non seulement des faits mentionnés, mais encore de cet autre, que les organes en question sont diversement distribués dans le larynx de divers ani- maux. Une autre considération qui doit être mentionnée à ce propos, c'est que le carti- lage aryténoïdien, dont la muqueuse semble posséder toujours des boutons gustatifs, est, dans l'échelle zoologique, la première à apparaître. Viennent ensuite le cartilage cri- coïde, et, en dernier lieu, le cartilage thyroïde et l'épiglotte, qui ne se trouvent que chez les mammifères. Enfin mon opinion est appuyée aussi par les recherches de Gegenbaur {Die Epiglottis, Leipzig, 1882,f_o), lequel soutient que l'épiglotte se forme, chez les mam- mifères inférieurs, à la suite du développement du voile du palais, dont la muqueuse conserve aussi, chez l'homme, de nombreux boutons gustatifs. » IV. — LA GUSTATION DANS LA SÉRIE ANIMALE. Lorsqu'on étudie l'organe du goût dans la série animale, on voit s'opérer d'impor- tantes modifications, mais qui touchent moins la forme de l'organe gustatif et de ses éléments anatonnques constitutifs que leur nombre, leur distribution, leur localisation et surtout la configuration générale de la langue. Nous avons vu dans la description anatomique de la langue de profondes différences entre les diverses catégories de papilles. Leur forme se modifie dans la série, ainsi que leur nombre et leur disposition. Étudions d'abord dans une rapide esquisse ce que l'on voit dans la classe des mam- mifères. Chez les quadrumanes, les papilles offrent cette simple différence avec celles de la langue de l'homme, qu'elles sont moins nombreuses et ne représentent pas par leur groupement la forme d'un V, Chez les chéiroptères, leur nombre se réduit à trois ou cinq, formant un V par leur réunion, du moins chez certains d'entre eux, qui se nourrissent de fruits, cai* chez d'auti^es, au contraire, qui sont insectivores, on rencontre surtout l'existence de papilles cornées facilitant la trituration des aliments. C'est là d'ailleurs une disposition du revêtement lingual, que l'on trouve chez les autres insec- tivores de la classe des mammifères (taupe, etc.). Chez les carnassiers, la langue pré- sente une surface héi'issée de papilles cornées très abondantes et développées. Chez les omnivores, au contraire, les papilles caliciformes augmentent de nombre, et la muqueuse linguale se rapproche de celle des quadrumanes. Parmi les rongeurs, les frugivores présentent des papilles caliciformes; dans les autres groupes, la langue a une consti- tution rugueuse avec des papilles cornées abondantes. Dans la classe des lémuriens, la langue présente des dispositions différentes, suivant les diverses espèces : tantôt elle est effilée, tantôt tronquée à son extrémité, tantôt épaisse, tantôt très mince. Les papilles caliciformes se rencontrent surtout au niveau du tiers postérieur de l'organe. Chez les ongulés, on remarque l'existence de papilles caliciformes plus ou moins nombreuses ; la surface de la muqueuse est tantôt finement papilleuse, tantôt dure et hérissée de papilles cornées. Chez les édéntés, les marsupiaux, les monotrèmes, le nombre des papilles caliciformes diminue, et la langue pi'ésente une structure en rapport avec le genre d'alimentation. C'est ainsi qu'elle est protractile, allongée, vermiforme chez certains édentés, le fourmilier par exemple. Chez les cétacés, le nombre des papilles caliciformes est réduit à son minimum. Dans la classe des oiseaux, la langue est très rudimentaire et atrophiée; il faut excepter le groupe des perroquets, chez qui elle est réellement charnue, molle et papilleuse, ainsi qu'on la voit également chez quelques rapaces et quelques échassiers, flamants. (Ch.^tin, Les organes des sens dans la série animale, Paris, Baillière, 1880, p. 726, 184.) GOUT. 595 Chez les repliles, la langue présente peu d'organes rappelant les papilles caliciformes. Mais là encore il y a des différences, suivant chaque groupe: les tortues ont une langue molle, papilleuse; les crocodiliens « possèdent (Chatin, loc. cit., 186) à peine une saillie rugueuse; chez quelques sauriens la langue est molle et charnue (scinque), ou se transforme en un véritable organe de préhension, qui rappelle ce qui s'observe dans les fourmiliers (caméléon) i. Chez les reptiles, la langue présente de véritables papilles bien développées, qui servent à la gustation. Chez les poissons, la langue ne présente pas de papilles ; mais la gustation paraît s'exercer ici au niveau de la muqueuse buccale, qui se plisse et s'ordonne, devenant ainsi une véritable surface gustative. F^es organes, à proprement parler gustatifs, ont la constitution suivante, qui peut se résumer <( en deux types histologiques : 1° des élé- ments protecteurs ou de soutien, cellules épithéliales légèrement modifiées, tendant vers la forme cylindrique ; 2° des éléments excitables distingués par Todaro en bâtonnets et en cônes ». (Chatin, 192.) Nous en arrivons maintenant au groupe des invertébrés. « Les céphalopodes, écrit Chatin [loc. cit., 183), possèdent une sorte de langue, cachée dans l'angle antérieur de la « mâchoire » inférieure, couverte de villosités papilleuses ; aussi la plupart des malacologistes n'hésitent-ils pas à y voir un véritable organe gustatif. » Chez les insectes, les parties au niveau desquelles on a localisé le goût sont encore bien hypothétiques. Chez certains coléoptères, on trouve un organe mou décrit par les auteurs sous le nom de langue, ou dhypopharynx, et richement innervé ; chez d'autres, on ne voit qu'un simple repli de la cavité pharyngienne. C'est chez les hyménoptères surtout que l'on voit l'appareil gustatif bien développé. A la partie médiane de la cavité buccale, on observe une formation allongée, au niveau de laquelle de nombreux filets nerveux viennent se ramifier. Sa surface est formée par une mince lamelle chitineuse, au-dessous de laquelle s'étend une épaisse assise glandulaire. A mesure que l'on descend l'échelle de la série animale, l'exercice du goût devient de plus en plus incertain; et surtout les régions où l'on doit localiser les appareils au niveau desquels il s'exerce sont de plus en plus problématiques. Leur aspect et leur configuration anatomiques ne permettent pas de les déterminer d'une façon exacte; la morphologie des organes gustatifs, si tant est qu'ils soient différenciés et spécialisés uni- quement pour cette fonction, telle que nous la comprenons chez l'homme, perdant toujours davantage les caractères particuliers que nous leur connaissons chez les ver- tébrés, et se rapprochant de plus en plus des terminaisons tactiles ordinaires. PHYSIOLOGIE. V. — DONNÉES ET HYPOTHÈSES SUR LE MÉCANISME PHYSIOLOGIQUE DE LA GUSTATION. S'il est une question de physiologie oi!i bien des points sont encore à la discussion et restent obscurs, c'est assurément celle des nerfs du goût. Ce qui contribue surtout à em- brouiller la question, ce n'est pas l'absence d'expériences et d'expériences précises sur ce point, car peut-être aucun sujet n'a été autant à l'étude que celui-ci ; ce n'est pas tant les inter- prétations données aux faits par les différents auteurs, mais c'est la contradiction même sur les expériences brutales entre les dilTérents physiologistes. Telle opération, telle section donne entre les mains de l'un tel résultat, qu'un autre expérimentateur obtient absolument contraire. En voulons-nous que]([ue3 exemples? Schiff sectionne les deux glosso-pharyngiens et les deux cordesdu tympan en respectant le lingual; la sensibilité tactile reste conservée, mais il obtient une diminution de la sensibilité gustative. Lussana avec Inzani sectionnent les deux glosso-pharyngiens et les deux cordes, et ils remarquent que la sensibilité gustative est perdue. Cl. Bernard etJ.-L. Prévost sectionnent les deux glosso-pharyngiens et les deux cordes, et notent la persistance du goût, au moins en avant; après la section des linguaux, ils observent la disparition totale de la sensibilité gustative. Voilà bien des résultats différents et opposés. 596 GOUT. I Malgré toutes les discussions encore pendantes, voici, rapidement signalées, quelques conceptions des principaux auteurs qui ont traité ce sujet. Herbert Mayo faisait jouer en 1823 un rôle dans la gustation an trijumeau et au glo^so- pharyngien. Herbert Mayo [Anatomical and Physiological Coinmentaries, etc., London, 1823. Journal de physiol. expér,, 1823, m, 356, et Longet, Traité de Physiologie. Paris, 1873, MI, 468) a observé un cas dans lequel les fonctions du trijumeau gauche étaient suspendues, et on constatait que « la langue, du côté gauche, avait perdu en avant la faculté de goiiter et celle de sentir... pendant que la surface gauche de sa base était sensible au toucher et aux saveurs... Une sonde, appliquée du même côté, déterminait des nausées et des efforts de vomir ». 11 en concluait (jue le trijumeau innervait la partie antérieure de la langue ; le glosso-pharyngien, la partie postérieure. Cette conception de plusieurs nerfs préposés à l'exercice du sens du goût devait bientôt être mise en doute; et chacun des deux nerfs indiqués par Mayo devait avoir ses partisans pour lui attribuer le rôle principal et unique dans la gustation. Panizza {Ricerche sperimentali sopra i nervi. Lett. del profess. Panizza al profess. Bufalini. Pavie, 1834) pratique sur des chiens la section des grands hypoglosses, puis des linguaux et n'observe aucun trouble. La section seule des glosso-pharyngiens amène la perte des sensations gustatives et produit de l'agueusie. Mais bien des protestations s'élèvent. Des physiologistes érainents repoussent cette façon de voir, qui consiste à placer toute la gustation sous la dépendance des glosso- pharyngiens. Pour eux, ils ne sont pas les seuls nerfs du goût ; cette fonction est partagée et dévolue à plusieurs. Parmi les auteurs qui formulent ces vives critiques, il y a surtout MiJLLER [Arch. fur Anat. und Physiol. , 1835. — Handbuch der Physiol. des Menschen. Coblenz, 1837), Alcock [The Dublin Journal, 1836), John Reid [The Edimb. Med. and Surg. Journal, 1838), Cazalis et Guyot [Arch. génér. de méd. février 1839, (3), iv), Biffi [Sui nervi délia lingua; ricerche anat. fisiol. Annali univers, di medicina, Milan, 1846). ScHiFF [Sui nerci gustatori, dans le Morgagni, 1870, et dans l'Impartiale, xi, 15), et Lo.n(;et {Leçons sur la physiologie de la digestion, Florence, 1867). Nous devons faire une men- tion toute spéciale pour Longet, sur l'opinion duquel nous reviendrons plus tard, après l'exposition des idées de Magendie. Nous verrons alors que Longet soutient la même idée que Mayo, et qu'il critique à la fois et Panizza, pour lequel le glosso-pharyngien est le seul nerf du goût, et Magendie et Mijller, qui veulent que le trijumeau soit le seul nerf de la gustation. Cependant cette opinion de Panizza, malgré les nombreuses critiques que nous venons de voir s'élever contre elle, trouve encore des partisans, qui se rangent à la manière de voir du physiologiste italien, en modifiant légèrement l'explication qu'il donne, afin de se mettre d'accord avec les critiques, qui lui avaient été faites, pour les tourner, tout en soutenant au fond la même idée. C'est ainsi que VALENTiN(De functionibus nervorum cere- bralium et nervi sympathici. Berne, 1839) et Hirschfeld [Traité et iconographie du système nerveux et des organes des sens de l'homme, 1866, Paris, 216, [2]), trouvant dans une fine dissection anatomique un rameau externe du glosso-pharyngien anastomotique entre ce nerf et le lingual, disent que les impressions gustatives passent des extrémités périphé- riques du lingual, par ce rameau anastomotique, pour arriver au glosso-pharyngien, dont elles suivent à partir de ce moment la voie. Le glossso-pharyngien, ici encore, serait donc le seul nerf gustatif. Cette conception, elle aussi, a été attaquée. Enfin, on a eu recours, pour montrer le rôle du glosso-pharyngien dans la gustation, et pour lui faire jouer un rôle de la plus haute importance dans l'exercice de cette fonction à l'histologie et à la méthode des dégénérescences nerveuses. Von Vintschgau et Honigschmied (Beo6ac/(^ îifter d. Venlnderungen der Schmcchbechern, etc., A. g. P., xxiii, 1880) ont sectionné le glossopharyngien, et ont fait une étude des bourgeons gus- tatifs ; ils ont noté une disparition de ceux-ci, ainsi que nous l'avons déjà constaté en histologie. Pour opposition à ces diverses conceptions d'une localisation de la gustation dans le glosso-pharyngien, il est d'autres physiologistes qui voulurent voir dans le second nerf, auquel Mayo faisait jouer un rôle dans la gustation, le seul nerf gustatif. Magendie (Leçon*^ GOUT. 597 sur les maladies d'i système nevvsuv. 1839, ii) prétendit que le lingual, et par lui le triju- meau, étnit le seul ueii'ilu ^oùt. M( lliir soutint la même opinion. Gomme il avait déjà com- battu l'idée qui attribuait tout le rôle dans la gustation au glosso-pharyngien, Longet se fait encore ici l'adversaire de l'opinion qui veut que le trijumeau soit le seul nerf exclu- sivement gustatif. Mais là encore il y a des discussions entre physiologistes, et des avis contraires sont en présence. Voici fomment Lo.ngrt {loc. cit., m, 469) combat les deux théories extièmes et diamètialement opposées, et s'exprime à ce sujet : « Selon Panizza, le résultat immédiat de la division des glosso-pharyngiens est la perte absolue du goût, sans lésion ni de la sensibilité tactile, ni des mouvements de la langue; et l'excision du nerf lingual de chaque côté ne fait disparaître que Id sensibilité tactile dans tout cet organe. » Préoccupé de l'idée que le nerf de la cinquième paire étend son influence sur tous les organes des sens spéciaux, Magendie avance, en 1839, « qu'il n'y a, en définitive, que la section de la cinquième paire qui abolisse la sensibilité tactile et gustative de la langue; que, pour abolir entièrement le goût, il faut couper le tronc même de la cinquième paire dans le crâne. C'est, dit-il, ce que j'ai eu plusieurs fois l'occasion de faire, et toujoursie me suis assuré que la section du tronc même de la cinquième paire abolit, complètement et partout, la propriété de reconnaître les saveurs les plus acres et les plus caustiques » (p. 289). Mais cet auteur oublie ses assertions de 1824 : « Après la section intra-cranienne de la cinquième paire, la langue est insensible du côté oii ce nerf est coupé, et des deux si les nerfs le sont à droite et à gauche. Les corps sapides n'ont aucune action apparente sur la partie antérieure de l'organe; mais ils ont une action évidente sur le centre et la base. « De ce qui précède il résulte que Panizza a accordé aiv glosso-pharyngien une part beaucoup trop grande dans la gustation, et que Magendie, en refusant à ce nerf toute influence sensorielle, a admis une action exagérée du nerf trijumeau sur le goût comme sur tous les autres sens spéciaux. « Le résultat immédiat de la division de ces nerfs (Longet, loc. cit., m, 474-475), (il s'agit des glosso-pharyngiens), dit Panizza, est la perte absolue du goût, sans lésion, ni de la sensibilité tactile, ni des mouvements de la langue... Un chien mangeait alors indistinctement, et avec la même avidité, de la viande pure et celle qu'on avait pétrie avec de la pou Ire de coloquinte. Il buvait également et le lait pur, et celui auquel ou avait mêlé une assez grande quantité de cette substance. Bien plus, ayant pilé et malaxé un morceau de viande dans une solution de coloquinte, et l'ayant présenté à l'animal non seulement il l'a mangé, mais encore il a bu tout le liquide qui était dans le vase. » Valentin (De fonctionibus nervorum cerebralium et nervi sympathici) dit avoir confirmé ces résultats par ses propres expériences. Au contraire, Alcock {The Dublin Journ., 1836, n° 29) affirme que, « sur un chien, le goût ne parut pas beaucoup affecté par la section des glosso-pharyngiens, car l'animal fit des efforts pour vomir sous l'impression de la coloquinte; néanmoins, il manifestait moins de dégoût qu'auparavant ». John Reid {Mém. cit. {Edimb. Journ.), xlix, 128) croit avec Alcock, contrairement à Panizza, qu'après la résection de cette paire nerveuse les animaux perçoivent encore la sensation des aliments amers. Toutefois Reid est loin de nier toute intlueiice sur le goût. « La section des glosso-pharyngiens, disent Cazalis et Guyot {Mém. cit., Arch. gén. de m,éd., février, 1839, 248), n'abolit point le sens du goût tout entier; elle permet à certaines saveurs très mauvaises de passer inaperçues, tandis que d'autres, même beau- coup moins déplaisantes, sont très bien distinguées. » Magendie va plus loin que tous ces auteurs, car il lui a semblé que l'animal sentait les saveurs tout aussi bien qu'avant cette section. Quoique j'aie pratiqué, ajoute Lo.NGET, bien souvent la résection de ces derniers nerfs, j'avoue que cette opération m'a toujours paru très délicate et très difficile à exécuter d'une manière convenable et complète. En effet, sans parler des embarras que suscite une abondante hémorragie, prend-on le nerf un peu trop bas, on laisse échapper un certain nombre de filets pharyngiens supérieurs; le saisit-on un peu trop haut et en arrière, on compromet les filets moteurs anastomotiques du rameau pharyngien du spinal : de là, des demi-résultats ou des résultats en apparence contradictoire?; ou bien encore des complications qui. 598 GOUT. comme la gêne de la déglutition, par exemple, sont rapportées mal à propos à la lésion des glosso-pliaryngiens. « Toutes les fois que j'ai pu réussir, j'ai vu les chiens qui, avant l'expérience, donnaient les signes de dégoût les plus marqués, quand je déposais sur la base de leur langue quelques gouttes d'une décoction concentrée de coloquinte, ne plus manifester la moindre répugnance après la section des glosso-pharyngiens, lorsque je prenais la précaution de ne verser le liquide que dans l'arrière-bouche; car trois ou quatre gouttes seulement étaient-elles mises en contact avec la pointe ou les bords de la langue, tout de suite l'animal grimaçait et exécutait des mouvements brusques de mastication, comme s'il cherchait à se débarrasser d'une sensation désagréable. Le nerf lingual était donc l'agent qui transmettait ces impressions sapides, et, par conséquent, le glosso-pharyngien n'est point le seul nerf gustatif. Toutefois, comme chacun peut l'expérimenter sur soi- même, ce dernier nerf se montre toujours beaucoup plus sensible aux saveurs atnères que le lingual. » Et, pour conclure, Longet écrit : « Je mentionnerai ici quelques cas dans lesquels, après la résection des deux glosso- pharyngiens et des deux nerfs linguaux, il m'a semblé que des chiens, conservés vivants pendant plusieurs jours, appréciaient encore, bien légèrement à la vérité, l'amertume ou la saveur désagréable de certaines substances, d'ailleurs dépourvues d'odeur. « Avais-je laissé intacts quelques filets des glosso-pharyngiens? Je suis porté à le croire, quoiqu'il m'ait été impossible de le reconnaître au fond d'une plaie, quelquefois cica- trisée, mais le plus souvent enflammée. Ou bien, ce peu de sensibilité gustative dépen- drait-il de cette petite surface du voile du palais qui, indiquée par Vernière, mais sur- tout bien circonscrite par Guyot et Admyrauld, est supposée emprunter aux nerfs palatins ses filets gustatifs? Pour trancher la question, il aurait fallu extraire le ganglion spliéno- palatin; mais j'avoue que je ne me suis pas senti l'adresse du D'" Alcock (de Dublin), qui dit avoir accompli cette opération et n'avoir point remarqué que le goût en fût altéré. » Quoi qu'il en soit, les faits démontrent : 1» que le rôle du (flosso-pharyngien, comme agent de sensibilité générale et spéciale, ne saurait être contesté ; 2° qu'il y aurait exa- gération et erreur à placer le goiit sous la dépendance exclusive de ce nerf. II Un rôle dans la gustation est reconnu et attribué au trijumeau par Biffi etMoRGA.NTi, se basant sur leurs expériences chez le chien, par FuzoNr, se basant sur ses expériences sur l'homme. Claude-Bernard et Prévost (de Genève) ont pratiqué la section des deux glosso-pharyngiens et des deux cordes du tympan, et ont observé que les sensations gustatives étaient conservées en avant ; ils pratiquaient alors la section des linguaux et remarquaient la disparition totale de la sensibilité gustative. Prévost pratique sur un chien la section des glosso-pharyngiens et des cordes, et observe la persistance du goût ; alors il coupe les linguaux, et remarque la disparition delà sensibilité gustative. D'autre part, Lussana retire tout rôle au lingual dans la gustation, Bimar (Étude phy- siologique sur le sensdu goût. Thèse inaugurale, Montpellier, 1875-76, p. 63), continuant le développement des conceptions de Rouget (cité par Bimar), exprime les mêmes idées et les confirme. Après une étude physiologique minutieuse sur la nature des impi'essions gustatives senties par les divei-ses parties de la langue et sur le siège du goût, il est amené à penser que « la partie antérieure de la langue ne perçoit pas les véritables sa- veurs, et que les sensations qu'elle fournit sont des sensations de contact toutes parti- culières, qu'il est tenté d'appeler pseudo-gustatives. Or cette partie de la langue est innervée par le lingual, nerf de sensibilité par excellence ; pourquoi donc chercher ailleurs un autre nerf de sensibilité, lorsqu'il est prouvé surtout que la section du lingual (ou celle du trijumeau) abolit entièrement la sensibilité tactile et générale de la partie antérieure de la langue? » Rouget les admettait en se basant sur des observa- tions faites sur des larves de grenouille; chez ces animaux, on constate, en effet, des tubes nerveux cheminant au milieu des cellules glandulaires et destinés probablement à ces cellules, attendu qu'il n'y a dans ces glandes ni vaisseaux, ni conduits excréteurs. Comme on le voit, ici encore certains prétendent (jue le lingual est le seul nerf du goût ; GOUT. 599 d'autres/que ce n'est pas le seul; d'autres, qu'il n'a aucun l'ôle dans la gustation; d'autres enfin limitent son action gustative et la localisent dans la partie antérieure de la langue. Tels sont les rôles attribués pour la gustation aux nerfs qui se rendent à la langue et s'y terminent. On avait bien pensé que le grand hypoglosse était le seul nerf gustatif ; mais cette opinion n'a pas vécu, et ne vaut pas la peine qu'on s'y arrête davan- tage. Mais, à côté de ces troncs nerveux, il en est d'autres qui ne se rendent pas à la langue, et qui néanmoins semblent jouer un rôle direct ou indirect dans l'excercice de la giislation. Ici encore ces phénomènes furent mis en évidence par des constatations pathologiques. Déjà Mavo (/oc. cil.) avait établi sur des observations anatomo-cliniques, le fait que les deux nerfs du goût étaient le glosso-pharyngien et le trijumeau ou le lingual. Voici ce que révéla la clinique à certains observateurs, ce qui plus tard posa des problèmes physiologiques et suscita des expériences fécondes en résultats. Caldani {Institiitio7is de physiologie et de pathologie, Padoue, 1703] aurait le premier remarqué l'abolition du goût dans certaines névralf^ies faciales; puis Roux [Dissertation sur les affections locales des nerfs, Paris, 1825), MoNTAULT {Dissertation sur l'hémiplégie faciale, Paris, 1831), Noble {London Med. Gazette, 1834), RoMBERG {Anesthesie im Gebiete des Quintus, Miniers Archiv, 1838), Bérard {Fractures du crâne par armes à feu, m Galette médicale, 1840), Stich {Beitràge zur Kenntniss der chorda tympani, Annalen der Charité-Krankenhauses, Berlin, 1857), GuENTHER, Arnison, Burrons, Vogt (cités par LuPSANA. Recherches expérimentales et obser- vations pathologiques sur les nerfs du goût. Archives de Physiologie, 1869, ii, 20-33) en rapportent des exemples. Une nouvelle voie s'ouvrait donc aux physiologistes : les rap- ports et le rôle du facial avec le goût. LussANA esquisse rapidement cet histori- que et d'une manière très précise. Bellingeri assigna le premier « à la corde du tympan une influence spéciale sur le sens du goût {De nervis faciei, Turin, 1818) ». Fici. 27. — hypothèse de Ldssana, d'après Bimar (Étude physiologique sur le sens du goût, Mont- pellier, 1875). L. Nerf lingual; — Sp, ganglion sphéno-palatin ; — Oï, ganglion otique ; — S, nerf sphénoïdal ; — W, grand nerf pétreux superficiel ; — P, petit pétreux superficiel ; — C, corde du tympan. Les lignes pointillées représentent les filjres gustatives ; les flèches indiquent leur direction des centres ner- veux à la périphérie. Sgarpa avait constaté « que le nerf inter- médiaire de Wrisberg a sa naissance à côté du IX» {Œuvres diverses, Florence, 1858, i" partie, chap. III, 3" p., 461), d'où communauté d'origine de la portion sensitive de la septième paiie et du glosso-pharyngien ». Caldani, de Padoue, signala le premier le phénomène singulier de l'abolition du goût dans les névralgies faciales: « Dans le spasme dit cynique, a-t-il écrit, où certai- nement les nerfs delà neuvième paire ne présentent aucune lésion, la névralgie ayant son siège uniquement dans les nerfs de la cinquième paire (?), le sens du goût est complè- tement aboli. {Institutions de Physiologie et pathologie, de Caldani, 2* édition, Padoue, 1793, I, 147). » Stich (Berlin, 1857) réunit et apprécia diverses observations dissé- minées « où l'on remarque l'altération de la faculté gustative dans le côté de la langue correspondant à celui du nerf facial paralysé ». Dans les cas de lésion de la cin- quième paire (facial) avec abolition du goût dans la partie antérieure de la langue, ou bien il s'agissait d'une lésion périphérique h. laquelle participait la corde tympa- nique déjà réunie au nerf lingual, ce qui résulte des observations de Muller, de Mar- CHAL, et des miennes; ou bien il s'agissait de lésion intra-crànienne compromettant l'innervation de la septième paire et celle de la corde, ce qui a été observé par Bell, BiscHOP, ScHNEEMANN. Lorsque la corde seule de la septième paire est atteinte périphéri- quement sans lésion de la cinquième paire, dans ce cas la faculté gustative se trouve altérée à la partie antérieure de la langue. » (Lussana.) L'influence de la corde du tympan sur le goût, écrit Sghiff, ne peut lui être com- COO GOUT. muniquée par les origines de la septième paire, qui sont exclusivement motrices. (( Cette objection n'est pas grave; car il est faux que la septième paire, en vertu de toutes ses origines, soit un nerf exclusivement moteur. Il est démontré, au contraire, que la corde de la septième paire est un nerf exclusivement sensitif. » (Lussana.) Citons aussi les nombreux résultats de Biffi et Morganti. « Dans toutes ces expériences, nous n'avons jamais pu observer que, en irritant la corde du tympan ou du moins sa portion périphérique, l'on puisse susciter le moindre mouvement dans la langue. » Voici les paroles de Longet : a Bien des fois j'ai fait passer des courants électriques dans le tronc du facial pris à son origine, en évitant de comprendre la langue dans le circuit, et jamais je n'ai réussi à déterminer dans cette dernière le moindre frémissement. Les mêmes effets négatifs ont été obtenus en agissant avec les précautions convenables sur la corde du tympan elle-même. » DucHENNE, de Boulogne, est arrivé aux mêmes résultats: « Je n'ai jamais, dit-il, négligé d'observer très attentivement, et souvent à l'aide d'une loupe, l'état de la langue pendant la galvanisation de la corde du tympan, et je puis affirmer n'avoir pas vu la plus petite coniraction librillaire à la surface de la langue. » «Je suis bien loin de nier, conclut Lussana, que la corde du tympan renferme aussi des fibres nerveuses vaso-motrices glandulaires ; mais ce que je crois essentiel d'établir, c'est que dans la corde du tympan se trouvent les fibres spécifiques gustatives propres du nerf lingual pour la partie antérieure de la langue. Eh bien, ces deux faits ne sont pas exclusifs l'un de l'autre, au contraire; aussi bien anatomiquement que physiologi- quement les nerfs sensitifs, sans en exclure la corde du tympan, contiennent ordinai- rement des fibres vasculaires. « Afin de concilier les résultats des expériences des professeurs Bernard et Vulpian avec les miennes, on pourrait invoquer l'opinion, d'après laquelle l'excision de la corde tympanique est suivie de l'abolition du goût par la raison qu'elle supprime la sécrétion salivaire (Lussana, Recherches expérimentales et observations pathologiques sur les nerfs du goût, Archives de physiol., 1869, ii, 20; 33-197, 210). Mais les expériences de ScHiFF ont réfuté d'avance la possibilité de cette conciliation, lorsqu'il écrivait ces paroles: « Chez les animaux qui montrent un alfaiblissement du goût après la section de la corde du tympan, cet afTaibiissement est indépendant de l'état d'humidité ou de sécheresse de la langue; c'est ce que j'ai souvent constaté chez les chiens. » III Cl. Bernard {Recherches sur la corde du tympan. Annales médico-psychologiques, mai 1843) étudia les modifications survenues dans l'exercice du goût à la suite de para- lysie faciale intérieure. Il fut amené d'autre part à taire des sections de la corde du tympaa portant dans la caisse. Des résultats fournis par ces diflerents ordres de recherches, il constata des troubles du goût dans les diflerents cas. Il fit alors porter la section plus haut et pratiqua une section intra-cranienne du facial. Là encore il nota une altération du goût, et les troubles observés étaient les mêmes que ceux qu'il avait déjà constatés dans les cas de paralysies intérieures du facial. Tels sont les faits. En retenant simplement les constatations physiologiques, Blu- menbach [Institutiones physiologiœ, Gœttingen, 787) et Haller {Elementa physiologias, 1763) avaient depuis longtemps déjà émis l'opinion que la corde du tympan agissait indirectement sur le goût en vertu de propriétés motrices. Guarini [Annali univer- sali di medicina, 1842) ne voyait même dans la corde qu'un nerf purement moteur, des- tiné spécialement au muscle lingual et au muscle stylo-glosse. Cl. Bernard n'attribue pas davantage un rôle gustatif au facial ni à la corde, en tant que nerf gustatif. Leur action et leur rôle dans la gustation étaient tout à fait indirects. Le facial et la corde exer- çaient des actions motrices sur les papilles, dont ils provoquaient l'érection, condition nécessaire à l'exercice du goût, et, d'autre part, ils exerçaient (la corde en particulier) une action sur les vaisseaux de la langue. Pour Cl. Bernard {Leçons sur la physiologie du système nerveux, Paris, Bailli ère et fils GOUT. 601 1858), le sens de la gustation est sous l'inlluence de deux nerfs, le glosso-pliaiyngien et la cinquième paire : « Outre la cinquième paire, il y a encore la corde du tympan qui agit sur la gustation dans la partie antérieure de la langue. » (p. 240.) « Quant à la paralysie du nerf facial proprement dite, les auteurs reconnaissent que tantôt elle est simple, c'est à dire qu'elle n'atteint que les mouvements extérieurs de la face et n'altère que l'expression de la physionomie, en laissant intactes toutes les parties profondes : voile du palais, langue, etc. (p. 113).» D'autres fois, au contraire, la paralysie faciale, outre les symptômes extérieurs, qu'elle manifeste, atteint aussi certains organes intérieurs : langue, voile du palais, pharynx et détermine alors des altérations parti- culières dans le goût, dans la déglutition, etc. « Dans la paralysie du facial, beaucoup de malades se sont plaints d'une altération du goût » (p. 120). Dans ce cas, l'altération remonte très haut. « On ne l'observe pas dans les affections de la portion superficielle du facial, dans les paralysies, dont la cause n'a atteint que les branches superficielles du nerf (p. 121). » « Or nous verrons que ce phénomène s'observe chez les animaux, auxquels on a coupé la corde du tympan. » La sensibilité générale et tactile est parfaitement conservée. « La section de la corde du tympan amène une diminution dans la faculté gustalive du côté correspondant. » (Cl. Bernard, loc. cit.) Cl. Bernard cite six observations cliniques, dont l'une suivie d'autopsie, dans lesquelles il montre des phénomènes de paralysie extérieure du facial « en même temps qu'il y avait des lésions caractérisant une paralysie des rameaux profonds de ce nerf »,(p. 122) et, dans tous les cas, il y avait des troubles manifestes et notoires du goût du côté cor- respondant aux signes de paralysie. « Nous pensons avoir établi qu'on doit distinguer deux sortes de paralysie de la septième paire : l'une, que nous appellerons extérieuie, tantôt double, tantôt simple, et qui dépend d'une altération du facial proprement dit, — l'autre, que nous appellerons intérieure, qui affecte certains mouvements pro- fonds des organes des sens, et qui dépendrait, suivant nous, d'une lésion du neif intermédiaire de Wrisberg » (p. 130). La section du facial dans le crâne produit les mêmes résultats chez des chiens (p. 130) et des lapins, savoir un trouble du goût du côté de la paralysie, ainsi qu'il ressort des expériences de Cl. Bernard (p. 133). Pour Cl. Bernard, la corde du tympan n'est pas un filet sensitif, ainsi que certains auteurs l'ont proposé : elle est motrice. « La muqueuse de la langue, à laquelle elle se distribue surtout, renferme des éléments moteurs dont la corde du tympan met en jeu l'activité. C'est ainsi que la paralysie ralentirait la perception de la sensation. » Il pense également que la corde s'unit à des filets du sympathique et qu'en consé- quence elle agit de la sorte sur les vaisseaux de la langue. « Ce qui reste acquis à la science, c'est que c'est par des actions motrices que la corde du tympan exercerait son influence sur des phénomènes de nature variée : sur les sécrétions glandulaires, sur la circulation locale, sur les sensations gustatives » (p. 174). La corde du tympan vient-elle du facial ou d'ailleurs? Cl. Bernard [Recherches sur la corde du tympan. Annales médico-psychologiques, mai 1843 et Archives de médecine, (4), II, 1843, 332-334) y répond par la dissection et les expériences, a) Par la dissection, il s'est assuré que la corde vient bien réellement du tronc du facial, sur des pièces ayant macéré dans l'acide nitrique. — 6) Par les expériences, il a observé que la section intra- crânienne du facial, c'est-à-dire avant qu'il ait abandonné la corde, provoquait, du côté du goût, exactement les mêmes phénomènes et symptômes que la section de la corde elle-même; la section du facial, à sa sortie du cràue, c'est-à-dire après avoir abandonné la corde, ne provoquait aucun trouble du côté du goût. Pour Claude Bernard, la corde du tympan, qui est un filet moteur, agit indirectement pour provoquer des troubles gustatifs ou sensoriels. La corde du tympan « donne aux papilles de la muqueuse linguale une action qui leur permet de s'adapter convena- blement aux molécules sapides et de rendre leur appréciation instantanée. Supprimez l'inûuence motrice du nerf, les papilles perdent l'action dont nous parlons : de là un retard pour la perception des saveurs » (p. 334). 602 GOUT. IV Vïî VuLPiAN {Remarques sur la distribution anatomique de la corde du tympan. Arch. de Physiol., 1869, ii. — Sur la corde du tympan, distributions et usages, iu Comptes rendus de la Soc. de 'biologie et Acad. des Sciences, 1873. — Leçons sur l'appareil vaso-moteur, Paris, Germer Baillière, 187S,2 vol.) partage cette conceptioa des troubles vasculaires.Et c'est ainsi qu'il explique l'action de la corde et les troubles gustatifs qui suivent sa sec- tion. Ce rôle vaso-moteur, il le constata aussi pour le glosso-pharyngien, et il remarqua qu'il exerçait sur la base de la langue une action analogue à celle que la corde du tympan avait sur la partie antérieure. L'action de la corde du tympan est étudiée alors, soit par la section et l'excitation électrique consécutive chez les animaux, soit grâce aux données de l'anatomie patholo- gique et à l'expérience électro -physiologique sur de jeunes animaux : lapin, chien. VuLPiAN {Remarques sur la distribution anatomique de la corde du tympan. A. de P., 1869, II, 209) arrache la partie intra-pétreuse 1 G ^ V II, 209) du facial, jusqu'à sa racine. Dégénéra- tion de la corde du tympan pour la plupart des libres : quelques-unes n'é- taient pas altérées. Vulpian les regarde comme des fibres anastomotiques éma- nées du nerf trijumeau. « En étudiant la partie supérieure du nerf lingual après sa réunion avec la corde du tympan, je reconnus, écrit-il, facile- ment les fibres altérées de ce rameau nerveux au milieu des fibres saines du lingual. Les filets nerveux allant du lingual au ganglion sous-maxillaire con- tenaient un nombre plus ou moins grand de fibres altérées. Mais, au delà des points d'où ces filets se séparent du lingual, c'est-à-dire entre ces points et les extrémités périphériques de ce nei f, celui-ci ne contenait pas une seule fibre altérée. Toutes les branches du lingual se rendant à la langue ont, d'ailleurs, - Hypotlièse de Schifk. D'apros Bimar. V,. Tronc du trijumeau; — G, ganglion de Gasser; — VII, nerf facial. — G. nerf intermédiaire de Wris- sberg; — GN. branche ophtalmique. — 2. Maxillaire supérieur. — 3. Maxillaire inférieur. — Ibidem. Les lignes pointillées représentent les fibres gustatives ; les flèches indiquent leur direction des centres nerveux à la périphérie. été examinées elles-mêmes, et l'on n'y a trouvé que des fibres saines. En laissant de côté toutes les expériences directes, qui témoignent dans le même sens, ces faits dé- montrent donc bien nettement, je crois : i° que les fibres nerveuses de la corde du tympan sont destinées à la glande sous-maxillaire; 2° que la corde du tympan ne fournit aucune fibre nerveuse à la langue, et qu'en conséquence elle ne saurait être en aucnue façon considérée comme un nerf gustatif. » Vulpian, par l'excitation de la corde du tympan avant sa jonction au lingual, provoque de la rougeur et de la congestion de la langue du côté oij portait l'excitation. Il a vu qu'après la section de la corde, lorsque la dégénérescence avait eu le temps de se produire, l'excitation périphérique du lingual ne produisait plus ses effets ordinaires de vaso-dilatation. C'est donc un nerf vaso-dilatateur (i, 157). ScHiFF avait, dès 1851, constaté (Vulpian. Leçons sur l'appareil vaso-moteur, 1875, 1, 153), par l'expérimentation, que la corde du tympan « avait une influence sur les glandes salivaires ». DucHENNE (de Boulogne) {Recherches électro-phys. et pnth. sur les propriétés et les usages de la corde du tympan. Archives générales de médecine, décembre 1860) s'adresse à l'anatomie pathologique et à des expériences électriques pour reconnaître que la corde est nécessaire u la sensibilité générale et à la sensibilité gustative des deux tiers antérieurs de la langue. Contrairement à cette opinion qui rapporte l'action de la corde à une action GOUT. 603 purement vasculaire, les travaux de Stich {Loc. cit.) et de Moos {Innervationstôrungen (hi)'ch Application der kùnstlichen Trommelfells. Centralblalt fur die Med. Wiss., 1867, etc.) tendent à prouver que la plupart des filets nerveux de la corde sont gustatifs. La même opinion semble encore confirmée par les cas de Louis Blau {Ein Beitrag zur Lehre von Fiinction der Chorda tympani, in Berliner klinische Wochemchrift, 1879) et de Mac Bride [Observations on Ear Diseases, in Edimburg Med. Journal, avril 1881). Les physiologistes pratiquent la section de la corde du tympan et ne sont pas tou- joui's d'accord sur les résultats observés. Schiff (Loc. cit.) sectionne les glosso-pharyn- giens, puis le lingual au-dessus de la corde, et voit que les sensibilités générales et douloureuses étaient complètement abolies, tandis que la sensibilité gustative était simplement diminuée en avant. Dans une autre série d'expériences, il sectionne les deux glosso-pharyngiens elles deux coi^des, en respectant le rameau lingual : il remar(|ue dans ce cas une diminution de la sensibilité gustative, alors que la sensibilité tactile était conservée. Concluant dans le même sens que les expériences de Schiff, Lussana et Lnzani (Loc. cit., et Sur les nerfs du goût, observations et expériences nouvelles. Archives de PhysioL, 1892, 150-168) eurent l'occasion d'observer dans un cas clinique une véritable expé- rience de section de la corde du tympan réalisée chez l'homme. Il s'agissait d'un sujet auquel un charlatan avait sectionné la corde du tympan. Le goût était aboli dans les deux tiers antérieurs de la moitié correspondante de la langue. La sensibilité tactile et douloureuse était au contraire bien conservée. Les expériences physiologiques de ces auteurs parlent d'ailleurs dans le même sens. Sur un même sujet, ils pratiquent d'un côté la section du lingual avant que ce dernier ait reçu son anastomose de la corde du tyn)pan; de l'autre côté, après que ce dernier nerf a reçu son anastomose de la corde. Sur un chien, ils pratiquent de la sorte, d'un côté la section du lingual dans la région sous-maxillaire (il s'agit ici du lingual mixte), de l'autre la section du lingual au-dessus de son anastomose avec la corde (il s'agit du lingual simple) : voici, après le choc opératoire passé, les résultats observés. Ils remarquent une abolition de la sensibi- lité générale des deux côtés et la conservation du goiit du côté où la corde n'avait pas été comprise dans la section. Mais ils ne se contentent pas de cette expérience, ils poussent le détail plus loin et instituent une contre-expérience. Sur un chien, ils pra- tiquent la section des glosso-pharyngiens et la section des deux cordes, et voici ce qu'ils obtiennent; la sensibilité gustative fut complètement perdue. La conclusion, qui se dégage de ces différentes expériences, est donc celle-ci : que la corde distribuerait des filets propres réellement gustatifs à la partie antérieure de la langue. V Lussana affirme que le glosso-pharygien est le nerf du goût pour la partie postérieure de la langue; la corde du tympan pour lu partie antérieure. Voici les expériences sur lesquelles il se fonde : I. « Le nerf lingual préside à la sensibilité générale et gustative de la partie antérieure de la langue. » Cas pathologique d'IxzANi, qui, pour une névralgie de la face, sectionna à un homme le lingual du côté de la névralgie. Les deux bases de la langue perçoivent les saveurs, ainsi que la partie antérieure du côté non opéré. Du côté où a porté la section, abolition complète du goût à la partie antérieure de la langue. La section des linguaux sur des chiens amène de l'agueusie, à la partie antérieure de la langue. II. « Le nerf glosso-pharyngien préside au goût dans la partie postérieure de la langue. » Section des glosso-pharyngiens à leur sortie du crâne. Tout d'abord abolition complète du goût. Au bout d'un an, signes manifestes que la chienne percevait les saveurs à la partie antérieure de la langue, et que l'agueusie était complète à la partie posté-- rieure. III. « La faculté gustative de la partie antérieure de la langue, à laquelle préside le nerf lingual, ne dépend pas des fibres propres de la cinquième paire, mais de fibres nerveuses d'une origine différente, qui vont se joindre au nerf lingual. » 604 GOUT. Le cas pathologique de Renzi est celui d'un homme dont la paroi crânienne était détruite par une tumeur. Tout le côté gauche de la face était insensible au tact et à la douleur, tandis que le goût était parfaitement conservé dans toutes les parties de la langue, même à lî partie antérieure gauche, « tandis que celle-ci était complètement insensible à toute espèce d'irritation et de contact mécaniques... Il n'existait pas de lésions d'autres nerfs... » On connaissait d'autres cas pathologiques rapportés par Guenther, Noble, Arnison, Burrows, Vogt, Béraud, et Romberg, dans lesquels le goût était conservé, bien que la sensibilité généralejût abolie, à la suite d'une lésion de la cinquième paire. Opération sur un chien : les linguaux sont mis à découvert, d'un côté section d'un nerf avant sa jonction avec la corde, de l'autre section de l'autre lingual après sa jonc- tion. Du côté où a porté la section de la corde, agueusie complète de la partie antérieure de la langue ; du côté où la corde n'a pas été sectionnée, le goût est parfaitement con- servé à la partie antérieure de la langue. IV. « C'est la corde du tympan qui préside au goût dans la partie antérieure de la langue. » Cas d'une femme à qui un charlatan sectionna la corde du tympan d'un côté. A la partie postérieure, goût conservé; à la partie antérieure et moyenne de la langue du côté opéré agueusie complète; du côté non opéré, conservation absolue du goût. Sur les animaux : sur un chien section des deux cordes du tympan (1862) abolition du goût à la partie antérieure de la langue, conservation à la base. Sur une chienne chez laquelle les deux glosso-pharyngiens avaient été sectionnés, destruction delà corde du tympan des deux côtés au point de son passage dans la caisse. Depuis ce mo- ment, on vit disparaître à jamais tout indice de faculté gustative. Observation de Lussana et de Vanzetti {loc. cit., ii, 20-33) : « Excision du nerf lingual (chez une femme pour névralgie linguale), abolition du goût dans la partie antérieure correspondante de la langue. » Observation de Vizioli de Naples [Movimento medico-chirurgico, Naples, n"^ 34 et 35 de l'année 1864) recueillie par Lussana : « Paralysie du nerf trijumeau; abolition de la sensibilité générale et tactile dans la partie correspondante de la tête et de la langue ; conservation du goût dans toutes les parties de la langue. » Observation tirée du Wiener mediiin. Wochenschrift par AlthaCs : « Paralysie du tri- jumeau; abolition de la sensibilité générale et tactile; paralysie vaso-motrice dans la moitié correspondante de la tête et de la langue; conservation du goût. » Observation de Vizioli, de Naples (n"^ 34 et 35 du Movimento medio ■chirunjico , 1804) : « Paralysie du nerf facial par blessure; abolition du goût dans la partie antérieure cor- respondante de la tète et de la langue. » On constate en somme: Fara'ysie du nerf facial; abolition du goût dans la partie atité- rieiire de la langue. Paralysie du nerf facial; abolition du goût dans la partie antérieure correspondante de la langue. LoxGET {loc. cit., III, 546) exprime une opinion à peu près analogue : « Des observa- tions pathologiques et quelques expériences tendraient à établir leur influence sur la gustation, puisque l'altération du goût aurait été constatée dans des cas où le nerf facial était paralysé ou divisé au-dessus de l'origine de la corde du tympan; mais on est encore loin de s'entendre sur la nature de cette influence, les uns voulant faire de la corde du tympan un nerf moteur, les autres un nerf sensitif, les autres enfin un nerf mixte. » Plus près de nous, Donnell {Double facial paralysy with loss of taste in the forepart of the tangue, The Lancet, 29 mai 1875, 759) a observé un cas de paralysie faciale double avec perte du goût dans la partie antérieure de la langue et conservation de la sensibilité générale. Voici l'observation qu'il rapporte. « Agé de 24 ans, bien portant d'ordinaire, le malade avait contiacté une paralysie faciale sous l'influence du froid et de l'humidité, le nerf facial du côté gauche ayant été compromis avant celui du côté droit. Rien n'indiquait l'existence d'une lésion centrale du cerveau, non plus que l'altération d'aucun autre nerf crânien. Le sens du goût était complètement aboli à la partie antérieure de la langue, ce que l'autf^ur atlribue à la paralysie de la corde du tympan. La perception des impressions tactiles et thermique dans les mêmes points ne présentait pas le moindre afTaiblissement. Les irritants qui, GOUT. 605 chez les sujets sains, augmentent le tlux salivaire, n'excitaient point la sécrétion des glandes sublinguales. Cette abolition du goût dura plus longtemps que la paralysie motrice. » Plaidant toujours en faveur de la même hypothèse, Kiesow et Nadolkczni rapportent récemment les observations et expériences suivantes; elles conceTnent deux cas mis à leur disposition par G. Gradenigo, de Turin. Observation I. — Il s'agit d'abord de l'observation (Kiesow et Nadoleczni, Siiv la phy- siologie de la corde du tijmpan : Archivio italiano di Otologia, Rinologia e Laringologia, vol. X, fasc. 3) d'un sujet atteint d'otite moyenne purulente chronique gauche; lîi ans, écolier. Dans une opération curative on extrait le marteau entouré de granulations, mais non carié; aucune trace de l'enclume; curettage de la caisse et des cavités annexes. Suture complète de la blessure rétro-auriculaire. Lors du passage d'un stylet dans la caisse, le malade dit que, lorsqu'on touche un point déterminé, il persiste nettement une saveur acide métallique sur la moitié antérieure latérale gauche de la langue. Le phénomène ne se produit pas lorsqu'on touclie d'autres parties. Le point dont l'attouchement donnait lieu à la sensation gustative correspondait à la partie postérieure du cadre tympanique, et il semblait correspondre à l'endroit où la corde sort de l'os temporal. En répétant les attouchements avec le stylet, l'intensité de la sensation diminuait; si les attouchements étaient pratiqués avec] force, des douleurs apparaissaient dans les régions du second et du troisième rameau du trijumeau avec irradiation spéciale aux nerfs dentaires supérieurs et au rameau auriculo-temporal. Le plus souvent les douleurs étaient localisées aux deux dents molaires antérieures de la mâchoire supérieure. La saveur accusée était constamment acide ou acide métallique. Ces sensations pouvaient être provoquées non seulement avec des excitations tacti- les, mais encore avec des excitations électriques. L'examen tactile et doloriflque de la langue montra que ces deux sensibilités étaient normales partout, tandis que l'examen des quatre sortes de goût et du goût électrique fit reconnaître un territoire coinplctement unesthésique, qui s'étendait à gauche (côté cor- respondant de l'oreille malade) sur le bord'de la langue, depuis la 7'egio foliata jusqu'à sixousept millimètres de distancede la pointe. Partoutailleurs lasensibilitéétaitnormale. Obs. II. — Observation d'un sujet attei:it d'otite moyenne purulente chronique bilaté- rale; fils de paysan, 15 ans. A gauche un stylet touchant un point déterminé dans le recessus épi tympanique à la périphérie et un peu en avant provoque des excitations de la corde du tympan. « Le contact sur ce point provoque une légère sensation gustative camparable à celle pro- duite par l'eau de seltz (acide, piquant) ». En touchant ce point avec une solution iodo- iodurée à 1 p. 100, une fois la même sensation fut provoquée, une autre fois une saveur acide au bord gauche de la langue en avant de la regio foliata. Le badigeonnage avec du laudanum provoque, « sur la partie gauche de la langue, une impression comme de chair morte; Tattouchement avec de l'alcool à 45 p. 100 produit une sensation de frais et de contact sur la superficie inférieure de la langue ; puis, deux minutes plus tard, à gauche, une saveur salée. Avec le badigeonnage au moyen d'une solution concentrée de sulfate de quinine, perception à la langue d'une sensation de brûlure, qui diminue aussitôt après. » « L'examen du patient, relativement à la sensibilité tactile et à la sensibilité dolorifique sur la langue, fournit partout des données normales. L'examen du goût laisse reconnaître à gauche un territoire complètement anesthésique, qui s'étend de la région fohée à la pointe de la langue, tandis que la moitié droite de la langue, sur la même extension montre une diminution de la sensibilité pour les quatre qualités de goût. Le goût est normal sur le voile du palais et sur les piliers palatins antérieurs. » Outre ces deux cas, Kiesow a examiné dix autres malades, qui soit à la suite d'une opération radicale dans l'oreille moyenne, soit après l'extraction du marteau, avaient perdu la pouvoir gustatif dans la partie correspondante de la langue. Ces cas four- nissent essentiellement les mêmes données que celles des cas précédents. 606 GOUT. On pourrait expliquer la présence des sensations gustatives à la suite de l'excitation de la corde dans l'oreille moyenne, par le fait que rextrémité central de la corde a été stimulée. La lésion de la corde du tympan l'empêcherait de transmettre les excitations maxima adéquates; tandis qu'elle pourrait encore servir comme le canal des excita- tions inadiquates, d'où la perception gustative grâce au centre nerveux : Kiesow et Na- DOLECZNi remarquent avec raison que l'apparition de toutes les qualités gustatives par l'excitation directe de la corde n'avait pas été observée jusqu'à présent; ils se sou- viennent néanmoins des cas confirmatifs de Urbantschitsgh et de Blau. « Pour ce qui concerne, écrivent ces auteurs, les sensations tactiles et thermiques que l'on provoquée la langue avec l'excitation de la corde, on doit pensera des réflexes, du trijumeau. La sensibilité tactile n'était pas altérée du côté respectif de la langue; de même, nous avons constaté que la sensibilité pour la température se comporte d'une manière normale. » Sur un sujet on observe après l'extraction du marteau la perte, « du côté correspondant de la langue, de la sensibilité gustative, dont l'existence avait été constatée auparavant. « Le sens de la température était bien conservé dans les deux moitiés de la langue et de même la sensibilité tactile recherchée minutieusement avec le thermo-esthésiomètre de KiEsow, avec l'appareil de Frey et avec les pinceaux. Il ne fut pas même possible de reconnaître une diminution de la sensibilité dolorifique. " On pourrait inférer de laque la corde ne porte pas constamment des fibres tactiles ou dolorifiques ou thermiques, ou bien que, dans le cas de diminution de sensibilité tac- tile dans les lésions de la corde, le trijumeau a été alïecté en quelque manière, tandis que la corde ne contient d'ordinaire que les fibres gustatives. Enfin les sensations dolori- fiques qui, aux attouchements de la corde, apparurent sur les dents molaires et sur la langue, devraient être d'un intérêt tout spécial. Les douleurs, lancinantes dans la lan- gue, de même que l'odontalgie signalée quelquefois, dépendent certainen)ent de re'flexes du trijumeau. Elles ont été observées aussi par Urbantsghitsch, et vraisemblablement ces réflexes déterminés expérimentalement doivent être mis en relation, soit avec les dou- leurs d'oreille souvent irradiées, c'est-à-dire avec l'otalgie provoquée par la carie den- taire, soit avec les otalgies que l'on observe dans les maladies de la langue (carcinome et abcès). » Dans ces observations, on note des troubles de la sensibilité gustatice et l'intégrité des autres sensibilités, soit tactile soit thermique, soit à la pression. Il semble ainsi que la corde du tympan contienne uniquement des filets affectés à la gustation. Une observation faite par Vaschide et Marchand (Ariesthésie gustative et hypoesthésie tactile par lésion de la corde du tympan. Comptes rendus des séances à la Société de Biologie, séance du 29 juin 1901) semble au contraire parler en faveur de l'existence dans la corde du tympan non seulement de filets affectés à la gustation, mais encore de fibres nerveuses affectées à la sensibilité générale. Comme pareilles observations attribuant un rôle de sensibilité générale à la corde du tympan sont rares, nous citons in extenso, en raison de son importance physiologique, ce cas minutieusement observé : Il s'agit d'une jeune fille de 18 ans, qui a souffert depuis l'âge de 7 ans d'une otorrhée du côté gauche. L'écoulement d'oreille persiste encore. Elle a subi, il y a 3 ans, l'opération du trépan au niveau de l'apophyse mastoïde. A la suite, il lui est resté une contracture faciale gauche, qui disparut en quelques semaines. L'examen du conduit auditif montre une destruction presque ^totale de la membrane du tympan du côté gau- che; la surdité est absolue de ce côté. La sensibilité gustative a été mesurée avec le guesi-esthésimètre de Toulouse et Vaschide. Au niveau du V lingual, la sensibilité tactile et gustative est conservée également des deux côtés. Voici le résultat des expériences pratiquées sur les deux tiers antérieurs du dos de la langue. C Ô T É D R O I T C Ô't É G A U C II E Sensation. Perception. Sensation. Perception Saveurs salées. ... 4 p. 100 S p. 100 0 0 — acideî5. ... 1 p. 1 000 1 p. 100 0 0 — sucrées. . . 1 p. 1000 1 p. 100 0 0 — amères ... 1 p. 10000 1 ]). 1 000 0 0 GOUT. 607 La sensibilité guslative est donc normale pour toutes les saveurs dans la moitié droite de la surface supérieure de la langue, tandis que dans Ja moitié gauche on constate une agueusie complète pour toutes les saveurs. La sensibilité tactile de pression a été mesurée avec l'haphi-esthésimètre de Toulouse et Vaschide. On constate pour elle une diminution notable dans les deux tiers de la moitié gauche de la langue. Ci-joint les chiffres correspondant aux mini ma perceptibles. CÔTÉDROIT CÔTÉ GAUCHE 1 milligi-amme et demi. 7 milligrammes. La sensation provoquée par un courant électrique est obtuse aussi du côté gauche de la langue (2/3 antérieurs). Il fallait, par rapport au côté sain, doubler l'intensité du cou- rant pour obtenir du côté malade la sensation de piqûre caractéristique. Il semble donc résulter de notre observation que la corde du tympan contient les fibres gustatives des deux tiers antérieurs de la surface supérieure delà langue, et qu'en outre elle contient des filets de sensibilité générale, ce qui expliquerait la diminution notable des sensations tactiles du côté gauche de la langue. Toulouse et Vaschide ont montré que les nerfs gustatifs de la langue ne paraissent pas avoir des fonctions diffé- rentes; qu'ils sont capables de transmettre, à des degrés divers, il est vrai, les différentes saveurs; et que la corde du tympan et le (jlosso-pharyngien peuvent être considérés comme des nerfs ayant des fonctions semblables. Ce fait que la corde du tympan sem- ble aussi contenir des filets de sensibilité générale est à rapprocher des résultats expé- rimentaux, qui montrent que le glosso-pharyngien contient aussi des fibres pour la sensibilité générale. Il permettrait de supposer que la corde du tympan aurait des filets sensitifs généraux provenant du nerf intermédiaire de Wrisberg. L'opinion de Mathias DuvAL, montrant qu'un même noyau dans le bulbe reçoit les ramifications terminales des neurones sensitifs périphériques, qui forment le nerf de Wrisberg et le glosso-pha- ryngien, est conforme à nos constatations. Grasset et Rauzier partagent, dans leur classique Traité des maladies du système ner- veux, une opinion presque analogue au sujet du rôle gustatif de la corde du tympan dans les paralysies faciales : « Pour le moment, il semble être démontré par les observations recueillies scientifi- quement que les troubles du goût apparaissent dans la paralysie du facial, quand la lésion est placée assez haut au-dessus de l'origine de la corde du tympan, et ils devien- nent ensuite beaucoup plus rares, quand la lésion siège encore plus haut du côté des centres. » (Grasset et Rauzier, loc. cit., ii, 443.) VI Mais ces expériences, qui semblent très nettes et très catégoriques, sont contredites par l'observation de Cxrl {Ein Beitrar/ zur : E^ifhùlt die Chorda tympani Geschmacksfasern? Archiv fur Ohrenheilkunde, 1875). Ce médecin à la suite d'une otite moyenne survenue sur lui-même eut le goût aboli pour les saveurs, le tact étant conservé. Il put donc suivre son observation sur lui-même avec toute la finesse et tout le détail désirables. Malheureusement les constatations anatomiques ne purent pas avoir la même rigueur et restèrent hypothétiques. Chez lui, le facial, le trijumeau et la corde du tympan n'étaient pas lésés. 11 semble résulter de cette observation que la corde n'a pas de filets gustatifs. Un autre argument parlant dans le même sens que l'observation de Carl est tiré de l'étude des dégénérescences nerveuses consécutives à des sections de nerfs. Lussana (loc. cit.), sectionnant le lingual chez des animaux n'observa pas de dégénérescences con- sécutives récurrentes dans la corde du tympan. Enfin une autre preuve est tirée de la réaction aux excitations mécaniques ou électriques. L'excitation soit électrique, soit mécanique du bout central de la corde du tympan ne provoque aucune réaction soit de sensibilité générale soit de sensibibilité gustative. Pour Prévost {Recherches anato- miques et physioloyiciues sur le ganglion sphèno-palatin, Archives de Physiologie, 1868. — Nouvelles expériences relatives aux fonctions gustatives du nerf lingual, Archives de Phy- 608 COUT. siologie, 1873), la corde ira donc presque pas d'influence sur le goût. Ce physiologiste fait porter ses expériences sur le lingual, afin de voir si la physiologie peut démontrer l'existence de lilets gustalifs dans ce nerf. Voici les quelques expériences de J.-L. Prévost, et les conclusions qu'il se croit en droit de pouvoir formuler : « Eàp. VII (faite avec Déjertne). Jeune chat. Section des deux glosso-pharyngiens. Section des deux cordes du tympan dans l'oreille moyenne. Conservation avec affaiblis- sement du goût. Uégénération des glosso-pharyngiens et de la corde du tympan. Fibres nerveuses dégénérées dans les branches terminales du lingual, et la muqueuse de l'extré- mité de la langue. Corde du tympan saine à son émergence du facial, constituant donc son bout central. Exp. VIII (faite avec Favrot). Chatte. Section des deux glosso-pharyngiens, des deux cordes du tympan. Perte du goût. Dégénérations des cordes du tympan. Exp. IX (faite avec Déjerine). Chat. Section des deux cordes du tympan daus l'oreille. Fibres nerveuses dégénérées trouvées dans les branches terminales du lingual et l'épais- seur de la muqueuse recouvrant l'extrémité de la langue. Corde du tympan saine à son émergence faciale. Exp. X (faite avec Déjerine). Chat. Section des glosso-pharyngiens. Nerfs dégénérés dans les papilles caliciformes. Les branches terminales du nerf lingual sont intactes. Exp. XI, XII, XIII (faites avec Reverdin). Rats. Arrachement du facial droit. Dégéné- ration de la corde du tympan. Fibres dégénérées trouvées dans les rameaux terminaux du lingual et dans la muqueuse de la langue. Exp. XIV. Cochon d'Inde. Arx^achement du nerf facial. Dégénération de la corde du tympan. Des fibres dégénérées sont trouvées dans les branches terminales du lingual et dans la muqueuse linguale du côté correspondant. » De ses expériences cet auteur croit pouvoir^conclure que : « 1° L'ablation des deux ganglions siphè no -palatins n'amène pas chez le cbien et le chat de modification sensible relativement aux fonctions gustatives des parties de la langue animées par le nerf lingual. (Prévost J.-L. Nouvelles expériences relatives aux fonctions gustatives du nerf lingual, Archives de Physiologie normale et pathologique, \S12.) 2° Après la section des cordes du tympan, faite chez des chiens et des chats privés des glosso-pliaryngiens, le goût a été peu modifié dans certains cas, notablement dimi- nué dans d'autres, et comme aboli dans un cas. Nos résultats ne nous permettent pas de spécifier le rôle que la corde du tympan joue relativement aux fonctions du goût. Nous inclinons cependant à ne lui accorder qu'un rôle accessoire. 3° Contrairement aux anciennes observations de Vulpian, et conformément aux recherches plus récentes de cet observateur, nous avons trouvé que la corde du tympan envoie des filets aux branches terminales du lingual, ainsi qu'à la glande sous-maxillaire. Nous avons trouvé après la section de la corde du tympan faite chez le chat, le chien, le rat, le lapin, le cochon d'Inde, des filets nerveux dégénérés, soit dans les branches ter- minales du lingual, soit dans la muqueuse de la langue, soit dans le nerf de la glande sous-maxillaire. 4° La corde du tympan n'a pas de centre trophique dans les papilles de la langue, et si le ganglion sous-maxillaire agit sur elle comme centre trophique, cette influence doit du moins être limitée. Après la section de la corde du tympan faite dans l'oreille, le bout central de ce nerf (du côté de son émergence faciale) reste sain. » C'est également l'opinion de Schiff. « Après la section du maxillaire inférieur faite avant que la corde se joigne au lingual, il a trouvé le goût intact dans les parties anté- rieures de la langue. Après la section du maxillaire supérieur au-dessus des rameaux qui se rendent dans le ganglion sphéno-palatin, il a constaté l'abolition du goût, surtout pour les acides, la sensibilité générale étant conservée. Après la section du nerf vidien et l'arrachement du prolongement postérieur du ganglion sphéno-palatin, il a égale- ment constaté la perte complète du goût, surtout pour les acides. » (Gley. Article Gus- tation in D. D., 4" série, xi, 1886, p. C26.) GOUT. 609 Vil Telles sont les idées en cours au sujet du rôle des troncs nerveux dans la physiologie des impressions gustatives. Mais ces troncs nerveux périphériques, qui s'étaient présentés à nous isolés, suivent eux-mêmes plusieurs voies pour arriver à leurs centres nerveux. Ces centres nerveux doivent donc être précisés dans leur topographie. Cette partie de l'étude physiologique est encore soumise à plus de controverses (jue celle que nous venons de faire. Voici, brièvememenl résumées, les nombreuses conceptions et manières de voir émises sur ce sujet. Le trajet du glosso-pharyngien et du lingual se poursuit en un tronc nerveux continu jusqu'au bulbe et à la protubérance. Mais il n'en est pas de même de Vanastomose importante, qui relie le facial au lingual, corde du tympan, sur laquelle nous avons longuement insisté dans notre description anatomique précédente et sur laquelle nous ne vouions pas revenir ici. Tous les trajets plus ou moins compliqués pouvant être suivis par la corde ont eu leurs défenseurs, les uns la mènmt au bulbe par te nerf intermédiaire de Wrisberg, d'autres par le trijumeau, d'autres par le glosso-pharyngien. Étudions successivement les arguments invoqués par les différents auteurs pour étayer le trajet qu'ils lui imposent. I. Le chemin suivi est le nerf intermédiaire de Wrisberg. — C'est d'abord l'anatomie clinique qui donna à penser que le chemin suivi était le nerf de Wrisberg. Cusgo {Re- cherches sur différents points d'anat., de phys. et de path. Thèse inaugurale, Paris, 1848), DocHKNNE de Boulogne [loc. cit.), et Lussana {lac. cit.), observèrent des cas de paralysie faciale sans lésion du trijumeau, s'accompagnant de troubles gustatifs. De plus, Lussana observe qu'on ne relève de troubles du goût que lorsque la lésion touche le facial après sa jonction avec le nerf de Wrisberg et avant que la corde du tympan se soit séparée du tronc nerveux. En deçà ou au delà les lésions analomiques ne retentissent pas sur l'organe du goût, et ne produisent pas à leur suite de troubles dans la perception des saveurs. Comme, d'autre part, le facial est un nerf exclusivement moteur, sur lequel on ne trouve pas la caractéristique des nerfs sensitifs, le ganglion, ils en conclurent que le chemin suivi dans ce cas ne pouvait être que le nerf accolé au facial, qui devait être pris dans la même lésion : c'était le nerf intermédiaire de Wrisberg, sur le trajet duquel ou trouvait la caractéristique du nerf sensitif, le ganglion, qui ici était le ganglion géniculé. Néanmoins des physiologistes s'élevèrent contre cette manière de voir. C'est d'abord Cl. Bernard {loc. cit.), qui prétend que l'intermédiaire nest pas une branche sensitive. Il sectionne le facial et le nerf de Wrisberg, puis il pratique des pincements, des tiraille- ments qui ne provoquent aucune réaction de douleur chez l'animal. Lorsqu'on tiraille un nerf réellement sensitif, on obtient des cris de douleur, et cela d'une façon constante, ce qui n'a pas lieu ici. Le nerf de Wrisberg n'est donc pas sensitif. Quant à la présence du ganglion géniculé, il ne faut pas s'en laisser imposer par son existence. Car sur le trajet des nerfs sympathitiues on trouve toujours des ganglions. Pour Cl. Bernard l'inter- médiaire serait le filet le plus élevé, intra-crânien, de la longue chaîne sympathique, et non un nerf sensitif. Une expérience de Vulpian {Expériences ayant pour but de déterminer la véritable origine de la corde du tympan. Gaz méd. de Paris, 1878) parle dans le même sens. Ce phy- siologiste sectionne le facial avec le nerf de Wrisberg dans l'intérieur du crâne. 11 étudie les dégénérescences consécutives à la section et constate que les fibres dégénérées sont celles du facial et non celles de la corde du tympan. Il établit alors une contre-expérience, qui mène à la même conclusion; il sectionne le trijumeau intracranien, et constate, à la suite, de la dégénération des fibres de la corde, et nullement de celles du facial, qui restent absolument indemnes. Voilà des expériences qui semblent nettes et démonstratives. Cependant le même auteur donne des résultats d'expériences qui, apparemment du moins, semblent parler dans un sens absolument opposé. Il pratique l'électrisation du tronc du trijumeau, et DICT. UB PUYSIOLOGIK. — TOMK SU. 39 610 GOUT. dans ces conditions il n'obtient ni salivation, ni vaso-dilalalion, réactions ordinaires des perceptions gustatives. Voici encore une autre expérience, qui semble corroborer cette dernière manière de voir. L'auteur électrise le facial intracranien et voit des effets analogues à ceux que produit l'électrisation de la corde. Le cbemin suivi par la corde est donc le nerf deWRisBERG, qui se trouve èlectrisé lors de l'électrisation du bout central du facial intracranien, ce dernier nerf étant purement moteur et ne pouvant pas provoquer de réactions sensitives. Une observation anatomo-clinique parlait également dans le même sens. Il s'agissait d'une hémiplégie alterne, entraînant un affaiblissement dans la gustation du côté du facial paralysé. De son côté, Mathias Duval {Recherches sur l'origine réelle des nerfs crâniens. Journal de Vanat. et de la phxjsiologie, 1880), se basant sur des travaux anatomiques pour- suivis parallèlement sur l'homme, le singe et d'autres animaux, est conduit à supposer que le nerf de Wrisberg n'est, d'une part, que la continuation de la corde du tympan, " et d'autre part n'est lui-même qu'un filet du glosso-pharyngien. Ces mêmes résultats sont encore affirmés par Bigelow [The Brain, avril 1888) qui a pratiqué l'expérience suivante : il a coupé l'intermédiaire de Wrisberg dans l'aqueduc de Fallope, derrière le ganglion géniculé, et il obtint comme résultat de cette section l'abolition du goût. Au point de vue anatoniique, Spitzka [Neio-York médical Record, 31 janvier 1880, cité par Gley, loc. cit., 626) parle en faveur de cette conception, en refusant de voir l'origine de l'intermédiaire dans la colonne des noyaux moteurs du bulbe, et en la plaçant dans la colonne sensitive, qui suit en bas la colonne grise des racines du trijumeau. « Il con- vient, écrit Gley (article Gustation, in D. D., (4), xi, 620, 626), d'ajouter que ces faits semblent recevoir une confirmation sérieuse des recherches de Spitzka, sur la véritable origine du nerf de Wrisberg ; cette origine ne serait pas dans la colonne des noyaux moteurs du bulbe, mais dans la colonne sensitive, qui fait suite au noyau du triju- meau. » (Gley, Ibidem, 620.) Les travaux anatomiques de Mathias Duval placent en outre l'origine de l'intermé- diaire de Wrisberg dans les parties grises sensitives, et parlent dans le même sens. II. Le chemin suivi est le trijumeau. — Nous venons de signaler dans le chapitre précé- dent deux expériences de Vulpian [loc. cit.) semblant parler en sens différent. L'une, basée sur la dégénérescence consécutive aux sections nerveuses, montre des fibres dégé- nérées dans la corde à la suite de la section du trijumeau intracranien, ce qui semblerait indiquer que le trajet suivi par la corde est le trijumeau. D'autre part, l'électrisation du tronc du trijumeau ne produisait pas les réactions habituelles consécutives aux per- ceptions gustatives. ScHiFF [loc. cit.) relate une expérience qui semble indiquer que le chemin suivi par la corde est le trijumeau. Il sectionne le trijumeau intracranien et note l'abolition du goût dans la partie antérieure de la langue, dans la même zone que lorsqu'il s'agit d'une section de la corde, puis il coupe le glosso-pharyngien et obtient une abolition complète du goût. Certaines constatations et observations cliniques amènent aux mêmes conclusions; c'est en particulier cette remarque que souvent les lésions pathologiques du ganglion de Casser s'accompagnaient de perte du goût en avant de la langue, constatations qui semblent confirmées pai- plusieurs expériences de Vulpian développées dans le chapitre précédent. Donc, pour Schiff, les impressions qui empruntent le chemin de la corde suivent ensuite le trajet du trijumeau pour arriver jusqu'aux centres nerveux. Mais, pour arriver de la corde au trijumeau, quelle voie empruntent-elles ? Là encore des expériences de physiologie ont servi à préciser les voies nerveuses suivies pour aller de la corde au trijumeau. Il pratique la section du maxillaire inférieur avant la jonction de la corde au lingual, et il remarque que le goût est intact : il pratique alors la section du maxil- laire supérieur au-dessus du ganglion sphéno-palatin et observe des troubles du goût. Puis il pratique la section du nerf vidien, et il arrache le prolongement postérieur du ganglion sphéno-palatin; il obtient consécutivement à ces expériences l'abolition du COUT. (ill goût. Que conclure de ces expériences ? C'est d'abord que les fibres de la corde ne suivent pas le maxillaire inférieur, mais bien le maxillaire supérieur, et pour y parvenir suivent la voie du nerf vidien et du ganglion sphéno-palatin. Le trajet parcouru de la sorte serait donc le suivant : lingual périphérique, corde du tympan, facial ganglion géniculé, grand pétreux superficiel, nerf vidien, ganglion sphéno-palatin, maxillaire supérieur, ganglion de Casser, trijumeau. « 1° Les fibres gustatives (Sciiiff, Origine et parcours des nerfs giislatifs de la partie antérieure de la langue. Semaine mcd., 29 décembre, 1886. Anal, par A.-C. in R. S. M.- 1887, XXXIX, 403) de la partie antérieure de la langue ne proviennent pas originaire- ment du facial; 2" Elles quittent le cerveau avec la racine du trijumeau; 3" Elles suivent d'abord la deuxième branche de ce nerf; 4° Elles se rendent ensuite par les nerfs sphéno-palatin et grand pétreux superficiel à la partie coudée du facial; 5° Elles rejoignent enfin la troisième branche du trijumeau en partie par la corde du tympan, en partie, et surtout par le nerf petit pétreux superficiel. » Mais les expériences, sur lesquelles était basé ce trajet ainsi décrit, ont été absolu- ment contredites par les recherches d'ÀLCocK {loc. cit.) et de Prévost (loc. cit.). Ces auteurs arrachent les ganglions sphéno-palatins et n'obtiennent aucun trouble du goût. J.-L. Prévost pratique sur un chien l'ablation des deux ganglions sphéno-palatins : « le goût est conservé. Ou donne à l'animal un morceau de viande recouverte de quelques gouttes de solution alcoolique de vératrine; il le met dans sa bouche, le rejette immé- diatement, donne des signes de dégoût en secouant sou museau et en le frottant de ses pattes. » (Prévost. Recherches anatomiques et physiologiques sur le ganglion s/)/it'»o- Î5a/fl>, était donné par l'odorat. Cette constata- tion établissait expérimentalement la relation étroite qui existe entre legoût et l'odorat, relation que mirent ultérieurement toujours plus en lumière le& études de Longkt [Traité de Physiol., 3« édit., 2« tirage, 56, de BhicLARD [Traité de Physiol.,T édit., Paris, 1884, 364) &30 G O U T. et d'E. Gley et Ch. Richet {Sur la saveur vireuse de l'aconitine, Comptes rendus de la Société de biologie, 18 avril 188oj. D'autre pari, Vernière établissait, dès 182T, la nature purement tactile d'un grand nombre d'impressions réputées jusqu'alors sapides [Mémoire sur le sens du goût, Journal des Progrès, 1827). Seuls peuvent être considérés comme sapides les corps rentrant dans une cate'gorie bien définie. On les peut classer, d'après Chatin , selon quatre méthodes : méthode naturelle, méthode chimique, méthode électrique, méthode sensorielle. Camerianus, Hoff- mann, Linné, De Jussieu, Pyrame de Gandolle ont suivi la méthode naturelle. Les plantes d'une même famille, les animaux d'un même ordre jouissent, d'après cette méthode, des mêmes vertus, des mêmes caractères organaleptiques. Il nous semble inutile d'insister pour montrer que cette méthode, appliquée à la classification des sen- sations gustatives, est inacceptable. Elle se fonde, en effet, sur un principe faux. Chevreul, Bain acceptent la méthode chimique. Bain fait remarquer que le goût d'un sel est déterminé par la base plutôt que par l'acide. Cette méthode ne tient pas compte du fait évident que des corps chimiquement différents ont pourtant le même goût. Le sucre, la glycérine, l'acétate de plomb ont une saveur sucrée; la quinine, l'antipy- rine, le sulfate de magnésie ont une saveur amère. La chimie ne peut, selon Graham, que distinguer les corps sapides des corps insipides. A priori, les cristalloïdes sont sapides, et les colloïdes sont insipides. RosENTHAL {Ucber den elecktrischen Geschmack, Arch. fur Andt. und PhysioL, 1860) a adopté la méthode électrique qui offre les mêmes causes d'erreur que la méthode chimique. Le courant décompose les sels : l'acide se porte au pôle positif, la base au pôle négatif. La méthode sensorielle fut employée pour la première fois par Gmelin. « Rien de plus empirique, écrit Chatin {lac. cit., 181); on note les saveurs des corps, on rap- proche ceux qui paraissent offrir à cet égard les mêmes propriétés; on donne à chacun de ces grands groupes le nom d'un des corps les plus remarquables ou les plus usuels qu'il renferme; on cherche à réunir celles de ces familles qui semblent le moins éloi- gnées et la classification se trouve établie. » Inzani et Lussana {Sui nervodel gusto. Aiin. universali di med., août 1862) ont classé les saveurs selon la valeur nutritive des corps qui les déterminent. Le défaut de cette méthode est que Ton est forcé de confondre dans un même groupe des substances toxiques et des substances alimentaires. Bain [Les sens et V intelligence, 1889 , reconnaît six sortes de saveurs : la sucrée, l'amère, la saline, l'alcaline, l'acide ou aigre, l'astringente. G.MELix ajoute à ces six espèces de sensations gustatives une septième : le goût ai'dent (moutarde, poivre, etc.). Mais ces sensations sont d'ordre tactile. Les sensations acides, salées et alcalines ont paru dépendre aussi de la sensibilité générale. (Zenneck. Die Geschmackserscheinungen. Repertorium fur die Pharm. von Bughner. Nuremberg, 1839. — Valentin. Le/irÔMc/t der Phys. des Menschen, Braunschweig, 1848.) Pour WuNDT {lac. cit., i, 432), le goût est un sens encore imparfaitement formé. Il est en relation constante avec l'olfaction, et aussi avec la sensibilité tactile. D'où un très grand nombre de combinaisons possibles. Wundt reconnaît pourtant six sensations gustatives : l'acide, le doux, l'amer, le salé, l'alcalin et le métallique. Mais ces sensations, en se combinant entre elles, en se joignant aux sensations olfactives, peuvent donner un nombre extrêmement considérable de combinaisons : sensations d'astringence, sensation de mou, etc. C'est au tact, par exemple, qu'appartiennent les sensations causées par les corps froids, alcalins, astringents, les prétendues saveurs gommeuses et farineuses. La ques- tion fut longuement discutée à propos des saveurs acide et salée. Zenneck [Die Gesch- mackserscheinungen, Repertorium fur die Pharm. von Bughner, Nuremberg, 1839), les attribue à la sensibilité générale ; Valentin [Ouvr. cité) se range à cette opinion, que Mathias-Duval [Leçons sur la Physiologie du système nerveux, Paris, 0. Doin, 1883), adopte, en ramplifiant, et en déniant aux sensations gustatives, en général, toute spé- cialisation. Pour cet auteur, le goût ne parait pas constituer une sensibilité spéciale, car beaucoup des sensations produites sur la langue peuvent être tout aussi bien déter- minées sur d'autres muqueuses ou sur telles parties de la peau. GOUT. 631 ce ai > m H Q Z O H < O «3 < O <î Q z a Saveurs agré- ables. Saveurs désa- gréables. Saveurs ^ inter- 1 salé mé- (acide diaires. ' Le goût ar- dent. 1. Von ViNTscHGAU donne une classification à peu près analogues à celle de Bain; il ajoute la saveur métallique. 2. Inzani et Lussana classent d'après leurs valeurs nutritives ou non nutritives, 3. Pour RoiKiET et Bimar il n'y a que deux saveurs : l'awie)- et le dor(x ; ïacide et le salé sont des saveurs mixtes ou pseudo-saveurs : sensation et contact chimique (Rod«et). H P Z Acide. Doux. Amer. Salé. Alcalin. Métallique. < CQ Sucré. Amer. Salin. Alcalin. Acide. Astringent in 00 La saveur acide n'est pas perçue indis- tincte- ment sur toute la surface buccale ; seu le- ment où il y a des papilles,.. •^ •^ co M N Z Z (1848). MATHIAS DUVAL (1883). L'acide, le salé et l'alcali sont des sensations ap- partenant à la sensibilité géné- rale. a; z C-l X Beaucoup des impressions sapides sont uniquement tactiles com- me par exem- ple les im- pressions d'âcreté, dlrritation et d'astrin- gence. > 'A 0 X 1° Les corps sapides qui agissent par l'in- termédiaire du tact par exemple : glace, cristal, roche, etc. 2° Les corps sapides qui agissent sur le tact et en même temps sur l'odorat (par exemple : mé- taux odorants). 3° Les corps agissant sur le tact et sur le goût en même temps (par exemple : chlo- rure de sodium). 4° Les corps qui agis- sent sur le tact, sur le goîit et sur l'odo- rat (par exemple : les huiles volatiles). ■K Z Z Douces. Acres. Grasses. Styptiques. Visqueuses Salées. Aqueuses. 0 «3 Le fade. Le doux. L'amer. L'acide. L'acerbe. L'àcce. Le salé. L'urineux. Le spiri- tueux. L'aroma- tique. Le nau- séeux. Le putride. -« ^ m L'acide. Le doux. Le salé. L'acre. L'alcalin. Le vineux. Le spiri- s 43 Z S j «s 0 L'austère. L'acerbe. L'amer. Le salé. L'acre. L'acide. Le doux. .^ 5-1 co -* :C «0 t~ 00 C: = ^ £1 632 GOUT. Cette théorie fut combattue par Schiff [Physiologie de la Digestion, 1866, i, 81), qui put se convaincre, en appliquant sur une plaie de vésicatoire diverses substances sapides. que les sensations produites ne participaient en rien de la gustation; par Stich {Ueber die Schmeckkarbeit der Gase, in Annalen des Cfiarité-Krankenhaiiscs, Berlin, 1867), qui démontra que la saveur acide n'est perceptible pour le sujet étudié que si la solu- tion est appliquée sur une partie de la surface buccale pourvue de papilles gustative ; par FiCK [Lehrbuch der Anat. und PhysioL der Sinnes organe, 1864 et Von Vintschgau {Beitnige zur Physiol. des Geschmacksinnes, dans le Handbuch der Physiologie de Hermann, m, (2), Leipzig, 1880), dont les expériences ont établi en fait, que les acides et les sels s'ils provoquent en solutions concentrées des sensations tactiles et une excitation des nerfs sensitifs généraux, n'agissent que sur les nerfs du goût lorsqu'on les emploie en solutions diluées. Toutes les investigations ci-dessus relatées semblent donc bien établir la spécialisa- tion des sensations d'acide et de salé, et leur caractère guslatif, ainsi que la dissociation possible des sensations gustatives et tactiles (Cf. Longet, Observation de lésion de la sensibilité tactile de la langue avec persistance de la sensibilité gustative. Traité d'anat. et de Physiol. du syst. nerveux, ii, 198, 234. Spring, Symptomatologie, Bruxelles, 1870), Cette dissociation est encore attestée par les expériences de Klaatsch et Stich [Ueber das Gef'ûhl im Munde mit besonderer Riicksicht auf Geschmack. Arch. f. Pathol. Anat. und Physiol., XVII, 1859). Il faut encore mentionner, à propos de la question de savoir si les sensations d'acide et de salé appartiennent au goût ou au tact, la théorie du professeur Rouget, développée par BiMAR [Etude physiologique sur le sens du goût, Montpellier, 1875, 15 et 16) et P. Lannegracr (Termmaiîons nerveuses dans les muscles de la langue et dans sa membrane muqueuse, anatomie et physiologie, Paris, 1878, p. 39). Rouget tient l'acide et le salé pour des « sensations de contact » exquises, particulières à la langue; pour des saveurs mixtes, ou pseudo-saveurs qu'il propose de désigner sous le nom de « sensations de contact chimique )>. Pour Bimar (expériences avec le chlorure de sodium, le chlorure de potassium, l'acide oxalique), elles formeraient transition entre les sensations tactiles et les sensations gustatives, et les seules saveurs véritables seraient l'amer et le doux. Nonobstant l'ingéniosité de l'argumentation des auteurs, les physiologistes recon- naissent presque unanimement quatre sortes de sensations gustatives : les sensations sucrées, amères, salées et acides, et cette classification, pour imparfaite qu'elle soit, est encore la plus acceptable qu'on ait proposée jusqu'à ce jour. Elle est le fruit de la méthode dite d sensorielle » dont on doit l'ébauche à Gmelin, et l'emporte de beaucoup en simplicité et en excellence relative sur les méthodes naturelle (Camerianus, Hoffmann, Linné, de Jussieu, Pyrame de Candolle), chimique (Chevreul), électrique, (Rosenthal) et les classifications d'iNZANi et Lussana, établies d'après les valeurs nutri- tives, [Suinerio del gusto. Ann. universali di med., 1862) et de Wundt. Il faut mention ner pour mémoire l'interprétation que Von Vintschgau donne de la classification géné- ralement admise, à laquelle il ajoute cependant la saveur métallique. Dans le groupement du savant physiologiste (saveurs : 1» doux; 2° amer; 3" salé; 4° acide), l'ordre observé, allant des sensations gustatives pures et simples à celles où interviennent les impressions tactiles, paraît plus rationnel. Toutes les saveurs peuvent rentrer dans ces quatre groupes. Pour séparer les sensa- tions gustatives des sensations olfactives, on emploie le très simple procédé indiqué par Chevreul et par W^ing [Fonctions de la membrane pituitaire. Arch. générales de médecine, Paris, 1836) ; l'occlusion des narines. Pour séparer les sensations gustatives des sensa- tions tactiles, Toulouse et Vaschide [Méthode pour l'examen et la mesure des sensations gustatives. Académie des sciences, 19 mars 1900) ont imaginé le procédé suivant: Une goutte d'eau, déposée sur un point quelconque de la muqueuse linguale et élevée à une température voisine de celle de la muqueuse, n'y détermine aucune sensa- tion ;si donc on dissout les substances sapides dans un liquide élevé à une température d'environ 20°, on pourra percevoir des sensations gustatives pures. Par ce procédé expé- rimental, Toulouse et Vaschide ont pu établir qu'il n'existe que les quatre sortes de sen- sations gustatives ci-dessus mentionnées, et que les sensations acides sont celles qui se rapprochent le plus des sensations tactiles. COUT. 633 Il est extrêmement difficile, en tout cas, de localiser les sensations gustatives. Les mouvements de la langue, la salivation viennent à rencontre de la précision expéri- mentale. VIII. _ TOPOGRAPHIE DE LA SENSIBILITÉ GUSTATIVE Quel est le siège du goùl? De nombreuses expériences ont été tentées pour en déterminer la place exacte et les divers investigateurs sont arrivés à des conclusions que rendront manifestes les tableaux ci-joints. Non seulement la langue, mais un grand nombre d'autres parties de la muqueuse buccale peuvent être impressionnées par les substances sapides. La grande difficulté de ces recherches consiste dans la minutie et l'exactitude nécessaires à l'obtention de résultats probants. Voici i'énumération succincte des déterminations de la topographie du goût faites par les physiologistes et les psycho-physiologistes. Certains auteurs, se fondant sur des expériences trop superficielles, ont refusé à la muqueuse linguale la faculté de percevoir des impressions gustatives. De Jussieu, en 1718, présenta devant l'Académie des Sciences une jeune fille atteinte d'atrophie congénitale de la langue et montra qu'elle percevait cependant normalement les saveurs. Il en conclut que la voûte palatine était le siège de la sensibilité. Brillât-Savarin cite le cas d'un homme à qui on avait enlevé la partie antérieure de la langue jusqu'au filet. Le goût était normal, si ce n'est cette pai'ticularité que les substances amères ou alcalines provoquaient de très vives douleurs. RoDiER a observé un homme, parfait gourmet, qui pouvait distinguer les nuances les plus délicates des saveurs et auquel on avait extirpé la langue à la suite d'un cancer. Ces observations, si l'on veut bien les examiner sans enthousiasme, ne prouvent en somme qu'une chose : que la muqueuse linguale n'est pas la seule partie de la bouche capable d'être impressionnée par les substances sapides. Mais elles n'infirment en rien le rôle de la langue. Le premier, Vernii^re [Sur le sens du goût. Journal des Progrès, 18'27) chercha à localiser expérimentalement le siège du goût. Son procédé, très simple, consistait à poser de petites éponges imprégnées de substances sapides sur diverses parties de la muqueuse linguale. Il constata que l'arrière-bouche et le plancher de la bouche jouissaient d'une sensibilité gustative égale. GuYOT et Admyrauld [Mémoire sur le siège du goût chez l'homme. Bulletin des Se. méd. de Pérussac. Paris, 1830) reprirent ces expériences en entourant, pour empêcher la diffusion des substances à expérimenter, la partie impressionnée de la langue d'une feuille de parchemin. Leurs conclusions sont opposées à celle de Vernière. Pour eux : 1° les lèvres, la partie interne des joues, la voûte du palais, le pharynx, les piliers du voile du palais, la face dorsale et la face inférieure de la langue ne peuvent recevoir d'impres- sions gustatives; 2° ces impressions ne sont reçues que sur la partie postérieure de la langue au-delà d'une ligne courbe à concavité intérieure passant par le trou borgne et joignant les deux bords de la langue en avant des piliers; sur les bords de la langue; sur la pointe (quatre à cinq lignes sur la face dorsale, une ou deux sur la face inférieure) ; sur une petite portion du voile du palais, vers le centre de la face antérieure. Voici le détail de leurs expériences : Première épreuve. — Si l'on engage l'extrémité antérieure de la langue dans un sac de parchemin très souple et ramolli, de manière à la recouvrir complètement, il sera possible alors d'introduire entre les lèvres, d'écraser et d'agiter entre elles une petite quantité de conserves ou de gelées très sapides, sans qu'on puisse percevoir d'autre sensation que celle de consistance et de température. Il en sera de même exactement si l'on promène ces substances à la partie antérieure de la partie externe des joues et de la voûte palatine, pourvu que ni ces substances ni la salive imprégnée de leurs sucs ne puissent arriver à la langue. Nous avons varié cette expérience en employant l'acide hydro-chlorique affaibli et l'eau sucrée sans qu'il nous ait été possible non seulement de les distinguer, mais encore de leur attribuer aucune saveur. 2" épreuve. — Si l'on écarte la joue de l'arcade alvéolaire et qu'on la recouvre 634 GOUT. intérieurement d'une gelée acide ou sucrée, la sensation de saveur est tout à fait nulle dans toute son étendue en prenant poui- la salive et pour la langue les précautions indiquées. On peut varier cette expérience en mettant entre les joues et les arcades alvéolaires serrées un corps soluble, comme du sucre, du chlorure de sodium, un peu d'extrait d'aloës; la sensation ne se manifeste pas, même lorsqu'ils sortt tombés en déliquium; elle devient, au contraire, très vive lorsqu'on permet à la salive de s'épan- cher sur la langue. 3*^ épreuve. — La langue recouverte comme dans le premier cas, seulemeut dans une plus grande étendue, au moyen d'un prolongement qui descend dans l'épiglolte, si l'on avale plusieurs substances pulpeuses d'une saveur très prononcée et que dans le mouvement de déglutition on ait soin de les mettre successivement en contact avec tous les points de la voûte palatine et du palais, on observe que la saveur se manifeste vers la partie postérieure seulement. 4* épreuve. — Si l'on recouvre dans toute son étendue la voûte palatine d'une feuille de parchemin, un corps sapide placé sur la langue et avalé n'en produit pas moins sur cette dernière une vive impression. 5^ épreuve. — Un fragment d'extrait d'aloès fixé à l'extrémité d'un stylet et porté sur tous les points de la voûte palatine et du palais donne les résultats suivants : dans toute l'étendue de la voûte palatine, à ses bords comme à son centre, nulle autre impression que celle du tact. lien est exactement de même pour la luette, les piliers du voile du palais et la plus grande partie de cet organe. Seulement, à la partie antérieure moyenne et supérieure de cet organe, une ligne au-dessous de son point d'insertion à la voûte palatine, existe une petite surface sans limites précises, ne descendant point jusqu'à la base de la luette dout elle est distante de trois on quatre lignes, mais se prolongeant et se perdant insensiblement sur les côtés. Cette surface perçoit les saveurs d'une manière très marquée. Le même instrument porté dans l'arrière-bouche nous a montré que la partie postérieure du voile du palais et la muqueuse du pharynx ne prenaient aucune part au sens du goût. Si donc nous exceptons le point que nous venons d'indiquer à la partie supérieure du voile du palais, la langue est le siège du goût. Mais toutes les parties de cet organe ne concourent point à l'exercice de ce sens. Q^ épreuve. — La langue étant recouverte d'un morceau de parchemin percé à son centre de manière que l'ouverture corresponde au milieu de sa face dorsale, si l'on applique sur cette partie une conserve sucrée ou acide, on n'éprouve aucune sensation de goût, même en la pressant contre la voûte palatine, et la saveur ne se manifeste que lorsque la salive imprégnée arrive au bord de la langue. En répétant la même expérience sur la plus grande partie de sa face dorsale, on arrive au même résultat. 7" épreuve. — Un corps sapide quelconque placé au-devant du frein de la langue et comprimé par la face inférieure de cet organe le laisse tout à fait insensible. 8^ épreuve. — Un stylet disposé comme le précédent, c'est-à-dire muni à son extrémité d'un fragment d'aloës ou d'une éponge imbibée de vinaigre, porté sur les divei'ses parties de la langue, nous a donné les résultats suivants : toute la face dorsale de la langue ne jouit point de la propriété de percevoir les saveurs; seulement, on rencontre cette propriété en approchant de la circonférence, dans une étendue d'une à deux lignes sur les côtés, de trois à quatre à la pointe et tout à fait en arrière dans un espace situé au-delà d'une ligne courbe qui passerait par le trou borgne et dont la concavité serait tournée en avant. Ces auteurs eu concluent : 1° Que les lèvres, la partie interne des joues, la voûte palatine sont complètement étrangères à la perception des saveurs. 2° Que le pharynx n'y paraît point participer; 3° Que le voile du palais n'y concourt que par une petite surface sans limites précises, allongée transversalement, commençant à peu près à une ligne au-dessous de son insertion à la voûte palatine, ne descendant point jusqu'à la base de la luette dont elle est distante de trois ou quatre lignes se prolongeant et se perdant insensiblement sur les côtés; 4° Que la langue ne jouit de cette propriété que dans sa partie postérieure et GOUT. 635 profonde, au delà du trou borgne et sur toute sa circonférence dont la sensibilité s'étend un peu plus loin à sa face supérieure, surtout vers sa pointe, qu'à sa face inférieure ; 5» Que la partie inférieure de la langue et toute sa face dorsale sont incapables de percevoir les saveurs. Les mêmes observateurs {Nouvelles expériences sur le sens du goût chez l'homme, Arch. génér. de Méd., 3'= série, I, Paris, 1837), essayant de déterminer les sensibilités relatives des surfaces gustatives, trouvèrent que les bases de la langue, sa pointe, ses bords et le voile du palais sont particulièrement impressionnables. Ils constatèrent également que des sels tels que l'alun, le sulfate de soude, l'acétate de plomb, etc., donnaient au sens gustatif des impressions très différentes selon qu'on les appliquait sur la partie antérieure ou postérieure de la langue. La pointe et les bords de la langue apprécient mieux les acides, tandis que les bases sont habituellement goûtées par la base de la langue. 11 va sans dire qu'il existe à cette règle générale un grand nombre d'exceptions. F. Miller {loc. cit.) et Schiff [loc. cit.) estiment que les saveurs amères sont trans- mises surtout par le glosso-pliaryngien, mais que ce nerf n'est pas le seul capable d'agir. MûLLER accorde au palais la faculté de recevoir des impressions gustatives. Les résultats obtenus par Stigh et Klaatsch {Ueber den Art der Geschmackvermittlung. Arch.f.path.Anat. und Phys., xiv, 1858) sont à peu près identiques aux résultats de Guyot et Admyrauld. Mais ce sont les bords de la langue qui leur semblent les plus propres à recevoir avec délicatesse des impressions gustatives. Pour ScHiRMER [Sludiea zur Phys. des Geschmack. Deutsche Klinik, 1859), les bords de la langue sont les plus capables de recevoir les sensations gustatives; viennent ensuite, par ordre décroissant, la base et la pointe de la langue, le voile du palais, la partie inférieure des piliers. Neumann {Die Electricitât als Mittel zur Untersuchung des Geschmackssinnes im gesun- den und kranken Zustande und die Gechmacksfunction der Chorda tympani, Kœnigsberger Med. Jfl/trfc., 1864) tenta de déterminer par l'électricité quel était le siège du goût. Horn {Ueber den Geschmackssinn. des Menscheti, Heidelberg, 1823) inaugura des recherches sur les papilles linguales prises séparément, afin de rechercher s'il n'y avait pas de papilles spéciales pour chaque espèce de saveurs. RosENTHAL {Uebcr den electrischen Geschmack. MCiller's Archiv, 1860) et Neumann {Die Electricitât als Mittel zur Untersuchung des Geschmackssinnes in gesunden und kranken lus- tande und die Geschmacksfunction der Chorda tympani. Kœnigsberger Med. Jahrb., 1864^, expérimentant selon la méthode électrique, localisent le goût à la pointe, sur les bords et la base de la langue, sur la face inférieure du voile du palais, sur les piliers antérieurs, à l'exception de la luette; la voûte palatine ne pourrait être impressionnée. LoNGET {Traité de physiologie) et Dugès {Traité de phys. comparée de l'homme et des animaux, i, 131, Montpellier, 1838) attribuent le goût à l'arrière-bouche, à la base de la langue et aux piliers. ToDD et BowMANN (cltés par A. Bain) estiment que toute la surface dorsale de la langue possède la sensibilité gustative, mais surtout « la circonférence, la base, les bords et la pointe. •>•> Le palais, les piliers, les amygdales leur semblent aussi propres à être impressionnés par les saveurs, mais moins fortement que les parties susdites et d'une façon plus individuelle. Pour WuNDT {loc. cit.), l'organe essentiel de la gustation est la langue; mais la sen- sibilité spéciale serait localisée dans la partie supérieure de la face inférieure du voile du palais. Dans toutes ces recherches, la technique est pour beaucoup dans la divergence consilérable des résultats. Employant tout au moins des corps sapides bien définis, les conditions d'erreur diminueraient sensiblement, laissant de côté, ou au moins diminuant les variations individuelles. D'après les recherches déjà anciennes de Horn, Picht, Guyot et Admyrauld, les mêmes substances sapides produisent des sensations toutes différentes, selon surtout les régions de la langue qu'on examinait. Les recherches postérieures de Bimar, inspirées des considérations de son maître Rouget, précisèrent le fait que les impressions sensorielles différentes pour un même sel 636 GOUT. résultent de l'excitation particulière des cordes de sensibilité plus ou moins bien définies de la langue. Pour Rouget, seule, la partie postérieure de la langue perçoit les saveurs; la partie antérieure ne perçoit que les sensations tactiles ordinaires; cet auteur avait en vue surtout des considérations histologiques chez certains animaux. Au point de vue histologique, on ne trouve aucun organe spécial cà la partie moyenne de la langue. Le fait est certain, néanmoins, que des substances sapides agissent sensoriellement différemment si elles sont appliquées à la partie antérieure ou à la partie postérieure de la langue. Le chlorure de potassium, par exemple, est perçu comme salé, quand il est déposé sur la moitié antérieure de la langue, et il est perçu amer quand on le dépose .sur la partie postérieure; il en est de même pour le nitrate de potasse. L'acétate de potasse est salé ou amer selon la région de la muqueuse où on l'applique; il est amer au niveau des papilles caliciformes, et acide au niveau des bords de la pointe de la langue. Voici quelques données à ce sujet selon Lussana : Une première liste se réfère aux substances sapides perçues également dans la partie antérieure ou postérieure de la .langue. 1" Aliments. a. Saveur du lait. b. — de la viande. c. — des farines. d. — des substances sucrées. e. — des corps gras. f. — des alcooliques. U- — du vin. h. — des acides. i. — du sel. 2° Assaisonnements, aro- / a. Saveur piquante, mes, café, poivre, ab- \ b. — aromatique, sinthe , huiles essen- je. — aigre, tielles \ d. — éthérée. Les saveurs suivantes sont perçues seulement à la partie postérieure de la langue. a. Saveur acide, caustique (les acides minéraux, etc.). b. — métallique (sulfate de fer, alun, etc.). f. — alcaline. '/. — ammoniacale, urineuse. r. — acre (jalap, semen-contra, oignons, ail, etc.). /'. — auicrc (coloquinte, quinine, aloès). g. — putride. Ces dernières saveurs sont perçues d'une manière différente par la corde du tympan et par le glosso-pharyngien. A I.A PARTIE antérieure de la langue. a. Chlorure de potassium . Saveur de fraîcheur, salée. SUBSTANCES diverses. A LA PARTIE postérieure de la langue. Douceâtre. b. Acétate de potasse. c. Nitrate de potasse d. Alun c. Sulfate de soude . /'. Acétate de plomb. g. Acide oxalique. . . h. Bisulfate de quinine brûlante, acide piquante. Amère nauséabonde, ni acre, ni piquante, fraîche, piquante. Amère, fade, acide, fraîche, styptique. Douceâtre, non acide, salée. Amère. fraîche, piquante, styp- Sucrée. tique, piquante. Amère. piquante, acide, fraîche. Très amère. • On sait que d'après Lussana, le glosso-pharyngien avait comme fonction la distinc- tion qualitative des substances agréables ou désagréables; la corde du tympan serait réduite à la perception gustative des aliments. Ces investigations ont été récemment reprises par CEurwall [Untersuchungen ùber GOUT. 637 den Geschmackssinn, Skand. Arch. fiir Physiologie, ii, l)qui, prenant pour base la théoi'ie de l'énergie spécifique des organes sensoriels, envisageait ainsi la question. Il décrit en ces termes la technique qu'il a suivie : « Je commence par remarquer que les différentes expériences avec la même sub- stance, sur la même papille, n'ont jamais été faites immédiatement l'une après l'autre, mais dans la plupart des cas à des jours ditlerents. Généralement, j'expérimentais sur toutes les papilles d'un ou de plusieurs groupes avec une solution de quinine, par exemple, laissant passer un intervalle de quelques minutes entre chaque expérience. Ensuite, j'opérais de la même manière sur ces papilles avec une solution de sucre, par exemple, et ainsi de suite. Ici, les expériences se faisaient avec connaissance, de la part du sujet, de l'espèce de la substance gustative (à l'opposé de ce qui avait lieu dans les premières expériences). On peut, à mon avis, décider avec plus de sûreté, si une sensa- ^V. FiG. 29. (D'après Œhrwall). — La ligure nous montre trois sortes d'agrandissements du bout de la langue, et tend à nous donner l'imago de la position et de la grandeur relative sur ces derniers des papilles en forme de champignons, qui furent mentionnées dans les protocoles des essais. Elle est dessinée d'après un instantané au magnésium. Voici aussi le texte auquel l'auteur nous renvoie": « Je compte à 350-400 le nombre des papilles en forme de cTiampignon sur ma langue. Elles se divisent de cette manière, suivant les estimations de livres d'études d'anatomie qui sont à consulter, que la plus grande partie est sur le bout de la langue, un petit nombre sur les parties de derrière de la tache supérieure, immédiatement situées devant les papilles circumvallées, et sur les bordures de côté en plus petit nombre encore, tandis qtie celles exceptées dans le compte se trouvent sur la partie du milieu de la tache supé- rieure. J'ai choisi et examiné 125 morceaux, sur ce nombre, 31 (les groupes A B et C) se trouvaient sur les bordures de côté, le reste sur le bout de la langue. Au moment do choisir les papilles pour les recherches, je suivis seulement la règle, d'examiner de préférence les papilles qui étaient plus facilement accessibles et qui par leur image libre étaient plutôt consacrées à une excitation isolée. Mais le choix se rapporte plutôt aux groupes qu'aux papilles isolées, car j'ai examiné généralement toutes les papilles comprises sur le ter- ritoire de chaque groupe. » tion apparaît ou non — et, dans le cas présent, c'était la question principale — en connaissant la nature de la sensation à laquelle on doit s'attendre. Au contraire, je ne fis aucune attention aux séries d'expériences déjà faites, et je changeai exprès constam- ment l'ordre des différents groupes, afin de ne pas arriver à connaître les particularités des papilles, ce qui aurait pu influencer mon jugement. n Bien qu'il nous faille, continue-t-il, de prime abord renoncer à toute expérience de pouvoir stimuler isolément un seul appareil terminal ou le nerf correspondant, il serait peut-être possible et intéressant au point de vue de la théorie, d'exciter une seule papille fongiforme à la fois, pour voir comment est constitué le sens gustatif de cette papille. Si chaque papille est composée d'un nombre plus ou moins grand d'appa- reils gustatifs terminaux, ceux-ci peuvent être, bien entendu, de nature diverse. 638 GOUT. « Dans le premier cas, les papilles fongiformes présenteraient, suivant la théorie, de grandes différences : quelques-unes ne devraient percevoir que le goût amer, d'autres le sucré, etc. Les ressemblances enti^e la constitution des papilles fongiformes et celle des papillae circumvallatae (celles-ci peuvent être considérées comme une forme plus développée de celles-là) paraissaient cependant appuyer la seconde possibilité, à savoir que chacune des papilles fongiformes soit fournie de diverses espèces d'appareils ter- minaux, de même que doivent l'être les papillae circumvallatae, puisque celles-ci réa- gissent, comme on le sait, aux stimulus de l'amer, du sucré, du salé et de l'acide. On pourrait penser, cependant, que cette distribution des diverses espèces d'appareils terminaux n'est pas complètement régulière, et, dans ce cas, les diverses papilles fon- giformes devraient certainement montrer des différences fonctionnelles dont l'examen vaudrait bien une expérience. » Œhrwall a observé dans ces conditions 125 papilles fongiformes, dont 98 présen- tèrent une sensibilité gustative indéniable, se manifestant par des réactions à divers excitants. Il conclut, faisant allusion aux papilles demeurées insensibles : (( Me basant sur ces expériences, je considère comme probable que ces papilles e'taient complètement dépourvues de la perception gustative, soit pour le sucré, soit pour l'amer ou l'acide. Quoi qu'il en soit, il est clair qu'un nombre considérable des 12a papilles exami- nées montre de grandes différences fonctionnelles. Ces diiférences sont d'un grand intérêt pour la théorie des énergies spécifiques des sens. Il est clair aussi que ces diffé- rences fonctionnelles doivent être plus grandes qu'il n'apparaît directement d'après les chiffres donnés ci-dessus, car, pour des raisons bien compréhensibles, j'ai omis, dans les tableaux des expériences, presque toutes les observations ayant rapport à l'intensité de la réaction, laquelle est naturellement très difficile à apprécier. Dans le résumé, j'ai également omis les quelques observations notées dans les tableaux, bien qu'elles fassent voir que quelques papilles furent faiblement, d'autres fortement excitées par une certaine substance. Si j'avais employé des solutions plus faibles, certaines papilles, qui sont considérées actuellement comme appartenant à un groupe seul, auraient été distri- buées probablement parmi plusieurs groupes... Au contraire, le nombre des papilles non réagissantes se serait naturellement augmenté, et il est difficile de dire si les diffé- rences seraient devenues plus ou moins frappantes, au cas où des solutions plus faibles auraient été employées ». liiv.60w {ExpMences gustatives sur diverses papilles isolément excitées, A. i. B., xxx, 3, 1898) entreprit de contrôler les résultats des recherches d'ŒuRWALL, et nous citerons ici d'importants fragments de son remarquable travail. Les sujets étaient M™* Kiesow et M. Segré, étudiant en médecine... « Comme Œhrwall, nous avons employé un miroir concave pour nos expériences, qui se faisaient, cependant, seulement à la lumière du jour. Les substances gustatives furent appliquées au moyen de pinceaux, comme le faisait Œhrwall, par le sujet lui- même. Les pinceaux étaient de ceux qu'on emploie pour la peinture, mais de l'espèce fine, et taillés un peu au bout. Ils avaient une longueur de 8 millimètres à peu près, leur épaisseur moyenne ayant un diamètre d'un millimètre environ quand ils étaient mouillés. Il n'est guère nécessaire de dire que, nous aussi, nous avons examiné des papilles fongiformes, et que nous avons toujours choisi celles qui contrastaient avec les papilles voisines par leur grandeur et par leur couleur. Afin de simplifier la méthode d'ŒHRWALL, sans y porter préjudice, je fis faire une carte (voir la figure 29, 637), non de toutes les papilles qui devaient être étudiées, mais d'un groupe de 3 ou 5 papilles, que le sujet déterminait, et dont il faisait alors le dessin d'après l'image reflétée par le miroir. Les différentes papilles « étaient numérotées dans le dessin que le sujet gardait toujours près de lui pendant les expériences, afin de pouvoir s'orienter sans difficulté. Comme nous conservions toujours les dessins faits et que nous les comparions avec chaque nouveau groupe de papilles déterminé, il devenait impossible qu'une papille fît partie de plus d'un groupe ». Il dirigeait lui-même les expériences, <> en passant au sujet assis devant le miroir un pinceau trempé dans une des substances gustatives, lui indiquant en même temps le numéro de la papille qui devait être stimulée. Je tins les substances gustatives dans des GOUT. 63% éprouvettes derrière un petit écran .qui les cachait au sujet. Les substances gustalives étaient à la température de la chambre et consistaient en solutions de sel marin, de sucre de canne, d'acide chlorhydrique et de sulfate de quinine. L'acide chlorhydrique 9,vail une concentration de 0,2 p. 100; les solutions des autres substances étaient presque saturées. Suivant, dans ce cas aussi, l'exemple d'OEiiRWALL, j'ai choisi exprès des concentrations aussi fortes, afin d'être sûr que le stimulus correspondît au plus haut degré de la faculté gustative de la papille. Je n'ai pas augmenté l'intensité de l'acide chlorhydrique, parce que la solution me paraissait suffisamment acide, et parce que la sensation tactile produite par des solutions plus fortes est très prononcée et pourrait facilement influer sur l'expérience. J'étais curieux de connaître le jugement des sujets sur des solutions de sel marin. Je ne fis pas d'expériences avec des mélanges, afin de ne pas obscurcir les résultats. Les expériences étant faites d'après la méthode d'ignorance,, les processus centraux d'association, comme on le verra encore mieux par les tableaux, avaient un rôle très important dans les cas où la sensation restait très faible, ou bien dépassait à peine le seuil, ou lorsque la fatigue périphérique se faisait sentir. La dif- ficulté, déjà très grande, de juger des stimulus inconnus est augmentée dans ces cas, si l'on emploie des mélanges ; le sujet s'y perd, et il y a une accumulation de faux énoncés qu'on ne peut contrôler. Pour la raison donnée, il était à prévoir que les résultats de nos expériences ne seraient pas collectivement aussi clairs et aussi précis que le sont ceux de CEhrwall, car, lorsqu'on sait quelle substance gustative on a à apprécier, on peut répondi^e à la question posée par un << oui » ou « non » décisif, ou bien on répondra que la sensation est douteuse, indistincte, et ainsi de suite, et OEhrwall a certainement raison en trou- vant que ce procédé est plus facile. Si, malgré cela, j'ai préféré la méthode d'ignorance, c'est parce que le psychologue se décide mal volontiers à suivre une méthode qui est, ne fût-ce qu'à moitié, consciente. De plus, il me semblait que les résultats auraient ainsi une plus grande valeur, au cas où ils confirmeraient ceux qu'QEHRWALL a trouvés, et j'espérais d'ailleurs susciter de nouvelles questions dans le domaine du sens gustatif. J'ai prié mes sujets de diriger leur attention, autant que possible, sur la qualité de la sensation, puisque celle-ci m'importait plus que tout autre chose. Je ne leur demandai donc de ne donner une atten- tion spéciale nia l'apparition graduelle de la sensation gustative (Œhrwall donne à ce propos des renseignements précieux), ni aux sensations tactiles et thermiques qui l'accompagnent, ni aux degrés initiaux d'intensité de celle-ci. Néanmoins, mes sujets ont souvent fait spontanément, sur tous ces points, des communications que j'ai écrites dans mes tableaux. D'après ces jugements spontanés, on voit que les sujets distin- guaient quatre degrés d'intensité dans les sensations gustalives, qu'ils disaient : fortes, distinctes, faibles ou très faibles. Ils ont de même distingué des degrés d'intensité de la sensation tactile. La sensation de douleur a été évidemment confondue avec la sensa- tion tactile. Lès réponses : brûlant, piquant, comme une piqûre d'aiguille, etc., me semblent plutôt suggérées par des sensations douloureuses. En effet, j'ai pu observer plusieurs fois que les papilles fongiformes sont sensibles à la douleur, car des recherches faites dans un autre but m'ont obligé à couper des papilles avec les ciseaux. » Avant de recueillir les données définitives, Kiesow préparait les deux sujets aux expé- riences par des exercices méthodiques, les soumettant aussi parfois à des expériences d'alternance {Vexirversuche). « J'observai, écrit-il, en faisant ces expériences préparatoires, des « phénomènes de fatigue périphérique », fait qui paraît avoir éc-iappé à CUhrwall. Lorsqu'une papille avait été stimulée plusieurs fois de suite, elle montrait souvent, pour (les substances qui avaient été perçues antérieurement, une sensibilité diminuée ou insensibilité complète. Cette circonstance me semblait de grande importance pour la recherche proposée, et je m'en suis toujours rendu compte, sans que j'ose toutefois décla- rer que j'ai réussi complètement à exclure ce phénomène de la fatigue. Je n'ai jamais stimulé la même papille plusieurs fois successivement et sans intervalle; au contraire, je passais constamment, dans une série d'expériences, d'une papille à l'autre d'un groupe, ayant soin, cependant, de suivre un nouvel ordre de stimulation pour chaque série nouvelle, afin de ne pas habituer le sujet à un ordre fixe. Après chaque expérience unique, le sujet se rinçait la bouche avec de l'eau, afin de se débarrasser complètement 640 GOUT. 1'* Série. — 5 Papilles du bout de la langue (moitié gauche de la langue). PAPILLE SEL MARIN. SUCRE DE CANNE. ACIDE CHLORHYDRIQUE. SULFATE DE QUININE. Indéfinissable. + Salé. sens, de piqûre. Sensation tactile. » + Sensation de piqûre. Indéfinissable. 1 + ou acide. + un peu acide. 0 Sensation tactile. + ? salé. 0 Indéfinissable. + Sensation de piqûre. 0 0 + Sensation de piqûre. 0 + ou un peu acide. + + 0 2 ? + + Sensation de piqûre. 0 Indéfinissable, + Indéfinissable. 0 0 + Sensation de piqûre. Indéfinissable. + ou acide. 0 ? salé. sens, de piqûre. 0 Sensation de piqûre. + Salé ou acide. 0 3 0 + Sensation de piqûre. 0 0 0 Indéfinissable. Indéfinissable. 0 + Sensation tactile. " + 0 0 0 ? + Indéfinissable. Sensation de piqûre. 0 4 Sensation de piqûre. 0 0 + Indéfinissable. 0 Indéfinissable. 0 » 0 0 0 0 ? + + 0 + + Sensation distincte de piqûre. 0 3 + Douteux. Sensation de piqûre. + . Sensation tactile. ? + ? Salé. Sensation tactile. » Sensation tactile. un peu acide. Indéfinissable. 2" ^"^ Série. — 5 Papi Iles du bord gaucl lé de la langue, près du bout. Indéfinissable. ? + 0 Sensation tactile. Sensation tactile. Sens, tactile de piq. Indéfinissable. 1 0 + Sensation tactile. » 0 + )) » » 0 + „ » ? un peu sucré. ? amer. ? amer. ? + Indéfinissable. ? amer. 0 + 2 ? un peu salé. ? amer. + ou salé. + Sensation tactile. Amer. Sensation tactile. + avec sens. tact. ? un peu acide. Indéfinissable. ., + ? + + Salé. + + + .) + avec sens. tact. 3 + + ou amer. » ? -1- + ou sucré. + ., + + + '• + avec sens. tact. + ou acide. A.raer ou sucré. Sensation de piqûre. Indéfinissable. Indéfinissable. ? + » » Salé ou acide. i 0 Amer. Forte sensat. tactile. + + ou acide. + 0 0 Sensation tactile. + Forte sensat. tactile. + + Indéfinissable. ? un peu acide. ? + + ? + + ou salé. ? + 5 + + ? + f. Douteux. 0 ? + + ? + ? un peu acide. + + ou salé. Douteux. GOUT. 641 3"'' Série. — 5 Papilles de la moitié gauche antérieure de la langue à, 1 cm. environ de la pointe. PAPILLE SEL MARIN. SUCRE DE CANNE. ACIDE CHLORHYURIQUE. SDI.FATB DE QUININE. 0 0 Légère sensation llieimiqne. 0 0 0 0 0 1 0 0 Légère sensation de piqûre, sucré. 0 Un peu frais. 0 0 0 0 0 Lég. sent, de piqûre. 0 0 0 0 ? sens, thermique. 0 0 0 () 0 0 0 Un peu chaud. 0 Sensation tactile 0 0 0 léerère : un peu chaud. 0 Frais. 0 Un peu Irais. 0 0 0 0 0 0 0 0 3 0 Un peu frais. 0 0 0 Sens. tact, légère. 0 0 0 0 0 0 Frais. Un peu frais. 0 0 0 0 0 Frais. 4 0 Frais. 0 » 0 0 0 0 0 0 0 0 Faibleaieut + ou Indétinissable? Légère sensation de 0 acide. Faiblement + piqûre. Faiblement + Indéf., frais. 0 Frais. 5 + ou acide. 0 0 Légère sens. tact, et thermique. Indéf., métallique. Indéf. avec sensa- 0 Frais. certainement pas tion tactile. sucre ou amer. Entre + et acide, f. 0 0 » 4°"' Se rie. - 5 Papilles du bout de la langue s ituées à droite de lî x ligne médiane. Entre + et acide Indéfinissable. + et sens, de piqûre Indéfinissable. Faiblement + avec 0 + ou salé, sens. tact. Frais. 1 sensation tactile. + Très l'aiblenient amei + f. » + ou acide 0 Sensation de [)i(iûre Difficile à définir. Frais, sens. tact. F'rals. Légère sensation de piqûre. Indéf. , sens, tact. FaibleineiU + + f. sensation tact. Frais. ? acide avi'c Sfnsalioii laclilc + Forte sens. tact. 0 2 Très faibleml. acide 0 Sens. tact, légère. Indéfinissable. iiidt'f. forlf sensation taelile Sensation tactile. ? Sucré, frais. ? sucré. 0 0 Frais. Sucré, goût second + imm. Indéf., sens. tact. Indéfinissable. » 1. >i + " + sens. tact. ? sens. tact. 3 Sens. tact, acide. + » Forte sens. tact. 0 + + faible, mais Sens. tact. Sens. tact. immédiatement. ? + sensation tact. Sensation de piqûre. 0 Siici'é avec, sensalioii (aclile + avec sens. tact. -f sens. tact. ■•' + 4 Sneré aîet sensation tactile + imm. Sens. tact. -r Acide avec sensation tactile + » -f f. sens. tact. + .Sensation tactile légère. + imm. avec goût second'. + f. .. + et frais. Légère sens, de piqûre. + imm. ? + '. Sens. tact. 0 Sens. tact, légère. Indéfinissable. Frais. Sens. tact. Sens. tact. )) Sens. tact. t: » » Sens. tact, légère. Frais, f., sens. tact. Frais. » » légère. Indolinissable. » )j » 0 0 0 DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VU. 41 642 GOUT. de l'impression reçue. J'attendais alors 2-3 minutes avant de recommencer. Après chaque série, nous avons laissé passer un intervalle de o minutes au moins. Je changeais constamment aussi l'ordre des substances gustatives que je passais au sujet, lui donnant cependant, le plus souvent, la solution de quinine à la fin d'une série, parce que les saveurs amères laissent, en général, une saveur consécutive de plus longue durée. Dans les cas oîi, pour changer l'ordre, je donnais la solution de quinine au commencenient ou au milieu d'une série, je faisais interrompre les expériences pendant un intervalle de temps assez prolongé. L'observation de toutes ces règles justifie, j'ose le croire, l'assertion que la méthode, par nous suivie, était complètement celle d'ignorance. » Chaque papille a été stimulée, en règle générale, cinq fois avec chaque substance gustative. Dans le tableau de la page 641, 4- indique une réaction positive; ? veut dire peut-être; f. = faible; imm. =: immédiatement; 0 =: aucune réaction. Les autres réponses sont écrites en toutes lettres, ou bien l'abréviation est facile à comprendre. "Je remarque, conclut Kiesow, avant d'aller plus loin, que, en résumant les résultats donnés dans les tableaux, je n'ai tiré aucune conclusion décisive, quant à la faculté gustative d'une papille, si celle-ci n'avait pas réagi au moins deux fois positivement : car, malgré tous nos soins, on ne peut exclure toute erreur d'expérience, par exemple, qu'une ou plusieurs papilles voisines soient stimulées en même temps, ou que la petite goutte déposée sur la papille qu'on veut stimuler ne vienne à couler sur les papilles voisines. » Voici quelques-unes de ces données expérimentales ; elles sont intéressantes à être considérées. Kiesow a étudié en tout .39 papilles fongiformes. Sur ce nombre, 4 ne réagissaient pour aucune des quatre substances gustatives. Si nous considérons comme faisant défaut les réactions marquées peut-être {'!), sur les 33 papilles, qui restent : 18 réagissaient pour le sel 3 pour le sel exclusivement. 26 — — le sucre. 7 — le sucre. — 18 — — l'acide clil., 3 — l'acide chl. — 13 — — la quinine. 0 — la quinine. — Si, au contraire, nous considérons les réactions douteuses comme positives, nous aurons, pour les 33 papilles, ol réagissant pour le sel, 0 pour le sel exclusivement. 31 — — le sucre, 1 — le sucre — 29 — — l'acide chl., 0 — l'acide chl. — 21 — — la quinine, 1 — la quinine — Dans le premier cas,'^parmi les 33 papilles, 17 ne réagissaient pas pour le sel. 0 — — le sucre. 17 — — l'acide chl. 22 — — la quinine. Dans le second cas, 4 ne réagissaient pas pour le sel. 4 — — le sucre. 6 — — l'acide chl. 14 — — la quinine. Mentionnons, du même Kiesow, la communication qu'il fit le 14 novembre 1902 à l'Académie R. de méd. de Turin, sur « La présence de boutons gustatifs à la surface linguale de Vépiglotte humaine, avec quelques réflexion» sur les mêmes organes qui se trou- vent dans la muqueuse du larynx » (A. i. B., 4902). Les expériences de Schreiher sont en contradiction avec celles de Kiesow. Schrejber, employant des solutions de sucre cristallisé, de sel marin, de chlorhydrate de quinine et d'acide citrique, après avoir fait plus de 6.300 expériences, arrive aux conclusions sui- vantes : L'amer est perçu à la partie postérieure de la langue au niveau des papilles GOUT. 643 caliciformes, des bords et de la pointe de la langue. La partie postérieure et la face dorsale de la langue, les bords et la pointe de la langue sont sensibles à toutes les saveurs. Les régions insensibles pour le doux intéressent la moitié antérieure de la face dorsale de la langue. Voici encore, d'après cet auteur, quelques termes de ces différentes sensations : la langue est plus sensible pour toutes les saveurs au niveau des papilles caliciformes. Pointe de la langue . Bords Papilles caliciformes . Bouche SUCRE SEL AriDE QUININE OUI- 100. pour 100. [)our UIO. pour 100 0,20 0,10 o,oo:jo 0,0003 0.20 0,10 o,oo.;o 0,000.3 0,1. ■; 0,08 0,0040 0,0002 0,10 0,05 0,0025 0,0001 La sensibilité delà bouche, excitée par les solutions sapides, est plus fine qu'excitée isolément. Les recherches de Toulouse et V.^schidi': (Topoyrapliie de la sensibilité gustalive. Légende. Saveurs salées CfOOOOX 2 6 a opooj. 2. l 6 8 OiOOl 3 5 7 S o,oi L Sllf et ird (tti^^i^O- T Lojujuc VbiLi du Palaùs ^ùufwah 3 es 1 BoM ^ Ligne ngcUant Faee SUf> 2 S •0 •3 il \ il C t. II e ? 0 g. t a. Ml -H Kl N 111 n 2 a. -r ^ 1^ ) ' Saveurs sucrées fScuxJuxrose 1 M [ 1 1 1 1 1 ' , k ! ' 1 ' — ' \ •■ . 1 /v / l ( l Saveurs arriéres \îh. brvmhïjdjxite de aitinxnc > *— . ^ ' ^ Saveurs acides (Adde cUrùfue. ) ' 1 \ t , 1 1 \ ' \ ; \\ / 1; Z 1 1 \ ' Il J 1 ' , 1 1 " 1 J 1 1 ii 1 1 \ '1 1) * ;/ \ '\ , Y \\ v 1 t \ '. 1 J 1 \\ 1* f \\ 1 ', / * J : \ \ tt ï 1 ». \ 1 \ 1 \ / • fîl 1 A • r J II S ^ L A 1 \ ' ' n. 6 B 3 5 7 Jl J S 1 / \ 1 \ \ , . f 1 \ \ /' \ \ » \ 1 1 1 1 \ 1 1 1 * \ • \' \ 1 , \ 1 1 \ I V 1 \\ If 1 ! 1 M , . \ \ / \i 1 1 1 1 \\ ^ f li / y 1 ' / \\ \ 1 1 ? 9 1 1 1 1 ' ! ■ ' 1 1 ( ^ *l V \ i \\ i 1 V \ \ ' \ \ 1 ( n 1 r 1 \ \ 1 V \ i \ \ II \ 1 1 \ \ \\ \ J 1 \ If \ o 1 V y ï !^ . . »«H ICI ' «n ijf J s IM P* 7 , „ _ L ^^ L» . ._L .. 1 _ <^ _^ _ lE.aberbn Fiu. 30. — Topographie de la sensibilUv de la fjustation de la langue (Toulouse et Vaschidk). Comptes Rendus, cxxx, 1900), pratiquées sur vingt-quatre hommes (inlîrmiersj et sur trente et une femmes (infirmières) âgés en moyenne de 23 à 30 ans, conduisent aux conclusions suivantes : . « 1° Toutes les parties de la muqueuse buccale peuvent avoir des sensations gustatives 644 GOUT. Topographie de la sensibilité gustative de la bouche. (D'après Toulouse et Vaschide) (L'acuité de la perception est représentée par le titre des solutions. RÉGIONS EXPLOREES DE LA CAVITÉ BUCCALE. Lèvres siip. et inf. | Partie externe. (Face muq.) ( Partie interne. Muqueuse gingivale, l Partie externe. (Arcades sup. et inf.) i Partie interne. Muqueuse des joues. Bord Tiers antérieur. . — moyen . . . — postérieur . / Tiers antérieur. . Ligne médiane. | — moyen . . . ' — postérieur . Tiers antérieur. |cj Face supérieure. I Tiers moyen. . , Tiers postérieur. Face inférieure Frein. . . Plancher de la bouche. Voûte du palais. . . . Face antérieure. Face postérieure. Lueltc. . . . Piliers antér. Pilier.s iicstér. Amygdales. Épiglotte. . Face antérieure. ( Face antérieure . ( Face postérieure . \ Face antérieure. ) Face jioslérieurc. Face antérieui Chlorure de sodium. 1 p. 100 2 p. 100 3 p. 100 3 p. 1 p. 1 p. 9 p. 1 p. 1 p. 100 10 10 000 10 Chl. sod. pur Chl. sod. pur 1 p. 10 1 p. 10 Ghl. sod. pur 1 p. 10 Clil. sod. pur Chl. sod. pur Chl. sod. pur Chl. sod. jiur SAVEURS SUCREE.S. Saccharose. 1000 lOo 100 1 000 10 10 1 000 100 100 1 p. 10 Sace. pure ]). 100 l». 100 1). 10 p. 1 000 p. 10 1 p. 10 Sacc. pure. DibrQmhydrafe le quinine. 1 p. 10 000 1 p. 1 000 1 p 1 000 1 p. 1 000 1 p. 1 000 1 p. 1 000 1 p. 10 000 1 p. 10 000 1 p. 100 000 1 p. 10 000 Dib. de quin. pur. 1 p. 10 000 1 p. 10 000 1 p. 1 000 1 p. 1 000 1 p. 100 1 p. 1 p. 100 10 Dib. de quin. pur. 1 p. 100 Acide acétique. Ac. acét. pur Ac. acét. pur Ac. acét. pur Ac. acét. pur p. 10 000 p. 1 000 p. 1 000 p. 1 000 p. 100 p. 100 p. 1 000 p. 1 000 p. 100 p. 100 p. 100 p. 10 c. acét. pur p. 100 p. 1 000 p. 1 000 p. 100 p. 100 p. 10 c. acét. pur p. 100 p. 10 Toutefois les lèvres, les gencives, les joues, les dents, le plancher de la bouche, la voûte du palais ne perçoivent que les sensations acides. Comme ces parties ne sont pas inner- vées par des nerfs sensoriels, on peut se demander si la sensation d'acide est une véri- table saveur, ou bien une modalité de la sensibilité tactile. Les saveurs salées, sucrées et amères sont perçues par les autres parties de la muqueuse buccale, et notamment par la langue et l'isthme du gosier, qui constituent vi'aiment l'oryane du goût. Le bord et la face sup^'Tieure de la langue sont plus .sensibles que la face inférieure et le frein. H est à remarquer que, sur la face postérieure de la langue, la ligne médiane GOUT. 645 sent moins que les parties latérales. Le voile du palais est moins sensible que la langue. Il est intéressant de noter que les amygdales sont sensibles aux quatre saveurs. 2^ Si, contrairement à l'opinion d'un grand nombre d'anteurs, la langue et chacune de ses papilles, et aussi l'isthme du gosier, nous ont paru percevoir toutes les saveurs, il n'en est pas moins vrai que ces territoires anatomiques sentent mieux certaines saveurs que d'autres. C'est ainsi que le tiers antérieur de la langue sent mieux l'amer; de même, dans l'isthme du gosier, c'est le voile lui-mT-me qui sent le mieux le salé et l'amer. 3^ Il résulte de ces expériences que la partie antérieure de la langue, qui est innervée par le lingual, et la partie postérieure ainsi que l'isthme du gosier, qui sont innervés par le glosso-pharyngien, ont, à des degrés divers, les mêmes fonctions. Ce fait physiologique rend vraisemblable l'opinion de Carl, Urbantschitsch et Mathias Duval, d'après laquelle un nerf unique, le glosso-pharyngien, présiderait à ces fonctions sem- blables, en innervant, par des filets directs, la base de la langue et l'isthme du gosier et, par des filets indirects passant par la corde du tympan et le lingual, la pointe de la langue. » Mariau, dans une communication à la Socicté de Biologie, rapporte le résultat de quelques recherches sur le voile du palais, et fait un plaidoyer pour lui restituer en partie la fonction gustative, fonction niée actuellement par tous les physiologistes, et localisée uniquement par eux sur la langue. Mariau n'a expérimenté qu'au point de vue des saveurs sucrées et amères, les seules admises par tous les physiologistes, cer- tains rapportant les autres sensations gustatives à des impressions de sensibilité géné- rale. Il évita le contact avec la langue, en la comprimant avec un abaisse-langue; de plus, dès qu'une goutte de la solution, soit amère, soit sucrée, employée pour les expériences, semblait avoir impressionné l'organe classique de la gustation, il élimi- nait le sujet. Après avoir fait ainsi disparaître toutes les causes d'erreur, Mariau prit une dou- zaine de sujets sur lesquels il expérimenta, en prenant toutes les précautions possibles pour ne pas les suggestionner,"et en les faisant répondre par une mimique convenue. Comme solutions, il employa le sirop de sucre et une solution de quinine. ^ J'ai constaté, dit-il, en me mettant à l'abri de toutes les causes possibles d'erreur, que le voile du palais percevait les sensations de saveur, d'une façon peut-être un peu moins vive, un peu obtuse, surtout pour les saveurs sucrées, mais en tout cas réelle, comme la langue. Quant à la saveur amère, elle se perçoit très rapidement et se prolonge longtemps. « L'anatoraie permet de contrôler les données de l'expérience. Les voies de conduction centrales sont les mêmes pour la langue et pour le voile du palais. Elle nous apprend de plus qu'il n'y a qu'un nerf gustatif, le glosso-pharyngien; car le lingual, branche du trijumeau, innervant la langue, est, au point de vue physiologique, le prolongement du nerf intermédiaire de Wrisberg, racine supérieure du glosso-pharyngien, d'après Maïhias Duval. >> Mariau rappelle que l'innervation sensitive du voile du palais provient des nerfs palatins, mais que, de plus, le glosso-pharyngien envoie sur l'amygdale et le voile du palais et la luette une série de fibrilles nerveuses anastomosées. Il ajoute que le glosso- pharyngien, appelé encore nerf nauséeux, remplit sur le voile du palais le même rôle que sur la base de la langue, et qu'il a souvent constaté le réflexe nauséeux, après avoir impressionné, par des saveurs amères, les terminaisons dans le voile du palais. Les recherches de Mariau confirment à ce sujet celles de Toulouse et Vasciiide qui ont constaté que le voile du palais était capable d'être impressionné par une solution de chlorhydrate de quinine (à 1 p. 10.000, etc.). Nous résumons dans ces trois tableaux ci-joints (v. p. 646 et 647) les données les plus classiques sur la topographie de la sensibilité gustative jusqu'aux dernières recherches de Toulouse et Vaschide, et de Mariau, etc. Il serait difficile de classer les recherches disparates de Oehrwall et de Kiesow, qui concernent surtout l'analyse psycho-sensorielle du fonctionnement de certaines papilles. TOPOGRAPHIE DE LA 1 LÈVRES. 2 GENCIVES. 3 MUQUEUSE DKS JODES. 4 l'OINTK DE LA LANGUE Face supérieure. 5 FACE INFÉRIEURE de la langue. 6 BORDS DE LA LANGUE. Auteurs qui ont reconnu une sensibi- lité gusta- tive. G R E w (d'à ] 1 r è s RULLIER. Dict. en.Wvol.ii.l%j. Luchtmans {Spé- cimen phgsico- medicuin inau- qurcde def/uslu, 1758). Le Cat (d'après RuLLiER , toc. cit.). Magendie [Précis élém. de p/ig- siologie, t. I). Grey. Luchtmans. Le Cat. Magendie. Les anciens physiologis- tes (d'après R u L L I E R . Dict. en 30 volumes). Von Vintschgau [A. q. P., XIX, et H. H., m, (2), Leipzig 1880. Sent l'acide; moins bien le doux et le salé et pas du tout l'amer: sur lui). SCHREIBER. Vernière [Sttr le sens du goût j.d. progrès. 1827). Valextin [Lehr- fjitchd. Phys. d. Menschen,i848). Urbantschitsch ( Beobachtungen Uber Anormal d. Geschmacks 1876, Stuttgart); seulement pour les deux parties de la langue si- tuées de chaque côté du frein (d'après Gley). BiMAR [Etudephy- sio logique sur le sens du goût. 1874, p. 29): sur lui même, la sen- sation d'acide et de salé. Vernière. GuYOT et Ad- WYRAULT. BuDGE {Ueber Geschmack - sempfimleii - de Stellen. Deutsche ^ A'/wiA,1859). SciURMER [Ei- niges fiir Physiol. d. Geschmacks. De u tsche Klinik,\8ï,9). Klatsch et Stich. Neumann [Ko- 7iig s berger med. Jahrb. 1864). Uibaiitsiliilsch. BlMAR. Auteurs qui n'admettent la sensi bi- lité g us ta - tive qu'avec des réserves. Ui'bantsthilsch (chez les enfants). Inzani et LussANA [Sui nervi del gusto : Annali universalidime- dicina, 1862i : chez certains in- dividus. Drielsma (variât, individuelles). ScHiFF [Leçons sur la physiol. de la digestion (1867): on ne reconnaît que l'acide'i. Klaatsch et Stich [Ueber den Art des Geschm. Ar- chiv f. pathol. Anal. t. XIV.) Drielsma [Onder- zek over de7i ze- lelvonhetsmack zintinq, Gronin- guc,1859)d'après Gley. Drielsma. Auteurs qui n'admettent aucune sen- sibilité. Tous les physiolo- gistes modernes (d'après Gley D. D. article Goût, 597). GuYOT et Admy- RAULD. Vernière. Tous les phy- siol. moder- nes (d'après G L e Y' , toc. cit.). GuYOT et Ad- MYRAULD. Vernière. Tous les pliy- siol. moder- nes (Gley . Vernière. GuYOT et Ad- myrauld. Wagner [Lehr- huch der spe- ciellen Physio- logie. Leipzig, 1845). Funke [Lehrbuch der Phi/siolog. Leipzig,' 1869). Valextin. GuYOT et Admy- T!.xvi.D{Méi7i.sur le siège du goût chez l'homme. Bull. des sciences médicales de Fe'- russac. Paris, 1830). Longet. Traité de physiol.. III, 52. VON VINTSCHGAU ( lui-uK'me). SENSIBILITÉ QUSTATIVE. 7 MILIEU DV. LA LANGUE. 8 BASE de LA LANGUE. 9 VOUTE DU PALAIS. 10 VOILE DO PALAIS. Il LUETTK. 12 PILIERS du VOII.K DU PALAIS. 13 AMYGDALE.S. 14 FACE POSTÉRIRURK LANGUE. 15 ÉPIGLOTTE. Onestd'ac- c 0 r d à considé- rer cette région comme très sen- sible sur- tout pour l'amer. BiDDER, Wagner, etc. Rouget. Drielsma. Vernière. HoRN {Ueher d. Geschmacksinn cl. Mens c lien , Heidelberg. 1825). Tourtual { Die Sinne des Men- schen, etc. Miinster,182'ï). Rapp [Die Ver- richlungen d. funften Ner- 0 e iipa a r es , 1832. Leipzig). J.JVliiLLER.-BuD- (iE.- Drielsma UrLariIscliilsch. Vernikre. Horn. Tourtual. Rai'p. J. MiM.LER. Duo .-.S. BuDi.i:. Drielsma. Vernièp.k. LONOKT. Wl NDT. Luclilmans. Vernière. Valentin. Vernière. L'i'banlsciiisch. Wl NDT. MiCHELSON et Langen- DORF (face interne). Kiesow. Di'bantschitsch. Bi.mar: aper- çu sur le milieu de la face dor- sale de la langue l'a- cide et le salé. LoNGET (sur toute la ré- gion supé- rieure et majeure). Ui'bantschilsch (chez les en- fants plus que chez les adul- tes). DucÈs (Traité de Phys. compa- rée, Montpel- lier, 1838). Nkumann. SCHIFF. Kl A AT S CH et Stich (sauf le bord poster.). GuYOT et Admy- RAULD (sensi- ble sur une toute petite portion dévoi- le située au milieu de la faceantérieu"). LoNGET (ligne médiane). BiMAR (face in- férieure). VonVintschgau, VALENTIN(2sur8 cas positifs : surface anté- rieure). VON VINTSCHGAU Valentin (2 sur 8, surface antérieu- re). BiMAR (seulni. acide: piliers antérieurs). V. VINTSCHGAU. ScHIFF. Valentin (ex- trémités su- périeures el inférieures des deux pi- lie rs ; face antérieure du p i 1 i 0 1 Iiostérieur ei l'ace post. du pilier an ter.). Schirmer (par- tie inf. du piiierantér.). Neumann (par- tie inf. du piiierantér./. URBANTSCHITSCH (piiierantér.). Valentin . ( seule - ment par- ties post., situées en face de la racine de la langue) Valentin (autour). Opinion una- nime des physio- logistes (Gley). Vernièri:. GuYOTetAn- MYRAULD. LONGET. PiciiT {De Giis- tus et Olf'ac- tiis nem, etc. Berlin, 1829). Erlasser (Ma- GENDIE. Lekr- buch d. Pfiy- siol. Tubin- gen, 1834^. B I D D E R (Nene Beobachlim- qen ûber die Be iregu n g e n des weichen Gaumetis uiid iïfjerden Geru- chssinn, 1868. Dorpat). Wagner. FUNKE. Cambrer {Ueber die Abhilnqi- gkeit des Ges- chmacksinnes . Z. B., 1870). Neumann. Klaatscji et Stich. PiCHT. Erlasser. BiDDER. Wagner. FuNKE. Camerer. Guyot et Ad- MYRAULD. Wagner. FuNKE. Klaatscii et Stich. Camerer. t)48 GOUT. IX. - L'ANALYSE DES PERCEPTIONS GUSTATIVES. Le seul travail expérimental d'ensemble sur l'analyse des perceptions guslatives est celui de Patrick. Nous l'analysons en détail pour donner un aperçu complet du pro- blème; certes il est à peine posé, mais on pourra quand même tirer quelque prolit de la lecture de ce travail sérieux. Les recherches de Patrick peuvent tigurer avec hon- neur à côté de celles de Oehrwall, Kiesow, Nagel, Sternberg, etc., pour ne parler que des derniers auteurs qui se sont occupés de goût et de la psycho-physiologie gustative. Les recherches qu'on va résumer ici sont basées sur une série defests qui ont consisté a essayer un nombre considérable d'objets communs de boisson et de nourriture. On remarque d'abord que les perceptions gustatives sont la plupart du temps com- plexes, étant constituées par des sensations gustatives, olfactives, tactiles, visuelles, musculaires, de température, et qu'on n'a encore entrepris aucune analyse exacte de C3S perceptions. Vulgairement, les perceptions gustatives sont considérées tout simple- ment comme des sensations gustatives, le goût du fromage, du vin, etc. —Scientifique- ment, ndalgré les récentes recherches de Kiesow et celles de Zwaardemaker, la psychologie et la physiologie de ces perceptions sont très peu développées, surtout en ce qui concerne notre connaissance de leurs différences qualitalives. On croit et on dit qu'il n'y a que quatre sensations gustatives élémentaires : le doii.v, Vamer, le salé et l'aigre, qui ne sont pas dans des relations déterminées les unes avec les autres, excepté celles de compensation et de contraste; enfin, on dit que les sensations gus- • tatives sont mélangées aux sensations olfactives. Mais à voir les livres de plus près, on s'aperçoit qu'il y a beaucoup de confusions et controverses en ce qui concerne la com- position des perceptions gustatives. Au lieu de quatre saveurs simples, on dit qu'il y a un grand et indéfini nombre de goûts et que le doux, ['amer, le sale et l'aigre sont simple- ment quatre classes où toutes les saveurs peuvent être distribuées. Mais il y a plusieurs manières d'interpréter cette classification. On suppose par exemple que cette classification de saveurs est basée sur quatre sortes d'analogie qu'il y aurait entre les nombreuses sensations gustatives qualitativement distinctes. Mais c'est une vue qui ne doit pas être prise au sérieux. Une autre tendance consiste à dimiimer le nombre des différences qualitatives, et à réduire la multiplicité indéfinie de ces sensations, d'abord à dix, puis à six, puis à quatre, et finalement à deux. C'est parce qu'on croit que les quatre goûts élémentaires ont une base purement physiologique dans les quatre différentes sortes de nerfs ter- minaux. Nous aurions ainsi nombre de goûts de transition, tout comme nous avons des divers tons de couleurs. Cette vue non plus ne peut pas être acceptée; car elle n'est pas fondée. Selon une troisième hypothèse, le nombre indéfini de goûts résulte de la fusion des quatre sensations gustatives élémentaires, analogue à la fusion des tons dans les tons musicaux. Une quati'ième hypothèse enfin admet seulement quatre sortes de sensations gustatives. De toutes, la troisième hypothèse pourrait être admise par beaucoup d'auteurs; mais elle paraît manquer de preuves expérimentales. Si l'on exclut les relations quantitatives, cette théorie ne peut donner que quinze goûts différents. Puis les expériences faites en combinant les solutions simples de substances douces, amères, salées et aigres, n'ont pas révélé des goûts nettement perçus qui puissent être proprement appelés, fusions de goûts simples. On ne peut y trouver qu'un mélange de doux et amer, là où, physiologiquement, il y a deux simples sensations rapportées à un mélange des deux solutions. On ne peut pas obtenir, comme dans la musique, des fusions provenant du mélange de plusieurs éléments. Comme recherche préliminaire, Patrick a préparé les solutions suivantes : 10 p. 100 (le sucre; 0,25 p. 100 de sulfate de quinine; 5 p. 100 de sel: :i p. 100 d'acide tartrique. Ces substances sont combinées, dans des proportions égales, en onze combi- naisons possibles avec des groupes de deux, trois et quatre. En outre, six autres com- binaisons de sucre et de sel furent faites avec des variations quantitatives pour voir si GOUT. 649 des proportions ditféTentes de goûts simples combinés peuvent donner un goût nou- veau. Quatre sujets, deux hommes et deux femmes, ont essayé ces combinaisons. Les solutions furent présentées dans des bouteilles de verre marquées seulement avec un numéro respectif. On demandait aux personnes en question dégoûter ces solutions avec le plus d'attention possible et de dire s'il y avait là des substances douces, amères, aigres, etc., ou des combinaisons de celles-ci, en écrivant eux-mêmes le résultat, selon le numéro de chaque bouteille. Les résultats sont contenus dans le tableau suivant : SOLUTION. M«. S. Mr. .S. M'i'. W. U'. E. Doux et aigre. Doux et aigre. Amer. Doux Aigre et (doux). Doux et salé. Doux. Doux avec du salé. Doux et salé Salé et doux. Salé et aitrre. Salé et aigre. Salé et amer com- Un salé que je Très aigre. Ne parait biné. Le salé noté premièrement. n'ai jamais goûté. pas être simple. Doux, sali' et Aigre, salé et, Amer suivi par un Un aigre parti- Aigre et doux; pas aigre. doux. eftet astringent. culier, ni doux, comme précédem- ni salé, ni amer. ment. Peut-être un peu plus. Salé et amer. Amer. Un amer de quinine très décidé. Amer. Amer et salé. Doux, aigre et Amer et aigre. Un amer suivi par Amer et salé. Aigre et amer. amer. un goût doux pos- sible. Doux, salé, aigre Amer, aigre et Amer. Amer et aigre. Aigre et amer. et amer. doux. Doux, salé et Doux et amer. Un doux, décidé- Amer et doux et Un faible amer et amer. ment désagréable, amer salé. doux. Doux et amer. Doux et amer, aigre. Un goût doux amer. Amer et doux. Doux et amer. Aigre et amer. Amer et aigre. Amer. Amer, mais non pas quinine. Amer aigre piquant. Salé, aigre et Salé et .ligre. Aigre et amer. Salé et aigre. Aigre (salé). amer. encore diffé- rent. On doit remarquer avec Patrick, que, sur les ti8 jugements inclus dans les tests, aucun mauvais goût n'apparaît. La distinction ou l'intensité des sensations varie, mais c'est toujours « le doux », << le salé », '< l'aigre », et, à peine s'il y a une personne qui parle d'un aigre particulier, et plus souvent on en parle du goût astringent et piquani, qui sont de simples sensations tactiles. — Ensuite, il est aussi à remarquer une facilité considérable à analyser les mélanges. Ceux qui contiennent deux ingrédients sont ordi- nairement analysés d'une manière correcte, et ceux qui en contiennent trois sont seu- lement quelquefois analysés exactement. La seule exception est le mélange de tous les quatre ingrédients, où le sel n'est plus de'couvert par aucun observateur. Quant aux combinaisons de doux et amer dans des proportions variables, on peut voir que, lorsque l'un ou l'autre des deux éléments est augmenté, l'observateur ne peut découvrir que celui qui est augmenté; pas de goûls qualitativement nouveaux. Mais ces expériences, quoique incomplètes, ne vérifient en rien la troisième hypo- thèse, qui compare la combinaison des goûts à celle des tons dans la musique. Cependant Kiesow \Kant Studien), dans une série de recherches, arrive à. la con<'Ju- sion que le goût diffère de l'odorat, puisque, en combinant plusieurs odeurs, il en 650 GOUT. résulte plutôt une opposition qu'une fusion des éléments. Au contraire, si l'on combine des goûts élémentaires différents, on obtient, à son avis, un goût nouveau, dans lequel les goûts élémentaires peuvent être distingués, comme on distingue dans le brun une combinaison de couleurs. Le salé et le doux, combinés dans des proportions données, se neutraliseni l'un l'aulre, et donnent une sensation nouvelle, qu'on appelle insipide ou alcaline, ou bien insipide alcaline. Patrick essaya 25 aulres combinaisons de sucre et de sel, dont les solutions combinées variaient de 1 jusqu'à 40 0|0. De ces 2:j combinaisons, deux ne donnèrent aucun goût autre que l'insipide ou alcalin, trois autres donnèrent un goût insipide ou alcalin en connexion avec le doux ou le salé, tandis que lout le reste donnait le salé ou le doux, ou la prépondérance de l'un sur l'autre. Les résultats de Kiesow soulèvent deux questions. D'abord, ne peut-on expliquer l'alcalin ou l'insipide autrement que par une fusion ou un mélange de doux et salé? Kt puis, quand même ce serait là la vraie explication, peut-on trouver dans une telle fusion un résultat propre à rendre compte de toute l'infinie variété de goûts dont parlent les psychologues? Comme réponse à la première question, on a trouvé que l'eau dis- tillée peut, même seule, donner le goùl <( insipide » ou Orléans sirop. ew- Vin de Xérès. Comme du vin légère- ment aigre, quoique je n'en aie jamais goùtc. Spirit. ; du vin proba- blement wicky. Vin de Xérès. Acide lactique. Ce semble de l'acide ci- trique, mais un goût peu persistant. Acide, je ne peux pas le nommer. Citron. Eau distillée. De l'eau. De l'eau. Teinture de rhuba rbe. Amer. Je ne connais rien de comparable. Rhubarbe. Vin de Porto. Je ne connais pas ; ça a un goût qui ré- chauffe. Du vin, probablement du Xérès. Huile de fenouil et Une teinture de quel- Alcool, avec une odeur alcool. que chose d'agréable. Doit avoir une forte odeur. familière, probable- ment carvi. Eau distillée. De l'eau. De l'eau. Vinaigre. Acide acétique. Vmaigre Huile de carvi et Alcool, pas autre goût. Je ne puis pas le nom- alcool. mer, contient alcool. Assa fœtida. Je ne connais pas. C'est amer, probable- ment une teinture. Sirop de fraises. Doux. Je pense du sucre. Sirop de sucre. Ne peux pas le nommer. Sirop de pêches. Sucre. Jus de fruit. Ne peux pas le distinguer. Spirit. de menthe Menthe poivrée. Menthe jioivrée dans de l'alcool. Lait, oO p. 100 d' 3au. Ce semble de l'eau avec quelque chose de dis- sous, amidon. Du lait avec de l'eau. Jus de compote de Jus de pèche. Jus de pommes. pomme avec du su- cre. L'interprétation des résultats coordonnés dans ce tableau fait penser, dit Patrick, que les substances qui n'ont pas été reconnues par aucun des trois sujets dépendent, quant à leur reconnaissance, des sensations visuelles; celles qui ont été reconnues par les sujets normaux seulement dépendent des sensations olfactives; tandis que celles qui ont été j-econnues par tous les trois dépendent ou des sensations gustatives ou bien des sensations nmsculaires. Quoique le nombre et l'e-xactitude de ces recherclies ne puissent absolument satisfaire, on peut cependant dire, avec l'auteur, que la liste sui- GOUT. «53 vante montre au moins le rôle joué par différentes sortes de sensations dans les per- ceptions f^ustatives. Les substances suivantes ont été perçues par les sujets normaux, mais non pas par le sujet anormal, ce qui prouve que l'odeur est la caractéristique des goûts de ces substances : teinture de vanille, extrait de vanille, orange, citron, banane, thé, chocolat, lait, vinaigre, etc., etc. Cette liste doit être complétée par la suivante, qui contient les substances reconnues par un sujet normal seulement et d'où l'on doit tirer la même conclusion : sirop de pêches, gelée de groseille, vin de Porto, Champagne, beurre frais, crème, huile d'olives, bouillon de bœuf, etc. L'importance des sensations visuelles est donnée dans la hste des substances qui, reconnues dans l'expérience de tous les jours, ne le sont pas ni ]>ar les sujets normaux ni par le sujet anormal, les yeux bandés. Les plus remarquables sont les did'érentes sortes d'objets de nourriture. Ces substances n'ont pas de goût, excepté celui du sel ou un peu de doux, tandis que leur odeur est trop faible pour en être reconnue. Il est à remarquer que la viande fraîche de bouillon (non salée) ne peut pas être l'econnue par le sujet privé du sens de l'odorat, mais dès qu'elle est présentée salée, elle est reconnue comme étant de la viande. Le sujet anormal a eu plus de facilité à reconnaître les différentes sortes de pains : le fait est dû à leur différence de contexture. Parmi d'autres sortes de substances dans le goût desquelles les sensations visuelles jouent un rôle important, notons : le beurre, la crème, l'huile d'olive et différents fruits et légumes. Mais ce qui est intéressant à savoir, selon Patrick, c'est si ces résultats tendent à afîaiblir ou à confirmer l'hypothèse qu'on avait émise plus haut, à savoir qu'il y a seulement quatre sortes de sensations gustatives, que leur rôle dans la discrimination des boissons et nourritures est très peu important, et enfin qu'elles ne sont pas fusionnées dans les perceptions gustatives de l'expérience commune. Il est de toute évidence que les sensations visuelles, et plus particulièrement les sensations olfactives, jouent un rôle très important dans les perceptions du goiit,et qu'elles sont des éléments essentiels dans les plus communes boissons et nourritures. On comprend bien que le reste des subs- tances qui peuvent être reconnues sans l'intervention de la vue ou de l'udorat, peuvent être distinguées par la délicatesse du sens du toucher que la langue et les muscles de la mastication possèdent, y compris naturellement l'intervention des sensations gusta- tives salées, douces, amères ou acides. A peu près quarante substances furent correc- tement nommées par M. S. Mais, en examinant la liste de ces substances, on voit qu'elles ont presque toutes une composition caractéristique avec un effet astringent ou aigreur piquante, comme le camphre, la moutarde, le poivre, la menthe poivrée, la farine d'avoine, le maïs, le fromage, etc. Probablement, quelques-unes de ces subs- tances, spécialement celles qui étaient douces et acides, furent bien devinées; mais ce fut surtout par l'action musculaire et les sensations tactiles. Tels furent, probablement, les cas du fromage, du café, du poivre, de la farine d'avoine, des pommes de terre, etc., etc. En somme, ces expériences, aussi loin qu'elles sont poussées, confirment l'hypothèse chère au psychologue américain, à savoir que, sans diminuer l'importance qui est donnée aux sensations olfactives dans le goût, par l'expérience commune, elles indiquent, enplus, que le toucher et les sensations musculaires y jouent un. rôle d'une importance peu soup- çonnée. Dans une série supplémentaire d'expériences spéciales sur le goût du café et du thé, ces liqueurs diluées ont été confondues avec l'eau à la même température par le sujet qui manquait du sens de l'odorat. Enfin, le thé et le café ont un goût amer qui ne peut pas être distingué de l'amer de la quinine ou d'autres substances amères, quand l'intensité est la même. X. - MÉCANISME DE L'APPAREIL GUSTATIF. I Hypothèses sur le mécanisme de la gustation. — La sensation gustative dépend, comme on l'a vu, de l'excitation nerveuse par des corps sapides, en dehors de toute 65i GOUT. autre considération tliéorique. Mais de quelle manière les corps sapides agissent-ils sur les terminaisons nerveuses? C'est le point essentiel, car on sait que, quel que soit le mécanisme qui agisse sur les papilles et sur les bourgeons gustatifs, l'excitation est transmise par les nerfs de la gustation — question encore à résoudre — au cerveau, pour ne pas dire aux centres nerveux de la gustation. Deux hypothèses se disputent celte possibilité d'excitation : une première, déjà abandonnée d'ailleurs, invoque des liaisons toutes mécaniques; une seconde, celle qui arrêtera plus particulièrement notre intention, invoque des raisons chimiques. Cette dernière hypothèse est la seule plausible, car la nature chimique des excitants gustatifs s'impose presque catégoriquement à notre pensée. La combinaison chimique est pour- tant loin de nous donner l'explication complète, totale, et on ignore encore, malgré les recherches que nous analyserons plus loin, pourquoi telle substance chimique, et non une autre, produit une sensation gustative définie. La nature des sensations gusta- tives est extrêmement obscure, et des recherches nombreuses restent encore à être instituées. La chimie et la physico-chimie apporteront certainement des données plus précises, plus démonstratives et plus claires. L'action des substances sapides se réduit en somme dans celle hvpothèse à une réac- tion chimique qui ébranle les terminaisons nerveuses chimiquement. L'ébranlement mécanique est à rejeter, au moins à l'état actuel de ïios connaissances. Graham soutenait que les substances sapides appartenaient toutes à la classe des cristalloïdes, comme, par exemple, le sucre, le sel : les colloïdes ne' sont pas sapides, comme, par exemple : l'albumine, le tanin, les matières extractives et végétales, les gommes, etc. Ces dernières ne traverseraient pas les corps cristalloïdes ; au contraire, les corps cristalloïdes traversent les colloïdes. La muqueuse linguale appartenant à la classe des colloïdes se laisserait pénétrer par les cristalloïdes (Bain, Les Sens et Vlntelli- yence, 1889, p. 99). H. Taine énonçait, théoriquement une hypothèse presque analogue dans son volume sur Yîntelligence {2" éd. 1870, i, 245). Les nerfs gustatifs sont probablement per- méables aux colloïdes, et ils sont imperméables aux substances non colloïdes, d'où l'absence de saveur des substances colloïdes et la sapidité des substances non col- oïdes. La chaleur animale influencerait les combinaisons chimiques des substances Isapides dissoutes dans le tissu de la langue ; cette combinaison serai! variable selon la nature et la qualité de ces solutions. Tandis que Graham se posait ce problème comme étant à résoudre, Taine admet facilement sa vraisemblance et accepte comme probable l'existence d'une membrane colloïde imperméable qui protégerait les nerfs du goût. La pénétration des substances sapides jusqu'au contact intime avec les nerfs du goût paraît réelle, si l'on lient compte de l'observation que le chien, dans les veines duquel on a injecté de la coloquinte, manifeste vraiment le dégoût, tout comme si l'on appliquait directement les mêmes substances sapides sur la langue. Selon Beaunis, la substance sapide s'éliminerait par la salive, et agirait de cette manière sur les papilles gustatives. J'ai répété cette expérience à plusieurs reprises, et je n'ai pu constater d'une manière réelle ce dégoût annoncé par les auteurs. Les réactions psycho-physiolo- giques, si ce terme pouvait s'appliquer dans ce cas, ne se distinguent guère des autres réactions liées, en principe, avec d'autres manifestations guslalives. Sur trois chiens, une seule fois j'ai pu constater ce dégoût dont parlent les auteurs, mais il n'est guère typique : il n'avait pas la spontanéité de la réaction sensorielle gustative directe. Je l'ai constaté seulement avec la colociuinte, mais guère avec d'autres substances sapides amères. Béclard avait remarqué ce fait, d'ailleurs signalé par des cliniciens, que les malades atteints de diahèle sucré se plaignent de la sensation sucrée. Sur neuf diabétiques que j'ai pu examiner à ce sujet, un seul accusait d'une manière, manifeste ce goût de sucre. Je crois, à mon avis, qu'il s'agit surtout d'aulo-suggestions extrêmement faciles à se systématiser dans les cas pathologiques. Ch. RicHET, dans une note à la Société de Biologie {De l'action comparée de quelques viclaux sur les nerfs du goût, B. B., 25 décembre 1884, 687), avait recherché l'étude comparative des sels métalliques sur les nerfs du goût; au moyen des solutions titrées, GOUT. 655 il cherchait à préciser deux solutions, dont une A agissait sur le goût, et l'autrt- A' n'agissait pas. La limite de la sensibilili" gustative s(M'ai(, donc représentée par ce rapport — - — ' Les recherches sont pourtant extrêmement délicates, surtout à cause de l'eau des solu- tions niétalliques qu'on ne saura pas négliger; d'autre part, la sensation giislalive associée aux solutions métalli(iues n'est pas constante : les mêmes sujets accusèrent par- fois des sensations gustatives; et, d'autres fois, constatèrent que les solutions étaient insi- pides. Les causes d'erreur ne dépassent pas 50 p. 1000. Il faut retenir des recherches de Ch. Richet deux faits : tout d'abord qu'il n'y a aucune relation entre la sensibilité gustative et la toxicité, et ensuite que les différents acides ont une sensibilité gusta- tive assez fixe : elle varie seulement dans des limites très faibles. E. Gley et Ch. Richet, voulant t'-lablir la limite de la sensation gustative pour les sels des métaux alcalins, ont étudié de plus près l'action chimique des saveurs et la sensation gustative (E. Gley et Ch. Richet, Action chimique et sensibilité gustative. Soc. de Biol., 9 décembre 1883, 742). Ils expérimentèrent avec des sels de lithium, sodium, potassium, rubidium, substances chimiques qui, tout en ayant des poids atomiques bien dilTérents. (dont les rapports sont de 7, 23, 39, 85), possèdent des propriétés chimiques voisines. Prenant toujours la même quantité volumétrique des solutions (5 ce.) et comparant avec la même quantité d'eau ordinaire, on arrive à la précision de la dose-limite. Voici leurs chitTres; ils expriment la quantité de métal par litre (c'est-à-dire à la dose nécessaire perceptible) : MÉTAUX Lithium Sodium Potasî^iuui .... Ruliidium .... CHLORURES BROMURES lODURES MOYENNES 0,06 0,055 0,05 0,055 o,n 0,13 0,10 0,13 0,30 0,30 0,25 0,28 0,50 0,50 0,50 0,50 Moyenues 0,26 0,245 0,225 En rapportant la molécule de sel goûté à un atonie de métal, on constate que 7 grammes de lithium représentent la même quantité que 23 grammes de sodium, 39 de potassium et 85 de rubidium. On obtient alors les chiffres suivants: Grammes. Lithium 0,0078 Sodium 0,0056 Potassium 0,0072 Rubidium. ....... 0,0059 La quantité de lithium étant de 100, écrit Gley, les quantités correspondantes deNa, de Iv et de Rb seront de 139, 108 et 132; chiffres très concordants avec les chiffres théo- riques, étant données les variations bien connues du sens du goût. Ch. Richet [De l'action 'physiologique des sels de lithium, de potassium et de rubidium. Comptes rendus de l'Académie des Sciences, 12 oct. 1885. — De Vaction physiologique des sels alcalins. Arch. de Physiol., 3* série, 1886, p. 101) tira plus tard de ces faits et d'autres des données plus précises. L'action physiologique des métaux alcalins est proportionnelle non au poids absolu, mais au poids moléculaire de leurs sels. Les douze sels alcalins avec lesquels Gley et Ch. Richet ont expérimenté exercent la môme action pour une même molécule. <' Si nous prenons pour type le chlorure de lithium, écrit Gley (art. Gustation, p. 133) dont la molécule est de 42 grammes et, d'autre part, l'iodure de rubidium, dont le molécule est de 212, nous arrivons à constater qu'une molécule de chlorure de lithium et une molécule d'iodure de rubidium ont à peu près la même sapidité, ou, en effectuant les calculs, que 124 grammes d'iodure de rubidium ne sont pas plus sensibles que 36 grammes de chlorure de lithium. N'est-on pas, dès lors, en droit de conclure que l'action des substances sapides se ramène à une action chimique, puisqu'elle a lieu d'après les même lois que les actions chimiques? » Ch. Richet et Gley ont essayé de voir si les sels alcalins mélangés ajoutent leurs 656 GOUT. effets sur les nerfs du goût. Ils ont fait une solution contenant des proportions telles qu'il y avait : Grammes. Lithium 0,7 Sodium 2,3 Potassium. . . . 3,8 Rubidium. ... 8,5 Soit en unités atomiques : Grammes. Lithium 0,1 Sodium 0,1 Potassium. ... 0,1 Rubidium. ... 0,1 La solution de 1 p. 20 était très salée, et, à 1 p. 40, elle était encore sensiblement salée; la dose limite a été, en unités atomiques : Gi'ammcs. Lithium 0,00025 Sodium 0,0025 Potassium. . . . 0,00025 Rubidium. . . . 0,00025 Cette dose est à peu près le tiers de celle qui agissait sur le goût en n'employant qu'un seul des sels en question. « Ces divers sels accumulent donc leur action sur les nerfs du goût; et, s'il en est ainsi, n'est-ce pas parce que l'action de chacun d'eux, sen- siblement identique à celles de tous les autres, porte sur la même substance chimique des mêmes éléments anatomiques (matière nerveuse des terminaisons gustatives)? » (Gley, art. Gustation, 598. ] Dans d'autres expériences, Cley etCu. Richeï, ayant pris le même métal, avaient pré- paré une solution de chlorure, de bromure et d'iodure de potassium telle qu'un tiers de potassium fut mêlé à chacune de ces substances. Pour que le potassium fût sensible, on avait besoin d'une solution contenant O^^SO de potassium ; cela fait Ok'',06 par rapport à chacune de ces trois substances, donc une quantité extrêmement faible ; ce qui prouve que ces trois substances : le chlorure, le bromure et l'iodure, surajoutent leur puissance sapide. Ces expérience*, Gley etCn. RicHETles contrôlèrent par une autre méthode. On intro- duisit des quantités croissantes de sel dans une quantité déterminée d'eau jusqu'au moment où s'accusait une sensation gustative. La quantité de chlore, de brome et de soude fut recherchée, et on obtint les chiffres suivants : Chlorure de lithium . . Chlorure de sodium . . Chlorure de potassium . Chlorure de rul)idium . Rromure de lithium . . Rromure de sodium . . Bromure de potassium . Bromure de rubidium . lodure de lithium . . . lodure de sodium . . . lodure de potassium. . lodure de rubidium . . Rapportées au poids moléculaire, ces données numériques nous fournissent les chilTi'es suivants ; Lithium Sodium Potassium. . . . Rubidium. . . . Moyennes 0,0068 0,0069 0,0055 0,0062 POIDS DE CHLORE l'OmS DE MÉTAL brome ou d'iode. correspondant. 0,350 0.070 0,133 0,087 20,54 0,285 0,224 0,540 0,49 0,043 0,57 0,16i 0,52 0,253 0,66 0,700 1,06 0,058 0,717 0,130 0,664 0,194 0,374 0,260 CHLORURES BROMURES lODURES MOYENNES 0,0100 0,0060 0,0083 O.OOSl 0,0037 0,0070 0,0057 0,0055 0,0073 0,0064 0,0050 0,0061 0,0060 0,0082 0,0050 0,0051 GOUT. Ho7 Le ^oùt peut donc reconnaître avec une certaine probabilité la quantité moléculaire, des sels alcalins dans des solutions aqueuses. La sapidité des sels des métaux alcalins, c'est-à-dire leur action sur les terminaisons nerveuses, est, selon Cu. Riciiet etGLEv, pro- portionnelle au poids atomique de ces métaux. Le phénomène de la i,'Ustation se rappro- cherait donc des actions chimiques ordinaires. VV. Sternberg, de Berlin {Beziehungea zivischcii dein cliemischen Ihiu der i und hittev schmeckender Substanzcn. und titrer Eiijenschaft zu Schniecken. Arch. fur Fhij^ioL, 1898, 804-884) examina chimiquement et physiologiquement les relations qui existent entre les propriétés des corps doux et des corps amers. Selon ses recherches, il n'y a aucune dill'érence moléculaire. Des substances chimiques qui anesthésient la langue pour le goùl sucré (l'acide gymnérnique par exemple) suppriment également le goût amer. Le goût tiendrait de l'harmonie et de la dysharmonie moléculaire ou plutôt intra- moléculaire : l'harnionie serait le goût doux, et la dysharmonie le goût amer. Les substances sapides sucrées et les substances sapides amères appartiennentchimiquement aux groupes OH et Az H^; ils sont odorifères et chromophores. Reprenant plus tard ces recherches, auxquelles il ajoute avec sa précision habituelle quelques nouvelles données vraiment personnelles, le même auteur vient de publier récemment, dans les Archives internationales de Phartnacodijuamie et de Thérapeutique, un travail des plus curieux sur le << principe du goût dans le second groupe des corps sucrés » (xiii, fasc.l et 2, 1904). Lorsqu'on étudie toutes les combinaisons chimiques capables de nous donner des sensations gustatives, on remarque qu'il y a trois séries de combinaisons douces, de même qu'il y a trois séries de substances amères. Les trois séries des corps sucrés ont une propriété caractéristique toute particulière, propriété de nature double, comme l'avait remarqué W. Engelmann {Arch. f. Phjj- sioL, 1898), et qui semble être commune à toutes les combinaisons douces, W, Stern- BERG a cherché à trouver précisément le principe contenu dans cette nature double, qui provoque le goût. Quand le goût doux s'atténue ou disparaît, il pourrait devenir amer. Les recherches de Sterxberg l'ont conduit à croire que pour les siibslancrs inorganiques celle nature double est bien une condition particulière, mais elle n'est pas unique. 11 faut une seconde condition, que va nous montrer l'étude des combinaisons organiques. Tous les alcools sans exception possèdent la nature double à cause des radicaux alcooliques et hydroxyliques; le goût doux est limité seulement à certains groupes d'alcools : les glycols et les sucres. Les alcools monoatomiques ont aussi la nature double, pouvant fonctionner comme base et en même temps comme acide ; pourtant, ils ne sont pas de goût doux, pas même insipides. Avec un simple changement sur- venant dans les molécules du sucre, le goût doux est transformé en amer, comme dans les saccharates et les glycosides, substances amères. Partant de (;es considérations chimiques, Sterniseug a examiné les alcools mono- atomiques, diatomiques, polyatomiques et pleistatomiques, sans comparer l'intensité à la douceur, comme Lavait fait MOssle [Vergleichetide Geschmack)>prnfung ztviachea Alcoholen, Glycosen und Saccharosen. Dissert. Wûrzburg, 1891). Il résulte des observa- tions de l'auteur que tous les alcools polyatomiques On tin +2 (OH) possèdent sans exception le goût doux; les alcools monoatomi({ues, ceux donc qui ne contiennent le groupement hydroxylique qu'une fois, ne provoquent aucune excitation giistative ou autre dans la vraie acception du terme. Tous les alcools polyatomiques possèdent un goût, ou bien doux ou amer. c( Ce ne sont ni la composition arithmétique des atomes de carbone ni la position stéréoniétrique dans l'espace qui ont de l'intluence sur le goût. )> Le nombre des groupements hydroxyliques n'égalant pas au moins de moitié celui des radicaux alcooliques, le goût amer persiste; il se change en doux, aussitôt que ce nombre est au moins égal à la moitié des radicaux, {^'arrangement des atomes de carbone et d'hydrogène provoque une exception, car le rapprochement nmluel des atomes dans l'espace modifie sensiblement les conditions chimiques pour produire le goût doux ; un petit changement peut transformer le goût doux en amer, et il sutlit que ces transformations portent seulement sur la position relative. Le ;,'OÙt doux peu donc indiquer le premier et le deuxième éclielons sur le nombre d'hydroxyles mêlé pana les autres atomes de carbone, et le goût amer nous invite à connaître " la disproportion DICT. DE PHTSIOLOGIF.. — TOMK \ U. 42 658 • GOUT. réciproque de nombreux radicaux alcooliques en relation avec les groupements bydroxy- liques ». Le goût doux prend donc une part active à notre restauration, tandis que le goût amer nous défend contre tout ce qui nous nuit. Le goût aigre dénonce toujours le troisième degré d'oxydation, que les autres atonies de carbone soient ou non cbargés d'hydroxyle. Les conditions sont-elles les mêmes pour les matières douces de la chimie miné- rale? Il y a beaucoup de sels qui, malgré la qualité dulcigène de certains éléments et malgré leur solubilité, sont pourtant insipides. La qualité gustative d'un sel dépend exclu- sivement de sa base. Les éthers sels, soit inorganiques, soit halogènes, ont l'odeur dou- ce.'Ure, une saveur douce, c'est-à-dire le principe du goût. Aucun de ces éthers n'a le goût amer; c'est la même loi qui régit la qualité du goût des sels, qualité déterminée par la base exclusivement. Voici le tableau schématique des combinaisons douces et amères : COMBINAISONS DOUCES. COMBINAISONS AMKRF.S. I Combinaisons inorganiques. La zone dulcigène. La zone amaragène. II Combinaisons organiques. Alcools. Saccharates. Alcools. Éthers. Glucosides. Substances amères de constitution inconnue. Bitterstoffe. Acides uniers. Alcaloïdes. Les sels ont toujours sans exception le goût doux; pour les oxydes cependant, cette propriété gustative se limite à un petit nombre. Voici les conclusions terminales de W. Sternberg : « Comme les alcools ont le goût doux, les éthers proprement dits ont distinctement le goût amer. Cependant il est digne de remarquer que l'éther, si volatil qu'il soit, ne possède pas l'odeur amère.En général, il n'y a aucune substance qui possède i'odeur vraiment amère. Il existe, il est vrai, des substances à d'odeur douce ou acide, mais il n'en est pas même une seule à odeur amère, ni à odeur salée. L'éther, cependant, a une odeur, c'est-à-dire qu'il possède un goût amer, et outre cela une odeur propre. Les éthers proprement dits sont comparables aux oxydes minéraux. Parmi les oxydes minéraux, il n'y en a qu'un qui possède le goût amer; c'est H2O2. Le goût amer est réduit pour les combinaisons inorganiques aux sels, de même le goût acide exclusi- vement aux acides, de même le goût salé aux sels. Ce n'est que le goût doux qui se trouve en outre parmi les sels minéraux, et aussi parmi quelques oxydes. » Amer CH^ — 0 — CHa Insipide CH3 — O.H CH 2 — O.H Doux I CHo — O.H O.H Amer | O.H l'OL'l! I.F.S n CO.MBIXAISONS \)\j GOUT » DOUX AMKK j ;0H=l/2(— H-] , [0H<1/2G — H-] 1) Les o.rtjdcs. ■ Les alcools. Les alcools. ( [Lea sucres). Les e'ihers. , , , r ,i7 l Les alcoolatos. 2) Les se/.. l^s éthers. j Les saccharates. 3) Les combinaisons ( ^^^ ^es combinaisons organiques. inorganiques. ( Mais il est étrange, pense Stekniîerg,' « qu'en considérant le goût doux des combi- naisons minérales, il n'y ait pas même un seul exemple d'un cas où l'oxyde et en même temps le sel aient le goût doux. C'est ou bien l'oxyde comme As^U, As20;iqi!i a le COUT. 659 goût doux, ou bien les sels, mais pas les deux séries réunies. Pourquoi des combinai- sons comme Pb(OH)j, ont-elles le goût doux comme les combinaisons de Mg(0H)2, le goût amer? Cela n'est pas connu jusqu'à présent. Cependant Kahlenberg {The Action of solutions on the sensé of Taste. Bulletin of the University of Wisconsin , w 25, Madison, Wisconsin, September 1898, p. 30, § 6) dit : « The ions SOi and CH.t COO hâve but very little taste : the effect of the latter seems to be a triffle siveet. » Par conséquent, conclut Sternberi., ce sont les sels et les oxydes qui possèdent le goût doux dans cette série. Mais en réalité nous ignorons complètement la nature de la sapidité. Les recherches de Sternberg, qui confirment et complètent celles de Ch. Richet, de Gley et Ch. Richet, de Kahlenberg, nous indiquent la voie à suivre. La sapidité doit certaine- ment avoir une relation intime avec la nature des substances chimiques; les sensa- tions nerveuses doivent être pour quelque chose certainement, et on ne sait comment lixer sinon nos connaissances, du moin? quelques hypothèses possibles, sur l'action des substances sapides avec l'ébranlement nerveux. Faut-il admettre l'hypothèse de vibrations courtes, comme certains savants inclinent à le croire, schématisant nos connaissances acquises, ou faut-il attendre une explication possible des faits de la physico-chimie ou de la physique? Ce serait la voie la plus logique. Il faut en tout cas ne pas s'en tenir à la théorie subjective, facile à con- struire dans ce domaine comme dans tous les autres. Aussi bien ne pourra-t-on jamais nier la réalité objective des sensations gustatives. II Condition des sensations gustatives. — Pour qu'une substance sapide exerce son action sur la gustation, il est à considérer certaines conditions qui précisent, d'après tous les auteurs, l'hypothèse de l'action physico-chimique de la gustation. Il faut distinguer deux sortes de conditions, les unes dépendant des substances sapides excitantes de la muqueuse linguale, et les autres, de l'état biologique et physio- logique des éléments qui entrent en jeu dans la processus de la gustation. a) Conditions qui dépendent des excitants. — Nous avons vu que la solubilité est une condition nécessaire de la gustation, et de Blainville, dans un classique traité sur ï or cjanisaiion des animaux (1822), affirmait même un rapport étroit entre la solubilité et la sapidité; un corps était d'autant plus sapide qu'il était plus soluble. Il est vrai d'ailleurs que les corps insolubles n'ont pas de saveur, ou qu'en tout cas il s'agit alors d'une saveur spéciale. Analysant les sensations gustatives évoquées par les corps inso- lubles, on trouve toujours des sensations plus ou moins adéquates aux corps excitants. La saveur métallique n'a-t-elle pas été imaginée précisément pour définir des sensations gustatives autres que celles des classifications courantes? Il faut toutefois n'admettre pas comme définitive la classification des saveurs. Qui oserait d'ailleurs écrire ce mot définitif en science à moins d'être un grand ignorant? Il se peut bien qu'avec le temps, les sensations s'affinissant, et devenant plus délicates et plus analytiques, les épithètes gustatives s'enrichiront peu à peu. Une seconde condition, qui est d'ailleurs intimement liée avec l'hypothèse de la chimie du mécanisme gustatif, est, comme nous l'avons remarqué lors de l'étude des saveurs, la natuie de la solution sapide; ou en d'autres mots l'élément qualitatif de la solution. Von Vintschgau, avec son bon sens scientifique, indique cette inlluence, sans toutefois lui accorder la moindre considération. Nous répétons à titre de document l'observation de Cambrer, que le sel dissous dans une solution de gomme arabique perdrait notablement de sa sapidité; la sensibilité gustative deviendrait plus grossière : elle exigerait une solu- tion plus forte [Ueber die Abhâiujigkeit des Gcschmackss innés von der gereizlen Stelle der Mundhôhle. Zeitschrift filr Biolofjie, 1870). La troisième condition est la tcmpcraturc des substances sapides. Parlant des saveurs, nous avons rappelé rapidement certains faits ; examinons-les de plus près. Les expé- riences de Camerer, quoique critiquées, sont confirmées par de nombreux faits. Entre 660 GOUT. 10 et 20° !a sapidité s'exercerait dans les conditions les nioilleures. Nous avons vu que Beaunis donnait comme teiupérature favorable 10 et 3o°, chilTre d'ailleurs indiqué aussi par Béclaud (2!-3o). Les sensations ti'op basses ou trop luuiles diminuent ou annihilent la sensibilité gustative : cela se passe d'ailleurs comme dans tous les domaines sensibles car les sensations du froid et du chaud obnubilent loule autre sensation spécifique. Weber admettait déjà en 1847 [Veber den Einflusu der Envannung und Evkfdtung dcr Nerven aiifilir Leitungsnermôgen. Arch. fur Anot. und Phi/siol.), pour que la langue soit capable de percevoir les substances sapidesd'une température bien définie, le goi'it sucré n'est plus perçu à une température de 0, de même qu'à une température de 45 et 48. Nousavonsvu aussi dans les judicieusesremarijues de Guyot, qu'il était arrivé presque aux mêmes données. Il lui avait été impossible de percevoir la saveur amère du Colombo, après avoir gardé dans la bouche un morceau de glace. Il faut tenir encore compte de la quantité de la substance sapide, de sa concentration; nous reviendrons sur ces questions en parlant du seuil des sensations gustalives et de la loi psycho- physique de la gustation. b. — Les conditions concernant les organes de la gustation. — La gustation exige toute une série d'organes dont on connaît à peine la fonction psycho-sensorielle spécifique : les causes d'erreurs dans l'appréciation de la sensibilité gustative en sont d'autant plus nombreuses. Les premières conditions que demande une bonne détermination de la sensibilité gustative sont la détermination .des autres i^e7i>iihilUcs connexes, intimement liées, comme la sensibilité tactile et la sensibilité olfactive. Cette connexion est tellement éti'oite que des physiologistes, surtout parmi les anciens, refusaient d'admettre un domaine propre à la sensibilité gustative. Cuvier rapprochait le goût du tact; et Blai.nville le définissait « une simple extension du tact ». Pour rintluence de l'olfaction, nous avons cité, examinant la nature des saveurs et leur classification, les expériences de Chevreul : il y ades huiles essentielles qui agissent à la fois simultanément sur les deux domaines sensoriels. Le vin, avec son bouquet, est un exemple à citer; le goût n'a pas la même précision, la même finesse, si on goûte le vin avec ou sans l'intermédiaire du nez. Cela tient, selon M. Berthelot, à la présence de certains éthers composés. 11 en est de même pour de nombreux plats: l'art culinaire cite maints exemples (Brillât-Savarin), des arômes, du fumet des viandes (Wing), etc., qui réclament la collaboration des sensations olfactives. Cette associatioti s'exfdiquerait par la connaissance de la disposition si rapprochée, si connexe, des organes de la gustation et de l'olfaction; chez les Uepliles, il y a une communication directe entre la bouche et les fosses nasales, et, chez les Ruminants, l'organe de Jacouso.x représente l'intermédiaii'e entre ces deux organes sensoriels. Pour Liégeois celte association iniluerait sur la nature qualitative de l'odorat; l'odeur n'était pas la même si l'on prenait connaissance par les narines ou par la partie postérieure des fosses nasales. L'humidité de la cavité buccale favoriserait la diffusion des émanations odorantes [Méino'we sur les mouvements de cer- tains corps organiques à la surface de Veau et sur les applications qu'on peut en faire à la théorie des odeurs. Archives de FhysioL, 1868). Les exemples ne manquent pas pour prouver l'associalion étroite, et qui se trouve presque continuellement mise enjeu à l'étatnormal, de ces trois ordres des sensation : olfactive, tactile et gustative. La seconde condition qu'exige la gustation est d'ordre mécanique, pour ne pas dire muscidaire. La gustation est intimement liée aussi avec le mouvement musculaire de la cavité buccale et de la langue. Guyot et Admyrauld, Patrick surtout, nous donnent des détails précieux sur cette partie du mécanisme de la gustation, sur cette compression réciproque des substances sapides introduites dans la cavité buccale. Lo.nget, dans son Traité de Physiologie, ajoute quelques considérations, insistant sur la n«^essité de presser, de triturerle corps solide; la voûte palatine joue un rôlepurement mécanique, et elle sert comme point d'appui de résistance dans tous ces essais gustutifs, Les lèvres, les joues concourent seulement à retenir dans la bouche les substances sapides pendant l'acte de la gustation. Les mouvements de la langue jouent le rôle le plus important. Raspail et Valenti.n dénient la possibilité de percevoir les saveurs, la langue étant immobile. Baspail affirme GOUT. 661 « qu'en plong-eant la pointe de la langue dans une solution sucrée sans qu'elle touche uu point de la bouche, ni les parois du vase, on n'éprouve qu'une sensation de froid et d'un corps liquide, mais jamais on ne sent la saveur » {Das Orgun des Geschmacks. Froriep's ncue Notizen, février 1838. D'après Gley, art. Gustation, 607). Pour Vale.nt[.\, l'acte de la déglutition est nécessaire dans la gustation; le sucre pulvérisé et déposé sur le bord de la langue étant imperceptible entant que saveur sans le mouvement de la déglutition. Gley a vérifié l'e.xactitude des aflirmations de Rasi-ail et de Valenti.-v. J'ai répété sur moi-même l'expérience; elle est vraie, mais il faut remarquer qu'à la longue les sensations gustatives se perçoivent, l'amer surtout. La perception est plus difficile, plus tardive, le sujet met du temps pour accuser la sensation spécifique du corps sapide introduit dans la bouche, mais elle est réelle à la langue. Dans les expériences de Drielsma, les sujets, qui avaient la langue immobile et isolée dans la bouche, répondaient seulement 18 fois sur 2i pour les saveurs mises en contact avec la muqueuse linguale. Gley trouve dans la pathologie la confirmation de ce fait. « Les personnes atteintes de paralysie de la langue ou des joues donnent souvent des indica- tions fausses sur la saveur des substances appliquées sur les bords de la langue. » (Gley, art. cité, 607.) Selon les expériences et les observations de Blmah, il faut attri- buer aux mouvements de la langue la diffusion des substances sapides. L'expériertce citée par tous les auteurs, est assez concluante. Blmar n'a jamais observé de dilfusion de deux solutions différentes : une solution de ferro-cyanure de K., — quelques gouttes — déposée sur la partie de la langue tenue immobile hors de la bouche et une solution de perchlorure de fer déposée à la base de la langue. La langue devenant mobile, cette difi'iision avait rapidement lieu, et la coloration bien caractéristique se produisait à la pointe de la langue. L'expérience, répétée sur le chien, donne les mêmes résultats; sectionnant chez une chienne les deux linguaux dans la région sous-maxillaire, l'animal n'éprouvait aucune sensation gustative, il ne manifestait aucune réaction psycho- sensorielle tant qu'on maintenait sa langue immobile; mais il manifestait des signes de dégoût dès qu'il fermait sa gueule et qu'on lui rendait la liberté. La sensation gustative aurait besoin, selon J. Miller, d'une répétition mécanique, pour ainsi dire, des mouvements de la langue et de son appui sur le palais ckftk cavité buccale; la sensation est comme renforcée par la pression. Yox Vlntschg.^u considère, comme Fick et Fuxke {Lehrhuc.h der PhijsioL, Leipzig, 1860), le rôle de la compression comme important dans le mécanisme de la gustation. Selon Fick {Lehrhiich de?' Anat. und Physiol. der Sinnesorganen, ché par Von Vintsghgau), la pression, la tritura- tion donneraient aux substances sapides plus de lluidité pour qu'elles puissent arriver plus intimement en rapport avec les terminaisons nerveuses des nerfs de la gustation. « Il se passe dans la gustation, éct'ii Gley, ce qui se passe dans l'exercice des autres sens: les mouvements musculaires jouent un tel rôle dans la production de la sensation qu'ils en font partie intégrante. On a peine à se représenter ce que serait sans eux la sensation. Par exemple, les mouvements des yeux ne sont-ils pas néces- saires pour mettre les éléments sensitifs de la rétine en contact successif avec les différentes parties de l'image et, par suite, étant eux-mêmes réunis par la conscience, ne deviennent-ils pas véritablement des éléments de la perception? 11 en est de même de la part que prennent dans l'orientation auditive les mouvements de la tête et les vibrations du pavillon de l'oreille » {Art. cité, 608). Parmi les conditions exigées par une fonction normale de la sensibilité gustative, citons encore, comme d'ailleurs dans tous les domaines sensoriels : Vétat normal de la circulation et de la sécrétion de la muqueuse linguale. Une langue épaisse, recou- verte par un mucus épais, empêche la gustation; il en est de même pour une langue sèche. Les substances sapides exigent une humidité préalable et convenable, liée assez intimement à leur pouvoir gustatif. Analysant la physiologie de la gustation et son mécanisme de transmission, nous avons longuement parlé du rôle de la corde du tympan dans la gustation, et indirectement de l'importance de la circulation pour le fonction- nement normal de la gustation. Nous n'y reviendrons plus. La sécrétion salivaire est certainement nécessaire, connaissant surtout le rôle que l'humidité joue dans la gustation. L'expression populaire : « faire venir l'eau à la bouche », consacre le rapport étroit qui existe entre la gustation et la sécrétion sali- 662 GOUT. vaire. De la viande montrée à un chien provoque facilement une sécrétion salivaire. L'homme ne peut pas empêcher cette sécrétion, s'il vient à penser à un mets favori, à un plat succulent. La salive paraît donc jouer un grand rôle dans la gustation des substances sapides excitant particulièrement la muqueuse linguale. La sécrétion parotidienne entre aussi en jeu dans le mécanisme de la gustation, selon les expériences de Vulpian, dont nous avons fait plus haut une longue expo- sition. VuLPiAN admettait que la glande parotidienne était innervée par des libres excito-sécrétoires provenant du glosso- pharyngien, le nerf de la gustation par excellence, selon cet auteur; d'où la probabilité de la transmission par action réflexe. La glande sublinguale entrerait en action, selon G. Colin [Traité de Physiol. com-parce des animaux, 3^ édit., 1,1886, 336), de même que toutes les autres petites glandes à salive visqueuse, pendant l'acte de la gustation. Rappelons que la muqueuse linguale exige, ainsi que les substances sapides, une certaine température pour qu'elle puisse percevoir les substances sapides, tout comme ces substances sapides en exigent une pour se faire percevoir. F. Kiesow (Beitrage zur physiologischen Psychologie des Gcschmackssinnes. Phil. Studien, xii, 25o-275 et 464-473) fait remarquer que l'inlluence de la température se manifeste différemment selon qu'elle s'exerce en même temps que la gustation ou avant l'excitation de la nmqueuse lin- guale. Selon lui, la température delà solution de la substance sapide n'a aucune inlluence, mais au contraire la température de la langue aurait une influence certaine. La langue plongeant dans l'eau pendant au moins deux minutes, à une température de 0° ou de 50°, ne peut plus accuser aucune sensation gustative, même pour une solution très forte, au bout de quelques minutes, ce qui est énorme pour une activité sensorielle. Elle serait plus manifeste pour le sucré, pour l'amer et pour l'acide, et moins pour le salé. Sgureiber arrive à des conclusions difTérentes de celles de Kiesow [Étude sur le sens du goût (en russe. Recueil de Mémoires sur la Philosophie, ofi'ert à Morochowtzev en 1892, Moscou, 1893, 42-60). Il pense que l'influence de la température est d'autant plus grande sur les saveurs qu'elles ont une puissance plus sapide. Voici quelques chiffres de cet auteur : Solution à 30' ou 40" ' Solution à 0° Sucre 0,1 p. 100 0,4 p. 100 Sel. 0,5 p. 100 0,25 p. 100 Chlorhydr;Uc de quiuiue. 0,0001 p. 100 0,003 p. 100 Acide citrique 0,02o p. 100 0,003 p. 100 Notons enfin le rapport qui existe entre la gustation et l'étendue de la surface de la muqueuse linguale excitée. Plus la surface est étendue, plus l'intensité de la gustation est grande. Les expériences de Camerer plaideraient dans ce sens [Ueber die Abhna- gigkeit des Geschmackssinnes 'Von der gereizten Stelle der Mundhôhle, Z. B., 1870). Il avait employé quatre solutions de NaCl titrées dilléremnient, et il avait reconnu les saveurs plus facilement si la substance était plus étendue sur la surface linguale. Dans son dis- positif expérimental, on pouvait agir à volonté sur une surface simple ou double ; il avait imaginé un gros tube contenant deux petits tubes, de sorte qu'en introduisant la substance sapide dans un tube ou les deux à la fois, on était maître de l'augmentation de la surface excitée. En résumé, l'hypothèse chimique est la seule qu'on doive prendre en considéra- tion. Mais de quelle manière cette réaction se produit-elle ? Les substances sapides excitent-elles les bâtonnets de l'extrémité périphérique des cellules gustatives des bourgeons, ou cet ébranlement a-t-il lieu à l'intérieur même du bourgeon ? On pourrait faire encore la supposition que tout se passe dans le protoplasme cellulaire, supposition d'ailleurs gratuite et des plus hypothétiques. L'histologie nous a montré à quel point les terminaisons gustatives diffèrent de celles de l'olfaction. Les auteurs auraient tort de comparer ces deux sens au point de vue de leur fonctionnement et de leurs structures histologiques. Les terminaisons nerveuses sont tout à fait différentes. Les recherches histologiques de Renaut et Jacques sont démonstratives. Les cellules olfactives et les cellules gustatives n'ont pas la moindre analogie, et Wundt à tort considère, dans ses avant-dernières éditions, que dans les deux sensations les cils seraient mis en mouve- ment par les excitants chimiques. Les cellules olfactives sont des cellules ganglion- GOUT. 663 naires; elles constituent des protoneurones sensitifs. f.p corps cellulaire est superficiel, tandis que le corps cellulaire des protoneurones sensoriels iiustatifs est situé plus profondé- ment (ganglion d'AxoERscn et ganglion géniculé) ; le prolongement périphérique, très long d'ailleurs, se termine en s'enroulant presque autour des cellules des bourgeons gustatifs. D'après les recherches de L. M.VRCHAiND (Le 'goût. Bibl. Internationale de Psychol. expé- rimentale. Paris, Doin., 1903, 73) sur la muqueuse linguale du fœtus humain et sur les papilles foliées du lapin, on pourrait mettre en évidence le trajet suivi par les filets terminaux gustatifs. « Ces filets, écrit L. Marchand, suivant l'expression de Jacques, se servent des cellules gustatives et de même des cellules de soutien comme de simples perches autour desquelles ils s'enroulent pour atteindre l'extérieur. Dans l'organe folié du lapin, nous avons pu voir l'extrême terminaison des nerfs gustatifs ; ils viennent se terminer en partie à l'intérieur du bourgeon, en partie autour du bouquet des cols des cellules gustatives. Autour de celles-ci, les renflements terminaux des nerfs forment une couronne régulière. 11 n'y a aucune différence anatomique entre les filets termi- naux qui arrivent ainsi aux pores du goût et ceux qui se terminent à l'intérieur du bour- geon. Les pores du goût permettent aux liquides sapides d'arriver à l'intérieur du bour- geon et d'impressionner les filets nerveux plus profonds. Les filets qui sont les plus voisins du pore sont plus facilement impressionnés par les substances chimiques sapides. » Ces considérations anatomo-histologiques ne font que confirmer la probabilité de l'hy- pothèse chimique; on saurait comprendre le pourquoi du retard des réactions des sub- stances sapides. 11 y aurait un rapport entre la longueur de temps de réaction des saveurs et la persistance des impressions (Von Vintschgau et Hoenigschmied, Gley, Marchand). La durée est plus longue pour les substances amères que pour les substances sapides; cela s'expliquerait par la difficulté au liquide de venir en contact avec les bourgeons gustatifs, d'où leur persistance due à la difficulté de la faire ressortir des corpuscules gustatifs. Hypothèse claire, mais à mon avis trop sommaire. Les corpuscules gustatifs possèdent un dispositif spécial pour faciliter la pénétration et la diffusion des saveurs, à l'extérieur des bourgeons gustatifs. C'est l'appareil érec- teur décrit par Rexaut. Le mécanisme de la gustation provoque, soit par le jeu des mou- vements musculaires (mastication surtout], soit par la compresssion des troncs veineux des parties de la muqueuse linguale, l'érection des papilles qui s'élèvent, et les substances sapides arrivent plus facilement dans les rigoles, et par suite, dans les pores gustatifs. Les recherches histologiques de Marchand sur la langue de l'homme et du singe le conduisent à croire « que les bourgeons du goût sont très rares dans les régions dépourvues de papilles caliciformes. Au niveau des papilles fongiformes, selon lui, on ne trouve sur les corps histologiques qu'un ou deux bourgeons gustatifs par papille (Marchand, Ouv. cité, 7o). Et Marchand se demande, à la suite de tant d'autres auteurs, s'il faut considérer les terminaisons nerveuses des corpuscules du goût comme seules capables d'être impressionnées par les saveurs. La topographie de la gustation et les recherches récentes de Toulouse et Vaschide, de Martau, confirment des constatations antérieures des auteurs, et accusent une sensibilité gustalive en des régions buccales dépourvues de corpuscules du goût. Il existe donc d'autres terminaisons nerveuses capables d'être impressionnées par les saveurs en dehors des corpuscules gustatifs, et cette possibilité ébranle la théorie chimique et toute l'argumentation qui liait néces- sairement la gustation à la présence des bourgeons gustatifs. Marchand n'a pu trouver dans la muqueuse du voile du palais, ou dans les amyg- dales, des corpuscules du goût; les vagu'.es terminaison? libres qui s'arborisent dans toute la muqueuse, l'enflées à leur extrémité, pourraient être considérées, selon cet auteur, comme des filets nerveux sensibles aux substances sapides (Marchand, Ouu. cité, 76). Il faut pourtant retenir que les papilles caliciformes seraient surtout sensibles pour les substances amères ; la disposition anatomique des rigoles des bourgeons expliquerait pourquoi ces sensations mettent plus de temps à ébranler le système nerveux; les autres sensations seraient plus rapidement perçues à cause de la termi- naison des éléments percepteurs, les terminaisons libres intra-épithéliales. Un dernier point avant de finir ce chapitre. De quelle manière toutes ces voies de perception doivent-elles être conçues? Existe-t-il une seule voie nerveuse pour toutes les substances sapides, ou faut-il admettre des voies diflérentes pour toutes les sensa- 664 GOUT. tious gustatives, qualitativement difréientes ? Pourrait-on conclure, malgré les expé- riences, d'ailleurs exactes, des auteurs, de ce fait qu'il y a des papilles qui réagissent d'une manière difTérente, qu'il y aurait des voies différentes pour leur transmission et pour leur conductibilité? Ou bien cette transformation est-elle d'origine cérébrale? Ou cela tiendrait-à des modifications dues aux neurones de relais, qui renforceraient l'excitation première, plus on moins spécifique? Gorchkoff admet même des centres corticaux distincts pour les diverses saveurs : chez le chien, ils sont disposés à la partie antérieure inférieure de la 3'' et de la 4"^ circonvolution primaire, en d'autres mots, c'est dans la région de la sylvicnne antérieure et de l'ecto-sylvienne antérieure. Le plus bas situé serait !e centre pour l'amer; le centre pour l'aigre, plus haut; celui du salé encore plus, et le plus haut serait celui du doux (Gorchrofi'. Travaux delà cli- nique des maladies mentales et 7iervcnses de Saint-Pctershourg, 1902, 1, Revue Neurolo- gique, 1903, 764^ La question non seulement est loin d'être résolue, mais elle est à peine posée; elle est intimement liée au problème toujours nouveau de la spécificité des sens, qui, malgré les ingénieuses inductions de J. Mùller, Meynert, Heljiholtz, etc., reste encore debout et demande des faits, et toujours des faits nouveaux, pour consolider certains .points faibles, ou pour ejfphquer des données que les physiologistes ignoraient jadis. Les éléments périphériques de la gustation favorisent certainement la possibilité de percevoir les substances sapides. Comme dans tous les domaines sensoriels, l'organe d'impressionnabilité joue un rôle de tout premier ordre ; les neurones intermédiaires transmettraieut cette impression, la rendant encore plus spéciale en la renforçant davantage, et dans les centres corticaux, sur cette grande surface des lobes temporo- sphénoidaux, aurait lieu cette modification, cette empreinte sensorielle spécifique. Mais toute hypothèse plus explicite serait gratuite. XI. - LE SEUIL ET LA PSYCHO-PHYSIQUE DES SENSATIONS GUSTATIVES. I. Le minimum perceptible. — La détermination du minimum perceptible des sensa- tions gustatives est extrêmement difficile à cause des nombreuses conditions exigées, tant pour les saveurs excitantes que pour l'organe de la gustation, si indéfinissable, si complexe, et qui se prête surtout si peu à une analyse psychologique délicate. Toute détermination ancienne est empreinte de nombreuses causes d'erreur : l'absence d'une technique précise empêchera toujours la réalisation des conditions exigées par toute mesure scientifique. Les anciennes recherches de Von Vintschgal', Camerer, Valentin, etc., sont intéressantes seulement ;i titre de documentation. 11 faut arriver à Ch. RiCHET, et à Gley et Cii. Richet, pour noter des chiffres qui sortent de la valeur com- parative des renseignements des auteurs classiques. Von Vintschgau a d'ailleurs adressé à ces recherches les mêmes critiques, al il insiste sur les mauvaises conditions de tech- nique. On essayait de déterminer la connaissance perceptible soit des quantités données d'une solution quelconque, solution faite à tout hasard, et on cherchait à se rendre compte du titre de la solution perçue, solution de plus en plus diluée, ou on se servait d'une quantité aussi minime que possible d'une solution concentrée. La première technique est la plus logique. Nous avons parlé, dans le chapitre de la Gustatométrie, des techniques utilisées empiriquement ou scientifiquement par les différents auteurs. Je donnerai ici seulement les résultats de leurs expériences. Voici les chiffres de Valentin, et les substances sapides employées : Nature Quantité volumétrique de la substance de la solution ^ perçue sapide. (dans 1 eau distillée). Sucre de canne. ... 20 ce. à 1 p. 83 Sel de cuisine. ( 11", 5 à 1 p. 215 I 12 ce. à 1 p. 426 Acide sulfuriciiie. ... 1 p. 100000 Extrait d'aloès 1/4 ce. à 1 p. 323 Sulfate de quinine. . . 1 j». 33,000 Quantité absolue de la substance sapide. Observations. Grammes. 0,24 Sensation faible, presque indélinissable. 0,007 Sensation nette. 0,027 Saveur très faible. — Avec de l'attention. 0,008 Saveur nette. — Sensation nette. GOUT. 665 Valen'tin croit qu'il faut plutôt se servit- d'une petite quantité volumétrique d'une solution concentrée que d'une grande quantité d'une solution diluée. Ainsi, pour avoir des sensations sapides du salé, il faut prendre i ce, o d'une solution de sel de cuisine de 0,87 p. 100 pour provoquer la sensation de salé, donc, Os'OOO sel ; on perçoit pourtant à peine la saveur d'une solution' de 1/4 p. 100 de sel en prenant 12 ce. de la solution, soit 0?'"029 de sel. Cela est explicable, car il se peut bien que l'excitation plus intense de quelques fibres gustatives soit suffisante pour éveiller la sen- sation, tandis que l'excitation faible d'un plus grand nombre de terminaisons nerveuses serait moins capable d'évoquer une sensation nette. Vo.\ ViNTScuiiAU explique le fait ainsi, et, ce semble, avec raison. Pour la strychnine, Valentin donne comme solution possible : 1. p. 40,000. Camerer donne les chiffres suivants pour NaCI [Dte Grenzen (1er Schmeckbarkeit von Chlornatrium in wdssriger Lôsiing — A. g. P., ii, '2'M). QUANTITÉ DE SEL NOMBRE DE FOIS en milligrammes contenu niLUTiON où la sensation dans sa solution acide. du sel. a été vraie. 4,8 1 p. 6250 8,7 9,n l p. .3158 4S,7 U,3 1 p. 2098 79.7 19,1 1 p. 1570 91,5 28,6 1 p. 1049 98,7 Pour la quinine : QUANTITÉ DE LA QUININE NOMBRE DÉ FOIS en milligrammes dilution où la diagnose contenue dans la solution acide. de la quinine. a été exacte. 0,029 1 pour 103,400 32 0,044 1 pour 68,000 62 0,059 1 pour 51,000 77 0,074 1 pour 40,000 88 0,089 1 pour 34,000 89 La sensibilité sapide de la quinine est, d'après Camerer, 211 fois plus grande que celle du sel. Les chiffres de ces auteurs se ressemblent, avec cette ditTérence que la sensi- bilité gustative de Camerer est un peu plus grande que celle de Valentin. Camerer recon- naissait une saveur salée contenant 28™''" de sel, tandis que Valentin reconnut une saveur légèrement salée à une solution qui contenait Os'',027 de chlorure de sodium. Camerer se servait d'une solution h 1 p. 1049 et prenait 30 ce, tandis que Valentin se servait d'une solution à 1 p. 413 et prenait 12 ce. Camerer avait essayé de déterminer la sapidité du sel pour une région délimitée de la pointe de la langue, et il a obtenu la sensation salée avec une solution de .0S'"039 avec un coefficient de 70 p. 100 de vrais ; le coefficient était de 12 p. 100 seulement avec une solution à 0,089. Avec Ch. Richet on arrive aux observations plus précises. Les observations faites sur lui-même (B. B., 1883, 17 décembre) sont toujours à citer; il employait 1 ce. de solution. Voici ses résultats : QUANTITÉ DE MÉTAL (par litre de liquide). Sulfate de cuivre 0,001 Nitrate d'argent 0,004 Bichlorure de mercure . . 0,010 Chlorure d'ammonium . . 0,020 Sulfate de zinc 0,045 Voici aussi les chiffres de Ch. Richet pour la sapidité de quelques acides. -: POIDS d'acide par litre par litre évalué fpoids absolu) et poids de CaO sature. Acide sulfurique 0,07 0,040 Acide nitrique 0,07 0,031 Acide chlorliydriqn.' . . . 0,078 0,059 Acide acétique 0,09 0,042 666 GOUT. L'action des différentes solutions acides sur la gustation ne varie donc que dans de très faibles limites. Donc cela se passe tout autrement que pour le sel et pour les substances amères. E. Gley et Ch. Richet déterminèrent le minimum perceptiide de divers alcaloïdes; en goûtant 5 ce. d'une solution dans l'eau. On avait pris tous les soins pour laisser aux sensations toute leur indépendance psycho-physiologique, mettant de l'intervalle entre les essais gustatifs et cherchant à éviter les post-sensations ou arrière-goùt, source inépui- sable des causes d'erreur dans toute détermination gustative (De la sensibibilité (jusla- tive pour les alcaloïdes. D. B., 18 avril ISSU, 237). alcaloïdes DEGRK de la dilution par litre SI" ■ QUANTITE de substance nécessaire pour être perçue en gr. Strychnine mon ochlor.T .0.0006 0,000003 Strychnine 0,0008 0,000004 Nicotine 0,003 0,000015 Éthyl-strychniui- 0,004 0,00002 Quinine 0,004 0,00002 Colchicine 0,0045 0,0000225 Cinchonine 0,016 0,00008 Vératrine 0,02 0,0001 Pilocarpine 0,035 0,000125 Atropine 0,03 0,00015 Aconitine 0,05 0,00025 Cocaïne 0,15 0,00075 Morphine 0,15 0,00075 Il n'y a pas de rapport à établir « entre la quantité nécessaire pour produire la sen- sation et la composition chimique », et il n'y a aucun rapport entre la toxicité et l'amer- tume. La sapidité des substances amères est, comme on le voit, extrêmement variable d'un alcaloïde à l'autre : il faut 200 fois plus de morphine que de strychnine pour pro- voquer une sensation gustative. Voici, d'après Gley et Gh. Richet, quelques chiffres sur la quantité nécessaire pour être perçue des quelques corps dans lesquels entre aussi le groupe AzH-, comme dans les alcaloïdes : Degré do la dilution (Quantité de substance nécessaire par litre. pour être perçue. graninnes. grammes. Méthylamine 0,15 0,00075 Ammoniaque 0,4 0.002 Urée 7,5 0,035 J'ai étudié dernièrement avec le guési-esthésimètre Toulouse- Vaschide le minimum per- ceptible des sensations gustatives;j'ai voulu déterminer la sensibilité gustative générale, et nullement locale. J'ai examiné 28 sujets hommes et 30 sujets femmes, leur âge variant de 22 à 30 ans. C'est la première fois qu'on essaye de déterminer la sensibilité gustative pour obtenir une vraie moyenne. Voici les chiffres : NATURE des SUBSTANCES SAPIDKS. MOYENNE T)ES SENSATIONS. MOYENNE DES PICRCK P TION S. NOMBRE DK CAS SUR 10 où L.\ SUBST. EST RECONNUE. HOMMES. FEMMES. HOMMES. l■■EM^M•;s. HOMMES. KEMMES. Salé Doux Amer Acide 2 p. 1 000 6 p. 1 000 5 [). 100 000 8 p. 10 000 1 p. 100 7 p. 1 OUO 8 p. 100 000 7 p. 10 000 1 p. 100 (i p. 100 5 p. 10 000 8 p. 1 000 4 p. 100 7 p. 100 8 1). 10 000 7 p. 1 000 9,27 8,73 8,90 9,40 8,31 8,03 7,82 9,20 GOUT. «67 I/iiomme a donc une sensibilité plus fuie que la femme pour le salé; la supériorité persiste en faveur de l'homme avec moins de différence pour l'amer; pour l'acide et le doux, sa sensibilité gustative est presque égale, tant pour la sensation que pour la perception. La valeur des réponses concernant la sensation se juge chez les hommes et chez les femmes sur la proportion élevée des cas où l'eau est reconnue. Quoique l'homme paraisse avoir un goût plus iîn, la femme est supérieure pour la reconnaissance des saveurs-odeurs. Sur 10 saveurs-odeurs les hommes en reconnaissaient en moyenne 6,42, tandis que les femmes en reconnaissaient 7,46. Cela tient sans doute à l'habitude qu'ont les femmes de porter, parleurs occupations de ménagère et leurs habitudes de toilette, davantage leur attention sur les saveurs et les odeurs des corps (Vaschide. Mesure de la sensibilité gustative chez l'homme. C. R., 1901, 893-900). IL La psychophysique des sensations gustatives. — La loi psycho-physique de Weber- Fechner a été confirmée en partie seulement par les recherches de F. Keppelkr. Keppeler avait montré qu'il est impossible d'évaluer psycho-physiquement le rapport entre l'excitation et la sensation. Lorsqu'on prend deux solutions différentes et dont la sapidité est très faible, on se trompe assez souvent dans la désignation qualitative de ces solutions; le nombre de ces jugements vrais et de ces jugements faux ne présente en aucune manière un rapport plus étroit. Les sujets qui goûtaient les solutions même d'une progression croissante de sapidité accusaient tantôt des sensations vraies, tantôt des sensations fausses. Keppeler concluait que la loi de Fechner, c'est-à-dire que la sensation croît comme le logarithme de l'excitation, ne peut pas s'appliquer aux sensations gustatives '{Die Unterschcidwigsvermôr/en des Geschmackssinnes fur Concentra- tionsdifferenzen der sdimeckharén Korpcr. A. g. P., 1809, ii, 489). Voici quelques chiffres : Le degré de la concentration Le pourcentage des différentes solutions. des cas vrais. 2,0 0/0 53,8 5,0 61,2 7,5 73,2 10,0 80,8 G. T. Fechner, examinant les recherches de Kkpplkr, constate que les r(''îulLats de cet auteur confirment sa loi pour ce qui concerne le chlorure de sodium, confirmation approximative, sans doute à cause de la différence considérable des considérations expérimentales. Les résultats des autres recherches sur la quinine, sur la glycérine, etc., sont sans doute moins favorables, même selon G. T. Fecihner. Les dernières recherches de HôNiG confirment vaguement la loi psycho-physique de la gustation. Ces données expérimentales seraient d'ailleujs mises en doute par Fechxer comme dans les expé- riences de Keppler. Je ne connais pas d'autres recberches sur Ja psycho-physique; la question est encore à étudier expérimentalement. Les difficultés expérimentales sont notoires ; on ne peut pas circonscrire l'irritation sensorielle, et, pour une même excita- tion, la surface excitée peut introduire des coefficients difficiles à interpréter dans le calcul des résultats. XM. — LE TEMPS DE RÉACTION DES SENSATIONS GUSTATIVES La rapidité perceptive des sensations gustatives, c'est-à-dire le temps nécessaire pour que le corps sapide déposé sur la nmqueuse linguale soit perçu, est généralement très long. Vo.\ WiTTicii etGRUNHAGEN étudièrent les premiers cette question (Von Witïich, Ueber die Fortieitungsgeschunndirjkeit in mcnschlichen Nerven. Zeitschrift /'. wiss. Med., 31, xxxi). VoN WiTTiGH employa, pour la détermination de la durée des réactions des sensations gustatives, le courant électrique. Appliqué sur la pointe de la langue, le courant élec- trique provoquait une saveur acide; l'accusation d'une perception était accompagnée de l'interruption immédiate de l'excitation électrique. Il donne comme chiffre de la durée : 0"167 : dans ce temps entre aussi certainement l'acte musculaire qui détermine l'interruption du courant électrique. 668 GOUT. Les recherches de Von Vintschgau et Honigschmied sont plus noml)reuses, et sont, avec celles de Be.\un[s, de Buccola et de Cii. Henry, les seules qui aient été faites sur la vitesse des réactions gustatives. Les recherches de Kiesow concernent des points spéciau.t de la psycho-physiolologie sensorielle gustative. Vo.\ ViNTSCHG.AU et Honigschmied {Versuche ùbcr die Reactionazeit einer Geschnvacksemp' fmdung, A~ q. P., x; xii, 87; xiv, '}i9) employèrent une technique des plus ingénieuses et simples. La substance sopide était déposée sur la muqueuse linguale, à la hase ou à la pointe, avec un pinceau, en même temps qu'un courant électrique se formait instan- tanément. H y avait rupture de courant immédiatement dès qu'on accusait une percep- tion. Hs divisent leurs recherches en trois catégories : 1° Celles dans lesquelles les sujçts avaient connaissance de la nature de la substance sapide employée. 2° Celles dans lesquelles les sujets devaient distinguer la substance sapide connue de l'eau distillée. 3^ Celles dans lesquelles les sujets devaient distinguer deux sulslances sapides tota- lement ignorées. Il s'agissait, en somme, du « temps de choix ». Voici les chiffres de Von Vintschgau et de HôNiGscH.MiEr) sur le temps de réaction pour la base de la langue des sensations gustatives : Attouchement de la langue, simple contact, 0"1409. Temps de réaction pour les saveurs amères, 0"oij2. Temps de réaction pour les saveui\s sucrées, 0''502. Temps de réaction pour les saveurs salées, 0"543. Le tableau suivant donne le résultat des ex|)ériences sur la pointe : NATURE DE L'EXPÉRIENCE. LE SUJET H. S. D' 0. FU. Attouchement. Chlorure de sodium. Sucre. Acide. Quinine. 0",lo07 Û",lo98 0",1639 0",167ë 0",2196 0",i2:;i 0",.597 0",7o2 0",993 0",n42 0",3502 Les trois sujets avaient connaissance de la nature des substances sapides utilisées pendant l'expérimentation. Dans le tableau suivant, on trouvera en secondes les résultats des trois sortes d'expé- riences faites sur un sujet : Chlorure de sodium. Acide. Sucre. Quinine. c/j o ^ C DISTINCTION DE EAU. CHLORURE de sodium. ACIDE. SUCRE. QUININE. 0",,irj9S 0", 167(1 0",1G3:) 0",219G 0",27GG o",33i;; 0",3840 0",4129 0",3749 0",3G88 0",4388 0",3338 0",4373 0",5095 0",3378 0",4081 0",i21() 0",4802 0",4090 0",4224 La première colonne indique la substance dont on a mesuré la réaction gustative; les GOUT. ti()9 autres colonnes donnent le temps de réaction cherchée par distinction de la substance dont la colonne respective indique la nature. I. a conclusion des recherches de(;VoN Vimschgau et 11("inigschmied est que la vitesse des réactions gustatives de choix est d'autant plus lente que sa vitesse réactive indivi- duelle est plus lenle. Les dernières recherches sont celles de II. Beaunis, auciucl la psychologie doit de bien solides études. Les expériences ont été faites sur lui-même {Recherches e.vprri- mentales sur les conditions de l'activité cérébrale et sur la physiologie des nerfs, Paris, ii, 1884, 49-81). Le dispositif est plus précis que léprécédent. Sur la langue est appliquée une mince lamelle de platine, qui se trouve reliée à l'un des rhéophores d'une pile par un lil de platine; l'autre rhéophore de la pile est mis en rapport à l'aide d'un fil de platine, avec un anneau métallique, un bouton entouré d'une éponge; le signal électrique de Dei'rez, interposé dans le circuit, fermait le courant au moment où l'éponge imbibée de la substance sapide était ;ippli(|uée sur la muqueuse linguale. La réaction était indiquée par le signal donné par le sujet, signal électrique qui marquait la durée percep- tive gustative. Voici les chiffres de Rkaunis : POINTE DE LA LANGUE. Nature de la substance sapide utilisée. Minimum. Maximum, Sale . 0".25 0",71 Sucré 0",30 0",8d Acide 0",64 0",'70 Amer ...... 2", 00 T',00 DOS DE LA LANGUE IS'ature de la suljstancc sa[)ide. Minimum. Maximum. Salé 0",70 0",)46 Sucré ? 0",166 Acide O'Mtîo 0'M66 Amer en moyenne 1",5 Ces chiffres sont sensiblement supérieurs à ceuxde Vo.\ Vintschgau: cela tient certai- nement aux conditions différentes expérimentales. Graduer l'excitation pour avoir la mesure exacte et adéquate d'une excitation sapide donnée, c'est une besogne difficile, même entre les mains des physiologistes les plus exercés; le moment précis de Texcita- tion sensorielle ne peut pas être exactement déterminé; Beaunis analyse le minimum du temps de réacliou des sensations gustatives, et il passe en revue les conditions des excitants sapides et celles des sensations gustatives. Si l'on voulait comparer le temps de réaction des sensations gustatives et celui des sensations olfactives au temps de réaction des autres sensations, Beaunis fait i-emarquer qu'on marcherait à l'aveugle, car il s'agit d'unités bien différentes. Chaules Henry a étudié également la mesure du temps de réaction des sensations gustatives (Ch. Henry, Le temps de réaction et des impressions (justatives mesuré par un compteur à secondes, B. B., 1894, 27 oct., 682). On excite la langue avec un cou- rant électrique faible, produit par une pile placée dans une cuvette •' fixée au bouton déclancheur à secondes ». Cette pile consiste dans un disque d'argent, un mor- ceau de ruban de magnésium brillant, et une rondelle de papier saturée d'eau. Le de'clan- chement de l'appareil est piovoqué par l'application de la langue sur le disque d'argent. Le compteur s'arrête quand le sujet retire la langue. La mesure du temps de la réaction gustative est indiquée par le calcul du temps, depuis l'application de la plaque d'argent sur la langue et la perception de la sensation d'acide déterminée par le courant électrique. Pour cet auteur, la durée des sensations gustatives est de 1", 4", li", chiffres variant avec les individus, mais concordant chez le même sujet. Citons aussi pour finir les chiffres du psychologue italien, C. Buccola. On déterminait le temps par la mesure entre Tapplicalion d'une éponge imbibée avec la substance sapide et la rupture d'un contact électrique (G. Buccola, Le Lerjyc dcl tempo nci fenomcni del 670 GOUT. pensiero. Saggi di Psicologia sperimentale. Milauo, 1883, in-18, 632). Voici, en centièmes, le résultat de ses données : A la pointe de la lancrue. Base de la langue. 330 centièmes de secondes. 434 centièmes de seconde. Xm. — LES PERCEPTIONS GUSTATIVES. Dans ce chapitre, j'examinerai quelques données particulières qualitatives des sensa- tions gustatives, et, entre autres : les phénomènes de persistance des saveurs, de contraste des saveurs, combinaison des saveurs, de Vévolution des saveurs avec l'âge, et le phéno- mène psycho-physiologique du dégoût. 1. — Les sensations gustatives ont la qualité d'être généralement persistantes. Or la cause de ce phénomène est extrêmement peu connue. Les recherches méthodiques font défaut, et nous sommes en pleines hypothèses; les unes évoquent l'action chi- mique des substances sapides ; les autres, la lenteur de la perception. Biddkr trouvait une certaine analogie entre la persistance des couleurs et celle des saveurs, mais ses considérations sont vagues [Wagner's Handioôrterbuch der Physiologie, m, (J), 1846,10-11). Il faut toujours retenir l'hypothèse d'une énergie spécifique des sensa- tions gustatives qui procéderait des mêmes bases et des mêmes principes que les sen- sations visuelles de couleur. FiCK [Lehrhuch der Anatomie und Physiologie der Sinnesorgane, 1864) invoque les considérations anatomiques; il y aurait un rapport intime entre le nombre des fentes papillaires et la persistance des sensations gustatives. Valentin [Lehrhuch der Physiol.) invoque les considéiations chimiques. Certaines substances sapides changeraient de saveur après la première impression gustative; l'arrière-goût ne serait pas le même lorsqu'il s'agit de la gustation des substances aromatiques, des substances qui contiennent du tanin, certaines liqueurs, etc. Les substances qui contiendraient du tanin, donc une substance amère, laisseraient aussi un arrière-goût, parfois une sensa- tion de douceur. L'exemple de Bimar [ouv. cité) est assez typique; ayant fait des expé- riences avec l'acide oxalique sur lui-même, il avait remarqué des différences notoires qualitatives entre les excitations sensorielles de la même substance sapide par rapport à la topographie de la muqueuse linguale irritée; mais elle produisit à la base de la langue un goût acide, sensation devenue quelques instants après douce, et à tel point que l'eau pure prise à la suite paraissait sucrée. Les expériences manquent; tout au plus si la physiologie pourra enregistrer quelques cas d'observations isolées ou des considérations secondaires. La post-perception, ainsi que les psychologues allemands appellent la sensation postérieure à l'excitation première, est plus typique, plus précise dans les sensations gustatives. Les saveurs consécutives ont été rapprochées par certains auteurs des images consé- cutives et des couleurs contrastantes des sensations visuelles. Après la perception du sucré, il reste toujours dans la bouche la sensation d'acide; l'eau paraît., légèrement douce après qu'on a goûté du salé ou de l'amer. Nagel et KiEsow sont les seuls auteurs qui aient étudié scientifiquement ce problème. Il ont apporté tous deux leur niinutiosité habituelle, toujours intéressante à suivre, surtout quand on lit des auteurs aussi compétents dans les questions qu'ils étudient. Nagel [Ucbcr die Wirkung der Chlorsaueren Kali auf den Geschmacksinn. Z. f. Phys. u. Psych. d. Sinnesorg, x, 233-239) a constaté qu'une solution de chlorate de potasse à 1 p. 100, qui habituellement n'évoque qu'une vague et froide sensation gustative, presque indéterminable, communique à l'eau goûtée après cette solution une légère sa- veur sucrée et acide. La seconde sensation dépasse la première. Selon Kiesow, les sen- sations consécutives ne dépas.sent jamais les sensations primitives, contrairement à ce qu'affirme Nagel ; c'est seulement après un certain temps que la sensation se modifie, et elle devient alors amère. Le problème est à peine posé; il a besoin encore de nombreux faits pour admettre la moindre probabilité. Le goût,, par sa complexité chimico-phy- siologique, explique la vieille expression : « De gusfibus non est dispulandum. » Les GOUT. 671 actions glandulaires des papilles, les lûactions de la salive, les éléments nerveux et les coelTicients subjectifs, etc., sont des facteurs qui entrent en jeu et qui modifient et changent l'appréciation possible objectiye des sensations gustatives. Un fait est certain : le goût s'éniousse, les sensations s'all'aiblissent avant de s'éteindre d'une manière particulière, à cause de la difficulté et de la complexité d'ana- lyser les sensations de la cavité buccale. La fatigue gustative existe, mais elle est rare- ment constatable. Les phénomènes physiologiques troublent le goût par la distraction plus facilement qu'il ne peuvent troubler les autres excitations sensorielles. Comme phénomène psychologique, le goût constitue un état psycho-sensoriel particulier, car il a son autonomie toute particulière. 2. — Il n'existe aucun travail, en dehors des recherches de Patrick {On the analyses of perception of ««s^c), sur .l'analyse des sensations gustatives, sur la mémoire et sur la combinaison des saveurs. Tous les auteurs évoquent des souvenirs personnels, des analyses ingénieuses, des analogies, pour la plupart fausses, avec l'odorat; mais il n'y a aucun fait, aucune expé- rience précise, au moins dans la mesure où j'ai pu me documenter. En tout cas, la mé- moire d'une saveur, le souvenir d'une saveur ne doivent jamais se confondre avec la post-sensation gustative, avec Varricre-[ioût; le souvenir d'une saveur est un acte psycho- logique indépendant de l'excitation physiologique immédiate et peut être évoqué en dehors de tout concomitant physiologique. La post-sensation est comme l'ombre de l'excitation physiologique normale. Lo.xGET prétendait qu'il est impossible de remémorer les sensations gustatives, cela pourrait se traduire psychologiquement qu'il n'existe pas d'images gustatives. Nous sommes persuadés du contraire; mais toutefois il faut définir expérimentalement la nature et le contenu de ces images. Nous gardons le souvenir des saveurs, et Rouillard disait, peut-être avec raison, que la satiété est un effet de la mémoire du sens du goût. L'imaye yustative entre enjeu dans notre langage intérieur, dans notre mémoire affective, dans notre association d'idées. On en fait un usage plus rare à cause de la petite place que cette image occupe dans la sphère intellectuelle humaine. En tout cas, cette sphère est beaucoup plus grande qu'on n'incline à l'admettre. On s'en rend compte lorsqu'on analyse les perversions du goût, et toute cette riche et inouïe patho- logie des perversions sexuelles, pour la plupart toutes caractérisées par des perturba- tions gustatives. Chez l'homme normal, ces images jouent aussi un rôle considérable; mais l'attention est portée consciemment souvent sur elles, à cause de l'intimité du domaine qu'elle atteint. L'existence de l'image gustative ne serait-elle pas mieux expliquée par l'analyse de certains cas d'aphasie, où les sujets ne reconnaissent pas les objets visuellement, mais par l'odorat ou par le goût? Des lésions cérébrales bien délimitées, comme par exemple celles de l'occipital, n'empêchent pas les chiens opérés de reconnaître les aliments même par le goût en dehors de l'odorat; j'ai pu remarquer le fait maintes fois dans mes recherches sur les chiens écérébrés. L'image gustative existe; elle est définissable, et par conséquent la sensibilité gustative est capable d'emmagasiner des images, d'avoir une mémoire et d'intervenir dans le mécanisme mental au même titre que les autres sensations. Les saveurs sont toujours accompagnées, en tant que saveurs, d'une certaine atfecti- vité, mais à mon avis moindre que celle qui est admise par les auteurs. Les saveurs- images jouent dans la pensée normale un rôle effacé, 'elles entrent enjeu lorsqu'il s'agit surtout de l'apport des sensations de fusion ; tout au contraire elles deviennent obsédantes dans les, troubles pathologiques. Les images gustatives jouent souvent dans le mécanisme de notre pensée le rôle de rappel; elles servent comme plan à une asso- ciation émotive, souvent intimement liée avec des souvenirs olfactifs. Au point de vue de la mémoire et du souvenir des images, la gustation, est, à mon avis, l'esclave du méca- nisme psychologique de la gustation, et secondairement de la vision. Je pourrais donner des exemples multiples, mais je me cont(Mite de ces propositions explicatives, pensant y revenir plus tard avec des recherches expérimentales.' Une image gustative est rare- ment seule dans l'esprit : elle se confond facilement avec les autres, et ce qui les dis- tingue, ce qui donne de l'individualité à leur souvenir, ce sont précisément les images 672 GOUT. olfactives et visuelles associées. Cela s'explique, à mon avis, par la pauvreté de notre langaj^'e, et par le peu d'épithètes avec lesquelles nous fixons dans notre pensée les images gustatives. Que dire d'une sensation douce, amère, acide ou salée, autre cliose qu'elle est plus ou moins douce, amère, etc.? On ajoutera des termes approchés; mais l'image sera toujours pauvre. L'art culinaire, un art visuel plutôt que gustalif, a tellement compris, subconsciemment d'ailleurs, ce fait, que l'esthétique se réduit à une savante utilisation des matières premières culinaires pour frapper l'œil et le nez, pour provoquer des associations nombreuses et agréables de ces sensations adéquates. Les sensations de température et les saveurs-odeurs contribuent à donner le relief, à mieux fixer dans la mémoire toutes les excitations des substances sapides. 3. — I>e phénomène de contraste des sensations gustatives se rapproche sensiblement du mécanisme psycho-physiologique des autres sensations. On entend par contraste une transformation, une inversion des sensations; une sensation en évoquerait une autre tota- lement opposée. Physiologiquement on sent que le nerf du goùl est excité par une sub- stance sapide, il devient moins ou plus apte à être excité par une nouvelle saveur. J. Mi'LLER cite (dans son Traité de Physiologie, 1837, 493;, comme phénomène de contraste, le fait que les saveurs du vin seraient moins franches, après des substances sapides sucrées, de même que le goût du fromage évoquerait le goût du vin... L'obsci- vation courante, d'ailleurs précisée dans l'art culinaire, nous déconseille de goûter le vin après avoir goûté des substances amères ou acides. 11 y a incompatibilité entre certaines saveurs ; comme entre certaines autres une affinité. Pour la compensation des saveurs, la thérapeutique pharmaceutique pourrait à la rigueur nous fournir de nombreux exemples; les sirops et toutes les solutions sucrées servent couramment à cacher, à masquer les saveurs franchement désagréables. Je ne partage guère l'explication de BrCcke, admise par tous ceux qui le citent [Vorle- sungen iibev Physiol., 2"^ éd., Wien, 1870 . BrCcke est d'avis que le phénomène de la compensation est d'origine centrale ; le sucre ne pourrait neutraliser l'acide et n'exer- cerait d'autre part aucune action sur la muqueuse linguale, selon cet auteur. Or il arrive souvent que le sucre masque une saveur acide. Vo.\ ViiNtschgau, malgré l'opi- nion de Br( CKE, est d'avis qu'on pourrait expliquer la compensation par la modifica- tion de nos sensations sapides. En tant que sensation, nous corrigeons la sensation acide. Dans ce cas, elle devient donc plus agréable pour la muqueuse linguale. Je crois que, dans le phénomène de la compensation, la i-ubjectivité est prépondérante. Dans une série d'expériences et d'observations, je n'ai pas pu remarquer la moindre concordance expérimentale; les réponses variant non seulement d'un sujet à l'autre, mais aussi chez le même sujet et dans une proportion considérable, qui empêchai! de songer à un phénomène psycho-physiologique central. Lorsque nous parlerons de la subjectivité des sensations gustatives, nous verrons quel rôle joue dan-s ce domaine sen- soriel l'analyse mentale, le coefficient subjectif désorienté, n'ayant aucun point de repère et aucun critérium. Ainsi les suggestions sapides sont les plus faciles et les hal- lucinations les plus obsédantes. D'après F. Kiesow {Beitriige zur physiologischen Psycliologie des Geschmackssinne. § ■?. Compensation und Mischungscheinungen. Pfiilosophische Studien, xii, 2o4-274i, on ne peut pas obtenir l'annihilation réciproque d'une solution de deux substances sapides. 11 a expérimenté avec dix combinaisons : sucré-salé, sucré-acide, sucré-amer, salé-acide, salé- amer, acide-amer; il a utilisé des solutions de sucre de canne, d'acide chlorhydrique ou de chlorure de sodium et de quinine. Le me'lange était fait de manière à déposer sur la muqueuse linguale 1 ce. ; les sujets devaient faire grande attention à leurs réponses. On n'a pas pu avoir des mélanges franchement insipides; tout au plus arrive-t-on à obtenir un liquide fade, différent comme goût des deux solutions mélangées. Plus les solutions sont faibles, plus le mélange est facile; plus elles sont fortes, plus le mélange est impossible ; on perçoit la saveur sur la([uelle l'attention se porte; parfois, mais c'est rare, ou peut percevoir les deux saveurs en même temps. l>e retard de la réaction des substances sapides amères expliquerait pourquoi dans le mélange elles apparaissent en dernier lieu. Les impressions gustatives sont si variables qu'on ne saurait comparer au mélange des couleurs le mélange, improprement d'ailleurs nommé ainsi, des saveurs. GOUT. 0T3 Selon ScHiiiMKR Einiges zur Pltysiolo(/ie des Geschmackx. Dciitache Klitiik, 18;')0, xi, N°* 13, 1."), 18. Nounullae de giistu disrjuisUiones. Diss. inmif). Gryphiae, IS'iG), dans un mélange de saveurs on ressent (out d'abord le salé, le sucré ensuite; viennnent ensuite l'acide et dernièrement l'amer. Cela s'explique pour un mélange dans lequel le su(^ré se fait sentir le premier : la perceptibilité serait en rapport direct avec la sapidité des réactions sensorielles. 4. — L'art culinaire tire des avantages de ces phénomènes de contraste et de compen- sation. La combinaison des saveurs est l'àme de l'art culinaire ; il y aurait des gammes de saveurs selon les gourmets, et certains auteurs pensent même à comparer les accords et les désaccords des saveurs avec les phénomènes analogues des sensations auditives et gustatives. 11 serait inléressant de voir s'il n'y aurait pas là quelque phéno- mène d'interférence, et de contr(Mer expérimentalement toutes les données de ces com- paraisons gustatives, surtout si l'hypothèse du mécanisme de la gustation n'était pas celle d'ondes vibratoires, aussi courtes que possible, et surtout quand la théorie des ions nous oblige à nous diriger vers d'autres conceptions de nos mécanismes sensoriels. "). — Les modifications les plus variées, les plus importantes, sont dues aux coefli- cients subjectifs individuels. Les impressions gustatives subjectives constituent un cha- pitre à peine commencé, mais qui sera des plus riches quand la pathologie nous docu- mentera sur la portée analytique de nos investigations mentales dans le domaine de la gustation. Nous examinerons au chapilie suivant la pathologie de ces impressions gustatives, liées à des troubles nerveux soit centraux, soit périphériques ou fonctionnels Dans les cas normaux, les impressions subjectives apparaissent surtout lorsqu'il s'agit de la dénomination des saveurs. Comme nous l'avons dit, le langage n'est pas tou- jours apte à former le terme adéquat : d'oîi perte du souvenir des phénomènes de contraste ou de compensation, des illusions, etc. A ce titre, il faut lire le travail intéressant de Ch. S. Mvehs, de Cambridge, sur les dénominations gustatives chez les sauvages [Taslc naines in Miirray Island. Reports of the Cambridge antliropological Expé- dition ta Torres Straits, 11, (2), 180-189). C'est une étude psycho-linguistique des termes par lesquels les habitants de Murray-Island désignent les sensations gustatives. La voie indiquée par cet auteur sera très féconde; car, au point de vue psychologique, la linguistique peut nous donner des renseignements de tout premier ordre. Citons encore à ce sujet le travail de A. F. Chamberlain {Primitive Taste-Words. American Journ. of Psychol., xiv, 410-417'; on trouve les noms et les expressions se rapportant au sens du goût dans le tribu des Algonquins. L'attention joue un grand lôle dans les impressions subjectives gustatives, à cause des conditions si complexes de la psycho-physiologie buccale. L'art de goûter exige une grande attention, une fixation de l'attention, même très soutenue, et les dégusta- teurs des vins, de même que les chefs de cuisine, ont une attitude attentive typique quand ils dégustent. Il faut pourtant distinguer la gustation et l'acte de la dégustation ; le premier acte est purement physiologique; l'attention exerce un rôle secondaire, elle n'est qu'a]>pliquée. L'attention intervient au contraire dans l'acte de la dégustation, il s'agit alors de l'analyse du goût. L'acte de la dégustation exige dès le début une part active, immédiate, de l'attention. Le dégustateur cherche à obtenir de la gustation toutes les données physiologiques ; il savoure, ou, en termes physiologiques, il provo- que l'acte de la gustation un nombre indéfini de fois, et il fait ensuite appel à ses «ouveuirs, à la mémoire des saveurs. Cela en principe doit se passer de la sorte. Dans la vie courante, ces deux actes se confondent le plus souvent, et goiUer veut dire sou- vent déguster, même en dehors des dégustateurs de métier chez qui l'exeixice a déve- loppé particulièrement non seulement la sensibilité gustalive de la muqueuse linguale, mais aussi la mémoire et la sensibilité olfactives. Il faut étudier un dégustateur de profession, pour comprendre la complexité analy- tique des sensations gustatives. Il e.st vrai que le sens du goût ne peut pas avoir en même temps des actions aussi variées, aussi nombreuses que celui de l'audition et de la vision; mais des professionnels savent tirer de la gustation tout un monde d'images qui nous échappe. De sensations gustatives successives, momentanées, composées, etc., ils tirent des données précieuses, et ils arrivent à fixer la date, l'époque exacte d'un cru, ou les DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 43 674 GOUT. substances sapides qui entrent dans la composition d'un plat. L'olfaction joue, ne l'oublions pas, un rôle considérable. J'ai vu un chef de cuisine qui avait distingué dans une sauce à la crevette, où il y avait plus de vingt-quatre goûts différents, la présence d'un goût de vanille, après avoir mis dans la sauce o centigrammes d'un mélange liquide, et cela après une analyse de moins de trois minutes. L'usage plus fréquent du goût explique certainement son développement si restreint par rapport aux autres sensations. On trouvera des détails vulgaires, mais intéressants, dans tous les livres de cuisine, surtout dans ceux du xviii« siècle (Vicaire Geoui.es, Bibliographie (j astronomique). « L'iionime d'esprit seul sait manger, » disait Brillât-Savarin, dans sa spirituelle Physiologie du goût. Cet ouvrage est encore à lire, et, en dehors des considérations psy- cho-physiologiques, l'art culinaire n'aurait pas pu trouver un plus brillant et plus compétent rédacteur. En lisant ce livre, dont la psychologie ne pourra tirer, malheu- reusement, que des indications plutôt esthétiques, pour ainsi dire, que scientifiques, on trouvera des données bien curieuses sur la psychologie de la gustation, sur l'art de mander, et on s'habituera facilement à l'idée du grand rôle que jouent dans la vie les sensations gustatives, par leur coefficient intellectuel. « Le goût, dit cet auteur, nous invite par le plaisir à réparer les pertes continuelles que nous faisons par l'action de la vie {Ouv. cité, p. 37). » Il consacre aussi le plaisir de table et les jouissances du goût. « Tout ce qui est mangeable, écrit cet auteur, est soumis à l'appréciation de l'homme, et, dès qu'un corps succulent est introduit dans la bouche, il est confisqué, gaz et sucs, sans retour. Les lèvres s'opposent à ce qu'il rétrograde, les dents s'en accaparent et le broient, la salive l'imbibe, la langue le gâche et le retourne, un mouvement aspiratoire le pousse vers le gosier, la langue se soulève pour le faire glisser, l'odorat le tlaire en passant, et il est précipité dans l'estomac, pour y subir des transformations ultérieures; sans que, dans toute cette opération, il se soit échappé une parcelle, une goutte ou un atome qui n'ait pas été soumis au pouvoir appréciateur. C'est par suite de cette perfection que la gourmandise est l'apanage exclusif de l'homme. » {Ouv. cite, p. 51.) La gourmandise est, selon Brillat-Savarin, un acte de notre jugement. Parmi les aphorismes de cet auteur, citons encore ceux-ci, qui sont spirituels et vrais : « La table est le seul endroit où l'on ne s'ennuie jamais pendant la première heure. — La décou- verte d'un mets nouveau fait plus pour le bonheur du genre humain que la découverte d'une étoile. » Et celui-ci: «Prétendre qu'il ne faut pas changer devins est une hérésie; la langue se sature, et, après le troisième verre, le meilleur vin n'éveille plus qu'une sen- sation obtuse. » Parmi les chapitres « méditations » de Brillât-Savarin, citons la Médita- tion II, qui traite du goût, de sa physiologie, et de son mécanisme (p. 36-75) ; Méditation IV, de l'appétit; Méditation vi, de la friture; et les Méditations xi (de la gourmandise), XII (des gourmands), xiv (du plaisir de la table), xix (des vins); et la Méditation xxiii, où se trouve une complète histoire, abrégée et philosophique, de la cuisine. On se rend compte, à chaque page de la lecture de ce précieux ouvrage, que l'auteur aimait son sujet, qu'il avait une expérience large et sérieuse, et qu'il savait apprécier mieux que personne ces impressions subjectives dégustatives qui font défaut à nombre de per- sonnes; peut-être, disait cet auteur, parce que leur attention ne s'est pas encore portée vers ce domaine, le seul où l'homme trouve de la consolation, du « bonheur! », et prend parfois contact avec la sensation de la vie, et du goût de la vie. N'oublions pas de citer l'opinion de Luys, qui attribuait aux sensations gustatives l'origine des notions morales du bon et du mauvais, aux coefficients psycho-physiolo- giques, des sensations gustatives. On se serait habitué déclarer une action bonne ou mauvaise, en se rappelant les émotions subjectives des sensations gustatives agréables, douces; ou désagréables, amères. Nous citons cette opinion à titre de document; elle est certainement très discutable, et je ne saurais la critiquer sans évoquer le nombre considérable des problèmes qu'elle agite, en commençant par la théorie des causes finales. On pourrait faire à cette théorie l'objection que, dans les autres données senso- rielles, les sensations sont accompagnées de coefficients subjectifs agréables ou dés- agréables. Comme exemple de finesse des sensations gustatives, et de la délicatesse subjective à laquelle les sujets sont arrivés, soit par l'habitude, soit par des qualités sensorielles indispensables, citons celui où, selon un auteur anglais, Carpenter, cité par Biiiar, des COUT. 675 épiciers de Londres seraient capables de déterminer à. quel endroit de la Tamise on aurait retiré le sel dont on leur dira d'apprécier la saveur. On ne nous dit pas pourtant si l'examen a été fait par un homme de science, et si l'on a contrôlé scientillquement ces données, sans doute considérablement grossies et dénaturées par l'ignorance publique. D'après Carpe.nter, la personne qui dégustait d'habitude le Sherry à Cadix ou à Séville peut citer le tonneau dont il déguste l'c-chantillon; la variété des vins était pourtant considérable, plus de cinq cents. Moi-même, j'ai pu expérimenter sur deux dégustateurs : un sujet pouvait distinguer, les yeux bandés, dix-sept crus difl'érents : il ne fit aucune erreur sur leur âge, leur valeur et leur goût. Je publierai un jour les observations détaillées. Le même sujet faisait des erreurs notables, dégustant le vin avec le nez bouché; et, dès qu'on lui présentait en examen des boissons dilVércnlos, comme du Champagne, de l'eau-de-vie, etc., il faisait des erreurs grossières. Le second sujet a réussi devant moi, ayant les yeux bandés, à déterminer trente-trois nuances de vins de Bordeaux que j'avais pu recueillir; il ne se trompa jamais, quand il s'agit de la qualité du vin; et je n'ai réussi à le tromper qu'une seule fois, non avec des vins ayant le même âge, mais ayant dilué le vin dans des quantités difTérentes d'eau. Il ne put cependant déterminer l'âge aussi exactement que le premier; il me disait qu'il ne goûte que rarement des vins fins, et qu'il s'occupe de placer surtout des vins neufs, et qu'il représente plusieurs maisons. J'ai été également surpris de constater que ces deux sujets déterminent aussi exactement que possible leurs sensations gustatives, sans prendre de mesures préalables pour annihiler les sensations précédentes. Ils attendent la réponse de leur « gosier », et ne le nettoient jamais, selon leur dfre. L"habitude joue un rôle assez notoire dans l'appréciation des sensations gustatives; des exemples vulgaires peuvent être évoqués par tous et me dispenser d'en citer. Les éleveurs savent qu'en persistant, on peut arriver à faire manger aux animaux des ali- ments qui déplaisaient d'abord. L'inlluence du tabac modifie aussi l'appréciation des sensations subjectives; à la longue, les fumeurs n'ont plus le goût fin, et la délicatesse de leur sensibilité gustalive s'émousse. Dans mes observations, j'ai pu préciser de auditu quelques cas affirmatifs, mais je n'ai encore fait aucune détermination expérimentale. L'éducation est encore à avoir en vue lorsqu'on parle des coefficients subjectifs gus- tatifs. Tous les peuples ont des plats nationaux, dont ils savourent copieusement le goût, soit par habitude, soit surtout par éducation. Un homme instruit n'a pas le même goût qu'un analphabète et un amateur de la bonne cuisine saura mieux apprécier que le simple mangeur de plats banaux, la saveur de certains mets ou des vins fins. Une cuisine étrangère est toujoiirs peu agréable au sens dans les premiers contacts, et il y a des plats fameux que certaines personnes ne peuvent pas supporter, dont elles n'arrivent même pas à comprendre la réputation. La sauce romaine si vantée, le llquamen, n'était-elle pas préparée avec des intestins de poisson à moitié pourri? Les voyageurs publient, à ce sujet, des exemples très curieux, de peuplades aimant la viande pourrie, ou en état de putréfaction. Lhlimholz et Grky nous citent des cas instructifs sur les indigènes australiens, amateurs de viande pourrie, qu'ils avalent jusqu'à la satiété (Grey, Exploration in Norlh-West and Western Amiralia, Eyre, ir). Dans LuBBOCK {L'homme préhistorique, Trad. Baillière, 1876), on trouve des citations de voyageurs qui racontent des faits analogues; les sauvages ont un goût tout particulier pour la viande pourrie de poisson et des matières en décomposition (Hawkeswohth, Voyages, 403, William, Figi and the Figiens, i, 213), etc. La manière dont les chefs Taïtiens mangent les poissons crus est citée par tous les auteurs (Cook, Premier voyage, II, 100). Les Esquimaux atl'ectent une grande sympathie pour les matières végétales à, peine digérées (Cook, Troisième voyage, n, oll). La gourmandise, non dans le sens de Brillat-Savarin, hélas ! est habituelle aux sau- vages et aux êtres arriérés. Qui n'a pas remarqué l'appétit et la gloutonnerie d'un débile- idiot? On dirait que le pauvre être est réduit à la seule forme expressive de la sensaîion de la vie! Les auteurs ont essayé de trouver une explication psycho-physiologique du rire dans cet état de satisfaction alimentaire. Darwin avait déjà fait remarquer que certains sau- vages expriment le plaisir par des mouvements dérivés du plaisir de la nourriture. 676 GOUT. Hypothèse ingénieuse, mais qui n'expliquera certainement pas ies autres formes du rire, nombreuses, déviées peut-être de la forme primitive, mais difficiles à classer dans celle catégorie d'expressions. ]Jh(i]'(': dite entre aussi en ligne de compte. Marchand {Le Goût, 27.")) avait pu observer « une famille où bisaïeux, grands-parents, enfants et petits-enfants, avaient la répul- sion pour la même saveur, considérée cependant communément comme agréable, et, point intéressant, chaque membre de la famille avait tenté d'habituer ses enfants à considérer la saveur comme bonne. » L'observation de Marcmand est curieuse, mais pom quoi invoquer l'hérédité quand l'éducation expliquerait cette observation amplement? Le psychologue anglais Bai.n [Les Sens et l'hitcUigence), examinant les sensations guslatives, considère la langue comme directement dépendante de la sensibilité de l'estomac. La langue n'est qu'un appendice de l'estomac, et elle est agréablement affectée ou désagréablement, selon la sensibilité stomacale. Par saveur, il entend les sensations agréables déterminées par l'aliment; la langue aurait la propriété d'appré- cier, en d'autres mots, la digestibilité d'une substance. Les mois u frais, dégoûtant, nauséabond >■ et toutes les épithèles gustatives s'appliquent à la sensibilité stomacale et de la langue, organe attaché à son fonctiomiement guslatif. Pour Bain, l'élément psychique subjectif du goût joue un rôle presque nul. Certainement la digestion joue un rôle prépondérant dans l'appréciation et dans l'analyse des sensations gustatives; mais néan- moins, toutes ces épilhètes qualitatives, toute cette sensibilité guslative est bien subjec- tive; elle est liée à des doî)nées intellectuelles qu'on ne saurait dénier; car elles reposent sur l'éducation, sur l'habitude, sur la mentalité même du sujet. G. — Les illusions] gustatives et les hallucinations s'observent rarement à l'état nor- mal. L'illusion gustative n'est pas une erreur gustative; elle est explicable surtout par un déffiut d'attention, par une distraction plus ou moins grande, ouille peut être pro- voquée par la suggestion. Les mauvais médicaments ne sont-ils pas goûtés parfois délicieusement par des enfants, et aussi par des grandes personnes, a la suite de bonnes paroles? 11 serait banal de donner des exemples de .suggestion. Les enfants ont plus souvent des illusions à cause de la pauvreté de leurs termes linguistiques, et aussi à cause de leur analyse limitée. Les travaux expérimentaux manquent également à ce sujet. 7. — La variation des sensations gustatives avec l'âge suit la courbe normale de l'évo- lution individuelle humaine. Les enfants auraient, selon les affirmations classiques, dès la naissance, une sensi- bilité gustative fine et assez développée. Le sein de la nourrice humecté avec une solu- tion amère est pris avec moins de facilité que le sein humecté avec une solution sucrée. Selon Preyer, on reconnaît que le nouveau-né réagit, même s'il est né un ou deux mois avant le terme, lorsqu'on lui met dans la bouche des matières sapides. Kussmaul a expérimenté sur 20 nouveau-nés, et Genzmer sur 25 enfants, dont quelques-uns avaient à peine quelques heures, d'autres de trois à six jours, et d'autres six semaines au plus. La quinine et le vinaigre provoquaient, selon Kussmaul, des grimaces de déplaisir. La saveur acide fut constatée comme saveur acide, et nullement comme sensation de douleur provoquée par l'action chimique de l'acide. « Uuelques-uns, écrit Kussmaul, tirent la grimace la première fois qu'ils goûtèrent du sucre, mais, après les premiers moments, ils prirent plaisir au reste. La cause de ce fait me paraît être non dans la saveur elle- même, mais dans un autre phénomène psychique, la surprise ([ue provoque la subite excitation des nerfs du goût. Un des enfants s'agite, très etfrayé, au moment où il com- mence à goûter le liquide auquel il n'était pas habitué (et qui avait été réchaulfé). Si la quinine avait provoqué une vive réaction chez les enfants, ils avaient coutume de retirer la tôle plusieurs fois de suite quand on leur donnait ensuite du sucre, b'elTorçant vive- ment de repousser celui-ci jusqu'à ce qu'enlin il se produisît un mouvement de succion et de déglutition. Cela concorde avec l'expérience que tout adulte a pu faire sur lui- même : une saveur très amère ou nauséeuse n'est pas aussitôt dissipée par une saveur sucrée : une nouvelle excitation du sens du goût, par des saveurs dillérentes, provoque le retour — sans cesse plus faible — de la sensation primitive. » (D'après W. Phkver, L'âme de l'Enfant, Irad. fr., Alcan, 1887, iv. Oi.) Les expériences de Genzmer conUrment à tous points, et coniplùleiuon!, les observations GOUT. 677 de Ki'SSMAUL. 11 résulterait de ses recherches que, même chez les enfants, il existe des différences individuelles. Les expériences de W. PREYi'.nsont tout aussi confirmatives. Il a vu son fils, le premier jour de la naissance, lécher le sucré pilé dont il avait saupoudré légèrement le mamelon maternel. I'reykr va jusqu'à considérer que l'innervation de cer- tains mouvements de mimique et de certaines sensations gustatives est constante, parce qu'elle est innée. {(Juvr. cite, p. 99.) Le sens du goût chez le nouveau-né est constitué : il est donc capable de fonc^ tionner; il perçoit l'amer à une solution de 3 p. 100 jusqu'à il p. 100. Toute saveur nouvelle provoque chez les enfants qui ont plus de 6 mois un jeu de physionomie qui s'approche de l'étonnement. Je renvoie le lecteur au chapitre intéres- sant de Preyer, et particulièrement à la partie concernant la comparaison des impres- sions gustatives {Ouvr. cité, tOO-104). L'observation faite sur son fils est des plus inté- ressantes, surtout quant à la comparaison de.s saveurs différentes après le sevrage. Les animaux nouveau-nés distinguent aussi la qualité des saveurs, selon Preykr; ses observations sont à lire. 11 avait placé sous une coupe en verre un cobaye de 17 heures, et devant lui il avait mis un morceau de thymol, un morceau de camphre et un morceau de sucre candi. <( Il tourne autour et s'arrête surtout devant le sucre, en ronge un angle et se met à le téter avec ardeur. On le voyait nettement, dit Preyer, sortir la langue et la passer contre la surface polie du cristal. Après qu'il sef fut ainsi occupé pendant quelques minutes, avec grande satisfaction, je l'enlevai; je lui bandai les deux yeux, et je répétai l'expérience vingt-quatre heures plus tard. A mon étonnement il reconnut encore le sucre, bien qu'il n'eût ni touché au thymol ni au camphre, et qu'il ne pût le voir; sans doute, il se guidait par l'odorat. Il ne lécha ni le verre ni le bois, mais il lécha tout de suite le sucre comme précédemment et comme lorsque l'usage des yeux lui fut rendu {Oiwr. cité, p. 105). )> LoNGET aurait donc eu tort d'écrire que « le goût est faiblement développé dans l'enfance » {Ouvr. cité, m, 58). Les jeunes enfants, selon lui, mangeraient la plupart des aliments qu'on leur présente, les plus grossiers comme les plus délicats. Le goût se déve- lopperait à l'âge mûr, l'âge des gustations. « C'est qu'en effet, écrit-il, le goût survit à la perte de tous les penchants, de tous les sentiments, de tous les plaisirs; c'est souvent la dernière jouissance de l'homme dans la vieillesse. >- Di Mattei {At'chivio di Psichiatria, etc., xx, (3), 1900) a déterminé l'acuité gustative chez les enfants par rapport à l'âge et à leur sexe. Dans ces deux groupes composés, l'un, d'enfants âgés de 4 à 8 ans et l'autre d'enfants de 8 à 12 ans, il a constaté que l'acuité gustative n'est pas moins fine chez les garçons que chez les filles, comme toutes les autres sensibilités. Le salé est également perçu au même titre par les deux groupes de jeunes garçons; ils perçoivent et reconnaissent mieux l'amer que leurs camarades plus âgés; chez les filles, le premier groupe a une sensibilité plus fine que le second. Les filles auraient une sensibilité gustative plus fine que celle des garçons; pour les substances sapides salées, les filles et les garçons se valent. Les garçons auraient l'acuité sensorielle plus fine pour les substances amères. La sensibilité gustative augmenterait avec l'âge, et la perception deviendrait plus pure. Mes recherches sur la sensibilité gustative des adultes, dont j'ai rendu compte plu*, haut, ont montré une difl'érence notoire entre les deux sexes; l'homme aurait une se.ia- sibilité plus développée {Mcmre de la sensibilité gustative chez l'homme et chez la femme. — C. R., 21 novembre 1904, 898). La qualité des sensations enrichit la mémoire, et la reconnaissance des sensations devient plus facile. L'adulte — • et à ce point de vue Lo.\get a peut-être raison — aune acuité, une perception sensorielle gustative très développée, acuité qui, si l'on peut se baser sur les considérations vulgaires, et les données de l'observation courante, augmente- rait avec l'âge. Je doute fort que la vieillesse puisse compter dans son domaine sensoriel une acuité maximum; mes travaux sur la vieillesse, encore inédits, me conseillent la pru- dence devant une pareille affirmation, erronée de toute pièce, tout comme l'affirmation de Gall, que l'homme est très mal doué au point de vue du goût. 7. — LesRéves gustatifs ontété extrêmement peuétudiés. Les remarquesde Brillat-Sa- VARi.v sur les Rt'ves gustatifs constituent plutôt une causerie familiôi'e qu'un travail scien- tifique; l'analyse de ses rêves ne manque pas pourtant de finesse. Il fait remarquer que 678 GOUT. ]es sensations qu'on éprouve dans le sommeil se rapportent rarement à l'odorat et au goût. « Quand on rêve d'un parterre ou d'une prairie, on voit les fleurs sans en sentir le parfum.; si l'on croit assister à un repas, on voit les mets sans en savourer le goût. » {Ouvr. cité, 244.) Brillat-Savarix demande un psycholoi^ue qui puisse expliquer pourquoi ces deux rêves impressionnent si peu l'àme pendant le sommeil. La diète détermine les rêves; les aliments excitants font rêver, comme la viande noire, le pigeon, le canard, le gibier et surtout le lièvre; il en est de même pour les asperges, le céleri, les trulfes, les sucreries parfumées et particulièrement la vanille, c Ce serait une grande erreur, écrit Brillât-Savarin, qu'il faut bannir de nos tables les substances qui sont ainsi somnifères, car les rêves qui en résultent sont, en général, d'une nature agréable, légère et prolongent notre existence, même pendant le temps où elle paraît suspendue. » [Ouvr. cité, 21o.) Voir aussi A. Maury [Le sommeil et le rêve, iv, 98). M"^ M. W. Calkins, dans sa statistique des rêves [Statistics of Dreams. American Journal of Psychology, 1893, (3), 311), a relevé 2 rêves sur 33o cas, et elle n'a pu en constater aucun sur 298 observations. B. TiTCH^■^:R a étudié et analysé le rêve concernant les images gustatives. On constate des rêves contenant des images gustatives sans qu'on puisse accuser des corrélations décelables avec de réelles modifications physiologiques. L'examen de la salive n'a relevé, lors de l'observation d'un rêve, rien d'anormal; il ne s'agissait que d'une auto-suggestion (B. TiTCHNEB. Taste Dreams. American Journal of Psychology, 188o, vi). Weed, Hallam et Phinney donnent le pourcentage suivant sur la nature de la fréquence des images sensorielles dans le rêve (A Study of Dream Consciousness, American Journal of Psychology, 189(j, avril, vu, 405-411). Images visuelles .... 34 p. 100 Images auditives. ... 62 — Images tactiles 10 — Images olfactives ... 7 — Images gustatives ... 6 — 8. — Les impressions gustatives peuvent se modifier encore sous l'influence des troubles organiques fonctionnels; elles peuvent être altérées par l'action réflexe du sympathique. Une substance sapide provoque, on le sait, une sécrétion non seulement salivaire, mais gastrique; les idées de Pavloff et de son école ont confirmé scientifiquement les don- nées intuitives sur le rôle prépondérant du système nerveux dans les phénomènes de la digestion. L'appétit provoqué par la faim ne fait pas toujours choix des aliments, il accepte tout aliment ; le goût d'un plat favori, d'une sensation gustative agréable peu- vent, à leur tour, provoquer l'appétit. Dans les troubles gastriques, la sensibilité gusta- tive se modifie; les troubles fonctionnels mêmes du foie s'annonceraient par des trou- bles gustatifs; il y aurait une persistance d'une saveur amère i^Spri.ng). On sait le rôle que joue l'examen de la langue dans le diagnostic médical. 9. — Nous avons vu que certains auteurs prétendent pouvoir exciter la muqueuse linguale en injectant dans le sang la substance sapide en cause. Précisons par quelques mots cette objectivité de la sensation gustative. Si l'animal de Claude Bernard se léchait quand on lui avait injecté de la coloquinte, tout comme si on lui avait déposé une autre substance sapide sur la langue; si, de même, le chien de Magendie se léchait quand on lui avait injecté du lait dans les veines, ce n'est pas que ces animaux eussent alors des sensations subjectives. Il en sera de même des ictériques, qui se plaignent de la persis- tance d'une saveur amère dans la bouche ; des diabétiques, qui accusent la présence constante dans leur bouche d'une sécrétion sucrée, etc. Les malades ne subissent pas de sensations, mais il se peut bien qu'il s'agisse d'une réaclion chimique, curieuse, en tout cas, à déterminer. Béclard AJuvr. cité, 369) réplique avec raison que, s'il s'agissait d'une transmission directe, d'une excitation sensorielle reliée réellement avec la présence dans le sang du sucre, jamais les sujets normaux n'arrivent à accuser les mêmes sensations sucrées. Le sang circule continuellement dans nos tissus, et on n'a jamais le goût du sang, sauf quand il est déposé immédiatement en contact avec la muqueuse linguale. Il faut un contact direct, immédiat de la muqueuse linguale avec les substances sapides. L'habitude n'est pour rien, certainement. Très sceptique dans toutes GOUT. 679 ces affirmalions, je ne crois pas qu'on puisse transporter aux hommes les sensations des animaux en expérience, au moins pour le domaine si peu fouillé des sensations gusla- tives. A mon avis, il doit y avoir des sensations de psychologie, liées parfois à des combinaisons chimiques, qui provoquent ces sensations en apparence subjectives. Hrown-Skquard avait montré que l'excitation des nerfs du goût contribue d'une manière active à la sécrétion des sucs gastrique, pancréatique, biliaire et intestinal. C'est une action réflexe. Et il y a maintes relations fonctionnelles entre la gustation et les organes activés par le grand sympthique. La sécrétion salivaire est, comme nous l'avons vu, intimement liée avec les sensations gustatives; les glandes sous-maxillaire et sublinguale paraissent être plus directement en rapport avec la gustation. Cela complique encore l'analyse psycho-physiologique des impressions sensorielles gusta- tives : car il faut tenir compte de ces nombreuses actions réflexes, et des concomitants psychiques dont le grand sympathique a le monopole discret dans notre organisation biologique. 1° — La sensation du dégoxit est en rapport direct avec le ijoùt. 11 faut distinguer les sensations de nausée, le vomissement, phénomènes physiologiques bien distincts, de la sensation du dégoût. Le vomissement et la nausée sont des actions réflexes qui ne sont pas nécessairement accompagnées de dégoût; le dégoût, d'autre part, n'est pas lié avec ces sensations réflexes. Il faut chercher sa définition dans l'aualyse psychologique de cette sensation,; c'est ce que Charles Richet a fait avec précision. Rappelons, avant d'exposer l'explication de Ch. Richet, les quelques données et appréciations exprimées par les auteurs au sujet du dégoût. Voici un tableau schématique de ces quelques considérations. Pour : Vernièrk \ P^LEMMiNCi (cité ia CansLall's \ Il existe des excitations propres qui provoquent le dégoût. Jahresh., 181)3) ) Vai.extin. . ) ,, , • , ■ T ,r-, ( Le degout est une sensation gustativc. J. MLLLLR ) ~ " Le dégoût, selon ces deux derniers auteurs, dépendrait entièrement du glosso-pha- ryngien, et il se produirait surtout sous l'influence des substances sapides amères : Saporix ingrati affcctio quem motm pharyngis reflei'ivilnsequuntur » {YxhKîiT\s, De fonctioni- biis nervorum cer. et nervi sympathici. Berne, 1839). Pour RoAMJERG [Lehrbudi der i Le dégoût est une modification spéciale du goût d'ordre Nervkenrankheilen desMenscken, \ mécanique: elle serait en rapport avec les excitations du Breslau, 1851) ( glosso-pharyngien. BiDDER [Schmecken. ^^agner^s ) ^e dégoût est une sensation spéciale du tul.e digestif. HandirurlerljucliderPhystol.,\M Klippel a consacré à ce sujet un mémoire très complet, que nous examine- rons en détail : car c'est uu des rares travaux de clinique qui analysent minutieuse- ment les perturbations gustatives. L'étude du tabès apporte une importante contribution à la pathologie du goût. Bien que cette maladie alîecte fréquemment la sensibilité spéciale gustative, les ouvrages classiques indiquent à peine ce côté de la question. Vulpian [Maladies du système ner- veux, 1879, I, 330) affirme que le goût est très rarement atteint dans le tabès. Leyden [Maladies de la moelle épinicrc, 610) écrit : « L'odorat et le goût ne sont jamais sensi- blement troublés. » Raymond {Tabès dorsalis. D. D., 340) dit de ces troubles gustatifs et des troubles olfactifs : « Ce sont là des manifestations insolites auxquelles on ne saurait, en l'état des choses, attribuer une grande importance. » GOUT. 683 Cependant les observations publiées par Topi.nard, Pierret, Jokfuoy et Ha.xot, Falret, de Massary Topinard, Traité de Vataxie locomotrice. Paris, 1864, lo4 et 274. — Pierret Observations IV et X. — Joferoy et Ha>îot, Accidents bulbaires à début rapide chez les ataxiques, Congrès d'Alger, 1881. — Falret, cité par Althaûs, 61. — De Massary. D. de Paris, 1896) montrent bien que ces troubles ne sont point exceptionnels, et que, comme le dit Klii'pel {Les troubles du goût et de l'odorat dans le tabcs. Archives de Neurologie, 1897, n° 16), il s'agit là de symptômes souvent rencontrés en clinique. KLn>PEL a examiné la question d'une façon méthodique et a précisé les faits. Nous reproduisons le tableau des symptômes qu'il a relevés : Tableau des symptômes sensitivo-sensoriels gustatifs chez les tabétiques. Abolition totale du goût. Diminution uni- ou bilatérale du goût. Perversion du goût. Délire de persécution tabétique à point do départ dans les troubles du goût. (Sphère du glosso-pharyngien). Ancsthésie linguale, uni- ou bilatérale. Perversions du goût consécutives à des troubles d'inervation et de troi^liicité dans la sphère du nerf hngual. Langue sabui-rale névropathique (sphère du trijumeau). Abolition du réflexe pharyngien. Abolition du réflexe salivaire. Exagération du réflexe salivaire (surtout dans les perversions du goût). Troubles j^robables de l'action réflexe de la gustation sur les sécrétions gastriques. Klutel fait très justement remarquer que, dans ce tableau symptomatique, les troubles de la muqueuse buccale relevant de la sensibilité spéciale (nerf glosso- pharyngien) sont nettement séparés de ceux de la sensibilité générale (trijumeau) de cette muqueuse. Mais, dans la pratique, les deux espèces de sensibilité sont le plus souvent attaquées, et le sujet présentant de l'agueusie peut fort bien présenter de l'anes- thésie linguale. Il y a même plus : c'est que les troubles ci-dessus mentionnés ne sont pas forcément produits par des lésions du glosso-pharyngien. Les nerfs de la sensibilité générale jouent un grand rôle dans la gustation, et suffisent, à eux seuls, à en expliquer les troubles. Klippel a divisé les deux symptômes en deux ordres de phénomènes : phéno- mènes d'anesthésie, et phénomènes de perversion. i° Phénomènes d'anesthésie uni- ou bilatérale. — Lorsque le tabès est confirmé depuis un certain temps, le malade accuse assez fréquemment une agueuse totale. Il ne recon- naît pas la nature des aliments qu'on lui sert. A l'aide de différentes substances douces et amères, il est aisé de mesurer le degré de cette agueusie par la technique ordinai- rement employée pour la mesure des anesthésies hystériques. On reconnaîtra par le même procédé si l'agueusie est uni ou bilatérale. La sécrétion réflexe salivaire semble diminuée dans l'agueusie tabétique; dans les perversions gustatives, au contraire, la sialorhée peut être très importante: mais les recherches de Klippel ne sont pas suffisamment certaines sur ce point pour pouvoir y trouver un résultat précis. 2" Phénomènes de parcsthésie. Perversions du goût. — Le malade, dans ce cas, perçoit une saveur n'ayant pas de réalité objective. Ce phénomène, purement subjectif, provient soit d'un trouble de la sensibilité générale (muqueuse linguale), soit d'un trouble de la sensibilité spéciale; mais le plus souvent ces troubles affectent les deux appareils. Ces perversions de la sensibilité générale concomitantes aux lésions de la branche linguale du trijumeau sont des paresthésies se présentant sous divers aspects. Klu'pel dans son étude les a peu examinées, et il est possible, en effet, qu'elles soient moins caractérisées dans le tabès que les troubles de l'olfaction (crise nasale). Par contre, les perversions de la sensibilité spéciales sont extrêmement fréquentes, et carac- téristiques. Un malade, observé par Klippel trouve, à tous ses aliments, le goût de poisson pourri. (^ En même temps la salivation était extrême. La salive lecueillie en vingt-quatre heures dépassait deux litres et était en réalité plus considérable. Les aliments la provoquaient en très grande abondance. La diminution de la sensibilité générale de la langue était peu marquée; mais dans la sphère du trijumeau, à la face, 684 GOUT. il y avait des troubles des plus nets. Le malade sentait incomplètement au toucher; à la piqûre il y avait erreur de lieu. Il désignait la lèvre supérieure au lieu du front; le cou au lieu de la joue (Klippel, {loc. cit.. H). » Chez ce malade, les perversions g^ustatives étaient constantes. Mais, dans la plupart des cas, les perversions sont passagères. Elles se produisent soit spontanément, soit à l'occasion de l'ingestion des aliments qui semblent amers ou désagréables. Un fait remarquable, relevé par Klh>i'el, est que ces troubles de l'état physique de la langue semblent indépendants de l'état des fonctions digestives. Un tabétique peut présenter les troubles les plus nettements accusés de la perversion gustative sans que l'on puisse constater rien d'anormal dans l'état de ses fonctions digestives, Klippel a constaté deux états de la langue corrélatifs avec les sensations sub- jectives d'amertume ou de terre accusées par les malades. Dans le premier état, la langue présente à son centre « un dépôt blanchâtre, non humide, laissant les bords intacts ». Cet état est, du reste, assez passager. Dans le second état, toute la surface de la langue présente une coloration blanchâtre ou grisâtre, mais sans dépôt. Les papilles restent apparentes, mais l'épithélium qui les recouvre semble épaissi; la bouche est sèche, le malade est altéré. Cet état de la langue dépend, selon Klum'el, du tabès; il peut être compatible avec de bonnes digestions. L'expression de langue sabiirrale névropathiqiie semble donc légitime. Au point de vue psychiatrique, il faut se rappeler que ces illusions sensorielles évoluent parfois, lorsque le tabétique est affaibli intellectuel- lement, vers les interprétations délirantes, et qu'on les peut retrouver à la genèse de certains délires de persécution. C'est pourquoi il peut être utile de supposer un tabès caché dans certaines formes de persécution durant lesquelles l'aliéniste reste indécis. Un des résultats des recherches de Klippel est que la lésion des nerfs du goût s'accompagne de symptômes d'origine bulbaire. Chez le [malade de Klippel, dont nous avons déjà parlé, on relevait : '< 1° Des troubles de la déglutition avec parésie du voile du palais, répondant à la lésion du nerf facial et du nerf grand hypoglosse; 2» Une salivation d'intensité peu commune au cours du tabès, se produisant conti- nuellement avec des exacerbations, causant par elle seule une déperdition considérable des forces du malade et impliquant la lésion des nerfs dont la fonction est la sécrétion salivaire; ;i° Des troubles de la sensibilité dans la sphère du trijumeau caractérisés surtout par l'impossibilité de préciser le point oii l'on opérait un contact avec la peau de la face (le malade indiquant par exemple la lèvre supérieure quand on le touchait au front) ; 4° Des paralysies permanentes des muscles moteurs des paupières. Tous ces symptômes indiquent nettement le rôle joué par le bulbe dans ces processus morbides. De plus, il est à remarquer que les tabétiques alcooliques présentent beau- coup plus régulièrement des perversions de la sensibilité gustative que les tabétiques non alcooliques. Klippel examine ensuite la inarche des symptômes. L'agueusie ou les perversions du goût peuvent se reproduire simultanément avec les troubles de la sensibilité caracté- risant la première période du tabès. Parfois aussi, les troubles dont nous nous occupons ne se révèlent que beaucoup plus itard, souvent sans que l'on puisse préciser à quel moment le malade, accablé par tant d'autres affections, ne leur accorde pas d'attention. L agueusie paraît alors généralement en premier; les troubles peuvent être soit continus, soit intermittents; ils revêtent le ])lus souvent cette forme intermittente. Périodiquement (toutes les semaines, tous les mois, par exemple) le malade accuse un goût d'amertume, un goût de terre toujours désagréable. Ces troubles peuvent se produire à n'importe quel moment de la journée en dehors de toute ingestion d'aliments. Le goût de terre dure généralement une^ demi-journée; le goût âpre, que les malades définissent très difficilement, dure une dizaine de minutes. Les symptômes concomitants à ces processus morbides nous renseignent sur leur pathogénie. Rappelons qu'ils sont de deux sortes : ceux qui évoluent dans la sphère du trijumeau ; paresthésies diverses de la face, engoui^dissement, crispation, fourmillements; ceux qui modifient l'aspect de la muqueuse; troubles trophiques de la langue. GOUT. 685 Au point de vue de l'anatoinie palliologique, Klippel a eu l'occasion de faire l'autopsie d'un labétiquo ayant présenlé des troubles impoi'tants du goût et de l'odo- rat. Voici, brièvement n'-sumé, le résultai do cette autopsie : Les cordons postérieurs et les racines spinales présentaient les lésions raractéris- liques du tabès, qui ne faisait, du reste, aucun doute. Le volume des glandes salivaires était considérablement augmenté; elles ont révélé des lésions inflammatoires du paren- chyme glandulaire. Du côté gauche, le tissu conjonctif du nerf glosso-pharyngien présentait un épaississement considérable. L'action de l'acide osmique révèle pour un petit nombre de fibres nerveuses un état de dégénérescence caractérisé par la fragmentation de la myéline. Un grand nombre de fibres, examinées selon la méthode de Marchi, accusent des altérations pathologiques. La plupart sont plus grêles qu'à l'état normal. Le gam/lion d'ANDERSCH présente des lésions remarquables. Les coupes histologiques préparées selon les méthodes de Weigkrt et de Pat montrent une atrophie de ce ganglion. De plus, le protoplasma cellulaire est occupé tout entier par de légères granulations qui masquent parfois entièrement le noyau ; ce noyau est, du reste, fort grêle et souvent invisible. Les libres qui se présentent à la coupe longitudinale du ganglion sont altérées de la même façon que le nerf. Les vaisseaux du ganglion sont pleins de sang; la sclérose est incertaine. Les lésions du nerf olfactif ne nous intéressent pas. Elles sont surtout localisées dans le trajet nerveux d^ bulbe olfactif au cerveau. Dans le trijumeau, les ganglions de (Iasser, examinés suivant les mêmes méthodes, ont présenté cependant des lésions différentes du ganglion d'AxDERSCH. La plupart des cellules sont atrophiées; elles se forment parfois en groupes de trois ou quatre; elles présentent un corps festonné, allongé, couvert de granulations ocreuses, rendant le noyau invisible. Toutes les cellules du ganglion ne présentent pas ces lésions qu'on trouvait éparses sous forme « d'îlots de cellules ». Le système vasculaire est très développé. La sclérose est cejtaine, mais assez légère. Les branches du nerf ne présentent pas de dégénéres- cence caractérisée. Les lésions du bulbe rachidien se trouvent au niveau des noyaux grêles. Les noyaux des cellules ganglionnaires des nerfs moteurs sont atrophiés, ce qui montre nettement la généralisation des lésions du bulbe chez les tabétiques présentant des troubles gus- tatifs. Des stigmates de dégénérescence et d'atrophie ont été relevés sur les circonvolu- tions cérébrales, surtout sur les corps calleux, sur l'hippocampe, sur les frontales in- ternes et externes, et sur les temporales. De cet examen anatomique et pathologique, Klippel conclut que, pour ce qui concerne la localisation périphérique ou centrale, tout le système de la sensibilité entre en jeu. La question ne peut donc être que de déterminer son siège dans la première période du processus morbide. Klippel y répond en affirmant que, pour lui, comme pour d'autres auteurs, le tabès est « une maladie du téléneurone centripète ». Les nerfs du goût se rangent donc sous ce titre. Une seconde question, plus importante, se pose : à savoir si, dans les troubles que nous venons d'examiner, les lésions des nerfs du goût jouent seules un rôle, ou si les altérations du nerf lingual, bianche du trijumeau, suffisent à les déterminer? Klippel estime que, selon les cas, les troubles tabétiques de la gustation proviennent, soit de la lésion des nerfs de la sensibilité spéciale (nerf glosso-pharyngien), soit de la lésion des nerfs de la sensibilité générale de la langue, soit, ajoute-il, peut-être, des nerfs du sens musculaire. Examinons un instant, chacun de ces cas. i° La lésion du glosso-pharyngien, sans être nécessaire, est cependant suffisante. En eiret, ce nerf est maintenant connu comme le seul dont dépende la sensibilité spé- ciale du goût (Klippel). Or, même s'il y a anesthésie du trijumeau à la face, dans les cas où l'on constate que la sensibilité générale de la langue est intacte, lorsque l'on ne peut diagnosti(iuer la mauvaise nutrition de cet organe par le symptôme de la langue saburrale névropathique, lorsque les réllexes sont normaux, on doit attribuer les troubles exa- minés au nerf de la sensibilité spéciale, en dehors de toute participation du trijumeau. 2» Les troubles de la gustation peuvent aussi dépendre d'une lésion des nerfs de a sensibilité générale altérant secondairement la fonction des nerfs de ëensibilité 686 COUT. spéciale. Comment des lésions du trijumeau entraineroiit-elles l'anesthésie du glosso- pharyngien ? « Le trijumeau tient sous sa dépendance, dit Klippel [loc. cit., 23-24\ en ce qui concerne l'organe du goût et de l'odorat : 1° la circulation des muqueuses correspon- dantes; 2° la sécrétion de ces muqueuses; 3" leur état trophique... En un mot, le triju- meau est un nerf accessoire de l'olfaction et du ijoùt qu'il peut abolir en troublant les fonc- tions circulatoires, secrétaires et trophiques des muqueuses correspondantes. >> Le trijumeau, atteint dans le tabès, peut donc provoquer à lui seul, et indirectement, des troubles delà sensibilité gustative. 3° Enfin la sensibilité musculaire peut jouer aussi son rôle dans la forme tabétique de la pathologie du goût. Il est à remarquer, en effet, que les malades accusent toujours des troubles provoquant des sensations désagréables, et jamais des sensations agréables. La sensation de dégoût, qui va dans certains cas jusqu'à la nausée et au vomissement, ne peut-elle être trouvée à la genèse des perversions que nous avons décrites? Il y a là au moins une hypothèse à retenir. Klippel conclut finalement que : a) Les troubles du goût (et de l'odorat) sont fréquents chez les tabétiques; b) Qu'ils dépendent, soit d'une lésion du nerf de la sensibilité spéciale (glosso-pharyn- gien) ; soit d'une lésion de la branche du trijumeau dont dépend la nutrition de la muqueuse linguale; soit même d'un trouble primitif de la sensibilité musculaire; c) Qu'ils sont toujours associés, dans les cas très caractéristiques, à d'autres troubles d'origine bulbaire ; d) Les cas d'agueusie sont extrêmement rares, et ceux que divers auteurs ont publiés sont pour la plupart enregistrés sans aucun contrôle expérimental. J'ai eu l'occasion d'examiner minutieusement un; cas d'agueusie soi-disant complète (N. Vaschide. Un cas d'agueusie. Bull, de laryngolotjie, otologie et rhinologie, 30 mars 1003, vi). Observation. — Une femme de 62 ans, en août 1900, a remarqué que son goût s'affai- blissait. La nourriture n'avait plus de goût; la bouche avait un goût de sang, et, plus la perte du goût normal s'accentuait, plus le goût de sang prédominait sur toutes les sensations gustatives. Elle ne percevait le goût que par différence. L'odorat était resté excellent. On lui a donné des dépuratifs et on accusait l'état mauvais de son sang. On lui recom- manda, paraît-il, des inhalations. A cette époque, elle gardait encore, de chaque côté de la langue, deux régions sensibles ; elles étaient placées de chaque côté de la langue. Quelque temps après, elle perdit complètement le goût. Tous les aliments ont actuellement le goût de l'eau de mer, mais plus salé encore, et en même temps, du sucre lui donne la sensation de l'amer. La bouche devient salée et acre surtout à la suite de la digestion; elle devient alors acre et fade, sensation qui la gêne. Elle sent et perçoit tout en tant qu'odorat : elle ne distingue pas de sensations gus- tatives différentes. La seule sensation qui accompagne les aliments, en dehors de la perpétuelle perception du goût amer-fade, c'est celle du froid; quand elle mange, par exemple, des fruits, elle remarque, parfois, que c'est froid. La soupe lui paraît simple- ment chaude, et, comme sensation, elle n'accuse que celle de « l'eau de vaisselle ». Les sensations de « chaud >> et de « froid » sont perçues distinctement par la malade et la guident vaguement dans la reconnaissance des mets. Il lui est arrivé plusieurs fois de croire qu'elle avait recouvré le goût, notamment quand elle mange des fruits. Une fois, en avalant des groseilles, elle crut vraiment que le goût était revenu. L'odeur des fruits, les sensations olfactives, et parfois les images visuelles contribuaient à lui suggérer cette erreur.; car, il faut le dire, elle cherchait à se convaincre, faisant des expériences méthodiques pour arriver à consolider ou à reje- ter les sensations perçues. Retenons encore cette particulière observation ; quand elle avale doucement et qu'elle met du temps à mâcher, il lui arrive souvent d'accuser, au moment de la déglu- tition, une sensation gustative. « C'est l'arrière-gorge, nous disait-elle, qui me fait encore espérer que je pourrai sentir de nouveau. » Le goût des fruits, celui des plats GOUT. tJ87 sucrés, la saisissent parfois, quoique d'une munirre bien obtuse, et cela dans l'arrière- gorge; autrement « du sucre et du sel sont la même chose ». Examendes foliotions organiques. — ■ La malade se présente avec l'aspect caracté- ristique d'une mélancolique; elle est maigre, très peu musclée, et la parole laisse apercevoir un très léger embarras : sa marche n'est pas sûre et elle se fatigue bien vite. Les réflexes patellaires sont presque abolis; celui du pied droit paraît complètement aboli ; il en est de même pour les réflexes des membres supérieurs. Les réflexes pupillaires sont sensiblement abolis; le papille est puncliforme, et réa- git extrêmement peu et très lentement aux excitations lumineuses. Les mouve- ments des yeux sont parfaits, la vision binoculaire ne présente aucun trouble décelable. Pouls normal : 78 à la minute. — Rien du côté des salives. La sensibilité musculaire est précise; on peut déceler néanmoins quelques légers troubles de la localisation des excitations, de même que dans la fixité des attitudes musculaires. L'ouïe est en bon état; l'examen otoscopique et celui des sensations auditives à l'aide des diapasons ne révèlent rien d'anormal; les quelques troubles, d'ailleurs très peu sensibles, dépendent sans doute de l'âge du sujet. La sensibilité tactile est diminuée dans une mesure extrêmement restreinte; elle distingue toutes les excitations fortes, mais on remarque un léger retard dans la percep- tion de ces excitations. En moyenne et d'une manière générale, on peut affirmer une légère hypo-esthésie, qui porterait davantage sur les membres supérieurs, le cou et sur le dos, particulièrement du côté droit. Du côté de l'odorat, on peut affirmer une hypoesthésie notoire. L'examen, pratiqué avec Vosmi-esthésimctre Toulouse- Vaschide, nous a permis de noter les chiffres suivants : Sensation. Perception. Nombre des odeurs reconnues. 4 p. 10 000 7 p. 10 000 7 Cela prouve que l'hypoesthésie est considérable, surtout quand on pense que les femmes accusent nettement les sensations olfactives pour des solutions de camphre dans la série de 3 à 6 p. 100 000. La sensibilité tactilo-olfactive est également touchée; ainsi elle accuse pour l'ammo- niaque une sensation pour des solutions aqueuses de 1 p. 1 000 et une perception pour des solutions de 1 p. 100; il en est de même et dans les mêmes proportions pour l'éther. Le degré de la précision des sensations était de 7/10, et 8/10 dans les deux cas d'examen. L'examen du goût a été pratiqué avec le g'ué.s<-t'.s , ^ „ , i ^r , ■ a, r- ■ inno, T\ . .■ ,.1111 ( autopsie : Soc. Delqe de Neurolor/ee, zi Itivriev idOi). Destruction pi'osque totale du lobe V ^ '' '' sphénoidal ) BEcuTERE\v(Aes' voies de cond., t Aucun trouble gustatif : destruction de deux cornes d'AMMON Tr. fr., p. 684) j et des régions temporales voisines. Pour les faits négatifs, notons que les auteurs n'ont constaté aucune perturbation gus- DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. ^^ 690 GOUT. tative, malgré des lésions circonscrites dans la circonvolution de Yhippocampe et de la corne clAimoy. ^''"T.^.TJ'^'"- '^'"''°!"' ^.ant ) Aucun trouble gustatif : destruction du pôle sphénoïdal et vner 1902. Revue Neurol., 1902, j ^^ ^^ ^ ,^.^^ ^^ l'hippocampe dans les deux hémisphères. Bartels {Archiv f. Psi/ch. 7i. ) Aucun trouble gustatif : myxosarcome du lobe temporal Nervenkrankheilen, 1902, p. 326). j gauche; la corne d'AiMMON également prise. Grasset, examinant au point de vue clinique l'appareil central du goût, incline à conseiller de s'appuyer sur les faits positifs, parce que les cas négatifs ne sont jamais démonstratifs; car on n'est jamais sûr, d'abord, qu'il n'a pas persisté quelque parcelle du centre qui paraît détruit, et ensuite qu'une suppléance ne s'est pas établie par les parties voisines, spécialement dans les lésions à marche lentement progressive (J. Grasset, Les centres nerveux. Baillière, 1905, 504). Des troubles de la sensibilité gustative peuvent être déterminés encore, soit par les malformations congénitales du cerveau, soit par des maladies diffuses de l'écorce cérébrale. Diminution ou abolition, mémo au début, d'après J. Voisin [Traité de paralysie générale. Baillière, 1879, p. 419); Hermann [Ohozrenie psicliiatiie, 1899); Dans la paralysie générale . . / De Martines {Recfierches stir les troubles du goût et de l'odorat dans la paralysie générale progressive. Revue médi- cale de la Suisse romande, 20 août 1900, p. 405 et 409) : cet auteur a constaté 21 cas sur 22 malades, pour le salé surtout. Les troubles gustatifs sont, dans ces cas pathologiques, liés intimement avec ceux de l'odorat. Ou observe les mêmes troubles gustatifs dans les malformations congénitales, chez les idiots. Selon J. Voisin, les idiots mangeraient, sans choisir, tout ce qui tomberait sous la main : des cailloux, delaterre, des cataplasmes, etc. {L'Idiotie, F. Alcan,1893, 131). Obnubilation du goût après les crises paroxystiques dans 10 cas sur 20 malades, trouvée par Férk {Les épilepsies et les épileptiques, Alcan,1890, p. 123). — Féré, Batr;ne et Ouvry (fi. R., 1892). Une diminution de la sensibilité pour les saveurs salées et Dans Vépilepsie { sucrées, selon Hermann. L'obnubilation persiste chez deux j malades plus d'une heure après la crise. I Agostino observe le même fait qu'HERMANN et Féré {Suite I variazioni dette sensilAlita générale, sensoriale e reflessa ne- gli epileptici net periodo interparossistico e dopo le convul- \ sione. Riv. sper. di Frenialria, xvi, 36). Des idiots ne distinguent pas le sucré de l'amer, et l'iiypergueusie serait extrêmement rare. D'ailleurs l'hypergueusie se rencontre souvent dans toutes les affections de la sensi- bilité gustative. D. Mattei, examinant le sens du goût chez des enfants dégénérés, et comparant leur capacité mentale au degré de leur dégénérescence par l'examen de leurs stigmates, con- state qu'il n'y a aucun rapport entre la dégénérescence et l'acuité gustative. Chez les aliénés, à mon avis, il serait téméraire d'accuser anatomiquement des troubles objectifs de la gustation, quoique Mingazzini ait trouvé qu'ils présentent sou- vent une abolition complète de la gustation, ou une sensible diminution; la fréquence des troubles pour les saveurs fondamentales pourrait être classée dans l'ordre sui- vant : le sel, l'acide, l'amer, et, en dernier lieu, le doux {Archivio di Psichiatria, Scienze penali ed Antrop. Crim. xv, ii, 1894). D'AuuNDO signale le cas d'une agueusie héréditaire, due probablement aune anomalie du développement du centre cortical du goût (1894). Dans la catégorie des troubles gustatifs objectii's, citons les troubles gustatifs des névropathes, et particulièrement ceux des hystériques. Licirrwnz {Les anesthésies hystéri- COUT. 691 ques des muqueuses et des organes des sens et les tares hystériques des muqueuses. Thèse de Bordeaux, 1881) a trouvé très fréquent ce stigmate chez les hystériques : dix cas surit malades. L'hémiagueusie et l'hypogueusie sont plus fréquentes que l'aholilion totale guslative; le côté gauche de la langue est plus souvent atteint, et l'hyperesthésie reparaît, franchement limitée à la ligne médiane de la langue. Le tiers postérieur de la langue serait, selon Lichtwitz, une région toujours plus ou moins sensible; la sensibilité persisterait plus souvent. On constate encore dans l'hystérie de rhypcri/ueiisie, ou des monogueusies, des abolitions partielles de la gustation limitées à une seule saveur, ou encore cette insensibilité peut être circonscrite à une certaine région de la muqueuse linguale. Il me semble toutefois bizarre que Lichtwitz ait pu faire de telles constata- tions sur des malades complètement hémianesthésiques, et qui pouvaient encore goû- ter les substances déposées sur le voile du palais et sur la joue, et par exemple perce- voir le sel sur le bord gingival gauche, l'acide et l'amer avec la muqueuse de la joue gauche. Physiologiquement, il me semble qu'il s'agirait des impressions généralement gratuites des hystériques; caria topographie de la sensibilité gustative et les observa- tions des expérimentateurs nous indiquent des données tout autres. Je conçois par- faitement la persistance de la sensibilité pharyngienne dans un troisième cas, où le malade percevait ,à ce niveau seulement, les saveurs sucrée, salée et acide. Mais attri- buer ce fait à la sensibilité gustative semble, à moins d'autre preuve, une des nom- breuses fantaisies que les partisans de théories physiologiques de l'hystérie enre- gistrent avec crédulité toutes les fois qu'ils veulent expérimenter. Les hystériques perdraient même, selon Lichtwitz, la sensibilité gustative du courant électrique. Dans six cas, il a constaté une diminution ou une abolition du champ gustatif électrique; le champ du goût électrique, à la suite de l'examen bipolaire des malades, étant identique au champ gustatif pour les substances sapides, ou plus petit. Enfin, selon cet auteur, il n'y a le plus souvent aucune relation entre l'anesthésie spéciale et l'anesthésie générale. Gilles de la Tourette, et quelques autres auteurs, nient ce fait. Selon Gilles DE LA Tourette (TratYé clinique et thérapeutique de l'hystérie, 1891, 3-101), il faut croire au contraire que l'anesthésie générale domine toujours l'anesthésie spéciale : cette dernière se superpose pour le goût comme pour toutes les autres sensations. Lichtwitz ne fait que que confirmer d'ailleurs les recherches de A. Pitres [Leçons cli- niques sur rhystérie et l'hypnotisme, i. 1891, 87). Quand l'anesthésie est générale, les malades ne perçoivent guère les saveurs; quand elle est limitée, les malades ne s'en plaignent guère. <( La gustation se fait alors par les points de la muqueuse qui ont consei'vé leurs propriétés physiologiques, et il faut un examen attentif pour découvrir et limiter les plaques d'anesthésie gustative. » (Pitres., 87.) Certaines hystériques éprouvent du plaisir à boire du vinaigre ou à introduire dans leur alimentation des sub- stances dont le goût ne paraît pas agréable aux personnes bien portantes. Pitres fait remarquer aussi l'existence des perversions de la sensibilité gustative chez les hysté- riques : certaines saveurs seraient perçues autrement que par les personnes normales. Une de ces malades accusait à une solution de sel marin un goût acre, différent de la saveur salée bien connue. Selon Pitres, ces diverses anesthésies hystériques sont dictées par l'inertie fonction- nelle de certains centres. Je m'associerais davantage à l'opinion de Pierre Janet, qui explique les anesthésies hystériques par un affaiblissement de l'attention, par un état notoire de distraction sensorielle. Les criminels et les jwostituées auraient une sensibilité gustative diminuée, selon cer- tains auteurs. Ainsi Loubroso et Ferrero trouvent la p. 100 de ftimmes criminelles ayant une sensibilité gustative très fine; elles perçoivent J /500 000 de strychnine, tandis qu'on trouve pareille sensibilité dans oO p. 100 des cas normaux; 10 p. 100 des normales se montrèrent, selon leur méthode, très obtuses : 20 p. 100 des criminelles; et 30 p. 100 des prostituées (1 p. 100 de strychnine). M™« Tarxowsky, citée par ces auteurs, trouve que 20 p. 100 des criminels homicides et des voleurs, et 4 p. 100 des prostituées, ne distinguaient aucune des solutions : amère, douce et salée, employées pour l'examen du goût; ce qui ne s'était jamais vérifié chez les normales; le goût salé était sujet aux plus grandes erreurs (G. Lomiîkoso et G. Ferrkro. La femme criminelle et prostituée. Trad. fr., 1896, Alcan). Norwood East, examinant le 692 GOUT. rapport du sens moral avec les troubles physiques, étudie aussi les criminels au point de vue de la discrimination sensorielle, comparativement à 10 sujets normaux. Il emploie, pour l'examen de la sensibilité gustative, des solutions de 5, 10, 20, 50, 60 et 80 gouttes de glycérine pour une once d'eau. On procédait à l'examen sensoriel par la gustation des solutions les plus faibles. 11 n'examina que la sensation gustative du sucre à cause de son analyse psycho-sensorielle plus facile [Physical and moral Insemibiiity in tire Criminal. The journal of Mental Science, cet. 1901, 737); on examinait la sensibilité gustative en appliquant sur la langue une baguette de verre, soigneusement lavée chaque fois, nettoyée dans la solution respective. On a obtenu les chiflfres suivants pour la gustation; les sujets sont divisés en trois groupes dans toutes ses recherches : NOMBRE DE CAS GOUT Criminels de hasard 13 2,384 Criminels d'occasion 52 3,115 Criminels de profession ... 35 3,111 La sensibilité générale est en outre de moins en moins délicate à mesure qu'on se rapproche du criminel de profession. Si Ton compare les criminels instruits et les criminels illettrés, on constate que les différences sont extrêmement légères, et que pourtant le goût est plus délicat chez le criminel instruit. Criminels instruits . . . 2,571 Criminels illettrés . . . 2,965 Médecins 1,15 Dans une autre série de recherches, on examine la mesure de la sensibilité, par rap- port à la nature du crime, en classant les criminels selon le crime commis ; on trouve dans la liste des crimes, toutes les formes des délits criminels, à partir du vol avec effraction jusqu'aux crimes d'incendie. 11 y aurait un rapport assez déterminé entre la désignation du crime et la sensibilité sensorielle des criminels. Le fameux « Vampire du Muy » avait le goût tout à fait aboli : il ne distinguait pas le salé du sucré, et il mangeait toutes les choses les plus abjectes (A. Epaulakd, Examen du nécrophile,dit « Le Vampire du Muy », Archives d'Anthrop. criminelle, 1901, n" 98). Pour finir avec la liste des troubles des sensations objectives, citons encore les modi- fications provoquées par les maladies infectieuses graves. Ainsi Rockwells avait cons- taté l'abolition complète du goût à la suite d'une grippe chez une femme, et l'agueusie dura pendant deux mois {Un cas de perte complète et prolongée des sens du goût et de Vodorat, The Médical Record, 1881, janvier, 120). Un trouble assez fréquent chez les névropathes est l'association des sensations visueljes avec les sensations sapides, trouble analogue à l'audition colorée. Ch. Fkré {La vision colorée et Véquivalence des excitations sensorielles. B. B., 14 novembre 1891, 763) cite, le premier, le cas d'une anorexique qui avait associé au vinaigre la sensation du rouge, qui devenait persistant pendant de longues minutes, et apparaissait immédia- tement après l'ingestion buccale. Sollier publie un cas semblable {Gustations colorées, B. B., 1891, 763); son malade, un syphilitique neurasthénique, avait associé ses éructa- tions avec des sensations de couleur. Il avait des éructations vertes, qui lui rappellaient le cadavre et qui évoquaient en même temps un goût cadavérique : il avait aussi des ('ructations jaunes ou violettes. Le malade se figurait pourtant ne pas sentir la sapidité des aliments. Cette association s'expliquerait par une association psycho-mécanique, par une irradiation sensorielle et pathologique; car nous ne la trouvons pas chez les névro- pathes. Puisque nous parlons des névropathes, voici l'observation détaillée que j'ai publiée sur une malade extrêmement intéressante (N. Vaschide. Contribution à la psycho-physio- logie de la cavité buccale. Bulletin de Laryngologie, Otologie et Rhinologic, 1903, vi, 1<^'' trimestre, 30 mars). (( Elle sent le goût des aliments, mais à peine, et infiniment moins que par rapport au passé. La bouche est pâteuse, toujours sèche, quoiqu'elle n'ait pas soif. Elle a la sen- GOUT. 693 sation d'une bosse dans le palais. Des élancements traversent toute la cavité buccale, et ils se localisent surtout dans les gencives : elle a des picotements dans le nez et dans les lèvres. Elle ne sent pas les odeurs. Elle rend ce qu'elle mange, et n'a pas faim ; une haleine forte s'exhale de sa bouche; elle a connaissance de cette haleine, et elle remarque qu'elle sent encore plus mauvais après les repas. Le matin elle se réveille avec cette gène qui la tourmente. c' Elle ne dort pas, et elle fait tout pour dormir; sa bouche la préoccupe continuelle- ment. Elle, croit n'avoir que peu de salive dans la bouche, en efîet elle n'en a que très peu. La salive qu'elle a lui semble piquante. La langue la pique sur le milieu. Quand elle mange, il lui semble continuellement avoir des grains et de la farine dans la bouche. Elle éprouve continuellement la sensation d'avaler la salive. Elle juge étranges ces sen- sations; et ses souffrances sont si atroces qu'elle pleure à l'idée que cela pourrait con- tinuer ainsi. » L'examen de la malade nous a révélé la physionomie nette d'une névropathe. Aucun trouble organique, ni dans la sensibilité générale, ni du côté des sens. Audition et vision bonnes; sensibilité musculaire parfaite. Le tact est normal sur toute la surface du corps; nous n'avons pas pu distinguer des stigmates ou des zones sensorielles pathognomoniques. L'odorat existe, quoique sensiblement diminué, encore que la malade affirme ne sentir rien. Nous avons pu obtenir avec Vosmi-esthésunètre Toulouse-Vasghide, les chifTres suivants : SENSATION. PERCEPTION. NOMBRE DES ODEURS reconnues. 4 p. 10 000 6 p. 10 000' 6 ce qui confirme l'existence d'une hypoesthésie notoire. Il est à remarquer que celte hypoesthésie est plus grande pour la narine gauche, qui accuse une sensation à 6 pour 10 000, au lieu de 4 pour 10 000 pour la narine droite. La sensibilité tactilo-olfactive est perçue presque normalement, avec de légères dil- férences : l'éther perçu, à 1 pour 1 000, et l'ammoniaque au même titre. La sensibilité' gustative, mesurée avec le guésl-esthésimclre Toulouse-Vaschide, révèle l'élat suivant : SENSATION. PERCEPTION. Salé . . . 1 p. 100 3 p. 100 Amer . . . 1 p. 10 000 1 p. 1 000 Doux . . . , 1 p. 100 1 p. 10 Acide . . . 1 p. 100 1 p. 10 ce qui veut dire que la sensibilité gustative est à peu près normale, quoique légèrement hypoesthésique : la sensation gustative acide semble la plus atteinte. Si la sensibilité gustative est presque normale, la sensibilité tactile de la bouche est nettement hypoesthésique, le palais est tout à fait anesthésique, la langue sensiblement hypoesthésique, les gencives, le plancher de la bouche et la partie moyenne et anté- rieure de la langue, de même. Les piliers du gosier et le voile du palais sont pourtant très sensibles : même plus que d'habitude. On remarque encore, sur la langue, des régions plus sensibles que les autres. Ainsi, au dos de la langue, sur une surface de 1 centimètre carré, nous avons pu constater deux points aneslhésiques et cinq points hypoeslhésiquespar rapport à la sensibilité générale. Il existe, au milieu de la langue, précisément au point oii elle accuse des picotements, une zone d'environ .3 millimètres carrés qui est nettement anesthésique. Pour la reconnaissance des substances sapides, elle a une certaine facilité; elle a reconnu 8 sur 10, ce qui est tout à fait l'état normal : elle a même décelé une goutte de l'huile déposée sur la langue. Elle a reconnu l'ail, la menthe, le vinaigre, le camphre, la fleur d'oranger, le sulfate de fer, le rhum et l'huile. En résumé il s'agirait d'une névropathie localisée particulièrement dans la cavité buccale. L'attention du sujet étant portée vers les sensations delà cavité buccale, elle est saisie par des troubles plus ou moins complexes des sensations tactilo-gustatives, et, 694 GOUT. gêaée par son râtelier, elle greffe tout un système d'ennuis et de douleurs à la suite d'une forte secousse émotive. Le terrain névropathique était préparé pour l'éclosion de pareils troubles. Ce qu'il y a de vrai dans l'interprétation de ces douleurs liypoclion- driaques, c'est l'hypoesthésie tactile de certaines régions de la cavité buccale et l'anes- tliésie des autres. Or, si l'on se souvient bien de la description des douleurs, on remar- quera que ces zones font partie de son système d'interprétations douloureuses : le palais, qui est anesthésique, lui donne la sensation d'une bosse, et le milieu de la bouche est l'endroit où elle accuse des picotements. Or c'est précisément là qu'il existe une zone anesthésique. La malade remarque ces sensations, mais elle les interprète mal. Nous connaissons très peu d'observations d'hystérie buccale, si l'on peut s'exprimer de la sorte, et il est curieux que la bouche, organe aussi délicat et compliqué que pos- sible, et qui s'impose à plus d'un titre à l'attention du sujet, ne lixe plus leur analyse pathologique. II. Les troubles subjectifs de la gustation. — On peut distinguer trois catégories des troubles subjectifs de la gustation : (() Les illusions gustatives ; b) Les hallucinations gustatives-, C) Les perversions gustatives. a) Les illusions gustatives sont des interprétations fausses de sensations réellement perçues, où la subjectivité entre donc en jeu, d'une manière directe et active. Les aliénés, particulièrement les mélancoliques et les persécutés, accusent des illu- sions gustatives. Les persécutés se méfient des aliments, et ils ont peur d'être empoi- sonnés, mais il s'agit plutôt d'une idée fixe, d'une phobie, que d'une réelle illusion gustative. Des mélancoliques qui accusent de pareilles illusions ne me paraissent non plus exprimer la sensation concomitante; l'analyse des sensations gustatives étant faite dans un état de distraction notoire, l'interprétation est d'autant plus fausse que les exiitants ne sont pas francs. Dans le travail publié avec Vurpas sur V Analyse mentale moi'bid': (1 vol. 1894, Rudeval), j'ai insisté sur le rôle capital, fondamental même, de l'analyse mentale, dans toutes nos constructions et nos systématisations psychiques. D'après certains aliénistes, les illusions gustatives des aliénés seraient des (roubles réels objectifs, produits par des troubles organiques, particulièrement par la mauvaise digestion. L'absence d'une hygiène de la bouche, l'attention vague accordée à la nourri- tuie, contribuent à faire de la cavité buccale une source de saveurs indéfinies, des sen- sations prédominantes, obsédantes, et qui empêcheraient la perception réelle et exacte des saveurs. On sait à quel point la langue des aliénés est saburrale, blanchâtre et épaisse, comme leur haleine est désagréable, et leur salive visqueuse. D'après Joffroy et Haxot, les illusions gustatives se rencontreraient aussi dans les affections bulbaires. Leur malade accusait une sensation franchement amère pour tout ce qui était sucré {Accidents bulbaires à début rapide chez les ataxiques. Congrès d^ Alger, 1881). De nombreux tabétiques accusent également de pareilles illusions gusta- tives. Dans l'hypnose et la suggestion, les illusions, de même que les hallucinations, sont très faciles à évoquer. Les substances les plus amères sont bues avec délice, et les médi- caments les plus désagréables au goût passent comme inaperçus. Bernheim composait des breuvages avec de l'eau ou du vinaigre en guise de vin, et un crayon dans la bouche faisait l'office d'un cigare (H. Bernheim, De la Suggestion, 1891, 44). Charles Richet, com- posait des breuvages odieux, quoique inofîensifs, mélange d'huile, d'encre, de café, de vin : « et les malades endormies se disputaient ce ragoût détestable, dès que je leur avais annoncé que c'était de délicieux chocolat >> [L'homme et V Intelligence, 182). Dans l'expérience de tous ceux qui ont étudié l'hypnotisme et la suggestion, ces exemples peuvent se multiplier indéfiniment. b) Les hallucinations gustatives sont provoquées, selon les auteurs, soit par l'irrita- tion des centres nerveux, soit par l'irritation de l'organe sensoriel. Il me semble pour- tant qu'aucune des théories de l'hallucination n'explique réellement ces étranges phénomènes psychiques; mais ce n'est ici la place pour les discuter. Remarquons pour- tant qu'en pratique il est extrêmement difficile, sinon impossible, de distinguer les hal- lucinations centrales des hallucinations périphériques, surtout quand il s'agit de formes GOUT. 695 unilatérales, et chez les alirnés. Je ne conrois guère comme démontrée la théorie de l'irritation corticale pour expliquer les états hallucinatoires ; l'analyse psychologique de ces états implique toute une autre explication. On aura beau citer des cas avec des lésions circonscrites : ne sait-on pas à quel point ces circonscriptions sont vagues, et combien les constatations pathologiques sont globales, surtout pour les troubles senso- riels spécifiques? Bazire avait remarqué, chez un sujet atteint de paralysie faciale, une hallucination gustative métallique dans la moitié respective de la langue {Brit. med. Journal, 18G7, 21 septembre); l'hallucination avait fait apjiarition un peu avant l'accident paraly- tique. Marotte a publié un cas analogue : des hallucinations gustatives vagues, plutôt sucrées, concomitantes avec l'apparition des bourdonnements des oreilles et une névralgie temporale du côté respectif [Névrahjie accompagnée d'un goût sucré dans la bouche. Union médicale, vu). Ch. Féré nous donne l'observation d'une hallucination gustative — un goût '^e poisson prononcé — dans un cas de zona de la face, joue gauche, apparition parallèle avec celle des plaques érythémateuses {Note sur un cas de zona de la face avec hallucination du goût et hallucination unilatérale de l'ouïe chez un paralytique général. B. B., 3 juin 1899). Pierre Marie a constaté des hallucinations gustatives chez les tabétiques, « des saveurs bizarres, une saveur sucrée plus ou moins persistante » {Ouvr. cit., p. 216). Les fièvres graves sont souvent accompagnées d'hallucinations gustatives obsédantes plutôt indéfinissables : un mauvais goût d'amertume dans la fièvre typhoïde, malgré l'hygiène la plus soignée de la bouche. Certaines substances toxiques provoquent des hallucinations gustatives. Wermcre. rapporte deux observations de la présence d'un goût d'amertume à la suite d'injections sous-cutanées de morphine ; l'hallucination apparut dans un cas dix secondes après dans l'injection {Arch. fur Psych., 1896, vu). Pour Rose, la santonine produirait des hallucinations gustatives; le fait a été d'ailleurs souvent contrôlé, et il me paraît exact. La sensation hallucinatoire n'est guère définie : c'est un mélange de « mauvais goût »,. et d'un « goût d'amertume ». Les hallucinations gustatives des aliénés se confondent souvent avec les illusions gustatives. Elles se rencontrent fréquemment dans les délires mélancoliques, où les malades accusent des sensations fétides, des saveurs affreuses, ou encore chez des per- sécutés qui trouvent des saveurs bizarres dans tous les aliments : on veut les empoisonner ; dans n'importe quelle substance alimentaire ils trouvent de l'arsenic, du soufre, des matières putrides, etc. Chez certains aliénés, les auteurs ont constaté, particulière- ment chez les paralytiques généraux, des hallucinations gustatives très agréables. Pour ma part, je ne les ai pas remarquées chez les paralytiques généraux; leurs affir- mations ne doivent être prises en considération qu'après de nombreuses expériences. Il y a tout au plus des phases agréables, ou des excitations déprimantes de leur sensi- bilité, et ils font rentrer toutes les illusions et les hallucinations dans leur cadre mental. Les auteurs invoquent, pour expliquer les hallucinations gustatives, des lésions du cortex. L'opinion est trop classique pour ne pas être citée, même si elle n'est pas soli- dement démontrée. Un auteur italien (Tomassini, 1896) a publié le cas d'une mélanco- lique qui éprouvait la sensation hallucinatoire du sucré, et à tel point qu'elle avait des nausées. La malade examinée avait une hyperesthésie pour les saveurs sucrées et de rhypogueusie pour l'amer, pour l'acide et pour le salé. Après dix jours de traitement, anesthésie de la muqueuse linguale avec une solution d'acide gymnémique, les halluci- nations disparurent. Selon l'auteur, dans ce cas, les hallucinations auraient eu comme cause initiale des troubles périphériques. c) Les perversions et les aberrations sensorielles gustatives sont les plus fréquents des troubles gustatifs. Les aberrations gustatives chez les animaux sont connues, et les vétérinaires en donnent de nombreux exemples. Serions-nous pourtant en face de réelles perversions sensorielles, ou devant un goût préféré et réellement perça par des animaux"? Les psy- chologues des animaux sont, pour la plupart, si peu psychologues, ou si suggestionnés par la continuité des fonctions psycho-biologiques dans l'échelle organique, que presque toutes leurs observations sont empreintes d'une systématisation souvent grossière. 696 GOUT. On raconte couramment que des animaux mangeraient de la terre glaise (les loups, les porcs, etc.). Chez certains sauvages, ces perversions de goût ne prennent-elles pas la forme des habitudes coulumières? Les aberrations gustatives se trouvent chez les femmes enceintes, et moins souvent chez les chlorotiques, chez les neurasthéniques. Elles sont nombreuses aussi chez les hystériques et chez les aliénés. Chez les femmes enceintes les perversions gustatives sont presque un trouble symp- tomatologique. L'envie des femmes en état de gestation est le terme qui désigne chez elles le plus souvent les perversions gustatives. Les anciens connaissaient ce fait, et la littérature est pleine d'anecdotes et d'exemples, dans lesquels les femmes enceintes mangeaient les substances les plus répugnantes pendant la gestation. Elles ne pouvaient pas dominer leurs impulsions, et ingéraient alors des substances nauséabondes. Rode- RiCK DE Castro cite l'observation, qu'on trouve d'ailleurs un peu partout, d'une femme enceinte qui aurait eu envie de l'épaule d'un hou\singer {De wiiversali mulierum medicina. Hamburg, 1603). Langius rapporte le cas, classique aussi, d'une femme qui tue son mari, le goûte, le mange en partie, et elle sale le reste du corps {Opéra omnia, 1704). La plupart des femmes ont des envies simples, des goûts pour les écrevisses, le papier d'imprimerie, les fruits crus, les mets préparés d'une manière plus ou moins étrange, ou encore des boissons alcooliques. On a vu même des cas où de simples désirs se transforment en de vraies impulsions. Distinguons néanmoins les envies des femmes enceintes, avec hallucinations gustatives banales, symptomatologiques, de ces hallucina- tions impulsives qui sont pour la plupart des syndromes d'aliénation mentale. Je considé- rerai au moins comme tel le cas de cette jeune fille cité, je ne sais pas où, par Lasègue, laquelle dévora une partie de la redingote de son professeur de dessin. Parmi les perversions du goût citons les affections nommées : pica et malacia, la pre- mière de ces affections, comme l'indique bien son nom (pica = pic; oiseaux omnivores) quand les sujets absorbent sans aucun choix tous les aliments, tous les corps qui tom- bent sous leurs mains, comme cela se rencontre assez souvent chez les idiots, chez les imbéciles et surtout chez les aliénés. Le malacia (malacia = mollesse, défaut d'appétit) indique les ras où les sujets mangent des substances sapides insolites et qu'ils pré- fèrent à de vrais aliments ; ainsi ils mangent du sel, du poivre, du vinaigre, des fruits verts. On rencontre ces troubles pendant la puberté et chez des névropathes, chez des chloro- tiques. Ces troubles peuvent conduire les sujetsàdes systématisations, véritables mono- manies gustatives. Au point de vue du diagnostic, les perversions gustatives consti- tuent toujours un phénomène grave. Les dentistes le savent, et ceux avec qui j'ai pu causer m'ont confirmé l'observation personnelle que toutes les personnes qui accusent des hallucinations gustatives persistantes sont des névropathes difficiles à guérir et qui s'acheminent pour la plupart vers des troubles mentaux, comme le délire mélanco- lique, et vers le délire de persécution. Toute affection psycho-pathologique de la bouche semble comporter toujours un pronostic des plus sérieux au point de vue de la mentalité du sujet (V. Analyse mentale, par Vaschide et Vdrpas). Rappelons encore que les hallucinations et les perversions gustatives jouent un rôle considérable dans la vie sexuelle; les érotomanes cherchent les perversions gustatives spéciales : ils les provoquent de mille manières, et chez eux c'est une obsession presque typique. Les hallucinations sont mêlées le plus souvent avec des hallucinations olfac- tives, et il se forme un état sensuel des plus étranges, s'il est permis de considérer comme étranges les sensations qui constituent l'excitation mentale sexuelle. Pourtant Je.\n-Jagques Rousseau avait dit : « Je ne connais quun sens aux affections duquel rien de moral ne se mêle : c'est le goût. » XIV. — RECHERCHES A FAIRE SUR LA GUSTATION. Pour faciliter les recherches des expérimentateurs, je crois qu'il serait utile de donner, toutes les fois qu'on rédige une revue générale d'une question, une liste des sujets à traiter expérimentalement. GOUT. b97 Pour le goût, il y a beaucoup à faire, surtout au point de vue de la psyclio-pbysio- logie. Voici quelques-unes des questions les plus intéressantes à étudier. a) La piiysiologie de la corde du tympan. b) Le rôle dans la gustation du nerf intermédiaire de Wrisbero. c) Le rôle du facial et l'examen de la sensibilité gustative dans les paralysies faciales, péripbériques ou centrales et dans des névralgies opérées cbirurgicalement. (I) Le rôle de l'hypoglosse dans les paralysies intéressant l'origine centrale et le trajet de ce nerf. e) L'histologie de la langue, au point de vue de la conslitution différentielle dés papilles; examiner minutieusement et comparativement la muqueuse de la cavité buc- cale accusée comme capable de percevoir une sensation gustative. Étudier bistologique- ment les terminaisons nerveuses dans leurs rapports avec des excitations spéciflques des saveurs fondamentales. f) Le centre cortical du goût. g) Les voies sensitivo-sensorielles de la gustation. h) Le mécanisme de la gustation. i) La nature chimique des saveurs. j) La classification des saveurs et l'analyse psycho-physiologique des saveurs. A) L'analyse de la sensation gustative. l) La psycho-physique des sensations gustatives. m) Le temps de réaction des sensations gustatives, réactions simples et de choix. n) La détermination de la limite perceptible des différentes saveurs. o) L'évolution de la sensation gustative dans l'individu et dans la race. p) Les anesthésies gustatives. q) Les hallucinations et les illusions gustatives, la compensation des saveurs, le contraste des saveurs et leurs combinaisons ou mélanges. r) Enfin, l'image gustative, la mémoire des saveurs, le souvenir, et toute l'élaboration mentale des images gustatives. 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Ce sont encore les vaisseaux qui donnent au tissu cellulo-adipeux sa constitution lobulaire. En étudiant l'évolution du tissu adipeux chez le fœtus ou chez l'animal jeune, on peut suivre les différentes étapes de transformation de la cellule conjonctive en cellule et FiG. 31. — Réseau î limbiforme du mésentère d'un jeune chat. Acide osmique à 1 p. 100. Montage dans la glycérine. Injection physiolo- gique des vaisseaux sanguins par ligature de la veine cave supé- rieure : gross. : 53. « = Vaisseaux sanguins, Z= Lobules adipeux. GRAISSES. 725 vésicule adipeuses. Chez certains animaux comme le veau, chez l'homme, les cellules fixes conservent primitivement leur forme ramifiée; elles ne la perdent qu'au moment oii commence l'élaboration graisseuse intra-protoplasmique, et celle-ci se fait tout d'abord sans augmentation de volume de la masse du corps cellulaire. A côté de ce processus primaire, il en est un autre au- quel on peut donner, avec Ham- MAR, le nom de processus se- condaire; il s'observe chez cer- tains animaux tels que le rat, le cobaye, le lapin. Les cellules conjonctives ramifiées augmen- tent de volume d'une façon assez marquée, elles se rapprochent ensuite les unes des autres et prennent une forme polygonale par pression réciproque. Des granulations réfringentes, ° — '^—^ — '-^ "^^ ^ '^-v très fines d'abord, naissent par Fk. Z2. - Bistof/énèse du tissu adipeux.- stade i. dllierenciation au sem du proto- Graisse interscapulaire d'un embryon de cobaye de 35 millimètres. plasma et occupent ses vacuoles. Liquide de Flemming, Rouge de Magenta, Carmin d'Indigo pi- ,11] j i • •»• i crique, gross. : 500. Llles demeurent primitivement ^u sein du protoplasma de l'amas syncytial constitué par les séparées les unes des autres par cellules conjonctives (mésencliyme) c apparaissent des gouttes des travées i>rotoplasmiqiies chro- ^^ graisse g. Les cellules sont encore ramifiées et n'ont pas de vésiculG mopliiles relativement épaisses. Cette épaisseur diminue progres- sivement à mesure que les gra- nulations augmentent de vo- lume. Ces dernières confluent en trois ou quatre globes principaux et ne tardent pas à se confondre en un bloc unique, qui occupe plus ou moins complètement la totalité de l'élément. Le protoplasma et le noyau comprimés se trouvent refoulés à la pe'ri- .^ rs^' Kn Cl une cellule, plus avancée, est déjà limitée par une mem- brane. En y est un capillaire rempli do globules rouges. FiG. 33 et 34. — Histologie du tissu adipeux. — Stade 2. Graisse périrénale d'un enfant à terme. Gross. = 3-JO. A Liquide de Flemming; Fuchsine acide. B Même préparation après passage dans l'essence de térébenthine. (/ = gouttes de graisse osmiées. t = travées protoplasmiques séparant encore les gouttes de graisse. c = capillaires sanguins. a — alvéoles laissées vides après dissolution de la graisse dans l'essence de térébenthine. phérie de la cellule qui se trouve alors environnée par une cuticule protoplasmique plus ou moins épaisse. Au niveau du noyau, le protoplasma présente le plus souvent un léger épaississement, et, en coupe optique, la lame enveloppante de protoplasma appa- 726 GRAISSES. raît comme une bague, munie de son chaton, disposée autour du globe graisseux cen- tral ; le chaton de la bague représente le noyau. Mais là ne s'arrête pas l'évolution de la cellule conjonctive, déjà cependant nettement différenciée. La surcharge graisseuse se continuant, le protoplasma distendu se laisse- rait éclater s'il n'élaborait une membrane de soutien et de maintien. La vésicule adi- peuse, complètement formée, comprend : une membrane ou production exoplastique, une mince couche de protoplasma comprimée en forme de calotte, renfermant le noyau et une masse centrale, plus ou moins volumineuse, formée de graisse. Dans certaines cellules, la masse de graisse, au lieu de constituer un bloc unique, demeure divisée en amas séparés par des travées protoplasmiques. Déjà reconnaissables au microscope, grâce à leur réfringence toute spéciale, les formations graisseuses sont très faciles à déceler dans les cellules animales à l'aide de 0---1 «^^ » 5; ^«o y- l —Ji H" n FiG. 35 et 36. — Tissu adipeux adulte. — Graisse périrénale d'homme adulte. A. Liquide de Flemming ; fuchsine acide; B. même préparation traitée par l'essence de térébenthine gross. : 200. c == Cellule adipeuse avec sa capsule et son noyau. Cl = Cellules à l'intérieur desquelles restent encore des travées protoplasmiques. V = Capillaires sanguins. certains réactifs. Le plus communément employé est Vacide osmique : utilisé en vapeurs ou en solution aqueuse à 1 p. 100, il colore les graisses en noir plus ou moins foncé en quelques minutes. La graisse se trouve ainsi métallisée; elle n'est pas cependant rendue insoluble, comme on l'admet communément. Toutes les graisses animales ne se com- portent pas de la même façon en présence de l'osmium; s'il en est qui se teintent vigou- reusement en noir, il en est d'autres qui ne prennent qu'une coloration bistre, plus ou moins foncée. Les recherches d'ALTiiANN, Starke, Handwerk, Paul MuLON,nous ont fait comprendre la raison de ces différences : l'acide oléique seul est capable de réduire l'acide osmique, de se colorer et, partant, de se fixer grâce à cette léduction. La cou- leur, le degré de fixation d'une graisse sont en relation avec sa teneur en acide oléique. Certaines graisses peu colorables peuvent ainsi échapper aux recherches histologiques, alors même que celles-ci seraient poursuivies sur des pièces très fraîchement recueillies. MicHAËLis a doté la technique d'une autre couleur azoïque, le scarlach ou ponceau, dont les propriétés tinctoriales sont plus énergiques et plus électives que celles du sudan IIL Comme le sudan, l'orcanette, l'alkaima, le bleu de quinoléine, le henné, le scarlach est un colorant qui agit en se dissolvant simplement dans la graisse. Au con- traire de l'acide osmique, il colore par simple action physique (Michaëlis, Mulon), et, comme il se dissout dans toutes les graisses, dans tous les acides gras, il est donc supé- rieur à l'acide osmique pour la recherche des graisses dans les tissus. Mais pour faire agir le scarlach, on doit choisir des pièces fraîches ou fixées dans le formol au tiers et coupées par congélation. La solution suivante a donné à Paul Mulon les meilleurs résultats : Acétone (du bisulfite). . .| ,. „ Alcool absolu j ' Alcool à 70" 58 Scarlach (de Diebrich) Q. S. GRAISSES. 727 On colore avec celle soluLion en une minute, on lave la coupe rapidement dans l'alcool à 70" avant et après. Au moyen de méthodes spéciales, certaines graisses peu- vent se colorer par l'hématoxyline. On sait que la myéline des fibres nerveuses se colore par la méthode de Weigert (hémaloxyline agissant après un mordançage chromo- cuprique). Au niveau du testicule, les recherches de Loisel ont montré que les vésicules de sécrétion, colorables par "la méthode de Weigert, que l'on rencontre dans les cel- lules de Sertoli ou dans l'épaisseur de l'épilhélium séminifère. étaient formées par de la graisse. Regnaud avait considéré ces vésicules comme le produit d'une sécrétion spé- ciale. La graisse des cellules interstitielles du testicule et de l'ovaire, celle des cellules de la capsule surrénale (Mulon), celle des cellules des corps jaunes, certaines gouttelettes intra-épithéliales du rein jouissent toutes de la propriété de se colorer par la méthode de Weigert (Paul Mulox). La théorie de cette coloration n'est pas encore classiquement établie, mais il est rationnel d'admettre que la propriété' de se colorer par la méthode de Weigert appar- tient plus particulièrement aux graisees lécithiques. Pour différencier les acides gras des graisses neutres, Benda et plus récemment Paul MuLO.\ ont préconisé deux méthodes s'appuyant sur le principe suivant : les acides gras sont capables de s'unir à des bases métalliques insolubles. Ces savons métalliques sont ensuite capables de produire des laques colorées avec l'hématoxyline. Benda fixe des pièces dans l'acétate de cuivre additionné de formol, puis immerge les coupes dans l'hématoxyline : il aurait ainsi coloré en vert des cristaux (?) d'acides gras libres. Mulon mordance des coupes dans le fer dialyse, lave ensuite à l'eau pendant 24 heures et met à colorer dans 5 centimètres cubes d'eau additionnée de quelques gouttes de solution d'héniatoxyline à 1 p. 100 dans l'eau. Au bout de 24 heures, la coupe a pris une teinte bistre et les acides gras ont pris une coloration gris violet (surrénale). J. Camus et Pagxiez ont, de leur côté, observé que les acides gras se colorent par la solution de fuschine phéniquée de Ziehl et que la coloration résistait à l'action déco- lorante des acides minéraux. Les graisses ne présentent pas ce caractère d'acido-rési- stance. Ce procédé donne des résultats superposables à ceux de la méthode de colora- tion par les laques (surrénales, P. Mulon). La graisse se colore en bleu sous l'action de l'iode ; la teinte qu'elle offre diffère toujours de la coloration brun acajou que présente la matière glycogène, soumise à l'action du même réactif. L'usage d'une solution alcoolique de bleu de quinoléïne teint en bleu les cellules adi- peuses. Celte coloration se conserve, et même devient plus intense, si la préparation, colorée et lavée, est soumise ensuite à l'action de la potasse à 40 p. 100 (Ranvier). On peut se servir encore, pour colorer la graisse, d'wne solution alcoolique d'orcanette (Achard) ou de vert malachite. D'après Regnault, le henné serait un bon réactif de la graisse : employé en solution alcoolique à 50 p. 100, il lui donne une coloration verte et permet l'emploi des autres réactifs tels que le picro-carmin et l'hématoxyline. Dans ces derniers temps Rosenthal a introduit, dans la technique, un nouveau réactif, le soudan, qui donne à la graisse une coloration rouge. La graisse étant soluble dans l'alcool, l'éther sulfurique, le chloroforme, le xylol, on devra éviter l'emploi de ces agents, quand on voudra étudier soit les dispositions et les rapports des cellules adipeuses dans les tissus, soit leurs caractères structuraux. Ldi graisse est à Vétat liquide, quand la cellule animale est vivante : elle se présente alors comme une goutte d'huile plus ou moins volumineuse. Après la mort, après le refroidissement du cadavre, elle se fige, et souvent aussi cristallise, en formant, dans le centre de l'élément, de longues aiguilles radiées {cristaux de margarine). La cristalli- sation est d'autant plus nette que la mort remonte à une époque plus éloignée. La graisse contenue dans les cellules adipeuses, chez l'homme, est un mélange de iristéarine, tripalmitine, et trioléine ; il y a toutefois prédominence de stéarine et de palmitine. S'il en est ainsi chez l'homme, il ne faut pas oublier que les proportions de ces corps gras varient suivant les espèces animales : la graisse ou suif de mouton, pour ne rappeler que cet exemple, est presque uniquement formée de stéarine. Pour bien étudier les caractères morphologiques et structuraux des cellules et vésicules adipeuses, on peut recourir à la technique suivante. Sur un chien que l'on vient de tuer, 7 28 GRAISSES. on détache un fragment de peau muni de son tissu collulo-adipeux; tandis qu'il est encore chaud, on pratique dans l'épaisseur de ce dernier une injection interstitielle avec une solution de nitrate d'argent à 1 p. 100. On abrase avec des ciseaux une mince tranche de la boule d'œdème ainsi produite. Cette tranche, montée entre lame et lamelle, permet l'étude des vésicules adipeuses, élude qui sera facilitée par l'emploi des différents réactifs colorants indiqués précédemment. Les dimensions des vésicules adipeuses sont variables : leur diamètre, chez Vhomine, oscille entre 22 et 133 [l. Quand elles atteignent cette dernière taille, elles constituent les plus volumineuses cellules de l'organisme et peuvent être distinguées à l'œil nu. Les vésicules adipeuses peuvent acquérir des dimensions plus grandes encore chez certains animaux, tels que le bœuf, le porc, les cétacés. Elles présentent souvent, chez le même individu, des différences de volume très notables, d'une région à l'autre du corps. Elles sont, par exemple, plus petites, en général, autour du rein et dans les différents replis du péritoine que dans le tissu adipeux sous -cutané ou intermusculaire (Ch. Robin). Chaque vésicule adipeuse a la forme d'une utricule limitée par une membrane, reconnaissable au microscope par son double contour et remarquable par sa minceur et sa transparence. En écrasant lé- gèrement une préparation de tissu adipeux, on fait éclater quelques cellules : leur contenu s'échappe sous forme de gouttes de graisse, et la membrane d'en- veloppe apparaît vide et plissée. On peut de même examiner un fragment de tissu graisseux qui a macéré pendant vingt-quatre heures dans l'éther : les mem- branes cellulaires Ilasques de- viennent apparentes, grâce aux plis qu'elles présentent. Une couche de protoplasma finement granuleux double la membrane d'enveloppe. Elle ren- ferme presque toujours de fines gouttelettes ou de petites gra- nulations graisseuses, qui, inces- samment élaborées, vont rejoin- dre et grossir la masse centrale. Refoulée à la périphérie de l'élé- ment, la couche protoplasmique, toujours plus ou moins aplatie, forme tantôt un anneau complet, tantôt un simple croissant. Quelle que soit sa minceur, elle présente, en un point, un léger épaisissement qui renferme lenoyau. Celui-ci, muni d'un ou deux nucléoles, est de forme arrondie, s'il est vu cà plat; s'il se montre de profil, sur le côté de la cel- lule, il paraît ovalaire et aplati. Il n'est pas rare de trouver deux noyaux dans un même élément. Cette constatation indique, ou que deux cellules se sont fondues en une seule, ou que la division du noyau a eu lieu, sans que la division cellulaire s'en soit suivie. Entre la couche protoplasmique et la masse graisseuse centrale existe une mince zone qui paraît transparente, et qui est occupée par un liciuide séreux, à réaction alca- line, dont la quantité varie avec l'état de la nutrition. Quant à la partie centrale de l'élément, elle est occupée par la masse de graisse, qui se présente comme une grosse goutte d'huile, reconnaissable à sa grande réfringence et aux caractères histochimiques précédemment indiqués. Cette disposition se l'etrouve dans les cellules adipeuses de la graisse blanche som-culance ; elle n'est plus la même dans la graisse jaune ou ocre qui forme le corps adipeux des insectes, des batraciens et l'atmosphère adipeuse du rein chez les vertébrés. Dans les éléments qui, par leur assemblage, constituent ces réserves, la substance grasse est et demeure répandue dans le protoplasma, sous forme de grosses gouttes, séparées les unes des Fig. 37. — Types de cellules ndipeus.es fixées par l'acide osmi(iue et colorées par la fuchsine acide. a. Grosses cellules adipeuses coupées en dehors de leur noyau : la graisse, noire, et la membrane d'enveloppe sont seules visibles. b. Cellule type : contenu-graisse ; protoplasma granuleux et noyau réfugiés à la périphérie, sous la membrane d'enve- loppe. c. Cellule de graisse périrénale adulte avec une travée proto- plasmique. rf, e, f. Cellules mâriformes de plus en plus jeunes, c'est- à-dire confenant de plus en plus de gouttes graisseuses. Toutes ont une membrane d'enveloppe. Ces cellules volumineuses ont été coupées en dehors de leur noyau. (Graisse périrénale et interscapulaire d'embryons.) GRAISSES. 729 autres par des travées granuleuses plus ou moins épaisses. L'aspect des cellules est tout à fait particulier, et il justifie le nom de cellules mnriformes, que leur a donné Hamuar. Tout dernièrement, Unna, étudiant le noyau de certaines cellules adipeuses, crut remarquer qu'ils étaient perforés comme à l'emporte-pièce. Sack, cherchant a inter- préter l'histo-physiologie de ces noyaux perfores, admit qu'au voisinage d'un des nœuds du réseau chromatiniea nucléaire se forme une vacuole, se remplissant progressi- vement d'une substance particulière qui, émigrant du noyau, venait grossir l'amas de réserve central. Pour Rabl, les vacuoles nucléaires n'existent pas, l'aspect observé est dû à la présence de gouttes de graisse très réfringentes, qui, appliquées sur le noyau, semblent renfermées dans sa masse. La présence de la graisse à l'intérieur même du noyau a été constatée d'une laron irréfutable chez les végétaux par Garnoy, Zopf et Novarowski, Maire et, chez les fiiii- maux, par De Almeida dans le noyau des vésicules adipeuses sous-cutanées, par Paul MuLON dans le noyau des cellules surrénales. Tels sont les caractères histologiques des cellules et des vésicules adipeuses; ils per- mettent de classer ces éléments en deux variétés, suivant la disposition de leur contenu, et de distinguer les cellules blanches des cellules ocres. D'une façon générale, chez les vertébrés supérieurs, on peut dire que la graisse a une coloration jaune , mais cette coloration varie d'une nuance claire à une nuance foncée presque brune. On sait d'ailleurs que, chez un même individu, les pelotons adipeux n'offrent pas, dans toutes les régions, la même teinte, et que, sous ce rapport, la graisse sous-cutanée diffère considérablement de la graisse profonde. La matière colorante de la graisse est un pigment qui appartient au groupe des lipochrômes. Des variations de teinte s'observent dans la série animale, et, comme exemples frap- pants, il suffira de rappeler que, chez le crocrodile, la graisse est verte, tandis qu'elle est rouge chez un grand nombre d'invertébrés. La cellule graisseuse jaune est brillante au centre, lorsqu'on l'examine à la lumière transmise, ses bords apparaissent noirs : ces aspects sont particuliers aux gouttes et gouttelettes graisseuses, suspendues dans les liquides qu'on examine au microscope. Chez les animaux bien portants, chez ceux surtout qu'on soumet kV engraissement, les vésicules adipeuses, distendues, sont rondes ou ovales; elles se dépriment cependant plus ou moins par pression réciproque, quand les amas qu'elles forment sont très déve- loppés. Après la mort, elles se déforment, deviennent irrégulières ou polyédriques; ces déformations sont dues à la rétraction et à la solidification de la graisse, toujours plus ou moins rapides quand survient le refroidissement. Dans l'amaigrissement, la cellule diminue de volume, à mesure que la graisse de réserve disparaît. La membrane d'enveloppe, plus ou moins ratatinée, renferme pres- que exclusivement un liquide séreux, dont la quantité, minime à l'état normal, s'est considérablement accrue. Ces modifications sont faciles à apprécier sur les appendices épiploïques de la grenouille à la fin de l'hiver : les cellules, qui entrent dans leur consti- tution, ne renferment plus qu'un liquide un peu louche, dans lequel nage librement une grosse granulation, de couleur jaune ambré, et qui a la réfringence de la graisse. Dans ['inflammation, il se produit rapidement une raréfaction de la graisse : on voit se produire une hyperplasie du protoplasma en même temps qu'une prolifération des noyaux. Le protaplasma ne tarde pas à se segmenter, à se répartir autour des noyaux de nou- velle formation, de telle sorte que chaque vésicule adipeuse devient un véritable nid de cel- lules embryonnaires (Ranvier). La paroi s'élant de'chirée, les cellules jeunes sont mises en liberté, et l'élément revient ainsi à son stade primitif, en poursuivant un cycle inverse à celui qu'il avait parcouru pour arriver à sa complète différenciation. On admet aussi que, dans les régions enflammées, la margarine et la stéarine contenues dans les vésicules adipeuses se séparent de l'oléine et se déposent sous forme de cristaux s'irradiant du centre de l'amas vers la périphérie. La graisse apparaît de bonne heure dans les cellules fixes du tissu conjonciif chez les vertébrés supérieurs : des vésicules adipeuses, parvenues à leur complet développe- ment, se rencontrent chez l'homme, à partir du 50"^ jour de la vie embryonnaire. Elles font leur apparition successivement dans le fond de l'orbite, le creux de l'aisselle, le 7;^0 GRAISSES. dos, le pli de l'aîne et, un peu plus tard, dans la paume des mains et la plante des pieds. Depuis cette époque jusqu'à celle de la mort, on en trouve partout où il existe de la graisse visible à l'œil nu dans l'économie. De même, à compter de l'époque de la naissance, on en trouve dans la moelle des os, et sa quantité varie suivant les individus et les espèces animales. On en rencontre encore, en quantité variable et comme élément accessoire, dans un grand nombre de tissus et d'organes, où l'œil nu ne permet pas d'en soupçonner la présence. Il est, par contre, certaines formations où les vésicules adi- peuses font toujours complètement défaut ; elles manquent, par exemple, dans le derme de la peau, dans celui des muqueuses, dans les tendons, les aponévroses, les formations élastiques. Observées chez l'embryon ou le fœtus, les vésicules adipeuses sont petites : leur accroissement se fait insensiblement, non par multiplication directe ou indirecte, mais par accumulation progressive de le graisse de réserve, qui est une élaboration de leur protoplasma. Cette élaboration est sujette à des variations plus ou moins marquées, en rapport avec l'état de santé ou de maladie, c'est-à-dire avec les besoins de l'organisme qui utilise ou non ses provisions de réserve. En se plaçant au point de vue de la phy- siologie générale, on peut, avec Milne-Edwards, assimiler son fonctionnement à celui d'une glande. Une fois différenciée au sein du tissu conjonctif, la cellule peut, sans pour cela modifier sa constitution complexe, accumuler de la graisse au maximum dans son intérieur, la maintenir fluide pendant la vie et la dépenser plus ou moins complètement pour les besoins de la nutrition interstitielle, sans pour cela se détruire. Quand elle s'est appauvrie, elle devient alors larvée et demeure prête à séparer du sang une nouvelle réserve de graisse. « De semblables fonctions rentrent pleinement dans le rôle nutritif général, exercé dans l'organisme par le tissu conjonctif lâche. Sa plus large et sa pre- mière différenciation, aboutissant à l'édification des pelotons adipeux avec le concours des vaisseaux sanguins, est bien de la sorte en rapport avec la nutrition générale de l'organisme (Renaut). » ÉTUDE ANATOMIQUE ET HISTOLOGIQUE DU TISSU ADIPEUX. Le tissu adipeux ou graisseux est formé par la réunion des cellules et des vésicules adi- peuses, c'est-à-dire de cellules fixes du tissu conjonctif ayant subi une différenciation particulière; aussi ne le rencontre-t-on que dans les régions où il existe du tissu cellu- laire ou conjonctif. La dénomination de tissu cellule-adipeux est beaucoup moins appro- priée, car il n'existe pas de tissu adipeux à proprement parler, mais seulement des éléments adipeux juxtaposés, et ceux-ci appartiennent en propre au tissu conjonctif. Pour constituer le tissu cellulo-adipeux,ie.s uesici/Zes se groupent sous forme de pelotons, c'est-à-dire de petites masses dont l'ordination est réglée par les mailles vasculaires qui servent de travées directrices au moment de la formation. Les pelotons on lobules graisseux apparaissent au milieu des aréoles du tissu conjonctif comme autant de grains jaunâtres, ayant le volume d'un grain de millet à celui d'un petit pois. Ils sont englobés dans la trame même du tissu conjonctif qui les unit les uns aux autres. Chaque peloton est formé par un plus ou moins grand nombre de vésicules adipeusess accumulées sans ordre les unes contre les autres. En se juxtaposant, les cellules se déforment plus ou moins; elles demeurent parfois arrondies, mais prennent le plus souvent une forme polyédrique, présentant des angles assez nets quand elles sont forte- ment comprimées, comme cela s'observe chez le porc, les cétacés. Lorsqu'elles constituent des amas peu considérables, celles qui sont voisines du centre se déforment seules, celles qui siègent vers la périphérie s'aplatissent par leur côté tangent et demeurent arrondies par leur surface libre. Dans le voisinage des îlots cellulaires, on trouve toujours des éléments isolés, disposés souvent sous, forme de traînées. Leur observation permet de reconnaître qu'ils sont normalement de forme sphérique ou souvent aussi ovoïde. Sur une coupe, un peloton adipeux revêt l'apparence d'un pavage dans lequel les pierres seraient non seulement juxtaposées, mais encore superposées ; en raison de son épais- seur, la préparation intéresse toujours plusieurs couches de cellules. L'appareil vasculaire du tissu adipeux a été très bien décrit et figuré par Mascagni : il GRAISSES. 731 comprend l'épanouissement complet des réseaux limbiformes que nous avons étudiés aux premières phases du développement. Des rameaux artériels et veineux sont logés dans les sillons qui séparent les uns des autres les pelotons et englobés dans les éléments mi;mes de la trame conjonctive. Leurs divisions représentent par leurs anastomoses des résea,ux capillaires qui enserrent dans leurs mailles un plus ou moins grand nombre de vésicules adipeuses. Parfois une seule cellule se trouve enclose dans une véritable cage vasculaire. Un pareil ensemble de vais- seaux et de grains agglomérés a quelque ressemblance avec une grappe de raisins munie de son pédicule, dans laquelle chacun des grains qui la composent possède son pédicelle propre. Cette disposition est facile à observer sur un fragment de graisse prélevé sur un cadavre injecté, ou encore sur un animal dont les vaisseaux sont de- meurés gorgés de sang. On commence à apercevoir le tissu adi- peux, chez l'homme, à partir du soixante- quinzième jour de la vie intra-utérine (Ch. RoBiNj. Les premières régions, où il se montre, sont le pli de l'aîne, le creux de l'aisselle, le fond de l'orbite, la paume des mains, la plante des pieds. Peu de temps après, on voit se former la boule sous-massétérine de Bichat. Le tissu adi- peux apparaît toujours par petits lobules séparés, arrondis ou ovoïdes, ressemblant à de petits grains de semoule. Ayant, à ces premières phases de son développement, une coloration jaune blanchâtre, il possède un aspect tremblotant et gélatiniformeque Fig.38 l'on peut observer au fond de l'orbite chez la plupart des enfants à la naissance. Cette apparence gélatiniforme est due à l'état de la substance renfermant les cellules adi- peuses, substance qui est encore au stade nuiqueux de son développement. Peu à peu les lobules augmentent de volume et aussi de nombre; ils s'associent en masses plus ou moins considérables et prennent une coloration jaunâtre tout à fait caractéristique. Cette coloration, qui est celle de la graisse renfermée dans les cellules, varie chez les divers animaux et aussi dans les diffiérentes régions du corps d'un même animal. Dans le cas où la graisse est incolore, la lumière est réfléchie en blanc, comme cela s'observe chez le porc (lard) et chez les cétacés, par les amas de cellules adipeuses. Si, au contraire, il y a abondance de formations graisseuses d'une teinte jaune, comme le sont en particulier l'oléine et la margarine, on voit le tissu adi- peux prendre une coloration jaune ocre plus ou moins foncée (bœuf, viandes de bou- cherie). Chez les sujets émaciés ou amaigris, on observe souvent une teinte orangée ou rougeâtre; elle est en rapport avec le contenu des vésicules flétries, qui est formé par un liquide séreux renfermant des granulations d'un jaune orangé parfois très vif. La consistance du tissu adipeux est soumise à certaines variations ; ferme et résistant chez les sujets jeunes ou bien portants, il doit ces propriétés à une réplétion absolue de ses éléments constitutifs par la graisse. Chez les individus amaigris ou malades, il redevient gélatiniforme. Lobule adipeux du mésentère d'un jeune chat. — Acide osmique à 1 p. 100 ; essence de té- rébenthine ; fuchsine acide; montage au baume. — Injection physiologique par ligature de la veine cave inférieure. — Gross. = 96. Los contours des cellules adipeuses sont nettement visibles, ainsi que leur noyau. De l'artériole a, se détachent de plus petites branches ai, ces petites branches abandonnent à leur tour des capillaires c. Ceux-ci se ramifient et forment un réseau dont le pourtour assez nettement arrondi indique la limite d'un lobule graisseux l. De ce réseau lobulaire partent Wi, de petites veinules qui viennent s'ouvrir dans la veine u. Chaque cellule adipeuse est toujours en contact avec un vaisseau sanguin sur une partie quelconque de sa surface. 732 GRAISSES. Le tissu adipeux est moins dense que la plupart des tissus de l'économie : les masses adipeuses, plongées dans l'eau, sui'nagent, et cette propriété est due aux corps gras (margarine, stéarine, oléine), qui entrent dans sa constitution. Le tissu adipeux a une résistance beaucoup plus grande que les autres tissus de l'économie à la putréfaction : les corps gras, en pareil cas, se saponifient et forment une masse résistante qui ne se décompose pas à la manière des substances azotées. Dans le corps des mammifères, dans celui de l'homme en particulier, le tissu adipeux se dispose, à la superficie et dans la profondeur, en couches plus ou moins épaisses. Interposé entre la peau elles aponévroses, il forme \e pminicule adipeux sous-ciitané. La graisse, après avoir infiltré l'hypoderme, s'étend de la superficie vers les plans profonds, à la face sous les muscles de la région, au thorax sous le trapèze, le grand dorsal, le grand pectoral, à la fesse sous le grand fessier. Elle manque sous la peau de la ligne médiane du nez au niveau des os propres, so.us celle du pavillon de l'oreille, le lobule excepté, sous celle des paupières, du prépuce, de la verge, du scrotum. Le pannicule adipeux s'amincit considérablement au niveau de la portion moyenne du front, du ster- num, du sommet des apophyses épineuses dorsales et sacrées, de l'acromion et de la tête de l'omoplate. Il se réduit, dans ces différents points, à quelques rares lobules et peut même, chez certains sujets, faire complètement défaut. Au niveau du cou et de la racine des membres (creux de l'aisselle, creux inguinal) il forme des amas plus ou moins abondants dans lesquels se trouvent logés les ganglions lymphatiques. Ces relations entre les ganglions et les formations adipeuses ne sont vraisemblablement pas de simple relations de voisinage : les ganglions jouent probable- ment un rôle important dans l'élaboration des graisses, soit à l'état normal, soit à l'état pathologique. La démonstration absolue de ce rôle n'a pas encore été donnée, mais il est rationnel d'en admettre l'exactitude, ainsi que l'un de nous l'a supposé dans l'étude d'une affection cliniquement caractérisée, l'adéno-lipomatose symétrique à prédomi- nence cervicale (Launois et Bensaude). Au niveau des membres, le pannicule sous-cutané, très développé chez l'enfant et la femme en général bien potelés, est moins abondant chez l'homme adulte et vigoureux, dont les reliefs musculaires sont rendus plus visibles. A la paume des mains, à la plante des pieds, il forme un épaississement constitué par des lobules volumineux, arrondis et mous. Ces lobules sont enserrés dans de nombreux faisceaux conjonctifs, riches en for- mations fibreuses et élastiques, qui, de la face profonde du derme, vont s'insérer sur les aponévroses palmaire et plantaire. Incompressibles à peu près par eux-mêmes, parce qu'ils sont composés de gouttes d'une substance semi-liquide retenues dans des cavités closes, ils remplissent les intervalles des faisceaux fibreux et les maintiennent, ainsi que le derme, dans vm état de distension permanent. Leur tension est telle qu'on les voit faire saillie sur les lèvres d'une incision aussitôt qu'elle est pratiquée, pourvu qu'elle inté- resse toute l'épaisseur du derme (Robln). Dans la profondeur, on voit le tissu adipeux s'interposer au-dessous des gaines apo- névrotiques propres des muscles, autour des paquets vasculo-nerveux, autour des plexus nerveux, au niveau de la jonction des tendons élargis avec les ventres musculaires, etc. Les articulations elles-mêmes en sont parfois pourvues : dans certaines, le genou par exemple, les lobules se disposent sous forme de masses pédiculées, et constituent ce que l'on a improprement appelé les glandes de Clopton Havers. Au cou, le tissu adipeux d'interposition remplit les intervalles qui séparent les uns des autres les muscles ou mieux les gaines aponévrotiques de ces muscles, et, d'un sujet à l'autre, il laisse des intervalles plus ou moins profonds, selon que son abondance est plus ou moins grande. Le tissu cellulo-adipeux profond du cou communique largement avec celui du médiastin. Dans cette dernière région, ou trouve en effet toujours de la graisse, en plus ou moins grande abondance. On la voit, dans la partie antéro-supérieure, se substituer progressivement au thymus, alors que celte glande diminue et disparaît. Dans la cavit('' abdominale, au niveau du péritoine, si les formations graisseuses sont peu développées au-dessous du feuillet pariétal, on les voit acquérir, progressivement avec l'âge, des proportions plus ou moins considérables au-dessous du feuillet viscéral. A son niveau en effet, peu après la naissance, du tissu graisseux se développe, sous forme de GRAISSES. 733 traînées, le long des vaisseaux mésentériques et épiploïques. Chez beaucoup d'animaux, il reste, pendant toute la vie, à l'état de bandelettes jaunes ou blanches, dont la coupe triangulaire ont leur base appuyée sur les vaisseaux. Dans le mésentère d'abord, dans l'épiploon ensuite, ces ])andelettes s'élargissent et se réunissent pour former une couche continue entre les deux feuillels péritonéaux, qu'elles écartent l'un de l'autre propor- tionnellement à leur épaisseur, qui est parfois considérable. On le voit aussi souvent former, le long de l'intestin, des appendices plus ou moins volumineux. Chez l'enfant, comme l'avait déjà remarqué Bicuat, la quantité de graisse est en pro- portion beaucoup plus considérable sous la peau que partout ailleurs, surtout que dans l'abdomen : l'épiploon n'en renferme en effet qu'une très faible proportion à cette période du développement. A l'âge adulte, au contraire, la graisse abdominale est plus abondante que la sous-cutanée. « La bouffissure extérieure est aussi rare vers la quaran- tième année qu'elle est commune jusqu'à la quatrième ou la cinquième, époque à laquelle toutes les formes musculaires étant cachées par la surabondance graisseuse, le corps est sensiblement arrondi. » Certains viscères, autres que l'intestin, possèdent en propre une couche graisseuse plus ou moins développé. C'est ainsi que la graisse, contrairement à ce qui existe chez nombre d'animaux, les poissons en particulier, fait défaut dans la cavité encéphalique des mammifères. On la retrouve, par contre, dans le canal rachidien où, chez l'homme, à partir de la troisième vertèbre cervicale, elle se dispose sous forme de bandes transver- sales, semi-annulaires d'abord et ensuite sous forme d'une couche continue depuis la région lombaire jusqu'à l'extrémité du canal sacré. Au-dessous du péricarde viscéral , on trouve des travées graisseuses le long des vais- seaux coronaires du c(eur, sur les bords gauche et droit de l'organe, plus particulière- ment sur ce dernier et au niveau de la pointe. Ces traînées sont souvent assez larges pour empiéter sur les faces elles-même.= . Au niveau du sillon auriculo-ventriculaire, le tissu graisseux forme souvent des prolongements coniques, qui, soulevant le feuillet viscéral de la séreuse, alfectent des analogies avec les lobules graisseux épiploïques. Poirier a tout dernièrement attiré l'attention des anatomistes sur des franges adi- peuses qui sont groupées dans la cavité péricardique au niveau même de la pointe du cœur. Le rein, chez les vertébrés supérieurs, est caché au centre d'un amas adipeux auquel on donne, en anatomie descriptive, le nom de capsule ou atmosphère adipeuse du rein. Cet amas de graisse, qui est l'analogue du corps jaune étudié précédemment dans la série animale, constitue, chez l'homme, la première formation adipeuse qui se déve- loppe dans l'abdomen. Dans le dernier ou les deux derniers mois de la gestation, il forme déjà une couche lobulée à la surface de l'organe et vers son bile ; il envoie ensuite des traînées de lobules rougeàtres sur le rein lui-même. La quantité de graisse, accumulée dans cette région, augmente proportionnellement avec l'âge, mais en pré- sentant des variations d'un sujet à l'autre. Vers le hile du rein, le tissu graisseux s'en- fonce plus ou moins profondément dans la dépression par laquelle passent les vaisseaux artériels, veineux et l'uretère. En bas, il se prolonge, dès la naissance, dans le sillon qui sépare le muscle psoas du transverse de l'abdomen, et se continue, sous forme de traînées, jusque dans la fosse iliaque. On trouve encore, à la face, deux formations graisseuses qui se font remarquer par leur constance et par les caractères qui leur sont particuliers. C'est d'une part le cous- sinet adipeux ou graisseux de l'orbite, qui occupe le fond même de la loge qui renferme le globe de l'œil; c'est d'autre part la boule graisseuse de Bichat. La boule graisseuse de Bichaï forme comme une masse isolée au milieu de la graisse environnante; on peut, par la dissection, l'extraire eu totalité de la loge qu'elle occupe, loge formée par le buccinateur, le masséter et les plans aponévrotiques de la région (aponévrose génienne de Blandin). Les récentes recherches de Laffitte-Dupoxt ont permis de comprendre la valeur de cette formation qu'on retrouve toujours, môme chez les individus les plus émaciés. Chez le lapin, l'orbite s'ouvre, à sa partie inférieure et postérieure, dans la fosse zygomatique : une membrane obture, à l'état frais, cet orifice et porte le nom de mem- brane orbilaire. Elle est représentée, chez l'homme, par le périoste épais qui double 734 GRAISSES. l'os à ce niveau. Eu aiTière de cette membrane se trouve située une glande qui s'étend dans la fosse temporale et descend en avant du bord antérieur du muscle temporal pour se mettre en rapport avec la face externe du buccinateur. Ainsi située, elle affecte les mêmes relations avec les parties voisines que la boule graisseuse de Bichat qu'on ren- contre chez l'homme. La glande, dont nous venons d'indiquer les rapports, fait partie du groupe des glandes salivaires annexes décrit par Krauss et Lœventhal; elle porte le nom de glande infra-orbitaire. Elle possède un canal excréteur unique qui va s'ouvrir dans la bouche, au niveau de la troisième molaire. Elle est représentée chez l'homme par de petites formations glandulaires atrophiées, les glandes molaires, dont les canaux déversent le produit de sécrétion au niveau des deuxième et troisième molaires. L'es- pace que laissent libres ces glandes atrophiées est comblé par un tissu de remplissage, qui n'est autre que la formation graisseuse à laquelle on donne communément le nom de boule graisseuse de Bichat. Au point de vue physiologique, la boule de Bichat joue le rôle de coussinet élastique dans l'acte de la succion chez le nouveau-né et dans l'acte de la mastication chez l'adulte. Chez la femme , la glande mammaire, qui n'existe en tant qu'organe glandulaire qu'aux époques de la gestation et de la lactation, est riche en tissu adipeux, dont la consistance et la quantité varient aux différents âges. 11 fait place aux acini glandu- laires alors que s'établit la fonction physiologique et redevient abondant quand la sécrétion s'est tarie. La mamelle n'est plus alors représentée que par une masse fibreuse plus ou moins volumineuse, noyée au milieu de pelotons adipeux. Des variations nombreuses s'observent dans la disposition et l'abondance du tissu adipeux, suivant les individus et suivant aussi les espèces animales. L'hypertrophie graisseuse des fesses, chez les femmes boschimanes, est trop connue pour qu'il soit besoin d'insister sur sa description. Il en est de même de la surcharge graisseuse que l'on observe sur le dos des dro- madaires, des chameaux, des zébus, etc., et aussi à la racine delà queue, chez les mou- tons de Barbarie. FONCTIONS PHYSIOLOGIQUES DU TISSU ADIPEUX. RÉSERVES GRAISSEUSES DE l'oRGANISME. Comme le tissu conjonctif, dont il représente un stade d'évolution physiologique, le tissu adipeux joue, dans l'organisme, un rôle mécanique. Il remplit et comble plus ou moins complètement les espaces qui existent entre les parties constituantes, les rap- proche les unes des autres et les confond en masses plus homogènes. Dans certaines régions, ce rôle mécanique se précise en s'adaptaut à une fonction physiologique déterminée. Dans celles qui sont, comme la paume de la main et la plante du pied, soumises à des pressions plus ou moins fortes et plus ou moins con- tinues, il s'organise pour former de véritables coussinets, à la fois résistants et élas- tiques. Plus épais que celui de la main, le coussinet du pied se trouve de plus doublé par une remarquable formation vasculaire constituée par de volumineuses veines anas- tomosées en réseaux (semelle veineuse plantaire de Lejars). C'est aussi la graisse qui, dans le fond de l'orbite, forme un lit spécial sur lequel s'appuie le globe de l'œil et qui lui permet d'échapper aux pressions et aux trauma- tismes {coussinet adipeux de l'orbite). C'est elle encore qui, se disposant en masses homogènes plus ou moins abondantes, forme l'atmosphère graisseuse du rein et maintient l'oi^gane dans une situation fixe qu'on le verra abandonner (rein mobile) chez les sujets rapidement amaigris. Chez certains animaux, chez ceux en particulier qui vivent dans les régions froides (baleine, otarie, phoque, ours blanc, etc.), le pannicule adipeux acquiert une épaisseur considérable. La même richesse en graisse de l'hypoderme se retrouve chez l'homme (Lapon, Esquimau), quand il est appelé à vivre dans les régions voisines du pôle. Ainsi se forme sous la peau une couche qui, mauvaise conductrice de la chaleur, lutte contre le refroidissement périphérique de l'organisme. C'est encore un rôle purement mécanique que remplit la graisse [myéline] que l'on rencontre dans le système nerveux. En enveloppant chaque fibre nerveuse de la péri- phérie ou des centres, la myéline forme au cylindre-axe une gaine de protection et GRAISSES. 733 d'isolement. On la retrouve non seulement au niveau des nerfs périi^hériques {fibres à myéline), mais encore dans la moelle et le cerveau. Toutes les parties blanches de l'axe cérébro-spinal doivent leur coloration particulière à la myéline, qui entre dans la consti- tution de leurs parties formatrices. Mais le rôle du tissu adipeux de l'organisme ne se borne pas à des fonctions exclu- sivement mécaniques ; en s'accumulant à la surface et dans la profondeur, la graisse constitue une véritable provision de matériaux de réserve, qui seront utilisés suivant les besoins. Chez les fourmis, par exemple, les reines possèdent des ailes qui ne leur servent que pour le vol nuptial, pendant lequel se fait l'accouplement. Ces appendices, désormais inutiles, disparaissent peut-être par arrachement. Janet, qui vient d'étudier avec beaucoup de soin les mœurs des fourmis, a observé que les reines vivent de dix à quinze ans, ayant périodiquement des pontes pendant toute leur existence. Or les muscles moteurs des ailes, qui sont de beaucoup les organes les plus volumineux, ne sont pour ainsi dire utilisés que pendant un quart d'heure dans une existence de plus de dix années. D'après Giard, les masses musculaires sont remplacées par des colonnes de cellules adipeuses qui constituent, pour ces animaux, de véritables réserves. La graisse, chez les vertébrés, s'enmagasine dans les périodes oîi l'alimentation est surabondante pour être reprise et utilisée quand cette même alimentation devient insuffisante. C'est ainsi que, chez les animaux vivant à l'état sauvage, les i-éserves grais- seuses sont toujours plus abondantes en été qu'à la fin de l'hiver. Les réserves graisseuses sont sujettes, chez l'homme, à des variations. Très abon- dantes pendant l'enfance, on les voit diminuer considérablement à l'époque de la puberté : le corps prend alors des formes élancées, et les modifications observées à celte période de l'évolution, sont dues en grande partie, comme nous l'avons montré, à la raréfaction de la couche graisseuse hypodermique. Chez l'adulte, le développement du tissu adipeux présente les plus grandes variations. Il est des sujets qui, soit parce qu'ils ont une vie très active, soit parce qu'ils sont insuf- fisamment nourris, soit enfin parce qu'ils sont dans un équilibre de santé instable, no possèdent que peu de graisse {maigreur). Ils sont maigres, et le demeurent pendant toute leur vie, même quand, chez quelques-uns d'entre eux, la ration alimentaire est plus que suffisante. Il en est d'autres chez lesquels le tissu adipeux prend et conserve des propor- tions plus développées {polysarcie), et peut acquérir un tel développement qu'il constitue une dystrophie véritable, l'obésité, que nous étudierons plus loin. A mesure que l'homme approche de la sénescence, on voit diminuer ses réserves graisseuses : elles disparaissent même complètement dans l'extrême vieillesse : à cette époque de l'évolution, le corps, en effet, se ride et se racornit. Il se produit cependant dans quelques parties de l'organisme une infiltration graisseuse, qui est beaucoup plus un processus d'accumulation qu'un processus de dégénérescence et qui doit être consi- déré comme un stade de transition entre les dégénérescences physiologique et patho- logique. Dans les parois artérielles qui, chez les gens âgés, présentent des plaques d'athérome, on trouve toujours, à côté des grains calcaires, de très fines gouttelettes de graisse agglomérées les unes à côté des autres. De même dans les cartilages, on constate la surcharge graisseuse des cellules. La forme la plus fréquente de cette infiltration d'un tissu par delà graisse est représentée par le gérontoxon ou arc sénile. 11 constitue, à la périphérie de la cornée transparente, une bandelette blanc-jaunâtre, formée en partie par les cellules fixes ou migratrices devenues graisseuses, en partie par l'accu- mulation de graisse dans les lacunes de la membrane. Ce qui prouve bien que celte modification est plus le fait d'une simple accumulation que d'une dégénérescence, c'eit qu'on l'observe non seulement chez le vieillard, mais aussi chez l'individu encore jeune, mais polysarcique, en particulier chez la femme obèse. Parmi les réserves graisseuses de l'organisme, chez les animaux supérieurs et l'homme, les unes se font dans certains éléments anatomiques et ne sont apprécialiics qu'au microscope, les autres prennent un tel développement qu'elles forment de véii- tables organes et deviennent appréciables à la vue. Au premier groupe appartiennent, par exemple, les enclaves graisseuses que l'on peut observer dans les cellules cartilagineuses. Emprisonnées dans leurs capsules, incluses dans une substance fondamentale qui ne renferme pas de vaisseaux, dans 736 GRAISSES, laquelle ne pénètrent pas les cellules migratrices, elles doivent accumuler dans leur protoplasma de véritables provisions nutritives. Le cartilage, dans lequel elles repré- sentent les éléments nobles, est un tissu vivant, dans l'intérieur duquel se font des e'changes nutritifs. Aussi voit-on le proloplasma des cellules se charger en plus ou moins grande abondance de glycogène et se farcir de granulations graisseuses. La graisse y est ordinairement à l'élat neutre, individualisée sous forme de gouttelettes que le bleu de quinoléine teinte en bleu azuré, et l'acide osmique en noir. Dans certains cartilages, la graisse se montre sous une forme un peu différente : elle ne se colore que peu ou pas sous l'influence de l'osmium, mais elle prend une teinte rose quand on soumet la préparation à l'action e plus souvent, il y a corrélation entre les deux espèces d'accumulation et, dans la pratique, c'est par l'examen des formes extérieures que l'on cherche à apprécier le poids et les qualités commerciales d'un animal de boucherie. Stephen, cultivateur anglais, a cherché, en le soumettant à des règles méthodiques, à donner à ce- mode d'appréciation la plus grande précision possible. Il compare le corps d'un bœuf gras à un parallélipidède rectangulaire et il en conçoit une opinion d'autant plus favorable, quant à la quantité des produits, qu'il se rapproche davantage de cette figure géométrique. On inscrit les différentes faces (latérales, postérieure, antérieure, supérieure) de l'animal dans des cadres rectangulaires, et chacune de ces faces doit remplir le cadre de la manière la plus complète. Pour atteindre une exactitude plus grande, les données fournies par la vue deman- dent à être contrôlées par une exploration méthodique pratiquée avec la main. Il existe, en effet, sur le corps de l'animal des points particuliers qui ont une situation fixe et dans lesquels la graisse s'accumule de préférence. Ces points sont désignés par le nom générique de maniements. L'exploration des maniements a pour but de reconnaître l'importance des couches de graisse dont ils sont le siège, d'apprécier si celle-ci est dure, ferme ou molle et de tirer de là des inductions relatives à la qualité de la viande et au poids net de l'animal. Cette opération s'effectue, soit en appliquant la main sur le maniement, soit en cherchant à prendre la couche dégraisse entre le pouce et les autres doigts de la main pour en mesurer l'épaisseur. Ces données fournies par l'examen extérieur peuvent être contrôlées par la recherche du poids faite à l'aide de la bascule, soit pendant la vie, soit après l'abattage. C'est, en effet, surtout après la mort que l'on peut se rendre compte des énormes pro- portions qui peuvent atteindre les réserves graisseuses chez des animaux dont le poids total arrive à dépasser 1 000 kilogrammes. Les éleveurs ne pratiquent pas seulement l'engraissement chez les animaux adultes, ils choisissent parfois aussi de jeunes bêtes, en particulier des veaux. L'engraissement des veaux est une industrie qui se pratique surtout dans les environs des grandes villes : les veaux blancs, généralement très gras, sont ainsi nommés parce qu'ils ont la chair très pâle et d'une blancheur éclatante, quand elle est cuite. Cet aspect est en rapport avec la pauvreté du sang en globules rouges et avec l'état d'anémie dans lequel ils se trouvent. Les animaux sont étiolés par un séjour constant dans une quasi-obscurité. On juge de leur qualité par la pâleur de leur conjonctive et de leur muqueuse buccale. Ils sont nourris exclusivement avec du lait; on leur en fait ingérer la plus grande quan- tité possible; vers la fin de l'opération, qui dure parfois trois mois, il en est qui arrivent à consommer jusqu'à dix-huit litres de lait par jour. On joint aussi à leur ration alimen- taire des œufs frais et crus, qu'on leur fait avaler avec la coquille, mais la grande difi- culté est d'arriver à cette alimentation intensive sans provoquer l'indigestion ou la diarrhée (Sansox). Sans nous étendre davantage sur l'engraissement des autres espèces d'animaux (porcs, moutons), nous ferons mention des résultats obtenus chez des oiseaux de basse- cour (dindons, pintades, poulets, oies, canards). On cherche chez eux à produire soit un 742 GRAISSES. engraissement généralisé à tout le corps, soit un engraissement prédominant dans certains organes, tels que le foie. On voit alors cet organe, plus particulièrement chez l'oie et le canard, atteindre des proportions phénoménales et peser ù lui seul plus d'une livre. L'obésité. — La règle générale qui préside à l'engraissement des animaux domes- tiques peut être résumée de la [façon suivante : réduire au minimum les dépenses, élever au maximum les recettes fournies par une alimentation judicieusement combmée. Il s'agit donc d'une véritable rupture de l'équilibre organique, provoquée dans un but déterminé. Mais cette rupture peut se faire spontanément chez l'homme, surtout chez certains individus prédisposés et dans certaines conditions; elle aboutit, comme chez les animaux, à la formation d'abondantes réserves adipeuses et arrive à constituer un état particulier désigné sous le nom d'obésité. Ainsi qu'il a été précédemment indiqué, les réserves graisseuses varient, chez l'homme, aux différentes périodes de la vie. Si certains individus sont maigres et demeurent maigres pendant toute leur vie, la majorité des autres met et lient en réserve une proportion constante de graisse. Celte proportion a été définie par Bouchard qui admet qu'un adulte normal, dont la taille est voisine de i™,70, pèse en moyenne 70 kilogrammes et a dans son corps 9 k. 100 de graisse. Le même auteur, reprenant les données de v. Noorden, admet comme composition moyenne du kilogramme de corps humain les proportions suivantes : Albumine 160 grammes. Graisse 130 — Eau : 660 — Matières minérales 50 — 1 000 — Il s'en faut que ces proportions demeurent constantes et, sous des influences diverses, on voit varier celles de la graisse qui nous intéressent plus particulièrement. En se basant sur les résultats obtenus dans l'engraissement des animaux domestiques, on avait été amené tout naturellement à attribuer à l'alimentation excessive un rôle important dans la production de l'obésité. Mais, après avoir considéré l'engraissement comme la résultante fatale de l'excès des receltes sur les dépenses, les physiologistes posèrent autrement les termes du problème, lorsque l'étude de la valeur calorique des aliments se trouva faite et lorsque le principe de l'isodynamie des aliments fut admis. On formula que l'engraissement survenait lorsque le nombre des calories utilisées était plus petit que le nombre des calories reçues : on ajoutait à cela que le principe restait vrai, quelle que fût la nature de l'aliment, et qu'il n'y avait pas lieu de s'occuper de la teneur en graisse; seule, la valeur calorique était utile à connaître (v. Noorden cité par Leven). L'étude de 111 obèses, 36 hommes et 75 femmes a appris à Bouchard que 50 avaient un régime normal, 40 étaient gros mangeurs et que 10 avaient une ration quotidienne inférieure à la normale. On a accusé aussi, comme cause d'engraissement, l'absorption exagérée d'aliments liquides, de l'eau en particulier. Il est légitime, aujourd'hui, d'affirmer que l'eau ne fait ni maigrir ni engraisser, lorsqu'on a analysé les nombreuses expériences faites pour élucider le problème de l'influence de l'eau sur l'obésité, dont les données sont si nette- ment exposées dans un travail de Callamand. Les recherches de Debove et Flamand peuvent être considérées comme absolument démonstratives. La notion inexacte que l'eau fait engraisser, soutenue par tant d'auteurs en France et à l'étranger, comme le fait remarquer Leven, auquel nous empruntons toutes ces données, reposait sur les tra- vaux bien peu scientifiques de Dancel, qui avait emprunté à Boussingault des conclu- sions que ce savant n'avait jamais formulées. C'est Bunge qui a soutenu que l'insuffisance de l'exercice musculaire était la seule et unique cause de l'engraissement. Pour formuler une semblable proposition, il a dû se contenter d'observer des obèses qui, sous l'influence d'un exercice exagéré, perdent rapidement du poids. Son erreur est de même nature que celle du médecin qui supprime l'eau à un obèse, et le voit, avec joie, perdre 3 à 4 kilogrammes en quelques jours. La diminution de poids rapide, consécutive à un exex'cice pénible, est passagère : dès que GRAISSES. 743 l'individu cesse l'exercice, son poids augmente à nouveau. Sur 100 obèses qu'il examina Bouchard remarque que 35 avaient une vie insuffisamment active; il est amené à for- muler son opinion de la manière suivante : « L'obésité, cette maladie des gourmands et des paresseux, ne reconnaît pour cause, dans la moitié des cas, ni l'abus des aliments, ni le défaut d'exercice. » Le problème n'est donc pas aussi simple qu'on serait tenté de le croire au premier abord, et lorsque Worthington cite l'exemple des entraîneurs anglais, il ne voit pas que le canotier, qui perd 4 livres anglaises après une course, a perdu de l'eau et non pas de la graisse, tout aussi bien que les jockeys qui perdent 21 livres en huit jours ou même 17 livi'es en 24 heures, comme on l'a observé. Actuellement, on tend à considérer l'obésité comme un symptôme morbide ayant sa raison d'être dans un trouble de la nutrition. Comme la nutrition est sous la dépendance du système nerveux, on a été amené à rechercher si le système nerveux a une influence directe sur l'engraissement. Leven a rassemblé les preuves susceptibles de confirmer une semblable hypothèse ; il a montré, en particulier, que l'adipose localisée peut se produire à la suite de lésions nerveuses, de névralgies anciennes, par exemple ; qu'on peut observer l'adipose généralisée à la suite d'émotions morales, de traumatismes, de maladies du système nerveux et que les symptômes de névrose, de neurasthénie se retrouvent souvent, sinon toujours, chez les obèses. 11 a confirmé enfin l'opinion de Bou- chard,pour lequel l'obésité n'est que le symptôme d'une nutrition troublée, au même titre que l'asthme, le diabète, la goutte ou qu'une des autres manifestations morbides rangées dans le groupe des maladies par ralentissement de la nutrition, les maladies névro- arthritiques on dans la famille névropathique. Le même auteur a enfin montré la part qui revient dans la production de l'obésité aux troubles apportés dans les fonctions gastriques, et donné la preuve que tous les obèses sont dyspeptiques. Quoi qu'il en soit de cette pathogénie, l'obésité peut s'observer chez l'homme et chez la femme. Les hommes obèses sont nombreux et, chez eus, la surabondance de graisse- est surtout marquée lorsqu'ils ont atteint l'âge adulte. Chez la femme, l'obésité est prin- cipalement contemporaine de la puberté, de la grossesse, de la lactation et de la méno- pause, c'est-à-dire des actes importants de la vie génitale. L'adiposité peut s'observer aussi chez les enfants et les adolescents ; elle est chez eux une manifestation de leur hérédité neuro-arthritique. LES ORIGINES DES GRAISSES ANIMALES. La cellule fixe du tissu conjonctif, différenciée et devenue vésicule adipeuse, est donc susceptible soit d'accumuler, parfois même jusqu'à l'excès, des provisions de réserve dans les mailles de son protoplasma, soit de céder ces provisions suivant les besoins de l'organisme. Mais d'où tire-t-elle ces provisions de réserve, en d'autres termes quelle est l'origine de la graisse que l'on trouve dans l'organisme animal ? Cette origine a soulevé et soulève encore de nombreuses controverses. Pendant les premières phases du développement, le fœtus, chez les animaux ovipares, trouve dans le jaune d'œuf tontes les provisions graisseuses (lécithine, etc.), dont il a besoin, et il les utilise successivement, jusqu'à épuisement, au cours de son développement. Il eu est du jaune (graisse), comme du blanc (all)umine), comme de la coquille (sels de chaux) ; toutes ces parties disparaissent ou diminuent au fur et à mesure que se poursuit l'incu- bation. Les phénomènes d'utilisation de matériaux de réserve sont comparables à ceux que nous avons observés chez les plantes (graines oléagineuses). Chez les animaux ovipares, l'ovule est peu riche en réserves graisseuses ; sa pauvreté en matières grasses est telle qu'on décrit comme alccithe, c'est-à-dire comme privé de jaune. Une abondante provision serait d'ailleurs inutile, car l'ovule, une fois fécondé, se greffe sur l'organisme maternel dont il dérive, et c'est le sang même de cet organisme qui lui fournira tous les matériaux nécessaires à son développement. Après la naissance, c'est-à-dire à l'époque où le fœtus se trouve séparé de l'organisme sur lequel il était greffé, c'est encore la mère qui, par le lait qu'elle fournit, supplée aux besoins du jeune être. Quand il vit de sa propre vie, la graisse, qu'il consomme ou qu'il accumule, lui est fournie par les aliments qu'il ingère : elle provient soit des matières albuminoïdes, soit des hydrates de carbone. 744 GRAISSES. Comme l'écrit Langlois, la première supposition, qui vient nécessairement à l'esprit, est que la graisse de l'organisme animal a pour origine la graisse alimentaire. En augmentant la ration de matières grasses donnée aux animaux soumis à l'engraisse- ment, on active en effet celui-ci, en même temps qu'on l'accroît. « Mais une observation, même superficielle, ayant montré que, chez les herbivores, surtout, la quantité de graisse, déposée dans les tissus ou sécrétée par le lait des femelles, ne pouvait être fournie par l'alimentation végétale, il se produisit une réaction telle qu'on nia la formation, même partielle, de la graisse organique aux dépens de l'alimentation grasse et il fallut démontrer, par des faits expérimentaux, cette possibi- lité de l'assimilation des graisses alimentaires ». On peut, de deux façons différentes, démontrer la fixation dans les tissus animaux de la graisse alimentaire. Hoffmann fait jeûner un chien pendant trente jours. L'animal perd dix kilogrammes de son poids pendant l'expérience. Gomme on sait que la perte de poids porte avant tout sur la graisse, on peut admettre qu'à cette époque, la totalité des réserves grais- seuses a disparu. Ainsi dégraissé, le chien est nourri pendant cinq jours avec du lard et une quantité minime de viande. A ce moment, on retrouve dans ses tissus une quantité notable de graisse et sa proportion correspond à 43 pour 100 de la graisse ingérée. Pettenkoffer et Voit procèdent d'une autre manière : il donnent à un chien une alimentation presque exclusivement grasse et ils dosent l'azote excrété et l'acide carbo- nique exhalé. L'azote trouvé correspond aux albuminoïdes ingérés ; mais une partie du carbone ne se retrouve pas dans les produits de l'excrétion pulmonaire et cette quantité en moins est supérieure à celle que pourrait donner le carbone des albuminoïdes fixés. Les physiologistes de Munich en concluent que l'organisme peut fixer jusqu'à 35 pour 100 des graisses alimentaires. , Une seconde méthode a permis de montrer que la graisse, absorbée dans le canal intestinal, se fixe dans l'organisme. La graisse du corps des animaux supérieurs est constituée, comme nous l'avons précédemment indiqué, par un mélange de trois éthers glycériques : la tripalmitine, la tristéarine et la trioléine. Ces trois graisses se trouvent en proportions variables, suivant l'espèce animale, et chacune d'elles ayant un point de fusion différent, le mélange com- plexe présente un point de fusion dépendant de cette composition. La graisse de mouton, par exemple, très riche en stéarine et en palmitine, a un point de fusion (40°) supérieur à la graisse de chien (20") qui renferme une quantité notable d'oléine. Lebedeff et Munk ont utilisé celte propriété. En nourrissant un chien avec de la graisse de mouton, on trouve dans les tissus de l'animal une graisse dont le point de fusion est supérieur à 20°. En donnant de l'huile d'olives, on abaisse au contraire le point où la graisse recueillie devient liquide (Langlois). En faisant ingérer à des animaux une graisse qui n'existe pas normalement dans leur organisme, l'acide érucacique par exemple, Radziejewski et Subbotin ont retrouvé cette graisse localisée dans certaines régions; elle s'y trouvait, il est vrai, en faibles proportions, mais sa présence n'en était pas moins évidente. D'après Claude Bernard et la plupart des physiologistes qui ont étudié la digestion des graisses, ces dernières ne commenceraient à être attaquées que dans l'intestin et qu'après avoir subi l'action du suc pancréatique. Des recherches récentes tendraient à prouver que le dédoublement des graisses commence déjà d'une façon manifeste dans l'estomac. C'est du moins l'opinion à laquelle semblent se rallier maintenant Volhard et GiJRBER. (Volhard, Zeitchr. klin. Medic, 1901, p. 397-420. Gurber, Digestion stomacale des graisses. Société médicale de Wilrzbourg, 21 nov. 1901.) Magendie avait d'ailleurs admis autrefois que les matières grasses subissaient une véritable transformation dans la première partie du tube digestif et plus particulière- ment dans la partie pylorique. La graisse, accumulée sous forme de réserves, peut donc provenir des matières grasses, végétales ou animales ingérées. Celles-ci, lorsqu'elles ont pénétré dans le tube digestif, subissent une série de modifications dont le but est d'assurer leur absorption et leur assimilation. Dans l'estomac, les graisses alimentaires sont soumises à une double action, méca- GRAISSES. 745 nique et chimique. S'il s'agit, en effet, de graisses animales, incluses dans des cellules conjonctives, le suc gastrique, en désagrégeant la trame qui unit les éléments les uns aux autres, en dissolvant le protoplasma qui les forme, libère les enclaves cellulaires et leur permet de se mélanger aux autres parties constituantes du bol alimentaire. Avec elles, elles sont soumises à un brassage plus ou moins long, en rapport avec les con- tractions plus ou moins énergiques de l'estomac, brassage qui commence à assurer leur division. Magendie avait admis autrefois que les matières grasses subissaient une véritable transformation dans la première portion du tube digestif et plus particulièrement dans la partie pylorique de l'estomac. Contejean a reconnu depuis que l'agent chimique qui intervient en pareil cas n'est autre qu'un ferment saponifiant, capable de refluer de l'intestin par le pylore. De plus, dans l'estomac, si leur point de fusion n'est pas supérieur à la température du corps de l'animal qui les a ingérées, les matières grasses se trouvent fluidifiées. C'est donc à l'état de division et de fluidification que les matières grasses ingérées pénètrent dans l'intestin grêle. Elles en parcourent la première portion sans être gran- dement modifiées et ne changent véritablement d'aspect que dans la région où viennent se diviser, amenés par les conduits excréteurs, les produits de sécrétion du foie et du pancréas, c'est-à-dire la bile et le suc pancréatique. Le rôle le plus important dans la digestion des graisses appartient, sans contredit, au suc pancréatique : il exerce sur les matières graisses neutres' une double action, une action physique {émulsion) et une action chimique {saponification). Aucun liquide de l'organisme ne donne une émulsion aussi complète et aussi persistante. Le ferment émulsif admis par Cl. Bernard n'a pu être isolé il'émulsion peut, d'ailleurs, être une conséquence de la saponification, avec mise en liberté d'acides gras qui, en présence des alcalis du suc pancréatique ou de la bile, forment des savons qui agiraient comme émulsionnants. L'émulsion, c'est-à-dire la subdivision en nombreuses petites gouttelettes, est instan- tanée, permanente et complète. Elle se produit même après saturation par un acide, et elle est due à ce fait que le suc pancréatique est alcalin, visqueux, et aussi qu'il a une action saponifiante, toutes propriétés qui, comme !e remarque Hédon, sont favo- rables à une bonne émulsion. Le suc pancréatique dédouble les graisses neutres en acides gras et glycênne (Claudk BrîRNARo) ; il saponifie aussi les lécithines qu'il décompose en acide phosphoglycérique, choline et acides gras libres: c'est une diastase, la stcapsine ou lipase qui est le ferment saponifiant. On conçoit que la suppression du pancréas entraîne des troubles graves dans la nutrition, la digestion des graisses se trouvant fort compromise. Après l'abla- tion du pancréas et la suppression du flux biliaire, une partie des graisses peut encore être absorbée, et cela, grâce à l'action des glandes pancréatiques accessoires, grâce à l'épithélium intestinal, grâce enfin aux microbes habitant l'intestin. Il est intéressant encore de savoir que les graisses sont des excitants pour la sécré- tion pancréatique. Wag.\er a, en effet, établi que la sécrétion du ferment des graisses est sous la dépendance directe des corps gras ingérés. Pawlow a confirmé récemment cette opinion. « Dans les deux premières heures, écrit-il, qui suivent un repas de lait, il est sécrété par le pancréas un suc qui est très riche en ferment lypoli tique. Or vient-on à priver le lait par filtration de sa teneur en graisse, le suc produit, tout en étant aussi abondant et sécrété aussi régulièrement, se distingue alors par la grande diminution de son pouvoir lipolytique. Si on mélange de nouveau le filtratum de lait à de la graisse et que l'on reproduise ainsi synthétiquement le lait, le suc pancréatique s'enrichit parallèlement en ferment des graisses jusqu'à concentration caractéristique du suc de lait. » L'action de la graisse sur la composition du produit glandulaire sécrété est donc manifeste et, pour Pawlow, l'excitation réflexe se ferait au niveau de la muqueuse du duodénum. La graisse exciterait les terminaisons nerveuses, périphéri- ques spécialement destinées à réagir sous toutes les influences chimiques, mécaniques et autres. De plus, comme le fait remarquer Chahuet, le chyme stomacal lancé dans le duodénum étant acide, excite encore par son acidité même la sécrétion de la glande pancréatique. L'acidité est ensuite neutralisée par l'alcalinité des autres produits déversés dans la cavité intestinale. 746 GRAISSES. La bile vient combiner son action à, celle du suc pancréatique . Dasthe a nettement démontré que le suc pancréatique n'est pas apte à opérer seul la digestion des matières grasses, et que la bile, agissant isolément, n'est pas plus capable d'agir : le concours des deux sécrétions paraît indispensable. 11 a pu démontrer la synergie d'action des deux glandes annexes de l'intestin en pratiquant sur des chiens une fistule cholécysto- intestinale. Pour l'obtenir il a abouche la vésicule biliaire dans l'intestin grêle à soixante-cinq centimètres au-dessous de l'orifice du canal pancréatique et a constaté que, quand l'animal digérait des graisses, les chylifères n'étaient lactescents qu'au- dessous du point où la bile s'écoulait dans l'intestin. En perfectionnant ses moyens d'nivestigation, Pawlow a pu observer la pénétration de la bile dans l'intestin et son action sur les graisses chez les chiens. Il a montré, par exemple, qu'en donnant à manger à un chien exclusivement des graisses, il se produi- sait une issue abondante de bile, tandis que d'autres aliments ne provoquaient aucun écoulement. La bile émulsionne et saponifie les graisses comme tout liquide renfermant de la soude et de la potasse à l'état libre ou à l'état de combinaison facile à détruire ; elle ne contient pas de ferment capable de modifier les matières grasses. Elle dissout cependant légèrement graisses et savons, elle favorise leur passage à travers les membranes (WiSTINCtHAUSEn). Après avoir subi l'action combinée du suc pancréatique et de la bile, les graisses se trouvent amenées à un état de division extrême, elles sont alors véritablement émul- sionnées. Elles forment une sorte de fine poussière, dont les grains, visibles seulement au microscope, peuvent, en raison de leur ténuité extrême, pénétrer dans les voies d'absorption. Quant au mécanisme intime de cette émulsion, il paraît exclusivement résider dans une condition d'ordre physique, ainsi que l'a indiqué Duclaux. Pour produire l'émulsion de liquides non miscibles ni solubles l'un dans l'autre, il faut, dit cet auteur, et il suffit que les tensions superficielles des deux liquides soient égales ou voisines. Or cette condition est assurée, au moins pour le suc pancréatique et les graisses. Elle est moins précise en ce qui concerne la bile : aussi l'émulsion, opérée par ce liquide, est-elle instable et passagère, au contraire de l'émulsion réalisée par le suc pancréatique, qui se produit instantanément et demeure définitive. Comme tous les liquides alcalins,/es2 ferment des ferments )>, qu'il a baptisé du nom d' enter okinase ? Cette action de renforcement est d'ailleurs influencée par le régime : si l'on nourrit des chiens avec du lait ou de la graisse, le suc pancréatique fourni est très énergiquement renforcé par le suc entérique. L'action de la bile sur le ferment des graisses a été augmenté de la même manière. On doit enfin tenir compte du rôle joué par les leucocytes. D'après Delezenne, ils produiraient une kinase (kinase leucocytaire) qui serait étroitement unie par ses propriétés avec l'entérokinase. Quant au rôle de la sécrctine, produite par la muqueuse intestinale, il n'est pas encore complètement élucidé, tout au moins en ce qui concerne les graisses. Des considérations précédentes, il résulte que le suc intes- tinal n'a pas, par lui-même, d'action directe sur la digestion des graisses. Hédon et Ville ont supprimé, chez un animal, l'accès de la bile et du suc pancréatique dans l'intestin (fistule biliaire et extirpation du pancréas) et ont constaté que les graisses étaient reje- tées à peu près intégralement. Elles étaient saponifiées en partie; mais cette modifica- tion doit être attribuée à une action microbienne. On peut conclure avec Pawlow: k Les facteurs chimiques de la digestion forment une GRAISSES. 747 sorte d'alliance complexe, dans laquelle les composants respectifs sont enchaînés les uns aux autres, se suppléent et se soutiennent mutuellement. » L'étude hislo-physiologiqiie du passage des graiases émulsionnces au travers de la muqueuse intestinale, l'analyse chimique de leur dédoublement ont été traitées avec d'assez amples détails (voir Absorption) pour qu'il ne soit pas nécessaire d'y revenir actuellement. Le problème comporte d'ailleurs encore un certain nombre d'obscurités, que n'ont pu éclaircir complètement les recherches poursuivies dans ces dernières années. Quoiqu'il en soit, au niveau de l'intestin, la graisse passe de la surface dans la pro- fondeur et le passage se fait surtout au niveau des villosités qui hérissent la muqueuse de l'intestin grêle. Chaque villosité se compose d'une trame conjonctive lymphoïde, dans laquelle on trouve un chylifère central, des capillaires sanguins, des fibres muscu- laires lisses, des ramifications nerveuses. La surface est tapissée par un revêtement de cellules épithéliales de forme cylindro-conique dont le bord libre présente une bordure en brosse, faite de petits prolongements protoplasmiques serrés les uns contre les autres. La rangée de cellules cylindriques est parsemée de cellules caliciformes à mucus. Quel est le rôle de celle membrane épilhéliale dans l'absorption des graisses? Demeure- t-elle inerte, laissant aux seules forces physiques (osmose, dialyse, fîltration) le soin d'agir sur les graisses ? On admet que l'épithélium constitue une membrane active, et qu'en la traversant les graisses peuvent être modifiées et présenter d'autres caractères chimiques à leur sortie qu'à leur entrée (Friedenthal). Il se peut qu'une partie ^e la graisse neutre soit absorbée en nature directement, sous forme de fines gouttelettes, comme l'ont soutenu Munk, Exner, Hofbauer. Ce der- nier observateur, grâce à un dispositif ingénieux qu'il a employé, celui des colorants insolubles dans l'eau mais solubles dans les graisses, a pu conclure à l'absorption des graisses en nature. On discute encore pour savoir si la bordure en brosse joue un rôle actif dans la captalion des particules graisseuses et si d'autre part les cellules migra- trices éparses dans le stroma de la villosité et infiltrant même la paroi épilhéliale ne possèdent pas une fonction analogue. D'après une autre opinion, qui est d'ailleurs la plus commune admise par les physiologistes (Krehl, Cohnstein, Pfllger, Morat, DoYON, etc.), la graisse neutre ne pénètre l'épaisseur de la muqueuse qu'en se dédou- blant, de telle sorte qu'elle est modifiée et reconstituée au cours de son passage à tra- vers la membrane. Si, après avoir fait ingérer des graisses à un animal, on le sacrifie, on prélève de la muqueuse de l'intestin grêle et qu'on l'observe au microscope, on constate que, sauf les fibres musculaires et les cellules caliciformes, toutes les autres parties constituantes des villosités sont chargées de gouttelettes graisseuses. Si l'examen est pratiqué aux diffé- rentes périodes de la digestion des graisses, on constate que ces substances sont plus ou moins profondément modifiées. On ne retrouve pas de granulations graisseuses dans le plateau des cellules, pas plus que dans le ciment qui unit le plateau à ses voi- sins ; elles apparaissent par contre au-dessous du plateau et se disposent en rangées plus ou moins sériées dans l'intérieur du protoplasma. De par l'expérience, on a constaté que la paroi intestinale est susceptible non seule- ment de modifier, mais encore de régénérer les graisses aux dépens des éléments con- stituants que lui fournissent les produits de la digestion ou qui lui sont donnés arti- ficiellement. Si l'on injecte dans une anse intestinale grêle chez un chien un mélange de savons alcalius et de glycérine en solution aqueuse, on voit rapidement apparaître les globules gras dans l'épithélium des villosités et dans les chyliféres dont le contenu devient lactescent. Cohnstein, expérimentant avec la lanoline, substance érnulsionnable mais non saponifiable, a montré qu'elle n'était pas absorbée. Enfin d'autres observa- teurs, mettant en contact des fragments de muqueuse intestinale avec un mélange de savons et de glycérine, ont prouvé qu'il se formait de la graisse neutre. Toutes ces expériences et beaucoup d'autres du même genre, celles de Henriques et Hansen, de Pfluger en particulier, ont démontré que les intermédiaires qui contien- nent la graisse, la modifient profondément avant de la laisser pénétrer dans les vais- seaux, qu'ils la dédoublent et qu'après la traversée de la paroi intestinale les éléments constitutifs se reforment par synthèse pour constituer une graisse, tout particulière- 748 GRAISSES. ment apte à être utilisée par l'organisme. L'absorption des graisses au niveau de l'in- testin est lente; elle est d'ailleurs influencée par de nombreux facteurs qui ont été judicieusement analysés par Knœpfelmagher. Elle dépend tout d'abord du séjour de l'aliment dajis le tube digestif, et aussi de l'état de digestibilité sous lequel la graisse y parvient. On sait que, donnée seule, la graisse est moins bien absorbée que lorsqu'elle est mêlée aux autres aliments. Si la graisse est déjà émulsionnée, comme dans le lait, elle est plus facilement absorbable, à quantité égale, que la graisse provenant de la viande ou du lard. De nombreuses recherches ont montré que la graisse ingérée en proportion moyenne chez les animaux était très complètement utilisée, mais que, si l'on dépassait une certaine proportion, variable d'ailleurs avec chaque individu, elle était plus mal absorbée. Dastre a montré encore que la faculté absorbante de l'intestin avait des limites rapidement atteintes. Afin d'apprécier le chiffre d'utilisation des graisses, il est donc nécessaire de connaître la quantité de graisse ingérée pour voir si elle n'excède pas la quantité normalement digestible. V. N'orden nous a appris, en effet, qu'au fur et à mesure que la quantité des graisses de la nourriture augmentait, la perte p. 100 diminuait jusqu'à un certain point, au delà duquel, ayant dépassé les limites de l'assimilation, elle commençait à augmenter. Pour Rubner, ce chiffre serait de 300 grammes. Le point de fusion de la graisse ingérée doit également entrer en ligne de compte. Sous ce rapport, Arsghinek a divisé les graisses en trois groupes : celles dont le point de fusion est inférieur à la température du corps (huile d'olives, graisse d'oie, graisse de porc) et qui sont résorbées avec un faible déchet de 2 à p. 100; celles dont le point de fusion est supérieur à la température du corps ; elles sont résor- bées avec une perte de 7 à H p. 100; enfin celles dont le point de fusion dépasse de beaucoup la température du corps; elles sont très mal utilisées, telle la stéarine qui n'est utilisée que dans la proportion de 9 p. 100. D'une façon générale, l'utilisation de la graisse est en rapport inverse avec son point de fusion. Le point de fusion de la graisse du lait est de 34° : aussi ce corps gras remplit-il les meilleures conditions dési- rables pour être presque complètement utilisé. Est-il besoin de rappeler l'action favo- risante de la bile et du suc pancréatique, que les expériences de Dastrte, de Lombroso ont mise en pleine valeur. Il est encore certaines actions, comme celle des fibres musculaires lisses de la paroi intestinale et des villosités, qui réclament une certaine part dans l'absorption des graisses. Par leurs contractions, ces éléments lisses de la villosité, en diminuant la hauteur et comprimant le contenu du chylifére central, favorisent la pénétration des corpuscules graisseux. Enfin, d'après Concetti, à côté des ferments digestifs, de ceux qu'on peut trouver dans certains aliments riches en graisse, comme le lait, il faudrait accorder un certain rôle à des ferments assimilateurs (trophozymases), qui interviendraient dans l'assimi- lation par les tissus des substances ingérées. Quand elles ont traversé la paroi intestinale, les graisses, réduites à l'état de très fines particules, suivent le chemin des chylifères ou des capillaires sanguins ; c'est le réseau des chylifères qui en entraîne la plus grande partie; l'autre pénètre dans le réseau veineux par l'intermédiaire des ramifications originelles de la veihe porte. Entraînées par les chylifères, les graisses émulsionnées arrivent jusqu'aux ganglions {ganglions mésenténqiies) étages dans l'épaisseur du mésentère. Les récentes recherches de Poulain, poursuivies chez le chien, ont permis de suivre les modifications qu'elles subissent et qui ne consistent pas en une simple filralion, comme on aurait pu le sup- poser au premier abord. Chez des jeunes chiens sacrifiés de 2 à 3 heures après un repas, les ganglions sont peu modifiés ; l'examen histologique permet de retrouver la graisse dans quelques sinus situés au-dessous de la capsule. Si l'animal est tué au bout de 4 heures et demie, les ganglions mésentériques sont turgescents; ils renferment du chyle en telle abondance que celui-ci s'écoule, à la coupe, sous forme d'un liquide lactescent. Sur une coupe, on constate la présence d'une grande quantité de graisse : colorée par l'acide osmique, elle apparaît sous la forme de masses noires, très finement granuleuses, occupant les cavités des sinus sous-capsulaires, des sinus caverneux; elle fait complètement défaut dans les follicules. On aperçoit aussi çà et là, dans les sinus et parfois aussi dans les follicules, de GRAISSES. 749 grands macrophages surchargés de granulations graisseuses. De la 8" à la 12'' heure après le repas, l'aspect du ganglion se modifie progressivement : la graisse à l'état libre diminue peu à peu dans les sinus qui s'all'aissent; les macrophages graisseux persistent un peu plus longtemps, puis ils disparaissent à leur tour, et le ganglion rentre à l'état de repos jusqu'à la digestion suivante. L'étude des ganglions mésentériques, pendant la digestion, chez le chien, a montré que, contrairement à ce que permettaient de supposer l'augmentation de volume et la turgescence des glandes mésentériques, la graisse n'y était pas très abondante et qu'elle n'était pas répandue dans la totalité de la formation lymphatique. Pour avoir l'explica- tion exacte du phénomène, on a été amené à supposer que le suc laiteux du ganglion n'était pas exclusivement formé par de la graisse émulsionuée, mais qu'il devait être, au moins partiellement, constitué par une graisse transformée, vraisemblablement sapo- nifiée et rendue soluble dans les liquides fixateurs en même temps que moins facilement colorable par l'acide osmique. Cette supposition a pu être justifiée par les faits. Si, en effet, on prend un de ces ganglions turgescents et remplis de chyle, et qu'après l'avoir coupé en plusieurs fragments, on l'abandonne dans une petite quantité d'eau (20 à 30 centimètres cubes par exemple), additionnée de quelques gouttes de formol pour éviter la putréfaction, on constate qu'au bout de 24 heures le liquide est devenu opa- lescent. « Le ganglion s'est peu à peu débarrassé du chyle qu'il contenait, tout comme un foie cardiaque, gorgé de sang, abandonné pendant 24 heures dans un seau d'eau, revient sur lui-même et abandonne à l'eau la plus grande partie du sang qu'il conte- nait. » Le liquide opalin obtenu par cette macération du ganglion possède le reflet et la couleur d'une solution aqueuse de savon. Si, d'ailleurs, on ajoute quelques gouttes d'une solution concentrée d'alun, on voit se former immédiatement un précipité Uoconneux, blanchâtre; cette réaction est une de celles qui sont particulières aux savons. La même expérience peut être faite en remplaçant l'eau par de l'alcool, qui possède, lui aussi, la propriété de dissoudre les savons. De ces faits, il résulte que, pendant son passage au travers des filtres ganglionnaires du mésentère, la graisse n'est pas simplement émulsionuée; elle s'y dédouble de la même manière que dans l'intestin. Elle se transforme, avec mise en liberté de glycérine, en une substance analogue et même identique à un savon, substance éminemment soluble dans tous les liquides fixateurs. « Pendant la digestion intestinale, les chylifères apportent successivement aux gan- glions de la graisse partiellement reconstituée et émulsionuée. Celle-ci se saponifie dans le ganglion pour se transformer à nouveau et devenir à la fin une graisse directe- ment utilisable par l'organisme. » Quant à l'agent de ces transformations de la graisse, pendant son passage au travers des ganglions, il n'est autre qu'un ferment. Son existence avait été soupçonnée par Ch. Robin, par Renaut, mais il était réservé à Poulain d'en démontrer l'existence et de prouver qu'il n'était autre que le ferment lipasique, découvert par Hanriot. Dans une série de travaux et de communications faites à l'Académie des Sciences depuis 1896, Hanriot a montré qu'il existe dans le sérum sanguin un ferment saponifiant les graisses, une lipase, ferment distinct de la lipase pancréatique, bien que possédant une action analogue. Poulain a fait subir à la technique de Hanriot quelques modifications de détails; ses recherches l'ont conduit aux conclusions suivantes : 1" La sécrétion de la lipase est une propriété générale du tissu lymphoïde; 2° A l'état normal, tous les ganglions de l'économie ont sensiblement le même pou- voir lipasique, déterminé au même moment chez le même sujet; 5" L'activité lipasique des ganglions paraît plus marquée pendant la période digestive qu'à l'état de jeune ; 4° Le pouvoir lipasique, chez les animaux, paraît s'accroître, toutes choses égales d'ailleurs, avec l'âge, au moins pendant les premiers mois, et même pendant les pre- mières années (jusqu'à l'âge de 4 ou 5 ans chez l'enfant). La question de la nature de cette lipase est, comme le fait remarquer Poulain, le point le plus obscur de son histoire. A l'origine, elle fut considérée, par Hanriot et les auteurs qui l'ont spécialement étudiée, comme un ferment soluble. Elle en présente, en 750 GRAISSES. effet, un certain nombre de propriétés. Comme les ferments, elle est capable de trans- former, avec le temps, une quantité considérable de substance, de graisse dans le cas particulier; comme les ferments, elle est détruite par la chaleur et n'est pas dialysable. Mais elle s'en écarte par plusieurs propriétés qui lui sont spéciales. C'est ainsi que son activité semble s'exagérer en milieu alcalin, tandis que son action s'éteint rapidement en milieu acide. De plus, Hanriot n'a pu l'isoler ni la précipiter par l'alcool. On peut, actuellement, constater ses effets, mesurer et comparer son action, mais il n'a pas encore été possible de l'isoler, ni de déterminer sa nature. Si cette dernière n'est pas déterminée, on est, par contre, d'accord sur son mode d'action. Elle saponifie les graisses, c'est-à-dire les dédouble en acides gras et glycérine. Mais si elle dédouble les graisses, elle ne les décompose pas en leurs radicaux chi- miques élémentaires, comme le fait le ferment récemment découvert par Cohnstein et MicHAËLis dans le sang, et qui semble provenir des globules rouges. La lipase a une action saponifiante, mais non lipolytique. Entin cette action est à double effet : après avoir dédoublé les graisses, elle peut les reconstituer par synthèse. Elle est donc, tout à la fois, décomposante et recomposante, propriété qui appartient aussi au ferment des peptones. A la faveur de ces données nouvelles, cherchons à interpréter le mode d'absorption des graisses dans l'intestin et ù suivre les modifications successives qu'elles présentent. « Les graisses alimentaires sont, les unes à l'état d'acides gras, les autres à l'état de combinaisons de la glycérine (stéarates, oléates, palmitates, etc.). Les acides gras tra- versent l'intestin directement et, se combinant à une glycérine d'origine indéterminée qui a été constatée dans le sang, ils se retrouvent à l'état de graisse dans les chylifères. Quant aux stéarates, oléates, etc., de la glycérine, ils se dédoublent dans l'intestin sous l'influence du suc pancréatique et de la bile, peut-être aussi dans l'épaisseur de la paroi intestinale, sous l'influence de ces mêmes ferments associés à la lipase ganglion- naire. Mais cette lipase, d'origine lymphoïde, douée d'une double action, reconstitue aussitôt les éléments de la graisse, de sorte que les chylifères du mésentère contiennent de la graisse émulsionnée, mais à l'état de combinaisons. Cette graisse, transportée dans les ganglions mésentériques, y subit une série de transformations, consistant en des séries de dédoublements suivis de synthèses, sous l'intluence de la lipase ganglion- naire. Ce sont ces transformations successives qui, s'étageant de l'intestin jusqu'aux chylifères du mésentère, tributaires de la citerne de Pegquet, rendent peu à peu la graisse d'alimentation apte à être utilisée par l'organisme qui s'en sert, soit immédia- tement comme combustible, sous forme d'hydrate de carbone, soit en l'emmagasinant sous forme de graisse de réserve dans le tissu cellulaire. Les mêmes transformations se font, sans doute, dans la substance grasse qui pro- vient des albuminoïdes et des hydrates de carbone des aliments. Le but final de toutes ces modifications est visiblement l'identification non seulement chimique, mais encore biologique de la graisse de provenance variée, qui se trouve dans les aliments, en une graisse spéciale à chaque espèce animale (Poulain). C'est de deux à quatre heures après l'ingestion des aliments que la lymphe mésen- térique cesse d'être limpide pour devenir lactescente ou tout à fait laiteuse. Elle est, du reste, plus opaque après un repas riche en viande, en graisse, surtout en graisses oléa- gineuses. Les matières grasses se trouvent en suspension dans le chyle à l'état de fines gouttelettes, ayant environ 1 millimètre au plus de diamètre et qui se présentent, à l'examen microscopique, sous la forme de très petits points à centre brillant, lors- qu'on les observe à de forts grossissements et à contours foncés. Ces granulations sont extrêmement nombreuses et douées d'un mouvement brownien extrêmement vif (Ch. Robin). L'apparence laiteuse et l'opalescence des vaisseaux chylifères permettent de suivre, chez un animal sacrifié en pleine digestion, le chemin que suivent les graisses pour aller de l'intestin jusque dans l'appareil circulatoire. Au sortir des ganglions mésenté- riques, les vaisseaux chylifères, considérablement réduits de nombre, ne forment plus que quelques troncs qui convergent vers la citerne de Pegquet, Le chyle passe dans le canal thoracique et se trouve déversé dans le système veineux, dans le point même où ce canal vient s'ouvrir dans la veine sous-clavière gauche. Le mélange du chyle au GRAISSES. 751 sang donne au sérum de ce dernier un aspect lactescent tout particulier, qui persiste pendant quelques heures après la digestion. On a cherché à évaluer la vitesse moyenne du courant du chyle dans le canal thoracique; lei recherches ont donné des résultats différents: Beilard admet 2 centi- mètres et demi par seconde, WÉiss 4 millimètres, Bkraud 12 centimètres dans le même temps. LuDwiG, cherchant l'explication de ces différences, a constaté que la vitesse du courant change d'une expérience à l'autre, les conditions restant en apparence les mêmes. Quant à la quantité de chyle qui passe par le canal thoracique, elle a été déterminée par Colin; en établissant une fistule sur le canal thoracique du cheval, il a reliié 11 kilogrammes et demi de lymphe en douze heures et 9o kilogrammes sur une vache, en vingt-quatre heui-es. La pénétration des corps gras dans la circulation est d'ailleurs grandement inlluencée par leur état physique; elle dépend surtout de leur degré de fusibilité. Les graisses liquides à la température du corps (huile d'olives, graisse d'oie ou de porc) n'aban- donnent aux fèces que 2 ou 3 p. 100 de leur quantité totale. Le suif en laisse 7 à 11 p. 100. Quant à la stéarine, dont le point de fusion est à 63°, elle échappe à la résorption intestinale dans la proposition de 86 à 91 p. 100 (Arnochnick). Une partie de la ^graisse absorbée au niveau de l'intestin •pénètre dans les origines de la veine-poi'te et est ainsi amenée jusqu'au foie. Gilbert et Carnot ont montré que, seule, la graisse décomposée dans l'intestin en savons et glycérine et recombinée au delà de la paroi, prend la voie-porte et arrive par ce chemin au contact de la cellule hépatique. La graisse est arrêtée parle foie. Drosdokff a comparé la proportion de graisse dans les sangs porte et sus-hépatique : il a donné ii,04 pour 1000 dans le premier et 0,S4 dans le second. Même en admettant, comme le font remarquer Gilbert et Carnot, qu'il s'agisse ici d'un cas exceptionnel, le rôle du foie n'en paraît pas moins considé- rable. On a pu aussi s'assurer directement de l'arrêt des graisses dans le foie pendant la période digestive. Sur des coupes de l'organe hépatique, enlevé chez un animal au cours de la digestion, on peut constater, à l'aide de l'acide osmique, une grande accumulation de gouttelettes graisseuses à la périphérie du lobule. Sur des chiens nourris avec de l'huile de foie de morue, Frerichs a vu les cellules hépatiques se transformer en véritables vésicules adipeuses. Pour élucider ce problème, Gilbert et Carnot ont institué une série d'expériences reprises depuis par Jomier, et qu'ils ont résumées de la façon suivante : « Nous injec- tions par la veine-porte, chez des lapins, des cobayes et des chiens, une certaine quan- tité d'huile finement émulsionnée par addition d'une légère proportion de bile ou de carbonate de soude. Nos animaux étaient sacrifiés en série, de quelques minutes à quelques jours après l'injection. Lorsque l'injection a été copieuse, le foie apparaît congestionné, luisant à la coupe, et laisse sourdre, à la surface de section, un liquide huileux, tachant le papier et surnageant sur l'eau. L'huile a donc été retenue en masse par le foie ». Si l'on injecte par une veine mésaraïque une certaine quantité de lait, le foie, après quelques heures, et môme au bout de trois ou quatre jours, laisse écouler, à la coupe, un liquide blanc, opalescent, qui contient les graisses émulsionnées du lait : on voit ainsi sourdre le lait accumulé dans le foie. 11 en est de même lorsqu'on injecte du beurre liquéfié. Lorsque les quantités de graisse ou d'huile injectées sont faibles, on peut suivre, au microscope, les transformations des corpuscules graisseux. On voit alors, après fixation de petits fragments de tissu hépatique par l'acide osmique, les gouttelettes gi-aisseuses, retenues dans les capillaires, s'attarder en longeant les parois vasculaires et parfois tapisser celles-ci d'une lame mince ininterrompue. On retrouve également de fins cor- puscules graisseux à l'intérieur des cellules endothéliales; celles-ci en sont parfois absolument bourrées. Enfin, au bout de quelques heures, des gouttelettes de graisse, toujours très fines, apparaissent dans les cellules hépatiques. Elles augmentent pro- gressivement de nombre et se fusionnent ensuite en constituant des masses de plus en plus considérables. 752 GRAISSES. Celte localisation cellulaire des graisses dure un temps variable, suivant la quantité injectée. Puis on voit, au bout de quelques jours, le volume et le nombre des grains noirs diminuer et, finalement, on n'en retrouve plus, après dix jours environ, que quelques rares, qui disparaissent à leur tour. A ce moment on ne peut, avec l'iode, mettre en lumière une augmentation du glycogène, produit aux dépens des graisses disparues. Non seulement la graisse émulsionnée est arrêtée par le foie et absorbée par les cellules endothéliales, puis par les cellules hépatiques, mais aussi les éléments de décom- position des graisses y sont également fixés. Si on fait, avec des savons, des injections analogues et si on recherche la graisse par l'acide osmique dans les cellules hépatiques, on obtient des résultats analogues. L'action du foie sur les savons résulte des expériences de Munr : l'injection intra- veineuse de savons tue le lapin, à la dose de 0e''07 par kilogramme, à celle de 0e'".i4, si on fait la respiration artificielle. Parla veine-porte, au contraire, la dose mortelle est de 2 1/2 à 5 fois plus considérable, et ce résultat expérimental démontre bien le rôle d'arrêt du foie à leur égard. Si, à l'état normal, le foie est susceptible de retenir les graisses, qui lui sont appor- tées par la veine-porte, il les transforme, et, au bout d'un temps variable, leur dispari- lion est complète. Mais si l'organisme a besoin d'une provision dégraisse mobile et cir- culante, on voit celle-ci se faire dans le foie. Les gouttelettes de graisse se localisent autour de la veine sus-hépatique. C'est ainsi que Ranvier et de Sinéty ont constaté l'in- filtration graisseuse des cellules centrales du lobule, vers la fin de la gestation et pen- dant tout le cours de la lactation. Nous avons vu plus haut que le processus d'absorption des graisses étrangères et leur utilisation par l'organisme tendait, au moins en partie, à l'identification finale, chi- mique et biologique des matériaux hydrocarbonés ingérés aux constituants hydrocar- bonés normaux de l'animal observé. Cette identification n'est possible que si l'on admet l'intervention de réactions diastasiques. Or, nous savons que les réactions de cet ordre sont limitées par les produits mêmes qu'elles engendrent; elles s'accompagnent d'un très faible dégagement de chaleur, circonstance qui rend possible leur réversibilité. Cette réver- sibilité domine d'ailleurs la chimie cellulaire, mais elle ne suffit pas à élucider l'interpréta- tion des phénomènes observés, elle exige le concours d'un autre facteur, par exemple la formation de corps intermédiaires. Il paraîtrait certain en effet, d'après Armand Gautier, qu'au cours de ces transformations, une partie tout au moins des principes gras pas- serait transitoirement « par une forme complexe, car on a signalé dans le chyme des graisses azotées, entre autre une amido-distcarine C? H-' (Az H^), (C* H ^^^ 0^)^, qui témoignent que les nouveaux corps gras ont fait partie, avant de se transformer en graisses normales, de molécules azotées plus compliquées » (A. Gautier, Chimie de la cellule vivante, 71). Tout nous porte à croire que la formation de ces corps mixtes et transitoires, hydrocarbonés et amidés, intervient également dans l'évolution biologique du glycogène. La question de l'utilisation directe des graisses alimentaires hétérogènes, qui semble se produire surtout dans des conditions extra-physiologiques, tels que l'ina- nition préalable, la suralimentation ou le surmenage des organes digestifs, soulève de nombreux problèmes du plus haut intérêt. Nous signalerons particulièrement la possi- bilité du passage dans le lait des graisses qui interviennent dans l'alimentation. Cette éventualité, admise par quelques auteurs (Girard et Magnier de la Source), présente au point de vue des falsifications du lait une importance capitale. Il serait à désirer que de nouvelles expériences vinssent montrer s'il faut admettre le passage dans le lait de la graisse des tourteaux, si employés dans l'alimentation du bétail. A l'appui des hypothèses émises sur l'état de dissociation transitoire que présentent les graisses, et sur la possibilité des synthèses ultérieures, aiguillées en quelque sorte vers la reconstitution d'une molécule analogue ou identique à celle que l'on rencontre dans les tissus, nous pourrions citer les expériences qui ont été entreprises, soit avec des acides gras libres, soit avec des savons. L'ingestion stomacale de ces derniers étant suivie de la mise en liberté des acides correspondants, le problème est sensiblement le même, quel que soit le produit ingéré, savon ou acide libre. Nous rappellerons les tra- vaux de Percwoznikoff (1876) et ceux de A. Will (1876), qui semblent démontrer que l'ingestion de savons et de glycérine dans le tube digestif provoque la synthèse d'une GRAISSES. 753 graisse neutre et l'apparition de cette dernière dans les chylifères. Worogulikow (1871) et J. MuNK (1899), sont d'ailleurs cirrivés à un résultat analogue en administrant du savon sans glycérine. Lebedeff parait avoir obtenu également une synthèse des graisses dans ces conditions. Citons également une très curieuse expérience de Munk au cours de laquelle il aurait constaté que le palmitate de cétyle (blanc de baleine), introduit dans l'estomac, provoquerait la formation d'un corps gras proprement dit, le palmitate de glycéryle ou tripalmitine. Nous avons vu qu'une partie des graisses utilisées ou accumulées proviennent des matières grasses ingérées; il nous faut rechercher maintenant si la graisse ne provient pas de la transformation des matières albuminoïdes. Une première démonstration de cette transformation est fournie par la constitution, dans un organisme mort, de l'adipocire ou gras de cadavre. Dans certaines conditions d'inhumation, on trouve, au bout d'un temps variable, les corps transformés en une masse cireuse, constituée presque exclusivement par de la graisse. Dans cette transfor- mation, il faut, il est vrai, tenir grand compte de l'action de certaines bactéries. Elle parait due à une fermentation anaérobie. Elle a été étudiée pour la première fois par Fourcroy, qui remarqua la formation de gras de cadavres dans un charnier du cimetière des Innocents. Certains terrains, certaines eaux même ont la propriété de convertir rapidement en adipocire les pièces anatomiques qu'on y enfouit ou qu'on y plonge. Tel est le cas d'une fontaine d'Oxford. Le processus chimique de la transformation de l'albumine en graisse n'est pas encore entièrement élucidé. Le radical graisse ne semble pas persister dans la molécule d'albumine; sa formation ne peut donc être la conséquence d'une simple décomposition de l'albumine. Elle est vraisemblablement le produit del'activilé vitale du protoplasma, car elle ne se forme pas dans le protoplasma mort. Composée de trois éléments, C,H, 0. la graisse ne renferme ni Az, ni S dans sa molécule constituante. 11 s'ensuit que dans la transformation d'une molécule d'albumine en une molécule de graisse, les deux der- niers éléments, Az et S, ainsi qu'une partie de 0, qui se trouve en moindre quantité dans la graisse, n'entrent pas dans la constitution de la nouvelle substance. Az et S, sont éliminés dans l'urine, sous forme de matières solubles telles que l'urée, les extrac- tifs, les urates et les sulfates. Quant à la graisse, insoluble dans les sucs de l'orga- nisme, elle reste sur le lieu de sa formation et se présente physiquement sous l'appa- rence de granulations et de gouttelettes. Pour Chauveau, Kauffmann, Armand Gautier, l'albumine se dédouble en urée d'une part, en graisse et hydrate de carbone d'autre part. Le dédoublement se produit soit par hydratation (Armaxd Gautier), soit par oxydation (Chauveau). Quelques auteurs persistent à prétendre que la graisse ne peut se former dans l'orga- nisme aux dépens de l'albumine, et que sa source exclusive se trouve dans l'absorption des graisses et des hydrates de carbone alimentaires.il en est même qui ont proposé de proscrire jusqu'au terme de dégénérescence graisseuse. Rosenfeld, par exemple, a émis cette opinion que, dans l'empoisonnement par le phosphore, la graisse, qui apparaît dans le foie et dans les autres viscères, provient non d'une transformation de l'albu- mine, mais du transport de matières grasses puisées dans d'autres parties de l'orga- nisme. Chez les animaux maintenus dans un jeûne prolongé, le phosphore ne provoque- rait pas, d'après lui, la dégénérescence graisseuse viscérale. Mais on peut lui objecter, avec Chantemesse et Podwissotsky, que, sous l'influence du jeûne, l'albumine perd la propriété de se dédoubler et de donner de la graisse. La formation de graisse aux dépens de l'albumine est un processus vital qu'on observe dans nombre de circonstances physiologiques. Elle peut être suivie au cours de la régression de certaines parties de l'organisme, au moment où, devenues inutiles, ces parties doivent disparaître, ou encore lorsqu'il s'agit d'éléments hypertrophiés qui doivent s'amoindrir. « Les exemples de cette dégénérescence physiologique sont nombreux : fibres mus- culaires de l'utérus pendant l'involution post-puerpérale, dégénérescence graisseuse des cellules de la membrane granuleuse dans la vésicule de de Graaf au moment de sa ma- turité, dégénérescence des cellules du corps jaune pendant le développement du fœtus mCT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VIT. 48 754 GRAISSES. dans l'utérus, enfin dégénérescence de la membrane déciduale et de certaines partie;* du placenta, vers la fin de la gestation, à l'approche de l'accouchement. Dans ce dernier cas, la dégénérescence graisseuse des cellules et des fibres, qui réunissent le placenta h l'utérus, prépare graduellement l'affaiblissement des liens réciproques de ces parties et facilite le décollement du placenta au moment de la délivrance. » (Chante- messe et PODWISSOTSKY.) Il en est de même dans nombre d'affections pathologiques et aussi dans certaines intoxications. Le fait le plus remarquable réside dans la dégénérescence graisseuse qu'éprouvent la plupart des organes du corps vivant dans l'empoisonnement par le phosphore. D'après une expérience faite par J. Baur, il ne serait pas douteux que la graisse formée sous l'influence d'un empoisonnement lent par le phosphore dérive exclusivement de l'albumine ; il y a perte d'azote sous forme d'urée éliminée par les urines. Voici ce que rapporte l'éminent physiologiste de Munich. Un fort chien de basse-cour, laissé à jeun pendant douze jours afin de détruire complètement sa graisse, fut lentement em- poisonné par le phosphore : la mort survint dans la nuit du dix-neuvième au vingtième jour de jeûne. Avant l'empoisonnement, dans la période du cinquième au douzième jour, la quantité d'azote éliminée par les urines resta assez constante, et s'éleva, en moyenne, à 7, 8 grammes par jour. A la suite de l'intoxication, la quantité d'azote contenue dans les urines augmenta considérablement, au point d'atteindre, dans le môme temps, 23,9 grammes, soit une quantité triple de celle qui est journellement évacuée lors du jeûne normal. Chez un autre chien, soumis, en même temps que le précédent, à des expériences sur la respiration et traité absolument de la même façon que le premier, l'absorption de l'oxygène et l'élimination de l'acide carbonique formé n'attei- gnirent que la moitié des proportions constatées pour l'autre. On observe donc, dans les transmutations organiques, lors de l'empoisonnement lent par le phosphore, deux modifications qui paraissent indépendantes : d'abord une augmentation de la proportion d'albumine convertie en urée et en graisse ; ensuite une réduction dans la quantité d'oxygène absorbé, et, comme conséquence, une oxydation moins intense de la graisse. Mais ces modifications doivent tendre vers un même but et contribuer, malgré la condition du jeûne, à une accumulation de la graisse dans le corps, ainsi que l'examen du chien empoisonné l'a d'ailleurs démontré. En effet, la substance musculaire sèche de celui-ci contenait 42,4 p. 100, et celle du foie 30 p. 100 de graisse, c'est-à-dire trois fois plus qu'il n'en existe lors d'une nutrition normale, et au moins dix fois autant que le corps du sujet en aurait montré après vingt jours de jeûne, s'il n'avait pas été empoi- sonné. L'analyse du foie d'un homme décédé à la suite d'un empoisonnement par le phosphore a révélé que la matière sèche de cet organe renfermait 76,8p. 100 de graisse. On doit cependant faire observer qu'il a pu se produire dans le foie une rapide accumu- lation de graisse originaire d'autres parties du corps. Après l'énoncé de ces faits, si l'on conservait encore quelque doute au sujet de la formation de la graisse aux dépens de la substance albuminoïde, il devrait se dissiper en présence des résultats que fournit l'expérience directe ; alimentation d'animaux sains et normalement nourris. Ainsi F. Hofmann a observé que les oeufs de la mouche commune, déposés sur du sang pur, se développent, et que les larves qui apparaissent à l'éclosion contiennent sept à onze fois plus de graisse que n'en renfermaient les œufs et la nourriture offerte. Il restait cependant encore une notable portion de sang; l'excé- dent en graisse ne pouvait provenir que de l'albumine consommée. De nombreuses expériences de C. Voit et Pettenkoi'er, sur des chiens nourris au moyen de quantités abondantes de viande privée de graisse, ont conduit aux mêmes résultats; ainsi les animaux absorbaient par jour 42,1, 42,7 grammes de carbone en excès, qui n'était pas retrouvé dans les évacuations. L'azote dépensé correspondait exactement à celui des aliments; il y avait équilibre parfait pour cet élément, tandis qu'une proportion considérable de carbone existant dans les aliments restait dans le corps et s'y déposait sous forme de graisse, car on ne connaît aucune autre substance organique non azotée qui puisse s'accumuler dans l'économie animale en quantité quelque peu importante (Em. Wolff). 11 ne semble donc pas douteux que l'albumine puisse fournir de la graisse, et qu'une GRAISSES. 755 partie des albuminoïdes, introduits par l'alimentation, serve à constituer et à entretenir les réserves que l'animal accumule dans son organisme, ou encore à l'aider à subvenir à ses besoins du moment. Nous pouvons d'ailleurs citer encore quelques faits à l'appui de cette hypothèse. SuBOTTiN et Kemmerigii, soumettant une chienne à l'alimentation purement albuini- noïde, ont vu que cet animal continuait h produire un lait très riche en beurre. TscHERiNOFFa eugraissé des poulets en les ^'avant avec de la viande dégraissée. Blondeau, puis Kemmerich, ont montré que, pendant la maturation de certains fromages, la caséine se transforme en graisse. Burdach a observé la diminution de la matière albuminoïde et l'augmentation des graisses dans les œufs de Limneus stagnalis en cours de dévelop- pement. Armand Gautier explique par une simple hydratation la formation des principaux produits de la désassimilation des albuminoïdes. C'^Hn^AziRQ^sS albumine + 14H20 donnent : 9(COAz2H<-) (urée). + C'i'H'JSO'' (tripaliiiiline, graisse neutre). + C-''1K'0^ (acide lactique ou hydrate de carbone"). + 9C02 + S03 La formation des graisses aux dépens des albuminoïdes parait donc au-dessus de toute discussion. Il est d'ailleurs vraisemblable que cette transformation se fait par l'intermédiaire du glycogène ou d'un dérivé protéoglycogénique, ce qui ramène le pro- blème à celui que nous nous proposons d'aborder maintenant, c'est-à-dire à la formation des graisses aux dépens des hydrates de carbone. La part que prennent les hydrates de carbone da^is la formation des réserves graisseuses est depuis longtemps connue (Liebtg). L'observation a, en effet, appris que les animaux herbivores, nourris presque exclusivement avec des hydrates de carbone, engraissent, et que leur engraissement est d'autant plus rapide que leur ration hydro-carboiiée est plus abondante. De plus leurs femelles sont susceptibles, surtout s'il s'agit d'animaux domestiques, de fournir, par leur lait, des quantités de corps gras (beurre) parfois considérables. D'après KuHNE, dont l'opinion est acceptée par Seegex, les féculents ne se transfor- meraient pas directement en graisse : la production de matière glycogène serait un intermédiaire obligé entre les deux, et la transformation serait en partie localisée dans le foie. On pourrait sans doute expliquer ainsi la fréquence des rapports que la clinique constate entre l'adiposité et certaines formes du diabète (diabète gras, diabète arthritique). Voit n'admet pas non plus la transformation directe des hydrates de carbone en graisse : pour lui, les féculents ne servent que d'aliments d'épargne : pendant qu'ils brûlent, les albuminoïdes peuvent se transformer en graisse. Cette opinion a été démentie par des observations récentes qui ont apporté la démonstration évidente de la trans- formation directe des féculents en graisse. L'examen des résultats obtenus dans diverses expériences d'engraissement est-il susceptible d'éclairer le problème de l'origine de la graisse animale ? C'est ce que s'est demandé E. WoLi'F, dans son Élude sur l'alimentation des animaux domestiques. « Des recherches, poursuivies depuis longtemps en Angleterre, ont démontré que, dans l'engraissement, 100 parties d'augmentalion du poids virant contiennent : Total ^^atiè^es de la substance minérales. Albumine. Graisse. sèche. Eau. Porc 0,:;;{ 7,76 03,1 71.4 28,6 Mouton 2, .34 7,13 70,4 79,9 20,1 Bœuf 1,47 7,69 66,2 7.^,4 24,6 Moyenne.. . . 1,45 7,53 66,6 7ij,6 24,4 Dans ces derniers temps, diverses stations agronomiques ont beaucoup expérimenté sur l'engraissement, et, presque toujours, c'est l'espèce ovine, et spécialement les moutons 756 GRAISSES. adultes qui ont fait l'objet des recherches. Les fourrages consommés ont été soumis à l'analyse chimique d'après des méthodes d'opération uniformes, et les augmentations de poids soigneusement constatées : partout aussi la durée de l'opération a été suffisam- ment prolongée, puisqu'elle a embrassé une période de 2 1/2 à 3 mois ; presque tou- jours l'expérience se terminait par un abatage, dont on notait les résultats. Ces .^recherches ont accusé les chiffres moyens suivants, au sujet desquels il faut cependant ■observer que la proportion des éléments des fourrages digérés a été obtenue, sauf quel- -ques exceptions, non par détermination spéciale et directe, mais en prenant pour base •de calcul les données ordinaires : NOMBRE ÉLÉMENTS DU FOURRAGE QUI ONT été digérés RAPPORT entre les JCGMEXTITIOS POIDS NET POIDS du par jour et par tête. SUBSTANCES DE POIDS à SUIF DES RKINS d eipérieiices AUmmine. Hydrates de carbone. azotées et les substances non azotées. par jour et par tête. l'abatage, et du mésentère. grammes. grammes. grammes. (P. 100 du poids vif). (P. 100 du poids lit). 7 110 824 1 : 7,49 5.3,3 48,0 7,2 13 134 179 1 : 5,81 79,0 51,9 9,9 20 164 779 1 : 4,70 53,5 53,0 10,9 19 192 769 1 : 4,01 54,9 54,9 •11,2 Ces nombres font ressortir d'une manière péremptoire l'influence favorable de l'albumine du fourrage sur la production de la graisse. L'augmentation de la pioportion ■d'albumine est régulièrement accompagnée d'une progression correspondante du poids vivant, tandis que la quantité de substances nutritives non azotées, qui est restée •sensiblement invariable dans les divers groupes d'expériences, n'a pu exercer une action marquée sur l'accroissement en poids. Au surplus, ce dernier s'explique parfaitement en considérant seulement la richesse du fourrage en albumine ; bien plus, celle-ci a dû •laisser un excédent; caries aliments contenaient aussi une proportion de graisse toute •formée, variant, suivant les expériences, de 13 à 60 grammes par tête et par jour. Des faits analogues s'observent dans l'engraissement du bœuf. Des expériences générales, ainsi que des recherches directes, indiquent que, dans certaines limites, un fourrage passablement riche en azote produit aussi les meilleurs effets, et que l'albumine •et les corps gras qui lui sont enlevés par la digestion fournissent la matière première :suffisante au dépôt de la graisse dans l'organisme. Chez le porc, la formation de graisse par les hydrates de carbone a été mise hors de -doute par les recherches entreprises par Soxhlet à Munich, Tschirwinsky à Moscou et ''Weissl et Strohmer à Vienne. 'Les recherches faites sur des oies ont également montré que la graisse dérive des hydrates de carbone. Weiske et H. Schulze, à Proskau, ont nourri des oies au moyen de son, de seigle et de fécule de pommes de terre; la ration offrant le rapport nutritif ^de 1 à 0, l'intervention des hydrates de carbone dans la production de la giaisse a été incontestable. En admettant même que toute la graisse des aliments, ainsi que l'albu- mine et l'asparagine, aient contribué dans la plus large mesure à la production de la graisse trouvée dans le corps lors de l'analyse, il restait 73 et 84,8 grammes respecti- vement, soit 13 et 17,6 p. 100 de la quantité de graisse produite (en 36 jours) dont la (matière première doit être cherchée dans les éléments hydrocarbornés, sucre, fécu- lents, etc. Citons aussi les expériences très concluantes de Cuamewski à Péterhof, près iUiga. Des oies adultes furent engraissées pendant 18 jours au moyen d'orge et de riz, ( t on arriva à admettre qu'une proportion de 71,7 à 78,6 p. 100 de la graisse nouvelle dérivait des hydrates de carbone. Dans une autre expérience sur des oies, soumises au préalable à un jeûne de cinq jours, afin de les dépouiller de graisse, et que l'on gorgea •ensuite d'orge el de riz, on put conclure que la graisse nouvelle formée en 14 jours GRAISSES. 757* dérivait, dans la proportion de 86,7 p. 100, des hydrates de carbone renfermés dans la. nourriture. Signalons également que A. de Planta et Erlenmeyer, à Munich, ont observé, contrai- rement aux conclusions d'autres expérimentateurs, que les abeilles forment la cire, sub- stance analogue à la graisse, aux dépens du sucre. Enfin 0. Kellner conclut de ses- recherches sur l'alimentation du ver à soie que cette chenille a la propriété de produire de la graisse au moyen de substances non azotées, même lorsque le rapport nutritif est très étroit (= 1 : 1,4.')), quand l'animal se nourrit des feuilles du mûrier. RuBNER a montré qu'il peut aussi se former de la graisse à l'aide des hydrates de carbone dans l'organisme des carnivores, notamment quand il y a une notable ingestion de substances hydrocarbonées, et que les organes en sont, pour ainsi dire,. inondés. Il n'est donc plus permis de considérer la substance albuminoïde comme étant la^ matière fondamentale exclusive d'oîi dérive la graissa, bien que son rôle soit important, et qu'elle mérite de conserver le premier rang; souvent même l'albumine suffit pour reudre compte de l'origine de la graisse déposée dans le corps ou livrée par le lait. Mais- d'autres fois, spécialement chez le porc, l'intervention simultanée et directe des hydrates^ de carbone n'est pas douteuse. Du reste, il n'est guère admissible que, à cet égard, il existe une différence caractéristique entre le Carnivore et l'herbivore. Chez toutes les- espèces animales, et notamment chez les mammifères, les composés nutritifs organiques qui parviennent dans la circulation des liquides sont identiques : ils consistent essentielle- ment en albumine, en graisse, en sucre, et, comme les organes correspondants ont par- tout les mêmes missions physiologiques à remplir, les phénomènes de décomposition doivent concorder dans leurs caractères généraux. Mais les résultats de la décomposi- tion sont, au point de vue quantitatif, très divers, et particulièrement déterminés par la masse et par les proportions relatives dans lesquelles les éléments nutritifs sont résorbés. On sait d'ailleurs que les espèces animales possèdent à des degrés bien inégaux la pré- disposition à former et la propriété d'accumuler de la graisse dans leurs tissus. Dès lors, il est possible que l'organisme du chien et des carnivores en général ait la propriété de former de la graisse avec de la substance albuminoïde seule, dans des conditions d'alimentation où les ruminants, et aussi le porc, ont besoin, dans une plus large mesure, de l'intervention des hydrates de carbone pour produire la substance grasse (E. Wolff). On peut résumer toutes les expériences faites en vue d'élucider la transformation des hydrates de carbone en graisses par cette constatation que toute addition d'hydrate de- carbone au régime d'un carnivore augmente considérablement chez lui la production- des graisses. On peut objecter à l'interprétation un peu hâtive de ce fait expérimental que la combustion facile des hydrates de carbone permet à l'animal de ménager ses réserves graisseuses, ainsi que la graisse introduite par l'alimentation. Là encore les expériences faites sur les organismes inférieurs nous paraissent plus probantes. La pro- duction de la graisse par les levures nourries dans un milieu nutritif pauvre en albumine- et particulièrement riche en hydrate de carbone avec formation intermédiaire du glyco- gène, nous paraît poser la question sur son véritable terrain. Les expériences personnelles de l'un de nous sur la production de la graisse par les parasites des céréales, et en parti- culier par le ver des farines, expériences dans lesquelles le carbone albuminoïde initial ne pouvait suffire à la formation de la graisse dosée à la fin de l'expérience, donnent encore une solution expérimentale non douteuse du problème physiologique. Ces expé- riences présentent la plus grande analogie avec celles qui ont été réalisées sur des abeilles, et dans lesquelles on a constaté la transformation du sucre en une substance adipoïde, la cire. Les expériences de Hanriot sur le glu(;ose alimentaire ont mis en évidence ce fait important que le glucose introduit dans l'organisme ne se briilait pas toujours complè- tement. Si l'on fait ingérer à un sujet, au repos et à jeun depuis quelques heures, de* quantités considérables de glucose, on peut constater que, pendant les heures qui sui- vent, les volumes d'acide carbonique exhalé et d'oxygène absorbé par les poumons aug- mentent, mais l'augmentation de l'acide carbonique est supérieure à celle de l'oxygène;, il faut donc bien admettre que cet excès provient du glucose ingéré : cette quantité- 758 GRAISSES. est proporti onelle à la quantité de glucose absorbée et dédoublée suivant 1 équa- tion : 13C6Hi2O6 = CS3Hi04O6 oléostcaropalmitine + 23C02 + 26H20 Ch. RiCHET et Hanriot. C. R., CXIV, 371). D'ailleurs, chaque fols qu il n'existe pas un rapport convenable entre la capacité pulmo- naire et la quantité d'aliments ingérés, la proportion de graisse augmente, par suite d'une combustion incomplète des hydrates de carbone, la combustion complète se faisant sui- vant l'équation : C0Hi2OK + 6O2 = 6CO2 + 6H2O qu'il convient de comparer à celle qui a été donnée plus haut, et dans laquelle Voxygéne n intervient pas. La dernière formule indique la fixation d'un volume d'oxygène égal au volume d'acide carbonique formé. Ainsi donc, qu'une cellule soit imparfaitement irriguée par le sang et « la graisse apparaît et s'y accumule en place du glycogène » (A. Gautier, Chimie de la cellule vivante, p. 84). Claude Bernard admettait la transformation du sucre en graisse dans le foie, sans doute par l'intermédiaire du glycogène ; A. Gautier donne même l'équation de cette transformation dans son traité des Toxines (p. 204) : 13C6H"'Os = C"H'04O6 + 23C02 + 13H20 La formation de la graisse aux dépens du glycogène se ferait, suivant Bouchard, d'après un processus aérobie, et suivant l'équation : C^5Hi04O6 + COO = 12H20 + 7C02 + SCeHiûQs (Bouchard, C. R., 3 octobre 1898. Bouchard et Desgrez, C. R., 26 mars 1899). Cette dernière théorie a, d'ailleurs, été contestée par M. Berthelot, dans une note publiée le 10 octobre 1898. Nous ajoutons que, de son côté, M. Hanriot n'a jamais réalisé la production d'hydrates de carbone dans ses expériences sur l'oxydation des graisses. La transformation des graisses en hydrate de carbone, vraisemblable au point de vue physiologique, doit donc se faire par un autre mécanisme que le processus d'oxyda- tion, peut-être même par la simple réversibilité de la réaction de A. Gautier (Voy. aussi art. Glycogène). Se plaçant simplement au point de vue expérimental, Arthus pense « qu'il est possible qu'une très petite quantité de glycogène se produise à la suite de l'ingestion d'une très grande quantité de graisse; mais rien ne prouve que la graisse soit la matière première de la formation glycogénique. Il est très possible, d'autant plus que la quantité déposée est minime, que les graisses aient préservé de la destruction du glycogène d'origine protéique. 11 est même possible que les graisses neutres n'aient joué aucun rôle dans la production de ce dépôt, et que ce soit la glycérine, libérée en petites proportions dans l'intestin, après ingestion des graisses, qui en ait été cause, sans qu'il soit d'ailleurs possible de dire actuellement si la glycérine intervient comme matière première ou comme élément d'épargne. » (Arthus, Éléments de physiologie.) Les sources où l'organisme animal peut puiser des matières grasses étant connues, il convient d'établir le processus par lequel la cellide animale, et particulièrement la cel- lule conjonctive, les rassemble, les modifie et les fixe dans son protoplasma. On admet volontiers aujourd'hui que le processus de fixation de la graisse par la cellule animale est un processus d'ordre phagocytaire. 11 se rapproche des processus dont on doit la connaissance aux belles recherches de MetchniKofk. La consistance molle, semi-liquide de la molécule de graisse facilite son absorption par le proto- plasma vivant. De nombreuses expériences démontrent la réalité de ce phénomène, Munk donne à un chien, dégraissé par un jeûne suffisamment prolongé, de l'huile de colza, et retrouve dans les tissus de l'animal une graisse qui a les caractères de l'huile végétale GRAISSES. 759 ingérée. Lebedefi^ est arrivé aux mêmes constatations en nourrissant des animaux avec de riiuile de lin. Mais le rôle de la cellule animale ne se réduit pas à un simple phénomène d'intus- susception : ce rôle est beaucoup plus complexe. La cellule est, en effet, susceptible de procéder par synthèse. Dans l'expérience de Munk, concernant un chien dégraissé par le jeûne et nourri avec de la graisse de mouton, expérience que nous avons rapportée précédemment, la graisse de nouvelle constitution, entrant en fusion à 40°, comme la graisse de mouton, n'a pas été formée aux dépens des substances albumi- noïdes du chien, mais créée avec de la glycérine prise dans l'oi'ganisme et avec les acides gras ingérés. La cellule conjonctive, empruntant les matériaux au sang, a fait synthétiquement cette graisse. Ce sont des phénomènes du même ordre qui se passent dans les cellules épithéliales qui revêtent les villosilés intestinales, cellules qui empruntent au contenu du tube digestif les éléments premiers à l'aide desquels elles econslituent les graisses (absorption intestinale). Une dernière preuve du rôle propre des cellules dans l'élaboration des graisses est fournie par la diversité de composition du tissu adipeux chez les différentes espèces animales. On sait en effet que, chez un animal qui reçoit beaucoup de matières grasses, la graisse qui s'accumule dans son organisme, à moins qu'il ne se nourrisse exclusi- vement d'êtres semblables à lui, n'a pas, le plus souvent, la même composition chimique que celle qu'il a reçue. Ce cas particulier est une nouvelle preuve de la propriété générale appartenant au protoplasma animal comme végétal d'assimiler des substances et de les élaborer en produits nouveaux, après leur avoir fait subir une transformation plus ou moins complète. Dans ces derniers temps, on a cherché à déterminer le sort de matières grasses, en particulier de l'huile, introduites dans l'hypoderme. Wlntermtz admet une utilisation, extrêmement lente, des huiles injectées et il avait constaté qu'une injection massive de oOO grammes était absorbée à raison de 2 à 5 grammes par jour. Wandel Henderton et Ed. F. Crofutt ont, de leur côté, expérimenté à l'aide de l'huile de graines de coton, qui reste entièrement fluide à la température ordinaire, qui pos- sède une couleur jaune foncée, qui, par sa forte teneur en iode, donne d'une façon très nette la réaction de Halphen. La réaction de Halphen se pratique de la façon suivante : on prend du sulfure de carbone contenant environ 1 p. 100 de soufre en solution, et on le mélange avec un volume égal d'alcool amylique. Le réactif étant ainsi préparé, on mélange volume à volume le réactif et l'huile à examiner, et On porte dans un bain d'eau salée bouillante pendant 15 minutes. On obtient avec l'huile de coton une coloration oi'ange ou rouge tout à fait caractéristique. Des expériences poursuivies par les auteurs précédents qui injectaient de l'huile de coton sous la peau d'un chien, il semble résulter que l'huile est absorbée et transportée non pas à l'état d'émulsion, mais sous une forme soluble. Au point de vue de l'inlluence sur le métabolisme, on s'aperçoit que, bien que dans certains cas les espaces sous-cutanés soient restés saturés d'huile pendant 35 jours, il n'y a pas eu formation de tissu adipeux vrai. On a retrouvé de l'huile de coton dans les graisses péritonéales. Les mêmes observateurs ont constaté qu'après l'ingestion par voie buccale, on retrouve facilement l'huile de coton dans le lait, chez les femelles en lactation; il n'en a pas été de même en injectant la quantité sous la peau. Wandel Henderton et Ed. F. Cuofutt concluent que l'huile injectée sous la peau se répand faci- lement et rapidement à travers les espaces sous-cutanés, qu'elle n'est pas transformée in situ en tissu adipeux. Ce tissu réagit en présence de l'huile comme en présence de toute autre substance vuluérante étrangère. Après l'injection hypodermique, elle n'ap- paraît ni dans le sang, ni dans la lymphe, ni dans le lait. Son utilisation est donc extrê- mement faible, et les injections de cette huile ne semblent avoir pratiquement aucune valeur nutritive. Quant au mécanisme suivant kquel se fait, dans l'organisme, l'utilisation des graisses, il est diversement interprété. On admet communément que la graisse se brûle dans l'organisme, qu'elle constitue, dans l'économie, une réserve de combustible, et que, au moment du besoin, elle est mise en rapport avec l'oxygène pris à l'air, d'oîi il résulte formation d'eau et d'acide carbonique et dégagement de calories. D'après 760 GRAISSES. Bouchard, qui a cherché à donner la solution de cet important problème biologique, il y a des raisons qui tendent à faire supposer que la graisse peut disparaître par simple oxydation. A poids égaux, elle est la substance de l'organisme le plus riche- ment douée d'énergie (9 calories 3 pour 1 gramme), et elle ne saurait disparaître sans livrer ses calories. Chez les animaux nourris avec de la graisse, on constate une consommation intense d'oxygène et une production d'acide carbonique relativement moindre que dans la combustion du sucre. Un animal au repos engraisse. Un animal gras, auquel on impose un exercice muscu- laire actif, perd sa graisse en même temps qu'il consomme plus d'oxygène et émet plus d'acide carbonique. Ce fait n'est pas contestable: encore est-il bien difficile, d'après ce que nous savons de la constitution anatomique, de la chimie et de la physiologie de la libre musculaire, d'admettre que, même à titre exceptionnel, la graisse puisse se substituer au glycogène, se brûler directement dans le muscle et dégager son énergie en produisant du travail mécanique. La disparition de la graisse est certainement liée, dans certains cas, au fonctionnement des muscles, mais il doit y avoir des intermé- diaires entre cette disparition de la graisse et les actes chimiques qui s'opèrent dans le muscle pour lui livrer l'énergie. En tout cas, si la graisse s'oxyde, ce n'est pas dans le tissu adipeux que s'accomplit la combustion. Les larges mailles de son réseau capillaire tiennent la graisse à trop grande distance de l'oxygène, et d'ailleurs, dans les circonstances où la consommation de l'oxygène est la plus active, on peut constater que les parties les plus abondamment pourvues de graisse restent les plus froides et ne se réchauffent que tardivement, par emprunt de calorique aux tissus voisins. L'acte chimique accompli dans la cellule adipeuse ne peut être que l'hydratation qui dédouble la graisse neutre et peut permettre aux produits de dédoublement, acides gras et glycérine, de franchir la membrane cellulaire, ce que la goutte de graisse neutre ne ferait peut-être pas. Il y a dans le sang un ferment capable de produire ce dédou- blement: la lipase d'HANBior. Mais, comme on n'a pas constaté dans le sang la pré- sence de glycérine, il se pourrait, ou qu'elle y fût brûlée immédiatement, ou que la graisse dédoublée se reconstituât immédiatement après sa sortie de la cellule, comme cela a lieu vraisemblablement pour une partie de la graisse intestinale quand elle traverse la surface de l'intestin, comme cela a lieu certainement pour l'albumine intestinale qui se dédouble en s'hydratant pour franchir la cellule, et de peptone rede- vient albumine dès qu'elle arrive au capillaire. Si, directement ou après dédoublement, la graisse s'oxyde complètement dans l'organisme, la formule de sa combustion est la suivante, en prenant encore comme type l'oléo-stéaro-margarine : Cb5Hi04O6 + 1360 = 55002 + 520- { gramme de graisse en brûlant consomme 2,9023 d'oxygène et produit 2,8140 de CO^ et 1,0884 de H"^0 avec dégagement de 9"*', 3. L'eau produite reste dans le corps,^ l'acide carbonique est éliminé . Les 104 atomes d'hydrogène de la graisse, en passant à l'état d'eau, fixent dans le corps 52 atomes de carbone de la graisse et les^ 6 atomes d'oxygène qui y étaient unis ont quitté l'organisme, soit une perte de 756 pour 860 de graisse. Ainsi, un gain de 832 et une perte de 756 : comme résultante un bénéfice de 76. La variation de poids est positive. Pour 1 gramme de graisse brûlée, on a 0,0884 d'augmentation de poids. Cependant, la combustion complète pourrait ne pas être la seule métamorphose que la graisse subisse dans l'organisme. Cl. Bernard admettait que la glycérine peut se transformer en glycogène, et Berthelot a vu, en 1857, le dixième du. poids d'un corps gras neutre se transformer en sucre, mais c'était par le fait de la fermentation de la glycérine : les acides gras n'avaient pas participé à cette métamorphose. Après la digestion, le plasma sanguin est laiteux; au bout de quelques heures, il est clair. Peut-être quelques gouttelettes de graisse se sont-elles brûlées; la plupart se sont déposées. Il s'en dépose probablement dans le tissu cellulaire; ce qui est certain,. GRAISSES. 761 c'est que la plus grande partie se dépose dans le foie. La graisse, d'origine alimentaire, se dépose dans le foie, elle ne s'y accumule pas : malgré la succession des repas qui ramènent le même phénomène, le foie ne s'enrichit pas indéfiniment en graisse. Nasse pensait que le foie détruit celte graisse, que c'est même dans ses cellules que se détruirait la graisse venue du tissu adipeux. A la même époque, en 1886, Seegex formulait celte opinion que le foie fait en etfet disparaître la graisse qui s'y dépose, mais que cette disparition résulte d'une transformation en glycogène, et non d'une combustion. Sans spécifier le lieu de la transformation, Chauveau a insisté sur les raisons qui rendent vraisemblable et même nécessaire cette métamorphose de la graisse non en glycogène, mais en sucre. Il a adopté la formule hypothétique que Berthelot avait donnée de cette transformation : il prend pour exemple la formation de glycose- aux dépens de la stéarine : Co7HH0O6 + 670 = 8C6Hi206 + 9C02 + 7H20 Ce serait une combustion incomplète, à la façon de certaines fermentations. Les chimistes, en général, ne se sont pas montrés favorables à cette manière de voir, qui a cependant pour elle le témoignage de la physiologie générale. Dans les graisses oléagineuses, la germination fait disparaître la graisse, le germe et les cotylédons utilisent cette graisse qui disparaît. On peut, par un artifice, saisir le premier stade de la transformation. Quand on place à l'étuve sur une flanelle humide une graine de ricin, et quand, la germination étant commencée, on enlève le germe, le travail ne cesse pas pour cela dans la graine. Les cellules de l'albumen montrent, à côté des gouttelettes huileuses qui diminuent, des grains d'amidon qui se multiplient. Il est probable que, dans les graines pourvues de leur germe, le même travail s'accom- plissait, mais que les ferments du germe transformaient cet amidon en sucre, qui était détruit pour fournir l'énergie nécessaire à la constitution de la matière du germe, en attendant que le développement des parties vertes rendît possible l'utilisation de l'énergie solaire. Le ver à soie, au moment où il passe à l'état de chrysalide, est riche en graisse, pauvre en glycogène. Peu à peu la chrysalide devient pauvre en graisse et riche en glycogène, sans avoir rien pu emprunter à l'extérieur, sauf un peu d'oxygène. La marmotte, pendant l'hivernation, perd sa graisse; mais son foie garde sa teneur en glycogène. La plante, comme l'animal, nous donne, par ces exemples, lieu de croire que c'est bien d'une transformation de graisse en glycogène qu'il s'agit, le sucre arrivant comme produit d'une transformation ultérieure (Bouchard). L'organisme animal n'est pas seulement capable d'absorber, d'assimiler et d'utiliser les matières grasses; il peut encore sécréter de la graisse. Chez les animaux supérieurs, ce pouvoir sécréteur appartient surtout à l'ecloderme et à ses dérivés glandulaires. L'étude histologique de l'épiderme a permis à Ranvier de mettre en évidence la surcharge graisseuse que présentent les cellules d'une de ses couches constitutives, le stratum granulosum. Le protoplasraa des éléments est infiltré par une substance émulsionnée sous forme de très fines gouttelettes et comparable à de l'huile (éléidine). La répartition et la transformation de cette substance huileuse constituent, pour l'orga- nisme, un véritable moyen de protection. Il en est de même pour le produit des glandes sébacées {sébum), qui recouvre la peau d'une couche de matièi'e grasse. Quant au produit des glandes mammaires, le lait, il est destiné, chez les vivipares, à fournir au nouveau-né les substances grasses [beurre), dont il a besoin pour parfaire son développement, quand il se trouve séparé de l'organisme maternel sur lequel il était greifé pendant la vie intra-utérine. Enfin certaines glandes, comme les capsules surrénales, le rein, le testicule, l'ovaire, contiennent dans leurs cellules épilhéliales des enclaves graisseuses, lécithiques pour la plupart, dont la signification physiologique, encore peu connue, est vraisemblable- ment en rapport avec des fonctions d'excrétion. P. E. LAUNOIS et MEILLÈRE. 762 GRAPHIQUE (Méthode)'. GRAPHIQUE (Méthode). PREMIÈRE PARTIE " La méthode graphique indirecte. I REPRÉSENTATION GRAPHIQUE DE L'ESPACE La connaissance de la forme de la sui'face terrestre se place parmi les premiers besoins de l'humanité. — Aussi, de tout temps, les pasteurs des peuples ont dû cher- cher à représenter par des lignes, sur une surface, la forme des contrées sur lesquelles s'exerçait leur domination et les itinéraires entre les principaux marchés. Dès la plus haute antiquité aussi les philosophes se sont préoccupés de figurer l'ensemble des parties connues de la terre suivant les notions qu'on en avait alors. L'origine de la figuration graphique de la surface terrestre, figuration qui porte le nom de carte géographique, se perd donc dans la nuit des âges. La fable nous raconte que le bouclier d'Achille était orné de ciselures géographiques. Les voyageurs contemporains nous ont appris que les indigènes des pays sauvages, auxquels ils demandaient des indi- cations, exécutaient pour l'intelligence de leurs réponses des croquis géographiques. Cartes géographiques. — Pour pouvoir tracer sur un plan la forme d'une certaine étendue de la surface terrestre, il faut savoir déterminer sur le plan la position de plusieurs points du terrain. La position d'un point est déterminée quand on connaît les distances qui séparent le point de deux droites fixes qui se coupent. Ces droites sont représentées d'une part sur le terrain et d'autre part sur une surface de papier avec une réduction connue. Du point considéré du terrain, on abaisse deux perpendiculaires sur les deux lignes repères tracées sur le terrain. On mesure la longueur de ces droites, et on les porte, avec une réduction convenable, sur le papier. — Les lignes repères constituent un système de coordonnées. En géographie ces coordonnées s'appellent longitude et latitude. Nous nous contentons de mentionner ces cvordonnées géographiques sans entrer dans des détails concernant cette question qui est hors du cadre de noire travail. Courbes d'égal niveau terrestre. — 1) Quand on veut représenter sur un plan la forme d'un terrain présentant des irrégularités d'altitude, on commence par représenter, sur le plan, la forme du terrain, et par déterminer, à l'aide des coordonnées géogra- phiques, la position des points remarquables. A côté de ces points on marque le chifTre qui correspond à l'altitude de ce point. En réunissant par des traits les divers points qui correspondent cà la môme altitude, on obtient des courbes qui s'appellent courbes d'égal niveau. Les courbes de niveau ne sont autre chose que la projection sur un plan du relief du terrain. Les divers points du plan représentent les pieds des perpendiculaires abaissées des points correspondants du terrain ; une courbe de niveau, c'est la projection d'une sur- face horizontale qui couperait le terrain ; l'ensemble des courbes de niveau représente la projection de plusieurs surfaces horizontales parallèles qui couperaient le terrain. Ce mode de représentation graphique a l'avantage de présenter immédiatement à l'œil la forme vraie du terrain. 2) L'emploi des courbes d'égal élément remonte à une date fort éloignée. Vers 166?) furent publiées en Hollande des cartes sur lesquelles des rourbes d'égal niveau mon- traient les légères inclinaisons du terrain et servaient à calculer la pente des eaux dans ce pays sillonné de canaux. BuACHE a fourni le principe de ce mode de représentation dans son Essai de géogra- phie physique en 17o2; les premières applications de ce principe avaient été publiées en 1737. Les cartes de Buache se rapportent aux profondeurs de la mer. DucARLA, en 1780, étendit aux reliefs terrestres le système de courbes de niveau de Buache. 1. Voir le Sommaire à la fin de l'article. GRAPHIQUE (Méthode). 763 En 1804, celte mélliode de représentation fut présentée comme une invention nou- velle par Dopain-Triel. II LES MATHÉMATIQUES ET LA MÉTHODE GRAPHIQUE Les constructions graphiques ont joué de tout (emps un très grand rôle dans les sciences mathématiques. Contentons-nous de citer simplement ici celles qui en font plus parti- culièrement un usage constant : La géométrie et la géométrie descriptive étudient graphiquement la forme et la gran- deur des corps. La géométrie analytique étudie les relations qui existent entre les propriétés géomé- triques et les propriétés analytiques des équations. Le calcul graphique a pour but, certaines quantités étant représentées par divers élé- ments géométriques du plan, de déterminer les quantités liées aux premières par des formules connues. — Grâce à cette science, on peut, en se bornant à l'emploi exclusif de la règle et du compas, c'est-à-dire en n'employant que la ligne droite et le cercle, effec- tuer par des tracés géométriques des calculs assez complexes. La statique graphique, qui n'est qu'une branche du calcul graphique, a particulière- ment pour objet l'étude de la composition des forces et la recherche des conditions de leur équilibre. — Grâce à elle, les problèmes usuels concernant la stabilité des construc- tions et la résistance des matériaux peuvent être résolus par de simples tracés, aussi expéditifs qu'élégants, qui, tout en comportant beaucoup moins de chance d'erreurs que les calculs longs et pénibles, donnent cependant les résultats avec un degré d'approxi- mation plus que suffisant pour les besoins de la pratique. Enfin, une science toute nouvelle, la nomographie, a pour but de remplacer des opé- rations délicates et difficiles, qui exigent des calculs numériques laborieux, par des images appelées abaques, qui traduisent les lois qui unissent un certain nombre de quantités simultanément variables, de façon à permettre, par une simple lecture, étant données des valeurs particulières pour toutes ces quantités, sauf une, d'avoir la ou les valeurs corres- pondant à celle-ci. III LA MÉTHODE GRAPHIQUE INDIRECTE DANS LA PRATIQUE 1) L'origine de la représentation graphique des phénomènes par des surfaces et des symboles est très ancienne. Nous pouvons citer comme exemple un document du vieux Mexique. Ce document raconte les événements survenus pendant le règne du roi Aca- mapicb. La durée de ce règne est représentée par une large et longue bande bleue, divisée en treize parties ; chacune de ces parties représente une année; comme il y a treize divisions, il en résulte qu'Acamapich a régné treize ans. Dans chaque division de la grande ligne se trouvent représentés par des symboles les événements importants de l'année. 2) Parmi les premières applications de la construction graphique à la représentation des phénomènes nous pouvons citer un Mémoire de Lambert sur les mouvements hygro- métriques. Ce mémoire a été présenté à l'Académie des Sciences de Berlin, en 1769. 3) Vincent et GonroN, en 1769, ont employé une notation graphique très intéressante, et qui est restée jusqu'à présent le plus parfait mode d'exprimer les phénomènes des allures du cheval. Voici en quoi consiste cette représentation graphique. Sur une sorte de portée musicale, composée de quatre lignes, se trouvent notés l'instant de chaque battue des quatre pieds et la durée de l'appui qui le suit. 4) L'emploi de la méthode graphique en statistique est très ancien. Playfair, dans son travail : Tableaux d'arithmétique linéaire du commerce des finances et de la dette natio- nale d'Angleterre, publié en 1789, insiste sur la clarté que donne la représentation graphique et montre que les courbes font apparaître clairement la signification d'une statistique. 76i GRAPHIQUE (Méthode). 5) En 1845, Ibry imagina une construction graphique très ingénieuse pour montrer la marche des trains. On trouve à l'École des Arts et Métiers, inscrite au catalogue de 1845, l'indication suivante: tableau régulateur pour rendre sensible la marche générale des trains du chemin de fer (à la lettre Y, page 371). 6) Berghaus, dans son allas, publié en 18o2, a représenté par des courbes construites dans un système de coordonnées rectilignes quelques données relatives à l'anthro- pologie, 7) Les courbes propres à représenter la loi d'un phénomène s'appellent aussi courbes physiques. L'utilité de ces courbes est très grande et leur emploi très fréquent dans toutes les sciences expérimentales et appliquées. La mécanique, la physique et toutes les sciences qui en dérivent ou s'y rattachent par quelque côté, ont énormément généralisé l'emploi des tracés graphiques qui leur ont rendu des services d'une importance extrême. Les courbes construites d'après la relation analytique qui exprime la loi commune d'nn phénomène s'appellent courbes représentatives. Les courbes construites d'après un certain nombre de valeurs ou d'observations, en donnant une solution graphique du problème de l'interpolalion, s'appellent courbes inter- polaires. 8) Les constructions graphiques, les diagrammes, les abaques, etc., rendent de très grands services à toutes les sciences ; leur usage prend une extension de plus en plus grande. La logique même emploie quelquefois des graphiques pour représenter des propositions et des raisonnements. Les représentations graphiques employées par la logique sont, en général, des cercles concentriques ou des ellipses qui s'enlre-croisent. En voulant choisir des exemples pour montrer comment on représente à l'aide des graphiques de simples faits d'observation et des lois, nons n'avons que l'embarras du choix. Pour mettre de l'ordre el de la clarté dans l'exposition des exemples choisis, nous commencerons par les moyens les plus simples de représentations graphiques, et, gra- duellement, d'exemple en exemple, nous irons vers des représentations de lois et de faits de plus en plus complexes. § L — Droites, colonnes, surfaces. A. — Un phénomène quelconque peut être représenté à l'aide d'une seule ligne divisée, c'est-à-dire à l'aide d'une échelle. Voici un exemple de ce mode de représen- tation : Le spectre solaire peut être représenté par un trait divisé en parties proportion- nelles aux longueurs d'onde ou aux fre'quences des vibrations. Ces deux modes de représentations se valent au fond; mais, en général, l'échelle des longueurs d'onde a été préférée et a été employée parce qu'elle a l'avantage d'être directement réalisée par les réseaux. Avec une échelle proportionnelle aux longueurs d'onde, les divisions de l'échelle du côté de l'infra-rouge sont énormes; avec un échelle proportionnelle aux fréquences des vibrations, les divisions de l'échelle du côté de l'infra-violet sont énormes. C'est là un inconvénient de ce mode de représentation. Pour éviter ces inconvénients. Lord Rayleigii {Nature, 1885, XXVII, 559) a proposé, le premier, l'échelle logarithmique. — Guillaume {Revue gén. des Se, 1899, 5) a montré l'intérêt qu'offre l'échelle logarithmique pour la représentation d'une grande étendue du spectre. La fig. 39 représente le tableau que Guillaume adressé de l'ensemble du spectre. Ce tableau comprend, en dehors du spectre visible, qui s'étend à peu près sur une octave (de 0,4 [X à 0,8 [>.), les deux octaves de l'ultra-violet (0,1 [x à 0,4 jj.) et six octaves de l'infra-rouge (0,8 [x à 61 [x), explorées dans ces dernières années. On voit, de plus, sur ce tableau, qu'il reste encore une région inconnue, comprenant environ cinq octaves, qui s'étend des ondes calorifiques les plus longues que l'on ait mesurées jusqu'aux ondes électriques les plus courtes (4""™) observées par Lampa. GRAPHIQUE (Méthode). '65 Ce tableau nous montre que la représentation du spectre à l'aide de l'échelle loga- rithmique présente les avantages suivants : a) Elle est absolument symétrique par rapport aux longueurs d'onde et évite ainsi tout développement exagéré de la figure vers Tinfra-rouge. Il en serait de même si l'éclielle logarithmique correspondait aux fréquences des vibrations; dans ce cas, on n'aurait pas un développement exagéré de la figure vers l'ultra-violet. b) Elle correspond exactement à la division par octaves, usitée en acoustique. A une même différence de longueurs des divisions correspond toujours le même rapport des longueurs d'ondes ou des fréquences. c) Elle permet de représenter sur une même feuille les propriétés spectrales d'un corps depuis l'extrême ultra-violet jusqu'à l'extrême infra-rouge, sous une forme qui les fait ressortir avec la même netteté dans toutes les régions du spectre. Cela tient à ce que les propriétés varient d'une manière beaucoup plus régulière quand on fait varier la longueur d'onde ytar progression géomctrigue au lieu de la faire varier par pro- gression arithmétique. B. — a) On peut représenter une quantité quelconque par une coZonne. En subdivisant une colonne, et en teintant différemment les divers segments, on peut représenter les 0.2 0> 0,8 Ifi. 10 fl. 100 [j. Longueurs d'onde. 18 19 20 I' 21 22 ■ 23 pV ' Octaves l 100mm In FiG. 30. — Représentation p;raphiquo du spectre solaire. diverses variétés qui font partie de la quantité représentée par la grande colonne. Une telle représentation des faits s'appelle représentation en grandeurs scalaires. Par exemple, pour représenter la mortalité par an pour mille habitants dans un pays, on procède de la façon suivante : on représente le nombre total des morts par une grande colonne et dans celle-ci on fait plusieurs subdivisions correspondant aux maladies qui ont provoqué la mort. La colonne totale de la mortalité est ainsi formée d'un ensemble d'assises. Voici un exemple de ce genre de représentation : La ventilation pulmonaire (fig. 40). Les explications indiquées sur la figure nous dispensent de tout commentaire. 6) En mettant côte à côte plusieurs colonnes représentant eu grandeurs scalaires un fait, on obtient un tableau qui rend saisissable au premier abord un phénomène complexe. Naturellement, les colonnes peuvent être verticales ou horizontales. Voici quelques exemples de ce mode de représentation. l.La figure 41 représente un tableau dans lequel les colonnes sont disposées en ran- gées horizontales. Les parties hachurées des colonnes indiquent les pertes subies, à la fin de l'inanition par 100 grammes des tissus les plus importants de l'organisme; les parties blanches montrent ce qui reste au moment de la mort. Ce tableau montre immédiate- ment que la graisse est le tissu qui subit la plus grande perle, tandis que le cœur est l'organe qui subit la moindre perte. 2. On trouve dans le livre de M.\rey {La Méthode graphique) un tableau remarquable de chronologie graphique représentant en grandeurs scalaires la durée des règnes des souverains de la maison de Hanovre, depuis Georges !*='' jusqu'à la reine Victoria. — Dans ce tableau, qui est extrait d'une intéressante publication de J. Russell {Chronological, 7bb GRAPHIQUE (Méthode). Air complcmentdii'c. In'ipiration ordinaire Air respiratoire Expiration ordinaire... . Air supplùmenlairi Eipiration maximale. -V- Capacite d'équilibre. PiG. 10. — La ventilation pulmonaire. historical and stafistical Diagram from the year 1600 to the présent time), une bande teintée forme'e de hachures représente la durée de la vie de chacun des souverains; cette bande commence à la Inspiration maximale — 7--1 1 \ 1 1 1 1 • > ^ 7 I I \ (jate de la naissance, qu on lit sur la ligne horizontale supérieure du tableau, etfinit à la date de la mort. La du- rée du règne est figurée par Capacité vitale. Une bande noire. — Les gé- néalogies se comprennent aisément, car la bande qui correspond à la vie de chaque souverain se détache de celle qui mesure la vie de son père comme une bran- ^ che se détache d'un tronc. Airr,:siduai { |=?yjp^r-L^=^ \ — Au bas du tablcau, une ligne horizontale, coupée en tronçons de longueurs va- riables, exprime, pour l'An- gleterre, les périodes alter- natives de paix et de guerre pendant l'espace de temps considéré.] 3. La figure 42, empruntée àCHAUVEAu, représente l'élasticité musculaire de l'homme quand le raccourcissement et la charge varient en sens inverse. Les résultats d'une expérience sont représentés par un groupe de trois colonnes. Dans chaque groupe, la colonne a représente le raccour- cissement musculaire, la colonne b, la charge soutenue ou la résis- tance équilibrée, la colonne c, la force élastique créée pour équi- librer la charge. La partie claire, à la base de cette dernière colonne, représente l'élasticité elTective ou le travail statique qu'elle accom- plit. 4. Citons encore, comme exem- ples de ce mode de représenta- tion, les tableaux à colonnes d'ARTHAUD et Butte représentant l'action du pneumogastrique sur la sécrétion rénale; ceux de Lau- LAXiÉ représentant la marche des combustions et du quotient res- piratoire en fonction du travail musculaire et du repos consécutif. ■M Graisse, 97 p. 100. Rate, 66, Foie. 53,7 Testicule, 40 - Muscles, 30,5 ■ Saiv). S7 Ticin, t'j.y - Peau, SO.û Jntesliii, IS Poumon, 17,7 Pancréas, 17 - Squelette, 13,9 S'jxt. ncrv., 3,2 - Cieur, 9,6 10 20 20 . 40 ÔO 00 70 80 90 100 C. — Au lieu de colonnes on peut employer des surfaces de formes F'«- ^'- — inertes du poids des tissus pendant l'inanition. diverses. Ainsi Levasseur, dans sa Statistique graphique de 1885, a employé des rectangles et des carres pour représenter, par des aires proportionnelles, d'une part les superficies, de l'autre, les populations des divers Etats du globe. Cheysson, dans ses travaux de statistique graphique, a donné aux surfaces représentatives du mouvement maritime des ports français, la forme d'éventails disposés en demi-cercle. Dans ce dernier mode de représentation, la mesure visuelle des rapports n'est pas seulement provoquée par des éléments superficiels, mais aussi par des éléments linéaires, car chacun des éventails est partagé par des secteurs dont les rapports mutuels de grandeur résultent simplement de l'arc qu'ils embrassent. GRAPHIQUE (Méthode). iiiT § II. — Coordonnées rectilignes. Le résultat des expériences qu'on fait pour déterminer la loi d'un phénomène con- siste en général en une série de chiffres que l'on réunit en un tableau. Ces chiffres permettent quelquefois d'établir une formule. Dans ce cas, la loi du phénomène se présente plus facilement à l'esprit que sous forme de tableau. Pour avoir la loi en 30 29 28 27 216 25 2if 23 23 21 20 t3 18 17 16 IS î*^ 13 12 II 10 9 1 6 S k 3 0 L ^ ^ _ ~^ — ~ ~ H~ ~ — ^K~ — ' — — — uni" — iH nlii" iin iiii 1 111 1 II I iiii I iiiiii I il I iiii I liL abc FiG. -12. — "Variations «le l'ëlaslicité musculaire do l'homme en fonction du raccourcissement et do la charge. question sous forme de courbe, il suffit de prendre les chiffres du tableau sur les axes d'un système de coordonnées. Rien de plus simple que de représenter un phénomène en coordonnées orthogonales, quand dans la loi de ce phénomène il n'entre que deux variables : il suffit de porter l'une sur l'abscisse et l'autre sur l'ordonnée et de réunir par une courbe les points de rencontre des abscisses avec les ordonnées correspondantes. Le choix des échelles de graduation des axes des coordonnées n'est pas indifférent. Le graphique, ou diagramme^ est mou, si l'échelle des ordonnées et trop faible par rapport à celle des abscisses, car alors les différences des hauteurs de la courbe sont peu accu- sées. — Le graphique au contraire devient 'criard, si l'échelle des ordonnées est trop forte, car alors certaines différences s'accentuent trop énergiquenient. Quand un phénomène présente deux ordres de variations : des variations repré- 768 GRAPHIQUE (Méthode). sentées par des valeurs faibles, d'autres, au contraire, par des valeurs considérables, on rencontre de grandes difficultés pour sa représentation graphique. — On ne peut le représenter autrement, qu'en ayant recours à deux échelles différentes, avec deux champs différents. Des représentations des phénomènes par une courbe construite à l'aide de coordonnées rectilignes se rencontrent à chaque pas dans toutes les sciences. — Nous en donnerons quelques exemples pour montrer les avantages considérables que présente, au point de vue de la compréhension des phénomènes, ce mode de représentation. A. Physique. — I. L'une des variables est le temps, l'autre l'espace. — 1) La représentation graphique du mouvement, c'est-à-dire de l'espace parcouru par le mobile avec le temps, s'obtient très facilement. Il suffit de marquer sur l'axe des abscisses les variations du temps, et sur l'axe des ordonnées les variations de l'espace parcouru. En réunissant par une courbe les points de rencontre des abscisses et des ordonnées, on obtient la courbe du mouvement. De cette façon, on voit mieux toutes les circon- stances d'un mouvement, même quand la loi du mouvement se présente sous la forme d'une relation analytique de la forme : S = f{t), entre le temps [t] et l'espace (s). Précisons la relation entre le temps et l'espace, en prenant l'équation suivante : S = cos t, comme représentant la loi du mouvement. Dans ce cas, la courbe représentative du mouvement est une sinusoïde. Cette courbe montre qu'à l'origine du temps, le mobile était à une distance de l'origine égale à 1, puis il se rapproche, repasse à l'origine lorsque ï =^, la dépasse d'une quantité égale à 1 et revient sur ses pas, accomplissant ainsi de part et d'autre de l'origine des oscillations d'égale amplitude. 2) La courbe obtenue en construisant S == /"(i) est désignée quelquefois sous le nom de courbe de l'espace. Il ne faut pas confondre une telle courbe avec la trajectoire du point mobile. — De même, il ne faut pas confondre la courbe de l'espace parcouru et la courbe de la vitesse avec laquelle l'espace est parcouru. La courbe des espaces permet de construire graphiquement la courbe de la vitesse, en déterminant la grandeur de la vitesse à tous les points de la courbe de l'espace, et en portant ces grandeurs comme ordonnées au-dessus de l'axe des x. Pour déterminer la grandeur de la vitesse à un point de la courbe de l'espace, on procède de la façon suivante: à chaque point de la courbe des espaces, on mène une tangente à cette courbe et on la prolonge jusqu'à la rencontre de l'axe des x ou d'une parallèle à cet axe. De ce point de rencontre comme centre, avec une longueur quel- conque comme rayon, on trace l'arc de l'angle formé par la tangente et l'axe des x; la tangente trigonométrique de cet angle donnera la valeur de la vitesse. Dans une série de déterminations successives, il faut, pour tracer les arcs de la série des angles obtenus, se servir de la même ouverture de compas. La série des tangentes de ces angles fournira les rapports des différentes vitesses, et permettra de construire la courbe des vitesses. — Celle-ci est obtenue de la façon suivante: à chaque division du temps prise sur l'abscisse, on élève une ordonnée égale à la grandeur de la vitesse correspondant à la même division du temps. La courbe de la vitesse d'un mouvement quelconque est représentée par l'équation : Y = f {t). En appliquant à la courbe de la vitesse une construction identique à celle qui a été appliquée à la courbe des espaces, on pourra construire graphiquement la courbe des valeurs de Vaccélération. 3) Parmi les applications pratiques de la représentation graphique d'un mouve- ment, citons les tableaux de la marche des trains. Avec un tel tableau, un employé sait exactement l'heure du passage de tous les trains en chaque point de la ligne, le lieu de croisement des trains qui montent avec ceux qui descendent, la vitesse absolue GRAPHIQUE (Méthode). 769 de chacun d'eux, les temps de marche et ceux d'arrêts, les heures de départ et celles d'arrivée. L'invention de tels tableaux est due à Ibry (1845). On trouve dans le livre de Marey un tableau représentant la marche des trains entre Paris et Lyon. Sur l'axe des ordonnées de ce diagramme, on lit la série des stations, c'est-à-dire les divisions de l'espace à parcourir; l'écartement des stations entre elles est proportionnel aux distances kilométriques qui les séparent. — Sur l'axe des abscisses sont comptées les divisions du temps en heures, partagées elles-mêmes en subdivisions de 10 minutes chacune. La largeur du tableau est telle que les 24 heures du jour y sont représentées, commençant à 6 heures du matin et finissant à la même heure du soir. A des instants successifs, le train occupe des points toujours différents du tableau. La série de ces points donne naissance à une ligne qui est descendante et oblique de gauche à droite pour les trains venant de Paris, tandis qu'elle est ascendante et oblique dans le même sens pour les trains montant sur Paris. Les arrêts sont représentés par des lignes horizontales en face des stations. — Les ra- pides sont tracés par un trait plusfort. — Le croisement des trains a lieu à l'entre-croise- ment des traits. II. — Variations des phénomènes électriques avec le temps. — En pre- nant le temps sur l'axe des abscisses, on peut prendre sur l'axe des ordonnées des longueurs proportionnelles soit à l'intensité du courant, soit au potentiel, soit^enfln à la puissance. Dans le premier cas, l'échelle des ordonnées représente des ampères, dans le second des volts et dans le troisième des watts. Les trois diagrammes représentant les variations de l'intensité, du potentiel et de la puissance, ayant une échelle commune, celle du temps, marquée sur l'abscisse, peuvent être superposés. C'est ce qu'on a fait sur la fig. 43. De cette façon, on saisit mieux d'un seul coup d'oeil les relations qui existent non seulement entre une des variables et le temps, mais aussi entre toutes les variables. La figure 43 représente les variations des éléments d'une pile du colonel Renabd. La courbe en trait continu représente le voltage, un volt correspondant sur l'échelle des ordonnées à 0™™5. La courbe en trait discontinu représente l'intensité du courant débité par la pile, un ampère correspondant, sur l'échelle des ordonnées, à une longueur de gmm Enfin, la troisième courbe, en pointillé, représente la puissance du courant élec- trique, un watt correspondant sur l'échelle des ordonnées à une longueur de 0™™25. ^,-'' '"•» ,.-'-" ' /' ■•-,. ■'' \ ^-'''' .^"^"^ "^^' \ -^ " 15' 30' 15' 30' 15' 30' Fig. 43. — Variations de l'intensité, du potentiel et de la puissance d'un courant électrique en fonction du temps. m. — Variations du volume d'un corps avec la température et en fonction du temps. — 1) En portant sur l'axe des abscisses d'un système de coordonnées le degré de température et sur l'axe des ordonnées les variations de volume rapportées au volume primitif à zéro, on obtient la courbe des variations de volume d'un corps en fonction de la température. C'est ce qu'on a fait pour obtenir les diagrammes des fig. 44 et 45. — La figure 6 représente, d'après Ermanx, les variations de volume de l'alliage de Rose (alliage formé de deux parties de bismuth, une de plomb et une d'élain). — En regardant cette figure, on voit dès le premier abord que la variation de volume pendant la fusion n'a aucune influence sur le volume final, qui serait celui d'un solide s'étant J 1 té régulièrement, DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 49 770 GRAPHIQUE (Méthode). car la ligne D E de dilatation semble être le prolongement de la ligne 0 A. — En examinant de près cette courbe, on voit que, pendant l'échaufïement, le volume présente un maximum à 43° (A), ensuite l'alliage se contracte rapidement et son volume présente un minimum à 68°. A partir de 68°, le volume augmente de nouveau jus- qu'à 93° (C) environ, où le métal est complètement fondu. — En continuant réchauf- fement, on provoque une dilatation rapide jusqu'à 100° (D) environ : ensuite la dilatation est régulière et la ligne D E qui la représente semble être la continuation de la ligne 0 A. La courbe de la fig. 4o représente, toujours d'après Ermann, les variations de volume 43 68 g3 ioo T Fig. 44. — Variations du volume de l'alliage de Rose. Fig. 45. — Variations du volume de l'eau. de l'eau en fonction de réchauffement. Les lignes A B et C D représentent les dilatations de la glace et de l'eau. Le point B, maximum, correspond à la fusion à 0° et le point M au minimum de volume à 4°. 2) On peut représenter sur un diagramme les relations qui existent entre les variations de volume et la température en fonction du temps. — C'est ce qui a été fait sur la fig. 46, empruntée à Guillaume. La courbe 0 A B C D représente les variations de volume d'une masse de verre qu'on chauffe successivement à des températures différentes (01, 02). — Sur l'axe des abscisses -V se trouve marqué le temps (T) ; B' e, ^' sur l'axe des ordonnées des di- 6; D minutions de volume, c'est-à- dire des contractions (— V). En analysant cette figure, on voit comment la contraction se produit lentement, suivant la courbe OA, quand la masse de verre est à la température ©i. — A une autre température, 02, le verre se dilate d'abord rapi- dement (courbe descendante) et ensuite se contracte lentement, suivant la courbe A B. Ramenée de nouveau à la température 0i, la masse de verre se contracte de nouveau, suivant la courbe B C. Enfin ramené à 02, le verre reprend les mêmes valeurs qu'à la fin du premier recuit à cette température. IV. — Statique des fluides. Température, volume et pression. — Les relations qui existent entre les variations de la température, du volume et de la pression ont été représentées graj>hiquement de la façon suivante : 1) La figure 47 montre comment Clapeyron a représenté l'état d'un corps dont le volume est v et la pression p à un instant donné. — Sur l'axe des abscisses d'un système de coordonnées se trouvent marquéesles valeurs v du volume et sur l'axe des ordonnées les valeurs j^ de la pression du gaz. A deux valeurs déterminées des coordonnées v ei p correspond un point figuratif (A) du plan. Fig. 46. — Variations des contractions ( — V) d'une masse de verre en fonction de la température et du temps. GRAPHIQUE (Méthode). 771 Si le point figuratif se déplace de A en B sur une parallèle à l'axe de 0 p, cela •signifie que, le volume du gaz restant constant, on a augmentéla pression en augmentant la température; si au contraire le point figuratif se déplace de JB en C suivant une parallèle à l'axe Ov,ce\a signifie que, la pression étant maintenue constante, un accrois- sement de température a provoqué un accroissement correspondant du volume. Suivant ce mode de représentation, on trace soit une série de lignes isothermes F B| |C A i FiG. 47. — Variations de volume d'un gaz en fonc- tion delà pression. FiG. 48. — Lignes isothermes. FiG. 49. — Lignes adiabatiques. (fig. 48), représentant les transformations d'une masse gazeuse à température constante, soit une série de lignes adiabatiques (fig. 49), représentant les transformations d'une masse gazeuse à chaleur constante. — La forme générale de ces courbes rappelle celle des hyperboles équilatérales. 2) La figure 50 représente une série de lignes isothermes qui montrent la relation qui existe entre le volume et la pression d'une vapeur à différentes températures. — Dans cette figure, les pressions, au lieu d'être marquées sur l'axe des ordonnées, AAÀ' B^ K B^\^ B" (t) (f) (-t"j C C" (' . 1 f f f" p Fig. 50. — Variations du volume et de la pres- sion d'un gaz à différentes températures. FiG. 5L — Lignes isothermes d'ANDREWs. comme dans les figures précédentes, sont prises sur l'axe des abscisses. —En examinant la branche de courbe A B de la ligne A B C D, correspondant à la température [t), on voit qu'elle indique que, au fur et à mesure que le volume diminue, la pression augmente suivant à peu près la loi de M.\riotte. — La droite B C, de la même ligne isotherme, parallèle à l'axe Ov, montre que si l'on continue à diminuer le volume de la vapeur, il arrive un moment où la force élastique, qui a toujours été en croissant, cesse d'aug- menter, et demeure invariable; en même temps la vapeur commence à se condenser en une goutte liquide. A ce moment, la vapeur saturante a atteint la force maximum corres- 772 GRAPHIQUE (Méthode). pondant à celte température. La branche C D de la courbe, qui est une droite sensible- ment parallèle à Op, représente les faibles variations de volume subies par le liquide provenant de la condensation de toute la vapeur sous l'influence d'une pression toujours croissante. Les courbes A'B'C'D', A"B"G"D", obtenues à des températures plus élevées (f, t"), sont analogues à la courbe A B G D que nous venons d'analyser. Les portions rectilignes B' C, B" G" de ces isothermes (correspondant à l'existence simultanée ^du FiG. 52. — Courbes de la compressibilité des gaz d'après Amagat. liquide et de la vapeur) diminuent de longueur à mesure que la température augmente. 3) La figure 51 représente un tableau de lignes isothermes construit par Andrews Dans cette ligure, les abscisses représentent les variations de volume d'une vapeur; les ordonnées, les variations de pression. Sur l'une des courbes GABL, l'ordonnée com- mune aux points A et B mesure la force élastique maximum à la température t, à laquelle a été construite cette isotherme; les abscisses u' et u des points extrêmes de la droite AB sont les volumes spécifiques de la vapeur et du liquide dans les mêmes conditions de température et de pression (f et t) ; au point A, la vapeur est saturée, la liquéfaction commence, au point B, elle est totale, et en un point intermédiaire M, les distancesiVB, MA sont proportionnelles aux poids du liquide formé et de vapeur restante. A une température supérieure t' , les points A' et B' se rapprochent; ils se con- fondent à la température critique en C où la ligne isotherme présente un point d'in- flexion et une tangente horizontale. La courbe qui joint les points A, A', G, B', B sépare le plan en deux régions. Dans GRAPHIQUE (Méthode). 773 l'intérieur de la courbe, en un point M, le fluide se présente simultanément sous les deux états. A une même température et à une même pression, correspondent une infi- nité de volumes entre u et u'. A l'extérieur de la courbe, une température et une pression données suffisent à définir le volume correspondant, et, si la température est supérieure à la température critique, les deux états distincts de la matière ne se montrent plus simultanément. Si l'on imagine que, par des transformations, on fasse suivre au corps la courbe PQ, le corps passera totalement de l'état gazeux à l'état liquide en c' sans aucune traosition .appréciable : il existe donc une continuité de l'état gazeux à l'état liquide dans toute cette région du plan. 4) La figure 52 représente les résultats des éludes d'Aii.^GAT sur la compressibilité ■des gaz sous des pressions très fortes et à température constante. Dans celte figure, les abscisses sont proportionnelles aux pressions (p),et les ordonnées sont proportionnelles au produit de la pression par le volume {pv). En examinant ce tableau, on voit que l'azote commence à se comprimer plus que ne l'exige la loi de Mariotte, comme Regnault l'avait annoncé. Cet écart passe par un uiinimum, puis il change de signe, de sorte que, aune pression très considérable, l'azote se comporte comme se comportait l'hydrogène dans les expériences de Regnault, et se •comprime moins que la loi de Mariotte ne l'indique. On retrouve ce minimum bien accentué pour tous les gaz étudiés par Amagat : air, oxygène, hydrogène, oxyde de carbone, formène, éthylène.Pour l'éthylène, ce minimum est placé tellement bas qu'il sort des limites de la figure. Celte courbe de l'éthylène, 1 réduite au -, se trouve représentée, en haut, dans un coin de la figure. La courbe de compressibilité a donc, pour tous les gaz, la forme générale suivante : Une branche descendante, un minimum, ensuite une branche ascendante. L'hydrogène, qui sur la figure paraît faire exception à celte règle, en réalité n'en fait pas. V. Wro- BLEwsKi a montré qu'on retrouve aussi pour ce gaz la branche descendante et le minimum de p v si l'on expérimente à de très basses températures. V. — Thermodynamique. Représentation graphique du travail. Cycle. — 1) Quand, à la suite des transformations qu'un corps subit, le point figuratif qui re- présente la relation entre le volume et la pression décrit d'abord l'arc A MB (fig. 53) et ■ensuite revient en A en décrivant l'arc BNA, c'est-à-dire quand le point figuratif décrit une figure fermée, l'état final du corps étant identique à son état initial, on dit que le -corps a parcouru un cycle fermé. 2) Soit AB (fig. 54) une courbe représentant la relation qui existe entre les varia- tions de volume et de pression d'un corps, le volume étant marqué sur l'axe des abscisses, la pression sur l'axe des ordonnées. Le travail du corps, qui a subi des trans- formations telles que le point figuratif décrit la courbe A B, a pour valeur l'aire curvi- ligne comprise entre la courbe, l'axe des volumes et les deux ordonnées extrêmes, c'est-à-dire AabB. Il est convenu de prendre comme positif le travail effectué par le corps quand le point figuratif décrit la courbe, en allant de A en B, et comme néyatif si \e point parcourt la courbe de B en A. 3) Quand un corps parcourt un cycle fermé, le travail a pour représentation (isométrique taire de la courbe qui représente le cycle fermé. Soit le cycle fermé A3fBiY(fig. 55). Menons deux tangentes parallèles à l'axe Op. Imaginons que le corps subisse la transformation d'une façon telle que le point figuratif décrive la courbe représentative dans le sens des aiguilles d'une montre. Pendant qu'il •décrit l'arc AMBle travail est positif et est représenté par Faire AMB6«; quand il revient de B en A, le travail est négatif et représenté par ANBba, qu'il faut prendre en signe •contraire, c'est-à-dire retrancher de l'aire AMBba. Le travail total est donc mesuré par l'aire de la courbe fermée (représentée sur la figure avec des hachures simples). Le travail est pris positivement quand le corps décrit un cycle fermé de façon que la trajectoire du point figuratif est parcourue dans le sens des aiguilles d'une montre; il »est pris négativement dans le cas contraire. m GRAPHIQUE (Méthode). 4) Parmi le nombre infini de cycles qu'on peut faire décrire à un corps, il est un cas particulier très intéressant : c'est celui qui a reçu le nom de Cycle de Carnot. Ce cycle représenté par la fig. 56, est foi'mé de deux portions d'isothermes infiniment voisines,^ ABet CD, aux températures Tt Ti, et de deux portions de courbes adiabatiques AD et BC, également très voisines. Si ce cycle est parcouru dans un sens, cela correspondra au cas 011 la chaleur se transforme en travail; s'il est parcouru en sens contraire, cela correspondra au cas où le travail sert à fournir de la chaleur. Un pareil cycle est entiè- Fia. 53. — Cycle formé. Fig. 54. — Graphique du travail. Fig. 55. — Représentation géomé- trique de travail dans le cas d'un cycle fermé. rement réversible et par conséquent le rendement du moteur thermique qui l'aura décrit sera maximum. 5) Pour montrer comment on interprète un cycle, nous allons donner deux exemples de cycles décrits par l'air de deux machines à air chaud. a) Dans la machine de Robert Stirling (1816), à laquelle correspond le cycle de la figure 57, il y a deux transformations à volume constant. Supposons d'abord l'air à une pression et à une température élevées ; soit A la position du point représentatif. Dans ïa première phase, l'air se détend à température constante 0i en poussant un piston P. Le point figuratif décrit le tronçon d'iso- therme A B, la machine fournit du travail et le foyer fournit de la chaleur pour main- tenir constante la température de l'air; Dans la deuxième phase, l'air déplacé par un piston auxiliaire P' imperméable à la chaleur, traverse un volume constant, le régénérateur de chaleur et s'y refroidit jus- qu'à atteindre une certaine température 02 : le point figuratif décrit la parallèle BC à l'axe des pressions : la machine ne fournit pas de travail. Dans la troisième phase, l'air est comprimé, à la tempéra- ture constante 02 par le piston P qui re- vient en arrière : le point figuratif décrit le tronçon d'isotherme CD, la machine consomme du travail et une source froide reçoit de la chaleur en maintenant l'air à la température basse 02. Dans la quatrième phase, l'air déplacé par le piston auxiliaire P' qui revient en arrière, traverse à volume constant les régénérateurs de chaleur et s'y réchauffe jusqu'à atteindre la température primitive ©i ; le point figuratif décrit la parallèle DA k Taxe des pressions : la machine ne fournit pas de travail. Tout est ainsi revenu à l'état initial. b) Dans le cycle de la figure 58 correspondant à la machine d'ERiccsox (1872-1856), .1 y a des transformations à pression constante. L'analyse de cette figure se rapprochant de l'analyse du cycle précédent, nous trouvons qu'il est inutile de la faire. 6) GiBBs a préconisé l'introduction en thermodynamique d'un diagramme différent du diagramme classique de Clapeyron, et que, depuis quelques années, certains ingé- P u x> Fig. 56. — Cycle de Carnot. GRAPHIQUE (Méthode). 775 nieurs emploient couramment dans l'étude des machines thermiques. Ce diagramme consiste à prendre pour variahles, non plus le volume spécifique v et la pression p, mais l'entropie S (rapportée à. l'unité de masse) et la température absolue T. On a pour la chaleur, dans le .■^ijstème aux variables ST, la représentation (jraphique qu'on avait pour le travail clans le diagramme de Clapeyron. Brunhes (B) (1901) a montré l'intérêt que présente le diagramme entropique, aussi bien en physique appliquée qu'en physique pure. Pour un corps bien déterminé et bien étudié, gaz parfait, gaz réel, mélange de liquide et de vapeur il n'est pas toujours facile, mais il est toujours possible de passer des variables (v, p) aux variables (S, T). Brunhes a étudié les propriétés essentielles du diagramme (S, T) et ensuite il en a montré l'application aux moteurs à gaz. Le mode de représentation géométrique de Willard Gibbs est plus rationnel que FiG. 57 et 58. — Cycles de deux machines à air chaud. celui qu'a imaginé Clapeyron. Il permet, en quelque sorte, de peindre aux yeux les lois de la thermodynamique, et les conditions qu'elles imposent aux diverses transfor- mations de la matière. Toutes les lignes tracées sur une surface thermodynamique de Gibbs représentent un changement réversible. On distingue des surfaces primitives, surfaces physiques, surfaces chimiques, lignes dHsodissociation ou lignes isochimiques. 7) Saussure, dans ses travaux sur la thermodynamique graphique (1895), a fait des essais de transformations thermodynamiques en choisissant les coordonnées de facjon que le plus grand nombre possible des éléments variables qui accompagnent ces traus- formations, tels que les coefficients de dilatation sous pression constante et sous volume constant, soient représentés graphiquement par des grandeurs géométriques, ne dépen- dant que de la forme et de la position du cycle de transformation rapporté à ces coordonnées. Dans le système de représentation qu'il a adopté, et que nous ne pouvons pas exposer ici, comme la plupart des éléments variables qui accompagnent toute transformation ont une signification géométrique, il en résulte une simplification dans la démonstration de quelques théorèmes thermodynamiques. VI, — Acoustique. — On représente graphiquement la distribution des pressions, à un instant déterminé, dans un tuyau d'orgue, en prenant comme axe des abscisses la longueur du tuyau et en portant de chaque côté de cet axe x y, sur l'ordonnée, la diifé- rence entre la pression dans la tranche correspondante et sa valeur moyenne, différence qu'on appelle élongation. On trace, pour un même instant, le système des ondes inci- dentes et celui des ondes réfléchies. La somme algébrique des ordonnées de ces courbes, 776 GRAPHIQUE (Méthode). 'qui correspondent à un même point de l'axe, donnera l'élongation réelle en ce point, à l'instant considéré. La figure 59 représente la forme des ondes sonores dans un tuyau fermé. La sinu- soïde S représente les ondes incidentes, et Si, cette courbe prolongée au delà du fond M. Les ondes réfléchies sont de même nature que les ondes incidentes dont elles proviennent et s'obtiendront, par conséquent, en prenant le symétrique de la partie Si dans le plan M. On voit alors que, dans les tranches n, ni, n-a..., les élongations compo- santes sont toujours égales et de même signe et s'ajoutent. Ces tranches sont fixes, leur distance mutuelle est d'une demi-longueur d'onde et la pression y subit des variations périodiques dont l'amplitude est le double de celle des ondes incidentes. Ces tranches constituent les nœuds. Au contraire, dans les tranches Vi, vo, v.î..., qui sont à égale distance des nœuds, les élongations sont toujours égales et de signe contraire. Leur résultante est toujours ^¥ ^a ^2 ''y M ^ -\ /^ "X a* y ^ ^ \ / ^ s^ S, /'' •^nS. .y > ^ / \ N ^ /S" s\ ^ ■'' *:!•-' FiG. 59. — Diagramme des ondes sonores dans un tuyau fermé. nulle, c'est-à-dire que la pression y reste immobile : vi, V2, V3, sont appelés les ventres. VIL — Optique. — 1) La répartition de l'énergie dans le spectre d'un corps peut être représentée graphiquement en prenant comme abscisses les longueurs d'onde et comme ordonnées l'énergie mesurée à l'aide d'un bolomètre. C'est ainsi que Lummer (fig. 60) a représenté la répartition de l'énergie dans le spectre d'un corps noir. En faisant la détermination de l'énergie, le corps noir étant porté à différentes températures, Lummer a tracé les différentes courbes superposées de cette figure. 2) La figure 61, empruntée à Rydberg, montre les rapports qui existent entre les valeurs de certains éléments du spectre émis par un corps et sa masse atomique. Les premières valeurs sont prises sur l'axe des ordonnées; les secondes, sur l'axe des abscisses. Voici un passage extrait du travail de Rydberg, qui fera comprendre l'importance de ce graphique : « On sait que quand la valeur et la masse atomique augmentent, les spectres devien- nent de plus en plus compliqués, mais l'expérience a montré jusqu'ici qu'à chaque raie au moins d'un spectre plus simple correspond toujours une raie au moins d'un spectre plus compliqué. De sorte qu'on peut dire en général que /e nombre d'ondes qui correspond à une forme de vibration quelconque est une fonction périodique de la masse atomique de Vêlement. « Oh peut donc former autant de fonctions périodiques qu'il y a de modes de vibra- tion différents dans un spectre quelconque et en outre toutes les constantes des équa- tions varient périodiquement. Comme ces fonctions suivent à peu près la même marche, il est toujours possible d'interpoler, avec une certaine approximation, la position d'une raie ou d'une série quelconque d'un élément, quand on connaît cette marche générale des fonctions. » VIII. — Solubilité. — 1) La solubilité d'un sel à différentes températures peut être représentée graphiquement, comme l'a fait Gay-Lussac. Sur les abscisses (fig. 62), est marquée la température, et on prend sur les ordonnées des longueurs proportionnelles aux poids de sel dissous dans un même poids d'eau à différentes températures. On GRAPHIQUE (Méthode). 777 détermine, enjoignant les extrémités des ordonnées, la courbe de solubilité du sel considéré. Il n'est pas nécessaire, pour construire cette courbe, de connaître les (juan- tilés de sel dissoutes à toutes les températures; il suffit d'avoir un petit nombre de Observé culé FiG. 60. — Répartition de l'énergie dans le spectre d'un corps noir porté à différentes températures. déterminations directes convenablement espacées. La courbe, une fois construite, peut servir pour reconnaître la solubilité aux températures intermédiaires. 2) Au lieu de rechercher, comme Gay-Lussac, les quantités de sel dissous dans 100 grammes de dissolvant, on peut rechercher la quantité de sel anhydre contenu dans 100 grammes de dissolution saturée, c'est-à-dire le quotient — ; — ; — r-. j : (Étard); ° ^ sel + dissolvant on a ainsi immédiatement la composition de la dissolution. On peut alors étudier la 778 GRAPHIQUE (Méthode). solubilité (l'un sel dans un intervalle de tempéralure beaucoup plus étendu, par exemple, 60 000 , 10» Vi p2 200 180 160 UO 120 100 60 60 fO 20 . i ; / 4 nJ ; -, l Cd P "é T( Hp] \H Ca ,Cj| ' Sri > / f Ct- \ Nx ^^ "' \ b './ 1 S e^J Ci/ s i T '/ Ga.. I 1/ '. M . ^^1 / ! 2J 1 Ce / i -^A u He! i^é/ Ca cj ' J '^,^, ^i \ ' \1 : 1 Sri M ;N,L K iRb/ •Vcs oV; sV S eV; Masses atomic|ues . FiG. 61. — Représentation graphique des relations qui existent entre les masses atomiques et les spectres des corps. jusqu'à la température de fusion du sel anhydre. On constate alors que la solubilité est toujours représentée par des droites inclinées sur l'horizontale. Le changement d'incli- FiG. 62. — Courbes de solubilité de différents sols. naison de la droite qui correspond cà la solubilité d'un sel paraît correspondre à un changement dans le degré d'hydratation du sel dissous. GRAPHIQUE (Méthode). 779 3) Parmi les travaux sur la solubilité des corps dans lesquels on trouve des représen- tations graphiques, nous citerons ceux de Charpy (voir Revue gén. des Sciences, 1893, p. 30) et de Le Chatelier (/(/., 1894, p. 36). Ce dernier a constaté qu'un corps a autant de courbes de solubilité distinctes qu'il peut présenter d'états différents. Ainsi, les différents hydrates d'un môme sel, ses différents états chimiques ou physiques, n'ont pas, à la même température, la même solubilité. De même, deux états allotropiques d'un même corps, l'iodure jaune et l'iodure rouge de mercure, le nitre prismatique et le nitre rhomboédrique n'ont pas la même solubilité. B. Statistique, Industrie, Finances, etc. — 1) La statistique graphique a pris, de nos jours, un très grand développement. Des exemples de son application se trouvent par- tout. On trouve dans La Méthode graphique de Marey un exemple très ancien, le tableau construit par Playfair (1789) pour représenter les accroissements successifs de la dette d'Angleterre. Dans ce tableau les abscisses représentent le temps et les ordonnées les valeurs de la dette. 2) Voici la liste de quelques travaux où l'on trouve d'intéressantes applications de la méthode graphique à l'industrie, au commerce, à l'agriculture, etc. : — Les cartes agronomiques de A, Hébert {Revue gén. des Se., 1893, 286). — Les produits végétaux du Congo français (Leconte, ibid., 1894, 803). — Culture de l'oi-ge de brasserie et du houblon (A, Larbalétrier, ibid., 1895, 965). — État actuel de la vinification en France (L. Hoos, ibid., 1895, 798). — La vinification en Algérie et en Tunisie (J. Dugast, ibid., 1895, 140). 1. Courbe de la richesse saccharienne du jus; 2. Courbe de l'acidité; 3. Courbe de la température pendant la fermentation. — État actuel de la sucrerie en France (L. Lindet, ibid., 1895, 224), Avec les autres courbes suivantes : 1. Piix d'achat de la betterave en fonction du sucre; 2. Épuration du jus; 3. Extraction du jus ; 4. Évaporation du jus et cuisson du sirop; 5. Prix de la main-d'œuvre en fonction du sucre extrait; 6. Carte; 7. Tableau représentatif des productions françaises, indigènes, coloniales et étrangères. — Influence de la température sur le rendement et la richesse en sucre de la bette- rave {Revue gén. des Se, 1896, 638). — Tableaux des alcools {ibid., 802). — L'industrie française des pêches maritimes (Roche, ibid., 1895, 109). On y trouve des courbes et des colonnes scalaires. — L'industrie des suifs commerciables et industriels (F. et J. Jean, ibid., 1895,. 421, etc.). — L'avenir géologique de l'or et de l'argent (L. de Launay, Revue gén. des Se, 1895, 369). — Industrie des chaux hydrauliques et des ciments en France (Candlot, (6ic?., 331-332 . — État actuel du travail du fer et de l'acier (E. Demenge, ibid., 885, 931). Avec de nombreux diagrammes, par exemple un diagramme montrant la marche de la tempé- rature pendant l'opération du recuit. — Nouvelles recherches sur la métallurgie du bismuth (Ed. Mathey, Soc. Roy. de Londres et Rev. gén. des Se, 1893, 90). — Variation de la superficie cultivée en plantes oléagineuses herbacées de 1840-95. Courbes des graines oléagineuses {Rev. gén. des Se, 1897, 425, etc.). — Commerce du cacao depuis 1850 {ibid., 472). — Population porcine des principaux États {ibid., 619). — Parfumerie {ibid., p. 660). — Industrie de l'ivoire {ibid., p. 822). 780 GRAPHIQUE (Méthode). — Industrie du fer et de l'acier {ibid., 1898, 293). — Industrie de la soie {ibid., 573). — Le commerce de la Grèce {ibid., 903). — Le commerce de la Turquie {ibid., 941). — L'olivier en France {ibid., 682). — La pomme de terre {ibid., 27). — Tonnage des voies navigables {ibid., 1896, 823). — Tonnage des chemins de fer {ibid., 825). — Notes statistiques sur la Tunisie {ibid., 1209). — Carte de la population et des races en Tunisie {ibid., 975, etc.). — Disposition de la marche dans la brousse du Soudan et Dahomey {ibid., 1897, 895). — Courbes des débits des filtres. Influence de la façon dont se fait le nettoyage (/6ici., 1891,400. 3) La méthode graphique vient de recevoir une nouvelle application, assez ingé- nieuse, dans un ouvrage de P. Ayné (1904) traitant des opérations financières. — Cet ■auteur montre que la méthode graphique peut rendre de grands services aux financiers dans la direction des échelles de primes, sur lesquelles les méthodes numériques ne donnent pas d'indications générales. Les constructions graphiques mettent en évidence, d'une façon gériéraJe : les limites au delà desquelles l'opération cesse d'être avantageuse; les conditions les plus favo- rables pour l'entreprendre; le maximum de gain qu'on peut espérer; l'étendue des risques auxquels on s'expose. Elles renseignent, en outre, exactement le financier sur sa position à chaque variation de cours et sur les opérations qui lui restent à faire pour se liquider. L'exposé des conventions, très simples, représentant les opérations fondamentales des marchés à terme ferme et des marchés à prime, a été fait par P. Ay.\é dans un article intitulé : Nouvelles applications des méthodes graphiques à l'étude des opérations financières {Revue générale des Sciences, 1904, p. 733-740). 4) Babinet {Rev. gén. des Se, 1894, 491) a construit le graphique des rivières tor- rentielles et des rivières tranquilles en prenant sur l'axe des ordonnées la hauteur du niveau de l'eau lue à une certaine heure sur une règle verticale plongée dans l'eau; et en marquant sur l'axe des abscisses les jours. On obtient ainsi des diagrammes repré- sentant des crues d'eau. 5) On a représenté graphiquement les erreurs faites par un tireur envoyant des balles dans un cible, en représentant sur l'axe des abscisses les écarts, et, en construi- sant, sur chaque fragment fini de l'abscisse comme base, un rectangle dont l'aire est égale au nombre des écarts positifs observés dans les limites de la base. (Voir Violle, Physique, I, p. 7 et 10). G. Physiologie. — 1. Une des variables est le temps. — Les représentations gra- phiques des variations d'un phénomène physiologique en fonction du temps sont d'un emploi courant en physiologie et en clinique. Rappelons seulement les courbes des variations diurnes de la température, de la fréquence des pulsations, du nombre des mouvements respiratoires, du poids, delà quantité d'urine éliminée, etc. Voici quelques exemples de ce genre des courbes : 1) La figure 63 représente, d'après Charles Richet, l'influence de l'alimentation sur les échanges. Sur l'axe des abscisses se trouvent marquées les heures; sur l'axe des ■ordonnées sont marquées, en chifTres absolus, par heure, d'abord la ventilation, en litres (350, 400 litres, etc.), puis la quantité d°acide carbonique produit en litres (13, 14 litres, etc.), enfin la quantité d'oxygène absorbé (15 litres, etc.). La courbe en trait plein représente les variations de l'acide carbonique; la courbe en tirets représente les variations de la ventilation ; enfin la courbe en tirets et points représente les variations des quantités d'oxygène absorbé. 2) La figure 64, empruntée à Waller {Traité de Physiologie), représente, d'après BiDDER et ScHMiDDT, la diminution de poids et l'excrétion journalière d'un chat en ina- nition. L'unité de l'échelle linéaire n'est pas la même pour toutes les courbes ; celle GRAPHIQUE (Méthode). 781 qui correspond à la courbe des variations du poids est beaucoup plus petite que celle FiG. 63. — Variations des échanges respiratoires (suivant l'alimentation). qui correspond aux courbes des variations de l'urée et du carbone. — Remarquons encore que les courbes de cette figure, au lieu d'être représentées par un trait continu. Carbone. Poids (la corps . Urée. Jours. ^2 38 IÔ73 1 IX III IV V VI va, vai IX x xi :ai. ^on xiv ;cv^ xvi xvn jotu FiG. 64. — Variations de la diminution do poids et de l'excrétion journalière d'un chat en inanition. sont en gradins. Les chiffres donnés parles observations sont représentés par un trait. Les valeurs des ordonnées sont marquées à côté de chaque trait. 3) La figure 60, empruntée, comme la précédente, au livre de Waller, représente le 782 GRAPHIQUE (Méthode). poids et la surface du corps à diffe'rents à^es et les quantités nécessaires d'éléments nrotéiques, en grammes, par kilo de poids du corps. — Sur l'axe des abscisses sont marquées les années (de 1 ù 30 ans). La courbe PP représente les variations du poids du corps : un millimètre de l'ordonnée correspond à un kilo. — La courbe SS représent Ne" — wn5.*«oIC mètres. Sa vitesse de translation est en général de 5 millimètres par seconde. Le volant régulateur de vitesse, placé sur l'axe du cylindre mis en mouvement par un mécanisme d'horlogerie, présente des ailettes qui plongent à demi dans de l'eau glycérinée. En fai- sant plonger plus ou moins les ailettes, on peut varier la vitesse de translation du papier. L'appareil de Hering se compose, de même que l'appareil de Marey, de deux cylindres sur lesquels peut être tendue une bande de papier. — • L'enregistrement se fait sur le papier quand il passe sur le cyliudre principal. Ce cylindre est mis en mouvement par un mécanisme d'horlogerie. — Tout l'appareil peut être déplacé de haut en bas, afin que toute la hauteur de la bande de papier puisse être employée. — Cet appareil a été construit par Roïhe. Dans l'appareil de HOrthle le support des deux cylindres, constitué par une forte tige métallique, présente une articulation en forme de genouillère, ce qui permet de placer l'appareil dans différentes positions. — La hauteur des deux cylindres est de 20 centi- mètres; l'un des deux cylindres est mis en mouvement par un mécanisme d'horlogerie. — La longueur de la bande de papier peut varier de 185 à 320 centimètres. La vitesse de translation du papier varie de 5 centimètres à 1™,45 par seconde. Cet appareil a été construit par Alrrecht (de Tiibingen). Zimmermann a construit un appareil semblable au précédent, mais il a remplacé le mécanisme d'horlogerie par un moteur électrique. L'appareil de Palmer peut être mis en mouvement par un moteur quelconque. Le KymograpMon d'EpsxEiN (1896) est mis en mouvement par la chute d'un poids de 1 à 9 kilos selon la vitesse qu'on veut imprimer au papier. — Un régulateur à ailettes permet de régler le mouvement. — On peut varier la vitesse non seulement à l'aide de poids moteurs, mais aussi à l'aide des roues d'engrenage. La vitesse minimum est de 5 millimètres par seconde ; la vitesse maximum est de 150 millimètres par seconde. Magnus (1902) a fait construire par Runne (de lleidelberg) un appareil analogue à celui de Hering, de Brodie, etc., pour les inscriptions de longue durée. — La partie motrice est représentée par un mécanisme d'horlogerie. — Les deux cylindres, sur lesquels est tendue une bande de papier enfumée, longue de deux mètres, sont placés à 75 centimètres, de distance. La hauteur des cylindres est de 18 centimètres; leur périphérie, de 50 centimètres. Les variations de vitesse s'obtiennent à l'aide des ailettes du régulateur (système Runne). On varie les ressorts qui attachent les ailettes. — On peut avoir 10 vitesses dif- GRAPHIQUE (Méthode). 803 férente?. La vitesse maximum donne 03 millimètres par seconde ; avec la vitesse minimum un millimètre correspond à une seconde. Cet appareil présente le grand avantage de n'être pas cher comme les autres. 2. — En général, quand on veut avoir l'enregislrenient des mouvements sur papier sans fin, on [)rend des bobines sur lesquelles est enroulée une longue bande de papier, et on les adapte à un mécanisme moteur qui, mettant une des bobines en mouvement, provoque le déroulement du papier, et son enroulement sur l'autre bobine. Les cylindres enregistreurs décrits précédemment peuvent facilement être transformés en appareils enregistreurs de longue durée. Il suffit pour cela d'enlever leur cylindre et de le rem- placer par des bobines, ou bien, tout en le gardant, de disposer à côté de lui une bobine magasin à papier et une autre bobine destinée à recevoir la bande de papier qui, partant FiG. 82. — Cvliudre de Chauveau et Marey, modifié par Fr. Franck. de la bobine magasin, pnsse sur le cylindre et va s'enrouler sur la bobine vide. — L'enre- gistrement des mouvements d'une plume se fait sur la feuille pendant son passage sur le cylindre. Les appareils de Ludwig-Baltzar et Blix sont pourvus du dispositif nécessaire au pla- cement des bobines. Les constructeurs font des appareils spéciaux à bobines. Dans le catalogue de ZiMMERMANN (de Leipzig), on peut voir un grand nombre d'appareils construits sur le même principe. — Voici ta description de quelques appareils de ce genre : Le Kymoijraphion de Baltzar (laboratoire de Leipzig) est indépendant de son méca- nisme moteur. Celui-ci, qui peut être un mécanisme d'horlogerie, ou bien un moteur électrique, à vapeur, ou autre, transmet son mouvement, à l'aide d'une courroie, à une grande poulie. Cette poulie met en mouvement un arbre horizontal (w). Sur cet axe il y a un galet (f) qui roule sur un plateau (s) avec friction. — Le plateau et l'axe vertical (l) qu'il porte est mis en mouvement de la sorte. — Une bande de papier, large de 17'='", 5, passe sur le cylindre fixé sur l'axe du plateau; la bande est pressée par deux galets (p',p'-) sur le cylindre; elle est de la sorte forcée de se déplacer en se déroulant 804 GRAPHIQUE (Méthode). d'une bobine (»•') pour s'enrouler sur une autre (r-) qui est mise en mouvement au moyen d'une corde qui s'enroule d'une part à un disque (sch^), qui se trouve à sa base, et d'autre part sur une poulie de l'axe qui tourne. — Un cylindre métallique placé à côté de l'axe sert à guider le papier. — On varie la vitesse de translation du papier, en variant, comme dans l'appareil de Ludwig-Baltzar, la position du galet sur le plateau. Un dispositif spécial {d) sert à établir un bon contact entre le galet et le plateau. L'appareil d'vluBEUT et Angelucci se compose de plusieurs cylindres sur lesquels passe la bande de papier. La bande de papier se trouve enroulée sur le cylindre I, de là elle passe sur les cylindres II et III qui servent de guide, ensuite sur le cylindre IV, sur lequel se fait l'enregistrement, et enfin elle va s'enrouler sur le cylindre V qui est animé d'un mouvement de rotation. — Sur ce dernier cylindre, l'extre'mité de la bande de papier est fixée à l'aide d'une lame élastique, d'après le procédé de Trauhe. L'appareil de Francois-Franck et Galante se compose d'un bâti dans lequel sont dis- posés trois cylindres R R' R" sur lesquels se développe d'une façon continue le papier. Ce papier, placé en réserve sur un touret, est exactement appliqué sur les cylindres par un système de rubans analogue à celui qu'on emploie dans les presses à imprimer pour conduire le papier; un tendeur sert à régler la tension de ces rubans. Trois pignons, calés dans un même plan sur cbacun des arbres des cylindres R R' R", engrènent avec une roue dentée actionnée par un pignon commandé par une cbaine venant du moteur. Les trois cylindres sont animés d'un mouvement parfaitement uniforme. Les styles inscripteurs sont en rapport avec le papier dans sa partie disposée en pupitre. Le papier est noirci à son passage sous le cylindre inférieur R" de la façon suivante : Parallèlement à une génératrice de ce cylindre est disposée dans un cadre une vis à deux pas, de sens contraire, entraînant un chariot porteur d'une grosse bougie dont la position de lafiamme est convenablement réglée. Un double déplacement (aller et retour) de cette bougie noircit une bande de papier dont la longueur est le dixième de la circon- férence du cylindre. Sur la surface de ce cylindre sont placés dix taquets régulièrement espacés. Lorsqu'un de ces taquets rencontre le levier de commande de l'appareil de noircissage, la vis à deux pas est embrayée et elle entraîne le chariot porteur de la bougie; celui-ci, à la fin de son mouvement de retour, c'est-à-dire à son point de départ, en rencontrant une butée, détermine le débrayage de la vis. Le chariot reste alors immobile jusqu'à ce qu'une nouvelle longueur de papier soit déplacée et que le taquet suivant détermine une nouvelle mise en marche de l'appareil de noircissage. La fixation est obtenue par le passage dans un bassin contenant du fixatif; des galets assurent l'immersion du papier dans le bain. Pour aider l'évaporation de l'alcool, le papier passe ensuite sur une plaque chauffée. Comme nous venons de le voir, dans l'appareil de François-Franck et Galante, l'enre- gistrement, au lieu de se faire à l'encre, comme dans les appareils à bobines, se fait sur une bande de papier noirci, ce qui permet d'enregistrer des mouvements très délicats et rapides. Nous retrouvons, de même, dans l'appareil de Lumière (1900) un dispositif intéressant pour l'enfumage et le vernissage continus de la bande de papier. Citons encore parmi les enregistreurs de longue durée, les appareils de Roussy (1898) dont l'un se prête aux inscriptions sur papier enfumé, et l'autre aux inscriptions à l'encre. Jansen(1894) a fait construire par Richard un météorograplie à longue marche, destiné à l'observatoire du Mont-Blanc et dont le mécanisme de l'appareil enregis- treur est intéressant. Tout l'instrument est actionné par un poids de 90 kilogrammes, descendant de 5 à 6 mètres en 8 mois. Ce poids donne le mouvement à un pendule qui communique, en le réglant, le mouvement à l'appareil. Tous les mouvements de l'appareil sont donnés par un arbre horizontal qui reçoit son mouvement du pendule, à raison de un tour en 24 heures, et le communique aux bobines et aux autres organes des enregistreurs. Les bobines, qui portent le papier, se déroulent avec une vitesse variable pour chaque instrument. GRAPHIQUE (Méthode). 805 3. — Parmi les appareils enregistreurs à inscription de longue durée, citons aussi les polygraphes qu'on emploie en clinique pour l'enregistrement simultané des battements du cœur, du pouls et de la respiration. Dans le polygraphe de Marey, une bande de papier, large de 10 centimètres et longue de 15 à 20 mètres, est enroulée sur une bobine. Un cylindre, mis en mouvement par un mécanisme d'horlogerie, entraîne le déroulement de la bande de papier. Le polygra-phe de Coop (1896) se compose d'un mécanisme d'horlogerie qui, à l'aide d'un dispositif spécial de roues d'engrenages, permet d'avoir des vitesses variables : 0",60, l'°,20, 1^,70 par minute. La bande de papier est entraînée sur une plate-forme par deux galets appuyés par des ressorts. Cette plate-forme est en deux pièces qui peuvent être écartées, de sorte que sa longueur peut atteindre le double de sa largeur primitive, L'intervalle entre les deux pièces est comblé par des plaques situées sur la plate-forme et qui sont poussées par des ressorts à la place qu'elles doivent occuper dans l'intervalle ouvert entre les deux parties qu'on écarte. Ce dispositif permet d'employer des bandes ayant 75, 100 et liiO millimètres de largeur. Le même mécanisme d'horlogerie qui met en mouvement le papier, commande aussi le mouvement d'un métronome, qui, à l'aide d'une transmission à air, que nous étudierons plus loin, enregistre ses mouvements sur le papier. La hauteur totale de cet appareil est de 10 centimètres ; sa base présente un côté de 8 centimètres. 4. — Dans le récepteur du télégraphe inscripteur de Morse et dans beaucoup d'autres appareils employés en météorologie et en physique, le mécanisme qui commande le déroulement d'une bande de papier est le suivant : La bande de papier est serrée entre deux cylindres, dont l'un est mis en mouvement par un appareil d'horlogerie et dont l'autre est libre sur son axe ; les deux cylindres tournent nécessairement en sens inverse et entraînent la bande de papier à la façon d'un petit laminoir. Au-dessus de la boîte qui contient le mécanisme d'horlogerie se trouve la bobine sur laquelle est enroulée la bande de papier à provision. § IL — Appareilii enregistreurs arec plaque animée d'un mouvement de translation. A. Pendule enregistreur {Pendelmyographion). — Pour faire l'étude de certains phénomènes de très courte durée, par exemple l'étude de la période latente, les physio- logistes emploient, au lieu d'un cylindre enregistreur, une plaque flxée à l'extrémité inférieure d'un lourd pendule battant la seconde. L'enregistrement des mouvements se fait sur une plaque de verre noircie avec du noir de fumée ou bien sur une feuille de papier noircie collée sur la plaque du pendule. Les abscisses des tracés sont des courbes dont le rayon est égal à la longueur du pendule. Le premier pendule enregistreur a été imaginé par Fick. L'axe de son Pendelmyo- graphion, qui était long d'environ un mètre, reposait sur deux petites roues pour que le frottement fût très faible. A l'extrémité de la plaque de verre portée par le pendule, se trouvent, à droite et à gauche, deux pointes qui vont s'accrocher à deux crochets fixés à droite et à gauche sur le support du pendule. Le pendule reste immobile, dans une position oblique, à droite ou à gauche, selon (ju'il est accroché par l'un ou l'autre crochet. En tirant le crochet qui fixe le pendule, celui-ci commence à osciller, mais, arrivé du côté opposé, il est immobilisé par le crochet qui se trouve là. L'enregistrement du mouvement étudié a lieu pendant l'oscillation simple etiectuée par le pendule. Pendant son oscillation, les crochets de l'extrémité du pendule ouvrent un contact électrique qui se trouve placé sur le support de l'appareil. Helmholtz a perfectionné l'appareil de Fick en rendant possible l'enregistrement de plusieurs tracés sur une même plaque. Pour cela il a fait la plaque mobile. Pour que ce changement de position de la plaque n'entraîne pas un changement du centre de gravité du pendule, et par conséquent un changement des oscillations, il a ajouté au pendule une plaque compensatrice qui descend quand la plaque sur laquelle se fait l'enregistrement monte. Les deux plaques sont mobiles sur des rails ; leur mouvement 806 GRAPHIQUE (Méthode). est commandé par un système d'engrenage. Il suffit de tourner une manivelle pour que le mouvement des plaques ait lieu. Dew-Smith a fait construire aussi un pendule enregistreur. Dans cet appareil un électro-aimant, mobile sur un axe gradué derrière le pendule, maintient le pendule immobile. — Eu déplaçant l'électro-aimant, on peut varier l'amplitude de l'oscillation du pendule. Sur la plaque enregistrante du pendule du King's Collège Laboratory de Londres on peut enregistrer 40 tracés superposés. — L'inscription se faisant toujours au même endroit, correspondant au centre de gravité du pendule, les tracés ont tous la même courbure et les durées sont représentées par des abscisses égales. — La vitesse du mou- vement pendulaire peut être variée, en changeant la position des crochets qui fixent la plaque dans une position obliqua. La vitesse maximum est de 0",00028 de seconde par millimètre de surface ; la vitesse minimum est de 0",0023. — Une lige qui se trouve à la partie inférieure du pendule sert à rompre un courant électrique, comme dans les pen- dules de FiCR et de Helmholtz, La vitesse de translation du pendule est calculée d'après la formule suivante : = 0.^^ Connaissant ch, la corde de l'arc décrit par le centre de gravité, /, la longueur du pendule simple équivalent, et g, on voit qu'il est facile de calculer la vitesse du pen- dule. Sur la plaque du pendule, la vitesse n'est pas la même aux extrémités de l'oscillation et au milieu; si la vitesse est de 0", 000383 par millimètre au centre, elle sera de 0", 0003912 aux extrémités. — Au milieu de la plaque, sur une longueur de 5 centi- mètres la vitesse paraît uniforme. Les pendules que nous venons de décrire sont des instruments encombrants et fixes, étant scellés au mur pour éviter les oscillations irrégulières. On a construit aussi des pendules petits et transportables. — Le pendule enregistreur de WuNDT est un appareil de ce genre. Le pendule de Putnam permet d'avoir des tracés [superposés sur la plaque en faisant le déplacement vertical de tout l'appareil. — A l'aide d'une roue, d'un pignon et d'une corde, on peut, en tournant une manivelle qui se trouve derrière l'appareil, faire monter dans un cadre le support du pendule. — Ce déplacement se fait facilement; car un contre- poids équilibre le pendule. La plaque enregistrante du penduleTest émaillée; sur sa surface se trouvent tracées des lignes divergentes qui représentent les ordonnées des tracés. Les abscisses, étant donnée la petite longueur du pendule, présentent une courbure très accentuée. La plaque est maintenue immobile à droite et à gauche par des crochets fixés sur des axes ayant une courbure égale à celle de l'arc décrit par la plaque enregistrante. Pour faire l'étude de la contraction des muscles de l'homme, Mendelssohn a employé une sorte de pendule enregistreur dont voici la description : Sur une planchette rectangulaire est articulée une charpente métallique susceptible de se reployer en s'accolant à la planchette pour rendre l'appareil peu encombrant et portatif, ou bien de se déployer en formant une sorte de trépied au sommet duquel est suspendu un autre trépied semblable qui oscille librement à son intérieur. A sa partie inférieure, le trépied oscillant porte une plaque métallique courbée suivant une circon- férence qui aurait l'axe d'oscillation pour centre. C'est sur cette plaque que le tracé myographique sera recueilli. Pour cela on le recouvre d'un papier que l'on fixe avec deux agrafes, et qu'on noircit à la fumée, puis, portant le trépied intérieur du côté de la branche unique du trépied extérieur à la rencontre d'un ressort, on pousse la plaque contre ce ressort, et on l'y accroche. En appuyant sur une détente, on dégage le crochet qui maintient la plaque, et, par la détente du ressort, celle-ci est projetée d'un mouve- ment accéléré d'abord, puis uniforme, aussitôt que le ressort est complètement détendu. A partir de ce moment s'inscrivent les indications myographiques, et la plaque, ayant achevé sa course et traversé l'intervalle des deux branches du trépied extérieur, reste GRAPHIQUE (Méthode) 807 fixée dans cette position par un encliquetage. — A l'intérieur d'une cavité creusée dans la planchette support se trouvent les appareils enregistreurs : 1° Un clironograpiie, simple tige vibrante rnunie à son extrémité d'une masse pesante et d'un style inscripteur : cette tige, déviée de sa position, est maintenue par la même pièce qui retient la plaque oscillante; elle devient libre en même Len)ps que la plaque ; elle vibre 100 fois par seconde. 2" Un tambour de Marey est placé à côté du chronographe. La plaque rencontre dans sa course une petite tige métallique qui joue le rôle d'in- terrupteur. On détermine le moment où l'excitation se produit par la méthode de Helmholtz. B. Appareils à plaques. — I. Parmi les appareils à plaque, il y en a qui sont mis en mouvement par la détente d'un ressort. Citons parmi ces appareils : Le Federmyographion de Du Bois-Reymond. Cet appareil se compose d'une plaque de FiG. S3. Federmijographion de Du Bois-Uey.mond. verre longue de 20 à 2o centimètres et haute de 2 centimètres [p] placée verticalement et pouvant se déplacer le long de deux fils d'acier qui la guident. Ces fils sont tendus sur un fort support. A l'une des extrémités du support se trouve un ressort spiral (/"i. Deux tiges d'acier, fixées à la plaque, passent sans frottement par deux trous du sup- port. En tirant la plaque autant que possible vers la gauche, à l'aide d'une des tiges, on comprime le ressort; quand on lâche la tige, le ressort se détend; pendant celte détente la plaque est poussée vers la droite. La vitesse de déplacement de la plaque dépend de la force du ressort, du frottement et du poids du système; elle n'est pas uniforme, elle augmente d'abord pour diminuer ensuite (juand la plaque atteint presque l'extrémité de sa course. En employant des ressorts plus ou moins forts, Du Bois-Reymond a obtenu les vitesses suivantes : 1 088, 1 o3G et 2 522 millimètres par seconde. Cet appareil présente l'inconvénient d'offrir une place très restreinte pour les tracés. Du Bois-Ueymond l'a employé pour faire l'enregistrement de la contraction muscu- laire. A côté du support de la plaque, son appareil était pourvu d'un support spécial pour les appareils d'enregistrement. La plaque, pendant son mouvemeni, rompait un contact électrique et par cela provoquait une excitation. Un diapason, qui enregistre ses mouvements sur la plaque, commence à vibrer dès que la plaque commence à se déplacer. Cet appareil a été perfectionné par Fredericq et Vandervelde (1880). 808 GRAPHIQUE (Méthode). Le cbronograplie de Mac Kendrick ressemble, dans ses parties essentielles, à l'appa- reil de Du Bois-Reymond, seulement la plaque de verre est portée par un chariot qui se déplace sur des rails. Le myograpJte à ressort {Federmyographion) de Mares (1891) se compose d'une plaque de métal pesant un kilo et se déplaçant horizontalement Le mouvement est provoqué par la détente de deux forts ressorts en spirale. II. La chute d'un poids, au lieu de mettre en mouvement un cylindre, peut provoquer le déplacement d'une plaque enregistrante. Harless (1860), le premier, a employé un appareil de ce genre, basé sur le principe (le la machine d'ATwooD. Il obtenait de la sorte une vitesse d'un millimètre par 0",001208 de seconde. Jendrassik (1873) a construit un appareil de grande précision basé sur le principe de la machine d'ArwooD. En variant le poids moteur, il a obtenu les vitesses suivantes : un millimètre en 0"00I86; 0", 00150; 0",00133, etc. A Vinslituf (le PMjsiolorjie de Kunigsberg on peut voir un appareil de ce genre, c'est- à-dire formé d'une plaque qui descend verticalement entre deux rails par suite de la descente d'un poids. Dans le chronograplie de Smith (1890) une plaque de verre enfumée est fixée sur un chariot qui se déplace horizontalement sur des rails longs de deux mètres environ. III. Dans le hymographion de Wilkins, une plaque est mise en mouvement par un moteur à eau. La plaque, équilibrée par deux poids, descend verticalement entre deux rails. Une corde attachée à la plaque s'enroule sur l'arbre d'une poulie mise en mouve- ment par le moteur à eau. IV. Il existe des appareils enregistreurs formés d'une plaque se déplaçant horizon- talement ou verticalement sur des rails, et mis en mouvement par un mécanisme d'horlo- gerie. Un tel dispositif, en petit, se retrouve dans des appareils enregistreurs employés en physiologie, comme par exemple dans le sphygmographe direct de Marey. V. On peut enregistrer un mouvement sur une plaque de verre collée à une branche de diapason, comme l'ont fait Klûndeu et Hensen (1868-69). Le diapason portant la plaque se déplaçait verticalement en face de la plume enregistrante. § III. — Appareils enregistreurs à disque tournant. C'est Valentin qui, le premier, en 18bS, a employé comme surface enregistrante un disque circulaire, noirci avec du noir de fumée. La toupie myographique de Rosenthal se compose d'un disque de verre, dont le rayon est de 25 centimètres, placé verticalement. — Sur l'axe du disque se trouve une poulie autour de laquelle s'enroule une corde. Cette corde, qui porte un poids, passe sur une poulie fixée cà la partie supérieure d'une machine d'AiwooD. — La chute du poids entraîne le mouvement du disque. — La vitesse de rotation du disque varie entre un tour en 2 secondes, ou un tour en 1 seconde 1/2. — En général, le disque fait un tour en 0",75 ; un centimètre de la périphérie du disque correspond à 0",00d ; comme vitesse maximum on a 2 millimètres en l/lOOO de seconde. Clopatt (1900), dans ses recherches myographiques, a employé aussi un disque de verre placé verticalement ; le système d'entraînement par un poids est analogue à celui qu'a employé Ficic, pour mettre en mouvement un cylindre. Presque tous les constructeurs d'instruments ont construit des appareils enregistreurs plus ou moins différents les uns des autres. — Voici les noms de quelques constructeurs d'appareils ej-nployés en physiologie: Albrecht (Tiibingen); Bianco et Corino (Turin); Fuess (Steglitz) ; Korvistka (Milan); Krusïch (Prague); Noyer (Londres); Petzold (Leipzig); Peyer et Favarger (Neuchàtel); Rei- CHERT (Vienne); Richard (Paris); Sandstrom (Lund); Schmidt (Giessen); Siemens et Halske (Berlin) ; Speri (Sienne) ; Cambridge Scientific Instrument Company ; Tainturier (Paris) ; Verdin (Paris) ; Zambelli (Turin) ; Zimmermann (Leipzig). GRAPHIQUE (Méthode). 809 II Régulateurs et Rouages § I. — Régulateurs. La qualité essentielle d'un appareil enregistreur étant la régularité de ses mouve- ments, il nous paraît intéressant de donner ici quelques aperçus sur les régulateurs chargés d'uniformiser les mouvements des moteurs qui commandent les déplace- ments des surfaces enregistrantes. 1. Les régulateurs usités en horlogerie comprennent les types suivants : a) le pen- dule simple ; b) le balancier entretenu par une lame vibrante, telle qu'un ressort en spi- rale ; c) le régulateur conique, et d) le régulateur à ailettes. Les deux premières (a et b) formes de régulateurs entretiennent une régularité par- faite des mouvements des montres et des horloges. Ils présentent l'inconvénient de donner aux rouages une marche saccadée, car le pendule et le spirale agissent par l'in- termédiaire de l'échappement qui arrête périodiquemeut les rouages. — Hipp a essayé de remédier à cet inconvénient en employant comme rouage de réglage une lame métal- lique vibrant un grand nombre de fois. Une pièce fixée à ce ressort appuie sur la dent d'une roue à rochet reliée au rouage moteur et ne laisse passer qu'une dent par oscil- lation. Le mouvement est saccadé, mais les arrêts sont tellement rapprochés, qu'au point de vue pratique l'appareil peut être considéré comme animé d'un mouvement continu. c) Le pendule conique est un pendule nommé ainsi parce que, au lieu d'osciller comme le pendule ordinaire dans un plan vertical, il décrit dans un plan horizontal un cercle qui est la base d'un cône ayant pour sommet le point de suspension. Cet excellent régu- lateur ne présente pas des mouvements saccadés. Le pendule conique ou centrifugal a été appliqué au chronographe de Fuess par Fegker. Le poids constituant le pendule, suspendu par. un double ressort en spirale, est entraîné par le rouage du mécanisme d'horlogerie. Plus la vitesse du mouvement est grande, plus le poids s'écarte du centre. Le déplacement du poids vers la périphérie provoque la flexion du ressort, ce qui accroît la résistance. Cette augmentation de la résistance entraîne la diminution de la vitesse du mouvement. d) Les régulateurs à ailettes sont excellents pour les appareils enregistreurs de grande vitesse. Leur application à la régularisation des mouvements est très ancienne. Avant la découverte des propriétés du pendule, le régulateur àjpalettes était le seul moyen connu de régulariser les mouvements des horloges. De nos jours, déchu d'un tel honneur, il n'a plus que la modeste mission de régulariser les mouvements des tournebroches. Les régulateurs à ailettes, par leur poids; agissent comme volant et entretiennent la régularité du mouvement quand le travail moteur et le travail résistant viennent à subir de brusques variations ; par leur surface, ils agissent en régularisant la vitesse quand celle-ci devient trop grande; car, plus la vitesse est grande, plus la résistance que les lames présentent à l'air est considérable. Lerégulateur de Foucault est le type des régulateurs^lesplus employés pour la régula- risation des cylindres enregistreurs employés en physiologie. Ce régulateur se compose essentiellement de deux ailettes triangulaires, munies de petites masses addition- nelles et suspendues au sommet d'un axe en relation avec les rouages d'un mouvement d'horlogerie par un pignon et une roue de champ. Ces deux ailettes sont rapprochées à leur base par des ressorts à boudin, de sorte que, quand l'appareil est en mouvement, elles peuvent s'écarter plus ou moins sous l'intluence de la force centrifuge et décrivent pendant leur rotation un cône à base plus ou moins large. Le régulateur d'YvoN Villarceau est plus parfait que le précédent. Dans ce régulateur, les deux ailettes et les tiges de réglage qu'elles portent, sont reliées à la partie inférieure de la tige articulée qui est au-dessus. Quand la rotation s'effectue, les ailettes et les 810 GRAPHIQUE (Méthode). masses s'écartent en vertu de la force centrifuge, les tiges articulées se redressent et la douille centrale mobile à laquelle elles sont fixées se relève. Ce régulateur peut prendre des vitesses qui varient du simple au double, suivant que l'appareil est incliné ou vertical. 2. Pour maintenir constante la vitesse d'un moteur électrique, on emploie des régu- lateurs spéciaux. a) Voici la description du régulateur électrique de d'Arsonval : sur la poulie motrice qui termine l'axe de la machine électrique, se trouve fixée une lame de ressort plat, dont les deux extrémités sont pincées sous une plaque tenue par des vis à l'extrémité de la poulie. Ce ressort prend une forme circulaire par sa propre élasticité. Lorsqu'on veut une grande précision, on munit le ressort de deux niasses égales placées symétriquement par rapport à l'axe de rotation. En face de ce ressort, et sur le prolongement de l'axe de rotation, se trouve une vis portée par une potence faisant corps avec le bâti qui porte le moteur. Cette vis est munie d'un contre-écrou servant à la fixer dans sa position. Elle peut naturellement s'approcher plus ou moins du ressort en la faisant avancer dans l'écr.ou qui la porte. Le courant passe par la pointe du ressort, de là dans l'anneau du moteur et de l'anneau dans les inducteurs pour ressortir par la borne la plus éloignée. Le jeu de l'appareil est le suivant : dès que le courant traverse le moteur, l'anneau se met à tourner, et aveclui la poulie et le ressort circulaire qui lui sont solidaires. Sous l'influence du courant, la vitesse de rotation s'accélère, jusqu'à ce que la force centrifuge développée par la rotation aplatisse suffisamment le ressort circulaire pour l'obliger à quitter la pointe et rompre par conséquent le courant. Le moteur n'étant plus traversé par le courant, sa vitesse diminue, et le ressort venant alors de nouveau au contact de la pointe le courant se rétablit, et ainsi de suite. Le ressort oscille donc, sous l'influence de la force centrifuge, entre deux positions extrêmement voisines, puisqu'un centième de millimètre d'écart est suffisant pour rompre le circuit. Par suite, la vitesse du moteur est astreinte à rester constante. Les masses qu'on met sur le ressort permettent de sensibiliser l'appareil. b) Pour régler la vitesse d'un petit moteur électrique, Helmholtz faisait interrompre le courant par un régulateur à boules. c) Toujours par l'intermédiaire d'un régulateur centrifugal, on peut avoir le réglage d'un moteur quelconque de la façon suivante. Dans le circuit d'un courant interrompu par le régulateur centrifugal, on intercale deux électro-aimants qui agissent sur un frein qui arrête le mouvement d'un mécanisme d'horlogerie commandé par la chute d'un poids. d) On emploie aussi comme régulateur électrique un vibrateur-alternateur. ^11. — Rouages. La facilité avec laquelle on peut faire varier la vitesse du mouvement d'un cylindre enregistreur est une qualité importante de ces appareils. L'amplification et la réduction de la vitesse du moteur s'obtiennent généralement à l'aide d'un système d'engrenage particulier. — En variant les rapports entre le nombre des dents des roues et des pignons, on obtient la vitesse voulue. Par exemple, si un pignon de six dents engrène avec une roue ayant 10 fois plus de dents, la roue fera un dixième de tour pendant que le pignon en exécutera un entier. Ces rouages de transmission, qui sont intercalés entre le moteur et l'arbre qui porte le cylindre enregistreur, doivent être travaillés avec grand soin. — Un régulateur parfait ne suffit pas pour avoir un mouvement uniforme du cylindre enregistreur, il faut que les rouages soient aussi parfaits. — Le régulateur et le rouage de transmission consti- tuent deux parties distinctes; le premier ne peut être assujetti à corriger les erreurs du second. GRAPHIQUE (Méthode). 811 III Styles enregistreurs. — Leviers. — Inscription tangentieile Inscription frontale Le mouvement qu'on désire enregistrer est transmis, directement ou indirectement, à un style. Il est rare que le style ne soit qu'une simple tige se déplaçant parallèlement à la génératrice du cylindre sur lequel elle inscrit ses mouvements; le plus souvent, l'organe traceur du mouvement se présente sous la forme d'un levier. M- — Leviers. Un levier enregistreur se compose d'une tige présentant à une de ses extrémités une articulation et à l'autre une plume. Le mouvement étudié est transmis, à l'aide d'organes spéciaux, particuliers à chaque espèce d'appareil, à un point du levier plus ou moins rapproché de l'axe de mouvement; l'extrémité du levier portant la plume, est rapprochée de la surface enregistrante sur laquelle elle inscrit les mouvements qui lui sont imprimés. — Ces mouvements sont d'autant plus amplifiés que le levier est plus long et que les mouvements étudiés sont transmis à un point très rapproché de l'axe de mouvement du levier. — Le levier est une sorte de microscope du mouvement. 1. Le levier peut être complètement métallique, par exemple en aluminium, ou bien n'être composé que d'une partie métallique, celle qui constitue l'axe et le bras auquel on attache le corps dont on étudie les mouvements, et dans la plus grande partie de sa longueur, celle qui porte la plume inscrivante, être formé d'un mince brin de paille ou d'une lame fine de jonc ou de bambou. L'axe du levier est constitué par deux pointes fines qui appuient, sans frottement, sur deux vis portées par un support. — Le corps dont on étudie le mouvement peut être attaché, à l'aide d'un crochet ou d'une goupille, à un manchon mobile sur la partie métallique du levier ou à un des trous percés dans cette partie de levier. — En variant la position du point d'attache du corps par rapport à l'axe, on varie l'amplification du tracé inscrit par l'extrémité du levier. — Par exemple, si la longueur totale du levier est de 200 millimètres, et si le point d'attache est une fois à 5 millimètres et une fois à 10 millimètres de l'axe, l'amplification du mouvement donné sera de 40 dans le premier cas et de 20 dans le second. 2. Rien de plus simple que d'improviser un levier enregistreur : on prend un brin de paille, on le transperce à l'aide d'une aiguille chauffée au rouge; on place dans ce trou une lige d'acier (une épingle par exemple) (ixée par ces deux bouts dans une sorte de petit cadre en liège ; on fixe à l'extrémité de ce levier une plume, et on place le levier sur le corps à étudier, ou on l'attache à ce corps par un fil si Ton ne peut l'en rap- procher. Helmholtz et Pfluger ont employé dans leurs appareils des leviers métalliques en forme de cadre. FiCK s'est servi de leviers formés de deux bandes de jonc collées ensemble. RosENTHAL remplissait un brin de paille d'une solution chaude de colle, et le mettait ensuite immédiatement dans une presse pour le presser jusqu'à ce que la colle se fût solidifiée ; il obtenait ainsi d'excellents leviers, très légers, larges de deux millimètres. 3. Si l'on veut que le poids du levier n'intervienne pas dans le phénomène qu'on étudie, il faut équilibrer le poids du bras de levier à l'aide d'un poids placé sur la partie du levier qui se trouve de l'autre côté de l'axe du mouvement. — La parfaite équilibration peut être obtenue à l'aide d'un petit cavalier ou d'un poids mobile sur une vis. — Quand il s'agit de leviers comme ceux qu'on emploie en physiologie, et qui sont très légers, on peut improviser l'équilibration, en collant une épingle tout près de 812 GRAPHIQUE (Méthode). l'axe du levier, de façon que la tête de l'épingle, passant de l'autre côté de l'axe, serve de contrepoids. L'équilibration des leviers, bonne pour les cas où il s'agit de l'enregislrenient des mouvements lents, est tout à fait nuisible quand il s'agit de l'enregistrement des mouvements rapides. On en comprendra facilement les raisons quand on aura lu le chapitre consacré à l'inertie des leviers. Quand on veut obtenir une grande amplification d'un mouvement, on peut employer un levier double composé de deux leviers superposés (fig. 84). Le mouvement à enre- gistrer transmis au plateau (p) fixé au premier levier h^; ce levier le transmet au deuxième levier h-. — Le poids {g), mobile sur une tige équilibre le levier. La figure 84 représente, schématiquement, un levier accroché au corps dont on étudie les mouvements. Comme, dans ce cas, le poids du levier ne suffit pas à ramener le levier à sa position e G -//- Jl ± p Fig. 84. — Plume avec levier double. primitive, après la cessation d'un mouvement, on accroche au levier un plateau dans lequel on met un poids. En général le fil qui porte le poids, au lieu d'être accroché directement au levier, s'enroule sur une poulie fixée à l'axe du levier. En réfléchissant le fil qui sert d'attache entre le corps mobile et le levier, et entre le levier et le poids, sur des' poulies, on peut enregistrer verticalement ou horizontale- ment le mouvement d'un corps qui occupe n'importe quelle position. § II. — Plumes. L'enregistrement des'mouvements lents peut être fait soit à l'aide de crayons, soit à l'aide de plumes à encre. L'enregistrement des mouvements rapides se fait à l'aide de plumes très légères qui grattent le noir de fumée de la surface enregistrante. La matière dont sont faites les plumes enregistrantes pour inscription sur noir de fumée est variable ; on en fait en corne mince, en papier, en clinquant, en baleine, en mica. Un brin de crin, un fil de verre, une petite pointe en acier, constituent souvent d'excellentes plumes. La condition essentielle que doit présenter une plume est que sa souplesse ne soit pas trop grande, afin d'éviter les boucles quand les mouvements sont très rapides. Les plumes sont, soit collées directement à l'extrémité du levier enregistreur, soit collées sur un petit manchon qu'on fixe à l'extrémité du levier. Quand on fait l'enregistrement sur une feuille de papier blanc, on emploie des plumes à encre. L'encre est formée d'une solution d'aniline (violet de méthyle, par exemple) dans laquelle on a ajouté de la glycérine pour éviter la dessiccation trop rapide. LuDwiG a employé, comme plumes enregistrantes, des plumes de moineau ou de loriot, coupées en pointes fines et bien polies; il a employé aussi de petits tubes de verre à réservoir, comme ceux représentés par la figure 85, qu'il remplissait d'une solution d'aniline. Les tubes, au lieu d'être en verre, peuvent être en caoutchouc. C'est Rosenthal (1862) qui a décrit pour la première fois l'emploi de petits tuyaux à encre. Devs^-Smith a imaginé un dispositif composé d'un tube capillaire en argent qui aspire sa provision d'encre contenue dans un réservoir. GRAPHIQUE (Méthode). 81S VoLKMANN a employé de petits pinceaux à l'encre de Chine. Westienh employé des plumes d'oie ou de pigeon taillées comme une plume ordi- naire. La solution qu'il recommande se compose de 1,8 parties de noix de galle, de 7 parties de gomme arabique, de 7 parties de vitriol martial et de 96 parties d'eau. Ce mélange, bien secoué, n'est liltré qu'après plusieurs semaines. L'inscription doit se faille sur un papier très glissant. MoROKHOVETz emploie des plumes en ébonite à réservoir cylindrique. — Le réservoir est muni à sa partie inférieure d'un tube horizontal à bec court, courbé dans le même plan horizontal. — On introduit dans le réservoir un fil que l'on coupe en biais, après qu'il a traversé la bianche horizontale. Non seulement ce fil empêche l'encre de couler, mais encore il trace une courbe très line lorsque sa pointe appuie sur le papier. Le moyen d'enregistrement à encre le plus répandu est la plume Richard qui se place à l'extrémité d'un style d'aluminium très léger et très souple. Cette plume est constituée par un petit récipient métallique, dans lequel on dépose une goutte d'encre spé- ciale ne séchant que sur le papier; elle possède une petite queue avec deux agrafes à l'aide desquelles on l'enfile sur ^^j|i^l||R — ^_ l'extrémité du style. Une vis permet de régler la position de la plume de manière que sa pointe vienne simplement Fig. 85. — Plume Richard. effleurer le papier sans qu'il y ait un frottement apprécia- ble ; de cette façon, une fois la plume amorcée, l'encre se dépose par capillarité sans gêner le mouvement. Dans le but de remplacer le léger frottement de glissement de ce dispositif par un frottement de roulement, on emploie quelquefois une plume à molette (Arnoux). La molette est composée de deux petites calottes sphériques dont les bords sont séparés par un petit disque de matière poreuse ; quand la molette est garnie d'encre, le disque s'en imprègne, et laisse une trace sur le papier. § Iir. — Qualités clun bon style enregistreur. Un style enregistreur doit être aussi léger que possible, pour que son inertie ne modifie pas le mouvement qu'on veut étudier ; il doit être parfaitement flexible dans le sens suivant lequel il rencontre le papier, et parfaitement rigide dans l'autre sens. En effet, si le style n'était pas flexible dans Je sens de la pression qu'il exerce sur le papier, la moindre irrégularité de la surface enregistrante créerait des frottements énergiques, ou bien le contact du style avec le papier cesserait. — Au contraire, le style doit avoirune grande rigidité dans le sens transversal; car, si le style était flexible dans tous les sens, les mouvements étudiés seraient entièrement absorbés par cette flexion. De plus, le style ne doit pas gripper sur les rugosités du papier, et sa position doit être telle qu'il puisse être toujours en contact avec la surface enregistrante. Pour cela, le style doit rencontrer le papier sous une incidence très oblique, et, avant de placer le style, il faut observer dans quel sens se fait le déplacement de la surface enregis- trante : le papier doit fuir la pointe inscrivante et non pas aller à sa rencontre. § IV. — Enregistrement par traits continus, discontinus on 'pointage. L'enregistrement d'un mouvement peut se faire d'une façon continue ou discontinue ou par pointage. En général, quand il s'agit d'étudier des mouvements délicats, l'enregistrement est continu. — Pourtant Ewald, pour éviter l'influence nuisible qu'exerce le frottement sur la forme des courbes, a imaginé de tracer les courbes par traits discontinus en tenant la plume éloignée de deux millimètres environ de la surface enregistrante, et de ne la laisser toucher cette surface que de temps en temps. Dans l'enregisti'ement discontinu ou par pointage, le style enregistreur, muni à son extrémité d'une plume à encre, d'un crayon ou d'une pointe métallique, est tenu éloi- gné de la surface enregistrante au moyen d'un ressort. De temps en temps, à intervalles réguliers, un petit marteau, actionné par un électro-aimant, vient appuyer sur le 81 i GRAPHIQUE (Méthode). style. — On obtient ainsi, sur le papier, uu point ou un trou. — Dans certains appareils, la bande de papier, sur laquelle se fait l'enregistrement, est placée entre un ruban chargé d'une matière colorante et l'extrémité du style formée par un tampon. Quand le marteau appuie sur le style, la surface postérieure du papier touche le ruban chargé d'encre.. — De cette façon, on obtient sur le papier, à chaque appui du marteau, une tache colorée. § V, — Inscriptio7i tangentielle. — Inscription frontale. La plume enregistrante peut occuper, relativement au cylindre enregistreur, deux sortes de positions : 1° elle peut être placée de côté, latéralement ; ±° elle peut être placée normalement à la surface enregistrante. Dans le premier cas, on dit que l'inscription est tangentielle ; dans le second cas, elle est frontale. a) Inscription tangentielle. — 1) Quand la plume se déplace parallèlement à la géné- ratrice du cylindre enregistreur, c'est-à-dire quand le style enregistreur n'est pas un levier, la courbe tracée est la reproduction fidèle du mouvement transmis à la plume; quand le style enregistreur est un levier, le tracé obtenu n'est pas la reproduction fidèle du mouvement qu'on enregistre. — En elfet, la plume trace un arc de cercle dont le rayon est égal à la longueur du levier. Rigoureusement, les courbes tracées ont pour coordonnées des abscisses rectilignes et des ordonnées curvilignes. 2) Si l'on prenait des tracés sur des surfaces planes, la déformation précédente serait la seule déformation imposée aux courbes par l'inscription tangentielle. — Quand on enregistre un mouvement sur une surface cylindrique, comme on le fait le plus souvent, on observe de ce fait encore une autre déformation que voici. La plume enre- gistrante, au lieu de tracer une courbe plane, trace en réalité une courbe dans l'espace. La courbe obtenue devrait donc être rapportée à un système de trois coordonnées. Cette déformation de la courbe est due à la llexibilité du levier. Elle ne peut être évitée; car cette flexibilité est nécessaire à l'enregistrement. Un levier rigide qui ferait ses mou- vements ligoureusement dans un plan, ne pourrait enregistrer ses mouvements sur une surface cylindrique; car, forcément, à certains moments, il quitterait la surface du cylindre ; c'est grâce à une certaine mobilité de la plume dans un plan normal à la surface enregistrante que l'inscription continue peut avoir lieu. C'est RoLLET, le premier, qui a attiré l'attention sur cette déformation des tracés. D'après ses déterminations empiriques, et d'après les calculs de Dantscher, il résulte que l'erreur introduite par cette déformation est très petite. — Elle est d'autant moins importante que le cylindre enregistreur est plus grand. 3) Pour qu'une plume porte bien sur toute la surface enregistrante, elle doit être à la fois rigide pour la direction du mouvement et flexible pour l'inscription. Il est diffi- cile de réunir dans un môme organe ces deux qualités contradictoires. Pour les concilier. Hospitalier a imaginé un dispositif qui consiste, en principe, à séparer, tout en les laissant solidaires, l'organe de direction du mouvement et l'organe d'inscription, et à réaliser, avec un système directeur de faible rayon, un enregistrement dont les ordonnées ont un rayon assez grand pour que l'inscription se rapproche sensi- blement de celle que donnerait un enregistreur dont la plume décrirait un arc de cercle de rayon infini. L'aiguille directrice consiste en un levier rigide monté sur l'organe dont on veut enregistrer le mouvement. Une de ses extrémités, celle qui est la plus éloignée de l'axe de rotation, se termine par une fourche dans laquelle vient s'engager le levier portant la plume. Cette fourche décrit, pendant l'enregistrement, le chemin que décrirait un levier enregistreur ordinaire. La plume d'inscription est constituée par un levier de grande longueur, dont l'une des extrémités pivote autour d'un axe parallèle à celui de l'enregistreur, mais en est éloignée d'une distance sensiblement égale à la ditférence des longueurs des deux leviers. Son autre extrémité s'engage dans la fourche de l'aiguille directrice, et porte, un peu au delà de cette fourche, la plume inscrivante qui peut être quelconque (plume Ri.chard, roulette Chauvin-Arnoux, tube capillaire renfermant de l'encre, fil de crin pour enre- gistrement sur papier enfumé, etc.). — • Pendant que la fourche décrit un arc de cercle de GRAPHIQUE (Méthode). 815 petit rayon, la plume décrit un arc de grand rayon. En donnant au levier qui la porte une longueur suffisante, cet arc peut, dans les limites de la largeur du cylindre, se con- fondre sensiblement avec la tangente en son milieu. Le point de contact de la plume avec le papier s'éloigne ainsi fort peu d'une génératrice, et l'inscription se fait avec une égalité parfaite dans toute l'étendue du cylindre. La plume et son levier peuvent donc être proportionnés pour satisfaire aux conditions de souplesse et de réglage de l'in- scription, et de l'inscription seule, puisque la direction de la plume est conQée à un autre organe auquel on donne, de son côté, toute la rigidité nécessaire pour remplir exactement celte fonction directrice. Le levier directeur et le levier inscrivant décrivant des arcs de cercle de rayons dif- férents, il en résulte que le levier portant la plume glisse légèrement, animé d'un mou- vement de va-et-vient, dans la fourche ménagée sur le levier de direction. Le levier et la fourche doivent être comhinés pour faciliter ce déplacement relatif. Dans ce but, la tige de la plume est bien polie dans la région du glissement, et la fourche est taillée en biseau ou arrondie sur les côtés pour permettre les légers déplacements angulaires G' 0 B FiG. 86. — Dispositif de Hospitalier pour la correction des arcs de cercle. relatifs des deux organes. Elle est articulée à son attache par un joint à la Cardam, qui permet à la plume de se déplacer librement et d'exercer sur le papier une pression constante réglée par son propre poids en partie équilibré par un contrepoids à vis mobile à volonté. — L'axe vertical permet des déplacements pour la direction, l'axe horizontal les légers déplacements en hauteur nécessités par le mouvement de la plume sur le système enregistreur. Le levier inscripteur peut d'ailleurs être monté verticalement, tandis que le levier directeur reste horizontal. L'inscription de la courbe se fait presque rigoureusement sur la génératrice du cylindre enregistreur, et la plume, indépendante et facilement réglable, ne produit aucun raté d'inscription. Ce dispositif sera utilisé avec avantage dans tous les cas où l'allongement de l'appa- reil, résultant de l'emploi d'une plus longue aiguille, ne constitue pas une sérieuse objection à cet emploi. Il est facile de démontrer que la différence de longueur entre les deux ordonnées curvilignes, l'une correspondant à la valeur théorique pour l'aiguille donnée, et l'autre à l'ordonnée redressée par la plume, est absolument nulle. En effet, si l'angle a, décrit par l'appareil de mesure, est proportionnel à la grandeur à mesurer, il est facile de voir qu'en faisant 00' =r=: -, le triangle OO'A est isocèle j il en résulte que : a = 2 a' L'arc AB de longueur l est égal à l'arc BG de longueur /', et l'appareil reste rigou- reusement proportionnel . b) Inscription frontale. — Dans ce genre d'inscription, la plume, fixée à une partie mobile de l'extrémité du levier, décrit ses mouvements dans une direction parallèle à. la génératrice du cylindre enregistreur. 816 GRAPHIQUE (Méthode). Pour enregistrer les contractions musculaires, Helmholtz (1852) a employé ce genre d'inscription. A l'extrémité d'un levier se trouve articulée une tige verticale sur laquelle est fixée la plume. — Cette première tige porte une deuxième tige sur laquelle on peut déplacer un poids. En rapprochant ce poids de la tige qui porte la plume, on rend de plus en plus intime le contact entre la plume et la surface enregis- trante. On peut, au lieu d'avoir un poids qui assure le contact de la plume avec la surface enregistrante, employer un ressort. Ce dispositif existe dans l'appareil de Helmholtz qui se trouve à Tlnstitut de Physiologie de Kônigsberg, et qui est un des premiers instruments de ce genre. Un dispositif analogue a été employé par Hermann; mais la plume est fixée sur la partie la plus convexe d'un ressort fixé à l'extrémité du levier. Dans le dispositif employé par Fick, entre la plume et l'extrémité du levier, il y a un ressort en forme d'étrier. Un dispositif spécial a été employé par Ludwig et est encore en usage dans le labo- FiCi. 87. — Inscription frontale (Schéma). ratoire de Leipzig. L'extrémité du levier se termine par une sorte de fourche qui sup- porte un axe très fin. Une aiguille incurvée est mobile sur cet axe. L'extre'mité inférieure de cette aiguille appuie sur la surface enregistrante ; son extrémité supérieure est atta- chée au bout d'un fil en caoutchouc. L'autre bout de ce fil est attaché à une pièce mobile sur le levier. Suivant la direction du fil en caoutchouc, l'aiguille appuie plus ou moins sur la surface du cylindre enregistreur. t)ans le dispositif employé par Vierordt la plume s est fixée à une sorte de paral- lélogramme de Watt p porté par deux leviers a* et a-. Le mouvement qu'on étudie est transmis au levier a'^. Dans l'inscription frontale, avec n'importe quel dispositif mécanique, le mouvement étudié ne s'inscrit pas dans toutes ses phases avec la même amplification. Quand le levier est soulevé, le bras de levier enregistreur est plus long que quand le levier est en bas; les amplifications sont donc moins grandes quand le mouvement commence. Par contre, le frottement est beaucoup plus grand au commencement du mouvement que quand le mouvement atteint son maximum. La figure 87 montre comment, au fur et à mesure que le levier as^ s'élève en s- et s^, il faut, pour que la plume touche toujours la surface enregistrante, que le levier s'allonge. Cet allongement est obtenu grâce à la mobilité de la partie qui supporte la plume. GRAPHIQUE (Méthode). 81T IV Transmission à distance par l'air ou par l'intermédiaire d'une colonne liquide. L'enregistrement des mouvements des corps qui ne peuvent pas être rapprocliés d'une surface enregistrante est obtenu grâce à des moyens spéciaux de transmission. — Ces moyens permettent aussi d'enregistrer simultanément, sur une même surface enre- gistrante, des mouvements qui ont lieu dans des endroits éloignés les uns des autres. Les courbes ainsi obtenues montrent les relations qui existent entre les phénomènes synchrones. La transmission d'un mouvement par la pression de l'air est assez ancienne. En 1854, Galy Cazelat, en France, et L. Clarke, en Angleterre, ont fait breveter des moyens pour faire avancer par l'air raréfié ou comprimé, dans des tuyaux fermés, des boîtes en fer- blanc qui contenaient des lettres ou des petits paquets. En physiologie, la transmission d'un mouvement a été tentée pour la première fois par Upham, de Boston, en 1859, pour faire percevoir à un public nombreux la succession des battements du cœur d'un individu, Groux, atteint d'une fissure congénitale du sternum. Upham appliquait sur la peau, au devant des oreillettes et des ventricules, de petits entonnoirs en verre remplis de mercure, dont les pavillons étaient fermés par des mem- branes en caoutchouc. Les entonnoirs étaient remplis de mercure ; leurs tubes étaient prolongés par des tuyaux en caoutchouc pleins d'air. Le déplacement d'air, produit dans ces tuyaux par le déplacement du mercure, actionnait deux sonneries de timbres dif- férents ; la succession de ces deux sons révélait à l'oreille celle des mouvements des oreillettes et des ventricules du cœur. Dans une brochure publiée par G roux (F/'s.sm'a sterni congenita, New Observ. and cxperim., 2" Edit., Hambourg, 1839) on trouve la figure de l'appareil d'UpHAM. Buisson (1839) réalisa le premier une véritable transmission par l'air, en prenant deux entonnoirs de verre et en les réunissant par un tube en caoutchouc. Les pavillons des entonnoirs étaient fermés par des membranes en caoutchouc. A l'aide de ce dispositif, les mouvements les plus légers pouvaient être transmis à distance. En appliquant la membrane d'un des entonnoirs sur la carotide d'un homme et en faisant agir la membrane du second entonnoir conjugué au premier sous le levier d'mi sphygmographe, Buisson a obtenu à distance le tracé très fidèle du pouls carotidien. Il a obtenu de même des tracés cardiogiaphiques en plaçant un des entonnoirs sur la région précordiale. Marey s'est emparé de cotte idée de transmission au moyen d'une colonne d'air, et, en lui donnant une grande extension, il en a agrandi considérablement le champ d'application. En 1861, Marey et Ghauveau, dans leurs mémorables recherches sur les mouvements du cœur, se sont servis de la transmission par l'air. Les entonnoirs de Buisson furent alors remplacés par des appareils spéciaux : d'une part des ampoules exploratrices qu'ils placèrent dans les cavités du cœur; d'autre part des ampoules réceptrices qui, par leur gonflement, soulevaient les leviers des sphygmographes enregistreurs. § 1. — Transmission aérienne. Le principe de cette méthode d'enregistrement est le suivant : Un espace clos, déformable, est mis en relation avec le corps dont on désire étudier les mouvements. Ces mouvements provoquent des déformations de la membrane élas- tique qui ferme l'espace clos. Ces déformations donnent naissance à des variations de pression à l'intérieur de l'espace clos (ampoule ou tambour explorateur). Ces varia- tions sont transmises par l'intermédiaire d'un tube de caoutchouc à un deuxième espace clos, formé essentiellement d'une membrane élastique déformable. Les variations de DICT. DK PHYSIOLOGIE, — TOME VII. 52 818 GRAPHIQUE (Méthode). pression mettent en mouvement cette membrane élastique de l'appareil récepteui (second espace clos). Les mouvements de la membrane du deuxième espace clos sont la reproduction, en sens inverse, des mouvements de la membrane du premier espace clos. En enregistrant à l'aide d'un levier les mouvements de l'appareil récepteur, on a la forme des mouvements du corps qui agit sur l'appareil explorateur (premier espace clos). Les appareils enregistreurs, dans la transmission par l'air, atïectent trois sortes de formes : 1° de tambour; 2° de piston; 3° de soufflet. Dans lepiston-recorder, il n'y a pas de membrane déformable. Dans cet appareil, l'air ne fait que se déplacer entre l'appareil explorateur et la partie mobile de l'inscripteur, tandis que dans le tambour à levier l'air subit à la fois une compression et un léger déplacement. Le soufflet enregistreur, comme le piston-recorder, est un appareil à déplacement. Les appareils explorateurs des mouvements affectent des formes très diverses, selon FiG. 88. — Deux tambours explorateurs, dont les leviers (a et 6) sont reliés entre eux, transmettent le mouvement qu'on imprime à leur tige commune à deux tambours récepteurs, dont les leviers (a' et b') tracent fidèlement la forme du mouvement reçu. l'organe auquel ils s'appliquent. Oa en trouvera les descriptions dans les chapitres consacrés à l'étude des applications de la méthode graphique en physiologie. — Pourtant, quelle que soit leur forme, leur partie essentielle est presque toujours un tambour à air, c'est-à-dire une cuvette métallique sur laquelle est tendue une membrane de caoutchouc ; sur cette membrane se trouve le plus souvent collé un disque métal- lique, qui, par des pièces intermédiaires, est mis en relation avec l'organe dont on veut étudier les mouvements. A) Le tambour enregistreur de Marey se compose d'une cuvette métallique circulaire (de 30 à 50 millimètres de diamètre) à bords recourbés. Sur ces bords est attachée une membrane de caoutchouc. Sur cette membrane est collé un petit disque d'alumi- nium ; au centre du disque est fixée une pièce d'articulation ; cette pièce relie la mem- brane à un levier inscripteur. La double articulation est nécessaire pour assurer la mobilité parfaite du levier. Celui-ci à l'une de ses extrémités tourne librement autour d'un axe horizontal. Le levier est métallique en partie. Dans un manchon qu'il supporte on place une lame de bambou, de jonc, ou une tige de paille qui porte à son extrémité une plume en corne ou en papier. La forme du levier enregistreur est donc identique à celle des leviers qui inscrivent directement un mouvement quelconque. La partie métallique de ce levier présente une fente, le long de laquelle glisse la pièce a double articulation qui réunit le levier à la membrane du tambour. Ce glissement a pour effet d'amplifier ou de diminuer l'étendue des oscillations. Un même déplacement de la membrane du tambour imprimera au levier une oscillation d'autant plus grande GRAPHIQUE (Méthode) 81t> que ce déplacement sera transmis par la pièce intermédiaire à un point plus rapproché de l'axe de pivotement du levier. En faisant glisser le long du levier la pièce qui termine en haut la pièce intermé- diaire entre le levier et le tambour, celle-ci cesse d'être verticale. Pour la redresser, on tourne une vis de réglage qui, faisant avancer ou reculer le tambour, le ramène au- dessous du point où le mouvement de la membrane se transmet au levier dans les conditions les plus favorables. Un levier solidaire du support de l'axe du levier sert à H 0 FiG. 89. — Tambour enregistreur de Marey. donner à la plume une position convenable dans le plan vertical et le ramène à l'hori- zontalité. La longueur du levier du tambour varie de 10 à 15 centimètres. RuMMO a perfectionné le tambour enregistreur de Marey en ajoutant à la virole, qui sert à fixer le tambour sur un support, une vis tangente qui permet de mettre le style inscripteur au contact de la feuille de papier du cylindre avec beaucoup de précision. Le tambour enregistreur de Chauveau présente une vis d'avance et de recul qui per- met le réglage de la plume sur le papier. Verdin a construit un tambour qui présente à la fois le système de réglage du tam- bour de RuMMO et celui du tambour de Chauveau. Dans le tambour enregistreur de Brondgeest, le style enregistreur repose sur un cou- Fici. 90. — Tambour enregistreur de Chauveau. teau collé sur la membrane du tambour. Le contact du levier et du couteau est assuré au moyen d'un anneau de caoutchouc. Le tambour de Coop présente un levier enregistreur qui amplifie doublement les mouvements de la membrane du tambour. Le levier placé au-dessus de la membrane s'articule à charnière avec un autre levier qui porte la plume. Le support de l'axe de ce deuxième levier est fixé sur la cuvette du tambour. Le tambour présente un diamètre de 30 millimètres; le levier enregistreur est long de 85 millimètres. Dans le tambour de Grunmach (1876), le levier enregistreur est équilibré par un contrepoids. La longueur du levier est de 220 millimètres; le point d'attache de la membrane du tambour au levier est à 5 millimètres de distance de l'axe du levier ; l'amplification des mouvements de la membrane par le levier est égale à 44; cette 820 GRAPHIQUE (Méthode). qjnplificalion ne peut pas être variée, car la pièce intermédiaire entre le levier et le- tambour ne peut pas varier de position. Les dimensions de ce tambour sont moindres que celles du tambour de Marey : son diamètre est de 3 centimètres et demi; le dia- mètre du disque posé sur la membrane est de 1 centimètre et demi. Le tambour de Knoll (1879) dilfère un peu, par la forme, du tambour de Marey. Son amplification est aussi fixe, comme dans le tambour de Grunmagh, elle est de 33 fois, son levier ayant 100 millimètres de longueur, et le point d'attache de la membrane étant à 3 millimètres de l'axe du levier. Le diamètre du tambour est de 3'"'", 3 ; sa membrane est très mince. Dans le tambour de K.noll, construit par Rothe de Prague, la pointe du style enregis- treur peut être rapprochée du papier au moyen d'une vis de réglage qui appuie sur une lame élastique d'acier qui supporte le tambour. Le tambour de Hurthle, construit par Albrecht, présente un système enregistreur extrêmement léger. Le poids total du levier, long de 120 millimètres, de la pièce inter- médiaire, et du disque en aluminium perforé (ayant 20 millimètres de diamètre) est de 0,3 grammes. Un dispositif spécial permet l'arrangement très parfait du levier enregistreur. Le diamètre du tambour est égal à 3 centimèlres. Petzold a construit un dispositif spécial pour le support du tambour qui permet d'avoir, avec un tambour placé sur un support vertical, l'inscription des mouvements du tambour sur une surface horizontale ou verticale, à volonté. BovvDiTP.H a imaginé un dispositif spécial pouvant servir de support à plusieurs tambours. Ellis (1883), dans ses recherches pléthysmographiques sur la grenouille, a employé un très petit tambour, dont le diamètre est de l'"",5, et la profondeur de i à 2 milli- mètres. Sur la membrane très mince de ce tambour se trouve collée une bande de papier, large de 5 millimètres, et coupée en V. Un des côtés de ce V est collé à la mem- brane ; l'autre sert de support à un très léger levier en paille; une petite feuille de clinquant sert de plume. Une petite boule de cire équilibre le levier. Le tambour enregistreur de Porter est très simple ; le tube de transmission sert en même temps de support au levier enregistreur. Il est dépourvu d'appareil de réglage, Ren'é (1887) a modifié le support du tambour de Marey, et lui a donné le nom de : Tambour à levier rectifiable. Lepage a modifié le levier inscripteur du tambour de Marey. Il a muni l'extrémité du levier d'une petite fourche en aluminium qui porte le style inscripteur formé par un iil métallique recourbé qui repose par son propre poids sur le cylindre enregistreur. Ce style est mobile autour d'un axe transversal passant par les oreillets de la fourche. Roossy (1899) a construit un tambour à encrier équilibré. Une vis anneau et le style forment une sorte de balance de précision. — La vis est à molette ; le déplacement de l'écrou sur la vis permet d'équilibrer le fléau de balance pour la rendre sensible. — Le style, qui est cannelé, se termine par une pointe maintenue de chaque côté par un petit ressort plat extrêmement doux. — Le tout est en aluminium. Le tambour inscripteur Morokhovetz consiste en un petit réservoir de cuivre (1 cen- timètre de hauteur, i"™,',') de diamètre), ayant la forme d'un entonnoir large et bas, que l'on recouvre d'une mince membrane en caoutchouc Au sommet du cône de l'entonnoir se trouve un tube qui se dirige perpendiculairement à l'axe du cône et sert de commu- nication avec le tambour récepteur. — La membrane est percée au milieu par la pointe d'une tige, dont l'autre extrémité se divise en deux branches qui entourent le levier enregistreur. Il n'y a donc pas de disque sur la membrane. Le levier est vertical et sa pointe dirigée vers le bas. L'extrémité opposée présente un pas de vis dans lequel passe un contrepoids. Le point d'appui du levier se trouve au bord supérieur du tambour ; un mécanisme très simple permet de le déplacer à volonté. Les tambours enregistreurs de Blix (construits par Sandstrôm) présentent des mem- branes en celluloïde. — On en distingue deux types : de grands, à deux membranes gondolées comme les membranes des capsules anéroïdes; et de petits tambours, com- posés de Cà8 membranes élastiques superposées. La sensibilité de ces tambours paraît être très grande; Blix a pu enregistrer avec eux les vibrations d'un diapason faisant GRAPHIQUE (Méthode). 821 250 oscillations doubles par seconde. — L'élasticité de la membrane decelluloide paraît être invariable. Le tambour enregistreur ^'Athanasiu (construit à l'Institut Marey) se compose d'une cuvette dont la capacité est réduite au minimum; au bord de la cuvette et à l'extérieur se trouve une gorge dans laquelle la membrane est attachée. Au-dessous de cette gorge il y aune saillie circulaire et filetée sur laquelle se visse une bague qui protège la mem- brane sur les bords de la cuvette, tout en les comprimant assez fortement, ce qui assure la fermeture du tambour. Le tube de transmission débouche dans le fond de la cuvette, et il sert en môme temps à fixer la cuvette sur sa monture. A son extrémité libre se trouve un diaphragme percé en mince paroi. La monture du tambour se compose d'une virole ouverte servant à fixer l'appareil sur la tige support. Sur cette virole en forme de chape s'articule tout le système de la monture pour la mise en contact du style sur le cylindre enregistreur. La correction s'obtient à l'aide d'une vis tangente. Le déplacement d'avant en arrière s'obtient à l'aide d'une vis analogue à celle qui se trouve c a ) -( l ) i ff\J\J\J\J FiG. 91. — Tambours enregistreurs de Blix. dans le tambour de Chauveau. La pièce supportant le levier est suspendue longitudina- lement, ce qui permet de remplacer la cuvette par une autre de diamètre différent et de changer l'amplification du levier. Pour tendre la membrane sur ce tambour, on emploie un appareil spécial. L'appareil tenseur de la membrane, qu'ATHANASiu a fait construire pour son tambour, se compose d'une pièce métallique en forme d'étrier. Cette pièce est traversée par une vis. L'extrémité supérieure de cette vis est percée d'un trou dans lequel pivole librement une pièce qui est pourvue d'un plateau sur lequel on fixe la cuvette du tambour. L'an- neau métallique de l'étrier a une largeur de 12 millimètres environ, et une épaisseur de 8 millimètres. A l'extrémité de cet anneau se trouve un pas de vis sur lequel se visse une bague. La membrane de caoutchouc est serrée entre l'anneau et la bague, et sur cette membrane on dessine un carré de côté connu. La cuvette de la membrane se trouve en dessous de la membrane. En tournant la grande vis de l'appareil, on peut faire monter la cuvette. Celle-ci en montant tend de plus en plus la membrane qui la recouvre. Ou uniformise la tension de la membrane en gardant toujours la forme du carré dessiné sur la membrane ; le rapport entre la surface fijiale et la surface initiale de ce carré nous donne le degré de tension. — Quand cette tension est jugée suffisante, on applique une ligature dans la gorge de la cuvette, et l'on découpe la membrane assez près de la ligature. De cette façon la cuvette du tambour enregistreur se trouve couverte par une membrane de tension connue. Le tambour enregistreur de Mariette Pompilian présente un dispositif spécial qui permet de changer, à volonté, la tension de la membrane sans nécessiter pour cela le démontage de l'appareil. B) Le piston-re corder a été employé pour la première fois comme appareil enregis- treur dans la transmission aérienne par Ellis (1886). Avant lui, il était employé seule- ment dans la transmission par une colonne liquide. Le piston-recorder (/'Ellis se compose d'un petit tube de verre dans lequel se trouve un piston en paraffine. L'extrémité inférieure du tube est reliée par un tube de caout- -chouc à l'appareil explorateur. Les mouvements du piston sont enregistrés par un levier 8^22 GRAPHIQUE (Méthode). équilibré au moyen d'une tige de verre. L'occlusion de l'appareil esl assurée à l'aide d'un peu d'huile de menthe poivrée placée entre le piston et la paroi du tube. Dans le piston-recorder de Johaxsson Tigerstedt (1889) le piston, qui a la forme d'un couvercle, est en éboiiite. L'amplification des mouvements du piston par le levier FiG. 02. — Tambour enregistreur de M. Pompilian. peut être variée à volonté. Le leviei" enregistreur est équilibré par un 'contrepoids mobile sur le bas du levier qui le supporte. Dans le piston-recorder de Hûrthle (1893) le cylindre qui constitue le corps de pompe est métallique; le piston est en ébonite. Une petite tige est articulée d'une part au piston, d'autre part elle est attachée au levier enregistreur au moyen d'un anneau en caoutchouc. Le levier est équilibré par un contrepoids. Le cylindre est fixé sur un sup- FiG. 93. — Piston-recorder d'ELLis. port à l'aide d'une vis de pression qui permet de changer l'amplification du levier.'. La hauteur du cylindre est de 4 à 5 centimètres pour les petits appareils, de 8 centimètres pour les appareils moyens et de 14 centimètres pour les grands. Entre les parois du piston et du cylindre il n'y a pas d'huile. Le ■piston-recorder do Sandstrom et Blix se compose d'un piston en acier se dépla- çant sans frottement dans un cylindre en acier; il est comme l'appareil de HOrthle dépourvu d'huile. Le piston-recorder de Lombard c< Pillsburg (1899) est remarquable par la légèreté de GRAPHIQUE (Méthode). 823 ses parties mobiles; leur poids ne dépassant pas 0s%34, tandis qu'il est de 0s'-,68 dans l'appareil de Johansson et Tigerstedt. L'appareil de Lombard et Pillsburg ressemble au piston-recorder d'ELLis. C) Le soufflet enregistreur de Brodie (1902), comme le piston-recorder, est un appareil à déplacement d'air. Cet appareil se compose d'une plaque métallique rectangulaire qui est fixe et qui porte le tube au moyen duquel on établit la communication entre cet appareil et l'appareil explorateur. Au-dessus de la plaque fixe se trouve une autre plaque (formée d'un cadre en aluminium sur lequel est collée une feuille de papier) de mêmes dimensions que la plaque fixe, sur laquelle elle est articulée. Tout autour de FiG. 94. — Soufflets enregistreurs de Brodie ces deux plaques se trouve collée une membrane en baudruche qui ferme l'espace qu'elles laissent libre quand on les écarte d'un certain angle. Sur la plaque supérieure est fixée une plume (en bois très léger), qui suit les mouvements de cette plaque. Les dimensions du souffiet sont variables : les petits sont de 30 millimètres sur 20 millimètres (leur capacité est de 7,2 ce); les moyens sont de 45 millimètres sur 30 millimètres (leur capacité est de 25 ce); enfui les grands sont de 120 millimètres sur 80 millimètres (leur capacité est de 300 ce). D) Quelle que soit la forme des appareils enregistreurs et explorateurs, ils sont tou- jours reliés par un tube de caoutchouc, ayant un orifice large de 3 à d millimètres, et une paroi plus ou moins épaisse. La longueur du tube est très variable, selon les besoins de l'expérience. En général, le tube est interrompu par une soupape, comme celle employée par Marey. Cette soupape est formée d'un petit tube métallique qui présente un petit trou. Ce trou est fermé par la pointe d'un levier. Le bras du levier étant maintenu soulevé par une lame ressort, le trou est bouché. En appuyant sur la longue branche du levier, le trou se débouche, et l'air contenu dans le tube peut se mettre en équilibre de pression avec l'air extérieur, et la pression dans les cavités closes devient égale à la pression atmosphérique. La vitesse de transmission d'un mouvement (d'une onde) dans un tube ayant un orifice de 4 millimètres est de 280 mètres par seconde. HU GRAPHIQUE (Méthode). § II. — Transmission par une colonne liquide. Marey, en 1858, a essayé d'obtenir la transmission des mouvements à distance à l'aide d'un tube de plomb plein d'eau et muni à une de ses extrémités d'ampoules pleines d'eau également. Une de ces ampoules élastiques était mise en contact avec le corps dont on voulait étudier le mouvement (elle était introduite dans le cœur par exemple, s'il s'agissait de l'étude des mouvements cardiaques) tandis que sur l'autre ampoule on posait un levier enregistreur. — Les variations de volume imprimées à la première ampoule étaient transmises par la colonne liquide à la seconde ampoule ; ces dernières variations étaient enregistrées par le levier. Cette méthode présente l'inconvénient d'exiger une force considérable pour que les variations de volume de la première ampoule puissent être transmises à la seconde ; l'inertie du liquide de transmission est un obstacle difficile à vaincre. Roy (1879) a construit, pour faire ses recherches sur le cœur, une sorte de piston- recorder plein de liquide (bicarbonate de soude). — Dans un petit cylindre, servant de corps de pompe, se déplace un petit piston dont les bords sont attachés aux bords du FiG. 95. — Appareil de Koy. cylindre, par l'intermédiaire d'une mince lame flexible. Le piston transmet ses mouve- ments, par l'intermédiaire d'une tige, à un levier enregistreur. A cette tige sont attachés deux fils élastiques qui s'enroulent sur deux poulies, de chaque côté de la tige. Dans l'appareil de Sch.^fer (1884), le piston se déplace dans un cylindre horizontal plein d'huile. Enregistrement électrique. L'application de l'électricité à l'enregistrement comprend plusieurs procédés fondés sur trois propriétés différentes des courants électriques : 1° Sur l'emploi des propriétés électro-chimiques du courant : décomposition électro-chimique ; 2" Sur l'emploi de l'étincelle d'induction : production d'étincelles au moyen de courants induits; 3° Sur l'emploi des propriétés électro-magnétiques : enregistrement électro-magnétique. C'est de ce dernier mode d'enregistrement que nous allons nous occuper, après avoir dit quelques mots seulement sur les deux autres. Dans tous les moyens d'enregistrement électrique cités, la partie de l'appareil qui est mise en contact direct avec le corps dont GRAPHIQUE (Méthode). 825 on désire étudier les mouvements est identique : il s'as't "^l'un dispositif spécial de contacts électriques. — Ce n'est pas cet appareil, variable de forme, selon le phénomène qu'on étudie, qui nous occupe pour le moment : nous n'avons en vue que la partie enregistrante proprement dite. § I. • — Eiiregisi rement électro-chimique. Le passage d'un courant à travers un style de fer, appuyé contre une feuille de papier humide imbibée de cyanure de potassium, détermine à la surface du papier la production d'un trait bleu qui cesse dès que le courant est interrompu. En faisant varier la composition des substances dont le papier est imbibé, ainsi que la nature de l'élec- trode, on peut obtenir des tracés de ditférentes couleurs. Cette méthode d'enregistrement présente l'inconvénient d'exiger un courant de grande tension et un papier dont le degré d'humidité soit toujours le même. — En effet, quand le papier n'est pas humide, le courant est trop affaibli; quand, au contraire, il est trop humide, il se déchire et, en outre, les traces deviennent étalées et diffuses. Il y a un autre inconvénient encore : l'électrode servant de style conserve à sa surface, pendant le passage du courant, une couche de matière colorante qui continue à tacher même quand le courant est interrompu. Malgré ces inconvénients, cette méthode a été employée avec succès dans plusieurs cas, et en particulier dans les télégraphes autographiques. , § II. — Enregistrement au moyen des étincelles d'induction. L'étincelle d'induction jaillissant contre un cylindre argenté enduit de noir de fumée laisse à la surface une auréole au centre de laquelle se trouve un point brillant •extrêmement petit. — L'étincelle peut laisser une trace aussi sur une feuille de papier enfumé entourant la surface métallique du cylindre. Cette méthode n'est pas très bonne. La production de l'étincelle est un phénomène capricieux qui dépend beaucoup de la manière dont la rupture est faite. — L'étincelle ne suit pas, pour aller frapper le cylindre, le chemin qui est géométriquement le plus «ourt, mais bien celui qui est électriquement le plus court. De là des déviations de l'étincelle, qui ne sont pas négligeables, et dont le sens et la grandeur ne sauraient être prévus. — C'est là un inconvénient. Un autre inconvénient de l'étincelle est qu'elle est suivie d'une foule de petites étin- <;elles parasites formant comme une queue. Ces étincelles prouvent que la décharge du fil induit n'est pas instantanée. — Il résulte de là que, si l'on voulait mesurer la durée d'un phénomène très court, dont l'origine et la fin devront être indiquées par deux étincelles jaillissant du même fil, la deuxième étincelle pourrait se confondre avec les étincelles parasites qui accompagnent la première étincelle. — Il arrive souvent que le trait de feu produisant l'étincelle principale se divise en deux ou trois autres traits produisant «hacun une trace sur le cylindre, de sorte qu'on ne sait absolument lequel choisir. Ces inconvénients, déjà observés depuis longtemps, sont bien plus graves encore lorsque le cylindre est recouvert d'une feuille de papier enfumé destinée à conserver la trace de l'expérience. Même lorsqu'on amène le fil d'où jaillit l'étincelle au contact du papier, de façon à en faire un véritable style frottant, l'étincelle n'éclate pas au contact, mais bien à une distance de ce point qui varie capricieusement d'un moment à l'autre, et qui peut atteindre 1/2 millimètre. Le nombre d'étincelles distinctes qu'on peut obtenir avec une bobine Rummkorfk est ■de 250 environ par seconde. Lorsque les interruptions du courant deviennent très rapides, les étincelles deviennent de plus en plus petites, et finissent par ne plus éclater. Comme le courant inducteur doit passer pendant un certain temps pour qu'il «e produise une étincelle, il faut, quand on veut appliquer la bobine d'induction aux phénomènes extrêmement rapides, employer un nombre de bobines égal au nombre de signaux qu'on veut obtenir. 826 GRAPHIQUE (Méthode). 1 M. Deprez a mesuré le retard de 1 étincelle, et il l'a trouvé inférieure à -twtt^ de 10000 seconde. Quelquefois, quand la distance explosive est très petite ( 7 de millimètre j, ce retard devient tout à fait imperceptible, puisqu'il se confond avec la déviation de l'étin- celle. § III. — Enregistrement électro-magnétique. Presque tous les enregistreurs électriques sont des enregistreurs électro-magné- tiques. — Les premiers appareils de ce genre ont été imaginés par Wheatstone. — Ils se composent tous, essentiellement, d'une armature garnie d'une plume inscrivante et soumise, d'une part, à l'attraction d'un électro-aimant, et, d'autre part, à l'action d'un ressort antagoniste. La première condition que doit remplir un tel appareil est d'avoir un retard inva- riable. Ce résultat est très difficile à atteindre. Pour le réduire à ses dernières limites, on a donné aux électro-aimants des dimensions très petites. Le retard total d'un électro-aimant se compose de deux parties : la première, due au temps que nécessite l'aimantation ou la désaimantation; la seconde, due à l'inertie des pièces mobiles qui mettent un certain temps pour accomplir leurs oscillations. A) Signaux électriques. — Voici la description de quelques signaux électriques gros- siers (a) et de grande précision (6). a) Le signal électrique de v. Wittich est un appareil très grossier ne pouvant enregistrer les signaux que sur une surface horizontale. — Cet appareil se compose d'un électro-aimant placé horizontalement, et d'un levier à deux bras, mobile autour de l'axe (x), placé verticalement. — Quand le courant électrique passe dans l'électro-aimant, le morceau de fer doux (a), fixé au bras inférieur du levier, se trouve attiré par l'électro- aimant; le bras supérieur du levier, se rapprochant alors du cylindre enregistreur, trace une droite sur la surface enregistrante, grâce à une pointe inscrivante (s). Cettft pointe, étant portée par une vis, peut être plus ou moins rapprochée de la surface enre- gistrante. — La longueur de la ligne tracée par la pointe varie avec la durée du passage du courant électrique. — Quand le courant ne passe plus, la pointe s'éloigne du cylindre enregistreur, le levier étant entraîné par un poids [g] mobile sur une tige fixée au levier. — Le tracé donné par cet appareil est formé de traits discontinus. Le signal électrique de Brondgeest se compose d'un électro-aimant en forme de fer à cheval (m) ; en face des pôles de cet électro-aimant se trouve placée une armature {p), formée d'une plaque en fer doux lixée au levier {h). Ce levier est mobile autour de l'axe (a) porté par un support placé à côté de l'électro-aimant. Près de l'axe, au- dessous du levier, se trouve le ressort (/") qui maintient le levier éloigné des pôles de l'électro-aimant. — Quand le courant électrique passe dans l'électro-aimant, la plaque (p) se trouvant attirée, l'extrémité inscrivante du levier se trouve abaissée, et elle trace sur le cylindre une ligne descendante. Tant que le courant passe, ou quand le courant ne passe pas, le levier trace une droite horizontale. Quand le courant cesse d'agir, le levier, étant soulevé brusquement par le ressort, trace une droite verticale ascendante. De cette façon on obtient un tracé continu à dents. — Cet appareil présente trop d'inertie, et il ne peut inscrire les signaux que sur une surface verticale. Le signal de Baltzar se compose d'un électrn-aimant et d'un signal direct. — L'électro-aimant {m, m) présente ses pôles disposés de telle façon que, pendant le pas- sage du courant, l'armature [a, a), qui porte la plume inscrivante (s'), tourne autour de l'axe x' . Quand le courant électrique ne passe plus dans l'électro-aimant, l'armature est ramenée à sa position primitive par un ressort réglable à l'aide de la vis [sch). Les fils électriques sont fixés aux bornes (p, p'). Au-dessous de l'électro-aimant, il y a un contact électrique de platine (A"). Les mouve- ments de la tige (d) sont transmis par l'intermédiaire de l'axe [x-] et de la pointe (s-) au levier [b] qui porte le style enregistreur (.s-). De cette façon on a finscription directe du moment où l'on fait l'interruption d'un courant électrique. GRAPHIQUE (Méthode). b) Le signal de Deprez (flg. 96) (construit par Yerdin) se compose d'un petit électro- aimant {m), en forme de fer à cheval. Le fil dont se composent les deux bobines est très fin. En face des pôles de l'électro-aimaut se trouve placée une armature mobile autour de l'axe (c). L'armature porte une plume inscrivante très légère {s). L'armature est tenue éloignée des pôles de l'électro-aimant par un petit ressort spiral accroché à l'axe (c). Un petit levier (/") permet de varier la tension du ressort, et varie, par conséquent, l'éloignement de l'armature des pôles de l'électro-aimant, jusqu'à ce que le tracé donné par la plume (s) paraisse le plus convenable. Le courant électrique, qui arrive à l'électro- aimant, passe par les fils (d') et {d-). Toutes les pièces que nous venons de décrire sont fixées à une tige mobile à l'aide d'ime crémaillère dans une autre tige qui se fixe à un support. De cette façon on peut varier la longueur de la tige support de l'électro-aimant et placer la plume à l'endroit voulu. L'inscription peut se faire, indifféremment, sur une surface horizontale ou verti- cale — Le signal de Deprez peut fonctionner avec un seul élément Bunsen. L'appareil de Kronecker et Pfeil (fig. 97), connu surtout sous le nom de signal de Pfeil, est basé sur le même principe que le téléphone. Cet excellent appareil se com- pose d'un petit électro-aimant {m) et d'une mince plaque d'acier (p), servant d'armature. Les extrémités de cette lame, qui sert d'armature, sont solidement ILxées aux deux branches du support. Le milieu de cette plaque est relié, par l'intermédiaire d'une petite tige, avec un levier enregistreur (//) très long, mobile autour de l'axe (a). Un contrepoids {g) fait équilibre à la longue branche du levier. En tournant une vis (s) placée au-dessous de l'électro-aimant, on peut rapprocher ou éloigner l'électro-aimant de l'armature. Quand le courant passe, la lame (p) se trouve attirée, sans pourtant jamais arriver à toucher les pôles de l'électro-aimant : une vis tangente (t) sert à régler la position de l'appareil par rapport à la surface enregistrante. Le fil des bobines de cet appareil étant plus gros que celui des boiines du signal de Deprez, on peut employer des courants forts sans craindre de le brûler. B) Sig7iaux électriques doubles. — Pour certaines expériences il est utile d'avoir deux signaux électriques très rapprochés l'un de l'autre. Pour cela les constructeurs ont fixé sur une même tige à support deux signaux identiques. C'est ainsi, par exemple, que Verdin a construit des signaux doubles de Deprez. C) Retard des signaux électriques. — a) Helmholtz a imaginé une méthode qui permet d'estimer avec une précision extrême le retard d'un signal électrique. Voici en quoi consiste cette méthode : On commence par déterminer, sur la surface enregistrante, la position où le signal s'inscrirait si l'appareil enregistreur n'avait pas de retard; ensuite ^^«,«^ Fiu. 9G. — Signal électrique de Dkpkez. on laisse l'appareil enregistrer normalement le signal sur la surface en mouvement.' La distance qui sépare les deux tracés du signal électrique représente le retard de l'appa- reil. C'est le cylindre enregistreur lui-même qui, à un certain moment de sa rotation, rompt ou ferme le courant électrique qui provoque le signal. Dans une première expé- rience, on fait tourner le cylindre enregistreur avec une extrême lenteur au moment où va se produire le signal électrique ; la vitesse du cylindre étant presque nulle, le signal ne subira aucun déplacement. Dans une autre expérience, on imprime au cylindre enregistreur son mouvement rotatif maximum, et l'on fait inscrire le signal. Le tracé, 828 GRAPHIQUE (Méthode). dans ce deuxième cas, se trouve inscrit un peu plus loin que la première fois, car, depuis le moment où la rupture du courant de pile s'est faite, jusqu'à celui où le signai est inscrit, le cylindre a tourné d'une certaine quantité. Cette quantité, mesurée au chronographe, donne exactement le retard du signal. Marcel Deprez, pour déterminer à l'aide de cette méthode le retard d'aimantation et de désaimantation de ses signaux électriques, a incrusté dans l'un des fonds du cylindre tournant un secteur de caoutchouc durci. Doux frotteurs métalliques, en contact avec le fond du cylindre, ferment le courant tant qu'ils touchent les parties métalliques; le courant est rompu quand le secteur isolant passe au-dessous d'eux. En procédant comme nous l'avons dit plus haut, Deprez a trouvé des retards plus ou moins grands : dans certains 1 cas, le signal de clôture retardait de ^ (retard d'ai- mantation) tandis que le retard de rupture était de 1 --— (retard de désaimantation). b) En réduisant la masse de fer doux qui est soumis à la traction de l'électro-aimant, en donnant une légèreté extrême au style, et en plaçant en circuit dérivé sur le courant de la pile une bobine munie d'un fer doux, Deprez a abrégé d'une façon considérable le retard des FiG. 97. — Signal de Kronecker signaux électriques. Plus ce retard est petit, plus le et Pi-EtL. nombre de signaux par seconde qu'on peut enregistrer est grand. Deprez a réussi à construire des appareils capables de' donner 1 500 signaux doubles par seconde avec possibilité de fournir .3 000 signaux, si l'on utilisait séparément la rupture du circuit de pile. c) Tigerstedt et Yeo ont déterminé la période latente de démagnétisation des signaux électro-magnétiques. Voici les chiffres trouvés par ces auteurs : Le signal de Pfeil présente, en moyenne, une durée de démagnétisation égale à 0", 00077, avec une erreur moyenne de 0", 000048. Le signal de Pfeil, employé par Tigerstedt dans ses expériences, présentait une période de démagnétisation égale, en moyenne, à 0",0003. Le signal de Deprez, quand son ressort en caoutchouc est très peu tendu, présente, en moyenne, une durée de démagnétisation égale à 0", 00090, avec une erreur moyerme de 0"000048. — Quand le ressort du signal de Deprez est tendu, la durée de démagnéti- sation est, en moyenne, de 0", 00060, avec une erreur moyenne de 0"000042. Les signaux Deprez à ressort métallique, construits par Verdin, présentent une période latente constante, dont la durée moyenne est de 0", 00086, avec une erreur de 0"000087. Le signal de Dew-Smith (construit par la G. C. S.), semblable à celui de Pfeil, présente, selon la dislance qui sépare l'électro-aimant de l'armature, une période latente variable. Cette période est, pour un certain écart de l'électro-aimant, de 0", 00076 avec une erreur moyenne de 0"000032 ; pour un autre écart de l'électro-aimant, la période latente est de 0", 00086, avec une erreur moyenne de 0", 000057. Le signal de Smith, construit dans le laboratoire de Bordon-Sanderson, possède une période latente de 0"00086, avec une erreur moyenne de 0", 000087. D) Réglage des signaux électriques. — Quand plusieurs électro-aimants sont employés simultanément, il faut que leurs retards d'aimantation et de désaimantation soient uni- formes. Quand même ces retards seraient grands, s'ils sont tous égaux, les rapports de durée et de succession des phénomènes qu'on étudie ne sont pas altérés. Une série de signaux électro-magnétiques, construits simultanément, en employant le même fer doux, le même fil conducteur, et en donnant les mêmes dimensions à toutes les pièces, ont beaucoup de chances pour avoir les mêmes qualités électro-magnétiques. Pour avoir l'égalité de leurs retards, il suffira d'assurer l'uniformité parfaite de leurs ressorts de traction. GRAPHIQUE (Méthode). 8i29 Pour cela, on place dans le circuit d'une même pile un interrupteur et les signaux qu'on veut régler. Leurs styles enregistreurs sont au contact d'une surface enfumée animée d'une translation rapide. — En faisant, à l'aide de l'interrupteur, des fermetures et des ruptures de courant, on voit si les signaux s'arment ou se désarment simultané- ment. En général cela n'a pas lieu. — On commencera alors par régler l'égalité de la rupture; pour cela on agira sur les petits ressorts tenseurs du contact en fer dou.x : on armera davantage celui dont le mouvement est le moins rapide. Avec quelques essais et tâtonnements, on arrivera rapidement à un résultat satisfaisant. — Puis on s'occupera de régler la simultanéité dans les indications du commencement du passage du courant ; il suffira pour cela d'agir sur la vis de réglage qui rapproche ou éloigne le contact en fer doux de l'électro-aimant. Ce petit réglage se fait rapidement, et dès lors les signaux fonctionnent simultanément. § IV. — Grariire électrique. Voici un mode d'enregistrement qui pourrait, peut-être, trouver une application à l'inscription électrique des phénomènes. — 11 a été employé par Planté (1878) pour graver sur verre. On recouvre la surface d'une lame de verre ou d'une plaque de cristal avec une solution concentrée de nitrate de potasse. On fait plonger dans la couche liquide, le long des bords de la lame de verre, un fil de platine horizontal, communiquant avec les- pùles d'une batterie secondaire de ;J0 à 60 éléments. Tenant à la main l'autre électrode formée d'un fil de platine, on touche le verre recouvert de la mince couche de solution saline. Un sillon lummeux se produit partout où touche l'électrode. Quelle que soit la rapidité avec laquelle on écrit, les traits se trouvent nettement gravés sur le verre. Il faut un courant moins fort pour graver avec l'électrode négative. VI Chronographie. Pour analyser un phénomène dont on a le tracé, il faut connaître avant tout la vitesse avec laquelle s'est déplacée la surface enregistrante pendant l'expérience. Quand on emploie une surface enregistrante mise en mouvement par un mécanisme d'horlogerie bien régulier, il suffit de connaître la vitesse de rotation du cylindre, car d'après elle on peut estimer la durée d'une étendue quelconque de l'abscisse. La vitesse de rotation d'un cylindre peut être déterminée très facilement de la façon suivante : on fait tracer, par une plume enregistrante, sur le cylindre au repos, une ligne verticale; cette ligne servira de point de repère; elle donne le moment à partir duquel il faut déterminer le temps. En mettant le cylindre en mouvement, on compte le nombre des passages du repère devant la plume en un temps déterminé à l'aide d'une montre (1). Pour avoir la vitesse, il faut diviser le nombre de minutes ou de secondes, pen- dant lesquelles on a compté les tours, par le nombre de tours observés. Soit par exemple un cylindre qui fait 4 tours en 160 secondes. En faisant la division de 160 par 4, on voit que la durée d'un tour est de 40 secondes. — Si le cylindre présente une périphérie de 300 mil- 40 limètres, une abscisse d'un millimètre représentera -„ r- = 0",08. oOO Avant d'apprécier la vitesse de rotation, il faut d'abord laisser au cylindre le temps de faire quelques tours pour acquérir un mouvement régulier. On ne doit pas non plus faire cette détermination quand le cylindre est près de s'arrêter, car alors sa vitesse est moindre qu'au début. La détermination de la vitesse de translation d'une surface enregistrante à l'aide du procédé que nous venons de décrire, est lente et ne s'applique qu'aux surfaces cylin- (1) Les anciens cylindres enregisti-eurs, comme ceux cI'Helmholtz et de Volkmann, étaient pourvus de compteurs de tours. 830 GRAPHIQUE (Méthode). driques. Pour déterminer rapidement la vitesse de déplacement d'une surface quel- conque, il faut inscrire sur la surface des durées connues. Les appareils et les procédés qu'on emploie pour eni'egistrer des durées longues, comme les quarts d'heure, les heures, les demi-heure, ou bien des durées brèves comme les minutes, les secondes et les fractions de seconde, ne sont pas les mêmes. L'ensemble des procédés qu'on emploie pour faire la mesure graphique du temps constitue la chronographie proprement dite. — Les tracés qui représentent le temps s'appellent des chronogrammes. § L — Mesures des longues durées. A. Mécanisme d'horlogerie. — I. Chronomètres à pointage. — On peut déterminer la durée d'un phénomène à l'aide d'un chronomètre à pointage. L'aiguille d'un tel chro- nomètre est chargée d'encre à sa pointe; par la pression d'une détente, cette pointe s'applique sur le cadran et laisse la trace de la position qu'elle occupait au début du phénomène qu'on étudie. A la tin du phénomène considéré, on provoque un second pointage. Le nombre des divisions du cadran qui séparent les deux points donne la mesure de l'intervalle considéré. Le principal avantage de cette méthode est qu'il n'est pas nécessaire de regarder le cadran pendant la durée d'une observation ; une simple pression du doigt au moment où le phénomène commence, et une autre au moment où il finit, suffisent pour en déterminer la durée. Si le temps à mesurer excédait la durée d'un tour de cadran, on risquerait de com- mettre des errenrs sur le nombre de tours. Grossmann (1882) a fait l'historique des montres qui présentent ce moyen si simple d'enregistrement . RiEussAC (brevet du 9 mars 1822) a construit un chronographe dont voici le méca- nisme : Sur l'axe des secondes d'un mécanisme d'horlogerie était ajouté, par son centre, un cadran se mouvant avec lui. Sur le bord de la i)oîte de l'appareil, tout près du cadran, une petite pointe lancée par une détente à la volonté de l'observateur, sortait d'un encrier par une échancrure de celui-ci, et projetait une petite goutte d'encre sur la partie du cadran qui se trouvait devant lui à cet instant. Ce n'était pas là un appareil de précision; son auteur l'avait uniquement destiné aux courses de chevaux. La grande masse du cadran placée sur l'axe des secondes en faisait un instrument très impropre aux mesures exactes des phénomènes physiques et astronomiques. Le chronographe de Rieussac avait la forme et le volume d'un gros chronomètre de poche ; le cadran était mobile autour d'un axe perpendiculaire à son plan passant par le centre. Quand la montre marchait, le cadran faisait un tour en une minute. Plus tard, en 1837, Rieussac a perfectionné son appareil en le rendant semblable à celui de Breguet. Le chronomètre à détente de Breguet (1822, Rapport de l'Exposition de 1823) donne le moyen d'apprécier rigoureusement la durée d'un phénomène. Le cadran est fixe, tandis que l'aiguille des secondes, qui porte un petit encrier, ainsi que la pointe destinée à marquer les instants d'observation, est mobile, II. — Chronomètres enregistreurs directs. — Jaquet a fait construire par Runne un chronographe qui permet d'inscrire directement les mouvements d'un mécanisme d'hor- logerie sur un cylindre enregistreur recouvert d'une feuille de papier enfumée. Ce chronographe se présente sous la forme d'une petite boite rectangulaire, haute de 4'>™,5, profonde de 1<'™,5, pesant 200 grammes, avec une virole qui lui permet d'être fixé sur un support à côté des autres appareils enregistreurs. Son levier inscripteur est long de 12"'"'. Sur une des faces de la boîte se trouvent deux cadrans : un pour les secondes, l'autre pour les minutes. La pression sur un bouton spécial permet de ramener les aiguilles à zéro. L'erreur de cet appareil est de 3 secondes en 24 heures. En déplaçant une petite tige, on peut inscrire les secondes ou les demi-secondes. On peut arrêter l'appareil à volonté. GRAPHIQUE (Méthode). 831 III. — Électrochronographes. — a) L'clectrochronographie a été introduite dans les recherches astronomiques par Locke en 1848. Locke se servait d'une montre à contacts électriques. Il marquait les secondes par de petits traits ; les minutes étaient marquées par des traits plus longs, car alors le cou- rant était laissé ouvert pendant plus longtemps. Les traces du temps étaient disposées ainsi en groupes, ce qui est très commode pour la lecture. b) Quand la surface enregistrante est mise en mouvement par un mécanisme d'hor- logerie, on s'est souvent servi du même mécanisme, pour avoir le tracé de la durée d'un phénomène, en forçant ce mécanisme à établir ou à rompre des contacts qu'on inscrivait à l'aide d'un signal électro-magnétique. L'appréciation des durées à l'aide de ce procédé est imparfaite, car le mouvement d'horlogerie de l'appareil enregistreur présente rarement une grande régularité. c) On peut enregistrer électriquement les mouvements de n'importe quelle montre ; il suffit pour cela d'adapter au rouage des contacts électriques. La seule condition à observer est la suivante : les contacts électriques doivent être disposés de telle façon qu'ils n'influencent pas la marche de la montre. Ainsi le chronographe de Jaquet présente un dispositif qui permet d'avoir, à côté de l'inscription directe, l'inscription à distance au moyen de l'électricité. Baltzar a construit une montre à contacts extrêmement intéressante, dont les FiG. 98. — Électrochronographe de Baltzar. figures 98 et 99 représentent les parties essentielles. Le disque métallique m est mis en mouvement par le rouage d'une horloge. Celte horloge est mise en mouvement par 832 GRAPHIQUE (Méthode). la chute d'un poids, un pendule dont on voit une partie de la tige en p, bat la seconde. Le disque m, qui fait un tour en une minute, présente plusieurs pointes mé- talliques disposées en 10 cercles concentriques. Le cercle extérieur se compose de 60 pointes; le second cercle se compose de 30 pointes; le troisième de 20, et ainsi de suite jusqu'au cercle intérieur qui ne comprend qu'une pointe. En face du disque m se trouve une petite languette métallique élastique z, portée par le support k. Ce support peut être déplacé de façon que la lame z puisse être placée en face d'un des 10 cercles du disque. Quand le disque tourne, les pointes soulèvent la languette z. Quand cette languette est soulevée, le contact électrique qui existe entre son prolongement en platine et la pointe de la vis s se trouve interron)pu. Quand la languette z n'est plus soulevée, le contact se rétablit. La lame de platine est en commu- nication avec le fil électrique d' ; la pointe, avec le fil (/. Si la languette z est en face du cercle composé de 60 pointes métalliques, on aura 60 interruptions du courant par minute; si elle est en face du cercle composé d'une seule pointe, il n'y aura qu'une seule interruption par minute. — Le nombre des inter- ruptions par minute est indiqué par les chiffres qui sont en face de l'index i. En variant la position de la languette sur son support, on peut varier la durée d& l'interruption du circuit. La montre à contact de Baltzar est renfermée dans une boîte fixée au mur. — Les interruptions du circuit sont marquées sur la surface enregistrante par un signal électro- magnétique. Un élément Da>'iell ou Leglanché suffit pour obtenir des chronogrammes. BowDiTCH, dans ses recherches faites au laboratoire de Ludwu;, avait employé un dispositif particulier, qui permettait d'obtenir, avec la montre de Baltzar, des tracés plus grands toutes les î> secondes. Brodie a fait construire par Palmer (1900) un appareil analogue à celui de Baltzar. B. Le pendule. — 1. Le pendule battant la seconde est le type des appareils qui servent à mesurer le temps. Voici la description d'un pendule à seconde très simple employé au laboratoire des recherches physiques de la Sorbonne : Une tige plate en sapin porte une masse de fonte que l'on assujettit à la hauteur convenable à l'aide d'une vis de pression. La tige du pendule est de bois de sapin verni, très sec et très droit de fil, parce que le sapin est indifférent nux variations de température. Le coefficient de dilatation linéaire du sa[)in dans le sens des fibres est à peu près de 3 millionièmes. Un tel pendule oscille pendant plusieurs heures. On peut, de plus, entretenir un pen- dule en mouvement en faisant agir sur lui des impulsions. — Lippmann (1896) a conçu et réalisé un pendule sans perturbation et dont le fonctionnement repose sur la propo- sition suivante : « Si deux impulsions égales sont imprime'es au pendule en un niême point de sa trajec- toire, l'une à la montée, l'autre à la descente, les perturbations qu'elles produisent sont «gales et de sens contraire. » GuiLLET (1898) a produit des impulsions au moyen de courants d'induction dus à la fermeture et à l'ouverture d'un circuit indu(;teur; le pendule ouvre et ferme le circuii, inducteur, lorsqu'il passe par la verticale dans les deux sens. Le mouvement d'un pendule successivement libre et entretenu a été comparé à celui d'un pendule auxiliaire approximativement synchrone au premier. Les oscillations des deux pendules ont été inscrites au début et à la fin de chaque phase d'observation sur un cylindre enregistreur. On a constaté ainsi la régularité des mouvements du pendule entretenu par des impulsions. FlG. 99. — Contacts électriques de l'appareil de Baltzar. GRAPHIQUE (Méthode). 833 II. Les oscillations d'un pendule peuvent être enregistrées au moyen de l'élec- tricité de la façon suivante : On fixe perpendiculairement à la tige (s) et dans son plan d'oscillation, une petite tige de cuivre (<), recourbée à son extrémité, qui se termine par une pointe de platine. Cette pointe effleure la surface du mercure (m) conteuu dans un petit godet placé sur une tablette d'ébonite fixée à côté du pendule sur le même support que lui. — Le mer- cure d'une part, la tige {() d'autre part, sont en communication par deux fils fins, aux deux bornes (b) auxquelles aboutissent les conducteurs polaires d'une pile (P). — Dans ce même circuit se trouve intercalé un électro-aimant inscripteur placé à côté de la surface enregistrante. — A chaque oscillation du pendule, le courant est interrompu et établi. On transmet ainsi à l'électro-aimant des signaux périodiques espacés d'une seconde. Un tel pendule peut osciller pendant plusieurs heures; il se prête donc parfaitement à des expériences de longue durée. — La mesure de la seconde par ce procédé est très précise. Voici encore quelques dispositifs de contacts électriques appliqués au pendule pour en enregistrer les oscillations. Le godet à mercure, au lieu de se trouver sur le côté, comme dans le cas précédent, peut être placé à la partie inférieure, au-dessous du pendule. Krille a imaginé le dispositif suivant. Deux vases contenant du mercure commu- niquent entre eux par un petit pont formé par une goutte de mercure qui se trouve entre les extrémités effilées des tubes fixés aux parois des vases. Le courant passe par le pont de mercure. — Le pendule présente à son extrémité inférieure une lame de mica. A chaque oscillation du pendule, la lame de mica coupe le pont, et ainsi interrompt le courant électrique. C'est là le signal enregistré par l'électro-aimant intercalé dans le circuit. Voici le dispositif de Buff. D'un seul côté, ou des deux côtés du pendule, se trouve une petite plaque métallique supportée par un ressort spiral très délicat. Le pendule, quand il est dans sa position la plus éloignée de sa position d'équilibre, touche une de ces plaques. Le ressort spiral permet à la plaque de céder facilement sous l'influence de l'impulsion donnée par le pendule, de sorte que les oscillations de ce dernier ne sont pas trouble'es. La tige du pendule communique avec l'un des pôles d'un circuit, tandis que la plaque, ou les pla- ques, s'il y en a une de chaque côté, communiquent avec l'autre pôle. On obtient ainsi un ou deux signaux par seconde, signaux qui sont enregistrés par l'électro-aimant intercalé dans le circuit. G. Le métronome. — I. Klemensiewigz a enregistré les mouvements d'un métro- nome de la façon suivante : On fait agir le balancier du métronome sur un ou deux tambours à. air de Marey placés de chaque côté de l'appareil. Chaque fois que le balancier touche la membrane du tambour, l'air qui en est chassé pénètre dans le tambour inscripteur, et on a un trait sur la surface enregistrante. Au lieu de faire agir le balancier directement sur la membrane, on peut le faire agir sur un fort levier qui se trouve relié à la membrane (Dispositif de Langendorff). Verdin, observant que les chocs imprimés à la membrane du tambour allèrent les oscillations du balancier d'une quantité variable et inconnue, a confié cette fonction à la roue dentée qui commande l'échappement du rouage qui met en mouvement le balan- cier. Pour cela la roue dentée est munie de chevilles qui, à chaque oscillation, frappent un tambour à air. 11. Les mouvements du métronome peuvent être enregistrés au moyen d'une trans- mission électrique de la façon suivante : On fixe sur le balancier du métronome un fil de cuivre recourbé, et amalgamé à son extrémité. Cette extrémité du fil plonge à chaque mouvement du balancier dans un petit godet rempli de mercure. Le godet à mercure d'une part, le métronome de l'autre, étant reliés aux électrodes d'une pile, à chaque mouvement du balancier il se produit un DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VH, o3 S34 GRAPHIQUE (Méthode) contact, et par conséquent le circuit électrique est fermé. Un signal électro-magnétique intercalé dans le circuit, enregistre les mouvements du balancier sur une surface enre- gisli'anle. Le courant électrique peut ne pas traverser le métronome, si au lieu d'un godet à mesure on en prend deux à côté du métronome et si l'on place à l'extrémité de l'arc fixé au balancier un fil à deux branches recourbées. Ces branches, plongeant dans le mercure des godets, ferment le courant électrique d'une pile dont les électrodes sont en relation avec les godets. 111. Il y a des métronomes, comme par exemple celui de iNoel et Le Bon (1878), qui sont pourvus à ia fois d'un contact électrique et d'un tambour à air. D. Stalamochronographie. L'isochronisme de la chute des gouttes d'un FiG. 100. Métronomes. liquide, s'écoulant par un orifice étroit sous une charge constante, a été employé par Grutzner (1887) pour évaluer la durée des phénomènes. SiGAL.^s a utilisé aussi ce phénomène delà façon suivante : Deux tambours de Marey étant conjugués, on met sur l'extrémité du levier d'un des tambours une petite cupule à conve.xité supérieure; les gouttes qui tombent d'un flacon de Mariotïe viennent frapper sur cette cupule. Chacun des chocs provoqués parla chute d'une goutte se trouve enregistré parle tambour inscripteur. Le réglage de la chute des gouttes se fait en agissant : i° sur le tube du flacon de Mariotte, pour varier la charge de la chute; 2° sur le robinet d'écoulement, dont la clef est munie d'un levier, déplaçable sur un cercle divisé, grâce auquel on peut produire des variations lentes et progressives de la lumière du tuyau de sortie. Pour des vitesses d'écoulement ainsi réglées, à 1,2, 3, 5, etc. par seconde, les oscillations représentées sur le tracé correspondent évidemment , ,„ 1" 1" 1" a 1 . ^» 2 ' 3 ' 5 ' ®*^" .ii II. Mesures des petites durées. Le vrai moyen de mesurer le temps, c'est de compter le nombre de vibrations dune tige vibrante. Cette méthode d'estimer le temps, base de la chronographie, est due à Tho.mas YouiNG (A course of lectures on natural philosophy and the mechanical arts, 1807, I, p. 191) qui se servit à cet effet d'une tige vibrante munie d'un style. Duhamel (1841) a appliqué cette méthode à l'étude des vibrations des cordes. Wertheim (1844), le premier, l'employa à déterminer le nombre des vibrations d'un son ù l'aide d'un diapason de tonalité connue {Ann. de Chim. et de Phys., 1844, (2), xii, 385) • GRAPHIQUE (Méthode). 835 A. Le diapason. — I. Les vibrations du diapason, ayant une amplitude rapidement décroissante, le diapason ne pouvait servir à mesurer le temps, pendant une expérience de quelque durée, si l'on n'avait des moyens pour entretenir ses vibrations'. 1) Parmi les moyens employés, il faut citer en premier lieu l'emploi de l'électricité. L'entretien, par l'électricité, d'un diapason est un problème résolu depuis longtemps par Helmholtz, Regnault, Foucault et autres physiciens. Le principe de ce moyen est le même que celui de V interrupteur de Wagner. Une des branches d'un diapason forme l'armature d'un électro-aimant; le tout, électro- aimant et diapason, est disposé comme une sonnerie trembleuse, et la branche vibrante elle même, en touchant un contact ou en s'en éloignant, établit ou interrompt un courant électrique synchroniquement avec le mouvement vibratoire ; la branche mobile est par suite attirée régulièrement, et le mouvement est entretenu aussi longtemps qu'on le désire. L'entretien du mouvement du diapason, de même que celui d'une lame vibrante quelconque, n'exige pas que l'action électrique s'effectue à chaque période. En ne réalisant cette action que toutes les 2, 3, 4 ou 5 périodes, on peut obtenir une subdi- vision de plus en plus grande du temps. C'est le procédé employé par Cornu dans ses belles expériences sur la vitesse de la lumière, pour inscrire le 1/10"= de seconde en même temps que la seconde sur un cylindre enregistreur. Il est bon, dans les recherches de grande précision, de contrôler par l'observa- tion d'une horloge bien réglée la durée d'un grand nombre d'oscillations du diapason; car l'attraction électro-magnétique peut altérer légèrement la durée de la vibration. 2) Les électro-diapasons ont pris une forme pratique et industrielle. Il y en a de diverses formes, avec l'électro-aimant disposé de dilTérentes manières. L'électro- aimant peut être double, comme dans les électro-diapasons système Lissajous et FiG. 101. — Électro-diapason de Verdin. système Marcel Deprez; il réagit alors extérieurement sur les deux branches du diapason. Il peut être simple, comme dans le système Mercadier adopté par Bregueï et DuBOSQ, et dans ce cas il peut être placé entre les deux branches du diapason. Mercadier a montré que le même appareil d'entretien peut s'appliquer à des diapa- sons différents, moyennant une légère modification de la pile. Généralement, un élément Tauch de grosseur moyenne suffit pour entretenir un diapason automatique et pour faire fonctionner l'électro-aimant inscripteur. On a construit plusieurs types de diapason entretenus électriquement. Ainsi Koenig a construit des diapasons avec des contacts à mercure ou avec des contacts de platine. La position de l'électro-aimant par rapport aux branches du diapason est aussi variable. L'électro-aimant peut être placé entre les deux branches du diapason, comme dans le diapason interrupteur construit par Koenig; ou bien il peut être placé à côté d'une des branches, comme dans l'appareil construit par Verdin (fig. 101). Dans l'appareil de Koenig le contact électrique s'établit entre une colonne métal- 1. Pour les diapasons de fabrication française, le nombre des oscillations par seconde est donné en demi-vibrations; pour les diapasons allemands, les vibrations sont comptées en vibra- tions entières, nommées aussi oscillations doubles. 836 GRAPHIQUE (Méthode). lique et une tige A- en platine. La colonne et l'électro-aimant étant mobiles dans deux fentes, on peut régler l'appareil. Au lieu d'un seul électro-aimant il peut y en avoir deux, un de chaque côté des •deux branches du diapason. Pfaundler a construit un diapason interrupteur à mercure; deux électro-aimants «ntretiennent les vibrations du diapason ; une tige fixée à une des branches, plonge à chaque vibration dans le mercure contenu dans le godet. 3) GuiLLET (1900) a trouvé un procédé d'entretien qui s'applique aussi bien au pendule qu'au diapason. Le voici : L'électro-aimant est en série avec le fil d'une bobine dont le gros fil reçoit le courant d'une pile. Les interruptions ayant lieu juste au moment où le diapason passe par sa position d'équilibre, les charges induites à l'ouverture et à la fermeture du courant primaire impriment aux branches du diapason des impulsions favorables. On peut obtenir des interruptions du primaire à l'aide d'un microphone, dont les mouve- ments sont commandés par le diapason lui-même, soit directement, soit par l'inter- médiaire d'un milieu interposé. Lorsque les crachements ont disparu et que le microphone rend un son musical à l'unisson de celui du diapason, l'amplitude du mouvement des branches du diapason atteint sa valeur maximum. 4) EwALD (1888) a proposé d'entretenir les oscillations d'un diapason au moyen d'un courant d'air ou d'un courant d'eau. — Ce procédé est beaucoup plus simple que le procédé électrique. Le courant liquide ou gazeux peut agir de deux façons sur le diapason : en exerçant une aspiration ou en exerçant une pression. Dans les deux cas, on fixe à l'extrémité de l'une des branches du diapason une petite tige longue de 10 millimètres de diamètre. Cette petite plaque est placée en face de l'ouverture d'un tube dans lequel passe un courant d'eau ou d'air. — A l'aide d'une trompe à eau on peut exercer une aspiration dans le tube. — Tant que dure l'aspiration, le diapason est constamment en mouve- ment. Pour un diapason qui fait 50 oscillations par seconde, une pression négative de 3 millimètres de mercure est suffisante pour entretenir ses mouvements indéfiniment. Quand on veut faire agir une pression au lieu d'une aspiration, on fait passer le courant liquide ou gazeux entre la plaque et le diapason. II. L'enregistrement des vibrations d'un diapason peut se faire de différentes manières. 1) En collant une soie de porc ou une petite plume sur une des branches d'un dia- pason entretenu électriquement, et en le plaçant à côté d'une surface enregistrante, on obtient le tracé direct des vibrations du diapason. C'est ainsi qu'a procédé Mercadieb. Cette façon d'enregistrer les mouvements du diapason altère très peu le nombre des vibrations par seconde. — Koexig a constaté qu'un diapason, qui ferait 256 vibrations par seconde, fait, quand il enregistre ses mouvements, 1/6 de vibrations de moins par seconde. Ce procédé d'enregistrement n'est pas commode. 2) L'enregistrement du diapason se fait généralement au moyen de la transmission électrique. — Un second diapason, en tout semblable au premier, est placé à côté du cylindre enregistreur et est pourvu d'une plume. — Ce procédé, qui exige deux diapa- sons, uti primaire et un autre secondaire, est très encombrant. Le diapason secondaire est remplacé par un signal électrique, comme ceux que nous avons décrits dans un chapitre précédent. — Ces signaux électro-magnétiques qui enregistrent le temps s'appellent des chronographes. Le chronoyraphe de Marey se compose d'un électro-aimant présentant une masse de fer doux en face de laquelle se trouve une petite masse de fer doux, l'armature fixée sur une lame d'acier munie d'une plume. — La longueur de la lame d'acier doit varier avec le nombre des vibrations que l'on veut enregistrer. Pour faire le GRAPHIQUE (Méthode) 837 réglage de cette longueur, l'appareil présente une vis spéciale. — En tournant cette vis on déplace un étau mobile qui maintient la lame d'acier. — L'électro-aimant entre- tient les vibrations de la lame d'acier, en produisant, pendant le passage du courant, une série d'attractions renouvelées autant de fois qu'il y a de vibrations à enregistrer. Si l'appareil est réglé de façon que la lame du chronographe ait des vibrations propres du même nombre que celles du diapason, on voit, dès que le circuit électrique est fermé, le chronographe vibrer à l'unisson du diapason. Si le style du chronographe n'est pas soigneusement accordé pour le nombre de vibrations que le diapason exécute, il reste immobile, et le diapason vibre seul. Il suffit alors d'un léger tâtonnement pour amener, au moyen de la vis de réglage, le style du chronographe au nombre voulu de vibrations. Alors, les vibrations durent tant que la pile conserve une énergie suffi- sante, c'est-à-dire très longtemps. Un même chronographe peut donner, à volonté, différents nombres de vibrations par seconde; il faut alors prendre, comme interrupteurs du courant, des diapasons du nombre que l'on veut obtenir, et régler le chronographe à l'unisson de l'interrupteur employé. Avec un même interrupteur, on peut donner au chronographe des nombres divers de vibrations, qui varient du simple au double. Par exemple, avec un diapason de 100 vibrations par seconde, on peut faire vibrer le chronographe 200 fois par seconde; il suffit pour cela d'accorder le style à l'octave aiguë du diapason. Le chronographe de Marey donne, généralement, 100 vibrations par seconde. Le chronographe proprement dit est porté par une tige à crémaillère; à l'aide d'une vis, on varie la longueur de cette tige, ce qui permet de bien disposer la plume de l'appareil sur le cylindre; les fils électriques sont fixés aux bornes. Quand on veut n'inscrire les mouvements d'un chronographe que pendant un petit instant, on place le chronographe sur une pièce basculante qui, sous l'inlluence d'un électro-aimant, ne s'approche de la surface enregistrante qu'au moment voulu. — Le chronographe vibre cependant, même quand il est éloigné de la surface enregistrante. Cet appareil inscrit ses mouvements également bien sur une surface horizontale ou sur une surface verticale. Le chronographe de v. Fleisghl (1883) ressemble à celui de Marey : seulement sa lame vibrante présente une longueur fixe. — Elle est placée entre les pôles de l'électro- aimant dont elle est rapprochée ou éloignée à l'aide d'une vis. Quand on considère le style vibrant d'un chronographe, on voit que le style décrit une oscillation dont les limites sont constituées par deux images divergentes formant une sorte de V. Pour prouver le parfait synchronisme de deux chronographes, on regarde si, en les Fio. 102. — Inscriptions dos traci^'s chrouographiquos. tenant perpendiculairement l'un à l'autre, les deux V peuvent être amenés à se péné- trer l'un l'autre sans qu'il se produise de choc entre les deux styles. 3) Les vibrations d'un diapason peuvent être enregistrées au moyen de la transmis- sion à air. Pour cela une des branches du diapason est reliée à la membrane d'un tambour à air de Marey. Ce tambour est tout à fait identique à celui que nous avons décrit en parlant du tambour enregistreur. Ce dernier tambour reçoit, par l'intermé- 838 GRAPHIQUE (Méthode). diaire d'un tube qui le relie avec le tambour explorateur placé à côté du diapason, les mouvements de la membrane synchrones aux vibrations du diapason. En variant la position du tambour placé à côté du diapason, on varie l'amplitude du mouvement de sa membrane; plus le tambour est rapproché de la base du diapason, plus l'amplitude des mouvements qu'il reçoit est petite. B. Lames vibrantes — 1) Le chronof^raphe de Kronecker et Grunmach est basé sur le principe du sifflet à languette [Zungenpfcife). — Cet appareil se compose d'un tube de cuivre jaune, présentant une fente dans laquelle peut se mouvoir une lame d'acier, qui fait 100 vibrations par seconde. En aspirant l'air contenu dans le tube à l'aide d'un lube en caoutchouc en communication avec une trompe à eau, ou en aspirant simple- ment avec la bouche, la lame commence à vibrer. Un style enregistreur, fixé à la lame, trace les mouvements de la languette sur une surface enregistrante. — Entre le sifflet et la trompe se trouve intercalé un résonnateur accordé à une tierce supérieure. 2) Castagna (de Vienne) a construit un chronographe formé d'une lame métallique sur laquelle peut se déplacer un poids. Un levier enregistreur, placé tout près de la partie fixe de la lame vibrante, enregistre directement ses mouvements. — Des repères tracés indiquent oîi il faut placer le poids pour avoir un nombre donné d'oscillations par seconde. 3) Il existe des lames vibrantes entretenues électriquement comme les diapasons, et enregistrant leurs oscillations par l'intermédiaire d'un signal électrique. L'interrupteur acoustique de Bernstein peut aussi être employé pour la mesure des durées. Cet appareil se compose d'une lame d'acier vibrante, dont les vibrations sont entretenues électriquement comme celles du diapason. La lame vibrante peut être remplacée aisément par d'autres lames, d'élasticité et de longueur variables. On peut apprécier le nombre des vibrations de ces lames en les intercalant dans le courant d'un téléphone et en écoutant le son auquel elles donnent naissance. lîn variant la longueur du ressort à l'aide d'une pince qui peut se fixer à des endroits variables, et en choisissant des lames d'épaisseur variable, on peut avoir de .'5 à 250 vibra- tions par seconde. Un courant faible suffit pour entretenir les vibrations de la lame. Cet appareil a été construit par Zimmermann (Leipzig). C. Tiges vibrantes. — Le chronoscope de Kagenaar se compose de six tiges d'acier placées sur un support. Le mouvement vibratoire de ces tiges est entretenu électrique- ment. La plus grosse de ces tiges fait deux oscillations par seconde ; la plus petite, 50 vibrations par seconde. Les mouvements de chacune de ces tiges sont transmis au moyen de la transmission à air, à des tambours enregistreurs de Marey. Pour cela, chaque tambour est relié à un tambour explorateur. Les tracés obtenus permettent d'apprécier les 0",5; 0",2; 0",1; 0",04; 0,02; 0",0I. Pour faciliter la lecture des chronogrammes, on réunit, par un tube, les tambours de deux tiges, par exemple ceux des tiges dont les vibrations sont dans le rapport de i à 5. Dans ce cas, le tracé se présente sous la forme de courbes représentant des oscilla- tions lentes : sur les branches de la grande courbe il y a d'autres petites courbes, toutes les 5 oscillations, on observe une courbe ayant une amplitude plus considérable que celle des autres courbes. § III. — Enregistrement microphonique des chronomètres. Berget (1889) a fait l'enregistrement microphonique de la marche des chrono- mètres. Un microphone de Hughes à charbon vertical et à support léger, placé sur la boîte d'un chronomètre, est en relation avec un téléphone sur la plaque vibrante duquel est GRAPHIQUE (Méthode). 839 un transmetteur microphonique à quatre charbons. Ce transmetteur est en relation avec un récepteur téléphonique dont la membrane vibrante exécute des mouvemonls d'amplitude suffisante pour rompre à chaque fois le contact établi entre une pointe de charbon et une mince lame de platine fixée à la membrane. On enregistre ainsi, à l'aide d'un électro-aimant intercalé dans le circuit interrompu par la membrane téléphonique, les chocs du chronomètre, c'est-à-dire les battements de l'écliappement, sur un cylindre recouvert de noir de fumée. Cette méthode s'applique aussi à l'inscription delà marche d'une horloge astronomi- que à balancier. § IV. — Chronoscopie. t) Les mécanismes d'horlogerie et des dispositifs électriques spéciaux servent à la mesure des petits intervalles de temps. Wheatstone, le premier, a employé de tels dispo- sitifs de la façon suivante. Il fermait d'abord un courant électrique dans le circuit duquel était intercalé un électro-aimant qui agissait sur une montre. Quand le courant était ferme, l'armature de l'électro-aimant arrêtait la marche de la montre. Au début du temps qu'on voulait mesurer, on ouvrait le courant, ce qui faisait que, l'électro-aimant n'agissant plus sur l'armature, la montre se mettait en marche. A la fin de l'intervalle étudié on fermait le courant, ce qui arrêtait la marche de la montre. D'après les positions de l'aiguille, au début et à la fin de i'expe'rience, on déduisait la durée de l'intervalle étudié. La. montre donnait non seulement des secondes, mais aussi des fragments de seconde. Ce procédé comporte une erreur, le temps perdu pour la mise en marche de la montre; car il faut un certain temps pour qu'une montre prenne son mouvement uni- forme. 2) Le chronoscope de Hipp présente sur celui de Wheatstone l'avantage suivant : son mécanisme d'horlogerie n'est jamais arrêté ou mis en marche par l'électro-aimant ; le rôle de ce dernier est de rompre ou d'établir le contact entre une roue de la montre et une aiguille qui se déplace devant un cadran. De cette façon on peut avoir avec préci- sion la durée d'un intervalle de temps. Voici la description de l'appareil de Hipp. Sur une table de bois, supportée par des colonnes, se trouve placé le mécanisme d'horlogerie. Sur la face antérieure de ce mécanisme d'horlogerie se trouvent deux cadrans avec leur aiguille. Chaque cadran est divisé en 100 parties. L'aiguille du cadran z^ fait un tour en 10 secondes; une division du cadran représente doncO",l. L'aiguille du cadran Zi fait un tour en 0",1; une division de ce cadran représente donc O''0Ol. Le mécanisme d'horlogerie est mis en mouvement par un poids, dont le cordon d'attache s'enroule autour de l'axe de la clef de l'appareil. Le sens de rotation de la clef est l'inverse de celui du mouvement des aiguilles. Pour tourner la clef, il faut soulever la cloche de verre qui couvre l'appareil. Deux leviers servent à l'arrêt ou à la mise en marche de l'appareil. Des fils attachés à ces leviers traversent la table support. En tirant un fil pi, on abaisse le premier levier, et ainsi on met en marche l'appareil : en tirant sur un autre fil, on abaisse le second levier, et on arrête le mouvement de l'appareil. A la partie postérieure de l'appareil se trouve l'électro-aimant MM qui agit sur l'armature A. — L'armature A est fixée à l'extrémité inférieure d'un levier mobile autour de l'axe a. Le ressort T tient l'armature A éloignée de l'électro-aimant, quand le courant ne passe pas. Quand le courant passe, l'armature étant attirée, l'extrémité supérieure du levier avance dans la boîte qui contient le rouage, ce qui fait que l'axe de l'aiguille du cadran supérieur se trouve dérangé dans sa position. Alors une cheville qui se trouve sur cette aiguille est poussée hors des dents d'une des roues du rouage, ce qui fait que l'aiguille, n'étant plus en relation avec le rouage, s'arrête. Donc, tant que le courant passera, l'aiguille supérieure, et aussi l'aiguille du cadran inférieur, resteront immobiles, quoique le rouage soit en mouvement. — Quand le courant est rompu, la cheville de l'aiguille se lixant entre les dents d'une roue, les aiguilles se déplaceront sur leurs cadrans. Pour que l'appareil fonctionne bien, il faut qu'on puisse 840 GRAPHIQUE (Méthode). régler la position de l'armature; c'est à cela que sert lavis S qui commande la tension du ressort T. Pour mesurer la durée d'un intervalle avec le chronoscope de Hipp, on procédera donc de la façon suivante : avant le début du phénomène, le courant est fermé, les aiguilles sont par conséquent immobiles ; on lit leurs positions sur les cadrans. — Au début du phénomène on ouvre le courant, ce qui fait que les aiguilles commencent à se mouvoir. — A la fin du phénomène, on ferme le courant, ce qui fait que les aiguilles s'arrêtent; on lit de nouveau leurs positions sur le cadran. — La différence entre les chiffres donnés par les deux lectures donne la mesure de la durée cherchée. 3) Le chronomètre de D'Arso.wal (1886J, à embrayage magnétique, est fondé sur le principe suivant : Un axe entraîné par un mouvement d'horlogerie fait exactement un tour par seconde. Cet axe est terminé par un petit électro-aimant qui tourne avec lui. En face de l'électro- aimant mobile, et sur le prolongement de Taxe, se trouve un second axe portant une aiguille légère qui peut se mouvoir sur un cadran divisé en 100 parties. Cet axe est terminé par un petit disque de fer-blanc faisant face aux pôles de l'électro-aimant tour- nant. Un ressort antagoniste éloigne ce disque de l'électro-aimant, tant que celui-ci n'est pas aimanté par le passage du courant. Donc, tant que le courant ne passe pas, l'électro-aimant tourne seul. Quand on supprime le courant, le ressort antagoniste s'embraye, et l'aiguille reste fixée sur le cadran. Grâce à l'extrême légèreté de l'aiguille et à la grande force antagoniste du ressort, l'inertie de l'appareil n'est autre que celle du signal de Deprez lui-même, qui est égale à 1/700 de seconde environ. — Le méca- nisme d'horlogerie présente un régulateur Foucault. — Verdi.n en a fait un appareil de poche extrêmement commode. 4) Le contrôle des chronoscopes se fait à l'aide de la loi de la chute des corps. — Il faut que les chiffres donnés parle chronoscope soient identiques à ceux qui sont donnés par la relation : -^ dans laquelle t représente la durée, s la hauteur de la chute en mètres, et g est égal à 9'",8. Pour la mesure de la chute d'un corps on se sert d'un appareil spécial qui permet d'avoir une ouverture du courant au moment où le corps commence à tomber, et une fermeture au moment de la fin de la chute. Hipp a construit un appareil spécial de ce genre qui sert au contrôle de son chro- noscope. A l'aide d'un rhéocorde et d'un galvanomètre intercalés dans le circuit, on règle l'in- tensité du courant qui agit sur l'électro-aimant du chronoscope. VII Enregistrement d'un mouvement quelconque et du temps à l'aide d'un seul style enregistreur. Il existe des procédés qui permettent d'enregistrer le temps directement sur la courbe du phénomène qu'on étudie. I. Grashey, qui a introduit en physiologie la me'thode de l'enregistrement au moyen d'étincelles électriques, a employé le dispositif suivant dont voici le schéma. Le tambour enregistreur, qui trace la courbe d'un mouvement quelconque (des battements du cœur, des pulsations des artères, par exemple), présente un style enre- GRAPHIQUE (Méthode). t gistreur métallique. Ce style communique avec l'un des pôles de la boliine secondaire de RuHMKORFF. L'iuterrupteur de cette bobine est représenté par un diapason' dont les vibrations sont entretenues à l'aide d'un courant de pile. [r^Le cylindre enregistreur métallique communique aussi par son axe avec un des. FiG. 103. — Battements du cœur, avec inscription du tenip.s (Ziemssen et Maxi.mowitsch). pôles de la bobine de Ruhmkorff. Chaque fois que le diapason établit un contact, une étincelle éclate entre le cylindre et le style métallique du tambour. Cette étincelle laisse, comme trace, sur le papier noirci une tache blanche, le noir de fumée étant brillé. Si le diapason fait 50 vibrations par seconde, l'intervalle entre les taches représente 0",02 de seconde. La figure 103, empruntée à V. Ziemssen et Maximowitsch, représente un tracé obtenu à l'aide de ce procédé. La courbe représente les battements du cœur ; l'intervalle entre deux taches représente un intervalle de 0",028 de seconde, parce que le diapason employé donnait 36 vibrations par seconde. IL Hensen et son élève Klunder, pour obtenir sur un seul tracé l'inscription d'un phénomène et celle du temps, ont employé le procédé suivant (représenté par la figure lOi). Un tambour à air trace ses mouvements sur une plaque fixée à une branche Fi(i. 104. — Appareil de Hensen et Klunder pour l'inscription chroiiograplii(|ue. de diapason. Les vibrations de ce diapason (st) sont entretenues électriquement à l'aide de l'électro-aimant (m) et du contact i^). Le tambour enregistreur est fixé sur un chariot {w) mobile sur des rails iscA). Un 842 GRAPHIQUE (Méthode). moteur quelconque (l'arbre d'un cylindre enregistreur par exemple) met en mouve- ment le chariot, à l'aide d'un fil qui se réfléchit sur une poulie (r). Lajigure dOiJ représente un tracé obtenu à l'aide de ce procédé. Les grandes ondu- FiG. ]05. — Inscription chronographique des pulsations delà carotide (Hensen et Klunder). Kii;. 106. — Appareil pour l'inscription chronographique d'un phénomène (Langendoeff). lalions de ce tracé repr^ésentent les pulsations de la carotide; les petites ondulations, les mouvements d'un diapason qui fait 64 oscillations par seconde. III. Langendorff a employé un procédé très simple (représenté schématiquement par FiG. 107.'— Inscription clironographique d'une secousse musculaire (a) et d'un tétanos musculaire (6) (Langendorfk). FiG. 108. — Inscription chronographique du pouls. la figure [106), qui permet d'inscrire, sur un seul tracé, la courbe d'un phénomène quelconque et la courbe chronographique. Le tambour enregistreur (^^) communique, à l'aide d'un tube à deux branches, d'une GRAPHIQUE (Méthode). 848 part avec un tambour explorateur (/i'), qui reçoit le mouvement qu'on veut étudier (les contractions du muscle (m) par exemple), et d'autre part avec un autre tambour explorateur (A's) qui reçoit les mouvements d'un diapason entretenu électriquement. La figure i07 représente deux exemples de tracés obtenus à l'aide de ce procédé. La courbe a représente une simple secousse du muscle gastrocnémien de la grenouille ; le tracé b, le commencement d'un tétanos. Les petites sinuosités de ces courbes représentent les mouvements d'un diapason qui faisait 150 vibrations par seconde. VIII Supports. Chariot. I. Les appareils enregistreurs, tambours à air, signaux électriques, etc., sont placés à côté de la surface enregistrante sur des supports spéciaux. Dans certains cas, le support fait corps avec l'appareil enregistreur; dans d'autres, il est complètement indépendant. — Un bon support doit être solide et facilement réglable, c'est-cà-dire présentant des vis qui permettent de l'éloigner ou de l'approcber facilement de la surface enregistrante. Nous ne pouvons pas décrire ici les différentes formes de support. Citons le sup- port à bascule de Marey, le support de Cowl, le support universel à crémaillère de Verdin, etc. Il est bon que les tiges des supports employés dans un laboratoire, et les viroles des appareils qui se fixent sur ces tiges, aient toutes les mêmes diamètres. De cette façon les pièces des supports sont interchangeables. On fait des viroles à deux trous, ce qui permet que la même pièce portée par la virole puisse être fixée, tantôt sur une tige verticale, tantôt sur une tige horizontale. II. Quand on veut enregistrer un phénomène pendant longtemps, il faut faire en sorte que le style laisse la trace de ses mouvements sur des points différents de la surface du cylindre. A cet effet, bien des cylindres enregistreurs présentent un dispositif spécial de descente automatique. Pour les cylindres qui ne peuvent pas avoir ce mouvement, il faut que le style inscripteur se transporte parallèlement à la génératrice du cylindre d'un mouvement lent. Ce procédé d'enregistrement en spirale ou en hélice parait avoir été introduit en physiologie par Doxders. Pour cette sorte d'enregistrement, Marey (1866) a employé un appareil spécial appelé chariot automoteur. Cet appareil se compose d'un mécanisme d'horlogerie qui met en mouvement une vis sans fin ; sur la vis se trouve placé un chariot, et sur le chariot un support pour les appareils. Les mouvements de la vis sans fin provoquent le déplacement du chariot. Marey a employé aussi un chariot entraîné par le mouvement d'horlogerie du cylindre. Une corde sans fin passe sur une poulie, formant la tète de la vis sans fin du chariot, et sur une poulie à gorge du mécanisme d'horlogerie du cylindre enregistreur. De tels chariots font partie intégrante de beaucoup de chronographes employés depuis longtemps en astronomie et en balistique. En physiologie, Schelske (1864) a employé un chariot de déplacement avant Marey, dans ses recherches sur la vitesse de propagation de l'excitation dans les nerfs de l'homme. WiTTicH (1868) a employé un chariot mis en mouvement de la façon suivante : Sur l'axe du cylindre enregistreur se trouvait une poulie à gorge sur laquelle s'en- roulait une corde qui allait, après avoir passé sur une autre poulie, s'attacher à un chariot se déplaçant sur des rails parallèles à l'axe du cylindre. 84-4 GRAPHIQUE (Méthode). IX Préparation des surfaces enregistrantes. I. C'est Thomas Youno. qui le premier a employé, pour obtenir des tracés, un cylindre recouvert d'une couche fine de noir de fumée. Helmholtz enduisait directement le cylindre en verre de son myographe de noir de fumée. VoLRMANN semble être le premier qui eut l'idée de ne pas noircir la surface du cylindre, mais la surface d'une feuille de papier collée sur le cylindre. Ce dernier procédé est celui qu'on emploie à présent; il permet la conservation des tracés. Il suffit pour cela de couper, à l'aide de la pointe d'un couteau, le papier suivant une génératrice du cylindre, pour détacher la feuille de papier qui n'est collée que par ses bord?. Il y a des cylindres enregistreurs sur lesquels la feuille de papier n'est pas collée du tout, mais simplement appliquée à l'aide d'un ressort. — Dans le Kymographion de Traube, la lame du ressort ne s'enlève pas complètement; elle est articulée à la base du cylindre. Il est bon, dans une expérience, d'avoir toujours deux cylindres préparés d'avance recouverts de papier et noircis, pour pouvoir continuer l'enregistrement du phénomène, étudié sans trop d'arrêt. Le papier doit être lisse, mince et solide. Parfois on peut employer du papier glacé au blanc de zinc. Pour appliquer une feuille sur le cylindre, on place celui-ci horizontalement sur l'axe de l'appareil, ou sur un support quelconque, on glisse la feuille en dessous, tenant en haut la face qui porte le bord gommé; celui-ci est humecté. En refermant la feuille autour du cylindre, on a soin que le bord gommé et humide recouvre l'autre bord sur lequel on l'applique exactement. Le noircissage se fait généralement à l'aide de la flamme d'une bougie qu'on glisse sous le cylindre. — On se sert à cet effet de ces bougies à grosse mèche, ayant très peu de cire, et qu'on vend dans le commerce sous le nom de l'at-de-cave. On glisse une de ces bougies allumée sous le cylindre de façon que la pointe de la flamme vienne lécher la surface du papier; on tourne le cylindre à la main, et l'on promène la bougie d'un bout à l'autre du cylindre. Au lieu d'une bougie, on peut se servir aussi d'une lampe à pétrole ou à térében- thine qui donne une fumée épaisse. Dans ce cas, le noircissage se fait plus vite, mais la surface noircie est plus floconneuse. On peut noircir le papier à l'aide du camphre brûlant. Chauveau emploie la flamme d'hydrogène carburé que fournit une petite rampe dont le gaz traverse un flacon rempli de pierre ponce imbibée de benzine. HûRTHLE a fait construire un petit appareil spécial à l'aide duquel on souffle le noir de fumée de la lampe sur le papier, ce qui permet d'avoir un noircissage régulier. L'appa- reil de HCrthle se compose d'une sorte d'entonnoir, recouvrant la flamme d'une lampe à pétrole ou à gaz, terminé à sa partie supérieure par un tube horizontal mis en rela- tion avec un ballon de caoutchouc qui sert de soufflerie (fig. 109). MoROKHovETz emploie pourj noircir le papier une lampe à pétrole qui a la forme d'une boîte allongée en fer-blanc. Cette boîte est munie d'un mécanisme qui permet de régler la mèche d'après la longueur du cylindre enregistreur. Pour ne pas brûler le papier, on place la lampe sous un cylindre ordinaire, rempli de glace ou d'eau froide, que l'on introduit par une ouverture munie d'un bouchon. Dans les cas où il s'agit de noircir une bande de feuille sans fin, le noircissage du papier peut se faire automatiquement de la façon suivante : La bougie ou la lampe est placée sur un chariot qui chemine lentement d'un bout à l'autre du cylindre. — Au lieu d'avoir le déplacement de la bougie, on peut avoir le GRAPHIQUE (Méthode). 845 déplacement du cylindre, si celui-ci est porté par un axe lileté qui tourne dans un écrou. C'est ce dispositif qu'on emploie pour le noircissa^e des grands cylindres. II. Quand on emploie comme surface enregistrante une plaque, on peut la recouvrir d'une feuille de papier qu'on noircit, ou bien on peut noircir directement la plaque de verre. On peut obtenir le tracé d'un mouvement par grattage d'une pointe de diamant. Si l'on emploie des disques de verre argentés par le procédé Foucault-Martin, un frotte- ment très faible suffit pour produire un trait très fin et très net. Au lieu de noircir les disques avec du noir de fumée, on peut les couvrir d'une couche d'une substance colorante. Les couleurs d'aniline, les violets surtout, étant très solubles dans l'eau, présentent des inconvénients. En effet, la moindre condensation d'humidité sur le verre produit des taches et peut effacer les tracés. Favé a employé FiG. 109. — Appareil de Hùrthle pour noircir les tracés. l'azotate de rosaniline, qui est très peu soluble dans l'eau. Voici la formule qu'il pro- pose : dissolution saturée d'azotate de rosaniline dans l'alcool à 95°, soit 2 grammes pour 100 centimètres cubes d'alcool; on ajoute 10 centimètres cubes d'éther. Cette solu- tion est versée sur le disque légèrement chauffé et tenu d'abord horizontalement. Lorsque la surface est couverte, on la renverse verticalement et on la présente devant un feu ardent, en essuyant rapidement et constamment le liquide qui s'amasse à la partie inférieure, sur la tranche. — La couche ainsi obtenue sèche en quelques secondes; elle est uniforme. — On peut en varier l'épaisseur en augmentant ou en diminuant la pro- portion d'éther. III. Au lieu de faire l'enregistrement sur des plaques de verre, on peut, comme fa fait VosMAER (1899), employer des plaques de celluloïde polies sur les deux surfaces. Ces plaques peuvent avoir 1 demi-millimètre d'épaisseur. — Elles sont noircies au noir de fumée, comme les plaques de verre ; comme elles sont souples, elles peuvent s'ap- pliquer sur un cylindre enregistreur. Les tracés obtenus sur les lames de celluloïde peuvent être comme les tracés obtenus sur des plaques de verre, après fixation, pro- jetées. IV. Les surfaces enregistrantes peuvent être aussi recouvertes d'une couche de paraffine, de cire, etc., sur laquelle la pointe enregistrante laisse sa trace par grattage. — Hankel (1866) a fait l'enregistrement des mouvements sur couche de paraffine placée dans une rigole qui faisait le tour d'un disque de cuivre. V. VoLKMANN semble être le premier qui ait fixé les tracés en trempant la feuille de papier dans du vernis. Le vernis est mis dans une cuvette de photographe, capable de contenir la largeur de la feuille tout entière, ou dans une gouttière spéciale de zinc. 8i6 GRAPHIQUE (Méthode). On prend la feuille avec les ti-acés, sur laquelle on a écrit avec une pointe les indica- tions nécessaires; on la lient par ses deux bords extrêmes, avec la face noircie en haut. Ou la plonge dans le vernis par la partie moyenne, puis, par des mouvements de laté- ralité, on baigne successivement les deux moitiés de la feuille. On la retire ensuite, on la fait égoutter, et on la suspend à un support à l'aide d'épingles, pour qu'elle sèche. On remet le vernis dans le llacon pour s'en servir encore dans d'autres occasions. Marey recommande le dispositif suivant qui facilite la manipulation du vernis : on le met dans un flacon à deux tubulures, la tubulure inférieure communi(jue avec la cuvette ou le fond de la gouttière par un tube en caoutchouc. Veut-on remplir la gout- tière, on élève le flacon; le vernis s'écoule du flacon dans la gouttière. Au contraire, veut-on remettre le vernis dans le flacon, on élève la gouttière. VI. Voici la composition du vernis qu'employait Marey. On dissout à saturation de la gomme laque incolpre dans de l'alcool à 36°; après l'addition d'une très petite proportion de térébenthine de Venise qui donne de la souplesse au vernis, on filtre la solution dans un linge, puis au papier. Langendorff donne la formule suivante : 10 parties de gomme laque sont dissoutes dans 100 parties d'alcool à 90°. Cette résine (la gomme laque) se dissout facilement à une température douce. On ajoute, comme le faisait Marey, de la térébenthine de Venise, et l'on filtre. On peut employer d'autres résines que la gomme laque, par exemple du mastic ou du colophonium. Bleirtreu (1892) donne la formule suivante : 4 à 8 grammes de celloïdine dans 50 centimètres cubes d'alcool absolu et 50 centimètres cubes d'éther. Il est bon d'ajouter du collodion. Smith, et d'autres, fixent les plaques de verre noircies de fumée à l'aide du vernis photographique. Une partie dans 23 parties d'alcool méthylique. On peut employer simplement du vernis blanc, qu'on trouve dans le commerce, étendu d'alcool h 90°, dont la quantité varie selon qu'on veut avoir des tracés sur papier souple, ou sur papier plus rigide. Quand le tracé est fait sur une petite plaque (par exemple sur une plaque qui avait été fixée au diapason), on s'en sert comme d'une préparation microscopique, en la cou- vrant de baume du Canada (dissous dans du xylol) et d'une lamelle. VII. Pour conserver les tracés pris sur le cylindre enfumé, Helmholtz transpor- tait le noir de fumée sur du papier. Pour cela, il prenait le petit cylindre de verre, le mettait entre les pointes d'une sorte de fourche et le faisait rouler sur une plaque couverte légèrement de colle de poisson. — La couche de noir de fumée reste adhérente à la plaque. Celle-ci est posée sur une feuille de papier humide à laquelle elle reste collée. Toujours pour transporter le noir de fumée sur une feuille de papier, Marey recom- mande le i^rocédé suivant : On recouvre la plaque de verre qui porte le tracé avec une couche de collodion élastique (50 parties de collodion pour 1 partie d'huile de ricin) auquel on peut ajouter 5 parties de térébenthine. — Quand le collodion est sec, on presse dessus une feuille de papier recouverte de colle (de menuisier», pendant quelques minutes. — En soulevant le papier, on voit que le noir de fumée avec le tracé renversé est resté collé au papier. Si l'on ne veut pas avoir uu tracé renversé, on presse sur la plaque de verre recou- verte de collodion une feuille de papier de gélatine, recouverte aussi de collodion. Puis on colle sur une feuille de papier la lame de gélatine avec la partie directe- ment sur le papier. Comme la gélatine est transparente, on voit le tracé exact. Funke et Heidenhain ont copié les tracés faits sur plaque de verre sur du papier sensible, comme on le fait pour les négatifs en photographie. GRAPHIQUE (Méthode). 847 X Analyse des tracés. I. Tous les tracés obtenus à l'aide d'un levier enregistreur représentent le mouvement étudié un peu déformé. — Pour corriger l'erreur occasionnée par la marche du Jevier, il suffit de mesurer l'écart qu'il y a entre l'arc de cercle tracé parle levier sur la surface enregistrante immobile et la verticale. — Cet écart doit être mesuré à une hauteur égale à celle du point de la courbe qu'on veut rectifier. Cette distance est portée ensuite, soit il droite soit à gauche du point considéré, suivant que l'axe passe soit à droite soit à gauche de la verticale. C'est ainsi que Marey a procédé pour rectifier la courbe en trait plein de la fig. ilO La courbe en pointillé 0 rt' b' x" h" a" représente la même courbe rectifiée. Celle-ci est la reproduction fidèle du mouvement qui avait été représenté d'une façon erronée par le premier tracé. RoLLEïT a montré qu'on peut faire la correction d'une courbe à l'aide du calcul, au lieu de la faire, comme nous venons de le voir, à l'aide d'une construction géométri- que. II n'est pas nécessaire de corriger tous les points d'une courbe; il suffit de faire la correction pour les points les plus importants. Il ne faut jamais perdre de vue que les ordonnées des courbes tracées par des leviers ne sont pas rectilignes, mais curvilignes. Le rayon des courbes représentant les ordon- FiG. 110. — Rectification des courbes (Marey). nées est égal à la longueur du levier. En tenant compte de ce fait, les déformations des mouvements par le levier ont moins d'importance. II. Voici quelques considérations sur les tracés en général : 1) Un tracé donne une idée précise de la marche, en fonction du temps, d'un mouve- ment quelconque. Une courbe ascendante indique que la fonction croît; une courbe descendante, qu'elle décroit. Une ligne droite indique que le phénomène varie proportionnellement au temps. Une ligne courbe à convexité supérieure indique que la fonction croît moins vite que le temps; si la convexité est inférieure, cela veut dire que la fonction croît plus vite que le temps. Si une courbe ascendante ou descendante tend à se rapprocher d'une ligne droite sansjamais l'atteindre, on appelle cette coui^be une astmplote. Quand une courbe, après avoir été ascendante, commence à descendre, on dit qu'elle présente un maximum; si, après être descendue, elle remonte, on dit qu'elle présente un minimum. Une ligne parallèle à l'abscisse signale l'absence du mouvement. 2) Pour faciliter la mesure des divers éléments qui caractérisent une courbe, il faut tracer sous la courbe une droite horizontale. II est souvent difficile de déterminer le point où commence une courbe. La détermi- nation de ce point est très embarrassante, surtout quand on a recueilli le tracé sur^une 848 GRAPHIQUE (Méthode). FiG. 111. — Aûalyse des courbes d'après Landois. surface animée d'une très grande vitesse. Pour déterminer ce point, Hermann traçait à égale distance, au-dessus et au-dessous du début de la courbe, deux abscisses, et il mesurait l'écart entre la ligne précédant la courbe et les deux abscisses. Le point où ces deux écarts ne sont plus égaux représente le début de la courbe. 3) Pour savoir quels points de l'axe des abscisses correspondent aux points importants de la courbe, Lamdois a procédé de la façon suivante : il dessinait sur une feuille de papier un arc de cercle dont le rayon était égal à la longueur du levier; ensuite il découpait cet arc, et il s'en servait comme d'une règle. En plaçant cette règle sur n'im- porte quel point de la courbe, parallèlement à l'arc qui passe par le point où la courbe commence, on a sur l'abscisse le point correspondant au point de la courbe. C'est ainsi qu'ont été déterminés les points a' , b', c' cor- j,eppondant aux points a, b, c (fig : IH). 111. Pour analyser une courbe, il faut mesurer les abscisses et les ordonnées de ses points marquants. Ces mesures se font à l'aide d'une échelle millimétrique. Pour les mesures de grande précision, on emploie des appareils spéciaux appelés : analyseurs des courbes (Curvenanalysator). Ces appareils se composent essentiellement de deux échelles millimétriques transparentes pouvant se dé- placer perpendiculairement l'une à l'autre. L'une sert à la mesure des abscisses, l'autre à la mesure des ordonnées. La lecture des divi- sions des échelles se fait à l'aide d'un micro- scope ou d'une loupe. Le déplacement des échelles se fait à l'aide de vis micrométri- ques. La feuille sur laquelle se trouve le tracé qu'on désire analyser est placée sur une table, et bien fixée à l'aide de vis et de ressorts. Le cadre qui porte les échelles se place dessus. Parmi les appareils de ce genre citons ceux de Ludwig et Starcke, de v. Frey, de Jacquet, etc. L'appareil de Hallsten permet d'analyser les courbes tracées sur des disques circulaires. — L'appareil de Braun et Fischer permet de faire, à l'aide d'une seule échelle, la mesure des coordonnées des points tracés sur une plaque photogra- phique à 0,001 de millimètre près. Le support de la plaque peut se déplacer et faire un angle de 90°. IV. Quand on veut connaître la hauteur moyenne d'une courbe, on fait la somme des hauteurs de plusieurs ordonnées, et le chiffre obtenu est divisé par le nombre des ordon- nées additionnées. Quand il s'agit d'une courbe très compliquée, ce procédé étant trop long, il faut avoir recours à la mesure de la surface comprise entre l'axe des abscisses et la courbe. Pour cela, on commence par abaisser de deux points de la courbe des perpendicu- laires sur l'abscisse ; on mesure la surface comprise entre ces deux perpendiculaires, l'abscisse et la courbe; ensuite, on élève sur l'abscisse un rectangle dont la surface est la même que celle mesurée directement; la hauteur de ce rectangle représente la hau- teur moyenne cherchée. Quand la courbe est tracée sur un papier millimétrique, la mesure de la surface com- prise entre la courbe et l'abscisse est très facile; il suffit, en effet, de compter les petits carrés compris dans cette surface. On peut aussi mesurer la surface comprise entre la courbe et l'axe des abscisses, à l'aide du procédé de Th. Young, que voici : On coupe la surface qu'on désire mesurer, et on la pèse; ensuite on découpe dans une feuille de papier d'égale épaisseur un carré qu'on pèse également. Soit /; le poids de la surface irrégulière /' qu'on veut connaître, et p' et f le poids et la surface du tarré; on a, d'après la relation qui relie ces quatre valeurs : P GRAPHIQUE (Méthode). 849 FiG. 112. — Série d'ordonnées représentant les hauteurs maxima des courbes enregistrées sur une surface se déplaçant lentement. Pour déterminer la hauteur moyenne d'une courbe (la courbe de la pression du sang), VoLKMANN a procédé de la façon suivante : il a tracé au-dessus de la courbe une droite parallèle à l'abscisse; on forme ainsi un rectangle qui a une hauteur H. On découpe ce rectangle et on le pèse; soit G son poids. Ensuite on découpe la courbe, et on pèse la surface comprise entre la courbe et l'abscisse; soit 7 son poids. La hauteur moyenne h de celte dernière surface se déduit de la relation suivante : h : H = .7 : G, d'où on déduit : G V. BitMi souvent l'analyse des courbes enregistrées conduit à des calculs très compli- qués, si l'on veut exprimer les courbes par des équations. Comme exemples de calculs se I apportant à des courbes représentant des phénomènes physiologiques, citons les équations de la courbe de la contraction musculaire déterminée par Jendrassik {Po- gewlorff's Annalen, Jubelband, 1874, p. 598). Hermann, en poussant très loin l'étude mathématique des courbes relevées sur le phonographe, a créé à cette occasion une mé- thode simplifiée qui peut rendre de grands services aux physiciens toutes les fois qu'ils auront besoin d'analyser une courbe résul- tant de la composition d'un grand nombre de courbes sinusoïdales. Ces calculs, étant trop complexes, sortent du cadre de notre travail. Aussi n'en dirons- nous rien et renvoyons-nous ceux que cette question intéresse aux travaux de Hermann, et à l'excellent résumé que Weiss en a donné. VI. Quand on veut déterminer les points synchrones de deux tracés, pris simultané- ment, on procède de dilférentes manières : 1) Pour déterminer les points synchrones de deux tracés dont l'un n'a pas subi la déformation de l'arc du cercle, on procède de la façon suivante : soit s (fig. 113) un point de la courbe non déformée d'un signal électrique ; on veut savoir quel point de la courbe A correspond à ce point s. Pour cela on abaisse une perpendiculaire [sa] sur l'abscisse; par le point a ainsi déterminé on fait passer à l'aide du levier enregistreur un arc de cercle. Le point où cet arc coupe la courbe détermine le point qui correspond au point (s). 2) Quand on prend sur une même surface plusieurs tracés, on a soin de placer les leviers enregistreurs de telle sorte que leurs pointes inscrivantes soient exactement sur une même ligne verticale. Quand on désire connaître les points synchrones de deux courbes obtenues de la sorte, on procède comme nous l'avons vu précédemment dans le cas où l'un des tracés n'a pas subi la déformation en arc de cercle. Quand les deux tracés ont subi la déforma- tion de l'arc du cercle du levier, on procède de la façon suivante : Soit ft' et k^ les deux courbes dont on désire déterminer les points synchrones, par exemple on veut savoir quel point de la courbe A' correspond au point m, maximum de la courbe k^. — On commence d'abord par déterminer, d'après le procédé de Landois indiqué plus haut, le point a- de l'abscisse qui correspond au point m. De ce point a^ on abaisse une perpendiculaire sur l'abscisse de la courbe A'; on détermine aussi le point a'. Ensuite, on cherche le point de la courbe k^ qui correspond à a'; on trouve le point n. Ce point est donc celui qui correspond au point m de la courbe k'-. 3) Quand les points inscrivants n'ont pas été disposés exactement sur une même verti- cale, voici comment on procède pour déterminer les points synchrones : on im[)rime à la fois aux deux leviers un mouvement; ce mouvement s'enregistre sur le cylindre DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. U4 850 GRAPHIQUE (Méthode). immobile sous forme d'arc de cercle qu'on appelle repère. En traçant des repères sur différents points des courbes, on voit facilement quels sont les points synclirones. VII. L'étude des tracés est souvent facilitée si l'on a les moyens d'agrandir les tracés originaux. Pour cela il faut photographier les tracés. Les clichés obtenus peuvent servir à obtenir de très grandes projections. En faisant l'enregistrement d'un mouvement sur une plaque de verre enTumée, on FiG. 113. — Dëtermination de deux points synchrones. peut, grâce à des procédés spéciaux, obtenir la projection du tracé au moment même où il est obtenu. III AUTOGRAPHIE PROPREMENT DITE. Un mouvement peut être enregistré directement sans l'intermédiaire d'une plume inscrivante, sur une surface animée d'un mouvement de translation. C'est ainsi qu'on peut enregistrer les mouvements des ailes d'un insecte. Il suffit d'approcher la pointe d'une aile d'un insecte, tenu à la main avec les doigts ou à l'aide d'une pince, d'une surface enduite de noir de fumée, pour que le frôlement de la pointe de l'aile agisse sur la surface enregistrante comme une plume. Les variations de pression et les mouvements d'une colonne li- quide peuvent aussi être enregistrés sans l'intermédiaire d'une plume enregistrante. Il suffit de recevoir le jet liquide sur une sur- face en mouvement. C'est ainsi que LaiNDOis a obtenu des tracés hémautographiques. (La fig. 114 représente le tracé de jet de sang sorti de l'artère tibiale postérieure du chien.) IV GLYPHOGRAPHIE. Fig. 114. — Tracé li(5niautograplii(jue de Landois. Certains mouvements, au lieu d'être enregistrés à l'aide d'une plume qui se déplace dans un plan parallèle à la surface enregis- trante, peuvent être enregistrés à l'aide d'une pointe qui se déplace dans un plan perpendiculaire à la surface enregistrante. La surface enregistrante étant recouverte d'une couche de cire ou de paraffine, la pointe enre- GRAPHIQUE (Méthode). 851 gistrante creuse un sillon dans cette couche. La profondeur du sillon varie avec l'am- plitude des mouvements de la pointe. Ce mode d'enregistrement s'appelle glyphique. C'est lui qui est employa dans les phonographes. La fig. 115 représente une coupe schématique du cylindre du phonographe : la pointe (s) fixée à la membrane (p) creuse un sillon dans la couche (m) qui recouvre le cylindre {cy). Le sillon se présente en coupe sous la forme d'une courbe sinueuse. Pour faire l'étude de cette courbe on peut pro- céder de deux façons : 1° Placer dans le sillon une légère plume enregistrante qui sui- vrait, quand le cylindre est en mouvement, toutes les inégalités de profondeur du sillon, FiG. 115. — Schéma d'une coupe du phonographe d'EuisoN (Witt). et enregistrer sur un cylindre enduit de noir de fumée les mouvements de cette plume; 2° En faisant des coupes de la couche de paraffine qui recouvre le cylindre et en les examinant au microscope. ENREGISTREMENT OPTIQUE. CHRONOPHOTOGRAPHIE. Quand les mouvements qu'on veut étudier sont très faibles ou très étendus, il est difficile de les enregistrer à l'aide de la méthode chronostylographique. Dans ce cas il faut avoir recours à l'enregistrement optique. Dans cette méthode d'enregistrement, entre le corps en mouvement et la surface enregistrante il n'y a qu'un seul intermédiaire : un faisceau de rayons lumineux. — Ce faisceau joue le rôle du levier enregistreur dans la chronostylographie, et il présente sur ce dernier l'avantage d'être dépourvu de niasse. Stroboscopie'. II Photographie. Les premières applications de la photographie à l'étude des mouvements sont natu- rellement récentes, puisque la photographie est elle-même une découverte contempo- raine (1816) et que son emploi n'a guère commencé à se généraliser que depuis 1860 environ. Depuis-, le rôle de la photographie dans la science est devenu très important. 1. Voir un livre qui paraîtra prochainement : La Mclhode fp'ajj/tk/iif, par .Mariette Pom- PIUAN. 852 GRAPHIQUE (Méthode). Une des premières applications de la photographie à l'étude des mouvements est celle d'ÛNiMUs et Martin (18<30) qui eurent l'idée de photographier le cœur sur une pla- que photographique. Le cœur en mouvement, comme tout corps qui présente des mou- vements rythmiques, oscillatoires, laisse sur la plaque deux images particulièrement accusées de ses deux positions extrêmes, tandis que les images intermédiaires ne laissent pas de traces nettes. L'image photographique se présente donc avec un double contour; l'écart de ces deux contours est proportionnel à l'amplitude des oscillations du coi'ps photographié. i. Pour obtenir l'image photographique d'un corps, on commence par l'éclairer vivement, et on reçoit les rayons réfléchis sur une surface sensible, plaque ou papier. On peut avoir l'image photographique par projection, quand ce n'est que le contour du corps qui intéresse. Dans ce cas, le corps intercepte les rayons lumineux, étant inter- posé entre la source lumineuse et la surface sensible; le corps se détache en noir sur un fond clair, dans les images positives. 2. Que ce soit par j^éflexion ou pSiV projection, on peut obtenir une image photographi- que du corps plus grande ou plus petite que le corps lui-même, en interposant entre l'objet à photographier et la surface sensible des lentilles. L'ensi mble de la plaque sen- sible et des lentilles constitue un appareil photographique. La forme de cet appareil varie avec le phénomène qu'on désire étudier. 3. Les plaques sensibles photographiques ne sont pas sensibles seulement aux rayons lumineux : elles le sont aussi à d'autres sortes de rayons, comme les rayons x par exemple. Dans ce cas, on n'a plus la photographie d'un corps, mais la radiographie. Les images radiographiques ne nous présentent plus seulement le contour et la forme du corps, mais sa structure intérieure, quand il s'agit d'un corps non homogène, dont les diverses parties constitutives présentent des opacités différentes aux rayons pénétrants qu'on étudie. La radiographie nous permet de faire l'étude des mouvements des corps contenus dans une enveloppe opaque à la lumière. Les Américains ont appelé la radiographie skiagraphie. 4. Quand on désire obtenir la photographie de corps en mouvement, d'une scène animée, on emploie la photographie instantanée : c'est-à-dire, on expose une plaque très sensible pendant un temps extrêmement court. On peut avoir la photographie instantanée d'un corps de deux façons : soit en éclai- rant très vivement un corps placé dans l'obscurité, pendant un temps extrêmement court, soit en démasquant l'objectif ou la surface sensible, pendant une durée extrême- ment courte à l'aide d'un dispositif mécanique. Dans les deux cas, le corps doit être vivement éclairé afin que les rayons lumineux qu'il envoie soient suffisamment intenses pour impressionner la plaque. 5. En pratique, on nomme communément photographie instantanée une épreuve prise en un dixième ou un centième de seconde. Pour l'étude de la plupart des êtres animés, le millième ou le dix-millième sont suffisants d'ordinaire. Mais il y a des phé- nomènes qui exigent des expositions plus courtes. Par exemple, pour l'étude des projec- tiles en marche, il faut des durées d'exposition extrêmement courtes, car une balle de nos fusils actuels parcourt 600 mètres en une seconde et 6 centimètres en un dix-mil- lième de seconde. Une telle durée d'exposition donnerait une simple ombre vague sur la plaque. Avec un millionième de seconde, l'image serait indistincte à l'avant et à l'ar- rière, et les phénomènes qui accompagnent le passage de la balle dans l'air perdraient toute délicatesse. Il faut donc diminuer la durée de l'exposition au delà de cette limite. Aucun dispositif mécanique ne permet d'obtenir une durée d'exposition suffisam- ment courte ; seule l'étincelle électrique permet de résoudre le problème. Mais même une étincelle peut être cent fois trop lente pour donner un bon résultat. L'e'tincelle doit être brillante en même temps que de très courte durée; la condition est donc que GRAPHIQUE (Méthode). 853 le circuit dans lequel elle éclate ait une assez grande capacité, en même temps qu'une induction propre extrêmement petite; en un mot, il doit donc contenir un conden- sateur. D'autre part, le seul moyen d'obtenir l'étincelle au moment voulu (par exemple au passage d'un projectile) est de faire fermer le circuit par la balle elle-même. Mais, si l'étincelle active éclate dans le cercle ainsi complété, elle est trop rapprochée, ou bien le circuit est trop long : surtout l'étincelle qui éclate près de la balle est si brillante que la plaque est forcément voilée. Il faut donc avoir recours à un artifice particulier. Voici le dispositif employé par Boys : Un grand condensateur C est en connexion avec un autre plus petit c; les armatures extérieures sont en court-circuit, tandis que les autres sont réunies par un fil de coton trempé dans une solution de chlorure de calcium. Le grand condensateur peut se dé- charger par E, E', tandis que le petit se ferme sur E' B. Lorsqu'une balle, passant en B, met les fils en communication, le condensateur c se décharge en produisant une petite étincelle en E'; la résistance du cir- /' '"•. cuit de G est subitement diminuée, et le grand condensateur devient capable de se décharger par E' et E. L'étincelle E' est cachée par un écran, tandis que l'autre étincelle projette l'ombre de la balle sur la plaque P. Durant la charge du système, les condensateurs C et c ont leurs armatures res- pectivement au même potentiel, l'équilibre se faisant par le morceau de fil; maisla décharge est de trop courte durée pour que ce mauvais conducteur y prenne aucune part, et la charge entière du condensateur G passe par E et E'. On sait d'autre part que, pour une longueur donnée, l'étincelle en E est plus brillante si le circuit contient une autre interruption que s'il est complet. Get arrangement réunit donc tous les avantages. Pour que l'expérience réussisse, il est nécessaire que la diffé- rence de potentiel produisant l'étincelle soit comprise entre certaines limites; si elle est trop faible l'étincelle active n'éclate pas; si elle est trop forte, elle part sans être et la plaque est perdue. Lord Rayleigh, dans ses expériences sur la rupture des bulles de savon, se servait d'un petit électroscope en dériva- tion sur le condensateur. Mais, lorsqu'on a une machine statique d'un débit régulier, il est beaucoup plus simple de compter les tours de roue, et d'arrêter la charge lorsqu'elle est près de suffire à la décharge spontanée. Dans certains cas. Boys a muni l'appareil d'une soupape électrique de sûreté; les deux boules sont reliées aux bornes du circuit électrique. Gelle de droite porte une vis de réglage ; en avançant plus ou moins la vis, on règle sa position de telle sorte que l'effluve suffise pour maintenir le potentiel au-dessous de la valeur dangereuse. Le circuit de Boys peut être étudié, au point de vue de son efficacité, par un pro- cédé indirect permettant de fixer d'avance les conditions dans lesquelles on peut obtenir de bons résultats. Il suffit pour cela de photographier l'étincelle active, étalée d'abord à l'aide d'un miroir tournant, faisant par exemple 512 tours par seconde. L'image de l'étincelle ainsi obtenue montre que la durée totale de l'étincelle est inférieure à un millionième de seconde. Une petite partie seulement, celle qui passe pendant le pre- mier dixième de ce temps, est assez intense pour produire l'image du projectile; le reste est presque inactif. La durée efficace de l'étincelle est d'environ 1 2"JO()0 000« de seconde. A l'aide de cette étincelle, Boys a photographiera projection de la balle sur une plaque sensible. Gette méthode de projection donne des images un peu agrandies. La grande simplicité d'appareil qu'elle exige permet d'attaquer des problèmes divers. 2P FiG. 116. — Dispositif do Boys pour obtenir des étin- celles de très courte durée. 854 GRAPHIQUE (Méthode). III Diagramme photographique des oscillations. Pi'enons un corps en mouvement, par exemple une tige vibrante, à l'extrémité de laquelle se trouve collé un petit miroir éclairé par les rayons solaires concentrés ou par une source lumineuse artificielle. Ce point lumineux se déplace avec la verge ; les rayons qui en partent présentent la même forme de mouvement oscillatoire. Regar- dons ce point lumineux; l'œil percevra une ligne lumineuse. A cause de la persistance des images, l'œil ne peut pas voir le point lumineux dans ces diverses positions, mais la trajectoire reste comme un sillon lumineux sur la rétine qui se comporte comme une plaque photographique. Les rayons lumineux agissent sur la rétine à l'instar d'un levier sur une surface enregistrante noircie. Dans ce dernier cas, nous savons que, pour analyser un mouvement, il faut que la surface enregistrante se déplace dans une direction perpendiculaire à celle dans laquelle s'effectue le mouvement à analyser. Pour analyser les mouvements du point lumineux, nous pouvons en faire de même : déplacer la tête dans une direction hori- zontale, si la tige oscille verticalement, ou dans la direction verticale, de haut en bas, si la tige oscille horizontalement. Dans ces conditions, au lieu d'un trait lumineux, on verra une courbe. On conçoit facilement que l'effet est le même si, au lieu de déplacer la tête (avec la rétine surface enregistrante), on déplace le corps vibrant même. En imprimant un mouvement de translation dans une direction horizontale à une verge qui effectue des oscillations verticales, l'œil immobile verra une courbe qui lui permettra de connaître la forme du mouvement. Une telle analyse des mouvements est difficile ; il y a d'autres procédés qui la rendent plus aisée. — En voici un très simple ; Si entre le corps vibrant et l'œil restant immobile, l'on intercale un miroir qu'on fait tourner, on obtient le même résultat que celui qu'on obtenait en déplaçant la tête, c'est-à-dire, on voit la forme du mouvement effectué par le corps examiné. Ce procédé du miroir tournant a été inventé parWHEATSTONE qui s'en est servi pour la détermination de la vitesse de propagation d'un courant électrique. Foucault s'en est servi dans ses recherches sur la vitesse de la lumière. Au lieu de regarder les images lumineuses d'un corps en mouvement dans le miroir tournant, on peut les projeter sur un écran, à l'aide d'un miroir. Plus le miroir est éloigné de l'écran, plus le grossissement de l'image est grand. Quand on déplace le miroir pendant que la verge avec son point lumineux oscille, on voit, sur l'écran, se dessiner en gros traits la courbe d'oscillation. Pour rendre visible un mouvement à un nombreux auditoire, on peut employer ce procédé grossier : Un diapason de Lissajous (diapason avec un point lumineux) est tenu à la main de telle façon que le faisceau du rayon se réfléchisse sur le plafond ou sur une paroi. En déplaçant le diapason pendant qu'il oscille, on voit, sur le plafond ou la paroi, la courbe des oscillations sans qu'il soit nécessaire de faire l'obscurité de la chambre. Si, au lieu de projeter l'image du miroir sur un écran, on la projette sur une feuille seusible en mouvement, on obtient l'image photographique du mouvement étudié. § I, — Enregistrement des oscillations à l'aide du miroir. L'emploi des rayons lumineux en physique, pour la mesure des petits déplace- ments, est très ancien. La méthode de Poggendorff est basée sur le théorème d'op- tique suivant : « Quand un miroir, sur lequel tombe un rayon incident fixe, tourne d'un angle 0, le rayon réfiéchi tourne d'un angle 2 0". GRAPHIQUE (Méthode). 855 Voici comment on procède d'après cette méthode : Un petit miroir (M), généralement concave, est fixé avec de la cire sur le fil qui sou- tient la partie mobile dont on veut mesurer le déplacement angulaire (soit par exemple une aiguille aimantée). A une distance égale au rayon du miroir, on installe en avant une fiamme (T) qui éclaire une fente à réticule (F); au-dessous de la fente il y a une règle horizontale (RR') perpendiculaire à la droite (KM) qui unit le miroir à la tlanime. Dans ces conditions on voit sur la régie une image réelle de fil, qui se projette sur les divisions. On note la division n ;i laquelle correspond la position d'équilibre de l'aiguille. Si l'aiguille tourne d'un angle inconnu 0, l'image s'arrête sur une division n'. Si la règle est divisée en centimètres et que d représente, en centimètres, la distance de la règle au miroir, nous aurons, en nous basant sur ce fait que le quotient des deux côtés, ■ d'un triangle rectangle représente la tangente trigonométrique de l'angle que fait l'hypo- ténuse avec l'un des côtés, la relation suivante : Si l'angle est assez petit, on peut confondre la tangente avec l'arc, et alors on a : 2d Connaissant la déviation du spot lumineux sur la règle, et la distance qui sépare la règle du miroir mobile, on peut donc calculer le déplacement réel du corps, de même que, quand on emploie un levier enregistreur, la connaissance du déplacement de l'extrémité inscrivante du levier, de la longueur du levier et du point d'attache du corps dont on étudie le mouvement, nous donne la possibilité de calculer le déplace- ment réel du corps. 1. En général, lorsqu'on veut étudier les oscillations d'un corps à l'aide de la photo- graphie, on colle sur le corps oscillant un petit miroir, qu'on éclaire vivement, à l'aide FiG. 117. — Courbes phonophotograpbiques (Hermann). d'un faisceau lumineux et on en reçoit l'image rélléchie sur une surface sensible en mouvement. C'est ainsi qu'ont procédé Czermak, Stein, Bernstein, etc. La figure 117 doime, d'après Hermann, les courbes phonophotographiques des voyelles A, U et 0, Elles ont été obtenues de la façon suivante : Sur une plaque ou une membrane vibrante se trouve fixé un miroir extrêmement petit qui oscille, pendant les vibrations de la membrane, autour de son axe vertical. Sur ce miroir, une lentille placée tout près projette l'image d'une fente verticale fortement éclairée par une lampe électrique. L'image de cette fente, rélléchie par le miroir, tra- verse la lentille et arrive sur la fente horizontale d'un écran noir. Derrière cette fente, et tout près d'elle se trouve un cylindre enregistreur de Baltzar recouvert d'une feuille de papier sensible. Par un choix convenable de la largeur de la fente, Hermann est arrivé à obtenir des tracés admirables de finesse. Pour avoir l'indication du temps au-dessous du photogranime du mouvement étudié, on peut photographier, pour les mêmes procédés, l'image d'un petit miroir collé à la branche d'un diapason. Pour avoir sur un seul tracé la courbe du phénomène étudié et l'indication du temps, on éclaire le miroir par un faisceau de lumière intermittent, par exemple pour les étin- celles d'une bobine de Ruhmkorff dont l'interrupteur serait un diapason. Dans ce cas 856 GRAPHIQUE (Méthode). les photogrammes se présentent sous forme de traits discontinus. C'est ainsi qu'a pro- cédé GÉRARD (1890) pour étudier les mouvements de l'aiguille d'un galvanomètre, 2. Pour faire l'enregistrement du miroir des galvanomètres et des oscillographes, on emploie généralement un cylindre enregistreur ordinaire, recouvert d'un papier sen- FiG. Ii8. — Projection des vibrations d'un diapason à l'aide d'un miroir (Tyndall). sible, et enfermé dans une chambre noire. Le spot lumineux se déplace suivant la géné- ratrice du cylindre. HoTCHKiss, MiLLiset Mac-Kittrick ont employé en 1895 un dispositif déjà employé par NiCHOLS, et qui consiste à faire tomber devant le spot une plaque photographique glis- sant dans un châssis à glissière analogue à une guillotine. La vitesse initiale est pro- duite par une certaine hauteur de chute préalable, ou par un ressort. Pendant le passage devant le spot, la vitesse est rendue sensiblement constante par la résistance de l'air dans la coulisse fermée, munie d'orifices d'échappement dont on peut modifier à volonté l'ouverture. Pour faire l'enregistrement du spot lumineux des oscillographes, on a employé aussi un cylindre tournant lancé par un ressort au moment de l'ouverture d'un obturateur instantané, puis abandonné pendant un tour à sa vitesse acquise. 3. Dans certains appareils, comme par exemple dans les oscillographes, il est quel- FiG. 119. — Schéma de la méthode de composition optique permettant d'étaler les courbes sur un écran (Blondel). quefois nécessaire d'avoir non seulement l'enregistrement photographique d'un miroir, mais aussi la vision directe de la courbe de ces mouvements. Voici quelques dispositifs employés à cet effet. Le plus ancien est celui du miroir tournant. Dans ce dispositif, on projette sur GRAPHIQUE (Méthode). 8S7 l'écran d'observation les rayons venant du galvanomètre, à l'aide d'un miroir plan tour- nant à une vitesse uniforme autour d'un axe de rotation compris dans le plan de dévia- tion. Le mouvement du miroir est entretenu par un mécanisme d'horlogerie ou par un moteur électrique. Quand le moteur est synchrone et alimenté à la même source que le courant qu'on veut étudier à l'aide de l'oscillographe, les images projetées à chaque tour du miroir se superposent. Frolich (1887) a employé un miroir cylindrique polygonal ayant un nombre de faces réiléchissantes égal à celui des champs du moteur synchrone ou à un sous-muUiple, de sorte que les images successives obtenues sur l'écran se superposent. Abraham (1896) a remplacé la rotation du miroir par une oscillation produite par une came qui lui donne un mouvement d'aller lent proportionnel au temps, suivi d'un brusque retour aidé par un ressort. Le mouvement de la came est entretenu soit par un pendule soit, de préférence, par un moteur synchrone. — Le miroir oscillant donne la vision continue plus simplement que le miroir tournant polygonal et sans la cause d'erreur, assez importante et croissante avec l'angle d'incidence, qui résulte pour ce dernier de l'écartement existant entre l'axe de rotation et le plan des miroirs. Le synchronoscope à miroir oscillant de Blondel (1897) présente l'avantage d'éviter la perle de lumière due à la réflexion. Dans ce dispositif optique on donne au point éclairant lui-même un déplacement vertical uniforme. Pour cela, on fait tourner devant une fente verticale éclairée par un projecteur (dont le foyer conjugué est sur l'oscillo- graphe) soit un filament vertical de lampe à incandescence, soit un disque percé de fentes radiales, rectilignes si l'angle de déplacement est très faible, ou en forme de développante, si cet angle dépasse 18°. — Ce disque est entraîné par un moteur syn- chrone aux courants alternatifs étudiés. Les effets dus à chaque fente se superposant, on a la vision continue. Pour la photographie des courbes de l'oscillographe on remplace l'écran par une plaque sensible avec obturateur instantané. 4. Dans certains appareils très délicats, comme par exemple dans les oscillographes, il est indispensable d'une part de réduire les dimensions du miroir le plus possible, et d'autre part il faut que l'éclairement du spot soit suffisamment grand pour avoir une image photographique rapide. — Ces deux choses sont difficiles à concilier, étant donnée la formule de l'éclairement du spot qui est la suivante ; (1 — a) s i ^ en appelant a le coefficient d'absorption totale des rayons dans leur trajet à travers le projecteur et l'oscillographe; s la surface éclairée du miroir; / la distance de celui- ci au spot; i l'éclat de l'arc; [3 le coefficient de diffusion du verre dépoli. Boys a eu l'ingénieuse idée, pour diminuer la surface du miroir de l'oscillographe, de concentrer verticalement les rayons qui en proviennent par une lentille cylindrique .&^:::- FiG. 120. — Dispositif de Bots pour la concentration des rayons (Blondel). à axe horizontal (C) (fig. 120), qui permet leur libre déviation dans le sens horizontal. La source de lumière est une fente verticale éclairée par le projecteur, dont les miroirs plans des oscillographes, précédés d'une lentille plan convexe sphérique, donnent des images conjuguées. La lentille (C) réduit chacune de ces droites lumineuses à un point rectangulaire ayant pour hauteur celle du miroir correspondant, réduite dans le rap- 858 GRAPHIQUE (Méthode). port des distances ( p-^ )• L'éclaireinent de l'image se trouve accru en raison inverse de sa hauteur, de sorte qu'en appelant i et Z' les distances du point iraa^e respective- ment au miroir de l'oscillographe et à l'axe optique de la lentille cylindrique, H la hauteur de la fente, a la hauteur et b la largeur du miroir, l'expression précédente de e est remplacée par (1 — a) (1 — a') b H i II' Xp a' étant le coefficient d'absorption de la lentille cylindrique. On conçoit facilement combien est précieux ce procédé qui permet d'augmenter l'éclat, non par la dimension du miroir mobile, mais par celle d'une simple fente fixe ; il résout complètement la question de l'éclairement des oscillographes, quelque petite que soit leur partie vibrante. En outre, il suffit que les miroirs (Mi, Ma, M.j) de plusieurs oscillographes soient placés sur une même horizontale pour que leurs images, fournies par la lentille (C) à génératrices horizontales, soient également toutes sur une même horizontale, alors même que ces miroirs ne seraient pas verticaux. Cette méthode de Boys permet à volonté l'enregistrement sur glace tombante ou tambour tournant, ou l'emploi des miroirs tournants ou oscillants. § IL — Enregistrement des oscillations d'une colonne liquide. l. Quand on veut photographier les mouvements d'une colonne de mercure, on peut procéder de deux façons différentes : 1° On peut placer le tube à mercure sur un fond noir, l'éclairer vivement et recevoir l'image réfléchie sur une plaque sensible qui se FiG. 121. — Variations électriques du cœur de la tortue (Marey). déplace devant un écran à fente ; 2° On peut faiie agir la lumière, par transparence, sur un tube à mercure placé devant la fente d'un écran qui protège la surface sensible. — Dans ce dernier cas, la surface sensible se trouvant à l'abri de la lumière dans les endroits cachés par la colonne mercurielle, le photogramme se détache en blanc sur FiG. 122. — Variations électriques du cœur du chien (Fredeeicq). fond noir. Cette dernière méthode a été la première employée cà l'Observatoire de Green- wich pour l'enregistrement des oscillations de la colonne des thermomètres à mercure. Dans certains cas, il est nécessaire d'agrandir l'image de la colonne mercurielle, à l'aide d'un objectif microscopique, avant de le projeter sur la surface sensible. C'est Marey qui le premier a photogi'a[)hié les mouvements d'un électromètre capil- laire; après lui nous pouvons citer : Burdo.x-Sandehson, Frederigq, Fano, etc. 2. Pour photographier les mouvements d'une colonne d'eau, on procède de même que pour la colonne mercurielle, c'est-à-dire on la photographie par transparence. — GRAPHIQUE (Méthode). 859 Quand l'eau est colorée en rouge, la colonne d'eau ne laisse pas passer les rayons actifs; quand elle est pure elle se laisse traverser par la lumière, et on n'obtient sur la surface sensible que l'image du ménisque. — 11 est souvent nécessaire de réduire l'image de la colonne d'eau avant de la photographier; pour cela on interpose entre la colonne d'eau et l'écran à fente de la surface sensible une lentille appropriée. 3. Ellis (1886) a imaginé un piston-recorder à liquide et à enregistrement photo- graphique pour l'étude des mouvements au moyen de la transmission à air. Un petit tube de verre, mis en communication par un. tube avec un appareil explorateur, est rempli de liquide et placé horizontalement dans une fente faite dans la paroi d'une chambre obscure. Derrière le tube se trouve diposé un système d'éclairage. L'image du tube est concentrée, au moyen d'un système de lentilles, sur un diaphragme présen- tant une étroite fente horizontale derrière laquelle se déplace une feuille de papier sensible. — Les petits mouvements du piston liquide sont amplifiés par les lentilles. — La nature du liquide qui forme le piston varie avec la largeur du tube; on met de l'éther dans les tubes étroits, de l'eau ou de l'alcool dans les tubes larges. § IIL — Enregistrement des oscillations d'une aiguille. Pour photographier les mouvements d'une aiguille, Raps (1894) a employé le pro- cédé suivant : Dans une boîte, près de la fente d'un écran, on place l'aiguille dont on veut étudier les mouvements. Derrière l'écran à fente se trouve un cylindre enregistreur recouvert de papier sensible. Une lampe électrique projette sa lumière sur l'index et sur la fente ; de cette façon, le papier étant protégé aux endroits occupés par l'aiguille, on obtient, en blanc, la silhouette des positions occupées par l'aiguille à différents moments. — En même temps, on obtient aussi l'image des fils tendus verticalement devant la fente et des lignes et chitfres tracés sur un disque transparent ([ui tourne devant la fente. Ce disque est mis en mouvement par un mécanisme d'horlogerie (le même que celui qui commande le mouvement du cylindre). — On obtient de cette façon sur les photo- grammes l'indication du temps. Grâce à un dispositif spécial, la feuille de papier qui recouvre le cylindre enregistreur peut être changée en plein jour. § IV. — Flammes manométriques. 1. Les oscillations d'une masse gazeuse peuvent être rendues visibles, sous forme d'oscillation d'une flamme, de la façon suivante : On prend une petite capsule (flg. 123) divisée en deux par une membrane de caout- FiG. 123. — Capsule de Kœnig. chouc, ou bien par une feuille de papier ou d'or (m, m), et on fait agir sur la face posté- rieure (K) de cette membrane la masse gazeuse dont on veut étudier les mouvements. Dans la moitié antérieure de la capsule, on fait passer un courant de gaz d'éclairage. Le gaz entre par le tube g et sort par le tube f, k l'extrémité duquel il brûle. Tant que la membrane est au repos, la flamme n'oscille pas ; quand la membrane, à la suite des oscillations qui lui sont imprimées par la masse gazeuse avec laquelle elle est en contact, commence à vibrer, la flamme présente des oscillations synchrones avec les vibrations de la membrane. La figure 124 représente le dispositif classique adopté par Kœnig pour l'étude des 860 GRAPHIQUE (Méthode). vibrations sonores. En parlant dans l'entonnoir t, les vibrations sonores arrivent par l'intermédiaire d'un tube dans la capsule manométrique K. — L'observation des mouve- ments de la flamme /"est faite à l'aide du miroir tournant sp. En regardant l'image de FiG. 12J. — Flamme manométrique et miroir^touriiant (Kœnig). la flamme dans ce miroir, qu'on tourne à l'aide d'une manivelle, on voit, quand la flamme esl immobile, une bande lumineuse, et, quand la flamme oscille, une ligne dentée. 2. Quand on veut photographier les flammes manométriques, on n'emploie pas le gaz d'éclairage ordinaire, mais le cyanogène ou un mélange d'acétylène et d'hydrogène FiG. 125. — Courbes de la voyelle A. brûlant dans une atmosphère d'oxygène. On obtient ainsi des flammes très lumineuses qui donnent de belles images sur la surface sensible. L'image de la flamme est projetée au moyen d'un objectif photographique sur la surface sensible. — Si l'on laissait agir toute l'image de la flamme, on obtiendrait un photogramme très grossier, une sorte de ligne épaisse, comme tracée par un pinceau. Pour obtenir de belles images, on place devant la surface sensible un écran qui présente une mince fente. Le déplacement de la surface sensible, qui est une feuille de papier enroulée sur un cylindre ou bien une longue pellicule photographique, se fait horizontalement, dans une direction perpendiculaire à la direction des oscillations de la flamme. Avant de tomber sur la surface sensible, l'image de la flamme peut être étalée par un miroir tournant. GRAPHIQUE (Méthode). 861 La figure 126 représente un photograrame obtenu par v. Kries (courbe de la vitesse du sang). La courbe inférieure de cette figure représente le phologramme cbronogra- phique ; il correspond aux oscillations d'une flamme animée d'oscillations synchrones avec celles d'un diapason. Pour avoir l'indication du temps, on peut aussi procéder autrement. Par exemple, FiG. 120. — Courbes de la vitesse du sang et tracé chronograpliiquo (V. Krie.s). en faisant qu'un diapason ou un chronomètre quelconque agisse sur une lame qui obtu- rerait périodiquement la fente de l'écran sur laquelle tombe l'image de la flamme. Dans ce cas, le photogramme serait représenté par un trait discontinu. — On pourrait aussi faire une fente au-dessus de la fente principale de l'écran, l'éclairer vivement, et, par un dispositif chronométrique quelconque, l'obturer périodiquement. ^ Y. — AppareiU enregistreurs. Dans les paragraphes précédents nous avons décrit quelques procédés spéciaux d'enregistrement photographique. Nous dirons maintenant quelques mots des surfaces sur lesquelles se fait l'enregistrement. Les surfaces enregistrantes qui servent à la chronostylographie peuvent servir aussi à l'enregistrement photographique, si on les recouvre d'une feuille de papier sensible et si on les place dans une chambre noire. La maison Richard construit des cylindres très commodes pour l'enregistrement photographique. Le cylindre h feuille de papier sensible tourne dans l'intérieur d'un cylindre fixe possédant une fente longitudinale munie d'un volet obturateur. Ce cylindre peut être mis dans une position horizontale ou verticale, et peut être déplacé de haut en bas sur un support (Fig. 127). 1. Pour étudier à l'aide d'enregistrement photographique des changements très lents, Hermann (1896) a imaginé un dispositif spécial qui permet d'avoir une image tous les quarts d'heure, toutes les demi-heures ou toutes les heures. Dans ce dispositif, l'aiguille des minutes d'une horloge établit deux contacts élec- triques : l'un pour l'exposiliou d'une surface sensible, l'autre pour le glissement de la surface sensible entre deux expositions. Le contact d'exposition ferme le courant d'un petit électro-aimant qui agit sur une mince plaque d'aluminium placée dans la chambre obscure derrière l'objectif. — Le cylindre enregistreur, qui est recouvert d'une surface sensible longue de l'",50, est formé par un cylindre de bois ayant à sa base une roue avec 360 dents. Deux crochets s'engrenant avec la roue l'empêchent de se mouvoir. Sur ces crochets d'arrêt agit un électro-aimant. A chaque contact établi par l'aiguille de l'horloge, l'électro-aimant devient actif, et, la ligue d'arrêt se déplaçant, le cylindre avance d'une dent. Le courant commun pour les deux électro-aimants provient de 3 accu- mulateurs. L'appareil peut fonctionner nuit et jour. 2. Le pendule photochronoij raphe de Morokhowetz se compose d'une tige de pendule sur laquelle on fixe à différentes hauteurs une plaque photographique. L'appareil est. 862 GRAPHIQUE (Méthode). enfermé dans une boîte dont la face antérieure est pourvue d'une fente. Un objectif et un soufflet peuvent être fixés en face de cette fente. 3. Samojloff, pour photographier les déplacements du ménisque de l'électromètre capillaire, a employé une plaque mise en mouvement par un ressort. 4. MoROKHowETz a fait construire dans son laboratoire une chambre noire de très grandes dimensions, véritable salle obscure dans laquelle l'observateur lui-même peut pénétrer pour placer des cylindres enregistreurs, des pendules chronographes, etc. Les dispositifs expérimentaux sont situés à l'intérieur de cette chambre. Les faisceaux de FiG. 127. — Enregistreur photographique Richard. lumière impressionnant les surfaces sensibles pénètrent dans la chambre noire par des ouvertures convenablement placées. De cette façon, on évite la construction des chambres noires spéciales pour chaque genre d'expériences. 5. Le papier qu'on emploie pour obtenir des phologrammes est préparé au bromure d'argent. Hermann augmente la sensibilité du papier par des bains d'ammoniaque. La surface recouverte de papier sensible est enfermée dans une boîte. La lumière qui éclaire l'objet dont on désire photographier les mouvements doit être intense, uniforme et d'une forte activité chimique. Les éclairages avec la lumière solaire, directe ou réfléchie par un héliostat, avec l'arc électrique, avec la lumière au magnésium ou au calcium, sont excellents. — Si l'on veut employer un éclairage au gaz, il faut le mélanger avec des vapeurs de naphtaline ou de benzine pour en augmenter l'intensité. Plus l'éclairage est intense, plus la vitesse de la. surface enregistrante peut être rapide, et la fente qui livre passage aux rayons lumineux étroite ; par conséquent, les photo- grammes obtenus sont d'autant plus beaux que l'éclairage est plus intense. GRAPHIQUE (Méthode). 863 IV Ch ronophotographie. On donne le nom de chronophotographie à une méthode qui analyse les mouvements au moyen d'une série d'images photographiques instantanées, recueillies à des intervalles de temps très courts et équidistants. Cette méthode, qui peut être considérée presque entièrement comme la création de Marey, avait été désignée par lui, au de'but, sous le nom de phofochronographie. Le nom de chronophotographie lui a été donné par le Congrès photographique de i889. Cette méthode trouve sa principale application dans l'étude des grands mouvements de translation. C'est Muybridge (1S82) qui le premier l'a mise en oeuvre. Pour avoir une série d'images représentant les différentes phases d'un mouvement, il a employé une série d'appareils photographiques. Voici la description de son dispositif : Muybridge (Willmann : « The horse in motion», London, Turner and C°, 1882, livre publié sous les auspices de Stanford, ancien gouverneur de la Californie, qui a eu l'idée première, et qui a confié ce travail à Muybridge) a étudié les mouvements des ani- maux en les faisant passer sur une piste tracée devant un plan incliné, formant écran et orienté de façon à réfléchir la lumière solaiçe pour augmenter, par contraste lumi- neux, l'intensité des silhouettes à reproduire. En face de cet écran se trouvait une série d'appareils photographiques chargés de plaques sensibles, et placés de façon à viser ensemble tous les points de la piste et de l'écran. En travers de la piste des fils électriques tendus commandaient les électro- aimants qui maintenaient fermés les obturateurs des appareils ; de telle sorte qu'en par- courant cette piste à une allure quelconque l'animal rompait successivement les fils tendus, et déterminait lui-même, automatiquement, l'ouverture instantanée des objectifs. De nombreuses divisions équidistantes (0™,58), tracées sur le plan incliné, se trouvaient naturellement reproduites avec les silhouettes dans les clichés et servaient à mesu- rer les déplacements des membres de l'ensemble des animaux observés. Au début de ses essais, Muybridge n'obtenait que des silhouettes peu nettes, parce qu'il n'employait que des plaques au coUodion humide. Plus récemment les plaques extra-rapides au gélatino-bromure d'argent lui ont donné des résultats très supérieurs, et tout à fait remarquables. Le temps de pose pour chaque image était de 1/500 de seconde. Les images n'étaient pas prises à des intervalles de temps rigoureusement égaux, la vitesse du cheval n'étant pas uniforme, Muybridge a essayé de corriger ce défaut en déclanchant les objectifs par un mécanisme indépendant, mais il n'a pas réussi d'une façon satisfaisante. Muybridge a appliqué cette méthode aussi à l'analyse de l'aviation. Ottmar AnschOtz (de Lissa) a fait une très belle étude des mouvements de l'homme et des animaux par la méthode de Muybridge. Le procédé de Muybridge n'était nullement pratique. Les dispositifs de Marey sont au contraire très commodes; c'est grâce à eux que la chronophotographie a pu entrer dans la pratique courante des recherches sur la locomotion. Les images photographiques peuvent être obtenues sur une plaque fixe ou sur une pellicule mobile. § I. — Chronophotographie sur plaque fixe. Si l'on vise avec un appareil photographique convenablement orienté, c'est-à-dire en tournant le dos au soleil, un champ complètement obscur, même après une pose d'une certaine durée, la plaque sensible, n'ayant reçu aucune impression lumineuse, ne porte aucune image. Si l'on lance, devant ce champ obscur, un objet brillant au soleil, une boule de métal poli, par exemple, l'image de cette boule sera reproduite sur la pla- que sous la forme d'un trait courbe blanc, représentant la trajectoire de la boule, puisque la boule aura impressionné, en passant, d'une façon continue tous les points de 864 GRAPHIQUE (Méthode). la plaque sur lesquels l'objectif aura renvo3'é les rayons lumineux re'fléchis par elle. Si, au lieu de laisser l'objectif ouvert pendant toute la durée du passage de la boule devant le champ obscur, on le ferme et on l'ouvre successivement, au lieu d'un trait blanc continu sur la plaque, ou aura des points blancs correspondant à chaque ouver- ture de l'objectif. L'ensemble des points représente la trajectoire de la boule. La série des points de cette trajectoire fournira des renseignements complets sur la marche dans l'espace du mobile observé, si les obturations de l'objectif ont été faites à des inter- valles de temps rigoureusement égaux et si ces intervalles, d'une durée connue, ont été assez courts pour que, sans se confondre, les images soient pourtant aussi rapprochées que possible sur la plaque sensible. L'exemple que nous venons de citer nous montre que, pour obtenir sur plaque fixe la chronophotoyraphie d'un corps quelconque animé d'un mouvement de translation, il faut : jo Employer un dispositif tel que l'image seule du corps en mouvement soit repro- duite sur la plaque sensible; 2° Réaliser des obturations successives de l'objectif, obturations se succédant à des intervalles égaux d'une grande brièveté. L Champ obscur. — Quand il s'agit de photographier les mouvements de translation d'un objet clair ou brillant, il faut que derrière le mobile le fond soit obscur. Au con- traire, quaud le mobile est de couleur sombre, il faut que le fond soit blanc. Un simple rideau noir, tendu devant le champ de l'objectif, ne suffit généralement pas pour constituer le champ obscui' sur lequel doit se détacher le mobile blanc ou bril- lant. Aucune substance n'est absolument noire. Chevreul a montré que le noir ou l'obs- curité absolue ne pouvait s'obtenir qu'au moyen d'une cavité tapissée de noir et sur les parois de laquelle la lumière ne vient pas frapper. Pour obtenir le champ obscur, Marey a installé au Parc des Princes, à la Station Physiologique, une sorte de grand trou noir, orienté de telle façon que les rayons du soleil ne peuvent y pénétrer. Devant ce champ obscur se trouve une piste de pavés de bois noircis sur laquelle s'avance en pleine lumière le sujet soumis à l'observation chronophotographique. II. Appareils chronopholoyruphiques de Marey. — 1. L'appareil pour la chronophoto- graphie sur plaque fixe (1882) se compose, ainsi que les appareils photographiques FiG. 128. — Appareil chronophotographique de Marey. ordinaires, d'un objectif et d'une chambre noire à soufflet renfermée dans le haut d'une boite dont la partie inférieure est occupée par un mécanisme de transmission de mou- vement agissant au moyen d'engrenages. Ce mécanisme a pour but de mettre en rota- tion rapide, par une manivelle, un large disque jouant à la fois le rôle de volant et d'obturateur. Quand, après plusieurs tours, ce disque fortement lancé à la main par l'intermédiaire de la manivelle, a acquis une grande vitesse, réglée par un régulateur, la marche du disque reste uniforme pendant toute la durée, d'ailleurs fort courte, de GRAPHIQUE (Méthode). 865 l'opération photographique proprement dite. Le disque présente des fentes ou fenêtres, percées à égale distance les unes des autres. A l'arrière de l'appareil, tout contre le disque, on place le châssis négatif contenant la plaque sensible. Le disque constitue un système d'obturations et d'éclairements successifs d'autant plus rapides qu'il y aura sur le disque un plus grand nombre de fenêtres, et que la vitesse de rotation du disque sera plus grande. La plaque sensible reçoit à chaque passage d'une des fenêtres du disque une nou- velle image représentant le mobile visé dans la position qu'il occupe au moment du pas- sage de cette fenêtre. Comme entre le passage de deux fenêtres le mobile s'est déplacé, on obtiendra sur la plaque une série d'images. L'intervalle entre la prise de deux images était primitivement de i/lO^^ de seconde, et la durée d'un éclairement était de i oOO de seconde. En perfectionnant l'appareil chronophotographique, Marey a obtenu dos images bien plus fréquentes avec des durées d'éclaireraent très petites. 2. Marey a construit un appareil qui réunit toutes les conditions pour la chrono- photographie sur plaque fixe et sur pellicule mobile. Nous le considérons dans ce paragraphe seulement au point de vue de la chronophotographie sur plaque fixe. L'appareil complet se compose de deux parties : un avant-corps portant l'objectif et un arrière-corps relié au premier par le soufUet de la chambre noire. L'arrière-corps renferme soit simplement le châssis pour la chronophotographie sur plaque fixe, soit, en outre, au besoin, le mécanisme spécial nécessaire pour le déroulement des pellicules sensibles dans les applications de chronophotographie sur pellicule mobile. Pour la mise au point, l'arrière-corps avance ou recule sur des rainures ou rails au moyen d'une crémaillère et d'un pignon qu'actionne un bouton placé à la base de l'ar- rière-corps. A la partie supérieure de l'avant-corps, l'objectif est à moitié contenu dans une boîte coulissant à frottement dans cet avant-corps. La boite de l'objectif est percée à l'avant et au-dessous d'une fenle qui coupe en deux l'objectif perpendiculairement à son axe optique principal. Cette fente est réservée pour le passage des disques fenêtres qui pro- duisent, en tournant, des obturations intermittentes régulières. Les intermittences d'éclaireraent sont données par deux disques fenêtres tournant en sens contraire; les rencontres des ouvertures produisent les éclairements. Grâce à cette disposition, les éclairements sont très brefs et très rapprochés. Les dimensions des disques sont assez réduites, de sorte que l'appareil présente un volume 1res maniable, puisqu'il est à peu près égal à celui d'une chambre noire ordinaire de 30 X 40. Dans la parlie supérieure de l'arrière-corps se glisse, par une rainure, le châssis à verre dépoli pour la mise au point, ou le châssis contenant la plaque sensible. Le mécanisme du rouage actionnant les disques est mis en mouvement par une manivelle placée derrière le second corps de l'instrument. L'arbre de la manivelle tra- verse l'arrière-corps pour rejoindre l'avant-corps au-dessous du soufflet. Cet arbre est extensible et réductible, étant formé de deux tubes carrés coulissant l'un dans l'autre, de quantités variables à volonté, télescopiquement, pour permettre la mise au point par le rapprochement ou l'éloignement des deux corps de l'instrument. III. L'opération chronophotographique. — Si l'objet dont on veut étudier le mouve- ment n'a pas beaucoup de relief, ou s'il peut être vu sous des perspectives très diffé- rentes, sans que ce relief ait une importance pour l'observation, on peut le chronophoto- graphier de près avec un objectif à court foyer, pour avoir des images très lumineuses. Mais, si l'objet a un relief important, il est nécessaire, au contraire, de s'en éloigner autant que possible pour éviter les différences de perspective qui nuiraient gravement à la comparaison des images chronophotographiques.En ce cas, pour ne pas trop réduire les images par l'éloignement, on emploie de préférence un objectif à long foyer. Marey employait à la Station Physiologique du Parc des Princes une sorte de cabane montée sur un chariot roulant sur des rails, qui renfermait l'appareil chrono- photographique. La cabine pouvait être avancée ou reculée, à volonté, sans cesser de rester, dans ses mouvements, perpendiculaire au champ obscur. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOMR II. 55 866 GRAPHIQUE (Méthode). Après le réglape et la disposition du champ obscur, le réglage de l'éloignemenl de l'appareil et le choix de l'objectif, l'opération chronophotographique proprement dite Gommence. La mise au point se fait en amenant les fenêtres des disques en coïncidence et en examinant sur la glace dépolie un objet quelconque, placé dans le plan que devra parcourir l'objet qu'on veut chronophotographier . La mise au point étant faite, on ferme l'objectif extérieurement avec un obturateur d'avant ordinaire actionné par une poire en caoutchouc; on remplace le châssis de mise au point par un châssis garni d'une plaque sensible ; on lire la planchette de ce châssis; ou lance les disques en manœuvrant la manivelle, et enfin on presse la poire en caout- chouc de l'obturateur d'avant pour l'ouvrir au moment où l'objet en mouvement va passer devant le champ obscur dans le plan pour lequel on a fait la mise au point. Quand l'opération est finie, on lâche la poire en caoutchouc; l'obturateur d'avant se referme, et on repousse la planchette du châssis qui contient la plaque sensible. Cette plaque est traitée dans la chambre noire comme les clichés ordinaires. IV. Mesures et comparaisons des images chronophotographiques — 1. Muybridge avait eu l'idée de tracer sur le plan incliné servant d'écran des gradations qui, se trouvant reproduites dans les clichés en même temps que les images des animaux en marche, fournissaient un moyen d'apprécier exactement l'amplitude des mouvements exécutés dans un temps donné. Mabey a employé un procédé plus pratique. Devant le champ obscur, visé par l'ap- pareil, sont tracées une suite de divisions métriques très visibles dans le plan parcouru par le mobile observé. Cette échelle métrique, reproduite en même temps que le mobile sur la plaque sensible, sert à mesurer la grandeur réelle de l'objet et des espaces qu'il a parcourus. Afin de supprimer les calculs résultant de la réduction pho- tographique de l'image, on peut agrandir celle-ci à l'aide d'une lanterne à projection, et l'amener jusqu'aux dimensions exactes du sujet observé. Dans ce ca';, il n'y a qu'à lire directement, sans faire aucun calcul, les divisions de l'éclielle métrique, également ramenées à leurs dimensions vraies. 2. Le temps pendant lequel le mouvement chronophotographié s'est accompli peut être déterminé d'après la vitesse de rotation du disque. Pour une appréciation plus délicate du temps, Marey employait le cadran chrono- métrique. — Cet appareil se compose d'un cadran en velours noir, gradué de traits blancs devant lequel tourne un indicateur blanc semblable aux aiguilles des anciennes horloges. — Cet indicateur est actionné par un mouvement d'horlogerie, muni d'un régulateur Foucault; il fait le tour du cadran en une seconde et demie. Le cadran pré- sente 18 divisions. Si l'obturateur de l'appareil chronophotographique n'est pas assez rapide, les images successives de l'aiguille en marche ne sont pas nettes; si, au contraire, la vitesse de l'obturateur est suffisante, les pointes mêmes des images de l'indicateur apparaissent nettement. Cette netteté des images donne le moyen de mesurer exactement le temps écoulé entre deux éclairements successifs, seule mesure nécessaire, la durée de l'éclai- rement lui-même étant trop courte pour qu'on puisse l'apprécier utilement. Les images de l'aiguille sont d'autant plus nombreuses que la vitesse de l'obturateur est plus grande. 3. Pour un espace de temps donné, on peut prendre d'autant plus d'images d'un mobile que sa vitesse de translation est plus grande. Prenons un exemple : un homme passe en courant avec une vitesse V devant le champ obscur; sur la plaque de l'appa- reil chronophotographique, on n'obtient que quatre images non superposées. Sans modifier le mouvement des disques de l'appareil, faisons repasser l'homme au pas avec la vitesse v; dans ce cas, la plaque sensible portera 16 images superposées en grande partie et presque confondues les unes avec les autres. — Pour la petite vitesse de trans- lation de l'homme, il aurait fallu, pour obtenir des images distinctes, réduire au quart la vitesse de rotation des disques de l'appareil chronophotographique. La notion de temps est très complète quand celle d'espace est très restreinte (Marey). Quand le mobile est de faibles dimensions, par exemple, quand il s'agit d'une boule brillante, il est facile de multiplier les images chronophotographiques. — Au contraire, GRAPHIQUE (Méthode). 867 si pour une même vitesse le mobile occupe un grand espace, quand il s'agit par exemple de l'homme ou du cheval, il devient impossible, sans certains appareils, d'en inuUiplicr beaucoup les images, vu leur confusion provenant de leur superposition. V. Chronophotographie géométrique. — Il est rarement indispensable de reproduire toutes les parties d'un sujet pour être renseigné sur son mouvement. Ainsi, chez l'homme et la plupart des animaux observés de profil, les mouvements d'un seul côté du corps suffisent pour caractériser la marche, la course, le saut, etc. En ce cas, pour supprimer les images, il suffit de supprimer un côté du corps en le noircissant, puisque ce côté noirci se confondra avec le noir du fond obscur. Mais on peut faire mieux encore : rev»Hir, par exemple, l'homme observé, si le sujet est un homme, d'un maillot noir l'enveloppant de la tête aux pieds et ne tracer que des points et des lignes (boutons brillants, galons blancs) correspondant aux segments des membres et à leurs articulations. La chronophotographie d'un personnage en marche vêtu de cette façon ne donnera FiG. 129. — Chronophotographie de la marche (Marey). comme images que des lignes et des points, figures géométriques assurément peu encom- brantes, et multipliables sans inconvénients. Néanmoins, chaque figure prise isolément permettra de reconstituer, avec des lignes et des points, l'exacte position des membres et par conséquent du corps entier de l'homme dans chacune des phases du mouvement où il aura été chronographié, VI. Miroir tournant. — Dans bien des cas, il est désirable de multiplier les images tout en leur conservant leur intégrité. —Pour réaliser ce desideratum, Marey a imaginé de suppléer à la translation insuffisante du sujet par un déplacement imprimé à l'image sur la plaque photographique. On peut arriver à ce résultat de diverses manières, par exemple, en faisant pivoter la chambre photographique sur son support autour de son axe vertical. — La difficulté de mouvoir régulièrement la masse considérable de l'appareil a fait remplacer celte méthode par l'emploi d'un miroir tournant. L'image reflétée par le miroir dans l'objec- tif va se peindre sur la plaque sensible en des points toujours différents. On obtient de cette façon une série d'images complètes se succédant à des intervalles de temps très courts. Voici comment on procède pour dissocier les images au moyen du miroir tournant : On enferme tous les instruments dans une caisse obscure formée de deux compar- timents à angle droit l'un sur l'autre. Une ouverture (DD) pratiquée dans l'un de ces compartiments, en forme de tube carré (ÏT) reçoit les rayons (rr'j émanés du mobile en expérience. Ces rayons tombent sur le miroir (M) qui les réfléchit dans l'objectif (0) de l'appareil chronophotographique. Un mécanisme d'horlogerie imprime au miroir (M) un pivotement vertical. Ce mouvement a pour effet de promener de gauche à droite 868 GRAPHIQUE (Méthode). les images et de les étaler sur la plaque photographique (o) dans des positions tou- jours différentes, à chaque fois que la rotation du disque (/) provoque une nouvelle admission de lumière dans l'appareil. Le rouage d'horlogerie doit conduire le miroir d'autant plus vite que les images doivent être plus écartées. Grâce à ce moyen, comme aussi à la chronophotographie géométrique, les limites imposées à l'enregislrement sur plaque fixe peuvent être élargies dans une très impor- tante pi'oportion. § II. — Chronophotographie sur plaque mobile. En 1873, Janssen eut l'ide'e de prendre une série de vues successives d'un même corps sur une plaque photographiqne en mouvement. En faisant ses observations sur le passage de Vénus devant le soleil, Janssen se servit d'une lunette qui présentait à son foyer une chambre photographique. La plaque sensible de cet appareil était circulaire et tournait par saccades autour de son centre, de manière à présenter toutes les 70 secondes un point différent de son pourtour au foyer de l'objectif. On obte- nait ainsi la silhouette faite par Vénus sur le soleil à des intervalles connus. Ces images permettent de mesurer la vitesse du phénomène. Janssen a désigné son appareil sous le nom de revolver astronomique. En 1878, il a indiqué l'application qu'on peut faire de cet appareil à l'étude des mouvements des animaux. En 1882, Marey, en adoptant le principe du revolver astronomique de Janssen, a construit un appareil spécial, appelé fusil photographique, avec lequel il visait un oiseau pendant une partie de son vol. Dans cet instrument, le canon du fusil, gros tube noirci, servait à la visée et conte- nait l'objectif. A la place de la batterie, une chambre noire cylindrique à mécanisme automatique, logeait une plaque sensible, ronde ou octogonale, qui tournait sur elle- même, et un obturateur tournant commandé par un fort mouvement d'horlogerie. — L'oiseau étant visé, le déclanchement de la détente du fusil mettait le mouvement d'horlogerie en marche, et, par une suite de petits déplacements de la plaque seiv- sible, déplacements coupés d'arrêts, pendant- lesquels agissait l'obturateur, douze images successives se trouvaient prises en une seconde de temps sur tout le pourtour de la plaque. Chacune des images était faite en 1/720 de seconde et donnait des rensei- gnements pi'écis, mais encore trop incomplets, sur les mouvements du vol. Les images obtenues étaient fort petites. — Pour plus de sûreté dans la mesure des durées, Marey adapta au fusil un appareil chronographique formé d'une capsule à air qui recevait un choc à chacun des déplacements de la plaque sensible ; un tube de caoutchouc reliait ce tambour à un tambour enregistreur qui traçait les mouvements reçus sur un cylindre tournant; on enregistrait aussi en même temps les vibrations d'un diapason. De cette manière, la durée de l'impression lumineuse et l'intervalle de temps qui séparait les images les unes des autres, étaient mesurés avec une précision satisfaisante. Janssen (C. R. Ac. des Se, 4882, xciv, 911) a proposé de recueillir les images photo- graphiques sur une plaque animée d'une rotation continue. — Ce procédé ne donne que des images peu nettes. § III. — Chronophotographie sur bande pelliculaire. Pour avoir un grand nombre d'images, bien distinctes, Marey a imaginé de recueil- lir les images successives sur différents points d'une longue bande qui passerait au foyer de l'objectif en s'y arrêtant un instant très court pour la prise de chaque image. Les premiers appareils chronophotographiques à pellicule mobile de Marey présen- taient un dispositif électrique constitué par des contacts et des électro-aimants qui pro- voquaient l'arrêt de la bande pelliculaire sensible au passage d'une fenêtre éclairante. Le papier sensible se déroulait sous l'inlluence d'un mécanisme d'horlogerie. Plus tard, Marey a renoncé à l'emploi de l'électricité, et dans les appareils les plus récents les mouvements de la pellicule et ses arrêts ne sont plus confiés à un rouage indépendant, mais ils sont solidaires des mouvements du disque. GRAPHIQUE (Méthode). 869 1. Appareil chronophotographiquc. — Le chronophotographe de Marey qui sert pour la chronophotographie sur plaque fixe sert aussi à la chronophotographie |sur pellicule, mobile. Pour cela, il suffit de remplacer, dans l'arrière-corps de l'appareil, le châssis négatif de la plaque fixe par un autre châssis qui se nomme fenêtre d'admission, parce qu'il joue, en effet, au moyen de deux panneaux mobiles coulissant dans une rainure, le rôle de fenêtre à ouverture variable pour l'admission de la lumière. En arrière de cette fenêtre se place dans une boîte spéciale, dite chambre aux images, la pellicule sensible et son mécanisme, le tout se logeant comme la fenêtre d'admission dans l'arrière-corps du chronophotographe. Dans la chambre aux images la pellicule s'engage sur divers organes mécaniques qui servent à la faire passer, en la déroulant d'une bobine (M) servant de magasin sur une autre bobine réceptrice (R) après avoir reçu, derrière la fenêtre d'admission (en F), dans la chambre aux images, l'impression lumineuse. Les pellicules qu'on emploie sont de longues bandes sensibles de 9 centimètres de hauteur qui se terminent à leurs deux extrémités par une certaine longueur de papier parfaitement opaque et taillé au bout en pointe. Les bobines ont, comme les pellicules, 9 centimètres de hauteur; ce sont de petits cylindres fermés en haut et en bas par des disques d'épaisseur inégale. Ceux du haut sont minces; et ceux du bas, épais, portant en dessous des trous sur tout leur pourtour. Un petit tube traversant chaque bobine d'un fond à l'autre serl à l'enfiler, dans la chambre aux images, sur une broche verticale fixée à cette chambre. A l'abri de la lumière, dans le laboratoire, on garnit la bobine-magasin (M) de la pellicule sensible en engageant le papier opaque sur celle-ci par l'une de ses pointes dans la fente ménagée sur le cylindre, puis en enroulant. Il suffit de maintenir cette pellicule enroulée bien fixe sut la bobine-magasin, avec un lien par exemple, pour qu'elle soit à l'abri de la lumière, grâce aux sortes de queues de papier dont nous avons déjà parlé. L'enroulement achevé dans le laboratoire, on peut eu sortir pour charger en pleine lumière la boite aux images de la façon sui- vante : sur la broche de gauche de cette chambre on place la bobine-magasin; puis on dégage l'extrémité de la queue opaque libre pour l'engager par sa pointe dans la fente de la bobine réceptrice en faisant un ou deux tours avec l'extrémité de cette queue sur celte seconde bobine. Enfin, en gardant cette dernière bobine de la main droite, ou fait passer, avec la main gauche, la queue opaque dans une rainure, devant une ouverture (Fj de la chambre aux images, puis sur un tambour-guide (L), où elle se trouve maintenue par un rouleau compresseur (r) qu'on écarte légèrement, et il n'y a plus qu'à enfiler la bobine réceptrice (H) par la broche de droite en écartant son rouleau compres- seur [r] pour que la chambre aux images soit chargée. La queue opaque, partant de la bobine réceptrice (R), passe devant l'ouverture (F) sur un tambour-guide pour aller jusqu'à la bobine-magasin (U) qu'elle recouvre encore de plusieurs tours, protégeant ainsi la pointe sensible de la pellicule qui se déroulera au moment de l'opération. Quand elles sont placées sur leurs broches dans la chambre aux images, les bobines s'engagent par les trous peixés en couronnes dans l'épaisseur de leur base sur des chevilles fixées dans des plateaux tournants actionnés par la mani- velle du chronophotographe comme les disques obturateurs fenêtres, de telle sorte que le même effort de la manivelle du chronogrorphe lance les disques fenêtres et met en mouvement le mécanisme de la chambre aux images, au moyen d'un embrayage, dès qu'on veut commencer l'opération. Marey a modifié cet appareil dans ses détails afin d'obtenir une parfaite égalité entre les intervalles des images, égalité qui lui a paru nécessaire pour rendre la chro- nophotographie applicable aux pi'ojections. Marey, depuis lors, s'est contenté de recourir à des bandes refermées sur elles- mêmes et présentant le retour périodique d'un même mouvement. Il tombait ainsi dans un dispositif très analogue à celui du kinétoscope d'Eoisox à bandes. A présent on trouve dans le commerce des pelliculaires de 20 mètres et plus. L'invention de Kodak ayant mis dans le commerce de longues bandes de papier au gélatino-bromure d'argent, et la facilité de se procurer des fiUm transparentes plus avantageuses encore, oat aidé au développement de la chronophotographie. 870 GRAPHIQUE (Méthode). 2. Voici encore, très brièvement, la description de quelques types d'appareils chro- nophotographiques de Marey : Le type I (a), fonctionnant dans la lumière rouge du laboratoire photographique ; l'objectif est braqué au dehors au travers d'un pavillon en forme d'entonnoir. A la place du châssis ordinaire on glissait une planchette sur laquelle était monté un rouage d'hor- logerie (R) conduisant sur des rouleaux une longue bande de papier. La rotation du disque produisait, à chaque passage d'une fenêtre éclairante, un contact électrique pen- dant lequel un électro-aimant comprimait la bande et l'arrêtait. Cet arrêt très court est nécessaire au moment de la prise d'une image. Le Type II (6). On ne photographiait plus dans la chambre noire. Marey fit une boîte portative qui se chargeait dans le laboratoire, mais qu'on pouvait porter au dehors avec le chronophotographe lui-même. Le Type III (c). Renonçant à l'emploi de l'électricité, Marey fit un appareil où les mou- vements de la pellicule et ses arrêts n'étaient plus confiés à un rouage indépendant, mais étaient solidaires des mouvements du disque. 3. Fusil chronophotographiqué à bandes pelliculaires. — Dans sa forme primitive, le fusil chronophotographiqué ne donnait qu'un nombre insuffisaut d'images, 12 seule- ment. — Dans le nouveau fusil, une bande de 20 mètres reçoit les images successives. L'obturateur est formé d'un robinet à lumière, bien moins encombrant que le disque. Un rouage mû par une dynamo est placé dans la crosse. Chaque fois qu'on presse sur la détente, le courant se ferme, et la pellicule prend son mouvement, qui cesse aussitôt qu'on cesse d'appuyer sur la détente. Des accumula- teurs légers ou une pile portative fournissent le courant nécessaire. 4. Opération chronophotographiqué sur pellicule mobile. — Le champ clair ou obscur étant choisi et réglé, ainsi que la distance du chronophotographe, et la fenêtre d'admis- sion étant mise dans la rainure, avec l'écartement qui convient, on ouvre dans l'arrière- corps de l'appareil la chambre aux images; on repousse dans cette chambre le verre dépoli (V) contre l'ouverture (F); on referme le couvercle de la chambre et, par le viseur de cette chambre, on règle la mise au point. Il n'y a plus ensuite qu'à garnir la chambre aux images de ses deux bobines, enlever le verre dépoli, refermer le couvercle et lancer les disques fenêtres au moyen de la manivelle. Quand le sujet va passer devant le champ obscur ou clair, on fait agir par un déclan- chement l'embrayage, et le mécanisme de la chambre aux images entre en fonction, tandis que sur la bobine-magasin [M) le papier opaque et la pellicule sensible se déroulent, malgré la pression de son rouleau compresseur, le papier opaque s'enroule, maintenu par un autre rouleau compresseur, sur la bobine réceptrice (R), après avoir passé sur le tambour-guide du laminoir i L) et devant l'ouverture (F). Pendant toute la durée de l'opération la marche du mécanisme est égale et continue, mais la pellicule, néanmoins, n'avance devant l'ouverture (F) que par saccades, car il importe qu'à chaque éclairement des disques obturateurs il y ait un arrêt de la surface sensible pour que les images possèdent toute la netteté désirable. Ce mouvement sac- cadé est donné, au passage de la surface sensible devant l'ouverture (F), par un organe spécial qui la pince, l'arrête et la laisse reprendre son mouvement quand l'image est reproduite. Dès que les derniers tours de papier opaque, enroulés sur la bobine-magasin, se sont déroulés, la surface sensible arrive au foyer de l'objectif devant l'ouverture (F) et la chronophotographie commence. Quand la surface sensible a passé, la seconde queue opaque se déroule à son tour et recouvre la pellicule impressionnée, de telle sorte qu'à la fin de l'opération il ne reste rien de la bobine (Mi, toute la pellicule étant enroulée sur la bobine R, et celle-ci est prête à être reprise en pleine lumière et portée dans le laboratoire pour le développement photographique. Pour toutes les opérations, la fenêtre d'admission règle l'utilisation de la surface sensible et permet de l'économiser en la réduisant au minimum nécessaire. — Si le sujet à chronophotographier est plus long que large, on rapproche les volets mobiles de la fenêtre. Si le sujet est au conti^aire plus large que haut, on écarte les volets, ^ GRAPHIQUE (Méthode). 871 on retourne même au besoin le chronographe sur le côté afin d'utiliser la plus grande largeur de la fenêtre d'admission, mais en ce cas la succession des images, au lieu d'être transversale, est verticale et se lit de haut en bas. Sur une même largeur de bande pelliculaire on peut prendre d'autant plus d'images que celles-ci sont plus réduites ; il suffit pour cela de multiplier les éclairemenls au moyen des disques obturateurs dans une proportion correspondant à la réduction de l'admission de la lumière par la fenêtre d'admission. A cet effet, les fenêtres des disques obturateurs sont munies de volets, et on n'a qu'à ouvrir ou fermer un certain nombre de ces volets pour augmenter on réduire le nombre des fenêtres des disques. On ne se préoccupe pas du nombre des arrêts de la pellicule, une disposition parti- culière du mécanisme de l'appareil le réglant automatiquement. b. Pour le développement des épreuves, Marey se sert de deux poulies de métal, munies chacune d'une manivelle et montées l'une à côté de l'autre sur un bâti porté par quatre pieds. En se déroulant d'une bobine pour s'enrouler sur l'autre, la pellicule se réfléchit sur une tige de verre horizontale placée au niveau des pieds. Cette tige plonge dans une cuvette qui contient le développateur. On fait passer la pellicule d'une bobine sur l'autre, autant de fois qu'il est nécessaire pour que le développement soit complet. Pour tirer les images positives, on se sert d'un appareil spécial : Une caisse de bois peu profonde et s'ouvrant sur une de ses faces, porte sur sa paroi opposée quatre broches destinées à recevoir la bobine. Des laminoirs animés d'un mouvement auto- matique entraînent la pellicule négative et la feuille de papier sensible. § IV, — Chronophotographie à l'aide de plusieurs objectifs. .1. LoNDE (1883), revenant à la méthode de MuvBRiDGE perfectionnée, a construit, en collaboration avec Dessoudex, un appareil dans lequel une série de 12 objectifs forment leurs images en des points ditl'érents d'une plaque rectangulaire de grandes dimensions. Un ingénieux dispositif provoque l'ouverture successive de ces objectifs à des inter- valles équidistants, aussi rapprochés que l'on veut. L'analyse du mouvementés! parfaite; l'ordre des images ne peut être interverti, puisqu'elles sont toutes obtenues sur une même plaque ; mais le nombre de ces images est nécessairement limité par la nécessité d'avoir un objectif pour chacune d'elles. Le général Sébkrt a employé un appareil analogue pour étudier les phases du lan- cement des torpilles. KoHLRAUSCH (1891) a couslruit uii appareil formé d'un disque sur lequel se trouvent placées un certain nombre de chambres photographiques. L'axe du dis(jue est disposé comme le fléau d'une balance. Les chambres photographiques passent l'une après l'autre devant une fente éclairée. 2. Images alternantes. — En accouplant deux chambres noires, munies de leurs objectifs et de leurs plaques sensibles, et en n'employant pour l'obturation de ces deux chambres qu'un seul disque (ce qui est facile en faisant occuper aux deux chambres des positions diamétralement opposées par rapport au disque^ on obtiendra des images alternatives dans chacune des chambres visant l'une et l'autre le môme point du champ obscur, pourvu que le nombre des fenêtres du disque soit impair et que ces fenêtres soient régulièrement espacées autour du disque. (irâce à cette disposition, une fenêtre sera en face d'un des objectifs et produira l'éclairement dan? une chambre noire, tandis que l'autre sera dans l'obscurité, puisque son objectif se trouve dans l'intervalle des deux fenêtres, et les images alterneront à droite et à gauche ou en haut et en bas. Après l'opération, les deut plaques développées devront être rapprochées, mises côte à côte, ou l'une sur l'autre, suivant que les chambres diamétralement opposées par rapport au disque obturateur auront été placées l'une à droite, l'autre à gauche, ou l'une en haut et l'autre en bas, et les images se suivront pour la lecture dans un ordre alter- nant.On peut appareiller aussi de la même façon quatre objectifs, mais c'est difficile . «72 GRAPHIQUE (Méthode). § V. — Chwnophotograplue microscopique. Il est très difficile de faire l'étude des mouvements des organismes microscopiques, car il faut réduire beaucoup la durée de pose, d'une part, et, d'autre part, il y a défaut d'éclairage, puisqu'un agrandissement linéaire de cent diamètres, par exemple, réduit 10 000 fois l'intensité lumineuse de chaque point grossi. i. Marey, pour faire delà chronopbotographie microscopique, a adapté sur l'avant- corpsdu chronophotographe une caisse portant un objectif qui condense la lumière trans- mise par un héliostat. — La lumière, en passant par l'objectif, traverse d'abord l'avant- corps de l'appareil, les disques fenêtres, dont on a amené les fentes en coïncidence, puis arrive au foyer du condensateur, derrière l'avant-corps, là où une platine est disposée pour recevoir les préparations microscopiques. La position de celte platine se règle, pour la mise au point, au moyen d'une crémaillère, puis à l'aide d'une vis micrométrique. Derrière la platine porte-objet, l'objectif microscopique est adapté à une boîte métal- lique dans laquelle passent les rayons lumineux et l'image grossie de la préparation pour aller se reproduire sur une glace dépolie de la chambre aux images. — Un tube microscopique, placé à gauche de la boîte métallique, permet, grâce à la réflexion totale d'un prisme, de rechercher les points intéressants de la préparation microscopique avant d'opérer la chronopholographie. Une lentille de correction permet, en regar- dant par l'oculaire du tube du microscope, de régler l'appareil de grossissement. Pour effectuer les observations, il est indispensable d'interposer entre l'objectif concentrateur et l'héliostat une feuille de papier- épais, afin de réduire la lumière et de ménager la préparation et l'œil de l'opérateur. — Pour éviter les inconvénients de la chaleur, on interpose des écrans de solution d'alun dans la glycérine. Grâce à l'intermittence des éclairages qui ont une durée infe'rieure à d/1000* de seconde, les organismes microsco- piques ne sont pas détruits par la grande chaleur de la lumière concentrée. Nachet a construit un condensateur de lumière conique, à base sphéroïdale, qui réalise fort bien un champ obscur, pour les faibles grossissements, ce qui permet d'avoir des images sur plaque fixe. Au centre de la base sphérique du cône du condensateur, une capsule est creusée et remplie d'un vernis noir opaque. La lumière arrivant au sommet du cône se trouve réfléchie en rayons convergents à la base et illumine forte- ment la préparation qui se détache en clair sur le fond noir central. 2. Pour faire la chronophotographie microscopique des mouvements des cils vibra- tiles du manteau de la moule, Noguès a employé, à l'Institut Marey, le dispositif suivant : Un soufflet photographique (S) relie le microscope (M) au chronophotographe (C). La lumière donnée par la lampe à arc (B) à réglage automatique est concentrée au moyen de 3 condensateurs (un, placé dans la lanterne; le second (A) placé entre la lanterne et le disque (D), et le troisième est le condensateur Abhe du microscope. Pour diminuer la durée de l'éclairement, assurer son uniformité et avoir le meilleur rendement, le disque fenêtre (D) se trouve placé sur le trajet du faisceau lumineux à l'endroit où. il est le plus mince. 3. On peut faire l'étude chronographique des mouvements très rapides en faisant des projections microscopiques sur écran fenêtre. Voici comment on procède : On s'enferme dans une chambre obscure où la lumière solaire ne pénètre que par un trou. On recueille le faisceau lumineux au moyen d'un condensateur (le faisceau lumineux traverse d'abord une cuve pleine d'une solution d'alun), et on le dirige sur la préparation microscopique. L'objectif microscopique, placé derrière, en renvoie l'image sur un écran percé de trous de même forme et de mêmes dimensions que la fente d'admis- sion du chronophotographe qui est derrière ce trou de l'écran. Quand on veut avoir des photographies, on presse la gâchette du chronophotographe. Avec ce procédé, la mise au point peut être faite avec plus de perfection, plus vite, et l'observateur n'est plus exposé aux dangereux effets de la lumière concentrée. GRAPHIQUE (Méthode). 873 § VI. — Chronophotographie des mouvements lents. Voici la description des dispositifs employés à l'Institut Marev pour faire la chro- nophotographie des mouvements lents. l.Un chronophotographe de Marey(C) estreliéàun treuil (T) actionné par un poids (P). Sur l'axe qui relie ces deux appareils se trouve une ailette (L) dont une des extrémités repose sur une tige verticale (E) en face de laquelle se trouve un électro-aimant (Fj. Sur le circuit de cet électro-aimant, est intercalé un basculateur à eau (B) dont le fonction- nement est assuré par le réservoir à niveau constant (R). La fermeture du courant de l'électro-aimant produit l'attiaction de la tige (E) vers l'électro-aimant (F) et laisse libre l'ailetle (L). L'appareil se met à tourner jusqu'à ce que Tailelte (L) soit de nouveau arrê- tée par la tige (E). Pour un tour complet de l'axe qui relie le chronophotographe au treuil, on peut avoir une image ou plusieurs images, suivant le besoin. Les intervalles de temps entre deux images successives se trouvent réglés par la vitesse d'oscillation du basculateur. C'est à l'aide d'un tel dispositif qu'on a pu photographier les phases successives de l'ouverture d'une fleur de volubilis. 2. Pour cbronophotographier un phénomène très lent, comme par exemple le déve- loppement d'une colonie de botrylles, Bull et PizoN ont employé, à l'Institut Marey, le dispositif suivant : Un système d'horlogerie (A) actionne un chronophotographe (B) auquel est adapté un microscope (C). La préparation (D) est éclairée au moyen d'un bec Auer (E) à veilleuse dont l'éclairage est rendu intermittent par un électro-aimant en relation avec le chrono- photographe. L'expérience peut durer plusieurs jours. § VII. — Chronophotographie des mouvements rapides. / 1 I 1 1. Quand la durée d'un phénomène est inférieure à une seconde ---, 7-—, 77^7-;, etc., \10 100 1000 de seconde) les appareils chronophotographiques que nous avons décrits ne sont plus suffisants, car le nombre d'images qu'ils peuvent donner pendant une seconde ne dépasse pas le chiifre de 2a à 30 en moyenne. En réduisant la largeur de l'image, Marey est arrivé à obtenir jusqi!i'à 110 photographies par seconde. A l'Institut Marey, on a pu avoir 140 images par seconde sans changer le principe de l'appareil chronophotogra- phique.à savoir; la marche de la pellicule avec arrêt pour le temps de pose et l'éclai- rage intermittent obtenu au moyen d'un disque fenêtre. Dans le nouveau chronopho- tographe de l'Institut Marey l'entraînement de la pellicule est réalisé par deux cylindres (C et C) ; sur la circonférence de l'un de ces cylindres (C) se trouvent 8 méplats qui rendent la marche de la pellicule intermittente. A l'aide de multiplications par des;engre- nages, ces cylindres peuvent faire 17-18 tours par seconde. Un compresseur (B) assure l'arrêt net de la pellicule toutes les fois qu'elle n'est pas entraînée parles cylindres. Devant la fenêtre (F) la pellicule est aussi légèrement comprimée pour éviter les vibra- lions qu'elle pourrait avoir en grande vitesse. La réserve (R) de pellicule se trouve dans une petite boîte à part (supérieure). Dans cette même boîte, la pellicule est guidée et débitée au moyen de deux cylindres lamineurs (D et K) dont l'un (D) reçoit le mouve- ment delà manivelle par une transmission à courroie. — Après avoir été impressionnée, la pellicule tombe dans une boîte inférieure (L) où se trouve un système analogue au précédent et qui assure la descente de la pellicule. 2. L'appareil qui a servi à Lendenfeld pour étudier les mouvements des ailes des Muscidés, Culcidés, et Bombus, se con)pose d'un héliostat qui envoie la lumière solaire directe sur une grosse lentille biconvexe. Derrière cette lentille se trouve un disque de 36 centimètres de diamètre, avec 50 fentes rayonnantes ayant chacune 3 centimètres de long sur 1/2 millimètre de large. Ce disque est placé verticalement sur l'axe lumi- neux de façon que le foyer de la lentille tombe sur la zone marginale à fente du disque. A l'aide d'une transmission quelconque, on met le disque en mouvement avec une 874 GRAPHIQUE (Méthode). vitesse de 50 tours par seconde, et même davantage. On peut ainsi avoir plus de 2500 éclairs lumineux. Si le disque ne tourne qu'une fois par seconde, on n'obtient que oO éclairements. Derrière ce disque à fente-!, il y a une deuxième grosse lentille biconvexe, qui ras- semble les rayons divergents après le point focal deja première lentille. Derrière et tout près de cette lentille se trouve un écran avec un trou circulaire. Dans cet écran se trouve une petite boîle à parois transparentes, dans laquelle on introduit un insecte. En introduisant de l'oxygène ou des vapeurs excitantes dans cette boîte, on provoque les mouvements de l'insecte. Au foyer de la seconde lentille se trouve un miroir (ou un prisme) mobile autour d'un axe borizontal. Ce miroir, dans sa position moyenne, fait un angle de 45° avec l'axe du faisceau lumineux ; il réfléchit donc la lumière sous un angle droit. — Tout près de ce miroir, il y a le système de lentilles de l'appareil photo- graphique. Les rayons lumineux, qui sortent en divergeant de ces lentilles, tombent sur un second miroir (ou prisme) qui se trouve à l'intérieur de la chambre photographique. Ce miroir est mobile autour d'un axe vertical ; dans sa position moyenne le miroir fait un angle de 45°, et renvoie la lumière sur la plaque photographique. En variant la distance qui sépare les deux lentilles et le premier miroir, on peut faire varier à volonté la grandeur des images obtenues. Derrière l'écran à trous, entre celui-ci et la boîte qui contient l'insecte, on fait tomber FiG. 130. — Chronophotographe électrique de Buli-. des grains de plomb d'une hauteur de 459 millimètres, de façon qu'ils traversent le faisceau lumineux avec une vitesse de 3 mètres par seconde. — Ou obtient donc, en même temps que l'image de l'insecte, l'image d'un grain de plomb. En mesurant le diamètre des images et la distance qui les séparent, on peut calculer, connaissant le diamètre réel du grain de plomb et la vitesse de chute, le temps qui sépare les diverses images. Pour photographier, on fait tourner le 2^ miroirautour de son axe vertical de gauche ù droite, très rapidement, et le t*"'' miroir de haut en bas. On répète plusieurs fois ce mouvement jusqu'à ce que toute la plaque soit recouverte. On peut ainsi obtenir de 4 à 10 séries, de 20 à 40 images chacune, sur une plaque de 18 x 24 centimètres. Les meilleures images ont été obteimes avec des intervalles de pose de 1/2150 jusqu'4 1/1600 de seconde. On obtient encore de belles images avec une durée d'éclairement de 1/42000 de seconde. Pour avoir une plus grande série d'images, Lendenfeld a employé, au lieu du système GRAPHIQUE (Méthode). 875 de deux miroirs, décrit plus iiaut, un miroir animé d'un mouvement de rotation (le miroir est fixé sur un axe horizontal à 80"). 3. Les séries d'images obtenues par Lendenfeld sont courtes et ne se prêtent pas à la synthèse ; elles présentent en outre un certain degré de llou, dû à la trop grande durée de la période d'éclairement par rapport à la vitesse de déplacement de l'image. Ces inconvénients ne se retrouvent pas dans le dispositif de Bull, qui a employé comme source lumineuse l'étincelle électrique. Les images équidistantes sont obtenues par Bull en provoquant les étincelles à des intervalles de temps correspondant à des dépla- cements égaux d'une pellicule. Voici la description de ce dispositif, employé par Bull à l'Institut Marey (fig.130) : Dans une boîte se trouve un cylindre monté sur un axe horizontal. Sur ce même axe, mais extérieurement à la boîte, est monté un interrupteur rotatif destiné à rompre un certain nombre de fois pendant un tour le circuit primaire d'une bobine d'induction. Sur le trajet du courant induit est placé, en dérivation, un condensateur. Les étincelles éclatent entre deux électrodes en magnésium derrière une lentille. Celle-ci concentre les rayons dans l'objectif, au foyer duquel tourne très rapidement le cylindre entouré d'une pellicule sensible. A chaque tour du cylindre jaillit un nombre d'étincelles corres- pondant à celui des contacts sur l'interrupteur. 11 snflit de démasquer l'objectif pendant la durée d'un tour pour obtenir une série d'images régulièrement espacées de l'insecte placé entre la lentille et l'objectif. A cet effet est disposé derrière ce dernier un obtu- rateur à double volet, qui, au moment voulu, est ouvert par le passage du taquet dont est muni le bord du cylindre ; la fermeture s'effectue automatiquement au tour suivant au moyen du même taquet. Avec ce chronophotographe électrique, Bull a obtenu 1 oOO images par seconde. V Clnématographie. La synthèse des mouvements, dont l'analyse a été faite par la chronophotographie, peut être obtenue à l'aide des projections animées ou de la cinématographie. La vue cinématographique d'un mouvement avec sa vitesse réelle est obtenue quand on fait la projection animée avec la même rapidité que dans la prise des images. Cette vue, en général, n'est pas intéressante, au point de vue scientifique. Ce qui est intéressant, c'est de ralentir les mouvements rapides, et d'accélérer les mouvements trop lents. Dans ces conditions, on donne la sensation d'un mouvement parfaitement défini, qui montre toutes les phases d'un phénomène de longue ou de courte durée. Les conditions expé- rimentales qui rendent instructives les projections animées ont été indiquées par Marey (1897). Le chronophotographe n'a besoin, en principe, d'aucune modification pour devenir projecteur d'image, c'est à dii'e cinématographe. A l'intérieur de la caisse aux images se trouve un tube carré de métal qui encadre exactement la fenêtre oii les images se forment. Ce tube est fermé en arrière par un volet qu'on ouvre pour diriger un faisceau de lumière sur l'image positive qu'on projette. — Dans la prise des images, au contraire, cette fenêtre est fermée, et le tube a pour fonction d'empêcher la lumière de se diffuser dans la chambre et de voiler la pellicule. Le principe de la cinématographie se trouve dans le phénakisticope ou zootrope de Plateau. — En 1857, Reville proposait de faire succéder dans le stéréoscope une série dédoubles images représentant les phases successives d'un phénomène. — Vers 1861, Colemann Sellers a imaginé un appareil nommé stéréophantascope, qui était en quelque sorte la réalisation de l'idée de Beville. — Enl87i, Ducos du Hauivox a pris un brevet pour un appareil destiné à reproduire photographiqucinent une scène quelconque avec toutes les transformations qu'elle a subies pendant un temps déterminé. La prise des images succès- 876 GRAPHIQUE (Méthode). sives et leurs projections sous forme de photographies animées — c'est-à-dire, la chro- nophotographie, — tout est décrit et figuré dans ce brevet. En 1893, Marey construisit son projecteur chronophotographique, qui était la réalisa- tion de la conception de Ducos du Hauron. L'imperfection de cet appareil était le sautil- lement des images projetées provenant des inégalités des intervalles entre les images. Edison, en 1894, dans son /ctneïoscope, a réalisé l'équidistance des images en perfo- rant la pellicule sensible de trous équidistants. Cette pellicule était entraînée par des chevilles. En 1898, Marey a construit un chronophotographe analyseur et projecteur qui permet- tait d'avoir l'équidistance des images sans perforer les pellicules. Les projections chronophotographiques commencèrent à jouir d'une grande vogue, quand les frères Lumière ont construit leur cinématographe. VI Diagrammes naturels. Il y a des phénomènes qui s'enregistrent sous forme de figures, sans l'intermédiaire d'un appareil enregistreur proprement dit. Voici quelques exemples de ce genre d'enre- gistrement : 1. Chladni (1787), pour rendre apparente les lignes nodales des plaques vibrantes, a imaginé de semer un peu de sable fin sur une plaque mise en état de vibration à l'aide d'un archet. Le sable mis on mouvement par les vibrations du corps se déplace, en s'accumulant dans les parties immobiles. Les lignes nodales se trouvent ainsi dessinées sous forme de figures (diagrammes). La forme de ces diagrammes est intimement liée aux sons produits par la plaque. On peut les conserver, en appliquant sur la plaque une feuille de papier mouillé avec de l'eau légèrement gommée, et en la retirant ensuite avec précaution. 2. Pour étudier les lignes équipotentielles, Guebhard (1882) a proposé une méthode électro-chimique qui permet en quelque sorte de trouver la solution graphique de divers problèmes. — Cette méthode est basée sur le principe suivant : Quand on décompose par électrolyse l'acétate de plomb, ou une solution d'oxyde de plomb dans la potasse, l'oxygène produit à l'électrode positive y donne un dépôt de bioxyde de plomb. Cette propriété, observée par Nobii.i et Becquerel, leur a donné l'idée d'une expérience intéressante. En prenant pour électrode positive un métal poli, on obtient des colorations très vives qui changent avec l'épaisseur du dépôt en donnant des anneaux colorés. Si l'on donne à l'électrode négative la forme d'une pointe, et qu'on la rapproche de l'électrode positive, on obtient des anneaux circulaires sur une plaque isolée plongée dans le liquide au voisinage. Guebhard a remarqué que, quels que soient le nombre et la forme des électrodes, le dessin qui recouvre la plaque fournit un diagramme des lignes équipotentielles, Qt que c'est précisément celui que don- nerait la théorie de Kirchhoff pour une plaque conductrice limitée au même contour et en contact avec les électrodes. Cette concordance est telle que Guebhard propose l'appli- cation de cette méthode à la solution graphique des problèmes de ce genre qui n'ont pas encore été résolus par le calcul. 3. On peut avoir d-!s renseignements précieux sur la constitution des faisceaux sonores, en employant le procédé des anneaux colorés de Guebhard. Voici en quoi con- siste ce procédé : si l'on projette le souffle humide de l'haleine sur un bain de mercure, la vapeur d'eau, en s'y condensant en nappes minces, y produit des anneaux colorés compai'ables aux anneaux de Newton, et dont les bandes colorées correspondent aux quantités d'eau condensées et par suite aux densités de vapeur à chaque point de la section de la colonne d'air expirée. Si l'on émet différents sons au voisinage d'un bain de mercure, on obtient une série de diagrammes différents correspondant à chaque son. GRAPHIQUE (Méthode). 877 On obtient aussi des figures colorées tourbillonnantes caractéristiques pour chaque son dans le Phonéido!^cope de Sedlev-Taylor. Ce physicien, ayant remarqué qu'une lame liquide présente, sous l'iiilluence des vibrations sonores, des vibrations caractéristiques, a fait construire un appareil, le phonéidoscope, permettant l'étude des figures présentées par la lame liquide. 4) Dans la catégorie des diagrammes naturels, obtenus sans appareils enregistreurs, nous pouvons classer aussi les lignes de Luders, qui apparaissent sur la surface d'un morceau d'acier qui a subi une déformation permanente. Ces lignes décrites et observées pour la première fois par Luders (1860) ont été bien étudiées par Beck-Geurhard, Gallon, Hartmann, Frémont, etc. — (Voir : Frémont. Bul- letin de la Société d'encouragement par l'industrie nationale, Septembre 1896). Bibliographie. — Technique générale. — Bernstein (J.) et Steiner (J.). Ueber die Forlpflanzung dcr Contraction und der negativen Schwankung im Siliigethiermuskel {A. P., 1873, 526-551). — v. Bezold. Untersuchungen iiber die electrische Erregung {A. 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En procédant de la sorte, BoRELLi était arrivé à cette conclusion étrange que l'effort opéré par le cœur, à chacune de ses systoles, devait être égal à celui qui est nécessaire pour soulever un poids de 180 000 livres. En J733, la méthode expérimentale fut appliquée pour la première fois à l'étude de la pression sanguine par Hales, qui imagina d'introduire dans J'artère crurale un long tube de verre. La pression artérielle était mesurée par la hauteur à laquelle le sang s'élevait dans le tube. Les dimensions de l'appareil de Hales en rendaient l'usage difficile. Aussi ce fut un grand progrès que l'idée qu'eut Poiseuille, en 1829, de substi- tuer au tube droit un tube en U contenant du mercure. L'appareil de Poiseuille, appelé hémodynamomètre , qui n'est en définitif qu'un manomètre ordinaire appliqué à l'étude de la pression du sang, devint un appareil d'un usage courant dans les laboraloires. L'appareil de Poiseuille fut modifié de la façon suivante par Guettet : Une large cuvette remplie de mercure communique d'une part avec un tube rempli d'une solution alcaline qui s'engage dans l'artère, et d'autre part avec un tube vertical dans lequel oscille le mercure. Les oscillations du mercure dans cet appareil, qui possède un zéro à peu près constant, sont deux fois plus étendues que dans l'appareil de Poiseuille où le changement de niveau d'une des branches n'exprime que la moitié de la pression qui agit sur l'instrument. Magendie et Cl. Bernard ont employé, avec le nom de cardiomètre ou d'hémomètre, l'appareil de Guettet. En 1847, LuDWiG plaça sur la surface du mercure d'un manomètre de Poiseuille un flotteur muni d'une plume inscrivante. Cette plume traçait les mouvements de la colonne mercurielle sur la surface d'un cylindre enregistreur placé verticalement. Cet appareil enregistreur de la pression sanguine, et qui n'est en réalité qu'une modification du manomètre enregistreur de James Watt, est le premier enregistreur employé en physiologie. Cet appareil fut appelé par Ludwig : kymographion (xù[j.a = onde; ypaysiv). A côté des manomètres à mercure ou à eau, nous trouvons les manomètres élas- tiques dont l'usage devient de plus en plus fréquent. La forme de ces appareils diffère beaucoup selon la façon dont on désire étudier la pression sanguine. Les appareils qui peuvent être mis en communication directe avec le sang du système artériel ont une autre forme que les appareils destinés à étudier la pression à travers la paroi artérielle non ouverte ou à travers la paroi artérielle et les tissus qui la recouvrent. Nous commen- cerons par décrire les appareils appartenant à la première catégorie. 1. L'application de la méthode graphique à l'étude des phénomènes mécaniques et physiques, en général, ne pouvant trouver sa place dans notre article, nous renvoyons les lecteurs que ces questions intéressent à notre livre : La Méthode graphique, qui paraîtra prochainement. GRAPHIQUE (Méthode). 883 § I. — Mesure de la pression à l'intérieur des vaisseaux satiguins. Hémomanomètres enregistreurs. Pour mesurer la pression sanguine, on emploie deux sortes de manomètres : des manomètres à colonne liquide et des manomètres à membrane élastique. A. Manomètres enregistreurs à colonnes liquides (à mercure ou à eau). — Ces appareils, qu'on pourrait appeler hémomanométrographes, permettent d'enregistrer la pression sanguine soit d'une façon directe, au moyen d'une plume fixée au flotteur, soit à distance, au moyen de la transmission à air ou bien au moyen de l'enregistrement électrique, soit enfin au moyen de l'enregistrement photographique. Quand il s'agit d'étudier des pressions faibles, comme la pression du sang dans les veines, on emploie des appareils dans lesquels l'eau remplace le mercure. I. Hémomanométrographes directs. i. Voici la description d'un appareil de Ludwig tel qu'il se trouve dans les labo- ratoires. Sur une planchette verticale se trouve fixé un tube de verre en U rempli, jusqu'à une certaine hauteur, avec du mercure. Une des branches du manomètre présente une extrémité coudée munie d'un robinet : c'est la branche qui sera mise en communication avec l'artère. Dans l'autre branche du manomètre se trouve une tige appelée flotteur, parce qu'elle Uotte sur la surface du mercure. L'extrémité inférieure de cette tige est renflée; son extrémité supérieure porte une plume inscrivante ou un pinceau. Pour assurer le contact du pinceau avec la surface enregistrante, le flotteur est guidé par un fil de plomb ou par un archet muni d'un crin. Le flotteur doit être assez fort, rigide, et pourtant léger pour qu'il n'enfonce pas au-dessous de la surface du mercure. On le fait généralement en aluminium; son extrémité renflée est en ivoire. Quand la pression du sang agit sur le mercure, le mercure descend dans la branche qui est en communication avec l'artère et monte dans l'autre branche. La mesure de la pression est donnée par la différence de niveau entre les surfaces de mercure contenues dans les deux branches du manomètre. Le flotteur suivant les mouvements de la colonne mercurielle, la plume tracera sur la surface enregistrante la courbe des varia- tions de pression du sang. La ligne du zéro de pression est tracée par la plume quand les surfaces mercurielles sont au même niveau dans les deux branches du manomètre. Sur la planchette-support, il y a une échelle millimétrique qui permet la lecture de la hauteur de la colonne mercurielle. Naturellement, la hauteur de la courbe de pression au-dessus de la ligne du zéro n'exprime que la moitié de la pression réelle, car elle représente seulement l'ascension de la colonne mercurielle dans une branche de mano- mètre. Pour avoir donc la valeur réelle de la pression, il faut multiplier par deux la hauteur de la courbe de pression. Quand les variations de pression qu'on veut étudier sont très faibles, on amplifie les mouvements du flotteur en le faisant agir sur un levier qui porte la plume inscrivante. On varie l'amplification en attachant le flotteur plus ou moins près de l'axe de mouve- ment du levier. Le manomètre de Traube-Gyon se compose de deux tubes qui s'ouvrent à leur partie inférieure dans une boîte en acier. Celte boîte présente une ouverture d'écoulement qui permet de vider et de nettoyer l'appareil. Le flotteur est formé par une tige d'ivoire en forme de fuseau; son extrémité inférieure est entourée d'une gaine en caoutchouc dont les bords inférieurs reposent sur la surface du ménisque de mercure. Au-dessus de la tige d'ivoire, il y a une tige d'acier qui porte soit une plume à encre, soit un fil de verre coudé pour l'inscription sur une surface noircie au noir de fumée. Une petite capsule percée, placée à l'extrémité supérieure du tube, sert de guide au flotteur. Un fil de cocon, ou un cheveu tendu par un poids, appuie la plume sur la surface enregistrante. Cad emploie dans ce but un fil de verre creux avec un bout inférieur plein. Le cheveu ou le fil de verre se trouve accroché à un support métallique qui fait partie de l'instrument. Le manomètre de François-Franck (1878) présente une constance absolue du zéro, 884 GRAPHIQUE (Méthode). grâce à la mobilité du manomètre le long de l'échelle graduée. Celte mobilité est obtenue au moyen d'un écrou qui produit l'abaissement ou l'élévation de la pièce qui supporte le manomètre. De cette façon, soit qu'on renouvelle le mercure, soit qu'un accident en amène la sortie, le zéro du manomètre ne change pas. Le dispositif, formé par un fil tendu par un poids, qui était employé dans les autres manomè- tres pour appuyer la plume sur la surface enre- gistrante, étant mauvais, Fr. -Franck l'a remplacé par un cheveu tendu entre deux pointes fixes et maintenu par un fil de caoutchouc. Le procédé ancien est mauvais, parce que la pression exercée sur la plume n'est pas toujours la même pour toutes les positions du flotteur. De plus, le fil tendu par un poids présente des oscillations qui se trans- mettent à la plume du manomètre. Le flotteur est formé par une tige d'aluminium ou d'acier terminée en bas par un renflement biconique de caoutchouc durci qui se visse. En haut de la tige, un disque avec un orifice central, ou un triangle formé par un crin, sert de guide au flotteur. L'appareil est mobile autour de son axe vertical au moyen de la rotation d'un disque sur un autre. Cette rotation permet d'appliquer facilement la plume écrivante sur le papier. Le tube manométrique est constitué par un tube en U dont la courte branche est munie d'un réservoir sphéroïdal, de façon que les changements de niveau dans la longue branche correspondent à la valeur réelle des changements de la pression, comme dans le manomètre de Guettet. François-Franck a ajouté de nouvelles modifi- cations à celles qu'il avait apportées au manomètre de 1878. Ainsi il assure le contact permanent du mercure et du flotteur par un peu de glycérine et une légère charge de mercure. Il a aussi réuni sur le même bâti deux manomètres servant à mesurer deux pressions. Le manomètre de Ludwig présente de grandes oscillations; pour diminuer ces oscillations et pour avoir la pression moyenne, Marey a construit un appareil qu'il a appelé manomètre compensateur. Cet appareil est un manomètre pareil à celui de Guettet, présentant une colonne large d'environ 5 millimètres séparée du flacon de mercure par un tube capillaire assez fin. Cette étroitesse empêche la colonne mercurielle d'osciller sous l'influence des variations cardiaques de la pression du sang; aussi voit-on le mercure rester sensiblement fixe au niveau qui exprime la valeur moyenne de la pression dans les artères. Setschenow, pour obtenir le rétrécissement de la colonne mercurielle, indiqué par Marey, a ajouté au kymographiou de Ludwig un robinet placf; au bas du coude de verre formé par les deux branches de l'appareil. En tournant lentement ce robinet, on fait varier la lumière de cette partie du tube. Stuart emploie comme flotteur dans le manomètre une lige de verre avec un bulbe à son extrémité inférieure ; à ce bulbe se trouve fixé au moyen d'un peu de cire à cacheter un petit tube en verre qui forme une sorte de collier ; le bord tranchant de FiG. 131. Manomètre de François- Franck. GRAPHIQUE (Méthode), 885 ce tube touche le mercure, de cette façon la tendance du mercure à monter sur le llot- teur se trouve diminuée. Le poids de ce llotteur est de \s^,S seulement, tandis que celui du llotteur du kymographion de Ludwig est de 4e'', 4. Klemensiewicz, dans ses recherches sur la pression du sang dans les veines, a employé aussi des manomètres à llotteur très léger formé par une tige creuse, fermée à ses deux bouts par des membranes en caoutchouc. Les physiologistes se sont appliqués à diminuer non seulement le poids du flotteur, mais à réduire aussi la quantité de mercure mise en mouvement. Ainsi Roy utilise un tube manométrique de tiès faible diamètre intérieur. Dans son manomètre, l'anneau qui guide la tige du llotteur est placé au-dessus du point d'attache de la plume écri- vante. Chauveau a fait construire un grand appareil de laboratoire pour lequel il se sert FiG. 132. — Tracé de la pression sanguine. Chute de la pression due à l'arrêt du cœur à la suite de l'e.xcitation du nerf pneumogastrique. du manomètre à flotteur. Celui-ci est muni d'un fil passant sur des poulies et tendu par un contrepoids. A un point du fil est placée une plume écrivante qui suit les mou- vements du fil et par conséquent ceux du mercure. (Voir le schéma dans Doyon et MoRAT. Traité de Physiologie, m, 138, fig. 71.) 2. La pression enregistrée par le manomètre n'est connue que grâce à la mesure de la distance qui sépare le tracé obtenu de la ligne du zéro de pression. Pour obtenir le tracé du zéro de pression, on procède de la façon suivante: La canule artérielle, qui relie l'artère au manomètre, au lieu d'être placée dans l'artère, est plongée dans un vase plein de liquide placé à la hauteur de l'artère dans l'intérieur de laquelle on veut con- naître la pression. Le tracé enregistré par la plume du flotteur dans ces conditions représente l'abscisse ou la ligne de zéro de pression. Quand il s'agit d'un enregistrement de pression fait sur papier sans fin, il suffit d'avoir l'indication de la position de l'abscisse au commencement et à la fin; en pliant le papier, et en le perçant à l'aide d'une épingle, on obtient la position de l'abscisse pour le restant du tracé. 3. Il est souvent intéressant de n'avoir que l'inscription de la pression maximum ou minimum dans le cœur. Dans ce but, on emploie un manomètre à maxima ou à minima. 886 GRAPHIQUE (Méthode). Pour obtenir ces indications avec un manomètre ordinaire à mercure, Goltz et Gaule ont employé le dispositif suivant : La sonde cardiaque est bifurqnée ; avant d'arriver au manomètre à mercure, ces deux branches se réunissent en un seul tube. Sur une des branches de bifurcation se trouve placée une soupape. Si cette soupape est disposée de telle sorte qu'elle empêche la colonne mercurielle de tomber entre deux systoles, la masse de mercure s'élève à chaque systole jusqu'au niveau qui correspond à la plus haute pression atteinte dans le cœur au cours de l'expérience. Si, au contraire, la soupape est renversée, on ne peut plus enregistrer que le minimum de la pression qui existe dans le cœur. Le mano- mètre devient, dans ce cas, un manomètre à minimum alors qu'il était manomètre à maximum dans le premier cas. Le manomètre à mercure n'est minimal ou maximal que si la branche de bifurca- tion sans soupape est fermée ; autrement, il fonctionne comme un manomètre ordi- naire qui n'enregistre que la pression moyenne, car ses sommets supérieurs sont au-dessous de la pression maximum et ses sommets inférieurs au-dessus de la pression minimum. Ce phénomène est dû à l'inertie de la colonne mercurielle qui ne peut pas suivre rapidement des variations qui, dans le cœur du chien, sont égales à 130 ou 200 millimètres de mercure environ. Le manomètre à maxima et minima de Hiirthle se compose d'un tube recourbé à la partie inférieure, présentant dans sa petite branche un renflement et une soupape qui s'ouvre en bas, vers l'intérieur du renflement. Ce renflement a pour but d'assurer le contact intime du tube recourbé avec un autre tube placé au-dessus. Ce tube, qui est court, communique d'une part avec l'artère, et d'autre part, par sa partie supérieure, avec un tube long. Ces deux'derniers tubes ne communiquent pas directement, mais par l'intermédiaire d'un tube étroit à soupape. Cette seconde soupape s'ouvre aussi comme la première de haut en bas. Les deux tubes longs, le tube recourbé et le tube qui coiffe la seconde soupape sont remplis de mercure ; le tube intermédiaire entre les deux soupapes, plus large que les deux premiers tubes, et qui communique avec l'artère, est à moitié rempli de mercure : sa moitié supérieure est remplie d'une solution anti- coagulante. L'extrémité inférieure du petit tube de la seconde soupape plonge dans le mercure. 11 est facile de comprendre comment, quand la pression augmente, le mercure pénètre et monte dans le tube recourbé, et comment, quand la pression baisse, le mer- cure descend dans le second tube long qui coiffe la seconde soupape. Ce dernier tube indique les minima de la pression ; le tube recourbé, les maxima. 4. Quand il s'agit de faire l'étude de pressions très faibles,'on emploie un manomètre à eau. Dans ce cas, le soulèvement de la colonne de liquide est environ 14 fois plus grand que le soulèvement de la colonne mercurielle, à cause de la différence de poids spécifique qui existe entre l'eau et le mercure (10 millimètres de mercure correspondent à 136 millimètres d'eau; et inversement, 10 millimètres d'eau correspondent à 0,74 milli- mètres de mercure). Le flotteur, dans le manomètre à eau, doit être extrêmement léger ; il est formé en général par un petit bouchon creux, en liège, paraffine ou caoutchouc avec une tige en fil de verre. Quand on emploie le liège, on le fait bouillir d'abord dans de la paraffine pour boucher les trous. La plume inscrivante, formée par un brin de paille ou une épingle, est fixée perpen- diculairement à la tige du flotteur. Un fil tendu la maintient appliquée à la surface enregistrante. Le manomètre à eau de Milne-Murbay est composé d'un tube en U rempli en partie avec de l'eau. Le flotteur est fixé à un fil mince passant sur deux poulies et allant s'attacher à une plume inscrivante. Le poids de la plume suffit à tendre le fil. La quan- tité d'eau qui remplit le tube doit être en rapport avec la pression qu'on veut étudier. Le manomètre enregistreur universel de Laulanié se compose d'un tube de verre en U contenant de l'eau. Dans l'une des branches du tube il y a un flotteur en bougie, dont l'extrémité supérieure est reliée avec un levier inscripteur par un fil qui passe sur une poulie. GRAPHIQUE (Méthode). R87 5. Le volume ilu lube du manomètre n'est pas le même pour tons les animaux; il doit être en rapport avec la taille de l'animal sur lequel on expérimente, car un mano- mètre loge à son intérieur une quantité de sang proportionnelle à la sectiou de sa colonne. De sorte que ce serait produire une véritable hémorra2:ie que de prendre la pression artérielle d'un petit animal avec un manomètre de gros calibre. II. Enregistrement de la pression sanguine au moyen de la transmission à air. Le ilotteur d'ivoire qui repose sur le mercure présente l'inconvénient de ne pas suivre toujours fidèlement les mouvements d'ascension et de descente du mercure. Parfois, il plonge dans le mercure à des degrés divers, d'où il résulte une cause de défor- mation des mouvements et une inscription infidèle des variations de la pression. Le manomètre à flotteur présente de plus d'autres inconvénients d'un autre ordre : par exemple, il exige l'emploi d'une surface enregistrante verticale placée tout près du manomètre; il est un appareil encombrant quand on veut faire des inscriptions multiples. On peut facilement éviter ces inconvénients en employant la transmission à air. Pour cela, on introduit le tube du manomètre, sans flotteur, dans un tuyau de caout- chouc qui se rend à un tambour à air inscripteur. C'est Marey, le f)remier, qui employa ce dispositif. On comprend facilement comment il fonctionne : le déplacement du mercure fait l'office d'un piston qui foulerait ou aspirerait l'air du tube manométrique Jusque dans le tambour à levier. Il est préférable de remplacer le tambour à air par un piston-recorder, car les mouvements du piston sont proportionnels aux mouvements de la colonne mercurielle. L'inscription par la transmission à air permet d'inscrire sur n'importe quelle surface enregistrante, à quelque distance que ce soit, et de disposer comme l'on voudra les appareils dont on veut enregistrer simultanément les mouvements. Naturellement, elle ne peut s'appliquer que dans les cas où il s'agit de faibles déplacements de la colonne mercurielle. L'inscription par la transmission à air est d'autant plus sensible que la colonne de mercure a un plus grand diamètre; dans ce cas, les mouvements du mercure déplacent une plus grande quantité d'air, ce qui provoque des mouvements de déplacement d'au- tant plus forts. III. Hémomanomètres enregistreurs électriques. L'électricité a été employée aussi comme moyen de transmission pour faire à distance l'inscription des oscillations de la pression sanguine. Ainsi, le kijmographion télégraphique de Kronecker (1881) inscrit à n'importe quelle distance le nombre des millimètres parcourus par la colonne mercurielle d'un mano- mètre, en montant ou en descendant. Pour cela, la tige du flotteur est disposée de telle façon qu'à chaque parcours d'un millimètre il y a une rupture de courant électrique. Chacune de ces ruptures est enregistrée par un téléphone inscripteur sur un cylindre enregistreur. Nous ne pouvons donner les détails de construction de cet appareil, nous renvoyons au mémoire de l'auteur; nous donnerons seulement quelques brèves indications : la tige métallique du flotteur est une vis dont les creux sont remplis de gomme laque (substance isolante). Le pas de cette vis est d'un millimètre. Cette tige glisse entre trois poulies qui se trouvent placées à l'ouverture supérieure du tube manométrique. Deux de ces poulies sont en platine, sur elles frotte un petit balai par lequel arrive le courant. Le pas de vis métallique de la tige établit la communication et le passage du courant entre ces deux poulies. Les balais qui frottent sur les poulies métalliques ont la forme d'un levier à deux bras; l'un de ces bras joue entre les mâchoires d'un contact élec- trique par lequel le courant arrive dans le levier. La poulie en caoutchouc commande aussi le jeu d'un contact électrique. GrCnbauu (1898) a employé aussi l'électricité, mais d'une façon tout à fait difTérente. Il a enregistré par la photographie les mouvements d'un électromètre capillaire. L'élec- tromètre capillaire montrait les variations de potentiel de deux pointsdont le circuit élec- trique subissait des changements de résistance'provoqués par les variations de la pression. 888 ' GRAPHIQUE (Méthode). IV. Enregistrement de la pression sanguine au moyen de la photogi^aphie. Il est difficile d'enregistrer, avec un manomètre à eau ordinaire, les variations de la pression sanguine dans les veines, car ces variations n'ont pas la force nécessaire pour soulever une colonne d'eau à une hauteur convenable et en plus pour déplacer une plume inscrivante. Pour avoii' l'inscription des variations faibles, on emploie la méthode pho- tographique. Cybolski (1888) a construit un appareil spécial, une sorte de manomètre fermé, qui se compose d'un tube long de 300 millimètres ayant un diamètre de 3 millimètres. 1/extrémité supérieure du tube se continue en un petit gonflement dont le volume est de 5 à 10 fois plus grand que celui du tube, calculé à partir du coude que présente son extrémité inférieure. Celle-ci est recourbée et fait avec le tube un angle de 120°-130<'; elle est mise en communication avec une veine par une canule et un tube remplis préa- lablement d'une solution de bicarbonate de soude. Le tube du manomètre est rempli d'une solution de picrocarmin. Au-dessus du liquide, dans le tube et dans le gonflement qui est pourvu en haut d'un robinet, il y a de l'air. Quand la pression veineuse est égale à la pression atmosphérique, le niveau du liquide marque le zéro de l'appareil. Les oscillations du liquide dépendent du diamètre du gonflement; elles sont plus petites dans ce manomètre fermé que dans un manomètre à eau ordinaire ouvert. L'appareil est pourtant très sensible. On peut, n'importe quand, en ouvrant le robinet, transformer le manomètre fermé en un manomètre à eau ordi- naire, sans qu'il y ait un déplacement du zéro. Si les oscillations de la colonne liquide sont trop grandes, on ferme le robinet. Le manomètre est placé sur un support, entre deux fentes : une antérieure, l'autre postérieure, larges chacune d'un millimètre, au travers desquelles passent des rayons lumineux parallèles. On place l'ensemble de l'appareil devant la lentille d'une chambre obscure, on obtient sur une plaque sensible l'image du ménisque concave du liquide contenu dans le manomètre : c'est une ligne claire sur un fond obscur. En déplaçant le support du manomètre, on peut agrandir ou diminuer l'amplitude de cette image. L'appareil de Bayliss et Starling consiste simplement en un large tube de verre étiré à une de ses extrémités en un tube capillaire très étroit; cette extrémité est fermée après avoir rempli le tube d'eau. Dans le tube capillaire, on a ménagé un petit espace, long de 1 centimètre 1/2, qui est rempli d'air. L'autre extrémité du tube est mise en communii^ation, par l'intermédiaire d'un tube en plomb, avec une artère ou avec une sonde intracardiaque. L'image du tube capillaire, agrandie, est projetée sur une fente derrière laquelle se trouve un cylindre enregistreur recouvert d'une feuille sensible. On obtient ainsi la photographie de la pulsation cardiaque. Bayliss et Starling ont étudié, pour les comparer à leurs appareils, les manomètres de HuRTHLE et de v. Frey. Ils ont trouvé que le premier donne des résultats conformes aux leurs, tandis que celui de v. Frey est moins fidèle; car, d'une part, la masse liquide qu'il contient possède trop d'inertie, et, d'antre part, la transmission à air amortit les mouvements. Plus récemment, en 1894, Bayliss et Starling ont photographié les variations d'une vésicule d'air, dont le plus grand diamètre mesurait 3"™, 8, contenue dans l'extrémité conique d'un tube capillaire de verre. Cet espace plein d'air était en communication par un robinet à trois voies avec une sonde cardiaque et avec une bouteille de pression remplie de Mg SO'^ à 25 p. 100. A un changement de pression de 100 millimètres de mer- cure coiTespondait l'entrée, dans le tube capillaire, d'un volume égal à 0,0335 c. c. Bayliss et Starling considèrent leur méthode comme permettant d'obtenir la forme typique des courbes cardiaques. H en serait ainsi s'il n'y avait pas de frottements; or le frottement est considérable dans un tube capillaire. B. Manomètres enregistreurs à membrane élastique ou Hémomanométro- graphes élastiques. — En faisant agir le sang sur une membrane élastique, métal- lique ou en caoutchouc, et en enregistrant les déformations subies par celte membrane sous l'influence des variations de la pression du sang, on obtient un tracé qui représente les variations delà pression sanguine. L'étalonnage préalable de l'appareil fait connaître GRAPHIQUE (Méthode). 889 à quel degré de pression, en poids ou en hauteur de colonne mercurielle, correspond un degré donné de la déformation de la membrane élastique. Les déformations de la membrane élastique peuvent être enregistrées directement, au moyen d'un levier, ou bien à distance, à l'aide de la transmission à air. Les manomètres à membrane élastique permettent d'enregistrer la forme des varia- tions rapides de pression, qui ne peut pas être donnée par des manomètres à mercure. I. Hémomanométrographes élastiques directs. Parmi les appareils qui appartiennent à cette catégorie, il y en a qui permettent de mesurer la pression sanguine d'après les déformations subies par un tube élastique, d'autres d'après la déformation d'une lame ressort ou d'une membrane élastique en caoutchouc ou métallique. Les variations de la pression sanguine sont transmises au corps déformable par l'intermédiaire d'un tube plein de liquide ou d'air. Les déforma- tions du corps élastique sont enregistrées directement au moyen d'un levier qui trace ses mouvements sur une surface enregistrante noircie au noir de fumée. Les mouve- ments à enregistrer étant très délicats, on ne peut pas employer une plume à encre, comme on le fait quelquefois pour les nmnomètres enregistreurs à mercure. d. Le manomètre élastique de Fick (le Federkymographion) est le premier hémomano- FiG. 133. — Manomètre élastique do Fick. métrographe élastique métallique employé en physiologie (1864). Cet appareil se com- pose d'un tube élastique plat, comme celui d'un manomètre de Bourdo.n, recourbé en arc de cercle, ayant une extrémité mobile fermée et une extrémité fixe communiquant avec une artère. Le tube élastique est rempli d'alcool, tandis que le tube en plomb qui le relie à l'artère est rempli d'un liquide anticoagulant. Quand la pression sanguine croît, le tube-ressort s'étend et son extrémité supérieure libre se déplace. Les déplacements de l'extrémité libre sont enregistrés au moyen d'un levier enregis- treur dont la plume, pourvue d'un dispositif .spécial, transforme les mouvements en arc de cercle du levier en mouvement rectiligne. Les vibrations propres du levier sont amorties au moyen d'un petit disque de papier, relié au moyen d'une tige au levier ; ce disque de papier plonge dans un récipient rempli de glycérine ou d'huile. Le kymographion de Fick a été modifié par Hering (Herm.\n.\, Handbuch der Phys. IV, p. 234, fig. 21). 890 GRAPHIQUE (Méthode). 2. Les hémomanométrographes élastiques se composent, en général, d'un très petit tambour, analogue au tambour ù air de Marey, recouvert d'une membrane en caout- chouc très fine. Ce tambour communique avec l'artère. Sur la membrane du tambour appuie une lame ressort. La variation de la pression du sang provoque les déforma- tions de ce ressort, déformations qu'on enregisti^e à l'aide d'un levier enregistreur. Voici la description de quelques appareils dont la construction est basée sur ce principe. Le manomètre élastique de Fick (1883) se compose d'un cadre rectangulaire [e eee) sur lequel sont fixés un tube {aa) très fin, ayant un millimètre de diamètre, et l'extrémité d'une lame-ressort (f). Le tube aboutit à une petite capsule (un petit tambour) recouverte d'une fine membrane de caoutchouc. Un petit bouton en ivoire {d), fixé sur la mem- brane de la capsule, appuie sur la lame-ressort. La capsule renferme quelques gouttes liquides qui assurent son étanchéilé parfaite ; le tube (u a) de la capsule communique avec l'artère par l'intermédiaire d'un tube de vei^re coudé. Au début, il y avait dans l'appareil de Fick, comme moyen de transmission entre le sang et la capsule, de l'air : plu? tard, Fick a rempli tout le tube de communication avec un liquide (Fig. 134). Quand la pression augmente dans l'artère, et par conséquent, dans la capsule, le Fig. 134. — Manomètre élastique de Fick. bouton (d) appuie sur la lame-ressort et la déforme. Les déformations de la lame- ressort, extrêmement petites, sont proportionnelles à la pression. Les déformations du ressort sont enregistrées de la façon suivante : l'extrémité libre de la lame-ressort est prolongée par une tige de jonc {g) dont l'extrémité, en forme de fourche, est mise en relation avec l'extrémité (h) d'un bras de levier. Le levier est mobile autour d'un axe (K) fixé à une des extrémités du cadre. L'une des exti'émités du levier (h) est pourvue d'une plume qui inscrit sur une surface enregistrante les variations de la pression san- guine. Un dispositif spécial (qui n'est pas représenté sur la figure) permet d'avancer ou de reculer l'axe du levier et par conséquent de varier l'amplification des tracés. Au même point du cadre où se trouve le levier est fixé un style enregistreur immobile qui trace l'axe des abscisses. Le tonographe de v. Frey (1890) n'est qu'une modification de l'appareil de Fick. Son tambour (petite capsule), qui présente un diamètre de 10 millimètres, reçoit à sa partie supérieure un tube de 1,S millimètres, formé par une vis tubulée. Le bouton de la membrane du tambour appuie ordinairement sur la lame-ressort; celle-ci porte un petit coin dont l'arête appuie sur le levier enregistreur près de l'axe. Le contact entre le levier et le coin est assuré par un poids suspendu à un fil. L'axe du levier enregis- treur est porté par une tige mobile sur le support ; cela permet de varier l'amplification du tracé. Les déformations du ressort sont amplifiées de 15 à 20 fois environ. La lame-ressort peut être remplacée par des lames de différentes épaisseurs; on choisit l'épaisseur de la lame selon les besoins des expériences. Le plan de l'axe du levier enregistreur peut être varié de telle sorte qu'on peut avoir l'inscription verticale ou horizontale. Le tambour est à moitié rempli d'eau; le tube qui relie l'artère au tam- bour est rempli d'air. La communication du sang de l'artère avec le liquide de l'appareil de v. Frey se fait de la façon suivante. Une canule métallique pourvue d'un robinet entre dans l'artère. Un tube en verre renflé, à moitié rempli d'un liquide anticoagulant, relie la canule avec un tube capillaire long de 30 centimètres. Au delà de ce tube se trouve un tube GRAPHIQUE (Méthode). 891 métallique en T, dont l'une des branches va à un manomètre à mercure, et l'autre au tonof.'raplio. Lorsque l'on ouvre le robinet de la canule, le sang fait monter le liquide du tube de verre renflé, et le fait passer en partie dans le tube capillaire. Il résulte une augmentation de la tension de l'air contenu dans l'appareil. Le manomètre élastique de HCrthle {Federmanometer) se compose d'un bâti métal- lique dans lequel glisse à frottement dur une cheville qui porte à son extrémité un petit tambour (T). Ce tambour, de 6 à 7 millimètres de diamètre, est fermé à sa partie supérieure par une membrane de caoutchouc sur laquelle se trouve un disque de 3,5 à 4,5 millimètres de diamètre. La membrane est tendue au moyen d'un anneau métal- lique qui la maintient pressée contre le tambour. Un tube (R) sert à amener le liquide dans le tambour ; un autre tube sert à l'écoulement du liquide. Au-dessus du tambour se trouvent superposés une lame ressort (F) et un levier enregistreur (H). Une des extré- mités de la lame ressort (F) est fixe, l'autre est reliée par l'intermédiaire de deux pièces, d'une part (pièce Gi) avec le disque de la membrane du tambour, d'autre part (pièce Gii) avec le levier enregistreur. En variant la position des pièces intermédiaires par rapport à l'axe (A) du levier enregistreur, on varie l'amplification des tracés. Le levier enregistreur est long de 120 millimètres et il amplifie 40 fois les mouvements de la membrane du tambour. La lame ressort, en acier, est choisie de telle sorte que, avec l'amplification citée, l'extrémité du levier enregistreur se soulève d'un centimètre pour une variation de la pression sanguine égale à 100 millimètres de mercure. L'amplitude des mouvements du ressort est donc très faible. A côté du levier enregistreur se trouve fixé un style enregistreur immobile qui trace l'axe des abscisses. On ajuste les styles enregistreurs à l'aide d'une vis micrométrique (M) sur laquelle appuie un ressort (Fi). Un autre ressort (S-F) appuie sur une roue dentée portée par la vis. La communication de l'appareil avec l'artère est établie par un large tube plein de liquide. On amortit les oscillations du levier de l'appareil en faisant un rétrécissement entre le tube et le tambour. Dans l'appareil de Hurthle, comme dans celui de Fick, les déplacements de la plume enregistrante sont proportionnels aux variations de la pression du sang, parce que les déplacements des parties élastiques sont très petits. Le tonographe de Franck ressemble à celui de Hi rthle ; il en diffère par son volume, qui est beaucoup plus petit, ce qui fait que, dans une expérience, on peut super- poser plusieurs appareils. Dans l'appareil de Gad, on trouve, à la place de la membrane de caoutchouc, une plaque métallique très fine et un ressort spécial attaché à un des bras du levier. Le tonomètre différentiel de Hurthle sert à enregistrer les différences de pression entre deux vaisseaux. Cet appareil se compose de deux tambours, semblables à ceux du federmanomètre, fixés sur le même bâti et séparés seulement par un court espace dans lequel on a fixé le support d'un fléau. De petites tiges, fixées sur les membranes de chaque tambour, s'articulent avec les extrémités du fléau. Lorsque la pression est égale dans les deux tambours, le fléau est horizontal ; lorsqu'elle est supérieure dans l'un, le levier oscille dans un sens ou dans l'autre, selon le sens de la différence. Une lame ressort appuie sur le fléau. Dans le modèle construit le « Cambr. Cie » on a simplifié l'appareil de Hi rthle, et on a substitué à la lame ressort un ressort spiral. 3. L'hémonianométrographe à membrane élastique en caoutchouc n'est, en détinitive, qu'un petit tambour enregistreur de Marey, à membrane très forte, rempli de liquide, et qui, par l'intermédiaire d'un tube, communique avec le sang. Dans l'appareil de Hurthle (le Gummimanometer) le tambour, qui présente 18 milli- mètres de diamètre et une hauteur de 9 millimètres, est muni de deux tubes, de 3 millimètres de diamètre, dont l'un sert au remplissage du tambour avec une solution anticoagulante, et l'autre, à la communication de l'appareil avec l'artère. Au support du tambour se trouve fixé, en dehors du petit support du levier enregistreur qui inscrit les déformations de la membrane du tambour amplifiées 40 fois, un style enregistreur fixe qui trace l'axe des abscisses. Une lame d'acier peut, sous l'action d'une vis, déplacer 892 GRAPHIQUE (Méthode). Jes styles enregistreurs de manière à régler leur position sur la surface enregistrante. L'appareil de Hurthle a subi quelques petites modifications peu importantes, dans ses parties accessoires. CowL (1890) a ajouté à l'appareil de Hûrthlk un ressort spiral qui appuie sur la plaque métallique et amortit les oscillations de cette plaque. V. Frey a construit aussi un tonographe, formé essentiellement d'un tambour de Marey rempli d'eau, et dont la membrane présente un petit coin, dont l'arête est en contact avec un style enregistreur. Ce contact est assuré par un ressort régie' par une vis. Gad a remplacé la membrane de caoutchouc de Tappareil de Hïrthle par une plaque très fine de métal. Le hymographt tympanique de Sewall et Dorance (1887) est aussi un manomètre à membrane élastique. Cet appareil se compose d'un tube en laiton se prolongeant en une sorte d'entonnoir recouvert d'une membrane métallique, ayant 2 centimètres 1/2 environ de diamètre et une épaisseur de 0,0o millimètres. Ce tube plein d'une solution anticoagulante communique avec l'artère. Une tige met en relation la membrane métal- lique avec un levier enregistreur, dont l'axe est porté par un support fixé au support de l'appareil. Sewall a choisi la forme de la membrane du tympan, pour la membrane de son appareil, se basant sur les recherches de Helmholtz qui croit que l'eftîcacité de la membrane du tympan à recevoir les vibrations sonores dépend en grande partie de sa forme convexe en entonnoir. Le manomètre métallique de Gréhant (1892), basé sur le principe du baromètre anéroïde, est formé d'une plaque solide sur laquelle on a soudé une boîte circulaire de 10 centimètres de diamètre, fermée par une membrane métallique. La boîte est remplie de bicarbonate de soude. Les mouvements de la membrane métallique sont transmis à un levier en aluminium ayant 38 ou 40 centimètres de longueur. 4. Le manomètre à torsion de Roy (1887) se compose d'une sorte de piston-recorder communiquant par l'intermédiaire d'un tube plein de liquide avec la cavité cardiaque. Quand la pression augmente, le piston se soulève; alors, la tige du piston tire sur une lame-ressort et tend à la tordre. La lame-ressort est fixée au moyen de deux pinces sur un cadre vertical. On varie la résistance opposée aux mouvements de la tige du piston, en variant la longueur de la lame, en rapprochant ou en éloignant les pinces qui fixent la lame-ressort, ou en mettant des lames élastiques de différentes épaisseurs. La tige du piston, reliée à la lame-ressort, présente un fil qui s'enroule sur une poulie fixée sur l'axe d'un levier enregistreur. En enregistrant les mouvements de ce levier, on enre- gistre les déformations de la lame-ressort, et par conséquent les variations de la pres- sion sanguine auxquelles ces déformations sont proportionnelle?. Le tube qui relie l'appareil avec la cavité cardiaque présente une brani'he latérale qui sert à mettre l'appareil en communication avec un manomètre à mercure quand on fait l'étalonnage de l'appareil. 5. L'appareil de Cowl (1889) {Blutwellenzeichner) inscrit les variations de longueur d'un tube de caoutchouc qui communique avec une artère. Les variations de longueur du tube sont proportionnelles aux variations de la pression, car le tube en caoutchouc est construit de telle façon qu'il ne peut pas subir des changements d'épaisseur ; ce qui fait que toutes les variations de la pression intérieure se manifestent par des changements équivalents de longueur. Le levier enregistreur est placé entre l'extrémité de ce tube et un ressort spiral. 6. Le manomètre métallique de Béer (1896) se compose d'un ressort creux rempli d'air et mis en communication avec une artère par un tube plein d'une solution à \ p. 100 de citrate de sodium. Les mouvements de ce ressort métallique sont transmis à deux leviers, dont l'un trace les mouvements sur un cylindre enregistreur, et l'autre porte un index qui se déplace sur une feuille qui porte des chitl'res. L'étalonnage de l'appareil est fait d'une façon empirique GRAPHIQUE (Méthode). 893 II. Hémomanométrographes élastiques à transmission. Les déformations d'une membrane élastique peuvent être enregistrées à dislance, au moyen d'un tambour enregistreur de Marey qui communique au moyen d'un tube plein d'air avec l'appareil explorateur de la pression. Cet appareil explorateur de la pression peut présenter une membrane en caoutchouc, ou bien une membrane métallique. 1. Dans le Sphijgmoscope de Marey-Chauveau (1861), le premier appareil de ce genre, la membrane déformable consiste en un doigtier de caoutchouc qui coitre un tube de verre qui traverse un bouchon de caoutchouc. Ce doigtier est placé dans un tube de verre gros et court, fermé à l'une de ses extrémités par un bouchon de caoutchouc traversé par un tube de verre qui est relié par un tube à un tambour enregistreur de Marey. Le doigtier de caoutchouc, rempli d'une solution alcaline, bien purgé d'air, est mis en communication avec une artère par l'intermédiaire d'un tube. Chaque augmentation de pression subie par le sang, qui pénètre à l'intérieur de l'ampoule élastique, gonfle l'ampoule. Ce gonflement occasionne le déplacement de l'air qui entoure l'ampoule. Ces déplacements de l'air arrivent au tambour enregistreur qui inscrit de la sorte les déformations de la membrane et, par conséquent, les variations de la pression san- guine. Pour donner plus de sensibilité au sphygmoscope, Chauveau intercale entre cet appa- reil et l'artère un flacon à deux tubulures contenant une solution anticoagulante. Le tube d'arrivée du sang plonge dans la solution, tandis que le tube de l'appareil n'y plonge pas. Fredericq (1889) a modifié le sphygmoscope de Chauveau-Marey en diminuant beau- coup la cavité du doigt de gant. De cette façon, on n'a plus une trop grande quantité de liquide en contact avec la membrane élastique, ce qui est une cause d'erreur. HOrthle a construit un sphygmoscope, applicable aux petits animaux, composé de deux tambours inégaux, placés avec leurs membranes bien en face l'un de l'autre. Le petit tambour, qui est recouvert d'une membrane ayant 2 mm. d'épaisseur et 6 mm. de diamètre, présente deux tubes; un de ces tubes communique par l'intermé- diaire d'un calhéter avec le cœur, l'autre tube sert au remplissage du tambour avec une solution anticoagulante. Les variations de pression du sang impriment des oscillations à la niemljiane du tambour; en variant l'épaisseur et la tension de lamembrane, on peut faire varier l'amplitude des mouvements provoqués par les variations de pression. Le grand tambour à air, placé en face du petit, reçoit les impulsions im- primées à sa membrane par la membrane du petit tambour, ces deux membranes étant reliées entre elles. Le grand tambour présente un diamètre de 60 mm.; sur sa mem- brane il y a un disque de 40 mm. de diamètre. Le tambour à air communique avec un tambour enregistreur. Cet appareil est très bon; il présente peu d'inertie, la masse liquide conteime dans le tambour étant très petite. 2. Le manomètre métallique de Marey se compose d'un vase métallique plat dans lequel est placée une capsule de baromètre anéroïde remplie de liquide et s'ouvrant au dehors par un tube qui traverse la paroi du vase enveloppant. Ce tube se termine dans un flacon rempli d'une liqueur alcaline, au goulot duquel se rend un ajulagi' muni d'un robinet. Un tube vertical de verre surmonte le vase qui enveloppe la capsule mano- métrique; par ce tube, on verse de l'eau jusqu'à ce qu'on ait rempli le vase et même la moitié du tube. Les variations de pression du sang (jui pénètre dans la capsule se traduisent par des mouvements de la paroi de la capsule et par des oscillations de l'eau contenue dans le tube vertical du vase. Pour inscrire ces mouvements, on introduit dans le tube vertical un ijouchon de caoutchouc percé et traversé par un tube qui est mis en communica- tion avec le tambour enregistreur. Tatin a construit un manomètre métallique un peu difTérent de celui de Marey. Dans l'appareil de Tatin les valeurs absolues des pressions sont indiquées par une aiguille sur un cadran qui fait partie de l'instrument. La transmission du mouvement de la mem- brane anéroïde à l'aiguille s'opère au moyen d'un petit couteau coudé, (jui fait tourner 894 GRAPHIQUE (Méthode). une hélice formant le pivot de l'aiguille. En même temps que l'aiguille marque les valeurs absolues des pressions, ces pressions sont transmises à dislance à un tambour à levier enregistreur par l'intermédiaire d'une caisse à air comprise dans l'appareil. III. Étalonnage des manomètres élastiques. Voici le procédé employé par M.vrey pour graduer les manomètres élastiques : On prend un flacon de verre qu'on met en relation avec un manomètre élastique. On introduit dans ce flacon l'orifice d'un tube qui se rend à un manomètre à mercure; enfin, on y introduit aussi un tube par lequel on peut comprimer l'air du flacon à des pressions variables. Tous ces tubes traversent un large bouchon et sont hermétique- ment lûtes au goulot du flacon. On insuffle de l'air dans le flacon jusqu'à ce que le manomètre indique un centimètre de mercure au-dessus de la pression atmosphérique; on note alors pour le levier du manomètre élastique le niveau auquel cette élévation de pression l'a soulevé. On répète cette expérience 13 ou 20 fois avec des pressions crois- santes. On obtient ainsi une graduation expérimentale qui permet d'estimer, dans un tracé, la valeur réelle des pressions expri- mées par les changements de hauteur de la courbe. L'appareil employé par Roy, pour effectuer la graduation du manomètre élastique, est constitué de la façon suivante : L'une des branches d'un manomètre à mercure en U com- munique d'une part avec le manomètre élastique et d'autre part avec un ballon eu caoutchouc. Ce dernier est placé entre deux plaques de bois articulées par une charnière. On comprime le ballon en abaissant la plaque de bois supérieure à l'aide d'une vis. On fait varier, de celte façon, la pression dans le manoniètie élastique, graduellement de 10 en 10 mil- limètres de mercure. A chaque pression nouvelle, on fait tracer, par le levier du manomètre élastique, une droite sur la surface enregistrante. On oblient ainsi l'échelle de graduation. Le dispositif employé par Hurthle est encore plus simple et plus commode. Un manomètre à mercure, composé d'une longue branche et d'une petite branche très large, présente à sa partie coudée un ballon. Le tube, le ballon de caoutchouc et la moitié de la large branche du manomètre sont remplis de mercure. La partie supé- i^ieure de la large branche du manomètre est remplie d'eau et communique avec le ma- nomètre élastique. En comprimant le ballon de caoutchouc on fait varier la pression; la lecture de la hauteur de la colonne mercurielle nous indique sa valeur. Dans le manomètre élastique il pénètre très peu de liquide; pour 200 millimètres de mercure, à peine pénètre-t-il dans la capsule une goutte. Pour chaque pression différente donnée par le manomètre à mercure, le levier enregistreur trace une ligne de l'échelle de graduation du manomètre élastique. Pour tous les appareils à membrane élastique, il faut, à chaque expérience, refaire la graduation empirique; car l'élasticité du ressort peut varier. FiG. 135. — Manomètre de Marey. G. Technique générale : Canules; solutions anticoagulantes; préparation de l'artère; pression veineuse. — La technique de l'enregistrement de la pression sanguine comprend quatre phases : I. Préparation du manomètre, soit élastique, soit à mercure; II. Mise à nu et préparation de l'aitère; III. Introduction et fixation d'une GRAPHIQUE (Méthode). 895 canule dans l'artère et sa liaison avec le manomètre; IV. Mise en marche des appa- reils, manomètres el appareils enregistreurs. Nous connaissons les manomètres, nous connaissons les surfaces enregistrantes, qui sont un des nombreux types de cylindres enregistreurs que nous avons vus, animés d'un mouvement peu rapide, avec ou sans papier sans fin. Disons quelques mots sur les canules, les tubes de liaison avec le manomètre et le liquide anticoagulant avec lequel on remplit ce tube. 1. La canule qu'on introduit dans l'artère est en verre et présente diverses formes : elle est simple ou présente une branche latérale pour le nettoyage des caillots. Quand on introduit une canule dans le bout central d'une artère et qu'on lie le bout périphé- rique, la pression qui agit sur le manomètre est augmentée par la force provenant de la vitesse du sang. Pour n'avoir que la pression latérale dans l'artère, il faut que le sang puisse circuler librement et que le tube qui va au manomètre soit perpendiculaire sur l'artère. Pour cela, on se sert d'une canule en T, introduite par une boutonnière faite dans la paroi artérielle, ou bien d'une canule de Ludwig et Spengler, qui ne nécessite pas la ligature, car la paroi artérielle se trouve pressée entre deux disques. Pour combattre l'obstruction des canaux par les caillots, Meyer se sert d'une canule qui contient des tiges en baleine mobiles. Un mandrin, selon qu'il est levé ou baissé, permet d'interrompre ou de laisser passer le courant sanguin. La canule triple tubulaire de Bardier est un perfectionnement de la canule Meyer. 2. Le tube qui relie la canule au manomètre doit être à paroi inextensible (pour ne pas absorber de la force de pression). Il doit être court et large. A une de ses extrémités il présente un robinet, et il est relié par l'autre à la canule par un petit tube en caout- chouc. Ce tube est en plomb généralement, car le plomb a l'avantage d'être flexible. Moleschott employait des tubes formés de petits tubes de verre reliés entre eux par des petits tubes de caoutchouc très épais. 3. La canule qu'on introduit dans l'artère et le tube de communication avec le manomètre sont remplis d'une solution anticoagulante. Poiseuille employait une solution de soude. Klemensiewicz recommande un mélange de bicarbonate et de carbonate de soude dans les proportions suivantes : 4 litres d'eau, 186 grammes de bicarbonate de soude et 286 grammes de carbonate de soude. Ce qui fait environ une solution de 45 p. 1000 de bicarbonate de sodium et de 60 p. 1000 de carbonate de sodium. Paneth et Hurthle ont employé une solution à 25 p. 100 de sulfate de magnésie (50 parties de sel pour 150 parties d'eau). Cette solution a l'avantage de ne pas rendre glissante la canule comme la solution de soude. Tigerstedt recommande une solution de peptone à 8 p. 100 pour le remplissage de la canule et des parties avoisinantes, et une solution de sulfate de magnésie à 2o p. 100 pour le reste du tube. On a recommandé aussi, comme l'a fait Fano, d'injecter une solution de peptone dans le sang, Haycraft a employé de l'extrait de sangsue : décoction de 10 têtes de sangsue dans 100 centimètres cubes d'eau salée, pendant un mois ; on ajoute un cristal de thymol. Lewaschew a injecté du sang défibriné dans les veines, en même temps qu'il faisait subir à l'animal une perte de sang correspondante. Il y a des expérimentateurs qui ont rempli le tube d'huile d'olive ou d'une solution d'oxalate de soude saturée. 4. Pour éviter l'entrée dans le manomètre d'une trop grande quantité de sang, on charge le manomètre purgé d'air avant l'expérience, en le mettant à une pression égale à celle qu'on suppose exister chez l'animal (en moyenne, 14 centimètres chez le chien). Cette mise sous pression se fait au moyen d'un ajutage latéral relié soit à une seringue, soit à un réservoir élevé, ou dont le liquide est chassé par une poire à com- 896 GRAPHIQUE (Méthode). pression. On évite de mettre l'appareil sous une trop forte pression, car l'entrée de la solution de carbonate de soude, surtout par la carotide, exposerait à des accidents souvent mortels. 5. Quand on veut prendre la pression centrale existant dans une artère, on pose une ligature du côté périphérique, on oblitère momentanément, avec une serre-fine ou un fil, le vaisseau du côté du cœur et, d'un coup de ciseaux, on pratique dans la paroi une boutonnière au travers de laquelle on introduira la canule artérielle qu'on fixera par une solide ligature. Quand on veut prendre la pression périphérique ou la pression latérale, on ne pose que des ligatures d'attente, et on introduit dans l'artère, soit une canule ordinaire dirigée vers la périphérie, pour la pression périphérique, soit une courbe en T, si l'on veut connaître la pression latérale. Voici la description du dispositif employée par Wertheimer (1894) à l'étude de la pression dans la veine rénale et dans la veine d'un membre inférieur : Pour ne pas entraver la circulation dans le vaisseau, on peut y introduire simple- ment un tube en T ; mais il est préférable d'employer la canule imaginée par Ludwig et Spenglek. Wertheimer a construit une canule sur le même modèle. Dans cette canule la petite plaque terminale qui s'introduit dans le vaisseau par une boutonnière, au lieu d'être circulaire, s'allonge en triangle à l'une de ses extrémités et se termine par une pointe mousse. Le manomètre et le tube qui le rattache à la canule sont remplis d'une solution de carbonate de soude (densité: 1080). La branche libre du manomètre est mise en com- munication avec un tambour enregistreur dé Marey. La pression artérielle était prise presque toujours simultanément dans le bout cen- tral de la fémorale, au moyen du manomètre métallique de Marey. Quand il s'agit de Tenregistreraent de la pression veineuse, il y a avantage à irri- guer d'une façon continue le point de jonction delà canule et du vaisseau par une solu- tion de carbonate de soude, arrivant goutte à goutte, pour retarder la coagulation. § IL — Mesure de la pression à l'aide d'appareils qui se placent sur la paroi artérielle. — Sphygmotonométres enregistreurs. Parmi les appareils destinés à mesurer la pression du sang sans nécessiter l'ouver- ture de l'artère, citons d'abord le tonométre de Talma et Yangiomètre ou sphygmographe de HûRTHLE. — Ce dernier appareil est employé surtout comme sphygmographe ordi- naire pour avoir les pulsations artérielles à travers les tissus. On trouvera sa description dans le chapitre consacré aux sphygmographes. Le tonométre de Talma (1880) se compose d'une petite gouttière destinée à recevoir une artère dénudée; le diamètre de cette gouttière est plus étroit que le diamètre de l'artère. Une tige, terminée à sa partie inférieure par un bouton, placé sur l'artère, trans- met les pulsations de l'artère à un levier enregistreur. A ce levier se trouve attaché un ressort; la pression exercée par ce ressort peut être variée à l'aide d'une vis. — L'appa- reil est gradué de telle sorte qu'un déplacement déterminé du levier correspond à un nombre déterminé de grammes. Magnus (1896) a fait construire par Runne (Heidelberg) un appareil excellent qui permet d'avoir la pression sanguine sans ouvrir l'artère. La pression sur l'artère, carotide ou thyroïdienne supérieure, s'exerce à l'aide d'un ressort à boudin, et l'inscription est donnée par un levier placé sur l'artère. Par des trac- tions, plus ou moins fortes, exercées sur le ressort, on amortit plus ou moins l'appa- reil. Un dispositif mécanique spécial permet de varier à volonté la longueur des bras du levier (la longueur totale du levier est de 140 millimètres). Magnus a faitl'étalonnage de son appareil à l'aide du même manomètre à mercure dont s'est servi Hirthle. — Les courbes obtenues par lui ne ressemblent pas à celles obtenues par Hurthle avec son appareil non amorti. Le tonosphygmographe de Roy se compose d'une sorte de récipient dans lequel on place l'artère; ce récipient communique avec un piston-recorder. GRAPHIQUE (Méthode). 897 § III. — Mesure de la pression sanguine chez l'homme. — Sphygmomanomètres ou sphygmotonomètres. Les appareils qui servent à mesurer la pression du sang chez l'homme, à travers les parois artérielles et les tissus s'appellent sphygmomanomètres ou sphygmotonomètres. — Ces appareils sont presque tous basés sur le principe suivant. Si l'on comprime extérieurement un vaisseau, non point à l'aide d'un poids ou d'un corps solide, mais par l'intermédiaire d'un liquide ou d'un gaz soumis à une certaine pression, la pression du fluide nécessaire pour effacer le vaisseau et pour arrêter la pro- gression des ondes intravasculaires est très sensiblement égale à celle qui détermine la progression de ces ondes, c'est-à-dire à la pression intra-vasculaire elle-même. Au lieu de ne considérer qu'un vaisseau, on peut considérer l'ensemble des tissus qui constituent une extrémité. Le volume d'un membre varie dans le même sens que la pression du sang; ses variations indiquent si la pression monte ou descend; mais elles n'expriment pas les variations réelles de la pression intérieure. Pour déterminer ces valeurs, il faut, comme pour l'artère seule, équilibrer la pression intérieure au moyen d'une contre-pression extérieure. La plupart des appareils que nous allons décrire ne sont pas enregistreurs, mais presque tous peuvent être rendus enregistreurs, si le manomètre qui donne la mesure de la pression est enregistreur. A. Sphygmotonomètres artériels. — I) La pression sanguine peut être mesurée à l'aide d'appareils qui se placent sur l'artère radiale. a) Sphygmotonomètre à pelote. — 1. Le sphygmomanoméire de Basch se compose d'une pelote de caoutchouc, pleine d'eau, communiquant par l'intermédiaire d'un tube plein d'eau avec un manomètre à mercure. On appuie la pelote sur l'artère radiale jus- qu'à l'extinction complète des pulsations; la pression exercée sur la pelote est trans- mise au manomètre ; la hauteur de la colonne mercurielle en donne la mesure. Telle est la forme primitive de l'appareil de Basch. Plus tard, Basch a perfectionné son appareil de la façon suivante : 11 a remplacé le manomètre à mercure par un ma- nomètre métallique, et il a entouré la pelote d'une enveloppe qui empêche les défor- mations latérales et donne à la pelote une forme d'oreiller. 2. Pour les recherches cliniques rapides, Basch a fait construire un appareil extrê- mement commode et peu coûteux. Cet appareil se compose d'un tube de thermomètre, dont l'extrémité supérieure est renflée en forme de boule, et dont l'exlrémitée inférieure est collée sur un large tube de verre. Un bouchon en liège ferme ce dernier tube. Le bouchon est traversé par un petit tube de verre. L'extrémité supérieure de ce petit tube, qui fait saillie dans le large tube du thermomètre, est recouverte d'une mem- brane en caoutchouc. L'extrémité inférieure du petit tube communique avec une pelote pleine d'air qu'on appuie sur l'artère. Un liquide coloré remplit le large tube qui envi- ronne le doigtier de caoutchouc. Quand on presse la pelote sur l'artère, le liquide monte dans le tube thermométrique. Le degré auquel s'arrête le liquide, quand la pelote a comprimé l'artère jusqu'à l'extinction de pulsations, donne la mesure de la pression du sang. Cet appareil ressemble un peu au sphygmoscope de Marey. 3. Dans le sphygmomanomètre de Potai.v, une simple ampoule de caoutchouc, pleine d'air, communique par un tube, plein d'air également, avec un manomètre mé- tallique. Un tube de remplissage est branché sur le tube de communication. L'ampoule, de forme ellipsoïde, doit avoir, quand elle est distendue par une pres- sion de 3 centimètres de mercure, une longueur de 3 centimètres et un diamètre trans- versal de 2 centimètres et demi. Plus volumineuse, elle est encombrante et s'applique mal; plus petite, elle serait écrasée avant d'arriver aux pressions les plus fortes qu'on peut avoir à observer. Elle est formée c!e 4 secteuis collés ensemble. Trois de ces sec- teurs sont assez épais et assez résistant-; pour ne pas se laisser entièrement distendre, DICT. OE PHYSIOLOGIE. — TOME VU. 57 898 GRAPHIQUE (Méthode). même à une pression qui avoisine 30 centimètres de mercure. Un quatrième, qui doit être appliqué sur la peau et transmettre la pression à l'artère, est aussi mince que pos- sible et renforcé seulement près des pôles. Si le caoutchouc est trop faible, il cède, fait hernie et se détériore rapidement. Le tube de transmission doit avoir une paroi très résistante et un calibre intérieur aussi réduit que possible. Si sa capacité était trop grande, la masse d'air qui s'y trouve se laisserait trop aisément comprimer, et l'ampoule s'affaisserait sans pouvoir donner d'indications. Le tube d'insufflation latéral présente un petit robinet. La tension initiale qu'on établit, en soufflant dans ce tube, est absolument arbitraire; elle est indispensable au fonctionnement de l'appareil, mais elle n'a aucune inlluence sur les résultats qu'on obtient ensuite, pourvu qu'on ne la porte pas trop loin. Potain la portait d'habitude h 3 centimètres de mercure. 4. HiLL et Barnard ont construit un petit sphygmomanomètre, très commode, capable de donner la pression sanguine, et d'indiquer, en même temps, la disparition du pouls au moment de l'écrasement de l'artère. Cet appareil se compose d'une petite ampoule de verre, remplie d'un liquide coloré, fermée à sa partie inférieure, qui s'applique sur l'artère, par une membrane élastique et présentant à sa partie supérieure un tube de verre de très petit calibre. Ce tube, terminé par un renflement, est muni d'un robinet. On ferme ce robinet, et on applique l'appareil sur la radiale. L'air emprisonné dans l'appareil agit comme un ressort sur-le liquide qui, à chaque pulsation, monte dans le tube. En augmentant l'écrasement jusqu'à la disparition des oscillations, on obtient la contre-pression nécessaire pour faire disparaître la pression artérielle. Le tube porte une échelle divisée empiriquement en millimètres de mercure. En reliant le tube à un tambour enregistreur de Mare y, l'appareil est transformé en sphygmographe. 5. L'artcriomètre d'OLivER se compose d'une petite pelote en caoutchouc, pleine d'air et entourée d'un bord rigide. La surface inférieure de cette pelote s'applique sur l'artère ; sur sa face supérieure se trouve un disque sur lequel appuie un ressort. b) Sphygmotonomètres à tige. — Parmi les appareils très commodes qu'on emploie en clinique, citons les sphygmomanomètres dans lesquels, au lieu d'avoir une pelote, rem- plie d'un fluide, qui comprime l'artère, nous avons une tige métallique. 1. Le sphygmomètre de Blogh se compose d'un petit cylindre en cuivre contenant un ressort à boudin qu'actionne une tige centrale terminée à une de ses extrémités par un patin perpendiculaire, au moyen duquel s'exerce la pression sur le pouls. L'autre extrémité est soudée à une crémaillère engrenant avec un pignon. Une aiguille fixée à ce pignon marque sur un cadran circulaire les déviations produites par les pressions exercées sur le patin qui termine la tige centrale. La puissance de l'appareil de Bloch est de 1000 grammes; la pression qu'il exerce est de 300 grammes. L'écrasement du pouls n'est pas exercé directement par l'appareil mais par l'intermédiaire du pouce qui est placé sur l'artère. 2. Verdin a construit un sphygmomètre en bien des points semblable à celui de Bloch, mais ne comportant plus de cadran, ni d'aiguilles, ni de crémaillère ; de ce fait, la sensibilité de l'appareil en est accrue. Les indications sont données par le piston qui constitue l'appareil. Quand on appuie sur le pouce, un cylindre intérieur portant des divisions correspondant à des grammes est découvert grâce à un ressort à boudin. Le nombre des divisions découvertes indique la pression nécessaire pour contre-balancer la tension artérielle. Bloch a ajouté un ressort placé contre la tige du sphygmomètre et destiné à arrêter à volonté cette tige lorsque l'opération est terminée, c'est-à-dire quand les battements de l'artère ont disparu. 3. Ghérox a modifié un peu l'appareil de Bloch, en le rendant démontable. Au patin primitif, on peut substituer des patins de forme olivaire avec garniture de liège, ou bien circulaire avec garniture de cuir. Ces modifications ont pour but de supprimer l'inter- médiaire du pouce dans l'écrasement du pouls. GRAPHIQUE (Méthode). 899 c) L'appareil de Waldenburg se compose d'une lige verticale rigide se terminant inférieurement par une petite pelote reposant sur l'artère radiale, s'articulant par son extrémité supérieure avec l'extrémité du petit bras d'un levier, dont le grand bras est en rapport avec une aiguille indicatrice. L'extrémité inférieure d'un ressort spiral est fixée à l'extrémité du petit bras de levier, au-dessus de la tige. Un dispositif spécial, formé d'une vis et d'une tige, fait varier la tension du ressort dans l'écrasement de l'artère. La longueur du ressort varie avec la résistance que rencontre la pelote de la tige ; de l'étendue du raccourcissement du ressort on déduit la valeur de la pression sanguine. Deux aiguilles indiquent sur un cadran les mouvements des extrémités du ressort multi- pliés par 100. Cette amplification est obtenue grâce à un grand nombre de roues dentées. d] Quand on fait la mesure de la pression artérielle, il faut tenir compte de la tension de la paroi artérielle même, de la tension qu'elle possède quand elle est vide. Waldenburg (1880), à l'aide de son Pulsuhr, en faisant des recherches sur l'artère crurale du chien, a trouvé que la tension de la paroi artérielle est égale à 160 grammes (ou à une colonne haute de 294™", 4). Basch (1880) estime ce chiffre trop fort. En effet, Ghristfani et Kronecker ont vu qu'une pression de quelques millimètres d'eau, exercée sur la paroi extérieure d'une artère, suffit pour rendre l'ouverlurede l'artère imperméable. L'artèreradiale d'uncadavre est complètement comprimée par une colonne de mercure haute de 1,5 à 2 millimètres ; une artère sclérosée est comprimée par 5 millimètres, un tube de caoutchouc ayant une paroi épaisse de 0""™,5 est comprimé par une colonne de mercure haute de 147 milli- mètres. Ce dernier fait explique pourquoi Waldenburg avait trouvé un chiffre si fort. En effet, Waldenburg n'a pas pris directement une artère, mais il considérait celle-ci comme étant l'équivalent d'un tube de caoutchouc dont la paroi avait la même épaisseur. Les chiffres que donne le sphygmomanomètre de Potain sont en rapport avec les maxima de la pression du sang et lui sont supérieurs. D'après Tigerstedt, on ne peut pas connaître, à l'aide de l'appareil de Basch, la valeur absolue de la pression sanguine. En faisant la somme des erreurs, on obtient les chiffres de 32 millimètres de Hg. ; dans les cas défavorables, ce chiffre s'élève jusqu'à 78 milli- mètres. II) Le tonomètre de Gartner (1899) donne la valeur maximum de la pression du sang dans les doigts. La partie essentielle de cet appareil est formée par un anneau, haut de 1 centimètre environ et ayant un diamètre de 2 centimètres 1/2. Cet anneau métallique creux est revêtu à sa partie interne par une membrane de caoutchouc. L'intérieur de cet anneau communique par l'intermédiaire d'un tube en T et de tuyaux en caoutchouc avec un manomètre à mercure et un ballon en caoutchouc. Le manomètre peut être à mercure, ou être un manomètre métallique de Bourdon. A l'aide du ballon, on gonfle l'anneau et on note la pression indiquée par le manomètre. Ensuite, on passe l'anneau sur la deuxième phalange d'un doigt ou sur la première phalange du pouce, et on augmente la pression dans l'anneau, en pressant le ballon, jusqu'à ce que le doigt devienne exsangue, car l'anneau comprime très fort l'artère digitale. On diminue petit à petit la pression qui existe dans l'anneau, jusqu'à ce que l'on commence à sentir des battements dans le doigt, et que celui-ci commence à rougir. La pression indiquée par le manomètre à ce moment-là est égale à la pression sanguine. HiRscH (1901) en faisant des recherches comparatives avec les sphygmomanomètres de Basch et de Gartner, a trouvé que le tonomètre de Gartner est supérieur à l'appa- reil de Basch. III) Il existe des appareils construits sur le même principe que le sphygmomano- mètre de Potain, mais dans lesquels l'écrasement de l'artère se fait sur le bras (artère humérale). 1. Dans le sphygmomanomètre de Hill, le bras est entouré d'un bracelet formé d'un tube en caoutchouc recouvert extérieurement d'une mince lame d'acier flexible. L'air contenu dans le bracelet est en communication avec un manomètre métallique et avec une pompe à air munie d'une valve. On introduit de l'air dans l'appareil jusqu'à la ^00 GRAPHIQUE (Méthode). disposition du pouls et on lit sur le cadran du manomètre la pression qui a produit ce résultat. 2. Le sphygmomanomètre de Riva-Rocci (1896) est constitué de la façon suivante : Une bande hémostatique d'EsMARCH est appliquée autour du bras, vers son milieu, les muscles étant relâchés. On augmente la pression de la bande jusqu'au moment où le doigt de l'observateur ne perçoit plus les battements de la radiale. — La pression ^raduellemejit croissante de la bande est obtenue au moyen de l'insufflateur Richardson Cette bande est constituée par un manchon formé d'un tube creux de para, comme la chambre à air de la bicyclette, revêtu à l'extérieur par un fourreau de tissu inexten- sible. On gonfle le manchon qui est mis en communication avec un manomètre quel- conque, à mercure ou métallique. Ce manomètre est placé entre la bande d'EsMARCH €t l'insufflateur. IV) On a essayé de mesurer la pression du sang à l'aide du sphygniographe. — Ainsi ViERORDT (1855) faisait le petit calcul suivant pour évaluer la pression dans l'artère radiale à l'aide de son sphygniographe : la surface de la plaque qui appuie sur l'artère •étant de 12 millimètres carrés, le poids soulevé par chaque pulsation étant de 40 gram- mes, et la hauteur de soulèvement de ce poids, par chaque pulsation, étant de 0,23 mil- limètres environ, le travail effectué par une pulsation est de 9,2 grammillimètres. En augmentant le poids qui appuie sur l'artère jusqu'à l'écrasement de l'artère, on pour- rait calculer la pression existant dans l'artère. LuDWiG, un an après Vierordt, montra que ce procédé ne peut pas donner la valeur réelle de la pression du sang. En effet, l'inégalité des artères introduit des erreurs dans ce genres de mesures, comme MAREYl'a démontré (1876). Ainsi, chez un même individu ayant les radiales de diamètres différents, on trouve à l'aide du sphygmographe des pressions différentes. B. Mesures de la pression à l'aide des pléthysmographes. — 1) Marey (1876) a essayé de mesurer la pression du sang chez l'homme par la valeur manométrique de la contre-pression qui empêcherait l'abord du sang dans les tissus. Pour cela, Marey employa un cylindre, comme dans le pléthysmographe de Mosso, dans lequel le doigt seul est plongé dans le liquide. L'appareil se compose d'un tube qui reçoit le doigt enveloppé d'un petit sac de caoutchouc très mince qui se réfléchit sur les bords du tube et est fortement lié à l'extérieur de celui-ci. Un manchon de talfetas inextensible est lié par-dessus le caoutchouc qu'il empêche de faire hernie. Le tube rempli d'eau et bien purgé d'air est en rapport, d'une part avec un manomètre qui indique la valeur de la pression à laquelle le doigt est soumis, et d'autre part avec une pelote remplie d'eau qu'on peut comprimer plus ou moins. Avec cet appareil, il est impossible, même en portant la contre-pression jusqu'à 28 et 30 cm. de mercure, d'éteindre les oscillations du mercure, et cependant ces chiffres sont certainement supérieurs à la pression du saug. Ces oscillations sont dues évidem- ment aux mouvements de totalité imprimés à l'appareil par les pulsations des tissus non immergés dans l'appareil. Ce procédé ne peut donc donner le maximum de la pression sanguine; mais il peut indiquer le point auquel la pression intérieure dn sang et la pression intérieure de l'eau se font équilibre : c'est le moment où les oscillations du mercure sont à leur maximum d'amplitude. 2) Mosso (1895), au lieu de chercher la valeur de la pression extérieure qui empêche la circulation du sang dans une extrémité du corps, mesure à l'aide de son sphygmo- manomètre la pression extérieure sous laquelle les pulsations des artères acquièrent le maximum de leur ampleur. L'appareil de Mosso se compose de deux tubes de métal, longs environ de 160 mil- limètres et ayant 25 millimètres de diamètre. Ces tubes sont superposés et communi- quent entre eux par leurs parties moyennes. Les quatre ouvertures de ces tubes sont fermées chacune par un doigt de gant en caoutchouc mince, dans lesquels on introduit le doigt annulaire et le médius de chaque main. On peut changer les doigts de gant, selon les dimensions des doigts qu'on examine. Pour remplir ces deux tubes d'eau, on se sert d'une bouteille dont le fond est muni GRAPHIQUE (Méthode). 901 d'une tubulure. Un robinet fait communiquer l'eau contenue dans les tubes métalliques avec un manomètre à mercure pourvu d'un flotteur inscripteur. On augmente la pres- sion de l'eau contenue dans l'appareil à l'aide d'un piston. 3) HùRTHLE (1896),pour mesurer la pression du sang chez l'homme, dans l'avant-bras, commence par rendre la pression nulle dans les artères de ce membre, en l'anémiant par une bande élastique posée sur le bras et l'avant-bras. Ensuite l'avant-bras est introduit dans un cylindre qui communique avec un manomètre. On remplit d'eau l'espace compris entre l'avant-bras et la paroi du cylindre. En relâchant la bande élas- tique, le sang pénètre dans les artères. La pénétration du sang est empêchée par la masse incompressible d'eau qui n'a d'autre issue que vers le manomètre. La pression augmente dans le cylindre, et le sang ne peut pénétrer que tant que sa pression dans les artères est supérieure à la pression extérieure de l'eau; cette dernière donne la pression du sang. On peut enregistrer les oscillations de la pression. Cette méthode permet de faire une expérience d'une durée assez longue et non pas seulement de courte durée, comme avec les méthodes de Basch et de Marey. 4) Voici la méthode de Frey (1896) pour la mesure de la pression du sang chez l'homme : On enfonce la main dans du mercure ; l'endroit de la main dans lequel on sent les pulsations indique la limite à partir de laquelle le sang ne pénètre plus dans les artères, la pression exercée par le mercure à la surface de ces points-là, étant égale à la pres- sion du sang. Par exemple, la main étant verticale, supposons qu'on l'enfonce dans du mercure jusqu'à la tête des métacarpiens; la hauteur du doigt donne la hauteur de la colonne de mercure égale à la pression du sang, C. Mesures de la pression du ssing dans les capillaires. — Voici le procédé de Kries (1873) pour mesurer la pression du sang dans les capillaires : on applique sur la peau des lames de verre ayant une surface de 2 mm. 5 à 5 millimètres carrés et chargées de poids jusqu'à ce que la peau pâlisse. Ce qu'on mesure par ce procédé en réalité, ce n'est pas la pression réelle dans les capillaires, mais seulement l'excès de celte pression sur la tension des tissus et la contre-pression qu'ils exercent sur les capillaires. Pour rendre exsangue la peau, Bloch a imaginé de la comprimer à l'aide d'une tige métallique, entrant dans un étui qui contient un ressort à boudin. La tige se termine par un étrier d'acier dont la base est formée par un disque de verre de 8 centimètres de diamètre. II Sphygmographie. Les appareils qui servent à enregistrer les pulsations des vaisseaux s'appellent sphyg- mographes, et les tracés obtenus : sphygmogrammes (i^uyp.o; = pouls; yp*?ii= écriture). L'idée d'étudier le pouls autrement que par le toucher semble être très ancienne. L'histoire nous apprend que Galilée a construit un appareil [puhologie) pour l'étude du pouls; malheureusement, nous ne savons pas en quoi consistait cet appareil. Klng (1837), ayant observé les oscillations imprimées à une jambe croisée par les battements de l'artère poplitée, eut l'idée de faire quelque chose d'analogue pour rendre évidents les mouvements d'expansion des veines du dos de la main. Pour cela il colla au moyen d'un peu de suif, près de la veine à explorer, la grosse extrémité d'un fil de verre ou de cire à cacheter étiré. Ce fil formait une sorte de levier dont l'extrémité fine amplifiait les petites impulsions reçues près de la grosse extrémité collée à la peau. Le premier sphygmographe a été construit par Vierordt (1835). En 1836, Marey, en construisant un sphygmographe très pratique, mit entre les mains des physiologistes et des médecins un appareil grâce auquel la sphygmographie entra dans la pratique. 902 GRAPHIQUE (Méthode). FiG. 136. — Tracé hémautographique du pouls. Depuis lors, de nombreuses formes de sphygmographes ont e'té imagine'es; elles diffèrent par des détails de construction peu importants. La forme de la pulsation peut èlre enregistrée chez les animaux, sans l'aide d'un spliyg- mographe proprement dit. — Pour cela, il suffit d'inciser un vaisseau et de recevoir le jet de sang qui s'en échappe sur la feuille de papier d'un enregistreur quelconque. Le jet de sang montant plus ou moins haut, selon la pression que le sang possède dans le vaisseau, son tracé sur le papier reproduira ces variations de hauteur. Le tracé ainsi obtenu peut être appelé un hémautogramme. Ce procédé, dans lequel le sang trace lui- même son graphique, a été appelé par Landois, qui l'a imaginé : méthode hémautographique. Les tracés obtenus avec de bons sphygmographes et les hémautogràmmes sont identiques. § L — Sphygmographes directs. Tous les sphygmographes se composent essentielle- ment d'un levier enregistreur qui reçoit les impulsions d'une artère. Le moyen le plus simple d'improviser un sphygmographe est le suivant : On colle un brin de paille au voisinage d'une ar- tère; la partie du brin de paille la plus rapprochée du point collé repose sur l'artère; l'extrémité libre portCi une plume qui inscrit sur une surface en mouvement recouverte de noir de fumée, les impulsions de l'artère. En général, entre le levier enregistreur et l'artère, il existe une pièce intermédiaire qui sert à exercer diffé- rentes pressions sur la paroi artérielle. — La nécessité de cette pièce a été montrée par l'expérience. En effet, si on n'exerce aucune pression sur l'artère, les tracés obtenus sont trop petits. — Dans certains sphygmographes, on exerce cette pression à l'aide d'un poids, dans d'autres, à l'aide d'un ressort. A. Sphygmographes à poids. — Le sphygmographe de Vierordt (1855) se compose d'un levier {l) qui peut tourner dans un plan vertical autour d'un axe horizontal. — Ce levier présente une tige verticale terminée par une plaque (6) ayant une surface de 12 millimètres carrés; celte plaque s'applique sur l'artère. — Le levier supporte deux petites cupules dans lesquelles on met des poids. En variant les poids, on varie la pres- sion exercée par le levier sur l'artère, et par conséquent, la résistance opposée par le levier à son enlèvement pendant la pulsation artérielle. — On n'inscrit pas directement le mouvement en arc de cercle de l'extrémité du levier, mais on transforme ce mouve- ment en un mouvement vertical à l'aide d'un dispositif analogue à celui du parallélo- gramme de Watt. — Un second levier (/'), plus court que le premier, est articulé au premier levier au moyen des barres transversales contenues dans un cadre quadrangu- laire(p).A l'extrémité inférieure de ce cadre est fixée une tige qui porte la pointe inscri- vante. — Les tracés obtenus présentent une période ascendante égale à la période des- cendante. — Cet appareil a été modifié par Aberle et Berti. L'angiographe de Landois est aussi un appareil à poids. On place différents poids dans la coquille (g) qui est dans le prolongement de l'axe relié à la pelote qui appuie sur l'artère. — Cette pelote (p) soulève une tige dentée qui s'articule avec une roue dentée fixée sur l'axe du levier (comme dans l'appareil de Marey). — La plume pré- sente un dispositif qui permet d'avoir l'inscription rectiligne; une épingle coudée (n) est attachée par une articulation : son propre poids la fait pendre; elle se déplace devant une plaque noircie qui est en mouvement derrière elle. Le sphygmographe de Sommerbrodt (1876) n'est qu'une modification de l'appareil précédent. — Dans cet appareil, le poids est mobile sur le levier, ce qui fait qu'on peut connaître et faire varier exactement la pression qu'on exerce sur l'artère. Dans \e sphygmographe de Baker (1867), la pulsation est immédiatement transmise GRAPHIQUE (Méthode). 903 au levier. — Cet appareil se compose d'un levier d'aluminium ou d'acier, fixé par un axe très délicat à l'extrémité inférieure d'une vis supportée par un support de bois. Sur ce levier agit la pelote qui appuie sur l'artère. La pression sur l'artère est exercée par un poids mobile sur le levier. — L'inscription se fait par une plume à encre, fixée au levier. — Au support se trouve fixé un petit mécanisme d'horlogerie. HoLDEN (1870-73) a construit aussi un sphygmographe à poids et à inscription à encre. Dans cet appareil, l'enregistrement se fait sur une bande de papier se déplaçant horizontalement. Le sphygmographe de Brondel (1879) est un appareil de Marey dans lequel le ressort a été remplacé par un simple levier en cuivre, rigide, inerte et très léger, qui suit, d'après l'auteur, fidèlement et passivement les mouvements de l'artère. — Sur ce levier, qui est gradué, il y a un poids mobile (couvreur). On varie la pression exercée sur l'ar- tère en variant la position de ce couvreur. Il en est de même dans le sphygmographe de Philadelphie.^, dans lequel l'inscription se fait à l'encre sur une bande de papier longue d'un [mètre. Le sphygmographe de Righardson (1885) n'est qu'un sphygmographe de Dudgeon, modifié de la façon suivante : la lame-ressort de ce dernier appareil, dont on trouvera plus loin la description, a été remplacée par une tige d'acier sur laquelle un poids peut être déplacé (comme le poids de la tige d'un métronome). Un cylindre à roues dentées appuie sur la bande de papier en mouvement et trace des lignes horizontales, compo- sées de petits traits discontinus ; ces lignes servent de repère dans l'étude du tracé. Parmi les sphygmographes à poids, citons encore l'appareil de Marage (1889) dans lequel l'enregistrement se fait sur le noir de fumée à l'aide d'un jet liquide, qui donne de grands tracés. B. Sphygmographes à ressort. — L Le sphygmographe de Marey (1856), qui a servi de type à de nombreux appareils, se compose d'un cadre métallique rectangulaire qui se place sur l'avant-bras, au-dessus de l'artère ; ce cadre est maintenu à l'aide de deux F FiG. 137. — Sphygmographe direct de Marey. demi-gouttières latéi'ales réunies par un lien. — Une lame ressort, fixée par une de ses extrémités à l'un des petits côtés du cadre, porte à son extrémité libre un bouton d'ivoire qui s'applique sur l'artère. Une vis permet de graduer la pression du ressort sur l'artère. De la partie supérieure du bouton s'élève une petite tige (en forme de vis) qui s'engrène avec une roue dentée qui supporte un levier enregistreur. Ce levier est très léger et très long. La pulsation de l'artère soulève le bouton d'ivoire; ce soulèvement est transmis par l'engrenage au levier enregistreur qui inscrit ses mouvements sur une plaque verticale recouverte d'une feuille de papier noircie. Cette plaque se meut parallèlement à la lougueur du levier. Un mécanisme d'horlogerie contenu dans une petite boîte, fixée au cadre support du sphygmographe, commande le mouvement de la surface enregistrante. La durée du déplacement de la plaque est de 10 secondes (12- 15 millimètres par seconde). Le dispositif de liaison du ressort avec le levier enregistreur n'existait pas dans le sphygmographe primitif de Marey. Cet engrenage de tige en forme de vis et de roues dentées a été employé aussi par Béhier. Voici, d'après un dessin de Mach, quel était au début le dispositif du sphygmographe de Marey. Le levier inscripteur (/() mobile auteur de l'axe (a) joue sur un couteau (s) qui se trouve à l'extrémité d'une pièce métallique {st). L'autre extrémité de cette pièce mé- 904 GRAPHIQUE (Méthode). tallique s'appuie sur un fort ressort coudé (/■') qui porte la pelote {f). Les mouvements de la pelote sont transmis au levier au moyen d'une vis {sch) qui traverse la pièce {si) et qui est mise sur la pelote une fois que celle-ci a été bien placée sur l'artère. Pour que le levier soit mieux en contact avec le couteau, un petit ressort [f-) appuie sur le levier. Le sphjjgmographe de Mach (1863) n'est qu'une modification de l'appareil de Marey. Dans cet appareil, le levier inscripteur est articulé directement, par une pièce intermé- diaire avec le ressort qui porte la pelote. La position du levier est réglée à l'aide d'une FiG. 138. — Tracé de l'artère radiale obtenu à l'aide du spliygmograplie de Marey. vis sur laquelle se déplace le support de l'axe du levier. — L'inscription se fait sur une plaque mise en mouvement par un mécanisme d'horlogerie. Le sphygmographe de Béhier diffère du sphygmographe de Marey par les parties suivantes : 1° Le levier est indépendant, de façon à ne plus porter sur le bras au moment de l'application et à ne plus être influencé par cette pression première dans des propor- tions inconnues; 2° Une vis armée d'ailettes commande un plateau gradué qui permet de mesurer la pression du levier sur l'artère; 3° Le chariot est plus long et sa course est assurée par une tige à poulie; 4° Le support sur le bras a été rendu indépendant. La pression du ressort sur l'artère est modifiée à l'aide d'une vis dont la pression peut être évaluée au moyen d'un petit dynamomètre. Cette pression doit être graduée de façon à obtenir le maximum d'amplitude des tracés. Le sphygmographe de Marey a été introduit en Angleterre par Anstie et Sanderson, et a été perfectionné par Berkley Hill (1866) de la façon suivante : il a mis un petit coussin sur le support, et il a ajouté une bande élastique qui passe au-dessus de la paume de la main. FosTER (1867), pour graduer la pression exercée par le ressort du sphygmographe de Marey, a fixé à la vis un index qui se déplace sur un cercle gradué. Burdon-Sanderson a fait construire par Meyer un sphygmographe qui diffère peu de celui de Marey. Ces différences portent sur la façon dont on varie la pression que le ressort exerce sur l'artère. Sanderson a fixé le bouton qui presse sur le ressort à une pression fixe de 300 grammes, supposée suffisante même pour les pouls les plus résis- tants. Quand il voulait diminuer la pression, il mettait des blocs de différentes épais- seurs entre le poignet et le sphygmographe, et vissait en bas l'extrémité libre du ressort à un degré correspondant. La mesure de la distance de séparation entre l'appa- reil et le bras donne la mesure de la pression. Dans le sphygmographe d'ANSTiE (1868), on retrouve le même principe du procédé de variation de la pression exercée sur l'artère que dans l'appareil de Sanderson; seu- lement, on a remplacé ici les blocs gradués, qui manquent de précision, par un appa- reil spécial qui règle l'extension de l'extrémité libre du ressort par l'élévation du sphyg- mographe. — En mesurant la distance qui se trouve entre le ressort (tactile) et la tige horizontale en bronze qui est immédiatement au-dessous, avant et après la réduction de la pression, on obtient deux chiffres. Leur rapport indique la pression qui répond aux courbes maximales. Le sphygmographe de Mayer et Meltzer est un sphygmographe de Marey posé trans- versalement sur le bras. Son support est formé par deux moitiés de bracelet recouvertes d'ouate, pouvant s'approcher ou s'éloigner, ce qui fait que l'appareil peut être ap- GRAPHIQUE (Méthode). 905 pliqué aussi à un enfant. — La pression sur le ressort est réglée à l'aide d'une roue qui agit, quand on la tourne, par l'intermédiaire d'un coin qui appuie sur le ressort. — On peut faire, facilement, au moyen d'une vis, rajustement de l'appareil au pouls, même quand il y a déjà fixation au bras. — La longueur de l'appareil, étant donnée sa posi- tion transversale, est moindre que celle du sphygmographe de Marey. Le sphygmographe de Mahomed (1872-73) diffère très peu de l'appareil de Mabey. La pression sur le ressort est exercée au moyen d'un excentrique, les pressions sont lues sur un disque. Dans l'appareil de Stone (1875), il y a une table support pour le bras. L'inscrip- tion se fait sur une plaque de verre enfumée. Le style inscripteur est en aluminium. Il n'y a pas de levier intermédiaire entre le ressort et l'index; il est remplacé par une vis fixée au ressort et engrenant avec les dents d'une petite roue, qui est fixée à l'arbre de l'index. L'index est équilibré par un ressort hélicoïdal formé par un fil en acier. Ce ressort spiral est attaché par deux fils de soie, dont une extrémité est fixée à l'arbre de l'index, et l'autre au ressort. L'indicateur est aussi maintenu entre deux ressorts, ce qui fait qu'il n'y a pas d'erreurs. Thanhoffer a modifié aussi l'appareil de Marey. Le sphygmographe de v. Fbey se compose d'un support double : l'un qui se fixe sur l'avant-bras, et l'autre qui supporte le sphygmographe proprement dit. Le premier, en forme de cadre dont les deux côtés longitudinaux sont des rails, est attaché à l'aide d'un ruban à l'avant-bras; sur les rails de ce support peut glisser le second support qui porte le ressort en forme de lame qui appuie sur l'artère. Ce second cadre est fixé au premier, à l'aide d'une vis, quand le bouton du ressort est bien placé sur l'artère. Le ressort qui appuie sur l'artère présente une vis de réglage de la pression. La transmission du mouvement du bouton au levier enregistreur se lait comme dans le sphygmographe de Mach, à l'aide d'une pièce intermédiaire articulée, avec cette ditTérence toutefois que cette pièce n'est attachée au bouton que quand ce dernier est bien placé sur l'artère. L'inscription se fait sur un petit cylindre mis en mouvement par un méca- nisme d'horlogerie. Ce cylindre peut être rapproché de la plume enregistrante à l'aide d'une vis sans fin. Un petit électro-aimant inscrit le temps. Dans le sphygmographe de Longdet (1868), la pièce principale est une tige vprticale terminée à son extrémité supérieure par une potence supportant un fil qui s'enroule autour d'un axe mobile, et à son extrémité inférieure par une très petite plaque qui doit êlre en contact avec la peau. Un double ressort, appuyé sur cette tige, la ramène de haut en bas quand le choc artériel l'a soulevée de bas en haut. Sur un axe mobile est fixée une roue à laquelle chaque mouvement vertical de la tige fait décrire un arc de cercle en rapport avec la hauteur du mouvement principal. La tige transmet à une aiguille mobile un mouvement par lequel est indiquée la pression de la plaque sur l'artère et la force de projection de la pulsation. Une plume ordinaire, terminée par une tige articulée et soudée à une pince à pression continue, s'applique sur la roue et suit son mouvement. Elle décrit un trait horizontal quand la tige principale décrit un mou- vement vertical. Le papier passe entre deux cylindres qu'un mouvement d'horlogerie fait tourner l'un sur l'autre. La bande de papier est longue de un mètre environ. La vitesse d'en- traînement du papier est plus grande que dans le sphygmographe de Marey. La partie du papier sur laquelle se fait l'inscription est appliquée sur le mouvement d'horlogerie et celui-ci est mû par une vis plantée dans un socle de bois. Sur ce socle deux supports mobiles servent à maintenir le bras, sans que celui-ci subisse aucune pression. On abaisse l'appareil comme une crémaillère. La plume est très maniable : on peut l'élever, sa branche fixe peut être raccourcie ou allongée. Cet appareil est en même temps un dynamomètre. Le sphygmographe de Vaughan (1888) se compose d'une table support, d'une gout- tière pour le bras, de la partie essentielle du sphygmographe de Marey et d'une plume en verre à encre qui inscrit sur une bande de papier qui passe transversalement sur le bras. Le papier, enroulé sur un cylindre vertical, va s'enrouler sur un autre cylindre mis en mouvement par un mécanisme d'horlogerie. Un des cylindres est placé à droite du bras, l'autre à gauche. Derrière la bande de papier se trouve une petile 906 GRAPHIQUE (Méthode). plaque métallique, sur laquelle se fait l'inscription. Quand la plume est lancée trop haut, elle touche un ressort qui se trouve au-dessus. Le sphygmographe de Holden (1873) est aussi un appareil à encre. Dans cet appareil l'inscription se fait horizontalement sur une bande de papier qui se déplace dans la direction de l'axe du bras. Le mouvement d'horlogerie est contenu dans la boîte en bois du support, qui s'attache par un lacet au bras. Le ressort qui appuie sur l'artère présente une courbure spéciale qui permet d'avoir le mouvement du levier inscripteur dans un plan horizontal. Pour la pression, on a une vis avec un disque gradué. Pour les expériences de longue durée, faites dans les laboratoires, on n'emploie pas des sphygmographes qui enregistrent les pulsations sur des surfaces solidaires de l'ap- pareil, mais sur n'importe quel cylindre enregistreur. Citons, parmi les appareils de ce genre, le sphygmographe de Ludwig (construit par Petzold). Dans cet appareil, le levier enregistreur ne se déplace pas dans un plan vertical et parallèle à l'axe de l'avant-bras, mais dans un plan perpendiculaire à cette direction. Le levier faisant saillie sur le côté externe de l'avant-bras peut être facilement approché d'un cylindre enregistreur. Le levier porte à son extrémité un dispositif spécial qui transforme ses mouvements en arc de cercle en mouvements rectilignes. Le bouton du ressort qui appuie sur l'artère est relié au levier enregistreur au moyen d'un dispositif analogue à celui qui existe dans l'appareil de Marey. Le bras sur lequel on pose le sphygmographe est fixé dans un support, et la main sert une poignée de bois. Le cadre est attaché au moyen d'un lacet. IL Le sphygmographe de Dudgeon est remarquable par ses petites dimensions (6 cen- timètres dans tous les sens) et par la commodité de son application. Cet appareil se compose d'un petit cadre auquel est fixé un ressort réglable à l'aide d'un disque mobile autour d'un excentrique. Les mouvements de la pelote fixée au ressort sont d'abord transmis au levier angulaire, par l'intermédiaire d'une attache annulaire ; ensuite, du levier, par l'intermédiaire de l'attache au levier angulaire. Un contrepoids assure le contact de ces pièces. La pointe inscrivante, qui repose par son poids sur la surface du papier, est reliée par une articulation à l'extrémité du levier. Un mécanisme d'horlo- gerie, placé dans une boîte fixée sur le côté postérieur du cadre, met en mouvement des galets qui entraînent une bande de papier noirci. Le me'canisme d'horlogerie peut marcher pendant deux minutes de suite. Le sphygmographe de Dudgeon, de même que le sphygmographe de Marey, a servi de type à de nombreux appareils. Van Santvood (1885) a placé, sur la courroie qui fixe l'appareil de Dodgeon au poignet, un petit tourniquet qui permet de mieux placer l'appareil. Jaquet (1890) a construit un sphygmographe de précision sur le type de l'appareil de Dudgeon. Dans l'appareil de Jaquet, un dispositif spécial permet d'avoir l'enregis- trement du temps (des demi-secondes) ; un autre dispositif permet de varier la vitesse de translation du papier. Celui-ci peut se déplacer soit avec la vitesse de quatre centi- mètres par seconde, soit avec la vitesse d'un centimètre par seconde. Récemment Jaquet (1902) a modifié les leviers de son sphygmographe, qui étaient semblables à ceux de l'appareil de Dudgeon. Les leviers de l'appareil de Dudgeon, étant peu solidaires entre eux, ne donnent pas des tracés fidèles ; l'inertie des pièces déforme considérablement la forme des pulsations. Il n'en est plus de même avec le nouvel arrangement des leviers fait par Jaquet. Dans cet arrangement, la transmission des mouvements du levier coudé au levier enregistreur se fait à l'aide d'un petit engre- nage; le levier coudé, au lieu d'être complètement rigide, est en partie élastique, grâce aux lames-ressorts intercalées sur la branche horizontale et sur la branche verticale. Par suite de ce dispositif, la solidarité des pièces est grande, et les tracés obtenus sont remarquables par leur fidélité. Une partie de l'appareil de Dudgeon, le dispositif à faire progresser une bande de papier, a été adopté dans plusieurs appareils. Ainsi Petzold l'a ajouté au support du sphygmographe de Ludwig, que nous avons décrit précédemment. III. Le sphygmographe d'EDES (1888) ressemble à celui de Pond (dont on verra la GRAPHIQUE (Méthode). 907 description plus loin); il en diJfère par l'absence de liquide et de la membrane en caoutchouc. Une tige métallique, portant la pelote qui appuie sur l'artère, glisse dans un tube ressort terminé par un pied élargi. Ce tube est supporté par un petit ressort qui sert à varier la pression et non pas à la mesurer. Ce tube, à son tour, glisse dans un autre qui sert de base à l'appareil. La tige qui porte la pelote agit sur un levier coudé qui transmet ses mouvements à une légère plume de bois qui inscrit ses mouvements sur une bande de papier enfumée. Le papier est entraîné horizontalement par un méca- nisme d'horlogerie qui se trouve à l'extrémité supérieure de l'appareil, en haut, comme dans l'appareil de Pond. Cet appareil présente l'avantage que la position de la plume sur le papier est elle- même une indication et une inscription de la pression; de plus, la pression peut être variée pendant que le papier est en mouvement. ÎV. Vangiomètre ou sphygmographe de Hùrthle se compose d'une tige présentant à une de ses extrémités une petite plaque qui repose sur l'artère nue ou recouverte de tissus. A l'autre extrémité de la tige, et faisant un angle droit avec elle, il y a une lame- ressort en acier. Ce ressoi't est fixé à l'extrémité d'une lame-support recourbée de telle façon que son extrémité qui ne porte pas le ressort vient juste en face de la tige. A cette extrémité se trouve fixée une plume enregistrante qui trace l'axe des abscisses; en même temps celte extrémité sert de support à l'axe d'un levier enregistreur auquel la tige qui repose sur l'artère transmet ses mouvements. Toujours au même point de la lame- support recourbée se trouve une tige-support qui va dans une direction opposée à celle de la tige qui repose sur l'artère; cette tige traverse une plaque-support et porte un index. A l'aide d'une vis, d'un écrou et d'un ressort à boudin, on fait descendre ou monter la tige-support qui porte tout le système décrit précédemment. La position de l'index de la tige donne la mesure de ces déplacements. Tout l'appareil est porté par un support spécial qui permet de donner à l'appareil n'importe quelle position. La pression de la lame-ressort sur la tige qui appuie sur l'artère est réglée à l'aide d'une vis. Quand on veut étudier les mouvements et la pression d'une artère dénudée, on adapte à cet appareil une gouttière dans laquelle on place l'artère. C. Sphygmographe à ressort et à poids. — Il y a des sphygmographes qui sont à la fois des appareils à poids et à ressort. Citons comme exemple de ce genre d'appareil le sphygmoscope de Morokhovetz, qui peut servir à la fois de sphygmographe et de sphygmomètre. § II. — Sphygmographes à transmission. A. Sphygmographes à transmission à air. — On peut inscrire à distance les pulsations artérielles, en procédant de la façon suivante ; on appuie simplement avec le doigt sur l'artère un tube en caoutchouc relié à un tambour inscripteur ou à un piston- recorder. C'est ainsi qu'a procédé Blix. Celte méthode est très grossière et ne donne de bons résultats que pour les pulsa- tions très fortes. Généralement on emploie des sphygmographes spéciaux qui diffèrent entre eux par l'arrangement du tambour explorateur. L Le sphygmographe à transmission de Marey, le plus répandu des sphygmographes, peut être considéré comme le type de tous les sphygmographes à transmission. Cet appareil est tout à fait semblable au sphygmographe direct : seulement le ressort qui appuie sur l'artère, au lieu d'être en relation avec une plume inscrivante, est en rela- tion avec la membrane d'un tambour à air. La position du tambour était, dans le type primitif, verticale; plus tard, Marey a placé le tambour horizontalement, de façon que, entre la membrane et le ressort qui appuie sur l'artère, il y ait un contact plus intime. Le support du tambour a subi différentes modifications de la part de constructeurs: VeRDIN, ZlMMERUANN, etC. Le sphygmographe de Meurisse (1874), construit par Mathieu, se compose d'une petite plaque mélallique surmontée d'une tige terminée en pointe. A cette tige est attachée la 908 GRAPHIQUE (Méthode). portion horizontale d'un ressort recourbé qui vient se continuer par son autre extré- mité avec une plaque beaucoup plus grande et qui repose sur un morceau de cuir destiné à être attaché. Cette dernière plaque n'est pas entière, elle est coupée en son milieu pour donner passage à la plaque qui s'applique sur l'artère. La grande plaque- support porte sur ses parties latérales deux colonnes munies de dents à crémaillère. Le tambour à air de Marey est porté par deux colonnes latérales creuses qui peuvent être introduites dans les colonnes pleines; une vis fait descendre le tambour au moyen de la crémaillère. L'appareil enregistreur contenu dans le couvercle de la boîte de l'appareil est mis en mouvement par un poids. Une bande de papier passe entre deux poulies. Inscription à l'encre (Breguet). par la plume du tambour. On peut enregistrer aussi, à l'aide de cet appareil, les pulsations du cœur, de la caro- tide ou d'un anévrysme. Il est léger et facile à appliquer. Il en est de même du pansphygmographe de Brondgeest (1873). Cet appareil se com- pose d'un tambour de Marey sur la membrane duquel est collé un petit disque de bois avec un bouton. Le tube pour la sortie de l'air du tambour est mobile dans un man- chon; ce tube peut être fixé à l'aide d'une vis. Le manchon est fixé à un support métallique en forme d'étrier, qui peut être attaché à l'aide d'un ruban. Quand le sup- port est bien placé, on descend le tambour jusqu'à ce qu'il exerce une pression conve- nable sur l'artère. L'appareil de Knoll et Grunmach est une modification de l'appareil Mathieu et Meu- risse; il présente comme lui un ressort intermédiaire entre l'artère et le tambour. Le sphygmographe de Chapmann est analogue au sphygmographe direct de Ludy^^ig, seulement le levier inscripteur est remplacé par un tambour à air de Marey. Le sphygmographe de Fleming se compose d'un tambour avec boulon qui appuie sur l'artère. Le support du tambour présente un dispositif spécial qui fait qu'un des rubans d'attache passe sur la paume de la main, entre le pouce et l'index. Le sphygmographe d'EoGREN (1889) est aussi très simple; un tambour à bouton seule- ment dont le tube de communication avec le tambour enregistreur passe dans un man- chon qui se trouve à l'extrémité supérieure d'une grande vis. Cette vis, qui sert de support, est attachée par un ruban à l'avant-bras. En tournant un écrou qui se trouve en bas sur la vis, on fait monter ou descendre le tambour, et on règle par là sa position sur l'artère. Là pince sphygmographique de Laulanié se compose d'un tléau de balance. L'un des bras du fléau appuie sur l'artère, l'autre est en relation avec un tambour à air. Un ressort à boudin, attaché au lléau de balance, permet de régler la pression exercée sur l'artère. Le sphygmographe de HCrthle (1898) est très simple. Le support est une sorte de pince dont les deux branches courbes embrassent l'avant-bras. L'articulation de ces deux branches est à charnière serrée par une vis. Une des branches de cette pince sert de support au tambour explorateur à air. La membrane de caoutchouc de ce tambour est très épaisse, entre elle est l'artère radiale, il n'y a pas de ressort métallique. La tige qui porte le bouton qui appuie sur l'artère est fixée à la membrane. Le sphygmographe de Mariette Pompilian (1" modèle) se compose d'un cadre-sup- port, semblable à celui du sphygmographe de Marey, qui s'attache au poignet ù l'aide d'un ruban. Ce cadre supporte un levier rigide à deux bras. Le long bras du levier porte le bouton qui appuie sur l'artère et qui est relié au tambour à air. Un resssort à boudin est attaché au petit bras du levier. En faisant varier à l'aide d'une vis la longueur du ressort, on varie la pression exercée par le levier sur l'artère. Un index, porté par l'extrémité supérieure du ressort, indique, sur une tige graduée, la valeur de la pression exercée sur l'artère. Le sphygmographe de Mariette Pompiliax (2« modèle) se compose d'un support pour le poignet. Ce support est formé de plusieurs pièces réglables permettant d'adapter l'appareil à des poignets de grosseur variable. Sur le cadre supérieur du support se trouve placé un cadre mobile dans les directions antéro-postérieures et latérales. Sur ce cadre mobile est fixée une vis qui porte le sphygmographe proprement dit, composé d'un levier rigide, muni d'un ressort à boudin et d'un tambour à air pourvu d'un dispo- sitif spécial permettant de faire varier la tension de la membrane de caoutchouc. GRAPHIQUE (Méthode). 909 II. Les pulsations de l'artère carotide sont enregistrées à l'aide de sphygmographes dont le support présente une forme spéciale. Dans le sphygmographe carotidien d'EoGREN le support présente la forme d'un arc métallique qui entoure la moitié du cou. Une des extrémités de cet arc porte un petit coussin sur lequel repose la nuque, l'autre extrémité porte un tambour à air. La tige collée à la membrane du tambour piésente un bouton qui appuie sur la région caroti- dienne. Le petit coussin sur lequel repose la nuque est porté par une vis. En tournant cette vis, on fait monter ou descendre le coussin, ce qui permet d'adapter l'appareil à tous les cous. Dans l'appareil de Hurthle, le support du tambour prend son point d'appui sur le front. tout simplement, III. Pour enregistrer les pulsations des veines, on peut employer comme l'a fait Buisson, un petit enton- noir, appliqué sur la région qu'on veut /^ explorer, par exemple sur la région sus- Ym claviciilaire quand on veut enregistrer les J^ pulsations de la jugulaire. Le petit en- tonnoir est mis en relation, par l'intermé- diaire d'un tube, avec un tambour enre- gistreur de M.VREY. Le i^phymograplte veineux de François- Franck se compose d'une boîte à coussin, sur lequel repose la nuque. Cette boîte forme le pied de l'appareil; à une de ses extrémités est vissée une tige verticale qui supporte l'explorateur veineux. Celui-ci est constitué par un petit tambour à air dont la membrane très souple supporte un petit disque auquel est appendue la tige exploratrice qui appuie sur la jugu- laire. Une articulation à double noix per- met de faire l'application de l'appareil perpendiculairement à la jugulaire. B. Sphygmographes à transmis- sion liquide. — Naomann a transformé le sphygmomètre d'HÉRissoN en appareil enregistreur, et lui a donné le nom im- propre de hémodynamomètre. On sait que le sphygmomètre d'HÉRissoN se compose d'un tube, rempli de mercure, évasé à sa partie inférieure qui est fermée par une membrane de parchemin. Le sphygmomètre enregistreur de Keyt (1874) se compose aussi d'une partie analogue au sphygmomètre d'HtRissoN. Cette partie qui repose sur l'artère est reliée par un tube plus ou moins court avec la partie médiane d'un tube horizontal. Ce dernier est recourbé à une de ses extrémités qui se présente sous la forme d'un tube vertical gradué ; à l'autre il est fermé par une membrane élastique, qui est reliée à un levier inscripteur. Tout le système est rempli d'un liquide. Keyt, dans ses premiers appareils, employait l'eau; plus tard il a employé de l'alcool. Les hauteurs de la colonne liquide contenue dans le tube donne la mesure de la pression artérielle. Les pulsations reçues par la membrane ({ui ferme le petit entonnoir qui repose sur l'artère sont transmises par l'intermédiaire de la colonne liquide à la membrane qui ferme une des extrémités du tube. La plume enregistrante inscrit ces mouvements sur une plaque de verre enfumée, placée vertica- lement et mise en mouvement par un mécanisme d'horlogerie. Le compound sphygmograph de Keyt se compose de deux appareils, semblables à celui que nous venons de décrire, llxés sur un même support. Les plumes enregis- FiG. 139. — Sphygmographe à transmission do Mariette Pompilian. {1" modèle.) 910 GRAPHIQUE (Méthode). trantes sont superposées ;, on a ainsi l'inscription simultanée des pulsations de deux artères, ou des battements du cœur et des artères. Sur la surface enregistrante un chronographe inscrit le temps. Le sphygmographe de Pond (1877) est formé essentiellement par un tube plein de liquide et fermé à sa partie inférieure par une membrane en caoutchouc qu'on applique sur l'artère. Sur le liquide se trouve un flotteur qui, par l'intermédiaire d'une tige et d'un levier, communique les mouvements du liquide à une plume enregis- trante placée horizontalement, sur une bande de papier qui se déplace transversalement à la droite du bras. Le mouvement d'horlogerie se trouve à la partie supérieure de l'appareil. On varie la pres- 5 9 sion exercée sur l'artère en serrant une vis qui se trouve entre les deux branches d'une sorte d'étrier qui emboîte le poignet et qui sert de support à l'appareil. La pression est lue sur un disque placé à la partie inférieure du support sur le côté externe du poi- gnet. Cet appareil, dans son ensemble, est petit et peut être tenu à la main. RiGHARDsoN (1880) a ajouté un microphone à cet appareil et l'a transformé en sphyg- mophone. On peut donc voir et entendre en même temps les pulsations. Le sphygmographe d'OzA- NAM se compose de trois élé- ments : un moteur, un cylindre et un sphygmoscope à mer- cure. L'ampoule qui s'appli- que sur l'artère communique par un tube de caoutchouc avec un tube de verre. Tout le système est rempli de mer- cure. Le flotteur est muni à sa partie supérieure d'une aiguille en acier qui inscrit le tracé sur une feuille de papier enroulée sur le cylindre. Un aimant vertical, soutenu par une pince, plonge dans le cylindre creux et attire à travers les parois l'aiguille d'acier qui s'applique sur le papier sans que sa mobilité soit gênée. Le sphygmographe différentiel d'OzANAM (1886) se compose de deux petites ampoules de verre, une pour l'artère, l'autre pour la veine. Ces ampoules sont accouplées au moyen d'une double bague métallique ; elles sont recouvertes de minces membranes de caoutchouc. Les branches terminales des ampoules sont prolongées, comme dans le sphygmographe simple, par des conduites de caoutchouc et des tubes à flotteur. Les deux systèmes sont remplis de mercure. L'inscription des mouvements se fait sur un cylindre enregistreur. Parmi les sphygmographes à eau, citons encore les appareils de Basch, de Zadek, etc. C. Sphygmographes électriques. — Pour mesurer exactement la durée de la systole et de la diastole artérielles, Czermak a employé l'électricité de la façon suivante : il a adapté des contacts électriques, soit au sphygmomètre perfectionné d'HÉRissoN, soit aux appareils de Vierordt ou de Marey. L'enregistrement, à l'aide d'un électro- aimant, des fermetures et des ruptures du courant, permettait de mesurer la durée de chacune des phases du pouls. FiG. 140. — Sphygmograiihe de Mariette Pompilian (2" modèle.) GRAPHIQUE (Méthode). 9H § m. — Enregistrement photographique des pulsations. Voici comment ou a employé la photographie à l'enregistrement des pulsations artérielles : GzERMAK plaçait sur l'artère la petite extrémité d'un miroir mobile autour de son axe horizontal; un rayon lumineux était réfléchi par le miroir. Entre le miroir et la surface sensible, il y avait un écran percé d'une fente verticale, de sorte que le rayon lumineux ne pouvait tracer sur la surface enregistrante qu'une ligne verticale quand la surface enregistrante était fixe ; quand cette dernière se déplaçait, Czermak obtenait la courbe de la pulsation. Stein (1877) a employé aussi le procédé de Czermak; seulement, dans ses recherches. Fia. 141. — Sphtjgmof/raplie photogrupidque d'OzANAM. — La chambre noire est représentée relevée; elle s'abaisse en rr quand l'expérience commence. La fente (a) de la chambre noire peut être rétrécie ou élargie à l'aide do la pièce b. L'ampoule artérielle l est reliée par le tube i au tube de verre t. La plaque sensible V placée dans les montants ce se déplace dans le sens de la flèche. le miroir était fixé par l'intermédiaire d'une tige à un ressort, qui servait à faire varier la pression exercée sur l'artère. Bernstein (1890) a collé un petit miroir à la peau de la région carotidienne. Le rayon réfléchi par ce miroir pénétrait dans une chambre obscure, en passant par des lentilles qui concentraient la lumière sur la surface d'un cylindre enregistreur; il obtenait ainsi une image très nette. Le rayon lumineux, comme dans la méthode de Czermak, était interrompu toutes les deux secondes à l'aide d'un métronome. CowL (1900) a photographié les mouvements du bord lumineux d'un petit écran placé perpendiculairement sur l'artère radiale. La chambre photographique était placée sur les rails de glissement d'un myographe à ressort. Les photogrammes obtenus montrent nettement l'existence du dicrotisme. Oz.4^NAM a employé aussi le procédé photographique pour enregistrer les mouve- ments de la colonne mercurielle de son sphygmographe. La feuille de papier sensible, animée d'un mouvement transversal, était renfermée dans une chambre noire portative, percée d'une fente correspondant au tube dans lequel oscillait le mercure. Landois a construit un sphygmographe à gaz, basé sur le procédé de Kleme.xsievicz 912 GRAPHIQUE (Méthode). et Gerhardt. Les pulsations sont transmises au gaz renfermé dans une capsule mano- métrique; le gaz est allumé à sa sortie, comme dans l'appareil de Koenig. Les oscilla- tions de la flamme sont photographiées. § IV. — Sphygmographie digitale. Le sphygmographe digital, ou onychographe, est un instrument qui donne les pulsa- tions des petits vaisseaux d'une extrémité digitale placée entre un support et l'appareil qui repose sur l'ongle. Le sphygmographe totalisateur de Fr. -Franck (1881) rentre dans cettle catégorie de la sphygmographie volumétrique. Cet appareil se compose d'un levier amplificateur for- FiG. 142. — Splij'gniographe totalisateur de François-Fkanck. mant un système articulé (deux leviers superposés) qui s'applique sur le dos d'une phalangette à l'aide d'une petite plaque. \,' onychographe de Herz (1896) est un instrument analogue. Le sphygmographe digital de Laulanié (1898) se compose d'un système multiplicateur formé par la combinaison d'un levier et d'une poulie pourvue d'une plume inscrivante. C'est l'introduction de cette poulie qui constitue le détail caractéristique; c'est par elle que le sphygmographe acquiert une sensibilité exquise. Les constantes mécaniques de l'appareil déterminent une multiplication de 70. La pesée sur le doigt est accrue par le déplacement d'un poids de 10 grammes qui se meut sur une tige horizontale graduée. Cet appareil inscrit verticalement ses mouvements. SoLLiER (1902) a modifié l'appareil de Laulanié pour avoir l'inscription horizontale. Pour cela, la fourche qui soutient la poulie verticale à laquelle est fixé le style, présente un ajutage qui permet de placer cette poulie tantôt verticalement, tantôt horizontale- ment, au moyen de quatre vis. Le sphygmographe digital de Waller (1900) est un appareil beaucoup plus simple que celui de Laulanié. Un ressort applique un levier enregistreur au-dessus de l'ongle. Le levier amplifie 50 fois environ les mouvements qu'il reçoit. Castagna (1901) a construit aussi un appareil analogue. L'appareil de Kreidl (1902) se compose de deux leviers enregistreurs : l'un pour les mouvements de la main, et l'autre pour les pulsations de l'ongle. § V. — Enregistrement de l'ébranlement pulsatile du corps. Hartshorne et Gordon ont remarqué que, quand un individu était placé sur une bascule, l'aiguille faisait des mouvements isochrones au pouls. Pour enregistrer ces mouvements, Hartshorne a imaginé un appareil, qui ne fut jamais construit, appelé bullographe. Gordon fut le premier qui enregistra ces mouvements. Landois {Lehrb. der Physiolo- GRAPHIQUE (Méthode). 913 gie, 1888, îp [156) a décrit et figuré un appareil qui permet de les enregistrer avec facilité ;. FiG. 143. — Sphygmographe digital de Laulanié. FiG. 144. — Tracé du pouls digital (tracé inférieur), obtenu à l'aido du sphygmographe de Laulanié; pouls de l'artère radial (tracé supérieur). les tracés obtenus par sou procédé présentent de grandes analogies avec les tracés du pouls. DIOT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VII. 58 9U GRAPHIQUE (Méthode). Les tracés de Landois montrent, contrairement à ceux de Gordon, que tout le corps, au moment de la systole verticulaire, éprouve une forte poussée vers le bas. La balance enregistrante de Mosso se compose d'une caisse en bois placée en guise de balance sur un couteau d'acier; le tout se trouve sur une latte percée de 3 ouver- tures, une au milieu, et une à chaque extrémité; la première donne passage à une barre de fer d'un mètre de hauteur qui porte un gros cylindre de fer; les deux autres donnent passage à des barres semblables fixées obliquement à la première; le fond peut être abaissé ou soulevé grâce à un pas de vis; on rend ainsi la balance plus ou moins sensible. En fixant un index à l'extrémité de la balance, on enregistre ses mouvements sur un cylindre. § VL — Enregistrement des pulsations longitudinales. Warren, p. Lombard et Sidney, P. Budgett ont enregistré l'expansion longitudinale de la carotide. — Voici leur méthode : La carotide est disséquée sur une longueur aussi grande que possible; on la coupe ensuite entre deux ligatures. Le moignon de l'artère est fixé en le plaçant dans la cavité d'un petit cylindre en emplâtre de Paris. Quelques gouttes de sang suffisent pour coller l'artère à l'emplâtre. Trois ou quatre millimètres de longueur d'artère sortent du petit cylindre; l'extrémité de l'artère est attachée à un petit levier, léger et rigide, qui am- plifie dix fois les mouvements de l'artère. Le tracé est recueilli sur une feuille de papier longue de six à huit mètres étendue sur deux cylindres dont l'un est mis en mouvement par un moteur. Une méthode analogue (la méthode de la suspension) a été employée aussi par DuccEscHi (1903). § VIL — Enregistrement des pulsations d'une veine dénudée. L'inscripleur du pouls veineux de Gottwalt (1881) se compose d'une gouttière sur les bords de laquelle est étendue une membrane mince qui transforme la gouttière en un petit tambour à air. La veine est placée entre cette membrane et une petite plaque maintenue par un ressort qui la comprime contre la membrane. La gouttière communique par un tube à transmission avec un tambour enregistreur. L'enregistrement se fait à l'aide de l'étin- celle électrique et du papier amidonné et ioduré. § VIIL — Sphygmoscopes. Hérisson, dans un mémoire présenté à l'Institut en 1834, a donné la description du premier appareil qui a servi à la mesure du pouls. Cet appareil se composait d'un tube de verre portant des divisions. L'extrémité inférieure de ce tube était terminée par une partie cylindrique plus large dont l'ouverture était fermée par une feuille de parchemin. Le tout était rempli de mercure et était en plus pourvu d'un robinet. Les oscillations de la colonne mercurielle correspondaient aux pulsations. Plusieurs sphygmoscopes ont été construits sur le modèle de l'appareil d'HÉRissoN : Alison Scott (1856), a construit un instrument qui peut indiquer les pulsations du cœur aussi bien que celles des artères. Son sphygmoscope se compose d'une sorte de petite coupe renversée (calice) fermée à l'une de ses extrémités par une lame fine de caoutchouc, et se terminant à l'autre extrémité par un tube de verre rempli d'eau colorée et fixé à une planchette graduée. La partie intermédiaire, tubulaire, qui relie le tube à la coupe, peut être très courte, ou très longue, surtout dans le cas où l'on veut avoir les deux tubes des deux sphygmoscopes à côté l'un de l'autre, avec un de ces appareils posé sur l'artère, et l'autre sur la région du cœur. Le sphygmoscope de Pond (1875) consiste en un tube de verre d'ouverture capillaire GRAPHIQUE (Méthode). 915 long de 3 à 6 pouces (8 à 16 centimètres). Une de ses extrémités s'évase graduellement en un entonnoir. Une goutte du liquide colorée se trouve à la moitié du tube, et forme Vindex qqi se déplace suivant les pulsations, quand l'extrémité large du tube, fermée par une mince lame de caoutchouc, est placée sur l'artère. Un lacet attache l'appareil au poignet. Le fils de Pond (W. R. Pond), a modifié cet appareil en élargissant le tube capil- laire, en le remplissant de liquide, et en le rendant par cela semblable à l'appareil Scott Alison. Le sphygmoscope de Stevens (1880) se compose d'un tube de thermomètre gradué, long de 110 millimètres, ayant un calibre de 6 millimètres, terminé à son extrémité inférieure par un bulbe, contenant un liquide coloré qui ne peut pas passer au-dessous du bulbe. Dans le tube il y a un petit index long de 2 millimètres. Au-dessous du bulbe il y a une ampoule en caoutchouc très fort, qui, quand on applique l'instrument, doit être saisie entre le pouce et l'index. Au-dessous de cette ampoule, il y a une échelle de pression formée par un ressort à boudin, indiquant 8 hectogrammes de pression. L'instrument se termine par un long disque creux, de caoutchouc très fort, présentant un diaphragme de caoutchouc à sa surface inférieure, qui s'applique sur l'artère. L'hœmarumascope de White est une sorte de sphygmoscope. 11 est formé d'un tube recourbé en forme de trompette et libre à ses deux extrémités. L'extrémité évasée s'ap- plique sur l'artère; un petit index, formé par une goutte d'alcool coloré en rouge, suit les oscillations de l'artère. § IX. — Sphygmophones. Les appareils qui servent à transformer les pulsations artérielles en bruits nettement perceptibles s'appellent sphygmophones. Quoique ces appareils ne puissent pas être classés parmi les appareils enregistreurs, nous allons décrire, à titre de curiosité, quelques sphygmophones qui ne sont en définitive que des sphygmographes modifiés. Le sphygmophone de Stein se compose d'un ressort métallique analogue à celui du sphygmographe, ressort reposant par un bouton d'ivoire sur l'artère. A chaque batte- ment, le ressort soulevé va buter contre une vis et ferme le courant qui arrive par le ressort et sort par la vis. Un téléphone mis en rapport avec l'appareil, permet d'en- tendre nettement les interruptions et les fermetures du courant. Ce sphygmophone a été modifié par Dumont. Le sphygmophone de Boudet se compose d'une plaque d'ébonite munie de deux ailettes, par lesquelles on fixe l'appareil au moyen d'un ruban. Un ressort métallique porte à son extrémité libre le charbon inférieur d'un microphone. Le charbon supérieur est suspendu à une vis, mobile entre les deux branches d'une pièce, qu'on peut élever ou abaisser le long d'un support à l'aide d'une vis. Le contact des deux charbons est assuré à l'aide d'un morceau de papier replié. Une deuxième lame métallique, placée parallèlement au-dessous de la première, porte un bouton explorateur qui presse sur l'artère; sa pression est réglée par une vis. Des bornes métalliques communiquai, avec les charbons servent à fixer les extrémités d'un circuit dans lequel on intercale une pile et le téléphone récepteur. Chaque pulsation de l'artère se trouve ainsi transformée en un bruit nettement perceptible. Sommer a fait aussi d'intéressantes recherches sur la transformation de la pulsation en son. 111 Cardiographie. Les appareils destinés à étudier }es mouvements du cœur par la méthode graphique s'appellent cardiographes ; les tracés des mouvements du cœur s'appellent cardio- grammes. 916 GRAPHIQUE (Méthode). Le procédé le plus simple, et en même temps le plus grossier, pour avoir un cardiogramme, c'est d'enregistrer, comme l'a fait Wagner, les mouvements d'une aiguille enfoncée dans le cœur. Pour cela, on fait frotter l'extrémité libre de l'aiguille sur la surface d'un cylindre enregistreur. Brondgeest a attaché un fil à l'extrémité supérieure d'une aiguille enfoncée dans le cœur; ce fil passait sur une poulie et était attaché à un levier inscripteur. En faisant agir l'aiguille enfoncée dans le cœur sur un tambour de Marey, Kronecker a pu enregistrer à distance les mouvements du cœur. L'introduction de l'aiguille dans le cœur, à travers le thorax, ne fait aucun mal. Pour un lapin, la longueur de l'aiguille est de 4 à 6 centimètres; pour le chien, il faut qu'elle soit plus grande (aiguille de Jung). Un autre procédé grossier, mais exact, pour obtenir un cardiogramme, est le suivant r On introduit un tube de verre dans la cavité du ventricule gauche, à travers la paroi ponctionnée avec un gros trocart. Le jet de sang qui s'échappe par l'extrémité libre du tube préalablement effilée est recueilli sur une bande de papier en mouvement. La trace laissée par le sang sur le papier représente bien les différentes phases de la contraction cardiaque. Dans notre exposé, nous décrirons sous le nom de cardiographie directe les procédés qui nécessitent la mise à nu, ou l'isolement complet du cœur ou autres opérations et sous le nom de cardiographie indirecte (ou cardiographie clinique) les procédés qu'on emploie pour faire l'étude des pulsations cardiaques à travers la paroi thoracique. §L Cardiographie directe. A. Cardiomyographie. — La myographie proprement dite du cœur a pour but l'étude de la contraction du muscle cardiaque en elle-même, sa nature, ses analogies et ses différences avec celle des autres muscles. L Cœur isolé. — Le cœur des animaux à sang froid (grenouille, tortue, etc.) peut être étudié en dehors de l'organisme. Il en est de même du cœur d'un animal à sang chaud nouveau-né ou d'un animal qui a été refroidi artificiellement avant d'être tué. FiG. 145. — Cardiographe double de François-Feanck. a) Rien de plus simple que d'enregistrer les mouvements d'un cœur isolé : on le pose sur une surface fixe, et on fait reposer dessus un levier enregistreur très léger. Dans le cardiographe simple de Marey, un petit cylindre de moelle de sureau est interposé entre le cœur et le levier. Un tel procédé d'enregistrement a été employé aussi par Ludwig, Baxt, etc. François-Franck, Lauder-Brunton, Cash, etc., ont construit des myographes du cœur à double levier. De cette façon, ils ont obtenu une amplification plus grande des mouvements du cœur, car les mouvements, déjà amplifiés par le premier levier, sont amplifiés une seconde fois par le deuxième levier superposé au premier. On peut enregistrer séparément les oscillations de l'oreillette et du ventricule, en se servant de deux leviers enregistreurs, dont l'un repose sur le ventricule, et l'autre sur l'oreillette. Ce dispositif a été employé par François-Franck. La plaque sur laquelle repose le cœur peut être mise en communication avec une GRAPHIQUE (Méthode). 917 ■électrode, tandis que l'autre électrode est reliée avec la tige du levier qui repose sur ie cœur. De cette façon, le même appareil sert à exciter le cœur et à enregistrer les mouvements. Au lieu d'enregistrer directement les mouvements d'un cœur isolé, on peut les enregistrer à distance au moyen de la transmission à air, mettant le cœur entre la plaque d'un tambour à air et une surface fixe. La pince myocardiqiie de Chauveau {myocardiographe) est constituée de cette façon. Le tambour de la pince est mis en communication avec un tambour enregistreur de Marev. b) Les mouvements d'un cœur isolé peuvent être étudiés au moyen de la méthode de suspension. Voici comment on procède dans ce cas : Le cœur est fixé à un support au moyen d'un crochet placé dans le sillon auriculo- ventriculaire. L'oreillette est attachée, au moyen d'un crochet et d'un fil, à un levier enregistreur supérieur; la pointe du ventricule est attachée de même à un levier enre- gistreur placé sur le même support que le levier supérieur. Des poids ou des ressorts sont attachés aussi au levier et agissent sur eux dans une direction diamétralement opposée à celle suivant laquelle s'exercent les mouvements du cœur. De cette façon, on enregistre simultanément et séparément les contractions du ventricule et de l'oreillette. Ce procédé a été employé par Gaskell (1882), Fano, Gotch, etc. II. Cœur en place. — Les procédés qu'on emploie pour enregistrer les mouvements d'un cœur isolé s'appliquent aussi à l'e'tude des mouvements d'un cœur en place et mis à nu simplement. a) LuDwiG et Hoffa ont enregistré les mouvements du cœur à l'aide d'un simple levier comme celui du cardiographe simple de Marev. Le cardiographe double de Soukanoff se compose de deux leviers enregistreurs, dont 'un se place sur le ventricule et l'autre sur l'oreillette du cœur d'une tortue. Le cardiographe de Kaiser se compose d'une tige verticale (un fétu de paille) dont \ine extrémité touche la surface du cœur, tandis que l'autre extrémité est attachée, au moyen d'un crochet d'alumi- nium, à un levier en- registreur. La tige ver- ticale estguidée par deux anneaux fixés au sup- port. L'amplification des tracés est variée eu dé- plaçant le crochet en aluminium le long de la tige. La pince myographi- que du cœur, ou pince cardiaque de Marey, est formée de deux cuillerons portés chacun par un bras coudé. L'un de ces bras est fixe, et l'autre mobile. Le bras mobile porte un levier horizontal qui lui est perpen- diculairement implanté; l'extrémité du levier, munie d'une plume, trace sur une surface enregistrante les mouvements du cœur. Le cuilleron est rappelé par un petit fil de caoutchouc qui agit comme un ressort. Chaque systole du ventricule écarte les mors de la pince et tend le fil élastique; à chaque diastole, le cœur, redevenant mou, laisse revenir le mors de la pince sous la traction du ressort. La pince et l'axe du levier sont fixés à l'extrémité d'une tige qui, à l'aide d'une virole, peut être fijcée sur un support attenant à la planchette sur laquelle est fixée la grenouille. Des fils conducteurs étant attachés à la pince, les cuillerons peuvent servir d'électrodes quand on veut exciter le cœur. RÉ.NÉ (1887) a modifié le cardiographe de Marey en remplaçant le fil de caoutchouc FiG. 146. — Pince cardiaque de Marey. 918 GRAPHIQUE (Méthode). par un poids qui permet de graduer exactement la pression exercée sur le cœur de grenouille. Le poids est mis dans un plateau accroché par un fil qui passe sur une poulie; ce fil est attaché à une des branches de la pince. GiLARDONi (1901), dans son myographe à poids variable pour l'étude des conditions mécaniques de la systole ventriculaire, a employé un poids cylindrique, à section très grande, qui flotte sur un bain de mercure. GiLARDONi a construit aussi un myographe à ressort de torsion. En agissant sur ce ressort au moyen d'un fil attelé à un levier très léger et orienté d'abord à près de 180 degrés de la direction de la force, le déplacement angulaire de ce levier produit une augmentation de la résistance du ressort proportionnellement à l'angle décrit. Le cardiographe de Legros et Onimus consiste en deux tiges verticales supportées par une branche horizontale, et entre lesquelles se trouve saisi le cœur. L'une des tiges est fixe, l'autre est mobile autour d'un axe à pivot; cette dernière est reliée par sa partie supérieure au levier enregistreur du myographe de Marey. Quand le cœur augmente de volume dans le sens transversal, l'extrémité supérieure de la tige mobile entraîne le levier du myographe qui trace une courbe ascendante sur le cylindre enregistreur. Cet appareil s'applique aussi aux animaux à sang chaud, si l'on pratique la respi- ration artificielle. Fbedericq a modifié la pince myographique de^MARET de manière à pouvoir introduire une des branches à l'intérieur du cœur et à saisir entre ses mors la paroi du ventricule suivant l'épaisseur de celle-ci. Les deux branches de la pince sont mobiles sur une tige support. Une des branches est constituée par une tige de laiton pleine terminée par une petite plaque circulaire de 20 millimètres de diamètre. Cette branche est introduite dans le cœur par l'auricule et est poussée à travers l'orifice auriculo-ventriculaire. La branche qui s'applique à l'extérieur est terminée par une capsule exploratrice à air dont le bouton qui appuie sur le ventricule est supporté par un ressort qu'on peut approcher ou éloigner du tambour. ViBERT et Verdin (1892) ont modifié les cuillerons de la pince cardiaque de Marey, en ont perfectionné la mise au point, et ont fait en sorte que le cardiographe puisse aussi bien enregistrer les mouvements du cœur sur une surface horizontale que sur une sur- face verticale. La. pince cardiaque de Luigi d'AMORE enregistre les mouvements du cœur sur une surface verticale. Parmi les cardiographes ressemblant plus ou moins à la pince cardiaque de Marey, citons encore l'appareil de Porter. 6) L'étude des contractions cardiaques d'un cœur en place (m situ) à l'aide de la méthode de la suspensio7i a été faite par Langendohff (1884), Engelmann (1892) et Bottazzi. Voici le procédé employé : La grenouille étant mise sur le dos, on fait, dans la région cardiaque, une fenêtre d'un centimètre carré environ, on ouvre le péricarde, et on met dans le cœur un crochet d'ivoire, de métal ou de verre, à une distance d'un millimètre et demi environ de la pointe. Ce crochet est attaché par un fil à un levier disposé de telle sorte que le poids ou le ressort qui agit sur lui tende à le tirer vers le haut, tandis que les contractions cardiaques tendent à le ramener vers le bas. Le levier d'ENGELMANN était long de 12 centimètres ; il avait deux bras de 6 centi- mètres chacun. A l'extrémité d'un de ces deux bras il y avait un poids; à l'extrémité de l'autre, une plume inscrivante d'aluminium. Le levier présentait plusieurs trous pour l'attache du fil portant le crochet. On pouvait ainsi varier l'amplification des tracés. Un poids d'un gramme, mobile sur le levier, permettait de varier la résistance du levier aux mouvements. Pour inscrire les mouvements du cœur de la grenouille à l'aide de la méthode de la suspension, Brodie (1902) a construit un levier, à deux bras, extrêmement léger, fait par un fétu de paille et avec une plume en papier fixée à son long bras. La pointe du cœur est accrochée au petit bras du levier. L'axe du levier est formé par une aiguille qui se meut, avec le moins de frottement possible, entre les rainures d'un support à deux bras. Une petite lame-ressort appuie sur l'axe. c) Roy et ADAMr(1890) ont enregistré directement et simultanément les contractions GRAPHIQUE (Méthode). 919 longitudinales du cœur et les contractions des piliers. Voici le procédé qu'ils ont employé: Un petit support portant un levier est fixé au moyen d'un crochet sur la paroi cardiaque. Sur le levier, une petite poulie peut glisser dans une coulisse ; sur cette poulie passe un fil dont l'une des extrémités est Iixée par un crochet au cœur et l'autre extrémité au petit bras d'un des deux leviers enregistreurs qui sont placés au-dessus du cœur. Le deuxième levier enregistreur est destiné à enregistrer les contractions des piliers du cœur ; en effet, le fil qui lui est attaché, passe sur une poulie qui se trouve à l'extrémité du levier porté par le cœur, traverse l'oreillette, la valvule auriculo- ventriculaire et va se fixer par un crochet à un pilier du cœur. Les leviers enregis- treurs, placés sur un même support, sont portés par une sorte de suspension à la Cardan qui leur permet de suivre les mouvements de translation du cœur. d) Pour faire l'étude des contractions cardiaques à l'aide de la transmission à air, François-Franck a pro- cédé de la façon suivante : Quatre tambours à air sont mis en relation avec les deux oreillettes et les deux ventri- cules. Les membranes des ambours sont reliées, d'une manière fixe, à la paroi au- iculaire, au moyen d'une petite seri-e-fine ; cette serre- fine est en rapport avec la membrane par l'intermé- diaire d'une tige légère, ré- sistante et non articulée. Le diamètre des disques placés sur les membranes des tam- bours est grand. Les pulsations des ven- tricules sont recueillies sé- parément par des tambours à levier de 7 à 8 centimètres de long. Le bouchon de liège qui termine le levier est appliqué latéralement sur la paroi ventriculaire et perpen- diculairement à la surface. Tous ces tambours explorateurs sont reliés, par des tubes, avec des tambours enre- gistreurs qui inscrivent les mouvements reçus simultanément sur la surface enregis- trante. HijRTHLE (1891), au lieu de tambour à air, comme appareil explorateur, a employé une tige creuse, terminée par une très petite ampoule élastique qui était mise en contact avec le cœur par une ouverture faite à la paroi thoracique. Les mouvements du cœur étaient transmis à un petit tambour. Le tout, appareil explorateur, tube de transmission et tambour, était rempli de liquide. B. Cardiographie pléthysmograhique. — Le volume du cœur diminue pendant la systole et augmente pendant la diastole. Ces variations de volume peuvent être inscrites par des moyens appropriés : c'est là l'objet de la cardiographie volumétrique ou pléthys- mographique. I. Cœur isolé. — Fick et Blasius (1872), qui sont les premiers à avoir fait l'étude volumétrique d'un cœur isolé, ont employé le dispositif suivant: Le cœur est renfermé dans un espace clos rempli d'une solution saline; cet espace communique avec un tube manométrique, coudé deux fois, et rempli aussi d'une solu- FiG. 147. — Schéma du dispositif de Fkançois-Franck pour l'inscription simultanée des mouvements des ventricules et des oreillettes. 920 GRAPHIQUE (Méthode). tion saline. Dans le bras libre de ce tube il y a un flotteur enregistreur. Le cœur possède denx canules, l'une dans le sinus veineux, l'autre dans l'aorte, pour la circulation arti- ficielle ; l'une de ces canules est en relation avec le rase qui contient la solution nutri" tive (du sérum défibriné par exemple). — Quand le cœur est en diastole, et que son volume augmente, le liquide du manomètre, et avec lui le flotteur, monte ; c'est le contraire pendant la systole. Les variations de hauteur du manomètre indiquent les diverses phases de l'activité du cœur. Le tube mamonétrique, au lieu d'avoir un tlolteur, peut être relié avec un tambour enregistreur. Le récipient du cœur est placé dans un bain à température constante. Maret (1875) a placé le cœur dans un récipient plein d'air ; cet espace clos commu- niquait par un petit tube avec un tambour enregistreur. Dans l'appareil d'ensemble employé par Marey pour faire la circulation artificielle du FiG. 148. — Cardio-pléthysmographe de Fick et Blasius. cœur, et pour inscrire simultanément les variations du volume, de la pression et du débit, le récipient du cœur est formé par un tube en U dont l'une des branches, celle dans laquelle se trouve placé le cœur, est large, et l'autre étroite ; cette dernière pré- sente un renflement qui, par un tube en caoutchouc, communique avec le tambour qui enregistre les variations de volume du cœur. Le liquide arrive dans le cœur sous pression constante, grâce à un vase de Mariotte ; il entre dans le cœur par une canule de William. François-Franck (1877) a placé le cœur dans un tube plein d'huile. Le liquide est plus avantageux que l'air ; c'est même une très mauvaise condition pour mesurer les changements de volume d'un organe, que de le placer dans l'air, celui-ci absorbant par son élasticité une grande partie des variations de volume. L'appareil de Roy (1878) se compose d'un vase plein d'huile dans lequel le cœur est placé. Un petit tube vertical est adapté à la paroi inférieure du vase; dans ce tube, un petit piston peut se déplacer verticalement; pour que le liquide ne coule pas entre les parois du tube et celles du piston, une mince membrane est attachée aux bords du tube GRAPHIQUE (Méthode). 921 et au piston. Cette membrane souple, formée de la membrane péritouéale du veau imprégnée de glycérine, ne gêne pas les mouvements du piston. La lige du piston est reliée à un levier enregistreur placé sous le récipient. Gaskell (1880) a modifié un peu le tonomètre cardiographique de Roy, et il a remplacé l'huile par une solution saline. Le cardiopléthysmographe ou piston-recordcr de Schâfer se compose d'un petit réci- pient de forme ovoïde. Aux deux extrémités (diamétralement opposées) de ce petit FiG. 149. — Cardio-pléthysmographe de Marey. récipient se trouvent fixés deux tubes en verre munis de robinets. A la partie supé- rieure du récipient se trouve une canule à deux voies à laquelle est attaché le cœur. Des électrodes pénètrent dans le récipient par sa paroi inférieure. Dans un des tubes de verre horizontaux se trouve placé un petit piston dont la tige porte une plume enregis- trante. Tout l'appareil est plein d'huile. II. Cœur en place. — La cavité péricardique, close de toutes parts, peut être considérée comme une boîte à parois inextensibles qui entoure le cœur. En mettant cette cavité en communication avec un tambour enregistreur, on peut étudier les variations de volume du coeur, comme si le cœur était placé dans un pléthysmographe. Voici le procédé qu'on emploie pour faire ce genre d'enregistrement : Un tube de verre étant introduit dans le ligament creux qui relie le péricarde au diaphragme, on ligature le sac péri- cardique sur le tube. Ce tube est relié à un tambour enregistreur. Avant l'enregistre- 922 GRAPHIQUE (Méthode). ment, on introduit, par insufflation, un peu d'air dans la cavité péricaidique, pas trop, pour ne pas comprimer le cœur. Cette façon de faire l'étude des variations de volume du cœur a été employée par François-Franck, Stefani, Tigerstedt, Knoll, etc. Pour éviter les variations de résistance présentées par la membrane du tambour enregistreur, Johanson et Tigerstedt l'ont remplacé par un piston-recorder. Knoll a construit une canule spéciale qui peut être introduite dans le péricarde du lapin, sans nécessiter l'ouverture du thorax. La canule médiaslinale de Knoll est en métal, elle se termine par une forte pointe aiguë qu'on loge derrière le sternum. L'ouver- ture qui se trouve sur la partie convexe de la canule fait communiquer la cavité péri- cardique avec l'intérieur de la canule, et de là avec le tambour enregistreur. Cette canule, de même que celle de Spengler, n'a pas besoin d'être fixée par une ligature. Pour enregistrer les variations de volumes du cœur de la tortue, il suffit de faire une ouverture, à l'aide du trépan, dans la carapace, juste en face du cœur, et d'y fixer un tube en verre qui est relié avec un tambour enregistreur. On peut improviser facilement un appareil pléthysmographique très simple, en plaçant le cœur du chien dans un bocal de verre. En rabattant le péricarde par-dessus les bords, on constitue une cavité bien close qu'on met en communication avec un tam- bour enregistreur. Le pléthysmographe cardiaque ou oncographe ou cardiomètre de Roy (1887) et Adami (1888) se compose d'une sorte de boite formée de deux moitiés, se fermant autour d'un anneau qui embrasse les vaisseaux de la base du cœur. Cette boîte est remplie d'huile; à sa moitié supérieure se trouve fixé un tube cylindrique dans lequel peut se mouvoir un piston. Les bords du tube sont réunis au piston par une mince membrane inextensible et lâche, qui permet au piston de se mouvoir, mais qui empêche que l'huile s'échappe en dehors de la boîte. Le piston est en relation avec un levier inscripteur. Ce levier et avec lui le piston sont soulevés par un ressort en caoutchouc. De cette façon la pression autour du cœur (dont le pe'ricarde a été ouvert et fixé autour de l'anneau de la boîte) est inférieure à la pression atmosphérique, comme dans l'état normal. Les déplacements de la plume donnent des tracés qui représentent les variations de volume du cœur. On peut connaître le volume du sang qui entre et qui sort du cœur si l'on fait, avant ou après l'expérience, l'étalonnage de l'appareil. C. Cardiographie manométrique. — Les variations de pression intracardiaques, étant très rapides, ne peuvent être étudiées avec un manomètre à mercure, cet appareil présentant une trop grande inertie. Seuls les manomètres élastiques peuvent servir à ce genre d'étude. Nous ne reviendrons pas ici sur la description des appareils de Fick, V. Frey, HOrthle, Krehl, etc., que nous avons étudiés dans le chapitre consacré spécia- lement à la pression du sang; nous exposerons seulement quelques faits relatifs au moyen d'aborder le cœur pour le mettre en relations avec les appareils enregistreurs. I. Chauveac et Marey (1861), dans leurs mémorables expériences sur le mécanisme du cœur, ont employé des sondes exploratrices spéciales pour les différentes cavités du cœur. La sonde cardiaque droite, qu'on introduit dans le cœur par la veine jugulaire droite, est une sonde à double courant qui porte deux ampoules. Ces ampoules sont formées par un tube de caoutchouc soutenu par une carcasse en fil d'acier qui empêche le tube de s'affaisser entièrement sous la pression du sang, tout en lui permettant de changer légèrement de volume sous l'influence des variations de la pression. Des tubes séparés mettent chacune de ces ampoules en communication avec des tambours enre- gistreurs. La sonde cardiaque (jauche possède des ampoules plus résistantes qu(>. la sonde cardiaque droite. Une des ampoules se loge dans l'oreillette, l'autre dans le venti icule. Les sondes sont montées sur un tube métallique ayant un diamètre extérieur de J à 4 millimètres. Ces sondes cardiaques sont de véritables sphygmoscopes; leur membrane élastique, au lieu d'être soumise aune force expansive intérieure, est soumise à une force de pres- sion extérieure. Les sondes de Chauveau et Marey étaient applicables au cheval. Sur leur modèle, on a construit des sondes applicables au chien. GRAPHIQUE (Méthode). 9-23 Les sondes de François-Franck (1891) sont en métal ou en caoutchouc durci; elles sont terminées par une petite carcasse métallique en ressort d'acier fin, sur laquelle est modérément tendu un doigtier de caoutchouc soufflé qui supportera les pressions sans que ses parois opposées s'accolent. Dans les sondes manométriques doubles, la portion destinée à l'oreillette peut glisser, le long du tube de transmission, jusqu'à la portion destinée au ventricule, de façon à permettre un écartement variable, suivant la longueur du cœur des animaux. La sonde cardiaque gauche est introduite dans le cœur gauche par la veine pulmonaire supérieure gauche. Le tambour enregistreur mis en com- munication avec une sonde cardiaque doit être d'une faible capacité. Gley, v. Frey et Krehl, Fredericq, etc., ont aussi construit des sondes cardiaques pour le chien, ressemblant plus ou moins aux sondes de Chauveau et Marey. La sonde de HuRTHLE contient un ressort antagoniste. Les sondes de Rolleston, Roy et Adami sont des sondes ouvertes. La sonde de Meyer (1894) fonctionne à la fois comme les ampoules à air fermées de Chacveau-Marey et comme la sonde à ressort de Hurthle. Cette sonde se compose d'un tube de .3 millimètres de diamètre extérieur; ses ampoules peuvent être réduites au moment du passage dans le vaisseau. L'ampoule est formée par une carcasse métallique à jour de même diamètre que le tube, et se termine par une olive. De cette olive partent trois ressorts à concavité interne, placés entre les ouvertures de la carcasse métallique et venant s'attacher à un disque évidé qui limite sans frottement la portion inférieure du tube à transmission de la sonde. De ce disque part une fine tige de cuivre qui remonte le long du tube à transmission et le dépasse par une extrémité opposée. Elle est destinée à actionner le disque manipulateur des ressorts : à cet effet son extré- mité est filetée et peut recevoir un écrou mobile qui, lorsqu'on le manœuvre, perd son point d'appui sur le bord libre de la sonde, fait remonter la tige filetée, le disque qui la termine et les ressorts qui viennent s'y attacher. Ces derniers sont alors tendus et s'effacent au niveau de la carcasse rigide de la chambre à air. Un manchon de caout- chouc recouvre toute l'ampoule. La sonde étant placée dans le cœur du chien, on dévisse l'écrou, les ressorts reprennent leur position concave et dilatent le manchon (de 1 centi- mètre de diamètre). IL La voie d'introduction des sondes cardiaques varie suivant les expérimentateurs.' La majorité des physiologistes, à l'exemple de Chauveau et Marey, les font pénétrer dans le cœur par la jugulaire et par la carotide, sans ouvrir le thorax. — Rolleston, Roy et Adami ont introduit la canule appropriée à leur appareil soit par l'oreillette, soit par la pointe du cœur. — Fredericq et François-Franck ont fait passer aussi leur sonde par l'oreillette, pour la mettre en place. — Magini pénètre, à travers la paroi thoracique, dans le cœur, au moyen d'un trocart. IIL Les sondes manométriques cardiaques peuvent donner non seulement le sens des changements de pression, mais encore leur valeur absolue, si l'on a eu soin de les graduer préalablement au moyen d'un manomètre à mercure. Pour lire avec plus de sûreté les indications fournies par leurs sondes, Chauveau et Marey ont déterminé le moment où la pression tombe à zéro, au moyen d'une sonde spéciale, la sonde à pven- sion négative. IV. Porter a employé (1896) un procédé spécial qui permet de mettre le manomètre élastique en communication avec le ventricule à un moment quelconque de la systole. Une canule double est introduite, par la sous-clavière et l'aorte, dans le ventricule gauche. Une des canules est mise en communication avec un manomètre de Hurthle renversé B (avec le levier en bas). La deuxième canule est reliée également, mais par un tube muni d'un robinet, à un second manomètre A qui inscrira les courbes. Sur le levier du manomètre B est appliqué un fil métallique dont les extrémités viennent plonger dans deux cupules de mercure. Quand la pression augmente dans le ventricule, et que, par conséquent, le levier s'abaisse, le contact du fil avec le mercure complète un circuit électrique et envoie un courant dans un fort électro-aimant dont l'armature ouvre le robinet interposé entre la deuxième canule et le manomètre A. Lorsque, au contraire, le fil du manomètre B abandonne le mercure, l'armature reprend sa position première, et le robinet se ferme. Pendant que le courant traverse l'électro- aimant, le manomètre A, ainsi mis en communication avec la cavité du ventricule, 9U GRAPHIQUE (Méthode). grâce à l'ouverture du robinet, inscrit la courbe de pression. On peut donc s'ar- ranger de telle sorte que les bouts du fil adapté au manomètre B soient, pendant la diastole, plus ou moins rapprochés de la surface du mercure, et que le mano- mètre A inscrive la courbe à partir d'un point plus ou moins voisin du sommet. Quand on commence à enregistrer ainsi la courbe très près de son maximum, ia fermeture du robinet laissera dans le manomètre A une pression déjà très élevée; à la systole suivante, l'instrument n'aura plus à indiquer que la différence entre cette pression et le maximum, c'est-à-dire qu'on a ainsi un moyen de rendre presque insignifiante la cause d'erreur due à l'inertie. Le sommet de la courbe sera donc inscrit avec ses véritables caractères, V. François-Franck (1893) a fait l'étude de la pression intra-cardiaque, artérielle et veineuse, et de la force maximum du cœur, à l'aide de la méthode des ampoules conju- guées. — Cette méthode, introduite dans la technique physiologique par Morat (1882), à l'occasion de ses recherches sur les contractions de l'estomac, a été modifiée par Wertheimer et Meyer. — Voici la description du dispositif adopté par François- Franck : Une sonde vide, pourvue d'une ampoule, est introduite dans la cavité cardiaque. Cette sonde se divise en trois branches. Une de ces branches se termine par une ampoule qui est enfermée dans un tube de verre rempli d'eau, et communiquant avec un tam- bour inscripteur de Marey. — Une autre branche communique avec une ampoule que l'on comprime à l'aide d'une pince à vis, quand on veut étudier les maxima de pression systolique. — Enfin, la troisième branche de la sonde communique avec un manomètre métallique. VI. Pour mesurer le travail du cœur de la grenouille, Kronecker a employé le dispo- sitif suivant : Deux burettes (b, c), fonctionnant comme des llacons de Mariotte, peuvent être mises alternativement en rapport par l'intermédiaire d'un robinet à trois voies hi avec l'une des branches d'une canule double introduite dans le cœur; l'autre branche de la canule, plus large, communique avec le manomètre. Une branche du manomètre se continue avec un tube recourbé muni d'un robinet h^, de telle sorte que, quand ce dernier est ouvert, le liquide venant de la burette traverse le cœur sans que celui-ci agisse sur le manomètre. Par une position convenable du robinet hi, on peut mettre soit l'une soit l'autre des deux burettes en communication avec le cœur, et étudier ainsi l'influence des liquides de différente nature. En élevant ou en abaissant les tubes de verre qui plongent dans les burettes, on augmente ou on diminue la pression à laquelle le cœur est soumis pendant la diastole. Le cœur est placé dans un récipient coudé r, renfermant, avec une petite quantité de mercure, une solution physiologique de Na Cl; le mercure sert à compléter un circuit, si l'on veut exciter électriquement le cœur. Quand le cœur doit actionner la colonne du manomètre, les robinets hi et h) sont fermés. La branche libre du manomètre est munie d'un flotteur avec plume inscrivante. Le travail produit par chaque systole est proportionnel au carré de la hauteur de la pulsation. Si r est le rayon du tube manométrique, d la densité du mercure, hi la hauteur de la colonne de mercure dans la branche libre au-dessus du niveau diastolique, le poids de la colonne soulevée sera r.i'-Jh. Ce poids a été soulevé, d'autre part, à une hauteur h : tout se passe, en effet, comme si l'on avait enlevé la colonne de hauteur h dans la branche cardiaque, à partir du niveau primitif, pour la transporter dans la branche ouverte, au-dessus de ce même niveau. Chaque particule ayant été soulevée d'une hauteur h, le travail sera : r.r- dh x h = r.r^ dh-. D. Cardiographie photographique. — Onimus, en 1865, et, plus tard, Onimus et Martin, Thompson (1886), etc., ont photographié le cœur vivant du lapin, du pigeon, du chat et de la grenouille. — Sur les photographies obtenues, on voit un double contour nettement dessiné : le contour extérieur correspond au cœur en diastole, le contour intérieur au cœur en systole. Marey a fait la chrjnophotographie d'un cœur de tortue séparé du corps. Fano et Baldano (1889) ont enregistré, par la méthode photographique, les mouve GRAPHIQUE (Méthode). 9125 ments des régions veineuse et artérielle du cœur embryonnaire du poulet, entre le second et le troisième jour de développement. ScHÂFER (188i) a photographié les mouvements d'une colonne liquide qui communi- quait avec une chambre pleine d'huile dans laquelle était placé le cœur. Le tube était placé entre les deux fentes de deux écrans, l'un antérieur et l'autre postérieur, qui délimitaient bien la lumière qui tombait sur la surface sensible. La lumière était soit celle du soleil reflétée par un héliostat, soit celle d'une lampe à oxycalcium. § IL — Cardiographie indirecte [cardiographie clinique). Les battements du cœur'peuvent être aussi étudiés, chez l'homme et chez les animaux, sans nécessiter l'ouverture du thorax, la mise à nu du cœur, ou l'introduction d'appa- reils dans l'intérieur de la cavité cardiaque. Les appareils qui servent à cette étude s'appellent cardiographes. — Il y a peu de cardiographes directs ; il y en a beaucoup à enregistrement à distance. A. Cardiographes directs. — Le sphygmographe direct de Marey a été employé comme cardiographe par Garrod (1870), Galabin (1875), Landois, etc. Le cardio-sphygmographe de Garrod est formé par la réunion de deux sphygmo- graphes directs de Marey, dont l'un sans mécanisme d'horlogerie. Ce dernier est formé par un simple ressort dont le bouton est appliqué sur la région précordiale. Dans le cardiographe direct de Galabin, le ressort présente une forme spéciale : il est à deux bras. Le bras long du ressort s'applique sur la région précordiale ; l'autre bras, beaucoup plus court, présente une vis qui permet de varier la pression du ressort à volonté. La partie qui transmet le mouvement au levier enregistreur est suspendue ; de celte façon son poids ne presse pas sur la région dont on examine les mouvements. L'appareil est attaché à l'aide d'une ceinture. La pression du ressort de cet appareil doit être tellement faible que l'appareil puisse enregistrer même les pulsations des veines. Laulanié a construit un cardiographe direct sur le principe de la pince sphygmo- graphique.Dans cet appareil, la branche fixe du sphygmographe a été supprimée, le cœur reposant sur une partie fixe, la paroi thoracique. B. Cardiographes à transmission. — I. Chez l'homme. — a) Pour enregistrer les pulsations cardiaques de l'homme à l'aide de la transmission à air, Marey s'est servi d'abord d'un stéthoscope de Koenig. Cet appareil se composait d'une capsule ouverte, mise en commnication avec un tambour enregistreur, qu'on appliquait sur la région précordiale. Marey ne larda pas à perfectionner ce procédé d'enregistrement, en prenant d'abord un tambour métallique fermé d'un côté par une double membrane élastique, qui, par insufflation, circonscrit un espace lenticulaire ; l'ouverture opposée du tambour commu- niquait avec un tambour fermé par un embout. Plus tard Marey (1865) donna à son cardiographe une forme plus pratique. Le cardio- graphe de Marey se compose d'une sorte de cloche métallique dans laquelle se trouve logé un tambour à air. Ce tambour renferme un ressort à boudin qui fait saillir la mem- brane en dehors. Un petit disque, collé sur la membrane, porte le bouton qu'on applique sur la région précordiale. Le tube qui met en communication le tambour de l'appareil explorateur avec le tambour enregistreur traverse le fond de la cloche support. Une vis de réglage avec ressort permet de faire descendre ou monter le tambour dans la cloche, et par conséquent de faire varier la pression que le bouton exerce sur la paroi précor- diale. L'appareil est tenu à la main, ou à l'aide d'une bande élastique il est appliqué contre le thorax, le bouton du tambour étant logé dans un espace intercostal, au point où la pulsation du cœur est le plus sensible. Sur le modèle de l'appareil de Marey, on a construit plusieurs cardiographes dont voici quelques exemples : 926 GRAPHIQUE (Méthode). Le cardiographe de Burdon-Sanderson (1873) se compose d'un tambour à air qui repose sur la paroi thoracique à l'aide d'un support qui présente trois pieds en forme de vis; de cette façon on peut ajuster très bien l'appareil. Une lame-ressort recourbée en dedans est fixée par une de ses extrémités au dos du tambour; l'autre extrémité se trouve entre la paroi thoracique et la membrane du tambour; à travers cette extrémité passe une vis dont la tête, formée par un bouton d'ivoire, appuie sur le thorax, et la pointe sur la membrane du tambour. ZiMMERMANN (Leipzig) a construit des cardiographes analogues. Le cardiographe d'EoGREN (1889) se compose d'une sorte de coquille à l'intérieur de laquelle se trouve un tambour à air. Cette coquille sert de stéthoscope en même temps que de support du tambour, car elle présente un tube qui va à l'oreille. Le tambour présente une tige à dent qui s'engrène avec une roue dentée fixée sur la coquille. Cette roue peut être mise en mouvement à l'aide d'une manivelle qui se trouve en dehors de la coquille ; de cette façon, on fait monter le tambour. Le tambour contient dans son intérieur deux ressorts en spirale. Le tube qui met en communication le tambour explorateur avec le tambour inscripteur traverse la paroi de la coquille. Une bande de caoutchouc fixe l'appareil au thorax. Le pansphygmographe de Brondgeest (1873) et l'appareil explorateur du polygraphe de Mathieu et Meurisse (1875) peuvent servir aussi comme cardiographes. Il en est de même du cardiographe de Knoll (1879) construit sur le principe donné par Grunmach (1876). — Cet appareil se compose d'une plaque en fer à cheval recou- verte de cuir, et reposant sur la poitrine. Sur ce support est fixé le ressort qui porte une petite pelote appuyée sur la région précordiale. La pression exercée par le res- sort peut être réglée à l'aide d'une vis. A la partie supérieure de la pelote se trouve une pointe qui touche la membrane du tambour à air fixé au support. L%- cardiographe de Mariette Pompilian est tout à fait semblable au sphygmographe du même auteur; il n'en diffère que par la forme du support. Celui-ci se compose d'un petit cadre pourvu de deux ailettes articulées qui sont appliquées sur le thorax à l'aide d'une bande élastique. Sur ce cadre se trou- vent fixées les pièces réglables qui portent le levier et le tam- bour à air. Le grand bras du le- vier porte le bouton qui appuie sur la région précordiale et qui est relié à la membrane du tam- bour; le petit bras du levier est attaché à l'extrémité inférieure d'un ressort à boudin. Le tam- bour est pourvu d'un dispositif qui permet de varier la tension de la membrane de caoutchouc. b) On a construit aussi des cardiographes dans lesquels l'eau a été employée comme moyen de transmission. Le cardiographe de Keyt (1887) est en tout semblable au sphygmographe du même auteur. Un petit tube évasé, analogue au sphygmoscope d'HÉRissoN, est appliqué sur la région précordiale; ce tube est réuni par un tube de caoutchouc plus ou moins long avec le milieu d'un tube horizontal ayant ses deux extrémités recourbées. L'une de ces extrémités est fermée par une membrane élastique sur laquelle repose le levier enregistreur; l'autre extrémité est formée d'un long tube gradué. Tout le système est rempli d'eau ou d'alcool. La plume enregistrante inscri FiG. 150. — Cardiographe de Mariette Pompilian. GRAPHIQUE (Méthode). 927 les pulsations cardiaques sur une plaque verticale mise en mouvement par un méca- nisme d'horlogerie. Dans le cardiographe de Zadek, les pulsations cardiaques sont transmises, par l'inter- médiaire d'une pelote qui appuie sur le thorax, à une petite capsule recouverte d'une membrane de caoutchouc, et de là par un tube de caoutchouc à une seconde capsule. Sur la membrane de cette dernière capsule, repose une perle de verre, laquelle est fixée à une tige verticale qui met en mouvement le levier inscripteur. Tout le système est rempli d'eau. II. Chez les animaux. — Pour enregistrer les pulsations cardiaques de petits animaux, Marey a construit un cardiographe à deux tambours conjugues. Deux tambours à air semblables, contenant à l'intérieur chacun un ressort à boudin^ sont fixés aux extrémités de deux branches d'une sorte de pince articulée au moyen d'une charnière. Chacun des tambours présente un tube qui s'ouvre dans un tube en Y, dont la branche unique aboutit à un tambour enregistreur de Marey. Cet appareil est placé de telle sorte que la charnière s'applique sur la ligne médiane du corps de l'animal. Le thorax du lapin ou du cobaye est compris entre les deux tambours comme entre les mors d"une pince. Un lien jeté autour du corps de l'animal est fixé par un bout à chacun des tambours au moyen d'un crochet. Sur le modèle de l'appareil de Marey, d'Arsonval a fait construire par Vepdin un explorateur du cœur du lapin à glissière. Les branches de cet appareil ont des fentes qui servent de glissières aux tambours explorateurs, ce qui permet à ces derniers de se rapprocher des extémités au centre, et par conséquent de saisir des thorax de toutes dimensions Le cardiographe direct à aiguille de Laulanié (1889) se compose d'un tambour à air de Marey, dont la membrane est mise en relation avec l'extrémité supérieure d'une aiguille coudée à angle droit. Cette aiguille pénètre dans la cavité thoracique d'un chien, dans la région précordiale. Le support du tambour est fixé sur un disque métal- lique, ouvert au milieu pour laisser passer l'aiguille; ce disque est placé sur la paroi thoracique et y est attaché par des agrafes ou des liens élastiques. Le cardiographe de Bardier (1897) pour le cœur du lapin, se compose de deux par- ties : la première, c'est l'appareil de contention du thorax; elle se compose de deux arcs métalliques articulés; à l'extrémité d'une branche est ménagée une ouverture pour l'exploration précordiale. La deuxième partie, c'est le tambour d'exploration fixé par un support sur la branche gauche de l'appareil de contention. Le tambour est mobile dans tous les sens grâce à une articulation à billes constitué de la façon suivante : deux billes, une fixée au support, l'autre au tambour, sont serrées par une pince. La mem- brane du tambour présente un bouton ou une aiguille qui appuie sur la région précor- diale. C. Gardiopneumographie. — Ceradini a construit un hémothoracoyraphe et Landois un cardio-pneumographe , en se basant sur le fait suivant, observé par Voit et LossER : La diminution de volume du cœur, à chaque contraction ventriculaire, détermine une raréfaction de l'air intra-pulmonaire, de sorte que si l'on suspend la respiration, la glotte étant ouverte, il se produit à chaque systole un passage d'air du dehors dans le poumon. Il est facile de rendre évident ce courant d'air et de l'enregistrer. 11 suffit pour cela de tenir entre les lèvres un tube de caoutchouc communiquant avec un tam- bour à levier. Landois a mis en évidence ce courant d'air en se servant des flammes manométriques, comme l'avaient fait aussi (jErhardt et Klemensiewicz. Fredericq a inscrit les mouvements du cœur en introduisant une sonde dans l'œso- phage. Cette sonde, munie à une de ses extrémités d'une ampoule, communique par l'autre avec un tambour à levier enregistreur. D. Cardioradiographie. — La radiographie a été appliquée à l'étude des variations de volume du cœur par Zuistz et Schumburg {Arch. f. Phys., 1896, p. o50), Bouchard {Soc. de BioL, 1898, p. 95 , etc. 928 GRAPHIQUE (Méthode). § III. — Enregistrement des bruits du cœur. Les premiers essais d'enregistrement graphique des bruits du cœur sont dus à Fredericq (1892) qui a photographié les oscillations de la membrane d'un phonauto- graphe. HuRTHLE (1893) a employé une méthode basée sur l'emploi du microphone. Voici en quoi consiste cette méthode : Quand en un endroit d'un circuit électrique la conduction se fait à l'aide de deux morceaux de charbon, la résistance rencontrée par le courant dans ce point varie avec les variations de pression qui existent entre les deux charbons. En faisant arriver des vibrations sonores sur l'un des charbons, celui-ci commence à osciller; par conséquent la pression qu'il exerce sur le charbon avec lequel il est en contact présente des variations. Il en résulte des variations de l'intensité du courant qui traverse les charbons. Le microphone employé par Hùrthle se compose d'un petit entonnoir fermé par une membrane en papier (M). A celte membrane se trouve fixé, comme le marteau à la mem- brane du tympan, un petit morceau de bois dont l'extrémité est formée par un des trois morceaux de charbon intercalés dans le circuit. Deux morceaux de charbon (Ki, K2) présentent une petite cavité à leur extrémité; le troisième (K3), qui est entre les deux précédents, se termine par des pointes qui pénètrent dans les cavités présentées par les exti'émités des deux autres charbons (Ki, K2). A l'aide d'une vis on peut rapprocher un des charbons (K2) plus ou moins des charbons précédents, et par conséquent les comprimer plus ou moins. Quand un des charbons commence à vibrer sous l'influence des vibrations sonores, il y a des variations de pression entre les contacts des charbons, et par conséquent des variations de l'intensité du courant électrique qui passe par les fils [du d^) et les charbons. En enregistrant les variations de l'intensité du courant électrique, on enregistre les bruits du cœur. En intercalant le microphone dans le circuit primaire d'une bobine d'induction, on obtient des courants induits correspondant aux variations d'intensité du courant pro- voquées par les bruits du cœur. En excitant par ces courants induits le nerf du muscle gastrocnémien de la grenouille (à la température de 30°, pour avoir une excitabilité plus grande du nerf) et en enregistrant les contractions musculaires, on obtient la représentation graphique des bruits du cœur. C'est ainsi qu'a procédé Hurthle. Les ébranlements thoraciques provoqués par les battements du cœur influencent le microphone au même degré que les vibrations sonores. Pour éviter l'influence de ces ébranlements sur le microphone, Hurthle plaçait le microphone sur la surface pré- cordiale loin de la pointe. Pour éviter complètement l'intervention des ébranlements mécaniques, Einthoven et Geluk (1894) ont placé le microphone loin de la paroi thoracique sur une pierre reposant sur quatre morceaux de caoutchouc fixés à une colonne. A cette même colonne se trouve fixé un tube métallique, dont une extrémité est reliée par un tube de caoutchouc avec l'entonnoir du microphone, et l'autre extrémité, toujours par l'inter- médiaire d'un tube en caoutchouc, avec un entonnoir qu'on place sur la paroi précor- diale. Le tube métallique présente une troisième ouverture munie d'un robinet qu'on ouvre pour régler la pression à l'intérieur du tube. Pour enregistrer les bruits du cœur, c'est-à-dire les variations de l'intensité élec- trique, Einthoven et Geluk, au lieu d'intercaler dans le fil de la bobine d'induction un muscle, comme Hurthle, ont intercalé un électromèlre capillaire. Les variations de la hauteur de la colonne capillaire de l'éiectromètre étaient enregistrées par la photo- graphie. Hurthle (1895) a construit un microphone plus perfectionné que celui que nous avons décrit. .S'étant assuré que la tige d'un diapason en bois vibre parfaitement à l'unisson du son transmis, il a fixé les contacts du microphone (charbon et argent) sur les deux branches d'un diapason de ce genre. Entre la tige de l'instrument et la paroi thoracique, il a interposé un appareil destiné à renforcer le son (cône creux de bois) dans lequel une série de disques minces en sapin sont superposés et fixés sur une tige GRAPHIQUE (Méthode). 949 de bois cylindrique qui les traverse en leur centre). Les variations du courant produites par les ébranlements des contacts du microphone servent à exciter un électro-aimant. En face de ce dernier est disposé un tambour à air fermé par une membrane élastique épaisse et fortement tendue, sur laquelle est fixée une lame de fer actionnée par l'électro- aimant; les variations de pression dans la capsule sont inscrites par un tambour enre- gistreur. On peut aussi faire agir le microphone sur un téléphone. HoLOwiNSKi a réussi, vers 189lj, à instituer une méthode entièrement automatique pour photographier les bruits du cœur. Le principe de cette méthode repose sur ce fait (jue la tension périodique des val- vules est non seulement synchronique avec les vibrations sonores des bruits stéthosco- piques, mais aussi avec les secousses mécaniques (ébranlements) qui l'accompagnent en se propageant sur toute la surface du thorax. Ces secousses sont directement insen- sibles à l'ouïe (à cause de leur petite fréquence ; mais on les sent souvent sous la pression du doigt et on les voit par la réflexion d'une mite sur un miroir appliqué à tous les points du thorax. Pour fixer photographiquement les instants de ces secousses, Holowixski a employé un appareil qui comprend quatre organes princi- paux : 1° Un microphone perfectionné, appliqué sur la surface du cœur ; 2° Un téléphone opti- que, excité par le micro- phone, et dont le dia- phragme produit les an- neaux colorés de Newton ; 3° Un système optique pour éclairer les anneaux et en réfléchir l'image réelle, inverse et agran- die, sur une étroite fente verticale; 4° Un cylindre, enve- loppé par un papier très sensible, qui tourne derrière la fente de la chambre photo- graphique. Examinons chacune de ces parties séparément : L Le microphone (à contacts de charbon et platine) est fixé, par l'entremise d'un axe de rotation, sur le support d'un cardiographe à transmission aérienne, et l'on règle rapidement la sensibilité voulue de l'instrument, en l'inclinant plus ou moins autour de son axe, par rapport à la direction verticale. De plus, l'amplitude des vibrations microphoniques peut être amortie à l'aide d'une spirale, qui permet d'éliminer l'effet des secousses accidentelles et plus faibles au profit des ébranlements plus forts, synchro- niques avec les bruits. Kn commençant par la sensibilité minimum du microphone, et en l'augmentant successivement, on entendra : (a) d'abord les deux bruits si faiblement que l'application immédiate de l'oreille au téléphone devient alors nécessaire; (6) puis, le premier bruit s'entend à distance, tandis que le second ne l'est pas encore; (c) les deux bruits sont assez forts pour être perçus à grande distance; (d) enfin le rythme des bruits devient de plus en plus indistinct et est accompagné de trépidations accidentelles (interruptions momentanées du courant). La phase (c) de la régulation convient seule pour la photographie des deux bruits, et elle est maintenue indéfiniment, une fois réglée, tant que le microphone ne change pas son inclinaison par rapport à la verticale. Les commencements des sons téléphoniques sont alors nets et précis et coïncident exactement avec l'auscultation simultanée d'un stéthoscope. Le diaphragme du téléphone accomplit des vibrations sonores qui dépassent souvent 0"°»,0002 pour le premier bruit et sont généralement moindres pour le second bruit. FiG. 151. — Microphone de HCrthliî. DICT. DE PHYSIOLOGIE. — TOME VU. 39 030 GRAPHIQUE (Méthode). II. Le diaplirairme du téléphone optique porte à sou centre une fine aiguille, 1er minée par un chapeau, que l'on colle à la surface (vernie en noir) d'une mince ^0™",t lame de verre. Cette lame acquiert ainsi une courbure convexe (à très gi'and rayon) et se trouve placée à une petite distance sous une autre lame plus épaisse (micromètre de Babinet), qui est portée par trois vis micrométriques (méthode de Fizeau). La couche d'air comprise entre ces deux lames forme les anneaux colorés, dont les diamètres se contractent ou se dilatent sous l'influence d'un mouvement descendant ou ascendant du diaphragme. Lorsque le sens du courant est inverse, c'est-à-dire contraire au champ magnétique des noyaux dans les bobines téléphoniques, et que la sensibilité du microphone est réglée de manière à ne jamais interrompre le circuit galvanique, alors chaque secousse cardiaque (bruit) accroît la résistance du microphone et afTaiblit l'intensité primitive du courant; son e(Tet se traduit par un mouvement total brusi{ue et descendant du diaphragme téléphonique, qui est d'ailleurs concomitant avec les vibrations sonores. On obtiendra, dans les mêmes expériences, un mouvement ascendant du diaphragme en changeant le sens du courant (direct, c'est-à-dire concordant avec le champ magné- tique des noyaux). Néanmoins, toutes autres conditions égales, le mouvement ascendant aura une amplitude moindre, et cela à cause de la viscosité de l'air, condensé à la surface des deux verres. Celte viscosité croît dans une progression rapide, à mesure que la couche d'air devient plus mince, et son influence est manifeste aux mesures niicroniétriques, non seulement pour les anneaux du premier ordre (O'"'",0002 d'épaisseur d'air), mai'; même pour les anneaux au delà du quatrième ordre (0™™,001). III. Le téléphone optique est placé à 4o degrés par rapport aux rayons émis par une lampe au magnésium, dont la lumière traverse d'abord deux verres violets (X = 0'"",0004 environ), éclaire ensuite les anneaux et en réfléchit l'image réelle (agrandie 4 à 3 fois par la lunette) sur la partie inférieure d'une fente verticale. La partie supérieure de cette fente, éclairée par un autre système de lentilles, sert à enregistrer simultanément les oscillations des autres aiguilles inscrivantes (levier d'un cardiographe, d'un pneumo- graphe, d'un chronographe, etc.). IIoLowixsKi a employé un grossissement de 1.600 environ; rapport entre les ampli- tudes de l'image photographiée des anneaux mobiles et les amplifications correspon- dantes du diaphragme téléphonique. La secousse du premier bruit cardiaque produit ordinairement une contraction de l'anneau central (violet clair, du deuxième ordre) de plus de 8 millimètres, ce qui correspond à un déplacement total et descendant du diaphragme de 0'"'°,0003, calculé sous l'incidence de 45 degrés pour la valeur déterminée d'avance de la courbure du verre inférieur. Après chaque contraction principale, ou voit apparaître sur les photogrammes d'autres dentelures aux contours des anneaux : ce sont les vibrations sonores des bruits téléphoniques, dont la fréquence a varié de 25 à 43 par seconde et dont l'amplitude dépasse quelquefois 0™", 0002. Avec cette méthode, on pourra atteindre facilement des grossissements linéaires de plusieurs millions, et cela en diminuant la courbure du verre, en remplaçant la lunette faible par un microscope, et enfin en agrandissant une seconde fois les photo- grammes obtenus à l'aide d'un autre microscope. IV. La limite pratique de l'agrandissement dépendra de la sensibilité du papier photographique, par rapport à la durée de son exposition (de 0,01 seconde, avec une vitesse de 30 millimètres par seconde, dans les expériences de Holowinski) ainsi que de l'intensité de la lumière réfléchie. Voici comment Holowinski a fait la vérillcalion chronométrique de son appareil : a) En fixant le microphone invarialilement sur un support plus lourd, et en tou- chant celui-ci avec un bouton métallique, de manière à fermer chaque fois un circuit électro-magnétique, les indications de l'électi'o-aimant récepteur ont toujours été syn- chroniques (à0,0i seconde près) des mouvements correspondants des anneaux (dans un autre circuit); il n'y a donc pas retard (pratique) entre fiustant de la secousse et les con- tractions (ou dilatations) des anneaux. b) L'expérience précédente, répétée avec un électromètre capillaire vertical (au lieu GRAPHIQUE (Méthode). Îi31 du téléphone oplique), ne donne pas des mesures aussi exactes, à cause de l'inertie et du frottement de la colonne mercurielle, dont l'inlluence est manifeste pour les secousses rapidement répétées. c) En remplaçant, dans l'expérience (a), le microphone par un tambour de Maiiev, dont on touche périodiquement la membrane, on constate le synchronisme entre 1rs signaux de l'électro-aimant et les commencements des secousses aériennes, lorsque le levier du cardiographe est suflisamment amorti. d) Le téléphone optique, grâce à la minime inertie de sou diaphragme et à l'anipli- tude microscopique de ses mouvements, amortis par la viscosité de l'air, donne des indications pratiquement exactes pour l'inscription chronométrique des commence- ments des bruits cardiaques, séparés d'ailleurs par d'assez longues itilerniittences; d'autre part, la fréquence, la phase, l'intensité et le timbre de l'onde perrue par le mi- crophone, sont alors évidemment et complètement changés. § IV. — Enreghtrement des mouremcnis des valvules. Chauveau (1894), pour déterminer sur les tracés la position du second bruit du cœur, a introduit chez le cheval, par la carotide, un explorateur électrique du mouvement des valvules sygmoïdes, et il a enregistré ces mouvements en regard des tracés cardio- graphiques. Voici la description du dispositif de Chauveau : Une sonde métallique à double courant est munie de deux ampoules cardiogra- phiques du type de l'ampoule ordinaire. Ces deux ampoules sont séparées par un espace de 3 centimètres environ. Leur disposition est telle que l'une peut être placée dans le ventricule gauche, l'autre restant dans l'aorte au-dessus de ces mêmes valvules. Alors l'étranglement qui sépare les deux orifices occupe le centre même de l'orifice aortique. Là, cette partie de l'appareil est tantôt libre, tantôt serrée par les valvules, suivant que l'orifice est ouvert ou fermé. Sur cet étranglement on a disposé un contact électrique (jui s'établit ou se rompt par le jeu d'une étroite lame élastique faisant office d'un ressort fiexible. Le circuit électrique est formé par l'armature métallique de la sonde et par un fil isolé inclus dans la cavité externe de celle-ci. Ce fli est soudé à une petite plaque de platine également isolée, contre laquelle vient s'appuyer l'extrémité libre du ressort, garnie d'une petite pointe de plaline. Des pinces extérieures servent à mettre dans le circuit une pile et un signal électro-magnétique qui marque toutes les ouver- tures et toutes les fermetures du circuit, déterminées par le jeu des valvules. IV Pléthysmographie. Les appareils à l'aide desquels on fait l'enregistrement des variations de volume des membres et des organes s'appellent des plétfajsmographes (zXrjOjatio; = accroissement — Ypaipi^' = écriture). Les variations de volume sont déterminées par les variations de la (juantité de sang que les organes contiennent. On sait que, pour mesurer le volume d'un corps, on le plonge dans un liquide et on mesure le volume du liquide déplacé. — Cette méthode, dont l'invention appartient à ARCHiMiîDE, s'applique aussi en physiologie. Des observations anciennes, celles de Swammerdau par exemple, ont montri'- ([ue si un membre, ou l'extrémité d'un membre, est renfermé dans une espace plein d'eau, espace qui communique avec un tube également plein d'eau, la colonne liquide conte- nue dans ce tube présente des oscillations. PoisEÙiLLE (1829) a vu que, si l'on place une grosse artère de cheval dans un appareil, à déplacement liquide, il existe une élévation du niveau du liquide h chaque implusion du cœur ou h chaque diastole artérielle. Au contraire, il y a un abaissement du niveau du liquide aux moments où le cœur se repose et quand le sang s'évacue par les veines. 932 GRAPHIQUE (Méthode). PoisEUiLLE a VU de plus les variations du niveau du liquide provoquées par la respira- lion : la dépression du liquide était au minimum pendant l'inspiration, et au maximum pendant l'expiration. PiÉGU (1847) a vu, en poussant une injection dans le membre inférieur d'un cadavre immergé dans un grand vase d'eau tiède, que le liquide du vase débordait quand l'in- jection distendait les vaisseaux. PiÉr.u a fait de plus des observations analogues sur l'homme vivant . Avant PiÉGU, Chelius a vu les oscillations d'une colonne d'eau contenue dans un tube vertical qui surmontait un cylindre plein d'eau et contenant l'extrémité d'un membre. — Ces recherches restèrent longtemps inconnues, car Chelius ne les a publiées qu'en 1850. L'appareil de Chelius était suspendu librement. Ainsi l'influence des mouvements musculaires du membre et l'effet des oscillations du corps sur les variations du niveau de la colonne liquide se trouvaient amoindris. Le dispositif employé par Chelius se retrouve dans les appareils pléthysmograpliiques qui servent à l'enregistrement des variations de volume des membres. § L — Pléthysmographie des membres. Les pléthysmographes des membres peuvent être à transmission liquide ou à trans- mission à air. A. Les pléthysmographes à transmission liquide se composent d'un récipient plein d'un liquide dans lequel on place un membre ou l'extrémité d'un membre. Ce récipient communique avec un tube dans lequel on voit les variations de volume du membre se traduire par les oscillations de la colonne liquide. On enregistre ces oscil- lations de la colonne, et on obtient ainsi un pléthysmogramme. Voici la description de quelques formes spéciales de plélhysmorjraphes. L'appareil de Fick se compose d'un récipient cylindrique en fer-blanc rempli d'eau tiède. La membrane de caoutchouc qui se trouve à l'une des extrémités du récipient livre passage à l'avant-bras. Quand l'avant-bras est introduit dans le récipient, celui-ci est rendu étanche à l'aide d'une épaisse couche d'argile consolidée par une plaque métallique. Le récipient présente deux ouvertures : l'une est pour l'introduction de l'eau : l'autre est mise en communication avec une branche d'un tube en U (une sorte de tube mano- métrique). L'autre branche de ce tube contient un flotteur muni d'une plume qui trace ses mouvements sur une surface enregistrante quelconque. Le flotteur consiste en une petite plaque de liège ; sur la tige du flotteur, qui est en jonc, sont collées de distance en distance des aiguilles sagittales et frontales qui empêchent les mouvements latéraux du flotteur. Mosso a montré que l'appareil de Fick ne convenait pas à l'enregistrement des varia- tions de volume, car le poids de la colonne liquide qui monte dans le tube mano- métrique exerce une pression nuisible dans l'intérieur du récipient. Cette influence de la colonne est très marquée (juand elle s'élève à 20 centimètres au-dessus du zéro. Pour éviter cet inconvénient, Mosso (1874) a construit un dispositif enregistreur spécial appelé hydrosphyymographe. L'appareil de Mosso ne peut pas enregistrer les variations rapides, mais il inscrit très bien les variations lentes de volume et donne la mesure absolue de ces variations. La partie essentielle de cet appareil est une éprouvette suspendue, plongeant dans un vase plein d'eau alcolisée. Dans cette éprouvette plonge le tube qui le relie avec le cylindre de verre dans lequel le bras est plongé jusqu'au- dessus du coude. L'éprouvette est suspendue à l'aide d'une corde qui passe sur une poulie et qui porte à son autre extrémité un contrepoids et une plume enregistrante. Quand le volume du membre contenu dans le récipient augmente, de l'eau pénètre dans l'éprouvette, celle-ci plonge dans le liquide, le contrepoids monte et trace sur le cylindre, enregistreur une courbe ascendante. Au contraire, quand le volume du membre diminue, de l'eau passe de l'éprouvette dans le récipient cylindrique, l'éprouvette allégée monte, et le contrepoids descend et décrit une courbe descendante. GRAPHIQUE (Méthode). 033 Le plélhjjsmographc de Kromecker (construit par Klopfkr) ressemble en partie à celui de Mosso. Comme lui, il a une manchette de caoutchouc à double paroi, avec un tube à l'aide duquel on insuflle de l'air afin de réaliser une élanchéité plus parfaite de l'instrument. Un thermomètre indique la température de l'appareil. I/appareil inscripteur consiste en une petite boîte de verre pleine d'eau mise en communication avec le pléthysmographe. Sur la surface de l'eau flotte une petite plaque de liège carrée imbibée de paraffine. Cette plaque présente sur sa face supérieure un petit prisme de caoutchouc durci, formant une sorte de couteau qui supporte le levier inscripteur. Les changements de niveau de l'eau, étant très petits, n'exercent qu'une très faible variation de pression sur le bras. Les petits mouvements du niveau de l'eau sont amplifiés par le levier inscripteur. L'appareil est gradué à l'aide d'une burette qui, par l'intermédiaire d'un tube enTet d'un robinet, est en communication avec l'appareil. Fir.. 152. — Hydrosphymographo de Mosso. On met la burette en communication avec l'appareil inscripteur seulement, et on marque les ordonnées correspondant à des nombres de centimètres cubes déterminés intro- duits à l'aide de la burette. Dans le pléthysmographe de liowDiTCH (1879), comme dans l'appareil de Mosso, l'eau qui sort du récipient qui contient le membre passe par un tube qui descend Jusqu'au fond d'une éprouvette. Cette éprouvette est suspendue au moyen d'un ressort spécial dont l'allongement est proportionnel à l'élévation du niveau du litjuide conteriu dans l'éprouvette. Les variations de longueur du ressort sont enregistrées au moyen d'uni' plume fixée à l'extrémité inférieure du ressort. Sew.\ll et Sanford (1890) plaçaient le doigt, médius ou index, dans un tube plein d'huile ou d'eau salée, bien fermé par une membrane de caoutchouc et par de la vaseline. Ce tube communiquait avec le tonomètre de Roy, formé par une sorte de piston recorder plein d'huile. Le fond du corps de pompe du piston-recorder était dirigé vers le haut, et le levier inscripteur était en dessous; le piston est attaché au bord du cylindre par une membrane làclie et inextensible qui empêche le liquide de s'écouler. B. Pléthysmographe à transmission à air. — On peut transformer le pléthys- mographe à transmission liquide de Fic.k en pb'tliysinograplie à transmission à air, si 931 GRAPHIQUE (Méthode). on enlève le lloUeur du tube manométriqne et si on réunit l'extrémité supéiienre de ce tube à un tamliom enregistreur de Marey. C'est Buisson (1862) qui, le premier, a enre- gistré de cette faron les variations de volume d'une main plongée dans un bocal rempli d'eau. On peut aussi enregistrer à dislance, à l'aide d'un tambour de Marey ou d'un piston- recorder, les variations de volume de l'air contenu dans un récipient clos, plein d'air, et contenant un membre. Nous avons donc à considérer deux sortes de plélhysmographes à transmission à air : 1° les pléthysmographes à liquide et 2" les plctlii/smographes à air ou à gaz, si au lieu d'air le récipient contient un gaz quelconque. a) Les pléthj/i^inograjyhes à liquide et à transmission ne sont en définitive que les pléthysmographes directs un peu transformés. François-Franck a perfectionné l'appareil de Buisson de la façon suivante : Un opercule métallique, rabattu sur la membrane que traverse l'avant-bras, s'oppose aux mouvements de cette membrane qui, sans cela, eussent absorbé presque entière- ment les divers cliangf inents de volume de la main. De plus, pour éviter l'inertie de la colonne d'eau dans le tube étroit, inertie qui déforme les mouvements rapides, François-Franck a mis sur le trajet de ce tube un renilement dans lequel se font les oscillations du liquide. Une poignée contenue dans le bocal, et qu'on saisit, tient la main immobile. Les oscillations sont transmises par un tube à un tambour à air de Marey. La forme des courbes est identique à celle du pouls. L'hydrosphygmographc de Mosso ressemble à l'appareil de François-Franck, avec celte différence qu'au lieu d'un bocal on a un cylindre de veri'e, suspendu au plafond, pour éviter l'inlluence des mouvements involontaires sur l'eau. L'avant-bras est intro- duit dans une manchette en caoulchouc. Une tubulure qui se trouve à la partie supé- rieure du cylindre est en communication avec un tambour inscripteur de Marey. Pour maintenir constante la pression dans l'appareil, une bouteille très large, pleine d'eau, est en communication avec le cylindre. Le niveau de l'eau dans la bouteille s'élève jusqu'à la tubulure supérieure du cylindre. Le pléthysrnographe de Lehmann (construit par Zimmermann) se compose d'un cylindre en zinc. Un sac mince de caoutchouc est placé à l'intérieur du cylindre. L'espace compris entre le sac et la paroi de zinc est rempli d'eau. L'eau monte dans un tube fixé à la partie supérieure du cylindre ; ce tube communique avec un tambour enre- gistreur de Marey. L'appareil peut être suspendu au plafond. BowDiTCH et WvRREN (1880), dans leurs expériences pléthijsmographiques, ont placé l'extrémité d'un animal dans un tube de verre plein d'eau communiquant avec des récipients pleins d'eau froide et d'eau chaude. Ce tube était en communication avec un tambour à air inscripteur de Grunmach. Le tambour avait 3, 4 centimètres de diamètre avec un levier long de 20 centimètres. L'amplification était égale à 40. b) — 1). Parmi les plélhysmographes à gaz, citons d'abord l'appareil de Mosso : le ph'lhysntographe g azomc trique. Dans cet appareil le membre est renfermé dans un espace clos plein d'air. Le pied est chaussé d'un soulier de gutta-percha; la main est placée dans une bouteille sans fond ou dans un gant de gutta-percha, qu'on ferme au poignet avec du mastic de vitrier. On mesure l'air qui se déplace par suite des change- ments du volume des membres. L'air dont il s'agit de mesurer le déplacement pénètre, par un tube en caoutchouc, à travers le fond d'un vase de verre rempli d'un liquide léger, éther de pétrole ou éther éthylique ; le tube monte au-dessus du niveau du liquide. Le vase rempli de liquide est recouvert d'un petit cylindre métallique, équilibré par un contrepoids. On a ainsi un petit gazomètre. Les mouvements du cylindre sont inscrits par la plume qui est fixée au contrepoids. Le pléthysmograplie d'ELLis (1885) se compose d'un petit tube de verre effilé à son extrémité, dans lequel on place les membres de la grenouille. — Ce tube communique par un tube en T avec un tambour à air et avec un tube qui sert au réglage de la pres- sion de l'air dans l'appareil. GRAPHIQUE (Méthode). 935 2) Le plétliysmoyraphc diyital de IIalijon et Comte (1894) est destiné ù explorer les variations de volume d'un doigt. Il comprend deux modèles : Le modèle à ampoule seini-riyide se compose d'un doigt de gant en caoutchouc, volumineux, de forme cylindrique, à parois épaisses de 1 millimètre au moins, et, par conséquent, assez résistantes à la déformation. Ce doigt de gant est clos à sa base pai un diaphragme percé d'un orifice central, orifice sur lequel s'insère un tuyau de caout- chouc. Autour du doigt de gant il y a une gaine de tissu souple, mais inextensible : cuir, drap ou toile. Si le doigt introduit entre l'ampoule et la paroi semi-rigide; vient à augmenter de volume, il ne peut le faire qu'en déprimant la paroi de l'ampoule; s'il diminue de volume, la paroi de l'ampoule, en vertu de son élasticité, le suit dans son retrait; dans le premier cas, la cavité de l'ampoule est resserrée; elle est dilatée dans le second. En reliant un tambour de Marey au tube, on inscrit ces variations. On peut aisément, pourvu que la gaine extérieure soit assez ample, introduire dans cet appareil deux doigts ensemble. On peut aussi pourvoir à la fois plusieurs doigts de pléthysmographes appropriés, et collecter les indications, en faisant converger leurs tubes en un tube unique. Énfm, on peut tenir l'ampoule entre les doigts réunis en cône, et coiffer ce cône d'une gaine inextensible (Bixet et Courtier). Le modèle à valves élastiques n'étant plus employé à l'exploration du volume des doigts, mais à l'exploration des variations de volume d'une foule d'organes, nous le décrirons plus loin, dans le paragraphe consacré spécialement à la plélhysmograpliie des organes. PosTMA (1904) a photographié les indications données par l'appareil de Hallion et Comte de la façon suivante. Les pulsations du plétyhsmographe sont transmises à un petit manomètre à eau. Dans la branche libre du manomètre, se trouve placé un petit Uotteur surmonté d'un disque de papier qui intercepte partiellement les rayons d'une source lumineuse qui tombent sur un microscope. Un enregistreur photographique se trouve placé devant l'oculaire. 3) Pour faire l'étude des changements de volume des pattes du chien, Wertueimer (1884) s'est servi d'un système d'ampoules conjuguées. La plupart des appareils pléthysmographiques à air peuvent être pourvus d'une ampoule. — Dans ce cas, au lieu de relier directement la cavité du plélhysmographe à un tambour enregistreur de Marey, on la relie à la cavité d'une ampoule de caout chouc pareille au sphygmoscope de Chauveau et Marey, et on enregistre les variations de volume de cette ampoule, qui sont elles-mêmes commandées par les variations de volume de l'organe exploré. Ce dispositif permet d'exercer sur l'organe des compres- sions assez fortes, ce qui est parfois utile. 4). Pour faire la pléthysniographie de la langue, voici comment on procède (Hallion) : Deux planchettes ayant à peu près la largeur de la langue sont placées, l'une sur la face supérieure de la langue; l'autre, échancrée en arrière pour laisser place au frein de la langue, repose sur la face inférieure. Deux gouttières longitudinales sont creu- sées sur la face inférieure de la planchette supérieure ; deux ampoules de caoutchouc, à paroi un peu résistante, sont logées dans ces gouttières. Deux cordons relient les deux plaques de bois. — Suivant le volume de l'animal, l'appareil est plus ou moins grand. — Si la crête longitudinale médiane de la plaque supérieure est assez saillante, on peut comprimer la langue suivant son raphé, et en isoler ainsi les deux moitiés l'une de l'autre. Le pléthi/smographe labial se compose d'une pince dont les mors peuvent êlre rapprochés ou écartés à volonté à l'aide d'une vis de rappel. A l'extrémité de chaque mors, et suivant une direction perpendiculaire à celle des branches de la pince, se trouve fixée une valve à paroi élastique. Les deux valves se regardent par la concavité de leurs gouttières. Elles sont légèrement inclinées l'une sur l'autre, de telle sorte (jue leurs bords supérieurs, qui répondent au bord de la lèvre, se rejoignent presque; tandis que leurs bords inférieurs conservent un écartement suffisant pour ne pas comprimer la base même de la lèvre au point d'entraver la ciiculalion. Les ampoules du plélhysmogiaphe labial, comme celles du plt'tliysinographt' lin- gual, sont mises en communication avec des lamliours eiiregislreurs de Marey. 936 GRAPHIQUE (Méthode). Pour faire la pléthysniographie des fosses nasales, on commence par fermer rorifice postérieur des fosses nasales par un tampon, comme cela se pratique chez l'homme dans le cas d'épistaxis incoercible. Ensuite, on choisit un tube de caoutchouc dont le calibre extérieur est un peu supérieur au calibre intérieur de l'orifice nasal anté- rieur. Pinçant er.tre les deux mors d'une pince hémostatique un bout du tube de caoutchouc, on exerce une traction sur l'autre bout; on étire ainsi le tube, et l'on introduit dans la narine l'extrémité pincée. — Le tube étant en place, on le laisse reprendre sa forme, et on relire la pince. La fosse nasale constitue ainsi un espace clos qu'on peut relier à un tambour enregistreur, qui inscrira les variations d'épaisseur de la muqueuse. Pour faire la pléthysmographie auriculaire, on enroule l'oreille autour d'un bàlon de cire à modeler; on impose ainsi à l'oreille une forme convenable, et on inclut le tout entre deux valves à membranes de caoutchouc (Hallion). 5) Quand les variations de volume sont trop faibles pour pouvoir être enregistrées directement, on peut employer des relais amplificateurs. — Voici comment on procède dans ce cas : Le récipient dans lequel est placé le doigt, par exemple, est mis en com- munication, à l'aide d'un robinet à (rois voies, avec un tube indicateur (Klu'pel et Dumas) formé par un tube de verre de petit calibre dans lequel peut se déplacer un index liquide. Au lieu d'un index, on peut avoir une colonne liquide continue, si l'on fait plonger l'extrémité coudée du tube dans un liquide coloré. Sur la tubulure latérale se trouve adaptée une petite seringue qui permet d'aspirer l'index du tube de verre et de le mettre à un niveau quelconque. — Les indications données par l'appareil indica- teur sont enregistrées de la façon suivante (Hallion et Fkançois-Fraivck) ; le tube indi- cateur est posé sur une table. Derrière lui, à quelque distance, est fixé un tambour explorateur de Marey; le levier de ce tambour est très long, croise perpendiculaire- ment le tube indicateur. Un aide observe constamment le niveau marqué par ce tube, et fait suivre au levier les oscillations de ce niveau; ces oscillations se trouvent ainsi enregistrées par le tambour inscripteur relié au tambour explorateur. C. Erreurs des pléthysmographes. — Les appareils plethysmographiques comportent de notables causes d'erreur : 1° La partie explorée, insuffisamment immobi- lisée dans l'intérieur de l'appareil, tend à changer de position, au grand détriment de la précision des tracés. En suspendant l'appareil, on n'atténue que partiellement cet inconvénient, le récipient présentant toujours, par le fait même de son poids, une fixité relative. Aussi, pour peu que le membre se meuve, voit-on des modifications tout accidentelles se substituer ou se combiner aux courbes volumétriques. Cet incon- vénient s'atténue beaucoup dans les pléthysmographes à récipient contenant de l'air; car on peut modifier considérablement la position de la main dans l'espace, sans chan- ger ses rapports avec le récipient qui l'inclut; mais l'interposition d'une grande masse gazeuse entre l'organe exploré et le tambour inscripteur peut émousser les indications fournies par celui-ci. 2" Il est assez difficile d'en assurer l'occlusion, surtout si Ton opère sur des sujels différents; il est dès lors nécessaire qu'on ait à sa disposition une série de manchons interchangeables. Quant à l'occlusion réalisée avec du mastic, un mouvement risque de la compromettre. ^ II. — Pléthysmographie des organes internes en place. Pour enregistrer les variations de volume des organes, comme le rein, la rate, l'intestin, etc., il faut procéder de la même façon que dans le cas d'un membre, c'est- à-dire, il faut l'enfermer l'organe dans un récipient clos contenant un liquide ou un gaz quelconque et faire communiquer ce récipient avec un appareil enregistreur, avec un piston-recorder, ou avec un tambour à air de Marey. Parmi les organes, il y en a un, le cerveau, qui, étant contenu naturellement dans une boite inextensible, s'offre plus facilement à l'observation. La cavité crânienne constitue une sorte de pléthysmographe naturel; pour enregistrer les variations de GRAPHIQUE (Méthode). 937 volume du cerveau qu'il contient, il suffira de faire un trou dans la paroi crânienne pour mettre son contenu en relation avec un tambour à air. A. Pléthysmographie du cerveau. — Les mouvements du cerveau peuvent tHre facilement enregistrés à l'aide de la transmission à air chez les' animaux et quelquefois chez l'homme aussi. i) Les mouvements du cerveau ont été observés pour la première fois par Bour- gougnon(T/(. de Paris, 1839), en plaçant un tube ouvert perpendiculairement dans une ouverture faite dans le crâne d'un animal. L'enregistrement des mouvements du cerveau du chien a été fait par Salathé, Fre- DERiGQ, Roy et Sherringtox. Ces deu.x physiologistes se sont servis d'un appareil spécial appliqué au trou du trépan ; ils éliminaient l'inlluence de la pression du liquide céphalo- rachidien, en permetlantà ce liquide de s'échapper sur les bords de l'orifice osseux. Freder:'::q (1887), pour enregistrer les mouvements du cerveau, a proce'dé de la façon suivante : il décollait au thermocautère le muscle temporal de ses attaches, il enlevait à l'aide du trépan une lamelle osseuse de 2 centimètres de diamètre, il résé- quait la dure-mère, et il adaptait à l'orifice un tube appelé par lui pléthysmographe cérébral. Wertheimer (1893) a employé la même méthode à peu près : il a coulé tout autour de l'orifice une couronne de cire à cacheter de quelques millimètres de hauteur, à laquelle il a raccordé un tube de verre qui, évasé inférieurement sur une longueur de 4 à 5 centimètres, ayant un diamètre un peu supérieur à celui de l'orifice osseux, se rétrécissait presque immédiatement sur une longueur de 3 ou 4 centimètres. Ce tube était rempli d'eau jusqu'à une certaine distance de son bout supérieur, et il était mis en communication avec un tambour de Marey. 2) Les mouvements du cerveau chez l'homme peuvent être facilement enregistrés, dans les cas de trépanation ou de perte de substance osseuse de la boîte crânienne due à une lésion quelconque. 11 suffit dans ce cas de placer sur les tissus qui recouvrent le trou de la boîle crânienne un tambour explorateur analogue au cardiographe de Marey et de relier cet appareil avec un tambour enregistreur. Dans les cas où le trou crânien est ouvert, on le recouvre d'une plaque de caout- chouc sur laquelle on pose l'appareil. C'est ainsi qu'ont fait Mosso, Mays et autres. BiNET et SoLLiER (1875) ont enregistré le pouls cérébral chez l'homme à l'aide du dispositif suivant : Un dilatateur utérin en baudruche était appliqué et enfoncé dans la plaie crânienne et recouvert ensuite de plusieurs bandes faisant le tour de la tête; on gonllait légère- ment ce dilatateur au moyen d'un tube de caoutchouc qui était ensuite relié à un tam- bour enregistreur; le dilatateur se moulait en quelque sorte sur toutes les anfracluo- sités de la cavité oîi on l'avait logé. B. Pléthysmographie d'un organe quelconque. — Les pléthysmographes des organes, comme ceux des membres, peuvent être soit à transmission liquide, soit à transmission à air. \) Parmi les pléthysmographes à transmission liquide, il faut citer en premier lieu Voncographe de Roy. Cet appareil se compose d'une sorte de boîte ovale métallique, dont les deux moitiés qui la composent sont articulées à l'aide d'une charnière. Les bords des deux moitiés présentent chacun une échancrure, qui, quand la boite est fermée, forment une sorte d'ouverture qui livre passage au bile de l'organe qu'on renferme dans la boîte. Chaque valve de la boîte est tapissée intérieurement d'une sorte de séreuse (un sac à double paroi). Les parois internes de ces sacs remplis d'huile s'appliquent sur l'org'ane renfermé dans la boîte, tandis que les parois externes s'appliquent aux parois métalliques de la boîte. L'intérieur des sacs communique à l'aide d'un tube rempli également d'huile avec une sorte de piston-recorder qui enregistre les variations de volume de l'organe contenu dans la boîte. Un autre tube qui traverse également la paroi de la boite sert au remplissage de l'appareil avec de l'huile. 938 GRAPHIQUE (Méthode). Roy s'est servi de son pléthysmographe, au début, pour faire l'enregistrement des variations de volume du rein, de là le nom à'oncographe. Plus tard, par extension, on a employé ce nom pour désigner tous les pléthysmo- graphes des organes internes. C'est là une erreur, car le terme d'oncographe ne peut s'appliquer qu'aux appareils qui enregistrent les variations de volume du rein. La boîte de l'appareil de Roy qui renferme le rein a été appelée oncomèlre. Par extension, on a appelé oncoinétrie cette façon spéciale d'enfermer un organe dans un espace clos, pour faire l'étude des variations de volume. Cette expression, comme aussi l'extension donnée au mot oncograplie, est mauvaise. 2) Les pléthrjsmographes à air se composent d'un récipient analogue à celui de FiG. 153. — Oncographc de Roy. l'oncographe de Roy, dont les sacs sont remplis d'air. Ces sacs, ou coussinets à air, sont mis en communication par un tube en caoutchouc avec un tambour enregistreui' ou avec un piston-recorder. On peut, grâce à des valves formées d'une membrane de caoutchouc et d'une feuille de métal malléable, à laquelle on donne !a forme qui convient pour épouser l;i surface de l'organe, étudier les variations do volumes de n'importe quel organe : foie, pancréas, glandes sous-maxillaires, lobes pulmonaires, certains muscles, etc. On peut employer, soit des valves en forme de goultière, soit des coquilles semi-ovoïdes. Il est facile d'imaginer et de construire, sur un même type, des appareils de formes Irès diverses. Le pléthjjiimogmphe à valves clai^tiqiics di; Hallion et Comte, délaissé pour l'exploration du volume des doigts, trouve son emploi dans l'exploration d'une foule d'organes. Pour confectionner une valve, on taille dans une plaque de liège une gouttière dont la concavité loge aisément l'organe dont on veut étudier les variations de volume; on enduit cette gouttière de paraffine en la plongeant dans un bain de paraffine fondue; la paraffine une fois concrétée, par le refroidissement, en une couche mince, on introduit la goultière dans un manchon de caoulcliouc d'un calibre tel, que la GRAPHIQUE (Méthode). 939 partie du manchon qui forme un pont d'un Ijoi'd à l'autre de la gouttière soit modé- rément tendue; on pose, sur chacun des bouts du manchon, au ras de l'extrémité do la gouttière, une ligature circulaire, mais après avoir introduit, dans l'un d'eux, un petit tube de verre; on immerge le tout dans de l'eau chaude ; la paraffine alors se li([uélio et fait adhérer la face dorsale de la gouttière à la portion du manchon de caoutcliouc qui lui correspond. Finalement, on obtient un appareil clos, n'ayant d'autre voie d'abduction que le tube de verre, et constitué par une gouttière que sous-tend une mem- brane de caoutchouc. On accouple deux appareils semblables en adossant l'une à l'autre deux membranes, et ou les attache ensemble par des liens circulaires, de façon à constituer, somme toute, une façon de cylindre cloisonné dans sa longueur par une membrane élastique double; on accouple, par un tube en Y, les deux tubes de verre abducteurs. En aspirant l'air contenu dans l'appareil ainsi constitué, on voit les deux membranes de caoutchouc se séparer l'une de l'autre pour s'accoler chacune au fond de sa gouttière; on peut alors introduire aisément l'organe entre les deux membranes FiG. 154. — Tracés simultanés des variations de volume do la rate [trar'é supérieur) et de la pression artérielle (tracé inférieur). écartées; on supprime finalement le vide dans l'appareil, et les deux membranes viennent s'accoler à la surface de l'organe introduit dans leur intervalle. 11 ne reste plus qu'à relier le tube en Y à un tambour inscriptour, pour obtenir les tracés volu- métriques. On peut se contenter d'une seule goutlière, d'une seule valve à membrane, appliquée sur une des faces d'un organe, pourvu que la face opposée soit maintenue par une valve pleine ou une plaque de soutien quelconque, d'une forme et d'une dimension appro- priées à celles de l'organe. 3) Dastre et MoRAT, dans leurs recherches sur les variations de volume du rein, au lieu de mettre directement en communication le sac du récipient (de l'oncomètie) en communication directe avec un tambour enregistreur, employaient un deuxième sac à air intermédiaire. Ils avaient donc deux sacs (ou ballons) conjugués; l'un, placé dans le récipient, communiquait pai' un tube avec un autre sac (ballon) contenu dans un petit flacon mis en communication avec un tambour enregistreur. Ce dernier enregis- trait donc les déplacemenis de l'air provoqués par les mouvements du ballon contenu dans le Uacon. 4; ScHAKER et More, au lieu d'employer un récipient ovale comme l'oncomètre de Roy, se sont servis d'une sorte de boîte rectangulaire en gutta-percha, dont une des parois était en verre. Entre l'organe et la paroi, il n'y avait pas de coussinet spécial; l'air do la boîte communiquai! directement avec un tambour enregistreur ou avec un piston recorder. o) Quand il s'agit d'étudier les variations de volume de l'intestin, la méthode d'inclu- sion d'une portion de l'intestin entre les deux coussinels d'un plétbysmograplie a air présente des inconvénients. En effet, le [>léthysmographe à air expose à prendre des indications myographiques pour des indications vaso-motrices, car, cet appareil n'étant applicable ([ue gvàco à une certaine pression exercée sur la paroi intestinale, les 940 GRAPHIQUE (Méthode). changements de consistance de cette paroi ne peuvent manquer d'agir sur l'explorateur élastique et de se traduire par des courbes qu'il est souvent fort difficile de distinguer des véritables courbes volumélriques. Pour obvier à cet inconvénient, François-Franck, et Hallion ont construit des appa- reils spéciaux. Leur appareil volumétrique à déplacement avec inscription par transmission à air se compose d'un ilacon de verre à large goulot dans lequel on introduit une anse intesti- nale, attirée hors de l'abdomen et séparée du reste de l'intestin par une section faite entre deux gros fils à ligature. Cette anse est en rapporl avec un large repli mésenté- rique. Le fond du (lacon est remplacé par un bouchon de caoutchouc percé de plu- sieurs trous. L'orifice d'entrée du flacon est muni d'une membrane souple de caoutchouc qui s'applique sur le mésentère. Cette membrane peut s'invaginer sur elle-même, de façon à constituer un cul-de-sac qui assure l'herméticité de l'appareil. Le Ilacon est rempli d'eau salée dans laquelle flotte le paquet intestino-mésentérique. Au-dessus du niveau du liquide, on a ménagé une chambre à air qui communique par un tube avec un tambour enregistreur. On peut inscrire, si l'on veut, les contractions intestinales à côté des tracés repré- sentant les changements de volumes des vaisseaux de l'intestin, en mettant en communication l'intérieur de l'anse intestinale, à l'aide d'un tube, avec un tambour enregistreur. Le bouchon du ilacon est traversé, en dehors du tube qui va au tambour enre- gistreur, par un tube de remplissage à entonnoir, par un tube d'écoulement et par un thermomètre. François-Franck et Hallion (1896) ont employé aussi un appareil volumétrique à déversement avec mesure du débit du liquide déplacé. Dans cet appareil le niveau du liquide était maintenu constant, grâce à l'apport rigoureusement réglé d'eau salée chaude, fournie par un vase de Mariotte qui se déver- sait par gouttes dans l'appareil; un tube d'écoulement, disposé de façon que son orifice extérieur fût exactement sur le même plan que le niveau du liquide dans l'appa- reil, débitait un nombre de gouttes exactement semblable à celui que fournissait le vase de Mariotte; le volume des gouttes étant le même de part et d'autre, la constance du niveau était assurée. Le contrôle de l'appareil était obtenu en montrant que l'addition de la moindre masse liquide ou solide produisait tout aussitôt une augmentation dans le nombre des gouttes qui s'écoulaient par l'orifice de déversement; réciproquement, l'aspiration d'une très petite quantité de liquide déterminait une diminution dans les gouttes de sortie. Cet écoulement s'enregistrait au moyen d'une palette oscillante fixée au levier d'un tambour à air. § IIL — Pléthysmor/raphie des organea isolés. Les variations de volume des organes isolés peuvent être étudiées de la même façon que les variations de volume des organes en place. — Quelquefois on emploie des dispositifs particuliers. Mosso a employé le dispositif suivant : L'organe (le rein), dans lequel on fait la circulation artificielle, est placé dans un récipient plein d'huile. — Un tube établit la communication entre le récipient et une éprouvette qui est suspendue à une poulie et équilibrée par un contrepoids. L'éprou- vetle plonge dans un vase plein d'huile. Quand le volume de l'organe diminue, l'éprou- vette monte, et le contrepoids descend. La plume fixée au contrepoids enregistre les variations du volume. Un tube du récipient fait pénétrer le sang artériel dans l'organe; un autre laisse sortir le sang veineux. La pression est maintenue constante à la surface de l'organe. Schafer (1884) a photographié les variations du volume d'un organe, en employant un pléthysmographe à eau. L'organe était renfermé dans une boîte de verre, reliée à un tube horizontal; la boite et le tube étaient remplis d'eau. On photographiait les mou- GRAPHIQUE (Méthode). Oil vemenls du liquide dans le lube. Le lube avait 3 à 4 millimèli-es de diamètre, et I.» à 20 centimètres de longueur. Il était pourvu d'un robinet. On le plaçait derrière une étroite fente faite dans la paroi d'une chambre obscure; un écran avec une autre fente était placé en face du tube. Les rayons qui traversaient la portion du tube pleine d'air étaient interceptés par la réflexion interne; une ligne lumineuse représentait sur la sur- face sensible les oscillations de la colonne d'eau. V Tachographie. A. Méthode indirecte. — Une simple construction géométrique nous permet de tracer, d'après la courbe des variations de volume ou plétitysmogramme, la courbe des variations de la vitesse du sang, le tachoyrammc. En effet, l'inclinaison de la courbe du pb''lhysmogramme, à un moment déterminé, représente la vitesse avec laquelle s'est fait le changement de volume à ce moment-lù, c'est-à-dire, la vitesse avec laquelle le sang pénètre dans un membre. Pour mesurer la pente de la courbe pléthysmographique, on trace une tangente à cette courbe, et on mesure la tangente trigonométrique de l'angle que la tangente à la courbe fait avec l'axe des abscisses. La valeur ainsi obtenue représente l'ordonnée de la courbe de la vitesse au moment considéré. — En faisant des constructions analogues pour difl'érents points de la courbe des variations du volume, on obtient différents points de la courbe des variations de la vitesse. C'est ainsi qu'ont procédé Fick, K.vtzenstein, etc. B. Méthode directe. — I. On peut connaître la vitesse du sang en mesurant le volume de sang écoulé d'une artère dans un temps donné. Cette méthode a été employée dans le laboratoire de Ludwio. Pour enregistrer la vitesse du sang, il suffit d'enregistrer le volume du sang écoulé. Pour cela on reçoit le sang dans une bouteille, pleine d'une substance anticoagulante, qui est mise en communication avec un tube en U, dont l'une des branches est pourvue d'un flotteur enregistreur. A mesure que du sang pénètre dans la bouteille, du liquide en sort et va dans le tube en U. Connaissant le calibre du tube, il est facile de connaître la valeur des ordonnées en volume. Celte méthode n'est applicable que dans le cas oii l'on ne craint pas les grandes pertes de sang. — Pour des recherches prolongées, Ludwig a construit un appareil appelé Slromuhr. HCuTHLE a construit récemment un appareil enregistreur de la vitesse du sang basé sur le principe de l'appareil de Ludwig (transformé par Tkierstedt). Dans cet appareil, le sang pénètre dans un cylindre par le fond et en sort par la surface supérieure pour aller dans un tube, et de là dans l'artère. Dans le cylindre, qui est une sorte de corps de pompe, le sang qui entre et le sang qui en sort sont séparés par un piston. Ce piston est mis en mouvement par le passage du sang. Les mouvements du piston e'quilibré sont transmis à un levier enregistreur au moyen d'un fil qui lelie le piston au levier. II. Pour mesurer la vitesse du sang, Vierordt (1858) a imaginé un appareil appelé Hcmotachomctre. Cet appareil se compose d'une cage rectangulaire dont les parois opposées sont formées par des glaces transparentes. Le sang pénètre dans cette boîte par un ajutage situé d'un côté, et en sort par un autre ajutage situé du côté opposé. Dans son passage à travers la boîte, le sang fait dévier un petit pendule à boule d'argent. Cette boule est munie de deux pointes qui touchent sans frottement les deux glaces; on peut ainsi voir les mouvements du pendule, malgré l'opacité du sang. La vitesse du sang est donnée par la déviation du pendule, qu'on mesure à l'aide d'un cercle gradué. Plus tard, Vierordt a enregistré les mouvements du pendule de son tachomètre de la façon suivante : il imitait les mouvements du pendule avec la main. Les mouvements de ce pendule extérieur étaient enregistrés facilement. 042 GRAPHIQUE (Méthode). Le procédé de Vierordt est mauvais, parce que toutes les pièces qui le constituent présentent une grande inertie. VhéinodromoQi'aphe de Chauveau (1838) est construit sur le même principe que l'appareil de Vierordt; mais il lui est supérieur, parce qu'il n'a pas une grande inertie. Cet appareil se compose d'un tube métallique qu'on intercale sur le trajet d'une artère. Ce tube présente une sorte de fenêtre fermée par une membrane de caoutchouc. Fiu. 155. — Hémodroniographc de Chauveau et Lortet. Une longue aiguille traverse cette membrane; l'extrémité de l'aiguille qui est dans l'in- térieur du tube est terminée par une petite plaque; l'extrémité de la longue branche extérieure de l'aiguille se termine par une plume enregistrante. — Le sang, en traver- sant le tube, déplace la palette de l'aiguille. Les déviations de l'aiguille sont propor- tionnelles à la vitesse du sang. La lîg. 15o représente, d'après Lortet, cet appareil (1/3 grand, nat.). La section du tube métallique est eu r; la membrane de caoutchouc en m; en p c'est la palette de l'aiguille /*,; en s le support du tube. V hcmodromuyraphe à train^mission de Chauveau est basé sur le même principe que l'appareil précédent. A part le changen)ent apporté par la mise en relation avec la membrane d'un tambour à air, cet appareil, représenté parla fig. 156, présente en plus quelques changements. — La mem- brane de caoutchouc m n'est plus appliquée sur une fenêtre du tube pc qu'on introduit dans l'artère; mais sur l'ouverture supérieure d'un tube qui en- toure l'aiguille n. — Ce dernier tube est mobile sur le tube pc, ce qui permet l'arrangement de l'appa- reil et l'introduction de la palette pi. Le sang, en traversant le tube pc, agit exclusivement sur la pa- lette, parce que l'ouverture qui sépare les deux tubes perpendiculaires l'un à l'autre est une fente très étroite, permettant seulement les mouvements de l'aiguille. — Un tube latéral, qui n'est pas repré- senté sur la ligure, permet le nettoyage de l'appareil et l'introduction d'une substance anticoagulante dans le tube qui entoure l'aiguille. — Le tambour k communique avec un tambour enregistreur. Étant données les dimensions de cet appareil (le tube qu'on introduit dans l'artère présente un dia- mètre de 6 millimètres, et une longueur de 4 à 0 centimètres), on ne peut s'en servir que pour l'étude de la vitesse du sang dans les artères carotides du cheval. François-Fra>;ck (1890), pour étudier la vitesse du sang dans les jugulaires du cheval, a remplacé la membrane de caoutchouc par une lamelle de baudruche assouplie par l'eau glycérinée. Pour étudier la vitesse du sang chez le chien, François-Franck a implanté dans la paroi de l'artère une aiguille, et il en a enregistré les mouvements. De cette façon il avait un hémodromographe rudimentaire dans lequel le tube de l'appareil était repré- senté par la paroi artérielle même. ni. (^YBULSKi a construit un appareil appelé photohémotachoméfre, basé sur le prin- cipe des tubes de Pitot : Deux tubes verticaux, dont les extrémités inférieures tournées 4 pi Fig. 156. — Hcniodromographc à transmission do Chauveau. GRAPHIQUE (Méthode). 943 157. — Tracé de la vitesse du sang dans l'artère carotide droite du cheval (Lortet). en sens contraire, plongent dans un tube horizontal traversé par le courant sanguin. Les liquides qui remplissent les tubes verticaux présentent des dillérenccs de niveaux proportionnelles à la vitesse du sang. Ces différences de niveaux des deux colonnes liquides sont photographiées sur une surface sensible en mouvement. IV. Une méthode très ingénieuse, qui permet d'obtenir directement le tracé de la vitesse du sang, est la suivante, qui a été employée par v. Kriks 1888), Aueles (1892) et autres. On enferme la main et une partie de Tavant-bras dans la boite d'un plélliys- mographe à air. Cette boite communique par un tube avec un brûleur, comme ce- lui qui est représenté par la fig. 158. Dans ce brûleur, l'air chassé du pléthysnio- graphe arrive par le tube C. Par le tube B pénètre le gaz, qui, après avoir traversé ^,j^. le tube A, est allumé à rextrémité de ce dernier tube. La hauteur de la llamme . dépendra de la quantité de gaz qui l'alimente et du courant d'air qui arrive par le tube C. A chaque variation de volume du membre enfermé dans la boite plétliysino- graphique, il se produit un courant d'air. L'intensité de ce courant d'air expiime la vitesse avec laquelle le volume du membre aug- mente et diminue; par conséquent, l'intensité du courant d'air représente la vitesse de l'afllux du sang dans le membre. Comme le courant d'air agit sur la flamme manométrique, les variations de celle-ci représenteront les variations de la vitesse du sang. Bien entendu, il faut que pendant toute la durée de l'expérience le courant gazeux qui alimente la llamme soit constant. La flamme monte quand l'air sort du pléthysmographe, elle descend quand l'air est aspiré. Si le changement de volume du membre se fait très • lentement, la flamme reste immobile. C'est la vi- FiG. 158. — Flamme tachograplii-iue. tesse avec laquelle se font les variations de volume qui agit sur la flamme, et non pas la variation absolue du volume. Quand la flamme descend très bas, elle pourrait s'éteindre si le brûleur n'était muni d'un dispositif spécial. Comme on peut le voir sur la figure, la flamme est alimentée par un second courant gazeux qui lui arrive par le manchon l) qui entoure le tube A par lequel passe le courant gazeux principal. La flamme est photographiée au moyen d'un objectif. L'image renversée de la C A Fig. 159. — Tachogramme photograiihiquc (v. Kiui:s). flamme est projetée sur la fente (large de 2r> millimètres) d'un écran cpii cache un cylindre enregistreur recouvert d'une feuille de papier sensible. Pour qu'il n'y ait pas de superposition d'image, un dispositif spécial fait que le cylindre ne fait qu'un tour devant la fente ouverte. Le disque qui cache la fente présente un trait qui indique M4i GRAPHIQUE (Méthode). la position de celle-ci. De cette façon, on peut facilement régler l'appareil de telle sorte que l'image de la fente tombe sur ce trait. L'expérience peut se faire en plein jour. Le cylindre est enfermé dans une caisse; l'espace compris entre l'objectif et la fente est recouvert d'un manchon ; derrière la flamme il y a un écran noir. On peut calculer le rapport qu'il y a entre la hauteur réelle de la flamme et la hau- teur de son image sur la surface sensible. La vitesse avec laquelle se fait le mouvement de la surface sensible n'a aucune influence sur la hauteur des images. Si l'on veut avoir au-dessous du tachogramme l'indication du temps, on photogra- phie une seconde flamme, dont les rayons sont réfléchis par un petit miroir. Ces rayons sont interceptés périodiquement par une petite feuille de papier fixée au battant d'un métronome. Toutes les pièces de cet appareil de v. Kries, appelé 7 achographe à flamme manomc- trique, sont placées sur des rails et constituent un ensemble facile à manier. MARIETTE POMPILIAN. {A suivre.) '««'•f.? ^'*?^^- ■^^r^r iJ^ ■M-, '^.f-' , -*'^: M >^1 4r<[^;^r#^5p^ -^^ » d»' ■ >k ,^' .î».^- .V?. (.11 .7^-i' •î^vi^ !«*="#/: ncM-')'^ !^0 Sjfe4l'': i^'w- ,£' i^^sfe: _WVr'- >*fe,.-JÉi«.^.^ï-