43571 VE Digitized by the Internet Archive 4 | in 2009 with funding from University of Ottawa htip://www.archive.org/details/essaisu rlasciencOOger ESSAI SUR LA SCIENCE ET L'ART DE L'INGÉNEUR AUX PREMIERS SIÈCLES DE L'EMPIRE ROMAIN C. GERMAIN DE MONTAUZAN INGÉNIEUR CIVIL DES MINES AGRÉGÉ DE L'UNIVERSITÉ, DOCTEUR ÈS-LETTRES be PARIS ERNEST LEROUX, ÉDITEUR 28, RUE BONAPARTE, 28 1999 SES EL L AUX PREMIERS SIÈCLES DE L'EMPIRE ROMAIN. | = SAINT-ÉTIENNE SOCIÉTÉ DE L'IMPRIMERIE THÉOLIER, J. « | 12, rue Gérentet, 12 æ + (Qi + * THOMAS ET C* Led <- . ’ _ pa y ÉnSAT SUR LA SCIENCE ET L'ART DE L'INGÉMEUR AUX PREMIERS SIÈCLES DE L'EMPIRE ROMAIN C. GERMAIN DE MONTAUZAN INGÉNIEUR CIVIL DES MINES AGRÉGÉ DE L'UNIVERSITÉ, DOCTEUR ÈS-LETTRES PARIS ERNEST LEROUX, ÉDITEUR 28, RUE BONAPARTE., 28 1909 À Monsieur AprIEN bE MONTGOLFIER INGENIEUR EN CHEF DES PONTS ET CHAUSSÉES DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA COMPAGNIE DES FORGES ET ACIÉRIES DE LA MARINE ET D'HOMÉCOURT. A l’un des grands ingénieurs d'aujourd'hui jJ'offre respectueusement cette étude sur les ingénieurs d'autrefois. AVANT-PROPOS Parmi les nombreux objets d’étude que nous offrent les monuments de l’antiquilé romaine, deux sont à l’origine de tous les autres, et cependant sont loin d'être les plus connus: c’est d'abord la science, expérimentale ou rationnelle, qui a permis d'inventer les procédés techniques appliqués dans la construction de ces monuments; c’est ensuite la personnalité de l’homme qui possédait celle science el l'utilisait dans la pratique. De même que, tout en continuant de s'intéresser aux lignes et aux formes extérieures des édifices, on en est venu à porter un intérêt presque aussi grand à leur structure intime, de même on peut, dans les auteurs de ces temples, de ces palais, de ces amphithéâtres, de ces arcs de triomphe, dont nous admirons même les restes mutilés, considérer non pas seulement l'artiste qui en concevait la belle ordon- nance, mais l’ingénieur qui en calculait la solidité. Qui dira que pour l'admirable coupole du Panthéon de Rome, par exemple, la savante expérience du métier n'a pas aidé son architecte autant que l'intuition spontanée d’une grandiose harmonie? Il était d’ailleurs d’autres travaux où les dons esthétiques n'intervenaient guère, et où le savoir technique faisait presque tout, Il fallait des géomètres pour tracer le — VII — parcours des routes ou des aqueducs ; des hydrauliciens pour calculer la force ou la vitesse des eaux, des mécaniciens pour imaginer et ajuster les instruments de mesure, les engins de précision ou de puissance. À ces hommes, le simple savoir d’un artisan suffisait-il toujours ? Ne fallait-il pas, dans bien des cas, des connaissances générales, une véritable science d'ingénieur ? ‘nvisageons surtout l'époque de l’antiquité qui fut la plus féconde en grands travaux publics, c’est-à-dire les deux premiers siècles de l'empire romain. Pour peu qu’on veuille étudier quelques-uns de ces importants ouvrages, par exemple ces magnifiques aqueducs construits pour l’approvisionne- ment des grandes villes, le problème se pose à chaque pas, et on ne peut l'esquiver. Songeons au volumineux bagage de connaissances qu'il faut de nos jours avoir acquis pour étudier avec compétence un projet d’'adduction et de distribution d’eau dans une ville importante. On n'en charge que des hommes formés par une longue préparation scientifique, soumis à des épreuves répétées d'examens difficiles. Ils s'entourent de nombreux auxiliaires qui se consacrent séparément aux diverses fractions de cette étude compliquée et qui, tout eu possédant l'expérience pratique des travaux de ce genre sont, eux aussi, pourvus d'une instruction scientifique moins approfondie que celle de leur chef assurément, mais déjà forl étendue et solide. Or, nous voyons que les ingénieurs romains ont résolu dans le tracé et la construction de leurs aqueducs, des problèmes très complexes et très délicats, parfois audacieux, que nos meilleurs techniciens ne résou- draient pas avec plus de sürelé. Qu'est-ce à dire ? C’est que ces ouvrages étaient, à n’en pas douter, le résultat d’une savante élude où intervenaient la géométrie rigoureuse, la mécanique précise, l'hydraulique raisonnée, l'art minutieux du dessin d'architecte. Il va sans dire que l'on ne dresse pas un projet d'ensemble, que l'on n'établit pas les détails d’un chantier, les dimensions des ouvrages, les prix de revient, sans manier constamment des chiffres. Comment calculait- on pratiquement, et sur quelle science théorique ces calculs étaient-ils fondés? Dans quelle ‘proportion pouvaient s'unir, chez les coopérateurs de degrés divers, la théorie et la pratique? Les sciences mathématiques les plus élevées s'enseignaient chez les anciens. Cet enseignement était-il fait pour des esprits purement spéculatifs et avait-il pour unique fin son objet même, ou se proposait-il en même temps et au delà un but pratique, celui de former une élite parmi les futurs directeurs de travaux, conformément à ce que se propose pour une bonne part aujourd’hui notre haut enseignement scientifique ? Dans ce cas, où se recrutait cette élite, et comment, selon toute probabilité, s'acquérait simultanément ou postérieurement l'instruction pratique ? En un mot, quelle était la formation technique de l'ingénieur ? Et enfin, l'ingé- nieur une fois formé que devenait-il? Dans quelle mesure son emploi et sa situation dépendaient-ils de sa condition sociale d'une part, de l’autre, du savoir acquis ? Voilà, certes, un champ d'exploration bien vaste, où chaque question pourrait faire l'objet d'un volume; ce n’est pas dans les quelques pages qui vont suivre que pourra se résoudre une pareille complexité. [l n’est pas interdit toutefois de s'essayer à promener çà et là quelque lueur sur l'ensemble, quitle à ne pas tout éclairer également et à laisser bien des choses dans l'ombre. Engagé dans de longues recherches sur les aqueducs antiques de Lyon, où se révèle une techni- que d'ingénieur si complète, je n'ai pu me résigner à contempler le résultat sans me préoccuper de ce qui l'avait — X — rendu possible. Telle fut l'origine de la série des questions que je viens d'énumérer et de l'enquête qui les a suivies. C'est le résultat de cette enquête que j'essayerai d'exposer ici. Résultat modeste, simple aperçu très incomplet, première ébauche d'études qui pourront être reprises sur chaque sujet partiel, et traitées alors de facon plus approfondie et plus personnelle. Il était indispensable de s’en référer d’abord au traité d'architecture de Vifruve. Non seulement il a été composé à l'époque où nous voulons remonter, mais encore c’est le seul traité concernant l’art de l'ingénieur que l'antiquité nous ait transmis en entier. Il y est fait assez souvent allusion aux relations entre la théorie et la pratique. Malheureusement ce ne sont guére que des allusions. Les mots de screntia, disci- plina, doctrina, ratiocinatio, reviennent de page en page, ainsi que les noms des savants, philosophes et inventeurs dont l'étude à formé cet architecte; mais il dit bien peu de chose des recherches et des calculs qui ont donné lieu à leurs inven- tions {. Aussi, en se contentant, pour faire le bilan de la science romaine à l'époque impériale, du seul écrit de Vitruve, on ne donnerait qu'une idée fort incomplète de ce qui était alors, non seulement connu de quelques-uns, mais publiquement enseigné. Une étude parue en 1885 et dont l’auteur était 1. 11 faut mettre à part la science des phénomènes célestes, sur lesquels il donne même beaucoup plus de renseignements qu'on n’en attendrait dans un traité d’archi- tecture. (Voir, en particulier, liv. I, 6.) M. A. Terquem, professeur à la Faculté des Sciences de Lille, avait le mérite de résumer clairement les renseigne- ménts scientifiques de Vitruve et de les isoler du bavardage qui les encombre dans l'original; mais son titre, la Science romaine à l'époque d'Auguste, était beaucoup trop vaste, car Vitruve seul y était censé représenter tout le savoir de l'époque, ce qui est bien loin de la vérité. La seule inspection des travaux eux-mêmes, en l’état de mutilation où nous les voyons, atteste des connaissances bien plus larges, bien plus précises, des procédés beaucoup plus variés et plus achevés qu'on ne le croirait d'après Vitruve. Il faut donc chercher à compléter l'écrivain latin par d'autres auteurs techniques, remonter le plus possible aux sources de la science qu’il développe, à ce qui nous reste de la géométrie et de la mécanique grecques antérieures à l'ére chrétienne, soit en fragments authentiques plus ou moins complets, comme les traités d’Euclide, d'Archimède ou de Héron d'Alexandrie, soit à l'état de sommes et de résumés rédigés plus tard, comme les œuvres de Proclus ou de Boëce. I faut consulter aussi ces écrivains techniques romains connus sous les noms de metrologici et gromatici, tels que les Hygin, les Aggenus Urbicus, les Siculus Flaccus et autres, qui, sur les opérations de géodésie, ajoutent bien des notions précises aux vagues indications de Vitruve; ne pas trop négliger les écrits latins sur l’agriculture (de Caton, Varron, Columelle) ; chez l'un ou chez l’autre, on peut parfois trouver la mention d'un appareil ou d’un procédé que Vitruve a passé sous silence. Il n’est pas jusqu à l’histoire naturelle de Pline, dont l’érudition est souvent un chaos incertain, où l’on ne puisse trouver quelque précieux filon de la science et de la technique de l'ingénieur ancien. Sur la personnalité de celui-ci, la correspondance de Pline le Jeune avec l’empereur male Trajan est intéressante aussi à consulter. Ce sont, enfin, outre les quelques allusions éparses chez les auteurs de tout genre, les inscriplions antiques qu'il faut recueillir el comparer. Elles sont malheureusement trop rares et trop courtes. Cependant, ces brèves désignations de noms, de dales, de litres, ces commentaires laconiques, mais qui présentent la vérité sans alliage, peuvent aider à se repré- senter ce que fut’un architecte, un entrepreneur, un géomètre ou arpenteur chez les Romains. J’ai laissé de côté toutes les sciences qui n'ont pas immé- diatement leur emploi dans une entreprise de travaux publics, et me suis contenté de parler sommairement de ce que l'on possédait et enseignait aux premiers siècles de l'empire romain en fait de connaissances mathématiques, physiques et mécaniques, et de ce que représentaient par rapport à la théorie les applications pratiques de chacune de ces sciences, dans le domaine des entreprises d'utilité générale. On trouvera donc dans ces pages quelques indications sur les procédés de calcul, et la description d'un certain nombre de machines usuelles, puis des instruments et des méthodes de nivellement et d'arpentage. Pour ces questions scientifiques, j'ai pris pour appuis et pour guides des traités et notices d'une solidité et d'une sureté d'information connues. Les références, réunies d’abord dans un index bibliographique, seront en outre indiquées au fur et à mesure. Qu'il me suffise de mentionner d'avance mes soutiens les plus continus : les deux ouvrages de Michel Chasles : Rapport sur les progrès de la géométrie et Aperçu historique sur l'origine et le développement des méthodes en géométrie; divers articles techniques de la Réal-Encyclopädie, de Pauly-Wissowa; les études de Th. Henri-Martin sur l'arithmétique ancienne; les traités == PAU subsistants de Héron d'Alexandrie, d’après l'édition Schmidt et Schœne, la traduction des Mécaniques, du même auteur, par M. Carra de Vaux, et les traductions partielles annotées de MM. Vincent et de Rochas ; la Technologie, de Blümner ; enfin, divers traités et articles de Paul Tannery, entre autres son Æssai sur la géométrie grecque, chef-d'œuvre de pers- picacité et de prudence scientifique. Je me suis efforcé d'imiter cette prudence en évitant de donner aux conjectures, forcément nombreuses, le caractère d’affirmations. Il vaut encore mieux pour cette esquisse paraitre quelquefois d’un contour peu arrêté que de passer pour un tableau de fantaisie. Donner à ces divers sujets un intérêt plus facile en les présentant rassemblés ; faire œuvre, si petite soit-elle, dans les recherches historiques sur le génie du travail humain : telle a été l'ambition qui a animé cet essai. Puisse-t-elle n'avoir pas été entièrement vaine ! æ KY2 à EL 2 d'i INDEX BIBLIOGRAPHIQUE AUTEURS ANCIENS TEXTES, COMMENTAIRES, ÉTUDES) ARCHIMÈDE. — Opera omnia, cum commentariis Eutocii, recensuit Heiberg, Leipzig, Teubner, 1880-87, 3 vol. in-8°. Boëce. — Boëtii de Institutione arithmetica libri duo; de Insti- tutione musica libri quinque; Ed. Friedlein, Leipzig, Teubner, 1867. CATON, VARRON, COLUMELLE. — M. Porci Catonis de Agricultura liber. — M. Terentit Varronis Rerum Rusticarum libri tres, cum recensione H. Keilii, Leipzig, Teubner. — Scriptores Rei Rusticae latini, Schneide, Leipzig, 1794-1797. Corpus Inscriptionum Latinarum. — (Abréy : C.I.L.) Dion Cassius. — Ed. Dindorff, Leipzig, 1863-1865. Eucrine. — Opera omnia, ediderunt Heiberg et Menge, Leipzig, 1880. Gromatici veteres. — Ed. Lachmann et Rudorff; Berlin, Reimer, 1848-1852. HÉRON D'ALEXANDRIE. — Âeronis Alexandrini opera quae super- sunt omnia, 3 vol. et suppl. Leipzig, 1899-1903. — I et suppl. : Pneumatica et Automata, Wilhelm Schmidt,1899.—I1. Mechanica et Catoptrica (texte arabe), Nix et Schmidt, 1900.— III. Rationes dimetiendi et commentatio dioptrica, Hermann Schœne, 1903. Th. Henri-Martin. — Recherches sur la vie et les ouvrages de Héron d'Alexandrie (Mémoires de l’Académie des Inscriptions et Belles -Lettres, savants étrangers, 1'° série, t. IV, 1854). 2 < RE — Vincent. — Le traité de la Dioptre de Héron d'Alexandrie, texte grec et traduction française. (Notices et extraits des manuscrits de la bibliothèque impériale, t. XIX, 1858.) Heronis Alexandrinigeometricorumet stereometricorumreliquiae, Ed. 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Boutroux, Paris, 1873. té. le LA SCIENCE ET L'ART DE L'INGÉNIEUR AUX PREMIERS SIÈCLES DE L'EMPIRE ROMAIN PRÉLIMINAIRES LA SCIENCE GRECQUE ET ROMAINE On est à peu près d'accord aujourd’hui pour reconnaître aux Grecs le mérite, non pas seulement d’avoir divulgué les éléments de la science, élaborés par les peuples dont la civilisation avait précédé la leur, mais d’avoir découvert eux-mêmes un grand nombre des principes fondamentaux sur lesquels repose toute connaissance rationnelle. Que l’astronomie leur soit venue des Chaldéens et des Babyloniens, ainsi que l'usage de la table à calcul, conçue d’après une machine à compter, d'une très ancienne origine asiatique, où il faudrait voir la première ébauche de l’arithmétique; que Pythagore et à sa suite nombre de philosophes grecs soient allés s’instruire dans l’Inde et en Egypte : il n’en est pas moins vrai que la science exacte fonda- mentale, la géométrie, en tant que présentant un ensemble logiquement déduit et rigoureusement lié, est surtout une science grecque, et que chez les Grecs, la perfection de l’architecture, la savante économie des proportions monumentales, est en grande partie un résultat de leurs étonnantes aptitudes de géomètres, Les plus importants traités de géométrie grecque qui subsistent 9 + et qui permettent de se rendre compte des progrès de cette science sont : les écrits d'Euclide !, composés à Alexandrie vers la fin du 1v° siècle avant Jésus-Christ; ceux d'Archimède?, de Syracuse, qui sont du 11° siècle ; ceux d’Apollonios de Perge *, qui vécut à Alexandrie vers la fin du 1r° siècle, enfin ceux de Pappus d'Alexandrie *, datant du 1v° siècle de notre ère. L'œuvre de ce dernier, bien postérieure aux autres comme on voit, est un recueil précieux, mais n'est en fait qu’une compilation de travaux remontant pour la plupart à une date antérieure à l’ère chrétienne”. Au v° siècle, Proclus, le dernier des grands philosophes grecs, écrivit un commentaire sur Euclideï. En dégageant ce qui, dans ce commentaire, est purement mathé- matique des considérations philosophiques qui l'enveloppent, on s'aperçoit qu'il ne contient presque rien de personnel et que la plus grande partie en estempruntée à Geminus, auteur du premier siècle avantJésus-Christ. On en conclut quela géométrie, de même que l'arithmétique, qui ne fut jamais étudiée scientifiquement chez les anciens autrement qu'avec l'appareil géométrique, que ces deux sciences, disons-nous, avaient atteint leur apogée avant l’avènement des Césars. Donc leur enseignement théorique ne dut guère se modifier depuis la période alexandrine jusqu'à l’âge de Constantin, où commença la décadence. Ce n’est pas à dire que les Romains, après la conquête de la Grèce, aient le moins du monde cherché à étouffer la culture scientifique. Ils se plurent, au contraire, à reconnaitre la 1. Eléments (otouyeta). 13 livres. — V. ci-dessus l’Index bibliographique. 2. V. Index bibliographique. Les œuvres d'Archimède qui nous restent ont pour titres : De la PISE du cylindre (IIept ris coulous xat xuhivôsou) ; — Mesure du cercle (Küxov | LETONS <): : — Des conoïdes et des figure s sphéroïdes (Iles! xwvoeèewv xa GLAUAT ruy Gpatoostèewv); — Des spirales (Isot EAXOV) ; — De l'équilibre des plans et de leurs centres de gravité (Ieot 2TITEOWY 1G0000T1XOY, 1 XEVTO® Bapov ErtreGv) : — La quadrature de la parabole (Terpaywviouds rap 260 ÿs); — L'arénaire (W auUuETNs) ; — Des corps flottants sur l'eau (ec! Toy UÈUT! Éger TAULEVOV . 3. Kowxc FACE 4. Euvaywo yat ualnuxrixut (Collectiones mathematicae). V.1ndex bibliographique. 5. V. Paul Tannery, La géométrie grecque, Essai critique, première partie, p. 13. Paris, Gauthier-Villars, ISS7. 6. V. Index bibliographique. HR ICTRES supériorité intellectuelle des Grecs en cette matière et accordèrent à ces études toute la protection qui convenait. « Il n'est d’ailleurs, dit M. Paul Tannery, ni établi historiquement ni unanimement reconnu que le niveau moyen de la science à l'époque gréco-romaine ait été inférieur à celui de la période gréco-alexandrine !. » Sa diffusion par l’enseignement fit même beaucoup de progrès sous l'empire, favorisée par l'intervention personnelle des princes. Il ne faut pas oublier non plus que la grande époque de l'astronomie ancienne s'étend depuis Hipparque dont les observations furent faites à la fin du n° siècle avant Jésus-Christ, jusqu'à Ptolémée, qui vivait sous les Antonins. Mais pour l’arithmétique et la géométrie proprement dite, c'est-à-dire pour celles des sciences exactes que l’art de l'ingénieur utilise constamment, leurs grands progrès avaient été accomplis par les savants de l’âge antérieur. La trigonométrie, dont on a quelquefois attribué l'invention à Ménélas d'Alexandrie contemporain d’Auguste, remonte en réalité à Hipparque; d'ailleurs, elle semble n'avoir été utilisée par les anciens que pour les arcs de la sphère en astronomie, et encore de façon très incomplète ; aucune application régulière n'a été faite de la trigonométrie plane ?. Quant à l'algèbre, on la voit faire son apparition au 1° siècle de Jésus-Christ, avec Diophante. Mais c'est, si l'on peut dire, une semence trop tardive, car elle tombe sur un terrain déjà desséché; elle ne pourra germer et fructifier qu'après plusieurs centaines d’années. Bien que le génie particulier des Romains les portât beaucoup à l'étude des problèmes pratiques, en cela même ils ont été à l'école des Grecs. Les arpenteurs romains avaient bien des procédés traditionnels, mais la plupart d'entre ceux-ci remon- taient encore à des sources grecques. L’étude de Vitruve, de Pappus*, permet de constater que tous les principes de mécanique énoncés par ces deux auteurs, tous les instruments qu'ils décrivent avaient déjà été énoncés ou décrits soit par 1. V. Paul Tannery, La géométrie grecque, 1. c., p. 11. 2. Recherches sur l'Histoire de l’Astronomie ancienne, par Paul Tannery, Paris, Gauthier-Villars, 1893, ch. 111, 5. 3. Collectiones mathematicæ, liv. VII. SE QUE Archimède, soit par Ctésibios, Philon de Byzance, et Héron d'Alexandrie. Donc, qu'il s'agisse de travaux publics exécutés au temps des Gracques, de Cicéron, d'Auguste ou des Antonins, ou plus tard encore, les données scientifiques sur lesquelles ont reposé les méthodes ne se sont pas sensiblement accrues en allant de l'une à l’autre de ces époques ; ce qui d’ailleurs ne veut pas dire que les méthodes elles-mêmes ne se soient pas modifiées ou perfectionnées ?. Mais relater ce que l’on connaissait en fait d’arithmétique, de géométrie, de physique et de mécanique dans l’école d'Alexandrie vers la fin du n° siècle avant l'ère chrétienne, c’est exposer par le fait même selon toute probabilité ce que l’on savait et ce que l’on enseignait à Rome et dans les diverses provinces de l'empire pendant les trois ou quatre siècles suivants. 1. Si toutefois celui-ci est antérieur à Vitruve, comme on le croit généralement. Il sera plus loin dit un mot de cette question. 2. C'est ainsi que la construction par voûtes ne prit une très grande extension que sous l'empire romain; mais les principes mathématiques en étaient connus depuis longtemps. CHAPITRE PREMIER ARITHMÉTIQUE I. — La science des nombres chez les Grecs. Son étendue et ses parties. Pythagore et ses disciples, véritables créateurs de cette science, avaient longuement médité sur les propriétés des nombres, leurs combinaisons diverses et leur suite indéfinie. Rien dans l’ardeur au travail, dans le zèle investigateur de nos savants modernes, ne saurait donner une idée de la passion dévorante et du brûlant enthousiasme qui consumaient ces premiers mathématiciens, contemplateurs ravis des vérités abstraites et absolues. C'est qu'ils n'étaient pas simplement poussés par la curiosité de résoudre des problèmes isolés, par le désir d’avancer pas à pas dans une connaissance plus étendue des phénomènes naturels : ce qu’ils cherchaient à dégager de la complexité infinie des rapports numériques, c'était la loi même du monde, le dernier mot de tout, le savoir divin. Le pythagorisme était une philosophie ou, pour mieux dire, une religion avec ses initiations, ses mystères et ses rites. « Salut, Nombre fameux, générateur des dieux et des hommes! » ‘l'el est le début d’un poème, ‘Tecos Aoyos, longtemps cru d'Orphée et que Stobée attribue à Pythagore. Plusieurs écoles philoso- phiques de l'antiquité ont connu cette sorte de délire mystique 1. Philolaos, un des plus célèbres disciples de Pythagore, enseignait que toutes les choses relevant de notre faculté de connaitre ont chacune un nombre, sans quoi rien ne saurait être conçu. C'est l’application de ce principe aux mots, définitions et symboles des réalités, qui a créé la Kabbale ou estimation en nombre des lettres considérées comme des chiffres. La somme de ces chiffres est le nombre de l’objet défini. Ainsi, dans l’Apocalypse, le nombre de la Bête est 666 (ch. xr1r, v. 4), LEE ee à l’idée d'une révélation universelle crue prochaine !. Mais à la différence des autres, l’école pythagoricienne, grâce au caractère rigoureux de l'objet qu'elle considérait, fut bien plus soutenue qu'égarée par son rêve, et fonda une science exacte, tandis qu'ailleurs s’enfantaient tant de chimères. La science arithmétique issue de ces hautes méditations se divisa en théorie des nombres linéaires, théorie des nombres plans et théorie des nombres solides. Outre les opérations élémentaires dites les quatre règles et ce qui concerne les fractions, elle comprenait déjà, au temps de Pythagore, au moins dans leurs propositions essentielles, les théories des nombres premiers, des progressions arithmétiques et géométriques, des proportions, des moyennes proportionnelles, des sommes et différences de carrés, et de l'infini, conçu comme ce qui n’a aucune grandeur assignable, ou ce qui est plus grand ou plus petit que toute quantité donnée*?. Les mathématiciens modernes ne le conçoivent et ne le définissent pas autrement. Les V°, VII, VIII et IX° livres d’Euclide résument cet ensemble, en y joignant l'apport des philosophes de l’âge suivant, c'est-à-dire des écoles de Platon et d’Aristote, et aussi l'apport d'Euclide lui-même. Son X° livre, notamment, développe d'une manière très étendue les théories, qui semblent bien lui appartenir en propre, des grandeurs incommensurables et des 1. La dévotion de Lucrèce à l'égard d'Epicure s'explique par cet état d’appétition extatique, pour ainsi dire, où l'avaient plongé les écrits du maitre. Fluctibus e tantis vilam, tantisque tenebris In tam tranquilla et clara Luce locavit. (De Rerum natura, V. 11-12.) His tibi me rebus quaedam divina voluptas Percipit atque horror, quod sic Natura tua vi Tam manifesta patet ex omni parte relecta. (Ibid., III, 28-30.) 2. « Si je me suppose, disait Archytas de Tarente (disciple lui-même de Philolaos), placé à la limite extrème du monde,pourrai-je ou non étendre la main ou une baguette au dehors? Dire que je ne le puis pas est absurde; mais si je le puis, il y aura done quelque chose en dehors de ce monde, soit corps, soit lieu. Et peu importe comment nous raisonnerons; la même question se renouvellera toujours : s’il y a quelque chose sur quoi puisse porter la baguette, alors évidemment l'infini existe. Si c'est un corps. notre proposition est démontrée. Est-ce un lieu ? Maïs le lieu est ce en quoi un corps est ou pourrait être ; et il faut alors, s’il existe en puissance, le placer au nombre des choses éternelles, et l'infini serait alors un corps et un lieu. » (Archytas Ilept ruvroç, passage cité par Simplicius, philosophe de l’époque de Justinien. Cf. Chaignet, Pythagore et la philosophie pythagoricienne.) him. és à 7 quantités irrationnelles. D'ailleurs, ainsi qu'il est dit plus haut, les démonstrations arithmétiques se modelaient sur celles de la géométrie. Euclide se sert de lignes pour exprimer les nombres, et il est plus que probable que dans l’enseignement de l'arithmé- tique cette méthode fut toujours suivie au moins jusqu'à Diophante ? (11° siècle après J.-C.). L'ouvrage de ce dernier, ’AptOurraæt, en six livres, fait usage pour la première fois d'un signe particulier S', pour désigner un nombre inconnu ou à trouver, c’est-à-dire l’x d'une équation. Il est donc l'inventeur de la forme algébrique. Mais à vrai dire, sauf l'appareil extérieur du raisonnement, il n’apporta guère d'aperçus nouveaux et ne permit pas de trancher un plus grand nombre de questions qu'auparavant. On avait pu, par les anciens moyens, résoudre de véritables problèmes d’'algèbre. Ainsi, on peut déduire aisément de quelques propositions du livre des Données (Acueyo) d'Euclide, la résolution des équations du ?° degré *. Ceci est évidemment important à retenir, si l’on envisage la pratique de l'art de l'ingénieur dans l'antiquité. De même que la géométrie théorique était complétée par la géodésie, qui était son application aux opérations pratiques, divisions et mesures des surfaces ou volumes, de même on appelait logistique la partie de l’arithmétique qui enseignait les procédés du calcul. La Géodésie et la Logistique sont analogues aux branches précédentes (géométrie et arithmétique) ; seulement au lieu de traiter des nombres ou des figures intelligibles, elles s'occupent 1. Exemple : Pour exprimer que la somme des carrés de deux nombres est égale à deux fois le carré de la demi-somme de ces nombres, plus deux fois le carré de leur demi-différence, Euclide dit (liv. II, propos. 9) : « Si une ligne droite est coupée en parties égales ct en parties inégales, les carrés des segments inégaux de la droite entière sont doubles du carré de la moit'é de cette droite et du carré de la droite placée entre les sections. » 2. Ayant Diophante, Nicomaque, qui vivait probablement au premier siècle de l'ère chrétienne, avait fait des exposés arithmétiques indépendants de la géométrie. (Entroduction arithmé tique, "AptÜunrtixn ctouywyn, en deux livres.) Mais cette méthode ne semble pas avoir été suivie. Cet auteur n’aurait d’ailleurs pas été un mathématicien original: pseudo-mathématicien, dit P. Tannery. (La géométrie grecque, p. 12.) 3. Telle est la proposition 85 : « Si deux droites comprennent un espace donné, dans un angle donné, et si leur somme est donnée, chacune d'elles sera donnée. La solution de cette question donne les racines de léquation du 2° degré : 2? — b æ + a? —0 (V. Michel Chasles, Des méthodes en géométrie, Paris, 1875, p. 11). a — des sensibles; car l’œuvre de la géodésie ne consiste pas à mesurer le cône ou le cylindre, mais bien les monceaux comme cônes ou les puits comme cylindres ; les droites qu'elle emploie ne sont pas intelligibles, mais sensibles, tout en étant d'ailleurs, par rapport aux intelligibles, des représentations, tantôt plus exactes, comme les rayons du soleil, tantôt plus grossières, comme des cordeaux ou des règles. De même le logisticien ne considère pas les propriétés des nombres en eux- mêmes, mais sur les choses sensibles, d'où vient qu'il leur donne des noms d’après les objets qu’ils dénombrent !. » « La Logistique est la théorie qui traite des dénombrables et non des nombres... Elle a, comme matière, tous les dénom- brables; comme parties, les méthodes dites hellénique et égyptienne pour les multiplications et les divisions, ainsi que les additions et décompositions des fractions. Elle a pour but ce qui est utile dans les relations de la vie et dans les affaires, quoiqu’elle semble prononcer sur les objets sensibles comme s'ils étaient absolus*?. » «... Elle se sert de l’un comme minimum des objets homogènes sous une même pluralité. Ainsi elle pose un homme comme individu dans une pluralité d'hommes, mais non pas absolument; une drachme comme indivisible dans une pluralité de drachmes, tandis qu’elle se divise en tant que monnaie *. » La logistique était donc bien ce que nous entendons par arithmétique pratique, c’est-à-dire l'art de calculer au moyen des signes et de leur ordre. II. — Systèmes grecs et latins de numération. Pour les nombres entiers, le système de numération, en Grèce, comme chez les Romains, était le système décimal, qui 1. Proclus, extraits de Geminus, cités par P. Tannery. (La géométrie grecque, p. 40.) 2. Scolie sur le Charmide (Variae collectiones, 3), et Plato’s Charmides, inhaltlicherlaütert von Dr. Th. Becker, Halle, 1879. (Zbid., p. 48, 49.) 3. Variae collectiones, 10. — Ibid., p. 49, eq a son origine toute naturelle dans le nombre des doigts. Quant à la numération écrite, le plus ancien système grec consista simplement à représenter les chiffres par des barres en quantité égale au nombre à désigner. Ensuite vint le système acro- nymique ou hérodien, consistant à prendre pour chiffre la première lettre du mot qui exprime le nombre, l'unité restant représentée par une barre. Mais, beaucoup de nombres ayant la même initiale, et d'autre part la quantité de signes étant limitée tandis que la série des nombres est indéfinie, il est évident qu'il fallut se contenter de noter par une initiale ou par un autre signe conventionnel seulement certains nombres, par exemple les unités et les multiples de 10. Tel fut le système alphabétique décimal, dans lequel les signes numériques sont les vingt-quatre lettres de l’alphabet grec, ou plutôt les vingt-sept lettres, car on fit usage de trois caractères archaïques, le Bau ou Digamma, F ou S, qui vient après le, le Koppa, :, venant après le r et le Sampi, », après l’o. De x à 8 inclusivement, y compris le F ou S qui correspond au chiffre 6, sont les unités (nombres monadiques); de & (iota) à !, qui exprime 9,0, les dizaines, et de p à @ (900), les centaines (nombres hécatontadiques). Quant aux nombres intermédiaires, on les représentait par deux ou trois signes, inscrits de gauche à droite, comme nous le faisons nous-mêmes. Ainsi 700 s’écrivant 4 (le petit signe en haut distinguant les chiffres ou nombres des simples lettres ou mots), 750 s'écrivait dv’, 754 dud. À 1.000 on reprenait l'alphabet au début, en traitant ce nombre dans l'écriture comme une nouvelle unité, mais en ayant soin de marquer les lettres jusqu'au 4 inclusivement d'un trait en bas à gauche (nombres chiliontadiques). Ainsi { valant 7, & vaut 7.000. On opérait de même pour les myriades, en remplaçant le trait en bas par deux points (un tréma) au-dessus de la lettre. On commençait de la sorte une nouvelle série, un autre ordre de nombres, et l’on avait les nombres monadiques de myriades simples jusqu'à 6, décadiques jusqu à L, hécatontadiques jusqu’à À et si, en plus du trait, il y avait aussi des points, les lettres désignaient autant de milliers de myriades qu'elles auraient — 10 — désigné de milliers sans les points. Si au-dessus des deux points on en mettait deux autres, la quotité représentée par la lettre se trouvait multipliée par une myriade : c'était ce qu'on appelait les myriades doubles ou myriades de myriades; et ainsi de suite : on avait des myriades triples, quadruples, ete., jusqu’à l’infini, en superposant deux points autant de fois qu'on voulait {. D'après cette méthode le chiffre 640.803.175, par exemple, s'écrivait $ 877pee ?. On croit généralement que ce système ne fut en vigueur qu'à partir du premier siècle de notre ère, ce qui n'est pas assuré : il pourrait être bien antérieur. Quoi qu’il en soit, il en est un autre constaté par des documents beaucoup plus anciens, conçu égale- ment d’après le principe acronymique et offrant une assez grande analogie avec la notation romaine, en ce qu'il comporte des signes particuliers pour 5, 10, 100, 1.000 et 10.000 : P, rex, cinq; À, déxæ, dix; H, éxare, cent; X, ya, mille; M ou M, ppur, dix mille. Les multiples de cinq par les puissances de dix s’y notent par la lettre qui exprime une de ces puissances, logée sous la barre supérieure du F. Ainsi F signifie 50. Voici du reste le tableau numérique, tel qu'il résulte d’une inscription du musée du Louvre, dite marbre de Choiseul*. Cette inscription est un compte rendu des sommes dépensées par les trésoriers du Parthénon dans la 3° année de la 92° olympiade (410 avant J.-C.). Les nombres et les monnaies sont exprimés par les chiffres suivants : 1. V. Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque nationale, t. XXXIL, Deux lettres arithmétiques de Rhabdas, éditées par P. Tannery, p. 144-146. 2, Pour exprimer des nombres fractionnaires, les Grecs ne séparaient par aucune ligne le numérateur du dénominateur : ils écrivaient l’un et l’autre sur la même ligne, mais les caractères du numérateur étaient plus gros queceux du dénominateur. Ainsi, par exemple 4e Ëà signifiaient 15/64. (V.F. Hoefer, Histoire des Mathématiques.) On pouvait aussi écrire, en caractères égaux, Le Ed” £2” en répétant le dénominateur deux fois et en l’accentuant de deux traits en haut. Si la fraction avait l'unité pour numérateur, soit 1/64, on n’écrivait que le dénominateur avec deux traits 25”. 3. V. Catalogue des inscriptions grecques du musée du Louvre, interprétées par W.Froehner. Paris, 1888 — N° 46. ; É 26 SR CITES l I... ? C 1/4 d'obole (tétartémorion). MI... : 9 1/2 obole (hémicbolion). MIT... É | 1/3 d’obole (tritémorion). MAS Le l? ou 3/4 d'obole (Fræœhner). LT ANS 10 k 1 obole. F 7” 00 En LIN 100 + l drachme (6 oboles). ER 500 T {talent (6.000 drachmes). Re . 1.000 F 9talents. TIR o.000 À 1Otalents. D. 10.000 F 50talents. peut 20.000 Pour noter avec ce système le chiffre 5.432, par exemple, on écrira FHHHHAAAII. S'il s’agit d'exprimer cette somme en drachmes, on modifiera simplement les deux derniers chiffres en les écrivant FH. L'usage est à remarquer de ces sortes d’exposants qui multi- plient le chiffre 5 par 10, 100, ou 1.000. Il est vraisemblable, sinon certain, que cet usage pouvait être étendu aux multiples de 10; ainsi un million aurait pu être exprimé par le signe MA. Les petits traits du système alphabétique jouent ce même rôle d'exposants multiplicateurs, et il n’y a rien de bien téméraire à imaginer que l'ont pût, en groupant un nombre de traits suff- sant, exprimer des nombres aussi élevés qu’on voulait. La numération écrite des Romains était fondée sur ce même principe de la notation particulière du 5, du 10, des puissances de 10 jusqu'à 1.000,et des multiples de 5 par 10 etses puissances. Les signes employés pour les nombres entiers n'étaient qu'au nombre de sept : I (unité), V (5), X (10), L (50}, C (100), D (500), 1. Comme dans la numération grecque, les chiffres s'ajoutent les uns aux autres en allant de gauche: à droite. Cependant, on sait qu'une barre (une unité) placée à gauche d'un autre chiffre, se soustrait de celui-ci. — Les nombres 4, 9. 14, 19. etc., s'écrivaient le plus souvent IT, VIII, XIII, XVIII, mais aussi IV, IX. XIV, XIX, etc., comme nous le faisons de préférence. On écrivait aussi quelquefois, et c’est ce que nous ne faisons plus, — IIX et XIIX pour 8 et 18, — X, placé à droite de L et de C se soustrait aussi. — XL — 40 et XC — 90. 2. Ce signe, dans le principe, était l’aspirée 7, sous son ancienne forme \ ou L qui s’altéra ensuite et donna L. Aa M (1.000). Les exposants multiplicateurs avaient pour équivalents : 1° une barre transversale au-dessus de la lettre ou des groupes de lettres, indiquant qu'il s'agissait de milliers ; 2° un rectangle, non fermé par en bas, autour de la lettre ou du groupe, mar- quant les centaines de mille. Souvent on ajoutait la lettre M à la droite des lettres barrées pour spécifier encore davantage qu'il s'agissait de milliers. Ainsi le chiffre 12.523.837 s'écrivait : [CXXV Ir XXI: M LDCCCXX XVII Le nombre 1.000 pouvait s'exprimer aussi par le signe CID! et les multiples de 1.000 par autant de fois cette parenthèse ajoutée à la première que le nombre 1.000 était multiplié par 10. Ainsi: 10.000 s'écrivait (CCi99 100.000 s’écrivait CCCI299 et, pour restreindre l’espace occupé par les signes, on eut : (DEA OUL ® — 10.000 @® — 100.000 Pour figurer les multiples de 5, on n'eut plus qu'à séparer ces divers signes en deux, en conservant la partie de droite : 3 ouSD = 200 (399‘ou Dr" 252000 1299 ou D — 50.000 Soit à écrire, avec ce système, le chiffre 583 211, nous aurons : 19999 1999 CC199 ‘CCI99"CCI99 CI9 CID, CID CES ou D b ® ® ® © © © CCXIIII : 1. C'était à l’origine l’aspirée @. — 1.000 s’écrivit aussi @© et ©. 2. Quand il s'agissait de monnaies, le nombre s’exprimait en sesterces et cela se marquait par le signe HS à gauche du chiffre. En RE Le premier système, somme toute, était d'une écriture beau- coup plus simple. La différence fondamentale des deux numérations grecque et latine avec la numération moderne consiste en ce que celle-ci se borne à n’avoir de signes que pour les neuf premières unités, et à répéter ces mêmes signes pour les unités des divers ordres en ne les distinguant que par le rang qu’elles occupent par rapport au chiffre des unités simples qui est à droite. Mais pour marquer ce rang, il a paru indispensable d’avoir un signe supplémentaire qui est le 0, destiné à remplacer le chiffre des unités d'un certain ordre qui peut manquer dans un nombre. Ce signe manquait aux anciens !. Or, avec ces dix signes, nous arrivons à écrire brièvement et simplement les nombres les plus élevés; on voit au contraire l'espace qu'occupait un nombre chiffré avec les méthodes anciennes, dès qu'il atteignait seulement les centaines de mille, et que tous les ordres d'unités y figuraient. Tout cela est bien connu. Si j'ai cru à propos de le rappeler, c'est pour en arriver à cette question : comment, avec un appareil de numération si incommode, les ingénieurs romains, les archi- tectes, les chefs de chantiers, en un mot tous ceux qui concou- raient aux travaux publics, obligés qu'ils étaient de manier constamment des chiffres, pour évaluer rapidement les poids et les surfaces, pour dresser les devis et les comptes, pouvaient-ils suffire à cette besogne dans le temps voulu et sans risque d'erreurs ? Il en est de même pour les banquiers, les marchands, les hommes d'affaires de toute espèce. Et jusqu'ici, nous n'avons considéré que les unités. Mais une complication plus grande encore provenait de ce que l'unité se subdivisait chez les Romains d'après le système duodécimal, l'as, ou unité simple comprenant 12 onces, l’once se partageant à son tour d’après le même principe. Je rappelle pour mémoire la liste de ces divers sous-multiples avec leurs valeurs et leurs signes ou sigles. 1. Ou tout au moins il ne fut jamais utilisé pratiquement (v. ci-après. UE AS ONCES SIGLES de CO PAU PIERRE 5e Dane l 12 [ Deunx pee 11/12 Il S'=Er MERS, TP 9/6 10 ses EN PET CERPRERT 3/4 9 SEE LOCATAIRE Jeu Ari 2/3 ce) = Septunx........:... 7/12 ïl Si- SOIMIE Eve rc a. 1/2 6 S Duimceunx 22-44 -ceccu O0) 5) = TOLESES DMenS ee open % 1/3 4 =E Quadranse..E..$ Te 1/4 3 = - SDextangue tes bras 1/6 2 = | Sescuncia. 2:24414114 8 4% : 1/8 1 1/9 2:68 BEA LE AE PARU MR 1/12 ! -,U,%,0 SeMuACIAa.. ...-... SAT 1/2 RS M =: : Binae sextulae ou duella. 1/36 1/3 USER ÉCilieus eee leo 1/4 9 Ébnila ns preco ee ne 1/6 e Dimidia sextula........ 1/144 1/12 è Scripulum.......... , A1 288 04/2 SR SIM = as mepemdes . 1/1728 1/144 pas designe distinctif. 1II. — Mode de calcul usuel par les cailloux et l’'abaque. Les monuments écrits, grecs ou latins, non seulement ne présentent rien d'analogue à notre disposition des chiffres en colonnes, où les unités des divers ordres sont étagées respective- ment les unes sous les autres!, mais nous n'y voyons aucune penses figurant sur une inscription grecque 1. Voici, par exemple, un compte de dé 36). Ces dépenses avaient été faites du musée du Louvre (Catalogue de Froehner, n° s Ge LT Gi — 15 — trace de disposition méthodique d'un calcul, avec traits de séparation, juxtaposition de facteurs, etc. L'explication en est bien simple. C’est que les calculs s’opéraient par des procédés qui ne laissaient pas de trace, pas plus que n’en laisse le maniement de notre règle à calcul ou de toute autre machine arithmétique. Le moyen de calcul le plus ancien nous est indiqué par le sens même du mot calculus, caillou. Ce mot latin, comme le mot grec ot #nçu (pluriel), qui a le même sens, au propre et au figuré, montre assez que l’usage universel et primitif était de prendre, pour calculer, de petites pierres ou des jetons. On les disposait dans un certain ordre en traçant certaines lignes _ suivant lesquelles on les faisait mouvoir. C'était le principe du procédé de l'a6aë 1, abacus, ou table à calcul. par le dème de Plothée (Attique). Lés chiffres ne sont nullement rangés comme ils le seraient dans un monument moderne analogue, avec le total au-dessous : Halala icio...... eee ee 4 Log paralies. [ n] U d 24 wt | Ke. O2 € DO D'ou ..... Au démarque........ 1000 drachmes. à RENE CT 24} ( Aurdeurtrésoriers 5 [rou]ut œuviécs|tTald: [ëto | teoa | F.!Pour les sacrifices de F L 5 l l’année courante . ..... 5000 Célelr o| H px xAET ovIFXX sis shelolole Pour le temple d'Hereule. 7000 Cëds| "A 2p0 Ôtota | 2: ÉPMEREAEL Pour la fête d’Aphrodite. 1200 [è] dec) XX H........ D RRTe Pour la fête des Dioseures. 2100 , L DER er $ Pour latélie (exemption Ehhrnviarélerov|".... CO c C OI NES 5000 Lé]s|’A 0 ORNE A RP TR +. Pour la fête d’Apollon ... 1100 RSS co PH... «+ Pour les Pandies. 600 [ul:506cewv|HAAAFFFFIIC... Fermages........... ... 134dr. 2oboles 1/2. Un compte moderne serait disposé comme la traduction l'indique, et le total serait mis au-dessous du chiffre 600 ; les fermages, qui constituent sans doute une recette et non une dépense, étant mis à part, séparés du reste au moins par un intervalle. 1. Cf. Hültsch, art. Abacus (R-E. de Pauly Wissowa, t. I, et Dictionnaire de Daremberg et Saglio, même article). L’étymologie de ce mot, dit M. F. Hoefer (Histoire des mathématiques, p. 126, note 2), a divisé les érudits en deux camps. Les uns, comme Nesselmann et Vincent, le font venir de l’hébreu abak, qui signifie poussière, par allusion au sable ou à la poussière dont on couvrait les planchettes sur lesquelles les anciens faisaient leurs calculs, témoin ce passage de Perse (sat. I, 131): Nec qui abaco numeros et secto in pulvere metas Scil risisse vafer. Les autres, comme Th. Henri-Martin. le forment de x privatif et Baotc (ce qui n’a pas de support, de base, une planchette).”A6aË a toujours, en effet, désigné une plaque polie, gravée ou non, et la signification de poussière n’est jamais intervenue pour ce mot; d'autre part, abacus vient évidemment d’464£. Il n’y a donc pas à hésiter entre les deux opinions; la première semble n’avoir aucune valeur. AU SE Dans le traité de géométrie de Boëce! (1° livre), se trouve le passage suivant : « Des Pythagoriciens, pour éviter de se tromper dans leurs multiplications, divisions et mesures (car ils étaient en toutes choses d’un génie inventeur et subtil), avaient imaginé pour leur usage un tableau, qu'ils appelèrent en l'honneur de leur maitre, table de Pythagore; parce que, ce qu'ils en avaient tracé, ils en tenaient la première idée de ce philosophe. Ce tableau fut appelé par les modernes abacus. » Ici est insérée, dans les plus récents manuscrits de Boëce, la table de multiplication bien connue, Or, d'après l'examen des manuscrits les plus anciens et les meilleurs, cet abacus n’était nullement la table de multiplication, à laquelle on donne ainsi par erreur le nom de fable de Pythagore*. C'était une série de traits verticaux formant des colonnes, dont la plus à droite correspondait aux unités, tandis qu’en allant de droite à gauche on rencontrait la colonne des dizaines, puis celle des centaines, ete., etc. Dans chacune d’elles pouvaient se placer des caractères spéciaux, appelés apices, de diverses formes et au nombre de neuf (dont quelques-uns, tels que le huit et le neuf, ont précisé- ment la forme de nos chiffres dits arabes 8 et 9. Et le texte de Boëce ajoute : « S'ils plaçaient ces divers apices sous l'unité (c'est-à-dire l. Boëtii quae fertur geometria, à la suite de l’Arithmétique et de la Musique dans l'édition Frieälein. (V. Index bibliographique.) 2, V. Michel Chasles, Les methodes en géométrie, p. 467. Cf. du même auteur : Sur l’origine de notre système de numéralion (Comptes rendus de l'Académie des Sciences, 21 janvier 1839). — Sur la question de l'origine de notre numération vulgaire et particulièrement sur la signification du passage de Boèce (Jbid.,7 et 14 octo- bre 1839). — Explication des traités de l’abacus et particulièrement du traité de Gerbert(Zbid.. janvier et février 1843). « Le même savant (Chasles), dit Th. Henri-Martin (ouv. cité, Revue archéologique, 1856-57), a établi, d’après les meilleurs et les plus anciens manuscrits, que, primiti- vement, ce texte de Boëce était éclairci par la figure du tableau qui, avec les neuf signes numériques où apices, conservés dans ces manuscrits, permettait d'exprimer tous les nombres; que ce tableau y est nommé abacus Pythagoricus. c'est-à-dire table de Pythagore; que ce même tableau et son usage sont expliqués, sous ce même nom et plus en détail, non seulement dans un traité de Gerbert, mais aussi dans d’autres ouvrages latins du x°, du xi1° et du xu° siècle; que c’est à tort que, dans les autres manuscrits de Boèce, il à été remplacé par une table des multiples tout à fait étrangère au passage; et que le nom de Table de Pythagore,donné maintenant à la table de multiplication, résulte uniquement de cette faute des copistes de quelques manuscrits de Boèce. » LE tr; JS dans la colonne des unités), ils représentaient toujours les digiti (unités simples). « Plaçant le premier nombre, c'est-à-dire deux (car l'unité, comme il est dit dans les arithmétiques, n’est pas un nombre, mais l’origine et le fondement des nombres), plaçant donc deux sous la ligne marquée dix, ils convinrent qu'il signifierait vingt; que trois signifierait frente, quatre, quarante, et ils donnèrent aux autres nombres suivants les significations résultant de leur propre dénomination. « En plaçant les mêmes apices sous la ligne marquée du nombre cent, ils établirent que deux signifierait deux cents, trois, trois cents... Et ainsi de suite dans les colonnes suivantes, et ce système n'exposait à aucune erreur. » Ainsi, les anciens auraient connu et pratiqué, depuis une époque reculée, notre système de numération écrite, sauf l'emploi du zéro, qui, d’ailleurs, était inutile, à cause des colonnes tracées d'avance. La petite différence aurait consisté précisément dans l'emploi de ce tracé, c'est-à-dire de l’abaque. Or, d'après Théodore Henri-Martin!, ce système devrait être attribué, non aux disciples directs de Pythagore, mais à des néo-pythagoriciens, contemporains de l’époque du néo-platonisme alexandrin, ou plutôt de son dernier représentant, Proelus : cela à cause des noms et figures des apices, qui expriment des idées pythagoriciennes, en effet, mais mêlées de gnosticisme. « Si Pythagore, d'ailleurs, avait été l'inventeur de l’abacus qu'on lui attribue, et si les Grecs avaient connu cet abacus pendant toute l'époque florissante et progressive de leur science mathématique, ils n'auraient pas dédaigné cette invention de leur grand philosophe, mais ils s’en seraient servis, et surtout ils en auraient parlé, et un auteur latin de la fin du v° et du commencement du vi° siècle de notre ère n'aurait pas été le premier à nous en transmettre le souvenir?. » Voilà certes de fort bonnes raisons. Mais elles ne valent que contre l'emploi prématuré des apices et du caleul écrit, non 1. Ouvr. cité. Revue archéologique, 1856-57, 11, 2. Ibid. AVS contre l'emploi de l’abaque à colonnes de divers ordres pour le calcul usuel instantané. Il est à croire, en effet, qu'au temps de | Pythagore, on ne donnait pas aux chiffres des valeurs de position, mais on en donnait certainement aux rangées de cailloux ou de jetons. ; Hérodote (11, 36) dit : « Les Grecs calculent avec de petites | pierres (2oyiéoyreu Ynças:), en portant la main de la gauche vers la droite, tandis que les Egyptiens la portent de la droite vers la gauche !. » Qu'est-ce que cela signifie, sinon qu'on faisait passer les cailloux d’une colonne à droite à une colonne à gauche, ou inversement, lorsqu'on faisait un calcul : le sens importe peu, c’est affaire de convention. Prenons la disposition en colonnes telle qu’elle est dans l'abacus de Boëce. (Remarquons en passant que les colonnes sont numérotées d'après un système d'écriture numérique qui n'était pas, ce semble, usité aux époques antérieures, et qui consiste en ce que les lettres associées, séparées ou non par des points, se multiplient, comme dans la notation algébrique, au lieu de s’additionner. Le nombre malle y est aussi écrit de deux façons, M, et 1, d'après le procédé multiplicateur que nous connaissons, de la barre transversale ?.) Tableau 1. 10 milliards! 1 milliard |100.000.000 | 10.000.000 | 1.000.000 | 100.000 | 10.000 1.000 100 | XIMI | IMI | CMI | XMIÏ | M. 1. V. ci-dessus, p. 8. — On usa sans doute plus tard indifféremment des deux méthodes ; puis la méthode égyptienne prévalut. 2. Ceci est d’ailleurs tout à fait indépendant du tableau lui-même, et ne fait rien préjuger de l’époque où l’on commença à se servir de celui-ci. — 19 — Le nombre 4 milliards, 315 millions, 26 mille, 407, soit 4.315.026.407, est marqué sur ce tableau (tableau 1) par des points qui représentent les petits cailloux. Examinons comment pouvaient s'effectuer avec cet abaque les quatre opérations arithmétiques. Addition. — Au nombre 26.407 qui constitue la fin du nombre inscrit ci-dessus, proposons-nous d’additionner 9.786, par exemple. J'ajoute (tableau ?) 6 cailloux à la colonne I, ce qui fait 13; j'en laisse 3 seulement et j'en enlève 10 qui sernnt remplacés par un seul à la colonne X, et ainsi de suite. C'est notre opération Tableau 2. p< d’addition exécutée en fait. Il y aura finalement, sur le tableau, la disposition et le nombre de cailloux ci-dessus, représentant la somme 36.193. On devait faire autant d'opérations qu'il y avait de nombres à additionner. L'habitude permettait d'effectuer très vite cette série plus lente, à première vue, que notre opération unique. Soustraction. — C’est encore la mise en action, palpable, de ce que nous faisons nous-mêmes. Soit à retrancher 12.124 du nombre précédent. J'enlève un caillou à la colonne X et le remplace par dix autres sur la colonne I, qui en aura 13 (tableau 3), , desquels j'en retranche 4, il en restera 9!; j'en enlève 2 aux 8 qui restaient sur la colonne X et ainsi de suite. 1. Bien entendu, le calcul de tête permettait de placer tout de suite 9 cailloux, au lieu d’en poser d’abord 13 et d’en ôter 4. — 20 — La différence 24.069 apparaissait ainsi : Tableau 3. Multiplication. — Pour multiplier par 10, 100, 1.000, ete., on n'avait qu'à faire avancer tous les cailloux d'un, deux ou trois rangs. S'il s'agissait de deux nombres quelconques, voici, sans doute, comment on opérait. Soit à multiplier 342 par 27 (tableau 4). Le nombre 342 étant inscrit, on le multipliait d'abord par 7f. Ce produit partiel, 2.394, facilement obtenu par un mouvement de cailloux qu'il serait fastidieux d'expliquer, on faisait glisser ceux-ci plus bas, en les laissant dans leurs colonnes respectives. Puis, avec d’autres cailloux, on inscrivait de nouveau 342, mais en le faisant avancer d’un rang pour le multiplier par les deux dizaines, c’est-à-dire qu'on inscrivait 3.420. La nouvelle multi- plication étant faite et donnant 6.840, on faisait comme aupa- ravant glisser les cailloux, qui venaient se mélanger aux premiers. On avait ainsi le produit total 8. 11.13. 4. Il n'y avait plus qu’à simplifier par 9.234, en enlevant dans chaque colonne les dizaines de cailloux, pour les remplacer par des cailloux uniques à la colonne suivante. Et ainsi de suite, si les chiffres du multiplicateur étaient plus nombreux. La simplification pouvait se faire à chaque fois, ou seulement à la fin, au gré de l'opérateur. 1. L'usage avait assez appris quels étaient les produits des neuf premiers nombres multipliés les uns par les autres, pour que la prétendue table de Pythagore ne fût nullement nécessaire à la pratique des opérations. den à 4 RE | 4 M C = EI Le] = El L = = = l 3 4 2 | = E L = L | = [| E L] = L] Er | L E = | 3 L | 6 8 4 0 LI E EEE & a L | ES. = = EE = L] Total.. 8 41 43 4 22 Division.— La division n’était pas beaucoup plus compliquée. Il n’y a qu’à la concevoir de même d'après notre opération à nous. Soit à diviser 6.243 par ?9, je suppose; il est probable qu'on sériait les calculs comme nous le faisons en cherchant le quotient de 62 par 29 ét en posant ? cailloux dans le bas de la colonne C. On faisait, comme nous, du même coup, la multi- plication et la soustraction. La seule différence était que le divi- dende et les restes successifs ne restaient pas inscrits, et se transformaient en se réduisant dans le haut du tableau, jusqu'à ce que le dernier fût obtenu. On suivra facilement la méthode en considérant les tableaux de la page 23 qui 694,3 29 représentent les phases successives de l'opération, 44I— et en les comparant à l'opération moderne figurée 15 ° 215 ci-contre. On voit que, contrairement à ce que l’on est porté à supposer de prime abord, le maniement d'un semblable appareil n’était pas d’une grande complication. Pour calculer ainsi, il n'était même pas besoin d’avoir une plaque de marbre ou de métal préparée d'avance. Quelques lignes tracées à terre sur le sable suffisaient ; et ce mode de calcul devait être, par cela même, de beaucoup le plus usité!. | 1. L’extraction des racines carrées, à une unité près, pouvait aussi fort bien s'effectuer avec ces abaques, au moyen des opérations successives de soustraction et de division que comporte cette recherche. Un certain Nicolas Artavasdi, de Symrne, dit Rhabdas, auteur byzantin du x1v° siècle, dont M. P. Tannery a publié, en IS86, deux petits traités de calcul, documents inédits et uniques dans leur genre, énumère ainsi ces opérations (2° lettre sur l'arithmétique, T) : « Je retranche du nombre proposé le carré qui en est le plus voisin, puis je double la racine de ce dernier et je divise les unités qui restent du carré non exact après le retranchement du carré exact, par le double de la racine de ce dernier ; les fractions ou quantièmes que donne cette division, je les ajoute à la racine trouvée pour le carré exact, et je dis que j'ai ainsi la racine du carré non exact. » © 'Exé%o aTrd ToÙ Gnrouué vou (?) ap “buoù TOY ÉVYIGTA TOUT TAPAXEWEVOY jvoy, sito drAactaCo TV TOUTOU rhevp 4 KA! ne évarokerpOeious Hova Das où Dr, 4 1n0oùs TETEAYOVON, ÊTEXELVE Dnhevér! TOÙ EN pepio cie FAY V << À couv > Toù AAN0OÙS Tete ZYOVOU, AU! edpe TOÙ [LEPLOUOÙ TUVATT © T} edcebeton he vp& TOÙ &À n0oùs rETo1YOVOU xa ‘5 ET) TOG AT NY ELVL x0! ThY T}e VELV TOÙ Un) 4 n0oùs ETOAYEOVO U,. ) Le même Rhabdas Fe aussi des exemples d'opérations sur les nombres fractionnaires (2° lettre, 3 à 6). Ces opérations, qui comportaient comme les nôtres des réductions au même dénominateur, ont ceci de particulier que les nombres fractionnaires étaient, en général, donnés en sommes de quantièmes, c’est-à-dire de fractions ayant pour numérateur l'unité. Il y avait à convertir, avant toute autre opération, ces sommes de quantièmes en fractions ordinaires; puis le résultat frac- tionnaire final seramenait inversement à un nombre exprimé en somme de quantièmes. a = 5 © mail / 4} T \ \1] “ Sa A+ 4 3 1 eo = Ga. 1°" reste. 1° quotient 1‘ reste 2° quotient 2° reste. 1 5 3 3° quotient = ëä 8 B 5En [| 2 1 5 | M C X I | = | ES =. __ (8) 3" reste. 8 Quotient m æ = | = 5. Le] IV. — Divers types d'abaques. Mais il y avait d'autres types d’abaques. L'un, construit d'après un procédé ingénieux, était un système plus spécialement romain. N'ayant besoin que d'un petit nombre, invariable, d'éléments mobiles, il constituait un appareil dont faisaient partie ces petits éléments, remplaçant les cailloux : c’étaient de petits boutons glissant dans des rainures. On connait quatre ou cinq spécimens de ce genre d’abaques, qui ont été conservés !. Je me contente de figurer celui qui a été décrit par Grüter et celui qu'a découvert M. Rangabé en 1846. OTTTTENT Re «cho «y b QN Se ME «Sr Fig. 1. — Abacus romain, mentionné par Grüter. Le premier est en métal et a comme dimensions 35 centimètres sur 42 (fig. 1)°. C'est une plaque striée d’une rangée de huit longues rainures, au-dessus et en face desquelles sont huit autres rainures plus 1. 1° Abacus métallique ayant appartenu à Welser, publié dans ses œuvres (1682) et reproduit par Grüter (p. 224) et par Pignorius (De Servis, Amsterdam, 1674, p. 165 et 340). C’est celui qui est décrit ici. — 2° Abacus romain, ayant appartenu à Ursinus, mal dessiné par Pignorius (1. ce. p. 339). — 3° Abacus romain, appar- tenant au musée Kircher, reproduit dans le Dictionnaire de Saglio. — 4 Abacus romain, actuellement au Cabinet des médailles de Paris (De Molinet, Cabinet Sainte-Geneviève, Paris 1692, p. 23. PL. I.). — 5° Abacus athénien, découvert par M. Rangabé et reproduit ici. 2. Cf. Marquardt, Vie privée des Romains, t.1, p. 19, trad. Henry. SEL Os (4 m= 91 (Lepous TAIVOov xafaneo OwprxoÙ xtovou xEpaAtoV, eumperelus Evexa l'o 3 stonueve LES “ , à p 7 # 1 «+ : | Se PE pe Le 000VTWT& TUUTAVIw raouT OeTar xoyÀlÔLOV Eyov Tv EÀtXA GouoGTNy TOÏs O0oUGL ToÙ i LL ‘ : … 1: un \ LA! 4 _ » — n°2 ’ LA ruuraviou. Ta dE ot o ! S/ jUTux TOÙ oyALdiOU GUUGUT YLVETE: LEtCovt TUUTAVIO, 1 « !’ TO WOOVTUWU.EVOV TUUTAYLOY, 20! TNY GUUQUT 4) ro) Jowrx{èa. liverur 0 GULQUTS 10TO, TODUWY TOL@V AOEUEVOY EX TAS Edous Ts yorvixtdoc, XA! GUYXIVOULEVOY AÛTG T® TUULTAVÉE. Auubaver dE 0 xoyhias LATE UT4OS OAV RA/0S E/OVTL 0GOV ot! To The EALXOG abToÿ Baños- oùxoùv Eav énisroebwues Tav 204 ha dois d elpnmeévos ÉV avr ART | je une plinthe à laquelle on donne, en manière d'ornement, la forme du chapiteau d'une colonne dorique. A côté de la roue dentée est placée une petite vis dont le filet engrène avec elle; etles supports de cette vis sont fixés au plateau, dont le diamètre est plus grand que celui de la roue. Si donc nous faisons tourner la vis, nous ferons mouvoir en même temps la roue dentée ainsi que le tube qui fait corps avec elle, ce tube s’y trouvant fixé au moyen de trois goupilles qui, partant de sa base, pénètrent dans l’épaisseur de la roue qu'elles suivent dans son mouvement. Un sillon, de largeur à peu près égale au pas de la vis, est creusé suivant toute sa longueur; de sorte que, si nous faisons tourner cette vis, le sillon viendra se placer vis-à-vis des dents de la roue, qui se trouvera ainsi tout à fait libre dans ses mouvements !. Ayant alors placé la roue dans une position convenable, faisons de nouveau tourner la vis si peu que ce soit, de manière que le filet vienne engrener avec les dents de cette roue, et celle-ci se trouvera fixée. Soit donc AB (fig. 4) le plateau qui environne l’axe et qui est attaché d'une manière fixe au support: GD la roue dentée qui fait corps avec le tube; EZ la vis placée à côté de cette roue ; HC le tube adhérent à la roue, qui porte, comme on l’a dit, un chapiteau dorique KL. Maintenant sur la plinthe de ce chapiteau sont fixés (verticalement) deux montants de cuivre, en forme de règles, séparés entre eux par un intervalle égal à l'épaisseur d'une roue; et sur la même plinthe, entre ces deux montants, se trouve une vis mobile dont les supports 1. « Cette disposition à pour but d'éviter une perte de temps en permettant de placer le tube avec la main dans une position voisine de celle qu'il doit avoir définitivement. » (H. Vincent). L GO NY XATX TOUS oùvr 26 ToÙ TUUTavIoU TEVATAL, DLAGTOAYHGETAL TO TUMTAVLOV ! \ ATAGTAGUVTES oùy ar Q Os à&v À Jpetx 2RaTT, éTLGTpEVOUEV TOv x. Boay, GWGTE EUTÀ AXTVAL TAY Ehtxa TOI LÉPDES 3 xa! OÙTWS ULEVEL AXÉVTN nTOv Td FOUT AVION. » € Eotw oùv T0 ue v ep! TOY. TOPUOV TUUTAVLOY KA! GUULDUËS TO FAYE, ro AB: To LE GUpUÈS 77 T: ñ orvexièt to l'A (GD}: 0 dE TAPAXEIWEVOS TOUT 40 }ius, o [Z- nn Ô TOUQUTS Joue T& l'A truux FavÉ 7 He (HC), Eouca ÉTtxEÉLEVOV, OS etpntat, dwctxov xepaktov To KA (KL ). Er: ÔÈ Ts TA!VOOU ÉpesTaTw ÔUo EVE AA AUATUL, xaarsp LALYOVLL, ATÉYOVT 4 AR &)À AO TO50UTov GOGTE EG TOY HETAEÙ \ TOROY AÜTOV TAYOS TUUTAVIOU QUVA a Evaguosbavar. nt dE TAG rhVbeu UETaEd TOY XAVOV{OY x0phire ÉGTw GToewuevos, OÙ Ta GTAUATUA | 3 10007 T@ sp nUÉvE | sont fixés sur le chapiteau du tube (et qui est ajustée de manière à faire mouvoir cette roue dans un plan vertical) !. Dans l’inter- valle des deux montants, qui s'élèvent à une hauteur de quatre doigts au-dessus du chapiteau, peut s'adapter une règle trans- versale de quatre coudées de longueur, dont la largeur et l'épaisseur sont en rapport avec l'intervalle précédent, et dont la longueur est partagée en deux par le même intervalle. $ IV. Sur la surface supérieure de la règle est creusé un canal cylindrique ou quadrangulaire, de dimension convenable pour recevoir un tube de cuivre, dont la longueur, prise sur celle de la règle, est d'environ douze doigts. Au tube de cuivre sont fixés à angle droit, par les deux extrémités, deux autres tubes qui semblent n'être qu'une courbure du premier, en formant au-dessus de lui une saillie de deux doigts tout au plus. En outre, le tube de cuivre est enchâssé dans le canal de la règle, auquel on a donné une longueur appropriée à cet objet, de manière que, paraissant faire corps avec elle, il présente ainsi à la vue un aspect plus gracieux. Aux deux points où le grand tube se relève, et de chaque côté, s’emboîite un petit tube de verre dont le diamètre lui permet de s'ajuster bout à bout avec le tube de cuivre, et dont la hauteur est d'environ douze doigts; en outre, ces deux petits tubes de verre sont lutés aux deux saillies du tube de cuivre avec de la cire ou tout autre mastic, de sorte que 1. Ce membre de phrase mis ici entre parenthèses a été ajoute par le traducteur. Hermann Schœne (Héron d'Alexandrie, Ed. Teubner, t. III. Prolegomena, p. xY). relève aussi l’inexactitude de la traduction « sont firés sur le chapiteau du tube. » Le grec dit : fiæs à l'axe. — M. Vincent l'avait lui-même fait remarquer, mais sans chercher à la justifier. TOpu of DE [LuXDO! XAVOVES" TO TIOUW TAQUTEPAIPOUGLV els T0 VO 116006 G5ov ÔxxTUAOUÇ Tétruous. ’Ev Dè T7 ueraëd Tov Üre :20 OV 1004 évagudteras XAVY mAÉyLOS, UAxOs LEV E/OV © Th LELS Op. rhutos di xa! TAOS (oTtE LpUNCELV etc AY. cpnuévn 10e" x Grareuvé co) ÜT ’AÜTHS XATI UXOS. D ep, d. — « ’Ev Ôë T7 dvw émtonvelx Toù XA1VOVOS y GHAÂNY ÉYXEXOTTU, HTOL GT0 vvd)06 î TETELYVOS, TL fixer ThArxoÏTOs cts deachat cwAVA 2hxoûv une : EOVTA ** to xav0voc os DAxTY} ous dwôexz. To à /a2hx& ox: ROOGXELVTAL am T£00! FOAVES 0 oofo! Le TOY 2450, WGTE QOXELV araxex in p0 2e TOY SOATY va” This dE LVIXAUTAS To UZ DGur ,Ù Th£ïoy YÉVETA DAT So ÔU0. Eira U. etTX TOTO TI O 2GETat D Jahxoûs 5 TONY, AAYOVL ÉTUU. Xe’ 209Tovrt ec To SOAVA, Oote GUVE LEY TOY TE 14)200v GW À nva x4! EUTOETENTÉOUV TV o'biv RAPE JEU. ’Ev dE rats ELONUEVALS **k 2 * Var SU TA De, LAN FRET ER 1 = / rs XHAVOVEG KA! OL OVTEG, — £OVTY. EÀ 2GGOY TOU XIVOVOS. — 56 — l'eau versée dans l’un des tubes ne puisse s'échapper d'aucun côté. Ce n'est pas tout: sur la règle transversale, là où sont fixés les deux petits tubes de verre, on fixe autour de ceux-ci deux petites enchäss.‘res ou deux petits pilastres creux, dans l’inté- rieur desquels s'ngagent les tubes de verre, de manière à faire corps avec eux. À ces pilastres s'adaptent deux petites lames! de cuivre, qui peuvent glisser dans des coulisses, le long de leurs parois, en rasant la surface des tubes de verre, et dont le milieu présente des fentes au travers desquelles on peut viser. A ces lames sont fixés, par la partie inférieure, d’autres petits tubes d'un demi-doigt de long, dans lesquels s'engagent des goupilles de cuivre d’une longueur égale à la hauteur des pilastres qui enveloppent les tubes de verre ; elles s'y implantent au moyen d’un filet de vis qui rencontre son écrou dans l'épaisseur même de la règle. Si donc on fait tourner la tête de ces goupilles qui dépasse dans le bas, on fera, par ce moyen, mouvoir en haut et en bas les petites lames qui pré- sentent les fentes dont nous avons parlé. C'est ce qui arrivera nécessairement par l'action de cette extrémité des goupilles qui 1. C’est ce que l’on appelle généralement des pinnules. _ LR ? ’ \ AVAX ÉETRES TOU GWATVOS EVYOU. gCetat Ev EXUTEOW" dE £ALVOY xvAvÔCLOV, T0 ULEV € OV Se ns ce , ax Leo To TG) GOATV!, UYos O€ TOYS duX Jo V QWÔEXL ELTA DURE [VOUTAL ELG TS \ CNE) S! IN \ \ LES AVAXUU. TA TA UEALVX XUALV PAPE 4 X 120 î 4 À À Tu GT EYVOUUTL, T2 T9, VOYITOC NE à Eu6X 1n0Evros ÔL " EVOS TOY xUhtvBoÉv, unôauéôev à Ôtapbetiv. » , s\ \ , \ « ITecéxertu: dE TO TÀ L2400 AAVOV TNYLATIO do XUTH TOUC TOTOUC EV OÙc EGTL TU 7 , es e\ h QUO DEAIVZ xu}ivèpLe, ste ÔL aUTOY Le Xe TA VEÀIVA GUVE 1502. ’Ev Ôë totc conuévors TNYLATLOL }erlôta ax ÉvVApUS Cetas, Drarocyev ULEV duvauever £y couv." à dx TOY TAYUAT fev, davovz 4 TOY DdEÀLVOY xuAtvèotwy, LE EGUS ÉOVT2 AVAL s! \ = mas à cv duvatoy avadronreuerv"*". Toïc dE Elo" HEVOLs }ert , \ EX TOY UT & [LEDOY AOC d'bos Étovr Ta 0 Tuù AXTUÀOU, HA! TOUTOIS XOU0GTA S _ lots sUuQUI) YÉVETUL © C Jévera ANT 2h, UT, X0S UEV E0VTa 060 égtt To Vos TOÙ TAYUAT 795 TOÙ RES Ev! TOY dE ÀVOY xuuvèctoy, % Qu% TEAU. ATO6 AVÉSYETAL 2 T& XAVOVL TG TOY GOATVL Eovtt. Ev Ôë voïc æoviots EÂuxec évréuvovtar, eïs ru} doux aeuontX yivetat GUUQUT] OVTX TO 2 LVL, E y Apa”""* The lc TO dr «) 1é006 ÉTIOTPEPN TG, XIVTGE! Tù De ru The d GYUTOULAS £OVT L, ÈX TE TD VO XA! XATO LLÉpOUS* set y20 Ta Rpos Th Aertd Axpov ToÙ aéoviou tuAdotov Eubatvov sis GAL ÉVOVTZ ÉV TO JOUI= LR X!010) » © Var. év Exatéon. — ** cwAñor. — ‘** Ecru Gionteuerv. — **"* rs TOY LEovloy Lie À se trouve engagée dans l'intérieur des petits tubes adhérents aux lames. » Cette description, d’ailleurs très claire, présente dans les H Es 2) 7 Fig. 5. — Dioptre de Héron, restituée par Schœne. manuscrits une lacune, entre les mots ornudna et apuoata. (V. ci-dessus le texte grec, au bas de la page 54.) Dans le manuscrit que M. Vincent avait sous les yeux, cette lacune était marquée par un espace laissé en blanc, et le traducteur à pensé, — 90 — contrairement à l'opinion de Venturi, qui croyait à une lacune du texte, que c'était simplement la place laissée pour une figure DLL LL DR LL LL LD L LL LALLIILL TR LLLA CLR L CLR LOL LLLR LL RL LL nr PZ22 DLL LLLLLELTIT LLLL 2LA V777722 222277222277 IZZL27777 ESS SSS Sù K = SSP 77 ALTO PIIILIL MR NT API I IS STE DIS PI LL TITLE ES ES : NAEUN LL DRAC OANAATAINAANNAUMIAREUL! £ Tr Fig. 6. Détail du niveau d’eau, d'après Schœæne. explicative que le copiste avait ensuite négligé de reproduire. L'hypothèse paraissait vraisemblable, en ce que la phrase È } 1 À 99 — demeure fort intelligible si l’on ne tient aucun compte de la lacune. Mais M. Hermann Schœne a prouvé que cette lacune était bien réelle et qu'il manquait à cet endroit précis une page entière dans le manuscrit original!. Et, en fait, il était bien étonnant que Héron n’eût rien dit dans ce passage de la roue verticale dont il décrit plus loin le fonctionnement, comme si elle était déja connue; d'autant plus que cette roue présente Fig. 7. — Dioptre de Héron. Le Reconstitution du niveau d’eau (Schæne). une particularité à faire remarquer : ce n'est, proprement, qu’une demi-roue, qui sert de support à la règle horizontale (fig. 4 et 6). M. Vincent lui-même a glissé dans sa traduction un petit membre de phrase (V. ci-dessus, p. 59, la parenthèse et la note 1), expliquant que la petite vis entre les deux montants fait mouvoir la roue verticale. On voit également, par la suite, que l’appareil comprenait d’autres dispositifs, très importants, dont il n’est pas parlé dans la description d'ensemble. On voit que la règle pouvait tourner indépendamment du reste de l'appareil 1. Edition citée, Prolegomena, p. xv et suiv. — OÙ — en rasant la surface d’un large plateau circulaire, ruuravey ! fig. 4 et 95). Ce plateau portait une division en 360 degrés, Fig. 8. — Mire de Héron pour les opérations de la dioptre. que parcourait la pointe d'un index fixé sur la règle. Ce plan pouvait donc, comme la règle elle-même, s'incliner sur l'horizon, jusqu’à devenir exactement vertical, et se fixer, comme la règle 1. Il ne faut pas le confondre avec le diminutif ruuravtoy, qui figure dans la description d'ensemble et désigne le disque A B. — 61 — aussi, dans n'importe laquelle de ces positions!. Règle, demi- cercle denté, plateau, tout enfin, on le comprend par la descrip- tion des opérations, était démontable, et la règle pouvait fonctionner sans le plateau, quand il ne s'agissait que de nivellement *. La description de l'appareil est suivie ($ V), de celle de la mire qui l'accompagnait. C'était (fig. 8) un poteau long de 10 coudées (4,62), large de 5 doigts (0",095), épais de 3 (0®,057), dont la face antérieure portait une rainure longitudi- nale sur toute la hauteur; dans cette rainure glissait un tenon portant un disque de 10 à 12 doigts (0",20 environ) de diamètre, partagé par le diamètre horizontal en deux demi-cercles, l’un blanc, l’autre noir, et manœuvré par une corde qui, passant sur une poulie, s’allongeait ou se raccourcissait au gré de l’aide placé derrière, et suivant les indications de l’opérateur. Il était facile de fixer la corde en l’engageant dans l'intervalle de deux lames-ressorts ou par tout autre moyen. Le poteau était gradué, à partir de la base, en coudées, palmes et doigts. Rien n’est oublié dans cette description, pas même l'index que portait le disque à la hauteur de son diamètre horizontal, et qui marquait la division correspondante sur Île poteau. Il y avait encore un fil à plomb suspendu par un piton, derrière la perche, pour vérifier sa verticalité. C'est bien là, comme on le voit, à peu de chose près, la mire à voyant dont tous nos géomètres se servent avec le niveau d’eau. 1. V. plus loin les citations des Z X. XIV, XVIII. Les visées pouvaient d'ailleurs s'effectuer par la fenêtre N (fig. 6 et 7) indépendamment de la ligne d’eau, dans une position quelconque de la règle. Il a été dit aussi plus haut que la règle à niveau pouvait se remplacer par une simple alidade. — Quant à la position verticale du plateau, elle n’est possible qu'avec le dispositif reconstitué par Schœæne, consistant à surélever ce plateau au-dessus du diamètre de la demi-roue (fig. 5). 2. M. P. Tannery (La Géométrie grecque, p. 54) regarde cet appareil comme trop compliqué pour avoir été mis en pratique. Cette opinion ne me paraît pas très fondée. La plupart de nos instruments modernes, dont on se sert journellement sur le terrain, sont d'une construction et d’un maniementencore beaucoup plus délicats. De plus, la facon dont Héron décrit la solution de chaque problème a tout l’air d’être dictée par l'expérience. Enfin, les problèmes résolus effectivement par les anciens exigeaient bien un appareil aussi complet que celui-là. III. — Problèmes d'arpenteurs et d'ingénieurs résolus par la dioptre. Les applications de la dioptre sont exposées par Héron d’une manière très complète. Nous allons les suivre, en insistant surtout sur celles qui concernent le tracé des routes et des aquedues. 1 PROBLÈME. — Déterminer la différence de niveau de deux points donnés. La méthode de Héron ne diffère pas de la pratique moderne. Mais c'est précisément ce qui m'engage à en reproduire Île détail in extenso. L'auteur se plaçant précisément au point de vue de l'établissement des conduites d'eau, cet exemple d’une manière de procéder identique à la nôtre est des plus instructifs pour expliquer la perfection de ces ouvrages construits par les anciens. Fig. 9. — Graphique de l'opération du nivellement. « Soient ! (fig. 9) les deux lieux ou les deux points donnés A,B, dont il faut déterminer le plus élevé et le moins élevé. Soit B celui d'où part l’eau et A celui où elle doit être place en A l'un des poteaux dont il a été question; loin du point À quil est conduite. Je puis ayant porté la dioptre aussi - : : e Al possible, sans cesser d’apercevoir ce poteau AG, en allant DS ’ Q , \ _ | = 1 LE ! 1. "Ecrocav oi dobévrec Ténos, routéott Ta cul, TA À, B. Aï Ôt érioxépachat , … ‘ 1 , EL DER CRE AAA = | ne , PAU HTÉTENOV HÜTOV ILETEWCOTEPOV ÉGTIV, M TUTELVOTEPOV" XXE TO LLEV B onuetoy £67To SA) LR Co En n ! Ar 5 _ Se ! Q y © To Dowo, To à À els uéhet pEpecbat. Evx oùv Toy elonEvoy XAVovuY à pe ; F Ah 14 jo Ku L 5 , / \ N 7! ÿ 3 =: _ tornut Toûs TÜ À, xQ! EST 0 AT (AG): ira amootnous Tv SLOTTPAY ETO TOU À, — 63 — du côté du point B, je fais tourner la règle transversale qui se trouve au haut de la petite colonne et sur laquelle sont les tubes de verre, jusqu'à ce que cette règle paraisse être dans l’aligne- ment de AG. Faisant ensuite tourner les vis qui traversent cette règle, j'élève les lames jusqu’à ce que leurs fentes soient vis-à- vis des lignes que marque, sur les tubes de verre, la surface de l'eau qui est dedans. Les lames étantarrêtées dans cette position, je regarde par leurs fentes pour voir le poteau AG, en faisant élever ou abaisser le disque autant qu'il est nécessaire pour apercevoir la ligne qui sépare le blanc du noir. Laissant alors la dioptre fixée dans cette position, et passant de l’autre côté, je regarde à travers les fentes l'autre poteau ! que l’on éloigne de la dioptre aussi loin que peut s'étendre ma vue, et je fais de même placer son disque de manière à voir la ligne qui sépare les deux couleurs. Soit donc DE le second poteau, ZJ la dioptre, G,E les points déterminés par la dioptre, D le point où lesecond poteau est fixé sur le terrain. Je mesure les deux lignes AG, DE ; supposons que l’on ait trouvé A G de six coudéeset D E de deux. Cela admis, je dispose deux lignes? (d'écriture); dans 1. On sait que deux poteaux (deux mires) ne sont pas nécessaires. On donne simplement pour chaque point ce qu'on appelle deux coups de niveau, le coup avant et le coup arrière, mesurés sur la même mire, pour deux positions de l’instru- ment. Cela revient au même. 2. Ce sont deux colonnes séparées par un trait : peu importe sur quoi on faisait ce relevé, tablettes de cire, feuille de papyrus ou de parchemin. Tosodtoy og 650v duvaueba cv Tov AT XANONI. ÊTI TA AT LE pn To 5 B, ériotccow TOV ËT AXPW TO CADET v & éctt Ta DdéAiVY ALES pers V E evetuc YÉVATA 9 Fha105 AVE <$ AT. Ex, érIGTpS Vas Ta xo Ad Ev TS xavôvL, AVLYW TAG deièus, 3 dois Av xa! Êv aUTaIc Gvaroua YÉVOVTAL XATX TU ÊV TO dehors NET ds TO T TOÙ Doutos ÉV AUTOÏs Éipavers xal xaTacTa)evtwy OÙTWS TOY hertôtov, di TOY èv LOT LV Trou Dro7Teio, fewc@v Toy AT LINOVSL., Ts 45 TT Ns LETEHOUCOUEV NS ñ TATELVOU LÉVS 2161 ZV SANT À HG où T s _ / 7 A z. A£UZOU x! U£havos LpÉUATOS Y24U.U. LE Ka: Weviuons tas DuOT Tous AVLXV TOU ’ = 9 \ 2 e 4 Ni UeTuO Us, EX TOÙ £TEL0Ù LE 2906 O10T \ 22 TEUG ÔLX TOY LVATO 0110, TOGT TAG AT TAS NS _s \ «! — 1 DIOTTONS TOV ETEDOV X4A LYOVH TOGOÛTOY (WGTE Bénabar: LA! TAALV ZOPE QUE , Q/ » Ts ÉTépas 2m ÈITANE, 0e we TNV ÉV at} Le SH ee nu YOLLUTY. ” LT ® e ! \ =\ dE Ecrw oùv 6 Deûtegos LAVOY û AE (DE), Dém Tps à S (ZJ), zx ôè sihnu- UEVA Faystx ta Ts DomTous Ta l'. E° xx0’0 dE x burn Cl AE XAVOY TD éDtper, - éstw to À. Euéronca oùv Exatepav Tv Al, AE* xx! Ecrw î uëy AT eopasévn rn4Ov E, h de AE 74072 Ôvo. Eréye sx uv oùv Duo GTÉLOU6, £v UEv To év! Ereyphÿus xaT166EwS, £v D TO 5T200 aV2645 EU, EG ÜROYEYOUTTAL XA! To pv nt » La + 54 RHEL Ev T& This LATAG AGE GTÉy w GNLLELOUULU!, TOUS dE QUO EM Tu TA av461- d. pysue l'une, j'écris le mot descente et dans l'autre le mot montée, comme on le voit plus loin; J'inscris les six coudées dans la ligne de la descente, et les deux coudées dans D M la ligne de la montée. Maintenant le poteau DE restant fixe, je transporte la dioptre par exemple 6 9 en K;et seulement je retourne le poteau DE, r 9 de manière que je puisse apercevoir de nouveau | 3 son échelle de division. Je mets les lames en A 9 place, et j'établis l’autre poteau en LC, au delà 5 de la dioptre, et du côté opposé à DE; puis, l 3 derechef, la dioptre restant fixée en place, je 9 3 fais mettre le disque en ligne droite avec les - 9 fentes. Soient H,C les points des deux poteaux 9 I qui correspondent aux aiguilles des disques; je 3 I note la distance comprise entre le point H et le sol dans la colonne de la descente, et celle du Me point C dans la colonne de la montée. Supposons . que cette première distance soit de quatre cou- dées et la seconde de deux. Alors le poteau LC restant en place, je 10 transporte la dioptre ainsi que le poteau DE. Puis, ayant placé en ligne droite, comme on l’a déjà dit, les disques et les fentes, je prends sur les poteaux les points L,M; je note la mesure de la descente en L, et celle de la montée en M. Supposons la première d'une coudée et la seconde de trois. cews. Kat wevovros toù AE HAVOVOS peratébrau T'Y Giérrpav” xai Ecru moùç to K: Ve ’ \ — 4 \ nl XL ÉTIGTOEDW TOV AE xavove, 210 ŒV TaÀLY 100 XAL* ToÙ TS aylou xavôovos Tov AE \! XAVOVA" KA! XATAGTHGUS TA TE heri, Téônu: Tov AO (LC) xavova £urposÿey TAG ÔLOTTPUS, TSUTÉOTIY ET êT! TA étepa HET roù AE xavovos, Kat TL, &xvrirou This ÔLOTTOUS OÙGN6s audi Tv asmdcxnv Êr” evbelus Tac LVATOUQIS" xai ÉgTw Ta robs Tai AOTLÔIGXUL NUEÏX ên! Tov xavévwy T4 H, @ (H, C). [Id Av oùv tb > Ev Aro Toù H Gtacrnux Le Toù sdxyouc Taper QUELS TO TS XAT aÉdoeu 6 cTlyov, To dE amd rod O ic rov Tic avaO Low" La ÉcTo Guy LV XATAOAGEWS TLELS TÉTONPES, avabdcewc dE nAysts dUo. Kat ah uévovtos Toù Tps Tù © XAVOVO » (LETATI Ou: TAY ÔLOTTEAV x Fèv Étepov LAVOVA" XUT AGTÉTUS Or RROEIENTA èx eUbelac Tdc TE LomtBioRNs xt ras AvATOUUs AuubAV xa ss TOY XAVOYOY ut LET à LA coç T& À uETpov xatrubasews EcTat, To dE np Gdsewc 7 typuc ec, AVAbAGEWS THE TRES. re \, ML, M): xat naliv To pèv r& M avabisews" Eotw oùv xUTU- * Var. du To... SR LT 7 — 09 — « Maintenant le poteau restant en M, transportons la dioptre et le second poteau. Soit X O0 l'alignement de la dioptre, et supposons le chiffre de la descente en X de quatre coudées, et celui de la montée en O de deux coudées. Continuons de la même manière, jusqu’à ce que nous arrivions en B; soit la dioptre placée en T, RS son alignement, » le chiffre de la descente, 3 celui de la montée. « Soit ensuite la dioptre placée en Q, UF son alignement, { la descente, 3 la montée. Ensuite soit A’, la dioptre, W & son alignement; soit la descente de deux coudées, la montée de trois. « Puis D'la dioptre, B'G'son alignement, cinq coudées pour - la descente, trois pour la montée. « Soit encore Z'la dioptre, E’J' son alignement, la descente de deux coudées, la montée de une. Enfin supposons que l’un des poteaux soit parvenu près de la surface même de l’eau qu'il s'agit de conduire, et que, pour cette dernière station de la dioptre,nous ayons trouvé trois coudées pour la descente et une pour la montée. « Alors, faisant la somme de tous les nombres précédemment marqués, tant pour la descente que pour la montée, je trouve 33 pour les premiers et 23 pour les derniers. La différence est de TJ LS EL , _s \ _ nm Hat oùv uévovros toù mods T& M xavôvos, ueruxslow 7 te DLOTTPX xat à EcTw cobetx ï = O (X O), xat ze L e si ee \ _ ’ Etecos XAVWOV' 1 dE OL TS in 7 : vue 7 £, To0c dE TO ©; AVaG LENS We Ù y À xATAO AGE DE É5TwGAy R'ÂLEU TÉG Er’ € ns Ta 20Ta au &: uëv h TL, ñ à da Tôy LYATOUG RÉVTE, Avabdsews D rite Tee Erra 2 Guortoa uev ñ X (Q), evbeia 0 ñ WD (UF) xat xurabaoews riyuc efc, Avabdseuws dE TÂLEIS TRES > LOTTOL ëv TALELS ES 2 Hry ÔLOTTONL MÈV D ,/ A (A”), eubeta de à L D (W &)' xai xatabasews THE ; 3 ê do, avabdseuws D mes LE Eira Giontou uèv Écro ,A (D'}, eddeïz à à ,B ,l' (B'G'), xal xaraGdosws DEV TLELS TÉVTE, NE A dE The ToEts AN Fi Gontou LEv n 4, eubeta 0 ñ ,E S (E'J'). xat sy Âge ÔU0, ivabäseus DENT TA {US ES. » ss _ _ In } ; 0 à CE rehsutaïos xavv xE{c00 TP0S AUTT TA TOÙ UCATOc ét DAVEUL" XU x4T7264- re > _ LA GEWS LEV PAS TRES, AVA6 GES DE ripus ets. Tov oùy Leu uv GEGNU.ELWULE LVGY ÉV TOÏS €! o7 LA , À} OU.OLS 441 ae Ft HS ARE EG! 5 0 ET 2 1 , « 1 EX \ ’ oùv à Tis xuTAO LES AEuÎLdS, TouTéoTiy © ÈTt Tà Uéon "tue dix coudées en plus du côté de la descente; c’est le côté où l’on veut conduire l'eau; celle-ci coulera donc dans la direction B A ; et je marque les dix coudées dont le point B est plus élevé que le point A. Si les deux sommes se fussent trouvées égales, c’est qu'alors les deux points A etB eussent été également élevés, c'est- à-dire situés dans un même plan horizontal, et à la rigueur, dans ce cas, l'eau arriverait encore. Mais si le nombre de la descente était plus petit, alors il serait impossible que l’eau coulât d'elle- même, et il faudrait, de toute nécessité, employer une machine. Ce sera, s’il y a une grande différence de hauteur, un système de seaux, ce que l’on nomme une chaine. Si la différence est petite, il suffira d'une vis ou d’une roue à aubes. Quant aux lieux intermédiaires par lesquels nous nous serions proposé de conduire l’eau, nous obtiendrons leurs relations de position, soit entre eux, soit avec les points extrêmes, absolument par la même méthode, en appliquant à ces points intermédiaires l'hypothèse qu'ils ne sont eux-mêmes autre chose que les points donnés; il n’y a pas la moindre différence. Il conviendra encore, après avoir fait le calcul pour toute la longueur, de chercher quelle est la pente correspondante à chaque stade; puis d'élever des monticules dans les lieux intermédiaires, et d'y établir des signaux de reconnaissance ou des bornes portant des inscriptions; c’est le moyen de s'assurer que l'opération ne sera en erreur sur aucun point. Observons en outre que l’eau ne doit pas être conduite en _ ’ , n LE LU \ en 14 , \ LE Ü-/ _. \ (4 2. EE at Toù Toro etc Ov Dsauev ayetv TO VW, eu é5T!, xaTeveyÜrioeTur TO DYPOV' xUL s = \ _ D SR ET ! , \ ÉOTUL (LETEWPOTEPOV TOÙ Tpos T& À 7m (VAE dexx. It dE Too yeyovacty aptôtor, \ DES \29 19 _ , & A ! 1 iooÿbr dnhpye Ta À, B onpeix, TouTÉoTIV Ev Ev! éntnedw T@ 0pCovri xa! oÙTuwG dË \ duvarov xarayecbut To Ldwp. It èe ru Av o Ts xaTaG deu aotÜuds, advvaTov ? D! 4 y Le ai 9 adtouatiqut To ÜWE" aVT\HUUTOS LOU TPOGÔEOLE eZ H à (] su > \ + « ToÀù TUTELVOTEOS nv Ô Tonoc, dix roduxadtas 1 Ts xx] , » EAl À LT NE 2" OÀ!yov, fret Ô èux x 0/0 1 A Tov rapahT fAwy TUUTAVÉOY. F 7 p, , ULEVNS ŒAUGEWG* EL ÔE nm 4 ” [l Kai ToÙs LLÉGOUS DE TOTOUS à OV GYEXOIVAUEV LYELV TD HLIOIR Ertoxebouesla rü6 mpbc À fhous TE HA! TOUS EZ 207 ñs TROUS 5 Eyoume, dx rhs adThs (LD0dou, dxnÀ&- Govr ss TOÙS EC £vo oUc UÉGOUS, TOTOUS ELVAL TOÙS € à ao{hs doPEvrac" XuT ” oÙDEV Yàe Oroloer. Aeï de xat éxhoyisauevov Tv T0 UXX, értoxs Ya v To oTaÔtw TOGOY xt yevés eTAt TOÙ HAVTO XA!UATOS" x GÜTOS ELs rose HÉGOus TOTONS, PET x! Ggous Ty 2} Vas Exovras Guy/wvvberv 1h rpocavoxodoueïiv, pos To Tous Épyalo- mévous Ev UNŸ Dev! rh2vAc0 21. os \ _ Ds, LS S FE 4 « 'AybHoerat 2 ro Üyo0v 0Ù DIX TS AUTAS 000Ù À. NS XA! TO XAÏUX ÉTÉVVOUEY, OR PP he, ee CT — Dj a suivant la direction de la pente, mais en choisissant la voie la mieux appropriée aux circonstances. Souvent, en effet, on ren- contre un obstacle !, soit une montagne trop rocheuse ou trop élevée, soit un terrain de nature poreuse ou sulfureuse, ou de toute autre matière capable d'altérer la qualité de l'eau. Partout où nous en rencontrerons, nous nous détournerons, pour ne point nuire à l’eau transportée. Et, pour éviter qu'en la dirigeant par un chemin trop long, on ne tombe dans une dépense trop considérable, nous montrerons dans le problème suivant com- ment on peut trouver la ligne droite qui passe par deux points donnés (l'un ne pouvant être vu de l'endroit où est l'autre), car cette ligne est la plus courte de toutes celles qui aboutissent aux mêmes extrémités. Alors, si après la détermination de cette ligne, nous y rencontrons quelqu'un des inconvénients précédemment signalés, nous changerons de direction. » Ce texte était intéressant à citer dans son entier : il a d'abord l'avantage de nous faire connaître dans tous ses détails le nivel- lement à la dioptre. Ensuite, par son exactitude minutieuse, par le procédé même de la description d'appareil ou d'opération, il nous montre quel degré de précision scientifique les Grecs avaient atteint déjà. À lire la traduction de ce passage, on croirait souvent avoir affaire à un traité d’arpentage moderne. La différence est saisissante quand on aborde ces clairs exposés à la suite des textes de Vitruve ou des Gromatici veteres. 1. Il est évident que Héron parle ici en géomètre plus qu’en hydraulicien; il envisage le type le plus simple des aqueducs, celui d’un simple fossé : c’est pour cela qu'il parle de la nature du terrain traversé; les anciens n'étaient guère embarrassés pour faire passer leurs aqueducs partout, au moyen d’une construction solide et étanche. Il est bien rare aussi qu'une conduite d'eau longue et importante suive la ligne droite; mais, avant de s’en écarter, il est indispensable de la déterminer par le nivellement préparatoire qui vient d’être décrit. au dE étépus edberoÿrns POS To DBpayoyrov. [oïiaxts yùo éuredwv TOTATUL TL, T pos 6x 2 ANEOTEEOV, ñ [LETEMDOTEPOV, ñ 4AdvOL TOR, ñ Dust, ñ ToLoUT oi TLVEs Toro! Bhanrovrec ro wo. Totobraus OTAV REpITÜ/ wWHEV, ÉXVEUGOUEV, Gate XATX unÈv Bharresbur TAY Toù UouTOs YO Av. "Evexa dÈ xut roÙ Un axe OTEDAV OÙ0V pepipEvoy ro dd'wp etç uetCova d'aruvr av ExTirTetv, d'eléounev ETC O6 duvarbn à EGTAL TAY mi Ta duo Gistz Emteuyvoyévry evOetav ebploxetv Aÿrr V2 Ézyiorn À éor! TAG@Y TOY TL AÛTA RÉPUTA 4996 &Y YEN. » Eira druy ëv TAÛTY] Th bot5ûe (on) éurecn (r1) rüv sionuévoy arôrwvy, ToTs ÉxEivO ÉxvEUGOULEV. m*._ } Res 2° PROBLÈME. — Mener une droite entre deux points tels. que de l’un on ne puisse apercevoir l’autre ($ vir). Le procédé de Héron consiste à se transporter du premier point, par tâtonnements, et par redans successifs, jusqu'à un autre point d'où l’on apercoive le point d'abord invisible. Une proportion de triangles semblables donne la ligne cherchée. 3° PROBLÈME. — Mesurer la distance, réduite à l'horizon, comprise entre le point où l'on est et un point éloigné, sans s'approcher de celui-ci ($ vrnr). Ici, on fait mouvoir l'alidade dans les deux sens, horizontal et vertical. C’est toujours une question de triangles semblables. Il en est de même du problème suivant (4° probl., $ 1x): mesurer la largeur d'une rivière, opération que les arpenteurs romains désignent sous le nom de varatio!; des cinquième? et sixième ? problèmes. Il n'y a entre ces procédés et les nôtres que peu de différences. T7 PROBLÈME. — Mesurer la hauteur d'un point inacces- sible ($ xx). Le texte ici est intéressant, en ce que l’auteur emploie, pour indiquer qu'il y a un uivellenient à faire entre deux points à proximité l’un de l’autre, le terme ywpo£arev. S'agit-il, comme le croit M. Vincent, de l'emploi du chorobate, l'instrument dont parle Vitruve et qui sera décrit plus loin? Je ne le pense pas, car la dioptre elle-même était aussi bonne que le chorobate pour opérer ce nivellement. Le mot ywpo£area, dont le sens propre est parcourir du terrain, signifiait sans doute dans son acception technique opérer un nivellement et non pas seulement se servir du chorobate. 1. Marcus Junius Nipsus (Gromat. veteres, p. 285). 2. Mesurer la distance horizontale de deux points éloignés (x). — Une des trois solutions que fournit Héron est donnée par Hygin (De limit. constituendis, Grom. vet., p. 193). 3. Etant donnée une droite, mener une perpendiculaire à l'une de ses extrémités, sans approcher de la droite, ni de l'extrémité (x1). ee 13% ProBLème !. — Percer une montagne suivant une ligne droite qui joigne deux points À, B, opposés sur ses flancs (S xv). Ce problème intéresse fort le tracé des aqueducs. Héron le résout en contournant d’abord la montagne et en mesurant (fig. 10) les différentes lignes à angle droit AC, CD, DE, EF, FG, GH, HB, réduites à l'horizon, Prenant ensuite un point O à gauche de A et L à droite de B, BL — AO, de manière à pouvoir mener les perpendiculaires O X et LP, il obtient les longueurs OX, OP, et, par suite, la direction AB? par la similitude des triangles OAX, ABZ, BPL, le point Z étant d’ailleurs obtenu par la différence (AC + DE) — (FG + HB). Pour régler l'excavation par rapport à l'horizon, il n’y a qu’à opérer le nivellement entre les deux points À et B, ce qui d’ailleurs était sans doute fait tout d’abord. {Ame PROBLÈME. — Creuser, dans une montagne, des puits qui tombent perpendiculairement sur une excavalion ($ xvi). 1. Mesurer la différence de hauteur de deux points inaccessibles (probi. 8, x1n). Mesurer leur distance (pr. 9.) Déterminer la position de la droite qui les joint (pr. 10), et applications. Déterminer la hauteur d’une montagne (pr. 11) et déterminer la profondeur d’un fossé (prob. 12, x1v). C'est toujours le même principe que dans les méthodes modernes; il y a même souvent identité absolue. 2. Les perforateurs, de chaque côté, suivront la direction indiquée, pour les uns par XA, pour les autres par PB, et ils se rencontreront forcément, — 70 — L'auteur envisage le cas bien simple où la voie souterraine est en ligne droite : le problème est résolu facilement par les visées de la dioptre et des jalonnements successifs. 15%° PROBLEME. — ÆElant donnée une galerie souterraine (lorlueuse et d'une certaine largeur), trouver dans la campagne au-dessus un point d'où l’on puisse creuser un puits vertical aboutissant à un point donné de cetle galerie ($ xvrr). Le problème correspond seulement à l'éventualité d’un ébou- lement, pour faire en sorte que par le puits à creuser l’on puisse, soit transporter au dehors les décombres provenant de l’éboule- ment, soit descendre des matériaux pour la reconstruction; et la donnée suppose qu'il y a déjà deux puits existants. Le point voulu est obtenu par une double triangulation effectuée paral- lèlement dans le fond de la galerie et à la surface. Héron n'indique pas le moyen d'aboutir de l'extérieur, par un puits, en un point donné d’une galerie quelconque, étroite et sinueuse, telle que sont souvent les canaux souterrains. Mais la dioptre permettait fort bien, d'abord de conduire le tracé d’une semblable voie, ensuite de trouver à l'extérieur la verticale de n'importe quel point de la galerie. Le traité n'aborde que quelques problèmes types. C'était aux ingénieurs eux-mêmes à connaître assez bien la pratique de l'instrument pour en tirer tout le profit voulu sur le terrain. Des problèmes de ce genre devaient être proposés dans les écoles aux jeunes gens qui étudiaient la géométrie en vue des carrières d’arpenteur, niveleur, architecte, auxquelles ils se destinaient. Voici l'énumération des autres problèmes, pour la plupart desquels je me bornerai au simple énoncé. 16° PROBLÈME. — Les extrémités d'un port élant données en dessiner le contour suivant un arc de cercle ou une courbe quelconque. C'est ici qu'intervient le plateau (ruurawer). On le dispose horizontalement, et l’on effectue des visées d'un point un peu plus élevé de manière que les rayons visuels, partant de ce point et passant par le bord du plateau, dessinent sur le terrain eg la circonférence de base d'un cône dont deux génératrices passent par les extrémités A et B ($ xvrit). 17% PROBLÈME, — Hausser un terrain de manière qu'il prenne la forme d'une portion donnée de surface sphérique. Les visées se font de la même façon, mais cette fois le plateau adapté à l'instrument doit prendre la position verticale (S x1x). 18% PROBLÈME. — Incliner un terrain suivant une pente déterminée ($ xx). 19° PROBLÈME. — Fixer, au moyen de la dioptre, sur une certaine droite horizontale menée à partir du mur, un point qui soit éloigné de nous d'une distance donnée. Le procédé consiste à trouver la distance voulue par un calcul de proportion au moyen de l’échelle graduée de la mire (S xx1). 20"° PROBLÈME. — D'un point éloigné de nous, prendre avec la dioptre une distance égale à une distance donnée, sans approcher de ce point, et sans avoir la droite sur laquelle il faut prendre cette distance. Construction facile par les triangles semblables ($ xxrr). 21%° PROBLÈME. — Mesurer un champ au moyen de la dioptre ($ xxr11 et xxIv). C'est le problème général de l'arpentage. Héron donne plu- sieurs méthodes, dont le principe est semblable à celui des arpenteurs romains et au nôtre. Il en est de même des deux problèmes suivants. 22° PROBLÈME. — Les bornes d’un champ ayant disparu, à l'exception de deux ou trois, retrouver au moyen du plan Ou dessin (roù puunuatos Urapyovres) les limites perdues. Le problème revient à construire sur le terrain, au moyen d’un côté donné, un polygone semblable à un polygone donné sur le papier ($ xxv). — [£ — 23° PROBLÈME. — Partager un terrain en portions données, au moyen de droites menées par un même point ($ xxvr). 24° PROBLÈME.— Mesurer un charnp sans entrer dedans. La solution est obtenue en traçant, à l'extérieur du pourtour polygonal, des triangles semblables à tous ceux qu'on pourrait figurer dans l’intérieur en joignant un sommet à tous les autres (SX VIT) À. Les deux problèmes suivants, d'une application pratique directe, ne comportent pas l'emploi de l'instrument, et rentrent par conséquent dans le domaine de la géométrie proprement dite. 25° PROBLÈME.— Diviser un trapèze ou un triangle donné suivant un rapport donné, par une parallèle à la base ($ XXVII1 et XXIX). 26"° PROBLÈME.— Trouver l'aire d’un triangle, en fonction de ses trois côtés. C'est la démonstration géométrique de la règle que nous représentons par la formule : S—Vp(p—a)(p—b)(p—0 (8 xxx). Suit un problème où la dioptre n’a rien à voir non plus, mais sur lequel nous aurons à revenir plus loin, car c'est une question d'hydraulique pratique. 27° PROBLÈME. — Etant donnée une fontaine, évaluer son produit, c'est-à-dire la quantilé d'eau qu'elle fournit. 28° PROBLÈME.— Déterminer la distance angulaire de deux astres. Elle s'obtient au moyen du plateau de la dioptre et de la règle de visée, d'ailleurs sans le secours d'aucune lunette, les anciens ne connaissant pas les proprictés et l'usage des verres lenticulaires {$ xxx11). 1. Cf. Junius Nipsus. Limitis repositio (Grom. vet., p. 272). 29%° PROBLEME. — Critique de l'astérisque. Instrument fort analogue à la groma des Romains, si ce n’était cet instrument lui-même (f xxx111) !. 30%° PROBLÈME. — Description et usage de l'odomètre. Il s'agit ici d'un assez ingénieux compteur adapté aux voitures, et consistant (fig. 11) dans une combinaison de vis sans fin et de roues dentées (S xxx1v). LOU LEE : 5 Yo Fig. 11. — Odomètre de Héron. 31%° PROBLÈME. — Mesure du sillage d’un navire. L'appareil est analogue au précédent. Le navire avançant d’une longueur donnée, faisait tourner d’un certain angle une roue à palettes, laquelle commandait une série de roues dentées (S XXXV). 3200 PROBLÈME. — Déterminer la distance de deux lieux situés dans des climats différents. Héron résout ce problème par le procédé qui consiste à noter les heures auxquelles s’observe une même éclipse, dans les deux lieux en question. Quelque intéressante que soit cette solution (M. Vincent considère le passage comme le plus curieux de tout 1. V. ci-dessus, p. 51. TRES le traité), elle se rattache trop peu à la question des travaux publics, pour que nous ayons ici à l'expliquer ($ xxxvi). 33° PROBLÈME.— Avec une force donnée, faire mouvoir un poids donné, au moyen d'un système de roues dentées (Sxvxvn). Ici se place la description de l'appareil dont il a été parlé plus haut, auquel s’est appliqué par l'usage le nom générique de Bæpoulos, et sur lequel nous reviendrons plus loin. Cette insertion à la suite du traité de la dioptre peut s'expliquer, comme celle de quelques-uns des problèmes précédents, par un classement maladroit provenant une première fois du fait de quelque copiste, et qui s’est perpétué Nous n'avons pas à nous engager dans des discussions à ce sujet !. Il nous suffit que les textes soient authentiques, et que le traité dans son ensemble soitle meilleur des documents pour suivre dans leurs opéra- tions sur le terrain les ingénieurs de l'empire romain, chargés des travaux publics. IV. — Le chorobate de Vitruve. Vitruve, au livre VIIT du De archilectura, où il s'occupe des eaux et des aqueducs, parle des appareils de nivellement, et mentionne en premier lieu les dioptres, puis les librae aquariae, enfin le chorobate, qu'il déclare le plus exact, et auquel seul il fait l'honneur d'une description sommaire. « Libratur autem dioptris, aut libris aquariis, aut chorobate, sed diligentius efficitur per chorobaten, quod dioptrae libraeque fallunt. » Le mot dioptre est au pluriel; il y en avait, en effet, plusieurs espèces, et dioptre ne signifie pas autre chose que « appareil de visée ». En ce sens, la groma, qui a été décrite plus haut, est une dioptre; elle pouvait servir aux nivellements, puisque l'opération de réglage consistait à placer de niveau la plate- forme, et aussi, par conséquent, les bords des fenêtres de visée. 1. Cette question des interpolations est posée et discutée dans les Prolegomena de Hermann Scl'œæne, édition de Héron citée, tome II, p. xix et xx. POP tite té uité —0 | 7 — Ce serait une dioptre aussi que cet appareil qui était encore chez nous en usage il n’y a pas très longtemps, et qui consistait en une simple planchette fixée à angle droit sur une masse métallique de forme allongée, le tout suspendu par un anneau. L'horizontalité de la planchette était assurée par le poids du métal ; qu’on imagine deux pinnules avec fenêtres de visée aux extrémités de cette planchette, on aurait un appareil à peu près aussi exact que la groma pour opérer un nivellement. Quant à la libra aquaria, ce ne peut être autre chose que le niveau d’eau, traduction littérale des deux mots latins : il n’y a pas d’hési- tation à avoir, puisque nous venons de trouver cet appareil employé dans la dioptre de Héron. Tous n'étaient peut-être pas d’une construction aussi soignée. Vitruve n’y avait pas grande confiance. Voyons si le chorobate valait mieux. « Le chorobate, dit-il, est formé d’une règle d'environ vingt pieds ; elle porte à ses extrémités deux pièces coudées parfai- tement égales, qui y sont ajustées à angle droit; entre la règle et ces crosses s'étendent des traverses fixées par des tenons, et sur lesquelles sont tracées des lignes perpendiculaires, corres- pondant chacune à un fil à plomb suspendu à la règle. Ces fils, quand la règle est en place, s'appliquant exactement et égale- ment sur les lignes tracées, font voir que l'instrument est bien de niveau. « Pour le cas où le vent interviendrait, s’opposant par l'oscil- lation des fils à la netteté des indications fournies par les lignes, on peut creuser sur la face supérieure de la règle un canal long de cinq pieds, large d’un doigt, et profond d'un doigt et demi, destiné à être rempli d’eau. Si l’eau touche également l’extré- mité des bords du canal, on saura que l'instrument est de niveau. Ainsi, quand on aura pris le niveau au moyen du chorobate, on connaïtra la surélévation cherchée, » ! Vitruve, à la suite de sa description, croit devoir réfuter l'objection de ceux qui, sachant d’après Archimède que l’eau ne présente pas une surface absolument plane, mais suit le contour du globe terrestre, contesteraient pour cette raison la justesse IPAVAET VIT, D. A0 € de l'instrument. La surface de l’eau, dit-il, a beau être arrondie dans le canal, cette eau n’en sera pas moins à la hauteur exacte des deux bords si l’instrument est de niveau ; dans le cas contraire, d’un côté elle n'atteindra pas le bord. Cette consi- dération parait bien superflue, sinon un peu puérile, et nous aimerions mieux quelques détails de plus sur l'appareil et sur son maniement. Il est vrai que l'auteur renvoie à un dessin qui figurait à la fin de son livre, et qui a, comme tous les autres, disparu. On a essayé souvent de le reconstituer, et les reproductions des divers commentateurs sont toutes à peu près pareilles, à ‘878 — : = = _ = = = = | CR H Fig. 13. — Le chorobate. Restitution de Newton. part la manière de placer les traverses entre la règle et les crosses. « Inter regulam et ancones, dit le texte, a cardinibus compacta transversaria, quae habent lineas ad perpendiculum recte descriptas, pendentiaque ex regula perpendicula in singulis partibus singula. » Perrault en fait des traverses horizontales parallèles à la règle, tandis que Newton, de façon plus vraisemblable, en fait deux jambes de force, qui assurent la fermeté de l’assemblage à angle droit et garantissent du fléchissement la pièce supérieure (v. fig. 12 et 13). Vitruve ne donne pas le nombre de fils à plomb, mais il suffisait de quatre, un de chaque côté de chacune des traverses, pour le contrôle de la 4 Re justesse de l’appareil. Il indique la longueur du canal, mais il est évident que pour des nivellements précis, ce canal pouvait être plus long. La justesse, et aussi la précision, dépendaient du degré de perfection réalisé dans l'agencement des différentes parties et dans la solidité des assemblages. Faute de renseigne- ments là-dessus, nous ne pouvons contrôler la raison plus ou moins bien fondée de la préférence de Vitruve pour cet appareil. Toutefois, on peut la croire due pour une part à ce qu'il dispensait des visées, nécessaires à l’usage de la dioptre. Pour déterminer avec le chorobate la différence de niveau entre deux points choisis, on mesurait dans l'intervalle chaque déni- vellation donnée par un déplacement d’une longueur de l’appareil, ce qui s'obtenait sans doute en glissant sous une des crosses des cales d’épaisseurs différentes, bien étalonnées, jusqu’à ce que l'instrument fût remis de niveau; la somme de ces épais- seurs donnait un chiffre inscrit chaque fois ; à la fin, une somme algébrique, effectuée comme l'indique en détail le traité de la Dioptre, donnait la différence de niveau entre les deux points choisis. Evidemment, cet instrument était bien lourd, et son avan- cement bien lent. 11 faut cependant considérer que chacune des mesures prenait peu de temps, ce qui compensait leur multi- plicité;, en outre, en raison même de cette multiplicité, une erreur partielle commise ne tirait guère à conséquence. L’appré- ciation de Vitruve n'a donc rien qui doive étonner beaucoup, et les nivellements soignés, pour le tracé des aqueducs par exemple, pouvaient fort bien être opérés ainsi. 1 CHAPITRE IV MÉCANIQUE ET HYDRAULIQUE I. — Principes généraux de mécanique. En fait de mécanique théorique, les connaissances des anciens paraissent au premier abord avoir été peu étendues et peu appro- fondies. Les Grecs déployèrent, il est vrai, en cinématique, beaucoup d'ingéniosité pour analyser les combinaisons de mouvements, et cela de fort bonne heure !. Maisla notion même de vitesse, pourtant fondamentale, n'était pas très exactement précisée. Nous ne trouvons rien nulle part qui corresponde aux équations élémentaires du mouvement, ou qui ressemble à une théorie raisonnée de l'accélération ?. Pourtant, si en fait la statique, avant Archimède, se borna aux conditions d'équilibre du levier, il y avait comme une intuition du principe des vitesses virtuelles dans la théorie du levier par Aristote. & Le poids qui est mû, dit-il *, est un poids qui meut en raison inverse des longueurs des bras de levier; toujours, en effet, un poids mou- vra d'autant plus aisément qu’il sera plus loin du point d'appui. La cause en est celle que nous avons déjà mentionnée : la ligne qui s’écarte davantage du centre décrit un plus grand I. Le système des sphères concentriques d'Eudoxe est une combinaison de mou- vements déjà très savante. Voir également un passage de Platon (Lois x, 893, d.), qui montre une grande subtilité à démêler un cas de mouvement fort compliqué. 2. « Aristote avait expliqué l'accélération des corps pesants par un accroissement de leur qualité de pesanteur au fur et à mesure qu'ils s’approchent de leur lieu naturel. » (E. Jouguet, Lectures de mécanique, 1" partie, p. 79). 3. Mayavexa roo6htuura. Edition Didot, t. IV, p.58. 0 cerele. Donc, en employant une même puissance, le moteur décrira un parcours d'autant plus grand qu'il est plus éloigné du point d'appui. » Avec Archimède apparaît la théorie de la composition des forces parallèles et des centres de gravité, avec celle de l’équi- libre des corps flottants. Mais il ne formula ni les lois de la composition statique les forces concourantes, ni les principes de la dynamique : égalité de l’action et de la réaction, masse, travail et force vive. On suppléait cependant, dans la pratique, à l'insuffisance de la théorie; fait constant d’ailleurs et de tout temps, même du nôtre. Que de découvertes spontanées enfantant d’admirables engins mécaniques, et que de progrès dans la puissance et la souplesse de ceux-ci, avant que la théorie en ait été constituée! Une bonne part des connaissances de mécanique pratique que l’on possédait, aux alentours de l’ère chrétienne, figure dans le contenu des traités de Héron d'Alexandrie et de Vitruve. Il a été fait mention plus haut (p. 40) des Myyawxx de Héron, où sont décrites les cinq puissances simples, treuil, levier, moufle, coin, vis sans fin. Les différentes matières traitées dans cet ouvrage se répartissent ainsi: | Livre I. — 1. Mouvoir un poids donné avec une puissance donnée, au moyen d’un train d’engrenages. 9 2. Mouvement relatif des cercles qui engrènent. Vitesses relatives des cercles fixés ou non sur le même axe. 3. Construction de figures semblables ayant entre elles un rapport donné, et instruments destinés à cette construction. Trouver deux moyennes proportionnelles entre deux lignes données. Centres de similitude. 4. Mouvement des graves sur les plans inclinés. Poulie simple. 9. Définition du centre de gravité d'après Archimède (point tel que lorsque le poids est suspendu par ce point, il est divisé en deux portions équivalentes). 6. Répartition des poids sur leurs supports. Equilibre des fléaux de balance et de la poulie simple. 0 Livre II. — 1. Les cinq machines simples : treuil, levier, moufle, coin, vis sans fin; combinaison de la vis et de la roue dentée, 2. Théorie de ces machines, ramenée à celle des cercles concentriques. Levier et treuil. Théorie de la moufle : lorsque la corde passe une fois au support fixe, la puissance dans l’état d’équi- libre est égale au poids ; quand elle passe n fois au support fixe, la puissance est égale à PTE FE du poids; quand l'extrémité est 1 + 1 attachée au support fixe, au lieu de l'être au poids, la résis- tance du support équivaut à de la puissance motrice. — Effets de la percussion sur le coin. — Théorie de la vis; tracé de son hélice. — Déplacement de la vis et des dents dans un engre- nage. 3. Combinaison de plusieurs machines simples. Ralentisse- ment de la vitesse dans ces combinaisons. 4. Explication de divers problèmes de mécanique physique !. 5. Centres de gravité du triangle et du pentagone. Livre III. — À. Appareils à mouvoir les lourds fardeaux sur le sol (supporten charpente avec rouleaux), à élever les fardeaux avec un, deux, trois et quatre montants. Pinces et coins pour saisir les pierres. — Appareil pour faire descendre de lourds fardeaux d’un lieu élevé. (C'est un système de chariot contre- poids, qu'on peut d’ailleurs utiliser aussi pour faire monter la charge.) — Appareil pour dresser les colonnes sur leurs bases (Système analogue, avec poulies, et coffre contre-poids). — Appareil pour poser de lourds fardeaux dans la mer. (Barques que l’on submerge en les chargeant de lest.) — Appareil pour redresser les murs ébranlés. (Etais verticaux réunis par 1. Voici l'énoncé de quelques-uns de ces problèmes : Pourquoi un chariot à deux roues porte t-il les fardeaux plus aisément que le chariot à quatre roues? — Pourquoi les bêtes de somme ont-elles de la peine à tirer les chariots dans le sable ? — Pourquoi les gros poids tombent-ils à terre dans un temps moindre que les poids légers ? (Réponse vague et qui d’ailleurs n’est pas une explication: Parce que la puissance et l'attraction dans les mouvements physiques se communiquent en plus grande quantité aux poids lourds qu'aux poids légers.) — Pourquoi un poids de forme plate tombe-t-il plus lentement qu'un poids sphérique? (Héron ne fait pas intervenir la résistance de l'air; son explication peu nette semble prétendre que dans le cas d’un poids sphérique les forces sur chaque élément s'ajoutent ou se superposent tandis qu’elles se juxtaposeraient seulement dans le cas du poids plat.) or une traverse horizontale; on incline à force le système contre le mur au moyen de poulies.) 2. Pressoirs à poids, à poulies, à leviers et à vis. Le livre X de Vitruve est tout entier consacré à la mécanique. Il complète utilement le traité de Héron, dont ilne fait d'ailleurs pas mention !. Les mêmes machines usuelles s'y trouvent décrites, quelques-unes avec plus, d'autres avec moins de détails ?. Après avoir défini la machine * : « un assemblage bien lié de pièces solides possédant des forces considérables pour mouvoir les corps pesants », Vitruve distingue trois genres de machines : celles qui servent à élever (genre scansorium, en grec depobaruxov) ; celles qui ont pour principe la pression de l’air (genre spirilale ou ryevuatuoy) ; et enfin celles quiservent à tirer (genre tractorium ou Bapoïuoy). Il fait aussi une distinction entre celles qui demandent le concours de plusieurs bras, machines proprement dites (quae unpavmas moventur), et celles auxquelles suffit la force d'un seul homme, les maniant avec adresse (organa ou quae oépyanras moventur) ‘. N'accordons aucune importance à la déclaration qui suit, à savoir : que le principe du mouvement circulaire appliqué dans la plupart des machines a été emprunté à la nature, par l’obser- vation du mouvement circulaire des corps célestes”. Ce n’est là qu'une de ces idées sans fondement qui, émises une première fois, ont semblé ingénieuses, puis se transmettent indéfiniment par une sorte de pieuse routine, sans discussion. Il est bien plus probable que la simple observation des choses toutes proches a naturellement amené les premiers hommes à se servir du levier, avant qu ils eussent la moindre notion de cosmographie. 1. Pas plus que Héron ne mentionne Vitruve. On ne saurait donc tirer de là aueun argument concernant l’époque relative des deux auteurs. 2. Héron est néanmoins plus complet, ses théories sont plus solides et les machines décrites plus nombreuses. Les machines à engrenages manquent dans Vitruve. En revanche, on y trouvedes machines hydrauliques, que les Mnyavtxx ne contiennent pas. 3. « Machina est continens ex materia conjunctio maximas ad onerum motus habens virtutes. » (x, 1.) MX; ];" 244. 5, Ibid., 245. DEFROoe Un peu plus loin !, Vitruve montre quetoutesles machines se raménent à une combinaison de mouvements rectilignes se tranformant en mouvements circulaires, et réciproquement. Mais sa démonstration du principe de l'équilibre des forces appliquées aux machines, principe qu'il fait dépendre de celui du levier, est loin d’être une démonstration rigoureuse : c'est un exposé de faits plutôt qu'une théorie. Si Vitruve explique le fonctionne- ment de la balance dite statera (balance romaine), la puissance de traction des bœufs modifiée par la plus ou moins grande longueur des branches du joug; s’il distingue le levier du second genre de celui du premier; il ne fait pas voir que la différence d'effort à exercer dans les deux cas provient de la différence qui existe dans le rapport des bras du levier. De même, pour les rames des bateaux, il indique bien que, plus elles sont longues, plus elles donnent de vitesse ; mais il ne voit pas que le point d'appui est dans l’eau et non sur la cheville, que la rame est un levier du second genre et non du premier. Sa théorie est donc assez incertaine. II. — Machines de soulèvement et de traction. Avant même de parler du levier et de ses applications directes, Vitruve décrit les appareils élévateurs que nous appelons communément chèvres, et qu'il comprend dans le groupe général des machines de traction, sans les désigner autrement que par le terme de machinae (fig. 14, 15, 16 hors texte). Leur disposition pratique est décrite plus complètement que par Héron. Selon la façon dont on lit le texte”, ce sont ou deux, ou trois poutres réunies par le sommet, et maintenues à l'aide 1..7bid., 3, 352. 2. x, 2. — Le texte le plus authentique qu’adopte V. Rose est : Tigna duo ad onerum magnitudinem ratione expediuntur. Perrault lisait tigna #ria, et beaucoup d’éditeurs l'ont suivi. Cette différence n'influe d’ailleurs que sur le mode de soutien des poutres, et non sur le fonctionnement mécanique. On trouvera, fig. 14, la disposition avec trois poutres. d’après Perrault, et fig. 15 et 16 le système à deux poutres, tel que l’a décrit et représenté Blümner. (Technologie und Terminologie der Gewerbe und Künste, t. I, $ 1v, Hebenmaschinen, p. 111 et suiv.) Trispastes, simple et double. 14. Fig, (d’après Blümner). Fig. 16. — Trispaste double (d’après Blümner). # RE EE NTENEE TE He de quatre (fig. 15, 16) ou de trois cordes (fig. 14) que l'on noue au sommet, que l’on tend obliquement et que l'on assujettit au sol par de courts piquets. Une moufle, c'est-à-dire la combinaison de deux systèmes de poulies tournant les unes au-dessus des autres respectivement dans deux chapes ({rochleae ou réchami), constitue l'appareil mécanique proprement dit. La chape supé- rieure est fixe, attachée au som- met des montants, l’inférieure est mobile, et soutient par un crochet le fardeau qui monte avec elle quand on tire la corde (ductorius funis) passant sur les poulies. Vitruve débute par le modèle le plus simple !, dit trispaste (fig. 14 à gauche, et 15) (de roc, et rx, je tire) parce qu'il com- portetrois poulies, deux en haut, une en bas. Le câble de traction passe d’abord surla poulie supé- rieure dela chape fixe, puis sous la poulie de la chape mobile, remonte sur la poulie inférieure de la chape fixe, et redescend vers la chape mobile à laquelle il s'attache ?. L'autre extrémité de ce câble s’enroule sur un axe horizontal qui relie les deux poutres et que l’on fait tourner par des leviers. Fig. 17. — Tenailles de soulèvement. 1. Le modèle le plus simple serait à vrai dire non la frispaste, mais la dispaste, avec deux poulies seulement, une en bas, une en haut. 2. Vitruve ne donne pas la condition d'équilibre du système, qui, dans ce cas, où le nombre n de poulies mobiles est inférieur d’une unité à celui des poulies fixes s’exprime par P — NAÉtANT M ÉSAlN AN IEP — : , c’est-à-dire que l'effort à AnCEHe exercer pour soulever le fardeau est égal au tiers dun poids de ce fardeau. Le pentaspaste, que Vitruve mentionne aussi, ne nécessite qu’un effort cinq fois moindre que le poids. PA os Après la trispaste simple est décrite (x, 2) une trispaste à double rang de poulies (fig. 14 à droite, et 16). Dans ce système, le câble est assujetti, non par un de ses bouts, mais par le milieu, à la chape inférieure, et les deux moitiés passent, l’une sur les poulies de gauche, l’autre sur les poulies de droite des deux chapes, puis elles viennent s’enrouler séparément sur l'axe moteur. Comme cette machine est destinée à soulever des fardeaux plus lourds que la trispaste ordinaire, les leviers sont remplacés par un {ympan, ou roue d'assez grand rayon, calée sur le milieu de l'axe et manœuvrée elle-même par un câble indépendant qui va plus loin s’enrouler sur un treuil à axe vertical, cabestan ou vindas!,. Vient ensuite (x, 2, 248) la description d'une autre machine d'une manœuvre plus rapide, mais aussi plus délicate, exigeant le concours d'ouvriers exercés. Elle ne comportait qu’une seule pièce de bois (una statutio tigni), qui pouvait non seulement se placer suivant l’inclinaison qu’on voulait, mais se mouvoir à droite ou à gauche. C’est du moins ce que l’on peut entendre par ces quelques mots du texte : « Hanc habet utilitatem quod ante quantum velit et dextra ac sinistra ab latere proclinando onus deponere potest?. » C'est-à-dire : « Cette pièce de bois a ceci d'avantageux qu elle peut à volonté déposer le fardeau en avant, et de côté à droite et à gauche en s'inclinant. » C'est en somme une grue, avec cette différence que nous n'avons pas ici d'engrenages, et que tout se faisait par câbles et poulies. Vitruve appelle cet engin spécialement polyspaste. Il comporte, en effet (fig. 18), non plus cette fois trois ou cinq poulies, mais dix-huit : trois rangs de trois dans chacune des deux chapes, et trois câbles distincts. Chacun de ces câbles s'attache, non plus à la chape inférieure, mais à la chape supérieure. En bas, ces mêmes câbles passaient respectivement sur les trois poulies 1. Le fardeau se soulevait par un crochet ou une pince, dont les deux branches en ciseaux portant des griffes à leurs extrémités se resserraient par la traction du câble (fig. 17). Quand il s'agissait de soulever des pierres de taille, on creusait dans celles-ci deux trous, C, D, où s’engageaient les griffes. Ces trous se constatent effectivement dans la plupart des constructions romaines en grand appareil, quand les lits d'assises peuvent se voir à découvert, 2. x, 2, 249. : ï - get pp, .— he. fours. — 85 — d'une autre chape, assujettie au pied de la poutre et qu'on appelait éréywy ou artemon ; et ils étaient tirés séparément par trois équipes d'hommes, dont les forces réunies permettaient, Fig. 18. — Polyspaste. en raison du nombre de poulies, de se passer du vindas. Pour imaginer le mouvement latéral à volonté, sur la production duquel le texte ne nous renseigne pas, il suffirait, dans notre dessin reproduit d’après Perrault (édit. Tardieu et Coussin fils), de se représenter les quatre câbles de soutien comme susceptibles nn te de se tendre ou de se relâcher séparément plus ou moins par l'intermédiaire d'autres poulies !. D'ailleurs, Vitruve déclare un peu plus loin que l'on peut utiliser les éléments de toutes ces machines pour le chargement et le déchargement des navires, en les disposant par exemple sur des supports tournants, « in carchesiis versatilibus conlo- catae ». Avec si peu d'indications, nous ne pouvons rien recons- tituer; mais il n'est pas douteux que par la combinaison, la multiplication de ces engins, et la quantité de bras employés, on arrivait à eflectuer des manœuvres à la fois très puissantes et très précises. Il faut reléguer parmi les légendes le récit de Plutarque ? concernant les machines inventées par Archimède, qui soulevaient hors de l'eau au moyen de griffes de fer les navires ennemis au siège de Syracuse. On n’en reste pas moins confondu quand on voit sur les hautes collines de l’ancienne Agrigente, dans les ruines majestueuses de ses temples, des blocs renversés de 20 mètres de long, 4 mètres d'épaisseur, et près de 7 mètres de hauteur, cubant 500 mètres cubes et pesant plus de 1.000 tonnes : ce n’est pourtant qu’à l’aide de ces engins, _rudimentaires à nos yeux, que de telles masses ont pu être hissées. Il en est de même de ces gigantesques obélisques, transportés d'Egypte à Rome par les empereurs, et dont l'un pèse jusqu’à 1.160 tonnes. De tels efforts ne s'expliquent que par la multiplicité des éléments de traction et l’ingéniosité déployée dans leur disposition. Il est vrai qu'on employait aussi, pour élever les fardeaux, des machines que Vitruve laisse de côté”, et qui pourtant devaient être d'un maniement bien plus commode que les câbles et les 1. Tel est le système bien connu des palans appelés caps de mouton, qui servent dans la marine à raidir et à distendre les haubans. 2. Vie de Marcellus. 3. On s’étonne à bon droit de ce que dans ce chapitre où l’auteur annonce lui-même qu'il va parler de la transformation du mouvement rectiligne en mouve- ment circulaire, on ne voie figurer ni la crémaillère, ni les engrenages, ni le balancier. Mais c’est un peu partout que Vitruve à négligé beaucoup de choses, ainsi que le constate M. V. Mortet (Recherches critiques sur Viti'uve et son œuvre, Revue archéologique, t. XLI, 1902). A-t-il voulu ne décrire que ce qui lui semblait principal dans chaque ordre de connaissances se rapportant à son art? Comme beaucoup d'hommes de métier, avait-il ses préférences et ses exclusions systéma- tiques ?.. Ces omissions n’en sont pas moins étranges. PAT EE poulies : c’étaient les machines à engrenages. Tel était le Gapoïhros de Héron d'Alexandrie, que nous avons déjà mentionné plusieurs fois!. L'appareil est constitué (fig. 19) par une sorte de châssis en forme de caisse; dans les faces parallèles les plus longues sont engagés plusieurs axes perpendiculaires à ces faces et séparés deux à deux par des intervalles correspondant à la longueur des rayons d'une roue dentée et du pignon qui la commande. S'appuyant sur ce que « les cercles les plus grands l'emportent sur les plus petits quand ils tournent autour du Fig. 19. — Appareil de traction et d'élévation (Bxcou)z0c) de Héron. même centre », principe énoncé, comme il a été dit, par Aristote, Héron établit qu’un cercle d’un diamètre quintuple de celui d’un autre permettra de soulever le même poids avec une force cinq fois moindre ; et ainsi de suite, en établissant une série de pignons et de roues dentées dont les diamètres aient entre eux les rapports que l’on voudra. Finalement, un poids de mille talents sera mû par un jeune garçon qui, seul et sans machine, n'aurait pu soulever que cinq talents. Le mouvement est donné par une manivelle qui fait tourner une vis sans fin en prise avec un premier pignon. Jusqu'à quel point cette machine, théoriquement si bien expliquée par Héron, était-elle entrée chez les anciens dans le domaine pratique ? Il nous est difficile de le savoir, à cause de 1. V. ci-dessus, p. 41, 75. a — la rareté des écrits sur ces matières. Mais il nest guère croyable qu'on eût laissé pendant plusieurs siècles, de Héron à Pappus, sans essayer de l'utiliser, une conception aussi simple et aussi féconde que celle-là. Ce n’est pas tout de soulever de lourds fardeaux, il faut encore pouvoir les conduire à destination. Vitruve se contente de dire que, suivant la loi de toutes les machines à mouvement circulaire, les appareils de transport plaustra, rhedae, ont d'autant plus de puissance que leurs roues sont de plus grand rayon : « Rhedae (ou raedae), plaustra (ou plostra).… ceteraeque machinae, isdem rationibus per porrectum centrum et rota- tionem circini versando faciunt ad propositum effectum. » On aimerait à avoir quelques détails sur les plaustra (chariots destinés au transport des fardeaux lourds), sur leurs roues, pleines ou rayonnées, sur leur mode de suspension et d'attelage. Vitruve se contente de rapporter deux procédés exceptionnels emplayés par les architectes Chersiphron et Métagène, chargés de la reconstruction du temple de Diane à Ephèse! Ces systèmes ne semblent pas, bien que Vitruve vante leur ingéniosité, avoir mérité de rester dans la pratique, Il s'agissait d'amener de la carrière au chantier les fûts de colonne ct les architraves. Le premier des deux procédés consistait à faire rouler les fûts eux-mêmes sur le sol; on y avait scellé, suivant l’axe aux deux bouts, des boulons de fer qui s’engageaient dans des moyeux formant comme les crosses de deux timons. L'autre, pour les architraves, comportait deux roues très hautes (12 pieds) et des jantes très larges probablement (sans quoi le but, qui était de ne pas défoncer les chemins, eût été manqué). Des boulons, adaptés comme ceux du système précédent, s’engageaient dans les moyeux des roues, de telle sorte que la masse à transporter constituait elle-même l’essieu tournant. La traction s'exerçait par l'intermédiaire de colliers de fer dans lesquels tournaient aussi les boulons d’axe, et auxquels s’accrochaient les chaînes de traction. ë | À 1 » h À us = fe ti Fr À A QUr = Un autre architecte, nommé Paconius, du temps même de Vitruve, ayant à transporter un énorme bloc pour un piédestal, l'assujettit de la même manière entre les roues; mais il fit exercer la traction par la circonférence, au moyen de fuseaux reliant les jantes des roues, et autour desquels s'enroulait un câble. Il fallut y renoncer, parce que la traction par les bœufs ne pouvait pas être régulière. Le câble en se déroulant entraïînait tout l’ensemble, tantôt à droite, tantôt à gauche. Il y avait là néanmoins quelque chose d’intéressant, en tant qu'essai de traction par la jante, problème difficile, que nous n'avons même pas encore résolu d’une façon pratique. En somme, les transports de très grosses masses devaient s’opérer de la même façon que les tractions de navires sur les rivages, par le moyen des rouleaux, des treuils, des diverses machines à palans, et du Baæpoïlxos, qu’on pouvait disposer pour la traction aussi bien que pour l’élévation!. On peut concevoir des déplacements successifs de cet appareil en avant d’un chariot porteur du fardeau, et celui-ci tiré lentement, mais régulièrement, par le câble de la machine, qui, une fois rejointe, était reportée plus loin pour une nouvelle manœuvre. III. — Machines à moteurs animés pour élever l’eau. L'étude des machines élévatoires pour l’eau suit, dans Vitruve, celle des appareils de soulèvement et de traction des solides. Sans distinguer méthodiquement celles qui sont mues par les forces mécaniques ordinaires de celles dont le fonctionnement repose sur les principes de l'hydraulique ou de la pneumatique, il se contente de décrire les organes de chacune d'elles, en faisant remarquer, les différences, non de principe, mais d'effet pratique, c'est-à-dire concernant le débit et la hauteur d'élévation. À nous, il importe de faire autrement la distinction, et de décrire 1. V. ci-dessus, p. S0, l'énumération des diverses machines de traction décrites par Héron d'Alexandrie (Mnyavixx, liv. LIL, 1). 40 d'abord à part les appareils où n'intervient ni la notion du vide, ni celle de la pression hydraulique. C'est d'abordle {ympan, sorte de roue creuse à compartiments 5 (54 Fig. 20. — Vis d’Archimède. déterminés par des cloisons touchant l'axe et allant jusqu’à la circonférence ; l'eau y entre par des ouvertures D, D (fig. 21, hors texte) ménagées dans les planches qui forment l'enveloppe de celle-ci, et se déverse latéralement par des canaux creusés Ê dans l'arbre de couche. Des hommes font tourner la machine | avec leurs pieds. + 5 4 . à + po : 6 J - à CA ta ENT É NT ‘ LD dé * = b 1e wf Ch “ ». L2 3, / La ? | à T | ‘ CM TT) A AE + A. [NT S H fi *OJQIAN AUN,P Na] 49/9 AnO re *sJopoS Ja souurd saqne & U0Y — ‘28 ‘SLI “NV9 1 104919 UBdWÉ LE — ‘12 ‘SIT HU Ve nel VIE | = | [|  “UN OU UN JUEUUOTJOR OULBUOI AUDIMEIPAU ONOY — = Ë TT = : F \ *DANUIA S9ddv,p ‘CUOU ET — ‘EX "SN — 91 — Vient ensuité la noria, à laquelle Vitruve ne donne pas de nom particulier. In rotae axe involuta duplex ferrea catena demissaque ad imum libramentum conlocabitur, habens situlos pendentes æreos congiales (fig. 23). Il donne une place plus grande à la description de la vis d'Archimède (cochlea) qui élève l’eau moins haut qne la noria, mais peut en fournir une bien plus grande quantité!. Cette machine, qui est encore souvent employée aujourd’hui pour l’épuisement dans les endroits où l'on veut poser à sec les fonde- ments d’une construction, devait intéresser spécialement l’archi- tecte Vitruve. Aussi donne-t-il les indications les plus précises sur son mode de construction. Cet enroulement, autour d’un cylindre de bois, de baguettes d'acier superposées ? et collées à la poix pour former les cloisons en spirale, paraît de conception rudi- mentaire autant que d'exécution compliquée (fig. 20). Il est vrai que l'appareil était ainsi un peu plus léger que ceux qui se construisent encore à présent avec des douvesencastrées dans un sillon hélicoïdal autour du noyau. Au temps de Perrault, traducteur de Vitruve, c’est-à-dire au xvn° siècle, la cloison était plus ressemblante à celle que décrit l'auteur latin, puisque c'était une sorte de panier d'osier revêtu de poix pour l’étan- chéité, et tressé autour de petits bâtons qui suivaient le tracé des hélices, enfoncés de distance en distance normalement au cylindre. Dans l'appareil tel que le décrit Vitruve, le cylindre ou noyau central doit avoir autant de pieds de longueur qu'il a de doigts d'épaisseur ; son diamètre est donc égal au 1/16*° de sa longueur. Les spires, au nombre de huit, sont obtenues en divisant les circonférences des deux bouts en huit segments, dont les extré- mités se correspondent sur les arêtes du cylindre, en prenant sur ces arêtes des longueurs égales à ces segments, en traçant par ces points des circonférences parallèles aux bases, et en ex G- 2. Sumitur salignea tenuis aut de vitice secta regula quae uncta liquida pice figitur, etc. » Salignea est une baguette de saule ou d'osier, vitex est proprement l’arbrisseau appelé encore aujourd'hui agnus-castus. Pour le détail de cet enrou- lement, se reporter au Lexte de Vitruve et à Blümner (Technologie, t. IV, pp. 123-126). menant les diagonales des carrés ainsi déterminés sur le cylindre. Quant au pas, ilest, par construction, égal à la longueur de la circonférence, donc au 1/5 de la longueur du cylindre, à très peu près!, et nous avons ainsi huit canaux qui font cinq fois le tour du cylindre, et dont la profondeur est égale au rayon du noyau central; on les recouvre de planches, liées par des cercles de fer. L'appareil ainsi construit est installé avec une inclinaison sur l’horizon, fixée par Vitruve à 3/4. Aujourd'hui, ces divers éléments sont variables : le nombre des canaux en spirale est moindre, quelquefoisil se réduit à deux : et l’inclinaison peut aller de 35° à 50°, avec augmentation ou diminution propor- tionnelle du pas de vis. IV. — Principes de physique. Equilibre et mouvement de l'air et de l’eau. Les pompes, les roues hydrauliques que décrit Vitruve, et plus généralement tous les dispositifs en usage chez les anciens pour le mouvement de l’eau, supposent un certain nombre de connaissances théoriques sur l'équilibre et le mouvement des fluides. Ces connaissances elles-mêmes se reliaient à des spéculations plus hautes sur la nature des divers corps et la constitution de la matière. « Il importe à l'architecte, dit Vitruve lui-même?, de connaître, par une étude toute spéciale, la nature des choses, guowloyiæ, pour être en état de résoudre quantité de questions, comme lorsqu'il s’agit de la conduite des eaux. Dans les tuyaux dirigés, par différents détours, de haut en bas, sur un plan horizontal, et de bas en haut, l’air pénètre de bien des manières avec l’eau; et comment remédier aux désordres qu'il occasionne, si dans la philosophie l’on n'a pas puisé la connais- sance des lois de la nature? Qui voudrait lire les ouvrages de 1. En effet. la circonférence — TD; or, D, diamètre est le 1/16 de la longueur L; T 3,1416 d _ Se X L—0.19,6 L. ou sensiblement 0,2 ou 1/5 de L. D donc le pas — 2. 1. Introd. ambient). 0 ue Ctésibius, d’'Archimède et des autres auteurs qui ont traité de cette matière, ne pourrait la comprendre, sans y avoir été préparé par la philosophie. » Il serait difficile de tirer de l'ouvrage de Vitruve un ensemble de doctrines liées sur la physique; il en dissémine quelques notions çà et là, en citant les opinions de Thalès, Héraclite, Pythagore, Empédocle, Epicharme, Démocrite, sur la consti- tution des corps!. Il adopte la théorie des quatre éléments, et cherche à l'appliquer à certains phénomènes, tels que la cuisson des calcaires, l'extinction de la chaux, la cohésion des mortiers?, la durée et la résistance des bois de construction ?. Mais c'est de peu d'importance et l'on ne saurait parler de la « physique de Vitruve ». Les auteurs techniques grecs étaient beaucoup plus explicites. A défaut des traités de Ctésibios, perdus, on peut tirer des Pneumatiques de Héron d'Alexandrie et de Philon de Byzance, une suite de principes coordonnés. J'emprunte à un ouvrage de M. de Rochas un résumé assez clair des idées générales professées en fait de physique par ces savants d'Alexandrie. « Tout corps est composé de molécules très petites, entre lesquelles se trouvent des espaces vides ou pores, d'une grosseur moindre que ces molécules. « Les corps se présentent à nous sous quatre aspects : celui de la terre, celui de l’eau, celui de l’air et celui du feu (chaleur, lumière); ces quatres formes typiques sont appelées éléments. « Un élément peut se transformer en un ou plusieurs autres, par l'action d'un autre élément, comme quand l'eau se réduit en vapeur où qu'un solide se dissout dans l’eau, ou qu'on fait brûler un solideÿ. 1. x, 2. — vin, Introd. AAIEN D. DU 0. 4. La science des philosophes et l'art des thaumaturges dans l'antiquité, p. 41. (Paris, Masson, 1882.) 5. Il y a dans ces conceptions des anciens sur la divisibilité, les transformations, et l'unité pourtant fondamentale de la matière, une part de vérité à laquelle on se plait de nos jours à rendre pleinement justice. Dans un des derniers discours qu'il ait pro- noncés, un grand savant, M. Henri Becquerel, reconnaissait que trois idées principales ressortent des théories anciennes, et que ces idées nous les invoquons encore aujour- d’hui. Ce sont : la conception de l'atome, l'existence des mouvements intérieurs, le te) « L'air est élastique; quand on le comprime, ses molécules se rapprochent, plus que ne le comporte leur état d'équilibre naturel, en pénétrant dans les espaces vides qui les séparent. Quand au contraire on les dilate, les molécules s’espacent davantage. Mais dès que la force qui les comprimait ou les dilatait cesse d'agir, les molécules reviennent très rapidement reprendre leur espacement normal. « Le feu est composé de particules d'une ténuité extrême qui peuvent pénétrer dans les pores du corps. Il agit de deux. manières différentes suivant son intensité. Quand il est modéré et se manifeste seulement par une certaine sensation de chaleur, il se borne à écarter les molécules entre lesquelles il a pénétré, et il augmente ainsi le volume des corps sur lesquels il agit; mais quand il devient plus violent et prend l'aspect d'une flamme, il use ces particules et les rend plus ténues, de telle sorte que, finalement, le corps est en partie consumé. « Les corps se superposent par ordre de densités; en bas, les solides et les liquides; au-dessus l'air, puis le feu. Ils tendent toujours à se suivre dans cet ordre sans laisser d'intervalle entre eux. C’est là une des propriétés de la matière dont on ne peut empêcher l'effet que par l'application d’une force étrangère. « Cette propriété se manifeste par l'attraction qu'exercent les différents éléments les uns sur les autres. Qu'on jette une pierre, à mesure que la pierre se déplace, l'espace qu'elle abandonne est aussitôt occupé par l'air qu'elle attire après elle. Plongez un tube de verre dans l’eau, vous verrez l’eau se coller contre les rapprochement entre ces mouvements et les propriétés de l'aimant. M. Becquerel qualifiait de prophétiques ces vers de Lucrèce : Versibus ostendam corpuscula materiai Ex infinito surmam rerum usque lenere Undique protelo plagarum continuato. (De Rerum natura, 11, 529-531.) Et ceux-ci : Fit quoque ut hunc veniant in cœtum extrinsecus illa Corpora quæ faciunt nubes nimbosque volantes. (vi, 481-482.) « Chaque mot de ces citations correspond à chacune des propriétés que nous attribuons aujourd'hui aux corpuscules électrisés. » (H. Becquerel, réflexions sur une théorie moderne. Lu en séance publique annuelle des cinq Académies, le vendredi 25 octobre 1907.) 0 — parois du tube. Cette force d'attraction n’est point la même entre tous les éléments ; peu considérable entre un liquide et un solide, elle l’est beaucoup entre un liquide et l'air. C’est pour cela que, quand il y a de l'air sur de l'eau dans un tube et qu'on retire l'air, l’eau le suit, obéissant ainsi à une force qui agit en sens inverse de la pesanteur. On voit que, d’après les idées des anciens, l'eau pouvait ainsi monter jusqu’à ce que le poids de la colonne d'eau soulevée fit équilibre à la force d'attraction exercée par l'air sur l'eau et que l'explication du phénomène observé par le fontainier de Florence eût été facile pour eux s'ils l'avaient connut. » Cette théorie de l'ascension des liquides est celle de Philon de Bysance. « Que l'eau, dit-il, puisse s'élever en haut, cela est manifeste. Elle est, en effet, entraînée avec l'air qu’on élève parce qu'elle lui est continue, ainsi que cela est patent pour le vase au moyen duquel on goûte le vin. On voit que lorsque quelqu'un tient à la bouche une des extrémités de ce vase et fait une aspiration, il attire l'air, et avec l'air tout corps mou très liquide qui est au-dessous, parce que ce liquide est continu à l'air comme s’il lui était attaché par de la colle ou quelque autre liaison de ce genre?. » Héron donne une explication assez différente, tirée de la pression de l'air, dont l'aspiration a dérangé l'équilibre et qui tend à le reprendre : « Nous pouvons élever du vin par la bouche à l’aide d’un siphon, bien que ce mouvement d'ascensicn ne soit pas naturel. En effet, quand nous avons reçu dans notre corps l'air qui se trouvait dans le siphon, nous sommes devenus plus pleins qu'auparavant, et nous pressons l'air qui nous touche; cet air presse lui-même de proche en proche jusqu'à ce que la pression arrive à la surface du vin; et alors le vin comprimé s'élève dans 1. C'est-à-dire qu’ils n'auraient pas été surpris de voir que cette attraction avait une limite définie. On sait que le fontainier de Florence, ayant essayé vainement d’aspirer l’eau par une pompe jusqu’à une hauteur au delà de 32 pieds, communiqua son embarras à Galilée, qui ne sut que lui répondre, sinon que « La nature n'avuit horrewr du vide que jusqu'à 32 pieds. » 2. [vevuarixe. — 96 — la partie du siphon qui a été vidée, car il n'y a pas d'autre lieu où il puisse se porter sous l'influence de la pression. C'est ainsi que s'explique le mouvement ascendant du vin, mouvement qui n'est point naturel!. » Ni l'un ni l'autre ne songent à leffet de la pesanteur. Et pour- tant l’on savait de longue date que l’air est pesant. Aristote le dit formellement?. A l’appui de son affirmation, il gonfla d'air une vessie, et constata que cette vessie, ainsi gonflée, pesait plus qu'une vessie vide. Avant lui, Empédocle avait attribué la cause de la respiration « à la pesanteur de l'air qui se précipite dans l'intérieur des poumons*. » Plutarque cite l'opinion toute pareille d’Asclépiade : « L'air est porté avec force dans la poitrine par sa pesanteur #. » Mais on sait de reste que cette notion, pour être éclaircie, devait attendre de longs siècles, jusqu'aux expé- riences de Torricelli et de Pascal. V. — Pompes et machines hydrauliques. Que l'aspiration de l’eau fût attribuée par les uns à l'élasticité de l'air, par les autres à l'attraction des deux éléments, les anciens n’en avaient pas moins inventé et fait fonctionner des machines ayant pour principe l'aspiration et la compression. La pompe à deux cylindres que Héron décrit”, sans indiquer le nom de son auteur, et qui, d'après Vitruve, serait due à Ctésibios, dont Héron était le disciple, est, à quelques détails près, notre pompe foulante à incendie. C'est du reste comme instrument à cet effet que Héron la présente’, les tubulures aboutissant à une pompe de jet (fig. 25); tandis que Vitfuve la donne comme 1. Ilvevuurtxx, 1, 2, 155. 2. Ilept oupavod, 1v, 1. 3. Traité de la médecine, vu. 4, Plutarque, Opinions des philosophes, 1v, 22. 5. [vevuarixx, 1, 28. 6. Où dè s'owves, os ypovrat els TOUS ÉUTOAGHLOUS, XATAGXEUATOVTAL OÙTWE. 1107 = pompe élévatoire, les deux corp de pompe envoyant l'eau dans un récipient formant cloche à air, d'où l'eau, par un tuyau vertical, pouvait s'élever à la hauteur qu'on voulait (fig. 26). Il est intéressant de comparer les deux descriptions. Celle de Héron est beaucoup plus ordonnée, précise et complète, rédigée sous forme didactique, avec mention des lettres qui renvoient au Fig. 25. — Pompe foulante de Héron. dessin, conformément à la méthode générale des exposés de l’auteur. Après l'avoir lue, un constructeur pourrait l’établir sans avoir rien à imaginer lui-même. Celle de Vitruve, quoique pouvant compter parmi les plus claires de l'ouvrage, ne peut permettre de dessiner qu’une figure schématique; de plus, l'ordre n’y est guère rigoureux : il est d'abord question des cylindres, puis du récipient accumulateur, qui est décrit entiè- rement, avant qu'il soit encore fait mention des pistons. Bref, nous avons là une vraie démonstration, ici une simple indication !, 1. Pour donner une idée des deux systèmes, je transcris et traduis le début des deux descriptions. Voici d’abord celle de Héron : An 7, #7) s n i , \ , ! \ Q Ecrwouy Ôvo muidec PLAT KOTETOPVEUMEVOL, TAY ÉVTOS ETIDAVELUV TOO — 98 — Toutefois, le texte latin présente un intérêt capital, en ce qu'il nous apprend qu’au moyen de ces pompes on pouvait M Fig. 26. — Pompe foulante de Vitruve, d'après Ctésibios. élever de grands volumes d'eau à des hauteurs considérables, Eubolsa, xubareo ai Tüy 0920 À2wY see , ai ABTA, EZHO@: éubokei dt adrais EcTwGaY &p1067T0! 0! K À, MN. Evyrerofolwauv dE robs 322 has ai rudes \ s — _ = _ ’ dix cwAñvos Toù EOAZ. Ex ps rOV ExTOS Lepos ui muËidec Evroc Toù £OAZ ! » ’ = ’ GWATVOS EETUIAV AOGAPIX TPOXELEVY, OÙX ElCTUL ÉV TOÏS ÉTAV, n Le P; dore L *, 1 LL vw , Er, TuËld'es Tpnuura oTcoyyüAa ra X, T, ÉTITUOANVOEVL TUUTAVÉON £ , c ATPISUEVOLS Toic a 7 a FE PP { = A1 D, XWY', di ‘wv reoovix diubeo to sw, iT:X240 Nnyéva ñ 7e TE ; EGt NN É x OGXEXOLVOULÉVE TO TUZ Tps TÙ TUUTAVLL 1 rubpést rv ruËtdlwv, ra Q, Q, Eyovrx Ex TOY Axowv xwAUUX unxert ÉtéAxecar EE ar « Soient deux cylindres creux de bronze ABT A, EZHO, dont la surface intérieure soit bien mandrinée, comme celle des cylindres d’orgues hydrauliques : soient les pistons-rouleaux KA, MN, exactement logés dans ces cylindres, ceux-ci communiquant l'un avec l’autre par le canal ZO0AZ. Qu’à leur partie extérieure et à l'intérieur du canal Z O0 AZ, les cylindres aient des clapets PR, comme en ont ceux qui sont décrits plus haut, et que ces clapets s'ouvrent de dedans en dehors. Qu'au fond des cylindres soient des ouvertures circulaires Ë,T, bouchées par des disques FD, XW que traver- sent des chevilles, Q Q, fixées et assujetties au fond des cylindres, et portant à leurs extrémités des arrêts pour s'opposer à ce que les disques s’en échappent. » A côté, voici le début de Vitruve (x, 7, p. 259 « Ea (machina) fit ex aere, cujus in radicibus modioli fiunt gemelli paulum distantes. habentes fistulas furcillae figura similiter cohaerentes in medium catinum concurrentes. In quo catino fiunt asses in superioribus naribus fistularum coagmentatione subtili conlocati, qui praeobturantes foramina narium non patiuntur redire quod spiritu in catinum est expressum... » « La machine est en bronze. On place à sa base, à une petite distance l’un de l'autre, deux cylindres creux jumeaux munis de tuyaux semblablement adaptés, formant fourche, et se réunissant dans un récipient intermédiaire. Dans ce récipient sont ajustés deux clapets aux orifices supérieurs des tuyaux, qu’ils bouchent hermé- tiquement, pour empêcher que ce qui a été poussé, par la pression de l'air, dans le bassin, ne s'en échappe. » ds «di Éh ZE et les emmagasiner dans des réservoirs, d'où cette eau pouvait jaillir dans des bassins et des fontaines. Vitruve parle aussi? du moyen d'élever l'eau par une roue suspendue au-dessus d’une rivière, y plongeant légèrement, et mue par la force même du courant. C’est donc une roue motrice hydraulique, la roue en dessous à aubes planes, dont les aïles du côté opposé à celui que frappe le courant sont munies de godets (pinnae), qui puisent l'eau en se relevant, et arrivés au haut la déversent dans un chenal, comme font les godets de la noria (fig. 22, hors texte). À cette occasion, l’auteur indique le mécanisme des moulins mus par le même système de roues (fig. 24, hors texte). Ce passage * est d'autant plus intéressant que c'est le seul texte ancien où le moulin à eau soit décrit ‘, et que nous y trouvons indiquée la transmission du mouvement d’un axe horizontal à un axe vertical par roue d'engrenage et pignon”. « Ita dentes tympani ejus quod est in axe inclusum impellendo dentes tympani plani cogunt fieri molarum circinationem ; in qua machina impendens infundibulum subministrat molis frumentum eteadem versatione subigitur farina. » On voudrait que Vitruve donnât quelques renseignements sur d’autres roues hydrauliques. On en connaissait certainement plusieurs systèmes, entre autres la roue à augetsi; mais les textes précis font défaut. On reste à se demander comment il se fait que les anciens, si ingénieux pour tant de choses pratiques, n'aient pas su, après les premiers essais, mieux mettre à profit 1. « Ita ex inferiore loco castello conlocato ad saliendum aqua subministratur. » Ainsi une ville au bord d'un fleuve, Lyon, par exemple, ou plutôt la presqu'ile de Condate, pouvait fort bien posséder des bassins, un amphithéâtre avec son euripe et ses jets d’eau, sans qu'un aqueduc spécial fût pour cela nécessaire. (V. notre ou- vrage publié en même temps que celui-ci, Les aqueducs antiques de Lyon, ch. 1, p. 18.) DA SENS 2%, D. 4. On ne trouve ailleurs que des allusions (Strabon, x11 ; — Pline, xvirr, 97 ; — Palladius, De re rustica, 1, 42; — Ausone, Poëme de la Moselle, 361). . Le système de Vitruve parait assez primitif. Mais les indications de Héron dans les Mécaniques prouvent que l’on savait fort bien construire théoriquement les engrenages. (Fragments des Myyavixz, 11, 18.) 6. Cf. Marquardt (Manuel des antiquités romaines, xv, p. 441. — MO une force naturelle constamment disponible, comme celle de l'eau. C’est que l'histoire des inventions est toujours la même. Les vraies solutions sont presque toutes simples, et l’on reste stationnaire, ou l'on s'égare dans les complications, sans aper- cevoir ce qui devrait sauter aux yeux. VI. — Hydraulique des conduites d'eau. Ni dans le livre VIII de l’ouvrage de Vitruve, ni dans le livre XXXI de l'Histoire naturelle de Pline, où est traitée la question des eaux, nous ne trouvons énoncé aucun principe d’hydros- tatique et d'hydrodynamique. Pour estimer approximativement ce que pouvaient être à cet égard les données des anciens, il faut se reporter au traité d'Archiméde sur l'équilibre des corps flottants, et aux descriptions d'appareils fournies par Héron et Philon. On peut en déduire que ces données théoriques se bornaient à deux ou trois des principes fondamentaux de l'hydrostatique moderne : encore, sauf le principe d'Archimède, ne sont-ils pas formulés explicitement. On savait qu’un corps plongé dans un liquide perd de son poids une part égale au poids du liquide déplacé ; que le liquide contenu dans des vases ouverts à l'air libre et qui communiquent entre eux se met toujours de niveau, quelle que soit la forme des vases et des conduits de communication; que dans une masse liquide il existe une relation entre la profondeur, la pression et la vitesse d'écoulement. Mais on ne voit nulle part cette relation scienti- fiquement évaluée : il est possible que l’on ne fit pas une distinction très nette entre la variation de la pression et celle de la vitesse! ; rien non plus n'est dit d’explicite au sujet, ou des pressions exercées sur le fond et sur les parois des vases, ou de la transmission des pressions au sein d’une masse liquide, ou de la variation du débit suivant le mode d'écoulement adopté (mince paroi, ajutages, déversoirs, orifices noyés, etc.), ou des 1. C’est ainsi qu’Aristote semble avoir cru pour la chute des corps à la propor- tionnalité de la vitesse avec les espaces parcourus. ([Isc: oùouvod, 1, 8.) — A01 — pertes de charge par Ja viscosité, les changements de section, les coudes brusques des conduites. Et, pourtant, il apparaît qu'en pratique les problèmes d’hydraulique applicables aux conduites d’eau ont été résolus comme si tout cela eût été connu. Cette anomalie s'explique à la réflexion. Ici plus qu'ailleurs l'expé- rience a pu suppléer à l'absence de théories bien définies. Nous établissons des relations de forme précise entre les divers éléments ci-dessus énumérés, pressions, vitesses, pertes de charge. Mais dans toutes ces formules, de Saint-Venant, de Bazin, de Prony, dont nos ingénieurs hydrauliciens se servent journellement, considérons la part laissée à des coefficients que l’on fait varier suivant des données purement expérimentales. L'emploi de ces coefficients repose sur des observations si multiples et si attentives qu'il permet d’opérer avec certitude. Mais la pratique ancienne reposait aussi sur des expériences très nombreuses et sur des traditions très continues et très solides. À défaut de formules proprement dites, les ingénieurs grecs et romains pouvaient avoir des tables, des listes, corres- pondant à l'immense variété des cas qui pouvaient se présenter : l'intuition et la science professionnelle de chacun suffisaient pour les interpolations nécessaires. Il est à recretter que rien ne subsiste de ces documents transmis par l'expérience. Mais on s'explique assez que les traités théoriques n'en aient rien conservé. Ne pouvant exciter la curiosité comme les petits phénomènes amusants des cabinets de physique, ni être ramenés à des lois, à des définitions précises, ces recueils de faits et de chiffres n'auraient pu fournir que des énumérations monotones et démesurément longues. Voici l'exemple d'un problème pratique très simple, où l’on regrette que Héron ait pour ainsi dire tourné court avant de fournir la solution rationnelle que l’on attendait, ce qui d’ailleurs peut tenir à l’omission d'un copiste.C’est cette question d'hydrau- lique intercalée dans le traité de la Dioptre : Une source étant donnée, évaluer son produit, c’est-à-dire la quantité d'eau qu'elle fournit. a LE En RS (208 2. SLAVE = A , 1e RE A D OL PA 1. Hnyñs drapyotons, énisxédaclar riv andbôuatv adrs, rouréort nv avi6Auaty \ 4 Q on éct£. (Ilect Arôrrouc, $ xxxr.) SD Après avoir recommandé de déterminer, au moyen de la dioptre, un point convenable assez bas pour recevoir toute l’eau de la source, l’auteur indique l'emploi d’une conduite en plomb de forme quadrangulaire, d’une section plus grande que celle du courant, et qui recueille toute la veine liquide. « Prenons donc à l'extrémité de la conduite, l'eau qui s'y engage ; supposons qu'elle s'y élève à une hauteur de deux doigts et que la largeur de l'embouchure soit de six. Multiplions 6 par ?, cela fait 12 : nous voyons ainsi que la section de la veine est de 1? doigts. Observons toutefois qu'il ne suffit pas, pour connaitre la quantité d'eau fournie par la fontaine, de détermi- ner la section de la veine que nous disons être de 12 doigts : il faut avoir en outre sa vitesse ; car plus l’écoulement estrapide, plus la fontaine fournira d'eau; et plus il est lent, moins il aura de produit. Pour ce motif, après avoir creusé un réservoir sous le courant, il faut examiner, au moyen d'un cadran solaire, combien il y entre d’eau en une heure, et de là déduire la quantité d’eau fournie en un jour; alors on n’a pas besoin de mesurer la section de la veine, la mesure seule du temps suffit pour rendre évident le produit de la source. » Il est très vraisemblable qu'il y ait une lacune avant la phrase commençant par « pour ce motif » entre les mots du texte uetov et Au dn. On s’expliquerait ainsi comment l’auteur n'indique pas le procédé pour mesurer la vitesse, connaissant la section, pour avoir le débit. Sinon, il serait à croire qu'il se dérobe devant la définition précise, mathématique, à donner de la vitesse. VII — Hydrologie. A ces considérations sur l’hydraulique des anciens, peuvent s'ajouter quelques mots sur leurs connaissances d'hydrologie, du moment qu'avant d'entreprendre un travail d'adduction d’eau, ils se préoccupaient beaucoup de la qualité de celle-ci. Tout dépourvus qu'ils étaient de procédés d’analyse chimique, ils se rendaient compte soigneusement du degré de pureté et de à 7/0 — 103 — salubrité d’une eau potable. Vitruve consacre une partie impor- tante de son vin° livre à ce genre d'indications. Pline l'Ancien et lui! recommandent surtout les eaux des montagnes, provenant des roches dures et siliceuses de préférence, du tuf, du gravier, quoique dans ce dernierles veines soient irrégulières ; ils regar- dent comme inférieure l’eau des sables mouvants et de la craie. Mais quelle qu’elle soit, l'eau de source, ou des puits alimentés par des sources, leur paraît toujours préférable à l’eau des rivières, médiocre, des torrents, moins bonne encore, et des citernes, celle-ci considérée comme peu salubre. Vitruve signale l'utilité des forêts pour conserver la neige et permettre à l’eau de s'’infiltrer peu à peu dans la terre. Mêmes indices sont recueillis par lun et l’autre auteur pour la découverte des sources, c’est-à-dire la présence de certaines plantes ou arbres, jones, aunes, saules, roseaux, etc., puis les brouillards qui s'élèvent de la terre au lever du soleil. Ils distinguent aussi les différentes espèces d'eaux minérales, froides ou chaudes, incrustantes, sulfureuses, alumineuses, salines, nitreuses, bitu- mineuses, acides, indiquent leurs effets, et quelque peu leurs origines, leurs relations avec les terrains ?. Pour apprécier la dureté ou crudité de l'eau, nous avons aujourd’hui le procédé rapide de l’hydrotimétrie, fondé sur la réaction de l’eau de savon sur les sels terreux, et qui donne, par une simple lecture sur l'échelle graduée d’une burette, la propor- tion de ces sels pour un litre de l'eau essayée. Les anciens n'avaient que le procédé sommaire de l'ébullition produisant avec plus ou moins de rapidité la cuisson des légumes *. Ils examinaient également si, après ébullition, des incrustations restaient adhérentes aux parois des vases. Quant aux notions sur le régime des eaux suivant les saisons et dans les différentes contrées, on ne pouvait les rassembler comme nous le faisons grâce à nos installations hydrométriques et à nos statistiques minutieuses. Mais les enquêtes pour chaque 1. Vitruve, virr, 1. — Pline, xxx1, 21, 23, 28. 2..Vitruve, vIir, 3. — Pline, xxx1, 2, 3, 20, 32. 3. Vitruve, VII, 5. cute projet d’adduction d’eau étaient faites avec une diligence et une sagacité telles, que nous ne saurions aujourd’hui, avec tous nos renseignements méthodiques, choisir avec plus de sûreté pour l’approvisionnement d’une ville, les versants où puiser, les nappes d’eau à saisir, et les sources à aménager. VIII. — Mécanique de la construction. Perspective et dessin. Si les ouvrages hydrauliques de l'époque romaine révèlent chez les ingénieurs qui les ont construits une connaissance, sinon exactement formulée, du moins implicite et effective des lois régissant l’équilibre et le mouvement des fluides, à plus forte raison l’art romain de la construction, reposant sur les principes connus de la géométrie, témoigne-t-il d'une science d'application fort étendue et fort solide. Il fallait être autre chose qu'un bon maçon expérimenté pour équilibrer les forces de compression, de flexion, de traction qui agissaient en tous sens sur toutes les parties de ces puissants édifices. Sur cette résistance des matériaux, on s’attendrait à trouver dans Vitruve, au chapitre vi du livre VI, qui traite de la solidilé et des fondements des édifices, quelque chose de précis. Mais il s’en tient à des indications générales, conseillant avant tout d'éviter les porte-à-faux (pendentia), de placer des décharges en forme de chevrons ou de cintres au-dessus des linteaux, et de consolider les piliers d’angles. Il est plus explicite pour les murs desoutènement, et recommande de proportionner l'épaisseur du mur au volume de terre qu'il a à soutenir, de le renforcer par des arcs-boutants et des contreforts dont la largeur soit égale à celle des fondements, et qui soient distants les uns des autres de toute la grandeur qu'on aura donnée à l'épaisseur des fondements. Il ajoute que la partieinférieure de ces contreforts devra avoir autant de longueur que les fonda- hions auront de hauteur; puis qu'ils se rétréciront graduelle- ment de manière que la partie supérieure de leur saillie ne — 105 — soit pas plus grande que le mur n'est épais. Mais il manque bien des choses à ces indications pour être complètes. Il faudrait donner le moyen de calculer l'épaisseur du mur en fonction de plusieurs éléments essentiels : le poids de l’unité de volume de maçonnerie, celui de l'unité de volume du terrain à soutenir, etl’angle formé par le talus naturel des terres: voilà les relations qu'il nous importerait tout d'abord de connaître. Après cela, dire qu'on vient d'enseigner la maniere defaire une construction sans défaut paraît un peu excessif, surtout quand on se dispense d'ajouter quoi que ce soit sur ce qui concerne la charpente, sous prétexte que lorsque ces pièces sont défectueuses il est facile de les changer !. Et ce ne sont pas les seules omissions à relever en ce qui concerne la construction proprementdite; iln’est question nulle part des divers systèmes d'assemblage, non plus que de la coupe des pierres. Ce qui est dit au chapitre 11 du livre VIT sur la construction des voûtes est à peu près insignifiant. Et c’est pourtant le procédé par excellence de l'architecture romaine. On a pensé que du temps de Vitruve « la construction voûtée n'avait point, à beaucoup près, reçu le développement qu’elle a pris dans la suite : aucune voûte de très grande ouverture, dit M. A. Choisy, et établie dansle système de maçonnerie brute qui fut plus tard si répandu, ne peut être attribuée à une époque antérieure à celle de Vitruve ; l’auteur du seul traité ancien qui nous reste sur la construction assista tout au plus vers la fin de sa vie à ces colossales entreprises qui nous rappellent les noms d'Auguste et d'Agrippa, et qui ont marqué dans l’architecture romaine l’avènement d'une ère nouvelle : lui-même n’eut point de part au magnifique essor qui produisit les thermes d’Agrippa et le Panthéon de Rome; et son livre, œuvre de sa vieillesse, nous offre moins un tableau des innovations de l’époque contem- poraine qu’un souvenir des procédés en usage aux derniers I. « Quemadmodum sine vitiis opera constitui oporteat et uti caveatur incipienti- bus exposui. Namque de tegulis aut tignis aut asseribus mutandis non est eadem cura quemadmodum de his, quod ea, quamvis sint vitiosa, faciliter mutantur. » (V1, 8, 154.) Au livre IV, 7, on ne trouve qu’une brève énumération des diverses pièces d’une toiture. EE AUS temps de la République, une sorte de retour vers des méthodes qu'il avait appliquées pendant le cours de sa longue carrière » {, Le silence gardé sur les voûtes est ainsi en partie expliqué, quoique l'époque où a vécu Vitruve fasse encore l’objet de bien des discussions *. Mais les autres omissions ne s’en trouvent pas justifiées. On pourrait peut-être invoquer la raison que Vitruve donne lui-même *, à savoir qu'il écrit non pas un ouvrage pure- ment technique destiné à n'être lu que par les apprentis archi- tectes, mais un livre à l'usage de tout le monde, qui puisse se lire sans fatigue dans les moments de loisir que laissent les affaires. Il s'excuse d'employer trop de termes de métier (inconsuetus sermo) et proteste de son intention de faire court, pour se mettre à la portée du lecteur (ad sensus legentium). S'il eût moins écouté ces scrupules d'écrivain, sa réputation de savant y aurait sans doute beaucoup gagné aux yeux dela postérité, et nous aurions entre les mains un document bien plus solide, bien plus complet, pour juger de la science et de l’art de l'ingénieur ancien. Il suffit de considérer la série des constructions voûtées, en maçonnerie, soit concrète, soit d’appareil (voûtes en berceau, voûtes d’arête, voûtes sphériques ou conoïdes, voûtes biaises, berceaux en descente), que les architectes romains ont établies avec tant d'adresse et de sûreté, et qui comportent tant de variétés de liaisons, de coupes et de pénétrations, pour croire fermement à des préceptes suivis, directement déduits de raison- nements mathématiques. On ne peut guère douter que les principes de la stéréotomie n'aient formé un corps de doctrine scientifiquement établi, à l'époque de ces grandes constructions, sous les premiers empereurs. On est malheureusement fort peu renseigné sur ce que pouvait 1. À. Choisy, L'art de bâtir chez les Romains, Introduction, p. 4. 2. Cf. Recherches sur Vitruve et son œuvre, par V. Mortet. Revue archéologique, 1902 et 1904. 3. Liv. V, Introduction. 4 V. ci-dessus, p.34, 35 et 36, où il est question de l’étude des sections coniques. par Platon, Euclide et Apollonios. Ces théories furent, à n’en pas douter, utilisées par les ingénieurs pour la construction de toutes leurs voûtes à intersections. ao pr — 107 — être alors l'art du dessin géométrique, indispensable cependant pour dresser les épures de stéréotomie. D'après M. P. Tannery!, il serait douteux que les architectes de l'antiquité eussent pratiqué l'épure, parce que, dit-il, « leur architecture était conçue suivant des nombres (proportions, rapports aux modules) et non suivant des formes, comme, au contraire, celle du moyen âge. » II me semble qu'il faudrait distinguer entre les ordres d'architecture grecque, dorique, ionique, corinthien, où il sufi- sait, en effet, d'appliquer une échelle modulaire, et la construc- tion voûtée des Romains, qu'on ne peut guère imaginer sans le secours de représentations géométriques, et d’où, au surplus, est dérivée l'architecture du moyen âge. M. P. Tannery tient lui-même pour évident que dans d'autres cas particuliers, comme pour l'établissement des cadrans solaires, il fallait dresser des épures; que « les charpentes paraissent avoir également été de bonne heure assez compliquées pour demander un tracé d’épure ». Je crois donc volontiers, non seulemenë aux plans généraux d'architectes (formae, exemplaria picta?), dessins d'ensemble qu'il leur fallait soumettre à celui qui leur avait commandé le travail, avant de passer à la construction#, mais encore à des plans de détail, à des épures d'exécution, remis soit aux chefs de chantier, soit aux tailleurs de pierres et maçons. On n'ignorait pas les lois de la perspective géométrique. Vitruve rappelle * que Démocrite et Anaxagore ont enseigné « comment on peut d'un point fixe, donné pour centre, imiter la disposition naturelle des lignes qui sortent des yeux en s’élargis- sant, de manière à faire illusion, et à représenter sur la scène de véritables édifices qui, peints sur une surface droite et unie, paraissent, les uns rapprochés, les autres éloignés ». C'était la scenographia, ce que nous appelons perspective ordinaire, avec point de vue, point de fuite, point de distance. Mais il y avait 1. P. Tannery, article Geometria, du Dict. de Daremberg et Saglio. 2. Vitruve, :, 1. 3. Suétone, J. César, xYI, 31. 4 4, VII, Introduction. — 108 — aussi l'orthographia, élévation ou projection sur un plan vertical !. Le procédé le plus usité était probablement celui de la projection oblique ou perspective cavalière?, que nous utilisons encore pour la charpente et la stéréotomie, et qui montre les objets comme s'ils étaient vus de haut, pour ainsi dire à vol d'oiseau. Tels sont les dessins représentés sur plusieurs planches de l'édition Lachmann des Gromatici veleres : ce sont ceux des manuscrits du moyen âge ; on peut croire qu'ils reproduisaient les figures originales. Il est regrettable que les dessins qui accompagnaient l'ouvrage de Vitruve, qu'il avait exécutés lui-même, et auxquels il renvoie souvent en faisant ses descriptions, aient été perdus : 1l y aurait eu là une bien intéressante variété de plans et figures d'architecte. En tous cas, la disparition de ceux-ci, que tout engageait à conserver, fait qu'on ne s'étonne guère de la perte de tous les autres qui, n'ayant qu’un intérêt passager, devaient, même à leur époque, être prompts à disparaitre. On en exécutait quelques-uns en relief sur le bronze ou le marbre, surtout ceux qui devaient se conserver comme documentsadministratifs officiels (plans de villes, réseaux d’aquedues, etc.)°. Encore en a-t-on retrouvé bien peu, et à l’état de fragmerts. Quant aux plans graphiques, ils étaient tracés au tire-ligne et au compas sur papyrus où parchemin #. La fig. 27 représente un petit instru- ment romain de dessin linéaire?, qui, à part la vis de serrage, dont tient lieu un anneau coulant, et la forme des becs, est tout à fait semblable aux tire-lignes que nous employons. C'est là un indice matériel, assez curieux, de l'analogie entre les procédés graphiques des anciens et les nôtres. JRAVitr- er, 1e 2. Ce serait ce que Vitruve entend par ichnographia. (Ibid.) 3. Jordan (Forma Urbis Romae regionum, XII): — Plutarque (An vitiosilas, 3). CT y 201 4, Aulu-Gelle, xix, 10. 5. Reproduit d'après une figure de l'ouvrage de M. Curt. Merkel (Die Ingenseur- lechnik im Altertlhruin), p. 605. | CHAPITRE V FORMATION ET CONDITION DES INGÉNIEURS I. — Instruction théorique et culture générale. La formation scientifique et technique de l'architecte fait l’objet du premier chapitre, malheureusement trop court, du livre premier de Vitruve. L'auteur commence par distinguer la théorie (ratiocinatio), et la pratique (fabrica), et par affirmer très justement qu’il faut être en possession de l’une et de l’autre, pour avoir en même temps l'autorité nécessaire et la puissance de réalisation. Tout en prenant soin de déclarer que l'ambition de l'architecte ne doit pas être de devenir un pur mathéma- ticien !, c'est néanmoins sur l’importance de l'instruction théori- que qu'il insiste le plus. De même que Cicéron exigeait de l'orateur digne de ce nom *?, non seulement l’habileté profession- nelle de la parole, mais, avec l'élévation du caractère, une vaste et solide érudition, de même Vitruven’accordele titre d'architecte qu à l’homme pourvu d’une éducation libérale et d'un savoir étendu. Non content de distinguer expressément l'architecte du simple conducteur de travaux, chef de chantier (officinator) ?, il voudrait que la profession fût interdite aux individualités sans mandat garanti, sans instruction éprouvée, auxquelles la présomption tient lieu de science, et l'intrigue de talent #. 1. « Quibus vero natura tantum tribuit sollertiae, acuminis, memoriae, ut possint geometriam, astrologiam, musicen, ceterasque displinas penitus habere notas, praetereunt officia architectorum, et efficiuntur mathematici. » 2. De Oratore, 1. SAINT, 9: 4. X, Introd. « Namque non sine poena grassarentur imperiti, sed qui summa doctrinarum subtilitate essent prudentes, sine dubitatione profiterentur architec- turam. » 9 — 110 — La dénomination d’ésyttéxrey ou d'architectus ne désignait pas uniquement chez les anciens le constructeur d'édifices : elle équivalait à notre appellation moderne d'ingénieur !. C'est-à- dire que le constructeur d’édifices devait connaître tout ce qui se rattachait à ce que nous appelons l’art de l'ingénieur, et pouvoir diriger n'importe quelle fabrication technique, d'engins industriels ou de machines de guerre. C’est ainsi que Vitruve lui-même, qui était bien un architectus, avait été chargé, avec trois collègues, de la construction des balistes, scorpions, catapultes, etc., en somme avait dirigé les arsenaux de l'Etat ?. La formation de l'architecte, tel que l'entend Vitruve, c’est donc la formation de l'ingénieur. Il énumère les connaissances nécessaires à cette formation, et indique les raisons de leur nécessité. En fait de sciences proprementdites,ilnomme la géométrie, l'arithmétique, l'optique, l'astronomie, l'histoire, la philosophie, le droit et la médecine; en fait d'arts, le dessin et la musique. N'oublions pas l'étude des lettres, que Vitruve place en première ligne, estimant à juste titre qu’un ingénieur doit pouvoir rendre compte de ses travaux avec clarté et précision *. On voit assez qu'entre ces diverses connaissances il y a, au 1. Ce n’est pas que les ingénieurs fussent toujours appelés architectes. On les distinguait souvent par leur spécialité. Le geometra, l'aquilex (hydraulicien), le librator (niveleur), le machinator où mechanicus. machinarius (constructeur de machines), étaient des ingénieurs. En principe, l’architectus était plutôt le constructeur d’édifices ou le chef d'entreprise. Il faut faire la différence quand on oppose les termes les uns aux äutres dans une énumération. Mais bien souvent chacune de ces dénominations, et celle d’architectus, Se prennent l’une pour l’autre. Architectus est donc bien, en somme, le terme générique pour désigner un ingénieur. Quant à mensor c'est un terme d'acception fort étendue. Sans parler des vérifi- cateurs des poids et mesures et de l'annone, les mensores élaient en général des arpenteurs. (C.I.L. I1I. 1220. 2124. 2128. — VI. 13. 198. 905. 3988. 4244. 6321.S912. 9619. 9624.) Mais ce pouvaient être aussi des architectes (III. 2129.— VI. 1975. 9622. 9625. — XIV. 3032. 3713). On croit que les mensores aedificiorum avaient des fonctions spéciales, distinctes de celles des architectes proprement dits, mais on ne saurait préciser lesquelles. Dans l’armée, les mensores et metatores étaient chargés de déterminer l’empla- cement du camp, d’en tracer les lignes et de présider à leur aménagement. 2. Liv. I. Introduction. 3. Les Grecs appréciaient fort cette qualité chez leurs architectes. « Athènes, dit Valère-Maxime (vu, 12), est fière de son arsenal, et avec raison... Philon qui en fut l'architecte, rendit compte de ce travail en plein théâtre, et en de si beaux termes, que le peuple le plus éclairé de l’univers n’applaudit pas moins à son éloquence qu’à son talent dans l'architecture. » — 111 — , point de vue de l'utilité professionnelle directe, de grandes différences. Bien que Vitruve semble s’évertuer à les mettre toutes presque sur le même pied, personne ne pense qu’un architecte romain eût autant d'intérêt à apprendre la médecine ou la musique qu’à étudier l’arithmétique ou la géométrie. Mais les présenter ainsi de pair était une manière d'insister sur l'importance d’une culture générale ! pour le futur ingénieur. Lui-même, sous la surveillance de sa famille, avait reçu une instruction complète. Il se félicite ? de ce que ses parents l’aient confié de bonne heure à des maîtres sous la direction desquels il s'est adonné à toutes les sciences, en vue de sa profession. Il avait ensuite affermi et étendu son savoir par la lecture de nombreux ouvrages techniques *. Alors était venue la formation pratique, l'apprentissage sur les chantiers. Nous pouvons donc être persuadés que Vitruve — et il devait en être de même de l'élite des ingénieurs de son temps — connaissait rationnelle- ment une bonne part de ces sciences mathématiques dont la matière et l'étendue ont été sommairement décrites aux chapitres précédents. Il pouvaitexpliqueret justifier, d'après des principes scientifiques, les œuvres qu'il exécutait, « res fabricatas sollertia ac ratione demonstrare atque explicare # ». Il. — Architectes grecs et architectes romains. Diversité des conditions sociales. Maîtres et écoles. En Grèce, des écoles anciennement fondées dans différentes cités par des architectes célèbres” avaient perpétué les bonnes disciplines à travers des générations d'ingénieurs, à la fois 1. Il est intéressant de constater que la liste de Vitruve contient, avec quelques éléments de plus, toute la série de connaissances dont on instruisait. d’après Quintilien (Instit. or. 1:4, 8, 10, 11, 12, 14), les enfants des classes élevées qui se destinaient aux carrières libérales, avant leur passage sous la direction du rhéteur. Ces connaissances étaient : la grammaire et les lettres, l'histoire, la philosophie, l'astronomie, la géométrie, l’arithmétique et la musique. . VI, Introduction. . Ibid. . I, Introduction. . V, Beulé, l'Art grec uvant Périclés. O1 R CO ww — 112 — savants techniciens et artistes consommés. À Rome, des traditions existaient depuis longtemps aussi, sans qu'il y eût précisément d'école ouverte. La profession d'ingénieur ou d'architecte se transmettait jadis de père en fils dans des groupes de familles, et il semble bien que Vitruve ait été le rejeton d’une de ces vieilles souches!. Les pères instruisaient eux-mêmes leurs enfants et leurs proches?. C'était à ces ingénieurs que l'Etat confiait l'exécution de ses travaux publics, soit directement, à titre d'entrepreneurs adjudicataires, soitindirectement, parl'entremise de redemptores, isolés ou groupés en sociétés. C'était aussi parmi leurs élèves que se recrutaient les chefs de travaux de l’armée, soumis, comme les ouvriers leurs subordonnés, à la juridiction du praefectus fabrum *, et répartis dans les'légions ou affectés aux arsenaux. Si consciencieuse que fût, chez ces anciens professionnels romains, la manière de pratiquer et d'enseigner leur art, la concurrence des architectes grecs, venus nombreux à Rome après la conquête de leur pays, produisit d’heureux résultats. L'émulation, le contact et les lecons mêmes de ceux-ci, l'ensei- gnement des mathématiciens et des philosophes, développèrent forcément les connaissances théoriques de l'école romaine. 1. Le surnom de Vitruve était Pollio. Il y eut aussi Vitruvius Rufus, auteur d’un traité d'arpentage, et plusieurs autres, tels qu'un certain Vifruvius Cerdo,C.I.L.,V,3464, qu'on a confondus avec notre auteur, mais à tort, croit-on. (V. Mortet, Recherches critiques sur Vitruve et son œuvre.) 2, Vitruve, VI, Introduction. 3. Le rôle du praefectus fabrum, qui se modifia dans la suite, est très imparfai- tement connu, malgré les recherches dont il a été l’objet. (Cf. Borghesi, Œuv., v; Mommsen, Hermès, 1; Maué, der Praefectus fabrum.) Il paraît prouvé que sous l'empire, ce préfet n’avait pas de fonctions militaires et que les ouvriers d'armée dépen- daient non pas de lui — en dépit de l’assertion de Végèce, 11,9 — mais du praefectus castrorum, officier supérieur de la légion qui, à partir de Gallien, sous le nom de praefectus legionis, fut appelé à la commander, en remplacement du légat, supprimé. Le praefectus fabrum exerçait auprés du gouverneur de la province des fonctions non définies, peut-être d'ingénieur en chef pour l’ensemble des travaux qui s’y exécutaient. Mais. en tous cas, il n’aurait pas eu à ce titre une autorité sur les ouvriers militaires plus que sur les autres. 1. Celles des Grecs étaient en effet beaucoup plus avancées. Quantité de traités avaient été publiés en Grèce sur la construction ou des édifices ou des machines, Vitruve, qui s'était beaucoup instruit à leur lecture, regrettait, après avoir énuméré la longue liste de leurs auteurs, de ne trouver que deux écrivains latins ayant abordé ces matières, Terentius Varron et P. Septimius, auteurs d’ailleurs récents, et ayant subi eux aussi l'influence grecque. De même, tout en déclarant que Rome avait jadis produit de grands architectes, il ne pouvait citer qu’un seul nom, Cossutius. (VII, Introd.) = 419 L'inconvénient fut, il est vrai, que la profession en devint beau- coup plus mélangée ; une partie de ces maîtres grecs étaient esclaves ; les riches Romains faisaient instruire par eux leurs serviteurs, qui, à leur tour, pouvaient exercer le même artf. De plus, à la faveur de la confusion créée ainsi, beaucoup de gens se faisaient passer pour architectes qui n'avaient ni culture scientifique, ni formation pratique, et Vitruve le déplore amère- ment?. Mais ces intrus ne pouvaient faire illusion qu'à des particuliers peu clairvoyants. L'Etat ne s'y laissait pas tromper, et ne confiait qu'à des hommes éprouvés la direction de ses travaux : le contrôle de ceux-ci était d'ailleurs sévère. On sait le grand essor donné à ces entreprises publiques à partir du règne d'Auguste, et la part importante qu y prit son ministre Agrippa. Ce dernier, fort instruit dans les sciences, fut un exemple pour les hauts fonctionnaires impériaux ses successeurs. On vit des 1. Certaines inscriptions nous font concevoir à quel degré de science pouvaient parvenir ces esclaves ainsi instruits. Voici entre autres un verna, esclave né dans la maison de ses maitres, et devenu professeur de calcul, auteur d'un savant traité sur l’art qu'il enseignait; ce qui, d’autre part, prouve bien que les lecons d’arithmétique données aux jeunes Romains, et à plus forte raison à ceux d’entre eux qui se desti- paient à la profession d'ingénieur, ne se bornaient pas à des notions élémentaires. CET XIV, 72 D M MELIORIS + CALCULATORIS VIXIT -+ ANN : XIII - HIC + TANTAE - MEMORIAE : ET : SCIENTIAE FUIT : UT : AB - ANTIQUORUM : MEMORIA .: USQUE : IN : DIEM FINIS + SUAE + OMNIUM +: TITULOS + SUPERAVERIT SINGULA : AUTEM : QUAE : SCIEBAT : VOLUMINE : POTIUS QUAM :- TITULO : SCRIBI : POTUERUNT : NAM COMMENTARIOS : ARTIS . SUAE : QUOS . RELIGIT (sic) PRIMUS : FECIT - ET + SOLUS : POSSET : IMITARI : SI - EUM INIQA (sic) . FATA : REBUS + HUMANIS + NON : INVIDISSENT SEX + AVEVSTIVS : AGREVS - VERNAE SVO : PRAEGEPTOR (i) : INFELICISSIMUS FECIT EXCESSIT -+ ANNO : URBIS : CONDITAE DCCGXCGVII 2. D'autant plus que ces ignorants arrivaient parfois à des situations lucratives. « Animadverto ab indoctis et imperitis tantae disciplinae magnitudinem tractari, et ab his, qui non modo architecturae sed omnino ne fabricae quidem notitiam habent. » « Plerique.. audacia adhibita cum divitiis etiam notitiam sunt consecuti. » (Liv. VI, Introd.) De là aussi les divers avis exprimés sur l'architecture et les architectes. Cicéron classait cette profession parmi les arts honorables, à côté de la médecine (De Officiis, 1, 42), tandis que Martial (1, 5. 56) l’assimilait à celle de crieur public. Il est vrai que ce n'est là qu’une épigramme, — 114 — citoyens de rang élevé se préparer par des études spéciales aux charges de curateurs dont ils pouvaient être revêtus. Dans ces conditions, le niveau de la science des ingénieurs ne pouvait que s'élever. On ne peut dire d’après quelle règle générale l'instruction théorique s'acquérait : il n'y en avait pas, à cause de la diversité d'origine des apprentis. Mais, avant qu'il y eût des écoles spéciales fondées par les empereurs pour ceux qui devaient entrer au service de l'Etat, des groupes se formaient sans doute librement autour des maîtres qui ne manquaient pas, pour chaque ordre de science. Il était ensuite facile d'entrer comme aide au service d'un architecte privé, jusqu'à ce que l’on pût exercer la profession à son compte. Te Ingénieurs militaires et civils. C'était aussi dans l’armée qu’on pouvait, une fois l'instruction générale acquise, apprendre et pratiquer le métier d'ingénieur. Indépendamment des travaux de campagne et de siège, les troupes étaient fréquemment employées à de grands travaux d'utilité publique !. Sous l'empire, les ouvriers et ingénieurs mili- taires, non seulement accompagnaient l’armée, mais en faisaient partie intégrante, les ouvriers comme simples légionnaires, les ingénieurs avec des situations à part qu'il est difficile de bien définir. Chargés d'étudier et de faire exécuter, souvent par un immense personnel, des ouvrages techniques de la plus haute importance, ils étaient certainement pourvus à la fois d’une autorité effective, et d'avantages matériels considérables. Et cependant la plupart des architecti militaires que nous font connaître les inscriptions sont désignés par la qualité de milites ; 1. Le C.I.L., VII, donne, pour la seule province de Bretagne, la mention de 128 travaux exécutés par les légions. Voir aussi au C.I. L., VIII, les nombreuses inscriptions rappelant les travaux exécutés par la IT° légion Awgusta, seulement pour le camp et la ville de Lambèse. (Cf. Cagnat, L'Armée romaine d'Afrique, p. 43i et suiv.) On pourra trouver encore quelques renseignements sur ces travaux des armées romaines dans notre ouvrage : Les aqueducs romains de Lyon, p. 368, — 115 — plusieurs sont veterani ou evocati Augusli!, un seul est sous- officier ?. Cette sorte d'anomalie peut s’expliquer ainsi : en tant que combattants, leur grade ne les distingue pas de la troupe; en tant que chefs de travaux, leur emploi les met fort au-dessus. Il y avait d’ailleurs, assurément, des degrés dans la hiérarchie de ces emplois techniques, soit d’après le talent et l'instruction, soit d'après les spécialités; un arpenteur ou un niveleur (metator ou mensor, libralor) était probablement au-dessous de l'archi- tectus proprement dit. Mais nous ne pouvons là-dessus rien dire d’assuré. Les architectes civils figurent en assez grand nombre * dans les 1. Cette appellation désignait, comme on sait, les vétérans qui reprenaient du service après leur libération. Sous l'empire, ils formèrent à Rome un corps d'élite, dépendant du préfet du prétoire; un certain nombre d’entre eux étaient détachés, dans les provinces, avec des missions spéciales, auprès des différents légats légion- naires. 2. Ce sous-officier est T. Flavius Rufus (C. I. L., XI, 20), soldat à la XIT° cohorte urbaine, puis corniculaire Au préfet de l’annone, bénéficiaire du préfet du prétoire, trésorier de la garde prétorienne et architecte dans le même corps. La garde prétorienne nous donne encore (C. I. L., X, 1757), Cissonius Apulis. « C. Cissonio, À. f. Hor. Apuli veterano coh (ortis secundae) pr (aetoriae) architecto Augustorum, Patricia Trophime, etc... » Un autre appartient aux equites singulares : T. Aelius Martialis; il n’est désigné que par sa qualité d’'architectus equituin singularium Augusli. (C. I. L., VI, 3182.) Dans les légions, nous trouvons M. Cornelius Festus (C. I. L., VIII, 2850) et (C. I. L., VI, 2725) C. Vedennius Moderatus. C. VEDENNIVS C.F. QUI (rin@) MODERATVS ANTIO, MILIT (@vit) IN LEG (ione) XVI GALL (ica) A (nnis) x TRAN(S)LATVS IN COH (ortem) IX PR (æ£oriant) IN QUA MILIT (GUit) ANN (is) VIII. MISSUS HONESTA MISSION (e) REVOC (alus) AB 1MP (eralore) FAGT (us) EVOC (alus) AUG (usti) ARCHITECT (4S) ARMAMENT (arius) 1MP (eratoris) EVOC (atus) ANN (is) XXII DONIS MILITARIB (US) DONAT (us) BIS AB DIVO VESP (asiano) ET iMP (eralore) DOMITIANO (Aug.). C. 1. L., XII, 723 et X. 5371. est mentionné un ingénieur de la flotte, Cælius, architectus navalis; de même, X, 2372, C. Vettius, ingénieur de la flotte de Misène. Assez nombreuses sont les inscriptions relatives aux mensores. Les armées de Lambèse, à elles seules, en ont fourni une demi-douzaine (C. I. L., VIII, 2564, 2856, 2857, 2935, 2946, 3028). C'est là aussi que l’on à retrouvé (VIII, 2728), le nom et l’histoire fort intéressante du librator Lollius, constructeur de l’aqueduc de Saldae (Bougie). V. notre ouvrage Les aqueducs romains de Lyon, p. 292. 3. Dans le Corpus Inscriptionum latinarum, on peut relever, parmi les ingénieurs civils, ceux qui figurent aux numéros suivants : Ingenui. — II, 2259. — III, 6588. — V, 3464. — VI, 9153. — X, 1443. — X, 6126. — X, 8093. — XII, 186. Liberti. — V, 1886. — V, 2095. — VI, 8724-8725. — VI, 9151-9152-9154. — IX, 1052. — X, 841. — X, 1614. — XT, 3945. — Dans ce nombre, quatre seulement sont liberti Auguslorum : VI, 5738-8724-8725-9151. Servi. — VI, 8726. — VII, 1082. — IX, 2886. — X, 8146. — X, 4587, — XII, 2993, — Le premier seul est esclave impérial, inscriptions, et se répartissent entre les trois conditions sociales, hommes libres, affranchis et esclaves. Ces derniers, et même les affranchis, sont en grande majorité des architectes privés. Cela s'explique assez bien d'après ce qui a été dit plus haut de l'instruction technique très développée que les riches particuliers, par un calcul intéressé, faisaient donner à leurs esclaves. Mais les empereurs eux-mêmes n'ont pas négligé ce moyen; dans leurs familles d'esclaves, ils instituèrent de bonne heure des écoles (paedagogia)!, qui leur fournirent un excellent personnel de chefs subalternes pour les divers services publics ?. Quant aux directeurs de grandes entreprises, souvent eux-mêmes entre- preneurs responsables (redemptores), ils étaient de condition libre, ou au moins affranchis. Faute de documents précis, il faut toutelois, sur de pareilles questions, se montrer fort réservé. Bien peu de monuments, à Rome ou dans les provinces romaines, portent le nom des architectes qui les firent élever. Les quelques lignes que Tacite (Ann., XV, 42) consacre à rappeler le nom, le génie et l'audace de deux ingénieurs de Néron, Severus et Celer, ne nous renseignent pas sur leur condition*. Tout ce que nous pouvons conclure du récit de l'historien, c’est qu'ils avaient, sans compter, puisé au trésor impérial pour construire la fameuse Maison d'or, tracer et planter les merveilleux jardins qui l’environnaient:; et qu'ils avaient fait agréer par Néron le projet d’un gigantesque travail, 1. Cf. C. I. L. — VI, 8965, 8966, 8967, 8971, 8989. 2. C'étaient probablement des affranchis issus des pacdagogia que ces deux architectes attachés à la Cura aquarum, et dont parle Frontin (de Ag. 119) en termes qui font comprendre que leur rôle se bornaïit à surveiller l'entretien habituel des aqueducs. 3. Le souverain s'en attribuait tout l'honneur. C'était bien conforme à l'usage des anciennes monarchies. Lucien raconte le plaisant stratagème de ce Socrate de Cnide. constructeur du phare d'Alexandrie, qui, obligé d'inscrire sur son ouvrage le seul nom de Ptolémée Philadelphe, grava son propre nom dans un espace en creux quil recouvrit de plâtre ; sur la surface ainsi aplanie. il traça celui du roi, Quelques années après, le plâtre s'étant détaché, le nom de l'architecte apparut, indélébile, (Lucien, Quoi. hist. conscrib.) 1. Tacite ne les désigne pas par leur qualité d'archilerti. «+ Magistris et machina- toribus Severo et Celere », dit-il. Mais ces deux mots de snagister et machinalor ne sont pas des titres; mis comme ici à l'ablatif absolu, ils indiquent seulement que les deux personnages ont dirigé et combine le travail. (Cf. Ruggiero, Disionario, article architectus, où se trouve exprimée une idée différente.) E ee MD qui ne put être achevé. Mais ces deux personnages étaient-ils attachés à la personne de l’empereur, comme esclaves ou affranchis, ou bien étaient-ils engagés par libre contrat ? La question ne peut guère être résolue !. IV. — Ingénieurs officiels des empereurs. Influence et faveur croissantes. Ce qu’il y a de certain, c’est que les empereurs cherchèrent de plus en plus à tenir ainsi des architectes constamment à leur disposition : véritables ingénieurs d'Etat, et fonctionnaires officiels. Les travaux à exécuter dans les provinces exigeaient des hommes de l’art qu'on ne trouvait pas souvent sur les lieux, sauf en Grèce, et les gouverneurs s’adressaient parfois au prince lui-même pour qu'il leur en envoyât*. L'empereur Hadrien pourvut à tout, en rassemblant autour de luicomme une phalange d'ingénieurs, qui l'accompagnèrent dans ses nombreux voyages, et furent l’un ici, l’autre là, préposés aux travaux qu'entre- prirent sous son impulsion quantité de villes de l'empire. Cet empereur, qui vivait dans la familiarité de ses architectes, était architecte lui-même”, et architecte des plus instruits : 1. Si des documents nouveaux doivent être recueillis sur les ingénieurs anciens, il semble que c'est de préférence l'Orient et l'Egypte qui sont appelés à les fournir. On peut attendre beaucoup des papyrus égyptiens. Tout dernièrement M. Bouché- Leclercq a extrait des papyrus de Gourob la matière d’une notice sur les travaux de desséchement et d'irrigation du Fayoûm, dirigés par l'ingénieur Cléon, sous Ptolémée IL Philadelphe. « Les papyrus provenant des bureaux de l’ingénieur Cléon, donnent une foule de détails sur l'emploi et le prix des matériaux, terrassements, manœuvres de vannes; sur les canaux, l'entretien des ponts et des routes, les salaires des ouvriers, l’observance du repos décadaire, attestée par les comptes mensuels qui déduisent les décades de la somme des journées de travail et aussi de la somme des salaires. » Il y à même des allusions à des grèves ouvrières, à des violences exercées par le personnel sur certains chefs. Après avoir présidé pendant 6 ou 7 ans à la direction des travaux, ce Cléon fut disgracié par le roi, et remplacé par un autre ingénieur nommé Théodore, qui avait été son subordonné et son auxiliaire. (Comptes rendus de l'Ac.des Inscr.et Belles-Lettres, janvier 1908, p. 23.) 2. Pline le Jeune, étant gouverneur de Bithynie, sollicitait de l’empereur Trajan, tantôt un architecte pour un théâtre et pour des bains (Lettres, X, 48), tantôt un ingénieur aussi, un niveleur (libralorem, vel architectum) pour un projet de canal. (Zbid., L.) L'empereur lui répondait qu’il ne pouvait en manquer, étant près de la Grèce, à laquelle Rome même s’adressait pour en avoir. 3. Dion Cassius, LXIX, 4 et suiv. — 118 — arithmeticae, geometriae peritissimus, dit son biographet. Aussi discutait-il les plans qu’on lui soumettait, et parfois imposait les siens. L'on a dit que sa villa de Tibur avait été exécutée en partie d'après ses dessins ?. Ses successeurs continuèrent pour la plupart à s'occuper beaucoup de ce recrutement d'architectes. Alexandre Sévère, qui, selon son biographe, Lampride, s’occupait non seulement l'astrologie (mathesis), mais de toutes sortes d'arts et de sciences, en particulier de géométrie (geometriam fecit)?, prit des mesures pour étendre le plus possible l’enseignement dans toutes les branches, particulièrement dans l'art de l'ingénieur, et de façon à ce que cet enseignement fût accessible même aux citoyens pauvres; à cet effet, il institua un traitement de l'Etat pour les professeurs. La même mesure fut renouvelée par Constantin ; en outre, ce prince engagea, par l'espoir des récompenses et des privilèges, les jeunes gens qui avaient reçu une éducation distinguée à se livrer à l'étude et à la pratique de l'architecture ?. Un peu plus tard, nous trouvons un architecte élevé aux plus hauts honneurs, Alypius d'Antioche, confident de l'empereur Julien et intendant de province î. Puis c’est la grande école 1. Spartien, Vita Hadriani, 13. 2. Dion Cassius, loc. cit. 3. Aelius Lampridius, Vie d'Alexandre Sévère, 27. 4. Lampride, Vie d'Alexandre Sévére, 44. « Rhetoribus, grammaticis, medicis, haruspicibus, mathematicis, mechanicis, architectis salaria instituit et auditoria decrevit; et discipulos cum annonis pauperum filios, modo ingenuos, dari jussit. » On peut inférer, croyons-nous, de l'expression modo ingenuos (pourvu qu'ils fussent de condition libre), que dans l’intention des empereurs, le savoir de l'ingénieur devait être plus particulièrement réservé aux hommes libres. 5. Code Théod., XII, INT, 1. « Imp. Constantinus A. ad Felicem. — Architectis quam plurimis opus est; sed quia non sunt, sublimitas tua in provinciis africanis ad hoc studium eos impellat, qui £d annos ferme duodeviginti nati liberales litteras degustaverint. Quibus ut hoc gratum sit, tam ipsos quam eorum parentes ab his, quae personis injungi solent, volumus esse immunes, ipsisque qui docent salarium competens statui. » (334 ap. J.-C.) Ibid. : « Imp. Constantius et Constans a. a. ad Leontium praefectum praetorio. — Mechanicos et geometras et architectos qui divisiones partium omnium incisiones- que servant mensurisque et institutis operam fabricationi stringunt, et eos, qui aquarum inventos ductus et modos docili libratione ostendunt, in par studium docendi atque discendi nostro sermone perpellimus. Itaque immunitatibus gaudeant et suscipiant docendos qui docere sufficiunt. » (344.) 6. Julian. Epist, XXIX et XXX. — Il fut chargé de rebâtirle temple de Jérusalem. — 119 — d'architecture qui, sous Justinien, donne les Anthémius de Tralles, et les Isidore de Milet, les célèbres auteurs de Sainte-Sophie de Constantinople. Cette école est honorée et soutenue comme elle le mérite : elle produit de belles et fortes œuvres !. À Rome, où l’empire avait succombé, la faveur accordée aux architectes avait survécu, mais leur art et leur science fléchissaient. Cassiodore, ministre de Théodoric, écrivait au nom de son maitre à l'architecte Aloysius, à Ravenne, à l’occasion de certaines réparations de thermes et d’autres édifices à Rome : « Vous marchez immédiatement devant notre personne, au milieu d'un nombreux cortège, ayant la verge d’or à la main, prérogative qui, en vous rapprochant si près de nous, annonce que c’est à vous que nous avons confié l'exécution de notre palais. » Cette fois la juste mesure des honneurs était dépassée. Et ce fut dès lors la décadence. En définitive, si les documents nous font défaut pour établir de façon précise et assurée comment se recrutaient et se formaient les ingénieurs sous l'empire romain, et pour distinguer nette- ment leurs catégories diverses et la hiérarchie de leurs emplois, nous possédons du moins deux données certaines. La première procède de l'examen des travaux effectués par ces ingénieurs : il révèle un art méthodique qu’une simple pratique de métier aurait été insuffisante à soutenir. Et c’est de là que nous sommes partis. D'autre part, et c'était le but principal de cette étude, en parcourant, à travers l'étendue des connaissances scientifiques de l’époque romaine celles qui pouvaient préparer et conduire aux applications pratiques, nous avons apprécié les ressources qu'elles étaient susceptibles de fournir à l’ingénieur chargé des travaux publics. L'œuvre de celui-ci s'explique sans difficulté, 1]. Procope, De aedificiis I. 1. — Ammien Marcellin, XXII. 1, 2, 3. — 120 — si on le suppose muni de ces connaissances, et ne s'explique œuère sans elles. Nous tenons donc fortement les deux bouts de la chaîne. Quant aux anneaux intermédiaires, c'est-à-dire aux moyens par lesquels se propageait l'instruction, nous imaginons plutôt, il est vrai, leur combinaison idéale que nous ne connais- sons leur système réel. Mais nous savons cependant que les diverses sciences, théoriques et pratiques, s’enseignaient à Rome régulièrement sous l'empire, et que les futurs ingénieurs étaient mis à même de les acquérir. La tradition des écoles grecques, importée dans la capitale du monde, y avait fait naître le zèle fécond de l’enseignement privé et public; puis était venue la fondation d'écoles officielles, entretenues ou encouragées par le pouvoir impérial. Une élite d'ingénieurs pouvait de la sorte se former et se perpétuer. Tout cela sans doute est déjà connu, et à la vérité c’est peu de chose. Mais en jetant un regard attentif sur de semblables notions qu'on à pris soin de grouper pour former un tout, on en aperçoit plus distinctement les lacunes. On ressent et l'on inspire le désir de combler ces vides. Et la science finit par être accessible à ceux qui la cherchent ainsi de bonne foi. TABLE DES MATIÈRES PAGES, ENINN PROPOSE NME RAIN TN IT NAN li LUNA I-XJII INDECBIBHIOGRAPHIQUE.. LULU TeNCE HART DIUNINOE XV-X VIII L'ECRAN RER RE PR A RE ue l CHAPITRE PREMIER Arithmétique. I. — La Science des nombres chez les Grecs. Son étendue et ses ÉRIC done AC ACER APR ORAN ROSE 5] II. — Systèmes grecs et latins de numération..................... 8 III, — Mode de calcul usuel par les cailloux et l’abaque......... .. 14 MR Divers types d'apaques. see: teens tee. docs 24 Calcul par les doiots.::....:..115.....40: he eme 29 CHAPITRE II Géométrie. GE OMEtTIeMhÉOPIQUE metres dense sen deco eee 33 II. — Géométrie appliquée. Son étendue d’après les écrits de ÉRÉLOMAEA IR ANOTIE RE Mn re co e ML en or 38 CHAPITRE III Arpentage et nivellement. I. — Instruments d'arpentage. La groma............ CHENE RL CRE Lo IT. — La dioptre de Héron d'Alexandrie. Description.............. 5) IT. — Problèmes d'arpenteurs et d'ingénieurs résolus parla dioptre 62 M Le chormpate deWVITEUVE. Nestes. RE 14 ==.199 sa. CHAPITRE IV Mécanique et hydraulique. I. — Principes généraux de mécanique ............. Re II. — Machines de soulèvement et de traction....., ......, .... 82 IT. — Machines à moteurs animés, pour élever l'eau............. 89 IV. — Principes de physique. Equilibre et mouvement de l'air et de Teaus. 212.2. TN die 20 1° ORPES 92 V. —Pompes et machines hydrauliques .... ...:........... 4 98 VI:-—"Hydraulique des conduites d'eau... .,2,,.. 1.271008 100 VII. — Hydrologie ...... se en ne 08 Re Te LE e UE OUT OI RSS 102 VIIT. — Mécanique de la construction. Perspective et dessin...... 104 CHAPITRE V Formation et condition des ingénieurs. I. — Instruction théorique et culture générale.......... ........ 109 IT. — Architectes grecs et architectes romains. Diversité des conditions sociales. Maîtres et écoles....... see SRE RE 111 I::— Ingénieurs militaires et.civils.2.0..:.0.. 2 RS 114 IV. — Ingénieurs officiels des empereurs. Influence et faveur CTOÏSSANTES Sec. 2e erluse dcr CRE s2 8850 117 arte ERRATA , à droite, lignes l et 2; au lieu de C 1/4 d’obole, 9 1/2 obole, lire e) 1/4 d'obole, : obole. û 6, note 6, au lieu de euroouous, lire Eurencuns. ERNEST LEROUX, ÉDITEUR 28, Rue Bonaparte (VI) BLANCHET (A.). Les enceintes romaines de la Gaule. Etude sur l’origine d’un grand nombre de villes françaises. In-8°, figures CE PIANCHES RE LR Gare. CAGNAT (R.), de l'Institut. L'armée romaine d'Afrique et l’oc- cupation militaire de l'Afrique sous les empereurs. In-4, figures, planches-et cartes : 2512551 %r NE EN CRETE CERN : CHAPOT (Victor). La flotte de Misène, son histoire, son recru- tement, son régime administratif, In-80..:... GAUCKLER (Paul). Enquète sur les installations hydrauliques romaines en Tunisie. Tome I, en 4 fascicules in-8, figures........ s vie see cie sat ois GERMAIN DE MONTAUZAN (C.). Les aqueducs antiques de Lyon. Etude comparée d'archéologie romaine. 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Etude sur l’origine d’un grand nombre de villes françaises. In-8o, figures + PE DIRES, SUN NE ONE 2 Le dE Ag Per Set ES CAGNAT (R.), de l’Institut. L'armée romaine d'Afrique et ro. ë cupation militaire de RE sous les empereurs. In-4°, figures, planches et cartes . NES En n,ge ntoite Se et cioo ne Nes aie etes RUE £ CHAPOT (Victor). La flotte de Misène, son histoire, son recru- fe tement, son régime administratif, In-80,............,... : GAUCKLER (Paul). Enquête sur les installations hydrauliques _ romaines en Tunisie, Tome I, en 4 fascicules in-8, figures....... — Tome Il, fascicules 1, 2, 3. In-8, figures. Chacun Le: +0 "0 s°e.,0 1e . GERMAIN DE MONTAUZAN (C.). Les aqueducs antiques de at Lyon. Etude comparée d’archéologie romaine. In-8&, figures, MAN THER CR CAPLCS SDS UN A 3 UOTE RRRE ARENA LNANENAL 0e | LONGE (L.). Histoire intérieure de Rome jusqu'à la bataille Ad _ d'Actium, tirée des Ræœmische Alterthuemer, par A. Berthelot et - _ Didier, agrégés de l’Université. 2 vol, in-80. notons ssseusse LA NOÉ (G. de). Le rempart — limite des Romains en Allemagne. In-8o, avec une carte et 2 planches ..,...,.............,....... — Principes de la fortification antique depuis les temps préhis- toriques jusqu'aux Croisades, pour servirauclassement des enceintes dont le sol de la France a conservé la trace. I. Fortification préhis- torique et fortification gauloise. In-8°, planches. ................... Il. Fortification romaine. In-8°, planches... ....,..,.......,,..,... | _ WEILL (Raymond). L'art de la fortification dans la haute Ka antiquité égyptienne. In-8, figures..,....,.....,...,... SAINT-ÉTIENNE, SOCIÉTÉ DE L'IMPRIMERIE THÉOLIER — J, THOMAS & C! UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY Do not remove the card from this Pocket. — Acme Library Card Pocket Under Pat. “Ref. 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