Grave par Ph. Nimonneau Crav6n4 du Re ar Arr. Crypel ‘ACADEMIE PHOYALE DES SCIENCES. ANNEE M DCCXL. < Ave les Mémoires de Mathématique & de Phyfque, pour la même Année. Tirès des Regifies de cette Académie. M'A RIS, | LIMPRIMERIE ROYALE. ia M DCCXLIL POUR L'HISTOIRE. PHYSIQUE GENERALE. BSERVATIONS de Phiique générale. Page 1 ANATOMIE. | Sur les actions fimultanées. 35" Sur ls Monftres. , 37 Obférvations Anatomiques. ï St "CHIMIE. Sur une nouvelle efpece de Porcelaine. 56 Sur les Teéintures. 59 BOTANIQUE. 63 GEOMETRIE. 64 TABLE. hr As plu Ex Lis SSSR ASTRONOMIE. Sur les E‘chipfes des fecond &r troifiéme Satellites de Jupiter. 6 De la Méridienne de Paris prolongée vers le Nord, ce. 69 Sur les Excentricités des Planetes en général. 75 GNOMONIQU_E. 8; OP.T iQ U'E. De la Diffraéion ou Inflexion des Rayons. 84 Sur les Anaclafliques ou Réfradoires, nouvelle elpece de Courbes. 89 MECHANIQUE. Sur un Probleme de Statique, qui a rapport au Mouvement perpetuel. 103 Sur les Fufées volantes. 105 Machines ou Inventions approuvées par l'Académie EN 1740. 110 + ER a oe LES MEMOIRES. UarriÉéMeE PARTIE des Recherches Plhyfco- Mathématiques fur la Réflexion des Corps. Par M. DE MAIRAN Page 1 Secrion I. Des Anaclafliques, ou Réfraétoires , c’ef-a-dire, des Courbes apparentes qui réfultent d'un fond opaque vé à cravers un, milieu réfringent. Idée générale de ces Courbes , à examen particulier de celle du fend de l'eau. Z SecTion II. De la Courbe: apparente du fond de l'air, ou de la Réfraëloire dans un milieu moins réfringent que celui où eff l'œil, à dans lequel le rayon s’écarte de la perpendiculaire en fe rompant ; à confruétion générale des Réfraë&toires & fond quelconque. ML CT: 32 Dicression fur laCourbüre apparente du fond du Ciel. 47 Réflexions Anatomiques fur les incommodités , infirmites, ce. qui arrivent au Corps humain , à l'occafion de certaines attitudes à de certains habillements. Par M. Winszow. 59 Objfervations de la durée des E “chpfes du fecond & du troifiéme = Satellites de Jupiter, faites proche des limites en 1739 © 1740, avec des réflexions fur le mouvement du fecond Sa- tellite. Par M. MARALDI Réflexions fur les Obfervations du Barometre, faites fur les Montagnes du Puy-de-Dome, du Mont d'Or © du Canigou. Par M. Cassini DE THURY. 73 Moyen de préparer quelques Racines à la maniére des Orien- © jaux. Par M. GEOFFROY. 96 T ABLE. Sur la Trifetion de l'Angle. Par M. N1COLE. 100. Troifiéme Mémoire fur les Monfires à deux Têtes , dans lequel, à l'occafion de celui dont j'ai donné la defcription dans ‘le Tome de l'Académie de l'année 1724, j'examine de plus près que je ne l'ai fait jufqu'ict, la formation de ces Monfres par les caufes accidentelles. PREMIÉRE PARTIE. Par M. LÉMERY. 109 Mañiére fort fimple de fe fervir d'Horloges de moyen volume, au lieu de groffes Horloges , dans les cas où l'on efl obligé de les faire fonner fur des Timbres fort gros &r fort éloignés. Par M. GRANDIJEAN DE Foucur. 122 Théorie Chymique de la Téinture des Etofes. PREMIER MÉmoIRrE. Px M. HELLOT. 126 De la Spirale d'Archimede décrite par un mouvement pareil à celui qui donne la Cychide, © de quelques autres Courbes de mème genre. Par M. CLAIRAUT. 148 Second Mémoire Jur la Fiflule Lacrymale. Par M. PETIT. 1 55 Loi du Repos des Corps. Par M. DE MauPErTuISs. 170 Examen des Remedes de Me Stephens , pour la Pierre. Par M. MoRAND. 177 Probleme de Statique. Px M. Camus. 201 Seconde Partie du Troifiéme Mémoire fur les Monfres à deux Tétes, Par M. LÉMERY. 210 Second Mémoire fur l'Excentricité des Planetes. Par M. GRANDJEAN DE Foucury. 235 Sur la Vapeur qu'on appercoit dans le Récipient d'une Machine Pneumatique , lorfqu'on commence à raréfer l'Air qu'il contient. Par M. l'Abbé NoLLET. 243 Probleme Phyfico-Mathématique. Par M. CLAIRAUT. 254 Hifloire du LeuMA. Pax M. BERNARD DE Jussieu. 263 L EN B'L'E De la Méridienne de Paris, prolongée vers le Nord, à des Obfervations qui ont été faites pour décrire les frontiéres du Royaume, Pa M. Cassini DE T'HURY. 276 Sur L'Intégration ou la Confiruclion des Equations différentielles du premier ordre: Par M. CLAIRAUT. 293 Derniére Partie du Troiliéme Mémoire fur les Monffres à deux Têtes. Par M. LÉMERY. 324 Explication des Figures de la derniére Partie du Troifiéme Mémoire ur les Monftres à deux Tétes. 616 Obfervation de l'Eclipfe du Soleil, du 30 Décembre 1739. Par Mers Cassini & MaraLpDi. 355 Examen du Sel de Pécais. Pax M.'s LÉMERY, GEOFFROY & HELLOT. 361 Recherches fur les caufes de la flrulure finguliére qu'on rencontre quelquefois dans différentes partis du Corps humain. Pax M. HuNAULD. 371 Mémoire fur les Inffruments qui font propres aux Expériences de l'Air. PREMIÉRE PARTIE Par M. l'Abbé NoLLET. 385 Quatriéme Mémoire fur les Monffres. PREMIÉRE PARTIE. Par M. LÉMERY. 433 Expériences fur la force du Bois. Par M. DE BUFFON. 453 Défcriprion à Ufage d'un nouvel Inffrument pour obferver en Mer les hauteurs à les diffances des Affres. Par M. GRANDJEAN DE Foucuy. 4638 Diverfes Obfervations fur le Guy. Par M. pu Hart. 483 Suite de l'Effai d'une Theorie des Pompes. Par M. P1ToT. SII Seconde Partie du Quatrième Mémoire [ur les Monffres. Par M. LÉMERY. S17 TABLE Obfervations du Thermometre faites en 1 740 à Paris, & dans d'autres endroits , foit du Royaume, foit des Pays étrangers. Par M. DE REAUMUR. 539 Sar les! Infiruments qui font propres aux expériences de l'A, SECONDE PARTIE, Par M. l'Abbé NoLLerT. 567 Obfervations Anatomiques fur un Enfant né fans Téte, fans Col, fans Poitrine, fans Cœur, fans Poulmons, fans Eflomac, fans Foÿe, fans Ratte, fans Pancreas, fans une partie des premiers Juteflins, &rc. Avec des Réflexions fur cette conformation extraordinaire, Par M. WinsLow. 586 Remarques fur un nouveau Monfîre dont M. Winflow a done depuis peu la defcription à l'Académie. Par M. LÉMERY. 607 Obfervations Metéorologiques faites à T'Obfervatoire Royal pen- dant l'année 1740. Par M. MARALDI. 613 Sur quelques nouveaux Inffruments de Chirurgie. Par M. GouLARD, de la Société Royale de Montpellier. 617 HISTOIRE bete CRE L'ACADEMIE ROYALE Dub 151 SICLENEUES Année M. DCCXL. D2000000000006000000000.808.1 PHISIQUE GENERALE. OBSERVATIONS DE PHISIQUE GENERALE. . L M DU GUÉ a écrit de Dieppe à M.de Reaumur, qu'il . y a dans cette Ville un Jardin où fe trouve une efpece de Limace inconnuë aux Jardiniers du Pays. Elle eft longue de 18 à 20 lignes, & à peu-près de la forme des Limacons . Hifl. 1740. 12 2 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE rouges qui courent fur la terre, & n'ont point de Coquille. Elle fe terre à la façon des Vers, & ne fort que la nuit. Elle porte fur la Croupe une partie femblable à un Ongle, placée comme il l’eft au bout du doigt, & pour le moins auffi dure, Tout l'Animal eft fi dur, qu'on a peine à le couper avec un Couteau. On l'a enfermé dans un Pot avec des Vers de terre, longs de 3 à 4 pouces, & gros comme une Plume ; il s'en nourrit quoique beaucoup moins fort qu'eux en apparence. Il met environ 4 ou $ heures à en avaler un entiérement, mais ce long temps ne lui fait point hazarder de perdre fa proye; quand il la une fois faifie par un bout, elle ne peut plus échapper, quelques efforts qu'elle faffe. II dépofe dans la terre fes Œufs, parfaitement ronds d’abord, & qui ne font qu'une petite pellicule remplie d'une humeur vifqueufe ; mais au bout de 1 $ jours où un peu plus, Phumeur s’épaiflit, la forme ronde fe change en ovale, & la Limace éclôt comme un Poulet. F dE ê Il y a eu à Annonay en Vivarais quelques petits T'rem- blements de Terre, dont M. Chomel de Breffieu a envoyé la Relation à M. de Reaumur. Le premier arriva le 30 Janvier entre 1 1 heures & Midi. IE dura 3 ou 4 Secondes, & après un petit intervalle il re- commença prefqu’aufli long-temps, mais moins violem- ment. On fe fentoit comme bercé, on crut feulement que quelque Maifon voifine s’étoit éboulée, parce qu’on enten- doit un bruit à peu-près pareil. On l'entendoit fous fes pieds quand ‘on étoit à rès-de-chauflée, & fur fa tête, quand on étoit fur des planchers. Il n’y eut aucun defordre. Ce Trem- blement ne s’eft point étendu au de-là de FTfere ; il n’a point été fenti à Vienne, ni à Condrieux. Du côté de la Montagne il eft allé jufqu'à St Bonnet, & en Dauphiné une lieuë & demie au de-là de S* Vallier. Dans les parties du Rhône qui furent fecouées, les Bateaux crurent qu’ils échouoient fur des Rochers. Le fecond Tremblement arriva la nuit du 14 au 1 $ Févr. IDE SAS CAIIE Ne BAS. 3 à 2 heures du matin, ül fut plus foible que le premier, & füivi d'un bruit que l’on prit pour du Tonnerre, mais le Ciel étoit fort ferein. Le troifiéme arriva la nuit du 20 au 21 du même mois à 3 heures + du matin, moins fort que le premier, & plus que le fecond, précédé & fuivi d’un-bruit comme de Ton- nerre, l'air étant fort calme. Ce bruit a duré demi-Minute, & il alloit d'Oftave en Otave. On a toûjours fenti que la fecoufle commençoit du côté du Sud. M. de Breffieu ne croit pas qu'Annonay fût au centre du Tremblement, mais à une lieuë ou environ. III. La nuit du 23 au 24 Février on vit vers la Rade de Toulon un Globe de feu comme violet, qui s'étant élevé peu à peu, plongea enfuite dans la Mer, d'où il fe releva comme une Balle qui réfléchiroit, après quoi étant parvenu à une certaine hauteur, il creva, & répandit divers globes de feu, dont les uns parurent tomber dans Ja Mer, & les autres fur les Montagnes. Le bruit qu'il fit en crevant, fut femblable pour l'éclat à celui du plus gros Tonnerre, mais comme il dura peu, il refflembla davantage à celui d’une Bombe. Ce Phénomene ne fut pas vü par des Obfervateurs bien exercés, & d'ailleurs la plüpart eurent grande peur, & voilà tout ce que M. le Marquis de Caumont a pu recueillir de plus certain de divers récits dont il a envoyé le réfultat à M. de Reaumur. Ette année parut le Vme Volume de T'Æifloire des 1n- fetes, où M. de Reaumur finit celle des Mouches à deux Aîles, & pale aux Mouches à quatre Aîïles. Les quatre Volumes précédents doivent avoir aflés ac- coûtumé le Public à deux fortes de merveilles, à toutes les variétés, aux adrefles, aux artifices des Infeétes d’une part, & de l'autre à la fineffe, à la fagacité, à la patience de l'Obfervateur, qui a dû voir ce qui étoit le plus caché, & À i Xp. 35« 4 HiISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE deviner jufte ce qu'il étoit impoflible de voir. Ainfi nous ne nous arrêterons fur toute cette matiére qu'à ce qui peut encore avoir quelque nouveauté, & mériter d'être dit après tout ce qui l'a été déja. En traitant des Mouches à deux Aïles dans l'Hiftoire de 1738 *, nous avons parlé de celles qui vont dépofer leurs Œufs fous la peau de quelque gros Animal, tel qu'une Vache. Il y faut joindre celles de la même efpece qui les dépofent ou dans le Nés du Mouton, où dans l'Anus du Cheval, étranges fortes de Nids, deftinés pourtant à l'être par la fage Nature. Il fe forme dans ces endroits des tumeurs, qui le plus fouvent n’incommodent point les Animaux picqués ou bleffés, & quand les Œufs des Mouches font éclos dans ces tumeurs, il en fort de petits Vers qui n'ont qu’à fe laiffer tomber doucement à terre, où ils vont vivre deformais. On trouve de femblables Vers dans deux Bourfes charnuës qui font près de la racine de fa Langue du Cerf, & cette pofi- tion a donné lieu d'imaginer que c'étoient eux qui faifoient tomber tous les ans le bois du Cerf, parce qu'ils Favoient attaqué & rongé par fa bafe, dont ils ne font pas fort éloignés. M. de Reaumur fe déclare hautement contre cette opinion, qui eft cependant celle de tous les Chafleurs, & il la combat ayant en main des T'êtes de Cerf, envoyées par M. le Prince de Conty, qui a été bien aife de rendre fes plaifirs utiles aux Sciences. Les Vers du Cerf bien examinés, n’ont point d'Inftruments propres à l'ouvrage qu'on leur fait entrepren- dre, à détruire un Bois dur, & fort épais; ils n’auroient pas même d'objet dans cette entreprile, car ils ne s’en nourri- roient pas, on n'apperçoit aucunes traces, aucuns veftiges de leur prétendu travail; quoique le lieu où ils travailleroient ne foit pas loin de ces Bourles qu'ils habitent, il faudroit qu'ils s’y rendiffent en perçant, en déchiquetant une affés grande épaiffeur de Chairs, qui fe trouvent toüjours fort entiéres & fort faines. I faut donc , comme le conclud M. de Reaumur, qu'à l'exemple des Mouches qui vont pondre dans le Nés du Mouton, ou dans l’Anus du Cheval, celle D SM SNCUIE NICE S $ qui a produit les Vers du Cerf, ait été pondre dans fes deux Bourfes charnuës, & pour cela qu'elle foit entrée par fes Narines, & ait fuivi une route qu'il eft bien aifé de mar- quer. Elle n'aura pas non plus trouvé de difficulté au retour. À ce compte les Bourfes du Cerf ne font faites que pour _ loger des Vers qui lui font parfaitement étrangers , & cette deftination pazoît d'autant plus naturelle que le Cerf n'eft point incommodé. Notre imagination aimeroïit mieux qu'il fouffrit ; "cela paroîtroit un accident. Après les Mouches à deux Aïles viennent celles à quatre Aîïles, qui occupent tout le refte de ce Vme Volume. Plufeurs de leurs efpeces ont commencé par être des Che- nilles que M. de Reaumur a nommées fauffes* ; les vrayes Chenilles feroient devenuës Papillons , & non pas Mouches. Entre les Mouches à quatre Aïles, les premieres qui s’atti- rent ici une attention particuliére, font des Mouches d’un fort petit volume, appellées par M. de Reaumur Aouches à Scie, parce qu'eflectivement elles ont à leur partie pofté- rieure une Scie dont elles fe fervent pour faire des entailles à une petite branche, comme celle d'un Rofier, & y creufer un petit Nid où elles mettront leurs Œufs en füreté. On reconnoît les Miles de l'efpece à ce qu’ils n’ont point cet Inftrument, qui leur feroit inutile. Une preffion un peu adroite le fait fortir du corps des Fémelles, mais il eft aifé de juger qu'on ne le verra bien qu'en s'aidant beaucoup de la Loupe ou du Microfcope. On connoît la conftruction de nos Scies, & la maniére dont elles agifient. La Scie de nos Mouches eft d’une conf- truétion plus compliquée, & expédie beaucoup plus d’ou- vrage, les proportions gardées. Elle n’a rien de commun avec les nôtres que la difpofition des Dents, fans quoi elle ne feroit pas Scie ; du refte elle eft double, compofe de deux, dont l’une peut aller d'un fens, & l'autre du fens oppolé, en avant ou en arriére quand l'autre va en arriére ou en avant ; des Mufcles auxquels elles font attachées, rendent T'Animal maître d'exécuter à Ja fois ces deux mouvements. A iÿ * V. PHiff, de 1736. P: 32- 6 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE De plus la Scie totale eft une Rape par fes deux grandes & longues faces oppofées qui dans nosScies ne font que plattes & unies, & l’on voit aflés combien cela doit contribuer à ufer promptement le bois fur lequel la Mouche travaille , & à y faire le creux dont elle a befoin. Enfin la Scie a une pointe tranchante dans le bout par où elle doit commencer l'incifion. Affés fouvent les Œufs font logés chacun à part dans fa petite cavité, & fi l'on apporte à ces fortes d'objets des yeux tels qu'ils les demandent, on voit fur une branche de Rofier une fuite de petites entailles arrangées à peu-près fur la même ligne droite, & féparées les unes des autres par de petits intervalles. Que l’on ouvre chacune de ces entailles, on y trouvera un Œuf de la Mouche à Scie. Mais fe feroit-on avifé de foupçonner qu’il pût y avoir du miftere jufque dans les intervalles qui féparent les entailles ? On ne daïgneroïit pas y faire Ja moindre réflexion, cependant il y a là du deflein & de l'entente. Les ŒÆufs difpofés dans ces entailles croîtront,: ce qui n'eft pas-ordinaire à des Œufs, ils ouvriront davan- tage les entailles, & par conféquent il a été bon de les tenir un peu éloignées les unes des autres. Il y a toute apparence que ces Œufs tirent leur nourri: ture de {a Plante où ils ont été dépolés, & que c’eft cela même qui détermine le choix de la Mere Mouche en faveur de certaines Plantes. Elle préfere ordinairement le Rofier. Quelquefois ces Mouches pondent plufieurs Œufs dans uné même cavité, & les y arrangent proprement & agréa- blement par paires à droite & à gauche d'une même ligne. I arrive aufli qu'il y ait deux couches d'Œufs l'une fur l'autre. Alors ils ne laiffent pas encore tous de croître. Ceux de la couche pofée immédiatement fur le bois, & qui en tirent de l'aliment, doivent donc en tranfmettre aufli à ceux de l’autre couche. Cela, quoiqu'un peu plus difficile à con- cevoir, eft bien éloigné de paffer les forces induftrieufes de la Nature. Les Cigales font des Mouches à quatre Aïles, fans com- BEN MMNCN EN CES paraifon plus groffes que celles à Scie. On n’en voit guére _que dans les Pays chauds, tels que le Languedoc & la Pro- vence, & M. de Reaumur n'en a pu avoir que de mortes, mais d'ailleurs fi bien conditionnées, qu'il en a pu recon- noître différentes efpeces, diftinguer le Sexe, & faire les fines diffections de parties qui lui font devenuës familiéres fur ces petits fujets. IL n'eft pas poffible de lui en conferver le mérite dans des Extraits néceffairement fort fuperficiels. Il y a long-temps que les Cigales font fameufes par {eur chant, qui cependant n'en eft guére un. If n'appartient qu'aux Mäles, ainfi que chés les Oiïfeaux. Peut-être ces chants fervent-ils à mettre les Fémelles dans les difpofitions où les Mâles feront bien aifes de les trouver ; car il n’y a pas beaucoup d’apparence qu'elles foïent appellées par ces chants, & aillent fe préfenter, les Fémelles font ordinairement plus réfervées, & celles des Vers luifants, qui par leur lumiére avertiflent leurs Mâles de l'endroit où elles font cachées, ne font du moins aucun pas vers eux. Les Inftruments qui exécutent le prétendu chant des Ci- gales, n’avoient pas encore été découverts, leur pofition feule des eût cachés, ils font fous le Ventre, & les Cigales font réellement Gaffri-mythes, où Ventriloques. Pour dire en un mot ce qui par fa nature demanderoit une defcription très- ample & très-détaillée, c'eft une efpece de Tambour ou de Timbale. Dans le moment que la Peau du Tambour eft frappée, elle s'enfonce un peu à l'endroit du coup, fe releve auffr-tôt après par fon reflort, & on l’a tenduë le plus qu’on a pu, afin que ce reffort caufât des vibrations plus promptes & plus vives, telles qu'il les faut pour a produétion‘du Son. Ce fon eft fortifié par une infinité de réflexions foudaines ‘qui fe font dans la cavité de la Caïfle du Tarmbour. Les mêmes principes, mais avec une difpofition de Machine contraire, font mis en œuvre pour le chant de la Cigale, Une Membrane recouvre une cavité, & un Mufcle attaché à la furface intérieure de cette Membrane la tire en dedans, elle retourne en dehors par fon reflort, & fes vibrations font 8 H1iSTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Je fon. C'eft le Tambour frappé par dedans. Cela eff fr vrai, que M. de Reaumur a eu le plaifir de faire chanter une. Cigale morte. Ce chant, tout imparfait qu'il eft, a befoin dans la Cigale Müle d'un prodigieux appareïl de Méchanique, & on ne voit as avec moins de furprife celui qui eft néceflaire dans la Cigale Fémelle pour faire agir une Tariére avec laquelle elle va percer fur des branches d’Arbres des trous où elle dé- pofe fes Œufs ; la reffemblance des deux Méchaniques par le grand art qui y eft employé, pourroit aider à croire qu'elles ont toutes deux le même objet, la génération, qui de toutes les opérations des Animaux paroït être Ha plus précieufe à la Nature. La Tariére des Cigales eft une double Lime dont les deux James égales & paralleles ont un jeu alternatif, au lieu que dans les Mouches dont nous avons parlé auparavant, l'Inf . trument analogue eft une double Scie. Ces Mouches ne pondent que fur des Branches fraîches & pleines de fuc, les Cigales fur des Branches féches. Apparemment les unes fça- vent que leurs Œufs auront befoin de fe nourrir, les autres qu'un fuc étranger leur nuiroit. Les Cigales ont quelque conformité avec ces autres Mouches dans la maniére d’arran- ger & d’aligner aflés bien fur un même côté d’une Branche les entailles qu’elles y font, mais elles ont foin de les cou- vrir de quelques petites fibres du bois qu'elles n’ont déta- chées qu'à moitié, afin que les petits Vers qui éclorront, puiflènt fe glifler aifément par-deflous, & fortir; & au con- traire ces autres Mouches n'ont point recouvert leurs en- tailles, parce qu’elles fçavoient que leurs Œufs en croiffant, les élargiroient fuffifamment, & que les petits ne trouve- roient nul obftacle à leur fortie. On employe malgré foi dans toute cette matiére des expreffions impropres de con- noiflance & de prévoyance. On peut croire, car on ne le fçait pas encore exactement, que la Cigale pond jufqu'à 6 ou 700 Œufs. » M. de Reaumur n'a pu encore parvenir j voir éclorre des DES 11 Mr CU EN © ES. 9 des Œufs de Cigale, mais il en a eu des Nimphes, où il a très-diftinctement reconnu ces. deux Inftruments principaux qui appartiennent l'un au chant, l’autre à la ponte, & toû- jours l'un fans l’autre, de forte que la différence des Sexes étoit bien marquée dans les Nimphes même. Elles ont encore une propriété, elles ne font pas privées de mouvement & d'action. Un bon Obfervateur a écrit de Languedoc à M. de Reaumur, qu'il avoit trouvé des Nimphes de Cigale qui avoient pénétré fous terre jufqu’à la profondeur de 3 pieds, & cela malgré de l'argile qu'elles avoient rencontrée. Î[ eft vrai qu'on foupçonnoit qu'elles l'avoient mouillée pour la percer plus aifément. Après tous ces Infectes, qui ne font que les principaux de ceux que M. de Reaumur a traités, & qui pour la plüpart étoient fort inconnus, il vient enfin aux fameufes Abeilles, qui ne laiflent pas d'être encore affés peu connuës. Ce n’eft pas qu'on ne les ait regardées de tout temps avec admiration, ce n'eft pas que dans ce dernier Siécle, où l'on fçait mieux voir que jamais, d’habiles Obfervateurs, tels que Mrs Swammer- dam & Maraldi*, ne les ayent étudiées avec foin; ceftqu'ilya + .rr0. beaucoup à voir chés elles, & que cette merveilleufe mduftrie de 1712. dont on les louë tant, elles femblent l'employer en grande P- 5 partie à fe dérober à nous. Nous fommes à leur égard, dit M. de Reaumur, comme un Homme qui, placé au haut d’une Tour, verroit en bas une grande Place d’une Ville où tout un peuple feroit en mouvement & en agitation, que pourroit-il deviner des deffeins, des intentions de cette multitude? com- bien fes conjeures feroient -elles fautives ou courtes ? Auf le Spectateur, pour fe rendre le fpectacle plus commode, & y mieux démêler les objets, s’eft-il avifé de rebâtir la Place de la Ville d’une maniére qui lui convint, c'eft-à-dire, que non feulement aux Ruches ordinaires cou- vertes de paille, on a fubftitué des Ruches vitrées, qui laiffent voir ce qui fe pafle au dedans, mais M. de Reaumur a extrèmement perfectionné cette invention, en imaginant de/nouvelles conftruétions de Ruches vitrées, & différentes Hiff, 1740. . B 10 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE conftruétions, qui toutes fans nuire au travail des Abeilles, & fans leur déplaire, car elles font délicates, les expofafñlent aux yeux plus aïfément, & différemment felon les deffeins ue lon auroit. Toutes les Ruches ordinaires font Coniques, & les Payfans ont trouvé-.par un long ufage, ou rencontré heureufement ar hazard, une figure qui plaît aux Abeilles. Elles aiment le chaud, & quand elles commencent à habiter une Ruche où elles font encore en petit nombre, elles ne manquent pas de s'aller établir au haut de ce Cone creux, où elles fe tien- nent fouvent ferrées les unes contre les autres, pour s'échauffer. A mefure qu'elles fe multiplient, elles viennent en bas, où un plus grand nombre augmente la chaleur à proportion. Mais là elles font fort difficiles à obferver malgré la tranf parence du Cone vitré, elles font de gros grouppes ronds & fort épais, où l’on ne difcerne rien. De plus, comme leurs Gâteaux de Cire, paralleles entr'eux, font en grand nombre, à caufe de la grande épaifleur de la Ruche, elles ne ceflent d'aller & venir dans les intervalles, où l’on ne fçait ce qu’elles font. Une Ruche, qui ne feroit qu’une efpece d’Armoire fort large & fort peu profonde, conviendroit beaucoup mieux à l'Obfervateur. Les Abeilles n’y pourront plus former de ces gros grouppes fr incommodes, elles feront obligées à s'étaler felon la largeur de la Ruche, & le peu d’épaiffeur ñe leur permettant que d'y faire peu de Gâteaux, deux feu- lement fi l'on veut, elles ne fe perdront plus tant, à beau- coup près, dans leurs intervalles. Mais les Abeilles pourroïent n'aimer pas un féjour qui les expoferoit & au froid, & aux regards des Curieux. Pour concilier tout en prenant un Milieu, M. de Reaumur a imaginé des Ruches Piramidales compofées de quatre plans Triangulaires, dont deux oppofés fuffent beaucoup plus étroits que les deux autres. Cette figure réunit fuffifamment les avantages réciproques du Cone & de Armoire platte. L'Inventeur y ajoûte encore beaucoup d'élégances utiles. DES SCcrENCES. LI La Piramide toute vitrée eft divifée en étages, qui font pour le moins au nombre de trois, & dont-chacun a fes quatre faces, inégales deux à deux, couvertes d'un Volet de bois qui s'ouvre & fe ferme, de forte qu'on peut voir les Abeilles travailler à telle hauteur de la Ruche & à tel endroit de cette hauteur que l'on veut, fans les inquiéter dans tous les autres endroits. IL y a plus, ces différents étages peuvent fe féparer, & l’on aura entre fes mains une portion de l'ouvrage des Abeilles toute faite, tandis qu’elles travailleront encore au refte, ou réciproquement une portion commencée que l'on comparera aux autres, ce qui ne peut manquer d'avoir de grands ufages pour lobfervation. Ce n'eft pas cependant que M. de Reaumur s'en tienne abfolument dans fa pratique à la Ruche Piramidale. I con- ferve l’'Armoire platte, & y ajoüte même une Tour quarrée qu'il a imaginée pour certaines occafions. Un bon Obler- vateur a tant de vüës différentes, il a fi fouvent befoin de s'affürer fi telle ou telle conjecture eft vraye, qu'il ne peut avoir trop d’Inftruments différents pour fatisfaire à tout. On diroit qu'il y a ici un combat d’induftrie entre des Infectes & un Philofophe. Tout cela ne donne encore que le moyen de voir les Abeilles mieux qu'on ne les verroit dans les Ruches ordi- maires, mais malgré ces nouvelles commodités on ne verroit que plufieurs Milliers de Mouches renfermées dans un fort petit efpace, où elles voltigeroient fans ceffe avec beaucoup de vivacité, & fe perdroient continuellement les unes dans la foule des autres. Eüût-on cru poflible de parvenir à les voir dans un état fi tranquille qu'on les compteroit une à une comme les Moutons d’un Troupeau, & qu’on les exa- mineroit chacune féparément tout à fon aile, & tant que Von voudroit? M. de Reaumur en a trouvé le fecret qui d'abord doit paroïître peu ingénieux & cruel, c'eft de noyer toutes les Abeilles d’une Ruche. Il eft vrai qu’on les aura bien alors en fa difpofition, mais outre la cruauté qu'on aura exercée fur un grand peuple, qu'il eft difficile de ne B ïj 12 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE pas affeétionner un peu, on l'aura perdu, & ce n'eft pas l'intérét du Poffefleur, ni même de l'Obfervateur. Auffi M. de Reaumur na-t-il pris cet expédient qu'après s'être bien affüré que les Abeilles noyées revenoient à la vie parfaite- ment telles qu'elles avoient été, & c'eft avec raïifon qu'il n'appelle cela que les baigner. Les Abeilles baignées font mortes en apparence au bout de 3 ou 4 Minutes au plus, & elles peuvent foûtenir cet état peut-être pendant 2 0 heures, & revivre en fuite parfaitement. Îl ne fçait pas encore au jufte quelle peut être la plus longue durée de cette fauffe mort, mais toüjours il eft bien certain qu'elle donne tout le loifir néceffaire pour les compter, pour s'affürer précifément du nombre des Abeilles Fémelles ou Reines, s’il y en a plufieurs, du nombre des Abeilles fans fexe, de celui des Mäles ou Bourdons, car on fçait d’ailleurs que les différentes figures en font fort reconnoiflables. On pourra anatomifer tranquillement & fans crainte de f'Ai- guillon celles qu'on voudra; enfin il eft ailé d'imaginer en général quel avantage ce fera que de s'être rendu abfolument maître d’une Nation auffr intraitable. On peut perdre les Abeilles en les baïgnant , à moins que d'y apporter certaines précautions, & quelquefois fi délicates, que l'expérience feule les enfeigne. Par exemple, l'opération fe fait en plongeant une Ruche de haut en bas dans un Tonneau où il y a de l'eau à la même hauteur dont eft la Ruche: & pourvü qu'il y en ait à cette hauteur, il ne paroît nullement important qu'il y en ait d’ailleurs plus ou moins. 1 y va pourtant de fa vie des Abeilles. S'il n’y a dans le Tonneau que l'eau néceflaire pour y plonger à Ruche, les ‘Abeilles feront véritablement noyées ; s’il y a confidérable- ment plus d’eau, elles revivront. La caufe de cette différence, qu'apparemment on m'auroit pas prévüe, c'eft que l’eau en entrant dans la Ruche, prend toüjours une teinture de Miel, qu'elle la prend plus forte fi elle eft en plus petite quantité, qu'alors elle bouche les Stigmates par où les Abeilles doi- vent prendre l'Air, & les bouche de maniére qu'ils ne fe DES SYCURE NOChE,S 17 peuvent plus ouvrir, ce qui n'arrive pas quand fa même quantité de Miel s’eft répanduë fur une quantité d’eau beau- coup plus grande, Comme après avoir baigné les Abeilles on les effuye & on les échauffe pour les ranimer, il faut bien prendre garde de ne les échauffer qu'après les avoir parfaitement efluyées, car il arriveroit encore que des gouttelettes d’eau reftées dans les Stigmates les fermeroient à l'Air. | Dans l'efpece de réfurreétion des Abeilles, c’eft la Trompe qui reprend du mouvement Ja premiére, enfuite les Jambes, & en peu de Minutes tout eft expédié. L'accident qui leur eft arrivé ne Jaiflé aucune trace, & c’eft un bonheur pour les obfervations. Nous fupprimons plufieurs autres chofes, mais moins fin- guliéres, qui appartiennent à l'art d’obferver employé par M. de Reaumur. I! nous füuffit d’en avoir rapporté les prin- cipales, & prévenu le doute où l'on feroit peut-être en quel- ques occafions, qu'il pût avoir tant & fi bien vü. Nous ne donnerons plus que les réfultats les plus confidérables de fes découvertes, en nous abftenant même, quoiqu'à regret, des fins détails, tant de l Anatomie du Corps des Abeilles, que de la compofition de leurs Ouvrages. Elles vont prendre le Miel dans le fond des Calices des Fleurs, au moins de certaines Fleurs, où de fçavants Bota- nifles modernes commencent à découvrir {oit des Glandes, {oit des Réfervoirs deftinés à préparer ou à contenir cette liqueur. On voit les Abeilles la prendre avec leur Trompe, & rien n'a été plus naturel que de croire qu'elles la fuçoient par le moyen de cette Trompe qui feroit percée à fon bout ; mais M. de Reaumur ne croit pas qu'elle le foit, ni par conféquent Pompe afpirante comme elle leût été. Selon lui cette Trompe, dont la conftruétion eft beaucoup plus com- liquée & plus merveilleufe que l'on ne penfoit, eft une efpece de Cilindre folide enfermé dans un Etui que forment deux piéces qui fe peuvent féparer jufqu'à un certain point; .ilya, ou il peut y avoir entre le Cilindre & l'Etui, un B'üiij 14 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE vuide, & le Cilindre par de petites inflexions qu’il fe donne, fait entrer la liqueur dans ce vuide, & par cette action con- tinuée, la conduit dans une Bouche que l'on ne connoifloit pas encore à l'Abeille. Une partie de fon Miel eft pour fa nourriture, l'autre elle la rejette hors de fon Corps, où elle n’eft entrée que pour être tranfportée à la Ruche, & là dé- pofée dans les Alvéoles pour nourrir, foit les petits Vers qui y éclorront, foit les Abeilles elles-mêmes, dans les temps où elles ne fortent pas. | La Cire, autre production des Abeilles, fert aux Bâtiments qu'elles conftruifent. Tout le monde connoiît les Poufféres des Etamines des Fleurs, qui, felon les plus grands Botaniftes modernes, font néceflaires pour féconder les Graines; les Abeilles vont recueillir ces Poufliéres lorfqu'’elles font forties des Capfules qui les contenoient, & fe font ouvertes, & fouvent elles hâtent par quelques coups de dent, car elles en ont deux, l'ouverture des Capfules. Elles ont trois paires de Jambes, dont la premiére enleve avec beaucoup d'aétivité ces grains très-fins, & s'en charge pour les tranfmettre à la feconde paire qui les reçoit, n'ayant pas laiflé de travailler auffi de fon côté, & de-là les petits grains font livrés à la troifiéme paire, dont chaque jambe fe termine par une efpece de Cuiller ou Palette affés profonde pour recevoir ce qui y fera envoyé, & ne le pas laifler échapper quand lAbeille senvolera ailleurs. 11 y a toute apparence que pendant tout ce mouvement de la récolte des Pouffiéres, l’Abeïlle en paitrit les grains enfemble, les lie, & même y fournit quelque fuc. Auf M. de Reaumur ne croit-il pas que les Poufiéres foient la Cire, mais feulement la matiére à Cire. La récolte n'en feroit pas fuffifante fi les Abeilles n’y employoient que leurs fix Jambes, elles y employent tout leur Corps, c’eft-à-dire, une infinité de Poils affés longs & aflés forts, dont tout leur Corps eft hériffé, fans en excepter même leurs milliers d'Yeux. Tous ces Poils fe chargent de Poufliéres qu'il leur eft fort facile d’accrocher par-tout, & quand il arrive que deux Abeilles ont pris beaucoup de , DES SCIENCES . 75 Poufliéres chacune d'une différente Fleur, & que les deux Fleurs avoient des Poufliéres d’une couleur différente, ce qui n'eft pas rare, on voit les deux Abeilles vêtuës de deux diffé- rentes couleurs. Les Abeilles chargées ainfi de matiére à cire fur tout leur corps, outre les deux pelottes qu'elles ont à leurs deux derniéres Jambes, s’en retournent à la Ruche, où leurs Compagnes leur aident à fe foulager de leur fardeau, & font tomber la matiére à cire de leurs poils, foit en lêchant avec Ieur Trompe, foit en les éroffant avec des efpeces de Brofles qu'elles ont à leurs Jambes ; quelquefois les Abeilles, qui avoient leurs Poils chargés, ont prévenu ce foin, & en fe broflant elles-mêmes très-adroitement, ont fait pañfer Ia Cire de leurs Poils aux deux petites cavités de leurs derniéres Jambes. Les Abeïlles, excellentes ouvriéres, & fi bien pourvüës d'Inftruments propres à leurs ouvrages, font aufli très-bien armées ; leur Aiguillon eft très-connu, mais beaucoup plus par fes effets que par fon admirable ftructure, telle que M. de Reaumur l’a développée. I n’eft pas fimple, comme il le paroît, ce font deux Aiïguillons enfermés dans un même Etui affés compofé lui-même ; il eft très-probable qu'ils agiflent alternativement & fe relayent, ce qui ne fait l'apparence que d’un feul qui picqueroit toüjours. L’Aiguillon n'eft pas uni- quement un Inftrument à percer, c'eft auffi un tuyau creux qui conduit & jette dans l'endroit percé une liqueur empoi- fonnée qui s'y fait bien-tôt fentir. M: de Reaumur a fait fi curieufement des épreuves de ce Poifon; qu'il les a pouffées jufqu’à en goûter avec fa Langue. IL eft cauftique, la douleur qu’il caufe eft aflés vive pendant quelques inftants, mais de peu de durée. On s’y accoûtume, & quelques perfonnes ou n’en fentent plus rien, ou peut-être étoient de tempérament à n’en fentir jamais prefque rien. I peut y avoir eu des Contrepoifons, ou en général des Re- medes qui ont été fort vantés pour avoir été appliqués dans des cas où l'on fuppofoit un mal qui n’exiftoit point. L’Abeille fe nuit prefque toûjours à elle-même incom- % p- 30. & fuiv. 16 HiSTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE parablement plus qu'à l'Animal qu'elle picque, du moins fr cet Animal eft un Homme. Non feulement elle perd fon Aiguillon qui reftera dans la phye, & elle ne pourra plus >icquer, mais fi on l'oblige à fe retirer brufquement, ce qui eft ordinaire, elle déchirera, en fe retirant ainfi, des parties auxquelles tient l'Aiguillon, & principalement une aflés grofle Véficule où le poifon eft renfermé. Ce Vaiffeau, qui apparemment répond à notre Véficule du Fiel, étant arraché, ouvert, & fa liqueur épanchée dans le corps de Abeille, elle meurt. Auffi paroït -il qu'elles ne fe déterminent pas trop légerement à picquer, & à exercer une vengeance qui leur coûteroit tant. L’Aiguillon laïflé dans une playe par l'Abeille, a une propriété qui furprend d'abord, on le voit s’enfoncer de lui- même, quoique privé de l' Animal qui le mettoit en action. Il a ce mouvement que des parties d’Infeétes coupées, une Queuë de Lézard par exemple, confervent encore. Telles font les principales parties & les plus vifibles des Abeilles, celles du moins qui exécutent les actions dont on a été le plus frappé. Nous avons parlé aflés au long en 1 73 9* de leurs admirables Gâteaux ou Rayons de Cire, admirables même pour les Géometres modernes. Sera-ce diminuer la merveille que de rapporter ici que les Alvéoles ne font pas tous de l'égalité parfaite dont nous les avons fuppolés? ou phûtôt n'augmenterons-nous pas cette merveille, quand nous dirons qu'il y a une raifon indifpenfable pour l'inégalité ? Les Bourdons, feuls mâles des Abeilles, font beaucoup plus gros qu'elles, ils viennent de Vers plus gros auffi, & à qui il faut de plus grands Nids, & comme le nombre des Bour- dons eft petit par rapport à celui des Abeiïlles ordinaires, il y a peu d’Alvéoles qui excedent les autres en grandeur. Il y en a auffi qui ne font pas parfaitement exagones, mais on s'apperçoit que cette irrégularité eft réparée peu à peu & comme par degrés dans les Alvéoles voifins. Peut-être une Abeille moins appliquée à fon travail, aura fait une faute que les autres fauveront enfuite le mieux qu'il fe pourra. Il eft DES SCIENCES. 17 I! eft de l'honneur des Abeilles de faire des fautes, cela les rapprochera de nous. Elles commencent toûjours un Alvéole par cette bafe piramidale dont nous avons tant parlé en 1 739 , elles éle- vent fur ce fondement tout le refte du petit édifice, non qu'il foit achevé par la même Abeille qui l’a commencé, ce fera-là l'ouvrage de quelqu'autre, ou de plufieurs autres, & en même temps fur cette premiére bafe piramidale formée, d'autres Abeilles en établiront une autre qui appartiendra à la face oppofée du Gâteau. Il faut fe repréfenter un nombre prodigieux d’Abeilles qui travaillent en même temps, dont chacune ne travaille que peu de temps de fuite à un même ouvrage, qui fe fuccedent inceflamment les unes aux autres avec une extrême rapidité, & entrent fi-bien dans le deflein de ce qu'elles trouvent déja fait, que l'ouvrage total va auffi vite que s'il avoit été exécuté par des Ouvriers fédentaires & non interrompus chacun dans fon Attelier, Malgré ce grand amour des Abeilles pour le travail, mal- _ gré leur grande adtivité, il eft vrai que dans les Ruches bien peuplées, on en voit toûüjours de gros grouppes qui fe re- polent, fe tenant accrochées les unes aux autres par leurs pattes. Peut-être le nombre de celles qui font en action, neft-il pas plus grand, mais affürément celles-ci prennent un repos qu'elles ont bien acheté, Le grand travail des Abeilles eft d'aller à a Campagñe faire la récolte du Miel & de la Cire. Dans les beaux Jours, & qui leur font favorables, on en voit à tout moment un grand nombre qui fortent de la Ruche pour cette récolte, & un grand nombre qui y rentrent chargées de leur butin. M: de Reaumur a jugé par des obfervations très-attentives & bien réitérées, & on croira aifément qu'elles devoient l'être, qu'il rentroit dans une Ruche bien conditionnée 1 00 Abeilles à chaque Minute, & cela pendant toute Ja journée, IL {çavoit d’ailleurs que fa Ruche contenoit bien 1 8000 Abeilles, & en ne fuppofant-cette Journée que de 14 heures feulement, il étoit donc rentré dans la Ruche pendant ce Hifl, 1740. : 18 HisToIRE DE L'ACADEMIE ROYALE temps-là 84000 Abeilles, & comme elle n'en contenoit que 18000, chaque Abeille étoit allée à la campagne 4 fois & =, on voit aflés le fens de cette fraction. Des Abeilles qui auront fait 4 ou $ voyages hors de la Ruche, & fouvent dans des lieux affés éloignés, méritent bien de fe repofer, & on doit préfumer qu'elles ne font pas moins actives & moins laborieufes dans la Ruche même. Un de leurs principaux foins eft de ménager Ja Cire. Les fonds piramidaux de leurs Alvéoles font déja tels par leur figure, comme on l'a vü, qu'ils forment tous enfemble un fond commun aux deux faces oppolées du Gâteau, ce qui eft déja l'épargne d’un fond, mais de plus elles veulent que les parois, les fix pans de leurs Alvéoles leur dépenfent le moins de Cire qu'il foit pofñble, elles les font auffi minces que le papier le plus fin. Elles ne fe picquent pas de les mettre d’abord dans cette perfection, elles les font plus mafñfs, plus grofliers, & comme à la hâte, mais après celles qui les ont laifés en cet état, il en vient d’autres qui en enlevent toute la Cire fuperfluë, dont elles fçauront bien faire ufage. Mais qu'eft-ce enfin que cette Cire fi précieufe! comment a-t-elle été formée? Il eft bien für qu'elle l'a été des Pouf- fiéres des Etamines recueillies, ramaffées fur différentes Fleurs ; mais ces Poufliéres bien éxaminées, ne paroiflent avoir rien de commun avec la Cire, & une différence effentielle, qu’on né peut faire difparoître par aucune opération, & qui nous faffit ici pour repréfenter toutes les autres, c'eft que les Poufliéres ne peuvent jamais fe fondre au feu, comme la Cire, & qu'elles ne font qu'y brüler. Un grand nombre de ten- tatives inutiles, quoiqu'ingénieufes, que M. de Reaumur a faites fur ce fujet, l'ont conduit à croire que les Poufliéres devoient prendre dans les Inteftins des Abeilles une prépa- ration particuliére, & après cela il n'eft pas étonnant que tout l'Art de la Chimie ne puifle avec des Poufliéres faire de la Cire, puifqu'affürément il ne parviendroit pas à faire du Chile avec toutes les matiéres végétales ou animales que nous prenons pour nourriture. DES SCIENCES 19 « Il faut donc que les Abeilles faffent entrer les Poufféres dans l'intérieur de leur corps, & M. de Reaumur en convient d'autant plus volontiers qu'il leur a découvert, ainfi qu'il a été dit, une Bouche jufqu'à préfent inconnuë. Il eft certain qu'avec leur Trompe, eût-elle même été percée, elles n’euffent pas avalé les Poufiéres. IL y a encore plus; outre la Bouche, M. de Reaumur a vü une Langue dont les mouvements font très-vifs, qui paîtrit les Pouffiéres, & les humecte de quelque liqueur propre à leur donner une premiére préparation. Elles recevront la derniére dans les entrailles des Mouches, qui après en avoir tiré les fucs convenables à leur nourriture, rejetteront par leur Anus les féces de ces fucs, & de plus tiendront en réferve, & rejetteront par la Bouche quand elles voudront, une autre matiére, qui fera la Cire extraite des mêmes Poufñéres. Selon cette idée, les Abeilles feront affés peu de Cire, & il femble que ce foit-là une difficulté ; c’eft au contraire une confirmation. M. de Reaumur ayant pefé un petit nom- bre de ces pelottes de Cire brute que les Abeiïlles apportent dans les Cuiïllers de fleurs derniéres Jambes, a trouvé que pendant les 7 ou 8 mois de récolte il devoit entrer dans fa Ruche de 1 8000 Abeilles plus de 1 60 livres de cette Cire, & cependant quand on viendra à vuider la Ruche, à peine y trouvera-t-en 2 livres de Cire véritable. Que font deve- nuës les 98 autres livres ? le peu de Cire qu'elles font avec une très-grande quantité de matiére, paroît être une.des plus raifonnables caufes de leur avarice. Elles n’ont garde de prodiguer la véritable Cire en l’em- -ployant à des ufages groffiers, tels que celui de bien luter leur Ruche, tant pour y conferver la chaleur qu’elles aiment, que pour en défendre l'entrée à des Infeétes ennemis. Elles fe fervent alors d’une matiére appellée Propolis, avant-ville, défenfe de la ville. C'eft une Réfine très-différente de la Cire, elle fe durcit beaucoup avec le temps, & peut toûjours être ramollie par la chaleur. On ne fçait pas trop fürement fur quels Arbres elles la vont prendre. Comme elles en prennent Ci 20 HIiISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE beaucoup moins que de Cire brute, lobfervation en eft à proportion plus difficile. Un hazard heureux a fait voir à M. de Reaumur une Abeille qui revenoit chargée de Pro- polis, & les longs & pénibles efforts que fit une autre Abeille pour détacher avec fes dents cette matiére tenace des Pattes de celle qui l'apportoit. Ha vû auffi dans une Ruche vitrée où les Carreaux de verre étoient collés à l'ordinaire aux Chaffis de boïs avec des bandes de papier, que les Abeilles ne ceflerent de ronger ces bandes, & parvinrent enfin à les détruire entiérement, pour mettre en la place leur propolis, à laquelle feule elles pouvoient fe fier. En voici encore un ufage plus remarquable par fa fingu- larité. 11 entre quelquefois dans la Ruche des Animaux, tels que des Limaces ou des Limaçons ; ils pourront être bien-tôt expédiés par une infinité d'Aiguillons qui les attaqueront à la fois, mais comment emporter hors de la Ruche ces gros Cadavres , dont la mauvaife odeur feroit ou un poifon, ou une extrême incommodité ? on les embaume avec de la ropolis. Le Miel & la Cire, qui font les deux aliments des Abeilles, le font affés différemment. Le Miel left déja dans l'état où il eft pris fur les Fleurs, & ce que les Abeilles en prennent de plus qu'il ne faudroit pour fe befoin actuel, elles vont le dégorger à la Ruche pour les befoins à venir, auxquels il n'eft apparemment que plus propre, parce qu'il a paflé par les Vifceres de la Mouche. Mais quand la Cire brute a paflé par ces Vifceres, elle y a laiflé tout ce qu'elle avoit de nour- ricier pour l’Abeille, & le refte étant dégorgé, ne peut plus fervir qu’à la conftruétion des Bâtiments. ; … Les Alvéoles ne font pas feulement deftinés à loger un petit Ver, chacun à part, mais encore à contenir le Miel dont les Abeilles fubfifteront, foit pendant l'Hiver, foit dans les mauvais temps de l'Eté, Ceux qui compofent ce Magafin de Etat font en grand nombre, ils font fermés par un cou- vercle de Cire aflés bien arrondi. Les Abeilles conftruifent HIADYE SIASCQ FEI NC ES. 21 ce Couvercle en faifant d'abord à l'ouverture du tuyau exa- gone un rébord qui fuit les fix côtés, enfuite en appliquant un fecond.intérieur & plus petit, & toûjours ainfi jufqu'à la fin, où il n'y a plus qu'un point, centre de l'exagone. Les Alvéoles font exactement pleins, ce qui eft bien du génie des Abeilles, & comme ils font ordinairement dans une pofition horifontale , puifque les Gâteaux, auxquels ils font perpendiculaire, font verticaux, il femble que quand on Ôte un Couvercle, le Miel devroit fortir d'un Alvéole bien plein, & tomber, ce que les Abeilles auroient eu tort dé ne pas prévoir. Mais la vérité eft que le Miel ne tombe point, un Alvéole ef toûjours fi étroit, & le Miel fi gluant, que fon adhéfion aux parois de l’Alvéole fuffit pour le foû- tenir. | Venons préfentement au gouvernement des Abeilles, à cette République qu’elles compofent, fi vantée dans tous les temps. : La République eft formée de trois efpeces de Tribus. La premiére eft celle des Abeïlles communes, qui font chargées de tous les travaux, & n’ont point de fexe ; la feconde eft celle des Mâles, qui ne prennent part à aucun travail ‘des Ouvriéres ; la troifiéme eft celle des Fémelles, Meres, où Reines, & le plus fouvent dans chaque Ruche cette Tribu n'eft que d’une feule Abeille. Les feules figures extérieures fuffroient pour faire diftinguer ces trois efpeces. Les Mâles ou Bourdons font près de deux fois plus gros que les Ou- vriéres; les Meres font beaucoup plus allongées que toutes les autres, & plus grofles que les Ouvriéres par la partie qu’on appelle proprement leur Corps à la différence du Corceler, parce que cette partie eft pleine d'Œufs. Les Bourdons, qui ne font point deftinés à travailler, n'ont pas les dents auf fortes que les Ouvriéres, ils n’ont pas aux Jambes ces Cuillers propres à rapporter la récolte, ils n'ont point d’Aiguillon, & lon verra bien-tôt pourquoi. Les Meres ou Reines, exemptes auffi de tout travail, excepté celui de perpétuer Tefpece, n’ont que des aîles fort courtes en comparaifon des C ii} 22 HisToIRE DE L'ACADEMIE RoyaLe autres Abeilles, il ne leur en faut pas de plus longues pour fortir de leur Palais auffi rarement qu'elles font. On a pré- tendu leur faire honneur en leur tant l’Aiguillon, mais elles en ont un, & même plus long que les autres. IL eft vrai qu'elles font d’ailleurs plus paifibles, plus difficiles à irriter. Le caractere royal n'en fera que mieux marqué quand elles, auront un plus grand pouvoir, & une moindre volonté de punir ou de fe venger. Le nombre des Mâles eft aflés petit par rapport à celui des Abeilles Ouvriéres qui font fans {exe, à peine, quand il fera le plus grand qu'il puifle être, en fera-t-il la 7 ou 8me partie; mais il eft très-grand par rapport à une Fémelle ou Reine, tout au plus & rarement à deux ou trois. Le calcul en fera bien aifé à faire fur la Ruche de 1 8000 Mouches.. Les Serrails les plus abondants des Rois d’Afie feront mo- deftes en comparaifon de ceux de ces Reines. Les facilités que M. de Reaumur s’eft procurées de dif- pofer des Abeilles prefqu'à fon gré, l'ont mis en état de partager un grand nombre d'Abeilles en deux Ruches, dont l'une eût une Reine, & l’autre n’en eût pas. La Reine ne parut pas d’abord fort confidérée dans fa Ruche, mais peu à peu fes Sujettes vinrent à la reconnoître, à lui faire cortege, à la careffer, à la lècher avec leurs Trompes, ce qui eft leur maniére de flater, & une maniére utile, puifque le corps de la Reine en eft plus net, & fes Stigmates mieux ouverts à l'Air. M. de Reaumur juge très-probablement que le trouble & la confufion, dont avoit été néceflairement accompagné le partage des deux Ruches, avoient caufé le peu d'attention qu'on avoit eu pour la Reïne dans les premiers moments, où chacun n’avoit penfé qu'à foi. Les deux Ruches étoient fort inégales en grandeur & in- également peuplées de Mouches. La petite en avoit quatre ou cinq fois moins que l'autre, mais c'étoit elle qui pofié- doit la Reine. On fe mit à y travailler de bonne grace à des Giteaux, cependant au bout de peu de temps elle fut aban- donnée par des Abeilles, qui voulurent s'aller établir ailleurs, DES SCrEnNcEs. 23 peut-être par cette raifon même qu’elles avoient une Reine. Elles reconnurent que cette Reine feroit trop féconde par rapport à la Ruche, qui ne pourroit pas contenir aflés d’Af- véoles pour tous fes Petits. D'un autre côté es Mouches de la grande Ruche privée de Reine, venoïent fe rendre dans la petite, qui fe dépeu- ploit, quoiqu'avec une Reine, & y venoient en fi grand nombre, que n'y pouvant pas entrer toutes malgré leurs efforts, elles s'amonceloient du moins fur le dehors en gros . tas ; quelqu'inftinét bien fubtil leur avoit appris qu'il y avoit R une Reine, & quelque raifon bien preffante les y con- duifoit. : Comme cette Reine pouvoit être auffi 1eur Mere, ou du moins leur Sœur, on pourroit leur attribuer quelqu'affection particuliére pour elle, mais M. de Reaumur s’eft bien affüré que toute Reine leur eft égale, & qu'elles font attachées, non à la perfonne, mais à la dignité, ce qui n’eft que trop fou- vent vrai des Hommes. La grande Ruche eut un fort très-différent de la petite. À peine les Abeilles pouvoient-elles fe réfoudre à fortir pour aller chercher leur fubfiftance à la campagne, plufieurs de celles qui en fortoient, dédaignoient d'y rentrer, nul travail au dedans, point de conftruétion de Gâteaux, leur nombre diminuoit de jour en jour, enfin élles moururent toutes, & Je tout faute d'avoir une Reine, c'eft-à-dire, en approfon- diflant cette efpece de fentiment, fante d'avoir l'efpérance qu'une nombreufe poftérité leur furvivroit. Non feulement elles s’épargnoient les foins néceffaires pour cette poftérité, qui ne viendroit pas, ce qui n’eût été que fage, mais le déplaifir d'être privées de poftérité alloit jufqu'’à leur faire négliger lavie, ce qui peut paroître héroïque, IH a été bien avéré que la petite Ruche déplaifoit fort par elle-même aux Abeilles qui y furent logées, cependant elles y firent des Gäteaux ; elles avoient une Reine. Quand on a baigné des Abeilles, parmi lefquelles une Reine eft comprife, on voit que dès qu'elle revient le moins \ 24 HIisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE du monde à la vie, toutes les autres, qui n'y font pas encoré plus revenuës qu'elle, s'oublient elles-mêmes pour ne s'occu- per que de cette importante perfonne, & contribuer de tout leur pouvoir à Ja ranimer. : 0 Il y a pourtant quelque fondement à chicaner les Abeilles fur cet amour héroïque, où pour leur Reine, ou pour leur poftérité. Elles font fort intéreflées à être dès leur vivant un grand peuple, les temps froids les feroient périr fi le grand nombre n'échaufloit fufhfamment la Ruche, & le grand nombre dépend de la fécondité de la Mere. Elles proportionnent leur travail à cette fécondité. M. de Reaumur voyoit une Ruche où il ne fe faifoit que peu de Gäiteaux avec peu d’ardeur. Pourquoi cette parefle, fi rare chés les Abeilles? IL en vit la raifon, quand il eut entre fes mains la Mere de cette Ruche, petite & chétive en com- paraifon des autres Meres. Elle avoit été jugée comme elle méritoit. Ce qui eft encore plus furprenant, c'eft qu'une Cellule, que l'on connoifloit à fa figure qui contenoit un Œuf d'où une Mere éclorroit, ayant été tranfportée dans une Ruche étrangere, dépourvüë de Mere à deffein, les Abeilles de cette Ruche fentirent auffi-tôt qu'elles avoient au moins l'efpé- rance d’une Mere, fe mirent à travailler, mais feulement fur -le pied d'une efpérance, & ne s’y porterent avec toute leur vivacité naturelle que quand la Mere fut née, qui effedtive- ment paroifloit bien propre à remplir leur attente. Comme la Reine ne l'eft que parce qu’elle eft la Mere de tout le peuple, les Abeilles ne lui font attachées qu’entant qu'elle eft Mere, & non entant qu'elle eft Reine. Elles lui rendent une infinité de foins qu’elles ne fe rendent pas les unes aux autres, & cela par le befoin qu'elles ont de fa fé- condité, mais qu'il vienne une autre Reïne dans la même Ruche, elles la traiteront aufli-bien que l’ancienne, dont elles foufrent fans peine que la.royauté foit partagée; elles reçoi- vent avec plaifir l'aflürance d’unepoftérité plus nombreufe. Si la fécondité eft fi honorée chés les Abeilles, l'acte de la DES SCIENCES. 25 la fécondation n’y devroit pas être aufli caché qu'un acte honteux, il eft cependant couvert d’un fi grand miftere, que tout ce qu'on a dit fur l'inviolable chafteté des Abeilles, fur leur génération extraordinaire & célefte, fur ce Roi formé d'une quinteflence de Fleurs, mille Fables anciennes & mo- dernes,en deviennent excufables: Jamais Obfervateur n’a vû un accouplement bien décidé, non pas même M. de Reaumur, avec tous Îles ftratagemes qu'il a trouvés pour voir plus que l'on n’avoit encore vü. Il a mis enfemble un Mâle & une Fémelle tête. à tête , ce qui n'étoit pas aifé. Le Mäle a toûjours été très-indifférent & très-froid, & tout au contraire de ce qu'on auroit dû attendre, ç’a été la Fémelle qui lui a fait toutes les avances, mille careffes des plus tendres, quelquefois même de Ja der- . niére immodeftie entre Mouches, le tout inutilement. Il eft vrai que la Fémelle étoit bien pleine d'Œufs, & le Bourdon peut avoir été aflés délicat pour la dédaigner, mais en ce cas la Reine avoit donc tort, ou du moins peu d'honneur. L'expérience a été répétée & variée ; toûjours la même indifférence des Mâles à peu-près , & parfaitement la même ardeur des Fémelles. L'aventure a fouvent une fin tragique pour les Mäles ; ils meurent, on ne fçait pas trop de quoi, fi ce n'eft de honte. Peut-être cependant avoient-ils déja fait leur devoir, & méritoient-ils qu'on les laiffât en repos. : Pour mieux éclaircir cette. importante particularité de l'Hiftoire de nos Mouches,, M. de Reaumur a jugé qu'il fau- droit avoir une Fémelle vierge, & il croyoït en tenir une dans la Cellule où elle éclorroit, mais par je ne fçais quelle fatalité attachée à ce fujet, il ne la tenoit point, & l'expérience ne fe put faire. Quand on la fera, ne feroit-il pas bon que ce fût aufli avec un Bourdon vierge ? on s’aflüreroit de leurs difpofitions mutuelles dans cet état d'innocence. En attendant, M. de Reaumur n'a pas laiflé de voir une jeune Fémelle dans une telle attitude avec un Mile, & fe donnant de tels mouvements, qu'il a pu croire qu'elle fe chargeoit elle feule de tout ce qu'il y avoit de laborieux Hifl. 1740, . D 26 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE dans l'accouplement. Cela n’a duré qu'un inflant, mais com- bien d'accouplements d'Oïfeaux ne durent pas davantage ? Il auroit donc déja trouvé ce qu'il cherche encore, & il ren- droit raifon de l’indolence des Bourdons, en difant que comme ils font en grand nombre par rapport à une Reine, fouvent unique, elle feroit trop fatiguée de leurs empreffe- ments, s'ils étoient plus vifs, trop détournée de fa fonétion royale, qui n'eft que de pondre, & de pondre beaucoup. Müis il eft plus fage, plus conforme à l'efprit de {a Philo- fophie moderne, de fufpendre encore un peu fon affrma- tion {ur la maniére dont fe fait l'accouplement des Abeilles, car pour la réalité elle ne peut plus être mife en doute. L’Anatomie, que M. de Reaumur fçait employer, lui a fait voir dans les Bourdons où Miles un appareil de Vaifleaux qui contiennent une liqueur laiteufe, dont l'ufage ne peut être que de féconder ces Æufs fi apparents, fi vifibles, & renfermés en fi grande quantité dans le corps des Reines. On ne voit dans celui des Abeïlles communes ni ces Œufs, ni les Vaiffeaux laiteux, nuls indices de fexe. A cela fe joint Yanalogie des Guëpes, qui font du genre des Abeilles, qui en ont les propriétés générales, qui ont comme elles par rapport au fexe trois différents ordres, des Mäles, des Fé- melles, des Guêpes qui ne font ni l'un ni l'autre, & chés qui l'accouplement des Mäles & des Fémelles eft conftant, Les Abeïlles fçavent fi-bien qu'elles ont entr’elles ces trois ordres, & quelle eft la proportion de nombres qu'ils gardent à peu-près entr'eux, que dans la conftruction de leurs AI- véoles elles ne manquent pas d'y avoir égard, nous l'avons déja dit. Mais ce qui eft fort à remarquer, c’eft que les Alvéoles deftinés aux Œufs, d’où il éclorra des Reines, les Cellules Royales, comme dit M. de Reaumur, font d’une ftruéture tout-à-fait différente de celle de ces exagones d'où fortira le menu peuple, ou des exagones peu réguliers &c plus grands qui renfermeront des Mâles. Les Cellules royales font des efpeces de Gobelets affés ronds, plus profonds & plus amples que leur ufage ne femble le demander, & où DES SCIENCES. > avarice des Abeilles fe dément pour honorer les futures Reines. Ces Cellules font quelquefois fufpenduës aux bords des Gâteaux, quelquefois pofées & couchées fur la furface même d'un Gâteau, de maniére qu’elles en boùchent plu- fieurs Alvéoles, & les rendent inutiles, tant ces Mouches deviennent prodigues en cette occafion. Mais après qu'elles en ont ufé fi noblement, comment les Reines en profitent-elles dans leur ponte ? comment {ça- . vent-elles qu'elles vont pondre un Œuf royal pour aller le dépofer précifément dans la Cellule qui lui convient ? Elles fentent peut-être qu'un Œuf qui fe préfente pour fortir, eft d'un plus gros volume qu’à l'ordinaire, mais cela feroit équi- voque entre un Œuf royal & un Œuf Mile. H faut encore un fentiment plus fin, tiré ou de la différence des volumes de ces deux efpeces, ou de quelque différence de figure ; il y aura toûjours à quelque chofe de bien fubtil. H eft à remarquer qu'une Reine ayant pañlé l'Hiver dans une Ruche où certainement il n’y avoit aucun Mäle, pondra dès le commencement du Printemps fuivant, & par confé- quent en vertu d’une fécondation qu’elle ne peut avoir reçûüë que quelque fix mois avant cette ponte. Dans l'année pré- cédente elle avoit pondu auffi en vertu de cette même fé- condation, & fix mois plütôt. Ces Œufs d’Abeiïlles ne font donc pas, comme chés les grands Animaux, deftinés à {ortir tous après la fécondation dans un certain temps déterminé à peu-près & égal. Is n'acquiérent que dans des temps fort inégaux fa maturité qui leur eft néceflaire; apparemment ils ceflént d'en acquérir pendant tout l'Hiver. Par un calcul de M. de Reaumur , une Reine peut pondre 200 Œufs par jour, dans les temps favorables, qui peuvent comprendre plus de 100 jours de l'année, | Réguliérement elle ne pond qu’un GÆuf dans chaque Cel lule, & ce n'eft qu'après l'avoir vifitée, pour s'aflürer fr elle “eft bien vuide & bien nette, Si cependant il ne fe trouve pas aflés de Cellules pour füuffre à la fécondité de la Reine, sil y en a un trop grand nombre, remplies de provifions t D ji 28 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE de Miel déja faites pour l'Hiver, il y aura deux Œufs dans une même Cellule, très-rarement trois, parce qu'en effet une Cellule n’a que l'efpace néceflaire pour contenir la Mouche de fa grandeur dont elle fera quand elle viendra à en fortir. Quelquefois des Cellules où l'on avoit vû deux Œufs, fe font trouvées le lendemain n’en avoir plus qu'un. Les Abeïlles pouvoient avoir tranfporté les Œufs furnuméraires dans des Cellules nouvellement conftruites ; elles pouvoient auffi les avoir fait périr, car elles font cruelles en quelques occafions, & la cruauté eût été excufable en celle-là, où deux petits Animaux étoient en grand danger de périr Fun par l'autre, à moins qu'on ne facrifit l'un des deux. En deux jours il éclôt de l'Œuf un petit Ver blanc, qui fe tient dans le fond angulaire de fon Alvéole, & à mefure qu'il croît, fe roule fur lui-même, de forte que les deux extrémités de fon corps fe touchent. On le trouve couché fur une efpece de Bouillie, ou de Gelée, qui lui fournit non feulement un lit bien commode & bien doux, mais encore, felon toutes les apparences, fa nourriture. Elle lui doit être apportée par les Abeilles que lon voit qui vont examiner avec foin les Cellules à Œufs, ou à Vers, & dont l'inten- tion eft d'autant mieux marquée, qu'il y a-telles de ces Cellules où elles entrent & féjournent quelque temps, pen- dant qu'elles ne font que paffer légerement fur d’autres en y donnant feulement un coup d'œil; ce feront celles où il ne manque rien. La quantité de nourriture eft proportionnée à l'accroife- ment du Ver, nouvel indice d'intelligence. Bien plus, M. de Reaumur, en regardant de près cet aliment, & en le goûtant même avec la langue, fa trouvé différent & en couleur & en faveur felon l’âge des Vers. Il paroïît qu'il ne peut être tiré que des entrailles des Abeilles, qui feront véritablement Nourrices, fans pouvoir jamais être Meres. Le Ver parvenu à fa jufte grandeur, devient Nimphe, & puis Mouche, & auffi-tôt débarraflé de fa dépouille, il fort de fon Alvéole, & prend part au travail commun, dont il D'ES S CH E N CES." 29 n’a eu befoin de faire aucun apprentiffage. 11 n’y a qu'environ 20 jours d'intervalle entre fa naïflance & fon état parfait. Ï peut {ortir en un jour 100 Mouches, chacune de fon Alvéole. On en détermine le nombre par celui des Alvéoles, dont on voit d’un jour à l'autre que les Couvercles font percés ou renverfés, ces Couvercles de Cire que les Abeilles avoient eu foin d'y mettre, lorfque les Vers n'ayant plus befoin de nourriture, étoient prêts à fe transformer en Nim- phes & en Mouches. Ce même foin s'étend jufqu'aux Alvéoles où font ren- fermés les Vers qui deviendront Bourdons. On voit aflés combien ils font importants à l'Etat, & chers par conféquent aux judicieufes Abeilles Ouvriéres. Mais ils ne le font que par leur fonction, & dès qu'ils l'ont fuffifamment exercée, ce qui ne dure guére que trois mois, à compter du commencement du Printemps , toute l'obligation qu’on leur a euë, eft entiérement oubliée, ils font devenus inutiles, ils feroient deformais à charge, en confu- mant une partie-des provifions, ils ne font plus dignes de vivre, & on les maffacre tous fans miféricorde. Ce procédé ingrat & barbare eft encore lâche par le grand avantage de ces Abeilles armées de bons Aiguillons contre les malheu- reux Bourdons, qui n'en ont point. Quelquefois ces mêmes Abeilles qui ne font qu'une feule famille, & qui paroifient fi unies entr'elles, ne laifient pas de fe fervir auffr de leurs Aïguillons contre leurs propres Sœurs. Affés fouvent ce font des Duels, deux Abeilles for- tent de leur Ville pour fe battre plus librement, chacune cherche à fe mettre fur l’autre dans le deflein de choifir mieux l'endroit où elle la percera, & d’enfoncer mieux fon Aiguillon. Le fujet de leurs combats n'eft pas aïfé à deviner. M. de Reaumur croit en avoir deviné un, par la maniére dont la querelle fe termina. Trois ou quatre Mouches en attaquoient une feule, dès que celle-ci eut fuccombé, elle préfenta fa Trompe pleine de Miel aux viétorieufes, qui la vinrent fucer, & il ne fut plus queftion de rien. D iÿ o HisTOIRE-DE L'ACADEMIE ROYALE mS. y a aufli des actions générales, des combats de deux Troupes plus où moins nombreufes, & c'eft principalement dans le temps des Æffains que s'allument ces fortes de guerres. La fécondité des Meres, qui en ont le plus, a été fuf- penduë pendant l'Hiver, & de plus une Ruche a toüjours perdu beaucoup d'habitants, foit par le froid, foit par la faim. Au retour du Printemps la Mere reprend fon emploi, & comme il ne faut à un GÆuf que trois femaines au plus pour devenir Mouche parfaite, bien-tôt il fe retrouve de nouvelles Ouvriéres qui raniment tous les travaux, & même, ce qui eft encore plus important, il eft né de ces nouveaux Œufs, & de jeunes Meres & de jeunes Bourdons, car il ÿ avoit long-temps qu'on s'étoit défait de tous ceux de l’année précédente, & toute cette jeunefle s’étoit vivement employée à Ja multiplication. Il ne fera donc pas étonnant qu'une Ru- che ne puifle plus contenir & fes anciens Habitants & les nouveaux, & qu'il y en ait un grand nombre qui foient obligés d'en fortir pour aller s'établir ailleurs. C’eft-là ce qu’on appelle un Eflain, & on dit que la Ruche « jeté. Quand un Effain, qui cherche fortune, veut s'emparer d'un ieu déja occupé par d'autres Abeilles, d'une Ruche bien peuplée, il y trouve aflés fouvent une vigoureufe réfiftance, & c’eft dans ces Guerres civiles que fe donnent les grandes Batailles. Un Effain ne fort point qu'il n'ait une Reine à fa tête, & cela eft à tel point que M. de Reaumur ayant été furpris de n’en point voir fortir d’une Ruche fr peuplée, qu'elle de- voit être devenuë une habitation très-incommode, & ayant foupçonné que le manque de Reine en étoit Ja caufe, trouva en effet par le bain de toute la Ruche, qu'une nouvelle Co- lonie ne pouvoit avoir de Chef, c'eft-à-dire, de Mere qui leur aflürât cette poftérité dont elles font fi paflionnées.. Au- roient-elles travaillé fans Mere, elles qui fe laiflent mourir quand elles n'en ont pas? Mais la feule efpérance d'une Reine ne fufhroit-elle point pour les engager au travail? C’eft une épreuve délicate dont leur Obfervateur les a jugées dignes. Il a pris un aflés grand :11DEÆES SCIENCES. 31 nombre d’Abeilles fans Reine, & ïl les a logées dans une Ruche avec quelques Cellules royales où un Œuf étoit en- fermé. Les Mouches ont bien-tôt fenti ce qu'elles avoient à efpérer, elles ont travaillé, mais feulement fur e pied d’une chofe incertaine, un peu mollement, & elles n’ont com- mencé à s’y comporter de la bonne forte que quand les Œufs royaux ont été éclos. Quand on voit que le travail eft fanguiflant dans une Ruche, c'eft une marque qu'il en va fortir un Effain. I femble que la réfolution en ait été prife dans un Confeil de 1 Nation, le jour fixé, & que jufque-là il fuffit de fubvenir aux befoins actuels & preflants. Quatre ou cinq jours après qu’une Fémelle eft née, elle eft en état d’être Reine, & de commander un Efain. Comme toute fa dignité confifte dans fa fécondité, il y a beaucoup d'apparence que dès qu'elle eft fortie du Nid, elle fe fait rendre habile à porter la Couronne par le miniftere des Bourdons, car il ne paroît pas qu’il en forte avec les Effains, du moins avec tous les Eflains, & d'ailleurs dès que l'Eflain eft établi où il doit l'être, la Reine fait fon devoir de pondre, Il: peut arriver qu'un Eflain ne foit compofé que d’une génération toute nouvelle, mais ce n'eft pas-là une Régle, De vieilles & de jeunes Abeilles fortent enfemble pour aller fonder une Colonie; on reconnoiît leur âge prefque fürement à leur couleur feule, les vieilles font plus rougeâtres. Les Reines mêmes font à cet égard comme les autres. Il eft plus commun qu'un Efain foit conduit par une jeune Reine. Mais il eft poflible qu'il le foit par deux, & même par trois. Qu'arrivera-t-il en ce cas-là? on ne l'eût peut-être pas deviné; il en coûtera la vie aux Reines qui feront de trop, il n’en reftera qu'une feule. Sont-ce les Abeilles Ouvriéres qui ont tué les Reïnes fur- numéraires ? s’eft-il paflé un combat entre les Reines rivales ? on ne fçait encore ni lun ni l'autre. Il ya pourtant plus de lieu de croire que c’eft le premier. Les Abeilles veulent de la poftérité, c’eft leur unique defir, mais elles n’en veulent 32 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE qu'une proportionnée à la force qu'elles ont de travailler pour la loger & pour la nourrir. Le furplus les outreroit de fatigue fi elles entreprenoient d'y fournir, ë en cas qu elles n'y réuffiflent pas, toute la Nation en fouffriroit beaucoup. Elles ont mieux aimé prévenir ces inconvénients, en fe dé- faifant de quelques Reines, qu'elles comptent:.qui n'étoient faites que pour le bien commun, & qui doivent y être facri- fiées dans les occafions. Si cette grande raifon ne demandoit pas ce facrifice, plu- fieurs Reines feroient donc fouffertes dans un Etat ? Auffi le font-elles quelquefois, & même des Reines étrangeres aux- quelles on n'étoit point accoûtumé, Les 1 $ premiers jours du nouvel établiffement d’un Efain dans une Ruche, font ceux du travail le plus vif, il fe trouve quelquefois autant d'ouvrage expédié dans ce peu de temps que dans tout le refle de la Saïfon propre à travailler. I peut fortir jufqu'à trois Eflains d’uné Ruche en une feule Saifon. IH y a tel Effain qui eft de 40000 Mouches, le Calcul en a été fait par une voye aflés adroite, & pourra l'être plus fimplement quand on voudra. Une Ruche, dont on prendra les foins ordinaires, ne haiffera pas de périr au bout de quelques années par diffé- rents accidents arrivés aux Mouches. M. de Reaumur parle d'une Ruche qui s’eft confervée pendant 30 ans, le cas doit être rare, mais 9 ou 10 ans feroient fort poffibles fi fon vouloit. Communément on ne le veut pas. Tous les ans quand les froids commencent, on fait mourir toutes les Mouches d’une Ruche en les enfumant, l'habïleté ne confifte qu'à les expédier bien fürement & bien vite, & cela pour avoir les Gâteaux de Cire qu’elles avoient faits, & le Miel dont elles devoient fubfifter pendant l'Hiver. ù Cette cruauté n’eft à compter pour rien, nous en exer- çons fans cefle de pareilles fur tous les Animaux qui ont le malheur de nous être utiles par leur mort, mais en cette occafion DES :S°Cc1EN CE: 33 *occafion nous fommes cruels contre nos propres intérêts. Nous voulons de la Cire & du Miel, & il eft vrai que nous enlevons tout ce qu'une Ruche en contient, mais cette Ruche ne nous en fournira plus ; fi nous l'avions confervée, c'eft- à-dire, f: nous en avions laïffé vivre les Mouches, il feroit forti de cette même Ruche un Eflain, peut-être deux ou trois, qui auroient peuplé une nouvelle Ruche, & ces Effains en aurojent produit d'autres ; & quelle auroit été pendant dix ans, ou moins fi l'on veut, l'étrange multiplication de Mouches toutes originaires de la feule premiére Ruche, & qui toutes auroient donné de 1a Cire & du Miel? A la vérité, il n'auroit pas fallu enlever de la premiére Ruche tout le Miel & toute la Cire, on n’auroit pu en prendre qu'une partie, pour laifler le refte aux Abeilles qui en avoient befoin, mais une avarice bien entenduë auroit réprimé fa propre avidité dans la vüë d’un très-grand profit bien für, quoique moins préfent. L'entretien des Abeilles ne coûte rien, il ne leur faut que des Campagnes bien chargées de Fleurs, & fi elles font en plus grand nombre, elles ne demandent que quelques Ruches de plus, qui ne font d'aucune dépenfe lorfqu'’elles ne font deftinées qu’à leur ufage naturel, & non pas à des obferva- tions phifiques. | Les Abeïlles n'ont pas befoin de beaucoup de nourriture pendant l'Hiver, où elles ne travaillent point, & même quand le froid eft à un certain degré, elles n’en ont plus aucun befoin, elles tombent dans un engourdiffement, qui eft une efpece de mort. Dès que le temps devient plus doux, elles reflufcitent, mais elles ne peuvent pas foûtenir un grand nombre de ces alternatives, elles y fuccombent à la fin, & meurent véritablement. ; Le plus für eft donc, fi l'on veut les conferver, de les tenir chaudement pendant l'Hiver, & pour cela M: de Reaumur cherche les moyens les plus fimples & les plus aifés à pratiquer, qui rendront les Ruches impénétrables à l'air extérieur, car les Mouches fçauront bien entretenir la chaleur Hif. 1740. . E 34 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE au dedans, ne füt-ce que par le battement de leurs Ailes, qui à caufe du grand nombre en excite une aflés forte, Il y a des Pays où l'on tranfporte les Ruches d'un lieu où les Abeilles manqueroient de pâturages, c'eft-à-dire de Fleurs, dans un autre où elles en trouveront. Ces tranfports demandent encore beaucoup de précautions, dont le détail n'échappe pas à M. de Reaumur, qui veut appliquer, autant u'il eft poffible, à la confervation & à la multiplication des Abeilles la grande connoïflance qu’il a acquife de ces In- fectes. Toutes les obfervations Phifiques ne peuvent pas aboutir à ces utilités qu'on ne traite de réelles, que parce qu'elles font plus populaires & plus grofiéres, il faut hazar- der bien des Théories, dont le pis aller fera de nous éclairer & de nous inftruire beaucoup. Ous renvoyons entiérement aux Mémoires V. les M. Les Obfervations du Barometre fur différentes Mon- P-73* tagnes, par M. de Thury. L’Ecrit de M. l'Abbé Nollet fur une Vapeur qui paroît p:243° ; dans le Vuide de la Machine Pneumatique, &c. p.385. Deux Ecrits du même fur les Inftruments propres aux &567- Expériences de l'Air. P- 539° Les Obfervations du Thermometre par M. de Reaumur. p.613. Les Obfervations Météorologiques de M. Maraldi DAENS FASSENT E NU CNE: SO 25c ÉVERNEENS\S NE EE) ANATOMIE. SUR LES ACTIONS SIMULTANEES. Ï fur une ligne horifontale je veux décrire un démi-, y 1. M Cercle, en commençant par un point quelconque de de 1730. , cette ligne, & en conduifant ma main de droite à gauche, P- 14. & fi je veux décrire en même temps avéc ma main gauche un autre demi-Cercle tout pareil fur la même ligne hori- fontale, en commençant auffi la defcription par un point quelconque de cette ligne, cette action de mes deux mains enfemble s'appellera fimultanée. On voit aflés qu'il peut y en avoir une infinité d’autres pareilles, d’un doigt & d’un doigt de l’autre main correfpondant, d'une main & d’un pied, d’un bras & d’une jambe. Nous avons pris pour exem- ple une aétion fimultanée des plus fimples. Ce qu'elle a de remarquable, c'eft que fi dans le temps qu'on décrit de la main droite le demi-Cercle fuppofé, on n'a que le feul deflein d’en décrire un pareil de la main gauche fans y faire aucune autre attention, il fe trouvera certaine- ment que les deux demi-Cercles auront été décrits à contre- fens l'un de l'autre, c'eft-à-dire, que celui de la main droite ou le premier ayant été décrit felon la fuppofition de droite à gauche, le fecond le fera de gauche à droite. Et fi l'on vouloit décrire ce fecond de droite à gauche, on s’apper- cevroit que le feul deflein général de faire cette opération ne fufhroit pas, qu'il y faudroit apporter une attention con- tinuelle & pénible, & même de l'effort. Pour mieux entendre que de la maniére dont l'opération fe fait vaturellement, les deux demi-Cercles font à contre- fens lun de l'autre, il n’y a qu'à fe repréfenter que s'ils font pofés du même fens, on aura fur la ligne horifontale quatre E ÿ 36 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE points ainfi arrangés, origine du premier demi-Cercle, fin du premier, origine du fecond, fin du fecond, & qu'au contraire dans la defcription naturelle la fin du premier & la fin du fecond font placées au milieu des quatre points. En effet dans cette defcription les deux mains qui étoient d'abord à une certaine diftance l’une de l’autre, fe font toûjours rapprochées, & viennent enfin à être dans fa plus grande proximité poffible en finiflant l'opération, ce qui rend les deux fins des deux demi-Cercles confécutives fur ha ligne horifontale. Dans la defcription que j'appellerai forcée, les deux mains au contraire auroient toüjours été à même diftance l’une de Fautre, ainft que l’on peut ailément s'en convaincre, les origines & les fins des demi-Cercles auroient été rangées alternativement, & par conféquent les demi-Cercles polés en même fens. Maintenant il s’agit de fçavoir pourquoi dans l'action fimultanée de décrire les deux demi-Cercles, on les décrit naturellement & facilement à contre-fens l'un de l'autre, & avec peine feulement & par effort en même fens. Ce plus ou moins de facilité ne mérite pas le nom de phénomene, & quand on eft dañs le cas de s'en appercevoir, on ne daigne pas s’y arrêter pour en rechercher la caufe ; il y en a une cependant, & fi on veut la trouver, on reconnoîtra bien par le travail qu'il en coûtera, qu'elle étoit digne de Yattention d'un philofophe. C’eft ce que prouvera le Mé- moire de M. Winflow fur cette matiére. Ce que nous avons déja dit, quoique très -légerement, peut nous mettre fur la voye des idées qu'il s'eft faites. Dans la defcription forcée les deux mains font toûjours paralleles, dans la defcription naturelle elles ne le font jamais, donc dans cette defcription en général les deux mains trouvent plus de facilité à ne pas garder le parallelifme entr'elles qu’à le garder. Les mains ne font que les inftruments apparents de l'action, les vrais ce font des Nerfs qui ont mü les mains, & par conféquent les Nerfs qui ont mû en même temps la DES SCIENCE S. 7 ain droite & la gäuche, n’agifloient pas parallelement l'un à l'autre, du moins avec facilité. Or ils n’y feront certaine- ment pas difpolés s'ils ne font pas paralleles lun à l'autre, II faut d’ailleurs qu'ils puifent agir enfemble, & pour cela qu'ils ayent une origine commune, il faut donc qu'étant partis de cette origine, où ils pouvoient être paralleles, ils viennent à fe croifer, ce qui les met abfolument hors du parallelifme. Cette conjecture, qui conduite par ces efpeces de degrés, ne feroit que vraifemblable, devient un fait par les recherches Anatomiques de M. Winflow fur le croifement des Nerfs en queftion, déja connu & bien établi par d'autres grands Anatomiftes. Nous n’appliquons ce principe qu'à une des plus fimples d'entre ces actions fimultanées, qui font plus ailées d’une façon que d’une autre. M. Winflow le retrouve encore dans d’autres cas plus compliqués, mais le trouvera-t-on toüjours par-tout? Il y fera peut-être fans fe laiffer appercevoir affés fürement, peut-être, fera-t-il mêlé avec quelqu'autre prin- cipe encore inconnu. Ceux qui ont les plus grandes connoif- fances font les plus perfuadés qu’il deur en manque toûjours beaucoup. si SUR LES MONSTRES. E fujet n’a été traité dans l'Académie que par rapport vw. KM. à la Théorie de la formation des Monftres, & comme pages 109, cette queftion, fur laquelle on fe partageoit, produifoit plu- Se Hs fieurs Ecrits de part & d'autre, nous avons attendu qu'il y & 607: . en eût une certaine quantité, afin que le tout enfemble pût être plus facilement vû d’un feul coup d'œil. Avant que l’on eût découvert que toutes les générations # font par des Œufs, les Phificiens n’ont rien dit fur les Monflres qui pût appartenir à la véritable Phifique, ïls ne des ont traités que comme des erreurs & des méprifes de la Nature, qu'il falloit en quelque forte lui pardonner, & qui E ïÿ 2 V. les M. p.418. ED 20: © p. 366. SP. € p.260. & LEE 38 Histoire DE L'ACADEMIE ROYALE ne méritoient pas leur attention, ou ne méritoient que de l'horreur. Dans la fuite, le Sifleme des Œufs étant connu, on a vû que la formation générale des Monftres doubles pouvoit s'expliquer par deux Œufs que quelqu'accident auroit unis ou confondus dans la Matrice d’une Fémelle, & en effet cette formation s'offre d'elle-même aux yeux dans un grand nombre de Monftres, tels que deux Enfants unis enfemble par le Front, ou par le Dos, &c. & du refte bien féparés. Mais il arrive fouvent que cette formation ne foit pas fr fenfible. Des parties, foit externes, foit internes, irréguliére- ment conftruites, mal arrangées entr'elles, déplacées, tantôt fimples, tantôt doubles, &c. ne paroïffent pas s'accorder avec ce Sifleme, & de grands Anatomiftes, tels que M.'s du Verney & Winflow, ne croyant pas y pouvoir appliquer tous les faits qu'ils avoient fous les yeux, ont fuppolé des Œufs originairement monftrueux, dont le développement auffr régulier que celui de tous les autres, donneroit ce que nous appellons des Monftres, & ces Monftres feroient autant de la premiére intention de la Nature que les Animaux plus ordinaires qu'il nous plait d’appeller parfaits. On a vü fur cette matiére les Ecrits de M. du Verney en 17062, de M. Lémery en 1724P, de M. Winflow en1733° &1734%, de M. Lémery en 1738 <. M. Lé- mery a toujours combattu & combat encore ici pour le Sifteme des Monftres devenus tels par l'union ou confufion accidentelle de deux Œufs contre le Sifteme des ŒÆufs origi- nairement monftrueux. Le premier Sifteme a befoin d’être prouvé par la vrai- femblance qu'on y trouvera, par fa convenance avec des vérités certaines, & fur-tout par des réponfes nettes & fatis- faifantes à toutes les difficultés qu'on lui oppofera, & qui ne manqueront pas de fe préfenter en grand nombre & fouvent très-fortes dans la quantité prodigieufe de faits furprenants & inoüis dont on fera accablé, Pour le fecond Sifteme, il eft exempt de toute cette incommodité & de tous ces embarras, DES SCIE NICE Ss 39 il n'a par lui-même rien à prouver, rien à éclaircir, il eft établi dès qu'il a fait tomber l'autre. On ne rend pas plus raifon pourquoi un Fœtus a deux Têtes, que pourquoi il n'en a qu'une ; c’étoit la conftruction primitive, on en eft quitte pour ce mot, & l’on a vü encore en d’autres occa- fions que des idées très-peu philofophiques ont réuffi par {a grande facilité qu’elles donnoient d’expédier tout à peu de frais. Puifqu’il faut des preuves au premier Sifteme, & des réponfes à ce qu'on lui objeéte, nous allons tâcher de raffem- bler ici, mais fort en abbrégé, tout ce qui en eft répandu dans les Mémoires de- M. Lémery. IL y a des Monfires parmi les Plantes, deux Troncs, qui font vifiblement deux, & qui n’en font qu'un, des Branches qui fe font unies, quelquefois pour ne fe plus féparer, quel- quefois en fe croilant, &c. La Greffe même, fi commune & fi ufitée, peut pafler pour quelque chofe de monftrueux, puifque deux Plantes tout-à-fait différentes s’y unifent de Ja façon la plus intime. 11 eft bien certain cependant que tout cela ne fe fait que par des caufes accidentelles, & qui de plus ont agi fur des matiéres beaucoup plus dures, & par conféquent avec moins de facilité que celles qui auront pro- duit les mêmes effets fur des Embrions d'Animaux. Des Animaux de différente efpece, comme un Chat & une Chienne, font des Monftres. On ne peut attribuer cette production qu'à des caufes accidentelles ; on n’imaginera pas qu'il y eût des Œufs originairement monftrueux, préparés pour laccouplement fortuit du Chat & de la Chienne, & qui l'attendiflent. Il eft même très-difficile d'imaginer quelles ont été ces caufes accidentelles, mais on eft bien für qu'il ne peut pas y en avoir eu d’autres, & combien doit-on à plus forte raifon les admettre dans le cas de l’accouplement de deux Animaux de même efpece, où elles font quelque- fois prefque vifibles? Non feulement elles le font affés fouvent dans des cas fim- * ples, mais leur opération en général eft très-facile à conce- Voir. Quand un Œuf commence à fe développer, l'Embrion 4o Hisroire DE L'ACADEMIE RoyaLE de l'Animal, qui n'a qu'un très-petit volume, n'éft prefque qu'une goutte de liqueur, organifée cependant , ayant déja prefqu'en infiniment petit, tout ce que l'Animal aura un jour en grand , avec les mêmes proportions & les mêmes connexions. Tout cet Edifice, auffr compofé que l'Animal, eft donc d’une finefle & d’une délicatefle extrême, & de plus il eft d’une matiére aflés glutineufe, ce qu'on n'aura pas de peine à fuppofer. Que deux Embrions pareils viennent à fe rencontrer, un fimple contaét fans rien de plus fufhra pour les coller enfemble, & fi le point de leur rencontre étoit le front de l'un & de autre, il viendra au jour un Monflre, deux Enfants unis par le front. S'ils ne fe font pas fimplement touchés, fi quelque caufe étrangere les a preflés Fun contre l'autre, les deux petites Machines s’endommagent, fe brifent mutuellement, & enfin fe détruifent totalement, fi la preflion a été aflés forte ou aflés continué ; il ne reftera que des ruines & des débris, dont tout le volume n'excédera peut-être pas celui d’une groffe tête d'Epingle. Mais fi la preflion a été moins forte ou moins longue, il ne fe fera de deftruétion mutuelle que dans un certain nombre des parties de l'un & de l'autre Embrion, tout le refte fubfiftera, & pourvû que ce refte puifle être condi- tionné de façon à prendre la vie pour quelque temps, il naîtra un Monftre compofé de parties, les unes fimples, les autres doubles contre nature, de parties ou trop grandes, ou trop petites, déplacées, mutilées, &c. car on voit aflés quelle infinie variété doit s’enfuivre de cette demi-deftruc- tion, felon la force différente de la preflion, felon le temps qu'elle a duré, felon les endroits qui ont été fucceflivement attaqués. H ne faut pas fe repréfenter les deux Embrions qui fe dé- truifent à demi l’un l'autre, comme deux Animaux qui ne different qu'en grandeur d'avec des Animaux venus au jour. Ils en different plus effentiellement , en ce qu'ils peuvent n'avoir pas encore toutes leurs parties développées, ou en ce qu'ils DES SCIENCES. 41 qu'ils les auront plus où moins développées les unes que les autres; car, comme on l'a vûü dans l'Hift, de 1739 * d'après M. Lémery même, & dans celle de 1701*, le développe ment du Fœtus.eft non feulement fucceffif, ainfi qu'il doit l'être naturellement, mais inégalement diftribué entre fes différentes parties; cela dépend de fon âge. Par-là on con- çoit aifément que telle partie qui aura été détruite par la preffion mutuelle de deux Fœtus, ne l'aura pas été par une preffion parfaitement égale de deux autres, parce qu'elle n'exiftoit prefque pas encore dans ces deux derniers, qu'on fuppofera plus jeunes. Il fe peut auffi que deux Embrions de différent âge, fe choquent ou fe preffent de façon que ce quisaura été détruit dans Fun, ne le foit pas dans l'autre. IL fuffroit même de la feule différence de force avec un âge égal. Il doit naître encore de ces principes généraux beaux coup de variétés. Les Monftres le font ordinairement par un affemblage irrégulier de parties , les unes fimples & uniques comme dans les Animaux parfaits, les autres doubles au lieu d’être fim- ples, deux Cœurs, deux Foyes, &c. Ces parties doubles marquent aflés évidemment l'union de deux Œufs ; pour les fimples, on eft d'abord frappé de l'idée qu'elles ne font que celles de lun des deux Fœtus, les correfpondantes ou pa reilles ayant été détruites dans l'autre. Cela eft auffi fort poffñble, & quelquefois vrai, mais il y a encore une autre maniére de concevoir la formation des parties fimples. Que deux Cœurs, par exemple, pofés l’un à droite, l'autre à gauche, fe prefent de façon que la moitié gauche du pre- mier agifle contre la moitié droite du fecond, & récipro< quement, ces deux moitiés pourront fe détruire l’une l’autre, & fi la preffion cefle précifément quand les deux Cœurs ayant perdu chacun une moitié, feront parvenus à fe toucher par leurs deux lignes du milieu ; fi de plus on les fuppofe tous deux, comme ileft vrai, d'une matiére très-propre à fe coller :enfemble, on verra aifément qu'il en doit rélulter un feul Cœur, qui n'aura rien que de naturel. Sa Veing Hÿfl 1740. .F * p. 4. &f. *p. 19.& 42 HisTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Cave & fon Artere Pulmonaire fortiront de fon Ventricufe droit, fa Veine Pulmonaire & fon Aorte du gauche, &c. car c'eft-là une fuite de ce que le côté gauche du premier Cœur & le droit du fecond ont péri. Ce ne feroit plus fa même cholfe, fi les deux Cœurs n'avoient pas été d'abord pofés de maniére que leurs deux faces correfpondantes, les antérieures , fi l'on veut, regardaflent dû même côté; cela eft aflés clair pour peu qu'on y faffe attention. Deux parties plus creufes que le Cœur, deux Eflomacs, deux Veflies, peuvent de même n’en avoir fait qu'une, pourvû que le hazard ait voulu que les conditions nécef- faires pour cette jonétion fi intime fe foient rencontrées affés jufte, que, par exemple, deux Veflies fe touchant latérale- ment, ayant leur Col ou leur fond tourné du même côté, fe retrouvent, après avoir perdu chacune une moitié, appli- quées l’une contre l'autre par deux efpeces de circonférences circulaires, & adaptées de façon qu'elles ne forment plus qu'une feule cavité égale à celle que renfermoit auparavant chaque Veffie entiére en particulier, . I n'eft pas furprenant qu’en ce cas-là les petits Vaiffeaux d’une des moitiés fubfiftantes s’anaftomofent, s'embouchent avec ceux de l'autre moitié fubfiftante auf. Les Sucs, qui font en mouvement, puifque les Embrions fe développent, ne peuvent manquer d'entrer dans des routes qu'ils trouvent ouvertes, & c’eft-là ce qui identifie le plus, pour ainfi dire, ces deux moitiés, qui n'étoient pas faites originairement pour appartenir à un même Tout. Mais il faut pour cet effet ue les deux Veflies, qui repréfenteront tous les autres cas femblables, fe foient rencontrées dans une certaine pofition aflés précife, prefqu'unique entre une infinité d’autres éga- lement poffibles, & il doit être rare que le hazard foit fi favorable à ces fortes d'unions, & par conféquent qu'il fe forme des Monftres. Quand il s'en forme, en qui quelque partie étant unique, a été compolée de deux moitiés rapportées de deux diffé- sents Fœtus, il feroit trop difficile que cet affemblage fortuit AAAPOIETEMIS OR E NICE 43 e fût fait avec tant d’exaétitude, qu'il n’y parût point du tout. ‘Un Cœur, une Veflie, ainfi conftruits, s’écarteront peut-être beaucoup de la figure naturelle qu'ils euflent dû avoir. Les Monftres vivent quelque temps, du moins dans {a Matrice, fans quoi ils ne feroient pas Montres, ou échap- peroïent entiérement à notre connoiflance. Si l'on imagine en général ce qui arrive dans le choc violent de deux Œufs, qui fe pénetrent & fe brifent mutuellement, on concevra plus aifément que toutes leurs parties fe détruifent les unes les autres, & deviennent incapables de leurs fonctions natu- relles, que l'on ne concevra qu'il y en ait dans ce débris un aflés grand nombre qui fe raflemblent affés heureufement “pour compofer un Tout vivant, quelqu'imparfaite & quelque courte que doive être fa vie. Cela arrive cependant, & c'eft une preuve que la Nature a pris fes mefures bien jufte, & s'eft ménagé bien induftrieufement des reflources pour ne pas manquer de donner la vie aux Animaux. Ceux qui n'ont pu jouir que de fes plus foibles moyens, & de fes derniéres reflources , font les Monftres, & comine on voit, ils ne peuvent être que rares. On remarque qu'ils le font moins dans les Efpeces où les Fémelles ont ordinairement plufieurs Petits à la fois, ce qui eft bien conforme auSifleme de l'union accidentelle des Œufs. Quand une partie fe forme de deux piéces rapportées, il eft à préfumer que ce font deux piéces de deux parties fem- blables entr'elles ; un Cœur, par exemple, fera formé de deux demi-Cœurs, une Veffie de deux demi-Veffies; car la récompofition doit être précédée de deux demi-deftruétions, & ces deftructions ne peuvent être caufées que par une pénétration mutuelle, qui aura rompu & anéanti tout le tiflu éffentiel à ces parties. Or comme elles ne font que de petits liquides, quoique déja organifées, il fe peut que deux parties diffemblables, comme un Cœur & une Veffie, foient deux liqueurs telles que l'Eau & Huile, qui ne foient pas propres à fe pénétrer ; & pour mettre l'exemple dans des parties qui püiffent fe rencontrer plus aifément, un Eflomac qui eft tout Fi Histoire DE L'ACADEMIE ROYALE mufculeux, & un Foye qui eft tout glanduleux, pourront être trop hétérogenes. É Quant à la preflion que nous avons toujours fuppofée pour caufe des unions ou pénétrations, if eft prefqu'inutile de dire qu'elle viendra ou des contractions fortuites de {æ Matrice, ou des Paflions Hiflériques, &c. car il fuffit d’en- vifager en général le grand nombre de maniéres dont cet effet peut être produit. Pour prouver le Sifleme de Ia preflion accidentelle, M. Lémery set principalement appuyé fur un Monftre, qui effectivement femble le préfenter écrit par les mains de la Nature. C’eft celui de 1724 à l'endroit cité ci-déflus, & dont nous ne répéterons point la defcription, qui fufhra au moyen de quelqu'addition, & de quelque réflexion qu'on y va faire, Deux Foœtus étant pofés latéralement l'un contre T'autre, & preffés toûjours également, de forte que leurs Epines du dos en s'approchant l'une de l'autre, demeurent paralleles entr'elles, & par conféquent auf les deux Cavités renfermées entre les Côtes qui s’attachent de part & d'autre à chaque Epine, il eft évident que les deux Epines ne peuvent s'appro- cher fans que toutes les parties contenuës entr'elles, & qui s'oppoloient à leur approche, foient détruites ; & fi enfin les deux Epines viennent à fe joindre, & que la preffion cefle à, toute une moitié d’un Fœtus, & toute une moitié de l'autre, c'eft-à-dire, les deux moitiés internes qui fe font touchées, auront péri, & les deux externes fe feront confer- vées bien entiéres. De-là naît un Monftre à deux Fêtes, car les Têtes ne fe font point rencontrées, & c'eft tout ce qu'il a de monitrueux ; du refte il n’a que deux Bras, deux Jam bés, &c. un Cœur, une Veffie, &c. tout à l'ordinaire, car pour les Bras & les Jambes, par exemple, on voit aflés que cela étoit dans la moitié externe de chaque Fœtus, & hors d'atteinte à l'égard du choc, & pour le Cœur, la Veffie, & autres parties fituées au milieu du Fœtus, elles ont'été faites de deux moitiés prifes, l'une d’un Foœtus, qu d'un côté, # :2D, € SrHS 4 GILE NACuE ;Se sYIT 45, Yautre de l'autre. C'eft cette formation proprement qui eft monftrueufe, & ce qui en rélulte ne le paroît point, les deux Tètes fe font formées très-naturellement, & äl n'y a qu'elles ici qui faffent le Monftre; tout le refle.eft parfaite- ment dans l'ordre. Mais fi la preflion n’a pas été auffi égale & auffi uniforme qu'on l'a fuppolée, fi, elle a été en augmentant ou en dimi- nuant, mais avec uniformité, il viendra un Monftre difié- rent. Les deux moitiés internes des deux Foœtus n'auront pas, été, dans, toute leur, étenduë également détruites, mais toû- jours plus ou moins vers le haut que vers le bas des deux Epines, felon que la preffion aura été en croiflant ou en décroiffant du haut vers le bas. De-là il arrivera que dans les endroits où elle aura été plus foible, il fe trouvera des parties doubles , & par-là,monftrueufes, qui dans.la pre miére fuppofition étoient fimples, parce qu'alors.elles étoient formées de deux moitiés rapportées de chaque Fœtus, au lieu qu'ici ces parties fe feront confervées entiéres chacune dans le fien. Que fi la preffion eft parvenuë jufqu’à elles mais trop foible.pour.enlever une: moitié ou.à.peu-près de cha- .cune, elle fera au moins des deux une partie unique, monf. irueufe en grandeur. | Le Monfre de 1724 dont M. Lémery a confervé le Squelette, qui lui a été. d'un, aflés grand ufage, étoit ur Monument remarquable de cette inégalité de preffion.. Les deux Epines_plus éloignées d'abord l'une de l'autre par le haut, alloient toujours en fe rapprochant vers le bas, & finifloient par {e joindre. La preffion avoit donc été toüjours en,croiflant du haut vers le bas, ou en décroiffant du bas versie haut, felon qu'elle avoit commencé par le haut ow . par le bas, ce qui.n'eft de nulle conféquence quant à préfent. Les parties qui ,occupoient le haut des deux cavités renfer- “amées dans les Côtes des deux Epines, ont donc été moins pouflées les‘unes contre les autres que celles d'embas, & -c'eft précifément ce qui eff atteflé par leifait; deux Poumons, deux Trachées , deux Œfophages. Le Cour dé unique; BF 46 Hisromme pr L'ACADEMIE Roÿare mais beaucoup plus grand & de figure moins réguliére que: dans l'état naturel, marque évidente qu'à l'endroit où il eft placé, la preffion commençoit à être aflés forte pour unir feulement ou confondre imparfaitement les parties. Paflé le Cœur, prefque tout étoit fimple, la preffion avoit été dans toute fa force. On a déja dit en 1724 de quoi étoit rempli l'intervalle que laifloient entr'elles les deux Epines avant que de fe tou- cher. Il partoit du côté interne de chaque Epine de petits ©s plus longs dans le premier ou plus haut rang que dans le fecond, dans le fecond que dans le troifiéme, & toûjours ainfi de fuite, qui fembloient s'être unis au milieu de l’efpace où ils étoient, & s'y être arrêtés l’un l'autre, qui fortoient des endroits d'où doivent fortir des Côtes, & qui fe trou-* voient au nombre de douze comme des Côtes, refles évi- dents de Côtés qui s'étoient mutuellement détruites, mais non pas entiérement, & dont la deftruétion imparfaite a été la premiére origine de tout ce qu'il y a eu enfuite de monftrueux. I naquit à Lyon un autre Monftre du même caractere; deux Têtes, les parties fupérieures doubles, les inférieures fimples. Ses deux Epines étoient par le haut beaucoup plus écartées que celles du Monfire de M. Lémerÿy, & on ne fera pas furpris qu'il eût deux Cœurs, & que le Diaphragme, qui étoit parfaitement fimple dans le premier, portât dans ce fécond une marque fenfible d'avoir été fait de deux piéces ; : c'étoient deux Centres nerveux au lieu d’un, & chacun d'eux devoit fürement appartenir à un Diaphragme différent. M. Lémery a bien fçu profiter de la comparaifon de ces deux Montres, qui heureufement ne différoïent que par la diffé: rénte force des preffions qui les avoient produits, Ce que lun pouvoit laiffer douteux ou obfcur, l'autre l'affüroit où Féclaircifoit. Puifque dans les deux Monfires les parties inférieures étoient fimples , les Inteftins létoient auffr, c'efl-à-dire, ce Canal unique fix où fept fois plus long que FHonime r'eft TUIDÉE s11Src'r/E N'cCiE NS Haut, roulé de tous des fens, à droite, à gauche, en enhaut, æn embas. Toutes ces circonvolutions, tous ces tours & retours étoient parfaitement dans l’ordre naturel & commune On conçoit aflés comment un Cœur peut: fe former de deux demi-Cœurs, une Vefle de deux demi-Veffies, deux moitiés 4 feront adaptées l'une contre l'autre du fens qu'il aura fallu: mais on a plus de peine à imaginer que deux longs Canaux Jnteflinaux, pris dans leur tout, & avec toutes leurs circon- volutions, ayant été coupés en deux, toutes les parties de Canal ouvertes d'un côté, & toutes les parties pareilles & correfpondantes ouvertes de Fautre, viennent à s'aboucher & à s'unir enfemble, comme le demande le Sifteme des Caufes accidentelles de M. Lémery. Il eft vrai que felon ce Sifteme, les portions quelconques de circonvolutions, celles. qui doivent être placées foit à droite, foit à gauche, foit plus haut, foit plus bas, fe trouveront précifément comme dans l’état naturel, les deux Foetus étant fappofés , ainfi qu'ils le font toûjours ici, regarder du même côté, & c'eft déja une fuite heureufe du Sifleme, Mais ik veut auf qu'il fe fafle un fi grand nombre d'unions de: bouts -d'Inteflin, & cela tout à la fois & avec une extrême juftefle, que l'ima- gination en eft effrayée: … : Aufli d'habiles gens ont-ils bien appuyé fur cette diffi- culté en faveur du Sifteme des Œufs originairement monf- trueux, & d'autres fans abandonner le Sifteme:des Accidents, ont voulu prendre fur ce poñit une idée différente de celle de M. Lémery. Hs ont eonçû que des: deux Canaux Intefti- naux qui doivent s'unir, l'un avec toutes fes circonvolutions alloit fe pofer exactement fur autre pour ne plus l’aban- donner, & que par:lèles membranes qui forment les tuyaux, fe trouvant toûjours doubles d'ün côté du:tuyau, & non du côté oppolé, elles fe: confondoient partout où elles étoient doubles, & reftoient fimiples:par-tout ailleurs , dé forte qu'il périfloit toûjours une moitié de chaque Canal total. o1° Mais M: Lémery n’adopte-pas icetté explication. Et err effèt comment imaginer qu'un Canal-Inteflinal-pañfe d'un 43 Hisrorre De L'ACADEMIE Rorare Fœtus dans l'autre? pourquoi cette tranfmigration ? pourquoi un des Canaux la fera-t-il plütôt que l'autre, qui fera demeuré à fa place? comment celui qui fe déplace, a-t-il rompu des attaches, les ligaments qui l'arrêtoient où il étoit? com aiment en trouve:t-il ou en prend-il dans fon nouveau féjour? J1 paroît que cette idée fourmille dedifhcultés, & M. Lé- mery trouve que la formation qu’il a imaginée jufqu’à préfent pour des parties plus fimples, lui fuffit pour celle des Inteftins, Ji fe fera, à la vérité, des anaftomolfes en grand nombre, mais il s’en fait un grand nombre auffi dans l'union de deux moitiés de Veffies, tous les petits Vaifleaux de l’une s’abou- cheront avec ceux de autre, & il y en a une infinité, {eu- lement cette infinité n'eft pas fi fenfible, & l'on ne compte que fur l'union de deux moitiés de Veflie, au lieu qu'ici if y a plufieurs bouts d'Inteflin fenfibles, du moinsipar rapport à leurs petits Vaifleaux, qui doivent s'unir. Maïs ce plus ou ce moins dans une efpece précilément la même, doit-il être compté! Si l’on objeéte que des parties molles, & même flottantes, telles que des Inteftins, doivent difficilement fe rencontrer afiés jufte, M. Lémery répond par l'exemple du Monftre de Lyon, dont le Diaphragme étoit vifiblement formé de deux Diaphragmes. Ce que les Inventeurs ou les Défenfeurs des Œufs origi- nairemenñt monftrueux ont trouvé de plus fort pour leur Sifteme, ç'a été le Cadavre de ce Soldat des Invalides, dont on vit toutes les parties intérieures tranfpolées, le Cœur à * V. les M. droite, le Foye à gauche, &c. on en a parlé en1733*. II p.374 & fuiv. n'y a nulle union ou confufion d'Œufs où de Fœtus qui puiffe rendre raifon de ce fait fingulier. I commence cepen- dant à n'être plus unique.1M. Lémery le reçoit pleinement & fans reftriétion ,:& foûtient en mêmetemps qu'il n'appar- tient pas à la Queftion préfente. L'Invalide n'étoit pas un Monftre. tpRre 1° Quoiqu'il nelle fût nallement à l'extérieur, if auroitencore pulêtre par des parties intérieures doublés, tronquées,, défigurées, __ SA OMT ASUS NC ATEN €E -$ 49 défigurées, déplacées, &c. mais rien de tout cela : toutes les ‘parties.intérieures avoient leur figure, leur confiflance, leurs fonctions, leur place, leurs connexions mutuelles, &c. feu- lement tout ce qui eft ordinairement à droite étoit ici à tgauche, & réciproquement. Qu'on imagine deux Maifons -parfaitement femblables en tout, horfmis que l’une eft tournée de façon que l'Efcalier eft à la droite de ceux qui entrent, & dans l'autre à la gauche ; la Mode fera, fi l'on veut, pour YEfcalier à droite, mais l’autre Maifon ne laiflera pas d’être “abfolument auffi réguliére, auffi commode, auffi-bien en- tenduë. e M. Lémery prouve que les Monftres font attaqués de maladies organiques, c'eft-à-dire , qui viennent du vice de quelques Organes incapables par leur ftruéture de bien faire leurs fonctions. Auffi les Monitres ne vivent-ils pas, & dans la grande quantité qu’on en a vü, peut-être n'y en a-t-il pas eu un feul qui ait vécu 30 ans. L’Invalide en a vécu 72, & jamais il ne s’étoit apperçû, jamais on n’avoit foupçonné qu'il eût aucune conformation particuliére. Ce font les fonc- tions animales confidérablement bleflées qui font principa- _ Jement l’eflence des Monftres. Mais l'Invalide étoit donc né d’un Œuf où originairement toutes les parties intérieures étoient tranfpofées, & voilà une conformation différente par elle-même de 11 conformation commune. M. Lémery l'avouë fans peine, mais il nie que .cfoit une conformation monftrueufe, puifque les fonctions animales n’en étoient aucunement blefées. On voit affés quelles font celles que l’Auteur de Ja Nature a voulu que les différents Animaux exerçaflent chacun dans fon efpece. S'il en vient au jour quelques-uns avec une in- capacité entiére ou une extrême difficulté de les exercer, on peut être für qu'ils ne font point de la premiére inten- tion du Créateur, & que les mefüures qu'il avoit prifes felon des Loix générales, les feules dignes de fa Sagefle, ont été -traverfées par des Accidents auxquels il valoit mieux laifler leur cours que de prévenir leur ation, Sur:tout, l'intention Aif 1740. CG o HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE la plus marquée de celui qui a fait l'Univers étant que les Animaux fe perpétuent par la voye de génération, f1 l'on voit naître une forte d'Animaux qui ne puifle fe perpétuer, dont aucun n'ait jamais produit fon femblable, & n'ait ja- mais trouvé avec qui le produire, enfin dont chacun eft toüjours un nouvel Animal, différent du moins par des circonftances très-remarquables de tous ceux qu'on avoit déja vûs, comment croira-t-on qu'ils ayent tous été faits pour être tels qu'on les voit, tous deflinés avec foin dans des Œufs particuliers, tous eflentiellement diflemblables entr'eux, fous uniques ? Ne reconnoît-on pas Îà les effets de Caufes accidentelles, irréguliéres, aveugles, qui n’agiflent pas de concert avec les Loix générales, & ne reviennent point deux fois à une même combinaifon ? : L'Invalide pouvoit certainement avoir des Enfants, &il auroit été curieux de fçavoir s'ils avoient les parties inté- rieures tranfpofées comme lui, ou du moins fi fes Parents les avoient euës. Mais il eft bien vifible qu'on n'avoit garde d'y penfer, & en général le nombre des Diflections que lon fait, eft {1 prodigieufement petit par rapport à celui des Morts, qu'il n'eft pas étonnant que des connoiflances qui demanderoient un nombre beaucoup plus grand de Difiec- tions, nous échappent. Il y a toute apparence qu'on trou- veroit encore des Sujets pareils au Soldat, & qu'à la longue on en trouvera, & alors on pourra bien dire que l'Auteur de la Nature a voulu, en créant ces fortes d'Œufs, mani- fefler fon entiére liberté de prendre différentes voyes pour une même fin. Cette fin aura été effefivement toûjours la même, puifque l'on vit également bien avec des parties intérieures placées à droite ou à gauche, mais des Monftres ne vivent pas, & n'exercent pas leurs fonétions comme les autres Animaux, & s'ils avoient été faits immédiatement & diréftement pour être tels qu'ils font, H feroit impoffible de voir à quelle fin ils fe rapportent. On y auroit reconnu, fe lon vouloit, la Liberté du Créateur, mais non pas fa Sagefle. Les Attributs divins ne fe féparent jamais. DV ESS AGUTPEIL NI CAE! !s) si OBSERVATIONS ANATOMIQUES. 1 KosTREMsKt, Polonois, mangeant avec M. Forff, - Officier Suédois, âgé de $ o ans ou environ, s'appéer- çut que dès que M. Forft mangeoit quelque chofe de bien falé & de haut goût, il fuoit abondamment de la Jouë droite, la gauche étant fort féche, & à plus forte raifon le relle du Corps. Les mets doux ne caufoient point cetté fueur, M. Koftremski, curieux d'approfondir un phénomene fi bizarre, fit bien des queftions à l'Officier, & n'en apprit autre chofe, finon qu’il avoit eu cet accident dès fon enfance, & qu'il ne fçavoit rien qui en pût être l'origine. Sa tête & fa face furent bien examinées, nulle tumeur, nulle cicatrice, feulement M. Koftremski remarqua qu'au côté droit de la Langue il y avoit un efpace long de demi-pouce, où man- quoit l'Epiderme qui doit couvrir toutes les Papilles ner- veufes, & au rapport de M. Forft, cela avoit toüjours été ainfr. Cet endroit nud, placé juftement au côté droit, de- voit donc être plus fortement ébranlé, plus vivement irrité par les Sucs picquants, & la Jouë droite pouvoit s’en reflentir par la communication des Nerfs. C’eft la conjecture de Obfervateur, qui a envoyé la relation du fait à M. Winflow pour le communiquer à l’Académie. pi 47 F0 M. du Hamel a Iû à l’Académie une Obfervation de M. Aubert, Médecin de la Marine à Brett, qui confirme exaéte- ment celle de M. Hunauld fur la Valvule du Trou Ovale dont nous avons parlé en 1735 *. Toute la différence eft que le Sujet de M. Hunauld avoit 50 ans, & celui de M, Aubert 30. ” III Frere Modefte Cloupeau , Religieux de l'Obfervance & Gi * p. 19e 2 Apothicaire du grand Couvent de Touloufe, a envoyé à l'Académie la Relation fuivante. Le Sr Trebos, Habitant de la Paroiffe de Daux, diftante de Touloufe de près de deux lieuës, tourmenté depuis deux ans de Coliques très-violentes, d'envies exceflives de vomir, & d'une faim prefqu'infatiable, fé fentant intérieurement rongé, & rendant des Vers plats en quantité, & quelquefois par pelotons, s'adreffa au Frere Modefte, qui lui donna des Pilules à prendre les unes après les autres avec certaines Dé- coctions. Le Malade, impatient de fe délivrer d'un mal qu'il ne pouvoit plus fupporter, hazarda d’accourcir beaucoup les intervalles des Pilules, & fut en effet fur le point d'en mourir, il tomba dans des défaillances & dans des évanouiffements qui n’annonçoient que la mort; on eût entendu facilement le bruit du grouillement de fes Boyaux à plus de trente pas. Mais enfin il rendit plufieurs Vers, quelques-uns aflés longs, & un dernier plus remarquable que les autres, & que l'on crut avoir été fon plus cruel ennemi. IL étoit long de 1 6 pieds, tenant toüjours la tête levée d'un pied & demi, foit qu'il fe traïnât fur la terre, foit qu'il fe mît en peloton. On le mit dans un Pot plein d'eau, où il fit des mouvements étonnants, toüjours la tête levée d'un pied. Cette Tête étoit noire, ronde comme un Pois, le Col fort étroit, avec des éminences qui reflembloient à des Ver- tebres. Ce Ver avoit deux Yeux. Depuis ce temps-à, le Malade fe porte parfaitement bien, & il fe fçait bon gré d’une témérité qui peut-être étoit né- ceflaire, & du moins a hâté fa guérifon. I V. Au mois de Juin 1738, une pauvre Fille de Metz, nommée Marguerite, badinant avec une de fes camarades, à loccafion d'un Ecu de trois livres qui étoit plus large qu’à l'ordinaire, mit cet Ecu dans fa bouche, difant qu'il n'étoit pas fi large qu'elle ne l’avalât bien ; fa compagne paroifiant avoir peur de perdre fa piéce, Marguerite fit un éclat de rire, > HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE DES SCIENCES. ST auquel fuccéda un mouvement d'infpiration, pendant lequel elle avala l'Ecu, qui fe trouva engagé de façon qu'il ne pouvoit ni defcendre ni remonter. Un Chirurgien du voi- finage fit tout ce qu'il put pour le tirer, & n'en pouvant venir à bout, il fe fervit d’un Poireau huilé qu'il pouflà auffi avant qu’il püt dans le gofier, fans pouvoir rien changér à la fituation du corps étranger. M. du Luc, Chirurgien- Major du Régiment de la Marine, fut mandé au fecours de cette Fille, qu'il trouva dans un état périlleux; & ayant rèvé un moment {ur les moyens de la foulager, l'idée de lui faire avaler du Mércure fe préfenta à lui, il en fit venir deux livres, qui après avoir été chauflées, furent avalées dans du Bouillon par la Malade. Cet expédient réuffit ; TEcu fut précipité dans YEftomac , & les accidents cefferent. M, du Luc fit coucher Ja Malade fur le côté gauche, efpérant par-là donnerle temps à une partie du Mercure de s'attacher à l'Ecu, & le rendre plus propre à pañfer par le Canal inteflinal. Deux heures après il voulut qu'on promenât la Malade, & qu'elle avalit wrois onces d'Huile d'Amande douce; un moment après elle fut travaillée de cruelles douleurs à la région de l'Éflomac vers le Pilore, accompagnées d’envies de vomir & de dé- faillances ; alors on la mit dans un Carofle avec deux per- fonnes, & on la fit cahoter dans des endroits raboteux, ce qui réuffit, puifque l'Ecu defcendit dans les Inteftins, & qu'elle rendit tout le Mercure par les Selles. M. Verdier, Apothicaire de l'Hôpital, fit obferver à M. du Luc que le Mercure rendu étoit d'une couleur plus plombée, & moins. coulant qu'il n'eft ordinairement ; alors ils penferent tous deux que quelque partie d'Argent s'y étoit amalgamée; dans cette idée, ils paflerent le Mércure par le Chamois, & il refta fur le Chamois environ un gros d'Argent; ils le mirent fur une pelle à feu, ilsen firent évaporer le Mercure, & ils virent que c'étoit réellement de l'Argent. Cépendant la Ma- lade fouffroit toüjours des douleurs de Colique infüpporta- bles, M. du Luc lui fit avaler une feconde fois du Mercure, elle avoit gardé le premier 60 heures, elle garda celui-ci G ii HisTOoIRE DE L'ACADEMIE ROYALE 6 heures, & ne le rendit que par le moyen du Carofe, où elle fut promenée comme la premiére fois. Tous les accidents ceflerent dès qu'elle l'eut rendu. Le même Mer- cure fut repañlé par le Chamois, & il s'y retrouva à peu-près la même quantité d'Argent qu'à la premiére expérience. La Malade ne fentit plus aucunes douleurs, & fe rétablit par- faitement, fans qu'on ait eu depuis aucune nouvelle de l'Ecu, qui vraifemblablement a été tellement pénétré par le Mer- cure, que fes parties en ont été defunies & confonduës dans les groffes matiéres que la Malade a renduës dans la fuite. On s'imaginera aifément que durant cette cure, les Saiynées, les Lavements & les Potions huileufes furent employées felon l'exigence du cas, & les différentes fituations où fe trouva la Malade. Cette Relation a été donnée à l'Académie par M. Morand, qui la tenoit de M. du Luc. (a année M. Morand a auffi communiqué à l’Aca- démie l’hiftoire de dix-fept opérations de la Taille, faites par la Méthode Latérale; fçavoir, une à Paris par lui, onze à Roüen par M. le Cat, Correfpondant de l'Académie, une à Befançon par M. Vacher, aufli Correfpondant, deux à Rochefort par M. de la Haye, une à Lille en Flandre par M. Planque, une à Perpignan par M. d'Arigran, Eleve de M. Morand. Quatorze de ces opérations ont parfaitement réuffi ; un des trois morts avoit dans les Inteftins treize grands Vers. La Pierre tirée par M. Planque eft d'un volume confidérable, reffemble à une Pierre Echinite, & pefe trois onces, & le Malade eft parfaitement guéri. M. Morand a appris que M. Grillet, fon Eleve, & Chi- rurgien du Grand-Maïtre de la Religion à Malte, la failoit dans ce Pays-là avec grand fuccès, & il en a promis un détail à l Académie. DES SCIENCE s; 55 N°: renvoyons entiérement aux Mémoires L’Ecrit de M. Winflow fur les incommodités, in- firmités, &c. qui arrivent à l’occafion de certaines attitudes & de certains habillements. Un fecond Mémoire de M. Petit fur la Fiflule Lacrimale. La derniére partie du troifiéme Mémoire de M. Lémery fur les Monftres à deux Têtes. * Les Recherches de M. Hunauld für la ftrudture finguliére qu'on rencontre quelquefois dans quelques parties du Corps. V. les M, P: 59. P-T5$. P: 3 24e p.371. V. les M. de 1739. P- 370- * V. les M. p-185. * V.les M. P:525- s6 H1ISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE :9:0:0:0:0/0/0:0:0:0:0:0:9/0:0:0:0/0:0:0:0:0:0:0:0:0:010:0:010! CHIMIE. SUR UNE NOUVELLE ESPECE DE PORCELAINE de fujet de Ja Porcelaine a déja été traité par M. de Reaumur en 1727 * & en 172 9 *,-& nous n’en par- lons qu'aujourd'hui dans cette Hiftoire, parce que les trois différents Mémoires raffemblés commencent à faire un corps que l’on verra plus aifément & plus agréablement d'un feul coup d'œil. La Porcelaine eft une matiére cuite au feu, & vitrifiée à demi. Elle tient le milieu entre nos Poteries de terre, ou nos Fayences & le Verre. Si elle étoit entiérement vitrifiée, elle ne foûtiendroit pas plus que ne fait le Verre, les liqueurs fort chaudes & verfées brufquement, ce qu’on lui demande pourtant dans l'ufage ordinaire qu'on en fait. Elle eft à demi- tranfparente, parce qu'elle eft à demi-vitrifiée. On veut de plus qu'elle foit d’une certaine blancheur, ce qui dépend entiérement des matiéres qui la compofent. On ne peut avoir que de deux façons une matiére à demi- vitrifiée ; ou 1° on l'aura faifie, enlevée du feu, avant qu'elle le fût entiérement ; ou 2° elle étoit compofée de deux ma- tiéres, dont l'une étoit vitrifiable, & l’autre ne l’étoit point, ou du moins ne l’étoit que plus difficilement & avec un plus long temps, de forte que la vitrification de l’une étant faite, & celle de l’autre ne l’étant pas, on a enlevé le tout du feu. M. de Reaumur a reconnu que toute la Porcelaine de Ia Chine & des Indes avoit été fabriquée de Ia feconde ma- niére. Des inftruétions qu’il a reçüés d’un habile Miffion- naire Jéfuite, portoient que les deux matiéres compofantes étoient le Pe-tun-tfe & le Kao-lin, & par un grand nombre * d'expériences DES" S°CH'E N° CE &. $7 d'expériences & d'eflais fur des. échantillons qu'on lui en avoit envoyés, il eft parvenu à entendre ces deux mots Chinois. Le Pe-tun-tfe, ce font toutes les terres, tous les Sables, Cailloux, qui fe fondent au grand feu ; le Kao-lin, qui a été plus difiçile à entendre, c'eft le Talc, incapable, ou très-peu capable de vitrification. Toutes les Porcelaines d'Europe, comme celles de Saint- Clou, de Chantilli, de Saxe, appartiennent à la premiére maniére ou efpece ; ce font des vitrifications qui auroient été parfaites, {1 on ne les eût arrêtées dans leur cours, & pour s'exprimer en Chinois, ce n’eft que du Pe-tun-tfe fans Kao-lin, des matiéres toutes vitrifiables, & à peu-près éga- lement. : … Sur ces principes, M. de Reaumur a imaginé une troi- fiéme & nouvelle efpece de Porcelaine. Celle d'Europe, at-il dit, auroit été Verre, fi on l'eût pouflée jufqu’au bout, donc il y a apparence que le Verre a paflé par un état où il n’étoit que Porcelaine, & de tout Verre on en feroit de la Porcelaine en Îe remettant dans cet état. Des Ouvrages de Verre, comme des Bouteïlles à mettre du Vin, des Cloches à couvrir des Melons, deviendroient des Vafes de parade. Mais la vitrification eft-elle le dernier effet du feu, le der- nier état où l'on puiffe porter une matiére folide? Quand cela “eroit vrai, il s’enfuivroit qu'on ne peut la porter plus loin, mais non pas qu'on ne püt l'en faire revenir, il ne paroît nullement impoflible de rendre au Verre lopacité qu'il a euë, & de lui donner en même temps une certaine blan- cheur, moyennant quoi il fera Porcelaine. IL n'eft plus queftion de poffibilité, la chofe ef faite, mais, comme on le croira facilement, ce n'eft qu'après une infinité d’eflais & de tentatives, qui ont demandé beaucoup de temps, de foins & de vüës fines. Des Ouvrages de Verre ent été recuits par le moyen de certaines matiéres qui sy font incorporées, & leur ont rendu la demi-opacité qu'il “eur falloit pour être Porcelaine, & même la blancheur qu’on a voulu qui füt néceflaire, Hifl 1740. H $8 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Ce qui marque bien la transformation intime de ces Verres, c'eft leur caflure ; elle n'a plus du tout ce poli, ce luifant de celle du Verre, il eft vrai qu'elle n’a pas non plus parfaitement les grains de celle de la Porcelaine, ce font plütôt des fibres couches les unes fur des autres que l'on apperçoit, mais enfin il fuffit que fa caflure de la nouvelle Porcelaine foit telle qu'on ne la prendroit jamais pour être celle d'un Verre. | Le choix du Verre n’eft pas indifférent pour la perfection de l'ouvrage. Il eft bizarre, fi quelque chofe l’eft en Phifique, que les Verres les plus durs foient ceux qui fe recuifent le plus aifément, & que ceux qui font les plus defagréables à nos yeux, CEUX, par exemple, de nos plus vilaines Bou- teilles, donnent les plus belles Porcelaines de cette efpece. Jamais le Verre de la plus belle Glace n'en donneroit de pareille. Le Gips, qui eft une des matiéres de la recuite, eft la principale caufe de la blancheur. Celle de la furface eft moins belle que celle de l'intérieur, ce qui n'eft pas dans Y'ancienne Porcelaine. Cette inégalité eft malheureufement placée pour les yeux auxquels on défere tant, mais quel fujet n'y a-t-il pas d'efpérer qu'un Aït, à peine encore né, fe perfeétionnera ? Dans l’état où il fort préfentement des mains de M. de Reauinur, cette Porcelaine peut déja tenir un fecond rang parmi toutes les autres. Elle pourra pécher par un endroit qui lui feroit grand tort, elle coûtera trop peu, & par-là aura de la peine à orner les Appartements. En récompenfe on en pourra faire les plus excellents Creufets que l’on ait encore eus, & les Chimiftes lui par- donneront aifément de n'être pas chere, DES SCIENCES. s9 EP RUULE SM UME LNYTUNR.E S M HELLOT ayant été chargé par le Confeil, de füivre . le travail que feu M. du Fay avoit entrepris par le même ordre, fur l'Art de la Teinture, s’eft livré avec plaifir à tout ce que demandoit cette honorable commiflion, & donne ici un commencement de fes recherches. On a déja vû en 1737 * un pareil commencement de celles de M. du Fay, & nous fuppofons que l'on s'en fouvienne. Les deux Auteurs font parfaitement d'accord. Toute Teinture eft une matiére étrangere colorant, appli- quée à un Set quelconque. Il faut 1° qu'elle lui foit appli- quée jufqu'en fes plus petites parties, 2° qu'elle le foit par- tout également, 3° qu'elle le foit intimement, & non fu- perficiellement. . Par-là on voit déja qu'il faut que la matiére colorante ait été difloute par un Diflolvant bien convenable, fans quoi elle n'arriveroit pas à la divifion de parties, à l'extrême, fineffe qui eft néceflaire. Cette finefle doit étre telle, que, comme il a été dit à l'endroit cité de 1737, deux corpuf- cules voifins ne puifient pas être diftingués à 'Œil, & n'y faflent qu'une feule fenfation. | La diftribution égale des atomes colorants far tout le Sujet, dépend & de l'uniformité d'action que pourra prendre par elle-même la matiére colorante mife en mouvement, & d'une certaine juftefle d'opération que l'expérience enfeigne. Les atomes colorants entreront d'autant plus profondé- ment dans les pores du Sujet, que ces pores auront été plus ouverts, & non feulement le feu ou la fermentation peu- vent les ouvrir, mais les atomes peuvent fe les ouvrir eux- mêmes, foit par leur mouvement feul, foit en les corrodant un peu, ce qui eft très-poffble, puifqu’il y a telle matiére qui ronge la Laine, par exemple, au point de la détruire entiérement, & de n’en laifier nul veflige, H ij V. les M. P- 126. * p.58. & fuiv. 60 HisToire DE L'ACADEMIE ROTALE Si l'on joint à cela que les pores élargis fe referment ou par leur reffort naturel, ou par le froid extérieur, on concevra aifément que les atomes colorants non feulement auront bien pénétré le Sujet, mais ÿ feront encore bien retenus, Toutes ces idées n'appartiennent qu'à [a Teinture en énéral, mais il y a de plus le bon teint, qui exige deux nouvelles conditions & plus rigoureufes, que la matiére colorante réfifte & à l'Eau de Pluye & au Soleil, c'eft ä-dire, que l'Eau ne la diflolve point, & que le Soleil ne la deffeche point jufqu'à la réduire en poudre, & la calciner:; il eft vifible qu'en ces deux cas fa couleur difparoitroit ou s’affoibliroit beaucoup. Cela limite extrêmement fe nombre des mgrédients qui peuvent entrer dans le bon teint. Il eft impofhble de ne pas employer des Sels dans une Teinture, & tous les Sels ou fe diflolvent à l'Eau, ou fe calcinent au Soleil, excepté le Criftal de Tartre & le Tartre vitriolé, inaltérables l'un & Jautre tant au Soleil qu'à l'Eau. Ils feront donc toüjours, du moins l’un ou l'autre, & du moins pour certains Sujets, néceflaires au bon teint. On peut imaginer encore pour fa perfection, que ces Sels enduiront d’une certaine glu les pores qui retiendront les atomes colorants, & que par-là ils les attacheront davan- tage au Sujet. Peut-être mème couvriront-ils d'une petite kme tranfparente Îa partie des atomes qui fe montre en de- hors, ce qui donneroit au tout enfemble un certain éclat & un œil plus agréable. H eft très-naturel que le Tartre, en fe eriftallifant à l'air froid, fournifle aux atomes cette petite couverture, qui d’ailleurs les défendra encore, s'il le faut, des impreffions nuifibles. Sans doute on ne fe figurera pas que cette Théorie géné- rale de lx Teinture zit précédé les opérations Chimiques de M. Hellot, elle n'en eft que le réfultat, que nous donnons dépouillé des faits, dont le curieux détail feroit trop ample. Ces faits en grand nombre, tournés de plufieurs façons DES. SCIE N.CE.s. 6x différentes, & qu'enfin on a trouvé l'art de bien voir, ont conduit à un méchanifme qu'il étoit impoffible de voir, & dont les fimples Teinturiers ne s’'embarraffent pas. +, M. Hellot a travaillé d'abord fur fIndigo, qui fournit à l'Art de la Teinture fon plus beau Bleu, & un Bleu qu'on prend pour bafe de prefque toutes les autres couleurs, C'eft de toutes les obfervations faites fur l’Indigo, qu'eft née la Théorie que nous venons de rapporter. Il eft à remarquer que quand le Bain d'Indigo a été enfin mis dans le dernier état où il doit être pour teindre une Etoffe, il n'eft bleu qu'à fa furface fupérieure qui touche VAir, & verd dans toute fa profondeur. Pourquoi n’eft-il pas bleu par-tout ? certainement l'Etoffe qu'il va-teindre ne fera que bleuë. of Il faut que la matiére de l'Indigo foit parfaitement difloute: er elle eft végétale & difloute par un Alkali végétal, &c'eft -une Regle conftante en Chimie, que quand un Ajkali végétal diffout une Plante bleuë, la difolution eft verte: Le Bain d'Indigo, qui n’eft que la diffolution d’une matiére végétale bleuë par des Alkali végétaux, devroit donc être entiérement verd, & la merveille n’eft plus que de ce qu’il a une premiére : fürface bleuë.. Mais il eft aifé de concevoir que dans cette - furface touchée par l'Air, il fe fait quelque changement qui ne lui eft pas commun avec le refte de la liqueur. M. Hellot Fexplique plus à fond, & peut-être n’a-t-il été embarraflé que . dans le choix des explications conformes à la faine Phifique. \ Ette année M. Maloüin, Docteur en Médecine de Ia: No Faculté dé Paris, a lu à l'Académie un Ecrit fur Union du Mercure avec l'Antimoine, avec l'Etain & avec le Plomb. Le Mercure eft fi important, en-Chimie, qu'on ne peut . Le connoiître top à fond; il y a long-temps que pour. y + parvenir, on le tourmente en différentes façons, &-on ne’ les a pas encore épuilées toutes. On ne fa point: jufqu'ici allié avec l'Antimoine,, autre Minéral très-important auffis- El ui 62 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE On a bien purifié le Mercure avec l'Antimoine, mais on ne les a pas unis enfemble. Cette union paroîtroit devoir être aifée, parce que celle du Mercure & du Soufre left beau- coup, & que l'Antimoine a beaucoup de Soufre, mais c'eft cela même qui fait une difhculté que l'on n’eût pas devinée, le Soufre s'attache mieux à l'Antimoine qu’au Mercure, & il s'attache fi fortement à l’Antimoine, qu’il l'a en quelque forte faifi tout entier, & ne permet plus au Mercure de sy attacher. | Après bien des tentatives, dont le détail feroit inftructif ou du moins curieux, s'il nous étoit permis ici, M. Maloüin eft enfin parvenu à unir fi intimement le Mercure à l'An- timoine, que l’Antimoine en eft devenu fenfiblement plus dur, & cela par une opération aflés directe & aflés fimple, c'eft-à-dire, qui ne demande pas un certain circuit d’opéra- tions préliminaires, ou préparatoires, mais en récompenfe elle demande beaucoup de précifion dans tout le procédé & dans les circonftances, & il eft aifé de la manquer. M. Ma- Joüin, pour achever de faire voir combien il s’étoit rendu maître du Mercure à cet égard, l'a retiré entiérement de ce même Antimoine, où il l'avoit fait fi bien pénétrer. I a trouvé en fon chemin une Neige d'Antimoine, qu'un Chi- mifte Italien n’avoit découverte que par un long & pénible travail qu'on n'auroit pas volontiers recommencé. On convient que l'Etain feroit plus parfait s’il étoit plus blanc, plus dur, plus fonore, & s'il perdoit un certain cré qu'il a ordinairement quand on le plie. Quelques Chimiftes l'ont perfectionné fur quelqu'une de ces qualités, d'autres fur une autre, aucun ne la fait fur toutes enfemble, & aucun n'a employé le Mercure à ces effets. M. Maloüin qui en avoit vü le fuccès fur l’Antimoine, en a efpéré un pareil fur Etain, & ne s’eft pas trompé. 1! a réuffi de même, & par le même moyen, à rendre le Plomb plus blanc & plus dur. Le Mercure retiré de ces Métaux en a pris un peu la couleur, & peut-être, à ce que conjecture M. Maloüin, MIDDLE SAS CON Y AEL NPC ETS 62 deviendroit-il violet, s'il avoit paflé par quelque matiére minérale violette, comme le Cobalt, ” N°; renvoyons entiérement aux Mémoires L'Ecrit de M. Geoffroy fur un Moyen de préparer V. les M, quelques racines à {a maniére des Orientaux. p.96 L’Examen des Remedes de Mile Stephens contre la Pierre, P- 177: par M. Morand. L'Examen du Sel de Pécais, par Mrs Lémery, Geoffroy p.367. & Hellot. SERRES) BOTANIQUE. Ous renvoyons entiérement aux Mémoires L'Hiftoire du Lemma, pax M. Bernard de Juffieu. . V. les M: 268. Les Expériences de M. de Buffon fur la force des Bois, 14 P-453: Les Obfervations de M. du Hamel fur le Guy. p-483. V. les M. p.100. p- 148. P-254- P:293° 6à Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE CSST AS ETS CZ LASLPÉS GEOMETRIE. CS année M. Robillard, âgé de 1 6 ans, fils du Maître de l'Ecole d’Artillerie de Metz, prélenta à à l'Académie un Traité fur les Sections Coniques, où il examine non feu- lement ces Sections , & les Solides qui en peuvent naître, mais encore les nouvelles Seétions qui peuvent naître de ces Solides, la dimenfion des Solides, & celle des Surfaces planes & fphériques de plufieurs Courbes Géométriques, où mêmé Méchaniques, les Centres de Gravité & de Percuffion de beaucoup de ces Surfaces & Solides. On a trouvé toutes les Propofitions bien démontrées, la plüpart curieufes, & quel- ques-unes nouvelles. L’Auteur, quoique très-jeune, a non feulement des connoïflances en Géométrie, mais il pofiede affés bien le Calcul Différentiel & l'Intégral. N Ous renvoyons entiérement aux Mémoires L’Ecrit de M. Nicole fur la Trife&tion de l'Angle: L’Ecrit de M. Clairaut fur la Spirale d’Archimede, décrite comme la Cycloïde, Un Probleme Phifico-mathématique du même. Un Ecrit fur l’Intégration ou la Conftruction des Equs- tions différentielles, &c. du même, ASTRONOMIE; DES SCIENCES 6s ASTRONOMIE. SUR LES. ECLIPSES DES SECOND ET TROISIEME SATELLITES DE JUPITER. O N fçait de quelle extrême utilité nous font les Ecliples v. Ie M. du 1°* Satellite de Jupiter, qui, parce qu'il eft le pre- p- 66. mier, ou le plus proche de Jupiter, a prefque tous les jours une Immerfion ou Emerfion, moments bien marqués dans le Ciel, & par-là très-importants. On ne peut trop avoir de ces moments, & on en augmenteroit le nombre par les Ecliples des autres Satellites, quoique plus rares à propor- tion de l'éloignement où ils font de Jupiter. Le fecond eft celui qui après le premier, fournira le plus d'Eclipfes, & c’eft auffi celui fur lequel on a le plus travaillé à l'Obfervatoire, en fuivant ce qu'avoit fait fur ce grand fujet feu M. Caffini. Nous ne répéterons point ce que nous en avons déja rap- porté en 1727* & 1729*, * p. 108. Pour profiter des Eclipfes du 24 Satellite, il faut les pou- & fuiv. voir prédire, comme on fait celles du premier, & on a vû & p.63 à en 1727 quels étoient les Eléments ou connoifflances né- ceflaires pour cette prédiction. Ce font les mêmes que ceux qui entrent dans le calcul des Etclipfes de la Lune, notre Satellite. L’inclinaifon des Orbes des Satellites fur celui de Jupiter eft.un de ces Eléments, & très-difficile à déterminer précifément. Feu M. Caflini l'avoit pofée de 2° 5.5" pour tous les Satellites, & conftante pour chacun. En même temps il plaçoit les Nœuds ou interfections de ces Orbes des Satel- dites avec celui de Jupiter, au 14° 30’ du Lion & à l’'oppo- fe, & les y fuppofoit fixes. C'étoit le réfultat de toutes fes if, 1740, | 66: HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE obfervations faites avec l'afiduité, le foin & l'adrefle que Jon fçait. Il a été dit dans les endroits cités, qu'en comparant la plus longue & la plus courte Eclipfe d'un Satellite, on en tireroit linclinaifon de fon Orbe fur l'Orbe de Jupiter, & on l'a prouvé. Mais il faudroit donc voir des Ecliples en- tiéres pour en avoir la durée, & il eft certain qu'à caufe de la grande proximité où efl le 1°* Satellite à l'égard de Ju- piter, on ne peut voir de fes Ecliples que l'un des deux moments extrêmes & effentiels, Immerfion ou l'Emerfion:; & dans les Eclipfes du fecond qui eft plus éloigné de Ju- piter, on peut voir ces deux moments appartenants à une même Eclipfe, mais rarement & en certains cas favorables, Voilà de quoi il s’agit préfentement. Que le Soleil, la Terre & Jupiter foient fur la même droite, que j'appellerai ligne des Syzygies, & qu'un Satellite quelconque tourne autour de Jupiter, on conçoit bien que quand ce Satellite rencontrera l'ombre de Jupiter, qu'il aura enfuite à traver{er, il pourra être invifible à la Terre, & dans le moment de fon Immerfion, & dans celui de fon Emer- fion, parce qu’il aura alors été caché à la Terre par le globe de Jupiter dont il étoit trop proche, & que de plus il fera entré dans une Ombre Conique dont le diametre étoit plus petit que celui de Jupiter, ce qui favorife encore l'occulta- tion du Satellite dans les deux moments d'’Immerfion & d'Emerfion. Je fuppofe que fi le Satellite avoit été un peu plus éloigné de Jupiter, ïl auroit été vû de Ta Terre dans ces deux moments, & je dis que cela étant, il pourra encore être vü de la Terre dans ces deux mêmes moments, fans que fa diftance à Jupiter foit augmentée, pourvû feulement que Jupiter ne foit plus avec la Terre & le Soleil fur la ligne des Syzygies, mais qu'il en foit à 90 degrés, ou, ce qui eft le même, fur une ligne perpendiculaire à celle des Syzygies. La Terre qui dans le premier cas ne pouvoit abfolument voir le Cone d'Ombre de Jupiter, fur-tout à l'endroit où le Satellite y entroit, voit entiérement ce Cone dans le fecond DES SCIENCES 67 cas par la différente maniére dont il lui eft expofé, Tout cela fignifie, & peut-être l'entend-on déja aflés, que dans les Conjonétions ouOppofitions de Jupiter au Soleil, la Terre ne pourra voir f'Immerfion & lEmerfion d’une même Eclipfe de tel Satellite, dont elle verra l'un & l’autre moment, quand Jupiter fera en Quadrature avec le Soleil. Cette condition peut être de rigueur, c'eft-à dire, qu'on ne pourra voir dans une même Eclipfe les deux moments ou des deux phales que dans la Quadrature précife ; mais f cela fe trouve, ce fera l'effet d'une certaine diftance unique du Satellite à Jupiter, diftance qui fuivra immédiatement la ‘ derniére de celles où l’on ne voyoit qu’une des deux phafes. À mefure que les diftances augmenteront, il y aura plus de ® temps favorables avant & après la Quadrature, & enfin on verra toûjours l'une & l’autre phafe. Quand on cherche la plus longue Edlipfe, il la faut cher- cher à un des Nœuds de lOrbe du Satellite avec l'Orbe de Jupiter. Plus l'Orbe du Satellite eft incliné fur celui de Ju- piter, plus cette plus longue Eclipfe du Nœud eft longue, & l’inclinaifon peut être f1 grande, que des Eclipfes arrivées à des diftances fort fenfibles du Nœud, ne laifferont pas d’être fenfiblement égales à l'Eclipfe du Nœud. + Toute cette petite Théorie s'applique aifément au 24 Sa- tellite de Jupiter. Il en eft prefque exactement à la diftance où les deux phafes d’une de fes Eclipfes feront vüés de la Terre, lorfque Jupiter, vü de la Terre, fera en Quadrature avec le Soleil. Or Jupiter n'ayant qu'un mouvement de 1 degré en 1 2 jours à peu-près, il eft long-temps dans une Quadrature fenfiblement & phifiquement, ce qui favorife les obfervations: I faut donc, fi l'on veut avoir la plus longue Eclipfe de ce 24 Satellite, prendre J upiter dans le temps où il eft en Quadrature avec le Soleil, ou aux environs. - Îl faut de plus que Jupiter, vû du Soleil, foit à 2 $ degrés de côté ou d'autre du lieu du Zodiaque où fera un Nœud de fon Orbe avec celui du Satellite. Ces deux circonftances néceflaires fe font trouvées unies Li € Hisroire DE L'ACADEMIE ROYALE dans le Mois de Février 1740, Jupiter étant dans fes Gé- meaux ; on a déja dit que les Nœuds des Satellites font fixes jufqu'ici au milieu du Lion & d'Aquarius. M. Caffini ob- ferva d'un côté, & de l’autre M. Maraldi, Neveu de feu M. Maraldi, dont on a vü les recherches fur ce même fujet en 1727 & 1729. Les deux Aftronomes obferverent que les Eclipfes du 24 Satellite, où l'une & l'autre phafe eft vifible, s’'étendoient des deux côtés du limite à une plus grande diftance que l’on ne croyoit, jufqu'à plus de 25 degrés, ce qui marque une grande inclinaifon de l'Orbe du Satellite, & en effet, felon feu M. Caffini, angle n'en eft pas de 3 degrés entiers. On ne découvre pas non plus par ces obfervations fi récentes, que les Nœuds des Satellites que ce grand Aftronome a fup- pofés immobiles, ceflent de l'être, quoiqu'on s’y attende, & avec raifon. Mais une chofe remarquable & nouvelle, c’eft que par la comparaifon des anciennes Etclipfes du 24 Satellite avec les derniéres, on s'apperçoit que des Eclipfes arrivées dans les mêmes circonftances, ne font pas exaétement de la même durée, & par conféquent l'inclinaifon de l'Orbe ne feroit pas conftante. M. Maraldi trouve que cette inclinaifon ne varieroit pas uniformément, mais tantôt en augmentant, tantôt en dimi- nuant, ce qui feroit une fource d'erreur dans le calcul des Eclipfes. Il apperçoit même qu'il peut y en avoir une autre à craindre, qui paroîtroit devoir être périodique. Mais il vaut mieux attendre la décifion fouveraine des Obfervations que M. Maraldi continuera toüjours. Le 3me Satellite étant plus éloigné de Jupiter, il n’eft pas rare dans fes Eclipfes, comme dans celles du fecond, que les deux phafes y foient vüës à la fois. M. Maraldi trouve que depuis qu’on les obferve, leur durée va toûjours en dimi- nuant, effet qui s’enfuivroit de l'augmentation perpétuelle de l'inclinaifon de l'Orbe de ce 3° Satellite fur l'Orbe de Jupiter. À ce compte ces deux Satellites différeroient beau- DES SCIE NC.ES.. : 69 coup-entreux, & fon ne fçait pas bien encore ce qu’une connoiflance exacte du quatriéme ajoûteroit à la diverfité des quatre Satellites comparés enfemble. Mais les Philofophes ne feront jamais furpris de voir tout extrêmement varié, & aufli varié qu'il le peut être fans fortir de certaines Regles inviolables. DE LA MERIDIENNE DE PARIS PROLONGEE VERS LE NORD, &tr. N a vû en 1737 * où en étoit l’Académie fur la fa- V. les M. meufe Queftion de la Figure de la Terre. Il réfultoit p- 276- des opérations faites par les Académiciens envoyés fous le NS 90e Cercle Polaire, que la Terre étoit un Sphéroïde applati vers * les Poles, au lieu qu'elle en devoit être un allongé dans ce même fens par le réfultat de toutes les opérations faites précédemment dans l’étenduë de tout le Royaume du Nord au Sud. Dans cette incertitude, on réfolut en 1739 de vérifier la longueur & la direétion de la Méridienne de Paris, où étoit la fource de Ferreur, s’il y en avoit du côté du Sphé- roïde allongé, & M. de Thury, accompagné de M. Abbé de la Caille & de M. le Monnier le Médecin, Frere de l'Aca- démicien qui avoit été au Nord, entreprit le travail de cette vérification. On la voulut commencer par la partie Méri- dionale de la Méridienne, beaucoup plus longue, à compter de Paris, que la Septentrionale. Comme l'affaire étoit non feulement difficile par elle-même, mais de plusitigieufe, on peut juger quel extrême foin M. de Thury apporta à tous les préparatifs néceflaires, au choix des Inftruments les plus parfaits, & à celui des Méthodes les plus füres. Il fe pref- crivit, par exemple, comme des loix abfolument inviolables, deux pratiques qui ne font que plus avantageufes, l’une de n'employer que des angles aétuellement obfervés, & non des angles conclus, quoiqu'ils le fuffent Fret BéAnériquenEns, rie go HISTOIRE DE ACADEMIE ROYALE l'autre de n'employer point de petits angles, & qui ne fuffent au deflus de 30°. La raifon de la premiére pratique eft que fi l'on n’a ob- fervé que deux angles, & qu'on fe foit trompé aux deux, où à un feulement, on en conclura auffi-tôt le troifiéme fans fe douter d'aucune erreur, au lieu que quand on a obfervé les trois, on en trouve la fomme plus grande ou plus petite que 1 80°, dès qu'il y a erreur quelque part, & on revient {ur fes pas pour fe corriger. La raifon de la feconde pratique eft que ce font ici des lignes dont on veut avoir la longueur par le moyen d’angles dont elles font les bafes, & que les erreurs qu’on peut com- mettre fur les angles obfervés, tirent moins à conféquence pour les bafes quand les angles font grands, que quand ils font petits. Par exemple, un angle triple d'un autre peut avoir une bafe qui ne foit que double de celle du petit, & fi une erreur de 1 Minute a été commife dans l'obfervation des deux angles, elle ne produit pas une erreur triple fur la bafe du grand, mais feulement une double, & par confé- quent moindre par rapport à la grandeur de l'angle. Ainfr les grands font à préférer. M. de Thury auroit pu vérifier la Méridienne de Paris, en recommençant des opérations qui avoient été déja faites, & en examinant avec une attention nouvelle tous les T'rian- gles qui entroient dans fa conftruction. Ce fut auffi ce qu'il fit d'abord, & jufque vers Orléans ; mais la grande rigueur qu'il s’étoit impofée, ne lui permit pas d’aller plus loin de cette façon, des Triangles trop petits qu'il trouva fur fon chemin, ‘& qu'il ne vouloit plus admettre dans fon travail, l'obligerent à fe détourner de la Méridienne pour en former d'autres, qu'il y lioit pourtant toûjours, & qui fervoient également à la vérifier. Toute l'étenduë de Paris à Perpignan fut partagée en trois grandes Stations, à chacune defquelles on vérifioit par la mefure actuelle de {a plus grande bafe qu'on püût tirer fur le terrein, tous les T'riangles qu'on avoit conftruits depuis la 1 DES SCcrENCE ss: r Station-précédente. La 1'° fut à Bourges, la 2de à Rhodès, Ja 3m à Perpignan. On faifoit à chacune les obfervations Aftronomiques néceflaires pour connoître le rapport de Fefpace terreftre mefuré à l'arc célefle correfpondant. On ne manquoit pas d'avoir égard àtce phénomenei fi délicat de lAberration apparente des Fixes, dont nous avons parlé en 1737 *, & on reconnut cette attention pour être d'autant plus importante, que quelquefois deux Etoiles peuvent avoir leurs Aberrations en fens contraires, ce qui augmente beau- coup leur fauffe diftance. Quoique fuivant les nouveaux Triangles que lon fit, Ia Tongueur & la direction de la grande Méridienne fuflent un peu différentes de celles qui avoient été établies précédem- ment, le depré moyen de latitude qui réfultoit de ces fe- condes opérations, fut le même que celui des premiéres, car S'il fe trouvoit des différences, elles étoient trop légeres pour être comptées. Mais en prenant les réfültats particuliers des opérations de chacun. des trois intervalles des Stations, & en les con- parant enfémble, on s'appercevoit que la grandeur du degré de latitude n'étoit pas toûjours égale comme elle Le feroit fur une Sphere; qu'elle varioit de ro à r1 Toifes , ce qui, quoique très-léger par rapport à unie étenduë de 57060 Toïfes, méritoit poüftant alors d’être bien remarqué; que cette Variation étoit une diminution du Polé vers l'Equateur, ce qui indiquoit un Sphéroïde applati; & qu'enfin la dimi- mution n'étoit pas uniforme, comme elle auroit dû l'être fur un Sphéroïde régulier, mais croiffante après avoir été décroiffante, où an contraire. Si Terre eft non feblemiént un Sphéroïde, au dieu d’être une Sphere, mais encre uñ Sphéréïde qui ne foit ni allongé hi applati répuliérement & uniformément, la Queftion de fa figure fe complique beaucoup, & la décifion en pourroit dévenir très-difficile, & peut-être impoffible. : IH eft vrai que 2 Sécôndes d'erreur dans les Opérations Aftronomiques quantité dont on né peut jamais répondre , füffroient pour z Histoire DE L'ACADEMIE RoyALr caufer lirrégularité qu'on a trouvée dans la variation du degré de latitude, mais d'un autre côté cette irrégularité pourroit être réelle; car qui nous aflüre que la Terre doive être un Sphéroïde régulier ? y a-t-il dans la Nature quelque figure qui le foit abfolument? De plus, l'irrégularité peut venir, non des erreurs for- tuites des opérations Aftronomiques, mais de caufes phifi- ques fur lefquelles on ne comptoit pas, & qui n'ont pas laiflé d'agir dans ces opérations, & de troubler leur cours naturel. On y fuppofe que le Fil à plomb eft exactement per- pendiculaire à la furface de la Terre, cependant M. Bouguer a depuis peu fait au Pérou des obfervations qui prouvent qu'en certaines circonftances ce Fil s'écarte de la perpen- diculaire. On fuppofe que le centre de la Terre auquel fe dirigent les Perpendiculaires à la furface, & qui doit être fon centre, de gravité, eft le même que fon centre de figure, ce qui ne peut prefque pas être phifiquement vrai. De plus, le centre de gravité eft changeant, felon les changements vifibles ou invifiblés qui arrivent à la conftitution du globe terreftre. Enfin on fuppofe que les Etoiles fixes n’ont aucun mou- vement réel les unes par rapport aux autres, & loin que cela foit certain, le contraire, beaucoup plus probable par lui-même, commence déja à le devenir aufli par quelques obfervations. Pour éviter ces fources d'erreur, où feulement, fi l'on veut, pour tenter une autre voye, M. de Thury & fes Aflociés prirent le parti de mefurer quelque degré de longitude, au lieu de degrés de latitude. Dans là Terre Sphérique, les degrés de latitude & de longitude étant d’une certaine gran- deur, ils en changent fi elle devient Sphéroïde, ceux de latitude deviennent plus grands qu'ils n'étoient, & ceux de longitude plus petits, fi la Terre eft un Sphéroïde allongé vers les Poles, & au contraire fi c'eft un Sphéroïde applati. Voilà le principe fur lequel on fe fonda, On SHADIE SI HS 10 LTÉE: N CE Ag » On détermina par le grand nombre d'obfervations que Yon avoit, un degré de latitude moyen, qui fût fans erreur. fenfible celui de la Terre Sphérique. Enfuite il fallut prendre un degré de longitude fur un Parallele dont la diftance à JEquateur füt bien connuë, & comparer fa grandeur à celle qu'il auroit euë für la Terre Sphérique. Plus grand ou plus tit, il décidoit quelle efpece de Sphéroïde étoit la Terre. La grande difhcukté étoit d'avoir ce degré de longitude. Ea meilleure méthode, & peut-être la feule bonne, eft de les avoir par des phénomenes céleftes, tels que des Eclipfes quelconques vüës en même temps de différents lieux, qui comptoient alors différentes heures ; mais on fçait que cette: méthode demande des lieux fort éloignés entreux, parce qu'autfement les moindres erreurs fur le temps y tirent trop à conféquence. [ci on ne la pouvoit pratiquer que dans une petite ctenduë de Pays, & on fe crut heureux de trouver deux Montagnes, lune en Languedoc, l'autre en Provence, éloignées l'une de l'autre de 40 Lieuës, & f1 élevées, que de lune on pouvoit voir un feu allumé fur l’autre. Ce feu, tenoit lieu d’un phénomene célefte, & comme il étoit né- ceflaire qu'il parüt fubitement, & ne durât qu'un inftant, on le faifoit avec une certaine quantité de Poudre à Canon. On avoit dans chacun des deux lieux une Pendule réglée: avec un extrême foin pour l'heure du lieu. Les temps que- Von comptoit dans chaque lieu à linftant que le feu parut, furent donc différents à caufe de la diftance affés grande, & on en tira la différence de longitude entre ces deux lieux, ou l'arc qui y répondoit dans le Parallele où l'on étoit. Cet arc fe trouva plus grand qu’il n'eñt été fur la Terre, Sphérique, & par conféquent la T'erre feroit un Sphéroïde applati. . | En 1740 Mrs de Thury & Maraldi avec M. l'Abbé de la Caille qui fut auffi de ce fecond voyage, allerent vérifier la Méridienne de Paris jufqu'à Dunkerque, & quoiqu'elle {oit beaucoup moins étenduë de ce côté-là, le travail n'en fut pas moins pénible dans la même proportion ; il fe trouva Hifh 1740. . K 74 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE des difficultés nouvelles à caufe de quelques changements. confidérables dans les lieux, & l’on ne put s'accorder exacte- ment avec une ancienne bafe aétuellement mefurée par feu. M. Picard, peut-être parce que fes Inflruments n'avoient pas: été fi parfaits que ceux dont on fe fervoit.. A prendre cependant le réfultat général, le degré de la- titude alloit en augmentant vers le Pole, & par conféquent la Terre étoit encore un Sphéroïde applati. On détermina même que fon grand axe, qui feroit alors. lEquateur, feroit au petit ou au Méridien comme 6or à 600, c'eft-à-dire, plus grand d’une 600€ partie, ou d'en- viron 5 lieuës fur les 3000 qu'on peut donner au diametre de la Terre Sphérique. C’eit-là à peu-près le rapport que mettoit entre les. deux axes M. Huguens, premier Auteur: du Sphéroïde applati.. Que la Terre foit un Sphéroïde en ce fens ou en l'autre, elle le fera toüjours fi peu, que toute cette Queftion peut: paroître plus curieufe qu'importante ; mais elle a beaucoup: contribué à faire entreprendre des travaux dont l'importance- eft plus fenfible, & l'utilité plus marquée. On a vü dans les. Volumes précédents combien: on a tiré de perpendiculaires: ou de paralleles à la grande Méridienne de fa France, il y faut ajoûter des paralleles tirées par M. Maraldi dans toute la Frontiére Orientale du Royaume, & des perpendiculaires- dans la Septentrionale, de forte que des lignes dont la gran- deur eft géométriquement connué ,. enferment toute fa France, & en fuivent tout le contour, fans compter celles qui font encore tirées dans l'intérieur, & affürent le détaif des grandes parties. 400 Triangles principaux, terminés à des objets remarquables, & les plus éloignés entr'eux qu'il fe puifle, ont été formés fur 1 8 Bafes de plufieurs milliers. de Toifes actuellement mefurées, & l'on. peut avancer fans crainte que jamais la Géométrie-pratique n’a opéré fi en. grand. Si on fe contente de la Terre Sphérique, & apparem- ment il faudra s’en contenter dans l'ufage, ce fera la France- qui en donnera la grandeur précife, du moins pourra-t-elle: . 1ID'E S''S CT EIN C Es A avoir des Cartes Géographiques de tout ce qui lui appar- - tient, plus juftes que celles d'aucun autre Pays. RD EN DR ENURE GT E.S DES PLANETES EN GENERAL. he fujet déja traité en 1738 *, feulement pour la Terre & les Planetes inférieures, s'élève maintenant à fa plus grande généralité. M. de Fouchy fuppofe le lieu de l'Aphélie & du Périhélie de chaque Planete affés précifément connu, comme il l’eft effectivement aujourd'hui, & il ne s'agit que de fçavoir le plus exaétement qu'il foit pofhble, quel eft le rapport des deux parties inégales de la ligne des Apfides, ou du grand axe de l'Orbe de Îa Planete, dont l’une eft la diftance de T'Aphdlie au Soleil, & l'autre celle du Périhélie. *: L’efentiel de la Méthode générale de M. de Fouchy confifte en un Triangle, dont les trois côtés font, le r°* la diftance de la Terre, d'où fe fait toüjours l'opération, au Soleil, Le 24 Ja diftance de la Terre à la Planete quelconque, le 3m Ja diftance de la Planete au Soleil. Les angles que font ces 3 lignes éntr'elles, font différents félon la pofition qu'ont “entr'enx les 3 Corps. placés aux fommets des 3 angles, & on a du moins deux de ces angles par obfervation, le rer côté eft toûjours connu, & de-là fuit la réfolution de tout de Triangle. ; :: Quand Ja Planete, dont on a donc la diftance au Soleil, ‘a-été prife dans fon Aphélie, où aux environs dans une certaine ctenduë, cette diflance eft la grande moitié du grand axe de l'Orbe, & il n’y aura, pour en trouver la petite moitié, qu'à former un autre Triangle pareil quand la Planete »fera dans fon Périhélie ; alors fa diftance au Soleil fera la petite moitié du même axe, & le rapport de ces deux moi- tiés ou leur différence fera l'excentricité de la: Planete. 0 Puifqu'il faut la prendre & dans fon bd dans fon “Ki V. les M. Fete * P- 65. & fuiv. 76 Histoire DE r'ACADÉMIE Rovyarr Périhélie, il eft chair que l'opération totale ne fe peut faire qu'une fois dans le cours d'une révolution de la Planete au- tour du Soleil, & qu'entre les deux opérations partiales, if y aura toûjours un temps égal à la moitié de la durée de Ja révolution. Pour Jupiter, par exemple, il y aura 6 ans, 15 pour Saturne, plus de 3 mois+ pour Vénus. Par le moyen du Triangle pofé, on pourroit abfolument mefurer de deflus la Terre l'excentricité de la Terre mème, # ne faudroit qu'avoir bien exactement dans ce Triangle Ja grandeur de la diftance d’une Planete quelconque au Soleil ; mais on a vü en 1738 une autre Méthode plus füre, qui fe borne à la Terre, & qui, fi lon veut compter cela pour quelque chofe en fait de Science, eft plus fine & plus adroite, Il faut toûjours avoir le plus précifément qu'il fe puifle, les lieux où font dans le Ciel le Soleil & la Planete obfervée, Jamais Îe lieu de la Planete ne fera fi certain pour nous que quand nous la rapporterons au même point du Ciel où elle feroit rapportée par un Spectateur placé dans le Soleil, or c'eft ce qui ne peut arriver que quand le Soleil, la Terre & la Planete, où le Soleif, la Planete & la Terre font fur la mème ligne droite ; dans le cas du premier arrangement, le Soleil & la Planete font en oppofition, dans le cas du fecond en conjonction, ce font donc à les temps les plus propres pour les opérations de lExcentricité, fi on les y peut em= ployer. Mais d’abord les Planetes inférieures ne peuvent jamais être en oppofñition avec le Soleil ; elles font deux fois dans une même révolution en conjonétiôn avec lui, mais dans ‘Fune elles font cachées derriére fon difque, dans l'autre on les voit fur ce même difque, ou trop proches pour pouvoir “entrer dans notre Triangle. De-kà fuit au contraire qu’on ne les peut prendre trop éloignées de la conjonction , ce qui s'accorde parfaitement avec une remarque faïe à leur fojet “en 1738. Les Planetes fupérieures dans leur conjonction, font effa- “gées par les rayons du Soleil, & deviennent invifibles, Il ng DES SerENCeES refte donc pour elles que Foppofition, qui effectivement eft à fouhait. A fon défaut, 1 Quadrature de {x Planete avec le Soleit feroit prefqu'aufli favorable, car c'eft un arc de 90 degrés précis, tiré du point où a été loppofition, dont on peut s'être bien aflüré. « La Méthode générale de M. de Fouchy pour les Excen- tricités, peut être appuyée par une autre qu'il ne donne que comme fubfidiaire. Les Planetes ne fe meuvent pas dans le plan de l'Ecliptique, mais dans des plans qui y font tous. inclinés, & différemment, c’eft ce qu'on appelle feurs ati tudes. La latitude de chaque Planete eft conftante, du moins fenfiblement, & pendant une longue fuite de Siécles, mais il eft clair que fi une même Planete vûë de la Terre en eft tantôt plus éloignée, tantôt plus proche, fa lititude,, quoi- qu’elle ne change point réellement, fera vüë tantôt moindre, tantôt plus grande, en raifon renverfée des diflances à la Terre. Donc em obfervant les latitudes apparentes d’une Planete dans fon Aphélie & dans fon Périhélie, on aura leur rapport, & ce rapport renverfé fera celui des diftances de la Planete à la Terre. H n'eft pas befoin de dire que cette Méthode ne s’appli- quera qu’à des Planetes dont la latitude réelle foit aflés grande pour être fufceptible de différences qui fe faflent fentir par les différents éloignements. On fçait que cette latitude eft un: arc décrit de FOrbe de la Planete perpendiculairement fur l'Ecliptique à. 90 degrés des Nœuds de FOrbe & de 'Ecliptique.. Comme la latitude eff nulle dans les Nœuds, il faudra qué - Ja Planete, tant à l'A phélie qu'au Périhélie, fe trouve encore dans le plus grand éloignement de fes Nœuds, c’eft-à-dire, à 90 degrés. IL étoit poffible que l'union de ces deux cir- :conftances fût rare ,. mais une efpece de*hazard Heureux. voulu que dans la plüpart des Orbes des Planetes, l'A phélie & le Périhélie fufient à 90 degrés des Nœuds, ou à peu- - près, & que par eonféquent les Planetes sut leur plus üi] 38 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE grande latitude, ou plütôt leur latitude entiére à l'Aphélie & au Périhélie. M. de Fouchy, qui avoit traité des Planetes inférieures en1738, ne traite maintenant que des fupérieures. Il commence par Mars, auquel il applique fes deux Mé- thodes. | 11 les applique de même à Jupiter. Les deux opérations partiales que demande l'Excentricité, y font éloignées entre elles, comme on l'a dit, d’un intervalle de 6 ans, c'eft-là tout ce qui eft abfolument néceflaire, mais M. de Fouchy donne un moyen aflés facile de les fortifier ou vérifier toutes deux ; il ne faut qu'attendre 6 mois après la premiére, & prendre de nouveau Îa diftance de Jupiter au Soleil. Jupiter, qui ne fait r Signe qu'en 1 an, n'aura fait que 1 5 degrés en 6 mois, -& fera encore prefqu'autant à fon Aphélie qu'il y étoit 6 mois auparavant, & cela fera encore plus vrai s'il étoit alors un peu en-deçà de l'Aphélie. On fera la même chofe pour l'opération du Périhélie. Que fi la différence des lieux de Jupiter produit à cet égard un effet fenfible, M. de Fouchy fçait encore en tirer parti, ce feront différentes diflances de Jupiter au Soleil, que l'on comparera au même axe de FOrbe terreflre, & le changement de leurs rapports à cet axe, fervira à conduire jufqu'aux rapports extrêmes, qui font ceux que Ton cherche, ou l'Excentricité même de Jupiter. Et fi axe de lOrbe terreflre étoit alors la ligne de fes Apfides, il eft évident que l'on auroit en même temps & l'Excentricité de Jupiter & celle de la Terre. Saturne a fi peu de latitude, qu'il ne peut admettre que Ja méthode principale de M. de Fouchy. Il ne manque pas de calculer les erreurs dont Îles nou- velles pratiques qu'il propofe, font fufceptibles. On eft obligé d'employer des Eléments douteux quelquefois jufqu'à un certain point, & des Inflruments qui ne peuvent jamais être abfolument parfaits. L'Aflronomie moderne s'eft impolé le devoir d'évaluer le degré de certitude qu’on doit attendre des uns & des autres. Il fe trouve, après les calculs de M. DES S€ETENCES 79 de Fouchy, que les erreurs ou inévitables ou inconnuës qui pourront fe gliffer dans fes Méthodes, ne les empècheront pas d'arriver à leur but. Puifqu'il faut toûjours craindre de s'être trompé, quelques précautions qu’on ait prifes, on fera bienheureux du moins fi on fçait qu'on fe feroit trompé hnpunément, Ette année M. Caffini donna au Public deux Volumes, s intitulés, l'un ZÆments d'Affronomie,. & autre Tables Affronomiques du Soleil, de la Lune, &c: Nous avons déja rendu compte en 1702 * des Tables Aftronomiques de feu M. de la Hire, Ce que nous dîmes alors à cette occafion, eft aujourd’hui plus vrai que jamais par rapport à un Ouvrage du même genre qui fort auf de l'Académie, & de plus la fomme ou la quantité de ce-vraf _eft encore augmentée. Non feulement les. vérités communes aux deux ouvrages, font plus exaétes dans Je fecond, parce qu'il eft le dernier, mais par la même raifon il contient plus de vérités. Ce n'eft pas la peine de prouver que l'exactitude des Calculs Aflronomiques eft proportionnée au nombre plus ou moins grand.d'Obfervations fur lefquelles.ils font fondés : que par conféquent les Siécles, en augmentant ce nombre, augmentent cette exactitude; que quoique les deux derniers. Siécles feuls puiflent en valoir plufieurs des précédents, & peut-être tous les précédents, par avantage qu'ils ont tiré des Inftruments de nouvelle invention, & des. excellentes. Méthodes modernes, ils enchériffent pourtant toûjours fur eux-mêmes, & perfectionnent toûjours l'Aftronomie : tout: cela eft trop inconteftable & trop connu. Mais. on ne fçait: pas fi communément que le Ciel change beaucoup: plus: qu'on ne penfoit. : Les premiers Obfervateurs ont été frappés de l'uniformité,, de la régularité, de là conftance des mouvements céleftes.. &c en partant de-là, on a-été jufqu'à croire le Ciel inaltérable, + P: 75° & fuiv. 2de Edit. So HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE ; privilege qui convenoit bien à fa dignité. Les Aftronomes Grecs dûrent être bien furpris quand ils s'apperçurent que les Etoiles fixes avoient un mouvement, fi lent, à la vérité, qu'à peine a-t-on encore bien déterminé la durée de fa ré- volution, mais enfin un mouvement, qui, quoique fimple- ment apparent dans les Fixes, eft très-réel dans l'Axe de la Terre. On commence à s'appercevoir d'un autre mouve- ment, beaucoup plus lent encore, par lequel le plan de Y'Ecliptique s'approche toüjours de celui de l'Equateur de la Terre, & plus ces mouvements font lents, plus nous fommes éloignés de fçavoir s'ils feront des révolutions entiéres, où s'ils fe réduiront à n'être que de fimples librations, mais ce feront toûjours des mouvements exécutés fur de très-grands corps, dans de très-grands elpaces, & qui feront très-léai- timement croire qu'il y.en-a de pareils partout où il peut en avoir, c'eft-a-dire, dans tout l'Univers, Auffi les Tables de M. Caffini commencent-elles déja à indiquer cette poflhbilité, non fur le mouvement des Etoiles fixes, établi depuis long temps, mais fur celui de l'Ecliptique, nouvellement obfervé, ou du moins foupçonné avec beau- coup de fondement, & qui tirera extrêmement à confc- quence, fur-tout étant combiné avec l'autre. Ce n'eft pas ici le lieu de nous étendre fur cet article, il nous fuffira de dire que M. Caffini a eu égard à la variation ou préfente ou future de la pofition de l'Ecliptique par rapport à l'Equa- teur, & que c'eft-là un exemple des avantages des Tables nouvelles, précifément parce qu'elles font rouvelles. Celles de M. Caffini en fourniflent encore un qui n'eft pas moins confidérable, c’elt le Calcul des 4 Satellites de Jupiter & des $ de Saturne, que nous ne connoiffons, à les prendre tous enfemble, que depuis 1 $o ans, efpace de temps aflés court par rapport à tout le travail qu'ils ont demandé, ; En général, les Tables de M. Caffini ont l'avantage d’être fondées en grande partie fur ce grand amas d'Obfervations faites depuis plus de 70 ans à l'Obfervatoire de Paris, fans aucune Lin DES SCIENCES, 8r aucune interruption, avec un foin toûjours égal, avec d’'ex- cellents Inftruments, par des mains habiles & exercées. C’eft en ce genre le plus riche tréfor qui foit au monde. On communique ici tout l'art dont on s'eft fervi pour en profiter, toutes les Méthodes néceflaires aux différentes opérations, tantôt choilies felon les Iumiéres d’une longue expérience, tantôt renduës plus fimples & plus faciles, tan- tôt inventées de nouveau, & de tout cela fe forme un corps complet des Eléments d'Aflronomie, qui. manquoit encore à cette Science. Il y a plus à fcavoir que jamais pour être Aftronome, mais aufli on le deviendra plus facilement. ‘ L es même année M. de Gamaches publia auffi une Affronomie Phifique ; ou des Principes généraux de la Na- ture, appliqués au Méchanifme Aflronomique, à comparés aux Principes de la Plilofophie de M. Newton. Quelque magnifique que foit tout ce que promet ce titre, le Livre en tient peut- être encore davantage, & n’embrafle pas moins qu'une Phi- fique générale Cartéfienne , mais Cartéfienne feulement par la méthode & par les principes fondamentaux de Defcartes. Ce neft donc qu'en ce fens qu’on foûtient ici la Philofophie de ce grand Homme, & fans aucun égard aux opinions & aux explications particuliéres qu'il auroit fans doute aban- données lui-même, s'il avoit pu profiter des lumiéres qu'ont produites les obfervations & les expériences faites depuis fa mort. | - Soûtenir aujourd'hui le Cartéfianifme, ou réfuter Newton, c'eft prefque la même chofe. Cependant M. de Gamaches, plus attentif à ce qu'il convient de rejetter ou d'admettre, indépendemment de tout efprit de parti, qu'à juflifier ou à critiquer ce que Defcartes & Newton ont rejetté ou admis, paroît vouloir accorder à ce dernier plus qu'aucun Cartéfien . ne-lui avoit accordé jufqu'ici ; conduite qui ne peut que faire honneur à fon difcernement, & lui concilier beaucoup de confiance de Ja part de fes Ledteurs. Hif, 1740. + * p. 94e X p.37: Xp. 36: 82 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Les Tourbillons font devenus le point capital de Ja Phi- fique de Defcartes, & celui fur lequel fes Difciples ont principalement infifté dans ces derniers temps, parce qu’il n'en eft point contre lequel les Newtoniens ayent fait de plus fortes objeétions. La Théorie des Tourbillons ne fçau- roit auffi être traitée fans toucher aux grandes Queftions du Plein & du Vuide, de la Loi & de la Regle de Képler, & à plufieurs autres queftions incidentes qui s’y mêlent, & qui comprennent prefque toute l’Aftronomie Phifique. Nous nous fommes déja aflés expliqués fur cette matiére, à l’occa- fion des Leçons de Phifique de M. l'Abbé de Moliéres, dans les Hiftoires de 1734*, 1736 *, 1737*, & nous y ren- voyons le Lecteur. Mais c'eft*dans le Livre même de M. de Gamaches qu'il faut voir tout ce qu'il ajoûte, ou qu'il change aux idées qu'on s'étoit faites fur ce fujet. Il admet une matiére Ethérée, circulante, dans laquelle les Planetes principales fe meuvent autour du Soleil, & autour de celles-ci les Planetes Secondaires, ou les Satellites. Mais c’eft fans aucune impreflion fenfible de la part de la matiére Ethérée, tant fur les Planetes principales que fur les Secondaires ; elles s’y meuvent avec elle, chacune dans le lieu & à la diftance du point central qui lui convient, fans être entraïnées par elle, en un mot comme dans le Vuide, quoique M, de Gamaches admette le Plein, & qu'il le juftifie de plufieurs maniéres auffi nouvelles qu’ingénieufes. I compte s'être mis ar-là à couvert de ce qu'il y avoit de plus embarraflant dans les difficultés qu’on a formées contre les T'ourbillons, & qui fe trouvent répanduës dans les Principes mathéma- tiques du Philofophe Anglois. Notre Auteur n’a pu fe prêter à la pefanteur réciproque, & il fait pefer les Planetes vers le Soleil, &, comme Newton, en raifon inverfe des quarrés de leurs diftances ; mais il refufe au Soleil de pefer vers les Planetes, & il démontre que fi la pefanteur étoit réciproque, les phénomenes en feroient très-fenfiblement défigurés. I donne auffi un tour nouveau à quelques démonftrations des principales propofitions de ce Philofophe, & relativement N AIMBE SM SI ENT E Nice s'il 8; au Sifteme général d’Aftronomie Phifique. Car M. de Ga- maches n’a pas négligé de faire fentir l'excellence de l'efprit de Sifteme, efprit qui caractérile, felon lui, les Sçavans de notre Nation, & les vrais Philofophes. N Ous renvoyons entiérement aux Mémoires L'Obfervation de l'Eclipfe Solaire du 30 Décembre . tes M. 1739, par M5 Caffini & Maraldi. Pe 355. L’Ecrit de M. de Fouchy fur un nouvel Inftrument pour }. 468. obferver en Mer les hauteurs & les diftances des Aftres. DODOO00000000000000000 GNOMONIQUE. CE année M. de Parfieux a préfenté à l’Académie un Traité de Gnomonique, qu'il veut mettre à la fuite de celui de Trigonométrie reétiligne & fphérique, dont il a été parlé en 1738 *. Ce fécond ouvrage contient un abbrégé méthodique des principes de la Gnomonique, la defcription de quelques Inftruments pour décrire les Cadrans avec beaucoup de précifion & de jufteffe, & des Tables des Angles horaires de tous les Cadrans Déclinants de 1 $ en 1 5: Minutes pour la Latitude de Paris. On a cru que ce travaif feroit très-utile, * p. 80. £ Es Li} 84 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE DE LA DIFFRACTION ov INFLEXION DES. KR A OAV Ous fuppoferons comme connu, ce qui a été dit fur + V. PHift. ce fujet en 1738 *, & nous entrerons dans un plus p.95: &f. grand détail & du phénomene & des caufes. Toute Diffraction ou Inflexion des Rayons fe fait avant qu'ils ayent touché le Corps à l'occafion duquel elle fe fait, & c’eft en quoi elle differe, du moins en apparence, de la Réflexion ou de la Réfraétion, qui demandent toutes deux un contact immédiat. Il y a deux cas oppofés de la Diffraftion. Le premier & le plus marqué, où les Rayons arrivés à une certaine petite diftance du Corps diffringent, prennent une nouvelle di- rection en s'écartant de lui: le fecond, obfervé & découvert par M. Newton, où le Rayon tourne en quelque façon autour du Corps, voici le fait. Un Rayon reçu fur un côté d'un Prifme triangulaire de verre, entre dans ce Prifme, tombe fur le côté voifin, fort par-là du Prifme, & y rentre par le même côté, en traverfe de nouveau une épaiffeur égale à celle qu'il avoit traverfée d'abord, refort & retourne dans l'air fous le même angle fous lequel il étoit entré. II eft certain que ce Rayon paroît bien attiré par ce Prifme qu'il ne peut fe réfoudre à quitter, & que les anciens Scho- laftiques, & ceux qui leur ont fait l'honneur de renouveller leurs idées, ont ici un grand fujet de triomphe. Mais M. l'Abbé de Moliéres ne defefpere pas de ramener ce fait fin- gulier au fimple Méchanifme que l’on auroit tant d'envie de décréditer, & qui eft encore plus vifible & fans comparaifon mieux conftaté que toutes les attractions du monde. ÉVRBM ESPACE NC ES 8s … M. l'Abbé de Moliéres adopte ces mêmes petites Atmo- fpheres dont nous avons déja parlé en 173 8 à l'endroit cité d'après M. de Mairan. M. Newton a obfervé, finement & heureufement felon fa coûtume, qu'un Rayon qui tombe obliquement fur un Verre plat, n'y arrive pas précifément felon la ligne droite de fa direétion, mais en fe courbant “avant que d'y entrer, après quoi il le traverfe en ligne droite, & en refortant il reprend en dehors la même petite cour- büûre de l'entrée, mais en fens contraire. Il ne faut qu'ima- giner une Atmofphere autour du Verre, & la raifon de ce petit phénomene faute aux yeux. Cette Atmofphere, qui fe préfente au Rayon qui va entrer, ne fera pas un Milieu uni- forme; quelque peu épaiffe qu'elle foit, elle le fera beaucoup par rapport à un Rayon qui eft d'une fineffe prefqu'infinie, & qui fentira, pour ainfi dire, les moindres différences de denfité qu'il pourra y avoir entre les couches de l Atmo- fphere; or il y en aura toûjours, puifque ce fera une éma- vation de différentes particules du Verre qui sarrangeront entrelles felon leurs denfités ou pefanteurs. Le Rayon ne pourra donc traverfer cette Aimofphere qu'en décrivant une Courbe. Il faudra de même qu'ayant paflé du Verre dans YAtmofphere, il y décrive une Courbe, & lAtmofphere étant fuppofée d’une égale épaifieur tout à l'entour du Verre, & fes différentes couches difpofées par-tout entr’elles de la même maniére, ce qui eft aflürément le plus naturel, ces deux Courbes ne feront que la même renverfée, & puifque ce font dés Courbes, leurs côtés infiniment petits repréfen- teront les différentes directions du Rayon à chaque inftant qu'il fera dans da partie, foit fupérieure , foit inférieure, de Y'Atmofphere. En fortant par la partie inférieure, il fort avec là direction du dernier côté de la Courbe qu'il décrivoit, & n'entre dans l'Air pur qu'avec cette direction qu'il ne quit- tera plus, puifque l'Air eft un Milieu uniforme, ou confi- déré ici comme tel. Les différentes directions des côtés de 1a Courbe décrite par le Rayon dans J'Atmofphere du Verre, dépendent de L ii 86 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE l'ordre général des Couches entr'elles, c’eft-à-dire, de ce ue les inférieures, plus proches du Verre, feront plus denfes que les fupérieures, ou au contraire, car le Rayon qui fouffre à chaque inftant dans cette Atmofphere une Réfraction nouvelle, prendra une direction différente felon qu’il pañiera d'une Couche plus denfe dans une moins denfe, ou au contraire. La Courbe du Rayon s'inclinera donc toüjours vers un certain côté, quel qu'il foit, & tendra au paralle- lifme par rapport à ce côté-là. Le Rayon qui vient de fortir par un côté du Prifme, & traverfe encore la partie inférieure de l'Atmofphere, peut donc s’incliner toüjours vers ce côté du Prifme, & lui devenir enfin parallele, & il le deviendra fi V'Atmofphere eft affés épaifle pour le lui permettre, & lui en donner le temps, ou s'il y eft entré d’abord affés in- cliné pour devenir bien vite parallele, ce qui ne dépend que de l'angle fous lequel il a été reçû dans le Prifme, & cet angle peut toüjours être tel qu'on voudra. Le Rayon devenu parallele à ce côté du Prifme avant que d’être forti de 'Atmofphere, n'a plus une direction à pouvoir en fortir, il ne peut plus que faire un chemin contraire à celui qu’il avoit fait dans cette même partie in- férieure, & par conféquent il rentrera dans le Verre par le même côté du Prifme par où if en étoit forti, le traverfera de nouveau, & retournera dans l'Air, ce qui eft l'explica- tion du cas de M. Newton fans aucun fecours de principes imaginaires. Le chemin que le Rayon à fait dans l Atmofphere felon cette explication, demande qu'en fortant du Verre, il ait toû- jours paffé d’une Couche plus denfe dans une moins denfe jufqu’à ce qu’il foit devenu parallele, après quoi en retour- nant vers le Vêrre, il paflera toüjours d’une moins denfe dans une plus denfe, & il eft très-vraifemblable que les Atmofpheres étant des émanations du Corps qu'elles enve- loppent, elles aillent toûjours en diminuant de denfité à melure qu'elles s'en éloignent, puifque leurs particules plus groffiéres & plus maffives, doivent être pouflées avec moins de vitefle.. . + 0 DES SCIENCES. 87 - Cependant comme tout ce qui n'implique pas une con- tradiction formelle eft poffible, & même fe trouve quelque part, il pourroit y avoir quelqu'Atmofphere, dont la dif- pofition des Couches feroit toute oppofée, Par exemple, les particules les plus éloignées, dont le mouvement par confé- uent auroit été moindre, auroient été d’ailleurs de nature à s'accrocher aifément enfemble, & par-là feroient devenuës plus denfes, fans néantmoins retomber, parce qu'elles n’au- roient pas la force de furmonter la réfiftance des inférieures. Cela conviendroit à l’Atmofphere d'un Corps gras, tel qu'un Cheveu ; auffi fe trouve-t-il par l'expérience que lInflexion qu'il caufe aux Rayons, eft contraire à celle que leur caufe le Verre. Qui fçait s'il ne fe découvre point ici quelque rapport avec les deux Electricités, l’une Vitrée, l’autre Ré- fineufe, dont nous avons parlé ailleurs? IL eft toûjours für qu'elles naiffent d’Atmofpheres différentes entr’elles, & les mêmes que nous venons de concevoir pour les Rayons. Il y a toûjours quelque difhculté à comprendre comment un Rayon qui pañle d’un Milieu dans un autre où ïf doit fe mouvoir plus aifément, en augmente fa vitefle, car elle ne doit qu'y diminuer moins qu’elle n'eût fait dans le premier Milieu. Nous avons dit en 173 8, que leSifteme de la preffion fauvoit entiérement cette difficulté, mais non pas celui de V'émiffion. Maintenant M. l'Abbé de Moliéres la leve auffi par le Sifteme des petites Atmofpheres. M. Huguens, dont nous avons rapporté en 1706* de très-belles découvertes fur le Choc des Corps à reflort, a démontré que fi des Globes élaftiques inégaux font rangés de façon qu'ils aïllent en augmentant de mañle, & que l’un des deux extrèmes foit choqué, la vitefle qui fe communi- quera de lui à tous les autres de la file, ira toüjours en di- minuant de Fun à Fautre, en cas que le plus petit Globule ait été choqué, & en augmentant au contraire, fi ç’a été le plus grand. Cela s'applique aifément aux Atmofpheres, où l'on conçoit une difpofition aflés réguliére de Couches. Qu'un Rayon pafle de l'Air dans le Verre, qu'on fuppofe * p. 136, &fliv. 88 HisToiRE DE L'ACADEMIE ROYALE plus favorable à fon mouvement, il a traverfé auparavant une Atmofphere où les Couches qu'il rencontre {es pre- miéres, font toñjours moins denfes que les fuivantes, & par conféquent il n’eft arrivé au Verre qu'avec une vitefle aug- mentée. Et fi Von veut fuivre cette idée plus loin, il traverfe le Verre avec cette vitefle augmentée qui fera uniforme, parce que le Verre n'eft pas compofé de Couches différentes en denfité; mais au fortir du Verre, il retrouve l Atmofphere dont les Couches font à fon égard dans un ordre contraire à celui où elles étoient de autre côté, il y perd toute fa vitefle acquife, & ne rentre dans l'Air qu'avec celle qu'il avoit lorfqu’il en eft forti. Ce n’eft pas une pure fuppofition que l’élafticité des pe- tites Atmofpheres. Elle fera bien conftatée, s'il eft vrai que ces Atmofpheres s'étendent, s’'aggrandifient, dès qu’elles font moins comprimées par le reffort de l'Air qui les ren- ferme de toutes parts, & agit contr'elles. Or c'eft ce que l'on voit dans la Machine du Vuide, en y mettant ce Prifme dont nous avons parlé *, & d'où un Rayon qui y a été reçù fous un certain angle, fort dans l'Air en ligne droite. I ne fort plus du Prifme quand l'Air a été pompé à un certain point, mais il rentre dans le Prifme à la maniére de celui qui fembloit y être porté par attraction. C'eft mani- feftement parce que l Atmofphere du Verre eft devenuë plus grande. Selon Fidée que nous propofons, le Rayon a eu réelle- ment plus de viteffe en traverfant le corps du Verre qu'il n’en avoit eu dans l'Air, mais cette augmentation de vitefle, il ne la tenoit que de l'Atmofphere du Verre qu'il avoit traverfée, & il la perd en repaflant de nouveau dans l'At- mofphere pour rentrer dans l'Air, où il fe retrouve préci- fément tel qu'il étoit auparavant. : S'il y avoit une Atmofphere dont la difpofition fût con- traire à celle du Verre, ce feroit la même chofe renverfée; le Rayon arriveroit au Corps qu'elle envelopperoit avec moins D'E SNS (CR /EIN C Es vol! 69 moins de vitefie qu'il n’en avoit eu dans d'air, mais il répa- reroit entiérement cette perte par fon fecond paflage dans cette Atmofphere, &c. Tout cela eft bien recherché, mais il y regne une analogie affés fatisfaifante. 11 y a bien de l'appa- rence que tous les phénomenes fins de la Phifique, ceux qui nous échappent le plus, tiennent à des caufes de cette efpece. SUR LES ANACLASTIQUES OU REFRACTOIRES, NOUVELLE ESPECE DE COURBES. Our ce qu'on a vû de M. de Mairan en 1722 *, V. les M. 1723 * & 1738 *, fur des fujets qui appartiennent à P- !- la Théorie fondamentale de l'Optique , lui a fait naître plu- * P- 109 £ 9 uiv. fieurs vüës incidentes, & en quelque forte épifodiques, qui x p. 107. lui ont paru dignes d'être fuivies. Voici le premier exemple & fuiv. w'il en donne. Un Baïlin étant plein d'une Eau claire & tranquille, fr d'un point placé à quelque hauteur au deflus de la furface de cette Eau, ‘on regarde le fond du Baflin, qui eft un plan horifontal, on le voit comme une furface concave, qui de- puis le point où tombe la perpendiculaire tirée de 'Œüil fur la furface de l'Eau, ou Axe de la Vifion, s'éleve toûjours vers les bords du Baflin, & sy termine, & qui s’élévera uniformément tout autour de cet Axe, s'il tombe fur le milieu du Baffin. Et fi le Baffin ou la furface fupérieure de VEau a une aflés grande étenduë, & l'Eau une aflés grande profondeur ; on verra cette furface apparenté du fond, con- cave d’abord.vers Œïl, devenir toüjours moins concave, S'applanir, & enfin devenir convexe vers ce même côté, où faire au moins douter fi elle ne left pas devenué. IL eft très-évident que ce phénomene eft caufé par les Réfraétions des rayons du fond du Baffin, qui ont paflé de Eau dans Air, mais voilà une génération de Courbürg Hif. 1740. e M P- 82, & fuiv. 90 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE bien réelle, qui ne doit pas être vûüë indifféremment par les Géometres, & que l'on ne fçait pas cependant qui ait été examinée par aucun d'eux, quoique quelques-uns l'ayent remarquée. M. de Mairan a trouvé le fujet aflés neuf & aflés curieux pour l'approfondir, Comme toute cette furface apparente du fond du Baffin eft la même tout autour de l’Axe de la Vifion, ïl fuffit d’en confidérer une Section verticale qui paflera par cet Axe, & même dans cette Section une feule moitié qui s'étendra de-. puis l’Axe vers un bord du Baffin. Cette demi-Section fera terminée par une Courbe qui, partant d'un point de Axe au fond de l'Eau, s’élévera toüjours vers le bord du Baffin. M. de Maïran la nomme Réfrachoire. Voici comme elle fe forme. Si de 'Œi pris pour un feul point, & placé à une hau- teur finie quelconque au deflus de l'Eau, on tire des droites à tous les points d’une ligne horifontale quelconque prife fur Ja furface de l'Eau, depuis Axe de la Vifion jufqu'au bord du Baffin, il eft vifible que toutes ces droites feront autant de Rayons vifuels qui iront frapper Gil, & enr même temps ce feront les parties fupérieures, mais rompuës, d'autant de rayons qui du fond du Baflin auront été frapper en deflous la furface fupérieure de l'Eau aux mêmes points d'où partent les lignes fupérieures. Les rayons pris dans TEau, partent tous d’une même ligne du fond parallele à celle qu'on a déterminée fur la furface, & comprife dans le même plan vertical. L Chaque point de cette ligne du fond de FEau rayonne fur toute la ligne de la furface, & la couvre toute entiére des rayons qu'il lui envoye. Chacun des rayons partis d'un feul point du fond, va donc rencontrer fur la furface un de ces rayons fupérieurs qui vont tous à l'Œil, mais un feul point du fond ne fe fait pas fentir à lŒïl par cette infinité de rayons à la fois, tant inférieurs que fupérieurs, & dont chaque inférieur a fon fupérieur correfpondant ; car certai- hement dans le paflage de l'Eau à l'Air où eft l'Œïl } il a DES' SCIENCES. :. gr dû fe faire une Réfraction, & comme cette Réfraétion dé- termine l'angle que feront enfemble au paflage de l'Eau dans V'Air fa partie inférieure & la fupérieure d’un rayon total quelconque du fond , chaque point du fond ne fe fait fentir à l'Œil que par un rayon tel que fa partie inférieure fafe précifément cet angle avec la fupérieure, & il la va choifir, pour ainfi dire, entre toutes ces lignes fupérieures que nous avons conçüës tirées de la furface de l'Eau à lŒil. Chacune de ces lignes fupérieures appartient donc à un rayon infé- rieur avec lequel elle n’eft point en ligne droite ; il n'y a d'exception que pour les deux parties de l’'Axe de la Vifion perpendiculaire à la furface de l'Eau & au fond. Les lignes fupérieures par lefquelles PŒil eft frappé, étant toutes, horfmis une, obliques à la furface de FEau, elles appartiennent ou correfpondent chacune à une ligne inférieure moins oblique à cette même furface; car dans le paffage de l'Eau à Air, milieu qui conftamment réfifte plus à la Lumiére que l'Eau, le rayon a du perdre de fa viteffe verticale, felon ce qui a été expliqué amplement en 1723 à l'endroit cité, & par conféquent il devient dans l'Air plus oblique à la furface de l'Eau qu’il ne l'étoit dans l'Eau. On fe le repréfentera bien clairement, fi l'on imagine que 1a partie de Axe qui va du point fixe où eft l'Œüil à la fur- face de l'Eau, & eft a prémiére de toutes les lignes fupé: rieures , eft en même temps celle qui exprime leur vitefle verticale à toutes, & puilqu’elle eft conftante , leur viteffe verticale ne peut diminuer relativement à Fhorifontale que par l'augmentation de l’horifontale, ou, ce qui eft le même, par une plus grande obliquité du rayon à la furface de l'Eau. IL eft vrai que ce n’eft pas là exaétement la premiére idée qu'on pourroit prendre. Le paflage de l'Eau dans l'Air demande que la viteffe horifontale du rayon dans l'Eau ayant été 4, fa vitefle verticale dans V'Air foit 3, & par confé- quent lhorifontale étant fuppofée conftante pour tous les rayons, leur viteffe verticale diminueroit toujours à mefure qu'ils viendroient de plus loin. Mais ici où l'on a fuppofé M ij 2 HisTOIRE DE L'ACADEMIE RoYyALE fi fixe, & par conféquent fa vitefle verticale de tous les rayons conflante, il faut prendre l'horifontale toûjours croif- fanté ; les deux idées ne font réellement que la même. Que l'Œil foit frappé par une ligne qui ait autant de parties qu'on voudra, différemment pofées les unes à l'égard des autres comme un zig-zag, il ne fentira le coup que felon la direction de la derniére partie qui laura touché immédia- tement, & ne le rapportera qu'au bout de cette partie le plus éloigné de lui, c'eft, felon la penfée ingénieufe de Def: cartes, une efpece d’Aveugle qui ne s'apperçoit point de tout le refte du zig-zag. Aïnfi dans le cas préfent, un point quelconque du fond du Baflin n'eft vûü que par la partie fupérieure & rompuë de fon rayon, & il eft toüjours vû fous l'angle que fait la direétion de cette partie avec la fur- face de l'Eau ; & comme cette direction elt toüjours plus oblique ou plus inclinée à l'Eau que n'étoit celle du rayon du même point fous l'Eau, il fera rapporté par l'Œil, fui- vant cette feconde direétion, à un point plus élevé que le fond du Baflin, où il eût été rapporté felon la premiére, ce qu'il eft très-facile de voir. Ce point plus élevé eft dans la même ligne verticale ou perpendiculaire à l'Eau dans laquelle l'Objet eût été vü, s'il n'y eût pas eu de Réfraction, car la Réfraétion ne change rien, quant à la pofition, dans tout ce qui eft vertical. Nous venons de le voir dans les deux maniéres équivalentes de concevoir la Réfraction , l'une laifle ce qui eft vertical, fans en altérer ni la grandeur ni la pofition, l'autre n'en altere que la grandeur ; & en effet, que l'on remette au lieu des deux vitefles, l'une verticale, l'autre horifontale, les deux Sinus d’Incidence & de Réfraction qu'elles repréfentent, on trouvera que pour conferver de part & d'autre les mêmes rapports, il eft néceffaire que les deux Sinus fe rapportent à la mème verticale. Cela eft même devenu en Dioptrique un principe qu'on ne prend plus la peine de prouver. Tous les points de la ligne droite tirée au fond du Baflin font donc vüûs plus élevés, ou au deffus de ce fond, & D'E-S: $C IE N C-:E ss, 03 comme c’eft l'obliquité de leur rayon rompu au deflus de l'Eau, qui caufe leur élévation apparente, plus cétte obli- quité eft grande, plus l'élévation l'eft auffi. Or l'obliquité des rayons rompus eft d'autant-plus grande, qu’ils partent d’un point. de la furface de l'Eau plus éloigné de l'Axe de la Vifion ; donc à compter depuis cet Axe, les points du fond du Baffin font.toûjours vüs plus élevés, & la ligne qui contient tous ces lieux apparents, s'éleve toûjours vers un bord du Baflin, & enfin y arrive. Si les lieux apparents s'élevoient toûjours également les uns par rapport aux, autres, la ligne qui les contient tous feroit une droite, &. l’hipoténufe d’un Triangle Reétangle, comme il, eft ailé de s’en .aflüxer ; mais les lieux. apparents ne s’élevent pas uniformément, ils s’élevent de plus.en plus, Ce, font les différentes obliquités des rayons rompus fur Ja furface de l'Eau, ou, ce qui eft le même, les Sinus des différents angles qu’ils font fur cette furface, qui reglent les différentes élévations des lieux apparents. Je prends une Suite de ces angles, tels qu'ils différeront tous entr’eux d’un degré, la Suite de leurs Sinus fera telle que ceux des grands angles différeront moins entr'eux que ceux des petits. Cela éft évident dans un Quart de Cercle, dont toutes les Or- données tirées fur fun des deux rayons qui comprennent l'angle droit, font les Sinus de tous les angles depuis o jufqu’à 90 ; car lOrdonnée égale à la moitié du Rayon, eft le Sinus de l'angle de 30, & la fomme de toutes les diffé- rences des Sinus qui ont été depuis l'angle. o jufqu'à celui de 30, & par conféquent l'autre moitié du Rayon, qui ajoûtée à celle-ci, fera le Rayon ou le Sinus de 90, fera la fomme des différences de tous les Sinus qui font depuis 30 .jufqu'à 90. Or de ces deux fommes égales, l’une con- æient la moitié moins de grandeurs qui la compofent que autre ; donc les grandeurs compofantes de la premiére, ou les différences des Sinus des petits angles font plus grandes que les différences des Sinus des grands. 2 Dans le cas préfent, la ligne des lieux apparents des points M iij 4 HisToiRE DE L'ACADEMIE RoYALE du fond s'éleve toûjours, parce que les rayons que nous y confidérons, font toüjours plus obliques à la furface de l'Eau, ou font avec elle des angles plus aigus; mais parce que ces angles étant fuppofés plus aigus ou plus petits d'une même quantité, les différences de leurs Sinus ne font pas pour cela égales, mais croiflantes, la ligne des lieux apparents s’'éleve de plus en plus, & ne peut plus être une droite. Ce fera donc une Courbe Réfrattoire où Auaclaflique, & fi on prend pour fon Axe la ligne du fond du Baffin, dont tous les points ont été élevés par la Réfraction, & pour fon origine un point de l’Axe de la Vifion, il eft vifible que fes Ordonnées croîtront toüjours, & même de plus en plus, ce qui rend les Courbes convexes vers leur Axe, & par conféquent celle-ci concave en mème temps vers l'Œil. Cette Courbe ne peut jamais s'élever plus haut que le bord du Baflin, ou la furface fupérieure de l'Eau, & fi le Baflin & l'Eau, dont la profondeur feroit toüjours finie, avoient une étenduë ou furface infinie, la Courbe auroit donc un cours infini par lequel elle ne s’éléveroit que fini- ment, ce qui, felon les principes établis par les Eléments de la Géométrie de l'Infini, produiroit néceffairement un Afimp- totifme, & donneroit pour Afimptote à Ia Courbe une ligne horifontale tirée fur la furface de l'Eau parallelement à fon Axe. Or, felon ce qui vient d'être dit, la Courbe feroit concave vers cette Afimptote qu'elle joindroit par un cours infini, & cependant, felon les principes du Livre cité, une Courbe ne peut jamais joindre fon Afimptote par fon côté concave. Le dénouement, très-facile & très-naturel, eft que la Courbe a une Inflexion. Convexe d’abord vers fon Axe, & concave vers lAfimptote qui lui eft parallele, elle a un point où elle devient concave vers l Axe, & convexe vers l'Afimptote. De-là vient que fi le Baffin eft affés grand, on voit la concavité apparente du fond du Baffin vers l'Œïl, diminuer toüjours jufqu’à ce qu’enfin elle devienne convexité. IF eft DES SCIENCES. 9$ aifé de concevoir ce que produit à cet égard l'augmentation de d'étenduë du Baffin. S'il étoit infiniment grand, on verroit la Réfraétoire changer fenfiblement , après un certain cours fini, fa concavité vers Œil en convexité, continuer enfuite de s'élever vers la furface de l'Eau où fon Afimptote, & ne la joindre qu'au bout d’un cours infini. Il eft évident par-là que tant que le Baflin eft fini, comme il left toûjours. réellement, on n'en voit point le fond s'élever jufqu’à la furface de l'Eau, & qu'on le voit s'élever d'autant plus que le Bafin eft plus grand. > On fçait par la Géométrie del'Infini, que quand les Or- données d'une Courbe croiffent de plus en plus, comme font celles de la Réfratoire en partant de fon Origine, cela vient de ce que leurs Différences premiéres font croiffantes. Mais ces Différences peuvent n'être croiffantes que jufqu'à un certain point, & avoir un Terme de grandeur, après le- quel elles décroiïflent. En ce cas-là il y a une Différence feconde qui devient ou infiniment plus petite ou infiniment plus grande qu’elle n'étoit, & la Courbe alors a un point d'Inflexion ou un point de Rebrouffement. I eft vifible que la Réfraétoire a un point d'Inflexion; donc après ce point, fes Ordonnées continuant de croître, leurs Différences pre- miéres ne peuvent que décroître, ce qui eft parfaitement conforme à l Afimptotifme qu'elle ne commence à prendre qu'à ce point d'Inflexion. Ces Différences premiéres dé- croiflantes conduifent la Courbe à s'approcher toûjours, mais très-lentement, de fon Afimptote, à lui être toûjours plus parfaitement parallele, & à fe confondre avec elle au bout d’un cours infini, felon ce qui a été dit dans les FE %- Ments cités. * Le cours Afimptotique de Ia Réfraétoire ne commençant qu'à fon point d'Inflexion, après lequel elle tend toûjours à devenir parallele, & même plus exaétement parallele à 1a furface de l'Eau, on voit clairement que cette tendance lui vient de l'extrême petiteffe des angles que les rayons rompus font alors furcette même furface, & qu'elle ne prend cette 96 HisTotRe DE L'ACADEMIE RoyALE tendance que quand ces angles toujours décroiflants, font parvenus à un certain degré de petitefle. D'où il fuit que s'ils étoient originairement plus petits, ce qui arriveroit nécefairement fi l'Œil étoit moins élevé au deffus de l'Eau, is parviendroient plütôt au degré de petiteffe qui caufe l’In- flexion, & ce point d’Inflexion feroit plus proche de l'Ori- gine de la Courbe, & fi enfin l'Œil n'étoit qu'à une très- petite diftance, la Courbe n’auroit prefque plus que fon cours Afimptotique ; on verroit le fond du Baffin prefque parallele dans toute fon étenduë à la furface de l'Eau. Si au contraire 'Œil étoit infiniment élevé au deflus de VEau, tous les rayons rompus tirés de la furface de l'Eau jufqu'à lui, feroient, à caufe de cet éloignement infini de TŒil, paralleles entr'eux & à l'Axe de la Vifion, &l Œïl ne verroit par cette infinité de rayons, que le feul point du fond du Baffin où fe termineroit cet Axe. Puifque dans le cas de la plus petite élévation l'ŒIT voit prefque tout le cours infini de la Réfraétoire, & que dans le cas de l'élévation infinie il n'en voit qu'un point, il faut que ce ne foit qu'à une certaine élévation fmie qüe lŒïi commencera à voir quelque petite portion de fa Réfraétoire, tout le refte, quoique fuppolé infini, lui en étant abfolument inconnu ; enfuite l'Œïl en verra, fi l'on veut, toute la partie concave, pourvü qu'il defcende d'une certaine quantité ; enfuite viendra le point d'Inflexion, &c. En effet, nous avons dit que ce point d'Inflexion, par exemple, n’étoit caufé que par des rayons rompus très-obliques, & s'ils le font à un certain point, ils ne pourront aller frapper un Œïil trop élevé. Le Baffin étant fini , fa différente grandeur produit tout ce qu'auroit produit la différente élévation del Œïil. Car dans un Baffin infiniment petit, les rayons rompus qui iroient à l'Œiïl finiment élevé, feroient tous parallelès entr'eux, comme fi l'Œil étoit infiniment élevé ; on n'a qu'à partir de-là pour trouver tout le refle, La Réfractoire n’eft une Courbe qu'à caufe de la Réfraction qui #60 Rue DJE So SC, LÉE. NC EE 6. 97 qui produit un changement de rapport de la viteffe hors. fontale des rayons à la verticale. Donc plus la Réfraction fera forte, ou, ce qui eft le même, plus le changement dans ce rapport fera grand, plus la Réfraétoire fera courbe, étant comparée. à une autre Réfractoire caufée par une moindre Réfraction. Mais la Réfraction étant fuppofée telle qu'on voudra, fi on veut confidérer la courbüre d’une Réfractoire quelconque en elle-même, on trouvera très-ficilement que puifqu’elle eft Afimptotique depuis fon point d'Inflexion, ou tend toû- Jours à devenir ligne droite, fa courbüûre eft toüjours dé- croiflante depuis ce point ; qu'à ce point même, puifque ceft une Inflexion, elle a dû avoir deux côtés infiniment petits, exactement pofés en ligne droite ; que par conféquent depuis fon origine jufque-là, elle + toûjours eu {es petits côtés confécutifs plus approchants d’être polés en ligne droite; & qu'enfin depuis fon origine jufqu'à fon extrémité, fa courbüre a toûjours été décroiflante. Donc à compter depuis l'origine, plus la partie de cette Courbe que voit l'Œil différemment élevé, eft petite, plus ce qu'il voit de la Réfraétoire, ou plütôt Ja Réfractoire qu'il. voit, eft courbe. Donc quand il voit la Réfractoire entiére, ce qui lui arrive à peu-près, quand il eft très-peu élevé, il la voit la moins courbe en fon total qu'il fe puifle ; &.en effet,nous avons trouvé qu'il ne la voit prefqu'alors que comme une ligne droite. Nous n'avons point encore fait entrer dans cette Théorie la profondeur du Baflin, qui paroît cependant en être un des Eléments. Si cette profondeur eft infinie, & qu'on ne laifle pas de concevoir Œil à une diftance finie de la fur- face fupérieure de l'Eau, on trouvera que deux rayons partis du même point du fond dans l'Axe de la Vifion, & dont un fera perpendiculaire, & autre oblique à la furface de LEau, y font tous deux perpendiculaires à caufe de la dif. tance infinie d’où ils viennent : qu'il en fera de même de tous les autres rayons pris deux à deux ;, que par conféquent Hifl. 1740. . N 98 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE ils fortiront tous de l'Eau paralleles entr'eux, & que l'Œil ne verra qu'un feul point du fond qui fera dans l'Axe de Ja Vifion, ce qui revient exactement au cas de l'ŒZil pofé à une diftance infinie d’un Baffin de profondeur finie; & en effet l'Œil eft encore ici à une diftance infinie du fond du Bain, & c'eft ce fond dont il s’agit, Si au contraire, Oil étant toujours à une diftance finie, Ja profondeur du Baflin eft infiniment ou extrêmement pe- tite, il eft évident que la Réfractoire du fond, ou ne pourra pas s’y former phifiquement, ou ne fera géométriquement qu'une ligne à peu-près toute droite, comme dans le cas d’une très-petite diftance de l'Œil à un Baffin de profon- deur finie. Les deux cas extrêmes de la profondeur du Baffin ayant les mèmes effets que ceux de la diftance de l'Œïil, on peut compter que les effets des cas moyens feront auffi les mêmes de part & d'autre, & il fufhra, pour avoir tout ce qui concerne la Réfraétoire, de fuppofer la profondeur du Baflin conftante avec tous les autres Eléments variables. Tout ce fujet, dont nous n'avons expolé que les fimples principes, a été revêtu par M. de Mairan d’une forme fans comparaifon plus géométrique, & telle que les fçavants Géometres la pouvoient defirer. Il a cherché quelle Courbe engendreroit la Réfractoire conditionnée comme elle doit l'être, & il a trouvé que ce feroit une Ellipfe dont il dé- termine l'efpece. L’Equation algébrique de la Réfraétoire monte au 4me degré, ce qui lui donne une Compagne, c'eft- à-dire, une autre Courbe qui naît avec elle de la même Equation; car comme cette Equation eft du 4me degré, elle peut produire 4 Branches de Courbe, & la Réfraétoire feule n'a pas épuifé toute fa fécondité. On a toûjours fuppofé un Baflin dont le fond horifontal étoit parallele à fa furface de l'Eau, & par conféquent les deux lignes prifes dans ces deux plans, droites & paralleles. Mais fi le fond du Baffin étoit une furface courbe, fi la furface de l'Eau, ou plûtôt du Milieu réfringent en général, ni Des 4S C1 E N.CE s 9 étoit courbe aufli, & même d’une autre courbüûre, il eft certain qu'il en viendroit des Réfradtoires différentes, & ft différentes, qu'il y en auroit telle qui ne feroit qu'une ligne droite. Ces trois lignes, celle du fond du Baffin, celle de la furface où fe fait la Réfraétion, & la Réfraétoire, peuvent * être toutes trois courbes, & non pas toutes trois droites, car l’accroiflement inégal des Sinus que la Réfraétion donne à des angles également croiffants, produira néceflairement des inégalités quelque part, & tout au moins dans l’une des trois lignes, les deux autres ayant compenfé entr’elles les inégalités par une certaine combinaifon unique. = Que la Réfraétoire foit droite ou courbe, ce fera toûjours une ligne élevée en apparence au deflus du fond du Baflin, & cela dans toute fon étenduë, c’eft-à-dire, que fon point même du milieu, ou fon fommet, ce point qui eft en même temps l'extrémité de l'Axe de la Vifion fera vü plus élevé que s'il n’y avoit point eu de Réfraétion, ou de différence de Milieux réfringents. Mais comment accorder ce phéno- mene avec ce grand principe de Dioptrique, fi inconteftable, fi univerfellement reçû, Qu'il ne fe fait point de Réfra@ion dans la Perpéndiculaire ! W faudra convenir que ce principé n'eft pas tout-à-fait bien énoncé, quoiqu’on l’entende bien, & qu'on ne Fait jamais mal appliqué. On entend naturelle- ment par le mot de Réfraétion un détour, un changement de direction, & il eft vrai qu'il n’en arrive jamais dans la Perpendiculaire, mais il n’eft pas vrai que la différence des Milieux qui auroit caufé ce détour dans toute ligne oblique, foit alors abfolument fans effet, elle caufe une élévation apparente fans détour, & par-tout ailleurs détour avec élévation. Toute cette Théorie envifagée de tous les côtés, & pro- menée dans tous les cas différents, offre un vafte champ à la Géométrie ; mais il devient encore beaucoup plus vafte, quand cette même Théorie eft prife du fens contraire, c’eft- à-dire, quand au lieu de fuppofer, comme on a toûjours fait jufqu'ici, l'Œï dans un Milieu plus réfringent que l'Objet, N i 100 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE on fuppofe l'Objet dans un Milieu plus réfringent que celui où cft l'Œif, par exemple, quand on confidérera la Ré- fraétoire de la furface inférieure du Couvercle d’un Puits, vûë par un Œil plongé dans une Eau, au deflus de laquelle il y aura de l'Air. Pour deviner les effets de cette feconde fuppoftion, il ne faut que renverfer convenablement ceux de la premiére. La Réfraétoire du Couvercle fera d'abord convexe vers l'Œil, puifque celle du fond du Baffin y étoit concave ; la nouvelle changera fa convexité vers l'Œil en concavité, puifque l’autre changeoït fa concavité en convexité ; toutes deux recevront un point d’Inflexion, toutes deux une Afimptote, &c. Mais la Géométrie, qui n’admet pas les plus fortes conjedures, prouve touût cela à la rigueur, & porte même cette analogie perpétuelle plus Join qu’on ne leût peut-être deviné. L'Ellipfe étoit la génératrice de la premiére Réfraétoire ; l'Hiperbole eft celle de la feconde, & on fçait combien ces deux Courbes ont d'affinité, & combien elles fe changent aifément l’une en Jautre. Cette occafion mème a fait naître à M. de Mairan l'idée d’une nouvelle maniére de décrire ces deux Courbes, qui ont paflé par les mains de tous les Géométres. © M. de Mairan trouve encore de l’analogie entre fes Ré- fraétoires & les Caufliques par Réfraction, & en effet il eft bien naturel que ces Courbes, nées les unes & les autres des propriétés de la Réfraétion, tirent de cette origine com- mune quelques conformités. Quoique les Réfractoires de la 2de efpece paroiïflent avoir une génération plus forcée que celles de la 1'°, car il eft beaucoup plus facile & plus ordinaire de regarder, par exem- ple, de l'Air dans l'Eau que de l'Eau dans l'Air, cependant il y a une Réfraétoire de la 24e efpece qui nous eft très- familiére, mais il eft vrai qu'on n'y penfe prefque pas, c’eft celle de la concavité apparente de la Voute du Ciel étoilé ; certainement notre Rayon vifuel pafie de notre Atmofphere dans l’Ether, d'un Milieu denfe dans un autre qui l'eft prefque infiniment moins. DES SCIENCES. 101 %1 Sans l’inégale denfité de ces Milieux, le Ciel nous paroi- troit une furface Sphérique concave, dont on ne pourroit déterminer le rayon par rapport à nos fens, qu’en le pofant éoal à la plus grande diflance où un Objet terreftre pût être apperçû à l'extrémité de l'Horifon , car le rayon ver- tical feroit néceflairement de la même grandeur, que cet horifontal, ce qui n'iroit qu'à quelques Lieuës. Mais nous ne fommes pas dans ce cas-là, il eft bien für que le Ciel nous paroît une Voute furbaiflée à compter du Zénit, & la Réfraétion ne peut manquer d’avoir aû moins quelque part à cette apparence, puifque le Rayon vifuel a traverfé deux Milieux très-différents. M. de Mairan cherche quelle Réfraétoire doit naître de-là, feulement pour un grand Cercle de la Sphere, ce qui fufi- roit ; mais Ja Réfractoire qu'il trouve par fa Théorie eft fi peu différente du Cercle, qu'elle ne pourroit pas fatisfaire au phénomene. Un Sçavant Anglois, au défaut de la certi- tude entiére qu'on ne peut avoir fur la quantité du furbaiffe- merit de la Voute du Ciel, a calculé par des tâtonnements très-ingénieux, que le petit Axe de cette Voute pouvoit être au grand comme 3 à 10, différence trop grande d'avec la Voute Sphérique. I y a donc là, outre la Réfraétion, quelqu'autre caufe qui agit. C'eft celle dont nous avons parlé en 1707 *, qui fait * p. 160. paroître la Lune plus grande à l'Horifon qu'au Zénit, le & 161. jugement naturel & involontaire par lequel Ame croit un Objet plus éloigné, quoiqu'il foit à même diflance, quand il y a une longue fuite d’autres Objets interpofés entre lui &lŒïl. Cela s'applique de foi-même à la Voute apparente du Ciel. Par cette même raifon la furface inférieure du Ciel cou- vert de Nuages, nous paroïît faire la même Voute furbaiffée que celle du Ciel étoilé. Les Nuages font fi peu élevés, & dans un Air fi peu différent du nôtre, que la Réfraction ne . doit pas ici avoir lieu, ou que du moins elle ne s’y feroit pas fentir, N iÿ 102 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE Les Réfractoires générales des deux efpeces que M. de Mairan a déterminées, fembloient l'inviter d’elles-mèmes à les renfermer toutes deux dans une formule algébrique en- core plus générale, où l'on verroit leurs reflemblances, leurs oppofitions, leurs changements mutuels de l'une en l'autre, enfin tout leur jeu poffible : auffr n'a-t-il pas manqué de . pouffr fa Théorie jufque-là ; & même comme les Réfrac- tions ne font qu'une branche du même Tronc qui produit les Réflexions, il auroit fait entrer dans une formule deve- nuë encore plus générale, des Courbes Anacamptiques ou Réflexoires avec fes Anaclaftiques ou Réfraétoires, mais il a été obligé d'interrompre ce travail en faveur de l'Académie elle-même. Ces fortes de formules font un aflemblage du plus grand nombre d'idées qu'il fe puiffe, roulées les unes dans les autres, pour ainfr dire, avec beaucoup d’induftrie, de maniére à ne leur laiffer occuper que le moindre efpace poflible. MECHANIQUE. SUR UN PROBLEME DE STATIQUE QUI A RAPPORT AU MOUVEMENT PERPETUEL. U NE Roue chargée de poids égaux à d'extrémité de tous fes Rayons, étant polée verticalement fur fon Effieu horifontal, il eft très-évident qu'à caufe de l'égalité de tous les poids qu'elle porte, elle demeurera immobile, Mais fi l'on conçoit feulement que les Rayons de la droite de la Roue deviennent plus longs, tout le refle étant le même, on imagine aflés naturellement que les poids de ces Rayons exerçant l'action de leur Pefanteur par un plus long Levier, ils auront plus de force pour defcendre que les poids dés Rayons de {a gauche n’en auront pour leur réfifter, & s'empêcher d’être élevés, & que par conféquent la Roue tournera. Si ces Rayons de la droite étant arrivés à Îa gauche par le mouvement de 1a Roue, pouvoient s'accourcir par rapport à ceux qui feroient alors à la droite, la Roue continueroit de tourner, & le même jeu récommençant toûjours, ce feroit le Mouvement perpétuel. Il n'y. a plus qu'à trouver l'équivalent de l'allongement & du raccourciffement fucceffif & conti- nuel des Rayons, & on la trouvé par des poids égaux mo- biles dans des canaux où rainures, Pour en prendre quelque idée, on peut concevoir que chaque poids, au lieu d’être attaché à l'extrémité du rayon qui le porte, peut & doit, quand la Roue tourne, pafler de ce Rayon für fon voifin, parce qu'il y trouve une cavité ménagée pour le recevoir, & dans laquelle il tombe. Comme chaque Rayon en a une, V. les M, p.201. ro4 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE la fuite de ces cavités fait une rainure totale qui traverfe tous les Rayons, & eft une Courbe rentrante en elle-même. Par rapport au deffein que l'on a, elle eft en fes différentes parties inégalement éloignée du centre de la Roue, afin que les mêmes poids ayent tantôt un plus long levier, tantôt un plus court, quoique les Rayons de la Roue ne changent pas de longueur. Il n'eft pas néceffaire d'expliquer en détail la conftruétion de la Machine, on en voit aflés l'efprit, & nous la fuppofons exécutée dans toute la perfeétion poflible. 1 eft certain que fi les principes en font bons, le Mouve- ment perpétuel eft trouvé, & ceux qui ont eu les premiers cette idée, ont pu s'en applaudir. Mais M. Camus la croit faufie, fi l'on vient à l'examiner de près. Que l’on conçoive la Roue dans l'état où elle doit tourner, c'eft-à-dire, chargée dans le haut de fa moitié droite de poids qui, en vertu de {a place qu'ils ont dans la rainure courbe, agiffent par des leviers plus longs que les poids qui font dans la moitié gauche de la Roue, il eft bien für que les poids de la 1'< moitié auront de l'avantage fur ceux de la 24e, que par conféquent leur pefanteur qui tend à les approcher toüjours du centre de la Terre, les fera defcendre, ce qu'ils ne peuvent fans faire tourner Îa Roue de droite à gauche, & on imagine aifément que les poids qui étoient d'abord à gauche, ayant pris la place des premiers, & la mème fupériorité de levier fur ceux qui feront alors à gauche, la Roue continuera de tourner de droite à gauche, & toüjours ainfr de fuite, cela eft vrai jufque-R, & ce feroit réellement fe Mouvement perpétuel, s'il n’y avoit rien de plus à confidérer. Quand en vertu de la figure de la rainure, les poids de la moitié droite de a Roue ont des leviers plus longs que ceux de la moitié gauche, c'eft parce qu'alors la portion de cette rainure qui eft à droite, eft plus éloignée du centre de la Roue, point d'appui de tous les leviers. Or ces poids de la droite, plus éloignés du centre de la Roue, étant com- parés à ceux de la gauche qui en font moins éloignés, ff on les DES SCIENCES. 10$ on les comprend les uns & les autres dans un même efpace ou entre deux paralleles où ils feront de part & d'autre éga- lement éloignés du centre de la Terre, il fe trouve que {es premiers font en moindre nombre que les feconds, & cela précifément parce que les premiers font plus éloignés du centre de la Roue que les feconds, & par conféquent en raifon renverfée de leurs diftances à ce centre. C’eft ainfi qu’on voit un moindre nembre des parties d'un Objet, quand il eft plus éloigné de FŒüil, & au contraire. Si les poids qui ont les plus longs leviers, font en même raifon moins forts par leur nombre, & réciproquement, voilà un Equilibre parfait, & loin que les efpérances du Mouvement perpétuel fubfiftent, la Roue ne commence pas feulement à tourner. SUR LES FUSE'ES VOLANTES. N a vû en 1702 * quel eft le principe général de l'élévation des Fufées volantes, c'eft le même que celui du recul d’un Canon. L’Air contenu dans la Fufée, & dont tous les reflorts font violemment & fubitement bandés par Tinflammation de la Poudre, fait effort en tous fens pour s'étendre, & par conféquent pour s'échapper de fa prifon. I ne le peut que par le bout inférieur de la Fufée toüjours ouvert, & par où fort la matiére enflammée qu'il pouffe avec lui. Mais en même temps il agit aufli, & avec la même force contre le bout fupérieur de la Fufée, qui eft fermé, & il agit en s'appuyant fur l'air extérieur placé fous le bout in- érieur, parce que cet air ne peut lui céder aflés promptement à caufe de l'extrême foudaineté de l’inflammation: Ainf le bout fupérieur eft pouflé en enhaut, & monte d’une grande -vitefle. C'eft ce qui a été expliqué plus amplement. … Cela fuppofe qu'il y ait de l'air étranger renfermé dans la Fufée, c'eft-à-dire, un autre air que celui qui peut fe trouver maturellement enveloppé das chaque grain de Poudre, car celui-là ni ne feroit en aflés grande quantité, ni ne pourroit, Hifl. 1740. O * p.11, & fuiv. 106 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE étant difperfé dans tous ces grains qui ne s’enflammeront que fucceflivement, faire agir aflés promptement tous fes reflorts pour produire les plus grands eflets poffibles. La Fufée monteroit toûjours, puifque les reflorts de l'air fe dé- banderoient toüjours en tous fens, mais ni elle ne monte- roit fi haut à beaucoup près à caufe du petit nombre de ces reflorts, ni elle ne commenceroit fi-tôt à monter, parce qu'il faudroit qu’une quantité fufffante d'air eût le loifir de fe dégager de l'intérieur des grains de Poudre. Il eft vrai qu'une compo/ition plus vive de Ja Poudre ou matiére inflam- mable pourroit réparer ces défauts, mais dans la comparaifon que nous faifions, il falloit fous-entendre que toutes chofes étoient d’ailleurs égales. LL fera donc avantageux de mettre & de conferver, s'il fe peut, dans la Fufée de l'air étranger, quoique d’un autre côté il foit néceffaire que la Poudre ou la matiére inflam- mable en foit la plus ferrée, la plus comprimée qu’il fe puifie, & que dans ce deffein on la batte avec force. L’expédient eft qu'une Broche de fer, attachée au Cor ou bafe fur la- quelle on charge Ia Fufée, pénetre dans fon intérieur auff avant qu’elle le peut, moyennant quoi quand la Fufée part, elle emporte la cavité où la Broche fe logeoit, & cette ca- vité fe remplit d'air, & fubfifte au moins quelques moments dans la forme que la Broche lui avoit donnée, parce que la matiére qui lenvironne, a été liée par une affés forte compreflion. C’eft un réfervoir d'air que l'on a ménagé pour le befoin de la Fufée, : Mais on conçoit naturellement que ce réfervoir ne durera qu'un inftant. L'air de la cavité fera fon effet fur l'air exté- rieur par une dilatation très-brufque, la Fufée en fera pouffée en enhaut avec plus de vitefle, mais paflé ce premier inftant, tout s’enflamme, la cavité s'efface, puifque la Broche qui la formoit n’y eft plus, étant demeurée attachée au Culot immobile, & la Fufée eft dans Ie même état que fi elle avoit été d’abord toute pleine, à cela près qu'elle contient un peu plus d'air, qui pourra ne lui être pas inutile, & qui au moins ne l'aura pas été d'abord. DES SCIENCES. 10 Ces idées ne feroient pas tout-à-fait précifes ; la Fufée étant conçüé divifée en couches horifontales, elle s’enflamme fucceffivement dans chacune, quoique très-rapidement, & à parler à la rigueur, il n’y en a qu'une qui brüle dans un inftant quelconque, toutes les précédentes font confumées, & les fuivantes font encore entiéres. La Broche de fer inter- rompt un certain nombre de couches, & rend plus petite l'étenduë où elles prennent feu. Il y a plus, fans cette Bro- che, un grain de Poudre pris folitairement, enflammeroit toüjours le grain fupérieur qui feroit dans la même ligne que lui parallele à l'axe de Ia Fufée ; fi la Broche eft Cilin- drique, ce fera la même chofe, mais fi elle eft Conique, le même grain n'enflammera plus que le grain fupérieur, pofé dans une ligne parallele, non à l'axe de la Fufée, mais au côté du Cone incliné à cet axe. Ainfi la Broche Conique déterminera dans l'inflammation fucceflive de grain en grain, une direction différente de celle qui eût réfulté d’une Broche Cilindrique. Quand la Fufée s'éleve, la cavité formée par la Broche ne fe détruit pas auffi-tôt, & il en refle encore une qui contient de l'air d’où l'on tire les avantages. qu’on defiroit. La cavité, après avoir perdu fon Moule, ne laïfle pas de füivre la Fufée & de s'élever avec elle, en confervant quelque temps la figure que le Moule lui avoit imprimée, car fa direction d'inflammation que la Poudre avoit prife felon ce même Moule, ne change pas en un inftant, & c'eft à cette direction que tient la figure de la nouvelle cavité. Il eft évident que plus cette cavité fera de figure à fe maintenir lông»temps, plus la Fufée fera parfaite, & c’eft-là le prin- cipal objet d'une petite Théorie géométrique que M. de Buffon a donnée. - Ce’ qui a été déja dit, füffroit prefque pour prouver que la figure Conique doit être ici préférée à la Cilindrique. La direction d’inflammation que la Broche Conique donne à la Poudre, eft aflürément moins naturelle que celle que lui donneroit la Cilindrique, elle'eft en quelque forte forcée, O ji } 108 HISTOIRE DE L'ACADEMIE ROYALE & par conféquent il faut plus de temps pour la changer, puifqu'il faut d’abord celui de la détruire entiérement avant que de lui en fubftituer une autre. Il ne s'agit ici que de temps extrémement courts, dont la petiteffle échappe à notre imagination, mais enfin ils exiflent, & peuvent encore être inégaux. De plus, quand [a cavité eft Conique, fa bafe étant en embas, il y a une moindre quantité de Poudre dans une couche inférieure que dans une fupérieure, & par conféquent moins de matiére enflammée en bas qu'en haut, lorfque le bas & le haut font enflammés. La cavité ne peut s’effacer que quand tout eft également enflammé autour d'elle, & il faut un temps ‘pour furmonter cette inégalité d’inflamma- tion, & amener tout à l’uniformité. La Broche Cilindrique ne cauféroit pas cette inégalité que l'on recherche ici. M. de Buffon prouve que la cavité Conique l'emporte à cet égard, non feulement fur la Cilindrique, mais fur celles de toute autre figure poflible. Ce qui vient d’être dit, peut le faire prefque fuffifamment appercevoir. L'expérience, qui eft la Souveraine en Phifique , a con- firmé les raifonnements. Des Fufées à Broches Coniques fe font élevées à 8 & 900 pieds en $ Secondes.._ I[ eft vrai qu'on y avoit aufii apporté toutes les autres attentions plus connuës que leur conflruétion peut demander. Ette année M. du Lacq, Capitaine dans Ie Régiment d’Artillerie du Roi de Sardaigne, Commandant des Ecoles de Campagne du même Corps à Turin, apporta à YAcadémie un Ouvrage intitulé, Nouvelle Théorie fur le ME- chanifme de l'Artillerie. L'Académie y a trouvé en effet affés de nouveauté avec la folidité géométrique néceffaire, des recherches & des expériences curieufes. Voici quelques exemples que nous détachons du tout. En plein air un tas de Poudre d’un certain diametre étant enflammé, enflammera toüjours un autre tas de Poudre qui DEVICE NuCDE Sr TI 109 ne fera pas éloigné de lui de plus de 8 fois ce diametre.” Les formules de l Auteur donnent le rapport de la vitefle _ du Boulet, qui ne commence à fe mouvoir qu'après l'in- flammation de toute Ia Poudre, à Ia viteffe qu'il a sil Le meut plûtôt, SAV", H faut toüjours de fa meilleure Poudre, ‘parte qu'une - moindre quantité équivalente à une plus grande de Poudre médiocre, eft plütôt enflammée toute entiére, & que le Boulet en partira plus fürement avec toute la force qu'il peutavoir. De plus, les Piéces pourront être moins longues,! & on mettra moins de temps à charger. La formé la plus avantageufe des Chambres pour les Mortiers eft la Sphérique, & pour les Canons c’eft la Ci- lindrique, un peu arrondie en Entonnoir dans le fond. Dans les Mines, les rayons des Entonnoirs peuvent excé- der de beaucoup la diftance du Fourneau au niveau de 1a Terre qu'on doit faire fauter, ce que les anciens Mineurs ne croyoient pas poffible. Pour le Jet des Bombes, M.du Lacq, outre des Méthodes funples, & même nouvelles, quoique dans une matiére fr traitée, donne un Inftrument beaucoup plus commode encore aux Aïtilleurs, qui leur montre la Parabole que doit décrire Ja Bombe pour aller frapper au point donné. Toutes les démonftrations géométriques de M. du Lacq ayant fuppolé que la Poudre s’enflammoit dans le Vuide, & par conféquent fins éprouver aucune réfiflance de fa’ part . de l'Air, il eft certain qu'il faudroit enfuite joindre à cette premiére Théorie celle des Mouvements faits dans des Mi- lieux réfiftants, & la Géométrie va fans doute jufque- là, mais il fe fait une complication qui n'eft plus qu'à Pufage des Sçavants, & qui s’éleve trop au deflus de la pratique, M. du Lacq, qui n'a eu que cette pratique en vüë, a eu Tart d'y amener {es principaux cas, fur des principes, non pas démontrés à la derniére rigueur, mais que lon a Jugés fufffamment approchants du vrai. Par-à il a mis les Artit- leurs en état d'agir & plus & autrement qu'ils d’auroient fait, O ii V. les M. p: 122. P. 170. P-S11. 110 HISTOIRE DE L'AcADEMIE ROYALE & nous pouvons efpérer qu'il nous viendra de ce côté-fà des connoïfiances dont nous aurions été privés. Thiout l'aîné, Maître Horloger à Paris, préfénta à, . l'Académie un Traité d'Horlogerie, qui contient une defcription détaillée & exacte de tout ce qui appartient à cet Art, & parmi tout cela plufieurs inventions nouvelles de Auteur. L'Académie a cru que cet Ouvrage feroit d’au- tant mieux reçû du Public, qu'il ÿ a long-temps qu'on en fouhaitoit un pareil, & que non feulement les Sçavants ou les Curieux ordinaires, mais même plufieurs Maîtres de l'Art pourroient y puifer des connoïflances utiles Ous renvoyons entiérement aux Mémoires Un Moyen propofé par M. de Fouchy, de fe fervir d'Horloges de moyen volume au lieu de grofles, &c. L'Ecrit de M. de Maupertuis fur le Repos des Corps. Une feconde Suite de la nouvelle Théorie des Pompes de M. Pitot. MACHINES OU INVENTIONS APPROUVE ES PAR. L'ACADEMIE ENS M. D CC; L NE Pendule de M. Gallande, où le nombre des Roues eft moindre qu’à l'ordinaire, & où par conféquent les frottements font diminués : ils le font encore d’ailleurs par P le moyen de quelques petits Rouleaux. Tout l'ouvrage a y queiques, p paru exécuté avec grande précifion, & on a trouvé qu'il marquoit dans Ÿ Auteur beaucoup de génie & de connoiffance des principes de Horlogerie. Sad DES SCIENCES. 111 IL Une Pompe de feu M. du Puys, Maître des Requêtes. On a trouvé par l'expérience, que fon produit étoit du moins auffi grand que celui d'aucune autre Pompe qui eût été vûë par l’Académie, qu'elle étoit eftimable par fa fim- plicité & par l'avantage de pouvoir être aifément tranfportée par-tout à peu de frais, n'étant que de bois, qu’enfin elle étoit très-bonne. TITI. … Des Additions-ou-Correétions faites par M. de Moura, Gentilhomme Portugais, aux Pompes à feu. Il a voulu, 1 ° diminuer la grande quantité d’eau qu'on fait bouillir pour exciter la vapeur, & qui demande un trop grand feu, trop de bois & trop de temps pour s’'échaufier fuffifamment, 2° épargner un homme chargé de tourner à propos les Ro- binets des Vapeurs & du Réfrigérant, & que l'on {çait par expérience qui manque toüjours de l'attention néceffaire, & qui ne peut guére même éviter d’être quelquefois furpris. M. de Moura diminuë 1a quantité d’eau, en confervant la grandeur des furfaces d'où part la vapeur, & à la place de l’homme des Robinets il fubftituë un Levier qui agira né- ceflairement felon le befoin du moment. Les moyens qu'il employe, ont paru très-ingénieux, conformes de tout point aux principes de Phifique & de Méchanique, d’une exécution qui demande encore beaucoup d'attention & d'exactitude, mais non pas d'une difficulté qui doive les faire rejetter. IV. Une maniére de faire agir des Scies, inventée par M. Chambon. C’eft un Pendule ou Balancier chargé d’un gros poids, qui les met en mouvement par fes vibrations alter- natives, & cette idée eft neuve. Quoique la force appliquée devienne fort petite, on a cru que la Machine de M. Cham- bon pouvoit avoir des applications utiles, fur-tout pour fcier & refendre en feuilles minces. CNRC Fautes à corriger dans les Mémoires de cette année 1 740. Page390, Ligne 1, Au lieu de i 396, Er pd: 8 425 427» 428, Nour È Lifés, de vacuo Spatio. 32 par conféquent , : ordinairement. 12, en F, en E. 26, le cordon Z, le cordon F. 16, (Fig. 11.) (Fig. 1.) 21, Fig. 10)& 11. Fig. 2 & 3. 5e Ajoiiés a la RENE PLANCHE Il.i° ! MEMOIRES MENOIRES s MATHEMATIQUE DE PHYSIQUE, RIRES D EL GR E.GAS TRE S de l’Académie Royale des Sciences, De l'Année M. DCCXL. d & k qu * QUATRIEME PARTIE DES RECHERCHES PHYSICO-MATHEMATIQUES - SUR LA REFLEXION DES CORPS. Par M. DE MAIRAN. E n'ai pu travailler aux Mémoires que je donnai Décembre en1722, 1723 & 1738, fur la Réflexion & fur 1739: ZEUS la Réfraction des Corps en général, & en particulier un Lumiére, fans qu'il ne me foit venu plufieurs idées dé- . pendantes de la Théorie que j'y ai fuivie, mais qui s’écartoient Mem. 1740, s'A 2 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE trop du plan que je n''étois fait dans chacun de ces Mémoires, pour y être inférées. Cependant quelques-unes de ces idées * concourent fi bien à confirmer, ou à éclaircir ce que j'y ai avancé, que je ne crois pas les devoir paffer fous filence. J'en vais expoler ici une des principales; & s’il s’en trouve à l'avenir quelques autres qui méritent d'être communiquées à l'Acadé- mie & au Public, ce fera toüjours en les rapportant à cette 4.me Partie: c’eit pourquoi je la partagerai en Sections & en N.°, pour la rendre plus propre à recevoir des matiéres détachées du refte de l'ouvrage, & pour la diftinguer des autres. SEC T TON AT DES ANACELASTIQUES où REFRACTOIRES, C'eff-à-dire, des Courbes apparentes qui réfultent d'un Jond opaque vi à travers un milieu réfringenr. Idée générale de ces Courbes , à examen particulier de celle du fond de l'eau. 1. I n'y a perfonne, fans doute, qui n’ait pris garde, en voyant le fond d’un baflin plein d’une eau claire & tranquille, qu'elle y paroït toüjours moins profonde qu’on ne la trouve en effet, lorfqu'on vient à la fonder. On pourroit auffi avoir remarqué, ou l'on ne manquera pas de s’en appercevoir, quand on voudra y faire attention, qu'en regardant tout autour, ou qu’en embraffant de l'œil une plus grande partie de la furface de l’eau & du fond du baffin, tout ce fond paroït courbe, au lieu de plan & parallele à lhorifon & à la furface de l’eau, qu'il eft d'ordinaire, & que nous le fuppofons, fans qu’on puifle trop diftinguer fi on le voit concave ou convexe, parce qu’en effet il doit paroître concave à un endroit, & convexe à Yautre. Cette courbüre apparente du fond de l'eau dans un baffin plan a été connuë, je ne fçaurois dire jufqu’à quel point, de quelques Auteurs du fiécle pañlé. Le P. Aferfenne , au rap- port d’/f. Voffius dans fa réponfe à J. de Bruyn, avoit demandé à Defcartes, d'en déterminer la nature : & l’on trouve en effet DENS ESC EN CE S une Lettre de Defcartes à ce Pere, où il paroït vouloir fe dif- enfer de cette recherche, par l'incertitude du lieu apparent de l'image réfraétée. Selon le même Poffus, la Refraoire ou ligne apparente du fond de l'eau avoit été décrite par Sne/hus, fur de principe de la raifon conftante des Sécantes des anglés de Réfraétion & d’Incidence, & J. de Witte avoit aufli donné cette Courbe. Mais foit que rien de tout cela n'ait été im- primé, ou que les traces en foient légeres, j'avouë que j'ai parcouru en vain, pour m'en inftruire, & les Lettres de Def- cartes, & fa Dioptrique, & es Eléments des Courbes de Wire, inférés dans le fecond volume de la Géométrie de Defcartes, publiée par Schooten avec les Commentaires de divers Au- teurs. Quoi qu'il en foit, j'ignore ce qu'on pourroit avoir fait li-deffus en ces temps-là, & je ne me rappelle pas davantage qu'aucun des Modernes les plus célébres pour la connoiflance des Courbes, ait rien donné fur celle-ci, qui étoit cependant également digne de l'attention des Géometres & des Phyfi- ciens, comme j'efpere qu'on le verra par ces Mémoires, 2. Le fond de l'air, dans le cas où le rayon vifuel paferoit de l'eau dans l'air, qui n’eft que l’inverfe du précédent, donne un fond de baflin tout autrement configuré, puifqu’on doit le voir fous lapparénce d’un Conoïde convexe dans toutes fes parties, compris dans un angle d'environ 7 degrés plus grand que le droit, & qu'il s'y écarte de plus en plus de la furface réfringente. On peut s’en faire une idée, en imaginant Toil de lObfervateur fubmergé quelques pieds au-deflous de Ja furface de l’eau d’une vafte Citerne, dont le platfond féroit parallele à cette furface, & qu’on regarderoit au travers. Et c'eft, je l'avouë, ce que je ne penfe pas que le hazard, dénué de théorie, ait encore appris à perfonne. 3. Pour découvrir & déterminer la caufe de tous ces effets, je fuppoferai l'œil de lObfervateur placé à une diftance connuë au de-R de la furface réfringente du nouveau milieu; & abbai£ fant ou élevant une perpendiculaire de ce point, j'imaginerai que le fond apparent eft formé par la révolution d’une ligne droite ou courbe autour de cette perpendiculaire, qui en fera 6 | t A ij 4 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE Vaxe, & qui en ira rencontrer le fommet. Car il eft évident que de quelque côté que l'on regarde de ce point, comme centre de la vifion, chaque feétion verticale du baffin appa- rent par cet axe, doit être la même. Et lorfque par la figure du fond réel, ni ce fond, ni l’apparent ne pourront être réduits à des furfaces engendrées de cette maniére, je ne ferai atten- tion qu’à la feétion verticale donnée. Car ce font des lignes à tracer fur un plan, qui font proprement l'objet de ma recher- che, & non des furfaces à confidérer dans le folide, comme il faudroit faire alors, chaque feétion pouvant donner des lignes différentes. 4 La ligne, droite ou courbe, & ce fera prefque toüjours la derniére, qui réfulte d’une telle feétion, eft donc ce que j'appelle F Anaclaflique ou la Réfrathoire. Je Ia nomme auf da Courbe apparente du fond du baffin en général, & dans le cas du paflage de l'air dans l'eau, /a courbe apparente du fond de l'eau, où dans le cas inverfe, la courbe apparente du fond de l'air, ou de l'Eïher, fi le rayon vifuel pañloit de l'air dans TEther, comme il arrive quand nous regardons le Ciel. Ces deux fortes d’Anaclafliques ne différant qu’en vertu du paflage réciproque d’un milieu moins ou plus réfringent, dans fon contraire, le rayon s'approchant de la perpendiculaire dans le premier cas, & s’en écartant dans le fecond, feront encore quelquefois défignées par premiére & feconde efpece, & dites oppofées ; parce qu’en effet elles font toüjours placées lune en de-çà, l'autre au de-là du fond du baffin, & que les convexités de leurs fommets font toüjours oppofées. s- Je me bornerai dans cette Section à la defcription de la Courbe apparente du fond de l’eau, & à fes propriétés. C'étoit tout ce que j'envifageois d'abord, quand je cherchai cette Courbe: cependant je ne l’eus pas plütôt trouvée, que je penfai à la maniére d'en généralifer la théorie, tant par la | premiére méthode que j’y avois employée, que par une autre qui eft, fi je ne me trompe, tout ce qu'on peut fouhaiter fur ce fujet, de plus général & de plus fimple. L'ordre des chofes & une certaine élégance demanderoient peut-être que l'on DES SCIENCES. commençät par cette derniére, où même qu'on s’y arrètit uniquement ; mais l'ordre & le détail de l'invention m'ayant paru dans cette occafion plus inftruétifs, & en même temps plus conformes au refle de l'ouvrage dont celui-ci fait partie, je me fuis déterminé à leur donner la préférence. J’avouerai auffi que les folutions & les conftructions dont le fujet ainfi traité, devenoit fufceptible, m'ont rappellé quelquefois le fouvenir de celles que demandoit Fermat, dans l'exhortation qu'il adreffe aux Géometres de fon temps *, & que M. Newton femble avoir renouvellée en plus d’un endroit de fes Ecrits. Réfervant donc pour la fin de cette recherche la Méthode générale dont je viens de parler, je fuivrai ici entiérement la conduite que j'ai tenuë pour y arriver. | 6. Ma premiére méthode appliquée d’abord aux exemples les plus fimples de l’une ou l'autre des Réfraétoires oppofées, confifte à trouver une Génératrice GR, autour du centre O de {a vifion, & fur l'axe G OX, perpendiculaire à la furface ou à la droite réfringente F°Z, telle, qu'ayant mené d'un de fes points quelconques A, & par le centre O, le rayon MOB, indéfiniment prolongé vers N, au de-là de la réfrin- gente FZ, fa partie BN, égale à OM, donne le peint A à la Réfraétoire cherchée, & foit avec la ligne BA, menée du point 2, au point À, où la perpendiculaire PNX rencontre le fond du bafin DS, en raifon réciproque des finus de Réfraftion & d'Incidence, ou, ce qui revient au même, en raifon directe de leurs fécantes. 7. On voit par-là que j'adopte pour principe de mes conftructions, qu'un point quelconque #, de l’objet ou du fond du baflin DS, vû à travers le milieu réfringent SZ, y eft vü fur la perpendiculaire menée de ce point à la ré- fringente FZ. s Je n’ignore pas ce qu'on allegue contre cette détermination *, Monemus tantüm viros clariffmmos, ut fepofitis tantifper fpeciebus ana- Dyfeos, Problemata Geometrica via Euclideanê è7 Apollonianâ exequantur, ne pereat paulatim elegantia è7 conftruendi &7 demonftrandi, è7c. Epift. D. Férmati ad D. Ken. Digby. p. 859. Tom. 2. Oper. Wallifi. À ii Fige. 1° & 2. 6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE du lieu apparent de l'image ; que nous ne jugeons des diflances que par le concours des rayons vifuels qui partent des deux yeux ou des extrémités de la prunelle ; que le concours de tous ces rayons ne fçauroit être exactement fur la perpen- diculaire, & remplir les conditions de la Réfraction, &c. Müis quoi qu'il en foit de cette queftion, que je crois avec M. Newton une des plus épineufes de la Dioptrique*, jad- mets la détermination du lieu de l’image à la perpendiculaire, comme hypothele géométrique, & je l'ai choifie préférable- ment à toute autre, parce qu'elle eft la plus généralement reçüé, & qu'elle m'a paru la plus approchante de la nature, & la plus fimple. Car il faut fe faire une hypothefe fur ce fujet, comme on le voit encore dans l'endroit cité de M. Newton, pour ne pas tomber dans le cas d'un Probleme, felon lui, très-difhiaile, & peut-être infoluble : C’eft que le concours ou foyer exaét en W de tous les rayons vifuels qui viennent de Ia prunelle, de part & d'autre de l'axe optique ON, étant in- compatible avec le concours unique & exaét en des rayons rompus, ou avec le point radiant #, celui-ci étant fuppofé unique, comme on le fuppofe d'ordinaire, il faut néceflai- rement que les concours des rayons incidents vifuels qu'on imagine partir de la prunelle, occupent un efpace fenfible far l'axe optiqueON *. Mais comment la vifion diftinéte pourra- t-elle naître de cet efpace ou de cette multiplicité de points de concours qui répondent à un point unique radiant ? Com- ment les pinceaux optiques qui en réfultent, s'affembleront- ils exactement dans un même point du fond de l'œil, ainfr que le requiert la vifion parfaite? Ne feroit-il pas plus à pro- pos de rejetter cet efpace inévitable pour Fun ou l'autre des deux foyers, autour du point #’, fur le fond du baffin, & de faire du point V un concours exaét & unique de tous les rayons viluels ? Car c'eft le point V qui eft l'objet immédiat + Punéi vero illius accurata determinatio, cm omnium radiorum (à punélo radiante} verfüs oculi pupillam refraélorum habenda fit æffimatio, problema folutu difficillimum præbebit, nifi hypotheff alicui faltem verifimili, Ji non accuratè veræ, innitatur affértio. Lect. Opt. Schol. Prop. vI1r. p. 80. * Aded ut refpe“u oculi per cujus pupillæ centrum radius [ON] tranfit, locus imaginis [punéti £c. K] per totum fpatium{N, &c.] diffundi debear, Ibid. ADIEISN SC E NUC'E s 7 de la vifion, l’image direétement apperçuë, & de laquelle doivent réfulter les pinceaux optiques, & la vifion diflinéte. J'ai calculé quelques exemples d'après cette idée, en fuppofant le point phyfique Æ, ou l'efpace qui l'entoure fur le baffin DS, d'environ une ligne de diametre, la hauteur 7° O de la prunelle, de s pieds, fon ouverture ou fon diametre de 3 lignes, Ja pro- fondeur FD du baffin d'envirôn 8 pieds, l'angle d'incidence ou d'inclinaifon OBF de 45 à 40, &c. degrés, & le rapport dela Réfraction :: 3 . 4, qui eft le cas du pañfage des rayons vifuels de l'air dans l'eau ; &c j'ai trouvé que la perpendiculaire KP, menée du centre # de cet efpace à la réfringente FZ, ne s’écarte pas du concours exaét des rayons vifuels inci- dents, fuppofé en V, d'une 100000."€ partie de ON, tous ces rayons, de quelque point qu'ils partent de la prunelle ,: répondant exactement à autant de points radiants autour du centre #, dans cet efpace d’une ligne. Si l'on imagine que par quelque mouvement interne de l'œil , & par le fentiment naturel qui difpofe toûjours fes par- ties de la maniére la plus avantageufe pour la vifion parfaite, il fe fafle ici une compenfation entre les deux foyers, par le tempérament réciproque de la régularité de l'un avec l'irrégu- larité de l'autre, on retrouvera’encore le lieu de l'image fenfi- blement fur la perpendiculaire XP. C'eft fans doute fur Ja pofñbilité d’un femblable méchanifme de l'œil que fe fonde M. Newton dans le milieu qu'il propofe de prendre fur l'axe optique; car fans cela ce point de milieu devient purement idéal, & ne peut rien fur l'organe. L'expérience du fl d'un Pendule plongé dans l'eau par fa partie inférieure, & foûtenu dans l'air par la fupérieure, lune & l’autre étant vüës fur une même ligne droite, prouveroit Topinion commune fans replique, f1 tout le fil & l'œil fe trouvant également dans le plan de la Réfraétion & de la Ré- * flexion ne rendoient équivoque le jugement des fens. Mais encore moins juftifieroit-on par-là que le lieu de l’image n’eft pas für la perpendiculaire. On voit l'image du fil & du plomb du Pendule fenfiblement au de-là de la perpendiculaire, lorf- qu'on approche horifontalement les deux yeux fur le bord Fig. 3. 8 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE du vafé, chaque œil étant par cette proximité dans un plan de Réfraction fort différent de l'autre. Mais c’eft alors un phénomene particulier qui fort de la queftion, & qui a été expliqué par Kepler, & par quelques autres Opticiens attachés d'ailleurs à l'opinion commune fur le lieu de l’image. H fuit de tout ce que nous venons de dire, que les Ré- fraétoires tracées fur le principé ou l’hypothefe de la perpen- diculaire, ne différeront pas fenfiblement de celles qui fe- roient décrites d’après les Théories précédentes ; & c’eft tout ce dont j j'avois beloin ici, par rapport aux induétions phy- fiques que j'en pourrai tirer, & pour répondre à quelques objections que l'on m'a faites fur ce fujet. DE 14 COURBE APPARENTE DU FOND DE L'EAU, ou de la Réfraëoire dans un milieu plus réfringent que celui où eff placé l'œil, &r dans lequel le rayon [e rappro- che de la perpendiculaire en fe rompant. CONSTRUCTION DE SA GÉNÉRATRICE, 8. On peut toüjours avoir un arc de cercle BC, dont le finus CD, foit à fon rayon À B, en raifon donnée de » à m. Car ayant fuppoé À B égal ou proportionnel à #, pris AD égal ou proportionnel à Vnm —un, & élevé en D une perpendiculaire, il eft clair qu’elle ira couper le cercle en 1 C; & que DC fera égal ou proportionnel à 7. Cela polé, & que — exprime le rapport des finus de Réfraction & d'Tncidence de la Lumiére, dans fon pafage d’un milieu moins réfringent dans un plus réfringent /#1 étant > #) {oit du rayon 42 de l'arc BC, de fa tangente BR, & de fa fécante AR, formé le Triangle ABR, femblable à ADC. Ayant divifé DCen autant de parties quelconques que l'on voudra, & par autant de points tels que X, mené par chacun de ces points une parallele Q XYE, au rayon AB, & qui coupe l'arc BC en £, & continué cet arc vers G, foient du centre À, &des points Q, élevées les perpendiculaires AG, Q 1, au rayon AC, qui (DES SCUENCES 9 qi fe confond avec la fécante AR: Si de tous les points Z, où ces perpendiculaires coupent le cércle GC, on mene fur: 46, des finus /# des angles! G A1, qui ‘font partie ‘du quart de cerclé GC, il eft évident /#yp. ér conffr.) que tous ces finus auront le même rapport avec leurs correfpondants FE, dans l'arc BG, que le finus total AC, AG où AB, avec le finus CD: ca ]n— AQ ,-&FE=DX; Or A4Q.DX:1A4C + DC; par conféquent des fmus/7; font’aux finus corref- pondants FÆ, comme AC? à DC; ou comme " à #.' Je prends maintehant. fur les : rayons A1, dans le\ quart ‘de :cercle GC, prolongés en #7, autant de parties 4 M, égales aux: fécantes-correfpondantes AEF, dé l'arc BC, & joignant tous les points.tels que 4; y compris @'&R'j1je décris la courbe GMR, qui aura fon fommet en G, & une branche femblable de l'aütre côté de l'axe AG; & je dis que cette courbe fera la génératrice que Ton chérché, conformé- ment à la méthode énoncée N.° 6, & comme on va voir par la conftruétionde la Réfaloiges pal il J’appellerai auf la courbe GAZR, Courbe FA fé ouvertes en éventail, ou fimplement, Courbe des écantes ouvertes, pour la diftinguer des Courbes des fécantes qui ont été ima= ginées jufqu’à préfent, & qui font toutes tracées par les extré- mités des fécantes élevées perpendiculairement fur da circon- férence du cercle danscun ‘plan qui dui eft. per pendiculaire ; ou fur une autre ligne, droite ou courbe, & toüjours paral- lelement entr'elles. BC fera nommé fon arc générateur, &pax même raïon, ABR fon triangle, & CD fon} Jinus générateur. CONSTRUCTION DE LA RÉFRACTOIRE. 9. Soit! FZ' la finface de l'eau, DS Le fond-du baffin'} Pure & l’autre paralleles à Phbrifons FD , qui leur eft per> D la profondeur de ce fond ou fa diftance de #Z; FO, prife fur le prolongement de DF, la hauteur de is au deflus de la furface de l’eau. ! Ayant mené par O la lignéWR parallele à F8 fait fr k prolongémient de FO vers G, 0G. ED :: n im, quieftle Mem. 1740. B Fig s. ao MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE rapport du finus de l'angle de Réfraétion à celui d'Incidence, & qui, dans le cas dont il s'agit, eft environ :: 3.4, je décris fur le diametre O G, là tourbe des fécantes ouvertes, GMR, ainfi qu'il a été enfeigné ci-deflus, je mene à cette courbe par le centre O, les rayons #10, mO, &c. indéfini- ment prolongés vers DS, je prends fur ces prolongements, & de la furface réfringente FZ,, vers DS, les parties FA, BN,6N, BR N, &c. égales aux rayons GO, MO, mO, &c. & je dis que la ligne qui pafle par tous les points 4, W, N,N, &c. & qui a fon fommet en À, eft la courbe appa- rente du fond du baffin DS, ou la Réfraétoire de tout milieu, dont la force réfringente eft à celle du milieu d’où part le rayon vifuel, en raifon de m à n.! DÉMONSTRATION. 10. Par le principe ci-deflus, N.° 7, tout objet Æ, apperçû du point ©, dans un milieu de différente réfringence, Z S, y doit être vü fur la perpendiculaire XNP, menée de l'objet Æ, à la furface réfringente FZ. Et fi c'éft au ‘point A, par exemple;;que cet objet eft vü, & fur le rayon vifuel OBW, on fçait que les lignes BN, BX, menées du point de ren- sontre, 2, du rayon avec la furface réfringente, feront entre elles dans le rapport donné de # à m, qui eft celui des finus des angles de Réfraction & d’Incidence, rapportés à l’axe de Réfraétion, ou, ce qui revient au même; des fécantes de leurs compléments. | Cela poé, il s’agit feulement de faire voir, que BN & BK, font entr’elles dans le rapport donné de x à m. Pour ne point compliquer davantage la Figure 4, de a Réfractoire AN, reprenons fa génératrice dans la Fig. 5, à côté de fa femblable Fig. 3. Ayant tracé du centre À, & de Pouverture AY, prife du point À, à un point quelconque }, de la tangente B R, l'arc de cercle Y M1, qui coupe GR en M, & la tangente GT en r, il eft clair par la conftruc- tion, & par tout ce qui a été dit ci-deflus, que AM— AY == At eft la fécante d'un'angle, BAY = GAt, dont le = DES %7 :1DES;, S CI E:N C':E S a finus FEZsu, eft au-fnus /y,de fon.correfpondant, G 447, dans le quart decercleG CA, en raifon des à m. Suppofant donc AG. AH ::n. nl, menant /7 K parallele à GT, & prolongeant A7 jufqu'en #,:où élle rencontré AK, les trian- gles femblables G Ar, H AK, -donneront toûjours Az. A4 2: AG+ AH: n,m) d'eft-à-dire} comme les finus s#, /», des angles GA, GAM, ou, réciproquement; comme les … fécantes dé leurs compléments € 42, G4#4 Donc fr lon mene par 4 .& par A1, la droite 4 ML, elle fera parallele à HA, & perpendiculaire à AR. Donc ( Fig. 4.) ayañt déerit femblablerment un atc 47e du centre O, par un point quelconque, 47, .de la génératrice GR, &.le quart de cercle G C:dans l'angle droit GOC, _& mené femblablement la tangenteGr, & les lignes 6 A, Hk, Ok, 4L= B h, H eft évident, par légalité de BN à OM ( conffr.) qui donne le triangle £ PN égal & fem- blable au triangle LOM, & le parallelogramime.2 84 X — LOHR, il ét, dis-je, évident que BK Æ=UOK, de ‘même que BN—= OM. Mais OM égale à Or, eft a OR :: 0G,OH, ::su.in::n.m DoncBN, BK ::h.m. Ce qu'il falloit démontrer. Un fil coloré, tendu horifontalement à quelques pouces au deffous de la furface dé l'eau, où le tranchant d'une Règle, -dans une grande cuvette remplie d’eau, feront voit la cour- büûre de Ja Réfraétoire que nous venons:dedéterniiner, & d'autant plus fenfiblement. que l'œil fera plus proche de la furface réfringente ; &. il fera plus aifé de faire ainfi cette expérience, que de trouver un grand baffin dont le fond foit exactement plan, & l'eau parfaitement tranquille. 1 faut y régarder par un petit trou fait à une carte dans le plan du fi, où quelques lignes à côté. PAR AE Diaballr rèr At n De la nature des Courbes des Sévantes onvertesÿ" son de la Générarrice GR. LM °r1 Suppofnt la deleriptiôh de cette courbe IC AZR, Fi. 6. comme ci-ideflus; ê des lignes dont elle réfute ;:ou qui B i 12 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Vaccompagnent, défignées par les mêfhes lettres ; foit le diame- tre AG AC 5, & par conféquent AA (N.° 8.) —=%c. Ayant nommé l'abfcifie AP, x, & l'ordonnée PM, 2, les triangles femblables AG, & À Lk égal & femblable à HA, donneront L4 {=c). AG (c) :: AL (7). Gt(=4) & At =Vec + 27. Mais At (conftr.) = AY= AM mm = Vxx + 77. Donc At (ect 2 yr) = AM mM—Nnn (xx+-32); d'où l'on tire cc—xx = y, qui eft une Equation à l'Ellipfe, dont le petit axe AG (c) eft au grand axe AR (—"— «) comme la racine de fa Vm M—n0n différence des quarrés des deux termes du rapport + eft au plus grand terme, "; c’efl-à-dire (N.° 8.) comme le finus du complément de l'arc générateur au finus total, ou, plus directement , comme Îe rayon àa fécante de cet arc. Ainfi fa Courbe des Sécantes ouvertes, & la Génératrice de l'Anaclaftique dont il s’agit, ne font autre chofe qu'une Ellipfe ; & voilà une propriété de l’Ellipfe, & une maniére de la décrire dont je ne fçache pas qu’il eût été fait mention nulle part. REMARQUES ET COROLLAIRES. 12. Il fuit de la propriété démontrée, qu’une Ellip{e quelconque étant donnée, on aura réciproquement le triangle, Y'arc & le finus générateurs, qui déterminent ou renferment les fécantes dont elle exprime lexpanfion ; car il n’y a pour cela qu'à décrire le démi-cercle A BR, fur le grand demi- axe AR, de l'Ellipfe, prendre fur ce demi-cercle la corde AB" égale au petit axe, &c. Mais pour avoir la valeur analytique, & du finus, & du rapport de réfringence, <, que les diametres donnés de cette Ellipf renferment, & dont on fçait feulement que m > x ; il “DE S :S'C'1X EN C'E S er faut fuppofer fon grand axe ou diametre AR , exprimé par le petit, AG, multiplié par une fraétion dont le numérateur foit le plus grand dés deux termes du rapport inconnu, & le dénominateur la racine de mm—nn, différence des quarrés des deux ; ce qui donne AR = === 460; trouvée ci-deflus. Remarquant enfuite que le finus qu'on cherche eft au finus total dans le rapport indéterminé de # àm, & faifant ce total, où M=—=1, on aura AG. AR ss Vmm—nn . mi: Vi nn, 1 ; d'où lon tirera n — LE == 26 qui devient auffi l'expreffion de +, m y tenant la place de l'unité, qui ne change rien au fecond membre de l’Equation , fi elle le muluplie. Ainf les deux axes de F'Ellipfe étant fuppofés être, comme ils le font en effet dans le cas préfent, en raïfon de 1 à #, {a formule V7 VAR — AG VE: ——— , fe transformers en == —;}; d'où l'on fçaura que la réfraétion indiquée ici, ou le rapport des fécantes dont l'expanfion a pu former une telle Ellipfe, eft 3, 13. Cette maniére de confidérer l'Ellipf, par les {é- cantes ouvertes, ou, ce qui revient au même, par les finus d'un arc donné, qui forment fon aire, d'aller. du rapport connu de fes axes au rapport qui regle l'ouverture de ces fécantes, qui deviennent autant de fes rayons, Ou récipro- quement du rapport générateur qui regle la grandeur & la direction de fes rayons, à celui de fes'axes, de réduire ce : rapport à celui de la RéfraGtion, s’il s’agit d'un probleme de ce genre, ou, de l'appliquer à la valeur des angles que fes rayons font avec fes axes, s'il s’agit d'une pofition ou d’un mouvement angulaires; cette maniére, dis-je, de confidérer TEllipf, me paroît une fource féconde de folutions, & d’une pratique très-commode pour le calcul & l’ufage des Tables, foit dans la recherche des Réfractions, foit dans certains B ii 14 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyaLE problemes de l'Aftronomié Elliprique ; & j'efpere le montrer quelque jour. plus. particuliérement par des exemples. J'ai conftruit auffi d’après cette idée des fécantes ouvertes, plufieurs autres courbes de différent ordre, & de différentes clffes, Algébriques, & Méchaniques, engendrées fous une autre loi; comme, par exemple, en fe fervant de la corde, ou d'une autré ligne relative au cercle , au lieu du finus de l'arc générateur ; ou par la divifion ou la bifiection immé- diate & continuelle de cet arc, indépendemment de fon finus, ou de fa corde, &c. qui auront en cette qualité des ufages curieux & utiles. Mais ce n’eft pas ici le lieu d’en parler. * 14 Au refte il eft clair que la droite HAK parallele & égale à AR, dont la diftance AH — © AG, repréfente celle de la furface réfringente au fond du baflin, eft le lieu de tous les fommets de triangles, tels que A4L, & dont le dernier, AKR, déterminé par le prolongement de la fécante AT=AR, donne la derniére fécante & Æ (Fig. 4.) du fond DS, F& étant fuppofée infinie, & le plus petit angle & KD, qui peuvent réfulter du rapport = = +, & que four: niroit le cas du rayon vifuel rafant & infini. Et voilà l’efprit & le fondement de notre méthode ; les derniéres fécantes, 4X, BN(—=56bp}) ne fçauroient avoir, par la propriété donnée de la Réfraction & de là Réfraëtoire, un plus grand rapport avec les premiéres, FD, FA, que celui des finus réciproques, en raifon de "m à . Donc un are dont le finus eft au total en raifon de n à m, ou fa tangente, fera le lieu de toutes les fécantes poffibles FA, BN, EN, bp; d'où rélulte l'aire de notre rectangle générateur. Mais les fécantes F4, BN, &c. font autant dé rayons de la Réfraëtoire répandus dans l'angle droit AO V’, & qui, étant prolongés, concourent au centre O de la vifion. Donc fi je raffemble les mémés rayons autour du point O, dans le même angle, ou dans fon oppolé, GOR, & felon la même direétion, leurs extrémités formeront une courbe, qui fera la génératrice de la Réfraétoire conçüë DES SCIENCES 1 comme conchoïde. Or on peut toûjours avoir cette courbe (n.° 8.) quelle que foit fa nature. Donc, &c. De la nature de la Réfraëtoire. . Ayant nommé:la profondeur FD du baffin, a; la diface OF de l'œil! à la furface réfringente, 2 ; l'abfcifle FQ de la courbe AN, x; fon ordonnée QN, y; & OL, égale à l’ordonnée menée du point Mi l'axe AG de TElliple génératrice, 7; on aura FA— 0G— = +de INTER Les triangles femblables ONQ, BNP, donneront o@ +). QN(): ANR * BP ). Donc ÊN —O0M —0t — BP PIC | 38 *499 DE+2bs + Les côtés homologues des triangles 4 LO, OGr, don: ront auffi 4 L (a). LO {7} : AE a). Gt(2), d'où l'on tire Or — —oa + x 2 ; & prenant dans l'Equa- XXe tion à l'Ellipfe (n° 11.) la dc des zen x, les x étant les mêmes dans lune & dans l'autre Re on trouvera me Die a Or = = ET X Aa — xx. Mäis on vient de voir que Or —0M = EN & à 1 CE27 à x == cs + xx. Donc tas BbHabxHax \ (LEE TEST LE (1 Sn &, MAROC L S = x aa—xx, qui eft l'Equation de la courbe mm AN, & qui, étant ordonnée, devient, x#-1# 2 4x? mm—nÀ mm Jy xx "2 2727 nn" a abx — ee aabb—0 — Faaxx sh bbxx REMARQUES ET COROLLAIRES. * 16. .Sï au lieu de faire entrer dans cette Equation a Fig. 4 Fige. 7° 8, 16 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE profondeur ÆD /a) du baflin, comme j'ai cru qu'il conve- noit au fujet, on y introduit l'expreflion du diametre OG (c) de la génératrice, ou la diftance F4 — OG du fommet de la Réfractoire à la ligne de réfringence, en écrivant c au lieu de, on aura x 20 ax 4 ME pyxx —2bccx — CCXxX + bbxx — bbec— 0, qui eft une Equation plus fimple que Ia précédente, & qui ne differe de celle de Ia Conchoïde de Nicomcde que par le coëfficient _— , qui accompagne le terme yy x x. Et alors la formation de la courbe qu'elle ‘exprime, étant en tout femblable à celle de fa Conchoïde, fi ce n’eft que fon module eft variable, & croît comme les fécantes de l'arc générateur de la courbe des fécantes, ou les rayons de l'Ellipfé génératrice, prefque tout ce qui a été démontré de la premiére conviendra à celle-ci, à quelques modifications près, Ainf notre Réfraétoire aura pour direc- trice, & pour afymptote la ligne FZ, qui dans le cas pré- fent n’eft autre chofe que la furface ou la ligne de réfrin- gence ; un point d'inflexion de part & d'autre de la perpen- diculaire FD, que l'on trouvera par le calcul différentiel, comme il eft enfeigné dans le Livre des Infmiment petits de M. de l'Hopital pour la Cochoïde de Micomede ; & une feconde double branche XY, au deflus de l'afymptote FZ, que nous appellerons la Compagne de la Réfrathoire. Cette Compagne, dans le cas où la diftance O F' de l'œil à Ia furface réfringente, FZ, eft plus petite que la Æ de Ia pro- fondeur FD du bafin, DS, c'eft-à-dire, lorfque & < Ta où < c, formera, Fig. 7, comme la Conchoïde fupérieure, un anneau OR X, & fes deux branches fe coupant en O, leur partie infinie, OF, s'étendra fur la même afymptote FZ ; fi b—=<+ a, Le >c, 19 9 3 … DES SCIENCES. 17 Fig: 9 , la compagne X} prendra une figure à peu-près femblable à celle de la Réfraétoire, & d'autant plus fem- blable, que la diftance OF /b) fera plus grande ; fon. fom- “met, X, étant toûjours, dans les trois cas, à la même diftance de lafÿmptote commune que le fommet, À, de la Ré fractoire. Ce qui eft évident par la génération conchoïdale de la courbe, & par fes coordonnées, x, y, fucceflivement égalées à Ta, À—6, à o, & à co. La compagne de la Réfraétoire a quelques propriétés ana= logues à cette courbe confidérée comme telle, mais dont le détail & la démonftration ne feroient que prolonger affés inutilement ce Mémoire. 17. Quant à l'efpace compris entre la Réfraétoire AW, . & la furface réfringente!ou fonafymptote FZ, il fera infini, comme celui de la Conchoïde de Miromede, & même plus - infini, par la circonftance du rayon delcripteur, BN, croif- fant comme les rayons de l'Ellipfe génératrice. Car, pour le dire ici en pafant, l’efpace conchoïdal eft infini, malgré ce qu'en ont dit quelques Auteurs, qui l'ont cru fmi*, faute * 1: Catut d’avoir examiné géométriquement fa nature & fes rapports, Cia Er ef & pour s'être trop fiés à l'ufage qu'ils faifoient du calcul | intégral, mal employé fans doute dans cette occafron. C'eft ce que J'avançai dans une de mes remarques à la fuite du Probleme de Ia Rouë d’Ariffore, qui fut envoyé à l'Académie enuy1 5, & dont il a été fait mention dans l'Hiftoire de la fl même année, & ce fut en indiquant Ja démonftration pure- ment géométrique que j'en pouvois donner, & que je don- neraï, s’il eft néceflaire. Mais c'eft ce qui importe peu au “fujet que jetraite aujourd'hui. : : or0) 29f au © 18: Par üunewaifon fmblable à celle de l'efpace AZ, Fig. 4. plus grand que célui de Ja conchoïde ordinaire, dont la géné- ratrice eft un cercle, il fuit que quoique la Réfractoire AN ne touche jamais fon afymptote, ou, ce qui revient au même, quoiqu'elle ne la touche qu'à une diftance infinie, elle la touchera plus tard ou plus infiniment loin que la conchoïde, Mem. 1740. 18 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE en raifon du grand diametre de fon Ellipfe génératrice au petit; car ayant fait, comme ci-deflus, _ ac, & pris la ligne c pour le rayon du cercle générateur de Ia Con- choïde de Micomede , & pour le petit axe de l'Ellipfe géné- ratrice de la Réfraétoire AN, fi dans l'Equation de l'une & de l'autre de ces deux courbes prifes dans les mêmes. cir- conftances , on fuppofe x —0o, qui donne y, confondué avec l'afymptote, infinie, on trouvera dans la Conchoïde de Micomede, y —= vi , & dans a Réfractoire, y — 3 o — nn ? Lu eee Le deux infmis qui font lun à l'autre :: 1 m 7 2: Wmm—nn.m, & (N.° 12.) comme le petit axe de l'Ellipfe génératrice eft au grand. 19. La courbüre concave, apparente du fond du baffin, & réelle de a Réfraétoire, eft en raifon compolfée inverfe de la diftance / 2) de l'œil à la furface réfringente, & directe de la force réfringente / =) du nouveau milieu! Car 1.” les cas moyens de la diftance de l'œil, participent des extrêmes, dont l’un, fçavoir b — ©, donne une courbüre infiniment petite, & — 0 Ja plus grande courbüre qu'il foit poffble. 2.° La RéfraGoire ou la Conchoïde 4 N eft d'autant plus grande, ou plus petite, toutes chofes d'ailleurs égales, que le diametre, 0G = _ FD, de fa Génératrice, l'eft davantage, & cette Génératrice, fuppofée toûjours femblable, eft d'au- tant plus petite, que le rapport =- eft plus grand. Mais on LA fçait que les Conchoïdes qui réfultent de Génératrices fem- blables, & dans les mêmes circonftances, font femblables “entr'elles ; donc les rayons ofculateurs menés de femblables points de ces Conchoïdes, feront proportionnels ; & puif- que la courbüre des courbes eft en raifon inverfe du rayon ofculateur. Donc, &c. Par la même raifon a courbüre de la Réfractoire croit.ou $ DES SCIENCES. I diminué, toutes chofes d’ailleurs égales, en raifon inverfe de la profondeur du bain. 20. b—0o donnera donc, toutes chofes d'ailleurs égales, la Réfraétoire la plus courbe qu'il foit poffible. Mais fi l’on introduit cette hypothefe dans fon Equation, & qu’on y détruife tous les termes où 2 fe trouve, fon Equation fera ANA A—MMAX MM AN ment l'Equation dé l'Ellipfe génératrice, & qui ne differe changée en celle-ci, = y}, qui eft vifible- - de celle qu'on a vüë ci-deflus (n.° 1 1.) qu’en ce que © 4 m y tient la place de c, & y celle de 7, qui dans ce cas de- viennent égales. D'où il fuit que la Réfraétoire AN n'étant pas décrite, & ayant feulement fon Equation, on remontera par ce moyen à fa Génératrice. 21. La Réfractoire transformée en fa Génératrice, & dans le cas préfent, en une Ellipfe AL, dont le grand demi- axe ef FL—OR, eft une fingularité qui mérite quelque éclairciffement , dès que l’on confidere toüjours cette courbe comme réfultante de l’inflexion des rayons par la réfringence d’un nouveau milieu. Car la condition de 4—0 prie à la rigueur, exclud tout nouveau milieu, le point O fe trouvant alors abfolument confondu avec le point F de la furface ré- _ fringente, & appartenant également au milieu d’où part le rayon, & à celui-où il va. Or s’il n'y a point de nouveau milieu , il n'y aura point auffi d’inflexion de rayons. Il faut donc changer la fuppofition rigoureufe de à — 0 en celle de »-égale à une quantité infiniment petite, & dès-lors on voit renaître tous les effets de la Réfraction, & la Réfractoire, EU CE OR LE. 22. J'ajoûterai encore, pour la netteté de cette fpécula- tion, & l'exactitude des idées géométriques dont elle eft fufceptible, qu'il faut fuppofer OF (6) un infiniment petit du fecond genre , l'élément A/R, de la Génératrice GR, qui foûtend l'angle vifuel MOR, étant fuppofé du premier. : 3 Ci Fig. 10. 20 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE Car foit O F' un infiniment petit du premier genre, & OM un rayon de l'Ellipfe génératrice, prolongé vers N, & infiniment proche de À, c'eft-à-dire, que l'angle ROM égal à OBF, foit infiniment petit, & ait pour foûtendante l'élément RAZ, ou la tangente À r, de même genre queOF'; il eft évident que les côtés OB, FB, du triangle O FB, femblable à RO, étant proportionnels à rO, RO, & de même genre, feront finis, où infiniment grands par rapport au côtéOF, comme les rayons OM, OR, le font par rap- port à l'élément RM, ou à fa tangente Ar. Donc (conffr. N.° 9.) la toute ON égale à OB+ BN — OB-+-OM, fera plus grande que le rxyon O 4 auquel elle répond, d'une quantité £N, qui ef finie: & comme, en augmentant de plus en plus Fangle de la vifion O2 F ou MOR, on peut en dire autant de tous les rayons O, By, & d’une infinité menés femblablement, & infiniment proche les uns des autres, tant au-deflus de OM, qu'au- deffous de ON, jufqu’à ce que l'arc RMu, ou l'angle ROw — VO LBy foit arrivé au fini, & que par-là BF foit devenu un infiniment petit du même genre queOP, il fuit, que la Réfraétoire dont cette infinité de rayons donneroit les points, ou qui pafferoit par les extrémités M, », &c. de cette infinité d'excès finis EN, ey, &c. qui la fépare de FZ, ne fçauroit ni fe terminer infiniment proche de L, ni être prife fenfiblement, & aflés exactement pour fa génératrice AL ou GR. Mais fuppofons OF du fecond genre, tout le refte de- meurant comme ci-deflus, c'eft-à-dire, RAA, ou Rr, toû- jours du premier, &c. on aura dès-lors OB & BF infini- ment petits du premier genre ; puifque par l'analogie des triangles femblables, R7 infiniment petit du premier genre, eft au fini ©, comme OF infiniment petit du fecond, eft à OB infiniment petit du premier. Donc excès EN, & tous les fuivants ev, &c. feront infiniment petits du premier genre, & les toutes ON, Or, ou OB+ BN, OR +-R», difléreront infiniment peu des rayons générateurs correfpon- 1 DES SCYENCESs. 21 dants OM, On; & lorfque Farc RM, ou l'angle ROu — LBRy fera arrivé au fini, & le côté 8 F; au même genre que OF, ils n’en différeront que d'une quantité infiniment petite du fecond. Car à mefure,que l'angle LB» croît & devient fini, le côté 8 F du triangle O FR décroit & devient infiniment petit du genre de OF. Donc felon les regles & la théorie du calcul infinitefimal , la Réfraétoire, ou la Con- choïde rigoureufe À £7, pourra être prife pour fon Ellipe génératrice AL, égale &'femblable à G À, dont elle ne differe, & ne s’écarte finiment que par fa partie £7, toûjours infiniment proche de l'afymptote LZ, qui eft cenfée fe confondre avec elle. .… En un mot, le côté OF du triangle O FR, étant fappofé un infiniment petit du premier genre, ne donne les rayons de la Réfraétoire fenfiblément égaux à ceux de FEllip{e, que lorfque les côtés 80, BF, font devenus eux-mêmes de même genre que OF. Mais par l'analogie des triangles, cela ne peut arriver que lorfque l'arc Rx, ou fa tangente, ou fon fnus, ou l'angle qu'ils foûtendent, font devenus du même genre que OR, c'eft-à-dire finis ; donc dans le cas de OF infiniment petit du premier genre, l'œif placé en ©, voit fous un angle fini, 2OVF—ROM=—YRZ, une partie infinie de la Réfractoire » V, qui n'eft pas l'Ellipfe génératrice, & qui ne peut être confonduë avec elle. Donc pour fuivre Tordre des idées géométriques qu'on peut fe faire fur le cas donné, & en remplir les conditions avec clarté; il faut ima- giner la diftance de l'œil ou du pole ©, tout au moins inf niment petite du fecond genre. e C ii Fig: 4e * Philo. Tranfact. N° 402. 352 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE eft (n.” 4.) la plus grande qu'il foit poflible dans le rapport donné FX FL ::m.n; c'efkà-dire, que la partie KE, reftinté & infinie, ne fçauroit être apperçüë que fous un angle infiniment petit, ce qui ne fignifre autre chofe, phyfi- quement parlant, que n'être point apperçüë. L'œil ne voyant donc que la partie DÆ du fond du baflin, étenduë fur toute la courbe AL, n'appercevra rien dans le nouveau milieu au de-1à du fphéroïde formé par la révolution de cette courbe fur fon axe, AF, & tout le relte, LADEN, &c. quoi- qu'infini, & quélque tranfparent qu'il puifle être lui paroîtra auffr opaque que le fond même DX. … 24 I eft chair par fa defcription de la Réfraétoire AW, & par la racine x = _ a=#FAZ=FD— DA, qui eft une de celles que fournit y—o, dans fon Equation géné- rale , il eft clair, dis-je, que dans le cas même de la perpen- dicularité du rayon vifuel à la furface réfringente, la courbe eft à la diftance D À — — a du fond du baflin, que Yobjet fe rapproche d'autant de l'œil, qu'en cela la réfraction agit donc toüjours , & que l'Axiome de Dioptrique, qu’ n'y a point de réfraction , lorfque le rayon tombe perpendiculai- rément fur la furface réfringente , énoncé fans autre reftriétion, & comme excluant tout effet de la part du nouveau milieu, eft équivoque, ou incomplet, ainft que je penfe l'avoir indiqué dans quelqu'une dés parties précédentes de ces Re- cherches. ln 25. Nous ne jugeons des diftances que par lexpérience & par une longue habitude, qui a converti ce jugement en fentiment involontaire , comme l'ont bien juftifié les fuites de {a fameufe ‘opération de M. Chefelden fur un Aveugle né À qui il abbattit les Cataractes'*, Notre expérience à cet égard roule fur la grandeur des Angles qui réfultent des images peintes au fond de l'œil, & fur les intenfités de ces images, leurs apparences de couleur, de lumiére & d'ombre, ou de fplendeur différemment modifiée. Pour ne parler d'abord 12 5D Sy 3S COI'E NoGE Su 23 que de cette derniére, façon de juger de l'éloignement des objets, abflraétion faite de la premiére, je la crois fuffifame mentconflatée par l'effet que produifent fur nous les lointains d'un païfage que nous voyonsdans. un Tableau, & qu'ils produifent principalement en vertu de Ja dégradation des couleurs, des teintes bien ménagées, & de,ce qu'on appelle la perfpetive aërienne., Ox,cela.pofé , il m'y.a-pas de doute que, le fond. d'un baflin plein d'eau; par:exemple, vü per- pendiculairement ;en.D), ne. doive|nousparoitre.en.,4, au fommet de la Réfraétoire, indépendämment/.de. tout angle vifuel, du diametre de la prunelle,.&c, de la diftance des.deux yeux.:Jene youdrois pas aflürer auffi. que ce fond ne feroit point vû à cette diflance, quand.même l'œil |fe;trouveroit placésun peu ay-deffous,de Ja furface réfringente FZ 180. ya tout lieu de penfer, que les plongeurs verroient.les, objets qui les environnent dans l'eau; plus près qu'ils ne les voyent dans l'air, felon un femblable rapport, f tout le refte de la vifion sy faifoit demême,: Mais Ja. réfringence. de l'eau, 8 “celle: du criftallin &; des,autres humeurs: de l'ocil different f peu, que les rayons qui y entrenten venantde l'eau lestrà. verfent prefque.aufli parallelement que s'ils n'avoient point changé de milieu; ils ne fçauroient y concourir vers. la rétine, comme s'ils venoient de l'air, &ipar-là laivifion ne-fçauroit être qu'imparfaite & troubléerdans l'eau, à moins. qu'undong féjour; ou uné grande habitude, my. fafle prendre à. l'œil une conformation capable de remédier: à-une partie de ce defordre : au lieu que dans l'air l’obfervateur a tous les moyens énoncés ci-deffus pour former un jugémént des diflances, même fans le fécours .dés angles. Ainfr un bäton, plongé obliquement &'à moitié dans l'éau, nous y paroit fenfible- “Or! ment rompu, quoique nous.ne le régardions qu'avec. un {ul œil dans le plan même de fa longueur. 26. I faut convenir cependant que a grandeur des angles * ous lefquels les rayons entrent dans l'œil après leur réfrac- tion, eft la fource ordinaire &4'plus immédiate du fenti- ment que nous éprouvons de là érändeur, &.p#fon moyen, 24 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de la diflance des objets, lorfque rien n’occafionne un juge- ment contraire dont il fera parlé dans la fuite. En ce fens, je crois que ce qui nous fait voir l'eau d’un baflin moins profonde qu'elle n'eft en effet, n'eft pas tant la grandeur des angles AON, par exemple, fous lefquels les objets réels DE, font apperçüs fur le fond du baflin, que la petiteffe des angles ANOP, fous lefquels un de leurs points À eft vû avec quel- que point P de la furface de l'eau, à Jaquelle nous rappor- tons leurdiftance verticale N P ‘je veux dire, qüe c'eft moins ‘par l'addition de la différénce angulaire NOK, à l'angle DOK, que’par la fouftraétion-de cette différence fur l'angle POK,, de'maniére que la perpendiculaire XP devient NP: Cat pour juger de là diftance de l'objet D Æ'par fa grandeur apparente, ou par l'angle fous lequel il eft apperçü, il fau- droit que ce füt un objet d’une grandeur réelle à peu-près conftante & connuë, & qui püt nous fervir de terme de comparaifon ; ce qui n’a prefque jamais lieu à l'égard des objets qu'on voit fous l’eau. Maïs la profondeur PK, convertie en PN, eft un indice fenfible de la diminution de diftance dù point ? au fond du'baflin. : Je ne dirai rien de la hauteur apparente Np des parois verticales Xp du baflin, on voit bien qu’elles donneroïent plus fenfiblement ce hauffement de fon fond; mais je les Aüppole trop loin pour cela, & j'ai éprouvé mille fois d'ail- leurs, qu'on n'ena pas befoin pour former lé jugement de a profondeur de l'eau.‘ où 27. Un point apparent W fur la Réfraétoire, étant donné, Ceft-à-dire, l'angle fous lequel il eft vü avec le point À, étant obfervé, on pourra toûjours avoir trigonométriquement .& par les Tables, le point réel Æ du fond du baffin, l'angle de Réfration NBK, & la différence angulaire NOK." : Car, 1.° le rayon O M de la génératrice, égal à la fé- cante Or de l'angle GO, dont le finus su eft au finus £æ de l'angle obfervé,: en raifon de » à m1, par rapport au finus total 0G—= — FD, donnera BN, qui lui eft égale, 2.° On A connoltr4 né LAfe | DES SCIENCES. 25 connoîtra OP, puifque dans le Triangle reétangle O F2, de côté OF eft donné, & l'angle BOF connu ou obfervé, & par conféquent on aura toute la ligne ON, de même que le Triangle NPB, rectangle & femblable à O F8. 3. La raïfon conftante de BN. BK :: n. m, qui donne BK égale à la fécante O4, déterminera le point #, & four- nira de quoi trouver l'angle de Réfraétion NB K, compris entre les deux fécantes BN, BK, dont BP devient le finus total. 4.° Enfin les côtés BX, BO du Triangle XOB, qui comprennent l'angle XBO, complément au cercle ou à tous les angles qui font autour du point Z, & qui font connus, donneront l'angle KO B — NOK, ou la différence angulaire d'un objet DK, vû à travers le milieu réfringent FSZ. 28. Puifque le point A doit, toutes chofes d'ailleurs égales, fe trouver d'autant plus loin du fond DS dans la perpendiculaire PÆ, & le côté X N du Triangle KON, étre d'autant plus grand, que la courbüre de la Réfractoire eft plus prompte ou plus grande; & puifque cette courbüûre N.° 19.) croît en raifon inverfe de la diftance OF de l'œil à la furface réfringente , il fuit que la différence angulaire NOK, par rapport à la même partie DK, apperçüë au fond - du baffin, fera d'autant plus grande, que la diftance OF de Foœil fera plus petite, & deviendra enfin égale au complé- ment de l'angle réfracté, lorfque OF = o, qui eft le cas d'un accroiflement continu jufqu’à cette limite, où fe ter- mine laRéfration. Mais OF demeurant finie, la différence angulaire NOK ne fçauroit croître que jufqu'à une cer- taine grandeur au-deflous de la précédente, & d'autant plus au-deffous, que le rapport de OF à FD eft plus grand; après quoi elle diminuë jufqu’à devenir infiniment petite ou nulle, comme elle étoit à fon origine, lorfque le point Æ# fe trou- voit infiniment proche du point D. Car il eft clair que le point Æ étant arrivé à une diftance infinie du point D & de l'œil, les côtés OK, ON, du Triangle OXN, feront cenfés fe confondre ou approcher infiniment du parallelifme entre eux & avec la ligne de réfringence FZ, & ne comprendront Mem. 1740. 6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE par conféquent qu'un angle infiniment petit. Donc la diffé- rence angulaire, qui n'eft autre chofe que cet angle, y de- vient infiniment petite ou nulle : donc elle doit pañler par un maximum. D'où fuit encore ce paradoxe, que la différence angulaire entre un objet D K, apperçû dans un milieu uni- forme, & dans un milieu non uniforme plus réfringent, ne croît pas toûjours avec l'obliquité du rayon vifuel, dorfque la diflance de l'œil à la furface réfringente.eft finie, & que même cette différence eft prête à s’évanouir lorfque le rayon approche du parallelifme. Il fera donc utile, pour plus de clarté, de diftinguer le rayon rafant, où, comme nous l’en- tendons ici, qui réfulte de la diftance infiniment petite de l'œil, d'avec le rayon infiniment oblique, qui n'exclut pas de mème la diftance finie. On en verra encore mieux la raifon dans la fuite, quand nous en ferons aux furfaces réfringentes curvilignes, que le rayon vifuel peut toucher ou rafer en divers points, à une diflance finie de l'axe donné, où eft auffi placé l'œil à une diflance finie du point F. Des Génératrices indire&tes de la Réfradtoire, à diredtes du fond du bafin. 29. La courbe GR (Figg. 3. 4. 5.) peut être nommée à jufte titre Génératrice directe, complete, & proprement dite de la Réfraétoire À N, en ce qu'elle donne direétement tous fes points. V, N, en donnant fes rayons BN, &N, B N, de pofition & de grandeur, par fes propres rayons prolongés, & qu'elle fert par-là à déterminer les points correfpondants Æ, K, du fond du bafin fur la perpendiculaire PN, la longueur & la pofition des rayons ou fécantes BK, bK, BK, menées de B en K, &c. ainfi qu'il a été montré en décrivant la Réfraétoire, N.° 9. La Génératrice GR déterminera encore la pofition des BK, par le moyen de fon Triangle généra- teur À BR (Fig. 5.) tranfporté en AGT, ou (Fig. 4.) appli- qué fur O G par fon côté 4 BP, qui eft égal à OG. Car on a vû que décrivant l'arc Af7 (Fig. 5.) & (Fig. 4.) rO E eft toûjours parallele à 24°, &c. Mais on auroit trouvé toutes DES, S CI ENCE S. 27 les mêmes chofes, par le moyen d’une autre Génératrice A4 femblable à la premiére GAZR, & qui n’en differe que de grandeur, par fon diametre 4H, égal à la profondeur du baflin (a) au lieu de AG (—= a), laquelle donne directe. ment la longueur des rayons BÆ du fond du baffin, toüjours égaux à ceux / A Mu) de cette Génératrice ; & l'on détermi- nera leur pofition, comme par la premiére, en imaginant fon Triangle générateur tranfporté en OA (Fig. 4.) &c. & éle- vant du point À, la perpendiculaire ÆP à la furface réfrin- gente, elle ira couper le rayon 4102, prolongé au point W, qui doit être à a Réfraétoire; ce qui eft clair par tout ce qui a été dit ci-deflus, & par la fimple infpeétion des Figures 3, 4, 5 & 11. La courbe Hp, peut donc être regardée par-là comme Génératrice éndire(te de la Réfradfoire, où du Jond apparent AN, & directe du fond réel DKS. 30.. Cette diftinétion eft fondée fur ce que le Probleme étant conçüû dans fa plus grande généralité, & que des trois lignes quelconques, la Réfringente, la Réfraétoire & la Ligne du fond, deux étant données, avec la pofition de l'œil, & le rapport des finus, on peut demander la troifiéme. Il y à cependant une exception à faire fur une de ces lignes, qui eft a Réfringente ; mais ce n’eft pas ici le lieu d'en parler. Imaginant donc fa Réfraétoire AN, & fa Génératrice directe £ GR, avec la furface réfringente FZ, comme données, & que ce foit la ligne du fond DKS, qu'on fe propofe de trouver, ce fera la courbe Hu, qui en fera la Génératrice. On voit naître de-là plufieurs Problemes curieux, qui tiennent à celui des Réfractoires, & dont la folution devient fort aifée & fort lumineufe par la méthode des Génératrices, ces courbes, en tant que lignes des fécantes ou des finus, qui leur font réciproquement proportionnels, ou des tan- gentes, fourniffant, fans autre réduétion, les éléments de tous les calculs que la pratique peut exiger.en femblable matiére. - 32. Suppofons, par exemple, que l’on demande un fond D ij Fig. Ile Fig. 12. 28 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de baffin tel, que fa Réfraétoire foit une droite parallele à la furface de l'eau. Ayant pris fur l'axe commun AY, & du point O, où eft fuppofé l'œil, à la diftance OF de la furface réfringente FZ, la portion OH=— FD, profondeur de Feau fur faxe de révolution AX, OG= + FD=—#FA, diftance de la Réfraétoire donnée À N, fur cet axe, & mené par G & par À les droites GT, HT, paralleles à FZ, il eft évident que GT, Hr, feront les Génératrices de Ia Réfractoire, & du fond du baffin. Car on aura toùjours BN— OM, & menant par !V, la perpendiculaire PN, fur laquelle on pren- dra BX— Ou, on trouvera toüjours BK. BN:: Ou.OM :: 0H.06G ::m.m D'où réfulte pour le fond du baflin la courbe DKS, qu'on trouvera être une hyperbole ordi- OA >%FO naire, par rapport à fes diametres FD, MERS VFO + FA dont le centre eft en 7: 32. On peut déja inférer de cet exemple, tout fimple qu'il eft, une notion fort générale fur cette matiére, c'eft qu'il n'y a qu'un fond plan (Fig. 4.) & parallele à Ia furface réfringente, qui donne par-tout, à la même diftance de l'œil, fur la droite OR, prolongée de part & d'autre du point O, & parallele à FZ, la même efpece de Réfractoire 4 N. Car il eft clair qu’en tout autre cas (Fig. 1 2.) & hors du point O, qui eft à l'axe X DO, & fur la parallele RR, ce feroit une ligne différente. 33- Un fond de baffin hyperbolique pofé en fens con- traire par rapport au précédens, ou qui auroit fa concavité tournée vers la furface de l'eau, produiroit une Réfraétoire du 4.me degré, Il en feroit de même d’un fond parabolique, elliptique, ou circulaire, dans les mêmes circonflances. Aiïnft les fonds de baffin concaves, & même convexes, la feule hyperbole du N.° 3 1 exceptée, qui auroient ces courbüres, ne donneroient pas des Réfraétoires d’un genre plus élevé DES SCIENCES. 29 que celui que donne le fond plan, comme on le verra d’un coup d'œil par la méthode générale. Cette fingularité des Réfradtoires eft dûë à leur dépendance des deux lignes, celle du fond, & celle de réfringence, dont lune peut par {es différentes pofitions & affections , compliquer ou détruire ce que l'autre auroit fait. Les Conchoïdes au contraire, les Développées, les Cauftiques, les Rouletes & généralement toutes les Courbes, en tant qu'elles peuvent être rapportées à une feule autre ligne, qui eft confidérée comme leur géné- ratrice, leur directrice, ou leur bafe, ne fçauroient manquer d’être d'un degré relatif à celui de cette ligne, & qui s'éleve réguliérement à mefure que les dimenfions de celle-ci aug- mentent, D'une autre forte de Génératrices, tant de la Réfraétoire, que. du fond du baffin, quelles que foient les lignes qui des confluent, droites ou courbes, Géométriques ou Méchaniques, par rapport à une furface réfringenre 7 PP" 2 plane, à quelle que foit la poftion de l'œil fur une parallele donnée de diffance à certe furface. 34. Aucune des Génératrices réciproques dont il a été parlé ci-deflus, foit de la Réfractoire, foit du fond du baflin, ne détermine directement la pofition des fécantes ou rayons BK, comme la Génératrice propre de la Réfraétoire déter- mine celle de fes rayons BN; & la raifon en eft, que les rayons Ou BK, tranfportés & infcrits en BK entre Ia ligne de réfringence FZ, & celle du fond du bain DS, ne concourent point au centre de la vifion & de la génératrice, ni à un centre unique quelconque, comme FE A de Îa Réfraétoire. Mais les rayons BK, pouvant être confidérés comme autant de prolongements des rayons d’une Déve- loppée à laquelle ils vont aboutir, & dont ils font {es tan- gentes, il eft évident que fi l’on peut avoir une telle courbe, on. obtiendra tout ce que renferme le Probleme fous l'énoncé de la nouvelle Génératrice, Car le point 2 fur la ligne FZ, BJ Fig. 4e 30 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE pouvant toüjours être pris à volonté & déterminé par Ja tangente dont Z£ eft le prolongement, on pourra toüjours mener à ce même point, & du centre vifuel O, une autre droite, qui ira couper la perpendiculaire PX, par exemple en N, fi c'eft la ligne du fond DX qui eft donnée, ou au contraire, qui déterminera le point # du fond du baffin, par l'interfeétion de la perpendiculaire P N prolongée, & de la tangente de la nouvelle Génératrice, fi c'eft la Réfrac- toire AN, que l’on connoît : & comme cette Génératrice, que nous appellerons Tangentielle, en oppoñition aux précé- dentes qu'on peut nommer Centrales, ne doit dépendre d'aucune autre grandeur connuë, que de la diftance de l'œil à la droite réfringente, & du rapport quelconque du finus d'Incidence à celui de Réfraétion, il ef clair qu’elle fatisfera à tous les cas imaginables de la ligne du fond, & de fa Réfractoire alternativement données, & à quelque diftance qu'elles foient de la droite réfringente. 35. Or il n’eft pas douteux qu'une telle courbe n'exifte. On verra même, pour peu qu'on y faffe attention, que ce n’eft autre chofe que la Cauftique de la ligne droite par ré- fraction, indiquée dans la 7.me fection du livre des Infini- ments petits de M. le Marquis de l'Hôpital, art. 37, mais dans le cas inverfe, c'eft-à-dire, où les rayons qui partent du point O, confidéré comme le point lumineux, s'écartent de la perpendiculaire en fe rompant. L'invention de cette courbe, tant par la méthode générale des Cauftiques, toute fondée fur le rayon de la Développée, que par celle que nous pourrions établir ici fur le rayon de l’Anaclaftique, eft abfo- lument für la voye de notre méthode générale pour l'inven- tion & la defcription de cette derniére. DÉMO LTE 36. Chaque Cauftique, foit par réfraétion, foit par ré- flexion, peut répondre à une infinité de courbes dont elle eft Cauftique, quoique chaque courbe n'ait qu'une feule Caufti- que par réflexion, ou par réfraction. Mais dans le cas préfent, DES SCciENCGESs. 21 & conjointement avec la fonction de Génératrice Tangen- tielle que nous donnons à la Cauftique, ce n’eft qu’en tant que Cauftique de la ligne droite par réfraétion, qu'elle eft réciproquement Génératrice d’une infinité de courbes Ana- claftiques, ou de lignes du fond du bafin, & même d’une infinité d'infinités, ou de toutes les courbes poffibles, comme il a été expliqué N.° 34: Car il eft clair que toute autre ligne de réfringence que la droite FZ, fut-ce une des courbes quelconques dont la T'angentielle eft Cauftique, changeroit la Réfractoire du fond donné, ou, réciproquement, le fond de la Réfractoire donnée, & lui 6teroit par-là fa propriété de Génératrice, ou y apporteroit d’autres conditions. De cette idée prife en général, & indépendamment de nos Réfractoires, je tire une nouvelle efpece de Conchoïdes .(@ Pole mobile) qu'on pourroit ajoûter à la génération Con- choïdale des courbes géométriques imaginée par Defcartes, & que je conçois ainf. Soit DJ la Directrice, droite'ou courbe, GRTE, grte, . Ja Génératrice, dont le centre C, c, fe meut fur D, en même temps qu'il coule fur le rayon vecteur ACH, mck, qui change continuellement de centre ou de Pole, & de grandeur, fe même diametre GT, gr de la Génératrice, de- meurant toûjours perpendiculaire ou femblablement pofé fur la Direchrice DZ Soit enfin BMAmN a Courbe du Pole mobile pofée comme lon voudra fur le même plan ; il eft évident que les interfections #7, 4, S, s, des tangentes pro- longées MSCH, msch, de cette courbe, & de la Généra- tie GRTE, grte, donneront la Conchoïde AH X4, & fa fupérieure SOs, dont les fommets X, ©, feront dans l'axe AX, perpendiculaire à DZ, & touchant au fommet À de la courbe BA N, par rapport au diametre AP, & à la diftance FX =CT, FO—=CG, &c. É Et fous cet afpe& notre Tangentielle du fond du bafin DS, dans le cas de la Réfraétoire à fond plan (N.° 9. Fig. 4.) devient la courbe du Polé mobile par rapport à une Con- _choïde dont la Génératrice proprement dite eft un triangle Fig. 13. En 1740e Fig. 14 32 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE égal & femblable à AXR Fig. 11, fon côté ÆR, fuppofé égal à la profondeur du baffin, demeurant toüjours pareille- ment infcrit aux paralleles FZ, DS (Fig. 4.) tandis que le fommet Æ (Fig. 1 1.) de fon angle AXR, glifle comme centre fur la Directrice, & fur le rayon vecteur. D'où l’on voit comment une Génératrice centrale courbe Hup (Fig. 4.) du fond DS, ne produit qu'une droite, par la diftribution différente de fes rayons Ou, & au contraire (Fig. 12.) comment une Génératrice centrale reétiligne produit, par la même raifon, un fond courbe, & dans le cas donné (N° 3 1.) un Sphéroïde convexe hyperbolique. S ÉCRTON LE DE LA COURBE APPARENTE DU FOND DE L'AIR, ou de la Réfraloire dans un milieu moins réfringent que celui où ef? l'œil, àr dans lequel le rayon s'écarte de la perpendiculaire en fe rompant ; àr conffruétion générale des Réfraäoires à fond quelconque. . 37. Soit fur le même axe Yx, un même fond de baffin DS, de la même profondeur FD, une même ligne réfrin- gente F°Z, un même centre ©, de la vifion, à la même diftance OF, & un même rayon vifuel O 2, prolongé de part & d'autre vers 47, N. Si l’on imagine que le rapport de réfringence , dans lequel #7 a été fuppofé jufqu'ici > #, varie par l'augmentation continuelle du numérateur #, ou, ce qui revient au même, que la force réfringente du milieu FZ SD, plus grande que célle du milieu FZO, où eft l'œil, fe rapproche d'abord de la valeur de celle-ci, par une diminution continuelle, & fe trouve enfin plus petite,.il eft clair par tout ce qui a été dit dans la Se&. Ï. 1° Que la Réfraétoire AN, dont la Généra- trice étoitl'Elip GR, & le rayon BN—OM, deviendra, par exemple, ae, dont la Génératrice eft 44, & le rayon Be = OE, m étant à n :: FDs Fa=O4. 2° Que ri & » étant NT 52 HOME ST ISAICILIE EN CE 5, 33 étant arrivés à l'égalité, la Réfraétoire D » fe confondra avec a droite DS du fond du baffin, & fa génératrice gm avec la droite gr, fon rayon étant Bn—Om. 3.° Que » venant à fürpañler #, la Réfractoire 4\8 ou & y palera au de-là du fond DS, & fa génératrice y p ou Tu au de-là de la droite gr, puifqu’on doit toûjours avoir ».n:: FD, F\::0g.0, oum.n:: FD. Fa ::Og. OT, & Ie rayon B8 ou By égal à Op ou Ou. 4.° Enfin, que la courbüre de la Ré- fraétoire par fon fommet, & celle de fa génératrice, qui étoient concaves vers le point ©, allant toüjours en dimi- nuant, jufqu'à s'évanouir & fe confondre avec les droites DS, gr, dans le cas de l'égalité de réfringence, fe chan- geront en convexes vers le même point O, lorfque l'excès de réfringence aura paflé du côté oppolé, &c. 38. La même fuite de changements étant plus particu- liérement appliquée à la Génératrice, Thorilontale AR (Fig. 3. Sect. I.) & l'axe AG, qui la coupe à angles droits, étant fuppolés fixes, il n’eft pas moins clair, 1.° Que l'arc & l'angle générateurs, BC, BAC, croïtront avec le numé- . rateur, #, de a fraction L, où ce numérateur exprime toû- jours la réfringence du milieu où eft l'œil. 2.° Que par conféquent le rayon AB fe rapprochera toüjours du prolon- gement Ag, de l'axe AG au deflous de 4. 3.° Qu'il fe con- fondra avec lui dans le cas de m—. 4.° Et qu'enfin » de- venant >", À B pañlera de l'autre côté (Fig. 1 5.) & fera avec l'horifontale AF, un angle BA égal à celui dont le finus, XD, eft au finus total, ou au rayon AC, dans le rapport actuel des réfrin gences, —., &c. D'où l'on tire la conftruction fuivante. CONSTRUCTION DE LA GÉNÉRATRICE de la Courbe apparente du fond de l'air. | 39+ Les mêmes lettres défignant ici les points, & les Tignes de même efpece que dans la Fig. 3. Se&. I. n.° 8. Mem. 1740 E Fig. 3. CES LA Fig. 16. 4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE foit du rayon AB, & du centre À, décrit le cercle BKCG, auquel ayant mené la tangente 7, & à cette tangente la parallele ACo, on tirera de À fur BT, & par rapport à tout le quart de cercle BC, autant de fécantes AY, que lon voudra. Ayant pris enfuite l'arc CG= KB, & dont le finus Ca—=KD foit au total CA::m . n, & abbaïflé du point £, où À Ÿ coupe le cercle, les finus £ ", EQ, fur les rayons AB, AC, toit du point Q menée à l'arc CG, la droite Q7 qui le coupe en , & qui eft parallele au côté AG, de l'angle GAC ; fi par le point 7, & du centre À, on prend AM — AT, je dis que le point 47 eft à la courbe cherchée. Car ayant mené le finus /» fur À G, il eft évident par la conftruétion , & par tout ce qui a été dit de l'inverfe x.° 8, qu'on aura toûjours Ca . CA ::In=Ka.QA—=EF :: mu Mais Ca eft le finus de l'angle CAG, & CA le finus total, comme AM AY eft la fécante du finus EF de l'angle BAËE qui fait partie de l'angle droit ou du quart de cercle générateur BAC. Donc toutes les fécantes, 4AF, du quart de cercle BC, devenant de même des 4 M à l'égard de CG, fe trouveront comprifes dans l'angle CAG, & en même raifon avec celles qui leur répondent dans cet angle, que les finus £F, Zn, ou (N.° 6. Fig. 2.) en même raifon que BN à BK, & n à m, &c. Donc felon tout ce qui a été établi dans les articles cités, la courbe GR, qui pañle par tous les points, tels que 47, fera la Génératrice qu'on cherche. Nous la nommerons Courbe des fécantes fermées en éventail où rapprochées. De la nature des Courbes des Sécantes fermées, ou de la Générarrice GR. 40. Pour en avoir l’Equation, tout le refte demeurant comme ci-deflus, foit le diametre AG— AC=—=c, & AH = c. Ayant mené Gf tangente en G, HA parallele à Gr, pris At = AM, & fur AM, Au = = AM = (conffr.) —— AY, abbaiffé la perpendiculaire LM à Gr & à AY, DACDIEMSIMSUGTILE NICE: Se 3s & qui coupe A4 en#, &c. il eft clair que le point 4 tombe aufls fur Ar : puifque 4/47 ou Ar, en qualité de fécante rapportée à LM, doit être à la fécante 44 ou A, en raifon du finus s # à fon correfpondant /#, ou:;".m::AG. AH -: Gt. Hk, &c. Nommant donc l'abfcifle AP— LA, x, & lordonnée PM=—AE, 7, les triangles femblables 4G'z & ALk où À HK donneront L4 où AH {=c). AG (c) HALL). Ge(r) & At Vec +" A Mais, At (conffr.) —= AY — AM = Vrx Eux. Donc Ar (ect t7e) — AM (xx-1-27). D'où mm mm—Nn , . Etorr LAS x Von tire cc—xx— "57, ou, à caufe de ya > mm, AN — mm nm CC — xx + z4—= 0, qui-eft une Equation à l'hyperbole par rapport à fes diametres, & dont les afymp- -. totes Aa, A4, (Fig. 1 5.) font les côtés mêmes de l'angle générateur C AG, ou de fon double C'A +. 41. Voilà donc une nouvelle propriété de l'hyperbole, | & une nouvelle maniére de la décrire, fçavoir, par les fé- ni cantes du cercle reflerrées centralement dans un plus petit » angle. Car la maniére connuë de décrire l'hyperbole par les % fécantes ; ne refiemble en rien à celle-ci : puifqu'elfe confifte à faire paffer cette courbe par les extrémités, non des fécantes, £ 4 mais de leurs différences avec le rayon, élevées perpendi- Ÿ culairement fur la tangente commune, & parallelement en- À tr'elles. REMARQUES ET COROLLAIRES. 42. On voit’affés que tout ce qui a été dit de l'Ellipfe, & en général des Courbes des fécantes ouvertes, dans la Section I. NN° 8, 11, 12, 13, 14, convient en inverfe .& avec les reftrictions néceflaires, à lhyperbole, & en général aux courbes dés fécantes fermées ou reflerrées ; & qu'ainfi une hyperbole. quelconque étant donnée, on aura E ji Fig. 17. 36 MEMoIRES DE L'ACADEMIE RoYALE réciproquement le triangle, l'arc & le finus générateurs, ou leurs compléments, qui déterminent ou renferment les fécantes dont elle exprime le reflerrement ; le rapport de refringence +, qu'elle indique, les valeurs analytiques de ces quantités, & de ce rapport confidéré comme inconnu, &c. CoNSTRUCTION DE LA RÉFRACTOIRE du fond de l'air. 43. Soit dans l'exemple énoncé Se&. I. n° 2, où l'œil eft imaginé fous la furface de l'eau d'une vafte Citerne, FZ , la furface réfringente de l'air FS Z, commune à celle de Veau FZO ; DS le fond du baffin ou le platfond de Ia citerne, l’une & l'autre paralleles à l'horifon ; ÆD, qui leur eft perpendiculaire, & qui fait partie de l'axe AG, la pro- fondeur de ce fond ; & Æ'O la diftance de l'œil, qui eft dans l'eau, à la ligne de réfringence FZ. Ayant décrit ( N.° 39. Sup.) la Génératrice G R, dans l'angle afymptotique «O4, & qui ait pour axe OG = 7 FD, & mené par le point O dans cet angle, & dans fon oppofé Z OT, autant de lignes ou rayons qu'on voudra, GO, MO, mO, &c. indéfiniment prolongés au de-là du point O où ils fe croïfent, on prendra fur leurs prolonge- ments, & depuis la ligne FZ, autant de parties FA —0OG, BN=OM, EN où BN—Om, &c. La courbe qui pañiera par les points 4, N, &c. fera la Réfractoire dont ä s'agit. DÉMONSTRATION. 44. TI fuffit de relire fur les Figures 16 & 17, 1 dé- monftration qui a été donnée de la Réfrattoire oppolée, N.°10, par rapport aux Figg. $ & 4; fçavoir, fur la Fig. 16, au lieu de la Fig. s, & fur la Fig. 17, au lieu de la Fig, 4, cette démonitration étant abfolument 11 même, excepté qu'à caufe de la tangente finie GT — BR (Fig. s.) qui. devient infinie dans le cas de da Fig. 16, il faudra lire Gr, au lieu de GT, BT au lieu de BR, & Hk au lieu de HK.. LU 7 & y A YDITES SH 9 IC: LE N. G-E S 37 De la nature de la Réfrattoire du fond de l'air, Su nas ou de L'Etker. 25. Cet encore ici lé même procédé, mot pour mot, & lettre pour lettre, qu'à l'égard de la Réfractoire oppolée, Se. I. N.° 1 5. Fig. 4, en lifant feulement hyperbole, au lieu d'Elipfe génératrice. Mais quoique l'Equation qui en réfulte, foit la même en apparence, elle en differe réellement par le terme + "= yyxx devenu négatif de pofitif qu'il étoit dans la premiére, & cela par le renverfement des valeurs de » à n ; ce que lon pourra marquer ainfr, 4 3 an + mm nn an à NÉ AI Ep r aabx— = aabb nn mm + Bbxx aaxx REMARQUES ET COROLLAIRES, 46. TI eft clair, comme nous l'avons annoncé N.° 2. Seét. I. que le fond apparent 4 N devient un Conoïde infini a toûjours convexe vers le fond réel, & renfermé dans ?angle $ afymptotique Z OY, le même que celui de lhyperbole h génératrice GR, &c. 47. Mais la Réfraétoire AN n’a pas feulement des afymp- totes rectilignes, qui font celles de la génératrice GR, elle en a encore de curvilignes, fçavoir, les deux branches de fa génératrice même gr, tracée dans Fangle afymptotique oppofé. Car il eft évident par la conftruétion Sp. N.° 43, _ quélesr:N—OB,0Ob, où OR, donneront toüjours un … intervalle entre.cette courbe & l’hyperbole gr, jufqu'à ce …. que lune & l'autre fe confondent avec l'afymptote rectiligne …._ commune, c'eft-à-dire, à l'infini. — 45. L'hyperbole conjuguée YF, engendreroït une courbe qui, comparée à À N, deviendroit la réfraétoire de tout mi- . dieu dont la réfringence feroit à celle du milieu où eft l'œil | E ïij 38 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE eh raifon de Van —mm à n; c'eft-à-dire, comme fe finus du complément de Ja moitié de l'angle afymptotique O4, eft au finus total, ou (Fig. r 5.) :: Aa. AC, 49. Si l'on imagine en O un point lumineux d'où partent une infinité de rayons OF, OB, Ob, OR, OE, Ok, Oy, fur la furface réfringente FZ., il eft évident qu'il n'y aura que ceux qui tombent dans l'angle afymptotique FOX, qui foient rompus, ou qui traverfent le nouveau milieu FZDS, & que tous les autres, tels que OE, O®, feront feulement réfléchis de Æ ou de ® vers À, felon la loi des angles de réflexion & d'incidence, dont la raifon géométrique eft, que ces derniers fortant du lieu de lanalogie BN. BK ::n. mr, & ne pouvant rencontrer la courbe 4 N, ne fçauroient plus fournir des lignes qui ayent entr'elles ce rapport, en partant des points Æ, @, & en fe terminant à une perpendiculaire à FZ ; fans compter qu'il faudroit que cette perpendiculaire, telle que PXN, füt à une diftance plus qu'infinie, puifque le rayon Oe, qui fe confond avec l'afymptote OX, porte déja le point #, ou fon femblable par rapport à €, à une diflance infinie, en fe rompant fur 7°Z, & BK ne faifant plus alors avec FZ qu'un angle infiniment petit. Car la fécante BN, qui fe confond en ce cas avec l’afymptote «E, devenant D BK = oo entre les deux paralleles de diftance finie FZ, DS, donne DK infinie. La raifon phyfique ou méchanique prife du rapport des forces ou des vitefles de la Jumiére dans les deux milieux :: «#1, & tel que la lumiére ne fçauroit plus pénétrer le fecond , paffé l'obliquité O + F, n'eft pas moins claire, & elle a été, fi je ne me trompe, mife dans fon jour en divers endroits de ces Recherches, Art. XLVIII, XLIX, LV (1723) XCIV (1738) àe. Le phénomene étoit donc fuffifamment conftaté & expliqué, mais il me femble que {a defcription de la Réfraétoire acheve de le rendre palpable, tant dans le phyfique, que dans le géométrique. 50. Il eft évident qu'ici, comme dans la Réfraétoire t111D ES SCIENCES. 39 oppolée, N.° 24, la différence des milieux change Ie lieu apparent des objets dans le cas même de la perpendicularité; mais avec cette différence, qu’au lieu que dans la premiére le point D eft apperçû en de-cà du fond du baffin vers l'œil, il eft vû au de-fà dans la féconde (Sup. N.° 37.) fçavoir à fon fommet À, & même plus au de-là dans celle-ci, qu'en dé-çà dans l'autre ; c’eft-à-dire, que la profondeur apparente du baffin eft plus augmentée par la Réfractoire du fond de V'air, le rayon vifuel venant de l'eau, qu'elle n’eft diminuée par fon inverfe. Car foit, par exemple, la profondeur réelle —= 12, l'apparente fera 9 dans le paffage de l'air dans l'eau, & 16 dans le paflage de l’eau dans l'air; ainfi le rapproche- ment n'eft que 3, & l'écartement 4, en raifon réciproque de » à m, ou de la force réfringente du milieu où ef l'œil. -ÿ1. UN faut donc appliquer à cette feconde Réfratoire tout ce que nous avons dit fur la premiére, des diftances apparentes des objets vûs obliquement par rapport à fon axe, de fa grandeur apparente de ces objets, plus petite que le réel dans ce dernier cas, comme elle étoit plus grande dans l'autre, de Ja maniére dont nous pouvons en juger par fen- timent, ou par voye trigonométrique, &c. Sect, I. NN.° 25, 26274128: 52. Quant à la fuppofition de l'œil rafant, ou de fa diflance OF'infiniment petite, elle donne ici comme dans l'inverle (NN.° 20, 21.) la Génératrice même pour réfrac- toire, & dans les mêmes conditions. Il ne s'enfuit pas ce- pendant que l'œil n'apperçoive alors qu'une partie de la ligne du fond, comme dans l'autre cas (N.° 23.) il l'apperçoit toute entiére, mais renfermée dans l'angle afymptotique de l'hyperbole génératrice (N° 49. Sup.) quelque petit qu'il puifle être, tandis qu’au cas oppofé, il n’en voit: qu'une très- petite partie dans le ‘plus grand angle poffible de la vifion, ceft-à-dire, dans l'angle droit. : : ; 53: On appliquera auffi à la feconde Réfractoire ce qui aété dit des génératricesindirectes de la premiére, & directes du fond du baflin, Seét, I. N° 2 9 la Figure 16, tranfportée 40 MEMOIRES DE.L'ACADEMIE ROYALE prefque en entier fur la Figure 17, ayant été conftruite à cette intention; çar ce qu'il peut y avoir de petites diffé- rences, ne fçauroit faire ‘aucune difficulté. Ainfi la fécante Or, par exemple, qui exprime feulement la longueur du rayon BA de la Réfractoire, tandis que fon égale OM, en exprime la longueur & la pofition, ne donne que Ja pofition du rayon ZX de la ligne du fond, par fon parallelifme 20 Æ avec cette ligne, comme dans la Figure 4; mais fon inter- {e&ion Z avec l'ordonnée LM, en donne aufli, dans l’une & l'autre figure, la longueur O4 — On, rayon de la géné- ratrice up du fond DS, le parallelogramme L O Hk étant, par une fuite néceflaire des deux conftruétions, toüjours égal & femblable à PB4AK, &c. 54. Il a été remarqué Seét. I. n.° 3 r, d'après la théorie du N.° 30, que pour avoir une Réfractoire reciligne du fond de l'eau, il falloit que le fond réel füt hyperboloïde, ou engendré par la révolution d’une hyperbole fur l'axe de la vifion perpendiculaire à la furface réfringente. On trouvera de la même maniére, & par un femblable calcul, que pour avoir une Réfraétoire rectiligne du fond de l'air, il faudroit ue ce fond fût Ellipfoïde, ou engendré par la révolution d'une Ellipfe fur le même axe, ayant de même pour centre le point 7, & pour diametres, FD & F1=— PER De V FA? — FD* Ainfi la ligne du fond réel devenant une Ellipfe ZX DS, déterminée par ce calcul, fera de la Réfraétoire une droite AN, les deux équations, de l'hyperbole & de l'ellipfe, ne différant que par le changement d'un figne, de — en +, occafionné par le renverfement de valeur des finus d'Incidence & de Réfraction. Müis il:y a cette différence dans le cas préfent, que le rayon 2 K, qui doit toûjours fe terminer fur la perpendi- culaire AP, & fe trouver avec.B N dans le rapport conftant ::m.n:: OH, 0G, à mefure que les variables GA, AN, augmentent, ne fçauroit plus être en même temps égal au rayon Ou de la génératrice, comme l'exige le FRS ans PARU ENONCE UN C Es. 4t fins fe rapprocher continuellement de BZ, & fe confondre bien-tôt avec cette ligne ; après quoi, & lorfque OB où ON fort de l'angle afymptotique { Sup. N.° 40.) B K devient trop court pour atteindre la perpendiculaire menée du point N à FZ ; au lieu que par la nature du cas de la Fig. 12. N.° 31, toutes ces conditions fe trouvent toüjours remplies, quelle que foit l'obliquité de OB fur FZ. C'eft-là auffi ce qui produit une courbe DAÆ'7, rentrante en elle-même, & non une Conchoïde infinie fur la directrice FZ, comme on pourroit le croire d'une premiére vüûë, & avant que d'avoir aflés examiné les circonftances de cette conftruction. j Voilà donc encore, par ce Probleme & par ion inverfe, 4 une maniére fort fimple de décrire l'Ellipfe & l'Hyperbole. 1 . Enf t obferver cette analogie, que les deu 13 s5- Enfin on peut o gie, q x courbes du fond, qui donnent des droites pour Réfractoires, dans les deux cas, font réciproquement les mêmes que les Génératrices des deux Réfraétoires oppofées à fond plan, NN.° 11 & 53, 40 & 31. AVERTISSEMENT. — Quoique la méthode qui fuit pour les Réfradloires de toute elpece, 7 à fond quelconque, dont la Réfringente ef? une droite, femblat ne devoir paroître qu'en forme de Corollaire à la fuite de la méthode générale pour toutes les Réfratoires à fond ér à Réfringente quelconques, j'ai cru plus à propos de la donner atparavant , 6° d'en montrer quelques ufages, tant à caufe de fon extrême fimplicité, que pour ne point m'écarter du plan que je me fais fait d'abord dans cet ouvrage, N° 5. \:1+ C4 : , , , ._ ConNsTRUCTION GÉNÉRALE DES RÉFRACTOIRES | : + » 7 y __ , … d'un Fond quelconque, & réciproquement, À fippofant entre la droite FZ, à la ligne DS, un milieu dont la force réfringente eff à celle du milieu où eff le point O, en Mem. 174 0. à où méchanique , donnée auf de pofition Jar le même plan, & Figg. 19.2e 42 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE raïfon de m à n; décrire la Réfratoire AN de la Ligne da Fond DS, ou, réciproquement, la Ligne du Fond DS de la Réfratoire AN. L 1. Soit DS la ligne donnée. Ayant mené par O l'axe OF prolongé de part & d'autre perpendiculairement à fa Réfringente FZ, pris FC— © FO, & mené par C la parallele CR à FZ ; fi par un point quelconque 2 fur FZ, on tire le rayon vifuel OGZ2, indéfiniment prolongé au de-là de 2, & qui coupe CR en G, & qu'après avoir pris BE— BG, de B en E fur axe OF, on prolonge £Z jufqu'à un point Æ de la ligne DS, je dis que fe point d'in- terfetion 4 du rayon O B, & de la perpendiculaire ÆP, eft à la Réfraétoire de la ligne DS. Car, à caufe des paralleles FZ, CR, toutes les droites BOG, menées par le point ©, font partagées en © (Fig. 1 9.) ou en G (Fig. 20.) dans le rapport de FO à FC, & (conffr.) de n à m; & à caufe des paralleles OF, PK, qui coupent les précédentes à angles droits, & des triangles femblables qui en réfultent, BOF, BNP, & BEF, BKP, on aura toüjours BO. BG:: BO.BE:: BN.BK::n.men raifon des finus, &c. qui eft la condition requilé. 2. Soit AN la ligne donnée, tout le refte demeurant comme ci-deflus, & ayant mené les rayons OBN, EBK, l'interfeétion Æ de la perpendiculaire NP, & du rayon £B prolongé, fera à la courbe cherchée DS, par les mêmes raifons. REMARQUES ET COROLLAIRES. 57- Si l’on a l'équation de la donnée, cette conftruction fera trouver avec beaucoup de facilité celle de l’inconnué. Car ayant mené de l’une & de l'autre courbe, & par leurs points #, N, des appliquées à l'axe commun OD, ces appli- quées feront égales entrelles, & à la partie PF de la Réfrin- gente interceptée entre cet axe & la perpendiculaire XP, D'où, &c. ve. 2PESGSEE SIT. ‘ LE SOA TOD LS NSICÉTIENN c'E:s, À 08. Lorfque m>», c'eft-à-dire, lorfque fe rayon vifuel fe d'un milieu moins réfringent dans un plus réfringent (Fig 19.) la proportionnelle BG, bg, fuppolée fixe par “on extrémité B, b, étant tranfportée de G, g, en £, e, fur d'axe OD, par le mouvement angulaire GB£, gbe, pourra toûjours rencontrer cet axe, quelle que foit l'obliquité du rayon incident OB, Ob, & le rencontrera même par-là ‘d'aûtant plus loin en un point £', e. Mais dans le cas de m < n inverfe du précédent (Fig. 20.) la proportionnelle BE, be, nerencontrera l'axe en £,, e, que lorfque l'obliquité de l'incidence OBF, ObF, fera renfermée dans les bornes pref. “crites Sup. N° 49, & que BE— BC, où be—Dg ne ‘fera pas plus petit que BF ou BF. . La droite CR étant le lieu de toutes les proportion- nelles 2O, BG, & bO, bg, & donnant par le tranfport des BG, bg en BE, be fur l'axe OD, a pofition de tous les rayons incidents & rompus, menés à la Réfractoire & à Ja Jigne du fond, doit être regardée en ce fens, comme fa Génératrice univerfelle de toutes ces courbes. Mais elle ne fçauroit donner directement, & c’eft à caufe de fon univer- falité même, les longueurs de ces rayons, comme les don- nent les Génératrices diretles que nous y avons d’abord em- ployées, & dont il a été parlé NN.” 29 & 53. Go. Cette conftruétion remplit donc le principal but du Probleme qu'indique le titre du N.° 34, puifqu'elle fournit Je moyen de décrire toutes les courbes qui en font l’objet, _& d’une maniére beaucoup plus fimple que par la généra- trice tangentielle, que nous avons vü (N.° 3 $.) n'être autre chofe que la Cauftique de la ligne droite par Réfration. Mais ces deux efpeces de génératrices m'ont fait naître l'idée …_ ‘d'unetroifréme, que je ne dois pas paffer fous filence, par le — jour & l'analogie qu'elle jette encore fur toute cette matiére, | = 61. La conftruétion précédente étant fuppolée, & dans cas de m>n, je prends garde que les perpendiculaires … "Q", qm, à FZ, menées par G, g, vont couper toutes les BE, be, prolongées, en des points, 41, m, qui font à une Fi Fig. 214 44 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE hyperbole conique. D'où il fuit, & à caufe des paralleles, QM, gm, & PK, pk, à l'axe DX, qu'ayant mené par O les rayons vifuels GB, gb, prolongés vers N, n, & des points #7, m, de la courbe 7 AZ, les lignes BK, mbk4, les perpendiculaires PX, pk, abbaïflées de la ligne FZ, don- neront fur les OZ, Ob, ou fur leurs prolongements, autant de points N, », à la Réfraétoire AN, & réciproquement autant de points #, 4, du fond du baffin DXS, fi c'eft la ligne du fond que l'on demande ; les points À & D, à l'axe, étant toûjours donnés par le rapport conflant de FO . FC Rica miss FA FD, 62. Pour le prouver, foit FO —6, FC /—QG) =, &OC(= RE) =c,; FQ(—=CGC)=x, & QM=—=y. Les triangles femblables CGO, QBG, donneront OC(c). CG(x) :: GQ(=b).QB(E x). Donc BG—=V@B+QG° TL xx + bb, nncc & BM—=VQB +QM° =V xx + yy Mais BG. BM:ine m. Donc mV "TEE x x + 7e BB. nnce —# per xx + yy, qui devient, yy — BD mmbbxmm+nx à Den ; xx = 0, & qui eft l'Equation d'une ntcc . hyperbole T' AZ, rapportée à fes diametres, FT — 22% LE: ="" FO, Fr — y FO, dont le centre eft F, &c. Ainfi une courbe du premier genre aura, dans le cas dont il s'agit, toutes les fonctions & tous les avantages de la Génératrice Tangemtielle, qui feroit une courbe du cinquiéme genre, o mono D ES IS CAT E:N: CE: S, : 45 163. Onappliquera la même conflruétion, & tont l'articie précédent, au cas inverfe, où le rayon vifuel va d’un milieu plus réfringent dans un moins réfrmgent, en fuppofant » >», &.en ayant égard-aux inverfions de fignes que ce change- ment introduit dans le calcul; & la même Equation don- -nera au dieu d'une hyperbole, une Ellipfe TM mr, qui a auffi fon.centre.en F', & dont les diametres feront F7; F5, :. 64 On trouve ici une analogie femblable à celle du n°55, lHyperbole.& l'Ellipfe étant les Génératrices cen- trales réciproques des deux Réfractoires oppofées à fond plan; & l'on remarquera encore fur cette figure combien l'accord entre le Phyfique & le Géométrique {e foûtient. Car à me- fure que les rayons O g deviennent plus obliques à CR, où à FZ, ordonnée gg s'approche de l'extrémité # du diametre F+ de l'Ellipfe 7'M+, tombe enfin au de-là vers 4, & fort de l'Ellipfe en fortant de l'angle requis pour la Ré- fration, ce qui la rend imaginaire. 65. C'eft un principe fondamental en Dioptrique, que ‘tout rayon qui tombe fur une furface courbe, foit concave, foit convexe, s’y rompt de la même maniére que sil. tom- boit fur une furface plane tangente de la courbe au point atéfringent ou d'incidence. Donc fi le point Oeft fuppofé ‘infiniment proche du point F, de la courbe réfringente quel- m, la voute apparente GW, en qualité de Réfraétoire, fera d'autant moins courbe, & d'autant plus enfoncée, par rapport au cercle 7H, confidéré comme Îa ligne du fond. IL faut remarquer aufli que les hauflements Av, ZM, font décroiflants de A vers 7, & en même raifon que la différence des finus de la hauteur appa- rente & de la hauteur vraye, que leur maximum Hy, répond au point #7 de lhorifon, leur minimum au Zénit T, & qu'ils furpaffent toûjours les enfoncements A», L AZ, jufqu'au Zénit, où {es uns deviennent égaux aux autres, & où ils fe confondent tous en 7 G. 75+ 5° Les deux cercles 7, GM, l'un en qualité de Ligne du fond, l'autre de Réfraétoire, donnant réciproque- ment Ja raifon de m à #, ou la valeur de l'angle réfracté HO», I0M, &c. felon que l'une ou l'autre eft connuë, fr nous fuppofons AO», par exemple, de 32° 20", qui eft àätpeu-près Ja Réfraétion horifontale à Paris, on trouvera OH.Ov::m.n::10000000 . 10000442, ou environ comme 22624 eft à 22625. Ainfi la différence apparente jufque-Rà fe réduit à +; cequieft tout-à-fait infenfible, & ne nous répréfente point du tout la courbüre ou le furbaifle- ment apparent de 14 voute du Ciel, qui eft très- fenfible, 76. 6.° Mais outre les caufes d'illufion dont nous avons parlé fur Ha diftance & Ja figure de la voute du Ciel, caufes Mem, 1740. Fo # Rech. de la Ver. L 1: c. 7e d'après D'efcar- tes, dans fa Dioprr.Difc. ou €. 6. $.21. » Jhid. 1.7. in-12.p.4$ 4. & Journal des UE 1694. p. 23+ 93» P8. 129.Ü0 + MM. le Mar. de l'H6- piral, Catclan, 5° MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qu'on pourroit appeller purement Optiques & Mathémati- ques, en tant qu'elles dépendent de la grandeur des angles fous lefquels les objets fe peignent dans l'œil, il y en a une autre abfolument relative au jugement naturel que nous por- tons de la diflance & de la grandeur des objets, felon qu'il a plus de terrein, ou un plus grand efpace marqué par d’autres objets entr'eux & nous. Celle-ci eit dans bien des circonftances plus forte que toutes les précédentes, & fait fouvent difparoître tous leurs effets. Car quelle proportion ya-t-il, par exemple, entre le jugement que nous portons de Ja hauteur apparente d’un Géant vû à 20 pieds de diftance, & de celle d’un Nain vû à 6 pieds? If feroit très-poffible cependant que les angles fous lefquels nous les voyons fuffent égaux, & même que nous viflions réellement le Nain fous un plus grand angle que le Géant. Tout objet nous paroït donc d'autant plus grand, qu’il nous paroït plus éloigné, & nous paroît d'autant plus éloigné, que nous voyons une plus grande fuite d’autres objets entre lui & nous. C'eft ce jugement naturel, prefque toûjours involontaire, & qu'on pourroit appeller jugement des [ens, qui eft, comme on fçait, le grand principe d'explication du P. Malebranche * fur ces matiéres, & que j'adopte ici entiérement. Nous ne voyons rien entre nous & l'Aftre qui eft près du Zénit, nous le jugeons fort petit & fort proche ; nous voyons au contraire de vaftes campagnes entre nous & le même Aftre à l'horifon, nous le jugeons & beaucoup plus grand, & beaucoup plus loin, & en conféquence, car cela eft réciproque, l'arc qu'il décrit au deflus de notre tête nous paroît furbaiflé. Tout ce que M. Regis, & quelques autres Philofophes ont allégné contre cette explication, a été fuffifamment réfuté par le P. Malebranche mème dans la difpute qu'il eut avec lui Rà- defius*, & l’on n’ignore pas que l’Académie ayant fait exa- miner cette queftion par quatre grands Géometres d’entre fes membres *, ils déclarerent en faveur du P. Malebranche, que es preuves qu’il apportoit de fon fentiment étoient démonffra- tives , à clairement déduites des véritables principes de l'Optique, | DES SCIENCES. SI 11 eft donc bien certain que la voute du Ciel nous doit Varignon, & paroïtre par-là fort furbaillée. pus ol - 77: De Mais comment évaluer cette caufe, comment 44. Sup.p. 119. déterminer avec quelque exactitude le furbaiflement qui en Fi qe réfulte, & découvrir le rapport qu’il donne entre la verticale di OD, menée de l'œil au Zénit apparent, & l'horifontale OH ou OS, qui s'étend depuis l'œil © jufqu'à l'extrémité appa- rente de l’horifon ? C’eft cependant ce qu'a fait M. Sith, Profefieur d’Aftronomie & membre de la Société Royale de Londres, dans un excellent Livre d'Optique qu'il a publié depuis peu *. Il a trouvé par le réfultat d'un grand nombre * 4 compkat d'Obfervations, où il comparoit l'arc apparent inférieur FS, Bflen of ÉRUS compris entre l'extrémité $ de Fhorifon, & un Aftre F, Ps d'une hauteur connuë, avec l'arc fupérieur VD, depuis cet Aftre jufqu'au Zénit, que l'arc total DYS, ou DKA, étoit tel, que l'horifontale OS ou le finus droit, & la verticale OD ou le finus verfe, étoient entr’eux à peu-près dans le rapport der10 à 3, & que VS étoit fenfiblement égal à D, lorlque la hauteur ou l'angle SO F étoit d'environ 23 degrés, &c, D'où il eft aïfé de déduire que l'arc DS ou DA fera d’en- viron 33° 24’, & que le rayon du cercle auquel il appartient, eft environ fx fois aufli grand. que la verticale OD. 78. 8.° Il faut prendre garde que le rapport de Fhori- fontale OS, ou du rayon OT, à la verticale apparenteOD, eft tout ce qu'il y a ici de plus important, & fur quoi l’on puifle compter, de l'aveu de M. Smith, le prétendu arc de cercle DYS, n'étant qu'un à peu-prés déterminé en confé- quence de ces deux points, & par induction, plütôt que par obfervation. Il eft certain du moins que cet arc n’eft pris pour tel que par rapport à l'illufion du jugement involontaire des diftances appliquées à la vifion directe, abftraétion faite de ce que les milieux réfringents & la Réfraétion y peuvent changer ; & la preuve que la Réfraétion n’entre ici pour rien, c'eft que les points S ou A de cet arc, y font confondus . avec l'horifon rationel HAOS, ce qui ne fçauroit fubfifter vec la Réfraction, qui les éleve de toute la quantité Sr, G ïi 52 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ou Ar. Prenons donc l'arc de cercle, ou telle autre portion de courbe D VS’, qui n'en differe pas fenfiblement pour la feule réduétion du quart de cercle Z'$ à fon apparence, en vertu du jugement des diflances, & indépendamment de toute Réfraction, & voyons quelle fera la Réfraétoire de cet arc. Mais il eft aifé de trouver, après tout ce qui a été dé- montré ci-deflus, que ce fera une ligne du quatriéme ordre, a À Nr, qu'on décrira comme les précédentes(n.°66.) & qui s'éloignera d'autant plus de Farc S D A, dont elle eft Ré- fradoire, par fes extrémités », , que cet arc fera une moindre Fr + El » # UP portion du cercle, & que le rapport + de la réfringence des deux milieux fera plus grande ; qu’elle fera furbaiffée d’au- tant plus autour du fommet À, que fes points d’inflexion feront d'autant plus proches des points #, », &c. 79: 9.” Comparons maintenant cette Réfraétoire À Ny avec la Réfraétoire GA», qui eft celle du cercle 7H, nous trouverons que ce n’eft que la même Réfractoire furbaiffée de G en À, les points extrèmes », », étant communs à toutes les deux, comme cela doit être, puifque la Réfraétion & les hauteurs apparentes qu'elle produit, demeurent les mêmes, quel que foit le jugement des diflances de l'objet. La Ré- fraétoire n À Ny devra donc repréfenter la féétion verticale de la voute apparente du Ciel par le Zénit 7, & il n’y a rien jufqu’ici dans les obfervations immédiates qui n'en con- firme la reflemblance ; car, comme je l'ai déja dit, felon M. Smith lui-même, Farc de cercle HD VS n'eft qu'une fimple approximation, le point Ÿ, ou tel autre femblable, pouvant être fuppofé, par exemple, en F; & c'eft dans des Remarques qu'il a ajoutées à {a fin de fon fecond volume, qu'il nous en avertit. Mais il fait plus, il rapporte fur ce fujet le fentiment & les obfervations de M. Fo/kes, fon illuftre ami, qui change l'arc Æ DS en une courbe conchoïdale _tout-à-fait femblable à notre Réfraétoire y N A Yn, & M. Smith dit auffi avoir obfervé la même apparence. Ainfi voilà les obfervations, les regles d'Optique & de Dioptrique & RME DE +. DES SCIENCES. 53 notre théorie parfaitement d'accord fur ce point. 80. 10° Enfin fi l’on veut apporter encore ici une plus grande exactitude, il faudra, au lieu de l'arc de cercle D rS que nousavons fait réfulter du jugement des diftances indépen- damment de la Réfraétion, & qui, par rapport à fa conftruétion de la ligne du fond apparent AY», eft pris pour la ligne du fond réel, il faudra, dis-je, imaginer quelqu'autre arc de courbe décrit d'après la raifon donnée de OD à OS. Par exemple, ayant mené des paralleles quelconques B1, &c. à OT, on les divifera en }, dans le même rapport que celui de OS ou OT à OD, ce qui réduira l'arc circulaire 77 en un arc elliptique DY, & tout le demi-cercle A TS en une demi- ellip{e, dont le grand axe et OS, & le petit O D. Mais la courbûre AY#, ou la Réfraétoire de la voute apparente du Ciel, ne fera pas fenfiblement différente de celle de Farc circulaire. II fuit donc, dans le cas dont il s'agit, de conce- voir en général un arc de courbe quelconque décrit de D en S, qui s'approche toüjours de plus enr plus de l'horifon- tale OS, & vers laquelle elle eft concave, pour exprimer l'apparence qui naitroit de l'illufion des diflances, féparée dé celle de la Réfraétion , & tracer enfuite la Réfractoire qui lui convient, & qui aura toüjours fenfiblement la figure con- choïdale y N A Fr. Cette courbe donnera la coupe de la voute apparente du Ciel avec toute la précifion dont je crois. que cette matiére eft fufceptible, « &r4 ILeft clair par les principes pof&s, que les grandeurs, apparentes des Aftres, de la Lune, par exemple, & du Soleil, ui feront vûs fur À Ya, feront en raifon des diftances jugées, OD, OF, OS, &c. Et fi l'on trouve le moyen d'évaluer ces grandeurs.apparentes en vertu du jugement des diftances, par rapport aux grandeurs purement optiques &'angulaires,. ce qui, à mon avis, n'eft pas impofhble, on aura l'inverfe du Probleme précédent, & l’on retrouvera par ce moyen tous les points de la courbe A Y. | 82. Quant à la voute apparente que forment les couches de plufieurs nuages, dont le tiffu eft concentrique & parallele G iij MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE à la furface dela Terre, voute qui eft réellement très-furbaiffée à notre égard, & qu'on peut même prendre pour une furface phtte, la Réfraétoire qu'il faudroit lui donner, feroit celle du fond plan, & qui devient en ce cas (N.” $ 2.) une hyper- bole dont la convexité eft tournée vers le Spectateur. Mais la force réfringente de l'air à la hauteur où fe trouvent ordi- nairement les nuages, differe fi peu de celle de l'air à a furface de la Terre, que la Réfractoire ne changeroït prefque rien à la figure plane de cette voute. Il eft certain de plus, que non feulement elle ne nous paroît point plane, & encore moins convexe vers l'œil, mais au contraire concave, en forme de cintre Ellipfoïde fort furbaiflé. Sur quoi je me contenterai de remarquer que cette apparence eft en un fens l'inverfe de la précédente, puifque celle-là rend moins con- cave ou applatit une voute qui devroit paroitre fphérique, & que celle-ci rend concave une voute qui devroit paroître fenfiblement platte, quoique dans le fond, les caufes en foient à peu-près les mêmes, & doivent être prifes des arti- cles ci-deffus, fur-tout des NN.° 71, 73 & 76. 83. Du refte il faudra s'en tenir à la Réfractoire pure- ment circulaire, GA, dans l'application qu’on pourroit faire de nos Courbes aux Réfractions Aftronomiques, parce qu’il ne s’agit plus alors de la figure apparente du Ciel, mais feu- lement des valeurs angulaires des diftances ou des hauteurs entre les points céleftes apperçüs ou obfervés, & du rapport de réfringence qui en change la pofition, ce rapport & cette pofition étant les mêmes à cet égard dans la Réfractoire du cercle & dans celle de l'arc quelconque qui a fon diametre pour corde, comme on le voit par la conftruction de l’une & de l'autre. Or les fécantes, les tangentes, les finus ou les rayons de la Réfractoire & de la Ligne du fond , à l'égard d’un angle quelconque 2/0 M, calculé ou obfervé, réfultant toûjours du rapport de réfringence, , des deux milieux, ou, réciproquement, ce rapport connu & la hauteur appa- rente obfervée donnant toûjours fur la Réfractoire l'angle ATEN ‘= DNDIE SNS CHLE NuCLEs s5 que renferment ces rayons ( . Sup. 5”) il eft clair que l'un - ou l'autre étant connu, le fecond le fera aufli; & il me femble que la Regle de faufle pofition alternativement employée fur ces deux grandeurs, pourroit enfin après plufieurs retours de l'une à l'autre, donner quelque chofe de fort exact, On fe feroit d’abord une hypothefe du rapport de réfringence + de l'airque nous refpirons à l’Ether, foit en le déduifant des expériences du Vuide par la Machine Pneumatique, comme M. Lowtorp en 1 699*, ou M. Delifle en 1719, foit d’après * PhifTranf. des Tables de Réfraétion du lieu, où par quelque hauteur res PE déduite du calcul, ou conftatée par obfervation indépendem- } pe É à ment des Réfraétions *, foit enfm par da comparaïfon de + Ye» & toutes ces méthodes. On verroit enfuite ce que donneroïit /# 1736. ce rapport aux angles de la Réfraétoire, & réciproquement, "#7 Car quoique cette alternative paroifle tomber dans ce qu’on appelle un cercle en Logique, elle n’en auroit pas toûjours le vice, parce qu'il fe trouveroit des cas où l'on pourroit plus compter fur l'une des deux grandeurs hypothétiques, & des cas où il y auroit plus à compter fur l'autre; & l’on n'ignore pas combien ces fortes de tâtonnements font quel- quefois d'ufage, & utiles dans l’Aftronomie. SCHOLIE GÉNÉRAL 84. Les Réfraétoires dont il a été fait mention dans ces deux Sections, feront Géometriques fi les Lignes du fond, dont elles font les Réfraétoires, font géométriques, & réci- proquement, puifque l'équation des unes dépend de celle des autres. Leur degré algébrique fouffrira la même dépendance en général, mais avec des exceptions, dont nous avons déja touché la caufe, N.° 3 3. Leurs Génératrices propres & directes indiqueront plus fürement ce degré, en tant que les Réfrac- toires peuvent être regardées par-là comme des Conchoïdes, felon la Théorie de Defcartes, fous les conditions encore que quelques Comméntateurs de la Géométrie de ce Philofophe: y ont admifes. 85. La Réfractoire, telle que nous l'avons confidérée 6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE jufqu'ici, & fa Ligne du fond, peuvent être deux courbes; on en a vü les exemples, & c’elt de beaucoup le plus grand nombre. Mais elles ne fçauroient être en même temps deux droites, puifque l’une des deux étant droite, l'autre devient néceffairement courbe, NN.° 15 & 31, 45 & 54, & c'eft à caufe de la proportion conftante des finus ou des fécantes des angles, &c. qui complique celle de leurs ordonnées, & qui eit géométrique. 86. L'invention & la conftruétion de ces courbes, qui . font autant de Lieux ou de Problemes indéterminés, fournira d'une maniére très-lumineufe, & avec beaucoup de facilité, la folution de plufieurs beaux Problemes déterminés qui s’y rapportent. Par exemple, le Probleme que propofe M. le M. de l'Hôpital dans fon Livre des /ufiniment petits, Art. $9, & qui revient à cet énoncé, fur nos Figures 19 & 20 ; un Voyageur partant du lieu ©, pour aller au lieu #, doit tra- verfer deux campagnes féparées par la droite FZ. On fup- pole qu’il parcourt dans la campagne du côté de O, un cer- tain efpace dans le temps m, & dans l'autre du côté de #°, le même efpace dans le temps »; on demande par quel point Z de la droite FZ üil doit pañler, afin qu'il employe le moins de temps qu'il eft poflible pour parvenir de O en A. Ce Probleme, dis-je, que M. le M. de l'Æpital réfout par le Calcul différentiel appliqué aux queftions de maximis ér mi- nimis, fe trouve ici tout réfolu & tout conftruit par la plû- part de nos méthodes, & fur-tout par celle du N.° 56. Car ayant imaginé une ligne quelconque droite ou courbe paffant par #, décrit fa Réfractoire AN, & mené par 4, la perpen- diculaire XNP à FZ, &c. la droite NO coupera F Z au point cherché 8. D'où l'on tirera immédiatement {on Equa- tion conftitutive, qui doit être la même à peu-près que celle de nos Réfraétoires oppolées à fond re@iligne, NN.° 1 s & 45, en prenant pour conftante l’une de leurs variables. Nous ayons fuffifamment expliqué, Arr. LXIV & LXVIIT, dans la feconde partie de-ces Recherches, Mem. 1723, en quoi confifte ce Probleme, comment il s'y agit de la Réfraction, & ce $ 4 f La DAUDIENSU SCIE NICE S s7 & ce qu'il y faut obferver, pour ne pas tomber à cette occafion dans l'erreur où il a induit quelques Lecteurs. 87 La Réfringente & la Ligne du fond étant données avec la diftance de l'œil fur un même plan, on peut toûjours trouver la Réfractoire qui en réfulte, & réciproquement, la Réfractoire & la Réfringente étant données; car la ligne cher- chée eftunique. Mais la Réfraétoire & la Ligne du fond étant femblablement données de pofition avec l'œil, l'invention & la conftruction de la Réfringente ne font pas un Probleme de mème nature que le précédent , y ayant une infnité de lignes, droites ou courbes, qui peuvent le réfoudré. La Ré- fractoire & la Ligne du fond font en cela comme les Caufti- ques, foit par Réflexion, foit par Réfraétion, qui répondent chacune à une infinité de courbes dont elles peuvent être les Cauftiques, quoique chaque courbe n'ait que fa Cauftique propre & déterminée. Mais l'examen de ce Probleme appar- tient à la fuite de notre méthode pour les Réfraétoires à Réfringente Curviligne. 88. Les Courbes que produit une Ligne ou un fond quelconque vü par Réflexion fur une ligne, droite où courbe, -donnée de pofition avec l'œil fur un plan, & que j'appellerai Anacamptiques où. Réflethoires, doivent évidemment entrer dans notre Théorie des Anaclaftiques ou Réfraétoires ; car la Réflexion & la Réfraction ne font à la rigueur que des ‘efpeces d'un même genre que Jon peut réciproquement traiter fous le concept de l’une des deux, comme nous l'avons . 2 02 . pratiqué dans les premiéres Parties de ces Recherches. Mon . deffein eft auffi de réduire les Réflectoires aux mêmes conf truétions & aux mêmes Formules que les Réfractoires. Les Réfectoires font déja en un fens plus connuës, par la défor- mation des images, & par la figure convexe ou concave, : qu'on fçait que doit prendre une ligne droite vüë dans un … miroir convexe ou concave. Elles font même, à quelques végards, d'une defcription plus fimple que les Réfraétoires, » Le rapport de »# à , qui pourroit y exprimer celui des » änclinaifons des angles d’Incidence & de Réflexion, y devient Mem., 174 0e CE Li 58 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE inutile, ou fe réduit à l'égalité, la Réflexion ne renfermant communément que l'idée d’un feul milieu, & le reflort ou le principe quelconque de Réflexion dans la Lumiére, étant fuppofé infiniment parfait. C’eff fur ces fuppofitions tacites que fera fondée la principale différence que l'on pourroit mettre entre les Réflectoires & les Réfractoires, fçavoir, que par celles-ci le fond apparent differe du fond réel, lors même que la Réfringente eft une droite, & que par celles-là le fond réel ou l’objet ne peut être déformé, que lorfque la Réflechiffante eft courbe, Nous retiendrons cependant l'ana- logie & le rapport de »# à », tant pour les unes que pour les autres, afin de ramener toute cette matiére à la théorie & aux Formules de la Réflexion & de la Réfraétion des Corps en général, & d’un reflort parfait ou imparfait, comme on les trouve dans les Mémoires de 1722 & 1723. Dans cette généralité, la conftruction des Réfraétoires (N.° 5 6.) donne déja celle des Réflectoires qui font dans le même cas, & le petit changement qu'il y faut introduire, eft indiqué dans le dernier des Mémoires que je viens de citer, Arr. LXV. Le détail des Réflectoires fournira l'explication de la plüpart des phénomenes des Miroirs concaves & convexes, & même la folution de quelques difficultés qu'on a faites fur ce fujet, & qui ont arrêté d’habiles Géometres. C’eft ce dont je me fuis déja convaincu par quelques eflais ; mais il n’y a pas d’appa- rence que les nouvelles occupations auxquelles je fuis appellé, me permettent fi-tôt de remettre la main à ce travail. Le MR Fa 5 7 g7 740 PL. IL pan. 88 IL: tel 4 PL.IL pa em. de { 4 Fig Le là Mem, d e VAcade 1740: PU.HIT. PE] : € Dheulland Jeulp / cad.1770PL.V. Pag.58. Q Do 57 sue | sf À ail D ATEN ur Mem . de LATE P1. VI. pag-58. REFLEXIONS ANATOMIQUES Jur les incommodités , infirmités, à7c. qui arrivent ‘au Corps humain à l'occafion de certaines attitudes 7 de certains habillements. Pa M WixnsLo w. TL eft aflés notoire que certaines attitudes négligéesont feules , Juiter caufé au Corps humain quantité d'inconvénients, d’incom- 1740. _ modités, d’infirmités, & même des maladies confidérables; & que faute d’avoir fait attention à la premiére caufe de ces in- _convénients, &c. on ya employé plufieurs remedes, non feu- _ Jementen vain, mais quelquefoisavec augmentation des maux. Une Dame d’une grande taille, bien droite, & que j'avois và telle pendant plufieurs années, étant devenuë très-féden- taire, avoit pris coûtume de s ‘habiller tr ès-négligemment, & d’être affife toute courbée , tantôt en avant, tantôt de côté & d'autre. Au bout de quelques mois après, elle commença je à avoir de Ja peine à fe tenir droite debout comme aupa- avant, enfuite elle fentit une efpece d'inégalité au bas de 1e du dos. Mayant confulté 1à-deflus, je lui confeillai ord, pour prévenir au moins augmentation de cette ommodité, lufage d’un petit corfet particulier, & d’un er proportionné à fon fiége ordinaire. Elle négligea mon feïl, & l'épine du dos lui devint de plus en plus courbée une S romaine ; de forte qu'à la fin ayant toüjours différé les moyens que je lui avois propofés, elle perdit environ le, rt de Ja hauteur de fa Los & refta non feulement cour nrbée nais encore fi plie que les premiéres faufles-côtes d’un côté pprochoient très-près de la crête de los des îles du même & que les vifceres du bas-ventre étoient par-là irré- liérement pouflés vers le côté oppolé. Son eftomac même H ïj 60 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE en fut tellement comprimé, que ce qu'elle avaloit, lui pa- roifloit tomber diftinétement dans deux capacités différentes, J'ai vû plufeurs jeunes gens d'étude, qui étant obligés de fe tenir courbés pour écrire fur le genouil dans les Clatles publiques, ont été très-incommodés de la compreffion que cette attitude contrainte & réitérée avoit caufée au bas de la poitrine & aux vifceres contenus dans l'épigaftre ; fur-tout ceux qui, à caufe de la vüë bafle, avoient été plus expofés à ces inconvénients, dont différents maux de la poitrine & du bas-ventre avoient été la fuite. Les meilleurs remedes propolés par ceux qu'ils avoient confultés fur ces incom- modités, fans leur avoir parlé de l'attitude gênante qui les avoit précédées, étoient devenus très-inutiles aux uns, & avoient paru augmenter les maux aux autres. Ce n'a été qu'à force de queftionner , que j'en ai découvert la caufe dans cette attitude contrainte, laquelle ayant été enfuite difcon- tinuée, les malades ont été guéris, les uns uniquement par-là, les autres par les mêmes remedes dont le fuccès avoit été empêché ci-devant par la continuation de l'attitude. J'ai encore trouvé de jeunes Etudiants fujets à des maux de tête, d'yeux, de gorge, &c. defquelles incommodités, ni les faignées, ni d'autres remedes convenables, n’ont pu empêcher les récidives plus ou moins fréquentes. A Ia fin leur Infirmier m'ayant averti d'une habitude affés générale parmi ces jeunes gens, de dormir la nuit la tête renverfée derriére le traverfin, j'eus d'abord foin de les faire changer d’attitude, & d'y faire veiller ceux qui les avoient en garde ; ce qui a encore très- bien réufli, même à l'égard des infirmités qui depuis un temps confidérable de cette mauvaife habitude, étoient de- venuës comme habituelles. Combien de fois n’eft-il pas arrivé que l'inadvertence de cette efpece dans le traitement de certaines maladies, a occa- fonné des accidents très-ficheux, & même irremédiables, fans qu'on en ait pu comprendre la caufe, & quelquefois après toutes les marques d’une cure parfaite? En voici un æxemple très-remarquable, Je fus appellé, il y a plus de DES.SCIENCES Gr vingt ans, pour examiner la guérifon d’une fracture de {a Cuifle d'une femme, qui boitoit, quoiqu'il y eût des preuves ordinaires que cette fracture avoit été parfaitement bien réduite, & que los confolidé avoit fa dimenfion naturelle comme celui de l'autre côté. Je la fis coucher à plat, & dans cette attitude, après avoir mis avec beaucoup de facilité Les deux genoux, les malleoles, les talons & les deux gros orteils dans une fituation parfaitement égale, on crut me prouver par-R que la cuiffe qui avoit été fracturée & guérie, étoit dans une parfaite égalité avec l'autre cuiflé, ce qui me parut auffi d'abord. Mais voyant qu'un inftant après la jambe du côté malade étoit remontée comme d'elle-même un peu au-deffus du niveau naturel, & qu'elle paroiffoit en même temps plas courte que celle de l'autre côté, j’examinai aufli-tôt les deux hanches, & j'obfervai qu’elles étoient alors exactement dans leur pofition naturelle à la même hauteur, & qu'en remettant les jambes & les pieds dans une attitude égale, la pofition des hanches devenoit auffi-tôt oblique. Je compris par - à que l'os de fa cuife avoit perdu fa longueur naturelle par la foudure irréguliére de la fracture, & que faute d'attention {ur l'attitude des hanches, on étoit trompé par la maniére ordinaire de s'en rapporter à l'égalité feule des genoux, des - malleoles, des talons & des orteils ; ce qui arrive d'autant plus facilement, qu'à mefure qu'on tire la jambe du côté de da fracture pour la comparer avec l’autre jambe, le malade, crainte de douleur, fait obéir lui-même fi jambe au manuel de l'Opérateur, mais le fait naturellement fans réflexion , & … par conféquent fans avertir que pour le faire, il fait auffi en . même temps defcendre la hanche de ce côté. C’eft de quoi J'ai, depuis cette obfervation, averti en plufieurs rencontres, & j'en ai même fait mention ailleurs. 1» Les effets de certains habillements ne méritent pas “moins d'attention. Nos Anciens ont déja communiqué leurs -obfervations fur les inconvénients & les mauvaifes fuites .…qu'occafionnent aux filles & aux femmes le ferrement exceffif de leurs corps ou corfets à baleines, & {ur impreflion plus H if Fe 62 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ou moins funefte qui en arrive en différentes maniéres aux principaux vifceres du bas-véentre, jufqu'à bleffer même, à eflropier & à étouffer le fruit des femmes enceintes. J'ai obfervé depuis plufieurs années que le ferrement du col par les cravattes, les porte-rabats, les colets de che- miles, &c. avoit feul été la caufe primitive & immédiate des maux de tête, des maux d'yeux, des maux de gorge, des étourdifiements, des vertiges, des menaces de fyncope, des faignements du nez, &c. & que faute d'attention à cette caufe, on avoit employé quantité de remedes fans aucun fuccès ; auxquelles incommodités j'ai fouvent remedié, & quelquefois comme dans un clin d'œil, par Île feul relâche- ment de ces fortes de brides, qui avoient empêché de revenir librement par les veines jugulaires le fang que les arteres carotides avoient diftribué fans obftacle aux parties tant externes qu'internes de la tête. M. Cruger, Directeur général de la Chirurgie en Danne- marc & en Norveoue, étant venu à Paris, & m'ayant en- tendu parler de cette obfervation, me dit, qu'un Capitaine de ce pays-là s'étoit avifé d'accoûtumer tous les foldats de fa compagnie à ferrer très-fort leurs cravattes, & à porter des jarretiéres très-ferrées au- deflous des genoux, afin que par la haute couleur de leurs vifages & la grofeur du mollet de leurs jambes, que le ferrement produifoit, ces foldats paruffent bien vigoureux, bien nourris, & en grand em- bonpoint. Mais au bout d'un certain temps ils tomberent prefque tous malades d’une maniére particuliére, dont plu- fieurs, après les tentatives inutiles des remedes, tant externes qu'internes, périrent à la fin comme ayant été attaqués d’une efpece d'affection fcorbutique putride, & dont on a vü même avoir été infectées, altérées & corrompuës les parties internes du corps dans ceux qu’on avoit ouverts après eur mort. Ceci n''avant donné lieu de faire attention fur une efpece de Fiévre que caufent les compreffions douloureufes de quelque partie externe du corps, même la plus petite, par continuation ou la fréquence des ligatures, des plis, des Por DES SCIENCES. 6; inégalités, des duretés, des chocs, &c. il m'eft venu en pénfée que la même chofe peut arriver aux animaux, par exemple, aux Veaux, aux Agneaux, &c. par les fecoufles continuelles & les chocs des charettes en général, & parti- culiérement par les ligatures extrémement ferrées de leurs pieds, lefquels on voit encore très-enflés après la mort de ces animaux, & quelquefois même devenus bleuâtres par les meurtriflures que les liens y ont caufées. On pourroit de-là foupçonner que ces fecouffes continuelles & ces ligatures meurtriflantes alterent la mafle du fang de ces animaux, & en rendent la viande moins faine que celle d’autres pareils qui n’ont pas été expofés à ces tortures. J'ai fait obferver dans mon Traité d'Anatomie, que les différents mouvements des os du pied étant très-libres dans À l'état naturel, comme on le voit affés dans les petits enfants, “ fe perdent ordinairement par la mauvaife maniére de chaufler les pieds; que la chauffure haute des femmes change tout- à-fait la conformation naturelle de ces os, rend les pieds extraordinairement cambrés ou voutés, & même incapables de s’'applattir, à caufe de la foudure non naturelle ou anchy- lofe forcée de ces os, à peu-près comme il arrive aux ver- tebres des boffus; car ces chauffures hautes font que l'extré- mité poftérieure de l'os calcaneum , à laquelle eft attaché Le gros tendon d'Achille, fe trouve continuellement beaucoup _ plusélevée, & le devant du pied beaucoup plus abbaïfié que - dans l'état naturel. Par conféquent les mufcles qui couvrent _ Ja jambe poftérieurement, & qui fervent par lattache de leur tendon à étendre le pied, font continuellement dans un raccourciflement non naturel, pendant que les mufcles antérieurs, qui fervent à fléchir le pied en devant, font au + contraire dans un allongement forcé. On voit que les per- » fonnes ainfi chauflées, ne peuvent que très - difficilement _defcendre d’une montagne ; au lieu qu'en y montant, Îa chauffure haute leur peut en quelque façon fervir de marches — phattes, le bout du pied étant alors plus élevé. Elles ont auffi … de a peine à marcher long-temps, même par un chemin m: s 64 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE uni & plat, fur-tout à marcher vite, étant alors obligées ou de marcher en dandinant, à peu-près comme les Canards, ou de tenir les genoux plus ou moins pliés & foûlevés, pour ne pas heurter des talons de leur chauflure contre terre. C’eft encore par la même raifon qu'elles ne peuvent fauter avec la même liberté que d’autres qui ont la chauffure bafle ; car on fçait que dans l'homme, de même que dans les quadru- pedes & dans les oyfeaux, l'action de fauter s'exécute par le foûlévement fubit & prompt de l'extrémité poftérieure & faillante de l'os calkaneum au moyen des mufcles dont le gros tendon y eft attaché. Les chauflures baffes n’expofent pas à ces inconvénients, mais au contraire facilitent tous les mouvements naturels des pieds, comme le prouvent aflés les Courreurs, les Porte- chailes, les Laboureurs, &c. Les fabots les plus communs, malgré leur pefanteur & inflexibilité, ne mettent pas tant d’obftacles à l’action libre & naturelle des mufcles qui fervent aux mouvements des pieds, en ce que, outre le talon très- bas, leur extrémité antérieure eft arrondie vers le deflous, ce qui fupplée en quelque maniére au défaut de Finflexion alternative d’un pied appuyé fur les orteils, pendant que Yautre pied eft en Fair quand on marche. Les focques des Récollets fuppléent encore davantage à ce défaut, en ce que, outre leur talon, elles ont une piéce de la même hauteur vers le devant, fous l'endroit qui répond à l'articulation du métatarfe avec les orteils; car par ce moyen la portion an- térieure de ces focques étant en l'air, permet d’abbaifler la pointe du pied proportionnément à l'élévation du calcaneum. Les fouliers du petit peuple avec des femelles de bois n’ont pas tant de commodité, & font au contraire préjudiciables aux mufcles du tendon d'Achille, en ce que n'étant ni fle- xibles, ni façonnés de la maniére fufdite, ils rendent la por- tion antérieure du levier du pied plus longue que dans l'état naturel, & par-là font faire plus d'effort à ces mufcles pour foûlever tout le corps fur la pointe de ces fouliers inflexibles ; car on fçait que dans l'action de foûlever le corps fur la pointe du pied, 2= ; DES SCIENCES, 6; du pied, ce pied fait l'office du levier de la feconde efpece, le fardeau de tout le corps étant alors entre l'effort des mu£ cles & la réfiftance de la terre, &c. Mais pour revenir à la chauflure haute, en voici un autre inconvénient. Non feulement les mufcles du gros tendon d'Achille, qui fervent à l'extenfion du pied, mais auffi les muftles antérieurs qui fervent à l’extenfion des orteils, font par la hauteur de ces chauflures continuellement dans un état de raccourciflement forcé ; & non feulement les mufcles antérieurs qui fervent à la flexion du pied, mais les mufcles poftérieurs qui fervent à la flexion des orteils, font en même temps par cette hauteur continuellement dans un état d’allon- gement forcé. Cet état continuel de froncement des uns & de tiraillement des autres de ces mufcles, ne peut que caufer tôt ou tard à leurs vaifleaux, tant fanguins que lymphatiques, & à leurs nerfs quelque inconvénient plus ou moins confi- dérable, & outre cela par la communication de ces vaifleaux j & de ces nerfs avec les vaifleaux & les nerfs d’autres parties … plus éloignées, même avec ceux des vifceres de l'abdomen, …. &c. occafionner des incommodités que l’on attribueroit à toute autre caufe, & par conféquent on y apporteroit conti- nuellement des remedes, non feulement inutiles, mais acci- dentellement nuifibles & dangereux, à peu-près de la même …._ maniére qu'on a vü arriver aux foldats mentionnés ci-devant, 4 pour n'avoir pas eu cette attention. II eft vrai que cet état “—._ forcé de raccourciffement d'une part & d’allongement de _ Jautre part, devient avec le temps comme naturel, de forte que ceux qui y font habituellement accoûtumés, ne peuvent prefque pas fans peine & fans fouffrance marcher avec des » chauffures baffes ; mais cela n'empêche pas que cette attitude mon naturelle ne foit la caufe de certaines infirmités qui + paroïffent n’y avoir aucun rapport. Je m'étendrai davantage … li-deflus à la fuite de mes Remarques fur le Traité de Motu … Animalium, par Borelli, Se Mem. 1740, : 1 $ 23 Mars 1740, 66 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE DRD'SCE R'V A TT ONS De la durée des Eclipfes du fecond à du troifiéme Satellites de Jupiter, faites proche des limites en 1739 ©1740, avec des réflexions fur le mou- vement du fecond Satellie. Par M. MARALDI. L eft rare de voir dans la même Eclipfe l'entrée du fecond Satellite de Jupiter dans fombre, & fa fortie. Depuis la découverte des Satellites, on n’en a encore, que je fçache, que quatre obfervations rapportées dans les Mémoires de Académie de l'année 1729. Mon Oncle a fait aflés fentir dans fon Mémoire la conféquence & l'utilité de ces obfer- vations, il a invité les Aftronomes à y être attentifs, & leur a indiqué le temps, ou plütôt le lieu de Jupiter vü du Soleit & de la Terre, où l'on peut voir ces deux phafes dans la même Edclipfe. Cette Planete s'eft trouvée au mois d’Août de l’année derniére & au mois de Février de cette année dans la fituation favorable, mais il ne nous eft réufi de faire qu'une obfervation au mois de Février. Il eft important que les Aftronomes en foient inftruits, afin qu'ils puifient profiter de ces circonftances; elle fera aufii fort utile à ceux qui tra- vaillent à la théorie des Satellites. Nous avons fait cette obfer- vation M. Caffini & moi, chacun féparément, par un fort beau temps. Voici l’obfervation que M. Caffini a faite avec une Lunette de 18 pieds. Le26 Févrierà 8h 53" 42" du foir, le 2.4 Satellite fortoit de derriére le difque de #. o 12 ilfe fépare du bord de Jupiter. 7 4 8 Immerfion totale du Satellite dans Fombre. 9 31 23 Commencement de l'Emerf. S LIMDF EL SN SE CHE NÉ CG ES 5; 67 … J'ai fait cette obfervation avec une Lunette de 1 6 pieds, : & j'ai obfervé l’Immerfion totale du Satellite dans l'ombre Doatete dr de R Ne , 0e 77h HS 74, & le commencement de l'Emerfion à. . . ONE, 28; d'où je conclus la durée de l'Eclipfe de 2P 27 31", unpeu plus grande que par l’obfervation de M. Caffini, qui ne l'a trouvée que de 2h 27° 15", mais la différence n’eft que de 1 6 fecondes. Deux Obfervateurs s'éloignent fouvent de cette quantité dans lobfervation de la même phafe. … On remarquera que le lieu de Jupiter và du Soleil étoit à 9 45’ des Gemeaux, éloigné par conféquent des limites des Satellites, de 25415", & que le 4 de Mars, en étant encore plus éloigné, nous vimes le fecond Satellite fortir de derriére le difque de J upiter, & entrer dans l'ombre à oh 43° 59", & qu'ainfi ce n'eft pas feulement vers le milieu du Taureau &c du Scorpion, où font les limites des Satellites, qu'on pourra voir (comme mon Oncle l'a marqué) l'entrée du fecond Satellite dans l'ombre & fa fortie dans la même Ecliple, mais même à 25 degrés de côté & d'autre de ces points, lorfqu'en même temps cette Planete fera en quadra- ture avec de Soleil, Si l'on fuppofe que les Nœuds des Satellites font fixes, & que linclinaifon na pas changé depuis le paflage de Ju- piter par les limites jufqu'au 26 de Février, on la trouvera par cette obfervation, de 44 17’, à 1 6 minutes près de celle qui a été déterminée par mon Oncle en 1729. C’eft fur cette fuppoñtion, & fuivant cette inclinaifon » que nous avons calculé quelle devoit être cette année la durée des Eclipfes du fecond Satellite proche des limites, pour la comparer à celle des années précédentes, & nous avons trouvé qu'elle auroit été de 2h 17/40", un peu plus grande que celle qui | a été obfervée en 171 $ mais beaucoup plus petite qu’en 1727; car en 1715, elle a été obfervée de 2h 14' 28", _ &en 1727, de 2h31", ainfi il fembleroit que depuis 1715, elle a augmenté jufqu’en 1727, & qu'enfuite elle a diminué. : Aln'en eff pas de même de la durée des Ecli pfes du troifiéme ra Ti 68 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Satellite près des limites, on n’ÿ rémarque point ces victffir- tudes d'augmentation & de diminution, mais elle continuë de diminuer comme elle a fait depuis année 1691 ; car elle a été plus courte en 1739, qu'elle n’a encore été. Nous pourrions le prouver par plufieurs obfervations faites à diffé- rentes diftances des limites, en comparant leur durée avec celle qui réfulte d’une Table fondée fur les obfervations de 1727, rapportées dans les Mémoires de l Académie de l'année 1732. Mais il nous fufhira de rapporter celle qui eft plus proche des limites, & dont la durée a été plus courte : voici cette obfervation : Le 23 Août 1739, M. Caffini obferva TImmerfion du troifiéme Satellite dans l'ombre à 2h 15° 13" du matin, & il obferva le commencement de l'Emerfion à 3h55 53"; d'où lon conclud la durée de cette Eclipfe, . de 1h 44° 20", Jupiter étoit à 234 7’ du Taureau, éloigné des limites des Satellites, de 84 37". A cette diflance, & fuivant l'inclinaifon que nous avons déterminée en 1732, ar les obfervations de 1727, on trouveroit la durée de cette Ecliple, de 1P 53" 20", plus grande de 9 minutes que celle qui a été obfervée ; ainfi on voit une diminution eonfi- dérable depuis 1727 jufqu'en 1739, dont il n’eft pas aifé de découvrir 1 marche, car elle ne paroïît pas réguliére, puifqu'en 1733, la durée des Eclipfes a été la même qu’en 1727, comme il paroït par une obfervation du 2 Mars, où Immerfion du Satellite dans l'ombre arriva à 1h 17° 30" du matin, & fon Emerfion à 3» 1533", ce qui donne fa durée des Ecliples, de 1° 58° 3", Jupiter vû du Soleil, étoit à of s 1° du Scorpion, éloigné des limites, de 13439". A cette diftance, fuivant les obfervations de 1727, on trouve la durée de FEclipfe, de 1" 58° 14", à 1 5 fecondes près de celle qui a été obfervée. La variation de la durée des Eclipfes des Satellites de Ju- piter fera toüjours une fource d’erreurs dans le calcul des Immerfions & Emerfions des Satellites; mais elle n’eft pas Ja feule à craindre, particuliérement dans le fecond Satellite. Les obfervations de 1715 & de 1716, qui nous mettent à DES SCIENCES. l'abri de cette erreur (car on peut tenir compte de la variation de la durée des Ecliples, du moins dans les obfervations qui font entre le 23 d'Aoùût 1715 & le 24 de Février 1716, puifqu'on a déterminé dansces deux jours la durée des Eclipes, comme il eft rapporté dans les Mémoires de l Académie de Yannée 1729) ces obfervations, dis-je, nous font voir une inégalité qui monte à 24 minutes, tantôt additive, & tantôt fouftraétive; car on voit que le 2 2 Juillet, ce Satellite avoit une inégalité fouftractive, de 1° 27", Jupiter étoit à 104 58" du Taureau, éloigné du Soleil, de 784 25°. Le 23 d'Août, _ elleétoitder 2'19", elle a augmenté jufqu’au mois d'Octobre, & pendant tout ce mois elle a été de 22 minutes, enfuite elfe a diminué, puifque le 2 de Novembre, elle n’étoit. que de 21 minutes, & le 1 4 de Décembre, elle n’étoit plus que de 14 minutes; enfin on voit qu’elle avoit changé de déno- mination le 24 de Février 1716, jour auquel on a déter- miné pour la derniére fois la durée de FEcliple, & l'inégalité étoit de 8° 47" additive. Si on fuppofe que la moindre durée des Eclipfes de 171 $ ait été telle, qu’on l'a obfervée le 17 Septembre, & qu'elle n'ait changé en 17 1 6, que proportionnellement à l'approche de Jupiter aux Nœuds, comme elle a fait depuis le 17 Sep- tembre 1715 jufqu'au 24 Février 1716, & qu'on calcule fuivant cette hypothele les autres obfervations de 1716, on verra que le 21 Avril l'inégalité étoit de 24’ additive, ue le 22, Juillet elle étoit encore de 18 minutes, que le 17 Septembre elle n'étoit plus que de 1'21", & qu'enfin le 19 Oétobre elle avoit changé de dénomination, & étoit de 1 3 minutes fouftractive, & on pourroit conclurre que la période de cette inégalité a été de 1 4 moisun peu plus grande que le retour du Soleil à Jupiter, & qu'elle a été fouftractive pendant la moitié de cette période, & pendant l’autre moitié elle a été additive. Les obfervations de 1727 & de 1740, _ confirment la même inégalité, quoiqu'elle ait été un peu différente à égale diftance de Jupiter au Soleil. Je n'entre . ga . P! CE A "7 point dans le détail de ces obfervations, j'ai même pañfé fort ï ij 7o MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE légérement fur les obfervations de 1715, parce que je les aï rangées dans une Table avec le lieu de Jupiter & fa diflance au Soleil au temps de chaque obfervation, de forte que l'on verra d'un coup d'œil la progreflion de cette inégalité, & on fera plus aifément la comparaifon des obfervations de 1715 & der716, avec celles des autres années, que je ne le ferois par un long raifonnement. Heures des Immerfons syntirée Lieu Diflance Inégalités. | 4e Jupiter | de Jupiter vü du Soleil.| au Soleil. Dates des Immerfions & Emerfions. & Emerfions. 1715. Juiller.. .22|12h38/,,8/...Im. | 1° 37"—|1f 10458) 78425 SV20|ts r2272108%met|t 4047 Ur 1108 71108 NEA Août... 23/12 Satin 9 envir. Em. fr EAN 20°. .1nk | 1e x lin. F Em. Sas ntme I 5] Im. 2 2 19 —|1 13 $2 |106 16 2—|1 14 30 |r12 28 Septembre 1 B API Adi —| 1,16: 4641288713 Oëtobre.. 1|14 CA SMMÉONN G6—|r118 58 156 53 12—1\1 19 37 |163 20 169 ei NJ — mm UJ LA ne fe Lo D 1 ND V9 © Obn 0 buy mn A -b 1 Novembre 2|14 Décembre 15| 8 1716. Février... 17! 7 52 49... ANNÉE AS IS. le ARE |2300"23 Avril....21| 7.52 30...Em.|24 21 + S..25 | 2 Juliet. 22m M6 Mn. (19857) 2013630 2 tr ÉRURE = 11 +|1 29 46 Septembre 17|11 48 3...1Im. | 1 21+|2 18 26 Oétobre.. 19/11 24 1..:lm. [13 11 —{|2:2r 11 1727. Août . 15/14 21, 74m. |12 33 —|iu7tsu Septembre 911 29 3...1m. Octobre. + 4 5 1740. Février. U1]125 30. Em: 28+|2 7 37 19|:6 $1 36:4:En.l171024+]|2 go 26 : 26 26 Mars... 4 = \O ++ kb bb Le) R N DES SCtrENCESs, 71 Je ne m'arrêterai pas non plus à faire remarquer que cette inégalité na aucun rapport avec la feconde inégalité du premier Satellite ; il fuffit de voir qu’elle a commence entre la Conjonction & la Quadrature, mais beaucoup plus près de la quadrature, & qu'elle a été tantôt additive & tantôt fouftraétive, au lieu que la feconde inégalité du premier commence toüjours à l'Oppofition, & elle eft toûjours ad- ditive. Mais nous n'avons vû jufqu’ici que des obfervations faites lorfque Jupiter étoit dans le même Signe du Zodiaque, : & nous n'oferions rien conclure, que nous n'ayons confirmé cette inégalité par des obfervations faites dans d'autres points. Examinons celles qui peuvent être à l'abri de la variation de la durée des Eclipfes, pour ne pas confondre une erreur qui viendroit du défaut de cette connoïflance, avec la pré- tenduë inégalité du Satellite, Pour cet effet, je confidere qu’on peut fuppofer les Nœuds des Satellites, fixes ; car’ on ne leur a encore reconnu aucun mouvement, & mon Oncle à prouvé que ceux du fecond Satellite font encore au même endroit déterminé par les premiéres obfervations de M. Caffini. J'examine enfüite dans. quelle erreur on peut tomber en fe fervant des obfervations éloignées de 2 $ degrés des Nœuds, en fuppofant l'inclinaifon variable, à laquelle on à attribué jufqu'à préfent la variation de la durée des Eclipfes, & je trouve qu’on ne peut fe tromper que de 2° 23"; car par la Table de la demi-durée des Eclipfes de M. Caffini, qui fuppofe F'inclinaifon de 24 55, & le demi-diametre de l'ombre dans lOrbe du fecond Satellite, de 64 1616”, on trouve à cetté diftance la demi-durée des Eclipfes, de 1 27'21", &en fuppofänt le même demi- diametre de l'ombre & l'inclinaifon, de 4432", on la trouve de 162458". Mais fi on fuppofe le demi-diametre de Tombre, de 64 28", tel que mon Oncle a déterminé dans les Mémoires de l’Académie de l’année 1 729, l'erreur fera moindre ; car on trouvera la demi- durée dés Eclipfes à la même diflance de 2 $ degrés, de 1h 2 7'49"; dont la différence avec celle que nous avons trouvée par la Table de M. Caffini, 727 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE n’eft que de 28 fecondes. Ainfi on peut employer dans cette recherche, fans aucun fcrupule, les obfervations éloignées des Nœuds de 2 ; degrés. Le nombre en eft aflés grand, & nous prouve, à n'en pouvoir douter , que le fecond Satellite a été fujet à une inégalité fynodique, tantôt additive & tantôt fouftraétive. Mais il y a apparence que cette inégalité efk compofée de plufieurs, & qu’elle vient de différentes caufes, parmi lefquelles le mouvement de la lumiére, ou la caufe de la feconde inégalité du premier Satellite peut être comprife ; car on voit cette inégalité changer de fituation, comme fi la caufe dont elle eft produite, alloit de la Conjonétion à la Quadrature, de la Quadrature à l'Oppofition, ainfi de fuite. ‘ Elle eft nulle dans des années à des endroits où elle eft la plus grande dans d’autres années, & dans des temps elle eft additive à la diftance de Jupiter au Soleil, où elle eft fouf- tractive dans d’autres temps. Cependant on voit qu'elle fe remet à peu-près à la même fituation au bout de douze années. Sera-ce un mouvement dans la caufe de cette inéga- lité, comme nous avons dit ci-deflus, ou cette inégalité fera-t-elle compliquée d’une autre inégalité de douze années, femblable à celle du premier & du quatriéme Satellites? C’eft ce que nous n'avons pas pu encore découvrir, & à quoi nous nous propofons de travailler. REFLEXIONS s DAT S MAS CNE IN CES 73 RE EOLUE XX AO N:S SUR LES OBSERVATIONS DU BAROMETRE, … Faües für les Montagnes du Puy-de-Dome, du Mont d'Or & du Canigou. . Par M. Cassini DE THURY. à p:: 1 plufieurs obfervations que divers Phyficiens & + Mars À Aflronomes nous ont données fur la hauteur où le 1740. Mercure refle fufpendu dans le Barometre, à diverfes éléva- tions fur le niveau de la Mer, il ne s'en trouve que très-peu de faites fur des Montagnes très-élevées ; elles font cependant les plus propres pour connoître l’étenduë de notre Atmof- phere, & les différentes raréfactions de Fair à diverfes hau- teurs fur la furface de la Terre. Ayant donc eu occafion cette année de parcourir les Mon- tagnes d'Auvergne &c des Pyrénées, nous avons eu attention, M. le Monnier le Médecin & moi, de faire ces expériences = {ur plufeurs Montagnes, dont les hauteurs avoient été dé- terminées géométriquement, & dont nous nous contente- . ons de rapporter celles que nous avons faites fur ces trois Montagnes, les plus élevées de toutes celles que nous avons … parcouruës. Une des plus célébres, & en même-temps des . plus anciennes obfervations qui ayent été faites fur la hauteur où le Mercure refte fufpendu dans le Barometre à différentes élévations fur fe niveau de la Mer, eft celle qui eft rapportée dans le Traité de l'Equilibre des Liqueurs de M. Pafcal, faite à Clermont en Auvergne, & au Puy-de-Dome, qui eft une des Montagnes les plus élevées de cette Province, à la diftance —… d'environ deux lieuës de Clermont. Suivant cette obfervation, … qui fut faite le 1 9 Septemb. 1 648, le Barometre étant mis-en MD Men. 1740. a 74 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE expérience dans le Jardin des Minimes, qui eft le plus bas lieu de cette Ville, l'on trouva que le Mercure refloit fufpendu à la hauteur de 26p° 312 dans deux Tuyaux de verre de pareil diametre, longs de 4 pieds, &c fcellés hermétiquement par un bout ; & ayant réitéré cette expérience deux autres fois, la hauteur du Mercure fut toûjours trouvée la même. On arrêta fixement un des Tuyaux pour pouvoir obferver de moment en moment pendant toute la journée s'il y arri- veroit du changement, & l'on porta l'autre Tuyau fur le haut du Puy-de- Dome, élevé au- deflus des Minimes d’environ $°0 toifes ; y ayant fait les mêmes expériences qu'aux Mi- nimes, il fe trouva qu'il ne reftoit plus dans le Tube que la hauteur de 23 pouces 2 lignes de Vif-argent, ce que l'on réitéra cinq fois très-exaétement, en diverfifrant l'expérience, & la faifant tantôt dans une Chapelle qui étoit alors au haut de la Montagne, tantôt à l'abri, tantôt au vent, tantôt en beau temps, tantôt pendant la pluye & les brouillards qui y furvenoient, & l'on trouva toûjours la hauteur du Mercure la même, de forte que la différence par rapport à celle que Yon avoit trouvée aux Minimes, eft de 3 pouces 1 ligne +. On fit la même expérience en defcendant de la Montagne, toûjours avec le même Tuyau, le même Vif-argent & le même vaifieau,.en un lieu appellé le Fond-de{'arbre, & on trouva par trois fois la hauteur du Mercure de 2 5 pouc. ol. On a rapporté toutes ces circonftances pour faire juger de la précifion de cette expérience, qui femble ne laiffer rien àdefirer, fi cen’eft qu'on connoiïfle exactement la hauteur du Puy-de- Dome, tant au-deflus du niveau de la Mer, que fur la Ville de Clermont, dans l'endroit où font placés les Minimes, & que M. Perrier a jugé être d'environ 500 toifes, fans avoir marqué fi c’eft par eftime feulement, ou par quelques mefures géométriques, dont il ne donne point le détail. Dans le Voyage de la Méridienne, qui fut fait en 1700, lon mefura fucceffivement les hauteurs des Montagnes des Pyrénées & de l'Auvergne au-deflus du niveau de la Mer, on détermina celle du Puy-de-Dome de 8 1 2 toifes. A l'égard DES SCIENCES. 75 de’la différence de la hauteur du Puy-de-Dome & des Mini- mes, on ne l'avoit point déterminée géométriquement, & on s’étoit contenté de la déduire des obfervations du Baro- metre faites à Paris & à Clermont, comme on le peut voir dans les Mémoires de l'Académie de l'année 1705, où on la trouva de 571 toiles. Nous jugeimes donc non feulement devoir déterminer la hauteur du Puy-de-Dome au-deflus de Clermont , maïs auffi devoir répéter les mêmes expériences qui furent faites en 1648. Nous avions porté de Paris plufieurs Tubes de different diametre, que M: l'Abbé Nollet avoit choifis, & même remplis de Mercure, ayant bouché les orifices de chaque Tuyau de maniére que le Mercure fembloit ne pouvoir en fortir; mais quelqu'attention que nous ayons euë, il nous a été impoflible dans le cours du voyage de les conferver dans le même état. Nous eflayâmes donc de les remplir avec les mêmes foins, & de la maniére que M. du Fay dit avoir apprife d'un Vitrier Allemand pour rendre tout à coup les Barometres lumineux. Nous choisimes parmi nos Tuyaux des Tubes à peu-près de même diametre, mais de différente longueur. Après avoir _mettoyé le Mercure, en Île faifant pafler par un cornet de papier, dont le trou étoit le plus petit qu'il étoit poffible, Yon en verfoit dans le Tuyau une très- petite quantité, & Ton y introduifoit un fil de fer. Ayant allumé dans un ré- chaud plufieurs charbons ardents, l’on approchoïit peu-à-peu de la flamme l'extrémité du Tuyau remplie de Mercure, juf- qu'à ce qu'enfin on l'exposit entiérement , alors le Mercure “ bouillonnoit, & l'on voyoit paroître des bulles d'air qui s'évanouifloient en tournant continuellement le Tuyau, & en enfonçant ou en retirant alternativement le fil de fer juf- qu'à ce qu'il ne parût aucune bulle d'air ; on faifoit refroidir enfuite le Tuyau, & on y introduifoit une autre quantité de Mercure, & ainfi fucceffivement jufqu’à ce que le Tuyau fût entiérement rempli : on portoit ces Tuyaux dans un lieu K ï 6 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE obfeur, &en balançant le Mercure, l'on remarquoit fi l'efpace vuide paroifloit lumineux. Cette préparation, qui étoit néceflaire pour rendre les Tubes lumineux, le devenoit auffi pour les expériences que nous voulions faire ; car fans examiner quelle eft la caufede cette lumiére qui paroït dans le vuide du Baroméetre, & fi cette lumiére eft une preuve certaine qu'il né refte aucune bulle d'air dans le Tuyau, il eft cependant certain que puifque cette préparation rend les bulles d'air beaucoup plus fenfibles, il eft beaucoup plus facile de les faire fortir du Tuyau, & par conféquent le Tube doit être plus exactement chargé & purgé d'air que par les préparations ordinaires ; aufli nous avons toûjours remarqué que le Mercure refloit fufpendu à une plus grande hauteur dans les Tuyaux chargés au feu, que dans les autres qu’on avoit remplis à l'ordinaire. Pour juger de la hauteur abfoluë du Mercure, l'on avoit marqué fur le Tuyau même, vers les deux extrémités, deux points éloignés l'un de l'autre d’une diflance connuës & l’on rapportoit à ces deux points fa ligne de niveau du Mercure & la hauteur au-deflus du niveau, on rémédioit par-là aux erreurs qui fe trouvent dans les graduations ordinaires, dont aucunes ne s'accordent enfemble. Toutes ces préparations étant faites, on renverfoit'les Tuyaux dans un même vafe rempli de Mercure, & l'on re- marquoit fi la ligne de niveau étant la même, la hauteur du Mercure fe trouvoitauffi la même danstousles Tuyaux, & nous avons toûjours trouvé que les Tuyaux chargés au feu s’'accor- doient tous très parfaitement, quoique de différent diametre - & de différente longueur, & nous ne remarquions des diffé- rences que dans les Tubes chargés à la maniére ordinaire. Pour pouvoir comparer nos obfervations à celles de M. Perrier, nous jugeàmes devoir les faire de même que lui dans le Jardin des Minimes ; M. le Monnier fe chargea de les faire aux Minimes, tandis que j'irois à la Montagne du Puy-de Dome. Le 3 Août je partis de Clermont à 5h du matin, j'arrivai x de Sr AE res d répit Eu Bit SGA E INI CES. 7 à 862 à une Montagne dont la figure reffemble beaucoup à celle du Puy-de-Dome, & comme elle n'eft point fi élevée, & qu'elle fait encore partie de celle du Puy-de-Dome, on Yappelle le petit Puy-de-Dome; ayant mis un Tube de 29 pouces dé longueur en expérience, je trouvai la hauteur du Mercure de 24P0 1-6, Je montai enfuite au fommet du Puy-de-Dome , où jarrivai à ot, & le Tube étant mis en’expérience, je trouvai la hauteur du Mercure de 23P° 8!<., différente de 7! de celle qui avoit été trouvée au petit Puy-de-Dome. - Le temps étoit fort ferein, & comme j'avois fait porter un Quart-de-cercle, je pris des angles horifontaux, & j'ob- fervai la hauteur du Mont d'Or, de 0° 40' 30". M. le Monnier m'ayant communiqué l'obfervation qu'il avoit faite aux Minimes à .9P, où il trouva la hauteur du Mercure de 27P° 0!, l'on trouva par la comparaifon de cette obfervation aux deux précédentes, la différence de hauteur du Mercure qui répond à la différente élévation des Minimes & du petit Puy-de-Dome, de 2p° 81-6, & labaiflement du Mercure qui répond à la différence des-hauteurs des Minimes & du fommet du Puy-de-Dome, de 3p° 31, plus grande de 2 lignes que celle que M. Perrier a trouvée. - Nous jugeimes devoir répéter la même expérience. Le 6 Août M. le Monnier partit de Clermont avec un des deux Tuyaux que l’on avoit comparés la veille, il s'arrêta au Village appellé le Fond-de-Farbre, où M. Perrier avoit fait l'expé- rience en defcendant de la Montagne, fans avoir marqué le _ dieu de fa fttion. M. le Monnier la fit à une Croix qui eft à quelque diftance du Village, & il trouva la hauteur du Mercure de 2 5° 7122; il monta enfuite au petit Puy-de- Dome, où il trouva la hauteur du Mercure de 24Pp° 4! € ; enfin il arriva à 9h au fommet du Puy-de-Dome, il y trouva la hauteur du Mercure de 2 3 p° 9! 12° 4 … La différence de hauteur du Mercure du petit Puy-de- Dome au grand Puy-de- Dome réfulte de-cette obfervation de7!2. La différence de la Croix du Fond-de-Farbre au K iij 8 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE haut du Puy-de-Dome fera de 1 Po 101, plus grande de # de ligne que celle que M. Perrier a trouvée au Village, dont le terrein eft un peu plus bas que celui de la Croix. J'allai à 9" + au Jardin des Minimes avec deux Tuyaux de différente longueur, je trou vai la hauteur du Mercure avec Je Tuyau comparé, de 27P°0l4, & avec l'autre de 27P°ol£., Le temps étoit fort ferein à Clermont, mais lon ne voyoit point la cime du Puy-de-Dome, qui étoit enveloppée dans un brouillard fort épais qui fe diflipa peu -à-peu, & à 10h ‘on voyoit très-diftinétement le Signal que nous y avions fait élever. M. le Monnier, après la premiére expérience, avoit laiffé les Tuyaux au haut de la Montagne, & employa le refte de la journée à herborifer. À 3h il recommença l'expérience, le brouillard étoit alors diflipé, & le Ciel étoit fort ferein, il trouva la hauteur du Mercure de 23po 8122, H repañfa par le petit Puy-de-Dome, où il trouva la hauteur du Mercure de 24P° 31; & quoique les hauteurs abfoluës fuffent différentes, les différences furent trouvées les mêmes. Le temps fut affés conflant & uniforme à Clermont, & le Mercure fe trouva toute la journée à la même hauteur. Par la comparaifon de lobfervation faite aux Minimes, avec la premiére faite au Puy-de-Dome, l'on trouve la différence de hauteur du Mercure de 3p° 31, moindre de -#- de ligne que celle que lon a trouvée la premiére fois, mais toüjours plus grande que celle que M. Perrier a obfervée. - Cette différence de 2 lignes entre ’obfervation de M. Perrier & la nôtre, paroït d’abord jetter quelque doute fur l'exactitude des obfervations faites de part & d'autre, cepen- dant fi l'on fait attention aux circonftances dans lefquelles ces obfervations ont été faites, on verra qu’elles peuvent fe concilier parfaitement, & donner quelqu'idée de la maniére dont fe fait la plus grande ou la plus petite preffion de f'air que l’on obferve dans le Barometre dans des temps différents ; fi cela vient de quelque variation qui furvient dans fa hauteur de l Atmofphere, ou fr, fans aucun changement dans l’At- mofphere, le même volume d'air devient plus pefant, DES SCIENCES. 79 On confidérera d’abord que dans l'expérience de M, Perrier la hauteur du Vif argent à Clermont étoit de 2 6ps 31, plus petite de 9 lignes que celle que l'on a trouvée en dernier lieu , ce qui prouve que la colomne d'air étoit plus pefante dans notre obfervation que dans celle qui fut faite en 1 648, On trouve auffi que le Mercure a defcendu de 3° 31-8 dans l'intervalle entre les Minimes & le haut du Puy-de-Dome, au lieu qu'en 1648 il ne defcendit que de 3P° 111; d'où il fuit qu'un pareil volume d’air étoit plus pefant dans l'ob= fervation de 1739 que dans celle de 1 648 ; car d'étenduë de l'air depuis Clermont jufqu'au fommet de la Montagne, étant chargé d’une plus grande mafle, devoit être pluscom- primé, & faire équilibre avec un plus grand volume de Mer- cure, comme il eft arrivé dans l'expérience. L'on pourroit auffi rendre raifon de cette différence, en fuppofant que de plus ou le moins de hauteur du Barometre & les différents changements qu'on y obferve, viennent de quelque caufe extérieure qui augmente le poids de fair, comme on le . remarque dans le temps du brouillard, où le Mercure fe tient fufpendu à une,plus grande hauteur (ce qui eft confirmé par la feconde expérience que nous avons faite au Puy-de- Dome) dans ce cas l'air contenu dans le même efpace, doit y pefer davantage que lorfqu’il eit dégagé de cette matiére qui en augmente la pefanteur ; ainfi de quelque maniére que l'on conçoive que fe faffent les variations que l’on obferve dans la hauteur du Barometre, le Mercure a dû defcendre d’une plus grande quantité dans notre obfervation que dans celle de M. Perrier. 1 eft à remarquer que parles obfervations faites à Clermont depuis le 1°* Août 1649, & en 1650 & 165 1, la plus grande hauteur du Mercure y a été trouvée le 26 Février 1 65 1 de 2601112, à peu-près comme dans notre obfervation, ce qui prouve qu’elle a été faite dans un temps où la colomne d'air étoit plus pefante, L'on voit auffi que la différence entre la hauteur du Mercure fur le haut de la Montagne, dans les deux obfervations, a été de 6 lignes, au lieu qu'à Clermont elle a été de 8 lign. +; d'où il fuit que 8o MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE Les variations que l’on obferve dans le Barometre, font plus petites, plus les lieux font élevés fur la furface de la terre; & en effet, dans les expériences qui furent faites à Clermont en 1649, 1650 & 1651, la plus grande hauteur du Mer- cure a été trouvée de 26P9 r1l4, & la plus petite de 2 $P° 8, avec une diflérence de 1 P° 314 feulement ; au lieu qu'à Stokolm, qui eft au niveau de la Mer, cette différence a été obfervée pendant les mêmes années de 2P9 212, ayant été trouvée le 8 Décembre 1649 de 28p° 71, &le 6 Mai 1650 de 26P° 412. I eft vrai que par les expériences faites en même temps à Paris, cette différence n’a été trouvée que de 1P° 3! de même qu'à Clermont ; mais cette différence obfervée à Paris, eft beaucoup plus petite que celle que l'on y obferve ordinairement, car elle fut trouvée en 1738 de 1p° 5!; l’on verra aufli par la comparaifon de notre obfer- vation avec celle qui fut faite à Paris le même jour, où on trouva la hauteur du Mercure à 7", de 28r°ol+, que l'air y étoit auffi plus pefant que dans les temps ordinaires, quoi- qu'il ne fût pas cependant à la plus grande hauteur. Après avoir déterminé la différence de hauteur du Mer- cure dans l'efpace compris entre Clermont & le fommet du Puy-de-Dome, il ne reftoit plus que de connoître la hauteur perpendiculaire du Puy-de-Dome au-deflus des Minimes ; nous mefurâmes pour cet effet dans la place de Jod une bafe de 1 69 toiles 4 pieds, & ayant obfervé des deux extrémités les angles de pofition par rapport au fignal du Puy-de-Dome, nous déterminâmes la diftance de l'extrémité feptentrionale de la bafe au fignal de 48 34 toifes. La hauteur du fommet de la Montagne ayant été obfervée de 6° 37° 0", on trouve la hauteur perpendiculaire du Puy-de-Dome au-deflus: du niveau de la place de Jod, de s 57 toifes,, la différence: de hauteur du petit Puy-de-Dome au grand Puy-de-Dome ayant été trouvée de 1° 0° 0", on aura la hauteur du petit Puy-de- Dome au-deffus de {a place de Jod, de 473 toiles, & la diffé- vence de hauteur du petit Puy-de-Dome au grand Puy-de- Dome, de 84toif. à laquelle répondent 7 lignes de différence de L DES SCIENCES. Qr de hauteur du Mercure ; la place de Jod eft de même niveau que l'Eglile & la Maifon des Minimes, mais plus élevée que le Jardin d'environ 6 pieds. Suppofant donc les différences de hauteur établies ci-deflus, & la hauteur du Puy-de-Dome au-deflus du niveau de la Mer, de 8 1 2 toifes, l'on aura la hauteur des Minimes ou de Clermont fur le niveau de la Mer, de 25 5 toiles, celle du petit Puy-de-Dome de 728 toiles. La différence de hauteur du Mercure, obfervée à Paris & au haut du Puy-de-Dome étant , felon notre obfervation, de 4p° 4!, fi lon y ajoûte 4l+ düës à la hauteur de POP- fervatoire fur le niveau de la Mer, on aura 4p° 814 de dimi- nution du Mercure, qui répondent à 8 r 2 toifes de hauteur fur le niveau de la Mer, ce qui s'accorde mieux à l'expé- rience faite fur la Montagne de la Cofte, plus élevée que le Puy-de-Dome, de 38 toiles, où cette différence fut trouvée de 4p° 10! ; au lieu que par l'obfervation de M. Perrier faite au Puy-de-Dome, comparée à celle de Paris, cette différence étoit de 4po 1 1!, plus grande d’une ligne, quoique la diffé- rence des hauteurs füt plus petite, ce que feu M. Maraldi, dans les Mémoires de l’Académie de 1703, attribuë avec raifon aux réductions que l’on a été obligé de faire aux obfervations de Paris où il n'y avoit point eu d’obfervations correfpondantes. Après avoir fini nos obfervations au Puy-de-Dome, nous _ jugeâmes devoir en faire de femblables au Mont d'Or, qui eft la Montagne la plus élevée de l'Auvergne, & dont fa hauteur perpendiculaire fur le niveau de la Mer, eft de 1048 toiles. Cette Montagne eft fituée au Sud-oueft de la Ville de Clermont, àda diftance d'environ huit lieuës ; le chemin qui y conduit, n'eft praticable que pour les mulets & les che- _ vaux. Avant que d'arriver à la Montagne, l'on trouve une … efpece de Vallon où eft le Village des Bains ; les côteaux de ce Vallon font formés par différentes pointes qui s’élevent . infenfiblement jufqu'à la pointe la plus élevée, qui eft celle du Mont d'Or, & qui fe préfente dans l'enfoncement du Mem. 17404 -L 82 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Vallon, le Village eft éloigné d’une lieuë du fommet de Ia pointe la plus élevée. En face du Village, du côté du cou- chant, l’on voit une pointe affés finguliére par fa figure, & appellée la Montagne du Capucin, à caufe d’un Rocher qui en a la reflemblance ; du côté de l'Orient lon voit une chüûte d'eau qui fort par un tuyau, & qui eft la fource de la Riviére de Dordogne. Dans le Village font ces Bains fi renommés, & que lon dit avoir été conftruits du temps de Jules Céfar. Ce lieu femble n'être deftiné que pour les malades, il y a fort peu d’autres habitants, le terrein ne pouvant leur fournir aucune nourriture, de quelqu'efpece que ce foit, & ce n'eft que le concours des malades pendant été qui fournit à la fub- fiftance de ceux qui y habitent, & à qui appartiennent les maifons. Pendant l'hyver, lorfque la neige eft tombée, ce lieu eft impraticable, & pendant l'été il eft prefque toüjours couvert de brouillard. I y a deux différents Bains, dont l'un s'appelle le Bain de Céfar & autre le grand Bain. L'eau du Bain de Céfar femble bouillonner, & ayant enfoncé dedans le Thermometre de M. de Reaumur, le Mercure eft monté à 36°; l'ayant plongé enfuite dans le grand Bain, où l'eau fans bouillonner eft fimplement chaude, il eft monté à 3 5°+, de forte qu'il y a apparence que c’eft {a même fource, & que le bouillonnement n'eft pas tant caufé par la chaleur que par leau qui, en s'élevant, forme cette apparence qu'on remarque auffi dans diverfes Sources d’eau froide , lorfqu'elles. font abondantes. Nous fimes l'expérience du Barometre le 9 Août au Vil- lage avec les mêmes Tuyaux qui avoient fervi aux expé- riences du Puy-de-Dome, nous trouvâmes la hauteur du Mercure, de 24 pouces 1 0 lignes Z, le Thermometre étoit à 25 degrés. Nous partimes enfuite du Village pour aller au haut de la Montagne, il faifoit beaucoup de brouillard, & il tomboit de la pluye. Nous pouvions aller à la pointe la plus élevée par deux chemins différents; le premier, en fuivant le Vallon qui regne depuis le Village jufqu'au pied de la pointe, DES SCIENCES. 83 & qui eft d'environ une demi-lieuë, fon peut par ce chemin monter à cheval jufqu'aux deux tiers de la Montagne, mais comme M. le Monnier vouloit remarquer en chemin faifant les Plantes dont il devoit faire enfuüite différentes collections, nous jugeàmes dévoir fuivre le côteau occidental, & mon- ter fucceflivement par différentes pointes jufqu'à la plus élevée. Nous montâmes d’abord à la pointe du Capucin, & le Tube étant mis en expérience, nous trouvämes Ja hauteur du Mercure de 23 pouces 7 lignes €, le T'hermo- metre étoit à 1 o degrés +; nous fuivimes enfuite un chemin fort efcarpé, & après cinq heures de marche, interrompués paï les temps de repos & par les remarques que M. fe Mon- nier faifoit, nous arrivames à la pointe la plus élevée, Ie brouillard étoit toûjours fort épais, il tomboit de la pluye, & le Thermometre étoit à 5” + au-deflus de la congélation, la hauteur du Mercure fut trouvée de 22p° 5!. Nous defcen- dîmes enfuite de la Montagne par un autre chemin, & nous revinmes au Village après avoir employé le refte de la journée à ramaffer des Plantes. Comparant l'obfervation faite à la Montagne du Capucin avec celle que nous avions faite au Village avant que de partir, où elle fut trouvée de 24p° 10/7, lon aura {a différence de hauteur du Mercure au Village & à a Montagne du Capucin, de rP°31+, & celle du Village à la pointe du Mont d'Or de 2p° 517. Le ro le temps étoit encore plus affreux que la veille, nous fimes l'expérience au Village, & la hauteur du Mercure fut trouvée la même que la veille ; le brouillard fe diffipa un peu vers le midi, & l’on découvroit la pointe & même le Signal que nous avions fait élever au haut de la Montagne. Nous chérchâmes aux environs du Village, dans le vallon dont nous avons déja parlé, un lieu propre pour y mefurer une Bafe, & nous ne pûmes trouver qu'une prairie de 85 toifes de Tongueur, que je mefuraï ; la pointe du Mont d'Or paroïfloit élevée de 9° 37, & celle du Capucin, de 17° 40". Connoiffant par le moyen de la petite bafe, les rapports des diflances, Ton trouve {a hauteur du Mont d'Or au-deffus Li 84 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE du niveau de la bafe, qui eft à peu-près le même que celaï du Village, de s 1 2 toiles, & celle du Capucin, de 224 toiles environ ; car je ne prétends avoir déterminé qu'à peu-près ces hauteurs abfoluës. Suppofant la hauteur du Mont d'Or au-deffus du niveau de la Mer, de 1 048 toiles, l'on trouve que celle du Village des Bains eft de s 36, celle du Capucin, de 760 toiles. L'on remarquera ici que quoique la Montagne du Capu- cin foit moins élevée que celle du Puy-de-Dome, cepen- dant la hauteur du Mercure y a été trouvée moindre qu’au Puy-de-Dome, ce qui prouve bien ce que nous avons déja avancé ailleurs, que les variations de la hauteur du Mercure ne dépendent pas feulement de la différente longueur de la colomne d'air, mais encore des différents accidents qui en augmentent le poids. I falloit donc que la pefanteur de fair fût moindre dans l’expérience faite au Capucin, que dans celle du Puy-de-Dome; & en effet, fi Yon compare les ob- fervations faites à Paris le 9 Août, où la hauteur du Mercure fut trouvée de 27po 8l-Ë, avec celle que l'on y a obfervée le jour de l'obfervation du Puy-de-Dome, où on la trouve de 28po ol +, lon verra que fair étoit plus pefant ce jour-là que le o Août ; d’un autre côté, fi l'on compare a différence de hauteur du Mercure, obfervée au haut du Mont d'Or, avec celle qui a été obfervée à Paris le même jour & à là même heure, l'on aura une différence de hau- teur, de 5p° 31. Y ajoûtant 4 lignes pour la réduction de TObfervatoire au niveau de la Mer, l'on aura po 7! 4 de différence de hauteur du Mercure, prife au bord de la Mer & à la pointe du Mont d'Or. Suivant la progreffion établie en 1703, il devoit y avoir une différence de 5P° 71, ce qui s'accorde aflés exactement. Feu M. Maraldi, dans les Mémoires de l’Académie de 1705, rapporte une obfervation faite par le R. P. Sebaftien Truchet, au haut du Mont d'Or, le 8 Juin de là mêémeannée, par laquelle ïf trouva Îa hauteur du Mercure, de 22p° 21, moindre de 3 lignes que celle que nous avons trouvée ; la DES :SCTIENCES. $ hauteur du Mercure à Paris étoit ce jour-là de 27P0 012, Comparant enfemble ces deux obfervations, & faifant toutes ‘les réductions néceffaires, l'on trouve que la différence de hauteur du Mercure au bord de la Mer & au Mont d'Or, eft de $r°114, ce qui s'éloigne de 4 lignes de celle qui réfulte de la progreffion établie, & differe du réfultat de notre obfervation. Nous féjournâmes plufieurs jours au Mont d'Or, dans Tattente d'untemps plus favorable pour répéter l'expérience, & y faire diverfes autres obfervations que je m'étois pro- polées ; mais le temps ayant toûjours été conftimment Je même, nous recommencâmes l'expérience avec le temps ordinaire, c’eft-à-dire, avec de la pluye & du brouillard. Le 11 au matin, nous partimes du Village des Bains, & nous étant égarés dans la Montagne, à caufe de l’épaifeur de la brume qui ne permettoit point de diflinguer les objets les plus proches, nous n'arrivâmes que vers les 3 heures au fommet de la Montagne, le brouillard étoit alors moins épais, il tomboit de Ja pluye, & failoit beaucoup de vent, la fatigue que nous avions efluyée, la pluye, le vent & le froid qu'il faifoit alors, nous ayant rendu le corps & les mains prefque impotentes, nous ne pûmes faire l'obfervation que très-impar- faitement, nous trouvâmes la hauteur du Mercure, de 2 2po 412 Nous redefcendimes promptement de la Montagne, & nous arrivames au Village avec un temps plus favorable, le Ciel s'étant éclairci, l'on apperçût pendant quelque temps. le Soleil. Nous fimes l'expérience en arrivant au Village, & nous trouvâmes la hauteur du Mercure, de 24P° 816, moin- dre de 112 que nous l'avions trouvée les jours précédents, & dont il eft fort aifé de découvrir la caufe, puifque l'air devoit être alors moins pefant que dans le temps du brouil- lard; ce jour-là la hauteur du Mercure à Paris étoit de > 7 Po: 7!, moindre de 1! 1 que le 9 Août, conformément à ce: que nous avons trouvé. Ce moment de beau temps ne dura pas, & le lendemain. le temps étant toûjours le même, ayant perdu toute efpérance E iij 86 MÉMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de changement dans une faifon qui commençoit à être fort avancée pour cés pays-là, étant appellé d’ailleurs à mes obfervations ordinaires, je me trouvai obligé d'abandonner cette Montagne, avant d’y avoir pu faire aucune obfervation des objets que l'on devoit découvrir de cette élévation, qui, comme nous l'avons déja remarqué, domine fur toutes les autres Montagnes d'Auvergne. Je pourrois rapporter ici diverfes autres expériences faites dans le cours de notre Voyage fur d’autres Montagnes moins élevées, mais comme elles n’ont rien de particulier, je vais paffer tout de fuite à celles que nous avons faites au Canigou. Cette Montagne eft fituée au Sud-oueft de Perpignan, la diftance de la Tour S.t Jacques de cette Ville à la pointe la plus élevée, a été déterminée de 23946 toiles, & fa hauteur perpendiculaire au-deflus du niveau de la Mer, de 1447 toiles; elle peut être regardée comme une des plus élevées des Pyrénées, & l'eft en effet de toutes celles que l'on a déterminées jufqu’à préfent. Pendant plus de la moitié de l'année, cette Montagne eft couverte de neiges, & pour lors fon abord eft impraticable, mais pendant l'Eté & au commencement de l’Automne, on peut monter très-facile- ment jufqu'à la pointe la plus-élevée. M. de Plantade eft le premier qui ait fait l'expérience de la hauteur du Barometre au Canigou, & quoiqu'il y ait apporté toute l'exaétitude dont il eft capable, il étoit cepen- dant très-utile de la confirmer par une feconde, d'autant plus que fes obfervations lui avoient donné lieu à quelques remarques aflés finguliéres, & qui par conféquent ne pou- voient être trop prouvées. Je ne rapporterai point ici les fingularités & détails de ces expériences, mon Pere en ayant déja rendu compte à l'Académie ; il me fufhra de dire qu'il y avoit à defirer dans l'expérience de M. de Plantade, que lon eût fait au bord de la Mer des obfervations correfpondantes aux fiennes, c'eft-à-dire, dans le même temps, &avec des Tubes comparés; car autrement on ne peut. déduire avec exactitude la diffé- DES SCIENCES. 7 rence de hauteur du Mercure au bord de la Mer & au lieu où l'on a fait l'obfervation ; de plus une feule expérience ne fufifoit pas pour reconnoitre f1 les variations de la hauteur du Mercure étoient aufli grandes fur les lieux élevés que celles que l'on obferve au bord de la Mer, dans différents temps; remarque que nous avions déja faite, mais qui avoit befoin d'une nouvelle confirmation; enfin il étoit fort avantageux de connoître le degré du Thermometre dans le temps que Ton feroit l’'obfervation du Barometre, car il doit y avoir un fi grand rapport entre les différentes hauteurs du Mercure dans le Barometre, & les différents degrés de condenfation ou de dilatation de l'air, que cela nous a donné lieu de penfer à une expérience concernant le Thermometre, qui étoit de fçavoir fi le terme de l'eau bouillante ou de la congélation, étoit le même au bord de la Mer que fur des lieux élevés ; quelques expériences que nous avions déja faites fur des Mon- tagnes peu élevées, nous avoient fait remarquer quelques variations, mais il étoit néceffaire de les rendre plus fenfibles en choififfant des lieux très-élevés ; tous ces différents motifs nous parurent fufhfants pour devoir recommencer cette expérience. Nous remplimes pour cet effet plufeurs tubes de différent diametre, de la maniére que nous avons déja expliquée; & comme dans Îles expériences que l’on a faites jufqu'à préfent, lon sétoit contenté d'employer des Barometres chargés à la maniére ordinaire, ce qui doit caufer une différence dans la hauteur abfoluë du Mercure, & femble n’en devoir pro- duire aucune dans les différences de hauteur, nous en char- geàmes quelques-uns fans feu, nous fimes l'expérience avec tous ces tuyaux plongés dans un même vafe; la hauteur du Mercure fut trouvée la même dans tous les tuyaux chargés au feu, & moindre de 2 lignes dans les tuyaux de même diametre & longueur, chargés à l'ordinaire. Nous laïflâmes à M. l'Abbé de la Caille, qui devoit faire les obfervations correfpondantes au bord de la Mer, deux tuyaux de deux efpeces, c'eft-à-dire, l'un chargé au feu, & l'autre à la maniére ordinaire, 83 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Tous nos préparatifs étant faits, nous partimes, M. le Monnier & moi, de Perpignan le 2 $ Septembre, nous fui- vimes le chemin que plufreurs perfonnes nous avoient indi- qué, nous paflämes par Villefranche, où nous fimes l'expé- rience avec un Tube de 2 lignes de diametre; la hauteur du Mercure fut trouvée de 26P° 712, elle fut trouvée dans le Tuyau capillaire, de 26p° 61 -£. De Villefranche, nous montämes à l'Abbaye S.t Martin du Canigou : cette Abbaye eft fituée au couchant du Canigou, fon élévation n’eft en- viron que le tiers de celle du Canigou, elle eft bâtie fur le roc, & de tous côtés lon ne voit que des précipices affreux, fon expofition finguliére rend ce lieu fort fréquenté pendant l'Eté, & l’on croit être monté au Canigou lorfqu'on eft venu à cette Abbaye, & c'étoit certainement le Canigou des gens qui nous avoient indiqué ce chemin ; nous fimes l'expérience le 27 à 8 heures du matin dans l'Abbaye, le Thermometre étoit à 12 degrés, & la hauteur du Mercure fut trouvée de 24p° ro!, De l'Abbaye lon peut monter tout droit à la pointe du Canigou, en fuivant un chemin qui n’eft guére pratiqué que par les chevres, & comme nous avions avec nous des bêtes chargées de nos équipages, & des provifions nécefaires pour la vie, nous fûmes obligés de defcendre de l Abbaye pour prendre le chemin qui conduit à Pra-de-Mouillou. Après quatre heures de marche nous arrivämes à une plaine où nous nétions guére plus élevés qu'à l'Abbaye ; nous avions à notre gauche la pointe occidentale & la plus élevée du Canigou , devant nous {a pointe orientale moins élevée que l'autre, & il falloit que nous montaffions à cette pointe pour en redefcendre enfuite, & traverfer une efpece de Vallon qu’on appelle le Clos du Canigou, & qui forme la féparation des deux pointes; ce chemin n'étoit praticable que pour des gens de pied, de forte que nous fümes obligés d'y laifer nos chevaux & nos équipages. Après neuf heures de marche ar des chemins efcarpés, nous arrivimes au pied de Ja pointe orientale & dans cette efpece de Vallon dont nous avons parlé; 3 à x DES SCIENCES. 9 parlé; comme il faifoit nuit, & que le brouillard étoit fort épais, nous ne pouvions guére juger à quelle diflince nous étions encore de la pointe occidentale, nous y palmes la muit, & le brouillard s'étant diffipé peu-à-peu, nous conti- nuâmes à diftinguer les objets qui nous environnoient. Nous découvrimes d’abord un étang au milieu du Vallon, & dans d'enfoncement du Vallon plufieurs monceaux de glace & de . neiges, élevés en forme de rochers ; ces rochers de glace font en tout temps à l'abri des rayons du Soleil, de forte que cette glace ne peut jamais fondre, il ne peut s’en former ! que toutes les années de nouvelle, & comme elle n'eft point d'abord fi dure que l’ancienne, ni même de couleur fem- bhable, les gens du pays croyent que cette différente couleur * de la glace dénote quelque chofe de particulier dans l’eau qui la forme, & vous aflürent qu'au Canigou l’on voit de f la glace verte, blanche & de toute autre couleur. Le lendemain nous montâmes en deux heures de temps au haut de la pointe la plus élevée, où nous trouvâmes les reftes de la Pyramide qui fut élevée en 1701 ; dans l'axe » de fa Pyramide lon avoit placé une Croix de fer, & nous - fûmes fort furpris de la voir dans le même état que fi elle » fortoit des mains de l'ouvrier, c'eft-à-dire, fans aucune appa- … rence de rouille ni de diminmtion dans fa mafñe. Le temps étoit fort calme, & le T'hermometre étoit à 5° au-deflus de a congélation ; nous fimes l'expérience le 28 à 9h du matin, & la hauteur du Mercure fut trouvée dans le Tuyau Chargé au feu, de.....:. 2opo 211 Chargé à fordinaire, de:.. 20 o Tuyau capillaire, dé... 19 11 vb » Nous répétâmes l'expérience d'heure en heure jufqu'à midi, — nous pe remarquâmes ‘aucune variation fenfible dans les hauteurs. HI ES 0 FO : | — Nousdefcendimiesenfüite de la pointe, & M. le Monnier, _ enchemin faïfaut ÿexanina [es Plantes que produit cette | Montagne, quine font pas bondéntes dans la partie la plus Mem. 1740. . M b. oO MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE élevée, le fond du terrein n'étant que de pierrailles & de roches. Nous ne fümes point tentés de reprendre notre premier chemin, nous envoyämes un de nos guides donner de nos nouvelles à l'Abbaye, où on nous attendoit, & nous pré- férèmes de fuivre un chemin qui nous étoit inconnu. Nous fuivimes la gorge de la Montagne & le courant d'un: ruifleau dont la fource fe forme au clos du Canigou, & qui fe réunit à la Tech ; en cinq heures de marche nous arri- vâmes à un Village appellé Filiol, & qui eft aû pied de fa Montagne. Les habitants de ce Village vont chercher de Ia glace au clos du Canigou, en defcendent avec des mules chargées, & vont enfuite la diftribuer dans les pays circon- voifins ; ainfi lon peut juger combien ce chemin ef préfé- rable à l'autre, & c'eft certainement le plus court & le plus beau chemin que l'on puifie fuivre pour aller à la pointe du Canigou, puifque l’on peut monter aifément à cheval juf- qu'au pied de la pointe, & qu’il ne faut plus que deux heures. de marche pour être à la pointe du Canigou. Nous repartimes le lendemain de Filiol, & nous arrivämes. de très-bonne heure à Perpignan. M. l'Abbé de la Caille nous communiqua les expériences. qu'il avoit faites au bord de la Mer le 28, aux mêmes heures que nous les avions faites à la pointe du Canigou. LeTher- mometre étoit à 19°, il faifoit beaucoup de brouillard dans. la plaine & au bord de la Mer, & le vent étoit aflés violent ; il trouva la hauteur du Mercure dans le Tuyau Chargé au feu, de ....... 28p0 112, Chargé à l'ordinaire, de... 27. 217 + If continua ces expériences jufqu'à midi, & ne remarque: aucune variation fenfible dans les hauteurs. Comparant l'obfervation faite au Canigou avec celle qui a été faite au bord de la Mer, l’on trouve une diminution de hauteur du Mercure dans le Tuyau Chargé au feu, de ........ 7P° 111 Le Chargé à l'ordinaire, de... 7 114 à DAEUS) SI CIE NICE S. 1 . Si au lieu de fe fervir de lobfervation directe faite au bord de la Mer, l'on eût déduit cette différence des obfer- vations faites à Paris, où la hauteur du Mercure fut trouvée le même jour de 27p° 812; l'on auroit trouvé une différence entre la hauteur du Mercure obfervée à Paris & au Canigou de 70 61-5 ; y ajoûtant 41+ düés à fa hauteur de l'Obfer- vatoire au-deflus du niveau de la Mer, l'on aura la différence de hauteur du Mercure prile au niveau de la Mer & à la pointe du Canigou, de 7P° 10!+, ce qui ne differe que de trois quarts de ligne de ce qui réfulte de l'obfervation directe, cé qui fait voir que quoique l'obfervation immédiate foit toûjours préférable aux autres, l'on peut cependant employer très-utilement des obfervations, quoique faites dans des pays _ éloignés & fous des climats différents, pour en déduire fa différence de hauteur des unes par rapport aux autres, & même les rapporter au niveau de la Mer. + Nous avions commencé nos expériences à Perpignan le 27 Septembre, ones faifoit dans un lieu élévé au-defus du niveau de la Mer, de 21 toifes, & nous les continuâmes jufqu'au 12 du mois fuivant, je vais les rapporter ici. A Perpignan. A l'Obfervatoire de Paris. Éc27 SEPTEMBRE là 18" 04 2er | à"... 2r ol 28 Therm.à 14. 64 ../27 1021 ..4:.., 27 82 29 vent violent... 12... 2 HIT ETS a Ane MONO OL up UE RÉ 271010 MAS IOCTORRE NX MINE 41.2 28117 PS 0 D7ANITIES Abe 2 228 IA dati A7vUNE 7 srsreresdig 28 1-2l.....:.: 27 10% SUbfaibdu vEnt. . 2 Lea ane vole 27) 8 DITANS) DEL 2 ce MANIP TANT JE OT A Th te 11 Therm.à16.. 12.,..27 Sr UDe lee tete rt 16 DAT ISSU et 27 ALOL Palette 27 0 0 En comparant nos obférvations faites à Perpignan, avec celles qui ont été faites à l'Obfervatoire, l'on peut remarquer que deswariations dans les hauteurs du Mercure obfervées ÿ M ji } (4 92 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE dans ces deux lieux, font à peu-près les mêmes ; que [a plus. grande différence de hauteur du Mercure obfervée à Per- pignan, a été du 8 au 9 Oétobre, où la différence a été trouvée de 212, précifément de même qu'elle fe trouve à. Paris entre les obfervations faites le même jour, de forte que Ton pourroit dire que les variations que l'on obferve dans fa. hauteur du Mercure, font à peu-près les mêmes dans les lieux qui font également élevés fur la furface de la Mer, quoique ces lieux foient fort éloignés les uns des autres. L'on remarquera auffi que la plus petite hauteur du Mer- cure obférvée à Perpignan, a été le 29 Septembre, où le: vent étoit très-violent, ce qui confirme ce qui a déja été: prouvé par plufieurs expériences que le vent influoit beau-- coup fur la hauteur du Mercure dans 1e Barometre. - La premiére expérience que nous avions faite au Canigou, nous avoit donné la différence de hauteur du Mercure ai niveau de la Mer & au Canigou, mais elle ne nous avoit pas appris fi les variations font les mêmes au niveau de la Mer & au bord de la Mer; il falloit donc faire une feconde expé- rience dans une température d’air différente de la premiére, il nous reftoit de plus l'expérience concernant le Thermo- metre, que nous avions remife au fecond voyage, & que nous, différâmes en attendant un changement dans le temps. Nous conftruisimes deux lhermometres à Mercure, & nous primes fur ces deux Thermometres le degré de congé- lation & le terme de l’eau bouillante, & nous comparämes la graduation de ces Thermometres à celle du Thermometre- à Efprit-de-vin, conftruit fur les principes de M. de Reaumur.. Nous confervâmes dans une bouteille la même eau, & le même vafe où elle avoit bouilli, pour que toutes chofes. fuflent égales de part & d'autre. M. le Monnier partit le 4 Octobre de Perpignan, & arriva. le 6 au fommet de la Montagne. Le temps étoit fort ferein, . Ie Fhermometre expofé au Soleil, étoit à 20°; il fit, en arrivant, l'expérience de la hauteur du Mercure, qu'ib trouva de 20p0 21 =, à demi-ligne près de celle que l'on avoib m4 va NES 9 CTI EN CL.E’s. ‘60 trouvée la premiére fois. Ayant fait bouillir enfuite l'eau qu'it avoit portée, il y.trempa fon T'hermometre conftruit à Per- pignan, le Barometre étant à 28p0 2!, &il trouva que le terme de l’eau bouillante étoit plus bas de 1 5° de la gradua- tion de M. Delifle, qui répondent à 9° environ de celle de M. de Reaumur. Il enfonça enfuite la boule du Fhermometre dans de la neige ramaflée & expofée au Soleil, & le Mercure defcendit au même point qu'à Perpignan. Il réfulte de cette expérience que la différente pefanteur de l'air influë fur {a: chaleur de l’eau bouillante, & nullement fur la congélation. J'allai fur le bord de la Mer le même jour que M. le Monnier faifoit l'expérience au Canigou, le temps étoit fort beau, calme, & il ne faifoit point de brouillard comme la premiére fois, la hauteur du Mercure fut trouvée de 2 8po 31-2, plus grande de près de 2 lignes que la premiére fois, H paroït d’abord fingulier que-la hauteur du Mercure ait été trouvée plus grande dans un temps ferein que par un temps de brouillard, mais l'on pourroit dire auffi que dans la pre- miére obfervation une caufe contraire, telle que le vent qu'il failoit alors, avoit eu plus d'action fur le Mercure pour le faire defcendre, que l'augmentation du poids de Fair pour le faire monter. Par l'obfervation faite à Paris le 6 Oétobre, où Ja hauteur du Mercure fut trouvée de 27p° 10!£, l'on voit que la hau- teur du Mercure étoit plus grande le 6 Oétobre que le 4 du même mois, de près de 2 lignes, comme onle trouve dans notre expérience, ce qui prouve ce que nous avons avancé ailleurs, que les variations qui arrivent dans une partie de notre Atmofphere, fe font reflentir prefque dans toute fon étenduë. Je pourrois faire remarquer auffi ce que nous avons déja dit à l’occafion des obfervations du Puy-de-Dome, que la hauteur du Mercure ayant été plus grande au bord de Ja Mer le jour de la feconde expérience faite au Canigou, par conféquent la différence de diminution de hauteur du Mer- i . qure a dû être aufli plus grande dans l'intervalle compris | M ii. MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE entre le bord de la Mer & le Canigou, comme nous le donne l'expérience de 8 Po ol +2, | Ainfi l'on voit que toutes nos expériences faites fur ces trois Montagnes différentes, s'accordent aflés entr'elles pour les conféquences que nous en avons tirées, Elles prouvent, 1. Que la variation de hauteur du Mercure dans le Ba- rometre, correfpondante à la différente élévation des lieux, ne fuit aucune progreffion uniforme, y ayant près d’un pouce de différence dans l’obfervation faite au Canigou, de celle qui rélultoit de la progreffion établie en 1703, & fondée fur des obfervations faites fur des Montagnes peu élevées, & aucune des autres hypothefes que l’on a faites depuis pour pouvoir concilier les obfervations, n’a pu fatisfaire aux diffé- rences qui fe rencontroient dans plufieurs obfervations dont on ne pouvoit foupçonner l'exactitude. 2. Que la variation de la hauteur du Mercure, corref- pondante à une même différence de hauteur, n'eft pas toû- jours uniforme, puifque les variations ne font pas de la mème quantité dans les deux termes de comparaïfon, & que leur quantité dépend de l'élévation des lieux au-defus du niveau de la Mer, & qu'elle eft moindre dans les lieux élevés qu'au bord de la Mer; ce qui eft prouvé par les obfervations faites au Puy-de-Dome & au Canigou, où la hauteur du Mercure a été trouvée la même dans les deux obfervations différentes que nous avons faites, & encore la même que celle queM. de Plantade a trouvée dans l'expérience qu'il a faite dans une autre faifon. 3.° Que les variations que l'on obferve dans le Barometre, peuvent ètre cauftes par les différents accidents qui arrivent dans la température de l'air, c’eft-à-dire, par le brouillard, la pluye, le vent, &c. 4 Que l'on peut comparer très-utilement les obferva- tions faites dans des lieux éloignés & fous des climats un peu différents, puifque les variations que nous avons obfervées dans les hauteurs du Mercure, ont été prelque les mêmes DES SCIENCES. CE que celles que l’on à obfervées à Paris. Je ne crois pas qu'on doive trop étendre cette propofition, & lorfque les climats feront tout-à-fait différents, je crois qu'il pourroit fe faire que les variations füuffent entiérement contraires les unes aux autres ; mais il étoit bon de faire remarquer que dans la France ces variations font aflés uniformes, fi l’on diftingue les accidents qui peuvent arriver dans la température de l'air, & qui ne doivent pas être communs à tous les lieux, tels qu'un orage où un ouragant, comme il paroït par lobfer- vation faite à Perpignan le 2 9 Septembre, où le vent étoit très-violent ; Ia hauteur du Mercure a varié, du 28 au 2 Septembre, de près de 2 lignes, tandis qu'à Paris elle n’a prefque point varié. | 9 J uillet 1740 96 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE MOVE NR DE PRET PMLR ER QUELQUES RACINES A LA MANIERE DES ORIENTAUX. Par M: GEOFFROY. | we TUDE de la Botanique nous donne la connoiffance des Plantes, les expériences réitérées nous en font con- noître les propriétés dans les Arts, & les vertus dans la Médecine; ainfi l'on ne fçauroit répéter ces expériences avec ‘ trop de foin, fi l’on veut être certain des ufages auxquels on P ; les deftine. Le hazard a fouvent beaucoup de part aux dé- couvertes; fouvent aufli la prétenduë reffemblance de la racine, de la fleur, ou de quelqu'autre partie de la Plante avec certaines parties du Corps humain, a paru être une in- dication fufhfante pour les appliquer aux maladies dont ces parties étoient affectées. Ce préjugé a rarement été confirmé par le fuccès, mais enfin il l'a été quelquefois, & cela fufht pour qu'on foit autorifé à faire des tentatives nouvelles, à vérifier les faits avancés par les Auteurs anciens. La difficulté confifte fouvent à reconnoître les Plantes dont ils ont vanté les propriétés; même à reconnoiître celles qui nous arrivent toutes préparées des Pays étrangers, ou fimplement altérées par leur tranfport, par le climat, par leur culture. Nous avons vü depuis un petit nombre d'années, le Café varier de figure, de couleur, d’odeur & de goût, quoique ce {oit le fruit d'un Arbre reconnu pour être con- ffamment le même. Depuis que les Mofcovites ont établi leur Commerce dans les Etats les plus éloignés de lAfie, nous avons trouvé des variétés très-fenfibles dans la Rhubarbe: le tranfport de cette racine, plus prompt par la Mofcovie que par les Caravanes du Levant, femble être feul {a caufe de ces différences, puifque celle que nous tirons du Nord, ‘QUE DES SCIENCES. 9 qui ne paroït pas d'abord être {a même que celle du Levant, feulement parce qu’elle eft plus nouvelle, prend en la gardant & en la laïffant fécher quelque temps, la même couleur, {a même confiftance & le même goût que celle qui nous vient les Bâtiments de Marfeille. On nous apporte auffi du Levant des racines qu’on ne peut reconnoïtre fans cette connoiflance qu'une longue ha- bitude donne aux Botaniftes, parce que ces racines font déguifées par les préparations que les Orientaux leur ont données; préparations qu’il faut prefque toûjours deviner, fr Jon cherche à les imiter. Le Sulep des Turcs eft de ce nombre. On a découvert en 'examinant avec attention, que c'étoit une efpece d'Orchis ou de Saririon, qui emprunte fon nom de la figure extérieure de fa racine, & qui n’avoit été mile par les modernes au nombre des Plantes ufuelles & dans la clafle des Alexitaires, qu'à caufe des vertus fortifrantes & reftaurantes que les An- ciens lui ont attribuées, fans doute à caufe de la figure de cette œacine, qui reflemble à deux bulbes accolées l’une à l’autre. Perfuadé qu'on pourroit préparer le Salep des Turcs avec les Orchis qui croiflent & qui font aflés communs dans notre climat, fi l'on pouvoit trouver l’art de leur donner la même tranfparence, j'ai fait plufieurs eflais, & tenté d'employer fur d'Orchis ce que j'ai trouvé décrit dans le Fafciculus Amæ- aitatum exoticarum de Kempfer, au fujet de la préparation du Ginfeng de la Chine. Selon cet Auteur, on lui donne de la tranfparence en faifant macérer cette racine fraîche dans de l'eau de Ris froide, pendant trois jours, puis l’expofant genfuite à la vapeur de cette eau dans des vaiffleaux fermés. Alors, dit-il, fi lon fait fécher cette racine ainfi préparée, elle en devient plus dure, de couleur roufle & tranfparente comme une réfine, ce qui eft, ajoûte-t-il, une marque de fa bonté. ff Tout le Ginfeng de la Chine n’a pas cette tran{parence, & j'en conferve dans ma collection d'Hiftoire Naturelle un morceau apporté autrefois par les Ambafladeurs de Siam, Mem. 1740, SN 98 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qui n'a point acquis en vieilliflant, ni la couleur, ni Ja tranf- parence du Ginleng préparé ; ainfi ce n'efl pas le temps qui lui donne cette qualité, comme il la donne quelquefois à d’autres racines pleines de fuc & à des fibres très-déliées, qui étant bien féches, ont beaucoup moins d’opacité, & reffem- blent à peu-près à de la Corne. Si l'on tentoit cette pratique fur le Ginfeng du Canada, il n’y a point de doute qu'on ne parvint à le rendre femblable au Ginfeng Chinois préparé. Je l'ai eflayé fur quelques racines de Plantes ombelliferes, & fur-tout fur celle du Cherui, que j'ai rendu tranfparente en la faifant fimplement bouillir dans de l'eau commune, & l'expofant enfuite à l'air pour la faire fécher. J'ai encore obfervé que cette racine étrangere que nous tirons de l'Arabie, & que par cette raïfon on nomme Coflus Arabicus, pourroit bien être une efpece de racine qui ap- procheroit de l'Enula. Au moins notre Eula choifie, bien nourrie, féchée avec foin & gardée long-temps prend-elle Vodeur du Coflus, &.n'a-t-elle plus cette forte odeur qu'ont toutes les racines d’Enula que nos Herboriftes nous apportent des Montagnes. Peut-être pourroit-elle remplacer le Coflus, fi Yon cefloit d'en apporter du Levant. A l'égard du Sakep des Turcs, c'eft une racine blanche ou rouflâtre, felon qu'elle eft plus ou moins récente : les Orientaux nous l’envoyent tranfparente & enfilée avec un fil de coton. Elle eft en ufage pour rétablir les forces épuifées. C'eft un reflaurant pour les Phthifiques, & on la donne avec fuccès dans les diffenteries bilieufes, felon Degnerus qui a publié deux Differtations fur cette maladie, & qui fe fervoit alors du Salep des Turcs, comme d'un remede, pour ainfi dire, fpécifique. Quoi qu'il en foit, j'ai obfervé que c'étoit un remede adouciflant, reprimant l'acreté de la lymphe, & d'un affés prompt fecours dans plufieurs cas; qu'ainfi on le pourroit mettre en ufage dans les campagnes, & fur-tout dans les endroits où les Orchis croiffent en abondance. On pourra l'employer en boifion ou autrement, dans les maladies dont je viens de parler, fon efficacité y eft DES SCIENCES. 9 plus affürée que dans les autres cas pour lefquels on l'em- ployoit autrefois. Mais il femble que cette racine réuffit mieux, préparée comme le Salep des Turcs, que donnée fans préparation, & voici comment je les ai imités. Si l’on tente de faire fécher les racines ou bulbes de nos Orchis, avant que d’en avoir enlevé l'écorce, on n'y réuflit pas; elles reftent mollafies, bruniflent, & s'humectent trop facilement à la moindre humidité, Mais après avoir choifr lés racines les plus nourries, j'en fais ôter la peau, je les fais jetter dans l'eau froïde, & après qu'elles y ont féjourné quel- ques heures, je les fais cuire dans une fuffifante quantité d'eau, je les fais égoutter, puis je les enfile pour les taifler fécher à Y'air, choififfant pourçette préparation un temps fec & chaud. Elles deviennent tranfparentes, elles reflembient à desmor: ceaux de Gomme Adiagant, & demeurent très-dures. On lés peut conferver faines tant qu'on voudiaà, pourvi:qu'on les tienne dans un lieu fec; au lieu que des racines qu'on a fait fécher fans cette préparation, s’humectent, comme je d'a dit, & moïfiflent pour peu que de temps foit pluvieux.pen- dant plufieurs jours. 159 : Aiïnfi préparées, on peut les réduire en poudre auffi fine que l'on veut; on en prend le poids de 24 grains qu'on humeëte peu-à-peu d'eau bouillante, da poudre s’y fond en- ) tiérement , & forme un mucilage qu'on peut étendre par ébullition dans unechopine ou trois. demi-feptiers. d'eau, & l'on eft le maître de rendre cette boiflon plus agréable en y ajoütant le Sucre &quelques:legers parfums: cette poudre eut auffrs’allier au lait qu'on a confeillé aux malades affectés maladie de poitrine. Si l’on -évapore {ur .des afhettes de fayence l'eau dans Ja- quelle on a fait cuire,ces racines, il y refte am extrait vif queux dont odeur mélangée :eft la mème que! celle d'une Prairie en fleurs, quand on y'pafle au-deflous du vent. On pourroit :aufli la comparer à celle du Melilot. La fleur de VOrchis:qui commence à (fe faner, a auffi icette-odeur. mr nl SIA BUG N ï 6 Aoùt 1740. 300 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALr SUR LA TRISECTION DE L'ANGLE. Pa M. Nicozer. A maniére dont on confidere dans ce Mémoire Îa ueftion de la Trifeétion de l’Angle, fait trouver une infinité de cordes dans le Cercle, qui prifes trois à trois, expriment toüjours les trois Racines de l'Equation du 3. degré à laquelle ce Probleme fe réduit. La premiére de ces trois cordes divife un Arc en trois parties égales ; la feconde divife le complément de cet Arc à 360 degrés aufli en trois parties égales ; & la 3.m° corde égale à la fomme des deux autres, divife encore en trois parties égales l'Arc compolé de la circonférence entiére du Cercle, & de l'Arc qui appaitient à la premiére de ces trois. cordes. ST Cette 3.m€ corde a encore une autre propriété, c'eft que celle de fon complément à 1 80 degrés, divife auffr en trois parties égales l'Arc, complément au demi-Cercle de celui qui eft divifé en trois parties égales par la premiére des trois cordes, & par-là on voit que lorfque l'on peut divifer un Arc en trois parties égales, on divife de même fon com- plément à deux Angles droits & fon complément à quatre Angles droits. L'expreffion algébrique & indéterminée que l'on trouve dans ce Mémoire pour chacune de ces trois cordes, & pour celle qui appartient à l'Arc qui doit être coupé en trois parties égales par une de ces cordes, font quatre formules générales, dans lefquelles fi l’on donne telle valeur que l'on veut à l’indéterminée qui y entre, on trouve auffi-tôt & la corde de Arc qui doit être coupé en trois parties égales, & les trois cordes qui font les Racines de l'Equation du 3.me- degré que fournit le Probleme relativement à ce cas. Cette maniére de confidérer la queftion, n’eft que l'inverfe: DES SCIENCES, tof du Probleme de la Trifeétion de l'Angle ; mais par a conf- truction qu'elle fournit pour déterminer la corde de l'arc qui doit être coupé en trois parties égales, elle donne le moyen d'exécuter un mouvement continu qui réfout le Probleme direct : elle a encore cet avantage, qu'elle fait découvrir une propriété nouvelle du Cercle. Cette propriété eft, que deux cordes égales ou inégales, faifant entr'elles & à la civ- conférence du Cercle un Angle de r 20 degrés, cet Angle Jeff toûjours coupé en deux également par une 3.m€ corde ï ru eft égale à la fomme des deux autres, & ces trois cordes nt toûjours Îles trois Racines de l'Equation du 3.me degré, qui réfulte de la Trifeétion de Angle. _Æ& Soit le demi-Cercle ADECGB, &la corde DG _ parallele au diametre 4 2. On demande le point Æ fur l'arc DE CG, par lequel tirant la corde Z£C parallele à DG, cette corde EC divife Tarc donné DEC G en trois parties égales, * Soit fuppofé DE=EC— CG, fi Yon mene da centre O es rayons OF, OC, qui coupent DG en M & NN, les trian- gles OEC, OMN, feront ifofceles & femblables ; de plus … l'angle OEC eit par la fuppofition égal à lang O ED, & eft alterne à l’angle DE ; les triangles D ME, G NC; font donc aufli fofceles, & femblables aux deux premiers. MC OMAN UE Nate ré + Silon fait AB— 24, DG—b, MD—DE—EC … —CG—GN—», on aura MN=b— 2x); cela poé, Is triangles fmblables ODE, DEM, donneront OD (a) “… .DE(x):: DE(:). EM—"#*, donc OM—a—"#*, n à Eé a & les triangles femblables OM N, O EC, donneront OM(a— +). MN(b—2x) :: OE(a). EC(x); d'où l'on tire x— 3 aax-+aab=—=o, qui eft l'Equation du Probleme. RON BIT At ANT 1 À Fig, Is go2 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoÿALE CORO LLATRTES II. Il fuit de cette Equation, que fi L—= 24, qui ef Ja plus grande valeur que à puifle recevoir, cette Equation deviendra x?—3 aax4-24a 0. Mais lorfque = 24, l'arc ACB qu'on veut divifer en trois parties égales, eft de 180 degrés, dont le tiers.eft 6o degrés; or.on fçait que la corde de 6o degrés eft égale au rayon, il faut donc que dans ce cas x — 4 0 foit, un divifeur de. l'Equation N— 3aax+2a —=o. La divifion étant faite, il vient xx+ax—2aa—0, qui donne *X=— a V{faa+2aa) =—24a ia Les trois racines de l'Equation font donc alors x —4, x a, x——24a, dont deux font égales & pofitives, & la troïfiéme négative, égale aux deux pofitives. La premiére, pofitive, éft AC =— a, qui divifé le demi- Cercle AC B en trois parties égales. La feconde, pofitive, eft AD —4, qui divife l'autre demi-Cercle ADB ‘en trois parties égales. La troifiéme, négative, eft AB—-— 24, qui eft égale aux deux pofitives, & qui divife en trois parties égales l'arc compolé de 3604 1 80d = $ 401, TE Si = 4av2= AK, qui éft la corde de 90 degrés, Equation deviendra x}— 3 a a x + a? V2=0. On fçait que la corde A Æ' de 30 degrés éft 3, il ‘ aV3—+ AE et faut donc que x — = = o foit un divifeur de TEquation. , : PE à L Var fe La, divifion étant faite, on trouve xxx x = ) a— av} 2 V2 ada—1aav; è LOI) golf SE (és PER te 2 6aav; a—av;3 (5a+av;) 6 mp ES CERN per PNR LCA re re EE + JE Ru Lo Les —æaa—auvz —=o, qui donne x = DES SCIENCES. 103 ; V3— trois racines de l'Equation font donc alors x — 2"3—< V2 4 PE sb da à 23, dont deux font pofitives, V2 & la troïfiéme, négative, égale aux deux pofitives. ayY3;—a T) le quart de cercle AK en trois parties égales. La fconde, pofitive, eft AF— a ya, qui divife Fare de Cercle A F BK, qui eft le complément de l'arc 4, en trois parties égales. . La troifiéme, négative, égale aux deux pofitives, eft AG — RCA Pre qui eft la corde de 1 so degrés, & V2 divife en trois parties égales arc compofé de 3 604 +- god = 4501 | IV. Si — 0, l'Equation devient x?— 34ax—=0, qui donne x—o & x— + 4 V3, les trois racines de lEqua- tion font done alors x—=0, x —4ay3 & X——aV3. Dans ce cas, des trois racines il y en a encore deux pofi- tives, qui font les cordes du tiers de deux arcs, compléments Jun de l'autre à 360 degrés, & la troifiéme, négative, égale aux deux autres ; car avant que la corde 4 foit zero, on peut Ra confidérer comme la corde de l'arc Aa infiniment petit, alors da premiére racine pofitive fera la corde du tiers de l'arc infiniment petit Aa, cette corde fera donc infiniment petite, & fera exprimée par x—o. Le complément de cet arc infiniment petit eft 3 60 degrés, dont le tiers eft 120 degrés, la feconde racine pofitive x — 4 y 3—AT exprime cette corde, & la troifiéme racine négative et AH=—= QV3 ——0— a V3, qui divife en trois parties égales Farc compofé de 3 604-+-od— 3604, x—= a V2, &x— La premiére, pofitive, eft AE — qui divife REM AR Q U'E V. Par les trois cas que l’on vient d'examiner, on voit que les cordes égales AC, AD, chacune de 60 degrés, & Fig. 3. yo4 MEMOIRES DE L’'ACADEMIE ROYALE le diametre 42, font les trois racines de l'Equation pour le premier cas. .… Que fi l'on tranfporte le diametre 4 B en AG, de ma- niére que l'arc BG foit de 3 0 degrés, & les cordes AC, AD, en AË, AF, de maniére que les arcs CE & DF foient auffi de 30 degrés, alors les trois cordes AE, AF, AG, font les trois racines de l'Equation pour le fecond cas; & tranfportant encore la corde AG en AH, de maniére que Yaré GA foit de 30 degrés, & les cordes AE, AF, en Aa, A1, de maniére que les arcs £a, F1, foient auf de 30 degrés, les cordes Aa, A7, AH, font les trois racines de l'Equation pour le troïfiéme cas. CoROLLAIRE: I. VI De- il fuit que fi l'on fait un affemblage de trois lignes inflexibles AC, AD, AB, les deux premiéres égales chacune au rayon du Cercle, & la troifiéme égale au dia- metre, faifant avec chacune des deux un angle de 60 degrés, que l'on fafle tourner cet affemblage fur le point À, comme pivot, dans quelque fituation que cet aflemblage fe trouve, la corde À G fera toûjours égale à la fomme des deux cordes AË, AF, & ces trois cordes repréfenteront dans tous les cas les trois racines de l'Equation générale de la Trifeétion de l'Angle x}—3aax+aab—o. Quoique cette vérité fuive de la Remarque précédente, en voici une démonftration qui eft générale. VII Soit nommée la corde 4 Æ, x, & la corde EC —8BG—DF, 7; en menant le diametre £ T & les cordes AT, CT, des compléments des arcs £ A, EC, on aura AT=V(4aa—xx) & CT = V{4aa— 77). Mais par une propriété du Cercle on fçait que AC x ET=AE x CT + EC x AT, ce qui eft en termes analytiques 244 x V/{/4aa—7) + x V(4aa—xx) où 2aa—7V(4aa—xx) = x V{4aa— 77) d'où l'on tire 7 —=+:V#{/4aa—xx) —21xV3=CE=BG—=DFE ; > Si maintenant on mene le diametre DO FH & les cordes AH, 1 | DES SctENCESs To5 ; AE, FH, des compléments des arcs DA, DF, on aura AHVDH*—DA')=av} & FH=V(DH'—DF*) = Vlaaa—aa—;5xx rx V{izaa—3xx)] = Vl3aa— xx Hav(zaa—#xx)] — x + y{3aa—ixx). Orpar la même propriété du Cercle, on a DH x AF— AD x FH+4 DF x AH, donc FH+ DFx AH 2 : 2 FE, ce qui eft en termes analytiques AF — ax[£x+V/saa—iss)] av; x[iV/4aa— x) —21sv;] = ix+iVsaa—?txx) +EV/i2aa—3xx) ai Lx =V(3aanixx) —5xx; on a aufh AG =VAB'—BC)=VÎ4aa—}#x(gaa—xx) —Èxx +ixpf/i2aa—3xx)] = V[3aa—ixx + xV(3aa — xx) | —=ix+ {3 aa—?xx). On a donc AE=x, AF=V(;aa—îixx) — 1x, & AG—Ix + V{3aa—?xx) =AE+AF. Ce quil falloit pre- miérement démontrer. VIII. Mais de l'Equation généralex?—3aax+-aab—o, : : eo (.: aax — » # s 5 —, AMIE S N - aa aa aa me, V(zaa—#xx) — 2x, &V(3aa—#xx) Hix, font quatre formules générales, dont la premiére exprime la corde d'un arc quelconque, depuis o jufqu'à 1 80 degrés, : la feconde exprime la corde du tiers de cet arc, la troifiéme | Ja corde du tiers de fon complément à 180 degrés, & Ia quatriéme exprime une corde égale à la fomme des deux ; précédentes. Ces trois derniéres formules expriment aufi les trois … racines de l'Equation générale de la Trifeétion de l'angle, . x —zaax+aab—o. LD Si l'on fuppofe x——+a, on aura 8 — = 4, l'Equation générale fera x?— 3 aax + a —o, dont les trois Mem. 1740. n'@ 106 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE 28e ee + u — racines font #— 340, x— zaV4s ++4aZ=0, & xH+ra V4 +za— 0. E'o'R © L'r'aATR EMI IX. Il fuit de ce que à — PACÉERR y quex:b::x aa 3 3aax— * é he ————::aa.z3aa— xx: +aiia——, On a aa a z d xx donc la proportion + a : x :: La — 4e Si donc la corde À £ /x) de l'arc À E eft donnée pour une des racines de l'Equation générale, & que l'on demande Tarc À /1, que la corde À E divife en trois parties égales, il fera aifé de trouver par la proportion précédente la corde AH de l'arc qu'on cherche ; car il n’y a qu'à divifer les deux rayons OA, O B en deux parties égales aux points Æ & L, mener au point Æ le rayon À Æ, du point £ abbaifer la perpendiculaire £ P fur le diametre, prendre LQ = PA, tirer Q / parallele à Æ£Æ, qui rencontre À £ prolongée en Z. Si du rayon A7, & du point À, comme centre, on décrit Yarc / A, il coupera la circonférence AC B au point A qui détermine la corde 4 H, dont l'arc eft coupé en trois parties égales par la corde AE. Car le finus verfe AP— <= —QL, donc AQ=—=}Èa za — —, & les Triangles femblables LA E, QA1, donne- ront KA (ta): AE(x)::QA(Èa——=©) : AI(b) —AH, zaax—x} donc L— , Ou x}— 3 aax+aab—0, qui eft l'Equation du Probleme. C'otr'oirtr. A mn RtEL OT HE X. Il fuit de cette conftruction qui fait trouver la corde AH de arc triple de l'arc À £, dont a corde eft donnée, que fi c'eft la corde 4/7 qui eft donnée, & qu'il faille trouver la corde A£ du tiers de Farc AA, on pourra le faire par 1 DM NIS US" C'I EN CE S | 107 un mouvement continu aflés fimple, de cette maniere. Soient divifés les deux démi-rayons A & LO, en parties . égales, en commençant de 4 en P, & de L en Q. Soit prile la ligne XC, perpendiculaire fur le diametre, - & qui puifle tourner fur le point Acomme centre, de XC en ÂE. - Soit aufli prife la ligne ACF, égale à la corde donnée _ AH paflant par le point €, & qui. puifle auffr tourner fur À le point 4 comme centre, de ACF en AE]; que de plus en ajufle à extrémité F de cette ligne, uné autre ligne ou regle FP, qui puifle tourner fur ce point # comme pivot. li Cela polé, fi à l'extrémité C du rayon CO, on attaché un 1 fil à plomb CÆS, qui porte un petit poids S, & que l'on À fafle décrire au rayon CO un arc quelconque CE, en tranf portant le fil à plomb de CS en £R, & en obligeant la ligne XC à tourner en Æ£, & la ligne ACF à tourner én AE], en entretenant toùjours dans ce mouvement fa regle 7Q, parallele à £K, lorfqu'il arrivera que la ligne à plomb Æ R coupera le diametre en P, & la regle /Q en Q, …. de maniéréqu'il y aura autant de parties égales entre À & P, qu'entre L & Q, alors l'arc AE ainfr déterminé, fera le … tiers de l'arc À £ A, foûtenu par la corde donnée AH, ce … qui eftévident par la conftrüélion de l'article précédent. CoRoLLAIRE . I V. … XI. Si lon porte le rayon AO de A en C & en D, AMEL & que l’on tranfporte l'arc EC de D en F, & de B en G, n que l'on tire les cordes 47, AG, ona déja vü que les . troiscordes AE, AF, AG, font les trois racines de l'Equa- “ tion qui réfulte de la divifion en trois parties égales de l'arc » AH, déterminé comme on d'a fait, art. IX, par la corde —. AH—b, & que ces cordes font telles que les deux premiéres - divifent, l’une l'arc AC/ en trois parties égales, & l’autre lon complément à 3 6o degrés, aufli en trois parties égales. [Or on fçait que lorfqu'un arc tel que AC A eft donné, non _ feulement fon complément À DBH à 360 degrés, eft aufli 2 O ji Lo e 108 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE donné, mais encore fon complément BGH à 180 degrés. I femble donc que lanalogie demande que la troifiéme corde AG, qui eft la troifiéme racine de l'Equation, foit par elle- même, ou par quelque chofe qui lui appartienne, doive auf divifer l'arc BGH en trois parties égales, &c effectivement fi l’on examine de plus près cette corde 4G, on verra que celle de fon complément 2G, divife en trois parties égales l'arc B 4, complément de l'arc AA à 180. degrés ; car fi l'on nomme 2G, 7, & que l'on cherche la corde de l'arc triple de BG, on aura par ce qui précéde en nommant c cette corde, on aura, dis-je, c—37———, À Fe: par la même raifon que lon a b— 3 x — + Donc, à 3aa7—Ù 1) EL ns caufe que y —1V{4aa—xx)— Ex V3, ona ce (aa—xx) x V(aaa—xx) (e#—2aaxx+ st) x (4aa—xx) en TE lue Se aa on a aufli RE eo Donc ÿ{0b+ cc) gatxx—Caaxt+x6+ 4 a— 0 afxx+ Gaaxt—x5 sus à ST À CR PR TER NET TENT E ) =V{4aa) — 24. Donc les deux cordes AH, BH, font complément à deux droits l’une de l'autre, & de même que la corde 4 Æ divife en trois parties égales l'arc 4, la corde BG divifera auffi en trois parties égales l'arc BH, complément à 180. degrés de l'arc AA. 1 4 { | rt 0 Mem. de L cad. 1740 Pl.g. Pag. 10Ë Bi PEL _ Hem de Ulead. 1750 T9 Pag 108. | Dhalland eur DES SCIENCES ro TROISIEME MEMOIRE a SUR | LES MONSTRES A DEUX TESTES, k Dans lequel, à l'occafion de celui dont j'ai donné la …. defcriprion dans le Tome de l’Académie de l'année 1724, …. j'examine de plus près que je ne l'ai fait jufqu'ici, le … Jormarion de ces Monffres par les caufes accidentelles. Par M. LÉMERY. es & à l'occafion du Monftre rapporté par feu ; M. du Verney dans les Mém. de l'Acad. année 1706, dans lequet ce fameux Anatomifte avoit cru trouver des | preuves inconteftables de la formation des Monftres par des . Œufs monftrueux, j'ai fait voir en 17 38, dans mon premier - Mémoire fur les Monftres, & cela par l'examen du Monftre » même de M. du Verney, que l'opinion des œufs monftrueux it infoutenable, & ne pouvoit jamais avoir lieu. J'ai auffi ouvé en 1738 , dans mon fecond Mémoire, que la feule: on qu'on ait pu imaginer en faveur des œufs monftrueux, vec laquelle on s’eft cru en. droit de renvoyer à ces œufs tous les Monftres dans la ftruéture intérieure defquels on oit point auffi clairement qu'on le voudroit, la mécha- que particuliére de l'opération des caufes accidentelles ;. | queceite raifon, dis-je, eft une pure inconféquence qui ne » fait quoi que ce foit ni pour les œufs monftrueux, ni contre s caufes accidentelles ; que tout ce qu’on peut conclurre: ce qui fait le fondement de cette faufle induétion , c’eft à défaut naturel de nos lumiéres ; qu'enfin la faufleté de: e induétion fe découvre manifeftement par l'examen e multitude prodigieufe de parties monftrueufes, qui, en: lu de Ja raïfon alléguée, feroient uniquement attribuable. O ii 23 Août 17410 tro MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE ROYALE au fyfleme des œufs monftrueux, & néantmoins dans Jef quelles laæéalité de l'opération des caufes accidentelles fe dé- clare avec la derniére évidence, ou par le fecours des différents inoyens rapportés dans mon fecond Mémoire, ou parce que cette opération fe pafle en quelque maniére fous nos yeux, & par-là nous permet fi peu de douter de fon effet, que la certitude qu'elle nous en donne, va, s'il eft permis de le dire, jufqu'à la démonftration , tels font les Montres iflus d'un mâle & d’une fémelle d’efpeces différentes, dans lefquels leconcours fortuit d'animaux différents, unique caufe de leur produétion finguliére, exclut formellement les œufs monf- trueux, & cependant cache auffi fortement la méchanique de fon opération, que cette elpece de caufe accidentelle eft réelle & palpable à leur égard, ce qui ne devroit point être fi la raifon alléguée étoit véritable. J'ajoûterai ici une réflexion, c'eft qu'il paroïît, ou du moins qu'on à fouvent lieu de remarquer, que plus la caufe accidentelle d’un Monftre eft avérée, moins la méchanique de fon action fe laifle appercevoir. Quoique les différentes caufes accidentelles des Monftres iffus d’un mâle & d’une fémelle de même efpece, foient aifément reconnoiffables & très-évidentes, elles ne font cependant chacune ni aufli cer- taines, ni aufli clairement défignées que celles des Monitres venus d'animaux différents ; cependant on auroit peut-être bien plus de peine à concevoir comment le concours fortuit de deux animaux différents produit le Monftre particulier qui en vient, qu'on n'en auroit à rendre raifon de la maniére dont la preflion mutuelle de deux Fœtus produit tout ce qu'on obferve de fingulier dans le Monftre qui en réfulte, DIIEN SMS: COÉ E NI E' 6 l Ti PREMIERE: PARTIE, Dans laquelle on fair voir qu'il fufft de confulter le Squelere du Montre qui fair l'oljer principal de ce … Mémoire, pour avoir une certitude parfaite de la caufe … © de la méchanique de la formation de ce Monflre. P Our ce qui regarde préfentement fe Monftre que j'ai publié en 1724, & qui fera de nouveau notre objet prin- cipal dans ce troifiéme Mémoire, ce font les difficultés de M. Winflow contre ce que j'ai avancé au fujet de ce Montre, qui ont fait naître de ma part des éclairciflements plus par- ticuliers que je vais tâcher de donner {ur la méchanique de fa formation, & en même temps fur celle de tous les Monftres j qui lui reflemblent par les mêmes endroits, & qui font en _ très-grand nombre. J'ai dit, en parlant pour la premiére fois de ce Monftre, qu'il avoit été formé de deux Fœtus unis latéralement en- femble par une preffion accidentelle, & je me füuis cru par- . faitement autorifé à l’avancer fur la feule infpedtion de fon … Squelete: c'étoit un compofé de deux moitiés de Squeletes, —._ à chacune defquelles il étoit refté une tête S& une épine en= - tiére, qui dans le bas & vers le coccyx touchoit l'épine de - autre moitié de Squelete, mais à mefure que ces deux épines s’élevoient, elles s'écartoient un peu lune de l'autre, 4 fur-tout dans la région de la poitrine ; il y avoit au côté 4 gauche de l'une de ces moitiés de Squeletes, toutes les parties …. qui manquoient à fon côté droit, & au côté droit de l'autre — moitié de Squelete; toutes les parties qui manquoient à fon Li couvertes de la peau, n'offroit à la vüë, aux deux têtes près, » qu'un feul corps compofé de deux bras & de deux jambes, comme il a coûtume de l'être naturellement. … Si l'on peut conclurre avec évidence fur la confidération — duSquelete monftrueux dont il s’agit, que dans la pofition Ai rie MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE latérale des deux Fœtus défignés par les deux épines & par les deux têtes de ce Squelete, les parties de l'un & de l'autre qui fe font naturellement trouvées entre les deux épines de chacun de ces Fœtus, ont été détruites par leur rencontre & leur preflion mutuelle, ou du moins qu'elles ont été les unes aux autres par cette rencontre, un obftacle mutuel à leur développement ; voici encore un fait qui juftifie & confirme parfaitement l'idée de cette deftruétion de parties. Au défaut du total des côtes & de toutes les autres parties i manquoient au côté droit du Fœtus gauche, & au côté gauche du Foetus droit, telles que l'un des deux bras, l’une des deux jambes de chacun de ces Fœtus, on trouvoit aux deux épines de l'un & de l'autre, de petites portions de côtes, dont le nombre, ainfi que celui des côtes qui étoient reftées entiéres , étoit de douze, qui partoient, comme les côtes entiéres , des mêmes vertebres, mais par le côté oppolé à celui de ces côtes entiéres : ces petites portions de côtes qui étoient très-courtes dans l’une & dans l'autre épine, fe ren- controient de part & d'autre dans leurs extrémités, s'étoient unies par-là les unes aux autres, & avoient formé en fe foudant, une efpece de calus ou de bouton, au moyen de quoi les deux épines fe trouvoient jointes, & ne compofoient enfemble qu'un feul & même Squelete qui portoit deux têtes, & avoit deux épines. Les bouts des côtes dont on vient de parler, reftes du débris général de plufieurs parties, font des efpeces de mo- numents dont le témoignage n'eft point équivoque ; ils annoncent manifeftement, 1.° la rupture réelle ou le défaut de développement de deux rangs de côtes originairement entiéres & repréfentées dans le Monftre par les petits frag- ments qui font reftés attachés aux deux épines, & qui au- roient pu chacup être plus ou moins longs qu'ils ne l'ont été, fi la preffion qui a opéré la deftruétion des côtes dont ils faifoient partie, eût été plus ou moins forte, ou eût duré plus ou moins de temps, comme je Le ferai voir dans ce Mé- moire par une obfervation curieufe d'Anatomie comparée: au refte ’ 1 a : | DES SCIENCES. 213 au refte fi les côtes réduites en très-petites portions, n’euflent pas été détruites, comme elles l'ont été, on conçoit aifément que jamais les deux épines n'euflent pu s'approcher d’auffi près qu'elles l'ont fait, & elles fe feroient approchées encore davantage , du moins dans la région de la poitrine, s'il n’étoit refté aucun fragment, aucun veflige de ces côtes ; mais en ce cas les marques les plus authentiques de leur deftruction nous euflent été enlevées , & nous n’euflions plus été à portée de faire voir avec la même évidence, que l'époque de la jonction des deux épines eft le temps.où les côtes dont il s'agit ont ceflé d'être, qu'avant ce temps ces deux épines appartenoient à deux Fœtus diftingués alors, & fé- parés l’un de l'autre, & qui ne pouvoient être autrement Jun à l'égard de autre, tant que leurs côtes fubfiftoient : d'où il fuit que l'union des deux Fœtus dont notre Monftre eft compofé, n’eft nullement. originaire, qu’elle eft vifible- ment le pur effet des caufes accidentelles, & par conféquent qu'elle a été faite après coup. En fecond lieu, ce que les bouts de côtes indiquent à l'égard des côtes entiéres dont. ils faifoient une très- petite partie, ils l'indiquent auffr à l'égard de lomoplate, de Ja - clavicule, de lhumerus ou de l'os du bras, des os de la … hanche & de la cuifle, qui appartenoient à chacun des côtés où fe font trouvés les bouts de côtes dans chaque Fœtus : . «æs.os étoient aux deux épines & à la preffion latérale, ce — que des côtes y ont été avant leur deftruction ; tant qu'ils … cuffent fubfité, ils n’euffent jamais permis, non plus que les côtes, que les deux épines fe fuflent approchées comme elles … d'ont fait, & fi les bouts de côtes font une marque {enfible : … «& inconteftable de côtes originairement entiéres, & qui.en- dite ont été détruites par la preffion, cette même caufe qui porté fon aétion fur la région. de la poitrine & fur celle du bas-ventre, comme on le reconnoît par la confidération des deux épines qui s’approchent de près dans toute cette éiendué, mais encore plus vers la région hypogaftrique : “qu'ailleurs ; cette caufe, dis-je, n'a pu agir comme elle l'a Mem. 1740, . P HE 114 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fait fur les côtes, fans agir de même fur les os mentionnés, plus expolés encore à fon aétion que les côtes, & qui s’y préfentoient en quelque forte les premiers : par conféquent les bouts de côtes, en annonçant la deftruétion des côtes dont ils faifoient originairement partie, annoncent auffi celle de chacun des os qui ont été rapportés. Enfin ne diroit-on pas, en confidérant les petits fragments de côtes reflés à l'un des côtés de chaque épine, que la preffion latérale & réciproque des deux Foœtus, qui pour faire avancer ces deux épines l'une vers l'autre, paroït avoir facrifié toutes les parties intermédiaires, n’a laifié de toutes ces parties que le peu qu'il en falloit pour attefter les ravages qu'elle venoit de faire ? Et ce qui prouve encore bien claire- ment le retranchement de toutes les parties qui pouvoient empêcher les deux épines de fe joindre, & moyennant le- quel, au lieu de deux fternum , il n’en paroifloit qu’un feuf, qui répondoit à la fois à deux rangs de côtes, l'un de la part de l'épine de l'un des deux Fœtus, & l'autre de Ja part de celle de l'autre Fcœtus, c’eft une expérience bien facile, & indiquée au commencement de ce Mémoire. Suppofons qu'on enleve au Squelete d'un Fœtus l'omo- plate, la clavicule, Fhumerus, les os des hanches, & le femur du côté gauche; qu'enfuite on fende en long, & en deux parties à peu-près égales, le fternum de ce Squelete, qu'on en détache la portion gauche & les douze côtes du même côté, qu'on coupe & fépare chacune de ces côtes à quelques lignes en de-cà de l’épine, à laquelle il doit refter par-là douze petits bouts de côtes ; fuppofons encore qu’on fañle . ” parfaitement 14 même chofe au côté droit du Squelete d'un autre Fœtus de même grandeur, & qu'après avoir placé ces deux Squeletes à côté l'un de l'autre, de maniére que les deux moitiés du fternum s'appliquent immédiatement l’une à l'autre, & que les douze petits bouts de côtes de chaque côté s’'abouchent les uns aux autres par leurs extrémités cor- refpondantes ; qu’enfin on cole enfemble & les deux moitiés de flernum & les bouts de côtes de part & d'autre pour les DIE :S;: 9 CH EN CE Se 115 faire tenir dans da fituation marquée, le Squelete artificiel & rélultant de cet aflemblage bizarre, ne différera alors en rien d’eflentiel de celui de notre Monftre. D'où l’on voit que.ce que l'inftrument tranchant a opéré pour la formation de ce Squelete artificiel, & cela en employant deux Squeletes de Fœtus différents, originairement diftingués & féparés l'un de l'autre, la preflion l'a fait exactement de même pour a produétion du Squelete de notre Monftre avec deux Foœtus, qui dans eur premiére origine ne tenoient point du tout l'un à l’autre, & fur lefquels {a preffion a d'autant plus faci- lement opéré, que dans le temps de fon action toutes les parties de ces Fœtus étoient de la derniére mollefle, & prefque fans réfiftance ; & c’eft vraifemblablement en confé- quence de cet excès de molleffe que quand la preflion à ceflé, & que les côtes ont auffi ceflé d'avancer les unes vers les autres, de fe pénétrer mutuellement & de fe détruire, les bouts des côtes qui en font reftés, & qui peuvent ètre regardés comme l'endroit du terme ou de la fin de l'effet de la preflion, font demeurés attachés les uns aux autres, comme l'euflent pu faire en pareil cas deux morceaux de pâte nouvellement faite ; mais ce qui paroît encore avoir le plus contribué à l'union de ces fragments de côtes, ce font les fucs lymphatiques & nourriciers qui ont découlé de l'en- droit de la rupture de ces fragments, & qui en fe condenfant, ont foudé &. lié de plus en plus ces différentes piéces {es unes aux autres par leurs extrémités, & ont formé les efpeces de boutons qu'on y remarque; car on fçait que les fucs d'os & de viande defféchés font une colle forte analogue à celle dont nous nous fommes fervi pour unir les deux moitiés de fternum, & pour fouder les bouts de côtes de notre Squelete artificiel. . On voit aflés par ce qui vient d’être dit, que la forma- tion du Squelete. monftrueux fe conçoit & s'explique très- . nettement par le fecours de {a preffon : par conféquent le premier des trois moyens rapportés dans le précédent Mé- -moire, pour vérifier l’aétion des. caufes accidentelles fur telle Pi " 116 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ou telle partie monftrueufe, a déja lieu dans le cas préfent; & pour ce qui regarde les deux autres moyens, ils y font encore le même effet, comme il eft aifé de s’en convaincre par l'application de l'un & de l'autre de ces moyens au Sque- lete monftrueux; enfin ce Squelete paroît fi évidemment un ouvrage accidentel & fait après coup, que M. Winflow na pas jugé à propos d'attaquer ce qui a été dit à ce fujet, if avouë même que la maniére dont je conçois la formation de ce Squélete, eft ingénieufe & favorife le fyfteme des acci- dents par rapport à cet article, auquel il en joint deux autres de païties molles & internes du même Montre, qu'il laifle- roit auffi au même fyfteme , s’il n’en était empêché par deux ou trois autres de fes parties qu'il prétend originaires, fur ce qu'il ne peut en expliquer la formation par {a voye des accidents ; de forte que par-là toutes les parties du Monftre font renvoyées au fyfteme des œufs monftrueux, fans faire grace à aucune pour l'autre fyfteme. Mais fi la fuppofition des œufs monftrueux eft infoûte- nable , fi ces œufs prétendus font des êtres chimériques &c imaginaires, qui n’ont pour eux aucune raïfon valable, comme je me flate de l'avoir prouvé avec fa derniére évidence, & par des preuves décifives & inconteftables, comment s’eft-il pu faire que des parties monftrueufes qui, par ce qui vient d’être dit, ne doivent ni ne peuvent raifonnablement être cenfées venir d'œufs monftrueux, ayent eu le pouvoir d’en= traîner au profit de ces œufs, d’autres parties monftrueufes avec lefquelles elles fe trouvent dans le même Monftre, & ce qu'il y a de plus fingulier, dans lefquelles l'opération des caufes accidentelles fe voit manifeftement ? * Nous penfons, M. Winflow & moi, bien différemment fur les induétions qu'on doit tirer de la coexiftence de ces différentes parties dans un même Monftre, c’eft-à-dire, fur la caufe des unes par rapport à celle des autres; & quand je n'aurois pas prouvé dans d’autres Mémoires, que les par- ties monftrueufes, foit celles qui déclarent parfaitement Ia maniére dont telle ou telle caufe accidentelle a opéré leur DES SCIENCES. 117 produétion , foit celles où la manœuvre de ces caufes eft beaucoup moins évidente ; quand, dis-je, je n'aurois pas prouvé que les unes & les autres font également le produit des caufes accidentelles, la coexiftence de ces deux fortes de parties dans le Monftre qui m'appartient, me fourniroit la preuve de cette vérité; celles de la ftruéture defquelles Ja foiblefle de nos lumiéres ne permettroit pas de rendre raifon par le moyen des caufes accidentelles, n’en feroient pas moins attribuées à ces caufes, fur cela feul qu'elles logent avec d’autres parties, fur la conformation monftrueufe defquelles on apperçoit clairement la maniére dont les caufes acciden- telles ont réellement opéré; & en effet, outre qu'il eft hors de toute vraifemblance, & le plus fouvent de la derniére impoffbilité, qu'entre des parties monftrueufes qui fe trou- vent enfemble dans un même fujet, il y en ait plufieurs devenuës telles après coup, & par une caufe accidentelle, pendant que d’autres qui paroiflent avoir été formées fur le même modéle, font néantmoins originairement monf- trueufes, ce qui a aufli été remarqué de même par M. Winflow, mais avec cette différence qu’il dérobe aux caufes accidentelles en faveur des œufs monftrueux, ce que je rends exclufivement & à jufte titre à ces caufes , il eft encore vrai que la preffion n'a pu agir comme nous voyons qu'elle a fait fur les parties offeufes du Monfire, fans avoir agi de même fur fes parties internes : comment les deux épines des deux Foœtus dont ce Monftre eft compofé, euffent-elles jamais pu s'approcher d’aufii près qu'elles l'ont fait, & tenir enfemble comme on les y voit, fi la preflion, en détruifant un rang de côtes de chacun de ces Fœtus, n’eût pas en même temps ou détruit, ou déplacé toutes les parties contenuës en chaque Fœtus dans l'efpace formé par ce rang de côtes recouvertes de leurs téguments dans da poitrine, & par les feuls técuments ‘dans le bas-ventre? Tant que ces parties contenuës dans une moitié de chacun des deux Fœtus euffent fubfifté en entier fous leur forme, ou dans leur place naturelle, elles euflent été de part & d'autre un obftacle invincible pour l'approche & le contact des deux épines, 118 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Par conféquent la mème caufe de deftruction qui a donné lieu à ce qu'il y a de monflrueux dans le Squelete de notre Montre, a dû produire aufli ce qui s'eft trouvé de monf- trueux dans fes parties internes ; & pour faire fentir davan- tage toute Ja force de ce raifonnement, qu’il me foit permis de rappeller encore ici ce qui a déja été remarqué au com- mencement de ce Mémoire, en réfléchiffant fur la formation du Squelete du Monftre dont il s'agit préfentement, c’eft que la preflion, moyennant laquelle on conçoit cette formation avec autant de facilité que de netteté, de l’aveu même de M. Winflow, n’eft point ici une fimple poffbilité, une pure fup- pofition ; que fon effet eft très-réel, que la réalité de cet effet eft fpécialement prouvée par la confidération des petits bouts de côtes de ce Squelete, reftes évidents de côtes originaire- ment entiéres, qui n'ont difparu qu'après coup, qui ont laiffé des marques inconteftables de leur deftruétion, fans laquelle les deux Fœtus auxquels elles appartenoient, n’euflent jamais pu s'unir comme ils ont fait, & qu'enfin lorfqu'on voit dans les ruines de quelqu'ancien bâtiment des reftes & des fignes non équivoques d’un efcalier, d'un plancher, d’un mur, fr l'on eft en droit d'en conclurre que ces différentes parties du bâtiment ruiné exiftoient auparavant en leur entier, on en peut faire de même à l'égard des bouts de côtes qui atteftent avec la même évidence la deftruction ou le défaut de déve- loppement des différentes parties offeufes qui fe font trouvées les plus expofées, & qui n'ont pu réfifter par-là à l'effort de la preffion ; par conféquent fi l'effet de la preffion fur le Squelete monftrueux eft très-réel, & fi cette preflion n’a pu agir comme elle a fait fur les parties externes offeufes ou contenantes du Monftre, fans agir auffi fur les parties internes contenuës dans l'enceinte de ces parties enveloppantes, il s'enfuit que l'effet de la preffion fur les parties internes de- vient par cette confidération tout aufii réel que celui de la preffion fur les parties externes, & qu'il y a une égale certi- tude de cet effet fur les unes & les autres: auffi retrouve-t-on, 1. la même forte de productions monftrueufes dans les DES SCIENCES. 119 parties offeufes & dans les parties internes; 2.° obferve-t-on encore que fi les parties contenantes de l’un des deux côtés de chaque Fœtus ont été détruites toutes ou prefque toutes, les parties contenuës à moitié ou en entier dans l'enceinte de ces parties contenantes, ont auffi été détruites à moitié ou en entier, & que comme les parties contenantes de l'autre côté de chaque Fœtus n’ont point fouffert, & font reftées faines & fauves, les partiesinternes de cet autre côté font auffi reftées de même, ou du moins elles n'ont eu qu'unemoitié de détruite, c’eft-à-dire, celle qui réfidoit dans la région qui l'a été, car pour la moitié qui réfidoit dans l'autre région, on fera voir qu'elle a toüjours tenu bon, & que des deux moitiés fubfiftantes & appartenantes à chacun des deux Fœtus, ïl s'en eft fait un nouveau tout de la nature de celui qui a été formé de la rencontre & de l'union des douze petits bouts de côtes partant de chaque épine ; ce qui prouve une feule & même caufe, qui n’a pas eu befoin d’en admettre d’autres, & qui a agi en même temps & de la même maniére fur les parties externes & internes de notre Monftre. Et pour faire fentir encore davantage la vérité de ce fen- timent par un exemple tiré du même Monftre, comment concevoir que les deux Foœtus de ce Monftre ayent été unis originairement par le Cœur, comme le prétend M. Winflow, pendant que je fais voir inconteftablement que les deux épines ne fe font autant approchées qu'elles l'ont fait, que par la fuppreflion des parties intermédiaires qui étoient un obftacle à leur approche, & que ce n’eft encore qu’au moyen de cette fuppreffion que les deux foyes des deux Fœætus ont pu fe rencontrer & fe confondre par la preffion? Or fi ces deux Fœtus étoient originairement unis par le cœur, par quel miracle cette union pouvoit-elle avoir lieu avant que a preffion furvenuë après coup & accidentellement eût par- faitement détruit toutes les parties externes & intermédiaires, qui tant qu'elles auroient fubfifté en leur entier , euffent toû- jours empêché que les deux Fœtus euffent jamais pu être “unis par leurs parties internes, & fux-tout par celles de la 120 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE poitrine, dont le cœur en eft une? Par conféquent la for- mation du cœur unique & monftrueux, qui, de même que celle du foye, n'a pu arriver qu'après la deftruction des parties contenantes & intermédiaires des deux Fœtus, doit par la même raifon avoir été faite fur le plan de celle du foye, c'eft-à-dire, par la rencontre immédiate de deux cœurs, qui par la preflion n’en ont plus fait enfemble qu’un feul d’une ftruélure extraordinaire & monftrueufe. Au refte comme les induétions qui viennent d'être tirées de la coexiftence des différentes parties de notre Monftre, dont les unes répandent néceflairement fur les autres, en faveur des caufes accidentelles , le degré de lumiére & de certitude que ces autres parties n’offriroient point par elles- mêmes, & qu’elles offrent clairement par le fecours des pre- miéres ; comme, dis-je, ces induétions peuvent être tirées de même d’un très-grand nombre d’autres Monftres qui font rfaitement ou dans le cas du nôtre, ou dans un cas fem- blable, il s'enfuit qu'outre les trois moyens rapportés dans le précédent Mémoire pour fa vérification des caufes acci- dentelles à l'égard des différentes parties monftrueufes , 1a circonftance particuliére de la coexiftence de plufieurs de ces parties dans un même füujet, fournit encore un nouveau moyen très-méchanique & très-concluant pour vérifier l'action des caufes accidentelles fur les parties différentes d’une très-grande quantité de Montres. Après avoir prouvé aufii nettement que je viens de le faire, & par un quatriéme moyen, que ce qu'il y a de monftrueux dans chacune des parties du Monftre qui m'ap- partient, ne vient & ne peut venir que d’une preffion acci- dentelle, je pourrois parfaitement me difpenfer d’entrer dans examen de chacune des objections de M. Winflow contre ce que j'ai avancé fur la formation des différentes parties de ce Monftre, & cela d'autant mieux que le fond de ces ob- jections ne roule toüjours, ainfi qu’il a été remarqué ailleurs, que fur la difficulté ou même l’impoffibilité de concevoir comment les çaufes accidentelles euffent jamais pu produire certaines "4 DES SCIENCES. 121 certaines fingularités monftrueufes qu'il allesue ; or il eft inutile de répéter & de faire voir de nouveau que cette elpece d’objettion ne prouve rien, ou ne prouve que notre ignorance, Mais ce n'eft plus comme objections contre le fyffeme des caufes accidentelles que je regarderai dorénavant les Re- marques de M. Winflow fur différentes parties du Montre qui n'appartient, ce fera comme autant d'exemples parti- culiers du fond d'ignorance ou du défaut de pénétration où nous nous trouvons tous à l'égard des chofes mêmes dont la réalité nous eft d’ailleurs la mieux connuë ; & quoique mon deflein ne foit nullement de méconnoître ce fond d'igno- rance, ce défaut de pénétration, malgré lequel la production des Monftres n’en appartient pas moins aux caufes acciden= telles, ne pourroit-on pas faire voir que comme en certains cas nous fommes de grands aveugles, & qu'en d’autres nous voyons aflés clair dans la ftruéture des parties monftrueufes, il y en a d'autres aufli où, à la faveur de certaines circonf. tances fur lefquelles on s’avife de réfléchir, d'obfervations d'anatomie comparée, ou autres, dont on a eu le bonheur de faire ufage ; non feulement on entrevoit ce qu'on ne voyoit point auparavant, je veux dire ce qui a pu réfulter de l’action des caufes accidentelles, mais on peut encore par- venir dans {a fuite à quelque chofe de mieux par une multi- plicité de pareils fecours ? C’eft ce que nous tâcherons de faire appercevoir par les réflexions nouvelles que les diffi- cultés de M. Winflow nous donneront lieu de faire dans la feconde Partie de ce troifiéme Mémoire, j» 6 Avril 3740 122 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE MANIERE FORT SIMPLE de fe fervir d’Horloges de moyen volume, au lieu de groffes Horloges, dans les cas où l’on eff obligé de les füire Jonner fur des Timbres fort gros à fort éloignés. Par M. GRANDIEAN DE FOUCHY. [: n’y a perfonne qui ne fçache combien les groffes Hor- loges different des Horloges de moyen volume, appellées communément Æorloges à piliers, combien ces derniéres font plus aifées à placer, moins incommodes pour le bruit, & par-deflus tout, combien {a différence de prix eft confidé- rable, puifqu'au lieu de 1000 livres que coûte ordinaire- ment une grofle Horloge, on a une Horloge à piliers des mieux finies pour 1 50 livres. Ce font ces confidérations, & fur-tout celle du bruit qui fouvent fait abandonner les chambres voifines des Horloges, & celle de la dépenfe, qui m'ont engagé à faire part à l’Aca- démie d’une maniére qui n'a paru fort fimple, d'employer les Horloges à piliers, prefque par-tout où l’on a été jufqu'ici obligé de fe fervir d'Horloges de gros volume; je dis où Yon a été obligé, car je fuis bien perfuadé que la feule né- ceflité de faire fonner l'heure avec de forts marteaux fur de gros timbres, ou même fur des cloches, a empêché qu'on ne s'en foit fervi jufqu’ici : Voici en quoi confifte la maniére que je propofe. Je fuppofe que l’on ait une Horloge à piliers bien faite, de celles qu'on appelle du grand modéle, on commencera par la placer auprès de l'endroit où l'on fe propofe de met- tre le cadran, de maniére que l'axe de la roué du cadran (qu'on aura foin de faire faire aflés fort pour ne fe pas tordre aifément) porte immédiatement l'aiguille qui marque les DUE SINOUC TE N CE S. 122 heures, ce qui, en égard au peu de volume de l'Horloge, fe pourra toûjours, fi l'on n’a qu'un feul cadran à mener; & dans lé cas où l'on en auroit plufieurs, on aura attention à ne leur donner que le moins de frottement qu'on pourra. On Ôtera enfuite du corps de l'Horloge le timbre, lé mar- teau qui frappe fur le timbre, & fa levée, & on mettra en fa place la détente ADB, mobile en À fur une piéce AC, fixée fur la platine inférieure de l'Horloge, & dont l’extré- mité 2 eft engagée entre les chevilles de la rouë de che- villes JW, de maniére que cette rouë ne peut tourner fans fire mouvoir la détente 4 D B autour de fon clou À; au point D eff placé un fil de fer qui répond à la machine qué je vais décrire, & qui eft la feule addition que je propole. Dans un endroit commode, près ou éloigné de l'Hor- loge (cela eft abfolument indifférent) on établira fur quel- que piéce de charpente, fur quelque mur, une cage de fer EF propre à recevoir une rouë G #7, garnie de fa fufée 7, & de fon encliquetage; cette rouë eft dentée, & porte des chevilles, le nombre des dents & celui des chevilles eft ar: bitraire, il n’y a qu'une feule chofe à obferver, qui eft que les intervalles d’une cheville à l’autre foient égaux, & com- prennent chacun un nombre entier de dents, ce que je re- marque ici d'autant plus volontiers, qu'au moyen de cette liberté, on pourra choifir telle vieille rouë d'Horloge qu'on voudra, pour cet ufage; cette rouë engraîne dans un pignon K, porté par la même cage, & ce pignon doit avoir autant dalles que les intervalles entre les chevilles contiennent de dents. Sur l'arbre de ce pignon eft fixé un chaperon L, & un volant VO; le poids ?, dont la corde eft devidée autour de la fufée, mettroit dans un mouvement continuel {a rouë, le chaperon & le volant, fi lé chaperon n'avoit une entaille A7, qui reçoit le bec d'une détente NQR, laquelle eft pouffée vers Je chaperon par le reflort 4, ÿ. Dé l'autre côté & dans la même cage eft une levée S7; mobile en S fur un clou attaché à [a cage, & engagée par le bout 7° dans les chevilles dé fai rouë G/1, cette levée Qi 124 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fert à tirer par fon point F, un fil de fer FX, qui, au moyen d'un ou de plufieurs renvois UX, va répondre au levier YÆ du marteau Z, qui frappe fur la cloche, Ceci fuppofé, quand le rouage de fonnerie de l'Horloge viendra à courir, la rouë de chevilles W, tirera par la dé- tente AD, le fil de fer DR, & celui-ci la détente ROM; elle fe dégagera donc du chaperon LM, & lui laiflera la liberté de tourner, aufli-tôt la rouë G 4 marchera, & fera afler une de fes chevilles, qui fera fonner un coup au gros marteau Z. Mais comme le nombre des dents comprifes entre les chevilles eft égal à celui des ailes du pignon #, avant que la cheville fuivante puife agir fur la levée ST, le chaperon aura fait un tour, & préfentera fon échancrüre à la détente 47Q qui y entrera, & l'empêchera de tourner. Si donc la rouë W de Y'Horloge à piliers n’a fait pafler qu'une de fes chevilles, le mouvement ceflera au premier coup dans la groffe fonnerie, mais fi la rouë de la Pendule continuë à tourner, elle dégagera le chaperon autant de fois qu'il fe rengagera, & fera par conféquent fonner au gros timbre autant de coups qu’elle en auroit fait fonner au petit marteau, fans que l'Horloge ait eu plus d'effort à faire. La feule attention néceflaire dans cette conftruétion, eft de regler le volant NO, de façon que les chevilles de la rouë G FH paflent en un temps égal, ou même plus court que celui que mettent à pafler les chevilles de la rouë W, ce qui fe fera très-aifément fi l'on fait les aïîles du volant de façon qu'elles puifient s’incliner plus ou moins au plan de leur mouvement, de la maniére imaginée par M. Julien Je Roy. On peut épargner une bonne partie de la cage de fer qui doit porter la groffe fonnerie, en faifant fceller dans le mur, où enfonçant dans la poutre où on f'attachera, des crampons dans lefquels on percera des trous pour les pivots de la rouë & du chaperon. On peut auffr, au lieu du re- montoir, y mettre une double fufée pareille à celles qui font ufitées pour les Tournebroches, ce qui réduira la cage de fer Y Mer. de LAcad.1740. Pl20. Pag124. DES SCIENCES. 125$ à une fimple barre contournée, comme elle eft marquée dans la feconde figure, qui repréfente le profil de toute la machine. On pourra donc, par ce moyen, avoir une Horloge qui tienne peu de place, faffe peu de bruit, & dont le prix | me fera jamais le quart de celui d'une grofle Horloge ordinaire. n Jai dit qu'on ne feroit point.incommodé du bruit, car … | JHorloge à piliers n'en fait qu'un très-fupportable, même dans une chambre, & la nouvelle machine à laquelle même on peut épargner le bruit du volant en fe mettant à frotte- ment fur un axe elliptique preflé par le reffort du volant même, la nouvelle machine, dis-je, peut être placée par- tout où lon voudra, & très-éloignée des endroits que l’on habite. Enfn, un dernier avantage que je crois confidérable, c'eft de pouvoir emporter & placer aifément une Horloge _ dans les Provinces les plus éloignées, & où à peine quelque- …. fois connoit-on le nom d'un Horloger, & fi quelque chofe vient à y manquer, de pouvoir tout auffi facilement {a faire revenir entre les mains d'un ouvrier capable de le rétablir. - Je laifle à l'intelligence de ceux qui voudront fe fervir —. de cette conftruétion, la maniére de placer les renvois, tant «pour les détentes que pour les marteaux. —. - Je ne parle point non plus des Horloges à quarts, on en: fera quitte pour une feconde rouë G A, garnie de fon …. poids, de fon chaperon, &c. mais dont les chevilles feront alternativement placées des deux côtés pour prendre les levées des deux marteaux des quarts. Ÿ 2$ Juin 1740. 126 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyaLE MHEORIE :CHYMIQUE DELA TEINTURE,.DES.ETOFEFES, Premier Mémoire. Par M. HELLOT. Où fçait que l'Art de la Teïnture eft entre les mains de différentes clafles d'ouvriers, & qu'il y a dans les principales Villes du Royaume, des Teinturiers auxquels il n'eft permis de teindre qu'en petit teint, & d’autres qui ne doivent teindre qu'en bon teint: que certains ingrédients peuvent être employés par les uns, & qu'il n’eft pas permis aux autres de s'en fervir. Ces précautions ont été jugées néceflaires par M. Colbert, auquel l'Etat doit l'établiffement de fes principales Manufattures. Le Réglement qui porte fon nom, & qui fut publié en 1669, a été fuivi pendant un temps confidérable, & pendant tout ce temps le com- merce de nos Etoffes dans les Pays Etrangers n'a rien perdu de fes avantages. Mais enfin il s'eft introduit peu à peu une fi grande quantité d'abus, foit dans la fabrique, foit dans les teintures des Etoffes fabriquées, que nos Voifins, faififiant cette occafion favorable d'établir un Commerce avantageux én Italie, dans le Levant, & dans d’autres lieux où fa pre- miére réputation de nos Manufaétures les avoit ernpéchés d'y faire pénétrer les leurs, feroïent parvenus à ruiner entiére- ment notre Commerce avec l'Etranger, fi le Miniftere n’a- voit pas fçu prévenir la perte de cette partie des revenus de V'Etat. Il a fallu ordontier l'exécution rigoureufe des anciens Réglements, & remédier par dé nouvelles Ordonnances aux maux qui n’avoient pas été prévüs. Quelques articles de ce Réglement de 1669, qui ne regardent que les Teïntures, paroiffant difficiles à exécuter, & les Fabriquants ne man- quant pas de raifons plaufbles pour les éluder, on crut qu'il DES SCIENCES. 127 étoit néceflaire de répéter plufieurs des expériences dont la premiére réuffite avoit été la bafe de ce Réglement. II falloit aufli s'affürer de la folidité des nouvelles couleurs décou- vertes depuis; trouver le moyen de les appliquer également aux Laines, au Fil, au Coton & aux Soyes. L’Artifan, qui n’a ordinairement que des mains & fa routine, n'étoit pas propre aux vüës du Miniftere, il falloit un Phyficien qui fçût opérer & réfléchir, on crut qu'on ne pourroit le trouver que dans cette Compagnie, dont l'objet eft la perfection des Arts, aufli-bien que les découvertes dans les Sciences, & M: du Fay fut choifi. ll a employé huit années à ce travail, & dès la fixiéme il avoit une colleétion de faits certains, affés ample pour en déduire les principaux articles d’un nouveau Réglement qui parut au mois de Janvier 1737. Tout ce qui gêne l'ouvrier, tout ce qui peut diminuer pour un temps le gain journalier fur lequel il fonde l'efpé- rance d'une fortune rapide, excite fes clameurs. 11 ne peut ou ne veut pas fentir que ce qui n’eft qu'un retardement momentané de cette fortune, la rendra beaucoup plus cer- taine au bout d'un petit nombre d'années. Auffi le Régle- ment a-t-il fait naître des oppofitions & des plaintes de 1a part de quelques Fabriquants. Le Miniflere n'a pas jugé à propos de fuivre les voyes d'autorité pour le faire exécuter fans égard à ces oppolitions ; il a cru qu'il étoit de fon équité, d'examiner encore fi les plaintes étoient fondées, fi les expériences fur lefquelles on fe récrioit, ne pouvoient s'exécuter en grand, ou fi leur exécution étant démontrée poflble, elle n'occafionneroit pas des dépenfes qui augmen- teroient confidérablement le prix des Etoffes auxquelles on auroit donné le bon teint nouvellement ordonné pour faire exécuter les anciens Réglements. : Peu de perfonnes auroient pu, auffi bien que M. du Fay, continuer le travail qu'il avoit commencé, & le porter à ce terme de perfection, qui n’admet plus de doute. Mais . enfin la mort da prévenu, & ce travail n'eft pas achevé, 128 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE On a cru, & fans doute trop favorablement pour moi, que je pouvois être du nombre de ceux qu'on avoit à choifir pour lui fuccéder, &fi je me fuis déterminé à tenter de remplir les vüés du Confeil, qui m'a nommé, ce n'a été que dans l'efpérance d'obtenir les fecours & les confeils d’une Compagnie qui peut mieux qu'aucune autre, me diriger dans ce travail. Je vais donc lui propofer le plan que je me {uis formé, & lui lire un effai de la méthode que je fuivrai dans mes expériences. L'ax de la Teinture a pour objet de fatisfaire la vüë par des variétés de belles couleurs. Le Fabriquant cherche à faire ces couleurs prefque fans dépenfe. Le Miniftere veut qu'elles foient ftables, & que les ingrédients qui entrent dans leur compofition, n'alterent pas la folidité des Etoffes. Ainfi le Fabriquant choifit les drogues qui coûtent le moins, qui s'em- ployent le plus aifément, & peut-être par préférence celles dont {a couleur eft moins durable. C’eft ce que l’on a voulu prévenir par les articles du Réglement, qui défignent les in- grédients de bon teint, & ceux de mauvais ou de petit teint. En général, je crois que toute la méchanique invifible de la Teinture peut fe rapporter à ceci. Dilater les pores du corps à teindre, y dépofer des par- ticules d’une matiére étrangere, & les y retenir, ce fera le bon teint. Dépofer des matiéres étrangeres fur la feule furface des corps, où dans des pores dont la capacité ne foit pas fufh- fante pour les recevoir, ce fera le petit ou le faux teint, parce que le moindre choc détachera les atomes colorants qui ne feront pas enchafés aflés avant. Outre l'ouverture convenable des pores du fujet qu'on veut teindre, je ferai voir par les expériences rapportées ci- après, qu'il faut que ces corps foient enduits d’une efpece de maflic que ni l'eau de la pluye, ni les rayons du Soleil né puiffent altérer, & qu'on ne peut fe difpenfer d'admettre: différents degrés de ténuité ou de petiteffe dans les particules colorantes, . d. de. be … q Es DES SCIENCES, 129 colorantes, en forte que les plus déliées feront de bon teint, & les plus groffiéres de petit teint. Ce qui n'eft ici que fuppofé, fera démontré, à ce que je crois, dans le Mémoire qu'on va lire, & dans ceux qui le fuivront. DU" BLEU. Le Bleu eft une des cinq couleurs que les Teinturiers nomment primitives, parce qu'elles font le fondement de _ toutes celles qu'on peut appliquer fur les Etoffes, de quelque genre qu'elles foient. C'’eft aufli la couleur qui paroît la plus difficile à préparer : outre fa teinte propre qui s'applique feule fur la Laine, le Fil, le Coton & la Soye, elle fert auffx à faire des couleurs compofées, comme font les différents Verts, en ajoûtant le jaune, les Pourpres, les Violets, en y _ joignant le rouge, les Olives & autres couleurs plus ternes, en fe fervant des ingrédients qui font le fauve & le noir. . Ces détails, qui font de pratique, ne regardent que le Teïnturier, & il n’en eft pas queftion dans ce Mémoire. Je _ es réferve pour un autre ouvrage, qui fera rendu public, lorfqu’il conviendra d'imprimer un Traité complet de l'Art de la Teinture. de Vs LE Le Bleu, dont il s’agit dans ce Mémoire, étant une cou- leur dont on ne peut fe pañler dans la Teinture, & exigeant beaucoup d'attention dans fa préparation, c'eft par cette cou- leur que j'ai commencé le travail dont je fuis chargé, parce que j'ai cru que Îa théorie de fa préparation & de fon effet, étant ne fois bien développée, j'en pourrois tirer des lu- ie utiles pour la maniére d'employer toutes les autres matiéres colorantes dont on s’eft fervi jufqu'à préfent, ou celles dont on pourra fe fervir dans la fuite, tant pour cette couleur fimple que pour les quatre autres couleurs primitives, qui font le Rouge, le Jaune, le Fauve & le Noir. « Cette couleur, qui n’eft confidérée ici que par rapport à Tutilité dont elle eft dans la teinture des Etoffes, n'a été tirée … jufqu'à préfent que du regne Végétal; & il ne paroît pas L: qu'on puifle efpérer d'employer dansicet art aucun des autres Mem 1740: .R 130 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Bleus dont les Peintres fe fervent, parce que ce font toutes matiéres ou métalliques, ou minérales, ou vitrifiées, qui ne peuvent, fans perdre leur couleur, être réduites en particules afés fines pour refter fufpenduës dans le liquide falin qui doit pénétrer les fibres des matiéres, foit végétales, foit animales, dont on fabrique les Etoffes. Nous connoiflons deux Plantes qui donnent le bleu après une préparation préliminaire. L'une eft ’//atis ou Glaflum, qu'on nomme Paffel en Languedoc, & Vouëde en Normandie, où on le cultive & prépare. J'en parlerai dans un autre Mé- moire, parce que je n'ai pas encore eu les commodités né- ceflaires pour le bien examiner. L'autre eft l'Ani/; qui croît dans les Indes orientales & occidentales, où on le prépare pour l'envoyer en Europe, fous le nom d’/de ou d’ndigo. Dans la préparation de cette derniére plante, on a pour but de féparer la fécule colorante des autres parties inutiles de la plante. Cette fécule eft un objet confidérable de com- merce dans les Colonies Françoifes & Efpagnoles de Amé- rique, d'où l’on nous apporte la plus grande partie de lIn- digo qui fe confomme dans ce Royaume. Les Indes orien- tales ne nous en fourniflent que trés-peu. Ceux qui cultivent l'Ari/, & qui le préparent, ont trois Cuves de maçonnerie, placées l'une au-deflus de l’autre en maniére de cafcades. Hs rempliflent d'eau la premiére ou la plus élevée, & y mettent la plante entiére telle qu'ils ont cueillie, c’eft-à-dire, avec fes tiges, fon écorce, fes feuilles & {es fleurs. Comme ce n’eft que dans des Climats chauds gue cette plante peut être aifément cultivée, la chaleur du climat excite très-vite la fermentation. L'eau, où la plante trempe, s’échauffe au bout de quelques heures, bouillonne, s'épaiffit, & devient de couleur bleuë, tirant fur le violet. Quand, après cette vive fermentation, on s’apperçoit que Yeau s’eft chargée de toutes les parties colorantes, & que ce- qui la furnage n’eft plus que le cadavre inutile de la plante, on ouvre le robinet de cette premiére Cuve qui eft nommée D ES LS \C'TEIN C'E S: 137 a Trempoire, & l'on fait paffer l'eau chargée de toute la fé- cule colorante dans la feconde Cuve inférieure. On a donné à celle-ci le nom de Baterie, parce qu'on y bat l'eau avec un Moulin à palettes, pour condenfer où rapprocher les arties de cette fécule trop raréfice, & la faire précipiter au fond, jufqu’à ce que l’eau qui la furnage foit devenuë claire comme de l'eau ordinaire. On ouvre alors les robinets qui font vers le bas des parois verticales de cette Cuve, pour faire écouler cette eau inutile jufqu’à ce qu'elle foit diminuée à 2 où > pouces près de [a furface de la fécule. Après quoi ‘on ouvre les feconds robinets qui font au fond de {a Cuve, afin que toute cette fécule foit entraînée dans la troifiéme Cuve, qu'on nomme le Repofoir. C'eft au fond de celle-ci que l'Indigo fe dépofe de nouveau, & fe defléche par l'éva- poration de toute l'eau qui l'avoit accompagné. C'’eft de-là qu'on le retire pour en former des pains ou tablettes. * Cette fécule eft beaucoup plus riche en matiére colo: rante que ne le font le Paflel & le Vouëde, & il paroït par diverfes expériences rapportées dans le journal de M. du Fay, qu'une livre d’Indigo fournit plus de bleu que 12 à 1 3 liv du meilleur Paftel. Pour que FIndigo, tel qu'on nous l'envoye de l'Amérique, dépofe fur les Etoffes fabriquées, ou fur les Laines, les par- ticules colorantes dont le Teinturier a befoin dans fon art, on de fait infufer de plufieurs maniéres, qui cependant fe peuvent réduire à trois. Ce font ces infufons à froid ou à chaud qu'on nomme Cuves d'Inde, ou Cuves de bleu. Celle à froïd peut fervir pour les Fils & Cotons ; celles à chaud font employées pour les Laines & autres matiéres animales. * Dans celle à froid, on joint à Indigo la Potaffe, 14 Chaux vive, la Couperofe verte, la Garence & le Son. Celles à chaud fe préparent ou avec l'Eau ou avec l'Urine. Si c’eft avec l'Eau, on ajoûte à fIndigo les Cendres grave: Aées & un peu de Garence. Si c'eft avec l'Urine, on joint à YIndigo l’'Alun & le Tartre crud. L'une & l'autre de ces Cuves deftinées aux R ij 132 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Laines, ont befoin d’un degré de chaleur affés fort, fi l'on veut que la Laine s’y charge d’une teinture folide, c’eft-à-dire, qui puife réfifter à l'action de l'air & aux épreuves ordon- nées dans l’Inftruétion que le Confeil fit publier en 173 3. J'ai préparé moi-même ces trois Cuves en petit dans des vaiffeaux de cryflal, expolés au grand jour, afin de pouvoir voir ce qui sy pafloit avant que l'infufion fût venuë en couleur, c’eft-à-dire, qu’elle füt verte au-deflous de l'écume bleuë qui doit la furnager. C’eft une condition abfolument néceflaire, & fans laquelle la couleur que l'Etoffe y pren- droit, ne feroit pas de bon teint, & difparoîtroit prefque entiérement aux moindres épreuves. Je vais décrire la Cuve d’Inde à froid, parce que c'eft celle où les changements fe font mieux fait appercevoir, & que ce qui arrive dans les deux autres, n’a pas des différences bien eflentielles. J'ai mis 4 pintes d'Eau dans un vaifleau de verre, dont la capacité étoit de 8 pintes. J'y ai fait difloudre 3 onces de Couperofe verte, qui a donné à l'Eau une teinte jaune, J'ai fait difloudre à part 3 onces de Potafle dans fufhifante quan- tité d'Eau, & lorfque la diflolution en a été achevée, j'y ai fait digérer pendant trois heures fur un feu très-doux 3 onces d'Indigo de S.t Domingue, bien broyé. IH s'y eft gonflé, & ayant pris un plus grand volume, il s’eft élevé du fond de cette liqueur alkaline avec laquelle il a formé une efpece de fyrop épais, mais qui étoit bleu : marque que l'Indigo n'étoit que divifé, mais non pas entiérement diflout ; car fr la diffolution eût été parfaite, cette liqueur auroit été verte, au lieu d'être bleuë, parce que toute liqueur qui a été teinte en bleu par un végétal, quel qu'il foit, verdit, lorfqu'on y mêle un Sel alkali, ou concret, ou en forme liquide, foit qu'il foit fixe, foit qu'il foit volatil. De-là on commence à découvrir pourquoi l'Indigo ne teint pas une Etoffe en bleu folide quand fon infufion n’eft pas verte. C’eft qu'alors fa ‘ diflolution n’eft pas achevée, & que lalkali ne peut agir fur fes premiéres parties, pour ainfi dire, élémentaires, comme er À h D'ELSr LS CI EN C'E S. + 133 il agit, par exemple, fur la teinture des Violettes, qui eft -une diflolution parfaite des parties colorantes de ces fleurs, qu'il verdit dans Finftant & au premier contact. _ J'ai verfé cette liqueur bleuë épaifle dans la diflolution de la Couperofe, & après avoir bien agité le mélange avec une fpatule, jy ai ajoûté 3 onces de Chaux éteinte à Fair. Dans une faifon chaude, ces fortes de Cuves à froid peuvent monter en couleur en trois heures de temps ; mais lorfque … j'ai fait cette expérience, le Thermometre étoit à 4 degrés … au-deflous du terme de la congélation. Aufli cette Cuve | at-elle été quatre jours à prendre la couleur verte, & par conféquent j'ai eu plus de temps pour examiner les change- ments qui y arivoient. La fermentation qui doit fe faire _ Andifpenfablement dans toute liqueur vitriolique, où l’on …__ met un Sel alkali & une Terre abforbante, s’eft faite dans mon vaifleau avec tant de lenteur, qu'il n'a paru que très-peu »d’écume ou de bulles d'air fur la furface du bain, cependant j'avois foin d’agiter le mélange fept ou huit fois par jour. À chacune de ces agitations, j'ai remarqué le fecond jour que ce qui tomboit le premier au fond du vaiffeau, étoit Le fer de la Couperofe que le fel alkali de la Potafle en avoit précipité pour s'unir à lacide. Ainfi dans cette opération de la Cuve d'Indigo à froid, on fait un Tartre vitriolé à Ja façon de Tachenius , au lieu que dans la méthode ordinaire de … préparer ce {el moyen, on verfe de l'Efprit acide de Vitriol ur un Sel alkali végétal, tel que le Sel de Tartre ou la Potaffe. Voilà encore une circonftance qui conduit infenfiblement à la Théorie du bon Teint : je prie qu'on s’en reffouvienne, parce que j'en ferai ufage dans la fuite de ce Mémoire. - Après que le fer s'eft précipité, on voit tomber la terre — dela Chaux. Elle eft aifée à reconnoître par fa couleur blan- che, qui ne commence à difparoître pour en prendre une plus difficile à diftinguer, que quand les particules colorantes de FIndigo font affés développées. Enfin au-deflus de cette . terre blanche, fe dépofe la fécule de l'Indigo , qui peu-à-peu de raréfie de telle forte, que cette matiére, qui dans les deux R ii} ! 334 MEMoIREs DE L'ACADEMIE Royarr premiers. jours moccupoit au-deflus de Ja Chaux précipitée qu'un efpace d'un pouce ou deux dé haut, s'éleve infenfi- blement jufqu'à demi-pouce près de la furface du bain, le- quel devient alors tellement opaque, qu'on n'y peut plus rien diftinguer. j Cette raréfaction de l’Indigo , lente dans les temps froids, prompte dans l'été, & qu'on peut accélérer dans hyver, en donnant à la liqueur 1 $ ou 1 8 degrés de chaleur, eft une preuve qu'il fe fait dans le mêlange une fermentation réelle qui ouvre les molécules de lIndigo, & les divife en des païticulés d'une ténuité extrême. Alors leurs furfaces ayant été multipliées prefqu'à l'infini, elles en font d'autant plus également diftribuées dans la liqueur, qui par-là devient propre à les dépofer, avec cet ni qu'on'exige, fur le fujet qu'on y plonge pour y prendre la teinture. Avant cette diftribution parfaite, la Cuve d’Inde ne fait que des taches bleuës fur l'Etoffe, & ces taches bleuës font enlevées même par la fimple eau bouillante. Si cette fermentation fe fait précipitimment ou en peu d'heures, foit à l’occafion de la chaleur dé l'air, foit à l'aide d'un petit feu mis fous le vaifleau, on voit paroître fur la furface du bain une grande quantité d'écume bleuë que les Teinturiers appelient Fleuree, & une pellicule prefque toû- jours très-mince, qui a des reflets qu'ils ont auffi nommés Cuivreux, parce qu'on y voit les couleurs de lIris, où le jaune & le rouge dominent : ce qui n’eft pas cependant particulier à l'Indigo, puifqu'on apperçoit de femblables re- flets dans tous les mélanges qui fermentent aétuellement, & principalement dans ceux qui contiennent le plus de parties graffes mélées avec des parties falines. L’Urine, la Suye, & plufieurs autres corps mis en fermentation , préfentent les mêmes phénomenes. Cette écume de la Cuve d’Indigo paroît bleuë, parce qu'elle eft expofée à l'air extérieur, qui lui eft contigu. Mais fi lon prend avec une cuillere un peu de la liqueur qui eft au-deflous de cette écume, on la trouvera plus ou moins DES SCIENCES. 135 verte felon qu'elle eft plus où moins chargée de patticules colorantes. On verra dans la fuite de ce Mémoire {a raifon de cette différence, ou an moins une explication vraifem- blable de cette variété, qui eft abfolument néceffaire pour la réuffite de l'opération que je décris. Lorfque la Cuve eft en cet état, on y peut teindrele Fi, le Coton, les Toiles qui en font tifluës, & la couleur que: ces corps y prennent, eft de bon teint, c'eft-à-dire, que ce Coton & ce Fil laconferveront, même après avoir refté: pendant un temps convenable dans une diflolution deSavon actuellement bouillante. C’eft l'épreuve qu’on leur fait fubir, & celle qu'on a choifie préférablement à toute autre, parce que les Toiles de Coton & de Fil doivent être blanchies avec le Savon quand elles font fales. | . Quoique le bain d’'Indigo, qui eft vert fous l'écume puifle teindre folidement fans. addition d'aucune autre ma tiére, les T'einturiers qui font dans l'ufage d'employer cette Cuve, y ajoûtent une décoétion de Garence & de Son dans l'eau commune & paflée par un tamis; c'eft ce qu'ils nomment un Brevet. Is ÿ mettent la Garence pour aflürer, difent-ils, la couleur de l’Indigo, parce que cette racine en! fournit une fi folide für les fujets préparés, qu'elle réfifte à prelque toutes les épreuves. Is y ajoûtent le Son pour adou- eir l'eau qu'ils fuppofent contenir prefque toûjours des parties d'un fel acide, qu'il eft bon, felon eux, d'amortir. C'eft une fuite de l'ancien préjugé où l’on étoit du temps: de M. Colbert, contre l'Indigo, & ce Miniftre, qui ne pou- voit prononcer que d'après des expériences auxquelles fes grandes occupations ne lui permettoient pas d’être préfent, défendit par le Réglement de »669 , d'employer l'ndigo feul. Mais depuis que le Confeil a réconnu par les nouvelles épreuves faites fous lés yeux de M, du Fay, que da ftabilité de la teinture de cette drogue eft telle qu'on la peut defirer, le nouveau Réglement de 1737, laifle la libérté aux Tein- turiers de l'employer feule ou mélée avec le Paftel ; ainfr fi lon continuë de joindre la Garence à F'Indigo, c'eft plütôt” 136 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE parce que cette racine fourniflant un rougé aflés foncé, & ce rouge fe mêlant avec le bleu de lIndigo, il lui donne une teinte qui le fait approcher du Violet, & lui fait prendre. un plus bel «il. Quant au Son, fi on l'employe, c’eft moins pour amortir le prétendu acide répandu dans les eaux, que pour y diftri- buer une certaine quantité de matiére glutineufe, puifque la petite portion de farine qui y refte, fe mêlant avec la liqueur du bain, doit diminuer un peu fa trop grande flui- dité, & par conféquent empêcher que les particules colo- rantes qui y font fufpenduës, ne fe précipitent aufi vite qu'elles le pourroient faire dans une liqueur qui n’auroit pas acquis un certain degré d’épaififfement. Malgré cette colle diftribuée dans la liqueur, tant de Ia part du Son que de la part de la Garence qui fournit auffi quelque. chofe de glutineux, les particules colorantes ne laiflent pas que de retomber au fond du vaifleau, fi l'on eft quelques jours fans agiter le bain. Alors le haut de la liqueur ne donne plus qu'une foible teinte au fujet qu'on y plonge; & fi l'on veut qu'il en prenne une convenable, il faut re- brouiller le mélange, & le laïfler repofer une heure ou deux, pour que le fer de la Couperofe & les parties groffiéres de la Chaux fe précipitent de nouveau par leur pefanteur, de - crainte que fe mêlant inutilement aux véritables parties colo- rantes, elles n’alterent leur teinture, & ne dépofent fur le fujet qu'on veut teindre, une matiére peu adhérente, qui, en fe defféchant, rendroit ce fujet poudreux, & dont chaque petite partie occuperoit un efpace où la particule vraiment colorante ne pourroit s'introduire, pour s’y appliquer avec un contact immédiat au fujet. Pour ne rien changer, quant-à-préfent, à la méthode des Teinturiers, à celle que M. du Fay a fuivie, j'ai fait bouillir une partie de Garence en poudre & une partie de Son dans ce qu'il me falloit d’eau pour emplir entiérement ma Cuve d'Inde. J'ai paflé cette décotion, ou ce brevet en langage. de Teinturier, à travers un linge & avec expreflion ; puis Jai 7 D. #D ES 18 C1 E NC ES; K 4 _j'ai mis cette liqueur encore très- chaude, & qui étoit d'un rouge-de fang, dans le bain d’Indigo:: j'ai brouillé le tout, &au bout de deux heures ce bain s'eft trouvé verd, par conféquent en état deteindre, &il. teint emeffet du Coton. d'une couleur bleuë folide , mais un peu! plus vive,qu'elle ne 'étoit avant que j'y. euffe ajoûté le rouge de la Garence. Cherchons prélentement: quelle peut être la caufe parti- culiére de la folidité de cette couleur. Peut-être fera-t-elle Ja caufe générale de la ténacité de toutes les autres ; car il pa- roit d'avance par l'expérience décrite.ci-devant, que cette ténacité dépend du choix, des! Sels! qu'on.ajoûte aux dé- * coctions dés Ingrédients colorants. Si'avec les conféquences que je tirerai du choix de ces Sels de leur nature, de leurs propriétés, on confent à admettre (ce qu'on, ne peut refufer légitimement) le plus ou moins, de ténuité dans-Jes particules colorantes des ingrédients -dont on peut faire ufape en, tein- ture, il femble que toute la Théorie de cet Art fera connu, fans qu’il foit néceflaire de fuppofer des caufes incertaines. On concevraiaifément que les Sels qu'on. ajoûte dans 1a Cuve d'Inde, fervent autant :à -ouvri.les, porés naturels du fujet qu'on veut teindre;: qu'à développer les atomes colo: rants de cette fécule. Dans les autres préparations de teinture qui donnent les Jaunes, les Rouges, &c..( jen excepte la teinture d'Écarlatte, pour laquelle il faut-une explication particuliére:) on prépare d’abord és Laines dans. june. diflo- lution. de Sels que les T'einturiers appellent-le Zosillon. Or dans ces bouillons on employe ordinairement le Tartre crud & lAlun. Au bout d’un certain temps:on en retire la Laine, qu'on n'exprime que légerément, &on l'enveloppe dans un fac poux la,conferver humide: dans un lieu frais afin que la liqueur faline qui y-eftrefté adhérente puifle-agir deflus, & … la préparer à-recevoirda teinture: Pour lateindre-enfüite, on la plonge, encore humide, dans! une -décocion, bouillante ,. Je . , . Li: d'ingrédients jaunes ou rouges ;-fans cetté préparation, c'éft- dire, fans l'addition de: ces fels, ces teintures ne feroient ‘pas folides. Donc il a fau élargir par des els corrodants, S (Z{10 174 0, » 138 MÉMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE les pores naturels des fibres de cette Laine, peut-être y en ouvrir de nouveaux, pour y loger les atomes colorants des ingrédients. L'ébullition du bain y enfonce ces atomes par des chocs répétés , les pores déja aggrandis par les fels, fe dilatent encore par la chaleur de l'eau bouillante, & ils fe reflerrent enfuite par le froid extérieur, quand on retire le fujet coloré de la chaudiére, qu'on l'évente, & qu'on le plonge dans l’eau froide. Aiïnfi voilà l'atome colorant pris & retenu dans les pores ou fiffures du corps teint par le reflort de fes fibres qui s'eft remis dans fon premier état. Si outre ce reflort des fibres, on fuppofe que les parois de leurs pores ont été enduites intérieurement d’une couche * de la liqueur faline du bouillon, on verra aifément que c'eft un moyen de plus employé par l'art pour retenir l'atome coloré. Car cet atome étant entré dans le pore, pendant que Yenduit falin des parois étoit encore liquide, & cet enduit s'étant enfuite congelé par le froid, l'atome eft alors retenu, & par le reflort dont il vient d’être parlé, & par cet enduit, qui devenu dur en fe criftallifant, forme une forte de maftic qui ne le laïffera pas échapper aifément. Cet enduit falin dont je dis que les parois des pores font recouvertes, n’eft pas une fuppofition. I ef fi néceflaire, que ff, avant que de tremper le fujet préparé par les Sels dans le bain coloré deftiné à le teindre, j'enleve ces fels par de l'eau bouillante, ce fujet y prendra à la vérité la couleur du bain, mais cette couleur ne fera point folide : fi au contraire je le plonge encore chargé de tout ce que les pores ont pu retenir de ces fels, la couleur dont il fe chargera, réfiftera à toutes les épreuves. Si, outre cela, l'atome coloré eft d’une ténuité telle, que la petite éminence qui refte apparente à l'entrée du pore, & fans laquelle le fujet ne paroîtroit pas teint, puiffe être re- couverte de ce même enduit falin, comme de a lame extrê- ” mement mince d'un criftaltranfparent, on en doit conclurre qu'une teintüré réfültante de:tous ces'atomes retenus &re- couverts deviendra éxtrémement folide, & qu'elle fera-de Îa cafe du bon teint, pourvû que l’enduit falin ne puiffe être DES SCIENCES: i emporté par l'eau froïde, telle que celle de la pluye, ni calciné ou réduit en poudre par les rayons du Soleil; car pour qu'une teinture foit réputée folide, il faut qu'elle réfifte à ces deux épreuves. On n'en doit pas raïfonnablement exiger d'autres pour les Etoffes: deftinées à nos habits & à nos ameublements. Mais nous ne connoiflons en Chymie que deux Sels, qui étant une fois criftallifés & purifiés, puiflent ètre humectés par l'eau froide fans s'y difloudre. IL n’y a prefqu'aufli que ces deux Sels qui puiflent demeurer quelques jours expolés au Soleil fans s’y réduire en farme ou pouffiére-blanche. Ces fels font le Criftal de Tartre & le Tartre vitriolé. Or on peut faire ce dernier en mélant enfemble un fel dont l'acide foit vitriolique, tel que la Couperofe & l’Alun, & un Sel déja alkalifé, comme eft le fel de la Potafle qui entre dans la Cuve d'Inde dont j'ai donné le procédé. On voit que dès que leurs diffolutions s’'uniflent , 'alkali précipite le fer de Ia Couperofe en une poudre prefque noire. Cet acide vitrio- lique n'ayant plus alors de bafe métallique, fe tranfporte fur cet alkali, & de leur union ïl fe forme un Sel moyen au: quel on a donné le nom de T'artre vitriolé, comme s’il eût été fait avec le Sel de Tartre & l'acide du Vitriol déja féparé de fa bafe. Tout ce que je viens de dire dans cet article ne fouffre pas, à ce que je crois, de difficulté, “If n’en fera pas de même du bouillon fervant aux autres teintures jaunes ou rouges dont j'ai parlé ci-devant : on ne concevra pas que le Tartre vitriolé puifle s'y former, parce qu'on n'y fait pas bouillir avec l’Alun un Sel alkali, mais un fel qui ne peut le devenir que par calcination. Ainfi dorf- qu'on fait bouillir enfemble l'Alun & le Tartre crud, outre Vimpreffion que les fibres de la Laine reçoivent du premiér de ces deux fels, qui eft corrodant, le Tartré en reçoit unê préparation qui le purifie ; & qui d’un fel fdle-& groffier, en fait un fef net & tranfparént ; par conféquent les pores ou- verts par lAlun feront enduits par 1e Criftal de T'artre qui f criftallife dès qu'il fent Le froid, qui ne fe calcine point à S ij 140 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Vair chaud, & qui ne peut être diffout par l'eau froide de la pluye. C'efl tout ce que j'avois à démontrer dans cet article, Cette théorie eft commune à la Cuve d’Indigo, où fon met l’Urine à la place de l'Eau, FAlun & le Tartre crud à la place de la Couperofe & de la Potafle. Cette Cuve à YUrine ne peut teindre folidement que lorfqu'elle eft très- chaude, & il faut même y laïfer tremper la Laineune heure ou deux, fi l'on veut qu'elle foit teinte également. Dès que cette Cuve eft refroidie, elle ne teint plus. La raifon de ces faits ne feroit pas aifée à découvrir dans une Cuve de métal, mais dans un vaifleau de criftal on la découvre aifément. J'ai laiffé refroidir cette petite Cuve d'eflai, & toute la couleur verte qui y étoit fufpenduë pendant qu'elle étoit chaude, s’eft précipitée peu-à-peu au fond du vaifleau, parce qu’alors le Tartre fe criftallifoit, & fe réuniflant en des mafles plus pefantes que fes molécules ne l'étoient pendant qu'il étoit diflout, il tomboit au fond du vaifieau, & entraïnoit avec lui les particules colorantes. Quand je rendois à la liqueur fon degré précédent de chaleur, & qu'après l'avoir brouillée &. laïflé repofer un peu, j'y faifois tremper un petit morceau de Drap, je l'en retirois au bout d’une heure auffi folidement teint que la premiére fois. Ainfi il ne faut, pour la réuffite de cette Cuve, que tenir toùjours le Tartre en diflolution par une chaleur fufhfante. C’eft l'alkali de l'Urine qui en verdit le bain, c’eft Alun qui prépare les fibres de la Laine, & c'eft le Criftal de Tartre qui aflüre la teinture, en mafti- quant les atomes colorants dépofés ou introduits dans les pores de ces fibres. Mais il refte une difficulté par rapport à la Cuve d'Inde, dans laquelle on ne mét ni Vitriol, ni Potafle, ni Alun, ni Tartre, & où l'on employe fimplement la Cendre gravelée & un peu de Garence : il faut auffi qu’elle foit chauffée afés vivement pour y teindre la Laine & les étoffes de Laine. Avant que de rendre raifon de la folidité de fa teinture, qui eft la même que celle des autres Cuves de bleu , où l'on fait entrer les Sels que je viens de nommer, il faut examiner la sd DE Su «Ô, CI'E:N, CE S, 41 Cendre gravelée. On fçait que c’eft la Lie du Vin defféchée, puis calcinée. C'eft donc un Sel alkali de fa nature du Sel de Tartre, mais moins pur, puifqu'il vient de a partie Ja plus pefante des feces du Vin, & par conféquent Ia plus ter- reufe. Outre cela l'alkali de la Cendre gravelée n’eft jamais auf homogene que le Sel alkali du Tartre bien calciné, & il ya peu de Cendre gravelée non purifiée dont on ne puife retirer une quantité affés fenfible de T'artre vitriolé. C'eft ce qui fait que ce Sel de la Lie calcinée ne fe met jamais entié- rement en deliquium à humidité de l'air, au lieu que le Sel de Tartre fe liquéfie prefque tout entier, & que a petite partie talqueufe qui en refte fous une forme folide, paroît être une pure terre. Or s’il eft vrai, comme l'expérience me Va fait voir plus d’une fois, qu'il y ait un T'artre vitriolé tout formé dans la Cendre gravelée, il eft clair que cette Cuve d'Inde, qui ne teint bien Ia Laine qu'après l'avoir chauffée affés vivement pour qu'on ne puifle y tenir long-temps la main fans fe brüler, difloudra a petite portion de Tartre vitriolé qui s’y trouve, & par conféquent ce fel s’introduira dans les pores de Ja Laine pour les enduire, & il fe coagu- lera aufli-tôt que la Laine retirée de ce bain chaud fera expofée à l'air pour s’y refroidir. Ainfi l'explication que j'ai donnée ci-devant, ferviroit pour cette opération comme pour les précédentes. + Cependant fi l'on refufoit d'admettre l’exiftence de ce Sel moyen, je la démontrerois par une expérience qui fut faite pendant les mois de Juillet & d’Août 1738, pour vérifier celle que j'avois IüE dans un des derniers volumes des £phé- mérides des Curieux de la Nature. Je pris de la Cendre gra- velée nouvellement calcinée, je la fis difloudre dans de l'eau bouillante, & j'en filtrai la diflolution encore chaude. Je mis, comme l’Auteur Allemand, cette liqueur à la Cave, dans un Matras à long col, dont je fermai l'ouverture avec un papier à filtrer, fimplement appliqué deffus. Au bout de huit jours je ne trouvai au fond de cette liqueur alkaline, dont il avoit près de deux pintes, qu'un gros au plus de Tartre vitriolé, S ii 142 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Je réverfai cette liqueur dans une terrine de criflal, & j'y trempai des Linges blancs de leflive, & après les avoir fait fécher pendant le jour, je les retrempois le Jendemain matin dans la terrine pour les faire encore fécher pendant la journée, les tenant étendus fur une corde attachée à une fenêtre au haut de la maïfon, ce que je continuai de faire pendant huit jours. Enfin je verfai deflus de l’eau chaude en aflés grande quantité pour diffoudre tous les fels, quels qu'ils fuflent, j'en fitrai la diflolution toute chaude ; je l'expofai encore à l'air dans un lieu frais, & au bout de quinze jours j'y trouvai près de 7 gros de T'artre vitriolé. Ce qui fuffit pour en conclurre avec l'Auteur Allemand, que s'il y a un acide dans l'air, cet acide eft vitriolique, puifqu'il ny a que lui qui avec un Sel alkali végétal puifle faire un T'artre vitriolé. J'ai déja donné une autre preuve de Fexiftence de cet acide dans Vair, à la fm du Mémoire fur le Phofphore de Kunckel, qu'on trouvera dans le Volume de 1737. Ainfi comme le Tartre vitriolé eft actuellement dans Ja Cendre gravelée, qu'on n’employe ordinairement que cal- cinée depuis long temps, c’eft à ce fel qu'on pourra rapporter en partie la ténacité des bonnes teintures qui ne font altérées ni par le Soleil, ni par l’eau de la pluye. Il me refte à expliquer pourquoi la Cuve d'Indigo eft verte fous les premiéres furfaces du bain, pourquoi il faut que ce bain foit verd pour que Îa teinture foit folide, & pourquoi Fétoffe ou la Laine qu'on retire verte du bain; devient bleuë aufli-tôt qu’on la éventée. Toutes ces condi- tions étant néceflairement communes à toutes les Cuves d'Inde, foit à froid, foit à chaud , Ia même explication fer- vira pour toutes. À 1.” L’écume ou fleurée qui furnage le bain d’Indigo, lorf- qu'il eft en état de teindre, eft bleuë, & le deffous de cette écume eff vert. Ces deux circonftances prouvent que l'Indigo eft parfaitement diflout, & que le Sel alkali s’eft uni aux atomes colorants, puifqu'il les verdit, car fans lui ils refte- roient bleus, DES» :$ C1 EN CE S ï 2.° Ces. mêmes circonftances prouvent aufli qu'il ya dans l'Indigo lui-même un alkali volatil urineux que lalkali fixe de la Potaffe ou de fa Cendre gravelée développe, & qui s'évapore peu de temps après que cette écume a été expolée à l'air. On fe convaincra de l’exiftence de ce volatil urineux, en examinant l'odeur de la Cuve pendant fa fermentation, lorfqu'on l'agite, ou quand on la chauffe : on y démêle celle d’une viande gâtée qu'on feroit rôtir, avec quelque chofe d'un peu picquant. 3.” On prépare F'Anil pour en féparer la fécule par une fermentation continuée jufqu'à la putréfaction. Or il y a de l'urineux dans toutes les Plantes pourries , foit que ce volatil foit le produit d'une union intime des fels avec l'huile du végétal, foit qu'on doive le rapporter à la multitude prodi- gieufe des Infeétes qui abordent de toutes parts fur les Plantes qui fermentent , attirés par l’odeur qui s’en exhale, Ils y vivent, y multiplient, y meurent, & y laïflent par confé- quent une infinité de cadavres. Ainfr il fe joint à la fécule de l'Indigo une matiére animale dont le fel eft toûjours un volatil urineux, 4° Enfin pour derniére preuve , fi l’on diftile de l'Indigo feul, ou encore mieux, mêlé avec un peu de Sel alkali fixe, on en retire une liqueur qui dans toutes les épreuves chy- miques fait l'effet de l'efprit volatil de l'Urine. Mais on demandera peut-être pourquoi ce volatil urineux . que je fais voir dans Findigo, ne fait pas paroître cette fé- cule de couleur verte, puifqu’il doit être diftribué également entre toutes fes parties? pourquoi même, quand on diffout Indigo dans l’eau bouillante pure , il refte bleu, & ne de- vient pas verd ? Je réponds que ce volatil urineux eft fi concentré dans la fécule, qu'il lui faut un corps étranger plus actif que l'eau bouillante pour le chaffer des particules qui l'enveloppent, foit que ces particules appartiennent au vé- gétal, foit que ce foient les cadavres des petits Infectes qui font reftés après leur mort. D'ailleurs la diffolution de l'In- digo ne fe fait jamais parfaitement dans l'eau feule, quelque 144 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE degré de chaleur qu'on lui donne. A la vérité, cette diflo- lution bleuit les étoffes qu'on y trempe, mais la couleur ne s'y applique qu'inégalement, & d'autre eau bouillante l'en- leve prefque fur le champ. Le Sel ammoñiac, dont les Chy- miftes tirent l'Efprit volatil urineux le plus pénétrant, n’a point cette odeur vivement urineufe, quand on le fond & le fait bouillir dans l'eau. Il y faut joindre de Ia Chaux ou un Sel alkali fixe pour en dégager le volatil urineux, & 1e fé- parer de l'acide qui le tenoit lié De même l'Indigo exige des alkalis fixes ou terreux pour être exaélement décompofé, pour que fon volatil urineux fe faffe appercevoir, pour que fes atomes colorants foient réduits à leur ténuité vraifem- blablement élémentaire. Je pafe à la feconde condition. // faut que le bain de la Cuve d'Inde Joit verd pour que la teinture qu'il donne foit folide. C'eft, comme je fai déja dit, que fIndigo ne feroit pas exactement diflout, fi l'alkali, répandu dans la liqueur, n’agifloit pas deflus, & fa diflolution n'étant pas auffi parfaite qu'elle le doit être, il ne pourroit teindre ni également, ni folidement. Or dès qu'il eft aflés diflout pour que lalkali agifle deflus , il doit le verdir, parce que tout alkali qu'on mêle à un fuc ou à une teinture bleuë d’une plante ou d'une fleur, la verdit dans l'inftant quand il peut fe diftribuer éga- lement fur toutes fes parties colorantes. Mais fi par évapo- ration, ces mêmes parties colorantes fe font raffemblées en des mafles dures & compactes, l'alkali ne pourra changer leur couleur, qu’elles n'ayent de nouveau été divifées & ré- duites à leur premiére ténuité, C’eft ce qui arrive à l'Indigo. A l'égard de la troifiéme & derniére condition, que TE'toffe doit être retirée verte du bain, € devenir blenë auffi-t6r qu'on l'a éventée, fans quoi le bleu ne feroit pas de bon teint. On peut en rendre, à ce que je crois, les raifons fuivantes. 1.” On la retire verte, parce que le bain eft verd. S'il ne Vétoit pas, lalkali qu'on a mis dans la Cuve ne feroit pas également diftribué, ou bien Indigo ne feroit pas exacte- ment diffout, comme je viens de le dire, Si le Sel alkali n'étoit DES SCIENCES. 145 n'étoit pas également diftribué, la liqueur contenuë dans ja Cuve ne feroit pas également faline. Le bas de cette liqueur auroit tout le fel, le haut feroit prefque infipide. En ce cas Yétoffe qu'on y plongeroit ne pourroit y être préparée à recevoir la teinture, ni à la retenir. Mais quand on la retire verte au bout d'un temps convenable d'immerfion, ceft une marque que la liqueur étoit également faline, également chargée d'atomes colorants. C'eft une marque aufli que fe Selalkali a pu s'infinuer dans {es pores des fibres de la Laine, les élargir, en former peut-être de nouveaux, comme il a été déja dit. Or on ne doutera plus qu'un Sel alkali ne puifie faire cet effet fur les fibres de la Laine, fi l'on fe reflouvient que quand une leffive alkaline eft fort âcre, elle brüle ou diffout prefque dans l'inftant un floccon de Laine, ou la barbe d'une Plume qu'on y trempe. Une opération de Teinture, qu'on nomme la fonte de bourre, en eft encore un exemple, la bourre qu'on y employe, & qu'on fait bouillir dans une diflolution de Cendres gravelées faite par l’Urine, s’y diffout fi parfaitement qu'on n’en retrouve pas la moindre fibre. Donc fi une leflive très-âcre détruit entiérement la Laine, une lefive qui n'aura de Sel alkali que ce qu’il lui en faut pour agir fur la Laine fans la détruire, en préparera les pores à recevoir & conferver les atomes colorants de l'ingrédient dont je traite dans ce Mémoire. , - On évente T'Eoffe retirée verte de la Cuve après l'avoir expri- mée, 7 elle devient bleuë. Que fait-on en l’éventant ? on la rafraïchit. Si c’eft le volatil urineux, développé de l’Indigo, qui lui a donné cette couleur verte, il s'évapore, parce qu'il eft volatil, & le bleu reparoït. Si c'eft l'alkali fixe qui e& da caufe de ce verd, outre qu'on en a ôté la plus grande partie en exprimant l'étoffe, ce qui en refte ne peut plus agir fur la partie colorée, parce que le petit atome de Tartre witriolé, qui contient un atome coloré encore plus petit que ui, s'eft criftallifé dès qu’il a été expofé au froid de air, & a interrompu par cette cloifon faline criftallifée le contact “immédiat de l'alkali fixe avec la partie colorante. Mem. 1740. oi 146 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE On avive ce bleu, c'eft-à-dire, qu'on le rend & plus vif & plus beau, fi lon fait tremper l’étoffe, refroidie après fà teinture, dans de l’eau chaude, parce qu'alors la portion des particules colorantes, qui n'avoit qu'une adhérence fuperf- cielle aux fibres de la Laine, eft emportée. I fe fait auffi une diffolution moyenne des furfaces apparentes de chaque petit criflal falin, ce qui rend ces furfaces plus minces, & fait paroître l'atome coloré d'autant plus vif qu'il eft vû à travers un corps moins opaque, parce qu'il a alors moins d’épaifieur, On fe fert du Savon pour éprouver la folidité de cette teinture, & elle lui doit rélifter, parce que le Savon, que d'ailleurs on ne met qu'en petite quantité dans beaucoup d’eau, & qui ne doit bouillir avec l'échantillon teint que pendant cinq minutes, auxquelles on a fixé le temps de l'épreuve, eft un alkali mitigé par huile qui ne peut agir fur un fel moyen. S’il décharge l'échantillon de quelques parties de fa couleur, c’eft que ces parties n'adhéroient qu’à des fur- faces liffes des fibres de la Laine. D'ailleurs le petit criftal falin, enchâfié dans le pore, & défendu par fes parois, ne peut être totalement diflout dans un fi court efpace de temps. On a vû dans ce Mémoire un eflai de la Méthode que je me fuis propofé d'employer dans l'examen de toutes les matiéres qui ont été jufqu'ici ou qui feront dans la fuite em- ployées en teintures Si l'on juge que cette méthode puifle conduire à des découvertes utiles à cet art, même à la Phy- fique, on la fuivra dans les autres expériences qui regardent les couleurs fimples ; car il eft abfolument néceffaire de les connoître avant que de paffer aux compolées, parce que ces derniéres ne font ordinairement que des couleurs appliquées les unes après les autres, & rarement mêlées enfemble dans un même bain ou décoétion. Aiïnfi connoiffant ce qui a opéré la ténacité d'une couleur fimple, on pourra fçavoir plus aifément fi la feconde couleur peut prendre place à côté dans les efpaces que la premiére a laïflé vuides, fans déplacer la premiére de ceux qu’elle occupe déja. C’eft-là l'idée que je me fuis formée de l’arrangement des couleurs différentes DES SCIENCES. 147 appliquées fur une même étoffe ; c’eft celle auff que M. du Fay femble préférer à toute autre dans fon Mémoire de 1737: me paroît trop difficile de concevoir que des par- ticules colorantes puiflent fe pofer les unes fur les autres, & former ainfi des efpeces de pyramides, en confervant cha- cune leur couleur, pour que de l'aflemblage de toutes il en réfulte une couleur compofée. Il faudroit pour cela leur fup- polér trop de tranfparence. De plus pour qu'un atome jaune fe place immédiatement fur un atome bleu déja enchäffé dans le pore de la fibre, & pour qu'il y refte folidement attaché, il faut qu'ils fe touchent Fun & l'autre par des plans extré- mement polis: pour qu'un atome rouge vienne enfuite fe pofer fur le jaune, il faut encore fuppofer de nouveaux plans. L'imagination a peine à fe prêter à ces fuppoñtions, & il me paroît bien plus probable que la premiére couleur n’a occupé que les pores qu'elle a trouvé ouverts par la pre- miére préparation des fibres du fujet ; qu’à côté dé ces pores remplis il y a des efpaces non occupés, où l’on peut ouvrir de nouveaux pores pour y loger de nouveaux atomes d’une feconde couleur à Yaide d’un nouveau bouillon compolé de Sels, qui étant peu différents & fouvent les mêmes que ceux du premier bouillon, ne détruiront pas les premiers criftaux falins introduits dans les premiers pores. Mais tout cela fera difcuté plus amplement , lorfque je hazarderai la Théorie chymique des Couleurs compolées. I réfulte, à ce que je crois, de ce Mémoire, que tout ingrédient dont les particules colorantes feront naturellement affés fines pour entrer jufqu'à une certaine profondeur dans les pores ouverts de la fibre d’un fujet à teindre, & pour y être reflerrées par le reffort de cette fibre, fera de bon teint; Que tout ingrédient dont les parties fervant à teindre, feront d'un trop grand volume pour être enchäffées fuffifamment dans ces pores, fera de faux teint, parce que le moindre choc les détachera du fujet teint : Enfin que tout Sel fervant . d'enduit à ces pores, qui ne pourra être diflout dans l'eau froide, comme le peuvent être tous les Sels, excepté le Ti; 9 Juillet 1740. r48 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Criftal de Tartre & le Tartre vitriolé, doit être préféré à ceux qui n'ont pas cette propriété, non plus que celle de n'être pas réduits en poudre par les rayons du Soleil. DE LA SPIRALE D'ARCHIMEDE décrite par un mouvement pareil à celui qui donne la Cycloide, à de quelques autres Courbes de méme genre. Pa M CLAITRAUT. | Ro a imaginé différents mouvements continus pour décrire des Courbes, foit utiles, foit fimplement curieufes, on a prefque toüjours eu foin que le Style ou Crayon qui devoit tracer la Courbe qu'on cherchoit, füt mobile, & imprimât fa trace fur un plan immobile. Je ne connois que le Tour à tourner où le plan fur lequel on trace une Courbe, fe meuve pendant que le Style eft fixe. I femble à Ja premiére infpeétion, que ces deux defcrip- tions font les mêmes, & que lon peut choifir indifférem- ment l’une ou l'autre felon ce qu'on fe propole d'exécuter; que s’il s’agit feulement de tracer un trait fur un plan donné, il n'y a qu'à faire mouvoir le Crayon ou le Style; que s'il eft néceffaire que ce trait fur le plan y foit en creux ou en relief, il faut rendre ce même plan mobile, & fixer le Style ou l'outil tranchant, & que pourvû que le mouvement dans lun & l'autre cas foit le même, il en doit réfulter la même Courbe, Cependant c’eft une idée dont on fe détrompe avec un peu d'attention. J'examinois il y a quelque temps de quelle maniére on décrivoit l'Ovale fur le Tour, & je reconnus bien-tôt que fi le Style avoit été mobile avec les Regles fur lefquelles eft attaché le plan mobile, & qu'au contraire le plan eût été fixe, on auroit eu des Conchoïdes du Cercle, I ! DES SCIENCE Ss. n & ma premiére idée fut que les Ovales qu'on décrit fur fe Tour étoient des Conchoïdes du Cercle. En examinant fa chofe un peu mieux, je vis facilement qu’elles étoient de véritables Ellipfes d’Appollonius. Je penfai alors à quelques autres defcriptions de Courbes beaucoup plus fimples que celles du Tour. Je les avois négligées autrefois, ne croyant pas qu'elles me donnaffent rien de nouveau ; cependant ce que J'avois cru au premier coup d'œil devoir décrire des Cycloïdes, donne Ia Spirale d’Archimede. Quoiqu'il y ait peu d'utilité à retirer de la defcription d’une telle Courbe, ainfr que de quelques autres dont je traiterai dans ce Mé- moire, j'ai cru quil pouvoit m'être permis, comme à beau- coup d’autres Géométres, de m'occuper quelquefois à des recherches de pure curiofité, & j'efpere que l'Académie ne me refufera pas quelques moments de fon attention. PROBLEME L Soit BMEF un Cercle qui roule fur la ligne droite AM, eu Jorte que tous fes points foient fucceffivément appliqués fur cette Tigne. Soit de plus en S un Style fixe hors du plan du Cerck, on demande la Courbe qu'il trace fur le plan roulant pendant {on mouvement, Pour la trouver, imaginons que PME foit un fituation quelconque de ce Cercle; BCE, la pofition du diametre T ii %5o MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qui étoit perpendiculaire à À M en À, lorfque le Cercle touchoit cette ligne au même point À, c’eft-à-dire, que l'arc BM foit égal à la droite AA. En prenant BD — AS, on aura le point D qui étoit d'abord en S avant le commencement du roulement ; & comme la droite 3 Æ, mobile par le roulement du Cercle, eft fixe par rapport à lui, on la pourra prendre pour l'axe de Ja Courbe demandée DS, & lon cherchera l'Equation de cette Courbe entre les rayons CS & les arcs £F, ou les angles DCS. | On nommera pour cela CS, y; FE, x ; le rayon CM, a, & la droite CA, qui eft conftante, 8 ; d’où l'on aura SH —=AM=BM—V(yy— 086), & divifant cette valeur de SH par CH=—6, on aura fe pour la tangente _ de l'angle SCÆ, le rayon étant 1. Donc 5 fera bdy VO —b la valeur de cet angle, qui étant multipliée par le rayon bdy CM=a, donnera a [ —— >VO3—bt) ajoûte enduite cette valeur de 7 F à celle de EJZ—=BM, CESR 2 dy on: aura x —= V{y3— bb) het pt FEquation de la Courbe cherchée. pour l'arc ZF: Si on pour « DES SCIENCE 5 11 Si l'on fait dans cette valeur 4 — 0, c'eft-à-dire, que le point décrivant foit à la hauteur du centre, l'Equation fé changera en x —y + le quart du Cercle dont le rayon et a, où fimplement x — y, fi au lieu de prendre £Z pour axe, on prenoit un diametre à angles droits avec celui-Ià. Or il eft évident que cette Equation exprime une Spirale d'Archimede partant du centre €’, & coupant à angles droits le diametre Z £. Voilà donc une façon bien fimple de dé- crire la Spirale d'Archimede, 'puifqu'il ne s’agit que de faire rouler un Cercle fur une ligne droite, & placer un Style fixe à la hauteur de fon centre. PROBLEME II Suppolons préfentement que le Cercle BMEF roule fur un autre Cercle AM, le point décrivant S, étant toñjours fxe hors du plan roulant, on demande la nature de la Courbe décrite par ce 1HOUVEMEN I, BMEF repréfentant toüjours une pofition quelconque du Cercle roulant, BDE le dia- metre de ce Cercle, qui étoit perpendiculaire en A avant le commence- ment du roulement, D la trace du point S lorf- que B D étoit en AS, DS la Courbe cherchée, & SC un rayon quel- conque de cetteCourbe; on tirera de plus au centre Æ du Cercle À AZ, les deux rayons SX, CÆ. 152 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE | On nommera enfuite Varc FB, x, & le rayon CS, y ; le rayon du Cercle roulant c, la dif- tance SX, f; CK,b,; & Von cherchera l'expref- fion de Farc ZM & de Varc AM en y & en conftantes , & on en tirera lEquation de la Courbe cherchée; car x ou FB—FM—BM, où FM— AM, puif- que AM=— BM par le roulement. Pour parvenir à ces expreffions, on abaïflera la perpendiculaire C Æ, & l’on aura pour la va- leur de HK, "=, |. & pour celle de SA, RTE, d’où le finus de angle HCK fera = TÉ, & le finus de l'angle SCA fera 2fb BE L , & par conféquent l'angle HCX fera exprimé EL 4 ; par Je & angle SCA par + (HN) < AT EZ= Ty ] les multipliant par le rayon CAZ, c, Pt Varc FM, . Ajoûtant ces deux expreffions, & bb— — —y dy ref SAT ne 7 7 PVO EEE Pr) CET db; Comme l'angle AXC eft le complément de l'angle HCK, en point fixe décrivant. DES SCIENCES. 152% ,» . un y d en nommant D 'angle droit, on aura D — [ ——""7 fév y) pour la valeur de l'angle HKC ; & multipliant cette ns x le rayon MC—b—6c, on aura (b—c) D — —? dy mn Er TEST pour Ja valeur de Farc AM où BM. D'où l'Equation de la Courbe cherchée FA —»dy |. +) EC | “2 He FEV EI — (EL y] v[r— PER » ] — yd a. De ane REMR RUE ou en réduifant x—c af £ ” PRET NE" — dy 4 Méta (b—c) 2. Si lon vouloit conftruire Ja Courbe en queftion fur le papier, fans faire aucun rou- lement, voici l'opération qu'il faudroit faire. Soient FBMO Ie Cercle qui rouloit dans la conftruc- tion précédente, ZB le Cercle qui lui fervoit de bafe, D le On tracera du centre À & de l'intervalle À D le Cercle Ds. Enfüite pour avoir un point quelconque S de la Courbe cherchée, on prendra un point s à volonté fur le Cercle Ds, & l’on tirera C5 & Ks. Cela fait, on prendra Mem. 1 740: fur le Cercle FBO Yarc BM égal à l'arc BL, & Tarc BF égal à l'arc AO; puis tirant CF, & prenant CS —=C;s, «S fera un point de la Courbe cherchée. DES SCIENCES 1 5$ SECOND MEMOIRE SUR \ LA; FISTULE LACRYMALE Par M. PETIT. ANs le Mémoire que j'ai donné fur ce fujet en 1734, j'ai diflingué trois différentes Maladies auxquelles on donne fouvent le nom de Æiffules lacrymales ; fçavoir, Ja Tumeur lacrymale, qui n'eft point Fiftule ; la Fiftule qui 'eft point lacrymale, & celle que l'on doit appeller & qui eft uniquement Fiftule licrymale : dans celle-ci les larmes, au lieu d'être retenuës dans le fac nafal, ou de couler dans le nez, coulent par lulcere fifluleux, & fe répandent fur la joué. Dans ce Mémoire j'ai traité amplement de la Tumeur Jacrymale qui n’eft point Fiftule. Celle qui eft Fiflule, & qui n'eft point lacrymale, n’a rien de particulier, fi ce n’eft d’avoir été fouvent confonduë, & prife pour a vraye Fiftule lacrymale, je n'en parlerai point aujourd’hui : il s’agit feule- ment des Fiftules qui font réellement lacrymales, tant de celles qui font fimples, que de celles qui font les plus com- pliquées : j'en excepte encore les complications qui peuvent dépendre des caufes intérieures. Il ne fera queftion ici que du vice organique ou local, en tant qu'il eft poffible de le réparer, foit par des médicaments topiques, foit par des opérations chirurgicales. Ce vice, qui le plus fouvent eft peu de chofe lorfqu'il commence , devient confidérable quand la maladie a été négligée ou mal traitée dans fon commencement ; elle aug- mente peu-à-peu au point qu'il y furvient inflammation, qu'il s'y forme abcès, que le fac lacrymal fe perce, & que le pus & les larmes s'ouvrent un pañlage au dehors & fe répandent V ij 22 Juia 1740 #56 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE fur la joué ; que quelquefois les os fe carient, qu'il s'éleve des chairs fongueufes, de dures & de calleufes, que le fac Jacrÿmal fe détruit entiérement ou en partie, & que les points & conduits lacrymaux & le canal nafal même, fe dérangent, en forte que la ftruéture & les fonétions du fiphon lacrymal font entiérement perverties. Ce n'eft-là qu'une partie des defordres qui arrivent, fi l'on ne fait pas de bonne heure Vopération que j'ai décrite dans le premier Mémoire. On trouvera dans celui-ci un détail & une defcription exacte de toutes les opérations & autres moyens que j'ai eu occafion de pratiquer pour prévenir ou réparer ces defordres, du moins autant qu'il m'a été poflible, Les intentions que Fon doit avoir dans la cure de ces différentes complications, fe réduifent en général à deux. L'une eft de guérir la Fiflule, & l'autre de remédier au lar- moyement, en rétabliflant le cours naturel des larmes dans le nez. Je fçais que l'on ne peut guérir fe larmoyement fans guérir la fiflule, mais bien des gens fe contentent de guérir la fiftule fans guérir le larmoyement, & ils s'en applaudifient, cependant la perfeétion exige qu'on réuflifle dans lun & dans l'autre. En effet un Chirurgien peut-il fe vanter, par exémple, d'avoir guéri une Fiflule à l'anus, fi, après le traitement, te boyau fe trouve rétréci au point de refufer un libre paflage aux excréments , ou affoibli & fi dilaté, qu'il refle au malade une trop grande facilité d'aller à Ja flle, ou bien une impoftibilité de retenir les excréments? Croira-t-on qu'une Fiflule au périné foit bien guérie, s'il refte au malade une difficulté de rendre fes urines, ou une impoffbilité de les retenir? Je dis la même chofe de la Fiftule Jlacrymale : quiconque guérit cette fiflule, & laiffe le lar- moyement, ne fait que le plus facile de ce qu'il doit faire ; car pour réuflir dans cette opération, il n'eft pas moins effentiel de conferver ou de rétablir les fonétions du fiphon Jacrymal, qu’il eft effentiel de conferver celles de l'anus & de l'uretre quand on opere fur ces parties. Je fçais qu’il n’eft pas toûjours poffible de parvenir à cette DES SCIENCES. 157 parfeétion, mais il faut le tenter : ce qu’il y a de certain, c'eft qu'on n'y parviendra jamais en fuivant une méthode qui commence d’abord par détruire l'organe ( c’eft la mé- thode ordinaire} & que l'on y parviendra très-fouvent par celle qui a pour maxime de le conferver ou de le rétablir dans fon état naturel. Quoique la fiftule, fur-tout celle qui ef compliquée, paroifle le principal objet, cette fifiule i'eft pas ce qui donne le plus de peine; le difficile eft de rétablir le cours des larmes en même temps qu'on opere, & que l'on traite la fiftule : c'eft pour cela que je ne féparerai point ces deux chofes. Les opérations que je vais décrire, tendront également à remplir ces deux vüés. Elles fe réduifent à quatre. Les unes fe pratiquent au trou fiftuleux ; les autres regardent le vice des points & des conduits lacrymaux ; il y en a qui s'exer- cent fur le fac facrymal & fes dépendances ; enfin celles fans lefquelles on ne peut efpérer une guérifon parfaite, fe pra- tiquent au canal nafal, & confiftent à le déboucher & à conferver fon ouverture dans le nez*; mais comme on ne * M4. 2 doit rien entreprendre fans connoître l'état dans lequel fe! 1734: trouvent les parties afHigées , il faut d’abord s'attacher à bien die connoître à quel point chacune eft affectée, & pour y par- venir je fonde la fiftule avec un ftilet à bouton & très-pliant, je l'introduis avec beaucoup de douceur & de circonfpection jufqu'au fond de l’ulcere, où je fais une perquifition exacte en tournant ce ftilet de côté & d'autre. Si le flilet s’intro- duit facilement, & que je ne reconnoifle d'autre complica- tion à la fiftule, que l’obftruétion du canal nafal, Je n contente d’aggrandir le trou fiftuleux, de déboucher le canai nafal, & d'y porter une bougie qui paffe jufque dans le nez de fa maniére que je l'ai dit en parlant de l'opération de la (Tumeur & de la Fiftule facrymale fimple*, Mais fi Je trouve * Les mêmes, de Ja difficulté à introduire le flilet à bouton jufqu'au fond de la fiftule, j'en cherche la caufe, qui ordinairement n’eft que la petitefle du trou fiftuleux, ou laccroifiement & la dureté des chairs qui obliterent ce trou, ou qui en changent VON * UMém. de l'Acad. 1734. page 45. 159 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE la-direction : en ce cas, & avant toutes chofes, j'aggrandis le trou de la fiftule, & je détruis les chairs, fi ce font elles qui font l'obftacle. On peut les détruire, foit par l’'ufage des confomptifs, foit avec l'inftrument tranchant qui eft préfé- rable aux confomptifs ; je dirai ailleurs {es raifons de cette référence. Pour dilater l'ouverture de la fiftule, l'incifion fémi-lunaire fuffit *, mais on doit fa faire de maniére que l'ouverture de la fiflule s’y trouve comprife. Pour emporter avec linftrument tranchant les chairs qui font l'obftacle, je place bien le malade , & je le fais tenir ferme pour qu'il n'interrompe point l'opération ; je faifis les chairs avec une érigne très-fine & de la plus petite courbüre ; je les coupe d'une feule fois, s’il eft poffible, pour éviter de la douleur ; je conferve précieufement toute la peau qui n'eft point altérée ; je ne coupe dans le profond de la fiftule, qu’autant qu'il faut pour emporter les mauvaifes chairs, & je ménage tout ce qui appartient ou peut appartenir au fac lacrymal & aux autres parties de l'organe. Après avoir ainfi débarraflé Ja fiflule, le paffage pour aller au fond, étant libre , j'introduis une Sonde boutonnée & pliante pour connoître l'état du fac nafal & des autres parties qui y aboutifient & qui l'environnent. Avec cette fonde, je reconnois, par exemple, fi Fos eft carié, sil n’eft que fimplement découvert, ou s'il eft fain ; fr le fac lacrymal n'eft percé que par le trou fifluleux, s'il eft détruit totale- ment, ou fi l'altération s’eft communiquée aux autres parties du voifinage, & enfin fi la fiflule a percé dans le nez. Après cet examen, il faut reconnoître l'état où fe trouvent les points lacrymaux & le canal nafal par le moyen de la fonde qui eft propre à cet ufage, ou en faifant des injeétions avec la feringue lacrymale. Si on introduit facilement cette fonde par les points lacrymaux jufque dans le fac lacrymal, ou fi les injections paflent dans ce fac, c’eft une preuve certaine que les points lacrymaux & leurs conduits ne font pas obftrués ; lon peut porter prefque le même jugement, sil fort beaucoup d'humidité par le trou de la fiflule, ow DIE SN*S 1C l'E 2N C:E:S 159 par la narine du même côté; mais fi Je larmoyement eft confidérable, que la fiftule ne rende que très-peu de matiére, & que lon ne puifle faire pafier la fonde ni les injections jufque dans le fac, c'eft un figne prefque toûjours certain ue ces conduits font bouchés, & en ce cas il faut examiner quelle eft la caufe de l'obftacle, & la détruire, s'if eft poffible. … J'ai trouvé quelquefois ces conduits entiérement bouchés, ce qui eft rare quand la fiftule flué, leurs parois s’étoient renduës adhérentes pendant l'inflammation des paupiéres, & fur-tout de la conjonétive ; quand cette inflammation dure long-témps, & qu’elle fuppure, elle caufe ladhéfion des pa- _ rois de ces conduits. Pour remédier à cette adhérence, j'ai efflayé d'y introduire la fonde, & j'ai quelquefois réufli : quelquefois aufii ma fonde y a paflé fans trouver de réfiftance dans prefque toute leur étenduë, excepté à l'endroit où le canal commun de ces deux conduits fe dégorge dans le fac: en ce cas, ayant un peu forcé, j'ai vaincu lobftacle ; j'ai. fait la même chofe toutes les fois que j'ai cru n'avoir que très-peu de chemin à faire pour arriver au fac. Quand j'ai trouvé plus de réfiftance dans l'endroit que je défigne, j'ai ouffé ma fonde un peu plus fort, & très-fouvent je l'ai fait entrer dans le fac ; mais lorfque j'ai trouvé l’obftacle trop près des points lacrymaux, c’eft-à-dire, près du bord des paupiéres, mes tentatives ont toûüjours été inutiles, foit parce que les conduits étoient bouchés dans prefque toute leur étenduë, ou parce que la fonde alors étoit trop peu engaînée dans le conduit pour que je puffe la pouffer avantageufement contre l’obftacle : c'eft ce que j'ai remarqué particuliérement à ceux qui ont été fujets à l’ophtalmie, & à ceux de qui les paupiéres ont été maltraitées par les grains de la petite vérole. Dans le nombre de ceux qui ont eu les yeux attaqués par les puftules de cette maladie, & qui ont eu recours à moi, jen ai trouvé plufieurs qui avoient les deux points lacrymaux bouchés depuis long-temps. Ceux-là ont larmoyé toute leur vie, cette efpece de larmoyement étant prefque toûjours incurable, parce qu’il dépend de ce que les points lacrymaux, 160 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE & fouvent leurs conduits, font oblitérés par la cicatrice qui fe formant fous le grain de la petite vérole, réunit l’orifice des points lacrymaux, & très-fouvent les parois de leurs conduits. On peut prévenir cet accident, fr, pendant que les grains de la petite vérole fuppurent encore, on à foin de bien nettoyer l'ulcere que produifent ces grains, ce qu'on fait avec des lotions fréquentes qui détergent l'ulcere, &c fur-tout fi, lorfque l'inflammation a ceflé, & même pendant que la cicatrice fe forme, on tâche d'introduire de temps en temps avec douceur la fonde dans les points lacrymaux. Pour y introduire cette fonde avec facilité, je la trempe dans le blanc d'œuf, que je préfére à l'huile, non feulement dans le cas dont il s’agit, mais dans tous ceux où il eft né- ceflaire d'introduire ou le doigt ou la fonde, rien n’eft plus propre à les faire gliffer, & à faciliter leur introduétion. Si les adhérences des parois de ces canaux ne font que com- mencées, on les détruit avec la fonde, & s'il n’y en a point encore, on les prévient en faifant de fréquentes injections d’eau de Plantin, de Rofe, ou autre, avec la Seringue lacry- male du S.' Anel. Ce Chirurgien avoit des connoïflances, de Ja fagacité, &c le génie de fa profeffion. Ces avantages pouvoient lui pro- curer un établifiement folide, cependant long-temps avant fa mort la fortune & la réputation l'avoient abandonné. On pe peut s'empêcher de croire que fa poftérité lui rendra plus de juftice que fes contemporains. Ses inftruments lacrymaux ont enrichi l'arfénal de Chirurgie, & lui feront par eux- mêmes beaucoup d'honneur dans tous les fiécles. 11 feroit à fouhaiter pour {a gloire qu'il fe füt difpenfé de publier cer- taines Brochüres & Lettres apologétiques, dans lefquelles il attribuë à {es inftruments beaucoup de propriétés qu'ils n’ont pas, mais en revanche nous y en avons trouvé beaucoup d’autres qu'il n'avoit pas connuës, comme on verra dans la fuite de cet ouvrage. J'ai dit, & je crois véritablement que le larmoyement, produit par l'adhéfion des parois des conduits lacrymaux, | eft DES SCIENCES. 161 eft incurable lorfqu’il eft ancien. J'ai inutilement tenté de déboucher ces conduits à ceux qui depuis long temps étoient guéris de la petite vérole, & à qui par conféquent les cica- trices étoient déja trop folides pour obéir à la fonde. Peut- être que fi l'on eflayoit d'introduire cette fonde àceux qui font nouvellement guéris de la pêtite vérole, on pourroit réuflir ; c'eft ce que je n'afüre Pas,’ parce que je n'ai pas encore eu occafion de léprouver dans cette circonftance, Ce qu'il y a de certain, ceft que cette opération m'a toû- jours réuffi lorfque j'ai pu la Pratiquer immédiatement après la maturité des grains de la petite vérole, & fur-tout dans le temps que le grain s’'applatit, mais avant qu'il fe féche, parce qu'alors la réunion des parois n’eft pas encore faite. Dans les fiftules lacrymales anciennes, {oit compliquées, foit fimples, quoiqu'on ne puifle pañer la fonde par les conduits lacrymaux, il n’en faut pas toüjours conclurre que ces conduits foient bouchés, le plus fouvent ils ne font que repliés fur eux-mêmes, ce qui arrive par l’ufage immodéré des bourdonnets qui, en dilatant trop k fiflule, éloignent ces conduits du fac où ils doivent fe dégorger, ce qui les gène & les fronce de maniére, qu'ayant perdu leur direction , la fonde heurte leurs replis, & ne peut pafler, ou ne pañe qu'avec peine. Pour rémédier à cette crifpation ou fronce- ment, j'ai pendant quelques jours pan{é la fiftulé mollement & fans tentes ni bourdonnets, afin que les conduits repliés puflent S'allonger & reprendre leur étenduë naturelle ; pour y parvenir plus facilement, J'ai fait dans les points lacrymaux de fréquentes injections d’eau de Mauve & de Guimauve, J'ai appliqué des cataplafines pour amollir ces païties, & peu de temps après j'ai reconnu que les conduits étoient libres, . puifque la liqueur que J'y injectois, fortoit par la fiflule. uoiqué l'injection ne pafle point dans les premiers jours, “il faut la continuer, & faire de légeres téntatives avec la fonde lacrymale : lorfqu'on fait ces tentatives, :{ ne faut rien forcer , fi ce n’eft après avoir fait long-temps ufige - des injections émollientes fans fuccès ; car alors n'ayant plus Mem. 1 740: - 162 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE efpérance de réuflir par la douceur, on n'a rien à rifquer, & l'on peut poufler la fonde plus fort, comme je l'ai déja dit, fur-tout lorfqu'elle entre aflés près du lieu où ces conduits fe dégorgent dans le fac; on ne réuffit pas toüjours, mais on ne peut point faire de mal. Quand on a été affés heureux pour forcer l’obflacle, il faut conferver le palage, en y faifant des injections fré- quentes ; je crois même qu'on y pourroit pafñler un fil de plomb, d'argent ou d'or, bien menu, comme je l'ai éprouvé une fois ; il eft vrai que je n’eus qu'un médiocre fuccès, mais comme on peut faire cette tentative fans danger, je n’y renonce point encore. Si je n'ai pas réuflt complettement, d’autres feront peut-être plus heureux, cela dépend de cer- taines circonftances. | Au malade dont il s’agit, après avoir forcé l’obftacle du conduit facrymal inférieur, & avoir paflé ma fonde jufque dans le fac, j'ouvris la fiftule, j'introduifis un fil d'or à la place de la fonde avec laquelle j'avois forcé le conduit, je pañai ce fil affés avant dans le fac pour le pouvoir tirer hors du trou fiftuleux, ce que je fis facilement avec une petite Curette un peu courbe, que j'introduifis dans la playe; je coupai ce fil à un travers de doigt du point lacrymel & de la fiftule, je repliai fun & l'autre bout, & je les enveloppai d’un petit linge, de maniére qu'ils ne puflent bleffer l'œil. Mon opération auroit été complette, fi j'en avois pu faire autant au conduit lacrymal fupérieur ; mais foit parce qu’il w’eft pas fi facile à fonder que le point lacrymal inférieur, ou que fon orifice fût entiérement bouché, je ne pus jamais y paffer la fonde: cependant le malade a guéri fans larmoye- ment, ce qui ma fait juger que l’obftacle pouvoit n'être que dans le conduit commun, où bien que comme cette perfonne avoit naturellement l'œil moins humecté que d’au- tres, un feul point lacrymal pouvoit fuffire. On peut objeéter que j'ai dit dans mon premier Mémoire, que la dilatation du fac lacrymal dépend de lobftruétion du canal nafal ; d’où il femble qu'on doive conclurre que les pie fs! Slot) Et Nc: ES. 163 points lacrymaux ne doivent pas être obflrués dans plufieurs des cas que je viens de rapporter. Je ne réponds pas préfentement à cette objection, parce que ce que j'ai à répondre m'obligeroit à faire le détail d'une maladie du Siphon lacrymal, que je ne crois pas être décrite par les Auteurs, & que je décrirai dans un troifiéme Mémoire ; je ferai feulement remarquer ici que le larmoye- ment qui arrive après la petite vérole, ne dépend pas toû- jours des points ou conduits lacrymaux. Il n'eft que trop ordinaire que des yeux foient attaqués par les puftules de la petite vérole, & qu'en conféquence les paupiéres fe collent, qu'on y reffente une douleur plus ou moins cuifante, que les yeux douloureux & larmoyants fupportent difficilement l'action de la lumiére, & qu’alors les points & conduits lacrymaux enflammés fe collent &: même fe bouchent, d'où s'enfuit le larmoyement. Mais il arrive auffr très-fouvent que les grains de la petite vérole qui attaquent les narines, les rendent douloureufes, des féchent, les bouchent & les enflamment : alors d’inflammation de la membrane pituitaire s'étend jufqu'au canal nafal, & y produit les mêmes accidents qu'aux points lacrymaux ; car fi cette inflammation bouche le canal nafal, les farmes ne pafferont point dans le nez, & il y aura larmoyement : il faut donc fçavoir diftinguer fr le lrmoyement qui fuit la petite vérole vient de la part des points lacrymaux ou de celle du canal nafal. La chofe eft fouvent très-équivoque, fur-tout lorfque le nez & les paupiéres font attaqués en même temps, car quand il n'y a que l'un ou l'autre, on fçait auquel on doit attribuer le farmoyement: Cette obfervation m'a engagé de laver les narines, de les feringuer avec des décottions émol- lientes, & d'avoir les mêmes attentions pour le nez que pour les yeux , avec cette différence qu’on ne peut point fonder ni injecter le canal nafal comme les points lacrymaux. Ayant fait aux conduits facrymaux les-opérations que je viens de décrire; le jour même & tout de fuite j’examine le canal nafal, & fi je le trouve bouché; j'y introduis par le trou X i 164 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de la fiftule une Sonde à bouton, cannelée, & beaucoup plus grofle que celle qui fert à déboucher les points lacrymaux, & à la faveur de {a cannelure de cette fonde, je paffe une bougie de grofleur convenable, afin de conferver ce conduit ouvert, puis je panfe la playe avec le charpi fn & mollet. A la levée du premier appareil je n’ôte que le charpi pour en remettre d'autre, fans remuer la bougie ni les fils d'or ou de plomb; aux autres panfements je ne change pas la bougie, mais je la remuë dans le canal en la retirant à demi, &la repouffant deux ou trois fois comme pour frayer le paffage ; je ne change de bougie que le 4.me ou le $.me jour, & j'en continuë l’ufage jufqu’à ce que les larmes puifient elles-mêmes reprendre & continuer leur cours naturel dans le nez. Les premiers panfements doivent être très-doux, c’eft pour cela que fans Ôter le fil d'or, je me contente de le déployer, & de le faire mouvoir dans le conduit en le tirant doucement çà & là par les deux bouts, comme on feroit le Séton que l’on auroit pañlé dans une playe. Après m'être fervi de ce fil pendant quelques jours, je le retire fi je juge que la communication foit bien établie ; mais je recom- mence les injections par les points lacrymaux & par le canal nafal, & je les fais deux ou trois fois par jour jufqu’à ce que je fois bien affüré que les larmes auront la facilité de paffer dans fun & dans l'autre. J'évite fur-tout de comprimer les conduits lacrymaux par les tentes , par les compreffes & par les bandages ; car, dans les premiers jours, il eft d'autant plus important d'éviter la compreffion, que le fil d’or, fi l'on s’en eft fervi, ou la bougie, font malgré leur flexibilité, autant de corps étrangers qui incommoderoient beaucoup s'ils étoient preflés contre des parties auffi tendres & aufii délicates que font celles qui les contiennent. Les chofes ainfi difpoées, il faut travailler au rétabliffe- ment du Sac lacrymal, car il eft rare qu’il foit dans fon in- tégrité fr la fiftule eft ancienne. Lorfqu'avec la fonde boutonnée on aura reconnu en quoi le fac eft affecté, l'on y remédiera felon les cas dont je fais D ES $S CGI E-N C_E:5, 165 ici l'énumération. Ce fac peut être percé ailleurs que par le trou fiftuleux ; la gouttiére offeufe, dans laquelle il ef logé, pent être fimplement découverte où cariée ; quelquefois même on la trouve percée par la carie, & alors la membrane qui la recouvre du côté du nez, peut avoir confervé, fon intécrité, ou être altérée & percée de maniére que l'air & Ja morve fortent par le trou extérieur de la fiftule toutes les fois que le malade fe mouche. + L'os fimplement découvert, fe recouvre quelquefois fans s'exfolier, {1 lon a foin d'empêcher le féjour de la Sanie, en panfant mollement & fréquemment, en prévenant ou en combattant l'inflammation, par le foin que l'on prend de conferver les conduits des larmes bien libres, en injectant toutes les routes par lefquelles cette liqueur doit pañier, & enfin par les faignées & le régime. Tant que lon peut craindre linflammation, il ne faut mettre dans le conduit nafal qu'une bougie menuë & très- pliante, parce qu'il faut éviter toutes fortes d'irritations, & les bougies trop groffes & trop dures ne peuvent manquer d’irriter. Si l'os ne fe recouvre point, on attend l’exfoliation, & fi elle eft tardive, on la follicite & on la procure de la même maniére qu’on le fait à la carie dont je vais parler. Lorfqu'il y a carie, je me garde bien de lattaquer par Jesimoyens propofés par les anciens & par quelques mo- dernes qui les employent encore aujourd’hui. Cette carie eft virulente, ou elle ne left pas; fi elle eft: fufpecte de virus, on doit da traiter comme je dirai ailleurs ; car je ne traite ici que du vice local, que je n’attaque point par les topiques ordinaires, comme poudres, teintures, efprits, ardents. & autres : ces remedes font trop vifs pour l'œil, le feu convient encore moins, & je, n'ai jamais douté que les malades à qui _ j'aivû les paupiéres éraillées, n’ayent été mis en cet état par les Cauteres aétuels ou potentiels dont on sétoit fervi pour attaquer leur carie; il eft cependant des Cauteres potentiels dont on peut faire ufage en prenant de grandes précautions : j'en parlerai aïlleurs. X ii 166 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Pour détruire la carie de l'os unguis, j'attends que l’en- flüre foit diminuée, & que la playe foit en fuppuration : je me fers d’un petit inflrument long & étroit, terminé par Jun de fes bouts comme un Barin, & par l’autre comme un Cizeau. Je l'introduis fur los par le bout que je crois Je plus convenable à mon deffein, je picque, je racle, ou même je coupe & détruis l'os, car il eft très-mince, je le fais avec beaucoup de douceur, en évitant de heurter rude- ment les chairs, je retire des petites efquilles que j'ai féparées de l'os, celles qui peuvent être apperçüës, les autres fortent avec le pus. J'obferve pendant toute cette opération de ne point percer la membrane pituitaire qui couvre l'os unguis du côté du nez : je connois qu'elle n'eft point percée, lorf- qu’en faifant moucher le malade, il ne pañle point d'air ou de morve par la fiftule ; mais if faut faire cette épreuve avant que de déboucher le canal nafal, car fans cela on dou- teroit fi air qui fort par la fiftule, vient par le canal naturel ou par Île trou que la fiftule pourroit avoir dans le nez; s'il ne fort que de l'air, la chofe eft équivoque, mais sil fort de fa morve avec l'air, on ne peut douter que ce ne foit le trou fifluleux du nez-qui lui donne pañlage : ainfi pour lever toutes fortes d’équivoques , il faut faire cette épreuve avant que de déboucher le canal nafal, ou fi ce canal étoit libre, il faut le remplir avec la bougie, & alors fi le malade fe mouche, & qu'il ne forte que de l'air par la fiflule, on juge que le fac eft percé du côté du nez, mais que le trou n'eft pas confidérable ; au lieu que s’il fort de la morve, & fur-tout de la morve épaifle, on juge que le trou eft plus grand, & alors on voit bien que non feulement le fac eft percé, mais que la gouttiére ou demi-canal offeux qui le contient, & la membrane du nez le font aufli, de forte que le Siphon lacrymal ouvert dans l'endroit de l'union des deux branches ne doit plus exercer fa fonétion. I femble qu'un pareil defordre foit fans remede ; l'expé- rience m'a cependant appris plufieurs fois qu'on peut y're- médier, non feulement lorfqu’il n’eft que percé, mais encoré } hi à t f DIE +9 à 1 CO 'E IN CES, r67 lorfqu'il-eft prefqu'entiérement détruit, pourvû que lon puifle enlever la carie, & que le canal nafal ne foit point bouché. La premiére condition eft nécefaire, parce que les bonnes chairs ne peuvent croître fur un. os carié ; & la feconde ne left, pas moins, puifque quand les larmes n’ont point {eur cours libre dans le nez, elles inondent la fiflule, & noyent, pour ainfi dire, les fucs nourriciers qui doivent former les -chairs folides, d'où dépend le rétabliffement du fac & la confolidation des fiftules. | Les opérations que j'ai, propofées pour détruire Ia carie, fufhfent toûjours lorfque los unguis eft feul carié, & même on la détruit quelquefois dans le premier jour , parce que cet os, comme je l'ai déja dit, eft f mince, qu'on le réduit facilement en petites efquilles ; mais lorfque la .carie attaque Ja portion de Fos de la mächoire qui fe joint à l'os unguis, la chofe n'eft pas fr facile, parce que cette portion d'os a .un endroit plus épais que l'autre, cependant, avec un peu de patience & beaucoup de dextérité on en vient à bout. H faut de la patience, parce que la partie épaifle qui réfifte à l'inftrument, exige fouvent qu'on applique pendant plu- fieurs mois les médicaments propres à faciliter l’exfoliation ; & fi ces remedes ne réuffiflent pas, il faut de la dextérité, parce qu'il s’agit alors de détruire avec la Rugine l'os carié, en ménageant ce qui refte du fac, fans endommager la . membrane du nez, qui eft au-deflous de l'os qu'il faut dé- truire : à la vérité deux chofes favorifent cette opération délicate, fçavoir le peu d’épaiffeur des os que l'on doit dé- truire, & le-peu d’adhérence qu'ils ont dans ces cas avec fa membrane qu'il faut conferver. Après toutes ces opérations, il paroît. que le Sac lacrymal doit étre confidérablement endommagé, & que fon réta- blifflement doit être très-difficile, fur-tout lorfqu'il s’'eft fait exfoliation de l'os unguis & de l'os.de la mâchoire, parce qu'alors ce fac privé de la gouttiére offeufe qui lé logeoit, doitiêtre fans appui, Malgré toutes ces circonftances ficheules, 168 MEMoIRESs DE L'ACADEMIE ROYALE l'expérience fait voir qu'il fe rétablit quelquefois avec beau- coup de facilité. C'eft un fait que j'aurois eu peine à croire fi je ne l’avois vû. J'eus occafion de l’obferver für un Enfant de huit ans, à qui l'on avoit fait l'opération de Ja Fiftule Jacrymale, fui- vant la méthode ordinaire, c’eft-à-dire, que l’on avoit dé- truit los unguis & percé la membrane du nez pour faire un nouveau paffage aux larmes : on le panfoit inutilement de- puis fix mois. Ses parents l'amenerent à Paris, le voyage lui avoit caufé une ophtalmie confidérable & une fiévre affés vive : June & l'autre difparurent après deux faignées & quel- ques jours de repos, maïs fur-tout en le débarraffant d’une tente de plomb groffe comme une plume de pigeon & de la longueur de 9 à ro lignes, qui pañoit tranfverfalement du fond de la fiftule dans le nez; on en avoit changé cinq fois feulement depuis cinq mois, & celle que j'ôtai y étoit depuis un mois. On me dit que l'intention de celui qui avoit fait l'opération, étoit de ne Îa pas retirer, parce que, difoit-il, lorfque la fiftule fera fermée au dehors, la tente . de plomb par fon poids tombera dans la narine, & fortira lorfque le malade fera quelqu'effort pour fe moucher. J'exa- minai s'il y avoit quelques piéces d'os découvertes, & qui duflent s’exfolier, je n’en trouvai aucune. A Ia vérité, elles avoient eu le temps de s’exfolier depuis fix mois que lopé- ration étoit faite. Après avoir Ôté cette tente, je portai une Sonde à bouton du côté du canal nafal, j’eus affés de peine à le trouver, cependant j'y introduifis ma fonde, & je le débouchaï, puis j'y paffai une bougie aflés menuë par le bout qui va jufque dans le nez, & plus grofle par celui qui de- meure dans la partie du fiphon lacrymal qui doit former le fac : cette bougie étoit attachée par un fil, à une ligne près du gros bout, de maniére qu'après l'avoir pouflée du côté du nez jufqu'au fil qui y étoit attaché, je la retirai en enhaut de fa quantité de 2 lignes ou environ, pour qu'elle occupât le lieu où fe trouve le fac; de forte que le fil fe trouvoit au centre de l'ouverture de la fiflule, & que le gros bout de la bougie DSE4S y + C-L'E N,C-E., S, : 169 la bougie auquel j'avois donné la forme d’une olive, rem- plifloit tout le lieu où réfide le fac : cette bougie ainfi placée, prefloit les chairs, & les poufloit vers le trou, qu'avoit fait l'Opérateur, & par lequel pafloit ci-devant la Sonde de plomb. Mon deflein étant de boucher ce trou, je me fuis fervi de cette bougie comme d'une efpece de Mandrin fur lequel les chairs voifines fe font moulées à mefure qu'elles font accrüës & qu'elles fe font cicatrifées. Pour faciliter la chofe, je panfai le malade mollement avec le feul charpi fin & fec, je couvris le tout d’une comprefle mouillée dans un blanc d'œuf battu avec un peu d'Alun de roche : ce panfement fut continué cinq ou fix jours, & je retirai la bougie pour en introduire une, un peu plus grofle. J'eus la fatisfaction de voir que le trou fait par le Chirurgien ou Opérateur, étoit bouché, que les farmes pafloient par les points lacrymaux dans la fifule, & qu'elles ne tomboient fur la jouë que parce que le canal nafal, quoique bien débouché, ne pouvoit encore les con- duire dans le nez,-tant parce que la paroi n'étoit pas encore cicatrifée, que parce que la fiflule n'étant pas réunie, le fac ne pouvoit les recevoir & les diriger à l'ouverture du canal. Enfin, en continuant ce panfement , & en morigénant de temps en temps les chairs par le moyen de Ia Pierre infer- nale bien ménagée, les bords de Ja fiflule fe rapprocherent peu-à-peu, & lorfque l'ouverture extérieure commença de rendre le paffage de la bougie difficile, j'en ceflai l'ufage, & la réunion parfaite fe fit dans deux ou trois jours, Cette derniére obfervation pourroit étre accompagnée de bien d'autres circonflances, puifque la fiflule du malade étoit écrouelleufe; mais j'ai cru ne devoir rapporter ici que ce qui a un rapport immédiat aux dérangements du Siphon lacry- mal, & aux moyens que j'ai employés pour les réparer. ON 20 Février 1740. 170 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE BOT'DU' REPOS" DESMEORPE Par M. DE MAUPERTUIS. S: les Sciences font fondées fur certains principes fimples & clairs dès le premier afpeét, d’où dépendent toutes les vérités qui en font l'objet, elles ont encore d’autres principes, moins fimples à la vérité, & fouvent difficiles à découvrir, mais qui étant une fois découverts, font d’une très-grande utilité. Ceux-ci font en quelque façon les Loix que la Nature fuit dans certaines combinaïfons de circonftances, & nous apprennent ce qu'elle fera dans de femblables occafions. Les premiers principes n'ont guére befoin de Démontftration, par l'évidence dont ils font dès que l'efprit les examine ; les derniers ne fçauroient avoir de Démonttration phyfique a /2 rigueur, parce qu’il eft impoflible de parcourir généralement tous les cas où ils ont lieu. Teleft, par exemple, le principe fi connu & fr utile dans la Statique ordinaire; que Dans tous les affemblages de corps, Zeur commun centre de gravité defcend le plus bas qu'il efl poffible. Tel eft celui de la confervation des Forces vives. Jamais on n’a donné de Démonftration générale à la rigueur, de ces principes; mais jamais perfonne, accoûtumée à juger dans les Sciences, & qui connoitra la force de F'induétion, ne doutera de leur vérité. Quand on aura vü que dans mille occafions la Nature agit d’une certaine maniére, il n’y a point d'homme de bon fens qui croye que dans la mille- uniéme elle fuivra d’autres loix. Quant aux Démonftrations à priori de ces fortes de prin- cipes , il ne paroïît pas que la Phyfique les puiffe donner; elles femblent appartenir à quelque fcience fupérieure. Ce- pendant leur certitude eft fi grande, que plufieurs Mathé- maticiens n'héfitent pas à en faire les fondements de leurs Théories, & s’en fervent tous les jours pour réfoudre des — ST mm LATE Buse n 8 1@ AE Nr € -Æ re 171 Problemes , dont la folution leur coûteroit fans eux beau- coup plus de peine. Notre efprit étant auffi peu étendu qu'il left, il y a fouvent trop loin pour lui des premiers principes au point où il veut arriver, & il fe Jafle ou s'écarte de fa route. Ces loix dont nous parlons, le difpenfent d'une partie du chemin : il part de-là avec toutes fes forces, & fouvent n’a plus que quelques pas à faire pour arriver là où il defire. . H n'y a point de fcience où l’on fente plus le befoin de ces principes, que dans la Statique & la Dynamique ; la com- plication qui s’y trouve, de la force avec la matiére, y rend plus néceflaires que dans les Sciences fimples, ces afyles pour les efprits fatigués, ou égarés dans leurs recherches. Ils voyent facilement s'ils fe font trompés dans leurs propofitions, en examinant fi le principe s’y retrouve ou non. Ce n’eft que dans ces derniers temps qu'on a découvert une loi dont on ne fçauroit trop vanter fa beauté & l'utilité, c'eft que, Dans tout [yfleme de corps en mouvement , qui agiffent les uns fur les autres, la fomme des produits de chaque Maffe par le quarré de fa viteffe, ce qu'on appelle la Force vive, demeure inaltérablement la même. En méditant fur la nature de Equilibre, j'ai cherché s'il n'y auroit pas dans la Statique quelque loi de cette efpece ; s'il n'y auroit pas pour les corps tenus en repos par des Forces, une loi générale, néceflaire pour leur repos ; & voici celle que j'ai trouvé que la Nature obferve. LOI DU REPOS. Soit un fyfleme de corps qui pefent, ou qui font tirés vers des centres par des Forces qui agiffent chacune fur chacun, comme une puiffance n de leurs diflances aux centres ; pour que tous ces corps demeurent en repos , il faut que la fomme des produits de chaque Maffe , par l'intenfité de fa force, à par la prifflance n—-1 4 fa diflance au centre de [a force (qu'on peut appeller la fomme des Forces du repos) faffle un Maximum o4 un Minimum. ‘du Fig. 1. Fig, 2. 172 MEMOIRES DE L'ACADEMIE' ROYALE DÉMONSTRATION. 1.° Soit un fyfteme d’un nombre quelconque de points y sy q à efants, ou de corps dont les mafles foient fort petites par rapport à la diftance où ils font dés centres vers lefquels ils pport à K ee Es pefent. Soïent ces corps A7, M’, M”, &c. attachés à des rayons immatériels CM, CM", CM", mobiles autour du point fixe €. Soient leurs mafles =", m',m"; & foient, dans un nombre égal de points, Æ, F”, F”, des forces f, f’, f', qui s'exercent fur chacun des corps, chacune comme une puiflance » de fa diftance EM, FM", FM" =, 7,1%, chaque force n'ayant de pouvoir que fur fon corps. Soient prolongés les rayons CA, & tirées des points F, les perpendiculaires FG, Von aura ( par la décompofition RER P LE des forces) mf7" x E pour Îa force motrice qui tire le rayon CM perpendiculairément ; & cette force multipliée par la longueur du levier CM, fera mfz x Fe CM, pour celle qui tend à faire tourner ce levier, & ainfi des autres. Confidérant donc maintenant tout le fyfteme dans Ia fituation prochaine, & les corps en u, u', u"; ayant tiré les lignes Fu, & des centres F décrit les petits arcs AK, MAG SU MER. À x . On aura 77 — 77 » Qi fubflitué dans les forces motrices à la place de donne "1 f 7" x De C2, pour chaque corps. Et la raifon de CM à Mu étant pour tous les corps la même, & multipliant tous les produits, on aura, pour que le fyfleme foit en équilibre, mfg dy + m'f 7" d7 — n° ff {" dz"—=o. D'où l'on voit que » f 7 +" + f LT 4m PT" étoit un Maximum où un Minimum. C. Q. EF, D. 2.° Si les corps, au lieu d’être attachés à des rayons inflexibles, font attachés à des cordes unies en €, foit le fyfleme prêt à parvenir dans la fituation nouvelle uv w'y we", DES SCIENCES. 173 & foit tirée par € & » la droite indéfinie C». Rapportant à cette direction les efforts de chaque corps l'un contre les autres, & tirant des points 47, les perpendiculaires 41 P, AMP", M"P", fur cette ligne, il faut, pour qu'il y ait équi- Ï à no CP D pr un CP libre entre ces FRE que nftxor =" fx re 11 11 Un Hum fx or Décrivant maintenant des centres Æ# & des rayons 77 En 11 , ’ : y 4 Fr, Fr, les petits arcs v Æ, v K°, v K", on peut pour CP CP' CP" CK'.Ck', Ck' LT CM’ cn’ cr, Mate, =, “cg dans l'Equation précédente, & l'on aura mfg x CK= m'f' 7" x CK! + nf r" x CK”. Mais les cordes étant unies en C, CK, CK', CK", font les quantités dont les corps fe font approchés ou éloignés de leurs centres, c’eft-à-dire, font d?, dy, dZ": mettant donc dans Equation précédente ces valeurs, on a m fg dz = m'f"g" d{ + m'f"z'"d7". D'où l'on voit que #f7 "+ mn f LT om fr" étoit un Maximum où un Minimum. C, Q. F. D. SC Oo L'I)E: Si lon confidere maintenant tous les lieux des forces réunis, & toutes les forces réunies dans un feul point, & cette force qui en eft le réfultat comme conftante, & agiffant fur tous les corps, on voit que le fyfteme fera en équilibre lorf- que la fomme des corps multipliés chacun par fa diftance au centre de force fera un Maximum où un Minimum. Et fi lon fuppofe ce centre de force à une diftance in- finie du fyfteme, il eft clair que pour que le fyfteme foit en équilibre, 47 faut que le centre de gravité de tous les corps qui Ze compofent, foit le plus bas ou le plus haut qu'il Joit poffible, ou le plus près ou le plus loin du centre de force. Et ce principe fondamental de la Statique ordinaire, n’eft qu'une fuite & un, cas particulier du nôtre. On a fur le champ par ce Théoreme, la folution de plufieurs Queftions de Méchanique qui ont autrefois arrêté Y ii 174 MÉMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE d'habiles Géometres, & dont ils n’ont donné que des So- lutions particuliéres qui leur ont coûté bien de fa peine & * Voy. Fermat de grandes longueurs. * oper. Mathem. - Lneie à Soit, par exemple, Îe levier droit ACB, mobile autour fav. #"" du point C, & chargé de deux corps À & B, dont les Fig. 3. mafles foient fort petites par rapport à leur diftance du point Æ vers lequel ils pefent ; & foit en F'une force quel- conque p, dont l'aétion fur eux foit proportionnelle à une puiflance » de leur diftance à ce point : on demande quelle fera la fituation d'Equilibre? Soient tirées par les points F & €, la droite indéfinie FP, les lignes FA, FB, & abaïflées des points À & 8 fur FP, les perpendiculaires AP, BQ ; foient les lignes CA —a, CB—=b,CF=c, CP=x, & les mafles des deux corps — À &—=2B, on aura FA=V(cc+aat-2cx) & FB=Vcc+bb— 2), Maintenant par notre Théoreme, pour qu'il y ait équi- libre, il faut que Le on tn pA(ec+aa+2cx) ? +pB(cc+bb— cs CD Le fafle un Maximum ou un Minimum. On a donc HA—1 LED À 2 pA(cc—aa-2cx) À dx=pB(ec-bt—2#%3)t les H—1 nel v NE -UIT HS) 2bc z ou Aa (cc+aa-+-2cx) —=Bb(cc+ bb = x) dry BAT BAR (ec bb) — ANS a 01 fcc+ aa) | FAT Det SAS NAT TRES ne A RE gl +2 Bi ji Prenant CP égale à cette valeur de x, & tirant par le point P la perpendiculaire PA, le point où le levier B À 4 rencontrera, donnera la fituation d'équilibre, DES SCIENCES, 17$ L'Equation N—1 — Aa (cc + aa + 2x) . = Bl(cc+bb— 2h) fait voir que Si le centre de Ia force eft à une diftance infinie, comme on le fuppole pour tous les corps pefants qu'on examine dans Ja Méchanique ordinaire, il eft clair que quelle que foit Ja puiffance de la diftance felon laquelle cette force agit, lés termes aa, bb, & ceux où eft x, s'évanouiffent devant cc; & il fuffit, pour qu'il y ait équilibre, que A4= B4, ceftà- dire, que les mafles des deux corps foient en raifon renverfée des bras du levier, & l'équilibre fubfiftera dans toutes es fituations du levier, puifqu'il eft indépendant de x. Si n—1, c’eft-à-dire, fi la force agit en raifon directe de la diftance au centre X, on a encore, pour {a condition d'équilibre, Aa— B4. D'où l’on voit que dans cette hy- pothele il y a encore un point C autour duquel le fyfteme des deux corps eft toüjours en équilibre, s’il y a été une fois, c'efl-à-dire, qu'il y a dans ces deux hypothefes un centre de gravité toûjours le même dans toutes les fituations. Mais hors de ces deux hypothefes, on voit par Ja loi du repos, qu'il eft impoffble qu'il y ait de pareil centre, ; A—1 Et la fimplicité de l'Equation Aa (cc+- aa 2cx) 27 N— 1 = Bb CcHbb—2x) 2 ne donne pour le levier que deux fituations d'équilibre, lune à droite & l'autre à gauche. H ya cependant encore deux fituations où les corps de- meureront dans une efpece d'équilibre, ce font celles où ces deux corps fe trouvent dans la ligne qui pañfe par le centre de force & par le point d'appui. Quoique Equation précédente ne donne pas ces deux _f'uations, elles font cependant contenuës dans la loi du 176 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE repos, & dans la premiére Equation qui en réfulte, dans laquelle elles font données par dx = 0. On voit facilement que fi la pefanteur eft uniforme, comme on le fuppofe dans la Méchanique ordinaire , & fe fait vers le centre de la Terre, il n'y a point à /a rigueur, de centre de gravité dans les corps, c’eft-à-dire, de point par où étant fufpendus, ils fe tiennent indifféremment dans toutes les fituations, quoiqu'il y ait dans ces corps un point qu'on peut prendre phyfiquement pour ce centre , à caufe de la petitefle dont font les corps & les leviers qui font l'objet de la Méchaniqué ordinaire par rapport à la diftance où ils font du centre de la Terre. Nous donnerons dans la fuite d’autres applications de gette Loï. EXAMEN Mem. de LAcad 1740. pl u. pag. 176. | 77 Tld Jeu. Thailand ep, FPE # ‘4 MR SEUNSACIÉIENN CE 177 . EXAMEN DES REMEDES DE MAD.4* STEPHENS wr PAOMUIRN EVA PER R E, DD Par M. MORAND. —. TJ IN don confidérable fait par le Parlement d'Angleterre … à Mie Stephens, pour avoir publié fes Remedes pour —._ Ja Pierre, & fur les témoignages avantageux rendus par les … Commiffaires chargés d’en examiner les effets, devoit né- . ceffairement exciter l'attention des gens de l'Art. + La Pierre eft une maladie fi cruelle, & l'opinion, qu’il ne peut y avoir de remedes pour la difloudre, eft fi accréditée, qu'aucune découverte ne pouvoit être plus intéreffante que celle-ci. h. D'ailleurs, elle s’eft annoncée de la meïlleure façon; Mlle . Stephens convaincuë de la bonté de fes remedes, en a donné 4 qui lui affüroit une fotnme de cinq mille livres fterlings, ou … x1:4000 livres de notre monnoye, au cas que fes remedes … fuffent jugés tels qu'elle l'aflüroit. Les informations faites de Jon caractere, ont établi que c'étoit une Fille d'une honnête … famille de la Province de Berkshire, qui dès fa jeunefle s’eft occupée à compofer des remedes pour les donner aux pau- … vres. Enfin fes Commiffaires, au nombre de vingt-deux, ont . certifié qu'ils étoient convaincus de l'utilité & de l'efficacité . de fes remedes pour la Pierre, & vingt en ont reconnu la » vertu diffolvante ; en conféquence de quoi, M.le Stephens … a touché la fomme promife le 28 Mars 1740. V.S. Je fuppofe cette Recette connuë de tout le monde ; elle d'abord imprimée en Angloïs dans tous les Papiers pu- ics, enfuite donnée en François par M. de Bremond, & Latin par M. Hartley, Médecin de Londres. On fçait que Men. 1740. ZÆ 12 Nover:b, 1740. … a Recette au Public, fur la fimple promefle du Parlement, . 178 MEmMoirEs DE L'ACADEMIE RoYALE ces remedes confiflent en une Poudre & une boifion pour. la Pierre, & des Pilules pour la Gravelle. Aufli-tôt que la Recette eut été divulguée, les fentiments fe partagerent, & c'eft aflés ordinairement ce qui arrive à chaque événement nouvêau. Les uns perfifterent dans le fen- timent, qu'il ne peut y avoir aucun diflolvant de la Pierre dans la Veffie; les autres conviennent que lon n’en connoît point jufqu'à préfent, mais ne le croyent pas impoffible. Si les queftions agittes au fujet des Remedes de Mlle Stephens ne rouloient que fur ce point, on fe concilieroit eut-être aflés aïifément ; car quoique les mots de Pouvoir de diffoudre la Pierre, fuflent précifément énoncés dans l'Adte du Parlement, je crois qu'il en faut prendre l'efprit aux dé- ens de la lettre, & qu’on doit conclurre en faveur des rez medes, fi réellement ils font capables de guérir de la Pierre, de quelque façon que ce foit. | On s'eft encore partagé fur d'autres points. Les uns n’on$ cru voir dans la décoction & dans les Pilules, qu'un affem- blage bizarre de plufieurs drogues, qui ne pouvoit promettre un effet fi merveilleux : d’autres ont trouvé de refte dans différents remedes galéniques, des exemples de mélanges finguliers, dont les propriétés font cependant reconnuës. I y en a qui ont attribué aux remedes, la formation des matiéres crétacées & pierreufes, renduës par la voye des urines, & cette allégation.a eu affés de partifans pour en- gager M. Hartley à la réfuter férieufement ; d'autres au con- traire n’ont pas douté que l’expulfion de ces matiéres folides ne fût l'effet fouhaité des remedes. | Plufieurs les ont méprifés fans les connoitre ; mais ceux qui s'intéreflent au bien de la fociété, n'ont pas cru qu'il y eût rien à négliger fur une matiére fi importante. Tel & été le fentiment de l'Académie, qui m'a chargé d’en faire des expériences. Je les ai commencées il y a quinze mois, & j'en donne aujourd'hui le Réfultat dans ce Mémoire, qui contient, premiérement un précis de ce que j'ai obfervé dans. quarante perfonnes qui ont ufé des remedes de Mlle Stephens; + Mines TS CT EN CES 179 ? fécondement , différentes expériences que j'ai fites fur des Pierres de Veflie, pour expliquer l’action des rem:des; troi- fiémement enfin, les conféquences qu'on en peut tirer. | anus 1 | en PREMLÉRE PARTIE. } J'ai divifé en quatre claffes les malades chés qui j'ai fuivi Veffet dés remedes, & j'en aï fait une Lifte détaillée, qui * contieñt leur âge, leur maladie, le temps qu'ils ont ufé des remedes, & ce que l'on en a obervé. Cette Life étant affés —_ longue, je vais en donner une courte récapitulation , qui 4 » füfhra pour l'intelligence de mon Mémoire. Ceux qui vou- …. dront plus de détail, la trouveront en entier à la fin. Les … chiffres qui font ici, font relatifs à ceux de la Lifte, 0 La premiére clafle eft compofée de cinq perfonnes, qui ont éflayé les remedes pour des maladies des Reins, ou de la Vefie, autres que la Pierre: Ts ont paru faire du bien à ceux qui fe plaignoient d’embarras dans les Reins, & mème de Colique néphrétique : ils ont augmenté les maux de ceux qui rendoient des Urines purulentes, & qui par con“ Er avoient quelque Ulcere dans les voyes urinaires. La feconde claffe eft compofée de huit perfonnes des * deux fexes, qui ont pris les remedes pour la Gravelle, dont deux (7. 1 0:) fe comptent abfolument guéris, quatre (6- Dire … | 12.13.) font foulagés, deux ( 8: 0. # n'en ont tiré aucun fruit, plufieurs (6.7. 10. 1 3.) ont jetté des pierres, même . affés grofles. "La troifiéme claffe eff faite de cinq malades, qui avoient les fymptômes de la Pierre, mais qui n’ont pas été fondés. L'un d'eux ( 14.) âgé de cinquante-cinq ans, à pris la ‘rs & la boiflon pendant trois mois, & ne be plus rien de ce qu'il refféntoit auparavant ; trois autres (1 5. 16. . 18.) font foulagés, deux (1 5. 1 6.) ont rendu des pierres k lu entiéres, un autre ( 14.) a jetté des morceaux de pierre . en forme d’écailles. DL quatr iéme claffe eff faite de ving -leux malades de Dférents: âges, depuis trois ans jufqu’à foixante-dix-neuf, en Z i + 180 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qui la Pierre a été bien pofitivement conftatée par la Sondes De ces vingt-deux, il y en a douze que j'ai fondés moi- même, les dix autres l'ont été par des Chirurgiens connus. Deux de cette clafle (33. 34.) étant aétuellement dans l'ufage des remedes, qu'ils ne prennent que depuis peu, on pourroit la réduire à vingt qui les ont finis. De ces vingt, fur qui on peut porter un jugement plus certain, il y en a quatre (19.21.27. 28.) qui ont pris les remedes très-peu de temps, & dont l'un (2 1.) s'eft trouvé confidérablement foulagé ; deux (19. 28.) n’en ont reçü ni bien ni mal; un (27.) preflé par les douleurs de la pierre, s'eft fait tailler, & on lui a tiré une pierre molle. De feize qui en ont pris pendant un temps aflés confi- dérable, il y a onze adultes & cinq enfants. Des onze adultes, trois (20. 24. 26.) n'en ont retiré aucun fruit ; quatre (29. 31.32.35.) font fort foulagés, & quatre (22.23. 25.30.) fe comptent abfolument guéris. Des cinq enfants, un feul (37.) fe dit foulagé ; les quatre autres (36. 38. 39.40.) ne l'ont point été du tout, & ont fouffert l'opération de la Taille ; les pierres qu'on leur a tirées, ne portoient aucunes marques de diflolution. Comme les principaux effets que ces remedes ont pro- duits, ont été communs à plufieurs des malades , je les ai raflemblés fous un même point de vüë, & voici ce que j'en ai obfervé. La boiffon favonneufe & les poudres dans le Vin blanc, que l'on prend de fuite, ont caufé à plufieurs un mal de gorge qui n'a pas duré. Elles ont excité la toux en quelques- uns, & le vomiflement en quelques-autres; mais il a paru que c'étoit l'effet, ou de leur âcreté au pañlage, ou du dégoût, car les malades s’y étant accoütumés infenfiblement, ces petits accidents n'ont pas eu de fuite. Il y en a fort peu qui s'en foient rebutés, & plufieurs les ont continués avec cou- rage pendant près d'un an. En général, ils ont augmenté les douleurs dans les pre- miers jours; il y a eu des malades à qui ils ont rendu aflés DES SICIENCES. 18r promptement la faculté de retenir leur urine, ce qui eft ordinairement de bon augure , puifque ces remedes n'agiffent efficacement qu'autant que l'urine qui en eft empreinte, f€- journe plus long-temps dans la Veffie. + Les Urines de ceux qui font à l'ufage des remedes, ont une odeur très-forte de Sel volatil ammoniac. Communé- ment ils ont rendu avec l'urine, dès les premiers temps, des glaires & un fédiment blanc, qui, mis à part & defféché, fe convertit en une poudre jaunâtre, & cette poudre mife fur des charbons, rend une odeur fétide animale, Plufieurs n'ont jetté que de ce fédiment ; d'autres ont rendu de petites James criftallifées, & comme talqueufes ; d’autres, des écailles pierreufes, convexes d’un côté, & concaves de l'autre ; d'autres, des fragments de pierre qu'on ne pouvoit écrafer entre les doigts, & où l’on éomptoit plufieurs couches ; quelques-uns, de petites pierres entiéres, telles qu’on en jette quelquefois à la fin des Coliques néphrétiques ; d'autres ; fujets à rendre habituellement de petits fables très-ronds & rougeûtres, cefloient d'en rendre pendant qu'ils ufoient des remedes. If y en a fort peu en qui on ait vü du fang dans leur urine, & ils s'étoient apperçü de la même chofe aupa- ravant. . Ce font-là les effets généraux des remedes. Il y en a eu _de particuliers, par rapport à d’autres circonftances, dans lelquelles fe font trouvés quelques malades. Par exemple, ils ont diflipé une enflüre des jambes que deux (7. 2 3.) avoient . depuis long temps, & l'un des petits enfants (40.) a rendu des Vers. Une chofe bien eflentielle, c’eft qu'ils n’ont dérangé en perfonne ni l'appetit, ni les digeftions, ni aucune des prin- cipales fonétions de la nature. Communément ils conftipent , quelquefois ils ont fait le contraire ; mais on a appris par lufage, qu'on pouvoit em- ployer les poudres comme aftringentes, & la boiflon comme laxative, au moyen de quoi on corrige l'un par l'autre, en donnant plus ou moins de l'un des deux remedes. Z iÿ 192 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE Enfin l’on peut affürer qu'ils n'ont eu aucun inconvénient marqué, excepté en ceux qui avoient des urines reconnuës purulentes, avec la Pierre, ou indépendamment. Dans ceux-là, les douleurs ont été augmentées par les remedes, du moins eft-on autorifé à le croire, parce qu'elles ont été moindres en cefflant les remedes. Cet abbrégé fidelle de leurs effets, fuffira pour en donner une idée. Je pañle au détail des expériences qui ont été faites, pour tâcher de connoître la maniére dont ils operent, & d’en établir la raifon phyfique. JE G'OINIDIEN LP 4 RÎT ae La difinétion que quelques-uns admettent entre un re- mede lithontriptique & un diflolvant de la Pierre, peut avoir lieu, en prenant les termes à la rigueur. C'eft apparemment ce qui a engagé deux des Commiflaires de Mlle Stephens, M. Pellet, Préfident des Médecins du College de Londres, & M. Nefbitt, Cenfeur, à donner à part leur Certificat, dans lequel ils ont attefté feulement l'utilité & l’efficacité des Remedes. L'on a fçû que M. Nefbitt difoit en particulier, qu'ils agifloient plûtôt comme lithontriptiques que comme diflolvants. Pour qu'un diflolvant de la Pierre remplifle exaétement Jidée que préfente ce mot, il faudroit, dit-on, qu'un remede reconnu tel, changeît la Pierre qui en auroit éprouvé l'action, en une fubftance molle, comme fi elle étoit, pour ainfi dire, fonduë, & c'eft même une expreffion dont on fe fert quelquefois à cette occafion, au lieu qu'un lithon- triptique, à confulter rigoureufement l'étymologie, ne fait que divifer la Pierre en petites parties. 11 faut cependant convenir que rien n’a plus Fair d'une chicane de mots; car fi l'on avoit en Médecine un remede capable de pénétrer la furface de la Pierre, d’en décompofer le tiflu, d'en rompre les liens, & d'en procurer l’expulfion en petites parties par la voye des urines, on auroit un re- mede propre à guérir la Pierre; & avec un lithontriptique de cette efpece, chercheroit-on un diflolvant ? DES SCrENCES 18% . Au furplus, les Remedes de M.ll:Stephens femblent réunir les deux propriétés, & premiérement les expériences aux- quelles on les à foûmis, en montrent la vertu diflolvante, … Ces expériences ont été faites en Angleterre par M. Hales, Auteur de la Statique des Végétaux, & par M. Hartley; en France, par M. Geoffroy & moi. M. Hartley a donné les fiennes dans un Recueil qu'il a publié, & qui a été traduit en François. Les Lettres qu'il m'a écrites en particulier, en contiennent quelques-unes de M. Hales ; mais depuis ce temps-là, M. Hales lui-même a prefqu'épuilé la matiére, & l'on verra incefflamment les recherches curieufes qu'il a faites fur cela. …_ M. Geoffroy a donné à l’Académie un Mémoire très- Vo. &s Mém. intéreflant fur le même fujet. Je vais rapporter les expériences “pe 1759 que j'ai faites en particulier , & j'y ajoûterai des réflexions LE fur la marche des remedes avant qu'ils arrivent à la pierre. ; J'ai fcié en quatre une Pierre de Veflie humaine, fort lifle, . très-folide, & de la groffeur d’un Abricot. J'ai mis chaque morceau dans un Poudrier de verre, fçavoir, un morceau pefant 127 grains, dans Furine d’un homme qui prenoit actuellement la boifion & les poudres; un morceau pefant … rrg grains, dans l'urine d’un homme parfaitement fain; un . morceau pefant 9 3 grains, dans la boifion favonneufe ; un _ morceau pefant 68 grains, dans la diflolution fimple du Savon, en égale quantité à celle de la boule favonneufe. Les quatre morceaux de la même Pierre trempoient égale- ment, chacun dans fa liqueur refpeétive. - J'ai marqué les vaifleaux, & je les ai mis dans un four- neau de fable, à la chaleur d’un feu de lampe, à peu-près. égale à celle de l'urine naturelle dans la Veflie. J'ai laiflé ces . pierres en digeftion dans leur liqueur pendant un mois, en. … obfervant feulement de changer les urines tous les jours, & - ne faifant aux pierres autre chofe que de les laver légerement - dans de f’eau nette, fans les frotter, ni les brofier, comme: - on l'avoit fait dans quelques expériences rapportées par M. … Hatkey. 4 184 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE Ces quatre morceaux ayant reflé conflamment en di- geftion fur le fable chaud pendant un mois, je Jes retirai de leurs vaifleaux, & les pefant à l'inflant, je les trouvai augmentés de poids, hors celui qui avoit été dans la boiflon favonneufe. Celui qui avoit été dans l'urine d'un homme à lufage des remedes, paroifloit picqué de petits creux fur fa furface, & le vaifleau étoit incrufté d'une matiére pierreufe fort épaifle, qui repréfentoit une végétation faline avec quan- tité de petits brillants. Le morceau qui avoit été dans la boiffon favonneufe, me daiffa dans les doigts la premiére écorce, & quelque chofe de Ja feconde, & fe trouva pefer déja 1 2 grains de moins fur 93. Je mis enfuite les quatre morceaux fur des cartes, & je les fis fécher fur le même fable pendant trois jours, pour difliper l'humidité dont ils étoient plus ou moins chargés. Les ayant pes alors, le morceau dans urine empreinte de la qualité des remedes, qui pefoit avant l'expérience 127 grains, avoit perdu 3 grains. Le morceau dans l'urine d’un homme parfaitement fain, pefant avant l'expérience 1 19 grains, avoit acquis un grain de plus. Le morceau dans a boifion favonneufe, pefant avant l'expérience 93 grains, n’en peloit plus que 61 , ce qui fait près d’un tiers de dimi- nution. Enfin le morceau dans l'eau de Savon, pefant avant l'expérience 68 grains, étoit diminué de 8 grains. Il eft bien difficile de fe refufer aux conféquences natu- relles que préfentent ces expériences : on y voit clairement, ce me femble, que des pierres environnées de l'urine ordi- naire, y reçoivent des accroiflements par la jonétion de cer- taines parties de l'urine à la pierre. Au contraire, on y voit la pierre environnée de l'urine qui eft imprégnée des re- medes, devenuë plus pénétrable à {a liqueur environnante, & un peu diminuée de poids. On eft obligé d'attribuer cette diminution aux remedes, puifque la Pierre environnée de Ia liqueur favonneule, y a perdu près d’un tiers de fon poids. F1 paroït enfin que ce n'eft pas au Savon feul que cet effet appartient, DES" US CH ENIC ES. 185 appartient, puifque la Pierre ; dans l’eau de Savon, n'a perdu que 8 grains fur 68. Il faut donc néceffairement reconnoître dans Ia liqueur favonneufe une vertu diflolvante, dont on expliquera l'opé- ration par des principes avoués des Phyficiens. On fçait que la Pierre eft un véritable Tartre, qui contient béaucoup de Sel volatil, fuivant les expériences de Boyle?, * Cité par & une grande quantité d'air, fuivant celles de M. Hales b; M. Huales. D Sratique que les parties de Ia Pierre, & celles de toute concrétion 4x Végéux, dure dans le corps des animaux, font liées par des matiéres 7 167. Ÿ grafles, & que les Sels alkalis font feuls capables de defunir “ ces matiéres qui lient les concrétions. Or en prenant par jour trois demi-feptiers de la boiffon, dans chacun defquels il entre 2 onces 2 gros de Savon, on prend, fuivant l'analyfe faite par M. Geoffroy, une once 45 grains d'Huile d'Olive, & environ 3 gros de Sel de Soude, leffivé par la Chaux vive. Le malade reçoit donc dans fon Sang une certaine quantité de Sels alkalis lixiviels du Savon, qui font tranfmis aux Urines, puifqu’elles devien- nent alkalines elles-mêmes, & qu'elles verdifient le Syrop violat, fi-tôt qu'elles font renduës, ce que l'Urine ordinaire ne fait qu'après avoir été gardée pendant quelque temps. : L'action des Sels alkalis eft fortifiée par quelque portion de Chaux, qui eft le diflolvant général de toutes les parties animales ; elle eft encore augmentée par les poudres calci- nées de Limaçons & de Coquilles d'œuf, qu’on prend en même temps, lefquelles donnent une vraye Chaux, très-âcre à la Jangue ; & c’eft-là le véritable effet de ces poudres, car il feroit ridicule d'imaginer que la Coquille d'œuf, vantée de tout temps comme lithontriptique, puifle ufer la Pierre au moyen de fes afpérités. Il y a donc dans les remedes, des parties de Chaux qui doivent entamer la Pierre, & des Sels alkalis qui doivent la décompofer. Mais on fera fur cela trois queftions, qu'il eft important de réfoudre. On demandera premiérement, quelle preuve a-t-on que les remedes arrivent aux Urines avec les parties Mem, 1740. , Aa * ° les Mem. dl'Ac. 1725. 186 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE que nous reconnoiffons capables d'entamer la Pierre ? Secon- dement, s'ils y vont, comment ne font-ils point de mal, étant mélés avec le Sang qui les y porte? Troifiémement, y étant arrivés, comment ne bleflent-ils point la Veffie? Quant à la premiére queftion , il eft démontré que le Savon va aux Urines, par plufieurs preuves, dont les unes font fournies par la fimple obfervation, les autres par l'ana- lyfe chymique. J'ai retrouvé le Savon fous la forme d’une pellicule onclueufe fur la furface des Urines repofées, de plufieurs de ceux qui prenoient les remedes ; en d'autres, j'y ai vü les. mêmes couleurs d'Iris qu'on voit aux bulles de Savon, & que la liqueur favonneufe a laiflées aux parois du Poudrier où elle avoit féjourné. Quelques malades (2 3.40.) ont jetté avec les urines, des glaires d’un bleu-päle, mais aflés marqué pour prouver le pañlage des parties du Charbon & de la Soude dans l'urine; car M. Geoffroy l'aîné a fait voir * qu'on peut tirer de tout Charbon, foit animal, foit végétal, un bleu plus ou moins vif, à proportion que le Charbon appro- che plus ou moins de l'état de cendre, & qu'on en tire bien davantage, lorfqu'il y a mêlange de Sels alkalis. Enfin lAna- lyfe que M. fon Frere a faite l’année derniére, des Urines- imprégnées des Remedes, lui a fait retrouver dans les Urines. du Sel de Soude & de l'Huile, qui font la bafe du Savon. Donc les remedes arrivent aux urines avec leurs parties: diffolvantes. Quant à la feconde queftion, ces remedes ne féjournent pas aflés dans le Sang, pour y faire du defordre, & ce n’eft que par leur féjour avec les urines, & de fuite, par le féjour des urines autour de la Pierre dans la Veflie, qu'ils agiflent fur la Pierre. Apparemment qu'il eft réfervé à l’Urine de développer les principaux diflolvants de Ja liqueur, qui ne peuvent l'être dans le Sang, avec lequel elle roule trop rapi- dement.. Cette néceffité du féjour des urines, pour donner le temps: au développement, eft encore prouvée par une circonflanee DYECS MSTC TE NC ES 187 affés ordinaire à ceux qui ufent des remedes, fçavoir, qu'ils me rendent de parties pierreufes avec l'urine, que Jorfqu'ils commencent à uriner moins fréquemment : & de-Ià on a conclu avéc raifon, que ces remedes n'auroïent point de prife fur les Pierres des Reïns, au moins pour les difloudre, parce que l'urine qui les environne, n’y féjourne pas affés. Quant à la troifiéme queftion, fçavoir, fi les Remedes arrivés aux Urines fans avoir caufé aucun préjudice, ne blefféront point la Veffie même, il faut d'abord confidérer que 3 gros de Sel de Soude & 3 gros des Poudres pris par jour, fe trouveront noyés dans 2 livres 6 oncés d'urine, à quoi la quantité faite en 24 heures, eft évaluée par Keïll *;* 4yxorifmi par conféquent les parties âcres ont de quoi être émouflées : Sratii. de plus le Savon porte avec l'Huile le correctif du Sel de Soude, & les parties oléaginenfes doivent amortir 14 trop grande activité des Sels, & défendre Ja Tunique interne de la Veffie de leur imprefion. Cependant je crois bien qu’ils font quelqu'irritation à cette Tunique, mais elle n’eft trop vive que dans ceux qui ont la Veflie ulcérée, parce que a Tunique nerveufe eft immédiatement attaquée, étant dé- pouillée de la Tunique veloutée qui la recouvre dans l’état ñaturel. Les remedes arrivés à la Veflie avec toutes ces modifica- tions, donnent aux Urines le pouvoir de faire réellément impreffion fur la Pierre, & l’'hiftoire de M. Carteret, Maître des Poftes d’Angleterre, fournit fur cela une obfervation bien xemarquable +. I[ avoit été foulagé par les remedes, & les ceffa avant d'être parfaitement guéri. Etant mort deux ans après d’une Fiévre léthargique, on l'ouvrit, & on lui trouva dans la Veffie deux Pierres dures & unies, de fa groffeur d’une petite châtaigne, dont chacune en contenoit une autre, qu’on entendoit fonner comme une Pierre d’Aigle. Celles-ci étoient d'une confiftance telle, qu'on pouvoit aifément les écrafer entre les doigts, & elles paroifloient avoir été pourries & = Woyés le cas Ne C, de M. Hartley, ê7 ks Lettres ünprimées des Æommiffaires du Parlement à M. Morand. * Aa ji 188 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE rongées, ce font les termes du Chirurgien obfervateur, Ce qu'on pourroit appeller l'Amande , étoit formé par les Pierres qui avoient éprouvé l'effet des remedes, & l'écorce appar- tenoit à une Pierre formée depuis que M. Carteret les avoit difcontinués. IL eft vrai que cette différence de confiftance eft bien à l'avantage des remedes. Ce n’eft pas le feul exemple de diflolution cité par les Anglois. Les Lettres qui m'ont été écrites par les Commif- faires du Parlement, en rapportent quatre autres b. Si la vertu diflolvante de ces remedes étoit conteftée mal- gré tant de preuves, au moins faudra-t-il convenir qu'ils font fenfiblement l'effet d’un bon Lithontriptique, & qu'après les obfervations rapportées, on ne peut fans injuftice leur refufer cette qualité. Je fçais qu'il y a d'autres Remedes vantés pour cela, & fpécialement l'Electuaire de Cendres d'Avicenne®, que prefque tous les Auteurs recommandent ; mais il a quelqu'analogie avec les Remedes de Mlle Stephens, par la grande quantité de Sels alkalis produits par les Cendres végétales & animales qui en font la bafe, & je crois à d'au- tres égards les remedes de Mie Siephens bien fupérieurs. Mais leur vertu s'étendroit-elle jufqu'à guérir tout le monde de la Pierre? Leur feroit-il donné de faire craindre aux Lithotomiftes que leurs talents devinffent inutiles? C'eft ce qui va être examiné dans la troifiéme & derniére partie de ce Mémoire. TROISIÉME PARTIE. IT paroît conftant par les expériences faites en France &c en Angleterre, que les Enfants ne font pas fufceptibles de Teffet des remedes, & la raifon de ce phénomene n’eft pas encore trouvée, au moins n’en a-t-on pas encore donné de > M. Sharp. V. la Lettre de M. y Trad. 2. cap. 19. Le Remede de Sharp, p.242 du Recueil. Laurembergius faifoit rendre des » Voyés une Lettre de M. Hartley, écailles, p. 1 9. Celui de Beverovicius page >>> du Recueil. faifoit rendre des fragments, p.188 © Ayicenne, libr. 3. fèn. 18. ar 1 89, Voyés kurs Ouvrages, , DES $S1C IE NicE 5. 189 bien fatisfaifante. Heureufement les Enfants femblent être privilégiés pour l'opération de la Taille, & communément elle leur réuflit mieux qu'aux Adultes. : Mais cette opération qui les délivre de 1a Pierre pour le moment, n'eft pas un préfervatif qui les mette à l'abri des récidives , puifqu'on en a taillé jufqu’à fept fois. Or fi les remedes peuvent empêcher l’aflemblage des parties de l’Urine qui forment la Pierre, comme il y a lieu de le préfumer de quelques obfervations, ne pourroit-on pas les donner avec utilité aux Enfants, qui ayant été taillés une fois, mon- treroient de nouvelles difpofitions à la Pierre? Quoi qu'il en foit, en mettant tous les âges fous la puif- fance des Lithotomiftes, voilà d’abord une grande portion de leurs fujets confervée, & le partage du refte ne fera encore que trop en leur faveur. | + Entre les Adultes chés qui les remedes paroïflent agir. efficacement , le fuccès eft plus marqué à proportion de leur. grand âge. Les quatre que j'ai cités, font âgés de foixante- cinq, foixante-dix, foixante-onze & foixante-dix-neuf ans ;: & il femble que les bons effets aillent toûjours en décroiffant à mefure que les malades font moins vieux. Des Adultes qui feront dans le cas favorable pour éprou- ver les remedes, il s'en trouvera que les douleurs exceffives de la Pierre détermineront à l'opération, parce que les re- medes agiflent lentement. Ceux qui auront la Veflie ulcérée, ne pourront les prendre, par les raifons que j'ai expliquées. Enfin je ne crois pas que les remedes ayent prife fur les Pierres murales, fur-tout celles qui font noires, ou de cou-: leur de mâchefer. En effet, ces pierres paroiffent être d’une nature toute différente des Pierres blanches & crétacées. Celles-ci font faites de couches minces & concentriques , on peut les écorcher avec l’ongle, quelques-unes même fe brifent fous les doigts. Les Pierres murales font compolées de petites molécules à peu-près conoïdes, dont la pointe régarde le centre de la pierre, & la bafe préfente au dehors Aa ii 190 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE des mamelons irréguliers qui laiflent des intervalles entr'eux. On y découvre fur l'écorce extérieure, & quelquefois dans l'intérieur, de petits grumeaux de fang defféché, qu'on ne trouve point dans les autres, au moyen de quoi les Vers peuvent fe mettre dans l'écorce, comme je l'ai obfervé; de forte que je les regarde comme un compolé particulier d'Urine & de Sang, duquel réfulte une çoncrétion beaucoup plus dure que celle des Pierres blanches, & cela revient aflés à ce que l’on dit du Ciment des Anciens, dont l'on attribuë la folidité au Sang de Bœuf qui entroit dans fa compofition. Lorfque nos Pierres murales font fciées en deux, chacune des faces plattes reçoit le même poli que le Marbre & l’Agathe, & je les crois fort en füreté contre faction des remedes. Mais comme l’on ne connoït exactement la confiftance de la Pierre que lors de fon extraction, je confeillerai toûjours à un Adulte d’eflayer les remedes de Mlle Stephens, avant que de fe foûmettre à l'opération; premiérement, parce qu'ils n'ont point d'inconvénients, & qu'ils n'empêchent point de pratiquer l'opération enfuite s'ils ne réuffiffent point. Secon- dement, parce que s'ils foulagent, ils peuvent donner aux malades éloignés des habiles Lithotomiftes, le temps de s’en approcher, & à ceux qui voudroient attendre une faifon favorable, le temps d'y arriver. Troifiémement, parce qu’en diminuant les douleurs, & donnant la facilité de retenir les urines, ils procurent deux grands avantages à ceux qui ont peu de temps à vivre, felon l'ordre de la Nature, & qui rifqueroient de ’abbréger encore par l'opération. Quatriéme- ment, parce que n'y en eüt-il qu'un très-petit nombre de guéris, il eft tout fimple d'éprouver les remedes qui peuvent exempter d’une opération toûjours formidable, quelque per- feétion qu'on y ait ajoûtée. Tout ce que j'ai dit de la vertu de ces remedes, ne fufira cependant pas pour décider pofitivement s'ils guérifient de la Pierre. On en viendra toûjours à demander fi des malades fondés avant l'ufage des remedes, ont donné la preuve de DES SCIENCES. 191 leur guérifon par la Sonde, après les avoir quittés. H yen a fept dans ce cas en Angleterre. Nous n’en avons point à Paris, que je fçache, & les quatre qui fe trouvent f: bien des remedes, ont refufé conftimment de fe foûmettre à cette épreuve. i Après tout, elle eft plus curieufe qu'utile, & il eft facile de faire voir que fuivant les difpofitions qu'on apporte à l'examen de la chofe, l'expérience de la Sonde eft infuffifante ou fuperfluë, En effet, fi on fonde un malade qui f croit guéri par les remedes, avec le préjugé qu'ils n’ont pu le guérir, & qu'on ne lui trouve point da Pierre, on n'en concluëra pas moins qu'il l’a encore. On citera l'exemple du malade fondé. trois fois par M. Chefelden, fans rencontrer la Pierre, qu'il trouva dans une quatriéme rechercheb, & la pratique jour naliére en fournira d'autres. L'expérience de la Sonde eft donc infufhfante pour décider fi la Pierre eft anéantie par Yeffet des remedes, & ce tifonnement ne doit pas déplaire aux incrédules. A l'égard du malade, l'expérience eft fuperfluë, if n’a pris les remedes que pour ne plus fouffrir, & s’il cefle réellement de fouffrir par Fufage des remedes, fon objet eft rempli. Je ne fuis pas furpris que les malades qui font dans ce cas, ayent rejetté la propofition que je leur ai faite, & un d'eux n'a pas cru m'en donner une mauvaife raifon, en difant qu’? s'étoit laiffé fonder pour lui avant que de commencer les remèdes; mais que fe croyant guéri, il ne jugeoit pas à propos de fe lailler fonder pour le Public. La ceffation des douleurs ne fera point encore une preuve que la Pierre eft détruite: on dira que dans le cours ordinaire 2 y. M. Holland, XXX1V.* cas Ÿ mentionné aux Lettres de M. Sharp: dé M. Hartley. 2. M. Cheshire, | è7 Hartley. XLAII.* cas de M. Hartley. 3. 4. s- 6. AM." Gardiner, Appleton , b Voyés l'obfervation XX X IT. dé Norris, Brighty, imprimés dans Le | A. Hartky, page 8r, Certificat des Commif. 7: Brown. | 192 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLE de cette maladie, elle laifle quelquefois des intervalles de plufieurs mois, même de plufieurs années, & on aura des exemples de refle à en apporter. . La difficulté des preuves ne me permettoit donc pas d'attendre plus long-temps pour rendre compte à l'Académie de mes oblervations. Il n'y aura jamais qu'une preuve pofi- tive, de quelque façon qu'on penfe fur ces remedes : c'eft de rechercher après la mort de ceux qui croyent en avoir ufé avec fuccès, fi la Pierre exifte ou non dans la Veffie ; mais ce n'eft que la fuite des temps qui peut donner ces éclairciflements, & j'ai été jufqu'ici trop attentif à ce qui a rapport à cette matiére, pour oublier un point de cette importance. Je crois avoir fufifamment démontré Jes avantages qu’on peut retirer des Remedes; n'y auroit-il point quelque per- fection à y ajoûter ? M. Geoffroy a déja donné le détail de quelques précautions qu'il faudroit joindre à la formule venuë d'Angleterre, & par lefquelles elle eft corrigée ou rectifiée. On avoit efpéré de rendre la boiffon plus fimple, en ne la compofant qu'avec le Savon d’Alicante tout feu, dans l'idée que c’étoit le principal agent du Remede, & que les Plantes réduites en charbon, n'avoient été imaginées que pour déguifer la liqueur +. Cependant mes expériences ne me permettent pas de les regarder comme inutiles, & elles m'autorifent même à eflayer la liqueur favonneufe, mitigée avec de l'eau, en injection dans la Veflie, ce que je compte faire fi-tôt que l'occafion s'en préfentera. A l'égard des Poudres, j'aimerois aflés à ne les point donner dans les commencements, & attendre que les malades fuflent accoütumés à la boiflon favonneufe, dont l’action, felon moi, doit être fortifiée par l'addition des Poudres. Je ne crois pas qu'on puiffe déterminer combien de temps il faudra ufer de ces deux remedes, mais ce n'eft pas une raifon pour les décrier; on va aux Eaux en plufieurs faifons, > Voyés la Lettre de M. Hartley, page 327. pour DES ISICINE N'ES 192 pour-des maladies d'obftruétions ; & fans n''écarter du fujet, ceux qui craignent les douleurs néphrétiques, fe font une loi de prendre tous les mois, les uns le Remede de M. de Bâville, les autres celui de M. de Caumartin, d’autres l’in- fufion d’Enula Campana, & la patience de ceux qui s'aflu- jettiffent à prendre des Amers toute la vie, pour fe garantir de la Goutte, eft bien plus grande encore. : A1 pourroit y avoir pour les Remedes de Mille Stephens, une forte de compenfation avec le temps, en ne les prenant ua demi-dofe, & plufieurs malades s'en font bien trouvés. Les Pilules m'ont paru un bon remede contre la Gravelle, & peuvent être fubftituées à la boiffon favonneufe, par quelqu'un, qui fe croyant guéri de la Pierre, auroit befoin d'un remede pour en prévenir le retour. Enfin l’analogie des fubftances favonneufes m'a fait imaginer que ceux qui ne peuvent ufer du Savon d’Alicante, parce qu'ils ont quel- qu'ulcere dans les voyes urinaires, pourroient ufer avec fuccès de la Boule de Mt: Stephens, préparée avec le Savon qui entre dans les Pilules de Starkey, & qui ef faite avec l'huile de Térébenthine & le Nitre fixé par le Tartre. Il n’y a rien de fi approprié à leur maladie que ces drogues, & en cas de douleurs, les Pilules de Starkey en plein leur fourniroient un calmant dont la réputation eft faite. La conclufion de ce Mémoire eft que, lorfqu'un malade fouffrant tous les fymptomes de la Pierre, & fe fervant des remedes, rendra d’abord avec fes urines un fédiment fort épais, enfuite des écailles pierreufes, ou même des fragments de pierre, qu'il retiendra fes urines, qu’elles fe clarifieront peu-à-peu, qu'il ceffera de fouffrir, & qu'il fe trouvera en état de fupporter toutes fortes de voitures, je dirai qu'il n'eft point raifonnable d'attribuer au hazard le concours de tant de circonftances heureufes, pendant qu’on les verra arriver dans l'ufage des remedes, dont le malade ne fe fervoit point auparavant. En un mot, je déclare que fi le Certificat des Commiflaires nommés par le Parlement d'Angleterre, m'eût été préfenté, peut-être que par délicatefle pour le langage, Men. 1740. Ut 194 MEMOIRES DE L’ACADEMIE ROYALE je n'aurois pas prononcé fur la vertu diffolvante des Remedes, mais par amour pour la vérité, j'aurois volontiers foufcrit avec le Docteur Pellet, qu'ils font fouvent utiles € efficaces pour la cure de la Pierre dans la Vefie. LT SE DES QUARANTE PERSONNES Qui ont ufé des Remedes de M'° Srephens. PREMIERE CLASSE. Ceux qui ont pris les Remedes pour des maladies des Reins, ou de la Veffe, autres que la Pierre. (:.) M dsrters âgé de 3 3 ans, tourmenté d’un violent mal de Reins, & rendant des urines très-épaifles, a commencé les Pilules le 17 Décembre 1739, n'en a pris que fept ou huit jours, & s’cft trouvé confidérablement foulagé. (2) MT âgé de ss ans, rendoit des urines glaireufes , fétides & purulentes, & fouffroit depuis long temps les plus cruelles douleurs. Il a commencé la boiflon fans la poudre, à demi- dofe, le 1 2 Février 1740, l’a continuée pendant un mois, fes maux augmentoient toûjours, eft mort au mois de Juin. On lui a trouvé un Ulcere carcinomateux à la Veflie. (3) M..... âgé de 84 ans, rendoit des glaires avec fes urines ; a commencé le 14 Décembre 1739 à prendre la boiffon fans poudres & à demi-dofe, en a pris pendant huit jours feulement , & s'en eft dégoûté. (4) M..... âgé de 50 ans, rendoit depuis dix-huit mois des urines glaireufes & purulentes, étoit incommodé de fréquentes envies d’uriner, avec grande irritation, a pris de la boifion & des poudres pendant prés de quatre mois, à différentes rcprifes, & n'a point été foulagé. (5) M.%.... âgée de 29 ans, fujette à des Coliques néphrétiques & de fort grands maux de Reins, a commencé le 4 Octobre 1739, la boiffon & les pilules, qu'elle a prifes alternati- vement pendant deux mois, fort réguliérement, & a été guéric. L (6.) (7) (8.) (2). (10.) _(rr.) (12.) (13) DES SCIENCES. 195 SECONDE CLASSE. Ceux qui ont pris les Remedes pour la Gravelle. Mic... âgée de 27 ans, a pris de [a tifanne, des poudres, des pilules, en différents temps & à différentes reprifes pendant trois mois, a rendu de petites piérres, des fables, beaucoup de fédiment, & a été fort foulagéc. 11 CHAR âgé de 61 ans, avoit de grands maux de Reiïns & des Coliques néphrétiques, a commencé le 28 Novembre 1739 la boiflon favonneufe fans pilules & à demi-dofe, & au bout de dix jours a rendu une Pierre longue &affés groffe, a continué le remede pendant deux mois, & ne fouffroit plus ni maux de Reins, ni Coliques en Octobre 1740. M...... âgé de 66 ans, étoit fujet à la Gravelle, & affés incommodé, a pris pendant deux mois des pilules feulement, & ne s’en eft point trouvé foulagé. Me. ... âgée de 1 8 ans, a pris des pilules pendant deux mois & demi, & quelque temps après, la boïffon pendant deux mois & demi, fans foulagement. M..... âgé de 39 ans, a commencé le 9 Septembre 1739 la boiflon & la poudre, qu'il a fait venir d'Angleterre, & qu'il a continuées pendant trois mois, & enfuite des pilules pendant fix mois, a rendu de petites écailles & quantité de pierres rougeätres & groffes comme des grains de Coriandre, & beaucoup de fédiment blancheätre dans fes urines ; fes douleurs de néphrétique ont abfolument ceffé : il prenoit encore des pilules en petite dofe en Oélobre 1740. M.....âgé de 45 ans, étoit fujet à rendre des graviers. II a pris pendant fix mois les poudres & Ia boiïffon, ce qui lui a rendu la faculté de pouvoir aller en voiture, lui a Ôté fes douleurs & les fréquentes envies d’uriner. M... . âgée de 30 ans, a commencé les pilules Je 1 0 Mai 1740, a rendu beaucoup de graviers dans l'ufage des re- medes. En Novembre elle continuoit le remede, & n’avoit plus de Coliques. M..... âgé de 58 ans, attaqué de Ia Gravelle depuis long temps, & fujet à de fréquentes Coliques, a commencé l’ufage des pilules en Novembre 1739, & les continuoit encore en Nov. 1740. Depuis ce temps-là, il rend continuellement des graviers fans douleur, & n’eft plus fujet à la Colique. Bb i 196 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE TROISIEME CLASSE. Ceux qui avoient des fymptomes de Pierre, non fonds. HA) M..." âgé de s 5 ans, fils d’un Pere qui avoit été taillé, eut lui-même les fymptomes de la Pierre ïl y a près de quatre ans. Jl urinoit le fang fi-tôt qu'il faifoit un peu de chemin. Il urinoit fréquemment, peu à la fois, & avec des douleurs exceffives. Il avoit un poids infupportable fur le fondement. C'eft dans cet état miférable qu'il commença les remedés le 1er Août 173 9 ; au bout de trente-quatre jours il fut en état de fe promener à grands pas pendant deux heures fans en être incommodé. Il a continué les remedes pendant trois mois moins quatre jours , & s’eft trouvé au bout de ce temps-là abfolument délivré des fymptomes de la Pierre. ts Mes âgé de 46 ans, que j'ai taillé en 1732, ayant reffenti les fymptomes de la Pierre depuis deux ans, a pris Îles pilules pendant fix femaines, enfuite la boiffon & les poudres a la fois pendant quelque temps, il a jetté de gros graviers, * & a paru foulagé. {16-) M .:1: âgé de s 3 ans, porte depuis deux ans une ouverture fiftuleufe à la Verge, près du Scrotum, à la fuite d'un Abfcès: urineux , par laquelle il jette habituellement une grande quantité de gros graviers blancheâtres. S'étant trouvé fort _incommodé des douleurs de Reïns & à la Veflie, a com- mencé la boiffon favonneufe le 4 Mai 1740, Fa continuée un mois, l'a interrompuë lorfqu'il voyoit fes urines fangui- nolentes, & reprife à diverfes fois. Quoiqu'il n'ait pas fait un ufage bien fuivi du remede, il a jetté le 10 Juin une groffe pierre, fes douleurs de Reins fe font diffipées, & ilrend. avec facilité, plus & de plus gros graviers qu'auparavant. {17.) M:.... îgé de 64 ans, ayant les fymptomes de Ia Pierre, urinant très-fouvent, & rendant des urines fanguinolentes, a commencé la boiflon le 14 Nov. 1739, & les poudres: enfemble quelques jours après, & en a peu ufé de fuite, parce qu'il urinoit du fang. 82) M. âgé de 69 ans, ayant Îles fymptomes de la Pierre, 8 ÿ SAMP a pris le remede pendant neuf à dix mois. II à jetté des. glaires & du fédiment, & {es fymptomes ont difparu. DES SCTEN CES 197 QUATRIEME CLASSE. Ceux en qui la Pierre a été conffatée par la Sonde. « (19.) M.....âgé de 67 ans, fondé par M. Morand, à pris la boiffon favonneufe & les poudres pendant un mois, au bout duquel temps il a écrit de fa Province que fes douleurs étoient toû- jours les mêmes, & qu'il ne rendoit plus de graviers rouges tels qu’il en rendoit auparavant. I1 a difcontinué les remedes. (2e.) M.....ûgé de so ans, fondé par M: Morand, a pris la boiflon favonneufe & les poudres pendant fix mois, & n’en a tiré qu'un peu de foulagement; fondé de nouveau par M. Morand, avoit également: la Pierre, (21.) M.....ûgé de 66 ans, fondé à Beffort par M. Dubilion, à pris les remedes pendant trente-trois jours, s’en eft trouvé confidérablement foulagé ; les à interrompus à caufe de la Fiévre , & ne les a pas repris. (22) M..... âgé de7oans, fondé par M. Morand, foufroit les douleurs les plus aiguës, & ne pouvoit fupporter même 1a chaife à porteur, urinoit fept ou huit fois par heure, a com- mencé les remedes à demi-dofe le $ Oélobre 1739; peu après il retenoit fes urines pendant plufieurs heures. 11 2 continué les remedes pendant treize mois de fuite, & quoi- qu'il n'ait rendu que peu de matiéres pierreufes , il a été foulagé par degrés au point de ne plus reflentir aucune incommodité, & de pouvoir aller en voiture. {23.) M.....ägé de 65 ans, fondé par M. Morand, à commencé les remedes le 1 8 Septembre 1773 9, les a pris pendant 246 jours, a jetté beaucoup de fédiment, des glaires bleuâtres, des écailles de pierre à plufieurs couches, de petites pierres rondes ; enfin s’en eft retourné dans.fa Province, abfolui ment quitte de tous fes maux: (24) M:....ägé de s9 ans, fondé par M. Morand, -fouffroit les douleurs les plus vives, rendoit beaucoup de pus & de glaires avec fes urines. Il:a pris Îles remedes pendant trois mois, il a jetté beaucoup de fragments de pierre, & quel- ques-uns terminés à leur furface par des efpeces de houpnes ou mamelons. Cependant preffé par les doufeurs, il s'eit fait tailler par M: Morand, qui lui a tiré, au grand Appareä, une Pierre qui s’eft écrafée, il eft mort à la fuite de fon opé- ration. On lui a trouvé un Ulcere vers le col de la Vefie, & un gros morceau de fa pierre, hériffé des mêmes mame- Jons que ci-deflus, Bb ü. (27-) (28.) (29.) (30) (31) MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE M..... âgé de 79 ans, fondé par M. Petit, a commencé Îes remedes à demi-dofe, le 1 1 Février 1740, a reffenti une grande âcreté dans la gorge, les a continués pendant fept mois & demi, à deux reprifes ; il a jetté beaucoup de fédiment, des graviers, de petites pierres, & fe trouve abfolument délivré de tous les fymptomes de la Pierre. M..... îgé de71 ans, fondé par M. Boudou, a commencé les remedes Ie 24 Janvier 1740, les a continués pendant trois mois ; il rendoit avec fes urines un fédiment blanc, & des glaires qu'il ne jettoit pas auparavant, & a ceffé de rendre de petites pierres telles qu’il en rendoit. Au bout de ces trois mois il a été refondé par M. Boudou, & il avoit toüjours da Pierre. M..... âgé de 57 ans, fondé par M. Morand, rendoit des urines purulentes & très-fétides, a commencé en Fév.1740, l'ufage des pilules, enfuite a pris les poudres & la boiffon favonneufe, le tout pendant un mois ; enfuite de quoi fes douleurs augmentant toûjours, il a été taillé à l'appareil latéral par M. Morand, qui lui a tiré une Pierre en bouillie, eft mort fix femaines apres l'opération. M..... âgé de 77 ans, fondé par M. Guerin, a commencé les remedes le 20 Janvier 1740, &les a continués pendant le grand froid cinq femaines, nc s’en eft trouvé ni pis ni mieux , les a quittés, & s'eft retiré à fa campagne, difant qu'il retient plus facilement fes urines. M..... âgé de 77 ans, fondé par M. Dauban, a pris Îles remedes , d’abord pendant deux mois & demi de fuite, après quoi il les a difcontinués, & repris quelque temps; il s’en eft trouvé foulagé au point qu'il croit n'avoir plus la Pierre. M MT âgé de 70 ans, fondé par M. Boudou, a commencé les remedes le 23 Décemb. 1739, les a continués pendant le rude hiver, & fix mois de fuite, a jetté de petits graviers, & une quantité de fédiment d'une matiére crétacée , telle qu'il en a rempli plufieurs boites. 11 s’eft trouvé confidé- rablement foulagé, & même en état de monter à cheval fans accident. Net âgé de 62 ans, fondé par M. Boudou, à commencé les remedes le 21 Décembre 1739, & les a continués pendant le rude hiver & jufqu'au 4 Mai 1740 , ce qui fait quatre mois & demi, a jetté pendant deux mois beaucoup de fédiment, & a été foulagé. M..... âgé de 55 ans, fondé par M. Morand, à commencé DES SCIENCES. 199 Jes remedes le 1 8 Juillet 1740, ne pouvoit plus aller à cheval, ni foufirir aucune voiture. Les premiers jours des remedes, fes douleurs augmenterent ; dans le mois de Septembre il a rendu des pierres affés groffes, entr'autres une creufée à fa furface, de façon qu'elle fervoit de chaton à Û une plus petite : celle-ci étoit jaune, & l’autre étoit blanche. 11 a auffi rendu un fragment de picrre, auquel on pouvoit aifément compter plufieurs couches. En Octobre, il fe trouva fi confidérablement foulagé, qu'il fut en état de partir le 17, pour s'en retourner. 11 fit quatre licuës en carroffe, enfuite onze lieuës en chaife de polte. Le 22 il monta à cheval, & il a mandé ne plus reflentir de mal. (33-) M.....âgé de 37 ans, fondé à Thionville par M. Corbin, Chirurgien-Major du Régiment de la Reine Infanterie, & à Paris par M. Morand, a commencé les remedes le 21 Août 1740, qu'il a continués pendant quarante jours, il à rendu beaucoup d'écailles blanches, des urines fort glai- xeufes, de petits gravicrs. Le 1 2 Octobre il fut en état de fortir dans une voiture rude, pendant trois heures, fans incommodité, ce qui lui fit prendre le parti de retourner chés lui. II a fait le voyage fans foufirir, difpofé à reprendre les remedes. (34) M.....âgé de s 3 ans, fondé par M. Morand, 1 commencé les remcdes en Août 1740, & les a continués trois mois fans interruption. IF a d’abord rendu des urincs troubles, du fédiment dans fes urines, &des écailles pierreufes ; ehfuite il s'eft fenti un grand dégoût, il a eu du dévoyement, de lenflüre aux extrémités inférieures, une grande altération . & a difcontinué les remedes ; mais il rendoit toùjours des écailles, & même des fragments de picrre. (35.) M..... âgé de 23 ans, fondé par M. Morand, a commencé les remedes le 1 o Septembre 173 9. Dès les premiers jours il a fenti plus de facilité à uriner, a rendu dans fes urines quelque temps après, des matiéres de couleur de cendre ; à la fuite de cela, des écailles pierreufes, des glaires bleuâtres. Au bout de trois mois il a été fondé de nouveau par M. Morand, qui lui a trouvé Ia Pierre ; a continué les remedes pendant le rude hiver, & en a pour lors tiré peu de fruit; depuis ce temps-là il s’en eft trouvé très-foulagé. (36) M..... âgé de 1 2 ans, fondé par M. Gucrin à l'Hôpital de Ia ” Charité, a commencé les remedes le 9 Septembre 173 9, les a pris fans fuccès pendant fix mois, & a été taillé par M.Guerin: aa printemps de 1740. On lui a tiré une Pierre dure. 200 (37:) (38.) (39)) (40.) MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE M..... âgé de 12 ans, fondé par M. Morand , a pris les re- medes pendant un mois, après quoi fes parents ont mandé qu'il ne foutfroit plus. Une circonflance particuliére au fujet des corps étrangers que l’on dit qu'il a rendus par la voye des urines, & qui nous ont été envoyés, nous autorife à nous tenir en garde fur les fuites de fa cure, d'autant plus qu'il n'eft point à Paris. M.....âgé de 10 ans, fondé à l'Hôtel-Dieu par M. Lamblot, a pris les remedes pendant trois mois fans fuccès. I] nous à préfenté des Sables qu'il difoit avoir rendus par fes urines, & que nous avons reconnu être des Sables de riviére, & il Va avoué depuis. 11 a été taillé le 27 Mai 1740, par M. Lamblot, qui lui a tiré une Pierre groffe comme une petite Noix, & qui, fous l'écorce extérieure, étoit noire, fans avoir aucune marque de diflolution. Mocsse âgé de 10 ans, fondé à l'Hôtel-Dieu par M. Boudou, urinoit le fang, il a commencé les remedes, ainfi que le pré- cédent, le 24 Janvier 1740, les a continués trois mois fans fuccès. Il a été taillé par M. Lamblot le 27 Mai; on lui a tiré une Pierre groffe comme le pouce, plus menuë par un bout que par l'autre, n'ayant aucune marque de difolution. M..... âgé de 3 ans, fondé par M. Morand, a commencé le 9 Novembre 1739, l'ufage de la boiffon favonneufe, à trois poiffons par jour, fans poudres, il a d’abord été un peu foulagé , enfuite a eu du dévoyement : on a été obligé de difcontinuer leremede. A la fin de Décembre, il a jetté des Vers, a repris & continué Île remede jufqu'en Avril 1740, qu'il l'a ceffé, ayant la Fiévre : rétabli de fa Fiévre, il a été taillé en Mai à l'Hôtel-Dieu, par M. Boudou, qui lui a tiré une Pierre dure, fans aucune marque de diflolution. PROBLEME D ELS LESTCNII EICN ÊC IE (s. 201 PROBLEME DE STATIQUE. Par M. Camus. dO1r une Roue AGHBhgA, garnie d'une infinite de rayons diffribués également autour de Jon centre K, fur le- quel elle foit en équilibre , 7 mobile fans aucun frottement ; que chaque rayon enfile un petit corps qui puifle couler fans frottement fur ce rayon, à que tous ces petits corps , qu'on fuppofe étre de maffes égales, à pefer fuivant une loi quelconque, vers un même centre © de force, foient dans une rainure de courbäre quelconque MLFimfM, faire dans un plan immobile ; enfin, que tous ces petits corps, lorfque la Roue viendra à tourner, gliffent avec une facilité infinie dans la rainure en même temps qu'ils coulent fur leurs rayons, on demande le moment de chaque côté de la Roue, c'eff-à-dire, le moment que les corps enfilés par les rayons de la Roue auront pour la faire tourner. SOLUTION. Du centre €, où tendent les corps dont Ia Roue eft chargée, foient décrits deux arcs Am, LI, infiniment pro- ches, qui comprennent une portion infiniment petite AL de la rainure, & correfpondante à un fecteur G Æ H infini- ment petit de la Roue, il importe peu que ces infmiment petits foient de même genre : des extrémités 47 & L de la portion infiniment petite de la rainure, foient tirées deux droites MC, LC, au centre C des forces; enfin, du centre # de la Roue, comme centre, foit décrit par 47 arc 47Q. Cela fait, foit p la quantité de mafle de tous les corps enfilés par les rayons de la Roue, & mobiles fur ces rayons & dans la rainure ; la circonférence de la Roue — 1 , & z Vaétion du centre C des forces à la diflance CS. Les corps qui font enfilés par les rayons du féteur GK A, font dans la portion A2 L de la rainure ; leur mafle eft _ Mem. 1740, . Ce 28 Juia 1740. Fie. 1. 202 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE p x GH, & leur poids vers le centre © des forces, eft z*xp x CH. Mais ce poids qui fe trouve contenu dans la portion AL de la rainure, & dont la direction eft fuivant 42C \ fe dé- compofe en deux forces, l’une perpendiculaire à a rainure ML, & Y'autre perpendiculaire aux rayons du feéteur GXH. La force qui eft perpendiculaire à la portion AL de rainure, eft détruite par l’oppofition de la rainure même, qui, par fon immobilité, lui préfente un obflacle invincible ; ainfi cette force n’a rien qui puifle faire tourner le fyfteme de la Roue d'aucun côté, & doit par cette raifon être négligée, comme incapable de contribuer à l'effet que nous cherchons. L'autre force, qui eft perpendiculaire aux rayons qui pafient par ML, tend toute entiére à faire tourner le fyfleme, & eft par conféquent celle que l'on doit confidérer. L'arc ML de rainure & le fecteur GXH étant infiniment petits, 1.° l'arc AL doit être confidéré comme une ligne droite : 2.° les rayons compris dans l'angle GX, doivent être regardés comme paralleles : 3.° par conféquent les corps contenus dans l'arc AZL de rainure, agifent également fur ces rayons, & y font appliqués à diftances égales du centre Æ° Ainfi on peut fuppofer que toute fa maffe contenue dans Farc ML, eft au point 47, & que la force qui réfulte de fa pefanteur perpendiculairement fur X A, eft appliquée au levier Æ AZ, pour tendre à faire tourner le fyfteme de la Roue dans le fens BHG À. Examinons cette force, & le moment qui en réfulte. Le Triangle MNL a fon côté MN perpendiculaire fur la direction 41C du corps placé dans Farc de rainure JL ; fon côté NL étant parallele à AZK, eft perpendiculaire à Faction exercée perpendiculairement fur l'extrémité 47 de K M ; enfin le côté A1L eft perpendiculaire à l'action du même corps fur lui. Donc la pefanteur du corps contenu dans AL, fon action perpendiculaire à l'extrémité du levier KM, & celle qu'il exerce perpendiculairement fur A1L, font proportionnelles aux trois côtés AN, NL, ML. DE S'USICTENTCES 03 Donc du poids du corps contenu dans 42L, lequel poid, on a trouvé —=7 x p x GA, il réfulte perpendiculairement à se : —=zxpxGCHxN l'extrémité 41 du levier XAZ, une force RTE & multipliant cette force par le levier X A7, auquel elle eft zxpxGHx NL x KM - appliquée, on aura pu +: pour le moment différentiel d’un côté du fyfteme. Mais 1.° à caufe des Secteurs femblables GXH, MKQ, on a GH x KM—MRQ x KG; ain ER TEs PE “ auffi le moment différentiel d’un côté du fyfteme. .* A caufe des Triangles femblables AQ NW, LON, NL LO ‘, . MOxNL Ona 5 — iQ” ‘ini PTE —LÜO— PR, Donc z xp x KG x PR eft le moment différentiel du même côté du fyfteme, & l'intégrale de cette différentielle eft le moment même du fyfteme. Ce quil falloit trouver. REMARQUES. I. On voit dans le moment différentiel 7 x p x KG x PR, que p qui eft la quantité de la mafle des corps enfilés par les rayons de la Roue, eft conflante, & que XG, rayon de la Roue, eft auffi conftant, & par conféquent le moment différentiel eft comme zx PR, c'eft-à-dire, proportionnel _au produit fait de l'action z du centre C des forces fur ML, & de la différentielle PR ou OL de la diftance de ML au centre C des forces. 1 _ Quelle que foit Ia loi de 1a pefanteur des corps vers le centre €, pourvû que ce centre agifle également à diflances égales de lui, les corps contenus dans les portions AL, "7, de la rainure, prifes à diftances égales du centre C’, ou, pour mieux dire, Ée corps contenus dans les arcs AL, m}, compris Cci 204 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE entre deux arcs paralleles Am, L/, qui ont pour centre le centre C des forces, ont des moments oppolés égaux, & font par conféquent en équilibre. Car le moment des corps contenus dans A7L, CR UT PA PAUSE CRT pre AIG "RO Et le moment des corps contenus dans w/, ÉCT e n ee oue ss eue ZX Ù US NN Mais 7—7, puifque ce font les aétions du même centre à égales diftances de lui, & tout le refte eft aufli évidem- ment égal. Les moments des corps contenus dans les deux arcs de rainures AL, m7, font donc égaux ; & comme ces moments tendent à faire tourner le fyfteme en fens contraire , ils font en équilibre. Soit Fle point de Ia rainure le plus éloigné du centreC des forces, & f le point de cette rainure le plus proche du même centre C ; les corps qui feront dans la partie FA1f de la rainure, tendront à faire tourner la Roue fuivant BGA, & ceux qui feront dans l'autre partie F" f de Ja rainure, tendront à faire tourner laRoue en fens contraire, c’eft-à-dire, fuivant Bg À, & ces efforts contraires feront en équilibre. Car fi l'on décrit une infinité d’Arcs entre F & f, qui ayent tous pour centre le centre C des forces, les deux côtés FMf, Fmf, de la rainure feront coupés en même nombre de parties, & les corps qui feront contenus dans les parties correfpondantes de la rainure, comprifes entre les deux mêmes arcs, auront des moments égaux chacun à chacun; ainfi le moment entier d'un côté du fyfteme fera égal & oppofé au moment entier de l'autre côté, & par conféquent le fyfteme entier fera en équilibre fur le centre Æ de la Roue, TITI. De-fà on voit combien fe trompent ceux qui cherchent le Mouvement perpétuel par la feule pefanteur, ou par des actions centrales qui agiffent également fur le fyfteme à dif- tances égales de leur centre ; j'en ai vü plufieurs qui préten- doient le démontrer par une machine femblable à celle où je DITEX Si494 CHÉ.E Ni CHE; Se 205 viens d'établir l'Equilibre, & qui foûtenoient que des corps enfilés par des rayons de Roue, & qui auroient la liberté de circuler dans une rainure, qui d’un côté les approcheroiït du centre de laRoue, & de l’autre côté les en éloïgneroit, obli- geroient la Roue de tourner en defcendant du côté que les corps font le plus éloignés du centre, & que comme tous les corps pafferoient fucceflivement du côté où ils font le plus éloignés du centre, tandis que ceux qui font le plus éloignés, pafferoient du côté où ils doivent être plus proches, le fyfteme feroit dans un mouvement perpétuel. J'ai idée d'avoir vû un Machinifte qui prétendoit avoir trouvé le Mouvement perpétuel par une Roue femblable à celle que je viens d'examiner, avec cette différence cepen- dant qu'il employoit deux forces centrales. Ces forces étoient, autant que je puis m'en fouvenir, la pefanteur & a force d’une Pierre d'Aimant, qu'il plaçoït au-deflous du côté que la rainure s’éloignoit le plus du centre Æ de la Roue, comme en S. Les corps enfilés par les rayons de la Roue étant fup- pofés de Fer, il prétendoit que le côté le plus éloigné du centre #, feroit le plus attiré, & que la machine prendroit un mouvement qui ne finiroit qu'avec elle. Mais ce moyen ne waut pas mieux que la pefanteur feule ; car fuppofons la pefanteur dirigée vers un centre quelconque C; les poids qui peferont vers ce centre, feront en équilibre fur le centre Æ de la Roue, comme je viens de le démontrer : ainfi toute * Jaction du fyfleme, en vertu de la pefanteur, fe réduira à un effort compolé dans la direction ÆC', comme fi une feule force placée en Æ, où eft l'appui, pouffoit ce fyfteme vérs C: Comme on doit fuppofer que {a Pierre d’Aimant placée en S, agira également à diftances égales d'elle, Les boules de Fer qui feront dans des parties de rainure prifes à égales diftances de l’Aïmant, auront des moments égaux & contraires, & feront par conféquent en équilibre fur le centre # de la Roue. Ainfi de toutes les forces que les boules de Fer recevront de l Aimant, il réfultera une feconde force compofée qui agira de Æ vers S, comme fi _" force étoit. c ii 206 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE appliquée en À. Or des forces appliquées au centre d’une Roue, ne peuvent point la faire tourner, puifqu'elles trou- vent fur ce centre un appui qui les arrête. Donc le fyfleme propolé ne tournera point, quand les corps qui circuleront dans la rainure, auront deux centres de pefanteur vers lef- quels ils tendront fuivant des loix quelconques. Le même raifonnement prouvera que le fyfteme ne tour- neroit point, quand même les corps enfilés par les rayons auroient un plus grand nombre de centres de pefanteur, quel qu'en foit le nombre, puifque chaque centre produira le même effet total fur les corps, que produiroit une certaine force placée au centre de la Roue où eft fon appui. I V. Si les petits corps 47, L, m, 1, &c. qui circulent dans le canal FMfmF, font enfilés par des lignes courbes quel- conques femblables & femblablement polées par rapport à Ja Roue, & diftribuées également fur la circonférence, non feulement il y aura équilibre entre les corps qui feront dans les parties de canal LM, 1m, prifes à diflance égale du centre C des forces, mais les corps qui feront dans le canal, auront encore le même moment que s'ils étoient enfilés,par des lignes droites tirées du centre à la circonférence. Car les corps qui font dans Z M, font enfilés par les filets courbes XV, KLY, & par les filets intermédiaires qui aboutiflent au petit arc }Y de la circonférence de la Roue ; ainfi leur mafle fera p x WY, & leur poids fera zxpxVT. Mais ce poids 7 x p x WY, fe décompofera en deux forces, dont l’une fera perpendiculaire au filet courbe XLF, ou X MV, au point 47, & l'autre perpendiculaire à a portion LM du canal fur lequel elle trouvera un appui, en forte que les trois côtés MD, LD, ML, du Triangle MD L feront perpendiculaires à ces trois forces, & leur feront par conféquent proportionnels. On aura donc MODS LD ETRPATT: LE — ha force M SU OIC/IVENN CUE S 207 appliquée perpendiculairement en 4 fur le filet courbe KMV. Or en tirant 71 perpendiculairement fur le filet courbe XMV, & du centre Æ de la Roue, Æ7 perpendicu- Jairement fur /21, cette droite ÀZ fera le levier où s’appli- quera Ja force NPA qu'on vient de trouver, & xp xVY»x LD x RI 4 Monique ve te fera le moment diffé- rentiel d’un côté du fyfleme. | Mais les Triangles LOD, MED, étant femblables, DT: 4IZ0 MD ME zx px VYx LO x KI ME M APT x KI Mais TME centre Æ de la Roue, comme centre, on décrit l'arc 41Q ; ainfi on aura pour le même moment —= KG, rayon de Ia Roue ; car fi du entre les deux filets courbes {A1/V, KLŸY, on aura 1. À caufe des Triangles femblables AE£Q, KIA, qui ont les côtés perpendiculaires chacun à chacun, ME : K1:: MQ : KM. 2.° Et parce que les filets KXMV, KLY, font fem- h blables, & femblablement pofés par rapport à la Roue, M@ : KM :: VY : KG. Et par conféquent HE : K1 :: VY : KG=— VY x KI ME VY+xKI , ME dans le moment diffé- -Subflituant ÆG pour rentiel, on aura 7 x p x KG x LO pour le moment - différentiel, & ce moment eft précifément égal à celui qui … a été trouvé lorfque les corps étoient enfilés par les rayons _ de a Roue, Le moment des corps contenus dans l'arc correfpon- F dant /"” du canal, fera 7 x p x kg x lo, & par conféquent 208 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE égal à celui des corps contenus dans Farc L AZ Donc le fyfleme eft encore en équilibre. L'article IV qu'on vient de démontrer, auroit pu faire le fujet du principal Probleme, & le Probleme par lequel commence ce Mémoire, n'en auroit été qu'un Corollaire, qui n’auroit point eu befoin de démonfration particuliére. V. Si les filets courbes XMV, KLF, Xmu, K1y, ne font pas femblables, & femblablement pofés par rapport à Îa Roue, il n’y aura que quelques fituations où le fyfteme fera en équilibre, & il y aura d’autres fituations où il n'y aura point d'équilibre ; ainfi on ne peut pas démontrer F'équilibre du fyfteme en général, comme quand les filets qui enfilent les corps font femblables, & femblablement pofés. VI Tant que le mouvement différentiel fera fous la forme zxp x KG x LO, on ne pourra point en avoir l'intégrale, ou le moment d’un côté du fyfleme, & l'intégration ne pourra avoir lieu qu’autant que 7 fera, où comme une puif- fance de la diftance au centre € des forces, ou comme une fonction de la même diflance & de grandeurs conftantes. Soit z comme /A1C)”, & foit f l'aétion du centre des fx(CM)" (CRISE " & le moment différentiel deviendra f x p x KG x = x LO, dont l'intégrale ou le moment d'une partie quel- forces fur le centre Æ de la Roue, on aura 7 = conque du fyfteme eft Jante f de por V:LE Si l’origine des abfciffes eft en #”, c'eft-à-dire, fr on ne compte le moment du fyfleme qu'au-deflus où au-deffous de Yarc R 7, décrit du centre C des forces par le centre À de la | re DS D. Hi de = \ TE de Urad go pli3 pag 208 Mem TE TORDARERE bg ONE LABP AE" 188 , HIUMPIENSMS CIE N CE 6 209 Roue, & que le moment foit nul quand CM—CK, fxpxKG CM"* —fxpxKGxCK EE EMA GER TES TERRES CK mx mx, CM"* at GR j case a | à mi VIII Je centre C des forces eft infiniment éloigné, & qu'en quence l’action du centre des forces devienne conftante e fyfteme fini qu'on examine, on fera #—=Oo dans l'intégrale qu'on vient de trouver, & lon aura f x p x KG e (CM—CK)—=f xp » KG x KP pour le moment corps contenus dans Farc J7R du fyfteme. On auroit trouvé le même moment, en faifant z conftant ns la différentielle 7 x p x XG x LO, en prenant LO pour Ja différentielle de la diftance du point 47 à l'arc Rr décrit centre C des forces par le centre Æ du fyfteme, lequel a une ligne droite, perpendiculaire à la direction de la pefanteur. On aura encore le même moment, lorfque le centre C des £ ces fera à une diftance finie, & que ces forces feront LES. 3 te d'I7goù | «Da 26 Août 1747 »r0o MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE SECONDE, PARTIE D U T'ROISTE M EME MORE SUR LES MONSTRES À DEUX TESTES, Dans laquelle on examine les parties de la Pourine à de la Région Epigaflrique du Monftre dont il s'agit Darticuliér ement dans ce Mémoire. Par M. LÉMERY. UAND on confidere l'effet de la preffion latérale fur les parties internes des deux Foœtus dont notre Monftre eft compolé, on reconnoit bien-tôt que quelques-unes de ces parties ont été dérangées & même entiérement déplacées, ue d’autres, ainf qu'il a déja été remarqué, ont été tout- à-fait détruites, que d’autres enfin ne l'ont été qu'à demi, & que de l'affemblage des deux moitiés reftantes des mêmes parties de chaque Fœtus, il s'eft formé un nouveau tout, une nouvelle partie, commune à ces deux Fœtus. Les poulmons fourniflent une preuve de dérangement ; les: deux grands lobes de chaque poulmon, qui, dans un Fœtus fimple, auroient dû être placés aux deux côtés de leur épine, avoient été contraints par la deftruétion de l'un de ces côtés, de fe retrancher dans Îe terrein qui leur étoit refté de l’autre côté après la jonétion des deux Fœtus, & c'efl pour cela que chacun des côtés de la poitrine du Fœtus monftrueux con- tenoit deux grands lobes de poulmon, ou un poulmon entier ; au lieu qu'une poitrine ordinaire, & qui ne fuppofe qu'un feul Fœtus, ne contient dans chacun de fes côtés, qu'une moitié de poulmon. Je ne m'engagerai point ici dans une explication détaillée de la maniére dont les deux grands lobes DES S'CTEN CES. T 24xx des poulmons de Rs des deux Fœtus fe font placés & _ réunis dans lun des deux côtés de la poitrine du Monftre; M..Winflow convient que ce fait favorife le fyfteme de la formation des Montres par les caufes accidentelles, c’eft-à- dire, qu'il eft très-explicable par ces caufes, & on peut l'en croire fur fa parole, cependant ce même fait exige encore un éclairciffement qui viendra dans la fuite. Pour ce qui regar de préfentement l'union de deux parties . femblables qui n’en ont. fait qu'une, il a été rapporté que le ! foye du Monftre étoit compolé de deux foyes, que la preflion _ réciproque avoit fi fort confondus & déguifés, qu’il en avoit réfulté une maffe informe & fans lobes, & d'un fi grand vo- lume, qu'elle avoit rompu le diaphragme dans fa portion ten- dineufe, & s'étoit fait jour dans la poitrine. où la partie fupé- rieure de ce foye monftrueux s'étoit attachée au péricarde; -on n'a pu encore trouver à redire à l'explication de ce fait, & l'on a même été obligé de convenir qu'il étoit attribuable au fyfleme des accidents. Voilà donc déja un aflés bon nombre de parties de notre Monftre, en y comprenant fon Squelete, dans lefquelles ce qu'il y a d'extraordinaire s'accorde parfaitement avec le … fyfleme des accidents ; examinons-en préfentement d’autres, Lrèle produétion defquelles on nie formellement que ces caufes ayent pu avoir la moindre part. . Si du foye on pañle au cœur, quien eff très- proche dans _ 4e Monftre, puifqu'il y tient par fon enveloppe, en confi- | dérant que ce cœur monflrueux n'a point la forme d'un + cœur ordinaire, que fa figure reflemble à celle d’une gibe- _ ciére, qu'il manque de / ptun medium, qu'il ne forme inté- » rieurement qu'uné feule cavité, ou un feul ventricule qui avoit deux embouchüres, l'une à droite, & l'autre à gauche, “de chacune defquelles il partoit deux troncs d’arteres qui | portoient du fang dans les poulmons & dans le refte des ïes du Rue du même côté; en confidérant, dis-je, tes ces particularités, j'avois cru pouvoir en conclurre que comme ce cœur avoit été expolé à la même preffion que D d ji 312 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE le foye, & qu'il y avoit originairement deux cœurs, auffi- bien que deux foyes diftinéts dans les deux Fœtus, ces deux cœurs s'étoient réunis comme les deux foyes & comme les bouts de côtes des deux épines, & que la preflion n’avoit 1 opérer cette union à l'égard des deux cœurs, fans altérer confidérablèment la ftruéture naturelle de chaque cœur en particulier. Enfin ce qui m'avoit paru fournir une preuve convain- cante de l'union des deux cœurs, c'étoient les deux troncs d'arteres qui partoient de chacun des côtés du produit de ces deux cœurs, je veux dire du cœur monftrueux, pour fe diflribuer dans le poulmon, dans la tête, & dans les autres parties de chacun des deux Foœtus dont le Montre étoit compolé : cette diftribution de deux troncs à droite pour le Foœtus droit, & de deux troncs à gauche pour le Fœtus : gauche, défignant parfaitement la moitié de cœur qui appar- tenoit à chaque tête, chaque poulmon & chaque partie du Foctus double; cette diftribution, dis-je, des deux troncs de chaque côté, m’avoit paru un fait dont je pouvois condlurre avec aflürance, que le cœur monftrueux qui avoit fourni du fang à deux Fœtus originairement féparés, étoit vérita- blement un compofé de deux cœurs, & que chaque moitié de ce compolé, tournée du côté de fon Fœtus, & qui lui envoyoit du fang, étoit avant la formation du Monftre, un cœur fimple, entier, & d'une ftruéture ordinaire & naturelle. On ne croyoit pas que l'effet de la preflion fut moins évident fur le cœur monftrueux que fur le foye du même Monitre, & l'on eft encore aujourd’hui d'autant plus attaché au fentiment qu'on a d’abord adopté für la formation de ce cœur, que ce fentiment fe trouve parfaitement juflifié par Yexamen d'un Monftre né à Lyon en 1702, & comparé à celui dont j'ai donné la defcription en 1724: le Monfire de Lyon étoit extérieurement femblable au mien, il avoit de même deux têtes fur un feul corps, & n'avoit auffi de même que deux bras, deux mains, deux cuiffes, deux jambes, & deux pieds. Il fut préfenté à un des Médecins aggrégés au DES SCIENCES. 213 College de Lyon, qui en fit faire l'ouverture le fecond jour de fa naïflance par un Chirurgien ; M. Goeffon Médecin fameux, qui en a donné la relation, ne fut point préfent à cette ouverture, mais étant arrivé quelques heures après, if Æxamina les entrailles, les vifceres & toutes les parties dé- placées, dont plufieurs avoient été tirées hors de leurs ventres, mais qui reftoient encore dans leur entier, ou du moins aflés reconnoiffables, auffi-bien que les parties contenantes de ces ventres dont la plüpart n’avoient point été endom- magées : inconvénient qui réfulta de ce déplacement de parties contenuës, ce fut d'empêcher de bien diftinguer Ia pofition particuliére de plufeurs de ces parties, celle, par "exemple, des deux eflomacs; d'ailleurs ce Monftre apparte- mant à une Sage-femme, qui l’avoit voulu conferver, il n’avoit -pas été permis d’en faire un Squelete, pour voir à découvert da ftruéture particuliére & f'arrangement des os dont ce -Monftre étoit compolé. : M. Goeflon ne laïifla pas cependant d'appercevoir que ce Montre avoit deux épines, de combien ces deux épines étoient éloignées l'une de l'autre à la région de la poitrine, . que cet intervalle étoit rempli de plufieurs os féparés, ou, bouts de côtes qui alloient d'une épine à l'autre, & qui ne lui avoient paru être qu'au nombre de neuf; mais il avouë - qu'il ne lui avoit pas été poflible de reconnoître fi ces bouts: _ de côtes étoient faits de deux piéces réunies enfemble par . le milieu, ni de juger de quel côté étoit leur principe, plûtôt . que, leur terme & leur infertion, s'ils naïfloient de lépine- … qui étoit à droite, ou de celle qui étoit à gauche, en un mot, _ s'ils étoient propres à une épine, ou communs à toutes les. deux, ce qui étoit beaucoup ignorer fur cet article. . Comme je n'ai point trouvé dans l'examen anatomique ‘14 de mon Monftre, les inconvénients & les obftacles qu'a . trouvés M. Goeffon dans l'examen du fien, la defcription. … de celui qui m’appartient peut d'autant mieux fervir à l'éclair- où __éiffément de plufeurs faits ignorés dans celui de M. Goeffon, … que le fien & le mien font parfaitement de la même efpece, È Dd ïj » 214 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE que ce font dans Fun & dans l'autre, deux Fœtus unis fatés ralement dans les mêmes endroits, & que, comme on va le voir, ils ne diflerent point eflentiellement, mais feulement du plus au moins, & cela à l'égard feulement de quelques parties correfpondantes, dont la différence fuppofe & accom- pagne toüjours une circonflance accidentelle & particuliére dans chacun de ces Monftres; enfin ce qu'il y a dedifférent dans l'un des deux, va devenir un éclairciflement pour ce qu'il y a de différent dans l'autre, & ils fe préteront par-là mutuellement une folution de la méchanique de leur con- formation différente, La circonftance qui, dans la comparaifon des deux Montres, paroît vifiblement la fource de toutes leurs différences, & qui annonce l'action plus ou moins forte, & le différent effet de la même caufe dans ces deux Monftres ; cette cir- conftance, dis-je, confifte en ce que les deux épines du Monftre de Lyon étoient féparées lune de Fautre à la région de la poitrine, de 20 à 21 lignes, pendant que les deux épines de mon Montre ne l'étoient que de 7 à 8, comme je l'ai exactement vérifié fur le Squelete que j'en ai. Cet éloignement de deux tiers de plus des deux épines du Montftre de Lyon, indique encore que les deux flernum de ces deux Fœtus fe font moins détruits & plus confervés, & ont aufir produit par leur union un flernum plus large & plus étendu que ne l'étoit celui de mon Monftre; d'où il fuit que la largeur de la poitrine du Monftre de Lyon furpafloit de beaucoup celle du mien, & par conféquent que les deux cœurs des deux Fœtus de ce Monftre ayant eu plus de terrein pour s'étendre, ils ont été moins à portée de fe rencontrer, d'entrer l’un dans l’autre, & de fe réunir: auffr le Monftre de Lyon avoit-il deux cœurs entiers bien diflinéts & bien conditionnés, pendant que le mien n’en avoit qu'un d’une conformation extraordinaire, ce qui prouve, à mon avis, avec la derniére évidence, que comme les deux cœurs du Montre de Lyon n'en auroient fait qu'un fi les circonftances euflent été les mêmes que dans le Monftre qui m'appartient, Ipileusi Si cr E IN € E s. 215 le cœur unique qui s’y eft trouvé, fuppofe néceflairement deux cœurs différents qui feroient reftés féparés, fi l'efpace & la preflion le leur eût permis. Ce fentiment reçoit encore - un nouveau jour de la confidération fuivante; c’eft que les deux cœurs du Montftre de Lyon ne faifoient chacun que ce que faifoient les deux moitiés du cœur de mon Monftre, c'eft-à-dire, que le cœur droit du Monftre de Lyon envoyoit du fang dans la tête & la moitié reftée au Fœtus droit, &le cœur gauche dans la tète & le refte du corps du Fœtus gauche; ce que faifoient précifément de même les deux moitiés du cœur unique de l'autre Monfîre, qui repréfentoient chacune un cœur entier dont elles venoient, & dont elles portoient . des marques fenfibles par leur fonétion particuliére, _ Aurefte, ce qui fait bien voir encore que les deux cœurs du Monftre de Lyon n’en auroient véritablement fait qu'un, sils fe fuffent rencontrés & preffés mutuellement jufqu'à un certain point, & par conféquent que le cœur unique du Monftre qui m'appartient, eft réellement formé de deux cœurs, c’eft la comparaifon de ce qui eft arrivé aux deux cœurs dans Ja région de la poitrine, & aux deux foyes du Monftre de Lyon dans là partie fupérieure ou épigaftrique du bas-ventre. ê | Les deux épines de ce Monftre, après avoir été écartées | Yune de l'autre de 21 lignes par les bouts de côtes, com- mencent enfuite à fe rapprocher vers la premiére vertebre des lombes, où elles ne trouvent plus le même obftacle intermédiaire qu'auparavant ; & enfin à force de fe rappro+ cher toùjours de plus en plus, comme le font aufli les deux _épines de mon Monitre, elles deviennent contiguës l’une à Vautre, & fe terminent dans cette pofition de maniére que Ja région dans laquelle l'éloignement des vertebres forme un plus grand efpace, c’eft la poitrine, celle où cet éloigne- ment en forme un moindre, c’eft la partie fupérieure où épigaftrique du bas-ventre, & celle enfin où les parties À contenuës doivent naturellement être plus reflerrées qu'en aucun autre, c'eft le refle du bas-ventre, ce qui mérite 516 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE d'être remarqué pour ce qui fera dit dans la fuite. L'écartement des deux épines du Monitre de Lyon fe trouvant donc moindre dans la partie fupérieure du bas-ventre, qu’il ne l'étoit dans la région de la poitrine, les deux foyes des deux Fœtus de ce Monftre fe font trouvés par-là plus à ortée de fe rencontrer dans leur région naturelle, qu'ils ne l'euffent fait dans celle de la poitrine; & ce qui a dû faciliter encore cette union, c’eft le volume du foye qui, dans les Foœtus fur-tout, eft naturellement tel que ce vifcere s'étend depuis lhypocondre droit jufqu’au gauche, moyennant quoi, après la deflruétion des parties contenantes de l'un des côtés de chaque Fœtus, excitée par la preflion, les deux foyes ont dù s’atteindre dès les premiers pas de cette preffion, fe détruire en partie, & former de ce qui a refté de l’un & de l'autre, une nouvelle mafle épatique ; c'eft auffi ce qui eft arrivé dans le Monftre de Lyon, qui ne contenoit qu'un feul foye, mais dans lequel on voyoit clairement des indices manifeftes des deux foyes originairement féparés, dont il avoit été formé. La comparaifon du Monftre de Lyon & de celui qui m'appartient, fournit encore une obfervation curieufe , qui mérite d'autant mieux d'être rapportée, qu'elle fortifie & confirme de plus en plus ce qui a été dit fur la caufe des différences qui fe trouvent entre ces deux Montftres. S'ils fe reflembloient, parce qu’il ne s’eft trouvé dans chacun d'eux qu'un feul & unique foye formé dans lun & dans l'autre des deux foyes des deux Fœtus dont le Monfîre étoit com- polé, ces deux foyes doubles avoient d’ailleurs des différences qui partoient du même principe qui avoit donné lieu à toutes les autres différences de ces deux Monftres. On conçoit que plus les deux épines ont été écartées lune de l'autre dans la région de la poitrine par la longueur des bouts de côtes qui fe font confervés entre deux, moins ces deux épines ont été en état de fe rapprocher enfuite fune de l’autre, immédiatement au-deflous de la derniére vertebre du dos dans la région fupérieure & épigaftrique du bas-ventre, & plus DES SCcTENCES 217 & plus auffi cette région épigaftrique at-elle dû conferver d'étenduë & de largeur; c’eft pour cela que le foye du Monftre de Lyon s’étoit contenu, malgré la grandeur de fon volume, dans les limites de fa région, & que la preflion qui de deux foyes n'en avoit fait qu'un, y avoit cependant laiflé des marques fenfibles de ces deux foyes, c'eft-à-dire, deux veffi- cules biliaires trouvées dans la partie concave du foyÿe unique & monflrueux, éloignées l’une de l’autre, & écartées vers les deux extrémités oppofées. : Dans le Monitre au contraire qui m'appartient, & dans lequel la preffion avoit rapproché de bien plus près les deux épines dans la région de la poitrine, & dans la région fupé- rieure & épigaftrique du bas-ventre, les deux foyes des deux Foctus de ce Monftre bien plus reflerrés dans l'efpace qui leur avoit été laiffé, que ne l'avoient été dans le leur, ceux du Monflre de Lyon, s'étoient non feulement détruits & confondus bien davantage, & avoient formé par-là une mafle informe fans lobes, fans veflicules du.fiel & fans veftige de leur conformation naturelle, mais encore une portion de ce foye double & monftrueux, qui n'avoit pu trouver place dans fa région, avoit été obligée, pour fe loger, de créver le diaphragme dans fon milieu tendineux, & de percer dans le bas de la poitrine où on lavoit trouvé attachée au péricarde. Il paroît que la voye de l'anatomie comparée, dont nous venons de faire ufage, déclare affés nettement que le cœur du Monftre qui m'appartient, ‘eft véritablement le produit de deux cœurs, ainfi que je lavois conçû d'abord, indé- pendamment de ce nouvel éclairciffement, & cela fur la feule ftrudure bizarre & extraordinaire de ce cœur, & fur fes fonétions. Qu'oppole-t-on néantmoins contre ce fentiment, & cela _ates convienne que le foye du même Monftre peut ort bien avoir été formé de deux foyes réunis par une preflion accidentelle, & quoiqu'il foit vrai que cette union, toute vraifemblable &-certaine qu'elle eft, ne foit point Mem. 174 0. »* Ee * 218 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE encore annoncée par des fignes aufli clairs &c aufli fenfibles. qu'elle l'eft dans le cœur unique? On objeéte qu'on a examiné, autant qu'on l'a pu, toutes: fortes de coupes de deux cœurs naturels & de leurs oreil-- lettes, non pas tant en prétendant pouvoir trouver un affem-. blage de différentes portions qui imitàt entiérement la com- pofition du cœur monftrueux dont il s'agit, qu’en efpérant: trouver au moins quelques petites traces de rapport entre ces portions, mais qu'il a été impoflible d'en trouver, &. qu'on n'entrevoit aucun moyen d'y parvenir, en examinant: avec de vrais yeux anatomiftes.. Pour moi, c'eft à des yeux vraiment phyficiens que je- m'adrefie, & je leur demande fr c’eft en examinant toutes les coupes différentes de deux cœurs folides, & dont 1a- conformation eft naturelle, qu'on parviendra à connoître la ftruéture nouvelle de ce cœur monftrueux? fi ce n'eft pas plütôt en confidérant toutes les différentes impreffions dont: deux cœurs qui font aétuellement dans leur développement, ou qui en font à peine fortis, fe trouvent fufceptibles par la mollefle, la flexibilité & la fouplefle qu'ont alors leurs. parties, & qu'elles font bien éloignées d'avoir lorfqu'elles ont acquis plus de force & de folidité? C’eft dans ce premier état que la preflion, en joignant les deux cœurs des deux germes, y a produit un ravage & un bouleverfement général,. & fi confidérable, qu'il en a réfulté un arrangement tout nouveau, qu'on n'a pu retrouver, non plus que la forme extérieure & intérieure du cœur monftrueux dans les deux cœurs naturels qu'on a confultés; fouvent même de ce bou- leverfement, de la rupture de quelques parties, il en peut refler de petites portions qui fe préfentent enfuite fous la forme d’une partie nouvelle, dont il n’y a ni trace ni appa-- rence dans l’état ordinaire, & que le hazard fait quelquefois. rencontrer dans un lieu où elles font, ou paroiffent être de quelqu'utilité : c’eft apparemment par-là qu'il s’eft trouvé fur les côtés de la veine-cave defcendante deux apparences: de cloifons qui la féparoïent des deux troncs d'arteres du # LE DE S/ SCTENCE S \ ce côté droit, & qui fembloient faire l'office de valvules, quoi- u’à l'extrémité de cette veine il y en eût de véritables, appelées vahules triglochines | & qui n'avoient pas befoin des deux petites cloifons pour empêcher le fang d'entrer dans “cette veine, Au refte, quand on fuppoferoit que la difficulté de M. Winflow contre mon fentiment fur la formation accidentelle du cœur de mon Montre, feroit aufli-bien fondée qu'elle me le paroït peu, il m'en offre la folution fans le vouloir, ou du moins fans croire que je fois d'humeur à l'accepter. I avertit que fon objection ne tombe que fur l'union de deux cœurs femblables en conformation, & que fi l'un des deux étoit conformé à l'ordinaire, & l’autre à contre-fens, comme l’étoit celui du Soldat des Invalides, il n'ytrouveroit pas la même difhculté ; mais alors ; ajoûte-t-il, la confor- mation originairement extraordinaire d’une moitié du cœur monftrueux dont il s'agit, rendroit entiérement inutile tout dy V{ss +39) devant le figne de en laïffant le Zx fous le même figne, > dx Mr 77 pour la différentielle de / dx V{xx + yy), y variant. En général, la différence de É: Adx, y étant variable, Jera dy f<+ dx. Nous aurons donc Bdy=dy [dx + dY, ou, ce qui donnera , on en Ôtera dy, qu'on mettra ainfi qu'il étoit auparavant , d’où l'on aura dy y en divifant par dy, EE dx T. Prenant enfuite la différentielle de cette quantité, en | faifant ë LE. EE DES SCIE N C Es. (297 ! à dB d A dB __4A faifant varier x, on aura <= dx = Ty dx ou = Le C. Q. F. D. CN 1 LE À On démontrera de la même maniére l'Inverfe de cette k Das dB dA propofition, c’eft-à-dire, que fi <= = 7 Adx+-Bdy fera néceffairement une différentielle complette; c’eft-à-dire, qu'il y aura quelque fonétion de x & de y algébrique ou dépendant des quadratures, qui en fera l'intégrale, CN A4 + Suivant ce Théoreme, on voit que x dy V{xx+ y) me + y dx V{xx+-yy) n'a point d'intégrale, puifque la diffé: 1 méthode ’examiner ft rence de x {xx + yy), en fuppofant x variable & tant les différen- ss : tielles à deux : variables, font les dx, ft Vrx+yy) + PE ve Elie lieu que celle ue de yV{x +7), ‘en faifant y variable & Ôtant les dy, eft 4 1 DS HUM ST IL 3 Ë dx— +4 7 : On voit au contraire que PET eft une différentielle #8 +9) Ï complette, parce que la différence de —?—, } variant & : CE au 2 Ôtant les dy, eft ren & celle de. Lx +yy)°? & OÔtant les dx, eft la même quantités — =, x variant FENTE ds +2 pydx— x6 dy | DETTE TENTE dont on pourroit chercher long -temps l'intégrale, même jufqu'à fe décourager, dans l'incertitude. ff {a quantité eft intégrable ou non; on voit, dis-je, que-cette quantité eft néceflairement intégrable, ou plûtôt conftructible, à caufe À Her. 1+ 4 yy que la diffé entielle de FRS EP PRPP POP PT PE en faifant varier y & Ôtant les dy, eft égale à la différentielle Men, 1740. . Pp On voit encore que 298 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE — , en faifant 4 de = 3 AR 9 a 4 4 7 y + Gap + D 8 varier x & Ôtant les 7x. S& V. . Maniére Suppofons préfentement qu'on fçache par le Théoreme mn précédent, qu'une différentielle, comme Adx-+ Bdy, eft + Bdy, lor- intégrablé, fi on vouloit l'intégrer effectivement, ce qui fe quete font préfenteroit d'abord de plus naturel, ce feroit d'intégrer fépa- ticlles com rément Adx & Bdy, le premier membre en fuppofant x plates, feulement variable, & le fecond en faifant varier y feulement; enfuite d'égaler ces deux intégrales à l'aide d'une quantité compofée de x & de conftantes, qu’on peut ajoûter af Adx, & d'une quantité compofée de y & de conftantes, qu’on peut ajoûter à f Bdy. Müis il eft quelquefois difficile de découvrir ces quantités propres à égaler les deux intégrales, & je crois qu'on auroit beaucoup de peine à trouver une méthode générale pour cela. D'ailleurs les calculs font fouvent très-longs par cette méthode : en voici une plus courte, & dont le fucéès me paroît immanquable. IL faut fe contenter d'intégrer feulement lun de fes deux membres, Adx, par exemple, en fuppofant y conftant & x va- riable, l'intégrale étant trouvée, on la différenciera en traitant x comme conftant & y comme variable, on retranchera cette différence de Bdy; fi la différence eft zero, cela fignifiera que Ta À dx fuffit pour Fintégrale de Adx + Bd}; fi la différénce n'eft pas zero, elle ne pourra étre qu'une quantité coimpofée de y, de dy & de conftantes, dont l'intégrale étant ajoûtée à / Adx, la rendra l'intégrale complette de Adx+ Bdy, DES SCIENCES 299 $ VI. Il fera aifé de voir l'utilité du Théoreme précédent dans l'intégration des Equations différentielles. Pour fçavoir d'abord fi une Equation quelconque pro- pofée Max = Ndy=—o, eft exactement une différentielle, . - Pa : # # { a M 2 il faudra voir par le T'héoreme précédent, far neft pas , dN 1 . < » 0 0 ,. £ 2 A5 égal à ra Si par hazard cela arrivoit, l'intégrâle ou fa conftruction fe trouveroit par les moyens que nous venons d'indiquer. . Que fi cette Equation n'étant point une différentielle, on pouvoit néantmoins la rendre telle en la multipliant par quelque facteur compofé de x, de 3 & de conftantes, en ce cas la méthode que nous allons donner, ferviroit fouvent à découvrir quel pourroit être le facteur propre à cet effet, & qui fe féroit évanoui par la différenciation à caufe de Yégalté à Zero. ; Pour le retrouver donc ce facteur, nous le DOMMETONS 4, Ufage ds ainft u Mdx + p Na y fera la différentielle de quelque Théoreme l en fonction de x, de y & de conftantes. ner Donc par notre Théoreme, la différence de BAT, yva- Gi HU riant, eft la même que celle deu N, x variant: c'eft-à-dire; Equation inré. du M) du N) grable, en mul. she à Le : lu méme. | ipliant tous fes: SE RE CE AV ’ ou, ce qui revient au mème, termes. dM du aN du PL dE PRE FE TNT 6, Equation qui eft d'une grande utilité pour trouver y ; car la difficulté eft réduite à affigner la forme la Plus générale ae puifle avoir cette quantité, parce qu’à l'aide de la mé- ode des ndéterminées, on 1a reftreindra à être celle qui convient pour réfoudre cette Equation. On pourroit effayer de prendre pour cette fonétion y, a quantité k plus généräle du debré dé A7, qui contienne Pp i 300 MENMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE les mêmes quantités que A & N; fi on ne réuflit pas, on pourra prendre une fonétion d'un degré plus haut, ou bien une fonction qui ait un numérateur & un divifeur, &c. Mais comme il y a quelque chofe de trop vague dans toutes ces tentatives, nous allons donner quelques remarques que les Géometres qui ont différencié fouvent, auront fans doute faites auffi, & à l'aide de ces remarques, nous trouverons une maniére d’avoir æ, qui réuflira dans un très-grand nom- bre de cas. Ces remarques confiftent en ce que Ia plüpart des fonc- tions qui ne feront pas multiples d’une autre, c'ett-à-dire, qui n'auront pas un certain facteur commun à tous leurs termes, n'auront pas non plus ce même faéteur à leurs diffé- rentielles. De plus fr une fonction a un dénominateur , fa différentielle aura auffr un dénominateur qui fera un multiple de celui de l'intégrale. Cela pofé, mettons S au lieu de u, P & Q étant deux fonctions pofitives ( j'entends par fonc- tions politives, celles qui n'ont aucunes puiflances négatives ou divifeurs) P fera un facteur de la fonétion @ cherchée, dont la différence et 2 &- dx + dy, & Q contiendra le dénominateur de la même fonétion ®. Si l'on imagine donc que la différentielle foit divifée par l'intégrale, P s'en ira du numérateur, & Q fe divifera par le dénominateur, de maniére qu’il ne reftera après Ia divi- fion, pour le dénominateur commun à tous les termes, qu'une fonction À d'un degré de: plus que celui de 47; je JR 7: M4 Nd dis d’un degré de plus, parce que Ia quantité =, qui vient par cette divifion, eft égale à _ ou à la diffé- rence du logarithme de [a fonétion cherchée, & que par conféquent elle doit être d'un degré au-deffous de l'unité. Préfentement comme _ ou d/ç eft aufli-bien la diffé- rentielle d’une fonétion que d@, il s'enfuit que notre DIESN SAC TE Nice ss. zofl Théoreme a toûjours lieu ici, & qu'au lieu de », nous pou- vons mettre - , À étant la fonction pofitive la plus générale du degré d’une unité de plus que 44. Au lieu donc de l’Equation | 4M du 4aN Jai | FM Eu EN PE = 0) » il faudra {e fervir de celle-ci, RE ME — RÉ + NÉE —o, Equation dx fondamentale #3 ; } pour trouver & voici quel doit être le procédé du calcul. Uribe ï commun à ; On prendra R égale à la fonétion pofitive Ia plus géné- souslestermes, À rale du degré d’une unité de plus que 47, avec des coëffi- 1Yec la ma- ; RUE e ER 1 niére d'em- cients indéterminés; s’il y a des radicaux dans 47 & dans AV, ployer cette il faudra aufi qu’ils entrent dans À, en fe combinant avec Equation. x, y, de toutes les maniéres poffibles. On prendra enfuite “ la différence de cette-quantité, en fuppofant feulement x ; Ë dR A ; à . variable, ce qui donnera <=, & enfuite en faifant varier y, È E a dR . . ce qui donnera <=. { ” #ÿ » . Quant à SL & = on devra déja les avoir trouvés, lorfqu'on aura examiné fi l'Equation propolée Mdx+-Ndy 0, n'étoit pas une différentielle exacte. ; Subffituant enfuite ces quatre quantités dans la formule précédente R M re — &c. &ordonnant les texmes de l'Equation qui viendra de cette fubftitution , on aura par la méthode des indéterminées, la valeur de tous les coëff- cients de R, & par conféquent À même. Mdx Ndy . R + TR comme nous avons enfeigné à intégrer Adx + Bdy, lorfque l'on fçait que c'eft la différentielle d'une fonction. | : Après avoir trouvé cetté intégrale, on l’égalera à une xonfiante, ce qui donnera Intégrale cherchée, 3: :) .… Pp ii R étant déterminé, on intégrera 302 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE S'VIT _ EXEMPLE. Soit propolé d'intégrer l'Equation (ix + ky) dx + (Ix+-my+n) dy=0, la plus générale de fon degré, quoiqu'elle paroiffe d'abord manquer d'un terme, où il y auroit /x multiplié par une conftante, mais qu'on peut toüjours faire évanouir à faide d’une transformée. Suivant la méthode précédente, A7 fera = ix+4y, = x my +0, REX + bxy ex Hey +-f3 +6, , dR par conféquent a #4) 2e =, <= 2x+ by +0 dR TH — bx+2ey +f Subftituant ces quatre quantités dans l'Equation 4M 4R aN dry Rage Mirage RSR elle fe changera en ka + 2m xy + kcx + by + cmy kg HT —2ie —fi —Jle +nb +ecn — ib +2n —ke —1f —]Ig dans laquelle faifant chaque terme égal à zero, on aura fix : Ë : À Te ; A+ Equations du premier degré, qui donneront b=—= RG LES nk—nt Et) Los Fe, nl Lnkl—2nim EL — 1 TR TT dE Ur = ik —iim 0 Him qu'il faudra fubftitueér dans la valeur de R ; & R étant à Mdx+ Nd fubftitué dans = —7., on aura (ix+ky) dx + (1s+ my +n)dy Er mk nl 2 M. 2 RE ETES AEr nk+nkl— 2nim n° D Âli—iim, 77 Kim qui doit être, par ce que nous avons dit, intégrable, & DÉS 'S'CHENCES 07 dont l'intégrale, étant égalée à une conflante, {era l'Fquation intégrale de ix dx + 4ydx + &c. Pour intégrer la quantité précédente, on regardera d'abord x feulement comme variable, & on fe rappellera 1#+r que l'intégrale d'une quantité comme dx .eft XH SX +1 He) + Re up eg) ess), Comparant donc cette différentielle avec la nôtre, on en déduira les valeurs de r, 5, #, qui étant fubftituées dans Den précédente, la RE en LliLki nl) :: VAL) —4mi] ni (: 2 a en La miers RE SUR ne ON MA Ge rt ah. +li—?Ai Nr AY vLA+ 1)? —4mi] ni TT YLA+ 4 ami] 2hl—iim zé Éins el Cette quantité étant égalée à une conftante, foit Re foit logarithme, fera Intégrale cherchée & complette de l'Equation x dx — &c. car fi Von prend la peine de la différencier, & qu'on légale enfuite à Zero, On trouvera “4 quation différentielle propofée. SECONDE PARTIE Où & on traite des Equations différentielles qui renferment ps plus de deux variables. 1 FE tout ce que nous venons de dire, nous n avons parlé que des Equations différentielles à deux variables, “ ‘elles que font les Equations ordinaires des lignes courbes ; - cependant comme on rencontre fouvent des Problemes où il eft queftion d'Equations qui renferment un plus grand | … nombre de variables, nous allons donner quelques regles | pour fervir à l'intégration de ces s fortes d'Equations. Maniére de connoître fi une différen- tielle à trois variables, a une intégrale, Intégration des différen- tielles com- plertes à troïs variables, 304 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE CHAPITRE I. Des Equations à trois variables. 6 L Soit Mdx+ Ndy + Pdz—o, une Equation quel- conque différentielle à trois variables, on commencera par s'aflürer fi cette Equation dans l'état où elle eft, ne feroit as la différentielle exacte de quelque Equation à trois va- riables, & pour cela on aura recours à notre T'héoreme, en examinant fi TE fi Se — & fi F = Si ces trois Equations ne fe trouvoient pas vrayes à la fois, la quantité Mdx + Ndy-+ Pdy, ne feroit pas une diffé. rentielle exacte. Sie Si au contraire ces trois Equations ont lieu, on cherchera ainfi l'intégrale de Mdx + Ndy + Pdy. On commencera par intégrer le premier terme 4x; en fuppofant que les lettres y & 7, qui entrent dans la fonc- tion A1, foient conftantes; l'intégration ou la conftruétion étant faite, il ne pourra manquer qu'une fonétion de y & de 7 à la quantité qu'on aura par cette opération, pour être l'intégrale complette de A4x + Ndy+ Pd7z Pour la trouver cette fonction de y & de 7, on rédifférenciera Ia quantité intégrée “a Mdx, en traitant x comme conftante, & y & z comme variables, & l'on retranchera la différen- tielle qui en viendra, de Ndy + Pdy7, le refte fera une fonétion différentielle de y, 7, dy, dz, dont l'intégrale fera la fonction cherchée à ajoûter à f Mdx. H eft évident que la maniére d'intégrer li fonétion de ÿ; Z dy, dz, que l'on aura par cette opération, fera la même que celle que nous avons enfeignée pour intégrer Adx+ Bdy dans la 1.'e Partie, $ V. S'i L DES SCIENCES. 305 S'il avoit paru plus commode d'intégrer d'abord un des deux autres termes Vdy, Pdz, il eft évident qu’on en étoit le maître, & que l'opération auroit été la même à l'égard des deux termes reftants. s III Quoïque tout ce qu'on vient de voir fe tire de ce qui a été établi dans la premiére Partie, quelques lecteurs ne feront peut-être pas fâchés d’en trouver ici la démonftration. Premiérement, il eft bien évident que M4dx + Ndy — Pdy7, n'a point d'intégrale fr les Equations précédentes _- = , &c. n'ont pas lieu, puifque f Mdx+ Ndy + Pdy, eft une différentielle complete, il faut que Adx + Ndy en foit une en faifant 7 conftant, & x & y variables, . dM .__ 4N à ce qui donne TT = De même de Ndy+ Paz, & de Mdx-+ Pdz. Quant à linverfe de cette propofition, qui confifte en ce que fr = a 2H = ont lieu, Mdx+-Ndy+-Pdz, eft néceffairement une différentielle exacle, cela n’eft pas fi aifé à démontrer, quoique l'on en fente, pour ainfi dire, la vérité au premier coup d'œil. Pour en être convaincu, il fuffit de voir que l'intégrale de Mdx, prife en traitant y & 7 comme conftants, fera à une fonction de y, 7, près, l'intégrale de Mdx+ Ndy + Pdy, où x, y, 7, font variables. Ce qu'on découvrira ainff. S Soit différenciée f° Mdx, en faifant x, y, 7 variables, il 3 évident qu’on aura Mäx+-dyf Te dx def: Te dx, & la queftion fera réduite à voir que cette quantité ne differe de Mdx + Ndy + Pdy, que par une fonétion de y, z, dy, d7, qui foit une différentielle complette ; c’eft-à-dire, Mem. 1740. rar: Démonftra- tion de la mé- thode précé- dente, 306 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qu'il faut s’'affürer que / Le T-dx) dy PTE Te dx)dy eft une fonction fans x, & une différentielle si EN __aN nr JÆZ d#} ou /4X dx, ne fçauroit être que plus une fonction de y & de 7, fans x, & par conféquent que NE NUE AM 7x eft cette fonction ir x. aM Te = _ donne pour P — JE dx une fonction fans x. (N—f% dx) dy + (P—f dx) dy eft donc une quantité fans x. II ne s'agit plus que de fçavoir fi elle eft une différentielle com- plette, ou, ce qui revient au même, d(N— [#7 4x) d(p—f ax) f EE dz dy Pour cela, on réduira cette Equation d dx d([EZ 4x) à fre < — 2 —_ = ——— te st , puifque par l’hypothefe, TE nt D . Or comme nf + auf as eft la différentielle de a fontion 4 à Mdx, en fuppofant feule- ment y & 7 variables, il s'enfuit par notre Théoreme, que VA EP d dx Er 4. par 1 = = d . Donc, &c. FE IV. Suppofons préfentement qu’on ait découvert que l'Equa- tion propolée Mdx-+ Ndy + Pdz—=o dans l'état où elle eft, n'eft point une différentielle exacte, on cherchera, ainfi que l’on a fait pour les Equations à deux variables, la quantité qui, multipliant tous les termes de cette Equation, la rendroit une différentielle exacte. Dans cette vüë, on remarquera d’abord que fo On verra enfuite que <—- DES SCIENCES. 307 Pour cela on nommera encore ce faéteur commun à tous les termes, ; & alors uMdx + uNdy+ pu Paz fera une différentielle complette, qui donnera par conféquent les trois Equations fuivantes, du dM. = ny du dN HU NT HS, du AIN made dP dz SL dy = P dx TE dx ? du CENRET du dP Th PE ue. D'où la difficulté fera réduite, ainfr que dans les Equations qui ne renferment que deux variables, à donner à y une forme aflés générale avec des coëfhcients indéterminés, pour que cette quantité étant fubftituée dans les trois Equations précédentes, en fafle évanouir tous les termes. + Mais avant que d'entreprendre de trouver cette forme générale à donner à x, il eft à propos de faire voir que dans un très-grand nombre de cas il feroit bien inutile de la chercher, parce qu'il y a une infinité d'Equations diffé- rentielles à trois variables, qui n'ont point d'intégrales. 6. ne Pour le faire voir, faifons évanouir des trois Equations précédentes, dm, dk 4 Comme on fait évanouir trois dx? dy? dz inconnuës à l'ordinaire, il arrivera que x s’évanouira en même temps, & qu'on aura l'Equation ; _ —PT + cs NT ME PL ED, qui apprend que P, M, N, doivent avoir entr'eux la rela- tion exprimée par cette Equation, afm que l'Equation Mdx- Ndy + Pdz—=o foit intégrable. Ainfi il n’en eft pas des Equations à trois variables comme de celles qui n’en ont que deux; car rien, que je fçache, n'empêche de croire qu'une Equation différentielle quel- conque à deux variables, ne puifle fe tirer de Îa différen- ciation de quelque Equation en termes finis, au lieu que la Qai Recherche du Facteur, qui rend une Equation dif- férentielle à trois variables, une différen- ticlle com- plette. Manicre de connoître fr une Equation différentielle à trois variables, peut être in téprée, 308 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoY4LE démonftration précédente apprend qu'il y a une infinité d'Equations à trois variables, qui ne peuvent pas être venuës par la différenciation d'aucune Equation en termes finis, SVT La différence entre les Equations à deux variables & celles qui en ont trois, efl encore plus grande qu’il ne paroît réfulter de la démonftration précédente; car fans fçavoir fi toutes les Equations à deux variables font venuës par quelque diffé- renciation, il eft aifé de faire voir qu’elles expriment toû- jours quelque Courbe dont la conftruétion eft poflible. Mais toutes fes Equations à trois variables dans lefquelles l'Equa- Ïl ya une im- finité d'Equa- , , , - tions difféen. tion /V Le — BEA — &c. n'a pas lieu, ne peuvent pas tielles à trois Ÿ à à variables, qui être conftruites en aucune maniére, & les Problemes dont ge pee. Ja folution dépendroit de pareilles Equations, feroient im- conflruétion. poflibles. Pour le bien voir, nous confidérerons la chofe indépen- damment d’aucune intégration. Démonftra. Que d7 —« dx +-S dy foit une Equation quelconque Spa les à trois variables, & qu'on fe propofe de trouver la furface pes courbe exprimée par cette Equation, À P étant l'axe des x, AQ celui des y, AR celui des 7, w & & deux fonctions quelconques de x, y, 7, avec des conftantes. | Soient de plus PAN Ha tranche de la furface courbe par un plan perpendiculaire à l'axe des x, & Q N la tranche de la furface par un plan perpendiculaire à l'axe des y; il eft évident que l’Equation de la tranche PN fera d7—Sdy, & que celle de la tranche Q N fera d7 —0 dx. Imaginons enfuite que 7» & p# foient deux autres tran- ches de la furface par des plans infiniment près & paralleles aux premiers, il eft évident que fi l'Equation d7 = dx —- 3 dy exprime une furface courbe poffible, il faudra que les deux tranches ou courbes gs pu, fe rencontrent en un point / qui foit dans la droite 4/7. fetion des deux plans guy, pmn; ceft-à-dire, qu'il faudra que l'Equation de la DES SCIENCES, 309 À P P courbe gv/ foit telle, qu'en y faifant x 4, on ait pour z la même valeur qu’en faifant dans Equation de la courbe paul, y=pk. Pour voir fr cela eft, nous chercherons premiérement la valeur de 74 pris pour une ordonnée de la courbe pr]; & dans cette vüë il faudra confidérer /4 comme ce qu’eft devenu » m, Jorfque AP eft devenu A4p; NM, im; PM demeurant le même. C'eft-à-dire, que dans Ja sens de ur—=7+S dy, faudra mettre, au lieu de 7, 2m, ou 7 odx, & au lieu de 5, ce que devient cette fonétion,. fi lon y fubftituë «+ dx pour x, & 7 0 4dx pour 7 L'on aura donc par cette voye R=r+adx+Sdy + dx dy + Zu dxdy. Quant à la valeur de /4 pris pour ape de Ja courbe y, il eft clair qu'il faudra, pour Favoir, fubftituer dans ## = Z—+o0dx, vu, Où 74 dy, au dieu de z, & mettre dans la fonétion ©, y+- dy Fa Y, & 7-8 dy, au lieu dez, * reftant ont Qq ii g10 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE A P P Ces fubftitutions faites, on aura 2 + dy +adx + Rdydx + Sdydx. Egalant préfentement ces deux valeurs de /4, & rédui- fant, on aura d5 4$__ du Ro TO Donc pour que lEquation d7 = wdx + Sdy foit poffble, il faut que l'Equation précédente ait lieu. IL eft aifé de voir enfuite que cette Equation eft la même que Re ME NE — =: PE 0, que nous avons trouvée par la confidération du faéteur x, commun à tous les termes de la différentielle, & détruit par égalité à zero. Car Equation d7 —« dx + S dy étant la même que Mdx + Ndy+ Pdz =, il faut que = + CS +; & fubflituant ces valeurs dans %* M. Fontaine avoit déja donné cette Equation, mais le chemin par lequel j’y arrive, & l’ufage que j'en fais, font particuliers à mon Mémoire, car M. Fontaine n’avoit cherché & employé ce Théoreme que pour l’Inté- gration des Equations à trois variables qui n’ont point de conitantes. DES SCIENCES. 312 d% , d3 __ do do , . a TE ie dr , on aura JEquation :a7 dP N ra om | &c. Donc les Equations différentielles à trois variables expri- mées généralement par Mdx-+ Ndy+ Pdz =o, ne feront conftruétihles, ou plütôt ne feront poffibles que lorf- : dP Pie que l'Equation Ne — &c. aura lieu. moe "NH À Cette démonftration pourroit laifler une difficulté qu'il eft bon de prévenir. Il paroît hors de doute que lorfque Equation N << — &c. n’a pas lieu, lEquation A/4x + Ndy + Pdz—= 0 n'exprime aucune furface ; mais pour fçavoir fi, lorfque cette Equation NT — &c. a lieu, la furface eft poffible, ne faudroit-il pas encore examiner fi les tranches des x & des y ne donneroiïent pas quel. qu'autre condition? Ou, pour s'expliquer plus clairement, ne faudroit-il pas s'aflürer que toutes les fois que l'Equa- tion /V _ — &c. a lieu, on a le même. *, foit qu’on le cherche dans la tranche des y & des x, ou qu’on le prenne dans la tranche des 7 & des x! Pour reconnoître que cela fera ainfi, on remarquera que le calcul qu'il faudroit faire pour exprimer cette nouvelle PA es pe À condition, feroit abfolument le même que celui que nous venons de faire, à cela près qu’au lieu des 7, on auroit des x, & au lieu de A7, P. Mettant donc dans Equation dP aN. aN aM 4P dM 2 . Mpour P, & P pour M}; x pour 7, & 7 pour x, elle fe changera en dM aN aN dP dM_ | npdP. Nouvelle démonftration du Théoreme de la premiére Partie, 312 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE Or cette Equation eft abfolument la même que la précédente, en changeant tous les fignes, & tranfpofant, Donc, &c. On démontreroit de la même façon, qu'on auroit le même y, en le cherchant, foit dans la tranche des y & des z, foit dans celle des x & des y. $ VIIL En prenant une voye femblable à Ja précédente, on peut former une nouvelle démonftration du'Théoreme que nous avons donné au commencement de ce Mémoire, par lequel on apprend que Adx + Bdy n’eft une différentielle inté- _ grable ou conftruétible que Iorfque Se — : 2. ,A&B étant deux fonctions de x & de y avec des conftantes. Car fi Adx-+ Bdy eft une différentielle complette, YEquation d7— 4dx-+ Bdy fera évidemment une Equation à quelque furface courbe, & réciproquement fi dy = Adx-+- B dy eft une Equation pofhble, il faudra que Adx+- B dy foit une différentielle complete, puifque À & B ne renferment pas de 7. Soient donc, comme ci-defius, À P Yaxe des x, AQ celui des y, & AR celui des 7; PM la tranche perpendi- culaire à l'axe des x, Q N la tranche perpendiculaire à axe des y, & pal, g»l, les deux tranches voifines & paralleles à ces deux-là. On aura vw —=7—+ Bdy, & Onm—7—+Adx. Si l'on confidere / 4 comme ordonnée de Ia tranche pr; fa valeur f trouvera, en fubftituant dans y —=7+B4dy pour NM, nm—7+ Adx, & en mettant dans B, x + dx, au lieu de x, y reftant le même, ce qui donnera liz + Adx + Bdy + dxdy, à caufe que 7 n'entre point dans 2, | De la ) DES SCIÈNCES. 31 - De fa même façon, en prenant /4 pour une ordonnée de la courbe gv, on aura IR + Bdy+ Ads + djdx. Mais ces deux valeurs doivent être égales. Donc 22. = DE GC: Qi FE D. s IX. Après avoir appris à diftinguer parmi les Equations diffé- rentielles à trois variables, celles qu’il faut-abandonner, parce qu'elles ne font ni intégrables ni conftruétibles, revenons à Ta maniére d'intégrer celles qui peuvent l'être. Si lon fe rappelle ce que nous avons dit dans la premiére partie de “ce Mémoire à l'occafion des Equations à deux variables, on verra qu'il y a très-peu de changement à faire pour appli- “quer la même méthode dans ce cas-ci. On imaginera encore que la différentielle exacte qui, par fon égalité à zero, a été réduite à Mdx-+ Ndy+Pd7, foit divifée par fon intégrale, & l'on verra par les remarques Men, 1740. RT Procédé du Calcul pour l'intégration des Equations différentielles à trois varia- bles, que l’on a reconnuës poilibles. “aura prife pour À, on intégrera 314 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE expliquées à la même occafion dans la premiére partie, que dans un très-grand nombre de cas il réfultera de cette divi- fion, que le faéteur commun à tous les termes de la différen- tielle difparoïtra, parce qu'il fera commun à tous les termes du divifeur; de façon que Ad4x + Ndy-+ Pdy, fera une différentielle complette, fi on la divife par quelque fonction R d’un degré de plus que celui des fonctions A, N, P. Et pour trouver cette fonction À, on prendra la quantité la plus générale d'un degré au-deflus de 47, dans laquelle toutes les quantités qui entrent dans A7, N, P, fe trouvent. . On fera enfuite les trois Equations fuivantes, dM FR nul dR RE MES = RE N dx ? d Ci GE dy dM dR R dP dR Fra ALIEN SUR FFE afin de détérminer parleur fecours, les coëfhicients indéter- minés de la fonétion À. Mais on choifira entre ces trois Equa- tions les deux qui paroîtront donner moins de calcul, la troifiéme étant inutile, parce qu’il eft aifé de‘voir que fi l’on s'eft affüré par le moyen de Equation V —PL + &c. que l'Equation Mdx-+ Ndy-+-Pdz eft poffible, il arrivera néceflairement que Îa fonétion À qui convient à-deux des trois Equations précédentes, conviendra auffi à la troifiéme, Lorfque l’on aura déterminé par le fecours de ces deux Ædquations les coëfficients de la fonction générale qu'on Mdx+ Ndy + Pdy A nous avons appris à intégrer une différentielle qu'on fçait être-exacles ; comme DES SCIENCES. 315 CHAPITRE IL Des Equations à quatre, cing, dc. variables. De ce que nous venons de dire pour les Equations diffé- rentielles à trois variables, on peut tirer, facilement Îes regles fuivantes pour l'intégration des Equations qui ont un plus grand nombre de variables. a Le Mdx-+-Ndy + Pdz+ Qdu-+-R ds + &cc. Expri- Maniére de ant une quantité quelconque compofée de x, y, 7 u, 5, &c. Connoître fr avec leurs différentielles, afin que cette quantité foit inté- Be el, grable, il faudra que deux des termes de cette quantité, pris ana, &c va- à volonté, faffent toûjours une différentielle complette en blue, ne regardant comme variables que les deux feules lettres dont les différentielles fe trouvent dans ces deux termes, en forte donc qu'on aura autant d'Equations de condition, comme _ REA Le —œ à caufe de Equation Mdx+Pdz-+Qdu=o, dQ dP dP aN 4Q aN rime) proie alor fe NE +020, à caufe de l'Equation VMdy+ Pd7+ Qdu=0o. Or il ef aifé de voir que fi l’on prend à volonté trois de ces Equations, la quatriéme en fera néceffairement une fuite ; ainfi lorfqu'on voudra fçavoir fi une Equation différentielle à quatre variables eft poffible, il ne faudra examiner que trois des quatre Equations de condition qu'elle donne. $ VI Lorfque on aura une Equation qui contiendra un plus grand nombre de variables, il eft évident que parmi toutes les Equations de condition que donneront les différentes combinaifons des lettres A1, N, P, &c. prifes trois à trois, on pourra retrancher une Equation fur quatre, lorfque ces quatre ne renfermeront entrelles que quatre des lettres A7, N, P,Q, R, &c. puifque ces quatre Equations pourroient _ être regardées comme étant venuës d’une Equation à quatre variables, qui auroit été compofée des quatre termes que forment ces lettres ou fonctions avec les différentielles dx, dy, &c. auxquelles elles font jointes. $ VIL Par exemple, fuppofons que Equation propofée ait cinq variables, & qu'elle foit Mdx+ Ndy+ Pdy+ QduRdu—=o, on aura dix Equations de condition, par la combinaifon des lettres 7, N, P, Q, R, prifes trois à trois. Mettons, pour repréfenter toutes ces Equations, les dix termes, mp, MAY, Mur, MP, MPTr Ms aPq; npr,ngr le di Rx iij Nombre des Equations de conditions né- ceffaires. 318 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Il eft évident qu'avec les fix premiéres Equations, on aura les quatre autres, car les trois Equations MAP, MAG, MP, étant regardées comme venant d'une Equation différentielle à quatre variables; donneront l'Equation #p 4: Enfuüite les trois Equations ##p, mur, mpr, donneront de la même façon, Equation npr, & ainfi des autres, en forte que les fix premiéres Equations fufhront pour déter- miner fi l'Equation différentielle propofée eft poffible. & VIIL Si l'Equation propolée avoit fix variables, on verroit de la mêmé fiçon, qu’au lieu des vingt Equations de condition que donneroient Îes combinaifons de fix lettres, trois à trois, il fuffroit de dix Equations, & en général, on trouvera que le nombre de variables étant e, fe nombre d'Equations néceffaires fera ce que le nombre 6 — 1 peut donner de E—ir,€e—2 combinaifons deux à deux, c’eft-à-dire, s. IX. Par ce que nous venons de dire, il fémbleroit que pour. choifir parmi toutes les Equations que donnent les combi- naifons des lettres #1, ”, p, q, r, &c. celles qui font abfo- lument néceffaires à vérifier, il faut prendre toutes celles qui ont une des lettres 1, 7, &c. combinées avec tous les compolés sp, # q, &c. des autres lettres prifes deux à deux. Cependant on verra facilement qu'il y a bien d’autres choix à faire, fi l'on veut; par exemple, dans les dix Equations que demande TEquation Adx-4 Ndy+ Pdz; + Qdu +R ds = 0, on auroit pu choifir les fix MAP, MY, MOT, Pr MPTs QT ou telles autres fix qu'on voudra, dans lefquelles chaque lettre #1, n, &c. fe trouvera répétée au moins trois fois, & combinée avec toutes les autres lettres. DES SCIENCES, 319 s X. De même dans les Equations à fix variables, qui exige- roient vingt Equations, en combinant trois à trois toutes les lettres #1, n, &c. il fuffira d'en prendre dix au hazard, où chaque lettreife trouvera répétée quatre fois, & combinée avec toutes les autres, & ainfi des Equations qui ont un plus grand nombre de variables. Fe, 6 5 Lorfque l'on aura trouvé, par ce qui précéde, qu'une Ÿs ’ s Da é : Maniére de Equation différentielle A14dx + Ndy + Pdz+ &c. trouver le Fae- -— 0 eft pofüble, pour trouver le facteur x par lequel il Hate Ha . . . & . uation ‘faudroit multiplier tous fes termes pour la rendre une diffé difécielle à -rentielle complete, il faudra, ainft que dans les Equations per ques à deux & à trois variables, imaginer une forme générale complete,” pour ce , & en déterminer tous les coëfficients par le fe- / . d.M d d cours des Equations y a MS ==ÿ T NÉE # p HN 7 + &c Mais il eft à remar- quer qu'il ne faudra pas fe donner la peine d'employer toutes les Equations de la même nature que les précédentes, dont le nombre feroit celui des maniéres dont les lettres #7, », P, &c. peuvent être prifés deux à deux, & qu'il ne faudra de ces Equations, que le nombre qui eft d’une unité moindre que celui des lettres m1, #, p, &c. à Pour le faire voir, mettons, au lieu de toutes les Equa- tions femblables TE + MS Sonde que donne la différentielle Mdx + uNd y+uPdz + um Qdu+ uRds, les termes MA, MP, Ms Me 4P, sr M ‘Pq; Pr ge 320 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Et rappellons nous que nous avons vû précédemment que lorfqu'une Equation à trois variables étoit poffble, il arri- voit toûjours que deux des trois Equations y SL + &c. qui fervent à déterminer le w, renfermoient la troifiéme. Nous conclurons de-à que les deux Equations mn, np, doivent donner néceflairement Equation #p ; que les deux mn, ng, donneront #g, & ainfi des autres, en forte que Rédu&ion_ Îes quatre Equations m, mp, mg, mr, feront fufffantes du nombre des our déterminer 4 , & en général fe nombre d'Equations Equitons à Pour déterminer , & en géné mbre d'Equation employer pour néceffaires pour trouver le #, fera d'une unité moindre que pouver leFac- CeJui des variables de l'Equation donnée, I eft aifé de voir que parmi toutes les Equations m#, mp, ng, &c. que donne le nombre & des variables de l'Equation différentielle propofée, on peut en choifir au hazard le nombre e—1, pourvü que dans ce nombre d'Equations toutes les lettres ,", p, g, &c. fe trouvent, Quant à la forme à donner au w, on pourroit réuffi dans un grand nombre de cas, ainfi que dans les Equations à deux variables, en prenant pour uw, 1 divifé par la fonétion pofitive d'un degré au- deflus des fonétions 41, N, &c. dans laquelle foient toutes les quantités dont ces fonctions font compoles. LC HA PT RE TE Maniére d'intégrer où de conffruire toutes les Equations diffe- rentielles à trois à tant de variables qu'on voudra, lorfque ces Equations ne renferment point de conflantes. Lorfque les Equations à intégrer ou à conftruire feront -homogenes, c'eft-à-dire, que tous les termes ne contien- _dront que des variables, & feront au même degré, les coëffi- cients n'étant que des nombres ou des rapports, il fera in- utile d'employer les Equations précédentes pour trouver le 4. Voici une méthode pour conftruire ou pour intégrer ces fortes d'Equations, qui reffemble à celle qu'on employe ordinai- rement pour les Equations homogenes à deux variables. ; $. L2 | DES SCIENCES, 321 s L Soit Mdx-7Ndy+-Pdz=0, lEquation à intégrer, je ne lui donne que trois variables, parce que celles qui ont un plus grand nombre de variables, ne demandent pas d’autres calculs. On fera y = x & 7 — xt, il eft évident que la fonction 47 qui renferme des x, des y & des 7, fans. conftantes, fe changera en une nouvelle fonction qui fera compofée de x élevé an degré de la fonction 47, & mul- tiplié par une fonétion de # & de z. De même la fonction A fe changera en une autre fonc- tion compofée de la même puiffance de x, multipliée par une autre fonction de # & de, & ainfi de P. Mettons donc, au lieu de A7, x” F; au lieu de NV, x" G; au lieu de P, x" A; & fubftituons ces valeurs dans VE qua- tion Mdx+Ndy+-Pd7—0o, en mettant auffi pour dy, xdu+-udx, & pour d7, x dt+-1dx, nous aurons la nou- velle Equation à x"dx(F+ Gu+-Hi) +" Gdu+ x" Hdt—0, ou en divifant tous les termes par x”*" (F+-Gu+ Hi), ! dx Gdu+ Hdt x rar F+Gui+ Hr 0, L'Equation propofée étant fous cette forme, il eft af que les x font féparés des & des #, puifque les fonctions F, G, H, ne contiennent que des z & des z. De-là on voit qu'il n’y a aucun facteur y à chercher ; car fi cette Equation n’eft pas intégrable dans l’état où elle eff, elle ne pourra jamais le devenir, & fon intégrale eft nécef- À Gdu+ Hdt , fairement /x + J: Pete te Enforte donc qu'il ne s’agit que de fçavoir fi alé à une conftante. Gdu+ Hd! F+Gu+Hr eft unç différentielle complette, & de l'intégrer enfuite, ce que nous avons appris fufhfamment dans la premiére Partie de ce Mémoire. Si avant que de chercher l'intégrale d'une Equation Mem. 1740, . Sf On tire de Ja Solution récédente le héoreme de M. Fontaine, 322 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE homogene, on a reconnu qu'elle étoit poffible par le fecours de l'Equation N LE — PR + &c. ce qu'il eft très- naturel de faire, on voit bien qu'il fera inutile alors d’exa- A .. Gdu+ Hd La ncbé miner fi la quantité eft une différentielle com- plette, puifqu’elle ne pourra pas manquer de l'être, & IE De ce que l'Equation propofée M4x-+ Ndy+-Pdy;=o AU AE ñ dx Gdu + Hdt : ef se C angee en "h: —+- CE 10; qui eilt une différentielle complette, on peut tirer tout de fuite le x ou facteur par lequel il auroit fallu multiplier tous fes termes pour l'intégrer fans transformée ; car il eft aifé de voir que M d x + Nd y + P dy n'eft devenu cette même différentielle complette, qu'en divifant tous les termes par x" (F+-Gu+ Ht), ou, ce qui revient au même, Mdx+ Ndy + Pdz pa *M+yN+7P. Donc FT eft une TX. . - x AT LE différentielle complette, ainfi er toit le facteur ge. cherché, qui s’en étoit allé par l'égalité à zero, & étant ré- tbli, lIntégrale eft facile par ce que nous avons dit. $ IFIE Par la méthode précédente, on démontrera facilement le Théoreme de M. Fontaine *, qui confifte en ce que fr Mdx--Ndy + Pdy eft la différentielle d'une fon&ion g qui ne contient point de conftantes, x + Ny + Pz * On doit à M. Euler là juftice de dire qu’il avoit donné au Public en 1736, dans fa Méchanique, tome 2 , propofit. X1V,. une Equation qui faic voir fuffifämment le Théoreme dont je viens de parler, pour toutes les Efquations qui ne renferment que deux variables. Dans le Volume de Pe- terfbourg, qui va paroître, M. Euler a donné le même Théoreme pour tant; de variables qu’on voudra ; mais M. Fontaine ne pouvoit pas en avoir aucune. connoiffance lorfqu’il donna fon Mémoire à l’Académie. DES SCIE N CE S 323 fera égal à @ pris autant de fois que l'unité eft contenuë dans le degré de la fonction @. Pour le faire voir, reprenons la quantité x" dx(F+Gu+ Hi) + x" Gdu-+ x" Hdt, qui eft ce que devient A/dx + Ndÿ + Pd7, lorfqu” on fait y—x4 & 7 — xr. Je dis que fi cette quantité eft intégrable, fon intégrale ne peut pas être autre chofe que Le (EF ms Gu-+- Hr) que l'on a en intégrant le premier membre x” dx(Fæ+Gu+Hi), x feul variant, & qu'il ne faut lui _ajoûter aucune fonction de & def, puifque fi l'on en ajoûtoit une, lorfqu’on la rédifférencieroit enfuite, ce qui en viendroit ne feroit point multiplié par x” 7" comme le font les termes x” 7" Gdu # AN EE, Cela Lg remettons dans —— "7" (F-+ Gu+-Hi) pour #, 2; pour r, & M dé PE &c. & nous aurons Methptre pour l'intégrale de Mdx + Ndy+-Pd7, m+ ainfi que l'apprend le Théoreme de M. Fontaine, Sfi 324 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE DE RIN I ETR:E NEVAURIETE D U PR OST EMILE ME M'OTMIRE SUR LES MONSTRES À DEUX TESTES, Dans laquelle on examine les parties ombilicales à hypo- gaflriques du Monffre dont on a entrepris d'éclaircir n . » , . la méchanique dans ce Mémoire. Par M. LÉMERY#Y. [: s'agit préfentement de rendre raifon d’un fait fur le- quel je ne m'étois point expliqué dans mon Mémoire de l'année 1724, quoique la chofe mérität bien que je le fifle. Au fortir du pilore de chaque eflomac, non feulement du Monftre dont j'ai donné la defcription, mais encore de celui de Lyon, partoit de chaque côté un bout de duodenum qui s’alloit rendre de gauche à droite d’une part, & de droite à gauche de l'autre, dans un inteflin commun & unique qui continuoit d’être tel jufqu’à la fin du reétum, & qui dans toute la fuite de fon cours & de fes circonvolutions, ne différoit point par fa forme, fon étenduë & fa fimplicité, du canal inteftinal d’un Foœtus unique & naturellement con- formé : il n’y avoit aufii dans Fun & dans l'autre Monftre, ‘que deux reins, deux ureteres & une veffie, dont la confor- mation étoit encore tout-à-fait naturelle ; en un mot l’affem- blage & la conftruction de toutes les parties contenuës dans les régions ombilicales & hypogafiriques de nos deux Monf- tres, n'offroient rien de fenfiblement monftrueux, & qui ne parût pouvoir appartenir à un feul Fœtus conftruit à l'ordinaire. IL n’y a que deux moyens pour concevoir, à l'aide des DES SCIENCES. 325 caufes accidentelles, comment deux Foœtus clairement prou- vés dans nos deux Montres, par deux Têtes, deux Cols, deux Epines pour chacun, par les parties contenuës non feulement dans leur poitrine, mais encore dans la région épigaftrique de leur bas-ventre ; comment, dis-je, ces deux Foœtus difparoiflent en quelque forte, ou ne fe retrouvent plus dans le refle de ce bas-ventre, je veux dire, dans le nombre, l'arrangement & la conftruétion naturelle des diffé- rentes parties contenués dans les régions ombilicales & hy- pogaftriques. Ce qu'on imagine d'abord pour l'explication de ce fait, & ce qui coûte le moins à imaginer, c'eft qu'à l'exception d’un bout de duodenum , il s'eft fait une deftruction générale de toutes les parties contenuës dans les régions ombilicales & hypogaftriques de l’un des deux Fœtus de chaque Montre, & qu'au contraire ces mêmes parties font reftées en entier dans l'autre Foœtus, qui par-là fe trouve le feul repréfenté dans les régions ombilicales & hypogaftriques du Monfre, : L'autre maniére d'imaginer le même fait, c’eft de fuppoler que les deux Fœtus, dont chacun des deux Monftres’eft compofé, ont perdu l'un & l’autre une moitié de leurs parties ombilicales & hypogaftriques, & que des deux autres moitiés qui leur font reftées, & qui fe font rapprochées & réunies, il en a réfufté un nouveau tout appartenant à la fois aux. deux Fœtus, & qui n’a point paru différer de l'aflemblage. complet des parties ombilicales & hypogaftriques d'un {eul. Fœtus, conformé comme il le doit être, . Quand on ne fe donne pas la peine de réfléchir fur le premier des deux fentiments qui viennent d’être expolés, il. neft pas étonnant qu'il puifle paroître alors le plus fimple, le plus naturel, & peut-être même le plus vraifemblable: mais pour peu qu'on l'approfondifie, on en juge tout autrement :. & en effet fur quoi imagine-t-on avoir droit de fuppofer lanéantiffement total des parties ombilicales & hypogaftri. ques de un des deux Fœtus, pendant que celles de l'autre. Fœtus font reftées en leur entier, & n’ont pas reçû Ja: f li] { 326 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE moindre altération ? D'où feroit venuë cette prodigieufe fu- ériorité de force & d’aélion des unes fur les autres ? Voit-on rien de femblable, ni même qui en approche, dans aucune des parties du même Monflre? N'a-t-on pas fait voir que les côtes gauches du Fœtus droit & les côtes droites du Fœtus gauche avoient également agi les unes fur les autres, que la deftruction des unes & des autres avoit été la même, & que toutes avoient été réduites en des bouts de côtes d'une pareille étenduë ? que lomoplate, la clavicule, lhumerus, les os de {a hanche & de la cuifle d’un côté de chacun des deux Fæœtus avoient entiérement difparu dé part & d'autre au moyen de leur rencontre & de leur preflion mutuelle & latérale? Si la poitrine du Monftre ne differe point par fa forme extérieure de celle d'un Fœtus fimple & naturel, fi cette poitrine n'a qu'un flernum & le même nombre de côtes qu'une poitrine ordinaire, ce n'eft pas que ce flernum & ce nombre de côtes n’ayent été fournis que par l'un des deux Fœtus, puifque les côtes droites partoient uniquement de lépine du Fœtus droit, & les côtes gauches de l'épine dw Fœtus gauche, ce qui prouve inconteftablement que les deux Fœtus avoient contribué chacun par moitié à l'aflemblage de ces parties ; & à l'égard du flernum, comme il répondoit à la fois aux deux épines par les deux rangs de côtes qui en partoient, & qui fe terminoient à fes deux côtés, il eft clair que ce fternum monftrueux étoit le produit de deux portions plus ou moins grandes de deux fternum naturels, qui après avoir perdu chacun par la preffion l’un des deux rangs de côtes qui y tenoient naturellement à droite & à gauche, s'étoient trouvés en état par cette perte, de s'appro- cher de plus près lun de l'autre, de fe pénétrer & de fe détruire réciproquement jufqu'à un certain point, & de demeurer unis à la fin de la preffion par les portions de ces fternum, qui n'avoient point été entamées, & qui étoient reftées faines & fauves. N'obferve-t-on paslamême chofe fur les deux omoplates, DEN SAN 191 CL) E Nu CES 327 les deux clavicules, les deux humerus, les deux os des hanches & des cuifles de notre Montre, & par conféquent auffi du Monftre de Lyon ? Quoique le nombre & l'arrangement fymmétrique de chacune de ces parties, par rapport à celles qui leur répondent latéralement, fe trouvent entiérement les mêmes que dans un Fœetus fimple & naturel, cependant pour peu qu'on examine la pofition de chacun de ces os dans le Squelete de notre Monftre, on y voit aufli-tôt avec la der- niére évidence, que toutes les parties offeufes du côté droit eu du côté gauche, n’appartiennent qu’au Fœtus droit ou au Fœtus gauche défignés chacun par leur épine particuliére, .& par conféquent que ces deux Fœtus concourent auffr chacun par les os dont il s'agit, reftés à l'un au côté droit feulement, & à l'autre au côté gauche, à la production du Montre. Les membranes qui recouvroient intérieurement & exté- rieurement les côtes des deux Fœtus de notre Monftre, ne fe trouvent-elles pas encore, ainfi que les mufcles intercof- taux, dans le cas de ces côtes? celles qui ont été détruites, & qui faifoient un des deux rangs de côtes appartenantes à chaque Fœtus, n’ont-elles pas entrainé avec elles une moitié de chacune des membranes deftinées à recouvrir toutes les etes de chacun de ces Fœtus? & à l'égard de l'autre rang de côtes qui n'a point été détruit, non plus que fautre moitié des membranes qui les recouvroient, fi chacun des deux Fœtus a fourni l'un des deux rangs des côtes de Ja poitrine du Monftre, chacun de ces Fœtus a auffi fourni une moitié des membranes de cette poitrine ; & ce qu'il y a ici de fingulier, c'eft que fi les côtes des deux Fœtus fe font arrangées comme de concert pour former la capacité de Ja poitrine du Monftre, les deux portions de membranes pa- rgilles qui ont aufli concouru:à recouvrir le dehors & le dedans de cette capacité, fe font réunies fi parfaitement, que Fendroit de leur réunion ne s’eft point fait appercevoir, & que quoique le total des deux moitiés de chacune de ces: membranes füt réellement formé de deux piéces rapportées, 328 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE il fe préfentoit comme s'il n'eût été que d’une feule, & qu'il n'eût appartenu qu'à un feul Fœtus, ce qui prouve mani- feflement que de femblables apparences pourroient être fou- vent trompeufes, & donner lieu à de faufles conféquences. Si les téguments d’une moitié de la poitrine de chacun des deux Fœtus ont réellement cédé de part & d'autre à l'effort de la preffion, comment ceux d'une moitié du bas- ventre de ces deux Foctus, & fur-tout leurs téguments exté- rieurs continus avec ceux de la poitrine, & expofés à la même preflion, euflent-ils pu y réfifler ? Aufli ne l'ont-ils pas fait, & nous en avons la preuve, r.° dans la jonction immédiate des deux foyes des deux Fœtus ; jonétion qui n'auroit pu fe faire, fi les téguments du bas-ventre de Jun & de l'autre de ces Fœtus euffent toüjours refté entre deux, & n’euflent pas commencé par fe détruire & faire place aux deux foyes. 2.° Dans fa deftruction de los des hanches du côté gauche du Fœtus droit, & de celui du côté droit du Foœtus gauche ; or le retranchement de ces deux os produit par la preflion mutuelle des deux Fœtus, fuppofe préalable- ment la deftruction des téguments qui recouvroient l’un & l'autre de ces os. Enfin il fuit de ce qui a été dit fur la jonction des deux épines, & l'on va faire voir encore de nouveau qu'en conféquence de cette jonétion, il eft im- poffible que les téguments de tout un côté du bas-ventre de chacun des deux Fœtus n’ayent pas péri par fa preflion, & n'ayent pas donné lieu à chacune des deux autres moitiés de ces téguments, reflées à chaque Fœtus, de s'unir & de recouvrir enfemble toute l'étenduë de l'abdomen de notre Monflre. Voilà donc encore les téguments du bas-ventre de ce Monitre formés de deux piéces rapportées. Si des parties offeufes & contenantes on pafle aux parties contenuës dans la poitrine & dans la région épigaftrique, on n’y voit rien de ce qu'on s'imagine voir dans Îes régions ombilicales & hypogaftriques, .ce font, ou des parties plus répétées que ne le demande un Fœtus fimple, tels font deux cœurs bien conformés que contenoit le Monftre de Lyon, tels schéma frs Des #8 ACHLE IN CE 5. 329 tels font deux poulmons entiers, deux eftomacs, qui fe font encore trouvés dans celui de Lyon, ainfi que dans le nôtre; ou ce font des compofés de deux parties femblables, dans la ftruéture defquels on apperçoit à la vérité, des marques évidentes du concours de ces deux parties, ce qui n'eft pas à beaucoup près auffi fenfible dans les parties ombilicales &c hypogaftriques des deux Monftres; tels font le cœur unique & extraordinaire du Monftre dont j'ai donné la defcription, le foye d’une mafle & d'un volume confidérables trouvé dans chacun des deux Monftres , leur diaphragme dont il fera encore païlé dans la fuite. De toutes ces différentes parties-contenantes & contenués, en at-il une feule qui favorife, ou plûtôt qui ne contrarie formellement opinion que nous combattons ? Celles qui font reftées parfaitement dans leur conformation naturelle, ne font point fait aux dépens de parties femblables qu'elles ayent totalement détruites, & dont elles ayent pris la place, puifque ces parties femblables n’ont point été détruites, & ont même confervé leur état naturel, & cela parce qu'elles n'ont pu réciproquement s'atteindre ; car pour celles qui Yayant fait, {e font plus ou moins pénétrées, elles fe font toûjours aufli plus ou moins détruites, mais dans une pro- portion égale, & de ce qui en eft refté de part & d'autre, il a toûjours réfulté un nouveau compolfé de la même efpece, * mais à la formation duquel deux Fœtus ont également concouru, ce qui eft bien différent de ce qu’on fuppofe fur les parties ombilicales & hypogaftriques de Fun des deux Foœtus par rapport à celles de fautre. - L’uniformité de l'effet de a preffion für les différentes parties mentionnées, ne s'étant point démentie à leur égard, pourquoi l'auroit-elle fait feulement à l'égard de: celles des deux derniéres régions du bas-ventre ? ou plûtôt cette même uniformité qui s'obferve fcrupuleufement & avec la derniére évidence dans toutes les parties extérieures & contenantes de la poitrine & du bas-ventre, & dans les parties intérieures de la poitrine, & fpécialement encore dans celles de la région Men, 1740, » Ti 330 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE épigaftrique du bas-ventre ; cette uniformité, dis-je, ne nous déclare-t-elle pas exaétement ce qui a dû naturellement fe pafler dans le refte de ce bas-ventre ? Et fi les téguments membraneux de nos deux Monftres, que nous fçavons par- faitement avoir été formés de deux piéces rapportées, reflem- blent parfaitement en tout à ceux d’un Fœtus naturel, qui font d'une feule piéce, eft-on en droit de conclurre en général fur une reflemblance pareille, que les parties où elle fe trouve, n’ont été fournies que par un feul Fœtus ? Et bien-loin de nous laifler prendre le change fur les parties ombilicales & hypogaftriques de nos deux Monfires, cette reflemblance ne doit-elle pas au contraire nous donner lieu de penfer qu'il pourroit bien en être de la formation de ces parties comme de celles des téguments de la poitrine & de l'abdomen de ces deux Montres ? Enfin s'il étoit vrai, ou plûtôt sil étoit poffible que les parties contenuës dans les régions ombilicales & hypogaflri- ques de l'un des deux Fœtus de chacun de nos deux Monfires, euflent eu la faculté finguliére de faire totalement difparoître les mêmes parties de l’autre Fœtus, & cela fans que la ren- contre & le choc de ces parties détruites euffent produit avant leur deftruétion la moindre altération fur celles qui ont réfifté à leur effort, une moitié de ces parties viétorieufes auroit été obligée, dans la route que lui auroit fait tenir la preflion, de pañler par deflus l'épine, & de fe loger dans le propre terrein de l'autre Fœtus. Cela étant, que feroient devenuës les attaches premiéres de ces parties ? euflent-elles confervé dans ce domicile étranger leurs connexions parti- culiéres avec les vaifleaux fanguins de leur propre Foœtus? ou leurs vaifleaux fe fuflent-ils anaftomofés avec ceux de Vautre Fœtus, qui avoient feuls le droit de porter des fucs nourriciers à toutes les parties qui réfidoient dans le côté de ce Fœtus ? Enfin ces parties tranfplantées euflent-elles retrouvé dans leur nouvelle demeure les liens qui les conte- noient dans la leur ?:Cet arrangement compliqué ne dé- ment-il pas bien l'apparente fimplicité du fentiment qui le DES 'SCtrENCESs. 321 fuppofe ? Et l'exécution de cet arrangement n’eft-elle pas auffi difficile à imaginer que formellement contraire à tout ce qui a été obfervé fur la pofition des différentes parties des deux Montres ? Et en effet, quand on confidere la place qu'elles y occu- pent, on voit manifeftement que toutes celles qui fe trou- vent dans le côté de l'un ou de l'autre des deux Foœtus, appartiennent originairement & inconteftablement à ce Fœtus, & qu'aucune de celles de l'un des deux Fœtus ne s'eft allé loger dans le côté de l'autre Foœtus ; on remarque même que celles qui par des circonftances particuliéres n'ont point été enveloppées dans la ruine générale du côté où elles auroient toûjours demeuré fi ce côté n’eût point été détruit, bien-loin de s'étendre enfuite à droite ou à gauche, c'eft-à-dire, vers l'autre Fœtus, où il fembloit que leur direction naturelle devoit les porter, fe font au contraire tournées & renfermées dans la moitié reftée au Fœtus dont elles faifoient partie, & cela, 1.° parce qu'elles y tenoient toûjours par quelqu'endroit, & qu'originairement elles ne tenoient par aucun à l'autre Fœtus ; 2.° parce qu'elles y étoient d'autant plus déterminées par la preffion qui leur venoit de la part de l'autre Fœtus, qu'il étoit lui-même, _ ainfi que je l'ai déja remarqué, moins en état de les admettre dans le côté qui lui appartenoit. : On voit par ce qui a été dit fur les parties ombilicales & hypogaftriques de nos deux Monftres, que pour avoir une jufte idée de la formation de ces parties, c’eft toûjours à la méchanique, qui nous a déja fi bien fervi pour les autres parties de ces Monftres, que nous devons avoir recours; & pour nous convaincre de cette vérité par l'application de la même méchanique aux parties ombilicales & hypogaftriques, confidérons bien d’abord, & mettons nous bien devant les yeux, 1° Que les limites de l'enceinte de chacun des deux Fotus dont nos deux Monftres font compolés, c'eft l'épine de chacun d'eux, que c’eft elle qui, jointe à la tête du Fœtus auquel elle appartient, défigne ce Fœtus pt le Monfte, Tti 332 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE que chaque épine y peut être regardée comme le rempart de la moitié reftée à chaque Fœtus , & que c’eft dans l'épine de l'un & de l'autre que fe trouve le terme de leur deftruction mutuelle. 2.° Que toutes les parties contenuës dans les moitiés fubfiftlantes des deux Fœtus, ou dans leurs côtés externes, c’eft-à-dire, dans le côté droit du Fœtus droit, & dans le côté gauche du Foœtus gauche, que toutes ces parties placées en de-çà de feur épine y ont été à l'abri de l'effet de la prefion , & par conféquent confervées en entier. 3.° Que toutes celles qui réfidoïent dans les deux côtés internes, c'eft-à-dire, dans le côté gauche du Fœtus droit, & dans le côté droit du Fœtus gauche où elles fe trouvoient entre les deux épines, y ont efluyé par-là tout l'effort de la preffion, & par conféquent y ont été ou entiérement ou prefqu'en- tiérement détruites, ou ont été obligées de fe réfugier dans Yautre côté de leur propre Fœtus. 4.° Qu'aucune partie de V'un des deux Fœtus n’a dû paffer &c ne s’eft auffi trouvée dans le côté de l’autre Fœtus, non feulement parce que chacune de ces parties tenoient trop à leur propre Fœtus pour s’en féparer impunément, mais encore parce qu'elles n'auroïent pu être admifes dans l'autre Fœtus. $.° Que les parties qui dans chacun des deux Fœtus, s’étendoient à droite & à gauche dans les deux côtés que lun & l'autre avoient alors, ont eu le fort des deux différents côtés qui les contenoïient; que la portion de chacune de ces parties, qui étoit dans le côté interne de fon Fœtus, y a péri avec ce côté, & que l'autre portion de ces mêmes parties, qui étoit dans le côté externe, y a été confervée. 6.° Que comme la récompofition d'une partie dans nos deux Montres, y fuppofe toüjours deux parties femblables de deux Foœtus qui ayent commencé par fe détruire mutuellement à moitié, & qui fe foient en- fuite unies par les deux autres moitiés qui leur font reftées, une condition abfolument néceffaire pour lexécution & laccompliflement de cet effet, c’eft que chacune des deux parties femblables fe trouvent fituées de maniére dans leur Foœtus, que la ceffation de fa preflion accompagne toüjours _— DES SCIENCES. 332 la fin de la deftruétion d’une de leurs moitiés, ou, ce qui revient au même, qu'une de leurs moitiés fe trouve détruite dans le même inftant que les deux épines parviennent l'une à l’autre : Que cet effet doit toüjours & néceflairement arriver par la rencontre & l'action mutuelle de deux parties Æ#emblables, dont le milieu répond naturellement dans cha- cune de ces parties à l'épine de fon Fœtus, & dont les deux portions latérales Iogent dans les deux côtés de ce Fœtus : Que ce n’eft que dans cette pofition qu’il pourra refter deux moitiés de deux parties femblables de deux Fœtus, de l’affem- blage defquelles il renaîtra une nouvelle partie : Que par-tout ailleurs où l'on placeroit ces deux mêmes parties, elles y feroient confervées ou détruites en entier, & ne fourniroient pas par conféquent les deux moitiés néceffaires pour refaire une partie nouvelle, de laquelle chaque moitié n'a de place que fur fon Fœtus, a pour borne l'épine de ce Fœtus, & n'eft ordinairement aufli employée qu'à fon fervice, tel eft le cœur de mon Monftre. - Voilà la regle qui paroït avoir été exaétement füuivie à, Yégard de nos deux Monftres, & nous devons avoir d’antant plus de confiance en cette regle, qu'outre qu'elle eft très- méchanique & très-facile à concevoir, elle a été puifée dans Y'obfervation exacte des différentes parties de ces deux Monf tres, & fur-tout du Squelete monftrueux où l’on voit à dé. couvert & fans nuages toutes les efpeces de changements qui ont dü néceflairement arriver à chacune des parties de ces Montres. Si l'obfervation fcrupuleufe de cette regle paroît manifeftement quelque part, c’eft dans leurs parties ombi- licales & hypogaftriques , qui font celles néantmoins que, faute d'examen, on feroit tenté de fouftraire à l'exécution de cetteregle. La vérité de ce que j’avance, va s’appercevoir clairement par la confidération de ce qu'étoient originaire- ment ces parties, & de ce qu’elles font devenuës & ont dû néceffairement devenir par l'union des deux Fœtus portée jufqu'où elle l'a été dans les régions ombilicales & hypo- gaflriques des deux Monfires ; & en effet, ou dans ces t'il V. la Figure Jüivante. 334 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE régions que les deux épines fe font approchées de plus près, qu'elles ont laiffé moins d'efpace aux parties contenuës, & qu'elles y ont occafionné par-là de plus grands retranche- ments, moyennant lefquels la dimenfion & le nombre de ces parties fe rapportent d'autant mieux avec la dimenfion & le nombre des mêmes parties dans un Foetus fimple & naturel. Par exemple, pour concevoir aifément & avec la derniére évidence comment des quatre Reins, des quatre Ureteres & des deux Veflies des deux Fœtus dont chacun de nos Monf- tres ont été compofés, il ne s'y eft plus trouvé que deux Reiïns, deux Ureteres & une Vefñe, le tout dans une forme parfaitement naturelle, il fuffit de confidérer ce qui a dû arriver à ces parties en conféquence de la marche & de Yapproche immédiate des deux épines. 1.” Le rein droit du Foœtus placé à droite avec fon uretere, & le rein gauche du Foœtus placé à gauche avec aufi fon uretere, ont néceffaire- ment été confervés, ils ne fe trouvoient point entre les deux épines, elles pouvoient fe joindre fans donner lieu à ces reins & à ces ureteres de fe rencontrér, les côtés externes qu'ils habitoient, les éloignoient trop les uns des autres pour cela, & les deux épines en de-çà defquelles ils étoient chacun, bien-loin de les menacer & de leur nuire, leur fervoient au contraire de barriére, & les mettoient à l'abri du contact mutuel; en un mot, comment chacune de ces parties qui réfidoient dans les deux côtés qui n'ont point été détruits, l'euflent-elles pû ‘être ? 2.° A l'égard des deux autres reins & des deux autres ureteres contenus dans les deux côtés internes des deux Fœtus, c'eft-à-dire, dans le côté gauche de celui qui étoit à droite, & dans le côté droit de celui qui étoit à gauche, ils étoient dans une pofition toute contraire à celle des reins & des ureteres des deux côtés externes, ils logeoïent aflés près les uns des autres, quoique dans deux Fœtus différents, & cela par l'arrangement de ces deux Fœtus. Les deux épines entre lefquelles ils fe trouvoient en vertu de cet arrangement, DES SCIENCES. ne pouvoient avancer lune vers l'autre fans que les deux reins & les deux ureteres de ces deux côtés internes avan- _çaflent auffr au-devant les uns des autres, fe joigniffent, fe pénétraffent & fe défiffent mutuellement, & non à moitié; il eût fallu pour cela que l’effet de la preffion eût ceflé au moment qu'une moitié de chacun de ces deux reins, de ces deux ureteres, auroit été détruite ; mais le terme de cette preffion devant être lecontact des deux épines, & ces deux épines ne pouvant y parvenir qu'après la deftruétion totale de ces deux reins, on conçoit que ces deux reins & ces deux ureteres ont dû céder entiérement à la caufe, qui ne difcontinuant pas de les faire agir les uns contre les autres, a donné lieu par-là à leur deftruction totale. Les reins & les ureteres fitués dans les côtés internes & externes des deux Fœtus, dont chacun de nos deux Montftres font compolés, ont donc fuivi le fort des côtés où ils réfi- doient, c'eft-à-dire, que de quatre reins il n’en a dû refter que deux, par la raïfon que les quatre côtés des deux Fœtus ont été réduits à deux dans ces Monftres; cela étant, on ne doit point être furpris fr les deux reins de nos deux Monftres reffembloient fi parfaitement à deux reins naturels ; ils Yétoient en effet, ils n’avoient reçû aucune altération, mais Jun venoit d'un Foœtus, & fa demeure étoit aufli dans ce Foetus fuffifamment défigné par fon épine & par fa tête, & Yautre rein venoit de l'autre Fœtus défigné de la même ma- niére, Enfin pour ce qui regarde l'effet de la preffion fur les reins & les ureteres des deux Fœtus de chacun de nos deux Monftres, cette preffion n’a pas agi à moitié fur ces parties, celles qu'elle a détruites, l'ont été totalement, mais auffi celles _ qui ont été confervées, n’en ont pas reçü la moindre atteinte, IL n'en eft pas de même des deux veflies, & ce qui fait la différence du réfultat de l'action de ces deux parties l’une fur l'autre, & de celui des deux reins contenus dans les deux côtés internes des deux Fœtus, c’eft la fituation particuliére de chacune de ces veflies dans leurs Foœetus ; elles ne font point enfermées toutes entiéres comme les reins dans lun 336 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoY4LE des deux côtés de chacun de ces Fœtus ; en ce cas, fuivant le côté qui les auroit naturellement contenuës, elles auroient été totalement détruites ou confervées ; on fçait qu’elles font naturellement placées au milieu de l'hypogaftre, & par con- féquent que des deux moitiés de chacune, l'une eft à droite & l'autre à gauche. Lors donc que les deux Fœtus ont été pouflés latéralement l'un vers l'autre, on conçoit que la moitié de la veflie contenuë dans le côté interne de l'un de ces Fœtus, a dû s'offrir à la moitié de veflie contenuë de même dans le côté interne de l’autre Foœtus ; que ces deux moitiés de vefie avançant toüjours alors l'une vers l'autre, ont dû fe détruire mutuellement, mais que la deftruction n'a point été au de-là, c'eft-à-dire, jufqu'aux deux autres moitiés des deux veffies, parce qu’au moment que les deux premiéres moitiés ont été détruites, les deux épines fe font trouvées Fune à l'égard de l'autre, dans un contact immédiat qui ne leur a plus permis de pafler outre, & qui a fait cefler tous les ravages dont les deux autres moitiés de veflie, ainfi que les autres parties contenuës dans les côtés externes de chaque Fotus, fe feroient reflenties fans cela. Or comme ces deux moitiés de vefie placées chacune dans le côté externe de leur Fœtus, c’eft-à-dire, dans le côté qui n’avoit fouffert aucun dommage, fe trouvoient arrivées à côté l’une de l'autre, & fe touchoient même immédiate- ment depuis la difparition des deux moitiés internes, ces deux moitiés externes fe font d'autant mieux réunies, & ont formé par leur réunion une nouvelle veflie d’une conforma- tion d'autant plus naturelle, que quoique ces deux moitiés fuffent de deux Fœtus différents, elles étoient néantmoins de même nature, qu’elles avoient parfaitement la même forme, qu'elles fe préfentoient l'une à l'autre dans le même fens & par les mêmes endroits, que la deftruction des deux moitiés des deux veflies s’'étoit faite longitudinalement & de haut en bas ; qu'en conféquence de cette coupe longitudinale, les deux autres moitiés reftantes contenoient véritablement & à la fois chacune la moitié du fond & du col de leur veffie, partagée DE Sim SCIE NYC Soi gp partagée dans toute fon étenduë, moyennant quoi ces deux moitiés reftantes & réunies {e font trouvées en état de former une nouvelle veflie, qui ne différoit en rien d'une veflie ordinaire; ce qui ne feroit pas arrivé de même, files deux veflies des deux Fœtus,, qui fe font: jointes latéralement, l'euflent fait par d’autres endroits, fe fuflent enfuite mutuel- lement détruites jufqu'à un certain point, & fe fuflent unies par les deux portions qui en féroient reftées. - Pour me faire mieux entendre, je me fervirai de l'exemple de deux Poires parfaitement femblables, ou que je fuppoferai telles, & que, je placerai de maniére, que les deux têtes & les deux queuës des deux poires foient directement à côté des unes des autres; le choix de ce fruit convient ici d'autant mieux, que Ja veflie a véritablement la figure d’une poire. Si je coupe ces deux poires en long & en deux parties égales, ou fuppofées telles, qui foient chacune une moitié du haut & du bas de la poire, la moitié gauche de la poire qui fera à droite, & la moitié droite de la poire qui fera à gauche, repréfenteront les deux moitiés de veffie qui auront été dé- truites , & nous les retirerons comme fi elles l’euflent été, A l'égard des deux autres portions de poire, qui repré- fenteront les deux portions de veflie qui auront été confer- vées, fi on les applique l’une à l’autre, comme elles contien- dront chacune une moitié de toutes les parties de la poire, elles en formeront une nouvelle, qui ne différera en rien de ce qu'étoient les deux poires avant qu'elles euflent été coupées, mais qui en différeroit beaucoup, du moins par da forme, fi au lieu de les préfenter latéralement, & comme nous l'avons fait, nous euflions préfenté le bas ou le haut de l'une de ces. deux poires au bas ou au haut de autre poire, & qu'après avoir coupé & jetté le bas de chacune de, ces deux poires, comme repréfentant l'un & f'autre les portions de deux veflies. qui {e feroient approchées & dé- . truites en des endroits fémblables, nous euflions uni enfemble des deux portions de poires par les endroits coupés; &en effet, le, tout qui en auroit xéfulté, n’auroit jamais eu la Mem. 1740: . Vu 338 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE forme d'une Poire, mais d’une efpece de Monftre formé uniquement de deux têtes de deux poires, de deux moitiés de poires qui, au lieu de contenir chacune & à la fois une moitié du haut & du bas d’une poire, euflent contenu non une moitié, mais la totalité du haut, & rien du bas de I4 poire ; & comme ce haut fe feroit trouvé répété dans la totalité de la poire monftrueufe, les yeux n’euflent pas été alors en fituation de fe méprendre, & ils euflent tout d’un coup reconnu que c'étoit un compofé de deux portions de poires différentes, ce qui n'eft ni fi promptement, ni f aifément reconnoiflable dans l'union de deux moitiés dé deux poires différentes coupées en long. La poire monflrueufe fe retrouve en quelque maniére dans la veflie du Monftre de M. du Verney; comme les deux Fœtus de ce Monftre s’étoient offerts l’un à l’autre par le bas du ventre, leurs veflies s’étoient mutuellement atta- quées par leur col, de maniére que la veflie qui avoit réfulté des deux autres, avoit paru aux yeux mêmes de M. du Verney, un compofé de deux veflies applaties, & jointes l'une à l'autre fans cloifon & fans col, ce qui formoit une veffie bien différente de celle de nos deux Monftres, quoique compofée comme elle de deux portions de veflie de Fœtus différents. Après ce qui a été dit pour faire voir qu’en conféquence de la preffion latérale des deux Fœtus, & du terme de cette preffion, deux moitiés de leurs veflies ont néceflairement dû périr, & deux autres s'unir enfemble, f1 l’on a encore de la peine à fe prêter à l’idée d’une pareille récompofition de vefie, ce ne peut être que faute de faire attention à quantité de faits notoires qui font parfaitement dans le cas de celui de la veflie, & qui le juftifient pleinement ; par exemple, fi deux portions de deux diaphragmes qui fe font rencontrés: & pénétrés jufqu’à un certain point, ont bien pu faire um nouveau diaphragme, pourquoi deux portions de deux veflies- qui fe font aufli rencontrées & pénétrées dans le même Montre, n’y auront-elles pas pu faire une veflie nouvelle? L DES SCIENCES. 339. H éft vrai que le diaphragme du Monftre de Lyon avoit deux centres nerveux, deux empreintes qui attefloient les deux diaphragmes dont il avoit été formé; il eft eñcore vrai que dans d’autres parties de nos deux Monftres, compolées chacune de deux parties femblables, cette compofition fe manifeftoit bien vite par l'examen de la ftructure de ces parties, & qu’elle fe cachoit bien davantage dans l’exainéri de fa conformation des deux veflies de nos deux Monitres; mais j'ai fait voir, & j'ofe même dire que j'ai phyfiquement démontré que la peau qui recouvroit la poitrine & le bas- ventre de nos deux Monftrés, venoit de deux Fœtus diffé- rents, qu'elle étoit de deux piéces qui fe préfentoient, du moins dans le Monftre qui m’appartient, comme ff cette peau n'eût été que d’une feule, & n’eût appartenu qu'à un feul Foœtus, ce qui prouve que fi la ftruéture de quelques parties de nos deux Monftres offre des marques évidentes du con- cours des deux parties femblables qui ont fervi à leur com- pofition, il y en a d’autres où des marques pareilles ne fe trouvent point du tout, & dans lefquelles néantmoïins ce concours n'en eft ni moins réel, ni moins véritable. | Mais enfin pour ne rien laiffer à defirer, autant que nous le pourrons, fur le fait de la compofition des veflies des deux Monftres, nous allons tâcher de rendre par des fignes exté- rieurs, ce fait auffi certain qu'aucun de ceux qui le paroïffent davantage par des marques femblables, & cela en faifant un parallele exact de la veflie & du fternum de chacun de ces Montftres. j J'ai déja dit que quoique le fternum de mon Moniftre, & par conféquent auffi du Monftre de Lyon, parût être fimple, il étoit néantmoïns compofé de deux portions de deux fternum différents. On fçait qu'il part à droite & à gauche d’an fternum fimple & naturel, une double rangée de côtes qui vont toutes fe rendre à la droite & à la gauche d'une feule & même épine: les deux rangées dé côtes, au contraire, qui partoient à droite & à gauche du fternum demon Monftre, salloient rendre, les unes dans lé côté droit Vuïi 340 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ou extérieur de l'épine du Fœtus droit, & les autres dans le côté gauche ou extérieur de l’épine du Fœtus gauche, ce qui marquoit évidemment que la portion droite de ce fter- num, qui tenoit au Fœtus droit par les côtes & par l'épine qui lui étoient reftées, appartenoit véritablement à ce Foœtus, & que la portion gauche du fternum appartenoit, par les mêmes raifons, au Fœtus gauche; & ce qui rendoit encore l'union de ces deux portions de fternum plus certaine, :c'efk qu'on voyoit clairement qu'elle étoit une fuite néceflaire & indifpenfable de la deftruétion des deux rangs de côtes in- ternes des deux Fœtus, démontrée par les vingt-quatre petits bouts de côtes qui en font reftés; & en effet, les côtes in- ternes de ces deux Fœtus, qui feules pouvoient empêcher le contact des deux flernum, ces côtes, dis-je, n’y étant plus, & la preffion mutuelle fubfiflant toüjours, les deux fternum ont néceflairement dû s’atteindre, fe pénétrer ju£- qu'à un certain point, s'unir enfin par leurs portions reftantes, Il en eft parfaitement de la veffie de nos deux Montres, comme de leur fternum, & les mêmes raifons qui nous ont été offertes à l'infpeétion de ces flernum pour preuve de leur compofition monftrueufe, fe préfentent auffi à Finf- pection de leur veffie pour preuve pareille de leur compo- fition. On fçait qu'une veffie fimple & naturelle reçoit à droite & à gauche deux ureteres qui partent de deux reins fitués à la droite & à la gauche d’un même Fœtus, & cette droite & cette gauche ne font féparées que par une feule épine; au contraire la veflie de nos deux Monfires recevoit bien à droite & à gauche deux ureteres qui partoient à droite & à gauche de deux reins, mais ces ureteres & ces reins appar- tenoient à deux Fœtus différents qui avoient chacun leur efpace féparé & limité, non par une feule épine placée au: milieu des deux , mais par deux épines, par l'épine de chaque Foœtus; & cela de maniére que toutes les parties contenuës. dans l'efpace borné par l'épine de Jun des deux Fœtus, lui appartenoient d'autant plus vifiblement qu'elles y tenoient. DES SCIENCES. 341 par les liens & par les vaiffeaux qui venoient de ce Fœtus, ce qui marquoit évidemment que la portion droite de cette veflie attachée au Fœtus droit par l'uretere & par le rein droits, placés lun & l’autre dans le côté refté à ce Fœtus, & bornés par fon épine, que cette portion de vefie, dis-je, appartenoit véritablement au Fœtus droit, & que la portion gauche de cette veflie appartenoit par les mêmes raifons au Fœtus gauche. | Et ce qui rendoit encore le fait de l'union des deux moitiés de veflie plus certain, c'eft qu'on voyoit clairement qu'il étoit une fuite néceffaire & indifpenfable de:la deftruc- tion, non feulement de deux ureteres & de deux reins, mais encore de toutes les parties contenuës dans les côtés internes des deux Fœtus ; & cette deftruétion étoit atteftée dans te Monftre, & par le côté qui manquoit manifeftement à chaque Foœtus, & par l'approche des deux épines, qui n’auroit jamais pu fe faire, fi les parties intermédiaires euflent fubfifté, ou n'euflent pas entiérement difparu: par conféquent après la rencontre & la deftruétion des parties qui fe préfentoient les premiéres à la preflion mutuelle, les deux moïtiés de veflie qui venoient enfuite ont néceflairement dû s'atteindre à leur tour, & fe détruire réciproquement & en entier, parce que ces deux moitiés étoient contenués en entier dans les deux côtés deftinés à périr, & que la preffion ne devoit finir qu’au moment du contaét des deux épines, qui fe trou- voit juftement aufli le moment de la deftruétion entiére des deux moitiés internes des deux veflies. Enfin on apperçoit aflés par ce qui a été dit, que c’eft la deftruction de leurs deux moitiés internes qui a donné lieu à‘leurs deux moitiés externes, continuellement pouflées l'une vers l'autre; de fe joindre & de refaire une nouvelle veffie ; car tant que les moitiés internes des deux veflies des deux Fœtus euflent fubfifté, comment leurs moitiés externes euffent-elles pu fe trouver immédiatement à côté l’une de l'autre? On voit par ce qui a été dit, que nous retrouvons par faitement dans la veflie. de chacun: de nos deux Monfires, Vu iij 342 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE tout ce que nous avions remarqué dans leurs fternum, & ce parallele nous confirme de plus en plus dans l'idée où nous étions en 1724, & où nous avons toûüjours continué d'être fur le Squelete de notre Monttre, c'eft que les éclair- ciflements que nous puifons dans l'examen de la conforma- tion des différentes parties de ce Squelete, ne fervent pas feulement à nous inftruire fur la formation monftrueufe de fes parties, mais encore fur celle des parties molles de nos Montres. Il me refte préfentement à faire voir comment toute Ia fuite des inteftins de deux Fœtus a pu s'unir de maniére qu'il en a réfulté précifément le même nombre & la même conformation d’inteflins qui fe trouvent dans un Fœtus fimple. Quoique je ne me fois pas expliqué dans mon Mémoire de l'année 1724, fur la maniére dont j'imaginois ce fait, M. Winflow n’a pas laiflé de me fuggérer & de m'attribuer celle dont il croyoit que je le devois concevoir. Voici ce qu'il dit: L'aboutiffement de deux petits bouts d'inteflins a un fimple canal inteflinal très-long, er la formation de toute la fuite des différentes circonvolutions flottantes d'un tel canal par la con- fuh on accidentelle de deux pareils canaux originairement Jéparés, me paroiffent encore auffi peu favorables au fi ifleme des accidents que, &c. Il rejette en d’autres endroits du même Mémoire, à l'occafion d’autres Monftres que le mien, /4 confufion, ce font fes termes, des moitiés longitudinales de deux inteflins pareils ; & fpécialement dans nie du Faon à deux têtes, il dit que /idée de la confufion des fnoitiés oppofées par la def- truélion des moities voifines , fl infoûtenable à l'égard des parties internes, de celles fur-tout qui font folitaires g fans fymmetrie, qui font creufes Ca remplies de fluides , à encore plus de celles qui font mobiles &7 plus ou moins flottantes, comme l'efophage, Le cœur, l eflomac, les inteflins. Pour ce qui eft du cœur, qui de toutes jte parties qui viennent d'être énoncées, eft la plus mobile, j'ai fait voir clairement dans la feconde Partie de ce Mémoire, que le pére Se) RE WC 'E s 343 cœur du Monftre dont j'ai donné la defcription, étoit véri- tablement un compofé de deux cœurs : pourquoi donc deux cœurs, ou deux autres parties femblables d’autres animaux, quoique creufes, quoique mobiles, ne pourroient-elles pas fe joindre de mème dans l’occafion ? Ce qu'on ne conçoit pas en confidérant les chofes dans un certain temps, dans une certaine pofition, fe peut fouvent concevoir quand on les regarde dans des fituations différentes : de plus la méchanique d’un fait peut fouvent être cachée, quoique le fait ait en fa faveur des preuves plus certaines & plus convaincantes que celles qui réfulteroient d’une explication vraifemblable de la maniére dont il auroit été produit. Quand on ignoreroit la méchanique de la formation du diaphragme de chacun de nos deux Monftres, ou qu'on n’en auroit tout au plus qu’une idée obfcure ou confufe, la feule infpeétion des deux centres nerveux qui fe trouvent dans le diaphragme du Monftre de Lyon, ne fuffroit-elle pas pour nous convaincre qu'il a été formé de deux portions de deux diaphragmes différents ? Mais pour revenir à l'union des inteftins des deux Foœtus, ce que M. Winflow paroït nier, c’eft que deux portions in- teftinales, deux inteftins particuliers de deux Foctus placés à côté l’un de l'autre, puiffent fe détruire par leurs faces inté- rieures, & s'unir par leurs faces extérieures ; & s’il nie l'union de ces deux portions inteftinales, il nie encore davantage celle de toute une fuite d’inteftins pareils de deux Fœtus. Quant à l'union longitudinale de deux portions d’inteftins, 1 méchanique en eft entiérement la mème que celle des deux veflies ; & fi nous avons prouvé l'union des deux moitiés de veflie, nous avons auffi prouvé que deux portions. inteftinales qui fe préfenteront l’une à fautre dans les mêmes. pofitions que celles des deux vefies, s’uniront auffi tout-à-fait de même. A l'égard de la formation de toute Ia fuite des différentes girconvolutions inteflinales de chacun de nos deux Monftres: par la confufion accidentelle de deux fuites pareilles d’inteftins originairement féparés, je ne fçais pourquoi M. Winflow 344 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE m'attribuë ce fentiment. J'ai dit dans le Mémoire que j'ai donné en 1724, qu/ partoit de chaque pilore un petit bout d'intejlin , c'efl-a-dire, deux petits bouts qui Je réuniffoient bien- tôt en un canal commun qui fe portoit de la région épigaffrique dans le flanc droit, & après avoir fait Jes circonvolutions à l'or- dinaire, aboutifloit de même entre les deux releveurs de l'anus. C'eft-là une fimple defcription des parties inteftinales du Monftre, & nullement une explication de leur formation: je ne dis pas qu'à commencer où les deux bouts d'inteftins fe joignoient, une moitié longitudinale de tous les inteftins fuivants d’un Fœtus, s’étoit unie à la moitié longitudinale de tous les mêmes inteftins d’un autre Fœtus ; je fuis même fur cette union d’un fentiment bien différent de celui qu'on veut que j'aye, on le verra 1.” par fa réfutation que je vais faire de ce fentiment qu'a fuivi M. Goëffon, auteur de fa defcription du Monftre de Lyon; 2.° parce qu'enfuite de cette réfutation je ferai voir clairement la feule maniére dont Funion des deux Fœtus a dû fe faire pour ne préfenter dans le Monftre que le même nombre, le même arrangement, la même conftruction d’inteftins que dans un Fœtus fimple & bien conformé. M. Goëffon prétend que l'union des inteftins des deux Foœtus a commencé par leurs parties inférieures & leurs extrémités, par les endroits où ils ont été plus approchés, * plus preffés les uns contre les autres, vers le fondement, & à où les deux reétum, à caufe de la perte générale de Ia moitié de la peau, des chairs & des autres parties, n'avoient qu'une même ifluë ; il fuppofe donc que l'union de tous les inteftins des deux Fœtus, prife d'abord par le bas & par les derniers, & commencée par leurs extrémités inférieures, a continué enfuite par l'application de leurs faces intérieures & par la preflion des unes contre les autres depuis le fondement ou la fin des rectum jufqu'aux deux colons, & fucceffivement de même d’inteflins en inteftins femblables jufqu'à l'endroit : de l'union des deux duodenum, qui ont été chacun féparé- ment & de leur côté trouver leur eftlomac, s Pie D. Pris ER TS CRE ” > PR DE, S::9 C 1 EN CE 5. 345 On pouvoit d'abord arrêter M. Goëffon fur le lieu par où il a fait commencer l'union des inteftins; on pouvoit du mœ@ins lui faire remarquer que la preffion mutuelle des deux rectum ne pouvoit arriver qu'après qu'ellé auroit eu api fur les autres inteftins plus éloignés de leur épine que ne le font de la leur chacun des, deux rectum: pour. s'en convaincre, il n'y a qu'à fe repr éfenter un, inftant les deux Foœtus latéralement preflés l'un contre l'autre, & l’on re- connoîtra d'abord, que les parties qui doivent fe préfenter les premiéres les unes aux autres, font celles qui {ont plus éloignées de leur centre commun , de leur épine, & que celles qui en font plus proches, ne peuvent parvenir lune à l'autre qu'après la deftruction des premiéres. 2°. Pour que l'union de chaque inteftin femblable eût pu fe faire, du jejunum, par exemple, d’un Fœtus, au jejunum def'autre Fœtus, de l'ileum, & ainfi du refte, il auroit fallu que tous ces inteftins euffent defcendu de part & d'autre en droite ligne & fuivant celle de leur épine, & que dans chaque Fœtus le canal inteftinal eût eu aflés de volume pour qu'une . partie du diametre de F'inteflin eût été dans le côté droit, & l'autre partie dans le côté gauche de chaque Fœtus., En ce cas, les inteftins des deux Foœtus fe feroient unis longitudi- nalement, & n'euflent fait enfemble qu'un feul &: même canal, ainfi que | les deux veflies placées de Ia même maniére n'en ont fait qu'une feule. Mais il s'en faut bien que toute la fuite des inteftins. foit comprife dans l’étenduë longitudinale que nous, venonÿ de lui fuppofer : fi cela étoit, les inteftins n’auroient pas fept fois la longueur du corps dont on les a tirés, & ce n’eft auffi que par leurs circonvolutions qu'ils font en état d'être contenus dans fa petiteffe de l'efpace qu'ils occupent ;|,& comme ces circonvolutions promenent. chacun desinteftins en des fens différents, & qu'elles font qu'un même inteftin, fe porte à la fois à droite & à gauche, que le colon fur-tout, parcourt & les deux côtés & le haut du ventre, & fe termine vers le bas de l'abdomen ; comment, en réfléchiflant bien. Men. 1740, . XX 346 MEMOIRES DE L’ACADEMIE ROYALE fur toutes ces circonvolutions d’inteftins, & ne perdant point de vüë la méchanique générale & inconteftable de l'aflem- blage & de la formation des différentes parties de no$ deux Monflres, ‘pourra-t-on concevoir que chaque inteftin d’un Foœtus trouvera le moyen de s'unir au même inteflin d'un autre Fœtus ? Se glifleront-ils adroitement à côté l’un de Vautre dans les interftices qu'ils laiffent entr'eux & au milieu de leurs circonvolutions mutuelles ? Si cela eft, comme les mêmes portions d'inteftins qui fe trouvent dans le côté droit ou gauche de l’un des deux Fœtus, fe trouvent auffi dans le côté droit ou gauche de l'autre Foœetus, & que dans la pofi- tion latérale de ces deux Fœtus leurs deux côtés droits, non plus que leurs deux côtés gauches, ne fe touchent point immédiatement, mais font féparés les uns par les autres ; il faudra donc, pour que chacune des mêmes portions intefti- nales s'atteignent & fe joignent de part & d'autre, que celles, par exemple, du côté droit du Fœtus gauche pañlent par deflus celles du côté gauche du Foœtus droit pour arriver aux portions inteftinales droites de ce Fœtus ; & que celles du côté gauche du Fœtus droit pañlent de même par deflus celles du côté droit du Fœtus gauche pour arriver aux por- tions inteftinales gauches de ce Fœtus; mais par cette fuppo- fition fur les conféquences & fur la poffibilité de laquelle M. Goëffon ne paroît pas avoir fuffifamment réfléchi, les portions inteftinales des deux Fœtus de nos deux Montres auroient eu un fort très-différent de celui de toutes les autres parties des deux Fœtus ; car quoique toutes ces autres parties. contenuës dans les côtés internes ou externes de ces deux Fœtus, y ayent été manifeftement ou détruites ou confervées en entier, & cela plus exaétement encore dans les régions ombilicales & hypogaftriques de ces Fœtus qu'ailleurs ; fui- vant la fuppofition de M. Goëffon, les portions inteftinales contenuës dans ces mêmes regions n’auroient au contraire été nulle part, c'eft-à-dire, dans aucun côté, ni détruites, ni confervées entiérement, mais elles lauroient toüjours été à moitié, & il fe feroit fait par-tout une réunion des deux “25 DKE S, S'CHENCE S, 347 moitiés longitudinales qui en feroient reftées de part & d'autre, As IL'eft cependant vrai, il eft même démontré par la feule infpection de la pofition latérale des deux Fœtus, que leurs deux côtés internes, qui font différents, par les portions inteftinales qu'ils contiennent, c'eft-à-dire, dont l'un éft le côté droit du Fœtus gauche, & autre Île côté ‘gauche du Fœtus droit ; que ces deux côtés qui fe touchent immédia- tement, font feuls à portée l'un de l'autre; que les parties de l'un de ces côtés internes ne peuvent agir..que fur les parties de l'autre côté interne; que ces parties trouvent les unes dans les autres une caufe de deftruction totale, & un obftacle mutuel qui les arrête & les empêche de porter leur action au-de-là du côté interne, qui eft leur champ de ba- taille, & que la fin de la preffion qui arrive au moment du contact des deux épines, garantit les côtés externes de toute deftruction : pourquoi donc les portions inteftinales des deux Fœtus auroient-elles été moins exactement foûmifes aux loix de la preffion latérale, qui viennent d’être rapportées, que ne l'ont été toutes les autres parties de l’un & de l’autre Foctus, & fpécialement celles qui logeoient avec ces portions in- teftinales dans les régions ombilicales & hypogaftriques des Foœtus ? Et fi par une méchanique inconnuë les portions inteftinales contenuës dans les deux côtés internes des deux Foœtus, ont pu ne pas agir les unes fur les autres, quoique de part & d’autre elles fe préfentaffent naturellement & in- difpenfablement à leur rencontre mutuelle, fi elles ont eu la faculté de fauter, fans fçavoir comment, par deflus le côté le plus proche, pour s’'aller placer contre toute forte de vrai- femblance, dans {e plus éloigné, qui paroifloit devoir être à V'abri de leur action ; pourquoi les autres parties n’auroient- elles pas eu auffi la même faculté ? pourquoi ne nous ont-elles laïflé aucun indice de cette marche extraordinaire? pourquoi - nefa-t-on fait faire qu'aux inteftins? Imaginoit-on en leur faveur une caufe czpable de produire & de diriger leurs paflages bizarres d'un Foetus dans un autre ? Que feroïent Xx ij 348 MEMOIRES DE L'ACÂDEMIE ROYALE devenuës par cette tranfplantation toutes les attaches parti- culiéres qui les lioient fi fort à leur Foœtus ? fe fuffent-elles diffoutes impunément? Voit-on des exemples de chofes pareilles dans aucun de nos deux Monftres? Et n'y voit-on pas au contraire des faits réels qui démentent formellement ces fortes dE tranfpofitions de parties dans un Fœtus qui n'eft pas le leur?” ‘‘Aulrefle,-quand il feroit poffible que toute la fuite du canal inteftinal de Fun des deux Fœtus fe plaçât à côté d’une füite pareille d'inteftins appartenants à Fautre Fœtus, il n’err rélultéroit point encore ce que M. Goëffon en avoit attendu, la déftruétion de toute une moitié longitudinale des inteftins des deux Foœtus ; car on a fait voir que deux parties qui ne fe détruifent qu'à moitié, ne le font qu'en conféquence de leur fituation naturelle & particuliére, c’eft-à-dire, parce que le milieu de chacune de ces parties répond à Fépine de fon Foœtus dans laquelle fe trouve le terme de la preffion qui s'arrête néceflairement & à point nommé, lorfqu'il n'y a encoré eu qu'une moitié de chacune de ces parties de détruite. Par conféquent on ne voit pas comment, à l'exception de quelques portions inteftinales qui pourroïent être dans la pofition qui vient d'être rapportée, toutes celles qui n'y fe- roient point, & qui fe détruiroient mutuellement, ne le feroient qu'à moitié. Enfin, plus on réfléchit fur le fentiment de M. Goëffon;, plus on y découvre de contradictions, d'impoffbilités, plus on s'apperçoit que les circonvolutions inteftinales qui l'ont fi fort occupé, font un véritable labyrinthe dans lequel il s'eft perdu & égaré en füivant pas à pas chaque inteftin, en Faflociant du mieux qu’il a pu à fon femblable, & en fe perfuadant que ce n’étoit que par l’affemblage de deux moi- tiés longitudinales de chacun des canaux inteftinaux, qu'il pouvoit parvenir à refaire une fuite nouvelle d'inteflins fim- ples, bien conformés, & parfaitement tels qu'ils fe trouvent dans un Foœtus naturel. Voyons préfentement fi je ferai plus heureux que M: DE TSMASN CNE IN! CIE 15 9 Goëflon, dans l'explication du même fait, fr fa route que je vais tenir pour y arriver, très-différente de la fienne, aura autant d’inconvénients, {1 elle-fe fera mieux concevoir, & f Yunion des inteftins des deux Fœtus qu'elle fera apperce- voir, ne quadrera pas auffi parfaitement avec toutes les unions qui fe font faites entre les autres parties des deux Monftres, que la méchanique de celle de M. Goëffon y quadre peu, & y eft même formellement contraire. En entrant en matiére, je commence par déclarer que mon objet n'eft nullement de fuivre en particulier les diffé- rents inteftins de chacun des deux Fœtus que nous allons expofer à la preflion. Je confidere ces inteftins i globo, faifant tous enfemble avec leur méfentere, une mafle parti- culiére qui s'étend depuis le ventricule jufqu’à l'anus, & à la gauche, à la droite & au milieu de laquelle il fe trouve certaines portions inteftinales qui y ont leur place marquée. Je regarde cette mafle dans chacun des deux Fœtus, comme j'y ai regardé a veflie, le flernum, le diaphragme ; & la même méchanique qui m'a guidé fur là récompofition de: ces parties dans les: deux Monftres, m'y va guider de même fur la récompofition de la mafle inteftinale. Je place donc les deux Fœtus à côté l'un de l'autre, & j'apperçois aufli-tôt que a moitié de Ia mafie inteftinale: contenuë dans le côté droit ou externe du Fœtus droit, & que la moitié d'une mafle pareille, eontenuë dans de côté gauche ou externe du Fœtus gauche, n’y doivent point être’ “entamées, & y font à l'abri de la preffion ; mais je vois tout le contraire à l'égard des deux autres moitiés de ces deux mafles. Ces deux moitiés contenuës dans les.côtés in-- ternes: des deux: Fostus: où elles s'offrent en plein à l'effort de leur preffion mutuelle, doivent y périr.en entier l'une par d'autre, de maniére qu'il ne reftera plus à chaque Fœtus qu'une moitié de fa maffe inteflinale, la droite au Fœtus droit, & la gauche au Fœtus gauche. Je remarque encore que les deux moitiés des deux mafes inteftinales deftinées par leur pofition à. fe détruire.mutuellement, doivent, à melure: : X x üj. so MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qu'elles difparoîtront, donner lieu aux deux moitiés externes des deux mafles inteftinales des deux Fœtus, continuellement poufiées l’une vers l'autre, de s'approcher de plus près & de s'atteindre ; & comme le lieu & le temps de la rencontre & du concours de ces deux moitiés externes de mafles in- teftinales, font précilément ceux du contact des deux épines, & que la preflion cefle ou n'a plus d'effet quand ce contat eft arrivé, les deux moitiés de mafles inteftinales qui ne peuvent plus d'orênavant avancer l'une vers l’autre, & qui fe touchent immédiatement, s’unifient alors d'autant mieux, u’elles s'offrent l'une à l'autre avec le même tiflu de parties. Enfin, fi le Fœtus droit a perdu par la preflion la moitié gauche de fa male inteftinale, qui contenoit certaines por- tions d’inteflins qui ne fe trouvent que dans cette moitié, elle eft remplacée par la moitié gauche d'une mafle pareille reftée au Fœtus gauche; & fi ce Fœtus a auffi perdu la moitié droite de fa mafle inteftinale, qui contenoit de même cer- taines portions d’inteftins qui ne fe trouvent que dans cette moitié, il s’en fait un pareil remplacement par la moitié droite d’une mafñle femblable reftée au Fœtus droit, de ma- niére que chacun des deux Fœtus font en état, par la portion de mafie inteftinale qu'ils ont fauvée l’un & l'autre, de ré- former une nouvelle mafle inteftinale très-complette, con- formée tout-à-fait à l'ordinaire, & telle qu'elle fe trouve dans un Foœtus fimple & naturel. Avant que de finir ce Mémoire, il me refte encore quel- ques réflexions à faire fur la méchanique de la formation de nos Montres. Si l'on confidere avec attention quel a été le temps où les deux Fœtus dont chacun de nos Monftres font compofés, étoient plus particuliérement fufceptibles de deftructions & de récompofitions de parties, on reconnoîtra ce que j'ai déja avancé plus d’une fois, que ç'a été lorfque leurs parties ne faifoient que commencer à fe développer ; aufii ai-je re- marqué que les deux cœurs des deux Fœtus du Monfire qui m'appartient, {e font unis dans ce temps-là mème, & avant DES SCIENCES. it le développenrent des autres parties. Et en effet, quand les parties ont eu le temps d'acquérir un certain degré de force & de folidité, elles réfiftent bien davantage qu’elles ne fai- foient, à la preflion, elles fe pénétrent & s’entament bien moins aifément les unes & les autres, elles exigent pour cela une preffion bien plus forte, & les coups que porte cette preffion, tombant fur des parties plus roides, plus féches, plus élaftliques, moins pénétrables, y caufent plûtôt une rupture qu'une pénétration, & on conçoit que cette rupture, jointe aux fecoufles qui fe font fentir à fon occafion dans les parties voifines , eft d’autant plus funefte aux Fœtus, que fes parties font plus folides & plus formées. il Pour appercevoir combien la plus petite preffion eft ca- pable d'agir fur des parties qui font dans les premiers com- mencements de leur développement, il fuffñit de confidérer que chacune de ces parties ne font encore que de petites portions glaireufes organifées & prefque liquides, qui par cela même que leur confiftence tient davantage de celle d’un kiquide, fe mêlent bien plus aifément à des portions glaireufes: de même nature, les pénétrent & s’en laiffent plus facile- “ment pénétrer. Or on conçoit que par-tout où les deux. efpeces de liquides organifés fe pénétrent, lorganifation doit s'évanouir, & que les deux parties ou portions de parties. confonduës, & devenuës par -1à incapables de nourriture & de développement, doivent bien-tôt fe deflécher & fe féparer du refte de Ia partie, dont la portion qui n'aura point été pénétrée, pourra avec une autre portion femblable re- former une nouvelle partie. J'ajoûterai ici une réflexion, ou plütôt une conjecture, fur une nature de fait très-répété, & multiplié dans nos deux Monfires : ce fait eft que toutes les deftructions ou régéné- rations de parties qui s’y font faites, ne l'ont été que par Faction réciproque de deux parties femblables qui fe font entiérement pénétrées, ou qui ne l'ont été qu'à demi, & dont les deux moitiés échappées par leur pofition à l'effet. de à preffion, fe font enfin réunies. s2 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Il eft vrai que dans la preflion mutuelle & latérale de deux Fœtus, ce font ordinairement les mêmes parties qui fe préfentent fucceffivement de part & d'autre. Après la def- truétion de la peau; c’eft dans lun & dans l’autre Fœtus Ja membrane adipeufe qui vient fur les rangs, & ainfi de tout le refte, de maniére que fuivant cet arrangement, toutes les parties recompofes ont dû naturellement l'être de deux moitiés reflantes des mêmes parties qui fe font toüjours pré- fentées les unes aux autres; par conféquent, dira-t-on, ces faits fi fort multipliés, prouvent bien que des parties de mème nature peuvent aifément fe pénétrer, fe détruire & recompofer une partie femblable, mais non pas que toutes les deftructions & récompofitions fuppofent toüjours l'action réciproque de parties femblables. Rien ne feroit plus vrai ni plus jufte que cette confé- quence, fi nous ne raifonnions que fur des faits que l’arran- gement naturel des parties des deux Foœtus auroit toûjours, & néceffairement rendu les mêmes ; mais quelque fréquentes & ordinaires que foient, en vertu de cet arrangement, les deftructions & régénérations par l'action réciproque de deux parties femblables, cette généralité fouffre quelques excep- tions qui vont être rapportées, & ces exceptions femblent indiquer que l'uniformité des parties femblables qui agiffent les unes fur les autres, mérite qu'on y ait égard, & qu'il feroit très-poflible qu'elle influât beaucoup fur la deftruétion des parties expolées à la preffion, & qui fans cette uniformité, ou ne fe pénétreroient point, ou fe pénétreroient bien moins aifément. | Cela étant, &en partant toüjours de l’idée, que chaque partie dans fa premiére origine eft une efpece de petite glaire organifée & prefque liquide; comme on voit que les liquides pareils fe mêlent aifément, & que d’autres de nature diffé- rente ne fe mêlent jamais enfemble, & par conféquent ne s'alterent point, deux petites portions glaireufes & organifées qui repréfenteroient deux parties femblables, ne pourroient- elles pas par l'homogénéïté de leur fubftance, être bien plus propres B'ES SSH EN CES: : | 353 propres à fe mêler enfemble, & à fe pénétrer mutuelle- ment à la moindre détermination de l'une vers l'autre, que fi c'étoient des portions glaireufes de parties différentes qui pourroient être les unes à l'égard des autres ce que l'huile eft à l'eau. Suivant cette idée, deux parties qui paroiffent très-diffé- rentes, l'une glanduleufe comme le foye, d'autre membra- neufe comme l’eflomac, ne feroient capables ni de fe détruire, ni de s’unir, dans lé temps même qui paroîtroit le plus fa- vorable à cette deftruétion & à cette union, c’eft-à-dire, lorfque chacune de ces parties ne feroient encore qu'une pe- tite portion glaireufe & prefque liquide, mais d’une ftruéture différente de celle de l’autre portion glaireufe : aufli voyons- nous que l'eftomac du Fœtus droit qui dans la preffion des deux Foœtus fe trouvoit naturellement entre le foye de fon Foœetus & celui de l'autre Fœtus, & qui d’ailleurs étoit placé dans le côté qui devoit périr, & qui a auffi péri ; que cet eftomaë pouflé par le foye de l’autre Fœtus, en a été dé- placé, mais qu'il eft toüjours refté le même du côté de fa ftruéture, & qu'aucune union avec cé vifcere n'a été la fuite de leur contact immédiat & de la preflion, ce qui auroit tourné tout autrement, f1 les eflomacs des deux Fœtus fe fuffent rencontrés, & euffent été en fituation d’agir immé- diatement l’un fur l’autre ; mais la chofe ne fe pouvoit, car pour qu’elle eût été poffhible, il eût fallu que la demeure naturelle des deux eftomacs eût été dans des deux côtés in- ternes, c’eft-à-dire, dans le côté droit du Fœtus gauche, & dans le côté gauche du Fœtus droit ; & au lieu de cela, l’eftomac du Fœtus gauche logeoït dans le côté gauche & externe de fon Fœtus, où äl étoit par conféquent en füreté & à l'abri de toute atteinte, & l’eftomac du Fœtus droit étoit naturellement dans le côté gauche & interne de ce Fœtus, où il avoit à fe défendre de l'attaque & de la preffion qui lui venoient de {a part du foye contenu dans le côté droit & interne du Fœtus gauche, & ce foye n’a pu faire autre chofe fur l’eftomac du Fœtus droit, que de le pouffer Mem. 1740. UT 354 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE hors du côté qui alloit être détruit, & dans celui qui devoit être confervé. Et ce qui prouve enfin bien clairement que fi les deux eflomacs euflent pu fe joindre & agir lun fur l'autre par une preflion mutuelle ; fuivant leur pofition différente, ils fe fuflent détruits-ou totalement ou feulément à moitié, & euffent formé une partie nouvelle des débris des deux autres, c'eft premiérement l'exemple des deux reins & des deux ure- teres contenus dans les deux côtés internes des deux Fœtus, lefquels fe font détruits entiérement ; c’eft en fecond lieu Yexemple des deux veffies détruites à moitié, & réduites en une feule veflie ; or on ne voit point du tout pourquoi ce qui eft arrivé aux deux reins, aux deux ureteres, aux deux veffies, n'arriveroit pas dans la même polfition aux deux eflomacs : ce n’eft donc que le défaut de rencontre qui a opéré cette différence, & par conféquent ce que l'eflomac auroit fait avec un autre eftomac, & ce qu'il n'a pu faire avec un foye, ne donne-t-il pas lieu de conjecturer que Thomogénéïté de fubftance permet dans le premier cas ce que l'hétérogénéité empêche dans le fecond D'E1s *S1c/i: EN CES. 355 O:B SERV All 0; N DO DEL ECLIPSE" DU SOL'ETE, | Du 30 Décembre 1739. Par Mr: Cassinr & MARALDI. ne nous formes préparés à. obferver cette Eclipfe 9 Janvier avec deux Lunettes montées fur des Machines Paral- ” 1740. lactiques & garnies de Micrometres, dont l’un avoit des réticules que l’on avoit difpofés le jour précédent, de maniére que les extrêmes compriflent exaétement le diametre du Soleil. ÈS Nous avions jugé cette précaution néceflaire, parce que lEclipfe devant arriver le lendemain au matin, peu après * le lever du Soleil, fon difque apparent pouvoit être défiguré par l'effet des réfractions ‘extraordinaires, caufées par les vapeurs, comme il arrive fouvent au lever du Soleil; prin- cipalement en hiver. A 7h 53° 41" Heure véritable, le centre du Soleil parut à l'horifon. Lorfqu'il fut entiérement levé, fon diametre vertical n’occupoit que neuf intervalles entre les fils du Micro- metre, & le diametre horifontal en comprenoit douze. La grandeur du diametre du Soleil étoit le 30 Décembre, de od 32/40”, de forte que fon diametre vertical, fuivant le rapport de 9 à 12, n'a paru que de 24° 30", plus petit que l'horifontal, de 8” 10”; au lieu que par l'effet de da ré- fraction, telle qu'elle eft marquée dans la Connoiffance des Temps, il n’auroit dû être diminué que de 2 minutes 35 ainfi la réfraction apparente furpafloit de près de quatre fois la réfration que l’on attribuë aux. Aflres à l’horifon, lor£ qu'ils font dégagés de vapeurs. Nous continuâmes enfuite d'obferver le rapport du dia- metre vertical du Soleil à fon diametre horifontal, & nous AD 356 MEMmoiREs DE L’ACADEMIE ROYALE trouvâmes qu'à 7h 59’ 18”, il occupoit dix intervalles, ce ui donne l'effet de la réfraction, de 5’ 27", à peu-près le double de la réfraction ordinaire. A 8h çs’ 53", le diametre vertical du Soleil comprenoit onze intervalles, ce qui donne l'effet de Ia réfraction, de 2° 43", qui n'excédoit que d'environ une minute celle qu'on auroit dû y obferver. Le difque du Soleil, dont les bords depuis fon lever avoient été ondoyants, parut enfuite affés bien terminé. L A 8h ro’ 34”, nous apperçümes affés diftinétement le commencement de l'Eclipfe vers la partie feptentrionale du Soleil. A 8h 17" 30", l'Eclipfe étoit d'un doigt, c’eft-à-dire, fa partie éclairée comprenoit onze intervalles entre les fils; mais comme le diametre vertical du Soleil, dans le fens duquel li Lune éclipfoit le Soleil, étoit altéré par fa réfraétion qui en diminuoit la grandeur, ce qui empèchoit de connoître exactement la quantité de la partie éclipfée, par lobfervation de l'intervalle que la partie claire du Soleil oecupe entre les fils du Micrometre difpolés horifontalement, je me fervis pour déterminer avec plus de précifion la grandeur de l'E- clipfe, d'une autre méthode que je crois qu’on doit employer par préférence aux autres dans les Eclipfes partiales, & qui arrivent près de lhorifon. Je difpofai pour cet effet les fils du Micrometre, de maniére qu’ils fuflent perpendiculaires exactement à Ja fection de {a Lune dans le difque du Soleil, qui étoit à peu-près dans le fens de fon diametre horifontal, comme on l'a repréfenté dans cette Figure, & je remarquai le nombre d’in- tervalles qu'occupoit la partie À B éclipfée par la Lune ; ce que je continuai de faire jufqu'à la fin de FEtclipfe, ainf qu'il eft ici rapporté, Le … Cornes, ou de FC à AG, “—… la moitié de l'arc du Soleil DES 'ScIÉNCcESs. 357 A 8h27 46" l'efpace entre les Cornes À & B de lEclip{e L occupe cinq intervalles. 8 38 46 lefpace entre les Cornes occupe cinq inter- valles & un tiers, & l’Eclipfe paroît d’un doigt & un tiers, qui eft la plus grande qui ait été obfervée. 8 48 45 cinq intervalles. 8 585$ quatre 9 3 18 trois. 9 6'18 deux. 9 8 3 un. 9 8 43 fin de l'Eclipfe, que j'ai jugé exaéte, 9 8 46 fm de l'Eclipfe par M. Maraldi. Pour réduire ces obfervations en doigts & minutes , il faut confidérer que la quantité ÆE D du difque du Soleil, éclipfée par la Lune, eft me- furée par la fomme des finus verfes EG, GD, de la moitié 1 des arcs ADB, AEB, com- pris entre les Cornes 4 & B de lEtcliple; de forte que connoiffant par obfervation le rapport de FH, diametre ho- rifontal du Soleil, à 4B, qui mefure l'intervalle entre ces F 4 finus de Parc 4 £ qui mefure AËEB, écliplé par la Lune, on aura fon complément. À F; dont le fmus GC étant re- _ tranché de CE, refte la valeur de GE, dont le double me- …. fureroit la partie E D du difque du Soleil, éclipfée par la Lune, fi fon demi-diametre Z D étoit égal au demi-diametre CE du Soleil; mais comme il y a pour ordinaire quelque -Yy il 58 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALe différence entre ces deux demi- diametres, on prendra dans les Tables Aftronomiques ou dans, la Connoiffance des Temps, le rapport du demi-diametre LD de la Lune, qui étoit alors de 1 6’ 42", à celui du Soleil qui étoit de 16’ 20”, que Jon comparera à AG, finus de l'arc AD qui melure la moitié de V'arc ADB de la circonférence de la Lune qui éclipfe le Soleil ; on aura donc fon complément GL, qui étant retranché du demi-diametre LD de la Lune, refte G D, qui étant ajoûté à EG trouvé ci-deflus, donne Æ D qui mefüure la quantité du Soleil éclipfée. À Dans l’obfervation de Ia plus grande Eclipfe, où l'efpace AB, entre les Cornes, occupoit cinq intervalles & un tiers, douze defquels mefuroient le diametre entier FF du Soleil, on fera, comme 1 2 doigts font à $ doigts & un tiers, ou comme 720 minutes font à 320, ainfi le finus total eft au finus de l'arc À E, que l’on trouvera de 26d'23' 10", dont le complément AF eft de 634 36° 50". On fera enfuite, comme le finus total eft au finus de l'arc AF, aïnfi CÆ, demi- diametre du Soleil qui eft de 6 doigts ou 3 60 minutes, eft à CG, que l'on trouvera de 322 minutes & demie ; les re- tranchant de CE, on aura GE de 37 minutes & demi. Le demi-diametre DZ de {a Lune étant au demi-diametre CE du Soleil, comme 1 6’ 42" à 16’ 20", on trouvera, fuivant ce rapport, le demi-diametre de Ia Lune de 368 minutes & 5 fecondes, dont le demi-diametre du Soleil eft de 360, & l'on fera, comme LD 368’ s" eft à AG 160, ainfi le finus total eft au finus de l'arc AD du difque de la Lune, que l’on trouvera de 2 54 46’ 0”, On fera enfuite, au he DIFELS 8 C'LIELNA CE: 5, 359 comme le finus total eft au finus de l'arc A7, complément de l'arc AD, ain LD 368/ s"età LG, qu'on trouvera de331'28", & qui étant retranché de ZL D, donne D G de 36° 37"; l'ajoûtant à GE, qui a été trouvé de 37’ 30", on aura £D qui mefure la quantité de lEclipfe du Soleil au temps de cette obfervation, de 74/7", ou 1 doigt 1 4 minutes 7 fecondes. | On a trouvé par la même méthode, la grandeur de lEclipfe à 8h 48’ 45”, Jorfque l'intervalle entre des Cornes Occupoit cinq intervalles, de . , ,, ..,. tm (21 à 8h58" Side in ont dre late 4T AO TE de MR ID SOU ve 222 Fra" 9 6fr8sdes lo née a 4e 9 & à 9 BEA TU ETATS Erin 22 En comparant enfemble les deux derniéres obfervations, on tronve qu'en fuppofant que vers la fin de l'Eclipfe elle ait diminué fuivant le rapport du temps écoulé entre ces obfervations, la fin a dû arriver à 9h 8°43", de même que je l'avois trouvée immédiatement : ce qui ne s'éloigne que de $ fecondes de ce qui réfülte de l'antépénultiéme obferva- tion comparée avec la derniére. Il eft aifé de juger quelle précifion on doit attendre de cette méthode pour déterminer la grandeur des Etclipfes, lorfqu’elles font partiales, principalement vers leur commen- cement & vers leur fin; car comme les arcs interceptés entre les Cornes de l'Eclipfe augmentent alors ou diminuent dans une proportion fans comparaifon plus grande que les finus « verfes qui y répondent, la moindre augmentation ou dimi- nution réelle de l'Eclipfe doit S'Y appercevoir avec une grande évidence, de forte qu'on peut déterminer aifément Jufqu’aux minutes de doigts, qui ne font que la 720.me | partie du difque du Soleil, & n'occupent dans le Ciel que 2 à 3 fecondes. Müis outre les avantages que nous avons rapportés, il y … cnaun autre très-confidérable, qui vient de {a fituation où 360 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE s'eft trouvée la partie du Soleil éclipfée par la Lune ; car comme le Soleil devoit paroître, par l'effet de la réfraétion, en forme d’une Ellipfe, dont le grand axe étoit à peu-près dans le fens du diametre horifontal, & le petit axe fuivant le vertical, la partie du Soleil éclipfée étant vers le Nord, la quan- tité de la partie éclairée du Soleil, lorfqu'elle étoit mefurée par Les intervalles entre les fils difpolés horifontalement, de- voit paroître plus petite qu'elle n'étoit effectivement, & faire juger par conféquent l'Eclipfe plus grande qu'on ne l'auroit trouvée fr le diametre vertical avoit eu fa véritable étenduë ; ce qui eft conforme à l'obfervation , fuivant laquelle la plus grande Edlipfe a été jugée d'un doigt & un tiers, au lieu qu'elle n’a dû être réellement que d'un doigt & 14 minutes, telle que nous l'avons trouvée par la méthode propolée, parce que l'intervalle entre les Cornes, qui étoit dans le fens du grand axe, ayant toûjours dû refter le même fans altéra- tion par la propriété de l'Ellipfe, on a eu par cette méthode la jufte mefure de la partie du Soleil éclipfée par la Lune. EXAMEN DES M SLCTIENN C:E-s. 36x “ EXAMEN DU SEL DE PECAIS "en CADÉMIE a cru que s'il fe préfentoit dans L la finte des difficultés pareilles à celles dont il ef£ queflon dans le rapport fuivant, ce rapport pourroit être utile a ceux qu'elle nommeroit pour les examiner ; ainfi elle a jugé à propos de le faire imprimer. Les Comrniffaires qui y parlent, font M: LémEerY, GEorrroY & HELLOT: . MNJOvuSs avons examiné par ordre de l’Académie, le Sel de Pécais, & le Sel de Peyrac & de Sijan, qui nous ont été remis dans deux facs cachetés ; fçavoir, celui de Pécais,. feul dans un fac, & ceux de Peyrac & de Sijan, mêlés enfemble dans un autre fac. Les cachets de ces deux facs ont été reconnus fains & entiers par M. Joubert Syndic . général de la province du Languedoc, lequel nous a dit & … fait connoître, par des copies de procès-verbaux qu'il nous . a communiquées, que les Sels renfermés dans les deux facs » font fun & l'autre des Saumaifons de fannée 17 3 8, qu’ainft . fr nous y trouvions des différences, elles ne pouvoient pas être imputées au plus ou moins d'ancienneté de fun ou de Vautre de ces deux Sels. 4h nous à paru par la leGture des piéces qui nous ont été . remifes, que les habitants de Ia province du Gevaudan » demandent à lAdjudicataire des Fermes générales, qu'il leur fourniffe du Sel des Salines de Pécais, qui étoit autrefois . employé dans la province, à la place de celui de Peyrac & de Sijan, qu'il fait tranfporter depuis quelques années dans Je Gevaudan. * Ils prétendent que pour leurs fälaifons & pour les autres _ufiges où le Sel eft néceffaire, il leur faut quatre melures 0 Mem, 1740. . Zz DE Salaifon, 362 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de Sel de Peyrac & Sijan, dans tous les cas où ils n’em- ployoient autrefois que trois mefurès de celui de Pécais, Is prétendent auffi avoir fait plufieurs expériences qui conflatent cette différence. C’eft fur leurs repréfentations que M. le Controlleur général s’eft déterminé à demander à l Académie l'examen de ces deux Sels, & les expériences qui feroient jugées néceflaires pour fçavoix fi leur différence en bonté eft telle qu'elle eft prétenduë par la province de Gevaudan. Ainfi objet de nos recherches fe réduit à fçavoir lequel des deux Sels eft le plus falant, ft Fun peut être fubftitué à Vautre indifféremment, & au cas que l’un des deux foit plus pur, en quelle proportion le moins pur doit être délivré. A l'ouverture des deux facs, nous avons aifément reconnu que le Sel de Pécais étoit beaucoup plus blanc que celui de Peyrac & Sijan; que le même Sel eft plus net, d'une crif- tallifation plus ferrée que l'autre; que celui de Sijan mêlé avec le Peyrac laifle voir des différences notables dans le mélange, l'un des deux étant en grains fort terreux, criftal- lifés inégalement, l'autre en mafles aflés grofles & beaucoup plus blanches. Mais comme nous ne fçavons pas lequel eft le Peyrac & lequel eft le Sijan, & que d’ailleurs l’Adjudi- cataire des Fermes générales les fournit mélangés, c'eft avec ce mélange que nous avons fait nos expériences. Nous croyons qu’il eft néceffaire d’avertir qu'à l'exception de la falaifon, toutes les épreuves ont été faites par chacun de nous en particulier, la plûpart deux fois, & quelques-unes une troifiéme fois en commun. La queftion propofée nous a paru d’une aflés grande importance pour mériter latten- tion la plus fcrupuleufe. Le fieur Jacquefon, maitre Chaircuitier, mandé le 2x! Septembre dernier, a coupé devant nous de la cuifle droite & de la cuiffe gauche d'un Porc frais, un morceau femblable à l’autre, ayant même quantité de lard & même quantité de chair, & par conféquent pefant l’un & l'autre le même poids de 20 onces. Il a égrugé devant nous les deux Sels féparément, il à trouvé que celui de Pécais étoit plus clair, DES, $ CIE NCES. 363 plus dur à écrafer que l'autre. Il a falé thacun des deux morceaux de cuifle de Porc avec 1 6 onces de chacun des Sels, en forte qu'ils en étoient également recouverts & en- tourés, dans les deux petites huguenotes de terre vernifiée & d’égale capacité où il les a mis. Ces deux huguenotes, étiquetées & couvertes de leur couvercle, ont été portées L à la cave, & le s Octobre elles ont été retirées : le fieur Jacquefon a goûté ces chairs, qui étoient très-bien falées une & l'autre, & il nous a dit que la chair fortant du Sel de Pécais avoit plus de force dans fon Sel (c’eft fa maniére de s'exprimer) que cette différence alloit à 2 degrés & demi de plus que la falaifon par le Sel de Peyrac & Sijan. Nous lui avons demandé de quel terme il partoit pour fixer cette différence à 2 degrés & demi, & il nous a répondu qu'il n'en avoit pas d'autre que l’ufage. … Nous fçavons au furplus que ce Chaircuitier fait un très- grand débit de chairs falées, & que par conféquent il doit être habile dans fa profeffion. Nous avons fait défaler fépa- rément ces deux morceaux avec pareille quantité d'eau, on _ des a fait cuire féparément, mais huit perfonnes qui en ont goûté, n’y ont pas trouvé de différence fort fenfible. Ce -Salé leur a paru en général, meilleur que le petit Salé ordi- _ maire de Paris. …… Un autre Chaircuitier du fauxbourg S.t Germain, qui a » falé deux autres morceaux de pareille chair avec le Sel de | Pécais & avec le Sel de Sijan & de Peyrac, dont il avoit . employé feulement une livre fur quatre livres de chair, les ayant goûtés au bout de trois femaines, les a trouvé égale- ment falés. | | La différence de couleur que la feule infpeétion des deux . Sels fait appercevoir, nous faifant foupçonner dans le Sel de … Peyrac & de Sijan, des matiéres hétérogenes qui ne feroient “pas dans le Sel de Pécais, nous avons fait difloudre une livre de chacun de ces Sels avec fuffifante quantité d’eau, dans le … deffein de féparer enfuite par des filtres de papier, la matiére étrangére non faline que l'eau n’auroit pas pu andre Ha z ij 64 MEMotREs DE L'ACADEMIE ROYALE fallu pour difloudre la livre de Sel de Pécais, 2 liv. 1 4oncest d'eau, & l’on n’en a employé que 2 livres 1 2 onces + pour diffoudre Ia livre de Sel de Sijan & Peyrac ; ainfi le Sel de Peyrac & Sijan, ou contient moins de parties falines diflo- lubles, ou renferme naturellement plus de parties aqueufes que le Sel de Pécais. Ces diflolutions de Sels étant encore chaudes, ont été filtrées par des papiers dont on avoit fait latarre. Le Sel de Pécais a laifié fur le filtre bien lavé d’eau fimple après la filtration, une petite quantité de terre grife & très-fine, qui, féchée fur fon filtre pendant quatre jours dans une étuve, s’eft trouvée peer feulement 28 grains. Le Sel de Peyrac & Sijan a laïffé fur fon filtre, auffi bien lavé d’eau fimple, & defféché de même & pendant le même temps, 1 gros 12 grains, partie de terre grife & jaune, partie de faible & petits cailloux ; ainfi le Sel de Peyrac & de Sijan contient par livre 5 6 grains de matiére indifloluble plus que le Sel de Pécais. Sur ces fédiments, nous avons verfé du Vinaigre diftillé, il a diflout prefque toute la terre du Sel de Pécais, mais il n’a diffout qu'environ la moitié du fédiment du Sel de Peyrac & Sijan, parce qu'outre la terre abforbante & diffoluble par cet acide, il y a dans ce Sel, comme on l'a dit, un fable & de petits cailloux fur lefquels le Vinaigre diftillé n’a point d'action. Nous avons fait auffi la pefée des deux Sels, tels qu'ils { font trouvés dans les facs & fans autre préparation. Mais pour imiter la maniére de mefurer qui eft en ufage dans les Greniers à Sel, nous avons conftruit une efpece de Trémie ou plan incliné raboteux, au bas duquel il y avoit un vaifieau de bois cylindrique dont la tarre étoit faite, & dont on avoit imbibé fuffifamment les pores de matiére faline, en y faifant féjourner du Sel pendant quelques jours dans un lieu humide, afin que celle qu'il pourroit prendre dans la fuite des expé- riences, n'occafionnât pas d’erreur. Nous avons pilé ces Sels féparément , & les avons fait paffer par un Tamis de crin, féparant enfuite le trop menu par un Tamis plus fin. Quand notre mefure ronde étoit pleine, on la racloit avec une regle, DES SCIENCES. 36$ & l’on pefoit. Comme les petites différences des peftes va- rioient un*peu dans les répétitions, nous les avons fait répéter | par huit perfonnes différentes; & il réfulte de ces expériences, | en réduifant leurs diverfités à un terme moyen, que le Sel ÿ de Pécais pefe un quatorziéme de plus quéle Sel de Sijan. L … Nous avons aufii cherché le poids fpécifique de ces deux Sels par la Balance hydroflatique du Chevalier Boyle. Le fleau dont nous nous fommes fervi, lorfqu'il eft monté fur fon pied vertical, trébuche à un 8.me de grain. Ayant mis à un des bras une groffe bulle de criftal, laquelle pefe dans Y'air 2293 grains, & dans l'eau 1 192 grains +; nous l'avons fufpenduë par un crin, qui doit être regardé comme zero, & nous l'avons plongée dans un vaifleau cylindrique de criftal, rempli aux deux tiers d’eau de Seine filtrée. A l’autre bras du fleau, nous avons mis un poids de cuivre fait exprès pour ces expériences, & nous avons ajufté le tout, en forte que le fleau demeurât conflimment horifontal. Etant aflürés de cet équilibre, nous avons vuidé l'eau du vaifleau cylin- drique, & y avons mis à a place une liqueur compofée de 8 onces d’eau & d'une once de Sel de Pécais diflout dans cette eau. La bulle de criftal, replongée dans ce cylindre _de fluide falin, s'eft trouvée plus légere de 77 grains que dans l'eau pure. On a pefé de même le Sel de Peyrac & de Sijan , diflout auffi au poids d’une once dans 8 onces d’eau, & la bulle de criftal s’y eft trouvée plus légere feulement de » 74 grains. Ces deux expériences ont été répétées chacune - trois fois, & il ne s'y eft pas trouvé un 1 6.me€ de grain de . différence. | .… Le Sel de Pécais & celui de Peyrac & de Sijan, pris dans _ les facs, égrugés menu, puis étendus fur des vaiffeaux plats M .de fayence, & ces vaifleaux placés dans une étuve à même 4 hauteur & au mème feu pendant 48 heures; celui de Peyrac … & de Sijan y perd par livre 4 gros 4 grains d'humidité ; ” celui de Pécais n'y en perd que 3 gros 24 grains ; ainfi le … Sel de Sijan & de Peyrac, quoique paroiffant aufli fec en . ortant du fac que le Sel de Pécais, FORD naturellement Z ii 366 MEMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyALE 52 grains d'humidité par livre plus que le Sel de Pécais. Ces deux Sels ayant été égrugés, puis defléchés en fes agitant, prefque jufqu'à la décrépitation dans des vaifieaux plats de terre verniflée, on les a portés dans une cave mo- dérément humide. Depuis le $."€ Septembre jufqu'au 7 du même mois, le Sel de Peyrac & de Sijan a pris par livre une once d'humidité. Le 1 2 Novembre il en avoit pris 4 onces 7 gros; le 1 8 du même mois l'augmentation alloit à 9 onces 2 gros 24 grains. Le Sel de Pécais a augmenté depuis le $ jufqu’au 7 Sep- tembre d’une once 24 grains par livre, le 1 2 Novembre fon poids étoit augmenté de $ onces 2 gros, & le 1 8 du même mois de 9 onces 4 gros. Ainfi le Sel de Pécais prend dans ces trois temps plus d'humidité que le Sel de Sijan ; preuve qu'il y a dans une mafle de ce Sel plus de parties pures de Sel marin que dans l'autre, puifque c'eft une des propriétés du Sel commun de s’humeéter d'autant plus facilement qu'il eft plus pur. RÉCAPITULATION des Articles précédents. Une livre de Sel de Pécais laiffe fur le filtre 28 grains de fédiment non falin. La livre de Sel de Peyrac & de Sijan laifle 84 grains de matiére pareillement indifloluble, Par l'autre expérience, où ces deux Sels ont été également defféchés, ils ont diminué, fçavoir le Sel de Pécais de 240 grains, & celui de Peyrac & de Sijan de 292. Ainfï le Sel de Pécais n’a perdu, tant en fédiment terreux qu'en humidité, que 268 grains, & celui de Peyrac & de Sijan en a perdu 376. Donc une livre de Sel de Pécais contient 8948 grains de vrai Sel, & la livre de celui de Sijan & de Peyrac 8840. Par l'expérience de la Trémie, notre mefure de Sel de Pécais a pelé 14 livres, & pareille mefure de Sel de Sijan n'a pefé que 1 3 livres. Or comme chaque livre de Sel de Pécais contient 8948 DES MS IC EN. CIE 15 367 grains, les 14 livres de notre mefure contiennent 1 2 5 272 grains de Sel. Et comme chaque livre de Sel de Sijan & de Peyrac contient feulement 8840 grains de Sel, les 13 livres de _notre mefure ne contiennent que 1 149 20 grains de matiére faline difloluble. : Ainfr r1 mefures de Sel de Pécais valent 1 2 mefures de Sel de Peyrac & de Sijan. Par l'épreuve de la Balance hydroftatique, la matiére fa- line contenuë dans le Sel de Pécais eft comme 77, & la matiére faline contenuë dans le Sel de Sijan & de Peyrac eft comme 74. Or notre melure de Sel de Pécais contient 1 4 livres, & celle de Peyrac & de Sijan feulement 13 livres, il fuit de la multiplication de ces deux rapports, que la quan- tité de vrai Sel contenu dans une méfure quelconque de Sel de Pécais, eft à la quantité de vrai Sel contenu dans une pareille mefure de Sel de Peyrac & de Sijan, à très-peu près comme 11 + efl à r0, & qu'ainfi dix mefures de Sel de Pécais PEU onze CR &un cinquiéme de Sel de Peyrac & deSijan. Les petites différences qu’on pourroit appercevoir entre la premiére conclufion de rapport de 11 à12, & la feconde conclufion de rapport de 10 à 11+ , dépendent « d’une por- tion de terre légere prefque imperceptible, qui ne fe préci- pitant que très-lentement dans la diflolution de l’un des deux Sels, en augmente proportionnellement le poids de la liqueur - dans le vaifleau cylindrique de la Balance hydroftatique. M. Nicole & Camus ont bien voulu nous diriger dans ces calculs, & M. Camus les a vérifiés. Les autres expériences -dont nous allons donner le détail, n'ont été faites que pour fçavoir fi dans lun ou dans l'autre de ces Sels il n'y auroit pas quelque Sel étranger & diflérent 3 pu Sel marin. Nous avons fait diffoudre une livre de Sel de Sijan & de L 13 dans une fuffifante quantité d'eau. On a filtré fa | liqueur, & on fa fait évaporer jufqu'à pellicule pour en 368 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE avoir les premiers criflaux de figure cubique, lefquels fe font mieux formés & plus beaux que ceux des criftallifations fui- vantes; c'eft-à-dire, que quand on a évaporé de nouveau cette liqueur faline, ce qu'on a répété jufqu'à treize fois, les crif- tallifations fe font faites toüjours un peu plus confufément, mais conftamment de figure cubique, & par conféquent eflentiellement femblables aux criftaux du Sel commun du Grenier à Sel de Paris, & aux criflaux du Sel gemme qu'on criftallifoit en même temps. Après la treiziéme criflallifation, il eft refté du Sel de Sijan & de Peyrac trois onces d'une Eau-mere qui donne encore un fédiment jaune, outre la terre, le fable & les cailloux qui étoient reftés fur le premier filtre qui a précédé la criftallifation. Cette Eau-mere préci- pite en blanc la diflolution du Mercure dans l'Efprit de Nitre, Si on la mêle avec l'Huile de Tartre, il s’en précipite un autre fédiment gris-blanc qui eft une matiére purement ter- reufe, puifqu’elle ne fe diffout pas même dans l'eau chaude. L'Eau-mere de notre Sel de Paris & celle du Sel gemme font fa même chofe ; ainfi à cet égard il'n’y a point de différence entre ces Sels. Nous avons fait les mêmes expériences fur une livre de Sel de Pécais, & par treize criftallifations nous avons eu un Sel exactement de la même nature, & enfin une Eau-mere toute femblable, qui précipite auffi en blanc la diflolution du Mercure, mais qui mêlée avec le Sel de Tartre, ne pré- cipite pas, à beaucoup près, une auffr grande quantité de terre limoneufe & indifloluble à l’eau. De plus, le Sel de Pécais donne dans les derniéres criftallifations, des criftaux beaucoup mieux formés que ceux des derniéres criftallifations du Sel de Sijan & de Peyrac. Déja affürés par ces deux derniéres épreuves, que ces Sels ne contiennent pas de Sel étranger, & que tous les deux font bons & d'ufage, à Ia différence près de leur quantité dans une même mefure, nous Îles avons diftillés par deux méthodes, lune pour en avoir feulement l'acide, l'autre pour avoir féparément Facide & la bafe, Pour DES SCIENCES. 369 Pour fuivre la premiére, on a pris 2 livres + de Sel de Sijan & de Peyrac, qu'on a fait décrépiter comme à l’ordi- naire. La décrépitation qui s’eft faite avec beaucoup de bruit, étant finie, ces 2 div. + fe font trouvé diminuées de 2 onces 6. gros. … Le Sel de Pécais, qu’on a fait décrépiter en même quan- tité, & qui a fait aufli beaucoup de bruit, n’a diminué que d'une once +. On a pris 2 livres de chacun de ces Sels décrépités, qu'on a mêlés féparément avec 6 livres d'Argille, on les à fait entrer dans deux Cornuës qu’on a placées dans un même Fourneau avec deux autres Cornuës, lune chargée de Sel gemme décrépité, l'autre de Sel commun du Grenier à Sel de Paris, aufli décrépité ; les deux en même dofe que les précédents & avec la même quantité d’intermede. On a adapté des Récipients aux quatre Cornuës, & l’on a conduit la diftillation, felon l'art, à un même feu. Celui des quatre Sels qui a donné le plus d’efprit acide, a été le Sel de Pécais : on en a eu une livre 2 onces 2 gros. Le Sel commun de Paris én a fourni 1 4 onces 6 gros ; leSel deSijan & de Peyrac 13 onces un gros, & le Sel gemme feulement 1 2 onces un, gros. , Nous ne rapportons pas ces différences à deflein d’en conclurre rien d'avantageux en faveur de l'un ou de l'autre : des deux Sels que nous avions à éprouver, parce que M. Lémery, fun de nous, fera voir dans un autre temps à Académie, qu'on peut tirer de tous ces Sels la même quan- tité d’efprit acide, en fe fervant de certains moyens qu'il fe réferve d'indiquer lorfqu'il rapportera d’autres faits finguliers qui, n'intéreffent pas dans le cas préfent. À l'égard de l'autre maniére de diftiller les deux Sels de Pécais & deSijan & de Peyrac, il n’y a eu de différence que dans l'intermede, & l’on a ajoûté à l’Aroille pareil poids - de Vitriol calciné au blanc; l'efprit acide qu'on a retiré des . deux Sels, étoit fumant, mais les proportions n'ont pas été dans le même rapport que ci-deffus. On à verfé de l'eau Mem. 1740. . Aaa 370 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE chaude dans les deux Cornuës pour y difloudre le Sel de Glauber qui devoit s’y être formé par l'union de l'acide du Vitriol de f'intermede à la bafe du Sel marin que fon acide propre avoit abandonnée, on a filtré & évaporé à plufieurs fois cette leffive, & l'on a eu du mélange où le Sel de Pécais étoit entré, 1 $ onces 4 g'os 48 grains de Sel de Glauber pour chaque livre de Sel marin ; & de l'autre mélange con- tenant le Sel de Sijan & de Peyrac, 1 $ onces 2 gros 48 grains du même Sel moyen aufli pour chaque livre de cet autre Sel : la différence eft de 2 gros. Donc le Sel de Pécais fournit à l'acide vitriolique plus de bafe de vrai Sel marin, que le Sel de Peyrac & de Sijan ne lui en donne. De cette épreuve & des précédentes nous croyons pouvoir conclurre que le Sel de Pécais & le Sel de Peyrac & de Sijan ne différent point eflentiellement, & qu'ils font de même nature & de celle du Sel gemme, puifque leurs criftaux font parfaitement cubiques, puifque leur acide précipite la diflo- lution d'Argent en vraye Lune cornée, puifqu'il précipite en blanc la difolution du Mercure par V'Efprit de Nitre, enfin parce qu’étant joint à Facide nitreux, il s'en fait une bonne Eau régale qui diflout l'Or ; que les différences qui fe trou- vent entre ces deux Sels, ne doivent être attribuées qu'aux parties terreufes, plus abondantes dans le Sel de Peyrac & de Sijan que dans celui de Pécais, & au fable & aux petits cailloux qui fe trouvent dans le mélange de Peyrac & de Sijan, & dont l'autre Sel eft exempt; qu'ainfi, à raifon de ces différences , le Sel de Pécais eft préférable, & que dans la proportion qui réfulte de nos calculs, dix mefures de ce Sel tiendront lieu de onze mefures & un cinquiéme de SeF de Peyrac & de Sijan. A Paris ce 23 Novembre 1740 La A de — tint DES SCIENCES. 372 PEER CM ES Sur Les caufes de la flrulure finguliére qu’on rencontre quelquefois dans différentes parties du Corps humain. Pa M. HunauLp. grise qui difféquent fréquemment, trouvent quelque- Décempre fois dans la flruéture des parties, une conformation 1740. différente de celle qui eft appellée naturelle, parce qu'elle fe préfente plus ordinairement. La plüpart des Anatomiftes ont paru plus occupés du foin de donner la defcription de ces variétés, que d’en chercher les caufes. Je vais tâcher de dé- couvrir par quelles voyes la Nature s’écarte dans quelques occafions de fa façon ordinaire d'agir, c'eft-à-dire, ce qui peut occafionner {a ftruéture finguliére de quelques parties. Sur le Crâne èr le Cerveau. On trouve affés fouvent des Têtes où la future fagittale On trouve eft prolongée jufqu'à la racine du nez, & partage l'os coronal fhélauetois des en deux. I y a des Anatomiftes qui ont regardé les Crânes l'os du front oùon remarque une pareille future, comme particuliers à un $f Pumes cn exe plûtôt qu'à l'autre. Pour trouver la caufe de cette divifion du Coronal, il faut Caufe de cetté remonter jufqu’à l'état des os du Crâne dans l'enfance. Cet formation. os eft alors toüjours divifé en deux parties latérales ; ainfi Ja mème féparation qui fe trouve entre les deux pariétaux, fe rencontre auffr entre les deux piéces qui compofent alors le Coronal. Ces deux piéces du Coronal s’unifient entr’elles par des dents, enfuite elles fe foudent enfemble, & la future difparoiït. Cette foudure qui fe fait pour l'ordinaire de bonne heure dans les deux piéces du Coronal, fe fait auffi prefque Aaa ij * V. les Mén. æ& l'Ac.173 0. JT * 7. l'Hif. de l'Ac.1734. 7-43: 372 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE entre tous les autres os du Crâne, mais dans la vieillefie feulement. J'ai fait voir ailleurs * comment cela fe pañle. Mais fi les deux piéces qui compofent le Coronal, s’épaifliflent & fe durciflent avant que leur foudure foit formée, la future refte pour ne plus s’effacer que dans un âge très-avancé. On peut pouffer plus loin la réflexion que je viens de faire. J'ai trouvé dans le Crâne d'un affés grand nombre d'Enfants, le Coronal & les deux Pariétaux foudés enfemble,. fans qu'il reftât le moindre veftige de leur ancienne fépara- tion *, I] y a apparence que les os s'étant développés, & ayant augmenté dans les premiers temps plus promptement à proportion que le Cerveau, ces os encore tendres fe font foudés ; mais lorfque 1e Cerveau croît à proportion autant ou plus que les os du Cräne, ces os alors plus preflés de dedans en dehors, ont moins de difpofition à s'unir entre eux ; ainfi acquérant de l'épaifleur & de la folidité avant leur foudure, ils deviennent moins propres à fe fouder. De-là “on peut conclurre que fi le développement du Cerveau eft Lie Crâne n'a été d'abord qu’une mem- brane, dans différents en- droits de la- quelle lofff- cation à com- mencé. Affés fouvent- l'ofMification s'arrête, & laïffe des par- ties merabra- neufes. lent dans les enfants & l'offification prompte, la future qui eft entre les deux piéces du Coronal, s’efface plütôt : au contraire, lorfque le développement du Cerveau eft prompt & loffification lente, là future qui partage le Coronal en deux piéces, fe conferve Jlong-temps.. Ce qui eft un Crâne aétuellement, n'a été dans les pre- miers temps qu’une membrane, dont l'offification s'eft, pour ainfi dire, emparée. Aflés fouvent l'oflification: eft arrêtée dans quelques parties de cette membrane. J'ai plufieurs os de jeunes Sujets où l’on apperçoit des portions de cette membrane, dans lefquelles Poflification a été arrêtée, & qui par conféquent font reftées membraneufes. Si la caufe qui a arrêté le progrès de l'offification, fubfifte, tandis que le refte qui eft offeux, croit & durcit, alors ce qui pour l'ordinaire n'eft qu'un feul os, en formera déux. Voilà l'origine des Sutures finguliéres, ou, fi lon veut, furnuméraires, qu'on: trouve quelquefois, aufli-bien que celle des os nommés Clefs. DEMSMTSMORNE mener Su: 7 ou Offa Wormiana*. J'ai de ces os où loffification s'eft arrêtée depuis une de leurs extrémités jufqu'à l'extrémité oppofée. Dans quelques autres os, on voit des efpaces plus ou moins étendus qui {e font confervés membraneux ; il y en a où au milieu de ces efpaces membraneux on apperçoit un com- mencement d'offification. Je dirai en paflant, que j'ai un Crâne où on avoit appli: qué une couronne de trépan. Le trépané étant mort avant da guérifon da trépan, j'ai trouvé une membrane qui occupe toute l'étenduë du trou, & qui fort de la tablesniterne. II me paroit que cette membrane étoit la bafe de l’offification qui {e devoit faire. Voilà qui eft bien différent de l'idée qu'on donne de la façon dont le trou du trépan fe remplit. On jugeroit que le Cerveau feroit plus difpofé à fe détruire qu'à fe prêter à un: développement différent de celui qu'il doit naturellement acquérir, fi l'on fait attention qu'il eftun aflemblage d’une infinité de tuyaux d'une petiteflé extiême, & que les parties qui-compofent ces tuyaux; n'ont entr'elles qu'une liaifon- bien foible.. En effet, on fçait que lorfque Yinjeétion a pénétré jufque dans la fubftance corticale, fr on remuë un peu cette fubftance dans l'eau, fes partiès fe déta- chent les unes des autres, que les vaifleaux fe détruifent, & qu'il ne refte que des filets de cire prodigieufement petits, qui. Membrane qui remplit le’ trou fait par l'application du trépan, Le Cervenx fe développe: quelquefois d'une façon peu naturelle. ont pénétré jufque dans leur cavité. Cependant comme il fe: trouve un aflés grand nombre de Cränes qui ont une confi- guration bizarre, il faut que le Cerveau s'y, {oit. développé d’une façon qui y-réponde. On dit que les Caraïbes preflent le devant de la Tête de leurs enfants, & leur applatiflent ‘extrêmement le front. J'ai un Crâne que feu M. Reneaume, de qui je l'ai reçû, m'a aflré être d'un Caraïbe, il n'a * J'ai des exemples de Sutures furnuméraires dans prefque tôus les os du Crâne. Los planum fe trouve quelquefois partagé en deux. L’explication que “jé viens de donner, fert à faire’ entendre pourquot il fe trouve une pete ; 5 LE à 2 ture dans l'os maxillaire au’ bas de orbite; Je‘long. du canal qui forme le . . . ; AE . . Po tou orbitaire inférieur. L'endroit où fe trouve cette pétite future, a relté Crâne d'un: Caraïbe. Ing-temps membraneux ; loffifrcation gagnant enfuite les deux bords de ?a : membrane, il-en réfulte une future. : Aaa if Exemples de Crânes fin- guliérement conformés. Obfervation fur un hydro- céphale. 374 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE abfolument point de front. Le Coronal commence à s’'ap- platir à la hauteur des fourcils, & fe porte en arriére horifon- talement jufqu'à ce qu'il foit prêt à fe réunir avec les deux Pariétaux. Ce Cräne femble regagner poftérieurement en lon- gueur ce qui lui manque fur le devant. Voyes la Figure r'°, J'ai le Crâne d'un Sujet affés avancé en âge, où on voit au milieu de la future fagittale un enfoncement confidérable qui avoit été fait dans fa jeunefle. Cet enfoncement eft rem- placé par deux efpeces de boffes qui font fur les côtés du même Crâne. Je conferve un Cräne qui eft fort reflerré far les côtés, & il a en récompenfe beaucoup d'étenduë de devant en arriére. Je pourrois en faire voir encore plufieurs qui ont d’autres fingularités dans leur conformation. Peut-être que le Cerveau des perfonnes à qui ces Crânes appartenoient, ne faifoit pas trop bien fes fonctions. Quoi qu'il en foit, leur Cerveau s'eft prêté, fans fe détruire, à la conformation peu naturelle de ces Crânes dans lefquels les parties de ces Cerveaux ont dû prendre entr’elles des arrangements différents de ceux aux- quels elles étoient deftinées. Quelques portions de Ia fub- ftance médullaire ont dû acquérir plus d'étenduë, tandis que d’autres n’ont pas pu acquérir celle qu’elles doivent avoir, &c. Je crois pouvoir placer ici l’obfervation que j'ai faite cette année fur un Enfant de 7 ou 8 ans, mort d'hydrocéphale, La Tête étoit beaucoup plus grofle que celle d’un adulte, éxcepté en devant, où elle n’avoit que l’étenduë ordinaire à cet âge, mais latéralement & poftérieurement elle étoit monftrueufe. L'eau étoit renfermée dans les ventricules, & il y en avoit plus d’une chopine. Si on veut faire quelques recherches fur le temps où a commencé cet hydrocéphale, il y a apparence que ce n'étoit qu'après que les os avoient commencé à être un peu unis entr'eux par les futures, fans cela il feroit arrivé ce qui arrive quand l'hydrocéphale com- mence de très-bonne heure, car alors les os du Crâne s'écartent confidérablement les uns des autres, & la membrane qui les unit par leurs bords, acquiert beaucoup d’étenduë. IL falloit DEMI Sfé FE N°c'E/s. cependant qu'il y eüt du temps que cet hydrocéphale eût commencé, puifque les os unis par leurs futures, avoient ex le temps d'acquérir une étenduë fort confidérable ; l'action de l’eau fur les paroïs des ventricules, & de-là fur le Cerveau, avoit obligé les os du Cräne à prendre cet accroiffement dé- mefuré. Les apophyfes pierreules, qui font les os du Corps les plus durs, avoient tout au moins une longueur égale à celle qui fe trouve dans les plus grands Crânes. On voit par-là que lorfque l’épanchement d'eau dans les ventricules commence avant que les os du Crâne foïent fortement unis les uns avec les autres, les enfants qui ont cette maladie, peuvent vivre Jong-temps. Dans le Sujet qui n'a fourni ceite obfervation, je n'ai trouvé aucun vicé fenfible à 11 glande pituitaire ni à l'énfundibulum. L'effet que l'eau contenuë dans les ventricules, avoit pro- duit fur la fubftance du Cerveau, ne mérite pas moins d'at- tention. Les parois des ventricules font, dans l’état naturel, appliquées les unes fur les autres, & ne laiflent prefque pas: de cavité fenfible. Dans cet hydrocéphale les parois s’étoient écartées pour contenir plus d’une chopine d’eau. I falloit donc que la fubftance du Cerveau qui compofe ces parois, fût confidérablement allongée ; de plus, il falloit que Îa fubftance corticale qui étoit placée fur ces ventricules diftendus, & qui étoit appliquée contre le Crâne, eût beaucoup plus d’étenduë qu'elle n’en devoit avoir; auffi pour acquérir cette étenduë, elle n'étoit point difpolée en forme de circonvolutions. Au lieu de fe replier en dedans pour former des circonvolutions, elle ne faifoit qu'un plan uni qui avoit apparemment l’éten- duë que devoient avoir les circonvolutions développées. La fubftince médullaire formoit un fecond plan mince appliqué fous le premier : on fent la raifon de cette difpofition. La: pie-mere n'ayant point, comme à l'ordinaire, des circon- volutions du Cerveau à füivre, formoit auffi elle-même un plan fur la fubftance corticale *. * On trouve dans Vefale & dans quelques autres Auteurs, .des obfervations qui ont du rapport avec celle-ci. Difpofition finguliére de la fubftance corticale &c médullaire du Cerveau, Conféquences des remarques précédentes. Trou qui fe trouve quel- quefois à Îa partie infé- rieure du Sternum. Origine de ce trou, 376 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE On voit par cette obfervation & les précédentes, que le Cerveau fe prête quelquefois à un développement bien diffé- rent de celui qui doit s’y faire naturellement. Cette même obfervation, & ce que j'ai dit précédemment, prouvent auf que les parties les plus dures, c'efl-à-dire, les os, changent leur façon naturelle de fe développer dans un temps même où elles font déja grandes & épaifles, & par conféquent où elles oppofent plus de réfiftance aux caufes qui agiflent pour faire changer la marche de leur accroiflement. Cette réfle- xion appliquée à l'état d'un Fœtus qui n’a encore, pour ainfi dire, nulle forme & nulle folidité, fait concevoir combien dans les premiers temps il peut fe former de configurations finguliéres. Sur le Srernum. On trouve quelquefois à la partie inférieure du Sternum un Trou qui eft plus ou moins grand. Un Auteur Allemand dit dans une petite diflertation imprimée au commencement du premier volume des Se/ela Medica Francofurtenfia, avoix obfervé un pareil Trou, & que ce trou donnoit pafiage aux Arteres & aux Veines mammaires. Quoique j'aye plufieurs Sternum ainfi percés, je n'ai trouvé ce trou, en difféquant, qu'une feule fois, & il n'y pañloit rien ; ce trou étoit rempli par une forte de fubftance cartilagineufe. L’Auteur que je viens de citer, ne dit point précifément qu'il ait vû les Vaifleaux mammaires pafler par ce trou ; peut-être que Îa feule vraifemblance l'aura déterminé à afligner cette nouvelle route aux Vaiffeaux mammaires. Quoi qu'il en foit, voici, je crois, ce qui donne occafion à la formation de ce trou. Le Sternum dans les premiers temps eft tout cartilagineux, & l'offification y commence en différents endroits ; le nombre de ces offifications eft incertain, elles fe réuniflent toutes plus ou moins tard pour former trois piéces, qui en- fuite fe foudent pour n'en faire qu'une. Si donc, lorfque toutes ces différentes offifications commencent à fe réunir, il y a un endroit où loffification fe trouve arrêtée, cet 3 endroit LOT] DES S/C\1 EN C'E S 377 endroit reftera rempli de la fubftance cartilagineufe qui, en { détachant lorfqu’on fait le Squelete, laïffera appercevoir un trou dans l'os du Sternum ; peut-être encore que trois piéces d’offifications qui fe rencontrent par leurs bords, peuvent, en prenant de l'accroiffement & de la folidité avant que d'être unies, laifler un vuide entr’elles. Je n’ai jamais vû un pareil trou à la partie fupérieure du Sternum ; c'eft vraifem- blablement parce que la partie fupérieure du Sternum n’eft ordinairement qu'une feule piéce dès les premiers temps, & qu'elle ne s’oflifie point en différents endroits, au lieu que la multitude différente d'offifications fe fait à la partie infé- rieure où le trou dont il s’agit, fe rencontre toüjours. Jur le nombre des Côtes, moindre ou plus grand qu'à l'ordinaire. Ï y a fong-temps qu'on a remarqué de Ia variété dans le nombre des Côtes. Ceux qui ont fait des Livres d'Anatomie fans avoir beaucoup difféqué, ne parlent pas comme d’une chofe fort rare, de deux Côtes de plus ou de moins. Galien dit qu'il s'en trouve très-rarement treize pour un côté, & qu'il eft encore plus extraordinaire qu'il n’y en ait qu'onze. Colombus, dans fon 1.er Livre de Re Anatomica, affûre, en parlant du nombre des Côtes, qu'il ne lui eft arrivé qu'une feule fois de n’en trouver qu’onze, undecim mihi Jemel tantüm dinumerare licuit, & que c’étoit la premiére fois qu'il démon- troit l'Anatomie à Padouë à fa place de Véfile. Le même Colombus, dans fon 1 5. Livre, dit avoir trouvé 22, 2 $! ‘& 26 Côtes. Valverda dit avoir toûjours trouvé 24 Côtes, excepté dans le cadavre d’une femme que Colombus diffé- quoit à Pife, & qui en avoit 1 3 d’un côté. Riolan dit avoir -vû dans quelques Squeletes 1 1 Côtes de chaque côté, & dans d’autres 1 3. Bartholin fait mention d’un Cadavre qui q . “avoit 1 1 Côtes d’un côté, &112 de l'autre. Diemerbroeck, en 1642, ne trouva dans le cadavre d'un Soldat François que 22 Côtes. Fallope & Picolomini ont trouvé chacun dans deux Sujets, 26 Côtes. Bohnius en a trouvé le même Men 174 0: . Bbb Nombre des Côtes, qui varie. Anatomiftes qui ont trouvé des Côtes en plus grand ou en moindre nombre qu’à l'ordinaire, Sur le plus grand nombre des Côtes. 378 Memotrrs DE L'ACADEMIE RoyALE nombre une feule fois. Dans le catalogue d’un nombre pro- digieux de piéces que M. Ruifch avoit ramaflées de toutes parts, il n'eft parlé que d’un feul Sujet qui eut 26 Côtes. Dans le o.me volume des Ada Medicorum Berolinenfium , eft rapporté qu'en 1720 on avoit ouvert le cadavre d'un vieillard qui avoit 1 3 Côtes d’un côté. On conçoit aflés facilement comment un homme peut n'avoir que 22 ou 23 Côtes. J'ai le Squelete d'un adulte dans lequel la 1.re Côte de chaque côté, bien formée pofté- rieurement, & articulée avec la premiére Vertebre du dos, vient { joindre & fe confondre avec la 2.de Côte, qui par cette union, devient plus large qu’elle n’eft ordinairement (Voyes la Fig. 2.). En regardant ce Squelete par les côtés, ou par la partie antérieure, on ne voit que 22 Côtes. M. Mor- gagni & Fantonus dans fon Commentaire fur l'Epitome de Véfale, parlent de confufions de Côtes à peu-près pareilles. J'ai le Squelete d’un Fœtus d'environ fept mois, où du côté gauche les cinq côtes fupérieures font unies poftérieu- rement, & elles fe féparent antérieurement les unes des autres; la G.me & la 7.me font aufli un peu unies enfemble. Voilà donc des exemples de Côtes dont les unes font confonduës entr’elles poftérieurement, & les autres le font antérieurement. Le nombre des Côtes peut donc être ou paroitre diminué, parce que deux ou trois Côtes n’en feront, pour ainfi dire, qu'une. De plus il ne feroit pas étonnant qu'une ou plufieurs Côtes manquaffent à fe développer. Mais on ne conçoit pas auffi facilement comment un petit nombre de Sujets peut avoir une ou deux Côtes de plus que n’en a le refte des hommes. Si l’on dit que la Nature a donné à quelques Embryons le germe d'une ou de deux Côtes qu'elle a refufé à tous les autres, on fera en droit de regarder toutes ou prefque toutes les produétions finguliéres & moniftrueufes, comme étant telles dès la premiére origine (ce qu’on aura de la peine à fe perfuader). D'un autre côté, il n’eft pas facile d'imaginer que deux enfants étant contenus en mème temps dans la Matrice, l'un aura été oblitéré DES SCIENCES“ © 79 entiérement à deux Côtes près qu'il aura laiflées à fon frere, & qui fe feront placées juftement aux deux côtés d'une Vertebre. Voici, je crois, comment fe forment ces Côtes furnu- méraires. J'ai trouvé dans beaucoup de Sujets, que l'offifi- cation des apophyfes tranfverfes de la 7. Vertebre du Col fe fait d’une façon différente de celle qui arrive aux apo- phyfes tranfverfes des autres Vertebres du Col. Dans les jeunes Sujets la mafle offeufe qui compolfe les apophyfes des Vertebres du Col, eft unie aux parties latérales des mêmes Vertebres par un cartilage qui difparoît avec l’âge. Une portion de cette mafle / Fig. 3.) fe partage en deux efpeces d’arcs, l'un antérieur 2, Yautre poftérieur C, qui, en croiflant, vont à la rencontre l’un de l’autre, en formant par leur union apophyfe tranfverfe & 2 trou dont elle eft per- cée, B (Fig. 4:). Voïlà ce qui arrive à toutes les Vertebres du Col, excepté à la 7me, Au lieu de cet arc antérieur, on voit à cette derniére Vertebre /Fig. s.) dans la plüpart des Sujets, une piéce offeufe particuliére À, qui ne fait point corps avec le refte des apophyfes, & qui eft unie par un cartilage avec le corps de 11 même Vertebre. Cette piéce ofleufe comme une piéce de traverfe, n’eft point difpofée en arc : elle va tout droit horifontalement ; fi elle eft rencontrée & bornée dans fon accroiflement par l'arc poftérieur, elle s’unit avec lui moyennant un cartilage qui s'ofifie avec le temps. En suniflant & fe foudant avec cet arc poftérieur, elle forme avec lui une apophyfe tranfverfe, telle que celles des autres Vertebres du Col, & qui comme elles, eft percée d’un trou. Mais fi cette piéce de traverfe À (Fig. C.) augmente avec promptitude, & ff elle n’eft point bornée par l'arc poftérieur, elle pafle au de-là, elle s'étend & elle prend la forme d’une Côte; alors l'arc poftérieur n’a que la figure d’une apophyfe tranfverfe 2, telle que celles des Vertebres du Dos. On com- prendra facilement ce que je viens de dire, en jettant les yeux fur les Figures précédentes, ou bien en examinant plufieurs Squeletes de petits enfants qui n’ont vécu que quelques mois, Bbb ji Caufe de fa formation des Côtes furnu- méraires, Tous les hommes pour- rojent avoir 26 Côtes, 380 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE quoique dans quelques-uns de ceux qui font parvenus juf- qu’à fix ou fept ans, on puifle appercevoir la même chofe. J'ai des Squeletes où la piéce offeufe dont je viens de parler, déborde l'arc poftérieur de quelques lignes, d’autres où elle déborde davantage, À À (Fig. 6 7 7.) & d’autres enfin où la Côte eft toute formée, À / Fig. #.). Aïnfi tout homme pourroit avoir 26 Côtes, & les deux Côtes de plus dépen- dent de la façon dont la piéce ofleufe que je viens de faire remarquer, rencontre l'arc poftérieur, Si elle déborde cet arc, elle devient Côte, & l'arc poftérieur eft formé, ainfi que je viens de le dire, de la même façon que les apophyfes tranf- verfes des Vertebres du Dos. Cette Côte étant remuée, le cartilage qui devoit la fouder avec le corps des Vertebres, & celui qui la devoit fouder avec Farc poftérieur, reflent flexi- bles. Si cette piéce eft arrêtée par l'arc poftérieur, voilà une apophyfe tranfverfe formée comme les autres Vertebres du Col, & voilà un trou dont elle fera percée, ainfi que les autres Vertebres du Col. Je dirai en paflant, que quand ce trou fe rencontre à fa 7. Vertebre, je n'ai jamais vû qu'il donnût paflage à l'Ar- tere vertébrale qui paffe par le trou des autres apophyfes poux arriver dans le Crâne. Si l'idée que je viens de propofer eft vraye, les Côtes fur- numéraires doivent toüjours appartenir à la derniére Ver- tebre du Col, ou, fi l'on veut, la Côte furnuméraire doit être la 1.re Côte; alors il y aura 1 3 Vertebres au Dos, &il n'y en aura que 6 au Col. C'eft auffi ce qu'on voit dans les Squeletes que j'ai, où il y a 26 Côtes. Les Anatomiftes qui ont parlé des Côtes furnuméraires, ont obmis de dire où elles font placées, cependant je ne. voudrois pas aflürer qu'il ne fe püt faire qu'on trouvât les Côtes furnuméraires placées au-deflous des autres Côtes ; il peut y avoir une flruéture particuliére que je ne connois pas, capable de donner naif , fance à des Côtes ainfi placées. Quoi qu'il en foit, il paroït, fi l'on y veut faire attention, que les Côtes qui excedent le nombre de 24, ne peuvent être que la fuite d'un dévelop- DENSUSNEUME NC: Es. 38x pement particulier, & qu'elles n’exiftent pas comme les au- tres dans le germe. En eflet, on a vü par les exemples que j'ai tirés de différents Auteurs, qu'il y a quelquefois une Côte de plus pour chaque côté ; que quelquefois il y a une Côte de plus à un feul côté ; que quelquefois dans les adultes, où toutes les parties qui exiftent naturellement, ont acquis toute leur étenduë & tout leur développement, une de ces Côtes furnuméraires eft parfaite & l’autre imparfaite. Je fens bien que ce que je viens dé propoler, ne rend pas raifon de a configuration que prend cette Côte, du Cartilage qui fe trouve à fon extrémité antérieure, & des Mufcles intercoftaux, s'il s’en rencontre entre cette Côte & celle qui la fuit, mais je ne crois pas que cela fuffife pour détruire mon explication. De la variété qui fe trouve dans le nombre . des Ureteres. On voit quelquefois des Reins qui ont plus d’un Uretere. La difficulté qui fe rencontre à comprendre pourquoi il y a des Côtes furnuméraires, fe trouve auffi à l'égard de la mul- tiplicité des Ureteres. Voici, ce me femble, la raifon de cette variété, Un Uretere {e divife ordinairement dans le Rein en deux ou trois branches, chacune de ces branches va enfuite former des efpeces d’entonnoirs ou des calices qui embraffent Tes mammelons du Rein. Si dans les premiers temps du dé- veloppement de l'Embryon, & lorfque les Reins & la Veffie fe touchent pour ainfi dire, l'accroiflement fe fait dans l'Ure- tere & fes branches, comme ïl fe fait le plus ordinairement, les branches fe réuniront dans la finuofité du Rein, &un feul Uretere ira du Rein à la Veffie. Si ces branches croiïffent plus à proportion que l'Uretere, elles fe réuniront au-deflous du Reïn, à une diftance plus ou moins grande, ce qu'on rencontre aflés fouvent. Si enfin deux ou trois de ces bran- ches prennent beaucoup d’accroifflement, tandis que l'Uretere n'en prend point, alors il y aura deux ou trois Ureteres qui s'étendront depuis le Rein jufqu’à la Veffie. Si on jette les Bbb iij Un Rein à quelquefois plufeurs Ure- tcres. Caufe de la multiplicité des Ureteres. 382 MEmoIREs DE L’ACADEMIE ROYALE yeux fur la Figure 1.'e de Ia 3.m° Planche d'Euflachi, on verra fenfiblement que ces trois Ureteres ne font que les branches qui fe réunifient pour l'ordinaire dans la finuofité du Rein, & on reconnoitra dans la branche inférieure les calices qui en partent pour embraffer les mammelons du Rein. Pour épargner la peine de chercher cette Figure dans Eufta- chi, je l'ai fait copier ici exactement (Voyés Figure 9.). | ADDITION AU PRECEDENT MEMOIRE, Jur la variéré qui fe trouve dans la diffriburion des Vaiffeaux. Queftion qui A l'occafion de l'origine que j'attribuai, dans l Affemblée MA ‘Po précédente, aux doubles ou triples Ureteres qui fe rencon- démie, trent quelquefois, on me demanda fi, en fuivant les mêmes idées, je pouvois rendre raifon de la variété qui fe trouve dans les Arteres émulgentes. Pour l'ordinaire, une Artere émulgente qui part de lAorte, fe divife en plufieurs bran- ches en approchant du Rein, ou bien quelquefois deux ou trois petits troncs bien diftingués les uns des autres, partent de l'Aorte pour aller au Rein. Impoñibilité Je n’ai pas entrepris d'expliquer toutes les variétés qui fe due préfentent dans les Cadavres, j'ai feulement voulu faire voir chercher dns dans ce Mémoire, par l'exemple de plufieurs Cränes fingu- beaucoup de Jjérement confhuits, que les parties du Corps les plus dures particuliére fe prêtent à un développement fingulier. J'ai voulu faire voir ile °% Ja même chofe dans la partie de notre Corps la plus molle, j i eft le Cerveau, & j'ai afligné des caufes qui m'ont paru fenfibles, de la configuration, de la multiplicité & de l'abfence de certaines parties. Je crois qu'il fuffit de faire attention que bien des caufes peuvent produire de la variété dans le déve- Jloppemént des parties. Il feroit fouvent auffi impoñfible qu'in- utile, de vouloir déterminer précifément d'où vient cette variété, DES SCTENCESs. 333 Voici cependant un principe qui fert, ce me femble, à expliquer pourquoi il fe trouve quelquefois plufieurs Arteres émulgentes pour un même Rein, Je fuppofe que dans un Embryon qui commence à fe développer, un feul petit tronc d’Artere forte de l’Aorte, & qu'avant d'arriver au Rein, il f divife en plufieurs branches, ainfi qu’on le voit dans la plüpart des Cadavres. Dans cet Embryon le petit tronc de FArtere émulgente n'eft, pour ainfi dire, qu'un point ; fi les branches croiflent, tandis que le petit tronc ne croit pas, & fi en mème temps Îes petites parties qui font dans l'angle d’où partent les branches, vont à augmenter, voilà le petit tronc partagé én deux ou trois petits troncs qui auront chacun leur ouverture particuliére dans l’Aorte (Voyés la Fig. 1 o.). Avec le temps, ces deux ou trois petits Principe qui fert à faire en- tendre pou:- quoi il {e trouve de Îa variété dans l'origine & fa diftribution de plufieurs vaiffeaux. troncs pourront devenir fort éloignés les uns des autres, parce que Fefpace 2 qui eft entreux, croîtra à proportion que l'accroiffement de l'Aorte augmentera. On peut aufi com- prendre comment un de ces troncs ou une branche de l'Ar- tere émulgente n’entre pas dans le Rein à l'endroit de Ia fnuofité, & qu'il perce ailleurs Ia fubftance du Reïn. II fe peut faire que la fubftance du Rein fe développe fur le che- min par où cette Artere doit entrer, & alors cette Artere aura dans le Rein une entrée plus haute ou plus baffe qu'à l'ordinaire, Pour l'ordinaire, lAorte dans fa crofie fournit un tronc commun pour la Soûclaviére & la Carotide droites ; elle donne enfuite la Carotide gauche, & enfin la Soûclaviére gauche. Quelquefois la Carotide & la Soûclaviére du côté droit ont chacune une origine diftinguée. Le principe que je viens d'établir, peut encore être ici appliqué, & il fournit a raifon de cette variété. En effet, il eft aifé de concevoir que fi dans l’'Embrion le tronc commun de fa Carotide & de la Soüclaviére droites manque à fe développer, tandis que l'une & l'autre de ces Arteres prennent leur accroifie- ment, elles paroïtront par la fuite partir immédiatement & chacune féparément, de ja courbüre de l'Aorte. Si fa petite 384 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE portion d’Aorte qui eft entre la Carotide gauche & le tronc commun dé la Carotide & de la Soûclaviére droites, ne croît pas, il n'y aura qu'un tronc pour la Soûclaviére droite & les deux Carotides, c'eft cé qu'on trouve aufli quelquefois. On peut faire l'application du mème principe à l'égard des petits troncs qui fortent de l’Artere iliaque interne dans lefquels on rencontre beaucoup de variétés : on verra faci- lement qu'il peut y en avoir, car ce font cinq ou fix petits troncs qui partent de F'iliaque interne dans un efpace qui, dans adulte, n’a qu'environ un pouce d'étenduë ; ainfi ces tits troncs étant placés, pour ainfi dire, lun fur l'autre dans l'Embryon, la moindre variété dans le développement produit de la variété dans leur arrangement & leur diflri- bution. MEMOIRE Mem. de lacad.1740. pt26.pag. 384. \N NN K I À NS 4 | Mem.de l'Acad.:740. pli17. pag.384. Fi &. ï & 1 4 } ÿ Jimonneau Sup. LU DES SCIENCES. 385$ «MEMOIRE Sur les Inftruments qui font propres aux Expériences de l'Air. N Par M. l'Abbé NOLLET. N eft encore dans l'ufage de nommer indiftinétement Machine Pneumatique , cette efpece de Pompe dont on fe fert ordinairement pour raréfier l'air d’un vaifleau. Elle a pu jouir de cette prérogative tant qu’elle a été le feul inflru- ment employé pour découvrir les propriétés de ce fluide ; mais pr éfentement que la Phyfique expérimentale en a d'au- tres qui partagent le même objet, & qui lui font efpérer des —. découvertes dont on ne prévoit ni le nombre, ni toute l'im- portance, il m'a paru qu’on devoit rendre à la fignification du nom, toute l'étenduë de fon étymologie ; a pourquoi —. dans le titre de ce Mémoire, j'ai prétendu comprendre non … feulement les Machines vulgairement appellées du Vuide, … mais encore celles de Compreflion, & généralement tout ce qui fert d'affortiment aux unes & aux autres, ou qui s’em- - ploye fans elles, aux expériences fur l'Air. Mais comme le —. Vuide eft le premier moyen qu'on ait mis en ufage dans … les expériences de ce genre, & qui ait fait le plus d'honneur — à ceux qui les ont tentées, je donnerai auffi le premier rang à l'inftrument dont ils fe font fervis. Je traiterai d'abord de A la Machine Pneumatique de raréfaction, que je nommerai il fi nn | indifféremment Machine Pneumatique, où Pompe du Vuide, dans le fens de Boyle & de tous les Phyficiens, c’eft-à-dire, “fans prétendre qu'avec cet inftrument on parvienne à éva- “cuer un vaifleau de toute matiére, m..… La fameufe expérience que fit Toricelli en 1643, a {à Mcleus toutes celles qu'on a faites depuis fur Ja Pefan- “ur, fur l'Elafticité & fur les autres propriétés de l'Air, Mem, Rare Uiec 386 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Juiqu'à cette époque, tout ce qu’on avoit foümis à l'expé- rience, avoit toüjours été examiné dans ce même fluide dans lequel fe trouvent naturellement plongés tous les corps qui {ont en notre difpofition ; on ignoroit que cette matiére ambiante püt agir fur eux & en eux, parce qu'on n'avoit jamais eu occafion de la voir cefier d'agir, ou plütôt parce que lon n'avoit point pris pour un défaut d'aétion de fa part, ce qui l'étoit en effet, il falloit au moins s’en douter; mais Fhorreur du Vuide univerfellement reçüë alors comme bien d’autres chimeres, en empêcha long-temps. Une caufe qué l’on foupçonne, fe manifefle par fes effets, foit que l'on fufpende, où que l'on excede fa puiflance ; une petite co- lomne de Mercure, fixée à 27 pouces + dans un Tube plus lonc, fit enfin un & autre, elle indiqua clairement la pefanteur de Fair, elle fit connoître les effets qu'on devoit lui attribuer, en donnant la jufte valeur de fon poids, & en laiffant au-deflus d'elle un efpace où il n'avoit aucun accès, elle mit à portée de fçavoir ce que l'air avoit coûtume d'y faire, en faifant remarquer ce qu'il ne faifoit plus. Ce premier Vuide opéré par l’abaiflement d'une colomne de Mercure, qui fe met en équilibre avec le poids de l'Air extérieur, a été fa premiére Machine Pneumatique en ufage. Les Philofophes de Florence n’en ont point employé d’autres pour faire un aflés grand nombre d'expériences très-fubtiles, & qui font d'autant plus valoir leur fagacité, qu'ils ont pra- tiqué des moyens très-nouveaux & peu commodes. Ils ont ingénieufement fuppléé au défaut de capacité d'un Tube par un renflement fait à la hauteur du Vuide, & cette efpece de Récipient qui pouvoit s'ouvrir & fe fermer par le haut, admettoit des corps d’un aflés grand volume. Si ces laborieux Sçavants avoient été un peu plus familiers dans un genre d'étude qui ne faifoit que de maitre, & dont leur Académie de] Cimento, a été, pour ainfi dire, le berceau, ils auroient fans doute apperçû ce qui rendoit leurs expériences défe&tueufes, & peut-être y auroient-ils remédié. © Lorfque pour emplir un vaifieau femblable au leur, on fe LE Sp à Æ DAESSN AS VCHL.E (NI QE: !S: 387 contente d'y faire couler du Mercure, il y demeure beaucoup d'air adhérent aux parois du vafe, il en refte encore dans la mafle même de la matiére qui le remplit, & lorfque Le vuide fe fait au-deflus de la furface du liquide, cet air qui n'eft plus contenu par le poids de l'atmofphere, fe dégage & f répand dans le lieu même d’où l’on a prétendu l'exclurre, Cet accident qui eft prefqu’inévitable, fi 'on'n'apporte pas certaines précautions qu'on ne voit pas qu'ils ayent prifes, a fouvent fait échouer leurs expériences, & la nouveauté des faits leur a fait prendre le change fur la véritable caufe. Quoique le Vuide de Toricelli ait été le principal inftru- ment des Académiciens de Florence, il paroït par le détail imprimé de leurs Expériences, qu'ils n'ont point ignoré qu’on pouvoit raréfier l'air ou le condenfer dans un vaifleau par le moyen d’une Pompe ; ils en ont fait ufage en plus d’une occafion, mais on ne voit pas qu’ils {e foient propofé, comme a fait depuis Othon de Guéricke, d'en faire un inf trument généralement applicable à diverfes expériences du Vuide. C'eft donc, felon l'opinion commune, & fi fon en juge par les dates, à cet ingénieux Magiftrat de Magdebourg que nous devons la premiére invention des Pompes Pneu- matiques, dont Boyle fit dans le temps un fi fréquent & fr bon ufage, & qu'il a tellement perfeétionnées, que bien des gens l'en ont cru l'inventeur. On pourroit en effet lui en attribuer l'honneur, fi lon confidere la différence qui fe trouve entre fa Pompe du Vuide & celle qui la précédée de quelques années. Elle avoit des propriétés qui la rendoient d'un ufage plus prompt, plus für & plus étendu ; elle n’étoit cependant pas fans défauts, elle en avoit même d’effentiels, puifque, felon le propre aveu de fon Auteur, le Récipient ne pouvoit être évacué que rare- ment , difficilement, & qu'il ne tenoit jamais contre les efforts de l'air extérieur qu'il laïfloit rentrer en peu de temps. Elle ne jouifloit pas non plus des commodités qu'elle a re- çüës depuis, d’une Platine qui fervit fucceffivement de bafe à différents vaifleaux, d'un Cuir mouillé qui épargnät la Ccci 388 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE peine de les cimenter, d’une Clef au Robinet qui fit l'office de Soupape, &c. mais elle faifoit ce que celle d'Othon ne pouvoit pas faire, elle promettoit davantage encore, & elle touchoit de plus près qu’elle au point de perfection qu'on lui a procuré depuis. Cette Machine a eu le fort de toutes celles dont l'utilité eft une fois reconnuë. Chacun s'eft fait honneur d'y mettre du fien, & n’a point manqué de motiver fes changements ‘ou fes additions par quelqu'avantage nouveau. Elle a pris en divers temps & en divers lieux des formes & des fituations différentes. En Allemagne on a placé le corps de la Pompe prefque horifontalement, pour avoir lieu de lui donner plus de capacité par fa longueur. On verra par la fuite de ce Mémoire que cette dimenfion eft bornée, quand on s'en tient à la pofition verticale, & que le motif que je viens d’alléguer, eft vraifemblablement ce qui a déterminé à lui en donner une autre. En Angleterre on a compofé la même Machine de deux corps de Pompes pour gagner du temps par le mouvement alternatif des deux Piftons, & pour mettre un plus grand nombre de perfonnes à portée de s'en fervir, par une façon de la mouvoir, plus prompte & plus com- mode. En Hollande elle eft dans un état qui n’eft pas moins éloigné de fa premiére fimplicité, mais il faut convenir que le fçavant & ingénieux M. s'Gravefande lui a rendu à Leyde toute l'exactitude qu’elle avoit perduë à Londres. En France & en Italie on lui a toûjours confervé fon ancienne forme; ce qu'on y a changé, ne regarde que les proportions des parties, la maniére de la manœuvrer, la folidité, ou les ornements. J'avouë que la difette d'ouvriers, leur peu de connoïflance ou d'émulation pour les Inftruments dePhyfique, a peut-être contribué à nous conferver la Machine du Vuide dans un état fort approchant de fa premiére origine ; peut-être s'en froit-on écarté, comme ailleurs, par différentes routes, fi l'on n’eût point été réduit pendant un aflés long temps à confier l'exécution de fes idées aux mains d’un Emaiïlleur, DEL S TÉNACNIE LE ANT © Er $ 389 plus propres aux ouvrages de fa profeflion qu'à manier {a Lime & le Cifeau, mais on ne doit point refufer de croire auffi que le difcernement y eft entré pour beaucoup. Si lœconomie ou quelqu'autre raifon a confervé conftamment la Machine fimple entre les mains de plufieurs perfonnes, la curiofité, le defir du plus parfait, en ont introduit de plus compofées en France, dans des Cabinets où l’on fçavoit en juger, & dans lefquels on s’eft repenti de les avoir admifes, Je ne ferois pas en peine de juflifier le jugement defavan- tageux qu'on en a porté, & de prouver que de toutes les Pompes Pneumatiques, celle qui eft la plus capable d’exatti- tude, la plus propre à réunir toutes les propriétés qu'il lui convient d'avoir, c'eft celle qui a le moins perdu de fa premiére fimplicité ; elle a cela de commun avec un inftru- ment qui lui eft contemporain, je veux dire le Barometre, qui après avoir reçù fous divers prétextes, un grand nombre de formes différentes, reprend enfin chés les vrais connoif feurs, celle qu'il avoit en fortant des mains de Toricelli. Ce que j'ai déja dit & prouvé ailleurs en général pour tous les inftruments de Phyfique, je le répéte ici pour la Ma- chine du Vuide en particulier. IL eft à fouhaiter qu’elle puiffe être fimple dans fa conftruétion, facile dans fon entretien, exacte dans fes effets, commode dans ufage, applicable à un grand nombre d'opérations, & d’un prix modéré. Je ne doute point que ceux qui fe font appliqués à conf- truire ou à perfectionner ces fortes de Machines, ne fe foient propolé de leur donner toutes ces qualités. Les unes font indifpenfables, & n’ont pu échapper à leurs vûës ; les autres font avantageufes, & lon doit préfumer que s'ils ont tra- ‘ vaillé avec intelligence, ils ont tâché de réunir le nécefaire & l'utile ; mais il eft aifé de voir par les defcriptions que nous en avons, & encore mieux par l'ufage, que leurs in- tentions n'ont point toùjours été remplies. La premiére de toutes, felon l'ordre des temps, celle d'Othon de Guericke, dont on trouve la defcription dans un Traité imprimé en Latin fous le titre de nt Experimenta cc iij 90 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE Magdeburgica de Vacuo € Spatio, avoit fans doute a pre- miére, la feconde & la derniére des qualités que je viens d’énoncer. Sa conftruction peu compofée ne demandoit ni trop d'induflrie de la part de F'Artifte, ni trop de dépenfe de la part de celui qui la faifoit conftruire, quand il vouloit fupprimer tout fuperflus ; mais elle étoit embarraflante, elle ne faifoit que très-imparfaitement ce qu’on exigeoit d'elle, & fon fervice étoit borné à peu d'expériences. Ces repro- ches font fondés fur la nature même de fa conftruction, & fur les aveux de fon Auteur. Mais c’eft une chofe fort ordi- naire, que celui qui a la gloire de l'invention, n'a point l'honneur de perfectionner. Ces deux derniéres imperfections, je veux dire celle de ne pouvoir être manœuvrée qu'avec peine, & par une per- fonne qui en a l'habitude, & celle de refufer le fervice dans un grand nombre d’occafions, ont été pendant près d'un Siécle, l’écueil de ceux qui, par des vüës d'œconomie ou autrement, ont craint d'ajoûter à la premiére fimplicité de cette Machine. Si l'on en juge par celle de M. Poliniere, dont on voit la defcription dans fes Expériences phyfiques, on reconnoît aifément qu'il ne pouvoit la manier qu'avec fatigue, & qu’il y avoit grand nombre de cas où elle n'étoit pas fuffifante ; il fçavoit bien cependant que plufieurs per- fonnes, pour mouvoir le Pifton plus facilement, y avoient appliqué un Cric, à limitation de Boyle, mais il penfoit avec raifon, que ce remede avoit l'incommodité de fa len- teur, qu'il caufoit de l'embarras, qu'il ajoûtoit aflés confidé- rablement à la dépenfe, & qu'en l'employant, c'étoit changer une imperfection contre une autre; mais il a dû fentir par fes propres befoins, que le Vuide feroit d’un ufage beaucoup plus étendu, fi l'on pouvoit y tranfmettre des mouvements pour remuer à fon gré les corps qu'on y auroit une fois renfermés : c'eft un avantage que Boyle même s’étoit propolé, & lon ne peut difconvenir que ce qu'il a fait pour fe le procurer, quoiqu'inférieur à ce qu’on a imaginé depuis, n'en . doive être regardé au moins comme le prélude. D\E\S, IS CURE IN GÆ 391 La Pompe dont on fe fert communément en Allemagne, fe trouve décrite dans les Eléments de Phyfique de M. Techmeïere, Profeffeur à Jene. On voit par la Figure qu'il en donne, & par tout ce qu'il en dit à la page 135, qu'elle differe de la Machine fimple ordinaire par fa fituation, par fes dimenfions & par fa monture; mais quand j'aurai établi les Principes & les Régles qu'on doit avoir en vûüë dans la conftruction de cet inflrument, je crois que l’on conviendra que la Machine du Vuide a prefqu'autant perdu que gagné aux changements qu’elle a reçüs dans fa patrie. Je ne mettrai point au nombre des Machines fimples, celle que l’on trouve décrite fous ce nom, dans une Brochure in-quarto imprimée d'abord en Hollandois, par les foins de M. Jean van Mufichenbroeck, & qui a été traduite depuis en François à la fin des Eflais de Phyfique de M. Pierre van Mufichenbroeck fon frere. Je crois qu’à l'infpection feule de la Figure qui la repréfente, tout le monde penfera comme moi, qu'elle ne doit porter le titre de fimple, que parce qu'elle n'a qu'un corps de Pompe, & qu'à plufeurs égards les autres Machines du Vuide qui ont cela de commun avec elle, lui doivent être préférées. M. Hauxbée paroît être le premier qui ait fait fervir deux corps de Pompe à une même Machine ; il eft aifé d’apper- cevoir le motif qui l’a conduit à cette invention, c'étoit fans doute pour gagner du temps par le mouvement alternatif des Piftons, comme nous l'avons déja dit, & pour fubftituer d'une maniére moins embarraffante qu'on n’avoit fait jufqu'a- lors, l'action d’un Levier en forme de Manivelle, à celle du Pied fur un Etrier, qui n’a qu'une demi-commodité, s’il faut que le même Pied remonte le Pifton qu'il a fait defcendre, comme nous le ferons voir. Mais comme il faut toûjours que la communication des Pompes au Récipient, s'ouvre & fe ferme à propos, tandis que les Piftons defcendent & re- montent , & que mener alternativement à la main des Ro- binets, comme celui de Ja Machine fimple, c'eût été chofe difficile, peu commode & qui eût fait perdre tout le temps 392 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qu'on fe propofoit de gagner , l'inventeur a eu recours à des Soupapes, qui n'ont point remplacé par l'exactitude le fervice du Robinet, & qui ne permettoient pas une évacua- tion d'air auffi parfaite, parce qu’elles s’oppofoient à fon pañlage du Récipient dans la Pompe, lorfqu'il commençoit à n'avoir plus la force de les foülever, & cette force lui man- quoit bien avant qu'il parvint à fes derniers degrés de raré- faction ; de forte que le tout enfemble faifoit un inftrument difficile à conftruire, d’un entretien fréquent, & peu com- mode, qui ne faifoit qu'un Vuide bien imparfait, & qui coû- toit trois ou quatre fois autant que les Machines ordinaires. M. Defaguilliers, connu par fes ouvrages & par les cours de Phyfique expérimentale qu'il fait à Londres, peu fatis- fait de ces Soupapes trop compolées & trop pefantes, les a changées contre de petites bandes de Veflie fort minces, que tout le monde eft en état de renouveller, & qui font beaucoup mieux ; il a d'ailleurs changé toute la difpofition de l'inftrument, & Fa rendu plus fimple, plus commode & moins coûteux. Cependant cet habile Phyficien, malgré toutes ces corrections, convient ingénuement qu'une pareille Pompe Pneumatique eft plus propre à répéter des expé- riences communés dans une Leçon publique, qu'à en eflayer de nouvelles dans le Cabinet. Je fçais de lui-même qu'il donne la préférence à celle de M. s Gravefande, célébre Profefleur de Mathématique à Leyde, qui a ingénieufement remplacé les Soupapes par des Robinets qui fe meuvent quand il le faut, par la même aétion qui fait monter & defcendre les Piftons ; on en trouve la Figure & une courte defcription dans un de fes ouvrages, qui a pour titre Phyfices Elementa Mathematica , & à la fin des Eflais de Phyfique que j'ai déja cités ci-deflus. En effet, il fuffit de connoître cette Machine, & de fça- voir qu'elle eft exécutée par M. Jean van Mufichenbroeck, dont les lumiéres & l’induftrie furpañlent de beaucoup celles d'un ouvrier, pour convenir qu'elle peut égaler en exactitude la Machine du Vuide la plus fimple, & qu'elle furpafie celles qui DES SCIENCES. 392 qui ont été connuës jufqu'ici, par la facilité avec laquelle elfe fe meut, & par l'étenduë de fes ufages ; mais on ne peut difimuler aufli, qu'étant compofée d’un grand nombre de piéces, la plüpart jointes avec des Cuirs, elle exige des foins &c de l’adrefle dans celui qui doit s’en fervir, & par la même raifon elle eft d’un prix auquel bien des Particuliers ne peu- vent atteindre fans s’incommoder. D'un autre côté, la Machine la plus fimple, telle que celle dont s’eft fervi M. Poliniére, eft exacte dans fes effets, peu coûteufe & d’un entretien affés facile, mais elle eft d'un fervice plus borné, & elle fe manœuvre difficilement. Ne pourroit-on pas faire en forte, ou que la Machine fimple, en confervant les avantages qu'elle a für la double, acquit encore ceux qui lui manquent, ou que la Pompe double fe réduisit à une conftruétion aflés peu compolée, pour n'avoir pas befoin de réparations fréquentes & difficiles, & pour ne pas excéder un prix médiocre? H ya plus de fix ans que je me fuis fait cette double queftion, & que je me fuis propolé ces deux objets. Je crois avoir rempli le premier, en perfeétionnant les parties déja connuës de la Machine du Vuide à un feul corps de Pompe, & en y faifant quelques additions qui font d’une légere dé- penfe. Je viens de fatisfaire au dernier, en faifant conftruire une Machine à double Pompe, dont le #rix peut ne point excéder 300 livres, fi l’on fupprime les ornements fuperflus, & que toute perfonne peut aifément méttre en ufage, fans être aflujettie à aucun autre foin qu'à celui de graifler de temps en temps les Piftons &:les Robinets. . | De pareilles vüës m'ont conduit dans la recherche que J'ai faite des Machines qui aflortiffent la Pompe du Vuide, & fans lefquelles elle feroit d’un ufage bien borné. J'ai tâché de les réduire au plus fimple, fans rien rabbattre de la folidité, de l'exactitude ou de l'étenduë de leurs ufages. La defcription que j'en donnerai, fera voir qu'à l’aide d'un tel aflortiment, un Phyficien peut très-commodément raréfier l'air dans un degré, connu , faire paffer des corps du plein dans le vuide Mem. 1740, . Ddd 394 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE en moins d’une feconde, y tranfmettre des mouvements avec telle direction & telle vitefle qu'il voudra, y conferver le feu très-violent affés de temps pour lappliquer fans air aux matiéres combuftibles, &c. Mais s’il eft utile à la Phyfique d’avoir des inftruments par le moyen defquels elle puiffe éprouver les corps dans le Vuide, il ne lui feroit pas moins avantageux d'en avoir auffi avec lefquels elle pût commodément faire des expériences dans un air fortement condenfé. Ceux-ci promettent autant que les premiers, & s'ils ont moins fourni de faits remar- quables jufqu'ici, c’eft peut-être qu'il eft plus difficile de leur donner les qualités qu'ils doivent avoir. Cette confidération m'a fait naître l’idée d’une nouvelle Pompe de Compreffion qui eft d’un ufage très-commode, & que l’on peut appliquer à toutes les épreuves qui fe font avec la Machine du Vuide la mieux aflortie. Je la décrirai dans ce Mémoire ; & pour y comprendre tout ce qui concerne les inftruments de Pneu- matie, j'ajoûterai la defcription & les ufages de quelques Ma- chines qui font agir l'air comprimé, d'une maniére curieule, & qui fervent à prouver fon élafticité. Je diviferai ce Mémoire en quatre Parties. Dans la pre- miére, je traiterai de la Machine Pneumatique fimple. Je décrirai dans la feconde une Machine de la même efpece, que j'ai fait conftruire avec deux corps de Pompe. La troifiéme Partie comprendra tout ce qui fert d’aflor- timent aux deux Machines précédentes. Enfin, dans la quatriéme Partie, je parlerai des Machines Pneumatiques de compreffion, & de quelques Inftruments qui ont rapport aux expériences fur l'Air. PRE de #; z AA Len À Me 7e F< DES SCIENCES. 395$ PREMIERE PARTIE. DE LA MACHINE PNEUMATIQUE DE RARE FACTION, COMPOSE'E D'UN SEUL CORPS DE POMPE. CE qui a décrédité en quelques endroits la Machine Pneumatique fimple, c’eft fans doute la difficulté de s’en fervir; la force qu’il falloit employer pour la mettre en mouvement quand elle étoit exacte, ou le peu de juftefie qu'elle offroit quand on retranchoit une partie des frottements par une moindre preffion du Pifton dans le Cylindre, en a dégoüté ceux qui fe propofoient de travailler en même temps avec facilité & avec exactitude, & leur a fait donner la préférence aux doubles Pompes où le jeu des Manivelles a paru d'un ufage plus facile & moins redevable à l'habitude. Mais fi les Machines Pneumatiques fimples ont des avan- tages réels & confidérables qu’on réunit difficilement dans les autres, fi lorfqu'on les compare avec les doubles, elles les égalent ou les furpañfent à plufieurs égards, & que 1a comparaifon ne leur foit defavantageufe que par la mobilité du Pifton, eft-ce donc un mal fans remede? Ne pourroit-on pas leur épargner ce reproche, en proportionnant le Cylindre mieux qu'on n’a fait par le paflé, en employant, pour faire le Pifton, des matiéres plus propres à diminuer la preflion, fans rien relâcher de l'exactitude, en appliquant plus com- modément Îa force motrice, & en fupprimant certaines réfiftances qu'on a admifes à pure perte? C’eft à quoi j'ai penfé lorfque je me fuis vû engagé dans une profeffion qui me rend l'ufage de cet Inftrument auffi fréquent que néceffaire. Les corrections & les additions que j'y ai faites, m'ont aflés bien réufli pour me faire croire qu’elles pourroient être utiles à d'autres, & c'eft pour les faire connoître que j'ai entrepris de décrire la Machine Pneumatique fimple dont je me fers ordinairement. Ddd i 396 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Cette Machine a cinq parties principales, une Pompe, un Canal garni d'un Robinet, une Platine qui fert de bafe à différents Récipients, un Pied fur lequel elle eft montée, & un Roüet pour les expériences de mouvement rapide. DE LA; POMPE, La Pompe eft la piéce principale de F'Inftrument, elle à, comme toutes les Machines de cette efpece, deux parties dont l'une eft fixe, & l’autre mobile ; la premiére eft un Cylindre creux qui fe vuide par un côté pour fe remplir par l'autre; la feconde eft un Pifton qui en remplit exaéte- ment une portion, & qui peut le parcourir felon toute fa longueur. Du Cylindre. L'objet principal qu’on fe doit propofer en conftruifant le corps de la Pompe, eft de lui donner intérieurement une figure parfaitement cylindrique, & une furface bien polie; car on conçoit aifément que l’une ou l'autre de ces deux qualités venant à manquer, le Pifton ne remplira pas toù- jours exaétement la partie où il fe trouvera, & qu'il laiflera rentrer l'air dans celle où il doit occafionner le vuide. Mais ce n’eft point affés de lui donner la perfeétion qu'il doit avoir, il faut la lui rendre affés durable pour n'être point expolé à perdre le fruit de fon travail au moindre accident; c'eft pour cela que je fais ma Pompe de Cuivre, qui eft une matiére folide, & que je lui donne une fituation verticale qui partage également les frottements à toute la furface. C’eft une mauvaife œconomie de la faire d'Etain, ceux qui s'en font fervis, n’ont point eu lieu de s’en louer: s'ils ont employé une matiére moins coùteufe que la fonte, elle étoit aufli moins capable de garder fa forme, il a toüjours fallu fe procurer la folidité néceffaire, par une plus grande épaiffeur, & par conféquent par une augmentation de poids, & quand on ne l'a point fait, on s'eft impofé bien des foins qui n'ont pas toüjours été fuffifants. DES SCTENCE.S. 97 De quelque matiére que puifle être le corps de Pompe, il ne confervera conflamment fa figure intérieure que dans une pofition verticale, puifqu'il n’y a que dans celle-là où le Pifton frotte également toutes les parties de la furface; dans toute autre, fon poids le porte tout d’un côté} le frotte ment devient plus fort en cette partie, &:par fucceflion de temps le Cylindre change fa rondeur en ovale : cette feule raifon fufht pour faire voir que la Pompe Pneumatique a reçû dès fa naiflance la fituation la plus avantageufe qu'elle püt avoir, & qu'on ne peut la lui Ôter fans lui faire tort. Je me fuis donc déterminé par les motifs dont je viens de rendre compte, à placer verticalement un Cylindre creux fait de cuivre, & je préfére le cuivre qui eft fondu, parce que plufieurs épreuves m'ont fait connoître que cette voye étoit plus facile, plus prompte & moins difpendieufe, que de faire battre & fouder du laton. I faut faire tourner un modéle de bois pour le fondeur , mais on voit bien que pour être en état de le préparer, il faut néceflairement avoir pris fon parti fur les dimenfions.de la Pompe, & pour les régler avec intelligence, il faut avoir égard à plufieurs chofes. Si l'on pouvoit d'un feul coup de Pifton raréfier l'air au- tant qu'il peut l'être, ce feroit fans doute tout ce qu’on pourroit faire de mieux; mais il faudroit pour cela que {a Pompe fût infiniment grande, rélativement au Récipient, puifqu'après chaque coup de Pifton, l'air fe trouve raréfié fuivant le rapport de leurs capacités. Si l'on ne doit pas pré- tendre à linfmi, il faut au moins, conféquemment au prin- cipe, & par d'autres raifons que nous alléguerons dans la fuite de ce Mémoire, conferver à la Pompe la plus grande capacité qu'il fera poflible, elle aura fans doute fes bornes, &: nous allons voir d'où elles dépendent. : Dans la fituation verticale à laquelle j'accorde Ia préfé- rence, il n'eft guére poffible de: donner au corps de Pompe plus de 14 ou 15 pouces de longueur ; car de quelque maniére qu'on faffe mouvoir le Pifton, il faut toûjours que fon manche ou fa queuë forte du Cylindre, ce qui fait au D dd ii 398 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE moins 36 pouces de hauteur, à caufe de la partie où doit être appliquée la force motrice. Si l'on ajoûte à cela une diftance de $ ou 6 pouces qu'il faut entre la Platine & la Pompe pour placer le Robinet & fon Canal, le tout enfemble élevera le Récipient environ à 3 pieds+, & c’eft à peu-près la hauteur convenable pour voir commodément ce qui fe pañe dans le Vuide. : Il eft vrai qu'on pourroit procurer à Ia Pompe une plus grande longueur dans la pofition verticale, en la retournant: de haut en bas, mais il faudroit pour cela facrifier bien des avantages qui ne feroient pas compenfés par celui qui réful- teroit de cette pofition. La longueur étant donc limitée à 1 4 pouces environ, ce n'eft plus que par fa largeur qu'on peut fonger à lui donner: de la capacité; mais cette largeur elle-même a fes bornes, fr l'on fait attention à la nature des réfiftances qu'il faut vaincre, aux forces &c au temps qu'on veut employer. Une Machine Pneumatique doit être eftimée commode: dans l'ufage, fi un feul homme de moyenne force peut, fans un grand effort, faire defcendre le Pifton en 2 fecondes. Or. l'expérience apprend qu'un homme qui fait agir le poids de fon corps avec le pied, peut élever à 1 2 pouces en 2 fecondes, plus de 100 livres pefant ; ainfi pour conferver de l'aifance à la Pompe, il fufhra de régler les réfiftances de façon qu'elles n'excedent pas 100 livres. Quand on fait agir le Pifton de la Pompe pour raréfer l'air du Récipient, on a deux fortes de réfiflances à vaincre, l'une ef le poids de l'air extérieur, l'autre eft le frottement. La réfiftance de l'air extérieur eft celle d’un fluide, dont la hauteur eft toûjours cenfée la même, & la plus grande qu'elle puiffe être ; c'eft par la largeur de fa bafe qu'on doit eftimer fon poids, & cette: bafe eft le Pifton. En fuppofant, comme on le fait, qu'une colomne cylin- drique d’air:d'un pouce de diametre, pefe environ 1 2 livres quand elle a toute {a hauteur de l'atmofphere, fi lon fait un Pifton de 2 pouces de diametre, il répondra à une colomne DER SM ASC ALEEN CIE! 1" : 399 dont le poids fera 48 livres, &d'expérience m'a fait connoître qu'on pouvoit laitier croître la réfiftance de d'air jufqu'à 60 livres, en donnant au corps de la Pompe 26 lignes de diaz metre. Eorfque la communication eft ouverte entre la Pompe & le Récipient plein d'une mafle d'air qui n’eft point encore raréfié, & que l'on met la Machine en jeu, la réfiftance dont nous parlons, ne fe fait point fentir d'abord toute entiére : le Pifton fe trouve alors entre deux airs, dont l'un réfifte par fon poids, pendant que l’autre par fon reflort ajoûte à la force motrice ; mais cette puiflance auxiliaire diminuë à chaque coup de Pifton, de maniére que fur la fin elle‘eft prefque nulle: on ne doit donc pas compter fur elle, fi l’on veut être toüjours en état de mouvoir le Pifton facilement, l’on doit proportionner la Machine de façon que l'agent foit toûjours fupérieur en force. Quant à l'autre efpece de réfiflince , il eft affés difficile de déterminer fa jufte valeur par fupputation: on fçait bien en général que le frottement eft d'autant plus grand que les forfaces font plus étenduës , moins polies, plus fortement preflées, & muüës avec plus de viteflé ; mais toutes ces quan- tités ne font jamais connuës comme il faudroit qu'elles le fuffent pour être foûmifes au caleul, c’eft pourquoi je penfé qu'il ef plus facile & plus für de es mefürer par l'expé- riencé!, après avoir réduit chacune d'elles au degré le plus convenable par les effets. On'ne:rifque point de pécher par excès en poliffant les piéces qui doivent fe frotter mutuel- lement, pourvû que la figure n’y perde rien de ce qui lui ef éffentiel ;mais il n’en éft-pas dernème durrefte, l'étenduë des fürfaces ne peut êtrédiminuée; à Fégard de I Pompe, fans préjudice’ à fa capacité: Cquant- au” Pifton , S'il n’avoit point une longueur fuffifante, il féroit mal fes fonctions, & hous-ferofis voir ailleurs que‘ lé Canal'dh Robinet, où l'air à quelquefois beaucoupdé frottement , éftauffi limité-dans fes dimenfions ; l'exaétitude de la Pompe: &ilà nature: du fluide fur lequel elle eftemployée;1demandent auffr que le 10 à x Ê 400 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Pifton foit aflés ferré dans le Cylindre, & la preffion qui le retient, céderoit à une moindre force, fi lon vouloit agir plus lentemént; mais pour obtenir une vitefle convenable, il faut augmenter la force. J'ai appris par un long ufage, que dans ane Pompe de 26 lignes de diametre, & qui a été faite felon les regles, & avec les foins que je vais prefcrire, le Pifton peut toû- jours vaincre en 2 fecondes au plus le frottement d’un pied de longueur avec 24 livres, ce qui étant ajoûté au poids de la colomne d'air que nous avons évalué Go livres, la fomme des réfiftances dans les temps où elles font tout ce qu'elles peuvent être, fera 84 livres, toüjours inférieure à la puif fance qui doit mettre la Machine en jeu. I fuit donc de ce qui vient d’être établi, que le Cylindre ou corps de Pompe doit avoir 14 pouces de longueur & 26 lignes de diametre intérieur, & qu'on ne peut guére s'écarter de cés dimenfions fans caufer à la Machine quelque imperfection effentielle. On doit prévoir, avant la fonte, de quelle maniére on attachera folidement & commodément la Pompe fur fon Pied ; le degré de folidité doit être tel, qu'un effort de plus de 80 livres en abbaiffant le Pifton , & qu'une action équi- valante à 24 livres, en le relevant, ne puifie pas féparer les piéces, & pour la commodité il convient qu'on puifle le faire fans peine & en peu de temps, quand il eft à propos de graifler le Piflon. Il y a fans doute bien des maniéres de fe procurer ce double avantage ; celle que j'ai choifie, de- mande, 1.° Qu’à 2 pouces environ d’une des extrémités du modéle, on laifle de quoi faire une forte moulure ou un cordon Ÿ, qui ait aù moins 6 lignes de faillie,.& au-déflous une zone Z , d'environ de pouce dedarge, & dont l'épaifleur puifle évaler le relief; dés petites moulures, qui. ornent le refle de la Pompé.i 21° Que la derniéie moulure ‘foit,placée. à la . diffgnce d'uiponce de l'extrémitéducorps.de Pompe., Voyes Puancue, Figure prémiéreedqre 1 525 obebget Le ; 29) 2! Quandion:ahunresñom de-euivres fortant.de la fonte; itel qu'on DES SCIENCES. 401 w’on la defiré, c’eft-à-dire, fans trous, fans fouflüres confidé- rables, & d’une épaiffeur à peu-près uniforme dans les parties femblables. La premiére chofe à laquelle on doit penfer, c’eft à rendre le dedans parfaitement cylindrique; & comme les inftruments dont on fe fert d'ordinaire pour alaifer les corps de Pompe, laifient prefque toûjours des fillons cireu- hires qui augmentent beaucoup le frottement du Pifton, on fera bien de les effacer autant qu’on le pourra, fans préjudi- cier à la forme cylindrique qu'il eft effentiel de conferver. Quant à l'extérieur du Cylindre, on pourra le tourner & le polir felon fon goût, mais il ne faut point oublier de bien drefler l'extrémité fupérieure, afin que le plan de la piéce qui doit s'établir deffus pour lui fervir de fond, fe trouve par- faitement perpendiculaire à l'axe. | Cette piéce eft une efpece de couvercle de cuivre, qui doit emboïîter le haut de la Pompe, & qui doit y être for- tement & exactement fixé avec la foudure d'étain. Quelque figure qu’on lui donne au dehors, on doit lui conferver un quarré large & épais À, B, (Fi. 2.) pour recevoir des Vis longues de 3 ou 4 lignes. La partie C doit être bien plane; fon épaifleur doit être de 3 lignes au moins, & percée d’un trou large de 4 lignes & tarraudé pour recevoir le Canal du Robinet. Une attention qu’il faut avoir fur-tout, c’eft que le fond intérieur foit bien droit, afin que le plan fupérieur du Pifton le touche exactement dans toute fon étenduë, autrement il y refteroit de l'air non raréfié, & nous dirons ailleurs de quelle importance il eft qu'il y en ait très-peu ou point. Quand on aura foudé ce couvercle au corps de la Pompe, & qu’on aura Ôté le fuperflu de la foudure , on pourra s'aflürer de l'exactitude avec laquelle ces deux piéces font jointes, fr après avoir bien bouché le trou €, on y jette de l’eau bouillante, & qu’on la comprime fortement avec Ie Pifton quand elle fera un peu refroidie; cette double épreuve eft néceflaire, car fouvent la réfine dont on fe fert pour faire prendre la foudure d’étain, cache des défauts que la chaleur Mem. 174 0% . Ece 402 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de l'eau découvrira en la faifant fondre ; & fi ces défeétuo= fités étoient affés peu ouvertes pour réfifler à la preffiom d’une colomne d’eau trop légere, en appuyant avec le Piflon on peut la rendre équivalente ou fupérieure au poids de Yatmofphere, à l'effort duquel la Machine doit être foûmife dans fes ufages ; mais on ne pourra fatisfaire à cet article que quand on aura fait le Piflon, qui eft la feconde partie de la Pompe. © Du Piflon. Les deux qualités eflentielles du Pifion d'une Machine Pneumatique, c'eft qu'il foit exaét & facile à mouvoir ; fr la premiére manque, toute la Pompe devient prefqu’inutile, & fans la feconde elle eft impraticable pour la plüpart de ceux qui en ont le plus de befoin. Son exactitude doit être telle, qu'en commençant à agir, il ne laifle point d'air entre fon dernier plan & le fond de la Pompe, & qu’en continuant de fe mouvoir , il ne donne aucun accès à celui du dehors : fa mobilité eft bornée par un degré de preflion néceffaire, mais on doit concilier les chofes de façon qu’on n’accorde point trop au frottement, afin de conferver dans le mouve- ment une aifance fuffhfante. Ces deux conditions ont été rarement remplies en même temps par ceux qui jufqu'ici fe font appliqués à conftruire des Pompes Pneumatiques : les uns ne les. deftinant qu’à répéter des expériences communes dans les Colléges, ont regardé comme la chofe la plus effentielle, que le Pifton püt def cendre & remonter en peu de temps par la feule aétion du pied ; les autres exigeant d'elles un fervice moins négligé, ont augmenté le frottement, & fe font trouvés contraints de les mettre en jeu avec des Crics ou avec des Leviers, & d’en rendre la manœuvre incommode, plus lente, fouvent mal- propre & embarraffante par des Cuvettes remplies d'eau qui fuivoient le Pifton , pour fuppléer à fes fréquentes défe&uo- fités ; remedes ingénieux , mais dont il eft agréable de pou- voir fe paffer. DES ASIQIT EN c'e s. 40 On le peut aflürément, fi l'on eft plus attentif aux di- menfions & à la forme qu'il faut donner au Pifton , & Î on employe pour le conftruire, des matiéres plus convenables que celles dont on s’eft fervi par le pañlé. Il ne paroît pas qu'on ait fait beaucoup d'attention au dernier plan du Piflon, & qu'on ait pris foin de lui faire toucher exaétement & dans toute fon étenduë le fond de la Pompe ; cependant fans cette précaution, on ne fait point le vuide quand on croit le faire, l'air qui étoit entre ces deux parties mal jointes, fe raréfie alors & fe partage entre la Pompe & le Récipient en raifon des capacités ; c’eft ce qui fait qu’en pareil cas, fur-tout après que l'air a été raréfié dans le vaifleau, on apperçoit chaque fois qu'on ouvre la communication, un foufHe chargé de vapeurs, qui y rentre avec violence. La longueur du Pifton contribuë auffi à fon -exactitude, mais celle qui fufhroit, sil étoit toüjours mené felon l'axe de la Pompe, devient quelquefois infufffante, quand il n’eft pas dirigé de même. C'eft le cas où il s'eft , trouvé toutes les fois que l'action du moteur étoit oblique à fa direction, & qu'on n'y a pas remédié par des guides. On à fait premiérement & le plus ordinairement les Pif tons avec du Chanvre ou avec du Lin , Mais cette maticre qui fe pourrit en peu de temps dans l'humidité, perd bien-tôt fon reflort, & demande de fréquentes réparations. Cette confidération les a fait abandonner par plufieurs perfonnes qui leur ont-fubftitué un aflemblage alternatif de Rondelles de cuir de vache & de chapeau enfilées fur un axe commun, & ferrées plus ou moins entre deux oreilles de métal par le moyen d'un Ecrou. Ce Pifton eft fans doute plus durable que le premier, mais n'ayant point affés de reflort, il ne devient exaét que par une preffion confidérable qui augmente beau- coup fon frottement, il convient mieux aux Pompes à l’eau, dont il a été emprunté ; la denfité du Fluide permet de re- lâcher quelque chofe de la preflion, mais pour les Machines Pneumatiques il faut quelque chofe de plus flexible. Rien, que je fçache, n'a mieux réufli jufqu'à préfent, qu'un ee" 404 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Pifton de Liége couvert d’un Cuir de Veau bien graiflé, On trouve du Liége flexible à toutes fortes de degrés, & je fçais par un long ufage, qu’il conferve long-temps fon élafticité, qu'il n’eft point pénétrable comme les autres bois, & que s'il admet quelque fluide dans fes pores, fon volume & fa figure n’en reçoivent aucun changement notable. En ufant du fond de cette pratique, chacun peut former des Piftons comme il lui plaira ; pour moi, voici de quelle maniére je m'en fers pour la Machine Pneumatique fimple. DE (Pig. 3.) eft une Tige de fer arrondie, de 17 pouces de longueur & de 6 lignes de diametre, ayant un épaulement en D, & en F'une partie applatie, percée de deux trous. Au-deflus de l’épaulement D eft une Tige quarrée, longue de 2 pouc. +, & terminée par une Vis un peu forte. Au-deflous de Æ eft un Etrier d’une forme à peu-près ovale, dont le grand diametre a $ pouces, & le petit feulement trois. Cette piéce peut être arrondie par-tout, excepté la place du pied marquée F, qu'il faut limer plane en-deflus. Sur la Tige quarrée, j'enfile d’abord un morceau de cuir gras qui couvre l'épaulement, & fur lequel j'établis une Rondelle de cuivre fort, dont le diametre eft d'une bonne ligne plus petit que celui de la Pompe ; enfuite je place alternativement trois Rondelles de liége de même largeur que la précédente, &c de 8 lignes d’épaifleur, & trois Cercles de cuir de veau, dont chacun excede fon liége de 6 à 7 lignes tout autour, & enfin je mets fur le tout une autre Rondelle de cuivre fort, dont le diametre eft prefqu'auffi grand que celui de la Pompe, & je la ferre fortement par le moyen d’un Ecrou noyé dans fon épaiffeur, & qui reçoit la Vis qui termine la Tige quarrée. La Figure 4, repréfente une coupe diamétrale de cette derniére Rondelle, & fait voir comment on évite de lui hifler des bords épais pour donner lieu au Pifton de remplir exactement toute fa partie fupérieure de la Pompe ; cela fuppofe que la derniére piéce de liége eft creufée pour la recevoir, comme on le voit par la Figure ——— —————————— DES SCIENCES. 405. L'E'crou qui retient toutes ces-piéces, n'eft rien autre chofe qu'une petite Platine de cuivre tournée d’égale épaif- feur, tarraudée au milieu, & percée de deux petits trous, dans lefquels on engage une Clef où une pince forte pour la tourner fur fa vis. On ne doit point oublier d’enfermer deflous, un morceau de cuir gras, pour empêcher que l'air ne pale à travers le Pifton le long de la Tige quarrée, & quand tout eft ainfi placé, il faut rafer l'excédent de Ia vis, faire en forte que le plan fupérieur du Pifton foit bien droit &. à l'équerre avec fes côtés, & remplir de cire fonduë ce qui pourroit s'y trouver de creux. On doit choifir pour les Platines de Liége, celui qui eft le plus plein, le plus homogene & le plus également flexible, Farrondir felon le file, & rendre les deux plans bien paral- leles entr’eux. Les Cuirs me réuffiffent parfaitement forfque je prends de la peau de Veau bien égale, celle dont on fe fert pour faire les empeignes des Souliers, & que je la trempe dans un mélange de quatre parties d'huile d'Olive & une de fuif de Mouton médiocrement chauffé. Fout étant difpolé pour le Piflon comme on fa dit, il a la forme que repréfente la Figure €, les cuirs excedent le liége parallelement entr'eux ; alors on le force d'entrer dans la Pompe, & les bords excédents fe couchent tous du même fens, comme on le voit dans la Figure 7. Si l'on remarque que les cuirs en s'étendant, tombent plus bas que l'épaifleur du liége deftiné pour chacun d'eux, il faut ôter ce qu'il y a de trop, afin qu'ils ne fe recouvrent pas l'un l'autre, & que le diametre du Pifton demeure le même dans toute fa lon- gueur; on lui fait parcourir ainfi plufieurs fois la longueux de la Pompe, on l'y fait féjourner quelques jours, & quand on 2 lieu de croire qu'il eft bien moulé, il faut fonger à régler fon degré de preflion : on conçoit facilement qu’on le rend plus aifé en diminuant les liéges avec une rape en bois, ou une grofle lime, fans les démonter ; mais fi par hazard on en avoit trop Ôôté, ou qu'un long ufage les eût Eee iij 406 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE rendu plus foibles qu'il ne faut, on peut fans les changer, les ceindre d’une petite bande de cuir de mouton bien égale, Il feroit fort diflicile de déterminer par une Théorie cer- taine, à quel degré le Piflon doit être comprimé par les parois de la Pompe, pour ne pécher ni par excès ni par dé- faut ; l'expérience en pareil cas eft toüjours une voye plus courte & fouvent plus füre: on doit feulement ne jamais perdre de vüë ces deux chefs, qu'il eft avantageux de donner au Pifton toute l'aifance poflible, mais qu'il eft indifpenfable de lui conferver une grande exactitude. On fera affüré qu'il eft exact, lorfque la Pompe étant bien bouchée par le haut, il rémontera entiérement de lui-même après avoir été ab- baiflé. On pourra juger de la facilité qu’il a à fe mouvoir, par le poids &.le temps qu'il faudra employer pour lui faire parcourir toute la Pompe, quand elle fera ouverte en haut, par un petit Canal d'une ligne de diametre & de pouces de longueur, qui repréfentera celui du Robinet. Par un grand nombre d'épreuves femblables, j'ai appris qu'un Pifton fait avec foin & bien fidéle, pouvoit être tiré d’un bout à l’autre de la Pompe en 3 minutes avec fon propre poids & celui de fon Etrier, ce qui fait à peu-près 4 livres, ou en deux fecondes avec 24 livres. Dans les cas où l'on aura tout le poids de l'air extérieur à vaincre pour faire defcendre le Pifton , fi l’on agit en 2 fecondes, les réfiflances feront donc 60 livres de la part de Vatmofphere, & 24 livres de la part des frottements, ce qui fera une fomme de 84 livres; quoique cela paroifle exiger du moteur un effort aflés confidérable, en plaçant YEtrier à une hauteur convenable, un homme d’une taille ordinaire employe avec avantage le poids de fon corps, & ne fe fatigue point trop pour abbaiflér le Pifton ; mais quand on veut le relever en aufli peu de temps, une réfiftance de 24 livres devient pénible, parce que la puiflance qu'on met en œuvre, eft d’une autre nature, & qu’elle eft appliquée d'uné maniére moins commode, {1 l’on continuë de faire agir le pied. PÉEASMUSLCA LE IN: CES. 407 J'ai confidéré que l'effort du bras agiffant comme il a coûtume de faire, quand nous nous baiflons pour élever quelque fardeau, feroit beaucoup plus convenable pour re- monter le Pifton que Faétion du pied; c’eft pourquoi j'ai joint à l'Etrier une branche de fer coudée G, A, (Fig, Fey) dont l'extrémité inférieure 7 s'attache fortement avec deux vis. La tige depuis la patte A jufqu'à la fourchette G, a 10 pouces de longueur, & s'éleve un peu obliquement à {a queuë du Pifton dont elle eft écartée en bas de 2 pouces & en haut de 3. Aux deux tiers de fa longueur cette piéce fe divife en deux branches, dont les deux extrémités font jointes par un manche de bois qui eft environ à 3 pouces de Ia fourchette G. Quand on veut relever lé Pifton, le pied droit, fans fortir de l'Etrier, ne fait que l'entretenir dans la direc- tion perpendiculaire, pendant que la main droite tenant le manche, tire de bas en haut, & que la gauche avec laquelle on s’'appuye fur le Pied de la Machine, la contient immo- bile. Cette invention m'a fi bien réufli, que j'ai fouvent tra- vaillé trois heures de fuite, ce qu'on ne pourroit jamais faire avec le pied feul. Après avoir ainfi partagé avec fuccès entre le pied & le bras, tout le mouvement du Pifton, j'ai fait attention qu’on. pouvoit foulager le bras d’une bonne partie de la réfiftance caufée par le frottement, & ne lui laïffer que peu de chofe à faire, fur-tout vers la fin de fon travail, lorfqu'il eft le plus fatigué. Pour entrer dans ma penfée, il faut fe rappeller ce qui fe paffe dans une Machine Pneumatique à chaque coup de Pifton, foit en le defcendant, foit en le remontant. Quand on a defcendu le Pifton pour raréfier Pair d'un: Récipient, on ferme le Canal du Robinet du côté de ce yaiffeau, pour fe mettre en état de recommencer fans laiffer rentrer l'air qu'on en a fait fortir ; mais les Clefs ordinaires font faites de façon, qu’en fermant cette communication, elles en ouvrent une autre entre l'intérieur de la Pompe & Fair du dehors, qui ne manque pas d'y rentrer, & qui s'y trouve à l'inftant au même degré de denfité que celui de 408 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE l'atmofphere : alors en remontant le Pifton, on éprouve deux fortes de frottements ; l'un eft l'application fucceflive du Pifton à toutes les parties intérieures du corps de Pompe; Y'autre eft le paflage précipité d'une colomne d'air d’un pied de longueur & de 26 lignes de diametre par un canal tor- tueux, de quelques pouces de longueur & d'une ligne de largeur ; le premier n'a toüjours paru inévitable, mais j'ai penfé autrement de l'autre, & avant même que d'en venir à l'expérience, j'avois vi, à n'en point douter, qu'elle devoit réuffir, & que l’on pouvoit profiter, pour remonter le Pifton, au moins en partie, de la différence qui fe trouve entre a denfité de latmofphere & celle de fair contenu dans Ia Pompe, lorfqu'il ne communique point encore avec celui du dehors ; différence qui va toûjours en augmentant, & qui rend fon fecours le plus puiflant dans le temps où l'on en a le plus de befoin : en un mot, la feule réflexion m'avoit convaincu que l'on pouvoit fe fervir du poids même de Vatmofphere pour faire remonter le Pifton. Ne fçait-on pas que le poids de l'air remonte entiérement le Pifton, lorfqu'il a fait un vuide parfait dans la Pompe? Ne fçait-on pas auffi qu'il refte où il fe trouve, fi le vuide a été rempli par un fluide d'égale denfité? Mais que doit-il arriver, s'il fe trouve entre le Pifton & le fond de la Pompe un air plus rare que celui de l'atmofphere ? On voit d’abord que celui-ci agira felon fon excès de denfité, & que le Pifton remontera jufqu'à ce que les deux airs foient en équilibre ; & comme l'air fe raréfie toûjours de plus en plus à mefure qu'on multiplie les coups de Pifton, il s'enfuit que fur la fin de l'opération, on n'aura prefque rien à faire pour remonter le Pifton ; tout le fecret confifte donc à conftruire la Clef du Robinet de maniére qu’en fermant la communication du côté du Récipient, elle ne ouvre pas du dehors au dedans de la Pompe. C'eft ce que j'ai pratiqué avec fuccès & d’une façon fort fimple, comme je le vais faire voir en parlant du Robinet, DU Dies aS Ce) 1 E NICE S 11 409 DU ROBINET. * La Pompe dont on vient d'enfeigner la conftruttion , quelque bonne qu’elle füt, deviendroit inutile fi le Robinet qui doit la joindre à da Platine, n'étoit bien fidéle; & pour Yêtre, il ne lui fuffit pas d’être à l'épreuve de l'eau, comme ceux dont on fe fert communément pour les Fontaines, il doit tenir contrée un fluide beaucoup plus délié, & pr efque toûjours forcé par une charge confidérable: on doit donc y pourvoir, non feulement par le choix de la matiére & par la figure des parties qui le compolent, mais aufli par des Rrebte tions convenables, - Le Cuivré fondu eft de tous les métaux celui qu'il con- vient le mieux d'employer; il eft d’une folidité fufffante, il fe travaille aifément & ne coûte point trop ; mais on doit préférer pour cette partie feulement, celui qui a fouffert plu- fieurs fontes, & qui en eft devenu un peu plus aigre. J'ai remarqué que lorfqu’il étoit un peu moins doux que le Laton ou la fonte de Mitrailles, pour me fervir du terme des ou- vriers, il n'en valoit que mieux pour les ouvrages de cette efpece, qu'il fe rodoit avec le grès & le fable, plus facilement, plus également, & que les ouvertures qu ‘on eft obligé de croître avec les écarifloirs, s’arrondifloient beaucoup mieux. Les parties principales du Robinet font 1e Canal, la Boîte & la Clef: les deux Pi emiéres pourroient être d’une même piéce, mais j'ai trouvé qu'en les travaillant féparément, on pouvoit à peu de frais leur donner une forme agr éable, qu'on ne doit point négliger ; à mon avis, ne il n’en coûte qu'un peu d'attention... » IL eff très-facile de faire auffi la Clef d'un fl morceau de fonte ; mais il m'a. paru encoré plus. commode de la fé- parer de fa poignée, pour ne, courir jamais les rifques de pe érdre les façons de celle-ci, quand Jautrene réuflit pas. - Voici donc: quatre piéces à fondre fur des, modéles : il 5 agit maintenant de fe déterminer fur Jes dimenfions. : “ , ts | l Bern Un. pe 2.1 . Ff£ 410 MEMOIRES DE L'AÂCADEMIE ROYALE Du Canal du Robiner. Le Canal peut être confidéré de part & d'autre de a Boîte, c'eft-à-dire, du côté de la Pompe & du côté de {a Platine; il eft cylindrique dans toute fa longueur, parce que fa figure éft indifférente, & qu'il eft plus aifé de lui donner celle-ci qu'aucune autre. Si l’on fe rappelle ce que nous avons dit en parlant du Piflon, pour faire voir qu'il eft important de ne point laiffer d'air entre fon dernier plan & le fond de la Pompe, on conviendra d'abord que le Canal du Robinet ne peut êtré trop court en cette partie, puifque l'air qu'il retient quand le Pifton remonte, eft auffi denfe que celui de l’atmofphere: c'eft pour cela que je crois à propos de joindre immédiate- ment la Boîte du Robinet à li Pompe; réduifant ainfi cette partie inférieure du Canal à l'épaifleur des Cuivres, je ré- duirois de mème fa largeur à la plus petite mefure, fr le paflage de fair n’exigeoit au moins une ligne de diametre, pour ne pas rendre le frottement trop confidérable. L'autre partie du Canal, celle qui regarde le Récipient, doit être néceflairement plus longue, pour donner lieu à la poignée de la Clef de tourner fous la Platine ; elle peut même avoir 4 ou $ pouces fans aucun préjudice fenfible, parce que Yair qu'elle contient, eft raréfié, & qu'elle fait partie de la capacité du vaiffeau dans lequel on fait le vuide ; cependant il ne faudroit point abufer de cette raifon pour donner à la partie du Canal dont on parle, une longueur beaucoup plus grande, J'ai obfervé depuis long temps qu'un Tuyau trop long ou trop étroit, ne permettoit pas dans le Récipient un Vuide auffi parfait qu'on le peut faire quand il eft mieux proportionné ; lorfque l'air eft parvenu à un certain degré de raréfaétion, fon refort eft fans doute trop foible pour vaincre le frottement & la réfiflance des vapeurs graffes & humides qui regnent toûjours dans ces capacités étroites & longues. C'eft une des raïfons qui n'ont fait rejetter les Machines Pneumatiques où la Pompe eft renverfée, parce que dans in ÉETE, Rd em EEE see ES > DES SCIENCES. 411 cette pofition on ne peut guére pratiquer de communication entre le Robinet & la Platine, que par un Canal fort long. Ces raifons m'ont déterminé à faire le Canal du Robinet comme il eft repréfenté par la Figure 8, percé d'un bout à l'autre d'un trou qui a une ligne & demie de diametre & 4 pouces de Jongueur, portant en fa partie fupérieure une . Vis de 4 lignes de diametre, & en fa partie inférieure un Ecrou par lequel il s'attache à fa Boîte. De la Boite du Robiner. La Boîte doit avoir intérieurement une figure & une capacité telles, qu'un Cone tronqué bien proportionné aux ufages qu'on en veut faire, & réguliérement taillé, puifle toucher exactement toute la furface, & par dehors on doit la préparer de façon qu'elle puifle fe joindre folidement à la Pompe & au Canal. Les principales dimenfions de cette piéce, comme l’on voit, font relatives à celles de fa CEE sil ne s'agifloit que d’une fimple defcription, on devroit fans doute commencer par la Clef, mais s’il faut conftruire, l'ufage m'a fait connoître qu'on devoit compter für des à- peu-près, & faire la Boîte la premiére. | Le morceau de Cuivre fondu dont on fe fervira pour faire cette piéce, pourra repréfenter un Prifine exagone par le tiers de la longueur pris au milieu, le refte étant cylindrique ge part & d'autre, comme en la Figure 9: On doit pratiquer au milieu des deux faces oppofées du Prifme, deux Vis Z, Æ dont l’une fe joint au Canal & l'autre à la Pompe, & ces Vis doivent être percées fuivant leur longueur, comme 1e Canal dont elles font partie après l'affemblage, De la Clef du Robinet. La Clef eft Ja principale piéce du Robinet, c’eft celle qui mérite le plus d'attention ; Le défaut le plus commun que jy trouve dans les Machines Pneumatiques ordinaires, c’eft qu'on a donné trop peu de grofleur à cette partie, à qui l'on Fff ij 412 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE verra qu'il en faut beaucoup, pour peu qu'on réfléchiffe fur fes fonétions. ' Quand le Robinet eft fermé du côté du Récipient où l'on a fait le vuide, l'air fait effort pour y rentrer, 1.° par le Canal de la Pompe, foit qu'on remonte le Pifton, foit qu'il refle abbaïffé ; 2.° par les deux bouts de da Boîte; 3.° par les deux bords de la rainure dans toute fa longueur. La partie de la Clef qui tourne dans la Boîte vis-à-vis du Canal, doit être confidérée comme un Cercle, ou comme un Anneau interrompu deux fois par le trou diamétrale, & une troifiéme fois par la rainure, comme on le peut voir par la coupe que repréfente la Figure 1 o. Si ce qui refte plein n’a point une étenduë fuffifante, le moindre petit défaut donnera lieu à l'air de s’infinuer & de gagner le Canal. D'un autre côté, fi lon fait une groffe Clef pour augmenter cet Anneau, les bords de la Boite croiffent par proportion ; & fi l'on n’a pas foin d'oppoler un grand trajet à l'air, en faifant la Boîte plus longue, à mefure qu'on donne plus de prife à fes efforts, en la faifant plus grofle, c'eft remédier à un défaut par un autre. On verra par la defcription fuivante, ce que j'ai ob- fervé pour interrompre le moins qu'il eft poffible, la furface de la Clef, & pour empêcher que l'air ne puifle rentrer par la jonction des parties mobiles. La Figure 1 1, repréfente un morceau de Cuivre fondu & préparé de maniére qu'il remplifie exaétement l'intérieur de la Boîte du Robinet, & la Figure 1 2 eft une poignée de même métal qui s’'ajufte en À avec une goupille, ou de toute autre maniére qu'on jugéra à propos. Avant que d'achever d’ajufter la Clef dans la Boite, il faut la percer & pourvoir à fes différentes fonctions. Elle en a ordinairement deux. La premiére eft d'ouvrir quand il le faut, une communication entre la Pompe & le Récipient; pour cet effet on la perce diamétralement d'un trou L un ‘peu plus petit que le Canal, & qui puifle fe rencontrer dans Ja même ligne. La feconde confifte à laifler échapper l'air qui a paflé dans la Pompe, fans qu'il puifie rentrer dans le vaifleau d'où on l'a fait fortir. DES SCIENCES. 413 Cela s'exécute ordinairement par le moyen d’une rainure que l’on fait fur la longueur de la Clef à égale diflance des deux extrémités du trou diamétrale.. Mais outre que cette ouverture interrompt trop la furface, & qu’elle donne par-fà beaucoup de prife aux efforts de l'air extérieur, comme je lai déja fait obferver, elle ramafle continuellement en tour- nant, la graifle dont on enduit la Boîte, elle la féche & fe remplit, ce qui fait qu'on a plus de peine à remonter le Pifton, parce que l'air qu’il faut faire fortir, a trop de peine à pafler. C’eft pour prévenir ces inconvénients, qu’au lieu d’une rainure, je perce obliquement le trou 47, N, O, d'une ligne + felon l'axe de la Clef ; par l'obliquité 47 N. j'évite de rencontrer le trou diamétrale, & en donnant beaucoup de largeur à NW, ©, j'épargne à l'air qui doit pañler, une bonne partie de fon frottement. J'ai déja fait remarquer que les deux bouts de la Boîte étoient les principaux endroits par où l'air du dehors faifoit effort pour s’infinuer ; je trouve qu'il eft très-facile de lui en interdire un, en enfermant un morceau de cuir gras fous une large Rondelle de cuivre, placée fur le quarré O, & retenue par une Vis percée qui s'engagera dans l'extrémité du Canal O, N. Cette précaution a un autre avantage qui n'eft pas moins confidérable, c’eft d'empêcher que la Clef ne tombe & ne fe gâte lorfqu'on remuë la Machine Pneu- matique. Aux deux fonctions dont je viens de parler, j'en ai ajoûté une troifiéme que les Clefs ordinaires n’ont point, & par laquelle je remplis à peu de frais l'objet que je me fuis propolé en parlant de la mobilité du Pifton, de diminuer confidérablement la peine qu'on a pour Îe remonter. La conftruction de ma Clef eft telle, qu’elle permet bien, comme les autres, à l'air qui eft dans la Pompe d'en fortir, mais ce qui la diftingue, c'eft qu'elle empêche celui du dehors d'y entrer ; moyennant quoi l'air qui s’y trouve, conferve le degré de raréfaétion qu’il. a en fortant du Récipient, & le Fff üj 4ï4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE poids de F'atmofphere repoufle le Piflon jufqu'à ce que les deux airs, celui du dedans & celui du dehors, foient en équilibre : on voit affés que plus on travaille, plus ce fecours augmente, & que fur la fin de l'opération il ne refte prefque rien à faire pour remonter le Pifton. Il n’en coûte pour cela qu'une petite Soupape placée à l'extrémité O du Canal qui eft pratiqué dans l'axe de la Clef, & qui communique avec le trou oblique V A7, que j'ai fubftitué à la rainure. Au lieu de retenir la Clef par une fimple Rondelle & par une Vis percée, comme nous l'avons dit, il n’y a qu'à placer fur le quarré O , une piéce repré- fentée par la Figure 1 3, dont la partie la plus grande, qui fervira de Rondelle pour contenir le cuir gras, portera au bout d'une queuë mince & élaftique, une petite Palette P, couverte d'un cuir, qu'on repliera pour toucher le bout du Canal O, N, comme on le peut voir par la Figure 14, qui repréfente l'extrémité de la Clef garnie de cette Soupape ; la Vis qui doit retenir la Rondelle fur fon quarré, doit avoir une partie ronde pour couvrir entiérement Ja jonétion avec un cuir gras interpofé, & enfuite une autre partie taillée à pans pour donner prife à une Pince platte ou à une Clef quand il faut la tourner. Voyés la Figure 1 5, où Von a marqué par deux lignes ponétuées le trou qui doit fervir de continuation au Canal O, AN. Une attention qu'on ne doit point obmettre, c’eft de placer le trou diamétral de la Clef, de maniére qu'il foit dans la direction du Canal, quand la longueur de la poignée eft horifontale, & de faire une marque à celui des rouleaux qui regarde #7, afin de pouvoir diriger aifément l'ouverture des communications. * Enfin, fi on veut que le Robinet foit d’un fervice exact & durable, il faut empêcher que les furfaces de la Boîte & de la Clef fe frottent à fec; outre que leur union ne feroit jamais affés intime pour fermer tout accès à d'air extérieur, elles fe fiHonneroïent & fe gâteroient mutuellement : quand elles font bien faites il fuffroit de les mouiller avec de l’eau DES SCIENCES. 41S ou avec de l'huile ; mais un fluide qui a peu de corps, s'éva- pore aifément, il vaut mieux employer quelque graifle; celle de Mouton, qui a {ervi à faire de la chandelle, eft fort bonne pour cet ufage, Il faut en frotter légerement la Clef, la tour- ner trois ou quatre fois dans fa Boite, & l’ôter, pour voir fi l'enduit eft égal par-tout, & s’il n’a point bouché les trous; en prenant de temps en temps cette précaution pour con- ferver ces deux piéces en bon état, on ne doit point oublier de pafler une plume avec un peu d'huile d'olive dans le Canal pour l'entretenir net; car c’eft une chofe conftante, que quand il eft trop étroit ou trop fale, on ne parvient ja- mais à raréfier l'air aufli parfaitement qu’on peut le prétendre quand il a un paflage plus libre. Maintenant il ne s'agit plus que de joindre d'une maniére bien folide & bien exacte le Canal du Robinet à la Boîte, & la Boîte à la Pompe : c’eft pour cet effet qu'on a pratiqué les deux Vis /, K, {Fig. 9.) l'une des deux doit entrer en Q (Fig. 8.) & Vautre en C /Fig. 2.) Cela fufhroit pour la fo- lidité, mais pour l'exactitude dont on a befoin,, il faut quel- que chofe de plus: ceux qui voudront prendre le parti le plus für, après avoir bien ferré les Vis, couvriront les jonc- tions avec de la foudure d'Etain, mais on pourra fe con- tenter d’interpofer des cuirs gras, qui fe trouvant fortement preffés entre des furfaces très-larges par le moyen des Vis, tiendront lieu de foudure pendant plufieurs années , & laifle- ront la liberté de démonter des piéces commodément , foit pour les nettoyer, foit pour y remédier en cas d'accident. DE LA PLATINE ET DU RECIPIENT. Cette troifiéme partie de la Machine Pneumatique, dont nous allons traiter, eft aujourd'hui bien différente de ce qu'elle étoit du temps de fes premiers Auteurs. Othon de Guericke cherchant à faire le Vuide & à le prouver avant que de penfer à l'ufage qu'on en pourioit faire, d'eflaya d'abord dans des vaifleaux de boïs, qui lui réuffirent mal à caufe de leur grande porofité ; il le tenta plus heureufement 416 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE dans des Globes de cuivre ; enfin il le fit voir dans un Ballon de verre, que l’on nomme communément Récipient dans les Laboratoires de Chimie, & voilà fans doute ce qui a donné lieu de nommer ainfi ces efpeces de Cloches de criflal dont nous nous fervons maintenant pour couvrir les matiéres autour defquelles nous voulons raréfier l'air. Boyle regardant avec raïfon ce nouvel Inftrument comme un moyen d'enrichir la Phyfique Expérimentale, fentit d’abord tout l’inconvénient d’un Vuide prefqu'inac- ceflible, tel que celui qu’on avoit fait jufqu'alors ; je veux dire, dans des vafes dont l'entrée fort étroite, & prefque toûjours renverfée, ne permettoit pas qu'on y mit des corps de grand volume, ni qu'on les y tint dans une fituation commode. En effet, en confidérant ce défaut de la premiére Machine Pneumatique, on doit convenir que le Vuide de Magdebourg, tout ingénieux qu'il étoit, n'avoit pas beau- coup d'avantage fur celui de Florence ; c’eft pourquoi, en partageant entre Île Conful Allemand & le Philofophe Anglois, l'invention de l'Inflrument tel que nous l'avons reçû d'eux, on peut dire que la partie la plus eflentielle & la plus utile eft dûe à celui-ci, puifqu'il eft le premier qui ait fçû placer & mouvoir toute forte de corps dans le Vuide, puifque fon Récipient eft le premier dont les ufages foient communs avec ceux dont nous nous fervons à préfent pour toutes les expériences qui fe préfentent à faire. Il eft vrai qu'il étoit beaucoup moins commode ; les chofes que l'on corrige, ne font point portées tout d'un coup à leur derniére perfection , ce qu'il y a de défeétueux ne difparoît ordinai- rement que par degrés, & fouvent celui qui commence à perfectionner, ne remédie qu'au plus preflant. : Le Récipient corrigé ‘étoit une efpece d'Entonnoir de vérre, qui s’ajuftoit à la Pompe par fon col, ainfi que.le premiér Ballon ; mais fon ouverture fupérieure, fuffamment large pour recevoir toutes fortes'de corps, lui confervoit fon nom à plus juftetitre, & difpenfoit de le détacher de la Pompe toutes les fois qu'on vouloit faire une nouvelle expérience. On PEN S'NSMONT EN COTE ‘5 417 On arrangeoit à fon àife dans la capacité du vaiffeau, tou ce qu'on vouloit éprouver dans le Vuide, & on le couvroit d’un Chapiteau qui fermoit exactement, & au travers du- quel on pouvoit communiquer des mouvements fans laifer rentrer l'air, Cette invention renfermoit tout ce qu'il y a d'effentiel dans cette partie, nous n'avons fait qu'étendre depuis ce qu'elle nous a indiqué : la Machine Pneumatique a com- mencé dès-lors à devenir un inftrument général dans fon genre, & l’on peut dater de cette époque les fervices qu'elle a rendus à la Phyfique. IL y a déja long-temps que le Récipient a quitté la forme d'Entonnoir & de Ballon pour prendre celle d'une Cloche arrondie par le haut, dont les bords repofent fur une large Platine de cuivre à laquelle aboutit le Canal du Robinet. Un cuir mouillé, pofé entre le verre & fa bafe, procure une jonction très-exacte, & le poids de latmofphere, au premier coup de Pifton, fupplée amplement à toutes fortes de luts & de ciments. Nous diftinguerons donc deux parties principales au Ré- cipient, fçavoir, la Bafe & la Cloche. De la Platine qui fert de Bafe au Récipienr. Il eft indifpenfablement néceflaire que la Platine foit fo- lide, parfaitement plane, & tellement jointe au Canal du Ro- binet, que l'air ne puifle aucunement pénétrer la jonction. IL eft avantageux qu’elle foit grande, pour recevoir des vaiffeaux d’une capacité moins limitée, qu’elle puiffe contenir de eau, pour entretenir les cuirs long-temps humides, & qu'elle ait en quelqu’endroit de fa furface une Vis excédente, ou quelque chofe d’équivalent, pour fixer certaines piéces dont on a fouvent befoin. Pour fatisfaire à la premiére & à [a féconde de ces condi- tions, il faut choifir une Plaque de Laton, épaifle de deux bonnes lignes, bien égale dans toute fon étenduë, la faire planer fur un tas d’Acier, en forte qu'elle paroïfle droite à la Mem, 1740. , GEg Lre PLANCHE. 418 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Regle : ce n’eft point aflés qu’elle foit foûtenuë au centré par le Canal du Robinet, il faut qu'elle foit portée par les bords de fa circonférence, & cela peut s'exécuter d'une maniére agréable à la vüë, en employant trois fupports en confoles, attachés d’une part au cercle qui la borde, & de l'autre à la partie la plus faillante du Chapiteau de la Pompe, où nous avons dit qu’il falloit conferver un quarré fort épais. La Platine fera fuffifamment grande, lorfque toute arron- die elle aura ro pouces de diametre : on pourra la border d’un cercle qui ait environ un pouce de large, pour contenir de l'eau quand il en fera befoin ; avec cette précaution, non feulement on évite les mal-propretés, qu'on empêcheroit difficilement, mais on a un moyen fort für pour tenir en expérience le Récipient fans aucun foin, puifqu’en verfant fur les cuirs une fufhifante quantité d’eau, on peut, quoi- qu'abfent, les entretenir humides pendant bien du temps. Pour joindre la Platine au Canal du Robinet, il faut fa percer au centre pour recevoir la partie a a { Fig. 8.) bb, ayant été couvert d’un cuir gras aflés épais pour empêcher aa d'excéder l’épaifleur .de la Platine, on aflüre les deux piéces l'une fur l’autre par le moyen d'un. fort Ecrou de euivre ou de fer étamé, qui égale à b, en largeur, & fous lequel on enferme un ou deux cuirs préparés à l'ordinaire, comme on le peut voir par la Figure 1° de la Planche I1.4€ qui repréfente toutes ces parties coupées au centre. | On pourra s'affürer que la jonction eft exacte, fr après avoir couvert la Platine d’un demi-pouce d’eau. & d'un Ré- cipient, on n'apperçoit pafler aucuns globules d'air autour de l'Ecrou, quand on fait agir la Pompe. La Vis du Canal qui excede le milieu d'environ £ de pouce, ne doit point être rafée ; elle eft utile, 1.° pour empêcher que l’eau qui eft contenuë fur la Platine, & qui s'y répand abondamment en plufieurs occafions, ne tombé dans la Pompe, & ne foit rejettée dans la chambre lorfqu'on releve le Pifton. 2.° Elle fert à fixer tout ce qu'on veut rendre immobile fous la Cloche pendant qu'on travaille à \ | SAS L + dé Le 11e DES SCIENCES. 4t9 faire le Vuide, & ce dernier fervice eft très-fréquent ; mais” afin. que ce qu'on y attache, ne bouche point le Canal, if faut limer prefque quarrée la partie qui excede l'Ecrou, & ne Jaifler les filets de vis que fur les angles. Cette Bafe qui fert fucceflivement à tous les Récipients, ne fe fépare point de la Machine Pneumatique dont elle fait partie; quand une fois elle eft occupée par une expérience, elle tient la Pompe en arrêt, & ne lui permet pas d'agir pour une autre ; s'il n'y avoit point de remede à cet incon- vénient, il y auroit bien du temps à perdre dans une fuite d'épreuves où l’on auroit befoin de tenir le même corps long-temps dans l'air raréfié. On a imaginé fort à propos d'avoir pour des expériences de longue durée, des Platines mobiles, garnies de Robinets, que l'on ajufte avec un cuir à la Vis excédente de la Platine fixe, & que l'on met à l'écart fur un pied, quand on à fait le Vuide dans les Récipients qu'elles portent. Voyés la Figure 2. ï Les Robinets de ces Platines mobiles n'étant pas d’un ufage auffi fréquent que celui de la Pompe, & la furface de la Clef n'étant interrompuë que par le trou diamétrale, on peut faire la Boîte moins longue & moins grofle, mais on “ ne doit pas fe difpenfer des autres précautions, & l’on doit fur-tout tenir le Canal très-court & fort large, puifqu'il devient une continuation de celui de la Machine Pneumati- que, où nous avons fait voir qu'il falloit donner un pañlage affés libre à Fair ; & fi l'on craignoit de nuire à l'exactitude de la Clef, en élargiflant le Canal, on peut le tenir étroit aux parties qui joignent la Boîte, & le grandir tant qu'on woudra dans le refte de fa longueur. On doit auffi confidérer comme une partie de Ia Bafe, les Cuirs dont on couvre les Platines, pour faire jomdre exacte- … ment le bord du Récipient. La peau de Mouton pañée à huile, eft très-commode pour cet ufage; & fr l'on veut. \ qu'elle foit toûjours prête à fervir, & qu'elle ne fe durcifle point en fe féchant quand elle a été mouillée, il faut com- smencér par la pénétrer d’huïle d'Olive, & la mettre enfuite Ggsi 420 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE pendant quelques jours tremper dans l'eau ; les cuirs ainfr préparés, font plus propres que tout autre à retenir l'air, & peuvent fervir pendant plufieurs années. Si les corps que l'on doit renfermer fous le Récipient; exigent d'être polés fur un plan, on pourra fe fervir d'une petite Tablette /Fg. 3.) dont le deflous porte une Virole à écrou, pour être placée au centre de la Platine fixe. De la Cloche ou du Récipienr. La matiére dont on doit faire les vaifleaux qui fervent de Récipient à la Machine Pneumatique, n'eft plus en quef- tion : les premiers ufages qu’on en a faits, ont décidé que la Tranfparence leur étoit une chofe abfolument néceffaire ; & comme nous n'avons guére que le Verre qui puifle leur donner cette qualité, on s’eft déterminé d’abord à s’en fervir, & l'on a continué depuis, quoiqu'il ait l'inconvénient d'être fragile. On ne doit point fe promettre de remédier entiérement à ce défaut, tant qu'on employera la même matiére ; des accidents imprévüs mettront quelquefois cette partie de la Machine en defordre, & la plus füre précaution qu’on puifie prendre, c’eft d’en avoir plufieurs. Une certaine épaifieur proportionnée à la grandeur du vafe, rendra cependant les pertes moins fréquentes, & c’eft à quoi l'on doit prudem- ment penfer quand on en fait faire. Mais les perfonnes qui n'ont point aflés de connoiflance du Verre & de la maniére dont on le travaille, trouveront bon qu’on les avertiffe qu'une plus grande épaifleur, bien-loin de rendre la piéce plus du- rable, l'expofe au contraire à une rupture prompte &ino- pinée, fr elle eft peu égale, & que la recuite n’ait point été affés forte. Ce n’eft point ici le lieu d'entrer dans les raifons phyfiques de ce fait, il fufht de dire que je l'ai conftaté par une longue fuite d'expériences, dont plufieurs ont été faites à deffein, & que la feule frition , ou l'ébranlement caufé par les carrofles, n'a fouvent mis en piéces fur les Tablettes de mon Cabinet, des Récipients qui avoient quatre lignes au plus épais. DES ScrENCES. 42 L'épaifleur égale & la recuite par lefquelles on prévient, -du moins en partie, les accidents imprévüs, ne leur fuff- roient pas pour réfifter à la preffion de l'air extérieur, à 1a- quelle ils font habituellement expofés par l'ufage qu'on en fait: il faut ajoûter à cette premiére précaution celle d'une figure convenable; toutes les formes réguliérement arrondies, Sphé- riques, Cylindriques, Coniques, &c. dont la convexité fait face aux efforts de l'air, peuvent être employées avec fuccès, parce que les: parties qui compofent les épaifleurs de cette efpece, font autant de coins dont la pointe tend au centre ou à l'axe, & qui fe foûtiennent mutuellement. L’ufage à prévalu pour un Cylindre creux, dont la partie fupérieure eft voutée, fans doute parce qu'il a plus de capacité que le Cone, & qu'il a fur le Globe l'avantage de pouvoir être ouvert par toute fa bafe. Ce vaiffeau feroit incommode à manier, & par cette raifon plus expofé à être caflé, s'il n’avoit au fommet un bouton par où l’on puiffe le prendre ; ce bouton eft ordi- _nairement plein, parce qu'il eft plus facile de le faire ainf, imais j'aime mieux qu'il foit creux, & communiquant avec Ja capacité du Récipient, parce qu'il le rend moins pefant, & qu'avec un fimple bouchon de Liége placé comme 4 . (Fig: 4.) on peut fufpendre bien des chofes dans 1e Vuide, Quand les Récipients arrivent de la Verrerie, il eft rare que leurs bords foient aflés droits pour joindre de toutes parts la Platine de cuivre qui doit leur fervir de bafe, il faut des dreffer en les ufant avec de l'eau & du grès battu, fur une plaque de métal, ou fur une pierre dure aflés large & bien plane. On doit être pourvû de plufieurs Cloches, non feulement par précaution contre la fragilité de la matiére, mais encore … pour être en état de les proportionner aux différentes expé- -riences qu'on aura à faire ; c’eft une regle qu'on doit toù- jours fuivre, de n’en pointemployer une grande, quand on peut fe fervir d'une plus petite. I1,y a de l'œconomie à en ufr ainf,}.çar on gagne le-temps. qu'il faudroit mettre. à Ggg ii 422 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE raréfier une mafle d'air inutilement plus grande ; on ne fe affe point en pure perte par un grand nombre de coups de Pifton;'on s’expofe plus rarement à perdre les vafes les plus précieux ; on ménage la Machine même, & l'air fe raréfie toûjours plus parfaitement dans un petit que dans un grand -Récipient. On fera fuffifamment aflorti pour les Expériences ordinaires, fi l’on a feulement deux Cloches fur chacune des -mefurés fuivantes, que l'on doit prendre pour des à peu-près, parce que cela fufht, & parce qu'on auroit beaucoup de peine, fur-tout pour les épaifleurs, à les faire exécuter à la ‘rigueur aux Verreries. HAUTEUR | EPAISSEUR. fous le bouton. DIAMETRE. Pouces, Pouces. Lignes. 9 12 2 6 8 11 4 10 1 I 4 6 15 3 55 : Ces dimenfions pour les capacités, n'ont paru les plus convenables ; mais fi par extraordinaire on avoit befoin d’un vaifleau beaucoup plus grand, il ne faudroit pas regarder les limites de la Platine, que nous avons fixées à: 10 pouces, comme un obftacle invincible ; car en pareil cas, non feu- Iement on peut fe fervir d’une Bafe mobile, dont {a largeur fera telle qu'on voudra, il eft encore très-facile ( & ceft le mieux qu'on puille faire) de tenir le vafe plus étroit en fa partie inférieure, en lui donnant une forme plus enflée par le haut, comme on le voit par la Figure $. 14 Avec des Récipients fermés par le haut , tels que ceux di | L DES" SCrENCE',s 423 dont nous venons de parler, & qui font le plus communé: “ ment en ufage, ce que l'on met dans le Vuide devient pref- « qu'inaccefhble après le premier coup de Pifton. Ce n'eft qu'avec beaucoup de peine, & foùvent avec peu de fuccès, ÿ qu'on parvient à communiquer quelques mouvements ; s'il tr s'agit d'enflammer un peu de Poudre, ou de brüler un Fil “ quitient un reflort tendu, il faut attendre un rayon de Soleil “ qui affujettit à l'heure & au temps, il faut ufer de Lentilles ou de Miroirs, qui fatisfont rarement ou bien imparfaitement aux intentions de celui qui les employe. Il eft bien étonnant que dans un Siécle où lon eft fi attentif au progrès des ï Sciences, on ait fr peu profité d’un moyen dont Boyle même s’eft fervi, moyen non feulement digne de fa fagacité de cet ingénieux Auteur, mais fans lequel, j’ofe dire que la Machine Pneumatique perd une grande partie de fon mérite : à la réferve de deux ou trois Ecoles d'Angleterre & de Hollande, où la Phyfique expérimentale eft aidée de la plus fine indufrie, je ne vois pas qu'on ait fait des Récipients qui tranfmiffent le mouvement du dehors au dedans fans laiffer rentrer l'air ; ceux qui ont négligé de leur procurer cette pro- priété, n'en ont point aflés fenti les avantages, mes propres befoins me les ont fait connoître, & je me füuis appliqué à … rendre cette invention plus générale & d’une exécution plus . facile, c'eft pourquoi j'en ai fait un inftrument féparé qu’on peut appliquer fucceflivement à différents vaifleaux, afin qu'on ne foit point obligé d’en avoir autant que de Réci- pients, il faut feulement que toutes les Cloches avec lefquelles on veut le joindre, au lieu d'être terminées par un bouton, le foient par une douille ouverte & revêtuë d'une Virolle dont le fond porte un Ecrou de 4 à 5 lignes de diametre. Voyés la Figure 6. Cet inftrument, que je nomme Pofte à Cuirs, eft un Cy- lindre de cuivre, creux, d'environ 1 $ lignes de long /Fïg. 7.) … qui eft rémpli par des Rondelles de cuir de Bufle, pénétrées’ I d'huile & de fuif fondu, & preflées par un couvercle de même métal, qui s’y joint à vis, & qui comprime fortement les à % 424 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE Cuirs gras, & pour cette raifon fon bord extérieur eft dé- coupé en rofette pour donner prife à la main. Au centre de fa bafe eft une Vis qui convient à l'Ecrou du Récipient pour y joindre la Boite en interpofant un Cuir, comme nous l'avons dit en plufieurs occafions ; le couvercle, le fond de la Boîte & les Cuirs qu’elle renferme, font percés pour haifier pafler un peu à force une Tige de fer ou de cuivre de 7 à 8 pouces de longueur, parfaitement cylindrique, & de 2 lignes + de diametre. Cette Tige, que l'on façonne promptement & commodément, en la tirant par la Filiére, porte à l’une de fes extrémités un Anneau B pour la mou- voir, & à l’autre un Quarré & une Vis, où l'on peut fixer par le moyen d'un petit Ecrou à oreilles, une pince ou tout autre inftrument CC qu'on jugera à propos. Par ce moyen la piéce fixée à l'extrémité D, peut être müë verticalement & horifontalement. Ces deux direétions fuffifent pour pro- curer à un homme intelligent tous les mouvements dont il aura befoin, & fi la Boîte à cuirs eft faite avec foin, on peut être aflüré que l'air ne rentrera point dans le vaifleau pendant l'opération. Woyés la Figure €. Comme je me propofe de traiter en particulier des Inftru- ments qui aflortiffent la Machine Pneumatique, je ferai connoître alors les applications avantageufes qu'on a déja faites de cette invention, & le détail que j'en ferai, pourra fervir de guide à ceux qui auront befoin d'en imaginer de nouvelles, DU PIED DE LA MACHINE PNEUMATIQUE SIMPLE, De toutes les parties dont la Machine Pneumatique eft compofée, il n’en eft aucune qui foit plus arbitraire que fon Pied ou fon fupport ; il a tout ce qu’il lui eft effentiel d’avoir, quand il eft aflés ferme pour porter la Pompe, qu'il peut réfifter aux efforts de celui qui fait agir le Pifton, & qu'il a aflés d’afliette pour n'être pas facilement renverfé, Quant au refte, > ET. dE RESTE ane fn 2 re rame AE DES SCIENCES. 425 refte, il eft fufceptible de toutes les formes qu'on voudra lui donner, & de tous les ornements dont on jugera à pro- pos de l'enrichir. Je me füis borné dans cette partie, comme -dans toutes les autres, au néceflaire & à la propreté, & j'ai trouvé dans cette œæconomie un avantage qui fe rencontre rarement avec un grand appareil de piéces fuperfluës , je veux dire un certain degré de légéreté qui permet de tranf- porter aifément & fans embarras toute la Machine, fans empêcher qu'elle foit aflés ferme pour réfifter aux fecoufles ordinaires. Trois montants & deux Tablettes qui les affem- blent, comme il eft repréfenté par la Figure 8, c'eft tout ce _que j'employe ordinairement pour conftruire le Pied de fa Machine fimple. II ne s'agit plus que de dire en peu de mots les proportions que doivent avoir les cinq piéces. Chacun des montants doit avoir à peu-près 34 pouces de hauteur, & 2 pouces en quarré au plus gros : {a Tablette fupérieure eft un plan triangulaire dont les angles font tron- qués, elle a 1 5 lignes d’épaifieur, & elle eft percée au milieu pour recevoir la partie Z /Fg. 1.) de la Pompe ; l'autre ablette qui a la même épaifleur que la premiére, eft auffi percée au centre pour récevoir le bas de la Pompe, & la longueur des côtés à l'une & à l’autre tablette, doit être telle que les montants qu'elles affemblent, foient écartés par le bas d'environ 1 8 pouces. -_ Pour les diftances en hauteur, celle d’une tablette à l’autre doit être réglée pour afleoir fur la premiére le cordon Z, qui eft au corps de Pompe, & fur la feconde la moulure qui eft à un pouce du bas de [a Pompe; cette derniére tablette doit être élevée au-deffus du plan fur lequel repofe la Machine Pneumatique, de maniére que l’'Etrier le ren- contre quand le Piflon eft autant baiflé qu'il peut l'être. Comme il n'a guére qu'un pied de jeu dans notre Pompe, il ne faudra porter le pied qu'à cette élévation pour com- mencer à le mouvoir, c’eft une fituation dans laquelle un Lre PLANCHES homme d’une taille ordinaire peut employer avantageufe- ment le poids de fon corps. | Mem, 1740, ° Hhh 426 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Mais afin qu'en relevant le Pifton, l'on ne faffe point fortir la Pompe de fa place, il faut attacher deux Vis S, 7, (Fig. 1.) qui excedent fa Pompe d'environ un pouce, & enfiler dans la tige du Pifton une rondelle de bois W/Fig. 3.) qui fera traverfée par les deux Vis S, 7, & retenuë contre la tablette inférieure du Pied, avec deux petits écrous à oreilles lorfque la Pompe fera dans fa place. Par ce moyen la Machine fera folidement fixée, on pourra l'ôter en peu de temps de deflus fon Pied quand il en fera befoin, & la tige du Pifton fera toüjours guidée dans la direétion per- pendiculaire. Si le Vernis dont j'ai confeillé l'ufage en général pour tous les bois qui fervent de monture aux Inftruments de Phyfique, n'eft qu'une pure décoration en certains cas, on pourroit dire qu'il eft néceflaire en cette occafion, parce qu'il eft important de conferver l'aflemblage du Pied dans toute fa folidité, & qu'il eft prefqu'inévitable de le gâter par l'eau qu'on y répand, fi rien n’empèche qu'elle ne pénétre dans les mortoifes : c'eft d’ailleurs une dépenfe fi légere, & une façon qui coûte fi peu de peine, qu'il fufit d'en faire fouvenir, Dal. ROUE 2 Nousavons fait voir ci-deffus de quelle maniére on pouvoit tranfmettre le mouvement dans le Vuide, & lui donner telle direction qu’on jugera à propos, mais nous n'avons rien dit du degré de vitefle; il eft certain qu'il ne peut point être bien grand, fi on n'employe que la préparation dont nous avons parlé. La Tige de la Boîte à cuirs, immédiatement menée par la main de celui qui opere, ne peut donner qu'un mouvement lent, placer ou déplacer quelque chofe, tendre ou débander un reflort, ouvrir ou fermer un vaifleau, ré- pandre une liqueur, approcher ou éloigner des corps les uns des autres, &c. moyens à la vérité très-utiles & d’un fréquent ufage, mais à qui l'on procureroit un nouveau mérite, f Fon pouvoit augmenter la viteffe des mouvements, jufqu’au point de donner lieu à des collifions violentes, à des tritu- BREL SUIS OÂ'E IN CIE 1 427 :æations, à des fritions de longue durée, à des fecoufes accé- lérées & fuivies. Une expérience fort ingénieufe qui fe trouve dans les Traités de Phyfique de M.': s'Gravefande & Mufchenbroeck, m'a donné dieu d'y penfer ; il m'a paru que ce qu'on.avoit pratiqué avec tant d'induftrie pour frotter violemment de T Acier trempé contre des Cailloux tranchants, méritoit bien d'être appliqué à plus d'un ufage, & j'ai entrevû d’abord qu'avec quelques changements & peu d'additions, on pou- voit beaucoup étendre les bornes de cette invention, & rendre l'appareïl qu’elle exige, applicable à un grand nombre d'opérations nouvelles & curieufes. Je l'ai tenté avec tout le fuccès que j'avois fouhaité, en employant une efpece de Roüet qui fe Joint par forme d’appendice au Pied de 11 Ma- chine Pneumatique, & dont on va voir la defcription. ÆE, F,G, A, (Fig. 1 1.) eft un chaffis de bois, dont les montants ont chacun 28 pouces de hauteur & environ 3 pouces + au plus large. Ils font affemblés en G & en £ à 2 pouces de diflance lun de-Tautre & parallelement , par deux traverfes fixées à demeure au premier £G, & repré- fentées felon leur plan par les Figures ro 7 1 1, & le der- nier #°A eft retenu par deux goupilles de fer qui traverfent toute fa largeur, afin qu'on puifle le démonter pour placer une Rouë de bois de 16 pouces de diametre. Cette Roue m'eft, à proprement parler, qu'une grande Poulie enarbrée quarrément fur du fer, retenuë d’un côté par un large épau- lement, & de l'autre par un Ecrou, & qui fe meut par une Manivelle de 3 ou 4 pouces de rayon. Une des deux traverfes, celle qui eft au bas du chañfis, excede de 4 pouces le montant £G, & forme une efpece de patte percée en / & en #, & garnie de deux Ecrous noyés dans d'épaifieur du bois /#ig. 2.) La Figure 3 , eft une autre piéce, prefque femblable à da précédente, que lon attache au même montant, un peu au-deflus de l'axe de la Roue, & qui fert à joindre, quand on de veut, le chaflis du Roïet au Pied de la Machine Pneumatique. LAN G, H ij III. we PLANCHE, 428 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE repofe fur la Tablette inférieure qui eft percée de deux trous pour recevoir les bouts des Vis qui pañlent par les Ecrous Z, Æ, & la feconde, ouverte en L, reçoit une Vis 47, qui eft attachée deflous & au bord de la T'ablette fupérieure du Pied (Fig. 8.) alors un Ecrou à oreilles qui entre un peu dans l'épaiffeur du bois, acheve de la fixer. La partie du chaffis qui eft au-deflus de la traverfe EF, eft creufée à demi-bois dans l'épaifleur des montants, pour recevoir à coulifie la piéce NO, qui peut s'arrêter à telle hauteur que lon veut par les deux Vis P, Q, qu'on engage dans fon épaifleur, en leur faifant traverfer deux rainures pratiquées dans la largeur des montants. La piéce NO, fert de moufle à une Poulie à double gorge, de 2 pouces + de diametre, & qui fe préfente dans le même fens que la grande Roue; au-deflus de celle-ci, dé part & d'autre, on a placé deux petites Poulies de renvoi R, R, dont les circonférences doivent répondre d'aplomb aux gorges de la Poulie double NW. La même piéce NO, eft aflemblée à angles droits avec une traverfe OS, repréfentée par fon plan dans la Figure 4» brifée & mobile au milieu de fa longueur par le rmoyen d’une charniére, & ouverte fur fa largeur par une rainure de 3 pouces de long pour recevoir la piéce que l'on voit à la Figure $. Cette derniére piéce eft un petit chaffis de cuivre, dont un des côtés porte au milieu de fa longueur & de fa lar- geur, un quarré 7° T, capable d'entrer & de glifier dans la rainure de la traverfe précédente, & furmonté d'un bout de virole à vis, qui fert avec un Ecrou à oreilles pour la fixer ; le tout percé felon fa longueur, par un trou de $ lignes de diametre. Le côté oppofé du petit chaffis eft percé de même, pour porter une double Poulie /Fg. 6.) dont les diametres font de 2 pouces + & de 18 lignes, enarbrée fur un canon de cuivre qui a deux épaulements, & qui eft percé d’un bout à l'autre d'un trou quarré dans lequel on fait gliffer une Verge DES SCHFENCES. 429 d'acier de même figure, longue de 8 pouces &: d'environ 2 lignes de face. Cette Verge repréfentée dans la Ægure €, porte à lune de fes extrémités }, une: petite boîte propre à recevoir -un autre quarré femblable à celui auquel elle eft fixée, &'élle s'arrète à telle hauteur que l'on veut par le moyen d’une petite Vis qui eft au bout de l'axe de la Poulie. Toutes ces piéces étant afflemblées & difpofées comme dans Ja Figure 1, il faut prendre une corde de foye ou de boyau, fufhfamment longue, la mener autour de la grande Roue, la faire croifer au-deflus de la traverfe £ F, la placer de part & d'autre dans les deux gorges de a double Poulie portée par la piéce NO, faire pafler les deux bouts fur les petites Poulies À, & femblablement leur faire embraffer celle du chaffis de cuivre, & les joindre: de façon que le diametre de la corde, à l'endroit.de la jonétion, foit à peu- près égal au refte. Lorfqu'on tournera la Manivelle de la grande Roue, il ef évident que la Tige quarrée tournera fur elle-même! :& que fa vitefle pourra être augmentée, non feulément par celle de la main, mais encore en faifant paffer la corde fur le plus petit diametre de la Poulie double dont elle traverfe l'axe. : Quand le Roïet eft en place, cette même Verge quarrée fe trouve perpendiculaire à la Platine ; fi le Récipient alors eft garni par le haut d'une Boîte à cuirs, & que la Tige cylindrique, au lieu de finir en-dehoïs par un anneau! foit terminée par un quarré qui s'engage dans da petite Boîte, le mouvement, comme l'on voit, fera communiqué avec toute fa vitefle au dedans du vaifleau, & l’on en pourra faire telle application qu'on voudra ; car on conçoit aifément qu'avec un mobile de cette efpece; quoique par lui-même il foit déterminé à tourner on peut produire des mouvements en ligne droite, à qui l'on confervera la vitefle. _ Onauroit peut-être pu rendre-cette Machine un.peu-plus fimple, fi l'on eût borné fon ufage, à une feule expériences Hhhiüÿ 430 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE mais comme on s'eft propolé d'en faire un Inftrumént général pour toutes les opérations qui exigeroient un mou- -vement rapide, il a fallu étendre fes propriétés aux dépens -de fa fimplicité, & chercher dans une conftruétion un peu “plus compofée, des commodités dont on fentiroit fréquem- -ment de befoin, fi elles manquoient. L'humidité & la fécherefle ne permettent point qu’une corde demeure long-temps tenduë au même degré, il falloit donc faire en forte que celle de notre Roüet püt fe bander facilement, pour réparer en peu de temps ce petit defordre, c'eft pourquoi j'ai rendu mobile fa piéce NO, afin qu'en l'élevant, la corde ferrät plus étroitement les Poulies, & rendit leur action mutuelle plus forte ; mais comme en faifant monter cette partie, on éleve d'autant la Verge quarrée Y, qui doit communiquer le mouvement, & que la Tige de la Boîte à cuirs pourroit alors fe trouver trop baffle pour la recevoir, il a fallu prévenir cet inconvénient, en faïfant F aufli mobile de haut en bas que doit l'être NO, de bas en haut. Cet expédient eft utile, non feulement pour remédier à Y'allongement de la corde, mais il difpenfe d'employer toù- jours des Récipients de même hauteur, ce qui feroit d’une très-grande incommodité. Il arrive fouvent que ce que l’on place fur le Récipient, ne permet pas que les bords du vafe foïent concentriques à la Platine ; fi lon fe fert, par exemple, de la Vis qui eft juftement au milieu, pour aflujettir des corps dont la figure & le volume ne conviennent point à cette pofition, on y trouve d'abord un remede, en faifant gliffer de chaffis de cuivre dans la rainure de la piéce OS (Fig. 4.) car alors la Verge quarrée F, fans cefler d'être perpendicu- laire à labafe du Récipient , fe meut parallelement à fa bafe, & va chercher la Tige de la Boîte à cuirs où elle ef. Enfin s’il eft queflion pour peu de temps, de faire quel- ques expériences d’un autre genre, où la hauteur des'vaifleaux exige que le chaffis de cuivre & ce qui le porte, foient ôtés D'ESSAISTCENR E NTIC ES 435 pour laiffer la place libre, il ne fera pas néceffaire pour cela d'enlever tout le Roüet, if fufhra de dégager un crochet qui eft à l'endroit de la brifüre à l'oppofé de la charniére, cette partie faillante alors pourra fe renverfer, & ceffera d’être incommode. Je pourrois rehauffer encore le mérite de cet Inflrument, en faifant voir par un grand nombre d'exemples, que fon ufage n'eft point borné aux feules expériences du Vuide; s'il eft vrai, comme on doit en convenir, qu'il y ait autant à faire dans l'Air comprimé, qu'on a fait, & qu’on fera dans Y'Air raréfié, en adaptant cette Machine à une Pompe de Compreflion, comme on le verra par la defcription que j'en donnerai ailleurs, voilà tout d’un coup fon fervice augmenté de moitié, & appliqué à des expériences neuves. Mais indé- pendamment des épreuves fur l'Air pour lefquelles elle a été imaginée, une perfonne intelligente en pourra faire fon profit dans bien des occafions qu'il feroit difficile & hors de propos de prévenir ici. J'en citerai feulement une qui revient fréquemment, & qui a beaucoup de liaifon avec les manipulations où l'on fe trouve engagé par la Phyfique Expérimentale. On a fouvent befoin de percer des Glaces ou des vaifleaux de Verre, & ce n'eft point chofe aifée pour ceux qui n’en font point leur profeflion ; j'ofe dire que ce n’eft qu'une bagatelle, par le peu de peine & de temps qu’on y met, lorf- qu'on fe fert de notre Roüet : il fuffit de placer en F un petit quarré qui porte une Virolle de cuivre un peu conique, que l’on fait agir par fa bafe fur l’endroit qu’on veut percer, en y mettant un peu de grès battu & de l'eau, la fituation horifontale dans laquelle fe trouve naturellement la piéce fur laquelle on agit, eft la meilleure de toutes pour contenir le grès mouillé & la Platine de la Machine Pneumatique, où la Vis du milieu fert pour la fixer commodément ; de cette maniére, on fait les trous de telle grandeur que l'on veut en changeant de Viroles, on les ouvre très-proprement, & 432 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE on les place aufli près les uns des autres qu'on le juge à propos. Cette partie de la Machine Pneumatique, que je viens de décrire, eft la derniére des cinq dont je m'étois propofé de traiter, & dont j'ai donné le détail précédemment. Qu'on raflemble maintenant toutes ces piéces, & qu'on les mette en place, on aura une Machine Pneumatique fimple , telle qu’elle eft repréfentée par la Figure 7, qui fans un grand appareil, peut fatisfaire auffi-bien (je dirois volontiers mieux) qu'aucune autre, à toutes les Expériences de fon genre. QUATRIEME 2 UE a EN a Due = Mem. de lAcad. 1740 plifpay 432. Eg.4. oo a Fig. 5. be ie go à ((m Q mb LT Simonneau Seul Mem. de lacad 1730 pliSpag #32 Fig 4 D 7 Hig.5 a + è Ÿ * $ Ê Ÿ ë \ Mem. de l’Acad.1740. pl 20 pag: 432. DE = = Lo 7 NE M QU ———© TR —@—— LE j; En LR (HT Ut | il l'üinonneau Seu NI 0 a ut | DES SCrENCES. 433 QUATRIEME MEMOIRE NL RE Se :ALO NS: T RES, Par M. LÉMERY. | a de ce Mémoire, eft 1.” de faire voir ce qui défigne, diftingue & caractérife les Monitres iflus d’un mâle & d’une fémelle de la même efpece; 2.° de réfoudre la difficulté qu'a fait naître Je Soldat ou l'Homme fingulier dont les parties de a Poitrine & du Bas-ventre étoient pla- cées à contre-fens ; c'eft-à-dire, que celles qui communé- ment font au côté droit, y étoient au côté gauche, & que celles qui font communément au côté gauche, y étoient au côté droit. PREMIÉRE PARTIE. On fçait que l'Auteur de Ia Nature a attaché à chacuné des différentes efpeces d’Animaux répandus fur la Terre, une ftructure de parties, une conformation particuliére, qui fait leur caractere diflin&tif; d'où il fuit que les individus d’une même efpece doivent fe reflembler aufii parfaitement par cette conformation qui leur eft propre, qu’ils different par-là des individus de toutes les autres efpeces. Il eft des cas, & celui dont'il s’agit ici en eft un, dans lefquels les ouvrages du Créateur déclarent & expriment fr nettement fes defleins, fes vüës & fes motifs, qu'il n’eft ni poflble ni permis de les ignorer, & que quand on le fait, ce qui ne peut venir que d'un défaut d'examen ou de réfle- xions qui ne coûtent cependant pas beaucoup à faire, on eft fujet à tomber dans de faux raifonnements qui choquent les principes de fa Nature les plus certains, & qui n’ont befoin que de l'expofition de ces principes pour être parfais tement démentis. : 8h10 Mem. 17404 « lii 434 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE On voit aflés non feulement par le grand nombre de générations fucceflives qui ont tranfmis jufqu’à nous les diffé- rents animaux, mais encore par celles qui fe pañlent fous nos yeux, & qui nous déclarent évidemment ce qui eft arrivé, & ce qui arrivera dans la fuite; on voit, dis-je, que quand le Maître de l'Univers a donné l'être aux deux premiers ani- maux de chaque efpece, il n’a pas prétendu qu'elles puffent s’anéantir, c’eft-à-dire, que leur conformation particuliére & fpécifique pât s'évanouir & difparoître : il a jugé au contraire qu'il étoit de la derniére importance, pour l'exécution de fes vüés, que cette conformation fe foûtint conftamment dans tous les temps, en fe renouvellant à chaque moment par la régénération continuelle d'individus qui repréfentaflent cha- cun l’efpece à laquelle ils appartiennent, & qui fufient effen- tiellement autant de dépofitaires repréfentatifs d’une certaine ftructure immuable qui leur a été confiée pour faire pañler ce précieux gage à leur poftérité exactement tel qu'ils l'ont reçû de leurs auteurs. D'où il fuit que fans une exacte & fcrupuleufe obfervation des loix prefcrites par la Nature, il feroit impofñfible que les mêmes efpeces d'animaux fe perpétuañlent depuis le com- mencement du Monde jufqu’à la fin ; & en effet, fi la con- formation fpécifique , celle qui fert à caraétérifer l'efpece dans laquelle fe trouve un individu, n'étoit pas fixe & per- manente, & parfaitement la même dans toutes les généra- tions fucceffives, & qu'au contraire elle pût dégénérer chaque fois plus ou moins, il pourroit aflés promptement arriver qu'à force de dégénérer, elle deviendroit méconnoïiflable, & s’'anéantiroit enfin de maniére qu'il ne refteroit plus de monument certain de la forme eflentielle des deux premiers animaux de cette efpece & de toutes les autres auxquelles on peut appliquer le même raifonnement. | Au milieu de toute luniformité qui dans l'état naturelregne entre les individus d’une même efpece, il fe trouve dans cha- cun de ces individus, des variétés qui ont des utilités réelles, & qui font auffi dans l'ordre de la Nature: par exemple, » | DES SCIENCES. 435$ il n’y a perfonné qui n'ait pu appercevoir dans une muiii- tude de Chiens, de Chats, ou d'autres animaux, que quoi- que tous ceux de la même efpece {e reffemblent fi fort par leur forme fpécifique & caraétériftique, qu’il n’eft pas poffi- ble de méconnoitre l’efpece dont ils font, ils different ce- pendant entr'eux plus ou moins par la couleur de leur poil & par une infinité d’endroits ; mais où cet examen eft beau- coup plus intéreflant par les avantages qui en réfultent, c’eft dans l'Homme, où fans parcourir une foule de variétés tirées de fignes particuliers répandus fur fa peau, du fon de fa voix, & d’un million d’autres circonftances, il fuffit de s'arrêter à ce qui attire & fixe davantage les regards, au vifage ; on ne peut voir fans étonnement jufqu'où va Ia différence des vifages, quoique formés tous fur le même modéle, c'eft-à-dire, fur le même nombre, 11 même nature, la même forme, le même arrangement de parties ; cette différence ef telle que fi dans la multitude exceffive d'Hommes qui peuplent l'Univers, le hazard pouvoit faire trouver deux vifages qui, placés à côté Y'un de l'autre, fe reflemblaffent affés parfaitement en tout pour ne laifler appercevoir aucune différence qui püt fervir à les diftinguer, ce feroit un des phénomenes de la Nature des plus finguliers & des plus curieux par fa nouveauté. Les variétés qui fe trouvent toûjours dans les individus d'une même efpece, font avouées de la Nature ; 1.° parce qu'elles ne portent de préjudice ni à la conformation parti- culiére & effentielle, ni aux fonctions des parties où elles fe trouvent ; & fr elles euffent été capables de le faire, du moins jufqu'à un certain point, il n'y a pas d'apparence qu'elles euffent jamais été fouffertes : que les cheveux, par exemple, foient d’une couleur ou d’une autre; que la bouche, les yeux, foient un peu plus ou un peu moins fendus, que leur conftruction paroiffe plus ou moins belle, le fond de cette conftruction eft toüjours le même, ainfi que l’ufage de ces parties. Ce qui prouve en fecond lieu que ces efpeces de variétés font dans l'ordre naturel, & qu'elles répondent aux intentions lii i 436 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE & aux vüës du Créateur, ce font les utilités & même les néceflités indifpenfables dont elles font, fur-tout à l'égard des Hommes, attirés les uns auprès des autres par les avan tages de la fociété; & en effet, s'ils étoient tous fi parfai- tement femblables, qu'on ne püût y rien appercevoir de par- ticulier, comment fe reconnoîtroient-ils ? ils auroient les yeux ouverts les uns fur les autres fans fe voir, ou du moins, fans fe diftinguer ; ils feroient auffi peu à portée de le faire que des aveugles ; ils fe perdroient à tout inflant fans fe retrouver, & ce martyre continuel leur feroit d'autant plus. détefter la fociété, qu'elle ne pourroit alors leur fournir les, biens qu'elle leur procure dans la fituation contraire. Les variétés dont il s'agit, c’efl-à-dire, qui purement fu- perficielles, n'attaquent, ne changent, ni ne détruifent le fond de la conformation, toûüjours reconnoiffable d’ailleurs dans chaque efpece ; les variétés, dis-je, dont il s’agit, ne fervent donc qu'à défigner la perfonne de l'individu, & à le diflinguer de tout autre individu de la même clafle, comme la ftruéture eflentielle de l'individu défigne l’efpece dont ik eft, & le diflingue des individus de toute autre efpece. L'ordre naturel demandoit que les variétés & la forme effen- tielle de chaque efpece d'animal fe trouvaflent unies de ma- niére dans un même fujet, qu’elles ne fe nuififlent. jamais, & qu'elles s’offriffent chacune fi diftinétement à la vüë, que d'un coup d'œil on pôt difcerner dans l'inftant & à la fois, la perfonne & l’efpece de l'individu. Mais il eft à remarquer que telles ou telles différences attachées à chaque individu, font variables & accidentelles, &-ne font point partie de fon eflence ; il en eft à peu-près de ces variétés comme des noms arbitraires qu'on impole aux enfants, noms auxquels on en auroit pu fubftituer beau- coup d’autres qui les auroient fait également reconnoiître, & avec lefquels ils auroient toûjours été ce qu'ils font. I! n'en eft pas de même de la forme qui conflituë & diftingue l'efpece particuliére de l'individu, cette forme ca- raétériftique & différentielle eft fixe, permanente, ne peut DAENEMES CURE NI CES UE 42x être fuppléée par rien, & doit toüjours fe maintenir la même & en fon entier dans tous les individus d’une même efpéce. Si les variétés fur lefquelles nous venons de nous étendre, refpectent parfaitement & la conformation naturelle & les fonétions des individus, il n’en eft pas de même de quelques autres variétés, plus rares à fa vérité, mais qui pénétrent aufli bien plus avant dans cette conformation naturelle, &, qui- la ménagent fi peu dans les Fœtus de toutes efpeces pendant les premiers temps de leur formation ou du déve- loppement de leurs parties & dans la fuite, que quand ils fortent chacun de leur prifon, ils fe préfentent fous des for- mes bizarres, diverfes, fouvent éffroyables, hideufes, toûjours étonnantes, & tout-à-fait différentes de celles des Fœtus qui n'ont point dégénéré, & qui repréfentent exactement ceux de la même efpece qui les ont précédés. C'eft-1à ce qu'on appelle vulgairement ÆAouflres, dans lefquels la ftructure naturelle des parties fe trouve toûjours plus ou moins altérée, & par conféquent dont le caractere confifte toûjours dans un vice de conflruétion d’une ou de plufieurs parties.. Il ya tels de ces vices dont les fuites ne tardent guére à être très- funeftes pour le malheureux Foœtus dans lequel ils fe ren- contrent ; d’autres font moins ficheux, mais il n'y en a aucun qui ne produife un dérangement plus ou moins grand dans les fonctions, de maniére qu’à proprement parler, les Monf tres font autant d'exemples des maladies organiques qui peu- vent furvenir à un Foœtus qui ne fait que de naître, & qui m'a point encore vü le jour. | Pour fe convaincre de cette vérité, confidérons ce que c'eft que Maladie organique, ce que dans tous les temps les Médecins ont unanimement entendu par ce mot, quelles font les différences de cette maladie, d’où partent ces diffé- rences, & quelles en font les fuites. Tout vice, tout défaut -dans la flruéture naturelle des parties, qui eft capable de blefier les fonctions, eft une ma- ladie organique; & comme quatre chofes concourent à cette firucture , la figure des parties, la grandeur proportionnelle ; ii ïïj 438 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE des unes à l'égard des autres, leur nombre plus ou moins grand, & leur connexion, toute ftruélure qui péche dans l'un de ces quatre chefs, eft une maladie organique, dont il y a par conféquent plufieurs différences qui fe tirent de ces quatre fources, & qui font autant de maladies organiques. Ne retrouve-t-on pas évidemment dans ce détail tout ce qui conftituë les Monftres, ce qui produit leurs différences ? niera-t-on que ce qui caractérife ces Monftres, foit une conftruétion vicieufe & contraire à celle de la Nature? Or cette conftruction vicieufe eft une maladie défignée telle, non feulement par elle-même, mais encore parce. qu'elle attaque & blefle plus ou moins les fonctions des parties où elle réfide, ce qui eft une marque inconteflable de maladie. C'eft par rapport à cette léfion des fonétions, que la frudure extraordinaire & contre nature de certains Fœtüs monf- trueux, ne leur permet pas de voir le jour, & les fait périr dans le lieu même de leur naiflance ; que d’autres confervent la vie, mais pour très-peu de temps, hors du fein de leurs méres ; que d’autres, & ceux-là font fort rares, vivent, à la vérité, pendant quelques années, mais avec üne fuite d'in- commodités qui leur font pañler la vie triftement, & qui en avancent toûjours le terme. Enfin les fources d'où toutes les maladies organiques tirent leurs différences, font celles-1à mêmes d’où tous les Monftres dont nous parlons, tirent aufit la leur ; & de même qu'on dit communément parmi les Médecins, une maladie par la figure, la grandeur, le nombre, la fituation & la liaifon des parties, on peut dire auffi un Monftre par la figure, par la grandeur, par le nombre, par la fituation & par la liaifon de fes parties. Doute-t-on de cette vérité? il n’y a qu'à confulter les Livres qui ont traité des Monftres, & fur-tout nos Mémoires, on n'y en trouvera aucuns de ceux dont il s'agit préfentement , c'eft-à-dire, formés d’un mâle & d’une fémelle de la même efpece, qui ne foient à la fois & une preuve évidente de ce qui a été dit fur leur nature, & autant d'exemples de chacune des différences puilées dans les fources d'où toutes les maladies DAEISN AS CL EN C'E 5. 439 organiques tirent les leurs : on y reconnoîtra que c’eft à ces maladies qu'ils doivent leur état, leur conftruétion monf- trueufe ; qu'ils ne different des Fœtus naturels qu’en ce que ceux-ci font en fanté pour ce qui regarde la ftruéture de leurs parties, & que les autres font à cet égard non feule- ment de véritables, mais de très-grands malades ; & en eflet, un Fœtus qui n'apporteroit, en venant au monde, qu'une petite difformité, qu'un défaut léger dans la conftruction de quelque partie, ne mériteroit pas pour cela le titre de Monfire, & ne feroit pas regardé comme tel, quand bien même la fonétion de la partie en fouffriroit un peu ; & ce qui prouve que ce font des caufes graves & de différente nature qui viennent attaquer le Foctus dans le fein de fa mere, & qui d’un Fœtus en fanté en font à la fois un Fœtus ma- lade & monftrueux, c’eft que l’on voit communément dans des perfonnes & des animaux fains & bien conformés, naître des vices de conftruction aufli monftrueurx qu'aucuns de ceux qu'on apperçoit dans ce qu'on appelle Monftres. Pour fe convaincre préfentement par des exemples fen- fibles, qu'une ou plufieurs à la fois des différentes efpeces de maladies organiques donnent aux Monftres, dont il s'agit préfentement, la conformation extraordinaire qu'ils ont, en un mot, que tous ces Monftres font autant de grands ma- lades, confultons fur-tout nos Mémoires, & confidérons-y plufieurs defcriptions de Monfires différents. En 1700, M. Méry rapporta l'hiftoire d’un Enfant monf trueux, qui avoit l'Epine du dos contournée de telle forte, que la face, la poitrine & le ventre étant vüûs par-devant, les parties extérieures de la génération, les genoux & les pieds fe trouvoient placés au derriére du corps ; les trois capacités de la tête, de la poitrine & du ventre étoient toutes ouvertes, la voute du crâne manquoit à la tête, le fternum & le cartilage des côtes à la poitrine, & au ventre tous fes mufcles & le péritoine : les parties intérieures étoient auffi extraordinaires & monftrueufes que les extérieures. Je vou- drois bien fçavoir comment on pourroit faire pour ne pas 440 MEMGIRES DE L'ACADEMIE ROYALE reconnoître une maladie organique des plus confidérables dans ce Monftre, qui reçoit à la fois fa conftruction vicieufe de toutes les fources capables, chacune en particulier, de former une maladie organique. Cette maladie va fe retrouver encore évidemment dans les exemples fuivants. En 1703, le même M. Méry rapporta encore à l'Aca- démie l’hiftoire d’un Fœtus monftrueux venu mort d’une Brebis; il étoit fans tête, fans poitrine, fans vertebres, fans queuë, & fans le moindre indice de fexe : tout ce qu'il avoit, c'étoit une efpece de ventre, au bout duquel étoient les cuifles, les jambes & les pieds de derriére du Foœtus. Dans la même année, M. Littre fit voir à l'Académie un petit Chien mort peu de temps après être né, qui n’avoit qu'un œil, fans paupiéres, fitué au milieu de la partie infé- rieure de la face; il n'avoit ni nez, ni gueule, ni aucune ouverture pour y fuppléer. En 1709, M. Méry donna la relation d'un Fœtus hu- main, dont la tête étoit plus petite qu'à l'ordinaire, & la face toute recouverte de poils ; il y avoit au milieu du front une petite protubérance charnuë, au-deflous de laquelle étoit un œil de figure triangulaire, & qui étoit feul : ce Fœtus monftrueux n'avoit ni bouche ni nez. L En 1711, on préfenta à l'Académie un Fœtus humain fans cervelle ni cervelet, ni moëlle épiniére, quoique très- bien conformé d’ailleurs : ce Monfre étoit venu à terme, & avoit vécu deux heures. M. Méry a vû un Fœtus femblable qui a vécu vingt & une heure, & a pris quelque nourriture. En 1712, M. de Vaubonnais envoya la relation d’un Foœtus humain monftrueux, bien atteflée par les Médecins & Chirurgiens de Grenoble, où ce Fœtus naquit mort, & portant fon cœur en dehors, pendu à fon col comme une médaille, de forte que ce cœur pouvoit aller & venir für fa poitrine. En 1713, M. Roüaut rapporta Fhiftoire d’un Fœtus hu- main monftrueux, qui ne vécut que fix heures ; c’étoit un Garçon bien nourri & bien conformé, à la tête près ; les ; différents IAA DYEUSMSTCNE NUC E/ 8 44t différents os qui en font la charpente, n’étoient ni dans fa fituation, ni de la grandeur, ni de la figure ordinaires, & fur le haut de cette têté mal conftruite, étoit un creux rem- pli par une tumeur qui reflembloit à un rognon de bœuf. Cette têté ayant été ouverte, on n'y trouva ni cerveau ni cervelet, & la moëlle de l'épine ne commençoit qu'à la troi- fiéme vertebre du col. En 1715, M. de Lagny fit part à l'Académie d’une Lettre de M. du Puis, Médecin du Roy à Rochefort; il s’y agifloit d’un Agneau monftrueux venu à terme, & qui mou- rut à l'inftant de fa naiflance, parce qu'il n'avoit qu'un feul petit trou placé entre les deux oreilles, par lequel il püût recevoir un peu d'air, & que ce trou, outre qu'il n'avoit point d'entrée dans les poulmons, maïs feulement dans l'œfo- phage, ne pouvoit abfolument point encore donner paflage à aucune nourriture. En 1720, M. Méry donna un Mémoire à l’Académie fur un Foœetus humain monftrueux, qui vint mort à fix mois. IL avoit un tronc de corps très-informe, dont la partie fu- périeure étoit terminée par la premiére vertebre du dos : ce tronc arrondi en-defius, n'avoit ni tête, ni col, ni omoplate, ni clavicules, ni bras. A l'égard des parties internes il n’y avoit ni cœur, ni poulmons, ni ventricule, ni ratte, ni foye, ni véficule du fel, ni pancreas, ni inteftins grêles. En 1716, M.Méry fit voir à l Académie une petite Fille fortie vivante & à terme du fein de fa mere, & qui vécut quatorze heures ; elle avoit un Exomphale monftrueux, où l'on trouva renfermés le foye, la ratte, l'eflomac & tous les inteftins. M. Méry fit voir encore dans le même temps le même Exomphale monftrueux dans un Fœtus mort, fur lequel if ne paroifloit aucune marque de fexe, & qui n’avoit au-de- dans aucune des parties néceffaires à 1a génération, il n'avoit pas même d’anus. Dans la même année, M. Deflandes manda à l'Académie . quil avoit vû à Lanvaux près de Breft, un Enfant d'une Mem. 174 0. . KKkk 442 MEMOIRES DE LACADEMIE ROYALE conformation bien étrange, à qui toutes les articulations, manquoient, & dont le corps n'étoit qu'un os continu, & comme une pétrification des articles, nerfs & ioddnet il n’avoit de mouvement ni dans le poignet, ni dans le coude, ni dans l'épaule, ni dans Ja hanche, ni ailleurs; fes yeux &c fes paupiéres étoient fixes. Il avoit vingt-deux à vingt-trois mois, il fouffroit perpétuellement, pleuroit & crioit toujours, On voit dans quelques Auteurs la figure d’un Enfant pé- trifié, qui avoit été trouvé dans le cadavre d’une femme de la Ville de Sens en 1 5 8 2 ; elle étoit àgée de foixante-huitans,. & avoit porté, dit-on, ce Monftre pendant vingt-huit ans. En1:1717, M. Littre montra à la Compagnie un Fœtus humain monflrueux, né à fept mois, & mort quelque temps avant fa naiflance; il n'avoit point de nez, & n’avoit qu'un œil placé au milieu de la partie Ca rs du front, ce Montre avoit pourtant deux fourcils qui avoient confervé: leur place ordinaire, ce qui faifoit que l'œil en manquoit ; cet œil étoit un compofé de deux petits yeux renfermés fous une même enveloppe : le cerveau de ce Fœtus étoit fondu & femblable à une bouillie claire, dans laquelle on ne put obferver aucune forme de partie. A l'égard des Monflres qui viennent au Ma avec un: plus grand nombre de parties que n'en a & n'en doit avoir un Foœetus naturellement conformé, les exemples en font très- multipliés, & fe préfentent dans toutes les elpeces d'animaux, & fur-tout dans ceux dont les fémelles portent à la fois beau- coup de Fœtus. Quelques-uns de ces Monftres ont deux têtes à côté l’une de l'autre, & du refte paroiflent tout-à-fait femblables, du moins extérieurement, à un Fœtus ordinaire. Tels font , & le Monfire dont j'ai donné la defcription en 1724, & plufieurs autres pareils rapportés par différents Auteurs. Quelques Monftres, outre les deux têtes qui fe trouvent à côté l'une de l'autre fur un même corps, ont encore quatre jambes & quatre bras. Entx6sr, le $.me Juillet, il en eft né un femblable dans le Wirtemberg ; différents Auteurs en rapportent aufii nn en, 2 Li mg Nr « DEN sx 1 C1 E NC ES 443 d’autres de même nature. On voit encore des Monfires à deux têtes, quatre bras & quatre jambes, qui different des précédents par l'endroit de la jonétion des deux Fœtus dont ils ont été formés ; car cette jonétion s’y étant faite à la partie inférieure du ventre, les deux têtes de ces deux Foœtus ne s'y trouvent pas à côté lune de l'autre, mais aux deux extrémités du Monftre auquel elles appartiennent ; tel eft celui que M. du Verney a publié en 1706, & dont il a été parlé dans notre premier, Mémoire fur les Monftres. D'autres, tout-à-fait femblables à celui-ci & plus anciens, fe trouvent encore décrits par différents Auteurs. I y a auffi des Monitres qui n'ont qu'une tête & deux corps avec toutes les parties qui doivent naturellement accompagner chacun de ces corps ; tels ont été un petit Liévre monftrueux, ou deux Liévres joints enfemble depuis la tête jufqu'à la poitrine, que feu mon Pere fit voirenr700 à l'Académie, & qui n’avoient qu'une tête & qu'une face, quoiqu’ils euflent quatre oreilles. Le même fait monftrueux a aufli été obfervé fur des Fœtus humains. M. Winflow a rapporté à l Académie qu'il avoit vü à l'Hôpital général une Fille bien formée, à cela près qu'elle avoit à la région épigaftrique là moitié inférieure & les extrémités inférieures d’un autre corps. Ce fait avoit déja été obfervé par d’autres, non fur une Fille, mais fur un Homme, de la région épigaftrique duquel fortoit un autre corps d'Homme qui n'avoit ni tête, ni bras. Mol Feu M. Y Abbé de Louvois donna en 170 6: à l'Académie, la defcription & la figure d’un Monitre qui a bien du rapport au précédent ; c'étoit une Fille bien formée, qui en portoit une autre beaucoup plus petite, fans tête, & jointe à elle, poi- trine contre poitrine, depuis la partie fupérieure du fternum, où les clavicules font articulées, jufqu’au cartilage xiphoïde, . de forte que tout le refte étoit féparé, & que les deux pieds de la petite repofoient fur le haut des cuiffes de l'autre. Enfin, fuivant les endroits par lefquels deux Fœtus fe joignent & fe pénétrent plus ou moins profondément par la KKKk i 444 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE preflion dans la matrice, il s’y fait une perte ou une confer- vation plus ou moins grande de certaines parties tant externes qu'internes, & le Monflre qui en réfulte, arrive toûjours avec plus de parties que n'en a un Foœtus unique & natu- rellement conformé. Pour ce qui eft des Monftres qui péchent par le contraire, c'eft-à-dire, par le défaut de quelques parties, outre ceux de cette efpece que nous avons déja rapportés & recueillis des Mémoires de l’Académie, différents Auteurs nous en four- nifient encore beaucoup d'exemples. On a vüû à Paris, fui- vant le rapport de Licetus & d’autres encore, en 1528 & 1531, un Homme & une Femme venus au monde fans bras, & qui avoient trouvé le fecret de faire par le moyen d’autres parties & avec une adrefle admirable, beaucoup de chofes que font les autres avec leurs bras & leurs mains. On a encore vü à Paris en 1573, fuivant les mêmes Auteurs, un Enfant de neuf ans, fans jambes, qui n'avoit que deux doigts à la main droite, & qui préfentoit encore d'autres difformités. Enfin, jai fait voir il y a peu de temps à Académie, deux Mains monftrueufes, avec lefquelles un Homme, nouvellement mort à l'Hôtel-Dieu, étoit venu au monde ; il n’y avoit à l'une de ces deux mains que deux doigts, & que trois à l'autre. Ë Tous ces Monftres qui péchent par les parties qu'ils ont de trop ou de moins, fervent également à faire connoïtre que le nombre de celles que la Nature nous a accordées, eft le feul qui nous convienne, & qu'au de-là & en de-çà de ce nombre, les fonctions fouffrent toûjours plus ou moins : & en effet, avec ce nombre naturel de parties, nous exécutons aifément toutes les efpeces de mouvements qu'exigent nos beloins; mais quand il arrive que quelques-unes de ces par- ties manquent, comme elles étoient eflentiellement deftinées à certains ufages, on ne jouit plus des avantages qu'elles devoient procurer ; ou fi par hazard on vient à bout d'en jouir à la faveur de quelques autres parties qu'on a appris à remplacer celles qu'on auroit dû avoir, & qu'on n'a point, D ES S4CA EN CE $. 445 elles ne le font toûjours qu'imparfaitement, d’une façon --embarraffante, & après avoir été dreflées avec peine & à la longue aux mouvements particuliers que celles qui 'man- quent, euflent naturellement & facilement exécutés. * Enfin, quand le nombre des parties excede celui qui a été fixé par la Nature, & cela, foit que deux Fœtus diftinds foient unis par quelques endroits, foit que feulement quel- ques parties furnuméraires fe trouvent avec celles qui font naturellement partie de Findividu, on conçoit, & l’expé- rience fait aufil connoître que des Fœtus qui devroient être féparés , s'incommodent & fe gênent perpétuellement dans leurs fonétions par leur union forcée ; & que des parties de trop, dont un organe n'a nullement befoin pour fes mou- vements particuliers, ne font alors qu'interrompre ces mou- vements, ou en rendre l'exécution plus difficile & plus pé- nible : d'ailleurs rarement arrive-t-il dans les Monftres qui péchent par le trop grand nombre de parties, qu'il ne fe trouve pas encore un défaut, une bizarrerie dans la ftruéture de leurs parties internes, ce qui multiplie & aggrave les in- convénients qu'entraine après foi le vice réfultant du nombre excédent de certaines parties. À Je pourrois rapporter ici bien d'autres Monftres contenus dans nos Mémoires & ailleurs, mais mon deflein n’a été que de faire voir par quelques échantillons de chacune des efpeces de Monftres, iffus d’un mâle & d’une fémelle femblables, ce qu'on pourra reconnoître encore dans ceux qui n'ont point été rapportés, c'eft-à-dire, qu'ils tirent tous leurs différences d'où les maladies organiques tirent auffi les leurs, de la figure, de la grandeur, du nombre, de la fituation & de la liaifon des parties ; qu'enfin ils font tous autant d'exemples de cha- que efpece de ces maladies. Pour ce qui regarde préfentement les exemples particuliers . de vices de conftruétion qui furviennent tous les jours à des perfonnes faines & bien conformées, & qui font réelle- ment auffr monftrueux qu'aucuns de ceux qu’on apperçoit dans ce qu'on appelle Monffres ; confidérons combien de KKkk ii 446 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE gens deviennent exceflivement courbés ou bofius par-devant & par-derriére, & cela de maniére que la tête eft quelque- fois à moitié cachée ! combien de jambes fe contournent en-dehors ou en-dedans! Et pour faire voir par un exemple fenfible jufqu'où peut aller la courbüre de l'épine & celle des os des cuifles & des jambes, je ne puis mieux faire que de renvoyer à la lelure des obfervations de M. Méry fur le Squelete d’une jeune Femme âgée de feize ans : ces ob- fervations & la figure du Squelete monftrueux fe trouvent dans les Mémoires de l'Académie de l'année 1 706. Parmi les Loupes qui fe forment tous les jours fous nos yeux, il y en a beaucoup qui {ont fi petites, & qui incom- modent fi peu, qu on ne s'en embarrafle pas ; mais il y en a d'autres très-grofles, & qui pefent fouvent jufqu’à quarante & cinquante livres : j'en ai vü plufieurs de ce volume & de ce poids, pendantes au dos comme une beface. Combien de fois ai-je vû à l'Hôtel-Dieu, des vifages horriblement défigurés par des Ulceres carcinomateux, qui en avoient fi-bien rongé & confommé le nez & Îles parties voifines , qu'on voyoit à découvert le dedans de la bouche & le fond du palais ! M. du Verney le jeune a fait voir à l'Académie en 1703, le Cerveau d’un Bœuf, pétrifié prefqu'en toutes fes parties, & pétrifié jufqu'à égaler la dureté d'un caillou ; le cervelet l'étoit auffi ; la pie-mere étoit comprife dans ce changement général, & toute la mafle enfemble en étoit fi défigurée, qu'on avoit peine à en reconnoître les parties. Un fait fem- blable a été rapporté par Bartholin fur un Bœuf tué en Suéde. L'Hiftoire de l'Académie royale des Sciences de année 1732, fait mention d'un Rein qui formoit une tumeur dure & confidérable dans l'hypogaftre d’une Femme, & qui après fa mort & l'ouverture de l'abdomen, fe trouva pefer trente- cinq livres : la ftruéture naturelle de ce Rein étoit altérée à proportion de fon augmentation prodigieufe en grandeur & en poids, & lon eut encore bien de la peine à démèler d’autres parties de l'abdomen, qui ne tenoient prefque plus DEA SW CHI'E NN CE S 7 rien de l'état naturel, apparemment par la compreffion qu'elles avoient foufferte de la part du rein monftrueux. La même Hifloire de année 173 2, parle d'un Epiploon d'un volume énorme, lequel fut trouvé dans le cadavre d'une Fille, morte à l’âge de foixante-treize ans; cet Epi- ploon peloit treize livres neuf onces, & ce qui en augmen- toit la fingularité, c’eft qu'il étoit fi endurci & fi offifié , qu'il fallut une fcie pour d'ouvrir dans toute fa longueur & fa profondeur, encore n’en vint-on à bout qu'avec peine. En 1700, feu M. Littre fit voir à l Académie une Ratte entiérement pétrifiée ; elle pefoit une once & demie, & appartenoit à un Homme mort d’une chûte à foixante ans. Enfin, on trouve encore un exemple curieux d’offifica- tion dans une obfervation anatomique que feu M. Geoffroy donna à l’Académie en 1706. Entrautres faits qui font partie de cette obfervation, nous nous arréterons à ceux qui furent obfervés à l'ouverture de la Tête d’un mort. Après avoir levé le crâne avec peine, on apperçut 1.° cette mem- brane beaucoup plus épaitle & plus ferme qu'elle ne left ordinairement. 2.° La partie qu'on nomme # faux, étoit prefque offifiée dans toute fa longueur, ou plütôt revêtuë prefque par-tout de lames offeufes, qu’on pouvoit {parer en quelques endroits de la membrane fans la rompre, mais on ne le pouvoit dans d’autres fans détruire la membrane, qu'on ne diftinguoit point du tout dans quelques autres. endroits, de la fubftance offeufe. 3° La pie-mere, plus épaifle qu'à l'ordinaire, avoit prefque la fermeté de la dure-mere. 7 Je demande préfentement fi es exemples de pétrifications & d'offifications qui viennent d’être rapportés, ne font pas de même nature & tout aufli monftrueux que ceux de quel- ques Fœtus, dont une ou plufieurs parties ont été pétrifiées dans le ventre de leurs meres, & qui font arrivés au monde avec des marques évidentes de pétification ou d'offificatior: toute formée, 448 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE S'il y a des Montres fans bras, ou fans quelques autres parties, toute l’Académie a vü en 1703, une Fille de vingt & un an, à qui une gangrene furvenuë après une fiévre, deffécha fi parfaitement les deux mains & les deux bras jufque vers la naiflance du coude, que le tout tomba naturellement, & qu'il ne lui refta que deux moignons, d'un defquels elle fe fervit pour tirer de fa poche fes deux mains qui étoient noires & féches comme celles d’une petite Momie. Si l’on a beaucoup d'obfervations qui prouvent que les chairs & toutes les parties molles du corps, fans en excepter les tuniques des arteres, font fufceptibles d’offification, il y a de même une très-grande quantité d’autres obfervations qui font voir que les os, tout durs qu'ils font & qu'ils doi- vent être, fe ramolliffent plus ou moins, & fe carnifient en quelque maniére. Une Demoifelle de cinquante-cinq ans, que j'ai connuë, tourmentée par une Tumeur carcinomateufe au fein gauche, & par un Rheumatifme effroyable, à force de fouffrir, devint telle peu de temps avant fa mort, qu'auffi- tÔt qu'on la portoit d'un lieu dans un autre, & cela avec toute la précaution poflible pour ne la pas blefler, il s’en- fuivoit toujours la rupture de quelques os. Feu M. Tauvry fit part à l’Académie en 1700, d'une obfervation fur une Femme de vingt-un à vingt-deux ans, qui après avoir fouffert de grandes douleurs dans tout fon corps, à la fuite d'une fiévre, commença par ne pouvoir plus du tout fe foûtenir fur fes pieds, devint contrefaite, & décrut même fi fenfiblement, qu’en dix-huit ou dix-neuf mois de maladie, elle perdit un pied fur fa hauteur : on ne pouvoit la remuer fans que fes os pliaffent, & quand elle fut morte, on les trouva tous plus mous que de fa cire, à l'exception des dents, qui avoient confervé leur dureté naturelle. En:722, M. Petit a donné dans nos Mémoires plufeurs exemples de pareille converfion d'os en chair, c'eft-à-dire, en une fubftance molle, facile à couper, & faignante quand on la coupoit, I DES SCIENCES. 449 Il n’y a perfonne qui ne fente & ne connoiffe Futüité des ongles dont les extrémités des doigts des mains & des pieds font revêtuës ; mais ces ongles, pour être utiles, doi- vent avoir une certaine grandeur , une certaine dimenfion , au de-là de laquelle ils font à charge, incommodent beau- coup, & produifent fouvent de grands maux : nôus!en trou- vons la preuve dans plufieurs excroiflances d'ongles, & par- ticuliérement dans quelques-unes qui fontprodigieufes. Feu M. Denis, Médecin, en rapporte une de cette efpece, dans un Traité intitulé Conferences fur les Sciences, & publié en 1673 : cette excroiflance d'ongles douloureufe. étoit fur- vénué tant aux doigts des mains qu'à ceux des pieds d’un Gentilhomme Florentin, & ces ongles qui fe recourboient comme des griffes de certains oifeaux, ne lui permettoient de marcher qu'avec beaucoup de douleur ; enfin fon mal augmentoit toutes les fois qu'on les lui coupoit. En 1719, M. Rouhaut, premier Chirurgien du Roy de: Sardaigne, envoya à l'Académie une relation & un deffein: des Ongles monftrueux d'une pauvre Femme de Piémont; celui du gros doigt du pied gauche avoit depuis la racine jufqu'à fon extrémité quatre pouces & demi, & plufieurs de ces ongles avoient des inégalités dans leur épaifleur, & quel- quefois des recourbements. Si les parties qui doivent naturellement avoir des ongles, en fouffrent plus ou moins lorfqu'ils paflent de beaucoup une certaine mefure de grandeur, combien d’autres parties ui n'en doivent point avoir, ni rien qui leur foit analogue, doivent-elles fouffrir davantage quand il y naît des efpeces: de Cornes? Skenchius rapporte dans fes obfervations, qu'on: avoit vü dans Palerme pouffer des Cornes femblables à celles d'un Veau, par toutes les parties du corps d’une Fille, c'eft- à-dire, non feulement à la tête & au front, mais aufli dans toutes les jointures des pieds & des bras. On 2 vü naître encore des excroiflances prodigieufes de cette nature dans différentes Playes, & c’eft de cette maniére Mem. 1740. . Lil 450 .MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE qu'au fapport du même Skenchius, il a forti une Corne de couleur noire de la playe d'un Homme de Candie, qui avoit été bleflé au genouil par une fléche : idimus, dit-il, in Creta yulnerato genu fagittä Cornu nigrum prodiffe. Cette formation extraordinaire d’une fubftance de Corne, venué à l'occafion d'une playe, fe trouve parfaitement jufti- fiée par un fait de même nature, décrit & envoyé par le Cardinal de Médicis au Pere Libelli Maitre du Sacré Palais à Rome; on trouve cette defcription dans le traité déja cité des Conférences fur les Sciences. M s'y agit d'un Homme de montagne, âgé de foixante-dix ans, fous la jointure de la jambe droite duquel il ÿ avoit une Corne venuë d’une playe qu'il avoit négligée pendant trois ans ; la matiére qui en fortoit, devint d'abord épaifle comme de la colle, & s'étant enfuite endurcie, il s'en forma une efpece de Corne longue d'environ une palme, & dont la grofieur, qui étoit de deux pouces vers la racine, alloit toüjours en diminuant peu-à-peu : cette Corne arrachée deux ans après avoir paru pour la pre- miére fois, étoit revenuë plus grofle que devant, & avoit été coupée une feconde fois. On ne finiroit jamais fi l’on vouloit décrire toutes les efpeces de maladies organiques qui peuvent être mifes en parallele avec ce qu'on appelle Monftres, ou plütôt avec ce qui en fait le caractere : les exemples rapportés dans ce Mé- moire fuffifent pour faire voir que fi chacune des maladies que ces exemples défignent, fe trouvoient dans un Fœtus {ortant du fein de fa mere, elles en feroient autant de Monf- tres qui ne différeroient de ceux que nous avons vû le de- venir par ces mêmes maladies, qu'en ce que le tout s’eft pañlé fucceffivement fous nos yeux par différentes caufes accidentelles, & que les Fœtus monftrueux ne fe font: pré- fentés que quand le mal a été tout formé, de maniére qu'it ne nous a été poffible d’appercevoir, ni la métamorphofe du Foëtus naturel en Fœtus monftrueux, ni l'action des caufes qui l'ont opérée, ni Ja méchanique de cette opération. 0 DES S:CTIENCES. 45 Il eft cependant vrai que tel vice de flruéture peut fe former dans la matrice, qui ne fe feroit jamais ailleurs : ce n'eft pas que ce qui conftituë les Monfires ordinaires, foit moins un, vice de ftruéture, une maladie organique, que ce qui conftituë ceux que nous mettons de niveau avec ces Monftres, &:qui le font devenus fous nos yeux ; les Monf tres proprement dits, font au contraire tout au moins auffi malades que les malades mêmes que nous leur comparons, & à confidérer exactement la chofe , ‘ils le font ordinaire- ment davantage ; mais c’eft que les circonftances qui fe trou- vent dans un cas, ne fe rencontrent pas de même dans un autre ; deux germes, par exemple, preflés l'un contre l'autre en des fens différents par les parois de la matrice, qui eft leur habitation, pourront par la molleffe, la flexibilité & le peu de réfiftance de leurs parties, s'unir en différents fens, & produire des compofés monftrueux, que des corps orga- nilés & plus folides, preflés de la même maniére les uns contre les autres, ne feroient jamais capables de produire, & qu'ils produiront toüjours aufli d'autant moins, qu'ils ne peuvent jamais fe trouver dans une pareïlle habitation qui influë très-fpécifiquement fur la formation de ces fortes de Monftres. ‘4 Concluons de tout ce qui a-été dit, 1.° Qu'en confé- quence des vüés que Auteur de la Nature paroît manifefte- ment avoir euës, & des loix qu’on voit encore évidemment qu'il s’eft impofées dans la génération fucceflive des diffé- rentes efpeces d’Animaux, il eft impoffñble qu'il ait jamais voulu produire des Œufs monftrueux, c'eft-à-dire, des ger- mes caractérifés par quelques-uns des vices de conformation, qui font de véritables maladies organiques, en un mot des germes originairement & eflentiellement malades. 2.° Que l'idée particuliére qui vient d’être donnée de la nature pro- re des Monftres, bien-loin de favorifer le moins du monde le fyfteme des Œufs monftrueux, déclare au contraire avec la derniére évidence, que tous les Monftres font venus Lil ÿ 452 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE d'Œufs naturels & bien conformés, fur les parties defquels, différentes caufes de maladie ont enfuite porté leur aétion, comme elles le font auffi tous les jours & {ous nos yeux fur des adultes jouiffants d’une bonne fanté, & qui en conféquence des différentes efpeces de maladies organiques qui leur furviennent enfuite, & que nous voyons naître & croître exceflivement, ne font pas moins des Montres, &c n’en méritent pas moins le nom, que les Fœtus monftrueux auxquels on le donne, & qu'on voit clairement encore par ce parallele n'être point originairement monftrueux, mais Têtre devenus après coup. DE Ss S C'TE N°c Es. 453 EX PaBiR d'ENI CE: S MUR id ROBES NU BOL EL Par M. DE BurFroN. A NT été chargé par AL. le Comte de Maurepas, de travailler conjointement avec M. du Hamel fur Les Bois de conffruétion, j'ai penfé qu'il éroir effenriel de faire des expériences Jar la réfiflance du bois ; & ayans communiqué ce Projet à M. du Hamel, ile dir que ces recherches ne pourrotent être que très-uriles, mais que comme 1l n'avoir prefque rien Jait Ur cetté matiére, à qu'il n'avoir que quelques expériences fort impayfairés, tl une prioir de me charger feul de ce travail. : Le principal ufage du Bois dans les Bâtiments & dans Îes | . conftructions de toute efpece, eft de fupporter des fardeaux : la pratique des ouvriers qui 'employent, n’eft fondée que fur des expériences, à la vérité fouvent réitérées, mais toû- jours aflés grofliéres ; ils ne connoïflent que très-imparfai- tement la force & la réfiftance des matériaux qu’ils mettent en œuvre: j'ai tâché de déterminer avec quelque précifion la force du bois, & j'ai cherché les moyens de rendre mon wavail utile aux Conftruéteurs & aux Charpentiers. Pour y parvenir, j'ai été obligé de faire rompre plufeurs Poutres & plufieurs Solives de différentes longueurs. Je donnerai dans la fuite le détail exaét de toutes ces épreuves ; aujour- d'hui je vais en préfenter les réfultats généraux, après avoir dit un mot de lorganifation du bois, & de quelques cir- conftances particuliéres qui ont échappé aux Phyficiens qui fe font occupés de ces matiéres. | : Un Arbre eft un corps organifé, dont fa prete n'eft |. LIT ïüj «are 454 MEMOIRES DE L’'ACADEMHE RoYALE point encore bien connuë : les expériences de Grew, de Malpighi, & fur-tout celles de M. Hales, ont à la vérité donné de grandes lumiéres fur l'œconomie végétale, & il faut avouer qu'on leur doit prefque tout ce qu'on fçait en ce genre ; mais Üans ce genre, comme dans tous les autres, on ignore beaucoup plus de chofes qu'on n’en fçait. Je ne ferai point ici la defcription anatomique des différentes par- ties d’un Arbre, cela feroit inutile pour mon deflein, il me fuffira de donner une idée de la maniére dont les Arbres croiflent, & de la façon dont le bois fe forme. Une femence d’Arbre, un Gland qu'on jette en terre au printemps, produit au bout de quelques femaines un petit jet tendre & herbacé, qui augmente, s'étend, groffit, durcit, & contient déja dès la premiére année un filet de fubftance ligneufe. A l'extrémité de ce petit Arbre eft un bouton qui s’épanouit l’année fuivante, & dont il fort un fecond jet femblable à celui de la premiére année, maïs plus vigoureux, qui groffit & s'étend davantage, durcit dans le mème temps, & produit auffi à fon extrémité fupérieure un autre bouton qui contient le jet de la troifiéme année, & ainfr des autres, jufqu'à ce que l'Arbre foit parvenu à toute fa hauteur; cha- cun de ces boutons eft une femence qui contient le petit Arbre de chaque année. L’accroiffement des Arbres en hauteur fe fait donc par plufieurs productions femblables & annuelles, de forte qu'un Arbre de cent pieds de haut eft compolé dans fa longueur de plufieurs petits Arbres mis bout à bout, le plus grand n’a fouvent pas deux pieds de longueur. Tous ces petits Arbres de chaque année ne chan- gent jamais de hauteur, ils exiftent dans un Arbre de cent ans fans avoir groffi ni grandi, ils font feulement devenus plus folides. Voilà comment fe fait l'accroifflement en hau- teur ; l'accroiflement en grofleur en dépend. Ce bouton qui fait le fommet du petit Arbre de la premiére année, tire fa nourriture à travers la fubflance & le corps même de ce petit Arbre; mais les principaux canaux qui fervent à con- duire la féve, fe trouvent entre l'écorce & le filet ligneux : MT. rs mg ré TE SE é DEN SEL SIGUTMENN, CUE .S, 455 l'action de cette féve en mouvement dilate ces canaux & és fait grofir, tandis que le bouton en s'élevant, les tire & les allonge ; de plus, la féve en y coulant continuellement, dépofe des parties fixes qui en augmentent la folidité, ainfi dès la feconde année un petit Arbre contient déja dans fon milieu un filet ligneux en forme de cone fort allongé, qui eft la production en bois de Ia premiére année, & une couche ligneufe aufi conique, qui enveloppe ce premier filet & le furmonte, & qui eft la produétion de la feconde année, La troifiéme couche fe forme comme la feconde: il en eft de même de toutes les autres qui s’enveloppent fucceffive- ment & continuëment, de forte qu'un gros Arbre eft un compofé d'un grand nombre de cones ligneux qui s’enve- loppent & fe recouvrent tant que l’Arbre groffit; lorfqu’on vient à l'abbattre, on compte aifément fur la coupe tranf- verfale du tronc le nombre de ces cones, dont les fe&ions forment des cercles concentriques, & on reconnoit l’âge de Arbre par le nombre de ces cercles, car ils font diftincte- ment féparés les uns des autres. Dans un Chêne vigoureux, lépaifleur .de chaque couche eft de deux ou trois lignes ; cette épaifleur eft d'un bois dur & folide, mais la fubftance qui unit enfemble les cones ligneux, n’eft pas à beaucoup près aufli ferme, c’eft la partie foible du bois, dont l'orga- nifation eft différente de celle des cones ligneux, & dépend de la façon dont ces cones s’attachent & s’'uniflent les uns aux autres, que-nous allons expliquer en deux mots. Les canaux fongitudinaux qui portent la nourriture au bouton, non feulement prennent de l'étenduë & acquiérent de la foli- dité par l'action & le dépôt de la féve, mais ils cherchent encore à s'étendre d’une autre façon, ils fe ramifient dans toute leur longueur, & pouflent de petits fils comme de petites branches, qui d’un côté vont produire l'écorce, & de l’autre vont s'attacher au bois de l'année précédente, & forment entre les deux couches du bois un tiffu fpongieux qui, coupé tranfverfalement, même à une aflés grande épaifeur, laifle voir plufieurs petits trous, à peu-près comme 456 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE on en voit dans de la dentelle : les couches du boïs font donc unies les unes aux autres par une efpece de réfeau : ce réfeau n’occupe pas, à beaucoup près, autant d'efpace que la couche ligneufe, il na que demi-ligne ou environ d’'épaif- feur ; cette épaifleur eft à peu-près la mème dans tous les Arbres de même efpece, au lieu que les couches ligneufes font plus ou moins épaifles, & varient fi confidérablement dans la même efpece d’Arbres, comme dans le Chêne, que j'en ai mefuré qui avoient trois lignes & demie, & d'autres qui n'avoient qu'une demi-ligne d'épaiffeur. Par cette fimple expofition de la texture du bois, on voit que la cohérence longitudinale doit être bien plus confidé- rable que l'union tran{verfale ; on voit que dans les petites piéces de bois, comme dans un barreau d’un pouce d'épaif- feur, s’il fe trouve quatorze ou quinze couches ligneules, il y aura treize ou quatorze cloifons, & que par conféquent ce barreau fera moins fort qu'un pareil barreau qui ne con- tiendra que cinq ou fix couches & quatre ou cinq cloifons: on voit auffi que dans ces pétites piéces, s’il fe trouve une ou deux couches ligneufes qui foient tranchées, ce qui arrive fouvent, leur force fera confidérablement diminuée ; mais le plus grand défaut de ces petites piéces de bois, qui font les feules fur lefquelles on ait fait des expériences, c'eft qu'elles ne font pas compolées comme les groffes piéces, la pofition des couches ligneufes & des cloïfons dans un bar- reau eft fort différente de la pofition de ces mêmes couches dans une poutre, leur figure eft même différente, & par conféquent on ne peut pas eflimer la force d'une groffe piéce par celle d’un barreau. Un moment de réflexion fera fentir ce que je viens de dire. Pour faire une poutre, il ne faut qu'équarrir l'arbre, c'eft-à-dire, enlever quatre fegments cylindriques d'un bois blanc & imparfait qu'on appelle aubier, le cœur de l'arbre, la premiére couche ligneufe, refte au milieu de la piéce, toutes les autres couches enveloppent la premiére en forme de cercles ou de couronnes cylindriques, le plus grand de ces cercles entiers a pour diametre l'épaifleur de la re DIE IS 1$ CM EN C:E s. 457 de Ja piéce, au de-là de ce cercle tous les autres font tran- chés, & ne forment plus que des portions de cercles qui vont toûjours en diminuant vers les arrêtes de la piéce; ainfr une poutre quarrée eft compofée d’un cylindre continu de bon bois bien folide, & de quatre portions angulaires tran- chées d'un bois moins folide & plus jeune. Un barreau tiré du corps d’un gros arbre, ou pris dans une planche, eft tout autrement compofé ; ce font de petits fegments longitudi- naux des couches annuelles, dont la courbüre eft infenfible, des fegments qui tantôt {e trouvent pofés parallelement à une des furfaces du barreau, & tantôt plus ou moins in- clinés, des fegments qui font plus où moins longs & plus ou moins tranchés, & par conféquent plus ou moins forts ; de plus, il y a toûjours dans un barreau deux pofitions, dont l'une eft plus avantageufe que l'autre, car ces fegments de couches ligneufés forment autant de plans paralleles. Si vous pofés le barreau en forte que ces plans foient verticaux, il réfiftera davantage que dans une pofition horifontale, c’eft comme fi on faifoit rompre plufieurs planches à la fois, elles réfiftroient bien davantage étant pofées fur le côté que fur le plat. Ces remarques font déja fentir combien on doit peu compter fur les Tables calculées, ou fur les formules que différents Auteurs nous ont données de la force du bois qu'ils n'avoient éprouvée que fur des piéces dont les plus groffes étoient d’un ou deux pouces d’épaiffeur, & dont ils ne donnent ni le nombre des couches li gneufes que ces barreaux contenoient, ni la pofition de ces couches, ni le fens dans lequel fe font trouvées ces couches lorfqu'ils ont fait rompre Je barreau ; circonftances cependant eflentielles, comme on le verra par mes expériences, & par les foins que je me fuis donnés pour découvrir les effets de toutes ces différences. Les Phyficiens qui ont fait quelques expériences fur la force du bois, n'ont fait aucune attention à ces inconvénients, mais il y en a d'autres, peut-être encore plus grands, qu'ils ont aufli négligé de prévoir & de prévenir. Le jeune bois eft moins fort que le bois plus âgé ; un barreau tiré du pied Mem, 1740. »° Mmm 458 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE d'un arbre réfifle davantage qu'un barreau qui vient du fommet du même arbre; un barreau pris à la circonférence, près de laubier, eft moins fort qu'un pareil morceau pris au centre de arbre ; d’ailleurs le degré de defféchement du bois fait beaucoup à fa réfiflance, le bois vert cafle bien plus difficilement que le bois fec ; enfin le temps qu'on employe à charger les bois pour les faire rompre, doit auffi entrer en confidération, parce qu'une piéce qui foûtiendra pendant quelques minutes un certain poids, ne pourra pas foûtenir ce mème poids pendant une heure, & j'ai trouvé que des poutres qui avoient chacune fupporté fans fe rompre, pendant un jour entier, neuf milliers, avoient rompu au bout de cinq à fix mois fous la charge de fix milliers, c'eft- à-dire, qu'elles n’avoient pas pu porter pendant fix mois les deux tiers de la charge qu'elles avoient portée pendant un jour. Tout cela prouve aflés combien les expériences que l'on à faites fur cette matiére, font imparfaites, & peut-être cela prouve auffi qu'il n’eft pas trop aifé de les bien faire. Mes premiéres épreuves, qui font en très-grand nombre, n'ont fervi qu'à me faire reconnoître tous les inconvénients dont je viens de parler. Je fis d’abord rompre quelques barreaux, & je calculai quelle devoit être la force d'un bar- reau plus long & plus gros que ceux que j'avois mis à l'é- preuve, & enfuite ayant fait rompre de ces derniers, & ayant comparé le réfultat de mon calcul avec la charge actuelle, je trouvai de fi grandes différences, que je répétai plufieurs fois la même chofe fans pouvoir rapprocher le calcul de -Texpérience ; j'eflayai fur d’autres longueurs & d’autres grof- feurs, l'événement fut le même : enfin je me déterminai à faire une fuite complette d'expériences qui pût me fervir à dreffer une Table de la force du bois, fur laquelle on pourra compter, & que tout le monde pourra confulter au befoin. Je vais rapporter en auffi peu de mots qu’il me fera pof- fible, la maniére dont j'ai exécuté mon projet. J'ai commencé par choifir dans un canton de mes Bois, cent Chènes fains & bien vigoureux, aufli voifins les uns DES SCIENCES. 459 des autres qu'il a été poflible de les trouver, afin d'avoir du boïs venu en même terrein ; car les arbres de différents pays & de différents terreins ont des réfiftances différentes, autre inconvénient qui feul fembloit d'abord anéantir toute lutilité que j'efpérois tirer de mon travail. Tous ces Chênes - étoient auffi de la même efpece, de l’efpece commune qui produit du gros gland attaché un à un ou deux à deux fur la branche, les plus petits de ces arbres avoient envi- ron 2 pieds + de circonférence, &les plus gros $ pieds, je les ai choifis de différentes groffeurs, afin de me rappro- cher davantage de l’ufage ordinaire ; lorfqu'un Charpentier a befoin d’une piéce de $ ou 6 pouces d'équarriflage, il ne la prend pas dans un arbre qui peut porter un pied, la dépenfe feroit trop grande, & il ne leur arrive que trop fou- vent d'employer des piéces où ils faiflent beaucoup d’aubier; car je ne parle pas ici des folives de fciage qu'on employe quelquefois, & qu'on tire d'un gros arbre, cependant il eft bon d’obferver en paflant, que ces folives de fciage font fort mauvaifes, & que l’ufage en devroit être profcrit. On verra dans la fuite de ce Mémoire, combien il eft avanta- geux de n'employer que du bois de brin. * Comme le degré de defléchement du bois, fait varier très-confidérablement celui de fa réfiftance, & que d’ailleurs il eft fort difficile de s’affürer de ce degré de defléchement, & que de deux arbres abbatus en même temps, l'un fe def féche en moins de temps que l’autre, j'ai voulu éviter cet inconvénient qui auroit dérangé la fuite comparée de mes expériences, & j'ai cru que j'aurois un terme plus fixe & plus certain, en prenant le bois tout vert. J'ai donc fait couper mes arbres un à un à mefure que j'en avois befoin; le même jour qu'on abbatoit un arbre, on le conduifoit au lieu où il devoit être rompu, le lendemain des Charpentiers l'équarrifloient, & des Menuifiers le travailloient à la var- loppe; afin de lui donner des dimenfions exactes, & le fur- lendemain on le mettoit à l'épreuve. « Voici en quoi confiftoit la machine avec laquelle j'ai fait Mmm i} 460 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE le plus grand nombre de mes expériences. Deux forts Tré- teaux de 7 pouces d'équarriflage, de 3 pieds de hauteur & d'autant de longueur, renforcés dans leur milieu par un bon bois de bout; on pofoit fur ces Tréteaux les deux extré- mités de la piéce qu'on vouloit rompre. Plufeurs boucles quarrées de fer rond, dont la plus groffe portoit près de 9 pouces de largeur intérieure, & étoit d’un fer de 7 à 8 pouces de tour ; la feconde boucle portoit 7 pouces de lar- geur, & étoit faite d'un fer de $ à 6 pouces de tour, les autres plus petites ; on pañloit la piéce à rompre dans la: boucle de fer, les groffes boucles fervoient pour les grofles piéces, & les petites boucles pour les barreaux. Chaque boucle à la partie fupérieure avoit intérieurement une arrête bien limée, de la largeur de 2 ou 3 lignes ; cette arrête étoit faite pour empêcher la boucle de s'incliner , & aufli pour faire voir la largeur de fer qui portoit fur les bois à rompre. A la partie inférieure de cette boucle quarrée, on avoit forgé deux crochets de fer de même grofieur que le fer de la boucle ; ces deux crochets fe féparoient, & formoient une boucle ronde d’environ 9 pouces de diametre, dans laquelle on mettoit une clef de bois de même grofieur & de 4 pieds de longueur. Cette clef portoit une forte Table de 1 4 pieds de longueur fur 6 pieds de largeur, qui étoit faite de folives de 5 pouces d'épaifieur, mifes les unes contre les autres, & retenuës par de fortes barres : on a fufpendoit à la boucle par le moyen de la groffe clef de bois, & elle fervoit à placer les poids, qui confiftoient en trois cents quartiers de pierre, taillés & numérotés, qui pefoient chacun 25, 50, 100, 150 & 200 livres; on poloit ces pierres fur la Fable, & on bätifloit un maffif de pierre large & long comme la Table, & auffi haut qu'il étoit néceffaire pour faire rompre la piéce. J'ai cru que cela étoit affés fimple pour pouvoir en donner une idée fans le fecours d’une Figure. On avoit foin de mettre de niveau la piéce & les Tré- teaux, que l’on cramponnoit, afin de les empêcher de re- culer : huit hommes chargeoïient continuellement la Table, DES SCIENCES. 461. & commençoient par placer au centre les poids de 200 Ii- vres, enfuite ceux de 1 50, ceux de 100, ceux de so, & enfin au-deflus ceux de 2$ divres. Deux hommes portés par un échaffaud fufpendu en l'air par des cordes, plaçoient les poids de $o & de 25 livres, qu'on n'auroit pu arranger depuis le bas fans courir rifque d’être écrafé ; quatre autres hommes appuyoient & foûtenoient les quatre angles de la Table, pour l'empêcher de vaciller & pour la tenir en équi- libre ; un autre avec une longue Regle de bois, obfervoit combien la piéce plioit à mefure qu'on la chargeoit, & un autre marquoit le temps & écrivoit la charge, qui fouvent, s'eft trouvé monter à 20, 25, & jufqu'à près de 27 milliers de livres. J'ai fait rompre de cette façon plus de 1 00 piéces de bois, tant poutres que folives, fans compter 300 barreaux, & ce grand nombre de pénibles épreuves a été à peine fufifant pour me donner une Echelle fuivie de la force du bois pour toutes les grofleurs & longueurs ; j'en ai dreflé une Table, que je réferve avec tous les détails pour nos Aflemblées particuliéres, on verra combien les Tables de M. Mufichen- broeck & des autres Phyficiens qui ont travaillé fur cette matiére, font différentes de la mienne. Afin de donner une idée plus jufte de cette opération, je vais rapporter ici le procédé exact de l'une de mes expé- riences, par laquelle on pourra juger de toutes les autres. Le 4 Avril 1740, j'ai fait abbattre un Chêne de près de 5 pieds de circonférence ; le même jour je l'ai fait amener, & travailler par des Charpentiers ; le Jendemain des Me- nuifiers l'ont réduit à 8 pouces d'équarriflage & à 1 2 pieds de longueur. Ayant examiné avec foin cette piéce, je jugeai qu'elle étoit fort bonne, elle n’avoit d'autre défaut qu'un petit nœud à l’une des faces. Le fur-lendemain 6 Avril j'ai fait pefer cette piéce, fon poids fe trouva être de 409 livres; enfuite l'ayant paflée dans la boucle de fer, & ayant tourné en-haut la face où étoit le petit nœud, je fis difpofer la piéce de niveau fur les Tréteaux, elle portoit de 6 pouces. Mmm if 462 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fur chaque Tréteau; cette portée de 6 pouces étoit celle des piéces de 12 pieds ; celles de 24 pieds portoient de 12 pouces, & ainfi des autres, qui portoient toüjours d’un demi-pouce par pied de fongueur : ayant enfuite fait gliffer la boucle de fer jufqu’au milieu de la piéce, on foüleva à force de leviers la Table, qui feule avec les boucles & la clef, peloit 2500 livres. On commença à 3 heures $ 6 mi- nutes : huit hommes chargeoient continuellement la able; à s heures 39 minutes la piéce n'avoit encore plié que de 2 pouces, quoique chargée de 16 milliers; à $ heures 45 minutes elle avoit plié de 2 pouces +, & elle étoit chargée de 18soolivres ; à s heures $ r minutes elle avoit plié de 3 pouces, & étoit chargée de 21 milliers; à 6 heures une minute elle avoit plié de 3 pouces +, & elle étoit chargée de 23625 livres; dans cet inftant elle fit un éclat comme un coup de piftolet, auffi-tôt on difcontinua de charger, & la piéce plia d'un demi -pouce de plus, c'eft-i-dire, de 4 ouces en tout. Elle continua d’éclater avec grande violence pendant plus d'une heure, & il en fortoit par les bouts une efpece de fumée avec un fiflement. Elle plia de près de 7 pouces avant que de rompre abfolument , & fupporta pen- dant tout ce temps la charge de 23625 livres. Une partie des fibres ligneufes étoit coupée net comme fi on l'eüt fciée, & le refte s'étoit rompu en fe déchirant, en fe tirant, & laiflant des intervalles à peu-près comme on en voit entre les dents d'un peigne ; l’arrête de la boucle de fer qui avoit 3 lignes de largeur, & fur laquelle portoit toute la charge, étoit entrée d’une ligne & demie dans le bois de Ja piéce, & avoit fait refouler de chaque côté un faifceau de fibres, & le petit nœud qui étoit à la face fupérieure, n'avoit point du tout contribué à la faire rompre. J'ai un Journal où il y a plus de cent expériences auff détaillées que celle-ci, dont il y en a plufieurs qui font plus fortes. J'en ai fait fur des piéces de 10, 12, 14, 16, 18, 20,22, 24,26 & 28 pieds de longueur, & de toutes groffeurs depuis 4 jufqu'à 8 pouces d'équarrifiage, & j'ai =. sil D ES 1S1C/MIEIN C'E'Ss | 463 toûjours pour une même longueur & groffeur, fait rompre trois ou quatre piéces pareïlles, afin d’être affüré de leur force. La premiére remarque que j'ai faite, c’eft que le bois ne cafle jamais fans avertir, à moins que la piéce ne foit fort petite ; le bois vert cafe plus difficilement que le bois fec, -& en général le bois qui a du reffort, réfifte beaucoup plus que celui qui n’en a pas : F'aubier, le bois des branches, celui du fommet de la tige d’un arbre, tout le bois jeune eft moins fort que le bois plus âgé. La force du bois n’eft pas proportionnelle à fon volume ; une piéce double ou qua- druple d’une autre piéce de même longueur, eft beaucoup plus du double où du quadruple plus forte que la premiére ; par exemple, il ne faut pas quatre milliers pour rompre une piéce de 1 0 pieds-de longueur & de 4 pouces d’équarriffage, & il en faut 10 pour rompre une piéce double, & il faut 26 milliers pour rompre une piéce quadruple, c'eft-à-dire, “une piéce de 1 o pieds de Jongueur fur 8 pouces d’équarrifiage. IL en eft de même pour la longueur; il femble qu'une piéce de 8 pieds, & de même groffeur qu'une piéce de 1 6 pieds, doit par les regles de la méchanique, porter jufte le double, & cependant elle porte beaucoup plus du double. Je pourrois donner les raifons phyfiques de tous ces faits, mais je me borne à donner des faits : le bois qui dans le même terrein croit le plus vite, eft le plus fort ; celui qui a crû lentement, & dont les cercles annuels, autrement les couches ligneufes, font minces, eft plus foible que l'autre, J'ai trouvé que la force du bois eft proportionnelle à fa pefanteur , de forte qu'une piéce de même longueur & grof. feur, mais plus pefante qu'une autre piéce, fera auffi plus forte à peu-près en même raifon. Cette remarque donne les moyens de comparer la force des bois qui viennent de différents pays & de différents terreins, & étend infiniment l'utilité de mes expériences ; car lorfqu'il s'agira d’une conf- truétion importante, ou d'un ouvrage de conféquence , on pourra aifément, au moyen de ma Table, & en péfant des piéces, ou feulement des échantillons de ces piéces, s’aflürer 4647MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de la force du bois qu'on employe, & on évitera le double inconvénient d'employer trop ou trop peu de cette matiére, que fouvent on prodigue mal-à-propos, & que quelquefois on ménage avec encore moins de raifon. On feroit porté à croire qu'une piéce qui, comme dans mes expériences, eft pofée librement fur deux Tréteaux, doit porter beaucoup moins qu'une piéce retenuë par les deux bouts, & infixée dans une muraille, comme font les poutres & les folives d’un bâtiment ; mais fi on fait réflexion qu’une piéce, que je fuppofe de 24 pieds de longueur, en baiffant de 6 pouces dans fon milieu, ce qui eft fouvent plus qu'il n'en faut pour la faire rompre, ne haufle en même temps que d’un demi-pouce à chaque bout, & que même elle ne haufle guére que de 3 lignes, parce que la charge tire le bout hors de la muraille, fouvent beaucoup plus qu'elle ne le fait haufler, on verra bien que mes expériences s’appli- quent à {a pofition ordinaire des poutres dans un bâtiment : la force qui les fait rompre, en les obligeant de plier dans le milieu & de hauffer par les bouts, eft cent fois plus confi- dérable que celle des plâtres & des mortiers qui cedent & fe dégradent aifément, & je puis affürer, après l'avoir éprouvé, que la différence de force d’une piéce pofée fur deux appuis & libre par les bouts, & de celle d’une piéce fixée par les deux bouts dans une muraille bâtie à l'ordinaire, eft fr petite, qu'elle ne mérite pas qu'on y fafle attention. J'avouë qu'en retenant une piéce par des ancres de fer, en la pofant fur des pierres de taille, & en la chargeant par- defflus d’autres pierres de taille dans une bonne muraille, on augmente confidérablement fa force. J'ai quelques expé- riences fur cette pofition, dont je donnerai les réfultats dans un autre Mémoire. J'avouëérai même de plus que fi une piéce étoit invinciblement retenuë & inébranlablement contenuë par les deux bouts dans des enchâtres d’une matiére inflexible & parfaitement dure, il faudroit une force prefqu'infinie pour la rompre; car je démontrerai que pour rompre une piéce ainfi pofée, il faudroit une force beaucoup plus grande que DES SCIENCES. 465$ que la force néceflaire-pour rompre une piéce de bois de bout, qu’on tireroit ou qu'on prefleroit fuivant fa longueur. Dans les bâtiments & les contignations ordinaires, {es piéces de bois font chargées dans toute leur fongueur & en différents points, au lieu que dans mes expériences toute la charge eft réunie dans un feul point au milieu : cela fait une différence confidérable, mais qu'il eft aifé de déterminer au jufte ; c'eft une affaire de calcul que je renvoye à nos affem- blées particuliéres, il me fuffira d’obferver ici que cela ne change rien à la fuite ni aux réfultats phyfiques de mes expé- riences, feulement je tirerai de ces recherches géométriques une Table calculée pour les différentes portées & épaiffeurs des Planchers, qui fera fort utile aux Charpentiers & aux Architectes, & il ne paroît pas poffible de rapprocher da- vantage la phyfique de Ia pratique. Pour eflayer de comparer les effets du temps fur la ré- fiftance du bois, & pour reconnoître combien il diminuë de fa force, j'ai choifr quatre piéces de 18 pieds de longueur fur 7 pouces de grofeur ; j'en ai fait rompre deux, qui en nombres ronds ont porté 9 milliers chacune pendant une heure : j'ai fait charger les deux autres de 6 milliers feule- ment, c'eft-à-dire, des deux tiers, & je les ai laïflé ainft chargées, réfolu d’attendre l'événement. L'une de ces piéces a caflé au bout de cinq mois & 26 jours, & l’autre au bout de fix mois & 17 jours. Après cette expérience, je fis tra- vailler deux autres piéces toutes pareilles, & je ne les fis charger que de la moitié, c'eft-à-dire, de 45 00 livres : je les aï tenu pendant plus de deux ans ainfi chargées, elles n'ont pas rompu, mais elles ont plié affés confidérablement ; ainfi dans des bâtiments qui doivent durer long-temps, il ne faut donner au bois tout au plus que la moitié de 1a charge qui peut le faire rompre, & il n’y a que dans des cas preffants & dans des conftruétions qui ne doivent pas durer, comme lorfqu'il faut faire un Pont pour pafler une Armée, ou un Echaffaud pour fecourir ou aflaillir une Ville, qu'on peut. hazarder de donner au bois les deux tiers de fa charge. Mem. 1740. . Nan 466 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Je ne fçais sil eft néceflaire d’avertir ici que j'ai rebuté plufieurs piéces qui avoient des défauts, & que je n'ai com- pris dans ma Table que fes expériences dont j'ai été fatisfait. J'ai encore rejetté plus de bois que je n'en ai employé; les nœuds, le fil tranché & les autres défauts du bois font afés aifés à voir, mais il eft difficile de juger de leur effet par rapport à la force d’une piéce, il eft für qu'ils la diminuent beaucoup, & j'ai trouvé un moyen d’eftimer à peu-près la diminution de force caufée par un nœud. On f{çait qu'un nœud eft une efpece de cheville adhérente à l'intérieur du bois, on peut même connoitre à peu-près par le nombre des cercles annuels qu'il contient, la profondeur à laquelle il pénetre : j'ai fait faire des trous en forme de cone & de mème profondeur dans des piéces qui étoient fans nœuds, & j'ai rempli ces trous avec des chevilles de même figure; j'ai fait rompre ces piéces, & j'ai reconnu par-là combien les nœuds ôtent de force au bois, ce qui eft beaucoup au de-là de ce qu'on pourroit imaginer : un nœud qui fe trou- vera ou une cheville qu'on mettra à la face inférieure, & fur-tout à l'une des arêtes, diminuë quelquefois d’un quart la force de la piéce. J'ai auffi eflayé de reconnoître par plufieurs expériences, la diminution de force caufée par le fil tranché du bois. Je fuis obligé de fupprimer les réfultats de ces épreuves, qui demandent beaucoup de détail ; qu'il me foit permis cependant de rapporter un fait qui paroîtra fingulier, c’eft qu'ayant fait rompre des piéces courbes, telles qu'on les employe pour la conftruction des Vaifleaux, des Domes, &c. j'ai trouvé qu'elles réfiftent davantage, en oppo- fant à la charge le côté concave : on imagineroit d’abord le contraire, & on penferoit qu'en oppofant le côté convexe, comme la piéce fait voute, elle devroit réfifter davantage; cela feroit vrai pour une piéce dont les fibres longitudinales feroient courbes naturellement, c’eft-à-dire, pour une piéce courbe, dont le-fil du bois feroit continu & non tranché ; mais comme. les piéces courbes dont je me fuis fervi, & prefque toutes celles dont on fe fert dans les conftructions, DOR S OIC RE NC ES. 467 font prifes dans un arbre qui a de l'épaifleur, la partie in- térieure de ces couches eft beaucoup plus tranchée que Îa partie extérieure, & par conféquent elle réfife moins, ce qui fe confirme par les expériences que j'en ai faîtes, & que je donnerai féparément. .… Il fembleroit que des expériences faites avec tant d’ap- pareil & en fi grand nombre, ne devroient rien laifler à defirer, fur-tout dans une maticre auffi fimple que celle-ci, cependant je dois convenir, & je l'avouërai volontiers, qu'il refte encore bien des chofes à trouver ; je n’en citerai que quelques-unes qui doivent faire le fujet d’un Mémoire que je donnerai dans Ja fuite. J'ai cherché fe rapport de Ia force de la cohérence longitudinale du bois, à {a force de fon union tranfverfale, quelle force il faut pour rompre, & quelle force il faut pour fendre une piéce. Je donnerai une Table fur la réfiftance du bois dans une pofition très-différente de celle que fuppofent mes expériences ; pofition cependant aflés ordinaire dans les bâtiments, & fur laquelle ïl eft très- important d'avoir dés régles certaines, je veux parler dés bois retenus par une feule de leurs extrémités : j'y joindrai plufieurs faits intéreffants fur la réfiflance de quelques autres matiéres. Quoique ce travail foit fort avancé, comme il ef dur & pénible, je fuis bien-aife de prendre aujourd’hui des engagements que je refpecte infiniment, & qui feuls fuffiront pour me faire vaincre Jes dégoûts inféparables de l'affiduité & de la patience que cet ouvrage exige. 12 Novemb. 1740. 468 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE DB C RIAPTLONLE T''USSEAMEME D'UN NOUVEL INSTRUMENT Pour obferver en Mer les hauteurs, à les diflances des Affres. Par M. GRANDIEAN DE Foucuy. ERsoNNE n'ignore de quelle importance il eft que les Inftruments dont on fe fert pour obferver en Mer, foient exaéts ; d’une obfervation bien ou mal faite dépend quelquefois le falut ou la perte d’un ou de plufieurs Vaiffeaux, & toùjours le plus ou le moins de certitude que l'on a de conferver ou de perdre la route que l’on s'eft propolé de -tenir, & fi quelque chofe peut paroître furprenant, c'eft que malgré tous ces motifs, ce ne foit que depuis environ huit ans qu'on ait commencé à voir entre les mains des Pilotes d’autres Inftruments que la Flèche, le Quartier Anglois, & quelques autres prefqu’auffi anciens que la Marine, & done les défauts étoient connus de tout le monde. Je n’entreprendrai point ici de faire le détail & la def cription de ces anciens Inftruments, on la trouve dans prefque tous les Livres de Navigation, je ne parlerai que de ceux qui depuis très-peu d'années ont commencé à pa- roître & à faire efpérer de l’exaétitude dans les obfervations faites en Mer. Au commencement de 1732, je commu- niquai à l'Académie quelques idées que j'avois euës fur la perfection du Quartier Anglois, feul inftrument auquel on pôt alors fe fier dans la Marine; car je ne crains point de dire que la Flèche ou Arbaleftrille, malgré l'attachement qu'ont pour elle bien des Pilotes, ne fera jamais qu’un Inftru- ment très-imparfait, & avec lequel on ne peut faire que des obfervations encore plus imparfaites. D'ES,:S CIE N CES. { 469 La correction que je voulois faire à cet Inflrument , confiftoit à fupprimer en entier le petit arc, à fubftituer à la pinnule du centre un petit miroir plan fixé au centre de TInftrument, & perpendiculaire au rayon o du grand are, & enfin à mettre au lieu de la pinnule oculairé où mobile, une alhidade tournant autour du centre, & chargée d’une lunette difpofée de maniére que fon ouverture fût moitié libre aux rayons qui y venoient directement de fhorifon, & moitié expofée à ceux du Soleil que le petit miroir y renvoyoit, & auquel on tournoit le dos; en faifant joindre enfemble l'image du Soleil & celle de lhorifon, l’alhidade marquoit fur le limbe le nombre des’ degrés. de fa hauteur, & c'eft, je crois, la premiére fois qu'on ait employé une feule lunette pour repréfenter à la fois deux objets éloignés Yun de l'autre. La defcription de ce nouveau Quartier fe trouve imprimée dans, le Recueil des Machines de l’Aca- -démie, publié par M. Gallon. Pendant ce même temps, & fans que j'en fufle en aucune maniére informé, M. Hadley Vice-Préfident de la Société Royale de Londres, travailloit de fon côté fur le même fujet, & venoit de donner un Inftrument de fon invention, dans Jequel il employoit le même principe de la lunette repré- fentant deux objets à la fois; mais ayant rencontré de la difficulté dans l'exécution, il en Ôta prefqu’auffitôt la lunette, & le réduifit à ne fervir qu'avec une pinnule ; & comme il avoit deflein de lemployer non feulement à obferver’ des hauteurs du Soleil, mais encore des diftances d’Etoiles fixes à la Lune, il en fit conftruire un de 4 pieds + on s pieds de rayon, afin que la grandeur fuppléit à ce que la fouftrac- tion de la lunette lui faifoit perdre d’exactitude, ce qui pour- tant n'a eu lieu que cette feule fois, parce que depuis ce temps on les a réduits à un médiocre volume, abandonnant entiérement les obfervations des diflances des Etoiles à Ja . Lune, que la grandeur exceffive de l’Inftrument rendoit im- pratiquables. La defcription de ce Quartier fe trouve dans les Tranfaétions Philofophiques, N.° 420, & dans un petit Nnaniï 470 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE Ouvrage imprimé en 1739, chés Lambert, & compofé par M: Daprès de Mannevillette Officier des Vaifleaux de la Compagnie des Indes. Depuis ce temps il s'eft encore formé quelques Inftru- ments dans le même goût, mais de conftruction différente, comme le Quartier Prifmatique de M. Smith, celui de M. Ealton, &c. defquels je ne parlerai point ici, parce que les fuffrages fe font réunis en faveur du Quartier de M. Hadley, que les Marins ont regardé comme le plus expéditif & le meilleur. Ceux de nos Académiciens qui font allés au Pérou, furent chargés d’emporter avec eux un de ces Quartiers, & d’en examiner les ufages & l'utilité; ils manderent qu’ils en avoient été très-fatisfaits, mais que cependant à plufieurs égards, celui que j'avois propofé à l'Académie en 1732, & qui étoit garni de lunette, {eur paroïfloit devoir être fupérieur. Sur la fin de l’année derniére, M. du Hamel, de cette Académie, m'engagea à reprendre mon travail fur cette ma- tire, & peu de temps après, M. le Comte de Maurepas, à qui rien n'échappe de ce qui peut contribuer à l'avance- ment des Sciences & du Commerce, & à la gloire de Ia Nation, me chargea de Île continuer avec attention, & de tâcher d’ajufter des lunettes aux Inftruments de Marine, pour les mettre en état de fervir, tant aux obfervations des hau- teurs du Soleil, qu’à celles des diftances des Etoiles à la Lune. Animé du defir de me rendre digne de l'honneur que m'avoit fait ce Miniftre, en me confiant une recherche de laquelle je fentois toute l'importance, j'oubliai que j'entre- prenois de travailler après un des plus illuftres Membres de la Société Royale de Londres, & dont le nom feul, dans toute autre circonftance, neût fait regarder comme une chofe impofñble, de renchérir fur ce qu'il avoit fait. Je n'appliquai donc férieufement à examiner les diffé- rents Inftruments inventés jufqu'à préfent, les principes fur lefquels leur conftruétion étoit fondée, & fur-tout le point de précifion auquel ils pouvoient atteindre dans Ia pratique. DE SU: SLCULE:N CuE.Ss, | 4x Un point efientiel à leur conferver, étoit limmobilité refpective des deux objets dont on vouloit obferver la dif tance, je veux dire que les images de deux objets éloignés, par exemple du Soleil & de lhorifon, étant une fois jointes enfemble, il falloit qu'elles fuflent inféparables, malgré. Le mouvement que le Nävire pouvoit communiquer à l’inftru- ment, & qu'elles ne pufient fe détacher l’une de l'autre que par le mouvement de l'alhidade, Pour cela il falloit, ou que les deux objets fuflent vûs par réflexion, & c'eft le cas du Quartier de M.Smith, ou que l’un des deux étant vü directe- ment, l’autre le fût par une double réflexion, comme dans celui de M. Hadley. Je n'eus pas de peine à adopter cette dernicre confiruc- tion dans laquelle les Etoiles dont, on veut mefurer la diftance à la Lune, font vüës directement, & par-là bien plus nettement que fi leur lumiére étoit affoiblie par une réflexion, fans compter qu'il eft bien plus aifé de pointer directement à l'Etoile que l’on cherche, que de la trouver dans une lunette qu'il faut pointer où {Etoile n'eft pas, & je m'y déterminai d'autant plus volontiers, que M. Hadiey ayant propolé d'abord de conftruire fon nouvel Inftrument à lunette, je croyois, en fuivant cette route, n'avoir que peu ou point de difficultés à vaincre. Je n'ignorois pourtant pas qu'en fe fervant de lunette, it n'étoit pas aifé de conferver limmobilité parfaite aux objets l'un à l'égard de l'autre, mais je me flattois que je pourrois trouver quelqu'expédient qui me tiféroit de cet embarras, & je me déterminai à en faire l'expérience. Dans cette vüë, je conftruifis un modéle d’Inftrument à lunette avec deux miroirs plans, tel qu'il eft décrit dans les Tranfiétions Philo- fophiques, N.° 420, & je ne fus pas long-temps à m'apper- cevoir de Ja raifon pour laquelle M. Hadley avoit fupprimé les lunettes de fes inftruments, pour leur fubftituer des pin- nules. Dès que je voulus obferver des diftances d'Etoiles à la Lune avec cet inftrument » je remarquai qu'au lieu de voix le Croiffant de Ja Lune, dont je voulois ob{erver fa diftance 472 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE à Vénus; au lieu, dis-je, de voir ce Croiflant feul, il m'en paroïfloit quatre, deux defquels étoient fi égaux en lumiére, qu'il étoit bien difficile de diftinguer Le véritable ; mais ce qu'il y avoit de plus incommode, c’eft que toutes ces images empiétoient les unes fur les autres, à peu-près comme des jettons comptés fur une table, & qu'il étoit totalement im- poffible de diftinguer leurs bords. A mefure que la Lune approchoit de fon plein, & aug- mentoit par conféquent en lumiére, cette incommode mul- tiplication d'images croifloit aufli; dès le premier quartier il en parut d’autres au-deflus & au-deflous, & enfin dans la pleine Lune j'en comptai jufqu'à douze, qui formoient comme une rofe de lumiére, dans laquelle on ne diftinguoit aucun bord, & où il n’eût prefque pas été poffible d’apper- cevoir aucune Etoile. Il me fut aifé de trouver la raifon de cette apparence; Îes miroirs dont je m'étois fervi, étoient plans & de glace éta- mée , ainft il fe faifoit une réflexion des rayons de l'objet lumineux fur chacune des furfaces du premier miroir, ce qui produifoit deux images, chacune defquelles fe doublant par a même raifon dans le fecond, il en revenoit à l'œil quatre au fieu d’une feule, & quand l’objet étoit fort lumineux & vû par un rayon très-incliné, le nombre des images augmen- toit aufli, à peu-près comme quand on regarde très-oblique- ment dans un miroir une bougie placée près de la glace de ce miroir. Mais sil étoit facile de trouver la raifon de cette appa- rence, il n'étoit pas fi aifé de remédier à l'inconvénient qui en réfultoit ; il falloit pour cela, ou fe fervir de miroirs de métal, qui n'ayant qu'une feule furface, ne pouvoient ren- voyer plufieurs images, ou en fe fervant de miroirs de glace, écarter Îles rayons qui formoient ces. faufles repréfentations, de maniére qu’ils ne puffent venir jufqu’à l'œil. Quoiqu'il paroifie d’abord extrémement fimple d'em- ployer des miroirs de métal au lieu de ceux de glace, je ne crus pas devoir prendre ce parti fans néceflité : outre qu'il eft DES. SLeTEN CE s. 473 eft très-difficile d'en trouver qui foient aflés parfaits pour renvoyer les rayons dans une lunette fans défigurer les ob- jets, l'air marin, toûjours chargé d’une vapeur extrêmement acre & aflés corrofive pour endommager l'étain des miroirs, quand il peut y trouver accès, en eût bien-tôt altéré le poli, à moins que d'employer pour les conferver, des précautions infinies : il fallut donc revenir aux miroirs de glace, & pour cela tâcher d’écarter les rayons qui produifoient toutes les faufles images dont j'ai déja parlé. Cela ne fe pouvoit faire qu’en travaillant les miroirs de maniére que la face antérieure & la face poftérieure de chaque miroir ne fuflent pas paralleles. Je fis donc faire des Miroirs plans, dont les faces étoient un peu inclinées lune à l’autre, par ce moyen les rayons réfléchis par la premiére furface, prenoient une direétion tout-à#fait différente de celle que prenoient les rayons réfléchis par la furface poftérieure où étamée, & ne pouvoient venir jufqu'à l'œil ; mais quelques tentatives que J'aye faites, & quoique j'aye fait conftruire dé ces miroirs de plufieurs inclinaifons différentes, je n'ai jamais: pu parvenir qu'à écarter les unes des autres les images qui formoient cette rofe de Jumicre dont j'ai parlé, & non à les: chafler entiérement de la lunette. L'inclinaifon des faces des miroirs, néceflaire pour les porter hors de l'objectif, eût été trop grande & capable de défigurer les objets totalement, ce qui étoit d’une conféquence infinie, parce que l'objet vû par réflexion, étant allongé à proportion de fon inclinaifon avec le miroir, pendant que l’objet vü directement par la lunette étoit dans fon état naturel, l'inftrument n’auroit Jamais donné une feule hauteur ni une feule diftance exactes. Mais outre cette raifon, ïl y en a encore une feconde qui me détérmina à rejetter entiérement ces miroirs plans à faces inclinées. Fout miroir conftruit de cette maniére, eft un véritable Prifme ; or dès que les rayons ont une fois pañlé par un prifme, quoique par la pofition de fes faces, ou par Finterpofition d'un fecond, on puifle leur rendre leur pa- rallelifme, on ne les remet jamais dans le même état où ils Mem. 1740. + Ooo 474 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE étoient avant d’être rompus, les fept rayons qui compofent chaque trait de lumiére, ont été féparés dans le fens de l'inclinaifon du prifme, & quoiqu’ils foient redevenus paral- leles, au lieu de compofer comme auparavant un' cylindre à bafe circulaire, ils en compoferont un à bafe elliptique, & c'eft la raifon pour laquelle l'objet eft défiguré, eft augmenté dans ce fens. Mais un autre inconvénient qui en réfulte, & qui eft bien plus confidérable, c'eft que quoique ces rayons: ainfr altérés, repréfentent l'objet aflés nettement à la vüë fimple, ils ne font plus fufceptibles des réfraétions qu'ils au- xoient à fubir dans une lunette qui grofliroit les objets tant foit peu, en forte qu'une lunette de 1.6 pouces, telle qu'eft celle de l’Inftrument que j'ai fait conftruire, ne grofliroit pas: Yobjet plus de deux fois, bien-loin de Île rendre aflés net & affés diftinét pour les ufages auxquels ces inftruments font deftinés ; & en effet il feroit affés inutile de leur adapter des lunettes qui, à moins que d'être d’une longueur exceflive, ne pourroient pas groffir davantage les objets, que les plus foi- bles de ces lorgnettes qu'on appelle ordinairement Lunettes: d’opera, & par conféquent ne leur donneroient prefqu'aucun: avantage fur les inftruments à pinnules. Voyant donc que ces miroirs prifmatiques ne pouvoient répondre au deflein que je n'étois propofé, je réfolus d’effayer des Miroirs fphériques ou Verres de lunettes étamés, qui, comme on fçait, ont déja été employés avec fuccès, dans bien des Lunettes catoptriques. Mais quand. je voulus: Jes appliquer à l’inftrument en queflion, j'y trouvai de la: difficulté. Le miroir expofé à la lunette devoit par la conf- truction être incliné à l'axe de la lunette de 67° 30';.or cette inclinaifon augmentant la réfraétion d’un fens, fans l’augmen- ter de l'autre, les objets étoient néceflairement défigurés, &. eneffet dans toutes les Lunettes catoptriques, même dans celles: de M. Newton, on a mieux aimé employer des miroirs plans: & percer les miroirs fphériques, que de les incliner, n’y ayant eu jufqu’ici dans la Dioptrique aucun moyen de remédier à: la confufion des objets qu'auroit produit leur inclinaifon.. DES SCIENCES. 75 Ce füt alors que je compris Ja difficulté de l'entreprife que j'avois formée, que je vis clairement que toutes les com- binaifons de Verres & de Miroirs fphériques, ufitées juqu’à préfent dans la Dioptrique, étoient inutiles pour mon defein, & qu'il m'étoit impoflible d'y réuflir fans imaginer en ce genre quelque chofe de nouveau. Je voulus pourtant encore effayer de faire faire des miroirs qui, au lieu d'être terminés par des portions de la furface d'une fphere, le fuffent par des portions de fphéroïde ellip- tique; en réglant bien la proportion des axes de ce fphéroïde, je pouvois parvenir à conferver, malgré l'inclinaifon du mi- roir, une réfraction égale en tous fens, & par conféquent la netteté de l’objet. J'examinai donc avec foin les différentes manicres de tailler des verres, fuivant quelle feétion conique on veut, qui ont été données par différents Auteurs, & déja je mé- ditois quelques expériences fur la maniére de fimplifier ce travail, lorfqu'il me vint dans l'efprit un expédient qui me mit à portée d'employer des verres & des miroirs fPhériques ordinaires, fans rien craindre de {eur inclinaifon. La raifon pour laquelle un miroir fphérique incliné à Ja Jigne qui joint fon centre & l'œil du Speélateur, défigure es objets, eft que les rayons qui fe trouvent dans le dia metre de ce miroir qui eft incliné, tombent plus oblique- ment fur fa furface que ceux qui fe trouvent dans {a ligne perpendiculaire à ce diametre, & par conféquent fouffrent une plus grande réfraction que ces derniers; ainfi des rayons fe raflemblant les uns plus près & les autres plus loin, il ne fe fera aucune peinture au foyer de ce miroir, qui par cette raïfon ne pourra renvoyer aucune image diftinéte de l'objet auquel il eft expofé, Maïs fi entre ce verre & l'œil on interpofe un verre fphérique de même foyer que le miroir, & incliné d'un même nombre de degrés que lui, mais dans un fens diffé- rent, c'eft-à-dire, de haut en bas, fi le miroir eft incliné de gauche à droite, ce verre rompra davantage les rayons qui 00 i] 476 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Y'étoient moins par le miroir, & moins ceux qui l’étoient davantage, & par conféquent il fe formera un foyer à ce dernier: verre, dans lequel la peinture des objets fe fera comme fi ces verres n'étoient point inclinés, & par ce moyen on peut employer des miroirs fphériques inclinés tant que l’on voudra, fans craindre aucun mauvais effet de leur inclinaifon. Je m'aflürai d'abord du fait par plufieurs expériences, & m'en étant entiérement convaincu par le fuccès qu'elles eurent, je conftruifis un modéle d’inflrument fur ce principe, & le fis exécuter tel que je le vais décrire, par le S.' le Maire le fils, au zéle & à l'attention duquel je ne puis rendre un témoignage trop avantageux. ABC eft un Secteur d'environ 6o degrés, dont € eft le centre; le rayon C B eft de 14 pouces, melure à laquelle je me fuis arrêté pour ne pas rendre linflrument trop em- barraffant ni trop pefant. La tête ou partie qui porte le centre du Secteur, eft terminée dans une portion de fon contour par une circonférence de cercle, mais vers 2), elle s’allonge d'environ 8 pouces, & cette avance eff jointe C3 une régle D X au rayon AC de l'inftrument. Au centre € de l'arc eft placée une alhidade CF, mobile autour de ce centre, & dont l'extrémité V indique fur la divifion de l'inftrument les angles compris entre le point o de cette divifion & la ligne de foi de cette alhidade. Nous aurons lieu dans un moment de parler de la conftruction de cette piéce. Sur le même centre € eft placé un miroir GA fixement attaché für l'athidade, de façon que l'un ne peut remuer fans l'autre. Ce miroir eft compofé d'un verre fphérique plan convexe de 9 pieds + de foyer, étamé par le côté plan, & de 3 pouces de diametre. 1! eft exactement maftiqué dans la boîte qui lui fert de monture, afin que l'air de la Mer ne puifle trouver aucun paflage pour attaquer létain du miroir. Ce miroir eft perpendiculaire au plan de l'infbrument, & placé de telle maniére, que lorfque l'alhidade eft fur le milieu D! ES: CII'E:N C'E $ 477 de l'arc divifé, comme en O, ïl foit perpendiculaire à fa ligne CD, qui fépare en, deux l'avance 1 dont nous avons parlé. x Sur cette même ligne CD, à 4 pouces de diftance du centre C, eft placée une autre monture ZX, dont le centre eft aufli diftant du plan de l'inftrument que celui du miroir GH. Cette monture eft compolée d'un anneau de cuivre de 10 lignes de diametre, dans lequel on à creufé deux feuillures ou portées pour contenir deux verres. Le premier, qui eft du côté D, expofé au miroir GA, eft de 9 pieds 4 de foyer, & eft étamé dans un tiers ou environ de fa furface, le refle demeurant clair. Le fecond, qui fe doit mettre de Jautre côté, eft de 2 pieds 8 pouces de foyer, & n’eft point étamé. Ces deux vèrres font maftiqués'exactement tout au- tour avec leur, monture ; & comme l’étain fe trouve entre deux, Fair marin n'y peut trouver aucun paflage. La Fi. 2 repréfente cette piéce de front & de profil. Cette monture garnie de fes verres, eft placée de forte que fon plan fait un angle de 67° 30’ avec la ligne CD, qui joint les centres des deux miroirs, & elle a une queuë qui traverfe l'inftrument, & qui eft retenué de l’autre côté par un écrou qui la conferve dans la fituation convenable, & permet de l'y remettre quand elle s'en dérange. La piéce AB qui {ert de bafe à la monture, eft double, & la piéce de deflus qui porte cette monture, peut un péu s'incliner fur l’autre au moyen d’une vis £, ce qui fert à mettre le petit miroir 7 Æ dans Îa fituation perpendiculaire au plan de l'inftrument, qu’il doit avoir. Vis-à-vis de ce petit miroir, & dans une ligne inclinée à la ligne CD de 45”, eft fixé un tuyau de lunette porté par deux pieds, l'un attaché vers le limbe, & l'autre fur la ré- gle D. | Ce tuyau fe termine en Æ à.8 pouces ou environ du petit miroir ; il eft garni de deux verres, fçavoir, d'un oculaire de 2 pouces de foyer, & d'un autre verre qui lui fert comme d'objectif, qui eft d'un pied 10 pouces, & | O oo iij Fig. 2. Fig. 78 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE incliné au plan de l'inftrument de 67 degrés 30 minutes. Lorfqu'on voudra fe fervir de cet inftrument, on com- mencera par le vérifier, c'efl-à-dire, par voir fi l’alhidade étant à o, les deux miroirs font paralleles, ce qui fe con- noîtra fi en regardant par la lunette un objet, la partie de cet objet qui eft vüë direétement, n'eft pas plus haute ou plus baffe que celle qui eft vüë par réflexion , en un mot f on ne voit qu'un feul objet continu; & fi au contraire l'objet paroît comme coupé, il faudra remettre le petit mi- roir dans la fituation convenable, au moyen des vis qui le retiennent. Pour lors s'il eft queftion d'obferver la diftance d'une Etoile à la Lune, on commencera par mettre à peu-près l'alhidade fur le degré que l’on croit indiquer cette diflance, & pointant la lunette à l'Etoile, on tournera le plan de Vinftrument de maniére que l'on voye la clarté de la Lune qui la précede de plufieurs degrés, fe répandre dans le champ de la lunette, & alors on fera mouvoir l’alhidade jufqu’à ce que la Lune y entre & vienne fe joindre à l'Etoile, & le nombre des degrés du limbe compris entre le point o de la divifion & la ligne de foi de alhidade, fera la diftance cherchée de 11 Lune à l'Etoile. Et cette obfervation fe peut faire avec tant d'exactitude, qu'ayant pris fouvent deux & trois fois la diftance d’une même Etoile à la Lune, je n'y ai trouvé d'autre différence que celle que je reconnoiflois venir du mouvement propre de la Lune & du changement de parallaxe. La lumiére de la Lune étant fort vive, elle fe peint non feulement fur a partie étamée du petit miroir, mais encore fur la partie claire, en forte que l'on peut faire joindre immédiatement l'Etoile & la Lune, & même faire pañler l'Etoile fur le difque de cette Planete, & la joindre à quelle tache on voudra, car la lunette fait diftinguer aifément toutes les taches un peu confidérables, & c’eft ce qu'il eft difficile de faire avec aucun des inftruments inventés jufqu'à préfent. DES SCIENCES. 479 La lunette augmente huit fois & plus le diametre de {a Lune, & par conféquent pour fe tromper d’une minute, il faudroit fe tromper de 8’, en faifant joindre l'Etoile à fon bord, erreur qu'il eft facile d'éviter. D'où on peut conclurre que l'exactitude de cet inftrument fera de ce chef huit fois. plus grande que celle de tous les inflruments fans lunette, quelque rayon qu'on leur donne. : On peut obferver aifément les diftances de la Lune aux Etoiles de la 1 .r< & de la 2.4< grandeur, & peut-être à quel- ques-unes: des plus brillantes de la 3.m°; mais il feroit im- poffible de fe fervir de moindres Etoiles, elles feroient effa- cées par la lumiére de la Lune. Cette lunette peut, comme les lunettes ordinaires, s’ajufter toutes les vüés différentes, en pouffant ou. en tirant l'ocu- lire, ce qui met une infinité de perfonnes » pour qui les: autres inftruments font inutiles, à portée de fe fervir de: celui-ci. Pour obferver des hauteurs du Soleif, après avoir vérifié Finftrument, on mettra fur le grand miroir un verre enfumé très-foible, qui le couvre tout entier, & de peur que fa premiére furface ne renvoyäât quelque faufle image, on fera. en forte qu'il ne foit pas parallele au miroir ; pour lors on tiendra l'inflrument vertical par fa poignée, & pour l'appuyer plus fermement contre la poitrine, on y ajoûtera une efpece de pied Z, compofé d’un morceau de bois fendu & garni en dedans de velours pour ne pas gâter la divifion, qui faïfit le limbe dans quel point on veut, & eft retenu ferme une vis: on pointera la lunette au point de l'horifon immé- diatement au-deflous du Soleil, & faifant mouvoir l'alhi- dade, on verra l'image du Soleil entrer dans la lunette & fe: joindre à lhorifon, auquel on la fera devenir tangente, & l'alhidade marquera alors fur le limbe le degré de la hauteur de ce bord. Pour s’'affürer fr ona pris a plus petite diftance du Soleil: à l'horifon, on peut agiter légerement l'inftrument à droite: & à gauche, ce qui fera faire au Soleil des ofcillations dans: Fig, 480 MEMOIRÉS DE L'ACADEMIE ROYALE la lunette, & on verra fi dans ces ofcillations fon difque ne mord point fur Fhorifon. Mais pour épargner cette peine à l'Obfervateur, j'ai mé- nagé encore une commodité à cet inflrument : j'ai pris le verre incliné qui eft au bout du tuyau de la lunette un peu plus foible, d’un foyer un peu plus long qu'il n'auroit dû être, & je l'ai incliné davantage, ce qui, fans défigurer l’objet, le rend un peu plus allongé dans fe fens du plan de l'inftru- ment; ainfi le Soleil paroiflant elliptique, il ne faut, pour être für d'avoir pris fa vraye diftance, que remarquer fi Yhorifon eft perpendiculaire à fon grand axe. Je n'ai point encore parlé dans tout ceci de la divifion de l'Inftrument, c’étoit pourtant un point important, & qui méritoit bien que j'y fifle attention. La petitefle du rayon qui n'eft que de 14 pouces, ne me permettoit pas de marquer les minutes, même de deux en deux, fur-tout l'arc de 45° repréfentant le quart-de-cercle, & devant être divifé en 90 degrés. Je n'ignorois pas la divifion du célébre Nonius, renou- vellée de nos jours fur prefque tous les nouveaux Quartiers fabriqués en Angleterre, mais je fçavois auffi que les Marins avoient de la peine à s’en accommoder, & trouvoient qu'il leur étoit embarraffant de s’en fervir, & facile de s’y tromper. Je fouhaitois que l'inftrument ne füt divifé que par points de 20’ en 20’, les divifions en devoient être plus nettes, plus claires & plus füres ; mais pour avoir les divifrons inter- médiaires, il eût fallu, comme dans les inftruments d'Aftro- nomie, ajufter à la lunette un micrometre, & c'eft ce que je ne pouvois faire, tant parce que la lunette de celui-ci n’a point de fils, que parce qu'il n'étoit pas poflible d'arrêter comme fur terre, où l'on jouit d’une immobilité parfaite, V'index de l’alhidade fur le point le plus près de l'angle qu'on cherche, Pour fuppléer donc en quelque maniére au micrometre ordinaire que je ne pouvois émployer, au lieu de placer comme à l'ordinaire, au milieu de la fenêtre de l'alhidade, le fil DES SCIENCES, 481 fil. d'argent dirigé au centre, qui lui fert d'index, j'ai fait porter ce fil à une longue aiguille /e /, mobile fur un clou tourné d tout au bas de lalhidade & fort près du 1imbe : cette aiguille porte aflés près de fon centre de mouvement & dans la partie qui pañle deflus le Timbe de l'inftrument, le fil d'argent g» qui lui fert d’index ; elle eft prefque auf longue que l'alhidade, & fon extrémité vient fe terminer près du centre de l'inflrument fur une piéce de cuivre 7» attachée à l'alhidade, que nous appellerons Le petit limbe, & fur laquelle elle décrit par fon mouvement un arc de cercle. Vers le milieu de fa longueur elle eft pouffée par un reflort opg qui tend à la faire aller de droite à gauche, & contretenuë par une vis /r qui lui permet de céder au reflort, ou qui la pouffe en fens contraire. ‘ Comme la diftance du centre de mouvement de l'aiguille à fa pointe, eft vingt fois plus grande que la diftance de ce même centre à la divifion, il fuit que lorfque le fil index a parcouru 20 minutes fur la divifion de linftrument, la pointe de l'aiguille a parcouru fur le petit limbe un efpace vingt dois plus grand, & qu'en divifant cet efpace en 20: parties, chacune vaudra une minute, & fera aufi fenfible que les 20 minutes l'étoient fur le grand limbe, ce qui donne Ja liberté de les divifer en +, ou efpaces de 1 5 fecondes. Pour fe fervir de cette machine, on mettra avant l'opé- ration, la pointe de l'aiguille fur le o de la divifion du petit limbe, & après l’obfervation faite, on regardera fi le fil index tombe für un point de la divifion du grand limbe ou non; s'il y tombe, le micrometre eft inutile, & l'arc indiqué eft le véritable, mais s'il n’y tombe pas, on tournera la vis juf- qu'à ce que le fil coupe en deux le point de divifion immé- diatement précédent, & pour lors la pointe de l'aiguille in- diquera ce qu'il fant ajouter à ce point pour avoir la valeur de l'arc obfervé. L Cette machine eft d'autant meilleure que l'aiguille ayant fa courfe bornée à 20 minutes, il eft impofible de prendre un point pour l'autre, & de s'y tromper. Mem. 1740, PPP 482 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Pour diftinguer plus précifément quand le fil coupe en deux également le point de divifion, j'ai fait ajoûter une loupe ru au-deffus. Avec toutes ces précautions, il y a tout lieu de croire que l'ufage du nouvel inftrument fera facile & exact. Je fuis néantmoins bien éloigné de penfer que je Faye porté dès la premiére tentative à fa plus grande perfection, c'eft au temps & à l'expérience à nous fournir fur cela des lumiéres. Ce qu'il y a de für quant-à-préfent, c'eft que quoi qu'il arrive, la Dioptrique fera toüjours enrichie d’un nouveau Principe, d'une nouvelle combinaifon de Verres & de Mi- roirs, & qu'on pourra deformais les employer avec quelle inclinaifon l’on voudra, fans craindre de défigurer les objets, ce qui jufqu’à préfent avoit été impoffible. L'utilité même de cette conftruétion ne fe borne pas à la feule Marine, l'Aftronomie en peut elle-même tirer de grands avantages ; elle manque d'inftruments propres à me- furer les diftances, & celui-ci y eft d'autant plus propre, que les deux Aftres étant une fois Joints, ils traverferont tout le champ de la lunette fans fe féparer, ce qui donnera tout le temps de prendre leur diftance avec la plus grande précifion. On peut encore conftruire fuivant ce principe, un Inftru- ment très-commode pour prendre des hauteurs correfpon- dantes. Enfin il y a lieu d'efpérer que ces applications que j'ai faites du nouveau Principe, ne feront pas les feules confé- quences utiles qu'on en tirera. J'ignore jufqu'où elles pourront aller, mais je puis ré- pondre de les fuivre avec le même zéle & Ia même appli- cation que j'ai fuivi celles-ci, & de ne rien négliger pour en tirer toute l'utilité dont elles feront fufceptibles. AODAI pag.4 82 “ER a : a à AS — D K N cé Fig L (1) Î ph, WE ( (I | ” ni ] 17 0? } 17 U// ( HU / y, PU 0) 1 /l ) 1) 07 0 li /} 4 l 0} y} ns y, M 5 ! U// l / { sy, im TT US &. : / NON DES SCIENCES. 483 DIVERSES OBSERVATIONS RENAN NN AT STATS FES Par M. pu HAMEL. 1 NE Guy a pañlé chés les Anciens pour une Panacée ; ils le croyoient bon à tout, & même il a été un des objets de la vénération payenne chés nos anciens Gaulois. On lui attribué encore aujourd'hui de grandes vertus pour la Médecine, & quelques propriétés pour les Arts; il végete d’une façon finguliére. En voilà plus qu’il n’en faut pour attirer l'attention de beaucoup de gens; auffi les Superftitieux, les Artifans, les Médecins & les Phyficiens ont-ils été éga- lement curieux de bien connoître ce végétal. Chacun fa confidéré fous le point de vüë qui l'intérefloit, & on peut dire qu'il y a peu de Plantes qui ayent été examinées avec lus de foin. Pour moi je ne l'ai encore confidéré que du côté de la Phyfique; néantmoïns cet examen m'a fourni plufieurs obfervations finguliéres, qui ne fe trouvent point dans les ouvrages de ceux qui n'ont précédé dans cette recherche, & qui ne me paroiffent pas indignes de l'attention de l’Académie. Il y a certainement différentes efpeces de Guy ; le Pere Plumier en décrit plufieurs dans fon hiftoire des Antilles, qui font très-différentes de notre Guy ordinaire. Mais toutes mes recherches ont été faites fur cette efpece de Guy que Gafpard Bauhin appelle Vifcum baccis albis : c’eft la feule efpece que nous trouvions dans nos Forêts & fur les arbres de nos Vergers. En faut-il une preuve? j'ai femé fur le T'illeul, fur le Saule, fur le Poirier, fur VEpine, des femences que j'avois ramaflées fur des pieds de Guy qui avoient crû fur le Pommier ; elles ont végété fur ces différents arbres avec tout le fuccès que je pouvois defirer. La même efpece de Pppi 484 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Guy peut donc croître très-bien fur des arbres fort diffé- rents : d'ailleurs je n'ai point remarqué de différence confi- dérable , ni dans la figure des feuilles, ni dans la forme des fruits, ni dans le port extérieur des pieds de Guy qui vien- nent fur les différents arbres de nos Forêts. D'où je conclus que c’eft la même efpece qui vient fur tant d'arbres diffé- rents, & je fuis en cela le fentiment le plus généralement reçû des Botaniftes modernes. J'ai commencé mes recherches fur le Guy, par l'examen de fes femences & de leur germination : j'ai enfuite étudié la formation de fes premiéres racines & leur progrès dans l'intérieur des arbres ; puis j'ai examiné l’origine & le déve- loppement fucceflif du tronc, des branches & des feuilles. Enfin m'étant aflüré qu'il y avoit des pieds de Guy mûles, & d’autres qui étoient fémelles, j'ai eflayé de bien connoîtré quelle différence il y avoit entre les uns & les autres. Voilà quel a été l'ordre de mes recherches, & c'eft celui que je fuivrai dans le compte que j'en vais rendre, divifant en au- tant d'articles particuliers ce qui regarde la Germination, ce qui concerne les Racines, ce qui appartient aux Tiges, & ce qui diftingue le Sexe. ARTICLE I. Sur les Semences du Guy, &r leur Germinarion. Suivant les différents Auteurs, le Guy vient fur tous les arbres. Les uns difent lavoir trouvé fur le Sapin, fur Ia Meleze, fur le Piftachier, fur le Noyer, fur le Coignaffier, fur le Poirier franc & fur le fauvage, fur le Pommier fauvage & fur le domeftique, fur le Neffier, fur l'Epine blanche, fur le Cormier, fur le Prunier, fur | Amandiér, fur le Rofier. D'autres difent l'avoir vü fur le Chêne vert & fur le com- mun, fur le Liége, fur le Châtaignier, fur le Noifetier, fur le T'illeul, fur le Bouleau, fur l'Erable, fur le Frêne, for. l'Olivier, fur le Saule, fur le Peuplier noir & fur le blanc, fur l'Orme, fur le Noirprun, fur le Bouis, fur la Vigne, &c. DIÉE 15: M SAC ME. NOCLE NS. 48% Je l'ai trouvé fur le Pfeudo-Acacia, & fur une partie des arbres que je viens de nommer, excepté fur la Vigne & für les arbres réfineux, non plus que fur ceux qui ne quittent point leurs feuilles l'hiver. C’eft fans doute parce que ces fortes d'arbres font rares dans nos environs. Ariftote penfoit que le Guy ne venoit pas de femences : il le regardoit comme une produélion fpontanée, qui étoit produite ou par l'extravafation du fuc nourricier des arbres qui le portent, ou par leur tranfpiration: Prefque tous les Auteurs qui ont écrit fur le Guy, fi on en excepte quelques mo- dernes, ont fuivi le fentiment d’Ariftote, Cependant Théophrafte & Pline avoient affüré que le Guy venoit de femences, mais qui avoient befoin de pañler par l'eftomac des Oiïfeaux pour fe dépouiller d’une qualité froide qui les empêchoit de germer. Comme les femences du Guy ne font pas fort dures, je croirois qu'elles feroient digérées par l’eftomac des oifeaux, fi Boccone n'affüroit qu’il a obfervé que les oifeaux les ren- doient entiéres dans feurs excréments. Je n'ai point de preuve du contraire ; mais les oblervations modernes prouvent que le Guy fe multiplie de femences fans qu'il foit nécefaire qu'elles paflent par l'eftomac des oifeaux. M. Malpighi décrit aflés bien la femence du Guy, & il dit qu'il germe en pouffant deux cornes de deux des angles de fes femences, qu'il dit être triangulaires. Rudolphus Ja- cobus Camerarius Ephemeridum Nature curioforum, dec, 3. an. r.. p.173. ob. 10 6. dit à peu-près la même chofe. M. Ray rapporte que Doodi, Apothicaire de Londres, avoit élevé des pieds, de Guy de femences. Leonhard Frideric Hornung, dans une Thefe foûtenuë en Allemagne, dit avoir femé du Guy fur un Pommier, qu'il y germa en pouflant deux cornes de la bafe du fruit, qu'il s'attacha à la branche & qu'il y fructifia. M. Edmond Barel, dans un Mémoire qu'il a envoyé à M. le Chevalier Sloane, & qui eft imprimé dans les Tranf- actions Philofoph. affüre auffi avoir élevé le Guy de femences, Pppi. 486 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Après avoir parcouru ce que les Auteurs nous ont dit de plus pofitif fur la germination du Guy, je vais rapporter mes propres obfervations. Les fruits du Guy font des bayes molles, ovales, prefque rondes, un peu plus groffes qu'un pois : elles font attachées par un court pédicule au fond d’un calice charnu ; la partie oppofée au pédicule eft un peu applatie, & l'on y apperçoit un petit corps brun, luifant & ovale ; c'eft cette partie du piftile que M. Lineus appelle le fligrate : autour de ce ftigmate il y a quatre petites marques brunes, longuettes, qui indiquent les endroits où les feuilles de la fleur étoient attachées. Quand ces bayes font en maturité, la peau qui les re- couvre eft ferme, blanche, liffe, luifante, demi -tranfparente comme une Perle un peu paffée. En examinant cette peau avec attention, on découvre des fibres blancheîtres qui par- tent du pédicule, & qui s'étendent jufqu'à l'autre bout du fruit, formant des ramifications qui s’anaftomofent les unes avec les autres. Sous cette peau eft une fubftance tranfparente, glutineufe, ou, pour mieux dire, vifqueufe, dans laquelle fe trouve un corps verdâtre applati, qui eft la femence. Pour dégager ces femences de cette matiére vifqueufe qui les recouvre, & qui leur ef fort adhérente, je les ai lavées dans de l’eau chaude : Ja plüpart font triangulaires, il s’en trouve auffi quelquefois d'ovales ou de différente autre figure, ce qui dépend de circonftances particuliéres dont je parlerai dans la fuite. J'ai écrafé de ces bayes fur les branches de différentes efpeces d'arbres, & les femences y font refté attachées par la glu qui les recouvre. Cette glu fe féche bien-tôt, & elle forme une enveloppe aux femences, qui deviennent par le defféchement de la glu plus adhérentes aux branches. Cepen- dant mon expérience fut dérangée par des averfes d'eau, accompagnées de vent, qui détremperent la glu, & qui firent tomber la plus grande partie des femences, fur-tout 4 EE SDS DES SCIENCES. 487 celles qui étoient fur les écorces lifles & nettes de Lichens: quelques-unes néantmoins glifferent fous les branches, & ÿ étant plus à l'abri, y reflerent attachées. C'eft fans doute pour cette raïfon qu'on trouve plus de pieds de Guy attachés fous les branches des arbres que deffus ; & fi l'on remarque que le Guy ne s'attache guére fur les écorces trop lifles & nettes de Lichens, il ne faut pas s’ima- giner que ce foit parce que les racines du Guy auroient trop de peine à traverfer une écorce de cette nature. Au contraire c'eft le cas qui lui conviendroit le mieux, & il périroit fur une écorce galeufe, comme fur un morceau de bois mort, à moins que les premiéres racines ne puflent gagner un in- terftice où elles trouveroient tout d’un coup le vif. Mais après l'obfervation que je viens de rapporter, on fent de refte que les pluyes détacheront plus aifément les femences du Guy, lorfqu'elles feront fur une écorce lifle, que quand elles tiendront à une écorce un peu raboteufe, ou recou- verte de quelques Lichens. Pour empêcher que les pluyes n'emportaflent encore mes femences de Guy, je les pofai dans de petites entailles que je is à l'écorce de grand nombre d'arbres de différentes efpeces, & elles germerent également bien fur tous, excepté fur dé Figuier, où j'en remis inutilement à différentes fois, ce que j'attribuë au lait corrofif qui s’'échappoit des playes que je faïfois pour pofer les femences, & qui vraifemblablement les endommageoit. I n'eft pas furprenant que le Guy germe également bien fur des arbres très-différents : il ne faut que de l'humidité pour faire germer toutes fortes de femences, & celle des pluyes & des rofées fuffit pour la germination du Guy, puifque j'en ai vû germer fur des morceaux de bois mort, fur des teffons de pot & fur des pierres que j’avois feulement tenuës à l'ombre du Soleil. ; J'ai auffi pofé des femences de Guy fur ces vafes de terre à demi-cuits, qui laiffent échapper l'eau peu-à-peu, & fur lefquels on s’eft quelquefois fait un plaifir d'élever de petites 4838 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE falades : elles y ont germé plus promptement, & elles font venuës plus vigoureufes que fur les corps fecs dont j'ai parlé. La tranfpiration du vafe favorifoit donc leur germination : probablement la tranfpiration des arbres ne leur eft pas non plus inutile. Les femences de Guy que j'avois mifes en Février fur les arbres, ont commencé à germer à la fin de Juin. Alors on voit fortir de deux des angles des femences, fi elles font triangulaires, deux petits corps ronds; fi les femences font ovales, il n’en fort qu'un : quelquefois il en fort trois, & même quatre, & alors les femences ont des figures irrégu- liéres. Chaque petit corps rond eft attaché à un pédicule qui part de la fubftance charnuë de la femence à fon infertion : dans cette fubftance charnuë , il y a une rainure qui fait comme fi le pédicule fortoit de deflous une enveloppe. Cette germination eft propre au Guy, & je ne connois encore que cette femence qui produife plufieurs radicules On voit à la vérité très-fouvent deux Amandiers qui ont été produits par une feule amande ; mais on fçait qu'alors il y avoit deux amandes très-diftinétes qui étoient contenuës fous une même enveloppe ligneufe, au lieu que le Guy ne paroïît être qu'une feule femence, dans l'intérieur de laquelle on apperçoit feulement des veines blancheïtres qui fe diri- gent vers les endroits d'où les radicules doivent fortir. Cette multiplicité de radicules eft donc une fingularité propre à la femence du Guy, & elle deviendra plus digne de remarque, quand on fera attention que les radicules d’une même femence ne fortent pas toüjours dans le même temps, ce qui fait qu'il y en a quelquefois une qui n’a qu'une demi- ligne de longueur, pendant que l'autre eft fongue de près d'une ligne & demie ; elles femblent donc végéter à part: on va voir que la longueur des radicules dépend encore de la pofition des femences für les branches. Quand les radicules fe font allongées. de deux lignes ou de deux lignes & demie, elles fe recourbent, & elles continuent de DES SCIENCES. 489 de s’'allonger jufqu'à ce qu'elles ayent atteint le corps fur lequel la femence eft pofée, & fi-tôt qu'elles y font par- venuës, elles ceflent de s'allonger. On voit par-là comment, fuivant les différentes fituations des femences, une radicule d'une même femence fe doit allonger plus que les autres, puifqu'elle peut avoir plus de chemin à faire pour gagner l'écorce ; & à plus forte raifon la même chofe arrivera-t-elle, quand on comparera les radicules de différentes femences. Auïfli entre les femences de Guy que j'avois pofées fur des branches d'arbres, les unes avoient la partie d’où doivent fortir les radicules, tournée du côté de l'écorce ; les radi- cules de celles-ci s’'allongeoient fort peu, elles s'appliquoient tout de fuite fur l'écorce. D’autres femences étoient attachées aux branches par la partie oppofée ; alors les radicules s’allon- geoient environ d’une ligne & demie, puis elles fe recour- boient, & continuant toüjours à s'allonger, elles atteignoient enfin l'écorce, & s’y attachoient. Je fus frappé de cet allongement inégal des radicules, qui dépendoit des circonflances que je viens de rapporter, & je fus tenté de fuivre ce phénomene, & d’effayer de connoître jufqu'où pouvoit aller cet allongement. Pour cela je pofai une femence de Guy, déja germée, fur un petit fupport que j'ajuftai à la tige d’un jeune arbre. Je difpofai la femence fur le fupport, de façon que la courbüre de Ja radicule fût tournée vers le haut, pour qu’elle ne s’atta- chât point au fupport, & je la dirigeai à peu-près vis-à-vis un trou de vilbrequin que j'avois fait à cet arbre. La radi- cule s’allongea dans le trou prefque deux fois plus qu’à l'ordi- naire, le corps globuleux qui la terminoit, noircit avant que d'atteindre le fond du trou, & bien-tôt toute la femence fe deffécha. Je pofai une autre femence fur un pareil fupport, mais en fens contraire ; la radicule n'étant pas pofée du côté de l'arbre, elle fe recourba, elle s’appliqua fur le fupport, & elle y périt. Je vis, il y a deux ans, une radicule de Guy s'allonger une fois plus qu'à l'ordinaire, poux gagner le fond d'un Mem, 1740. -Qqq 490 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE . enfoncement qui étoit fur l'écorce d'un Noyer, elle atteignit le fond de cet enfoncement, elle s’y appliqua, & ce pied de Guy eft encore actuellement aflés vigoureux. J'obmettrois ce que j'ai obfervé de plus fingulier fur {a germination du Guy, fi je nég ligeois de faire remarquer que c'eft la feule femence que je connoiffe encore, dont a radi- cule prend indifféremment toutes fortes de directions. Je m'explique. J'affujettis des Amandes prefque fur la fuperficie de a terre dont j'avois rempli un pot de jardin ; je tins ce pot dans une fituation renverfée, de forte que fon fond étoit en haut, & fon embouchüre en bas ; j'eus foin de tenir la terre de ce pot un peu humeétée, en l'arrofant par les trous qui étoient au fond du pot : mes Amandes poufferent leurs radicules, mais au lieu de fe recourber pour s'enfoncer dans la terre, elles defcendirent en bas, où ne trouvant point de terre, elles périrent. Les Châtaignes, les Glands, les Noix en font tout autant ; & je rapporterai dans un autre Mémoire beaucoup d'expériences qui établiflent conftamment cette tendance des racines vers le bas. Il n’en eft pas de même du Guy : quand j'en ai pofé les femences deflus & deflous une branche, dont la pofition étoit prefque parallele à l'ho- rifon, les radicules des unes & des autres ont toüjours été de gagner la branche ; les femences qui étoient à la partie fupérieure de la branche, courbant leurs radicules vers la terre, & celles qui étoient à la partie inférieure, les cour- bant vers le ciel. Je mis dans le même temps un petit tas de femences de Guy fur un teffon de pot ; elles y germerent, & les radi- cules des femences qui étoient à la fuperficie, fe recour- berent comme pour gagner le teflon, pendant que les fe- mences du deflous du tas recourberent leurs radicules en fens contraire, comme pour s'appliquer fur celles qui les recouvroient. La même chofe n'arriveroit pas à un tas de Glands, de Châtaignes, &c. car, comme Fa remarqué M. Dodart, tous les germes tendroient vers le bas. B'Ers IS Cite) N'ic' Es. * 491 J'ai dit que les radicules du Guy, que j'appellerai doréna- vant les Zrompes, font formées d’une petite boule qui eft foûtenuë par un pédicule qui part du corps de la femence. J'ai encore dit que les trompes s’allongeoïient jufqu’à ce que la petite boule qui les termine, portât fur l'écorce des arbres. Alors le deflous de ces boules s’ouvre comme par la con- traction de l'écorce qui fait l'office d’un fphinéter : elles s'épanouiffent, & elles prennent la figure de l'extrémité d’un cor de chaffe, ou plütôt de la trompe de quelques infectes. C'eft quand elles font dans cet état, qu'elles s'appliquent fortement fur l'écorce des arbres. J'en ai détaché, pour en mieux examiner la ftruéture, & j'ai apperçû, à l'aide d’une Loupe, que ces trompes tenoient à l'écorce par une matiére vifqueule, qui filoitencore quand la trompe étoit éloignée de l'écorce de deux à trois lignes. A l'égard du deflous de ces trompes, ou de l'épanouiffe- ment qui s'applique fur l'écorce, le centre, dans une afés grande étenduë, eft occupé par une chair grenuë & fuccu- lente : autour de cette chair eft une enveloppe affés épaiffe, d’un verd tirant fur le jaune, grenuë, moins fucculente que le milieu, & qui reffemble affés à l'écorce des racines du Guy, ou à la feconde écorce de fes branches. Ces fubftances s'engagent par la fuite dans le bois, & ce font elles qui fournifient les racines. L’écorce la plus extérieure eft mince, d'un verd foncé, un peu raboteufe ; elle paroît plus ferme que celle qu'elle recouvre, elle eft de la même nature & contiguë à l'écorce extérieure des branches & des feuilles ; on nella trouve point fur les racines, mais elle s’épanouit fur l'écorce des arbres, à peu-près comme le fait le pied des Lithophytons fur les rochers. Quand j'ai détaché ces trompes, il m'a paru que la ma- tiére vifqueufe exudoit de toutes les parties que je viens de décrire, mais en plus grande quantité de l'écorce la plus extérieure. Qqqi 92 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Cette vifcofité eft certainement fournie par la jeune plante, & elle n’eft point afpirée de l'arbre où les trompes font attachées, puifque les trompes qui tenoient au vafe perméable à l'eau, dont j'ai déja parlé, en étoient au moins autant pour- vüëés que celles qui s'étoient attachées aux écorces. Quoiqu'il ny eût pas long-temps que ces trompes fe fuffent attachées aux différents corps dont je les détachois, elles y étoient néantmoins déja fort adhérentes, puifque celles qui étoient fur les teflons, en emportoient de la terre avec elles, & que les autres laifloient une impreflion très-fenfible fur l'écorce des arbres. Je remarquai aufli que la fubftance grenuë, de même que l'écorce intérieure, s’étoit moulée fur toutes les rimes & les inégalités des corps qui les foûte- noient, au lieu que l'écorce extérieure s’étoit épanouie fur la fuperficie de ces corps, où elle s’étoit attachée par la vifcofité dont j'ai parlé. Quand les pieds de Guy font en cet état, ils peuvent, pour ainfi dire, être tranfplantés ; car j'en ai plufieurs fois détaché de deflus un arbre, de deffus un pot, de deflus une pierre, je les aï pofés fur d’autres arbres, les trompes fe {ont recourbées de nouveau, elles fe font un peu allongées, & bien-tôt elles étoient aufli adhérentes que fi on ne leur eût jamais touché. II faut cependant que ces jeunes plantes commencent à tirer de la fubftance des arbres, fi-tôt qu’elles y font attachées, puifqu’on les voit devenir en peu de jours plus vigoureufes ; ce que j'ai principalement remarqué fur des pieds que j'avois élevés fur des teflons, qui y avoient langui, & qui fe font bien-tôt rétablis quand je les ai eu tranfportés fur des arbres. Jufque-là l'amande du Guy & un peu d'humidité ont fuffi pour l'allongement des trompes, mais l'amande eft alors épuifée , elle eft prefque réduite à rien ; il faut à la jeune plante, pour produire fa plume, des fecours étrangers & convenables. C'eft dans ce temps, & faute de ces fecours, que les femences qui avoient germé fur différents corps, ont péri. Je vais prouver dans l'article fuivant, que le Guy dérobe cette nourriture aux arbres CRE ee ce DES SCIENCES. 93 auxquels il s'attache, & qu'il la tire comme les Plantes ordi- naires, par les racines qu'il jette dans leur fubftance. ART CELLES De la formarion à du progrès des Racines du Guy. I eft bien naturel que ceux qui ont cru que le Guy n'étoit pas une Plante, ayent penfé qu’il n’avoit pas de ra- cines. Aufli Scaliger a-t-il comparé l'infertion du Guy fur les arbres, à celle des Greffes fur leur fujet, ou à celle des Cornes des animaux fur leur crâne. Mais il eft plus fingulier que des Auteurs qui connoïfloient la germination du Guy, ayent cru aufli qu'il n'avoit pas de racines. M. Ray entr'au- tres, paroït avoir été de ce fentiment. M. Malpighi, cet excellent obfervateur, qui ne s’en tenoit jamais aux apparences, & qui n'a jamais rapporté que ce qu'il a bien vü, décrit à la vérité fort en abbrégé, mais très- pofitivement, les racines du Guy. M. de Tournefort en parle aufli dans fon hifloire des Plantes des environs de Paris; mais il ne dit rien de plus que M. Malpighi. I! paroït cependant que ces deux Auteurs n’ont pas exa- miné le Guy dans fes différents états : ils ont pris probable- ment un pied de Guy tout venu, en coupant Ia branche à laquelle il tenoit, précifément au lieu de l'infertion ; ils ont trouvé les racines du Guy qui étoient engagées dans le bois de Îa branche, & ils en ont conclu qu'elles avoient aflés de force pour pénétrer le bois des arbres auxquels il étoit attaché. Ab his (dit M. Malpighi) minores aliæ exoriuntur radices Tignum penetrantes | & una cm tranfverfalium utriculorum ordi- nibus in medullam deducuntur. De même M. de Tournefort dit: « La radicule du Guy « pénetre dans l'écorce des branches, & s’allonge en fibres « verdâtres qui courent d’abord dans les fibres de l'aubier, & « qui percent enfuite le corps ligneux, s’entrelaçant dans les « Qgqa ii 494 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE » véficules, d'où elles tirent un fuc propre pour leur nour- riture ». À l'endroit où le Guy s'implante fur a branche, on apperçoit prefque toüjours une grofleur, & l'écorce de la branche qui le nourrit, y paroît gercée en plufieurs endroits. Ainfi par fa pofition il refflemble beaucoup à certaines greffes, d'autant plus qu'on n'apperçoit aucune des racines du Guy, elles font toutes recouvertes par les écorces, tant du Guy que de la branche. IL faut donc, pour les appercevoir, lever adroitement les écorces ; mais cette difleétion a fa difficulté, car la dureté des écorces & leur adhérence aux racines du Guy, m'ont empèché de bien connoître ce que je cherchois, jufqu'à ce que je me fois imaginé un moyen qui m'a très-bien réuffi : il eft fimple, il confifte à attendrir les écorces par l'ébulli- tion, & à difléquer les racines avant que le morceau qu'on examine, foit refroidi. Avec cette précaution, on emporte affés aifément écorce, tant du Guy que du fujet ; la partie ligneufe des racines du Guy, qui étoit fimplement engagée dans l'écorce du fujet, refte ifolée, & on voit le refte s'in- férer dans le bois. Enfin, pour peu qu’on y employe d'adreffe, on peut prendre une jufte idée de l'implantation du Guy fur les arbres. C’eft fur des préparations faites de cette façon, que j'ai deffiné les Figures qui font à la fin de ce Mémoire, & je puis affürer que les préparations étoient encore plus nettes que ne le font les Figures. Ce que je viens de dire fur la façon de difléquer les racines du Guy, m'a écarté de mon fujet ; & avant que de le reprendre, je crois qu'il eft à propos de rapporter d’une façon générale la ftruture de l'écorce des arbres ; ce que je dirai dans la fuite en fera plus aifé à entendre. Pour cela, je me contenterai de faire remarquer que cette partie qui fe détache du bois dans le temps de la féve, & qu'on appelle ordinairement l’Ecorce, eft compofée de plu- leurs couches. La plus extérieure eft un épiderme mince. Les autres font formées par des fibres ligneufes qui s'étendent CET PAPE DES, SCIENCES. 495 füivant la Jongueur du tronc, & qui l’enveloppent comme d'un réfeau ; car ces fibres font divifées par faifceaux, qui, en {€ joignant & en fe féparant à diverfes reprifes, forment des mailles qui font remplies par le parenchyme qui fe pro- longe auffi entre les couches : ceci eft commun à toutes les lames de l'écorce, mais celles qui font les plus intérieures, approchent plus de la nature du bois que les extérieures, qui font d'autant plus fucculentes & herbacées, qu'elles appro- chent plus de Fépiderme. Ces généralités fuffifent pour l’in- telligence de ce que j'ai à dire, ainfi je reprends mes {e- mences germées où je les ai laifiées. - J'ai dit dans l'article précédent, que les trompes du Guy fe recourboient & s’appliquoient fortement fur l'écorce des arbres. J'ai ajoûté qu'il m'avoit paru que les racines partoient de la fubflance fucculente & grenuë qui occupe le milieu des trompes, & de l'écorce jaunéâtre qui enveloppe cette fubftance. Nous fuivrons dans un inftant ces racines dans les écorces ; mais je ne puis m'empêcher de remarquer aupara- vant, qu'il femble que Îes trompes du Guy font fur l'écorce des arbres quelque chofe d'approchant de ce que font les trompes de plufeurs infeétes fur quelques végétaux. Un in- fete picque l'écorce d’une plante pour en fuccer la féve, la fuccion fait que le fuc nourricier de la plante fe porte en plus grande abondance à l'endroit de la picquüre , il S'y extravafe, & y forme une groffeur qu'on appelle des ga/les ; on peut confulter fur cela le troifiéme Tome de l’'hiftoire des Infeétes de M. de Reaumur. De même le Guy applique fa trompe fur écorce d’un arbre. La jeune plante commence à introduire fes racines dans cette écorce ; aufli-tôt la féve contenuë dans l'écorce de l'arbre, s’extravafe, il fe forme à cet endroit une groffeur , une loupe, ou, fi l'on veut, une efpece de galle, & cette galle augmente en groffeur à me- fure que les racines de la plante parafite font du progrès. Suivons-le donc ce progrès, & il me fournira l’occafion de dire encore quelque chofe de la groffeur dont il s'agit. Entre les premiéres racines du Guy, il yen a qui rampent 496 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE dans les couches les plus herbacées de l'écorce, & les autres en traverfent les différents plans jufqu'au bois, où elles fe difiribuent de côté & d'autre avec d'autant plus de facilité, que l'écorce n'eft pas fort adhérente au bois dans le temps de la féve, qui eft celui où le Guy végete avec le plus de vigueur. Des racines principales dont je viens de parler, & même de la fouche du Guy, qui fouvent forme un tubercule affés gros, qui eft en partie enchäflé dans le bois, il part d'autres racines qui s'entrelacent dans les couches de l'écorce. Mais je fuis convaincu que les racines du Guy ne pénetrent jamais ni l’aubier ni le bois qui eft formé. IL eft vrai qu'on trouve des racines de Guy qui font engagées d’un travers de doigt, & quelquefois de plus, dans la fubftance dure du bois. Si mème on enleve avec précaution l'écorce d’un jeune pied de Guy, & qu'on détruife pareillement l'écorce de la branche qui lui fournit la nourriture, on voit fouvent que ce pied de Guy refte foûtenu fur fes racines, qui font engagées dans le bois par leur extrémité. Mais fi l'on fait une pareïlle dif- feion fur de vieux pieds de Guy, on les trouve fouvent entiérement enfoncés dans le bois, qui fait même autour une efpece de cale ou un bourrelet aflés confidérable. Ces obfer- vations fembleroient prouver que les racines du Guy péne- tent dans le bois malgré fa dureté ; mais il me paroït que la chofe s’opere bien différemment. Je penfe toûjours que les racines du Guy ne s'épanouiffent que dans l'écorce, où elles trouvent des couches herbacées pleines de fucs, qui leur peuvent fournir la nourriture dont elles ont befoin, & un parenchyme qui eft tendre, & qui ne s'oppofe pas beaucoup à leur extenfion. Si elles rencon- trent le bois, elles fe réfléchiffent comme le font les racines des autres plantes, quand elles rencontrent quelque corps dur qui s’oppofe à leur paflage. Alors les racines du Guy che- minent entre les lames de l'écorce, elles fe replongent vers le bois, puis fe réfléchiffent de nouveau ; & c'eft ainfr que { forment les entrelacements dont j'ai parlé. Mais comme les # L rs rt en A A NSEET R EEE SERV E 3 DES ScrENCES, 497 - Tes lames intérieures de l'écorce font deftinées à faire dans {a fuite de nouvelles couches de bois, ces lames s’endurciffent. Les racines du Guy fe trouvent donc engagées de l’épaiffeur de ces lames dans le bois; d’autres lames de l'écorce devien- nent bois à leur tour, & voilà les racines du Guy engagées encore plus avant dans le bois, & à la fin elles le font beau- coup, fans que pour cela elles ayent pénétré le bois en aucune açon. On peut ajoûter à cela que les racines du Guy occafion- nent une extravafation du fuc ligneux, qui, comme je l'ai remarqué, forme une loupe ligneufe à l'endroit de l'infer- tion ; car cette groffeur contribuë beaucoup à engager plus promptement & plus avant les racines du Guy dans le bois. J'avois d'abord penfé que la groffeur qui s'obferve à l’en- droit où le Guy s'implante fur les branches, étoit fimple- ment produite par le volume des racines du Guy; car en fuppofant que la branche refle dans fon état naturel pour la quantité & l'épaiffeur des couches ligneufes, il eft certain qu'elle doit être plus groffe dans l'endroit où le Guy s'im- plante, puifque le volume des racines du Guy fe joint à celui des couches ligneufes ; mais il m'a paru que le volume des loupes étoit trop confidérable pour n'être produit que par Yaddition des racines du Guy. C'eft ce qui m'a fait penfer que ces loupes étoient produites par un épanchement du fuc ligneux, comme le font les galles ; & cette comparaifon paroîtra encore plus exacte, fi l'on fait attention à la texture du bois qui forme ces loupes, car il eft fort dur, & les fibres qui les compofent, ont une direction bizarre, très- différente de l’ordre uniforme & régulier des mêmes fibres dans le refte de Ja branche, mais fort femblable à la texture des galles ligneufes. 11 fe fait donc un épanchement de fuc ligneux au pied des Guys, & quand cet épanchement fera devenu bois, il recouvrira les racines du Guy. Tout cela prouve que les racines du Guy peuvent fe trouver engagées dans le bois, fans qu'on en puifle conclurre qu'elles le pé- netrent; mais voici qui eft plus pofitif, & qui démontre Men. 1740. , Rrr 498 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE que les racines du Guy ne pénetrent jamais le bois formé. Ï ne faut pour cela que couper de travers & fendre en long, fuivant fa direction des fibres, les branches chargées de Guy, précifément dans l'endroit de l'infertion ; car on verra autour du cœur de la branche plufieurs couches ligneu- fes qui feront pofées dans l'ordre naturel : elles indiquent la grofleur qu'avoit la branche quand le Guy en a pris pof- feflion. Or jamais on ne trouvera de racines de Guy dans cet endroit; mais au-deflus de ces couches on apperçoit une épaifleur plus ou moins grande, d'un bois rebours, où les fibres fuivent toutes fortes de direétions, & dont les couches font toutes confufes. C’eft-Aà le bois qui s’eft formé depuis Fimplantation du Guy, & c’eft où l’on trouve fes racines qui fe diftinguent bien par leur couleur du refte du bois. Ceci deviendra plus fenfible par les Figures. | Néantmoins une partie des racines du Guy, & quelque- fois toutes fe trouvent engagées dans la fubftance dure du bois : il eft naturel de penfer qu’elles ne peuvent alors lui fournir autant d'aliments qu'elles le faifoient orfqu'elles étoient dans les écorces. Le Guy fe trouve ainfr à peu-près dans fa fituation où feroit un arbre qu'on auroit planté dans une terre qui fe pétrifieroit peu-à-peu , à qui la nourriture feroit ainfi retranchée par degrés, & qui périroit enfin né- ceflairement quand la terre feroit totalement pétrifiée. Le Guy a donc befoin de reffources pour fubfifter quand fes racines font engagées à un certain point dans le bois, & il m'a paru qu'il en avoit plufieurs, je vais les rapporter. Premiérement, j'ai vû des pieds de Guy vigoureux, qui avoient un lit de racines engagées dans le bois, & un autre lit de racines plus jeunes qui fe diftribuoient dans l'écorce. Cette obfervation me fait penfer qu'à mefure que les pre- miéres racines du Guy fe trouvent engagées dans le bois, la fouche du Guy poufe des racines nouvelles qui s’épa- nouiffent dans l'écorce, & ces racines font bien capables de lui fournir de la nourriture. Secondement, je crois que les racines du Guy qui font, Mons RE Des DES SCIENCES. 99 engagées dans le bois, ne laiffent pas que de lui fournir un peu de nourriture, car elles ne meurent pas, & elles confer- vent toute leur verdeur, lors même qu'elles font reférrées & génées en différents fens par les protubérances que pro- duit néceflairement l’extravafation du fac ligneux. D'ailleurs il trouve fouvent au pied des Guys une efpece de Bulbe charnuë, de la confiftance des racines, qui eft engagée dans l'écorce, & on la doit regarder comme une grofle racine qui peut être d’un grand fecours aux pieds de Guy dont les autres racines font engagées dans le bois Troifiémement, j'ai quelquefois trouvé des pieds de Guy vigoureux, qui n'avoient aucune de leurs racines dans l'écorce : alors ils avoient contracté avec les arbres auxquels ils étoient attachés, une union plus intime, ils y étoient greffés. Maïs pour que cela arrive, il faut des circonftances heureufes ; cat dans un grand nombre de pieds de Guy que j'ai examinés, je n'en ai trouvé que deux qui fuffent véritablement greffés, & j'ai eflayé toûjours fans fuccès d'en greffer en fente, en couronne & par approche fur des Pommiers. J'ai auffi levé quelquefois de jeunes pieds de Guy avec un morceau de l'écorce où ils étoient attachés, & j'ai placé ce morceau d'écorce dans celle d’un autre arbre comme un écufion, ce qui m'a rarement réufli, & ne réufflira jamais, fi on l'en- treprend fur des pieds de Guy un peu gros. M. Frederie Hornung, que j'ai déja cité, dit auf qu'il n'a pas réuf lorfqu'il a eflayé de greffer le Guy fur différents arbres : je n'ai garde cependant de regarder la chofe comme impoffible, fur-tout ayant obfervé qu'il fe greffe quelquefois naturelle- ment für les arbres où il s'attache. D'ailleurs je puis affürer que deux branches de Guy fe joignent très-bien quand on les greffe par approche. Quoi qu'il en foit, le Guy a, comme on vient de le voir, plufieurs reflources qui peuvent le faire fubfifter aflés long-temps fur les arbres, cependant elles manquent quelquefois toutes à certains pieds. Lorfque fa branche fur laquelle eft un pied de Guy, eft grofle & vigou- reufe, les couches Ji gneufes recouvrent toutes les racines, & Rrri 500 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE embraflent tellement la tige des pieds de Guy, qu'ils ne pen- vent plus tirer de fubftance des écorces ; alors ils languiflent, & meurent à la fin : c'eft ce que j'ai obfervé plufieurs fois. Il n’en eft pas de même quand les branches font menuës & les pieds de Guy vigoureux, car j'en ai vû qui avoient émbraflé toute la branche avec leurs racines ; alors il fe forme un gros cal à l'endroit de l'infertion, l'extrémité de la branche cefle de profiter, & elle meurt à la fin. Pour que le Guy coupe ainfi les vivres à l'extrémité de la branche, il faut que la force avec laquelle il tire la féve, foit fupérieure à celle que la branche avoit pour fe la pro- curer. Le Guy dans ce cas peut donc être comparé à ces branches gourmandes, qui s'approprient toute la féve qui auroit dû pafler aux branches circonvoifines. Néantmoins le Guy ne remplace qu'imparfaitement l'extrémité de la bran- che qu'il a fait périr, car quand une fois elle eft morte, le refte de la branche ne profite prefque plus ; elle Janguit du temps, elle périt à la fin, & le Guy avec elle. 1! eft maintenant très-certain que le Guy fe multiplie de femence : il fe multiplie auffi quelquefois par des rejets, le Guy tale, comme difent les Jardiniers ; car j'ai difféqué de jeunes pieds de Guy, qui prenoient naiflance d’une racine d'un gros pied qui en étoit éloigné de plus d'un travers de doigt. Après ce que je viens de dire, on fent de refte combien le Guy fait de tort aux arbres dont il tire fa nourriture ; auffi les gens attentifs à l'entretien de leurs Vergers, font-ils leur poflible pour le détruire, ce qui m'engage à faire re- marquer qu’il ne fufht pas pour cela de couper les tiges du Guy, car j'en ai étêté plufieurs pieds qui ont repouflé à merveille, mais il faut emporter avec les tiges du Guy une portion de la loupe que j'ai dit qui étoit toüjours à leur infértion fur les branches. Pour finir ce que j'ai à dire des racines du Guy, il ne me refte plus qu'à parler de leur texture. Elles font vertes, fur-tout les nouvelles, qui font tendres & grenuës, aufi-bien rss DES SCIENCES. So: qu'une écorce aflés épaifle qui recouvre les groffes, mais le milieu de celles-ci eft ligneux. Il m'a paru qu'elles n’étoient pas toûjours rondes, mais qu'elles prenoient différentes for- mes fuivant les impreflions qu'elles recevoient du bois dans lequel elles étoient engagées. Enfin j'ai obfervé quelquefois dans le lieu de l'infertion un prolongement de l'écorce des racines, ou un amas d’une matiére femblable à cette écorce, qui fe méloit avec l'écorce des branches. ARTICLE III. Sur le progrès des Tiges du Guy. J'ai dit que le progrès des racines des jeunes plantes du Guy étoit d’abord très-confidérable, en comparaifon de celui des tiges ; effectivement, la premiére année, & quelquefois la feconde, les jeunes tiges ne font prefque que fe redreffer. Voici comment fe fait cette opération, qui leur eft fouvent très-funefte. On fçait que les femences du Guy s’attachent d’abord fur les arbres par la glu qui les environne : on fçait aufli que les trompes partent de différents endroits de la femence, qu'elles s'allongent & qu’elles fe recourbent pour s'appliquer aux branches ; ainfi le corps de la femence & le pavillon de la trompe font attachés à l'écorce, & le pédicule de la trompe qui répond à l'un & à Fautre, fait un petit arc. Quand h trompe eft bien attachée à une branche, & qu’elle a jetté quelques racines dans fon écorce, quand elles en tirent de la nourriture qu'elles tranfmettent à la jeune tige, cette tige, ou, ce qui eft prefque la même chofe, le pédicule de la trompe fait effort pour fe redreffer ; mais fou- vent elle a bien de la peine à y parvenir, h femence tient quelquefois trop par fa glu à fa branche, fur-tout quand if fait fec : alors la femence refte en arc, & périt dans cette fituation, ou bien la trompe fe détache, elle quitte l'écorce où elle s'étoit attachée, & il s'enfuit encore la mort de la jeune plante, sas Rrriÿ 502 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Müis il arrive d'autres fois aux femences qui produifent trois ou quatre radicules, que les trompes font tellement difpofées autour d'une femence, qu'elles tirent les unes contre les autres quand elles fe veulent redrefer. J'ai obfervé avec attention une femence de cette nature, qui avoit trois trompes difpolées en triangle autour de la femence qui étoit au milieu, 11 eft naturel que lorfqu'une femence n’a qu'une trompe, la jeune tige fe doit redrefler en emportant avec elle le corps de la femence, qui alors n’eft prefque rien, c'eft ce qui arrive à la plüpart des femences ; mais dans la femence dont je parle, les trois trompes étant difpofées en triangle, elles tendoient à fe redreffer dans des fens oppolés : elles tiroient donc les unes contre les autres, & je ne pou- vois imaginer comment elles parviendroient à fe redreffer. Je redoublai d'attention, & je fus très-furpris de voir la femence fe féparer en trois, & chaque trompe faire un pied de Guy particulier ; cependant je ne fçais pas fi chaque plante emporte fes lobes avec elle, ou fi elle s’en détache, mais l'expérience fuivante prouve inconteftablement que les lobes lui font alors inutiles. | Je choifis quelques jeunes pieds de Guy qui me paroif foient avoir bien pris pofleffion de la branche où ils étoient attachés, & quand ils commencerent à fe redreffer, je coupai le pédicule de la trompe le plus loin de l'évafement qu'il me fut poffible ; néantmoins J'étois bien für non feulement d'avoir emporté les lobes, mais même une portion de la jeune tige, cependant ces pieds ne font pas morts, & ils ont pouflé le printemps fuivant. J'ai dit dans l'article premier , que le Guy étoit le feul arbufle que je connuffe, dont les femences produififfent plu- fieurs radicules : je ne connois point non plus de femences qui fe divifent de la façon dont je viens de le dire, pour former plufieurs pieds. Je fçais bien, & je l'ai déja remarqué, qu'il eft commun de trouver des Noyaux qui contiennent deux amandes, & qui produifent deux arbres ; mais les deux amandes font très-féparées les unes des autres dans la boîte Dir su SC EUMN C'E:Ss. : 1503 ligneufe du Noyau : ici il n'y a point de boîte ligneufe, a femence paroït unique, & cependant elle produit deux & quelquefois trois plantes féparées les unes des autres. On eit cependant forcé de regarder ces femences comme formées de plufieurs, mais qui font unies fr intimement les unes aux autres, qu'il n'appartient qu'à la Nature de les diftinguer. N'examinons maintenant qu'un feul pied, & fuivons fon progrès. Je fuppofe pour cela que tout fe pafle comme il convient: fa jeune tige {e redrefle, & elle s’allonge un peu ; l'amande qui a fourni de fa fubftance pour la formation des trompes, devient à rien, ou à très-peu de chofe; qui étant enveloppé par la glu qui la recouvroit, forme quelquefois une efpece d’enveloppe à la nouvelle tige, ou bien la tige s'étant dé- barraffée des lobes & des enveloppes glutineufes, refte nuë, Quand la jeune tige ef redreflée, on la voit terminée par un bouton, ou par une efpece de petite houppe qui femble être Ja naïflance de quelques feuilles, & elle en refte-là pour la premiére année, & même quelquefois pour la feconde, Le printemps de l’année fuivante, & quelquefois de la troi- fiéme, il fort de ce bouton deux feuilles, & il fe forme deux boutons dans les aifelles de ces deux feuilles : de chacun‘de ces boutons , il fort enfuite une ou plufieurs branches qui font terminées fouvent par deux & quelquefois par trois feuilles. C'eft-là la production de la troifiéme ou de {a qua- triéme année. La cinquiéme, la fixiéme & les années fui- vantes, il continuë à fortir plufieurs branches, & quelquefois jufqu'à fix, des aifielles des feuilles, & le Guy devient ainfi un petit arbriffeau très-branchu, formant une boule affés réguliére, qui peut avoir un pied & demi ou deux pieds de diametre. Les vieilles feuilles jauniffent & tombent fans qu'il em vienne de nouvelles à la place, ce qui fait que les tiges font prefque nuës, & que l'arbriffeau n’eft garni de feuilles qu’à l'extrémité de fes branches. H y a ici une chofe bien digne d’être remarquée, & que: $o4 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE j'ai obfervée avec M. Bernard de Juflieu, c'eft que chaque bouton de Guy contient prefque toüjours le germe de trois branches, qu'on peut appercevoir par la difleétion ; ainft chaque nœud devroit fouvent être garni de fix branches, & il le feroit en effet, s'il n’en périfloit pas plufieurs, ou avant que d’être forties du bouton, ou peu de temps après en être {orties , ce qui arrive fréquemment. Je n'ai garde de négliger de faire remarquer une chofe très-finguliére ; c’eft que les branches du Guy n'ont point cette affeétation à monter vers le Ciel, qui eft propre à prefque toutes les Plantes, fur-tout aux arbres & aux arbuftes. Qu'on renverfe un pot ou une caife dans laquelle eft planté un arbrifleau, quand il viendra à poufler dans cette fitua- tion, fi-tôt que fes bourgeons feront fortis des boutons, ils feront une inflexion pour croître perpendiculairement au terrein. Mais il n'en eft pas de même du Guy : s’il eft im- planté fur une branche, fes rameaux s’éleveront à l'ordinaire : s'il part de deflous la branche, il poufle fes rameaux vers la terre ; ainfi il végete en fens contraire fans qu’il paroifie en {ouffrir. J'aurai occafion dans un autre Mémoire, d’infifter fur cette fingularité, & de faire fentir combien elle eft digne d'attention. Le Guy conferve fes feuilles l'hiver : il ne s’eft pas même dépouillé cette année 1740, où le froid a duré deux mois fans difcontinuer, & où il a été affés vif pour faire périr quelques jeunes pieds de Guy. Ainfi Théophrafte fe trompe, lorfqu'il dit que le Guy ne conferve fes feuilles que quand il tient à un arbre qui ne les quitte point l'hiver, mais qu'il fe dépouille quand il eft fur un arbre qui perd fes feuilles ; & effectivement qui eft-ce qui n’a pas vüû l'hiver, fur des arbres dépouillés de leurs feuilles, des pieds de Guy qui en étoient tous garnis ? ce qui au refte n'eft pas plus fingulier ue de voir le Chëne vert conferver fes feuilles lor{qu'il eft reffé fur le Chêne ordinaire. J'ai dit dans l'article premier que le Guy germoit, & qu'il s'attachoit également bien fur tous les arbres ; mais il m'a paru DES SCIENCES. $05 paru qu'il ne végétoit pas auffi heureufement fur tous ceux auxquels il s'attache : il vient, par exemple, très-bien fur le Poirier, fur le Pommier, fur l'Epine blanche, fur le T'illeul ; il ne réuffit pas fi-bien fur le Chêne & fur le Noyer. J'en ai femé plufieurs fois, mais toûjours fans fuccès, fur le Gé- névrier ; cependant des Auteurs de réputation affürent l'avoir vû fur cet arbrifleau, & les expériences que je viens de rapporter, n’établiffant que des preuves négatives, ne peu- vent détruire une aflertion pareille. Il s'attache auffi fur fes plantes annuelles; mais comme leurs tiges meurent, le Guy périt avec elles. J'en ai de même femé fur des Poires, qui font tombées avant que le Guy ait pu produire fa tige. J'ai pris toutes fortes de précautions pour en élever fur de la terre. J'en ai femé dans des pots que j'avois remplis de différentes efpeces de terre, qui dans quelques pots étoit très-foulée, & ne l’étoit prefque pas dans d'autres : j'ai eu grande attention que cette terre fût toüjours médiocrement humectée, fans que je fufle obligé de l’arrofer, pour ne point déranger la fituation des femences. Mes femences ont très- bien germé, elles ont poufié leurs radicules ; mais quand les tiges ont voulu fe redrefler, les trompes fe font détachées, & aucun pied n’a réuffi ; ce qui me fait penfer que le Guy eft une plante effentiellement parafite, & qui ne peut s'élever que fur les arbres. Il faut terminer cet article par ce qui manque à la def- cription des tiges & des feuilles de notre Plante. - L’écorce extérieure des feuilles & des tiges du Guy eft d’un verd terne & foncé, fur-tout lorfqu’elles font vieilles, car les jeunes feuilles & les nouveaux bourgeons font d’un verd jaunâtre. Cette écorce extérieure n’eft pas veluë, mais elle eft un peu inégale & comme grenuë. Sous l'écorce dont je viens de parler, il y en a une plus épaifle, qui eft d’un verd moins foncé; elle eft grenuë & pâteufe comme l'écorce des racines, & elle eft traverfée par des fibres ligneufes qui s'étendent fuivant la longueur des branches. Mem 17404 + SET 506 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE Sous cette écorce eft le bois, qui eft à peu-près de fa couleur : il eft aflés dur quand il eft fec, mais il n'a prefque point de fil, & fe coupe prefqu'auffi facilement de travers qu'en long. Les tiges font droites d’un nœud à l'autre, où elles font de grandes inflexions : la portion d£ la tige qui eft prife entre deux nœuds, reflemble à cet os qu'on appelle Tibia ; elle eft un peu plus grofle à une de fes extrémités qu'à l'autre, & elle eft moins grofle au milieu qu'aux deux . extrémités où elle groflit, pour s'articuler aux autres portions de la tige : je dis pour s'articuler, car les nœuds du Gu font de vrayes articulations par engrénement, & les poufles de chaque année fe joignent les unes aux autres comme les épiphyles fe joignent au corps des os. On fçait que dans les jeunes animaux les épiphyfes fe détachent aifément du corps des os, mais qu'elles y deviennent très-adhérentes dans les adultes : tout de même les articulations du Guy fe féparent aifément dans les jeunes branches, mais elles deviennent fi folides avec le temps, qu'on rompt plütôt les tiges d’un gros pied que de féparer fes articulations. Les feuilles du Guy font épaifles & charnuës , fans être fucculentes. En les examinant avec un peu d'attention, on découvre cinq à fix nervüres faillantes qui partent du pédi- cule, & qui s'étendent jufqu'à l'extrémité, fans beaucoup fournir de ramifications. Leur figure ef un ovale fort allongé, étant au moins quatre fois plus longues que larges, & elles deviennent plus étroites du côté du pédicule qui eft fort court. Les feuilles & l'écorce des branches ont un goût légere- ment amer & aftringent : leur odeur eft fcible, à la vérité, mais defagréable, Le Guy étant vivace & ligneux, je n'ai pas héfité de le mettre au nombre des Arbrifleaux entre lefquels il y en a de mâles & de fémelles, comme je le vais expliquer dans l'article fuivant, DES SCIENCES. 507 ARTICLE ÎÏV. Qu'il y à des Pieds de Guy mâles, à d'autres femelles. - - Pline diftingue deux efpeces de Guy ; Fun mâle, qui ne porte point de fruit, & l'autre fémelle, qui en porte. M. Edmond Barel, dans le Mémoire que j'ai déja cité, dit qu'il a élevé quatre pieds de Guy, dont deux portoient du fruit, & les deux autres fleuriffoient fans fruifier : d’où il conclut qu’il y a des pieds deGuy mâles, & d’autres qui font fémelles. Cependant Mrs de Tournefort, Boherhaave & Linæus difent que les deux fexes fe trouvent fur les mêmes indi- vidus, mais dans des endroits féparés. Ces autorités refpec- tables m'ont engagé à y prêter plus d'attention, & j'ai conf tamment remarqué des pieds de Guy mâles, qui ne portoient jamais de fruit, & d’autres fémelles, qui prefque tous les ans. en étoient chargés. De plus il n'a paru que ces pieds de Guy de différents fexes avoient chacun un port aflés diffé- rent, pour que je les pufle diftinguer les uns des autres indé- pendamment de leurs fruits & de leurs fleurs. Cependant comme le plus grand nombre des Plantes eft hermaphrodite, je n’oferois pas affürer qu'il ne fe trouve jamais de fruit fur des pieds mâles, ou quelques fleurs fur les fémelles, je me contente d’aflürer que je n'en ai jamais trouvé. Les boutons qui contiennent les fleurs mâles, font plus arrondis, & trois fois plus gros que les boutons qui con- tiennent les fleurs fémelles, ou les embrions des fruits. On apperçoit ces boutons dès l'automne, aflés pour les pouvoir diftinguer les uns des autres : au commencement de Dé- cembre ces boutons fe diftinguent encore mieux, quoiqu'ils ne foient point encore ouverts, & que les pieds fémelles foient encore chargés du fruit de l'année précédente. Les boutons mâles viennent ordinairement trois à trois fur un pédicule commun, &ils commencent à s'ouvrir à la fin dé. Sff ij 508 MEMOIREs DE L’'ACADEMIE ROYALE Février ou au commencement de Mars : leur fleur eft d’une feule piéce réguliére, formant une cloche fort ouverte, échancrée par les bords en quatre jufque vers le milieu de la fleur, & chacune de ces échancrüres forme la moitié d’un oyale. 11 y a quatre corps ovales & épais, ou quatre écuflons grenus, qui font attachés à l'intérieur de la cloche, & qui fe prolongent fur les lévres. D'abord ils font verdâtres, mais is jauniflent à melure que la fleur vieillit & qu'elle fe pafle. Lis font chargés de pouffére d'une finefle extrême, & ce font véritablement les étamines du Guy : quand on les examine avec une bonne Loupe, on voit que ces corps qui ne pa- roifloient que grenus, font creufés à peu-près comme une morille. Dans le courant du mois de Mai toutes ces fleurs tombent, & il ne refte plus que les calices, qui ont différentes figures fuivant le nombre des fleurs qu'ils ont fupporté : enfin ces calices jaunifient, fe defléchent & tombent à leur tour. H ne faut pas oublier de faire remarquer que les fleurs font ramaflées par bouquets, car chaque bouton mâle con- tient depuis deux jufqu'à fept fleurs, & ces bouquets font placés dans les aiflelles des branches ou à leur extrémité. Les boutons à fruit qui ne fe rencontrent que fur les in- dividus fémelles, font placés dans les mêmes endroits, & _ne contiennent ordinairement que trois fleurs difpofées en trefle, ou quatre, & alors il y en a une qui eft plus relevée que les autres, qui font difpolées en triangle autour de fon pédicule. Toutes ces fleurs ne viennent pas à bien : il y en a qui périffent avant que de former leur fruit, c'eft ce qui fait qu'on voit quelquefois des fruits qui font feuls ou deux à deux. Si l'on ouvre les boutons à fruit dans te mois de Janvier, on apperçoit déja les embryons des fleurs, mais les boutons commencent à s'ouvrir dès la fin de Février ou au commencement de Mars. Quand les boutons font tout-à-fait ouverts, on apperçoit les jeunes fruits ou les embryons qui font furmontés de quatre DES! SCIENCES, so pétales qui font implantés dans une rainure qui s'étend tout “ : autour du fruit, ce qui devient plus apparent à mefure que | le fruit groffit. Ces pétales font d’abord réunis par le haut, & forment tous enfemble une pyramide, mais ils s’écartent enfuite, & font comme une couronne antique ; alors ils laiflent apper- cevoir entr'eux une éminence chagrinée comme une écorce d'Orange, & dont le haut eft de couleur féuille- morte, : La partie du fruit qui eft au-deflous de linfertion des pétales, groffit beaucoup plus que celle qui eft au-deflüs; ce qui fait que quand ces fruits ont pris un peu de groffeur, ils paroiflent couronnés par les pétales que je viens de décrire. Au commencement de Juin prefque tous les pétales font tombés ; néantmoins les quatre infertions reftent très-appa- rentes, & l'on voit à la partie fupérieure de ces fruits, qui font gros comme des grains de Chenevi, une éminence brune & chagrinée qui étoit contenué entre les pétales. Si Yon coupe ces fruits de:travers ou fuivant leur Jongueur, on apperçoit l'Amande dans le centre, qui eft d’un verd plus brun que la chair. Ces fruits continuent à-groffir dans les mois deJuillet & d'Août ; ils müriflent en Septembre & Oétobre, & on les peut femer en Février & Mars, comme il a été dit au commencement de ce Mémoire. EXPLICATION DES FIGURES PLANCHE PREMIÉËRE. Le Guy mâle. F A, une branche de Guy mâle, chargée de fes fleurs. PB, b, bouquets de fleurs & leurs calices. C,c, calices qui contiennent les fleurs. D, d, d, les fleurs vüës de différents côtés. Æ, fleur groflie avec une Loupe, & vûë par-deflus, Jf; fleur déchirée, ouverte, & groffie avec une Loupe. &> une découpüre de a fleur, féparée des autres, & groffie au Microfcope. Sff iÿ s10 MÉMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE PLANCHE SECONDE. Le Guy fémelle. A, une branche de Guy fémelle, chargée de fon fruit. B, embryon groffi avec une Loupe. Bb, embryon dans fà groffeur naturelle. C, jeune fruit groffi avec une Loupe, & dépouillé des quatre follicules qui couronnoient l’embryon. €, jeune fruit dépouillé de fes follicules, & dans fa groffeur naturelle. D, jeune fruit coupé par le milieu, & groffi. d, jeune fruit un peu plus avancé, coupé & grofli comme Ie précédent. Æ, bouton qui renferme les embryons, vü au mois de Janvier. F, fruit dans fa maturité. G, fruit ou baye ouverte, avec la femence qui en fort, entourée d’une fubftance glaireufe, H, femence ovale. I, femence triangulaire avec les radicules qui en fortent. K, femence avec la radicule qui eft prête à s’attacher fur-une branche. L, trois jeunes pieds de Guy, qui font venus d’une même femence, L'implantation du Guy PLANCHE TROISIÉME. fur les arbres. A, a, pieds de Guy, implantés fur des branches. B,b, deux pieds de Guy fur une même branche. c, petit pied de Guy, qui tient au gros pied B par la racine €, E, la coupe d’un pied de Guy, & de la branche qui lui fournit la nourriture. F, pied de Guy, qui eft greflé fur une branche à Pendroit g. Le Mem. de l'Acad. 1740. pl 23. .PAg. #40 è SLmonniau Seudp. ——— Mem. de l’'Acad 1780 pl23. pag 0 le Gur femel 4 | Mem. de CAcad. 1740.pl24-pag.&0. ; à è Gui sur les QTOTCS. Mem de Ucad. 1740. pl24 pag 50 . | Ümplantation de Gui sur les arbres 4, da viteffe de la force motrice, EME PSM SPC PLIEPNT C'ETS, si SU'IT Ev DE "L'E S SA I DIUIN ETAT E"O"RIE "DEST POMPES. Par M. PiTor. ; ot r rendre l'effai de notre théorie des Pompes plus complet & plus utile, nous allons donner la réfolution des principaux Problemes des Pompes, pour connoiître les produits de ces fortes de Machines, & pour prévenir les défauts confidérables dans lefquels les perfonnes qui les font conftruire, & les ouvriers, tombent fort fouvent. Nous avons fait affés fentir, & même démontré dans nos deux Mémoires fur la théorie des Pompes, de 173$ & de 1739, que le défaut le plus confidérablé & le plus ordinaire, eft de ne pas donner un pañlage affés libre à l'eau, foit aux ouvertures des foupapes, foit aux tuyaux montants. Nous avons démon- tré dans ces Mémoires, que les réfiflances de l’eau font entre ” elles en raifon réciproque des quatriémes puifances des dia- metres des ouvertures par où l’eau eft contrainte & forcée * de pafer; d'où nous avons conclu enfin qu'il falloit faire les diametres des ouvertures des foupapes & clapets, & des tuyaux montants, les plus grands qu'il eft poffible, ’eft-à-dire, des plus grands que les autres proportions des parties de la ” Machine peuvent le permettre. Je vais donner ici une formule générale, de laquelle on déduira très-facilement la réfolution des principales queftions & Problemes qu'on peut propoler fur les Pompes. Pour cet effet, foit nommé a, le diametre du pifton, ou du corps de Pompe. ; le diametre de l'ouverture de la foupape ou clapet J; la force motrice qui fait agir la Pompe. 3 Septemb. 1740. s12 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyALE u, la viefle du pifton. #4, la hauteur où l'eau doit être élevée par la Pompe au- deffus du niveau .de l'eau, ou de la bafe du piton. Il eft bon de remarquer que la hauteur 4, & les diametres a & b, font exprimés en pieds ou parties de pieds; que les vitefles v & 4, font en pieds & parties de pieds par feconde; & que nous prendrons les quarrés des diametres pour les furfaces de leurs cercles, ce qui donnera des pieds cylin- driques d’eau, dont le poids eft de $ 5 livres. Pour avoir une formule générale qui renferme les réfo- lutions des principales queftions & Problemes fur les calculs de l'effet des Pompes, nous nous fervirons du principe fon- damental de la Méchanique, que dans toute Machine le pro- duit de la force motrice par [a viteffe, eff toéjours égal au produit du poids mü par la Machine, multiplié par [a viteffe. Or dans les Pompes, la force néceflaire pour mouvoir le pifton, eft précifément égale au poids mû par la Machine, le pifton étant chargé non feulement du poids de toute la colomne d’eau, mais auffi de la réfiftance de l'eau caufée par fon paffage le plus étroit, foit des foupapes, foit des tuyaux montants. Ayant donc la force motrice f, fa vitefle v, & la viteffe du pifton #, il ne s’agit que de trouver l'expreflion de la force néceflaire pour mouvoir le piflon, ou, ce qui eft le mème, du poids mü par la Machine. Pour avoir l'expreffion ou la valeur de Ja force néceffaire pour moüvoir le piflon , il faut trouver en premier lieu celle du poids de la colomne d’eau, & y ajoûter en fecond lieu la valeur de la réfiflance de l'eau caufée par fon paflage le plus étroit. S À Le poids de {a colomne d'eau eft égal à celui d'un cylindre d’eau qui a pour bafe celle du pifton, qui eft 44, & pour hauteur la hauteur 4 ; ainfi ce cylindre d’eau eft aah, qu'il faut multiplier par $ s livres, pour avoir ce poids en livres pefant, de $$ aa. Pour avoir la valeur de la réfiftance de l'eau caufée par fon paflage le plus étroit des foupapes, di es HLATODREUSEAS Ac) LE EN ST IQUAI" Qi des tuyaux montants, il faut trouver la vitefle de l’eau à ce paffage le plus étroit, enfuite la hauteur d’où l’eau devroit tomber pour acquérir cette vitefle, & enfm multiplier cette hauteur par la furface de la bafe du pifton, ce qui donnera un cylindre d’eau dont le poids, à raifon de 5 5 livres, fera la valeur cherchée en livres pefant. . L'ouverture de la foupape étant marquée par 44, la bafe du pifton par aa, & la vitefle du pifton par «; — fera ù di | 4 la vitefle de l'eau à fon pañlage par la foupape; ra fera la hauteur d’où l’eau devroit:tomber pour acquérir cette vitefle *, Multipliant cette hauteur par la bafe du pifton, » 1:45 4. Cyu ù L RU de l’Ac.1 yo2. on aura ÊR pour un cylindre-d'eau dont le poïds, à raïfon p.262. à ? dun ÿ de 5 5 livres, fra 5 : TE pour la, valeur de [a réfiftance de Teau. Enfin ajoûtant cette réfiftance au poids de la colomne d'eau $ $ aa, on aura la valeur de la force nécefaire pour mouvoir le piflon, ou du poids müû. par la Machine; de HE 55 afuu UE REA APTE ER | | . Le produit de la force motrice par fa viteffe eft fu, ce produit eft égal à celui de la force néceffaire pour mouvoir le pifton, multiplié par fa vitefle. Multipliant donc $ $aah ss afuu 1 s 54° 1 par la vitefle du pifton, on aura Ssaauh 77 > qu'il faut égaler à fo, pour avoir cetté Equa- tion .ou formule générale, pe” Érè 2 \ 55 «fu Cf 7 | 4% se nr SEA acrioc Nous-allons déduire de cette formule la réfolution des principaux Problemes des Pompes. (t Men. 1740: PT mire Ttt 514 MEMOIRES DE L'ÂCADEMIE ROYALE PROBLEME I. La force motrice &r [a viteffe étant données avec les diametres du piflon © de la foupape, d7 la hauteur des tuyaux 3 prés trouver le chemin ou la vitefle du piflon par feconde. Comme dans la formule if n’y a, dans ce cas, que la feule indéterminée 4 d’inconnuë, on en déduira cette Equation sGbt hu us6b IC CARE dont la dt 5 a réfolution donnera la valeur de fa viteffe # du pifton. du troifiéme degré, 1? + EXEMPLE : Soient le diametre du pifton, de 1 pied, celui de l'ouver- ture des foupapes, d'environ-+ de pied, ou de 72. Soient la force motrice ou k puiflance qui meut la Ma- chine, de 1 000 livres, le chemin ou la vîteffe de fa puiffance, de 3 pieds par feconde, enfin la hauteur des tuyaux mon- tants ou du réfervoir dans lequel on veut élever l'eau, de 27 pieds; on aura a 1, = V7, f— 1000, v—3, & À — 27. Subitituant ces valeurs dans l'Equation ci- qe elle fe changera en cette Equation numérique, 1 += 378 u = 782, dont la réfolution donnera la valeur de la vefle du pifton, #— 2 pieds, à très- pi de x à près. REMARQUE. Au moyen de la vitefle du piflon & de Ru ete, on connoît tout d’un coup la quantité d’eau que la Pompe peut fournir ou élever dans un temps donné; car, dans cet exemple, cette vitefle étant de 2 ‘pieds par feconde, & le pifton ayant un pied de diametre, il eft évident que dans ce cas la Pompe éleveroit à la hauteur de 27 pieds, 2 pieds cylindriques d’eau par feconde, ou 110 livrés d'eau fi la Pompe élevoit l’eau continuellement mais comme ordinai- rement il faut autant de temps pour la levée du pifton que pour fa defcente, il s'enfuit que la Pompe ne donneroit que . < DES SetENcESs S15 ‘ss livres d'eau par feconde, ce qui donne 3 300 livres d’eau par minute, & 198000 par heure, ou Ê3 53 muids =, & 8485 muids À par jour. \ PROBLEME Il. La force motrice ou la puiffance qui meut la Machine, n {a vielle étant donnees avec les diamietres du piflon € de l'ouver- ture de la foupape, © la vitefle du piflon , \trouvèr la plus gs hauteur à laquelle la Pompe pile: ‘élever d'eau. On tirer: de da formule Fa mir de ge a PE Vi Det UY 56 x s5bta au tit ps EXEMPLE, Soient la force motrice f—10001iv. fa vitefle d—3 pieds par feconde, le diametre du pifton 4 — 1 pied, celui de la foupape à — v+ pied, la vitefle du pifton = 2 pieds par feconde. Subfituart ces valeurs & leurs puiflances dans l'égalité ci-deflus, on trouvera la hauteur cherchée k = 26 pieds 7£. AE LEE Trouver le diametre du.piflon, toutes les autres quantités ci- deffus étant connuës ou données. On tirera de la formule cette Equation qui eft du troi- > # PE s6bthaa CATT 2) RU fiéme degré, af + A An 2e LE, dorit la réfo- lution donnera la valeur de 4, diametre du pifion. PROBLEME IV. Trouver le diametre de la Joupape, toutes les autres quantités étant données. Visa ä SGFU—56 x sçaaku L'ÉE Onitirera de Ja formule cette égalité 4 — 516 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE dans laquelle fubflituant toutes les valeurs connuës, on tirera celle du diametre 2 de l'ouverture de la foupape, PROBLEME V. » Toutes les dimenfions de la Pompe ‘étarit connuës , trouver la er de la force motrice ou de la puiflance qu il faut y appli- quer, le chemin ou la viteffe de cette puiffance étant conmuë auffr. s6x gsaabthu+ 55 di s6btu Enfin Ja force motrice étant connuë avec les dimenfions de la Pompe, fi l'on veut connoître la vitefle de la force’ motrice, 56 x Ssaabthu + 55 afni sCbtu On tirera de la formule, f— ontirera de Ja formule, Vv= re D ES *$S CHE NCES. $17 "SECONDE PARTIE D U | QUATRIEME MEMOIRE BORNE EM ONE T'R°ESY Par M. LÉ MER Y. TA nature propre des Monftres iflus d'un mâle & d’une fémelle de même efpece, étant bien connuë & établie par ce qui en a été dit dans la premiére Partie de ce Mémoire, nous pouvons entreprendre avec confrance l'échairciffement du fait annoncé au commencement de cette premiére partie & dans le fecond Mémoire fur les Monftres. Ce fait n’eit point unique, on en rapporte plufieurs autres exemples, & fi: lon ouvroit un plus grand nombre de Cadavres qu'on ne le fait, il y a toute apparence qu'on en trouveroit fouvent de femblables. Il s'agit d'un Soldat mort dans l'Hôtel royal des Invalides, à âge de foixante & douze ans, & d’autres Cadavres dans lefquels toutes les parties internes de Ia poi- trine & du bas-ventre étoient à contre-fens, par rapport à ce qu'elles font communément, c’eft-à-dire, que celles qui ont coûtume d'occuper le côté droit, étoient fituées au côté gau- che, & que celles du côté gauche occupoient le côté droit. On dit, & avec raifon, pages 377 & 378 des Mémoires de l'Académie de l’année 1733, qu'on ne peut imaginer ni accident, ni preffion, ni mouvement irrégulier capable de déplacer tous ces vifceres, en les détachant de leur connexion primitive, & en leur donnant des attachées nouvelles, & cela fans déranger le diaphragme & plufeurs autres parties ; de plus, ajoûte-t-on, par le déplicement de: ces parties, leur devant ordinaire ( ce font les termes de l Auteur) auroit été en arriére & l'arriére en devant, au lieu que ce devant & ce derriére y paroifloient comme de coûtume, mais avec cela tout ce, qui en devoit être à! droite, étoit à gauche, & tout. Tttii 5318 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ce qui devoit être à gauche, étoit à droite ; ainfi toutes ces parties étoient chacune non feulement dans une fituation extraordinaire, mais encore tout autrement conftruites qu’à l'ordinaire ; & ce qui mérite une attention finguliére, leur configuration, tant interne qu'externe ou fuperficielle, n'étoit femblable à celle d'autres Sujets, que comme la main gauche reflemble à la droite. Le cœur, par exemple, avoit fa bafe à gauche & fa pointe à droite, non par un fimple détour accidentel, mais par une conformation fpéciale à contre-fens, puifque le ventricule mince, communément appellé venrri- êule droit, étoit placé à gauche avec a grande oreillette & la veine-cave qui y tient, & que le ventricule épais, com- munément appellé ventricule gauche, étoit fitué à droite avec l'oreillette pulmonaire & l'aorte. D'où l’on conclut que dans un cas de la nature de celui-ci, il eft impoffible de fe dif- penfer d'avoir recours à des germes originairement monf- trueux, & par conféquent que le fyfteme des œufs originai- rement monftrueux, n'eft point une chimere, qu'il doit au moins avoir lieu dans Îles cas monftrueux, dont la mécha- nique ne peut être expliquée par les caufes accidentelles ; que le fait qui vient d'être rapporté, eft une preuve viéto- rieufe de la vérité de ce fyfteme ; que fi les exemples monf- trueux, à côté defquels M. Winflow a eu grand foin de placer celui du Soldat, ne font pas par eux-mêmes auffi décififs en faveur des œufs monftrueux que l’eft l'exemple de ce Soldat, ils le deviennent, & leur décifion fe trouve parfaitement juftifiée par la fienne ; qu'enfin chacun de ces exemples monftrueux, foûtenus de celui du Soldat qui leur a été aflocié, concourent fi efficacement par leurs témoi- gnages multipliés, à la preuve des œufs monftrueux, qu'il n'eft plus permis de douter de leur réalité. Pour moi je conviens parfaitement que ce n'efl point du tout à des caufes accidentelles qu’on doit attribuer la forme & l'ar- rangement des parties de l'exemple propolé, & quecette forme & cet arrangement étoient tels dans chacun des sérmies, dont le Soldat & les Hommes femblables où l’on a fait les mêmes PSS RSR PS DL.E4S' TSACÉIIELN CE S, S19 obfervations, font venus; mais ce qui paroîtra peut-être un paradoxe, je nie formellement que ces fortes d'Hommes viennent d'œufs monftrueux, je nie qu'ils foient des Monftres, & je vais faire voir au contraire que les œufs d'où ils vien- nent, font auffi naturellement conformés & auf peu monf trueux que le font ceux d'où viennent les Hommes ordi- naïres ; qu'ils different aufli effentiellement des Monftres proprement dits, qu'en different les autres Hommes ; qu'ils font tout-à-fait dans l'ordre naturel, dans le genre des ani- maux que l’Auteur de la Nature a voulu former ; qu'ils ne lui font point efluyer de contradiétions avec lui-même, comme le feroient les Montres proprement dits ; qu’enfin lobfervation rapportée ne peut jamais fervir à appuyer le fyfleme des œufs originairement monftrueux, mais à faire voir plus clairement par le parallele des uns & des autres, que le Créateur ne pouvoit jamais donner immédiatement l'être aux Monftres proprement dits, & qu'il eft tout-à-fait conforme à la raifon de le regarder comme l Auteur immé- diat des Hommes qui nous paroiffent fi fmguliers. Je dis donc que ces fortes.d'Hommes ne font point des Monftres : pour l'être, il faudroit, fuivant ce qui a été dit, qu'ils fuffent effentiellement malades ; or il n’y a chés eux aucun vice de conformation qui puifle être cenfé à jufte titre une maladie organique, & qui fe fafle connoître par les fignes qui caractérifent ces maladies, je veux dire, par la léfion des fonctions : d'ailleurs, en comparant la conftruétion particuliére de ces Hommes fimguliers avec celle des Hommes ordinaires, où voit-on que la conformation des uns foit plus felon l’ordre de la Nature & les vüës du Créateur, qu'elle foit plus parfaite, & qu'elle ne foit pas au fonds exaétement la même que celle des autres ? otoil BF" Et en effet, ce qui conftitué le corps de l'Homme, c’eft un certain. nombre de parties qui, outre la flruéture inté- rieure & particuliére qu'il eft abfolument néceffaire qu'elles ayent chacune pour les fonélions qui leur ont été impolées , doivent encore être telles par leur conformation'extérieuge, 520 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qu'elles puiflent s'accommoder à l'endroit de leur réfidence, & fe préfenter par certains côtés aux parties voifines, foit pour communiquer par-là plus aifément avec elles, foit pour remplir de concert plus exactement & plus commodément pour les unes & pour les autres, le terrein qui leur a été cédé, foit pour toute autre raifon de convenance ou d'utilité. Or tout cela fe trouve auffr parfaitement dans l'Homme, dont les parties font fituées à contre-fens, que dans celui où elles le font à l'ordinaire; & c'eft aufli ce qui fait que toutes les liqueurs différentes fe travaillent, fe perfeétionnent , toutes les différentes fonctions du corps fe font & fe doivent faire toutaufli-bien dans l'un que dans autre, ce qui n'arrive point dans les Monflres proprement dits, & comparés aux corps naturels iffus d'un mâle & d'une fémelle de même efpece que celle dont les auteurs de ces Montres ont été. Pourquoi donc regarder comme des Monftres la forte d'Hommes dont il s'agit ? Eft-ce par la fingularité qu'on trouve dans la place qu'occupe à droite & à gauche chacune de leurs parties? Efl-ce encore parce que Ia conftruétion de chacune de ces parties differe, à certains égards, de celle des mêmes parties des Hommes ordinaires? Mais 1.” pour ce qui regarde le côté différent où loge: chacune des parties de l'Homme qu'on veut faire paffer par-là pour un Monitre, peut-on fur une circonftance pareille, fur une fimple variété de Ja Nature, qui prouve fa fécondité, en produifant de deux maniéres & dans les mêmes vüës le même ouvrage ; peut-on, dis-je, donner le mot de Monftre à l'un de ces ouvrages plütôt qu'à l'autre, quand on ne voit pas que celui des deux à qui on le donne, le mérite plus que l'autre? Et en effet, par où fçavons-nous qu'il eft plus raifonnable que le Foye, par exemple, foit plütôt au: côté droit qu'au côté gauche? Les parties qui fe répetent à droite & à gauche dans un même fujet, les poulmons, les deux reins , les deux mains, les deux pieds ; toutes ces parties, dont les unes ne font pas plus monftrueufes que les autres, en conféquence du côté oi.elles ont été placées naturellement, ne DES SctrENCES. s21 ne nous font-elles pas bien connoître qu'une même efpece de parties peut aufli fe trouver très-naturellement à droite dans certains Sujets, & à gauche dans d’autres, fans être pour cela monflrueufe, pourvû néantmoins qu’elle foit telle alors que nous allons faire voir qu'elle doit être? & s'il étoit poffible de trouver quelque Pays où à l'ordinaire les Hommes euffent le foye à gauche, la pointe du cœur tournée _ à droite, & tout le refte dans le même arrangement, quel- qu'un qui s’y trouveroit par hazard avec un foye au côté droit & la pointé du cœur tournée à gauche, pourroit avec le même fondement être réputé un Monftre après fa mort, c'eft-à-dire, après l'ouverture de fon cadavre. Suppofons qu'un Horloger fe foit avifé de faire une Montre, où il ait placé à droite & à gauche toutes les parties qui font à gauche & à droite dans une Montre ordinaire : fuppofons encore que les deux Montres comparées enfemble, aillent également bien, & foient également bonnes, je demande fi l’une des deux fera un Monftre à l'égard de l'autre. Les Limaçons nous offrent une obfervation qui me paroît venir affés bien au fujet. On remarque fur leurs coquilles des tours de fpirales qui, dans le plus grand nombre: des Limaçons, vont de gauche à droite, & dans d’autres vont de droite à gauche, c’eft-à-dire, dans le fens contraire; ce- pendant il ne réfulte de cette différence que des variétés in- dividuelles, qui n'attaquant ni la ftruéture fpécifique, ni les fonétions des Limaçons, ne font ni ne peuvent jamais être réputées variétés monftrueufes : elles forment feulement deux efpeces de Limaçons. Il en eft précifément de même: de l'Homme, dans lequel les parties de la poitrine &du bas- ventre font à contre-fens ; ce n'eft point un Monftre, c’eft une efpece d'Homme particuliére, comme le font les Négres à l'égard des Blancs ; & toutes les efpeces de Chiens, dont il n'y en a aucune qui fur un pareil fondement ne pôt re- garder les autres comme autant de Monftres, quoiqu’elles ne foient toutes, les unes par rapport aux autres, qu'autant d'efpeces différentes d’un même animal. - Mem. 1740. . Vuu 522 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE A l'égard du nom de Monftre donné au Soldat fur la conftruétion particuliére de fes parties internes, ou plütôt fur ce qu’elles ont de différent de celles de l'Homme ordi- naire, rien n’eft plus foible ni plus mal fondé que cette in- duction ; rien ne prouve davantage qu'on n'avoit point une idée claire & diftinéte de la nature propre du Monflre en général, de ce qui le diftingue & le caraétérife ; car il eft aifé de faire voir par la confidération de ce qui réfulte de la différence qui en a impofé à M. Winflow, que cette différence, bien-loin d’avoir fait un Monftre du Soldat, a empêché qu'il n'en füt un, & que fans elle il en auroit été un véritable ; & en effet, pour qu'une partie quelconque n'ait rien de monftrueux, il ne fuffit pas que rien ne lui manque du côté de la ftruéture particuliére qui la conflituë telle ou telle partie, il faut néceflairement encore qu'elle ait été ori- ginairement taillée pour le côté qu'elle occupe, afin d'être par-Rà en état de faire face par certains endroits aux parties contiguës qui, dans l’ordre naturel, doivent en faire de même à fon égard. Pour mieux comprendre ce qui vient d'être avancé, fervons-nous encore de l'exemple des deux mains, dont l'une comparée à l'autre, nous va faire voir évidem- ment ce qu'on doit penfer des différentes parties du Soldat, comparées aux mêmes parties de l'Homme ordinaire. On fçait que les deux mains font compofées d'un même nombre de parties ; que la conftruction & l'arrangement de chacune de ces parties font les mêmes dans l’une & dans l'autre; que lorfque les deux mains font dans la même pofi- tion, les mêmes parties de lune & de l'autre fe préfentent de la même maniére ; que lorfque, par exemple, dans l’une de ces pofitions, le pouce de la main droite eft au côté interne, & le petit doigt au côté externe de cette main, ou que dans une pofition contraire le pouce fe trouve au côté externe, & le petit doigt au côté interne de la main droite, la même chofe arrive parfaitement dans les mêmes pofitions de la main gauche à l'égard de fon pouce & de fon petit doigt; d'où l'on voit que toutes les parties de la main gauche CE y te de = DEN S ICS D'EUN CE 523 font au côté gauche, ce que font au côté droit toutes les parties de l'autre main ; cependant toute cette uniformité eft dûé à une différence fondamentale, & fans laquelle l’unifor- mité qui vient d'être rapportée, ne fe retrouveroit plus, Cette différence vient de ce que les deux mains ont été différemment taillées, l’une pour le côté droit, & l'autre pour le côté gauche ; d’où il arrive que les parties qui, dans chaque pofition de fa main droite, font à la droite & à la gauche de cette main, fe trouvent toüjours dans la même pofition de l’autre main, à fa gauche & à fa droite ; & ce qui prouve que c'ef cette différence qui produit l’'uniformité fymmétrique de chacune des différentes parties des deux mains ; que c'eft elle qui fait que les mêmes parties de l'une & de l'autre fe préfentent de la même maniére, quand elles font l'une & l'autre dans les mêmes pofitions ; que c’eft elle auffi qui donne à chacune des deux mains, la conformation qu'elles doivent naturellement avoir : qu'enfin ces deux mains ne font véritablement dans l’ordre de la Nature, que parce que ne différant point l’une de F'autre par le fond de leur conftruction, elles en différent néantmoins relative- ment au côté qu'elles occupent, qui demande néceflairement que ce qui eft le côté droit & le côté gauche d’une main, foit le côté gauche & le côté droit de l'autre main ; ce qui prouve, dis-je, tout ce qui vient d'être rapporté für la né- ceflité de la différente conftruétion de la main droite & de la main gauche, c'eft que fi, par exemple, au lieu d'une main gauche, conformée comme elle le doit être & comme elle left, on fuppofe une main droite pendante à un bras gauche, de quelque maniére qu'on l'y concoive attachée, elle le fera toujours monftrueufement, elle ne fera jamais au bras gauche ce qu'eft à ce bras une main gauche, & ce qu'elle eft elle-même au bras droit : elle y préfentera Îe de- dans de la main, lorfque la main droite qui tiendra au bras droit, préfentera le deflus, ou en fuppofant une autre pofi- tion des deux mains, le pouce de Ja main droite déplacée, { trouvera à fon côté externe, & le petit doigt à {on côté uu ij 524 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE interne, pendant que le pouce & le petit doigt de l'autre main droite feront, l’un à fon côté interne, & l'autre à fors côté externe ; d'où l'on voit que quelque bien conformée que fût une main, fi d'ailleurs elle ne quadroit pas par fa conftruction particuliére avec le côté qu’on lui feroit occu- per, & avec le bras auquel on l'uniroit, cette conftruétion très-naturelle dans la main où elle conviendroit, deviendroit très-monftrueufe, vice de conformation, maladie organique, dans la même main placée où elle ne devroit pas l'être. Tout ce que nous venons d’obferver dans la comparaifon des deux mains, s’obferve parfaitement de même dans les parties différentes du Soldat, comparées aux mêmes parties de l'Homme ordinaire : la flruéture particuliére qui conftituë effentiellement chacune des parties d’un individu, qui les diftingue & empêche qu'on ne les confonde les unes avec les autres, rien de toute cette ftructure ne différoit dans les parties du Soldat & dans celles de l'Homme ordinaire : les mêmes vifceres de l'un & de l'autre étoient compofés des mêmes parties, ils fe préfentoient par les mêmes endroits, antérieurement & poftérieurement , ils répondoient de la même maniére aux parties contiguës ; en un mot, ceux du Soldat étoient parfaitement aw côté gauche & au côté droit, ce qu'étoient les mêmes vifceres de l'Homme ordinaire au côté droit & au côté gauche. Ce qui produïfoit, ainfi que dans les deux mains, Funi- formité exacte qui regnoit entre les mêmes parties de ces deux fortes d'individus, placées en des côtés différents, c'eft que quoique celles du Soldat ne différaffent point effentiel- lement & par le fond de leur conftruétion, de celles de Homme ordinaire, elles en différoient néantmoins relati- vement au côté qu'elles occupoient, & pour lequel elles avoient été originairement taillées : cette différence ne con- fifloit qu’en un point, en ce que la droite & la gauche d'une partie de l'Homme ordinaire étoient, ainfi que dans les deux mains, la gauche & la droite de la même partie dans le Soldat; au moyen de quoi tout devenoit auffi univerfelle- D:ES SCIENCES. 2 ment uniforme entre les mêmes parties du Soldat & de Y'Homme ordinaire, qu'entre les deux mains: cette unifor- mité donne lieu à une réflexion, juftifiée d’ailleurs par l'ex- périence, c'eft que l’organifation de fa machine étant au fond parfaitement Ja même dans l'un & dans Fautre individu, la vie & la fanté s’y peuvent foûtenir, & s’y foûtiennent auf également bien. I réfulte de ce qui a été dit, 1.° Que ce qui fait que les deux mains different lune de l'autre, ou plütôt que la méchanique en conféquence & par le moyen de laquelle Ja main gauche & la main droite ont une conflruétion diffé rente, que cette méchanique eft fa même, & produit Ia même forte de différence à l'égard des parties du Soldat & de celles de l'Homme ordinaire. 2.° Que les différentes par- ties du Soldat & de l'Homme ordinaire, contenuës dans le côté gauche de l'un & de fautre, répondent par les païti- cularités qui conftituent la différence de leur conftructiorr, . à celles par le moyen defquelles la main gauche differe de la droite, & que les parties contenuës au côté droit de l'un & de l'autre individu répondent comme les précédentes à ce qui fait que la main droite differe de la gauche. 3.° Que l'Auteur de la Nature a ajoûté à la ftruéture effentielle de chaque partie, à ce qui la conftituë telle ou telle partie, une forme ou un arrangement particulier, & relatif au côté où devoit réfider cette partie. 4.° Que quoique les parties qui fe répetent naturellement à droite & à gauche dans un même individu, paroïffent annoncer plus clairement que les autres par leur conftruétion le lieu de leur. deftination, & cela, parce qu'il réfulte toûjours dé la conftruétion particuliére de chacune des deux parties comparées l’une à l'autre, un éclairciffement fur la nécefité & les avantages de cette conf truétion différente par rapport aux déux côtés de la réfidence de ces parties, cependant celles qui ne fe répetent point dans un même fujet, ne laiffent pas de faire: appercevoir, quand on les confidere avec réflexion , que feur forme par- ticuliére convient fpécialement au côté qu'elles occupent .. d'A AU TE | AG $26 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qu'elle ne conviendroit point au côté oppolé, où ces par- ties ne fe préfenteroient point par les mêmes endroits, & où elles ne le pourroient faire qu’en changeant l'ordre des chofes, & en faifant, s'il étoit poflible, que ce qui eft leur droite & leur gauche, devint feur gauche & leur droite ; qu'enfin c'eft en plaçant les mêmes parties à gauche & à droite dans certains individus, & à droite & à gauche dans d'autres, & en donnant à ces mêmes parties des deux indi- vidus, la conformation fpéciale qu’elles devoient avoir par rapport au côté différent qu'elles devoient occuper chacune dans leur individu, que l’Auteur de la Nature a fait deux efpeces d'Hommes, ou, ce qui revient au même, le même Homme en deux façons, fymmétriquement uniformes, & dont l'une n’eft pas moins parfaite ni moins digne que l'autre de fon Auteur. C'eft cependant l'une de ces deux efpeces d'Hommes qu'on traite de Monftres, fans fonger que les parties qui fe répetent à droite & à gauche dans un même Sujet, font parfaitement connoître qu'une même partie peut naturelle- ment réfider dans les deux côtés oppolés, pourvû que dans chacun de ces côtés elle ait la conformation qu’exige celui de fa réfidence; que la regle qui prefcrit une différente conf truétion fuivant le côté différent, s'étend également fur les parties du Soldat & fur celles de l'Homme ordinaire ; qu'elle eft également exécutée dans les unes & dans les autres ; que toutes ces parties ne font dans l’ordre naturel qu’autant qu’elles obéiffent à cette regle; qu’enfin fi les deux mains qui y obéiflent auffr, ne font pas plus monftrueufes l'une que l'autre, f: elles font au contraire très-naturellement conformées, les parties du Soldat qui font exactement à l'égard des parties de YHomme ordinaire, ce qu’eft la main gauche à l'égard de la droite, & la droite à l'égard de la gauche, ne font pas auffi plus monftrueufes, & qu'elles font au contraire tout auffr conformes aux loix de la Nature, que celles de l'Homme ordinaire, & que le font en particulier les deux mains. Enfin une derniére remarque que j'ai faite fur la diffé- Ge er DES Sy CAR EN CES, s27 rente conftruction de la main droite & de la main gauche, fe retrouve encore parfaitement la même fur les différentes parties du Soldat, comparées à celles de l'Homme ordinaire. Bien-loin que les parties de ce Soldat fuffent monftrueufes, parce qu'elles n’étoient pas faites comme celles de l'Homme ordinaire, non feulement cette différence fur laquelle on a fi fort pris le change, étoit tout-à-fait dans l'ordre naturel, ainfi qu'on vient de le prouver, mais elle étoit encore fi indifpenfablement nécefaire, que fi elle eût manqué, c'eût été alors que toutes les parties du Soldat auroient été monf- trueufes. La preuve de cette vérité s’apperçoit manifeftement par l'examen des parties du Soldat, comparées aux mêmes parties de l'Homme ordinaire ; du cœur, par exemple, de Jun & de l'autre. On fçait que le cœur de l'Homme ordinaire ef prefque tout-à-fait tranfverfalement couché fur le diaphragme, que a bafe regarde la cavité droite de la poitrine, & que fà plus grande portion & fa pointe avancent dans la cavité gauche de cette poitrine, que ce cœur a deux ventricules, dont l'un qui eft le droit, & qui peut être appellé en conféquence de fa fituation naturelle, 2 ventricule antérieur, eft ample, mince & mollafle; & que l'autre qui eft le gauche, & qui peut être aufii appellé par fa fituation, Ze ventricule poflérieur, eft ferme, épais, & a moins de capacité que le droit; à l'égard du cœur du Soldat, il étoit tranfverfalement dans la poitrine ; fa bafe tournée du côté gauche, occupoit juftement le milieu, tout fon corps & fa pointe s’avançant dans le côté droit: le ventricule mince & le plus ample qui, dans le cœur de l'Homme ordinaire, étoit par f fituation le ventricule antérieur, l'étoit auffi par la même raifon dans le cœur du Soldat, & le ventricule épais, fitué de maniére dans l'Homme ordinaire, qu’il en avoit reçû le nom de ventricule poftérieur, l'étoit auffi par cette même fituation dans le Soldat : en un mot, le cœur du Soldat étoit exaétement par la fituation & l'arrangement de fes parties, à l'égard du cœur de l'Homme ordinaire, ce qu'étoient par-là les deux mains l'une à l'égard 528 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE de lautre ; & f1 ce qui eft à droite & à gauche dans la main droite, fe trouve à gauche & à droite dans la main gauche, la même chofe ne manquoit pas auffi de fe trouver dans le cœur du Soldat dont le ventricule mince & le plus ample, appellé communément Ze ventricule droit, parce qu'il eft à fa droite du cœur de l'Homme ordinaire, fe trouvoit à la gauche du cœur du Soldat, & en étoit-par conféquent le ventricule gauche; & par la même raifon le ventricule épais qui, dans l'Homme ordinaire, étoit le ventricule gauche, étoit dans le Soldat le ventricule droit. Enfin, ce qui prouve que le cœur du Soldat eût été véri- tablement monftrueux, fi fa conftruétion particuliére n’eût pas différé de celle du cœur de l'Homme ordinaire en ce qui a été remarqué, c'eft que fi à la place d'un cœur conftruit comme celui du Soldat, on fubfiituë le cœur d’un Homme ordinaire, dont une partie de la bafe foit dans le côté gauche, & dont le refte s'avance dans le côté droit de {a poitrine, ce cœur tranfporté dans un côté oppofé à celui pour tequel il avoit été formé, ne préfentera plus au côté gauche ce qu'il préfentoit au côté droit; ce qui y étoit fa partie pofté- rieure deviendra au côté gauche fa partie antérieure, & ce qui étoit fa partie antérieure deviendra de même fa partie poflérieure dans fa nouvelle demeure; ce ne fera donc plus le ventricule mince, le ventricule droit qui paroïtra anté. rieurement au côté gauche, comme il paroiïfloit au côté droit, ce fera le ventricule épais, le ventricule gauche, & par-là les deux cœurs antérieurement & poftérieurement différents l'an à l'égard de l'autre, n'auront ni ne pourront jamais avoir, à caufe de leur conftruétion trop femblable, l’uniformité fymmétrique des deux mains ; ils feront au contraire une répétition parfaite de tout le monftrueux qu'offre une main droite pendante à un bras gauche, ou une main gauche pendante à un bras droit, ou le cœur du Soldat rempliffant la place de celui de l'Horhme ordinaire; & l’on conçoit aifé: ment par ce dérangement qui, dans les trois exemples rappor- tés, intérefferoit toûjours les fonctions des parties déplacées, que DES SCIENCES, 529 que l’arrangement contraire doit produire un effet tout op- pofé, & être auffi naturel que l'autre feroit monftrueux. Tout ce monftrueux fe trouve fauvé dans le cœur du Soldat par fa conftruétion particuliére, &telle qu’elle devoit être par rapport au côté que ce cœur devoit occuper, ou du moins d'où il devoit partir; en vertu de cette conftruétion, tout ce que contenoit à droite & antérieurement Île cœur de l'Homme ordinaire, celui du Soldat le contenoit auffi à gauche & antérieurement, & il contenoit à droite & pofté- rieurement tout ce que contenoit à gauche & poftérieure- ment celui de l'Homme ordinaire : par conféquent le ventri- cule gauche que préfentoit antérieurement le cœur du Soldat, n'étoit point le ventricule gauche que préfentoit antérieu- rement le cœur de l'Homme ordinaire fubftitué à celui du Soldat; le ventricule que le cœur tranfpofé préfentoit à gauche & en devant, étoit, comme il a été dit, le ventricule épais, qui ne quadroit pas avec le ventricule mince que préfentoit ce même cœur lorfqu’il étoit dans fa place naturelle; mais au moyen de la conftruction particuliére du cœur du Soldat, tout quadroit parfaitement, fon ventricule gauche, celui qu'il préfentoit antérieurement, fe trouvoit être leventricule mince, celui-là même que préfentoit antérieurement auffi le cœur de l'Homme ordinaire, & qui étoit fon ventricule droit : par-là les deux cœurs préfentoient, l'un à gauche & l'autre à droite, le même ventricule fous deux noms différents: & comme cette uniformité fymmétrique qui ne s'en tenoit pas aux deux cœurs, & qui s'étendoit encore fur les autres parties du Soldat & de l Homme ordinaire, fuppofe le même principe, la même méchanique, & eft auffi la même en tout que celle des deux mains, n’a-t-on pas lieu de conelurre de cette remarque, que l’Auteur de la Nature n’a pas feulement attaché cette fymmétrie aux parties qui fe répetent à droite & à gauche dans un même fujet, qu'il, a encore voulu qu’elle eût lieu à l'égard des mêmes parties dont les unes fe trouvent à gauche ou à droite dans un individu, & les autres à droite ou à gauche dans un autre individu; qu'enfin cette fymmétrie Mem. 1740. MAX 530 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE peut être regardée comme une marque & une preuve certaine que les parties où elle fe trouve, font tout-à-fait dans l'ordre naturel & parfaitement bien conformées ? par conféquent, ce que je dois à la connoiflance que j'ai acquife de la nature particuliére des Monftres proprement dits, c'eft que les faits fur lefquels M. Winflow s’eft cru autorifé à donner le titre de Montftre au Soldat & à tous ceux qui font de la même efpece, me déclarent manifeftement le contraire, & me le font voir par des preuves fi méchaniques & fi convaincantes, que je ne crois pas qu'il foit poflible d'y réfifter. Cependant on me dira peut-être encore que je définis le Monftre à ma fantaifie, que j'en donne & Ôte le nom à qui il me plaît; qu'on a toûjours regardé comme Monftre tout animal d’une ftructure extraordinaire, qui ne reflemble point par-là à ceux dont il tient le jour, & qui furprend & étonne par ce qu'il a de fingulier : or cette définition convient parfaitement à lefpece d'Homme à qui le nom de Monftre a été donné. Je réponds que je ne prétends pas chicanner ici fur ce mot, notre difpute n’en eft point du tout une de nom, mais de chofe, & de chofe fort réelle, & l’on va voir très-claire- ment qu'en accordant le titre de Monfire à l'Homme qu'on qualifie de cette maniére, on n’y gagne rien, & que la quel- tion n’en fera pas moins nettement réfoluë en faveur du fentiment que je foûtiens : cependant je repréfenterai que pour être en droit de dire que l'Homme dont il s'agit, eft un Monftre, & cela fur ce qu'il a de fingulier qui l'empêche de reflembler à ceux dont il vient, if faudroit avoir examiné auparavant les cadavres de ceux ; ou plütôt de celles qui l'ont précédé, & lui ont donné l'être; mais quand cette efpece d'Hommedefcendroit d’autres Hommes dans lefquels le cœur & les parties du bas-ventre fe trouveroient fituées à l’ordi- naire, la différence dont il s’agit, n’attaquant ni l'ordonnance ni le fond de la machine, & n'étant qu'une fimple variété, de l'efpece de celles qui ont été marquées dans ce Mémoire, & que la Nature fe permet & s'accorde à tout inflant, la même DES SCIENCES. S31 femme qui contiendroit des œufs d'une façon, & en plus grand nombre, pourroit en contenir aufli quelques autres qui auroient le foye à gauche au lieu de l'avoir à droite, & ainfi des autres parties; & cela à peu-près de même qu'une Chatte ou une Chienne produit tous les jours des petits qui ne lui reflemblent point, non plus qu'au mâle qui y a travaillé: cependant quoique ces petits en foient fouvent très-différents par beaucoup d’endroits très-frappants, on ne s’avife point pour cela de leur donner le nom de Monfires, ils ne lac- quiérent que par des vices de conformation très-réels & très- fenfibles avec lefquels ils arrivent dans le monde, & fans lef- quels ils ont beau étonner par leur fingularité, dès que cette fingularité n’attaque ni les fonctions ni la vie, ce ne font point des Monitres proprement dits. Il eft vrai que ce mot fe donne à des chofes bien diffé- rentes, mais elles ne doivent point être confonduës, comme nous allons faire voir qu’ellés l'ont été. Je dirai en attendant, qu'ayant découvert par l'examen de la multitude.des Monftres répandus dans nos Mémoires & ailleurs, que ce qui conflituë, caractérife & diftingue tous ceux qui font iffus d’un mâle & d’une fémelle de même efpece, c’eft par-tout un dérangement dans les organes, une véritable maladie organique qui, en attaquant plus-ou moins la ftruéture des parties & leurs fonc- tions, porte des atteintes plus ou moins fortes à la fanté, & même à la vie, j'ai cru être en droit d’en conclurre que le mot de Monftre proprement dit, ne devoit être accordé qu'aux animaux qui viennent au monde avec quelqu’une des différentes efpeces de maladies organiques, fuffifamment re- connoiflables par les fymptomes qu'elles produifent; cepen- dant, pour éviter toute difcuffion fur le mot de Monftre, je veux bien aufir accorder pour un moment, ‘ce nom à l'efpece d'Homme auquel on l’a donné mal-à-propos; je dis pour un moment, car cette! fuppoñition eft fr évidemment faufle, & a été prouvée telle par des raifons fi claires & fr méchaniques, que quand on fe prête à des fuppofitions pareilles, ce doit être pour le moins de. temps qu'il: eft X xx ij 32 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE poffible, & feulement pour ôter par-là à l'erreur toutes les reflources qui pourroient encore fa faire méconnoître : je fuppofe donc que le Soldat foit un Monftre, mais malgré “cette fuppofition, on fera toüjours obligé de convenir avec moi, que les Monftres proprement dits, dans la claffe defquels font quelques exemples rapportés par M. Winflow, different totalement de ceux auxquels on me fait donner le même nom, & dans l'efpece defquels eft le Soldat que M. Winflow confond avec les Monftres proprement dits, & dont il tire de fauffes conféquences en faveur des œufs monftrueux. En un mot, en accordant le nom de Monftre au Soldat, com- ment viendra-t-on à bout de me faire voir que le fondement du titre de Monftre proprement dit, puifle jamais avoir lieu dans le même fens à l'écärd du Soldat & de tous ceux qui lui reffemblent ? Les uns, qui font les Monfires proprement dits, n'offrent que du defordre, de la confufion, des maladies qui les font fouvent périr dans le fein même de leur mere, ou peu après wils en font fortis; & ce qui fait le caractere & les attri- buts eflentiels de ces fortes de Monftres, ce font tous les dérangements poflibles des parties, tous les vices organiques, & plus ces dérangements, plus ces vices de conformation font grands, plus les Monftres méritent Ie nom qu'ils portent. Les autres, qui font le Soldat & tous ceux qui lui reflem- blent, préfentent un arrangement aufi parfait & effentielle- ment le même que celui des Hommes ordinaires ; auffi dans les uns & les autres en conféquence de leur conformation paticuliére, toutes les fonétions fe font également bien, & ils jouiffent aufit également des avantages de ia fanté & de la vie. Enfin, ce qui fait le caractere effentiel de ces préten- dus Monftres, c’eft l'ordre, {a régularité, la perfection dans la ftruéture de chacune de leurs parties. Les uns, qui font toûjours les Monftres proprement dits, ne peuvent être attribués à l’Auteur de la Nature, fans lui faire une injure proportionnée à tout ce que ces Monftres ont d'affreux &'de déraifonnable, fans lui reprocher en DES SCIENCES. 533 quelque maniére, par Ja feule expofition des parties de chaque Monitre, qu'il fe contredit très-fouvent fur la ftructure & les ufages de ces parties, fans lui donner des vüës fouvent ridicules, qu'il n'eft pas toüjours en état d'accomplir, ou qu'il accomplit aflés mal. Les autres, qui font encore le Soldat & fes femblables, peuvent & doivent être regardés comme autant de chef- d'œuvres qui le difputent de perfection avec l'Homme conftruit à l'ordinaire, qui non moins dignes que lui d’être avoués par le Créateur, ne déclarent pas moins auffi fa fagefe & fa toute-puiflance. Enfin, j'ai fait voir expreflément dans mon premier Mémoire fur les Monftres, & de plus encore dans les trois autres fuivants, qu'il étoit impoflible que l'Auteur de la Nature eût jamais pu concevoir le deffein de produire im- médiatement des Monftres proprement dits, & que comme leur formation ne fuppofe point auffi de deflein, les feules caufes accidentelles fe trouvoient en droit & en pofleffion de faire ces Monftres, c’eft-à-dire, de détruire & de défi- gurer les ouvrages du Créateur; ce qu'elles ne font pas feu- lement à l'égard des Fœtus enfermés dans le fein de leur mere, mais encore lorfqu'ils en font fortis, & cela de ma- niére que dans la fuite & à tout âge ils deviennent fouvent de véritables Monftres, qui naiflent en quelque forte & fe forment fous nos yeux, comme il a été prouvé dans la premiére Partie de ce Mémoire. : Ce que les caufes accidentelles font inconteftablement aux Monflres proprement dits, elles ne le peuvent jamais ètre aux prétendus Monftres qui font dans la claffe du Soldat ; il ne s’agit point pour la production de ceux-ci, comme pour celle des Monftres véritables, de frapper indiftinétement & fans aucune vüë particuliére, fur différentes parties, d'y porter le trouble, le defordre, la confufion, & de leur don- . ner une forme quelconque, irréguliére , indéterminée : il s'agit au contraire d'une conftruction de parties précile, exactement réguliére, qui ne foit point l'effet du hazard, Xxx ii] MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE mais d'un deflein formel fuivant lequel elle doit être exé- cutée, & dont elle ne-pourroit s’écarter fe moins du monde fans devenir vicieufe, & par conféquent différente de ce qu'elle doit être & eft naturellement ; or on fçait que les caufes accidentelles agiflent en aveugles, qu’elles vont comme elles font pouffées, & fans qu'aucun deflein les détermine à ce qu’elles font : comment donc, dénuées d’un pareil fecours, viendroient-elles à bout d'un ouvrage dont la méchanique réguliére demande l'attention la plus parfaite, & toûjours la même dans chacun des individus de l'efpece du Soldat, qui ne doivent pas différer & qui ne different pas auffi davan- tage les uns des autres, que ie font les individus de l’efpece de l'Homme ordinaire ? Mais enfin, quand on accorderoit aux caufes accidentelles, ce qu'elles n'ont point, une intelligence particuliére qui les dirigeroit dans leurs opérations, elles feroient toüjours in- capables de l’arrangement & de la formation des parties des prétendus Monftres dont il s'agit. Comment concevoir, 1° qu'en vertu de l’aétion de ces caufes, tous les Vifceres d’un Homme ordinaire fortiroient de leur côté naturel pour s’aller loger au côté oppolé? Quel accident, dit fort bien à cette occafion M. Winflow, quelle preffion, quel mouvement irrégulier pourroit-on imaginer qui füt capable de deplacer tous ces vifceres comme par un feul tour de pivot ou de broche, en les détachant de leur connexion primitive, 7 en leur donnant des attaches nouvelles, € cela, ajoûte-t-il, fans déranger le diaphragme, & Jans pour le moins tordre le pharinx, l'extrémité du colon, les portions Jupérieures 7 inférieures de l'aorte € de la veine-cave ! Enfin ce détachement niverfel ne pourroit jamais manquer d'être funefle. : 2.° Comment concevoir encore que l'aétion des caufes accidentelles fur les différentsVifceres d’un Homme ordinaire, puiffe changer de maniére leur conftruétion, que ce qui en étoit la droite, en devienne la gauche, & ce qui en étoit la gauche, en devienne la droite, & que cependant les parties antérieures & poflérieures de ces vifceres, aufli-bien que le . fond de leur ftruéture particuliére, foient toûjours les mêmes ? DES SCIENCES. 535 Quand une pareille transformation ne feroit pas impoflble, les difficultés & les inconvénients qui laccompagneroient néceffairement, tiendroient lieu d'impoffhbilité ; car enfin, pour faire trouver à la droite d’un vilcere ce qui étoit à fa gauche, & à fa gauche ce qui étoit à fa droite, il faudroit commencer par difléquer en quelque forte ce vifcere, pour en féparer diverfes portions, & pour remettre enfuite les unes à la place des autres, où elles n'iroient point encore comme il le faudroit; mais on conçoit aifément qu'avant ce remplacement de parties & la fin de cette opération, le vifcere difléqué auroit perdu par-là le mouvement & la vie ; d’où l’on voit que les caufes accidentelles qui peuvent tout pour ce qui regarde la formation des Monftres proprement dits, ne peuvent rien pour celle des individus de l'efpece du Soldat ; que leur conftruction n'eft point une transforma- tion, qu’elle eft originairement telle qu'elle a été obfervée dans ce Soldat ; qu'elle part immédiatement des mains du Créateur, comme celle des parties de l'Homme ordinaire; & que comme les parties de cet Homme ordinaire, toutes indépendantes qu'elles font des caufes accidentelles par rap- port à leur conftruction primitive, reçoivent néantmoins fouvent après coup, de la part de ces caufes, des atteintes plus: ou moins fortes qui pervertiflent plus ou moins la conftruction primitive, & qui la rendent plus ou moins monftrueufe , on conçoit qu'il en doit être de même de la conftruétion primitive oblervée dans les parties du Soldat, qu'elle peut être également fufceptible de l'impreffion des caufes accidentelles, & qu'elle peut auffi devenir après coup également monftrueufe, & cela cependant de maniére qu’au milieu & au travers du monftrueux qui furviendraà l'Homme ordinaire & à celui qui fera de l’efpece du Soldat, on pourra fouvent diftinguer & reconnoitre la différente conftruction primitive de l’un & de l’autre. Cette remarque qui nous fait clairement appercevoir que la fource immédiate du Soldat eft parfaitement la même que celle de l'Homme ordinaire, nous prouve encore avec la derniére évidence, que le Soldat s36 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE ne diffère pas moins des Monitres proprement dits, que Ie fait l'Homme ordinaire, & que tout ce qu'on peut dire de lun, fe peut dire auffi de l'autre par rapport à ces Monflres. Eft-ce donc par ce qu'il a plü de donner mal-à-propos, indiftinétement & fans examen le nom de Monftre au Soldat & aux Montftres proprement dits, qu'on s’eft imaginé qu'ils étoient tous devenus par cette licence une même chofe, & que les conféquences juftes que le Soldat failoit naître fur fon origine, étoient applicables aux Monftres proprement dits, quoique d’une nature très-différente, & pouvoient fervir de preuve viétorieufe pour le fyfleme des œufs monftrueux qu'on s'étoit propolé de foûtenir ? de ce que la conftruétion du Soldat, parfaitement conforme aux loix & à l'ordre de la Nature, ne peut jamais être, ainfi que celle de l'Homme ordinaire, l'effet des caufes accidentelles ; de ce que le Soldat, ainfi que l'Homme ordinaire, eft immédiatement parti des mains du Créateur, & étoit parfaitement tel dans l'œuf qui le contenoit, qu'il a toüjours été depuis qu'il en eft forti, peut-on en conclurre que le Monftre proprement dit, de- venu parfaitement contraire au Soldat & à l'Homme ordi- naire, par le vice de fa conftruétion, par fa maladie organique; que ce Montre, comme Montre, eft néantmoins auf en cet état le produit immédiat du Créateur, & par conféquent étoit tel dans l'œuf monftrueux qu’on lui fuppofe, malgré les traces & l'impreffion des caufes accidentelles qu'on ne peut s'empêcher d'y reconnoître, malgré toutes les preuves décifives, & fouvent même démonftratives qui parlent en faveur de ces caufes, & qui donnent l'exclufion parfaite à l'idée monftrueufe d'œufs pour la produétion des Monftres proprement dits? Nous pouvons bien donner à notre fan- taïfie le même nom à deux chofes différentes, mais elles réclament par leur différence même contre le mauvais ufage qu'on fait de l'une par rapport à l'autre; & fi lon eût fufh- famment réfléchi fur la différence du Soldat & du Monftre proprement dit, on auroit vû nettement par la confidération de cette différence, que l'un des deux prouve à l'égard de l'autre DES SCIENCES. 537 l'ätre tout le contraire de ce qu’on avoit imaginé. La conf truction ,du Soldat n'étant immédiatement attribuable au Créateur, que parce qu’elle eft pleine de raifon & enticre- ment conforme aux loix de la Nature, clairement exprimées & déclarées dans le grand nombre des ouvrages différents de fon Auteur, comme nous l'avons fait voir dans la pre- miére partie de ce Mémoire, il s'enfuit que le Montre pro- prement dit, qui péche formellement, & le plus fouvent même très groffiérement contré ces loix dictées par la raifon, eftindigne de la même origine, & qu'il eft même impoffible qu'il en ait d'autre que celle des caufes accidentelles qui, en agiffant fur l'ouvrage du Créateur, fur un ouvrage parfait, & qui ne peut continuer de l'être qu'en reftant comme il eft, ne peuvent que le pervertir & Île défigurer plus où moins. IL fuit de ce qui a été dit, que c’eft À tort & faute de bien connoître & la nature du Monftre proprement dit, dont il étoit queflion, & la différence effentielle de cette efpece de Monftre & du Soldat finguliérement conformé, qu'on les a tous confondus, & qu'on a mis l'exemple du Soldat à Ja tête & dans la clafle de plufieurs exemples de Monftres proprement dits, pour tirer de lun & des autres les mêmes conféquences en faveur des œufs originairement monftrueux, ce qui eft exactement la même chofe que fi après avoir fub- flitué au Soldat un Fœtus naturel & ordinaire, on eût voulu le faire fervir à prouver que puifque ce Fœtus naturel & ordinaire eft réellement tel qu'il étoit au fortir des mains du Créateur & dans l'œuf, les Fœtus monftrueux le font &. le doivent être auffi; mais le faux de ce raifonnement qui n'auroit été fuggéré que parce qu'on auroit confondu amal-à-propos deux chofes, qui ne pouvoient être plus con- traires & moins comparables qu'elles le font l’une à l'autre; ce faux, dis-je, auroit tout d'un coup éclaté dès qu'on auroit apperçü la différence effentielle du Fœtus naturel & du Fœtus monftrueux. | Par conféquent, fi l’on ne peut difconvenir que le Soldat, & tous ceux qui lui reflemblent par les mêmes variétés, ou Men, 1740. Yyy 538 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE par d’autres de même nature, ne fuflent dans l'œuf au fortir des maïns du Créateur, avec le même arrangement de parties que l'examen anatomique y a fait découvrir dans la fuite, fi jé fuis même convaincu que les caufes accidentelles n'ont aucune part à cêt arrangement particulier, ce n’eft pas que j'aye été déterminé à prendre ce fentiment par les tentatives inutiles que j'aye faites, pour concevoir comment des caufes accidentellés euffent jamais pu tranfporter à droite ce qui étoit à gauche, & à gauche ce qui étoit à droite, de maniére ue chacune des parties tranfpofées fe préfentaflent comme elles l'ont fait ; je n’avois pas befoin d'un pareil moyen pour me faire penfer comme je le devois, il me fufhioit pour cela de réfléchir fur le caractere & les fuites avantageufes de l'arrangement des parties du Soldat; il eft tel cet arran- gement, qu'ilexclud formellement toutes caufes accidentelles qui ne font admiflibles ni recherchables que lorfqu'il y a des vices réels de conformation, accompagnés de dérange- ment ou d’altération dans les fonétions; & fi j'eufie apperçü quelque chofe de femblable, c'eft-à-dire, de contre-nature dans ce qui fait le fingulier des Hommes dont il s'agit, quel- que difficulté, que dis-je? quelqu'impoflibilité que j'euffe pu trouver dans l'explication de ces faits par les caufes acci- dentelles, je ne les eufle pas moins mis fur le compte de ces caufes, & je l'euffe fait d'autant mieux, que j'ai prouvé inconteftablement dans mes précédents Mémoires, qu'au dé- faut de la voye anatomique, qui ne nous fait pas toüjours voir les caufes accidentelles, il y a d’autres moyens plus fürs : & plus concluants, qui m'euflent vérifié, dans le cas pré- feñt, l'action de ces caufes ; en tout cas, le témoignage que m'en eût donné le vice de conformation & le dérangement des fonétions, m'eût parfaitement fuffit pour être en droit d'impuüter aux caufes accidéntelles ce que la raïfon ne peut jamais permettre d'attribuer au Créateur. DEL SNS COLE IN: C:E Se 539. OBSERVATIONS DU THERMOMETRE FAÎTES EN M DCCXL. À Paris, àr dans d'autres endroits, foit du Royaume, foit des Pays étrangers. Pa M. DE REAUMUR. S' lon avoit interrompu l’ufage de publier Ja fuite com- 2 plette des obfervations journaliéres du Thérmometre pour chaque année, les ficheufes fingularités de 1740 de- manderoient qu’on le reprit : il peut étre utile, ou du moins il eft curieux de comparer les différents degrés de froid & de chaud qui ont été diftribués aux différents jours d'une année, où les fruits de la terre ont eu tant de peine à venir à maturité dans le Royaume, & où ceux de quelques efpeces qui nous font fort importantes, n'y font pas parvenus, de comparer, dis-je, ces degrés de froid & de chaud avec ceux des jours d'années plus heureufes. Nous donnerons donc à l'ordinaire les obfervations du T'hermometre faites, foït à Paris, foit à Charenton, pendant dix mois de 1740, & celles que nous avons faites pendant les deux autres mois, ceux des vacances, dans les lieux où nous nous fommés trouvés, qui font les mêmes que ceux où des obfervations ont été faites pendant les deux mêmes mois dans les années précédentes. Un avertiffement qui a été mis à la tête de toutes les Tables des Volumes antérieurs, doit encore être placé avant celles de cette année; fçavoir, que lorfqu'une petite ligne fe trouve au-deffus d’un chiffre, ce chiffre exprime des degrés au-deflous de la congélation, 6 exprime fix degrés au- deffous de ce terme. k LS Ru ma ht s4o MEMGIRES DE L'ACADEMIE ROYALE PL a 8 2 ol 1 SR LA J. Degrés du matin. | Degr. d'après-midi} J. | Degrés du matin. Degr. d'après-midi. Heures. Degrés. | Heures. Dugrés. Heures, Degrés 112623: Pente le la 2 RE 11à62. .‘. à r+là A SAT 1 ONE ME | ec [23 LE Er = RTE 12INe 141 3 ARE EU 4 LIU NUE . dr] L1) CN CRTEMER 331 41 7. 2" CREME «eee LES. ee ia SIG 2%| 1. 1 73 122 Vrai LL PEROU MER ER ES 4+ CAEN. FT) NPA 24 7l 6: 142 TS 63. . S+ . 33] 8] : 34] +00. 8 _631 9 Se Su APE ONE L S 92/10 Stat (2) IR EPIENAES o | a je es = ES Fe C1 pin es b . “A = pj« w U) — + ww +Ix Oo db LE] séni ciein LE joie ve = pile te + o |r8 . EU MER ot 3z 4 RSR ES MAL DM 52 o RARE . 14 25 sjoteee CURE] ENT 2% n HUE ai 27 . _ se LUE RE: . 82 SAONE PA 2 SP er RUE .... 104 ACCES TA een: UE AR + .. À E CRE, ÈS 3+ 27 . . à se PTE PE QE . 15 28h . NS UN Te Pic du LATE à 29] ... S se. JE 2 CPR QUE EN PME 2 30) . CRE Re ET ES je LE 31 chasenenmr 2 pme, 7 27 .D'E,S:: $C RE NC E.s. s4r MARS. [1740.] À NV RAS. ER J. | Degrés du matin. | Depr. d'après-midi J.! Degrés du matin. [Degr. d'après-midi, Heures. Degrés. | Heures. Drgrés. Heures, Degrés. | Heures. 11à61..... à + [az . . . à s | 1là6....ùà, . ER mesoroses SEA OT RÉ … Éudletere EU ID IONON Ve) 3 24 D: ä Charenton 3 . + 12] 4l +... $ ER à - DENT (EE st leiseran e SRE Soie UE RE st lot ot o'.e Ia ANR RUES SENTE So - f2E ss... 417 . 6 me: EP 68 ne - = Ë AU ee er ont 821 91 .. - . . . NA RME LA 3 uen ROMEO DS.x Ua I FE ES 1 = C1 Le] à Charenton ONU s à CRNL NC +R — bin spl oble spl plu | nm a CA CC ‘ D Ë [3 [2 , SUR 0, O bn mn U pb He fe D eee 5 : 5 D ‘en © 0 ŒIH Ne Ni pe = APE Ÿ B & b A CRE En LORS EEE RTL : , ælw EN he CS = CA JU) Lo a : £. D - ; La! ue NI COLLE She: || LENS hp f . . . . nn em C2 Ehz 2 Elo 4 A SET CN d - « «109 tete 24 RER s4120] +... 3 2 MAO NO | 122= re S F 72121 ‘ LA ro Es VE e 147 EEE Sue CE EEE 7il22l .. 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II INTEL 10 Cr DE ONE d'Aide ONCE QE d Ad! stfotte .... eee ns Degr. d'après-midi. _. —_—_—————_—_—_—_— choses erne dy sie _... à se bia ce e,;abs DES SCIENCES. 543 JUILLET. [1740 AOUST. = d ont À TER RS an J. | Deprés du matin. | Dégr. d'après-midi. J- | Degrés du matin. | Depr. d'après-midi. Heures. Degrés. | Heures, Dregrés. Heures, Digrés. | Heures. Drgrés. | 1fASE àPais à 10 |à3. . . . à 152 2 1,8 4. 9 Halle ess ON AN 2... 1) 3 _... 11 41 13 SÙ - 12 ON nn 13 7... 12 () MRC ES 12 | -9 OR | RON... 122 EN 25.2 12 12] . 13 15 à Ja Roquette 13 16 ALES S (S s44 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE SEPTEMBRE. [1740] ‘(OCTO BR E. J. | Degrés du matin. | Depr. d'après-midi. | J. | Degrés du matin. | Degr. d'après-midi: Heures. Degrés. | Heures, Degrés. Heures, Degrés.| Heures. Degrés. à 3 x x x x s s fase 4 4 à 1413... . à122) 1146... .à 7ilà2... «à 18 4 41 11! 17 huh hi SS d'u 7 Pts © Oo IE nn. IS se TMD E à ,.4 116 PS à + 210 16+ 6 6 RMI 6 & 4.2 18 A cut ME) 4iChuesse 174] 8] “àEtampesse 13 | 3äToury.: 19% 9] ‘àArteny-. 11 *à Orléans. 17 10 à Clerys +. 113 àSaint-Dié 19% RAM Br ... 10 3+à Amboife 22% 12 à Amboife « 13 3 près Tours 17+ 13] lang. 823] prèslaChapel.bl. 17% 14 à Saumurse TI près Montreuil I 9 1$ | à Thouarse + 124 près Brefluire 22 61 à Breflüire-. 113| S$ + près Reaumur I 9 17] äReaumur.. 13 | 3 + + « « 16 ° 19 I à Coulonges 65 6 + à Breflüire + 2 ä Montreuil 10+ à La Chapel, blanche 8 + àTourses + 8 6 àThours 1! à Saumurs « 1 à Langès » « 7 à Amboife près Blois... 12 à S. Laurent x des Eaux #1 à Orléans » « 3 àEtampes 10 à Clery » » e 2 4 6 àBloiss + 2 $ 7 àToury-ee I 6.i E‘tampes 2 près Linars 7 à Paris « « DE: 8% :$S C I E NC ES, M $49 NOVEMBRE. [1740] DECEMBRE. | Degrés du matin. Depr: d'après-midi. | J: | Degrés du marin. Devr. d’après-midi. 1p Heures. Degrés, | Heures, Degrés. 27 cooper es + 0 à : là PCA BE,uL LL Li 16 . b! 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Ainfi l'on peut régler fa longueur à 1 3 lignes +; par cette dimenfion le levier de la réfiftance fera à peurprès dans le rapport de 1 à $, avec une manivelle de 5 pouces. Si le bras qui le mene, fait un effort équivalent à 1 6 livres comme nous l'avons fuppofé, il eft évident qu'il agira avec avantage, puifqu'en pareil cas il fufhroit qu'il en employit douze. Paflons maintenant à l'exécution des pl FOR à Er afflemblage. fe Le diametre intérieur des corps és Pompes étant: déter- miné à 20 lignes par le poids de la colomne d'air.qu'on s'eft propofé de vaincre à chaque coup de pifton, on doit mefurer eur longueur par le développement de la rouë qui mene les crémailléres , quoiqu'on la fafle tourner-un huitiéme de plus que fa révolution entiére ; on verra par la fuite que le chemin qu'elle fait faire aux Piftons, eft à fon diametre dans le même rapport que fa circonférence. Les deux canons auront donc chacun 7 pouces de longueur, & leur épaifieux fera proportionnée aux ‘autres. dimenfions , c'eft-à-dire, CCcci. 572 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE d'environ une ligne fans compter les moulures : on fuivra pour la fonte, pour l'alaïfage & pour les autres façons, tout “ce qu'on a coùtume de faire pour le corps de Pompe de 1a Machine fimple ; mais comme ceux-ci doivent être fixés d'une part à une bafe commune, & de l'autre à une piéce fur laquelle eft établie la boîte du Robinet, il faudra pra- tiquer une vis AB (Fig. 1.) à lune de leurs extrémités, & rélerver à l’autre bout une petite portée CD d'une ligne & demie de hauteur. La bafe commune des deux corps de Pompes eft un coffret “dé cuivre fondu qui a 3 pouces de hauteur, 2 pouces Z de Aargeur, & un peu plus de $ pouces de longueur. Les deux -_ petits côtés, dont le dehors eft repréfenté par la Figure 2, & 4e dedans par la Figure 3, font joints en onglet & foudés' à Yun des grands côtés /Fig. 4.) Le dernier, préparé comme les autres /Fig. s.) eft retenu par quatre vis qui le traverfent aux endroits numérotés 7, 2, }, 4, & qui s'engagent dans deux bandes EF, GH, (Fig. 3.) rélervées à la fonte fur les bords des petits côtés. Le deflus du coffret eft une piéce de même métal {Fig. €.) qui entre à feuillure, & qui excede tout autour de 1 ligne + Deux oreilles réfervées en deflous, & plus longues que la feuillure, reçoivent deux vis qui tra- verfent les deux petits côtés en / & en #, & fervent à le fixer ; cette derniére piéce eft percée de deux grands trous L, M, dont les centres font à 2 pouces 4 lignes l’un de Fautre, & qui portent des filets de vis dans leur épaifleur pour recevoir les corps de Pompes, Woyés la Figure 7. Nous avons déja dit que les Piftons montés fur des cré= maïlléres, recevoient leur mouvement d’une rouë de fer qui doit avoir 2 pouces 3 lignes de diametre : en nous renfer- mant dans ces dimenfions dont nous avons rendu raifon, nous devons dire maintenant de quelle maniére il faut conf- truire & placer les piéces. | On doit forger de fer doux la rouë & fon arbre, comme il eft repréfenté par la Figure 8. La rouë toute finie, doit avoir 27 lignes de diametre & 8 lignes dépaifleur, & j'ai 22H ES SCIENCES, 573 “réglé le nombreide fes dents à onze, par des raifons que je . dirai ci-après. L'arbre eft un cylindre de 8 à 9 lignes de diametre au plus gros, & de $ pouc. de longueur ; à 3 lignes ‘de diftance de part & d'autre de la rouë, H faut pratiquer des épaulements O, N, & à l'extrémité un quarré À, pour -recevoir la manivelle. Lorfqu’on place la rouë dans le coffret , il ne faut pas fe -contenter de faire tourner l'arbre. dans l'épaiffeur des deux grands côtés qui doivent le porter; fon mouvement qui eft fréquent & rude, auroit bien-tôt rendu ovalesiles trous S, S, & lon feroit fouvent obligé de réparer cette partie. On préviendra donc ce defordre,: en faifant mouvoir: l'arbre dans -deux fortes viroles de cuivre qui feront fixées au coffret, & qui auront la longueur convenable pour aller joindre les deux épaulements de Farbre O, N. Pour cet effet, chacune de ces viroles formée en vis par-deflus, aura à l’une de fés extrémités un cercle ou une rofette }F qui portera à plat fur la furface extérieure de la piéce qu'elle traverfe, & fera retenuë par-un écrou 7; T°, qui portera de même fur l'autre furface. Voyés la Figure 9, qui repréfente une coupe du coffret felon l'axe de la rouë. ! Rien n’oblige abfolument à fixer à onze, comme j'ai fait, le nombre des dents de la rouë, mais on doit faire attention que fi l'on en augmente la quantité, elles en deviendront plus foibles, & qu’en la diminuant on aura plus de jeu dans l'engrénage, & par conféquent des mouvements moins me- furés. C’eften confidérant ces mouvements de part & d'autre, que j'ai tâché de prendre un milieu qui me laïffât une jufteffe & une force fuffifantes. Au refte, quelle que foit la denture de la rouë, celle des crémailléres qu'elle mene, doit être avec elle dans un rapport convenable, un peu plus foible, c'eft- ä-dire, qu’en prenant avec le compas d'épaifféur deux dents de la rouë, il faut qu'en rapportant cette ouverture à deux dents des crémailléres, elle fe trouve top grande d’une bonne demi-ligne, ce qui fufhra pour le jeu d’engrénage. » Si les dentures fe conviennent, il eft évident que la:rouë CCcc iÿ 574 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE mencera les crémailléres, lune des deux, dans un fens con- traire à l'autre, comme il convient que cela fe fafle; mais il faut pour cela qu’elles ne puiffent point échapper à fon action, que leurs dents demeurent toüjours engagées dans les fiennes, & qu'elles tendent à fon centre : c’eft pour cet effet qu’on a placé derriére chacune d’elles un rouleau dont la moufle prolongée fert de guide, afin qu'elles ne puiffent ni tourner ni reculer. Ces rouleaux font de petites molettes de fer poli, d'une épaifleur égale à celle des crémailléres, percées au centre, & retenuës dans des moufles par une vis qui leur fert d’axe (Figure 1 0.) la moufle eft fixée à la furface intérieure du. petit côté du coffret par une vis qui le traverfe, & qui peut, pour d'ornement, enfiler & attacher à la furface extérieure une rofette femblable à celles des deux grands côtés; il eft à propos que toutes ces rofettes ayent à leur bord un petit pied ou une goupille qui traverfe le côté du coffret auquel elles font appliquées, & la moufle qui leur eft oppofée, pour l'empêcher de tourner pendant que l’on ferre la vis. Voyes la Figure 11. Ce que nous avons dit jufqu’ici dé la rouë & des cré- muilléres, feroit fufffant s'il ne s’agiffoit que de faire monter & defcendre alternativement les Piftons, comme dans les Machines Angloiles où il y a des Soupapes ; mais comme la mienne eft à Robinet, & que je me fuis propolé de faire fervir le mouvement même de la manivelle qui mene la rouë, pour oùvrir & fermer les communications, il faut quelque chofe de plus. H eft abfolument néceffaire que ce même moteur qui doit tout faire, agifle fucceflivement fur la clef du Robinet & fur les Piflons, qu'il ne commence à mener ceux-ci dans un autre fens, qu'après avoir tourné celle-là dans une fituation nouvelle ; autrement le Pifton qui a tiré l'air du Récipient en defcendant, l'y feroit rentrer par le même pañlage s’il le trouvoit encore ouvert lorfqu’il commence à remonter, & pareillement celui qui a vuidé la Pompe en remontant, la DAMES: 48 CH ICE AN CE S: $ rempliroit aux dépens de l'atmofphere, fi, lorfqu'il com- mence à defcendre, il refloit un accès libre à l'air extérieur. Il y a plufieurs moyens par lefquels on peut partager l'action de la manivelle entre le Robinet & les Piflons, & la rendre intermittente pour ceux-ci & pour celui-là. J'ai choifi comme le meilleur, celui que M. s Gravefande a mis en ufage dans fa Pompe, il eft tout-à-fait ingénieux, j'ai feulement changé le corps des Piftons pour des raifons que je vais dire en parlant de leur conftruétion. Au lieu de fixer leur longueur en faifant la bobine d’une feule piéce, je l'ai compolée de deux virolles ou canons de cuivre, ouverts de toute leur largeur par un bout, & portant à l'autre une rondelle de même métal, dont le diametre eft un peu plus petit que celui des corps de Pompes. La premiére de ces deux piéces /Fig. 12.) parfaitement cylindrique, tant à l'intérieur qu'au dehors, & bien alaifée par dedans, entre à vis dans une autre femblable /F3g. r 3.) longue de 14 lignes, en comprenant l'épaiffeur de la ron-. delle, qui eft percée au centre pour laïffer paffer librement la tige de fer qui eft au bout de chacune des crémailléres. Lorfqu'elle eft pañlée dans cette feconde piéce, on l'y arrête, en mettant à vis à fon extrémité, ou en y rivant même pour plus grande füreté, un bouton de fer d’une ligne + d'épaifleur, arrondi par les bords, & de telle largeur qu'il gliffe fort aifément dans le canon de la Figure 1 2 :.on enfilera enfuite fur cette virolle des molettes de liée & des cuirs préparés, comme on l'a enfeigné pour le Piflon de la Machine fimple. Toutes ces piéces feront retenuës & ferrées entre les deux rondelles, lorfque les deux canons. entreront l'un dans l’autre, & le Pifton qui réfultera de cet affemblage, fera mobile fur fa tige, comme il eft aifé de le voir par la Figure 1 4, qui en repréfente la coupe. C'eft par ce mouvement de la tige dans le Piflon que Von fufpend laétion du moteur pour cette partie; car fi la manivelle repréfentée par la ligne Q, X, (Fig. 1 1.) fe meut de X en Y, elle menera la rouë à l'arbre duquel elle eft 576 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fixée, fera monter une des crémailléres & baifiera l'autre: mais elle parcourra tout l'arc 4, Ÿ, avant que de mouvoir les Piflons, qui ne commenceront à lui obéir que quand les deux tiges rondes a, c, & b, d, auront glifié de toute leur longueur, l'une en montant, l'autre en defcendant : on pourra donc employer le mouvement qui fe fait de Yen Y fur la clef du Robinet, pour la placer dans une fituation convenable au fens dans lequel les Piftons vont fe mouvoir immédiatement après, & l'on fera maître d'en augmenter ou d'en diminuer l'étenduë en allongeant ou en raccour- ciflant les Piflons, comme il eft aifé de le concevoir ; c’eft auffr pour procurer cette commodité, dont on fentira mieux le mérite, fi l'on en vient à la pratique, que je les ai faits de deux piéces, qu'on peut facilement diminuer de longueur fans rien gâter, & avec lefquelles on fera, s'il en eft befoin, des piftons plus longs, en augmentant les liéges & les cuirs. pour empêcher les viroles de fe viffer entiérement. Cette conftruétion, qui eft d'ailleurs fort fimple & fort aifée, a encore un autre avantage, elle ne prend rien fur le corps du Piflon, & la rouë le peut faire defcendre jufqu'à l'extrémité du corps de Pompe, ce qui rend fon fervice plus complet. Si le mouvement de X en F doit fervir à tourner la clef du Robinet, il faudra qu'un pareil mouvement de Y en X la remette dans fa premiére fituation après chaque coup de Pompe ; il eft donc néceflaire que la manivelle faffe environ un huitiéme de plus que fa révolution entiére ; qu’en partant de 4 pour tourner de droite à gauche, non feulement elle revienne en Ÿ, mais qu'elle continuë d’avancer jufqu'en F, ou (ce qui eft la même chofe, mais une des plus importantes) que lorfqu'elle arrivera en Ÿ fi elle tourne de droite à gau- che, ou en X fr c'eft de gauche à droite, l'un des deux Piftons touche très-exaétement le fond de fa Pompe, car ft elle pafloit trop de part ou d'autre le point X ou le point F, le mouvement qu'elle peut faire avant que d'agir fur les Piftons, feroit confommé avant qu’elle eût achevé ce qu'elle doit faire fur le Robinet. DS DU DES S'C-TE N.C:E S S77 DU ROBINET ET DE LA PLATINE. Le Robinet qui fert à ouvrir & à fermer les communi- cations dans la Machine à deux Pompes, differe en plufieurs choles de celui que nous avons décrit en parlant de la Ma- chine fimple ; le double fervice qu'il doit faire en même temps, demande qu’il foit autrement percé : la maniére dont la clef fe meut, exige une préparation particuliére, & fa forme extérieure doit aufh s’'accommoder à la difpofition des deux canons qu’il doit joindre enfemble. Dans tout le refle il faut fuivre les mêmes principes & les mêmes précautions que nous avons recommandés ailleurs. Une des chofes que nous avons prefcrites, & que l'on doit fuivre avec le plus de foin, c’eft de tenir la plus courte qu'il eft poflble, la partie du canal qui eft entre la clef & la Pompe. J'ai fondé cet avis fur des raifons que j'ai repré- fentées, & qu'il feroit fuperflu de rappeller ici : c’eft pour ne m'en point écarter que j'ai encore placé la boîte du Ro- binet fur la piéce même qui fert de fond aux deux corps de Pompes, & pour plus grande folidité j'ai fait fondre l'une & l'autre d’un feul morceau, dans lequel on peut diftinguer néantmoins trois parties par rapport aux différents ufages auxquels il eft appliqué. La premiére /Fg 1 5.) doit être confidérée comme une Platine de 3 lignes d'épaifleur, terminée par deux lignes droites paralleles & par deux arcs de cercles concentriques à e & à f. Ces deux derniéres lettres défignent deux cavités profondes de 1 ligne pour recevoir les deux canons, qu’on y foudera avec de l'étain, & à l'extrémité defquels on a réfervé pour cet effet une portée de longueur convenable, comme il a été dit ci-defus : une attention qu'on ne doit point oublier, c’eft de bien drefler les fonds de ces deux places, & d'empêcher qu'il n'y refte quelques grains de fou- dure qui empêchent les Piftons de s’y appliquer exactement felon toute l'étenduë de leur plan fupérieur ; nous avons dit, ailleurs combien cela eft important , & les inconvénients Mem. 1740. . DDdd 578 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE qui s’enfuivent quand on néglige de les prévenir. La feconde partie comprile entre g, À, i, eft de même épaifleur que la précédente , & fert de patte pour fixer la Machine au Roüet par le moyen d’une vis dont le collet eft quarré, & qui la traverfe à l'endroit qui eft marqué 4, comme on le dira plus particuliérement en fon lieu. : Ces deux prerniéres parties vüës par l’autre face dans la Figure 1 6, xepréfentent le plan de la troifiéme en 7, m; c'eft un Prifme-hexagone pofé {ur la bafe, qui peut avoir d'une face à l'autre oppofée 2 pouces +, 15 lignes de hauteur, terminée par une portée cylindrique #, 0, haute de 3 lignes, ‘& d'un pouce + de diametre, au milieu de laquelle s'éleve une:vis p grofle de 4 lignes & longue d'un demi-pouce. -Voyés la Figure r 7, qui fait voir fous les mêmes lettres cette partie felon fon élévation. Ce n'eft point par hazard que je me fuis déterminé à donner extérieurement à la Boîte du Robinet la forme d'un Prifme hexagone, j'avois befoin de deux faces droites pour l'entrée & pour la fortie de la clef, il me falloit ouvrir les communications g, r, (Fig. 1 7.) qui ne peuvent être que des trous obliqües; les angles /, m, qui avancent jufqu'aux centres des Pompes, m'ont donné lieu de les percer commodément, : & fans crainte de les mettre à découvert par défaut de ma- tiére : ajoûtés à ces raifons que tout ce qui peut fe limer droit & fe figurer avec le Tour, épargne bien des peines & du temps. Cette piéce, toute difficile qu'elle paroït à manier, reçoit aflés promptement de ces deux outils toute fa façon extérieure, mais avant que d’en venir à la décoration, il faut -commencer à préparer au moins ce qui lui ef effentiel. La boîte du Robinet doit recevoir une clef d'un pouce de diametre & d’une figure femblable à celle de la Machine Pneumatique fimple ; ces deux piéces doivent être très- exactement ajuftées l’une pour l'autre, & pour les ouvertures qu’il faut faire tant à celle-ci qu'à celle-là, on pourra pro- céder de la maniére fuivante. Lorfque les deux furfaces de a clef & de Ja boite feront D'E sl" SC EN CE \S):. $79 À peu-près ajuftées lune fur l’autre, on percera le trou P5 (Fig. 17.) d'une ligne de diametre, & en confidérant le plan de ce trou dans l'intérieur de la boîte, comme un cercle dont il interrompt la circonférence, on le divifera en cinq parties égales, à commencer du point s. Pour faire commo- dément cette divifion, rendés réel ce cercle imaginaire;;.en aifant entrer dans la boîte, jufqu'en s, une faufle clef de bois, dont l'extrémité foit tranchéebien perpendiculairement à fon axe ; Ôtés-la pour divifer ce plan circulaire par cinq rayons qui le partagent également, &c remettés la piéce en place, dé façon qu'une des divifions réponde à la lettre s. Marqués par deux points dans fa boîte les endroits où tombent la troifiéme & la quatriéme, pour ouvrir deux autres ‘trous #g & v r d’une ligne de diametre, en plaçant aux chiffres r & 2 (Fig. 1 5.) le foret dans une obliquité con- venable. Fi AD EEE Comme il importe beaucoup que ces deux derniers trous tombent avec juftefle aux endroits qui leur font affignés, il eft à propos d'élever fur la partie de la fauffe clef qui n'entre point dans la boîte, un guide avec lequel il-fera aifé de diriger l'inftrument qui les fera ; lil fufhra d'ailleurs pour le contenir dans le plan de la ligne e, f ; avec cette double attention, les trois trous p, g, r, tendront au centre du même cercle, & ils occuperont dans fa circonférence les points qui leur auront été marqués, ce qui eft abfolument néceflaire, La clef doit avoir cinq trous, chacun d’une ligne de diametré fur une même circonférence, fçavoir trois, efpacés comme ceux de la boîte, fe réuniflants au centre de leur cercle, comme 7, 2, 3, (Fig. r 8.) & deux autres 4; $, com- muniquants avec un canal un peu plus large, pratiqué felon la longueur de l'axe. Ces deux derniéres ouvertures, avec les trois premiéres, partagent exactement en cinq parties égales un cercle pris fur la clef dans l'endroit qui répond aux trous de la boîte dont nous avons parlé. La clef étant donc difpofée comme on vient de le dire, en conçoit aifément que quand le trou r répondra au DDdi ji 580 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE canal ps, il y aura communication entre le Récipient & l'une des deux Pompes, & qu'en même temps l'autre Pompe communiquera par le canal rw par le trou $ qui lui répond, & par le canal qui eft dans l'axe de la clef avec Fair exté- rieur ; ainfi pendant qu'un des Piftons fera le vuide, l’autre fera fortir de fa Pompe l'air qu’elle contient, & lorfque la clef faifant un cinquiéme de fa révolution, préfentera le trou z en v, & le trou 2 en s, le trou oblique marqué 4, ré- pondra en #, & les deux communications feront changées: Mais on conçoit auffi combien il eft néceffaire que toutes ces ouvertures, tant à la boîte qu'à la clef, foient bien efpa- cées & bien correfpondantes, & combien on-doit apporter d'attention pour donner aux parties pleines toute la per- fection poflible. La foupape de la clef étant tout-à-fait fem- blable à celle de Ja Machine fimple, on fuivra pour fa conf- truction ce qui a été dit à la page 414. Je me fuis propofé ci-deflus de mouvoir fa clef du Ro- binet par la manivelle des Pompes, en employant à cet effet un huitiéme de fa révolution en fus, qu'elle fait fans faire agir les Piflons, ou un neuviéme de tout le chemin qu'elle fait dans un même fens ; il ne s’agit donc plus que de pro- portionner ce mouvement de façon qu'étant employé fur la clef, il la fafle tourner la cinquiéme partie d'un tour. H feroit fans doute tout fimple de la fixer à un petit levier 4 (Fig. 1 9.) perpendiculaire à fon extrémité, & pa- ralléle au trou > (Fig. 1 8.) qui pourroit être mené par une cheville B attachée à la manivelle, & à laquelle il échap- : peroit dans le moment qu'il fe trouveroit vis-à-vis du canal gat, (Fig. 17) Mais ce n'eft point aflés qu’en portant la manivelle de X en Ÿ, on fafle mouvoir une fois la clef en conduifant le petit levier de F'en Æ/Fig. 7.) faut, avant le fecond coup de pifton, que la même cheville qui l'a tranfporté, le remene de £ en F'; & sil étoit fixe, quand il lui auroit une fois échappé, elle ne pourroit point le reprendre en revenant: il faut employer quelqu'expédient qui de-faffe revenir de £ DES SCHEN CES 11 sBr ene, & de F en f, après l’aétion.de la manivelle, afin qu'à fon retour elle le retrouve fous fa cheville. C’eft une chofe qui peut s’exécuter de diverfes façons ; la plus fimple, à mon avis, c'eft d’enfiler la tête ou l'œil’ du levier { Fig. 20.) fur une portée ronde pratiquée en C (Fig.2 1) & de faire entrer le mantonnet D /Fig. 22.) dans une échancrüre faite à l'épaulement £ /Fig. 3 1.) repréfenté de face par la Figure 2 3 ; une rondelle ou rofette retenuë par une vis fur le quarré, l'empèchera de fortir ; & fi l’'échan-! crûre eft de 1 ligne + plus large que fon épaifeur, il pourra tourner d'autant fur fa portée, qui doit être très-libre & toüjours un peu grafle d'huile, au moyen de quoi le petit levier accroché par la cheville de la manivelle en f, fera porté en Æ, & lorfqu’il aura échappé, fon propre poids fe fera retomber en e, où-il fera de nouveau en-prife-au retour’ de la cheville. per Au lieu d’une cheville fixe, qui pourroit s’üfer à [a lon- gue, & changer les rapports des parties par là diminution de fon diametre, on pourra fe fervir d’un petit Rouleau de’ cuivre qui tournera librement-fur un axe, & dont la lon- gueur excédera un peu-la largeur du levier. - Le canal fupérieur du Robinet fe joint à la boîte d'une: pat, & de l'autre à la Platine, comme celui de la Machine fimple ; il eft percé de même, & il n'en differe que par un: robinet qui eft pratiqué dans fa partie la plus enflée.. Ce fecond robinet n’eft point abfolument. néceflaire : : quand le premier eft bien fait, non feulement il fait l'office - de foupapes, mais il fufñit pour entretenir le vuide contre : les efforts de l'air extérieur ; cependant il eft plus für & plus ‘ commode de lavoir, r:° parce qu'il peut fuppléer aux petits défauts d’exaétitude qu’une longue fuccefion de temps peut ” caufer dans l'autre, dont le mouvement eft bien plus fré- quent ; 2.° parce qu'il fournit un moyen fort expéditif pour faire rentrer l'air dans le Récipient, quand il en eft befoin.‘ La clef de ce robinet, qui n'a pas plus de 6 lignes de dia-: metre, eft.percée-comme. celle. de la Machine fimple ; ‘elle DDdd ii, 582 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE n’a pas befoin de foupape, mais elle doit être retenuë par une rondelle & une vis percée, avec un cuir gras interpolé, comme il a été dit ailleurs ; la poignée doit être figurée de maniére qu'on reconnoifle aifément le côté qui ouvre le canal à l'air extérieur & celui qui le ferme, afin qu'on ne foit point expofé à tourner l'un pour autre : il eft inutile de dire que quand les Piftons font en jeu, le trou diamétral de cette clef doit être dans la direction du canal. La Platine & les Confoles peuvent être tout-à-fait fem- blables-à celles de la Machine fimple ; ce qu'on en a dit dans la premiére Partie de ce Mémoire, fufhra pour en faire connoître la conftruction & les ufages, DU ROÛET, ET DU PIED qui fert de monture à la Machine Pneumatique à deux Pompes. Le Roïet de Ia Machine Pneumatique à double Pompe, étant deftiné aux mêmes ufages que celui de la Machine fimple, il lui reffemble prefqu'en tout, & ce que j'ai en- feigné touchant cette partie à fa page 426, & fuiv. fufhira pour en faire connoître les principales piéces. Au lieu de 28 pouces de hauteur, les deux montants du point du corps. La main droite avoit feulement quatre doigts, & la gauche trois. Les cuifles étoient plus grofles qu'à l'or- dinaire. Les extrémités inférieures étoient vers le tarfe ou cou du pied, courbées en dedans ; la gauche plus que la droite. Le pied droit n'avoit que le pouce ou gros orteil, & le fecond orteil. Au pied gauche fe trouvoient feulement les trois premiers orteils. À la place de la tête, au haut du corps, où elle devoit être, l'épine du dos étoit recourbée en dedans (c'eft-à-dire de derriére en devant) & aboutifloit au petit corps glandu- leux décrit ci-deffus. 11 n’y avoit rien au lieu de tête, finon une fubftance fongueufe au-deflus des épaules, & dans laquelle on ne pouvoit voir aucun veftige de petits os du crâne, ni de cerveau, ni d’autres parties de la tête ; de même qu'auffi extérieurément les yeux, la bouche, le nez & les autres parties manquoient entiérement. Mais comme la protubé- rance fpongieufe placée fur le milieu de la poitrine étoit attachée au bout de l'épine du dos, elle étoit fans doute lé rudiment de fa tête, dont la produétion n’a pas été effectuée, & cependant paroïfloit aux fpectateurs comme quelque figure EE Des ScrtENcEs 595 de vilagé, ivec une petite ouverture tranfverfale, qui repré fentoit la bouche, & au côté droit un rüdiment d'œil pas bien formé. _ Lefoye, de même que l’eflomac ou ventriculé & bi ratté manquoient tout-à-fait. Les reins étoient placés dans l'un & l'autre hypochondre, & occupoient la place des vifceres fufdits. Le canal des intellins étoit adhérent au milieu de l'intervalle des reins par une membrane, à l'endroit où le méfentere tient ordinairement aux vértebres, & il étoit en- tiérement fermé par en-haut. La poitrine étoit féparce d'avec Vabdomen par un ‘dia- phragme. Sa cavité étoit très- petite, & ne contenoit aucun vifcere. La courbüre de l'aorte étoit placée au haut de la poitrine, & répondoit à Ja courbüre dé l’épine du dos. Au lieu de poulmons, on voyoit une fubftance membraneufe: tranfparente, ayant quelque cavité au dedans, & par- à em: blable à une petite véficule. Enfin il n'y avoit aucun veftige de thymus, ni de cœur. » (6.) M. Raylch, dans la r.re décade de fes Adherfaria, $. viri. de Monffris, N° 14, rapporte que parmi plufieurs fortes de Monftres, dont fon cabinet étoit garni , trouvoit confervé un Veau, dont toute la tête manquoit, au lieu de laquelle il y avoit aû haut du tronc feulement une petite oreille. (7- ) J'ai cru pouvoir aufi à cette occafion räpporter ce que j'avois obfervé d’extraordinaire dans un Pigeon. L'année paffée M. le Chevalier de la Chevaller. aye fit voir à l'Académie un petit Pigeonneau, qui n’avoit point de plu- mes ni de duvet fur I poitrine, & dont on voyoit très- fenfiblement le cœur battre contre la peau, comme s'il n'y avoit point de fernum , qui eft pour l'ordinaire fort faillant LS cc c Ces dans.les oïfeaux , & garni de mufcles fort é épais, connus fous : le nom d'afles ou de blancs dans les volailles. Effectivement on ne fentoit point de flernum à cet endroit, & la poitrine y étoit fort plate. La peau qui couvr oit la moitié inférieure de la poitrine, & qui étoit à nud, fans plume ni duvet, EFFE 596 MEMOIRESs DE L'ACADEMIE ROYALE comme je-viens de dire, étoit fi mince & tranfparente, que non:feulement on la voyoit céder aux battements du cœur, mais aufli de temps en temps on entrevoyoit la maffe méme du-cœur: Ce Pigeormeau fut nourri & élevé dans une cage fort grande, dans laquelle if avoit affés d’efpace pour faire toutes fortes de mouvements, & même voler. Ï s’y nourrit fort bien, & parvint enfuite tout-à-fait à la conformation ordinaire d'un ancien Pigeon ; excepté l'endroit de la poi- trine qui refloit toûjours\à mud! fans plume ni duvet, & où Fon voyoititoüjours fes mêmes battements, qui fouvent pa- roifloient plütôt comme des trémouffements. Il faifoit avec Yaifance naturelle tous fes mouvements ordinaires, même pour fe:tranfporter d'un endroit à un autre par lemoyen des ailes, mais il étoit toüjours dans un tremblement continuel de tout le corps. A Îa fin on l'a trouvé mort dans da cage. © L'ayant difiéqué, je trouvai le fternum fendu tout au long endeux, de maniére que les moitiés fupérieures.de ces deux piéces fe touchoient & tenoient enfemble par le périofte commun, & que les. moitiés inférieures avoient peu de lar- geur , & étoient obliquement écartées l’une de l'autre par un intervalle angulaire, occupé par une efpece de membrane fort mince à laquelle la peau étoit appliquée. L’avance offeufe du fternum y manquoit-entiérement , de forte que les muf cles peétoraux qui pour lordinaire font fort épais, & en partie attachés à cette avance offeufe, étoient ici fort plats, & n'avoient pour attache que le refte des piéces latérales. Le cœur avec fes dépendances, où je n’ai rien trouvé d’extra- ordinaire, touchoit à la membrane de l'intervalle de ces por tions latérales du fternum. Je n'ai rien trouvé hors de l'état naturel dans le refte du corps de ce Pigeon. RUE FLE XP ONS. à Av commencement de mes Remarques fur les Monfires, dans les Mémoires préfentés à l Académie en 173 3 & 1734, j'ai expofé par un détail anatomique plufieurs difficultés au . 3"4rD "Es" SC. ÉÈ'E NC E's, fujet de la prétention abfoluë de pouvoir expliquer évidem- iment parle fyfteme des Montres accidentels, toutes les conformations extraordinaires, foit externes, foit internes; du corps de l'Homme, des Animaux, &cc. & de bannir en+ tiérement l'opinion de:ceux qui dans certains cas admettent aufli l'extraordinaire originel. J'y ai averti exprès que des difficultés que: j'expoferois à: foccafion de ces deux fenti: ments, regardoient non feulement /ce: qu'on a coûtume d’appeller Afonffre (ce: font mes propres termes, comme ori le peut voir ) mais auffi tout ce qui fe trouve d’extraordii naire dans la ftruéture du corps humain & dans celle des animaux, &c. Et ceux qui fe donneront la peine d'examiner de fuite mes deux premiers Mémoires } verront ique je: n'ai nullement prétendu -exclurre en toute occafron de:fyfteme des accidents, ni admettre en toute occafion celui desextra- ordinaires originels, mais que fuivant toute l'exaétitudepoffi- ble dans les recherches anatomiques, je propofé des:diffrs cultés fur l'application de l'un & fur lexclufion de autre dans différents cas, comme je le ferai voir plus précifément dans le Réfultat général de toutes ces Remarques ; & que par les explications que j'y ai dit n'avoir paru difficiles ou impoflibles dans le fyfleme des accidents, je n’entends pas autre forte d'explications que celles que les fauteurs de ce fyfteme employent eux-mêmes, en défignant les traces &les vefliges du changement de l'ordinaire en extraordinaire, &c: excepté que je demande des explications qui répondent réel- lement à la parfaite connoiffance anatomique de la ftruéture des parties. : ÿ C'eft dans ces cas que je tiens le même langage qu'ont tenu avant moi d’habiles Anatomiftes de l Académie, comme en 1700 M. Poupart, qui n'ayant trouvé dans un Enfant au côté gauche, ni artere, ni veine émulgente ; ni rein, ni uretere, &c. dit pofitivement qu'il ne vit même nulle apparence qu'aucune de ces parties y eût jamais-été.! En 1701 M. Littre accufe expreflément lé défaut de la pre- miére conformation. En 1716 M: Méry ; après: plufeurs FFF 598 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyaLE remarques fur un Exomphale monftrueux , conclut ainfi: « Donc, dit-il, l'Exomphale monftrueux ne pouvant êtré » rapporté ni à aucune caufe externe, ni au mouvement du ventre; ne peut être qu'un vice de conformation.» Et je crois en:cela me conformer à l’avertiflement de M. de Fontenelle dans fa Préface générale fur le renouvellement de l Acadé- mie en 1699. «& Nul fyfleme général, dit-il, de peur de » tomber dans l'inconvénient des fyftèmes précipités, dont » Timpatience de Fefprit humain ne s’accommode que trop » bien, & qui étant une fois établis, s'oppofent aux vérités qui » furviennent. Aujourd'hui on s’aflüre d’un fait, demain d’un » aütre qui n'ya nul rapport. On ne laifle pas de hazarder des » conjecturés fur les caufes, mais ce font des conjeétures. » Ainfr, conclut-il, F Académie n’approuve les raifonnements » (de chaque particulier) qu'avec la reftriétion d’un fage Pyr- rhonifme ». C'eft dans cette idée que je vais encore propofer mes: difficultés -par des réflexions fur la ftruéture extraordinaire de ce demi-corps d'Enfant de Cambray, dont on peut tirer des conféquences pareilles fur les autres exemples que j'ai ajoütés. D'abord il paroïît très-facile d'expliquer par le fyfteme des Monftres accidentels, l'abfence où privation de plus de la moitié fupérieure de cet Enfant, & de toutes les parties qui y ont rapport, fçavoir, de la tête, du col, des vertebres du dos, de toutes les côtes, du fternum,, des clavicules, des omoplates, des bras, du cœur, des poulmons, du diaphragme, de l’eftomac, du foye, de la ratte, du pancreas, de la pre- miére portion des inteflins, des capfules atrabilaires, de l'aorte fupérieure, de la veine-cave, de la veine-porte, de toutes les veines en général, ‘du canal thorachique, &c. quoique fi lon confidéroit avec attention la grofleur exorbi- tante de la tête des Fœtus ordinaires dans leur premier temps par rapport à tout le refte de leur corps, comme aufir celle du foye dans la fuite, on trouveroit peut-être cette expli- cation moins facile. Mais voici des difficultés bien plus | DES SCIENCE:.s 59 confidérables que le refte de cette conformation extraordi- naire préfente. (1). On fçait que dans l’état naturellement ordinaire, la veine du cordon ombilical étant entrée par le nombril dans le bas-ventre, y fait encore du chemin pour aller s’infinuer dans la grande fciflure du foye, & enfüite s'ouvrir dans le finus de la veine-porte, où le fang ombilical fe mêle d'abord avec le fang de la veine-porte, & ainfi mélé, pafle dans le tronc inférieur de la veine-cave par un canal particulier, appellé le conduit veineux , qui efl comme niché dans une efpece de rainure de la facé inférieure du foye. On fçait que ce fang ainfi paflé dans la veine-cave inférieure , fe mêle encore avec le fang propre de cette veine, & en füit la route jufqu’au cœur, où encore mêlé avec le fang de la veine-cave fupérieure & le fang des veines pulmonaires, il eft pouflé dans le tronc de l'aorte, & de-là dans fa portion inférieure jufqu'aux arteres ombilicales de l'hypogaftre, & par ces ar- teres il revient à celles du cordon hors du ventre. Dans cet Enfant toutes ces routes fi néceflaires à Fœco- nomie animale, manquoient entiérement, La veine ombili: cale aboutifloit par dedans à Ja bafe du petit bouton externe de la peau, s'y ouvroit entre quantité de pellicules dans une petite cavité, à peine capable de loger la moindre lentille, & s'y rencontroit avec une pareille ouverture d’un autre gros vaifieau , qui tenoit lieu d’une aorte inférieure. Aïnfi voilà le fang veineux du cordon ombilical devenu tout -à -coup fang artériel de tout le corps, fans avoir paflé par tous ces entrepôts ordinaires. : (2.) Dans l'état naturel l'aorte defcendante accompagne de près l'épine du dos jufqu’en bas, & fans s’en écarter jette fes ramifications. Ici elle pafloit devant le rein, & plufieurs de fes branches, qui ordinairement paflent aufir en arriére, très-ifolées de reins, fe plongeoïent ici dans la maflé même du Rein unique, de laquelle fortoient enfüite très-oblique- ment deux arteres méfentériques & l'artere iliaque gauche, lefquelles dans état ordinaire fortent immédiatement du tronc de l'aorte defcendante, 600 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYALE (3+) Dans l'état naturel des Fœtus, la circulation du fang fe fait & fe perpétuë par les piflons du cœur, qui alterna- tivement reçoit par les veines le fang de toutes les parties du corps avec celui de la veine ombilicale, & l'envoye par les aïteres à toutes-ces parties dans le corps, de même qu’au cordon ombilical & au placenta hors du corps. Ici il n’y avoit point de cœur, à moins qu’on ne veuille regarder comme tel le petit bouton de la peau, à caufe que la veine ombilicale y aboutifloit, & que le tronc général de toutes les arteres de ce demi-corps en fortoit ; qu'on le veuille nonobftant fa petiteffe extrémement difpropor- tionnée aux arteres de tout le corps, fur-tout aux arteres de tout le cordon hors du corps, & qu'on le veuille fans la moindre apparence de fibres motrices ou de tiflu mufculaire de ce petit bouton. Par un pareil raifonnement avant la diflection, voyant un peu de poils au haut de ce bouton, un petit enfoncement en bas comme une bouche, & une très-petite excrefcence à côté comme une oreille, on auroit pu prendre ce bouton cutané pour les débris d’une tête extraordinairement déplacée & défigurée, comme on en auroit pu prendre le dedans pour un cœur extraordinaire: ment déplacé & défiguré. Comment concevoir ici le mou- vement de la circulation ? - (4) Maïs voici un phénomene bien plus extraordinaire & bien plus difficile à expliquer. Hors la petite portion de la veine ombilicale après fon entrée par le nombril, je n'ai trouvé dans tout le corps de cet Enfant aucun vaifleau vei- neux, ni le moindre veftige, foit de tronc, foit de rami- fications de veines ; & ce qui augmentoit encore ici l'extra- ordinaire, je n’ai pas trouvé la moindre goutte de fang rouge dans les autres vaiffeaux. La liqueur qu’ils contenoient, paz roifloit purement lymphatique & femblable à celle que j'ai toûjours vû tenir lieu de fang dans les limaçons, dont j'ai difléqué autrefois un aflés grand nombre. Comment expliquer par le fyfteme des accidents cette pri- vation univerfelle de toutes les veines ? Comment concevoir ici DES SCIENCES 6or ici la route de la circulation, n’y ayant point de veines? Je parle de la circulation générale dans les parties du corps même, auxquelles alloient ici les ramifications de toutes les branches artérielles dont j'ai donné la defcription ; car la route dé la circulation particuliére au Fœtus par le cordon ombilical, étoit encore ouverte de part & d'autre, moyen- nant la petite portion de la veine ombilicale, Ces deux phénomenes, fçavoir le mouvement de la cir= culation fans cœur, fans la moindre apparence de quelque autre force mouvante dans le corps de cet Enfant, & la route de a circulation dans fes parties mêmes fans veines ou d’au- tres vaifleaux de retour ; ces deux phénomenes, dis-je, après m'avoir embarraflé pendant quelque temps par rapport à leur exiftence & leur durée, m'ont occafionné là-deflus une conjecture que je propoferai ci-après. ; (5-) Ordinairement il y a dans le corps de l'Homme & de plufieurs animaux deux reins placés tout-à-fait en arriére dans le bas-ventre, vis-à-vis l’un de l'autre, à côté des ver- tebres des lombes, qui font entre deux, de même que l'aorte defcendante &da veine-cave inférieure. On fçait qu'ils y font placés longitudinalement par rapport à la colonie de l'épine du dos, l'une de leurs extrémités étant en haut, & l’autre étant en bas ; que leur concavité ou enfoncement regarde les vertebres, & leur convexité en eft éloignée ; que leurs vaifleaux particuliers, appellés arteres &c veines émulgentes, viennent latéralement de l'aorte & de la veine-cave, & vont tranfverfalement gagner la concavité de ces reins, & s’y in- finuer par des ramifications. Enfin, on fçait que dans l'état naturel il defcend de la concavité de chaque rein pour l'or- dinaire un uretere, & que les deux ureteres aboutifient à la veffie. Ici il n’y avoit qu'un rein fort grand, très-bien conformé à l'extérieur, pofé tranfverfalement devant les vertebres, Ja convexité en haut, & la concavité en bas, avec deux ure- teres qui fortoient des deux extrémités de la même conca- vité, Ce rein n’avoit ni artere ni veine émulgentes, IL étoit Mem, 1740. . GGgg 6o2 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE ROYALE percé d’arteres extraordinaires par la face antérieure de fa convexité, &c. Pour expliquer ceci felon le fyfleme des accidents, il fau- droit d’abord fuppofer la moitié fupérieure de deux reins entiers ordinaires emportée également, enfuite les deux moi- tiés inférieures changer leur direétion longitudinale en di- rection tranfverfale, pour que la coupe de l’un fût tournée directement vers la coupe de l'autre, fortir hors de la dupli- cature cellulaire du péritoine, s'avancer devant les vertebres, & ce qui eft plus remarquable, au lieu de paffer devant l'aorte: pour fe rencontrer, l'écarter des vertebres pour fe joindre & s'unir derriére elle, & y former un feul rein tranfverfa- lement placé.entre les vertebres & l'aorte. .… Une telle tournure de deux moitiés de reins ne me paroit pas explicable par quelque preffion fortuite ou accidentelle dans ce cas-ci, ni un tel écartement de l'aorte, fans lequel écartement elle auroit pu être écrafée par la rencontre & la jonction des deux demi-reins, ou comme étranglée entre, ce nouveau rein tranfverfal & les vertebres, fi quelque pref fion fortuite ou accidentelle y avoit eu part. Ceci m'a encore paru moins explicable par des accidents, après avoir bien examiné & confidéré la route du tronc artériel & de fes xamifications dans ce demi-corps. ( 6.) Ce tronc artériel qui étoit comme la portion in- férieure de l'aorte defcendante, au lieu de tenir la route naturelle en arriére le long des vertebres, auxquelles l'aorte defcendante eft très-adhérente dans l’état ordinaire, il en étoit ici très-éloigné. Il commençoit fur le devant du ventre au-deffus du nombril, à l'endroit où fe terminoit la petite portion de la veine ombilicale dans la cavité du bouton cutané, De-là il pafloit en bas, devant le gros rein tranf- verfl, &.en pañlant jettoit des branches dans la maffe même du rein par différents endroits extraordinaires de la face antérieure de fa convexité, fans en donner à fa concavité comme à l'ordinaire. Au lieu de céla il fortoit de cette con- cavité très-extraordinairement plufieurs arteres, dont uné ré ge emipe 2 DES SCIENCES. |! 603 réunion bizarre produifoit enfuite les arteres ordinaires du “côté gauche de l'hypogaftre & de toute l'extrémité inférieure de ce côté, de la même maniére que le tronc en produiloit les pareilles au côté droit comme à l'ordinaire. Je ne vois pas comment on peut expliquer par le fyftemie univer{el des accidents, la jonction immédiate de l'aorte avec le petit tronc de fa veine ombilicale; fon paflige devant le rein, fans avoir été endommagée par une prétenduë union de deux moitiés dé reins, ou pour le moins en‘ avoir été enveloppée; le paffage de fes branches dans le corps du rein; non pas à l'endroit de la prétenduë union, mais à différentes diftances de cet endroit ; la complication extraordinaire de ces branches après leur fortie du rein, & leur redivifion en d’autres branches; la privation totale des arteres émulgentes; la privation univerfelle de la veine-cave & de toutes fes ra- mifications. Car toutes les conformations extraordinaires ; même les plus bizarres, que l’on fçait certainement & in- conteftablement être arrivées accidentellement , foit par’ cas fortuit , foit par artifice, &c. comme j'ai déja marqué très- expreflément dans mon Mémoire de 1734, c'eft par les traces ainfi connuës du dérangement de leur premiére con formation qu'on les peut expliquer. C’eft ainfi qu’on explique avec évidence l'union de certaines parties du corps humain naturellement éloignées les unes des autres, que la Chirurgie procure, après en avoir emporté celles qui étoient entr’elles, comme dans l'opération du bec de liévre, dans lamputation d’une portion des inteftins, &c. C’eft par-là qu'on explique Vopération de greffer les arbres, celle d’inférer les érgots des chapons à da place de leurs crêtes qu’on auroit emportées. Et même c’eft par-là que felon le fyfteme dés accidents, on prétend fouvent expliquer la jonction extraordinaire des Fotus & de leurs parties, quoiqu'on n'ait nulle preuve réelle que ces Foœtus ou ces parties avoient exifté féparément dans leur origine. | à : En attendant des éclairciffemens folides par Îa plus par? faite connoiffance d’Anatomie fur les difficultés que je viens GGggi 6o4 MEMOIRES DE L'ÂACADEMIE ROYALE d’expofer, & dont j'avouë ingénument n'avoir pas pu trouver le vrai dénouement, j'expolerai ici en deux mots l'idée qui m'eft venuë fur les deux phénomenes extraordinaires dont j'ai parlé ci-deflus, fçavoir, Le cours du fang fans cœur, & le retour du fang fans veines; idée ou conjecture, non pas à l'égard de leur production originelle, que j'ignore abfolu2 ment, mais par rapport à leur exiftence réelle & leur durée. Une attention particuliére fur la bouffffüre extraordinaire de tout ce demi-corps, femblable à l'anafarque ou à un œdeme univerfel, me l’avoit occafionnée. Je confidérerai ici féparément deux fortes de circulation, fçavoir, a circulation extrinfeque qui fe fait dans les Fœtus, réciproquement par les vaifleaux du cordon ombilical hors “du corps de l'Enfant, & par les vaiffeaux ombilicaux du corps même; & la circulation intrinfeque, qui fe fait indé- pendamment: de celle-1à dans le corps feul & fes parties. L'ibfence ou privation de cœur, fans aucune apparence d’or- gane équivalent, me fit conjeéturer d’abord ici une lenteur extraordinaire dans le cours du fang, à peu-près femblable à celle du fang revenu de toutes les ramifications de la veine- porte inférieure ou ventrale, quand ÿl pafle dans les ramifi- cations de la veine-porte fupérieure ou hépatique, dont la conformation approche de celle d’une artere. On pourroit encore en quelque façon, comparer ici au finus des veine- portés le petit bouton cutané, dans lequel lembouchüre de la veine ombilicale fe rencontroit avec celle du tronc artcriel, à peu-près comme l'embouchüre de la veine-porte ventrale fe rencontre ordinairement dans le finus avec les -embouchüres de la veine-porte hépatique; & ainfi fe repré- fenter la circulation extrinfeque dans cet Enfant fans le {e- cours d'un cœur ou d’autre organe femblable, & feulement par l'élaflicité des vaiffeaux. Mais à l'égard de la circulation intrinfeque dans les parties mêmes de ce demi-corps, l'ab- fence ou la privation totale de vaifleaux veineux, m'a fait conjecturer , qu’au lieu de circulation proprement dité, il n'y a eu qu'une efpece de progreffion où tufion jufqu'aux Re us non à. DHEYS HR AQU ME EN. C LE 6 6o$ extrémités capillaires de toutes les ramifications artérielles, & que à ce fang lymphatique tranfudoit peu-à-peu, & très- lentement, dans le tiflu cellulaire de toutes les parties, & par conféquent produifoit la bouffflüre univerfelle de ce petit demi-corps, & peut-être même après un certain degré de cette infiltration, pafloit, par les pores externes de la peau en-maniére de moiteur. Je n'avance tout ceci que comme depures conjectures, & je répete encore ici, qu'elles regar- dent uniquement l'exiftence & la durée de ces deux fonctions extraordinaires, & nullement leur :produétion primitive, J'ajoûte aufli qu'à l'égard du fyfteme des accidents, je: n'ai jamais prétendu demander d'autres explications que celles qu'on employe en fa faveur, en défignant les.traces ou vef. tiges, foit de déperdition, foit de Jonction ; foit des. deux enfemble. Je ne trouverois pas mème équitable d’en deman- der d’autres, étant perfuadé qu'elles feroient pour le moins auffi difficiles que celles de la nutrition, de 1a croiflance des fécrétions, de l'aétion mufculaire, & de la propagation, defquelles on n'a encore jufqu’à préfent donné que des'ex- plications en partie imparfaites, & en partie plus ou moins fyflématiques, quoique fouvent très-ingénieufes, & dont même je n'ofe prefque plus efpérer des explications réellés & fuflifamment expérimentales, après tout ce que j'ai vû, Iû & eflayé là-deflus en toutes façons depuis plus de qua- rante ans, principalement fur l'action mufculaire & fur les #écrétions Cela néantmoins ne m’empêchera pas de pour- fuivré le travail. Le méchanifme en eft peut-être fr fimple, qu'après beaucoup d'expériences de toutes façons, & beau- coup de recherches inutilement employées, on fera furpris de ne s'en ètre pas apperçu. . Je conviens qu'on peut avec aflürance attribuer aux acci- dents les conformations extraordinaires des Fœtus, quand on fçait certainement que pendant la groffefle, il y a eu des accidents capables de les occafionner, comme chûtes, coups, mouvements extraordinaires, attitudes gênantes, prefle, ferrement des corps forts à baleine, certaines maladies, &ce | GGgg i 606 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE & quand on peut défigner réellement quelques traces ou velliges du changement de l'ordinaire, qui auroit préexifté, en l'extraordinaire furvenu. Mais quand on n'apporte pour preuves, que des parités dont les caufes accidentelles font évidemment notoires, foit cas fortuits, foit ‘artifices, &c. & que des fuppofitions arbitraires, des opinions privées ou perfonnelles, &c. & qu'on ne défigne aucune marque réelle de préexiftence de l'ordinaire avant l'extraordinaire, je me conforme à ce que j'ai cité ci-deflus de la Préface générale de M. de Fontenelle, & je me joins à ceux qui, non contents de tels raifonnements, avouent fimplement en tel cas leur ignorance, faute de preuves évidentes, fans vouloir inventer quelque fyfleme pour {e tirer d'embarras; & qui loin de penfer que leur idée fur les extraordinaires originels choque l'uniformité de la Nature, & bleffe la fageffe où autres attri- buts divins du Créateur, croyent plütôt rendre par-1à en- tiérement hommage à fa toute-puiflante liberté fouveraine. Je remets pour le Mémoire fuivant, mes remarques fur deux Diflertations touchant cette matiére, dont l’une eft anonyme, & imprimée à Lyon.en 1702, à la fin de l'Ar- fénal Chirurgique de Scultet ; l'autre eft de M. Haller Pro- fefleur en Anatomie à Gottingen, imprimée à Hannover en 1739. La premiére eft une fource très-féconde de tout ce qu'on peut avancer en faveur du fyfteme des conforma- tions accidentelles. La feconde eft un examen anatomique très-étendu & très-recherché d’un grand nombre de toutes fortes de conformations extraordinaires, & des deux opinions différentes là-deflus. Le | | | DES SCIENCES. Co7 REMARQUES SUR UN NOUVEAU MONSTRE, Dont M. Winflow a donné depuis peu la defcription à l'Académie. Par M. LÉMERY. C'I M. Winflow fe fût contenté de donner un détail ana L) tomique d’un Enfant né fans tête, fans col, fans poitrine, fans cœur, fans poulmons, fans eftomac, fans foye, fans ratte, fans pancreas, & fans une partie des premiers inteftins; quoique ce Monftre ait beaucoup de rapport avec quelques autres qui fe trouvent dans nos Mémoires, & qu'il paroife même refflembler parfaitement à celui que M. Méry donna en 1720 à l'Académie, cependant il eût toüjours mérité par l'exactitude de la defcription de fes parties, d’être placé’ avec plufieurs autres faits curieux fur le même fujet. Mais M. Winflow ne s’en eft pas tenu à cette defcription ; il ya joint des Réflexions pour prouver qu'il y a réellement des Œufs originairement monftrueux, & que le Monftre qu'il préfente, vient d’un de ces œufs ; & comme le Mémoire de M. Winflow eft arrivé à fa fuite de quatre des miens, im- primés en 1738 & 1740, & dans lefquels je réfute pleine- ment le fyfteme & la prétenduë preuve du fyfteme des Œufs monftrueux , & je donne encore fur la nature & la formation des Monftres proprement dits, des éclairciffements nouveaux, puifés dans une longue fuite de faits & d’obfervations qui font voir que ces Montres, bien-loin d’être originairement tels, le deviennent après coup par des caufes particuliéres de maladies, on pourroit croire que le nouveau Mémoire de M. Winflow contiendroit de nouvelles raifons en faveur des œufs monftrueux, ou que fon auteur auroit cherché à y défendre, juftifier & faire revivre la preuve unique, & 608 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoyaLeE qui lui avoit paru fufhre en 1733 & 1734, pour mettre fur le compte des œufs monftrueux la formation des Monf. tres rapportés dans les deux Tomes des Mémoires de ces deux années. Cependant M. Winflow n'a rien fait-dans fon nouveau Mémoire de tout ce qui vient d'être remarqué. Convaineu de l'excellence de fa preuve en faveur des œufs monftrueux, il a cru apparemment qu'elle fe défendoit toute feule, & qu'il pouvoit toüjours, malgré ce qui avoit été objecté, & fans y avoir égard, aflürer avec autant de confiance qu'au- paravant, que toute partie monftrueufe dans la ftruéture in- térieure de laquelle il n'appercevoit pas clairement comment elle auroit pu être l'effet des caufes accidentelles, appartenoit néeeffairement au fyfleme des œufs originairement monf- trueux : ce n'eft aufii que cette même confidération qui lui fait conclurre aujourd’hui que fon nouveau Monftre vient d’un œuf monftrueux, quoiqu’on lui ait fait voir très-claire- ment, & de plus encore par le témoignage d’une multitude de faits, que la raifon alléguée ne prouvoit quoi que ce foit ni contre les caufes accidentelles, ni pour les œufs monf- trueux ; que fi elle avoit lieu, ces œufs s'empareroient d’une infinité de Monftres que l’on fçait fi parfaitement d’ailleurs être le produit des caufes accidentelles, que la certitude que Yon en a à l'égard de la plus grande partie de ces Montres, va, sil eft permis de le dire, jufqu'à la démonftration ; qu'enfin fi cette confidération prouve quelque chofe , c'eft le défaut de nos lumiéres, qui ne nous permet pas toüjours de découvrir & de reconnoitre la maniére dont les caufes accidentelles ont opéré ce qu'il y a de plus particulier & de plus caché, dans la ftruéture intérieure de certaines parties monftrueules. Lt Je demande donc qu'il me foit permis de mettre doré- navant la defcription du nouveau Monftre de M. Winflow, non à la fuite de mes quatre Mémoires fur les Montres, comme elle s'y trouve en effet, mais à côté des Montres rapportés en 1733 & 1734 par M. Winflow, & cela me. qui D ENS CE ÉN'e Euh CE “qu'il ne dit à l'égard de la formation de fon dernier Monftre, que ce qu'il a dit à l'égard de celle des premiers : & comme ce que j'ai dit depuis contre les réflexions de M. Winflow fur ces autres Monftres , s'applique également bien à celles qu'il a faites fur le nouveau Monftre, il eft clair qu'avant que le dernier Monftre eût paru, il étoit déja réfuté d'avance dans la réfutation même des deux premiers Mémoires qu'il ayoit donnés en 1733 & 1734; & quand il en donneroit encore dans la fuite un grand nombre d’autres fur différents Montres, de chacun defquels il ne tireroit toûjours que la même conféquence; comme la même réfutation auroit enz core lieu à leur égard, je déclare d'avance que je n'y ferois aucune réponfe particuliére, & je m'en difpenferois d'autant mieux, que je me flate d’avoir fuffifamment détruit ou pré- venu dans mes quatre Mémoires fur les Monftres, les objec- tions qui mont été faites, ou celles qu'on pourroit me faire à l'avenir; & que de nouveaux faits interprétés comme l'ont tété les précédents, auront beau être multipliés, il n’en ré- fultera toûüjours qu'une répétition, ou un furcroit de faufles conféquences, dont le fyfleme des œufs monftrueux ne tirera jamais aucun avantage, & ne fe trouvera pas mieux qu'il étoit auparavant, Au refte quoique M. Winflow n'ait dit précifément fur la formation de fon dernier Monftre, que ce qu'il avoit dit fur celle des premiers, il faut pourtant convenir que le Mé- moire qu'il vient de nous donner, contient quelques parti: cularités qui ne fe trouvent point dans fes autres Mémoires. ‘ 1° IE mble chercher à juflifier la défenfe qu'il a prife du fyfteme des œufs monftrueux, par un article de la Pré- face que M. de Fontenelle a mife à la tête de l'Hifloire de Académie, & par ce que trois habiles Anatomiftes de cette Académie ont dit avant lui à l'occafion de trois obfervations particuliéres. M. Winflow commence l'article de la Préface de M. de Fontenelle par ces mots, Mul fjfleme général, &c. mais quand on lit ce qui précede ces mots & ce qui com- mence véritablement l'article dont il s’agit, on voit dé- Mem, ‘174 0. . HHRBR 610 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE monftrativement que M. de Fontenelle n'entend par /yffeme général, que celui de l'Univers, qui comprend à la fois toutes les différentes parties de la Nature. Mais quel rapport ce fyfteme général peut-il avoir avec celui de la formation des Monitres, qui n'eft qu'un fyfteme particulier? Quelle induc- tion M. Winflow en peut-il tirer, qui favorife le fyfteme des œufs monftrueux ? A l'égard de M." Poupart, Littre & Méry, qui font les trois Anatomiftes que M. Winflow fait parler & penfer comme lui, on ne voit pas dans ce qu'ils ont dit, qu'ils ayent euen vüë les œufs monflrueux, du moins ne parlent-ils point de ces œufs, & le vice qu'ils attribuent à la premiére conformation, peut & doit s'entendre de celui qui arrive dans le temps du développement du germe, & cela pour le diftinguer de celui qui ne fe formeroit qu'après que les par- ties du Fœtus auroient été entiérement développées ; & ce qui prouve qu'au moins M. Méry n'a jamais eu les œufs monftrueux pour objet, c'eft qu'on fçait qu’il a toûjours été contraire au fyfteme des œufs, qu'il ne s’eft jamais dédit fur cela, & qu'il a toûjours foûtenu par écrit & autrement l’an- cien fyfteme du mélange des deux femences. 2." I paroît que M. Winflow, en nous défignant dans fon dernier Mémoire les cas où il eft permis d'attribuer la formation des Monftres aux caufes accidentelles, a voulu reftreindre les caufes & les preuves de cette formation aux feuls accidents qui s’annoncent manifeftement pendant 1a groflefle, tels que chüûtes, coups, mouvements extraordi- paires, attitudes pênantes, prefle, ferrement ; & aux veftiges du changement de l'ordinaire qui auroit préexifté, en l'extra- ordinaire furvenu. On ne prétend pas nier que ces fortes d'accidents ne puiflent peut-être en certains cas occafionner quelques conf- truétions monftrueufes, mais en conféquence de la force & de la vivacité de leur a@tion, ils paroiflent en général bien plus propres à détacher brufquement le placenta, à faire périr tout d'un coup le Fœtus, & à caufer des avortements, qu'à D'E S SCIE N'CE S (24 produire des Monfires ; & fans entrer dans fa méchanique particuliére de cette produétion, nous pouvons toüjours avancer avec confrance, que les caufes accidentelles dont l'action eft fourde, imperceptible, mais continuë, contri- buent bien plus efficacement à la formation des Monftres, que cellesiqui agifient plus fortement, & font un plus grand fracas. A l'égard des vefliges requis, fi lon excluoit les caufes accidentelles de la production de toutes les conformations monftrueufes auxquelles ces veftiges manqueroient, on ren- voyeroit à tout inftant aux œufs monftrueux ce qui feroit bien certainement le produit des accidents. Par exemple, fe diaphragme du Montre de M. Goeffon. avoit deux centres nerveux qui marquoient qu'ilavoit été formé. de deux dia- phragmes ; mais f1 la preflion de ces deux diaphragmes eût été plus forte & plus complette, les deux centres nerveux fe feroient unis &-confondus comme ils l'ont fait ailleurs, & les veftiges des deux diaphragmes euffent difparu, cependant le diaphragme du Monftre n'en auroit pas moins été compolé de deux moitiés de deux diaphragmes différents. Enfin M. Winflow avance trois chofes qui méritent d’être remarquées. La premiére & la feconde, c’eft que fes idées fur les extraordinaires originels ne choquent ni l'uniformité de la Nature, ni la fagefle ou les autres-attributs du Créateur. La troifiéme, c’eft qu’il croit rendre hommage par ces mêmes idées à la toute-puiffante liberté fouveraine de l Auteur de TUnivers. ty °shäfto Pour ce qui regarde Funiformité -de la Nature, y a-t-il rien de moins uniforme qu'un Fœtus monftrueux par rapport au mâle & à la fémelle de même efpece dont. il vient, fur- tout quand on regarde fa conformation comme originaire- ment monftrueufe ? car f..on la fuppofe l'effet des caufes accidentelles, luniformité des germes fubfifte toûjours ; ils font tous alors originairement & éflentiellement les mêmes, il n'y en a que quelques-uns dont da: conftruétion primitive fouffre plus ou moins dans la fuite & après coup par cas Hhh i 612 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE fortuit. Enfin, des deux fyftemes fur les Montres, il n’y a, comme on le voit, que celui des accidents qui s'accorde avec luniformité exacte de Ia Nature dans la conformation particuliére des individas de chaque efpece d'animal. Pour fçavoir préfentement fi le fyfteme des œufs monf trueux s'accorde avec Îes idées que nous devons avoir de la fagefle & des autres attributs du Créateur, je renvoye fur cela à la lecture de mon premier Mémoire & à celle de la premiére partié du. quatriéme fur les Monftrés. Enfin, fi M. Winflow regarde les Monftres comme un effet-de la toute-puiffante liberté fouveraine du Créateur, j'ai d'abord à lui repréfenter que quoique la liberté du Créateur foit infinie, il eft impoñlible qu’en vertu de cette liberté, il fafle jamais rien qui puifle être defavoué par fa fagéfe : les attributs divins ne fe féparent pas, ils tiennent néceflairemen les uns aux autres. ; D'ailleurs; comment concevoir que c’eft rendre hommage à a liberté toute-puiffante de l Auteur de la Nature, que de lui attribuer la production immédiate des Monftres? qu'il me foit permis de m'expliquer fur ce fujet par la comparaifon fuivante. Je fuppofe un Horloger du premier ordre, & dont a droiture égale l'habileté : fr quelqu'un ne fçachant de qui font beaucoup detrès-mauvaifes Montres, s’avifoit de les attribuer à notre Horloger, & prétendoit en le faifant, célé- brer le pouvoir de fa liberté qui ne l’aftreindroit point à ne faire que des Montres excellentes, & qui lui permettroit d'en faire de monftrueufement mauvaifes, je demande ce qu'on devroit penfer d'un éloge de cette efpece. RS He TA . FAYDESS FSI CURE NICE: S0 17 61 OBSERVATIONS METEOROL OGIQUES FAITES A L'OBSERVATOIRE ROYAL PENDANT L'ANNEE M. DCCXI. Par M. MARALDL Obférvations fur la quantité de Pluye. oùc.. e P ne — à pouc: lign. N Janvier... o 52 | En Juillet... 315542 2 2 Février... 0 44 Aoûti ss. ‘2 6%: MERS RARES 0 8% Septembre: : ‘#1 10% AVAL mue 1 2? O&tobre. 1 10 1 NE NRA 2: 132 Novembre.. 2 11 . x 4 3 2. Juinbese 10 57 Décembre... 5, 0 2 ; « 2 1 ra DE < At Donc la quantité de la pluye, ou neige fonduë. a été de 21 pouc. 6 lign. +, qui eft beaucoup plus grande que l’année moyenne, Celle qui eft tombée pendant les fix premiers mois. de l’année, .eft de $ pouc. 7 lign.?, & celle des fix derniers mois eft de:1$ pouc. x 1 lignes. Le feul mois de Décembre en a donné prefqu'autant que les fix premiers mois de l’année, ce qui. a caufé un débordement confidérable de la Riviére,, qui a été plus grand qu'au mois de Février 1711, mais moindre qu'en 1658, fi l'on s’en rapporte à la hauteur mar- quée dans les Cloîtres des Céleftins de Paris, dont j'ai me- furé la différence, que j'ai trouvée de 2 Bieds 9 pouc. s ligne mais on m'a dit que cette grande inondation de 1658 n'a pas été générale dans Paris, mais particuliére pour ce quar- tier-là, parce qu'elle a été caufée par la chûte du Pont Marie qui a barré tout d’un coup la Riviére, & a obligé l’eau de réfluer & de s'élever pour échapper de l'autre côté de l’Ifle- Set Louis. HHhh ij 614 MEMOIRESDE L'ACADEMIE ROYALE Sur le Thermometre. Le froid du commencement de cette année a été très- grand. La liqueur de l'ancien Thermometre, qui eft celui dont s’eft fervi M. de la Hire en 1709, & qui eft placé au même endroit, c’eft-à-dire, dans l’intérieure de la Tour dé- couverte de l'Obfervatoire, eft defcenduë à 1 4 degrés le 10 de Janvier par un temps couvert, & un petit vent de Nord-eft. Elle eft montée à 1 $ degrés+le 1 1, & à 27 degrés le 12 du même mois. La liqueur du mêmeT'hermometre defcendit en 1709 à 5 degrés le 1 3 & Île r4 du mois de Janvier, ce qui marque que le froid de r709 a été plus grand qu'en 1740. En eflet, les Arbres fruitiers n’ont pas tant fouffert cette année, & je n'ai point entendu dire qu'il en foit mort comme en 1709. II en a été de même des Bleds, dont la récolte a été très-médiocre, mais qui n'ont pas tant fouffert qu'en 1709. La liqueur du'Thermometre de M. de Reaumur, placé à côté de l'ancien, eft defcenduë le ro de Janvier, jour du plus grand froid, à 1 0 degrés au-deflous de la congélation, & la liqueur d'un pareil Thermometre, expolé en dehors & vers le Nord, eft defcenduë à 1 r degrés. Le grand froid a duré long-temps, car le 27 de’ Février la liqueur de ce dernier T'hermometre eft encore defcenduë à 8 degrés au-deffous de la congélation. En général l'Hiver a été fort long, puifqu'on n’a vü les Thermometres au tem- péré le matin que vers le 2$ de Mai, excepté feulement une fois, qui eft arrivée le 24 d'Avril. La chaleur de l'Eté n’a pas été grande. La liqueur de Y'ancien Thermometre n’eft montée qu'une feule fois à 69. degrés + le 1 $ deJuillet après midi; fe matin elle étoit à 5 8. Ceux de M. de Reaumur ont été le même jour à 1 6 degr.+ le matin, & à 22-24 {e foir. Jur le Barometre. Le Barometre a marqué la plus grande élévation du DES SCIENCES. 615 Mercure à 28 pouc. 5 lign.+ le 30 de Juin, & le 1. de Juillet par un petit vent de Nord-nord-eft ; & il s’eft main- tenu à 28 pouc: 4 lign.+ le 2 &le 3 du même mois. Sa moindre hauteur a été à 27 pouc. 6 lignes le 21 de Janvier par un temps couvert, & un vent d'Oueft. Le 10 &le 1x: du même mois, jours du plus grand froid, il a été à 27 pouc. 3 lignes. Le 4 de Décembre il eft defcendu à 26 pouc. 1 1 lignes à 7 heures du foir par un grand orage & un grand vent de Sud-oueft qui a duré une grande partie de ce mois. Par les obfervations du P. Perot Jéfuite, Profefeur de Mathématique à Lyon, le plus grand froid n’eft arrivé à Lyon que le 19 de Février, la liqueur d’un Thermometre de M. de Reaumur étant defcenduë à o degrés au-deflous de la congélation par un vent de Nord-eft violent. Le 9.& le 11 deJanvier, jours du plus grand froïd à Paris, elle n’étoit defcenduë qu'à 6 degrés au-deffous de la congélation. Le plus grand chaud a été à Lyon le 19 de Juillet, Je Thermometre, entre 3 & 4 heures du foir, marquoit 28 degrés au-deflus de la congélation; les jours les plus chauds après celui-là ont été le 1 1 de Juillet, le r.e7 & le 6 d’Août, où Ja liqueur a été à 25 degrés. Déclinailon de l’Aiouille aimantée. On a obfervé plufieurs fois pendant l'Eté la déclinaifon d'une Aïguille aimantée de 4 pouces, de 1 sd 45’ vers le Nord-oueft. ea d'A 616 MEMOIRES DE L'ACADEMIE RoYyALE —————————————————_—______—_—_—______ À". EXPLICATION DES. FIGURES de la derniére Partie du troifiéme Mémoire fur les Monfires à deux Têtes, page 32 4 de ce Volume. Ces Figures ont rapport aux pages 334, 335, 336 & 337. À, À, font les deux Reïns externes des deux Fœtus dont le Monftre étoit compofé ; les deux Reïins qui étoient naturellement placés dans les deux moitiés externes de ces deux Fœtus, qui n’ont point été détruites. 8, B, font les deux Reins internes des deux Fœtus, lefquels fai- foient originairement partie des deux moitiés de ces Fœtus, qui fe font réciproquement détruites par leur rencontre mutuelle. €, C, font les deux moitiés externes des deux Veffies des deux Fœtus ; celles qui étoient contenuës dans les deux moitiés de ces Fœtus, qui ont été confervées. D, D, font les deux moitiés internes des deux Veflies des deux Fœtus; celles qui en fe rencontrant, fe font mutuellement détruites, & qui étoient auffi dans les deux moitiés de ces Foœtus, expofées à l'effet de la preflion réciproque. ÆE, eft la Veflie formée, & réfultante des deux moitiés externes des deux Foœtus. F, F, font les deux Ureteres externes des deux Fœtus; ceux qui ont fubfifté, ainfr que les deux Reins externes & les deux moitiés externes des deux Veflies, auxquels ces deux Ureteres tenoient. G, G, font les deux Ureteres internes des deux Fœtus; ceux qui ont péri, ainfi que les deux côtés internes qui les conte- noient, & ainfr que les deux Reins internes & les deux moitiés internes des deux Veflies, auxquels ces deux Ureteres étoient ofriginairement attachés. PF | MESSIEURS Mem. de lAcad. 1740. pt28pag 6 { — Maé Sen 270 pl.29. pag. 682. DE SM aS CE EN CE 5, 617 — TORRES Se] RD 4e D. y © a, 7. © DÉNCÈS en SO ENSE CES . pe SO DMC Ah La. RRPR CA FeC" ol © OÙ MESSIEURS DE: LA SOCIETE Royale des Sciences, établie à Montpellier, ont envoyé à l’Académie l Ouvrage qui fuit, pour entretenir lunion äntime qui doit être entre elles; comme ne faifant qu'un feul Corps, aux termes des Statuts accordés par le Roy au mois de Février 1706. eu Ge bo Bert lots TM SUR QUELQUES NOUVEAUX INSTRUMENTS DE CP IURSU BG HE. Par M. GouvizArD. I: m'a paru qu'on n’avoit pas encore trouvé des Inflru- ments propres à pafler avec facilité les fils néceflaires pour faire la ligature des Arteres intercoftales ; que les moyens qu'on avoit employés jufqu'ici pour les futures & la ligature des Vaifleaux, étoient extrêmement défectueux ; que ceux qu'on mettoit en ufage pour la réduétion des Côtes fraéturées en dedans, avoient encore plus de défauts, & qu'enfin juf- qu'à préfent on n'avoit pu qu'avec de: grandes difficultés, porter dans-les foffes nazales des médicaments pour arrêter les hémorragies qui fuivent ordinairement l'extirpation des polipes qui s’y forment... \ Quelques-unes de ces opérations manquent d'Inftruments pour les entreprendre ; les autres, d’Inftruments pour les faire avec aïfänce & avec füreté, C'eft ce qui m'a porté à inventer Men, 1740. ur 618 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE des Inftruments pour les faire avec facilité ; je erois-y avoir réufi, & je vais en quatre articles donner la forme & l'ufage de ces quatre fortes d'Inflruments nouveaux, avec la maniére dont je prétends me fervir de chacun d'eux, ARTICLE I. De l'Aïguille à manche pour la ligature de l'Artere intercoflale. Avant que d’expofer ici ma Méthode pour lier lArtere intercoftale, il eft néceflaire que je parle de celle que M. Gérard, Chirurgien-Juré de Paris /'inventa, au rapport de Ms Garangeot & la Faye. J'avois vû plufeurs fois la néceffiié de cette opération; & le béfoin que la Chirurgie avoit d’une méthode pour la faire avec fuccès, m'avoit fait inventer la mienne long-temps avant qu'on eût donné au Public celle de M. Gérard. On peut voir là-deflus ce qu’en dit M. de la Faye dans fes remarques fur le cours des opé- rations de Dionis, p. 42 $. dern. edit. Comme l'aifance à manier les inftruments dans les opé- rations de Chirurgie, contribuë à la füreté dans l’exécution, je jugeai que l’Aiguille dont fe fervoit M. Gérard, pouvoit ‘bien, avec l'aide de fa grande dextérité, fervir à faire cette opération, mais qu'elle deviendroit inutile entre les mains” de bien d’autres, ou du moins que fi l’on s'en fervoit, ce feroit avec une extrême difficulté, & avec danger pour le malade. J'ai donc imaginé un Inftrument propre à faire cette opération avec facilité, c’eft une Aiguille à manche À, d'environ cinq pouces de longueur ; elle a trois parties, la pointe, le corps & le manche. La pointe eft un peu moufle & légerement tranchante ; à une ligne & demie de cette ointe eft un trou €; j'en avois d'abord placé un autre à pareille diftance de celui-là, mais: j'ai reconnu qu'il étoit inutile & embarraflant. Un feul trou fuffira donc à pañfer le lien néceffaire pour faire la ligature de l’'Artere. Le corps a environ un pouce & demi, fa courbüre eft de 1.4 lignes où DIHISMASAGAMMEIN ciEersuaM 6 environ ( cela dépend du fujet fur lequel on F'employe) & fur toute la convexité regne une rainure € qui commençant au trou, {e termine à la jonétion « du manche avec le corps; cette rainure fert: à loger & à contenir le lien : le manche eft de deux pouces & demi, arrondi en Ja partie qui tiento au corps, & applati en forme de cœur dans {a partie re le termine 2. Quant à la façon de s'en fervir, je commence par couper les |téguments & les mufclés qui couvrent les côtes ,‘ainfi qu'on le pratique pour l'opération de l'Empyéme ; je prends l'aiguille, & je l'enfile de plufieurs brins de fil blanc & cité, oblervant de le faire pafler de dehors en dedans, & de n’en laifler dans la concavité que deux travers de doigt ou envi- ron/; je loge enfuite le lien dans a rainure, & je l'aflujettis dans la jonction du manche & du corps avec le doigt index de la main droite; je porte enfüite l'aiguille au-deffus de da côte fupérieure à lartere qui eft ouverte, &-du côté de fon origine, à un pouce environ de fon ouverture. Dès que j'ai percé les mufcles & la pleure, & que la pointe de l'aiguille eft dans la Poitrine, j'éleve le manche, & par ce mouvement la pointe, en s'approchant de a:partie fupérieure de la côte inférieure, perce de dedans en dehors la pleure & les muf- * cles intercoftaux. Je donne alors à un'aide l'emploi de tenir le manche élevé, & je tire de‘lien-qui paroït, je le retiens de I main gauche, & reprenant lemanche dela main di oite, je fais fortir l'aiguille par le même chemin qu’elle eft entrée, Le refte du fil fe trouve ainfr au-deflus de la côte fupérieure à l’efpace où l’'artere eft ouverté, & embrafle l'artere qu’il fautdier. Je lie enfuite un!gros .bourdonnet au bout du lien inférieur, & en tirant le bout-fupérieur , j'applique de bour- donnet contre l'artere ;aprèsiavoir fait-une petite incifion aux mufcles intercoftaux pour mieux appliquer le ‘bourdon net-auprès de f'artere; puis: fur la côte fupérieure je mets une comprefle fürsläquelle ÿ je faisiles nous convenablèse je-penfe enfuite’ à l'ordinaire! ! Après avoir expofé-ces deux méhodes, Le Gérard me ii ij 620 MEMOIRES DE L'ACADEMIE ROYALE permettra de déduire ici des raifons fur lefquelles je fonde la fupériorité de ma méthode fur la frenne. r.° La poffibilité que M: Gérard a de faire cette digature-avec des aiguilles ordinaires, dépend beaucoup de fon extrême dextérité ; j'ai seu raifon d'avancer que ce qui eft poflible pour lui, cefle- roit de l'être pour bien d’autres. Dans ma méthode, au contraire, un Chirurgien d’une dextérité ordinaire y réuffira avec facilité, & ce n'eft pas un petit avantage que ma mé- thode a fur la fienne. , 2.° Ma méthode éft préférable à celle de M. Gérard, à caufe qu'en perçant les mufcles intercoftaux, j'ai un moyen für d'éloigner l'aiguille des Poulmons , en élevant, comme j'ai déja dit, le manche de l'aiguille, dont Ja pointe par cé mouvement fe tourne vers les côtes de dedans en dehors: Dans la méthode:de M. Gérard c’eft tout le contraire; da pointe de fon aiguille, en paflant par-deflous, & étant pouflée vers le haut de dehors en dedans, s'avance toüjours vers l'intérieur de la Poitrine; de-là il s'enfuit que M. Gérard, malgré toute fa dextérité, ne peut conduire {a pointe de fon aiguille qu’au hazard. Plus elle va en avant, & moins il eft für de la faire fortir par l'endroit de l'efpace intercoflal où Yartere n’eft pas ; il ne peut voir ni l'artére ni la pointe de Taiguille, & dans la néceflité où il eft de faire paffer cette - pointe dans l'efpace intercoftal fupérieur, il n’eft pas poffible que la pointe ne rencontre fouvent l'artere qu’il faut éviter. Quel inconvénient n’eft-ce pas de donner au hazard le fuccès d'une opération fi importante ! I[ n’en eft pas de même dans la façon que je donne ici ;' en paflant mon aiguille dans un fens contraire, c’eft-à-dire ,remla portant immédiatement au-deffus de la côte fupérieure à l’efpace où l'artere eft ou- verte ; je ne donne rien du tout au hazard ; parce que je vois l'endroit où elle perce, & celui par oùr:elle doit fortir, qui eft à la partie fupérieure de a côte inférieure. Mais ce qui démontre encore plus combien: ilieft impoffible dans cette méthode de toucher ni de blefler d’arterelouverte; c’eft la courbûre fule de mon aiguille qui embrafie par élle-même DE Su SrCE NuCEnSoyyM 62% Ji côte & l'artere, & en écarte la pointe, de telle façon, que opérateur le moins adroit, ne pourroit, même parvenir à la toucher; la foime-feule de mon aiguille çaufe cette entiére dure: 7 HIHI E TE ! Hop À sh h .1:2.°: L'aiguille ordinaire ne pouvant étre dirigée commo- art he À 2e 1 D ” RE . > x 1 11E ent EETE IR es Vaifeanxoèr pour ler Sururas2} 5 8 +.-Après lamputation. des membres Je premier, foin, el d'arrêter le fang des Vaifleaux qu'on « coupés. La ligature à été reconnuë comme le moyen le plus für: pour da faire, on s'eft frvi jufqu'à-préfent d'Aiguilles extrémemént cour- ibes ;ouvertes à leur 1ète, qu'on eft,obligé: de faire patler entiérement & à deux repriles autour dles-vaifenux: Cette grande. courbüûre -eft. véritablement négeflaire, pour pouvoir