ENCYCLOPEDIE D'HISTOTRE NATURELLE Scieutific Bookn for aille bv A. E. FOOTE. \ 'AIUS - IMI'U|\IH:HIK SCIIXIiinEU, hue ll'ICMKHIirH, I. OiMii;; iiiitan innn^oanl. PI 5. ENCYCLOPÉDIE DHISTOIRE NATURELLE THAITÉ COMPLET DE CETTE SCIENCE d'après IFS TliAVAlX DES NATUUALISTES LES PLUS ÉMINENTS DE TOUS LES PAYS ET DE TOUTES LES ÉPOQUES BUFFON, DAUBENTON, LAGÈPÈOE, G. GUVIER, F. GUVIER, GEOFFROY SAINT-HILAIRE, LATREILLE, DE JUSSIEU, BRONGNIART, etc., etc. Ouvraft résumant les Observations des Auleuis anciens et comprenant toutes les Découvertes modernes jusqu'à nos jours PAR LE D'' CHEINU CHIBimClEN-MAJlir. \ L'IL.I'ITAL JlILITAIRE I>L VAL DE-GRACE, PROFESSEUR U'illSTOIRE NATDREll.E. ETC. QUADRUMANES / • /■' PARIS CIILZ MAIiESCO ET COMPAGNIE, . EDHEniS IIE t'tSClCLOl'ÉDlE. .'), HUE nu l'OM- IIE- [.1(1)1 ( l'IlÊS LE l'O^T-^EUF|. i; CHEZ GUSTAVE IIAVARU, LIBUAIRb, 15, hVE (iuÉMCc.AUD ( PRÈS LA >Ill^^Al^:. Nous avons cru devoir consacrei" un volume à l'iiisloire des Singes ; ces nniniau.x, par leurs lornies si voisines de celles de l'espèce humaine et par leur intelligence si développée, méritent bien, en eflét, de lixer particulière- ment l'attention. La plupart des figures que nous donnons des diverses espèces ont été faites d'après la nature vivante ou d'après les beaux vélins de la Bibliothèque du Muséum, et ce n'est que pour un petit nombre que nous avons été forcé d'avoir recours à la nature morte. Nous avons souvent reproduit textuellement les descriptions faites par les voyageurs et les naturalistes, et nous pensons n'avoir négligé auciui renseignement utile ou intéressant. AVIS Al' RELIEUR I.csphinches tirées hors lexte sont an nnmbif de qiiarniite l.;i ]ilanet)e doit toujours être en regard de la page indiquée. 9. 9*.- 10. 10»; 11. 12. 13. U. 15. 16. 17. 18. Cliimpanzé jeune 5 Or.ing outan vieux 10 Orang outan femelle 12 Orang outan (pose naturelle) 15 Orang oulan (mangeant) Titre. Squelette d'orang 18 Orang bicolore 51 Gibbon entelloîde 62 Gibbon siamang 50 .Gibbon concolore 67 Squelette de gibbon varié 68 ■ Gibbon aux mains blancbes 69 Semnopithèque de Dussumier 78 Semnopithèque entelle 76 Scmnopilbèque barbique 89 Semnopitbùque buppe noire 86 Guenons luclio et à favoris noirs 96 Colobe fuligineux 90 Guenon mône 105 Guenon couronnée 117 ^Innrlic^. l'ace*. 19. C.uenon à diadùme 120 20. Malbiondi mtOe . . . • 109 21. Ma ngaboy femelle 124 22. Macaque des Philippijies 134 23. Guenon callitbiicbe. — Macaque ursin.. . . 148 24. Alèle à face encadrée 189 25. Atèle coaita 191 26. Alèle mé.'.s 195 27. Atèle beclzébulb 196 28. Guistili mélanurc 256 29. Avabi lanigère 288 50. Galago de Jladi'gascar 277 51. Maki à front blanc 265 52. Avabi 256 33. Aye-aye de Madagascar 281 54. Guenon nisnas 291 55. Indri à courte queue 255 56. Loris paresseux 273 37, Ouistiti pincbe 249 38. Atèle 285 ERRATA Page 94, lig. 72; Colobe fuligineux, Visez : Myopithèque talapom — 96, — 73; Myopithèque talapoi7i,\hcz : Colobe fulirjineux. Ces deux figures onl été transposées par erreur, dans quelques exemplaires seulement. 29041 \l)rcs 1 liiimiiit', le singe est sans cunlredil 1 aniinul (jni senilile devoir intéresser le plus les personnes qui se livrent à l'étude des sciences na- turelles; mais pour un i^raiid nombre de lecteurs cet intérêt est tout (le curiosité, car le siiiye ne [leiit nous être d'aucune utilité. Il est impossible, comme nous le vemms bientôt, de le réduire en domes- tiiile et d'(djteiiir de lui une obéissance qui permette de profiter de roii;anisaliiHi vraiment singulière ([ni lui a été dévolue. Si l'bomme avait pu dompter la sauvagerie du singe et faire de cet être capricieux r.ii animal docile comme l'est naturellement le cliieil. il est probable qu'il au- lait été. lui aussi, employé à la chasse, à la garde des troupeaux, et surtout dans un grand nombre de cas où le lidéle et utile ami de l'espèce humaine tniuve dans sou organisation toute quadrupède des obstacles insurmontables aux désirs (ju'il manifeste si bien de se mettre plus complètement encore au ser- vice de sou maître ; et les regrets qu'il exjtrime si èiiergi(|Mement de voir son dévouement entravé par sa coiiforniatiou sont la meilleure prc'uve de sou intel- ligence au moins aussi avancée que celle du singe. L'histoire des singes mérite néanmoins de fixer ratteiilion des philosophes, des naturalistes, et celle de Ions les hommes désireux de s'instruire. Les formes de ces aniu;aux et leurs organes si sem- blables aux nôtres, la facilite que cette disposition analomiqiie leur donne poiirexécnter naturelle- ment certains monvriiieiils (pii. u'elaiil par le fait cpic le resnital de ii ur (irganisalion. ont pu trom- 1 2 lIISTOIRt; NATURELLE. pci- (jiu'lqiH's ailleurs et leur laisseï' supposer que ces mouvements auxqucLs les singes sont forcément assujettis étaient le résultat de leur intelligence et de ce qu'on a appelé à tort leur instinct d'imita- lion. (( On aime, disait AUaniand. à voir le délail des actions d'un animal qui imite si bien les nôtres; nous sommes tentes de lui accorder un degi'é d'intelligence supérieur à celui de toutes les autres brutes, quoique tout ce que nous admirons dans tout ce qu'il fait soit une suite de la forme de son corps et particulièrement de ses mains, dont il se sert avec presque autant de facilité que nous. Ce- pendant, si le cbien avait de pareilles mains, et s'il pouvait se tenir debout sur ses pieds, il nous pa- raitiail bien plus intelligent qu'un singe. » Tous les naluralistes sont d'accord sur la place que doivent occuper les f^inges dans les cadres zoologiques. L'organisation supérieure de ces animaux les range immédiatement après l'homme, mais, contrairement aux classitiealions généralement admises, il en est qui rapprochent la distance qui sépare l'homme des singes en établissant, pour le chimpanzé et l'orang-outang, une famille inter- médiaire sous le nom d'authi'opomorphes (qui veut dire à formes humaines), et en considérant ces grandes espèces connne le trait d'union qui lie l'homme aux véritables singes. D'autres veulent que le chimpanzé et l'orang soient compris avec les bimanes dans une même famille. Cette hérésie, particulièrement propagée par M. Bory de Saint-Vincent, n'a pas été prise au sérieux par les savants, car ils n'ont pas cru devoir réfuter une doctrine qui ne repose sur aucune observa- lion exacte, sur aucun fait concluant. Cependant il est d'autant plus nécessaire de la condialt.re qu'elle a été présentée, sous les formes les plus favorables, à de nombreux lecteurs généralement étrangers aux .sciences naturelles et que pouvait plus facilement séduire le cachet de conviction que Bory de Saint-Vincent a su donner à ses écrits. Si l'on ajoute à cela un style persuasif par sa familiarité, dogmati(pie (juoique simple, et l'apparence d'une logique serrée, on conviendra qu'il n'en faut pas tant pour donner à une erreur l'apparence de la realité. Les singes forment-ils un ordre distim/t de celui aucpiel l'espèce humaine appartient exclusive- ment, ou bien les deux ordres des bimanes et des quadrumanes sont-ils liés l'un à l'autre de ma- nière à n'en faire qu'un seul, sous le nom de ]irimates. déjà employé par Linné, et adopté depuis par plusieurs auteurs, mais seulement pour remplace!' la dénomination de (piadrumancs? En un mot, l'homme et le singe appartiennent-ils au même ordie? telle est la question. y '•'il,) ,iif ; Fiç. 1. — Fcmiiii' j:iviiinisc. ll^HM i''iî. 2. — Tùle lie guenon nscii^ne Depuis Inii-lemps elle ne laisse aucun doute; cherchons à le démontrer en mettant en présence les sophismer des naturalistes qui se disent philosophes, et les observations des phdosoplies qui .sont réellement naturalistes; le sujet est assez intéressant pour nous y arrêter un instant. (»u séduit souvent avec de l'esprit; mais, pourfaire école, il faut mieux que cela. Les .saillies, les boutades spirituelles ne manquent pas dans les écrits de M. Bory as ;i la liaiilcur i Ici, l'auteur veut jiarler de la déformation du pied des hommes qui, dans divers pays et parti- culièrement les Landes, .s'occupent de la récolle de la résine, que fournit le pin maritime. En effet, l'habitude de monter aux arbres, d'une certaine façon propre au métier, produit un écartement du '■ros orteil qui devient en quelque sorte opposable et acquiert une certaine facilité de mouvements. « Et c'est une chose diqnc de remarque que, pour rcjeler les oranfjs parmi les .sitifies , et ceux-ci parmi les hrulcs stiipidcs , en conservant à nos pareils la diijnilé qu'ils .s'arronenl au sein de l'immense nalure . on ail arifué d'un i W est \rai (|ui' le ciàur d'un jeune chimpanzé dilTère peu jiar sa forme de celui de l'homme jeune; mais les os maxillaires, ti'és-développés, allongent la face en museau, et, avec l'âge, ce même crâne 8 IIISTOIRE NATURELLE. n'est plus ciimpaiMblc; des prni'mineiices dégradantes couvrent les parties supérieures, postérieures et latérales, les rrétessourcilières se transforment en bourrelets saillants au-dessus des yeux, les dents deviennent i^rosses, et les raniiies surtout font une saillie earaetéristiqne en même temps que les in- Fiï. 'J. — Tcte d'oraii" adulte. I-'ig 10. — 'r»''ti' lie Lliiiii|iariz(' Irès-jcuiie. Fig. 11. — Ttlc de iliiiii|iaiizù ailiillc. eisives supérienres sdiit oliliqnes en avant. L'an£;le facial est beaucoup nmins ouvert que celui de l'homme, et le mollet, ((ne IJory dit si jjrononcé et formé par de puissants muscles jumeaux, n'est QlIADRUMANKS. 9 qu'un caiMclèi'e qu'il a sans doute étudié sur un orany- mal empaillé, et auquel on avait fabriqué des niiillels fantastiques. Le fait est que les muselés jumeaux sont vigoureux, mais assez peu charnus pour qu'on ne parle pas du mollet qu'ils forment, car, en réalité, il n'y en a pas. Ce qui prouverait (jue l!or\ a étudié les siuifes sur des individus mal empaillés, c'est qu'il dit que l'oranfr noir, ou eliinqiauzé, ne présente pas la moindre trace de callosités, caractère d'un deiçré d'infériorité parmi les sinijes, tandis qu'au eoulraire ces callosités sont évidentes. Si nous voulions plaisanter, nous pourrions dire que non-seulement le type dont parle liory avait de faux mollets, mais il serait peut- être facile de prouver qu'on l'avait habillé, (uiisqu'il n'a pas pu voir les callosités qui existent si positivement. Je ne dirai rien du lluv périodique, car d'autres animaux que les singes en présentent des exem- ples; et, certes, on n'a jamais pensé à considérer cet écoulement comme un caractère de supériorité animale. Quant à l'amour maternel qu'invoque l'auteur en faveur des singes, cette affection de la mère pour son petit n'est-elle pas commandée par l'instinct de conservation de l'espèce, et tous les aniuiaux, même les plus féroces, n'ont -ils pas cette même tendresse pour leurs petits; et un homme pent-il, sans outrager sa mère, comparer l'amour maternel de la femme, ce sentiment indélinissable qui survit même à celui qui en était l'objet, peut-il, dis-je, le comparer à cette loi de la nature qui a su attacher la femelle de tous les animaux à ses petits pendant tout le temps nécessaire aux besoins et à la faiblesse du jeune âge? En effet, lorsque ces petits peuvent se procurer eux-mêmes leur nour- riture, et sont assez forts pour se défendre, rien ne les relient plus près de leurs parents que l'habi- tude de trouverleur proie sans prendre la peine de la ehereher, et c'est pour ne plus avoir à par- tager cette proie que les parents les chassent ]ioiir luuiours. « Mn'is, Cl) i)(>iis>taiil jiliis loin rr.tdiiini, les (fMiinis s'clDifincul hiciilôl des oraii Frédéric Cuvier, dont les recherches sur les mœurs et l'instinct des animaux sont d'une importance scientifique incontestable, n'admet, entre l'homme et le singe, qu'un rapprochement d'oi'gunisalion ([ui permrltrait de les comparer l'un à l'auti'e, si l'on n'avait égard qu'aux formes anatomiques. Il accorde une large pan d'une inleirtijenee pnrlieuliire aux singes, tout en faisant observer qu'il n'est pas possible de bien rendre sa pensée, en parlant de l'intelligence des aniuiaux, avec un langage qui n'a été fait que pour l'intelligence de l'homme, et pour cette partie seulement de son intelli- gence qui le sépare de la brute et en fait un animal raisonnable. Voyons comment il développe sa pensée au sujet de l'orang : « Les singes, dit-il, peuvent ré|ieter toutes les actions auxquelles leur organisation ne s'oppose pas, ce qui résulte de leur confiance, de leur docilité, et de la grande facilité de leur conception. Des la première tentative, ils comprennent ce qu'on leur demande, c'est-à dire qu'après avoir fait l'action pour laquelle on vient de les guider, ils savent qu'ils doivent la faire eux mêmes, lors((ue l'2 HISTOIRE NATURELLE. la iiiiMiK' ciicdiislaiici' se rciiouvelli' ; ainsi ils apprennent à boire dans un verre, à mander avec une fourcliettc ou une cuiller, à se servir d'une serviette. Us se tiennent à table comme un domesti- que derrière leur maître, et l'on assure même qu'ils versent à boire, donnent des assiettes, etc. Mais toutes les actions de ce genre s'apprendraient à d'autres animaux, et surtout aux chiens de la race des barbets et des épayiieuls; seulement on y parviendrait avec beaucoup plus de peine. « Cependant ils ne se l)ornent pas à celte répétilion, qui jusque-là pourrait n'èlre que mécanique et n'appartenir qu'aux phénomènes d'association dans lesquels une action en fait machinalement re- produire une autre; ils s'approprient en quelque sorte ces actions, qui d'abord ne leur étaient point naturelles, et ils les exécutent chaque fois qu'elles leur deviennent nécessaires, quelles que soient les circonstances qui puissent les avoir précédées; ainsi, quand la soif les presse, ils prennent eux- mêmes le gobelet et le remplissent d'eau pour boire ; si le froid leur fait sentir la nécessité de se vêtir, ils cherchent partout la couverture dont ils se servent pour cela, ou même tout autre vêtement, et s'en enveloppent avec soin ; ils arrangent leur lit pour être couchés plus mollement, et relèvent la partie où doit être leur tête ; si le lieu qui conlieiit leur nourriture ou toute autre chose dont ils ont besoin est fermé, et que la clef sorte habituellement de votre poche, ils ne se bornent pas à montrer qu'ils savent que ce qu'ils désirent est dans ce lieu; ils viennent vous en demander la clef, et vont ensuite en ouvrir la porte. S'ils veulent atteindre à un objet qui est hors de leur portée, et qu'au pied de cet objet il n'y ait rien qui leur permette de s'élever jusqu'à lui, ils savent en approcher une chaise poui' monter dessus C'est à ces deux seuls ordres de phénomènes qu'appartient, il me semble, continue F. Cuvier, tout ce qui a été rapporté, avec quelque apparence d'exactitude, des actions de l'orang-outang; et ce qu'on a dit ne sort même guère des deux cercles d'actions que nous venons de rappeler; l'on conçoit cependant que les exemples sont de nature à se multiplier indéfiniment; car les phénomènes d'association pourraient être sans nombre pour des animaux or- ganises comme les orangs-outangs, et les rapports qui caractérisent le second ordre d'actions pour- raient également s'établir entre un nombre d'objets tout à fait infini, de sorte qu'on a droit de s'é- tonner que les observations auxquelles ces animaux ont donné lieu soient aussi restreintes, surtout quand ils étaient en bonne santé et jouissaient de toute leur force, ce qui, à la vérité, a été fort rare. « Mais, quelque remarquables que soient ces actions, lorsqu'un les compare à celles des autres mammifères, elles n'ont rien encore qui annonce, de la part des orangs, la faculté de connaître et de vouloir librement; la faculté, en un mot, qui donne la moralité aux actions, et qui, jusqu'à pré- sent, appartient exclusivement à l'espèce humaine; et ce qui est peut-être aussi digne de remarque que les perceptions de rapports dont les orangs sont capables, c'est l'étonnante force de celte fa- culté chez ces animaux à l'âge le plus tendre et leur apparente faiblesse dans un âge plus avancé. En effet, on ne peut guère mettre en doute que les orangs adultes sont des animaux si farouches que par aucun moyen on ne peut les apprivoiser; or, cette disposition ferait supposer, ou l'affaiblis- sement des facultés intellectuelles, ou l'exaltation des sentiments qui sont de nature à .s'opposer à l'exercice de ces facultés, comme la peur, la colère, la haine; en un mot, tous les mouvements intérieurs qui, par leur violence, sont susceptibles de paralyser les forces morales. « Lorsqu'on examine les modifications organiques qu'éprouve l'orang-outang, en passant du jeune âge à l'âge adulte, on serait conduit à penser que c'est son intelligence qui s'est affaiblie, et que de cet affaiblissement est résultée cette transformation de quelques-uns de ces sentiments en passions violentes. Le jeune oraiig présente un front saillant, arrondi, élevé, c'est-à-dire un grand dévelop- pement des parties antérieures du cerveau; bientôt toutes ces parties s'affaissent, se dépriment et se réduisent aux proportions qui nous sont offertes par les parties analogues de plusieurs autres quadrumanes. » Il résulte déjà de ces observations de Frédéric Cuvier, justifiées suffisamment par les faits, les comparaisons anatomiques et les observations, peu nombreuses, il est vrai, qu'on a pu faire depuis sur les rares sujets vivants apportés en Europe, que non-seulement le chimpanzé, mais tous les singes en général, ont l'intelligence qui leur est jiropre plus développée, plus souple pendant les deux ou trois premières années de leur vie, et que bientùl l'animalité reprend tous ses droits: l'in- telligence l'ait place au\ instincts de la brute en niénie temps (pie la forme du ciàne et de la face se ilr.iiii; outaii rcmclle. PI. 5. ni'AniU MANES. ^7» inodilie <'nnsi(l(T;il)lciiUMii et vienl ("xpli(|iici- l'jiliaisseimnt de r;iriilk's que l'éducation ne poiil eii- ireliMiir i)i ilcvoluppi'i-, i>uis(HK' lataliMiu'iit elles doivent suivre la dégradation des divers systèmes ory;ani([ues. Fig. 13, — Prolll conipaïc du crâne de l'orang à trois âges. Cependant Bory de Saint-Vinrent trouve le moyen de présenter les observations de Cuvier à l'appui de ses prétentions si favorables aux sinyes. « Commnil se fait-il (juc Frédéric Cuvirr, dit-il, pense que toutes ces choses ne sont pourtant pas (les actes de raisonnement, et qu'on pourrait 1rs apprendre à des chiens seulement avec un peu plus de peine? Ijirsqu'en 18IIS, ce savant naturaliste eut occasion d'étudier vivant l'orancj qu'on avait envoip- à l'impératrice Joséphine, il lui accordait cependant (Annales du Jliiséuni, p. 58, t. xvi) la faculté de (jénéraliser ses idées, de la /dik/ok c, de la prévoipince, et même des idées 'innées aux- quelles les sens n'ont jamais la moiïidrc part- » « L'orang de l'impératrice Joséphine, a dit Frédéric Cuvier, aimait à jouer avec un petit chat qu'on lui avait donné pour le divertir, il en fut éyratiyné ; aussitôt il regarda fort attentivement le dessous des pattes du chat; y ayant trouve des griffes, il examina comment elles étaient faites, et essaya de les arracher avec ses doigts. » Enfin, après avoir transformé l'exposé simple et naïf des observations de F. Cuvier, Bory de Saint- Vineent cherche le moyen d'attirer les rieurs de son côté au sujet des grands principes établis par Buffon. « Malijré l'asserl'ion de Buffon, la parole n'est pas toujours la preuve d'un pr'mcipe supérieur animant la matière; et il faudrait oublier les sots d'iscours de certa'ins hommes faits à i'imaqe de Dieu pour réduire les oran(jS au simple riilc d'automates, parce qu'il ne s'est point rencontré d'ora^ leurs parmi eujc. li IIISTOIRK NATURELLE. N Lu rrritr csl ijur les onjuncs ilc lu vu'i.i; ne .sont pas aussi semblables tliiiis l'Iuimme el ilitiis les orunçjs que le prélendml Biiffou, qui n'avait jirobablemcnt pas examiné ces orfjuncs. Et e'est préci- sément dans cette liiffévenrc que nous tniiiroiis les seuls caractères capitaux ou de j)reniière râleur qui puissent servir ii distinijner zooloiiiqucment les oranijs des lioninies. La différence essentielle consiste, comme co)idition /l'infériorité clia ces premiers, dans les poches tliqroidiennes qui sont pla- cées au-devant du larijnx, de manière h ce que l'air qui sort de la (jlotte s'ij emjouffre pour produire un murmure sourd, lequel ne peut conscquemment jamais fournir les éléments d'un lantiacie arti- culé. Si les poches thijroidieiiues ne se fussent pas opposées au mode d'crprcs.sion de la pensée, qui seul en peut rendre In communication ficile et l'éciinniji' projitable h t'e.riiérience des indiiidus d'une même espèce, le chimpanzé, entre les orancjs, serait, quoique avec son pouce scm'i-opposable , déjà supérieur h ce Ilotteniot qui, selon la judicieu. liliiiliiipiiv. moins lonij ■ifS HISTOIRE NATURELLE. leur liabilat naliii'i'l, ils nn'iiiTiil yènéralenu'iit, en peu de temps, de cun- 'IVaiispoi'li's licirs de soniptiûii. Les quadrumanes sont assez peu dispersés sur le globe. Ils se trouvent dans les régions tropi- cales, dans les pays peu élevés et boisés de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique; une seule espèce se trouve en Europe, et elle est confinée dans le midi de l'Espagne, sur les rochers inaccessibles de Gibraltar, où elle vit et se propage à l'abri des poursuites de l'bûnime. On n'en trouve point à la Nouvelle-Hollande. L'ordre des quadrumanes a été divisé en quatre familles par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilairc, et nous suivrons cette classification, qui nous parait être la plus naturelle, la plus simple, et qui pré- sente l'avantage de laisser à la mémoire des caractères tranchés et facilement saisissables. Des quatre familles adoptées par le savant professeur du Muséum, les singes proprement dits for- ment la première; les lémuriens, ou singes à museau de renard, se trouvent dans la seconde; la troi- sième, sous le nom de tarsiens, comprend un seul quadrumane remarquable par son organisation ; la quatrième, enfin, est composée des ehciromyens ou rats à mains. Fis- 31. Cheiroiiiyeu. (JUAUllliMANES. '27 PIS 1311 KIÎK FAMILLE. - SINGES. f'.elte famille est trés-iiclif en espèces; nous la divisons en deux seelions (sixges catuiumimens et singes platyrrhimeks), comprenant quatre tribus, dont uous allons l'aire connaitre les prim ijiaux caractères : Jxeimc-tc .vcclioii. c^tiii-icv 'Ci^cxIaxtUiiirtus. Georfroj-Saiiil-llilaire a donné le nom de catarrhiniens (/.ara, dessous; piv, nez) aux singes qui ont les narines ouvertes au-des- sous du nez. et rapprochées l'uni' de l'autre par le peu d'épaisseur de la cloison qui les sépare, ils sont tous de l'ancien continent, et leur système dentaire est composé de trente- deux dénis : , incisives, - canines, — - molaires : oS. 4 2 10 Cette section se trouve partagée en deux tribus : les primates et les pilhccicm. Fig Z'i — Gatarrliinii'ii (nncieii continent 1" TRIBU. — PRIMATES. La première tribu comprend des singes remarquables par leur taille et leurs formes compa- rables à celles de l'homme ; leurs membres antérieurs sont généralement plus longs que les posté- rieurs, ce qui rend la station bipède disgracieuse, difficile, et la station quadrupède oblique et gênée. Orangs et gibbons. 2"" TRIBU. — PITHÉCIEXS. La seconde tribu, beaucoup plus nombreuse que la première en genres et en espèces, est com- posée de singes dont les membres postérieurs sont généralement plus longs que les antérieurs, dis- position qui commande les allures ((uadiupèdes. Guenons et macaques. HISTOIRI': NVILHELLU OJeuocieuie àeohcu. ç^iwaeà ^ïa>hi.x.xAduiieuù. Lo nom de plalyrrliiniens {■n:'/.v.-u;, large ; piv, nez) a été donné aussi par Geoffroy-Saint-Hilaire aux singes qui ont les narines séparées par une large cloison, et dont le nez est aplati. Us sont tous du nouveau continent, et leur système dentaire est composé de trente-six dents chez les uns, et de trente-deux chez les autres Cette section se trouve partagée aussi en deux tribus : les eébkns et les arclopilhccieiis. Fin 53. — Platvii'liinien (nouveau continent). 3"" TRÏBll. — CÉBIENS. Dans cette tribu (cébiens, xt.to;. singe à longue queue) se trouvent groupés des singes américains ayant les narines ouvertes latéralement (sapajous), et dont le système dentaire se compose de trente- six dents : 4 . . . 2 . 12 - incisives, - canines, 7-r molaires ; 56. 4- I \ 2 4° TRIBU. — ARCTOPITHÉCIEIVS. La quatrième tribu (afUTc;, ours; mO-nt, singe) est établie pour les plus petites espèces de la famille. Ces singes, à narines séparées aussi par une large cloison et ouvertes latéralement, sont aussi de I Amérique, mais ils se distinguent par un caractère bien tranché. Les primates, les pilhé- ciens et les cébiens ont des ongles souvent assez aplatis aux doigts des pieds et des mains, tandis que, chez les arctopithéciens, ces ongles sont lemplacés par de véritables griffes. Leurs dents, au nombre de trente-deux, sont ainsi réparties : i. . .' -2 10 , . y incisives, - canines, -— molaires : û2. ■4 I lu En terminant cette exposition du plan que nous voulons suivre, nous dirons que si nous avons ré- servé à la première tribu le nom de primates, que Linnée et plusieurs naturalistes emploient d'une manière plus générale pour comprendre sous la même dénomination l'espèce humaine et une partie des singes, c'est que nous pensons, avec des savants du plus grand mérite, que l'homme doit être considéré comme un être à part et en dehors des cadres zoologiqiies. où il ne ligure (jue parce qu'il est composé des mêmes éléments et qu'il se trouve soumis aux mêmes lois que les animaux. Nous voubms aussi, par le choix du nom conservé aux singes de celte trijiu. (biniicr l'idcc de la supê- liiirile lie leur (ii'"aMisiilion. QUADUUMANES. 29 Enfin le nom de pithéeiens, employé pour la seconde tribu, nous semble plus général et plus con- venable que celui de cynopilhéciens, qui en réalité ne s'applique positivement qu'aux derniers gen- res de cette tribu. Fis;. 35. — Chacma. Fip;. 34. — Guenon ascagne. ContrairemiMit aux habitiules des auteurs, nous n'entrerons dans quelques détails sur l'organisa- tion des animaux qui tVnit le sujet de ce volume que lorsque nous les aurons fait connaître. Nous croyons que ces détails intéressèrent alors beaucoup plus le lecteur à cause des citatious nombreu- ses que nous pourrons faire des espèces qu'il ne conuail pas encore. 30 HISTOIRE NATURELLE. PREMIÈRE TRIBU. — PRIMATES. Nous donnons le nom de primates aux divers singes compris autrefois dans le seul genre orang, et formant aujourd'hui trois genres bien distincts : troglodyte, orang et gibbon. Ce sont des singes à formes presque humaines, et que quelques auteurs désignent sous le nom d'anthropomorphes. A première vue, on remarque que les troglodytes, ou chimpanzés, se distinguent des orangs et des gibbons par des proportions plus convenables de leurs membies antérieurs et postérieurs Cette disposition leur permet quelque temps d'allure bipède; tandis que la longueur des bras condamne pour ainsi dire les orangs et les gibbons à marcher à quatre pattes, alors même qu'ils font tous leurs efforts pour essayer de marcher debout. 1" GENRE. —TROGLODYTE. TROGLODYTES. (Geoffroy-Saint-Ililaire.) Tpm-yXoJuTïi;, nom d'une race d'hommes ou de singes habitant des cavernes. CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Bras de longueur motienne et atteignant le bas des cuisses. Pelage peu fourni. Corps gros et trapu. Mains larges et doigts assez proportionnés; pouces très-reculés. Ongles des pieds et des mains tres-aplatïs , comme chez l'homme. Face nue; oreilles a.iscz grandes, de forme humaine, nues et rebordées. Museau court; front fuijant en arrière et se prolongeant en avant au-dessus des yeux par des crêtes orbitaircs formant un bourrelet gros et saillant. Point de queue ni d'abajoues. Callosités évidentes, mais étroites, aux fesses. Habite la côte occidentale d'Afrique, régions équatoriales. (PI. 1.) On ne connaît bien qu'une seule espèce. Cette espèce varie beaucoup avec l'âge; aussi a-t-elle re(,:u plusieurs noms, ([ui, aujourd'hui qu'elle est mieux étudiée, se rapportent tous à titre de va- riété d'âge au troglodyte chimpanzé; les principaux de ces noms sont : jocko, pongo, enjocko, orang noir. Buffon a d'abord confondu le chimpanzé et l'orang-outang, et tout ce qu'il dit du jocko s'appli- (lue au chimpanzé. Ce n'est que plus tard que ce célèbre écrivain reconnut les différences qui exis- tent entre l'orang et le jocko ou troglodyte. « Nous présentons ces deux animaux ensemble, dit-il. le pongo et le jocko, parce qu'il se peut qu'ils ne fassent tous deux qu'une seule et même espèce. » De tous les animaux de l'ordre des quadrumanes, le chimpanzé est celui qui se rapproche le plus de l'homme par l'ensemble de son organisation et par son intelligence. Il a le crâne arrondi, mais déformé par la saillie des crêtes sourcilières; le nez est comme écrasé et très-distant de la bouche, dont les lèvres, extrêmement mobdes, et non bordées, sont très- peu épaisses; la face est nue. La poitrine est large et le bassin assez développé, disposition qui, jointe à un commencement de développement des muscles jumeaux et soléaires, permet en partie la station verticale et la marche bipède sans nuire à la faculté de grimper qu'assure l'écartemenl des pouces aux quatre mains QUADRUMANES. 31 I,p pelage, noir, assez fourni sur le dos et les é|iaules, est formé de poils assez rares aux parties antérieures du corps et internes des membres; on remarque autour de l'anus quel([ues poils blancs, formant une tache dans le jeune âge. Les poils de lavant-bras se recourbent vers le coude; les qua- tre mains ne sont velues qu'aux surfaces dorsales des régions métacarpienne et métatarsienne; ce- ])endant ces organes, comparés à ceux de l'homme, présentent des différences qu'on se plaît trop facilement à méconnaître; le merveilleux est si séduisant, qu'on a cru pouvoir établir des rapports étroits entre les traits de la face de ce singe et ceux de la ligure humaine: Il y a incontestablement des ligures humaines bien laides, mais cette laideur repoussante ou bizarre est exceptionnelle, et ra- rement elle fournit les caractères de l'animalité, qu'on ne trouve réunis que dans les brutes Fi;*. 50. — Chimpanzé nuii', jeune. (Véline fin Muséum,^, Le chimpanzé habite la Guinée et le Congo, la côte d'Angole et le Loango. On dit qu'il s'abrite sous des huttes qu'il façonne avec des branches et des feuilles; Jobson assure avoir vu, dans les en- droits fréquentés par ces animaux, une sorte d'habitation composée de branches entrelacées et qui pouvait servir du moins à les garantir de l'ardeur du soleil (Cuffon). On ajoute que lorsqu'un de ces animaux meurt, les autres couvrent son corps d'un amas de branches et de feuillages (Buffon d'après Battel); que cet animal peut se servir d'un bâton comme arme offensive ou défensive, et qu'il est assez adroit pour lancer des pierres à f ennemi qu'il attaque ou qu'il redoute; qu'il se range autour des feux abandonnés par les nègres, mais qu'il ne sait pas les entretenir en y mettant du bois (Battel). On dit encore, mais avec moins de certitude, qu'il enlève les négresses, qui ne peu- vent passer seules dans les bois qu'il habite (Dampier). De la Brosse assure avoii' connu une né- gresse qui a passé trois années avec ces animaux et a subi leurs caresses. An dire de Latreillc. m HISTOIRE NATURELLE. Balte! racunle qu'un pongo lui enleva un petit nègre et le conserva une année entière. Tout cela est écrit, mais n'est pas prouvé. La force de ce singe est prodigieuse, sans que sa taille atteigne celle d'un honnne. On n'en prend jamais en vie, parce qu'ils sont si robustes, que dix hommes ne suffiraient pas pour en arrêter un; mais les nègres en prennent déjeunes, après avoir tué la mère, au corps de laquelle s'accrochent étroitement les petits (Battel). Ce dernier dit qu'il y a deux espèces : le pongo, qui est aussi grand et plus gros qu'un homme, et l'enjocko, (|ui est beaucoup plus petit (Buffon). Enfin, Bosnian écrit que les singes de Guinée, que l'on appelle mtillm en flamand, sont de couleur fauve, et deviennent extrêmement grands. J'en ai vu, ajoute-t-il, un de mes propres yeux qui avait cinq pieds de haut, Ces singes ont une assez vilaine figure, aussi bien que ceux d'une seconde espèce qui leur ressemblent en tout, si ce n'est que quatre de ceux-ci seraient à peine aussi gros qu'un de la première espèce. On peut leur apprendre presque tout ce que l'on veut. On le voit, l'histoire du chimpanzé serait merveilleuse s'il fallait ajouter foi à tous les rapports plus ou moins exagérés de quelques voyageurs; on a été jusqu'à avancer que ces singes parlaient, mais en sifflant, k .le puis assurer, dit Buffon, qui dément formellement cette assertion, qu'ils ne p.arlent pas, quoi qu'en dise Bontius, ni ne sifflent pour s'exprimer, mais même qu'ils ne font rien qu'un chien bien instruit ne puisse faire. On avait appris à un de ces singes à manger avec la cuiller et la fourchette. Quand on lui donnait des fraises sur une assiette, c'était un plaisir de voir comme il les piquait une par une et les portait à sa bouche avec la fourchette, tandis qu'avec l'autre patte il tenait l'assiette. On ma assuré qu'étant à bord du navire, il courait librement parmi l'équipage, jouait avec les matelots, et allait quérir, comme eux. sa portion à la cuisine. » « Voici un trait singulier que Buffon a omis, dit Latreille. et que je tiens d'un témoin oculaire. Le jocko qui vivait chez Buffon avait conçu une affection particulière, dégénérée en une vive ja- lousie, pour une dame qui voyait quelquefois ce naturaliste. Il ne pouvait souffrir qu'on l'appro- chât; dès qu'il voyait quelqu'un près d'elle, il s'armait aussitôt d'un bâton ou d'une canne, et tombait sur l'imprudent qui avait alarmé ses sentiments. Buffon était le seul alors qui eût de l'as- cendant sur lui, encore même en témoignait-il une sorte de dépit. Il ne fallait rien moins que la voix d'un tel maître pour contenir son humeur violente. « Dans une note communi(piée à mon ami le docteur Lesson, au sujet du chimpanzé, M de Blainville s'exprime ainsi : La physionomie de cet animal est mélancolique, sérieuse, mêlée de quelque chose de doux Fig. 57. -- ïètes du cliimp.inzé jeune, niurt :ui Mu>t''uri QIIADHUIIANES. 35 et même d'aimant. 11 moiitro, on oflVl, If iiumiic dei;i'é tranVrtioii pour snn mailre et ceux qui le soignent, que le faisait l'oranij-outan, qui a été aussi au Jardin. 11 est trés-tranquille et très-obéis- sant aux moindres volontés de son maître et même de tout le monde. L'élévation du ton de la voix suffit pour l'arrêter, le faire venir à soi ou se faire embrasser comme par un enfant. Sa démarrbe à terre est encore assez bien celle de l'orang-outan , c'est-à-dire qu'il marche le plus souvent à quatre pattes , dans une position un peu oblique , appuyé en avant sur le moignon formé par les articulations des premières et secondes phalanges, et en arrière bien davantage sur la plante des pieds que l'orang-outan, qui s'appuyait sur le côté des mains, les doigts fléchis en de- dans. Du reste, il aime à sauter, à se balancer comme ce dernier. De même qu'un enfant, il ne peut rester seul, et crie continuellement si l'on n'est pas auprès de lui. Ainsi, en définitive, c'est un animal très-voisin de l'orang-outan, se rapprochant plus que lui de l'espèce humaine par les membres et surtout par les pieds; en un mot, plus bipède, mais plus sem- blable aux quadrupèdes par l'abaissement du front, la saillie des crêtes sourcilières et la grandeur des oreilles. La démarche des chimpanzés sur le sol, ajoute Lesson, est oblique, embarrassée, quand elle s'exécute sur les pieds seuls, mais des plus ingambes, quand les mains viennent l'aider. Dans les arbres, la souplesse des membres et leur force musculaire servent à la rapidité de leurs évolutions, et ces demeures intermédiaires entre le ciel et la terre leur permettent de parcourir à l'aise de vastes étendues de terrain en passant de branches en branches. Les chimpanzés, dans leur jeune âge, joignent aux formes arrondies des enfants la même pétu- lance, la même gaieté. Ils ont de la douceur, de la docilité et un rare esprit d'imitation. On les a vus, dans la domesticité, sérieux, graves, mais rendant caresses pour caresses, s'attachant à ceux qui leur accordaient de bons traitements , imiter nos actions , s'habituer à nos mets , même à ceux qui semblent le plus contraires à leurs goûts naturels; se transformer, par l'éducalion, en animaux raisonnables , et racheter la gaucherie de leurs gestes par la sagacité de leurs observations et la finesse intelligente qui les portait à les exécuter. En vieillissant, au contraire, les chimpanzés deviennent tristes et moroses. Presque tous les indi- vidus conduits en Europe sont morts sans atteindre un âge avancé. Dans leur vie libre et indépen- dante, ce qu'on appelle férocité et sauvagerie est le sentiment de leur force qui les porte à repousser toute atteinte agressive menaçant la sécurité de la famille. Les anciens voyageurs ne tarissent pas sur la brutalité des mâles qui enlèvent des négresses, et qui, cependant, les nourrissent avec soin dans leurs retraites pour en obtenir les faveurs; vieilles histoires invraisemblables qu'on répète, contes que les nègres ont popularisé, mais que rien ne légitime. Les singes ne sont lascifs devant les femmes, quelle qu'en soit l'espèce, que dans la captivité; car la prison exalte leurs passions sous l'empire d'une vie monotone et échauffante, privée de son libre arbitre. La femelle ne donne le jour qu'à un seul petit, et semble manifester, dit-on, des sentiments de pudeur; mais il est permis de révoquer ce fait en doute, car la pudeur est même inconnue à plusieurs races humaines qui vont nues. Les forêts équatoriales leur fournissent les fruits dont ils se nourrissent; ils mangent sans doute aussi des œufs et même des petits oiseaux qu'ils dévorent tout crus à la manière de quelques nègres de la Papouasie. Nul doute que les gorilles ou femmes sauvages que les Carthaginois, sous les ordres d'Ilannon , tuèrent dans une île de la côte occidentale d'.Afrique, ne soient des chimpanzés. (Lesson, Mœurs et inst. des anitn.j Le premier chimpanzé venu vivant en Europe était une jeune femelle de trois ans; elle avait été donnée, au commencement du dix-septième siècle, au stathouder Frédéric-Henri, prince d'Orange. Tulpius en donna la description, en 1(372, dans ses Observationesmcdicœ, et la classa sous le nom de Salijrus indictts, pensant qu'elle venait des îles de la Sonde, et ne se doutant pas que l'espèce ue se trouve que dans certaines parties de l'Afrique équatoriale. Buffon en a possédé un jeune individu en 1740, en même temps qu'un autre de même âge était à Londres l'objet des observations des na- turalistes anglais. Depuis cette époque , plusieurs chimpanzés ont été amenés vivants en Europe ; l'un est mort dernièrement à la ménagerie du Jardin des Plantes, et un autre, le plus âgé de tous, dit-on, et le plus grand, a été perdu récemment par la ménagerie d'Amsterdam. 34 HISTOIRE NATURELLE. Le chimpanzé est, comme on le voit, un animal encore peu connu, puisqu'il n'a été étudié que sur (le jeunes sujets. D'un autre côté, les peaux de grands individus, apportées en Europe et. con- servées dans les collections, présentent quelques différences de coloration ou de taille, et les sque- lettes, particulièrement le crâne, offrent aussi quelques caractères que l'on considère généralement comme des différences d'âge ou de sexe, quoique plusieurs naturalistes pensent qu'elles sont assez importantes pour permettre d'établir deux ou trois espèces. M. Lainier, conservateur du Musée du Havre, a bien voulu, dans le courant de cette année, m'envoyer, pour l'étudier, un troglodyte qui a une taille de plus de cinq pieds, et qui lui semble devoir constituer une espèce nouvelle; il a eu l'extrême obligeance de joindre à cette pièce remarquable un très-jeune individu parfaitement monté Fis Î5S — Cliimpanzù, supiiosé nouvelle espèce. (Musée du Havre ) et son squelette; mais, après uu examen minutieux et une comparaison sérieuse , je n'ai trouvé aucun caractère suflisant pour admettre ce singe comme une espèce différente du troglodyte noir ou chimpanzé. Cependant, il convient d'ajouter que cet énorme singe est dans un état qui laisse beau- coup à désirer ; il lui manque les organes principaux qui ]iourraient servir à lever les doutes , je veux parler de la tête osseuse, des mains et des pieds. Le capitaine qui a donné ce singe à M. Lai- nier lui a assuré qu'il existait sur la côte d'.\frique, où il se l'était procuré, deux espèces bien dis- tinctes et reconnues comme telles ])ar les nègres qui font la chasse à l'une, qui est plus petite, et qui serait celle que nous nommons chimpanzé ou troglodyte noir, tandis qu'ils refusent forineUement QUADRUMANES. 35 d'aller dans les forêts où vit la grande espèce , qui est redoutable par sa force prodigieuse plus encore que par sa férocité; cette assertion confirmerait celle de Battel. Il convient cependant, pour le moment, de s'abstenir et d'attendre de nouvelles observations plus précises que nous fourniront sans doute bientôt nos relations plus fréquentes avec les côtes occidentales de l'Afrique. 2'"'' GENRE. — ORANG des auteurs. SATYRUS. (Lesson.) Orang-outan. Homme ilcs bois, nom local. Satjie, nom m; llioloi;iquc. CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Bras longs et descendant jusqu'aux malléoles. Pclaçje assez fourni, excepté aux parties internes et antérieures du corpi. Corps gros et trapu. Doigts longs, grêles, un peu courbés et garnis d'ongles noirs à demi ciiUndriqucs , à l'exception de ceux des pouces, qui sont plus aplatis. Museau proéminent : des protubérances adipeuses aux joues des vieux mâles. Oreilles moyennes et bien bordées. Point de queue, pas d'abajoues. Pas de callosités aux fesses. Habite les forêts de Bornéo, de Sumatra, etc. Les orangs et les chimpanzés sont les plus grands de tous les singes. On a décrit plusieurs espèces d'orangs, mais on n'est point encore délinitivement iixé sur la valeur spécifique ut la con- stance des caractères différentiels. Le front des orangs est fuyant, la tète est grosse ; leur face nue, bleuâtre ou cyanosée, s'avance en museau disgracieux, et, chez quelques vieux mâles seulement, on a remarqué entre les yeux et les oreilles d'énormes pelotes de graisse qui forment un large bourrelet. Le nez est très-épatè et sans saillie; la lèvre supérieure, très-distante du nez, est lourdement arrondie. Si l'on examine le squelette d'un orang, on trouve, indépendamment des déformations qui se prononcent avec l'âge, des clavicules fort longues, et les apophyses épineuses des vertèbres cervi- cales très-développées ; le thorax est large, et les côtes fortes et bien attachées. Les os du bassin sont longs et étroits, disposition qui rend la marche bipède difficile et oblique. Dans le jeune âge , le crâne lisse et arrondi ne tarde pas à prendre les caractères de l'animalité , son diamètre antéro-postérieur s'allonge ; le bord orbitaire du frontal s'épaissit et produit une énorme saillie; les arcades zygomatiques s'écartent et élargissent la face ; plusieurs crêtes osseuses se développent sur la surface du crâne , se réunissent en prenant des proportions qui font oublier les rapports frappants que la tête des jeunes individus pouvait présenter avec celle de l'homme. Les dents, d'abord moyennes, deviennent fortes, larges, puissantes; et les canines, qui ne pré- sentaient qu'une saillie peu importante , dépassent les autres dents et suivent la dégradation du crâne. D'après cette déformation que subit l'enveloppe osseuse du cerveau aux diverses époques de la vie de ces quadrumanes, il est facile de comprendre les résultats variés, suivant l'âge, que doit donner la mesure de l'angle facial. L'intelligence, dont ces animaux donnent tant de preuves lor.'^- qu'ils sont jeunes, disparaît aussi à mesure que les forces physitiues se développent, et l'éducabi- lilé et la docilité font place aux instincts sauvages de la biule. 56 HISTOIRE NATURELLE. Fig, 59. — Têlcs d'orangs à trois â.N Fig. 44. — Oraiig jeune. Quoique l'orang se plaise pendant toute la journée sur la cime des grands arbres, on le voit très- rarement assis on accroupi sur les grosses branches, comme le font les hylobates; il donne la pré- férence aux branches les plus élevées et touffues, et il parcourt de cette manière le faite des im- QUAimiJMANES. 47 menscs forOls du pays. La inanii'ii; doiU il grimpe aux arbres et se pronuMie sur leurs branches présente cette apparence de flegme et de circonspection réfléchie que l'on ;-,e trouve pas chez les autres quadrumanes; mais ils sont plus en rapport avec les mouvements de l'homme. A l'aide de ses bras très- allongés, on le voit saisir les branches, et il se cramponne par les pieds; et la force mus- culaire de ses membres lui donne le moyen de supporter le poids de son corps. C'est toujours en avançant avec prudence et circonspection qu'il passe d'un arbre à l'autre, ayant soin de choisir l'en- droit où leurs rameaux s'entrecroisent; il les réunit, s'étend de toute sa longueur sur celle ispèce de pont improvisé, et en essaye la solidité par des secousses avant d'en risquer le passage ; sa prudence attentive ne l'abandonne pas, même dans l'ardeur de la fuite ; lorsqu'il est poursuivi, c'est plulùt par la ruse, en se cachant dans le feuillage ou glissant d'un arbre à l'autre, qu'il parvient à s'échapper; jamais par des sauts hasardés à des distances considérables, comme le font les hylo- batcs; ces derniers ont dans leurs pieds de devant le principal moyen de locomotion et d'ascension, tandis que ce sont ceu\ de derrière qui fonctionnent principalement dans les mouvements de l'o- rang, à tel point, que la fracture ou la paralysie d'un des membres postérieurs peut lui di;venir fa- tale, en ralentissant beaucoup ou empêchant sa fuite. Ses mouvements à terre sont bien moins agiles que sur les arbres; alors, la position oblique plutôt que verticale de son corps rend sa marche quadrupède vacillante et gênée ; à terre, il ne saurait échapper à la poursuite de l'homme, qui l'at- teint très-facilement à la course. Le corps se trouve alors penché en avant, reposant sur les bras faiblement fléchis au coude; et, dans celte position, il ressemble à un vieillard courbé sous le poids des ans, et s'aidant de béquilles. Il ne peut pas étendre la paume des mains ni les doigts à terre, mais les tient tournés en dedans et les doigts fléchis ; ce qui fait que la marche a lieu sur la partie externe des mains, l'exlrémilé du pouce appuyant à terre. Les mains inférieures ont les doigts cour- bés intérieurement, de manière à les poser à terre sur le côté externe, le talon seul louchant le sol , tandis que les doigts recourbés appuient par leurs premières phalanges. Toutes les ligures représen- tant l'orang debout sur les pieds de derrière ont une pose forcée, contraire à la nature, comme il est également faux que cet animal puisse se défendre contre l'homme avec aucune arme offensive : bâtons, branches ou pierres. Comme la nourriture de l'orang est essentiellement frugivore, il s'ensuit que les lieux qu'il choi- sit pour demeure sont déterminés par l'abondance et la maturité des espèces de fruits auxquels il donne la préférence, et que ce genre de vie le rend plus ou moins nomade ; c'est ainsi que l'orang se montre dans les parties méridionales de l'intérieur de Bornéo, et qu'il fait son apparition sur la rive droite du Dousson, dans la mousson de l'est, ou les mois d'avril et de mai, et qu'on ne l'y voit point durant le reste de l'année; et c'est aussi à cette époque que mûrissent les fruits du faits iii- fecioria, dont l'orang et quelques autres espèces de quadrumanes sont très-friands; indépendam- ment de ces fruits et de plusieurs autres espèces de figues, lu nourriture de l'orang consiste encore en bourgeons, fleurs et jeunes feuilles d'arbres et d'arbustes de ces contrées. Un vieux mâle, tué par nos voyageurs, près de l'embouchure du Sanipict, se trouvait avoir dans l'estomac des bandes d'é- corces d'arbres d'un et de deux pieds de longueur, et des semences, restes non digérés du fruit que produit le sandorïcum indicitm. Les Daiaks assurent qu'il ne fait aucun usage de nourriture animale ; c'est ce que nos naturalistes ont été à même de vérifier sur les individus tués, et ce qu'ils ont pu observer sur un orang mâle, haut de quatre pieds, qui a vécu environ un mois en captivité, malgré des blessures faites par des flèches empoisonnées. Cet orang n'a jamais voulu toucher à quelque nourriture que ce fût du règne animal, soit vivante, crue ou cuite. Lorsqu'un être vivant, un poulet, par exemple, l'approchait de irop près pour le déranger, il le saisissait, et le lançait loin de lui avec un air visible de méconten- tement. Cet orang était extrêmement sauvage, et, quoique souffrant de plusieurs blessures, il était in- abordable ; son œil perçant, son regard farouche et son extrême force musculaire, le rendaient re- doutable; il était faux et méchant, toujours accroupi, faisant entendre un fort grognement; il se levait lentement, et saisissait le moment opportun pour se lancer avec impétuosité sur l'objet qui lui portait ombrage, dirigeant, le plus souvent, une main vers la figure des personnes les plus rap- prochées des barreaux de sa cage. Dans' toutes ses actions, on remarquait une certaine sagacité ré- fléchie. 48 HISTOIRE NATURELLE. Tant que cet animal a vécu, on n'a pu lui faire iMciulre pour nourriture que du riz cuit , préparé eu boulettes froides ; mais il buvait beaucoup d'eau; il refusait constamment toutes sortes de fruits, tels que bananes, ananas, mangas, concombres. Il ne tachait pas de mordre, mais paraissait user de ses bras vigoureux comme unique moyen de défense, et se fier particulièrement à l'extrême force de ses mains. Nous ne mettrons point en parallèle de ces observations tout ce qui a été avancé, dans les écrits, relativement aux habitudes des jeunes iudividus élevés en captivité, n'ayant d'autre but, dans ce mémoire, que de faire connaître l'orang-outang à l'état sauvage. Lorsque les Daiaks découvrent dans les forets une femelle avec son nourrisson, ils tâchent de tuer la mère avec des flèches empoisonnées, afin de se rendre maîtres du jeune animal, qu'ils conservent assez facilement en vie au moyen de riz bouilli, de bananes, etc. A cet âge, ils sont très-lriands de la canne à sucre, boivent avec avidité de l'eau sucrée, et mangent le sucre de palmier et du tebou ; plus avancés en âge, on les accoutume â se nourrir de fruits, et, plus tard, de viande bouillie ou rôtie; mais ce régime leur est souvent fatal ; ils succombent trés-promptement sous l'influence d'une atmosphère différente de celle de leurs humides forêts équatoriales; tmit changement de climat et de température, même dans les régions tropicales, leur est fatal. Les Daiaks ne tâchent pas de s'em- parer des vieux, apparemment parce qu'ils savent par expérience que leur naturel est indomptable autant que leur force est rcdoulable. Lorsque la retraite d'un orang-outang est découverte, ils tâ- chent de l'atteindre en lui lançant des flèches empoisonnées, jusqu'à ce que l'animal, saisi con- vulsivement par la force du poison, se laisse tomber à terre, où ils l'achèvent avec de longues piques. Quelques races de Daiaks, particulièrement ceux de la partie occidentale et méridionale de Bor- néo, sont très-friands de la chair de l'orang, et ils lui font une chasse assidue. Aussi, les pour- suites dont cet animal est l'objet contribuent â l'éloigner de plus en plus des lieux populeux, des bords des fleuves, et à le reléguer dans l'intérieur des forêts, quoique par goût il aime â se fixer près des cours d'eau. Lorsqu'un orang a été tué par des flèches empoisonnées, les indigènes enlèvent de suite une par- tie des chairs â l'entour des blessures, puis ils dépouillent l'animal , le coupent par morceaux, et mettent soigneusement de côté la graisse, qu'ils estiment beaucoup pour la cuisson de leurs aliments. Ils font rôtir la chair sur des brasiers, ou la coupent par tranches, qu'ils font sécher au soleil, et qu'ils désignent alors sous le nom de dïnçjdhuj. La peau leur sert à faire des jaquettes ou des bon- nets de forme grotesque, dont ils s'affublent les jours de fête, ou pour se donner un air redoutable. Les mâles de forte taille sont ordinairement très-gras; leur poids est souvent de nature à faire la charge de trois ou quatre hommes. La chair est blanche et molle, mais elle a, comme celle des au- tres singes, un goût douceâtre qui répugne au palais d'un Européen. Lorsque l'orang se sent blessé grièvement, il monte incontinent à la cime de l'arbre sur lequel il se trouve ; et, lorsque cet arbre n'est pas assez élevé, il passe sur un autre qui puisse mieux le mettre â l'abri des armes. Pendant l'ascension, il fait entendre sa voix mugissante, semblable à celle de la panthère. Pour produire ces sons, il avance les deux lèvres en forme d'entonnoir; mais, lorsque sa voix devient plus sourde et bourdonnante, il ouvre la bouche et fait entrer l'air dans la poche gut- turale fortement tendue. Il ne montre pas les dents à son adversaire, comme le font quelques autres espèces de singes, et ne fait aucun usage de cette arme puissante pour mordre, sa véritable force résidant uniquement dans ses muscles ; car malheffi' â qui serait enlacé par ses bras vigoureux. Ne pouvant assouvir sa rage contre son ennemi, il s'en prend aux branches de l'arbre sur lequel il se trouve, casse des bûches de la grosseur du bras et les lance â terre, de façon que toute la cime d'un arbre est souvent dévastée pendant cette ascension tumultueuse. Il est probable que cette manière de fuir a pu fournir matière à tous ces contes exagérés, que l'o- rang lance des projectiles à son ennemi, ce qui est complètement faux; car les grosses branches qu'il casse dans sa furie échappent aussitôt de ses mains et tombent à terre. Cela est bien connu des Daiaks, et les chasseurs de M. MuUer, dont l'un avait tué sept de ces animaux et l'autre trois, assu- rent que l'honime ne court aucun danger dans cette attaque. A liornéo, l'orang n'a pas d'autre ennemi que l'honnne, car le tigre longibande ([dis macrocelis), le plus grand des carnassiers de l'île, est moins grand que fa panthère, et ne pourrait l'attaquer avec succès; bien moins encore l'ours des cocotiers {iirsus malatjanits), qui attaque rarement l'homme et Ol.VDRUMANES. 49 les grands mammifùres. Mais, à Sumatra, il est exposé à plus de dangers ; le tigre royal (fclis tiqris) le suiprcnil l'arilemeut à terre, mais ne peut le suivre sur les grands arbres dont le tronc est perpen- diculaire. Pour se soustraire à la poursuite de l'homme, la prudence el la ruse viennent à son secours; un sens auditif très-lin entretient continuellement son attention; il se délie du moindre bruit; la voix ou les pas d'un ennemi qui se dirige vers son gite, le frottement des feuille.s et des fougères, lui commandent la retraite; alors il se glisse furtivement dans les touffes les plus épaisses du feuillage et s'y lient immobile jusqu'à ce que le danger soit passé ; aussi les Daiaks, habitués à cette chasse, observent-ils le plus profond silence pour tâcher d'atteindre l'orang par ruse et par surprise. >' (Tem- siiNCK, d'après Sciilegel et .Mui.i.eii.) « Deux Anglais, MM. Craygimanu père et fils, à bord du brick la }f(irie-Annr-Sophic, en relâche à Banboom, sur la cote nord-est de Sumatra, furent avertis qu'un animal de la plus grande taille se trouvait sur un arbre du voisinage; ils résolurent aussitôt de s'en emparer, et plusieurs chasseurs du pays partirent avec eux. A leur approche, cet animal descendit de l'arbre sur lequel il était per- ché ; mais, quand il vit qu'on s'apprêtait à l'attaquer, il se réfugia sur un autre arbre, et rappela, dans sa fuite, l'aspect d'un homme de la plus grande taille et couvert de cheveux luisants qui parais- saient noirs, mais dont la démarche eût été chancelante, et qui, pour ne pas broncher, appuvait ses mains de temps à autre sur le sol, où, se servant d'un bâton, il cheminait alors assez doucement. Bientôt on jugea de son agilité et de sa force dès qu'il fut parvenu sur une cime, d'où, s" élançant à l'aide des grosses branches, il passait d'un arbre â l'autre aussi lestement que l'aurait fait le plus petit et le plus leste des singes. Il eût été impossible de s'en rendre maître dans un bois touffu et serré, car alors la rapidité d'un cheval au galop n'eût pas été plus considérable que son allure. Ses mouvements étaient si prompts, qu'on avait à peine le temps de l'ajuster. Ce n'est qu'après avoir abattu plusieurs arbres, et en agis- sant de ruse, qu'on parvint à l'isoler, il fut alors frappé successivement de cinq balles, dont une parut avoir traversé le ventre. Ses forces s'épuisèrent avec rapidité, et semblèrent complètement éteintes à la suite d'un vomissement copieux de sang noir. Néanmoins il se tenait toujours dans le feuillage, (juelle fut la surprise des chasseurs, lorsque, après avoir forcé le dernier asile de cet orang- outan, on le vit se relever avec vigueur et s'élancer sur d'autres arbres! Mais bientôt sa faiblesse le fit retomber presque mourant, et tout en lui annonçait qu'il allait rendre le dernier soupir. Les ma- rins se croyaient assurés de leur proie, lorsque ce malheureux animal recueillit ce qui lui restait de forces et se mit en posture de se défendre jusqu'à la dernière extrémité. Assailli à coups de piques, sa vigueur et l'énergie de ses membres robustes ne se démentirent point; il brisa comme un faible ro- seau la tige d'une pique qu'il avait saisie dans ses mains. Cet effort épuisa ce qui lui restait de vir gueur. et, renonçant à une défense devenue inutile, il prit alors l'expression de la douleur suppliante. La manière piteuse avec laquelle il regardait les larges blessures dont il était couvert toucha telle- ment les chasseurs, qu'ils commencèrent à se reprocher l'acte de barbarie qu'ils commettaient sur une créature qui leur semblait presque humaine, non moins par la manière dont elle exprimait ses dou- leurs que par ses formes corporelles. Lorsque cet orang fut mort, les naturels accourus autour des Européens contemplèrent sa figure avec un égal étonnement. Étendu sur le sol, il semblait avoir plus de six pieds de hauteur; mais quand il était debout, dépassant de toute la tétc l'homme le plus grand de l'équipage, on ne lui en avait pas supposé moins de sept. Le corps était fort bien proportionné, la poitrine large et carrée, le bas de la taille mince ; les yeux étaient assez grands, mais plus petits que ceux d'un homme: le nez paraissait plus saillant que chez aucune autre espèce de singe, et la bouche était notablement fendue. Une barbe frisée, couleur de noisette, longue de trois pouces, ornait les lè- vres et les jdues plutôt qu'elle ne dctiguiait ces parties : les bras étaient bien plus longs que les mem- bres postérieurs. Les dents, parfaitement complètes et d'une grande blancheur, annonçaient que cet individu n'était pas très-âgé. On comptait à cbaque mâchoire quatre incisives, de forme aplatie, tail- lées en biseau et longues de plus d'un ponce à la mâchoire inférieure. Les canines avaient plus de deux pouces. Les molaires présentaient, dans leur couronne, les mêmes particularités que celles de l'homme, mais leurs proportions étaient beaucoup plus considérables. Le poil qui constituait le pelage était partout doux et luisant. Ce qui surprenait le plus les as- sistants, était In ténacité de la vie, qui avait longtemps résisté à tant de blessures. La force nuiscu- 50 IIISTOmE NATURELLE. h'AvL' (levait avoir été bien considérable, car l'irritabilité île la libre se manifesta encore d'une ma- nière Irès-frappante lorsque le cadavre, ayant été transporté à bord et hissé pour y être écorché, le scalpel produisit un mouvement effroyable de contraction dans les muscles, même longtemps après la mort. Celle irritabilité fut telle, lorsqu'on atteit>nit les ])lans musculaires des gouttières vertébra- les, que le capitaine en eut horreur, et que, dans la persuasion où il fut que ces marques de sensi- bilité ne pouvaient avoir lieu sans de vives douleurs . il ordonna de ne pas continuer la dissection qu'on n'eût séparé la tête du tronc. Cet orang-, dépaysé, devait avoir voyagé pendant un certain temps avant d'être parvenu au lien où il fut tue, ( ar il avait de la boue jusqu'aux genoux, et les habitants de celte partie de Sumatra n'avaient aucune idée d'avoir jamais vu un animal semblable. Les Malais, qui peuplent ces côtes, ne s'enfoncent jamais dans les vastes et impénétrables forêts qui commencent à deux lieues de Uam- boom, et ils ignoraient complètement qu'un tel animal y existât. Ils lui attribuèrent les cris singu- liers qu'on avait entendus depuis quelques jours, et qui n'avaient aucune analogie avec ceux des ani- maux carnassiers qui viennent de temps à antre rôdei' la nuit antoir de leurs demeures. La peau de cet orang, ridée et racornie, présente encore à présent cinq pieds dix pouces de l'épaule aux mal- léoles. Le cou a trois pouces de longueur seulement ; la face, du haut du front jusqu'au menton, en a neuf; le i)ied quatorze pouces, et, d'une main à l'aiilre, les bras étendus mesuraient huit pieds deux pouces. L'examen de la dépouille de cet orang-outan a permis à M. Clarke-.\bel de résumer les \d. GeonVoy Saiiil-ttilaiic.; Cvr,ACTf;iiKS si'ecifioues. — Pelage roux supérieureiuent et au milieu du venti'c ; fauve blanchâtre sur le bas-ventre, les flancs, les aisselles, la porliim interne des cuisses et le tour de la honchc. Taille ; on ne coiuiaît que le jeune lige. Habite Sumatra. Cette espèce est établie par .M. Isidore Geoffroy Saint-llilaire sur un jeune individu mâle venu de Sumatra. Une partie de la face antérieure du corps, des membres et de la face, est d'un fauve blan- châtre, tandis que les parties postérieures sont couvertes de poils roux. Mais ce n'est pas seulement sur cette différence dans la coloration du pelage que le savant professeur du Muséum se fonde pour former une espèce confondue jusqu'ici avec l'orang-outang. Il trouve de bons caractères dans la forme des cavités orbitaires. Le saUjius riifiis, à tous les âges, a les orbites très-rapprocbées l'une de l'autre; elles sont ovalaircs et ont le diamètre transversal plus petit. Les os du nez ne forment, après leur soudure pi'ècoce, qu'une languette fort étroite. Le sutijrus bicolor, au contraire, a les orbites remarquablement quadrangulaires et à peine plus longm's que larges. Les os du nez. réunis, sont médiocrement larges. M. de ISlainville a communiqué la note suivante à l'.Vcadémie, au sujet de l'arrivée de ce singe rare et intéressant sous tous les rapports : k M. le capitaine Vausghen, qui a lui-uu''inc amené son jeune orang au Muséum, a bien voulu nous dire son histoire ; elle intéressera certainement nos lec- teurs. Il s'adressa, pour avoir un orang, à quelques chasseurs de l'île de Sumatra, où cet animal est 52 IllSTUIlŒ NATUKELLE. ilu reste très-rare ; les chasseurs s'étanl mis aussitôt eu reeiierelii , reunuitrereut une temelle portant sou jietit encore fort jeune. Cette femelle, poursuivie avec ardeur, se réfugia sur un arbre dont toutes les brandies furent successivement abattues par les chasseurs. Une seule restait encore et suppor- tait l'animal ; celui-ci, se voyant cerné de toutes parts, allait s'élancer sur un arbre voisin, lorsqu'un homme de la troupe lui coupa, d'un coup de hache, une main de devant. La mère saisit alors son petit avec la main qui lui restait; mais, comme il lui fut dès lors impossible de se soutenir, elle ne tarda pas à tomber an pouvoir de ses agresseurs. Elle fut alors aiuenee ainsi que son petit; mais les fatigues du voyage et la chaleur extrême s' ajou- tant à la gravité de sa blessure, une dégénérescence gangreneuse la fit bientôt périr. Le petit survécut : son âge fut approximativement évalué à six semaines ; cet animal était entièrement nu. et ce ne fut que plus tard que les poils, qui couvrent aujourd'hui son corps, commencèrent à se dé- velopper. Ceux du dos parurent d'abord, puis ceux du ventre et des parties inférieures. Néanmoins l'animal avait déjà fait ses dents incisives et les canines; ses molaires, aujourd'hui au nombre de trois de chaque côté et à chaque mâchoire, se montrèrent plus tard, mais sans occasionner aucun malaise appréciable. Le jeune orang fut nourri, en partie, avec de la bouillie, qu'on était obligé de lui donner comme on la donne à un enfant ; il était alors très-faible et très-peu intelligent ; mainlenant, il est très-actif, doux de caractère, et sensible aux caresses. Il affectionne surtout M. Vansghen , mais il est fami- lier avec tout le monde ; il prend la main, s'accroche aux jambes de ses visiteurs et monte jusque sur leurs épaules. C'est en lui donnant des soufflets, et même des coups de corde, que le ca]iitaine le corrige, quand il est trop turbulent : il s'assied alors dans un coin, se cache la ligure dans ses bras, et pleure parfois; dans ce dernier cas, il porte ses mains sur ses yeux comme pour les es- suyer. 11 joue avec les enfants, et il prend avec eux beaucoup plus de ménagements qu'avec les grandes personnes. 11 est aussi quelques animaux avec lesquels il sympathise, mais il ne peut souffrir les chats ; il n'aime pas non plus les autres singes ; il affectionne les chiens d'une manière toute particu tière, et le capitaine recommande de mettre dans sa loge un jeune animal de cette espèce pour lui tenir compagnie. Il paraît, en effet, aimer beaucoup la société, et il entre en colère dès qu'il se trouve seul, brise alors et déchire tout ce ([ui est à sa portée. Un peut, ;iu contraire, faire de lui ce que l'on veut en le mettant au milieu de quelques personnes; il joue avec elles, et aime surtout qu'on le bous- cule, qu'on le roule de toutes les i'ai,ons. On n'avait jusqu'ici possédé, en France, qu'un seul orang vivant, encore ce singe était il très-ma- lade et presque mourant lorsqu'il y est arrive; il n'a vécu que ([uelques semaines à la ménagerie de la Malmaison. Celui que l'on doit à M. Vansghen est en ]iarfaile santé ; on remai'que tout d'abord le volume de son ventre, sa manière lente de marcher connue un cul-de-jatte. et, au contraire, sa légè- reté à grimper et son intelligence. Nous l'avons vu, à la fenêtre de sa loge, tenant, avec une main de ilerrière. un verre d'eau su- crée ; et, avec l'une des mains de devant, iiu liiscuil. qu'il trempait dans la liqueur chaque fois qu'il voulait en prendre une bouchée. • (JIVUUIMANES. 53 5"" GENRE. —GIBBON. HYLOBATES. (Illiyer.) I YAaw, j;iljoii.'. Uxi/w. je iii.iix'lie CAHACTERES GENEllIQUES. Avuiil brus cl ina'ms cxcessivciiiciit uUoiujcs: oncjlcs dis pouces aplalis. Pclufic Ircs-cpais, laïneux. Corps moins lourd (pic dans tes deux cfcnrcs prccédciils. I)c fortes cuUosilrs uu.v fesses. Pus ile(pieite, pas d'(dia}oues Face obluse, encadrée de larges favoris; arcades snrciUcrcs protioiicces; oreilles nioiieuiics cl de forme prescpie liuiiiaiiie. Les yibboiis vivent, soit en troupes, soit pai' paires, dans les forêts des régions méridionales de r.\sie et de l'arehipel indien. ( PI 8. 9. 9 bis. 10 et 10 bis ] Les gibbons ont la tête déprimée au-dessus des yeux; la face obtuse, avec une saillie prononcée des arcades surcilières. Les mains sont étroites, à doigts longs, effdés et un peu courbés; le pouce est coui'l. et n'arrive qu'à la première articulation de l'indicateur. Aux membres inférieurs, le ponce est plus fort et très-reculé Les os du bassin sont fort allongés, étroits, et terminés inférieurement Fis. i5. — Gibbon bnoli. 54 HISTOIRE NATUUELLE. par des ischions dont le bord offre une large surfaee qui sert de base osseuse aux eallosités. Ces singes ont treize ou quatorze paires de côtes. Fiii. 4G. — Main aiitcricuru de iribbon. Fig. 47 — Main poslérieuie ilii mémo. Quelques L;ibbons, mais deux espèces oertaiiienient, présentent un caractère exceptionnel; deux doii,^ts des niendM'cs posiérieurs, l'indicateur et le médian, sont réunis, dans une partie de leur éten- due, par une mendirane, expansion des téguments. La plupart des auteurs, et le voyageur Duvauccl, pensent que cette disposition singulière se retrouve dans les autres gibbons, mais seulement dans un sexe, suivant l'espèce. M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire déclare n'avoir trouvé de membrane interdi- gitale que dans le siamang et l'entelloïde des deux sexes; tandis que l'examen d'un grand nombre d'individus mâles el feiiudles des autres. espèces lui a permis de s'assurer qu'ils avaient tous les doigts libres. Duvaucel dit avoir observé cette réunion des doigts sur une femelle du gibbon de liaf- fles, tandis que le mâle avait les doigts libres. Ce caractère, constant pour le siamang et l'entelloïde, se montrerait-il accidentellement dans d'autres espèces? C'est ce qui est encore à vérifier. La longueur disproportionnée des nu'inbres des gibbons tient au développement excessif de I a- vanl-bras et de la main qui est très-étroite. Cette conformalion, en apparence vicieuse, leur perniel la station bipède et leur fournit le moyen de marcher à quatre pattes, dans une position presque verticale. En effet, ils assurent leur station bipède en louchant de temps en temps le sol du bout des doigis des membres su|iérieurs, et leur marche, en se servant de leurs bras comme de balanciers. Les gibbons ont des callosités aux fesses ; mais ils n'ont ni queue, ni abajoues. Moins intelligents, ]>eut-étre, que les troglodytes et les orangs, ils sont criards, et font entendre continuellement leur voix, en sautant d'une branche à l'autre ou en marchant, ce ipii leur a valu le mim d'hylobales ; et QUADRUMANES. 55 Inii.s cris redoublent au lever et iiu coiicber du soleil. La présence d'un sac laryngien est évidente sur quelques yiidions, et l'on doit supposer que le même organe existe dans toutes les espèces; car ils ont tous une voix forte et reproduisant lesmènies sons. Us se suspendent par les bras, et ]>euveiit s'élaïu'er à de grandes distances après s'être balancés deux ou trois fois pour prendre l'élan convenable. La femelle porte son petit cramponné autour de son corps lorsqu'il est assez fort pour se soutenir seul dans cette position, et le soutient avec un de ses bras pendant son bas âge. Pendant le jour, les gibbons se retirent dans les bois, à la recherche de l'ombre et de la fraî- cheur. Ils ne quittent guère les arbres, où leurs membres longs et grêles leur permettent de sauter de branche en branche et de s'accrocher sans effort. Leurs fesses non renflées, les muscles jumeaux et soléaires effacés, leurs longues extrémités antérieures, n'annoncent point qu'ils soient destinés à marcher sur le sol. Les gibbons lient les orangs aux autres singes, car ils n'ont pas de queue ; mais on voit poindre les callosités, et leurs bras s'allongent démesurément. Cette conformation rend leur allure sur le sol peu assurée, mais, en revanche, en fait des animaux très-propres à grimper et à se tenir sur les bran- ches des arbres des forêts où ils vivent confinés. Exclusivement asiatiques, ces grands singes se réunissent en troupes, ont des mœurs douces, inoffensives, et se nourrissent de fruits, de racines, de bourgeons, et même de lézards et autres animaux, tels que des insectes et des mollusques. Ils sont paresseux, déliants, dormeurs, et moins intelligents que les orangs. (Lessoin.) La bouche des gibbons est proéminente; le visage est encadré de poils assez longs qui recouvrent même le front, s'avancent sur les joues et forment un collier sous le menton. Les poils de la tête sont dirigés d'avant en arriére; ceux du corps sont généralement foncés; quelques-uns, cependant, ont un pelage clair. Les poils de l'avant-bras sont dirigés plus ou moins obliquement de bas en haut. Le crâne est assez large, mais peu élevé; les crêtes surcilières, si on les compare à celles des orangs et des chimpanzés, sont médiocrement prononcées. Le cerveau présente des lobes antérieurs étroits; les postérieurs sont courts, et recouvrent incomplètement le cervelet. Les membres inférieurs, comparés aux supérieurs, sont» courts et généralement plus grêles. L'hu- mérus et le fémur sont de même longueur, et la grande inégalité qu'on remarque entre les propor- tions relatives des membres tient à ce que l'avant-bras et la main sont d'un tiers ])lus longs que la jambe et le pied. (Lesson.) « A la mftchoire supérieure, la première incisive est large, terminée par une ligne droite, usée obliquement en dedans, et coupée tran.sversalement par l'impression de l'incisive inférieure : la se- conde est plus petite que la première, et usée obliquement du côté de la canine; celle-ci, plus large qu'épaisse, est tranchante à son bord postérieur, et elle présente deux sillons longitudinaux à sa face interne, séparés l'un de l'autre par une côte saillante : le sillon postérieur est plus large et plus profond que l'antérieur. Les deux mâchelières suivantes sont deux fausses molaires : la seconde est un peu plus grande que la première ; mais toutes deux se composent de deux tubercules mousses, l'un au bord externe et l'autre au bord interne plus petit que le [iremier. Les trois molaires qui vien- nent après, et qui vont en grandissant de la première à la dernière, ont la même forme; elles se composent de quatre tubercules, deux d'égale grandeur, au bord externe, et deux au bord interne, le jiostérieur beaucoup plus petit ipie celui qui le précède : ces tubercules sont formés par des sil- lons qui partagent inégalement la dent. A la mâchoire inférieure, la première incisive est petite, et terminée par une ligne droite ; la se- conde est arrondie à sa face externe, terminée en pointe, et renforcée à sa face interne par une côte longitudinale qui l'épaissit dans sa partie moyenne. La canine est plus égale dans ses dimensions que celle de l'autre mâchoire, et elle est terminée postérieu''ement par un talon; mais sa face interne présente aussi les deux sillons et la côte que nous avons vus à l'autre. La première fausse molaire, placée obliquement, n'a qu'une seule pointe; la seconde en a deux, l'une interne et l'autre externe, situées plus près de son bord antérieur que de son bord postérieur. Trois molaires suivent, qui vont en augmentant de grandeur, et qui se ressemblent : elles présentent cinq tubercules, deux â leur partie antérieure, et trois, disposés en triangle, à lenrparlie postérieure. » (F. Cuvikr.) 56 HISTOIRE NATIREI.LE. La peau de la partie interne des quatre mains est nue, les pouces bien opposables aux aulres doigts. L'os métacarpien des pouces est libre, ce qui fait paraître ces doigts composés de trois plia- lancres. Fig. 48. — Sternum du gibbon siamang. Les doigts, surtout ceux des membres supérieurs, sont fort longs. Le sternum est aplati, large et composé de trois pièces. Les humérus sont grêles et de la longueur du tronc. Entre la première et la seconde rangée des os du carpe, on remarque l'os intermédiaire des singes, que ne présentent ni le chimpanzé ni l'oràng. Plus doux, même dans un âge avancé, que la plupart des autres singes, ils sont défianls, timides, surtout lorsqu'ils .sont à terre, k tort on les dit stupides. parce qu'ils paraissent indolents et gênés dans leurs mouvements sur le sol. On a découvert, dans le département du Gers, des débris fossiles qui peuvent se rapprorter à ce genre. 1. C.IBBON PIAMANG a Y LOUATES SYXDACTYI.VS (Fréd. Cuvier ) (fl.O.) Caractères srncirtQDES. — Pelage entièrement noir; un grand espace nu sous la gorge; doigts médian et indicateur des membres inférieurs réunis en partie par les téguments, Habite Sumatra Le siamang, ainsi nommé par les Malais, se distingue des autres e.spcces de gibbons par une mem- brane étroite qui réunit le deuxième et le troisième doigt des membres inférieurs (la dernière pha- lange est seule libre chez les mules, tandis que. dans les femelles, la membrane interdigitale est moins étendue, et laisse les deux dernières phalanges libres), et par une poche laryngienne membra- neuse et dilatable, en forme de goitre, pendant sous la gorge, qui est nue. Il se dislingue encore par un pelage noir, brillant, doux et épais, à poils longs par places et laineux. Les sourcils et le dessous du menton sont roussàtres; la face est noire, nue et des plus laides. Le front est. en quelque Gilibon siiimaiig. PI '.» QllAimUMANES. 57 sorte, réduit aux arcades sui'ciliéros suinioiilaiit des yeux enfoncés et sans expression. Le nez est large, aplati, à narines latérales très-grandes. I;a liniiclie est largement ouverte, les joues creuses, el les pommettes saillantes. Les poils de l'avanl-hras se dirigent du poignet vei's le coude, où ils fiMMueul une sorte de nianclielte en se rencontrant avec ceux du bras. Le mâle a deux pinceaux de poils roussâlres, souvent trè.s-longs, au scrotum, et la remelle a les parties correspondantes et les mamelles nues. On remarque aussi que les dents canines du siamang sont lrés-,saillantcs. Sa taille varie de 0'",!)0 à 1"',15. Le gibbon siamang a été découvert à Sumatra par MM. Duvaucel et IJiard, naturalistes, .'iccompa- gnant sir Slanifort Raftles. Il Cet animal est fort commun dans les forêts de Sumatra, dit M. Duvaucel, et j'ai pu souvent l'ob- server en liberté comme en esclavage. On trouve ordinairement les siamangs rassemblés en troupes nombreuses, conduites par un cbef que les Malais croient invulnérable, sans doute parce qu'il est plus fort, plus agile et plus diflicile à atteindre que les autres. Ainsi réunis, ils saluent le soleil, à son lever et à son couclier, par des cris épouvantables qu'on enlend de plusieurs milles, et qui, de près, étourdissent lorsqu'ils ne causent pas d'effroi. C'est le réveille-matin des Malais montagnards, et, pour les citadins qui vont à la campagne, c'est une des plus insupportables contrariétés. Par compensation, ils gardent un profond silence pendant la journée, à moins qu'on n'interrompe leur repos ou leur sommeil. Ces animaux sont lents et pesants; ils man(|uent d'assurance ([uand ils grinqient. et d'adresse ([uand ils sautent; de sorte ([u'on les atteint toujours quand on peut les sur- prendre. Mais la nature, en les privant des moyens de se soustraire promptement aux dangers, leur a donne une vigilance qu'on nicl rarement en défaut, et, s'ils entendent, à un mille de distance, un bruit qui leur soit inconnu, l'effroi les saisit, et ils fuient aussitôt. Lorsqu'on les surprend à terre, on s'en empare sans résistance, soit que la crainte les étourdisse, soit qu'ils sentent leur faiblesse et l'impos- sibilité de s'écliapper. Cependant ils cherchent d'abord à fuir, et c'est alors qu'on reconnaît toute leur imperfection pour cet exercice. Leur corps, trop haut et trop pesant pour leurs cuisses coui'tes et grêles, s'incline en avant, et, leurs deux bras faisant l'office d'échasses. ils avancent par saccades, et ressemblent ainsi à un vieillard boiteux à qui la peur ferait faire un grand effort. Quelque nombreuse que soit la troupe, celui qu'on blesse est abandonné par les antres, à moins que ce ne soit un jeune individu. Sa niere alors, qui le porte ou le suit de prés, .s'arrête, tombe avec lui, pousse des cris affreux en se piécipitant sur l'ennemi la gueule ouverte et les bras étendus. Mais on voit bien que ces animaux n(^ sont pas faits pour condjattre, car alors même ils ne savent éviter aucun coup, et n'en peuvent porter un seul. An reste, cet amour maternel ne se montre pas seulement dans le danger, et les soins ([ue les femelles prennent de leurs petits sont si tendres, si recherchés, qu'on serait tente de les attribuer à un sentiment raisonné. C'est un spectacle cu- rieux, dont, à force de précautions, j'ai pu jouir quelquefois, que de voir des femelles portei' leurs enfants à la rivière, les débarbouiller malgré leurs plaintes, les essuyer, les séchei', et don- ner à leur pr(qireté un tiunps et des soins que dans bien des cas nos propres enfants pourraient envier. Les Malais m'onl aflirnié un fait dont je doutais alors, mais que je crois avoir constaté depuis : c'est que les petits siamangs. trop jeunes encore pour aller seuls, sont toujours portés par des in- dividus du même sexe qu'eux : par leurs pères, s'ils sont mâles, et par leurs mères, s'ils sont fe- melles. Ils m'ont également assuré que cette espèce devenait souvent la proie des tigres par le fail de cette sorte de chaime qu'on a déjà dit que les serpents exercent sur les oiseaux, les écureuils, etc Je ne peux rien vous apprendre sur leur mode d'accouplement, sur la durée de la gestation, etc. Ces faits mystérieux sont ignorés des Malais eux-mêmes, les siamangs n'ayant point encore produit en esclavage. Au reste, la servitude, quelle que soit sa durée, ne paraît modifier en rien les défauts caractéristiques de ce singe : sa stupidité, sa lenteur, sa maladresse. A la vérité, il devient, en peu de jours, aussi doux qu'il était sauvage, aussi privé qu'il était farouche, mais, toujours timide, on ne lui voit jamais la familiarité qu'acquièrent bicnlôt les autres espèces du même genre, et sa soumission paraît tenir plutôt à son extrême apathie qu'à un degré quelconque de confiance ou d'affection. Il est à peu près insensible aux bons el aux mauvais traitements : la reconnaissance, la haine, paraissent être des sentiments inconnus à ces machines animées. Tous leurs sens sont grossiers : s'ils fi.\ent un (i 58 HISTOIRE NATURELLE. objet, on voit que c'est sans intention ; s'ils y touflicnt, c'est presque sans le vouloir. Le .siamang, en un mot, est l'absence de toute faculté; et, si l'on classe jamais les animaux d'après leur intelli- gence, celui-là occupera sûrement une des dernières places. Le plus souvent accroupi, enveloppé dans ses longs bras, et la tète cachée entre les jambes, position qu'il a aussi en dormant, le sia- mang- ne fait cesser son immobilité et ne rompt le silence qu'en poussant par intervalles un cri dés- agréable, assez approchant de celui du dindon, mais qui ne parait motivé par aucun sentiment, par aucun besoin, et qui, en effet, n'exprime rien ; la faim elle-même ne peut le tirer de sa léthargie na- turelle. En esclavage, il prend ses aliments avec indifférence, les porte à sa bouche sans avidité, et se les voit enlever sans étonnement. Sa manière de boire est en harmonie avec ses autres habitudes : elle consiste à plonger ses doigts dans l'eau, et à les sucer ensuite. » Raftles dit qu'on a vu des individus entièrement blancs. 2. GIBI30N AGILE UYLODATES VARinGATUS (Kulli ) C>.iiACTiiREs SPÉCIFIQUES. — Pelagc brun ; le dos, les lombes, les fesses et le derrière de la tête fauves ou d'un lirun clair. Des poils d'un brun grisâtre entourent la face chez le mâle, et couvrent seulement les arcades surcilières chez la femelle. Habite Sumatra. Le gibbon varié a le pelage composé de poils d'une seule nature, épais et laineux en apparence; les jambes très-dcjetées en dehors, les doigts des pieds courts, ceux des mains longs, excepté le pouce, qui est court; ce qui est l'inverse des pieds, où le pouce est long. Les yeux sont enfoncés dans leur orbite, et ont une pupille ronde. Les couleurs du poil varient suivant les âges et les sexes : Fia. 49. — Gibbon agile QUADRUMANKS. 50 les niàk's adultes sont d'un brun très-foncé sur la tète, le ventre, la partie externe des bras et des jambes jusqu'aux genoux, s'éclaireissarit sur les épaules, le dos, et passant au blond presque blanc sur les reins. Le pourtour de la région anale offre un mélange de brunâtre, de blanc et de roux, qui s'étend jusqu'aux jarrets. Le dessus des mains et des pieds est d'un brun lrè,s-foncé, pareil a celui du ventre. Les poils sont longs sur le cou, crispés sur les épaules, très-courts et très-serrés sur les reins. Les femelles, généralement plus petites, ont les sourcils moins prononcés que les mâles, se fondant dans le brun de la tête; les favoris sont aussi moins longs et moins colorés. Les jeunes sont presque en entier d'un blanc jaunâtre. Fig. 50. - Gibbon asile. Le gibbon varié est d'un naturel très-timide, bien éloigné de partager, même dans les proportions de la taille, ni la force ni la hardiesse du siamang. Sir Raffles rapporte que les naturels de Sumatra accordent à ce .singe une exquise sensibilité; ils pensent qu'un gibbon de cette espèce, leur ungka- puti, mourrait de chagrin s'il voyait qu'un autre animal lui fût préféré; et, pour légitimer ce pro- fond sentiment de jalousie, sir Raffles assure qu'un gibbon varié, qui lui appartenait, tomba malade parce qu'on caressait journellement devant lui un siamang également élevé en captivité, et qu'il ne se remit que lorsqu'on eut éloigné son rival. (Lesson.) Ce singe, moins connu que le siamang, parce qu'il est plus rare et que son agilité le rend plus dif- ficile à prendre, porte, à Sumatra, plusieurs noms, dont le meilleur est celui de wouwou, parce qu'il est la plus juste expression de son cri. Cet animal a la face nue, d'un bleu noirâtre, légèrement teinte en brun dans la femelle; ses yeux sont rapprochés et d'autant plus enfoncés que son arcade orbitaire est fort saillante, et qu'il n'a point de front ; son nez, moins aplati que celui du siamang, a de larges narines ouvertes latéralement; son menton est garni de quelques poils noirs qui ne changent pas; ses oreilles sont en partie ca- chées par de longs et épais favoris blanchâtres, qui s'unissent à un bandeau blanc, large de six li- gnes, situé immédiatement au-dessus des sourcils. (;0 IIISTOIUE NATUUELLE. La coukui' iiicerlaine de ce singe et le manque de termes pi'écis pour l'expressiuii des diverses teintes permettent difticiiement d'en donner une idée iixe à ceux qui n'ont pas vu l'animal. D'ailleurs cette couleur varie avec l'âge, et change selon le sexe. Le pelage des wouwous est lisse, brillant, et d'un brun très-foncé sur la tète, la partie interne des bras et des jambes jusqu'aux genoux; il s'é- claircit insensiblement vers les épaules, s'allonge sur le cou, puis se crispe , devient tant soit peu laineux, et, enfin, très-court, très-serré, et d'un blond presque blanc au bas des reins. Dans la femelle, peu velue en avant, les sourcils moins prononcés se fondent dans le brun de la tête. Ses favoris sont aussi moins colorés et moins longs que ceux du mâle, mais, néanmoins, encore assez grands pour rendre sa tête pius large que haute, ce qui donne â la physionomie des wouwous un caractère étrange et particulier fort différent du siamang, quoique ces animaux aient d'ailleurs la plus grande ressemblance. Ces singes, qui vivent plus souvent isolés par couple qu'en famille, sont les plus rares de ceux qui se trouvent ici, puisque sur cinq ou six wouwous on voit toujours cent siamangs. Bien différent de ceux-ci par son agilité surprenante, le wouwou échappe ainsi qu'un oiseau, et, comme lui, ne peut guère être atteint qu'au vol : à peine a-t-il aperçu le danger qu'il en est déjà loin. Grimpant rapidement au sommet des arbres, il y saisit la branche la plus flexible, se balance deux ou trois fois pour prendre son élan, et franchit ainsi, plusieurs fois de suite, sans effort comme sans fatigue, des espaces de quarante pieds. En domesticité, le wouwou n'annonce pas une faculté aussi extraordinaire S'il est moins lourd que le siamang, si sa taille est plus élancée, ses mouvements plus faciles et plus prompts, il est aussi beaucoup moins vif que les autres singes ; et, dans ses bras longs et grêles, dans ses jambes courtes et déjetées, on est loin de soupçonner des muscles aussi vigoureux et une adresse aussi merveil- leuse . La nature ne l'a pas doué dune grande intelligence ; la sienne n'est guère moins bornée que celle du siamang. Tous deux sont dépourvus de front; et c'est un des grands points de coïncidence entre ces deux espèces. Ce que j'ai vu me persuade néanmoins qu'il est susceptible de quelque éducation ; il n'a pas l'imperturbable ajiathie du siamang; on l'effraye et on le rassure ; il fuit le danger et re- cherche les caresses; il est gourmand, curieux, familier et quelquefois gai. Quoiqu'il diffère du siamang par l'absence d'un sac guttural, son cri est cependant à peu près le même, .\insi, ce sac ne jouerait pas dans la voix le rôle ([u'on lui suppose, ou il serait remplacé dans le wouwou par quelque organe analogue. (Duvaucel.) Il existe, au Muséum, un individu chez lequel, par un effet d'albinisme, le corps est presque uni- formément couvert d'un poil d'un fauve clair. Le pelage des très-jeunes individus est également d un fauve clair. 11 faut éviter de confondre avec eux quelques individus de l'espèce précédente dont la couleur a été altérée par diverses influences. (Isidoue Geoffhoy Saint-Hilaiue.) La femelle a l'index et le médius des membres postérieurs réunis comme le siamang. (Lesson, (lompl. (le Bu I fou. 3. GIBBON CEND1\É. HYLOBATES LBUCISCUS. (Kulh.) Caractères spécifiques. — Pelage uniformément cendré; le dessus de la létc noir ou gris foncé. Tour du visage gris clair. Peau nue de la face et des quatre mains, noire. Habite les iles de la Sonde et les Moluques. Le gibbon cendré, nommé aussi wouwou par les Malais, se distingue des autres espèces du genre par la couleur noire foncée de la face et des quatre mains, tandis que tout le reste du pelage est gris cendré uniforme, si ce n'est au sommet de la tète et à la partie externe des membres, où, dans quelques individus, il paraît plus foncé. La face noire est encadrée par un cercle de poils d'une teinte grise, plus claire. Les jeunes individus sont parfois d'un blond uniforme. Les poils sont longs, QUADRUMANES. 61 serrés et laineux, cl recouvrent les parties supéiieuics des mains et des doigts jusfpi'aux ongles. De l'ortcs callosités se dessinent sur les fesses. Ce singe est assez bien proportionné dans toutes ses parties sous le rapport de la force, car, quant ù la longueur, les membres supérieurs égalent à la fois le corps et les jambes. Camper rapporte qu'il marche souvent debout, et qu'il grimpe sur les bambous, où ses grands bras lui servent de ba- lancier pour le maintenir en équilibre. On le dit colère, capricieux et inconstant. Fig. 51. — Gibbon cendré. Le gibbon cendré ne vit point en troupe, mais bien par couples appareillés et solitaires. En cap- tivité, ce singe devient mélancolique et indolent, tandis qu'à l'état de liberté on le voit fréquem- ment se pendre aux rameaux les plus frêles et s'en servir comme d'une escarpolette pour s'élancer quelquefois à de grandes distances. Les habitudes de cette espèce sont d'ailleurs encore peu con- nues. (Lessox.) 62 HISTOIRE NATUIlELLE. 4. GIBBON ENTELLOIDE. avLOBATES E^TELLOIDES. (Isid. Geoffroy Saint-Ililiire ) (1M.8) Caractères spécifiques. —Pelage d'un fauve très-clair; face noire encadrée de blanc; paumes noires; callosités petites, arrondies ; le second et le troisième doigt des membres inférieurs réunis par une membrane sur toute la longueur de la première phalange. Habite la presqu'île malaise. « Le pelage, très-laineux, touffu et un peu plus long sur la Ictc et sur le dos, est généralement d'un fauve blanchâtre (couleur de iilasse claire), les poils étant roussiilres ;\ leur origine, et d'une couleur très-claire dans leur portion terminale. La face interne des bras, le dedans des coudes et le cou, présentent une teinte généralement roussAtre, beaucoup plus marquée chez la femelle, et tirant uiéme un peu chez elle sur le doré, principalement sur la |)artie postérieure des joues Les poils du dessus de la tète, assez longs, sont couchés et dirigés en arrière ; les poils des joues, assez longs aussi, sont, au contraire, redressés, et peuvent être comparés, aussi bien que dans d'autres espèces, à de larges, mais courts favoris. Un bandeau blanc, assez large, occupe la partie antérieure du front, et se fond presque insensiblement avec les poils d'un fauve très-clair qui couvrent le reste de la tête. Il en est surtout ainsi chez le jeune qui, d'ailleurs, ressemble généralement à h femelle. Le menton est également blanc, ainsi que la partie antérieure des joues chez la femelle, et les joues presque en- tières chez le mule. Dans les deux sexes, la face est donc encadrée de blanc : il y a toutefois cette dif- férence, que l'encadrement blanc s'élargit sur les joues chez le mule, ce qui n'a pas lieu chez la fe- melle ; celle-ci a les joues roussâtres en arrière. Les sourcils sont roux. La face est noirâtre, et les ongles paraissent aussi de couleur foncée. Les callosités sont peu éten- dues et de forme arrondie. Le doigt indicateur et le médius des membres postérieurs sont réunis par une membrane interdi- gitale jusque vers l'articulation de la première et de la seconde phalange. Dans l'individu mâle que nous avons sous les yeux, la réunion dépasse même cette articulation, et la membrane borde une grande partie de la face interne du médius. Par l'ensemble de ces caractères, et spécialement par les teintes claires de son pelage, qui con- trastent d'une manière remarquable avec la couleur foncée delà face, ce gibbon rappelle, au premier aspect, un autre singe indien généralement connu, le seranopithèque entelle. De là le nom que j'ai donné'à celle espèce ; nom qui rappelle à la fois la similitude de patrie et la similitude de coloration. 11 m'a d'ailleurs paru qu'il valait mieux indiquer seulement qu'exprimer exactement par la dénomi- nation spécifique la coloration remarquable de ce singe. Il existe de si nombreuses variétés de cou- leur parmi les gibbons, que je dois regarder comme très-vraisemblable l'existence de gibbons en- telloides, assez différents, par leur pelage, des individus que j'ai décrits. La taille du gibbon entellokle est d'un peu plus de O^.SO. Le Muséum doit la possession de cette belle espèce à M. Barre, missionnaire apostolique dans l'Inde et la Malaisie. Il a envoyé un mâle adulte, une femelle adulte aussi et un jeune mâle. » (Isidore Geoffroy S\im-Hilaire.) 5. GIBBON IIOOLOCK. UYLOBATES UOOIOCK. (R. Harlan.) Caractères spécifiques. — Pelage crépu, d'un noir brillant, avec une bande blanche au-dessus des sourcils, et non prolongée latéralement. Habite le royaume d'Assam et la chaîne des Gates, Indes orientales. Le hoolock, nom qu'on donne dans les Indes à cette espèce, que l'on croit aussi désignée sous le nom de wouwou, a la peau d'un noir profond. Le pelage est en entier de cette couleur, si l'on en l,il.l...M i-iilrlluul. PI. S QUADRUMANES. 63 rxcc]Uo une bande do poils grisâlrcs qui ivi^iie sur le front du sujet adulte. Les poils qui recou- vrent le dessus des doigis sont lrès-loni,'s, et ceux de l' avant-bras sont rebroussés. Les jeunes ont à peu près la moitié de la taille des vieux, mais ils présentent une particularité assez caractéristique, c'est d'avoir, proportionnellement, l'avant-bras beaucoup plus court que le bras, tandis que ces Fis. 52. — Gibbon IioolocU. deux portions des membres sont d'égale longueur chez les adultes. Le pelage des jeunes est d'un brun noirâtre, avec des poils grisâtres sur le dessus de la main et du pied. Quelques poils grisâlrcs se montrent sur le dos, et dessinent une ligne qui s'élend sur le corps jusqu'au milieu du fronl. Enfin, le bandeau gris des adultes est, chez les jeunes, interrompu au milieu par des poils noirs Cette espèce est surtout remarquable par des canines trôs-développées. Ce gibbon vit plus exclusivement sur les chaînes inférieures des montagnes, sans être organisé pour supporter les froids intenses des monts Garrows. Sa nourriture, dans l'état de liberté, consiste principalement en fruits abondants dans les jungles ou forêts marécageuses de cette contrée, en di- (îi HISTOIRE NATURELLE. verses graines, cl en baies de l'arbre sacré des Indiens (papullrée), et aussi en jeunes pousses, dont il suce le suc et rejette le parenchyme indigeste. Ses mouvements sont rapides, et c'est avec la plus grande prestesse qu'on le voit gravir le tronc des palmiers, sauter de branches en branches, et fuir à travers les arbres des forêts. En domesiicité, on peut le priver aisément, et alors il ne dédaigne pas ni les œufs, ni le cai'é et le chocolat; mais il a peu de goùl pour les viandes cuites. Souvent M. Burrough a vu l'individu qu'il possédait en vie prendre un vase rempli de liquide avec ses mains , et boire en le portant à ses lè- vres. Les aliments qu'il préférait consistaient en riz bouilli, en pain trempé dans du lait sucré, en bananes et oranges, et il ne dédaignait même pas les insectes, suilont les araignées, qu'il saisissait avec adresse dans les fentes des murailles. De même que les Indiens, qui ont horreur de la viande, ce singe manifestait la plus vive antipathie pour la cliair de bœnf ou de porc, bien qu'il ait essayé de manger du poisson frit. IHinx par caractère, il saisissait toutes les occasions de manifester son affection pour son maître. Dès le matin, il lui rendait visite, en poussant un son guttural (wou-wou-won) de contentement pen- dant plus de dix minutes; puis il enlaçait ses membres aux siens, et semblait éprouver une vive sa- tisfaction de ses caresses II le reconnaissait à la voix, et s'empressait d'accourir à son appel. (Les- sos, d'api'ès Martin.) Fig. 53 — Tète du gibbon liooliicli. 6. GIBBON DE RAILLES. HYLOBATES RAFFI.ni (Geoffroy S^irit-IIilniio ) Cab.\ctères spécifiques. — Pelage noir; le dos et les reins d'un brun roussâtre; sourcils blancs cl joues grises chez les mâles ; sourcils d'un gris clair et joues noires chez les femelles qui, au dire de Lesson, ont deux doigts des membres postérieurs réunis, conjme le siamang. Habite l'ile de Sumatra. « Ce gibbon, appelé ouiiko par les Malais de Padang, est irès-rare, dit M. Duvancel, puisque de- puis quinze mois, à Sumatra, nous n'avions jamais soupçonné son existence. J'en possède nue famille entière, le père, la mère et l'enfant, que j'ai tués presque ensemble, et j'en ai vu plusieurs antres ab- solument .semblables; l'existence de l'e.'ipèce est donc certaine. QUADRUMANES. 65 L'ounko est un peu moins grand que le gibbon varié, auquel il ressemble tellement sous presque tous les rapports, qu'on ne remarque guère entre eux d'autre différence que dans leur couleur. Il est tout couvert d'un poil long et fourni, moins noir et moins brillant que celui du siamang, se rappro- chant de celui du gibbon varié par sa longueur dans certains endroits, par un léger reflet brun qui Fiï. 54. — Gibbon rte llallles. varie selon l'incidence de la lumière, et par le bas des reins et le dessus des cuisses d'un brun foncé bien prononcé ; il lui ressemble encore par un bandeau blanc qui passe immédiatement au-dessus des sourcils et vient se perdre sur les côtés dans d'épais favoris blanchfttres, unis eux-mêmes au menton également blanc. 9 Cfi IIISTOIHE NATUHKLLK. La gorge n'est pas nue et dilatable comme dans le siamang, mais seulement garnie de poils moins longs et moins fournis que ceux du ventre. Au milieu de la poitrine du mâle, est une tache grise peu apparente et peut-être accidentelle. Comme dans le siamang et le gibbon varié, le scrotum est couvert de longs poils, qui forment un pinceau légèrement roussûtre au bout. Ainsi, l'ounko tient étroitement au siamang par la nature et la couleur de son pelage; au gibbon varié par ses sourcils, ses favoris, sa physionomie et ses proportions, par l'absence du sac guttural et par l'union de l'index au médius dans la femelle seulement. Entre autres caractères ostéologiques, je citerai une quatorzième côle qui manque aux deux autres gibbons. La femelle de l'ounko, sensiblement plus petite que le mâle, en diffère encore par l'absence des favoris blancs. Sa tète est toute noire, à l'exception de deux traits blancs autour des yeux; sa poi- trine et son ventre sont peu velus ; mais les poils du dos, des épaules et de la nuque, sont fort longs, et lui forment une sorte de crinière. Ce caractère existe aussi chez les siamangs et les wouwous ; mais, dans aucun cas, il n'est, à beaucoup près, aussi prononcé. » (Duvadcel.) 7 GIBBON A FAVORIS BLANCS. UYLOBATES LEVCOGENYS. (Ogilby.) CAnACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Pelage épais et noir; face noire encadrée en partie par de longs favo- ris blancs; poils de la tète dirigés en haut et en arrière. Habite l'Inde. Fi". 55 — Gihbon à favm is lilancs. liibhoii cuiitolor. PI. 'J l.is QUAUKLMANES. 67 Ce gibbon a des Ibniies élancées, un pelage épais, long, laineux et brillant; les poils de la tête sont droits et relevés dès leur base, disposition qui fait paraître le crâne plus développé en bauteur et allonge l'ovale de la face. La couleur du pelage contraste avec celle des longs poils blancs qui bordent la face et forment de gros favoris dirigés en arrière et simulant une collerette en se ren- contrant avec les poils du cou. Les paumes des quatre mains sont noires, et les doigts des extrémités inférieures sont tous libres. Debout, ce singe a deux pieds quatre pouces (anglais). 11 a vécu dans la ménagerie de la Société zoologique de Londres, et se faisait remarquer par son activité, sa douceur et sa familiarité. On n'a aucun renseignement positif sur son habitat. (Martin.) 8. GIBBON A MAINS ItLANCIIIiS. HYLOBATES ALDIM^^VS. (Isid. Geofiroy Saiijt-llilairu ) (PI. 10 bis.) Cahactères spécifiq'jes. — Pelage noir; les quatre mains et tout le tour de la face d'un blanc sale. Habite l'ile de Java. Cette espèce a le corps allongé et assez grêle, la tète arrondie, les yeux grands et enfoncés; les poils de la tête, du cou, du dos, des flancs et des membres, sont d'un noir intense chez les sujets adultes; la face est nue et de couleur brune. Un cercle de poils gris très-clairs traverse le front, s'élargit sur les joues, et contourne la mâchoire inférieure en dessous. Le dessus des mains, depuis le poignet jusqu'aux ongles, le dessus des pieds, depuis la malléole jusqu'à la dernière phalange, sont également recouverts de poils gris blancs plus ras que ceux du corps. La peau nue du dedans de la main et de la plante des pieds est de couleur noire, ainsi que les ongles et l'extrémité des phalanges. (Lessoin.) Le pelage du gibbon aux mains blanches paraît varier du noir intense au brun fuligineux; et la couleur des extrémités des membres et du tour de la face peut arriver au blanc presque pur. Le nom spécifique d'albimanus exprime beaucoup mieux les caractères de ce gibbon, et ce motif, joint à la difficulté de débrouiller la synonymie de deux espèces auxquelles on a appliqué le nom de lar (l'hyl. albimanus et l'hyl. Rafllei), ont engagé M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire à adopter le nom d'albimanus déjà proposé par Mil. Vigors et Horsefield. 9. GIBtiON CONCOLOR. IIYI.OItATES CODICOLOIt. ( Harlaii ) (l'I, Obis) Caractères spécifiques. — Pelage entièrement noir. Habite ? On ne possède aucuns détails bien circonstanciés sur cette espèce encore peu connue. Le mâle est noir, et la femelle est d'un fauve grisâtre ; le dos est plus clair et les parties antérieures plus foncées que le reste du pelage, ou du moins c'est ce qu'on peut dire des individus étudiés jusqu'ici , sans qu'on puisse afiirmerque ces individus appartiennent réellement à la même espèce. 10 GIBBON CHOROMANDtS. Hri.OBATES CUOROMANDVS. (Ogilby.) Car.\ctères spécifiques. — Front ample et haut , nez saillant; pelage épais et laineux d'un brun G8 HISTOIRE NATURELLE. pâle jaunâtre ; poils de la tète longs et redressés; ceux de la poitrine, des aisselles et de l'abdomen, bruns. Habite le continent indien, probablement la péninsule malaise. La tête est large et arrondie ; le nez saillant et à large cloison ; le pelage est épais, long, laineux et brillant ; les poils de la tète sont relevés et forment une volumineuse perruque. La couleur géné- rale est à peu près celle du gibbon varié ; elle est d'un brun jaunâtre, pâle ou basané. D'épais favoris encadrent la face; ils sont, ainsi que la barbe, d'un brun chocolat foncé. Les poils des doigts sont noirs, et les doigts des extrémités inférieures sont libres. A ces caractères, Lesson ajoute : « Pelage brun cendré, relevé sur la face par deux larges mous- taches noires. » Fig. 56. — Gibbun thoroiuaiidus. Sciueletle île gibbon viinr. PI 10. (îil)lioii aux iiiiiius hlunclics. l'i. 10 bis. QUADRUMANES. 69 DEUXIEME TRIBU. — PITHÉCIENS. . Sous le nom de pithéciens, nous comprenons tous les autres singes de l'ancien monde, et nous les divisons en quatre groupes qui sont : 1° les semnopithéciens ; 2° les cercopithéciens; 5° les ma- caques; 4° les cynopitliéciens. Jriciu.ieu atoii-pe. — Q^emuoeimec s Les semnopithéciens ont le corps grêle, les membres allongés, les mains antérieures étroites longues, à pouce très-court ou même nul ; ils n'ont pas d'abajoues et leur queue est très-longue. Moin pétulants que les autres singes de la même tribu, leur caractère semble plus froid et plus calme Ce groupe se compose des trois genres : Nasique, Semnopithèque et Colobc. 1" GENRE. — NASIQUE. NASALIS. (Geoffroy Saint-llilaire.) Nasus, riez. CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Nez irès-larçie, démesurément aUoncfê, et percé près de son exirémité de deux grandes narines Museau court, front assez proéminent Corps trapu. Membres assez longs, mains antérieures longues, pouces courts. Queue à peu près de même longueur que le corps. Des abajoues; des vallosilés aux fesses. Ongles assez aplatis, veux des pouces des membres inférieurs très-larges et épais. Poils abondants, serrés. Habite Bornéo, la Cochinchine. Taille I^.IO. Les nasiques sont fort remarquables par un trait apparent et qui n'appartient à aucun autre singe. Ce trait est un nez large, proéminent, assez semblable pour la forme à celui de l'homme, mince à son extrémité, et présentant dans toute sa longueur un sillon qui semble le diviser en deu\ lobes. Cette disposition a fait donner à l'espèce le nom de nasique par Daubenton. Les narines sont placées et ouvertes horizoolalement comme celles de l'homme; leur ouverture est grande et la cloison qui les sépare est mince. Ces narines, situées à l'extrémité du nez, et par conséquent fort éloignées de la lèvre supérieure, se dilatent à la volonté de l'animal sans que le nez puisse se mouvoir en totalité. Les os maxillaires et ceux du nez n'offrent aucune modification correspondante à cette longueur ex- traordinaire des parties molles; le cartilage seul est plus développé. La forme particulière de cet organe semblerait annoncer une grande puissance du sens olfactif; rien cependant ne le prouve dans ce qu'on sait des habitudes de cette espèce. La tète est ronde, couverte, au sommet et sur toutes les parties postérieures, d'un poil touffu assez court et d'un brun-marron clair ou roux ferrugineux. Le front est court ; les yeux assez grands et assez éloignés l'un de l'autre et sans sourcils, mais la paupière supérieure a des cils assez longs, tandis qu'on n'en observe pas à la paupière inférieure. 70 HISTOIRE NATURELLE. La face entière est dénuée de poils comme le nez; elle est d'un brun mêlé de bleu et de rougeâlre. I^a bouche est grande et garnie de fortes dents canines et de quatre incisives à chaque mâchoire. Le dessous du menton présente de longs poils d'un roux clair, dirigés en avant, courbés et à convexité inférieure. Les oreilles, cachées dans le poil, sont nues, minces, larges, de couleur noirâtre et de forme ar- rondie, avec une échancrure assez sensible à leur bord. Le cou parait court et forme une sorte de goitre, à cause du grand développement du sac la- ryngien. Le corps est gros et couvert d'un poil d'un brun-marron plus ou moins foncé sur le dos et sur les lianes, orangé sur la poitrine, et d'un fauve mêlé de grisâtre sur le ventre, la région lombaire, les cuisses et les bras, tant au dedans qu'au dehors. Fig. 57, — Nasiqiic linliau. 11 y a autour du cou et sur les épaules des poils bien plus longs que ceux du corps, et qui for- ment une espèce de camail dont la couleur contraste avec celle de la peau nue de la face. La queue est très-longue et garnie de poils fauves assez courts. Les mains et les pieds, nus à l'intérieur et d'un gris ardoisé, sont à l'extérieur couverts de poils courts et d'un fauve clair mêlé de gris. Cinq doigts aux pieds et aux mains; les ongles noirs, ceux des pouces aplatis, les autres convexes. (Description de Bidfon, à laquelle il y a eu peu à ajouter.) QUADRUMANES. 71 Ces singes sont frugivores, quoique d'un naturel féroce. Attaqués, ils se défendent avec beaucoup de courage. Des Cocliincliinois, dit LatreiUe, qui sont venus visiter les collections du Muséum d'histoire na- turelle, ont parfaitement reconnu ce singe, et ils ont dit qu'il est très-commun dans leur pays, où on le nomme tlie doe, c'est-;\-dirc grand singe. D'après les habitants de Bornéo, les nasiques ou kahaus, auxquels ils accordent beaucoup d'intel- ligence, seraient les descendants d'un peuple de pygmées qui, pour se soustraire à toute domina- tion, se seraient depuis longtemps retirés dans les forêts marécageuses où toute poursuite est im- possible. Wurmbs, qui a tuè un de ces animaux, dit qu'ils vivent en troupes nombreuses ; leur cri, qui est fort grave, fait entendre distinctement le mot kahau. Les naturels de Pontiana donnent à ce singe le nom de bantanjan, à cause de la forme de son nez. Ces singes se rassemblent le matin et le soir, au lever et au coucher du soleil, sur les bords des rivières ; on les voit sur les branches des grands arbres, où ils offrent un spectacle singulier en s' élançant avec une grande rapidité d'un arbre à l'au- tre à la distance de quinze ou vingt pieds. Je n'ai pas remarqué qu'ils tiennent, comme on le dit, leur nez en sautant; mais j'ai vu qu'ils étendent alors exiraordinaireraent leurs quatre pattes. Leur nourriture est inconnue, ce qui fait qu'il est impossible de les conserver en vie. Il y en a de diffé- rentes grandeurs, on en voit même qui n'ont qu'un pied de haut, et qui cependant ont déjà des petits. Vu par le haut, le nez de ce singe ressemble à la langue d'un homme, avec une raie au milieu. Les narines sont oblongues ; il peut enfler et étendre son nez au point que chaque narine offre un bon pouce d'ouverture. L'estomac est extraordinairement grand, et d'une forme irrégulière; et il y a sous la peau un sac qui s'étend depuis la mâchoire inférieure jusqu'aux clavicules. Ce genre ne comprend qu'une seule espèce, le nasique kahau. MM. Vigors et Horsfield ont pro- posé d'établir une nouvelle espèce sous le nom de nasalis recurviis, d'après une jeune femelle dont le nez est retroussé. (Zool. Journ., p. 109, t. IV.) Ce n'est sans doute qu'une variété accidentelle. Les naturalistes ont classé le nasique avec les cercopithèques d'abord, puis avec les semnopi- thèques, jusqu'au moment où Geoffroy Saint-Hilaire en a fait le type d'un genre. Les nasiques se rapprochent des semnopithèques par la brièveté des pouces des mains et les on- gles aplatis de ces doigts; mais ils en différent par des formes plus robustes, un sac laryngien dila- table, leur ventre gros et renflé, et leur région lombaire large et solidement établie. 1. NASIQUE KAHAU. NASALIS LARVATVS. (GeonVoy Saint-Hilaire. Car.\ctères spécifiques. — Pelage fauve passant au roux clair sur la poitrine, le cou et les bras; dos et dessus de la tête roux. Habite Bornéo (environs de Pontiana) et la Cochinchine. Taille l'",10. Le nom de kahau, avons-nous déjà dit, a été donné au nasique, parce qu'il représente à peu près son cri. « Les formes du kahau sont lourdes et trapues, et les membres sont proportionnés au corps ; le ventre, au lieu d'être peu apparent et rentré comme chez les semnopithèques, est très-gros et renflé. Le pelage en entier est, soit sur le corps, soit en dessous, également épais et également serré, les poils qui le composent sont courts, rudes, et ne s'allongent que sur les joues, où ils forment de larges favoris qui se déjettent en arriére, cachent en partie les oreilles, et se terminent sous le menton en une barbe rebroussée en avant ; les oreilles sont nues ainsi que la face, qui est saillante et colorée en noir vif; les yeux sont médiocres et la bouche fendue. La couleur générale du pelage du kahau est un roux ferrugineux à teintes beaucoup plus vives sur le dos, la tête, le ventre, les épaules et les bras. La paume des mains et la plante des pieds sont, 72 FllSTOIRE NATURELLE. ainsi que la fare, d'un unir profond; les doiyls des mains et des pieds, longs et très-fendus, sont velus jusqu'à la racine des ongles; les poils de la queue sont courts, serrés, de couleur rousse, et ne forment point de touffe à son sommet. » L'espèce établie par les Anglais sur un jeune individu, et dont nous avons déjà parlé, présente les caractères suivants, qui peuvent tous être rapportés à des différences d'âge : nez court et retroussé, tête, cou, épaules, cuisses de couleur rousse, milieu de la région dorsale d'un rouge grisâtre, par- ties internes des bras et des cuisses, croupion et dessus de la queue gris, dessous de la queue blan- châtre. Taille 0"',66. Habite Bornéo. On doit supposer avec d'autant plus de raison que cette description ne se rapporte qu'à un indi- vidu jeune de l'espèce, que cette différence de coloration du pelage se fait remarquer dans la plu- part des singes, et que le caractère tiré de la disposition du nez est bien peu certain, si l'on admet que les cartilages du nez sont exposés à de nombreuses variations de forme, sans parler même des variations accidentelles très-possibles. Fig. 58. — Nasique jeune. QUADRUMANES. î""- GENRE. - SEMNOPITIIÈQUE. SEMXOPITIIECI'S fFrcil. C.nvicr.) S^av',;, vi'iiêralilt' ; ~iOr.;, singe (Singes vûnérés ilaiis l'Inde.) caiiactéhes (jénérioues. iMiiscnii Ircs-coiirt ; »(•;•(( j)ciiic .sdilliiiit. Pohil d'itimjoucs, ou seulement des (dnijOUCK rudimcnla'ircs ou simulées par un ir/j/i de hi peau. Membres longs; corps grêle et très-allongé. Mains antérieures étroites et très-longues ; pouces antérieurs e.rircnirnieni courts et reculés. Queue Irès-loniiue. (linq tulicrcules h la dernière inoluire inférieure. Estomac à parois bour.ioullées comme celles du gros intestin, et formant trois poches distinctes. Ongles des pouces aplatis, les autres irè-t-conrcres. Des callosités aii.v fesses. Poils abondants et ordinairement longs. Les seninopitlH'([ues vivent j;t'iiéi';iU'meiit en troupes plus ou iiKilns nombreuses dans les forêts d'une partie de l'aneieii continent, dans l'Inde et l'aieiiipel indien. Fi^. ïiO. — Télé (lu femnopillièque doue. Fi^'. 00. — Tèlc lie .«enino|iiUir'i|cip. Frédéric Cuvier a séparé les seninopithèques des cercopithèques ou guenons, à cause de l'existence d'un talon tuberculeux à la dernière dent molaire de la mâchoire inférieure, caractère que ne pré- sentent pas les guenons. Cette différence, qui pourrait paraître légère à ceux qui ne connaissent pas toute la valeur des modifications du système dentaire, est cependant importante, car elle fait supposer un régime et des mœurs différents. Ainsi, la présence de ce cinquième tubercule à une dent correspond, comme on a pu le vérifier depuis, à une disposition particulière de l'estomac. Cet organe, dans les guenons, ne présente rien de particulier, tandis que, dans les semnopilhè(|ues, il acquiert des dimensions considérables, et ses parois boursouflées forment trois poches assez bien .séparées, savoir : 1° une poche cardiaque ou supérieure, dont les parois sont unies et simples ; 2" une 10 7i IIISTOIHl-: iNATUUELLE. poche moycniio Irès-large et boursoiil ce ; T." mie poclie pylorique ou inférieure, étroite, allonc^ée, tubifonne, boursouflée vers sou oi'iyine et lisse vers sa terminaison. D'après la grauile vascularilé de cette dernière partie et d'après le mode de distribution du nerf pueuniOi;astrique, M. Owen con- sidère cette poche p\lori([ue comme la véritable cavité di,nestive, tandis que les poches précédentes ne seraient que des réceptacles analogues à la panse des ruminants, quoique les divisions soient loin d'être aussi tranchées. Celte disposiliou anatomique permet d'accumuler dans l'estomac une grande quanlilé d'aliments peu nutritifs, sans qu'il y ait surcharge. Aux caractères énoncés, ajoutons que la branche montante de la màclioiie a une hanleur, un élargissement, surtout dans la partie angulaire, qui rappellent sa proportion dans les hurleurs d'A- mérique. Aussi, la plupart des semnopithèques ont-ils une poche gutturale communiquant avec le larynx à la manière de ces hurleurs. Chez les senuiopilhèqnes, on remarque une forte courbure des phalanges des quatre mains; cette courbure est aussi grande que dans les orangs et les gibbons. En outre, toutes les phalanges, les os du métacarpe et du métatarse, ont le même excès de longueur que les membres qu'ils termi- nent. Enfin, le pouce de devant y est un quart plus court que dans les guenons, raccourcissement (pii contraste avec la disjiroportion des autres doigts, et qui complète ce rapport déjà indiqué pai- les auteurs avec les atèles Le doue est peut-être le seul semnopithèque qui ait six vertèbres lombaires ; les autres en ont cinq ou sept. Tous les semnopithèques ont les incisives supérieures et inférieures de grandeur uniforme, et toutes à proportion beaucoup plus petites que les guenons. Les semno|iithèques ont la face aplatie et nue, le nez très-peu saillant, des sourcils épais et diri- gés en avant, ce qui est dû à un renflement assez remarquable des crêtes sourcilières; leur pelage est généralement teint de vives couleurs, et les distingue éminemment sous ce rapport. Avec leurs membres allongés, souples et agiles, on peut dire que les semnopithèques vivent dans lesfoi'éts; qu'ils trouvent dans les arbres un refuge sûr et commode, et que de branche en branche ils s'élancent dans ce milieu, pour lequel leur organisation est appropriée. Leurs longs bras eu ba- lancier atteignent aisément les rameaux, que leurs pieds saisissent aussi avec la plus grande faci- lité; ils s'y accrochent ou s'en servent comme d'échelons, tandis que sur le sol leurs mouvements deviennent gênés et gauches. On dit ces singes déliants, soucieux, très-attachés à leur liberté et peu susceptibles de se familia- riser avec l'état de captivité, à moins qu'ils ne soient très-jeunes. Leur humeur est irascible et leur caractère sauvage. Vieux, ils sont intraitables et très-méchants. Les semnopithèques se trouvent exclusivement en Asie et principalement dans les grandes îles de 1,1 Malaisie ; ils se réunissent en troupes nombreuses que redonleut les hahilants par le maraudage dévastateur qui les suit, et eepndani ils sont vénérés sur le conlinent indieu par les sedateuis de Brama; le semnopithèque entelle surtout y jouit du privilège de ne jamais être trouble lorsqu'il cueille leurs fruits, pille leurs jardins : et mille fois heureux l'Indien auquel une telle visite annonce la protection des dieux! (Lessox.) On connaît un assez grand nombre d'espèces dont nous allons donner la description. 1. StîMNOPlTHÈQUK DOUC. SEMNOPITIIECVS NEM^US. (Frù.l. Ctivicr.) Caractères spécifiques. — Pelage gris, tiqueté de noir; face d'un jaune mal, avec le front noir; épaules, cuisses, doigts et partie des mains la plus voisine des doigts, noirs; jambes et tarses d'un roux vif; avant-bras, gorge, bas des lombes, fesses et queue d'un blanc pur; gorge blanche entou- rée d'un cercle plus ou moins complet de poils d'un noix vif. Taille, 0"'.70. Habite la Ciichinchini' (et la jiresqu'ile de Malacca'?). Le dtiue est le plus richement peint de tous les singes ; il est surtout remarquable par la diversité QUADRUMANES. 75 de son pelaiçe. Bien proporlionné, ses meiiibros sont assez robustes. Sa tète est arrondie, ses oreilles nues et de moyenne dimension. Ses bras ne descendent que jusqu'à la partie supérieure des cuisses, malgré l'allongement des doigts des mains contrastant avec le peu de développement du pouce. La queue est arrondie, longue, grêle et blanche. Les joues sont couvertes de longs poils blancs dirigés en dehors et en arrière et d'un blanc rciussàtre. Les épaules sont noires, ainsi (jne les cuisses, tandis que les jambes sont d"un marron très-vif. Les poils de l'avant-bras sont diriges vers le poignet. Les paumes et les plantes, le tour des yeux et la muqueuse des lèvres, sont noirs. Le poil, serré sur le corps, est peu fourni sur le ventre, et il ne varie ni avec l'âge ni avec le sexe. Ce semnopithèque habite la Cochinchine, et le nom de doue, qui lui a été conservé, est celui qu'on lui donne dans le pays. Fig. 61. — Seinnopitliéque doue. 7{) IlISTOIRK NATLÎIŒLLE. t>. SEMMJl'ITliÈOUl': ENTKLLE. SEM.WPITIIECUS liMELLCi: (Firil. Cuvicr.) (FI. 1t>.) Cvractèhes si'ÉciFiQoiîs. — Pelage d'un l)Ianc jaunâtre; le dos, les membres et presque toute la queue d'une nuance plus foncée que le reste du corps; les quatre mains noires. Taille 0'",28, Habite le Bengale et la péninsule indienne en deçà du Gange. L'entelle, nommé wanderoo et lioulnian dans l'Inde, a la face et les mains d'un noir violet con- trastant avec le blancliâtre obscur et presque Isabelle du reste du corps. Les poils qui entourent la face forment un toupet plat au-dessus des sourcils, et sous le menton une barbe dirigée en avant. Sous le corps et sur les parties internes des mendjres, le poil est presque blanc; la couleur de la peau même est bleuâtre au dos, mais violàlre au visage, à la tète, à la gorge, aux callosités, aux membres et au-dessus des mains; elle est blanche aux membres. Malgré sa lenteur, la longueur des bras donne à ce singe une étendue, une portée d'élan supé- rieure à celle des autres singes du Bengale. Aussi, dans les langues de l'Inde, son nom exprime-t-il celte facnllé particulière de mouvement. (Besîioui.ims.) Celte belle espèce, dit Frédéric (Juvier, avait été vue souvent sans doute par les voyageurs, car c'est l'espèce de quadrumanes qui paraît être la p'us commune en Bengale; et c'est indubitablement à cette circonstance qu'il faut attribuer l'ignorance où nous étions restés à son égard. Ceux qui voyaient ces singes abondamment répandus dans celte partie des Indes, qui en trouvaient les forêts rem|ilics, les pagodes couvertes, pensant qu'ils avaient dû être transportés en Europe en plus grand nombre qu'aucune autre espèce, les repoussaient comme des animaux sans inlérél, et trop communs pour exciter aucune curiosité. C'est, au reste, et il est bon de le dire, ce qui arrive ordinairement. Ce ne sont pas les productions les plus communes des pays étrangers dont les cabinets sont le mieux fournis; et le voyageur qui s'attachera à les recueillir, surtout lors([ue les contiées où il se trouvera ne seront pas anciennement connues, sera sûr de rapporter prescpie autant tl'objets nouveaux que s'il ne réunissait que ceux qui sont plus difliciles à obtenir à cause de leur rareté, et surtout plus généralement recherchés à cause de leur éclat. L'entelle méritait cependant une attention toute particulière ; ce n'était point seulement une es- pèce distincte des autres, comme plusieurs le sont, par les teintes de quel([ues-unes de ses parties ou par les dimensions de quelques-uns de ses organes; tout en lui sendde annoncer un type nou- veau : sa physionomie générale, les proportions de ses membres, ses dispositions intellectuelles; car, avec tous les caractères génériques (Jes guenons, il n'a point l'extérieur de ces singes : au lieu de ces membres vigoureux dans leurs proportions, et qui annoncent autant d'agilité que de force ; au lieu de cette pétidance dans les mouvements, de cette vivacité dans le regard, de cette mobilité dans les traits du visage, l'entelle a des membres d'une longueur démesurée et en apparence très- gréles, des mouvements lents, un œil et une physionomie dont rien ne semble pouvoir altérer lo calme. Sans sa longue queue, on aurait pu le prendre pour une espèce de gibbon; en effet, c'est sous ce nom qu'il nous avait été annoncé, ses rapports avec les autres quadrumanes ayant été éta- blis d'ajirts son ('aractère moral plutôt que d'après ses caractères pliysi([ues. Il semblerait être pour les guenons ce que les atèles sont pour les sapajous. Cet animal nous avait été donné par M. liressand, qui l'avait lui-même rapporté de Bengale; il était très-affaibli des fatigues du voyage, et, quoiqu'il se fût assez bien rétabli, nous n'avons pu le conserver que pendant six mois : il mourut, et la cause de sa mort fut la maladie qui, dans nos cli- mats, enlève la plupart des animaux des zones torrides. Cet entelle frappait au premier regard par le contraste de la couleur noire de son visage et de ses mains avec celle du reste de son corps, entièrement recouvert d'un pelage blanchàlre, et par la direction des poils qui entouraient sa face et qui lui formaient au-dessus des sourcils une sorte de toupet saillant, et, sous la mâchoire inférieure, une barbe qui, au lieu d'être pendante, se dirigeait en avant dans le sens de la mâcliùire. Ses membres, ses dents, ses sens et ses organes génitaux avaient Semnopithèriue entelle. I>1. 12. (jLiADIUIMANES. 77 la plus grande ressemblance avec ceux des guenons ; et jusqu'à présent je n'ai pas lieu de penser cpie cet animal puisse présenter sous ce rapport d'autres ditïérences avec ces singes que celles qui se reneonirent même entre leurs diverses espèces : la conque externe de ses oreilles était assez grande, et circonscrite par des lignes di'oiles philùt qu'arrondies; ses narines étaient plus écartées l'une de l'aulrc inl'érieurcment, ses màciiuires étaient moins épaisses, et il est douteux qu'il eût des abajoues. Lu teinte du pelage variait du blanc grisâtre au blanc-roux. Le long du dos, et principa- lement sur les lombes, le poil est roussàlre; en descendant sur les côtes il pâlit, et devient presque entièrement blaiu: sous le ventre et à la lace interne des membres. Les poils qui couvrent les bras sont gris près des épaules, et ils deviennent de pins en plus foncés en avançant vers la main, où ils sont presque noirs; et il en est à peu près de même des membres postérieurs, seulement le derrière des cuisses est de la teinte du dos; la queue est aussi d'un gris roussàtrc. La peau du visage, de la tête, de la gorge, des membres et du dessus des mains est d'un noir violet; celle du dos est d'un bleuâtre beaucoup plus pâle ; celle du ventre est blanche; celle de la queue, de l'intérieur des mains, des oreilles et des callosités est tout à fait noire. Le cercle de l'iris est brun-roux, et la pupille noire. Tout le pelage ne se compose que de poils soyeux qui sont généralement rares, mais surtout aux ])arlies inférieures : ils ont assez de longueur, et, quoique doux au toucher, ils ne sont pas très- lisses. Pendant la jeunesse, et surtout l'enfance, l'entelle a le museau très-peu saillant; son front est assez large et presque sur la même ligne que les autres parties de sa face ; le ciâne est élevé, ar- rondi, et renferme un cerveau qui a la même étendue que lui. A ces traits organiques, se joignent des qualités intellectuelles très-étendues; une étonnante péné- Iralion pour concevoir ce qui peut leur être agréable ou nuisible, d'où naît une grande facilité à s'ap- privoiser par les bons traitements, et un penchant invincible â employer la ruse pour se procurer ce qu'ils ne pourraient obtenir par la force, ou pour échapper à des dangers qu'ils ne parviendraient pas à surmonter autrement. Au contraire, l'entelle très-adulte n'a plus de front; son museau a acquis une proéminence consi- dérable; et la convexité de son crâne ne nous présente plus que l'arc d'un grand cercle, tant la ca- pacité cérébrale a diminué. Aussi ne trouve-t-on plus en lui les qualités si remarquables qu'il nous offrait auparavant. L'apathie a remplacé la vivacité et la pénétration ; le besoin de la solitude a succédé à la confiance, et la force supplée â l'agilité et â l'adresse. Ces différences sont si grandes, que, dans l'habitude vi- cieuse où nous sommes de juger des actions des animaux par les nôtres, nous pi'endrions le jeune entelle pour un nidividu de l'âge où les développements les plus tardifs sont atteints, où toutes les perfections morales de l'espèce sont acquises, et où les forces physiques commencent â s'affaiblir, et l'entelle adulte, pour un individu qui n'aurait encore que ses forces physiques, et qui n'obtiendrait que plus tard celles qui sont destinées â les diriger. Mais la nature n'agit point ainsi avec les ani- maux qui ne doivent point sortir tle la sphère étroite où ils sont destinés à exercer leur influence. Pour cela, il suffit, en quelque sorte, qu'ils puissent veiller à leur conservation. Or, dans ce but, l'in- telligence était nécessaire quand la force n'existait point encore : dès que celle-ci est acquise, toute autre puissance perd de son utilité; et, en effet , c'est ce que nous montrent encore tous les singes : tant qu'ils sont jeunes, ils rivalisent presque avec l'honmie de pénétration et d'adresse, et, dès que leurs forces musculaires se développent, ils deviennent sauvages et féroces; en esclavage même, plutôt que de solliciter du geste et de la voix, ils exigent en menaçant, et, au lieu de la liberté tur- bulente, mais sans danger, dont on pouvait les laisser jouir, il faut les charger de chaînes pour évi- ter qu'ils ne se livrent â toutes sortes de méchanceiès. tt ces faits n'ont pour cause ni la gêne, ni lien de ce qui se trouve de violent dans la situation de ces animaux renfermés dans nos ménageries. Les mêmes observations ont eu lieu de la part de tous ceux qui ont pu étudier les singes dans les contrées où ils jouissent de plus de liberté. Les entellcs devraient, à cet égard, présenter des obser- vations curieuses dans les contrées d'où ils sont originaires, c'est-à-dire parmi ces Indiens, qui, croyant à la métempsycose, les traitent avec tous les égards qu'ils auraient pour leurs amis, leurs jiarents ou leurs chefs. « Les Indous bramas ont, comme on sait, un respect religieux pour la vie de tous les animaux ; il en est cependant quelques-uns pour lesquels ils ont plus de vénération que pour les autres, et les 78 HISTOIRE NATURELLE. semnopitlièques sont de ce nombre; ils se laissent dépouiller par eux, se glorifient même des ravages qu'ils causent dans leurs cultures ; et ces animaux sont tellement habitués à ne suivre que leurs pen- chants au milieu de cette population dégradée, qu'ils semblent y commander en maîtres : ils vien- nent jusque dans l'intérieur des habitations s'emparer des repas, et même arracher des mains les aliments qui leur conviennent. Après de tels exemples, on doit concevoir qu'on puisse ne jamais dés- espérer de faire prévaloir les préjugés sur la raison, et de rendre la soumission plus douce que l'in- dépendance. )l (FllÉDÉr.IC CuviER.) Voici ce que M. Duvaucel écrivait sur ces animaux : « Cette. espèce est très-respectée par les Indous, qui l'ont déifiée et qui lui donnent même une des premières places parmi leurs trente millions de divinités.... Son apparition dans le bas Bengale a lieu principalement vers la lin de l'hiver. Mais je n'ai pu d'abord m'en procurer; car, quelque zèle que j'aie mis dans mes recherches et mes poursuites, elles sont toujours restées infructueuses à cause (les soins empressés qu'ont mis les Bengalis à m'empécher de tuer une bête si respectable, qu'on doit nécessairement mouiir dans l'année qui suit son décès. Les Indous chassaient le singe aussitôt qu'ils voyaient mon fusil; et, pendant plus d'un mois qu'ont séjourné, à Chandernagor, sept ou huit individus qui venaient jusque dans les maisons saisir les offrandes des lils de Biama, mon jardin s'est trouvé entouré d'une garde de pieux brames qui jouaient du tam-tam pour écarter le dieu quand il venait manger mes fruits. Ce que je sais de mieux sur cette espèce, c'est son histoire mythologique; mais il serait trop long delà rapporter ici. Je dirai seulement que lehoulman, par sa force, son es- prit et son agilité, est un héros célèbre dans le recueil volumineux des J/f/.v/cîr.s du peuple iiuloti. On lui doit ici l'un des fruits les plus estimés, la mangue, qu'il vola dans les jardins d'un fameux géant établi à Ceyian. C'est en punition de ce vol qu'il fut condamné au feu, et c'est en éteignant ce feu qu'il se brûla le visage et les mains, restés noirs depuis ce temps, etc.... Je suis entré à Goupti- para (lieux saints, sur l'Ilougly, et habités par des brames et couverts de pagodes, dans l'une des- ((uelles on conserve la chevelure de la déesse Dourga), à peu près comme Pythagore à Benarès , lui pour chercher des hommes, moi pour trouver des bêtes, ce qui est généralement plus facile. J'ai vu les arbres couverts de houlmans, qui se sont mis à fuir en poussant des cris affreux. Les Indous, en voyant mon fusil, ont deviné, aussi bien que les singes, le sujet de ma visite, et douze d'entre eux sont venus au-devant de moi pour ni'apprendre le danger que je courais en tirant sur des animaux qui n'étaient rien moins que des princes métamorphosés; j'avais bien envie de ne point écouter ces charitables avocats; cependant, à moitié convaincu, j'allais passer outre, lorsque je rencontrai, sur ma route, une princesse si séduisante, que je ne pus résister au désir de la considérer de plus près. Je lui lâchai un coup de fusil, et je fus alors témoin d'un trait vraiment touchant : la pauvre bêle, qui portait un jeune singe sur son dos, fut atteinte près du cœur; elle se sentit mortellement blessée, et, réunissant toutes ses forces, elle saisit son petit, l'accrocha à une branche, et tomba morte à mes pieds. Un trait si maternel m'a fait plus d'impression que tous les discours des brames, et le plaisir d'avoir un bel animal n'a pu l'emporter, cette fois, sur le regret d'avoir tué un être qui sem- blait tenii' à la vie par ce qu'il y a de plus respectable, etc. » (Février 1825.) ■ 3. SEMNOPlTilÈQUE UE DUSSUMIER. SEMyoPITIIECUS DVSSUMIERI. (Isid. Geoffroy S^inl-llilaire.) [V\. 11.) G.\R.\CTÈRES SPÉCIFIQUES. — l'clagc (l'un bruu grisâtre sur le corps et fauve sur la tête , le cou, les flancs et le dessous du corps ; queue et membres d'un brun qui passe au noir sur une grande partie de la queue, les avant-bras et les quatre mains; pdils divergents sur la tête. Habile l'Inde continentale. La tète est couverte de pdils fauves en dessus, en dessous et sur les côtés; celte même couleur s'étend sur la nuque et le cou, et forme à l'animal une sorte de capuchon (ilus clair que la couleur StMiinopithèque ilo nii-isiiniior V\ II. OUADRUMANRS 79 génér:ili> tlii pelayc. Cetti! iiièiiU' couleur iauvc ocruiu' 1:\ iiiirtic iiifriiouio ilu curps, la t'aie externe (les liras, le lias des fesses et les flancs. I.e reste du pelai;e est de couleur jilus t'uucée. I.a partie supérieure du corps est d'un brun i;risâ- Ire. Les membres sont de cette même couleur dans la portion la pins rapprochée du tronc; mais d'un brun plus foncé sur les épaules, les bras, et sur la plus yraude partie des membres postérieurs. Enlin les avant-bras et les quatre mains sont noirs. La ([lieue présente une disposition de couleur inverse de celle des mendjres ; elle est noire dans ses deux ]ireniiers tiers ; dans le dernier tiers, le [mil passe au brun, puis à un brun yrisàtre, semblable à celui du dos. La face est noire et encadrée de poils noirs. En effet, outre des sourcils noirs, il existe, sur les parties latérales, des soies noires dirigées en arrière. De telles soies se voient aussi sur les deux lèvres et sur la face interne des oreilles. La disposition générale et la direction des poils ne présentent rien de remarquable, si ce n'est à la tête. Ceux du dessus de la tète sont divergents à partir d'un point central, situé sur la ligne mé- diane, à quelque distance de la partie antérieure du front : à partir de ce point, les poils antérieurs se dirigent en avant , les postéiieurs en arriére et les latéraux de côté. Les poils de la joue et ceux du dessus de la tète sont assez longs; mais il n'existe ni huppe, ni bouquet de poils divergents sur les joues, ainsi que cela se voit chez plusieurs autres semnopithèques. Au contraire, un bouquet de poils fauves se voit sous le menton, et offre la disposition que l'on remarque chez la guenon Diane. L'individu qui a servi de type à cette description est une femelle adulte. M. Dussumier a rapporté, avec elle, un jeune individu qu'elle allaitait lorsqu'on l'a tuée. Ce jeune sujet, dont la taille est seu- lement de trente centimètres, non compris la queue, est généralement noirâtre, la tète étant seule- ment un peu plus claire que le corps. Les seules parties qui ne soient pas de cette couleur sont la poitrine et la gorge, sur lesquelles on ne voit qu'un petit nombre de poils fauves, et le menton, sous lequel le bouquet de poils fauves, décrit chez l'adulte, est déjà bien caractérisé. Cette espèce, con- trairement à ce (pii a lieu chez ses congénères, passe donc, avec l'âge, d'une couleur foncée à une couleur plus claire, sur plusieurs parties du corps. (Isidore Geoffroy Salm-11il.\ire.j SEMXOI'ITUKOUD: AU.\ mains noires. SEMyOPITHECUS MGItlMAXrS. (Isiil. Gcoflioy S,iinl-Ilil,iire.) Caractères spécifiques. — De longs poils sur la tète, disposés en une crête ou huppe médiane, comprimée. Partie supérieure, face externe des bras et des avant-bras, jambes d'un cendré légère- ment brunâtre; parties inférieures, face interne des bras, des avant-bras, des cuisses et la plus grande partie de la face externe de ces dernières blanches; les quatre mains et presque toute la queue noires. Habite Java. La description sommaire qui précède donne une idée exacte de la plupart des caractères de cette espèce, et il me suflira d'ins ster ici sur quelques points, notamment sur la coloration des fesses, des cuisses et de l'origine de la queue, et sur celle de la tête. La couleur générale du pelage cendré brunâtre se prolonge supérieurement, non-seulement jus- qu'à la queue, mais jusque sur la base de celle-ci : mais le cendré brunâtre passe bientôt au brun sur la queue, puis au brun noirâtre, puis au noir. Les poils de l'extrémité sont plus longs que les autres, sans former toutefois ni une véritable touffe ni un pinceau. Le haut des fesses est, comme la région medio-dorsale, d'un cendré brunâtre; mais le bas et le dedans des fesses sont blancs, ainsi que la partie postérieure et externe et tout le dedans des cuisses : au contraire, le cendré brunâtre repaiait sur la partie antérieure et externe de celles-ci. Quant à la tête, elle est, chez notre individu adulte, blanche ou d'un blanc giisàtre sur les joues, la gorge, les lèvres; noirâtre entre les yeux et les oreilles; d'un cendré brun au-ilessus et en avant des oreilles et sur la huppe. Les longs 80 Ill^îTniRE N\TUnE],LE. poils qui composent ccUps-ei sont pour la plupart cendrés à leur base, et bruns dans leur seconde moitié. La face, autant qu'on en peut juger sur un sujet mort et préparé, est noirfttre autour des yeux, el partout ailleurs beaniou]) plus claire, vraisemblablement de couleur de chair ou de tan. Le pelage est généralement laineux, oiidnlenx el médiocrement long : on remarque cependant de longs poils, outre ceux de la luippe, a la partie postérieure des joues. Ceux-ci, diriges en arrière, sont blancs. Fig. C2. — Scmnopilliùquc auv inniiis noires. La taille est la même que cbez la plupart des semnopithèques ; un peu plus d'un demi-mètre du bout du museau à l'origine de la queue, qui est un ])eu plus longue que le corps et la tête pris en- semble. Un trés-jeune individu, que j'ai exaiuiné, n'a guère que la moitié de cette longueur; néanmoins il ressemble déjà beaucoup à l'adulte, et a de même les fesses en partie blanches; mais les parties qui doivent devenir noires ne sont encore que brunes ou noirâtres, et le front est d'un gris noirâtre, les poils étant d'abord blanchâtres, puis noirs dans leur ]iortion terminale. (Isid. Geoffroy S.^imt- illLAlRE.) 5. SEMNOPITHÈQUE AUX MAINS JAUiNES. SEMXOPITIIECUS FLAVIMAKVS. (Isid. Gcoflroy Saint-llilaire.) CMiACTÈRES SPÉCIFIQUES. — Uoc liuppc Comprimée sur le haut de la tète et â l'occiput; cette huppi', composée de poils gris en arriére, de poils noirâtres en avant. Côtés de la télé variant du fauve clair au roux doré; parties supérieures du corps d'un brun roussâlre; parties inférieures blan- OUADRUMANES. 81 (lies; qiiinie d'un roux brunâtre en dessus, blanchâtre en dessous, et rousse à l'extrémité; membres d'un roux clair en dehors, blancs en dedans; maius d'un jaune roussàtre. Habite Sumatra et Java. Par la disposition des poils de la tète, cette espèce se rapproche beaucoup des semnopilhèques cimepaye et croo; mais ses couleurs la caractérisent très-bien. Le dessus du corps est couvert de poils d'un roux clair et de poils noirs mêlés ensemble, d'où résulte une teinte générale d'un roux noirâtre, dont il est difficile, sans le secours de la couleur, de Fig. G3. — Semnopitlièquc aux mains jaunes. donner une idée exacte. Les poils noirs sont beaucoup moins abondants .sur les côtés, et, par con- séquent, la teinte rousse y est beaucoup plus pure que sur le dos. La face interne des bras est de la couleur du dessus du corps. Elle présente aussi deux sortes de poils. Il en est de même de la face supérieure de la queue qui, au contraire, à sa face inférieure, est blanche dans son premier quart, puis rousse. Son extrémité est d'un roux pur en dessus comme en dessous. La région externe des membres postérieurs, celle des avant-bras, et les mains, sont d'un beau fauve doré irés-foncé, tirant au roux sur les cuisses et les avant-bras, et très-éclairci sur les doigts. La région interne des membres, le dessous du corps et de la tête, et de très-longs poils qui y ac- croissent la face posléi'ieure des joues, sont blancs. C'est surtout ce princip.il caractère qui dislin- gue au premier aspect le semnopithèque aux mains jaunes du semnopitlièquc ciniepaye. Le front et les côtés de la tète, jusqu'aux oreilles, sont couverts de poils de longueur ordinaire. s-1 HISTOIRE NATllHELLE. (l'un Ik'îiii fauve doi'é liianl sur le roux, r^es pdils du iiiilkni tk' la U-li' cl de la imquc sont au con- Iraire li'ès-longs, cl formcnl une sorte de luippe comprimée; disposilion que l'on relrouvf^ chez les seninupiiliéques cimepayc et croo; mais, tandis que, dans ces deux espèces, la luippe est noire, elle est d'un blanc sale chez le semnopilhè(]Me aux mains jaunes, à l'exception de la partie la plus anté- rieure, qui est noirâtre. I>a face, autant (pi'il est possiiile d'eu juger par des pelleteries préparées, est noirâtre; mais les paupières sont hlanelies. Ia'S ongles sont brunâtres. Les proportions de cette espèce sont en général celles du semnopithèqiu' ciniepaye; seulement la queue est un peu plus longue. (Isin CKOFFnov SAiiNT-IIiL.MCF.) 6. SliJINOriTllÈQUtC A CArUGIION. SEMXOl'ITlinCVS CICVI.LATVS. (Isid. Geoffroy S:iiiit-lliloii-e 1 Caractîîres spécifiques. — Corps brun; queue et membres noirs; tête d'un brun fauve; pdils de la léle couchés et dirigés en arriére à partir du front; queue très-longue. Habite l'Inde continentale, et particulièrement les montagnes des Gates et Bombay. M. Isidore Geoffroy Sainl-IIilaire a donné â celte espèce le nom de cuciillntii.'! pour rappeler une disposition des couleurs qui est caractéristique pour elle. Le dessus et les cotés de la tète, ainsi que la gorge, sont d'un brun fauve, qui, par sa teinte très-claire, tranche, d'une manière remanpiable. ,ivec le reste du pelage, qui est brun sur les flancs, les lombes et les fesses; noirâtre sur la ligne médiane du dos et sur les cuisses, les jambes et les bras; enfin, d'un noir pur sur les avant-bras, les quatre mains et la ipieue. Le dessous du corps, et la face interne des lu'as et des cuisses, sont couverts de poils noirâtres peu abondants; la gorge l'est de poils d'un brun fauve et très clairsemés. Fig. 04. — ScninoiiiUiùciuc à c.i|iuilion (ila|iiùs Merlin). OlIAIMU'MAiSKS. ><7^ Les ongli's soiil nuir.s; la faci', t'ii yiaiulc partie nue, loiiiine chez les aulies seiiiiiupillièques, esi entourée, [iresciiie eiitiéi'enu'iit, (l'un cercle de soies noires, l'oides et assez loiiyiics. Ces soies sont, sur les côtés de la face, peu noiiilireuses, et dirii^ées en dclinrs; elles sont, au contraire, sur le front, trés-aboiidantes, et dirigées plus ou moins régulièienicnl en haut. Cette disposition se trouve éga- lement chez (|uelques autres sennioi)itlié(iues, principalement chez l'cntelle. Les oreilles sont revê- tues de poils noirs, assez roides, ([ui tranchent, |Kir leur couleur, au milieu des poils brun fauve du reste de la tète. l'ig. 05. — ScniiKi|iitliL'i|iie à c:\|niclion. Les poils du corps sont généralement moelleux et assez longs (ils ont de six à onze centinlétre^^j; ceux des membres et de la face supérieure de la léte sont moins longs (trois à cinq centimètres) Cependant, prés des oreilles, les poils de la léte elle-même égalent presque les plus longs poils du corps. Enfin, on remarque, sous le menton, un bouquet de poils dirigés en bas, et dont' quehiues- uns sont assez longs. Les pouces antérieurs sont tré.s-courls; les formes grêles et élancées; ut la queue surtout trés-al- longée. (IsiDouE Geoifkoy SaiiM-IIil.viue.) 7. SEMNOPITIIÈQUE DORli. SJ!MM)PmiECCS AUnATUS. (De.Mii.iuli.is ) C-\BACTÈiiEs SPÉCIFIQUES. — Pelage uniformément jauue doré, plus clair en dessous; une tache noire au genou de chaque côté. Habite les Moluques. « Cette belle espèce, si remarquable par sa taille, ayant environ soixante-huit centimètres de haiil , 84 HISTOIRE NATURELLE. el la queue aussi loiiyue que le corps, est d'un beau roux doré uniforme, à l'exception d'une tache noirâtre à la rotule, et du ventre, qui est presque nu ; les doigts des mains antérieures sont couverts de poils jusqu'à la deuxième phalange; ceux des mains de derrière le sont jusqu'aux ongles. Celte espèce de singe a toujours été classée avec les guenons proprement dites, el elle termine leur série dans la coUecdon du Muséum de Paris. Mais la longueur de ses doigts, aussi disproportionnée que dans aucun semnopitlièque, la figure et la grandeur uniforme de ses incisives, tout annonce un sem- nopithèque, ce que peut seulement déterminer, toutefois, l'existence d'un talon à la dernière molaire inférieure. Temminck assure qu'elle est des Moluques, position géographique qui éloigne encore l'idée que ce singe soit une guenon. » (Desmoulixs.) M. Isidore Geoffroy Saint-Ililaire pense que l'atys d'Âudebert et de Geoffroy Saint-IIilaire n'est qu'une variété alhine de cette espèce. Le seul individu que l'on connaisse, dit-il, celui qui se trouve au Muséum, ne diffère du semnopitlièque doré, à part sa couleur, que par l'allongement de son mu- seau ; allongement qui dépend sans doute d'une préparation mal faite. Il a d'ailleurs la même dispo- sition de pelage, la même taille, et ressemble, jusque par la présence d'une uelite nudité aux ge- noux, à l'individu du semnopilhèque doré, auquel il l'a comparé. 8. SE.MNOPITllÈQUE AUX FESSES BLANCHES. SEMiSOPITUECVS LEUCOPRYMNUS. (De.-marest.) Caractères SPÉCIFIQUES. — Dessus de la tète d'un brun foncé; face violet pourpré, entourée de longs poils blancs ; corps et membres noirs; région interne des membres et dessus du corps passant au brun noiiàtre; gorge, dessous du cou et parlie postérieure des joues couverts de longs poils d'un gris jaunâtre; une gr;.nde tache triangulaire d'un blanc grisâtre, commençant à huit ou dix centimètres au-dessus de l'origine de la queue et couvrant les fesses et le haut des cuisses ; la queue blanchâtre et terminée par un pinceau. Habite Ceylan. Ce singe, connu dans l'Inde sous le nom de soulili, a le museau très peu prolongé, le front lar- gement bombé et assez relevé; son corps est grêle ; ses mains et ses pieds sont très-allongés, et ont le pouce fort court et très-remonté ; son pelage, composé de poils fins et soyeux, est d'un brun obs- cur sur la tête et la nuque; mais, ce qui distingue le mieux cette espèce, c'est une tache, d'un blanc grisâtre, qui commence sur la lige médiane du dos, un peu au-dessus de l'origine de la queue, et s'étend sur les fesses et le haut de la cuisse. (Desmoulins.) 9. SEMKOriTllÈQUE NEIGEUX. SEilNOPITIIECUS PnUimSUS. (Ilesmarcst.) CAiiACTiiREs spécifiques. — Pclagc formé de poils noirs, ayant tous la pointe blanche. Ilabitc .lava et Sumatra. Le pelage de celte espèce est uniformément noir, plus fourni en dessus et très-rare au ventre ; les oreilles et la face sont nues, excepté le long des lèvres, surtout aux angles, où s'élèvent quel- ques poils lilancs; la peau du corps est bleuâtre; celle des mains est très-peu velue et noire, ainsi que celle qui recouvre les callosités; l'iris est jaune, ce qui semblerait annoncer une existence noc- turne; les jeunes sont d'un brun rougeàtre; la couleur noire ne se prononce qu'avec l'âge. (Des- MOULI.XS.) Ce singe parait exister â Sumatra; mais il est bien plus commun dans les forêts de Java, où il vit QUADRUMANES 85 en nombreuses troupes. Contrairement au respect que les Indiens accordent, comme nous l'avons dit, à l'entelle, par exemple, les Javanais font la chasse aux seranopithèques neigeux pour se procurer leurs peaux, qu'ils emploient comme vêtement militaire. Fig. CG. — ScmnopUlièquc ntigeux. 10. SEMNOPITlIlinL'E A FOL'RRl'UE SE.MXOPITnnCVS VELLEROSUS. (Isiii. Geoffroy Sainl-Hilaiie.) Caractères spécifiques. — Pelage noir, composé de poils extrêmement longs (douze à vingt centi- mètres) sur le dos, les flancs et les lombes; gorge, côté de la tète et queue d'un blanc nuancé de jaunâtre; une grande tache grise sur la fesse et à la partie postérieure de la cuisse de chaque côté de l'origine de la queue. Habite l'Inde ou l'un des archipels voisins? Le corps et le dessus de la lèie sont d'un noir brillant, les poils ont un aspect soyeux, brillant, qui rappelle le pelage du coaita. La gorge et le dessous du cou sont couverts, au contraire, de poils d'un blanc sale très-moelleux et un peu frisés ; les bras sont noirs comme le corps; les cuisses et le haut des jandies sont noirs comme les bras; mais il existe, de chaque côté, sur la partie postérieure et interne de la cuisse et sur les fesses, une grande tache d'un gris clair, qui passe au fauve autour de la callosité; les poils qui conq)osent cette tache sont, pour la plupart, d'un blanc grisâtre; mais 86 HISTOIRE NATURELLE un assez yiand nombre de poils noirs se trouvenl mêlés parmi eux. La queue esl tuul entière Manelie L'etal de la peau, que j'ai examinée, ne m'a pas permis de connaître la eoulcur des avant-bras, des mains, du bas des jambes, des pieds et de la faee. Les poils des membres et de la queue sont assez courts, ceux de la tête sont uu peu [dus loiiys ; mais les plus longs de tous sont ceux de la partie supérieure du corps et des tlancs qui ont jusqu'à cinq, six et sept pouces. Ceux des tlancs sont un peu plus loni;s que ceux du milieu du dos; tous ces toniçs poils sont lisses, coucliés et dirigés en arrière ; ceux du dessous du corps sont au contraire un peu frisés et disposés très-irrégulièrement. La taille dusemnopithèque à fourrure est la même que celle du doue, avec lequel il a beaucoup de rapports. iVéanmoins, il sera toujours facile de distinguer notre scinnopiiliccns vellcrosiis, soit du scninopilliiTits ncniwus, soit du sciiniojùllurus tcucopniiiinu.i, dont il est également voisin jiar sa laille, ses formes et sa coloration. Le meilleur caractère (|ue l'on puisse consulter pour établir cette distinction, c'est celui de la tache grise des fesses, qui esl bornée à peu près au niveau des callo- sités, et ne se prolonge point au-dessus de l'origine de la queue, origine qui est au contraire ca- chée sous les longs poils noirs da bas du dos. (Isid. GEot-pnoY S.^int-IIilaiiie.) 11. SEJINOPITtlÈQUE CIMErAYli. SEMXOPITULCUS MELMOI'IIOS^ (Fiéil. Cuvicr ) Caractères si'i-.cifiques. — Pelage d'un roux vif, une touffe de longs poils à la partie postérieure et supérieure de la tête, face très-aplatie, pommettes saillantes. Habite Sumatra. Le cimepaye a le pelage d'un roux brillant sur le dessus du corps, à la face extérieure des mem- bres, à la queue, au devant du front et aux joues, où les poils dirigés en arrière forment d'épais favoris. La poitrine, le ventre et le dedans des membres sont blanchâtres; la tète est ceinte d'un cercle ou plutôt d'une aigrette de poils noirs; quelques poils semblables sont aussi clairsemés le long du dos et sur les épaules. La face est bleue jus(prà la lèvre supérieure, qui esl couleur de chair ainsi que l'inférieure et le menton ; les oreilles sont de même couleur que la face, et le dedans des mains est noirâtre comme les callosités; le ventre est i)res(pie nu, et le dedans des membres peu velu ; le nez, très-ridé à sa base, fait une grande saillie; les poils de tout le corps sont tiés-longs et un peu laineux. (Desjiollixs.) Le cimepaye mesure un mètre cinquante centimètres du sommet de la tête à l'extrémité de la (piene, et, dans ces dimensions, cette dernière partie entre pour (|uatre-vingt-dlx centimètres. Les membres sont très-allonges et grêles relativement aux proportions du corps ; mais les avant-bras et les jambes sont surtout très-longs et terminés par des doigts bien fendus. Les pouces des mains sont très-courts et très-remontés ; les oreilles sont noires, larges, minces et non bordées. (Lesson.) 12. SEMNOPITIIÈQUE MAtlIiE. SEMiSOPITIIEClS iHAUItUS. (Frcd. Cuvier.) CAiiACTiiREs srÉciFiQuiîs. — Pclagc iiùir, uuc tache blanche en dessous à l'ongine de la cpieue ; poils longs, surtout à la tête. Les jeunes, entièrement fauves dans le premier ûge, et variés de fauve et de noir dans le second. Habile .lava et Sumatra. Ce .singe, nommé tchincou à .lava, est remarquable, comme tous les semnopithèques, par ses formes grêles, ses membres allongés, la petitesse de ses pouces aux mains antérieures, la brièveté de son cou et sa face plate entourée de poils droits, ((ui forment autour de sa tête une large auréole. Scmnopllliéque luippi' noire. m. i4. OHMinilMANES. 87 Tniii sdii nii'us. sniis cil ('\i'('|ilrr :iiiiiiiii' [ciflio, est iiiiifdriiu'mrnt roiivcrl (l'un pclnj^o noir, beau- (■iiii|i plus rdiiriii sur les parties siipéiieures du cor[)s que sur les parties inférieures et surtout l'ab- (lonieii, où iesjioils sont même assez rares. Les oreilles et la face sont nues, à l'exception des lèvres et des côtés de la bouche, d'où partent quebiues poils blancs. La couleur de la peau est bleuâtre. Les mains sont peu velues, et la peau ([ui les recouvre est noire, ainsi que celle qui recouvre les cal- losités; l'iris est d'un beau fauve oraiii;é. (FFu';n. C.cvifr.) Fis- *J''- — Scmnopithùaui; maure. Les jeunes tchincous sont d'un brun rougeàtre au lieu d'être noirs, et ce n'est qu'après leurs ].rc- mières mues qu'ils prennent les couleurs des adultes, et deviennent de plus en plus noirs avec 1 àyc. Il taille de ce sin-c approche de celle de l'entelle ; il a, du sommet de la tête à l'origine de la queue," deux pieds; celle-ci a plus de deux pieds et demi. La hauteur du train de devant est de quinze pouces, et celle du train de derrière est de dix-huit. (l'r.Én. Cuvieb.) 88 HISTOIRE NATURELLE. iô. SESIiSOPlTlIÈQUE rVBRUUS. SEMXOPITIIECVS PYnRIIVS. (IlnrsfieM.) CAisACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Pelage fauve vif sur le dos et les régions externes des membres; poils doux et mollets, blonds dorés sur la tète, au front, à la queue et aux quatre extrémités ; ventre et de- dans des membres jaune pâle ; pas de taches noires aux genoux. Habite Java. Parles couleurs qui teignent son corps, ce singe, dit Horsfield, a quelques rapports avec le scm- nopiiliéque maure, avant que le pelage de ce dernier soit entièrement devenu noir. Toutefois, le des- sus du dos et les parties externes des membres sont d'un fauve décidé et constant dans l'intensité de ses teintes ; son corps est allongé et assez grêle, et ses extrémités surtout sont remarquables par leur faiblesse : la nature des poils qui composent son pelage est d'être délicate, douce au toucher et comme soyeuse ; et sa couleur présente, sur les parties supérieures, une teinte brune rousse, affec- tant des reflets blonds dorés sur le sommet de la tête, le front, la queue et les extrémités, et passant au jaune pâle sur le ventre et le dedans des membres. Sur les flancs, depuis la tête jusqu'aux lombes, règne une bandelette longitudinale de poils clair- semés, frisottés, et d'une grande délicatesse, qui séoare ainsi les poils longs du dos. Ce singe porte, à Java, le nom de liitung. (Lesson.) 14. SEMNOPITllKQUE KRA. SEMNOPITHECUS FASCICVLAItlS. (Raifles.) C.\nACTÈRES SPÉCIFIQUES. — Vertex et dos brun rougeâtre ; flancs et queue gris, passant au gris clair sous le corps et en dedans des membres; face brunâtre, avec des favoris épais, blanchâtres; callo- sités des fesses très-larges. Habite Sumatra. Ce singe, nommé kra par les Malais, à cause de son cri, vit en troupes nombreuses dans les forêts. Son corps a cinquante-cinq centimètres, et sa queue mesure une plus grande longueur. Dubiun rougeâtre teint le dos et le dessus de la tête, tandis que la queue et les flancs sont d'un gris qui s'éclaircit en dedans des membres et sur la partie inférieure du corps. La face, que recou- vrent quelques poils courts, gris clair, est brunâtre, et des poils blanchâtres s'élèvent sur les joues pour former des touffes beaucoup plus longues que la barbe; ses yeux sont bruns, abrités par des sourcils proéminents et protégés par des paupières blanches; le nez, assez saillant à sa racine, s'aplatit vers l'extrémité, où s'ouvrent les narines en scissures obliques; des abajoues sont assez visibles; les oreilles, dont la forme est arrondie, présentent une pointe obtuse assez marquée à leur sommet ; les canines ont peu de longueur, et le pouce des mains est comme tronqué ; de larges callo- sités se dessinent sur les fesses. Sir Uaffles dit que le kra s'apprivoise diflicilemeut, et que les natu- rels en distinguent une variété à pelage plus blanc, et teint de rougeâtre sur le dos. Ce même auteur ajoute encore qu'il en existe une race plus petite nommée kra buku, qui n'a point de poils touffus sur les joues, et dont la taille atteint rarement trente-cinq centimètres. (Lesso.i.) Ces deux dernières espèces de seninopithèqucs, admises par Lesson, ne sont pas assez connues en- core pour que nous les présentions comme certaines, et nous regrettons de ne pouvoir rien dire de leurs habitudes. I Seniiiopithôiiiio li:iriii<|ii< P! |- QUADRUMANES. 89 15. SEMNOPITHÈQUE MITRE ou CROO. SËMNOPITIIECUS COMATVS. ( Desmarest.) Caiiactères SPÉCIFIQUES. — Dessus ilu corps et de l;i queue, région externe des meml)ros, d'un gris de fer foneé; dessous de la tête, du tronc, de la queue et dedans des membres, d'un liiancsale uni- forme; mains i)lanciies ou d'un gris elair; de longs i)oils noirs sui' le milieu de la tète et à l'occiput. Habite Sumatra. A Sumatra, on donne à cette espèce le nom de croo, sans doute par analogie avec son cri. Fi;. 08. — Seinnopilhùquc miliv. tu. SEMNOIMTIIÈQUE B.4RB1QI1E. SËMNOPITIIECUS BARnATUS. (l'I. 15.) Sous le nom de seninopithèque barbique nous indiquons une petite espèce classée parmi les guenons, et fort peu connue encore. On en voit un individu monté dans les galeries du Muséum; mais il est difficile d'en donner une description exacte, et nous nous contenterons de la citer. 12 00 HISTOIRE NATIUELLE. 5""= GENIIE. — COLOBE. COLOBUS. (lUiger. KcXoêc;, mutilé. CARACTÈRES GENERIQUES Ma'nis (nticrieurcs élroilcs, tns-iuiujuis, à pouces exlérieuremcnt nuls ou tout au plus rudimcn- taircs. Fonui's fjirlcs; meiitlires et queue Iris-lougs. Museau court; nei aplati ; crâne assez volumineux. Estomac complexe; des abajoues? Des callosités au.r fesses. La (teruière molaire inférieure à cinq tubercules. Habile rAIViquc. Les colobes sont très-voisins des semnopithèquos par leur oryanisatioii , et ils sont, en Afrique, les représentants de ces derniers, qui habitent exclusivement l'Asie. Ils ont le corps et les membres grêles; leur face est nue, mais l'on ne sait pas encore, d'une manière positive, s'ils ont des aba- joues. Leur queue est longue, et plus ou moins floconneuse à l'extrémité. Ce genre est encore in- complètement connu, quoique les auteurs aient décrit huit ou neuf espèces. Le caractère saillant qui les distingue des semnopithèques se trouve dans l'absence de pouce aux mains antérieures. Fis;. 69 — Main antérieure de colobe. 1. COI,OBE GUÉRÉZA. COLOBUS GUEREZA. (Ruppel.) CARACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Pclage noir; poils des côtés du corps allongés en franges longueset l)lan(^lies; queue noire dans la moitié de son étendue, blanche et floconneuse à l'extrémité ; face noire encadrée de blanc pur; canines très- saillantes. Habile les districts de Godjam, Kula et Damot (sud-ouest de l'Abyssinie). Guéréza est le nom local de ce singe. 11 vit, en Abyssinie, par petites familles, et se tient sur les arbres élevés et dans le voisinage des eaux courantes. Il est agile, vif, sans être bruyant, et d'un na- turel tout à fait iiioffensif. Sa nourriture consiste en fruits sauvages, en graines, en insectes, etc. Il fait ses provisions durant le jour, et passe la nuit ù dormir sur les arbres. On ne le trouve que dans les districts indiqués plus haut. Dans le Damot, les indigènes font la chasse à ce joli singe, et la possession d'un bmulier couvert d'une peau de giiéréza est considérée, par eux, comme une dis- tinction trés-reciierchèc. Colobc rullp;incii\ PI ir. (IliMilll MANKS. 01 Fi". 70. — Colobe Ruôréza. 2. Cm.OBE A FOURRURE. rOiOBVS VEI.LEItOSUS. (Isid. Geoffroy Smnl-Ililnire.) Caractères spécifiques. — Le dos, les lombes et les flancs couverts de poils noirs de un à deux décimètres de longueur; tour de la face l)lanc. Habite la Gambie. Le nom donné à ce singe rappelle la longueur considérable des poils du dos, des flancs et des lombes. Le tour de la face, la queue, une grande tache de chaque cùté sur la fesse et la partie pos- térieure de la cuisse, sont blancs. Les pouces antérieurs sont extrêmement courts, mais bien dis- tincts et onguiculés, disposition exceptionnelle des caractères du genre, mais indiquant le passage des semnopithéques aux colobes. .3 COLOBE OURSIN. COLOnUS VltSIKlIS. (Ogilby.) CAnACTi:r,ES spécifiques. — Pelage formé de longs poils, d'un noir intense; la queue terminée par nn flocon de poils blancs; quelques poils blancs mélangés aux noirs sur les épaules. Habite Sierra-Leone. Cette espèce diffère de la précédente, qui n'a de longs poils que sur les parties supérieures du corps, tandis que celle-ci a tout le corps couvert de longs puils. Est-ce une simple variété? Celte question doit rester indécise juscpi'à nouvel ordre. 92 HISTOIRE NATURELLE. 4. COLOBE VllM. roi.OBUS VERVS. (Vîin Dencilcn.) Caractères spécifiques. — Pelage brun olivâtre sur la tète, le dos et à la base de la queue ; queue grise; côtés du cou et gorge d'un gris sale ; épaules et membres gris verdàtre clair; mains anté- rieures ù quatre doigts. Habile l'Afrique, région indéterminée. Le seul exemplaire connu de cette espèce appartient aux galeries du Muséum ; il a malheureu- sement été monté avec peu de soin, et ses formes n'ont pas été conservées; aussi quelques auteurs ont-ils décrit le colobe vrai comme un singe à formes trapues et robustes, formes qu'il ne doit qu'à un montage fait sans intelligence. Fig. 71. Colobe vrai. .5. COLOBE DE PENNANT. COI.OBVS PENNANTII. (Waterliouse.) Cakactères spécifiques. — Tète et ligne médiane du dos noires; parties latérales d'un roux fauve; parties inférieures jaunâtres; queue d'un brun noirâtre; poitrine et joues blanchâtres. Habite Fernando-Po. QUADRUMANES 95 Cotte espèce diftère peu des eolobes tenuL;iiieux el t'uliyineux, aussi est-il permis de la considérer coniMU' douteuse. La couleur Manche des joues et de la poitrine est le seul caractère qui distingue le coiobe de Pennaul. G. COI.OBE FERRUGINEUX. COLOBVS FERRVGI.yosi'S. (Geolfroy Sainl-HiUire.) CAiiACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Dessus de la tête noir ; dos rouge-bai foncé ; parties externes des mem- bres noires; joues, dessous du corps et cuisses bai clair, queue noire. Habite Sierra-Leone. Celte espèce, moins connue encore que les précédentes, a été décrite ou indiquée, par les auteurs, sous les noms de coiobe de Temminck et de coiobe roux-noir; BulTon a peut-être voulu parler de cette espèce, à laquelle il n'a point donné de nom, mais qu'il semble indiquer sous le titre de autre (Hiciioi). Est-ce une variété d'Age du coiobe de Temminck, de Desmarest? 7. COLOBE A CAMAIL. COLOBVS POLYCOMOS. (Geoffroy Sainl-Hilaire.) Caractères spécifiques. — Pelage noir, avec de longs poils mélangés de noir et de jaune sale sur la tête, le cou et les épaules et formant crinière; queue blanche, terminée par un flocon de poils de même couleur. Habite la côte de Guinée, Sierra-Leone. Cette espèce est depuis longtemps connue, mais très-iraparfaitement. Elle a été indiquée sous les noms de guenon à camail, de roi des singes et de guenon coiobe. Les poils sont longs sur les par- ties supérieures, et courts sur les inférieures. C'est la guenon à camail de Buffon. 8. COLOBE LEUCOMûRE. COLOBVS LEUCOMEROS. (0|,'illiy ) Cette espèce n'est connue cpie par la description sommaire qu'en donne Ogilby dans {esProcccdingx de la Société zoologique de Londres. Llle a le pelage uniformément noir luisant et les cuisses seule- ment d'un beau blanc; elle habite l'Afrique, région indéterminée. sTr.i !). COI,OBE SATANAS. COLOBVS sJtANAS. (W.itcilinuse.l Cette dernière espèce est de Fernando-Po; elle a été décrite aussi dans les Proceedings de la So- ciété zoologique de Londres. Elle a le pelage noir, formé de poils très-longs et un peu lustrés. Martin, naturaliste anglais, en parle sous le nom de llic hlacl; cohbiis. 10 — COLORE DE TEMMINCK. COLOBVS TEMMINCKII. (liesmaresl.) Caractères spécifiques. — Tête, cou, dos, épaules, haut des cuisses noir intense; mains, l'ace et queue rouge pourpré; le reste des membres rouge clair; ventre jaune rougeàlre. Habite la côte orientale d'Afrique. Celte espèce, décrite par Oesmarest comme une guenon, est classée parmi les eolobes par Lesson. 94 HISTOIRE NATURELLE. 11. COLOBE FULIGINKUX. COLOBVS FUUGINOSVS. (Ogilby ) (IM. l-iliis.] Caractères spécifiques. — Pouces antérieurs extrêmement courts, mais encore distincts; pelage assez long; quelques longs poils divergents à la partie antérieure du front; parties supérieures d'un noir ardoisé ou d'un gris bleuâtre, nuancé de roux vers l'occiput; joues, épaules, face externe des avant-bras, des jambes et de la queue, d'un roux vif; parties intérieures et face externe des membres blanchâtres ou jaunâtres. (Isidore Geoffroy Saim-11ilaii\e.) Habite la Gambie. Les habitudes de ces singes sont très-peu connues; mais il est probalile tpio ce que nous avons rapporté du colobe guéréza peut s'appliquer à toutes les espèces du genre. Fig. 72. — Colobe lïilii'incux. I OUAbRKMANES. 95 Les cercopillièciens ont les membres assez pi'opùrlionnés au corps ; leurs pouces sont générale- ment développés, et leurs doigts assez souvent réunis à leur base par des membranes. Us ont des abajoues très-amples; la queue longue et le plus souvent relevée en arc sur le dos. Us sont agiles, pétulants, capricieux, voleurs et gourmands ; ainsi, par leur conformation, mais surtout par leur caractère, les singes do ce groupe diffèrent beaucoup des semnopithéciens. Deux genres seulement se trouvent compris dans ce groupe : Miopitlièque et Cercopithèque. - 4'"" GENRE. — MIOPITIIÈOUE. MIOPITUECUS (Isid. Geoffroy Saint-llilaire.) Miiov, niiiins (plus (jctil) ; liiOr,?, singe. CAR.\(;TliIiES GÉNÉRIQUES. Foruics [irctcs; membres et (juciie lutiy.s. Mains assez allongées, ayant les doigts réunis h lu base par des membranes. Poiiees atilériears bien développés, bien moins eepeititaiil (pic les postérieurs. Ongles eu gouttière. Crâne volumineux, s'élcvanl supérieurement au-dessus des orbites. Museau très-court; yeux très-grands ; conques auriculaires fort développées ; na très-peu sail- laut; cloison iiiternasalc assez épaisse; narines de forme allongée, nonpay seulement sous le nez, mais a la fois iuférieurement et latéralement. Des callosités ut des abajoues. La dernière molaire inférieure et supérieure à trois tubercules. Habite l'Afrique. — Taille : O^.oO, la plus petite de tous les singes de l'ancien continenf. Ce genre a été établi, par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, pour le talapoin de Buffon. Ce singe diffère, en effet, des guenons par plusieurs caractères assez remarquables. Les mœurs dos niiopithéques , à l'état sauvage, ne sont pas connues. En captivité, à Paris et à Londres, quelques individus ont pu être étudiés, et tous les observateurs, quand ils n'avaient pas sous les yeux des individus épuisés par la maladie, ont été frappés de la grâce, de la gentillesse et de la douceur de ces singes. Leur naturel diffère donc aussi de celui des cercopithèques et se rappro- che de celui des singes américains, notamment de ces petites et élégantes espèces insectivores, à cerveau et à organes des sens si développés, les callitriches et les saïmiris, qu'ils semblent représen- ter parmi les singes de l'ancien monde. On n'en connaît qu'une seule espèce. (Isidore Geoffroy S.\I>T-lllL.\inK.) MIOI'ITIIÈQUE TALAPOIN. MIOPITHECUS r.lL.lPO/.V. (Isid. Geoffroy Saint-llilaire.) Car.\ctères spÉciFiouEs. — Ncz uoir; pelage verl, avec les parties inférieures du corps et internes des membres, blanches-, poils du front relevés et formant une sorte de huppe large et courte. Habite l'Afrique, côte occidentale. Buffùii donnait à ce charmant petit singe le nom de talapoin ; Frédéric Cuvier crut devoir l'ap- peler mélarhine (à nez noir). Tontes les jiarties siipéi'ieures du corps du talapoin, dit ce dernier auteur, sont vertes, et les infé- rieures, du museau a l'extrémité de la queue, sont blanches; les mains, les oreilles et le nez, excepte 9fi HISTOIRE NATURELLE. à sa base, sont noirs; les yeux sont bruns; le dessus des paupières est lihinc; le dessous des yeux est couleur d'ocre; le tour de la bouelie couleur de chair, et le devant des oreilles blanc, parce que les poils, dans cette partie, se couchent du côté de la face. Les favoris qui naissent près du nez et s'é- tendent sur les pommettes et le long des joues jusqu'au-dessous des oreilles sont composés de poils Fig. Vô — Mio|HlliL'(|ur l^il,i|Mjiii jaunes, dont quelques-uns ont le bout noir, principaienienl sur les côtés du nez, ce qui leur donne, dans cette ]iarlie, l'aiiparenee de moustaches. Le dessus de la queue est d'un vert plus îfris que le dos, et le dessous d'un blanc moins pur que le ventre. Ou ne voit aucune trace de bandeau blanc sur les crêtes sourcilières ; enfin tous les poils sont gris à leur base. (Frédéiuc Cuvier.) ù"" GENRE. — CERCOPITHEQUE ou GUENON. CERCOPITHECVS. (Brisson.) K^oKcç, queue; -iOï,ç, singe. CARACTÈRES GÉNÉRK^UES. QiKilir lubcirulcs aux dcrincrcs molaires bifériaircs. E.slomac sim])le. Alxi'ioiic.i lrrs-aiii])l('s Museau (léveloiijié saus ('ire très-proémineni; ueipeu siiillaul; uarincs arrondies, inférieures, Iris- peu disinutes; oreilles moijennes. Forities assez proportionnées ; corps un jieu allon10CLI-NS.) Fig. 77. — Tête d'ascagne. Fis. 78. — Asc.Tsni! femelle. 3. GUENON CASIPBIÎLL. CEItCOPITIIECUS CAMPBELLI. (Waterliousc.) Caractères spécifiques. — Pelage gris olivâtre, touffu et divergent sur le milieu du dos. Habite Sierra-Leone; côte orientale d'Afrique. La guenon de Campbell, décrite par M. Walerhonse, est remar(piable par son pelage long et touffu, et par la disposition des pciils se partageant et divergents sur le milieu du dos. Lt's parties supé- rieures sont d'un gris olivâtre, les poils étant annelés de noir et de jaune; les parties postérieures du corps et les cuisses sont d'un gris ardoisé, avec de très-petits anneaux ; les parties inférieures du corps et le dedans des membres sont blancs. La queue, variée en dessus de noir et de jaune sale, l'est, en dessous, de noir et de blanchâtre, les poils de l'extrémilé étant plus longs et noirs. (Isidore Geoffroy Saim-Hilaire.) 4. GUENON DE MARTINI. CERCOPITHECVS MARTIXI. (Walerliouse.) Caractères spécifiques. — Poils de la partie supérieure du corps annelés de noir et de jaune pâle; sommet de la tète, membres et queue noirâtres; gorge et dessous de la gorge d'un gris bru- nâtre. Habite l'ile de Fernando-Po. Cette espèce, encore imparfaitement connue, a le pelage composé de poils assez longs; les parties 102 lySTOIRE NATURELLE. supérit'uivs sont ifrisAlres, les poils él;iiil aniirlcs de noir et de lil:inc j:iunAlrt'; le dessus de la tète, les bnis et la queue, sont iiniràlres. I.a poitrine est d'un liianc sali', tandis que l'alKlonien et la face e.xterne des cuisses sont brunâtres. On remarque à la (jueue des poils d'un liriin rouge. 5. GUF.iSO.N MOUSTAC. CICItCOl'ITIIEClS CEPIIIS. ( Erxlubcii.) C.\nACTÈRES spK.ciFiQUES. — Face bleue avee un erois.sant blanc sur le nez; pelage, sur le corps, vert brunati'e, j^ris verdatre sur les cuisses, et i;ris jaune sur les nienilires; (punie, aux di'ux tiers, d'un roux vif; dedans des membres i!ris; favoris jaunes; barbe blanclie; un bandeau noir sur le front; parties nues des extrémités de couleur carnée. Habile la cote occidentale d'.Xfrique; la Guinée. Cette espèce, nommée moustac pariJuffon, est d'une taille intermédiaire à l'ascagne et à la mône; toute la tête est couverte de poils verdâtres, plus foncés à l'occiput qu'au front; ceux du dos, des épaules, des flancs, de la croupe et de la base de la queue, sont d'un vert plus brun qu'à la tète; Fis- 7'J. - Ciiirnoii nioiistac. ceux des membres sont gris, avec une teinte de jaune. Ces luianees résultent de ce que les poils sont annelés. Tous sont gris vers la racine, puis noirs et jaunes au bout. Les deux derniers tiers de la queue sont roux. Les favoris sont Irès-épais, et d'un jaune brillant, passant au blanc sur la mâchoire inférieure; une raie de poils noirs les sépare de la coiffure verte de la tète. Les oreilles, les testi- cules et la peau des mains, couleur de chair; toute la face d'un bleu lapis à teinte noirâtre près des lèvres. Mais ce qui rend la face de cet animal tout à fait remanpiable, c'est une tache blanche, en forme de chevron brisé, qui se trouve au-dessous et de chaque côté du nez, sur la lèvre supérieure, de manière à figurer deux moustaches ; et, en effet, c'est cette tache blanche qui a valu à cet animal le nom de moustac ((ue lluffon lui a donné. (Desmouli.ns; Fiiédéiuc Cuviek.) I Gui'iHHi inniii' PI. 17. OlIADlilJ.MANES. 103 G, GUENON liAIililllî. Ci:itCOI'ITIIi;CVS POGoyiAS. (Ccimell) Caractères srÉciFiQUEs. — Barlie tr(\s-loni;iic el d'uii hhnc j;iiiii;'ili'f ; [^n'Iayi' noirâtre, ponctué de blanc; niilimi du dos, croupion, dessus de la queue el bandelette temporale noirs; front et cuisses jaunâtres, ponctués de noir; dessous du corps el dedans des membres roux jaunâtre. Habite l'iie de Fernando-Po. La guenon barbue un iKigoiiuix, (pi'il ne faut pas confondre avec le singe désigné, par les auteurs, sous le nom de guenon barbicpie, a été décrite, pour la j)remiére fois, en IS3?), dans les l'rocn'd- hujs de la Société ZLiulogique de Londres. Cette espèce est remarquable par l'existence d'une longue barbe d'un blanc jaunâtre qui couvre toutes les parties latérales et inférieures delà face, et tombe jusque sur le cou. Le pelage est noiràtie, tiqueté de blanc, et ])asse au noir sur le milieu du dos, la croupe, le dessus et l'extrémité de la queue. Le front et la face externe des cuisses sont d'un jau- nâtre tiqueté de noir. Les parties inférieures du corps et de la (pieue, ainsi que la face externe des membres, sent d'un jaune roussâtre. On a découvert cette espèce à Fernando-Po, petite ile de la côte de Guinée. 7. GUENON AUX LÈVRES BLANCHES. CERCOPiniUCVS I.MIIMIIS. (IsiJ. G^iflruy SeiU-llilaiie.) Caractères spécifiques. — Pelage long et bien fourni; parties supérieures d'un gris foncé très- liqueté de jaune pâle olivâtre; parties inférieures d'un blanc sale; une tacbe noire sur la face, au- dessus de la commissure des lèvres ; le reste du tour de. la bouche blanc; les quatre mains et la face externe des membres de devant noires; face externe des membres postérieurs cendré brunâtre; face interne des uns et des autres cendrée; queue d'un fauve sale iid'érieuremeiit dans une assez giande étendue, variée de roux el de noir, en dessus, dans la même portion; le reste de cet appendice noir. Taille : 0"", 40 environ du bout du museau à l'origine de la queue, dont la longueur est de prés de cinq décimètres. Habite l'Afrique, côte occidentale? Cette espèce a le pelage long et bien fourni ; les poils du dos sont couchés el dirigés en arrière. H existe, sur chaque joue, un bouquet de longs poils dirigés aussi en arrière. Les oreilles sont gar- nies, intérieurement, de poils gris et roussâtres; caractère par lequel la guenon aux lèvres blanches rappelle la guenon â oreilles rouges de M. Waterhouse. Le sommet de la tète est d'un noir ti(inelé de jaune verdâlre; le fi'onl et les joues sont, au con- traire, d' lui jaune verdâtre tiqueté de noii', parce qu'ici ce sont les anneaux clairs qui dominent. La coloration des parties supérieures et inférieures du corps, des membres et de la queue, a été décrite dans la caractéristique; mais j'ajouterai que la gorge est d'un blanc sale, aussi bien que les autres parties inférieures, et que le tour de l'anus est d'un fauve sale, comme l'est aussi iuférieure- ment la (pieue dans sa |iremière portion. (IsinoiŒ Geoffroy Saiint-JIii.aire.) 8. GUENON MONE. CEItCOPITIIECUS MuyA. ( Ei\liO)Cii 1 Caractères -^i'Écifioues. — Verlex vert doré; dos et tlaues niaridii vif pi(|nete de unir; dessus de la \u mSTOIRE NATURELLE. (|Ufue bleu arduisé; deux taches blanches sur les fesses; face bleue; lèvres ci nez couleur de chair; mains et oreilles carnées et livides; sourcils cendrés. Habite la cote occidentale d'Afrique; Guinée La tète est olivâtre; les joues d'un olivûtre clair; une tache noire s'étend de la partie supérieure de l'orbite à l'oreille, et l'on remarque sur le front une ligne d'un blanc verdâtre; le dos, les épaules et les flancs, sont d'un roux tiqueté de noir; la croupe est noire, i\ l'exception de deux taches ellip- tiques blanches, placées à droite et à gauche de l'origine de la queue; les mains et la face externe des membres sont noires; les parties inférieures du corps et le dedans des memlires sont d'un blanc pur qui, sur ceux-ci, tranche avec le noir de la région externe; la queue est variée de jaune et de noir, avec l'extrémité noire. (Isidore Geoffroy S.4int-Hilaire ) Fi?. 80. — Guenon mônc. Le dessus des jambes et des cuisses, ainsi que la queue, sont d'un gris ardoisé. Un léger bandeau gris ceint le froni aurdessus des sourcils; et, de cliaque côté des joues, d'épais favoris jaune paille, joints sous le menton, lui encadrent la face qui, des yeux jusqu'au nez, est lileuâlre et d'une belle nUAimUMANES. 105 couleur de ili:iii' sur le reste de son étendue; les pattes et les oreilles sont couleur de clniir livide. Différente de tous les autres singes par son sérieux, la niùne ne grimace jamais. Sa figure est tou- jours grave et ealnie. Sa décence n'est pas moins exeui])laife parmi cette race d'impudiques; sa dou- ceur n'est pas même altérée par les souffrances de la maladie. Nous eu avons observé une dans le dernier mois d'une consomption pulmonaire; elle recevait avec reconnaissance les caresses et les lémoignagcs d'affection, lors même que son état ne ki permettait plus de manger le sucre ou le gâ- teau qu'on lui présentait. (Desmoulins.) Nous ne pouvons nous dispenser de reproduire la description que Frédéric Ciivier donne de celle cliarmante espèce : Si l'élégance dans les formes, la grâce dans les mouvements, la douceur dans le caractère, la linesse dans l'intelligence, la pénétration dans le regard, tout ce qui, dans un animal, enfin, peut le faire rechercher et donner pour lui de l'affection, offraient aux naturalistes des caractères pro- pres à former des groupes dans leurs classifications, la mône devrait incontestablement servir de type à l'une de ces divisions; car elle se distingue, par ses qualités, de la plupart des autres gue- nons. Mais, si ce bel animal ne présente aucun caractère physique propre à confirmer la distinction ([ue ses qualités morales indiqueraient, c'est que celle.s-ci tiennent sans doute à sa nature particu- lière et à l'éducation que son extrême douceur lui a méritée. En effet, la mône ne se distingue es- sentiellement des autres guenons que par ses couleurs, et celles-ci ont une variété qu'on ne ren- contre point chez les autres espèces. Sa tête est d'un vert doré brillant; son dos et ses flancs sont d'un beau marron tiqueté de noir ; le dessus de ses jambes, de ses cuisses et de sa queue, d'un gris d'ardoise pur; et son cou, sa poitrine, son ventre et la face interne de ses membres, d'un blanc éclatant. De chaque côté de ses joues, sont d'épais favoris jaune-paille, mélangés de points noirs; et l'on voit deux taches très-hlanches de chacpie côté de la queue, au haut des cuisses, qui tran- chent avec la couleur foncée de ces parties. Ses pattes sont couleur de chair livide; sa face, des yeux jusqu'au nez, e.st bleuâtre, et, sur le reste du museau, couleur de chair pure. Cette variété de couleur avait fait penser à Dnffon que la mône était le lu'ho.s des Grecs; mais cette synonymie ne repose (|ue sur une simple conjecture. Les anciens ne nous ont presque jamais Itarlé des singes de manière à les faire reconnaître ; ils se bornaient à nommer les animaux, comme s'ils eussent ignoré que les langues suivent la destinée des peuples, ou comme s'ils n'eussent écrit que pour leurs contemporains. C'est aussi assez arbitrairement que Buffon a donné à cette guenon le nom de mône, générique dans l'Orient pour les singes à longue queue ; toutefois ce nom, n'ayant chez nous aucune significa- tion, a pu, sans inconvénient, devenir spécifique. Il n'est presque jamais possible au naturaliste d'a|)pliquer à une espèce étrangère et nouvelle un de ses véritables noms; mais, si celui qu'il donne est bien choisi, quoique arbitrairement, il est toujours iiréferable à ces dénominations composées, tirées de quebpu's caractères apparents, qui ont le grave inconvénient de ne point être des noms, et surtout de finir presqiu» toujours, ou par ne plus être exclusives, ou par être inexactes. On regarde communément la mône comme originaire de Barbarie, quoiqu'on n'en rapporte au- cune preuve. Toutefois, elle nous vient certainement d' .Afrique; et, à la facilité qu'elle a de vivre chez iKiUs, on peut conjectuier qu'elle se trouve piineipalemcnt dans les régions septentrionales ou dans les parties élevées de ce continent. Le bel individu, type de cette desciiption de iMédéric Cuvier, s'est, pour ainsi dire, développé sous ses yeu\. Il était extrêmement jeune lorsque la ménagerie du Muséum en fit l'acquisition; et sa douceur, mais surtout son peu de pétulance, permirent de le laisser en liberté. L'âge n'a point en- core altéré son bon naturel; il est devenu grand et a pris de la force; son adresse est extrême, et son ag-ilité sans égale; cependant tous ses mouvements sont doux, et ses actions semblent circon- spectes; ses désirs ont de la persévérance, mais ils ne le portent jamais à rien de violent. Lorsqu'a- près avoir bien sollicité, on persiste à refuser, il fait une gambade, et semble occupé d'autre chose; il prend tout ce qui lui plaît, les objets qui lui ont attiré des punitions comme les autres, et il a une adresse extrême pour exécuter ses rapines sans bruit; il ouvre des armoires qui ont leur clef, en tournant celle-ci ; il défait les nœuds, ouvre les anneaux d'une chaîne et cherche dans les po- ches avec une délicatesse telle, que souvent on ne sent pas sa main, quoiqu'on sache qu'elle vous dépouille. C'est l'examen des poches qui lui plait le plus, parce que sans doute il y a souvent trouvé li>' l.i 106 HISTOIRE "NATURELLE. (k's goiirniïiiuiisc'S qu'on voulait qu'il y trouvât, et il y fouille sans mystère : ordinairement il débute par là, dès qu'on s'approche de lui, et semble clierclier dans les yeux ce qu'il doit espérer de trou- ver. Il n'est pas très-arfectucux; cependant, lorsqu'il est tranquille, et que rien ne le préoccupe, il reçoit avec plaisir les caresses, et il répond avec grâce lorsqu'on veut jouer avec lui ; alors il prend toutes les attitudes possibles, mord légèrement, se presse contre vous, et il accompagne toutes ses gentillesses d'un petit cri assez doux, et qui semble être pour lui l'expression de la joie. Jamais il ne fait aucune grimace ; sa figure, bien différente de celle de la plupart des autres singes, est, au contraire, toujours calme, et paraîtrait même sérieuse; et, quoiqu'il soit mâle, il n'a jamais mani- festé la lubricité qui rend la plupart des singes si dégoûtants. (Fréd. Cuvier.) 9. GUEiNON MONOIDE. CEIiCOPlTlIECUS MONOIDES. (Isidore GeolfroY Sainl-Hilaire.) Caii.vctères spécifiques. — Dessus de la tète et nuque d'un vert oliviitre tiqueté de noir; parties supérieures d'un roux tiqueté, légèrement lavé de vert; épaules, une grande partie des membres et de la queue, noirs; ventre et bas de la poitrine grisâtres; devant de la poitrine et gorge blancs. Habite l'Afrique; jirobablement la cote occidentale. Vi". 81. — Guenon monoîde, (JUADUIIMANES. 1(17 Cette espèce, nommée monuide ;i cause de ses rapports avec la guenon mûne de lîiiffon, a le des- sus de la tète et la nuque d'un veit olivâtre tiqueté de noir; le dessus du col , les côtés de la tête, y compris de longs poils qui garnissent les joues, et la partie inférieure des flancs', d'un roux ti- queté légèrement lavé de vert; les épaules, la face externe des bras, les avant-bras, les quatre mains, une partie des cuisses, et la plus grande partie de la queue, d'un noir pur; le reste des cuisses el la base de la queue d'un noir grisonnant; la face externe des cuisses et des jambes, le ventre et le bas de la poitrine et la gorge, blancs; les oreilles sont garnies supérieurement, à leur face interne, de poils blancs assez longs. La distance du museau à l'origine de la queue est d'un demi-mètre environ , et la queue est plus longue d'un sixième que le corps et la tête pris ensemble. Le cercopithèque monoïde est connu par un individu femelle, donné à la ménagerie du Muséum d'histoire naturelle par madame la princesse de Beauveau; la patrie de ce singe n'était pas exacte- ment déterminée. Déjà vieux lorsqu'il arriva au Muséum, et très-vieux lorsqu'il mourut, il avait les allures et le naturel de la nione et de la diane. 11 est le premier singe de l'ancien continent que j'aie vu enrouler sa queue autour des corps placés à §a portée, et s'en servir pour assurer et facili- ter sa locomotion. (Isidore Geoffroy Saint-Hil.\ire.) tO. GUENON UE DELALANDE. CEnCOPITBECVS LALANDII (Isid. Geoffroy Sainl-llil.iiro ) Car.\ctèbes spÉciFiQnES. — Une bande blanche au devant du front; pelage long, d'nn gris légère- ment olivâtre sur le dos et les flancs; parties inférieures du corps et externes des membres blanchâ- tres ; la face , le menton et les quatre mains, noirs ; queue grise, avec l'extrémité noire ; l'anus en- touré de poils ras d'un roux vif. Habite l'Afrique australe; spécialement la Cafrerie. Nommée aussi guenon naine de Delalande par Desmoulins, qui ne connaissait qu'un jeune individu, cette espèce a la tête et le corps uniformément gris cendré, ainsi que la queue, dont le bout est noir; des poils plus longs débordent le pelage sur la nuque, le dos et les épaules; la gorge est gri- sâtre ; le dedans des membres est d'un gris blanchâtre, plus foncé que la gorge; sous le menton, une tache gris-brun se prolonge vers le larynx, au milieu du blanchâtre de la gorge; la face est de couleur tannée, ainsi que les mains; les sourcils sont noirs et surmontés d'un bandeau grisâtre. ' (Dessioclins.) Mieux connue aujourd'hui , la guenon Delalande a été ainsi caractérisée par M. Isidore Geoffroy Saint-Ililaire. Je conserve à cette espèce, dit le savant professeur du Muséum , le nom du célèbre voyageur qui l'a rapportée, il y a trente ans, de l'Afrique australe; mais je suis obligé de modifier le double nom spécifique, guenon naine de Delalande, qui est fort irrégulièrement formé, et de plus fort inexact. M. Desmoulins n'a, en effet, attribué à la guenon de Delalande une taille naine que parce que, ayant vu seulement de jeunes individus, il les a pris pour des adultes. Cette guenon n'est point rare dans l'Afrique australe, et existe depuis longtemps dans plusieurs collections; mais, à l'exception de M. Desmoulins qui, ainsi qu'on vient de le voir, attribue à l'es- pèce une taille comparativement très-petite, ce singe est toujours resté confondu avec la guenon vervet de Frédéric Cuvier; erreur commise parCuvier lui-même, aussi bien que par les autres zoolo- gistes. La guenon de Delalande a, en effet, h même distribution générale de couleurs que le vervet, et l'anus est de même entouré de poils roux; mais, si la distribution générale des couleurs est la même dans les deux espèces, leur teinte est différente ; le pelage très-long n'est véritablement pas vert chez la guenon de Delalande, même sur le dos et la tête, mais d'un gris à peine teinté de vert ou d'olivâtre. L'erreur qu'a commise Frédéric Cuvier, en confondant en une seule espèce le pijgerijlhrus et le 108 HISTOIRE NATURELLE. Ijikintlu. 110 piHit (r;nllour.sêlie impiitép à Tvpio(-lu' à ce célèbre zoologiste. Longtemps on n'avait connu, d'une part, le cenopUliecus Lakndïï que par de jeunes individus rapportés du Cap par M. Delalande, et le cercopïlhceiis pijfjcnjihms, an contraire, que par deux individus adultes, venus vivants par la voie du commerce, et acquis par la ménagerie du Mu.séum. Fis;. 82. — Guennn llclalando. Il était naturel d'attribuer à des différences d'âge les caractères différentiels que l'on observait entre ces individus, et c'est pourquoi le cercopillicctis pusillus Laland'ù de Desmoulins fut consi- déré, par tous les auteurs, comnie un double emploi du pijjirriitlinis. Mais de nouveaux et riches ma- tériaux sont maintenant à notre disposition. Aux jeunes rercopillicci Lulumiû , rapportés par De- lalande, j'ai pu comparer une belle série d'individus de tout Age et des deux sexes, rapportés par MM. Verreaux ; et c'est sur les résultais de cette comparaison que je me suis fondé pour considérer le ccrcopillients LalandVi comme une espèce voisine, mais distincte, du ccrcupïlhcvus pijijcitjlhnis. (IsiDOKE Geoffroy Sai.\t-11ilaire.) 11. (iUENON DIANF:. CERCOPirnECUS D-ANA. (Erslcben.; Car.\ctères spécifiques. — Pelage d'un marron vif sur le milieu du dos; parties latérales de la face, poils du menton, lesquels forment une barbe pointue et assez longue, gorge, partie interne ri antérieure de l'épaule et du bras, d'un blanc pur; une ligne blanche étroite au devant du front; ventre noirâtre; flancs d'un gris foncé tiqueté de blanc; la queue noire; membres de même couleur, sauf le dedans de la cuisse, qui est roux ou roussàtre, et une ligne longitudinale jaunâtre sur la face externe. labite le Congo et la Guinée. Miili»rouL!< iiiàlo. IM '20. (jUADliLMANKS. 109 La (liane appartient au groupe des yucnoiis de petite taille , dont le naturel est doux et la viva- cité aimable et gracieuse , mais qui n'a point encore été caractérisé avec précision par les organes, si te n'est, toutefois, par l'angle facial. Klle me paraît se rapprocher du Iioclieur, comme celui-ci le fait du blanc nez. Tous ces (|uailrnmanes ont a peu prés la même taille et les mêmes proportions: ils ne diffèrent que par la distribution de leur couleur, en général assez agréablement variée. (FitÉ- DÉnic CUVIER.) Tout le dessus du corps, les lianes, les bras, les cuisses , les jambes , la poitrine, le ventre et la queue, d'un noir uriifornu-; cette teinte est un peu moins foncée sous le corps; dos et flancs tique- tés de bhuK- et de noir; des poils fauves seulement autour des callosités ; un arc mélangé de petits poils blancs et jaunes assez clairsemés sur le front; quelques poils autour du menton, mais sans former de longue barbe; toute la face violâtre, avec du bleu dominant sur les pommettes et les joues, et du rouge dominant autour du museau et sur les paupières; mains noires; les yeux d'un jaune fauve. Telle était, à son entrée à la ménagerie, la diane observée par Trédéric Cuvier. Depuis, les anneaux blancs des poils du dos passèrent au fauve, et cette couleur augmenta aux favoris. (Des- MOIILINS.) L'animal que je décris, dit Frédéric Cuvier, en parlant d'une diane femelle , existe depuis plu- sieurs années dans notre ménagerie, et, à son arrivée, il ne ressemblait pas entièrement à ce qu'il est aujourd'hui. .Mors, sa tête, le dessus de son cou, ses épaules, .ses bras, ses avant-bras, ses mains,, son cou, sa poitrine, son ventre et sa queue, étaient uniformément noirs, mais d'une teinte un peu moins foncée aux parties inférieures du corps et dans une bonne partie de la longueur de la queue que partout ailleurs; le dos it les côtés du corps présentaient un pelage ti([ueté de blanc et de noir, parce que les poils avaient de petits anneaux noirs et blancs; les favoris étaient tiquetés de noir et lie jaune, et l'on voyait aussi un peu de jaune dans le bandeau blanc en forme de croissant renversé qui garnissait le front au-dessus dïs yeux. Quelques poils blancs se remarquaient autour du menton, mais ils n'y formaient point la longue barbe du roloway; et l'on ne trouvait de poils fauves que sous les callosités, et encore étaient-ils en petit nombre. Toute la ligure était d'un violâtre dans lequel le bleu dominait sur les pommettes et les joues, tandis que c'était le rouge qui l'emportait autour du museau et sur les paupières. Les mains étaient entièrement noires, et les yeux d'un jaune fauve. Aujourd'hui la distribution générale de ces couleurs n'est point changée; mais les anneaux blancs des poils du dos sont devenus jaunes, et cette couleur a de même augmenté sur les favoris. En outre, les poils qui garnissent la face interne des cuisses supérieurement sont colorés d'anneaux gris et blancs, ce qui donne à cette partie une teinte grise fort douce; et les poils de la queue sont également cou- verts d'anneaux semblables, mais les gris sont presque noirs. Le pelage de cet animal, très-fourni aux parties supérieures, l'est très-peu aux parties inférieures, où la peau, ainsi que sur le reste du corps, a une teinte violette. 12. GUE.NON MALUliOUCK. CERCOI'ITIIECUS CimsUllUS. (GeolTruy S.iiiil-ll[bire ) C.\R-vcTÈuEs spÉciFiQiEs. — Pelage d'un vert très-jaunâtre, tiqueté de noir sur la tête, le dos, les épaules et les flancs; gris sur la face externe des membres; une bande blanche au devant du front; parties inférieures du corps, ;/ compris le maitoii , et dedans des membres, blancs; face noirâtre, avec le tour des yeux livide; mains noires ou noii'âtres, avec l'c.rlirniilc des iln'niis pins cln'irc; queue d'un gris noirâtre en dessus, blanchâtre en dessous; des poils roux en petit nombre autour de l'a- nus et ne formant point une tache bien circonscrite; scrotum bleu lapis. (Isidore Geoffroy Saim- lIlL.ilRE.) Habite la côte ouest d'Afrique; la Gambie. Le malbrouck est une des grandes espèces de guenons. Lorsqu'il est à terre, dit Frédéric Cuvier, il se tient toujours sur ses quatre pattes; et, comme il est essentiellement organisé pour vivre sur les arbres et pour y grimper, sa marche n'a [loiut d'aisance; ses jambes de derrière étant jilus Ion- no HISTOIRE NATURELLE. gués que celles de devant, il en résulte que la partie antérieure de son corps ne peut pas, dans ses mouvements, se conrormer à ceux de la partie postérieure, et que celle-ci s'avance beaucoup plus que l'autre, ce qui le force à porter alternativement son train de derrière à droite et à gauche, lors- ([u'il veut s'avancer lentement, ou à s'élancer par saïUs lorsqu'il veut courir. Cette conformation, si peu favorable pour des animaux destinés ii vivre ù terre, l'est beaucoup , au contraire , pour ceux qui doivent se nourrir de fruits; l'excédant de longueur des jambes de derrière sur celles de devant Fij. 83. — Guenon nialbrouik. ne nuit point |iour grimper aux arbres, et donne, au contraire, le moyen de .s'élancer de branche en branche, et même d'un arbre à l'autre ; aussi ces singes descendent-ils rarement à terre ; réunis en troupes, ils peuplent, avec les oiseaux, le ciel de verdure qui couvre les riches forêts de l'Asie mé- ridionale, où l'on croit qu'ils .se trouvent, car on n'est pas bien certain encore des pays qu'ils ha- bitent; dans ces retraites élevées, ils n'ont guère d'autres ennemis à craindre que l'homme et les grands serpents; c'est pourquoi sans doute ils se rencontrent en nombre si considérable, qu'ils fati- guent le voyageur autant par la pétulance de leurs mouvements que par l'importunité de leurs cris. Nous en avons possédé un assez grand nombre, de tout âge et de tout sexe; il n'est point d'animaux plus agiles : celui que nous avons le mieux examiné s'élançait souvent de manière à faire plusieurs tours, comme en volant, couché sur le côté, ne se soutenant ainsi en l'air que par l'impulsion qu'il se donnait en frappant de ses pieds les parois de sa cage. Ces malbroucks faisaient rarement enten- dre leur voix, qui ne fut jamais qu'un cri aigre et faible, ou bien un grognement sourd. Les mâles, dans leur jeunesse, étaient assez dociles; msis, dés que l'âge adulte arrivait, ils devenaient méchants, même pour ceux qui les soignaient; les femelles restaient plus douces, et paraissaient seules suscep- tibles d'attachement. La circonspection est une des qualités principales du caractère de cette espèce; cependant les malbroucks sont excessivement irritables; mais si d'un côté ils sont violemment poussés par leurs penchants, de l'autre ils calculent tous leurs mouvements avec soin; et lorsqu'ils attaquent, c'est toujours par derrière et quand on n'est point occupé d'eux; alors ils se précipitent sur vous, vous blessent de leurs dents ou de leurs ongles, et s'élancent aussitôt pour se mettre hors de votre portée, sans cependant vous perdre de vue, et cela autant pour saisir le moment favorable à une nouvelle attaque que pour se soustraire à votre vengeance. L'extrême irritabilité du malbrouck est cause qu'on ne peut ni l'apprivoiser entièrement ni lui faire supporter de contrainte; c'est-à-dire qu'il n'est susceptible d'aucune éducation, que de celle de la nature; dès qu'on le violente et qu'on veut qu'il obéisse, sa pétulance cesse, il devient triste et taciturne, et bientôt après il meurt. Ces animaux se servent de leurs mains avec beaucoup d'adresse; ce sont des organes qu'ils emploient à tout; c'est avec elles qu'ils portent ordinairement leur manger à leur bouche, qu'ils jouent, qu'ils se battent; et ils saisissent les plus petits objets entre leur index et le pouce, malgré la brièveté de celui-ci. Lorsqu'ils mangent des fruits ou des racines, ils ont toujours soin de les peler avec leurô ui!.\l»llll.\IAM';s. m Fig s't. — Main antérieure ilti iinlbrotick. l'i;^. Sô. — M.ùii |nl^l^'■rieu^o ilii riiallirouiK. LtLf ST.,!: Fis. SI). — GiKiioii ÈiKilljroUL-k. H2 HISTOIRE NATURELLE. (lents; et ils flairent tout ce qu'on leur donne à manger; ils boivent constamment en humant. Leurs s<>ns sont fort bons, sans eepcndant être délicats; et c'est de celui de la vue dont ils font évidem- ment le plus d'usage. Les mâles paraissent toujours disposés à l'accouplement, mais je n'ai jamais vu de femelles dans ce cas; ainsi l'on ignore toutes les circonstances qui sont relatives à la repro- duction de cette espèce. En général, les guenons sont beaucoup moins portées à se reproduire dans nos climats, et dans la gêne où nous les tenons, que les autres singes de l'ancien continent. Toutes les parties supérieures du corps du malbrouck sont d'un gris verdàtre, qui résulte de poils alternativement colorés de jaune et de noir dans leur moitié extérieure; les membres, en dessus, et la queue, dans toute sa longueur, sont d'une couleur grise, produite aussi par des poils couverts d'an- neaux blancs et noirs. Les poils de toutes ces parties sont gris à leur base; la face interne des mem- bres, la partie supérieure des cuisses, le ventre, la poitrine, le cou, la gorge, les joues, et un ban- deau sur les sourcils, sont blancs. Les poils des côtés des joues sont très-longs, et se dirigent en ar- riére, en formant des espèces de favoris; les yeux sont bruns; le museau est noir, excepté autour des yeux, où il y a de la couleur de chair; et cette dernière couleur tient d'autant plus de place que les individus sont pins jeunes; les oreilles et les paumes des mains sont également noires; les callosités et le tour de l'anus sont rouges, et cette couleur devient encore plus vive à l'époque du rut; entin, le scrotum est remarquable par sa belle couleur du lapis le plus pur. (Fhédéric Cuvier.) t'ij;. S". — Tùle lie iiiiilbioucii 15. GlUONON TA.NT.M.r:. n-nCdVlTIll'XllS TA.\TM.i;s. (Ogill))-. Caractèhes spécifiques. — Pelage vert olivâire en dessus; queue brune, et lerminêe par une houppe de poils jaunes. Habite. patrie inconnue. Cette espèce n'est coiinni' (jiie par la desiriptioii ([n'en donne Ogilby. et elle est malheureusemenP trop peu détaillée, comme la plupart des caractéristiques fournies par les journaux scientifiques, lors- que les auteurs veulent s'assurer la priorité d'une description, véritable abus, consacré par l'usage, mais dont il est facile de comprendre les inconvénients; car il suffit de donner un nom à un animal, d'en fiire une description sommaire l'I presque toujours insuffisante, pour laisser à l'anlcnr le droit d'attendre ((u'il lui convienne de compléter son travail, et souvent il se croit dépouillé liiis{ine d'au- QUAimiJMANKS H3 1res, dans ce cas, donnent nn antro nom accompagné d'une description complète à l'animal que le premier aurait pu faire connaître de suite. De h'i cette multiplicité des noms, cette synonymie em- brouillée, ces erreurs inévitables, et le défioùt qu'on éprouve lors([u'on veut déterminer exactement une espèce qui a reçu dix ou douze noms difrérents, répétés ou cités sans examen, par autant d'au- teurs peu scrupuleux sur le choix des autorités qu'ils citent. Les nombreuses citations que l'on trouve dans les auteurs systématiques, dit Frédéric Cuvier, fe- raient naturellement penser que les animaux qui en sont l'objet ont été vus par un grand nombre d'observateurs, et qu'en réunissant ce que chacun d'eux a rapporté, on aurait, de la nature de ces animaux, une histoire complète. Cependant il n'en est point, à beaucoup près, ainsi : dès qu'on examine ces citations nombreuses et si variées, on voit bientôt qu'elles ne sont qu'un luxe d'érudi- tion inutile, que, de tous les auteurs dont elles rapportent les noms, il n'y en a qu'un fort petit nom- bre d'originaux , que les autres sont de simples copistes, et que tout ce qu'on possède sur ces sujets, si complètement traités en apparence, consiste en quelques observations isolées, souvent contradictoires, qui, presque toujours, plongent l'esprit dans une situation plus pénible encore à supporter qu'une entière ignorance. Nous nous élevons avec d'autant plus de force contre ce faste de citations, qu'il n'a d'autres effets que d'induire en erreur, d'affaiblir le zèle, et d'empêcher que de véritables recherches ne soient acquises. La guenon tantale a le pelage d'un vert olivâtre en dessus, et (U'udré sur la face externe des membres; la ((ueue est brune, mais terminée, comme chez le callitriche, par des poils jaunes, et les parties inférieures du corps sont de cette couleui'; la face est noirâtre, avec le tour des yeux livide; il existe une bande sourcilière blanche. 14. GUENON I\OUX-VL';iVr. CEIICOPITIIECUS liUFV-ViniDIS. visi.l. ClmiUio)- Saiiit-llibire.) CAR.^CTiir.ES SPÉCIFIQUES. — Uiie bande sourcilière blanche; face noire; pelage vert roussàire en dessus, gris verdâtre sur les épaules et les cuisses, blanchâtre en dessous et loux sur les flancs. Habite l'Afrique, côte occidentale. Le dessus du corps et de la tète est d'un vert olivâtre, plus lavé de roux sur le corps que sur la tète; les flancs sont, dans la partie qui se rapproche de l'épaule, d'un vert roussâtre; les poils lai- neux sont, dans cette région, lavés de fauve roux sur une partie de leur étendue, et les poils soyeux, annelés de noir et de vert. Plus en arrière, vers le milieu des flancs, les poils laineux sont presque entièrement d'un fauve roussâtre clair, peu différent de la couleur connue sous le nom de nankin, et cette couleur se montre au dehors, chez notre individu du moins au travers des poils soyeux an- nelés de vert et de noir, peu nombreux en cette partie. Enlin, plus en arrière, et jusqu'aux aines, les flancs sont d'un fauve roussâtre presque pur, les poils laineux étant de cette couleur, sauf la racine, qui est blanche, et les poils soyeux, toujours annelés de vert et de noir, étant extrêmement peu nom- breux. Vi'^. SH. — Gucnoii ruux-vcrt. 11 15 1l'f iirSTOIRE NATllUELM'. Los ('iiaiilos et les cuisses sont d'un vert giisMlro; la faee externe des avant-liras et des janihes d'un gris ii([iielé de verdàtre; les qualre mains, grisonnant. Quant à la fare interne des quatre mem- bres, elle est blanche, de même que les parties infei'ieures. La queue est, en dessus, d'un gris licjueté ; elle est blanchâtre en dessous; son extrémité est noire en dessus. Il existe quelques poils roux entre la queue et les callosités, à peu près comme chez la gneiion malbioiuk. La fare est noire, comme chez la guenon grivet, avec un bandeau blanc en avant du front ; le men- ton est noir; sur les côtés de la face existent de longs poils blancs, dirigés en arriére et en haut, à peu prés comme chez le grivet. La guenon roux-vert, quoique trés-voisine des guenons grivet et vervet, se distingue nettement de l'une et de l'aulre. (Uitre la couleur des lianes, et spécialement celle des poils laineux, qui sont blancs dans ces deux espèces, iiulre ([ucl((ues antres différences encore, il suflira de rap]ieler ici, pour la première, la couleur grise de la face externe des épaules, des cuisses, et, à plus forte rai- son, des avant-bras et des jambes; la couleur du menton, qui est revêtu de poils blancs et de poils roux; colle du pourtour de l'anus, où l'on voit aussi de longs poils blancs et point de poils roux ; |iour la seconde, le caractère qui lui a valu le nom de p;/f/cri;(/()-».ï, et la couleur nuire des quatre mains, ilsinoiir: tli'.iiFriaiv S.viM-lliLviiii:.) lô. CUliNON l'A'l'.\S..ft7lfo;'/n;£CrS llUniUI (Geoffroy Saml-Hihiii-o.) C.\a\CTÈr,Es SPÉCIFIQUES. — IVlage d'un fauve vif sur le corps et les parties externes des membres, Fig. 89. — Guenon patas. (jUADlUiMANES. 115 blanc en dessous et en dedans des mêmes parties; queue ruuge eu dessus, blanclie eu dessous; poils de la lèle roux vif; un bandeau noir sur le front; parfois un bandeau blaiie. Habite le Sénégal et l'Élhiopie. Buffon el Itaubenton ont décrit cette espèce sous le nom de patas à bandeau iioii', de singe rouge du Sénégal, et de palas à bandeau blanc, ce dernier comme variété du premier. Frédéric Cuvier semble disposé à croire qu'il existe deux espèces, laissant toutefois la question indécise. Voyons ce (ju'il dit de ces singes : Le patas est une des espèces les plus reniarcpiables du genre guenon, à cause de sa couleur d' un roux uniforme l'I brillant. En effet, la phqiart des autres guenons ont le pelage varié de noir et de jaune, plus ou moins fauve ou Idanc, nuances qui prodiiis<'nt une teinte tantôt claire et brillante, tantôt som- bre el foncée. Les rapports du patas sont plus nombreux avec les callitriclies et les malbroueks, etc., qu'avec les niônes et les ascagnes; son front n'a point le développement de celui des derniers; aussi ii'a-t-il pas leur naturel aimable et doux; et sa taille devient [ilus grande que la leur. Toutes les parties supérieures de cet animal sont d'un fauve brillant, qui s'affaibii de ton, et prend une légère teinte grisâtre en descendant sur les bras et sur les jambes. La ((ueue est également fauve à sou origine; mais cette couleur se mêle aussi au gris et au jaunâtre à mesure qu'elle s'avance vers l'extrémité de cet organe, et ces changements sont encore plus sensibles â sa partie inférieure. Toutes les autres parties du corps de cet animal sont blanches, c'est-à-dire le ventre, la poitrine, la face interne des membres et les favoris, oU l'on voit cependant quelques poils jaunâtres. La peau des quatre mains est d'une couleur de chair violâtre, et celle de la face de la même nuance, mais plus claire; sur la lèvre supérieure, deux lignes, en forme de moustaches, sont revêtues de poils noirs, mais très-courts, qui donnent à cet animal une physionomie toute particulière. Ce pelage n'est formé que de poils soyeux, qui sont gris à leur base, jaiine foncé au milieu, et noirs à leur pointe, et cette pointe noire se retrouve encore sur les poils entièrement blancs ; ils sont généralement assez courts, excepté à l'occiput, où ils sont beaucoup plus longs qu'aux autres parties; et les favoris se séparent vis-à-vis des oreilles, comme pour mettre ces organes à découvert. Du reste, le patas a l'organisation des autres guenons; il ressemble, de tous iioints, au malbrouck, par les organes des sens et de la manducation, par ceux du mouvement et par ceux de la génération, c'est-à-dire qu'il appartient à leur genre. J'ai possédé deux individus de cette espèce, et tous deux, quoique jeunes, étaient déjà méchants; ils montraient l'emportement, le caprice, et l'inaiTeclion des guenons; mais ils auuoiieaieiit aussi toute la pénétration de ces animaux. L'un était mâle et l'iiiitre femelle; ils étaient- du même âge, et se ressemblaient entièrement. Cette belle espèce de singe est connue depuis longtemps, et la couleur paiticulière qui ta distingue n'a pas permis qu'elle devint un sujet d'erreur en synonymie. Ou a toujours pu la reconuaitie aisé- ment; toutefois, quoiqu'elle ne paraisse pas très-rare, elle n'a pas été souvent représentée ni décrite. bufl'on a parlé d'un patas à bandeau noir et d'un patas à bandeau blanc, et il a donné les figures de l'un et de l'autre; mais il ne regardait leurs différences que comme différences de variété. J'ai moi-méuie donné la ligure et la description d'un palas à bandeau noir dans la 15'" livraison de mon ouvrage. Depuis j'avais eu occasion d'observer un grand nombre de patas, et tous appartenant à l'espèce ([ue j'ai décrite, ou, autrement, à la variété caractérisée [lar le bandeau noir. Aujourd'hui le hasard m'a procuré la variété ou l'espèce à bandeau blanc, beaucoup plus rare, sans doute, que la première, et qui se présente avec des caractères assez particuliers pour qu'il devienne important de la connaître mieux qu'il n'était possible de le faire par le peu de mots qu'en disent liuffon et Daubenton; car elle se distingue de la première autrement ([ue par li' bandeau du front, et pourrait faire mettreen doute ce simple titre de variété sous lequel tous les naturalistes l'ont désignée jus([u'à iirésent. A la vérité, mon patas à bandeau noir était une jeune femelle, tandis que celui à bandeau blanc était un mâle adulte, et l'on pourrait attribuer les dif.erences de couleur aux différences d'âge ou de sexe; mais, outre que l'individu à bandeau noir de Dulfon était une femelle adulte, ce ([ui exclutl 'in- fluence de l'âge, on sait que dans le genre très-naturel des guenons les mâles et les femelles ne dif- férent point par les couleurs; et ce qui a été observé chez les callitriclies, les grivets, les mal- 110 HISTOmii NATURELLE. broiR'Ls, les mangabeys, existe sans doute chez les patas. Par conséquent, le palas à bandeau noir et le patas à bandeau blanc sont des types de deux espèces. Nous ne toucherons point à cette ques- tion sur le seul examen de l'individu que nous publions aujourd'hui; nous pourrions même dire le seul que l'on connaisse, car Buffon et Daubenton se bornent à indiquer, en parlant de leur second patas, le trait qui le distingue du premier. D'autres détails porteront à penser que d'autres traits en- core, non moins importants que le |)remier, ]>()uvaieiil être présentés. En effet , notre patas à bandeau blanc diffère de l'autre par un pelage roux moins foncé et plus orangé aux parties supérieures du corps, par l'absence de moustaches noires sur les lèvres, par des membres antérieurs, gris dans toute l'étendue de leur face supérieure, depuis l'épaule jusqu'à la main, au lieu d'être roux; par la jambe de derrière, entièrement grise, au lieu d'être rousse; par deux lignes de poils noirs qui partent obliquement de chaque extrémité du bandeau blanc, et qui viennent se reunir sur la tête, à peu près à distance égale de son sommet et du front; et, enlin, par une la('he blanchâtre sur la cuisse, au-dessous de la base de la queue. Pour tout le reste, ces ani- maux sont semblables; ils ont les mêiiTes proportions, et paraissent avoir le même naturel. Les différences que nous venons de signaler entre les deux patas sont à peu près égales à celles qui distinguent l'un de l'antre les callilriches, les grivets, les inalbroucks, les vervets, etc.; mais, nous le répétons, nous ne prononcerons point sur ce que ces différences peuvent avoir de spécifi- que, il nous suffit, pour le moment, de les faire connaître. De nouvelles observations viendront, plus lard, pour décider la question qui, aujourd'iuii, nous parait encore indécise. (Frkdéric Ccvifii.) 10 fiUENON CALLITRICtlE rF.nrOPITlIECVS SAUMVS. ( Erxlcbcn.) (IM. 17.) CARACTÈnES SPÉCIFIQUES. — Pelage vert doré vif en dessus, gris sur les régions externes des mem- bres; queue jaune verdâtre, terminée par un bouquet de poils jaunes; parties inférieures et internes d'un blanc lavé de jaunfitrr; favoris jaune doré; scrotum blanc verdâtre; peau nue des extrémités, noire; face noire et surmontée d'une ligne sourcilière blanche, peu distincte, Habite le Sénégal, le Gap et les iles du cap Vcit. Le callitriche, dit Frédéric Cuvier, a les plus grands rapports avec le malbrouck, que nous avons décrit; ils sont tous deux du même genre : tout ce qui est propre à l'un des organes des sens, dans ceux du mouvement, et dans ceux de la génération, est, sans nulle exception, propre à l'autre, et ils ne doivent également que très-peu différer par l'intelligence. Aussi je ne rapporterai point ce que j'ai dit avec assez de détails sur ces divers sujets à l'article du malbrouck, et je passerai immédiate- ment aux caractères spécifiques. La couleur du callitriche, aux parties supérieures du corps, est d'un vert jaunâtre, comme son nom vulgaire l'indique, et provient de poils couverts d'anneaux jaunes et noirs, sur lesquels le jaune domine; la face externe des jambes est plus grise, le jaune des poils ayant disparu en partie; le des- sus de la queue est comme le dessus du corps, mais elle est terminée par un long pinceau de poils jaunes. Les parties inférieures, la face interne des jambes, le dessous de la mâchoire, de la gorge et du cou, sont blanc jaunâtre; le dessous de la queue est plus grisâtre que le dessus et que les poils qui environnent en arrière les parties de la génération; ceux du dessus des sourcils, et ceux des fa- voris, sont d'un brun-jaune ; et ces derniers se dirigent d'avant en arrière, en s'ccartant un peu, de sorte que, vus de face, ils forment comme une sorte de fraise. La face, les oreilles et la peau des mains, sont tout à fait noires; la peau des testicules est verdâtre. Les oreilles diffèrent de celles du malbrouck, en ce qu'elles sont moins arrondies et commencent à s'allonger en pointe; elles sem- blent faire le passage des oreilles de guenons aux oreilles de macaques. Comparé au malbrouck, le callitriche a aussi la face plus allongée, moins arrondie, sans cependant que cette différence paraisse influer en rien sur les qualités de l'entendement. Dans nos ménageries, ces singes montrent de la malice et de l'intelligence; mais ni l'une ni l'autre Guciioii couronnée l'I. 18. QUADRUMANES. Il' n'ont l'occasion de se développer, et , à p;irl ce qu'en dit Adanson , on ne connaît rien sur leurs mœurs à l'état de liberté. Ce célèbre voyageur a trouvé ces singes en très-grande quantité au Sé- négal ; ils se tiennent sur les arbres, en troupes très-nombreuses, et gardent le plus profond si- lence, même lorsqu'ils sont blessés. 11 ne les aperçut d'abord que par les brancbes que ces animaux lui jetaient, et les coups de fusil ne les effrayaient point; il en tua vingt-trois dans moins d'une lieure, et dans l'espace de vingt toises. Cependant ils finirent par se cacber derrière les plus grosses iiranches ou par s'éloigner, soit en descendant à terre, soit en .s'élançant de la cime d'un arbre à la cime d'un antre. Fig 00 — Guenon callitrichc. La Ménagerie du roi a souvent possédé des callitriches mâles; et je n'ai jamais eu l'occasion d'en voir de femelles. Buffon rapporte qu'elles ont une menstruation pcriodi([ue, mais il ne dit point si les parties environnantes des organes génitaux étaient susceptibles de se gonfler par l'accumulation du sang, comme il arrive à d'autres guenons, et on ne sait rien sur leur génération. L'individu que j'ai fait représenter était fort beau et assez doux, quoique adulte; il aimait à se faire gratter par les personnes qu'il connaissait, et il chercbait rarement à nuire. Lorsqu'il éprouvait du contentement, il faisait entendre un petit grognement particulier assez doux, qu'on pourrait reproduire par la syl- labe grou, sur l'r de laquelle le son se prolongerait; il ne se mettait point en colère. (FnÉuÉiiic CUVIER.) il GUENON VEIWET. CEMOPITnECVS PÏGERYTnnVS. (Fréd. Cuvier.) CvRACTÈiiES SPÉCIFIQUES. — Uuc baudc blancbe au devant du front; pelage d'un vert jaunâtre, ti- queté de noir sur la tète, le dos, les épaules, les flancs et le dessus de la queue; gris sur la face externe des membres; parties inférieures du corps et de la queue, et dedans des membres, blancs; la face, le menton, les quatre mains, dans leur totalité, et le bout de la queue, noirs; tour de l'anus d'un roux vif; scrotum vert-de-gris. Habite l'Afrique, région encore indéterminée. Le nom de pj/^ccf/z/irics . donné à cette espèce par Frédéric Cuvier, veut dire derrière rouge, et 118 HISTOIRE NATURELLE. exprime la particularilé que présente le vervet d'avoir l'anus bordé de poils de couleur rousse, par- ticularité qui ne lui est cependant pas exclusive, car plusieurs autres espèces nous en olfrirûnl l'exemple. Fig. 91. — Guenon vervet. 18. GUENON GRIVET. CERCOPITUECVS GRISEO-VIRIDIS. ( Desmarest.) Caractères spécifiques. — Face noire bleuâtre; tour des yeux carné; favoris et bandeau frontal blancs; pelage vert sale sur le corps et sur les flancs, blanc assez pur en dedans des membres, sur le ventre et le thorax; pieds et mains d'un noir vif; queue grise dans toute son étendue; scrotum vert-dc-sris, entouré de poils orangés. Habite la Nubie, l'Abyssinie el l'Egypte. Legrivet est connu, en Abyssinie, sous le nom de loin, et, dans le Sennaar, sous celui à'abcUan. Cet animal ressemble beaucoup au malbrouck par les couleurs générales du pelage, mais il en diffère par les formes de la tête, moins arrondies, par le scrotum, qui est d'un vert de cuivre, au lieu d'être bleu lapis. Il se distingue du callitriclie par sa couleur beaucoup plus sombre, le bandeau blanc des sourcils, ses favoris blancs el sa queue grise jusqu'à son extrémité; il lui ressemble, au coiiti'aire, par la forme pyramidale de la tête, par la couleur du scrotum, et par la coloration des poils qui en- vironnent ces organes, jaune, il est vrai, chez le callilriche, au lieu d'être orangée. Toutes les parties supérieures de son corps, excepté les membres el la queue, sont d'un vert sale QUADItllMANKS. 119 (|iii l'osiillo dos poils anncli's do i^ris noirâtre et do jaiino livido; los poils dos oiiissos ont la mômo disposition, mais il y a tros-pcu de jaune; cl tous los anneaux sont gris et blancs sur les pattes de devant et de derrière. A la face interne des membres, au ventre, à la poitrine, à la partie antérieure des épaules, au cou et à la face interne de la queue, le poil est blanc. Les favoris, et un bandeau qui passe sur les sourcils, ont aussi cette couleur; les oreilles, la paume des quatre mains et la face, sont Fig. 92. — Grivet et son petit. d'un noir violàtre, mais le tour des yeux est d'une couleur de cbair livide; quelques poils noirs, longs et roides, assez semblables à des soies, naissent sur la crête sourcilière, entre les deux yeux. J'ignore d'où cette espèce est originaire; et elle arrive assez fréquemment en Europe pour qu'on doivesupposer qu'elle a déjà été vue par les naturalistes; mais aucun d'eux ne l'a encore décrite, parce qu'elle a été confondue sans doute avec le callitriche, dont elle a la face allongée, et qui était mieux connu que le malbrouck, dont les véritables caractères, pendant bien longtemps, ont été ignorés. Le grivet a le naturel des guenons de grande taille. Celui que j'ai fait représenter avait été donné à 120 HISTOIRE NATLUil'LLE. la Ménagerie du roi parce que sa familiarité commençait à devenir dangereuse. Une feniello à la- quelle nous l'avions réuni, mais qui n'a jamais éprouvé le besoin du rut, parce qu'elle était f^iible et malade, a, par contre, toujours conservé sa docilité. Elle avait été élevée avec douceur, et n'avait jamais reçu de son maître que des caresses; aussi, répondant à ce traitement, elle avait acquis une confiance si grande, qu'elle en était devenue importune. Nous avons déjà eu plusieurs occasions de faire remarquer, chez les femelles de singes, cette dis- position à la coniiance et ce besoin d'affection qu'on ne rencontre que comme une exception chez les mâles; mais'c'est sans raison qu'on a dit que ce besoin .se manifestait plutôt pour un homme que pour une femme. Ces animaux sont trés-susceptibles de jalousie, ou plutôt d'un sentiment qui a l'apparence exté- rieure de cette passion; car elle ne peut pas exister chez les animaux avec les mêmes caractères que chez l'homme; mais il l'exprime indépendamment de tout rapport de sexe. Lorsqu'un singe femelle est attaché à sa maîtresse, il témoigne indifféremment, aux hommes et aux femmes, son espèce de jalousie; et s'il est quelquefois arrivé autrement, cela à tenu si^rement à des circonstances qui n'ont point été appréciées. Le nom que j'ai donné à cet animal est celui qu'il avait reçu de son maître, et auquel il répondait. (Fuédéric Cuvier.) 19. GUENON IIOLOWAY. CliMoflTIIECUS liOLUWAY. (Eiïlelicn.) Caracikhes srÉcii'iQUEs. — Dos brun très-foncé, presque noir; barbe pointue et blanche; dessous (lu cou. poitrine, ventre et face interne des cuisses, de couleur blanche, tirant sur l'orange. Habite la Guinée. Cette espèce a aussi reçu, de quelques auteurs, le nom de palatine. Elle a le dos d'un l)run très- foncé, et même presque noir; la tète, les flancs, les cuisses et les jambes, sont d'un gris obscur, les poils étant terminés par une pointe blanchûlre. On remarcpie une ligne blanche sur le devant du front, et, .sous le niei:ton, une barbe pointue pareillement blanche; la poitrine, le ventre et la face interne des cuisses, sont d'une couleur blanche tirant sur l'orangé, quand il n'y pas eu décoloration. (Isidore Geoffroy S.\im-IIilaire.) 20. GUE.NON UK TliMMlNCK. CERCOPITBECVS TEMMiyChlI. (Ogllby ) C\RACTÎ:iiES spécifiques. —Pelage gris cendré, mêlé de roux et de blanc; extrémités noires; men- ton et gorge blancs; face nue et d'un gris.de plomb pâle. Habite la Guinée. Le seul individu connu de cette espèce est au musée de Lejde, et encore est-il en si mauvais état, qu'il n'est guère possible d'en donner une description complète exacte. La couleur de la queue ne peut èlie indiquée. 21. GUENON A llIAllLME. CEItCOPlTflECUS LEUCAMPYX. (Fischer.) (IM. 18.) CARArTiiRES SPÉCIFIQUES. — Dcssus du corps et joues d'un gris olivâtre, tiqueté de noir; une tache, en forme de croissant, sur le front : cette tache est blanche, ainsi que le dessus du menton (mais non toute la gorge et la poitrine); queue noire, tiquetée de blanc; le reste noir. llaiiiie la côte occidentale d'Afrique. (juL'iiori à ùiadcmo. [M. m QUADRUMANES. 121 Cette espèce, très-voisine du roloway et de la diane, s"en dislingue par l'absence de barbe cl par une lunule frontale beaucoup plus grande. M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, comparant les trois espèces, confondues quelquefois par divers auteurs, fait remarquer que le roloway a la gorge, la poi- trine et le ventre blancs; que la diane a seulement de cette couleur la gorge et la poitrine, mais non le ventre, qui est noirâtre; et que, chez la guenon à diadème, il n'y a de blanc que le menton. Fig. 95. — Guenon à diadème. 22. GUENON PLUTON. CEIICOPITUECUS PLUTO iGiay.; Cette espèce existe dans la Ménagerie du jardin de la Société ztologique de Londres. Elle a été nommée, et très-sommairement décrite, par M. Cray. Nous dirons, d'après lui, qu'elle a été trouvée à Angola, et nous croyons devoir reproduire la ligure qu'il en donne. 23 GUENON A FAVORIS NOIRS. CERCOPITBECVS MELAXOGEyrs. (Gray.) (l'I. 15, lig 1 ) Nous donnons aussi la figure de cette espèce, nouvellement décrite par .\I. Gray; elle vient de la côte occidentale d'Afrique 24. GUENON LUDIO. CERCOPITHECIS LUDIO. (Gray.) (PI. 15, lig. 'i) Cette espèce de guenon est encore de la côte occidentale d'Afrique; elle a été récemment décrite et figurée par M. Gray; nous ne pouvons que la citer, et reproduire la figure que le savant naturaliste anglais en donne dans les Proveed'uKjs de la Société zoologique de Londres. 25. GUENON TEPllROPS. CEnCOPITIIECUS TEPIIROPS. (Bunnett CARACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Pelage bmn vcrdàtro cu (icssMs, blanc en dessous; membres gris en 12 IG vil HISTOIRE NATURELLE. fhors; face de couleur de chair pâle; fesses, joues et rebord des lèvres, couverts de poils courts t fuligineux. Habite la cote occidentale d'Afrique 26. GUENON NISNAS. CERCOPITHECUS PYRRIIONOTUS. (Ilcniprich ) Caractèiies spécifiques. — Pelage roux doré sur le corps et sur les membres, blanc en dessous, en dedans, .sur les avant-bras et sur les jambes; une tache triangulaire, rousse, bordée de brun-noir sur le front; face nue; des poils blancs, serrés, sur le nez; paupières carnées; scrotum bleu-vert; pourtour de l'anus rouge fulgide. Habite la Darschakie, entre le Spnnaar et le Dongola. Cette espèce est connue des Darfuriens sous le nom de nisnas. Elle ressemble beaucoup au patas, mais elle paraît devenir un peu plus forte; elle a aussi le museau plus élargi et plus obtus, la queue plus longue et la face entièrement noire. Sa couleur, dit M. Valencienne, est d'un beau rouge-brique sur le corps, les bras, la partie antérieure des cuisses et la queue. Celte teinte s'affaiblit et passe au jaune-paille sur l'occiput; le front est un peu plus vif que le dos; les joues sont blanches; la par- tie nue de la face est noirAtre; les avant-bras, les jambes et la partie postérieure des cuisse , sont d'un blanc pur; le dedans des mains et des pieds est noir; le scrotum est d'une belle couleur d'oxyde vert de cuivre. Cette espèce, très-rare, fait partie de la collection zoologique du musée de Berlin. On la dé,sign« aussi sous le nom de guenon à dos rouge. Fig. 94. — Guenon nisnas. QllADIlUMANES. 123 27. GUENON A OREILI.KS ROUGES. CERCOPITIIECUS ERYTHROTIS. (Waterliousc.) (lAfiACTKiiEs SPÉCIFIQUES. — Oieilles lousses; queue d'un roux vif. Habile l'île de Fernaïuio-Po. Cotte i^uenon, décrile par M. Waterliouse, a le pelage gris, formé de poils annelés de jaune et de noir; les joues et la gorge sont blaneiies; les bras noirâtres; les oreilles rousses, ainsi que la ré- gion anale. La queue est d'un roux vif; elle a la ligne médiane supérieure et l'extrémité noirâtres. Fier. 95. — Gucnoii voisine ^ fltl' Fii;. 102. — Tète de mangabey femelle. 2. MACAQUE ENFUME. ilACACVS FULlGimSVS. (Geotlroy Saint-Hilaire.) C.\RACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Pelage, en dessus et en dehors des membres, grls-bruii fuligineux, blanchâtre, lavé de gris en dessous et en dedans des membres, sur les joues et sous le menton; pau- pières blanches. Habite le Congo, la Côte-d'Or. Cette espèce est le mangabey sans collier de Ruffon. « Tout le dessus du corps et la queue sont d'un gris d'ardoise, passant au noir sur les membres; le dessous du corps et les favoris blancs grisâtres ; mains noires; oreilles violâtres; la paupière supé- rieure, toujours blanche, se détache fortement du visage, quelquefois tout entier d'une teinte livide foncée; quelquefois noirâtre en bas et cuivré sur tout le reste. C'est la seule des guenons qui porte sa queue renversée et droite parallèlement au dos. Frédéric Cuvier n'en a pas vu, sur un tiè.s-grand nombre, une seule qui ne fût douce et familière, malgré la plus grande pétulance. Les mâles accom- pagnent leurs gesticulations d'une sorte de rire. Nous en avons longtemps observé un vivant au mi- lieu des animaux destinés aux expériences de Magendie; jamais il ne leur cherciiait querelle. 11 op- posait même une assez grande patience aux provocations des élèves. » (Desmouliins.) Les femelles, à l'époque du rut, ou chaque mois, éprouvent un gonflement considérable des par- ties sexuelles. 3. MACAQUE TOQUE. MACACUS RADIATUS. (Desniarest.) C.vRACTÈRES SPÉCIFIQUES. — Pelage d'un brun verdâlre sur le corps et la tète; dessous du corps et de la queue, et partie interne des membres, blancs; membres grisâtres sur leur face externe; queue brunâtre ou noirâtre en dessus. Habite l'Inde, et principalement la côte de Malabar. 128 HISTOIRE NATURELLE. Le macaque toque a été décrit, par Ruffon, sous le nom de bonnet chinois, qui a été donné aune autre espèce par Geoffroy Saintllilaire. Cet animal est surtout remarquable, dit Frédéric Cuvier, par la singulière forme de sa tète et de son museau. Sous ce rapport, il diffère extrêmement de toutes les autres espèces de macaques, qui ts^cî^^ h< /'>!'? Fig. 103 — To\iue mâle. ont généralement un museau lourd et épais, tandis que ce toque l'a mince et étroit, ce qui semble donner plus d'aplatissement à son froni, dont la nudité et les rides sont, pour lui, des caractères exclusifs. Une autre partie de son organisation le caractérise encore : c'est la forme du gland. Chez le macaque, le magot et le rhésus, cet organe est simplement piriforme ; chez le toque, il se compose de trois parties distinctes : l'antérieure, qui est en forme de poire, et la postérieure, formée de deux bourrelets épais; de sorte que, dans l'érection, la coupe longitudinale de ce gland pré- senterait la ligure d'une feuille à trois lobes, les deux latéraux arrondis, et le moyen allongé. Pour tout ce qui concerne les autres organes essentiels, ce toque ressemblait aux macaques que nous avons déjà décrits; il en avait les dents, les sens, les membres, et il les employait aux mêmes usages qu'eux. Son pelage, composé de poils soyeux seulement, était d'un gris verdàtre, parce que lei poils, tous gris à leur moitié inférieure, avaient leur aulre moitié divisée par anneaux noirs et jaune sale; le dessous du corps, la face interne des membres, et le dessous de la queue, étaient blanchâtres; le dessus de la queue avait la couleur du dos; les poils divergents du dessus de la tète n'étaient pas fort longs, et leur divergence est un des caractères constants de cette espèce : tous les individus que j'ai vus avaient cette calotte de poils; ainsi, les conjectures de Daubenton, et celles de Buffon même, pour assimiler cette disposition de poils de la tête à un accident semblable à celui qui produit l'ai- grette des jeunes macaques, paraissent tout à fait dénuées de fondement. La peau des mains était violûtre; celle de la face du corps, et de toutes les autres parties nues, était d'une couleur livide; QUADRUMANES. 129 quelques poils rares garnissaient le front, rouvert, comme nous l'avons déjà dit, d'un assez grand nombre de rides, et quelques mouslaclies, très-eourtes. s'apercevaient sur la lèvre supérieure; les joues étaient creuses, et l'oreille avait un pli qui en rabaissait la pointe : mais c'est sans doute un simple accident, car tous les autres individus que j'ai observés avaient cette pointe relevée et tout à fait semblable à celle des macaques dont nous avons déjà donné les figures. 4. MACAQUE BONNET CHINOIS. MACACVS SINICUS. (Dfsmarest.) Caractèues si'ÉciFiQUEs. — Pclagc d'un roux brillant à la face supérieure du corps et à la face externe des membres; blanc à la partie inférieure du corps et interne des membres; queue grisâtre en dessous, noirâtre en dessus. [labite le Bengale. On a longtemps supposé que le bonnet chinois et le macaque toque appartenaient à la même es- pèce; il est bien constaté aujourd'hui que ce sont deux espèces différentes, mais très-voisines. Le bonnet chinois, dit Frédéric Cuvier, a toutes les parties supérieures du corps d'un fauve brillant et Fig. 104. — Bonnet chinois. duré qui résulte de poils gris à leur base, et couverts d anneaux noirs et fauves sur le reste de leur longueur, mais où les anneaux fauves dominent. Sa queue est un peu plus brune; ses favoris, la face interne de ses membres, le dessous de son cou, sa poitrine et son ventre, sont blanchâtres; ses mains, ses pieds et ses oreilles, noirâtres; et sa face est couleur de chair : seulement, la lèvre infé- rieure est bordée de noir. Ses yeux sont bruns. Les poils de la tète semblent former des miciu's. 1" 17 130 HISTOIRE NATURELLE. plutôt qu'une calotte unirornic, ce qui vient de ce qu'ils sont fort longs-, car, lorsque l'animal était plus jeune, ils ne se divisaient point ainsi, et ressemblaient entièrement ù ceux du toque. Fig 105 — Tète du bonnet chinois. 5 MACAQUE COMMUK. NACACVS CYNOMOLGUS (Desmarcst.) CvRACTÈr.Es SPÉCIFIQUES. — Pclagc olivàtrc, tiqueté de noir; membres un peu plus grisâtres que le dessus du corps et de la tète; dessous du corps et face interne des membres couverts de poils blancs très-peu abondants; queue noirâtre en dessus, cendrée en dessous Habite Sumatra et Java. Toutes les formes de ce macaque sont lourdes et trapues, dit Frédéric Cuvier, et surtout aux par- lies antérieures; il a la tète large, aplatie en dessus, et très-forte, à proportion du corps; le museau est court, obtus, le nez plat, et une forte crête, qui s'avance au-dessus des sourcils, couvre les yeux; les doigts sont réunis par une membrane jusqu'à la deuxième phalange. Il se tient à quatre pattes, ou assis sur les callosités de ses fesses, mange dans l'une ou l'autre de ces attitudes, soit en portant les aliments à sa bouche avec ses doigts, soit en les ramassant avec sa bouche elle-même; avant d'avaler, il remplit toujours ses abajoues, et il boit en humant; il dort conché sur le côté et reployè sur lui-même, la tète entre les jambes, ou assis, avec le dos courbé et la tète appuyée sur la poitrine. Sa voix est un cri rauque qui peut éclater dans la colère avec beaucoup de force; mais, lorsqu'il n'exprime qu'un sentiment paisible, il fait entendre un petit sifflement assez doux. Les couleurs du macaque, sur toutes les parties supérieures du corps, résultent du mélange d'un jaune doré avec du noir sur un fond gris, c'est-à-dire que son pelage a une teinte brun verdàtre un peu pâle, toutes les parties inférieures sont d'un gris blanchâtre, ainsi que le côté interne des mem- bres. La queue est noirâtre; les pieds sont entièrement noirs; et la face est livide et à peu près nue; mais entre les deux yeux se trouve une partie beaucoup plus blanche que celles qui l'environnent, et c'est un des caractères assez remarquables de l'espèce. Des poils verdâtres, courts, s'avancent sous les pommettes comme des favoris. La tête ne présente ni aigrette ni crête; les poils du sommet sont couchés uniformément d'avant en arrière; et les poils des joues, qui sont gris et rares, se dirigent en avant. Le tour de la prunelle est brun. Les parties de la génération sont couleur de chair; le gland est piriforme, et le scrotum volumineux. Les canines sont très-fortes et trè.s-longues. Cette espèce est une de celles qui résistent le plus aux moyens qu'on emploie pour soumettre et apprivoiser les singes, La femelle est sensiblement plus petite que le mâle; elle n'a guère que quatorze pouces de Ion- QUADRUMANES. 151 gueur; ses proportions sont plus ramassées, sa tête est plus petite, et sa crête sourcilière n'est pas, à beaucoup près, aussi saillante, quoiqu'elle recouvre également les yeux. Elle a deux mamelles sur la poitrine, et ses parties sexuelles ne paraissent point entourées, à l'époque du rut, de ces exubé- rances si remarquables, et quelquefois si monstrueuses cliez d'autres espèces de macaques et de babouins. Les canines sont petites, et ne dépassent pas les incisives, caractère de toutes les femelles du genre; sa face est entourée de poils gris, longs et droits, qui lui donnent un air hérissé que n'a point le mâle. Les poils du sommet de la tête se dirigent vers la ligne moyenne, et forment là une crête assez élevée qui s'étend du haut du front à l'occiput, ce qui forme le caractère de l'aigrette. Du reste, cette femelle ressemble entièrement à son mâle; elle en a les habitudes, le caractère, etc. Fig. 106. — Macaque comiiiun Le mâle et la femelle dont je viens de donner la description, ajoute Frédéric Cuvier, se trouvaient dans des loges contiguës et pouvaient se voir; ils annonçaient la meilleure intelligence, et bientôt ils furent réunis. L'un et l'autre étant adultes, habitués à l'esclavage, et en bonne santé, l'accouple- ment eut lieu; et, dès lors, j'eus l'espoir que la femelle concevrait, et qu'on pourrait suivre, sur les petits qu'elle mettrait au monde, le développement de son espèce; en conséquence, j'ordonnai qu'on la séparerait de son mâle, dès qu'elle paraîtrait le fuir, ou dès qu'elle ne montrerait plus de men- struation. Ces animaux vécurent ensemble environ une année, et s'accouplèrent, chaque jour, trois ou quatre fois, à la manière, à peu près, de tous les quadrupèdes. La menstruation n'ayant plus re- paru vers le commencement d'août, cette femelle fut soignée séparément; et, pendant les quatre- vingts jours qui .suivirent, aucun accident n'eut lieu : les mamelles se gonflèrent, et le ventre prit son accroissement, sans que la santé de l'animal en parût altérée; enfin, dans la nuit du 16 au 17 octo- bre 1847, elle mit bas un macaque femelle très-développé et fort bien portant; ses ongles étaient entièrement formés, et ses mouvements étaient libres; mais il ne pouvait point se soutenir, et restait couché ; on ne lui a pas entendu jeter de cris. Cependant, sa mère ne l'adopta point; il ne fut, pour 132 HISTOIRE NATURELLU:. elle, qu'un animal étranger; rien ne la porta à lui donner des soins; elle ne manifesta, d'aucune ma- nière, le besoin de l'allaiter, et l'abandonna bientôt entièrement. J'avais craint cette disposition in- stinctive; je savais que cbez les animaux en esclavage, lorsqu'ils ne sont pas soumis jusqu'à la do- mesticité, les facultés de l'intelligence s'altèrent au plus haut degré. On essaya d'allaiter ce jeune macaque artificiellement; mais il ne vécut que jusqu'au lendemain. La mère ne parut point souffrir du lait qui remplissait ses mamelles, et qui s'écoula, en partie, au dehors; vers le ([uatriénie jour, ces organes s'affaissèrent, et reprirent leur état ordinaire. Le rut reparut dix jours après. Il était peu vraisemblable que la gestation n'eût duré que depuis l'époque de la dernière menstruation jusqu'à celle de la mise bas : ce qui aurait fait environ trois mois ; une autre es|)èce de ce genre ayant eu une portée de sept mois; il faudrait donc en conclure que la men- struation de notre macaque reparut plusieurs fois depuis la conception. Fig. 107. — Tèle lio macaque jeune. La tête de ce jeune macaque était longue d'arrière en avant, comparée à sa largeur de droite à gauche; le museau saillant, mais le front droit; sa peau avait une teinte livide, excepté entre les yeux, où elle était blanche; tous ses poils étaient noirs; les parties supérieures du corps en avaient le plus, mais nulle part ils ne couvraient assez la peau pour qu'elle ne se vît pas. Les parties infé- rieures étaient presque entièrement nues. Le poil de l'extrémité de la queue paraissait le plus long, et la terminait en une mèche. Au sommet de la tèle, il s'écartait de la ligne moyenne, en se dirigeant obliquement en arrière, et il se réunissait ensuite à l'occiput en une sorte de crête. On voyait deux petites mamelles sur la poitrine; les callosités étaient saillantes, mais non encore calleuses. En janvier 1818, notre femelle macaque fut de nouveau réunie à son mâle, qui la couvrit le 25. Aussitôt CCS animaux furent séparés, et, dans le courant de mars, on s'aperçut que la conception avait eu lieu, par le développement du ventre et des mamelles, quoique la menstruation fût toujours (JUADRUMÂNES. 133 ri'veiiuc clinijnc mois; cntin, le lit juillet, noire macaque mit bas une femelle, qui eut le sort de la première, et qui lui ressemblait à tous égards. Ainsi, par cette nouvelle expérience, sur l'exacti- tude de laquelle il ne pouvait s'élever aucun doute, la portée avait duré sept mois, comme je l'avais déjà observé sur une autre espèce de ce genre. Fig. 108. — Macaque mâle très-jeune. Pendant le cours de la première année, il paraîtrait que le museau s'allonge, et que la tête se ré- trécit, sans qu'il se forme de crête sourcilière ; que les incisives se développent, et que les premières canines commencent à paraître à la mâchoire inférieure. Le pelage vcrdàtre de l'adidle remplace, dès la première mue, le pelage du nouveau-né, excepté à la partie antérieure du sommet de la tête; mais la léte n'est point encore entourée, à cette époque, de ces poils épais qui se montreront plus tard. Dans l'individu que je décris, on voit, au sommet de la tète, le caractère de l'aigrette de Buffon, une crête produite par la convergence des poils. L'in- tervalle qui sépare les yeux est toujours blanc, et les organes génitaux ne diffèrent de ceux de l'a- dulte que par moins de développement. Le jeune macaque a de la gaieté, mais la méchanceté perce déjà au travers de ses yeux; la longueur de son corps est de onze pouces, et toutes ses parties sont à peu près dans les proportions de celles de l'adulte. A la troisième année, le macaque ressemble beaucoup à la femelle adulte, par les proportions et par la taille, si j'en juge par un individu de cet âge que j'ai possédé; mais le front n'est point en- core en saillie au-dessus des yeux; les canines ne dépassent pas non plus les incisives, et on voit encore, au-dessus des sourcils, des restes de pelage noir qui y forment une bande assez marquée. Le dessus du nez et de la partie des paupières qui en est voisine conserve le blanc assez pur que nous avons vu dans cette partie chez tous les individus que nous venons de décrire. Ses couleurs sont les mêmes que celles de la femelle, et sa face est aussi entourée de poils gris et hérissés. Ses organes génitaux sont, ù peu de chose près, semblables à ceux de l'adulte. Cet animal est doux, mais il est déjà pesant et triste. (FnÉnÉnic Cuvier.) 154 HISTOIRE NATURELLE. G. MACAQUE ROUX DORÉ. MACACVS AVIIEUS. (Isid Geofl'roy Sainl-IUbire.) CAPiACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Dessus du corps d'un beau roux, tiqueté de noir; face externe des membres d'un gris clair; dessous du corps noirâtre; queue noirâtre en dessous vers la base, grise dans sa portion terminale. Habite le Bengale, le Pégu, Sumatra et Java. Cette espèce, depuis longtemps décrite par M. Isidore Geoffroy Saint-IIilaire, est très-voisine du ma- caque commun et du macaque à face noire. A Sumatra, on lui donne le nom de carray, et celui de croé à Ja\a. Le macaque roux doré a le dessus du corps et de la tète couvert de poils gris à la base, avec la pointe annelce de noir et de roux, d'où résulte, pour l'ensemble, une couleur rousse, tiquetée de noir. Les membres sont grisâtres à leur face externe, et blancs à leur face interne, de même que le dessous du corps et de la queue; celle-ci est, ù sa face supérieure, d'un noir tiqueté de roux ou de gris roussàlre dans sa première portion, puis, dans la portion terminale, d'un gris brunâtre. (Isidoue Geofihoï Saim-Hilaire.) 7. MACAQUE A FACE NOIRE. IHACACUS CARBONAniUS. (riéJéric Cuvicr.) Caractères spécifiques. — Pelage vert grisâtre sur le dessus du corps et sur la partie externe des membres; les parties inférieure ou interne correspondantes, les favoris, les joues et la queue, gris blanchâtre, face noire; une légère bande noire au-dessus de l'œil. Habite Sumatra. Cette espèce, très-voisine du macaque commun, n'en diffère guère que par la couleur de la face, noire dans l'un, de couleur tannée dans l'autre. Le macaque à face noire, en effet, a un pelage presque en tout semblable au macaque â face tan- née; il se compose, aux parties supérieures, de poils gris à leur base, et annelés de jaune et de noi- râtre sur le reste de leur longueur, ce qui lui donne une teinte d'un vert grisâtre dans res parties et sur la face antérieure et extérieure des membres; les favoris et les joues, le cou, la poitrine, le ven- tre, les fesses, la face Interne des cuisses, des jambes et des bras, sont gris; et il en est de même de la queue, excepté vers sa base, où elle est de la couleur du dos. Un léger bandeau noir se montre sur la crèle sourcilière. La face est noire, avec une légère teinte brune; et il en est de même des oreilles, de la plante des pieds, de la paume des mains, des doigts et des callosités. Les paupières supérieures sont blanches, particularité singulièrement commune chez les singes. Les testicules sont d'un jaune tanné. Celle espèce parait très-rarement en Europe aujourd'hui, et, si elle s'y est montrée plus fréquem- ment autrefois, lorsque les idées sur la valeur des caractères spécifiques étaient beaucoup moins pré- cises qu'à l'époque actuelle, on aura pu la confondre avec l'espèce de laquelle nous la rapprochons. (FnÉDÉnic Cuvier.) 8. MACAQUE DES PHILIPPINES. MACACUS r/y/i/PP/A'EAS/S. (Isid Geolfroy Saiiil-llll.iire ) (PI. 24.; Caractères spécifiques. — Pelage blanc. Habite Manille. Ce macaque albinos, qui a vécu à la ménagerie du Muséum, n'est sans doute qu'une variété albine d'une espère encore inconnue; M. Geoffroy Saint-Hilaire lui a, provisoirement, donné le nom de ma- caque des Philippines, et il l'a étudié tout particulièrement, et comparé aux autres espèces avec la QUADRUMANES. 135 plus scrupuleuse attention ; aussi croyons-nous devoir reproduire ses savantes observations. Ce singe, dit-il, dont la détermination offre d'assez grandes difficultés, a fixé de suite l'attention de tous les zoologistes et celle du public. Est-ce un macaque commun ou un macaque roux doré? ou bien encore, appartient-il à une troisième espèce, voisine des deux précédentes, et non encore éta- blie dans la science? Les caractères de coloration ne peuvent fournir le moindre élément pour la détermination de l'es- pèce. Tous les poils sont d'un blanc légèrement jaunâtre, toutes les parties nues sont d'un rose ten- dre; l'iris est très-peu colorée; je n'ai pu examiner la choroïde; les yeux, affectés de strabisme et de myopie, paraissent, sous certaines influences de la lumière, d'une couleur bleuâtre; sous d'au- tres, d'un rouge pâle. Ce singe offre, comme on le voit, un exemple d'albinisme complet. La nature du pelage, la longueur des poils, ne peuvent guère, plus que leur couleur, fournir de bons caractères; car l'albinisme les modifie aussi à un très-haut degré. Dans l'albinisme, les poils deviennent souvent plus moelleux, et surtout plus courts qu'à l'état normal. Il n'y a donc aucune conséquence à tirer de la longueur des poils, moindre, chez notre albinos, que chez les individus normaux des espèces auxquelles je l'ai particulièrement comparé. Mais il est d'autres caractères que ne modifie pas l'albinisme ; les uns, relatifs au pelage lui-même, résultent de la disposition et de la direction des poils; d'autres, sont ceux que fournissent les for- mes et les proportions. Or, d'après les premiers, je crois pouvoir affirmer que notre albinos n'est point un macaque roux doré, et, d'après les seconds, qu'il n'est point un macaque ordinaire. Chez le macaque roux doré, le roux des parties supérieures s'avance sur la tête en une sorte de triangle, limité à droite et à gauche par du blanchâtre, et dont le sommet se perd, en avant, dans quelques poils noirs placés entre les deux éniinences sourcilières. Les poils qui forment ce triangle sont, pour la plupart, dirigés obliquement. Chez le macaque albinos, au contraire, les poils du dessus de la tête sont parallèles, et leur en- semble forme sur la tête, non un triangle, mais un rectangle parfaitement limité, au défaut de diffé- rences de couleurs, par la direction différente des poils latéraux. Il faut ajouter que, chez le maca- cus attrcus, il existe, sur les cotés du crâne et de la face, de longs poils divergents, que l'on ne re- trouve pas chez notre albinos : celui-ci a les poils de la région auriculaire couchés et dirigés en avant, et ceux des côtés des mâchoires sont couchés et dirigés en arrière. Les uns et les autres se rencontrent selon une ligne qui, commençant un peu en arrière de l'angle externe de l'orbite, vient se terminer un peu en arrière de l'angle de la commissure des lèvres : sur cette ligne de rencontre seulement, les poils sont un peu longs et relevés. Les résultats de cette comparaison ne permettent pas de rapporter à l'espèce du macaque roux doré notre albinos, qui , au contraire, sous ce point de vue, se rapproche du macaque ordinaire. Mais, à d'autres égards, par ses proportions, et notamment par la longueur plus considérable de sa queue, il se distingue de celui-ci. La distance du bout du museau à l'anus étant d'un demi-mètre chez notre individu, la queue est d'environ six décimètres. Chez le macaque ordinaire, la queue forme à peine la moitié de la longueur totale. Le résultat de cette double comparaison est que le macaque albinos n'est ni un inacacit.s aiticiis ni un niacacus cijuoinolyus, et qu'il appartient à une espèce non encore établie dans la science. Cette supposition, déjà très-vraisemblable par ce qui précède, est confirmée par l'origine de notre maca- que albinos. M. Adolphe Chenest, qui a fait don au Muséum de ce singe précieux, l'a acquis à Ma- nille, et il le croit originaire de cette île; et l'on sait, en effet, qu'il existe, aux Philippines, des ma- caques, très-vraisemblablement d'une espèce particulière. Une note manuscrite, que M. Gervais a bien voulu me remettre, il y a quelques semaines, au retour d'un voyage en Angleterre, m'apprend que déjà même un macaque des Philippines, en pelage normal, a été transporté â Londres, où M. Ger- vais l'a vu et décrit. .le transcris ici textuellement le passage de cette note, qui est relatif au ma- caque des Philippines : « Le macaque de Manille, que j'ai vu vivant à Régent' s-Parck, est plus oli- vacé foncé pour la couleur de son pelage, et plus noir de face que le macaque ordinaire. Sous ce rapport, il ressemble plus au roux doré. Est-ce une troisième espèce? » La conjecture que faisait ici M. Gervais me parait acquérir, par l'examen comparatif que j'ai fait plus haut, un très-grand degré de probabilité. Je laisse d'ailleurs aux zoologistes de Londres le soin de prononcer et de caractériser exactement l'espèce dont l'état normal ne m'est pas connu. 136 HISTOIRE NATURELLE. On avait vu déjà plusieurs fois des singes albinos. Les collections du Muséum possèdent même des exemples d'albinisme dans un assez grand nombre d'espèces. Tels sont, dans la première tribu, quel- ques gibbons, cbez lesquels l'albinisme n'est, il est vrai, qu'imparfait; dans la seconde, un manga- beij, dont les auteurs ont fait une espèce, sous le nom de shnïa atijs; dans la troisième, plusieurs sapajous, dont les poils s'étaient, en partie, décolorés en captivité, et un autre sapajou complète- ment albinos, érigé en espèce sous le nom de cebus albus; enfin, dans la quatrième, des marikinas , chez lesquels l'albinisme n'est qu'imparfait, et un liapale mclaniints, que l'on a considéré comme une espèce, et désigné, à ('anse de sa couleur entièrement blancbe, sous le nom de siiuia argciitata. Mais ces singes n'avaient point été observés vivants (sauf quelques exceptions d'un genre particulier, relatives à des sapajous et à deux niarikinas, qui n'étaient point nés albinos, mais qui avaient subi, sous l'influence de la captivité, des décolorations seulement partielles. Voy. Histoire des anomalies, t. I, p. dl8); et notre macaque albinos est le premier dont on ait pu étudier les habitudes, fort re- marquables par leur analogie avec les mœurs et les habitudes des albinos humains. Comme ceux- ci, le macaque albinos évitait constamment l'éclat de la lumière; ses yeux ne pouvaient supporter un jour un peu vif, sinon sans souffrance, au moins sans fatigue et sans gêne. On le voyait se tenir ha- bituellement, triste et mélancolique, dans un coin de sa loge; et, lors même qu'il prenait ses ébats, c'était presque toujours avec une gravité et une lenteur qui contrastaient avec la vivacité turbulente de ses congénères. Comme les albinos humains, auxquels leurs anomalies imposent une vie et des habitudes excep- tionnelles, le macaque albinos était donc loin d'avoir entièrement le naturel et les mœurs des ma- caques. Le parallèle entre les conséquences de l'albinisme chez notre macaque et chez l'iiomme peut être poussé plus loin. On s-iit que, chez presque tous les peuples encore sauvages ou barbares, les hommes affectés d'al- binisme sont en butte au mépris et aux mauvais traitements de ceux qui les entourent. Dans quelques parties de l'Afrique, les nègres voient en eux, non des hommes, mais des ennemis, qu'ils chassent des lieux habités. Les noirs de quelques parties de la Guinée, si l'on doit en croire des renseigne- ments recueillis dans les colonies, font périr les enfants albinos, dans l'espoir de détourner les ca- lamités dont ils se croient menacés par la naissance de ces malheureux. Dans d'autres parties du monde, dans plusieurs archipels de l'Océanie, à l'isthme de Panama, le sort des albinos est égale- ment digne de pitié. Il en est de même encore des bédos, ou albinos de Ceylan : des renseignements, recueillis par Buffon, nous apprennent, en effet, que les bédos sont réduits à se tenir cachés dans les bois, et à éviter le commerce des autres habitants de l'île. Fig. 109. — Tète Ae macaque. QUADRUMANES. 157 II est curieux d'avoir à rapprocher de ces faits, constatés chez l'homme par les relations des voya- geurs, des faits complètement analogues ohservés à l'égard de notre macaque blanc. Dans les rares occasions où cet albinos s'est hasardé à sortir, au milieu de ses congénères, dans la partie la moins éclairée de la cour dis singes, sa couleur exceptionnelle, sa physionomie singulière, sa démarche embarrassée et incertaine, en ont fait l'objet d'abord de la curiosité très-marquée, puis des mauvais traitements des autres singes. Aussi, après quelques sorties, dont chacune lui a valu des contusions ou des morsures, s'est-il confiné dans sa loge intérieure, fuyant à la fois, comme le font les albinos iiumains, la lumière et ses semblables. La comparaison des caractères crâniens fait reconnaître une épaisseur considérable des bourre- lets sus-orbitaires et de toute la paroi supérieure des orbites, une forme étroite, allongée, presque rectangulaire de l'ouverture des fosses orbitaires, une brièveté de la face, la forme des ouvertures antérieures des narines à peine plus longue que large, disposition qui est en rapport avec la briè- veté générale de la face. Sont-ce réellement des caractères spécifiques ou seulement des caractères anormaux? (Isidohe Geoffroï Saim-Hiluiœ.) 3. MACAQUt: [)ASSAM. MACACVS ASSÀiaENSIS. (Mac Clellaml.) Cette espèce de l'assam ne nous est connue que par la description, très-incomplète, qu'en donne Mac Clelland dans les Procecdings de la Société zoologique de Londres, et nous ne pouvons que la citer.' § II. — MAIMONS (a QUEUECOUliTE). Les espèces de cette subdivision du genre macaque ont une queue courte; leurs formes sont aussi )lus lourdes et plus trapues; et leur museau est plus allongé. 10. MACAQUE OUANDEROU. MACACUS SILEXUS. ( Desmarosl.l C.viiACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Pclagc Hoir; une grande barbe blanchâtre ou gri.se, une crinière cen- drée; le visage et les mains noirs; les callosités rougeâtres; la queue floconneuse à l'cxirèmité Habite Ceylan et le continent indien. Cette espèce , nommée ouanderou par Buffon , et macaque à crinière par Cuvier, est connue, à Ceylan et dans l'Inde, sous les noms de nil-bandar, lowando et elwandu. L'ouanderou femelle, ob- servé par Cuvier, est d'un beau noir. L'abdomen, la poitrine et le tour de la tète, sont blancs. Les poils sont généralement longs, mais surtout ceux de la tète et ceux de la fraise blanche, qui part de chaque côté du front et vient se réunir sous le menton, en couvrant la pariie postérieure des joues; ceux de l'extrémité de la queue aussi sont longs, et forment un flocon ; le visage et les mains sont noirs, mais les callosités sont rougeâtres. Cette femelle, dit Frédéric Cuvier, n'a jamais montré le be- .soin du rut, soit parce que sa santé ne le permettait pas, soit parce que la captivité n'était i)as favo- rable au développement de ce besoin. L'ouanderou dont nous parlons était généralement doux et ca- ressant, mais très-capricieux, comme, au reste, toutes les autres espèces de ce genre, sur la durée des sentiments desquels il n'est jamais possible de compter. L'individu que Buffon vit à la foire Saint-Laurent était un mâle, dont la méchanceté était extrême. Depuis, la ménagerie du Jardin du Boi, dans ses premiers temps, a possédé un autre ouanderou mâle, qui est aujourd'hui dans les ca- 13- is 158 IIISTOIRE NATURELLE. binets de rétablissement, et qui était aussi tiés-niéehanl. Schreber et Pennant en avaient, aupara- vant, publié eliacun un; le premier, sous le nom de silenns, l'aiitie, sous celui de lion tailcd (singe à queue de lion). (EKÉDÉRie Cuvier.) Viii. 110. — M;icai|ue ouanderou 11. MiVCAOUli HHÉSUS MACACUS nitYTIIIl.EVS ( l.si.loro GeollVoy Sniiii-lliliircl Caractîiiœs spécifiques. — Pelage fauve ou roux grisâtre, passant au roux doré au bas du dos, et à la face externe des membres inférieurs; les membres supérieurs grisâtres en dehors; les inférieurs et les supérieurs blaiicbâlres en dedans, ainsi que le dessous du corps et de la tète; queue d'abord rousse en dessus et en dessous dans sa portion terminale; dessus de la lète de même couleur que le dessus du corps; queue courte Habite l'Inde, el particulièrement le.s bords du Gange. QUADllUMANES 130 Celte espî'ce a reçu, de Bulïoii, k's noms de macaque à queue courte, et de patas à queue courte; et celui de maimon ou rhésus, par Frédéric Cuvier. Ces animaux, dit Frédéric Cuvier, ont tous les caractères génériques des macaques, le même nombre de dents et les mêmes organes des sens, du mouvement et de la tçénération. Fig. 111. — Hliésus. Toutes les parties supérieures du corps sont d'un beau gris verdâtre, résultant de poils gris dans presque toute leur longueur, et jaunes et noirs au bout. Le jaune pâlit sur les bras et les jambes, et rend ces parties tout à fait grises; au contraire, prenant une teinte plus vive sur les cuisses, elles Fii; ll'i — Ithcsus leiiiellc. i-iO HISTOIRE NATURELLE. sont (l'un jaune plus brillant, plus doré, que les parties voisines. La gorge, le cou, la poitrine, le ventre et la face interne des membres, sont d'un blanc pur; la queue est verdâtre en dessus et grise rn dessous; la peau de la face, des oreilles et des mains, a une teinte cuivrée très-claire, et est tout à fait dénuée de poils; les fesses sont d'un rouge trés-vif, et celte couleur descend sur les jambes, ti'monte sur la croupe, et embrasse la queue à son origine. Cette couleur, qui subsiste toujours, est entièrement due au sang; et elle est d'autant plus étendue et d'autant plus vive, que l'époque du rut est plus prés d'arriver pour le maimon femelle. Alors les mamelons sont couleur de rose, et toutes ces parties colorées de rouge sont tendues, sans cependant être gonflées; car le rut ne se manifeste pas chez cet animal par ces exubérances qui caractérisent cet état chez d'autres espèces; il paraîtrait que le sang, se répandant sur une plus grande surface, ne tend pas â distendre autant les vais- seaux que s'il ne s'accumulait qu'en un point plus circonscrit. Lorsque le rut est passé, on voit des plis se former derrière les cuisses et à la base de la queue, plis qu'Audebert, dans son rhésus, et Buffon, dans son macaque à queue courte, avaient déjà remarqués, sans pouvoir s'en rendre raison. Fig. 113 — Hliésus niàle très-jeune. Les poils dont le pelage de cette espèce se compose sont extrêmement lins et doux, et assez épais sur les parties supérieures du corps, mais très-rares aux autres parties; et ils sont d'une seule iiaUire : tous sont soyeux. La peau du maimon offre aussi un caractère qui ne parait point se trou- vii' chez les autres macaques; c'est une flaccidité extrême : les jeunes individus ont déjà, de chaque cùlé de la gorge, ces deux plis pendants, qui sont, ordinairement, des signes de vieillesse; et les mamelles, ainsi que le ventre, prennent bientôt aussi ce caractère. Il en résulte que, lorsque l'ani- mal s'engraisse, il acquiert des formes tellement arrondies, qu'il en est monstrueux. Alors les ma- r.ielles sont pruéminenles et gloLuleuses comme celles d'une femme ; le ventre s'agrandit, et la face devient si large, que l'animal en est presque méconnaissable. Les montreurs d'animaux prolitent or- dinairement de ces circonstaaces pour présenter au public les maimons comme des animaux d'une espèce très-extraordinaire, et voisine de l'oraiig-outan; mensonge, que la vue d'une gorge arrondie et couleur de chair, leiiiiinee par un mamelon couleur de rose, contribue à favoriser. Les mâles ne diffèrent des femelles ([ue par des favoris plus touffus, des proportions plus trapues, une taille plus grande et des canines plus fortes. QUADRUMANES. 141 Ces quadnimanes sont originaires de l'Inde; ce sont eux qui peuplent les forêts des bords du Gange, et qui viennent jusque dans les villes, encouragés par la répugnance invincible des Indiens pour tuer les animaux, afin d'y chercher une nourriture plus agréable que celle qu'ils trouvent dans les forêts. Je me suis assuré de leur origine par des vaisseaux arrivés au Havre, qui venaient de l'Inde, et qui avaient pris plusieurs maimons à bord. ^f^i-'Qm^a V*.4i,#v- i Fis. 114 — Rhésus Le naturel des maimons m'a toujours paru intraitable. Tant que ces animaux sont jeunes, ils sont susceptibles d'une certaine famiharité; mais bientôt ils deviennent méchants, et l'âge les rend féroces, .l'ai vu peu d'exceptions à cette règle; et, comme ces singes ont beaucoup de pénétration, leur mé- chanceté est très-dangereuse. Bulïon, n'ayant qu'un jeune maimon mâle sous les yeux, n'a pu en indiquer exactement les carac- tères; c'est i)Oiir([uoi il lui donne de très-petites canines, et ne lui reconnaît point de scrotum; et la 14'2 HISTOIRE NATURELLE. ligure qu'en fit son dessinateur, vue de face et assise, en donne une idée peu précise. On retrouve mieux ce singe dans le macaque à queue courte femelle de ce célèbre naturaliste. Cet individu avait tous les caractères des femelles adultes; et il est impossible de méconnaître l'animal dont je donne la figure, dans la description qu'il fait du sien , et qui avait surtout cette couleur rouge si remar- quable des cuisses, qui n'a encore été observée sur aucun autre singe. La figure de ce macaque est d'ailleurs si exacte, qu on pourrait diflicilement, en le voyant, ne pas se rappeler les traits de l'es- pèce à laquelle elle appartient. Je ne doute pas aussi que son patas à queue courte ne soit un rhésus; mais il a été décrit d'après un individu empaillé qui avait perdu ses caractères principaux. Aude- bert a donné une nouvelle figure de l'individu d'après lequel Buffon avait formé cette espèce de pa- tas, et son rhésus représente une femelle adulte, mais vue de face, ce qui en déguise un peu le ca- ractère. Schreber a copié le macaque à queue courte de Buffon, auquel il a faussement donné une couleur d'un brun presque noir, et il l'a nommé siin'ia erijllirœa. C'est le nom que les auteurs systé- matiques me paraissent devoir conserver; et, lorsqu'on connaîtra mieux les espèces du genre maca- que, on décidera si celle qui fait l'objet de cet article doit conserver le nom de maimon ou prendre définitivement celui de rhésus. (Frédéric Cuvier ) Un jeune rhésus est né à la ménagerie du Muséum en novembre 1824, et, dès sa naissance, il avait tous ses sens parfaitement formés. Je ne puis fi.\er la durée de la gestation, dit Frédéric Cuvier, au- quel nous empruntons ces détails : la rareté du phénomène ne permet pas d'en faire un sujet d'expé- rience; j'ai seulement lieu de présumer qu'elle a duré de cinq à sept mois. Immédialer.ient après être né, ce jeune rhésus s'attacha sous le ventre de sa mère, en se tenant fortement, de ses quatre mains, au pelage, et porta sa bouche aux mamelons, qu'il saisit et qu'il ne quitta pas pendant envi- ron quinze jours; gardant continuellement la même situation; toujours prêt à teter, lorsqu'il en sen- tait le besoin; dormant quand sa mère était assise, mais ne lâchant pas, même pendant son sommeil, les poils qu'il avait saisis. Quant aux mamelons, il n'en abandonnait un que pour prendre l'autre, et c'est ainsi que les premiers jours de sa vie se sont écoulés, ne faisant pas d'autre mouvement que celui de ses lèvres et de sa langue, pour teler, et de ses yeux, pour regarder; car, dès qu'il vit le jour, il parut distinguer les objets et les regarder véritablement; il suivait des yeux les mouvements qui se faisaient autour de lui, et rien n'annonçait qu'il eût besoin du toucher pour apprécier, non pas l'effort qu'il aurait fallu qu'il fît pour atteindre les corps, mais la plus on moins grande distance où les corps étaient de lui. Les soins de sa mère, dans tout ce qui tenait à l'allaitement et à la sécurité de son nouveau-né, étaient aussi dévoués, aussi prévoyants, que l'imagination peut se le figurer. Elle n'entendait pas un hruit, n'apercevait pas un mouvement, sans que son attention ne fût excitée, et qu'elle ne manifestât une sollicitude qui se rapportait entièrement sur lui; car elle ne l'aurait jamais eue pour elle, appri- voisée au point où elle l'était. Le poids de ce petit ne paraissait nuire à aucun de ses mouvements, mais tous étaient si adroitement dirigés, que, malgré leur variété et leur pétulance, jamais son nour- risson n'en souffrait, jamais elle ne l'a heurté, même légèrement, contre les corps très-irrêguliers sur lesquels elle pouvait courir et sauter. Jusqu'au moment de la mise bas, elle avait eu le visage et les fesses fortement colorés en rouge; mais, presque immédiatement après, cette couleur, formée par l'accumulation du sang, disparut entièrement, et sa face redevint couleur de chair. Au bout de quinze jours environ, le petit commenva à se détacher de sa mère, et, dès ses premiers pas, il mon- tra une adresse et une force qui ne pouvaient être dus ni à l'exercice, ni à l'expérience, et qui mon- traient bien de nouveau que toutes les suppositions qui ont été faites sur la nécessité absolue du toucher, pour l'exercice de certaines fonctions de la vue, sont illusoires. D'abord il s'accrocha aux grillages verticaux dont sa cage était garnie, et montait ou descendait à sa fantaisie; mais sa mère semblait le suivre des yeux et des mains comme pour le soutenir dans sa chute; et, après quelques secondes de liberté, à un simple attouchement, il retournait à sa place habituelle; d'autres fois, il faisait aussi quelques pas sur la paille qui leur servait de litière; et, dès ces premiers moments, je l'ai vu se laisser tomber volontairement du haut de sa cage en bas, et arriver avec précision sur ses quati'e pattes, puis s'élancer contre le treillage, à une très-grande hauteur pour sa taille, et en saisir les mailles pour s'y accrocher, avec une prestesse qui égalait au moins eelle des singes les plus expérimentés. Bientôt on vit la mère chercher, de temps en temps, à se débarrasser de sa charge, tout en conservant la même sollicitude; car il n'était plus pour elle un fardeau dès que le moindre QUADRUMANES. 145 (iann-er pouvait être A rraiiidrp. A mesure que les forces du petit se développaienl, ses sauts et ses gambades devenaieul plus surprenants. Je me plaisais à l'examiner dans ses moments de gaieté, et je puis dire que jamais je ne l'ai vu faire un faux mouvement, prendre de fausses dimensions, et ne pas arriver, avec l'exactitude la plus parfaite, au point vers lequel il tendait. J'ai eu, par là, la preuve évidenle qu'un instinct particulier le dirigeait , pour juger des distances et déterminer le degré de force qu'il devait déployer dans chacun de ses sauts. Il est certain qu'avec l'intelligence même de l'homme il aurait fallu à cet animal de nombreux es- sais, des tâtonnements multipliés, pour acquérir l'adresse qu'il avait, et, cependant, il atteignait à peine le premier mois de sa vie. Quand il s'agit de la cause des actions des animaux, c'est bien le cas de dire : Que savons-nous! Ce n'est qu'après six semaines environ qu'une nourriture plus substantielle que le lait lui est de- venue nécessaire, et, alors, un spectacle nouveau s'est présenté à nous; de nouvelles révélations nous ont été faites, par ces animaux, sur leur nature intellectuelle. Cette mère, que nous avons vue si pleine de tendresse, mue par une sollicitude si active, qui portait son petit suspendu sans au- cune relâche à son corps et à sa mamelle, et qu'on aurait jugée devoir porter l'amour maternel jus- qu'à prendre les aliments de sa propre bouche pour les lui donner, ne lui permit pas de toucher à la moindre portion de ses repas lorsqu'il commença à vouloir manger. Dés qu'on lui avait donné les fruits et le pain qui lui étaient destinés, elle s'en emparait, le repoussait aussitôt qu'il voulait ap- procher, et s'empressait de remplir ses abajoues et ses mains pour que rien ne lui échappât; et qu'on ne cherche pas d'autres causes que la gloutonnerie à cette action singulière; elle ne pouvait vouloir forcer ce petit à teter : elle n'avait presque plus de lait. Elle ne pouvait craindre non plus que ces aliments lui fussent contraires; il les recherchait naturellement, et il s'est toujours bien trouvé d'en avoir mangé. Aussi la faim le rendait-il très-pressant, très-téméraire et très-adroit; les coups de sa mère, qui, à la vérité, n'étaient jamais très-violents, ne l'intimidaient point, et, quelque soin qu'elle prît pour l'éloigner et s'emparer de tout, il parvenait toujours à dérober un assez bon nombre de morceaux qu'il allait manger loin d'elle, en ayant toujours soin de lui tourner le dos; et cette pré- caution n'était pas inutile; car j'ai vu cette mère plusieurs fois quitter sa place et aller à l'autre bout de sa cage oter des mains de sou petit le morceau qu'il était parvenu à se procurer. Pour éviter les inconvénients d'un sentiment si peu maternel, on eut la précaution de pliicer dans la cage une beaucoup plus grande quantité d'aliments que celle qui lui était nécessaire, et dont elle pouvait s'emparer; alors le petit put avoir une nourriture abondante sans trop faire d'efforts pour l'obtenir. 11 continue à vivre et jouit d une sanle qui parait très-forte, toujours soigné par sa mère, tant qu'elle ne mange pas. Il distingue fort bien ceux qui le nourrissent et le caressent, ne montre au- cune malice, et n'a encore du caractère du singe que son adresse et sa vivacité. Comme nous l'avons dit, tous ses sens étaient ouverts au moment de sa naissance, son corps était entièrement couvert d'uu pelage qui ne différait de celui des adultes qu'en ce qu'il avait une teinte plus pâle, car la partie plus fauve des fesses se montrait déjà. Ce qui le distinguait dans ses formes, c'est que ses membres étaient plus grêles et sa tête plus grosse. (Frédéric Cuvier.) 12. MACAQUE MAIMON. MACACUS NEMESTRINUS. (Desm;iresl.) C.\R.\CTÈREs SPÉCIFIQUES. — iVlage fauve verdâtre ou roussàtre, avec le sommet de la tète noir, le milieu du dos brun; les joues et toutes les parties du corps sont d'un blanc roussàtre; queue très- courte. Habite Java et Sumatra. Dans les pays habités par ce singe, on lui donne les noms de barou et de briih; Edwards celui de singe à queue de cochon, et Bul'fon l'a décrit sous le nom de maimon, en le confondant, en partie, avec le macaque rhésus; Frédéric Cuvier en a donné l'histoire en lui conservant le nom de singe à queue de coclion. Voilà ce qu'il en dit : La couleur générale de ce singe est d'un blond foncé ver- iU IIISTOIUE NATURELLE. datre, lésullanl d'anneaux noirs et jaunes qui recouvrent la partie visible des poils. Leur moitié in- férieure est grise. Le milieu du sommet de la tête, dans une largeur de deux à trois doigts, est noir, et cette couleur descend sur le cou, le dos et la queue, mais en prenant une légère teinte verdâtre. Cette teinte couvre les épaules, devient plus jaune et presque fauve sur les avant-bras. Les cuisses sont verdâtres, comme les épaules, mais avec un mélange de gris; les joues, le dessous du menton et du cou, la poitrine, le ventre, le dessous de la queue, et toutes les autres parties inférieures du corps, sont blonds. Au devant des oreilles, à leur base et sur les joues, au-dessous des yeux, on voit un reflet noirâtre, et, derrière les oreilles, tous les poils sont noirs. La face basanée et presque nue, depuis les sourcils jusqu'à la bouche; on n'y voit que quelques poils longs et noirs. Les oreilles et l'intérieur des mains sont nus, et de la couleur de la face, ainsi que les callosités des fesses. Dans toutes les parties inférieures du corps, les poils sont très-rares ; mais le pelage est très-fourni dans les supérieures; et il ne se compose que de poils soyeux. Maca(|ue iiMiimm, Le mairaon est de la grosseur d'un chien de moyenne taille; les mâles et les femelles se ressem- blent pour les couleurs; les jeunes sont d'un ton plus doré que les adultes. Les maimons, comme tous les autres macaques, montrent assez de douceur et de ilociliié lorsqu'ils sont jeunes, et devien- nent extrêmement méchants dés qu'ils avancent en âge; seulement les femelles conservent toujours un caractère plus traitable que les mâles. Celle que nous avons eue était quelquefois attachée à un arbre, auquel elle montait avec beaucoup d'adresse et de facilité, et elle se plaisait à en arracher les feuilles, quoiqu'elle ne les mangeât pas. Ordinaiiement elle se plaçait sur une enfourchure, où elle restait tant qu'elle était attachée; mais elle dénouait, avec beaucoup d'adresse, la corde qui la retenait, et alors elle courait visiter les maisons du voisinage , jamais cependant elle ne cherchait à nuire ; et, si elle ne se laissait pas toujours reprendre volontiers, c'était du moins toujours sans grande résistance. Les enfants seuls excitaient son humeur, et elle le leur montrait en prenant une posture et en faisant une grimace très-bizarres : accroupie, les jambes très-rapprochées l'une de l'autre, le cou tendu horizontalement, elle avançait ses lèvres, en les serrant fortement, et transformait ainsi (JUADRUMANIiS. Ii5 sa bouche en une sorte de bec mince et large. Chaque mois elle entrait en rut, et cet ét:it se mani- festait par (les phénomènes particuliers. Dans son état ordinaire, sa vulve était entourée d'une large surface nue d'une forme trop compliquée pour être décrite, et revêtue d'une peau basanée que de nombreuses rides recouvraient. Dès les premiers moments du rut, le sang s'accumulait dans cette l'^iiï. 1 16. — Mainioii partie, et finissait, au bout de quelques jours, par h remplir entièrement, et par distendre, comme par une sorte d'érection, et en la colorant, la peau tlasque et lâche dont elle était revêtue; bientôt après, des traces de sang se montraient au dehors, et produisaient une véritable menstruation. Lors- que le rut était arrivé à ce point , le gonflement des parties environnantes de la vulve diminuait graduellement, le sang rentrait petit à petit dans la circulation générale, et tout revenait dans l'etui ordinaire. Cette femelle fut réunie à un mâle méchant jusqu'à la férocité, mais qui ne le fut point pour elle. Ils s'accouplèrent à la manière ordinaire des quadrupèdes, et leur union, qui se répétait à de courts intervalles, durait à peine quelques secondes. La femelle en fut bientôt fatiguée; et, comme le mâle la tourmentait beaucoup, on les sépara, et ils ne furent plus rapprochés qu'aux époques du rut. La dernière de ces époques se montra vers les premiers jours de décembre 1806, et l'accouplement eut fréquemment lieu du 10 au 15, après lesquels ces animaux furent séparés. Dès lors le rut ne reparut plus ; et, après sept mois et vingt jours, la femelle mit au monde un petit qui paraissait être à terme, mais qui avait perdu la vie en naissant. Ce jeune maimon ressemblait presque entièrement à sa mère; le fond de sa couleur était blond jaunâtre, et l'on voyait, très-distinctement, le noir de la tête et du dos. (FriÉDÉnic CuviF.r.) •14 l'j lie HISTOIRE NATURELLE. 13 MACAQUE LASCIF. MACACVS LIBIDINOSVS. (Isid. Geoffroy Saint-Hilaire.) Cakactères spécifiques. — Joues d'un fauve légèrement olivâtre, ainsi que les épaules et les mem- bres antérieurs; sur la tête, une tache noire se prolongeant sur le dos et la queue ; turgescence énorme des organes sexuels pendant le rut. Habite ? La description de cette espèce est faite, dit M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, d'après un dessin qui se trouve dans la riche collection des vélins du Muséum; l'individu représenté est une femelle. Ce singe est fort semblable au maimon , dont il diffère cependant par ses joues d'un fauve légère- ment olivâtre, comme les épaules et les membres antérieurs, et non pas blanches ou blanchâtres comme chez le maimon. Il a de même une sorte de calotte noire sur la tèle; et cette tache se pro- longe sur le dos cl la queue, qui se trouvent, ainsi que toutes les parties postérieures du corps et Fig. iI7. — Macnijue lascil. la face externe des membres de derrière, d'un brun légèrement nuancé de fauve olivâtre. La face interne des membres, soit antérieurs, soit postérieurs, semble grisâtre sur le dessin; et le dessous du corps d'un blanchâtre qui se nuance insensiblement avec le brun du corps. La face et les doigts sont à peu près couleur de chair. Enfin, le corps parait plus grêle que chez le maimon, et la queue est â peu près de même longueur. Mais ce qui rend cette espèce extrêmement remarquable, c'est l'é- norme turgescence des parties sexuelles pendant le rut. L'anus, les callosités, et même le dessous QUADRUMANES. 147 de la queue , dans presque toute son étendue , acquièrent un développement véritablement prodi- gieux , et dont il est tout à fait impossible de se faire idée par la fluxion, quelquefois cependant assez abondante, qu'on observe périodiquement chez les autres macaques. (Isidore Geoffroy Saint- IllLAIRE.) 14. MACAQUE A FACE ROUGE. MACACUS SPECIOSVS. (Fréd. Cuvier.) C.VR-4CTÈRES SPÉCIFIQUES. — Face Touge pourpré; queue très-courte et presque cachée par les poils; pelage gris vineux. Habite les Indes orientales. Le macaque à face rouge, dit Frédéric Cuvier, nous présente une de ces nouvelles combinaisons de caractères qui ne nous permet de la rapporter à aucune autre espèce de son genre, et qui lui donne une existence spéciale, que ne ferait, sans doute, que confirmer son étude plus particulière, et la connaissance plus détaillée, plus exacte, de ses organes et de son naturel. Sa face, si remarquable par la belle teinte rouge qui la colore, n'a peut-être point encore d'exem- ple, dans la famille si nombreuse des singes, à moins que la guenon à face pourprée, dont l'existence n'est même pas très-certaine, n'ait, en effet, la face colorée en rouge pur. Parmi les macaques, nous ne trouvons cette partie ainsi colorée, à peu près, du moins, que chez le rhésus, mais à l'époque du rut seulement, qui, à la vérité, dure, chez les femelles de ces animaux, jusqu'au moment où elles mettent bas, et qui reparait dès que la lactation commence à cesser ; encore la couleur rouge du rhésus a-t-elle beaucoup plus de rapports avec le rouge vermillon qu'avec la teinte pourprée de notre animal. Chez le rhésus, ce caractère s'associe à une queue de médiocre longueur, et, chez notre macaque, à une queue très-courte et presque cachée par les poils. Sous ce rapport, il se rapprocherait du ma- caque de l'Inde; mais celui-ci a la face entièrement noire; et, d'ailleurs, son pelage, très-brun, dif- fère essentiellement de celui du macaque à face rouge, qui. généralement, est d'un gris vineux; par là ce pelage ressemble à celui du maimon, plus qu'à celui d'aucun autre macaque : toutefois, ces deux espèces ne peuvent se confondre; le maimon n'a ni la face rouge, ni la queue très-courte. Outre la couleur de sa face et celle de son pelage aux parties supérieures de son corps, cet ani- mal a la face entourée d'un cercle de poils noirs; et son ventre, sa poitrine, les parties postérieures et internes de ses jambes de devant et de ses jambes de derrière, ainsi que le bord de ses fesses, sont d'un blanc grisâtre. Les ongles sont noirs. Le macaque à face rouge est donc très-réellement une espèce de plus à inscrire dans le catalogue des singes; et, quoique nous n'ayons aucuns renseignements sur ses mœurs, nous ne doutons pas un moment qu'il ne ressemble, sous ce point de vue, par ses traits généraux, aux autres macaques, comme il leur ressemble par les caractères généraux de son organisation. (Frédéric Cuvier.) 1.5. MACAQUE DE L'INDE. MACACUS MAVIIVS. (FréJ. Cuvier. C.vRACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Pclagc brun foncé uniforme; face noire, ainsi que la peau des membres et des oreilles; queue rudimentaire. Habite les Indes orientales. Ce macaque, décrit par Frédéric Cuvier, se distingue par la coloration noire de sa face, de la peau des membres et des oreilles, par sa queue rudimentaire, et par son pelage uniformément brun foncé. Chacun de ces points le caractérise, dit Frédéric Cuvier, l'isole, et ne permet ni de le méconnaître ni de le confondre avec un autre. Mais ce macaque ne me parait pas seulement devoir être, pour l'histoire naturelle, une acquisition nouvelle il contribuera peut-être aussi à répandre quelques lu- d48 HISTOIRE NATURELLE. migres dans les régions plus ou moins obscures de ci'tte science; l'on sait combien sont embarras- santes, pour le naturaliste, ces notions incomplètes qui, en faisant connaître l'existence d'un être, ne donnent cependant pas les moyens de le distinguer, avec précision, des autres, et exposent ainsi ;"i le confondre avec des èlrej différents, ou à le séparer de ceux qui lui ressemblent. Un des qua- drumanes qui, sous ce rapport, a plus d'une fois exercé la critique, est celui que Pennant a fiit re- présenter sous le nom de babouin des bois (wood babon), et qu'il ne connaissait que par une peau empaillée, du cabinet de Lewer. En général, ces animaux bourrés, toujours défigurés par la mort, quand ils ne l'ont pas été par des artistes capricieux ou malhabiles, méritent peu de considération. Celui de Pennant a cependant obtenu quelque attention : les uns en ont fait une espèce distincte, les autres ont voulu y rapporter les espèces découvertes depuis, et mieux connues. Notre macaque offrira un nouvel aliment à ces sortes de recherches; car, en supposant, ce qui n'est que trop ordi- naire, que l'empailleur de Pennant ait donné aux narines de son animal une extension monstrueuse, le babouin des bois ne différera plus par aucun caractère de quelque poids de notre macaque de l'Inde. (FitiiDÉr.ic CuviEK.) Ui JI.\(:AnUE URSIN. MACACUS ARCTOIDES. (IsirI Gcom-oy Sainl-Hihiri' ) Caractères spécifiques. — Pelage brun, li({ueté de roux; poils longs, plusieurs fois annelés de brun et de roux clair; queue excessivement courte. Habile la Cochinchine. Le macaque ursin, très-voisin du macaque de l'Inde, a le pelage presque partout composé de longs poils assez rudes, annelés, un grand nombre de fois, de roux et de noir, d'où résulte une couleur générale brune roussâtre, tiquetée de noir La queue n'a guère qu'un pouce de longueur. Fig. 118. — Macaque ui-sm. La coloration de la face, autant qu'on peut en juger sur une peau desséchée et conservée depuis l'Iusicurs années, présente un caractère très-particulier. En effet, le nez se détache par une couleur noirâtre au milieu de toute la face, qui parait avoir été couleur de chair. Cette espèce parvient à une assez grande taille. (Isidore Geoffroy Saint-IIilaire.) l-'ii;. 1. — Guenon ciHilnilu'. ^à£r Kij: *2 — MacJinuo ui^in [ni;"ik' IM '25. QUADRUMANES. 149 § m. — MAGOTS (sans queoe) Une seule espèce se trouve dans ce groupe, qui se rattache au précédent par le macaque ursin à qiieuo rudimentaire. Cependant tous les macaques sont de l'Inde, tandis que le magot est du nord de l'Afrique, et l'on en rencontre, dit-on, quelqu'^s individus sur le rocher de Gibraltar. Ces limites géographiques, fort importantes pour les naturalistes, ont fait considérer le magot comme devant former un genre particulier auquel on a donné le nom d'inuus; cependant nous pensons que ce singe, par son organisation, si semblable à celle des macaques du second groupe, sauf l'absence complète de la queue, ne présente pas de caractères suffisants pour en former le type d'un genre dis- tinct, aussi en formerons-nous seulement une subdivision du genre. 1". MACAQUE MAGOT. MACACUS IXUUS. (Desmoulins ) Caractères spécifiques. — Pas de queue, pelage d'un gris jaunâtre, avec les pa'rties inférieure du corps et la région interne des membres de couleur blanchùtre; face couleur de chair livide. Habile la cote nord d'Afrique, le sud de l'Espagne, chaîne de l'Andalousie. Fig. lly. — Macaque magot. 150 HISTOIRE NATURELLE. Ce singe, amené très-communément en Europe, est aussi le plus anciennement connu; c'est le singe (les bateleurs. Galien en a fait l'anatomie; et les Grecs le désignaient sous le nom de pithèque. On n'explique pas d'une manière satisfaisante la présence du magot sur le rocher de Gibraltar. Les uns supposent que l'espèce y a été apportée, et qu'elle s'y est acclimatée; les autres pensent que l'exis- tence de ce singe dans le sud de l'Espagne prouve la réunion primitive de l'Europe et de l'Afrique, et, s'il faut en croire un écrivain anglais, on aurait trouvé, dans les brèches calcaires de Madagas- car, des débris fossiles du m'agol. Docile, soumis, très-éducable, dit Lesson, ce singe, dans sa jeunesse, se plie aisément à la servi- tude, et retient facilement les tours que les jongleurs lui apprennent. Étourdi, inattentif, capricieux, vivement affecté par ce qui l'entoure, ce macaque, toutefois, lors même qu'il est bien appris, s'at- tire de nombreuses corrections en oubliant quelques-unes des parties du rôle qu'il doit jouer sur les places publiques. Plus âgé, ses penchants se découvrent, son humeur s'aigrit, son caractère devient revêche et intraitable : pris âgé, on ne peut en rien faire; il se défend, et mord avec fureur. La co- lère, chez lui, se traduit par le claquement des dents, accompagné d'affreuses grimaces. (Lesson.) Nous ne pouvons mieux donner l'histoire du magot qu'en reproduisant les savantes observations de Frédéric Cuvier, auquel on doit tant de détails sur les mœurs et l'intelligence des animaux. L'intelligence, ce don précieux donné aux animaux pour leur conservation, et au moyen duquel ils prennent leur rang dans l'ordre de cet univers, ajoute toujours, dans la liberté de la nature, au Fi". 120. — Main antérieure de niigol. Fig. 121. — Main postérieure de magot. bien-être et à l'indépendance, mais devient fréquemment, sous l'empire de l'homme, une cause de souffrance et de persécution. Le berger ne se sert guère que de sa voix pour conduire ses stupides moutons; le fouet est déjà en usage pour le cheval ou le chien, et ce sont les instruments de la tor- ture qu'on emploie envers l'homme esclave. C'est aussi à son intelligence que le magot doit les tour- ments sans nombre dont nos baladins sont dans l'usage de l'accabler. Excepté les orangs et les gibbons, il est le seul singe de l'ancien continent qui soit susceptible de recevoir une certaine in- struction; les autres, grossiers et farouches, sont incapables, en esclavage, de rien concevoir; mais ils conservent en paix leur liberté, et le magot est toujours exposé à perdre la sienne. Cependant le magot mâle ne se soumet à l'homme que dans son extrême jeunesse, et lorsque ses facultés actives n'ont point encore acquis toute leur force; arrivé une fois à l'élat adulte, il commence à être moins QUADRUMANES. 151 triiilable, cl bientôt, cûmme les autres espèces de macaques, il se refuse à toute soumission. Les bons et les mauvais traitements sont sans effet sur lui : aussi incapable de confiance que de crainte, le besoin de son indépendance est, pour ainsi dire, le seul qu'il puisse éprouver, et l'état pénible où ce sentiment le jette, lorsqu'on le réveille trop fortement en lui par de mauvais traitements, ne tarde pas à le plonger dans la tristesse, et à le conduire au marasme, et enfin à la mort; si, au contraire, on le laisse en paix dans son esclavage, il s'y habitue, mais toute activité cesse en lui; assis sur son derrière, les bras appuyés sur ses genoux, et les mains pendantes, il suit, d'un regard stupide, ce qui se passe autour de lui, et, si le besoin de la faim ou de l'amour ne venait pas de temps à autre le tirer de cette espèce de léthargie, sa vie se passerait, en quelque sorte, dans un état intermédiaire entre la vie des plantes et celle des autres mammifères : ses fonctions végétatives s'opèrent encore, mais, excepté les sensations, toutes celles qui dépendent de l'intelligence cessent; n'ayant plus de sentiments, son esprit n'a pfus d'idées. Au contraire, le magot en liberté est peut-être un des ani- maux qui réunissent, au plus haut degré, la vivacité et la variété des sentiments; aussi n'en est-il guère qui aient plus de pétulance, et dont l'intelligence soit plus active et plus pénétrante; et ses qualités, jointes au mode d'organisation qui distingue les magots, donnent, à ces animaux, sur les autres, une telle supériorité, qu'ils finissent par dominer en maîtres dans les contrées où ils s'établis- sent. Réunis en troupes nombreuses, ils couvrent les arbres des forêts, attaquent ouvertement les ennemis qu'ils se sentent la force de combattre, et éloignent, par leur nombre et l'importunité de leurs cris, ceux qu'ils pourraient redouter; ils n'ont à craindre que les espèces de chats de taiire moyenne, qui, en montant aux arbres comme eux, viennent les surprendre dans le silence et l'ob- scurité de la nuit. Cependant, malgré ses nombreux moyens de conservation, cette espèce ne parait pas oc( u])cr une grande étendue de pays; rien ne prouve encore qu'elle soit sortie des limites de la Barbarie et de l'Egypte, et des parties méridionales de l'Espagne. Si l'on a assuré le contraire, c'est- à-dire qu'elle se rencontre dans toute l'Afrique, à la Chine, aux Indes, on l'a fait, il nous semble, sans preuve suffisante; et, jusqu'à ce que des notions plus précises aient été acquises sur ces animaux, on doit regarder les contrées septentrionales de l'Afrique comme leur patrie principale. Le magot appartient au genre très- naturel auquel le macaque a donné son nom. Son museau large et saillant, ses yeux rapprochés et enfoncés sous d'épais sourcils, le peu d'étendue de son front, la brièveté de son cou, ses fortes canines et son corps épais, ramassé, font deviner, au pre- mier aspect, son naturel grossier et sauvage. Tous ses sentiments, peut-être, se manifestent sur la figure par une seule grimace dans laquelle, en tirant ses joues, il rétrécit ses lèvres et montre ses dents; seulement on le voit, quelquefois, témoigner son contentement en remuant la mâchoire infé- rieure, et en faisant un petit bruit avec sa langue. Cet animal a huit incisives tranchantes à chaque mâchoire, deux canines et cinq molaires. Les deux premières de ces dernières dénis ont deux tubercules à leur couronne; les trois autres en ont quatre, excepté la dernière de la mâchoire inférieure, qui en a cinq : elle est terminée par un talon qui l'a- grandit sensiblement. Leurs yeux, dans toutes leurs parties, sont semblables à ceux de l'homme, ainsi que l'oreille, dont la conque, cependant, s'allonge en pointe, sans toutefois se ployer encore en cornet. Le nez n'a presque rien de saillant, et les narines, semblables à deux fentes, forment, entre elles, et à peu près, un angle droit. La langue est douce, les lèvres minces, mais très-extensibles, et les joues ont, en dedans de la bouche, les poches que l'on connaît sous le nom d'abajoues. Les fesses ont des callosités, mais elles ne sont point nues comme celles des cynocéphales, et il n'y a point de queue. Les mains et les pieds ont cinq doigts, avec des ongles plats et des pouces distincts, très-développés aux pieds et très-pelits aux mains. Le magot marche habituellement à quatre pattes, mais sans aisance; il est surtout conformé pour grimper, comme tous les autres quadrumanes, aussi monte-t-il aux arbres avec une étonnante faci- lité ; pour se reposer, il s'assied; et, lorsqu'il veut dormir, il se couche sur le côté, ou, restant assis, il laisse retomber sa tête entre ses jambes de derrière; il porte ses aliments à sa bouthe avec ses mains, ou bien il les ramasse avec ses lèvres; et il approche de son nez, pour le flairer, tout ce qu'il ne connaît pas, ou tout ce qui lui est suspect; il s'habitue à toutes les nourritures; dans son état de nature, il vit principalement de fruits et de feuilles. Les aliments qui lui conviennent le mieux en esclavage, ce sont les fruits, du pain, les légumes cuits, surtout les carottes et les pommes de terre; il boit on hiniiant. lyorsqu'il est en colère, ses mâchoires se remuent avec une étonnante rapidité, 152 HISTOIRE NATURELLE. ses mouvements deviennent brusques, et il fait entendre une voix forte et rude qui devient assez douce quand il éprouve un sentiment plus calme. N'ayant besoin d'aucune arme offensive, il a, pour se défendre, ses fortes canines et ses doigts, dont les ongles épais et longs font, quoique plats, de profondes blessures. Le penchant naturel qui le porte à vivre en troupe le porte aussi, lorsqu'on le tient en esclavage, à adopter les petits animaux qu'on lui donne, et il les transporte partout avec lui, en les tenant fortement embrassés, et il se met en colère dès qu'on veut les lui ôter; il se plaît surtout à chercher dans leurs poils les moindres saletés, qu'il porte aussitôt à la bouche, et ce soin parait beaucoup lui plaire; lorsqu'un magot éprouve quelque bienveillance pour son maître, c'est en épluchant .ses mains ou sa tête qu'il le lui témoigne. On assure que ces animaux ont pour leurs pe- tits une tendresse et des soins remarquables, qu'ils ne les quittent jamais, et les tiennent dans une grande propreté. 11 est arrivé souvent aux magots de se reproduire en esclavage; mais ce phénomène n'a eu lieu que chez les montreurs d'animaux, qui n'en ont point examiné les circonstances. Nous ignorons donc tout ce qui a rapport à la reproduction chez ces animaux. Les plus grands magots ne dépassent jamais la taille d'un chien de moyenne taille. Fig. 122 — Magot. Le magot a le sommet et les côtés de la tète, les joues, le cou, les épaules et la partie du dos qui leur correspond, le devant des membres antérieurs, d'un jaune doré assez vif, mélangé de quelques poils noirs; chaque poil est gris foncé à sa base, et annelé de jaune et de gris dans le reste de sa longueur; les autres parties supérieures du corps sont d'un jaune beaucoup plus grisâtre; sur ces der- nières parties on voit les bandes transversales noirâtres, très-apparentes, mais accidentelles, et qui sont dues, en grande partie, à ce que les poils se séparent par bandes, et laissent voir leur partie inférieure, qui est d'un gris foncé, et aussi à ce que des poils noirs, qui sont mélangés avec le pelage, se développent surtout par bandes. Toutes les parties inférieures, ainsi que la face interne des membres, sont d'un gris jaunâtre, et il en est de même des poils qui garnissent les joues sur les mâchoires inférieures. Quelques poils noirs, avec le bout jaune, se montrent à l'angle interne de l'œil, et forment là une petite tache noirâtre qui descend obliquement sur la joue. La face est nue, et entièrement d'une couleur de chair livide, ainsi que les oreilles dont les bouts sont couverts de poils; les mains sont noirâtres, et aussi garnies de beaucoup de poils. Les poils des joues forment comme d'épais favoris et se dirigent d'avant en ariière. Les poils de toutes les autres parties du '/,■'/ /'^Jr Fig. 140 — Mnin postérieure du babouin noir. Le babouin est un singe à tète de chien , un cynocéphale , dans toute la signification étymologi- que de ce nom; il a tous les caractères qui appartiennent aux espèces de ce genre, dans les organes de la mastication, des sens, des mouvements, de la génération, et dans les facultés de l'intelligence. Nous ferons principalement connaître les traits particuliers qui distinguent de tous les autres cyno- céphales l'espère qui doit nous occuper ici. Elle est remarquable par ses narines prolongées autant que les mâchoires, séparées en dessus par une échancrure très-marquée, et dont les cartilages la- téraux ne s'avancent pas autant que le cartilage moyen. Sa queue, relevée à son origine, se reploie bientôt, et descend jusqu'au jarret; son museau est d'une couleur de chair livide, un peu plus claire autour des yeux. Les parties supérieures de son corps sont d'un jaune verdàtre assez uniforme, qui résulte de poils couverts de larges anneaux jaunes et de petits anneaux noirs, de manière que les rapports des premiers entre eux étant beaucoup plus nombreux que ceux des seconds, leur teinte domine, modiiiée seulement par les anneaux noirs, qui produisent le verdàtre. Toutes les parties in- férieures sont d'un jaune ]ilus ]uile que les supérieures, et la touffe de poils qui se trouve de chaque côté des mâchoires et v forme de larges favoris est blanchâtre. 168 HISTOIRE NATURELLE. Les jeunes individus ont, en dessus, les mêmes couleurs que les adultes ; en dessous, ils sont d'un blanc sale. Leur museau est moins saillant, et leurs organes génitaux moins développés : on ne voit point encore de scrotum, les testicules sont dans l'abdomen, et la couleur des fesses, au lieu d'être rouge, est d'une couleur tannée. (Frédéric Guvier.) 2. CYNOCÉPHALE PAPION. CYNOCEPHALVS SPHINX. (Desmoulins.) Caractères spécifiques. — Narines proéminentes au delà du museau; face, oreilles, mains noires; paupières supérieures blanches; pelage brun jaunâtre; joues brunes; poils des favoris dirigés en ar- rière; pelage peu fourni sous le corps et à la partie interne des membres. Habite l'Afrique méridionale? et occidentale. Le papion vit en troupes nombreuses sur les rochers des montagnes élevées. Le papion décrit par Frédéric Cuvier était à peine adulte, mais la description qu'il en donne se rapporte parfaitement à l'espèce, les femelles et les jeunes ne diffèrent pas des mâles pour les couleurs, mais seulement pour les proportions. La couleur générale de ce singe est d'un brun jaunâtre qui résulte de poils alternati- vement teints de petits anneaux noirs et bruns clairs; ce qui fait que l'animal, vu de près, paraît ti- queté de ces deux couleurs. Les poils des joues sont fauves, et en forme de favoris dirigés en ar- rière, et ceux du dessus du cou sont bien plus longs que ceux des autres parties du corps : ils sont très-rares à la face interne des cuisses et des jambes, et à la partie postérieure du ventre, sous le cou et sous les mamelles; leur base est ordinairement grise. Les jeunes individus et les femelles ne diffèrent pas des adultes pour les couleurs, mais beaucoup pour les formes; ils ne sont pas aussi trapus, et leur museau est beaucoup moins allongé. Cette espèce a une activité extrême, une grande pénétration, une adresse prodigieuse, une facilité de conception étonnante, et surtout une lubricité qui domine dans toutes ses actions, et qui même les détermine en grande partie (Frédéric Cuvier.) Fig. 141.— Main antéiUure de papion. Fig. 142. — Maiii postérieure de papion. QUADRUMANES. if)9 3 CYNOCKPIIALE IIAMADRYAS. CÏXOCliPHALUS HA,]IAnityAS. I nosmoulins ] Caractères spécifiques. — Face couleur de chair; une crinière ou caniail couvrant le dos, les flancs et les côtés de la tête. Habite l'Abyssinie, le Sennaar et l'Arabie. Ce singe, connu aussi sous le nom de tartarin, a été décrit, par lliiffon, sous ceux de lowando et de singe deMoco. En Abyssinie, on le nomme tota, et les Arai)es l'appellent robba. L'hama(lr^as a le pelage gris verdâtre, mais les parties postérieures sont plus pâles que les antérieures, et les bi'as sont presque noirs. La face, les oreilles et les mains sont de couleur de chair tannée. Un sil- Fi^. 145. — llamadryas. Ion trés-marqué sépare, en dessus, les narines qui, par là, ressemblent plus à celles du babouin qu'à celles du papion. Un camail long et touffu, d'une teinte gris verdâtre, couvre les parties supérieures du corps, et forme une véritable crinière. Le ventre et la face interne des membres n'ont que des poils rares. Les fesses sont rouges et la queue est terminée par une touffe de poils assez longs. IG" 22 170 HISTOlItE NATURELLE. Cl' singe est il'un iiatiiicl tiès-inéeliaiil, dit riéeltric Cuvier. Les ifanliens de celui qui a été ob- servé par ce savant natufalistc étaient ohliyés de le craindre; la haine était le seul sentiment qu'il parût éprouver. Même lor.sque la i'aim le pressait, et qu'on lui donnait sa nourriture, il s'en emparait brusquement, et menaçait aussitôt du reg^ard, du sieste et de la voix. .lusqu'à présent, continue le même auteur, toutes les observations conduisaient à regarder comme règle générale que les femelles des cynocéphales ne dii'térent point des mâles par la couleur, règle qui s'étendait même à tous les singes; il paraîtrait que la femelle du tartarin fait exception à cette règle, du moins dans l'âge adulte. Nous avons vu que le pelage du tartarin mâle était, en général, d'un gris légèrement verdàtre résultant de poils couverts d'anneaux alternativement noirs et gris jau- nâtre, (jù CCS derniers dominaient. Dans notre femelle, la teinte verdàtre l'emporte sur la teinte grise, sans doute parce que les anneaux noirs et jaunâtres sont dans des proportions plus égales, et que la couleur de ces derniers est plus jaune. Ces différences, assez considérables, et sur- tout cette exception à une rî'gle établie sur des faits nombreux, auraient pu conduire les naturalistes qui n'auraient vu qu'isolée de tout auti'e individu de son espèce cette jeune femelle de tartarin à la regarder comme la femelle d'une espèce inconnue, intermédiaire entre celle du tartarin et celle du chacnia; mais M. Ehrenberg ayant observé cette espèce dans les lieux mêmes qu'elle habile, et avec des individus de tout âge, les préserve de cette erreur. Aussi avons-nous appris par lui que les jeunes mâles ne diffèrent point des femelles, qu'ils sont aussi dépourvus de crinière, et que celle espèce vit en pet tes troupes; caractère qui parait être commun à toutes les espèces de singes. (FriiDiinic CuviEr,.] 4 CYNOClîriIALU; ClIACMA f JAOf^r;//i;.IS POHCMIIl'S. (DosHioiiliMs) CAr.ACTÈr.ES seÉciFiQUES. — Pelage noii' verdàtre, très-long sur le dos et le cou. cl formant en quelque sorte uiu> crinière; queue terminée par' un pinceau de poils noirs; ])eau de la face et des oreilles d'un noir violâtre; favoris dirigés en arrière et grisâtres. ILabite rAfri(iue australe. Le chacma décrit par Frédéric Cuvier était, en général, d'un noir verdàtre, plus pâle â la partie antérieure des épaules et sur les lianes que le long du dos; les poils étant gris â leur base, et noirs ensuite, avec quelques anneaux de jaune plus ou moins sale. Sa tète avait plus de vert; sa face et ses oreilles étaient nues, ainsi que la plante des pieds et la paume des mains, et l'on ne voyait que très-peu de poils cuui'ts, rudes et noirs; la queue se terminait par une forte mèche noire, et le cou était garni de poils très-longs qui formaient une sorte de crinière; enfin les favoris, dirigés en ar- riére, étaient grisâtres. La peau des mains, de la face et des oreilles, était d'un noir violâtre, mais le leur des yeux avait une teinte plus pâle, et la paupière supérieure était blanche comme celle du mangabey; les deux narines étaient séparées en dessus par une forte échancriire; la partie supérieure et antérieure de la tète tout à fait aplatie; et les callosiiés des fesses très-petites. Du reste, toute son organisation était celle des cynocéphales. Le chacma auquel se rapporte cette description était mâle, et appartenait à M. C**". qui l'avait eu fort jeune. Durant les premières années, ses sauts, ses grimaces, le rendaient supportable, et amusaient même; mais bientôt ses malices devinrent dangereuses, et il fut relégué et attaché par une forte chaîne dans une niche, à l'entrée d'une cour. Là il lit l'office de chien de garde; mais, après dix ans, il devint, par sa méchanceté, la terreur de ceux mêmes qui le soignaient, ce qui obljgea son maître à s'en défaire. Il pouvait avoir alors prés de quinze ans. lia Ménagerie du roi a possédé plusieurs chacmas, de tout âge et de tout sexe; et ceux dont on a connu l'origine venaient du cap de Bonne-Espérance. Nous avons reçu du capitaine lîandin un mâle et une femelle de cette espèce, et ils ont vécu fort longtemps. La femelle conserva tou- jours sa douceur; elle entrait en rut chaque mois, et avait des menstrues; alors ses parties géni- tales è|)rouvaient un gonflement qui, à sa partie su|iérieure, représentait une portion de sphère QUAWIUM.-VNES. 171 èchancréo en dessus, et qui s'allongeait en dessous après s'ètie rétréci subitement. Son cou n'était pas garni d'une erinière coninie le cou du niàle, et, en général, elle n'avait pas autant de poils. Le mâle perdit bientôt sa doeililé Un jour iju'il s'était éebappé de sa loge, dans l'eneeinle où il était renfermé, son gardien l'ayant imprudemment menacé d'un bàlon pour le faire rentrer, il se jeta sur lui en un tlin d'oeil, lui fit à la cuisse, avec ses fortes canines, trois profondes blessures c[ui péné- trèrent jusqu'au fémur, et qui firent longtemps craindre pour la vie de cet homme. On ne parvint à le renfermer que par un subterfuge qui réussirait toujours sur de tels animau.x, dans des cas sem- blables. Son gardien avait une fille qui lui donnait souvent à manger, et à laquelle il témoignait une affection particulière ; elle se plaça du coté de la cage de cet animal opposé à la porte par laquelle il devait rentrer, et un homme fit semblant de la flatter en s'approcliant d'elle; dès qu'il s'en aper- çut, il jeta un cri furieux, et, pour se jeter sur celui qui excitait sa jalousie, il s'élança dans sa cage, qui se referma à l'instant même. (FnÉDÉmc Cuvier.) 144 — Ch iciiia. Le chacma vit par bandes de dix ou trente individus, et les lieux qu'il fréquente sont les monta- gnes et les collines; rarement il entre dans les bois. Les fruits et les végétaux forment la base de sa nourriture, aussi fuit-il des ravages considérables dans les champs cnllivès. Souvent il arrive qu'une troupe de ces animaux fait irruplion dans la plaine à l'époque de la malurité des céréales. Ses dé- prédations ne cessent que lorsqu'on envoie à sa poursuite des hommes à cheval pour mettre les ma- raudeurs en fuite. Kolbe raconte que quelquefois un voyageur, prenant son repas au milieu des champs, se voit audacieusement enlever ses provisions par un insolent chacma qui, en voleur impu- dent, s'arrête à quelque distance, et, par une pantomime expressive, semble insulter à la surprise de celui qu'il a spolié, en lui montrant les objets dont il l'a dépouillé; il accompagne cette action de 172 HISTOIRE NATUltELLE. grimaces si comiques et de gosles si grotesques, que la victime de son audace ne peut s'empêciur de rire, à moins pourtant qu'elle ne soit obligée de se passer de dîner, ce qui ne doit pas peu con- tribuer à tempérer sa gaieté. Ces faits ne sont pas improbables; et Kolbe, dont le témoignage est assez souvent équivoque, peut, dans cette circonstance, être cru sur parole. Ceux qui vivent en captivité dans les maisons des habitants de la colonie sont de très-bonne garde, et avertissent de l'approche des personnes étrangères. Sur l'ordre de leur maître, ils ap- portent les objets qu'on leur désigne avec la même docilité que nos chiens domestiques; mais, pour qu'ils accomplissent leur tâche jusqu'au bout, il fautque la personne qui leur commande ne les perde point de vue; car, pour peu qu'elle détourne les yeux, le naturel indocile de l'animal reprenant le dessus, il fuit, laissant tomber l'objet qu'il a entre les mains. Certains d'entre eux sont quelquefois même employés à des travaux utiles : ici, c'est un forgeron, d'après ce que nous dit M. Verreaux, qui se sert d'un chacma pour entretenir le feu de sa forge; là, un laboureur qui fait conduire, à l'aide d'une corde, la première paire de bœufs attelés à son chariot ])ar un autre de ces animaux, qui, toutes les fois qu'il s'agit de passer une rivière, saute sur un des premiers bœufs de l'atlelage, et se tient accroupi sur sa monture pendant toute la durée du passage. Les Ilottentots ne touchent jamais aux substances alimentaires qu'un chacma aura refusées; ils savent que, guidés par l'excessive sen- sibilité de leur odorat, ces singes repoussent ce qui peut leur être nuisible; aussi rien de plus dif- ficile que de les empoisonner, si même cela est réellement possible; car un de ces animaux, dont voulut se défaire, par le ])ûison, la personne qui le possédait, resta dix jours sans toucher aux ali- nients qui lui étaient présentés, et il fallut le tuer d'un coup de fusil. (Puchehan, d'après Kolbe et Veriieaux.) § m. — CYNOCEPHALES (a queue très-couute). 5. CYNOCEPHALE MANDRILL. CYNOCEPUALVS ItlORMON. (De.'imouliiis ) CARACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Muscau très-p*oéminenl; parties latérales du nez bordées d'une masse de tissu érectile formant des sillons de couleur bleue ; nez rouge vif; organes génitaux, et parties qui les entourent, offrant les mêmes couleurs bleu et rouge; pelage gris-brun verdiitre en dessus; barbe et collerette jaune-citron; queue rudimentaire. Habile la Guinée. Dans leurs premières années, dit Frédéric Cuvier, et avant le développement des canines, ces ani- maux ont la tête large et courte, et le coips assez trapu; leur face est noire, avec les deux côtes maxillaires bleues et ridées; les fesses ne montrent encore aucune couleur particulière; et les testi- cules sont de couleur tannée. Dès que les canines commencent à pousser, leur corps et leurs mem- bres s'allongent, et prennent des proportions élancées en mènie temps que leur physionomie devient plus grossière par l'allongement du museau. Alors l'extrémité du nez rougit, les fesses se parent de leurs belles couleurs, et les testicules deviennent rouges. Après deux ou trois ans, les canines ont pris un accroissement considérable; les muscles des membres se sont fort épaissis; toutes les par- ties du corps ont acquis de l'ampleur, les postérieures principalement; et le museau s'est développé dans les mêmes proportions; de sorte que ce mandrill à membres si grêles, à corps si mince, a pris des formes si trapues et si lourdes, qu'on pourrait à cet égard le comparer à un ours. Du- rant cette époque, le nez devient rouge à peu prés dans toute sa longueur, et les brillantes cou- leurs des cuisses s'avivent, ainsi que le rouge des testicules et des parties voisines de l'anus. Quant au pelage, il n'éprouve aucun changement important : il est généralement d'un brun ver- dâtre, plus clair sur la lête que sur le reste du corps, et qui résulte de poils colorés dans leur lon- gueur d'anneaux alternativement noirs et d'un jaune sale; derrière chaque oreille se trouve une tache d'up blanc grisâtre; les côtés de la bouche sont d'un blanc sale, et le menton est garni d'une QUADRUMANES. 173 barbe jaunûtre. La partie postérieure du ventre est blanchâtre; mais les autres parties inférieures du corps sont brunâtres. Dans les vieux individus, les poils de la tête se relèvent quelquefois de manière à former une sorte d'aigrette; l'iris est d'un brun clair; les oreilles et les mains sont noires. La voix de ces animaux est sourde, semblable à un grognement, et semble exprimer rariiculalion aou, aou. Les femollos restent constamment plus petites que les mâles, et leur peau ne se colore pas d'une manière aussi vive et aussi biillante; leur nez ne devient jamais entièrement rouge; mais, par contre, à l'époque du rut. c'est-à-dire chaque mois, leur vulve se trouve entourée d'une protu- bérance monstrueuse, qui résulte d'une grande accumulation de sang dans ces parties, et qui a gé- néralement une forme sphérique. Lorsque le rut cesse, cette protubérance s'efface petit à petit, pour reparaître vingt-cinq ou trente jours plus lard. Fi". 145. — Mandrill Les mandrills ont le caractère féroce et brutal des autres cynocéphales; assez doux et confiants dans leur jeunesse, ils deviennent de la plus atroce méchanceté avec l'âge. Les meilleurs traitements ne peuvent les toucher, et les actions les plus insigniiiantes, un geste, un regard, une parole, sufii- sent pour exciter leur fureur; mais aussi la circonstance la plus légère les apaise. Tous les mammifères, â l'époque où ils deviennent capables de se reproduire, acquièrent un ac- croissement de vie et de force, une vivacité et un éclat de couleurs, une harmonie de projiortioiis qui fra])pent les esprits les moins observateurs; et ce n'est pas un faible sujet d'admii'atiun pour ce- lui qui se plaît à considérer la nature comme l'œuvre d'une Providence qui a tout créé, non-seule- ment par une puissance, mais surtout par une science et une sagesse infinies; cependant, parmi tous ces êtres, qui s'embellissent précisément à l'époque où ceux de sexes différents doivent se rechercher et se plaire, on n'en connaît aucun qui se revête de teintes plus riches et plus brillantes que le maii- 174 HISTOIRE NÂTUllEI.LE. (li'ill. Nous avons docrit les belles eouleiiis de cet animal, mais nous sommes sans doute encore bien loin de la vérité, tant il est difliiile de donner une idée exacte des richesses de la nature. En comparant la ligure du mandrill jeune à celle de l'adulte, on verra que le dernier a une teinte générale beaucoup plus brune que le premier, qui est plus verdâtre; ce que nous aui'ions pu indi- quer par analogie, car le pelage de tous les vieux cynocéphales est beaucoup plus foncé que celui des jeunes, comme nous l'avons déjà vu pour l'espèce du papion, pour celle du babouin. On sait que les sexes d'espèces différentes ne sont point naturellement ])ortés à se réunir : ce n'est qu'au moyen de circonstances particulières qu'on airive à former de ces associations contre nature, et, s'il en provient une race métisse, elle n'a point la faculté de se conserver. 11 semble que, plus on se rapproche de la race humaine, plus s'affaiblit la répugnance qui éloigne les espèces l'une de l'autre et les empêche de se confondre, ou, autrement, de s'anéantir, puisque les métis sont im- propres à la reproduction. En effet, il n'est pas rare de voir, parmi les singes, des individus d'es- pèces différentes se livrer à tous les actes de la reproduction, comme pourraient le faire ceux d'une même espèce. Ces exemples se sont reproduits plusieurs fois dans notre ménagerie, mais ces accouplements ir- réguliers n'ont jusqu'à présent jamais été féconds. Ce sont les macaques, et surtout les cynocéphales, qui éprouvent avec le ])lus de violence ces besoins d'accouplenent ; il paraît même que ces derniers singes, dans l'égarement de leur passion, pourraient devenir dangereux pour les femmes. Ce qui est certain, c'est qu'ils les distinguent très-bien des hommes; on ne peut en douter aux signes nombreux qu'ils en donnent. Et comment font-ils cette distinction dans une espèce si différente de la leur, et sur des individus couverts de vêtements au milieu desquels on ne peut apercevoir qu'une partie du visage? Quoi qu'il en soit, le mandrill est un des singes qui, dans ses désirs d'amour, montre le moins d'éloignement pour l'espèce humaine. Voici ce que mon frère dit du mandrill qu'il a décrit dans la ménagerie du Muséum d'histoire naturelle : « Nous avons déjà eu occasion de parler de l'a- mour des singes pour les femmes : aucune espèce n'en donne des marques plus vives que celui-ci. L'individu que nous décrivons entrait dans des accès de frénésie à l'aspect de quelques-unes, mais il s'en fallait bien que toutes eussent le pouvoir de l'exciter à ce point; on voyait clairement qu'il choisissait celles sur lesquelles il voulait porter son imagination, et il ne manquait pas de donner la préférence aux plus jeunes. 11 les distinguait dans la foule; il les appelait de la voix et du geste; et on ne pouvait douter que, s'il eût été libre, il ne se l'iit porté à des violences. Ces faits bien consta- tés, observés par mille témoins éclairés, rendent très-jligne de foi tout ce que les voyageurs rap- portent sur les dangers que les négresses courent de la part des grands singes qui habitent leur pays. On a attribué à l'orang-ouîan, ou plutôt au chimpanzé, plusieurs traits de ce genre qui ap- partiennent vraisemblablement au mandrill. 11 est clair, par exemple, que le barris de Gassendi est bien plutôt un mandrill qu'un chimpanzé; et, ce qui paraîtra peut-être singulier, il n'est pas sûr que le nom même de mandrill n'appartienne pas même en revanche au chimpanzé plutôt qu'à l'ani- mal que nous décrivons aujourd'hui; il paraît du moins certain, ainsi que l'a observé Audcbert, que Smith, dontliuffon a emprunté ce nom, a réellement voulu parler du chimpanzé, etc., etc.» (Fréd. CuVIEK.) 6. CYNOCÉniALE IJRILL. CiAOCEPIlALUS LEVCOPILEUS. (Dosmoulins.) Car.ictkres SPÉCIFIQUES. — Facc noire; scrotum cl fesses rouge vif; pelage verdâtre, foncé dans les parties supérieures, et blanchâtre dans les inférieures; peau de toutes les parties nues, noire, à l'exception des régions anale et génitale; peau des parties couvertes de poils, bleuâtre. Habite la Guinée. C'est Frédéric Cuvicr qui, le premier, fit connaître cette espèce, d'après un jeune individu femelle. 11 lui donna le nom de ximia Icucophwa, nom qui a été conservé, mais qui ne convient guère à l'a- dulte. Plus tard, dit Frédéric Cuvier, nous avons possède un mâle et une femelle adultes de la même es- QUADRUMANES. 175 pèce, de sorte que toutes les incertitudes qui pouvaient encore rester sur la réalité de son existence sont dissipées. Le drill a tant de ressemblance avec le mandrill , que c'est à cette cause sans doute qu'il faut attribuer le peu d'attention qu'on y a fait jusqu'à présent; l'un a été pris pour l'autre, et, en effet, le caractère le p'us apparent qui les distingue, c'est que le premier a la face entièrement ncire, tandis que le second a le nez roui^e et les côtes saillantes des joues d'un beau bleu de ciel. La figure du drill que nous publions montre assez que cet animal appartient au groupe des singes des cynocéphales. En effet, il en a tous les caractères : des narines sans mufle, placées à l'extrémité du museau; des abajoues; des fesses nues, avec des callosités; des membres à peu près d'égale longueur; des oreilles pointues; un front très-effacé; des sourcils qui couvrent les yeux; des côtes saillantes sur les joues; et, enliu, le naturel grossier et brutal qui est commun à tous les autres cy- nocéphales. Ses yeux sont semblables à ceux des autres singes à tous égards; ses narines ont le caractère qui est particulier à celles des mandrills, c'est-à-dire qu'elles se dirigent un peu en ar- rière; ses oreilles sont sans hélice, proprement dit; ses lèvres minces, entières; et sa langue est douce. La verge, dont le gland est piriforme, se retire et se cache dans le scrotum, qui est volumi- neux cl peiidanl. FiR. UG. Di-ill. La couleur de son pelage se rapproi liait aussi de celle du mandrill; seulement, elle était plus ver- dàlre aux parties supérieures, et il y avait plus de blanc aux autres jiarties. Le dos, les côtés du 176 HISTOIRE NATURELLE. corps, la tète, la face extérieure des membres, et une bande au bas du cou, en avant des pattes an- térieures, étaient couverts de longs poils très-fins, gris à leur moitié inférieure, et alternativement noirs et jaunes à leur autre moitié. Ce sont ces deu\ dernières couleurs qui formaient la teinte ver- dâtre de l'animal à toutes les parties supérieures du corps. Des poils également longs et fins, d'un blanc grisûlre, garnissaient toutes les parties inférieures. Cependant, la diverse direction des poils, et la plus ou moins grande étendue de l'une ou de l'autre de leurs couleurs, présentaient les modi- fications qui sont peut-être caractéristiques. Ainsi, ceux qui garnissent les joues ne rencontrant point la base de ceux qui naissent derrière eux sur le cou, il en résulte que la moitié inférieure et grise de ces derniers n'est point cacliée comme aux autres parties, et que là elle présente une sorte de collier gris qui commence sous le cou, et qui se termine au-dessus de l'oreille. Ces poils des joues sont assez rares; ils ont moins de noir que les autres, et sont couchés en arriére; ceux qui garnissent en dessous la mâchoire inférieure sont jaunes, et forment une sorte de barbe. Les poils du dessus de la tète se réunissent, vers la ligne moyenne, en une petite crête que l'âge rendra vraisemblablement plus grande; les poils de la queue sont gris, et disposés en pinceaux; la face et les oreilles sont nues, ainsi que le derrière de celles-ci, et il en est de même des fesses et des testicules; les doigts ne sont garnis que de quelques poils, et la plante des pieds, comme la paume des mains, en sont tout â fait dénuées; la peau de toutes les parties cou- vertes est bleue, et cette couleur s'aperçoit un peu au travers du pelage, sur les côtés des fesses et à la partie postérieure des mâchoires, où les poils sont plus rares qu'ailleurs; la face est entiè- rement noire, et deux côtes larges, saillantes et ridées, mais non plissées comme celles du man- drill, garnissent les côtés du nez; les mains antérieures et postérieures ont une teinte cuivreuse; les fesses et les testicules sont d'un rouge très-vif. Fij;. 147 — Drill femelle Irès-jeune La femelle ne diffère du mâle que par une tète moins allongée, par sa taille, et par la teinte beau- coup plus pâle de son pelage. A l'époque du rut, c'est-à-dire tous les trente jours environ, le sang se porte aux organes génitaux; toutes les parties environnantes se tendent, se gonflent, et bientôt elles ne présentent plus qu'une forte protubérance, plus large du côté de l'anus que du côté opposé; QUADRUMANES. 177 dans cette dernière partie, est un étranglement qui partage (^etle protubérance en deux portions in- égales. Si nous rapprochons actuellement la description du siinia leiicophœa de celle que je viens de donner du mftle et de la femelle adultes de cette espèce, nous voyons dans le jeune âge la tête plus arrondie, les crêtes sourcilières moins développées, et les teintes du pelage grises, et se rapprochant de celles qui sont propres à la femelle; les autres parties du corps ont les mêmes formes et les mêmes proportions que dans l'adulte, et présentent tous les caractères essentiels à l'espèce. Un nom était nécessaire à ce cynocéphale nouveau; celui de babouin des bois (wood baboon), en supposant qu'il lui appartint, serait assez peu convenable. Le grand rapport qu'il avait avec les cou- leurs de la face m'a suggéré l'idée de lui donner le nom de drill, qui a l'avantage, en quelque sorte, d'indiquer les rapports intimes de ces deux espèces. Je n'ai pas eu cet animal assez longtemps en ma disposition pour étudier son intelligence et son caractère. Il ressemblait sans doute aux cynocéphales par ses facultés intellectuelles comme par son organisation; tout ce que j'ai pu voir, c'est qu'il était assez doux, et qu'il répondait par de grands témoignages de joie aux caresses de son gardien; mais on ne doit pas oublier qu'il était encore très- jeune. (KrÉD. CllVlER.) (' Nous avons donné l'histoire des singes de l'ancien monde (catarruimens) formant la premier section de la famille et se divisant en dcus. tribus ■ primnlcs L'iiniliécieus. Dans la seconde section, comprenant les singes du nouveau monde (i'l.vtïrbhimeins), nous tiouvons un assez grand nombre d'espèces formant aussi deux tribus : cébicns et arclopilhédens . L'Amérique a donc des singes qui présentent une organisation particulière; la cloison de leurs narines est large, et les ouvertures nasales sont latérales. C'est une autre nature d'êtres ambigus entre l'homme et les carnassiers; c'est, dit M. Geoffroy Saint-Hilaire, un autre lijpe singe qui remplit les forêts du monde découvert par Colomb. Car si, comme les singes de l'ancien continent, ils vivent également sur les arbres, ce n'est plus en recou- rant à la même industrie qu'eux. Ils n'ont ni les callosités ni les abajoues des premiers; mais on trouve chez eux, ou de doubles moyens de saisir les branches, la queue et les mains, ou des on"les longs, courbés et formant des griffes à l'aide desquelles ils grimpent facilement le long des tiges. C'est vraiment un autre type, ajoute le savant professeur, comme si les singes d'Amérique prove- naient d'une autre époque de création, et comme si les espèces qu'on y trouve se fussent multi- pliées en retenant dans leurs modifications les traits fondamentaux du système primitif. Les uns, en effet, ont un système dentaire augmenté d'une molaire de chaque côté des deux mâchoires, et les autres, qui n'ont que cinq molaires, comme les espèces de l'ancien monde, sont à peine des qua- drumanes, car ils n'ont plus félément caractéristique de cet ordre, le pouce, chez eux, n'étant que rudimentaire. En comparant les espèces de l'ancien continent à celles du nouveau, on peut dire que, sous le rapport de la conformation de la tête, il n'y a point, en Amérique, de singes ni aussi voisins, ni aussi éloignés de l'homme que l'on en rencontre parmi les premiers. Aucun n'a la tête aussi haute et aussi large et saillante au front, que l'orang-oulang; mais aucun ne l'a non plus aussi allongée, au point que la face soit de beaucoup plus longue que la boite cérébrale. Tous, au contraire, ont la tête ronde, le museau court, et l'angle facial de 55 à 60 degrés; aussi cet angle cesse-l-il d'être un caractère bien utile. La tête sphéroidale des singes américains contient, â proportion, autant de cerveau que celle des singes les plus favorisés à cet égard parmi ceux de l'ancien monde. Enfin la distinction d'un type à part se montre presque dans le mode de variation de toutes ces têtes, don[ les différences semblent dériver les unes des autres. De même que l'on considère une guoioii comme l'idéal de l'être sina;e pour les quadrumanes ca- 1" ' 23 178 HISTOIRE NATURELLE. tarihiiiiens, do.nipmc aussi l'on trouve un type correspondant chez les plalvrrliiniens, c'est un sajou dette conformation typique est également susceptible d'être, en quelques points, niodiiiée; mais ce qui seiiil)lc un effet nécessaire de ce point de départ, cliaque modification y puisera des conditions autres que celles qui dislint;upnt les i;enres des sing-es de l'ancien monde; et l'on doit porter atten- tion à un tel résultat, car c'est tout au plus si d'autres variations étaient ou devaient sembler encore possibles; toutes les combinaisons supposables ne paraissaient-elles pas épuisées"? Mais il n'en est point ainsi. Autour des sajous sont d'autres conformations, parce qu'il est, en effet, plusieurs parties organiques, jusque-là restées dans le médium des développements, qui, sans quitter le caractère sinçie, et sans manquer aux rap|)orls harmoniques qu'elles doivent conserver avec les organes du voisinage, pouvaient être portées à l'état d'hypertrophie; le crâne, l'appareil liyoidien, les extrémités, les ongles et la queue, sont ces parties encore susceptibles d'être plus ou moins profondément transformées. Effectivement, comme affinités naturelles, il y a deux sous-types bien distincts de singes américains : i" Ceux qui restent plus ou moins assujettis aux formes caractéristiques des quadi'umanes, mais qui prennent une dent molaire de plus à chaque coté de chaque mâchoire; ils vivent, pour la plu- part, sur les arbres, en employant l'action préhensile des mains; et leurs ongles sont courts. 2° Les singes américains, qui ne font plus ressource des quatre mains, mais qui restent singes à tous autres égards : ils n'ont que cinq molaires au lieu de six, et, s'ils habitent encore sur les arbres, c'est en grimpant le long de leurs tiges à l'aide d'ongles transformés en de véritables griffes. Ceux-ci forment une tribu, sous le nom cVarciopitliccicns. Les autres formant aussi une tribu se partagent en deux sections-, car, ou ils ajoutent aux usages de leurs mains l'action de leur queue pre- nante : tels sont les liél<>pillii(jncs; ou bien, faute d'aider au premier effet par ini effet complélif, et d'ofl'rir le recours de la queue, reprenant pour soi le service quand il est abandonné par les extré- mités qui seraient trop fatiguées, ils ne peuvent vivre sur le haut des arbres : tels sont les (/copi- tlnqiics, ou singes de terre. Les hélopithéques ont la colonne épinière et les muscles qui la recouvrent portés au maximum de leur dcvelojipement, et leur queue gagne en volume et en puissance, parce que l'augmentation de force dans I axe vertébral se propage de proche en proche et s'étend à l'appareil caudal. Ce n'est qu une nname; mais ce degré en plus fait que la queue, qui d'ailleurs n'est qu'un appendice très- inutile, prend tout à coup l'essor d'un véritable et tout-puissant organe. Les hélopithéques, avec les mêmes moyens locomoteurs des autres singes, sont, de plus, pourvus d'un instrument capable d'actions pour son compte et de bons offices à l'égard de quelques autres organes, qu'il soulagera d'un excès d'activité. Comme les singes doivent leur queue prenante au renforcement de tous les muscles de l'épine, ils sont généralement plus forts que les autres espèces de même taille qui ne sont point ainsi favorisées; et, ce que produit toujours l'excès de la force, ils en abusent; car, sans qu'ils en aient sujet, on du moins sans ([ne cela leur soit profitable, ils maltraitent les autres singes. Les géopithèques, exposés à de tels caprices, n'attendent point le renouvellement de ces actes do tyrannie pour s'y soustraire; ils évitent la rencontre des singes à queue prenante, en se tenant à terre; ils recherchent des lieux où ils puissent trouver quelque sécurité : des broussailles ou des cavernes d'une retraite possible pour eux, et inaccessible à leurs ennemis. Pourquoi d'ailleurs tien- draient-ils à vivre sur les arbres'? ils n auraient à y employer que leurs mains, insuffisantes à saisir constamment les branches, parce que la fatigue musculaire les en détournerait. Les géopithèques sont donc nécessairement des singes vivant à terre. Mais il semble qu'il y ait contradiction entre l'organisation ambiguë du singe et sa non-existence sur les arbres. Les géopithèques marcheront-ils exclusivement sur le sol? Serions-nous arrivés avec eux et par eux à la plus fâcheuse modification du type, à des singes réellement misérables? Il n'en est point ainsi. Il est tant et de si différents re- liefs à la surface du globe, tant de sortes de localités à habiter! Le plus faible abri, sous l'éveil du besoin et de l'industrie, peut devenir un lieu assuré de refuge. Les singes à queue prenante, bien établis sur les arbres, ne prétendront point à une retraite souter- raine, qu'un sentiment d'infériorité et une situation |iresque de détresse auront fait préférer et adop- ter. Cependant, dans ces mêmes lieux, les géopithèques sont aussi exposés à des ennemis plus dan- gereux : les nombreu.ses espèces de carnassiers. Forcés de fuir, ils n'ont souvent de refuge, contre ceux-ci, que les arbres, et de ressources, dans les moments de danger, que l'instinct et les apti- I I QUADRUMANES. • 179 tildes du sini^p; alors ils mettent :i prufit la fanillé de saisir, qu'ils tiennent du fait de leurs quatre mains. Les géopilhèques sont donc renvoyés d'un ennemi sur un autre. Cependant, pour qu'ils puis- sent se maintenir au milieu de tant de traverses et de danjjers, il faut qu'ils soient plus attentifs, plus habiles dans la défense que l'ennemi dans son attaque, et généralement plus intelligents que le commun des singes. Or, c'est ce qui ari'ive et ce qui est suflisammenl prouvé pai' leur nombre proportionnel; mais, de plus, c'est encore ce qui paraît non moins bien établi par la dimension de leur crâne et le volume de leur cerveau. (Geoffuov S.m.m'-IIii.aihe.) ÏIIOISIEME TUIItU. CÉDliiNS. Dans cette tribu nous plaçons tous les singes américains ayant, comme nous l'avons déjà dit, les narines ouvertes latéralement et séparées par une large cloison; trente-six dents; des ongles aux quatre mains; une queue le plus souvent longue, et, dans ce cas, prenante ou enroulante, mais aussi quelquefois trés-conrte. Us n'ont ni abajoues ni callosités. On a établi dans cette tribu trois groupes assez caractérisés par l'organisation particulière de la queue, qui, chez les uns, est prenante, en partie nue et calleuse, et remplit les fonctions d'un cin- quième membre; tandis que chez les autres, qui Font entièrement velue, elle est enroulante; chez les derniers, enlin, elle n'offre rien de particulier que l'inertie on la brièveté. Les singes du premier groupe sont désignés sous le nom de sapajous ou hélopithèques; ceux du second sont connus sous le nom de sajous, et les derniers sous celui de sagouins ou (icopiilihiucs. Cette tribu comprend les sapajous et les sagouins de Bnffon ; les sapajous et les sakis de Cuvier et de la plupart des auteurs; et les hélopithèques, et les géopithcques de M. Geolïioy Saint-Ililaire. M. Isidore Cieoffroy Saint-Uilaire les a aussi désignés, dans ses leçons, sous le nom général d'uru- pithéciens. Jrteimet iitoiipc — c).c:, eii-TTiiis; -lô/.H, sinj;c. Singes à queue nue et calleuse à l'extrémité, et pouvant s'enroider comme un doigt sur les objets ((u'ils veulent saisir. Ce groupe comprend quatre genres : les alouates ou hurleurs, les atéles, les ériodes et les lagotriches; Spi.\ a désigné ces singes sous le nom de gymnuriens. Il y a peu de mammifères, dit Lesson, chez lesquels la queue aequièi'e une aussi grande force et remplisse d'aussi importantes fonctions. Cette partie, qui n'a presque toujours que des usages tout à fait secondaires, ou même entièrement nuls, devient, chez les sapajous, un instrument tout-puis- sant de préhension; c'est en quelque sorte une cinquième main à l'aide de laquelle l'animal peut, sans mouvoir son corps, aller .saisir au loin les objets qu'il veut atteindre ou se suspendre aux bran- ches des arbres. L'étendue de la partie calleuse de la queue, toutes cho.ses étant égales d'ailleurs, parait se trouver dans un rapport assez exact avec la force de préhension de cet organe; et, comme elle est très-constante pour chaque espèce, elle pourrait fournir d'excellents caractères spécifiques. Tûîitefois elle n'est sujette qu'à de bien légères variations, non-seulement d'une espèce à l'autre, mais même entre deux genres différents. .Viusi, la partie nue et calleuse comprend toujours le tiers environ de la queue chez les uns {liuricurs et atclcs}, et les deux cinquièmes chez les autres (criodes), un autre trait commun à ces sapajous consiste dans le peu de largeur de leur nez; les narines sont ouvertes latéralement, comme chez tous les autres singes américains, mais elles sont en général beau- coup plus rappiochécs que chez les espèces du second et du troisième groupe; et nous verrons 180 HISTOIRE NATURELLE. même que te caractère est li'lleineiit oxagéré clans le genre èrmlcs, que la disposition des narines rend les espèces qui le composent véritablement plus voisines des singes catarrhiniens que des platyrrhiniens. Cette remarque avait déjà été faite, à Tégard d'une espèce, par Spix, et elle doit être étendue à tous les ériodes. Une condition organique, qui est commune à tous les sapajous à Fig. 148. — Hurleur :ilouulo, ( Vùlins du Slusûuni ) queue nue, consiste dans l'ampleur de l'os hyoïde, qui arrive à son maximum de développement dans les espèces du genre hurleur, qui sont remarquables aussi par le développement des forces de la queue. (Lessop*.) 1" GENRE. — HURLEUR. STENTOR. (Geoffroy Saint-Ililaire.) Alouala, nom local; Stentor, nom tiré du cri de ces singes. CAU.\CTEHES GÉNÉRIUL'ES. Queue Ircs-lotifiue, preuuuic, nue et ailleuse !i l'e.vlrémhc cl en dessous. C).s ntax'itUùre inférieur h branches très-dcveloppérs. Os lujoïde renflé, caverneux et formant une boule creuse. Membres anlérieurs el postérieurs robustes et presque d'éçiale lonçiiieur. Tcte pijrdtn'idalc . Pouces (les mains anlcrieures de moitié moins lomjs (jue le second duicjt. ircs-peu libres dans leurs mouroncnis cl It pciiir opposables. QUADRUMANES. 181 Ces singes, tous de l'Aniérique intertropicale, sont lourds, paresseux et très-farouclies; ils vivent dans les forêts, en troupes nombreuses, que M. de HumboUlt évalue à deux mille par lieue carrée, et ils font entendre leurs cris à une grande distance. Dans les espèces de ce genre, la mâchoire inférieure est excessivement développée, soit dans son corps, soit surtout dans ses branches; celles-ci, dit Lesson, sont tellement étendues en largeur et en hauteur, que leur surface est presque égale à celle du crâne tout entier. Elles forment ainsi deux vastes parois, comprenant entre elles une large cavité dans laquelle se trouve logé un os hyoïde modifié d'une manière non moins remarquable. Le corps de l'os est transformé en un tambour ou caisse osseuse, à parois très-minces et élastiques, présentant en arrtère une large ouverture sur le côté de laquelle sont articulées deux paires de cornes, et figurant à peu près, lorsqu'elle a atteint son dernier degré de développement, une moitié d'ellipsoide. Cette caisse a cinq ou six centimètres de diamètre. Aussi, ce qui est une suite de cet énorme accroissement, le corps de l'hyoïde dépasse, en bas, la mâchoire inférieure, et forme au-dessous d'elle une saillie recouverte extérieurement et cachée par une barbe longue et épaisse. La grande influence qu'exerce, dans la production de la voix, cette conformation singulière de l'hyoïde, ne peut être douteuse. Cette voix est rauque et désagréable, et se fait entendre à plus d'une demi-lieue à la ronde, ainsi que l'assurent tous les voyageurs. Fis 149 — Os hyoïde vu de face. Fig. 150. — Crâne du Imrkur niouutc. Fii; 151. — Os hyoïde vu de prolil. D'Azara la compare au craquement d'un grand nombre de charrettes non graissées, et d'autres voyageurs aux hurlements d'une troupe de bètes féroces. Ces singes se font entendre de temps en temps dans la journée; mais c'est surtout au lever et au coucher du soleil, ou bien â l'approclie d'un orage, qu'ils poussent des cris effi'ayants et prolongés. Margraaff donne aussi à ce sujet quelques détails que nous rapporterons, sans toutefois nous por- ter garant de leur exactitude : il assure qu'un individu se fait d'abord entendre seul, après s'être placé dans un lieu élevé et avoir fait signe aux autres de s'asseoir autour de lui et de l'écouter. Dés qu'il les voit placés, dit le voyageur saxon, il commence un discours à voix si haute et si pré- cipitée, qu'à l'entendre de loin on croirait qu'ils crient tous ensemble; cependant il n'y en a qu'un seul; et, pendant tout le temps qu'il parle, tous les autres sont dans le plus grand silence; ensuite, lorsqu'il cesse, il fait signe aux autres de répondre, et, à l'instant, tous se mettent à crier, jusqu'à ce que, par un autre signe, il leur ordonne le silence. Immédiatement ils obéissent et se taisent; c I8t> IIISTOIRK NATURELLE. alors le |)i'emipi- rfpi'cnd son discours, et ce n'est qu'apivs l'avoir écoiité bien attentivement (|u'ils se sépacent et lèvent la séance. Quelques voyageurs assurent que les hurleurs se taisent lorsqu'un approche d'eux; quelques au- tres affirment, au contraire, qu'ils redoublent alors leurs cris, et font un bruit épouvantable, qui devient leur principal moyen de défense quand on les attaque. Ils cherchent en même temps à éloi- gner l'agresseur en lui jetant des branches d'arbres, et aussi en lançant sur lui leurs excrémeni;., après les avoir reçus dans leurs mains. La peau de ces singes est employée, au Brésil et dans les Cordillères, pour recouvrir les selles cl le dos des mulets; mais leur chair parait être d'un goût peu agréable, quoiqu'on l'ail conipaiée à celle du lièvre. Comme ils se tiennent toujours sur les branches élevées des grands arbres, les lié- es et les armes à feu peuvent seules les atteindre; encore, avec leur secours même, a-t-ou beau- coup de peine à se procurer un certain nombre d'individus, parce que, s'ils ne sont pas tués sur le coup, ils s'accrochent avec leur queue à une branche et y restent suspendus, même après leur mort. Les femelles des hurleurs, de même que celles des autres singes américains, ne paraissent point sujettes à l'écoulement périodique; et elles ne font qu'un seul petit, quelles portent sur leur dos. HAzara assure que, lorsqu'on pousse près d'elles de grands cris, elles abandonnent leurs petits pour s'enfuir plus rapidement; et quelques autres voyageurs rapportent aussi des observations d'où il résulterait que l'instinct de l'amour maternel a sur elles beaucoup moins de pouvoir que sur toutes les autres femelles de singes Cependant on trouve, dans le grand ouvrage de Spix sur les singes du lîrésil, nu fait dont ce voyageur nous dit avoir élè lui-même témoin, et qui tendrait à faire adop- ter nue opinion toute contraire. Ayant fait à une femelle une blessure mortelle, il la vit continuer à porter son petit sur son dos jusqu'à ce qu'elle fut épuisée par la perte de son sang; se sentant alors près d'expirer, elle rassembla le peu de forces qui lui restait pour lancer son précieux fardeau sur les branches voisines, et tomba presque aussitôt; trait (|ui, ajoute Spix, suppose une sorte de réflexion. Enliu un autre auteur affirme aussi que les femelles de hurleurs sont remarquables par leur atta- chement pour leurs petits, et qu'on ne peut se procurer de jeunes individus qu'en tuant leurs mères. Le même auteur ajoute que ces singes savent s'enti''ni(ler pour passer d'un arbre ou d'un ruisseau à l'autre, et que, lorsqu'un individu est blessé, ou voit les autres s'assembler autour de lui et mettre leurs doigts dans la plaie comme pour la sonder; alors, si le sang coule en abondance, l'un tient la plaie fermée, pendant que d'autres apportent des feuilles qu'ils mâchent et poussent adroitement dans l'ouverture pour arrêter l'hémorragie, .le puis dire, ajoute l'auteur que nous citons (Œxmelin, llisioireiles avcuturiers), avoir vu cela plusieurs fois, et l'avoir vu toujours avec admiration. Les hurleurs vivent en troupes nombreu.ses, et se tiennent habituellement sur les arbres; on pré- tend même qu'ils n'en descendent jamais. Spix affirme qu'ils sont monogames; mais le contraire semble résulter des observations de d'Azara. Us sautent avec agilité d'une branche à l'autre, et se lancent sans crainte de haut en bas, bien certains qu'ils sont de ne pas tomber jusqu'à terre, et de s'accrocher où il leur plaira, au moyen de leur queue à la fois longue, bien flexible et robuste. Ils se nourrissent de différentes espèces de fruits et de feuilles, et l'on assure qu'ils mangent quelque- fois aussi des insectes. Bien loin de redouter le voisinage des grands amas d'eau, comme le font un grand nombre de singes, ils se plaisent dans les forêts les plus rapprochées des fleuves et des marais; c'est ce qui a été vérifié également au Paraguay par d'Azara; au Brésil, par Spix; et à la Guyane, par un observa- teur que lUiffon cite sans le nommer, et qui est très-vraisemblablement le voyageur de Laborde. Enfin M. de Iliimholdt, dont l'autorité suffirait seule pour établir ce fait, l'a constaté dans plusieurs paities de l'Amèricfue espagnole. On ne doit donc pas s'étonner, quoique la plupart des singes appartiennent exclusivement aux régions continentales, que quelques lies renferment des hurleurs. Enfin, en terminant ce qui concerne les habitudes des hurleurs, nous dirons que ce sont des ani- maux tristes, lourds, paresseux, farouches, et d un aspect désagréable. Il est rare, pour cette raison, et sans doute à cause de leur voix, qu'on cherche à les apprivoiser; et il est plus rare encore qu'on y réussisse. Us paraissent, en effet, s'habituer très-difficilement à vivre en domesticité; et c'est ce qui nous explique pourquoi on ne les amène jamais vivants dans nos climats, malgré la fréquence des relations coiumercialcs de l'Europe avec plusieurs des régions américaines où ils sont le plus conniiuns. (Lesson.) OIIADBUMANES. 183 (aivior et (îrollroy Saint-Ililniir ;iv;iieiil |iiii]Hisé pour ce yenre le nom de ccbus, qui est mieux employé pour un ;iuti-e genre. Depuis, Geolfioy Saiul-Ililaire trouva un nom générique qui exprime le cararlère le plus remarquable des hurleurs, celui de stentor; ce nom a été généralement adopté. Le nom d'alouales, indiqué par Lacépéde, est aussi employé, et celui de mycètes, proposé par llli- ger, se trouve préféré par quelques naluralistes étrangers. . I. HURLEUR ALOUATE. STENTOR SI^MCULUS. (Geoffroy Saint-Ililaire.) Caractères spécifiques. — Face nue et noire; dessus du corps d'un beau roux; tète, extrémités Il queue d'un roux foncé très-vif; poitrine et ventre peu velus. Habile la Guyane, où il est connu sous le nom de )?(o»o Colorado, le Brésil, le Paraguay et presque licile l'Amérique méridionale. On a qui'bpiefois don'né à ce singe le nom de hurleur roux, nom insignifiant, puisqu'il convient à plusieurs espèces du même genre. L'alouate est remarquable par la nudité presque complète de sa lace, où l'on remarque seulement des poils irés-couris et trés-claii semés au-dessous des yeux et cuire les orbites, sur la ligne médiane. Le corps est eu dessus d'un fauve doré éclatant qui, vers la base de la queue et près des cuisses et des épaules, se change en roux brillant. La barbe, les joues, les bras, les cuisses et la partie supérieure des jambes, sont d'un marron clair très-vif, [•'l^', 152. — lllIll.MM ,lll.tl,ltC. et le reste des membres, le dessus de la tète et de la queue sont d'un marron foncé tirant un peu sur le violet. Les poils de la partie antérieure de la tète naissent du front, et se portent d'avant en arrière et de dedans en dehors. La longueur d'un individu adulte, mesuré du bout du nuiseau à l'origine de la queue, est de deux pieds environ, et la queue est un peu plus longue. Les jeunes individus ont le corps uniformément d'un ruiix brunâtre. (Lesson.) ■2. IlLRLIiLR A QIJEUE DORÉE. STEXTOR CIIRÏSVRVS. (Isidore Geoffroy Saiia-llil;iii-e.) Caractères SPÉCIFIQUES. — Partie antérieure du corps, tète, barbe et membres d'un marron foncé, avec quelques reflets violacés, surtout sur les bras; partie postérieure du corps d'un fauve doré brillant; queue marron foncé et d'un fauve doré brillant à son quart terminal. Habite l'Ainérique méridionale, mais parliiulièrement la Colombie. 184 HISTOIRE NATURELLE. La dernière moitié delà queue et le dessus du corps jusqu'en arrière des épaules, sont d'un fauve doré très-brillant; le reste de la queue est d'un marron assez clair, et le reste du corps, la tête tout entière et les membres, sont d'un marron très-foncé, principalement les membres, où il prend une teinte violacée. 11 est presque impossible d'exprimer par des paroles la nuance de ces couleurs : mais la figure suppléera à ce que je ne puis dire ici. La face est en grande partie nue, mais moins cependant que chez l'alouate. Fiy. 153. — Hurleur î\ quouc dorée et son petit. Le hurleur à queue dorée sera distingué très-facilement, au moyen des remarques suivantes, de cette dernière espèce, la seule avec laquelle il serait possible de le confondre. Chez le stcnior cltrysiirns, la tète et les membres sont d'une seule couleur, et la queue et le dessus du corps de deux couleurs; chez le stentor .tcuiculits, c'est l'inverse qui a lieu .• la tête et les membres sont de deux couleurs, et la queue et le dessus du corps d'une seule. Le premier est aussi sensiblement plus petit, et présente quelques différences de proportion : la queue forme seulement chez lui la moitié de la longueur totale; elle forme au contraire manil'estement plus de la moitié chez le stentor svniciiliis. La callosité de la queue est aussi sensiblement plus étendue dans notre nouvelle espèce. Le hurleur ;i queue dorée m'est connu par l'examen de trois individus, savoir, deux adultes en- tièrement semblables entre eux, et un jeune différant seulement par la nuance un peu moins claire de sa queue. 11 est probable que les très-jeunes individus sont même, comme dans les espèces voi- sines, géuèralenuMil bruns. La comparaison du crâne avec ceux de ses congénères a pleinement confirmé le résultat de mes premières observations. La partie antérieure de la tète a moins de largeur que chez le stentor senkulns, et se détache ainsi davantage de la partie moyenne, l'ar suite de celte modilicaiion, le palais devient plus étroit; mais, en revanrhe , il s'étend davantage en arrière , d'où il suit que les arrière-narines sont plus couvertes, et que leurs orilices sont placés dans un plan presque vertical, au lieu de l'èlre dans un OIIAOIIIIMANES 185 plan iri^s-nbllqiic. Les rnnyèes dos (Iciils, plus l'icmlues on longurur que dans les autres espèces, sont parallèles entre elles, principalement à la mâchoire inféri(^ure. La symphyse de cette mûchoire est aussi remarquable par sa direction très-oblique en arrière, et son bord inférieur est tellement sinueux, qu'il ne peut soutenir la tèle sur un plan horizontal, tandis que chez le sloilor semcitlus la mâchoire inférieure, en posant sur sa symphyse et son bord inférieur, fournit à la léte une base de sustentation très-solide. Enlin, je puis ajouter que chez le sicntor (lirijsnrtis les apophyses zygo- maliques sont plus larges que chez aucun autre hurleur. Le nom A' amcjuulo (nom local) donné à ce singe a été appliqué aussi à d'autres hurleurs et même à des singes de genres dilférenls, mais perlant également une barbe. Le hurleur à queue dorée, d'après M. le docteur lloulin, est commun dans la vallée de la Made- leine. Colombie? Comme presque tous les autres singes, il vit en troupes. M. lioulin, qui a eu l'occasion de l'ob- server plusieurs fois, a remarqué que lorsqu'une troupe doit passer d'un arbre à l'autre, tous les individus qui la composent agissent d'une manière toute semblable, sautent successivement aux mêmes poinis et posent leurs pieds aux mêmes places, comme si chacun d'eux était obligé d'imiter celui qui le précède. (Isidore Geoffroy Salnt-Hilaire.) 5. lll'RLIiCU ÛL'liSO.N. STliNTOR lltSlAVS (Gec.ffroy Saint-llilairc.) CvRAC.TÈRts SPÉCIFIQUES. — Polagc d'uii roux doré uniforme; poils longs et abondants; face en partie velue; barbe longue et épaisse. Habite le Brésil. Cette espèce a été décrite et figurée pour la première fois, sous le nom de simia ursina, par M. de Fii:. 1Û4 — llmliui innsdii. 18 2i 186 HISTOIRE NATURELLE. Ilumbûldt. Le pelag:e de l'ourson est composé de poils plus longs et plus abondants que celui des autres espèces, et il est d'un roux doré à peu près uniforme. Les poils de la base du front sont diiigés cil arrière; ceux de la partie postérieure de la tète dirigés en avant, de manière à former, au point de jonction au sommet de la tète, une sorte de créle. Les oreilles sont petites et cachées sous les poils. La barbe est plus foncée que le reste du corps, et à son centre on trouve des poils d'un noir intense. La face est beaucoup plus velue que celle des autres hurleurs, et il n'y a guère que le tour de la bouche et des yeux qui soit nu. Les jeunes individus sont bruns. La taille de l'ourson est un peu plus faible que celle de l'alouate. (Lesson.) 4. IIURLIiUIl NOIB. STENTOR MGEIt. (Geollroy Saint-Hilaire.') Cab.utèhes si'iîciFiQUEs. — Pelage des mules noir; celui des femelles jaune cendre; barbe longue. Habite le Brésil. Ce singe est très-probablement le caraifa d'Azara. Les mâles adultes sont généralement noirs, avec quelques poils jaunes : les femelles et les jeunes sont d'un jaune paille à la face inférieure du corps, Kl". ir lliii'kur noir. sur les flancs, sur les membres (à l'exception des mains) et sur la lète; mais le dos est couvert de poils noirs avec la pointe jaune, et parait dans son ensemble' d'un fauve cendré. La taille de cette espèce n'est que de trente à trente-deux ceniimèlres, du boni du museau à l'origine de la queue. (Lesson.) QUADRUMANES. 187 5 UURLKUn Al'X MAINS HOUSSES. STENTOn FLAVIMANUS. (Kulil.) Caractères spécifiques. — Pelage nuii'; les mains et l'extrémité de la queue de couleur rousse. Ilal)ite les l'urèls voisines de la rivière des Amazones. Le hurleur aux mains rousses ne se dislingue des espèces à pelage noir que par la coloration rousse des mains et de l'extrémité de la queue. Cette espèce, à laquelle on doit, suivant Spix, rap- porter le ijuarilm de Maregraff, que la plupart des auteurs considèrent comme le hurleur brun {■itoilur fuscus de Geoffroy Saint-llilaire), présente un grand nombre de variétés. Cette espèce est recherchée par les Indiens, qui trouvent sa chair de leur goût et emploient sa peau à divers usages. 1). IHJRLEUK A MANTEAU. STEXTOR PALilATUS. ((îray.) Caractères srÉciFiguES. — Pelage noir-brun; poils des flancs très-longs et d'un jaune brunâtre. Habite les forêts des environs de Caracas, Amérique du Sud. Fig. 15G. — Uui'leui' ù iiuiUeau. 188 HISTOIRE NATURELLE. Celte espèce, décrite et ligurée tout récemment par M. Gray, est d'un noir-brun; les poils du milieu du dos et de la parlie supérieure des flancs sont d'un brun légèrement fauve, avec la pointe noire; ceux de la parlie inférieure des flancs sont d'un fauve plus clair, très-longs, et forment, de chaque côté, une espèce de manteau. La figure que nous donnons à ce singe est copiée sur celle de Gray, et, il faut l'avouer, elle laisse beaucoup à désirer. Les auteurs citent encore plusieurs espèces qui scmblenl au moins douteuses; ce sont: 7. llURl.liUR BKUN. STEXTUa FUSCUS. .GeolTioy Saint-IIilairc.) M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire pense que c'est à cette espèce que 1 on peut rapporter ro«r(/'i»c (le Biiffûu et le sîniia bcch-chitlli de Gniclin. Ce singe habite le Brésil avec l'ourson, et présente, comme lui, plusieurs variétés ([iie l'on ]ieut atlribuer, au moins en parlie, à des difl'érences d'âge et dont plusieurs semblent former le passage du slcnlor itrsiniis au stentor fii.sciis. 8. HURLEUR DISCOLOR. STENTOR DlSCOLOIt. (Spix.) 9. HURLEUR A QUEUE JAUISE ET NOHiE. STEXTOIl FLAYICAUDÀTUS. (UumbolJl.) 10. HURLEUR ARABATE. STEXTOIi sm.iMIXEUS. (Geoffroy Saiiil-Hilaire.) Eig. 1Ô7. Hurleur aululc. (Vl'Iius du Jlusouui ) Atèlc j laru ccicailr'ce (l'uniulle). l'I. n. r. ( QUADRUMANES 189 -2-"' GENRE. - ATÈLE. ATELES. (Geoffroy Saiiil-llilaire.) ATcXr,;, inipjrl'ait. CARACTÈRES CÉ.NÉRIQUES. Mains antéricincs n'mjanl que quatre iloiçils appanntx. Membres aiilérieurs tris-lonrjs et Irts-çjrêtes. Qitcne iris-tonqiie, caHense iiiférietirement dmis sa partie terminale et fortement prenante. Les atèles se dislinguenl par l'étal rudimentaire du pouce des mains antérieures, caractère que nous avons déjà trouvé dans quelques singes de l'ancien continent (genre colobe), et par la facilité qu'ils ont de saisir les corps avec l'extrémité calleuse de leur queue. Enfin ils sont remarquables par les proportions de leurs membres antérieurs, et la coloration rouge-brun de cuivre de leur face. Liés de la manière la plus intime, soit avec les burleurs, qui les précèdent, soit avec les lago- triches, qui vont les suivre, ils en diffèrent, dit Lesson, d'une manière bien remarquable, en ce qu'ils manquent du caractère essentiel, non-seulement de la famille des singes, mais même de l'or- dre des quadrumanes. Les atèles n'ont point de pouces aux mains antérieures, ou, si les pouces existent, ils sont si rudimentaires, qu'ils restent cachés sous la peau; de \\ leur nom d'alèles ou sinijes imparfaits. Déjà les hurleurs ont, aux mains antérieures, des pouces courts, peu libres dans leurs mouvements, peu opposables aux autres doigts, et par conséquent d'un usage borné dans la préhension. Chez les atèles, l'emploi de ces pouces devient tout à fait nul, aussi bien lorsque leur extrémité parait à l'extérieur que lorsqu'ils sont complètement cacl es sous les téguments. Il semble que, dans ces deux groupes de sapajous, quelques-unes des fonctions qu'exerce ordi- nairement la main aient été dévolues au prolongement caudal, et que l'extrême développement de ce dernier organe soit lié nécessairement à l'atrophie plus ou moins complète des pouces. Chez les hurleurs, les membres sont proportionnés au corps, et les pouces ne font que s'atro- phier; chez les atèles, les membres, et plus spécialement les mains, sont d'une excessive longueur, et les pouces avortent presque coraplélemenl. Et il est si vrai que ces deux conditions organiques sont liées l'une à l'autre, que, chez les lagolriches, dont l'organisation répète presque en tout point celle des atèles, nous verrons en même temps les pouces reparaître et les mains se raccourcir. Au reste, si les membres ont une longueur considérable chez les atèles, ils sont aussi excessivement grêles, d'où résultent pour eux des habitudes et des allures très-remarquables; leur marche ressem- ble à celle des orangs, qui ont aussi des membres longs et grêles. Comme ces derniers, ils sont obligés, lorsqu'ils veulent marcher a quatre pieds, de fermer le poing et de poser sur la face dor- sale des doigts. Dans quelques cas, les atèles, ce qui est aussi une habitude commune aux orangs. ont uu autre mode de progression un peu plus rapide : après s'être accroupis, ils soulèvent leur corps à l'aide de leurs membres antérieurs, et les projettent en avant, comme font les gens qui se servent de béquilles, ou bien encore comme le font les culs-de-jatte. Les vertèbres caudales, et particulièrement les premières, sont hérissées de nombreuses et fortes apophyses servant de points d'insertion a des muscles puissants, tandis que les os des membres sont i;rêles et sans aspérités. L'os hyoïde des atèles peut être comparé, en petit, à celui des hurleurs; seu- lement, le corps de cet os forme une lame étendue de haut en bas et recourbée d'avant en arrière. Au reste, cette ressemblance anatomique, assez éloignée, n'entraîne point une ressemblance dans la voix. Celle des aléles. aussi bien que celle des genres suivants, est ordinairement une sorte de sif- tlement doux et tlùté qui rappelle le gazouillement des oiseaux. Les atèles sont généralement doux, craintifs, mélancoliques, paresseux, et très-lents dans leurs mouvements. Ou les croirait presque toujours malades et souffrants; cependant, lorsqu'il en est be- soin, ils savent déployer beaucoup d'agilité, et franchissent, par le saut, d'as.sez grandes distances. Ils ^ivent, en troupes, sur les branches élevées des arbres, et se nourrissent principalement de fruits. • In a.ssure qu'ils mandent aussi des racines, des insectes, des mullus(pies el de petits poissons, et 190 HISTOIRE NATURELLE. inèiiio qu'ils vont pècht'r Jcs liuilres pondant la niari'C basse et lmi biisent les coquilles entre deux pierres. Dampier, auquel nous empiunluns ee l'ail, et d'Aeosta, rapportent encore quelques autres eir- conslances propres à nous donner une haute idée de l'intelligence et de l'adresse de ces animaux Ils afllrmenl que, lorsque des atèles veulent traverser une petite rivière ou passer, sans descendre à terre, sur un arbre trop éloigné pour qu'ils y puissent arriver par un saut, ils forment une chaîne, dont le premier anneau, qui est toujours la queue recoquillée de l'un d'eux, est lixé sur une bran- che d'arbre prolongée au-dessus des eaux. L'atèle qui forme le premier anneau saisit, avec une dv ses mains, l'atèle qui forme le deuxième; celui-ci fait de même à l'égard d'un troisième, et ainsi de suite. La chaîne, quand le ilernier anneau quitte le sol, est raccourcie par un plissement des mem- bres que tous exécutent. Enfin mise en mouvement, et balancée sur son point d'attache, elle est lancée à propos vers un arbre de la rive opposée. I^eur queue, outre sa fonction la plus habituelle, celle d'assurer la station en s'accrochant à quelque branche d'arbre, est employée par eux à des usages très-variés. Ils s'en servent pour aller saisir au loin divers objets sans mouvoir leur corps, et souvent même sans mouvoir leurs yeux; sans doute parce que la callosité jouit d'un toucher assez délicat pour rendre inutile, dans quelques occasions, le secours de la vue. Quelquefois ils s'enve- loppent dans leur queue pour se garantir du froid, auquel ils sont très-sensibles; ou bien ils l'enrou- lent autour du corps d'un autre individu. INous n'avons jamais vu aucune espèce se servir de sa queue pour porter sa nourriture ù la bouche, quoi qu'en disent quelques voyageurs. Leurs mains, que l'absence de pouces, leur étroitesse et leur extrême longueur rendent d'une forme désagréable, mais qui sont loin d'être sans adres.se, remplis- sent constamment celle fonction. (Lesson.) Les disproportions des parties chez les atèles, leurs membres effilés, l'excessive longueur de leur queue, les ont fiit appeler, par les voyageurs, sinfics-aruijitiéci. Leur main, dépourvue de pouce, paraît sans paume et termine d'une manière désagréable un bras dcjù trop long et trop nuiigre; et, ce qui ajoute A cette mauvaise grfice, est la gêne où les jette, pendant le repos, la nécessité de pour- voir au placement de leur longue queue, qu'ils traînent après eux et que son volume rend en effet liè.s-exigeantc. Car, ou ils semblent l'oublier, l'ayant à leur suite, ordinairement recoquillée vers l'exlréniilé; ou bien ils en ])lacent la portion préhensible à l'entour de quelque branche; ou, enfin, ils la ramènent en manière de ceinture autour de leur corps. Mais les atèles sont-ils en volonté d'agir? leur queue est presque leur unique instrument de pré- hension; c'est le plus puissant, celui, par conséquent, dont ils préfèrent l'emploi. Ses trente vertè- bres, enrichies de fortes et larges aspérités, offrent aux muscles des points d'attache multipliés et solides; son quart terminal est nu et calleux en dessous. Cette portion s'enroule, et s'emploie spé- cialement à saisir : c'est une main à l'extrémité d'un long levier, d'une adresse parfaite, d'une puis- sance éprouvée. Enlacée en spirale autour d'une branche, elle suffit pour contre-balancer l'adion de la iiesanteur, quand l'animal s'est confié à sa force de préhension, et qu'il demeure suspendu aux arbres sans autre soutien que la queue. Les femelles ne se distinguent point facilement des mâles à la simple vue; un prolongement extraordinaire du clitoris, à la base duquel s'ouvre néanmoins le nuvat urinaire, a tout à fait Tap- ]>arence de l'organe sexuel mâle. Les atèles sont couverts de longs poils secs et roides; ceux de la tête rayonnent d'un point cen- tral, et sont ordinairement disposés en une sorte de chevelure rabattue par devant. Ces singes vivent en troupe sur les arb'res; s'ils craignent quelque surprise, ils s'y tiennent sus- pendus par la queue; car, alors, ils ont mieux l'œil au guet, et sont plus dispos puni' échapper et fuir. Le Muséum de Paris en a possédé plusieurs vivants, entre autres deux femelles, qui vivaient dans une parfaite intelligence; sensibles au froid, elles s'embrassaient corps à corps, et se servaient de leur queue comme d'une excellente fourrure, en s'en enveloppant le corps. En cet état, elles parais- saient un seul être surmonté de deux têles, mais, ce qui donnait surtout du piquant à ce spectacle, c'est (pie ('liaque tête, impressionnée diversement, s'agitait, se mouvait à part. Ces deux singes se quittaient rarement ; ou l'un d'eux s'appuyait négligemment sur l'autre, ou lui sautait sur le dos et lui rendait le service de le débarrasser de la vermine. Ils prenaient leur nourriture en commun, et. AU"-lc coniln PI. 2ô. i' I QlIAimUMANES. lt)I dans ces niomenls dV'prcuvc pour laniitii', le sentinienl de raniour de soi ne prévalait jamais, ou, du moins, n'excitait point entre eux de sérieux débats; mais quand l'un avait négligé un fruit ou une racine, l'autre s'en accommodait d'abord et le négligeait bientôt à sou tour: manège ((u ils répé- taient assez souvent plusieurs fois de suite. (("iI'.ofi'hoy Saint-Hii.aiue ) On rapporte que les aléles ne font qu'un seul petit par portée. Ils ont pour ennemis les petites espèces de chats et les serpents, qui les poursuivent sur leurs arbres. En capliviiè, ces singes se tiennent des journées entières presque sans mouvement et perchés sur les bâtons de leur cage. Desmoulins.) Ce genre, répandu dans une grande partie de l'Amérique du Sud, comprend quelques espèces, toutes très-voisines les unes des autres et se ressemblant même, pour la plupart, par les couleurs de leur pelage, mais il en est qui ont un rudiment de pouce aux membres antérieurs. Les atéles semblent être pour l'Amérique ce que les semnopilhèques sont pour l'Asie méridionale : ils ont la lenteur, la gravité, la pruilence de ceux-ci; comme eux aussi ils ont la tête ronde, les nunnbres longs et grêles, l'abdomen volumineux et la queue longue; seulement celle des atèlcs est prenante, landis que celle des semnopithèques, au lieu de leur servir d'organe de préhension, leur tient lieu de balancier. Lorsque les atéles voient une personne dans des localités où ils n'ont pas encore trop appris à craindre ou à fuir les hommes, ils se rajiproclient d'elle et lui jettent de petites branches, ou même leurs excréments. Us agissent sans doute ainsi toutes les fois qu'ils aperçoivent un être nouveau, et par l'impulsion d'un instinct dont le but est plutôt d'inquiéter que de menacer ou de nuire; car, dans ce cas, ils paraissent agir sans colère. Lorsqu'on leur fait la chasse et que l'un d'eux a été atteint d'un coup de feu, ils fuient tous au sommet des arbres, qu'ils ne quittent guère que pour boire, et ils poussent des cris lamenlables; celui qui est blessé porte ses doigts à sa plaie et regarde couler son sang jusqu'à ce qu'affaibli il perde connaissance et meure; alors il reste sus])endu à l'arbre, si, ce qui est ordinaire, sa queue étreignait une branche, car cet organe a la faculté de se contourner de lui-même à son extrémité, dès qu'il est étendu dans le reste de la longueur. Ce sont des animaux qu'on apprivoise bien facibment et que les caresses et les bons traitements rendent très-affeclueux. On assure même, mais la chose parait douteuse, qu'ils sont susceptibles de se prêter à différents services domestiques. (Fiiédéric Cuvier.) § V. — Pouces kudimektauies. I ATiCLlî COAITA. ATF.LES PANISCUS. (Gcoiïroy S.iiiit-llilairc.) C\nACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Pelage noir, face de couleur de mulâtre. Habite la Huyane. Diifi'on a donné â cette espèce le nom de coaila, .sous lequel il est connu à la Cuyanc, et les zoo- logistes le lui ont conservé. Nous joignons communément à l'idée de singes, dit Frédéric Cuvier, celle de pétulance et d'ac- tivité, et nous voyons, dans la structure des membres de ces animaux, une des sources principales de la vivacité de leurs mouvements et de leur prodigieuse adresse; en effet, lorsque nous voulons nous représenter un animal indolent, dont toutes les déterminations sont molles et incertaines,- nous lui donnons un corps épais et des membres courts. En un mot, c'est dans l'organisation, dans la disposition et les rapports des os et des muscles, que nous voulons surtout trouver l'explication de le facilité plus ou moins grande avec laquelle les actions s'exécutent. Un être qui, avec les disposi- tions organiques les plus favorables, n'agirait cependant qu'avec lenteur et embarras, nous semble- rait un contre-sens, et nous craindrions d'en accuser la nature. Mais, dans les .sciences, une seule observation nouvelle suffit pour détruire les règles les plus solidement établies en apparence, et U»2 HISTOIRE NATUltELLE. nous (levons lonjnurs crnindic quo ce qui nons paraîi è;re \c plus nécessaire ne le soit nullement pour elle. Par exemple, le eoaila, qui est un sinj^e mieux conformé encore que les auires pour se mouvoir avec vivacité, puisqu'il a des membres plus longs et une queue qui est pour lui une cin- quième main, ne se remue généialement qu'avec lenteur, et, pour ainsi dire, en se traînant. Ses bras et ses jambes semblent ne se déplacer qu'avec peine; on dirait qu'il a besoin d'une détermination nouvelle pour chacun de ses mouvements, et que l'intelligence, qui agit avec tant de lenteur, est d'une nature particulière Cet animal est cependant bien loin d'être dépourvu de jugement : je pense même qu'il en a plus que la plupart des autres singes, et surtout que les plus pétulants, et il joint à beaucoup de pénétration le naturel le plus doux, les besoins les plus affectueux. Tout son corps est recouvert de ]ioils noirs, soyeux, rudes et longs, mais moins épais aux parties inférieures qu'aux supirieures; il n'a aucune trace de poils laineux. La face, ainsi que la peau du corps, est d'une couleur de cbair cuivrée, et les mains sont noires. Les antérieures sont entièrement dépourvues de pouce à l'extérieur. D'ailleurs, ces organes sont conformés comme ceux des autres quadrumanes, si ce n'est que le coaita a les doigts plus longs. Les dents sont frugivores : il a quatre incisives ù chaque màclioire, deux canines et douze molaires à couronne mousse, comme celles de l'homme. Ces singes ont les plus grands rapports avec les sajous: les yeux ont la pupille ronde; les oreilles res- .semblent aux nôtres, mais n'ont point de lobe; les narines s'ouvrent sur les côtés du nez et sont séparées ]iar nue large cloison. Les lèvres sont très-minces, la langue est douce, et la queue, qui est prenante, est terminée eu dessous par une partie nue, recouverte d'une peau très-délicate qui par- tage avec les quatre mains le sens du toucher. Le vagin ne consiste qu'en une petite ouverture, mais le clitoris est eu quelque sorte développé d'une manière monstrueuse; il a près de deux pouces de longueur, et est couvert en dessous par un sillon profond qui est en quelque sorte une continuation de la vulve; mais, quoique un peu plus gros à son extrémité que dans sa longueur, il n'y a pas propre- ment de gland. Les mamelles situées sous les aisselles se montrent par un mamelon noirûtre. Mais ce qui distingue encore ce singe de tous les autres, c'est la grosseur de son ventre, qui semblerait annoncer des intestins très-volumineux. 11 se sert de sa queue comme d'un cinquième membre, pour empoigner, pour se suspendre, pour approcher même de lui les objets qui en sont trop éloignés et ([u'il ne peut atteindre avec ses mains. Uans tous ses mouvements, il l'enroide autour de tous les corps qui sont à sa portée, comme s'il voulait se précaulionner contre une chute, dans le cas où les corps sur lesquels il s'appuie fuiraient sous ses pieds. Sa, voix est un son aigre et pleureur, qu'il fait entendre surtout lorsqu'il désire quelque chose, et souvent il l'élève et la prolonge beaucoup. On dit qu'on rencontre souvent ces animaux en grandes troupes dans les forêts de la Guyane et du lirésil, d'où ils sont originaires, se balançant suspendus aux branches des arbres. 2. ATELli A FRONT ULAiSC. ATELES MAIIGIXATUS (Geoffroy Sainl-Iiilairc 1 CARACTtnEs sniciFiQi'ES. — l'elage noir; l'ace entourée, surtout supérieuienieni, d'une fraise de poils blancs. Habite le Brésil et les bords des llcnves Santiago et des Amazones. Ce singe, designé par M. de Ilumholdl sons le nom de clinva, ressemble à l'alèle coaita plus ((u'à toute autre espèce noire du genre ; il en a la physionomie, les proportions, les couleurs et le pelage, à l'excejition des parties blanches des joues et du front; la face est de couleur tannée, et non pas noire comme celle du cayou; son ventre, sa poitrine et la face interne des membres sont revêtus de poils noirs et non de poils blancs comme ces mêmes parties chez le beelzehuth; enlin, il n'a point, comme le chameck, un rudiment du pouce aux mains antérieures. En elfet, ce coaita à front blanc est en- tièrement revêtu d'un poil noir, long, soyeux et beaucoup plus rare aux parties inférieures du corps qu'aux supérieures; sa face, de couleui' tannée, n'a de poils i-eniarquables ([u'au-dessons di's pommettes, et ses poils sont noirs; dans tout li' reste on n'aperçoit que (piehpies ]ioils êpars, courts, et ipii ne déguisent point la conlenr de la peau La tace interne des mains cl la partie nue de la qiu'ue sont (HIM»rilIM\NF,S. I '.tr. vi(il;"ilri's. Les |i(iils du dos, di'S ( ùlcs du ('oi'iis, des i iiisscs, des jandics. drs lirais cl de l:i ((iii'iic. soiil diiiiîc'S dans le sens ordinaire; ceux de la lète, par contre, soni dirii^és d'arrière en avanl. tandis (jne ceux du front, s'élevant à peu près droit, forment, en s'opposant aux premiers, une sorte (le toupet, qui fait que la partie blanche du front est celle qui frappe le plus vivenieiil l'observateur. liCs poils de l'avanl-liras, près du coude, se dirigeant d'avant en ariièrc, se reploient à la rencontie de ceux du bras, qui se reploient èi,;alenieiit. (FiuiDÉnic ('.uvii:r, ) Dans les mâles adultes, les poils blanclifltres du toupet sont teints de jaunâtre; dans la femelle, ils sont blancs, et les jeunes n'ont point l'eiicadrenient de la face qui distinij^ue les individus Agés. On voit seulement quelques poils rares blanchâtres au bout du museau. C.eitains individus ont i)ré- senté des poils longs et blancs au menton cl près de la bouche. (Desmakest.) ' '• ATI'M.K CAVdtl MI-I.HS Ml- IL ll'ivdoric Ciivior.) (!,\ii,\(,TiîRKs si'ÉciFiQUEs. — Pclagc uoir: l'ace nuiie. un peu ridéiv Habite le lîresil et la Giivane. 19 Fig. 158 — Alùlc layou. 23 194 HISTOIRE NATURELLE. L'individu qui a été obscné-piir tiuvicr ctail une jeune femelle; son pidage ètail long, soyeux, un peu dur el tout à fait semblable à celui du coaita. i-es poils avaient moins de longueur sur la tète et la queue que sur le reste du corps, où ils suivaient la direction ordinaire d'avant en arrière, tandis que sur la tète ils allaient d'arrière en avant et tombaient sur le front de l'animal. La peau revêtue de ]ioils est d'un noir tanné ; celle de la face est d'un noir mal, rugueuse et ridée La pupille est brune et les organes ffénitaux couleur de cliair. i. ATÈI.E BEELZEBUTII. ATELES BEEl.ZEBVTn. (Cooirroy Sainl-IIllaiie.) Caractèiies spécifiques. — Pelage noir brunâtre; dessous du corps et parties iiilernes des mem- bres d'un blanc légèrement jaunâtre. Ilaliitc les bords de l'Uiènoipie. Ce singe a le pelage d'un noir-biun, un peu moins foncé cependant sur la croupe qu'ailleurs; et d'un blanc sale jaunâtre sous la gorge, la poitrine cl le ventre. On remarque également une ligne d'un blanc sale jaunâtre sur la face interne des bras et des avant-bras, depuis l'aisselle jusqu'au poignet, et une autre ligne pareille sur la face interne des cuisses et des jambes jusque près le talon; la face inférieure de la (jueue. dans une longueur de deux pouces près de son origine, est également blanchâtre. Une ligne rousse sur chaque flanc sépare la couleur du dos de celle du ventre. Le mu.seau est as.sez prolongé et détaché de la face; les oreilles sont assez semblables à celles de l'homme, mais sans tragus; l'œil est noir; les paupières et le tour des yeux sont couleur de chair, et le reste de la face d'un rouge-brun; les lèvres sont très-extensibles; le dessus de la tète est cou- Atèli! Métis. l'I. 20 QUADRUMANES. 195 voi t de poils jusqu'aux sourcils, et ceux des sourcils, plus noirs, sont relevés, et composent un bandeau élroil; ceux du dessus du cou, de l'occiput et du vertex, prennent leur direction en avant. et se rencontrent en opposition avec ceux des sourcils; les joues ont quelques poils noirs épars, et on en voit davantage sous le cou; les poils des avant-bras ont, comme ceux de l'orant; et ceux de l'homme, leur pointe tournée du côté du coude. Ces singes parcourent en petites troupes les rives de l'Orénoque; ils sont d'un naturel fort dou.\, triste et craintif. Us font souvent la grimace en avançant beaucoup les lèvres, qui sont très-mobiles, ils ne deviennent méchants qu'après avoir été vivement inquiétés. En captivité, on en a vu dormir embrassés par couple, à la manière des makis, et s'enroulant mutuellement de leur longue queue. (Desmarest.) 5. ATÈLE MÉLANOCHEIR. ATELES MELANOCBiR. (Desmarest) (1ai!.\ctères spécifiques. — Pelage gris; dessus de la tète, extrémités des membres, d'un brun-noir ou d'un gris-brun; une tache oblique, et de même couleur, sur la partie externe de chaque genou. Habite le Pérou. Cette espèce, considérée longtemps comme douteuse, ou comme simple variété d'âge, a été dé- crite par Desmarest, et, depuis, par Frédéric Cuvier, qui lui fait prendre rang parmi les espèces bien caractérisées. L'individu que nous décrivons, dit-il, détruit ù peu près toutes les incertitudes; et, dès aujourd'hui, le mèlanocheir vient, comme espèce, prendre un rang légitime parmi les atèles. Nous ferons observer, cependant, que tous les naturalistes ne partagent pas l'opinion de Frédéric Cuvier. (Lesson.) Ce singe a la tête, les quatre membres et le dessus de la queue, revêtus de poils noirs; la face in- terne des bras et des avant-bras jusqu'aux mains, la face interne des cuisses et des jambes, le des- sous de la queue, le dessous du cou, la poitrine, le ventre et les côtés des fesses, sont blancs; les épaules sont d'un gris jaunâtre; et le reste des parties supérieures du corps, ainsi que les fa- voris, d'un gris plus pur. Les quatre mains, et la partie nue de la queue, sont noires; et, à la face, il en est de même des joues et de la moitié inférieure du nez; mais le tour des yeux et le tour de la bouche sont couleur de chair. Le pelage se compose entièrement de poils soyeux; ceux des [lailics blanches et noires sont d'une seule teinte; et ceux des parties grises sont annelés de noir et de blanc plus ou moins jaunâtre. Ses proportions et sa taille sont exactement celles du beelzébuth. (Fré- DÉBIC CliVIER.) 6. ATIÎLE MÉTIS. ATELES UYMIDVS. {IsiJ. Geollïuy Siinl-Ililaiie ) Cah.^ctères si'Écifiques. — Pelage brun cendre clair eu dessus, blanc en dessous, â la face interne des membres et au milieu du front. Habile la Colombie. Le caractère le plus apparent de l'atèle métis consiste dans une tache blanche placée sur le front, el de forme à peu près sémilunaire; elle a environ un pouce de largeur sur la ligne médiane, et se termine en pointe de chaque côté, au-dessus de l'angle externe de l'œil. Le dessous de la tête, du corps et de toute la queue jusqu'à la callosité, et la face interne des membres, sont d'un blanc sale. Les parties supérieures sont généralement d'un brun cendré clair; cette nuance passe au brun pur sur la tête, les membres antérieurs, les cuisses et le dessus de la queue; tandis qu'elle passe au jaune très-prononcé sur les fesses, les côtés de la queue et une par tie des membres inférieurs. Le mâle et la femelle ont le même pelage. Le jeune mâle se distingue seulement par la teinte plus claire des parties su])èrieures. ipii sont d'un cendré roussâlre. I'.»t; IIISTOIUE NATURELLE. L'ali'le métis est à peu près de la inênu' taille que la |)lui)aft de ses ioiii;('riéres. Sa longueur, depuis la partie antérieure de la tête jusqu'à l'origine de la queue est de 0"',(J0; sa queue, un peu plus courte que chez les autres espèces, mesure 0'",70. L'aléle métis conserve, toute sa vie, la couleur indiquée; mais, en admettant qu'il devint noir à l'état adulte, supposition inadmissible, il ne serait pas moins certain qu'il doit former une espèce distincte de toutes celles qui sont déjà connues. Il en est deux seulement avec lesquelles on pour- rail le confondre : Vnlelcs beclzebulli et Vatclcs marcfinatus. Mais le bceUebulli n'a point de tache blanche au front, et les poils, du côté de la tête et du cou, sont disposés un peu différemment. Leur princi|ial centre d'origine est toujours, chez le beelzébuth, à l'occiput ou à la région supérieure du cou; chez l'atèle métis, il est toujours à la partie inférieure de la région cervicale. Dans les deux espèces, l'oreille est en grande partie cachée par des poils; mais, chez le beelzébuth, c'est par de irés-longs poils naissant sur toute la joue, depuis la commissure des lèvres, et se dirigeant en ar- riére; chez l'aléle métis, c'est par des poils assez courts, qui naissent du centre commun d'origine, et se portent en avant. Quanta Valcles murghialiis, il suffirait presque de dire qu'on en connaît le jeune mâle et la fe- melle, et que tous deux .sont noirs comme le mâle adulte. Cependant on peut ajouter que la portion supérieure de la léîe" qui est couverte de poils blancs et courts, est beaucoup plus étendue, chez Vatcles mimj'malHx, que chez Valcles lifibridiis; aussi la petite houppe, qui résulte de la lencontre des poils du front et de ceux du reste de la tète, est-elle placée sur le milieu du crâne chez le premier, et, au contraire, très-rapprochée des orbites chez le second. L'atèle métis est très-commun dans la vallée de la Madeleine (Colombie). On lui donne le nom de nmvhnomla. que l'on applique aussi à beaucoup d'autres singes, et celui de zmnbo ou mono zambo, c'est-à-dire singe métis. Zambo est en effet le nom créole du niélis du nègre et de l'indien; et nu l'a donné à Valrirs lii,- bnilu.i, parce que sa couleur est à peu prés celle de ce métis. Cette espèce vit par troupes de douze ou quinze individus. (Juaud on maiche dans les bois, leur présence s'annonce par le bruit qu'ils font en se jetant d'une branche sur une antre. Lorsqu'ils voya- gent, les femelles, qui paraissent tiès-atlachées à leurs petits, les portent sur leur dos. Quand une mère, embarrassée de son petit, a un saut considérable à faire, un mâle se place sur la branche où celle-ci doit passer, et il la fait osciller de manière à l'amener au niveau de la femelle, qui |)rolite de ce moment pour sauter. Si, au contaire, un jeune individu déjà fort, mais retenu par la peur, refuse de sauter, sa mère fait devant lui le saut qu'il s'agit d'exécuter, recommence à plusieurs re- prises, s'il est nécessaire, et tâche de le décider par son exemple. Le fait suivant a été rapporté à M. Roulin par un témoin oculaire. Une femelle, qui portait son pelil, loniba frappée d'une balle. Le petit la quitta au moment de sa chute, s'accrocha à une bran- che de palmier et se mit à crier. Presque au même moment, un mâle, qui l'entendit, s élança, ou plutôt se laissa tomber à côté de lui, sur la branche qui, trop faible pour supporter un double far- deau, se brisa. Les deux individus tombèrent a terre; le petit se plaça à l'instant même sur le dos du mâle, mais celui-ci resta immobile et comme étourdi. (Juelqu'uu s'avança alors pour le [irendre; aussitôt le mâle se releva, courut à quatre pattes vers une liane qui descendait du haut d'un arbre, et, la saisissant, monta et disparut bientôt avec le petit. (Isidore Geoffroy Saim-Uiluhe.) § 'J — Pouces sous eohme de lULiEncuLE et sans ongle. 7 ATÉLli CIIAMJiK AlliLliS VL.\TAU.\C HIAS iGcoltioy Saiiil-llil;iiic.) Caractères spécifiques. — Pelage noir; pouces des mains antérieures se monirani sdus la forme le liibercules ou de verrues sans ongles. Habile le Pérou et la Guiaiie. Alèlu belzL'Iiiilli (mâle). l'I '27. I QUADRUMANES. 197 relie espace :i (^té présentée par Spj\ coiiinie lype du fîenre cpi'il a établi sous le nom de l!ra- cliytèles (court, pouee). Ce genre n'a point été adopté; et, des espèces qui s'y (niuvenl réunies, l'une est un-atèle (hrachijliies pcntadacnjliis), ei l'autre un ériode (hraclifitclcs hijpoxaullnis). Le chaniek a les plus grands rapports avec le coaita; mais il en diffère essentiellement par la pré- sence d'un petit rudiment de pouce composé d'une seule phalange sans ongle aux mains antérieures. 11 est aussi plus grand que les autres atèles; sa longueur, mesurée du sommet de la tète A l'origine de la queue, est de quai'ante-huit centimètres. Sa queue est longue de près d'un mètre; le pelage est noir foncé partout, sec, grossier et luisant. Ce singe a le museau gros et allongé, le front élevé; la face et les oreilles sont d'un brun-rouge; le menton est nu, avec quelques poils épars; les poils du sommet de la tète, depuis l'occiput jusqu'au vertex, sont dirigés en avant, et recouvrent à peine le haut du front et les tempes. Les doigts des quatre mains sont presque nus, grêles et très-longs. Les mamelles sont placées très-près des aisselles; la queue est Irés-velue, surtout à sa base, et terminée, en dessous, par une partie nue, aplatie, marquée de petites rides concenlri(|ucs. comme celles qu'on voit sur la face palmaire des doigts de l'homme. (Desmakest.) 5"" GElMlE. - ÉP.IODE. EIUODES. (Isid. Geoffroy Saint-llilaire.) Efiw^Yi;, lainuux. CAn.\CTÈRES GÉNÉRIQUES. Pelaçie enlitrcmcnt composé de poils moclliux, doux au lonclier el laineux Pouces anlcricuis nuls ou extrêmement courts. Ongles compritncs, à arêle supérieure mousse, excepté ceux des pouces postérieurs Membres Irès-lonfis; mains grêles et allongées. Queue forte, prenante, nue et calleuse en dessous dans sa portion terminale. Narines arrondies, très-rapprocliées l'une de l'autre, et plutôt inférieures que latérales; cloison nasale li-h-peu épai.^se. Oreilles très-petites, et en grande partie velues. Dents molaires très-grosses, quadraugnlaires; incisives supérieures et inférieures rangées à peu près sur une ligne droite, égales entre elles, et toutes moins grosses que les molaires. Les ériodes habitent les forêts du Brésil. Ce genre a été établi, par M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, aux dépens du genre atèle. Les ériodes sont très remarquables, et semblent établir le passage des singes de l'ancien continent à ceux du nouveau monde. Comme les premiers, ils ont les narines ouvertes inferieurement; mais tous les autres caractères les classent parmi les singes américains. Les ériodes sont des singes très-rares, et qui n'ont pu encore être complètement observés. Ils n'ont ni abajoues ni callosités, et leur queue est longue et prenante. Leur système dentaire est surtout caractérisli(pic; les nndaires sont généralement très-grosses, et de forme qnadraiigiilairc; les incisives sont rangées à peu près sur une ligne droite, égales entre elles, el toutes fort petites. Les ongles sont comprimés, et ])euvcnt être regardés comme composés de deux lames réunies supéricu-. I Fig, IGO. — Onj;le île l'ûriuilo liûniiilactyle. rement par nue aièie mousse; ils se rapprochent beaucoup de ceux de quelques ('ariiassiers; et un seul doigt, le pouce des mains postérieures, a un ongit; qui présente les caractères de ceux des au- I9S HISTOIRE NATURELLE. Ires qiuidninianes. Les femelles ont le clitoris assez développé, et couvert, sur ses deux faces, de poils soyeux, rudes et serrés. Tous les poils du corps sont moelleux, doux au toucher, courts et laineux; et c'est à cette nature laineuse du pelage que ces animaux doivent le nom ((ui leur a élè. as- signé. (Desmauest.) Les ériodes habitent les forêts épaisses, où la présence de l'homme vient rarement les troubler; d'après Spix, ils vivent en troupes, et font, pendant toute la jonniée, retentir l'air de leur voix c/«- (luiiiiie, et se sauvent rapidement à l'approche du chasseur; ils paraissent d'ailleurs avoir les mêmes habitudes que les atèles. ■'tsr,>,. Fift. 161. — Ériode arachnoïde (variété). On connaît seulement trois espèces d'ériodes ; l'hémidactyle, l'arachnoïde et l'hypoxanlhe; et c'est surtout ;\ ces espèces que devait être appli([ué le nom de siiKjes araiqiurs lorsqu'elles étaient confondues avec les atèles. 1. ÉRIODE IIÉMIDACTYLE. EniODES IIEMIVACTI'LUS. (Isid. Geoffroy Saijil-tlilaire. (lAnACTÈiiEs spÉciFiyiEs. — Pclagc fauve terne; pouces antérieurs apparents, quoique rudimen- taires, et ayant un ongle très-petit. Habite le Brésil. OUAimUMANES. !!}{) i'.o sint^c :i, ;iii\ iiuiiiis aiilciit'iiros, un pi'lil youw (iiii^iiiriilc, Ii'i>s-gr6lc, irès-ooiirl, ri (|iii .semble devoir être loul ;i lait iiiiitile. La l(iiij;iu'ur de riiéniidaetjle, prise du bout du miisi-au à l'oriiiine d(' la queue, est, de ein(|uanle-ciuq eeutimètre.s; son pelage cstd'uu fauve eendré, (|ui prend une teinte noirâtre sur le dos; les mains et la queue sont d'un fauve plus pur. La faec n'est eomplétement nue (|ue dans le voisinage des yeux, et parait taclielcc de gris sur un fond coideur de eliair. Les cils sont longs et noirs. i Fis;. 162 — Éiiode liémidactjle. 2on HISTOIRE NATURELLE 2. ÉRIODE ARACHNOÏDE. ERWDES ARACimOIDES. (Isid. Geoffroy Sainl-Hilaire.) CAr.ACTÈnES srÉcrFiyuEs. — Pelap;e fauve clair, passant au cendré roussâtre sur la lète, el au roux doré sur l'extrémité des pattes et de la queue; pas de trace de pouces. Habite le Brésil. Ce singe est connu, au Brésil, sous le nom de nincaco vcrnivllo. 11 se dislingue facilement des deux autres espèces du gonre par l'absence compléta de pouce aux mains antérieures. Fis. 165. — LrioJc araclinoïde. 5. KfllOflE A TUBERCULICS. ERWDES TlinERIEER. (Isiit. Geoffroy Sainl-llil.iiro.) Car.\ctèiif,s spécifiques. — Pelage fauve, un peu cendré; pouces des mains anléiicuies parais.saiii sous forme de simples tubercules, el sans ongles. llahile le Brésil. Ce singe est connu, au Brésil, sous les noms de ininki, mono cl konpo. (»n en doit la décnuvcilc an prince de Neuwi(Hl, ([iii Ta décrit sous le nom A'uicks hijpoxanllius. OUADUUMANES. 201 4""= GENRE. - LAGOTIIRICllE. LÀGOTHRIX. (Geoffroy Saint-IIilaire ^ Aci-j'm;, liùvrc; 0;iï, poil. CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Cinq doigls aux (imilrc mains. Queue prcuanle, nue el ealleuse en dessous et h son quarl terminal. Membres j)eu développés. Petaf/c moelleux, fin, presque laineux, el comparé à celui du lièvre. Ongles un peu arques, presque en goullièrc; ceux des pouces seuls aplatis. Les lagothrichcs habitent l'Amérique du Sud. M. de Huniboldt a le premier fait connaître les lagotlirielics, et c'est à lui qu'on doit les quelques détails de mœurs cités par les auteurs. Après ce célèbre naturaliste, Spix a trouvé aussi, au Brésil, des lagotbriches; mais il en a fait un genre nouveau, auquel il a donné le nom de gaslrimarcjus (ventre, fou), à cause de la gourmandise de fes singes. Cette division générique n'a pas été adoptée. Les habitants des bords de la rivière des Amazones, dit Spix, distinguent deux espèces de singes de ce genre. Ils les nomment, à cause de leur gros ventre et de leur gourmandise, barigudos (gros ventre). Une fois apprivoisés, ces singes deviennent très-familiers; ils s'approchent de la table pendant le dîner de leur maître, se placent près de lui, et attendent avec beaucoup de patience qu'on leur donne des viandes cuites ou des oranges, qu'ils aiment beaucoup. Nous en avons eu un qui nous a accompagné, même pendant notre voyage sur mer, jusqu'aux Açores, où il est mort de froid. Quand il voulait nous flatter, il balançait un peu sa tête, bourdonnait et sautait sur nos épaules, et principalement sur celles de nos Indiens, qu'il aimait à embrasser fortement en appro- chant sa tête de la leur. C'est vers le mois de novembre qu'on trouve ces singes, ainsi que tous ceux à queue calleuse qui habitent les bords de l'Amazone, avec leurs petits nouvellement nés, et qu'ils portent sur le dos ou sous le ventre. Fig. 1G4. - Mnin .int'ricurc de la'jotlirichc. Fi^. 1G"> — Main |io5ti'iipuio ilc bigolliriclu Ces singes ont les membres assez proportionnés au volume du corps; ils ont, aux quatre mains, cinq doigts de longueur moyenne, à l'exception de l'indicateur, qui est court. Leurs ongles sont vr 26 202 HISTOIRE NATURELLE. jiliés en gouttière, comprimés et peu développés. Leur tète est arrondie; le cerveau volumineux, et le trou occipital est rentré sous la base du crâne. La face est large et courte; les yeux grands et rapprochés; les narines plus développées en largeur qu'en hauteur; les oreilles petites. Leur système dentaire est le même que celui des atèles. L'os hyoïde a sa partie centrale élargie; mais 11 n'est point assez gros pour faire saillie à la gorge et pour modifier la voix, qui est douce, flùtée, et ne devient aigre et perçante que sous l'influence de la crainte ou de la colère; alors elle ressemble à un claquement. Ces singes ont le pelage laineux, doux au toucher, cl d'une couleur peu constante. Quoique monogames, ils vivent en bandes nombreuses dans les forêts de l'Amérique du Sud, et exclu- sivement dans celles arrosées par des cours d'eau. Leur naturel est vif, doux, docile, èducable; ils sont adroits, intelligents, et surtout très-gourmands; leur station est fréquemment bipède. 1. LAGOTHRICIIE DE IIUMBOLDT. LAGOTIiniX lIl'MItOLDTir. (Georfroy Sainl-Hil.iirc.) CAnAciÈiîEs SPÉCIFIQUES. — Pclagc uniformément gris; queue grosse, et plus longue que le corps Habite les bords du Rio-Guaviare, et prés de l'embouchure de l'Oréncque. Le pelage de ce singe est généralement long, très-fourré et moelleux, de couleur grise, avec la pointe des poils blanche ; la tête est noire, et les poils qui la couvrent sont courts; la face est velue et noirâtre; les quatre mains noires; et la queue touffue, et plus longue que le corps. Ce singe, connu dans le pays sous le nom de caparro, vit par bandes nombreuses. :f"f^'Ui:. <--^m^ Fi;;. ICG. — L.igolliriclic de Humbolilt. QUADRUMANES. 203 2. LAGOTHRICUE GRISON. LAGOTIIRIX CANUS. (Geoffroy Saiiil-Uilaire.) Caractères spécifiques. — Pelage gris olivâtre en dessus. Habite le lirésil. Le grison est d'un gris olivâtre sur le dessus du corps, et la partie supérieure des membres est d'un brun plus ou moins cendré sur la tête, la queue, les parties inférieures du corps et la portion inférieure des membres. C'est à cette espèce que l'on doit très-probablement rapporter le gnstri- iiturçiiis olivaccus do Spix. (IsiDonE Geoffroy Saint-Hii.aire.) 5. I.AGOTHRICHE DE CASTELNAU LAGOTIIRIX CASTELNAUDII. (Isid. Geoffroy Sainl-Ili'airc.) Caractères spécifiques. — Pelage brun tiqueté de blanc; tête et mains noirâtres; dessus de la queue noir ou noirâtre vers l'extrémité. Habile les bords de l'Amazone; Brésil et Pérou. Cette espèce est assez proportionnée; la tête est ronde; le ventre assez volumineux, sans excès; et les formes générales n'annoncent rien qui puisse mettre obstacle à la rapidité et à la précision de ses mouvements. FiK. 167. — Lagolhriche de Caslelnau. 20-i HISTOIRE NATURELLE. Fii;. 1G8. — Lasolliiitlie de Casteliiau (joiiiic). 5"' GENRE. — SAJOU. CEBUS. (Erxlcbcn.) Siijou, (.iiniiimtif Je sijiajuu. CAR.VCTÈRES GÉNÉRIQUES. Queue h peu près de la lowjueur du corps, enticreinent couverte de poils et eiiroulmilc à l'extrémité. Membres proportionnés, robustes. Pouces des mains antérieures peu libres et peu opposables. Ontjles en youttièrc et peu aplatis. Les sajous habitent l' Amérique t(|u;iloiialc. QUAPRUMANES. 202 Les sajous ou sapajous proprenn'iU dits oui la tète arrondie, le museau assez large et camus, l'occiput saillant eu anière et le trou occi|iital rentré sous la base du crâne, qui est volumineux. Leur face est assez large; leurs jeux, grands et rapprochés, ont une direction un peu oblique, et leurs oreilles sout moyennes et arrondies. Les dents incisives, rangées sur une seule ligne, sont au nombre de quatre :\ chaque mâchoire, mais les deux médianes supérieures sont plus grosses que les latérales, tandis que le contraire existe pour les deux médianes inférieures; les canines sont prononcées, et les molaires, au nombre de douze, sont médiocres. Ces singes ont des membres proportionnés au volume du corps, robustes, surtout les postérieurs. Ils ont cinq doigts aux quatre mains, mais les pouces antérieurs sont peu libres et peu ûp[iosables. La queue est de longueur moyenne, velue dans toute son étendue, et en- roulante à l'exuéniité; quelquefois cependant la ])artie inférieure et terminale ne présente plus que des poils usés par l'action répétée du frottement, mais sans callosités. ^o^ '^^ V'\\'- 1 11 Fig. 169. — Sajou femelle. Les sajous, dit Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, sont des animaux pleins d'adresse et d'intelligence; ils sont très-vifs et remuants, et cependant très-doux, dociles et facilement éducables. Chacun a pu se convaincre de ces faits par ses propres observations, ces singes étant extrêmement communs. 11 serait donc tout à fait inutile de nous étendre sur les qualités que peut développer en eux l'éduca- tion. Ce qui serait vraiment intéressant, ce serait de donner quelques remarques sur leur intelli- gence, telle qu'elle est naturellement, et non pas telle que l'homme l'a faite. Malheureusement, nous ne trouvons, dans les ouvrages des voyageurs , aucun fait digne d'être cité ; tous se bornent à nous dire que les sajous sont intelligents. Nous essayerons de suppléer en partie à leur silence, en rap- portant une observation que nous avons faite nous-mème sur un individu vivant en domesticité , il est vrai, nuis n'ayant reçu aucune espèce d'éducation. Lui ayant donné un jour quelques noix, nous le vîmes aussitôt les briser à l'aide de ses dents, séparer avec adresse la partie charnue et la manger. Parmi ces noix, il s'en trouva une beaucoup plus dure que toutes les autres; le singe, ne pouvant réussir à la briser avec ses dents, la frappa fortement et à plusieurs reprises contre l'une des tra- verses en bois de sa cage. Ces tentatives restant de même sans succès, nous pensions qu'il allait jeter avec impatience la noix, lorsque nous le vhnes avec étonnement descendre vers un endroit de sa cage où se trouvait une bande de fer, frapper la noix sur cette bande et en briser enfin la co- quille. Cette observation nous paraît digne d'être citée, car elle prouve d'une manière incontestable que notre sajou, abandonné à lui-même et sans avoir jamais reçu aucune éducation, avait su recon- naître que la dureté du fer remportait sur celle du bois, ?t par conséquent s'était élevé à un rap- port, à une idée abstraite. Les sajous, comme les autres sapajous, vivent eu Iruupes sur les branches élevées des arbres, et 20t) HISTOIRE NATURELLE. ils sont copendanl monogames. Ils se nourrissent principalement de fruits, et mangent aussi très- volontiers des insectes, des vers , des mollusques et même quelquefois de la viande. Ainsi , sous ce rapport, ils commencent déjà une nouvelle série de singes que l'on peut signaler par la qualité d'omnivores. Les femelles ne sont pas sujettes à l'écoulement périodique; elles ne font ordinaire- ment qu'un seul petit, qu'elles portent sur leur dos, et auquel elles prodiguent les soins les plus empressés. C'est ;\ tort qu'on a dit que ces animaux ne se reproduisent pas dans nos climats; Buffon prouve, par plusieurs exemples, la possibilité de leur reproduction en France. Quelques espèces ont été désignées par les voyageurs sous les noms de sinçies jniisqucs et de singes pleureurs. Le premier de ces noms leur vient d'une forte odeur musquée qu'ils répandent, principalement dans la saison du rut, et, le second, de leur voix, devenant, lorsqu'on les tourmente, plaintive et semblable ù celle d'un enfant qui pleure. Le plus souvent, ils ne font entendre qu'un petit sifflement doux et fli'ité ; mais quelquefois aussi , principalement lorsqu'ils sont excités par la colère, la jalousie ou même la joie, ils poussent des cris perçants et qu'on a quelque peine à sup- porter, tant leur voix est alors forte et glapissante. Fig. 170. — Siijuu 5 loupet. Ce genre, auquel tous les auteurs donnent aujourd'hui le nom de cebus, autrefois commun à tous les sapajous, est principalement répandu dans le Brésil et la Guyane. 11 nous paraît démontré qu'il renferme un assez grand nombre d'espèces, malgré l'opinion de quelques naturalistes; mais il nous parait non moins certain que plusieurs de celles qu'ont admises les auteurs modernes ne sont réel- lement que de simples variétés. U n'est point de genres dont l'histoire offre autant de difficultés, sous le rapport de la détermination de ses espèces, ou, pour mieux dire, un tel travail est absolu- ment impossible dans l'état actuel de la science, quel que soit le nombre d'individus que possèdent toutes les collections, et de ceux mêmes que nous pouvons observer vivants. On peut dire que rien n'est plus rare que de voir deux sujets absolument semblables, et qu'il existe presque autant de va- riétés que d'individus, tant les couleurs du pelage sont peu constantes. (Isidore Geoffroï S.mnt- lIlLAIRE.) QUADRUMANES. 207 Les sajous plaisent par leur agilité, leur adresse et la variété infinie de leurs gambades. On les dit susceptibles de docilité et d'attachement; de vieux mâles ont cependant paru capricieux et enclins à mordre. Us vivent en troupe, il est vrai, mais, à l'époque du rut, ils se séparent pour s'apparier et vivre par couples. Ces singes ont le trou occipital rentré sous la base du crâne, aussi la station horizontale leur est- cUe incommode. Us se tiennent sur les arbres, mais rarement appendus par les pieds, et encore moins par la queue toute seule, qui n'est plus préhensile jusqu'au degré de contre-balancer effica- cement l'action de la pesanteur. J'ai désiré connaître, eu trouvant aux sajous le même entraînement pour le séjour des arbres qu'aux atéles et aux autres hélopithèques, ce qui suppléait chez eux à la force de préhension si profitable à ceux-ci; et il m'a paru qu'ils compensent ce qui leur manque de moyens par plus d'adresse dans leur manière de se poser sur les branches. Us s'y asseoient, on peut le dire, non plus en y faisant concourir la région ischiatique du bassin, mais en remplaçant l'usage des fesses par une action de la queue. Tout singe de l'ancien monde pose sur ses fesses calleuses en même temps qu'il s'appuie sur ses talons. Mais d'abord les sajous obtiennent, et de Fig. 171 — Sajou aux pieds dorés. l'habitude et de l'adresse que la répétition des mêmes actes leur procure, de se maintenir sur le tarse et le métatarse; les doigts servent peu, les sajous les ramènent en dedans sans les ployer entière- ment; dans ce cas, les doigts forment une large surface et fournissent un point d'appui. Cependant les sajous ont rarement occasion de recourir à ce moyen; c'est à leur queue qu'ils demandent le troisième support que les guenons se procurent par leurs fesses calleuses; mais ce n'est plus comme les hurleurs, les atèles, les èriodes ou les lagolhriches mêmes, dont la queue constitue véritablement un cinquième membre ; le rôle que doit jouer leur queue est tout accessoire. La queue des sajous .saisit une tige au-dessous de la branche sur laquelle ils sont accroupis, alors même qu'ils posent sur leurs talons. Mais si cette autre tige manque, ou même .sans qu'elle vienne à manquer, et uni- quement pour varier leur pose, ils composent autrement leur base pour le repos; ils enroulent ri 208 HISTOIRE NATURELLE. étalent leur queue autour de leurs talons, et, dans celte attitude, ils paraissent placés comme sur un socle. (Geoffroy SAiNi-IIiLAinE.) Ces singes en captivité ont la singulière liabitude de se manger la queue, malgré la douleur qu'ils éprouvent et tout ce qu'on peut faire pour leur ôter le goût de cette mutilation. Quoique vifs et tur- bulents, ils n'ont pas la pétulance brutale et capricieuse des autres singes, mais il est fûcheux qu'ils en aient la malpropreté et un peu la lubricité; sans cela, ce seraient les animaux les plus aimables que l'on pût soumettre à l'esclavage. En Europe, il est fort difficile de les conserver, parce qu'ils craignent excessivement le froid, et que les variations de température, si brusques et si fréquentes dans nos climats, leur donnent des maladies de poitrine qui les enlèvent très-promptement. (BoiTAnn.) 1. SAJOU BHUN. CRBU5 APEU.A. (Eixlebcn.) Caractères spécifiques. — Pelage brun clair en dessus, fauve en dessous, dessus de la tète, favoris, queue et partie inférieure des membres d'une couleur plus foncée ou même noire. Habite la Guyane. Cette espèce, à laquelle nous réunissons le sajou nègre de Buffon, est connue en Amérique sous plusieurs noms différents: caij-gouazou, d'où l'on a dit sajouassou et sajou. On prétend qu'on ne peut donner à ce singe, et généralement au\ sapajous, aucune éducation sans le secours du fouet, car, dès qu'on cesse de les battre, ils cessent d'obéir I Fii;. 172. — .Sn|ou Ijruii (v.irlôlù nc^rc). QUADRUMANES. 209 2. SAJOU LASCIF. CEBVS LIBIDINOSUS. (Spix.l Cahactères spécifiques. — Pelage brun, ferrugineux; barbe encadrant la face ; sommet de la ItMc brun-noir. Habite les forêts basses de Carinainha. Voisin des ccbtts apella et fatuellus, ce singe s'en distingue entièrement par la couleur ferrugi- neuse de son corps et surtout par sa barbe, qui entoure toute la face et se prolonge des tempes au- dessous du menton. Sur le sommet de la tèie il a une calotte brun-noir. Les pieds et le bas des jambes, les mains et l' avant-bras, noirâtres; le reste du corps est roux ferrugineux; les joues, le menton el les doigts des mains sont d'un roux plus clair. Le bas-ventre est presque nu; la face est brunâtre et un peu veloutée; le front relevé. Oreilles bien découvertes et garnies, seulement en avant, de quel- ques poils. Dents canines aiguës, ongles noirâtres. Queue un peu plus courte que le corps. C'est la lasciveté qui rend ce singe remarquable. Il aime à faire continuellement des grimaces en regardant certaines parties de son corps. Un sajou lascif, attaché par une petite chaîne de fer sur un mulet de charge, nous a accompagnés dans le voyage de la rivière de San-Francisco à Bahia. 11 était toujours aussi intelligent et aussi vif que malicieux. Pendant la route, un de nos domestiques, chargé du soin de pousser les mulets de charge, se moquait continuellement de lui. Le singe au commencement se fâchait et s'éLinçait vers le moqueur; mais, se sentant prisonnier, il ne répondit bientôt plus que par des grimaces, et, à la lin même, il détourna les yeux, dédaignant les vexations de son ennemi. Arrivés un soir à la couchée, le singe parvint à se détacher, et, avant de s'enfuir, il sauta à l'improviste sur ce garçon et le mordit cruellement. De ce fait on pourrait bien conclure que les singes conservent un esprit de vengeance, qu'ils tiennent caché même très-longtemps. (Spix.) ô. SAJOU ROBUSTE. CliBUS ROBVSTVS (Kulil.) Cabactères spécifiques. — Pelage brun; une crête frontale presque comme une guenon. Habite les forêts des bords de l'Amazone. Ce singe, auquel nous réunissons le macrocéphale de Spix, a le tronc, les bras et la partie interne des cuisses d'un rouge-brun ; la tète, l'occiput, l'avani-bras. la jambe et la ligne dorsale noirs. Une bande noirâtre en forme de favoris s'étend des tempes au-dessous du menton. Les joues, la partie antérieure du front et des tempes sont d'un fauve blanchâtre. La gorge et la poitrine sont rougc- brun. Le crâne présente une crête médiane sur le front, ainsi qu'une crête sourcllière. Il a de grands veux, des dents canines très-prononcées, les tempes presque nues, ainsi que les oreilles, qui sont très-visibles. Laface est roux foncé. Tous les poils sont roux à la racine et bruns à l'extrémité. (Srix.) On donne à ce singe les noms de liierang (chez les Botocoudes), de macaco ili hando et de macaco verdadero. 20 27 210 HISTOIRE NATURELLE. 4. SAJOU A TOUPET. CEBUS CIRRIFER. (Geoffroy Saint-Hilaire.) Caractères spécifiques. — Pelage brun-châtain; un toupet de poils très-élevés et disposés en fer à cheval sur le devant de la tête; poils longs, doux et moelleux. Habite le Brésil. Fig. 173. — Sajou à toupet. 5. SAJOU CORNU. CEBUS FATVELLVS. (Erxleben.; Caractères spécifiques. — Pelage marron sur le dos, plus clair sur les flancs, roux vif sur le ventre; tête, extrémités et queue brunâtres; deux fortes touffes de poils s' élevant de la partie mé- diane du front. Habite la Guyane. Ce singe ressemble beaucoup au précédent, c'est peut-être la même espèce; son pelage est d'un brun uniforme; deux pinceaux de poils font saillie sur les côtés de la tête. Plusieurs autres variétés, indiquées comme espèces par les auteurs, doivent probablement être considérées comme présentant seulement des différences d'âge. QUADRUMANES. 211 G. SAJOU BARBU. CEDUS D.iRnATVS. (Gcoffioy SaiiU-Hilaire.) C.vRACTÈRES SPÉCIFIQUES. — Pelage gris-roux, variant du gris au blanc; ventre roux; barbe se pro- longeant sur les joues. Habite la Guyane. A cette espèce se trouve réuni le sajou gris de Buffon Fig. 174. — Sajou kirbii. 7. SAJOU AUX PIEDS DORÉS. CEBVS CnRYSOPVS. (Fréd. Cuvier.; C.vnACTÊREs srÉciriQLEs. — Extrémités des membres d'un roux vif. Habite la Colombie. Cette espèce a le pelage de plusieurs couleurs, dont la disposition pourrait la faire confondre avec la plupart des autres sajous, mais dont la nuance la distingue parfaitement. La partie antérieure du dessus et des côtés de la tète est d'un blanc légèrement jaunâtre ; les pieds, les jambes, les ré- gions antérieure et interne des cuisses, les mains, les bras et une portion des avant-bras, sont d'un loux vif. Le reste des membres, le dessous de la queue, les flancs, les épaules, la partie antérieure du dos et le dessous du cou, sont d'un brun clair légèrement cendré qui se prolonge .sui' la partie pos- térieure de la tête, en prenant une teinte un peu plus foncée; la partie postérieure du dos et toute la région lombaire sont rousses. Enfin, le ventre est d'un fauve roussàtre, qui se confond par 212 HISTOIRE NATURELLE. nuances insensibles, en avant, avec le blanc tin dessous du cou, en arrière, avec le roux de la paiiie iiileine des cuisses. Celle espèce a de nombreux rapports avec l'ouarapavi de M. de llumboldt {cebiis alhifrons). Noire description est faite d'après plusieurs individus entièrement semblables, envoyés au Muséum par le voyageur Tlée , sous le nom de cariia blancu , nom très-analogue à celui de cari-blanco, que M. de llumboldt attribue au cebiis Itypolcucus. (Isidore Geoffroy S.unt-IIilaire.) Fig. 17 j. — Sajou aux pieds doiôs. 8. SAJOU VERSICOLORE. CEDUS VERSlCOLOIt. (Puclieraii ) CvRACïÈr.ES SPÉCIFIQUES. — Nuquc et quatre mains noires. Habite Santa-Fé de Bogola, Colombie. Ce sinn-e, très-voisin du sajou aux pieds dorés, a le dessus et les côtés de la tète jusqu'en ar- rière des oreilles couverts de poils blancs, ainsi que le menloii et la partie inférieure du cou. La région interauriculaire est noirâtre foncé, se terminant en pointe sur le blanc du vcriex, taudis qu'elle se nuance de brun sur la région supérieure du cou. Le milieu du dos est blond l'once , pas- sant au roussàtre sur le croupion, et se cbange en gris-brun foncé sur les flancs. Le thorax et l'ab- domen sont d'un roux vif, ainsi que les faces interne et externe des quatre membres; les poils qm couvrent les mains, en avant comme en arrière, sont noirs. La queue est, à sa racine, de la teinte du croupion; elle devient ensuite gris-brun foncé dans son tiers médian, et blond très-clair dans son tiers terminal. (Pucueram.) ni OLiAbiaiMAMliS. 'il'j !> SAJiUl MAIGIllv riilllis liltMll.lS. .Spix 1 Cai\actèiies si'i-:c.ii'iyiiKs. — Corps niaiyre t'I exlréiiiilés tri's-alluiigi'i's. Habite les forôls qui boitleiil l'Amazone. Les Indiens, en pai'coniant les yiandes t'orèts qui bordent la rivière des Amazones et en observant les diffèrenees qui distinguent les singes de ees pays, parlent du ccbus firacHis comme d'une espèce particulière, et lui donnent le nom de airiitrii. C'est un des pins vifs et des plus gais des sapajous du lîrèsil. Le corps et les extrémités sendjlent maigres et plus allongés (pie cbez les autres saiiajdus. Sa conformation paraîtrait le condamner à un mouvement continuel , auquel d'ailliMirs il se livre eu sautant sans cesse d'une branche à l'autre. Sa couleur est presque uniforme, brun fauve en dessus, passant au blaïu'Iiàtre au-dessous du corps. La femelle a , sur le sommet de la tête et à l'occiput, une calotte |)resque noire, tandis que le mâle l'a brune. Dans l'un et l'antre sexe, on remarqu<' au milieu du front une ligne brune qui se prolonge et se perd dans la calotte. Le dos est d'une teinte plus foncée vers le milieu, mais les parties latérales du front, les extrémités antérieures et le bout de la queue sont d'un fauve plus clair. ïja gorge, la poitrine et la ])artie interne des quatre membres sont d'un jaune blanchâtre. Les oreilles, bien appai'entes, sont presque nues et oblongues. Le bas- venlre et la l'ace sont aussi presque nus; cependant le uKUilon et les lèvres sont veloutés et d'une teinte claire. La face est couleur de chair. Les ongles sont fauves, courbes et obtus. La face plan- taire des extrémités inférieures est aussi couleur de chair. La queue est plus longue que le corjis. (Snx.) 10. SAJOU A CAPUCIIO.N. Ci/UW CUCVI.LATVS. (S|iix.) Caractèhes si'iiciFiQUES. — Poils de la partie antérieure de la léle diiiges rn avant , membres cl qiu'ue presque noirs, dos et tète brunâtres; bras, gorge, poitrine roussâtres, ventre d'un lonx ferrugineux. Habite le Brésil et la Guyane, les forèls de Saint-l'aul. De tous les singes du Brésil, aucun n'est plus distinctement m.irqné (pie le sapajou à capuchon. Tous les poils de la partie antérieure de la tète se dirigent en avant et encadrent tonte la face jus- qu'au-dessous du menton. Cette espèce est assez robuste, son poil est touffu et épais. Les extrémiies et la queue sont presque noires; le dos, la tète et le capuchon bruns; les flancs, le bas-ventre et l.i partie interne des cuisses d'une teinte ferrugineuse; les bras, la gorge et la poitrine, d'un rou\ blanchâtre. Les poils du dos sont noirs à leur racine, roux vers le milieu et d'un noir fauve â leur extrémité; ceux des extrémités sont noirs à la racine, fauves à l'extrémité, excepté cependant ceux des doigts, qui sont gris. Les poils de la tète et du capuchon sont roux-blanc à leur naissance, cl brun-noir â rexlrèmilè. Ceux du dessous du corps sont blancs ou roux. La fac e et les doigts sont comme veloutés et couleur de chair. Les lèvres et le menton portent une courte moustache blanche. Le capuchon se compose de poils qui partent du front, des joues et du menton, s'avancent et enca- drent toute la face Les oreilles, assez grandes, sont velues en avant. Les ongles sont petits et bruns; la queue, grosse, d'un gris noir, est presque aussi longue que le corps. (Snx.} Il SAJOU A TÊTE FAUVIv CEBVS XANTIIOCEPHÀLUS. (Spix.) Caiiactèhes spécifiques. — liegion lombaire, [lartie supérieure de la poitrine, cou, mK(ue et dessus de la tête fauves ; portion moyenne du tionc, fesses et cuisses brunes 514 mSTOlRE NATURELLE. Habite le Brésil, forêts de Rio-Janeiro et Saint-Paul, où il vit en troupes nombreuses, dévastant les plantations de mais. Ce sin"e est connu dans le pays sous le nom de sua ou de macaco. Qu'il marche à quatre pattes ou qu'il içrimpe, sa queue est toujours enroulée. S'il saute d'une branche à l'autre, il se sert de sa queue comme d'uue cinquième main, s'accroche en la roulant autour d'une branche, et, ainsi sus- pendu, il s'amuse à se balancer en se tenant la tète en bas. 11 se distingue par la couleur fauve ou jaune rougefitre du sommet de la tète, de l'occiput, de la nuque, des bras, des reins et des flancs. Le reste du corps est noir, à l'exception de la gorge et de la poitrine, qui sont d'une teinte ferru- gineuse. Une large bande noire, partant de la partie antérieure des oreilles, se prolonge jusqu'au- dessous du menton. Les poils du front et des joues sont blanchâtres; la face est presque nue et rou"eatre; les yeux sont bruns, les oreilles presque entièrement couvertes de poils formant de pe- tits faisceaux. Le tour des lèvres et le menton présentent des petits poils blancs. Les avant-bras et les mains, le dos, les membres postérieurs et la queue, sont noirs, et on ne remarque de taches jaunes qu'à la partie externe des cuisses et à la racine de la queue. Le bas-ventre et la partie interne des cuisses sont presque nus et ne présentent que quelques poils noirs très-rares. Les ongles sont noirs. Les dents canines assez proéminentes. Cette espèce ressemble, par la couleur ferrugineuse de la poitrine, à celle que le prince de Neu- wied nomme xanlhoster, on ; mais elle en diffère par la tête et la nuque , qui ne sont point noires. (Spix.) 12. SAJOU FAUVE. CEBVS FLAVUS. (GeolTroy Saint-Hilaire.) CARACTÈRES SPÉCIFIQUES. — Pelage entièrement fauve. Habite les forêts qui bordent le Teflé, près d'Éga. \ cette espèce il convient de réunir le cclius unicolor, do Spix, et le cebus albus, de Geoffroy Saint-Iliiaire. Cette espèce a quelque ressemblance avec le ccbiis (jracilis; mais sa grosse tête, ses poils roides, courts et gris varié aux quatre extrémités et à la queue, et sa taille plus grande , l'en distinguent assez. La grosseur de sa tète paraît le rapprocher du .sapajou macrocéphale, mais il en diffère par la forme; en effet, sa léte arrondie et aplatie sur le front, sa face courte, ses oreilles comme tron- quées, et surtout sa couleur générale, le caractérisent suffisamment. Il est d'un brun clair uniforme, seulement un peu plus foncé sur le dos et le sommet de la tète, et légèrement teinté de gris aux extrémités et sur la queue. Les oreilles assez courtes, nues en arrière, présentent quelques petits bouquets de poils en avant. La face est noirâtre, un peu veloutée; les yeux d'un brun clair, les ca- nines assez longues, les ongles fauves et un peu courbés. La queue, forte, est aussi longue que le corps. Telle est la description du mâle. (Spix.) 15. SAJOU SAI. CEBVS CAPl'CIMIS. (Guotrroy Sjinl-Hilairc.) Caractéiies spiiciFiQUEs. — Pclagc variant du gris-brun au gris olivâtre ; vertex et extrémités noirs; front, joues et épaules d'un blanc grisâtre. Habite la Guyane. Cette espèce, connue sous le nom de singe capucin, a la tète petite, arrondie; le musean gros et court; le bord des orbites saillant du côté interne; les oreilles grandes et nues; la face pâle, par- semée de très-petits poils noirâtres; les poils du sommet de la tête assez courts, à l'exception de ceux du vertex et du haut de l'occiput, qui sont de couleur noire et qui forment une calotte de cette QUADIUIMANES. 215 couleur, bien marquée, tous les autres étant d'un gris-blanc; une ligne noire de poils descendant de la calotte du sommet de la tète, traversant le front flans son milieu et venant s'arrêter à la racine du nez; les poils des côtés du front, des joues, des épaules et de la face extei'ne des bras, d'un gris pâle; la face interne de ceux-ci plus foncée; une ligne brune à la face supérieure des avant-bras; le dessus du corps et les flancs d'un gris-brun assez uniforme; la face externe des cuisses aussi brune et plus foncée que linterne , mais ayant la pointe des poils qui la recouvrent d'un jaune pâle; les pieds elles mains d'un brun obscur; la queue brune. Le saï a été regardé comme espèce douteuse par plusieurs naturalistes, et notamment par G. Cuvier, qui en faisait une variété du sajou brun. Néanmoins, il en diffère pour le moins autant que la plupart des espèces qui ont été distinguées dans ces dernières années. Le saï est d'un naturel doux et timide ; il fait souvent entendre un petit cri plaintif, qui lui a valu le nom de singe pleureur. On l'apprivoise facilement, et il a toutes les babiludes du sajou brun. Plus peut-être que tous les autres sajous, il répand une odeur musquée parlicnlière. (Desm.^uest.) 14. SAJOU A GORGK BLANCHE. CEBVS UYI'OLEUCUS. (Geoffroy Saint-Ililairc ; Car.\ctèkes spécifiques. — Pelage noir ou noirâtre; front, côtés de la tète, gorge et épaules, blancs. Habite la Guyane. Ce singe a la face et tout le front nus, et d'une couleur de chair assez pure; il en est de même (le ses oreilles; les mains, nues aussi, sont violâtres, ainsi que la peau des parties inférieures du corps. Tous les poils sont soyeux, très-lisses et roides, beaucoup plus épais aux parties supé- rieures qu'aux inférieures. Ils sont blancs sur les côtés des joues et sur les bras jusqu'aux épaules. Fig. 176 — Sii.jmi A snrpe M.i.i. li, sous le cou, sur la poitrine, ils sont jaunâtres, et, partout ailleurs, ils sont d'un noir très-foncé. Ce singe, nommé saï par Buffon, a, dit Cuvier, le bout de la queue un peu nu. Le cri du sajou à gori^e blanche, lorsque ce singe éprouve un désir, un besoin, n'est qu'un petit sifflement continu très-doux- dans l'effroi, il devient aigu et dé.'iagréable. ' L'individu dont parle Frédéric Cuvier était d'une douceur exirème et très-intelligeni; ses yeux avaient une pénétration remarquable; il semblait lire dans les vôtres ce qui se passait en vous; le 216 HISTOIRE NATURELLE. iiioiiiclre geste avait pour lui une signiiicaliûii, et il était rare qu'il n'en devinât pas le motif; mais il lonvicnl d'ajouter que ces qualités sont coniiiuines à tous les sapajous. 15. SAJOU A KRO.NT BLANC. CEIHS Al.BIFIlOKS. (GeoriVoy Saint-Hilaire ) CAKACTÈRts SPÉCIFIQUES. — Pelage noirâtre, pointillé de doré; ventre roussâtre; poils du dos bruns à la raeine, roux au milieu, noirs à la pointe. Habile la (îiiyane Ce singe se trouve dans les forêts qui avoisinentles eataraetes de l'Orcnoque, oii il vil en troupes. H a l'agilité et la doueeur des autres sajous, et il esl beaucoup moins criard. Sa face est d'un gris bleuâtre; le front et les orbites sont d'un blanc pur; le dessus du corps grisâtre, plus clair sur la poilrine et sur le ventre, les extrémités d'un blanc jaunâtre; le sommet de la tête est gris tirant au brun; une raie cendrée traverse la calolle et descend à la racine du nez; les oreilles sont velues- Celte espèce esl connue, dans le pays, sous le nom d'ouarapavi; et le nom de singe à front blanc lui a été donné par M de llundjoldl. CU'euecietue axo\ive. — C'aciouiiif» «^eoLulkemit Vr~, terre; iriOr.Ç, singe. Les géopithèques ou sagouins se distinguent de tous les autres singes d'Amérique par leurs lia- biludes. Leur queue, non prenante, ne pourrait leur servir â se balancer sur les branches et sauter d'arbre en arbre dans les forêts; aussi de celle conformation sont aussitôt découlées des privations, et les sagouins ont été contraints de chercher des refuges dans les broussailles et les crevasses des rochers. Ils vivent'en quelque sorte sur le sol, de là le nom de géopithèques, que leur donna M. Geof- frov Saint-Hilaire. FiR. 177 — CrSne de saïmiri Ces singes, à têle arrondie, paraissent avoir reçu en partage une ample dose d'intelligence; leurs yeux, organisés pour la vision noclurne, semblent prouver qu'ils n'ont jamais plus d'assurance que le soir et aux approches de l'obscurité, el que, pendant le jour, ils restent tapis dans l'asile qu'ils Habitent; leur face, généralement courte, forme un angle de soixante degrés; leur narines, large- ment ouvertes, sont percées sur le côté; leurs mâchoires présentent six dents molaires; et, enfin, leur longue queue ne paraît avoir aucun but d'ulililè. (Lesson.) Les sagouins, comme la disposition de leurs fausses molaires l'indique, sont insectivores autant (pie frugivores Ils liabileni, avec les .sajous, les immenses forêts du Rrésil QUADRUMANES. 217 1" GENRE. — SAIMIRI. SAIMIPxI. (Geoffroy SaiiU-Hilaire.) Saitniri, uoni local. CAHACTÈRES GÉNÉRIQUES. Crâne développé. Trou occipital percé au milieu de la hase du crâne. Fosses orhitaires séparées par une cloison membraneuse. Pelage uçfréablcment coloré. Queue non prenante, jloconnèuse a l'extrémité, plus ou moins longue, et velue dans toute son étendue. Ongles courts et plats aux pouces, longs et étroits aux autres doigts. Oreilles grandes, triangulaires, appliquées sur le crâne. Les saimiris vivent en (roupes plus ou moins nombreuses dans les forêts équatoriales du nouveau monde. Le type de ce genre est le saïmiri de Buffon, que Geoffroy Saint-Hilaire a pris pour le caractéri- ser; et il pense même que les autres espèces de callithriches des auteurs diffèrent assez notablement du saïmiri, par les détails de leur organisation, pour ne point faire partie du même genre. Le crâne '^V^ Fig. 178. — Srâliiri entomopliagc. des callithriches est énormément développé, et il acquiert des dimensions qui rendent compte de l'extrême sagacité que ce singe manifeste. Les yeux sont d'une grosseur considérable; les orbites complètement arrondies et séparées par une cloison membraneuse. 21 28 218 HISTOIRE NATURELLE. i. SAIMIRI ÉCUREUIL. SAWIRI SCIUltEUS. (Geoffroy Saint-IIilaire.) CAn\CTÈRES SPÉCIFIQUES. — Pelage giis olivâtre, composé de poils fins el doux couvrant abondam- ment le corps; face aplatie; museau peu saillant et noir. Habite le Brésil, la Guyane, ele. Le saïmiri est aussi connu sous les noms de sapajou aurore, singe écureuil, tili de l'Orhioque. Buffon, malgré son éloignement pour les méthodes naturelles, avait fait remarquer que ce qua- drumane d'Amérique, dont la queue n'était pas prenante, formait la liaison des sapajous aux sa- gouins; et il en avait placé la description et l'histoire entre ces deux genres, ce que la plupart des naturalistes ont imité depuis, tout en laissant cette espèce avec les sapajous. M. Geoffroy Saint-Hi- laire, par la considération de ce caractère de la queue non prenante, en a fait le type d'un genre ([u'il a désigné par le nom de callithrix. En effet, le saïmiri n'est ni un sapajou ni un sagouin, quoi- Fi". l'ÏO. — Saïmiri écureuil. qii'il appartienne bien à la nombreuse famille que forment ces singes d'Amérique, car ils se distin- guent encore les uns des autres par des caractères assez importants. L'un consiste dans la forme de I organe reproducteur, semblable à celui des cercopithèques, ou plutôt à celui de l'homme; tan- dis que le même organe des sajous et des sagouins a tout à fait la forme d'un disque ou d'un cham- OUADRUMANRS. 219 pignon. Un second caractèiT est fourni par la couleur des poils, très-sombres dans les sapajous comme dans les sagouins, et très-brillants, au contraire, dans le saimiri. Ce caractère n'aurait aucune valeur dans le genre cercopithèque, par exemple, où presque toutes les espèces ont le pelage plus ou moins varié par de belles couleurs; mais il doit avoir de l'importance dès qu'il s'agit d'espèces où toutes les couleurs et les teintes sont renfermées entre le noir et le gris enfumé. Les rapports des espèces d'un genre naturel existent jusque dans la couleur des poils; et, lorsque ces rapports cessent d'avoir lieu, on peut presque toujours être sûr que d'autres rapports cesseront aussi. C'est l'action d'un des principes cachés de la vie qui a changé, et ce changement se manifeste toujours par des effets plus ou moins nombreux. .Alors on a sous les yeux une autre nature, c'est-à-dire le type d'un autre groupe naturel. La tète du saimiri, par ses dimensions singulières, est encore un carac- tère qui doit séparer ce singe de tous ceux dont il se rapproche d'ailleurs; car il est impossible qu'un développement aussi considérable de la partie postérieure du crâne n'ait pas une influence impor- tante .sur les proportions du cerveau et par conséquent sur le naturel. Les parties supérieures du corps de l'individu décrit par G. Cuvier étaient d'un jaune verdâlre I Fi^. 180. — S:)iniiri ;i dos brûlé. qui prenait une teinte grise sur les bras et sur les cuisses, et qui se changeait en un bel orangé sur les avant-bras et les jambes. La queue était du verdàtre du dos, excepté le bout, qui était noir; le ventre, la poitrine, le cou, les joues, le tour des oreilles, étaient blancs, seulement une ])eiite lâche verdàtre se trouvait au milieu du blanc des joues. Le bout du museau, des narines, aux coins de la bouche et au-dessous du menton était noir; le reste de la face, les oreilles, les mains et les organes génitaux étaient d'une coideur de chair assez pure, ainsi que les ongles, noirs seulement par le boni . Les yeux étaient bruns. Les quatre mains étaient exactement formées ; les ongles des pouces plats et larges, et ceux des doigts longs et étroits. Ses yeux étaient vifs et à pupilles rondes; ses narines séparées par une cloison épaisse et ouvertes sur les côtés du nez, et ses lèvres entières; sa langur; était douce, et ses oreilles se faisaient particulièrement remarquer par leur étendue et leur forme générale. Les dents avaient tous les caractères de celles des sajous. 220 HISTOIRE NATURELLE. C'était un animal fort doux et tiés-gai : il ne se servait point de sa queue pour empoigner; ce- pendant il la reployait en dessous, et, lorsqu'un corps se trouvait convenablement placé, elle l'en- tourait, mais sans le serrer. Lorsqu'il était assis, ses pieds de derrière étaient étendus en avant, et ses mains s'appuyaient sur eux. C'est aussi delà sorte qu'il dormait, en ramenant sa tête entre ses jambes, qui alors touchaient à terre. Il mangeait, soit en portant les aliments à sa bouche avec ses mains, soit en les prenant immédiatement avec sa bouche elle-même; et c'était en humant qu'il bu- vait. Lorsqu'il empoignait un corps avec ses pieds de devant, le pouce se trouvait placé parallèle- ment aux autres doigts; ce n'était qu'aux pieds de derrière que le pouce était opposable. Son cri était un petit sifflement bien doux et assez aigu, qu'il répétait trois ou quatre fois, soit qu'il voulût exprimer sa colère ou seulement ses désirs. Si j'en juge par un sainiiri mftle beaucoup plus ftgé que celui qui fait l'objet de cet article, et que notre ménagerie a possédé en d8I2, les individus adultes ont une teinte plus vcrdàtre que les jeunes individus, ce qui fait que la couleur du corps et celle des jambes et des avant-bras paraissent en- core plus tranchées. Le saimiri est un animal du lirésil, de Cayenne, etc., etc., et sa beauté comme sa gentillesse l'ont fait remarquer par tous les voyageurs ou les naturalistes qui l'ont vu. (Fréd. Cuvieh.) La physionomie du saimiri est celle d'un enfant. C'est la même expression d'innocence, quelque- fois le même souris malin, et constamment la même,rapidité dans le passage de la joie à la tristesse; il ressent vivement le chagrin, et le témoigne aussi en pleurant. Ses yeux se mouillent de larmes quand il est inquiet ou effrayé. 11 est recherché pour sa beauté, ses manières aimables et la dou- ceur de ses mœurs. Il étonne par une agitation continuelle; cependant ses mouvements sont pleins de grâce. On le trouve occupé sans cesse à jouer, à sauter et à prendre des insectes, surtout des araignées, qu'il préfère à tous les aliments végétaux. M. de Humboldt a remarqué plusieurs fois que les titis reconnaissaient visiblement des portraits d'insectes, qu'ils les distinguaient sur les gra- vures même en noir, et qu'ils faisaient preuve de discernement en cherchant à s'en emparer en avançant leurs petites mains pour les saisir. Un discours suivi, prononcé devant ces animaux, les occupait au point qu'ils fixaient les regards de l'orateur ou qu'ils s'approchaient de sa tête pour loucher la langue ou les lèvres. En général, ils montrent une rare sagacité pour attraper les in- sectes dont ils sont friands. Jamais les jeunes n'abandonnent le corps de leurs mères, lors même qu'elles sont tuées; aussi les Indiens se procurent-ils facilement de jeunes saimiris, qu'ils vont vendre à la côte. (Geoffroy Saint-IIilaibe.) Nous considérerons jusqu'à nouvel ordre, comme variétés de cette espèce, le saimiri cntomophagc, de d'Orbigny, et le saimiri à dos brûlé, qui ne se dislingue du premier que par des teintes un peu plus foncées ou plus claires. Cependant le callithriche entomophage pourrait, plutôt que l'ustus, être considéré comme une espèce distincte. i"" GENRE. — CALLITHRICHE. CALLITIIIÎIX. (Geoffroy Saint-llilaire ) K-xXXo;, beau; OptÇ, poil. CARACTÈKES GÉNÉRIQUES. Pehujc (le couleur sombre rt formé de poils assez longs. Queue assa lunijue cl fournie. Cloison lies orbites entièrement osseuse Trou occipital percé en arrière de la base du crâne. Repli membraneux à la base des doigts des mains postérieures . Les callithricbes habitent les régions équatoriales de l'Amérique. Les mœurs et habitudes des callithricbes sont peu connues, cependant on peut .supposer que ce QUADRUMANES. 221 sont des singes qui ne sortent de leur retraite que vers la fin du jour. Us sont insectivores et frugivores. Fig. 181. — Crâne de sagouin. i. CALLITHRICHE MOI.OCH. CALLITURLX SIOLOCB (Geoffroy Saint-Ililaire.) CtBACTÈRES SPÉCIFIQUES.— Pelage cendré; mains et extrémités de la queue d'un gris presque blanc; face nue, brunâtre; dessous du corps, parties internes des membres fauve roussâtre assez vif; joues et menton garnis de poils assez rudes. Habite le Brésil et le Para. Cette espèce a été découverte par lloffmansegg dans les forêts du Para. V'i'i. 182. — Callilliriché molocli. 222 HISTOIRE NATURELLE. Son pelage est cendré, à poils longs et serrés, annelés de blanc et de noir; ses membres sont d'un gris plus clair, tirant au blanchfllre sur les mains ainsi qu'à la queue dont les poils sont annelés de gris-brun et de blanc sale. Sa face est brunâtre, nue, et le dessus du corps, ainsi que l'intérieur des membres, sont d'un fauve roussàtre assez vif. Quelquefois il a le pelage d'un cendré tirant sur le fauve, avec les joues, les tempes, le ventre, d'un roux vif, et le bout de la queue et les mains blancs. Ce singe est, dit-on, connu en Amérique sous le nom d'oiabonssa 2. CALLITIIRICIIE A FRAISE. CALUTniilX AMICTUS. (Geoffroy Saint-Hilaire.) Cahactèi'.es spécifiques.— Pelage brun noirâtre avec un demi-collier blanc. Mains antérieures d'un jaune terne pâle ou blanchâtre. Habile le Brésil. Fi". 1S5 ■ Callilliiklie à fraise. Le calliihriche à fraise a le pelage noir mêlé de brunâtre sur le corps et les membres; les poils des joues sont longs et bruns; le dessous du cou et le haut de la gorge blancs; les mains sont d'un blanc jaunâtre sale; la queue est noire et assez touffue. D'après Lcsson, les caliulirix luijen.i et torqitatiis ne seraient que des variétés de l'amiiiii.s QUADRUMANES. 223 3. CALLITlIdlClIE A MASQUE. CMLITIIItIX PERSOPiATUS. (Geoffroy Sainl-Hilaire.) Caractèkes spécifiques. — Pelage gris fauvo; tête et quatre mains d'un noir foncé; queue roussûtrc. Habite le Brésil. Celte espèce présente des variétés d'âge et de se.xe qui ont pu donner lieu à quelques erreurs et à de doubles emplois. D'après Lesson, le caU'uhrix mctaiwclieir, sagouin aux mains noires, le donaco- ph'ilus, sagouin des bambous, et Vinfiilaliis, sagouin mitre, ne seraient que des callitliriches A masque de sexe ou d'âge différents. La femelle est plus brune; dans le jeune ûge la queue est rousse avec l'extrémité blanche. I Fig. 184. — Callilliriche à masque. Dès le lever du soleil, ce singe fait retentir les forêts de cris désagréables el qui s'entendent de fort loin. 224 HISTOIRE NATURELLE. 3"" GENRE. - NYCTIPITIIÈQUE. NYCTIPITUECUS (Spi.v.) KuÇ, nuii ; t^'MI, siniçe. CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Tcte ronde cl large; museau court, obtus. Yeux noclurncs, irès-çirands. Narines séparées par une cloison Irès-mince et ouvertes à la fois sur les côtés et en bas. 0 rei lies t rcs-pcliles . Queue longue, couverte de poils lâches, non prenante. Toutes les mains pentadactijles. Les nyctipilhèques habitent les régions équatoriales du nouveau monde. Ce genre, désigné sous le nom d'aotus (» privatif, m;-bm;, oreille) par M. de llumboldt, qui supposa que la seule espèce connue alors n'avait point d'oreilles, reçut bientôt après le nom plus heureux de nyctipithèque ou singe de nuit, en même temps que celui de nocthore, qui a la même signification, lui était donné en France par Frédéric Cuvier. M. de Humboldt a annoncé, dit Geoffroy Saint-Hilaire dans ses Leçons, que, par ses mœurs et l'ensemble de sa physionomie, le douroucouli, qui était alors la seule espèce connue, formerait un genre particulier rappelant les caractères des loris de l'ancien continent, singes nocturnes dont nous parlerons bientôt. Et, en effet, le douroucouli est caractérisé par de grands yeux jaunes, inca- pables de soutenir la lumière du jour, par des oreilles fort courtes et par une queue non prenante et plus longue que le corps, kux faits qu'il avait observés, l'illustre naturaliste de Berlin avait ajouté quelques pressentiments, dont nous avons vérifié la justesse. Les rapports du douroucouli avec les loris l'onsistent effectivement dans les formes grêles de son corps, qu'on trouve allongé quand on en juge sans la toison, qui l'cpaissit en apparence, dans la longueur des lombes, dans la rencontre numérique des vertèbres lombaires, et dans des proportions semblables des parties de la tête, des fosses orbilaires et des quatre extrémités. Les habitudes des espèces du genre sont à peu près celles du douroucouli . ce singe dort le jour; la lumière l'incommode beaucoup, et, pour l'éviter, il se retire dans un trou d'arbre, faisant cepen- dant le guet en certains moments, et pour cela il avance un peu la tête hors du trou. Ses yeux, qui ressemblent à ceux d'un hibou, sont sans éclat, troubles et presque mourants pendant le jour. Pour dormir, il se pose sur sa croupe, les jambes de derrière ramenées sous le ventre, les quatre mains réunies, le dos courbé, la tête baissée et presque cachée dans les mains de devant. Les nyctipithèquessonl monogames; ils aiment les fruits doux, ceux du bananier, des palmiers et certaines amandes; mais ils se plaisent surtout à chasser et â attraper des insectes. Il suffirait de savoir que le douroucouli ne siffle pas à la manière des callithriches, pour qu'on fût assuré qu'il n'est point du même genre. Son cri, pendant la nuit, ressemble ù celui du jaguar. Sa voix est d'un volume et d'une force extraordinaires par rapport à sa petite taille; sa gorge enfle lorsqu'il est irrité, et il ressemble alors, par le ronflement qu'il fait entendre et par la position de son corps, à un chat attaqué par un chien. (Geoffroy SAiNT-IIrniRE.) ' i. NYCTIPITIIÈQUE DOUROUCOULI. NYCTIPITUECVS TRIVIRGATVS (De HuniboliU.l Caiuctèbes spécifiques. — Pelage cendré en dessus et jaune roussàtre en dessous. Trois raies noires et divergentes sur le front. Habile les forêts des bords du Cassiquiare et du haut Oiênoque. Le (iourouconli, {(uinu sur les bords de l'Orénuque sous le nom de cura raijada et de lili ligre. QUAltlUIMANES. 225 est sans rontrodit un des singes les pins veniai'([iiabl('s de l'Amérique méridionale, et par ses formes, les couleurs de sou pelage, el surtout par ses habitudes. Tout le pelage, sur les parties supérieures du corps, est d'un gris varié qui est dû à ce que chaque poil est anuelé de blanc et de noir; les parties inférieures, depuis le menton jusqu'à l'origine de la queue, sont d'un orangé qui remonte sur les côtés du cou; la queue, noire à son tiers terminal, est grise, jaunâtre dans le reste de son étendue; un sourcil blanc surmonte l'œil; trois raies noires sillonnent le front en divergeant; l'une occupe la ligne médiane et chacune des deux autres naît de l'angle extérieur de l'œil et se recourbe vers l'angle Fia, 185, nourotr:oiili. interne; l'intérieur des mains et des oreilles est [ui et couleur de chair; la face, également nue, est fuligineuse; l'iris est brun jaunâtre et les ongles sont noirs. Les dents du douroucouli ne diffèrent point de celles des sajous; les mains ont aussi la même conformation; les doigts antérieurs ne sont point extensibles; les ongles sont longs, étroits, cicusés en gouttière et un peu crochus. La queue, qui n'est pas prenante, e.st assez touffue et mobile. Le globe de l'œil est très-développé et a sa pupille ronde. Le nez n'est point terminé par un mufle et la bouche est fort grande. Les poils sont dou\, épais et très-soyeux. (Lesson.) '> NYCTlt'iTlIlK'l'K A FACIi DE CHAT, .WCriPITtllirUS FELIM'S. (S|nx.) Cmiactèiiks sriiciKiQUKs. — Pelage gris-brun uniforme; ventre roussâtre; tour des yeux blanc; queue noire à sa moitié leruMnale; yeux rouges. Ilahite le Tara Celte espèce resseml)le à la précédente par les couleurs du pelage, mais elle en diffère pai' des 22 'i'J 226 HISTOIRE NATUHELLE. orpilles hirn apparentes, des ongles aigus et le nez sans ligne blanche. Cette espèce a la face d'un chai, la bouche grande, les yeux Ircs-grands et rouges. La face, le dessous des yeux, les lèvres et le menton, sont d'un blanc velouté. Le front porte au-dessus des yeux deux taches triangulaires d'un Fig. 186 — Nyctipitlièque à face de chat. fauve blanc; des joues et du haut de la tête tombent des poils noirs qui, en se dirigeant en arrière, forment trois bandes et vont se réunir sur le sommet de la tête ; la face est encadrée de favoris gris; le poil du corps est très-serré, cendré à la surface et roux et noir à la racine. 3. NYCTIPITIIÈQUE HURLEUR. NYCTiriTHECUS VOCIFERANS. (Spix.) Caractères spécifiques. — Pelage brun. Habite les forêts du Solimoens, près de Tabatinga. Ce singe, nommé aussi babillard brun el caraï, ne se dislingue du précédent que par sa couleur brune el sa taille un peu plus petite. Spix pense qu'il existe encore d'autres espèces de nyctipithè- ques dans les mêmes régions. QUADRUMANES. 227 4"" GENRE. — SAKl. PITHECIA ( Desmaresl. CARACTERES GEîVElllCtUES. Queue non prenante, garnie de longs poils loiiffii.s, et assez courte. Dents incisives suphieures proclives. Tête arromlic; ntuseau court. Mains pentadactyles; ongles courts et recourbés. Les sakis habitent les régions équatoriales du nouveau monde. Ces singes, aussi désignés sous le nom de singes A queue de renard, sont en quelque sorte cré- pusculaires. Les sakis, dit Geoffroy Saint-llilaire, vivent en troupes de sept à huit individus; ils se nourrissent de fruits et de mouches à miel. Leur défaut d'agilité leur attire le mépris des sajous, qui les poursuivent pour leur voler leur nourriture et les battent encore après. Leur cantonnement découvert, ils en gagnent un autre, et se cachent dans les broussailles. 1. SAKI YARQUÉ. PITHECIA LEUCOCEPIIALA. iGeolTroy Saiiil-llilairu.) Cakactêbes spécifiques. — Pelage noir; le tour de la tète d'un blanc sale; chaque poil d'une seule couleur. Habite les environs de Cayenne. La taille de ce singe est de 30 centimètres environ ; son pelage est brun-noir; les poils sont longs, touffus eu dessus et beaucoup moins en dessous; ceux de la tète sont courts; les joues, le Fig- 187. — Saki yari|uc. 228 HISTOIRE NATURELLE. i front et la mâchoire inférieure sont d'un blanc sale teinté de jaunâlre; le tour des yeux, le nez et les lèvres sont les seules parties nues et colorées en brun. Les yarqiiés se réunissent par petites troupes et rechcrchenl, dans les broussailles, le miel des abeilles sauvages. (Lesson.) 2. S.\KI OURS. PITIIECIA IlinsUTA. (Spix.) CAr.ACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Pclage irès-touffu, Irès-épais, un peu frisé; queue très-volumineuse par l'abondance et la lontçiieur des poils. Habile les bords des rivières Tonantin et Japura. Les habitants des bords de l'Amazone désignent, sous le nom de ptvaoua, tous les singes à pelage très-touffu, et dont la fourrure ressemble à celle des ours. Ces singes, dit Spix, sortent des forèls le matin et le soir en troupes nombreuses, et font retentir l'air de leurs cris perçants. Ils sont très- Fig. 188. — Saki ours. alertes et défiants, et ce n'est pas sans peine que le chasseur les attrape. Au moindre bruit, ils se re- tirent. Cependant, une fois apprivoisés, ils sont très-attachés à leur maître; ils s'approchent de lui toutes les fois qu'ils le voient manger, et se réfugient près de lui s'ils sont effrayés. QUAimUMANKS. 229 Ces sinjîes ont les poils du corps et de la queue irès-touffus, et même frisés. L'espèce que nous allons décrire, et à hiqucllc les ludiens donnent le nom de ijrand paraoua, pour la distinguer d'une autre plus petite, est entièrement noire; elle a les poils longs d'environ trois pouces, crépus et touf- fus à l'extrémité, blancliAtres et comme brûlés en divers points. Les pieds et les mains diffèrent du corps en ce qu'ils sont roux et rasés, tandis que des poils longs flottent de haut en bas; ceux du bas de la jambe ne sont pas ondulés, et tombent droit en bas. Le devant de la tète est comme rasé, n'ayant que de très-petits poils noirs, un peu roux à l'extrémité. Les poils longs et ondulés du cou et de l'occiput tombent sur le devant de la tête en formant une espèce de capuchon qui couvre des oreilles courtes et environnées de parties nues. La face est un peu allongée, maigre et noirâtre. Les ouvertures nasales séparées par un intervalle très-large. La partie antérieure du front est couverte de poils blancs et roides, et une tache de poils semblables part de l'angle interne de l'œil, traverse la joue et se rend à l'angle de la bouche; de plus, une barbe, composée de poils courts et gris, tombe dans la même direction que ceux de la tète jusque sur les bords de la mâchoire inférieure ; la gorge est presque nue. (Snx.) 3. SAKl M1RIOUOU1>A. PITIIECIA VIIIIQUOUINA. (Geoffroy S;.int-JIilaire.) Car.\ctères spécifiques. — Cou très-court; pelage très-touffu; une tache blanche finissant en pointe au-dessus de l'œil. Habite les bois de la province du Choco et de la rive occidentale de la rivière du Paraguay, de l'autre côté de laquelle on ne le trouve pas. Ce singe a environ 80 centimètres de longueur du bout du museau à l'origine de la queue. Il vit dans les forêts; et oti dit qu'en captivité il est paisible et docile. Ce saki a un cou très-court, qui parait plus gros que la tête, qui est petite et arrondie; son œil est grand, et l'iris de couleur de la- bac d'Espagne; l'oreille est très-large, arrondie et velue; le pelage est très-touffu; une tache blan- châtre, finissant en pointe, surmonte l'œil; la face est nue, et les joues, légèrement velues, sont blanchâtres; tout le dessus du corps est d'un gris-brun assez uniforme, quoique les poils soient an- nelés de noir et de blanchâtre; les parties inférieures ont une belle couleur cannelle fort vive; la queue est noire, excepté à son origine, où elle est d'une couleur marron vif en dessous: les poils du dos sont longs de près de 5 centimètres. La femelle ne diffère pas du mâle par la couleur; elle est seulement un peu plus petite. On ne connaît pas les mœurs du miriquouina, on a seulement constaté que c'est la seule espèce du genre qui s'avance autant dans les zones méridionales. (Lesson.) 4. SAKI MOINE. PITHECIA MONACaUS. (Geoffroy Saint-llilaire.) Caractères spécifiques. — Pelage varié par de grandes taches de brun et de doré; poils de la tête formant une sorte de calotte. Habite le Brésil. Ce singe a les poils de couleur brune à leur origine, et rousse à leur extrémité. H n'a point de barbe; les poils divergents de l'occiput se terminent au vertex. (Lessom.) 27)0 HISTOIRE NATURELLE. 5 SAKl NOm. PITHECIA NIGHA. ( Frédéric Cuvier.) Caractères spécifiques. — Pelage noir-brun; face violacée et nue; mains peu velues, et d'un noir violet; queue assez fournie. Habite l'Amérique équatoriale, région indéterminée. Ce singe a pu être confondu avec le bnicluiiirus satanas; mais il en diffère par une queue plus longue et beaucoup moins touffue, et par la direction et la longueur des poils formant barbe sous le menton. Il pourrait former, avec le précédent, un groupe parmi les sakis. Fig. 189. — Sakinoir. 5"" GENRE. - BRACHYURE. BRACHYURIS. (Spix.) B(«f/_u;, court; o'jpa, queue, CAUACTÈRES GÉNÉRKJIES. Queue courte et touffue. Les brachyures habitent l'Amérique méridionale. Les singes de ce genre ne diffèrent peut-être des sakis que par leur queue plus courte, et en plumet. On peut établir deux divisions dans ce genre : l'une pour les espèces à queue très-courte, à barbe nulle ou presque nulle, et ù tête rase ou chauve; la .seconde, pour les brachyures à queue moyenne, à barbe épaisse et à tête couverte de poils abondants et formant calotte. Ces singes habitent les forêts, et leur naturel paraît triste et mélancolique. Lorsqu'ils sont irrités, ils se dressent sur leurs membres postérieurs, montrent les dents, et se lancent sur leur ennemi. Ils boivent après avoir puisé l'eau dans le creux de leurs mains, ce qui leur a fait donner le nom de chiropotes (/.sip, main; mT/.;, buveur, de Ilumboldt), et prennent, dit-on, les plus grandes précau- tions pour ne pas se mouiller. QUAPRUMANES. 2:^1 a. A queue de longueur moycnni". 1. BRACHYURE COUXIO. BltACnrVItUS SATAyAS. Caractères spécifiques. — Pelage brun foncé; une barbe longue, en demi-cercle autour du mu- seau; queue moyenne, grosse et touffue. Habite la Guyane et le grand Para. Ce singe est très-remarquable; Spi.\ le désigne sous le nom de brachyure Israélite; son pelage sombre est de couleur uniforme, et sa longue barbe lui donne une physionomie des plus singu- lières. Le couxio mesure ',10 centimètres environ du bout du museau à l'extrémité de la queue; sa face est nue, de couleur brune; l'ampleur de la bouche laisse entrevoir les dents et les canines surtout, qui sont d'une grande force. Le pelage est d'un brun foncé et lustré chez le mâle, et d'un brun fuligineux chez les femelles; les jeunes sont entièrement d'un gris brunâtre; les poils sont r Fin;. 490. — Rrachyure couxio. » épais sur le corps, rares et grêles sur la poitrine, le cou, le venire et les parties internes des membres: la tête parait revêtue d'une sorte de chevelure formée de poils droits, assez longs, re- tombant sur le front et sur les tempes, en irradiant du sommet de l'occiput; une barbe touffue, llexueuse, médiocrement longue, occupe les joues et le menton, et se compose de poils prodigieu- sement épais et tous d'égale longueur, de sorte qu'ils forment un demi-cercle barbu autour du vi- sage. La {[ueue est d'un brun-noir, et la barbe des femelles est moins prononcée que celle des mâles. (Lesson.) I 232 HISTOIRE NATURELLE. 2. BRACHYURE CAPUCIN. BRACHÏURUS CHIROPOTES. CARACTÈnEs SPÉCIFIQUES. — Pelage roux-marron; barbe épaisse, large, longue; poils de la lête for- mant deux toupets distincts. Habite les bords de l'Orénoque. Ce singe, nommé aussi capucin de l'Orénoque, a la face et le front nus; les yeux grands et enfon- cés, la ciievelure, qui recouvre le sommet de la tête, est formée par des poils fort longs et dispo- sés, sur chaque tempe, en une touffe ou toupet assez long; la barbe est três-touffue, et retombe sur la poitrine, qu'elle recouvre en partie; la queue est d'un brun noirâtre, et le scrotum est d'une ! Fi;;. 1"J1. — Bi-iicliyure c;i|iuciii belle couleur pourprée. Ce singe ne vil pas en bandes; le mâle et la femelle parcourent ensemble les forêts Le nom de cbiropole (qui boit avec la main) indique une habitude que lui suggère le soin pariiculier qu'il prend de sa barbe, qu'il évite de mouiller en buvant. (Lesson et Geoffroy Saikt- lllLMUE.) QUADRUMANES. 253 3 BRACHYURE CACAJAO. VLACIIÏIRVS MELAmCEPHALUS. (De Humbnldl.) CAnACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Tête noire; corps et membres jaune clair. Habite la Guyane. Ce singe a la tète noire, tandis que le corps et les membres sont d'un brun-jaune clair; sa queue est assez courte et touffue, et d'un brun jaunâtre, avec l'extrémité brune; les parties inférieures et la face interne des membres sont plus claires que les flancs; les quatre mains sont noires, et remar- quables par des doigts très-allongés. Ce singe, connu dans le pays sous les noms de carniiiity slitt- ciizo et nwna rabon, vit en troupes, et recherche les fruits sucrés et doux, tels que les bananes et les goyaves. Ses habitudes sont lentes et paresseuses, et son caractère est doux et paisible. (Lesson.) 4. RRACHYURE Ol'AKAUY. BRACHYURUS OUAKARY. (Spix.) Caractèbes spÉciFiQrES. — Télé, mains, cou et poitrine, noirs; cuisses, quçue et bas-ventre, brun- rouge; front chauve. Habite le Brésil. L'espèce à laquelle le nom de ouakary est donné par les habitants est le second singe à courte queue que nous ayons trouvé au Brésil, vers le Pérou, dans les forêts sur les bords de l'Iça, rivière voisine de celle des Amazones. Les singes de cette espèce vivent toujours en troupes, principalement dans les forêts qui longent la rivière. Pendant la journée, ils remplissent les bois de cris perçants et bizarres. Le ouakary est d'une taille médiocre, et se fait remarquer par une queue courte et comme tronquée, par des dents incisives très-longues et dirigées comme celles des lapins, c'est-à-dire proéminentes et fort avancées. La tète, les pieds, le cou et la poitrine, sont noirs; les cuisses, la queue et le bas-ventre, roux d'écureuil, et le front chauve. Les poils de la partie antérieure de la tète sont dirigés en avant, vers le front et le dessous du menton; ces mêmes poils se séparent, sur le front, en deux parties; ceux du dos et des cuisses sont bruns et longs; ceux de la queue pendent en bas. La face est noire et presque nue jusqu'au milieu du front, malgré quelques poils roides et noirs qui sont semés çà et là sur le visjige ; les oreilles, petites et noires, sont presque couvertes par les poils du sommet de la tête. Tous les poils de la tête se croisent sur le milieu de la nuque; la lèvre supérieure est très-large; le nez très-court, et les yeux bruns; les testicules extrêmement gros; les ongles noirs, minces et courbés, et celui du gros doigt est même un peu large. H est surtout distingué du braclnjurits isyactita par l'absence de la barbe. (Spix.) b. A queue Irès-courte. 5. BRACinURt; RUBICOND. BnÀCHYlRiS RimcUNDUS. (Isidore GeolTioy Saint-llilalie ) CvrACTÈHEs SPÉCIFIQUES. — Pelage roux; face nue et rouge; tête couverte de petits poils très-courts; une barbe courte sous le menton. Habite l'Amérique méridionale. • - Cette espèce très-remarquable a le pelage roux; les poils de la lèle, de la nuque et de la jjarlie 2'-2' 3U 234 HISTOIRE NATURELLE. postérieure du cou, sont blancs teintés de jaunâtre. La face est d'un rouge très-prononcé chez l'a- dulte, et beaucoup plus pâle chez le jeune. La tête a des poils très-courts, et d'un blanc jaunâtre; sous le menton, on distingue une petite barbe brunâtre, et divisée en deux houppes assez distinctes. Fig. 192. — Brichyure rubicond. La queue est Irès-courte, touffue et en plumet; les faces palmaires des quatre mains sont noires. Chez les jeunes, toutes les nuances du pelage sont plus claires, et la queue est moins louflue. G. BR.\CHVURE CHAUVE. BRiCHlTRUS CALVUS. (IsiJore Geoffroy S;iint-llilaire.) C^nAcràRES SPÉCIFIQUES. - Tète chauve; pelage jaune-paille sale; face rouge et nue Habite l'Amérique méridionale. Ce singe, aussi singulier que le précèdent, a le pelage assez long et fourni, et d'une couleur de QUADRUMANES. 235 paille sale; la tels est chauve et rouge, ainsi que la face; et la queue, très-courte, forme une touffe arrondie. Vifi. 195. — Br.itlivuie chauve. 236 HISTOIRE NATURELLE. QUATRIÈME TRIBU. — ARCTOPITHÉCIENS. AoKTc;, ours; iJiOf.Çi sinfie. On range clans cette tribu de petits singes américains ayant de grandes analogies avec certains animaux de l'ordre des rongeurs, et le nom de singes écureuils, qui leur a été aussi donné, se trouve parfaitement justifié par certains détails de leur organisation. Quelles différences, dit Lesson, entre ces petits singes à corps grêle, à tète arrondie, à queue longue et velue, et les orangs ou les gibbons, si remarquables par leurs longs bras; les semnopithè- ques, dont les formes sont grêles; les cynocéphales ;\ museau de dogue; les sapajous à queue pre- nante ! Ce n'est qu'aux sagouins qu'ils se lient; et c'est parmi eux qu'ils ont été classés pendant fort longtemps; mais on ne peut que reconnaître la justesse des idées de M. Geoffroy Saiut-Ililaire, qui a le premier isolé cette petite tribu sous le nom d'arctopitlièques ou de singes dont les ongles sont analogues à ceux des ours. Les ouistitis s'éloignent donc des autres genres, non-seulement pur l'exiguïté de leur (aille, l'har- monie svelte et gracieuse des formes, la vivacité des couleurs qui teignent leur pelage, mais encore par les traits les plus fondamentaux de l'organisation. C'est ainsi que, par opposition avec ce qui existe chez tous les autres quadrumanes, ils ont leurs incisives proclives et obliques, et leur ongles compi'imés, recourbés, crochus, imitant de véritables griffes; leurs dents, au nombre de trente-deux, tandis que tous les autres singes américains en ont trente-six, se composent de quatre incisives, deux canines et dix molaires ù chaque mâchoire. Tels sont les caractères zoologiques les plus constants pour réunir les ouistitis eu un groupe qu'on ne peut assimiler à aucun autre. L'examen des divers systèmes organiques ne fournit pas moins de données précises pour en tracer le signalement générique. Ainsi, le pouce de la main est peu mo- bile et se trouve presque soudé au carpe, .sansjouir par conséquent des mouvements d'opposition si complets, si étendus chez tous les autres singes, faculté qui a valu à ceux-ci le nom de quadrumaucs . Fig. 194 — Miiin anli'iiniirc du ouisilili clirvsomùlf. Fig. 195. — Main po.'it6rieure du ouislili clirysomcie. Ce pouce, au lieu d'avoir un ongle aplaii, prè.seiile une véritable griffe allongée et robuste. Cette anomalie ne se reproduit point au pouce de la niaiii postérieure, qui est légèrement mobile et revêt» Uiustiii nielnnure. l'I. -28. QUADRUMANES. 2".7 d'un ongle aplati, comme clipz les autres singes. Les membres postérieurs sont plus allongés que les antérieurs, et celle disposition décèle les fonctions qu'ils sont appelés ;i remplir, (''est-à-dire favo- riser le saut de brandie en brandie; tandis que les bras, terminés par des griffes, annoncent la fa- cilité de grimper sur les troncs des plus gros arbres. Leur queue est longue, abondamment couverte de poils sur toute sa surface, et ne se contourne point ou n'est point prenante comme celle des sa- pajous. Leurs oreilles sont grandes, minces, cartilagineuses et presque dénudées; et leurs narines sont percées sur les cotés du nez à une assez grande distance l'une de l'autre. Les ouistitis ont une épaisse fourrure, moins .serrée sous le corps et en dedans des membres, composée de poils doux, soyeux, très-mollets, ce qui avait engagé lUiger à créer le nom générique de hapale (aîraXo;, mou). Les nuances les plus gracieuses les teignent ordinairement et leur donnent un aspect satiné. Comme tous les singes américains, les ouistitis n'ont pas d'abajoues, ni de callo- sités aux fesses. De cette organisation générale doivent naturellement résulter des mœurs et des habitudes différentes de celles des autres singes. Leur petite taille, leur queue, qu'ils portent habituel- lement redressée sur le dos, leurs ongles acérés, en font des animaux destinés à vivre dans les forêts à la manière des écureuils. Leur intelligence est peu étendue, bien que leur angle facial fasse supposer une certaine ampleur dans la boite crânienne, et par suite dans le cerveau. Ce prolil, presque vertical, est donc dû à une disposition particulière de la face, qui ne contribue en rien au développement des hémisphères cérébraux moins volumineux que le cervelet ; ce qui doit Fis. 490. — Tète de ouistiti. subordonner l'intelligence aux facultés génératrices, dont la prééminence n'est pas douteuse. Les sens sont assez développés. Le loucher seul est à peu près nul, ou du moins fort incomplet, puisque les doigts sont peu mobiles et le pouce des mains antérieures non opposable. Cette iiuperfcction se trouve en quelque sorte compensée par des ongles aigus, destinés à pénétrer facilement dans les écorces des arbres. Toutefois, le cerveau est assez régulier pour que leurs actes annoncent une certaine prudence et une connaissance des corps utiles ou nuisibles qui les enlourent, sans que pour cela on puisse leur accorder une dose remarquable d'intelligence. A l'état sauvage, ces singes ont des mouvements rapides, pleins de grâce et de gentillesse; la brusquerie de leurs manières, l'incon- stance de leurs allures, les caprices du moment, qui ont tant d'influence sur leur attention toujours mobile, et la beauté de leur pelage, en font de charmants animaux, qu'on chercherait à conserver en captivité s'ils pouvaient vivre dans nos climats. Ce n'est pas cependant ([ue plusieurs espèces n'aient bravé les hivers de la France, car nous savons qu'un marikina courait dans les rues de Brest par les plus grands froids sans être incommodé; mais ces exemples sont très-peu nombreux et ne peuvent être cités que comme des exceptions individuelles. Des ouistitis, en captivité, témoignaient une grande aversion pour les chats et les guêpes, qui leur rappelaient peut-être deux véritables ennemis de leurs climats, les premiers ne différant i)oint en effet par les formes de plusieurs carnassiers du nouveau monde, et les secondes étant très-voisines des guêpes rouges, si dangereuses au Brésil et à la Guyane. Ces individus reconnaissaient même les insectes dessinés qu'on pla<;ait sous leurs yeux, et, lors(iue ces dessins représentaient des grillons et des sauterelles (pi'ils aiiuaienl, ils cherchaient à les saisir. Ceci nous rappelle qu'un macaque bonnet 238 HISTOIRE NATURELLE. chinois, que nous placions devant un miroir, faisait la içriniace A son imafte. et s'empressait de tourner derrière la glaee, croyant.y trouver un individu de son espèce, absolument de la même manière que le faisaient les nègres océaniens soumis à la même épreuve. (Lesson.) Les ouistitis adultes n'ont jamais montré beaucoup d'intelligence; très-défiants, ils sont assez attentifs à ce qui se passe autour d'eux; et on pourrait leur croire de la pénétration, à n'en juger que par leurs grands yeux toujours en mouvement et la vivacité de leurs regards. Cependant ils distinguent peu les personnes, se méfient de toutes, et menacent indifféremment de leurs morsures celles qui les nourrissent et celles qui les voient pour la première fois; peu susceptibles d'affection, ils le sont beaucoup de colère; la moindre contrariété les irrite; ils dressent alors leurs longs poils et croient faire peur autant (ju'ils sont eux-mêmes effrayés; et lorsque la crainte s'empare d'eux, ils clierelient à se cacber en jetant un petit cri sourd mais pénétrant; d'autres fois, et sans motifs ap- parents, ils poussent un sifilement aigu qu'ils prolongent singulièrement sur le même ton. Ils ont besoin de déposer souvent de l'urine, et ils le font toujours au même endroit et en s'accroupissant. (Frédéiiic Cuvier.) Les ouistitis n'ont plus de pouces dans le sens physiologique de cette expression. Ce doigt aux pieds de derrière est réduit à l'existence d'un petit tubercule; aux pieds de devant, il est un peu plus long, mais, rapproché des autres, il a perdu tout caractère de spécialité; il agit, s'ouvre et se ferme comme les autres doigts de la main. Mais il y a mieux : toute la main a beaucoup perdu de sa flexibilité, elle ne jouit point de la même faculté de préhension ; ce n'est plus que dans de grandes occasions que le caractère indélébile du singe se reproduit, et que les petites mains des arclopi- thèques sont employées à se fermer sur des corps détachés, à les saisir et à porter ù la bouche. Une destination plus importante semble indiquée par l'entière et toute merveilleuse aptitude de leurs mains, puisque par elles, par leur puissante faculté, ces singes sont si entraînés et lixés dans leur vie demi-aérienne, qu'ils sont contraints d'aller se réfugier et vivre dans les bois. Les arctopitlièques ont les mêmes besoins, et non les mêmes moyens; mais, s'ils ont les mêmes besoins, ils sont appelés à y satisfaire par une organisation différente et équivalente seulement en fonction: leurs ongles sont longs, courbes cl acérés à la pointe; ils ne formaient chez les autres singes qu'un étui protégeant la surface supérieure de la dernière phalange; les voilà, par un excès dans le volume et l'emploi, transformés en de véritables griffe»; griffes innocentes cependant; car elles n'ont d'autre effet que de donner aux arctopithèques les moyens de gravir le long d'un plan vertical, comme le font les écureuils: elles leur ménagent une autre sorte d'allure sur les arbres : leurs mains, insuffisantes pour la préhension, trouverjt une faculté nouvelle dans leurs griffes. (GiiormoY Sajnt-Hilaire.) La petite taille des ouistitis leur permet d'éviter les brutalités des singes, plus grands, plus forts et généralement querelleurs; ils sautent facilement aux dernières branches des arbres, branches auxquelles ces derniers ne peuvent arriver à cause de leur poids. Leurs mœurs, dans l'état de nature, sont peu connues, et l'on ne trouve en effet, dans les ou- vrages des voyageurs qui ont parcouru l'Amérique méridionale, presque aucun détail qui mérite d'être rapporté. Au contraire, plusieurs espèces ayant été fréquemment transportées en Europe, et s'y étant même reproduites, les naturalistes ont pu faire sur elles d'intéressantes observations. Fré- déric Cuvier a pu observer trois espèces : le tamarin nègre, le marikina et l'ouistiti vulgaire, et nous avons nous-méme vu vivantes ces deux dernières dans la ménagerie du Muséum. Edwards a également eu occasion d'étudier sur un assez grand nombre de sujets les mœurs du jrtcc//».s vid- (juris. comme on peut le voir dans ses Glauurcs d'histoire uaturcllc, t. I, p. 15; et les remarques qu'il a faites s'accordent assez bien avec celles de Frédéric Cuvier. Enfin, notre collaborateur Au- douin, ayant possédé pendant longtemps deux individus de cette dernière espèce très-bien appri- voisés et très-familiers, a pu aussi faire de nombreuses observations qu'il a bien voulu nous com- muniquer, et dont quelques-unes sont véritablement très-curieuses. Chacun sait, par l'expérience journalière, qu'un chien, placé devant un miroir, ne reconnaît pas dans l'image qui se présente à ses yeux celle d'un animal de son espèce, et qu'à bien plus forte raison, la vue d'un tableau ne produit sur lui aucune impression particulière. Il en est bien autrement des ouistitis : Audouin s'est assuré, par des expériences plusieurs fois répétées, que ces singes savent très-bien reconnaître dans un tableau, non pas seulement leur image, mais même celle d'un autre animal. Ainsi, ras|)cct d'un chat, et, ce qui semble plus remarquable encore, l'aspect d'une guêpe, leur causent une frayeur QUADRUMANES. 239 manifeste, taiulis (iii'à la vue d'un autre inseete, tel qu'une sauterelle ou un hanneton, ils se préci- |iitcnt sur le tableau cuinnie pour saisir l'objet qui s'y trouve représenté. Ce seul fait semble prouver chez les ouistitis un grand développement de l'intelligence; ce que l'inspection de leur crâne suffi- rait pour indiquer, et ce que plusieurs autres observations d'Audouin confirment également. Il arriva un jour à l'un des deux individus que possédait notre collaborateur de se lancer dans l'œil, en mangeant un grain de raisin, un peu du jus de ce fruit; depuis ce temps il ne manqua plus, toutes les fois qu'il lui arriva de manger du raisin, de fermer les yeux; observation qui suffit pour démontrer, d'une manière incontestable, que les ouistitis jouissent, à un haut degré, de la faculté d'associer leurs idées. Mais comment expliquer le fait suivant? Les deux individus qui ont fourni les intéressantes remarques que nous venons de rapporter, attrapaient, avec une incroyable dex- térité, les mouches que le hasard amenait dans leur cage : mais une guêpe s'élant un jour appro- chée d'un morceau de sucre qu'on avait fixé à leurs barreaux, ces animaux, qui n'avaient jamais vu de guêpes, et qui ne pouvaient connaître, par expérience, le danger de la piqûre de ces insectes, prirent aussitôt la fuite et allèrent se réfugier au fond de leur cage. Etonné de ces marques de frayeur, Audouin prit alors la guêpe et l'approcha des deux ouistitis, qu'il vit aussitôt cacher leurs têtes entre leurs mains, et rapprocher leurs paupières en fronçant le sourcil, de manière à fermer' presque entièrement leurs yeux. Au contraire, à peine leur avait-on présenté une sauterelle, un han- neton ou quelque autre insecte dont ils n'avaient rien à redouter, qu'ils se précipitaient sur lui avec un avide empressement, le saisissaient à l'instant même et le dévoraient avec délices. Us ai- maient aussi beaucoup le sucre, la pomme cuite et les œufs, qu'ils savaient saisir avec beaucoup de grâce, et vider avec une adresse remarquable; mais ils ont constamment refusé les amandes de toute nature, les fruits acides ou acidulés, et les feuilles qui se mangent en salade. Ils n'aimaient pas non plus la chair; mais lorsqu'on mettait dans leur cage un petit oiseau vivant, et qu'ils parve- naient à s'en rendre maîtres, ils lui ouvraient le crâne, mangeaient tout le cerveau, en ayant soin de lécher le sang qu'ils faisaient couler, et dévoraient quelquefois aussi la corne du bec, les tendons des pattes et quelques autres parties non charnues. Audouin a aussi remarqué que ses ouistitis étaient très-curieux; qu'ils avaient la vue très-perçante; qu'ils tenaient beaucoup à leurs habitudes, quoiqu'ils fussent sous plusieurs rapports fort capricieux; qu'ils reconnaissaient parfaitement les personnes qui avaient soin d'eux; enfin, que leurs cris étaient très-variés suivant les passions qui les animaient. C'était, lorsqu'ils étaient effrayés, des glapissements qui semblaient partir du go- sier, et qu'ils faisaient entendre en ouvrant la bouche et en montrant les dents, et, lorsqu'ils étaient en colère, un sifflement bref suivi d'une sorte de croassement. Dans d'autres circonstances, ils poussaient de petits sifflements prolongés, ce qui arrivait surtout quand on les mettait en plein air; ou bien ils s'appelaient l'un l'autre par un gazouillement semblable à celui d'un grand nombre d'oiseaux. On peut remarquer que quelques-uns des détails donnés par Frédéric Cuvier sur les mœurs des ouistitis ne s'accordent pas en tout point avec celles d'Audouin, probablement parce que les individus qu'il a examinés étaient moins apprivoisés, et peut-être aussi plus jeunes que ceux de notre collaborateur. (Isidore Geoffroy Saint-Hilaire.) 1" GENRE. — OUISTITI. JACCHUS. (Geoffroy Saint-Hilaire.) CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Front peu avancé. Dents incisives supérieures obliques en avant, inéç/alcs; tes intermédiaires larges; les latérales isolées et aiguës; les inférieures cijlindriciues, allongées, étroites, presque verticales; les latérales plus longues. Canines supérieures coniques et de moyenne dimension; les inférieures très-petites. Oreilles médiocres. Ces singes habitent le Brésil et la Guyane. Ce genre, désigné sous le nom de hapale par lUiger, comprend les petits singes nommés, par quelques voyageurs, singes-écureuils. Ils ont la face obtuse et velue jusqu'aux lèvres; le plus sou- vent, un faisceau de longs poils est inséré en avant des oreilles, qu'il couvre. Leur queue est très 240 HISTOIRK NÂiUIŒLI.E. fournie de poils longs et formant des anneaux de blanc grisâtre et de noir. Le pelage est très-doux au toucher, et formé de poils assez longs, si ce n'est à la tète et sur les mains, où ils sont courts et peu abondants. Les ouistitis vivent sur les arbres, comme la plupart des singes ; privés, pour ce genre de vie, des ressources que les sapajous trouvent dans l'organisation de leur queue, devenue pour eux comme une cinquième main, et les singes de l'ancien monde dans les callosités de leurs fesses, ils en trouvent de non moins puissantes dans la forme aiguë de leurs ongles; ils s'accrochent, en effet, au moyen de leurs griffes, l'extrême pelitesse de leur corps leur permettant de se soutenir parce seul secours; et ils parviennent ainsi très-facilement jusque sur les branches les plus élevées des ar- bres, comme le font les écureuils, avec lesquels ils ont de nombreux rapports par leur taille, leur forme, leurs couleurs et leur habitudes. (Isidore Geoffroy Saint-Hilaire.) t OUISTITI VU[,(!All^E. JACCHUS VULGARIS. (Giiofiroy Saint-IIilaiie.) Caractères spécifiques. — Pelage présentant sur le dos des bandes alternatives brunes et blan- ches; queue annelée des mêmes couleurs plus tranchées; de longs poils blancs sur les côtés de la tête; une tache blanche frontale. Il.ibiie la Guyane et le Brésil. Ce petit singe, gracieux et proportionne, a le corps long d'environ 20 centimètres; tandis que la queue est un peu plus longue. Sa face est très-aplatie; elle est complètement nue, ainsi que les oreilles et les mains, et de couleur de chair; son pelage est cendré, tirant au brun sur la tête et sur le cou, et offrant dix ou onze bandes alternativement brunes et cendrées sur le dos et sur les reins; la queue elle-même présente quinze ou dix-huit de ces bandes d'égale largeur, qui la coupent par des cercles de l'effet le plus agréable; ces rayures sont dues à ce que les poils, tous assez allongés, ont leur racine noire, leur milieu jaune, surmonté par un cercle noir, tandis que la pointe est blanche. (Lesson.) Deux de ces petits singes, dit Frédéric Cuvier, ayant été réunis vers la fin de septembre 1819, quoique assez imparfailement apprivoisés, ne tardèrent pas à s'accoupler; la femelle conçut et mit bas, le 27 avril liSll), trois'petits, un mâle et deux femelles très-bien portants; mais il n'a pas été possible de fixer la durée de la gestation, parce que ces animaux s'accouplèrent presque jusqu'au moment de la naissance des petits. Ceux-ci, en venant au monde, avaient les yeux ouverts, et étaient revêtus d'un poil gris foncé, très-ras, et à peine sensible sur la queue; ils s'attachèrent aussitôt à leur mère, en l'embrassant, et se cachant dans ses poils; mais, avant qu'ils tétassent, elle mangea la tête à l'un d'eux. Cependant, les autres prirent la mamelle, et, dès ce moment, la mère leur donna ses soins, que le père partagea bientôt. Tout ce qu'Edwards dit d'une paire de ces animaux qui produisirent en Portugal, j'ai pu l'observer sur ceux dont je parle. Lorsque la femelle était fatiguée de porter ses petits, elle s'approchait du màle, jetait un petit son plaintif, et aussitôt celui-ci les prenait avec ses mains, les plaçait sous son ventre ou sur son dos, où ils se tenaient eux-mêmes, et il les transportait ainsi partout, jusqu'à ce que le besoin de teter les rendît inquiets; alors il les remettait à leur mère, qui ne taidait pas à s'en débarrasser de nouveau. En général, le père était celui des deux qui en avait le plus de soin. La mère ne montrait point pour eux cette affection vive, cette tendre sollicitude que la plupart des femelles ont pour leurs petits. Aussi le second mourut-il au bout dun mois, et le troisième ne prolongea sa vie que jusqu'à la mi-juin; depuis les premiers jours de ce mois, sa mère, ayant éprouvé de nouveau les besoins du rut, avait fini par perdre son lait. La femelle était un peu plus grande que le màle, mais elle lui ressemblait entièrement par les couleurs. Tous deux avaient la face couleur de chair, ainsi que la plante des pieds et la paume des mains; et un lubeicnle s'iillant se trouvait sur leur front entre les yeux. Leur tête était noire, ainsi que les côtés et le dessous du cou. Tout le reste du corps, le dos, les côtés, le ventre, la poitrine, . la face extérieure et intérieure des membres, étaient d'un gris foncé jaunâtre, provenant de poils i|ni formaient, par leur disposition, comme des ondes sur tontes ces parties. La queue était couverte QUAORUMANKS. 241 (l'aiineaiix nltonialivpiricnt noirs et gris clair. Enfin toute l'oreille était entourée d'une toulTe de poils blancs roiùcs et lons^s, qui traucliaient fortement sur les poils noirs de la tête, et qui donnaient ;ï l'animal, vu de face, une physionomie très-particulière. Le jeune ouistili difi'erait des adultes par ses formes générales et par ses couleurs : sa tète était beaucoup plus grosse à proportion du corps, et surtout de la partie postérieure, restée fort petite; et tout son pelage était d'un gris presque noir trè-s-uniforme. On ne voyait encore aucune trace de poils blancs aux oreilles; mais la queue était déjà couverte d'anneaux blancs et gris. Ce jeune ani- mal n'a pas vécu assez longtemps pour donner lieu à de nombreuses observations : vers les derniers Fis. 19'î Ouislili vul<;.iire ar sa mère, H temps de sa vie, lorsque son père se trouvait fatigué de le porter, n'étant plus reçu par montait jusqu'au haut de sa cage; arrivé là, ne pouvant plus descendre, il jetait un cri de détresse qui réveillait quelquefois la sollicitude de ses parents; alors ils allaient à son secours, mais, le plus souvent, ils restaient sourds à ses plaintes; et il aurait été forcé de se laisser tomber si on n'avait pas eu soin de prévenir sa chute en lui tendant une main secourable. Dès qu'il fut tout à fait aban-^ donné, on essaya de l'allaiter arliliciellement; il but, mais il lui fallait d'autres soins encore; sa' santé s'altéra, et il mourut bientôt 2. OUISTITI A PINCEAU. JACCIIUS PENICILLATI'S (Geoffroy Sainl-IIMairci CaR.\CTÈI1ES SrKClFlQUES. et ventre roussâlres. Habite le Brésil. Un pinceau de longs poils noirs au devant de chaque Cette espèce ressemble beaucoup à la précédente; mais elle en diffère par la couleur roussâtre de la gorge et du ventre, par l'étendue un peu plus coiisidéiable de la tache blanche frontale, par la nuance plus éclaircie du dos, et surtout par le pinceau de longs poils noirs qui se trouvent au devant de chaque oreille. Chez quelques individus, on voit aussi de longs poils à l'occiput et à la partie postérieure de l'oreille. On a longtemps possédé celte espèce dans les collections de zoologie, sans la distinguer du 23 51 5/p2 HISTOIRE NATURELLE. ouistiti proprement dit, qui en diffère par les poils blancs dont ses oreilles sont recouvertes. C'est que toutes les espèces de ce sous -genre ont tant de rapports, se ressemblent par tant de points, sont si évidemment formées sur un type commun, qu'on ne faisait aucune attention aux différences de couleurs assez restreintes que quelques-unes de leurs parties présentent; ou, si ces différences Fig. 198. — Ouistiti à pinceau. avaient été observées, elles n'étaient sans doute considérées que comme accidentelles; et, en effet, elles sont de la nature des modifications que des causes fortuites peuvent produire chez les ani- maux : elles ne diffèrent du moins pas de celles qui s'observent chez les animaux domestiques ou même chez les animaux sauvages soumis dans nos parcs à notre influence. C'est qu'alors , comme il arrive toujours quand les faits n'ont été qu'imparfaitement observés, on étendait les obser- vations au delà de leurs véritables limites, on les généralisait plus qn il n était légitimement permis de le faire ; car, aujourd'hui , il est bien reconnu que les animaux sauvages , livrés à leurs penchants dans les conditions où la nature elle-même les a placés, et sans qu'aucunes forces étran- gères à celles de ces conditions agissent sur eux, ne sont presque susceptibles d'aucun chan- gement appréciable ni dans leurs formes ni dans leurs proportions; et si certaines espèces en pré- sentent quelques-unes dans leurs couleurs , rien n'autorise à conclure de ces espèces à toutes les autres. Or ceux qui pi'élcndent, dans l'état actuel de la science, argumenter des différences qu'é- prouvent nos espèces duniesliques à celles qu'éprouvent nos espèces sauvages, pour en conclure que toutes les différences qui distinguent celles-ci sont fortuites, méconnaissent les règles les plus sim- ples de l'induction, règles que nous tenons de la nature elle-même, que lart ne nous donne point, el auxquelles on ne peut renoncer, quand on est encore maître de soi, qu'en trahissant sa propre intelligence. (Fréd. Cuviep.) QUADHUMANKS. 243 5 OUISTITI bK GEOFKKOY. JACCUVS UBOFFROÏI (PucheMn.) Caractères spécifiques. — Face el tète blaiicliàtres; ilos et flancs iiûiis; qiu'ue iioiit- Habile lAméiique ineritlioiiale Ce singe a la face et la tète couvertes de puils blanchâtres, devenant pins allongés sur la partie médiane de la tête et formant là une tache longitudinale. La nuque et le dessus du cou sont roux- marron. Le dessus du dos, les flancs et la face externe de la moitié supérieure des bras el des cuisses, de couleur noire, offrant eà et l;i des espaces occupés par des poils blonds. La queue est colorée par places de rouge pourpré et de noir à sa base dans une très-petite étendue; elle est noire dans le reste. (Pucheran ) 4. OUISTITI A TÈTE BLANCHE. JACCaUS LEUCOCEPHALVS (GeolCroy Saint-Hilaire 1 Carjvctères spécifiques. — Tête et gorge blanches; un pinceau noir aux oreilles; un camail noir. Habite le Brésil. F.g. 199, — Uuiillli à léle blaudie. 244 HISTOIRE NATURELLE Cette espèce a la face lUie et de couleur de chair; son pelage est jaune-roux, grisâtre, excepté la tète, qui est, ainsi que la gorge et le dessous du cou, de couleur blanche; deux bouquets de poils noirs, allongés et roides, sont implantés en avant et en arrière de chaque oreille ; une tache brune noirâtre règne sur la partie supérieure du dos et sur les épaules, et se perd avec le blanc des parties inférieures et du dedans des membres ; les régions externes des extrémités sont revêtues de poils brun noir, à pointe d'un blanc sale. La queue est annelée. 5. OUISTITI A CAMAII.. JACCUUS IIUMERALIFliR. (Geoffroy Sainl-llilaire.) Cauactèhes srÉcinyuES. — Le dos blanc à sa partie supérieure; de longs faisceaux de poils bhui's sur les faces antérieure et postérieure des oreilles. Habile le liresil Ce joli petit singe a la face blanche, encadrée de brun clair et recouverte sur le front de petits poils lins et serrés. Le pelage est brun-châtain, mais les poils du dos étant blancs dans leur milieu cl noirs â leur origine et à leur extrémité, il en résulte une teinte générale noirâtre; les cuisses sont t'i.n. -iOU — Uiii»tiU à t,ili],ill d'un brun tiqueté de blanc; un camail d'un blanc neigeux occupe le haut du dos; de très-longs poils blancs naissent en faisceaux, non pas comme chez les autres ouistitis, mais bien sur les faces anté- rieure et postérieure des oreilles; eniin les anneaux de la queue, quoique distincts, ne sont pas complets. (Lesson.) I QUADRUMANES. 245 6. OUISTITI OREILLARD. JACCHVS AURITUS. (Geolfroy Saint-Hilaire.) CiinACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Pelag;e d'un noir roussAtre ; un petit pinceau de poils blancs de moyenne longueur en avant des oreilles Habite le Brésil. Ce ouistiti n'a plus sur le dos que des bandes rousses et des bandes noires , à peine distinctes, ces dernières surtout étant très-peu prononcées , parce que les poils sont noirs avec une bande jaune très-rapprochée de leur pointe. Le ventre, les flancs et la gorge sont noirs, et les membres sont couverts de poils ras noirâtres et grisâtres; la face et le menton sont blancs, et le dessus de la tète est d'un roux jaunâtre Enfin, ce qui distingue particulièrement cette espèce, c'est qu'il y a au devLint de l'oreille un pinceau de poils blancs beaucoup plus courte que le pinceau dnjncchux pcnicillaïus. Les jeunes de celte espèce sont généralement couverts de poils annelés de noir et de roux, et la calolte jaune n'existe pas.. Fis. 201. — Ouistiti oreillard. 7. OUISTITI D'ILLIGER. J ACCRUS ILI.IGERI. (Puchetan.) C.\BACTÈKES srÉciFiQDEs — Tête uoirc , lèvre supérieure couverte de poils blancs Habite l'Amérique méridionale Ce ouistiti d'Illiger a la tète noire ainsi que la face, et la lèvre supérieure est couverte de poils blancs. Le dessus du cou, la nuque, les menibrcs antérieurs, sur leurs faces internes et externes, jusqu'aux mains, sont rougeâtres, ainsi (jue tout le dessous du corps. La couleur rousse règne sur !iG IIISTOIUE NATLHKLLE. les membres postérieurs, ainsi que sur la partie inférieure de la queue, à sa base, dans quelques centimètres d étendue. Les quatre mains sont noires, tiquetées de roux, assez obscurément en avant, mais très-visiblement en arrière. (Pucueran.) Fis. 202. — Ouislili ailliger. 8 OUISTITI MÉI.ANURE. JACCBVS SIELA^URVS. (Geoffroy Saint-Hilaiie.) CAr..\CTtr,ES spÉciriQUEs. — Pelage brun clair; la queue noire, non annelée. Habite le Brésil. Ce singe, ainsi que l'indique son nom, a la queue d'un brun-noir uniforme; elle est d'un tiers plus longue que le corps. La face, les pieds et les mains sont bruns, cl le pelage sur le corps est noi- râtre fauve, plus foncé sur les reins et sur les bras. Les parties inférieures et internes du corps et des membres sont d'un gris tirant légèrement sur le fauve; les parties externes des cuisses, jusque sur le bassin, ont une teinte jaunâtre. (Lesson.) QUADIilJMANES. 247 2- GENRE. — TAMARIN. iMIDAS. (Geoffroy Sainl-IIilaiiv.) CARACTÈRES GKNÉRinUI'S. Froiil jiroriii'nicnl par la saillie des crîics snsorbilaires. Offillcs (iidiulcs. Dons imixiics supcricurcs conliçinës: les inférieures pmclives , conliguis el converijenles en bec de flùlc. I.i'.s l:iiii:iiiiis liabiteiit le Brésil, la Guyane, etc. Go genre, établi aux dépens du précédent, se compose d'espèces ayant les mêmes habitudes que les ouistitis. I TAMARtN AUX MAINS ROlISSi:S. IHIDAS RUFIMANUS. (Geoffroy Saint-llil.iic) Caractères spécifiques. — Pelage noir, annele de noir et de gris jaunâtre sur le dos ; mains d'un roux doré. Il.ibite la Guyane Ce singe est de la taille de l'écureuil ; son corps est assez allongé ; ses oreilles sont grandes , plates, nues et de forme anguleuse; le pelage est noir, varié de gris sur la région lombaire; la face supérieure des mains et des pieds est couverte de poils d'un jaune-roux; la queue est très-longue et noire. Ce tamarin vit en petites troupes sur les sommités des arbres des régions montueuses. Il s'apprivoise facilement, quoique vif et colère. En captivité, il aime à cberclit'r la vermine sur les animaux domestiques, et il grimpe avec plaisir sur les épaules des personnes qui le soignent. (Desmarest.) 2. TAMARIN NÈGRE SIWAS URSULUS. ,Geoflioy Saiut-Hilaire j Caractères srécifiqi'ES. — Pelage noir, varié de gris-roux sur la partie inférieure du dos; mains noires. Habite le Para. Cette espèce ne diffère guère de. la précédente que par la coloration noire des mains, et par la teinte rousse du pelage sur le dos, aussi l'a-t-on considérée longtemps comme une simple variété du midas riiftmaniis. Le tamarin nègre, dit Frédéric Cuvier, est à peu près de la taille du ouistiti; mais il paraît avoir quelque chose de plus léger dans les formes A cet égard, il se rapproche bien davantage du marikïna, auquel il ressemble d'ailleurs par toutes les parties essentielles de l'organisation , par toutes celles qui donnent des caractères génériques , c'est pourquoi je ne parlerai point ici de ces caractères, pour éviter une répétition inutile. Ce qu'on trouve sur ces parties, à notre article du marikinu , convient sans exception au tamarin. Son pe- lage, doux et épais, n'est composé que d'une sorte de poils, entièrement noirs à la tète, autour du cou, sur les membres et sur toutes les parties inférieures du corps où ils sont moins fournis qu'aux autres parties. Le dos, les flancs sont ondulés de noir et de fauve, et la disposition particulière de ces deux couleurs résulte d'anneaux noirs et fauves, assez larges et assez rares, qui se partagent 2-1 s IIISTOinE NATURELLE. oliaqno poil. La face, les oreilles, los piotls et les mains sont nus et d'un noir violâlre. F^a couleur (les yeux est (l'un jaune brun. La conqne externe de roreille , remarquable par sa {ifrandeur, l'csl encore parce qu'elle semble mutilée à son bord po.stérieur, la nature ne présentant point ordinaire- ment celte partie découpée avec autant d'iriégularité qu'elle l'est eliez cet animal. (Fréd. Cuvieii.) L'individu observé par Frédéric Cuvier était très-facilement irritable , et mordait les personnes qui le touchaient. Pig. 205 — TiiiiKiriii iiù^r Ilin.^llll niMillc l'I 7,1. OlIAltniiMANES 249 r< TAMAllIN LAHIK. .W//'.ts' I.MIIMIS (CcollVoy Sainl-llilaire.) C vr.uTLi'.Es SPtciFiQiEs. — r('l:iy(' lifuii en dessus, ioun vif en dessous; lèvres bliiiielies. Habite le Brésil. Celle espèce est remarquable par son pelaye brun li(iueté de blanc roussâlre sur le dos et la ré- i^ion externe des membres. La tète, la queue et les quatre extrémités, sont noires; le dessous du corps, le dedans des membres et l'origine de la (picue en dessous, sont d'un roux vif, qui se cliange eu fauve roussàtre sur la nuque; uue rangée de iioils blancs Ires-courts, très-serrés, euloure la bou- che, et contraste sinculièrement avec le noir de la face. Fi". 204. — ■niniarin l,.lné. 'i. TAMAKIN PlNCIIli. MIUA^ iJfc;)//'( S. ( iculVioy Sjiiit-llilairc.) ('.AP.ACTÈREs SPÉCIFIQUES. — Pelagc bpun en dessus, blanc en dessou.s; une longue chevelure; les cuisses et la première moitié de la queue d'un roux vif, la seconde moitié noire. Habile la Guyane. -Ji 52 250 HISTOIRE NATUriRLLE. Le pinilie a le pclagu composé ilc poils soyinix, assez longs, siirloiil sur la tète, où ils fornienl une crinière qui rctomi)e en arrière, et qui se dessine avec d'autant plus de netteté, que sa couleur neigeuse fait opposition aux teintes noire de la face et brune des parties supérieures du dos, des flancs et des bras. Celte teinte brune tire sur le roussàtre sur les fesses et les cuisses, et règne sur la première moitié de la queue, qui est noire dans le reste de son étendue. Tout le dessous du corps, les bras et les jandjes, ainsi que les ma'ns et les pieds, sont d'un blanc pur; les ongles sont jaunâ- tres. Ce singe a des oreilles assez largos, entièrement nues; elles sont d'un brun noir fulugineux, ainsi que la face et les faces palmaires des mains. (Lessoin.) Ce singe, nommé aussi pciit .mifn' du Mcx'ujne et ûlï de- Cnriluujlne, est fort délicat; il craint beaucoup le froid, et il est très-diilicile de l'amener vivant en Europe. J'eus occasion, en 1817, dit Frédéric Cuvier, de voir deux pinclies, l'un mâle et l'autre femelle, que je décrivis et que je fis dessiner; ils avaient beaucoup souffert pendant la traversée, et ils ne vécurent que pendant bien peu de temps après leur arrivée à Paris Le mâle s'était mieux conservé que la femelle; mais, quoique le pelage de celle-ci fût en mauvais élat, on voyait qu'elle ressemblait entièrement à son mâle, et que, sous ce rapport, les deux sexes, dans cette espèce, ne se distinguent pas. Au reste, c'est une observation qui avait déjà été faite pour les ouistitis, et qui, probablement, sera la même sur toutes les espèces de ce genre, sous certain rapport assez naturel, mais où cependant les espèces diffè- rent l'une de l'autre par queltjues organes d'une certaine importance et beaucoup par les couleurs. .\ussi M. Geoffroy S:iint-Ililaire les a-t-il divisés en ouistitis et en tamarins par la considération des incisives, ce qui in(li(ine du moins la nécessité de les étudier plus profondément qu'on n'a pu le faire jusqu'à t:c jour. Le pinclie présente tous les caractères génériques des marikinas et des tamarins, et particulière- ment ses mains antérieures, sans pouce distinct, et dont tous les doigts sont armés d'ongles crochus; c.iractère qui exclurait les jacchus de l'ordre des quadrumanes, .s'ils ne s'en rapprochaient essen- tiellement à beaucoup d'autres égards. Cette espèce est remarquable par le contraste des couleurs de son pelage : le cou, les épaules, le dos, les lianes, les cuisses et la queue, étaient bruns; tandis que la tète, les pattes et toutes les parties inférieures du corps, étaient blanches. La couleur brune résultait de poils gris à leur base et annelés, dans le reste de leur longueur, de noir gris et de brun fauve. Le pelage était entièrement formé de poils soyeux; on n'apercevait aucune trace de poils laineux; et les premiers étaient assez épais et assez longs, principalement ceux do la tète, qui, comme chez le marikina, formaient une perruque qui, quand ils étaient couchés, descendait jusque sur les épanles. La face et les mains, et, en général, toutes les parties nues, étaient d'un noir de suie. Il paraîtrait, d'après des descriptions qui ont été données de cet animal, que certaines parties, et par- ticulièrement la croupe, seraient quelquefois d'un brun moins foncé que les autres parties du dessus du corps, et que quelques variations, mais légères, s'observaient aussi dans l'étendue delà couleur blanche. Les individus que j'ai vus passaient toute la journée à dormir couchés dans la partie la plus obscure de leur cage; et ils ne se dérangeaient pas même pour se débarrasser de leurs excréments; mais, dès que le crépuscule arrivait, ils retrouvaient toute leur activité, et c'était alors qu'il? prenaient leur nourriture; aussitôt que l'aube paraissait, ils retournaient dans le coin qu'ils avaient choisi pour se cacher, et d'où l'on ne pouvait les faire sortir qu'avec peine. Loi'squ'ils étaient contrariés ou qu'ils éprouvaient quelques besoins, ils faisaient entendre un petit sifilement doux, peu prolongé, et qui n'avait qu'un ton. Ces animaux étaient encore jeunes, à en juger par leurs proportions comparées â celles d'un individu très-adulte, dont M. de Ilnmboldt donne les dimensions. (Fhédéric Cuvikh.) 5. TAMARIN MARIKINA. MWAS ROSALIA. (Geortroy Saint-llilaire.) CARAcrtiiEs si'ÉciriQiiEs. — Pelage roux doré; une crinière de même couleur. Habite la Guyane et le Drésil. Ce joli peiii animal a souvent été rapporté en Europe. Ses formes élégantes, ses mouvements fa- nii.\iiRij.MANr;s 251 cili's et gracieux, la hellt^ cimleiir de sou pelage, sa propreté, l'expressiuu (ileine d'intelligence qui anime ses regards, sa voix douée, et surtout i'allaeliement qu'il montre ùceux qui le soignent, l'ont toujours fait reflierehei' avee empressement. Sans avoir la pétulance et la lubricité des singes, il en a toute la gentillesse et toute la vivacité. C'est qu'il se raiiproeliC, à ([nel([ues égards, des singe.s d'Amérique proprement dits, des sajous; mais il s'en éloigne à quelques autres. Nous nous bor- nerons ici à décrire ses organes extérieurs et à parler de son naturel cl des observations particulières auxquelles il a pu donner lieu. Jje marikina que j'ai pu étudier avait été envoyé du Brésil à une personne qui, en i818, en fit don à la ménagerie du roi. Ce pays est en effet la patrie des marikinas; c'est pourquoi on ne parvient à les conserver en France qu'en les garantissant, avec beaucoup de soin, de l'intempérie de nos Fig. Î05. — T;uii,iiiti ii.,iiikiiu saisons, et surtout du froid cl de l'Iuimidité de nos liivers; ils demandent aussi à être tenus très- |iro[irement : la moindre saleté les fait souffrir, et bientôt ils perdent leur gaieté, dépérissent et meurent de tristesse et de dégoût. En général, ce sont des animaux fort délicats; outre les difficultés qu'on éprouve pour leur procurer tiiie nourriture convenable, ils ne s'accoutument point à vivre seuls, et la solitude leur est d'autant plus fatale, qu'ils sont d'ailleurs traités avec plus d'affection et de .soin. Le moyen le plus sur pour les faire vivre, c'est de les réunir à d'autres indivitius de leur espèce, et surtout de sexe différent. Ce qui fiatte le plus leur goût, ce sont les insectes et les fruits doux, et ils s'Iiabituent assez bien à vivre de lait, de biscuit, el<;.... On ne connaît guère leur genre de vie dans l'état de nature: il est à croire qu'il ressemble beaucoup à celui des écureuils, et que les marikinas se tiennent habituellement sur les arbri' dont l'épais feuillage, dans les climats qu'ils 25'2 IlISTOmE NATURELLE. MaliiliMit, leur offre Imijours un abri sur; et, si l'on pouvait conclure d'un animal en esclavage à un animal en liberté, on jugerait que ces singes n'ont point, comme les écureuils, de gite lixe, de nid particulier auquel ils reviennent lorsqu'ils ont besoin de repos; car tous les animaux qui, dans leur étal de nature, ont une retraite cboisie, sont doués d'un instinct qui les porte à la maintenir tou- jours extrêmement propre Lemarikina que nous avons possédé n'avait point cette qualité précieuse, ou bien il l'avait perdue ]iar l'effet de l'esclavage, qui presque toujours unit au développement ou à l'exercice des pencbants naturels. Ces penchants l'excitaient à se cacher dès qu'il avait la moindre inquiétude, et il exprimait sa crainte par un sifflement peu prolongé. Il aimait à recevoir des caresses, mais il ne les rendait pas, et, quoiqu'il témoignât de l'affection, il ne marquait jamais une entière confiance; cependant il venait i la voix des personnes qu'il connaissait; au contraire, il s'éloignait de celles qui lui étaient étrangères en les regardant avec défiance et en les menaçant même de ses faibles dents : car ce sont là les seules armes que ces animaux aient pour se défendre. C'est par leur agilité, sans doute, et par leur prudence qu'ils échappent à leurs ennemis, bien plutôt que par leur force; elle ne suffirait même pas pour les ilêfendre contre les plus (letils oiseaux de proie. Quelquefois notre marikiua semblait, pars.on cri, lenioigncr de l'ennui et de la tristesse; ce cri con- sistait alors dans un sifflement d'un seul ton élevé et doux, trè.s-prolongé. Comme les oiseaux, il aimait à se tenir dans la partie la plus élevée de sa cage, il n'en descendait que rarement et le fai- sait toujours à reculons; il prenait ses aliments, tantôt avec ses mains, tantôt avec sa bouche et buvait eu Iinmaut. Dès qu'il était repu, c'est-à-dire des ((u'il avait mangé la valeur d'une noix ou d'une pomme de moyenne grosseur, il remontait bien vite, en empoignant les objets auxquels il pouvait se suspendre, mais avec rapidité et en s'élancant vivement d'un objet à l'autre. Quoiqu'il n'eût pas le pouce séparé aux mains de devant, il ne s'accrochait pas avec ses ongles, il empoignait véritable- ment. Jamais je ne l'ai vu marcher sur ses pieds de derrière, et je crois que c'est à tort (|ue De Sève a dessiné ainsi le marikina de Duffon. Il se tenait hahiluellemeut assis; sa queue ne lui était d'au- cune utilité, elle restait toujours pendante. 11 était généralement d'un beau jaune clair, un peu plus doré à la crinière, à la poitrine et sur la croupe, et un peu plus pâle sur le dos, sur les cuisses, à la base de la qncne et sous le ventre pos- térieurement. Sa face était nue et livide depuis les sourcils, ainsi que la paume des mains; la peau de son corps était conleiir de chair. Son pelage était d'une seule nature : il ne se composait que de poils soyeux, mais liès-lins, el beaucoup plus longs sur la tête et sur le cou qu'aux autres parties du corps, ce qui formait cette crinière qui, avec sa couleur jaunâtre et sa face large et peu saillante, lui donnait en effet quelque ressemblance avec le lion. Voilà pour(iuoi ces animaux ont éle appelés, par les voyageurs, petits siiiges-lions. Sa queue était également couverte de poils sur toutes ses faces, et n'avait point de flocons à son extrémité, comme le dit Buffon de l'individu qu'il a fait graver; les pattes étaient cou- vertes de poils très-courts, et les fesses n'étaient ni nues ni calleuses. Cet animal n'avait pas de front proprement dit : les poils naissaient ininiêdiatenient au-dessous des sourcils, mais la ils étaient courts tians un espace li'iangulaire assez bien in(li(pie dans notre dessin. Ses sens n'offraient rien de remarquable : ses yeux avaient la conformation de ceux de l'Iiomme, et sa vue semblait être assez bonne. Comme tous les singes d'.Amérique, les ouvertures de ses narines étaient écartées l'une de l'autre et percées sur les côtés du nez, qui avait un jien de saillie, surtout à sa racine; l'odorat paraissait idiliis, la bouche était grande, la lan,;^ue était douce, et les lèvres étaient minces. Il n'y avait point d'abajoues, et le goût n'avait pas une grande délica- tesse, quoique l'animal fût assez difficile sur le choix de sa nourriture; l'oreille externe ronde. avec un rebord seulement à la partie supérieure, et n'avait point de lobule; du reste, elle ressem- blait à celle de l'homme : la partie postérieure de la conque était couverte de poils, et l'oreille elle- même était tout à fait cachée dans la crinière. Tous les pieds avaient cinq doigts longs et gi'êles; aux mains, celui du milieu était le plus long; ceux qui le touchaient de cliaque côté avaient entre eux la même longueur, à peu de chose près; l'externe, ou le petit doigt, venait à la suite des trois précédents pour la longueur, et l'interne, qui tenait la place du ])ouce, mais qui n'était jioint séparé des aulies doigts, était le plus court. Aux pieds, le doigt du milieu et celui ipu vient après en de- hors, étaient de la même longueur; les deux autres, plus petits que les précédents, étaient aussi d longueur égale, el le pouce, extrêmement court, n'atteignait |ias même à la naissance des doigts \ e I * I iiiilii :t rouik- ijiicu' !'l 55 QUADRUMANES. 9r^7, Le pouce était distinct, et lui seul avait un ongle plat; tous les autres éiaieiit gaiiiis d'ongles ero- eluis très-allongés, étroits et pointus. Les marikiiins ont trente-deux dents : seize à chaque mâchoire, c'est-à-dire quatre incisives, deux canines et ciu([ molaires. Celles-ci sont à couronnes plates; la plus voisine des canines est une fausse molaire , à une seule pointe ; les quatre autres , peu différentes pour la grandeur, ont de.s tubercules mousses. C'est Buffon qui. en français, a donne à cette espèce de sagouin le_ nom de nnir'iLina. Ce nom parait être, d'après le père d'AbeviUe, celui {[ii'elle porte au Maragnoii. Peniuiut nomme ce sagouin .«)//,;/ motihei, c'est-à-dire singe soyeux ; et Brissou (/J('f/»c animal, page 2U0i, qui en parle d'après un individu vivant appartenant à la marquise de l'ompadour. l'appelle i)etit singe-lion. C'est le shiiia ronilia de Linnaîus et de tous les auteurs systématiques. Les auteurs synonymes sont trop incertains pour que nous les rapportions. On voit, d'après ce que nous venons de dire, que cette espèce n'est encore qu'imparfaitement coinuie, qu'on ne sait que très-peu de chose.s sur ses habitudes naturelles, qu'on n'en a vu que h^ mâle, et que tout ce qui, chez elle, a rapport à la génération, est entièrement ignoré. 11 serait donc bien à désirer qu'elle fit de nouveau le sujet des observations des voyageurs et des naturalistes. (Fr.KD. CcviEn.) 0. TAM.VaiN BICOLORE. MlUAS DICOLOIt. (Spix.) Caractkiies SPÉCIFIQUES. — Nuquc, épaules, poitrine, membres antérieurs blancs. Habite le Brésil. Ce singe a le pelage d'un brun gris; laface noire; la nuque, les épaules et les membres antérieurs, 1U HISTOIRE NATURELLE . sont blancs; la queue est rousse; les poils du dos et de la queue sont noirs à leur racine, brunâtres au centre et roux à l'extrémité. (Snx.) 7. TAMARIN CHRYSOMÈI.E. MIDAS CIIRYSOMELAS. (Kulil ) Caractères spécifiques. — Pelage noir; front et partie supérieure de la queue jaune doré. Habite le Brésil. Le midas clirysoméle a le pelage noir; le front et la partie supérieure de la queue sont d'un jaune doré assez vif, tandis que les avant-bras, les genoux et les cotés de la tète, sont d'un roux qui tire sur le marron. Ce petit singe a été découvert dans les grandes forêts du Brésil, et principale- ment au Para. (Lessom.) Ce singe, que les Brésiliens nomment saliidm preto, dit le prince de Neuwied, est très-commun sur les bords du Ribeiraodas Manbocas. Son corps est long de buit pouces, et la queue a prés d'un pied. De longs poils roux dorés, droits comme ceux du maiikina, entourent la face, et ce même roux doré colore l'avaiit-bras, et se cbange en une raie roussâtre qui règne sur toute la longueur de la queue dans sa moitié supérieure seulement; tout le reste du pelage est noir foncé. Cette espèce vil en pe- tites troupes de quatre à douze individus, qui se tiennent à la cime des arbres les plus élevés; elle est trés-nuillipliée dans les grandes forêts entre San-Pedro d'Alcaiilara et le Serlam. Si l'on s'ap- procbe de l'arbre sur lequel sont posés les sahuis, ils prennent l'alarme, se cacbeiit derrière le.s grosses brancbes et regardent avec curiosité, en avançant la tète pour pouvoir fuir avec sécurité. On les tue aisément, mais leur petitesse les fait dédaigner par les colons pour leur nourriture, et le seul usage qu'ils en retirent est de fabriquer parfois des bonnets avec leur peau. (Lcssofi.) Fiï. 2117. — TMin.niii i lii\s..iii, QUADRUMANES. DI-liXIKMK FAMILLK. - LK M lUlI KNS. ieinuret, spootro. STIlEPTIRnilIN'IENS. (Geolïmy Sainl-lliliiiir.) STfîTTTo;, sinueux ; piv, nez. Les quadrumaiips de cette famille, aussi nommés singes à museau de renard, ressemblent aux singes par la eonformation de leurs membres; mais leur tète, terminée par un museau pointu, les rapproelie beaucoup des carnassiers insectivores. Ces animaux, presque tons de la grande île de Madagascar, ont les narines terminales et sinueuses; un jiouce bien développé et opposable aux quatre mains; l'indicateur des mains postérieures terminé par une phalangette filiforme, armée d'une griffe étroite et relevée. Les dents incisives sont variables dans les deux mâcboires pour le nombre et la situation ; les inférieures le plus souvent proclives. Les dénis molaires à tuberi'ules aii^iis, s'en- grenanl les uns dans les autres. Les membres postérieurs sont pins longs que les antérieurs, et la queue, quand elle existe, n'est pas prenante. 1" GENRE. - INDRl. JNDPJ. (Lacépède.) litdri, en langue iiiadécusse, lioninie Jes buis. CARACTÈnES GÉNÉllIQUliS. Narines terminales. Quatre incisives h chaque mùchoire. membres postérieurs très-lonijs et robustes. Queue courte, rudimeulaire. Les indris habitent les forêts de la partie méridionale de Madagascar. Les indris ont la léte conique, allongée et terminée en museau pointu; la mâchoire inférieure est plus courte que la supérieure; leur face est triangulaire; leurs oreilles moyennes, longues et velues. Ils ont trente-deux dents: quatre incisives, deux canines et dix molaires à chaque mâchoire. Les incisives supérieures sont réunies par paires; le bord des deux médianes est concave; celui des deux latérales est convexe. Les incisives inférieures, aussi au nombre de quatre, sont conliguës, longues, horizontales, et les latérales sont plus larges que les médianes. La position liorizonlale de ces dents supplée à l'inégalité des deux mâchoires. Les canines, assez saillantes, sont séparées des incisives par un petit intervalle, ce qui les rapproche des molaires, auxquelles elles ressemblent un peu. Ces dernières ont des tubercules mousses, sauf les fausses molaires, qui sont triangulaires, comprimées et pointues. Les membres postérieurs sont très-longs, et la forme générale du-<;orps rapprocherait ces animaux (les gibbons, si des caractères plus importants ne les classaient avec les lémuriens. Leur pelage est laineux et assez fourni. Les indris ne manquent pas d'intelligence, et, au dire de Sonncrat, ils sont susceptibles d'une '250 IIISTOIIU': iSATUliiaLl';. sorte d'éducation. Les habitants de Madagascar parvicimeiU à dresser ces singes |i(iiir la citasse, comme on dresse les cliiens. Leur régime est fiugivore et sans doute insectivore. IMUil A COL'UTE QUliLlE. IMIItl lUiEVICMOATlS. (GeoflVov Saiiil-llilLiiic.) Celle espèce est la seule connue du genre. Son pelage est brun noirâtre; la tète, le dedans des cuisses et les côtés de l'abdomen sont gris-blanc; la croupe, l'anus, la queue et le bord externe des tarses sont d'un blanc mat lavé de jaune. Les jambes de derrière sont, à tré.s-peu de chose près, doubles des antérieures; mises en mouvement, on dirait un ressort qui se détend et qui pousse le corps en avant : aucun lémurien ne s'élance aussi loin. La léte est pins forte et le museau au con- Iraire est plus court que dans les aulres genres de la famille; un giand espace, qui accroît d'autant l;i chambre nasale, tient les yeux distants. Les mains sont remarquables par leur longueur, et de plus par la dimension des pouces, qui sont reculés et séparés outre mesure. La queue est très- cuiirte; et à tous ces caractères vient s'ajouter le nombre de quatre dents incisives inférieures (tandis que les aulres lémuriens en ont six); ce ([ui explitpie la brièveté du museau. ((ii:oriROV SAi>r- lIll.URE.) 2"" GENRE. — AVAHl. AVAHl. (Jourdan.) Nom local. CARACTÈItES GÉNÉRIQUES Qncuc lonyiie et touffue. Quatre incisives et deux canines h cliafiuc mâchoire, dix molaires à la mâeiwire siiiuiienre et huit seulement h l'inférieure. Habite la côte occidentale de Madagascar. AVAIII A BOURllIi. .i\AIII i.i.MUEII. (Jounlaii.) L'avahi [indri lonrjicaudutus de Geoffroy Saint-Ililaire) a été séparé du genre indri par M. .lour- dan. 11 a la tète subglobideuse, la face camuse et velue, le muiie petit et nu. à chanficin busqué: les oreilles sont courtes, cachées par les poils de la télé et couvertes de ])oils elles-mêmes; le cou est gros, court, et semble renflé à la gorge; les dents incisives supérieures sont disposées par paires, les inférieures sont proclives et comme soudées. Les membres postérieurs longs, mais assez gros. Les pouces et l'indicateur des mains aniérieures sont irès-conrls, et les doigts réunis par une mem- brane jusqu'à ta deuxième phalange. Les pouces des mains postérieures très-larges. La queue est longue et touffue. Mon ami le docteur Lesson, qui a indiqué ces caractères sur nature, dit que ce quadrumane a des habitudes crépusculaires, qu'il vit en petites troupes formées de huit à dix individus, (pie sa démarche est géiiée et diflicile, mais qu'il saute avec facilité. Lavahi semble s'accommoder pour sa nourriture aussi bien d'insectes que de fruits, de grains durs et de racines. Le jour, on le trouve endormi quelquefois au fond d'un trou d'arbre, où il est roulé sur lui-même, ou le plus souvent accroupi sur des branches. 11 s'éveille au crépuscule en poussant un petit cri lent et ])leureur, recherche les animaux de son espèce de manière à former de ])etites troupes de huit à dix individus, et se met alors en quête de sa nourriture; sa démarche est gênée et diflicile, mais, en revanche, il saule avec une merveilleuse puissance, et franchit avec la lapidilé du vol do larges espaces en passant de branche en branche. Les Madécasses chassent ces animaux ])endanl le jour, car leur engourdissement cl leur paresse sont tels, que, bien qu'ils en- Avulii. l'I SI QlIAimUMANES. 257 leiuieiit approdiei' leurs ennemis, ils ne cherchent point à leur échapper. Les femelles ne portent qu'un petit; elles mettent bas vers la fin de février. Dès cette époque, on les rencontre portant leur progéniture sur le dos et accrochée par ses longues extrémités postérieures. L'avahi vit presque exclusivement dans les forêts qui avoisinent la côte orientale de Madagascar, depuis l'embouchure de la Manangara jusqu'à la baie d'Âtongil. (Lessok.) ô"'' GEiNRE. - PROPITllÈQUE. PfiOPITHECUS. (Bennett.) CAR.\CTÈRES GÉNÉRIQUES. Quatre incisives supérieures, disposées en une rnnijée réijuithre, très-tarfjes. les deux premières iriquèires, eonverçientes. Doifjts libres, l'iuile.v court; pouce des ntains postérieures robuste et tr'es-allontjé . Oreilles arrondies, velues et peu apparentes. Habite Madagascar. Bennett a fait connaître ce genre en 1852. Les propiihéques ont une queue comme l'avahi, et le museau comme l'indri, mais un peu moins allongé. On ne sait encore rien sur leurs mœurs. PROPITllEQUE A DIADEME. PROPITUECVS DIADEMA. (Bennell.) Ce singe a la face presque nue; de petits poils noirs se montrent sur les lèvres, et, entre les yeux, on remarque de petits poils d'un blanc jaunâtre. Le pelage est formé de poils longs, soyeux, droits et épais : la tête, la nuque et le haut du dos sont noirs; le front, les oreilles et le thorax d'un blanc jaunâtre; les épaules, les flancs et le dessous du corps blancs; une tache brune à la naissance de la queue, qui est blanche, marquée de jaune. Les mains sont noires, avec un bouquet de poils jaunâtres cachant les ongles. (Lesson.) 4"' GENRE. - MAKI. LEMVB. (Geoffroy Saint-Hilaire.) CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Mu.\eiin effilé connue le roiaril; un sillon nuir(juaul la ligne médiane du niujle. Six incisives proclives h la mâchoire inférieure. Les makis habitent l'île de Madagascar. Les makis ont une tête de carnassier, placée sur un corps de singe. En effet, leur tète est longue, triangulaire, à museau eflilé et à mufle séparé en deux par un sillon. Leurs mains sont bien orga- nisées pour la préhension, quoique les doigts ne soient plus guère indépendants dans leurs mou- vements. Le second doigt des mains postérieures a la phalangette amincie et un ongle subulé el relevé; les autres ongles sont en gouttière; ceux des pouces plats. Le tarse est de même longueur que le métatarse. Les yeux sont en partie latéraux, en partie antérieurs; les oreilles sont courtes et velues. La queue non prenante est longue et touffue. Trente-six dents, ainsi distribuées: à la mâ- choire inférieure, six incisives proclives, contiguës, longues, les externes plus fortes, ce qui les fil prendre pour de vraies canines. Ces dernières petites, triangulaires et reculées. Dix molaires, les antérieures à pointes, les postérieures à tubercules assez mousses. La mâchoire supérieure à quatre incisives droites, réunies par paires latérales, les deux intermédiaires distantes l'une de l'autre; 25 ôô 258 IIISTOIRR NATimELI,E deux canines loiig:iies, coniiirimées, irancliaiiles et ]ilaeé(s plus autérieuirineut ((ue les inférieures qui les croisent en airière, disposilion inverse de celle que présentent les autres nianimirères. Enfin douze molaires semblables à celles de l'autre mâchoire. Ces dents annoncent un réginie mixte frugi- vore, insectivore et même un peu Carnivore. L'os de la verge arrive jus([u'à rextrémité du gland, qui est conique et a sa surface couverte de papilles cornées, dirigées en arriére. L'estomac est presque splieroïdal et les deux orifices cardiaque et pylorique sont très-rapprochés. Le foie n'a que deux lobes conqtlets et un troisième très-petit. Le caractère de ces quadrumanes est moins turbulent, moins iudé])eiidaut. moins hargneux ([ue celui des vrais singes; ils sont aussi moins disposés à la luiiricité; ils vivent en troupes, et sont très- sensibles au froid Frg 208. — Main onléiieiire (tu malii vari Fig. 209 — Main postérieure du niald van. La toison des makis est douce au toucher. Leurs poils forment une laine moelleuse, qui, chez phisieurs, est longue et épaisse. Ces quadrumanes sont à demi nocturnes: la lumière les incommode et ils ehei'chent à l'éviter; leur pupille, transversale pendant le jour, devient i)eri)endiculaire dans l'obscurité. Us ne quittent pas leur retraite tant que le soleil est ardent. Les makis prennent leur nourriture indifféremment avec la bouche ou avec les mains: ils lapent en buvant à la manière des chiens. Revenant dans les mêmes lieux, ils se plaisent ;\ répéter les mêmes allures et les mêmes mouvements. L'un de ces mouvements, qn'ds reproduisent comme di- vertissement, consiste à s'élever perpendiculairement le long d'un mur ou d'un arbre: ils mettent une sorte d'amour-propre à s'élever très-haut; et, si ([uelques accidents les en ont empêchés, ils en montrent une sorte de dépit, et ils s'y reprennent avec tant de calcul, qu'ils se satisfoi:t le moment d'après par un saut de la plus grande hauteur. (Geoffiioï S.\iiNT-lliLAHtE.) t MAlvl V.Mil. ii-.«t7l MACACIJ. (GeuUroy Saiiil-llilaire.; CAr..\cTÈiiEs spÉciFiQDEs. — Pclagc noir et blanc. Habite Madagascar. Cette espèce de maki est une des plus grandes du genre. Ces animaux, que nous ne connaissons, à proprement parler, qu'en esclavage, pourraient bien avoir donné de leur naturel des idées toutes nOADRUMANES. 250 différentes de eellcs qu'on en devrait aviiir et (|n'un en prendrait si on pouvait les étudier dans leur état de nature. En effet, les makis, sans montrer beaucoup d'intelligence, sans témoigner d'affection pour ceux qui les soignent, semblent généralement avoir de la douceur; leur museau fin, leurs grands yeux n'annoncent rien de méchant, et l'on en trouve qui paraissent prendre plaisir à donner el à recevoir des caresses: il n'est pas rare de trouver des makis d'un caractère féroce, et uu vari nous en a donné un exemple frapjiant. Il était réuni à un mougous dans la même cage, et tons deux ])a- raissaient vivre l'un avec: l'autre, sinon affectueusement, du moins sans mésintelligence; lorsque, ayant été transportés dans une autre cage et dans un autre local, le vari, pendant la nuit, tua le mongous et le mangea. Cette circonstance s'accorde au reste parfaitement avec ce que des voyageurs rapportent des varis, qui, disent-ils, sont d'un naturel farouche et cruel comme les tigres. FijT o|n — Malii vari. Nous ferons remarquer qu'un des caractères communs à ces animaux, la diffeience de couleui' des mâles el des femelles, est conlirmé par l'espèce qui nous occupe; de sorte qu'il peut être con- sidéré comme étant sans exception, circon.stance importante, el qui, pour avoir été méconnue, pourrait avoir conduit à multiplier sans fondement les espèces de makis connus jusqu'à ce jour. Les cai'aclères spécifiques du vari consistent dans ses couleurs, qui sont de noir et de blanc : mais ces couleurs ne sont pas toujours réparties également. L'individu dont nous donnons la ligure présente un exemple de la distribution la plus commune chez les mâles: les parties blanches sont les jambes, les cuisses cl une bande transversale sur la croupe au-dessus de la queue, les bras, depuis le coude jusqu'aux mains, une seconde bande sur les épaules descendant aux aisselles, la parlic postérieure de la tète, et une troisième bande sur les côtés du museau, et la mâchoire inférieure; toutes les autres |)arties sont noires. Les mâles seuls ont la tête blanche: chez les femelles, elle est toute noire supérieurement. L'in- ilividu mâle que Buffon a fait représenter n'avait de noir que la queue, le museau et les mains, le (levant de la tête, la partie supérieure des bras, et le bord antérieur des cuisses. Ou a eu à la Malmaison, on madame liouaparte se plaisait à réunir beaucoup dohjels d'Iiistoire naturelle, des varis qui se sont accouplés et qui ont produit ; malheureusement on n'a point observe le tem|)s de la gestation; mais les jeunes varis sont nés les yeux ouverts, el avec les couleurs des adultes. (FnÉDÉRic Cuvieh.) 260 HISÏOIUE NATURELLE. 2^ MAK! MOCOCO. I.EMVR CATTA. (Geoffroy Sainl-Hilaire.) Caractères spécifiques. Habite Madagascar. Pelage cendré roussfttre; queue annelée de noir et de blanc Il est, en effet, peu de mammifères qui réunissent à des formes plus élégantes des couleurs plus douces et un caractère plus conliant. Toutes les parties supérieures de son corps sont d'un beau gris, qui prend une teinte rousse sur le dos et principalement sur les épaules; k sommet de la tète, le dessus et les côtés du cou sont noirs, ainsi que le tour des yeux et le bout du museau; toules les t'ic. -1 ! - — MiiUi niococo. autres parties de la tète, les oreilles, la face interne des membres, le des.sous du cou, la poitrine et le ventre, sont blancs; enfin, la queue est alternativement colorée, dans toute sa longueur, d'an- neaux blancs et noirs, dont le nombre s'élève jusqu'à trente. Chez les jeunes, le noir du sommet de la tête n'est pas aussi foncé que chez les adultes. Ses formes générales sont semblables à celles des makis que nous avons déjà fait connaître; mais les contours de sa tête ont plus de finesse, et ses oreilles pointues, élevées, et qui se dirigent en avant, semblent encore donner à .sa physionomie une vivacité que n'a point celle des autres espèces, avec les oreilles courtes et aplaties; et il ma toujours paru que, de tous les makis, c'était le mocoro qui s'apprivoisait le mieux, qui prenait ])Our son maiire nUADRUMANES. 2(51 la plus vive alTeclion, et qui monlrnit le plus diiilclligence. La paume de la main sV'lend par une linne i'tioitc cachée sous les poils jusiiu'au milieu du bras, où elle reparaît nue; c'est une particu- larité d'or£;anisation qui ne se trouve point chez les singes. Puis, lorsque ce maki étendait son bras, ses doii^ts se fermaient nécessairement; ce qui rend raison de la facilité avec laquelle ces animaux se suspendent aux branches. Ensuite je n"ai pu méconnaitre la cause de l'erreur où plusieurs natu- ralistes sont tombés, et notamment llulïoii, lorsqu'il avance qu'un des makis dont il parle avait la langue rude comme les chats, en remarquant que tous les makis, en même temps qu'ils lèchent, passent sur la peau leurs incisives inférieures, qui y produisent, en effet, une sensation tout à fait semblable i celle que nous fait éprouver la lantfue des chats. Ces animaux sont portes, par leur instinct, à se gratter mutuellement avec les dents, qui semblent ne leur avoir été données que pour nettoyer leur pelage, car ils ne s'en servent jamais ni pour mordre, ni pour couper. Ce sont de vé- rilables peignes. i'',nlin, j'ai pu vérifier ce que dit Linnaeus, que, dans le contentement, le niococo fait entendre un bruit sourd tout à l'ail semblable à celui des chats dans le même cas, (Fiœdéric CeviEn.) 5 M.Mvl ISnUGE. LEMl'It nVnEII. ( Ptron et Lesiiour. Cab.vctères spécifiques. ~ Pelage roux-marron irés-vif; mains, queue et ventre noirs; une tache d'un blanc jainiàlre sur la nuipic. Ilaliilc Madagaseai-. Fi". 212. — Muld rouge. .2(',t) IIISTOIUE NATURELLE. Le poil de ce singe est fourni cl irès-laineux, ce qui rend le corps très-épais en apparence ; la tête est garnie de longs poils noirs autour des oreilles. Le pelage est d'un roux-inarron très-vif; les mains, les pieds et la queue, qui est cylindrique et grosse, sont d'un noir très-foncé, ainsi que le ventre et la face interne des membres;" la peau de la face et celle des mains sont d'un roux foncé; les yeux sont fauves; le sommet de la tète est d'une teinte plus foncée que le dessus du dos; les poils des joues et des oreilles sont d'un marron moins intense que ceux des parties environnantes; une tache d'un blanc jaunâtre est située sur le cou et sur la nuque; les poils de la collerette sont d'une couleur marron plus claire que ceux des flancs; une tache blanche transversale se remarque sur chacun des pieds de derrière. (Desjup.est.I Un maki rouge (femelle), observé par Frédéric Cuvier, était très-doux et très-apprivoisè; mais, quoique Irès-agile, il était habituellement triste et dormeur. Il passait ses journées couché en rond, la tête entre ses jambes, et ne semblait se réveiller que quand le besoin de manger se faisait sentir. 4. MAKI MONGOUS. LE3IVR MO.yaoUS. (Ci'oriroy Saiiil-Hilaire ) C\RACTF,nES SPÉCIFIQUES. — Pclage cendré jaunâtre; une tache noirâtre sur le sommet de la (cte; les parties inférieures d'un blanc sale fauve. Habile Madagascar. Le nom de mongous a clé donne généralement à toutes les espèces de mnkis dont le pelage est Fig. 213. — Malii mongous. QUADRUMANES. 265 brun ou varié de lii'un et do fauve, et n'offre point de grandes taches de couleur déterminée, comme celui du maki vari, ou des anneaux sur la queue, comme celui du mococo. M. Geoffroy, ayant cru devoir distinguer comme espèces particulières tous ceux de ces makis dont les descriptions faites par divers auteurs offrent des différences appréciables, a réservé le nom de mongous à l'animal que Buffon nomma ainsi, bien qu'il ne soit pas certain qu'il lui appartienne plutôt qu'aux autres. (Desm.\best.) Le.s mains, aux exirémilés postérieures comme aux antérieures, ont cinq doigts et le pouce dis- tinct, beaucoup plus développé aux pieds de derrière qu'aux pieds de devant. Tous les ongles sont plats, excepté celui de l'index des pieds de derrière, qui est au contraire relevé et très-aigu; les yeux sont simples; les narines s'ouvrent à l'extrémité du museau, au milieu et sur les côtés d'un mufle, comme chez les chiens; la mâchoire inférieure est moins avancée que la supérieure, et la langue est douce; les oreilles ont une conque externe arrondie, et assez semblable à celle de l'Iiomme. On voit quelques moustaches à la mâchoire inférieure, aux côtés de la supérieure, et au-dessus des yeux; mais, si ces animaux ont un organe particulier du toucher, il pourrait résider dans les doigts, dont la peau est très-délicate. Le pelage est remarquable par sa finesse et son épaisseur. Les poils Fis. 214 — Maki (variété albine) qui le composent ont tous les caractères des poils laineux, et le corps en est partout à peu près également couvert, si ce n'est à la face et aux mains. Les poils soyeux ne sont développés qu'en très-petite quantité; on les voit épars sur tout le corps. Les parties génitales ont une organisation toute particulière : le scrotum paraît être entouré de glandes qui, à certaines époques, répandent sur cet organe une matière visqueuse. Le gland est garni d'épines cornées couchées en arrière, comme celui des chats. Enfin, l'anus, dans le mâle comme dans la femelle, est entouré d'une peau extrêmement plissée, qu'on n'a rencontrée jusqu'à présent chez aucun autre mammifère. Les dents ont aussi des caractères qui leur sont propres. A la mâchoire inférieure, il y a six inci- sives comprimées el couchées en avant; deux canines comprimées, latéralement plus petites que m IliSTOIRE NATURELLE. celles (le l'autre mâchoire, et cinq molaires à tubenules aigus. A la mâchoire supérieure, il y a quatre incisives droites, écartées l'uue do l'autre par paires ; deux canines comprimées latéralement, tranchantes, et assez longues pour sortir de la bouche lorsqu'elle est fermée; et cinq molaires comme à l'autre mâchoire. La couleur générale du pelage est d'un fauve brun, lavé d'olivâtre ou de jaune, et cette couleur est à peu près uniforme aux parties supérieures du corps comme aux parties inférieures; la queue a du noir â son extrémité, et le sommet de la tête est entièrement de cette couleur chez le mâle, tandis qu'il est gris chez la femelle; les côtés des joues sont garnis de favoris d'un bel orangé; la face, les oreilles et l'intérieur des mains, ont une teinte violette, et le cercle de l'œil est orangé. Les formes de la tète du mâle ne sont pas tout à fait semblables à celles de la tête de la femelle, et celle-ci diffère encore de l'autre par une taille un peu plus petite., et par la nuance plus jaune de son pelage J'ai eu en même temps deux mâles et deux femelles de mongous, auxquels la description que je viens de donner convenait également sous tous les rapports. Mais j'ai possédé un mâle qui avait avec ces animaux la plus grande ressemblance, et qui en différait cependant par quelques points assez remarquables pour que je croie devoir le faire connaître ici. Ce maki avait été ramené d'Anjuan par M. Houssard, capitaine de vaisseau, qui a bien voulu me permettre de le décrire; il était mâle et très-adulte; toutes les parties supérieures de son corps, et le sommet de la tète lui-même, Haient d'un gris jaunâtre, résultant des poils, alternativement colo- rés sur leur longueur de gris sale et de noir; ce gris était plus pur sur les jambes de devant et sur les côtés du corps. La partie postérieure des cuisses de derrière était jaune, et ce caractère était remarquable; le ventre était d'un jaune sale, et le gris-blanc dominait à la poitrine, au-dessous du cou et de la mâchoire inférieure, et au-dessus de la supérieure. Enfin il avait, comme les mongous, de larges favoris â la base des mâchoires, mais, au lieu d'être orangés, ils étaient d'un roux sale. La forme de sa tête différait aussi sensiblement de celle du mongous mâle; le crâne était plus élevé, le museau moins allongé, et il y avait une dépression à la racine du nez plus forte encore que celle qui se voit dans notre tète de mongous femelle; enfin la partie antérieure du museau était blanche. Du reste, il ressemblait entièrement aux mongous. Les mongous m'ont toujours paru des animaux fort peu intelligents, très-inoffensifs et fort ti- mides; ils s'apprivoisent quelquefois, mais ne s'attachent point. On les habitue à venir â la voix lorsqu'on attache à leur nom l'appât d'un aliment qu'ils aiment ; j'ai vu une femelle qui restait libre, s'éloignait peu et aimait â lécher, mais non pas comme les chiens, par affection. Ce sont des animaux en partie nocturnes; ils passent une grande partie de la journée à dormir, couchés en boule, leur grosse queue passée entre les jambes de derrière, et ramenée de manière â s'entortiller autour de leur cou. Comme tous les autres makis, les mongous sont essentiellement conformés pour monter aux arbres et pour sauter : aussi font-ils des bonds prodigieux, et ils par- courent un arbre avec une rapidité que l'œil peut à ]icine suivre. Un de ceux que j'ai possédés ne semblait faire aucun effort pour s'élancer aux premières branches d'un arbre, qui étaient à dix pieds du sol; mais il marchait â terre très-difficilement. Ces animaux agissent à peu près ù la manière des singes; ils portent, avec leurs mains, leurs aliments à leur bouche; et, malgré l'allongement de leur museau, ils boivent en humant; lorsqu'ils sont calmes, leur voix consiste dans un grognement assez faible; mais ils poussent des sons très-forts et très-graves dès qu'ils sont effrayés; alors tous crient à la fois, ce qui produit un bruit presque insupportable. Lorsque deux mongous sont habitués l'un avec l'autre, ils vivent en paix, et se réunissent en s'embrassant pour se coucher. Autrement, ils se battent cruellement en se mordant, et efi s'arrachant les. poils avec les mains; et je suppose qu'ils s'appareillent lorsqu'ils vivent en état de nature. Les deux paires que je possédais n'ont jamais pu .s'habituer à se voir; dès que j'enlevais la cloison qui les séparait, ils entraient aussitôt en fureur en jetant des cris aigres, interrompus, mais qui se succédaient rapidement; sans les grilles de leui's cages, ils se seraient sûrement fait beaucoup de mal, et les.femelles entraient dans la même fureur que les mâles. Nous les nourrissions de racines cuites, de fruits, de pain et de lait, et on les tenait dans une température uniforme de douze â quinze degrés. Avec ces seuls soins et de la propreté, ils conservaient une fort bonne sanle; en général, ils se sont toujours montrés moins sensibles à l'es- clavage et à l'intempérie de nos climats que les singes qui vivaient à côté d'eux. I .Maki II l'iniil lil.iMi' (l.'iiK'lli') ivi'c son {irlil. l'I r.i nUADIiUMAINliS. ^ll.'. î>oiis avons paiii' de l'oDgle |uiiiitii ^i reinarquable qu'uni rcs animaux dans h doiyt voisin du poui T, aux pii'ds de derrière. Nous ue les avons jamais vus se servir de cet ouijle à autre chose qu'à l'inlruduire dans leurs oreilles, el ils l'y tenaient assez longtemps; mais nous n'avons pu voir par (|uelle raison; et il parait que leurs incisives inférieures, couchées en avant, leur servent surtout à se gratter et à nettoyer leurs poils ; ils se rendent ce service muluellemenl ; il semblerait même (pie c'est pour eux une manière d'exprimer leur contentement mutuel. (l'ciSuÉiiii; CuviEii.) 5. M.\K1 A fllONT ULANC. l.liMUIt ALUltllUXS. (Geolîroy Saiiil-llilairc.) CuiAC.TÈREs si'ÉciFiQUËS. — Telage gcis-roux, gris à l'occiput el sur les épaules, blanc en dessous; face noire; un bandeau blanc chez le mâle. Habite Madagascar. I.e maki à front blanc n'est connu que depuis que M. Geol'lroy Saint-liilaire eu a donné les carac- tères dans le iliifiashi ciici/c/o/Jci/i'/HC. Depuis cette époque, l'espèce avait été admise, mais elle n'avait pas été revue, et elle ue re|)Osait toujours que sur l'individu qui avait primilivemenl été dé- crit Vers la fin de 1S16, j'eus occasion d'acquérir deux jeunes makis, dont la tête était entière- ment d'un sçris foncé, et qu'on donnait pour des femelles du maki à front blanc. La bonne intelli- gence dans laquelle ces singes vivaient, et même les désirs qu'ils manifestaient, ne suflisaient pas pour faire admellre qu'en effet des animaii.x très-différents de couleurs appartenaient à la même es- pèce; mais leur accouplement jie mit bieulôl de le conjecturer, et il ne fut possible d'élever à ce sujet aucun doute lorsqu'on vit que la femelle avait conçu. Ainsi il est bien établi que, dans cette espèce, le niàle diffère de la femelle, ce qui existe peut-être pour foutes les espèces du genre. Le maki à front blanc mâle a toutes les parties supérieures du corps, la face externe des mem- bres, le iiremier tiers de la queue, d'un brun marron doré lorsque la lumière vient obliquement; les parties inférieures et la face interne des membres sont d'un brun gris olivâtre; les deux der- niers tiers de la queue sont noirs; la paitie interne de la lête jusqu'aux oreilles, les côtés des joues et le dessous de la mâchoire inférieure, sont blancs. La face et la paume des quatre mains sont d'un noir violâtre, et le cercle de l'iris est orange. I^a femelle ue diffère du mâle iiour les couleurs qu'en ce que les parties qui sont blanches chez celui-ci sont, chez elle, d'un gris foncé. Le reste du pelage est également d'un marron dore, mais un peu plus jaune. Cet animai avait il'aiUi'urs la même organisation que le mongous; il lui ressemblait en tout point par la nature du pelage et par les organes des sensations, des mouvements et de la génération; pla- cés â coté l'un de l'autre, j'ai pu les couq)arer dans le plus grand détail, et je n'ai trouvé entre eux aucune différence appréciable; et il en était de même pour toutes les habitudes du corps, pour l'em- ploi des sens, des membres, et pour les facultés intellectuelles. Ce fut dans le mois de décembre 1817 que ces animaux parurent éprouver pour la première fois les besoins du rnl. Le mâle était très-ardent, et ses testicules paraissaient couverts d'une matière glutineuse. La fe- melle avait toutes les parties génitales très-gonflées et humides, mais non pas sanguinolentes; son rut n'a point été accompagné de menstruation, et tous deux cherchaient à chaque instant à frotter contre les parois de leur cage la peau plissée ([ui entoure leur anus. L'accouplement se lit le 23, à la manière de tous les autres qiuidnqièdes, et il se répéta souvent depuis, pendant cinq à six jours, ajirès lesquels lardeur de l'un et de l'autre parut calmée. Au bout de quarante jours environ, on vit les mamelles de la femelle se gonfler el son ventre grossir, et, le 13 d'avril suivant, elle mit bas un petit femelle qui avait sa couleur, mais des po.is très-courts et les yeux ouverts. Dès le moment où il fut au moude. il s'attacha â sa mère avec ses quatre pattes, en travers du ventre, au-dessus (les cuisses qu'elle reployait contre elle-même, connue pour le cacher; et, lorsqu'il voulait teter, il allongeait son i ou pour aller chercher la mamelle qui est sous l'aisselle. Ce n'était qu'avec beaucoup de patience (pie dans les premiers temps on parvenait â le découvrir; outre qu'il s'enfonçait dans le 'itjl) HISTOIRE NATURELLE. pelage épais do sa mère, celle-ci présentait toujours le dos aux personnes qui la regardaient, quelque familiarisée qu'elle fût avec elles, et ce n'a été qu'après plusieurs semaines qu'on a pu loliserver exactement. A sa naissance, il avait les mêmes proportions que ses parents, et sa taille était à peu près celle d'un petit rat; bientôt les poils se développèrent, et, après six semaines, excepté par la taille, il ne différait plus en rien de sa mère. Cette femelle, avant la naissance de son petit, était extrêmement douce et familière : on ne s'approchait point d'elle qu'elle ne vînt aussitôt chercher des caresses et lécher les mains; mais, dés ([ue son petit fut né, elle devint déliante, s'éloigna de tout le monde, et même elle menaçait dès qu'on l'approchait. Celte défiance s'est affaiblie par degrés et sa première familiarité est revenue lorsque ses soins n'ont plus été nécessaires à son petit, c'est- à-dire vers le troisième mois; jusque-là ces animaux ne s'étaient point séparés; alors le petit se hasardait à se détacher de sa mère; mais, au moindre bruit, il retournait se cacher entre son ventre et ses cuisses. Dès que la femelle fut prête à mettre bas, on tit passer son mâle dans une autre cage; car on ignore si ces animaux vivent en société et si les mâles partagent avec les femelles les soin.s de la famille : dans le cas où il n'en serait pas ainsi, le mâle aurait pu nuire au petit que nous avions tant d'intérêt à conserver. C'est à peu près vers la cinquième ou sixième semaine qu'on a vu ce jeune maki goùler aux ali- ments qu'on plaçait dans sa cage, et son allaitement a cessé vers le sixième mois. La différence qui existe, dans cette espèce, ejilre la couleur du mâle et celle de la femelle, ne permet guère de lui conserver le nom qu'elle a reçu, et qui lui convenait sans doute lorsque le mâle seul était connu. (iMuiuÉiiic Cuvieh.) G. MAKI A MAINS BLANCI1E5. LEllIVn ALBIMAXVS. (Drisson ) Carac.tkhes si'KciFKiuEs. — Maius revêtues juscpiaux ongles de poils blanchâtres. Nez et gorge blancs. Habile Madagascar. Celte espèce, mal connue encore, a la face noirâtre, avec des poils jaunâtres courts sur les joues; l-'iS ',215. — .\laki ,iu\ MMiMs Ll.inili.' QUADRUMANES, 267 II) gorç;c et les tempos sont (Fiiii fi'i'riis;incux iinifonin'; le iielage est t;iis-liriin, plus clair en dessous (lu'en dessus. Q«i'l([ucs poils blaiicliàlres recouvrent les mains; parfois le ventre lui-même est de celle même teinte. (Lesson.) 7. MAKI A FRONT NOIR. LEMUR MGRIFRONS. (Geoflioy Saiiil-Hilaire.) C.\r,.ACTtr,ES SPÉCIFIQUES. bandeau noir sur le front. Habite Madagascar. Pelage cendré en vivant et gris-roux en arrière; roux en dessous; un Cette espèce ressemble beaucoup à la femelle du maki à front blanc. Elle est caractérisée par la couleur brun-noir de ses joues et de son front, qui s'éclaircil progressivement jusque vers le bout du museau, (jui est blanchâtre. Le dessus de la tète et du cou, les épaules et la face externe des bras, sont d'un gris de plomb légèrement varié de blanchâtre, ce qui est dû aux anneaux des poils de ces difl'érenlcs parties; le dessus du dos, les lianes, les cuisses et la face externe des jambes, sont d'un gris-brun assez uniforme; la queue est d'un gris un peu clair à la base, et passe au gris noirâtre vers son extrémité; le dessous du cou et de la gorge est d'un blanc sale; les pieds et les mains sont couverts de poils courts d'un gris cendré. (Desm.\rest.] 8. MAKI ROUX. LEMUR RUFVS. { Audcbert.; CAn.vcTÈr.Es seÉciFiQiiES. — Une bande noire s'elciul du front à l'occiput; pelage roux doré en dessus, blanc en dessous. Habite Madagascar. Ce singe diffère peu du maki a mains blanches et du maki à front blanc femelle; cependant ses oreilles paraissent un peu plus courtes que celles de ces deux animaux, et sa queue est garnie de liir '210. — .\l;.k poils moins longs que ceux qui revé;ent la leur. Son ]ielage est d'un roux doré en dessus, blanc jaunâtre en dessous. Le tour de la face est blanc, excepté au front; une bande noire .s'eleud du front à l'occiput. (Desmarest.' 2C8 IIISTOIRK NATlIliELI.R. ;.'"■ GKNRE. — CHEIUOGALE. ClIEinOGALEVS. (GeofCroy Saint-Hilaire.) Xsip, main; •yaXr,, clial. CARACTÈRES GÉNÉUIUUES, Six incisives prodivcs à la màciwire infcrieiire. Onylcs étroits, carénés en dessus. Treize vertèbres dorsales et treize paires de eûtes. Les cheii'ogales liabiteiit l'île de Madagascar. Le genre cheirogale a été établi en 1812 par Geoffroy Saint-Hilaire, d'après des dessins faits par Commerson, naturaliste faisant partie de l'expédilion de Bougainville. Les animaux que ces dessins nous font connaître, dit M. Geolïioy Saint-Hilaire, ont, comme les chats, la tèle ronde, le nez et le museau courts, les lèvres garnies de moustaches, les yeux grands, saillants et rapprochés, les oreilles courtes et ovales. Leur queue est longue, touffue, régulièrement cylindrique, se ramenant naturellement en avant, ou s'enroulant tantôt sur elle-même et tantôt autour du tronc. Jusque-là, ce ne sont que des traits empruntés en quelque sorte à la famille des felis; mais ces traits sont com- binés dans les animaux de Commerson à des doigts aussi profondément divisés et aussi propres à la préhension que le sont ceux des makis. On trouve également dans ces deux genres d'animaux un pouce à chaque main, aussi écarté, aussi distinct et aussi susceptible de mouvements propres. Ces nouveaux animaux n'ont d'ailleurs d'ongle large, court et aplati, qu'aux pouces; les ongles des autres doigts sont étroits, grêles, aigus, et dépassent de beaucoup la dernière phalange. Toutefois cette disposition des ongles n'en fait pas des griffes, comme celle des arclopithécieiis, des ours ou des chats; leur forme et leur position les font plus ressembler à ces ongles subulés qui, dans les makis, ne garnissent que le deuxième doigt des pieds de derrière. (Geoffroy SAii\T-Ilii..vi«E.) Les espèces dessinées par Commerson et qui ont servi de type avaient été désignées par Geoffroy Saini-llilaire sous les noms de cliciroyakiis major, C. médius, C. ininor, nous nous contenterons de les citer, ])our ne parler que d'une espèce mieux connue. Fi". 217. — Clicirogalc de Commerson. QUADRUMANES. 260 CIIEIROGALE DE MILIUS. CHEinOGALEUS MILII. (Geoflroy Sa nl-Ililaire.) Caractèiies si'KciFiyuES. — Pelage i;i'is-roiix en dessus, blanc cendré en dessous; une taclie hlan- rli;"iiie entre les yeux; le museau nu et noirâtre. Habite l'ile de Madagasiar. C'est à M. Milius, commandant à l'ile Bourbon, que nous devons cette jolie espèce de quadrumane, (|Mi. comme les autres makis, se trouve à Madagascar. Elle a les organes du mouvement des makis li jusqu'à leur ongle crochu du second doigt des pieds de derrière; sa queue est moins fournie que la leur; ses oreilles sont irès-arrondies, sansbéliv. mais avec un tragus et un ante-tragus; ses \eux sont très-grands et à pupilles rondes, et ses narines entourées d'un mufle, sur les cotés duquel elles Tig. 218. — Cliciro^'nlc de Mad^igasciir. sont ouvertes, et elles sont plus avancées que les mâchoires; la langue est douce. Tout son corps, excepté son museau et l'extrémité de ses membres, est couvert d'un pelage épais, composé tout en- tier de poils soyeux en apparence, fortement gaufrés, qui lui donnent à la fois le vêtement le plus dijux et le plus léger. Le front, la paitie postérieure de la tête, le dessus du cou, les épaules et ic ■270 HISTOIRE NATURELLE. dessus des bras, le dos, les côtes du corps, la croupe, les cuisses, les jambes et toute la queue, sont d'un j^ris fauve uniforme. Le dessous de la mâchoire inférieure, la i^orge, le dessous du cou et les cotés de sa partie supérieure, la poitrine, la face interne des bras, le ventre, la face externe des cuisses, sont blancs. Les mains et la face sont couleur de chair; seulement on voit entre les deux yeux une tache blanche longitudinale, bordée sur ses côtés d'un peu de noir. 11 n'y a aucune différence entre les mâles et les femelles. Ce petit quadrumane passe tout le jour couché dans un nid de foin, où il est roulé en boule et où il dort assez profondément; mais, aussitôt que la nuit commence, il sort de sa retraite, et, tant qu'elle dure, il agit. C'est alors qu'il mange, qu'il satisfait à ses besoins, qu'il joue; il est peu d'animaux plus agiles et plus vifs pour sauter; il parcourt sa cage comme en volant, et fait verticalement des sauts de six à huit pieds. On le nourrit de fruits, de pain, de biscuits. Sa vie nocturne me parait avoir pour cause principale l'extrême sensibilité de ses yeux pour la lumière; le peu qui en reste durant la nuit, et que nous n'apercevons qu'à peine, lui suflit; il parait qu'alors il voit même très- distinctement les objets, car ceux que nous possédons, et qui sont mâle et femelle, s' étant échappés un jour de leur cage, parcoururent la pièce où ils étaient enfermés, et qui se trouvait remplie d'une foule d'autres cages et d'autres animaux, et rentrèrent dans leur gîte par le petit trou qui leur avait servi à en sortir, sans qu'il leur soit arrivé le moindre accident, et quoique l'obscurité la plus pro- fonde régnât dans cette pièce, dont tous les volets étaient fermés. (FrédéuicCuvier.) fr^ GENRE. - NYCTICÈBE. NYCTIŒBUS (Geoffroy Sainl-Hilaire.) NuE, nuit ; xr.ëo;, singe CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Ueux ou qualrc incisives h In mâclioire supérieure. Quatre mamelles. Queue rudimcutnire. On les trouve à Ceylan, Sumatra et Java. Les nycticèbes ou singes de nuit ont la tête arrondie; la face camuse; le riez petit et aplati; les oreilles courtes, velues et cachées sous les poils; les yeux grands, nocturnes, rapprochés et dirigés en avant; le corps ramassé, trapu; les membres courts et égaux. Quatre mamelles, deux pectorales et deux abdominales. A la mâchoire supérieure, quatre incisives, les médianes distantes l'une de l'autre, fortes et larges, les latérales plus petites ou nulles; deux canines et dix molaires. A la mâchoire inférieure, six incisives proclives, deux canines médiocres et dix molaires, celles du fond à large couronne, évidées au centre et tuberculeuses aux angles. Les doigts des pieds ont tous les caractères de ceux des quadrumanes de la même famille. Leur pelage est épais et laineux; leur vie est nocturne; leur régime* est probablement un peu Carnivore. NYCTICÈBE DE J.WA. KYCTICEBUS JAVANICi'S. (Geollroy Sjint-Hilaiie.) CARAC'fiinEs si'iiciFiQUEs. — l'elage roux, avec une ligue dorsale plus foncée. Cet animal, connu aussi sous le nom de poucan, est une preuve manifeste de la réseive que 'on doit mettre à donner comme absolues les généralités (|ui paraissent le mieux établies par l'observa- tion. Quelle vérité de ce genre pouvait être, en effet, mieux fondée que celle qui consistait à re- garder tons les quadrumanes comme des animaux légers, agiles, et non moins reuiartpiables par la vivacité de leurs sensations (pic par la promptitude de leurs mouvements? Les orangs et les gibbons, QUADRUMANES. 271 les senino|iillu''f|nes, les guenons et les maenques, et presque tous les quadrumanes de l'Aniéi-ique, sont en etïet des animaux qui, vivant de fruits ou d'insectes, elioisissent leur habitation à la einie des forêts, oit on les voit s'élancer de hianche en branche avec la rapidité du vol, surtout lorsqu'ils sont menacés et poursuivis. Le poucan, au contraire, parait avoir une indolence et une lenteur qu'on ne eheiclierait pas chez les ;ininiaux les plus exempts de besoins et les mieux armés contre leurs ennemis. On ne conçoit pas même comment la conservation de cette espèce peut s'accorder avec le naturel qu'elle a reçu. Deux auteurs qui ont pu l'examiner vivante, dObsonville au Bengale et Vosmaër dans la ménagerie du prin('e d'Orange, nous représentent le poucan comme s'ils eussent eu à parler d'un animal dégénéré, ou dont le développement n'aurait point encore été complet Le premier {Essais pliilosopliifiucs sur les mœurs de divers aniniaux élrniKjers. page 370) nous dit que la démarche de cet animal a (pielque chose de contraint, et que, même lorsqu'il parait se haier, il parcourt à peine un espace de quatre toises en une minute; et le second nous parle de la marche de son paresseux du Bengale, qui est le poucan, comme d'une sorte de reptation. Quoi qu'il en soit, cette espèce fait partie de l'harnionie générale, puisqu'elle se conserve, et l'exception qu'elle nous présente n'est qu'une [ireuve nouvelle de la puissance inliiiie de la nature. Fig. 'îl'J. — Nyc-licèbcilo \^i.\. Le poucan a environ un pied du boni du museau à la partie postérieure du corps; sa tête, de l'occiput au mufle, a deux pouces et demi, et, lorsqu'il a les pieds rapprochés l'un de l'autre, il a environ cinq jiouces de hauteur aux épaules; mais cet animal se tient rarement dans cette situ.'ilion; quand il marche à quatre pattes, ses jambes s'écartent de son corps, et sa poitrine et son ventre louchent presque à terre, ce qui lui donne une physionomie toute particulière et quelque res.sem- blance avec déjeunes chiens qui viendraient de naître et qui n'auraient pas encore la force de se soutenir. Cependant sa tête a une forme agréable, et sa ligure annonce de la douceur et de l'intel- ligence, ce qui vient principalement de la saillir de son front et de ses grands \eux rapprochés l'ini de l'autre. l' 272 HISTOIUE NATURELLE. Le SYSti'me de tieiitilion de eet animal est le même que celui des makis el des galayos, si ce n'est que la crèle du bord inlenie des M'aies molaires, au lieu d'èlie plus saillante à la parlie antérieure, est plus saillante à la postérieure; que les incisives supérieures sont placées à côté l'une de l'autre, l que la canine inférieure n'est pas aplatie à sa face externe, mais arrondie. Les organes du mou- vement ont aussi les plus grands rapports avec ceux des makis; on retrouve aux pieds de derrièi'e jusqu'à longie crochu du second doigt, mais, en général, les doigts paraissent plus courts el plus épais, et il n'y a point de queue. On serait aussi fondé à penser que les organes de la génération ne différent pas beaucoup do ceux des makis, d'après ce que rapporte d'Obsonville, que la verge était bien détachée du corps et couverte d'un prépuce. Quant à ce qu'il dit des testicules renfermés dans l'abdonjen, c'est que l'in- dividu qu'il avait sous les yeux était assez jeune, comme le prouvent les petites dimensions qu'il lui donne. Mais il diffère des animaux auxquels nous l'avons comparé jusqu'à présent par quelques-uns de ses sens; ses yeux ont des pupilles transversales, et c'est parce qu'au grand jour elles sont entière- ment fermées, que d'Obsonville en avait conclu que la lumière du soleil n'avait aucune action sur celte partie si sensible de l'œil; les oreilles sont assez grandes, et l'ouie parait être un des sens les plus délicats dupoucan. Les narines sont endurées par un mufle qui est surtout développé dans la parlie qui les sépare l'une de l'autre; la langue est rude et le corps est revêtu partout d'un pelage jiresque enlièrenient laineux, très-épais et très-doux, fort semblable à celui des makis, ce qui ne me permet pas de concevoir ce qu'a entendu Vosmaër, lorsqu'il a rapporté que le poil de son pa- resseux était rude au toucher. Les poils du museau sont plus courts que ceux des autres parties, et l'on aperçoit quelques moustaches sur les côtés du ne/, au-dessus des sourcils et au-dessous de l'œil. La couleur du poucan est un fauve gris, qui devient blanchâtre sous la gorge, le cou, la poitrine et le ventre, et qui prend une teinte d'un bi'un dore autour des yeux, sur le sommet de la tèle et tout le long- de la ligne dorsale. Une laclie blanche nait sur le front, ,se prolonge entre les yeux, et vient eitibrasser ies deux cotés du museau. Cet animal passe ses journées dans un sommeil assez calme, sans être profond, assis, le corps affaissé sur lui-même, et la télé posée sur la poitrine. Dès que le soleil est couche, il s'éveille, et ses ]iremiers soins sont de manger et de se débarrasser du superllu de ses repas de la veille. Son urine répand une fort mauvaise odeur, et ses excréments ont la forme des crottes de brebis. Il s-e nonriit de fruits succfilents et sucrés, mais principalement d'œufs, d insecles et de petits i iseaux, et il ne boit ]ias. Le pain, que mangeait volontiers celui de Vosmaèr, était rejeté si, auparavant, on l'ivait plonge dans l'eau. Cet animal, dit d'Obsonville, fait quelquefois enleiiilre une sorte de modu- lation de voix ou de siftlenienl assez doux. Je pouvais facilement distinguer le cri du besoin, du plai- sir, de la douleur, et même celui du chagrin ou de l'impatience. Si, par exemple, j'essayais de lui retirer sa proie, ses regards paraissaient altérés, il poussait une sorte d'inspiration de voix trem- blante, cl dont le son était plus aigu. Vosmaèr nous apprend que, lorsqu'on l'irrite, il pousse le cri continuel et l'éitéré d'aï, aï, aï, traînant fort longtemps, et d'une manière plaintive, chacun de ces sons. Il parait susceptible d'éducation; de légères corrections suffirent à d'Obsonville pour l'empêcher de mordre, et il s'était assez vivement altaclié à son maître. Voici ce que cet auteur nous rapporte en-' core de son thevangues ou tougre, qui est toujours le poucan : Aux a]i])roches de la nuit, il se frot- lait les yeux; ensuite, portant altentivement ses regards de tous côtés, il se promenait sur les meu- bles, ou plutôt sur les cordes que j'avais disposées à cet effet. Un peu de laitage, et quelques fruits bien fondants, ne lui déplaisaient pas; mais c'était un pis-aller; il n'était friand que de ])elits oiseaux ou d'insectes. S'il apercevait une pièce de pareil gibier, que je m'amusais à attacher à l'aulre exiré- milé (le la chambre, ou à lui présenter en l'aïqielant, aussitôt il .s'approchait d'nu pas allongé, mais circonspect, tel que celui de quidqn'uu qui uiarclie en làtonnanl. Arrivé environ à un pied de distance de sa proie, il s'arrêtait; alors, se levant droit sur ses jam- Ihs, il avançait debout, en élendant doucement les bras, puis tout a coup la saisissait et l'étranglait avec une prestesse singulière. (Fiiéd. Ciivii-i!.) I I I (jL'AUUUMANES. 273 7"^ GENRE. — LORIS. LORIS. (Geoffroy Saint-Hilaire.) CAllACTÈRES GÉNÉRKJllES. Qiialrc mamelles; lèle ronde; museau relevé; nez prolongé eu boutoir; point de queue. Ces animaux sont insectivores et carnivores; leur marche est très-lente, et lenr vie nocturne; ils habitent l'ile de Cejlan. Les loris ou singes paresseux ont les membres grêles et allongés, et point de queue; l'avanl-bras et la jambe plus longs que le bras et la cuisse. Us ont quatre mamelles, mais deux seulement ont Fig. 2'20. — Loris grêle. nne glande; les deux autres sont rudimentaires. Leur tète est ronde, avec un museau relevé, et le nez comme prolongé en boutoir. Les narines s'ouvrent sur les côtés d'un mufle glanduleux, divisé sur la ligne médiane par un sillon qui se continue sur toute la lèvre supérieure Les yeux sont 2G 274 HISTOIRE NATURELLE. grands, ronds et séparés seulement par une cloison osseuse très-mince. Ils ont, à la niSchoire supé- rieure, quatre incisives rudimentaires, pointues, les deux médianes très-distantes l'une de l'autre; deux canines coniques assez grandes, et six molaires à pointes ou à tubercules pointus. A la mâ- choire inférieure, on voit six incisives continues, longues, étroites, pointues et proclives. Deux ca- nines, croisant en arrière celles de la mAchoire supérieure, et cinq molaires à pointes et à tuber- cules aigus. Ils ont, à chaque main, cinq doigts et des pouces bien opposables. Les pouces des mains anté- rieures plus petits, ceux des mains postérieures plus grands, très-distants des autres doigts, aux- quels ils sont réunis par une membrane qui forme une sorte de tubercule. L'indicateur des mains postérieures est garni d'un ongle étroit, crochu et terminé en pointe; ceux des autres doigts sont plats et obtus. Chez le mâle, la veige est renfermée dans un prépuce, et les testicules ne sortent pas de l'abdomen; chez la femelle, le clitoris est si développé, qu'il couvre en partie l'ouverture delà vulve; il est aussi gros et aussi long que le pénis du mâle ; son extrémité est partagée en deux lobes, au milieu desquels se trouve l'orifice de l'urètre, dont le canal perce le cjiloris dans toute sa lon- gueur. LORIS GRÊLE. LOKIS GltACILIS. (Geoffroy Saint-Hilaire.) CARACTÈRES SPÉCIFIQUES. — Membres allongés, grêles; un tubercule caudal; pelage laineux, rous- sàtre. Habite l'ile de Ceylan. Le loris a le poil doux, lin, et d'une apparence laineuse; le tour des yeux est roux; les côtés du front, le sommet de la tête, les oreilles, le dessus et les côtés du cou, les épaules, la face externe du bras et du coude, des cuisses et des jambes, et le dos, sont roussâtres, l'extrémité des poils étant de cette couleur, landis que le reste est cendré jaunâtre. Au milieu du front, on remarque une tache blanche qui s'étend entre les yeux, sur le nez. Le bout du museau, les côtés et le dessous de la tête et du cou, sont blanchâtres. La poitrine et le ventre sont d'un gris blanc, ainsi que la faie interne des membres, oii le gris est mélangé d'une légère teinte jaunâtre. Ce quadrumane est nocturne, et sa démarche est lente et comme gênée. (Desmabest.) 8°" GENRE. — MICROCÈBE. MICROCEBUS. (Geoffroy Saint-Hilaire.) Mixpc;, jjL'til; y.r&i, singe. CAIIACTÈRES GÉNÉKKJUES. Quatre dents incisives supérieures, six inférieures Trois paires de nianieUes. Membres postérieurs plus tomjs que les antérieurs. Queue loncjue et velue. Sept vertèbres lombaires. Les microcèbes habitent l'ile de Madagascar Ce genre, établi par Lesson, pour le maki nain de Geoffroy Saint-Hilaire, est caractérisé ainsi : quatre incisives supérieures subégales, très-petites; six inférieures; canines subconiques; tête ronde; museau subaigu, sans moustaches , oreilles courtes, nues, â conque^ peu développée, et décrivant un segment de cercle; trois paires de mamelles; membres assez courts, les postérieurs plus longs que QUADRUMANES 275 les antérieurs, à tarses légèremenl allongés; queue longue, couverte de poils ras. s'amincissant en pointe, et finissant on pinceau grêle. Ces petits quadrumanes vivent sur les palmiers, dont ils mangent les fruits. MICROCÈBE DES l'AUlIliUS !\IICR0CEBVS PALMARUil. ( GeoflVoy Sainl-Hilairc.) Ce petit quadrumane, décrit par Buffon sous le nom de rat de Madagascar, et par I.esson sous celui de makirat des palmiers, a les yeux grands, entourés d'un cercle brun remontant sur le front, qui est roux-brun; ses poils sont gris et à pointe rousse; la poitrine, le ventre et la face interne des membres, sont d'un gris clair, tandis que le museau et les oreilles sont couleur de chair Fi" 221 ■ Microcètjj Les niicrocèbes ont des habitudes entièrement nocturnes, ainsi que le prouvent leurs yeux et leurs oreilles largement développés. Ils se tiennent sur les arbres, et nichent dans les trous qu'ils ren- contrent. Leurs jambes sont allongées, leur museau est court, et leurs dents sont fines et serrées. (Lessou.) \)"'- GENRE. — GALAGO, GÀLAGO. (Cuvier. CAKACTÈRES GÉNÉRIQUES. Deux OH quaire dents incisives verlicuks h la mâchoire supérieure. Oreilles membraneuses, conlracliles . Tarses trois fois aussi longs que les métatarses. On les trouve en Afrique, et particulièrement au Sénégal, où ils vivent dans les forêts de gom- miers. Les galagos ont la tête courte, arrondie; le museau effilé, et terminé par un mufle dans lequel les narines sont percées; leurs yeux grands et à fleur de tête, et leurs oreilles larges, membraneuses, contractiles, et se repliant comme celles de certaines chauves-souris, semblent annoncer des habi- tudes nocturnes ou crépusculaires. Les dents de la mâchoire supérieure au nombre de seize ou dix- huit; deux ou quatre canines verticales, les intermédiaires distantes l'une de l'autre parce que les 276 HISTOIRE NÀTURELI.E. os intermaxillaires ne sont pas soudés sur la ligne médiane; deux canines fortes et triangulaires douze molaires, les premières à une seule -pointe, les autres hérissées de tubercules. A la mâchoire inférieure, six incisives très-longues, très-étroiles, horizontales; les moyennes petites, et comme cré- nelées ; deux canines fortes et crochues; dix molaires semblables aux supérieures. Les membres postérieurs sont très-grands, par la longueur des tarses, qui est de trois fois celle des métatarses, et donne une dimension disproportionnée à leurs mains inférieures, dont le second doigt est allongé, filiforme, et armé d'un ongle effilé en alêne. Us sont doux, agiles comme des écureuils; leur régime est frugivore et insectivore. Leur queue est longue et touffue à l'extrémité. 1. GAI.AGO A QUEUE TOUFFUE. GALAGO CRASSICAVDATVS. (Geoffroy Saiiit-Uilairc.l Caractères spécifiques. — Pelage gris-roux; oreilles très-grandes; queue touffue. Habite l'Afrique, région indéterminée. Cette espèce a le pelage doux, d'un gris uniformément roux; sa queue est très-touffue, et ses oreilles sont d'un quart moins longues que la tête. l'Ig '2'22. — (Jaiaan à queue loulîu?. GnI.Tgo clo MailaRviscar. PI- r,n QUAUKUMANES. 277 2. GAI.AGO DU SÉNÉGAL. GALAGO SENEGALEXSIS. (Geoffroy Saint-Hilaire., Cakactkbes spécifiques. — Pelage gris; oreilles presque aussi longues que la lète; queue plus longue que le corps, et terminée en pinceau. Habite le Sénégal. Le pelage de celte espèce est gris-roux; ses oreilles, presque aussi longues que la tête, se termi- nent en pinceau ; le dessous du corps est blanchâtre, ainsi que les extrémités; la queue est brunâtre; une sorte de cercle noir entoure les yeux, qui sont gros et amples. Vif et pétulant, ce galago habite les forets de Mimosas, qui se rencontrent aux extrémités du désert de Sahara. 3. GALAGO DE MAD.4GASCAU. GALAGO DEMIDOFFll. (Geolfroy Saint-Hilaire.) Caractères spécifiques. — Pelage roux-brun; museau noirâtre; oreilles moins longues que la tête; queue plus longue que le corps, touffue à l'extrémité. Habite l'ile de Madagascar. Les galagos ont reçu, de Lessoii, le nom générique de léromaque {7)iioxicebus,} qui conviendrait plus particulièrement à cette dernière espèce. Fig. 223 — Squelette de loris. 278 HISTOIRE NATURELLE. TllOlSIEME FAMILLI-. - TARSIENS. Vy.jn'.i;, tai'>e. Celle famille a été établie par M. Isidore Geoffroy Saiiit-IIilaire pour deux petits quadrumanes nocturnes qui présentent presque tous les détails de forme des yalagos, mais qui en diffèrent par des caraetères très-tranchés : leurs mamelles, au nombre de deux, sont inguinales ; leurs dents in- cisives inférieures sont verticales; leurs mains postérieures ont les doigts indicateur et médian très-courts et à ongles allongés; et enfin leurs tarses sont démesurément longs, ce qui a valu à ces animaux le nom de tarsiens. La ruse est la ressource du faible, dit Geoffroy Saint-Hilaire, sous peine pour eux d'entrer dans la vie sans pouvoir s"y maintenir. Or, toute la tête du tarsien me parait être celle d'un animal très- rusé. La boite crânienne est sphéroidale, aussi bien renflée au vertex qu'arrondie à l'occiput. Les caisses auditives sont si grandes, qu'elles se touchent à leur bord interne, et cependant le trou oc- cipital est presque au centre de la base du crâne. Les yeux sont si volumineux, que le reste de la face en est débordé. Cette famille ne comprend qu'un seul genre GENRE TARSIER TARSWS (Storr.) CARACTÈRES GÉINÉRIOUES Deux iiKiiiicUes imiuinulen . Iknts incisives inféricHres verlicales. Doigts indicateur et médian des mains inférieures courts et à omjtes subulés et arqués. Tarses trh-longs; le tibia et le péroné soudés dans une partie de leur étendue. Queue longue et touffue h l'extrémité. Les tarsiers habitent les Moluques, l'archipel Indien. .\ ces caractères, on peut ajouter que les doigts, bien séparés les uns des autres, sont terminés par des ampoules charnues, et que leur pelage est doux et formé de poils assez longs. Le régime FIg '2'2'i'. — Main antérieure de tarsier Kig. 2'2ô — Main postérieure de tarsier QUADRUMANES. 279 lies tarsiers est frugivore el insectivore. Le systc''me dentaire de ces animaux présente deux inci- sives verticales ù la mâchoire inférieure et quatre à la mâciioire supérieure : les deux médianes très- développées et plus fortes que les canines. Cette disposition anomale, dit Geoffroy Saint-Ililaire, constitue pour les tarsiers dés conditions si singulières d'organisation, qu'elles justifient les natu- ralistes d'avoir hésité dans le classement de ces êtres. Cette anomalie a cela aussi de remarquable qu'elle frappe cette espèce pour la rendre comme étrangère à ses congénères, et qu'elle semble rompre un ordre d'affinités si exactement suivi parmi («s quadrumanes; cependant ce n'est point au hasard et sans que l'esprit puisse pénétrer dans les motifs de ces désordres apparents : c'est le fond commun d'organisation, ce sont de mêmes organes accrus déjà pour procurer les moyens de la vie nocturne, qui, dans les tarsiers, sont portés à un beaucoup plus grand volume, mais qui n'obtiennent ce maximum de développement qu'en imposant une condition de minimum aux parties du voisinage. 1 TARSIEIÎ SPECTRE. TARSIUS SPECTRVSI. (Pjllas ) C.\R.\cTÈRES spÉciFiQDEs. — Pelage brun roussâtre ; les mains rousses; oreilles moyennes. Habite l'île de Sumatra. Fig. 226. — Tarsier spectre. 280 HISTOIRE NATURELLE. Celtf espèce a le pelage doux, laineux, cendré noirâtre et fauve vif à la pointe des poils, sur le dos, la croupe et le ventre, plus clair sur le reste du corps; la queue est longue et terminée par une touffe de poils 2. TAHSIER AUX 5IAINS BRUNES. TAnSlUS FUSCOMASUS. (Fischer.) Caractères sfÉciFiQUES — Pelage brun roussâlre; les mains brunes; oreilles assez "randes. Habile l'ile de Madagascar. Cette espèce a le pelage gris-blanc sur le ventre, et sa taille ne dépasse guère celle d'un mulut de France. On cite bien encore le tarsier de Banca, icusiiis fnscus, de llorsiield, des Moluques; et le tarsier d'Amboine ; mais ces espèces sont trop i)eu connues pour qu'il soit possible de les admettre dans notre travail. li;; '2^7. — l'ni()illiùi|ue à diaiiémc. Avc-Ayc ili! Mail.iB'isi'i" QUADRUMANES. 281 QUATRIÈME FAMILLE. - CIIEIROMIENS. Xiip, main; ,".u;, ral. Celle famille se compose de quadrumanes qui s'éloignent beaucoup du type de l'ordre; les uns, connus sous le nom d'aye-a\e, les autres sous celui de galéopilhèques, semblent établir le pas- sade des singes aux rongeurs et aux chauves-souris. 1" GENRE. — AYE-AYE. MYSPITHECUS. (De Blainville. M\j;, rai ; ittOc,;, singe. CARACTERES GENERIQUES. Dents incisives comprimées latéralcmoit, dccrivant un demi-cercle et profondément cchancrccs. Mamelles abdominales. Mains antérieures très-grêles, h dohjts longs, armés d'ongles recourbés; le pouce des mains postérieures opposable et h ongle aplati. Queue touffue, longue et couverte de poils rudes. Les aye-ayes habitent l'île de Madagascar. Ces animaux doivent, dit-on, leur nom à l'étonnement que leur vue inspira aux Madé^;asncs, qai ne les connaissaient pas. Sonnerat, qui découvrit ce curieux animal, dit qu'il se creuse des ter- ( y Fig. 228. — Main antérieure d'aje-ayc. 27 Fig. — 229- Main poslûrieuro d'ayc-ayc. 282 HISTOIRE NATURELLE. riers; cependant il est [ilus probable qu'il vit sur les arbres, et trouve une retraite dans les trous ou les crevasses de leurs troncs. ^YE-AYE UADÉCASSE. ^liSPITIIECVS MADAGASCMtlEXSIS. (Lncépcdu.) CAn.iCTÈREs si'ÉciFKjuEs. — Pelage rude, de couleur brune mêlée d.e jaunâtre; le dessous du corps fauve; queue longue, touffue et garnie de longs poils noirs et durs. Habite l'île de Madagascar. L'aye-aye ressemble aux écureuils par le port et par la queue; ses dents incisives sont encore plus comprimées par les côtés, et plus larges d'avant en arriére que les leurs; mais soii principal I araclère consiste dans les doigts Irès-ailongés des mains antérieures et dans le pouce séparé et opposable des mains postérieures. Les poils de la queue sont dirigés sur les cotés et la rendent plate comme celle des écureuils. Le dos et les cuisses sont recouverts d'un duvet laineux et jau- nâtre que dépassent beaucoup de soies brunes; les quatre pieds sont d'un brun roussâtre, le de- hors est jaunâlre. La tête est surmontée de grandes oreilles mince.s et presque nues. On ignore quel usage cet animal fait de ses mains singulières. Sonnerat pense que le doig'l long et grêle lui sert à pénétrer dans les trous de l'écorce des arbres pour y chercher des larves d'insectes. Des aye-a\es qu'il a nourris employaient ce doigt pour porter à la bouche le ni cuit qu'il leur donnait. Cet ani- mal voit mal pendant le jour, et est d'un naturel très-paresseux, dormant pendant presque toute la journée couché sur le côté et la tête entre les jambes; sa démarche est lente et pénible, et il parait Irès-crainlif (Cuvif.r.) 2"' GENRE — GALÉOPITIIÈQUE. GALEOPITHECUS. (Pallas.) raXï,, chat; -i9r,|, singe. CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Un repli de In pcan, partant de la commissure des lèvres, enga'je les membres jusqu'aux doifjts cl tonte la (jncue. Membres d'éfjalc lonejucur. Mains pcntudacttflcs, a onr/lcs tranchants cl acérés, sans pouce opposable. Deux paires de iitamelles pectorales. Tête conique; ntuscuu pointu. Dents sillonnées verticalement. Les galéopithèques habitent les îles des Indes orientales. Ces animaux singuliers, que les uns considèrent comme un lémurien, les autres comme une chauve- souris, établissent réellement le chaînon intermédiaire qui unit les makis aux chauves-souris; ce sont les formes des premiers, avec les membranes qui lient les membres des seconds. Mais, chez les galéo- pithèques, cette membrane est caractéristique; elle naît des côtés de la tête derrière la commissure des lèvres, enveloppe les membres antérieurs jusqu'aux doigts, et s'étend de la même manière sur les postérieurs, sans en excepter la queue, qui se trouve complètement engagée dans ses replis. Chez les chauves-souris, il y a exagération de l'extrémité des membres antérieurs, et la membrane qui réunit les doigts est mince, nue, étendue en un léger réseau. Chez les galéopithèques, au con- traire, les bras et les mains ne différent point, par leurs proportions, des jambes et des pieds, et la membrane qui les enlace constitue un manleau d'un tissu épais, résistant, très-velu sur sa face dor- sale. QUADRUMANES. 287. Les galéopithèqucs sont aussi caractérisés par un système dentaire composé, à la mâchoire supé- rieure, de quatre incisives, deux canines et douze molaires, et, à l'inférieure, de six incisives, deux canines et dix molaires. Leurs habitudes sont ;1 peu près celles des roussettes; ils vivent comme elles de fruits et d'inseeles, et s'accruclient aux branches par leurs pieds, dit-on, poui' dormir suspen- dus la tète en bas. Pendant le jour, ils fuient la lumière, et se tiennent taches dans les endroits les plus abrités des forêts. Ils n'en sortent que le soir, pour chercher leur nourriture, en se servant de leurs membranes comme d'ailes, ou plutôt comme de parachutes, car leur vol est fort incomplet, lourd et embarrassé. Leur chair, qui a une odeur forte, plaît singulièrement à diverses peupladcL;, qui s'en nourrissent. (Lessox.) Décidément, dit Geoffroy Saint-Hilaire, dans une de ses leçons, le galéopithèque n'est point une chauve-souris, et nous devons en être certains après avoir constaté que les membres antérieurs sont une exacte répétition des postérieurs. Des doigts courts aux mains changent toute l'énonomie, et restreignent l'exercice de l'instrument du vol; c'est une aile qui ne s'est point produite entièrement; or, un mammifère caractérisé par un vol impuissant, sous le rapport des moyens organiques et de leurs fonctions, n'est point une chauve-souris; le galéopithèque n'est donc point une chauve-souris, puisqu'il manque du caractère essentiel à cette famille. (Geoffroy SAhM-IlimnE.) Les galéopitiièques ont chaque membre terminé par cinq doigts, tous dirigés dans le même sens, réunis par une palmature assez ample, et terminés par des ongles comprimés, aigus et très-forts, qui leur permettent de grimper aux arbres avec facilité. Leur tête présente un front un peu bombé, des oreilles arrondies, des yeux assez grands et des narines percées dans un mufle comme celles des makis. Leurs mamelles sont pectorales et au nombre de deux paires fort rappochées l'une de l'autre. (Gervais.) On cite plusieurs espèces de galéopithèques. 1. GALÉOPITHÈQUE VARIÉ. GALEOPITBECVS VARIEGATUS. (Geoffroy Saint-llilaire. ) Caractères spécifiques. — F'elage d'un brun sombre, tacheté de blanc sur les membres, avec des traits noirs. Habite l'île de Java. Cette espèce est considérée, par quelques auteurs, comme le jeune âge du galéopithèque roux, ce qui semble assez probable. 2. GALÉOPITHEQUC: UOUX. GALEOPITBECVS RUFUS. (Pallas.; Caractères spécifiques. — Pelage rouge cannelle, sans taches, roussâtre inférieuiement; membres blancs à leur face interne. Habite les îles Pelew, Cet animal est très-commun dans la péninsule et les îles Malaises; il se pend aux branches des arbres par les pieds ou par les mains. Sa membrane, semblable à des ailes, ne peut lui servir à voler; mais, lorsqu'elle est étendue, elle remplit les fondions de parachute, et, à son aide, il peut faire des sauts considérables d'un arbre à l'autre. La teinte du dos, chez les jeunes, est plus distincte et plus variée que celle des adultes. 284 HISTOIRE NATURELLE. 3. GALÉOPITHÈQUE DE TF.RNATE. GALEOPITUECrS TERNATEXSIS. (Geoffroy Snint-lliinire.) Caractères spécifiques. — Pelage gris-roux, serré et doux comme celui de la taupe; quelques ta- ches blanches sur la queue. Habite les archipels d'Asie, depuis Java, Ternate, Céraiii, jusqu'à Timor. 4. G.\LÉ0[>1T1IÈQUE DES l'IllLIPWXES. GALEOfITlIECUS rilII.IPriXEXSIS. (Walei lieuse.) Caractèiies spécifiques. — Museau large et obtus; incisives supérieures étroites et lisses. Habite les îles Philippines, Bohol et Mindanao. Cet animal, dit M. Cuming, est inoffensif; il vit dans les arbres des forets les plus épaisses, et se nourrit des feuilles du jaquier, aux branches duquel il se suspend par les quatre extréniilés. Il vole l'espace d'une centaine de mètres en décrivant une ligne oblique et inclinée; il relève sa queue cl les replis de sa peau pour satisfaire à ses besoins; et les indigènes s'en rendent très-aisément maîtres et le prennent à la main. La femelle ne fait qu'un petit, auquel elle est singulièrement attachée, et qu'elle porte sur la poitrine. (Lesson.) Fi". 250, Galcopilhèque des Philippines. Ali'-lc l'i r.s DES SINGES EN GÉNÉRAL a FORMES EXTÉRIFinES - ALLURES — CARACTÈRES. En rcaidanl un singe, dit Geoffroy Saint-Hilalre, il me semble voir un animal à beaucoup d'é- gards conformé comme l'homme, dont il retient, avec altération, et comme par une sorte d'abâtar- dissement, les principaux traits; un être placé, au physique et au moral, sous l'influence d'une si- tuation moyenne entre se tenir droit et se tenir couché. La tailledes animaux que nous désignons en général sous le nom de singes est très-variable; les uns ne sont même pas si gros qu un rat, tandis qu'il y en a qui atteignent la taille de l'homme. Les uns sont grêles, sveltes, légers et nerveux, les autres sont lourds, obèses et trapus. Beaucoup de singes, par leurs formes analogues à celles de l'homme, paraissent en être la cari- cature; mais il y en a qui, au point de vue des formes extérieures, ressemblent complètement à des animaux d'ordres inférieurs; les uns peuvent, à première vue, être comparés à l'écureuil; d'autres au chien au renard, au rat, etc., etc., comme nous l'avons vu. Ces animaux ont souvent des mem- bres peu proportionnés au volume de leur corps, et la longueur démesurée des bras est souvent un signe de la lenteur des mouvements; ils sont couverts de poils plus ou moins longs et serrés, sui- vant les espèces, mais le ventre et les parties internes des membres sont quelquefois presque nus. L couleur du pelage varie beaucoup, et quelques espèces sont remarquables par la disposition et la coloration vive des poils qui les couvrent. Il en est qui ont un véritable manteau de poils blancs, comme le colobe guéréza, et d'antres qui ont une épaisse crinière, comme l'hamadryas. Les uns n'ont pas de queue; elle est très-longue dans la plupart des espèces, mais elle présente, chez les uns, une disposition particulière qui en fait un organe supplémentaire de préhension; d'au- tres, en petit nombre, l'ont très-touffue et garnie de longs poils. La physionomie des singes est d'une mobilité extrême qui répond à la mobilité de leur caractère. Sur leurs traits, dit Lcsson, se réfléchissent avec vivacité les passions qui les animent; leurs mali- •cieuses grimaces sont depuis longtemps passées en proverbe. Rien, en effet, n'est plus ridicule, au premier aspect, que ces figures grippées qui rappellent les traits de la figure humaine et en repré- sentent la charge la plus grotesque. On a longuement discuté pour savoir jusqu'à quel point les sin- ges les plus rap]irochés de l'espèce humaine se servaient de leurs membres, et si la station bipède leur était ordinaire. Il est bien démontré, aujourd'hui, que ce n'est jamais qu'en employant leurs quatre membres que leur course est agile, et que leur adresse fait usage de toutes les ressources de leur appareil locomoteur. Ce n'est qu'accidentellement qu'ils cheminent quelques instants sur les membres postérieurs seuls, et encore est-ce, le plus souvent, en se servant de branches pour appui. Mais la gêne de leurs mouvements, le peu de stabilité de leur démarche, leur habitude d'appuyer sur le bord externe du pied, prouvent que cette position est bien loin de leur être le moins du monde familière; l'hésitation qu'on remarque, d'ailleurs, entre les deux allures bipède et quadru- pède, et le choix immédiat de cette dernière pour fuir un danger, prouvent surabondamment que la station droite, qui rencontre un puissant obstacle dans le poids de la tête, n'est pas plus naturelle à ces animaux que ne l'est pour nous la marche à quatre pieds que nous pouvons exécuter excep- tionnellement. Si la station de ces êtres, comme le fait parfaitement observer Geoffroy Saint-Ililaire, se rap- proche, à quelques égards, de celle de l'homme, ce peu suffit pour que les habiludes soient profon- démcni modifiées. Il y a, en effet, des singes qui, gardant quelque équilibre dans la station à deux 286 HISTOIRE NATURELLE. pieds, seront aussi portés à moins de pétulance, moins occupés de gambades, et montreront, en général, des mœurs plus graves. Les variations que présentent les divers singes à cet égard, tien- nent principalement aux formes variées du crâne, qui devient de plus en plus long d'arrière en avant, et, il n'y aurait que ce seul caractère, qu'on en peut et doit conclure un entraînemeni plus décidé vers la marche à quatre pieds, et les membres eux-mêmes sont mis en rapport avec la confor- mation de la tête. Fig. 251. — Orang-oiilang, d après un vélin du Muséum. (Dessin assez mauvais.'. Ces données de structure organique portent aussi à des mœurs plus ou moins modifiées dans les degrés assignés par l'organisation. Les singes à long museau ont des passions plus violentes; ils sont insensibles aux caresses, et ne se calment que par la crainte des châtiments. Menacés de coups, ils sont furieux et criards, font des grimaces qui varient à l'infini en agitant, comme convulsive- ment, tous les muscles de la face, et les mâles s'animent brutalement â la vue des femmes. Leur lascivelé s'explique par le développement souvent considérable des surfaces occupées par du tissu érectile qui s'élend sur la peau des fesses, surtout chez les espèces â museau de chien, et se voit même sur une grande parlie de la face de quelques-uns; le développement du tissu érectile et sa co- loration n'ont lieu qu'à l'âge de puberté QUADRUMANES. 287 Fi". iJS. — Orang-oulang, d'après un ancien vclin du Jluscuni. 988 HISTOIRE NATURELLE. Capricieux en excès, les singes conservés en captivité sont très-irascibles, et souvent sans sujet; doux et éducables pendant le jeune âge, ils ne tardent pas à devenir mécliants, intraitables, se je- tant traîtreusement sur les personnes qui les approchent, et n'étant retenus que par la crainte du châtiment. Les mâles surtout passent plus facilement de la douceur à la colère. Soit jalousie, soit sentiment de leur force, ils sont presque toujours disposés à maltraiter les enfants; l'histoire parti- culière de certaines espèces nous en a offert des exemples. Parmi les singes, les uns sont diurnes, et se livrent à toute leur activité pendant le jour; d'autres sont crépusculaires, et ne sortent de leurs retraites qu'au moment du coucher du soleil; d'autres, enfin, sont nocturnes, et se tiennent cachés dans des trous ou sous le feuillage pendant toute la journée. Frédéric Cuvier, auquel on doit de si importantes observations sur les mœurs des animaux, dit qu'un très-grand nombre de singes sont polygames, et vivent par petites troupes; mais il est certain que quelques-uns sont monogames. Intermédiaires, pour ainsi dire, entre les mammifères et les oi- seaux, ils ne viennent presque jamais à terre, et se tiennent presque constamment sur les arbres C'est ainsi que, dans les vastes forêls du Brésil et de l'Afrique, ds voyagent de branche en branche et d'arbre en arbre, en cherchant les fruits et les œufs d'oiseaux, dont ils font leur nourriture ha- bituelle. Dans quelques espèces, les petites troupes ne font chacune qu'une famille réunie sous la direction d'un vieux mâle; celui-ci est suivi par tous les autres, qui se rassemblent à sa voix : c'est du moins ce qu'on rapporte des singes hurleurs du Brésil et du Paraguay, dont les cris retentis- sants sont rendus plus sonores par une disposition très-singulière du larynx. Trè.s-rapides dans leurs mouvements, ils examinent ce qu'ils rencontrent d'un peu remarquable sur leur chemin; mais cet examen n'a que la durée de l'éclair, et ne semble donner lieu, chez eux, à aucune réflexion; car on les voit revenir à plusieurs reprises sur le même objet, et le regarder en le retournant rapidement sous toutes ses fiices, comme s'ils ne l'avaient pas encore aperçu. Ils changent d actions vingt fois par minute, et remplacent les unes par d'autres qui n'ont avec elles aucune espèce d'analogie ou de rapport. Us passent aussi subitement de l'état tranquille aux gestes les plus désordonnés et à la manifestation de la colère la plus furieuse. Leurs sens les dominent avec énergie, et chacun d'eux semble commander seul à son tour. Aussi les voit-on successivement passer de l'indolence à la gloutonnerie et aux excès de la lubricité la plus dégoûtante. Dans la captivité, on observe que cer- tains individus, et surtout de sexes différents, sont susceptibles de prendre de l'affection l'un pour l'autre; mais cette affection ne va pas jusqu'au partage tranquille des aliments qu'ils aiment : dans ce cas, ils diffèrent néanmoins des carnassiers, en ce que, au lieu d'employer la force pour rester seuls maîtres de l'objet convoité, ils ont toujours recours à l'adresse pour l'enlever furtivement à celui qui le perd de vue un seul instant. L'apprentissage au vol est le fond de l'éducation que les femelles donnent à leurs petits. Pendant leur jeune ûge, elles les soignent d'abord avec la plus grande tendresse, les transportent partout dans leurs bras, et leur donnent souvent à tetcr; mais cela ne dure ainsi que tant qu'ils ne peuvent manger seuls. Quand cette époque est venue, elles cessent, non-seulement de leur donner des aliments, mais elles s'emparent de tous ceux qu'on leur distribue, s'ils les laissent tomber. {Dictionnaire des sciences naturelles.) Les singes gardés en captivité, en Europe, succombent en peu d'années, comme nous l'avons déjà dit, mais une cause fréquente aussi de leur mort tient à une habitude de quelques espèces. On remar- que, en effet, qu'un assez grand nombre de singes prennent plaisir à se ronger l'extrémité de la queue sans être arrêtés par la douleur de la plaie qui en résulte, et qui, ravivée chaque jour, finit par gagner la moelle épinière et déterminer la mort. Avalii lanigère. l'I. '29, QUADRUMANES. 289 Fig. 233. — Chimpanzé, d'après un ancien véiin du Muséum. 28 57 290 HISTOIRE NATURELLE. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Les parties du monde habitées par les singes sont les régions intertropicales; cependant quelques espèces dépassent ces limites; toute l'Afrique parait être habitée par diverses espèces de singes, mais surtout la c(Me occidentale et l'extrémité méridionale; quelques espèces seulement se montrent sur la côte nord. Un seul représentant de cette grande famille se trouve en Europe, et encore n'existe-t-il que sur un point limité, les rochers de Gibraltar. Les parties méridionales de l'Asie et les îles de l'archipel indien fournissent un grand nombre de grandes espèces, et l'on en trouve aussi quelques-unes dans les provinces méridionales du vaste empire chinois. L'ile africaine de Madagascar fournit aussi un assez bon nombre d'espèces, mais elles forment un type particulier dans la famille; ce sont tous des lémuriens ou singes à museau pointu. Aucun singe ne se trouve à la Nouvelle-Hollande ni à la Nouvelle-Zélande, qui ne renferment en quelque sorte que des animaux d'une organisation toute particulière. L'Amérique enfin, si riche pour le naturaliste, fournit dans ses provinces centrales un grand nombre d'espèces remarquables, la plupart non-seulement par la gracieuseté de leurs formes, mais encore par la douceur de leur caractère. Les grandes limites géographiques pourraient en quelque sorte servir à classer les singes; car les espèces de l'ancien continent, Europe, Asie et Afrique, forment une famille à type particulier bien différent de celui que présentent les singes américains. Ces animaux constituent dans les diverses contrées des genres particuliers, parce qu'ils offrent des différences caractéristiques dans leur organisation, et ce ne sont guère que les guenons et les macaques qui offrent à la fois des espèces dans l'Asie méridionale et dans l'archipel indien, mais encore ces espèces sont-elles parfaitement distinctes entre elles. Les orangs et les semnopithèques sont particuliers à l'Asie et à ce même archipel indien; les cynocéphales et les troglodytes à l'Afri- que ; les sapajous, atèles, alouates, sakis, sagouins et ouistitis à l'Amèi'ique. Quoique les macaques et les guenons soient communs, ainsi que nous venons de le dire, à r.\fri- que et à l'Asie, on reconnaît néanmoins que le plus grand nombre des espèces du premier genre appartient au dernier de ces continents, et que c'est le contraire pour le genre des guenons, qui sont presque toutes du .Sénégal, du Congo ou du cap de Bonne-Espérance. Certains caractères distinguent parfaitement les singes de l'ancien continent de ceux qui habitent le nouveau, et ces caractères sont les uns positifs et les autres négatifs. Ainsi, tous les singes afri- cains ou asiatiques ont les narines séparées par une cloison fort mince, tandis que ceux d'Amérique ont une large cloison entre ces ouvertures. Tout singe pourvu de callosités ou d'abajoues est de l'ancien monde, bien qu'il existe en Asie quelques singes qui ont leur bouche sans duplicature de la peau interne et leurs fesses complètement revêtues de poils. Toutes les espèces sans queue, ou à queue rudimcntaire, ou celles enfin à queue courte, sont de l'ancien continent. Au contraire, tout singe à queue longue et prenante, soit que cette partie soit velue ou non à son extrémité, est propre à l'Amérique méridionale. [Diclioimaire.des sc'ieyices naturelles.) lîiieiKiit iiisrias. 11. 34 DIVERSES CLASSIFICATIONS DES QUADRUMANES. BUFFON. SINGES. J'appelle sinçie un animal sans queue dont la face est aplatie, dont les dents, les mains, les tluigis et les ongles ressemblent à ceux de l'homme, et qui, comme lui, marche debout sur ses deux pieds. Cette définition, tirée de la nature même de l'aninial, et de ses rapports avec celle de l'homme, exclut, comme l'on voit, tous les animaux qui ont des queues, tous ceux qui ont le museau long, tous ceux qui ont les ongles courbés, crochus ou pointus, tous ceux qui marchent plus volontiers sur quatre que sur deux pieds (Bdffon.) B.\BOUINS. Après les singes, se présente une autre famille d'animaux, que nous indiquerons sous le nom générique de babouins; et, pour les distinguer nettement de tous les autres, nous dirons que le ba- bouin est un animal à queue courte, à face allongée, à museau large et relevé, avec des dents canines plus grosses à proportion que celles de l'homme, et des callosités sur les fesses. Par cette détini- lion, nous excluons de cette famille tous les singes qui n'ont point de queue, toutes les guenons, tous les sapajous et sagouins qui n'ont pas la queue courte, mais qui tous l'ont aussi longue et plus longue que le corps, et tous les makis, loris et autres quadrumanes qui ont le museau mince et pointu. (BnFFON.) GUENONS. Après les singes et les babouins se trouvent les guenons; c'est ainsi que j'appelle, d'après notre idiome ancien, les animaux qui ressemblent aux singes ou aux babouins, mais qui ont de longues queues, c'est-à-dire des queues aussi longues ou plus longues que le coips. Le mot guenon a eu, dans ces derniers siècles, deux acceptions différentes de celle que nous lui donnons ici : l'on a erjployé ce mot guenon généralement pour désigner les singes de petite taille, et en même temps on l'a employé particulièrement pour nommer la femelle du singe. Mais plus anciennement nous appelions singes ou magots les singes sans queue, et guenons onmones ceux qui avaient une longue queue. (Buffon.) SAPAJOUS. Tous les sapajous se servent de leur queue, comme d'un doigt, pour s'accrocher cl même pour saisir ce qu'ils ne peuvent prendre avec la main. (Buffon.) SAGOUINS. Les sagouins, au contraire, ne peuvent se servir de leur queue pour cet usage; leur face, leurs oreilles, leur poil, sont aussi différents. (Buffox.) Les lémuriens, décrits par Buffon, sont indiqués parmi les animaux sauvages et exclut. t. (le sa nomenclature des singes. 292 HISTOIRE NATURELLE. GEOFFROY SAINT-HILAIRE, ^8^2. PREMIER ORDRE. - QUADRUMANES. Kornies Immaines; mnnielles peclorales; membres faibles comme support, mais dans tout leur développement comme organes de prclieiision; potice opposable aux quatre pieds. PREMIÈRE FAMILLE. — SINGES. Dents incisives au nombre de quatre, opposées dans les deux mâchoires; ongles des doigts de même forme, sauf celui du pouce, qui est plus aplati. PREMIER GROUPE. — CATARRHINIENS. ou sikges de l'ancien continent. Cloison des narines étroite; narines ouvertes au-dessous du nez. A. Sans queue. \" genre. Troglodyle. Troglodiftes. Orne — Orang. Pitliecus. ô'"' — Pongo. Pongo, B A queue 7)on prenante. 4">e _ Iiidris. Indri. Maki. Lcmiir. Lori. Loris. Nycticèbe. Nijclicebus. Galago. Galaf/o. Tarsier. Tarsius. Fig. 234. —Maki brun. 294 [IISTOIRE NATURELLE. G. CUVIER, 1828. DEUXIÈME ORDRE. - QUADRUMANES. PREMIÈRE FAMILLE. — SINGES. PREMIÈRE TRIBU. - SINGES DE L'ANCIEN MONDE. 1" genre. Singes sans queue. 1'' sous-genre. Orangs. jme — Gibbons. 2"" genre. Singes à queue. 1" sous-genre. Guenons. 2™" — Semnopilhèques. 5me — Macaques. 4"" — Magots. 5™' — Cynocéphales. (\mt — Mondrils. DEUXIÈME TRIRU. — SINGES DU NOUVEAU MONDE 1" genre. Sapajous. 1" sous-genrc. Alouates. omc — Alèles. Sme — Lagotriches. 4""" — S.iïmiris. 2nie genre. Sakis. \" sous-gcnre. Pithecias. onie — Brachiurus Snii-- _ CallUlirix. 41UC — Noctiiores. DEUXIÈME FAMILLE. — Ot'ISTITIS. 1" genre, lacchus. 2'"" — Midas. TROISIÈME FAMILLE. — LÉMURIENS. 1" genre. Makis. 2"" — Indris. 5""= — Loris. 4me — Galagos. 5""^ — Tarsiers. Cuvier classait les Galéopilhèques à la suite des Cheiroptèies. QUADRUMANES. 295 DE BLAINVILLE. DEUXIÈME ORDRE. - QUADRUMANES. PREMIÈRE FAMILLE. — SINGES. ANTnnOPITHÈQVES. Genre Chimpanzé. BRACBIOPirnÈQUES. i" genre. Orang. Pitliccus. ^me — Gibbon. Ihjlobales. SINGES PROPREMENT DITS. \" genre. Semnopithèque. Semnophliecus. 2 me — Guenon. Ccrcopitliccus. S"" — Macaque. Macacus. 4"ie — Cynocéphale. Cynoceplialus. 5"' — Mandril. Maliuon. DEUXIÈME FAMILLE. — SAPAJOUS. 1" genre. Alouate. Stentor. 2'"' — Alèle. Atctes. 3"» — Sapajou. Cebiis. 4°" — Saïniiri. Sahuiri. 5"" — Saki. Saki. TROISIÈME FAMILLE - OUISTITIS. Genre Ouistiti. Incclius. QUATRIEME FAMILLE. — MAKIS. i" genre. Indri.s. Iiidn ^me — Maki. Lciinir. 5""" — Lori. Stcnops. 4me — Gaiago. Gaingo. 5me — Tarsier. Tursiws. CINQUIÈME FAMILLE. — MYSPITHÈQUES, Genre Aye-Aye. Cliciromh. SIXIÈME FAMILLE. — GALEOPITIIÈQUES. Genre Galéopitlièquc. GalcopUliccus. -2% IIISTOIUK NATURELLE. DUVEUNOY, 1854. DEUXIÈME ORDRF. - QUADRliMANES. Esliciiiiléi moiiiUiîes pour griiiipoi; trois sortes de dents: incisives, canines, molaires, en si5rie continue, sanl l'inliiv;ille oit se place chaque canine de la luàchoire opposée. PREMIÈRE DIVISION. — SINGES. A chaque mâchoire, quatre incisives verticales ou peu incluaVs. PREMIÈRE FAMILLE. — SIXGES DE LANCIEX CONTINENT. Même système de lU-nlilion que l'homnie; les vraies molaires à tubercules mousses; les canines ilcpass,inl de heaucoup les incisives, et se plasant dans un intervalle de la siSrie des dents opposées quand la bouche est rcrinéc; les narines percées au kis du ne?.. I" 1,'iMiro. Grang;. Piihccus. (lEOFFiiov. 2"" — Cliimpaiizo. Trofilodiiics. Geoffroy. 5'" — Gibbon, lliiloluitcs. 1i.lic.er. i'"- — Semiiopiilu'(|iii'. ScimiopiilHciis. l'"ni^;n. C.uvikk. 5'"' — Guenon. C.crcopitlurus. Eiim.kben. G'""' — ALicaque. Mncanis. L.xcÉrftnE. T"' — Cynoci^phali". Ctiiwccphalus. Fbi':d. (Iuvieii. DEUXIÈME FAMILLE. — SINGES DU NOL'VEAll CONTINENT. Narines percé«s sur les côtés du nez; une longue nueue; point d'aba)ouos ni de loss.s calleuses A. .4 qufue prenante. Sapaiods. 1" y:tMiitv Alouale. Mijcctcs. Ii.i.igeu. 2"" — Coaila. Attic.i. Gi;oii-rov S"" — l.agotiiilie. Lngollni.r. Geoifiioï. i""-" — Sajou. Cebus. Ërxleben. 5"" — Saimiii. CaUitliri.r. Geoffroy. U. A tfufue uou prenante. S.AKis. 6"^' genre. Noclliore. .\(iriliora. Friîd. Cuvier. 7'"' — Saki. Piihcciii Desmxrest. TROISIÈME FAMILLE — OllSTITIS. Queue non pieiiaiite; pouces des mains aiilérieurcs peu ou point oppos.jlilcs aux autres doi;;ts. GiMit-e Ouisiiti. Hapnic. Illiger. DEUXIÈME DIVISION. - LÉMURIENS. Plus OU ii:<'ins (!e >k. 2™" — Indri. Lichaïujlus. Illigep.. rr' — Lori. Slcnopg. Illigeii. 4""" — Galago. Calago. Geoffroy. 5"" — Tarsier. Tarsius. Stofir. 28* 38 2'J8 HISTOIRE NATURELLE. LESSON, 1842. PREMIER ORDRE. — PRIMATES, ukm PREMIÈRE TRIBU. — BIMANA. Ongles apl.itis à tous les doigts; proa:ression verticale ou oblique sur le sol. PREMIÈRE FAMILLE. — HOMMIDEiE. Station normalement verticale; communiquant entre eux à l'aide delà parole. i" genre. Homo. Limné. DEUXIÈME FAMILLE. — AM'lIROPUMORPHEiE. Station normalement oblique sur les arbres, fréquemment verticale, plus rarement exécutée sur les quatre membres par terre; privés de la parole. 2">e genre. Troglodytes Geofffioy. 3""= — Salijriis. Lesson. DEUXIÈME TRIBU. - QUADRUMANA. Ongles aplatis à quelques doigts seulement; pouce opposable; membres antérieurs servant à porter les aliments à la bouche; progression borizontale. TROISIÈME FAMILLE. — KIMIADE^. Quatre dents incisives supérieures droites ; face nue; deux mamelles pectorales. PREMIÈRE SOUS-FAMILLE. — PITIIECI.X. Mains ayant un pouce opposable; cinq dents molaires tidicreuleuses; narines percées en dessous et séparées par une étroite cloison ; des callosités. 4"" genre, liijlobates. li.iir.Eii. fjme __ Scnmopitliccus. Fniin. CuviEii. g,i,c — Prrsbijlis. Eschschoi.tz 7'"' — Nasalis. Geoffroy. 8"" — Colobns. Illiger. Qme — Ceiropitliccus. Eiixi.eben. A. Vraies Guenona. B. Guevons mncnqucs . 10"" genre. Macacus. L.\ciirÈi)E. A. Cercocebus. Gr.orFitoY B. Silemis. I.essos. G. Rhésus. Lesson. Il"" genre. Imius. Geoffiioy. j2">« __ Cynoccpitcdii.s. Bnisso^. 1*' sous genre. Cynopitliecus. Isrn. Gtorriiov. jme — Papio. Brisson. QUADRUMANES. 29!) A. Geladas. B. Spfiynx. C. Hamadryas. 3"" sous-genre. Mormon. I.esson. DEUXIÈME SOUS-FAMILLE. — CEBINEiK. Mains sans pouce, ou pouce non opposable quand il existe; narines distantes; pas de callosités; ongles aplatis. A. Héhpithèquei. 15"" genre. Mijceles. Illiger. li-» — Lnçiotlirix. E. Geoffroy \^"" — Aieles. E. Geoffroy. \6"" — Eriodes. Isid. Geoffroy. B. Trichures. 17'"° genre. Cebiis. Erxleben. C. Géopithèqties. 18"" genre. Sagidnits. E. Geoffroy. i" so''.s-genre. Pithesciureus. Lesson, 2°*^ — Saguinus. Adctobcji. 19"° genre. Nijctipitliecus. Spix 20"" — Pilhecia. Desuarest. . l^' sous-genre. Pithecia. Lesson. 2me — Tarkea. Lesson jme — Chiropotes. Lessos. 4me — Cacajao. Lesson. TROISIÈME SOUS-FAMILLE. — HAPALINE.K. aiiGEB. Ongles des doigts très -longs, arqués, en forme de griffes. 21"" genre. Hapale. Illiger 1" sous-genre. Bapale. Lesson. 2"® — Mico. Lesson. gme — Midas. Lessok. 4me _ Œdipus. Lesson. 5°" — Leontopithecus . Lesson. ,<^" s.Tf' -^ \ QUATRIEME FAMILLE. — LEMURIDE^. Narines terminales et sinueuses; dents incisives inférieures généralement proclives. 22"" genre. Pithelemur. Lesson. 23"" — Scmnocebus. Lesson 24"" — Ccbugale. Lesson. 25"" — Myscebus. Lessoi?. 26"" — Glicebus. Lesson. 27"" — Mïoxiccbus. Lesson. 28"" — Prop'uliecus. Bennett. 29"" — Prosimia. Brisson. A. Mococos. rt. Monijnus. :^00 HISTOIRE NATURELLE. C. Hhtfiue-s. I). Varis. 30"" genre. Potio. Bosman. 31"° — Bnidijlcmur. Bi.ainvii.i.e. 52™= — Araclinoccbus. Lksson. Z'ô"" — Galaçjo. G. CuviER. 54">= — Tars'ms. Sionr,. 35"" — Htjpsiccbus. Lesson. CINQUIÈME FAMILLE. — PSErDOI^CMURIOE^:. Qu;ulrum;nies anoiniaux; membres antijrieui's puitant les aliments à la bouche. A. Pterocebincœ. Membres enveloppés d'un repli delà peau. 3G"" genre. Galcopilliecus. Pallas. j'jme — Gakolemur. Le.sson. B. Myspithecieœ. Membres libres; incisives manquant. 58"" genre. Mifs^ilhecus . Blainvii.le. C. MysJidelphieœ. Queue nue. 59""° genre. Pillieclieir. Fkéd. Cuvier D. Bradyjmsineœ. Doigts enveloppés par la peau. 40"" genre. Bradijpus. Linné. 1" sous-genre. CItolœpus. Ilugeii. 2°" — Ackeus. Fréd. Cutieb. E. Melecebineœ. Denis de carnassiers; exiréraités plantigrades. 41"" genre. Cercolcptes . Illiger. l'IX DU VOLU.ME. TABLE MÉTHODIQLE Généralités. DEUXIÈME ORDRE. - QUADRUMAIVES. PREMIÈUE FAMILLE. — SINGES. PREMIÈRE SECTION. — SINGES CATARRHINIENS. PREMIÈRE TRIBU. - PRIMATES. Genre Troglodyte. Troglodytes 31 Troglodyte cliimpanzé Troglodijlcs 31 Genre Orang. Satjirus. Orang outang Salyrus rufus 50 — bicolore . . — bicolor 51 Genre Gibbon. Hijlobales 55 Gihbon Siamang . . Hylobales syiKtactijlus ... 56 . — agile — variegatwi 58 — cendré — leuciscus 60 — entelloîde. . — eiitelloides 6'2 — hooloek — hoolock 62 — de Raines — Rafflei <>4 — à favoris blancs. ... — leucogenyi : 66 — à mains blanches — albimanus 67 — concolore — concohr 67 — choromandus . — choromandua 67 DEUXIÈME TRIBU. —PlTIlÉt^.IENS. PREMIER GROUPE — SEMNOPII HÉCIENS. Genre Nasiquc. Nasalis 69 Nasi<|ue Kahau Nasatts tarvaius '* 302 HISTOIRE NATURELLE. Genre Semnopithèque. Senmopilliccus. Semnopitlièqueiiouc Semnopilhectis ne:nœus. entelle. de Dussumier. . . aux ni.tins noires aux mains jaunes. . à capudion. . . . doré aux fesses blanches. neigeux à fourrure. . . . cimepaye maure Pyrrhus kra mitre barbique 74 7(3 78 79 85 entelhts, Dussumiei i. . nigrimanus. flavimanu^ . cucuHatus. . aurai tis. . leucoprymnus ^-^ pruiiiosiis 84 vellerosus ^^ melalophos «^(^ Maurtts W Pyrrhus 88 fascicularis 88 comatus 80 barbatus 8J Genre Colobe. Colobtis 90 Colobe Kuéréza Colobus gvereza à fourrure. . oursin . . vrai . . . de Pennant. ferrugineux. à camail. . . leucomère. . satanas. . . deTemminck. fuliRineux. . vellerosu vrsinus. 90 01 01 verus 02 Peunantii 02 ferruginosus 03 polgcontjs ^^ leucomeros '"^ satanas 03 Temminckii 03 fuliginosus Oi DEUXIEME GROUPE. CERCOPITHECIENS. Genre Myopilhèque Mijophhccus 05 Myopithèque Talapoin Myopithecus talapoin 95 Genre Cercopithèque OU Guenon. Cercopithecus 06 Guenon bochcur — lilanc nez — Campbell — do Martini — moustac — barbue — aux lèvres blanches. — mône — monolde — Delalande — Diane — malbiouck — Tantale — roux-vert — palas — callilhricbe — vervet — giivct — roloway — de Teniminck. . . . — à diadème — Pluton — à favoris noirs. . . Cercopithecus nictitans Oy — petaurista 100 — CampheUii 101 — lUarlini 101 — cephus 102 — pogonias -103 — labiatus 103 — niona 103 — moiiQides 100 — Lalandii 107 — !>iana 108 — cynosurus 100 — r.iil(a/«s 112 — rufo-viridis 115 — ritber 114 — sabœus 116 — pygerythrus 117 — griseo-viridis 118 — roloxvay 120 — Temviijîckii. 120 — leucainpyx ■. 120 — l'iuto 121 — welanogenys 121 QUADRUMANES. 7,07) Guenon ludio — Iwlio 121 — teplirops — leplirops igl — nisnas — visnas 122 — à oreilles rouges — erythrotis 125 TROISIEME GROUPE. — MACAQUES. Genre Macaque. Macacus 124 g I. MACAQUES * LONGUE quede. Mac;ique niangabey Macacus œlhiops 125 — enfumé — fuliginoms 127 — toque — radialus 127 — bonnet chinois. ..... — sinicus 129 — commun — cynomolgus . 150 — rou\ doré — aureus 154 — à face noire — carbonarius 154 — des Philippines — Plalippinensis 154 — d'Assam — Assamensis 157 § II. MACAQUES A QUEi'E courte • Macaque ouanderou Macacus ailenux 137 — rhésus. — erytiirœus 138 ^ maimon — nemestrinus (43 _ lascif — Hbidinosus I4() — à face rousc — speciosus 147 — de l'Inde — Maurus 147 — ursin — arcloides 148 § III. MACAQUES MAGOTS sans queue. Macaque magot Macacus inuus 149 QUATRIEME GROUPE. — CYNOCEPHALES. § I. CYNOCÉPHALES sass oueue. Genre Cynopithèque. Cijnopitliccus 162 Cynopilhèque nègre Cynopithecus niger 105 § II. CYNOCÉPHALES a queue assez allongée. Genre Cynocéphale. Cynocepltatiis '65 Cynocéphale babouin . Cyiiocephalus babouin 166 — papion. . — sphinx 168 — hamadryas — liamadryas 169 — chacma. . — porcarius 170 « § III. CYNOCÉPHALES a queue tiiès-courte. Cynocéphale mandrill Cynoceplialus mormon 172 — drill — leucophœus 174 'AU HISTOIRE NATURELLE. DEUXIÈME SECTION. — SINGES PLATYRRHINIENS. TROISIÈME TRIBU. — CÉBIENS. PREMIER «ROL'PE. — SAPAJOUS OU IIÉLOPITHÈQUES. ("icnre Hurleur. Stentor iSO Hurleur aloualc Sleutor aeniculu-i ISô — à queue dorée — cfiri/snruf 185 — ourson — ursinui 185 — noir — nigcr- . 180 — aux nwins rousses — (Imimanus 187 — à m.iMtcau — paltialus . 187 — brun — fu^cus 188 — discolore — iliscolor 188 — à queue jaune et noire. . . — flavicaudntus 188 — arabatc — slramineus 188 Genre Atèlc Aides • 189 § I. A POUCES BUllIMENTSinES. Atéle coaita Atehs paniscm 101 — à front blanc — marginatus 102 — cayoïi — dter 195 — Béelzébull] — Beelzehulh 194 — mélanoclieir — melauochir 195 — métis — hybridus 195 § I!. A rOUCES sous FOIIME [)E tubercule et SANS ONGLE. Atcle clianick. — lemlaciijltis 196 Genre Ériode. Eiiodcs 197 Ériodc bémiilactyle Eriodes liemidactijUii 198 — arathno'ide — arachnoides 2(i0 — à tubercules — ' tuheiifer '200 Genre Lagolriclie. Lacjolhvïx 201 Lagotbriche de Humboldl Lagolhrix llumboldlii 202 — grison — canus 205 — de Castclnan — fnsfctaniirfii 203 (iciire S;ijou. Cclnis 204 Sajou brun Cebus apella 208 — lascir — UhidinosHs 209 — robuste — robustus 209 — à toupet — cirrifer 2l0 — cornu — faliirlliis . 210 — barbu — barbatus 211 — à pieds dorés — chrysopus 211 — versicolore — rersicolor 212 — maigre — yracilis 215 — capuchon — cucuUatus 21.5 — tête l'auve — xanllioceplmlas 215 — fauve — /lavus 214 QUADRUMANES. 305 Sajou sai — cajmcinua 214 — gorge blanche — hypoleucvs 215 — front blanc — albifrons 216 DEUXIÈME GROUPE. — SAGOUINS OU GÉOPITE^QUES. Genre Saimiri. Saimiri 217 Saimiri écureuil Saimiri sciureus 218 Genre Callilhriche. Catlitlirix 220 Callilhriche nioloch Callitluix molocli 221 — à fraise — amiclus 222 — à masque — fersonatus 225 Genre Nyetipithèque. Nijclipithecus 224 Kyctipithèque douroucouli Nyclipithecus trivirgatus 224 — f;ice de chat — felinus 225 — hurleur — vociferana 226 Genre Saki. Pilhec'm 227 Saki yaïké Pithecia teucocephala 227 — ours — hirsuta 228 — miriquouina — miriquouina 229 — moine — monackus 229 — noir — nigra 230 Genre Brachyure. Brachyurus 250 § I. A OIEDE DE lONCDEOB MOÏENSE. Brachyure couxio Brachyurus satanas 251 — capucin — ckyropotes 232 — cacajoo — meîanocepkalas 235 — ouaUary — ouakary 255 §11. A QDEDE TEÈS-CODnTE. Brachyure rubicond Brachyurus rubicundus 233 — chauve — calvus 234 QUATRIÈME TRIBU. — ÂRCTOPITHÉCIENS. Genre Ouistiti. Jacclius 259 Ouistiti vulgaire Jacclius vulgaris 240 — à pinceau — penicillalus 241 — de Geoffroy - — Geoffroyi 245 — tète blanche — leucocephalus 243 — à camail — humeralifer 244 — oreillard — aurilm 245 — d'Illiger — lUigeri 246 — mélanure — melunurus 246 Genre Tamarin. Midas 247 Tamarin aux mains rousses. . . . Midas rufxmanus 247 — nègre — ursulus 247 — labié — lahiatus 249 — pinche — œdiptis 24!) 29 59 506 HISTOIRE NATURELLE. Tamarin marikina — romlia 250 — bicolore — bicolor 253 — chrysonièlc — chrysomelas 254 DEUXIEME FAMILLE. — LEMURIENS. Genre Indn. Indri 255 Indri à courte queue Indri brevicaudalus 256 Genre Avahi. Avalii 256 Avalii à bourre Avaki laniger 256 Genre Propithèque. Propithecus 257 Propithèque à diadème Propithecus diadema 257 Genre Maki. Lemur 257 Maki vari Lemur ntacaco 258 — mococo — catta 260 — rouge • . . . — ruber 261 — mongous — mongous 262 — front blanc — albifrons 265 — mains blanclies — albimanus 266 — front noir, — nigtifrons 267 — roux — rufu$ 267 Genre Cheirogale. Clieirogalcus 268 Cheirogale de Milius Cheirogaleus Milii 209 Genre- Nycticèbe. Nycticebus 270 Nycticèbe de Java Nyclicebus Javanicus. 270 Genre Loris. Loris 273 Loris grêle Loris gracilis 274 Genre Microcèbe. Mîcrocebus 274 Microcébe des palmiers Microcebus palmarum 275 Genre Galago. Galago 275 Galago queue touffue Galago crassicaudalus 276 — du Sénégal — Senegalenns 277 — de Madagascar — Demtduffii 277 TROISIÈME FAMILLE. — TARSIENS. Genre Tarsier. Tarshis 278 Tarsier spectre Tarsius spectrum 279 , — mains brunes — fuscomanus. . 280 QUATRIÈME FAMILLE. — CHEIROMIENS. Genre Aye-aye. Myspiiliecus 28i Aye-aye madécasse Mgspithecus Mndngnscariensis 282 QUADRUMANES. 507 Genre Galéopithèque. Calcopithcctis 282 Galéopithcque varié Gakopithecus vanegalus 285 — roux — rufus 28j — de Ternale — Temaleiisis ^84 — des I-hilippincs. ... — riiilippinensis 284 DES SINGES EN GENERAL. Formes extérieures, allures, caractère 285 Distribution géographique 290 DIVERSES CLASSIFICATIONS DES QUADRUMANES. Buffon 291 Geoffroy Sainl-Ililaire 292 Cuvier 294 De Blainvilie 295 Duvernoy 296 Lesson 298 TABLE ALPHABÉTIQUE Alouate 183 Arabate 188 ARCTOPITHÉGIENS 236 ATÈLES 189 — a(îi- 193 — bcelzébuth 194 — cayou 193 — chamek 196 — coaita 191 — front blanc 192 — kybridus 195 — mar(jinatus 192 — mélanocheir 195 — mélanocheir 195 — méli.'i 195 — paniscus 191 — pentadactijlus 196 AVAHI 256 — à bourre 256 — laniger 256 AYE-AYE 281 — madécasse 282 Babouin 166 Bcelzébuth 194 Blanc nez 100 Bonnet chinois 1Ï29 BRACHYURE 230 — cacajoo 233 — calvus 234 — capucin 252 — chauve 224 — ckyropoles 252 — cousio 251 — melanocephahis 255 — ouakary 235 — rubicond 253 — rubieandus 253 — sataiias 231 Callithriche 116 CALLITHRICHE 220 — amictus , , 222 — à fraise . 222 — à masque 223 — moloch 221 — personatus 223 CATARKHINICNS 27 Cayou 193 CEBIENS 179 CEBUS 204 — aîbifrong 216 — apelta 208 — barbatus 211 — capucinus 214 — cirrifer 210 — chrysopus 21 1 — cucuUatua ... 213 — fatueîlus 210 — flavus 214 — graciîis 213 — hypoleitciis 215 — Hbidinosus 209 — robustus 209 — versicolor 212 — xanfhocephalus 213 CERCOPITHÉCIENS 95 CERCOPITHÈQUE 96 — barbu 103 — blanc nez 100 — callithriche 116 — Campbell 101 — cephus 102 — cynosurus 109 — Delalande 107 — diadème 120 — Diane. . . 108 — erylhrolis J23 — favoris noirs 121 — griseo-viridis 118 — grivet 118 — hocheur 99 — labialus 105 — Lalaiidii 107 — leucampyx 120 — lèvres blanches 103 — ludio 121 — malbrouck 109 — Martini 101 — meîanogenys 121 — mone 106 — monoîde 106 — moustac 102 — nictitans 99 — nisnas 122 — oreilles rouges 123 510 HISTOIRE NATURELLE, CliRCOrmiÊOUE patas 114 — petaurista 100 — Pluton 121 — pogonias. 105 — pygerylhrus 117 — Roloway 120 — roux-vert 113 — ruber 114 — rufo-viridis 113 — aabœus 116 — Tantale 112 — Temminckii 120 — tephrops 121 — vervet 117 Chacma 170 Chamek 196 OHEIROGALE 268 — de Milius 269 CHIMPANZÉ 51 Cimepaye 86 Coaila 191 COLOBE 96 — à camail 93 — ferrugineux 93 — à fourrure 91 — fuligineux 94 — guéréza 90 — leucomère 93 — oursin 91 — PennatUii 92 — polyco7)ws 93 — salanas 95 — Temminckii 93 — ursinus 91 — vellerosus 91 — verus 92 — vrai 92 CYNOCÉPHALE 165 — babouin 160 — chacma 170 — driU 174 — hamadryas 169 — leucophceus 174 — mandrill 172 — mormon 172 — papion 168 — porcarius 170 — sphinx 168 CÏNOPITHÈQUE 162 — nègre 163 Diane 108 Doue 74 Douroucouli 224 Drill 174 Entelle 76 ÉRIODE 197 — arachnoïde 200 — hémidactyle 198 — à tubercules 200 — luhnifer 200 GIBBON 53 — agile 58 — cendré 60 — choromandm 67 — concolore 67 GIBBON entelloïde — à favoris blancs. . — hoolûck — à mains blanches. — de Raflles — siamang 62 66 62 67 64 56 GALAGO 275 — crassicaudatus 276 — Demidoffii 277 — de Madagascar 277 — à queue touffue 276 — Senegalmais 277 GALÉOPITHÈQUE 282 — Philippinensis 284 — rufits 283 ■ — Tervatensia 285 — variegatus 283 GÉOPITHÈQUES 216 Grivel 118 Guenon. V'oi/. Cercopithèque 96 Guéréza 90 Hamadryas 169 HÉLOriTHÈQUES 179 Hocheur 99 Hoolock 62 HURLEUR 180 — alouate 183 — arabate 188 — brun 188 — discolore 188 — aux mains rousses 187 — à manteau 187 — noir 180 — ourson 185 — à queue dorée 183 — à queue jaune et noire 188 HYLOBATES 55 — aîbiinanus 67 — choTomandus 67 — concolor 67 — cnleUoides 62 — hoolock 62 — leuciscus 60 — leucogenys b6 — rtafftei 64 — syndactyius 51 — variegatus 58 INDRI 255 — brevicaudatus 256 — à queue courte 256 lACCHUS 259 — auritus 245 — Geoffroyi. . ^ 243 — humeralifer 2i4 _ IlUgeri 246 — leucocfphalus 243 — melanitrus 246 — penicillalus 241 — vulgarii 240 Kahau 71 Kra. . . 88 Lagothriche 201 — canus 205 — Casletnaudii 205 — grison 203 QUADRUMANES. 511 Lagothriche Hum6o/d(ii , 202 LÉMVRIEXS 255 Lcmur 257 — albifrons ■ 265 — albimanus 266 — catla 260 — macaco 258 — mongous 262 — nigrifrons 267 — ruber 261 — rufua 267 LORIS 273 — gracilis 274 MACAQUES 124 Macaque 124 — arctoides 148 — Assametisis 157 — aureus 134 — bonnet chinois 129 — carbenarius 154 — commun 130 — cynomolgut 150 — enfumé 127 — erythrœus 158 — à lace noire 134 — à face rouge 147 — fuliginosus 127 — de rinde 147 — tnuu5 149 — lascif. 146 — libidinosus 146 — magot 149 — maimon 145 — mangabey 125 — ilaurus 147 — 7iemestrinu3 143 — Mlhiopa 125 — ouanderou 137 — Philippinemis 134 — radiatus 127 — rhésus 138 — roux doré 134 — silenus 137 — sinicus 129 — speciosus 147 — toque 127 — ursin 148 Magot.. 149 Maimon 143 MAKI 257 — à front blanc 265 — à front noir 267 — à mains blanches 266 — mococo 260 — mongous 262 — rouge 261 — roux 267 — vari 258 Malbrouck 109 Mandrill 172 Mangabey 125 Marikina 250 MICROf^ÈHE 274 — des palmiers 275 MIDAS 247 MIllAS bicolor 253 — chrysumelas 254 — labialus 249 — Œdipus 249 — rosaîia 250 — rufîmanus 247 — ursulus 247 Miriquouina 229 Mococo 260 Moloch 221 Mône 103 Mongous 262 Moustac 102 MYOPITHÈQUE 95 — talapoin 95 MYSPITHECUS 281 — Madagascarùnsis 282 NASALIS 69 — îarvatus 71 NASIQUE 69 — kahau 71 Nisnas 122 NYCTICÈBE 270 — de Java 270 NYCTIPITIIÈQUE 224 — douroucouli 224 — fdmua 225 — hurleur , . 226 — trivirgatus 224 — vociferans 226 ORANG 51 — bicolore 51 — outang 50 Ouanderou 137 OUISTITI 239 — à camail 244 — de Geoffroy 243 — d'Illiger . . 246 — mélanure 246 — oreillard 245 — a pinceau. 241 — à tète blanche 243 — vulgaire 240 Papion 168 Patas 114 Pinche 249 PITIIECIA • . 227 — hirsuta 228 — leucocepftala 227 — miriquouina 229 — monachus 229 — nigra 2o0 PITHÉCIENS.. 69 PROPITHÈQUE 257 — à diadème 257 QUADUIMANES 22 Rhùsus 138 SAGOUINS ... 216 Sai 214 SAIMIRI 217 — écureuil 218 SAJOU 204 — barbu 211 — brun 208 — .1 capuuhon - 213 M 2 HISTOIRE NATURELLE. SAJOUcornu 210 — fauve 214 — à front blanc 216 — à gorge blanche 215 — lascil 209 — maigre 213 — aux pieds dorés 211 — robuste 209 — sai 214 — à tèle fauve 213 — à toupet 210 — versicoloro 212 SAKI . 227 — miriquouina 229 — moine 229 — noir 2Ô0 — ours 22S — yarqué 227 SAPAJOUS 179 SATYRUS 35 — bicolor 51 — rufus 50 SEMXOPITHKCIENS 69 SEMNOriTlIÈQUE 75 — auralus 85 — barbalus 89 — à capuchon 82 86 89 82 cimepaje comatus cucuîîatus. . . . doré doue Dussu77lip.ri, . . . enleïlus fascicularis. . . . à fesses blanclies. flavimanus. , . . à fourrure. . . , kra ïeucopnjmnus , . à mains jaunes. . à mains noires. . 74 78 76 80 85 88 84 80 79 SEMNOPITHÈQUE Hatirus 86 — meïaîopkos 86 — niitré 89 — neigeux 84 — nemœus 74 — nigrimanus 79 — pruiîiosus 84 — Pyrrhus 88 — siamang 56 — mllerosus 85 Siamang 56 SINGES 27 STENTOR 180 — cfirysurus 183 — discolor 188 — flavimanus 187 — flavicaudatus 188 — fuscus 188 — nigcr 186 — palliatus 187 — seniculus 483 — stramineus 188 — ursinus 185 Talapoin 95 TAMARIN 245 — bicolore 253 — chrysomèle 254 — labié 249 — aux mains rousses. 247 — marikina 250 — nègre 247 — pmche 249 TARSIENS 278 TARSIER 278 — fuicomanus 280 — aux mains brunes 280 — spectre 279 TROGLODYTES 31 — chimpanzé 31 Van Vervel. Yarqué. 258 117 227