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The Ontario Institute for Studies in Education

Toronto, Canada

THE ONTARIO INSÏITUTE FOR STUD1ES IN EDUCATION LIBRARY

DISCOURS

SUR LA

QUESTION SCOLAIRE

prononcé à la Chambre des députés

PAR

M. Ém. PRUM

à l'occasion de la discussion générale dès changements proposés à la loi scolaire du 20 avril 1881.

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LUXEMBOURG.

Imprimerie de la Cour V. BUCK, LÉON BUCK, Successeur. 1897.

DISCOURS

SUR LA

QUESTION SCOLAIRE

prononcé à la Chambre des députés

PAR

M. Ëm. PRUM

à l'occasion de la discussion générale des changements proposés à la loi scolaire du 20 avril 1831.

NOV 1 2 1969

ÏUTE ' STUDiES IN EDUCATION

LUXEMBOURG.

Imprimerie de la Cour V. BUCK, LÉON BUCK, Successeur. 1897.

Discours du 25 novembre 1897. Réponse an discours de M. Kirpach

du 24 novembre 1897.

Après le discours si calme, si digne et si pacifique de notre lu m. rapporteur et vénéré collègue Mgr. Krier, nous étions en droit de nous attendre, de la part de l'hon. M. Kirpach, à une plus grande modération. Pour combattre les amende- ments de la section centrale, il n'était nullement besoin de déterrer ce tomahawk rouillé de 1881, de venir nous donner lecture de vieux articles de journaux, oubliés depuis de longues années.

<>ù en arriverions-nous, Messieurs, si nous voulions user des mêmes procédés et venir vous donner lecture des injures et des blasphèmes que vomissait, il y a vingt ans, la presse des défenseurs de la réforme scolaire de 1881 ? Ce n'est pas seule- ment d'articles de journaux que nous avons eu à nous plaindre. Ne vous souvient-il don..* pas qu'à cette époque troublée, du haut de la tribune nationale, on lançait à la face du pays catho- lique les plus sanglants outrages? Ne vous souvient-il plus de mrs où, dans celte enceinte, trois orateurs ont osé traiter la sainte religion de nos pères de secte et le sacerdoce chrétien ce pays de caste? Ne vous rappelez-vous pas qu'à cette époque un certain nombre d'hommes politiques avaient telle- ment perdu le sentiment des égards qu'ils doivent :j la religion nationale, qu'ils sont allés jusqu'à proposer la suppression du cours de religion à l'Athénée '

Os hommes , qui n'admettent pas la liberté d'enseignement, voulaient donc faire donner un enseignement neutre et sans religion, non seulement aux tlls de nos familles chrétiennes qui se destinent aux carrières libérales et administratives, mais même à ceux qui aspirent au sacerdoce, étouffer ainsi les vo- cations sacerdotales dans leur source et détruire froidement et sûrement l'Église catholique dans ce pays elle s'esl implan- tée à la suite déjà des aigles romaines.

Je ne suivrai donc pas Thon. M. Kirpach sur le terrain qu'il a cru devoir choisir. Je ne le suivrai pas non plus dans l'énu- mération qu'il nous a faite de toutes les bonnes et excellentes choses qui ont été créées par son département et par les com- munes au moyen des crédits d'année en année plus considé- rables que la Chambre a mis à sa disposition. Tout cela n'a que des rapports très indirects avec la question qui nous occupe.

Il est un point cependant sur lequel je tiens à déclarer que je suis d'accord avec l'hon. Directeur général : c'est l'éloge qu'il a fait de notre corps enseignant.

Je connais un grand nombre de nos instituteurs, je sais quels excellents principes leur sont inspirés dans notre école normale, je sais aussi les études sérieuses auxquelles ils s'adonnent pour obtenir leur brevet, le dévouement dont ils font preuve dans l'accomplissement de leur ingrate et pénible mission, et je ne crains pas de déclarer que devant le pays aussi bien que devant l'étranger, nous avons tout lieu d'être fiers de notre corps enseignant. Aussi, Messieurs, la section centrale a-t-elle voulu rendre témoignage de sa sympathie pour le personnel de nos écoles, en dépassant très notablement les propositions qui ont été faites relativement à la majoration des traitements, tant par l'hon. Directeur général de l'intérieur que par les diverses sections de la Chambre.

Pour ce qui concerne le détail de la question des traitements, je me réserve d'y revenir à l'occasion de la discussion des articles.

Le discours de l'hon. M. Kirpach, si je l'ai bien compris, peut se résumer comme suit : La loi de 1881 est bonne et excellente,

â

[elle tient compte dans une juste mesure des intérêts religieux et garantit suffisamment l'éducation religieuse des enfants. La loi a jusqu'à ce jour bien fonctionné el donné de très bons résultais; la section centrale a donc tort de vouloir la modifier à l'occasion du vote d'uni' loi puremenl financière, qui ne louche en rien à l'organisation de notre enseignement public. C'est là, si je ne me trompe, la thèse de l'hon. Directeur irai.

M. Kirpach, ' 1 ) i r . gén. de l'intérieur. Parfaitement!

M. Prum. D'abord, Messieurs, pour ce qui esl du fonction- nement de la loi, je répondrai à l'hon. M. Kirpach que je ne I»' discuterai pas, parce que la loi n'a pas fonctionné du tout. Jusqu'à ce jour et abstraction faite de la question de l'obligation et du système d'inspection, qui ne sont pas en discussion, parce que nos amendements ne portent pas sur ces points, la loi n'a pas été exécutée.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. C'est une erreur.

M. Prum. Je vous le prouverai.

Le fait de l'inexécution ou de Pinexécutabilité de la loi de 1881 nous a encore récemment été signalé dans un excellent avis séparé de la minorité du Conseil d'État.

J'irai même plus loin et sans vouloir en faire un reprocha à l'hon . Directeur général, je lui dirai : ce n'est pas la loi de 1881, mais bien la loi de 1843 qui, en pratique, a continué à être ;utée jusqu'à ce jour.

1. - lois organiques telles que la loi sur l'enseignement n'ont iour but de régler les détails de la matière. La loi pose les principes el c'esl seulement par les règlements d'exécution que ces principes généraux sont appliqués. Or, Messieurs, jusqu'à ce jour, aucun des règlements d'exécution prévus par l'art. 76 il'* la loi de 1881 n'a été élaboré el <•<• sont les règlements de 1845 qiij provisoirement, mais depuis seize ans, sont restés en vigueur.

M. Spoo. Pourquoi réclamez- vous donc ?

M. Prum. Pour mettre la législation scolaire d'accord avec la pratique.

En théorie, la loi de 18W a été abolie; mais, en pratique, on n'a pas cessé un instant à l'exécuter. Même pour ce qui concerne l'enseignement religieux, tous ceux qui connaissent la vraie situation doivent savoir qu'un grand nombre de nos instituteurs, précisément les meilleurs, convaincus que l'enseignement re- ligieux ne saurait être donné d'une manière efficace sans leur concours, coopèrent activement à cet enseignement et, malgré la loi, préparent régulièrement les leçons de catéchisme.

M. Brasseur. Actuellement?

M. Prum. Oui !

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. C'est une erreur.

M. Prum. Non, M. le Directeur général. Je sais pertinem- ment que beaucoup d'instituteurs le font.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Des institutrices reli- gieuses.

M. Prum. Je ne parle pas des religieuses, mais des institu- teurs laïques. Je sais ce qui en est et vous pourriez le savoir également ; mais je ne veux pas insister sur ce point.

Quant aux règlements, le fait est palpable et indéniable : aucun des règlements prévus par l'art. 76 de la loi n'a été élaboré jusqu'à ce jour.

Telle est, Messieurs, actuellement la situation de fait. Ce n'est pas tant de cette situation de fait que nous avons à nous plaindre, puisqu'en pratique c'est toujours la loi de 1843 qui est restée en vigueur dans ses règlements d'exécution.

Mais, Messieurs, cette situation, si elle n'est pas trop mau- vaise, est cependant très précaire, puisque nous n'avons aucune garantie légale. De plus, les droits des divers facteurs qui con- courent à l'enseignement ne sont que très vaguement définis, puisque les règlements de 184'), qui continuent tous à être ap- pliqués, ne peuvent cependant l'être d'après une disposition

transitoire (art. II»! que pour autant qu'ils ne sonl pas con- traires à la loi.

Aujourd'hui absolument rien de ce qui touche à l'école n'esl clairement el positivement réglé, tout est vague et provisoire depuis seize ans. si donc je discute la loi de 1881, ce n'est pas de l'exécution et du fonctionnement «le cette loi que je veux parler, mais de la loi elle-même.

Pour répondre complètement à l'hon. Directeur général, j'aurai l'honneur de vous exposer avec autant de clarté, de pré- cision et de brièveté quïl me sera possible :

Les revendications du pays catholique en matière de légis- lation scolaire ;

Les griefs que nous croyons avoir contre la loi de 1881 ;

Le but que nous poursuivons par nos amendements ;

I Enfin, les raisons pour lesquelles nous avons cru devoir rattacher ces amendements au projet de loi qui est en discus- sion.

Je commencerai par le dernier point et, même après le re- marquable discours de Mgr Krier, j'espère ne pas tomber dans des redites.

Le projet de loi qui porte majoration de la part d'intervention de l'État dans les frais de l'enseignement primaire amène un changement essentiel de la loi organique de renseignement, spécialement des art. 41 à 50.

Ce t'ait a été relevé par nos sections et par la section cen- trale ; le Conseil d'État lui-même l'a reconnu dans un dernier avis il a avoué « qu'il ne saurait être contesté que les majo- rations considérables des charges du Trésor en faveur de l'en- seignement primaire impliquent des changements essentiels de la loi organi pie de 1881, notamment de l'art. 19.

Si donc nous voulions écouter les conseils communaux de Mersch, Eich, Larochette, Diekirch, Willz et autres, qui nous ont adressé des pétitions en faveur du maintien de la loi de 1881 dans toutes ses parties, nous ne pourrions faire autre chose que de refuser les nouvelles subventions et de voter contre le projet de loi tout entier.

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M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. El les communes vous en seraient reconnaissantes.

M. Prum. Les communes n'y perdraient rien si on voulait attribuer le subside scolaire au fonds communal. Cependant nous ne demandons pas cela. La section centrale n'a pas été de cet avis. Elle vous propose de voter les subventions; mais d'autre part, pour contrebalancer les effets inévitables du changement de la loi organique, elle s'est ralliée à une série d'amendements qui avaient été présentés dans le même but par les sections.

\j' Conseil d'État, cependant, tout en reconnaissant que le projet de loi ainènf un changement essentiel de la loi de 1881, est d'avis qu'une mesure purement financière comme celle qui nous est proposée, n'est pas de nature à restreindre les droits dt'^ administrations communales. Ce corps trouve donc nos amendements inopportuns.

Incontestablement, la majoration de la part d'intervention de l'État dans les frais de l'enseignement n'est par elle-même qu'une mesure purement financière ; mais, ne sont ce pas les mesures financières qui généralement entraînent les consé- quences politiques les plus considérables? Certainement, le projet de loi ne porte pas directement atteinte aux: droits (\>^ communes sur l'école ; mais, au point de vue purement finan- cier, la situation des communes vis-à-vis des écoles sera com- plètement changée et ce changement exercera nécessairement une influence sur la position des autorités locales vis-à-vis des écoles et du personnel enseignant.

Déjà aujourd'hui il s'élève assez fréquemment des conflits <'ntre les administrations communales et les inspecteurs repré- sentants de l'État.

.le pourrais vous citer le cas d'une administration commu- nale qui, pendant des années, a lutter contre l'inspecteur avant de parvenir à faire mettre à la retraite un instituteur qui n'était même plus capable d'écrire son propre nom. L'inspec- teur, mu par un sentiment très respectable, défendait les inté- rêts matériels de son subordonné, qui, cependant, dans ce cas,

$e trouvait sans chapes de famille ; l'administration, par contre, luttait pour empêcher qu'une génération entière ne vînt à ci pir dans l'ignorance. Ce n'est qu'après plusieurs années, à force d'énergie et après avoir épuisé tons les moyens, que l'admi- nistration communale a pu avoir gain de cause.

Si de tels faits ont pu se passer sous le régim actuel, qu'en sera-t-il à l'avenir, lorsque l'inspecteur pourra, non sans raison, venir dire à une administration communale: celte école que vous prétendez être la vôlre, niais c'est l'État qui en supporte s les charges, c'est donc moi, représentant de l'État, qui dois avoir l'influence prépondérante et décisive sur tout ce qui concerne l'école?

Le projet de loi n'enlève directement aucun droit aux com- munes et n'accorde par lui-même aucun droit nouveau à l'État; cependant, il est de toute évidence que, dans la mesure même il enlève aux dépenses de l'instruction primaire le caractère de dette communale, il affaiblit les liens qui existent entre la commune et l'école. Si donc le projet de loi venait à être voté sans nos amendements, c'est-à-dire sans contre-poids ni garan- ties, il aurait pour résultat fatal et inévitable, non seulement de diminuer dès maintenant l'ascendant mora! des administ ations communales sur l'école, mais encore et surtout il préparerait pour l'avenir la déchéance complète de la commune en matière d'éducation et d'enseignement.

Lors des discussions budgétaires de l'année dernière, j'ai cité l'opinion du ministre prussien y. Miquel sur l'influence morale des majorations de l'intervention pécuniaire de l'État en ma- tière d'enseignement. Ces majorations, a déclaré -M. v. Miquel, doivent fatalement et inévitablement conduire à la déchéance de la commune et à la centralisation absolue de l'enseignement entre les mains de l'État, car il est de toute évidence «dassdieMaeht »und der Einfluss des Staates und der staatlichen Organe »wachsen muss mit den Betràgen, die der Staat fur die Schule » abgibt ».

Aujourd'hui, il me sera permis d'appeler l'attention de la Chambre sur ce qui vient de se passer eu Suisse.

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Dans ce pays, malgré certaine disposition de la Constitution de 187-i, disposition qui jusqu'à ce jour, grâce à la résistance du peuple, est restée lettre morte, l'instruction primaire est de fait encore de la compétence de la souveraineté cantonale. A plusieurs reprises déjà la Confédération a cherché à s'immis- cer dans l'école populaire. En 1882 notamment, les Chambres fédérales ont voulu créer un inspectorat scolaire permanent à Teflet de veiller a l'application de la Constitution fédérale dans le domaine des écoles. Le peuple suisse a vu dans cet inspec- torat une sorte de prise en possession de l'école par le pouvoir central et surtout une tentative indirecte de déchristianisation des écoles. Dans un mémorable référendum du 22 novembre 1882, le peuple a repoussé par 350,000 voix contre 200,000 l'arrêté qui créait cet inspectorat scolaire. Après cet échec écrasant des partisans de la centralisation il n'a plus été ques- tion de l'intervention de la Confédération dans l'école. Aujour- d'hui cependant la question se pose sous une autre forme bien plus dangereuse.

En Suisse, la Confédération, tout comme chez nous l'État, est riche, parce qu'elle perçoit le produit des impôts indirects de consommation, de douane et autres, qui augmente d'année en année. Par contre, les cantons et les communes qui ne pré- lèvent que des impôts directs sont généralement pauvres. Dès 1892, des journaux ont commencé par suggérer que la Con- fédération pourrait venir au secours des cantons et des com- munes en prenant à sa charge une forte part des frais de l'enseignement primaire. On a cherché à créer un mouvement d'opinions en ce sens. Des assemblées d'instituteurs ont été convoquées pour réclamer des subsides de la Confédération en faveur des écoles et en même temps des majorations de traite- ment. Un certain nombre d'hommes politiques se déclarèrent partisans de cette mesure, et po;ir ménager toutes les suscep- tibilités, tout comme chez nous, ils s'empressèrent de déclarer qu'ils n'entendaient nullement toucher à l'autonomie des can- tons ni aux prérogatives des communes, que la Confédération

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pouvait parfaitemenl accorder de fortes subventions en faveui ic« de l'enseignemenl sans s'immiscer autrement dans la marche des sjécoles.

Une conférence des directeurs de l'instruction publique des cantons de la Suisse centrale réunie à Lucerne se prononça en principe pour les subventions fédérales, tout en formulant la réserve expresse: « Dass der Bund keinerlei Anforderungen, weder bezùglich der Lehrerbildung, noch der Lehrerbesoldung, noch der Schulhàuser, noch des Lehrplanes an die antonomen Kantone stellen dûrfe. »

Sur ces entrefaits, le conseil fédéral ou plutôt M. Schenk, chef du départemenl de l'intérieur, s'était mis à l'œuvre. En 1895 M. Schenk publia un avant-projet de loi concernant la répartition de 2 millions de subventions fédérales. Le texte de ce projet respectail absolument l'autonomie des cantons en ma- tière scolaire. Cependant les partisans du maintien de l'autono- mie cantonale et surtout les catholiques se défièrent de ce cadeau fédéral. Le projet de loi Schenk fut loin de trouver les faveurs de l'opinion publique et son auteur jugea prudent d'en retarder la présentation officielle aux Chambres.

M. Schenk étant venu à mourir, son successeur au départe- ment de l'intérieur, M. Ruffy, laissa dormir le projet dans le cercueil de son auteur, malgré les véhémentes réclamations des instituteurs radicaux qui menaçaient de lancer une initiative constitutionnelle pour faire trancher la question par le peuple.

Enfin le Ier juillet dernier, un député radical du conseil na- lional, M. Hess de Zurich, a voulu donner satisfaction à l'im- patience des instituteurs radicaux en interpellant le conseil fédéral sur la question des subventions scolaires. Plusieurs orateurs marquants ont pris part à cette discussion. D'un côté, M. Decurtins s'est prononcé très vivement contre les subven- tions. Le diei éminent des catholiques suisses s'est fait le porte-voix île tous les adversaires de la centralisation, de tous ceux qui craignent que l'école ne tarderait pas à passer peu ;i peu sous l'influence exclusive de l'autorité qui la subven- tionnerait, l'ai' contre, M. Gobât, membre du gouvernement de Berne, se déclara favorable aux subventions, tout en reconnais-

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sant lui-même que le projet était très impopulaire el que si les instituteurs impatients voulaient poser la question devant le peuple, ils échoueraient complètement. Knfin, le nouveau mi- nistre de l'intérieur, M. Ruffy, avoua également que le projet était inopportun et qu'il recevrait probablement un très mau- vais accueil de la part du peuple suisse.

Vous voyez, Messieurs, qu'en Suisse (''gaiement les homm > d'État aussi bien q-ue le peuple voient dans un projet de loi ac- cordant des subventions importantes en faveur de renseigne- ment primaire, alors 'même que cette proposition n'accorde aucun droit nouveau au pouvoir central, une atteinte indirecte portée aux droits des collectivités autonomes.

Mais qu'avons-nous besoin de chercher des exemples à l'étranger, de consulter les hommes d'État de l'Allemagne, de la Suisse et d'autres pays? Je puis vous citer l'avis d'un de nos compatriotes, d'un homme dont personne ne contestera ni la grande compétence, ni la liante autorité, puisque depuis près vingt ans il siège dans cette enceinte au banc ministériel : c'est le Directeur général de l'intérieur, Thon. M. Kirpach. Cet avis, je le trouve consigné au Compte-rendu officiel des séance- de la Chambre de 18M-4882, p. 1678.

A la séance du 3 août 1882, feu M. le député Mertens a de- mandé au Gouvernement d'étudier la question de savoir s'il n'y avait jtas lieu de dégrever les communes en mettant à charge de l'État les traitements des instituteurs. Voici la réponse de l'hon. M. Kirpach :

La question soulevée par l'hon. M. iMertens est très épineuse, très ardue. Elle a été soulevée à différentes reprises el vous vous rappelez qu'avant la revision de la loi de 1843, l'opinion publique, les journaux du moins, s'occupaient de la question de savoir s'il ne fallait pas faire des instituteurs des fonctionnaires de l'État. Cette question offre de l'analogie avec celle que l'hon. M. Mertens vient de soulever, en tant que l'État, s'il était oblige de payer les traitements des instituteurs, pourrait aussi revendiquer le droit de leur nomination.

Aux yeux de l'hon. M. Kirpach, la question des subventions scolaires et celle de la nomination des instituteurs par l'État offre donc de grandes analogies en tant que l'État, s'il était obligé de payer le traitement des instituteurs, pourrait aussi revendiquer le droit de leur nomination.

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M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Si c'était l'intégralité, entendons-nous.

M. Prum. Sans doute; mais nous sommes bien près de cette intégralité.

M. Kirpach, Dir. gén de l'intérieur. Nous restons loin de la totalité.

M. Prum. Au contraire, nous en approchons beaucoup. Par le projet de loi, nous incitons à charge de l'État les cinq hui- tièmes des frais de l'enseignement primaire. Les traitements des instituteurs, sans les pensions, se monteront à l'avenir à 929,000 lh, donl 575,000 fr. à la charge de l'État et seulemenl un peu plus de 354,000 fr. à l;i charge des communes.

Je vous le demande, Messieurs, si, en ce moment, nous nous disposons à charger ainsi l'État de la presque totalité des dépenses se ilaires, nous sommes, oui ou non, autorises à ex- primer nos craintes au sujet du maintien des droits et de l'auto- nomie des communes en matière d'enseignemenl ?

Le Conseil d'État a reproché aux auteurs des amendements d'avoir soulevé une très grave question, à l'improviste, d'une façon incidente et à l'< ccasion d'une question d'argent à laquelle elle ne se rattacherait en rien. Ce reproche, Messieurs, nous ne l'acceptons nullement, surtout lorsqu'il vient de" la part de ces hommes qui, il y a deux ans à peine, dans un document officiel, ont proposé de charger l'État non seulement de tous les frais, mais encore et, à l'exclusion des communes, de l'or- ganisation comp'ète de l'enseignement primaire.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. C'est un avis séparé d'un membre, comme celui que vous invoquez aujourd'hui.

M. Prum. Nous ne pouvons pas savoir cela, nous nous trouvons devant un document officiel.

En admettant même m1"' cette proposition formelle n'ait été qu'à une seule voix, il ne faut pas oublier que la majorité du Conseil d'État s'est en principe ralliée à cette manière de voit- et n'a repoussé la proposition que par opportunisme.

Dans leur statolàtre doctrinarisme, ces hommes ont pu un instant se faire illusion et croire notre pays déjà mûr pour la

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pire des servitudes intellectuelles, pour la concentration absolue de l'enseignement entre les mains du pouvoir central. Aujour- d'hui qu'ils ont reconnu l'impossibilité de prendre d'un coup de main et de démolir immédiatement la citadelle de nus immunités municipales, ils espèrent atteindre leur but par une voie dé- tournée, par l'application de la célèbre maxime de Philippe de Macédoine : « Il n'y a pas de citadelle assez forte qui ne laisse entrer un mulet chargé d'or. »

Le mulet, Messieurs, nous le laisserons entrer, parce que l'or dont il est chargé nous appartient de plein droit ; mais nous ne voulons ouvrir les portes sans prendre la précaution de pourvoir à la dél'ense de la place en relevant certains bastions qui sont tombés en ruine, c.-à-d., nous ne voulons accepter les nouvelles subventions scolaires sans la modification de plusieurs dispositions de la loi de 1881.

La première de ces modifications concerne l'organisation et les attributions des commissions locales. Les autorités commu- nales ne peuvent exercer leur surveillance sur l'école que par l'intermédiaire des commissions locales prévues par les art. 96 et 97 de la loi organique.

A l'exception de quelques autorités scolaires allemandes qui, du reste, ont principalement en vue la situation des grandes villes les inspecteurs de l'État se trouvent à proximité de l'école et la coexistence des deux inspections Fach- inspection und Localinspection a donné naissance à certain antagonisme, tout le monde est d'accord pour reconnaître la nécessité de l'inspection locale. Elle existe dans tous les pays et ne saurait être remplacée par l'inspection par ressort. L'hon. M. Kirpacb a toujours déclaré attacher une très grande impor- tance au fonctionnement des commissions locales. Voici com- ment il s'est exprimé à la séance du 10 janvier 1883.

Je ne vous cacherai pas que le fonctionnement des commissions locales laisse beaucoup à désirer ; je ne vous cacherai pas non plus que j'attache à l'institution des commissions locales une grande importance. Cette insti- tution, à mes yeux, est d'une utilité majeure, et voilà pourquoi je liens aussi à ce que le fonctionnement en soit assuré.

Quelle q .e soit l'importance que l'hon. M. Kirpach ait attachée

à l'institution des commissions locales, il devra bien convenir

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que, pas plus aujourd'hui qu'en 1-ss;!, il n'a réussi à en assurer le fonctionnement. Lors des discussions budgétaires de l'année dernière, l'hon. Directeur général nous a avoué que la grande majorité des commissions, 91 sur 144, ne se son! pas réunies une seuil' lois et n'ont pas visité une seule des écoles de leur ressort, 34 commissions ont fonctionné irrégulièrement et 19 seulement ont répondu aux exigences de la loi.

M. Brasseur. On a déjà refuté cela ici.

M. Prum. Ce sont les chiffres de l'hon. M. Kirpach lui- même.

M. Brasseur. J'ai aussi des chiffres.

M. Bech. Vous citerez les vôtres.

M. Prum. Vous en citerez d'autres, si vous êtes en état de le faire. Mes chiffres sont officiels. À quelles causes doit-on attribuer un si lamentable échec? Il y en a plusieurs, la prin- cipale cependant a été reconnue par les auteurs de la loi de 1881, dès le lendemain de sa promulgation.

En effet, en 1883 déjà, feu M.deWacquanl, qui avait été à la Chambre rapporteur de la loi scolaire, a franchement avoué que l'on avait commis une faute en n'admettant pas le curé de chaque paroisse comme membre de la commission -locale. Dans ance de la Chambre du 11 janvier 1883, l'hon. membre a même formellement exprimé le désir de voir modifier la loi en ce point.

Cette modification, dont la nécessité a été reconnue, dès 1883, par un des principaux collaborateurs de la réforme et à laquelle MM. les inspecteurs eux-mêmes paraissent s'être ré- signés aujourd'hui, est une de celles que nous avons proposées.

Une autre proposition de la section centrale concerne le changement des commissions communales en commissions locales. Actuellement, il existe seulement une commission sco- laire par commune. C'est là, à mon avis, une des raisons pour lesquelles ces commissions n'ont pas fonctionné jusqu'à ce jour. Très souvent, dix ou douze écoles dispersées dans cinq dépendent d'une seule el même commission. Dans

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ces cas, il est forl difficile aux membres de ces commissions de pérégriner d'un village à l'autre pour visiter les écoles, et cela d'autant plus qu'aucun des membres, pas même le bourgmestre, n'est en droit de faire une visite sans être accompagné d'au moins d'un de ses collègues. Lois même que les membres des commissions sont animés d'un très grand zèle et visitent une ou deux fois par an les écoles de leur ressort, ils ne peuvent cependant exercer une surveillance sérieuse que dans la localité ils résident, car ils ne sont que très rarement à même de savoir et de juger ce qui se passe dans les différentes autres sections de la commune.

D'autre part, les dispenses scolaires qui entrent dans les at- tributions des commissions, donnent lieu à des courses nom- breuses et souvent pénibles. Je dois avouer que j'ai été souvent pris de pitié en voyant, en plein hiver, par des temps de neige et de glace, de petits enfants faire un trajet de cinq à six kilo- mètres pour aller au chef-lieu de la commune demander une dispense. Je suis persuadé que tant que les dispenses et les congés ne pourront pas être accordés par une autorité résidant à proximité de l'école, c.-à-d. tant qu'il n'y aura pas une com- mission locale dans chaque section de commune, la loi sur l'en- seignement obligatoire ne pourra pas être exécutée.

Il y a plus, Messieurs. Ce ne sont pas seulement les entants qui se trouvent dans le cas de devoir demander des congés, l'instituteur également se voit de temps en temps empêché de tenir sa classe. Ces empêchements sont souvent de telle nature qu'il lui est impossible de faire le voyage au chef-lieu de la commune pour demander un congé ; aussi arrive-t-il quelque- fois q.ue les instituteurs s'accordent d s congés eux-mêmes. A ce sujet, il existe peu ou po'nt de contrôle dans le> locali- tés éloignées du chef-lieu de la commune, et les abus sont iné- vitables. Je connais un instituteur qui, il n'y a pas 1res long- temps, s'est accordé lui même huit jours entiers de congé, ab- solument sans demander la permission a qui que ce soit.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Ce sont des excep- tions. Tout le village est pour exercer la surveillance.

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M. Prum. Les habitants du village n'onl aucune autorité sur l'instituteur. les commissions locales ne Ibnctionnenl pas, c'esl l'inspecteur seul qui reste chargé d'empêcher des abus comme celui dont je viens de parler. Certainement, et je me plais à le reconnaître, les inspecteurs s'acquittenl de leur mission avec un très grand zèle; cependant, malgré tout, ils ne peuvent faire que de très rares el de très courtes apparitions dans nos villages el s'ils parviennent à découvrir les abus, ce n'esl souvent que par un pur hasard. Ainsi, l'année dernière, im inspecteur arrivanl dans certain village a trouvé la porte de l'école fermée ; l'instituteur s'était, ce jour-là, pris un petit congé etse trouvait tranquillement à un cabaret occupé à jouer aux quilles, tandis que l'inspecteur se morfondail à la porte de l'école. Peu de temps après, l'inspecteur principal est venu dans le même village, et cette fois encore la porte de l'école était fermée, l'instituteur avait renvoyé les enfants chez eux pour faire une promenade avec un de ses amis. Il esl évident que ce ne sera que très rarement que les visites «les inspecteurs coïncide- ront avec les jours les instituteurs font l'école buissonnière.

La crainte de voir apparaître cet inspecteur, qui réside sou- vent à une dislance de cinq à six lieues, ne sera jamais assez forte pour maintenir dans le devoir un instituteur négligent. Sur 7 0 à son membres du corps enseignant, il y en aura tou- jours un certain nombre qui seront moins bons, et ceux-là

penseronl de l'inspecteur co îe les paysans russes du Czar :

a Der llimmel ist hoch und (1er Czar ist weit » !

Quant aux bons instituteurs eux-mêmes, il est nécessaire qu'ils trouvent à proximité de l'école une autorité à laquelle ils auront à recourir en toute circonstance, car personne ne doit être juge dans sa propre cause.

Voilà pourquoi, Messieurs, la section centrale a cru devoir proposer de changer les commissions scolaires actuelles qui, du reste, n'existent que sur le papier, en <\^+ commissions vraiment locales.

Lors de la discussion des articles, j'aurai l'occasion i\r revenir

sur 1rs autres questions de détail qui c incernent l'organisation

ommissions locales ; je liens cependant à relever encore un

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point. Nous avons emprunté aux législations anglaise et suisse l'idée de faire directement représenter les familles au sein des commissions locales.

Il est évident que la majoration de la part d'intervention de l'État dans les frais de l'enseignement aura pour premier résultat d'introduire la gratuité scolaire elle n'existe pas encore.

M. Welter. Vous êtes pour la gratuité ?

M. Prum. Je n'ai pas dit cela ; je constate seulement un fait. Le projet de loi amènera en fait la gratuité. Par suite, le dernier lien qui, sous le régime actuel, rattachait la famille à l'école sera donc détruit.

Dans ces circonstances, nous avons cru nécessaire de sanc- tionner de nouveau, par la législation, le droit primordial de la famille sur l'école, en proposant d'adjoindre aux représentants des autorités civiles et religieuses qui composent les commis- sions locales, un membre élu directement par les parents ou tuteurs des enfants qui fréquentent l'école.

Du reste, Messieurs, cette idée de faire entrer dans les com- missions locales un élément électif, nous a été en partie suggé- rée par l'hon. M. Kirpach.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Cela existe en Suisse.

M. Prum. J'allais justement le dire. Vous vous êtes inspiré de cet exemple en 1881. Voici, en effet, ce que nous lisons dans votre discours du 10 janvier 1883 :

L'idée des commissions locales n'est pas nouvelle; si elle est nouvelle chez nous, elle ne l'est pas partout ailleurs. J'ai déchue, lois de la discus- sion de la loi, qu'en Suisse les commissions locales fonctionnent parfaite- ment et qu'on y attachait une importance telle que dans bien des communes elles se composent de 8-9 membres, qui sont choisis el renouvelés tous les ans par tous les électeurs de la commune âgés de 21 ans. C'est en lisant cela que je me suis dit que cette institution serait mile chez nous aussi el voilà pourquoi j'en ai proposé l'adoption.

En lisant cet éloge qui a été fait par l'hon. M. Kirpach du fonctionnement excellent des commissions locales en partie électives, nous avons pensé que l'adoption de ce système contri- buerait peut-être à assurer chez nous (''gaiement le fonctionne- ment de ces utiles institutions.

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Les administrations communales ne pe venl exercer leur '■'f influence nécessaire sur l'école autrement que par l'intermé diaire des commissions scolaires. Co teni les autorités com- munales pourraient-elles à l'avenir, lorsque par suite des nou- velles subventions, l'influence morale du pouvoir central aura été singulièrement fortifiée, défendre efficacement les droits el les prérogatives des communes en matière scolaire , si les commissions continuent à ne pas fonctionner?

Pour cette raison, il nous est impossible de voter les sub- ventions nouvelles, sans nos amendements, c'est-à-dire sans prendre les mesures nécessaires pour assurer le fonctionnement des commissions locales.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Est-ce qu'elle ne fonc- tionne pas à Clervaux ?

M. Welter. Chez M. Prum ? 11 ne manquerait plus que ça !

M. Brasseur. Mais elles ne fonctionnent pas dans tout le canton.

M. Prum. La commission locale de Clervaux fonctionne très régulièrement, elle est une des dix-neuf qui, de l'aveu de l'Iion. M. Kirpach, ont seules répondu aux exigences de la loi. C'est précisément comme président de cette commission que j'ai pu me convaincre par ma propre expérience combien, sous le régime actuel, il est difficile aux membres des commissions locales de remplir la tâche que la loi leur impose et c'est ce qui m'autorise à recommander à la Chambre de voter nos pro- positions afin de réorganiser complètement ces commissions.

Cependant. Messieurs, les propositions de la section centrale ne concernent pas seulement l'organisation el les attributions des commissions scolaires, elles visent également renseigne- ment religieux.

Vous me permettrez d'exposer à ce sujet d'abord les revendi- cations du pays catholique en matière d'enseignement , ensuite nos griefs contre la loi de 1881 et le but que nous poursuivons par nos propositions.

L'école populaire dans notre pays doit être religieuse. Per sonne, je crois, ne le contestera.

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Grâce à Dieu, le peuple luxembourgeois^ dans son ensemble, est, jusqu'à ce jour, resté inébranlablement attaché à la religion de ses pères. Cette fidélité aux principes religieux es! la gloire

de noire pays, elle sera sa force au i snt du péril, elle sera

la plus forte barrière qu'on pourra opposera ces doctrines anti- sociales que nous voyons grandir autour de nous et qui me- nacent de devenir un véritable danger.

Ce serait une erreur bien grave que de ne voir dans la ques- tion sociale qu'une simple question économique. Le grand péril social est dans les idées. Ce sont les principes religieux et mo- raux qui, incontestablement, sont la base de la société et c'est cette base menu' que, depuis plus d'un siècle, on s't-st efforcé d'ébranler. Les doctrines subversives, élaborées d'abord pa les écrivains, sont peu à peu descendues dans les masses. Les su- prêmes révoltes de l'intelligence, des âmes égarées par l'orgueil de la pensée, se sont traduites au bas de l'échelle sociale par la révolte contre tout ordre intellectuel , moral et social. L'athéisme officiel dont la Révolution française a imprégné la législation des peuples modernes, en détruisant une partie de ce précieux trésor de moralité et de foi religieuse accumulée par dix-huit siècles de christianisme, a ébranlé la société toute en- tière sur sa base immuable.

Comme l'a très bien dit un des hommes le mieux au courant du mouvement socialiste contemporain, un orateur distingué du Parlement allemand, M. Winterer de Mulhouse: c'est l'apos- tasie de l'État, l'apostasie de l'école qui ont conduit à l'apostasie de la famille et h l'apostasie du travail.

Certes, Messieurs, même dans les pays moins religieux que le nôtre, la masse du peuple est loin d'être atteinte de cette hideuse gangrène du matérialisme au même degré que la scro- phuleuse postérité de Voltaire dans les classes bourgeoises et dirigeantes ; mais, Messieurs, le danger de la contagion devient de jour en jour plus grand et le péril social plus grave.

Ce point a été reconnu récemment par un professeur d'éco- nomie politique et de sociologie de Karlsrulie, le IV Herkner qui, dans un ouvrage remarquable sur la question sociale, s'est exprimé comme suit: «Die durchschnittliche Sittlichkeit unserer

I!)

Irbeitenden Rlassen stehl noch immer ûberraschend hoch ùber It'in Niveau der âusseren Bedingungen ; doch, das Kapital von isittlichkeit, das wir ans Prûheren Zeiten ùbernommen liaben, Schmiizt wie der Schnee ùber dem Wehen i\f* Fôhns zusammen

iiml wird bald geschwunden sein, we licht bald ein Wandel

erfolgl ».

La nécessité sociale de la religion a été clairement reconnue par les hommes d'Élat qui, après la Révolution française, onl cherché à reconstituer la société.

! e lendemain de ce cataclysme, devanl legouffreà peine Terme, retentit la voix de Portalis : « Point d'instruction sans éducation. Poinl d'éducation sans morale el sans religion. Toute la France appelle la religion au secours de la morale et de la société». El plus tard, au milieu de la tourmente révolutionnaire de 1848, cette vérité a été reconnue par ML Thiers, qui, à la tribune nationale de son pays, s'écriait : « Si j'avais dans mes mains le bienfait de la foi, je les ouvrirai sur mon pays, car j'aime cent fois mieux une nation croyante qu'une nation incrédule ».

Les constituants luxembourgeois également ont reconnu la ssité sociale de la religion et, malgré certaines inconsé- quences, ils ont consacré ce principe dans notre charte fonda- mentale. La Constitution luxembourgeoise garantit la liberté des cultes et leur exercice public. Elle distingue nettement dans son art. 19 entre cette liberté et la libre manifestation des opi- 5, pour bien marquer la différence qui existe entre les droits de la croyance en une religion positive et le simple énoncé d'une doctrine religieuse philosophique ou scientifique quelcon- que et, dans son art. 22, elle reconnaît implicitement les droits de l'Église, puisqu'elle prévoit un contrat bilatéral qui réglera les rapports entre l'Église et l'État.

La Constitution admet donc la religion positive el l'Église ca- tholique comme institution sociale qu'il faut protéger el soute- nir. Comment l'Église pourrait-elle se maintenir et vivre dans un pays "u "U lui conteste le droit et la liberté d'enseignement, si en même temps on l'excluait de l'éducation du peuple, si on ne l'admettait pas efficacement a l'école ? lue telle situation n'a jamais été faite a l'Église dans aucun pays du monde, depuis les temps de Julien l'Apostat.

Comment la Constitution pourrait-elle prôner l'influence de la religion positive au point de lui accorder une liberté sans pal reille, de la reconnaître même comme société indépendante au point de vouloir traiter avec elle de puissance à puissance, si en même temps elle lui refusait les moyens de se perpétuer et de vivre?

La Constitution n'aurait-elle donc reconnu l'Église que pour la détruire? Une telle inconséquence ne peut être le l'ait d'un législateur intelligent et consciencieux.

Donc, la Constitution qui reconnaît l'Église et veut la proté- ger, ne peut vouloir un enseignement primaire officiel sans re- ligion, elle ne peut vouloir d'autres écoles que des écoles con- fessionnelles.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Cela est autre chose.

M'. Prum. Je vous prie de ne pas m'interrompre.

Une éducation religieuse vraiment sérieuse et efficace est impossible en dehors de l'école confessionnelle ; donc la Cons- titution luxembourgeoise, qui reconnaît dans la religion un besoin social, doit vouloir l'école primaire confessionnelle et, étant donnée la situation de fait, en règle générale, l'école con- fessionnelle catholique.

Je concède que dans certains cas exceptionnels, les mesures nécessaires doivent être prises pour sauvegarder la liberté de conscience des dissidents. Quant aux libres-penseurs, je ne pense pas qu'ils aient droit à des égards particuliers.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. La liberté de cons- cience doit être respectée.

M. le Président. Messieurs, n'interrompez pas continuel- lement.

M. Prum. Lorsque l'État vient au secours d'un besoin social, il doit avoir en vue les besoins de la généralité et ne saurait s'arrêter devant les convenances personnelles de quel- ques individualités. Jamais, ni nulle part, la négation de tout culte n'a été considérée comme un besoin social. Comme l'a très bien dit le ministre prussien, comte de Zedlitz-Trûtschler.

J

1

J M. Prum. Vous pouvez citer quand H vous plaira Bebel el

es coreligionnaires. Je vous cite le comte Zedlitz qui esl pro- ..{ et conservateur et qui a été ministre des cultes et de instruction publique du royaume de Prusse, donc un homme f.iivs compétent.

Comme l'a très bien dit le ministre prussien, comte de Zedlitz-Trûtschler, en rendant les écoles confessionnelles au risque de forcer les libres penseurs de faire donner une édu- cation religieuse à leurs enfants, nous n'avons absolument pas l'inti ntion d'opprimer les consciences :

Wir wollen keineswegs, dil M. de Zedlitz, ich wenigstens môchte nicht iin geringsten einen Zwang ausuben ; ich will nur eine Wohlthat, die ich selbst empfangen habe, den ungliicklichen Kindem geten, denen keine frc-mim- Mutter die Bande gefaltet bat und die keine Worte der Wahrheit je in ibren Familier) horen.

Du reste, Messieurs, ne n'oublions pas, s'il est difficile de taire de bons chrétiens comme de bons citoyens, il n'est mal- heureusement pas difficile de défaire des chrétiens.

M. Krier. C'est très vrai.

.M. Prum. L'école confessionnelle ne peut donc guère of- fusqer les libres penseurs.

Quant à nous, catholiques luxembourgeois, comme citoyens de ce pays el au nom de notre pacte fondamental qui reconnaît l'Église et vont la protéger, nous sommes en droit de reven- diquer un enseignement primaire confessionnel et catholique, car c'est la le seul moyen de conserver au peuple luxerabour- - l'intégrité de la foi et de transmettre à nos descendants le dépôt le plus sacré qui nous a été légué par nos ancêtres.

Pères de familles chrétiens, à qui on refuse la liberté la plus précieuse, celle de l'enseignement, nous sommes en droit d'exiger que l'enseignement officiel soit confessionnel et catho- lique, car il n'est pas de plus grande souffrance pour un père que la déportation de son fils dans une école qui n'est pas con- lorme à sa conscience.

Mais, dira-t-on, l'école primaire de notre pays, n'est-elle donc pas cette école confessionnelle catholique, la seule qui puisse

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convenir à nos populations? C'est là, Messieurs, une bien grave question. Je n'en connais pas de plus importante qui puisse être posée à ceux que les circonstances ont investis du mandat redoutable de la législation.

Obéissant à un devoir qui m'est imposé par ma conscience chrétienne el par I»' sentiment de la responsabilité que je porte devant mon pays, je déclare franchement et ouvertement et avec une conviction pleine et entière : Non, l'école organisée parla loi de 1881 n'est pas cette école confessionnelle catho- lique, la seule qui puisse pleinement satisfaire nos familles chrétiennes.

Je vous prie, Messieurs, de ne pas vous méprendre sur le sens de nies paroles. Grâce à l'inexécution de la loi, un grand nombre de nos écoles en l'ait, méritent à tous égards la confiance des l'aniilles. Les écoles sont bonnes malgré la loi.

M. Kirpach, Die. gén. de l'intérieur. En vertu de la loi.

M. Prum. Non, car elles ne sont, pas confessionnelles, vous ne le nierez pas.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Nous voulons une école religieuse, mais pas confessionnelle.

M. le Président. Je vous en prie, n'interrompez pas con- tinuellement.

M. Prum. Je constate que l'iion. M. Kirpach reconnaît que, d'après la loi, l'école chez nous n'est pas confessionnelle. Cet aveu a sa valeur.

Qu'est-ce que l'école primaire confessionnelle ? Ce n'est pas l'école congréganiste, il y a d'excellentes écoles confessionnelles laïques; ce n'est pas non plus l'école dont les dissidents sont exclus, il y a souvent des dissidents dans les écoles dirigées par le clergé ; ce n'est pas plus l'école l'on enseigne le catéchisme toute la journée.

L'école confessionnelle esl celle l'enseignement religieux dogmatique se donne à certaines heures, mais où. aux autres heures, consacrées à l'enseignement littéraire et scientifique, l'instituteur saisit les occasions qui se présentent pour faire mieux comprendre aux enfants ce que l'enseignement dogma-

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tique a nécessairement d'abstrait, c'esl l'école dans laquelle l'instituteur coopère à l'enseignement religieux et à l'éducation morale et religieuse des entants, l'école dont le cachet et la physionomie sont religieuses, ou, pour me servir de l'expression de M. Guizot, dont l'atmosphère est religieuse.

L'instruction morale et religieuse n'est pas, comme le chant el le dessin, une leçon qui est donnée en passant, par un maître spécial et à une heure déterminée, après laquelle il n'en est plus question.

Mgr Dupanloup, dans son admirable livre sur l'éducation, dit :

11 ne suffit pas que la religion ait une part quelconque dans l'éducation, qu'elli temps en temps une apparition. Tout cela n'est rien si

elle ne pénètre pus. si elle n'inspire pas, si elle ne soutient pas tout i divine influence, si elle n'est pas l'âme de l'éducation toute entière.

Après ce témoignage de l'illustre évêque d'Orléans, il me sera permis de citer celui d'un protestant , de M. Guizot. S oici m quels termes ce grand homme d'État, dans ses Mémoires, a exprimé le regret de n'avoii servi plus efficacement la cause de l'instruction religieuse :

L'assimilation de l'étude de la religion à d'autres éludes secondaires qui n'ont que leurs heures spéciales el limitées ne pouvait satisfaire pleine- ment les familles dévouées aux croyances religieuses. La religion, sérieu- sement acceptéeel pratiquée, lient trop de place dans la vie de l'homme pour qu'il ne lui soit pas fait aussi une grande part dans l'éducation de l'enfant.

Telle école est-elle religieuse, confessionnelle? dette ques- tion capitale ne consiste pas tant dans le point de savoir si l'en- seignement religieux l'ait partie du programme, s'il sera donné à l'école ou à l'église ; ces degrés ont leur importance, sans doute ; mais tous les hommes d'Étal qui ont préconisé le caractère reli- gieux et moral de l'enseignemenl primaire ont voulu que l'en- seignemenl lut pénétré el imprégné de la religion et que l'insti- tuteur lui-même car c'i si lui qui a l'influence prépondérante sur les enfants sans négliger le moins du monde l'enseigne- ment littéraire et scientitique, s'occupe a toute heure de la journée a l'aire de ses élèves de bons chrétiens en même tei que de bons citoyens.

Pour «pie la l"i si conserve chez reniant , pour qu'elle gran- et devienne parfaite, il faut que se reniant se

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trouve dans une atmosphère religieuse. La foi ne vit pas de réticences et de contradictions; elle doit être alimentée et sou- tenue par une affirmation et une profession continues de la vérité totale et intégrale. Chacun le sent, l'enfant qui passe cinq ou six heures par jour sous l'influence d'un même institu- teur se forme à ses leçons, à ses exemples, à la pression quo- tidienne et victorieuse d'une telle supériorité, d'une si incon- testable autorité. Cette influence du maître sur l'élève, ce n'est pas l'influence de l'engrenage sur la roue ou du marteau sur l'enclume, c'est l'influence d'une âme sur une âme, d'un être raisonnable sur un être raisonnable, c'est l'influence des idées qui descendent doucement et victorieusement d'un cœur et d'une intelligence pour s'implanter et prendre vie dans un autre cœur et une autre intelligence ; c'est l'influence des idées, Mes- sieurs. Et celles qui se groupent et se réunissent dans un en- semble complet, comme il est nécessaire de les avoir unies et concordantes pour élever un homme, forment ce corps de prin- cipes qu'on appelle convictions religieuses . C'est l'influence de l'instituteur qui est prépondérante pour former les convictions de l'enfant; la coopération de l'instituteur à l'enseignement re- ligieux est donc indispensable.

On objectera peut-être que la liberté de conscience de l'insti- tuteur doit être respectée, que même la loi belge de 4895 per- met à l'instituteur de refuser sa coopération à l'enseignement religieux. D'après la loi belge de 1895, chaque jour une demi- beure est consacrée à l'enseignement religieux et cet enseigne- ment est donné en règle générale par le prêtre, avec la coo- pération de l'instituteur. Il est vrai que l'instituteur peut refu- ser cette mission.

Cependant, lorsque la commune maintient dans son école un instituteur qui refuse de donner l'enseignement religieux ou qui n'en est pas jugé digne, elle doit faire remplacer l'institu- teur dans cette tâche. Dans ce cas, la commune peut être obli- gée de payer une rémunération spéciale pour le cours de reli- gion. Le but évident de cette mesure est d'éloigner peu à peu des écoles primaires les instituteurs qui n'inspirent pas une confiance suffisante au point religieux.

2.J

Le Conseil d'État, dans son avis du 10 mars 1897 sut amendements qui nous occupent, trouve que le refus de certains instituteurs belges de coopérer à renseignement religieux «a créé une situation dont il est impossible de méconnaître la gravita

Certainement la situation créée par ces instituteurs est très regrettable; cependant elle est absolument celle qui a été créée dans notre pays par la loi de 1881. Dans les rares communes belges cette situation existe, c'est le prêtre seul, à l'exclu- sion de l'instituteur, qui s'occupe de l'enseignement religieux.

Le jugement porte par le Conseil d'État sur la situation ex- ceptionnelle qui existe dans quelques communes belges est donc la condamnation de la législation scolaire luxembour- geoise.

Du reste, Messieurs, la situation de la Belgique ne saurait être comparée à celle de notre pays. Si la loi belge tient compte de la liberté de conscience de l'instituteur, elle reconnaît éga- lement la liberté des parents. En Belgique existe la liberté ab- solue d'enseignement.

Dans notre pays, on refuse aux parents la liberté de choisir pour l'éducation de leurs enfants une école autre que l'école officielle, nous sommes en droit d'opposer à ceux qui invoquent la liberté de conscience de l'instituteur, la réponse qui a été faite à la même objection par le ministre prussien comte de Zedlitz-Trûtzschler :

Es ist mir mit einem grossen Maasse von Emphase, vielleicht auch sitt- licher Entrûstung entgegengehalten worden, die Gewissensbedrângniss des armen Lehrers, der durch diesen Gesetzéntwurf nothwendig zu einem Heuchler gemacht werden soll.

Warum, meine Herren ? Jeder Beamte hat bekanntlich den (nstructionen

zu folgen. welche die pragmatischen Dienstvorschriften geben. Wollen Sie

in dieser Beziehung jedem Beamten das Recht geben, lediglich nach

etivem Ermessen zu thun, waa er will? (Sein- gut Redits und im

Centrum.J

Heine Henen, auch fur midi bat das Wort « Freiheil und freiheitliche Entwickelung - einen entzûokenden Klang, aber ich muss dbch sagen, der I reiheit des 1 Bteht doch aucb die Freiheit der Eltera gegenûber.

(Sehr richtig.) Wolli i nder, wollen Sie die Kindi

Volkes, dem Bubjectiven Ermessen jedes Einzelnen ausllefern, in den-

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jenigen Jahren , in welchen (1er Grund der ganzen Entwickelung dos Menscheh gelegt wird ? (Lebhaftes Bravo im Centrum und Rechts.j

L'instituteur dans son école n'exerce pas un droit personnel. Il accepte un mandat qu'il aurait pu décliner, car personne n'est forcé de se dévouer à l'enseignement de la jeunesse ; mais nous avons le droit d'exiger que l'instituteur, comme tout^aulre fonctionnaire, remplisse complètement les conditions de son mandat, lorsqu'il l'accepte. La coopération de l'instituteur à l'enseignement religieux est la première condition d'une bonne éducation religieuse. Donc nous sommes en droit d'exiger de l'instituteur celte coopération.

Confier l'enseignement religieux exclusivement au prêtre sans y intéresser l'instituteur, renfermer la religion dans certains moments de la semaine, ce serait fausser l'esprit de l'enfant. Il ne faut pas que l'esprit de l'enfant s'habitue à l'idée d'un divorce, d'une séparation entre la religion et les autres choses de la vie. Il ne faut pas qu'un mur de séparation soit élevé entre la partie religieuse et la partie scientitique de l'enseignement. II faut l'unité dans l'éducation. C'est ce qui distingue l'école confes- sionnelle de l'école sécularisée.

Dans l'exposé des motifs du projet de loi scolaire de 1878, qui est sans conteste le document le plus remarquable et le plus substantiel qui ait jamais été publié dans ce pays sur la question scolaire , M. Nie. Salentiny démontre dans les termes suivants la nécessité de celle unité de l'enseignement :

I..' mot de catéchisme, lorsqu'il s'agit des attributions d'un instituteur paye par la commune ou par l'État, est, pour certaines personnes, un mot mal sonnant. Pourquoi, dira-t-on, faire de l'instituteur le serviteur du pi être et le charger de préparer à celui-ci un enseignement religieux, alors que c'est la tâche du desservant ?

Et d'abord, nous avons pensé qu'il y aurait un dange-i sérieux à dire que le domaine de l'instituteur finit celui du ministre du culte corn- nu née. Nous croyons qu'il y aurait un péril grave à créer ainsi parmi les deux agents de l'école une espèce d'antagonisme, en considérant l'un comme le représentant de l'élément laïque et l'autre comme le représen- tant de l'élément religieux. Nous pensons, au contraire, que l'école a dans son ensemble un certain caractère religieux et moral qui ne se laisse pas scinder.

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.... En quoi d'ailleurs l'instituteur appelé à se désintéresser complète- ment de toul enseignement religieux, différerait-il encore de l'instituteur de l'école neutre ou laïque? Nous devons avouer bien franchement que toute nuance instinctive entre eux nous échappe complètement.

Celte unité de l'enseignement, consacrée par la loi de 1843 et défendue si chaleureusement en liS78 encore par M. N. Salen- tiny, au prix même de son portefeuille

M. Eyschen, Minisire d'État. Et les journaux catholiques l'ont combattu.

M. Welter. Qu'est devenu le ministre ? (Hilarité.)

M. Prum. Les journaux catholiques ont combattu la révision de la loi.

M. Eyschen, Ministre d'État. Et M. Salentiny, qui voulait taire la révision !

M. Prum. M. Salentiny a été renversé du ministère parce qu'il ne voulait pas de la séparation entre l'élément religieux et laïque. Il a sacrifié son portefeuille parce qu'il ne voulait pas détruire cette unité, parce qu'il voulait nous conserver le bien- fait inappréciable de l'école confessionnelle.

M. Eyschen, Ministre d'État. Ce sont les catholiques qui font renversé, vous ne contesterez pas cela.

M. Prum. Singuliers catholiques que ceux qui formaient la majorité de la Chambre à cette époque et qui ont voté la loi scolaire libérale. C'est cette loi de 1881 qui a rompu l'unité de l'enseignement du moins en principe et, par nos amendements, nous la voulons rétablir.

Cependant, Messieurs, si nous désirons la coopération de l'in- stituteur à renseignement religieux, ce n'est pas, comme on a cherché à nous le reprocher, pour décharger le clergé. Li de l'art, -in de la loi de 1881 restera toujours en vigueur el le prêtre restera chargé de l'instruction religieuse; il devra, comme par le passé, continuer à donner deux fois par semaine le cours de religion. A cel enseignement donné par le prêtre, l'institu- teur prêtera son concours. L'instituteur remplace le père de famille et il doil agir comme agirait le père de famille lui-même

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s'il en avait les facultés, pour l'éducation morale et religieuse de l'enfant.

Messieurs, je manquerais de franchise si je ne vous rendais pas attentifs aux conséquences de notre proposition. Nous avons l'intention formelle de rompre avec le principe sur lequel repose la loi de 1881, qui est celui de la séparation absolue de l'élé- ment religieux et de l'élément laïque. (Protestation de M. Kirpach.)

La conséquence de ce principe de séparation, c'est que les dispositions de la loi actuelle et même les règlements d'exé- cution qui patient des intérêts religieux et de l'éducation reli- gieuse à l'école, s'appliquent exclusivement au prêtre et non pas à l'instituteur. Toutes ces dispositions qui, à première vue, semblent être des garanties d'une éducation religieuse, ne sont au tond qu'un trompe-l'œil.

Du moment, cependant, que parle vote de notre amendement, le principe de la coopération de l'instituteur à l'enseignement religieux sera inscrit dans la loi, il en sera tout autrement; toutes ces dispositions qui concernent l'éducation religieuse des cillants seront applicables à l'instituteur et par l'école laïque et sécularisée sera transformée en une école confessionnelle et catholique.

La coopération de l'instituteur à l'enseignement religieux est incompatible avec le principe de la laïcité de l'école que l'hon. M. Kirpach, dans son exposé des motifs, a déclaré former la base même de la toi de 1881. Du moment que l'instituteur devra collaborer à l'enseignement de la religion et à l'éducation reli- gieuse des enfants, il ne sera plus permis d'affirmer que l'école appartient exclusivement à l'État; car l'Etat ne peut enseigner ni la religion, ni la morale, et l'instituteur, pour autant qu'd coo- pérera à l'éducation morale et religieuse, tiendra sa délégation non pas de l'État, mais de l'Eglise, c'est la mission canonique.

L'État moderne s'est déclaré perpétuellement incompétent en matière de doctrines.

En face des grandes questions qui se présentent à toute intel- ligence qui s'ouvre l'origine et la lin de l'homme et de lVs- pèce humaine l'Etat s'est condamné a dire : je n'en sais rien et je nVn puis rien savoir. Gomme l'a très bien dit le comte de ZedliU-Triilzscbler

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M. Welter. Encore une fois! Vous necitez que des minisires renversés. (Hilarité. I

M. Laval. Inconnu chez nous !

M. Prum. Le comte de Zedlitz a dit tant de belles choses.

M. Welter. Nous n'en voulons pas.

M. Prum. L'hon. M. Welter cite souvent des choses dont nous ne venions pas et que nous écoutons quand même. J'es- père qu'il sera aussi complaisant à mon égard;

Le comte de Zedlitz dit donc :

ESne allgemein raenschliche Moral gibt es nicht; os gibt fine allge- gemein menscblicbe Unmoral, und< s ist ehendie Aufgabe aller Religionen und ganz besonders des Christenthums gewesen, (lies dem Monschen an- geborene nicht moralmâssige in Moral umzusetzen. Wàre das nicht rich- tig, dann brauchten wir Religion iil»erhaupt nicht. Und dann wâre die doch allerdings wunderbare Erscheinung, dass es nie eine Nation und nie ein Volk gegeben liât, bei dem nicht religiôse BcgrifTe sich entwickelt baben, ganz unerklârlich.

La morale universelle et indépendante rêvée par les déistes, 1rs panthéistes et les rationalistes de toutes les écoles, n'existe donc pas. Cette doctrine est le contre-pied de la doctrine chré- tienne. Lors donc que dans nos écoles primaires, quelques instituteurs, suivant en cela certains conseils, s'inspirent des principes des Dittes, autres pédagogues modernes qui admettent la morale prétenduement indépendante, ces instituteurs se trouvent, inconsciemment, je le veux bien, mais en fait et en réalité m contradiction avec l'enseignement religieux et créenl ainsi un véritable dualisme à l'école.

En Belgique, comme dans d'autres pays, il existe une inspec- tion scolaire ecclésiastique en dehors de l'inspection laïque, »■( les inspecteurs ecclésiastiques assistent a toutes les conférences d'instituteurs. J'espère que le règlement qui, en vertu de l'art. 76 de la loi organique, devra «'-ire élaboré, permettra chez nous également :'i un délégué de l'évêque d'assister aux conférences des instituteurs. Les catholiques luxembourgeois sont en droit d'exiger t\>'< garanties au sujel >\<^ principes pédagogiques que l'on inspire à nos instituteurs, ;i ces hommes auxquels, de par

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la loi, ils sont obligés de confier l'éducation de leurs enfants. L'État ne peut enseigner ni la morale, ni le dogme, qui en est la base m i essaire et la sanction. .Une morale sans dogme, une morale indépendante est inadmissible au point de vue scienti- fique. Est-ce que, dans l'immensité de l'univers, la science a trouvé un seul objet qui fût indépendant et isolé?

La morale procède du dogme comme l'effet de la cause ; sup- primez le dogme, et vous ne pourrez logiquement plus admettre d'antre doctrine morale que celle qui a été exprimée avec tant de précision par M. Taine, lorsqu'il écrivait : «Le vice et la vertu sont des produits comme le sucre et le vitriol ! » (Histoire de la littérature anglaise, introduction, p. xv.)

Je ne veux pas dire, Messieurs, qu'un libre-penseur et un lils de libre-penseur ne puisse pas être un très honnête homme.

M. Welter. Vous admettez l'atavisme, alors?

M. Prum. Bien loin de ; mais la moralité de ces hommes procède, souvent à leur insu, du dogme chrétien. Elle provient de dispositions naturelles , héritage d'innombrables générations chrétiennes ; elle est le produit de la civilisation chrétienne, car notre société actuelle est encore tellement imprégnée de chris- tianisme que beaucoup en éprouvent les effets salutaires, sans en reconnaître et bénir la cause.

Ce que j'affirme, Messieurs, c'est qu'en principe la prétendue morale universelle et indépendante ne résiste pas a l'examen de la raison. Il n'y a pas de morale universelle, il n'y a pas non plus et il ne peut pas y avoir de morale d'État, parce qu'il n'y a pas de dogme civil. On objectera peut-être que la morale est la base de notre législation. Je ne le nie pas. Les lois ont pour base une morale moyenne que l'État protège, abstraction faite de la vérité, parce qu'elle est le reflet de l'opinion publique, du sen- timent public, de la conscience publique. Dans une nation chrétienne, cette conscience publique est naturellement chré- tienne.

Incompétent en matière de doctrine, l'État doit protection à ses membres; il ne leur garantit pas seulement la tranquillité matérielle, il leur doit une certaine tranquillité morale.

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Chaque peuple a droit de n'être pas choqué dans ses mœurs, dans ses sentiments, dans sa conscience éclairée ou (''garée. De cette mesure de nécessité, de cette protection que l'Étal accorde à ses citoyens, on aurait tort de conclure à la capacité de l'Étal d'enseigner In morale. L'État protège un fait, indé- pendamment de sa vérité, rien de plus, rien de moins.

L'État moderne qui s'est déclaré lui-même perpétuellement Incompétent en matière de doctrine religieuse, ne peut en- seigner ni la morale ni la religion; il ne peut donc à lui seul organiser un enseignement confessionnel, il doit pour s'assurer l'élément religieux qui lui manque, faire intervenir l'Église. Cette intervention, comment peut-elle être obtenue? Je fais abs- traction du l'ait historique que durant les siècles passés, c'esl l'Église seule qui a fondé les écoles; je me place sur le terrain de la législation moderne et je demande par quelle voie peut- on obtenir l'intervention de l'Église à l'école ?

Dans certains pays on l'exige ; l'État commande à l'Église ou l'absorbe. Le prêtre n'est qu'un fonctionnaire publie qui relève de l'autorité civile. Tel est le cas en Russie, du moins pour ce qui concerne l'Église russe orthodoxe. Dans notre pays, la situa- tion est toute autre. La Constitution luxembourgeoise reconnaît l'indépendance de l'Eglise; d'après l'art. 22, les rapports entre l'Église et l'État font l'objet de conventions. Nous ne pouvons organiser l'enseignement sans l'intervention du clergé. Cette in- tervention ne peut être forcée comme en Russie, elle ne peut être que volontaire. Dès lors, elle doit être librement accordée et, pour l'être, il faut qu'elle soit durable et efficace.

Ce principe a été consacré par la loi de 1843. C'esl à feu le Roi Guillaume II que le pays est redevable de la loi scolaire de 1843.

En 1X12 le Gouvernemenl avait élaboré un avant-projet de loi sur l'enseignement primaire, sans s'entendre avec le chef du culte; mais Guillaume 11 refusa de signer cel avant-projel en déclarant à ses ministres qu'il n'entendait organiser l'enseigne- ment primaire dans le Grand-Duché que sur la base d'une entente, d'une certaine convention avec les représentants de i ^lise, Des négociations eurent lieu et elles aboutirent défi-

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nitivement; aussi en 1843, M. Simons, alors chef du départe- ment de l'intérieur, en déposant le projet de loi, fit-il la déclara- tion suivante. Je cite un résumé en langue allemande, un autre texte français un peu plus long se trouve p. 357 du G.-R. de 1843:

Der Clerus ist ein unerlâsslicher und mâchtiger Getiiilfe, er ist eine festere Stiitze als aile Strafbestimmungen, die nian erlassen kônnte. Der Clerus ist Partei im Contract; er hat Prârogativen zurGeltung zu biïngen, Rechte zu wahren und Bedingungen zu stellen. Da der Religionsunterricht dera Clerus zusteht , dieser Unterricht aber zur Primàrschule gehôrt, die gleichzeitig eine religiôse und bûrgerliche Anstalt ist, so hat der Clerus ein unstreitbares Anrecht auf die Mitiiberwachuug.

La loi de 1843 a donc été le fruit d'une entente, d'un contrat avec le clergé. Ce contrat a été de tout temps loyalement exé- cuté.

J'ai lu et relu les discussions parlementaires des douze années qui ont précédé la révision de la loi de 1843. C'était l'époque où, dans les pays environnants, une guerre à outrance était déchaînée contre l'Église catholique. Cette lutte devait avoir un contre-coup dans notre, pays. L'hon. M. Kirpach l'a franchement reconnu dans un discours du 2 février 1881, p. 774, il s'est à propos de la loi scolaire exprimé comme suit :

Nous ne saurions nous isoler tout-à-fait des nations qui nous entourent. La vie des nations est solidaire comme celle des individus, et un pays, quelque petit qu'il soit, ne peut se mettre au banc de son temps en restant tout-à-fait en arrière. Nécessairement et naturellement, le mouvement se communique d'un peuple à l'autre ; l'impulsion doit être reçue et trans- mise.

De 1870 à 1881, pendant que la guerre religieuse sévissait à nos frontières, certains hommes, mus par cette impulsion natu- relle dont parlait l'hon. M. Kirpach et excités par la lecture quotidienne des journaux étrangers, ont chez nous également profité de tontes les occasions pour prononcer des discours tonitruants et fulminants contre les envahissements de Pu lira - montanisme, les empiétements du clergé, et pour demander à cor et à cris la révision de la loi de 1843.

Cependant, au cours de toutes ces discussions, pas un seul abus sérieux n'a pu être signalé, pas un seul fait n'a été cité h

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l'appui de toutes ces réclamations. Nos annales parlementaires sont pour le prouver. Au contraire, tout le monde, même les adversaires de la loi ont avouer qu'elle n'avait produit que 1rs meilleurs résultats. Pas un seul abus sérieux n'avait été signalé.

M. Brasseur. Il va des faits.

M. Prum. On a relevé quelques faits; mais ils étaient abso- lument sans importance. Ainsi en 1878 l'hon. M. Kirpach a porté à la tribune un de ces faits qu'il me suffira de vous rap- peler pour vous faire juger la valeur des arguments dont on ait devoir faire usage à cette époque. Vous avez tous connu le bon vieux livre de lecture de M. Godart qui a été si long- temps en usage dans nos écoles. Quelques années après 1870 mi en a fait une édition nouvelle, et dans un petit appendice concernant la géographie, on avait oublié de changer Rome, capitale des États pontificaux, en Rome, capitale d'Italie. De une furieuse tempête à la Chambre. La section centrale inséra une observation dans le rapport du budget et on discuta là- dessus dans cette enceinte au long et au large; en grossissant le plus possible ce petit fait, on en fit un argument en faveur de la révision de la loi de 1843. Les autres faits qui ont'été signa- lés sont à peu près de la même importance.

C'est sous le régime de la loi bienfaisante de 1843 que l'enseignement primaire s'est développé clans notre pays, à tel point qu'en 1879 encore on nous citait dans les parlements étrangers comme marchant à la tête de tous les pays de l'Europe et dépassant même au point de vue de l'instruction populaire les pays dans lesquels l'enseignement a été obliga- toire depuis trois quarts de siècle.

Je doute même que le niveau de nos écoli il lepuis

constamment en tous points maintenu à la même hauteur. Si je suis bien renseigné, les résultats <\>'> examens d'admission des élèves de l'Athénée auraient à plusieurs reprises déjà été signalés à l'hon. Directeur général de l'intérieur comme l'in- dice d'une situation peu satisfaisante de l'instruction primaire, du moins pour certaines branches.

Je tiens, Messieurs, à relever ce détail, parce qu'il est des

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personnes dans le pays qui, detrès bonne foi, s'imaginent que le développement de l'enseignement primaire date de 1881. C'est là, Messieurs, une très grave erreur.

De 1843 à 1881 l'enseignement primaire a fait fies progrès énormes, c'est un fait que personne ne pourra contester. En !8ôT) le nombre des miliciens illettrés élait encore de 7.64 pCt. et en 1880 il était tombé à 0,50 pCt., alors qu'en Prusse à cette époque le nombre des miliciens illettrés dépassait le triple de ce chiffre.

Ce mouvement progressif a-t-il continué après 1881, ou s'est- il arrêté depuis cette époque? Messieurs, je n'oserais ni l'affir- mer ni le nier.

Nous ne possédons pas de renseignements positifs sur l'état de l'instruction des enfants de nos écoles. Nous avons, il est vrai, les rapports généraux publiés toutes les années; mais, Messieurs, avant 1881 on possédait également ces rapports. A cette époque on avait en outre les concours cantonaux, qui ont été supprimés depuis, ainsi que la statistique des miliciens. Cependant, Messieurs, les promoteurs de la réforme scolaire de 1881 ont trouvé tous ces renseignements insuffisants.

En 1879 M. de Wacquaut proposa de faire faire par tous les entants de onze à douze ans des classes supérieures des écoles primaires, sous la surveillance des inspecteurs, des composi- tions écrites dans toutes les branches. Cette proposition tut ac- cueillie par l'hon. M. Kirpach avec un véritable enthousiasme. Les concours eurent lieu dans tout le pays, en 1880. Ainsi qu'il ressort d'un rapport que j'ai trouvé dans le dossier, les enfants furent astreints durant trois heures entières à des compositions écrites. Les résultats furent collectionnés par les inspecteurs et déposés plus tard sur le bureau de la Chambre, accompagnes d'un rapport complet.

L'hon. M. Kirpach a même promis, à cette époque, de faire renouveler cette inspection générale toutes les années, afin de bien renseigner la Chambre et le pays sur la situation de l'ins- truction primaire. Malheureusement ce beau zèle n'a duré que jusqu'au vote de la nouvelle loi. Depuis lors on n'a plus en- tendu parler de compositions générales. L'hon. M. Kirpach

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nous a dit hier qu'en 1891 un concours général a eu lieu; mais [es résultats n'en ont pas été publiés. Nous ne pouvons pas nous servir de ce document.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Je l'ai donné hier.

M. Prum. Nous ne possédons donc, pour servir de com- paraison avec le concours de 1880, (pie ces malheureux rap- ports généraux qu'à cette époque la Chambre et le Gouverne- ment déclaraient insuffisants et sans grande valeur. Eh bien, Messieurs, en comparant It1 dernier rapport général avec le con- cours rigoureux de 1880, voici ce que nous trouvons :

D'après le dernier rapport général, oO pCt. des écoles ont mérité une note supérieure pour le résultat général de l'inspec- teur ; 44 r30 pCt. une note moyenne ; 5 T7B pCt. une note infé- rieure. Au concours de 1880 : 45 pCt. des écoles ont obtenu une note supérieure ; 3"> pCt. une noie moyenne ; 20 pCt. une note inférieure.

Si l'on prend en considération la rigueur du concours de 1880 et la circonstance que le résultat devait servir à prouver la nécessité d'une révision de la loi de 1843 , que donc le clas- sement n'a certainement pas été fait avec une bienveillance exagérée, on doit reconnaître que cette comparaison ne permet absolument pas de conclure que depuis 1881 l'enseignement primaire ait fait de grands progrès.

Quoi qu'il en soit, cette loi de 18.3, qui de l'aveu de tout le monde avait produit de si excellents résultats, ce contrat bila- téral entre l'État et l'Église a été violemment déchiré en 1881, malgré les protestations solennelles du représentant autorisé de l'Église et malgré les réclamations de la presque totalité des pères de famille. Le législateur de 1881, en réglanl unilatéra- lement l'enseignement primaire qui, auparavant, avait fait l'objet d'une convention, a non seulement brisé cette heure ise al- liance qui avait été concilie de l'assentimenl de tous, | ' lut- tri' contre l'ignorance, qui est h source de lous les maux, mais il a encore et surtout violé manifestement l'art. 22 de mitre pacte fondamental.

C'est là, Messieurs, le vice original de celte i"i de 1881,

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L'hon. M. Kirpach, en présentant et en défendant la loi de 1881 devant la Chambre, a proclamé le principe que leeole appar- tient exclusivement à l'État :

Aucune autorité en dehors de l'État, a dit l'hon. Directeur général dans son exposé des motifs, n'est recevable à prétendre qu'elle a un droit inné à la surveillance i\o l'enseignement. L'État a l'obligation de créer des écoles, l'État les organise, l'Étal y enseigne, c'est donc aussi l'État qui les surveille

Et si l'hon. M. Kirpach veut hiui laisser une part d'influence à la commune, ce n'est pas comme collectivité et représentation des familles, mais comme émanation de l'État et non de celui- ci, que la commune est appelée à exercer sur l'école une cer- taine surveillance.

Ces principes, qui sont la négation des droits des familles et des droits de l'Église, sont absolument faux et j'ai déjà eu l'oc- casion de le démontrer en une autre circonstance; ils sont con- traires à l'esprit de notre Constitution.

D'après les principes qui ont inspiré la Constitution luxem- bourgeoise, l'enseignement primaire n'est pas aux mains de l'État un de ces droits éminents, un de ces attributs de Pouvoir suprême qui ne souffrent aucun partage. Tout au contraire, en matière d'enseignement primaire, l'État intervient chez nous, non pas à titre de souverain, mais à titre de protecteur et de guide. « L'État veille », dit l'art. 23 de la Constitution, «à ce que tout Luxembourgeois reçoive l'instruction primaire ». Ce texte a été voté par l'Assemblée constituante de préférence à un autre qui avait été proposé et, comme les discussions qui ont eu lieu le prouvent à l'évidence, l'intention de la majorité des constituants, en votant ce texte, a été d'affirmer que l'école n'appartient pas exclusivement à l'Etat.

11 est vrai, le législateur de 1881 n'a pas tiré de ce faux principe toutes les conséquences, ou comme l'hon, M. Kirpach s'est exprimé à plusieurs reprises: «Il n'a pas cru que le moment était déjà venu chez nous pour sanctionner ces théories par la législature. »

La loi de 1881 l'hon. M. Kirpach l'a franchement avoué est une loi illogique et remplie d'inconséquences ; mais ce qui est plus, Messieurs, cette loi n'a pas été exécutée.

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Ne devons-nous pas craindre de voir, dans un avenir plus ou moins éloigné, après que les nouvelles subventions scolaires auront renforcé l'influence morale du pouvoir central, la loi de 1881 exécutée dans un tout autre esprit. C'est là, Messieurs, ce que nous avons voulu prévenir par nos amendements.

En consacrant, par la loi, le principe de la coopération de l'instituteur à l'enseignement religieux, nous aurons créé une garantie légale relativement à l'esprit qui devra, à l'avenir, présider à l'élaboration de tous les règlements administratifs concernant l'enseignement primaire.

Nous rendons hommage à la bonne volonté de l'hon. M. Kirpach ; mais dans une question aussi importante que celle de l'éducation des enfants de notre peuple, nous ne voulons pas dépendre de la bonne volonté du Gouvernement.

M. Kirpach, Dir. gén. de l'intérieur. Mais vous dépendez

de la loi.

M. Prum. Nous voulons des garanties légales.

Srize ans se sont écoulés depuis la promulgation de la loi scolaire de 1881. Durant ces seize années, presque tous 1rs pays dont, de l'aveu de l'hon. M. Kirpach, le législateur de 1881 n'a fait que suivre l'impulsion, ont, l'un après l'autre, rapporté les lois de sécularisation de l'enseignement.

La France est presque seule à faire exception. L'école laïque en France, malgré le grand correctif de la liberté complète d'enseignement qui en a tempéré les résultats, a été loin de vérifier une parole célèbre de M. Duruy qui, à plusieurs re- prises, a été cité à la Chambre luxembourgeoise, au ci uns des discussions sur la loi scolaire : « L'argent qui est dépensé pour les écoles, sera épargné pour les prisons. »

D'après une étude très intéressante publiée récemment dans la Revue des Deux-Mondes par M. Alfred Vouillée, depuis la laïcisération de l'enseignement primaire, la criminalité juvénile a augmenté en France dans des proportions effrayantes.

h.- insu a 1893, le nombre des «'niants criminels a augmenté deux luis plus que celui dus criminels adultes el en général la criminalité de l'enfance dépasse aujourd'hui en Fran< double celle des adultes.

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Une progression plus grande encore a été constatée sur le| nombre des suicides déniants et de jeunes gen

Un autre fait très intéressant a été relevé par À. Vouillée dans| la Revue des Deux-Mondes :

Pour la France entière, sur cent enfants poursuivis en justice, à peine deux sont sortis des écoles congrégfnisles et pour Paris plus spécialement] sur 100 enfants détenus à la petite Roquette, l'enseignement congréganiste n'en fournit que onze et .renseignement officiel laïque quatre-vingt-sept. Alors cependant que plus du tiers et presque les deux cinquièmes des en- fants de la ville de Paris sont élevés dans les écoles libres des congréga- tions religieuses.

Vous voyez, Messieurs, que si la France n'a pas suivi l'exemple des autres pays et rapporté sa loi de sécularisation de l'enseignement, on ne peut cependant pas dire que cette loi ait produit de bons résultats.

Dans notre pays, depuis 1881, il a été peu ou point parlé de la question scolaire. Ce n'est cependant que le clergé et l'Église se soient réconciliés avec la loi elle-même. Non, Messieurs, celte loi a été inspirée par des principes que l'Église n'acceptera jamais. L'Église a subi la loi et si le clergé luxembourgeois a concouru à son exécution, ce n'a été, comme s'est, exprimé feu Mgr. Adames dans sa lettre pastorale du 21 septembre 1881, que « pour amoindrir autant que possible les défectuosités de la loi et dans l'espoir que les législateurs reviendront à de meil- leurs sentiments et se donneront toutes les peines pour écarter ces défectuosités par une modification de la loi. »

Aujourd'hui , le Gouvernement ayant déposé lui-même un projet qui amène un changement essentiel de la loi de 1881, nous avons cru de notre devoir de chercher enfin à réaliser cet espoir de feu Mgr. Adames. Usant de notre droit incontestable, nous avons rattaché au projet du Gouvernement un amende- ment concernant la coopérationde l'instituteur à l'enseignement religieux.

Par le vote de cet amendement, l'unité de l'enseignement et par l'école confessionnelle sera rétablie. La voix autorisée de notre premier pasteur s'est fait entendre pour approuver ces moditications. Ne repoussez pas, Messieurs, la main qui vous est loyalement tendue à l'effet de rétablir cette entente complète

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ri intime entre l'autorité religieuse et le pouvoir civil, qui dans le domaine île renseignement et de l'éducation populaire est aussi nécessaire que la concorde entre le père et la mère au sein de la famille.

Ceux d'entre vous, Messieurs, qui croient sincèrement que l'étal actuel est satisfaisant et la loi de 1881 excellente, à qui donc nos propositions doivent nécessairement déplaire, je les prierai de s'inspirer du principe proclamé en 1881 par l'hon. M. Simons et de tenir quelque peu compte de l'opinion d'autrui.

Pour nous, Messieurs, si nous ne prenions pour guides que les principes et les théories, la réforme proposée ne nous don- nerait nullement satisfaction, parce que la loi scolaire, même amendée dans notre sens, sera bien loin encore de répondre a notre idéal; niais, Messieurs, nous tenons compte de la situation de lad et, précisément par notre modération, nous espérons réunir les suffrages de tous les hommes sages, modérés, vrai- ment libéraux et vraiment patriotes. Nous espérons que la ré- forme proposée méritera le nom qui a été donné par Monta- lembert à la loi scolaire française de 1850 et qu'elle sera pour notre pays: «Le Concordat de l'enseignement))! (Très bien, bravos sur quelques bancs.)

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