es + +4 HHISIOIRE L'ACADÉMIE HO VA LE PDES SCIENCES. : ANNÉE M DCCLIX. Avec les Mémoires de Mathématique & de Phyfque, pour la même Année, Tirés des Regiltres de cette Académie. DE L'IMPRIMERIE ROYALE. ” CAT M, DCCLXY. j 2 MASSE star 8 25 | nie L Hi es ee ob tie T A Blue POUR L'HISTOIRE. PHYSIQUE GÉNÉRALE. RENE RE C rh ur um Limaçon terrefire. , Page v Sur des accidens des Coquilles foffiles. 9 Sur une nouvelle épée de Ver qui ronge les bois. 15 Sur les Bois périfiés. 19 Sur la Minéralogie de l' Auvergne. 24 Oëfervations de Phyfique générale. 34 Lettres de M. de Mairan au P. Parennin. ar Sur les moyens de conferver la fanté aux équipages des V'aiffeaux. 4.8 ORNITHOLOGIE. st ANATOMIE. Sur les Chauve - fouris. 6t Sur la firuure à l'ufage du Thymus. 6; Sur quelques Olfervations de Médecine, 66 Sur la circulation du Fluide nerveux. A 75 Obfervarions Anatomiques. | 8x Précis de la Médecine-pratique, par M. Lientaud. 91 Anatomie artificielle, par M" Biheron. 94 CH IjM HE: » SyhA Los / ‘Alu 96 * jj TL A AP, iLYE Sur l'Éther acéreux où du Vinaigre. 100 Dragées anti-venérienues du fieur Keyfer. 102 BYO0'TIA NI © UFE Sur les caraëlères fpécifiques des Plantes. 107 Plan d'un Ouvrage fur la Botanique, par M. Adanfor. 115$ Æxpériences de M. Tiller; épi de froment ergote. 118 A: S"T-R'ON OMAN Sur le retour de la Comére de 1 682, obfervée en 1759. 119 Sur la Comte de 1758. 164 Sur l'obfervarion des Longitudes, par le moyen de la Lune. 166 Sur la Changeante du cou du Cygne. 180 Sur les Nebuleufes. ; 183 Sur une erreur qui s'étoit gliffée dans les prédiétions du paffage de Vénus fur le Sokil, pour l'année 1761. 185 Tables aflrononiques , par M. de la Lande. 189 Connoiffance des Temps, par M. de la Lande. 201 LCR CORSA PERLES Sur un projet d'Olfervations Affronomiques, rc. 7 MÉCANIQUE. Sur la néceffité d'incliner les aubes des Roues. 223 Sur la qualité de la fonte la plus convenable aux Canous. 227 Machines ou Inventions approuvées en 175$ 9. 232 Mémoires préfentés à l’Académie en 175 8. 244 Mémoires préfentés à l’Académie en 1759. 246 - Eloge de M. de Vallière. 249 Eloge de M. de Maupertuis. 259 CLONE TS « 40:010:010:0:0:010:010:0:0:0/0:0:010:0:0:010:0:0:0:010/01:0:0:0 Ton BE: E POUR LES MÉMOIRES. ASS ur le retour de la Comete de 1682, obfervé en 1759, avec les Élémens de fon orbite pour cette derniere apparition. Par M. DE LA LANDE. Page tr Olfervations de Médecine, Px M. GUETTARD. 4t Mémoire fur l'obfervation des Longitudes en mer, par le moyen de la Lune. Par M. l'Abbé DE LA CaAILLe. 63 Olfervations fur une efpèce de Limacon terreffre, dont le fommer de la-coquille fe trouve café, fans que l'animal en fouffre. Par M. BRisson. 99 Mémoire fur la Comète. de 1759 , dans.lequel on donne les périodes qu'il eff le plus à propos d'employer, en faifant ufage des Oëfervations faites fur cette Comete dans ls quarre dernières apparitions. Par M. CLAIRAUT. DES: Mémoire fur le caractère fpécifique des Plantes. Px M. GUETTARD. T2'E! Mémoire fur la Comte de 1758. Par M. DE L'ISLE. 154 - Mémoire fur les accidens des Coquilles foffiles , comparés à ceux qui arrivent aux Coquilles qu'on trouve maintenant dans la: mer. Par M. GUETTARD. ; 189 Obfervations fur 1 ? Étoile changeante X du con du Cygne. Par M. £E GENTIL. 227 Defiriprion d'une nouvel efpèce de Ver qui ronge les Bois ©. les Vaiffeaux, obfervé au Sénégal. Par M. ADANSON. 249 Olfervations de la Comète qui a paru en 1759 , & dont M. Halley avoit prédit le retour. Pax M. MarALDL. 279 Mémoire dans lequel on prouve que les aubes des Roues mies par les courans des grandes rivieres , feroient beaucoup plus: d'effet fi elles étotent inclnées aux rayons, qu'elles ne one: T+ ArB EU . étant appliquées, contre les rayons mêmes, conne elles le Jon: aux moulins pendans à aux moulins fur bateaux qui font fur les rivières de Seine, de Marne, de Loire, &rc. Par M. DEPARCIEUX. 288 Mémoire fur la circulation du Fluide nerveux. Par M. BERTIN. | 300 Mémoire fur la hauteur folficiale du Soleil au fofftce d'ûé de 1763. Par M. Cassini DE Taury. 32% Mémoire fur les accidens des Coguilles foffiles , comparés à ceux qui arrivent aux Coquilles qu'on trouve maintenant dans la mer. Seconde Partie. Par M. GUETTARD. 329 Mémoire fur le danger © l'infiuffifance des épreuves ufitées pour les Canons de fonte de fer ; fur la qualité de fonte la plus convenable à l'Arüllerie, © [ur les moyens les plus certains de la reconnotre. Px: M. ke Marquis DE MONTALEMBERT. : | 358 Memoire fur les Chauve-fouris. Par M. DAUBENTON. 374 Mémoire fur Les accidens des Cogquilles foffiles , comparés à ceux qui arrivent aux Coquilles qu'on trouve maintenant dans la mer, Troifième Partie. Par M. GuETTARD. 399 Mémoire fur la précefion des Equinoxes. Par M. le Chevalier D'ARCY. 420 Memoire fur les Bois pérrifiés. Par M. FOUGEROUX DE BonNDpaARoOY. s 439 Remarques fur les Étoiles nebuleufes. Par M. LE GENTIL. 453 Mémoire fur l'Alun. Px M. Fouceroux DE BonDARoY. à 472 Projet d'obfervations Affronomiques 7 Hydrographiques , pour parvenir à former pour la mer Méditerranée , une Juite de Cartes exales , accompagnées d'un Porrulan Jous le titre de Neptune françois, Second volume. Par M. BE CHABERT. . 484 Ofervations Botanico- météorologiques ; faites au château. de : « TA BILE. Denainvilliers, proche Pitiiviers eu Géinois , pendant l'année 1758. Par M. pu Hammer. 495 Sur le calcul des élémens de la théorie de la Comère qui parot maintenant. Par M. Y'Abbé DE LA CAïLLE. s22 Recherches anatomiques for la frrudure à l'ufage du Ti ymus. Par M. Moranp le fils. 525$ Memoire fur la Miucralogie de l'Auvergne. Paxx M. Guerrarp. 535 ERRATA Pour les Mémoires de IZS 4 l Pics 616, ligne 14, des Catholiques, effacer des, Page 617, ligue 1 à ailleurs, Timone, lifez Timoni, Page 619; ligne 18, avec, lifez il y joint. Page 627, ligne 19, feïze, lifez foixante-feize. Page 628, ligne ÿ , mettez à la marge 1752. Page 629, ligne 6, l'émétique, /ifez l'antimoine. + Page 630, note (b) ligne 3, Scheutzer, ex Scheuchzer: Page 6 72 , dernière ligne, dans des cas, effacez ces trois mors: Page 640, à la fin de la feconde note, ajoutez : Voyez l'Analyfe du Docteur Xirkpatrick , & la brochure 4» account, ÿ'c. by James Burges. London, 1754: : Page 661, ligne 7, qui, life & qui. * Tbidem , ligne 2, mais, lifey mais eft. Page 668, ligne 26, qui la firent adopter , ifez qui frent adoptez cette pratique. { 3 Jbidem ; ligne 28, n'a-t-elle, ifez n'y at-elle. Pour l'Hifloire, de. 17$8. Page 25, ligne 2, Haller & Appleby, quiont montré que Îe fel marin, hfez Hales. & Appleby, qui ont montré que l'acide du fel, Pour les Mémoires de 1758. Page 441, à la fin dé la note (a) > ajoutez D'ailleurs, cette pratique peut avoir été portée de l'Inde par mer, dans laipartie orientale de la Chine. RESF \ Page 443 » ligne 17, peut, lifez pouvoit. Jbidem , ligne 2ÿ, tout 4' la f?, mettez un point d'interrogation, ? Page 44 5; ligne 26, variolos, lifez variolas. Page 448, note, ligne pénultième, 1755, lifex 1754. Page 451, note (a) ligne 2, 148, life 163. QE TA À Jbidem, ligne 4,1NX, &fex IV. Page 454% ligne 19, les mêmes, /ifez jé mêmes bancs, Page 459; lignes 24 7 25, j'ajoutcrai, ifez je répéterai, Page 401, digne 25, l'épreuve, lifez qui en firent l'épreuve. Page 465, ligne 30, opération, ajoutez en 1750. Page 470, ligne 25, dix millième, lifez foixante-dix millième, Page 471, ligne 18, 1747: Gex 1746 Page 474, ligne 14, des hommes, » ajoutez -ou affez près de la moitié. Page 476, ligne 20, le troifième, ajoutez oude quatrième. Page 477, lignes 18 & 19, mort, qui n ’eft pas conteftée, life! Mae de la petite s vérole; ce qui n'eft pas contefté. NES Page #79? , ligne 18 èr fuiv. Les deux incifions qui... fuppurent … Dont. . laïffent.. . . laiffèrent. . + lifez L'incifion OISE 0 fippure Le Pre N: Life. .laifa feulement, Ibid. ligne 28, efface le mot qu ‘elle, Jbid.-ligne 29, mit, fer mit. Dans un Mémoire de M. Hériffant, PURE parmi ceux de 1758, page 428, il a oublié, à la ligne 34, de Citer une obfervation rapportée dans l'Hifloire de l'Académie de 1747» page 5 65. d'un Goutteux qui avoit rendu par les urines une quantité prodigieufe d'une maticre femblable à à de ha craie ou à du plâtre; il prie le Lecteur de vouloir “bien Y recourir. Pour l'Hifloire de cette année 1759. Page 233, ligne derniere, Pour en extraire enfuite parle mercure, lifez pour en extraire en même temps avec le mercure: Pour les Mémoires de cetté année 1759. Page 165$, ligne 19; Y'impreffion , lifez l'infpeclion. Page 177, note marginäle, 13, lifez 31. Eh Page 179, Table I, col. 3,724 29° 40", hifi ad 2: 22° 40". Page 358, titre du Mémoire de M. de Montalembert, fux la quantité de fonte, &c..lifez fur la qualité de la fonte , &c. Page 494, ligne 255 me, lifez m'a. » ON « Pour Les Mémoires de I7ÛT. PEER, Page 144: ligne pénultième, 35143 47", chrrigeg 35% 347 A RÈx HISTOIRE HISTOIRE L'ACADÉMIE ROYALE DES'SCIENCES" Année M. DCCLIX. ETS HAE ë W1 FA = = HP ATAET A + 4 Æ XOÿ LUE: EUX: XO £ RCE & Sp LU premier coup-d'œil qu'on jette fur une coquille, Voyez-les on fent qu'elle eft deftinée, dans l'ordre de la Mémoires, Nature, à fervir de retraite füre à un animal, P'£e 99- SN à ne lui laifler même aucune communication = extérieure, lorfqu'il en à fermé l'entrée par uu opercule, & à le mettre conflamment à couvert des accidens if, 1759. A 2 HisToiRe DE L'ACADÉMIE ROYALE auxquels fon organifation délicate l'expoferoit. D'après cette idée, que la plus légère obfervation fait naître, & qui eft toujours la même, quelque variété qu'il y ait dans les coquilles que nous connoiflons , il femble que la moindre altération qu'elles peuvent éprouver, eft toujours nuif ible aux animaux qu'elles renferment, & iroit quelquefois jufqu'à mettre leur vie en danger, fi cette altération étoit confidérable ; cependant, voici une exception bien digne de remarque par rapport au befoin qu'ont ces animaux de conferver leurs coquilles entières. M. Briflon nous trace lhiftoire d'une efpèce de limaçon terreftre, dont la coquille fouffre plufieurs retranchemens fuccefifs, fans que l'animal en foit incommodé ; il paroît même que ce retranchement lui devient néceflaire, & favorife fon développement. La coquille de ce limaçon eft un turbinite alongé ; elle auroit près de deux pouces de longueur , après fon accroiflement entier, fi à mefure que fa partie fupérieure acquiert de nouveaux tours de fpirale, il ne s'en détachoit pas d'autres de fa partie inférieure; elle n'a plus que treize à quatorze lignes quand l'animal cefle de croître, & l'on n'y remarque que quatre tours & demi de {pirale, au lieu de treize qu'elle auroit, s’il ne s’y étoit fait aucun retranchement. On ne trouve le limaçon dont il s'agit, que dans les pays plus chauds que le climat de Paris : ceux qui ont été le fujet des obfervations de M. Briflon, venoient des environs de Montpellier ; ils étoient au nombre de cinq, & avoient été envoyés vivans à M, de Reaumur par M, l'abbé de Sauvages, au commencement de Juillet 17 5 2. Un des premiers foins de M. Briflon, lorfqu'on lui eut remis ces limaçons, fut de les mettre dans un poudrier rempli à moitié de terre fraiche, & de les y nourrir de feuilles de: aitue : ils avoient annoncé leur goût pour cette plante lorf qu'elle étoit douce & tendre; fi la laitue n’avoit pas ces deux qualités , les limaçons n'en mangeoient point. Is étoient à la veille de leur dernier accroiffement, lorfque M. Briflon commença à les obferver; leur coquille eut dans. _ EN MANGER IN CES 3 peu cinq tours & demi de fpirale, & bientôt #près il yen eut un de retranché. Ces animaux ne tardèrent point enfuite à faire leurs œufs; on les trouvoit dépofés à un pouce & &emi ou deux pouces de profondeur : ils font tout-à-fait ronds, blancs, très-friables & d'une ligne & un tiers de diamètre. Si ces limaçons mangent affez abondamment lorfque leurs befoins exigent, ils font auffi dans l'habitude de jeüner pendant plufieurs jours, & de refter dans l'inaétion ; ils fe cachent alors dans la terre plus ou moins profondément ; quelquefois même ils s'y enfeveliflent tout-à-fait, & ajoutent encore à cette précaution celle de fermer l'entrée de leur coquille par une efpèce d’opercule compofé d’une matière blanche & demi-tranfparente : cet opercule n’eft adhérent qu'autour de l'ouverture de la coquille, & n’exige prefque point d'effort du limaçon, lorfqu'il veut s'en débarrafler pour aller reprendre de la nourriture : il lui fufñt de pouffer cette cloifon légère ; elle fe détache fans peine des bords de la coquille, en reftant adhérente, il eft vrai, à la partie de Fanimal, qu'on nomme l'empatemenr ; mais dès que de limaçon a fait un pas, cet opercule éprouve quelque frottement, & demeure biemôt attaché au terrain fur lequel l'animal marche, à fa faveur d'un peu de matière vifqueufe qu'a fourni lempatement. Les œufs de limaçon dont nous avons parlé, & qui avoient été dépofés vers le 1 $ de Juillet 17752, donnèrent des petits au bout de deux mois ou environ; mais il ne fut pas poffible à M. Brifion de les fuivre dans leur accroiflément, comme ik lauroit defiré. La faifon étoit avancée ; ces jeunes animaux fe cachèrent dans laterre, & y demeurèrent jufqu'au printemps faivant. Les œufs qu'eut M. Briflon en 17 5 3, furent plustôt éclos, & les petits qui en réfultèrent , lui fournirent la matière des obférvations dont on va voir le détail . Vers fa fin de Mars, les limaçons commencèrent à fe ranimer, & fortirent de: leur retraite; les laitues dont ils fe nourrirent. avec beaucoup: d'appétit , achevèrent de les rétablir dans leur première vigueur. Hs s'accouplèrent au commence- ment d'Avril, & dès le 16 du même mois, M. Briflon A ji 4 MistToiRe DE L'ACADÉMIE ROYALE découvrit dans le poudrier où il avoit mis les premiers limaçons, un nid d'œufs qui en contenoit à peu près une quarantaine ; on les apercevoit au travers du verre : deux jours après, if vit un fecond nid, & dans l'intervalle de dix jours il s’y en trouva cinq, c'eft-à-dire, que chaque limaçon avoit le fien. Ces animaux confervent toujours une communication pour aller à leur nid, & fe tiennent fouvent fur le trou qui les y conduit, comme s'ils veilloient à la confervation de leurs œufs, où cherchoient à les couver. Ce ne fut qu'au bout de deux mois ou environ que ces œufs furent éclos : la coquille des petits qui en fortent , a trois tours entiers de {pirale ; au bout de cinq ou fix jours elle en a un quatrième , & cette nouvelle fpire eft beaucoup plus forte que les premières, Les jeunes limaçons obfervent comme les vieux une diète régulière ; ils fe cachent comme eux dans la terre à une pro- fondeur proportionnée à leur grandeur ; ils les imitent encore dans la manière induftrieufe de s’interdire toute communication au dehors, en fermant la bouche de leur coquille par un petit opercule dont ils favent auffi fe débarraffer, Jorfqu'il eft temps de fortir de leur fecret. Tant que le limaçon fe prive de nourriture, il ne prend aucun accroiflement ; le nombre des fpires de fa coquille refte le même, mais il augmente bientôt à mefure que l'animal fe nourrit: en moins de deux mois fa coquille a neuf tours entiers de fpirale, & c’eft alors qu'il commence à s’y faire un retranchement. Afin de le mieux obferver, M. Briflon mit féparément dans un poudrier fix de ces limaçons qui étoient prêts à perdre une partie de leur coquille; il remarqua que pendant la for- mation de la neuvième ou dernière fpire, animal retiroit peu à peu l'extrémité inférieure de fon corps du bout de la coquille, & parvenoit à laïfler vides trois fpires entières : cet abandon eft fait en trois ou quatre jours. Ce qui coûte le plus au limaçon, eft de déplacer le ligament qui l'attache à fa coquille, & de le faire remonter vers les fpires les plus larges, où tout fon corps doit être renfermé : dès que le bout du corps du limaçon seft retiré fuffämment, & a atteint la quatrième ! pr" et ne à A PL 1 DAME SA SN CADMELNUC Bis. s fpire , il s’y arrête & s'y trouve bientôt à couvert ; une cloifon fe forme dans cet endroit de la coquille; les trois fpires aban- données deviennent inutiles à l'animal, & il ne tarde pas à s'en défaire : cette partie de a coquille commence d’abord à fe cafler dans l'endroit le plus près de la cloifon récemment formée, & qui couvre le bout du corps du limaçon ; le plus léger frottement fur un terrain inégal achève la féparation , fur-tout fi fanimal s'appuie un peu fur la partie inférieure de fon corps, & fait porter à faux le bout de la coquille vide & déjà altéré qu'il n'occupe plus. Les fix limaçons que M. Briflon obfervoit, eurent ainft leurs coquilles mutilées, & il n'y refla plus que fix fpires de neuf dont chacune d'elles étoit d'abord compolée. Toutes ces coquilles étoient fermées dans l'endroit de la rupture par l'efpèce de cloifon que nous y avons déjà obfervée. Il n'avoit pas été poflible à M. Briflon d'examiner de quelle manière le limaçon la formoit, parce qu'elle avoit pris toute fa confiftance lorfque la mutilation des coquilles eut lieu naturellement ; il fallut donc qu'il en opérât une par violence, & avant que l'animal y fût préparé. Deux limaçons qui avoient commencé d'abandonner les deux dernières fpires de leur coquille, fervirent à fon expé- rience : il caffa le bout de ces coquilles qui étoit vide ; l'animal dans l'inftant-retira le bout de fon corps, & abandonna deux autres fpires ; celles-ci furent caflées comme les précédentes, & extrémité du corps du limaçon refla à découvert; mais bientôt il fe trouva enduit affez confidérablement d'une liqueur vifqueufe qui f deffécha peu à peu, & ferma la coquille dans l'endroit où la rupture avoit été faite ; caite efpèce de cloifon eft fort mince dans les premiers momens où l'animal l'a pra- tiquée ; la pointe d’une épingle, appuyée même légèrement, la briferoit; mais elle s'épaiffit fans doute intérieurement par les nouvelles couches que le limaçon y applique: en moins de vingt-quatre heures, elle prend toute la confiftance du refle de la coquille, & fait corps avec elle, Un Phyficien ne perd pas volontiers de vue le fujet de A ij 6 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE fes obfervations; il l'a fans ceffe dans l'efprit ; il voudroit l'avoir toujours fous fes yeux. M. Briflon partit pour le Poitou au commencement de Septembre 175 3 ; {es limaçons furent du voyage. Des ménagemiens & quelques laitues leur firent fup- porter une route de dix jours, fans qu'il parût qu'ils en euffent été incommodés ; loin de cela, leur accroiïflement fut fenfible pendant ce peu de temps : au lieu de fix tours de fpirale fim- plement que leur coquille avoit à leur départ, il s'y en trouva fix & demi à leur arrivée dans le Poitou; quinze jours après, le feptième tour fut complet, & dès-lors les limaçons fe pré- parèrent à caffer leur coquille pour la feconde fois. La manière qu'ils employèrent pour parvenir à cette mutilation, fat la même que celle dont nous avons vu le détail ; ils perdirent deux fpires & demi dans cette circonflance-ci, & n’en con- fervèrent plus par conféquent que quatre & demi. Par-là, on voit qu'à mefure que ces animaux avancent en âge, le volume de leur corps groffit, & que cependant le nombre de leurs fpires diminue. M. Briffon revint à Paris à la fin d'Oftobre, & y rapporta fes limaçons ; leur coquille avoit acquis à leur arrivée trois quarts de tour de fpirale : quelques jours après, la fpirale fut complète, & l'animal fe difpofa à cafler fa coquille pour la troïfième fois; il lui en coûta une fpire, celle qu'il venoit d'acquérir. Le fort des fix limaçons fut le même ; après avoir reçu un pareilaccroïflement dans leur coquille, & avoir éprouvé un retranchement égal, ils fe trouvèrent tous réduits au même état : leur coquille n'avoit plus que quatre tours & demi de fpirale. Le temps de leur longue diète & de leur retraite abfolue approchoit ; ils s'en- foncèrent dans la terre au: commencement de Décembre, & n'en {ortirent qu'au printemps. À la fn de Mars 1 7 54 ,les limaçons quittèrent feur retraite, prirent de là nourriture, fe reposèrent ur peu, mangèrent encore & reçurent dans leur coquille une nouvelle angmen- tation : elle fut d'une fpire entière dans l'efpace d'un mois ; ils la perdirent bientôt, & leur coquille fut encore réduite à quatre tours & demi de fpirale:: cette quatrième perte fut æ D ESS C T\ EL NC Ei 8. réparée au bout d'un mois ; mais bientôt auf a coquille caffée pour la cinquième & dernière fois n'offrit encore que quatre fpires &demie, & c'eft le nombre auquel ellesrefte fixée dans le plus grand accroiffément des limaçons, & lorf. w'ils commencent à s’accoupler. Ji réfute en prémier lieu, des obfervations dont on vient de voir le détail, que depuis le moment où ces animaux ont pondu leurs œufs, jufqu'à celui où leur accroiffement a été parfait, il s'eft écoulé treize mois & demi. M. Briflon ne préfume pas que cette durée doive être auffi longue lorfque les limaçons fe trouvent dans un pays plus chaud que Paris, & qu'ils y jouiffent de toute leur liberté, En fecond lieu, nous remarquons que dans tout le cours de la vie de ces animaux , leur coquille s'eft trouvée augmentée de dix fpires, & qu'elle en auroit eu conféquemment treize & vingt-trois lignes de longueur , s'il ne s'y étoit fait aucun retranchement, parce qu'elle en avoit trois à la naïffance des limaçons, Il fuit encore de ces obfervations, que ces animaux caflent leur coquille cinq fois; que le retranchement eft d’abord de trois fpires, qu'il eft enfuite de deux & demi, & fe borne les trois dernières fois à une feule, en laiffant conftamment à leur coquille quatre fpires & demie, & une fongueur de ize à quatorze lignes. ii IL devenoit curieux d'examiner, fi en tâchant d'empêcher la rupture de la coquille des limaçons, on nuifoit à ‘leur accroiffement, ou fi l'on génoit leur marche, M. Briflon em- ploya dans cette vüe un moyen fort fimple ; il enduifit de plufieurs couches de vernis là coquille d’un jeune limaçon, laquelle étoit formée de huit fpires , dont aucune n'étoit vide : il donna par-là plus de folidité à la coquille, & en rendit la rupture moins facile, Cette expérience réuflit en partie ; le retranchement de trois fpires qui auroit dû fe faire dans un certain temps, n'eut pas lieu : Fanimal en conferva dix entières; mais il en perdit cinq tout d'un coup dans la circonflance où il n’auroit dû en perdre que deux, & ce retranchement * Voy. Mém, Acad. 1757; WE CE 8 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE confidérable équivalut à deux autres plus foibles qu'il auroit éprouvé, fi fa coquille n’eût pas reçu par les couches multi- pliées du vernis une confiftance qui lui étoit étrangère. Il parut à M. Briffon que le limaçon ainfi chargé d'une coquille plus alongée qu'elle ne doit l'être dans l'ordre de la Nature, ne marchoit pas auffi aifément que les autres ; & il préflume qu'en venant à bout de conferver les treize {pires dont la coquille s'accroît fucceffivement, on augmenteroit tellement le fardeau du limaçon, qu'il ne lui feroit peut-être plus poflible de marcher. M. Brifon termine fon Mémoire par la réfutation nette de quelques propefitions que M. Klein a hafardées, & dont le peu d'exactitude eff fenfible quand on les rapproche des faits qui viennent d'être expolés. Les deux principales con- fiftent à avancer que les jeunes coquilles ont autant de tours. de fpirale que les adultes de la même efpèce, & que dans toutes les coquilles l'animal demeure conftamment attaché à la première fpire, de quelqu’âge qu'il foit, & quelque longue que foit fa vie, füt-elle même de cent ans. Or nous avons vu 1.° que l'efpèce de limaçon terreftre dont il s'agit ici, n'a d'abord que trois fpires; qu’il en acquiert fucceflivement, & pourroit en avoir jufqu'à treize, s'il ne les perdoit pas à mefure qu'il les acquiert. Nous avons oblervé en fecond lieu, que l'extrémité du corps de l'animal abandonne les fpires de Ja coquille dont le retranchement doit avoir lieu ; qu'il fe forme une cloifon à l'endroit de la rupture, & que l'animal continue ainfi à £ replier fur lui-même, à mefure que fa coquille éprouve de nouveaux retranchemens. Le règne végétal nous préfente tous les jours un fait digne d'attention, & qui femble avoir quelque rapport avec celui qui vient de nous frapper dans le règne animal ; ce fait , remar- quable {ur un grand nombre d'arbres & fur plufieurs plantes farineufes, eft développé dans un Mémoire où il s'agit de la caufe de l'égalité affez conflante qu'on obferve dans les femences des plantes de même efpece, & qui eft inféré dans le recueil de l'Académie pour l'année 17 57 *. M. Tillet , auteur de ce Mémoire, ON AS ARE Dr WT" al DES SCIENCES. Mémoire, y obferve que l'orme, le tilleul, le murier noir, &c. que le froment, le feigle, l'orge éprouvent au printemps urt retranchement régulier, une décurtation conflante, Îles uns à l'extrémité de leurs jeunes rameaux, & les feconds au fommet de leurs épis. Cette obfervation lui donne lieu de faire admirer comment la Nature, prodigue d’abord, & tendant à la plus grande fécondité, s'arrête enfuite à un certain point, & aban- donne une partie de fes productions, afin que celles dont il doit réfulter des fruits par la nourriture qu'elles recevront, fe “trouvent en état de leur procurer la grofieur convenable, & de les conduire à leur maturité. D’après cette réflexion, à laquelle on ne fauroit fe refufer, en confidérant cette muti- lation régulière des jeunes rameaux d'un tilleul, & des épis encore tendres du froment, ne pourroit-on pas prélumer que le corps du limaçon fingulier dont nous avons vu l'hifloire, deviendroit trop foible, & refteroit peut-être languiflant, s'il occupoit les treize fpires que fi coquille acquiert fucceflive- ment ; qu'il perd moins de fa fubflance dès qu'il en a moins à fournir pour laccroiffement de cette même coquille; qu’en {e repliant ainfi fur lui-même, il devient d’une conftitution plus forte, & que ces ruptures fréquentes de fa coquille, dont {e nombre des fpires refte enfin fixé, ne tendent qu'à refferrer Y'animal dans un efpace court , à modérer la perte de fa fubftance, & à le mettre en état de foutenir les longs jeünes auxquels, dans l'ordre de la Nature, il eft rigoureufement affujetti. SUR LES ACCIDENS DES COQUILLES FOSSILES, comparés à ceux qui arrivent aux coquilles qu'on trouve F © maintenant dans la mer. | ’oPINION que les Naturalifles paroïffent avoir embraffée aflez unanimement de nos jours, fur l'origine des coquilles foffiles, eft que ces corps ont appartenu autrefois à la mers Hiff 1759: B V. les Mém. p. 189,329 & 399 ÿ ro HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Cette opinion déjà très-vraifemblable par {es changemens que la terre paroît avoir éprouvés dans les différens fiècles qui nous ont précédés, femble être portée jufqu'à l'évidence, lorfqu'on compare ces foffiles avec un grand nombre de corps femblables que la mer renferme encore aujourd'hui dans fon fein. S'if refte quelques cas qui paroiflent difficiles à expliquer dans ce fyflème, ils font peu nombreux , ne font pas moins difficiles à expliquer dans toute autre opinion, & ne font aucunement en contradiction avec celle qu'on fuit aujourd'hui. Il trouve néanmoins encore quelques Naturaliftes féparés du grand nombre fur ce point. Frappés de l'exactitude des tableaux que les pierres figurées nous donnent des animaux, des végétaux, des coquiliages & des poiffons , il leur paroît fans doute encore trop hardi d'attribuer des effets fi merveilleux & fi variés à une caufe en apparence auffi uniforme que le féjour fucceflif des eaux de la mer fur les parties de la terre aujourd'hui habitables, Telle paroït être l'idée de M. Bertrand, connu par plufieurs ouvrages fur Fhifloire naturelle de la Suiffe: ce Naturalifte femble difpolé à croire que les foffiles qu’on a coutume de regarder comme originairement dûs à la mer, n'ont pas d'autre origine que les fofliles propres, primitifs &c effentiels à la terre ( ce font fes propres paroles ). Cependant M. Bertrand ne donne ce fentiment que comme une con- jecture qu’ abandonne, dit-il, à qui pourra la remerfer ou voudra l'attaquer , mais il cherche à l'appuyer par cette con- fidération , que ce fentiment donne une idée plus étendue de l'harmonie que Dieu auroit mife dans fes œuvres, en liant les richefles de fa mer à celles de la terre, par des rapports plus marqués qu'on ne fa cru jufqu'ici. Ce fentiment a donné lieu à M. Guettard de revenir à l'appui de Fopinion commune par de nouveaux faits; mais avant d'entrer en matière, il a cru devoir examiner quelques conféquences qui paroifent réfulter de l'expofition que fait M. Bertrand de lorigine qu'il attribue à plufieurs fofliles, ainfi que les caractères que donne ce même Naturalifte pour reconnoitre tant les Lits de terres qui renferment, felon lui, LL DE ISNMSAICU E IN CHE! rt 4es foffiles qu'il appelle prinurifs © cffeuviels à la Terre, que pour diftinguer ceux-ci de eux qui ont été altérés & défigurés par les changemens que le globe de la Terre a éprouvés depuis fa formation. Cette difcuflion donne lieu à M. Guettard d'expofer plu- fieurs faits intéreffans fur plufieurs objets d'Hiftoire naturelle, particulièrement {ur les cailloux dont intérieur offre l'empreinte | d'une coquille, H fait voir que fi ces corps euffent été formés Loriginairement dans les montagnes où on les trouve, ils ne fe feroient pas confervés aufli entiers qu'on les voit, ils auroient été attaqués par l'eau & les matières rongeantes qui circulent dans la terre ; d'où il condlut, contre l'opinion de M. Bertrand, que ces cailloux n'ont point été placés primitivement dans ces montagnes , mais que formés très- anciennement autour du corps marin, dont ils ont l'empreinte , ils ont été fücceflive- ment détachés & ballottés par les eaux de la mer, & enfin abandonnés dans le lieu où on les trouve. Dans ce même examen que M. Guetrard fait de J'opinion de M. Bertrand , il difcute avec plus de détail cette pro- l pofition avancée par M. Bertrand, favoir ; que des foffiles n'ont réellement que quelques rapports © pleurs différences avec les corps qui ne font point foffiles. MW fuffit, dit M. Guettard, de renvoyer à la comparaifon qu'on peut “faire des différentes _ coquilles foffiles , avec celles qu'on tire maintenant de la mer, pour faire voir le peu de folidité de cette idée, comparaifon qu'il fe propofe de faire dans un autre Mémoire; mais quant à préfent, les faits fur lefquels M. Guettard entreprend d’ap- puyer l'opinion commune , font d'une autre efpèce, c’eft fur {a fimilitude des accidens qui arrivent aux coquilles qu'on trouve . aétuellement dans la mér, avec ceux qu'on voit évidemment être arrivés aux coquilles foffiles: ces accidens font de quatre fortes, favoir; ceux qu'on obferve dans les attaches, dans la confervation de ces corps, dans leur deftruétion & enfin dans leur déformation. La multitude des faits que fournit chacune de ces manières d'envifager les fofliles, comparés aux corps ma- xins actuellement exiflans dans la mer, a engagé M. Guetrrd B à 2 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE î à partager cette matière en trois parties, dont la première roule entièrement fur les attaches des coquilles foffiles. Les coquilles qui s'attachent à d'autres coquilles ou fur d'autres corps, font les huîtres de différentes efpèces, & les glands de mer: il paroïit même qu'on pourtoit y ajouter les tuyaux vermiculaires. Les huîtres s’attachent indifféremment fur les huîtres de même ou de différente efpèce, fur des coquilles de claffe ou # de genre différent, fur des coraux, fur des branches d'arbres, fur des cailloux, &c. mais les groupes d'huîtres de même efpèce font beaucoup plus communs que les autres. Les attaches de toutes ces différentes efpèces d'huîtres, ne fe font pas toujours aux mêmes endroits ; tantôt elles s'uniflent par le talon, tantôt par la furface de leurs battans, & cela avec des variétés fans nombre. Celles des huîtres fur des coquilles de genre différent d'elles, telles que les lépas, les turbinites, &c. offrent auf plufieurs fingularités remarquables. Les environs de Courtagnon & de Chaumont en Vexin, fourniffent des turbinites, dont la finface porte un grand nombre d'huîtres de l'efpèce connue fous le nom de pelure d'oignon, qui ont contraété une ttrès-forte adhérence avec cette furface, à laquelle elles font appliquées par la plus grande partie de la leur. Mais ces derniers groupes fe trouvent très-rarement fur l'efpèce de cailloux dont nous avons parlé ci-deflus, & jamais fur des ouvrages de l'art, quoiqu'on trouve d'ailleurs fur ceux-ci des groupes d’huîtres communes où d’huïitres épineufes & de tuyaux marins; on en conferve dans plufieurs Cabinets d'Hif- toire naturelle, ainfi que des bouteilles de verre, aux parois defquelles on voit des coraux adhérens ; il eft vrai qu'on a rencontré jufqu'à préfent quelques corps qui ont de fortes ap- parences de groupes de coquilles portées par des cailloux. Mais M. Guettard qui a vu plulieurs de ces corps, remarque que ces cailloux font de grès, qu'on a par conféquent lieu de regarder la formation de ces cailloux comme poltérieure à la réunion des coquilles. M. Guettard parcourt fueceffivement les différentes efpèces LA DES SCIENCES. 13 e corps auxquels les huûres s’attachent ; outre ceux dont nous venons de parler, les branches d'arbres en fournifent auffi des exemples; mais dans tous ces corps on voit toujours tant dans la conformation des coquilles mêmes, que dans la manière dont elles adhèrent tant entr'elles que fur ces corps mêmes , une reflemblance parfaite avec ce que la mer nous offre journellement ; il ÿ a d'ailleurs encore cette conformité remarquable, que ces fortes de groupes font prefque toujours formés d'huîtres : dans ceux qui raffemblent d'autres coquilles, Fadhérence n'eft jamais que médiocre, & paroît d'ailleurs pouvoir être attribuée à quelques circonftances accidentelles. Après avoir donné aflez en détail Fhiftoire des coquilles qui adhèrent les unes aux autres & à différens corps, M. Guettard examine aufll les attaches de plufieurs autres corps marins, tels que les anatifères ou glands de mer & les tuyaux vermiculaires: nous nous abftenons de le fuivre dans ces détails qui font faits pour être lûs en entier & non par extrait, c'eft pourquoi nous paflons à la feconde partie. I eft queftion dans cette feconde Partie des accidens des coquilles qui ont rapport à la confervation de ces corps : ces accidens font de deux efpèces principales ; certaines coquilles pénètrent dans fintérieur de différens corps tels que le fible, la vafe, les madrépores, les pierres , les coquilles & les bois ; d'autres fe chargent de petits cailloux, de coquilles, &c. M. Guettard rapporte un grand nombre d'exemples de coquilles trouvées dans l'intérieur des corps, même des plus durs. Quoiqu'il y ait lieu d'aribuer plufieurs de ces accidens à ce que la matière qui renferme ces coquilles , n’a acquis cette dureté que fucceflivement ; néanmoins il en eft beuu- coup d'autres dont on ne pourroit rendre raifon par cette fup- polition; d'ailleurs on trouve dans plufieurs de ces corps des traces du {ravail de Fanimal que renfermoit la coquille, & les différens exemples que rapporte M. Guetard, ne permett pas de douter que l'objet de ce travail ne foit la conférvatién de cet animal. L'efpèce de coquilles à laquelle on donne le nom de date, en fournit des preuves nombreufes & frappantes : B ii 3x4 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE elles pénètrent dans les huîtres, dans les madrépores , &ce. Ces accidens que lon trouve dans les coquilles & autres corps foffiles, font dans les corps analogues que la mer nous offre aujourd’hui; nouvelle preuve que ces foffiles ont été corps marins. Il en eft de mème des coquilles, à la furface defquelles £ trouvent intimement unis plufieurs petits cailloux & plufieurs coquilles : il femble d'abord que pour les foffiles, cette union pourroit être regardée comme dûe à la compreffion que ces coquilles peuvent avoir éprouvée dans les lits de terre où on les trouve; néanmoins M. Guettard fait remarquer dans la difpofition de ces corps étrangers, une régularité qui ne paroit pouvoir être attribuée qu'à l'induftrie d'un animal intérefié à fortifier fa demeure. Les déuils que M. Guettard donne fur tous ces objets font intéreflans; ïls le conduifent d'ailleurs à faire fur la nature des corps pénétrés par les foffiles, plufieurs réflexions importantes & nécefaires pour ne point être féduit par les apparences qu'ils offrent fouvent : à cette ocafion, M. Guettard parle des bois pétrifiés , & en convenant w’on à donné ce nom à des fubftances qui n'avoient jamais été végétales, il prouve néanmoins que sil faut revenir fur fes pas pour une partie des fubflances qu'on a regardées comme des bois pétrifiés, il n’en efl pas moins conflant qu'il exifte réellement des bois qui ont éprouvé cette modi- fication ; fes preuves & celles que M. Fougeroux à apportées far Je même fait, paroiffent ne laiffer aucun doute fur cette matière. La troifième Partie du Mémoire de M. Guetiard regarde la déformation & la deftruétion des coquilles. C'eft une troifième fource d'analogie que trouve M. Guettard entre les coquilles foffiles & les coquilles qu'on trouve actuellement dans la mer. Quoique les coquilles fofliles, par leur féjour dans la terre, éprouvent une déformation particulièrement dûe aux frottemens & à la compreffion des corps environnans ; cependant toute déformation furvenue à ces coquilles n'eft pas l'effet de ces caufes. Plufieurs de ces accidens ont précédé l'enfeveliffément de ces coquilles, & cette affertion eft fondée de SNS GARE N°C ES I $ fur ce qu'on en trouve d'abfolument femblables à des coquilles qu'on tire journellement de Ja mer. Comme les preuves de M. Guettard font appuyées fur des faits, & tirent leur force autant de leur nombre, que de lanalyfe que fait M. Guettard de tous les objets qu'il compare, nous énerverions fes preuves en les détachant & en nous contentant de fes prendre par extrait; nous nous arrêterons donc ici, en avertiffant que {es trois parties du Mémoire de M. Guettard doivent être regardées non-feulement comme très-propres à confirmer le fentiment le plus généralement adopté fur l’origine des coquilles foffiles, mais encore comme une collection précieufe d’un grand nombre de faits intéreffans fur l'hiftoire de ces corps. SUR UNE NOUVELLE ESPÈCE DE VER QUI RONGE LES BOIS ET LES VAISSEAUX, obfervée au Sénégal. C: n'eft que la fimple curiofité qui nous porte commu- nément à raflembler des coquillages , & à confidérer avec uue certaine attention toutes les variétés qu'ils offrent. Voici une production en ce genre qu'un motif plus preffant a donné lieu de bien examiner. Le ver rongeur de bois, dont M. Adanfon: nous à donné lhiftoire, s'attache quelquefois aux Vaifeaux ; & dès-lors, on fent combien il étoit naturel qu'on s'en occupit,. indépendamment de ce qu'il pouvoit préfenter par lui-même de curieux dans l’ordre des coquillages. . Ce ver rongeur de bois que M. Adanfon nomme rare, par allufion fans doute à une tarière, inftrument propre à percer les bois, eft commun dans le Sénégal ; il fe trouve abondamment dans les racines des mangliers & des fanards, qui bordent le fleuve Niger, le Gambie & d’autres rivières. Piufieurs auteurs ont parlé de ceite efpèce de ver deftruéteur V. les Mém:. page 249: 16 HisToire DE L'ACADÉMIE ROYALE (nous entendons celui qui eft connu en Europe ) mais d'une manière peu exacte : quelques-uns lui ont fuppofé des pieds , à la faveur defquels il pouvoit fortir de fa coquille; & tous ont été dans l'erreur, au point de prendre pour la queue de l'animal ce qui eft proprement fa tête, tandis qu'ils donnoïent le nom de tête à la partie que M. Adanfon a reconnue pour être véritablement le pied. Le raret ne fe manifefte au dehors que par une de fes extré- mités : il faut couper le bois dans fa longueur pour découvrir Fanimal en entier; alors paroît fa coquille qui eft compogée de cinq pièces fort inégales, dont la plus grande a 11 forme d’un tuyau blanchâtre, fort dur, & qui enveloppe les quatre autres. Les plus longs de ces tuyaux que M. Adanfon ait obfervés, avoient dix pouces de longueur fur fix lignes de grofleur. Il eft rare que ces tuyaux foient parfaitement droits ; mais {es courbures qu'ils prennent font légères, & dépendent, felon toute apparence, des finuofités auxquelles les nœuds des bois, ou d’autres irrégularités, forcent l'animal de fe prêter. L'ouverture de l'extrémité inférieure de ce tuyau eft ronde, & deux fois plus grande que celle de l'extrémité oppofée ; elle fe ferme lorfque l'animal eft devenu vieux, & ne creufe plus pour fe loger. À l'aide d’une loupe on remarque, au bout inférieur du canal creufé dans le bois & arrondi en hémifphère, des traits fort déliés, & tels à peu près qu'une lime douce les auroit formés. Le raret fuit le fil du bois en fe perçant, & préfère celui qui fe trouve placé verticalement : en sy introduifant , if s'élève à des hauteurs différentes du fond de l’eau ; M. Adanfon a remarqué que, füuivant les circonftances, ces hauteurs vont depuis fix pouces jufqu'à trois pieds. Le dernier point de Yabaifflement des eaux de la mer, dans le temps du reflux, eft communément le terme au-delà duquel le zaret ne perce plus les bois. : Quoique ces animaux paroiffent deftinés à vivre dans l'eau falée, cependant ils s'accoutument fans peine aux eaux les plus douces, ; DYEVSUNOSNICEEUE IN! CE: “douces, & ils ont cela de commun avec les pholades ; les couteliers, les pétoncles & quelques autres coquillages. Nous ne fuivrons pas M. Adanfon dans l'examen très- ‘détaillé qu'il fait des parties les plus effentielles de cet animal, des tuyaux charnus par lelquels il refpire l'eau & prend fa nourriture , & de V'ufage des autres pièces de coquille qui font attachées à fes extrémités ; c'eft dans fon Mémoire même qu'il faut juger de l'exactitude de fes obfervations, & du foin qu'il a pris de développer des parties qui n'avoient été confidérées jufqu'ici que confufément. I nous fufhra de dire ici en fubftance, que le corps du zaret a la longueur & à peu près la forme de fa coquille ; c'eft une efpèce de fac membraneux, fort mollañe, & qui a quelque rapport avec la chair des moules & des huñtres : cette membrane, que M. Adanfon nomme le manteau de l'animal, eft femblable dans le taret, la pholade & le coutelier ; les deux extrémités du corps, qu'on pourroit regarder comme la continuation du manteau, en font bien diftinguées par leur forme & par la féparation qu’en font deux mufcles. Le bout fupérieur eft compofé d'un tuyau partagé en deux à fon extrémité, & de deux pièces de coquille qui ont la forme de palettes ; les tuyaux font le prolongement du man- teau, ils font charnus, mollafles & fort courts ; celui qui eft en deflous, a une frange très-délicate de quarante filets charnus diftribués fur trois rangs; l'autre tuyau eft fimple: c'eft par ces deux organes que le saret fe procure les alimens ; le tuyau frangé afpire l'eau du dehors pour en remplir le manteau : cette eau eft chargée de parties limonneufes dont F'animal fe nourrit ; ces parties entrent dans fon eftomac par un orifice particulier, pendant que l'eau qui en eft dépouillée, fort par l'autre tuyau qui fert aufli de paflage aux excrémens. Les petites pièces de coquille , en forme de palettes, dont nous avons parlé, font appliquées fur les tuyaux, elles peuvent fe mouvoir latéra- lement, donner lieu par-là aux tuyaux de fortir de Ha coquille ; & lorfqu'ils rentrent, ces palettes fe rapprochent par le fommet, & leur ôtent toute communication avec l'eau du dehors. A 1759. c 18 HisTOoIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE L'extrémité inférieure du corps porte deux autres pièces de coquille parfaitement égales, que M. Adanfon nomme battans , par le rapport qu'il y trouve avec les battans de la coquille de la pholade : ces pièces de coquille font aflez dures, quoique fort minces, d’une grande blancheur, & creufées en portion de fphère; leur partie convexe eft relevée d’un grand nombre de petites dents quarrées ou en lozanges, diflribuées fur vingt- cinq lignes, & qui par-R donnent à ces battans les propriétés d’une lime fine: c'eft à laide de cet inflrument délié que le zarer perce les bois : on en juge par les fillons qu'on aperçoit dans les morceaux dont on a tiré récemment l'animal; ces fillons font parallèles aux lignes des dents des battans. M. Adanfon les a obfervés dans plufieurs trous de taret, & on les voit même encore dans quelques morceaux de bois qui ont fervi de retraite à cet animal, & que M. Adanfon a eu l'attention de conferver. La membrane du manteau qui enveloppe, comme dans un fac, les parties intérieures , eft fi tranfparente, que l'on diftingue- au travers leftomac; il eft prefque toujours rempli d’une matière verdâtre, qui, examinée à la loupe, fait juger qu'elle eft un limon mélé de quelques grains de fable que Fanimal a afpiré avec l'eau : on n’y voit rien qui ait l'apparence de Ja fciure de bois, & qui donne lieu de préfumer que l'animal Fait prife comme aliment. " Après une defcription fort exaéte du zaret du Sénégal, M. Adanfon le compare avec celui qui eft connu en Europe, mais {ur l’hifloire duquel il y avoit quelques erreurs. Il fait voir les différences bien marquées qu'il y a entr'eux ; il rapproche encore ce même sarer du Sénégal de celui de Inde, & defcend dans plufieurs détails qui le conduifent à bien caraétérifer Fun & autre, La principale opinion mal-fondée qui s'étoit établie au füujet de cet animal, confiftoit à croire qu’il fe nour- rifloit de la râpure du bois dans lequel il s'étoit logé. M. Adanfon apporte plufieurs raifons pour prouver que cette râpure ne fauroit être l'aliment du rarer ; une des plus fortes eft que cet animal, parvenu une fois à une certaine grandeur, & logé auffi. D'ES S CHrENCE S 1 fpacieufement qu'il lui convient, bouche entièrement fa coquille par l'extrémité inférieure, fe prive par là du moyen de ronger le bois, vit cependant dans cet état, & a leflomac rempli, comme auparavant, de la matière qu'on y obferve dans la circonftance où l'action des battans à lieu. M. Adanfon, loin de confondre le zarer avec toutes Îes efpèces de vers à tuyaux, comme quelques auteurs ont fait, ou de le regarder comme un corps ifolé dans la Nature, le place dans la famille des conques multivalves, mais qui, par . le nombre des pièces de fa coquille, fe rapproche plus de Ia pholade que de tous les autres. SUR LES BOÎÏS PÉTRIFIÉS. I: arrive quelquefois qu'après avoir admiré fans fondement V. les Méms de fnples jeux de la Nature, dans des pierres que le hafard P28e 430: a offertes, & avoir cru y reconnoître les veftiges d'un corps primitivement organifé, on cefle non-feulement de les regarder comme tels, à melure que ces objets deviennent plus familiers, mais qu'on en vient même à des doutes fur les marques bien réelles d’une ancienne organifation, tandis que ces traces déci- fives n'échappent point à des yeux attentifs ; c’eft alors pafer d'un excès à un autre, & quitter lerreur fans tenir à la vérité. On convient qu'un grand nombre de pierres fibreufes ou feuillées, ont quelque reflemblance avec certains bois, & qu'il a été poflible par conféquent de les prendre au premier coup- d'œil pour des bois pétrifiés ; mais les Naturaliftes circon{pects ont bientôt reconnu que ces corps fe trouvoient dans la terre difpotés par lits, & avoient, comme les autres pierres, leurs bancs plus où moins étendus. Ils nous ont appris encore à ne point confondre les incruftations fimples avec les vraies pétri- fications. On fait que {es premières font dües au fuc pierreux de quelques fontaines : fes diflérens corps qu'on jette dans leur cours , fe trouvent, après un certain temps, encroûtés de C 20 HisTOiRE DE L’ACADÉMIE ROYALE ce fuc pierreux, & ne lui fervant que de noyau, ils reflent de la même nature dont ils étoient. Quelques morceaux affez finguliers font plus capables de faire illufion par toutes les apparences qu'ils ont d'une planche de fapin; on y aperçoit en effet les veines du bois, les fibres, les nœuds, mais ce ne font point encore de véritables pétrifications : un fédiment qui fe dépofe fur des planches de cette efpèce, forfqu'on les emploie pour conduire l'eau à des moulins, donne lieu à des incruflations, lefquelles moulées exactement fur cesplanches,, en repréfentent toutes les variétés, Ce n’eft donc point, en ne s’arrêtant qu'à des indices fuper- ficiels, qu'on peut décider qu'une pierre doit fon origine à. un morceau de bois ; il faut y chercher les vefliges de l'orga- nifation particulière aux végétaux, & reconnoitre au moins. diftinctement les traits principaux qui fervent à la caraétérifer.… M. Fougeroux préfente fur cela tous les détails que l'efprit d’obfervation lui a fait faïfir, & qu'il doit encore à l'examen. réfléchi de plufieurs morceaux curieux. Si l'on pouvoit avoir quelque doute fur Fexiftence des bois pétrifiés, on n’héfiteroit plus à la regarder comme réelle, . en lifant dans le Mémoire de M. Fougeroux, qu'aux-environs. de Rochefort, M. du Hamel découvrit dans un lit de glaife un tronc d'arbre pétrifié qui étoit garni de fes racines, & dont: deux morceaux qu'il a fait tranfporter à Paris, pèfent environ dix-huit cents livres: l'organifation prife en détail , n’y eft pas fort apparente à {a vérité ; mais il porte des caractères qui décèlent fon origine. A cette occafion, M. Fougeroux obferve judi- cieufement que quand la fubflance ligneufe paroït uniforme, comme dans le peuplier , le faule, &c. on ne doit pas aper- cevoir dans les bois petrifiés de cette efpèce, une organifation bien fenfible, & telle qu'on l'obferveroit dans un chêne ou un orme pétrifié. D'ailleurs, la qualité du fuc lapidifique influant fur la dureté & la couleur du bois, il peut furvenir des. changemens dans fa texture, qui le faffent un peu méconnoïtre, & dérobent en partie la netteté de fon organifation. S'il eft évident que le bois peut fe convertir en-pierre, &c. DES SCIENCES. AE acquérir toute la dureté du marbre & de l'agate, on ne voit pas clairement comment cette tranfmutation a lieu. Les conjec- tures de M. Fougeroux fur ce point délicat, paroîtront fatisfai- fantes ; elles naiflent de fes obfervations. L'opinion la plus commune fur la formation des pierres, confifte à fuppofer qu'une fubftance propre à lier des parties entr’elles , qu'une efpèce de gluten dont Veau efl chargée, s’in- finue avec elle dans des monceaux de fable, dans des terres argi- leufes, bolaires, &c. qu'elle y unit les molécules terreufes, & y forme peu à peu des maffes de pierres, lefquelles-acquièrent une dureté proportionnée au dépôt du fuc pétrifrant & à l'éva- poration de l'eau qui l'a charrié. Il doit réfulter de cette fuppo : fition, comme il'réfulte en effet, beaucoup de variétés dans la pétification d’une même fubflance, fuivant l'abondance du fuc qui y concourt, & les différentes matières dont il peut s'être chargé dans la terre. II faut ajouter à ces caufes de variétés les différences fans nombre que les corps expoés à la pétrifr- cation peuvent occafionner par eux-mêmes, foit qu'on les confidère comme végétaux, foit comme appartenans au règne animal, foit enfin comme alliés avec des particules métalliques ou pyriteufes. Ce fuc pétrifant, ce gluten une fois admis, on conçoit “qu'il pourra fouder entrelles les molécules des corps qui fe trouveront expofés au paflage des eaux chargées de ce même fuc: ces molécules pourront sattacher enfuite à des corps organifés qu'elles rencontreront, tels que des coquilles ou des morceaux de bois, & y refleront adhérentes, fuivant le plus ou le moins de difpofition qu'auront ces mêmes corps pour les faifir & les loger dans feurs pores. D'après cette fuppofition, on ne fera point furpris qu'un morceau de bois foit en-partie pétrifié & foit refté en partie dans l’état de végétal : la totalité de ce morceau de bois n'aura: pas été expolée au cours de eau chargée du gluten; il s'en fera trouvé une portion aflez bien garantie de f'infiltration, pour que ce morceau ait d'un côté la dureté d’une agate, 6. qu'il n'ait de l'autre que à confiftance ordinaire du bois. | C ij 22 Histoire DE L’ACADÉMIE ROYALE Comme M. Fougeroux ne diffimule aucune des objections qu'il efl poffible de faire fur ce fujet, en confidérant la variété des morceaux de bois pétrifiés,. ou des coquilles dont la fubf tance a éprouvé ceue efpèce de tranfmutation, ou dans lef- quelles il s'eft formé fimplement un noyau pierreux , nous renvoyons à fon Mémoire même, afin qu'on juge mieux du poids de ces objeétions. Il nous à paru y répondre en Ob- {ervateur éclairé, & il ne lui a pas été poffible de fe les pro: poler à lui-même fans avoir examiné avec foin un très-grand nombre de morceaux qui préfentent beaucoup de difficultés à expliquer. On ne confidère fur-tout qu'avec étonnement ceux qui, quoique convertis en agate très -dure, confervent des caraélères d'organifation bien marqués, tels que les cercles concentriques, les infertions , la diflinétion même de l'aubier & du bois. La fubflance végétale paroît ici abfolument détruite, & tout y a la dureté de l'agate. Cependant il faut qu'il y {oit refté une efpèce de charpente, un tiffu, quelque léger qu'on le fuppole, pour que lorganifation du bois s'y foit maintenue & y foit remarquable jufque dans les chofes les plus fufcep- tibles d’altération. En vain M. Fougeroux a-t-il tenté d'attaquer par les acides ou par une calcination modérée cette apparence de uiflu végétal ; le bois agatifié n'a point été altéré par ces épreuves; elles ne lui ont pas même fait perdre fon poli: la fubftance pierreule a fi bien enveloppé les particules végétales, ou plutôt, les a fi parfaitement pénétrées qu'elles ont été miles hors d'attaque, après avoir frvi de moules pour conferver l'organifation. D'ailleurs, comme l’obferve très- bien M. Fougeroux , les parties fixes d'un morceau de bois fe réduifent à très - peu de chole: la plus grande portion de la matière qui le conflitue peut être enlevée peu-à-peu par l'eau , à melure qu'il fe pourrit; il ne refte plus alors qu'un fquelette ligneux , dont le poids eft fi léger, quil n'a aucune proportion avec celui du bois confidéré dans fon état fain & entier. M. Fougeroux ne diffimule point encore qn'on peut lui faire une objection fur ce que le fuc lapidifique ne lie pas PME SUIS UOTE. N C' EIS, | TAN fouvent le fable qu'il trouve dans fon pafñlage & n'en forme pas des pierres, tandis qu'il produit cet effet fur un morceau de bois placé au milieu de ce fable. Outre les conjedures bien fondées & tirées du réfultat de quelques opérations chi- miques, dont M. Fougeroux fe fert avec avantage pour ré- pondre à cette objection , il eft naturel de penfer que le füc lpidifique trouve quelquefois plus d'obflackes pour pafiér au travers d'un corps organifé, tel qu'un morceau de bois, qu'il n'en rencontre en pénétrant du fable; que retardé alors dans fa marche, s'il s'agit du premier, à caufe de la multipli- cité & de lentrelaffement des parties ligneufes, il y peut dépofer les molécules pierreufes dont il eft chargé, tandis qu'un paffage facile à travers du fible, ne donnera pas lieu au même effet. Mais quelle eft la nature du fuc pétrifiant? exifte-t - il? comment doit-il être défini ? Voici en fubftance les remarques d'après lefquelles M. Fougeroux a cru pouvoir admettre un gluten, un füuc crif- tallin ou pétrifiant, qui rafflemble une terre propre à fervir de bafe à la pétrification: il a reconnu ce gluten dans les terres graffes, bolaires, argileufes; il s’eft afluré que les acides Yattaquent & dénaturent les terres dans lefquelles il entre : ce gluten s'annonce encoré dans certaines coquilles, dont l'intérieur eft rempli d’une matière plus pure que le refle de la pierre, parce que le fuc criflallin s'y eft raffemblé avant que de fe combiner avec une terre propre à lui être unie, & qui agroit fervi de bafe à la pétrification. D'ailleurs on remarque ce fuc criftallin à l'extérieur de certains morceaux de bois pétrifiés ; il y eft frappant par fa pureté. Mais peut-on regarder ce fuc criflallin comme une eau pure? Contient - il un acide particulier, où un de ceux que nous. connoiflons qui a éprouvé quelque modification? C’eft ici-où il faut s'arrêter & attendre que des expériences multipliées où une obfervation heureule jette de la lumière fur cette queftion. délicate; il paroît feulement qu'on ne doit pas confidérer ce fic comme une eau pure, puifqu'il diflout les pierres déjà. V. les Mém. page 535. 24 HMisToiRE DE L’ACADÉMIE RoYyALE formées, propriété que l'eau fimple n'apas, & produit par-fà les flalactites. Ce fuc criftallin peut encore s'unir à une füubflance métal- lique, & l'introduire dans les bois dont il pénètre la texture. M. du Hamel ayant fait fier un morceau de boïs agatifié, y a découvert au milieu un morceau de fer que la fcie avoit divifé en deux. On a vu des morceaux de bois pourri, lef- quels après avoir été long-temps imprégnés de rouille de fer , fe font convertis en bois ferrugineux; lorganifation du bois y étoit encore reconnoiffable, mais le feu ne les attaquoit point, & ils tenoient plus de la nature du fer que de leur état primitif. IL faut conclure du Mémoire inftru@if de M. Fougeroux, qu'il n'y a aucun doute raïfonnable à former fur l'exiftence des bois pétrifiés, & que les vefliges bien confervés de leur organifation , feront toujours des témoins invariables de cette vérité ; elle fe montre même dans une nouvelle évidence, lorfqu'il s'agit d'un morceau de bois, qui, reftant tel à une de {es extrémités, acquiert à Fautre toute la dureté d'une agate. La variété des phénomènes en ce genre offre des dif- ficultés à réfoudre, nous en convenons; mais outre que M. Fougeroux en fe les propofant dans toute leur étendue, y a donné des explications plaufibles , il eft conftant qu'un fait, quoique certain en lui-même, n’eft pas toujours bien éclairci, parce que nos connoiffances ont un terme, & encore après être parvenues, ne font-elles que le fruit du temps, le produit des obfervations multipliées , & le réfultat du travail d'une foule d'hommes qui ont réfléchi. S$ U RIT A MINÉRALOGIE DE L'AUVERGNE. O° ELQUE bon Obférvateur que lon foit, & quelque ardeur que l'on porte au travail, lorfqu'il eft queftion de donner une idée exacte de la Minéralogie d’un pays un peu DÉS SErENCcESs 2 péu éendu, il ef fort difficile que les recherches d'uné perfonne feule procurent toutes les notions qui doivent entrer dans un tel plan: peut-être même devroit-on regarder comme le grand effort d’un Minéralogifte laborieux, qu'il ne fournit que les traits principaux, mais bien marqués de ce plan, & qu'il laïffät les détails à des hommes moins capables que lui, de former lenfemble de tout ce qui caraétérife un vafte pays. Un travail préfenté ainfi en grand attire l'attention du Leéteur, l'intérefle par l'ordre qui y règne, & laifle dans fon efprit un tableau qu'il lui eft toujours facile de fe rappeler : les parties les moins frappantes, mais dignes d'attention, qui en font en quelque manière le rempliffage, fe placent enfuite, à mefure qu'on les découvre, dans les endroits auxquels elles appartiennent ; Vefprit toujours fixé par des vues générales, defcend aifément dans les détails particuliers, & ne-craint point de les confondre, parce qu'il n'oublie pas qu'ils tiennent à certains faits principaux dont il ne doit jamais s'écarter. Les connoiffances qu'a M. Guettard dans l'Hifloire naturelle, & l'application qu'il a donnée à la Minéralogie de l'Auvergne, n'auroient pas fufh fans doute pour lui fournir dans un examen affez court tous les matériaux du Mémoire dont nous allons donner le précis. Les fecours qu'il a reçus de quelques Phyficiens diftingués, & auxquels il rend hommage avec une modeftie bien digne d'être imitée, prouvent, ainfi que nous l'avons dit, combien il faut réunir d’obfervations pour parvenir à quelqu'exactitude dans Fefpèce de travail dont il s'agit, M. du Tour, Correfpondant de l'Académie, eft celui de ces Phyficiens qui a le plus aidé M. Guettard, & il étoit naturel * qu'on lui füt redevable de plufieurs obfervations : ce Savant réfide à Riom, & a fans ceffe fous les yeux, lorfqu'il voyage dans les environs de cette ville, la plupart des grandes mafies & des matières différentes qui entrent dans la Minéralogie de T Auvergne, Ses recherches & celles qu'on a d’ailleurs commu- niquées à M. Guettard , étant diftinguées avec fidélité dans fon Mémoire, il nous fuffira dans ce moment-ci de confidérer en grande partie ce Mémoire comme forti de la même main, Hit. 1759. D 26 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE & nous nous bornerons à un expolé fimple de ce qu'il contient de plus marqué. Les environs de Riom y font plus détaillés que les autres parties de l’Auvergne ; les pierres calcaires font les feules qu’on trouve dans la Limagne, tandis que:les endroits qui bornent à lorient & à l'occident ce canton fi fertile, n’offrent que des pierres vitrifiables, des quartz, des granits, &c. Depuis Châtel- guyon jufqu'à Salvert, c'eft-à-dire, dans une étendue de plus de huit lieues, on ne trouve que des granits, fi l’on en excepte un canton voifin du Puy-de-Thufet où l'on voit des pierres: ponces & une grande quantité de pierres noires : celles-ci forment des tas affez confidérables qui ont quelque refflemblance. avec des ruines ; elles annoncent qu'il y a eu un volcan dans le voifinage : l'afpeét de ce canton eft affreux. Au milieu d’une gorge que forment des monticules, dont la Limagne eft bordée du côté du couchant, on trouve un. banc de fpath ftrié ou filamenteux : cette pierre peut être em- ployée à faire de la chaux ; & comme en cet état elle acquiert une grande blancheur, on s’en fert pour blanchir les murailles: cependant on ne convertit pas communément ce fpath en chaux, parce qu'il exige plus de temps & de charbon pour parvenir à l'état de calcination que n'en demandent les pierres ordinaires. Dans les rochers où l'on trouve ce fpath, il ef difpofé par couches, lefquelles font entremélées d'autres d’une efpèce de pierre graveleufe & grifâtre. On y remarque de gros cailloux arrondis & liés par une matière pierreufe ; les petits graviers dont elle eft parfemée, offrent toutes fortes de couleurs : on peut regarder cet amas comme un bloc de Poudingues. Il ÿ a dans les environs de Davayat un canton aflez étendu qui renferme d'excellentes pierres pour bâtir. On y remarque encore des pierres plates calcaires, qui ont à leur furface des taches circulaires dont la circonférence eft noire : le point qui eft à leur centre a la même couleur ; d'où il réfulte quelque reffemblance à une fection d’entroque : ces taches pénètrent la pierre, & leur centre eft un petit trou rempli quelquetois Des SCTE N'CE'Ss 27 de fpath criflallifé. Les pierres à chaux font communes aux environs de Davayat : on y trouve des pierres feuilletées, des marnes de différentes couleurs : celles qui font d’un brun- jaunâtre deviennent propres à fertilifer les terres. M. du Tour Ja éprouvé d'une manière avantageule ; on reconnoît encore aujourd'hui le terrain où il a fait répandre cette efpèce de marne ; il eft plus fertile que les champs voifins. Les pierres à chaux font auffi fort communes entre Gimeaux & Beauregard-Vandon : dans une étendue affez confidérable qui fépare ces deux endroits, règnent à fleur de terre des rochers compolés de cette efpèce de pierre où l'on remarque des particules brillantes, qui ne font autre chofe que des parties fcailleufes de fpath. On fait de la chaux à Chauriat, Mezé, Vañel, &c. celle de Mezé eft la plus eftimée ; il s'en fait auff de très-bonne à Bar près de Brioude : les fours à chaux qu'on y emploie, ont la forme d'un prifme dont chaque côté peut avoir fix pieds, tant en largeur qu'en hauteur; il y a une ouverture au bas de chacun de ces côtés ; le four eft découvert par le haut : lorfqu’on veut y faire cuire la pierre ; on commence par établir au fond du four une forte couche de charbon de “terre; on recouvre celle-ci d'une couche de pierre, & on place ainfi ces matières alternativement jufqu’au haut du four : à melure que les pierres fe convertiflent en chaux, on retire avec une ufine de fer recourbée la couche de deflous par les ouvertures qui font fur les côtés ; on rémet par celle d'en haut de nouvelle pierre & du charbon, & lon continue ainfi ce travail pendant un an ou deux, fans aucune interruption du feu , fuivant la quantité de chaux dont on a befoin; il ne faut que cinq à fix heures pour que [a première couche de pierre qu'on a mife dans le four foit parfaitement réduite en chaux. On trouve à Lauriat & à Vernafal de grands rochers, d’où Jon tire des efpèces de marbre qu'on ne deftine guère qu'à convertir en chaux ; encore leur préfère-t-on pour cet ufage la pierre de Bar, comme moins difficile à calciner. M. Guettard remarque avec raifon, comme une fmgularité, que dans un très-grand nombre de pierres différentes dont il D ji 28 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE donne la defcription, il n'ait pas trouvé de coquilles foffiles ; à moins qu'on ne prenne pour telles ces taches rondes qu'il a obfervées fur les pierres de Davayat, & qu'on pourroit regarder comme des portions d'entroques où de bélemnites: ce n’eft pas que l'Auvergne n'ait montré quelquefois des coquilles foffiles: mais on les y trouve rarement; en vain plufieurs Curieux & M. du Tour lui-même en ont-ils cherché. M. Ozy, apothi- cire de Clermont, eft le feul que cite M. Guettard, comme ayant donné un Mémoire où il parle de coquilles attachées à de grandes tables de pierre vers la partie méridionale du Puy-de-Mur, & d'un banc d’huîtres de trois ou quatre pieds d'pailfeur, qui a été trouvé dans la partie feptentrionale de Clermont, à trente pieds ou environ de profondeur. Nous avons dit plus haut que les pierres calcaires {ont les feules qu'on rencontre dans la Limagne. M. Guettard a re- marqué que depuis Vichy jufqu'à Gannat en Bourbonnois, if ne fe trouvoit guère que des pierres blanches calcaires; que depuis Chatufat jufquà Aigueperfe, on ne voyoit que le même efpèce de pierre, & qu'elle régnoit encore dans plu- fieurs autres cantons de l'Auvergne. Si, comme on le penfe communément, les pierres calcaires ne font qu'un compolé de coquilles détruites, dont néanmoins certaines efpèces ont de la confiftance & peuvent conferver quelque chofe de leur ancienne forme, ainfi qu'on le remarque dans une infinité de pierres de cette elpèce; f1 cette opinion eft bien fondée, ïl doit paroître fort furprenant que les coquilles foffiles foient auf rares dans les parties de l'Auvergne que nous avons défignées & qu'on les y regarde comme un objet de euriofité. Quelques endroits de l'Auvergne renferment des bois pé- trifiés. M. du Tour a eu lieu de faire une oblervation digne de remarque fur un morceau de bois de cette efpèce ; il le mit dans l'eau, fans autre vue que celle de le nettoyer : au bout de uelques heures L'eau fe trouva teinte; le même morceau ayant été bien efluyé & mis dans une eau nouvelle, y produifit ur effet pueil, mais il y perdit quelque chofe de fa dureté, & donna moins d'étincelles étant frappé par l'acier, qu'il n'en ‘ DAEUNSIAS EN E N7C.F'S; 29 avoit rendu avant qu'on le trempât dans l'eau: ce morceau de bois préfenta encore une fingularité; ayant été plongé dans l'eau en partie, le liquide s’y éleva au bout de quelques mi- nutes de-plus d'un pouce au-deffus de fon niveau, & auroit fans doute monté plus haut, fi lon navoit pas craint qu'en le laiffant plus long-temps en expérience il n'eût perdu une grande partie de fa propriété accidentelle & bien décifive pour les bois pétrifiés, celle de donner des étincelles. Il femble, d'après cette expérience, que les bois pétrifiés, du moins œux qui n’ont pas acquis une dureté complète, peuvent être décompofés par l'eau fimple. Sont-ce les parties ligneufes qui colorent ainfr l'eau en s’y diflolvant , ou cet effet eft-il dû aux parties pierreufes? On feroit porté à fuivre ce dernier fentiment, en réfléchiflant que ce bois, après avoir été trempé dans l'eau donne moins d'étincelles: cette pro- priété en effet fembleroit ne devoir pas beaucoup s'affoiblir, sil n’y avoit d'altération que dans la partie ligneufe; & fi les parties de ce bois qui font parvenues à une certaine dureté n'éprouvoient pas quelque ramoliffement : il y auroit fur cela matière à des expériences curieufes, & dont la marche feroit tracée par les différentes efpèces de bois pétrifiés, Nous avons défigné la plupart des endroits de l'Auvergne où l'on trouve les pierres calcaires; elles règnent encore dans quelques cantons que M. Guettard a indiqués, & peut - être lui eft-il échappé d'en marquer d'autres qui ne renferment que des pierres à chaux. D'ailleurs fon ne remarque dans la province que des pierres vitrifiables, des granits, des fchits, des quartz, des pierres talqueufes , des pierres de volcans, des bitumes; & plufieurs endroits de l'Auvergne produifent cette dernière matière, principalement le Puy - de - Crouelle & celui de Pege ; le bitume”fort liquide de ce dernier Puy : les pierres du monticule où il ef fitué, portent l'empreinte de ce bitume ; il s'y trouve quelquefois incrufté fous une forme dure & brillante: on remarque à côté de ce monticule une petite élévation de :trois pieds de hauteur où environ fur quinze de largeur, laquelle ne paroït étre formée que du l D ii 30 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Diinne qui fe deffiche à mefure qu'il fort de la terre ; à fourcé en «ffet eft au milieu de cette élévation. Ce que nous d'fons du Puy-de-Pege peut ètre appliqué en général à celui de Crouelle: le bitume cependant n'y fort pas dans un état de liquidité ; on ne l'y voit qu'en gros morceaux durs & placés entre les crévaces des pierres : d’ailleurs tout ce qui environne ces deux puys porte des veitiges du bitume, & les pierres fur-tout en font plus ou moins imprégnées: ces fources bitumineufes ne font pas les feules que contienne le canton de l'Auvergne qui avoifine Riom, il y a une fuite de ces fortes de puys, en partant du bas de celui d’Anol jufqu'à Clermont ; ainfi il eft naturel que les pierres répandues fur ce terrain aient été péné- trées par le bitume. M. Guettard trouve beaucoup de rapport entre quelques- unes de ces pierres & celle du Canada, qu'on nomme prerre puante. M féroit difpofé à croire que toutes les pierres d’où il s'exhale une odeur forte & défagréable , n'ont cette qualité que parce qu'elles contiennent des parties très-tenues de bitume: il avoit déjà obfervé que les pierres de Vichy étant frottées, jettent une odeur diforacieufe, laquelle ne paroit être dûe qu'au bitume dont elles font pénétrées, & qui eft fr bien fondu avec elles, qu'on leur fait prendre fans peine un beau poli, & que leur dureté approche quelquefois de celle du filex. D'après plufieurs obfervations dont il faut lire le détail dans le Mémoire de M. Guettard, on doit regarder cette efpèce de pierre puante de l'Auvergne cômme compofée en grande partie d'argile; elle eft verdätre & parfemée de taches noires, rondes, Bitumineufes felon toutes les apparences, & en total elle a quelque reffemblance avec la pierre ferpentine. On trouve au haut du Puy-de-Dome, du Mont-d'or & de Volvic une forte de pierre qui reflemble beaucoup à de la cendre qui fe feroit condenfée, & auroit acquis'une certaine dureié ; elle eft parfemée, outre cela, de parties noirâtres & brillantes, telles qu'on les voit dans plufieurs pierres qui ont été vomies par les volcans, La fameule momie qu'on a trouvée dans l'Auvergne, étoit renfermée dans un bac qui paroït être Dl'EsS):4$ 0: A'E NiC-E.S. r formé de la même efpèce de pierre dont nous parlons : celle du bac eft en eflet d’un gris-cendré, elle a des points noirs & brillans ; les éclats qu'on en a retrouvés, en fouillant autour de l'endroit où cette momie fut découverte, fembleroient annoncer que des cendres entroient pour beaucoup: dans leur compofition : ces éclats de pierre étoient fort tendres, & on les divifoit facilement avec la bêche ; ce peu de ANR des reftes d’une pierre, qui primitivement devoit être aflez dure, peut s'expliquer fans peine par la facilité qu'a la cendre d'être pénétrée par l'humidité , & de tendre au ramolliflement, quoique portée en apparence à un point de dureté qu'elle n'acquiert pas ordinairement, & ne paroït devoir qu'aux parties bitumineufes qui s'y trouvent incorporées. La pierre glaifeufe de Salvert mérite une attention parti- culière, c’eft une vraie ftéatite ou pierre ollaire , dont la pro- priété cf connue dans les Arts; on peut en effet la tourner & en former des vaiffeaux capables de réfifter au feu. Le Mémoire de M. Guettard fournit à ce fujet quelques détails qui lui ont été envoyés par M. du Tour; il eft bon d'y remarquer entr'autres chofes, la manière ingénieufe dont on arrête la filtration de l’eau dans ces fortes de vales, Jorfque le feu y a fait apercevoir quelque fente qu'on n'y avoit pas d'abord découverte. Pline qui connoifloit la pierre ollaire, connoifloit aufli, à ce qu'il paroït, le moyen de remédier aux gerfures imperceptibles qu'il eft affez ordinaire d'y obferver lorfqu'on en fait ufage : ce moyen confifte à tremper les vafes dans fhuile d'olive pendant vingt-quatre heures, & à les mettre enfuite dans un four pendant que le pain y. cuit. Pline croyoit que l'effet de l'huile étoit de durcir la pierre ollaire qui eft tendre par ellemême, & par-là de refférrer les fentes qui s'y trouvent; mais il eft vraifemblable, comme l’obierve M. du Tour, que l'huile, dans cette occafion-ci, pénètre fimplement Le pores du “Ai qu'il en occupe les Fate im- percepübles, & les rend inaccethhles à à l’eau. Les Minéralogifies: n'avoient point encore découvert en France cette efpèce de pierre, où du moins ils n'avoient point fait, en la voyant, > HisToiRe DE L'ACADÉMIE ROYALE Yattention & les expériences qui devoient conflater fes proprictés. M. Guettard, après avoir rangé cette forte de pierre ollaire dans la clafle des ftéatites, & lavoir fait entrer dans la chaîne des pierres glaifeufes de l'Auvergne, obferve que cette chaîne règne entre celle des pierres calcaires & celle des pierres viuifables, & que s'il y avoit quelque mélange, la chaine intermédiaire auroit plus de rapport avec les pierres vitrifiables qu'avec celles de l'autre genre. Suivant les obfervations de M. Guettard & celles de M. du Tour, une grande partie de l'Auvergne eft occupée par les pierres vitrifiables, de manière que certains cantons font remplis de fchits, d'autres de quartz, & d'autres de granits: cette derniere efpèce de pierre eft fort commune aux environs de Davayat, quoique le fond du terrain y foit marneux ; mais elles y viennent d’ailleurs, & y ont été conduites par un rui (eau; en Le remontant jufqu'à un quart de lieue de ce village, on découvre la carrière qui les fournit : les collines efcarpées qui bordent le ruifleau, font bordées de rochers de granits ; les eaux pluviales en détachent des morceaux que le ruifleau, devenu plus rapide alors, entraine vers des endroits affez éloignés : la chaine méridionale de ces rochers eft interrompue far un efpace de deux cents pas, par un terrain qui eft compolé d'argile, dont une partie et verdâtre, & l'autre d’un rouge- foncé ; cette argile eft mélangée de fable, de débris de cailloux & de mica: la dureté & une liaifon plus intime femblent être la feule chofe néceffaire à ces matières ainfi réunies, pour être transformées en véritables granits. Quelques remarques de M. Guettard für ces argiles compofces, qui ont acquis plus ou moins de confiflince & ont du rapport avec les granits bien formés, foit qu'il ait confidéré ceux qui étoient d'une couleur verdâtre, foit qu'il aït eu égard à ceux qui étoient d'un rouge-foncé, ces remarques méritent qu'on s'y arrête, & donnent beaucoup de vraifemblance à fon opinion. On trouve à Davayat une efpèce d'obélifque formé de granit ; on ignore fi c’eft l'ouvrage des hommes ou celui de h Nature DES SCIENCES 3% a Nature feule. D'après les détails que donne M. Guettard , il feroit difficile d'imaginer que les eaux euffent entraîné dans ce village une mafe de picrre aufli confidérable, & que par hafñrd elle eût acquis 12 forme affez régulière dont il s'agit. Les Naturalifles regardent les quartz comme fa matrice des criftaux ; leur fentiment paroît appuyé fur ce que l'on oblérve, que dans un grand nombre des cantons de l’Au- vergne, les quartz y font abondans & les criftallifitions communes ; il s'en trouve- anx environs de Pent-Gibaud , le long du chemin de Clermont au Mont-d'or, à la Chaile- Dieu : ces criflaux font de différentes couleurs, & forment des maflés affez jolies; il y en a de verts, de violets & d’un beau rouge grenat ; les uns tiennent à des quartz & d'autres à des granits. Nous ne nous étendrons point fur la partie du Mémoire de M: Guettard, qui concerne Îes volcans de l'Auvergne; il a déjà donné en particulier * des obfervations fur ce fujet, & ce qu'il en dit ici fe borne à un petit nombre de remarques : elles concourent à prouver de nouveau .que plufieurs montagnes de l'Auvergne -ont vomi des feux ; les pierres ponces, les laves & tout ce qui caractérife ces grands effets de la Nature, fe trouvent dans plufieurs cantons de cette province. Sur la montagne de Volvic, au bas du Puy-de- Dome fur-tout, & du côté de Pont-Gibaud les laves font fort communes, Les environs du bourg d'Orcival font remplis de pierres de volcan; & le nom feul de ce bourg femble an- noncer qu'il eft fitué dans un lieu où les feux fouterrains s'étoient fait jour de toutés parts, & y en avoient laifK des uaces effrayantes, F \ Hfi7sg: E * Voy, Mers Acad, 1752, Page 27e 34 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE OBSERVATIONS DE LH Y.S1Q UE TG ENNE RIANLIE. L : EF fumiers acquièrent par leur fermentation intéfline, . une chaleur confidérable qui en fait élever une grande quantité de vapeur où de fumée; mais il eft très-rare que cette vapeur s’enflamme, particulièrement au milieu de Fhiver, &. lorfque les fumiers font expofés en plein air : cependant c'eft” ce qui eft arrivé au haras du Ris (en Normandie) vers la. fin de 1758: On s'aperçut dans les derniers Jours du mois de Décembre de cette année, qu'il s'élevoit d'une des mares à fumier de ce haras, une vapeur enflammée fort confidérable, . & que le feu étoit dans le fumier de cette mare à une pro-- fondeur de plus de huit pieds: on y jeta une grande quantité : d'eau pour l'éteindre, mais ce fecours fut inutile; il brüla pendant plus de fept jours; on fut obligé à la fin de faire une tranchée pour le féparer du refle, & de l'emporter fur les prés où il brûloit:encore au “bout du dixième jour. If y avoit de l'eau au-deflous de ce fumier, qui ne l'empêcha pas dé prendre feu; & fà chaleur étoit fi grande, qu'il échauffa même cette eau confidérablement. Au relte, dans la relation de ce fait fingulier , envoyée à M. Guettard, & qu'il a communiquée à l'Académie, il n’eft fait mention d'aucune circonftance ex- traordinaire, qui paroifie avoir pu y donner lieu : on l'attribue feulement à la grande putréfaétion du fumier. Voici encore un exemple d'embrafement fpontané à ajouter à ceux que nous: avons rapportés dans lhifloire de 1757. Nos fuccefieurs : blämeront fouvent notre précipitation d'avoir qualifié de rares, . tant de faits qui ne nous le paroifient, que par la rareté de: nos obfervations. IG Le 13 Juin de cette année 1750, vers les neuf heures du: DES SérTENCES 35 oir , le ciel étant clair & ferein, avec un vent frais qui venoit du nord, le Curé du village de Captieux (à deux lieues de Bazas ) aperçut en l'air une colonne de feu , qui fembloit fe diriger du levant au midi; mais bientôt des bois lui en dérobèrent la vue. Cependant étant rentré chez lui, à peine fut-il couché, qu'il -entendit crier au feu; fon frère courut promptement à l'é- curie, où l'incendie paroifoit ; les flammes la remplifloient déjà de toutes parts, ayant difparu aufli promptement, il vit quatre chevaux qui venoïent d'être tués, fans aucune marque de brûlure, & que tout le fumier avoit été confumé par le feu ; enfin il fntit une odeur de foufre fi forte, qu'elle penfa Tétouffer; on eut beaucoup de peine à le faire revenir. Ce- pendant le plancher fupérieur de cette écurie n’étoit point enflammé, on n’y trouva que deux trous de trois ou quatre ‘pouces de diamètre; mais toute la charpente du toit étoit embrafée, & il fallut l'abattre pour fauver la maifon. Une heure après , il parut une autre colonne de feu qui alla fe jeter dans la petite rivière de Ia Gainère, & qui en tombant éclata avec plus de force qu'un coup de tonnerre. Ce qu'il y a de vraiment fingulier, c’eft que pendant tout ce fracas , le-ciel étoit clair & fans nuages, comme nous l'avons dit, & que la nuit étoit très-belle. M. l'Évêque de Bazas qui rapporte ce phénomène dans une lettre, communiquée à M. l'Abbé Noliet, & de qui Académie l'a appris, ajoute dans cette fettre, que le même jour il avoit vu au nord de Bazas, à l'extrémité de l'horizon, un feu femblable, qu'on croit avoir embrafé une mailon à Saint-Pey-de-Langon, qui a été brülée pendant la nuit, fans - quon fache comment le feu y a pris. Plus nos obfervations fe multiplient, plus nous voyons .que les colonnes & les globes de feu ne font pas rares: ce- pendant nous fommes encore fort ignorans fur feur nature, ont-ils les mêmes caufes que le tonnerre? font - ils produits par la matière électrique ? C’eft ce qu'on eût peut-être appris, s'il s'étoit trouvé quelque barre de fer ifolée dans cet endroit, comme celles qu'on a élevées pour reconnoître lanalogie du E ï 36° Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE tonnerre avec cette matière : nous ne pouvons trop multiplier les moyens de favoir ce qui fe pale dans fa Nature. JA Le Profeffeur de Phyfique du Séminaire des Sulpiciens du bourg de Saint-Andéol en Vivarais, (M. Fayol } faifoit quelquefois des expériences d'Electricié avec un tube de verre de quatre pieds de long, rempli de limaille de fer, & dont le bout étoit armé d'un petit fil de même méul, implanté dans le liége qui en fermoit l'ouverture. Un foir, fur les neuf heures (en Juin 1754), pendant qu'il samufoit dans fa chambre à frotter & éedtrifer ce tube, un Séminarifte qui demeuroit au-deffus, arrofa par hafard une caifle de bafilic qui. étoit fur fa fenêtre. À peine eut-il jeté de l'eau fur cette caiflé qu'elle lui parut toute couverte de bluettes de feu: apparence : qui dura jufqu'à ce que l'eau eût été imbibée dans la terre : il en jeta de nouvelle à plufieurs reprifes, & à chaque fois il revit les bluertes. Frappé dè ce phénomène, il le raconta : le lendemain au Père Conrat, qui ayant été préfent la veille, . lorfque le Profefieur frottoit le tube , foupçonna dans F'inflant que ce phénomène étoit un effet de l'éledtricité. Quoique fa conjedure füt jufte, le Profefleur s’y refufa pendant quelque temps, par la difficulté de concevoir comment il pouvoit y avoir une communication entre fon tube & cette: caifle de bafilic, qui en étoit diflante de près de huit pieds; en eflet, cela avoit l'air d'un petit prodige. Cependant le Profeffeur répéta l'expérience ,. preflé par les inflances du Religieux, tandis que celui-ci monta dans la chambre du Séminarifle. arrofer le bafilic ; l'évènement fut précifément tel qu'il l'avoir conjeduré, les bluettes de feu reparurent. Bientôt le Pro- fefleur s'affura du phénomène par lui-même ; car étant monté à fon tour dans la chambre du Séminarifte, pendant que le Père Conrat frottoit le tube dans la fienne, il vit ces bluettes de feu fur le baflic auffitôt qu'il l'arrofa, La feule différence qu'il y eut, c'eft qu'elles ne furent pas auffi brillantes que lorfqu'il frottoit le tube, ce Père n'ayant pas la main aufli propre que lui, pour produire une forte éledricité : le lendemain, . DPE SNS CIE NC ES: cd tout le Séminaire fut témoin du même phénomène, Cependant pour peu qu'en examine toutes ces circonflances ; le mer- veilleux difparoïtra; car le tube de verre étant rempli de limaille de fer, la plus grandé partie de PÉlechicité pañloit en dedans, & cette électricité pouvoit fortir & s’élancer en aigreites par Fextrémité du fil de fer paflé dans le bouchon. De plus, l'électricité en fortant par des aigrettes, fe commu nique, comme on fait, à de très-grandes diftances; elle pouvoit donc parvenir jufqu'au plancher fupérieur & à la muraille ; lorfqu'on arrofoit la caifle du bafilie, l'eau qui fe répandoit de toutes parts, mouilloit une partie des pierres qui étoient au-deflous , & peut-être le plancher aux environs: par-là cette humidité devenoit une efpèce de conduéteur qui tranfmettoit apparemment au bafilic une partie de la foible électricité que le plancher ou la- muraille recevoient. Enfin cette életricité s'y confervoit, parce que la pierre sèche des environs: l'ifoloit pour ainfi dire: on fait que la pierre ne tranfmet pas l'électricité comme l'eau ni les métaux. Les hifloires font pleines de récits racontés comme merveilleux , qui le font bien moins qu'une foule de faits électriques. Le détail de cette expérience a été envoyé par le Père Conrat lui-même à M. l'abbé Nollet. Li . Les Aurores boréales complètes fontrares; il y-en a peu où Von voie raffemblés tous les effets finguliers qui font de cetté efpèce d’aurore boréale un fi beau fpefacle: cependant en Suède où ce phénomène eft beaucoup plus fréquent que dans les parties plus méridionales de l'Europe, celles-ci doivent y étre moins rares, en. voici une qui a-été obfervée à Upfl par M. Thorbern-Bergman, de Îa Société Cofmographique de cette ville, &: dont il a envoyé la defcription à M. l'abbé Nollet qui la communiquée à l'Académie. Le 4 Février, nouveau ftyle, vers les cinq heures du foir, par un beau clair de Lune, cette planète étant déjà entrée dans fon premier quartier, on vit à Upfl une Aurore boréale complete , comme les appelle l'illuftre M. de Mairan, & quine. difléroit point de celle qui eft repréfentée dans la planche A. E if, 38 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYALE de fon Zraité de l'Aurore boréale. La diflance. au zénith defa couronne qu'avoit cette aurore, varia beaucoup ; d’abord elle en parut peu éloignée , enfuite elle s'en écarta jufqu'aux environs de 20 degrés; enfin elle s'en éloigna vers le fud-eft de so degrés. I partoit de cette couronne un nombre infini de rayons dirigés vers l'horizon ; cependant ils étoient en plus petit nombre vers le fud - eft que dans toutes les autres parties du ciel : elle parut d'abord d’une couleur rougeître au levant & au couchant , enfuite moins vive & après fort affoiblie; enfin elle s'évanouit entre fept & huit heures : mais à neuf heures & quelques minutes, la matière de ce phénomène parut mieux raflemblée vers le Pole, & forma un fegment obfcur avec quatre arcs lumineux , dont les trois intérieurs étoient parallèles entreux, mais non pas de la même courbure que l'extérieur qui étoit élevé fur l'horizon aux environs de 20 degrés; cependant fa hauteur augmenta encore beaucoup, & le fesment obfcur parut s'enflammer dans plufieurs endroits ; ce phénomène dura jufqu'au milieu de la nuit, en offrant aux yeux une variété admirable de rayons & de colonnes lumineufés qui tendoient au zénith, jufqu'à ce qu'enfin il tourna de plus en plus vers le feptentrion. V. Prefque tont Je monde a obfervé qu'il y a des pluies que le baromètre n'annonce pas; on eft fort furpris de voir des brouillards , de la pluie, en mème temps que cet inftrument marque le beau temps par fa hauteur : mais il paroît que ces brouillards & cette efpèce de pluie n’ont pas les mêmes caufes que les pluies générales, & qui s'étendent à une grande dif- tance. Celles-ci font l'effet des nuages apportés des mers ou des endroits où il y a de grands amas d'eaux , qui ne tombent ou fe réfolvent en pluie, que lorfqu'ils font preflés & accu- mulés par des vents contraires, ou qu'il y a un changement dans fa pefanteur de l'atmofphère: celles-à, ou les pluies qu'on pourroit appeler locales, font vraifemblablement l'effet d'un changement, plutôt dans la température de l'atmofphère, que dans fa pefanteur, On les obferve particulièrement dans Îes Ir, 20 DE SUS IG TEIN CE 39 terrains humides, dans le voifinage des mares, des étangs, des rivières, &c. En effet, dans un jour chaud ,-& par un temps calme, on voit dans ces endroits, & même ailleurs, monter & s'élever un grand nombre de vapeurs ; on l’obferve fenfiblement dans les premiers jours du printemps. Alors fi le beau temps dure quelques jours, & qu'il ne s'élève point un vent capable d'emporter ces vapeurs , dès que la tempé- rature de fair change, elles retombent bientôt en pluie. On voit cet effet arriver fouvent , lorfque des -brouillards s'élèvent dans un temps où la chaleur de latmofphère ne pouvant pas leur communiquer un certain devré de raréfadtion, Ja denfité de leurs parties les fait retomber bientôt après. M. l'Abbé de Sauvages, Correfpondant de Académie, & dont nous avons déjà parlé plufieurs fois, a fait plufieurs obfrvations à ce fujet qu'il a communiquées : il a découvert particulièrement un moyen fort fimple d’obferver: avec facilité l'élévation de ces vapeurs, dont nous venons de parler. Au - devant d’une falle bafle, dont la porte étoit tournée vers le midi, il y avoit par hafard une branche d'arbre dépouïllée de fes feuilles, dont l'ombre foible & légère venoit fe peindre fur la partie du carreau éclairée par le foleil ; il s'aperçut que dans cette ombre, il voyoit celle des vapeurs qui s'élevoient dela terre, & quil les voyoit auffi diftinétement que fr: elles euffent été occafionnées par de-la fumée ordinaire: cette ombre avoit un mouvement très-diftin@ & continu de bas en haut ; fans quoi il neût pu l'apercevoir, & elle étoit beaucoup plus fenfible que ces vapeurs-ou exhalaifons, qu'on voit trembloter en été fur un champ éclairé du foleil. Ici la pénombre que formoit la branche dont nous avons parlé , modéroit l'éclat du foleil qui empêche, dans les endroits où il donne en plein, qu'on puife rien apercevoir : M. l'Abbé de Sauvages ajoute qu'on ne voit ces vapeurs monter que quand la terre eft: humectée, & lorfqu'ikfait un foleil chaud & un temps calme & ferein, particulièrement en hiver, parce qu'alors les particules de ces vapeurs ne font pas affez raréfiées par la chaleur, pour échapper par leur finefle aux yeux de l'Obfervateur: mais ce 4o HisroiRe DE L'ACADÉMIE ROYALE qu'il y a de plus intéreffant dans cette obfervation , c'eft qu'elle nous met à portce, felon M. l'Abbé de Sauvages, de prédire fürement dès la veille, & même par le temps le plus ferein, pourvu que le vent ne vienne point déranger la prédiction, la pluie ou un temps couvert pour le lendemain, ce qui feroit vraiment utile; car, ainfi que nous avons dit, le baromètre n'indique rien de bien certain par rapport au temps qu'il doit faire, qui dépend de ces circonftances locales. Il feroit fort à defirer pour la Phyfique qu'on püt découvrir un inftrument qui fuppléät en cela au baromètre d'une manière füre. V LL Des Pêcheurs occupés à prendre du thon près du port de Cette, trouvèrent leurs filets plus pefans qu'à l'ordinaire; en les retirant , ils y virent un poiffon monftrueux , ayant entre la tête & le gros du.corps, cinq grandes membranes en forme de capuchon , comme on le peut voir dans la figure, qui lui firent donner le nom de Moine : au-deflous de ces membranes étoient des ouvertures par où l'eau entroit & reflortoit avec impétuofité; fa peau étoit rude , écailleufe & tranchante comme célle du chien de mer. Il avoit vingt-deux pieds de longueur & dix-fept pieds de circonférence dans la partie de fon corps la plus large. Sa tête avoit quatre pieds de long feulement, avec un mufeau ou groin qui savançoit de plus d'un pied au-delà de la gueule, qui étoit trèsdarge, & formée en croiflant en deflous : elle étoit garnie de dents très-petites & très-aigues, peu faillantes, & femblables aux flries d’une lime à bois + les narines étoient au bout du mufeau & en deflous ; fes yeux peu proportionnés à fa grandeur n’avoient qu'un peu plus d’un pouce de diamètre : la largeur des cinq membranes détachées & flottantes étoit de plus de deux pieds ; & les ouïes cachées au- deffous de ces membranes , étoient garnies de barbes flexibles qui faifoient une efpèce de grillage : il avoit trois nageoires de chaque côté & deux éminences fur le dos, ainft qu'il eft marqué dans la figure ; enfin on eflima par len- foncement de la barque qui le portoit, qu'il peloit, RAS nl ut aa. so: ll Hérroire de Ule. R der fe 1750. Pas 40.Plx LE MOINE Monstre Marui, ayant 22 pied de long ur 17 de circonferencen Pris & Celle le 24. Avril 1760. k | DES SCIENCES 4T fat tiré de la mer, au moins cinquante quintaux, Quand on le tira à bord, on lui trouva une douzaine de lamproies attachées fous le ventre, & qu'on n'en détacha qu'avec force. Vrai- femblablement ce poiffon étant devenu très-cros ou malade, fe trouva hors d'état de fe garantir des famproies qui le füçoient & des Pécheurs qui le tirèrent à bord. M. Ribar, de l'Aca- démie de Béfiers, & Directeur du canal royal à Agde, a vu & defliné ce poiffon dans cette ville lorfqu'on l'y apporta de Cette; & c'eft à lui que nous fommes redevables de lasde£ cription que M. Bouillet, de la même Académie, a envoyée a M. de Mairan. Cr année parurent trois Lerwres de M. de Mairan Vs au R, P. Parrenin, Miffionnaire de la Compagnie de Jéfus a Pékin, contenant diverfes queffions Jur là Chine : ces lettres écrites depuis 1728 jufqu'en 1736 ( & qui furent jugées dignes d’être lües dans les affemblées de l'Académie, * méri- toient par toutes les queftions intéreffantes qu'elles renferment, d'être imprimées : mais M. de Mairan qui avoit réfifté autre- fois aux inftances du P. du Halde ( alors Éditeur des Lettres édifiantes) qui le follicitoit de les publier, ne fe feroit peut- être jamais déterminé à les faire paroître, fans ane nouvelle occafion à laquelle il ne pouvoit f refufer. M.° l'Abbé Barthélemy & de Guignes, de l Académie royale des Inf- criptions & Belles-Lettres, venoient de faire des découvertes importantes {ur l'écriture Phénicienne, Égyptienne & Chinoile:- il réfultoit particulièrement de celles de M. de Guignes, que es Chinois étoient une colonie des Égyptiens; ces Meffieurs, faichant que dans {es Lettres au P. Parrenin, M. de Mairan avoit fait voir par un parallèle fuivi , qu'il fe trouvoit une grande conformité entre es mœurs & les coutumes des Chinois &, des anciens Égyptiens, furent les premiers à le folliciter de donner ces Lettres au public; il ne put réfifter à ces nouvelles inftances; il fallut fe rendre. Rien en effet ne pouvoit avoir plus de rapport avec la découverte de M. de Guignes, que ce parallèle de M. de Mairan entre les Chinois Afe 1759. ; F * Vivez PHif de 1732 42 HisToiREe DE L'ACADÉMIE ROYALE & les Égyptiens, & il étoit très-intéreffant de pouvoir dans ce moment parcourir & fuivre tous les traits de reffemblance qu'il avoit trouvés entre ces deux DA près de trente ans auparavant. C’eft un beau fpeétacle que la variété 2 odigieufe des mœurs & des coutumes des différens peuples de l Dates Mais s’il eft intéreffant d'examiner comment les mêmes caufes , les befoins & les paflions ont pu produire chez ces peuples des efets fi différens , il ne left pas moins d'obferver comment deux peuples habitant un climat différent , féparés par tant de fiècles , & parun efpace de terre fi vafte , ont tant de chofes communes ; on né peut alors prefque fe difpenfer de leur accorder la même origine. Tel eft l'effet qui réfulte du parallèle curieux de M. de Mans entre les anciens Égyptiens & les Chinois, & de tous les traits de reflemblance qu'on y obferve, entre les coutumes, les mœurs, l'écriture, &c. de ces deux peuples. C'étoit un prodige chez les Égyptiens qu’ une coutume nouvelle; les Chinois ont un attachement inviolable pour les leurs. Le refpect extrème pour les pères, pour les Rois & pour les vieil- trs qui fe perpétue envers leurs corps inanimés, étoit égale- ment recommandé & pratiqué chez les deux nations. L'Égypte fut accufte de n'être pas guerrière ; on fait que les Chinois ont té fubjugués plufieurs fois par leurs voifins. Elle fut célèbre par fon amour pour les Sciences, & füur-tout pour l'Aftronomie ;. la Chine a la même réputation. Les Égyptiens avoient une écriture hyéroglyphique, nullement deftinée à repréfenter la Langue parlée, & ils étoient à cet égard les feuls peuples connus chez qui l'on obfervât cette différence; les Chinois font dans le même cas, car on ne peut douter que les Japonois, les Coréens & autres, chez qui ia même cfpèce d'écriture eft en ufage, ne la tiennent de ce peuple. Il y avoit en Égypte la fête des lumiéres : les Chinois ont une fête célèbre des lanternes. Nous ne finirions pas, fi nous voulions rapporter tous les traits de conformité que M. de Mairan remarque entre les Égyptiens & les Chinois ; il en trouve jufque dans leurs phyfionomies : - quelques figures antiques de T Egppte , dit-il, ont rappelé , DES SCIENCES. 43 les phyfionomies Chinoifes ; ces yeux fendus un peu con- vergens de haut en bas vers le nez. À Vafpect de tant de chofes communes entre les Foyptiens & es Chinois, on ne peut prefque pas fe défendre de leur fuppoker, comme nous l'avons dit, fa même origine: mais auquel de ces deux peuples appartient le droit d'aînefle, ou lequel a porté chez l'autre fes loix , fon écriture & fes ufages ? c'eft ce qu'il eft très- difficile de déterminer, & fur quoi on ne peut raffembler que des préfomptions, quiparoiffent toutes, à la vérité, en faveur des Égyptiens. Diodore de Sicile rapporte que Séfoflris dans une expédition qui dura neuf ans, %e Joumit pas Jeulement tous les pays fubjugués après lui par Alexandre, mais qu'il pale Le Gange; & il ajoute formellement que «œ Prince parcourut toutes les Îndes jufqu'à l'océan. Si cet océan étoit celui qui baigne les côtes orientales de Ja Chine, ce Prince aüra pénétré dans ce royaume, il aura pu y laifler une colonie ou des troupes qui. auront communiqué aux Chinois leurs mœurs & leurs ufages, &c. D'ailleurs on ne trouve dans l'ancienne hiftoire des Chinois, aucune trace de leur communication au dehors avec l'Egypte, aucune mention d'un Prince qui foit forti de fes États, & qui ait porté fes armes dans une contrée {1 éloignée : il réfulteroit donc de cet expolé que la com- munication des Égyptiens avec les Chinois s'eft faite par ces premiers, tranfportés à la Chine ; enfin, que ce font eux qui ont tranfmis leurs loix, leurs mœurs, &c. aux Chinois ; mais nous nous garderons bien de prononcer {ur une queflion que M. de Mairan a laiffé indécife. Ce parallèleentre les Chinois & fes Égyptiens, n’eft pas a feute chofe curieufe que renferment les Lettres de M. de Mairan: elles contiennent encore nombre de queftions & de difcuffions fur l'authenticité des anciennes hifloires de la Chine, fur le génie de fes peuples pour les Sciences, leur favoir en Aftronomie, &c. & enfm fur plufieurs autres fujets, non moins intéreffans. Les anciennes hifloires de la Chine font remplies de cir- conflances qui les rendent bien fufpectes à M. de Maïran, au moins dans Le détail; car en gros & pour la durée de { Fi 44 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE l'empire Chinois, il ne lui paroït pas que les auteurs les mieux inftruits laient révoquée en doute. On a effedivement de la peine à croire qu'au milieu de la viciflitude de tant de fiècles, des guerres civiles & étrangères, que les Livres, ces monumens de l'hifloire Chinoiïfe, aient été épargnés : monumens d'ailleurs fr peu durables par eux-mêmes, & qu'on dit pourtant fe conférver encore aujourd’hui depuis quatre mille ans. Mais f, comme on-nous Faflure, l'hiftoire Chi- noife étoit toute fondée fur des obfervations aflronomiques , fur des éclipfes, des conjonétions de Planètes, &c. elle paroitroit à l'abri de ces révolutions ; il fembleroit au moins qu'on ne pourroit attaquer la date des époques de cette hif- toire, fi on l'attaquoit fur le détail & a nature des faits: cependant il y a tout lieu de regarder encore plufieurs de ces époques, & la chronologie qui en réfulte, comme fufpeéles. Cela paroifloit d'autant plus vraifemblable à M. de Mairan, que l'illuftre Jean-Dominique Caffini , ayant calculé la fameufe conjonction des cinq Planètes, que l'on difoit que les annales de la Chine plaçoient fous le règne de l'empereur Zchouen-Hyo, plus de deux mille cinq cents ans avant Jéfus-Chrif; ce grand Aftronome trouva qu'elle avoit dû arriver cinq cents ans plus tard que ne le marquent ces annales ; il eft vraï que M. Kirch, Aftronome de Berlin, qui avoit auffi calculé cette conjonction, prétendoit qu'elle étoit arrivée précifément dansle temps qu'elles indiquoient. Mais le P. Parrenin apprit à M. de Mairan par fes réponfes, qu'il n’étoit point park de cette conjonction dans les annales Chinoifes, qu'il n’en étoit fait mention que dans le commentaire; que de plus un Aftronome Chinois difoit pofitivement qu'elle étoit feinte, & enfin que les: Mandarins des Mathématiques ne { faifoient point de fcrupule, de fup- pofer de faufies conjon@ions, fur-tout au renouvellement ou changement de dynaflie. Uhe conjonétion de quatre Planètes, arrivée la feconde année du règne de l'Empereur qui étoit fur le trône, lorfque ces Lettres furent écrites, fuffit aux Mandarins pour en faire une de cinq en faveur du nouveau règne ; on fit en conféquence des complimens de DRENSIMO ENT. E NYC ES toutes parts à l'Empereur, qui s’en réjouit, & le Tribunal ne Mathématiques en profita. Tout ce détail montre combien M. de Mairan étoit fondé à foupçonner f'exaétitude de ces époques fixées par l’Aftronomie Chinoife. Lorfqu'on entend parler de ce Tribunal des Mathématiques, de ce nombre de Mandarins occupés depuis tant de fiècles, par l'État, à l'obfervation & à l'étude des mouvemens céleftes, on ne peut fe défendre de concevoir une grande idée de l’Aftronomie & des Mathématiques chez les Chinois; mais lorfqu’on eft mieux inftruit, cette illufion difparoïit bientôt. On eft tout étonné que quelqu'intérêt que tous ces Mandarins aient eu à perfec- tionner ces Sciences, ( car ils ont fouvent payé de leur vie leur ignorance en Aflronomie ) ils n'y aient fait qu'un très- médiocre progrès. Les Chinois furent furpris d'admiration , lorfqu'ils virent les Elémens d'Euclide , traduits dans leur Jangue ; ils connoïifloient à peine la démonflration, cette marche de Fefprit, par laquelle, en pañlant des chofes évidentes à des chofes aufli vraies, mais moins évidentes, on parvient, par une chaine de propofñtions , à des vérités fort abftraites & très-éloignées de la première dont on-étoit parti; rien ne fe propoloit chez eux que par la pratique. La Navigation, la Géographie , compagnes de P Aftronomie , étoient encore bien moins avancées chez eux. Toutes ces confidérations & nombre d'autres , que nous fommes obligés de fupprimer, font dire à M. de Mairan avec raifon, que le génie des Chinois, très- eftimable d'ailleurs, eft fort inférieur à celui des Européens, & qu'ils favent peu inventer ou perfeétionner; & ce jugement des Chinois eft encore confirmé par le P. Parrénin. Le génie de l'invention, qui fait faire des progrès fi rapides à nos connoif fances, eft donné à peu de Nations ; Ja plupart ne favent qu'imiter; c'eft un talent que la Nature donne, même aux hommes les plus fimples ; mais cette force de l'efprit qui fait que, s’'élançant hors de la fphère des idées ordinaires, on s'élève à des idées nouvelles & inconnues, eft prefque le partage unique des Européens. On difpute depuis Jong-temps {ar l'antiquité du monde, & F ïij 46. HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE on compte environ foixante-quinze fyftèmes fur la date de fa création, tous tirés des Livres faints : tant de fyftèmes ne peuvent que prouver beaucoup d'incertitudes. M. de Mairan penfe qu'on ne peut, à ce fujet, s'empêcher de fe rapprocher de la Chro- nologie des Chinois, en adoptant la Chronologie des Septante; encore ce monde, felon 1 QI TT TITI) ETES AT ORNITHOLOGIE. | as année M. Briflon publia un ouvrage qui a pour Lu titre Ornirhologie. L'ornithologie comprend là defcription de toutes les efpèces d'oifeaux connues & rangées par ordres, lefquels font divilés en genres, & lés genres en éfpèces, avec tous les caraétères qui les diftinguent les unes des autres. Les pattes & les becs, font les parties qu'on a choifies pour _établir ces caraétères. Le nombre des doigts, leur pofition, leur féparation ou leur réunion entreux, les'mémbranes qui les joignent enfemble, où le défaut de ces mêmes membranes font autant de caraétères qui ont fervi à faire les grändes & premières divifions: les fous - divifrons font défignées par les différentes formes du bec; les autres particularités déter- minent le genre: enfin la différence des couleurs diftingue les efpèces. c L'ouvrage commence par lexpofition de la méthode que l'ona fuivie. On y voit que l'ouvrage entier éftdivifé en vingt-fix ordres, qui contiennent cent quinze genres , fous lefquiels font rangées environ quinze cents éfpèces où variétés. À la fuite de cette expofition viennent différentes tables méthodiques, dont la première prélente fous un feul afpect les caractères dés vingt-fix ordres, pour chacun defquels eft enfüuite une table particulière, dans laquelle chaque ordre fe trouve divifé’ en feétions & les feétions en genres, avec tous les caractères qui les défignent. Pour ce qui eft de la différence fpécifique, elle eft exprimée dans une phrafe latine qui précède la def- cription de chaque efpèce. De tous les oïfeaux, les uns ont les doigts dénués de mem- branes: c'eft pour cela qu'on leür à donné le nom de ffpedes ; les autres ont les doigts garnis de membranes dans toute leur longueur, & font appelés pa/mipédes. G ji HisTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Parmi les ffipcdes, les uns ont les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, les autres ont la partie inférieure des jambes dénuée de plumes: ceux des fiffipédes qui ont les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, ont tous quatre doigts; mais les uns les ont tous féparés jufqu'à leur origine. ou environ, & les autres ont Île milieu des trois antérieurs étroitement uni au doigt extérieur jufqu’à la troifième articu- lation, & au doigt intérieur juqu'à la première, comme le martin - pécheur. Parmi ceux qui-ont tous les doigts féparés, les uns en ont trois devant & un derrière, & les autres en ont deux devant & deux derrière, comme les perroquets. De ceux qui ont trois doitgts devant & un derrière; les uns ont le bec droit , le bout du demi - bec fupérieur un peu renflé & courbé, & les narines à demi couvertes d'une membrane épaifle & molle: tel eft le pigeon; d’autres ont le bec en cone courbé, comme le cg ; d'autres ont le bec court & crochu comme lépervier., le chat - huanr & les autres oifeaux de proie : d'autres ont le bec en cônealongé, comme le corbeau ; d'autres ont le bec droit & les bords de la mandibule fupé- rieure échancrés vers le bout, comme la pie-grièche & la grive ; d'autres ont le bec droit & les deux mandibules entières , comme léfourneau ; d'autres ont le bec menu & un peu courbé en arc, comme la /upe ; d’autres ont le bec très-petit, comprimé horizontalement à fa bafe, & crochu à fon extré- mité, & ouverture du bec plus farge que la tête, comme le tette-chèvre & Vhirondelle ; d'autres ont le.bec en cône rac- courci, comme le soineau ; d'autres ont le bec en alène, comme le becfigue ; d'autres ont le bec en forme de coin, comme le orche-por ;. d'autres enfin ont le bec efflé, comme le grienpereau & le colibry. Parmi ceux des fiffipédes qui ont la partie inférieure des jambes dénuée de plumes, les uns ont les ailes très - petites à proportion de la groffeur de leur corps, & ces ailes leur font tout-à-fait inutiles pour Le vol: tels font l'awruche & le cafoar ; es autres ont les aïles aflez grandes & propres pour le vol: de ces derniers les uns ont trois doigts devant, & DES S'CchE Nice s n'en ont point derrière, comme lowrarde & le plivier ; les autres ont quatre doigts; favoir, trois devant & un derrière, comme le vannean, la beccaffe , le héron, &c.. Parmi les palmipédes , les uns ont les doigts garnis de mem- branes fendues, comme la poule- d'eau, la foulque ; d'autres ont les doigts garnis de membranes demi -fendues, comme la vrébe ; d'autres enfin ont les doigts garnis de membranes entières : de ces derniers, les uns ont les jambes placées tout- à-fait derrière & cachées dans l'abdomen ; les autres ont les jambes avancées vers le milieu du corps & hors de l'abdomen. Parmi ceux qui ont les jambes placées tout-à-fait derrière, & cachées dans f'abdomen, les uns ont trois doigts devant, tous joints enfemble par les membranes, & n'ont point de doigt de derrière, comme le gwllemot , le pingoin , & es autres ont quatre doigts, dont les trois: antérieurs font joints enfemble par les membranes, & le poftérieur eft féparé, comme le plongeon; de ceux qui ont les jambes avancées vers le milieu du corps & hors de l'abdomen, les uns les ont plus courtes que le corps, & les autres les ont plus longues que le corps. Parmi ceux qui ont les jambes plus: courtes que le corps, les uns ont trois: doigts devant, tous joints enfemble par les membranes, & n’ont point de doiat derrière, comme la barros ; les autres ont quatre doigts: de ces derniers, les uns: ont trois doigts devant, joints enfemble par les membranes, & le poflérieur féparé; les autres ont les quatre doigts tous. joints enfémble par les membranes, tels font le paille-en-cul, le cormoran, le pélican. Parmi ceux qui ont trois doigts devant,. joints enfemble par les membranes, & le poftérieur: féparé ; les uns ont le bec fans dentelures, comme le goiland, l'hiron- delle-de-mer ; es autres ont le bec dentelé, comme l’#ark, le canard: enfin ceux des palmipedes qui ont les jambes plus- longues que le corps, ont quatre doigts, dont les trois an- térieurs font joints enfemble par les membranes, & le pof- térieur eft féparé, tels font le amant & V'avocerte. - Toutes ces différences font celles dont on s'eft fervi pour: carackérifer les vingt-fix ordres dans lefquels. l'ouvrage eft ii HisTOIRE DE L’'ACADÉMIE ROYALE. divifé. Les deux premiers volumes dont nous avons à rendre compte, contiennent les huit premiers ordres; favoir , celui des pigeons, celui des cogs où poules , celui des oifaux de proie, celui des corbeaux, celui des grives , celui des fourneaux, celui de la Aupe & celui des hirondelles. Le premier ordre ne contient qu'un feul genre, qui a pour caractère d'avoir quatre doigts dénués de membranes , trois devant & un derrière, tous féparés environ jufqu’à leur origine ; les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon; le bec droit, le bout de la mandibule füpérieure un peu renflé & courbé, & les naïines à demi couvertes d'une membrane épaifle & molle, tels font les pigeons. Ce premier genre contient la defcription de quarante - quatre efpèces & dix-huit variétés, avec dix-huit efpèces gravées, Dans le fcond ordre font compris tous les oifeaux qui ont quatre doigts dénués de membranes, trois devant & un derrière , tous féparés environ jufqu'a leur origine; les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, & le bec en cône courbé: les oifeaux de cet ordre font divifés en deux fections ; dans Ia première, font ceux qui ont la tête ornée de membranes charnues, & dans la feconde, ceux qui ont fa tête dénuée de ces membranes. Ceux de la première fection fe divifent en trois genres, qui fe diflinguent entreux par le nombre & a pofition de ces membranes charnues; car les unis ont une membrane charnue, longitudinale, pendante fur la gorge, comme le dndon: ce genre contient la-defcription de deux efpèces & deux variétés, avec une feule efpèce gravée. D’autres ont deux membranes charnues, longitudinales , pendantes fous la gorge, & une crête membraneufe fur le front, comme le cog: ce genre contient la defcription de fix efpèces & fix variétés, avec deux efpèces gravées. D'autres enfin ont deux mémbranes charnues, longitudinales, pendantes à côté de l'ouverture du bec, &c une corne conique fur le front , comme la pintade : ce genre contient la defcription d’une fule efpèce & d'une variété, avec la gravure de cette efpèce, Les oifeaux de la feconde feétion fe divifent auffi en trois genres, dont ) pi ESS Ci EIEU NRC: E, Se les caraétères font tirés des pieds & de la queue; car les uns ont les pieds couverts de plumes, comme la gehnorte : ce genre contient la defcription de douze efpèces & une variété, avec la gravure de quatre efpèces, dont deux ont Jeurs femelles. Les autres ont les pieds nus : parmi ces derniers, les uns ont la queue courte, comme la yrdrix, Les autres ont la queue longue, comme le faifan; le genre de fa perdrix contient la defcription de vingt -une efpèces & quatre variétés, & neuf efpèces gravées; celui du faifan contient {a defcription de feize efpèces & cinq variétés, avec la gravure de cinq efpèces & une variété, \ Dans le troifième ordre font compris tous les Oifeaux qui ont quatre doigts dénués de membranes , trois devant & un derrière, tous féparés environ jufqu'à leur origine, les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, & le bec court & crochu, tels font tous les oif£aux de proie, tant diurnes que nocturnes : les oifeaux de cet ordre font divifés en deux feGtions, dans la première font ceux dont la bafe du bec eft couverte d’une peau unie, tels font les oifeaux de proie diurnes:; & dans ka deuxième, ceux dont la bafe du bec eft couverte de plumes tournées en devant, tels font les oifeaux de proies nocturnes :. ceux ue la première fection fe fubdivilent en trois genres, qui fe diflinguent entr'eux par la. courbure du bec & la couverture de la tête; car dans les uns la courbure du, bec commence dès: fon origine, comme dans l'éervier: ce genre contient la def cription de trente-fix efpèces & dix-fept variétés, avec la gravure de cinq efpèces & d’une variété ; & dans les autres, elle ne commence qu'à quelque diftance de fon origine. Parmi ces derniers, les uns ont la tête couvertes de plumes, comme l'aigle ; les autres ont l tête ou nue ou feulement couverte de duvet, comme le vaurour. Le genre de Y'aigle contient la defcription de quinze efpèces avec la gravure de deux efpèces ; celui du vautour contient la defcription de douze elpèces, &c une feulé efpèce gravée. Les oifeaux de la feconde fe&tion fe fubdivifent en deux genres : es uns ont Ja tête ornée de paquets de plumes en forme d'oreilles, comme le Aibou , & les autres: "6 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE ont la tête dénuée de ces paquets de plumes, comme le char- huant : le genre du hibou contient la defcription de neuf efpèces & trois variétés, avec une feule efpèce gravée; celui du chat- Han contient la defcription de onze efpèces, & la gravure d'une feule. Dans le quatrième ordre, font compris tous es oifeaux qui ont quatre doigts dénués de membranes, trois devant, une derrière, tous féparés environ jufqu'à leur origine, les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, & le bec en cône alongé. Les oifeaux de cet ordre fe divifent en deux feions, dans la première, on comprend ceux dont les plumes de la bafe du bec font tournées en devant, & couvrent les narines: & dans la feconde, ceux dont les plumes de la bafe du bec font tournées en arrière, & laiffent les narines à découvert : ceux de la première fection fe fubdivifent en cinq genres , les uns ont le bec un peu courbé en arc, comme le coracias ; ce genre contient la defcription de deux efpèces, avec une feule efpèce gravée. D'autres ont le bec droit, & dont le bout eft un peu tourné vers le bas, & parmi ceux-ci, les uns ont les plumes de la queue à peu - près d'égale lon- gueur, comme le corbeau ; & les autres ont les plumes du milieu de la queue beaucoup plus longues que les latérales, comme la pie: le genre du corbeau éontient la defcription de dix efpèces & de fix variétés, avec la gravure de trois efpèces ; celui de la pie contient la defcription de fix efpèces & d'une variété, avec la gravure d’une efpèce & d'une variété, D'autres enfui ont le bec tout-à-fait droit ; de ces derniers, les uns ont les deux mandibules égales, comme le geai ; & les autres ont li mandibule fupérieure plus longue que l'inférieure, & obtufe comme le caffe-noix : le genre du geai contient la defcription de quatre elpèces & d'une variété, avec deux efpèces gravées ; celui du caffe-noix ne contient la defcription que d'une efpèce, avec la gravure de cette efpèce. Les oifeaux de la féconde fection fe fubdivifent en trois genres : les uns ont le bec droit, & dont lé bout eft un peu tourné vers le bas, comme le ro/her : ce genre contient la defcription de dix elpèces, avec cinq efpèces +, IFEN Fev. LE ÿ in 24 - + TPE | | di: RUN MIDÉENSANISUCER INC EIE S7 efpèces gravées. D'autres ont le bec droit & très-pointu , comme le roupiale ; ce genre contient la defcription de trente efpèces, avec la gravure de treize. D'autres enfin ont auffi le bec droit & très-pointu, mais un peu comprimé par les côtés ; ils ont de plus au-deflus de fa queue deux plumes plus longues que tout l'oifeau, & qui n'ont des barbes qu'à leur origine & à leur extrémité, tel eft l'oÿf£au-de-paradis : ce genre contient la defcription de deux efpèces, avec la gravure de ces deux efpèces. Dans le cinquième ordre, font compris tous les Oifeaux qui ont quatre doigts dénués de membranes, trois devant, & un derrière , tous féparés environ jufqu'à leur origine, les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, le bec droit, les bords de la mandibule fupérieure échancrés vers le bout ; & les oifeaux de cet ordre fe divifent en deux feétions, dans 1 la première, on comprend ceux qui ont le bec convexe en deflus; & dans la feconde, ceux dont le bec eft comprimé horizontalement à fa bafe & prefque triangulaire. Ceux de la première fection fe fubdivifent en trois genres ; les uns ont le bec aufli épais que large à fa bafe ; & parmi ceux-ci, dans les uns le bout de la mandibule fupérieure eft crochu , comme dans la pie-grièche ; & dans les autres le bout de la mandibule fupérieure eft prefque droit, comme dans la grive : le genre . de la pie-grièche contient la defcription de vingt-fix efpèces & d'une variété, & dix-huit efpèces gravées; celui de la grive contient la defcription de foixante-quatre efpèces & de huit variétés , avec la gravure de trente-trois efpèces; les autres ont le bec plus large qu'épais à fa bale, comme la coringa : ce ‘genre contient la defcription de dix efpèces, dont cinq font # gravées. Les Oifeaux de la feconde fection ne compofent qu'un ful genre, qui eft celui du gobe-mouche ; ce genre contient la æ defcription de trente-fept efpèces, & la gravure de vingt-quatre. +. Dans le fixième ordre, font compris les Oifeaux qui ont quatre doigts dénués de membranes, trois devant & un der- _ rière, tous féparés environ jufqu'à leur origine, les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, le bec droit, & les à à Hi. 1759. * 58 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE Royare deux mandibules entières : les Oiïfeaux de cet ordre fe divifent en deux fections , dans la première, on comprend ceux qui ont le bec prefque quadrangulaire, un peu convexe en deflus & anguleux en deflous ; & dans la feconde, ceux dont le bec eft convexe, fon bout étant un peu plus large qu'épais & obtus : Ceux de la première feétion ne compofent qu'un feul genre, qui eft celui du pique-bæuf ; ce genre ne contient la defcription que d’une feule efpèce avec fa gravure : Ceux de la feconde feétion ne compofent auffi qu'un feul genre, qui ef celui de l'éourneau ; ce genre contient la defcription de quatre efpèces & de quatre variétés , avec la gravure de deux efpèces. Dans le feptième ordre, on comprend tous les Oifeaux qui ont quatre doigts dénués de membranes, trois devant & un derrière, tous {éparés environ jufqu'à leur origine, les jambes couvertes de plumes jufqu'au talon, le bec menu & un peu courbé en arc; les Oifeaux de cet ordre fe divifent en deux fections, dans la première, font ceux qui ont la tête ornée d'une hupe longitudinale, compofée d’un double rang de plumes, & que l’oifeau peut plier à volonté; & dans la feconde, ceux qui ont la tête fimple: Ceux de la première fetion ne com- pofent qu'un feul genre, qui eft celui de là hype, & qui ne contient la defcription que d'une feule efpèce, avec la gravure de cette efpèce : Ceux de la féconde fetion ne compofent auffi qu'un feul genre, qui eft celui du promerops ; ce genre contient la defcription de cinq efpèces, avec la gravure d'une feule. Dans le huitième ordre, font compris tous les Oifeaux qui ont quatre doigts dénués de membranes , trois devant & un derrière, tous féparés environ jufqu'à leur origine, les jambes couvertes de plumes jufqu’au talon , le bec très-petit, comprimé horizontalement à fa bafe & crochu à fon extrémité, & l’ou- verture du bec plus large que la tête. Les oifeaux de cet ordre forment deux genres, qui fe diflinguent entr'eux par la forme de la queue; car les uns ont la queue fimple, comme le rerre- chevre , & les autres ont lx queue fourchue comme l'#irondelle ; le genre du zette- chèvre contient la defcription de fept efpèces, avec la gravure d’une feule; celui de lhirondelle contient la D'E SAS VCONN EN CES s9 defcription de dix-ept efpèces & d'une variété, avec la gravure de fept efpèces. Le plan qu'on a fuivi pour chaque defcription eft le même pour toutes, c'eft-à-dire, qu'on les commence &.les finit toutes de la même façon; on décrit d’abord les grandeurs & les proportions de l'oifeau , enfüite fes couleurs, commençant pa da tête & finiffant par la queue: cela produit, il eft vrai, une monotonie, qui deviendroit infoutenable dans un Ouvrage fait pour être 1à de fuite ; mais dans celui-ci cet inconvénient ceffe d'en étre un, parce que chaque defcription eft en quel- que façon un ouvrage à part & indépendant de tout le refte. Au contraire même, cette uniformité procure un avantage réel, qui eft celui de pouvoir aifément comparer une efpèce avec une autre, & voir du premier coup d'œil en quoi elles diffèrent l’une de Fautre : à la fin de chaque defcription on indique le pays où l'on trouve loifeau décrit. Pour donner les moyens de s’inftruire en fort peu de temps de tout ce qui a été écrit fur tel ou teloifeau, on fait précéder les defcriptions par les indications de tous ee Auteurs qui en - ont parlé, & de toutes les figures qui en ont été données, en avertiflant de l'exactitude ou du défaut de ces mêmes figures ;' on ya aufii ajouté tous les noms que donnent à chaque efpèce les différentes Nations, ainfi que les noms * vulgaires. Des deux cents RAAENE planches, dont cet Ouvrage eft enrichi, & qui font très-bien exécutées , les fept premières font deflinées à repréfenter les différentes formes des pattes & des becs des Oïfeaux, qui {ont les parties dont on a tiré es caractères ; les autres contiennent cinq cents quatre-vingt. douze oifeaux , deffinés & gravés d'après nature , dont près de quatre cents ne l'avoient jamais été ; & de ces quatre cents, plus de trois cents cinquante n'avoient pas même été décrits: pi. lorfque les oifeaux fe font trouvés affez petits pour permettre _ de les coñferver fur la planche dans leur grandeur naturelle, ils n’ont point été réduits; les autres Font été dans des pro- portions exactes de toutes leurs parties, & chacun a fon échelle, À H ij 60 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE au moyen de laquelle on peut voir aifément quelle’ eft Ja grandeur réelle de l'animal. A la fin de chaque Volume, on trouve une Table des Oifeaux contenus dans ce Volume, & placés fuivant l'ordre dans lequel ils font rangés dans l'ouvrage; celle-ci eft fuivie par une Table alphabétique de tous les noms François, Latins, Hébreux, Grecs, ltaliens, Allemands, Anglois, Suédois, &c. qui {e trouvent épars dans l'ouvrage : cette Table, qui renvoie au genre & à l'efpèce auxquels appartient le nom que l'on cherche, peut faire l'ofice d’un Dictionnaire de toutes les Langues pour ce genre de Science, DES SCIENCES. 6: 10000000000000000000000I ANATOMIE. SUR LES CHAUVE-SOURIS. O N ne peut obferver la marche de la plupart des Sciences, V. les Mém. qu'on n'y retrouve ce défaut de notre efprit, qui fait P* 374 que nous nous’occupons fouvent par préférence des objets qui nous font étrangers, ou qui nous viennent de loin, & que nous dédaignons ceux qui nous environnent ; il femble que les chofes les plus fingulières , dès qu'elles font à notre portée, perdent cet attrait qu'eût excité en nous ‘un mouvement . de curiofité fi vif, s’il avoit fallu furmonter de grandes diffi- cultés pour les voir ou pour les obtenir, M. Daubenton remarque avec raifon que les Naturalifles n'ont point été exempts de ce défaut, que par-là ils ont, à la vérité, agrandi le champ de la Science qu'ils cultivent, mais qu'ils en ont amaigri le fonds, n'ayant pas acquis affez de connoiffances fur chacun des objets qui le compolent. Eneffet, on ne peut pas toujours acquérir des connoiffances bien approfondies fur les productions de la Nature qui nous font apportées de loin, par la difficulté de les avoir bien confervées , & de pouvoir les confidérer dans leurs différens états, pendant que celles que nous trouvons autour de nous, nous offrent toutes les facilités poffibles pour les bien examiner. M. Daubenton, en s'écartant de la route ordinaire & en s'appliquant à connoître les animaux de ce royaume, n'a point perdu fes péines car il eft parvenu à en découvrir fix efpèces qui avoient échappé aux Naturaliftes, quoique celles des quadrupèdes de France n'aillent qu'à quarante-cinq, & qu'il n'y en ait que cinq ou fix de plus fur les frontières. Dans le Mémoire dont nous rendons compte, M. Dau- benton donne les defcriptions caraétériftiques de fept efpèces de Chauve-fouris de ce pays, dont il en a découvert cinq qui H ii 62 HisToiRE DE L'ACADÉMIE RoyaLr n'étoient pas connues-des Naturalifes ; il y joint auffi des def criptions du même genre, des chauve-fouris des pays étrangers qui font parvenues à fa connoiflance & qui font au nombre de neuf. I! froit impoffible de le fuivre dans les détails où ilentre, fur la figure & les caractères de ces différentes efpèces de chauve-fouris ; il faut les lire dans le Mémoire même, on y fera fürpris de la prodigieufe variété qu'il y a dans ces efpèces de quadrupèdes volans. En effet, quelle différence pour la grandeur & pour la forme, entre la chauve - fouris { de l'ile de Bourbon) appelée le chien -volant, & celle de France que M. Daubenton a nommée la pipiffrelle, dont la première a neuf pouces de long & trois pieds d'envergure, { c’efl-à-dire de la pointe d’une aile à fautre, lorfqu'elles font étendues } & la feconde n'a que quatorze lignes de long, & que fix pouces cinq lignes d'envergure. Si celles de ce pays-ci ne diffèrent pas autant en grandeur, elles n’en ont pas moins des caradtères très - diftinéts & très - reconnoifiubles, comme Tobferve M. Dauberiton. Car les chauve - fouris qu'il appelle la barbaflelle & le fer-a-cheval font très-remarquables, particu- lièrement la première dont le nez large & plat, le chanfrein court & fillonné, & les oreilles grandes & larges forment une figure fi bizarre , que lon pourroit y trouver , ajoute M. Daubenton, wz modele naturel des ma/carons , qui n'ont éé jufqu'à préfent que des charges imaginées par les Deffinateurs. Celle qu'il appelle le fer-a-cheval, n'eft pas moins fingulière, comme nous l'avons dit: car cette chauve - fouris a au-deffus de la lèvre fupérieure & au-devant des narines, une membrane qui fe prolonge en defcendant en arrière en deux branches con- caves en dedans, qui donnent à cette membrane tout-à-fait l'air d’un fer-à-cheval : c’eft cette fingularité qui a déterminé M. Daubenton à lui donner ce nom, perfuadé avec raifon qu'on ne confondra jamais le fer-4-cheval ( animal quadrupède volant } avec une table, un efcalier en fer-à-cheval. M. Daubenton { à ce fujet, & par rapport aux noms qu'ila donnés à ces différentes efpèces de chauve-fouris } fait plufieurs obfervations très - judicieufes fur les principes qui doivent nous DIE SUNOLCRLE NiChE IS 63 guider lorfque nous voulons impofer des noms à des objets nouveaux. En effet, fi ce nom doit être de nature à éviter les équivoques, & à ne devoir pas être changé par la fuite, en cas qu'on découvre quelque individu du même genre, & qui foit plus grand, ou qui ait la même propriété plus marquée ; il n'eft pas moins à defirer cependant qu'il nous rappelle l’idée du genre, ou qu'il fe rapporte à quelque idée familière : car toutes nos idées fe tiennent beaucoup plus que nous ne l’imaginons, & l'on feroit tout étonné, fr l'on pouvoit s'en apercevoir, de la force que nous donne l’analogie pour en acquérir denouvelles & pour les conferver. M. Daubenton ne fe contente pas dans ce Mémoire d'é- tablir les caractères diftinétifs de ces différentes chauvéfouris; il décrit encore le mécanifme de leurs différens mouvemens, particulièrement comment elles marchent ; on y verra aufii avec quel artifice la Nature a difpofé les chofes, pour que les bras ou les jambes de ces animaux puffent s'alonger & étendre leurs efpèces d'ailes. Enfin, M. Daubenton ne laiffe rien à defirer fur ce qu'il peut y avoir de remarquable dans ces quadrupèdes finguliers. Lorfqu’on envifage cette étonnante diverfité dans de femblables animaux, cette variété de formes, ces caractères fi diftinéts qu’ils ne femblent en aucune façon pouvoir être l'effet du hafard, on ne peut sempècher de reconnoître combien nous fommes loin encore de pouvoir faifir le but & les vues de l’Etre fuprême, dans la formation de tous ces êtres. : SUR LA STRUCTURE ET L'USAGE DU THYMUS. : 6e Thymus eft cette partie { que lon appelle vulgairement les ris dans les veaux, les agneaux, &c.} qui fe pré- fente d’abord, lorfqu'on ouvre la poitrine d’un fœtus, & qui paroît en occuper une affez grande partie. A l'afpeét de fon volume, on croiroit qu'il ne feroit pas difficile ou impoffible d'en découvrir la flruéture & d'en déterminer les fonctions ; \ V. les Mér. P: 255: 64 HisToiRE DE L’ACADÉMIE ROYALE cependant c'eft à quoi on n'a pas encore pu parvenir. Les plus habiles Anatomifles ont regardé le thymus comme une glande ; mais comme on na pu y démontrer de canal excrétoire, cette opinion eft demeurée incertaine : ils n'ont pas été plus heureux par rapport à fes fonétions ; on convient à la vérité en général, qu'il fert dans le foetus & dans les enfans nouveaux nés, puifqu'étant aflez gros dans les premiers inflans de la vie, il diminue enfuite tellement, qu'à peine en trouve-t-on des ” vefliges dans les vieillards, & même dans les adultes. Mais quel eft fon ufage dans le fœtus? quelle fonction remplit-il? C'eft ce qui jufqu'ici n'a pas encore étééclairci, Quelques Ana- tomiftes ont cru qu'il étoit deftiné à recevoir & raflémbler une efpèce de lymphe ou de férofité; d'autres l'ont regardé comme un entrepôt néceffaire au chyle, qu'ils y font venir par le canal thorachique , pour qu'il ne furcharye point, par fon abondance, le fœtus trop foible ; d'autres enfin ont penfé que le thymus étoit un réfervoir dans lequel le chyle fjourne quelque temps pour .y devenir plus fluide, par le mélange de la lymphe qui a été atténuée & divifée dans cette partie; mais toutes ces diverfes fonctions font fujettes à plufieurs objections & ne paroifient pas s'accorder avec ce que l'Ana- tomie a découvert fur cet organe. M. Morand le fils, en ayant examiné de plus près la fubftance & la flruéture, & ayant réfléchi avec plus d'attention fur l'ufage auquel la Nature a pu le deftiner, croit que le thymus fert à donner une élaboration au fang pour qu'il puifle eñfuite fervir plus direétement à la nutrition du fœtus ; & voici comment: le fang laiteux étant apporté dans le thymus par les artères, y trouve une grande quantité de lÿmphe, & en fe mélant avec cette liqueur, il reçoit une préparation particulière; lorfqu'elle eft achevée, les vaif- feaux lymphatiques de cet organe, qui communiquent avec le canal thorachique, reprennent ce fang ainfi élaboré pour le porter dans ce canal, d’où il pafe par la veine fous-clavière dans le cœur. M. Morand appuie cette nouvelle idée {ur l'ufage du thymus, fur ce que l'on a déjà obfervé dans cette partie, fur ce qu'il y a obfervé lui-même, & fur la connoiflance de fa ftructure, qu'il DPI AOICAMIENN.C (EILS 6 qu'il a acquife par l’Anatomie. On a remarqué, if y a déja long-temps , que dans les fœtus & lesanimaux nouveaux nés, particulièrement dans les petits chiens & chats, le thymus eft d'une couleur blanchâtre, & quefi on le coupe, il en fort une matière Jaiteufe de la même couleur ; il réfulte de-là, que cette partie contient, comme nous l'avons dit, une férofité laiteufe, & qu'elle y eft en bien plus grande quantité que dans les autres parties ; les vaiffeaux lymphatiques que renferme le thymus, font deflitués de toutes valvules, & communi- quent avec le canal thorachique, comme on le démontre {en- fiblement par les injections ; il ÿ a donc une communication ouverte du thymus à ce canal, par ces vaiffeaux, au moyen de laquelle le fang élaboré y doit pañer. Or, ce qui forme une nouvelle préfomption en faveur de ce fentiment, c'eft la ature même du thymus, qui eft compolé de véficules comme le poumon; car on les voit dans la difleétion des petits lobes du thymus defféchés, après avoir été foufflés & liés de façon que Fair ne puifle s'en échapper. Quelques Anatomiftes avoient bien obfervé que dans le fœtus humain , le thymus étoit véfi- culeux ; mais ils navoient pas fait affez d'attention, que par cette flruéture, il reflémble beaucoup à l'organe de ka refpiration, excepté cependant Baflius, qui le fuppofe deftiné à fouetter le fang; mais cette fonction paroît trop contraire à la nature du thymus pour sy arrêter. Cet organe eft donc, felon M. Mor:nd, une efpèce de poumon, qui, par fa nature & fans Faétion de l'air, donne une préparation au fang laiteux , fi cela fe peut dire, qui lui eft apporté par fon artère, afin que ce fang , reporté enfuite dans le cœur, foit plus propre à circuler, enfin ait toutes les qualités qu'il doit avoir: il paroït en effet fort vrailemblable que la Nature aura deftiné quelqu’organe dans le fœtus, pour fuppléer en partie à l'aétion du poumon, Jorfque l'animal refpire ; c'eft apparemment ce que des obfer- vations poftérieures confirmeront. Si l Anatomie a fait de grands pas du côté de la defcription des parties , elle n'eft pas encore fort avancée par rapport à leur ufage : il y a bien des parties dont les fonctions nous font encore inconnues. Hf. 1759. I V. les Mém. P: +! 66 HisToiRÉé DE L'ACADÉMIE ROYALE NCRNO CEE TO UIENS" OBSERVATIONS DE MÉDECINE. os fenfations ne peuvent fe deviner; on ne peut les bien connoître qu'après les avoir éprouvées foi-même ; c'eft une difficulté dans la connoiffance des maladies qu'il y a long-temps qu'on a-remarquée. Platon difoit autrefois qu’il feroit à fouhaiter que les Médecins euflent paffé par toutes les maladies. En effet, il y a nombre de fignes, de fymp- tômes qui ne font que pour le malade; fouvent il éprouve un état & des fenfitions qu'il ne fait pas trop bien déméler, & qu'il peut encore moins définir ou expliquer. Tout cela eft perdu pour le Médecin : ici, rien n'eft échappé ; c'eft tout à la fois le malade & le Médecin qui parle. M. Guettard rend compte de ce qu'il a éprouvé lui-même, dans un accident auquel l'Académie a pris beaucoup de part, & dont elle Jui a demandé une defcription. If a joint au détail qu'il en a donné, deux obfervations qui n’y ont aucun rapport , mais qui n'en font pas moins intéreflantes. M. Guettard s'étant endormi après le dîner dans un fauteuil auprès de fon feu, les pieds appuyés contre le fond de la cheminée, de façon que fes jambes étoient horizontales & étendues pour le foutenir dans cette attitude : il fe réveilla, au bout d'une demi - heure ou de trois quarts d'heure, & faifant un efort pour fe relever dans le fauteuil, il reflentit dans Pinflant une douleur des plus violentes; cette douleur fut caufée par h preffion qu'éprouvèrent par ce mouvement contre la traverfe de ce fiége, los facrum & les dernières vertèbres des lombes: ces parties avoient porté fur cette traverfe, parce que le couflin avoit gliflé de deffous les: reins dans le fond du fauteuil. Croyant que cette douleur pafferoit, M. Guettard garda pendant quelques fecondes la même pofition horizontale où il étoit encore : cependant, fentant la douleur toujours fort vive, il fit un fecond eflort, en appuyant les mains fur les DES S CNE NYCUES y moñtans du fauteuil, & il-fe redrefla, non fans éprouver par ce nouveau mouvement, une douleur aufli violente que la première. Enfin, M. Guettard ayant voulu tirer, comme il le fit, le cordon d’une fonnette pour faire venir quelqu'un, il devint après ce dernier efort froid comme marbre, depuis la tête jufqu'aux pieds ; il fentit une foibleffe confidérable dans fes bras, & il perdit le mouvement de a moitié du corps; c'tà-dire, depuis la ceinture jufqu'en bas. La perfonne qui vint au bruit dé la fonnette , le trouva penché fur un des côtés du fauteuil, les bras pendans & incapables de fe mouvoir : elle le prit par-deflous les aiflèlles , & l'ayant foulevé, & M. Guettard lui ayant embraflé le cou avec peine, elle le traîna de cette forte jufqu'à fon lit. Mais comme il ne pouvoit ni lever les jambes, ni s’aider en aucune façon, on le mit deflus du mieux qu'on put: alors, recourbé & comme plié fur ce lit, il fentit le froid s'augmenter par tout fon corps d’une ma- nière prodigieufe ; fa refpiration devint difficile, & ne s'exé- cutoit que par fanglots : la foibleffe de fes bras augmenta , & les picotemens fe firent fentir jufque dans le bout des doigts; il fembloit qu'on les lui piquoit avec des épingles : quoique tout habillé on le recouvrit encore de deux couvertures, & on employa pour le réchauffer tous les moyens ufités en pareil cas ; on lui enveloppoit le vifage & les mains de ferviettes chaudes, on lui en étendoit de même fur la poitrine, & on les renouveloit dès qu'elles fe refroidifloient. Avec ces fecours on parvint à le réchauffer, & avec la chaleur revint le mou- vement des jambes & des bras; les fanglots diminuèrent, & les picotemens des doigts cefsèrent: cependant le retour de la chaleur ne diffipa pas {a douleur des reins, mais elle devint très-fupportable ; elle ne fe ranimoit que lorfqu'on le remuoit ou qu'il vouloit faire quelque mouvement. Pour le réchauffer plus promptement, on lui avoit propofé de prendre de l'élixir de Garus ou du vin d’Alicante: mais il refufa ces liqueurs, il craignoit qu'elles ne l'excitaffent à vomir, parce qu'il s'y fentoit quelques difpofitions , & qu'elles n'augmentaffent encore par-là le froid qu'il reffentoit, On fait que dans le vomiffement, ue Ti 68 HisTOoiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE & même aux approches des naufées, on eft faifr d'un froid très-fenfible. | Tant que M. Guettard éprouva ce froid extrême, qui fe faifoit fentir même au travers de fes bas & de fon bonnet, fon pouls refla très-petit, concentré, & prefqu'infenfible. H eut le vifage verdätre.& défiguré, & la tête un peu embarrafiée : cependant il ne perdit pas connoiflance, les fonétions de fon ame étoient feulement afloiblies ; il fentoit le danger de fon état ; il croyoit qu'il pouvoit mourir, ou refter au moins para- lytique des parties inférieures ; mais il le difoit fans en être agité; & cette tranquillité de M. Guettard, dans un état fi ficheux, marque bien que la crainte de 1 mort n'avoit au- cune part à ce grand froid qu'il reffentoit. Au bout d'une heure & demie, il fut abfolument pañlé; il ne refta à M. Guettard qu'une foibleffe dans toute l'habitude du corps & la douleur très - fupportable de la région des reins : quelques heures après il fe leva; il ne marchoit qu'avec peine: cepen- dant il foupa avant de fe coucher, & dormit très - bien. Le lendemain il fortit, il en fut un peu fatigué, & s'étant par hafard encore alongé fur fon fauteuil , il fentit fa foibleffe- s'augmenter un peu, & il éprouva une douleur intérieurement vers le fommet de la tête, mais elle n'eut pas de fuite. Enfin le fur-lendemain , la douleur des reins fut prefque entièrement diffipée, il n'y eut que la foiblefle qui dura ençore quelques jours. L’extenfion violente que les mufcles des Jombes, des nerfs & la moelle épinière éprouvèrent dans les différens efforts que fit M. Guettard dans l'attitude où il étoit pour fe redreffer, Yextrême preffion que los facrum & la dernière des vertèbres fubirent contre la traverfe du fauteuil , lors de ces efforts, furent fans doute, comme il le penfe , les caufes de tous les fymptômes fâcheux qu'il éprouva. L’extenfion de toutes les parties dont nous venons de parler, ne put avoir lieu fans que les nerfs de ces parties n'éprouvaffent une grande diftenfion , & particulièrement ceux des lombes & de la moelle épinière, lorfque l'os facrum fut comprimé contre la uaverfe du fauteuil. 1 HSNAS CAE mic Es 6 Or, par les communications de ces nerfs & leur diftribution , il ne féra pas difficile d'expliquer ces fymptômes. Les nerfs qui partent de la moelle épinière animent les parties inférieures, & dès qu'ils font affectés, ou que le cours du fluide nerveux y eft fufpendu, ces parties, comme on fait, tombent en para- lyfie: M. Guettard dut donc éprouver un état pareil dans les parties. inférieures de fon corps, par l'effet que la diftenfion des nerfs de la moelle épinière avoit fouffert : l’eftomac ref- fentit des foubrefauts, parce que le rameau que ce vifcère reçoit de la huitième paire, fut fympathiquement affecté, à caufe de la communication de plufieurs des branches de cette paire de nerfs avec d’autres branches des nerfs lombaires: Ja même chofe arriva au diaphragme , de-là la refpiration fan- glotante, & par une caufe femblable, l'altération du mouvement du cœur. Les fluides de cet organe & des nerfs étant ainfi confidérablement troublés dans leur cours, il devoit vraïfem- blablement en rélulter un froid exceffif, la pâleur & le relà- chement des mufcles de la face qui la défiguroient. On ne peut regarder tous ces effets comme les fuites d’une indigeftion ; cette indifpofition n'occafionne pas la perte du mouvement , les fanglots & les picotemens aux extrémités des doigts & les autres fymptômes que l'on obferva dans f'acci- dent de M. Guettard: enfin, ce qui eft fans replique, c’eft qu'ils ne fe montrèrent qu'après l'extrême douleur qu'il reffentit par la compreflion des parties inférieures du dos contre la traverfe du fauteuil. Quant aux légers mouvemens de naufées qu'il eut , ils ne furent pas longs , & fon eftomac ne s'en reflentit nullement après. | M. Guettard auroit penfé que ce détail fur fon accident feroit incomplet sil n’y ajoutoit un mot fur les moyens qu'on doit employer dans la cure d’un cas ou d’un accident femblable: en effet, la defcription d’une maladie, fans les moyens de Ja guérir, n'efl en quelque forte qu’une connoiffance flérile, ce m'eft plus que la defcription d'un phénomène de Phyfique : M. Guettard indique en conféquence ce qu'il croit qu'il faudroit faire en pareille occafñon; il penfe que le premier objet qu'on X ii in, 70 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE doit avoir en vue , eft de rétablir la circulation ; &c que pour cet effet, il faut employer tout ce qui peut ranimer, en commen- gant par réchauffer le malade par tous les moyens connus, comme les linges chauds, les baflinoires remplies de feu, des fers échauftés, &c. enfuite en lui faifant prendre des élixirs un peu fpiritueux, en lui frottant Fépine du dos, &c. les faignées qui paroîtroient indiquées pour la paralyfie, loi femblent dans ce cas plutôt funeftes qu'avantageufes. On pourroit peut-être y avoir recours après que la chaleur feroit rétablie , pour éviter les engorgemens qu'il y auroit à craindre dans quelques parties, & particulièrement dans le cerveau, mais M. Guettard ne s'eft pas fait faire de faignée, & ne s'en eft pas mal trouvé. A quoi tient notre exiftence dans la meilleure fanté, un certain effort, un certain mouvement peuvent nous mettre aux portes de la mort? un effort de plus, M. Guettard n'en feroit peut-être jamais revenu, Une jeune fille , âgée de huit ans, avoit dès fon enfance une grofieur où tumeur, qui s’étendoit du côté droit à peu près depuis la partie antérieure des faufles côtes jufqu’à la moitié ou environ de leur longueur: un homme qui marchoit affez vite l'ayant pouffée, elle tomba rudement jur le pavé; & le coup ayant apparemment porté fur cette tumeur, elle difparut à l'inflant: cet enfant fut auffiiôt attaquée de douleurs ; le ventre devint libre prefqu'en même temps. Bientôt la maladie devint grave, & M. Guettard ayant été appelé pour voir cette fille, il la trouva avec un pouls élevé, très-prompt & qui annonçoit une fièvre violente; elle fe plaignoit de douleurs dans le ventre, dont Ja violence augmentoit par intervalles, au point qu'elle en tomboit prefqu'en foiblefie : fon ventre étoit gonflé & tendu, & il fe déchargeoit fouvent d’une affez grande quantité de matières verditres & blanchâtres, qui nageoïent dans une autre qui étoit féreufe. & abondante. On avoit déjà faigné cet enfant trois fois & on lui avoit donné quelques lavemens émoliens; remèdes qui paroïfioient avoir apporté quelque foulagement dans le temps qu'on les lui avoit adminiftrés, AU sh ? DÉS SCIENCES. 71 La tumeur dont nous avons parlé, & qui avoit difparu par la chute de l'enfant , paroiffoit devoir appartenir ou au foie ou au colon, cependant c’eft ce qui m'étoit pas facile à concilier avec les fymptômes dont nous venons de parler, parce qu'il fe rencontroit plufieurs difficultés dans l'une ou autre fuppofition; c'eft ce qui fit que, dans ces incertitudes fur la caufe de la maladie, M. Guettard penfa d’abord à calmer la violence des fymptômes ; il ordonna en conféquence une potion antifpafmodique & d’autrés remèdes convenables ; mais quoiqu'ils paruffent d'abord agir favorablement, {es douleurs fe réveillèrent la nuit fuivante, elles devinrent convulfives & emportèrent la malade, Curieux de favoir ce qui avoit pu faire mourir cet enfant d'une mort fi prompte & fi douloureufe, M. Guettard obtint des parens, après beaucoup d'inflances, qu’on en feroit l'ouverture. On commença par le ventre, au premier coup-d'œil M. Guettard y vit à la partie inférieure & convexe du grand dobe du foie, une fente de plus de trois ou quatre pouces de longueur, & après en avoir écarté les bords, if en tira un kifle, qui étoit contenu dans une cavité, à laquelle cette fente fervoit d’ouverture:: ce kifte tapifloit intérieurement cette cavité & étoit ouvert par une fente femblable à la précédente ; il avoit une ligne ou environ d’épaiffeur, & étoit entièrement vide comme la cavité qui le renfermoit , qui ne contenoit de même aucune autre matière, ni véficules, ni hydatides, La première attention de M. Guettard fut d'examiner s’il ne trouveroit pas dans la capacité du ventre, quelque matière qu'on pôt imaginer être celle du kifte; mais il fut fort furpris de n'y en pas trouver ; il n'en trouva pas davantage dans les inteftins; ils étoient nets de toute matière, & comme s'ils avoient été lavés ; enfin il ne remarqua rien d’extraordinaire dans les autres vifcères. Cependant, que pouvoit-être devenue cette matière renfermée 18 le kifte? Après y avoir bien réfléchi, M. Guettard penfa qu'elle pouvoit bien avoir été reprife ou être repaffée dans les inteftins par la compreffion des mufeles & de toutes les parties du ventre, & rendue dans les felles L. 72 Histoire DE L'ACADÉMIE RoyaLe abondantes que la malade avoit eues; cette conjecture étoit d'autant plus vraifemblable, qu'il paroït , par plufieurs ébferva- tions , que des matières extravafées dans la capacité du ventre, font repafites dans les inteftins, & qu'ils femblent perméables de dehors en dedans, comme de dedans en dehors, puifque retournés & remplis d’eau , ils la Jaiffent paffer. I reftoit une difficulté ; d'où pouvoit venir cette grande quantité de matière que la malade avoit rendue par les felles, car la capacité du kifle n'en pouvoit contenir à beaucoup près autant, n'ayant que quatre pouces de diamètre en longueur & autant en Jar- geur? M. Guettard fuppole avec raifon que la matière du kyfte , en paflant par les inteflins, les irritoit ; d'où il devoit réfulter en même temps une évacuation abondante de la férofité des glandes qu'ils renferment. Tout paroît donc indiquer que la matière du kyfte, qui vraifemblablement fut crevé dans linflant de la chute de l'enfant, fe répandit d'abord dans a cavité du ventre, & qu'enfuite elle repafla peu-à-peu par les inteftins; ce qui donna lieu à tous les fymptômes & à tous les accidens dont nous avons parlé, Une tumeur de la nature de celle de cet enfant, ne pouvoit être guérie, comme lobferve M. Guettard, par tous les remèdes internes qu'on emploie pour fondre les tumeurs ordinaires ; on ne pouvoit efpérer aucune action des fondans ; un kyfle n'ayant pas par fa mature, cette action organique par laquelle les différentes parties de notre corps tendent ( lorf- qu'elles ne font pas obflruées à un certain point ) à fe débarraffer des matières étrangères qui y font engorgées: d'ailleurs ce kyfte étoit trop épais pour qu'on püt efpérer de rendre fa matière affez fluide pour pafler au travers; cependant M. Guettard ne trouve pas que l'état de cet enfant, avant fa chute, füt fans reflource , & il prétend que dans ce cas & les autres du même genre, il faudroit avoir recours à l'opération ou à fa ponction, qui ne peut être fort douloureufe ni fort difficile ; en effet lorfque , comme dans le cas dont il s'agit, le volume de la tumeur eft aflez confidérable pour être bien fenfible au dehors, & qu'on peut facilement safiurer par le tact, fi La matière (D'EIS S c1rE Nc‘ s 73 matière eft dans un état de fluétuation propre à pouvoir ouvrir latumeur, il ne paroît pas qu'il puifle y avoir alors aucun danger ni une grande difficulté ; après louverture de la tumeur, on la wraiteroit comme les autres maladies de cette nature. - Un parent de l'enfant dont nous venons de parler, fe trou- vant dans un état des plus triftes, voulut après quelques jours de maladie confulter M: Guettard, qui fe tranfporta chez lui. Il le trouva avec tout fon bon fens, répondant bien à tout ce qu'on lui demandoit, fe donnant dans fon lit tous les mou- vemens d’une. perfonne en fanté, c'eft-à-dire, fe mettant fur fon féant, fe retournant à droite & à gauche; enfin n'ayant au premier coup d'œil l'air d'une perfonne malade, que par Ja pâleur qui étoit répandue fur fon vifage: malgré ces appa- rences, ce malade étoit à la mort. II reffentoit un froid général, & il étoit couvert d’une faeur froide & gluente; telle qu’en le touchant, il fembloit qu'on touchoit un corps mort. Sa ma- dadié n'avoit commencé que par une fièvre continue, légère & avec de foibles redoublemens, fans ancun autre mal qu'une douleur fourde & peu fenfible , qu'il reffen‘oit vers la région de la rate. Lorfque M. Guettard le vit, il avoit été faigné deux ou trois fois; on lui avoit donné des lavemens purgatifs, & fait .obferver une diette févère-: au moyen de ces remèdes, la fièvre s'étant calmée, on le crut mieux ; le Chirurgien le purgea , & la médecine fit fon effet, mais l'après-midi il tomba : dans l'état dont nous venons de parler. Ce qu'il y avoit de vraiment fingulier dans cet état, c'eft qu'on ne pouvoit trouver de pouls à ce malade, ni aux deux poignets ni à la jugulaire, comme M. Guettard Fobferva; il ne put même apercevoir le moindre mouvement au cœur en appliquant la main fur fa région; if n'y eut que l'artère temporale qui R fit fentir, & encore très -foiblement. Ces fmptômes annonçoient que le malade étoit dans le plus grand danger, M. Guettard en avertit & ie quitta après avoir ordonné ce qu'il falloit pour le réchauffer, en même temps que lufage d'une potion cordiale. Il revint quelques heures après, il Le trouva comme auparavant, Aifl 1759: UE 74 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE toujours auffi froid & avec le mouvement des artères auffi peu” fenfible. Réfléchiffant encore fur tous ces fymptômes, M. Guettard jugea qu'il y avoit dans le bas- ventre quelque partie qui fe gangrénoit, & dont la gangrène n'étoit déjà peut-être que-trop avancée , & que cette gangrène avoit été occafionnée par un engorgement de fang qui ne sétoit pas réfout ; il infifla en conféquence fur la faignée & le quinquina: le malade fut faigné deux fois, prit du quinquina, & il parut que le pouls {e ranimoit. Il y eut une confultation pour une troifième faignée, qui fut faite, mais le malade étoit dans un état- trop fâcheux pour en revenir: fa refpiration devint fort uênée, & il refpiroit de façon que les mufcles du bas-ventre faifoient des ondulations, M. Guettard en conclut qu'il mourroit bientôt ; en effet, à peine étoit-il forti qu'il expira. Son pro- nofic étoit fondé fur l'obfervation qu'il avoit faite déjà plufieurs fois, que la refpiration forte & ondulente étoit un. fymptôme mortel dans les maladies inflammatoires. I étoit trop intéreffant de favoir ce qui avoit pu caufer, une maladie aufli fingulière que celle dont ce malade étoit mort, pour que M. Guettard ne defirät pas qu'on en fit l'ouverture ; les parens y confentirent : fayant commencée à l'ordinaire par le bas-ventre, on trouva l'eflomac, le foie & les inteftins en très-bon état & bien conftitués; mais la rate. étoit entièrement pourrie , les doigts pañloient au travers, & elle tomboit par lambeaux lorfqu'on vouloit la prendre: cependant la veflie & les autres parties contenues dans le ventre, étoient, comme le foie & l'eftomac, parfaitement fains & en très-bon état , ainfi que tous les autres vifcères de la poitrine & du cerveau; on ne remarqua dans le cœur, ni polype, ni dureté, & dans le cerveau , ni inflammation , ni engorgement, ni concrétion, ni pourriture. Il étoit ainfi évident que la gangrène de la rate avoit été la caufe de la mort du malade; mais que cette gangrène ait pu arrêter prefqu'entièrement la circulation du fang, au point que fon mouvement ne fe faifoit prefque pas fentir, c'eft ce qui paroîtra fort fingulier: la rate reçoit, à la vérité, une DES SCIENCES. grande quantité de fang; mais lorfqu'il trouve des obftacles pour y entrer, il peut refluer ailleurs. La preuve en eft, que ce vifcère s'eft offifié & pétrifié, même plufieurs fois, comme nombre d’obfervations le prouvent, fans que pour cela il ait caufé la mort du fujet dans lequel il fe trouvoit dans cet état ; il paroît donc, comme M. Guettard l'obferve , que ce n'eft point en arrêtant le cours du fang que la rate a produit tous les : fymptômes dont nous avons fait mention, mais par les parties gangrénées qui s'en détachoient, & qui, paflant dans le refle de la mafle du fang , le gangrenoient lui-même & ralentifloient fon mouvement en agiffant fur les vaifleaux. Cependant on ne trouva point d'autres parties tombées en gangrène , comme il paroît que cela auroit dû arriver s’il eût paflé dans la mafle duMfang des parties gangrénées , fournies par la rate. M. Guettard remarque à ce fujet que la maladie a été trop prompte, pour que cette gangrène fe manifefit , quoique les parties gangrénées que le fang charioit, puflent agir fur le mouvement des vaifleaux fangains, de manière à en fufpendre l'action. M. Guettard conclut tout ceci par obferver que dans de femblables maladies, les faignées répétées coup {ur coup dans le commencement , font ce qu'il y a de plus avantageux, & qu'on doit y avoir beaucoup plus de confiance que dans tous les antifeptiques, les purgatifs, les relächans, &c. L S U R L A CIRCULATION DU FLUIDE NERVEUX. N convient affez généralement aujourd'hui que tous nos mouvemens & nos fenfations s’exécutent à l'aide d’un fluide fubul, qui, partant du cerveau, fe répand dans tous les nerfs. Mais ce fluide ne fe meut-il dans ces canaux infiniment déliés que lorfque nous éprouvons quelque fnftion, ou que nous faifons quelque moûvement ? eft-il en repose refle du temps, où bien fe meut-il continuellement & par un mou- K ij V. les Mém. page 300. 76 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE vement de circulation, tel que les particules qui font parties du cerveau, y reviennent après, ramencées par ce mouvement ? c'eft ce que perfonne jufqu'ici wa dit, n'a pas même fuppolé, fi l'on en excepte M. Haller, * Boërhave fuppofe que les nerfs moteurs fe terminent par des efpèces de cul-de-fac ou cellules, & qu'une partie des efprits _du fluide nerveux qui animent ces nerfs, s'échappe après la contraction du mufcle par des pores imperceptibles, tandis qu'une autre partie des efprits efl reprife par des vénules qui les conduifent dans les veines fanguines ; d'autres avancent que par une efpèce de balancement , ces efprits refluent vers le cerveau, par les canaux qui les ont apportés ; d’autres qu'ils trouvent des réfervoirs dans les tendons; d'autres enfin penfent que ces efprits ou ce fluide fe diffipent par la peau & dans les grandes cavités du corps. M. Bertin entreprend de prouver que le fluide nerveux, ou les efprits animaux circulent ; que s'ils partent du cerveau, ils y reviennent par des nerfs : enfin il fe propole d'ériger le cours de ce fluide en un fyflème de circulation, moins appuyé, à la vérité, fur les fes que celui de la circulation du fang, mais du refte fondé fur des raifons également folides. Avant d'en venir à l’expofition des preuves de fon fyflème, on conçoit que M. Bertin devoit raffembier tous les faits qui fervent à établir qu'il y a en nous un fluide nerveux , par lequel s’exécutent tous nos mouvemens & nos fenfations , & c’eft aufft ce qu'il fait; le Mémoire dont nous rendons compte, contenant particulièrement un expofé de tous les faits qu'ilétoit néceffaire de remettre fous les yeux , avant de pafler au détail des dif- férentes preuves de fon fyflème. En effet, il filloit montrer auparavant, comme nous l'avons dit, que nos fenfations & nos mouvemens ne fe font que par un fluide extrêmement fübtil, il falloit faire voir que ce fluide coule en effet dans des canaux très-déliés qu'on appelle erfs: qu'il part du cerveau, qui en eft comme le réfervoir commun : enfin que cette partie eflentielle de notre éorps, n'eft qu'une efpèce d’organe fecrétoire qui fépare du fang le fluide nerveux, ou DIFENIS ES NGUEN ENS CF ENS les efprits animaux, comme d'autres organes féparent de ce fang d'autres liqueurs. Toutes les expériences qu'on a faites, & on en a fait fans nombre, prouvent que dès que la communication d'un nerf “avec le cerveau eft interceptée , toutes les parties qu’il anime, fi cela fe peut dire, ou bien dans lefquelles il fe ramifie, & qui font fituées au-delà du point où cette communication eft interceptée, perdent le mouvement & le fentiment; & au contraire, que fuôt que l'obflacle cefle, & que la commu- nication du nerf avec le cerveau eft rétablie, ces parties re- prennent le mouvement & le fentiment; ce fait { confirme Journellement par une expérience très-fimple. Que l'on appuie le coude fur un corps dur, & que par cette aétion on com- prime le nerf qui pafle auprès; ou qu'aflis fur un corps peu flexible, le poids de notre corps prefle le nerf fciatique , on a dans le premier cas l'avant-bras engourdi, & dans le fecond la jambe & le pied; mais fitôt que la preffion cefle, ils reprennent leur fentiment : donc il y a un effet qui fe communique du cerveau à l'extrémité du nerf, pour lui donner le fentiment, On pourroit fuppofer que les nerfs étant fimplement des fibres élaftiques, -pourroient préfenter des apparences femblables ; la ligature du nerf ou l'interception de fa communication avec le cerveau, lempéchant de lui tranfmettre fes vibrations. Mais il eft bièn prouvé aujourd'hui que cette opinion fur la nature des nerfs, ne peut fe foutenir ;les nerfs loin d’être élaftiquesétant d'unefubflance très - molle, Un grand nombre d’autres faits prouvént encore ‘que, lorfqu'il s'excite un mouvement dans un mufcle, c’eft par le paflage dans ce mufcle, d'une certaine fubflance, d’un certain fluide contenu dans le nerf: que ce fluide parte du cerveau, que cet organe en foit le rélervoir, que ce foit là où il fe prépare, c'eft ce que beaucoup de faits, & d’Anatomie & de Médecine établiflent encore. On a des expériences très- multipliées qui prouvent que le cerveau étant obflfté, en- flammé, coupé ou en fuppuration , tantôt le mouvement s’afloiblit, fe détruit, & tantôtle fentiment, & fouvent que l'un & l'autre arrivent à la fois. L'anatomie , les injections ne paroiffent 78 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE pas moins prouver que le cerveau eft un organe fecrétoire comme plufieurs autres organes ; & quand on l'examine avec attention on ne peut s'empêcher d'y trouver une très - grande reflem- blance avec le rein. Cet organe excrétoire n'eft compofé que e deux fubflances, la fubflance corticale & la fubflance tu- buleufe; le cerveau n'en a que deux pareillement, Ja fubflance corticale &. la fubflance médullaire : dans les reins, la fub{- tance corticale donne naiflance à la fubflance tubuleufe; dans le cerveau , la fubflance corticale donne naiffance à la fübflance médullaire: on voit naître dans le rein de tous les points. de la füubflance corticale, la fubftance tubuleufe: on obf&rve de même dans le cerveau que la fubftance médullaire part de tous les points de la fubflance corticale ; enfin, fi dans les reins les différentes portions de la fubflance tubuleufe éparfes çà & là, paroiffent fe choilir pour ain dire une origine, & enfuite {e raflembler comme autant de rayons convergens pour former les papilles, on voit dans le cerveau les diflérentes portions de Ja fubflance médullaire, fe raflembler & devenir convergentes pour former les trois cordons nerveux. Une analogie fr marquée dans la difpofition des parties, femble* en annoncer une non moins grande dans les fonétions ; par conféquent fr dans le rein il fe fait une fecrétion de l'urine dans la fubftance corticale ; il paroït devoir fe faire de même une fécrétion d’un fluide, des efprits dans la fubflance corticale du cerveau ; & de même, fi la fubftance tubuleufe reçoit la liqueur continuellement filtrée par la fubflance corticale , la fubftance médullaire du cerveau doit recevoir les efprits filtrés par la fubflance du cerveau, mais avec cette différence qu'ils doivent _ paflér de cetie fubflance dans les nerfs, pour retourner énfuite au cerveau, au lieu que la liqueur filtrée par le rein n'y doit plus rentrer. Si on joint à ceci, ce que la ftruéture du cerveau nous apprend , il paroîtra en réfulter que la partie rouge du fang circule dans les artères & dans les veines rouges de la pie-mère : que la fubitance corticale étant compolée d’une inhnité d'artérioles & de vénules, qui font des prolongemens de celles de la pie-mère, il circulera dans ces artérioles un DHETSN OMC DNE UN ic 8 79 fluide beaucoup plus ténu que la partie rouge du fang; que ces atérioles & ces vénules fe continuant avec la fubftance des nerfs, les filets de cette fubfance feront des artérioles telles que celles de la fubflance corticale ; enfin que de même que la ténuigé de ces vénules va toujours en augmentant, de même celles de la fubftance médullaire doivent être encore beaucoup plus petites, & que fi nous ne pouvons pas les apercevoir, c'elt que nos fens font trop foibles , mais qu'elles n'en exiflent pas moins. M. Bertin conclud delà, que la partie rouge du fang - apportée au cerveau , circule dans la pie-mère, que des fluides plus ténus, plus tranfparens, circulent dans les artères & les vénules de la fubflance corticale, & enfin que des fluides beaucoup plus fubtils encore, patfent dans la fubflance des nerfs, qui ne font que des artérioles & des vénules par où ces fluides ou efprits vont du cerveau aux extrémités , & reviennent des ex- trémités au cerveau. On diftingue ces efprits en trois clafles différentes , non par aucune différence qu'on obferve où qu'on puifle obferver dans leur nature, mais par celle des fonctions qu'on leur attribue ; les premiers font les efprits vitaux, qui animent les mufcles des parties eflentielles à la vie ; les feconds font les efprits naturels qui animent les mufcles qui ont un rap- port beaucoup plus éloigné avec la vie; le mouvement de ces deux fortes d'elprits ne reconnoît point l'empire de la volonté, ou du moins nous ne pouvons l'exercer à leur égard; les troifièmes font les efprits animaux , qui fervent aux fondtions du corps:& de Fame : on les diflingue en deux efpèces, les efprits animaux moteurs, & les efprits animaux fenfitifs ; les premiers font ceux qui, en conféquence de l'aétion de la vo- lonté, animent nos mufcles; les feconds, ou les efprits fenfitifs, font ceux qui portent au cerveau les impreffions des objets. Tel ef le tableau que M. Bertin nous donne des moyens que la Nature a employés pour produire & faire circuler ce Auide fubtil, ces efprits qui, répandus par tout le corps, l'animent, lui donnent tous fes mouvemens & le rendent fenfibte à l'im- prefhon des objets; mais la partie de ce fyflème qui regarde la 8o HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE caufe de nos mouvemens, de nos fenfations, & qui paroît être adoptée aujourd’hui par les meilleurs Phyfologifles, n'eft point l'ouvrage des Modernes; on la doit à Galien. Ce grand homme, comme le dit M. Bertin, vit bien, il y a plus de feize centsans, qu'un fluide devoit produire tousles merveilleux effets que nous obfervonsdans l'exercice de nos mouvemens & de nos fenfations, & qu'il tiroit fa fource du cerveau , d'où il fe répandoit dans tout le refle du corps. S'il ne put voir ce que l'Anatomie moderne a découvert , il put encore moins voir ces efprits, ce fluide fabtil; mais il conjectura, par l'enfémble de tous les effets qu'il avoit obfervés , que les chofes devoient fe pañler de la manière qu'il les expoloit; il commença à lever un coin du voile qui nous cache le myftère de nos fenfations. Les Modernes ont trouvé de nouvelles preuves de fon fentiment ; ils ont mis fous les yeux des chofes qu'il n'avoit pu obferver; mais ils n'ont pas été plus loin que lui fur le cours & la circulation du Auide nerveux , où du fluide fubtil qui nous anime. On ne peut attendre qu'avec impatience la fuite des preuves que M. Bertin nous promet fur cette importante matière, dans laquelle il n'y a que la plus fine Anatomie & la plus grande pénétration {ur les moyens que la Nature emploiedans {es opérations, qui puiffent nous faire faire de véritables progrès. On verra fans doute que la Nature agit toujours dans fes opérations par les mêmes prin- cipes, & que fi elle fait circuler le fing pour nourrir & entretenir toutes les parties du corps, & l'empêcher de s'altérer par le repos , elle n'a pas moins fait circuler le fluide nerveux , pour que, par une fage économie, il fe perde le moins qu'il efl poflible, des parties de ce fluide précieux. Nous devons ajouter que M. Bertin, incapable de diflimuler les plus légers pas que les autres auroient pu faire dans la même carrière, rapporte différens paffages tirés des ouvrages de M. Haller, où ce célèbre Anatomifte paroît avoir foupçonné ou conjecturé avant lui, que le fluide nerveux retourne au cerveau , quoique dans des ouvrages poftérieurs, il femble revenir à l'opinion ordinaire , qui n'admet point le retour de ce fluide; cependant M. Bertinattefte que les ouvrages de M. Haller ne lui ont fervi que d'appui pour publier ES DES IIS'CIENN CE & 8r es idées, & que ce qu'il propofe eft à lui en propre. Rien n'eft plus ordinaire dans l'hifloire des Sciences, que de voir ‘d’habiles gens fe rencontrer fans aucune communication entre eux ; parce que dans le progrès toujours lent de nos connoif- fances, il y a de temps en temps dans chaque Science des vérités que les travaux précédens ont rendu prêtes à éclore, & que les bons efprits qui s’en occupent favent faifir ; enfin nous devons ajouter encore que M. Bertin commence fon Mémoÿre par ces paflages de M. Häller, afin qu'on puifle juger d'abord de. ce qu'on lui doit fur ce fujet, fans doute le plus intéreflant de l’Anatomie. OBSERVATIONS ANATOMIQUES. L | a Monftres, au moins ceux dont la fingularité paroît tenir à l'union des parties de deux individus, devroient être plus rares parmi les animaux dont la matrice a plufieurs loges ou. cavités, que parmi les autres où elle n'en a qu'une; chaque fœtus ayant en quelque façon fa place diftinguée , il femble qu'ils ne devroient pas fe mêler ni leurs parties fe con- fondre d’une manière à produire des affemblages monftrueux; cependant c'eft précifément le contraire que l'on obferve : les momitres font plus communs parmi les premiers animaux que parmi les derniers ; mais quoi qu'il en foit, voici un monftre dont M. Fougeroux a donné la defcription à l’Académie, & où la Natureen confondant plufieurs parties a obfervé à certains égards une régularité fingulière dans la réunion de quelques autres qu'elle a confervées. Un lapin ayant été tué d'un coup de fufil, on trouva qu'il étoit femelle, & qu'il renfermoit un fœtus, qui, par fa groffeur paroifloit prêt à naître : ce fœtus étoit un montftre formé de deux lapins réunis depuis la tête jufqu'au bas du flernum, & qui depuis là jufqu'aux extrémités, étoient féparés en deux parties bien diftinétes. Les deux corps, dans la partie réunie, Hife 1759. 82 HisToiRe DE L'ACADÉMIE ROYALE n'étoient qu'un peu plus gros qu'un feul ne l'auroit dû ètre, relativement à la grofleur de chacune des parties poftérieures : une tête unique & qui étoit affez grofle, terminoit ce tronc; enfin lorfque ce fœtus étoit dans la fituation d’un lapin appuyé fur fes pattes, on apercevoit quatre jambes, deux placées fous le ventre & pofant par terre, & deux autres en l'air & placées en fens contraire fur la partie fupérieure de animal; & comme la réunion de ces deux lapins s'étoit faite par le devant de chacun d'eux, on voit qu'une des pattes pofant par terre & une des pattes en fair, devoient appartenir à chacun des individus, comme en effet cela étoit. H réfultoit auffi de la nature de cette Jonction que dans la pofition que nous venons de fuppofer, les ventres des deux lapins fe regardoient & étoient verticaux. Ce qui confirmoit que c'étoit ainfi que s'étoit faite la Jonétion de ces deux corps, c’efl qu'on trouvoit fur le milieu de l’occiput deux oreilles furnuméraires fans aucuns organes qui y répondiflent ; c'étoit vraifemblablement les oreilles de chacun des côtés de la tête de chaque lapin, qui étoient reflées après que les organes qui leur répondoiïent avoient été détruits par la compreflion des deux têtes lune contre l'autre: une chofe remarquable, c’eft qu'excepté que cette tête étoit un peu groffe, tout y paroiffoit bien conformé; il y avoit de chaque côté une oreille dans la place ordinaire, & à laquelle répondoit un organe pour foule, bien conformé; il en étoit de même des yeux. Enfin il paroifloit que #dans ceite grande confufion que les parties de la tête avoient foufferte par cette compreflion, elles s'étoient ajuflées & rencontrées précifément comme elles l'auroient dû, pour que la fymétrie fût obfervée, M. Fougeroux ayant difléqué ce fœtus, trouva que Îe corps étoit double depuis la naiflance de l'épine jufqu'aux deux queues, mais qu'il nétoit féparé en deux parties que depuis le bas du flernum, comme nous l'avons dit; la capacité de & poitrine étoit formée par deux colonnes vertébrales, garnies chacune de deux rangs de côtes qui fe réunifloient à deux flernum, l'un fupérieur , l'autre inférieur ; en imaginant toujours MES S ÉNTENN CES 83 le fœtus dans la pofition dont nous avons parlé, cés côtes ainfi réunies ne formoient qu’une feule cavité pour le thorax, cette cavité étoit partagée longitudinalement par une mem- brane, qui, en s'étendant d'une épine à Fautre, formoit une efpèce de médiaftin; une autre membrane la croifoit, ce qui étoit aflez fingulier, à angles droits, & formoit comme un fecond médiaftin : enfin dans cette réunion, le cœur & les poumons d’un des individus avoient prefque été détruits; on trouvoit bien deux trachées-artères, placées féparément dans chacune de ces capacités dont nous. avons parlé; mais fr lune répondoit à un poumon dans l'état naturel, Fautre s'abouchoit à une efpèce de poumon où il manquoit le grand lobe, & il ne fe trouvoit point de vaifleaux qui communiquafient au cœur qui étoit unique, comme nous favons dit; enfin il n'y avoit qu'un foie, qu'un eftomac, quoique d'abord il parüt double, & qu'un œfophage; mais cet eflomac répondoit à un double canal inteftinal féparé : le refte des parties du bas- ventre, les reins, les parties de 1 génération étoient doubles comme elles le devoient être. On n’eft pas étonné que dans cette confufion il y ait tant de parties ou détruites ou qui perdent leur forme; mais il eft fingulier qu'il y en ait au milieu de tout cela, qui fe joignent d'une manière fi fymétrique : fa bizarrerie de la Nature dans certains monftres nous frappe beaucoup; mais-nous ne fommes fouvent pas aflez étonnés de fordre & de farrangement qu'elle obferve dans certaines parties, au milieu de la confufion qui a dû régner dans leur jonction. it ® Lorfque la forme extérieure d’un animal nous paroît telle qu'elle doit être, nous fommes portés à croire que l'intérieur eft dans le même cas; cependant il y a encore ici des variétés infinies , proportionnées à la multitude des parties dont le corps eft compofé. Tantôt ce font des dérmgemens extraordinaires, tantôt des productions étrangères , dont on ne peut fouvent découvrir ni la caufe ni l'origine; en voici un exemple fin- gulier. On a trouvé dans le bas-ventre d'un jeune agneau, L ïÿ 84 HISTOIRE DE L’ACADÉMIE ROYALE une poche membraneufe placée devant la partie inférieure du rectum, & dans l'endroit où eft ordinairement la vefie: cette poche étoit divifée en deux parties qui formoient une efpèce de bifurcation, étant aflez éloignées par en haut, & allant en fe rapprochant par en bas, où leurs cavités communiquoient enfemble. Ces deux parties de la poche étoient à peu-près de la forme & de la groffeur d'un cornichon moyennement gros: la furface intérieure de cette poche fingulière étoit femée de fibres charnues, très-nombreufes & très-diftinctes : elle tenoit uniquement de chaque côté aux teflicules, par le moyen d'une efpèce de ligament ou cordon qui partoit de l'épididyme , proche les vaifleaux déférens auxquels ces ligamens reffembloient beaucoup. Ce cordon après avoir marché dans la lame da péritoine, venoit s'attacher à l'extrémité fupérieure de la poche membraneufe : lorfqu’on l'ouvrit, on trouva qu'elle contenoit: près de fept onces d'une férofité fort claire, qui la remplifloit. exactement , & qui donna des indices d'acidité très-marqués : car en y verfant du fel de tartre, il s'y excita une effervelcence gonfidérable ; cependant c'étoit au bout de deux mois que cette efpèce de fac avoit été confervé dans de Pefprit-de-vin: ce qu'il y avoit encore de fingulier, c'eft qu'on ne put y trouver aucune efpèce d'ouverture par où la liqueur eût pu y entrer, ni par où elle eût pu en fortir. Cette poche avoit été appa- remment ou l'eflet,ou la caufe de plufieurs dérangemens dans ces parties; car l'endroit de l’épididyme d'où part le canal déférent étoit prodigieufemernt dilaté, & formoit une expanfion marquée. Les vaitleaux déférens étoient eux - mêmes plus: dilatés à leur infertion qu'ils ne le font ordinairement ; ils fe porioient à la partie moyenne de chaque partie de cette poche, fur laquelle ils formoient une arcade pour redefcendre enfuite au-deffous de ce fac, & fe réunir dans une maffe de figure cylindrique, qui formoit une efpèce de cul de-fac ouvert par en haut, & dont la texture étoit toute femblable à celle des canaux déférens à leur origine. Quand on fouffloit dans l'un des vaiffleaux déférens , Fair pafloit dans l'autre, & fortoit par. cette efpèce de tuyau dont nous venons de parler : on voyoit, MENSUSICHEE NC Es. 8< au-deffous une autre partie charnue qui paroïffoit être la vefie qui avoit éprouvé un raccorniflement. Aux parties latérales &c inférieures de la maffe qui terminoit les vaifleaux déférens , on obfervoit de chaque côté un tubercule à peu-près de la forme & de la groffeur d'une féverole : la pofition de ces tubercules répondoit à celle des’ ganglions ou des plexus. femilunaires du nerf intercoflal ; c'eft-à-dire que leurs petites extrémités fe regardoient, & que leurs convexités étoient tournées en en bas & leurs concavités en en haut. Enfin par leur union, ces féveroles formoient une efpèce de col étroit qui. f glifloit fous le corps, qui paroifloit être la veflie,. vers fon. orifice , & alloient vraifemblablement communiquer dans le- canal de l’urètre. LITE On à fait plufieurs Traités fur les Plantes ufuelles , il feroit. bien à fouhaiter qu'on en fit aufli fur celles dont on ne doit pas ufer, qui font nuïfibles, enfin qui empoifonnent. On ne fauroit croire combien ik arrive d'accidens, faute de connoitre ces plantes, ainfi que les fruits, les champignons, &c. qui ont des qualités aufir funeftes. Nos Hifloires, les Tranfaétions . philofophiques & d'autres recueils en fourniflent des preuves fans nombre: if faudroit même que ces Traités fur les plantes & les fubftances végétales vénéneufes, fuffent très-répandus ,. & que ces plantes, &c. y fuflent fi bien décrites, que tout le monde püt y apprendre facilement à les reconnoître, par- ticuliérement les paylans, les foldats & autres gens qui font toujours, ou fouvent à fa campagne. On a rapporté en 1715, l'hifloire de trois foldats. Allemands qui moururent. en moins d'une demi-heure pour avoir mangé de la Cicutaria: aguatica, qu'ils prenoient. pour le Calamus Aromaticus, propre à fortitier feftomac. En voici une autre de dix-fept foldats du régiment de Flandre qui furent empoilonnés dans l'ile de Corfe , pour avoir mangé d'une plante vénéneufe, om- bellifére, connue par les Botaniftes fous le nom d'Ocnanthes fucco virofo. croceo , & que les naturels du pays appellent: Ochio-Gri(o.. ; L üif 86 HisTorRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Ces foldais ayant mangé le foir d'un potage dans lequel ils avoient mis de cette plante, afin d'en relever le goût; ils furent auflnôt faifis de vomitfemens, & de tous les fymptômes qui annoncent le poilon: deux moururent avant qu'on eût le temps de les fecourir; les quinze autres furent tranfportés à Fhôpital d'Ajaccio, où M. Vacher, Médecin des Troupes du Roi -& de cet hôprial les ayant traités avec les émétiques, les évacuans, les cordiaux , & par un régime convenable les fauva de ce funefle accident : cependant ils ne furent en état de fortir de Fhôpital qu'au bout de fix jours, il y en eut même un qui ne fut rétabli que vingt-trois jours après. C'eft de M. Vacher lui-même que l'Académie tient œtte relation; & il lui a fait voir un pied de cette plante defféchée avec fa fleur; il a joint à tout cela un détail circonftancié des fympiômes que ces foidats éprouvèrent , & du traitement par lequel il les a guéris , qui forment un corps d'hiftoire intéreffant fur ce poifon végétal ; il préfume que les acides pourroient bien être fon antidote par le fuccès avec lequel il a employé foxymel fcyllitique. Il paroït par ces fymptômes que faccident de ces - foldats a beaucoup de rapport avec celui dont parle M. Watfon dans les Tranfations philofophiques , & que l'enanthes produit réellement fur les nerfs les efiets dont plufieurs Médecins avoient déjà parlé. D * Nous avons park dans l'Hifloire de 1758, d'une pierre formée autour d'un petit morceau de bois, & qui fut trouvée dans la veffie d'un cheval. Nous avons dit que ces pierres formées autour d'un corps étranger n'étoient pas rares: enr voici encore un autre exemple. Antoinette Brülé , igée de vingt-fix ans, née dans le village de Choifeul en Bourgogne, pafla à Saint-Domingue en 175 3 ; quelques mois après fon arrivée elle eut la maladie qu'on appelle des nouveaux” venus , & qui et communément une forte de fièvre putride: elle fut fort long-temps à s'en rétablir, & eut pendant plufieurs mois des fièvres tierces & double tierces qui étoient fouvent accom- pagnées d'envies d'uriner: on fit peu d'attention à cette in- DES S'CTENCES 87 commodité, Cependant ayant fait un voyage à cheval de quatre lieues, elle fentit tout-à-coup une grande deuleur dans les reins avec une pefanteur dans e bas-ventre & de fréquentes envies d'uriner ; mais à {on arrivée le repos diflipa la plupart de ces accidens. Quatre jours après elle fit un nouveau voyage, & quoiqu'il ne füt que de deux lieues & que ce füt en chaife, la douleur des reins revint avec une nouvelle force ; cette fille ne pat plus uriner, & la fièvre la prit le lendemain avec vio- lence; enfin elle rendoit, en urinant, du fang de temps en temps. Dans ce trifte état, elle confulta un Chirurgien, qui, peu inftruit, la taxa d'avoir une gonorrhée: au défefpoir qu'on put la foupçonner d’avoir une pareille maladie, elle fouffrit pendant près de huit mois des douleurs inouies, mais enfin ne pouvant plus les fupporter, elle fit prier M. Latapy, M. Chi- rurgien du quartier de l’Artibonite de Îa venir vifier; ce Chirurgien s'étant tranfporté où elle demeuroit, la vifita, la fonda, & reconnut dans le moment l'ignorance de celui qui l'avoit examinée auparavant ; car il trouva que c'étoit un corps étranger, logé dans la veflie, qui caufoit toutes ces douleurs. Il revint de nouveau la voir avec M. Brethon Mé- decin, & il s'aflura que ce corps étranger étoit une pierre, qui savançoit un peu dans le canal de l'urètre, Cette fille ayant été “tranfporiée quelques jours après chez M. Lombart Chi- rurgien & habitant du canton, M. Latapy, aidé de M. Pothenot, autre Chirurgien de cet endroit la délivra de fes maux, en lui tirant une pierre qui peloit 9 gros 42 grains. Mois il fut bien étonné , ainfi que tous les affiftans, loriqu’il vit à la paitie fupérieure de cette pierre une pointe fort longue, qui ayant été lavée , fut reconnue pour faire partie d’une aiguille d'yvoire, de celles dont les ouvrières en linge fe fervent pour pañer des rubans de fil dans les coifles; cette aiguille failoit le noyau de la pierre, qui avoit trois pouces huit lignes de circon- férence, & deux pouces deux lignes de longueur; & comme Faiguille étoit longue de trois pouces huit lignes, il en reftoit un pouce {IX lignes à nu, qui étoit précilément , comme nous: l'avons dit, le côté de la pointe. 88 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Cette opération fut fuivie du plus heureux fuccès ; tous les accidens difparurent : cette fille reprit de l'embonpoint , & f'incontinence d'urine , à laquelle elle fut fujette d'abord, étoit tellement diminuée au bout de fix femaines, qu'à peine s'en apercevoit-elle une fois en vingt-quatre heures, & qu'il avoit tout lieu d’efpérer qu'ellé en feroit entièrement guérie dans la fuite. L'Académie tient ce détail de M.° Brethon, Latapy & Lombart qui le lui ont envoyé, ainfr que la pierre qui en fait le fujet, mais, fans entrer dans aucun examen fur la route que l'aiguille, qui lui fervoit de noyau, a dû fuivre pour parvenir jufque dans la veflie. Cependant Antoinette Brüûlé rapportoit qu'étant dans fon village, elle avoit avalé à l'âge de fept ans une arète, en mangeant du poiflon, & que cette arête s'étant engagée dans fa gorge, fon frère, âgé de feize ans, après plufieurs tentatives inutiles, avoit enfoncée avec une aiguille d'yvoire, toute femblable à celle de la pierre, mais qu'en la délivrant de farête, il avoit eu le malheur de laïfier échapper l'aiguille; dont néanmoins elle n'avoit eu depuis aucun reflentiment. Si les chofes fe font paffées ainfi, la marche de cette aiguille aura été bien longue ; car il eft vraifemblable qu'elle n'étoit pas encore arrivée dans la veflie en 1753, ( c'eft-à-dire feize ans après qu'elle eut été avalée ) puifque cette fille avoit fait le voyage de l'Amérique fans reflentir aucune douleur où incommodité qui püt l'indiquer, & il eft peut-être aufli extraordinaire que cette aiguille ait paifé depuis l'eflomac jufqu'à la veflie, fans lui caufer aucune douleur. Il eft vrai qu'elle ajoutoit qu'à l'âge de quatorze ans elle avoit eu un flux de fang que rien mavoit pu arrêter pendant une année entière : étoit -il caufé par quelque plaie que cette aiguille auroit faite dans fon trajet? c'eft ce qu'il {eroit difficile de décider. Quoi qu'il en foit du récit d'An- toinette Brülé, il paroît que cet accident de pierres formées autour d’une aiguille n'eft pas abfolument rare parmi les filles: on en trouve un exemple dans les Tranfaétions philofophiques, & l'Hiftoire de 1735, fait mention d’une Italienne nommée Doniünica , DES SCtÈNcCESs. 89 Doninica, à qui l'on avoit tiré une pierre, ayant auffi une aiguille pour noyau; mais elle avouoit ingénument comment cette aiguille avoit paflé dans la veflie. On trouve encore en 1750 *, l'hifloire d'une fille du village de Sala en Italie, à qui l'on trouva une pierre formée autour d'une fongue épingle de fer. V. II n'eft pas extraordinaire dé rencontrer dans. des perfonnes mortes de certaines maladies, quelques parties qui adhèrent plus ou moins avec celles qui les environnent ; mais il eff fort rare de trouver des adhérences auffi fortes & en auffi grand nombre que celles que l'on a obfervées dans un homme de trente-ciniq ans, mort à Londres dans une efpèce de marafme. M. Jenty, habile Anatomifte de la même ville, qui l'ouvrit deux jours après fa mort, fut fort furpris de voir comment toutes les parties de l'abdomen tenoient enfemble ; l'épiploon étoit collé fi fortement aux inteftins qu'on ne put l'en féparer fans lé déchirer ; ces vifcères adhéroiïent entr'eux avec f1 même force, & M. Jenty ayant voulu les déplacer pour examiner le mé- fentère, il ne put y parvenir fans les déchirer auffr. Son éton- nement redoubla, lorfqu'ayant voulu diftendre le canal inteftinal en y fouffant, il ne vit que quelques -unes de fes circonvo- lutions ordinaires, Îes inteftins étant reftés prefque fous la même forme, à caufe de ladhérence forte & mutuelle des parties latérales de leur furface extérieure. Si cette adhérence a exifté un certain temps avant fa mort de cet homme, comme il y a lieu de le préfumer, ce fera une nouvelle difficulté contre le mouvement périftaltique : il eft bien difficile en effet de comprendre comment il eût pu s'exécuter, les inteflins tenant enfemble de cette manière. Le méfentère, dont les glandes ne paroifloient cependant pas obflruées , ne formoit qu'une efpèce de male, qui ne fe développoit pas. On voyoit une femblable ‘adhérence du foie avec le diaphragme & avec les parties voi- fines; & ce qu'il y avoit encore de particulier dans cette adhéfion de toutes les parties les unes avec les autres, c’eft que les membranes qui recouvroient les vifcères s'en détachoient Hi 1759: . M * Hifhir: de l'Acad, p, 5 or 90 HISTOIRE DE L’ACADÉMIE ROYALE avec la plus grande facilité. On enleva de même à leflomac fa membrane extérieure : Pépiploon, ainfi que les inteftins , paroifloient au dehors fecs & rudes au toucher; ce qui venoit fans doute de ce grand defféchement. On voyoit für es vifcères une grande quantité de petits boutons gros comine la tête d'une épingle, & prefque nulle efpèce d'humidité : ces boutons n'étoient autre chofe que les orifices des vaifleaux exhalans qui étoient obftrués, & qu'on ne peut obferver que dans certaines maladies. On remarquoit les mêmes adhérences dans là poitrine : les poumons tenoient fortement aux côtes par leurs parties poñérieures & latérales, & n'avoient pas moins d’adhérence- intérieurement avec le péricarde: la partie de la plèvre qui les recouvroit étoit beaucoup plus épaifle qu'à l'ordinaire, & s'en détachoit facilement en plufieurs endroits. Cette membrane paroifloit au microfcope comme couverte de grains de fables & c'étoit apparemment cette afpérité de fa furface qui caufoit h rudeffe qu'on y obfervoit en la touchant. M. Jenty fit une incifion au péricarde pour l'ouvrir, mais il adhéroit fr fortement au cœur, qu'il ne put l'en détacher fans beaucoup de difficulté & fans endommager cet organe: il n’y avoit point d'eau dans le péricarde, comme il eft facile de le penfer, & fs pores du côté interne, paroifloient fi grands, ainfi que ceux de la furface externe du cœur, qu'on pouvoit y introduire la tête d'une épingle de moyenne groffeur. Quelques Ane- tomiftes qui ont rencontré des cas femblables à celui-ci {quoique l'adhéfion des parties ne pût y être auffi. générale } ont décrit ces pores en les regardant comme des glandes ; mais, felon M. Jenty, ils ne font autre chofe que les extré- mités des vaifleaux exhalans. IL obferva de même beaucoup d'autres défordres dans la poitrine ; des glandes.lymphatiques obftruées, tuméfiées & endurcies; de petits amas de pus dans différens endroits de l'aorte: mais ce qu'il remarqua de plus fingulier, fut dans le cerveau, où il trouva à la partie qui pole immédiatement fur le cervelet, une petite cuillerée de pus d'une couleur verdâtre, dans laquelle il crut voir au DESJUSCTENGCES ot “icrofcope , quelque chofe qui refflembloit à des animalcules, L'Académie tient tout ce que nous venons de rapporter, de M. Jenty lui-même, qui étant venu à Paris lui en a donné le détail. I ne put apprendre malheureufement l'efpèce de la maladie qui avoit caufé tant de ravages ; cependant il eût été bien intéreffant de favoir ce qui avoit pu produire des effets auffi extraordinaires : il conjecture néanmoins que Ra trop grande abondance dés parties vifqueufes du fang caufa l'obftruction des vaifleaux exhalans internes, vaifleaux répon- dans aux externes, qui vont fe terminer à la peau; car il ÿ à une tranfpiration intérieure, fr cela fe peut dire, qui n'eft pas moins néceffaire que l'extérieure, pour entretenir une certaine humidité entre les parties, afin que leur contact ne devienne pas affez intime, pour que leur adhérence s’enfuive. Si l'obftruétion des vaiffeaux exhalans produit des maladies, M. Jenty penfe qu'il n'eu doit pas moins réfulter de l'obfttruction des vaifféaux inhalans ou abforbans, & qu'elle aura pour caufe l'effet contraire, l'acrimonie des liqueurs. Il rappoute À ce fujet le cas d’un de fes voifins, qui, par un ufage continuel de graines de moutarde & d'acides, tomba dans une hydropifie atafarque dont il mourut ; on lui trouva tous les mufcles fi pâles, qu'à peine pouvoit-on fes diftinguer des tendons. Ils étoient comme s'ils avoient été lavés dans de l’eau ; on n'obfervoit de même dans le fang qui paroifloit entièrement diffous, prefque aucune partie rouge. Combien d'écueils, au milieu defquels un homme doit pafler, pour arriver -à un certain âge ! le Philolophe le plus afluré ne pourroit s'empêcher d'en être effrayé, s'il pouvoit les envifager d'un {ul coup-d'œil. NYETTE année parut un Livre de M. Lieutaud , intitulé: Précis de la Médecine pratique ; pour fe former une idée de cet ouvrage, & des vues dans lefquelles il a été fait, il eft néceflaire de fe rappeler un moment ce que c'eft que la Médecine. De toutes les Sciences, il n'y ena peut-être point qui exige un fi grand nombre de connoiffances : on eft-effrayé and on penfe à la quantité, à la diverfité de toutes les M ji 2 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE maladies qui afligent le corps humain, & à la variété & à la multitude des fymptômes qui les caractérifent. Cependant celui qui fauroit reconnoître toutes ces maladies, qui pour- roit en décrire tous les fymptômes, ne feroit point encore Médecin; il faudroit qu'il joignit à cette connoiffance l'art de les traiter, & cette fcience n’elt peut-être pas moins étendue que la première, Il eft vrai que ff l'on pouvoit réduire Fart de guérir à des méthodes & à des traitemens généraux , on abrégeroit infiniment la peine & la difhculté ; mais les plus grands Médecins avouent qu'il faut malheureufement renoncer dans beaucoup de cas à ces théories générales, fr flatteufes fans doute pour l'efprit, mais fi dangereufes en même temps pour les malades. Des obfervations dans tous les genres bien méditées , peuvent feules former par leur en- chaînement un fÿflème folide & inébranlable :: c'eft de ces obfervations ainfi digérées, dit M. Lieutaud , que peut rélulter la feule doctrine à laquelle le temps qui renverfe toutes les autres, ne fauroit donner la moindre atteinte. C’eft la feule théorie qu'on puifleadmettre, & qui diffère peu de la pratique, puif qu'elle n'eft que l'étude méditée de tous les faits réduits en principes, & que la pratique n'en eft que l'application. Ce- pendant qui pourroit réunir tout à la fois dans fa mémoire tous ces faits fi néceffaires à connoître avec toutes les circonf- tances qui en dépendent? cela n'eft pas poffible. Notre mé- moire n'eft capable de contenir qu'un certain nombre d'idées : & fi nous voulons qu'elles y foient rangées avec ordre, &c d'une manière qui nous en rende l'ufage & la combinaifon facile, il faudra encore diminuer le nombre de ces idées, C'ef cette difficulté d'avoir toujours préfens tous lés fymptômes & tous les faits qui ont rapport aux maladies, qui a fait entreprendre à M. Lieutaud le Livre dont nous rendons compte, Îl a penfé, avec raifon, qu'il feroit très-avantageux d'avoir un ouvrage qui comtint fous un volume qui ne füt pas op confidérable, un précis de tous ces faits, ou dans lequel on trouvät un tableau des maladies où ces faits fe wouveroient rapprochés & préfentés d’une manière Du | Dé SES IC TE NN c'E is CE] “précife, accompagnés de la manière de les guérir ; & tel eft le projet qu'il a tâché de remplir dans fon livre. Chaque mialadie y a fon article particulier, dans lequel M. Lieutaud ‘décrit les fignes de la maladie, les fymptômes qui l'accom- pagnent & le traitement qu'elle exige, felon ce qu'il a reconnu de-plus für & de plus avantageux par fa propre pratique & celle des plus habiles Médecins, Il y a joint auffi l'hiftoire & la defcription de ce qu'on obferve dans les per- fonnes mortes de certaines maladies; defcription faite d’après ce qu'il a remarqué lui-même dans un très-grand nombre de cadavres, & de ce qu'il a raflemblé dans Îles meilleurs Auteurs qui ont recueilli des faits de cette nature. I avoue cependant qu'il y a beaucoup de maladies fur lefquelles l'ou- verture des cadavres n'apprend rien. On peut ajouter encore que les connoiflances que nous’ pouvons atquérir par cette voie, font dans plufieurs cas très-incertaines, parce qu'il eft fouvent fort difficile de diftinguer ce qui a été la fuite de la maladie, d'avegles premiers défordres qui l'ont caufée; à peu-près comme dans les ruines d'un bâtiment , il eft fouvent impof- fible de réconnoître fa partie qui ayant manqué, a entrainé la deftruétion & a ruiné de toutes les autres. Afin de fuivre un ordre fimple & facile dans ce traité, & d'éviter l'embarras qui ne réfulte que trop fouvent de l'ordre alphabétique, M. Lieutaud Fa divifé en trois livres; dans le premier, il parle des maladies internes , générales & particulières ; dans le fecond, des maladies externes; & dans le troïifième, des ma- ladies des femmes & des enfans: chacun de ces livres eft partagé en différentes fections, où il traite des maladies, re- lativement à leurs fiéges ou à la partie qu'elles affeétent; ainfr dans. la feconde feétion., il parle des maladies de la tête, dans la troifième, de celles de la poitrine, dans la quatrième, de celles du bas - ventre; il s'étend dans. cette dernière f&ion fur la mauvaife digeftion , maladie bien commune ; bien générale, lorigine de la plupart des maladies chreniques , & fur laquelle cependant on ne trouve, comme l'avoue M. Lieutaud, que bien peu de lumières au milieu des travaux M ii 94 HisToiRe DE L'ACADÉMIE RoyALE immenfes qu'on a fait fur les autres maladies, Il donne des préceptes très-fages & tous fondés fur l'expérience, par rapport aux moyens de conferver en bon état notre eflomac, cette partie dont notre fanté eft fi dépendante. On ne s'occupe pas aflez de fart de conferver ou d'entretenir la fanté, qui diminueroit fans doute, s'il étoit perfectionné, tous les autres travaux de la Médecine. Lorfqu'on voit comment les plus habiles gens, dans cette Science, s'efforcent d’en fimplifier les connoiffances afin qu'on puiffé en embraffer la pratique avec plus de fuccès ; quand on penfe à la multitude de celles que, malgré tous leurs ‘eflorts, elle exige encore, on ne peut que defirer , avec plulieurs grands hommes , que l'art de guérir, fût parmi nous, comme autrefois chez les Égyptiens, partagé en un très - grand nombre de branches, Chaque Médecin pourroit alors s'occuper plus eflentiellement & plus particulièrement des maladies qui font fon objet, & non-feu- lement acquérir des connoiffances plus füres & plus promptes de leurs fymptômes; mais encore s'occuper plus agantageufément des moyens de les guérir, & de la recherche des remèdes qui pourroient y contribuer : partie de la Médecine qui eft malheu- reufement prefqu'entièrement négligée. ee ETTE année 1759, M. Morand fit voir à l'Académie une Anatomie artificielle, faite fous fa direction, par M. Bihéron. Dans les pièces de ce genre, telles que les anatomies de M. Defnouës & d’autres morceaux détachés, faits par différens particuliers, on n'avoit repréfenté jufqu’ici que la pofition, la forme & la couleur des parties: limitation p'alloit pas plus loin; la confiftance, la légèreté, la fouplefe qu'il eût été néceflaire d'imiter encore dans plufieurs de ces parties, ne fe retrouvoient pas dans ces pièces: on n'y voyoit, en quelque façon, que des blocs de cire qui rendoient fort mal la Nature & fur-tout les parties minces. M. Bihéron a fi bien réuffi dans l'anatomie dont nous parlons, que ces parties qui ont peu d’épaifieur, comme les membranes, y font imitées de manière à tromper les fpeétateurs: on l'a particulièrement DES SCALE UN G'E.8: remarqué dans lépiploon, avec fes bandes graifleufes. On à .chfervé dans les vifcères creux, tels que l'eftomac & les in- teftins, la confiflance, la fouplefle & la Iégèreté des vifcères naturels ; leflomac mème peut s'enfler pour en faire voir le relief, la figure & les contours : de plus, les parties folides comnie le foie, les reins, le cerveau quoique de cire, font faites avec un alliage tel que ces partiés ne peuvent fe caffèr par le froid ou par accident, non plus que fe ramollir dans les grandes chaleurs. Le corps de cette anatomie eft recouvert d'une vraie peau, qui, outre qu'elle imite bien mieux que la cire l'enveloppe extérieure du corps humain , n’eft point fujette comme elle à fe jaunir à la longue, à fe fondre par la féche- refle & à { caflér dans le tranfport : enfin les proportions naturelles & les rapports des parties entrelles, ont paru fort bien obfervées dans l'anatomie de M Bihéron, & onfa trouvé qu'elle étoit parvenue à copier & imiter la Nature dans cette païtie avec une précifion & une vérité dont jamais per- fonne n'avoit encore approché. Si fon eft étonné des talens qui ont fait réufir cette demoifelle jufqu'à ce point, dans Timitation de la Nature, on ne doit pas moins l'être de fon goût pour FAnatomie, qui lui a fait furmonter la répugnance prefqu'invincible des perfonnes de fon fexe, pour des objets. de cette nature, L'anatomie artificielle de M! Bihéron a été faite pour &ccompagner une collection d'inftrumens & de machines de Chirurgie, que M. Morand a été chargé de faire faire pous S. M. Élifabeth, Impératrice de Ruffe. & . V. les Mém. D: 472. 96 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE CSSS CSSS POS CSS CS CSSS CSSS CS CHIMIE. SJ UBR L'A L U N, C oMME l'eflence des corps nous eft entièrement inconnue ; ce n'eft que de l'expérience que nous pouvons apprendre leurs propfictés ; encore plufieurs de ces propriétés font-elles fouvent fr cachées, qu'elles nous échappent lorfque nous con- fidérons uniquement les corps en eux - mêmes. II faut des mélanges, des combinaifons multipliées des fubftances les unes avec les autres, pour en développer les propriétés; il femble Ici que les mélanges foient comme des inflrumens phyfiques qui nous rendent ces propriétés fenfibles; à peu-près comme en Mécanique, les leviers combinés nous font apercevoir des mouvemens, des effets, qui fans eux nous auroient échappé. I arrive de-là qu'en combinant fucceflivement une fubftance avec d'autres fubflances qui nous paroifloient fenfiblement les mêmes, nous fommes tout étonnés de voir qu'il en rélulte des mixtes tous différens, 8e combien nous nous trompions en regardant ces füubfances comme identiques; ceft ce qui arrive tous fes jours dans la Chimie, & qui fait fouvent le tourment du Chimifte qui veut saflurer d’un fait. LA La baf de l'alun fembloit avoir tant de rapport avec les térres abforbantés , que quand on commença à analifer ce fer, on crut devoir ranger cette bafe dans fa claffe de la chaux, de la craie & des autres terres abforbantes ordinaires; mais on apprit bientôt qu'elle en différoit beaucoup , puifque ces fubftances . combinées avec l'acide vitriolique donnoient des félénites ou des fels pierreux, abfolument différens de l'alun. Et comme fouvent ce qu'on avoit cru aifé, paroît plus difficile à mefure qu'on l'approfondit, les plus habiles Chimiftes après beau- coup de travaux fur lalun, ont trouvé que la nature de fi bale eft une de ces énigmes chimiques très-difficiles à dévoiler : cependant DES SCIENCES. 97 cepéndant comme il ne peut réfulter que des chofes très-in- téreffantes d'une connoiffance plus approfondie de cette bale ; M. Fougeroux a entrepris de l’examiner. Cet examen, comme on peut bien l'imaginer, peut être fait de cent façons différentes, felon les différentes vues que l’on fe propofe : mais M. Fougeroux seft principalement appliqué à la combinaïfon de différentes fubftances avec l'acide vitriolique , pour découvrir s'il en réfulteroit un fel neutre, femblable en tout ou en partie à celui de l'alun. C’eft en conféquence qu'il a fait fur cette ma- tièreun travail affez étendu , dont il fe propole de rendre compte dans la fuite; mais en attendant, il en a détaché quelques faits qui font l'objet principal du Mémoire dont nous parlons. L'acide vitriolique paroît avoir moins d’afhinité avec la bafe de lalun qu'avec plufieurs autres fubftances qui fe ren- contrent dans les entrailles de la terre: ce fait, qui eft une exception à la table des affinités de M. Geoffroy, & qui avoit été déjà remarqué par M. fon frère, paroît confirmé par les obfervations de M. Fougeroux. Ayant fait une lotion de laves & de certaines pyrites ferrugineufes qui avoient fleuri à l'air, pour retirer le vitriol & l'alun que ces fubflances contenoient , M. Fougeroux fut furpris qu'ayant verfé de l'acide vitriolique fur les terres qui étoient reftées après , il lui vint de nouveaux criftaux d’alun : cette expérience lui fit imaginer . que dans la formation des pyrites, acide vitriolique fe jetant fur les parties ferrugineufes , laifloit une portion de a terre de Talun fans acide, & qu'ainfr, auffitôt qu'on lui en préfentoit on obtenoit des criflaux de ce fel, Ce fait & d'autres font penfer à M. Fougeroux que Facide vitriolique s’unit plus facilement avec le fer qu'avec la terre de l’alun ; mais que fon union avec celle-ci eft plus intime ‘& cède moins facilement 1e l'action de l'eau: d’autres expériences lui ont encore appris que les fels alcalis & d’autres terres calcaires abforbantes ont plus d'affinité que la bafe de lalun avec facide vitriolique, (Une circonftance curieufe que M. Fougeroux a obfervée dans ces différentes expériences, c'eft que les criftaux de falun régénéré, fe criftallifent plus ou moins facilement, felon UT SD AE 8 HisTorre DE L'ACADÉMIE ROYALE k dofe de l'acide vitriolique, relativement à la bafe de l'alun;- d'où il tire Ja raifon d'une difficulté que M. Margraff a ren- contrée dans la criftallifation de l'alun régénéré. En effet, ce favant Chimifle dit, qu'il a trouvé une matière gommeufe qui. s'oppofoit à cette criflallifation, & qui l'obligeoit à joindre un peu de fel alcali, pour dégraifler cette terre & faciliter la criftallifation; mais, comme M. Fougeroux l'obferve, il paroît que cette difficulté tenoit à ce que le rapport de l'acide vitrioliqueavec la bafe de l'alun, n'étoit pas dans une proportion... convenable, ayant rencontré dans quelques occafions les mêmes obflacies, qu'il a fait difparoïtre en changeant la proportion. des dofes. Parmi les différentes tentatives des Chimiftes fur Valun, plufeurs étoient parvenus à avoir des criflaux de ce- ff, par la combinaifon de l'acide vitriolique avec différentes fubflances, & particulièrement avec celles qui approchent des fubflances bolaires & argileufes: mais perfonne n'avoit encore réuffi à trouver une terre, qui ne contenant point d'alun, & fans le fecours d'aucun alcali, formät avec l'acide vitriolique - de véritable alun; cependant c'eft à quoi M. Fougeroux. eft parvenu. Ayant reçu quelques échantillons d’une terre fine & légère, couleur de citron, envoyée de Bretagne à l'Aca- démie, par M. Abeille, fun de fes Correfpondans , il verfa- deffüs de l'acide vitriolique, qui produifit une effervefcence lente - & modérée, quoiqu'en excitant une chaleur fort confidérable ;.. ces phénomènes, qui reflemblent à ceux qu’on obferve dans. le mélange de l'acide vitriolique avec fa bafe alumineufe pour régénérer lalun , formoient. des préfomptions favorables . par rapport au compolé qui réfulteroit de l'union de ces deux fubftances : en effet, la criflallifation s'établit dans plus de a moitié de ce mélange; il fe forma de beaux. criftaux oéta- ëdres, très-réguliers. & fort gros, qui fe diflolvoient dans l'eau, qui avoient fur la langue un goût aftringent & ftyptique, fe bourfoufloient fur la pelle rouge, ne tomboient point en deliquium à Yair, & dont on précipitoit la terre par un fel alcali fixe ou volatil, enfin qui étoient de véritables criftaux, d'alun, H étoit aflez intéreffant d'avoir découvert une terre, . DES /LS CURE NI CE 5 99 squi, combinée avecl'acide vitriolique, formoit de véritable alun, M. Fougeroux voulut encore examiner s’il n’en trouveroit pas quelques autres, & fi au cas qu'il en rencontrât , il n’ob- ferveroit pas des variétés dans la criflallifation des fels, qui, ayant des bafes différentes, auroient cependant les mêmes propriétés en général que l'alun. Il femble, felon les Auteurs qui ont arlé de ce {el, que fà criftallifition naturelle, c'eft - à - dire celle que l'on obtient après l'avoir diflous, par l'évaporation des fubftances qui. le contenoient, varie beaucoup : tantôt on a des criflaux de ce fel qui fe-féparent par feuillets ; tantôt on ‘en a qui font fous a forme d'aiguilles & fines comme des cheveux; quelquefois ces {els reflemblent à une éponge, à de la farine, &c. mais quoi qu'il en foit, la plupart de ces auteurs s'accordent dans la defcription d’un alun en filets, auquel on a donné en conféquence le nom d’almn de plume, & qui diffère beaucoup par fa criflallifation de l'alun ordinaire. La forme de cet alun, qui eft très-rare, a été caufe que quelques Naturaliftes l'ont confondu avec l'amiante, quoique les caractères de ces deux fubftances foient entièrement différens. Cependant comme leur erreur pouvoit avoir quelque fondement , M. Fougeroux penf, que conformément à fes vues, il ne devoit pas néoliger d'examiner ce qui réfulteroit , & en combinant l'acide vitrio- lique avec l'amiante, & en le combinant avec la pierre grife qui Jui donne naïffance. La première combinaifon n'offïit rien de remarquable; mais la feconde fournit un fait intéreffant : au bout d'un certain temps, prefque toute certe terre grife de Tamiante fe trouva changée en criftaux, qui avoient la forme d'un parallélipipède alongé ou de prifimes carrés à vives arêtes, terminés par une pyramide très-diffrente de celles qu'on obferve dans la criftallifation de l'alun ordinaire, Cependant cet alun artificiel, excepté la forme de fes criftaux , paroïfloit avoir les mêmes caraétères que l'alun, fe bourfouflant fur les charbons, -& y dépofant une terre. De plus on précipitoit fa terre par un -alcali comme celle de l’alun, la fule différence que M. Fou- geroux obferva dans cette expérience, c'eft que cette terre étoit Plus grife que celle de l'alun qu'on retire par le és moyen; \ 1} 500 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE enfin il fembloit à tous égards que ce fel qu'il avoit obtentg étoit de véritable alun de plume, quoiqu'il n'ofe pas aflurer pofitivement que c'en étoit. Si la bafe de l'alun a été jufqu'ici une énigme pour les Chimiftes, comme nous l'avons dit, c'eft avoir fait un pas avantageux vers fa folution, que d'avoir découvert une terre qui donne avec l'acide vitriolique le même fe, & une fubflance qui, combinée avec fe même acide, donne encore un fei fort femblable à celui d’une autre efpèce d'alun: la première terre n'étant peut-être pas très-rare, on fera plus à portée d'en faire l'analyfe que de la bafe de l'alun , & un bafard heureux y fera peut-être reconnoître quelque propriété, par hquelle on en découvrira la nature avec plus de facilité. SOÉROL ETUE LE NRA CET E LE OU DU VINAIGRE. Gi ETTE année, M. le Comte de Lauraguais ut un Mémoire, qu'il a fait imprimer depuis, {ur l'Éther acéteux ou du vinaigre : l'éther eft aujourd'hui une liqueur aflez connue; oir fait que c'eft le réfultat d’une certaine combinaïfon de l'acide vitriolique avec l'efprit-de-vin; on fait encore qu'on fait une liqueur, qui en général a les mêmes propriétés, en combinant l'acide nitreux avec cet efprit; c'eft-à-dire qu'on fait de l'éther nitreux, Mais jufqu’ici ifne paroît pas qu'on eût tenté avec fuccès de faire un éther avec l'acide radical ou du vinaigre , quoique cet acide aït du rapport avec celui du nitre; c'eft ce que M. le Comte de Lauraguais a entrepris, & où il a réufl. On croiroit peut - être qu'il fufffoit de penfer à faire cette tentative pour parvenir à avoir cet éther, mais la chofe comportoit d'au- tres difhcultés. H falloit trouver un tour de main , fr cela fe peut dire, tel qu'il en pût réfulter une combinaifon de l'acide radical avec l'efprit-de- vin; & ce tour de main étoit fondé fur la nature de facide radical : car cet acide n'ayant pas le phlogif tique de l'acide nitreux, a befoin d'un certain degré de chaleur pour pouvoir fe combiner avec l'efprit-de-vin; & c'eft ce que M. le Comic de Lauraguais a découvert. Ayant mêlé parties LL MES OI COLIEIN CES) 1" 'DOr égales d'acide, du vinaigre & d'efprit - de - vin; & s'étant fervi de l'appareil dont on {e fert ordinairement pour faire l'éther, il fit promptement bouillir le mélange, pour fuppléer. par cette chaleur, comme nous avons dit, au phlogiftique qui manque à cet acide; cet expédient lui réuflit fi bien que Péther monta prefqu'auflitôt ; c'eft-à-dire qu'après une première Hiqueur, qui n'eft prefque que de l'efprit -de- vin uni à un peu d'acide, on eut de l'éther : après cette diflillation , il refta du vinaigre radical, qui, combiné de nouveau avec de l'efprit- de- vin, lui redonna , par une nouvelle diflillation, de nouvel. éther; tellement qu’en répétant plufieurs fois cette opération ; on peut épuifer l'acide au point qu'il ne refle plus dans les vaifleaux qu'une trace charbonneule. Cet éther a la plupart des propriétés des deux autres; il en a la volatilité & linflammabilité ; ap- pliqué fur la main il y excite comme eux un fentiment de froid très-vif à mefure qu'il s’'évapore, &, préfente tous les autres phénomènes de refroïdiflement qui dépendent de la prompte évaporation. Il diflout les huiles, les réfines, comme ces éthers, il diffout de même la cire & fa partie colorante jaune, une légère portion du fel fédatif & de la gomme copal: il n'eft point à k vérité coloré comme l'éther nitreux, mais il répand comme lui une odeur qui caraétérile fon acide; & lorfqu'on fature de l'eau avec cet éther, celui qui eft de trop ou en excès s'en fépare en globules comme l'éther nitreux. On n'aura peut-être pas de peine à croire que l'éther acéteux ef plus mifcible à l'eau que léther vitriolique; mais ce qu'on ne fe perfua- dera pas fi facilement, c’eft qu'il eft plus pefant, ce qui eft réellement fort fingulier ; il fe pourroit bien que ce füt à cette différence de pefanteur fpécifique de ces deux éthers que tient un fait que M. le Comte de Lauraguais rapporte. Si on verfe fur une diflolution très - concentrée de fer ou de cuivre par l'acide nitreux , de l'éther acéteux, quoiqu'il furnage plufieurs jours fur cette diflolution, fans prendre un feul atome de ces fubftances métalliques , auffitôt qu'on agite le mélange, cet éther fe mêle avec Ja diffolution , tandis que l’éther vitriolique, qui refle à la vérité de mème fur la liqueur, fans difloudre aucune des parties métalliques ne Sy mêle jamais , quoiqu’on agite la diflolution ;. ï*o2 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYaLeE on obférve encore que fi on verfe une partie d'efprit-de-nitre fumant fur trois parties de l’éther acéteux, & que lon diflille & que l'on cohobe ce mélange, on a une liqueur qui prend la couleur, le goût & l'odeur de l'éther nitreux ; mais qu'on ne peut avoir un réfultat femblable, c’eft - à - dire de l'éthes vitriolique, en employant de la même façon l'acide vitriolique- au refle, on a deux fois plus d’éther acéteux que d'éther vitrio- lique, pour la même quantité d'acide & d'elprit-de-vin. M. le Comte de Lauraguais parle encore dans le Mémoire dont nous rendons compte, des différentes tentatives -infruc- tueufes qu'il a faites pour faire de l’éther marin, & il rapporte -deffus un très-grand nombre d'expériences. Mais, comme en Phyfique nous ne connoiflons les chofes qu’à pofferiori, ou que d'après les faits, on ne peut jamais afhirmer quan certain fait, une certaine opération n’eft pas poflible, à moins qu'on me puifle démontrer qu'il y a contradiction dans les caufes néceflaires pour les produire ; & quoique l'acide marin ait très-peu de rapport avec les huiles, propriété très-néceffaire cependant, felon M. le Comte de Lauraguais, pour former -de l'éther, on trouvera, ou l'on a peut-être déja trouvé quel- que moyen de combiner cet acide avec Fefprit- de- vin, de manière qu'il en rélulte-un éther. ETTE année, l'Académie fit faire par des Commiflaires * à l'examen de la Poudre ou des dragées anti-vénériennes du fieur Keyler, & voici à quelle occafon. Ces dragées faifoient beaucoup de bruit par les cures fingu- lières qu'on leur attribuoit; & comme dès qu'un remède -sannonce avec quelqu'éclat, le Public ne peut refter indifférent fur fon compte; les uns l’exaltoient comme un remède pré- cieux , les autres le décrioïent au contraire comme dangereux, prétendant qu'il contenoit du fublimé corrofif : cependant M. le Maréchal Duc de Biron qui avoit établi un hôpital pour -que le fieur Keyfer y traitit avec fes dragées des Soldats du régiment des Gardes -françoifes, & qui, pendant quatre ans en avoit vu des effets très-avantageux, defiroit que le public * M.% du Hamel, Hellot, Bourdelin & de Montigny. Dadat Ch ts Tnt pts Go à, 7-20 med -t D'ES SIC L'E'N GES 103 apprit par une analyfe exacte & authentique de ces dragées, combien le foupçon qu'il y entroit du fublimé corrofif étoit injufte & mal fondé: c'eft pourquoi il écrivit une lettre à M, le Duc de Chaunes pour être communiquée à l'Académie, où il témoignoit le defir qu'il avoit qu'elle en fit faire l'analyke, pour décider de ce qu'elles contenoient. L'Académie ayant nommé en conféquence des Commiflaires, on leur remit un paquet cacheté & figné par M. Boyer, Doyen de la Faculté de Médecine de Paris, & fur lequel étoit écrit : Poudre mercurielle, dont on forme les dragées anti - véneriennes de M. Keyfer, dont on Je fert à l'hôpiral de M. le Maréchal Duc de Biron, pour le traement des foldats du régiment des Gardes-françoifes , laquelle poudre m'a été remife audit hôpital par le Jieur de Saint - Martin, Sergent dudit régiment, qui eff chargé de l'adminiftration à de la diffriburion dudit remède, &. m'a certifié en prefence de mondit feigneur le Maréchal de Biron, . que cette poudre eff la fenle dont on compole les dragces. On remit pareillement aux Comnmifiaires une petite boîte cachetée, contenant des dragées du fieur Keyfer, qui étoit. fignée de même par M. Boyer, & qui avoit cette étiquète, . Pilules de M. Keyfer, dont on fe fer à l'hôpital établi par ME" le Maréchal Duc de Biron, + Toutes ces précautions étoient abfolument nécefaires pour: que les Commiflaires fuffent affurés que la poudre qu'ils exa-- minéroient étoit bien exaétement la même que cellé dont. fe fert le fieur Keyfer, & dont il fait ufage dans l'hôpital de: M. le Maréchal Duc de Biron: . Les Commiffaires raffemblés ayant ouvert le: paquet, ils : en tirèrent deux: autres non cachetés, fur chacun defquels. étoit écrit : preparation mercuriellek de M. Keyfer, prére à: auettre en dragées anti-vénériennes ; ls ouvrirent ces paquets, . & ils y trouvèrent une poudre de couleur ifabelle matte, sat- tachant aux doigts, & pelant prefque une fois moins qu'un : même volume de fublimé corrofif; c'eft-à-dire que fa pefanteur - fpécifique étoit prefque la moitié moindre: cette poudre blan- - chifloit l'or & le cuivre : ayant diftillé fix cents grains de: x04 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE cette poudre dans une cornue de verre lutée, à laquelle on avoit adapté un récipient, on n'aperçut au col de la cornue aucun fublimé falin; les vapeurs qui pafloient dans le réci- pient étoient blanches & laiteufes, & fe condenfoient en un vinaigre d'odeur très- pénétrante; on en trouva une quantité pefant quatre - vingt-douze grains. Comme le mercure com- mençoit à monter on Ôta le récipient pour lui en fubitituer un autre à moitié plein d'eau, & on continm le feu ; il pafia dans ce fecond récipient quatre cents trente grains de mercure, pur, brillant & très-mobile; il refla au fond de la cornue une poudre noire pefant vingf-trois grains, il manquoit ainfr cinquante-cinq grains des fix cents mis dans la cornue; mais - outre les vapeurs qui s'étoient échappées, on avoit laiffé tomber quelques gouttes de mercure en nettoyant le col de la cornue: on examina enfuite féparément les différens produits de fa dif- tillation , en commençant par la liqueur acide ; on remarqua que fon odeur étoit la même que celle d'un vinaigre très- concentré ; fa feule vapeur teignoit en rouge le papier bleu; on en verfa quelques gouttes fur la diftillation d'argent par l'efprit de nitre, & il fe forma au fond du verre une criftalli- fation brillante, qui fut difloute entièrement par de l'eau ajoutée, ainfi ce n'étoit pas une lune cornée, & par :conféquent ce produit acide ne contenoit pas l'acide du fel mari. Le troifième produit, ou le caput mortuum, étoit comme il a été dit, une poudre noire, grafle & qui réfflémbloit aux flocons de fuie d'une lampe à huile : cette poudre étoit attirable par l'aimant; mais il paroifloit que les acides miné- raux ne lattaquoient pas. On mit calciner vingt grains de cette poudre dans un creufet à un feu de forge; à la première chaleur elle brüla comme de l’amadoue; enfuite elle fe-réduifit en une poudre rouge comme un beau fafran de Mars, & qui ne peloit plus que quinze grains: cette poudre étoit entièrement attrable par faimant, & ne paroifloit pas plus, qu'avant la calcination , pouvoir être attaquée par les acides minéraux, ni par l'eau régale. Non content de cette analyfe de ka poudre du fieur Keyfer, on mesh TENTE Lu D'EVANSTE L'r IN CES, 105 on la foumit à un autre examen: on en fit bouillir cent cin. quante grains dans un matras avec deux onces d’eau pure, le mélange fe gonfla & écuma beaucoup; une partie de la poudre fe précipita; la liqueur filtrée encoré chaude paffa très-limpide & fans aucune teinte ; dès qu'elle commença à fe refroidir, il fe forma à fa furface une pellicule qui fournit fucceflivement une grande quantité de criftaux neigeux & brillans ; les mêmes criftaux recueillis fur un filtre, y laifsèrent, en féchant, une matière femblable à celle qu'on nomme effence d'orient où aux écailles de l'able, dont on fe fert pour faire les perles faufles. Les lotions ayant été réitérées avec de l'eau bouillante, on eut encore une quantité confidérable de ce fel brillant ; en forte que des cent cinquante grains de poudre noire, il nerefta que trente- quatre à trente-cinq grains d'une poudre grife, qui, après avoir été féchée, fe trouva parfemée de mercure en globules. HE fuit ainfi de cette expérience & de la précédente , que la plus grande & a principale partie de fa poudre du fieur Keyer, eft un /e/ mercuriel, formé de la combinaifon de l'acide végétal ou du vinaigre avec le mercure: ce fel, que nous appellerons Jel mercuriel acéteux , a été vu pour la première fois par M." Pie & Cadet, ainfr qu'il paroît par l'examen qu'ils en avoient fait, & qu'ils ont communiqué aux Commifiaires. Ce fel fe décompofe fans intermède; à un feu doux , il prend une couleur jaune, & à un feu plus animé, une couleur rouge ; il eft acidule, rougit le papier bleu, & a le goût des prépa- rations mercurielles par les acides ; on le décompofe encore en verfant fur @ folution, une folution de {el marin, qui occa- fionne un précipité blanc; ainfi l'acide du fl marin a plus d'affinité avec le mercure, que n'en a l'acide végétal. Une folution de tartre vitriolé, ayant été verfée fur la folution du même /e/ mercuriel acéteux , Yacide vitriolique a quitté fa bafe alcaline & a précipité le mercure en turbith minéral, Il fuit encore de ces deux expériences , que le fl mercuriel de la poudre du fieur Keyfer, n'eft ni un fublimé corrofif, ni# un mercure doux ; de plus, lefprit volatil du fel ammoniac, verfé fur la même folution du fel mercuriel acéteux , donne un Hi 1759. O 106 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE précipité gris-cendré, tandis que, verfé fur la folution du fublimé corrofif, il donne un précipité blanc; enfin l'alcali fixe précipite en jaune citron la folution du /e/ mercuriel acéteux , pendant qu'il précipite en rouge de bue, la folution du fublimé corrofif. On examina encore féparément les dragées ou pilules du fieur Keyler, & on trouva qu'elles avoient une odeur de vinaigre , & qu’elles étoient compofées d’une poudre toute fem- -blable à celle dont nous venons de donner l'analyfe, avec une matière mielleufe qui avoit le goût de la manne; ordinaire- ment elles font roulées dans du fucre en poudre. De toutes ces expériences , les Commiflaires conclurent, que Ja poudre & les dragées, ou pilules anti-vénériennes du fieur Keyfer, ne contiennent , comme on le voit évidemment, ni fublimé corrofif, ni mercure doux, ni turbith minéral, ni {el nitreux mercuriel ; mais un fel formé de l'union du mercure à un acide végétal, qui eft vraifemblablement l'acide du vinaigre, auquel fe trouve mêlé une très - petite quantité de matière ferrugineufe, jointe à une matière grafle, fournie pro- bablement par l'acide véyétal. k Il feroit bien à fouhaiter pour le public, que tous les re- mèdes chymiques qui lui font propofés, fuffent examinés de cette manière, avec cette attention & ce fcrupule: il feroit für par-là au moins que ces remèdes n'ont point de qualités dangereufes, en attendant que le temps & les expériences lui euffent appris qu'ils en ont d'utiles & d’avantageules, Au refte, la combinaifon du mercure avec l'acide végétal n’eft pas nouvelle ; M. Margraff en parle dans un Mémoire inféré dans le volume des Mémoires de l Académie de Berlin de l'année 1746: Le Sperma Mercuri de Gnemelius, Apothicaire de Tubinge eft un précipité rouge, travaillé enfuiteavec le vinaigre: enfin M. Hellot ayant fait en 173$ du précipité de mercure per fe, par une opération curieule, ce précipité fut diflous dans le vinaigre diflillé ; on le mit enfuite dans une cornue Pour en retirer le vinaigre, & lon eut des criflaux falins mercuriels; mais. comme on les fit chauffer pour les avoir plus fecs, ils fe revivifièrent en mercure coulant. CARO nie ac dti nd HOSÉE ÿ > Ÿ > M 2 M » 2 ÿ 2 ÿ > Ÿ > ÿ L 5 x ÿ >: ÿ des Satellites de Jupiter, 172 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE < étoiles es plus brillantes; il en arrive chaque mois plufieurs que lon peut obferver avec d'aflez petites lunettes; & M. Halley jugeoit que c’étoit aflez de pouvoir de temps à autre, par des obfervations , rectifier l'eflime des Pilotes fur Ja fituation du vaifleau. Îl refloit toujours limperfedion des Tables de la Lune; M. Häalley n'efpéroit pas qu’elles puffent être perfectionnées de long-temps ; mais il trouva le moyen de les corriger quelques années d'avance, par le moyen des obférvations faites pendant une période de dix-huit ans, & c'étoit affez pour le befoin de la Marine; on voit à la fin des Tables Carolines de Street ( édition de 1710 ) un effai de ce que M. Haley avoit conçu à ce fujet. « Ayant trouvé, dit M. Halley , par ma propre expérience, l'infufhfance de toute autre méthode pour trouver les Longitudes en mer, j'ai defiré fortement de furmonter les difficultés qui ont empêché jufqu'ici d'y employer les mouvemens de la Lune. Pre- mièrement, j'ai trouvé qu'on pouvoit, fans une adreffe bien fingus lière, fe fervir à la mer d’une lunette de cinq à fix pieds, propre à obférver les appulfes, ou les occultations des étoiles par la Lune, toutes les fois que à mer n’eft pas extrêmement agitée; fpécialement dans le premier & le dernier quartier de la Lune, lorfque fa lumière n'eft pas aflez forte pour effacer celle des étoiles ; mais les fatellites de Jupiter, quoique très - propres d'ailleurs aux ufages géographiques , ne peuvent s'obferver en mer, parce qu'ils exigent des lunettes trop grandes pour pouvoir être employées fur un vaifleau continuellement agité ». Qu'il nous foit permis d'interrompre ici le difcours de M. Halley, pour remarquer qu'il y auroit un moyen, ce femble, d'obferver en mer les écliples des fatellites de Jupiter, avec un télefcope de quinze à vingt pouces, fi lon avoit foin de fufpendre l'oblervateur vers le centre de gravité du vaifleau, - auffi-bien que la ble fur laquelle poferoit le télefcope; Jacques Beflon, Profeffeur de Mathématiques à Orléans, fit imprimer en 1567, un ivre qui a pourtitre : le Co/molabe ou inflrument univerfel concernant toutes les obfervations qui fe peuvent faire par DES SCIENCES: 173 Jes füences mathematiques , tant au ciel, en la terre comme en la mer; à la page 28 de cet ouvrage il donne la façon de s’en fervir fur un vaifleau, en difant qu'il faut accommoder l'inf- trument fur le plan d'une table, au-près de laquelle foir attachée une chaire, qui toures deux aient lieu fur le couvert de la poupe, € Joient accommodées enfemble par deux grands cercles de fer s'entre- coupans felon leurs diamètres àr pôles en équerre , de Jorie que l'Obfervateur ou Pilote étant affis dans ladite chaire, puiffe - demeurer © être arrêté au niveau de l'horizon, à limitation des Douffoles, compas marins 7 certaines efpèces de lampes, qui, allumées €7 roulées fur une table , ne peuvent répandre auu- uement leur huile, 7 ainfi fera nivelé l'infhrument fur mer pour l'ufage des mariniers | comme il vous appert en la figure. L’Auteur donne enfuite la figure d'un vaifieau, où l’on voit le Pilote ainfi fufpendu, obfervant là hauteur d’une étoile; cette idée a été renouvelée & perfectionnée en Angleterre par M. Irwin qui a fait exécuter une chaife marine très -com- mode, avec laquelle on a obfervé plufieurs fois fur mer, en 1759, les fatellites de Jupiter {Journal éranger, Mars 176 1). Ces épreuves avoient été faites par ordre de fAmirauté, & lAuteur après avoir fait exécuter cette machine à grands frais, & d'une manière très- commode, fe préparoïit en 1763, à faire un voyage en mer pour de nouvelles épreuves, par ordre des Commiffaires de la Longitude, avec M. Tyrel, Capitaine de vaifleau , afin de pouvoir concourir au Prix que la Nation promet à celui qui trouverale fecret des Longitudes * ; ce feroit le moyen de rendre fort utile fur mer l'obfervation des fatellites de Jupiter. Revenons à la méthode propofée par M. Halley , qui con- fifloit à employer les mouvemens de la Lime; « après avoir beau- coup examiné, par obfervation, les Tables de la Lune, données par Street, quoique généralement meilleures que celles de T'ycho, Képler, Bouillaud, & Horox, il ne paroït pas, dit-il, qu'elles foient fufffantes pour repréfenter les mouvemens de la Lune * Voyez l'acte du Parlement d'Angleterre, au fujet des Lonpitudes, dans Ja Connoïffance des Mouvemens célefles de 1765. iif Chaïle marine, A (4 LOS A (4 À .174 HisToiRE DE L'ACADÉMIE RoYaLe Uñge de la période de é 223 lunaif, » 2 Ÿ > M 2 Ë » Ÿ > Ÿ » » 2 » 2 2 avec la certitude néceflaire; & quoique dans certains cas, Jeur exactitude foit fingulière, lorfque les erreurs des différentes équations viennent à fe compenfer , il arrive enfuite que les erreurs font prodivieufes , quand elles viennent à fe trouver du même fens, & qu'on feroit expolé à des écarts de cent lieues dans l'eftime de la Longitude ; en forte que À méthode feroit abfolument infufhfante. « Mais, continue M. Halley, c’eft ici la faute de l'Artifte ; & non de l'Art; & fi l'on a égard à la période des inégalités de la Lune, qui eft de dix-huit ans & onze jours ou de deux cents vingt-trois lunailons , on trouve que le retour des éclipfes & des autres phénomènes du mouvement de la Lune eft fort régulier ; alors l'erreur que. vous aurez obfervée dans la pre- mière période fe répètera encore dans la feconde période, par l'égalité des circonftances ou des diflances de la Lune à fon apogée & au Soleil. Ainfi, par l'obfervation de l'éclipfe de Soleil, arrivée le 2 2 Juin 1 66.6, qui fut vue à Londres & à Dantzick, j'ai été en état de prédire avec certitude l'éclipfe du 2 Juillet 1684, en fuppofant dans celle-ci l'erreur des Tables que j'avois trouvée dans la première ; je puis faire la même chofe hors des fyzygies, en forte que je fuis affuré que l'erreur des Tables eft füjette à un retour périodique & régulier ; j'ai donc fongé à la manière de connoître la quantité de ces erreurs pour chaque fituation de la Lune, & cela par une fuite d'obfervations comparées avec le calcul, & dont les erreurs feront réduites en ‘Tables, pour les appliquer au calcul dans pareilles fituations. Ayant entre les mains le fextant que je fis faire pour cbferver les étoiles auftrales en 1677, à l'ile de Sainte-Hélène, je le plaçai dans le deflein de continuer à obferver la Lune jufqu'à ce que j'eufle rempli la Table qui doit procurer en mer le moyen de trouver exactement la Longitude. C'eft en 1683 que je commençai à obferver la Lune auffi fouvent que le ciel me le permit, & dans l'efpace de feize mois, jobtios environ deux cents obfervations ; je comparai la plupart avec les Tables d'Horox, dont le calcul eft un peu plus fimple que celui de Street, & ayant fait une Table des erreurs, je vis queleur A DEN S/ SIC ME) NICE: Si: 175$ marche étoit affèz régulière ; dans les cas où Ja Luneavoit été obférvée deux cents vingt-trois lunaifons plus tôt, j'étois en état de prédire l'erreur des Tables avec une ex1itude à peu-près égale à celle des obfervations mêmes : l'entreprife que j'avois formée fut bientôt interrompue par des embarras domefliques ; il me fallut préférer là défenfe de mon propre bien à tout autre foin , & depuis ce temps-là j'ai été fi détourné, que je n'ai pu ‘continuer mon projet ; mais lorfque les annales des obfervations qui fe font à Greenwich & à Paris, feront publiques, j'efpère qu'on en pourra tirer une fuite d'obiérvations de la Lune fuffifante pour l'objet que je propole ». Ce fut dans ce defléin que M. Halley publia à Ja fin des Tables de Street, dont nous parlons, és obfervations qu'il avoit faites depuis 1682 jufqu'en 1 684 ; il fit contraindre enfuite Flamftead à relâcher les regiftres des obférvations qu'il avoit faites à Greenwich, & les fit imprimer, malgré l’auteur même, fous l'autorité du Gouvernement : enfin, ayant fuccédé en 1720 à Flamftead dans la phce d’Aftronome royal à Greenwich, il entreprit lui-même une fuite nouvelle d'obfer- vations ; & depuis 1722 jufqu'en 1740, il ne cefla d’ob- ferver la Lune ; on trouve toutes ces obfervations à la fuite des Tables de M. Halley ; elles ÿ font comparées avec le calcul L & lon peut, au moyen de l'erreur de cette période, trouver celles de la période füivante. Depuis la fin de Ja période de M. Halle, M. le Monnier à Paris, M. Bradley à Green- wich, M.. de ffle, &c. ont continué fans interruption d'obferver la Lune, pour déterminer les mêmes erreurs dans la période fuivante ; en forte que, par cette méthode & par ces obfervations, nous fommes en état de calculer toujours le lien de la Lune à une où deux minutes près ; d’ailleurs les Tables de la Lune, perfectionnées encore depuis quelques années par le moyen des calculs de fattraction & des obfer- “ations mêmes, nous raflurent entièrement de ce côté-Ià. À l'écard de la manière d’obfrver en mer, elle s’eft éga- lement perfectionnée depuis le temps de M. Halley, nous ne fommes plus réduits à attendre les occultations d'étoiles qui n ñ A 8 n A A ñ An À a ñ n ñ An Li O&ant pour obferver en mer. 176 HisToiRE DE L’ACADÉMIE ROYALE font trop rares, & nous pouvons, avec l'olaut de réflexion , trouver en tout temps la diflance de la Lune à une Etoile, d'une manière fuffifante pour la Longitude. Jean Hadley, Chevalier & Vice-préfident de la Société Royale de Londres, fut le premier qui donna la defcription d'un oétant , propre à prendre des hauteurs en mer & à mefurer des diflances, malgré le mouvement du vaifleau ; il le préfenta à la Société Royale au mois de Mai 1731 ; on a trouvé dans fes papiers un Manufcrit de Newton fur cette matière, & il paroît, par le regiftre de la Société Royale, qu'elle en avoit eu connoiflance en 1699 , par M. Newton lui-même; l'inventeur des télefcopes étoit bien digne de découvrir auffr les octans de réflexion. On trouve dans les Franfaétions phi- lofophiques de la Société Royale pour 1731 {7° 420, art, Î, page 138 de la tradufion françoife ), une defcription de Foctant de M. Hadley; cet inflrument parut d'abord en Angleterre de la plus grande utilité, les Commiflaires de PAmirauté voulurent que l'effäi en füt fait en mer {ur un yacht, & ils nommèrent M. Young, Commiflaire de la Ma. rine, pour y être préfent; M. Hadiey s'y rendit, accompagné de fes deux frères, de M. Halley, de M. Bradley, & de quelques autres Membres de Ja Société Royale; M. Bradley fur-tout y obferva des diflances d'Etoiles , qui étoient connues d'avance par les obfervations de Flamftead, & des hauteurs du Soleil, pour en conclure la latitude, qui étoit également connue d'ailleurs ; aucun des Obfervateurs n'étoit accoutumé au mouvement du vaifiean , mouvement toujours plus vif quand on eft près des côtes, & encore plus confidérable fur un bâtiment qui n'étoit que de foixante tonneaux , cependant les erreurs des obfervations n'alloient pas ordinairement à une minute , rarement à trois ou quatre { Zranfatt. philofoph. 1732, 0° 425, art. À, page 120 de la Traduchon ). M. Godin, Bouguer & de la Condamine, pendant leur traverfée en Amérique , firent ufage du nouvel inftrument; M. Godin, dans un Mémoire daté de Guayaquil Le 9 Avril 1736 & lù à l'Académie le 13 Mai 1739, dit qu'on peut 4 ’ ESS IQ WE Es: 71 177 ut avoir la hauteur à une demi-minute près, & trouver l'heure qu'il eft à ro fecondes près par des hauteurs corref- . pondantes ; cet inftrument fut perfectionné & décrit par M. d'Après de Mannevilleite, dans un petit ouvrage qu'il publia vers ce temps-là. M. de Bory en fit imprimer une autre defcriptionen 1751; le P. Pézenas en a donné une en 1 PSS" encore plus détaillée, dans les Mémoires de Mathématiques & de Phyfique, rédigés à l'Obfervatoire de Mardille ; il décrit l'oétant de M. Hadley, celui de M. Caleb Smith, celui de M. de Fouchy / Recueil des Machines, tome V1, page 79 ), celui de M. Elton, celui de M. de Radouay , les machines de M.° Godefrey & Graham; enfin plufieurs inftrumens préfentés à l’Académie pour Fufage de la Marine. Nous renvoyons à ces différens Ouvrages ceux qui voudront connoître plus en détail les inftrumens dont il s’agit ; M. l'abbé de la Caille a donné aufli les dimenfions qu'il juge les plus convenables pour un otant de réflexion. { Voyez ci-après la page 89 des Mémoires } Après avoir perfectionné les Tables de la Lune & les inftrumens propres à obferver en mer, il ne reftoit plus qu’à choif” & perfectionner la méthode, c’eft-à-dire, à chercher e moyen de calculer promptement une obfervation, & à choifir obfervation la plus concluante & Ja plus facile à faire; c'éft l'objet du travail que M. fabbé de fa Caiïlle a entrepris. Nous avons dit en quoi confiftoit la méthode par laquelle Morin déterminoit le‘ lieu de la Lune, en fuppofant la diftance de la Lune à une Etoile; dans la fuite on crut qu'il étoit poffible de le faire avec plus de faéilité ; il y a plus de trente ans qué M. Leadbetter expliqua, dans un Ouvrage publié en Angleterre, la manière de trouver la longitude de la Lune par une feule hauteur, pourvu que la latitude de la Lune fût fuppofée exactement connue /a complear fyffem of Affronomy in two volumes , in-8.° 1728 ). M. Bouguer, dans fon Traité de Navisation , indiquoit le paflage de la Lune au méridien, déterminé pat des hauteurs correfpondantes ; M. Pingré, dans fon Éut du ciel pour l'année 1754 (page 153), propoloit if, 175 9. Li \ Defriptions qu'on a données de cet étant. Méthodes pour obferver le lieu de la Lune. 178 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE également cette méthode : /ob/ervation ,dit-l, du paflage de la Lune par le méridien, fournit la méthode la plus facile que lo puifle avoir pour- découvrir la différence des Longitudes ; mais dans fon Etat du ciel pour 1755 (page 185 à füiv. ), expliqua une méthode plus facile, qui confiftoit à chercher l'angle horaire de la Lune, par le moyen d'une hauteur obfervée lorfque la Lune eft éloignée du méridien , en fuppofant fa déclinaifon connue. A l'égard de cette déclinaifon, M. Pingré fuppofoit d'abord, avec M. le Monnier , qu'on l'eût obfervée lorfque la Lune pañloit au méridien; mis ayant enfuite confidéré que cette obfervation de la déclinaifon étoit fujette à une erreur plus grande que celle du calcul des Tables, il donna une autre méthode & diutres procédés, par lefquels on trouve l'angle horaire par une hauteur de la Lune, en fuppofant la déclinaifon telle que les Tables nous 1 donnent ; cette méthode paroït en effet la meilleure de touites, quand on ‘ne peut obferver que la hauteur de la Lune; on peut en voir le détail dans fon État du ciel pour 1755 (pages 186 © Juiv. } & dans l'Etat du ciel des années 17 $ 6 & 1757. Quant à la méthode des diftances de la Lune aux Étoiles, employée autrefois par Morin, elle a toujours paru des plus exactes; M. le Monnier fa propofoit & la recommandoit aux Navigateurs, dans un Mémoire lû à l'Affemblée publique de l’Académie au mois d'Avril 1747 ( Nouveau Zodiaque , dc pages 29 © fuiv.). Dans les Tables de M. Halley, qui parurent à Londres en 1749 , cette méthode eft expliquée avec un exemple du calcul *, parce que cette méthode a toujours été regardée en Angleterre comme la meilleure; M. Maskelyne, envoyé à l'île de Sainte - Hélène en 1760, & qui a beaucoup travaillé fur les Longitudes, a pris cette méthode pour le fondement de l'ouvrage qu'il a publié fur cette matière (a British mariner's guide, in-4.° 1763 ); M. Wadington, * II eft néceffaire d’avertir cepen- | 1749 par un nommé Raper, & dant que les explications qui font | c’eit avec raïfon qu’on les a fuppri- à la tête de l'édition latine de M. | mées dans l'édition. françoife faite Halley,, ne font point de cet illuftre | à Paris. Aftronome; elles furent faites en | DES SCIENCES ; 179 quf accompagna M. Maskelyne dans ce voyage, adopte la . même méthode dans fon ouvrage intitulé / a pradical method for finding the longimde and latitude of a Ship at fea, in-4. 1763 ); enfin c'eft celle que M. de Ja Caiïlle a choifie & qu'il a entrepris de perfeétionner en la rendant plus facile, 11 explique dans fon Mémoire les avantages de cette méthode fur toutes les autres, les procédés qu'il faut fuivre pour l'employer, la manière de calculer le temps vrai par la hau- teur d'une étoile, de réduire par le calcul la hauteur de la Lune & celle de l'étoile, à ce qu'elles devoient être dans le moment où l'on à mefüré leur diflance; il explique la manière de trouver la diftance vraie, par le moyen de la diftance apparente que l’on a obfervée, & qui eft affectée de la réfraétion & de la parallaxe. Ces deux fortes de corrections font a principale difficulté de la recherche des longitudes ; M. l'abbé de la Caille avoit expliqué fort au long, dans fes Fphémé- rides {pour 1755—65 ), le calcul trigonométrique dont on peut faire ufage; il le confeille encore à tous ceux qui font capables de le faire; mais fachant combien il eft difficile d'acquérir aflez d'habitude pour faire promptement d'auifi longues opérations, il a cherché une méthode graphique, où il a fupprimé toute efpèce de calcul ; le fondement & les démonftrations de cette méthode, fe trouvent dans fon Mé- moire , les préceptes & les détails ont été expliqués dans les Connoiffances des Temps de 1761 & de 1762, dans le Traité de Navigation donné par M. Fabbé de la Caille, & dans l'expofition du Calcul aftronomique de M. de la Lande; ces préceptes ne fuppofent pas même qu'on fache faire une règle de trois, mais uniquement l'addition & la fouftraction des degrés, minutes & fecondes ; quelques lignes tirées fur "un carton, mefurées avec un compas & rapportées fur des échelles, font trouver la longitude avec toute la précifion que comportent les Tables & lobfervation. Les Commiffaires que l'Académie nomma en 1#59, pour examiner ces nouveaux procédés, reconnurent qu'on pouvoit en une demi-heure de temps, rnême avec très-peu Zi V.les Mém. p.227. 380 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE d'habitude , achever tout le calcul de la Longitude; les trois obfervations que l'on fuppofe faites, ne demandent pas un quart d'heure, fuivant le témoignage de M. fabbé de la Caille, qui en avoit fait plus d'une fois l'expérience ; ainfi dans l'efpace de trois quarts d'heure, on peut obferver & calculer, c'eft-à-dire, trouver enfin Ja longitude du lieu où lon étoit au temps de l'obfervation, à un degré près, & mieux encore , fans aucune théorie ni aucun calcul aftronomique , en fuppofant que l'Obfervateur foit muni d’un Almanach nautique, calculé par avance à Paris ou ailleurs, dans la forme indiquée par M. l'abbé de la Caille, foit dans fes Éphémérides , {oit dans la Connoïffance des Temps de 1761, & dans le Traité de Navigation ; nous en parlerons ci-après , à l'occafion de la Connoiflance des Temps, que M. dela Lande publia la même: année , & dans laquelle fe trouve un très-ample détail fur cette matière, SUR- L'A CHANGEANTE DU GOU DU CYGNE. N trouve dans l'Hifloire ancienne un grand nombre d'étoiles qui ont paru & difparu; l'étoile nouvelle de Caffiopée qui parut en 1572, & celle du Serpentaire qui parut en 1605, ont été les plus remarquables de toutes, puifqu'elles furpañloient en éclat les étoiles même de la pre- mière grandeur : on trouve dans le livre de Liceti, de novis affris, dans les Élémens de M. Caflini, & dans l’Aftronomie de M. de la Lande, un grand nombre d'exemples de ces étoiles nouvelles. Mais ce qui paroït encore plus fimgulier, c'eft l'alternative d'apparition & de difparition qu'on obferve d'une manière à peu-près conflante & périodique dans l'étoile o de la Baleine, & dans l'étoile y, du Cygne; la première a une période de trois cents trente-quatre jours, & la feconde de quatre cents cinq jours ; ainfi l'étoile , au cou du Cygne, après avoir paru 4 DES ScrENCEs 1817 dans fon plus grand éclat , diminue de grandeur, elle difparoit même totalement, après quoi elle augmente de nouveau & revient à fon plus grand éclat, comme elle étoit quatre cents cinq jours auparavant: ces changemens furent découverts par hafard en 1 686 par M. Kirch (Mifcellanea berolnenfia, 17 1 0, Philof. wanf. n° cccxLr11). Depuis bien des années l'on n’a rien écrit fur ces phéno- mènes; ils attirèrent l'attention de fous les Aftronomes dans le temps de leur nouveauté: mais lorfqu'on eut confiaté la vérité des changemens obfervés, & la durée de leurs périodes, on oublia, pour ainfi dire, ces aftres finguliers , & depuis les obfervations que M. Maraldi fit en 1 715 fur la changeante du cou du Cygne, on n’en retrouve aucune obfervation dans nos Mémoires. M. le Gentil a entrepris de vérifier ce qu'on avoit obférvé fur cette changeante, il a examiné quels étoient les temps de fa plus grande cluté, combien il s’'écouloit de jours entre ces différens retours de lumière : il a comparé fes obférvations avec celles qui furent faites par M. Kirch & M. Maraldi : & par cette comparaifon il a déterminé la durée moyenne de ces retours de quatre cents cinq jours & =, c'eft-à-dire de 405i:7h 12°. Mais les différentes comparaifons que donne M. le Gentil de fes obfervations faites en 1747, 1756,1757 & 1758, avec celles de 1 686 & des années füivantes, lui font croire que la durée-de cette période eft Plus courte aujourd'hui d'environ deux ou trois jours, qu'elle ne l'étoit il y à cinquante ou foixante ans ; M. Caffinia remarqué de femblables i négalités dans l'étoile o - du cou de la Baleine, en forte qu'il eft déjà très-vraifemblable que ces fortes de périodes ne font point uniformes & égales ; un plus grand nombre d'obfervations fera connoître quelque Jour quelles font les circonftances & les inégalités de ces appari- tions & de ces dif paritions, alors peut-être on pourra remonter à leur caufe, qui eft Jufqu’ici abfolument inconnue, M. le Gentil ne s'eft Pas cru en état de faire fà-deflus au- cune conjecture ; on peut confulter Riccioli, au fecond tome Z ijj 182 HisToiRE DE L’ACADÉMIE ROYALE dé fon Almagefle, p. 176; M. Cafini, Ékem. d'Affr. p. 67; M. de Mairan, if. Acad. 1725,p. 75; M. Maraldi /Acm. acad. 1719) ; Ouvrage que M. Bouillaud, célèbre Aftronome de Paris publia en 1667, à ce fujet, dont voici le titre: Î{maëlis Bulliadi ad Aflronomos monita duo, primum de flella nova in collo Balenæ ante aliquot annos via, alterum de nebulofa in Andromede cingulo, ante biennium iterum orta , Paxif. 1667, in-4.; enfin le Difcour$fur les différentes figures des Aflres, par M. de Maupertuis, #n-8° 1732; Riccioli & Bouillaud fuppofent, pour expliquer la difparition des étoiles changeantes, que ce font des globes qui ont une partie obfcure & l'autre lumineufe , en forte que tournant fur leur axe, ces étoiles nous _préfentent quelquefois la partie obfcure, & deviennent alors invifibles: M. de Mairan penfa que ce pouvoit être des comètes d’un autre fyflème planétaire, dont les orbites étoient fort excentriques. Mais la découverte de l'aplatiflement de la Terre & la théorie des forces centrifuges, ont donné lieu depuis ce temps-là d'imaginer une caufe plus vraifemblable de ces difparitions : voici l'idée que M. de Maupertuis nous en donne dans l'ouvrage qne nous venons de citer; if démontre d'abord qu'une Planète en tournant fur fon axe, peut prendre un degré d'aplatiflement très - confidérable, fi la viteffe de fa rotation eft fort grande, & la pefanteur de fes parties fort petite; dans plufieurs hypothèfes , la planète peut devenir plate comme une lentille où une meule de moulin, & fe réduire même, pour ainfi dire, à un plan circulaire, peut-être y at-il beaucoup de ces fortes d’Aftres, & nous ne jes verrons jamais fi nous fommes à peu près fitués dans le plan de leur équateur , parce que leur tranchant étant dirigé vers notre œil, nous ne voyons que l'étendué d’un méridien, qui eft une elliple très - étroite & d’une furface trop petite pour que fa lumière paroiffe de f. loin. I eft fort vrai-fmblable que les étoiles fixes ont leurs planètes qui circulent autour d'elles, comme notre Soleil a les fiennes: ces planètes peuvent être fort groffes, fort excen- triques, décrire des orbites très-inclinées au plan de féquateur DIFNSUISLOLTRE WC ES 183 de l'étoile, & changer la fitation de cet équateur par des attractions femblables à celles qui produifent fur la Terre le déplacement de l'Équateur & des Pôles & la préceflion des équinoxes : fi cela a lieu dans les fyftèmes planétaires de quelques- unes de ces étoiles fixes, il arrivera néceffairement que tantôt on verra leur difquele plus large, & que dans d’autres temps elles nous préfenteront feulement leur épaiffeur; alors on les perdra de vue: c’eft ainfi que M. de Maupertuis explique les appa- ritions à peu-près conftantes de l'étoile o de la Baleine & de l'étoile + du Cygne. M. le Gentil voulant faciliter aux Aftronomes l’obfervation des phafes de cette étoile, a calculé pour tout le refte du fiècle les années & les jours où doit arriver fa plus grande lumière; ce calcul aura befoin d’être comparé avec l’obfervation, car on a trouvé dans certains temps plufieurs mois de différence entre les apparitions de ces étoiles & les temps où elles au- roient dû reparoître, en calculant leurs phafes par des périodes uniformes. La Changeante de la Baleine eft également fujette à ces irrégularités, comme M. Maraldi l'a obfervé / Mém. Acad. 1719), & il mous refte à defirer fur cette étoile des obfervations aufli récentes & auffi curieules que celles dont nous venons de parler à foccafion de la Changeante du Cygne. , URL ES NEBUTLEUSE Æ A bhncheur qui fe remarque dans & voie lactée tout autour du ciel, eft remarquable à la vue fimple, à caufe de fa grande étendue; mais on trouve dans plufieurs endroits du ciel de petits efpaces d'une blancheur pareille à la voie héée, quelquefois même plus éclatans ; c'eft ce qu'on appelle les Nébuleufes ; leur petitefle fait qu'en ne les voit prefque point fans le fecours des lunettes. La nébuleufe d’Andromède eft fa première qui fut oblervée & décrite après la découverte des lunettes d'approche; elle fut V. les Mérme P: 453 184 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE aperçue par Simon Marius en 1612, comme on le voit dans la préface de fon Livre intitulé A4wdus jovials ; elle paroi à la vue fimple comme un nuage léger qui fe diflingue à peine ; mais dans la lunette, elle paroît formée par plufieurs rayons blancs, pâles & irréguliers, qui font un peu plus clairs en appro- chant du centre, du moins fuivant quelques Auteurs / Voyez M. Cafjini, Elemens d'Afronomie, M. de la Lande dans Jon Affronomie , p. 217 ); dépuis fa nébuleufe d’Andromède , on en avoit découvert d’autres dans les conftellations d'Orion, du Sagittaire, d’Antinoüs, du Centaure, & d’Hercule; M. le Gentil en a obfervé plufieurs dans l'hémifphère boréal ‘ ( Mém. préfentes , tome 11, p. 138 ). M. l'abbé dela Caille, dans le cours des obfervations qu’il fit au cap de Bonne-efpérance en 1751 & 1752, pour déterminer les pofitions de dix mille Étoiles, aperçut quarante-deux nébuleufes / Mém. Acad, 17 ÿ 4), & il ne fe flattoit pas d'avoir remarqué toutes celles qui font dans la partie auftrale du ciel ; ainfi nous avons lieu de croire qu'il y a beaucoup plus de nébuleufes qu'on n’en a décrit jufqu'à préfent. On ignore la caufe ou la matière de toutes ces nébuleufes, qui font un phénomène diflicile à comprendre ; mais ce qu'il y à de plus fingulier encore, ce font les variations qu’on a cru apercevoir dans quelques -unes ; Bouillaud & Kirch ont penfé que la nébuleufe d'Andromède n'avoit pas été vifible au temps de Tycho & de Bayer, quoiqu'elle l'eût été plufieurs fiècles auparavant ; M. de Mairan a cru reconnoître quelques changemens dans la nébuleufe d'Orion, & M. le Gentil foup- conne que la nébuleufe qu'il découvrit en 1749, navoit pas toujours paru, & que la nébuleufe d’Andromède a changé de forme; pour s’'affurer de ces difparitions ou de ces changemens, M. le Gentil a voulu obferver les nébuleufes avec toute l'attention poffible, & pour cet effet , il y a employé la lunette de trente- deux pieds qui eft à l'Obfervatoire Royal, & un télefcope de fix pieds, qui appartient à M. Pingré, il les a comparées avec de plus petites lunettes ; il a examiné & décrit plufieurs nébuleufes , & par ce moyen, il a fourni aux Aftronomes qui nous fuivront un DES SCIENCES. 185 un terme de comparaifon , qui fera juger fi ces ébuléufee font véritablement fujettes à des variations de grandeur, de figure & de lumière. SUR UNF ERREUR QUI S'ÉTOIT GLISSÉE DANS LES PRÉDICTIONS D U PASSAGE DE VÉNUS SUR LE SOLEIL, Pour l’année 1761. oUS avons parlé fort au long dans l'Hiftoire de l'Aca- démie pour 1757, des préparatifs qu'avoit exigés le pañlage de Vénus fur le Soleil, parce que l Académie en étoit fpécialement occupée au temps où s'imprimoit le Volume de 127573 nousn'infiflames point alors fur le fait affez remarquable de ferreux où l'on avoit été long-temps à ce fujet ; le détail fe trouvoit dans les regiftres de 1759, qui eft l'année de fa véritable date, & nous allons le reprendre ici en peu de mots. M. Häalley fut le premier qui, dans les Tranfaétions philo- fophiques de la Société royale de Londres en 1691 , annonça de quelle importance devoit être ‘le pafage de Vénus fur le . Soleil pour découvrir la diftance du Soleil à la Terre, en difant que fi l'intervalle de temps entre les deux contaéts intérieurs de Vénus, pouvoit fe déterminer à une feconde près, en deux pays fitués convenablement, on en concluroit là parallaxe du . Soleil à un cinq centième près; il développa en 1716 cette propolition curieufe, en affignant les lieux où il croyoit que Méette obrvation devoit être faite pour remplir l'objet qu'il .# annoncé: voici à peu-près ce qu'il en dit { Philof. Taufs "348, p.454, lones, p. 213). « Vénus fera au milieu de fon pafage le 6 Juin 1761 , vers les 6 heures du matin au méridien de Bondres, & l'inter valle des « deux contacts intérieurs de Vénus & du O vus du centre « Hifl. 175 9° ; Aa 186 HisToirRe DE L'ACADÉMIE ROYALE » de la Terre, fera de 7" 20"; fi l’on obferve ces deux contatts » à l'embouchure du Gange fous une latitude de 2 2 degrés, on » trouvera l'intervalle des deux contaéts de 7° 8° 42";'plus petit » de 11° 18” que l'intervalle vrai qui feroit vu du centre de Ja » Terre, & ces 11° font l'effet de {a parallaxe ; fi d'un autre » côté la même obfervation peut être faite au port Nelfon, » dans l'Amérique feptentrionale près la baie d'Hudfon à 56 » decrés de latitude, l'intervalle depuis l'entrée totale de Vénus » fur le Soleil jufqu'au commencement de fa fortie, fera de 7h » 23° $2", plus grand de 3° 5 2” que l'intervalle vu du centre » de la Terre, & plus grand de 1 5’ 10" qu'en Afie vers l'em- bouchure du Gange :» cette différence de 1 5” 10"”entre les deux durées obfervées, fuppofe la parallaxe du Soleil de 1 2"+, comme l'eflimoit M. Halley, & devant être proportionnelle à la parallaxe, cette différence devoit nous en apprendre fa véritable valeur. M. Häalley ayant ainfi décidé les Voyages qu'il convenoit d'entreprendre , pour faire avec le plus grand fruit cette im- portante obfervation, on n'avoit point fongé à appeler de fa décifion, ni à vérifier fes calculs ; les Anglois, remplis d’une jufte confiance pour cetilluftre Aftronome, fongeoient à envoyer un Obfervateur au nord de l'Amérique, où la Nation angloife avoit déjà quelques établiffemens; le projet avoit été annoncé dans les papiers publics en 1759, & perfonne encore n'avoit douté du fuccès. | Ce fut alors que M. de F'Tfle commença d'examiner cette matière ; il avoit imaginé, à l'occafion des paffages de Mercure fur le Soleil, une efpèce de Carte fort commode pour aper- cevoir les circonftances d’un paflage dans tous les pays de la Terre, & l'effet des parallaxes dans chaque lieu; il en avoit donné une en 1753 pour le paflage de Mercure, que nous obfervames le 6 Mai, il voulut en faire une pour le pañlage de Vénus qui étoit attendu; la conftruétion de cette Carte ne pouvoit manquer de lui faire apercevoir non-feulement le défivantage de la pofition indiquée par M. Häalley, mais encore le choix qu'on devoit faire pour trouver dans cette obfervation le plus grand avantage, DES SCIENCES. F #8 M. Häalley ne favoit pas en 1716, que le nœud de l'orbite de Vénus fur l'écliptique rétrograde chaque année de 20”; mais quelques années après, lorfqu'il fit imprimer fes Tables des Planètes (qui n'ont été diftribuées dans le public qu’en 4749 ), il reconnut ce mouvemnnt , en forte qu'il fufh{oit de calculer le paflage de Vénus par les Tables de M. Halley, - pour rectifier fes Élémens, & pour trouver que la latitude de Vénus, au temps de fa conjonction, devoit être de près de 10 minutes, au lieu de 4’ que M. Halley avoit fuppofées ; c'étoit ici la principale caufe de l'erreur, mais il y en avoit une autre qui étoit une véritable méprife & dont nous par- lerons plus bas. Ce fut le 21 Novembre 1 759, que M. de fffle annonça à l'Académie fes réfultats, fort différens de ceux de M. Halley ; au lieu de “1 1° 3 dont la durée devoit être à Pondi- cheri plus courte que la vraie, fuivant M. Halley , M. de l'Ifle donnoit feulement 8 minutes; à l'égard de la baie d'Hudfon, il trouvoit un réfultat contraire à celui de M. Halley, c'eft-à- dire, 6 de diminution , au lieu de 4° d'augmentation que M. Halley avoit annoncées ; il ne devoit donc y avoir que 2 minutes de différence entre ces deux durées, au lieu de 18 que M. Halley avoit trouvées; le lieu que M. de fIfle avoit choïfi pour ces calculs, étoit à 65 degrés de latitude feptentrionale, & fitué de manière que fe milieu du pañlage y .arrivoit à minuit; çar il avoit reconnu que la fortie de Vénus ne pouvoit pas s’obferver au port Nelfon, parce qu'elle devoit arriver avant le lever du Soleil. | . La méthode par laquelle ces calculs avoient été faits, eft celle que M. de l'Ifle avoit donnée dans les Mémoires de lAca. démie pour 1743 , la quantité de la parallaxe eft celle que M. de l'Ifle avoit trouvée de 10"+ par l'examen des obfer- vations faites au cap de Bonne-efpérance & à Greenwich *, . La grande différence qui fe trouve entre le réfaltat de M. de l’Ifle & celui de M. Halley, vient fur-tout de a latitude de Vénus, que M. Hälley fuppofoit de 4’ au lieu de 10’, parce que le mouvement du nœud de Vénus n'étoit pas encore L Aa ji} * Mén, acak année 1752, Pr 43 8 188 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE connu en 1716; M. Halley avoit preflenti qu'il devoit y avoir une différence à cet égard, il examina même ce qui devoit avoir lieu fi Vénus venoit à pafler plus au nord qu'il ne avoit fuppofé, & il trouva que la différence n'étoit pas confidérable; car en fuppofant que la latitude füt de 4 minutes boréale , au lieu de 4’ auftrale, il trouvoit que la différence des durées obfervées aux Indes & en Amérique, au lieu d’être de 18’ 40", feroit de 21° 40". Si au lieu de fuppofer ainfr que l'erreur des Tables pouvoit mettre Vénus trop au midi, M. Halley eût fuppolé que le calcul la donnoit trop fepten- trionale, & s'il eût examiné ce qui pouvoit arriver en fup- pofant la latitude plus méridionale de 6 minutes, comme on l'a trouvé par obfervation, il auroit vu que les réfultats changeoient totalement, & qu'ils étoient à peu-près tels que nous venons de les rapporter d'après M. de fifle. Il s'éoit gliffé dans les calculs de M. Halley une faute qui pouvoit être très-eflentielle, quoique dans le cas particulier que nous examinons elle ait eu peu d'influence ; au lieu de mettre le cercle de latitude à la droite du cercle de déclinaifon , ou du côté de l'occident vers le nord, il l'avoit mis du côté oppolé : par ce moyen l'orbite de Vénus faifoit avec le cercle de décli- naifon ou méridien, un angle de 244, au lieu de 1444 qu'on auroit dû trouver ; M. de F'fle avoit rectifié cet élément auffi-bien que les autres parties du calcul de M. Halley , lorf- qu'il annonça à l'Académie, le 21 Novembre 1759, les nouveaux réfultats dont nous venons de parler. Quoi qu'il en foit, M. de l'Ifle ayant dreflé une Mappe- monde où l'on voyoit les circonflances & l'effet des parallaxes dans toutes les parties de la Terre, on fut bientôt en France & dans tous les pays de l'Europe, à portée de choifir les pays où il falloit fe tranfporter pour faire avec fruit cette importante obfervation ; les Anglois renoncèrent au voyage d'Amérique, reconnu abfolument inutile, pour envoyer M. Maskeline à l'ile de Sainte-Hélène, & M. Mafon à l'ile de Sumatra (ou par l'évènement au cap de Bonne-efpérance ) ; on peut confulier à cet égard l'Hifloire de l'Académie pour DES S'CTE N CES. 18 œ 2757 & 1761, & les Tranfaétions philofophiques de fa Société royale de Londres pour 1761. sit année, M. de la Lande publia un ouvrage qui a poux titre: Zables affronomiques de M. Halley pour les Planètes 7 les Comeétes , réduites au nouveau flyle &r au mé- ridien de Paris, augmentées de plufieurs Tables nouvelles de différens Auteurs pour les fatellites de Jupiter ©" les’ Etoiles fixes, avec des explications, détaillées © l'hifloire de la Cométe de 1759. Ce recueil de Tables eft un des plus intéreffans qui ait paru depuis long-temps pour l'Aftronomie; les Aftro- _nomes s'en fervent journellement: nous allons donner une idée de la variété des objets qu'il renferme & de leur im- portance, Les Tables aftronomiques du célèbre Halley furent im- primées vers l'an 1720; mais l'efpérance qu'avoit l'Auteur d'y faire encore des additions, & fur-tout d'y inférer la fuite de fes obfervations de la Lune, le porta à en différer la publication ; l'Auteur mourut en 1742, & ce fut feulement en 1749 que fes Tables parurent dans le public : quelques années après, M. le Monnier engagea M. l'Abbé Chappe, aujourd'hui Membre de l’Académie, à donner une nouvelle édition de ces Tables pour la partie du Soleil & de la Lune, elle parut à Paris en 1754, accompagnée de plufieurs ad- ditions utiles, & fur-tout d'une explication plus ample & mieux faite que celle de l'édition de Londres *: il reftoit à publier les Tables des Planètes, des Satellites & des Comètes ; ceft ce que M. de la Lande entreprit en 17 $ 9 dans l'ouvrage dont nous avons à rendre compte. En annonçant au Public les ouvrages de M. Häalley , if étoit naturel de parler un peu de l'auteur ; M. de la Lande, * Nous devons avertir ici que | le Docteur Bevis, célèbre Aftro- dans quelques Écrits on a fuppofé | nome d'Angleterre, à qui la méprife mal-ä-propos que l'édition de | a dû déplaire: l’Éditeur fe nomme Londres avoit été donnée par M. | Raper. Aa ii x90 Histoire DE L'ACADÉMIE RoYaALE dans une préface hiftorique ; rend hommage à la mémoire de cet illuftre Anglois, en parcourant les principaux évènemens d'une vie qui fut illuftrée par les plus belles entreprifes, par les idées les plus fublimes & par les plus heureufes découvertes ; Edmond Halley naquit le 8 Novembre 1656, & dans l'efpace de quatre-vingt - fix ans qu'il a vécu, il n'eft aucune branche de l’Aftronomie qui ne lui ait dû une partie de fa perfection; dès l'âge de vingt ans il alla dans File de Sainte-Hélène pour dreffer le catalogue des Étoiles auftrales; il y obferva un paflage de Mercure fur le Soleil ; & dans le livre où il rendit compte de fes obfervations, on vit plufieurs idées neuves qui annonçoient le génie de l'auteur ; fes Mémoires fur la variation de laimant, fur les paffages de Vénus devant le Soleil, fur les vents alizés & les mouflons, fur la période des inégalités lunaires, fa Cométographie, {es Tables, fes obfervations, ont juftifié dans la fuite la haute idée qu'on avoit conçue de lui dans fa jeunefle, & Newton le cite plus d’une fois dans fon fameux livre des Principes, qui ne fut même publié que par les {ollicitations & les foins de M. Halley : au refle, fon peut voir l'Éloge de M. Halley dans l'Hiftoire de l'Académie, année 1 742. Ses Tables aftronomiques font un de fes principaux ouvrages; les Aftronomes les regardent encore comme les meilleures qu'il y ait, fi fon en excepte celles de M. Caflini, qui peuvent aller de pair à plufieurs égards; M. de la Lande n'a pas cru cependant qu'il convint de publier des Tables im- primées depuis quarante ans, fans y ajouter celles qui font relatives aux progrès que l’Aftronomie a faits dans cet efpace de temps; c’eft pourquoi il y a mis de nouvelles Tables pour les fatellites de Jupiter, pour les Etoiles fixes, des Tables de réfraétion, d'aberration, de nutation, enfin tout ce qui man- quoit jufqu’ici à nos recueils de Tables aflronomiques. Le volume commence par l'explication des Tables; on y trouve d’abord les préceptes qu'il faut fuivre pour trouver la longitude & la latitude d'une Planète, foit pour le centre du Soleil, foit pour celui de la Terre, fans négliger aberration &c la nutation; il étoit naturel de placer cette partie fondamentale DES SCIENCES. ‘191 de Pexplication à la tête de lo vrage, afin qu'on la trouve fans peine, les Aftronomes nait un ufage continuel. M. de la Lande ajoute à ces préceptes un aflez grand nombre de remarques intéreflantes, tant fur l'hifloire que fur h conftruétion des Tables aflronomiques; il donne un cata- logue de toutes les Tables aftronomiques des Planètes qui ont eu quelque célébrité, à commencer depuis celles qui font dans l'Almagefte de Ptolémée, jufqu'à celles de M. Halley ; il compare enfuite celles-ci avec les Tables de M. Caffini , les feules qui puiflent le leur difputer ; & pour qu'on puifle juger de leur différence dans tous les points de la théorie planétaire, il donne une Table de comparaïfon, où fe trouve la quantité qu’il faut ôter de tous les nombres de M. Caffini, ou y ajouter pour avoir ceux de M. Halley. On eft étonné de voir dans cette Table que M. Halley donne 65 minutes de moins que M. Caffini au mouvement féculaire du nœud de Saturne, & 41 minttes de moins à la longitude du nœud : on ne pourra guère vérifier cette pofition qu'en 1769, où Saturne paflera par fon nœud afcendant; mais quant aux mouvemens du nœud, M. de la Lande l'ayant calculé par la théorie de Fat- traction de Jupiter & des autres Planètes, a trouvé qu'il doit approcher beaucoup plus des Tables de M. Halley. Les équations féculaires de Jupiter & de Saturne, c’eft-à- dire les inégalités de leurs moyens mouvemens, dont M, alley fait ufage dans fes Tables, fans en donner aucune ex- plication, & qui navoient été détaillées par aucun Auteur, avoient déjà été l’objet des recherches de M. de la Lande, comme on l'a vu dans les Mémoires de l’Académie; ainfi perfonne ne pouvoit mieux expliquer la Table de M. Halley, fes fondemens & fes ufages. Il parle enfuite fort au long de fa manière de conftruire les Tables de l'équation du centre dans une orbite elliptique; comme ce problème eft réfolu fort diverfement par différens Auteurs, & fouvent d’une manière très-longue, M. dela Lande explique deux règles fort commodes, lune rigoureufe mais indirecte, qui confifte à fuppoler connue l'anomalie vraie, poux 102 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE retrouver enfuite l'anomalie moyenne qui étoit donnée; f'autre par approximation mais directe, qui a été donnée par M. Simpfon dans un recueil anglois de Mémoires Phyfico - mathé- matiques, & qui eft extrêmement fimple & commode quand l'excentricité n'eft pas bien forte, ou qu'on n'a pas befoin d’une extrème précifion; la première méthode eft celle que M. de la Lande préfère dans l’ufage de l'Aftronomie , parce qu'elle eft plus générale & fufceptible d’une plus grande exac- titude ; les Comètes même: qui tournent dans des orbites prodigieufement alongées , fe calculent par ce moyen. Les dif tances au foyer ou les rayons veéteurs , fe trouvent auffi dans cette méthode avec beaucoup de facilité, & M. de la Lande donne pour chaque Planète les logarithmés conftans qui peu- vent fervir à conftruire, à vérifier & à étendre les Tables de M. Halley: les démonftrations de ces règles fe trouvent aétuellement dans fon Traité d’Aftronomie, qui vient de paroître en 1764, dans le temps où lon imprime cette . Hiftoire. L’explication des Tables des Planètes ef fuivie de Ia théorie des Comètes; M. de la Lande y donne d'abord une traduc- tion littérale de la Cométographie que M. Halley avoit donnée en Jatin; il a cru devoir féparer du texte les démonitrations, ks notes, les additions, qu'il a mifes en grand nombre à la fuite de lOuvrage de M. Haley. Après un petit abrégé de l'hifloire des Comètes, prife en général, M. Halley parle de la Comète de 1680 , qui fut l'époque de toutes les découvertes relatives à cetté théorie : cette Comète extraordinaire defcendit prefque perpendiculai- rement vers le Soleil; elle parut pendant quatre mois, & Ja courbure de fon orbite étoit fi confidérable, qu'on ne pouvoit trouver une occafon plus favorable pour former une théorie de ces fortes de mouvemens. : | Les Oblervatoires de Paris & de Greenwich étoient occupés par les plus habiles Aftronomes, & la Comète fut obfervée avec une extrême exactitude ; dans le même temps Newton, : éccupé du grand Ouvrage qui parut peu d'années après, venoit de DES SCIENCES. 193 de découvrir la belle loi de l'attraction planétaire, if aperçut bientôt que la Comite de, 1680 avoit fuivi la même loi, & que toutes fes inégalités s'expliquoient en la fuppofant dans une ellipfe dont le Soleil occupoit un foyer, & qu'on pouvoit y fubftituer une parabole fans erreur fenfible; ce qui rendoit les calculs infiniment plus faciles. Ce fut d'après les principes de ce grand homme, que M. Halley chercha les moyens de trouver, par un calcul facile, les lieux d'une Comète dans la parabole, & de trouver la parabole qui fatisfait à trois obfervations ; il calcula pour lors les orbites de vingt-quatre Comètes, travail prodigieux ; pour ce temps-là fur-tout, où les méthodes n'étoient point encore fimplifiées comme aujourd'hui ; nous en avons parlé ci-devant à l'occafion de la Comète de 17509. La Table générale du mouvement parabolique , faite par M. Hälley, contribua beaucoup à rendre ces calculs faciles ; M. Haley en donne la conftruétion dans le Livre dont nous parlons, & quoique M. l'abbé de la Caïlle en ait calculé une plus étendue & plus commode *, M. de la Lande a cru devoir conferver celle de M. Halley il ya feulement ajouté dés démonftrations que M. Halley avoit omifes: de même la Table des élémens des vingt-quatre Comètes de M. Halley, ayant été augmentée dans la fuite, foit par le calcul de quel- ques anciennes Comètes, foit par les obfervations de celles qui ont paru depuis 1698 , où finifloit la Table de M. Halley, M. de la Lande y a fait un fupplément de vingt & une Comètes ; ce fupplément eft encore plus étendu dans VAsTRONOMIE que M. de la Lande a publiée en 1764, poftérieurement à l'Ouvrage dont nous parlons. Tant qu'on ignore la période & le retour d’une Comite, on ne peut calculer fon mouvement que dans une orbite parabolique ; c'eft une approximation dans laquelle on fuppofs que l'elliple qu'elle décrit eft affez alongée & excentrique pour que la diff‘rence entre la parabole & l'ellipfe foit infenfible ; mais quand on connoît la durée de fa révolution, on connoît toutes les dimenfions de fon orbite, on la traite alors comme Hif. 1759. Bb * Von Meme de l’ Acad, année 174 0e 194 HISTOIRE DE L’ACADÉMIE ROYALE une véritable elliple , & le calcul devient fort différent : c’eft le fujet de la feconde partie de la Cométographie de M. Halley. | Il raconte d'abord de quelle manière il découvrit l'identité des Comètes de 1682, de 1607 & de 1531, nous l'avons expliqué affez au long en parlant du dernier retour de cette fameufe Comète obfervée en 1759 ; enfuite donne la conf- truction d’une Table générale elliptique, propre à faciliter le calcul d’une orbite elliptique, de quelqu'excentricité qu'elle foit; fa méthode confifte à employer fanomalie excentrique ; if donne la valeur du fegment qui y répond, d’où il eft facile de conclure l'anomalie vraie & l'anomalie moyenne , & d'en faire une Table pour chaque Comète; en effet M. Halley em- ploya fa Table générale à faire deux Tables particulières , l’une - pour la Comète de 1682, f'autre pour là Comète de 1680; il en donne la conftruétion & la démonftration. Pour vérifier & démontrer fa théorie, M. Halley rapporte les obfervations faites en 1682, par Flamftead à Greenwich, en 1607 par Képler à Prague, & par Longomontanus à Malmoe en Suède, & en 1531 par Appian à Ingolfladt ; il en conclut les longitudes & les latitudes de la Comète, & ar la comparaifon du calcul & de l'obfervation , il démontre l'exactitude de fa théorie : « cet accord, dit-il, feroit bien » étonnant fi c'étoient trois Comètes diflérentes, ou que ce ne » fût pas le retour d’une même Comète dans une orbite elli » tique qui pañle aflez près de la Terre & du Soleil ; fi donc » elle revient encore, fuivant notre prédiétion, vers l'an 1758, » a poftérité fe fouviendra que c’eft à un Anglois que l'on en doit la découverte. » M. Halley ne trouvoit pas d'autre Comète dont les retours fuflent aufi évidens que ceux de la Comète de 1682; « mais » s'il eft permis de conclure quelque chofe de l'égalité des périodes » & de la reffemblance des phénomènes , il y a lieu de croire, » dit M. Halley, que cette Comète étonnante, qui parut en » 1680, eft la même qui avoit paru en 1 106 fous le règne » de Henri 1, roi d'Angleterre; l'on vit aufli une Comète fem- » blable en 531, & fi l'on remonte jufqu'à fannée 44 avant: y y DES ScrENCES. I: J. C. on trouve qu'après la mort de Célar il parut une Comète « “extrêmement remarquable, dont parlent prefque tous les Hif- « toriens de ce, temps-là / Voyez M. de Mairan, Journal des Savans, 1764.) » M. de la Lande, dans les He qu'il a faites au texte de M. Halley, rapporte un pañlage d’un ancien Manufcrit ( Philof. Tranfaë. vol. x LV 11) au fujet de la Comète de 1106; on y trouve que la Comète parut au commencement des Poiflons, qu’elle fuivit l’ordre des fignes jufqu’au commen- cement du Cancer, & qu'alors elle changea de direction ; on “ne fauroit fatisfaire à ces conditions avec l'orbite de la Comète de 1680, ce qui rend fort douteufe l'identité de ces Comètes. Mais auf l'on a reconnu depuis le temps de M. Haley, deux autres Comètes dont le retour paroît être plus certain ; celle de 1661 eft attendue pour l'année 1790, & celle de 1556 pour l'année 1848 ; lune & l'autre ayant déjà été obfervées avéc des marques d'identité très-concluantes ; plus on obfervera déformais les Comètes, plus l’on en trouvera dont les orbites feront les mêmes , & dont les retours feront connus. Dans le Mémoire de M. Halley fur la théorie des Comètes, l'auteur ne fe propofoit que de donner la conftruétion des Tables générales qui fervent à calculer le lieu d'une Comète dans une orbite déjà connue; il y manquoit une partie effen- tielle que M. de la Lande a ajoutée, & qui confifie à trouver la pofition & {a grandeur d’une orbite, par le moyen de trois obfervations, pour une Comète dont on ignore les élémens; ce problème avoit été rélolu par Newton, par M. Euler, par M. l'abbé de fa Caïlle ; M. de la Lande la fait d'une manière encore plus commode, plus méthodique , plus élémentaire, & il a accompagné fes préceptes d'un exemple très-détaillé. Pour tenir dans ces Jongues opérations l'ordre le plus facile, M. de la Lande commence par prendre feulement deux ob- fervations , ë& il cherche différentes paraboles qui fatisfaffent aux deux premières obfervations ; ce problème ef indéterminé, parce que l'on peut toujours trouver la pofition & la grandeur d'une infinité de paraboles, qui repréfenteront deux obfer- Bb ij 196 HisTorREe DE L'ACADÉMIE ROYALE vations données ; il faut donc fuppofer dans une de ces deux obfervations l'un des élémens que lon cherche, comme la diflance au Soleil ou l'angle de commutation ; on en con- clut tout le refte pour la feconde oblervation , par le moyen de quelques faufies pofitions, & l'on a pour lors une parabole qui fatisfait à deux obfervations ; il en faut trouver enfuite au moins une feconde qui fatisfaffe encore aux mêmes obfervations, en faifant une autre fuppofñition pour la première diflance. Quand on a deux ou trois paraboles qui repréfentent égale- ment bien les deux obfervations, on calcule dans chacune dé ces orbites le lieu de la Comète au temps de la troifième® oblervation, & celui qui s'accorde avec le lieu obfervé, indique la parabole qu'il faut préférer, ou celle qui approche le plus de la véritable orbite; on trouvera dans l'Aftronomie de M. de la Lande le détail de quelques opérations graphiques qui peuvent faire trouver avec beaucoup plus de promptitude & de facilité les fuppofitions qui s'écartent le moins de la véri- table orbite. M. de la Lande traite enfuite du retour des Comètes: il explique la manière de trouver le grand axe & le paramètre de leur orbite, quand on a la durée de la révolution, & de trouver le lieu de la Comète avec fa diflance au Soleil pour un moment quelconque ; de-là il pafle à la Comète de 1682, obfervée en 1759, dont il donne une hifloire fort détaillée, avec tous les calculs qui en dépendent; mais puifque nous en avons parlé fort au long dans un article féparé de cette Hiltoire, nous n'infiflerons point fur cette partie du Livre de M. de la Lande, & nous paflerons à l'article des fatellites de Jupiter. M. Halley , dans fà colletion de Fables , avoit inféré celles de M. Bradley pour les fatellites de Jupiter, elles étoient en 1719 les meilleures que l'on eüt, quoique M. Bradley lui- même les jugeït fort défectueules ; M. de la Lande a donc cru devoir les fupprimer dans la nouvelle édition, & il y &° fubititué des Tables plus récentes & plus parfaites. Pendant bien des années, M. Maraldi s'étoit occupé à D'EASUSA CIE NOCHENSN TE FO _bfrver les fatellites de Jupiter, il avoit donné, à l'exemple de feu M. Maraldi fon oncle, divers Mémoires où il per- fectionnoit leur théorie ; mais il n'avoit pas cru qu’il y en eût affez pour publier de nouvelles Tables. M. Wargentin, célèbre Aftronome Suédois qui habitoit à Upfal en 1746, & qui obfervoit affidüment les fatellites de Jupiter, aperçut plus d'une gs combien les Tables de leurs éclipfes étoient défeétueufes, combien il étoit défagréable pour les Obfervateurs de ces climas glacés de n'être pas certains du ealcul d’une éclip{e, & d’être réduits à manquer les obfervations, ou à les attendre fort long-temps; M. Wargentin réfolut donc de conftruire de nouvelles Tables, il raflembla toutes les obfervations qu'il put trouver, & il en forma des Tables qui parurent en 1746 *: ces Tables étoient toutes dans la forme que M. Caffini avoit donnée à celles du premier Satellite, pour pouvoir en calculer les éclipfes par la feule addition de quelques nombres; M. Wargentin introduifit dans les Fables du premier Satellite, une équation de 7° 20”, dont il trouva la période de quatre cents trente - huit jours; M. Bradley avoit déjà indiqué la néceflité d’avoir égard à cette période , à caufe des attractions mutuelles des Satellites les uns fur les autres, & par le moyen de cette équation, dont M. Wargentin détermina la valeur, il parvint à faire des Tables du premier Satellite, dont l'erreur n'alloit prelque jamais à une minute. Il introduifit auffi dans le fecond & le: quatrième Satellite des équations pareilles , fondées feulement fur les obfervations; il employa dans finclinaïfon du deuxième & du troifième Satellite des variations dont on n'avoit jamais tenu compte, enfin il donna des Tables incomparablement plus exactes que celles dont on s'étoit fervi jufqu'alors , & qui auroient mérité d'être fubflituées à celles de M. Bradley dans la collection des Tables de M. Halley.. . l Mais M. de la Lande favoit encore que depuis douze ans M. Wargentinavoit fait à fes Tables des corrections importantes : un grand nombre d'obfervations nouvelles lui avoient. donné # Voy. Alta Socieraris. Regiæ Scienr, Upfalienfis , ‘ cure 1741: ii 198 HisToiRE DE L'ACADÉMIE RoyaALe le moyen de rectifier prefque tous les élémens de fes Tables , ou plutôt d'en conftruire de nouvelles; ce furent celles-ci qu'il envoya à M. de la Lande en 1758, & qui font inférées dans le Recueil dont nous parlons. Ces Tables font précédées d’une ample explication, où l'on voit la quan- tité des corrections nouvelles, les fondemens fur lefquels elles font appuyées & les exemples du calcul.. Dans ces nouvelles Tables, M. Wargentin a employé pour le troifième Satellité une équation de 16 minutes, dont {a période eft de douze ans; elle fatisfait à la plus grande partie des inégalités obfervées, & elle paroït dépendre de l'excentri- cité de l'orbite de ce troifième Satellite, auffi - bien que l'équation du quatrième Satellite, dont lexcentricité eft re- connue par M.° Bradley, Maraldi & Wargentin, qui ont tous travaillé fur cette matière; enfin M. Wargentin, dans fes Tables, a donné au nœud du quatrième Satellite un mouvement direct, ce qui eft conforme aux obfervations , quoique M. Bradley eût jugé que ce mouvement devoit être rétrograde : M. de la Lande a fait voir dans un Mémoire fur cette matière que les attractions mutuelles des Sueilites devoient en effet produire le mouvement direét que l'on obferve : M. Maaldi ayant jugé le mouvement de ce nœud plus confidérable que M. Wargentin ne le fuppole /Mem. Acad. 1758), M. de Ha Lande explique la manière de fe fervir des mêmes Tables, en y employant la correction trouvée par M. Maraldi, au lieu de celle de M. Wargentin. Depuis l'impreflion de ces Tables, M. Mualdi, M. War- gentin & le P. Hell Jéfuite, Aftronome de Leurs Majeftés Impériale & Royale, à Vienne n'ont ceflé de travailler à la perfection de ces théories des Satellites, fur lefquels il refte beaucoup à faire: M. de la Lande a publié dans la Connoif- fance des Mouvemens célefles de 1766, de nouvelles Tables du quatrième Satellite , que M. Wargentin lui a envoyées, & l'Acalémie s'eft déterminée à propoler pour le fujet du Prix qu'elle adjugera en 1766, la recherche des inégalités que les Satellites éprouvent en vertu de l'attraction univerfelle ; Dir ist St CATLE ANG Es: 10.9: tout céla contribuera fans doute encore à la perfection des. Tables des Satellites, & par conféquent au bien de la Géogra- phie; car ces obfervations , fur-tout c«iles du premier & du . deuxième Satellite, font très-utiles pour larecherche des Longi- tudes ; elles font très-commodes & elles méritent bien toute l'attention des Aftronomes. Les Tables du mouvement apparent des Étoiles font encore une partie eflentielle du Recueil de M. de laLande ; on obferve dans les fituations des étoiles fixes trois fortes de changemens, la préceffion , aberration & la nutation: ces trois efpèces de calculs reviennent à chaque inflant dans la pratique de l’Aftro- nomie , & il eft très-important d'en avoir les Tables entre les mains quand on fait des obfervations & qu'on veut en calculer . les réfultats. M. de la Caille avoit donné d'excellentes Tables d'aberration, de préceflion & de nutation dans fon Livre, intitulé Affronomiæ fundamenta ; mais ce Livre avoit été tiré à fi petit nombre, que le Public n'auroit pu jouir du travail de ce grand homme, fr. M. de la Lande n'eût inféré ces Tables dans fà collection ; il a confervé les Tables d'aberration de M. de la Caille, mais celle qui fert à trouver l'argument d'aberration en déclinaifon, a été détaillée d’une manière plus commode que dans le Livre de M. de la Caille: les Tables de préceffion font en partie de M. de la Caille & en partie de M. de la Lande: quant à celles de nutation, M. de la Lande les a calculées prefque tout de nouveau, afin de les aflujétir au fimple argument du nœud de la Lune & non pas à l'afcenfion droite du pôle vrai, comme l'avoit fait M. de la Caille, ce qui étoit un peu plus embarraffant. Ce font ces T'ables générales qui ont fervi à calculer cent cinquante-fix Tables particulières, inférées par M. de latkande dans fa Connoiflance des Temps de 1760 & des fix années fuivantes, où l'on voit avec la plus grande facilité, la préceffion, l'aberration & {a nutation en afcenfion droite & en déclinaifon des cent cinquante - fix. principales étoiles, & par lefquelles on peut avoir en cinq: minutes de temps le lieu apparent d'une étoile pour un temps quelconque , avec la plus grande précifion.. 200 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE L'äberration des Planètes a trop de rapport avec celle des étoiles pour pouvoir en être féparée; aufli M. de*la Lande a inféré dans fon Recueil, des Tables particulières de l'aberration de chaque planète, & une Table générale qui peut fervir pour toutes les Planètes & pour toutes les Comètes, quel que foit leur mouvement & leur diflance à la Terre: il y a joint la démonftration d'une règle fort fimple, tirée des principes de M. Clairaut fur cet matière { Mém. Acad. 1746), & dont M. de la Lande s'eft fervi pour calculer cette Table, F La parallaxe annuelle des étoiles fixes qu'on a foupçonnée fort fong -temps ,. & à laquelle on attribuoit les variations oblervées dans les hauteurs des étoiles, a beaucoup de rapport avec l'aberration, car ces deux effets fe réduifent également à une ellip{e apparente, décrite chaque année par une étoile, avec cette différence que le même point de l'ellipfe marque le lieu apparent d’une étoile pour le commencement de Janvier en vertu de laberration , & pour le commencement d'Oétobre, en fuppofant la parallaxe de 20 fecondes: M. de la Lande fait voir, par une figure de l'allipfe que la Chévre paroît dé- crire, quelle différence & quel rapport il y a entre ces deux - fortes de phénomènes. Le dernier article de ce Livre, a pour objet la réfraction aftronomique ; M. de la Lande y emploie les deux Tables de M. de la Caiïlle, tant pour la réfraction moyenne que pour les changemens qu'elle éprouve, fuivant les hauteurs du thermomètre & du baromètre. Il en a été parlé dans l'Hifloire de l’Acadéinie de manière à ne rien laiffer defirer à ce fujet. Ainfi cette collection de Tables que M. de la Lande nous a donnée en 1759, doit être regardée, même actuellement, comine une des plus complètes & des plus utiles que les Aflronomes puiflent avoir ; elle paroït même d'un ufage in- difpenfable à FHipaqe voudra connoiître l'état aéluel de YAftronomie ou travailler à la perfection de cette Science. On trouvera encore dans le Traité d'Aflronomie du même Auteur, publié en 1764, des additions utiles fur plufieurs articles de ces Tables, CETTE DES SCIENCES. 201 ee année, M. de la Lande publia le Livre qui a pour titre : Connoiffance des Temps pour l'année biffextile 1760, au méridien-de Paris. M. Maraldi qui jufqu’alors avoit été chargé de la compofition de cet ouvrage, ayant ceflé d'y travailler, le Roi, fur la préfentation de l'Académie , en confia le foin à M: de la Lande. Cet Académicien a entrepris cet ouvrage fur un nouveau plan, & il y a fait des additions importantes. Cela nous donnera lieu de parler de l’origine de ce Livre, & dés différens «degrés de perfection par lefquels il a paffé. Depuis la découverte de l'Imprimerie, c’eft-à-dire depuis plus de trois fiècles, la connoiffance des Aftres & de leurs mouvemens a paru aflez intéreflante au Public pour que les Aftronomes aient employé une partie de leur temps à calculer des Fphémérides ou des Tables de la pofition des Planètes pour chaque jour : le célèbre Muller, plus connu fous le nom de : Réciomontanus , fut Îe premier qui fit imprimer un volume d'Éphémérides pour trente ans, à commencer de l’année 1475; en 1482 on eut les Éphémérides de Stofficr: en 1488 celles d'Angelus; celles de Stoffler durèrent jufqu’à Jannée 1550; on eut enfuite fucceflivement les Éphé- mérides de Pitatus, de Simi, de Carelli, de Moletius, de Modftlinus, d'Everard, de Magini, d’Eichfladius, de Leovi- tius, d'Ulacq, de Duret, de Wing , de Gadbury, de Montanari , de Mezavacchi ; celles de Stadius s'étendoient de 1 583 à 1606; celles d'Origan de 1595 à 1655 ; celles d'Argoli de 1641 à 1700; celles de Heker furent très - célèbres, mais elles finifloient en 1 679. Il y eut encore de temps à autres, dans le dernier fiècle, des Ephémérides calculées pour un petit nombre d'années, avec une exactitude plus fpéciale, telles furent les Éphémérides de Képler pour les années 1617-1636, qui font encore recherchées actuellement; celles du Marquis de Malvafa pour 1661-66, à la fuite defquelles M. Caffini publia fes nou- velles obfervations, dans le temps où il travailloit avec tant de fuccès à une réforme entière de l'Aftronomie. Hif 1759. Gc 262 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE C'étoit principalement Allemagne qui avoit fourni des Éphémérides aux Aftronomes, pendant le quinzième & le feizième fiècle; Duret fut le premier en France qui fe livra à ce genre de travail ; il avoit publié des Tables aflronomiques qu'il appela Tables Richeliennes, à. Vhonneur du Cardinal de Richelieu, & en 1641 il donna quinze années d'Éphémé- rides accompagnées, de plufieurs traités d'Aflronomie , avec des Tables de logarithmes. L’établiffement de 1 Académie des Sciences ranima bientôt le goût de l'Aftronomie en France ; M. l'Abbé Picard fut un de nos plus habiles Obfervateurs ; toutes les parties de cette fcience furent perfeétionnées par fes travaux ; l'affiduité qu'il avoit à obferver les aftres, lui rendit plus néceflaire qu'à perfonne le fecours des Éphémérides, & voyant que celles d’Argoli n'étoient ni exactes ni commodes , & que les Ephé- mérides de Heker finifloient à année 1679, il forma le projet de donner chaque année une Ephéméride calculée avec plus d'éendue & plus de foin qu'on ne Favoit fait avant lui, fous le nom de Connoifflance des Temps : a première parut en 167 9; l'année étoit déjà avancée, & M. Picard ne sétoit propofé de commencer qu'à l'année 1680 ; mais il fut dé- terminé à donner celle de 1679, à l'occafion d'un voyage du Roï, qui defira d'avoir ce livre, qui en avoit approuvé le projet, & qui en accepta la dédicace. La Connoïffance des Temps ne formoit alors qu'un petit volume de foixante pages (elle s’eft augmentée depuis jufqu’à plus de deux cents quatre-vingts pages ); elle contenoit cependant dès- lors un grand nombre de chofes nouvelles, & qu'on n'étoit point accoutumé à trouver dans les Ephémérides; par exemple, le lever & le coucher du Soleil & de la Lune, eu égard aux réfraétions & aux parallaxes ; pour Paris & pour les principales villes du royaume , le paflage de la Lune au mridien, l'afcenfion droite du Soleil & {a déclinaïfon, é- quation du temps, la durée des crépufcules, la manière de trouver l'heure des marées , de connoître pendant la nuit l'heure u’il eft au moyen des étoiles circonpolaires, les obfervations. météorologiques faites pendant l'année 1678, &c. : DES SCIENCES 203 M. Picard annonça, en publiant ce livre, qu'il continueroit "de le calculer chaque année, & qu'il y ajoutéroit tout ce qui auroit été trouvé de nouveau & de curieux dans l’Aftronomie, tant en. France qu'ailleurs , les obfervations des années précé- dentes & des traités de Phyfique & d’Aftronomie. En effet, le volume qui parut enfuite pour 1680 , ren- fermoit plufieurs objets nouveaux , fur les réfraétions, fur le pendule fimple, fur la propagation du fon, &c. Dans les volumes fuivans il fut parlé de 14 mefure de la Terre, de la déclinaifon de Faimant, de la recherche des Longitudes en - mer, des obfervations de la Comète de r 680. En 1682, M. Picard'étant mort, le travail de là Con- noïflance des Temps fut confié à M. Lefebvre pour 1 6 85; C'étoit un des Aftronomes de l'Académie qu'un talent naturel pour l’Aftronomie avoit attiré à Paris, & enlevé à des oc- cupations mécaniques ; il donna aux calculs de 11 Connoïffance des Temps une nouvelle précifion ; il f conftruifit méme de nouvelles Tables, par le moyen defquelles il prédifoit Les écliples avec une exactitude dont on fut furpris plus d’une “dis, & que les Tables Rudolphines de Képler dont on fe fervoit alors, n'auroient pu lui donner ; il continua auf d'y ajouter chaque année quelques remarques nouvelles fur 'Af- tronomie , la Gnomonique, la Phyfique: En 1 688 il y donna une Table des pofitions d'étoiles obfervées par M. Picard ; c'étoit une chofe intéreflante & nouvelle pour ce temps-là: en 1690, il donna les immerfions du premier fatellite de Jupiter, calculées fur les Tables de M. Caffini; en 1 691 il rapporta les obfervations que M. Sedilau en avoit faites. La Connoiffance des Temps de 1701 fut la dernière que M. Lefebvre compofa ; les Éphémérides d’Argoli finif- foient à l'année 1700, comme nous l'avons dit ci-deflus: M. de 1 Hire avoit compolé des Tables aftronomiques, & M. de la Hire le fils qui avoit été reçu à l’Académie en 1 693, “entreprit de calculer des Ephémérides fur es Tables de fon pèré: la concurrence que cette entreprife forma entre M. Lefebvre & M. de la Hire le fils, leur donna lieu de relever Cc'i 204 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE mutuellement leurs fautes; la difpute s’'aigrit, & M. Lefebvre perdit le privilége de la Connoiffance des Temps. M. Lieutaud , qui avoit déjà fait les calculs de ce livre pour Vannée 169 3 à la place de M. Lefebvre, en fut chargé en 1700, & compola celui de 1702 ; il y ajouta les paflages des Planètes par le méridien, les amplitudes du Soleil, &c. il continua de l'augmenter dans les années füuivantes. Nous n'infiftegons pas davantage fur les progrès de ce livre, il nous fuffira de dire qu'après M. Lieutaud ce fut M. Godin qui le compofa pour l'année 1730 & les quatre années fuivantes; M. Maraldi lui fuccéda lorfque M. Godin partit pour aller au Pérou travailler à la mefure de la Terre ; M. Maraldi commença par le volume de 1735, & a fini par celui de 175 M. de la landes dans celui de 1760 , a entrepris dde menter l'utilité de cet ouvrage en y facrifiant plus de temps, & il n'a point été effrayé par un travail pénible & rebutant; le feul article de la Lune a exigé de lui autant de calculs &c de temps que tout le livre en dermandoit auparavant. On n'avoit confidéré jufqu’ici la Connoïffance des ‘Temps que comme, un avertiflement pour les Aftronomes ; il fufhfoit pour cela que les lieux de la Lune y fuffent calculés à quelques minutes près, & l'on pouvoit {e contenter des trois principales équations: mais M. de la Lande voyant que les lieux de la Lune calculés avec foin & jufqu'à la précifion des fecondes, pouvoïient fervir à trouver les Longitudes en mer; il s'eft livré à ce travail utile; il a choifi les Tables de la Lune de M. Mayer, qui font au nombre de celles qu'on regarde comme les plus con- formes à l'obfervation, & dont l'erreur ne va que rarement à une minute, mais dans lefquelles on eft obligé d'employer quinze équations pour chaque lieu de la Lune. Les calculs des lieux du Soleil pouvant fervir aux ‘Aftro- momes dans les recherches qu'ils font journellement & dans la réduction de leurs obfervations, M. de la Lande les a calculés aufli avec une précifion nouvelle; il a choifi les Tables de M. l'Abbé de la Caille qui venoient de paroître en 1758, D' EASY SCIE NICE: 20 # dans lefquelles on emploie non-feulement l'équation du centre, déterminée par de nouvelles obfervations, mais encore les inégalités produites par les attractions de la Lune de Vénus, de Jupiter, foit fur la Longitude, foit fur la diflance de la Terre au Soleil, & l'inégalité de la précefion des équinoxes. L'équation du temps ou la Table du temps moyen au midi vrai, n'avoit été calculée jufqu'ici qu'en fecondes, M. de la Lande à voulu poufier la précifion jufqu'aux dixièmes de fecondes; mais il a fallu pour cet effet employer dans le calcul de l'équation du temps: toutes les inégalités produites par les attractions planétaires, ce qui rendoit le calcul une fois auffr Jong; mais’par ce moyen les Aftronomes fe trouvent en état de déterminer chaque jour avec la plus grande préci- fon la marche de leurs horloges, par rapport au temps moyen, ou par rapport au premier mobile, avec les feules obfervations du Soleil, & de réduire en- temps moyen, comme cela eft néceflaire, les temps vrais de toutes leurs ob{ervations. Les calculs des éclipfes des fatellites de Jupiter font encore une partie de la Connoiffance des Temps, dont la précifion eft fort néceflaire aux Aftronomes & aux Navigateurs, fou- vent on manque le moment d'une obfervation, parce qu'on S'y prépare trop tard, ou parce que l'attention fatiguée trop long - temps d'avance, n'eft plus aflez forte au moment de Yobfervation; d'ailleurs, une éclipfe de Satellite-oblervée dans -des pays éloignés, & dont on n'a point d'obfervation corref pondante, donne la Longitude du lieu: de l’obfervation quand en la compare avec un calcul exact & rigoureux, fait {ur des Tables qui ne s'écartent prefque jamais d'une minute de Vobfervation ; telles font les Tables de M. Wargentin, du moins pour le premier Satellite: M. de la: Lande à qui Auteur les avoit envoyées, venoit de les publier avec {es Tables de M. Halley pour les Planètes & les Comètes, &. il fit choix de ces Tables pour calculer les éclipfes des quatre fuellies de Jupiter, avec toute a précifion dont ces Tables étoient fufceptibles. On. trouve dans la Connciffance des Temps de 1760;, Cc iïif, 206 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE une colonne très-utile aux Aftronomes, & par conféquent au progrès de l'Aftronomie, elle contient les obfervations à faire pour chaque jour du mois, les conjonétions de la Lune aux Etoiles ou aux Planètes, celles des Planètes entr’elles & par rapport aux Étoiles, les paflages du Soleil & de chaque Planète par les points principaux de leurs orbites, c'efl-à-dire, le temps où il importe le plus de les oblerver, les oppofitions des Planètes fupérieures, les digrefTions des Planètes inférieures, les paffages du Soleil dans les nœuds des Planètes qui fervent à déterminer les inclinaifons de leurs orbites , les paflages de Jupiter dans les nœuds de fes Satellites, qui fervent à déter- miner la fituation de ces nœuds, & le dianëètre de l'ombre que les Satellites traverfent ; on trouve dans cette colonne, l'indi- -cation des éclipfes de Soleil ou de Lune, qui font détaillées dans une autre partie du Livre, les occultations ou éclipfes d'Étoiles, les phafes des Étoiles changeantes, enfin tout ce qui peut inté- reffer l'attention des Afhronomes ou la curiofité du Public. M. de la Lande ajouta encore à ce Livre de nouvelles colonnes pour le mouvement horaire du Soleil, pour le lo- garithme de fa diflance, & pour le lieu du nœud de 1a Lune, dont les Aftronomes font un ufage continuel, à caufe de la nutation des étoiles fixes qui en dépend. Nous nous bornons ici à rendre compte des augmentations que M. de la Lande a faites à cet Ouvrage, ainfi nous ne dirons rien des autres calculs que ce "Res renfermoit avant que cet Académicien en fut chargé, & qu'il a confervés dans le Calendrier; nous paflons au refle de Ouvrage, qui ren- ferme un grand nombre de Tables qui n'avoient point encore paru , de nouvelles explications fur toutes les parties de l'Ou- vrage, & l'extrait des chofes les plus nouvelles & les plus intcreffantes pour l’Aftronomie , conformément au projet que M. Picard avoit annoncé en 1679. On y voit d'abord des Tables pour convertir en degrés le temps d'une pendule réglée fur le moyen mouvement du Soleil, & le changement qu'il faut faire à cette réduction quand l'horloge avance ou retarde de quelques fecondes par DES US'C Tr EN CES 20 ur; tout cela a été calculé en décimales de fecondes par M. de la Lande, & doit épargner aux Aflronomes des rèoles de trois, qui font très-fréquentes, très-longues, & pour lefquelles fouvent les Jogarithmes ordinaires ne fufhifent pas. " L'accélération des étoiles fixes fur le moyen mouvement du Soleil avoit été inférée depuis 1 679 dans la Connoiffance des Temps, d'après la Table de M. Picard, fans aucun chan- gement, peut-être fans aueune vérification ; M. de la Lande, qui vouloit perfeclionner, autant qu'il étoit poffble, chaque partie de fon Ouvrage, examina cette Table ; il aperçut qu'elle n'étoit pas aufli exacte qu'elle pouvoit l'être, & il h calcula de nouveau , en y employant jufqu'aux décimales de fecondes. Les mouvememens apparens des Etoiles, c’eft-à-dire fa: préceflion, Faberration & la nutation font des élémens fort longs & fort difficiles à calculer, dont les Aftronomes ont cependant un befoin continuel pour trouver les pofitions apparentes des Etoiles, auxquelles on compare fans ceffe les. Planètes ; M. l'abbé de la Caille avoit donné des Tables générales qui diminuoient beaucoup le calcul, M. de la Lande les avoit publiées dans fon recueil de Tables; il reftoit à appliquer ces Tables aux principales Étoiles, M. l'abbé de la Caïlle l'avoit commencé pour aberration , M. de la. Lande facheva; il calcula les nutations pour vingt-quatre Étoiles principales, & les inféra dans la Connoiffance des Temps, en annonçant qu'il en réfervoit un plus grand nombre pour les Volumes fuivans ; c'étoit la première fois qu'on avoit donné aux Aftronomes une pareille facilité : ces T'ables par- ticulières ont été dans la fuite étendues à cént cinquante-fix Étoiles. j . Le Catalogue des Etoiles fixes, qu'on avoit coutume d’'inférer dans ce Livre, fut refait pour année 1760, mais d'une manière bien plus étendue, d’après les nouvelles pofi- tions obfervées par M. de la Caille; le mouvement annuel: de préceffion fut calculé pour chaque Etoile, tant en afcenfion- droite qu'en déclinaifon, & pour en conclure aifément la. préceflion dans tous les temps de l'année, M. de la Lande: 208 HisToire DE L'ACADÉMIE ROYALE calcula une Table à double entrée, où lon trouve de cinq en éinq jours, jufqu’a la précifion des dixièmes de fecondes, toute forte de préceflion, lorfque l'on connoît celle de l'année éntière. Les Tables de nutation avoient été inférées'en 1748 dans Je Journal de Trévoux, puis dans le Calendrier aftronomique de Berlin, mais avec une faute dans les fignes, qui en rendoit Yufage non-feulement inutile, mais même défeétueux; on les retrouve dans ce Livre non-feulement corrigées, mais augmentées des Tables nécefaires pour trouver la préceffion,- même dans l'hypothèfe indiquée par la théorie, favoir que le pôle apparent décrit autour du pôle moyen, non pas un cercle de 18 fcondes de diamètre, mais une elliple dont le petit axe n'a que 13,4 de longueur. La variation féculaire des étoiles fixes, tant en longitude qu'en latitude, réfultante de l'attraction des Planètes qui change le plan de l'orbite terreflre, n'avoit point encore été employée dans les Tables ni dans les calculs aftronomiques, on la trouve ici pour chaque degré de longitude; à la fuite de ces Tables font celles de laberration des Planètes , tant générale que particulière ; Faberration particulière avoit été donnée dans le Calendrier aftronomique de Berlin d’après les calculs de M. Euler, M. de la Lande calcula une Table générale qui peut fervir pour toutes les Planètes & pour toutes les Comètes, d’après une formule très-élégante que M. Clairaut avoit donnée pour cet eflet dans fon Mémoire fur aberration des Planètes, (Mém. Acad. 1746 ). Nous paflerons rapidement fur plufieurs autres Tables que M. de la Lande infra encore dans la Connoiflance des Temps, pour trouver le temps que le diamètre de la Lune emploie à traverfer le méridien, la quantité dont ce diamètre augmente à diverfes hauteurs fur l'horizon, l'équation pour les hauteurs correfpondantes, foit générale, foit particulière, les dimenfions des télefcopes & des lunettes, les principales mefures de Europe comparées au pied de Paris, les réfraétions fuivant M. Caffini & fuivant M. de la Caille ; mais nous ne devons pas UNS DES SCIENCES. 209 pas pañer fous filence deux objets entièrement neufs, dont M. de la Lande enrichit cet Ouvrage, pour futilité de Y'Aftronomie. L'aplatifément de la Terre avoit été négligé dans toutes les méthodes données jufqu’ici pour le calcul des éclipes, parce que les moyens qu'on avoit indiqués pour calculer les parallaxes dans le fphéroïde aplati, étoient d’une longueur effrayante, on avoit même donné à ce fujet des Tables qui étoient abfolument fautives ; M. de la Lande trouva le premier un moyen de faire entrer l'aplatiffement de la Terre dans le calcul des éclipfes d’une manière qui, fans changer les méthodes connues, y ajoutât feulement une ou deux équations ; if conftruifit des Tables de ces deux équations, & il donna une méthode pour calculer une éclipfe avec cette nouvelle confidé- ration, fans augmenter fenfiblement la longueur du calcul, La déviation du fil horizontal d'un quart-de-cercle, & le changement de hauteur près du méridien, font encore deux Tables nouvelles d’un ufage très-étendu & très-commode, qu'on n’avoit jamais calculées, & que M. dela Lande donna dans la Connoiflance des Temps de 1760 ; elles fervent à corriger des hauteurs correfpondantes ou des hauteurs méri- diennes dans plufieurs cas, 1. Jorfqu’on n’a pas obfervé un aflre fur l'axe même de la funette ; 2.° lorfqu'on fa obfervé un peu avant ou après le véritable paffage au méridien ; 3. lorfque Ia lunette n'eft pas exaétement parallèle au plan ou au limbe de Finftrument, foit que la lunette concoure avec le méridien ou que ce foit le plan de finftrument; M. Bouguer avoit montré Aimportance de cette confidération, il ne manquoit aux Afro- nomes que des Tables commodes pour tenir compte promp- tement & facilement de ces petites équations. | M. de fa Lande donne auffi une Table pour trouver l'heure des marées avec plus d'exaétitude qu'on n'avoit coutume de le faire; M. Picard prefcrivoit dans la Connoiffance des Temps de 1679, d'ajouter l'établiffement du port avec l'heure du -paflage de la Lune au méridien, pour avoir celui du flot ou de la pleine mer, & lon avoit toujours continué depuis ce Pl 1759. | 210 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE temps-là d'indiquer la même règle dans la Connoiffance des Temps; cependant la théorie de l'attraction a fait voir que la Lune n'eft pas la feule caufe des marées, le Soleil y entre pour deux cinquièmes; ainfi l'heure dela pleine mer doit parti- ciper du paffage de la Lune au méridien & de celui du Soleil. M. Bernoulli avoit trouvé que le flot peut avancer ou retarder d’une heure fur le paflage de la Lune, il calcula une Table pour tenir compte de cette différence, & M. de la Lande l'a inférée dans la Connoiffance des Temps avec l'explication & l'ufage, pour faire jouir les Marins du fruit de ces profondes recherches qui n'avoient été que trop long-témps inconnues. A la fuite de ces Tables, on trouve des explications nou- velles de toutes les parties du Calendrier, & de toutes les Tables dont nous venons de parler ; celles qu'on avoit inférées jufqu'ici dans la Connoïifflance des Temps avoient été faites autrefois par M. Caffini, & l'on n’y avoit rien changé ; M. de la Lande a trouvé que l’état aétuel de l'Aflronomie exi- gcoit de nouveaux détails & de nouvelles explications , il s'eft même difpen£é d'infifter beaucoup fur les articles qui, jufqu'ici, avoient été expliqués fort au long dans la Connoiffance des Temps; & dans ces cas-là, il renvoie aux Volumes donnés par M. Maraldi : M. dela Lande a foin, dans tous les articles de fon explication , de rapporter les formules qui ont fervi à calculer les Tables, & de citer les fources où l’on peut trouver des détails plus amples fur les mêmes objets. La méthode d'obferver les Longitudes en mer par le moyen de la Lune, eft enfuite détaillée avec fes différentes parties; - on y voit le principal ufage des calculs exaéts qu'avoit donnés M. de fa Lande, du lieu de la Lune pour chaque jour, en faveur des Marins, & dont nous parlerons plus au long à l'occafion de la Connoiflance des ‘Femps de 1761. Ce Livre eft terminé par l'annonce du retour de la Comète de 1682, prédite par M. Halley & attendue avec tant d'im- patience; elle venoit de reparoïtre lorfque M. de la Lande publia le Livre dont nous parlons, & il n’avoit garde d’ou- blier dans cet Ouvrage un évènement fi curieux, puifqu'il £ DES ScHENCEs o2rr propofoit, comme nous l'avons annoncé , d'y raffembler tout ce qu'il y avoit de nouveau & d'intéreflant dans l’Aftronomie, Nous aurons occafion de faire voir dans la fuite, que M. de la Lande a continué dans les années fuivantes à remplir fes engagemens à cet égard. A même année, M. de la Lande publia encore la Cow noïffance des Temps pour Yannée 1761 ; elle parut au mois de Juillet 17 5 9: fon intention en publiant deux volumes dans la même année, fut d'avoir à l'avenir dix - huit mois d'avance, afin qu'un ouvrage utile à la Navigation pût par- venir d'affez bonne heure dans tous les lieux où l'on peut en faire ufige ; les Vaiffeaux qui doivent revenir des Indes ou de la mer du fud en 1761, partent en 1759, & ils ne fauroient être munis de cet ouvrage s'il ne paroît dix - huit mois avant le commencement de l'année, Cette raïfon étoit d'autant plus importante pour M. de là Lande, qu'ayant pris une peine extrême pour donner aux caleuls de ce livre toute l'exactitude néceffaire aux ufages de la Marine, il eût été privé du fruit de fon travail par le retardement de fa publication. La forme de cet ouvrage avoit changé ( comme nous Favons dit dans l'article précédent) auffnôt que M. de la Lande en avoit été chargé; mais n'ayant que peu de temps pour la publication de la Connoïffance des Temps de 1760, & ne pouvant efpérer de la faire fervir à l'ufage des Longi- tudes en mer , il ne calcula les Longitudes de la Lune qu'une feule fois pour chaque jour, & il choiïfit alors l'heure du paflage de 1 Lune au méridien de Paris, pour la commodité des Aftronomes qui obfervent chaque jour la pofition de la Lune, au moment où elle pale au méridien. Lorfque tra- vaillant enfuite au volume de 1761, il fe trouva à portée de remplir fon objet, en le faifant paroïtre d’affez bonne heure pour l’ufage de la Marine , il changea une feconde fois la forme de ce livre; il calcula les lieux de la Lune deux fois pour chaque jour , favoir, pour midi & pour minuit : cette méthode eft réellement préférable pour plufieurs raifons ; 1.” l'inégalité Dd ïi 212 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE des différences étant beaucoup moindre, fes parties propor- tionnelles deviennent plus exactes ; 2.° les intervalles de temps étant moins inégaux , il devient plus facile de vérifier les lieux de la Lune, & de reconnoître les fautes qui ne peuvent manquer de fe gliffer dans des calculs auffi ennuyeux & auffi longs; 3.° il eft plus facile de calculer le lieu de la Lune pour une autre heure & fous un méridien quelconque , par les interpolations, comme nous l'avons expliqué ailleurs à l'occafron d’un Mémoire de M. de la Lande fur cette matière (ff. 176 1,p. 97). Les latitudes de la Lune font calculées dans ce livre pour midi feulement, parce que les Navigateurs mefurant la diflance de la Lune à une étoile un peu éloignée (fuivant la méthode que M. de la Lande regarde comme la meilleure pour les Longi- tudes), on n’a aucun befoin de la latitude de la Lune, & plufieurs minutes d'erreur fur cette latitude n’en produiroient aucune fur la diftance calculée; les longitudes font la partie eflentielle, ou plutôt la feule qu'il eft néceflaire de connoïître avec précifion pour calculer la diftance de la Lune à une Etoile, & trouver la Longitude en mer, par la comparaifon de ce calcul avec Tobférvation. Les autres calculs du calendrier étoient les mêmes que dans le volume de 1760, ainfi nous n'avons rien de plus à dire à ce fujet; nous allons pañler aux explications, qui font la plus grande partie du volume ; & donner quelque idée des articles nouveaux que M. de la Lande y fit entrer. Le paffage de Vénus fur le Soleil qu'on attendoit pour le 6 Juin 1761, devoit néceflairement y trouver place, & ce fut par-là que M. de la Lande commença fon explication ; on n'avoit rien écrit fur cette matière depuis les grands Mé- moires de M. Halley: cependant il étoit temps de rappeler l'attention des Savans & du Public fur cette importante obfer- vation qui devoit occafionner des voyages confidérables. M. de la Lande commence par les travaux de Képler, qui le premier annonça en 1629, que Vénus pouvoit paroître fur le difque du Soleil, & qu'elle y paroiîtroit en 176: ; il parle enfuite de l'obfervation de Horoxius, qui obferva en 1639 DNETSMASNCONE NOCUE Se 213 de premier paflage de Vénus, & il rapporte en entier toutes les obfervations de ce célèbre Aftronome; de-là il pale aux Mémoires que M. Häalley donna en 1691 & en 1716, fur les paffages de Vénus en général, & en particulier fur celui / de 1761: enfin il donne un nouveau calcul de la conjonc- tion, de la latitude & des autres circonflances de ce paffage, en y employant les Tables les plus parfaites, & corrigeant mème les Tables, par le fecours des obfervations les plus ré- centes. L'obfervation faite en 1761 a vérifié l'exactitude de ces calculs, fur-tout à l'égard du nœud de Vénus ; car la plus courte diftance qui s'eft trouvée de 9" 30" étoit annoncée dans ces calculs de 9° 46" +, cette différence de 16 fecondes eft abfolument infenfible; à l'égard du temps de la conjonction il y eut environ une demi-heure d'erreur; mais il ne falloit pour produire cette différence que $ 2 fecondes d'erreur fur la longitude de Vénus; quantité dont on ne pouvoit guère s'af- furer / Voyez les Mémoires de l'Académie pour 1761 © la Connoiffance des mouvemens célefies pour 1763, page 216). Les Tables de la Lune de M. Mayer, fur lefquelles M. de la Lande calcule chaque année les longitudes de la Lune pour la Connoiffance. des Temps , font inférées en entier dans le volume dont nous parlons: ces Tables n'avoient encore paru que dans les Mémoires de la Société Royale de Gottingen, & depuis qu'on les avoit trouvées auffr exactes que commodes , le Public qui avoit de la peine à fe les procurer defiroit d'en avoir une nouvelle édition ; M. de la Lande accompagna ces Tables d'un précepte détaillé que M. Mayer navoit point donné, & qui étoit cependant néceffaire pour la facilité de ceux à qui ces Tables n'étoient point encore familières, La méthode pour trouver les Longitudes en mer, qui n'avoit été expliquée dans la Connoïflance des Temps de 1 760, que fort en abrégé, fe trouve avec un très-grand détail dans celle dont nous parlons; M. l'Abbé de la Caïlle, qui pendant fon voyage en Afrique avoit difcuté & approfondi tout ce qui peut contribuer aux progrès de la Navigation, avoit trouvé {e moyen de difpenfer les Navigateurs de toute efpèce de calcul, Dd iïij 214 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE au moyen de quelques opérations de la règle & du compas; analogues à celles dont on fe fert déjà communément pour connoître l'amplitude du Soleil & favoir la variation du compas; l'Académie avoit donné les plus grands éloges à ces ingénieufes pratiques, après avoir nommé des Commiflaires pour les examiner; M. de la Lande qui en étoit un, exécuta toutes les règles prefcrites par cette méthode, dans l'efpace d’une demi-heure, en les lifant pour la première fois, & cela en préfence des autres Commiflaires ; en forte qu'un Navigateur exercé peut avec leur fecaurs trouver la longitude du lieu où il eft, avec une facilité & une promptitude qu'on n'auroit jamais foupçonnées. On fuppofe que les Navigateurs aient une Éphéméride toute calculée pour les jours où la Lune peut s’obferver, dans laquelle foit marquée de quatre en quatre heures la diftance de quelque belle Etoile, au bord éclairé de la Lune, avec le paflage de l'Étoile au méridien de Paris, en heures, minutes & fecondes: on trouve à Ja fuite des préceptes un modèle de cet almanach nautique pour le mois de Juillet 1761 , dans lequel l'on voit les diftances du bord de la Lune au Soleil, à l'épi de la Vierge, au cœur & à [a queue de Lion, au cœur & au front du Scorpion; quelquefois il y a trois ou quatre Etoiles dans le même jour; ce qui forme une vérification pour l'Oblervateur , & aflure de plus en plus la précifion que l'on cherche. Il eft aifé pour un Navigateur, tant foit peu exercé dans la Trigo- nométrie , de calculer ces diftances par le moyen des longitudes de la Lune, que M. de la Lande donne pour midi & pour minuit de chaque jour. On fuppofe auffi un grand carton liffé d'environ vingt-deux pouces fur dix-fept, tels qu'on les trouve ordinairement dans nos fabriques de carton, ou bien une planche bien dreflée, fur laquelle on aura collé proprement trois ou quatre feuilles de papier en forme de couches appliquées lune fur l'autre, de manière qu'il n'y ait ni plis ni jointures & que ln furface {oit bien unie: on trace le chaffis de réduction, compofé d'un cadre, d'un cercle & de trois échelles, tous divifés ainfs qu'il eft DRESS MSNCMLE Mic tirs 215 prefcrit dans l'explication & repréfenté fur une planche gravée, dont toutes les parties font le tiers de cêlles qu'il convient d'employer dans l’ufage. L'exactitude & la clarté avec laquelle toutes ces règles font détaillées, font telles qu'on devoit les attendre d’un Aflronome habile , tel que M. de la Caille , qui travaille pour des perfonnes peu avancées ; il ne fuppofe aucune connoiffance des théories d'Aftronomie, aucune combinaifon ; il fupplée à tout, & en fuivant pas à pas les règles qu'il pref. crit, on trouve le temps vrai de lobfervation, la correétion qu'exige la parallaxe pour la diftance obfervée, l'accourciffement de Ja réfraction & le temps vrai compté au méridien de Paris : da différence entre les deux temps, dont l'un eft pour Paris & autre pour de lieu de l'obfervation , donne les différences des dongitudes , en convertiffant à raifon de 1 $ degrés par heure. L'explication de cette pratique eft fuivie de plufieurs inf tructions fur da manière d’obférver en mer : d'inflrument le plus commode pour avoir la diflance de a Lune à une étoile, eft un oélant de réflexion de dix-huit poucés de rayon, garni d'une lunette: l'objeétif de cette lunette doit être un verre convexe d'un pied de foyer avec environ vingt -huit dignes d'ouverture, & oculaire un verre concave qui ait cinq pouces de foyer virtuel , avec une ouverture de quatre dignes. Cette lunette groffira les objets deux fois & demie Seulement, mais elle aura un champ de 10 degrés; elle fera peu füjétte aux iris :& donnera une très-grande lumière, Nous avons parlé ci-deflus ( à l'occafion du Mémoire de M. de la “Caille, fur H-méthode des Longitudes) des-diflérens auteurs qui ont décrit les inftramens propres à ‘obférver en mer. Parmi les .différens objets-que M. de la Lande traite enfuite dans {es explications de la Connoiffance des Temps pour 1764, nous choifrons ‘feulement l'article intéreffant de la variation féculaire dans la latitude & dans la longitude des Étoiles : il explique de quelle manière l'attraétion des Planètes für le globe de la Terre la détourne de fon orbite & lui fait changer de route dans le ciel, combien chacune influe dans l'effet total, ce qui en réfulte fur différentes étoiles ; il donne les formules V. les Mém. P- 325: p. 420. 216 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE pour calculer la longitude & la latitude d'une étoile quelconque pour un fiècle donné, ayant égard à ces nouveaux phénomènes ; enfin il rapporte une Table de la préceffion inégale des équi- noxes de fiècle en fiècle: on y voit, par exemple, que la préceffion ou le changement des étoiles en longitudes , obfervé actuellement de 1423" 33",6, n'étoit que de 14 23° 2”,8 il y a dix-huit cents ans. Tout ceci eft le réfultat d'un travail confidérable que M. de fa Lande venoit de faire fur cette matière, & dont on peut voir les démonftrations & les détails dans les Mémoires de l'Académie pour 1758 & 1761. La Comète de 1759, dont nous avons parlé fi au long dans un des articles précédens, fut aufli pour M. de la Lande l'objet d’une ample explication: Ja nouveauté & la célébrité de cette apparition exigeoient bien un article dans ce Livre, deftiné à faire connoître les révolutions & les progrès de l’Aftronomie; auffi l’on y voit l'hifloire de cette Comète depuis fesanciennes apparitions , la prédiétion de M. Halley , les travaux de M. Clairaut fur la même matière, & les élémens de l'orbite de cette Comète, déterminés de plufieurs manières différentes. C'eft ainfi que M. de la Lande remplit deux fois dans fa même année cette tâche pénible dont il venoit d'être chargé ; le zèle qu'il y mit en commençant ne s’eft point reläché : au moment où cette Hifloire s’imprime il vient de publier la Connoiffance des Mouvemens céleftes pour la feptième fois, c'eft-à-dire pour 1766, avec des additions nouvelles égale- ment intéreflantes pour l’'Aftronomie, N° renvoyons entièrement aux Mémoires ; | L'Ecrit {ur la hauteur folfticiale du Soleil. Par M. de Thury. Et e Mémoire fur fa préceffion des Équinoxes, Par M. le Chevalier d'Arcy. TARA HYDROGRAPHIE, sd Le st is D'E.S1 "SC ILE Ni C:E: S 2\12 10000000000000000000000 HYDROGRAPHIE. SUR UN PROJET D'OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES ET HYDROGRAPHIQUES Pour former une fuite de Cartes exacles, avec un Portulan pour la mer Méditerranée. Ï on eût dit, il y a cent ans, qu’on avoit plufieurs Cartes des côtes du nouveau monde plus fufceptibles d'être per- feétionnées, que celles de la mer Méditerranée, on ne l'auroit pas cru: cependant ce fait tout extraordinaire qu'il paroît au- jourd'hui, n'en étoit pas moins vrai alors. Toutes les Cartes de la Méditerranée étoient fi informes, f1 défeétueufes, qu'on n'ofoit s’y fier pour faire canal, c'eft-à-dire, pour abandonner les côtes en la traverfant: & cette mer, le théatre de tant d’ex- ploits, & que les Européens & les autres peuples qui en ha. bitent les bords, traverfent & parcourrent dans tous les fens, depuis près de trois mille ans, étoit fr mal connue, qu’on la failoit plus longue qu'elle ne l'eft de près d'un quart. Cependant s'il eft important de perfectionner les Cartes des grandes mers, il left encore plus de-rectifier celles des mers renfermées dans les terres, des grands golfes, des Archipels, &c. les routes y font plus courtes; les vaifleaux font fouvent obligés de ranger les côtes & de les approcher de très-près ; fr l'on ne connoît pas bien ces côtes, sil y a des différences dans les repré- fentations qu'on en a, on fera expofé à mille dangers. je Cartes de li Méditerranée étant auffi défeétueufes que nous venons de le dire, il étoit bien important de travailler à en. former de plus exaétes & auxquelles on pt fe fier ; c'eft ce qu'on defroit depuis long- temps; lorfque M. Colbat à qui rien n'échappoit de ce qui pouvoit contribuer à la gloire ” . » A -& à l'avantage de la Nation, ordonna qu'on raffemblât les if 1759: E F* V. les Mém. p- 484. 218 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE matériaux néceffaires pour faire une carte exacte de cette mer. Mais une entreprife de cette nature demandoit pour être exé- cutée dans toute l'étendue qu'elle comportoit, beaucoup de temps, des mains habiles & le concours de plufieurs circonf- tances favorables. M. de Chabert rend compte, dans le Mémoire dont il eft ici queftion, de cette entreprife, des différentes révolutions qu'elle a effuyées, & des caufes qui jufqW'ici en ont retardé l'exécution, enfin du projet qu'il a propofé pour compléter les matériaux néceffaires pour l'achever, M. Colbert ayant, conune nous venons de le dire, donné des ordres pour travailler à la defcription de la Méditerranée, on confulta les Officiers du département de Toulon, les plus éclairés fur cette matière, & on fixa les moyens que l'on regardoit comme fuffifans pour avoir en peu de temps une Carteexcellente de cette mer, Ces moyens confiftoient à prendre hauteur fur les caps, à eftimer les diftances d'un cap, ou d’une pointe à fautre, &. leurs directions fuivant la bouflole, dont'on obferveroit la variation, & particulièrement à deffiñer les vues des montagnes & des autres objets qui fervent à faire reconnoitre les côtes. On envoya en conféquence dans les années 1679, 1685 & 168 6 des Officiers expérimentés fur les côtes de Catalogne, d'Italie, dans la mer Adriatique, dans Archipel, pour lever des Cartes de ces différentes parties de la Méditerranée, & on forma de leurs travaux des Recueils parfaitement bien def- finés. Ces travaux pouvoient à la vérité déterminer quelques parties de ces côtes, & fervir à les faire mieux connoître; mais, comme on le voit par la nature des moyens qu'on avoit dû y employer, ils étoient très -éloignés de pouvoir fatisfaire à ce qu'il falloit pour avoir une Carte exacte de cette mer. En effet, ceux qui avoient formé ce projet, ne l'avoient envifagé que comme Marins & comme Caboteurs, lorfqu'ils auroient dù le confidérer fous un point de vue beaucoup plus étendu, c'eft-à-dire, comme Géographes & comme Aftronomes. On ne peut parvenir à décrire avec exactitude une mer comme la Méditerranée, qu'en oblervant deux chofes; la première de déterminer avec précifion les fituations & les DES ISICILE N'ctE's, 219 diflances des points principaux qui en forment & en limitent l'étendue, la feconde de parcourir les côtes qui font entre ces points, pour bien en marquer la direction , l'étendue & les autres circonflances, Or, la détermination exacte de ces points principaux ne peut fe faire que par les moyens les plus précis qu'offrent l'Aftronomie: & même autant qu'on pourra encore employer ces moyens, pour déterminer la pofition des points intermédiaires & qui appartiennent aux détails de la Carte, autant on approchera de la précifion, car il y aura par-là une vérification réciproque de toutes les parties entr'elles: mais les Marins n'étoient pas alors affez inflruits pour fentir Ja nécefité & l'importance des obfervations Aftronomiques, faites à terre avec le plus grand foin, pour déterminer Ja pofition des lieux. Au contraire, par une prévention pour les anciens ufages , toujours funeftes aux progrès des Sciences, ils penfoient qu'une Carte dreflée uniquement fur les pratiques de leur métier, & dont les fatitudes avoient été déterminées avec des inftru- mens qu'ils employoient à fa mer pour les obferver, favoir, Faftrolbe & l'arbaleftrille, étoit ce qui convenoit le mieux aux Navigateurs, & qu'une pareille Carte étoit de beaucoup préférable à celles dont on auroit déterminé les latitudes à terre avec d’excellens inflrumens; enfin , ils prétendoient que dans leur eftime ils fe retrouvoient mieux fur des Cartes drefiées de cette manitre, par un effet de l'accord qu'il devoit y avoir entre les obfervations faites avec les mêmes inftrumens. Ils ne faifoient pas attention que la méthode par laquelle les différens points d'une Carte feront déterminés avec le plus d'exactitude, fera précifément celle oùles erreurs commnifes en obfervant d'une manière quelconque, donneront en général les différences les moins grandes ‘entre la Carte & des obfer- wations. Une opinion auffi faufle que celle dont nous venons de parler, étoit cependant adoptée par les Officiers de la plus grande diflinétion. L'illuftre M. de Tourville , qui fut depuis Maréchal de France, foutenoit , En écrivant à la Cour fur ce fujet, qu'il n'y avoit pas d'autre moyen de faire de bonnes Cartes de la Méditerranée, Ce fait mérite de n'être pas oublié Ee jj 220 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE & d'être joint à plufieurs autres du même genre, pour infpirer plus de défiance à ceux qui aveuglément prévenus en faveur de la routine & des anciennes pratiques, s’oppofent avec tant de force à l'introduétion de méthodesnouvelles, & bien fupérieures, que fouvent même ils n’entendent pas. ÿ I ne falloit pas moins qu'un homme très-habile pour déra- ciner, par fon exemple & par fes travaux, ces préjugés des Navigateurs de la Méditerranée, les éclairer fur les pratiques de leur métier, & leur enfeigner les avantages qui réfultoient des Obfervations aftronomiques , faites avec précifion, pour déterminer la latitude & la longitude des lieux ; c'eft ce que fit M. de Chazelles, qui avoit été Difciple de M. Caffini, & qui étoit Profeffeur d'Hydrographie à Marfeille. If com- mença par s'embarquer fur les Galères , toutes les fois qu'elles faifoient campagne, pour faire des obfervations de latitude & des remarques fur les côtes que ces Galères parcouroient; & ayant témoigné un grand defir d'aller à l'extrémité orientale de la Méditerranée, pour déterminer & pour conflater fa lon- gueur par des Obfervations aftronomiques , M. le Comte de Pontchartrain , qui avoit réfolu de faire travailler à un fecond volume du Neptune françois pour cette mer , le chargea de cette entreprife, & l'envoya dans le Levant en 1693. Ayant recueilli pendant plufieurs années les matériaux nécef- faires pour remplir les vues du Miniftre, il donna à l'Aca- démie, en 1701, le projet d'un Portulan de la Méditerranée, pour former le fecond volume 4 Neprme françois, qui, felon ce qu'il annonçoit , devoit être un Portulan raifonné, compolé de trente - deux Cartes. Les obfervations de latitude & de longitude , faites dans Archipel & à Tripoli fur la côte d'Afrique par le P. Feuille en 1701, étoient encore de nouveaux matériaux qui pouvoient être employés dans fon projet, & contribuer à en faciliter l'exécution ; mais il y a lieu de croire, comme le conje‘ture M. de Chabert, que lorfqu'il en vint à la révifion de tous les matériaux qu'il avoit, pour ‘en compofer les Cartes des différentes parties de la Méditer- ranée ; il trouva de fi grandes diflicultés pour accorder entre VrARr BASN IS ICE" N'CLES, 221 eux les différens réfultats de ces matériaux, qu'il ne put exécuter fon projet, au moins n'en trouva-t-on aucun veftige à fa mort, arrivée neuf ans après. Les conjeétures de M. de Chabert fur l'infuffifance des matériaux de M. de Chazelles , font d'autant plus fondées que, lorfqu'en 1737 M. le Marquis d'Albert propofa , non l'exécution en entier du projet de M. de Chazelles, mais de tâcher de former, des matériaux que M. de Chazelles avoit eus, & qui étoient confervés au Dépôt de la Marine , une Carte générale de fa Méditerranée réduite, on trouva des contradictions fans nombre dans la plupart des matériaux mêmes dont il avoit eu la meilleure opinion. Les chofes en étoient reftées à, &, malgré la multiplicité des Cartes publiées fucceflivement par différens Pilotes, on remarquoit les mêmes _ différences entr’elles, produites toujours par l'infufñfance des moyens hydrographiques, par lefquels ces Pilotes prétendoient les rectifier ; lorfque M. de Chabert, pour faire cefler une confufion fi dangereufe , forma le projet en 1753 de com- pléter les matériaux néceflaires pour former enfin cet Ouvrage tant defré, le fecond volume 4 Neptune françois. Ce projet ayant été agréé de M. Roüillé (alors Miniftre de la Marine), M. de Chabert reçut les ordres du Roi pour en entre- prendre l'exécution ; mais la guerre étant malheureufement furvenue, il fallut fa remettre encore à un autre temps. Cependant M. de Chabert, toujours occupé de fon projet, n'a pas manqué, dans les différentes campagnes qu'il a faites, de profiter des occafions de faire des Oblfervations aftrono- miques qui pouvoient y être relatives. En conféquence, il a déterminé en 175 6 la latitude & la longitude du port Mahon, & il a fixé la longitude d’un port de l'ile de Chypre, que ‘le mauvais temps avoit empèché autrefois M. de Chazelles d’obferver. Par fes navigations il a encore mieux reconnu J'imperfection de ce que fon a fait jufqu'ici fur la Méditer- ranée, & elles Font convaincu de plus en plus de Ja né- ceflité de renoncer à la plupart des matériaux qu'on a eus jufqu’ici fur cette mer. II remarque , avec raifon, que dans une -mer qui renferme, dans un efpace qui n'eft pas fort étendu , un Éc üp, 222 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE fi grand nombre de golfes , d'îles, &c. il ne faut employer que d'excellens matériaux, une petite erreur dans une obfervation ou dans l’eftime d’une route, pouvant défigurer toute une côte. Ce n'eft donc point ici comme dans l'Océan, où l'on peut employer des obfervations de longitude de tout genre, il ne faut fe fervir que de celles où lobfervation eft la plus inftantanée & la plus exempte d'illufion optique, comme les éclipfes du Soleil & des Etoiles par là Lune. On ne peut attendre qu'avec impa- tience l'exécution d'un projet aufli vafte & auffi important, que M. de Chabert eft fr bien en état de remplir, par la réunion heureufe des connoiffances de fon état, à toutes celles de l'Obfervateur & de l’Aftronome: au refte, il fe propofe de fuivre, quant à la forme de cet Ouvrage, à peu-près le même plan que M. de Chazelles, foit pour le nombre des Cartes, foit par rapport au Portulan. On ne peut s'intéreffer aux progrès des Sciences, qu'on ne voie avec regret, combien il faut de temps pour que les projets les plus néceflaires & les plus importans foient mis en exécution ; des fiècles entiers s'écoulent avant qu'on y par- vienne : heureux encore lorfque de nouveaux obflacles ne les font pas évanouir pour jamais ! Cette crainte, par rapport au projet de M. de Chabert, eft entièrement diflipée; M. le Duc de Choifeul qui faifit avec em- preflement tout ce qui peut être avantageux à la Marine, a profité de la Paix pour faire agréer au Roï la continuation d’une auffi utile entreprife; & M, de Chabeït ayant reçu en conféquence les ordres de Sa Majefté, partit au mois de Mai 1764, pour reprendre fon travail au point où il Favoit laiflé en 175 3. Nous nous hâtons d'annoncer qu’il vient d'arriver *, après avoir fait pendant fa campagne des obfervations très-multipliées fur les côtes d'Efpagne , depuis Cartagène jufqu'au détroit de Gibraltar, de 1 fur les côtes de Fez, d'Alger & de Tunis, fur une partie des côtes du pays de Derne, & de celles de l'ile de Sardaigne. * En Mars 1765 , où l’on imprime les dernières feuilles de ce volume. MÉCANIQUE. SUR LA NÉCESSITÉ D'INCLINER LES AUBES aux rayons , dans les roues mües par le courant d'une grande rivière , afin d'avoir le plus grand effet pofible. L_° RSQU'ON fait des recherches fur un fujet, on ne peut trop fe défier des premières idées qui fe préfentent à l'efprit ; fouvent leur fanplicité nous féduit, & nous croyons avoir bien découvert comment les chofes fe paflent , lorfqu'un examen plus approfondi nous montre combien nous nous étions trompés. Le courant d'unerivière fait tourner une roue en agiffant fur fes palles ou fur-fes aubes , ce courant a une viteffe avec laquelle il frappe tout ce qui s’oppole à fon paffage ; on en conclut que c’eft uniquement par fon choc qu'il agit fur ces aubes, & que la-pefanteur de l'eau n'y a aucune pat, ou qu'on ne doit pas la faire entrer dans l'eflimation des forces qui les font mouvoir. D'habiles Géomètres partent de cette ‘fuppofition & imaginent qu'on ne doit faire attention qu'au choc dans le calcul de l'action de l'eau fur les ailes de moulins & fur les aubes des roues; ïls déduifent de cette fuppofition un grand nombre de confèquences fur la viteffe de la roue relativement au courant, fur la pofition de fes aubes, fur leur nombre, &c. Cependant fr, plus circonfpeéts dans l'application de leurs calculs , ils avoient confulté l'expérience , ils auroient reconnu que l'eau d'un courant agit fur les aubes par fon poids, & qu'elle y agit tellement que leur pofition doit être calculée en conféquence : c'eft ce que M. Deparcieux a découvert par fes ‘expériences , comme il le rapporte dans le Mémoire dont nous rendons compte. Ayant démontré en 1754, que l'eau d’une chûte agit plus avantageufement par fon poids, que par fon V. les Mém, p. 288. 224 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE choc, cela lui rappela les idées qu'il avoit eues autrefois fur la pofition des ailes des moulins qui font fur Ja Seine, & fur celle des aubes dans les roues des machines à élever de l'eau, comme celles de la Samaritaine & du pont Notre-Dame. En obfervant la manière dont l'eau monte le long des ailes de ces moulins, lorfqu'elles fe plongent dans le courant, M. Deparcieux avoit penfé plufieurs fois que fon action fur ces ailes feroit plus grande, fr elles étoient inclinées aux rayons; mais le contraire étant établi, & ayant 1 ce que M. Pitot avoit donné fur ce fujet en 1729, il cut qu'il fe trompoit -& il n’y fongea plus. Cependant ce qu'il avoit découvert, comme nous l'avons dit, au fujet de l’action de l'eau d’une chûte, qui efl la plus grande lorfqu'elle agit par fon poids, lui fit exa- miner de_ nouveau les idées qu’il avoit eues anciennement par rapport à cette pofition des ailes & des aubes , & il fe convain- quit, pat {es nouvelles réflexions , que malgré ce qu'il en avoit: penfé depuis, fes premières idées à cet égard étoient juftes. En effet, fi on fe rappelle ce qui ce pafle lorfque F'aile d'un moulin plonge dans l’eau, on verra que Feau sélève & monte le long de cette aile, & par conféquent que dans cet inftant elle agit par fon poids pour la faire tourner ; cela eft d'autant plus fenfible que lon voit à fa face ou à fa partie poftérieure, un vide dans l'eau, qui montre que cette aile en foutient une partie: fr elle étoit donc inclinée au rayon ou qu'elle le füt davantage au courant en y entrant, l'eau y monteroit plus haut, & elle refleroit plus long-temps deflus , ne ceffant d'agir par fa pefanteur qu'au-delà du point où le rayon de cette aile eft vertical. De plus lorfque des ailes ainfi placées fortent de l'eau, elles ne font pas obliées d’en élever autant que celles qui font en rayons. Ces confidérations & plufieurs autres encore, formoient des préfomptions très-favorables en faveur du fen- timent de M. Deparcieux ; cèpendant comme dans des objets de cette nature il eft toujours important que des expériences directes & préciles mettent le fceau à la juftefle des raifonnemens, M. Deparcieux voulut voir, conformément à la méthode qu'il avoit fuivie jufqu'i ici, dans fes recherches fur çes ee 1 Les ! IMPDIEIS MS NCUIMELN C'RES Wa 2 fi les faits répondroient à des conjectures fi bien établies. Pour éprouver, il fit faire une roue de trente-deux pouces de dia- mètre qui portoit douze aubes attachées en charnière à fa circonférence; de façon qu'on pouvoit leur donner l'inclinailon qu'on vouloit, fans pour cela que le diamètre de la roue changeñt, & par une mécanique particulière on les retenoit fixément dans cette inclinaifon. Cette roue étoit portée fur une efpèce de chaffis ou de chevalet, affez haut, pour que placé fux le fond de la rivière, la roue n’entrât dans l'eau que de la quantité à peu-près néceffaire; & pour qu'on réglât cette quantité d'une manière précife, les parties qui portoient les paliers fur lefquels rouloient fes pivots, fe haufloient & fe baifloient; de forte qu'on pouvoit à volonté les fixer (& par conféquent la roue } à la hauteur requife ; enfin elle avoit un arbre fur lequel s’enveloppoit une corde qui pafloit par - deffus une poulie, & qui portoit à fon extrémité un poids. Cette poulie étoit fixée au haut d’une perche qui tenoit au chevalet, afin que dans les expériences le,poids pût monter d’une cer- taine hauteur, comme on le verra dans un moment, [La machine ainfi difpofée fut placée dans une petite rivière, mais cependant qui étoit afRz large & affez profonde pour qu'on ne püt point craindre que le: volume de la machine apportit aucun obftacle à la liberté du courant le long des côtes’ de {a roue; la vitefle de ce courant étoit de treize pouces par féconde, Pour expérimenter les divers effets qui rélultoient des diffé- rentes politions des aubes, voici comme M. Deparcieux s'y prenoit; il obférvoit en combien de fecondes le courant de l'eau failoit faire un tour à la roue, qui étoit très-mobile, &c laquelle en tournant étoit obligée d'élever ce poits dont nous ‘avons parlé, qui réfifloit par fa pefanteur juiqu'à un certain point à l’action de ce courant, Il feroit trop long de rapporter ici les expériences de M. Deparcieux & leurs différens réfultats, on pourra confulter là-deffus fon Mémoire; nous dirons feu- lement qu'il paroït évidemment par ces expériences, que la roue tournoit toujours plus lentement quand les aubes étoient des rayons prolongés, que lorfqu'elles étoient L' à ces if. 1759, 226 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE rayons d’une certaine quantité : f'angle de 30 degrés donna le plus grand effet ;' c'eft-à-dire que les aubes étant inclinées aux rayons de cette quantité, la roue tournoit avec la plus grande viteffe, mais ce n'étoit que lorfqu'il n'y avoit que deux ailes qui trempoient dans l'eau tout à la fois, les deux qui les accompagnent, étant lune prète à fortir & l'autre prête à entrer; car lorfque la roue plongeoit davantage & que le poids étoit plus confidérable, cette inclinaifon de 30 degrés n'étoit plus celle d'où réfultoit la plus grande a@tion; il*en falloit une moindre, On voit par ce dernier fait, qu'il faudroit, comme le dit M. Deparcieux , un grand nombre d'expériences & faites même en grand & dans différens courans, pour parvenir à donner des règles générales à ce fujet; cependant, comme l'avantage des aubes inclinées aux rayons eft conflant par ces expériences , il faudra en attendant, lorfqu'on voudra établir fur une rivière quelques moulins, ou quelques machines avec des roues à aubes, confulter l'expérience, afin d'apprendre le degré précis d’inclinaifon qu'on doit donner aux ailes de ces moulins, ou aux aubes de ces roues , relativement à la vitefle du courant & aux autres circonftances, foit de la grandeur de la roue, du nombre des aubes, & de leur enfon- cement dans l'eau. M. Deparcieux fit encore avec fa machine plufiêurs expériences relatives à quelques faits de cette partie de l'Hydraulique; il examina, par exemple, f1 l'action du courant augmente ou diminue par le plus grand nombre des aubes, & il trouva, par plufieurs expériences, que la roue trempant toujours dans le courant de la même quantité, & ayant toujours le même poids à élever, elle tournoit, quand elle avoit douze aubes, & plus vite & plus uniformément que lorfqu'elle n'en avoit que fix ; il obferva encore que l'action du courant fur la roue étoit la plus grande, quand il y avoit deux aubes également plongées dans l'eau, ou à peu-près, & non lorfqu'une des aubes étoit dans la verticale, comme on l'avoit cru jufqu'ici ; enfin il reconnut, ce qui paroît tenir à la même œaufe, qu'il n’eft point vrai, malgré ce qu’en ont dit plufieurs Auteurs, que lorfque deux aubes font plongées également dans D PSS SONGS NI G an Lt: oo Je courant, celle qui eft devant l'autre prive celle-ci de toute l'action de ce courant ; car lékpérience montre évidemment qu'elle en reçoitune partie. Combien de faits trop généralement fuppofés vrais dans la Phyfique & dans les fciences Phyfico- mathématiques feroïent démentis, s'ils étoient examinés au creufet d'une févère expérience. Plus on s'appliquera à la recherche de la vérité dans les Sciences, plus on reconnoitra fa néceffité de confulter fans ceffe la Nature par l'expérience , & de n'ériger en principes que les faits qu'elle a établis d’une manière inconteftable ; fans cela les années s’'écoulent, les erreurs fe mul- tiplient, & au bout d'un fiècle on eff tout étonné de voir tant de uavaux perdus, & qu'il faut renoncer à tout ce qu'une théorie fondée fur de faux principes avoit établi auparavant, SUR LA QUALITÉ DE LA FONTE DE FER la plus convenable aux Canons , r Les meilleurs 110yenS »« de la reconnoäre ; à fur l'infufifance à le danger de la manière ordinaire d ‘éprouver ces Canons. : lines joue un fi grand rôle dans la manière dont on fait la guerre aujourd'hui fur terre & für mer, qu'on ne peut trop s'attacher à la perfeétionner pour la gloire de Ja Nation & la füreté des Troupes, Ce perfectionnement ne doit même pas fe borner à ce qui regarde la manière d'employer le canon, & aux dimenfons qu'on doit lui donner; il doit s'étendre particulièrement encore à la matière dont il eft fa- briqué, afin qu'il puiffe réfifter aux violens eforts qu'il éprouve, Sans cela, es effets fe tourneront contre ceux qui l'emploient, & le canon fe brifant & volant en éclats , tuera & blefièra tout ce qui l’environne. La confervation de l’'Artillerie, la füreté des Canonniers qui la fervent, exigent donc la plus grande attention dans le choix de la matière des canons; cependant l grande quantité qu'il en faut pout la Marine ; fait qu'on FF à V. les Mém, Pe 358. - 228 HisTOiIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE ne peut guère en employer d'autres dans ce fervice que la fonte de fer, qui eft fort inférieure à cet égard au bronze ou à la fonte de cuivre; dans cette néceffité, il eft donc de ka plus grande importance de tâcher de déterminer parmi les différentes efpèces de fonte de fer, celle qui eft la plus propre à réfifter aux efforts de la poudre, c’eft ce que M. le Marquis de Montalembert fe propole particulièrement dans fon Mémoire. Cette queftion fur lefpèce de fonte de fer, qui doit être préférée, eft d'autant plus intéreflante, qu'on ne fabriquoit pas autrefois les canons de la même fonte dont on les fabrique aujourd'hui. Pour fexaminer d'une manière convenable, il eft néceffaire de pénétrer dans les forges ,#& de bien obférver ce qui arrive à la fonte de fer, & les différens états par où elle pañle. L Dans la première femaine du fondage, & lorfque le four- neau n’eft pas encore bien échauffé, on n’a qu'une fonte fort infé- rieure à celle qu'on obtient par la fuite , lorfque ce fourneau a acquis une grande chaleur ; cette première fonte eft très-brune, très-tendre, très-poreufe & très-légère, ce qui lui a fait donner, par les ouvriers, le nom de fonte hourrue ; mais enfuite, lorfz que le fourneau va bien, qu'il eft bien chauflé, & qu'après y avoir mis de la mine de plus en plus, il eft bien amine, comme difent les ouvriers, il donne une fonte beaucoup plus blanche, plus dure, plus ferrée & plus compacte que la première, & par conféquent plus pefante. C'étoit de cette fonte, qu'on dit aminée où avoir toute fà mine, que les Maîtres des forges s'attachoient à faire les canons avant 175 $, par les avantages qu'ils y trouvoient. À la vérité ils employoïent auffi d’autres fontes qui n’avoient pas toujours les mêmes qualités, mais ce n'étoit que par la difhculté d'entretenir toujours la matière dans le fourneau au même état de chaleur & de fufion, à caufe de la diverfité des veines de mine, qui ne font pas également fon- dantes, & des bois & des charbons qui ne donnent pas toujours la même chaleur; cependant ils n'employoient jamais la pre- mière, &, comme nous l'avons dit, les canons étoient fabri- qués en général de cette fonte aminée, qui ef la plus dure. Dies IS LCTIE Nic Es 229 M. Maritzayant été nommé, en 175 5 , Infpeéteur général des fontes dela Marine, & ayant obtenu du Miniftre que fes ma- chines à forer les canons de cuivre, feroïent employées auffi pour forer ceux de fer; il s’attacha à faire fabriquer, par les Maîtres de forges , les canons d’une fonte de fer très-tendre, au lieu de la fonte dure dont on les faifoit auparavant , parce qu'il regardoit cette première fonte comme plus douce &' moins caffante que l'autre, & qu'ellè étoit d'ailleurs beaucoup plus facile à couper, foit qu'on voulût forer les canons, ougles tourner. Cependant , felon M. de Montalembert, les faits ne s’ac- cordent point avec la propriété qu'on fuppofe à cette fonte, d’être moins fragile que l'autre, & femblent au contraire y être : oppofés ; on ne l'a admife que par une reffemblance qu'on a cru y voir avec les métaux doux & lians; mais étoit-elle bien fondée, & na-t-on point été trompé par une fauffe analogie? c’eft à quoi on ne peut trop prendre garde dans la Phyfique , où l'on eft fouvent induit en erreur par de faufles apparences. On obferve que les métaux les plus doux, les plus lians font les moins caflans ; la fonte tendre eft beaucoup plus facile à tra- vailler que la fonte dure ; on laregarde en conféquence comme plus douce, on en conclut que cette fonte réfiftera le mieux à toutes fortes de violens efforts; mais il peut y avoir loin de la propriété d'être plus facile à travailler, à celle d’être moins fragile; au moins cette conféquence eft-elle aflez incertaine pour n'être admife qu'après des expériences réitérées qui la confirment. En effet, la fonte de fer n’a aucune des propriétés qui caratérifent la duétilité des autres métaux, ne pouvant s'étendre à la forge, & les coups de marteaux la caffant par morceaux. L'analogie entre cette fonte & ces métaux, fe dément donc à cet égard. Il femble ainfi qu’on s’eft trop preffé de conclure, lorfqu'on a jugé que la fonte la plus tendre devoit avoir plus de corps que la fonte dure, parce qu’elle avoit la propriété, comme les métaux doux & lians, d'être facile à travailler que celle-ci n’æpas. Si l'on confulte certains faits, il paroït que c'eft tout le contraire; on fait qu'on ne fait les enclumes des forges à battre le fer qu'avec la fonte la plus F fiÿ 230 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE dure; on choïfit pour les couler Île temps où le fourneau eft le plus échaufié & où il eft le mieux aminé, parce que l'ex- périence a appris que fi on les failoit avec les premières fontes, celles qui donnent de la fonte bourrue ; dans peu de jours ces enclumes feroient mifes en pièces par les coups du marteau de ces forges, qui pèle plus d'un millier, Or il paroît que ces coups reflemblent aflez à l'effort violent & momentané de la poudre. Ce qu'il y a de conftant, c'eft que lorfqu'on fe trouve auprès de l'enelume où ils battent, on fent le même frémif- fement fous {es pieds qu'auprès d'une pièce de canon qu'on tire. J1 fmbleroit donc plus conforme à f'analogie des chofes, de croire que da fonte dure & compacte feroit plus capable de réfifter aux efforts de la poudre que la fonte tendre, puifque nous voyons qu'elle réfifte beaucoup mieux à des coups, à des ébranlemens qui paroïffent y avoir beaucoup de rapport. Un autre fait que M. de Montalembert a obfervé dans fes forges, vient encore à l'appui de celuià; c'eft que de plufieurs boîtes qu'il avoit fait faire pour porter les forets ou langues-de-carpe, avec lefquels on devoit forer un grand nombre de canons ; celles de fonte tendre cafloient prefqu'auflitôt qu’on les em- ployoit, celles de fonte dure réfifloient beaucoup davantage, & qu'enfin celles d'une fonte refondue une feconde fois, en obfervant feulement qu'elle ne fe trempât pas en fe refroidiffant, fe trouvèrent d’une f1 bonne qualité, qu'elles fervirent à forer plus de quatre cents pièces de canon. Ces faits femblent donc annoncer que la fonte dure eft celle qui eft réellement la plus propre à réfifler aux eflorts de la poudre, &.par conféquent à la fabrique des canons. Mais ce qui a fans doute jeté de l'incertitude fur cette conclufion, c'eft ce qu'on obferve dans certains uflenfiles de fonte de fer, qui font tout à la fois fi durs qu'on ne peut les travailler, & fi fragiles qu'ils fe caffent au moindre choc: on en a conclu que la fonte dure devoit être dans le même cas; mais c'eft faute d'avoir fait attention à la forme de ces uflenfiles & aux effets qui en doivent nécef- fairement réfulter. Ils font tous très-minces, ils doivent donc fe tremper en fe refroidifäant , il n'eft donc pas étonnant qu'ils DORÉ“, aie | D ES) SCIE NUCYE S 231 fe caffent facilement; ainfi ce défaut ne tient point à la nature de la fonte, il tient uniquement à a forme de ces uftenfiles ; & les canons étant des maflés très - confidérables, & qui refroidiffent très-lentement, on n'a point cet inconvénient à craindre; la dureté qu'on éprouve dans ceux qui font de fonte dure, ne vient que de ce qu'ils font d'une matière plus com- pacte & plus ferrée. Enfin cette fonte n'étant point poreufe, comme la fonte tendre, & n'étant point fujette comme elle à une multitude de foufllures, elle eft fpécifiquement plus pefante; nouvelle raifon de croire encore que fa dureté doit être accompagnée en même temps de plus de corps & de plus de force. C'eft par ces faits & ces raifonnemens que M. de Montalembert établit, fes conjeftures par rapport aux avantages des carons de fonte dure, fur ceux de fonte tendre, & aux préfomptions qui lui font penfer qué* ceux-ci doivent être beaucoup plus fujets à fe brifer & à éclater que les premiers; cependant, malgré tout ce qu'il allègue en faveur de fon fentiment fur cette matière, obfervant une fage réferve M. de Morntalembert ne prononce point fur une queftion de Phyfique auffi compliquée , & dont la décifion eft néanmoins fi importante, Il fe contente de faire remarquer que tous ces faits montrent la nécefité de la décider par un grand nombre d'épreuves de canons fabriqués avec différentes efpèces de fontes, afin de déterminer expérimentalement celle qui réfiftera le plis: & cette queftion eff trop intéreffante , pour qu'il ne foit pas fort à defirer qu'elle foit en effet décidée par cette voie. Il en réfulteroit encore un autre avantage, felon M. de Montalembert ; les diverfes efpèces de fonte de fer ayant, comme il Ja découvert, des pefanteurs fpécifiques différentes, & affez fenfibles pour être oblervées; lorfqu’on auroit découvert par les épreuves celle qui réfifte le plus, on n'auroit qu'à.re- . connoître fa pefanteur fpécifique; cette pefanteur deviendroit un terme de comparaifon, par lequel on détermineroit à l'avenir la fonte qui auroit les mêmes propriétés, celle qui feroit plus légère devant être rejetée, Par-là M. de Montalembert penfe ëncore qu'on pourroit éviter les épreuves des canons; les 232 Histoire DE L'ACADÉMIE RoYaLE pièces qui feroient trouvées fpécifiquement trop légères feroient rejetées comme d'une fonte trop tendre, ou comme con- tenant beaucoup de foufHures ou de cavités intérieures. M. de Montälembert fait à ce fujet des obfervations très - judicieufes fur ces épreuves, qui, dit-il, peuvent fouvent nuire, mais rarement être utiles. Il ef für que lorfqu'on éprouve les canons ils font expolés à un fr grand effort, que plufieurs en font rendus inutiles qui auroient pu fervir long-temps; & ce qui eft beaucoup plus fècheux encore, c'eft que nombre de pièces font altérées par ces épreuves fans qu’on s'en aperçoive, & qu'il s'y fait des fentes imperceptibles, dont les fuites ne fe mani- feflent malheureufement que dans le fervice de la pièce, qui éclate après plufiéurs décharges. Il feroit à fouhaiter au moins, en attendant qu'on trouve quelque meilleur moyen, qu'on ne fit es épreuves des canons qu'avec une charge un peu plus forte que l'ordinaire, & telle qu'elle répondit au plus grand effort que ces cinons peuvent éprouver .par quelque “inadvertance dans li manière de les charger. . . MACHINES OU INVENTIONS APPROUVÉES PAR L'ACADÉMIE EN 1759. “+ N°: VE AU Couromement ou tête: de cheminée pour les empêcher de fumer , fit par le foleif, la pluie, où toutes fortes de vents dires ou réfléchis ; imaginé par M. Genneté. La forme de cette cheminée eff telle qu'on reconnoît par la feule infpection, qu'elledoitavoir fa propriété de garantir les cheminées des effets du foleil & de la pluie, & quant à l'effet des vents direéts ou réfléchis, on en a fait l'expérience fuivante. Sur un modèle de tuyau de cheminée, M. Genneté fit placer fon nouveau couronnement, on fit monter de la vapeur d’eau bouillante dans ce tuyau, qui fortoit naturellement par les ouvertures de ce couronnement, on foufHa deflus enfuite-avec deux, trois & jufqu'à PUS er % tOPDBLE SAS ICT E INtCUE 6 2233 jufqu'à fept gros foufflets à fouder, dans toutes fortes de fèns & par fes diverfes ouvertures : on ne put jamais obliger Ja vapeur a defcendre, elle monta toujours fuivant da direction du tuyau, & s’échappa par quelques -unes de ces ouvertures. Pour mieux €n comparer l'effet avec celui des anciens Couronnemens de cheminée, M. Genneté avoit fait faire des modèles de tous ceux qui ont été imaginés jufqu'ici , qu'on mit fur ce tuyau dont nous avons parlé; lor{qu’on foufHoit par les ouvertures de ces cou- ronnemens , la vapeur rentroit au même inflant , il fuf{oit même d'un coup de foufflet pour produire cet effet & l'obliger à redefcendre dans le tuyau; mais pour déterminer fi dans tous les cas, Îa tête de cheminée de M. Genneté, réufüroit Éga- lemert bien, c’eft ce qu'on n'auroit pu faire qu'après un grand nombre d'expériences. L'effet du vent dans les cheminées, qui les fait principalement fumer, n’eft pas tant celui du vent, qui paffe par une ouverture où par une autre , que l'effet d’une mafñe totale d'air condenfé qui entre dans la cheminée, & dont l'action ne pouvant fe faire que de haut en bas, parce que cet air eft toujours pouflé par celui qui arrive de nouveau, oblige la fumée de defcendre dans la cheminée ; enfin il ya des cheminées très - rébelles & qu'on a Îa plus grande peine à exempter de fumée, Nous voudrions bien pouvoir faire connoître plus particulièrement ce couronnement de cheminée de M. Genneté, mais nous n'avons Pu en rapporter que les propriétés, l'auteur ayant demandé à l'Académie Ja permiflion de la rendre publique lui - même ; nous dirons feulement que les Com- miflares l'ont trouvée d’une conftruction fimple, de nature à ne pas caufer une grande dépenfe, & d’une exécution d'autant plus facile & folide, que toutes les pièces en font fixes. ” k … = Moulin à Lavure, préfenté par le fieur Pierre Jodin, de . Genève. Les Orfèvres font faire de temps en temps chez eux, par des gens qu'on appelle Lavesrs, une opération qui confifte à broyer en parties extrémement fines , avec des petits moulins faits exprès, les cendres & les terres de leurs ateliers, pour en extraire enfuite, par le mercure, l'or & l'argent qu'elles Afi7sg. Gg 234 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE peuvent contenir; l'objet du nouveau moulin eft de réunir dans un même lieu & de faire agir à la fois, par un même moteur, plufieurs de ces petits moulins. Par-là les Orfèvres pourroient faire faire en un jour, au moulin du fieur Jodin, ce qu'ils ne font faire chez eux qu'en plufieurs par les laveurs : on a cru, autant qu'on peut juger fur un modèle en petit, dans une machine de ce genre, que ce moulin pourroit réuflir, s'il étoit bien exécuté, & avec les attentions néceflaires pour que la puiffance motrice foit bien proportionnée aux diffé- rentes réfiflances dépendantes des vitefles & des frottemens multipliés. JRQIME Phifieurs Lampes & Lanternes conftruites & préfentées par le fieur Rabiqueau , les unes avec des miroirs de réflexion pour renvoyer plus de lumière d’un ou de plufieurs côtés; les autres avec des verres lenticulaires & des bocaux , pour réunir dans une même direétion les rayons, qui fans cela iroient en divergeant de tous côtés ; enfin d’autres encore de travail, ou pour mettre {ur des tables, auxquelles le fieur Rabiqueau met une calotte fphérique de cuivre argenté & poli, au lieu du cône de carton , de papier ou de fer-blanc , dont beaucoup de perfonnes fe fervent. Tous ces difiérens moyens pour augmenter la lumière, en réuniffant dans une même direction, foit par des miroirs, foit par des verres, les rayons, qui fans cela fe feroient dif- perfés de toutes parts dans l'efpace, ont été connus & mis en pratique depuis long - temps. En 1703, M. Favre préfenta à l'Académie une lampe compofée de quatre miroirs para- boliques faits avec foin, pour éclairer quatre rues ou quatre coridors, en les difpofant convenablement : cette lampe avoit quatre tuyaux pour conduire la fumée; les lanternes des chaifes de pofte {ont faites fur le même principe. On connoît les bocaux, dont les Metteurs en œuvre (Oïfèvres qui mon- tent les pierreries } fe fervent. Les lampes & lanternes du fieur Rabiqueau ne font donc point nouvelles, relativement aux dif- férens moyens qu'ila employés pour leur faire donner une grande MDI Se ONCE NCE S 235 Jumière ; mais il a fu en tirer un meilleur parti qu'on n'avoit fait avant lui. Il fait s miroirs fphériques, ayant fnti fans doute la difficulté, & même l’impoffibilité de les faire’ par- faitement paraboliques. Il met la mèche ou les mèches, quand - il y en a plufieurs, tout près du miroir. Si la lampe eft élevée, & qu'il faille éclairer en bas, il incline le miroir, comme on l'a déjà propofé il y a longtemps ; alers il fait une ouverture tout près de la flamme, immédiatement au-defius, pour donner de l’échappée à la fumée, afin qu'elle ne terniffe . pas le miroir : pour mieux l'attirer, il applique un tuyau ver- tical par-derrière pour lui fervir de cheminée; précaution qu'il falloit pendre, mais qui n'empêche pas cependant qu'on ne foit obligé de nettoyer les miroirs très-fouvent. Les lanternes pour les voitures font compolées de trois miroirs très - bien ajuftés, & difpolés pour éclairer le dehors, une loupe ou verre lenticulaire reçoit la fumière du bas par-derrière, pour éclairer le dedans de la voiture. Dans toutes les chofes de ce genre le tâtonnement mène fouvent plus loin que la théorie, qui ne peut embraffer dans fes déterminations toutes les irrégularités inévitables dans l'exécution. On regarde dans la théorie le foyer comme un point, la flamme d’une mèche n'eft pas un point, encore moins lorfqu'il y en a plufieurs, c’eft donc à l'Artifte à effayer la pofition des mèches, & à tâter la courbe de fes. miroirs, pour tâcher de tirer du total le plus grand eflet poffible ; c’eft ainfi que dans une lampe du fieur Rabiqueau, que lon voit dans la tribune de F'églife des Invalides, le miroir ne paroît pas avoir de forme décidée, parce que la flamme de cette lampe, produite par dix - huit , mèches, occupant une étendue de huit à dix pouces de long, il a fallu y approprier la forme de ce miroir. En: général, les Commiflaires ont trouvé que les lampes & les lanternes du fieur Rabiqueau éclairoient beaucoup mieux que toutes les autres qu'ils avoient vues, & qu'il méritoit des éloges pour avoir perfeétionné ces inftrumens : cependant que ces lanternes n'étoient pas encore au point de perfection où, ils pénfent qu’on peut les porter. Ggi 236 Histoire DE L'ACADÉMIE RoYALe Le Colle forte fabriquée par le fieur Antoine du Péchez. Les échantillons de cette colle ont paru à lextérieur femblables à la meilleure colle, dite d'Angleterre , de la même tranfparence, fe fondant dans l'eau chaude, fans mauvaife odeur, & fourniffant une colle liquide, qui colle folidement les plus larges jointures, qui fe sèche affez vite & ne s’humecte plus. Les certificats des Jurés Menuifiers-Ébéniftes, & Jurés Luthiers-Kbéniftes ayant atteflé d’après les épreuves qu'ils en ont faites, qu'elle étoit de même force & ténacité que la meilleure colle d'An- gleterre ; on a jugé qu’on pouvoit accorder au fieur du Pêchez la permiffion qu'il demandoit , de fabriquer, vendre & dé- biter fa colle forte; mais à condition qu'il fe foumettroit à déclarer le lieu ou les lieux qu'il choifiroit pour faire macérer les peaux & autres parties des animaux, dont il comptoit faire fa colle, afin qu'on avifàt fi on les approuveroit ou non, Grue propre à battre’ des pilois , préfentée par le fieur l'Herbette, maitre Charpentier à Saint-Denys. Cette grue eft conftruite à l'inflar de la machine qu'inventa le fieur Jacques Vaulois Horloger, pour battre les pilotis du pont de Weft- minfter à Londres, & dont on trouve la defcription dans le fecond volume du Cours de Phyfique expérimentale de Defaguliers. Pour la faire agir, le fieur l'Herbette emploie au lieu de chevaux, comme dans la machine Angloife, des hommes qu'on applique à des manivelles; cependant on peut dans l'occafion la faire agir aufli par des chevaux: afin de ménager lefpace, & de rendre le tranfport de la grue plus facile, le fieur l'Herbette fixe fur l'arbre du treuil une roue de champ, dans laquelle engrènent des pignons menés par les axes des manivelles où font appliqués les hommes; mais on a penfé que de cette manière ils fatiguoient davantage que s'ils étoient fimplement appliqués au bout d'un levier, comme dans les cabeftans ordinaires. De plus, on a trouvé que le verrou qui fait lâcher le mouton , n’eft pas tout-à-fait femblable à celui de la machine Angloife, & qu’il pourroit FAN «DRE !S)) S\GRNE Ni:C ETS EE arriver, dans certains momens, la machine étant conftruite comme le modèle qu'on a vu, que la tenaille ne defcendroit pas jufqu'au mouton, avant que le verrou eût repris; mais l'auteur a fait voir un moyen qu'il a imaginé pour remédier à cet inconvénient: au refle, cette grue a paru bien entendue & bien conftruite. V I. à Zaffrument propre à déterminer commodément la continence des tomieaux, propolé par le fieur Châtelain, Employé dans les Fermes du Roi. Cet inftrument eft compolé de deux parties principales, embraffées par un anneau qui fert d’index , favoir; d'une tringle carrée, appelée béton de jauge & d'un curfeur : ce bâton a une face divifée en pouces, & l'autre qui lui eft , contiguë, en parties inégales jufqu'au nombre de 120: ces parties prifes depuis le crochet, font les racines cubiques , ou plutôt les hauteurs ou diamètres de 120 mefures cylin- driques ou fetiers de huit pintes en progreffion arithmétique, depuis 1 jufqu'à 120. Toutes ces melures folides étant fup- pofées avoir des hauteurs égales à leurs diamètres , cette feconde divifion donneroit par une feule opération , la continence de toutes les futailles qui ne contiennent pas au-delà de 120 fetiers, fi leurs longueurs intérieures étoient égales à leur diamètre moyen. Le curfeur qui embraffe le bâton, & qui a huit pouces de longueur, Porte fur une de fes faces, deux fortes de lignes de divifion, auxquelles il faut avoir égard pour trouver la continence des tonneaux , dont la longueur eft plus grande que leur diamètre moyen. Les lignes qui forment la première divifion de la première face du curfeur, font tirées fuivant la longueur de cette face, & font numérotées 10, 15, 20, 25, 30; elles doivent répondre aux futailles, dont le diamètre moyen eft de 10 pouces, de 15 pouces, de 20, de 25 & de 30 pouces; & lorfque les pièces ont des diamètres moyens intermédiaires entre ces mefures, il faut imaginer d’autres lignes pareilles intermédiaires : chacune -des lignes droites dont nous venons de parler, eft divifée par des tranfverfales courbes, en parties G gi 238 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE inégales; de telle manière que l'extrémité du curfeur étant éloignée du crochet d'une quantité égale au diamètre moyen du tonneau, fi l’on place l'index au point d'interfeétion de la ligne droite marquée du nombre des pouces du diamètre moyen , & de la tranfverfale, qui porte le numéro du nombre de pouces dont la longueur du tonneau furpaffe fon diamètre moyen; cet index marquera fur le bâton le nombre des fetiers contenus dans le tonneau. On a trouvé que cet inf trument pouvoit être très-commode pour jauger avec précifion les tonneaux, fans faire d'autres calculs que ceux qui font néceflaires pour trouver le diamètre moyen & la longueur de l’intérieur du tonneau, & fon curfeur a paru nouveau dans fon genre. VUE Vernis maffic du fieur Guillaume Martin, Verniffeur du Roi à Rochefort. Ce vernis , que fon auteur appelle Camourlot, nom fingulier tiré de l'Hébreu , a paru d'après des épreuves juridiques faites pendant fept ans, avoir plufieurs propriétés avantageufes. Ces épreuves ont été faites à Rochefort fous les yeux de M. le Normant, Intendant, & de fon fucceffeur M. de Druis; au cul-de-fac du fort Saint-Pierre, fous les yeux . de M. Roüillé, Gouverneur de Ja Martinique; au Canada par M. le Comte de Vaudreuil, & par M. de l'Eguille, Capitaine des vaifléaux du Roi: M. du Hal en a fait auffi des épreuves. Les propriétés du camourlot font , qu'employé dans l'intérieur d'un navire, il ne s'attache ni aux marchandifes ni aux habits de ceux qui font employés à la manœuvre; qu'il diffipe & fait périr les vers & autres infeétes qui s'engendrent dans l'eau ftagnante du fond de cale; que fur l'extérieur du navire il chafle tout vers, infele & coquillage, ce que ne fait pas le goudron ordinaire ; qu'il garantit le bois de toute action cor- rofive de l'eau de la mer; qu'il ne s'écaille point au plus grand froid ; qu'il ne fe fond ni fe bourfoufle au plus grand chaud ; qu'il obéit dans les tourmentes à la flexibilité des parties du vaifieau, fans fe cafler ni fe refendre; enfin qu'il s'étend plus que le couroi ordinaire, & qu'il reprend fur lui-même fans qu'on foit "4 | D'ESN S'COHENCE & 239 obligé de mettre le feu & de racler les endroits qu'on juge devoir enduire de nouveau. D'un autre côté, on s’en eft fervi à joindre des dalles de pierre d’Arcueil & des carreaux de terre cuite, & quelques jours après on n'a pu les féparer fans les rompre , épreuves qui ont été faites fous les yeux de M. Souflot, Contrôleur des bâtimens du Roi; on a penfé en - conféquence qu'il feroit excellent pour les terraffes , le carrelage, sil n'eft point altéré par l’intempérie & la chaleur des faifons, &, comme il s’incorpore bien avec le bois de menuiferie , comme on l'a expérimenté, on pourra lemployer utilement aux boi- feries des lieux humides & aux parquets du rez-de-chaufée, Le fieur de Boispineaux, Yun des affociés du fieur Martin, prétend encore qu'on doit le regarder comme incombuftible ; des charbons allumés , dont il avoit recouvert plufieurs pièces de bois enduites de ce vernis, s'étant éteints, & leur feu ne s'étant point communiqué au bois; mais on a remarqué à ce fujet qu'il y a quelques années, un Chimifte avoit propolé un goudron incombuftible, dont en eflet plufieurs douves ayant été recouvertes , elles fouffrirent là même épreuve fans que le feu y prit. 3 VIII Vernis noir pour les Tabatières, du fier Goff, maître Peinue, Sculpteur & Verniffeur. Ce vernis a paru brillant & d’un beau noir, tant fur les boîtes de carton de l'Inventeur, que fur le fer d’un canon de piftolet, & fur une petite cafferole de cuivre rouge ; il eft dur & tenace, cependant if ne s’eft ni gercé, ni écaillé, en ployant la queue de cette petite cafie- role, qui en étoit recouverte; l'eau-forte ne fattaque pas à froid, & fi, pour la faire évaporer, on la met bouillir dans un vafe recouvert de ce vernis, comme on le fit dans la petite cafférole de cuivre, elle paroït n'en diffoudre que la partie qui lui donnoit la couleur noire, il refte après, de couleur tannée, & il femble d‘fendre fi-bien de l'eau-forte, le métal qui eft au-deffous , que l'ayant enlevé, on ne trouva le cuivre de la petité caflerole aucunement ahéré. Le fieur Goffe fit une petite omelette avec un œuf & du beurre dans une cafferole 240 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE femblable, vernifiée de même en noir, & placée fur un feu de charbon animé par un foufHet, l'omelette ne prit aucun goût de vernis & la cafierole lavée & efluyée après cette opération, fon vernis n’en parut endommagé ni par - dedans ni par-dehors , quoique cette partie eût été expofé à la flamme du charbon ; enfin une boîte de cuivre recouverte de ce même vernis, ayant été mile fur de la braife allumée, on l'en retira toute chaude, & on la porta au nez fans y reconnoître aucune odeur d'huile, de réfine, de thérébentine, de fuccin, &c, On a conclu de toutes ces épreuves, que le vernis noir du fieur Goffe eft un des meilleurs que fon puiffle employer pour les tabatières, qu'il ne communiquera vraifemblablement aucune odeur au tabac, défaut qu'on reproche au plus grand nombre de tabatières verniffées ; & qu'il pourroit être très- avantageux pour préférver de la rouille Les canons de fufil des Équipages des vaifleaux ; mais c'eft à l'expérience à pro- noncer fur cette dernière propriété. [Se Compofition ou enduit qui empéche le fer de fe rouiller, & qui lui donne en même temps une affez belle couleur d'argent mate, préfenté par le fieur Chartier. Cette compofition ayant très- bien réfifté aux différentes épreuves qu'on en fit, pour voir fi l'humidité, les fels & l'eau-forte ne l'altéreroïent pas; on a penfé qu'elle n'avoit pu réfifter à ces épreuves, & par- ticulièrement à celle de l'eau-forte fans pénétrer le fer & fans s'y incorporer très - intimement, On a jugé en conféquence qu'elle devoit être très -propre à le défendre de la rouille : J'action corrofive des fels répandus dans l'air, n'approchant pas à beaucoup près de celle de l'eau-forte, dont on frattoit cette compolition avec la barbe d'une plume ; & quoique le blanchiment du fer ne foit pas une invention nouvelle, puif- qu'on trouve dans d'anciens châteaux des ferrures blanchies, & qui ont réfifté à la rouille pendant un grand nombre d'années, & que M. Malouin dans un Mémoire {ur analogie du zinc avec létain, donne un procédé pour blanchir le fer avec le zinc, beaucoup mieux qu'avec l'étain: on a trouvé néanmoins que DE se S'eFE NICE & 247 que le blanchiment du fieur Chartier (que l'on a foupçonné contenir de l'étain & du zinc ) méritoit d'être approuvé, ayant les deux qualités les plus efléntielles, favoir , la beauté & la folidité, & pouvant d'ailleurs s'appliquer fur du fer fous toutes fortes de formes, & fur des pièces de toutes grandeurs: X. Clavecin, au moyen duquel on peut, fans ter les mains de defus le clavier, produire plufieurs changemens confiderables dans l'harmonie à le Jon de cet inffrument, préfenté par le fieur Veliman. Afin de faire mieux comprendre ce qu'il a de nouveau, il eft néceffaire, avant d’en parler, de dire un mot de la conftruétion des clavecins ordinaires. On ne peut penfer à cette conftruction , fans fe rappeler que chaque rangée de fautereaux eft conduite par une longue règle mile en travers du clavecin, & qu'on nomme segiffre ; cette règle eft percée d'autant de petites mortaifes qu'il y a de fautereaux dans le jeu, & ils y paffent tous affez près de leur partie fapérieure ; pour qu'en la reculant de quelques lignes, on les empêche de pincer les cordes avec les plumes dont ils font armés: on fupprime par ce moyen leur aétion fur ces cordes, & on en rend le jeu muet: ce mouvement s'exécute par un levier qu'on mène à {a main. Dans quelques clavecins, on ajoute une efpèce de fourdine qui confifie en une règle de bois placée près du chevalet, & chargée d'autant de morceaux de buffle, qu'il y a de cordes dans le jeu dont on veut adoucir le fon ; felon que a règle eft plus où moins pouflée, ces petits morceaux de buffle s'éloignent ou s’approchent de ces cordes, & éteignent dans ce dernier cas ce que leur fon peut avoir de trop éclatant; le mouvement de cetie règle fe fait encore avec la main, par le moyen d’un bouton qui lui eft attaché. II réfulte de-là, qu'il faut que la main de celui qui touche le clavecin quitte Le clavier pour fupprimer un jeu ou faire agir les fourdines, & que ces dif. férentes parties reftent conflamment dans fa même pofition, jufqu'à ce que la même main fes remette dans celle où elles étoient auparavant. Ainfi les variétés dans l'harmonie, Hi 1759: : Hh 242 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE qui naiflent deces changemens, ne peuvent avoir lieu dans le cours d’une même pièce, & bien moins encore pendant la durée d’un même pañage, ou d'une même cadence. + Ce dernier avantage qui feroit extrémement précieux , dans les clavecins, en ce qu'il leur donneroit une efpèce d'expreffion, fait particulièrement le mérite de celui dont nous parlons. Des reflorts y font artiflement placés pour maintenir tous les diffé- rens regiftres & toutes les fourdines dans leur fituation natu- relle, & des bafcules ou leviers, dont la pulfion agit en fens contraire, communiquent par des renvois, à des boutons fitués en dehors, de façon que les genoux peuvent les pouffér enfemble ou féparément ; par-là , on eft le maître dans l'exécution d'une pièce & pendant la durée d’un paflage, d'une cadence même, non-feulement de produire plufieurs échos, mais même de diminuer ou d'augmenter le fon comme infenfiblement. If y a encore plufieurs artifices dans linflrument dont nous parlons , pour tirer des fons plus agréables du clavecin; ainft on y trouve une pièce pour étouffer le fon des cordes , frappées par les marteaux ( efpèce de fautereaux, qui, au lieu de pincer les cordes les frappent en deflous }; & cette même pièce appliquée aux cordes, lorfqu’elles font pincées par les fautereaux ordinaires, produit une harmonie tout-à-fait fingulière : enfin Auteur a ajouté au clavecin un carillon monté fur une planche, & dont les marteaux font, par une mécanique particulière , mis en mou vement par les touches du clavecin. Ce carillon ef à ravalement haut & bas comme le clavecin; & il y a des pièces deflinées à éteindre le fon des marteaux auflitôt qu'ils ont frappé. On a trouvé que l'exécution de cet inftrument, qui eft excellente & de la dernière exaétitude, marque dans le fieur Weltman un génie mécanicien & une grande habileté dans fon art; mais que quant à l'invention des principaux changemens qu'on y obferve, fi l'on en exempte l'addition du carillon, & cette manière d'étouffer le fon des cordes frappées par des marteaux, elle appartient pour le fond à M***, qui, plus de deux ans aupa- ravant avoit fait exécuter au fieur Weltman un clavecin, pour un grand Prince, où la plupart de ces changemens fe trouvent. 0 DES S'cbmE N'CUE s 243 As Parafol ou Parapluie qui fe renfèrme dans une canne , préfené par le fieur Navarre. Dans ce parafol la tige eft creufe, & la noix qui porte les barrettes eft mobile, & placée au - deffus de la noix fixe, ce qui eft le contraire des parafols ordinaires. Cette noix a une queue qui entre dans la tige du parafl; un petit canon de cuivre qui fe meut le long de cette tige, recouvre une fente ou fenétre qu’elle a vers fe milieu de fa longueur ; ce canon & la queue de ia noix, font corps enfemble, au moyen d'une vis qui pafle dans a fenêtre dont nous venons : de parler , ainfi en pouflant le canon on fait monter en même temps la queue de la noix, par conféquent la noix elle-même, & .on ouvre Le paralol. La canne eft creufe de la longueur des côtes du parafol ou un peu plus ; & c’eft par la pomme qui fe monte à vis, qu'on le met dans fa place. Cette pomme eft percée d'un trou rond au milieu, & au moyen d’une boule plus grande que ce trou & que celui de fa monture d'au-deflous, le fieur Navarre forme une efpèce de genou, où il adapte à volonté le parafol où un télefcope de poche, en le montant fur une vis foudée à a boule ; on arrête le genou à demeure | contre fa pomme de la canne avec un contre-écrou. Quand on n'en fait pas d'ufage, on retourne fa boule fa queue en dedans , & alors il en pafle une petite partie par le trou de la pomme fans la défigurer: enfin à fautre bout de {a canne il y a une-pointe, qu'on en fait fortir pour fa fixer en terre, lorfqu'on veut que fa canne ferve de pied au télefcope. Quoi- que l'idée de mettre un parafol dans une canne ne foit pas nouvelle, on 2 trouvé cependant que celle de placer la noix mobile au - deffus de fa noix fixe l'étoit, ce qui eft d'autant plus à propos dans ce cas, qu'il eft néceffäire que le parafol occupe le moins de place poffible, & que par-là les barrettes agiflant en tirant , lorfque le parafol eff ouvert, elles réfiftent. avec plus d'avantage; enfin ce parafol a paru beaucoup plus parfait que ceux qu'on a vus jufqu'à préfent; mais on a jugé qu'il demandoit à être très-bien exécuté pour réunir les avan: fages que nous venons d'y remarquer, H hi #Vy, l'Hif, de WZÿ2p.14Ùe 244 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYALr FE Parlement ayant fait l'honneur à l'Académie, par fon Arrêt du 20 Janvier, de lui demander fon avis fur les Lettres patentes accordées par le Roi à M. de Vanières, le 29 Novembre 1758, pour la vente d'un foyer de cuifine de fon invention; la Compagnie a trouvé que ces Lettres ne contenoient rien que de conforme au jugement avantageux qu'elle avoit déjà porté de cette cuifine en 1752, & qui eft rapporté dans l’Hiftoire de cette année *. L'Académie ayant été pareillement confultée par le Parlement fur les Lettres patentes accordées par le Roi le 19 Juillet 175 3, aux fieurs Pargade & Goyon, portant un privilége exclufif de fabriquer, faire fabriquer & employer par tout Je royaume la machine que le fieur Pargade a inventée, pour vider les foffes d’aifance fans mauvaife odeur ; la Compagnie a jugé que cette machine pouvoit étre utile pour fupprimer, où au moins diminuer l'odeur infecte, dont non-feulement les plus proches voifins, mais encore les plus éloignés, font incommodés dans cette opération, pourvu qu'elle fût conftruite folidement, entretenue proprement, & qu'on obfervât exactement dans fon ufage toutes les précautions qu'on prit dans l'expérience dont on lui a fait le rapport. MÉMOIRES PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE EN 1758. ANS le nombre des Mémoires qui ont été préfentés à l'Académie pendant le cours de l'année 1758 , elle a jugé les dix-huit fuivans dignes d'avoir place dans le recueil qu'elle a coutume &e publier *. . Sur les Carrés magiques. Par M. Rallier des Ourmes. * Cet article fut oublié dans l’impreffion de l'Hifloire pour 1758, où il auroit dü naturellement avoir place. DES SCIENCES 245 Defcription anatomique de lhydrocéphale de Béole. Par M. Marcorelle, Correfpondant de l’Académie. Sur les feux d'artifice Chinois. Par le P. d’Incarville, Correfpondant de l'Académie, Sur une efpèce de coquillage appelée Date. Par M. Fou- geroux de Bondaroy. Mémoire de Dynamique. Par M. l'abbé Boflut, Corre£ pondant de l'Académie, Lettre à M. l'abbé Nollet fur l'Électricité. Par M. de Romas, Correfpondant de l'Académie. , Supplément à l'ouvrage publié fur lufage des feuilles dans les plantes. Par M. Bonnet, Correfpondant de l Académie. Sur la caufe des foufflures dans les Métaux coulés. Par M. Dantick, Correfpondant de Académie. Sur la caufe des bulles dans le Verre, Par le même. Obfervations des Éclipfes de l'étoile £ de la Baleine, de Mars par la Lune, & d’une Aurore boréale, faites à Rouen. Par M. Bouin, Chanoine régulier & Correfpondant de TAcadémie. . Lettre fur V'Électricité, Par M. l'abbé de Mazéas, Corref- pondant de l’Académie. Defcription de l'éruption du Véfuve, feconde partie. Par: M. d'Arthenay. Sur les Corps gauches. Par M. Mauduit. Delcription & analyfe d'une eau minérale, trouvée à Douai. Par M. d’Aboville & Baumé. Obfervations fur Vénus. Par M. Bouillet, Correfpondant de l'Académie, Sur la théorie des Satellites, & fur le calcul de leurs: mouvemens, Par M, Jeaurat, Profeffeur de Mathématiques. à l'Ecole militaire, 3 H ïj L2 246 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Defcription d'un Foœtus monftrueux. Par M. Marrigues. Sur le Borax, premier Mémoire. Par M. Cadet, Apothicaire- major des Invalides. l ACADÉMIE avoit propofé pour le fujet du Prix de 1758; Si les Corps célefles ont des atmofphères ! à fappolé qu'ils en aient, jufqu'où ces atmofphères s'étendent ! Elle a adjugé ce Prix à la Pièce n.° 1 , qui a pour devife : EURE RE LA Hac cognofcere primum lique domos fuperas Jcandere cura 4 7 dont l’Auteur eft le P. Frifi, Clerc régulier de ft Congrégation de Saint-Paul, de F Académie Impériale de Péterfbourg , de celle de l’Inftitut de Bologne, ci-devant Profeffeur dans lUni- verfité de Pife à Milan. MCEIM O'DRVESS PRÉSENTÉS À L'ACADÉMIE EN 1759. D ANS le nombre des Pièces qui ont été préfentées cette année à l’Académie , elle a jugé les vingt-trois fuivantes dignes d’avoir place dans le Recueil de ces ouvrages , qu'elle fait imprimer fous le titre de Mémoires de Mathématiques à de Phyfique, préfentés à l'Académie royale des Sciences, pat divers Savans, à ls dans fes Affemblees. Sur la fenfibilité des parties du corps animal. Par M. Gerard de Villars, fils. Extrait des Obfervations météorologiques , faites à Dun- Kkerque depuis 17 54 jufqu'en 17 5 8. Par M. Tully, Médecin, Obfervation de Féclipfe de Lune du 13 Janvier 1750, faite à Béziers. Par M.* Bouillet, Correfpondant de lAca: démie, Barbier & Forez. DIE SN SCTENCES " 247 Obfervations météorologiques, faites à Touloufe depuis 1747 jufqu'en 1756. Par M. Marcorelle, Correfpondant de l'Académie. Sur les anneaux colorés, produits par deux glaces planes. Par M. du Tour, Correfpondant de l'Académie. Obfervations de là Comète de 1759, faites à T'ouloufe. Par M. d’Arquier, Correfpondant de l'Académie. Sur les eaux de Plombières. Par M. Morand le fils. Sur un Fœtus monftrueux. Par M. Bordenave. Obfeivations nouvelles fur la Matrice. Par M. Suë, Théorie de la Comète de 1759. Par M. Bailly. Problème de Dynamique. Par M. Chabanon de Maugris.. Obfervations de la Comète de 1759. Par M. Jeaurat. Sur un nouveau genre de Crabes , qui ont des pattes fur Je dos. Par M. Wofmaër, Correfpondant de l’Académie. Sur les Staladtites. Par M. l'abbé de Mazeas, Correfpondant. de l’Académie, Obfervations de la Comète de 17509. Par M. Lullofs, Correfpondant de l'Académie. Les mêmes. Par M. Klinkemberg , Correfondne de Académie. Les mêmes. Par M. Gabry, Correfpondant de l'Académie. Obfervations fur plufieurs efpèces de Caucalis. Par M. Gerard: de Villars. Expériences qui paroïffent prouver que le Borax contient: véritablement une terre vitrifiable. Par M. Cadet. Obfervations de la Comète de 17 59 , faites à Lifbonne:. Par le P. Chevalier, Correfpondant de l'Académie. Diverfes Obfervations aftronomiques. Par M. Bouin. 248 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE De termino generali fericrum recurrentium cum appendice dif- quifiio analytica. Par le P. Ricati, Jéluite. Sur les Solfatarres des environs de Rome. Par M. l'abbé de Mazéas, Correfpondant de l'Académie. "ACADÉMIE avoit propofé pour le fujet du Prix de 1759: L'examen des efforts qu'ont à Joutenir toutes les parties d'un Vaiffeau dans Le roulis © dans le tangage, €r la meilleure manière de procurer à leurs affemblages la folidité néceffaire pour réfifler à ces efforts, fans préjudicier aux bonnes qualites du Vaiffleau. Elle a partagé ce Prix entre Ja Pièce n.° 1, qui a pour devife: Anfequitur clamorgue virim clangorque tubarum , dont l'auteur eft M. Euler, Direéteur de l’Académie royale des Sciences & Belles-Lettres de Prufle ; & la Pièce n° 2, quia pour devife : Vis unita major, dont l'auteur eft M. Groignard, Conftruéteur des Vaifleeaux du Roi. ÉLOGE DES SEUIL E NUC.E s 249 Rsesteste Sectes Teste Eee See Ne FLOG'E ‘DE M DE VALLIÉÈRE. EAN-FLORENT DE VALLIÈRE, Lieutenant général des Armées du Roi, Gouverneur de Bergues-Saint-Vinox, Grand-Croix de l'Ordre royal & militaire de Saint - Louis, Directeur général des Bataillons & des Écoles d'Atillerie, ‘ paquit à Paris le 7 Septembre 1667, de Jean de Vallière, Écuyer, & d'Anne Huée d'Arteville. La valeur & le génie militaire étoient probablement héré- ditaires dans cette famille: Jean de Vallière, encore Mouf- uetaire, avoit été au fiége de Candie; devenu enfuite Lieu- tenant d'Infanterie, il fut blefé en 1 673 de deux coups de feu à l'attaque de la contrefcarpe de Maëfhricht, & finit par être Capitaine de Cavalerie; & fon fecond fils, cadet de M. de Vallière, mourut Capitaine au régiment Dauphir, des bleffures qu'il avoit reçues au fiége d’Aire, efpèce de fucceffion bien plus précieufe que celles que donne la fortune, & qui doit être enviée de tous ceux qui favent penfer noblement. ‘Le goût de M. de Vallière pour la guerre fe déclara dès qu'il put en marquer un: Fapplication qu'il donna à fes pre- mières études, ne fut chez lui qu'une marque de la folidité de fon génie , qui s’exerçoit fur cet objet, faute d’avoir encore aperçu celui auquel un penchant naturel l'entraînoit ; bientôt le fervice de l'Artillerie attira toute fon attention, & toutes les autres occupations furent facrifiées à cette inclination naifflante. ; Il entra én 1685 dans les Cadets d’Artillerie, âgé d’en- viron dix-huit ans; & il y employa fr bien fon temps, que dès 1688 il fut fait Commiflaire extraordinaire, & quatre ans après Commiflaire ordinaire d’Artillerie, Rien n'étoit peut-être alors plus mal connu que les effets Hifl, 1759: Ji pa 250 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoxaLeE de la poudre, fur-tout dans la partie des mines; on regardoit fon aétion comme fujette à des bizarreries qui échappoient à toutes les règles, & qui ne pouvoient être aflujetties à aucune théorie. Les plus habiles Officiers n'étoient guère que ceux, qui, par un, long ufge , s'étoient formé une pratique capable de fatisfaire aux cas ordinaires, mais que les moindres acci- dens pouvoient à tout infkint rendre inutile, & pour comble de malheur on ne connoifloit rien au-delà. Malgré cette pré- vention générale, M. de Vallière porta fes vues plus loin; il -obferva les faits avec tant d'attention , qu'il aperçut bientôt que toute la bizarrerie apparente des effets de la poudre, tenoit à des principes fimples, & il ofa Faflurer ; il fit plus, il travailla à les connoître, & s'il n’y réufit pas entièrement, il en dé- couvrit affez pour faire prefque changer de face au fervice de Y’Artillerie ; il porta même fi loin fes recherches, fur-tout dans la partie des Mines, qu'on vit avec le plus grand étonne- ment, qu'en fuivant fes principes, un même point pouvoit être enlevé jufqu'à vingt fois; paradoxe alors inoui, mais qui devenoit une conféquence néceffaire de fes déconvertes. La récompenfe de fes utiles travaux, fut une place de Capitaine de Mineurs, qu'il obtint en 1699. : H avoit déjà donné des preuves de fa valeur & de fa capa- cité aux fiéges de Philifbourg, de Manheim & de Frankendal, au bombardement de Coblentz & aux prifes des villes de Spire, de Trèves & de Worms; il fe diftingua fur-tout à la furprife de Rocheim , où ayant été chargé d'attacher le pétard , il entra le premier dans Ja ville, & fut même confidérablement bleflé en cette occafion d'un coup de fabre au bras droit : une expédition auffi délicate & aufii hardie que la furprife d'une ville fut'alors confiée à un jeune homme de vingt-quatre ans, Quelle idée devoient avoir les Généraux de fes talens & de fon intrépidité? Le fiége de Mons, que le feu Roi prit en feize jours de tranchée ouverte, ceux de Namur, de Furnes, de Douai, de Saint-Amant, de Traerbach, du fort de Kell, de Neuf- Brifac, de Girone , de Barcelone , de Nice & de Turin, PEN EU SU TS) IUT EU NE UE Se 2$t & les bombardemens de Charleroi & de Bruxelles, furent de nouvelles occafions de fignaler fon courage & de donner des preuves de fa capacité; il fut même bleffé au fiége de Nice du vent d'un.boulet, qui lui endomimagea les côtes, & lui mit à découvert l'os du bras droit: cette bleffüre, dont la guérifon füt très-longue, lui fit faire ce qu'il n'avoit pas encore fait depuis qu’il étoit entré dans l'Artillerie; pafla fans fervir le refte de la campagne. Dès le fiége du Quefnoy, où il avoit pour la première fois commandé l'Artillerie en chef, il avoit fait voir ce qu'on en pouvoit attendre, lorfqu'elle éoit bien employée. En vingt-quatre heures de temps il éteionit avec srente-huit pièces ‘de canon, quatre-vingt - quatre bouches à feu que l'ennemi avoit fur le front de l'attaque : au fortir de ce fiége il alla à celui d'Aire où il fut bleffé d'un éclat de bombe, & au retour de cette campagne il fut fait Brigadier des Armées du Roi. Nous excéderions de beaucoup les bornes qui nous font prefcrites, fi nous voulions faire ici la plus fimple mention de tous les fiéges où il s'eft trouvé; aucun Général n'ignoroit fes talens, & c'étoit prefque s’aflurer du fuccès d'une entre- prife que d'y appeler M. de Vallière ; il avoit non-feulement : l'art de rendre l’Artillerie formidable àd'ennemi, mais encore le fecret bien plus précieux de ménager, autant qu'il toit poffible, la vie des hommes & même la dépenfe. La con- fiance & attachement que les Soldats avoient pour lui, pourroient fervir de preuve au premier, & nous n'apyorterons pour confirmer le fecond, que l'étonnement où fut Louis XIV, lorfqu’après les fièges du Quefnoy , de Douai & de Bouchain, on lui préfenta les mémoires de la dépenfe de l’Artillerie: ce grand Prince qui fe connoïfloit fr bien en expéditions de cette nature, ne put d'abord fe perfuader que la dépenfe qu'on lui préfentoit füt celle des trois fiéges; il crut long-temps que ce m'étoit que celle de lun des trois, & lorfqu'il fe fut bien affuré du contraire, il voulut en témoigner fa fatisfaétion à M. de Vallière, par une gratification de douze mille livres Ji ij 252 HisroiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE qu'il lui accorda, & par une penfon de quatre mille livres, dont il lui fit expédier le brevet à fon infu; récompenfe juflément méritée, & à laquelle la manière même de l'accorder donnoit un nouveau prix ; il n’eft pas ailé de décider qui elle honoroit le plus, où du Souverain qui reconnoifloit {1 bien les fervices, ou du fujet qui les rendoit avec un zèle fi pur & fi défintérefé, Ce que M. de Vallière favoit faire dans l'attaque des places, il avoit auffi le metre en pratique pour les défendre ; il étoit dans Landau en 170 2, lorfque cette place fut défendue par M. de Méac, & il contribua beaucoup à la longueur de ce fiége qui dura près de quatre mois ; il étoit encore dans la même place, lorfau’après avoir été reprife par M. de Tallard, les ennemis l'afliégèrent de nouveau en 1704, & il la défendit fous les ordres de M. de l’Aubanie avec tant de fuccès qu’il en retarda beaucoup la prile : il fe trouva dans la ville de Douai, lorfque M. d'Albergotti y foutint un fiége de cinquante-deux jours; en un mot, il y a eu peu de défenfes mémorables de places auxquelles M. de Vällière n'ait eu part, & où il n'ait rendu des fervices confidérables. Le fervice de l'Artillerie n'eft pas borné à Pattaque & à Ja défen'e des places, il eft prefque toujours néceflaire dans les batailles, & fouvent contribue, autant que tout le refle à la viéloire. M. de Vallière ne fut ni moins fréquemment ni moins utilement employé dans ces occafions importantes qu'il lavoit été dans les fiéges : il étoit à la bataille de Fleurus en 1690, en 1692 à celle de Leufe, en 1702 à celle de Frédelingue, en 1704 à celle d'Hofchtet, en 170 5 à celle de Ramilly, en 1708 & 1709 à celles d'Oudemarde & de Malplaquet, & en 1712 à la célèbre affaire de Dénain; cette mémorable aétion qui rendit à la France la fupériorité de fes armes, & à l'Europe prefqu'entière, une paix dont elle étoit privée depuis fr long-temps, fut la dernière à laquelle il affifla fous le règne de Louis XIV. La paix qui fuivit la mort de ce grand Prince lui Ôta les occafions de fignaler fon zèle contre les ennemis de l'État; mais elle ne le rendit pas | DE Shi SL GNDE, NC S 253 inutile: feu M. le Duc d'Orléans Régent, qui connoïfioit à fond fa capacité, lui avoit accordé la plus grande confiance; il le fit Maréchal-de-camp en 171 5 , Commandeur de l'Ordre de Saint-Louis, & Direéteur général de l’Artillerie en 1720. M. de Vallière ne fongea pas à fe prévaloir de la faveur de ce Prince pour fa propre utilité, mais il l’épuifa prefque en faveur de l'Artillerie , qu'il vouloit relever, & il employa tout fon crédit pour faire agréer les projets qu'il avoit formés, pour porter ce genre de fervice au degré de perfection, auquel nous le voyons. Dès qu'il fe vit à la tête de ce Corps, dont il connoifloit fi bien toute l'importance, il n'eut rien plus à cœur que d'en extirper les abus qu’une longue négligence y avoit introduits, & qui en énervoient, pour ainfi dire , toute la vigueur ; il fentoit combien l'étude des Mathématiques & une efpèce d'habitude éclairée des opérations de lArtillerie étoient néceflaires aux jeunes gens qui fe deftinent à ce genre de fervice, c'en fut affez pour l’engager à folliciter tous ces établiffemens f dignes de fon zèle & de la grandeur du Roi, & qui ont porté l’Ar- tillerie de France au point de fupériorité où elle eft aujourd'hui; les talens ne manquèrent plus de l'inftruétion néceffaire pour les développer, l'application & le mérite ouvrirent l'entrée aux poftes &-aux dignités, & les honneurs devinrent, comme ils devroient toujours l'être, une récomipenfe des fervices rendus & un motif d'émulation pour en rendre de plus grands. Telles furent les occupations de M. de Vallière pendant la longue paix qui accompagna la Régence & les premières années du règne de Louis X V ; on jugera aifément que les Mathématiques & la Phyfique entroient pour beaucoup dans fexécution de fes deffeins, & que l’Académie, qui a pour objet favancement de ces Sciences & leur avplication à des ufages utiles, ne pouvoit pas négliger de sacquérir un - Citoyen qui les rappeloit fi direétement aux befoins de 4 Société ; elle faifit avec empreflement loccfion de den: nouvelles places d'Aflociés-Libres, créées par le Roi en 1731, pour le mettre au nombre de fes Membres. Li ii 254 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE RoYALE La guerre s'étant rallumée en 1733, M. de Vallière reprit tout le feu de fa jeunefle, & fervit en qualité de Lieutenant général avec la même vivacité que s'il n'avoit pas eu alors foixante-fix ans accomplis; fon zèle fembloit remplacer les forces que l’âge lui avoit enlevées ; il fe trouva à toutes les occafions, & fit par-tout fentir aux ennemis le poids de fa préfence, il rendit fur-tout de fi grands fervices à la fameufe action de Dettinghen, que nous ne croyons pas pouvoir nous difpenfer d'en tracer ici une Iégère efquifle. La rivière du Mein, qui pafle au pied de Dettinghen ; forme en cet endroit un vafte marais abfolüment impraticable, au milieu & proche la rive du fleuve s'élève une montagne en fer-à-cheval, dont l'ouverture eft tournée vers le rivage ; elle renferme une petite plaine dont l'étendue n'excède pas la portée du canon, & dont le fol plus élevé eft au-deflus des eux du fleuve; la pente, le fommet & le revers de la montagne font couverts de bois, & cette petite plaine n'eft acceflible que par la gorge du côté du Mein, dont le village de Dettinghen occupe une partie, & par une chauflée qui traverfe le marais. C'étoit dans cet endroit que, par une marche favamment combinée, M. le Maréchal de Noailles avoit trouvé le moyen d’enfermer les ennemis ; J'Infanterie françoife, placée à l'ou- verture de la gorge & dans le village, ne leur permettoit de fortir qu'en effuyant de très-près tout le feu de fa moufque- terie ; la chauffée qui traverfe le marais étoit occupée par un détachement, qui en rendoit le pañfage impraticable, & M. de Vallière avoit établi fur une des collines de l'entrée, une batterie dont le feu faifoit une fi terrible exécution, que des files entières étoient emportées à chaque coup de canon ; enun mot l'armée Angloife fe trouvoit dans la même pofition où les Samnitesavoient autrefois fu amener celle des Romains dans les fourches Caudines. Déjà les ennemis parloient de couper les jarrets à leurs chevaux, & de fe débander à travers les bois & les marais ; mais le Commandant Samnite fut obéi, & le Général françois ne le fut pas, malgré trois ordres confécutifs Ve. "4 i MONDES PSG E, Nc Es. 255 qu'il envoya à l'Oficier. qui commandoit l'Infanterie placée … dans le village, de garder fon pole : celui-ci fe laiffa €mporter à l'ardeur de fon courage & à l'envie de fe fignaler, il eut limprudence d'en fortir & de f venir mettre entre le feu de M. de Vallière & l'ennemi , & par-Rà rendit inutile tout ce que la prudence de M. le Maréchal de Noailles & l'habileté de M. de Vallière avoient fi bien préparé ; il leur arracha la victoire des mains, & fit évanouir l'occafion fi précieufe de terminer une guerre, qui a depuis coûté au roÿaume le fang d'un fi grand nombre de fes plus braves défenfeurs. Le Public rendit pleine & entière juftice à M. de Vallière, & fi les éloges les plus exempts de reftrition devoient être la feule récom- penfe de pareils fervices , jamais perfonne n'auroit eu plus que lui Jieu d’être fatisfait. M. de Vallière fervit encore les deux campagnes fuivantes, & ne fe retira qu'après le fiége de Fribourg ; les pluies conti- nulles qui durèrent pendant prefque tout le temps de ce fige, inondèrent plufieurs fois la tranché & tous les travaux, dans lefquels on ne pouvoit entrer fans avoir les jambes dans . l'eau : cette ficheufe circonftance ne fi rien rabattre à M. de Vallière de fon activité à remplir fes fonctions ; mais elle lui attira un mal de jambes qui lui ôta la faculté de marcher aifément, & l'empécha de fe trouver aux autres expéditions qui fuivirent la prife de Fribourg. On fe tromperoit cependant fi on s'imaginoit que M. de Vallière demeuroit oifif dans fà retraite. Du fond de fon cabinet, où la foibleffe de fes jambes 1e tenoit confiné , il avoit toujours les yeux ouverts fur le Corps de l'Artillerie, & il en füuivoit exactement les opérations. 11 voyoit avec plaifir un fils, digne héritier de fes talens, marcher {ur fs traces & iBuftrer, par de nouveaux exploits, ce Corps qui lui étoit ff cher; il le Voyoit partir de Lawfelt, par ordre du Roi, & venir éteindre à Bergopzoom , avec deux feules batteries placées fur les pro- Jongations qu'il fit faire de Ja parallèle , tous les feux que l'ennemi avoit fur le front de l'attaque | & que les travaux , pouflés julqu'au glhcis, n'avoient encore pu faire cefler ;, il de 256 Histoire DE L’ACADÉMIE RoYALE. voyoit ouvrir enfuite les brèches au corps de la place & à Ia demi-lune, & déterminer, par fes confeils, à monterà l'une & à l'autre en même temps, & à emporter par ce moyen la ville d'affaut prefque fans aucune perte; il le voyoit difpofer tout à Haftembeck pour aflurer la victoire, par un choix réfléchi des divers poftes où il convenoit d'établir fes batteries, & par l'intelligence avec laquelle l'Artillerie fut fervie. A ces traits ce relpectible vieillard reconnoifloit fon fang; mais tandis que le Corps de f'Artillerie s'épuifoit par fes travaux & fes victoires, il tenoit exactement la main à ce que les jeunes gens qui fe préfentoient pour le renouveler & pour y entrer, fuffent inflruits & examinés avec foin ; il procuroit l'avancement de ceux qui s’en montroient les plus dignes ; il mettoit toute fon attention à faire exécuter ces fages règlemens, qui étoient le fruit de fon zèle, de fes foins & de fon expérience; en un mot, il étoit toujours l'ame & le premier mobile de ce grand Corps, & ne pouvant plus lancer lui- même les foudres qui lui avoient été confiés, il s'appliquoit au moins fans relâche à en affurer les effets ; ces fervices ne demeurèrent pas fans récompenfe, & le Roi lui donna en 1749 le Gouvernement de Bergues-Saint-Vinox. Telles furent les occupations de M. de Vallière jufqu’à fa mort; car fa tête, refpectée par les périls & les fatigues de la guerre, le fut auffi par les années: on ne s’aperçut de fa vieillefle que par l'affoibliffement infenfible de fon corps & jamais par celui de fon efprit ; il ne fut qu'environ onze mois obligé de garder tantôt le lit tantôt la chambre; & cet homme qui avoit paffé prefque tout le cours d’une très -longue vie dans le tumulte des armes, qui avoit aflifté à plus de foixante fiéges, & à plus de dix batailles, qui avoit efluyé les atteintes & les bleffures de prefque toutes les efpèces d'armes, finit fa longue & glorieufe carrière paifiblement entre les bras de fa famille, fans douleur, & par la feule néceffité impofée à tous les hommes; il mourut le 6 Janvier 1759, âgé de près de quatre-vingt-douze ans. A ne confidérer que ce que nous venons de dire de la vie de M. de Vallière, on feroit tenté de fe le repréfenter comme ‘ un DR 7. D LE RON NV AT Ep LR AN MAR CE CAR 0 NN TARN TEE à DES SCIENCES 2 LR 257 “un homme vif, bouillant, plein de feu, & dont & phyfio- nomie annonçât une efpèce de férocité maïtiale; on fe trom- peroit cependant, & jamais portrait n’auroit été moins ref- femblant ; la douceur qui faifoit le fond de fon caractère, paroifloit jufque fur fon vifage ; & cét homme fi terrible aux ennemis quand fon devoir l'y obligeoit, étoit dans le corg- merce de la vie, le plus fimple & le plus tranquille de tous les hommes; les évènemens heureux où malheureux n’ont jamais altéré l'égalité de fon ame ; l'ingratitle même de ceux auxquels il avoit fait le plus de bien, n'a jamais pu l'ébranler; épreuve la plus forte à laquelle un cœur noble & droit puiffe être expolé; c'eft prefque lui faire tort que de parler ici de fa candeur & de fa probité; fa réputation étoit fi entière & fi générale fur cet article, que, nous ne pourrions en rien' dire qui w'affoiblit l'idée qu'on en avoit ; toutes ces vertus, d’au- / tant plus eftimables chez lui, qu'elles étoient foutenues d’un très - grand fonds de religion, étoient encore couronnées par une rare modeftie & par cette noble fimplicité qui fied fi bien aux grands hommes, & dont le défaut a terni la gloire de plus d'un Héros. Après ce que nous venons de dire, il eft prefqu'inutile d'ajouter que rien n'étoit plus tranquille ni plus réglé que l'in- térieur de fa maïfon: il ne perdoit rien à être vu dans le particulier; bien différent en cela de plufieurs hommes illuftres, dont on a admiré les actions au dehors, tandis qu'ils fe ren- doient petits & méprifables au dedans. Nous n'ajouterons plus qu'un feul trait à cet Éloge ; nous “avons dit dans celui de feu M. le Maréchal de Lowendal, qu'il feroit volontiers entré dans cette Compagnie, fous quelque titre que c'eût été, plutôt que d'attendre qu'il y vaquât une place d'Honoraire ; mais nous devons ajouter ici que le Miniftre lui alléguant fa dignité de Maréchal de France, pour le dé- tourner de demander une place d'Aflocié-Libre qui vaquoit alors, M. de Lowendal répondit qu'il fe trouveroit toujours honoré d'une place où il fe verroit à côté de M. de Vallière, ce mot eft trop honorable à celui qui l'a prononcé, à M. de Al. 1759. 258 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE Vallière & à l'Académie même, pour que nous ayons pu le pafler fous filence. Ce jugement d’un des plus grands Géné- raux de notre fiècle vaut feul tout ce que nous pourrions dire à la louange de M. de Vallière. Il avoit été marié deux fois; la première avec M. Trudaine, parente de M. de Voiïfins, alors Miniftre de la Guerre; & la feconde avec D. Marguerite Martin, fille de M. Martin, Brigadier des Armées du Roï; il a laïflé de ce fecond mariage deux fils; l'aîné, décoré par le roi-d'Efpagne d'un titre de Caftille, fous le nom de Marquis de Vallière, fut fait Lieutenant général en 1748, Directeur général du Génie & de l’Artillerie en 1757, Gouverneur de Bergues- Saint-Vinox en 1759, & Membre de cette Académie en 1761. Le cadet, d’abord Meftre-de-camp du régiment Royal | Corfe, Cavalerie, & depuis Maréchal - de-camp des Armées du Roi ; & une fille mariée à M. de Tournière, aufli Membre de cette Académie, La place d'Afocié-Libre de M. de Vallière a été remplie par M. de Chabert, Chevalier de l'Ordre de Saint - Louis, Lieutenant des Vaifleaux du Roi, de l'Académie de Marine, de celle de Berlin & de celle de l'Inflitut de Bologne. DE M. ' DE MAUPERTUIS, à Er Moreau DE MaurerTuis, Chevalier de l'Ordre du Mérite, Préfident perpétuel de l'Académie royale des Sciences & Belles-Lettres de Berlin, l'un des Quarante de l'Académie françoife, & Membre des Académies royales des Sciences de France, d'Angleterre, de Suède & d'Italie, naquit à Saint - Malo le 28 Septembre 1698 , de René Moreau , Écuyer, Seigneur de Maupertuis, Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, Député de ladite ville au Confeil de Commerce, & de Jeanne - Eugénie Baudran. La première éducation du jeune Maupertuis fut domeftique; Jamour qu'avoit pour lui madame fa mère, ne lui permit pas de l'éloigner d'elle, & peut - être prit -elle alors par foibleffe un parti très-raifonnable, I auroit été à craindre qu'un elprit auff vif & auffi ardent que l'étoit celui de fon fils n'eût eu de Ja peine à fe prêter à la marche lente, quoique füre, de l'éducation des Colléges : fon génie exigeoit plutôt d'être fuivi que d'être conduit, du moins n'étoit - il fufceptible de l'être qu'avec des précautions infinies, qu'il trouva dans les foins d'un Précepteur attentif & habile, qui fut fe plier à fon caractère ; foins defquels M. de Maupertuis a confervé toute fa vie une fi conftante reconnoiffance, que deux mois avant fa mort, il en donna encore des marques à la famille de ce premier guide de fes études. Le cours de fes humanités étant fini, il fut envoyé à Paris, où il fit fa philofophie fous M. le Blond, célèbre Profeffeur du Collége de la Marche : ce genre d'étude ne saccordoit pas auffi bien avec la vivacité de fon imagination que les Belles-Lettres; il s'y trouva bien moins à fon aïfe, & n'en remporta qu'une grande quantité d'idées qu'il ne pouvoit pas aifément affortir les unes avec les autres, & dont par-là même Kkij Le 260 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE la certitude lui devint fort fufpeéte : ce fut-là pour lui l'origine du doute philofophique ; on ne fe feroit pas fürement avifé de croire que la vivacité d’efprit, ordinairement fi décifive, eût été capable d'y conduire. Les leçons de philofophie reçurent bientôt un plus terrible échec. Au fortir des études il fallut faire choix d’un état : le - génie bouillant de M. de Maupertuis l’entraina vers la guerre ; & tout ce qu'il put accorder à la tendreffe maternelle fut de renoncer à la Marine, à laquelle fon inclination le portoit, pour prendre le fervice de terre; & il fallut fe livrer à tous les exercices néceflaires à cette profeffion. Un penchant fecret lui. fuggéra d'y joindre l'étude des Mathématiques, alors. moins. cultivées qu’elles ne le font à préfent, même par la plupart des: militaires, auxquels elles peuvent être cependant fi utiles, & il en prit des leçons du célèbre M. Guifnée, Membre de cette Académie. Il trouva dans cette étude une fatisfaction qu'il n’avoit encore rencontrée dans aucune autre. L’enchaînement néceffaire des vérités mathématiques toit à fa vivacité tout prétexte d'écart: elle lui fervoit au contraire d'aiguillon pour parcourir avec rapidité cette nouvelle carrière. I entra dans les Moufquetaires en 1718, âgé d'environ. vingt ans ; le goût des Mathématiques l'y fuivit, il s’y livra avec ardeur, & cette étude favorite remplit les vides du fervice que fon âge & l'ufage fembloient prefque deftiner à des amufemens moins férieux. Après avoir fervi pendant deux ans dans ce Corps, il obtint Fagrément d’une compagnie de Cavalerie dans le régi- ment de a Roche-guyon , alors en quartier à Lille en Flandre, où il fe rendit & où il féjourna. jufqu'à la fin de 172 1 : la Géométrie lui fut encore d'une grande reflource contre l’'oifr- veté ordinaire des garni{ons ; & il y avoit fait tant de progrès, qu'à fon retour à Paris il fut en état de fe lier avec les plus illufires Membres de la république des Lettres: feu M. Fréret,. depuis Secrétaire perpétuel de l'Académie royale des Infcrip- tions & Belles-Lettres , fut un des premiers qui ofà lui confeiller de renoncer à tout pour {e livrer à l'étude des Mathématiques. DES ScTENCGESs. 267 qui feule pouvoit ( ce font fes propres termes} repaître fon ame active & dévorante : il n'eut pas beaucoup de peine à perfuader M. de Maupertuis; la paix qui paroifloit devoir être, & qui a effeétivement été d’une très- longue durée, ne lui permettoit plus d'efpérer aucune occafion de {e fignaler dans le métier des armes , & les Géomètres de l'Académie qu’il fréquentoit, ache- vèrent de le déterminer, en le flattant de trouver dans cette Compagnie des occafions d'être utile & d'acquérir de la gloire. IL fe rendit à leurs raifons, & remit fa compagnie de Cavalerie, pour fe livrer entièrement aux occupations qui pouvoient lui ouvrir l'entrée de l’Académie, où il obtint en effet, le 1r Décembre 1 723, une place d’Adjoint, qui, moins de deux ans après fut fuivie de celle d’Aflocié, ; Dès 1726, ilfit voir, par l'application de lanalyfe à une queftion de maximis d minimis, que quelquefois le Calcul donnoit plus qu'on ne lui demandoit, & qu'il avertifloit fouvent de certaines circonftances qu'on w'auroit point trop foupçonnées, où qu'au moins on n'auroit devinées que par une efpèce de hafard. L'année fuivante fut marquée par un morceau auffi inté reflant que celui dont nous venons de parler ; il donna l'examen. des lignes produites par le roulement des différens polygoneg réguliers {ur une ligne droite ou fur un polygone femblable, On voit bien que ces lignes doivent être, à l'égard des polygones qui les produifent, ce que la cycloïde & l'épicycloïde font à l'égard du cercle, puifque ce dernier n'eft qu'un polygone régulier d'une infinité de côtés ; auf M. de Maupertuis leur trouve-t-il à cet égard toutes les mêmes propriétés. I joignit à ce Mémoire une nouvelle théorie du dévelop- pement des courbes par un rayon qui, au lieu de leur étre toujours tangent, comme dans le développement ordinaire, leur foit au contraire toujours perpendiculaire, & ce feul chan: gement lui donne une infinité de courbes diffrentes de toutes celles qu'on connoifloit, toutes engendrées les unes par les autres, & defquelles il déiermine les propriétés. Muüigré le vol rapide qu'avoit pris M. de Maupertuis , il. | K K ii | 262 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE étoit trop éclairé pour ne pas voir qu'il n'étoit pas encore arrivé au but qu'il s'étoit propolé, & trop impatient d'y parvenir pour n'en pas prendre tous les moyens; dans cette vue il prit le parti de chercher des fecours étrangers capables de lui faire parcourir avec plus de rapidité la carrière dans laquelle il s’'étoit engagé. I partit pour Londres & y féjourna quelques mois ; la Société Royale n'eut pas befoin d'un long examen pour fouhaiter de fe l'acquérir & elle ne le laiffa revenir en France qu'après l'avoir mis au nombre des illuftres Membres qui la compolent. À peine étoit-il de retour à Paris, qu'il en repartit pour fe rendre à Büle auprès de feu M. Bernoulli. Toute l’Europe littéraire a fu la part que les deux frères de ce nom avoient eue à l'invention des nouveaux calculs, qui ont , pour ainfi dire, ouvert aux hommes l’entrée à la haute Géométrie; l'aîné étoit mort depuis long-temps , mais le cadet vivoit encore, & M. dé Maupertuis trouva près de lui le double avantage de contracter Vamitié R plus étroite avec cette refpectable famille, & de partager avec elle le précieux héritage des connoïflances & des talens qui femblent y être devenus héréditaires. De retour en fa patrie, M. de Maupertuis offrit à fes com- patriotes les richeffes littéraires qu'il avoit acquifes dans fes voyages, & l’Académie lui donna des marques de fon eftime & du plaifir qu’elle avoit de le revoir , en le nommant à la place de Penfionnaire-Géomètre, qui venoit de vaquer par la vétérance de feu M. Saurin; ilen prit pofleffion le 24 Juillet 173 1. Nos Hifloires font foi qu'il a toujours été un des plus laborieux Académiciens, & un de ceux qui aient fu le mieux choifir les objets de leur travail: les bornes prefcrites à cet Éloge ne nous permettent pas de donner une idée même très-légère de tous fes ouvrages, & nous nous contenterons d'en préfenter ici quelques-uns plus confidérables que les autres, foit par la nature du fujet , foit par différentes circonflances qui les ont rendus plus intéreffans; car les ouvrages même de fcience ne font pas abfolument exempts du caprice de la fortune. Le premier de cette efpèce fut la théorie générale de DNE SL ISACIIVEUN CLE.S 263 . Fattraction, qu'il donna en 1732 : Newton n'avoit d'abord admis ce principe que comme un fait primitif probablement fubordonné à une caufe qui lui étoit inconnue, mais qui pouvoit fervir, finon à expliquer, du moins à calculer les mouvemens céleftes ; il n’en avoit même développé que ce qui pouvoit concerner le fyftème du monde: M. de Maupertuis va plus loin, & regardant l’attraétion comme une qualité effentiel- lement inhérente à la matière, il difcute les différentes loix fui- vant lefquelles elle doit s'exercer, pour qu'on puifie expliquer par fon moyen les phénomènes particuliers, & fur-tout les phénomènes chimiques auxquels la loi de Fattraétion en raifon inverfe du carré des diftances , paroït abfolument fe refufer. Cet ouvrage fut bientôt fuivi d'un autre plus confidérable qui parut la même année, fous le titre de Difcours fur les différentes figures des Affres. En fuppofant que la matière qui compofe les Aflres ait été primitivement fluide & animée d'un mouvement de rotation, & que de plus chaque amas de matière ait eu une tendance ou pefanteur vers un centre, il déduit de ces feules: fuppofitions, non-feulement la figure des Planètes, mais même celle de quelques Étoiles fingulières, rend raifon des appari- tions, des difparitions & des changemens qu'on obferve dans quelques-unes , il tire même de cette théorie la formation de l'anneau de Saturne ; on eft étonné de voir quel parti M. de . Maupertuis fait tirer de Fattraction dans cet Ouvrage, tantôt en faifant varier la loi fuivant laquelle elle s'exerce , tamôt -en changeant le centre vers lèquel elle { porte ; elle devient entre fes mains un véritable Protée, qui prend toutes les formes poffibles. Cet Ouvrage ft précédé d'une differtation, dans. laquelle il fait un parallèle des fentimens de Defcartes & de Newton ; après ce que nous venons de dire il n'eft pas difhcile de deviner auquel il donne la préférence, : Nous voici infenfiblement arrivés à ce qui donna lieu à : Ouvrage le plus célèbre de M. de Maupertuis. I nétoit queftion, il y a un fiècle, que de mefurer la grandeur de la Terre, perfonne ne doutoit de fon exxte * 264 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE fPhéricité ; ce fut dans cette perfuafion que l'Académie, occupée de cette importante détermination , fe contenta d’abord de la mefure d'un Degré du méridien pris au nord de Paris , & qui fut exécutée par M. l'abbé Picard ; on ne fut pas long-temps à foup- çonner, par le réfultat de quelques obfervations de ja longueur du pendule , que cette longueur n'étoit pas la même dans tous les endroits, & qu'elle paroifloit aller en croiflant à mefure qu'on approchoit de l'Equateur ; on en eut bientôt trouvé la raifon dans la théorie des forces centrifuges, qui, croiflant avec Île rayon des parallèles , devoit rendre les graves moins pefans fous l'Équateur que par-tout ailleurs ; en appliquant cette théorie aux obférvations, on vit qu'elle donnoit à la Terre une figure aplatie & différente de la fphérique qu'on lui avoit jufqu'alors attribuée ; on crut lever le doute en conti- nuant la mefure des Degrés du méridien qui traverfe la France depuis Collioure jufqu'à Dunkerque ; mais il arriva tout le contraire: M. Caflini, qui en avoit mefuré la plus grande partie, crut y trouver une inévalité en fens contraire à ce que donnoit la théorie des forces centrifuges de M. Huyghens, & celle de la gravitation univerfelle de M. Newton ; d'où il conclut, & peut-être un peu trop vite, que la Terre avoit la figure d'un fphéroïde alongé; car il eft vrai que l'inégalité étoit petite & pouvoit très-bien être attribuée aux légères erreurs inféparables des obfervations les mieux faites ; on crut d’ailleurs pouvoir accorder la théorie avec l'obfervation, & M. de Mairan donna fur ce fujet, en 1720, un Mémoire où, en fuppofant feulement que l'amas de matière dont la Terre a été primitivement formée ait été d'abord très - alongé, il s'enfuit que l’aétion de la force centrifuge aura pu diminuer feulément cet alongement fans l’anéantir tout-à-fait, & Ja queftion refla pour lors indécife. Le Roi ayant réfolu , par l'avis de feu M. Orry, alors Contrôleur général des finances , de faire drefler une Carte de fon royaume, fur l'exactitude de laquelle on pût compter, M. Caffini fut encore chargé de cet ouvrage, qu'il commença en 1733 par la mefure du parallèle de Paris; cette mefure pouvoit fervir à décider la queftion; car il eft évident PE CT | 7 DES 'S CIE N°C‘E S. 265: évident que fi la Terre étoit un fphéroïde alongé, les degrés du parallèle de 48 degrés devoient être confidérablement plus courts que ne le demanderoit la Terre fuppolée fphérique, & que le contraire devroit arriver fi elle avoit la figure d'un fphéroïde aplati. Différentes circonflances , defquelles nous avons rendu compte dans l'Éloge de M. Caffini même, introduifirent dans cette détermination une erreur qui fit croire le parallèle fen- fiblement plus petit que ne le demandoit la Terre fuppolée fphérique, ce qui confirmoit la figure alongée que {a mefure des Degrés du méridien en France fembloit avoir donnée à la Terre, & paroifloit détruire fans retour toute la théorie Newtonienne fur ce fujet : ce fut dans cette circonftance que M. de la Condamine, propofi, d'abord verbalement , d'aller mefurer les Degrés terreftres à Cayenne aux environs de FE- quateur, & qu'enfuite M. Godin & un autre Académicien formèrent le projet de décider fans ambiguité la queflion de la figure de la Terre par la mefure de quelques Degrés de l'Équateur & de quelques Degrés du méridien près de l'Équa- teur, & s’offrirent à l’exécuter. Une pareille propofition méritoit d'être examinée par l'A cadémie, elle le fut en effet, & cet examen produifit une grande quantité de bons Ouvrages & d'idées ingénieufes, que différens Académiciens {e hâtèrent de lui communiquer. M. de Maupertuis fut de ce nombre; ‘il avoit donné dès 1733 un Mémoire dans lequel il faifoit voir que la mefure d'un feul parallèle eft infuffifante pour déterminer les élémens de la courbe dont la révolution engendre le fphéroïde terreftre, quand même on fuppoferoit cette courbe une elliple, à moins que le parallèle mefuré ne fût Équateur même, ‘ou qu'on ne mefurât deux parallèles à des latitudes très- différentes. | Ce Mémoire fut aflez promptement fuivi d’un autre, dans lequel en fuppofint que le globe terreftre foit une ellipfoïde, il trouva un rapport néceflaire entre l'axe, le diamètre de Y'é- uateur & ceux des différens parallèles ; en forte que trois FF 1759 LI 266 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE de ces grandeurs étant déterminées , elles donnent infaillible- ment la quatrième. | Il partit de ces principes en 1735, pour faire voir que l'étendue des 8 degrés, mefuréeen France, n'étoit pas fuffifante pour décider la queftion; que ces mêmes 8 degrés comparés à ceux du méridien près de l'Équateur, en feroient encore trop voifins pour tirer de leur comparaifon tout l'avantage poflible ; & que pour jouir de cetavantage il falloit aufli mefurer quelques Degrés du méridien le plus près du Pôle qu'on le pourroit, pendant que les Académiciens, déjà partis pour le Pérou, melureroient les Degrés de ce cercle , voifins de l'Equa- teur; & il soffrit en même temps à exécuter cette mefure avec M. Camus, Clairaut & le Monnier, de cette Académie, & M. l'abbé Outhier, Chanoine de l'églife de Bayeux, & Correfpondant de l’Académie. Cette propofition fut acceptée par l'Académie, & le Roi voulut bien donner fes ordres pour procurer aux Académiciens voyageurs, tous les fecours dont ils pourroient avoir befoin, Pendant que tout s’'apprètoit pour le départ des Académi- ciens deftinés au voyage du Nord, M. de Maupertuis, plein de fon objet, donna deux Mémoires relatifs à l'expédition qu'il alloit entreprendre: le premier contient un moyen de déterminer par la mefure d'un arc du méridien, même mé- diocre, & lobfervation de deux étoiles très- proches l'une de l'autre faite aux deux extrémités, & au milieu de cet arc, fi là Terre eft fphérique ou non, & en quel {ns elle s'éloigne de la fphéricité. Le fecond eft un moyen de déterminer la déclinaifon des étoiles, par l'obfervation du temps qu'elles mettent à parcourir un arc donné; méthode fimple, ingénieufe, & fufceptible même, dans certains cas, d’une affez grande précifion. Ce Mémoire fut le dernier que donna M. de Maupertuis avant fon départ; il partit au mois de Juin 1736 pour fe rendre en Suède, & de-là dans la Lapponie Suédoife, où fe fit l'opération. Nous ne le fuivrons point ici dans les fatigues & les dangers d'un climat & d'un pays fi différens du nôtre, NET DES SCIENCES 26 ni dans les horreurs d'un hiver, pendant lequel l'abfence prefque totale du Soleil, Ja longueur exceffive des nuits, le froid, les neiges, les vents & les tempêtes rendent ces régions en quelque forte inhabitables: & M. de Maupertuis lui-même fit frémir plus d’une fois fes auditeurs, par le récit intéreffant qu'il en fit à fon retour en France à l'affemblée publique du 13 Novembre 1737. … I réfültoit des obférvations faites en Lapponie, que le Degré du méridien qui coupoit le Cercle polaire étoit beaucoup plus grand qu'en France, & que par conféquent la ‘Terre avoit Ra figure d'un fphéroïde aplati; on eût pu à a rigueur affigner les limites de cet aplatiffment, en fuppofant le méridien elliptique ; mais la théorie méme de M. de Mau- pértuis enfeignoit que pour avoir cette quantité avec plus de certitude, il falloit attendre la mefure du premier Degré de latitude que M." Godin, Bouguer & de la Condamine étoient allés mefurer. Il étoit cependant hors de doute que la Terre étoit fenfiblement aplatie ; ceux qui auroient eu le plus d'intérêt à le nier s’étoient rendus: & un principe fi fécond ne pouvoit demeurer oifif entre les mains de M. de Maupertuis, Le premier ufage qu'il en fit fut d'examiner le changement que cette figure devoit produire dans la recherche de la parallaxe de la Lune. En effet, dans le fyftème de la Terre fphérique, toutes les cordes des arcs de grand cercle d’un nombre égal de degrés font égales, mais dans celui de la Terre fphéroïde elles ne: le font plus ; une corde de 10 degrés par exemple, n'eft pas Épale à une corde de ro degrés, prife à une latitude différente: il étoit donc queftion de déterminer cette différence: M. dé Maupertuis prit précifément l'inverfe de l'idée de M. Manfredi. L’Aftronome Italien avoit propolé de faire fervir les différences des parallaxes de la Lune, obfervées à différentes latitudes ,àla recherche de Ha figure de la Terre; le Géomètre François part de la figure de la Terre, déjà déterminée pour fixer les différences qu'elle doit introduire dans les parallaxes, & il examine en paffant l'utilité des obfervations de la longueur du pendule” faites à différentes latitudes, pour déterminer les LI -268 Histoire DE L'ACADÉMIE ROYALE forces & la direction de la pefanteur aux différens points de la Terre: cet ouvrage parut en 1741. I fut fuivi en 1742, des élémens de Géographie; M. de Maupertuis n’y traite prefque d'aucune des chofés qui entrent ordinairement dans les élémens de cette fcience: mais il applique à la divifion du globe la découverte qui venoit d'être faite de fa véritable figure, il y donne un précis de tout ce qui à été fait pour opérer cette découverte, & il ajoute une Table des degrés de longitude & de ceux de latitude, fruit d’un long & pénible calcul qu'il épargne à fes” lecteurs, en leur en donnant je réfultat. On pourra prefque regarder comme une fuite de cet ou- vrage, un Mémoire qu'il donna cette même année, fur Ja manière de calculer, fuivant la figure réelle de fa Terre, da Loxodromie: cette efpèce de fpirale que décrit fur la furface du globe, un Vaifléau qui coupe tous les méridiens fous un angle conftant, moindre que l'angle droit: toutes les Tables ui en avoient été calculées, l’avoient été dans la fuppofition de la Terre fphérique, & avoient par conféquent befoin d'être renouvelées. Ce dernier ouvrage devoit peut-être fon origine à un nouvel engagement que venoit de prendre M. de Maupertuis; M. le Comte de Maurepas, alors Miniftre de la Marine, & de l'Académie, l’honoroit de fon eftime & de fon amitié; il voulut lengager à tourner fes vues du côté de la Navigation, pour l'y déterminer, il fit ajouter aux autres bienfaits du Roi, dont jouifloit M. de Maupertuis, une penfion de trois mille livres , accordée à cette condition; & ce fut par l’examen de la Loxodromie, qu'il commença à s'acquitter de ce devoir. Ce même engagement lui fit entreprendre un autre ou- vrage qui parut en 1743, fous letitre d’Affronomie nautique. On y trouve prefque tous les problèmes néceffaires au pilo- tage, & même plufieurs autres relatifs à l'Aftronomie pro- prement dite, préfentés & réfolus dans une fi grande briéveté, qu'à proprement parler tout y eft réduit à cinq formules; il eft vrai qu'il a fallu pour cela avoir recours à l'analy{e la plus DIE SN IS ICU'E NICE SvUu 236 favante , qui f trouve ordinairement bien au-delà de 1a portée de ceux auxquels cet ouvrage femble deftiné. Ces fortes de raccourcis, s'il m'eft permis d'employer ici ce terme, étoient apparemment de fon goût; il avoit donné dès 1731, une Balliftique arithmétique ou plutôt algébrique, dans laquelle tout ce qui avoit été dit für le jet des bombes, fe trouve renfermé dans une feule formule. On juge bien qu'il faut être bon Géomètre pour l'y reconnoître, & que ce uaité du jet des Bombes , n’eft pas à l’ufage des Bombardiers: mais enfin tout y étoit contenu, & quand on ne regarderoit cet ouvrage que comme un jeu géométrique; il doit toujours être rare qu'une fcience entière puiffe être réduite à moins de deux pages de calcul. En lifant ces ouvrages de M. de Mau- pertuis, on eft tenté de fe rappeler ces prefliges de l'art, où Tadreffe de l'ouvrier trouve moyen de renfermer un vêtement entier dans une très-petite boîte ou dans une coquille de noix. Nous n'avons jufqu’ici confidéré M. de Maupertuis que comme Géomètre, c'étoit en effet fa principale étude ; mais il ne sy étoit pas abfolument borné; il aimoït l'Hiftoire Na- iurelle: on a de lui des recherches & des expériences für les Salamandrés, qu'il dépouille entièrement des qualités redoutables & merveilleufes, dont la crédulité & l'ignorance les avoient revêtues; il en a fait de femblables fur les Scorpions, dont il réduit le venin à fa jufte valeur, & fait voir par quelle mécanique Fanimal l'introduit dans la plaie ; point -qui avoit échappé jufqu'alors aux Obfervateurs : il étoit aflez au fait de Anatomie & de l'économie animale pour prendre part à tout ce qui fe difoit dans f Académie fur cette matière, on a même de lui une Differtation fur la génération des animaux, qu'il publia fous le titre de Vs plyfique ; on y trouve des con- Jeélures aufli neuves que hardies, qui depuis ont acquis une grande célébrité; il poffédoit non-feulement la théorie mathé- matique de la Mufique, mais encore Ja pratique de cet art enchanteur, & connoifloit les fources de l'agrément qu'il peut procurer ; le premier Mémoire qu'il donna à Académie fut fur Ja forme des inftrumens de mufique , il fut imprimé en il] 1 270 HIisTOIRE DE L’'ACADÉMIE ROYALE 1724, & on y reconnoit avec plaifir combien les Aïts, même les Arts de goût, peuvent tirer d'avantage des recherches & des travaux d’un habile Phyficien. Les Belles-Lettres, l'Éloquence & même x Poëfie ne lui étoient ni inconnues ni indifférentes, on trouve dans fes Ouvrages la relation d’un voyage qu'il fit au fond de Ja Lapponie, pour y voir un ancien monument de ces peuples, confiflant en une infcription dont il donna la figure exacte, mais de laquelle perfonne n’a jufqu'ici pu déchifrer les carac- tères, ni par conféquent donner le fens ; ce fera peut-être un jour une des plus importantes découvertes en Littérature : fon ftyle étoit net & précis, les fineffés de notre Langue lui étoient familières, il poffédoit même à tel point ce précieux talent, que l’Académie françoife le jugea digne d'être admis dans le Sanétuaire des Mufes, & lui conféra, en 1743, la place que la mort de M. l'abbé de Saint-Pierre venoit d'y laifler vacante. Revêtu de tous les titres dont fon état le rendoit fufcep- tible, honoré des bontés & des bienfaits de fon Roi, jouiffant de la confiance des Miniftres & de l'eflime du Public, aimé & recherché de ce qu'il y avoit de plus grand & de plus illuftre, il ne tenoit qu'à M. de Maupertuis de jouir dans fa patrie & au milieu des fiens du fort le plus heureux ; mais il avoit au dedans de lui-même le plus irréconciliable ennemi du bonheur : une imagination trop ardente lui peignoit avec tant de force les objets qu’elle lui préfentoit , qu'elle lui déroboit en quelque forte la vue de tous les autres. Ce fut vraifem- blablement fous ce point de vue qu’elle lui offrit les invitations, par elles - mêmes féduifantes , d'un grand Roi qui l'appeloit . auprès de lui pour lui confier la préfidence & Ha direction d’une célèbre Compagnie littéraire. Il ne fut d'abord queftion que d'un fimple voyage , pendant lequel ayant fuivi Sa Ma- jefté pruffienne à l'armée, il voulut partager avec Elle les périls & les fatigues de la guerre, & les partagea en effet fi bien , qu'il fut fait prifonnier de guerre & conduit à Vienne; fa captivité ne fut ni longue ni dure. L'Empereur & l'Impératrice te: DES ScrENCES. 271 Reine ne démentirent point en cette occafion leur façon de penfer noble & généreufe : ils ne le retinrent qu'autant de temps qu'il en fallut pour lui donner les marques les plus flatieufes de leur eftime, & le renvoyèrent à Berlin comblé de leurs bontés, & pénétré de la plus vive reconnoiffance, De Berlin il revint en France, où il reprit pour quelque temps le travail académique; il fit même paroître alors, à l'occafion de la Comète de 1742, un petit écrit en forme de lettre, dans lequel fous le voile d’un léger badinage, ül préfente au lecteur l'état de l’aftronomie des Comètes , & tout ce qu'on favoit alors de leur théorie. L'année fuivante le vit repartir pour la Prufle; il sarréta cependant au fiége de Fribourg, que faifoit alors M. le Ma- réchal de Coigny; il y paya de fa perfonne, non en Acadé- micien fimplement fpeétateur, mais en Volontaire qui auroit eu à fe faire une réputation ou des grâces à mériter ; il en mérita effectivement une : il fut envoyé, par une diftinétion . bien flatteufe, porter au Roï de Prufle la nouvelle de la prife du Château. 1. Ce fut le dernier acte de patriotifme de M. de Maupertuis ; il s’étoit enfin déterminé à quitter la France & à s'établir en Prufle. La févérité du miniftère que j'ai honneur d’exercer en ce moment, ne me Jaifle pas la liberté d'applaudir à cette démarche; il eût mieux fait fans doute de continuer à rendre à fon Roi & à fa patrie, des fervices qui y étoient reconnus, honorés & récompenfés; & l Académie eft trop inftruite des devoirs d’un fujet envers fon Prince, & d’un citoyen envers fa patrie, pour propofer cette conduite comme un modèle à imiter. Nous devons pourtant ajouter que les offres du Roi de Prufle, toutes féduifantes qu’elles étoient , n'auroient peut-être pas fuff pour déterminer M. de Maupertuis, s'il eût pas vu dans fon premier voyage à la Cour de Pruffe M.! de Borck, d’une des meilleures & des plus anciennes Maïfons de ce royaume. La philofophie qui n’avoit fouvent pu dé- fendre fon efprit des illufions de fon imagination, défendit 272 HisToiRE DE L'ACADÉMIE ROYALE encore plus mal fon cœur contre les charmes d’une perfonne aimable. Il ne connut bientôt plus de bonheur fans elle, & cet intérêt fi cher le fit pafler par-deflus tout ce qui auroit pu l'arrêter en France. Il fe rendit à Berlin où il arrangea tout ce qui pouvoit concerner fon mariage, & ne revint à Paris en 174$ que pour obtenir le confentement de fon père, remettre fes penfions, & demander la permiffion de s'établir en Prufle; le Roi voulut bien la lui accorder, & même y joindre un brevet , par lequel il lui confervoit les droits de Regnicole. Ce fut ainfi que M. de Maupertuis prit congé de fa patrie: il obtint en Prufle tout ce dont on l'avoit flatté; il fut fait Chevalier de l'Ordre du mérite, Préfident perpétuel de ka célèbre Académie des Sciences de Berlin, fur ladminiftration de laquelle il ne prenoit d'ordre que du Roi, & fes vœux furent accomplis par fon mariage avec M. de Borck, & par la confiance qu'il obtint de fon nouveau Maitre. Ce qu'il a fait depuis ne nous appartient plus, & cette partie de fon Hiftoire eft confiée à une plume plus éloquente que la mienne. Nous ne pouvons cependant omettre ici la. manière dont il reçut M. de la Lande à Berlin, lorfqu'en 175 1 il y fut envoyé à fa requifition, pour y faire des obfervations corref- pondantes à celles que faifoit alors M. abbé de la Caille au cap de Bonne-efpérance, pour déterminer R parallaxe de à Lune ; tous les fecours & toutes les marques d'arnitié qu'il donna à cet Académicien, auquel même jl procura entrée dans l’Académie de Berlin; il pouvoit avoir le deffein de l'y arrêter pour toujours, heureufement il n’y a pas réufli. Peut-être s’étonnera-t-on que nous nayons fait dans cet Éloge aucune mention de plufieurs morceaux de Métaphyfique & de Morale, qui fe trouvent dans le recueil des Ouvrages de M. de Maupertuis; mais outre que la plupart n'ont été publiés que depuis fon établiffement en Prufle, l'Académie, uniquement bornée à l'étude des Mathématiques & de la Phyfique, dans lefquelles elle ne reconnoît pour {es guides que l'évidence & l'expérience , s’eft fagement interdit celle de toute autre DAENS A SANG EN cENS: 273 autre Science, & fur-tout des deux dont nous venons de parler , qui tiennent de trop près à des objets refpectables, & dans lefquelles il ef fi facile de prendre un fophifme pour une démonftration. Nous ne parlerions pas même de l'Ouvrage de M. de Maupertuis , fur lequel l'Académie pourroit avoir le plus de droit, 4 Principe de la moindre ation, qu'il avoit donné à l'Académie dès 1744, & qu'elle a fait paroître dans fes Mé- moires de cette mêmeannée, fi cet Ouvrage n'avoit attiré à fon auteur une querelle ou plutôt une guerre littéraire, dans laquelle le roi de Pruffe daigna l'aider non-fulement de fon autorité, mais encore de fa plume; il eft rare fans doute de voir un Souverain défendre devant le Public Ja caufe de fon Sujet, mais” il left peut-être encore plus de voir une même main manier avec le même fuccès le fceptre, fa plume & l'épée: Céfar ne devoit probablement cette réunion de talens qu'aux derniers temps de la République où il avoit vécu Citoyen. M. de Maupertuis trouvoit en Pruffe tout ce qui pouvoit le dédommager d'avoir quitté f& patrie; mais la Providence divine qui deftine vraifemblablement le plus grand nombre des hommes à vivre dans le climat où elle les a fait naître, femble auffi leur avoir donné des tempéramens relatifs à ce climat: M. de, Maupertuis éprouva bientôt que celui de la Prufle n'étoit nullement analogue à fa complexion ; des maux de poitrine & des crachemens de fang qui s'y joignirent en 1747, altérèrent beaucoup fa fanté, & il fut obligé de re- venir fouvent en France, & fur-tout à Saint-Malo, reprendre Vair natal, qui paroifloit effectivement le foulager : ce fut dans le premier de ces voyages qu'il fit en 1749 , après la mort de fon père , que le Roi voulut bien lui accorder une penfion de quatre mille livres :. il vouloit par-là récompenfer les fervices qu'il avoit autrefois rendus à fa patrie, &. jugeoit apparemment que M. de Maupertuis n'avoit pas ceflé d'être François pour habiter en Prufe. Malgré les fecours paffagers que ces voyages apportoient au Hi. 1759. M m 274 HISTOIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE mal dont il étoit attaqué, ce mal alloit toujours en augmentant: il sy joignit une telle mélancolie, qu'elle lui rendoit dans quelques momens da vie odieufe: il portoit alors avec une efpèce d’impatience ce qu'il appeloit / fardeau de vivre ; fa patrie qu'il avoit cru quitter fans regret, lui étoit redevenue chère, ou plutôt ce fentiment qu'il n'avoit pas écouté dans le temps de fon départ, fe réveilloit chez lui avec violence. I revint en France en 1756, & pafla l'hiver & le printemps à Saint-Malo; il en partit en 1757 pour aller s'embarquer à Bordeaux & retourner par mer à Hambourg, & de-là à Berlin, mais divérfes confidérations lui firent prendre la route de terre; arrivé à Touloufe, il s’y trouva fi incommodé , qu'il fut obligé d'y paffer l'hiver : la guerre allumée pour lors entre la France & la Prufle, le mettoit dans une étrange fituation à l'égard de fes deux patries; il n'avoit cependant pas lieu d'appréhender qu'on le regardät en France comme fufpeét, on y étoit trop perfuadé de la droiture & de la noblefie de fes fentimens, & il venoit d'en recevoir un témoignage afluré par la diftinétion que M. le Comte d’Argenfon lui avoit cbtenue du Roi, en le faifant rétablir comme Penfionnaire vétéran fur la lifle de Académie, de laquelle il avoit été effacé auflitôt après fon départ. H partit de Touloufe au mois de Mai 1758, il s'arrêta à Neufchîtel, dans les États du roi de Prufié; il sy ‘trouva très-mal & s'avança jufqu'à Bâle, comptant , après y avoir pris quelque repos , continuer fa route jufqu’à Berlin, mais le fort en avoit autrement ordonné ; fon mal s’accrut iéleriient à Bâle quil ne lui fut pas poffible de ‘pañler outre; il demeura chez M. Jean Bernoulli, qui lui donna tous les fecours qu'il pouvoit attendre. d'une véritable amitié ; il crut, au mois d'Avril 1759, être aflez foulagé pour continuer fa route, mais la veille du jour fixé pour fon départ il tomba évanoui ; fés douleurs, qui s'étoïent jetées fur les entrailles, recommencèrent avec plus de violence, & il les fouffrit avec une patience dont fa vivacité fembloit le devoir rendre incapable ; D Es" S'c TE N'c'E's 49€ + Il n'entendit cependant renouveler cétte entreprife que par ripport à la conftruétion d'une Carte générale de la Médi- terranée réduite, en la dreffant fur a than des mêmes matériaux hydrographiques qu'auroit pu employer M. de Chazelles, confervés pour la plupart au Dépôt, avec les dé- terminations aftronomiques qui réfultoient des voyages de cet Académicien, de ceux du P. Feuillée & autres. On avoit d'ailleurs beaucoup de routes & de remarques nouvelles. On appela nième de Toulon, pour les confulter, les plus habiles Pilotes, & qui avoient fouvent navigué dans la Méditerranée. . Le travail qu'on fit eft très-confidérable & digne d’éloges; cependant il n'eut pas tout le fuccès qu'on en efpéroit, par les contradiétions fans nombre qu'on trouva dans la plupart des matériaux même dont M. de Chazelles avoit eu bonne opinion. Auf, en rendant compte de tous les moyens de cor- rection qu'on avoit employés pour cette Carte, on eut foin d'avertir qu'on la trouvoit bien éloignée de ta die que demanderoit un pareil ouvrage *. On peut dire néanmoins qu de ot abplietonéeC faire aux Navigateurs ; car, outre les fecours qu’ils ne pou- voient manquer d'en retirer , elle leur offroit un tableau des points dont la pofition eft certaine, pour y rapporter es nou- velles remarques qu'ils font continuellement à portée de‘faire. Depuis la publication de la Carte du dépôt, Grognard & Olivier, Pilotes de Toulon, ayant déduit de leurs routes les fituations de plufieurs points, différemment de ce qu'ils les trou- voient fur les diverfes Cartes, f ‘font encore crus fondés de publier , l'un en 1745 & l'autréen 1746 ; de nouvelles Cartes plates. On ne doit les regarder que comme différentes éditions de celle de Berthelor qui leur a-fervi de ‘bafe, &' fans aucun avantage marqué, par la difficulté de retrouver dans chacune le petit nombre de bons matériaux qui ont pu y être em- ployés, fans qu'ils en aient rendu compte. WE Nere É Remarques fur la confhuction de R Carte de la Méditer- ranée, dréffée au Dépôt en 1757. Qqqïÿ * Mém. Acade année 17S 6, page 438 2 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE C'eft ainfi que, malgré la multiplicité des Cartes publiées fucceffivement, les différences entr'elles fubfiflent toujours par Finfufhfance des moyens hydrographiques ( les feuls que les Pilotes emploient), & par lefquels cependant ils prétendent tous rectifier ces Cartes. Dans la vue de faire cefler cette dangereufe confufion, je formai en 1753 le projet d'un grand travail pour compléter les matériaux néceffaires à la formation d'un fecond volume du Neptune François. Ce pro;et fut agréé par- M. Roüillé. Je reçus dès fa même année les ordres du Roi pour en entreprendre l'exécution , &c à l'occafion de la grande éclipfe de Soleil du mois d'Oétobre que je fus obferver à Cartagène; je parcourus les côtes d'Ef- pagne & celles de l'ile Mayorque; j'y fis des obfervations dont j'ai eu l'honneur de rendre compte à l’Académie. La guerre furvenue a interrompu ce travail; j'ai cepen- dant profité depuis ce temps des occafions, que mes diverfes campagnes m'ont procurées, pour faire des obfervations relatives à cet objet. Je déterminai à la fin de 1756 & au commencement de 1757 *, la latitude & la longitude du Port-Mahon ; je fis au Levant, l'été fuivant, de nouvelles obfervations, & entrautres celle de la longitude d'un Port de file de Chypre, dont les mauvais temps avoient autrefois privé M. de Chazelles. Cette longitude fut même déterminée au moyen d'une occultation d'étoile par la Lune; on fait que cette méthode eft celle de toutes qui donne les réfultats les plus précis, ce ui rendoit très-intéreflante une obfervation de cette efpèce Par à l'extrémité orientale de la- Méditerranée pour déter- miner à jamais fa longueur de cette mer. Les réfultats de mes routes, dans ces dernières navigations, m'ont de plus en plus convaincu de la défe&uofité d'une grande partie des matériaux employés jufqu'à préfent, & de la néceffité de les oublier. IL eft fenfible que pour décrire exactement une mer qui, dans un très-petit efpace, renferme une. fi grande quantité de D'EuS-SiG. l'E NC, E, S. golfes & d'iles, il ne faut employer que d'excellens matériaux , & que R moindre imperfeétion dans une obfervation ou dans une route, y défigure toute une côte. Ainfi, bien loin qu'on pût faire ufage pour cette mer, comme pour l'Océan, des obfervations de longitude de tout genre, on ne doit guère fe fervir que des écliples de Soleil & d'Étoiles par la Lune, dont l'obfervation eft très-inftantanée , & n'eft fujette à aucune illufion d'optique; tout au plus y pour- roit-on joindre les éclipfes du premier fatellite de Jupiter. Encore faut-il que pour les premières , on ait des obfervations qui affurent l'état des Tables de la Lune au temps du phéno- mène, & que pour les fecondes on ait des obfervations cor- refpondantes, faites, s'il fe peut avec une lunette de même longueur que celle dont on seft fervi; car le rapport des effets des différentes lunettes entr'elles, & fur-tout celui des lunettes avec les télefcopes, eft très-mal connu *. Les obfervations de latitude, faites en grand nombre fur les caps & les îles remarquables , avec un quart-de-cercle aftro- nomique, font un des meïlleurs moyens à employer dans mon travail, füur-tout fi de ces mêmes caps ou îles , on peut en relever d’autres qui font en vue; car de cette manière on les lie fouvent par des triangles, dans la réfolution defquels on trouve, avec la plus grande précifion , leurs diftances refpeétives. Les obfervations de ce dernier genre, faites fur un vaiffeau à la vue des lieux dont l'accès n'eft pas praticable, font devenues de la plus grande reflource dans Hydrographie, par l'ufage de l’oéfan où quartier de réflexion. On peut aujourd'hui, par ce moyen , déterminer avec une exactitude fufhfante les lati- tudes d’un grand nombre de points qui ne font pas connues, ou qui ne le font qu'imparfaitement. - Ma propre expérience m’aflure de pouvoir obferver en mer, Jorfque les circonftances font favorables , la hauteur du Soleil à une minute près, avec l’oéfant dont je me fers depuis plufieurs années, garni d’une petite lunetre au lieu de pinule; jufqu'à pré- {ent aucun Pilote n’a répondu de parvenir à une telle exactitude. Enfin l'ufige fréquent des routes de cap en cap, eft encore Q qqi * Mém. Acañ, année 17372% page 419: 494 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE très - avantageux dans la Méditerranée pour connoître leurs diflances & leurs directions, c’eft même fouvent l'unique moyen qu'on puifle employer pour conflater la pofition des roches fous l'eau & des bancs; mais il exige qu'on atteigne à la plus grande précifion, foit dans la mefure & la pratique du loch, foit dans le compte qu'on doit tenir de la variation de fa bouflole, ou dans l'eftime de la dérive. Quant à la forme de cet Ouvrage, je me propofe de fuivre à peu-près la même que M. de Chazelles, tant pour le nombre de Cartes que pour le Portulan , lorfque les matériaux de détail feront fuffifans. D'après tout ce que je viens d'expofer , je ne me diffimule point que la reétification des cartes de la Méditerranée ne foit une entreprife des plus étendues & des plus délicates; dans la néceffité dont elle eft pour fa navigation de cette mer, le defir de me rendre utile au fervice du Roi & à tous'les Navigateurs, peut feul me juftifier d'avoir ofé le tenter. D'un côté, la multiplicité d’occañons que je puis avoir, par état, de faire ufage des connoiffances d’Aftronomie & d'Hy- drographie, que j'ai déjà employées ailleurs ; de l'autre, fa protection que le Miniflère a accordée à ce projet dès fa naïf fance, m'ont fait regarder comme poffible de le conduire à une heéureufe fin. Mon zèle à cet égard eft encore excité par l'honneur que me fait l'Académie en me recevant dans fon Corps; je crois ne pouvoir lui préfenter un tribut de reconnoiffance plus digne d'elle, qu'en me livrant à un travail dont elle a reçu avec tant d'intérêt les prémices de la part de M. de Chazelles, a DAE SISNCUR/EIN:C ES 27$ enfin un abcès qui s’étoit formé au côté, perça en dehors, es douleurs cefsèrent & on reprit l'efpérance ; elle ne fut pas longue; il perdit abfolument l'appétit & mourut le 2 7 Juillet 1759, ayant confervé fa raïon prefque jufqu'au dernier moment, & en ayant fait un digne ufige en fe préparant à la mort de la façon la plus chrétienne, M de Maupertuis étoit partie de Berlin au premier avis qu'elle avoit eu de la maladie de fon époux, une Lettre de M. de Maupertuis même lui avoit fait rebrouffer chemin: mais ayant appris le danger où il étoit, elle s'avança à grandes journées jufqu'à Strafbourg, d'où elle envoya un exprès s'in- former de fon état, pendant qu'elle continuoit fa route ; celui-ci le trouva à l'agonie & le vit expirer : M.4 de Maupertuis ne put arriver à Bâle que le fendemain pendant qu'on portoit fon corps au bourg ‘de Dornac, à deux lieues de Bâle dans le canton de Soleure, pour y être enterré auprès de Baltazar Malo, Miniftre de France en Suiffe, mort en 161 3. H eft plus ailé de fe figurer la cruelle fituation de cette Dame que de la décrire; le roi de Pruffe a tâché de F'adoucir, & a voulu donner à la mémoire de M. de Maüpertuis une nouvelle marque de fon eftime, en accordant à fi veuve 1a charge de Grande- Maitreffe de la Maiïfon de la Princefle Amélie, qu'elle avoit déjà exercée en l'abfence de M. de Maupertuis, par une dif tinétion particulière & contre lufage ordinaire, qui n'admet, en Prufle, à ce rang que des Dames veuves. Ce que nous avons dit de M. de Maupertuis a dû peindre fon caraétère : il étoit d’une vivacité fingulière & qui paroïffoit dans tout fon maintien: fa converfation étoit, quand il le vouloit, pétillante d'efprit & infiniment amufante : il avoit toujours été pénétré de fa Religion, & il y a perfévéré jufqu'à la mort. Dans une Lettre qu'il écrivit peu auparavant à un Académicien de fes amis, il ui mande que, quoiqu'il n’eût jamais rien écrit qu'il ne crût compatible avec la Religion, il reprochoit cependant beaucoup d'ouvrages, & nous 276 HisToirE DE L'ACADÉMIE RoraLE, &c. rapportons d'autant plus volontiers ce défaveu de fa part, qu'il importe à fa gloire, & que nous ne pouvons diffimuler qu'il a effectivement hafardé quelques principes que la droiture de {on cœur lui auroit fait certainement rejeter , fi le feu de fon imagination lui avoit permis d'en apercevoir les dangereufes conféquences. MÉMOIRES MÉMOIRES LD ILE, D, DE PHYSIQUE, TIRES DES REGISTRES de l’Académie Royale des Sriences, De l'Année M. DC CL X. | MÉMOIRE SUR LE RETOUR DE LA COMÉTE DE 1682, Obférvé en 1759, avec les Élémens de Jon orbite Pour cette dernière apparition. Par M. DE LA LANDE. $ Liié fatisfaifant que l’Aftronomie nous ait jamais offert ; PTIT évènement unique jufqu'à ce jour , il change nos doutes en certitude, & hos hypothèfes en des démonftrations. Min. 1759. Le 4 L. # £ A . ft ’UN1vERS voit cette année le phénomène le plus 2 $ Avril 4 4 3 1799: 2 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE L'Académie s’empreffe d'annoncer ce retour *, comme une époque déformais mémorable dans nos Sciences, qui nous affure enfin le prix d'une multitude immenfe de calculs, d'ob- fervations & de recherches. En effet, quoique de tout temps les Phyficiens intelligens aient efpéré le retour des Comètes, quoique Newton l'ait afluré, & que Halley en ait ofé fixer le temps; tous, jufqu'à Halley lui-même, en appeloient à l'évènement & à la pofterité. Quelle différence entre fa fituation & la nôtre , entre le plaifir que lui donna cette heureufe conjecture & les avantages que nous trouvons aujourd’hui en 1 voyant fe vérifier ? Com- biner enfemble des faits que préfente l'hifloire, & en tirer des conféquences pour l'avenir , ce fut l'ouvrage de M. Häalley. Voir ces conféquences juftifiées après plus de cinquante années par un entier accomplifiement , c'eft une fatisfaction qui nous étoit réfervée, & que dans les temps les plus reculés les Philo- fophes envioient à la poftérité. JENTIMENS des anciens Philofophes fur la nature des Comiètes. Sénèque , dans fon vir.° livre des Queftions naturelles, dit que fuivant Apollonius le Myndien , les anciens Chaldéens mettoient déjà les Comètes au nombre des Planètes, & qu'ils en connoifloient les retours ; s’il eft vrai que des connoiffances fi fublimes aient exifté autrefois parmi les hommes , il faut du moins les placer dans des temps infiniment plus éloignés que tout ce que l'hiftoire nous raconte. Les connoiflances que pui- sèrent dans la Chaldée les plus anciens des Égyptiens & des Grecs étoient dans un état de foibleffe & d'enfance bien éloigné d’une fi haute perfeétion ; mais qui fait fi quelque révolution fatale à l'efprit humain n'avoit pas féparé des fiècles, plus éclairés peut-être que le nôtre, d'avec les commencemens grofliers * Une partie de ce Mémoire fut lüe dans l’Affemblée publique du 25 Avrili759, dans le temps où la Comète paroifloitencore , & la fuite du Mémoire fut lüe au mois de Juillet, après que la Comète eut difparu. CR PO LT de De. D'EIS :S GiL'E NC E €. r efquels on voit les hommes renaître environ dix fiècles avant l’'Ere Chrétienne. : Eudoxe, qui avoit apporté d'Égypte de très-grandes con- Séréque, Quef. noifiances dans la Grèce , n’y avoit rien appris fur les Comètes, “* Pre ce qui prouve que les Egyptiens même, quoique bons obfer- vateurs, avoient peu cultivé cette branche de l’Aftronomie, Conon raffembla les écliples obfervées par les Égyptiens, mais il ne fit aucune mention des Comètes, qu'il n’auroit point négligées s'il eût pu trouver quelque chofe à ce fujet. ; Epigènes & Apollonius le Myndien, très-habiles dans la connoïffance de la Nature, ne font point d'accord fur les connoifflances qu'on avoit en Chaldée, quoiqu’ils y euffent ‘étudié lun & l'autre. Epigènes difoit que les Chaldéens ne favoient rien fur le mouvement des Comètes, qu'ils les regar- doient comme des corps allumés par le mouvement de l'air, Apollonius difoit au contraire que les Chaldéens les regardoïent comme des Planètes, & en connoifloient le cours, Lenerique curfus eorunt. . Quoïiqu'ilen foit du fentiment des Chaldéens, il eft für que Philofophes beaucoup d'anciensPhilofophes ont confidéréles Coniètescomme € Pre ne des Aftres & des Planètes perpétuelles & périodiques ; ainfi je ne des météores. dirai qu’un mot des fyfèmes de ceux qui prirent les Comètes pour des illufions , pour des météores, ou pour des corps céleftes d’une exiftence paffigère. On peut voir à ce fujet Riccioli & Am 2, 54 beaucoup d’autres Auteurs qui ont compilé les rêves des anciens Philofophes. Panætius crut que les Comètes n'étoient qu'une pure apparence de lumière, femblable aux iris, aux halo & aux parhélies. Héraclides de Pont les reyardoit comme une nuée Py, & plac très-légère & très-élevée; Ariftote les regarda comme un météore ?#! 7, 2. igné , formé au haut de Fatmofphère par des exhalaifons de la Méér. ü, 1, terre & de la mers tous les Péripatcticiens & plufieurs autres #77 *°* Philofophes en eurent à peu-près la même idée. Les Stoïciens, * "7 ou du moins les Pilofophes Latinsdu temps de Sénèque, étoient 5, Quefle mar. à peu-prèsd'unavis femblable, & fuppofoient que les Comètes 4 711, & 21. étoient formées par un air condenfé, I paroît que Ptolémée crut que le concours des Planètes A ij De Aftrorum judiciis , lib, 11, LUXIU [3 « Dial, 1, de Sifl. M, Trurinarore, Alim 2, 43° Am, 2,58 Sentiment de Bacon. De augmentis Scient, lib, III, Cap, 4;ps 103; edit, 1740 Sentiment des Pythagoriciens. Arifl Méréor, L'r 0 4 MÉMOYRES DE L'ACADÉMIE ROYALE étoit la caufe de la formation des Comètes, ce fut enfuite le fentiment d'Hévélius ; comme nous le dirons bien - tôt. Galilée même crut que les Comètes étoient formées par des exhalaifons, aflez légères pour s'élever au-deflus de la Lune, : Tycho & Longomontanus crurent que les Comètes étoïent véritablement des corps céleftes, formés de la fubftance de la voie lactée, mais fujets à fe décompofer & d’une exiftence paflagère. Képler même laifla les Comètes au nombre des phénomènes momentanés, comme nous le dirons en parlant de fon hypo- thèfe fur le mouvement des Comètes; & Hévélius n’en jugea pas mieux, quoiqu'il ait eu le premier une très - belle idée fur les Comètes, dont je parlerai bien-tôt. Enfin le P. Riccioli, après avoir examiné fort au long la queftion fi les Comètes font des Planètes anciennes, perpétuelle ou qui reviennent après de longues périodes, finit par dire que cela n'eft guère probable, & qu'il lui paroît qu'elles fe forment de nouveau. Après avoir enfuite raconté différentes opinions fur la caufe phyfique de leur formation , & n'étant point fatisfait de ces différens fyflèmes , il propofe religieu- fement fon avis, qui étoit de recourir à des aétes particuliers & volontaires de la T'oute-Puiffance divine. Je vois avec peine l'illuftre Chancelier d’Angleterre, François Bacon , au nombre de ceux qui regardèrent les Comètes comme des météores; il parle à la vérité des prédictions qu'on en peut faire : Prædiiones fieri poffunt de Cometis futuris , qui ut noftra fert conjetlura præmuntiari poflunt , maïs il met cette prédiction dans le catalogue de mille prédictions Aftrologiques dont on étoit encore perfuadé de fon temps (il mourut en 1626). Je reviens avec plaifir aux fentimens des anciens Philofophes qui eurent des idées plus grandes & plus vraies du mouvement & de la nature des Comètes. Suivant Ariftote même, quelques Philofophes d'Italie, appelés Pythagoriciens , foutinrent que les Comètes étoient des Aftres errans, qui ne paroifloient qu'après un long efpace de temps , ainfi que Mercure fe voit rarement & pendant peu de temps fur Fhorizon. I ajoute que Hippocrate BES SCIENCES. s de Chio étoit du même fentiment , avec tous fes difciples, & fur-tout Æfchyle. Plutarque dit auffir que quelques Pythagoriciens avoient Depla, Phi regardé les Comètes comme de véritables Aftres qui ne pa- #1: «2 roiffent pas continuellement ; maïs qui après avoir achevé leur tour reparoiffent dans des temps réglés. Il ajoute que Diogène le penloit ainfr. Aulugelle fait parler là-deflus Phavorinus, qui foutient qu'il Zi, xtv, cr, y a beaucoup de Planètes que lon ne connoït pas. Artémidore difoit auffr que les cinq Planètes, quoique les feules qu’on eût obfervées , n’étoient pas les feules qui euffent un cours réglé; qu'il y en avoit une multitude qu'on ne voyoit pot, ou à caufe de leur peu de lumière, ou parce que leurs cercles étoient placés de manière qu'on ne pouvoit voir ces Aftres que vers l'extrémité de leur cours ; mais il joignoit à cela beaucoup de Séèque, lib, rêveries que Sénèque eft obligé de réfuter. éd or Quelques Pythagoriciens croyoient que les Comètes par- toient du Soleil & y retournoient enfuite, parce qu'on avoit . vu fouvent autrefois les Comètes difparoître dans les rayons du Soleil. | Ariftote réfute à cet égard les Pythagoriciens ; mais Pline a mal entendu le paffage d'Ariftote, quand il lui fait dire que les X42 à Gm, Comètes ne font jamais dans la partie occidentale du Ciel, 7:96. Démocrite, qui, au jugement de Cicéron & de Sénèque, , Sentiment fut le plus fubtil de tous les anciens Philofophes , avoit étudié fou Fins A TEE PES TE ss à . Bb, chez les Chaldéens, « if foupçonna, dit Sénèque , qu'il y avoit Ouh er beaucoup de Planètes dont chacune avoit fon mouvement; mais « #.11,0 r. il n’entreprit pas de les nommer & d'en afligner le nombre, dans « Divg, Laëre, un temps où le cours des cinq Planètes, étoit à peine bien « connu ». A l'égard de la formation & de l'origine des Comètes, je crois, comme Ricciolï, qu'Ariftote a mal interprété Le fentiment de Démocrite & d’Anaxagore , ils ne pensèrent jamais, comme on l'a dit, que les Comètes fuffent formées par la réunion des Planètes que nous connoiflons , mais peut-être, que les grandes Comètes pouvoient fe produire par la réunion de plufieurs aftres À iij Sénég. lib. VIT, Cajn 19» Sentiment d'Apollonius. Chap, XV, 4 Sentiment de Sénèque. » » » » » » 6 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE inconnus , ce qui n'a rien que de très-phyfique & de très-digne de cesilluftres Philofophes, ce fut auffi le fentiment de Zénon. Sénèque nous apprend qu'Apollonius le Myndien penfoit qu'il y avoit beaucoup de Comètes, & que c'étoient autant d’Aftres particuliers, auffi-bien que le Soleil & la Lune, mais que leur route s'étendoit dans le plus haut du ciel, & ne nous pérmettoit de les voir que dans la partie inférieure de leur cours; Sénèque parle dans le premier Livre de fes Queftions naturelles, de ces météores que Pline met au rang des Co- mètes , pogoniæ lampades , Cyparifliæ ; mais il n’en dit qu'un mot, à l'occafion de ceux qui regardoient les Comètes comme des météores ; c'eft dans fon vir.* livre qu’il traite de la nature des Comètes & de leur mouvement : on lui doit ce témoignage qu'aucun Auteur ancien n'a parlé des Comètes d’une manière auffr fublime que lui. On y voit briller fa pénétration d'un homme de génie, & les grandes idées d’un efprit philofophique ; il réfute les fyftèmes & les opinions abfurdes de fon temps, & il annonce à la poftérité une connoïiffance exacte de ce qui lui étoit alors inconnu. « On a cru, dit-il, que les Comètes n'étoient point des Aflres, parce qu'elles n'ont pas la figure ronde des autres corps céleftes ; mais ce n'eft que la lumière qu'elles répandent qui eft alongée, le corps de la Comète eft arrondi, fon éclat ou fa lumière la fait paroître alongée ; & quoiqu'’elles aient une autre figure, il ne s'enfuit pas qu'elles {oient d’une efpèce différente; la Nature n'a pas tout fait fur un modèle unique, & c’eft ignorer fon étendue & fa puiffance que de vouloir rapporter tout à la forme ordinaire, la diverfité de fes ouvrages annonce fa grandeur... On ne peut point encore connoitre leur cours & favoir fi elles ont des retours réglés, parce que leurs apparitions font trop rares, mais leur marche , de même que celle des Planètes , n'eft point vague & défordonnée comme celle des météores qui feroient agités par le vent. On obferve des Comètes de forme très-difiérente, mais {eur nature eft femblable, & ce font en général des aftres qu'on n'a pas coutume de voir & qui font accompagnés d'une lumière inégale; elles paroiffent en tout temps & dans toutes D\E4)S AUS CL I: EN CG: Es. 7 les parties du ciel, mais fur-tout vers le Nord ; elles font , comme tous les corps céleftes, des ouvrages éternels de la Nature; la foudre & les étoiles volantes & tous les feux de fatmofphère font pañlagers & ne paroiffent que dans leur chûte ; les Comètes ont leur route qu'elles parcourent ; elles s’éloignent, mais ne ceffent point d'exifter. Vous prétendez que fi c'étoient des Planètes, elles {€ trouveroient dans le Zodiaque; & qui donc a fixé dans le Zodiaque les limites des corps céleftes? qui peut affigner des. Bornes aux ouvrages divins? le ciel n’eft-il pas libre de tous côtés? _n'eft-il pas plus convenable à la grandeur de l'Univers d'admettre plufieurs routes différentes , que de réduire tout à une feule région du ciel? Dans cet ouvrage magnifique de la Nature, nous voyons briller. une multitude d'étoiles qui embelliffent la nuit, elles nous apprennent que le ciel de toutes parts eft rempli de corps céleftes , pourquoi faut-il qu'il n’y en ait que cinq à qui il foit donné de fe mouvoir? & pourquoi tous les autres Aftres doivent-ils être immobiles ? On me demandera peut- être pourquoi donc il n’y en a que cinq dont on ait obfervé le cours? Je répondrai qu'il y a beaucoup de chofes que nous favons être, fans favoir de quelle manière elles font ; nous avons un efprit qui agit & nous dirige ; nous ne favons ni ce . que c'eft, ni comment il agit ; ne nous étonnons pas que l'on ignore encore la loi du mouvement des Comètes, dont le fpedacle eft fi rare ; qu'on ne connoiffe ni le commencement ni la fin de ces Aftres qui reviennent d’une énorme diftance ; il n'y a pas encore quinze cents ans que la Grèce à compté les étoiles & leur a donné des noms ; flelhis aumeros ér nomina Jecit : il y a encore bien des Nations qui n’ont que la fimple vue du ciel qui ne favent pas même pourquoi ils voient la Lune s'é- clipfer; il n’y a pas bien long-temps que nous le favons d’une manière certaine ; il viendra un temps où par une étude de plu- fieurs fiècles , les chofës qui font cachées actuellement, paroîtront au grand jour. Un fiècle ne fuffit pas pour découvrir tant de chofes , quand même on ÿ donneroit tout fon temps : cependant nous ne partageons que trop celui qui nous eft donné, les vices en ont la plus grande part. On étudie quand on manquede fpectacles A ñ « Prédiétion ; j de Sénèque, L fuivront trouveront des vérités nouvelles, contentons-nous de » celles qu'on a découvertes. Nec miremur tam: tarde erui quæ tam » alre jacent .… Que de chofes dont l'exiftence nous eft inconnue, » & que l'Auteur de la Nature femble fe réferver ! nous ne favons L w pas ce qu'eft celui fans fequel rien ne peut étre: quand on ignore ainfi la partie la plus eflentielle de Univers, on ne doit pas être furpris que les petites parties nous échappent ». Ce qu'il y a de plus fingulier encore, c'eft la manière dont Sénèque parle des inégalités des Planètes , de leurs flations & de leurs rétrogradations : « il s'eft trouvé des Pilofophes qui nous ont dit, vous vous trompez en croyant qu'il y ait des M3 : » Aftres qui rétrogradent ou qui s'arrêtent ; cette bizarrerie ne » peut avoir lieu dans les corps céleftes , ils vont du côté où ils » ont été jetés, ils ne fufpendent jamais leur cours, ils ne changent » jamais leur direétion , pourquoi donc paroiffent-ils quelquefois « retourner en arrière ? C’eft le Soleil qui en eft caufe, leurs cercles , ou leurs orbites font placés de manière à nous tromper dans » Certain temps , tout ainfi qu'on croit fouvent immobile un vaif- Gyr25,26, feau qui va pourtant à pleines voiles ». Ptolémée, Pline & tous les Anciens qui ont parlé des mouvemens céleftes étoient bien éloignés de les concevoir d'une manière auffi philofophique; au refle, jen’ai donné ici qu'une traduétion libre de différens paflages de Sénèque rapprochés l'un de l'autre pour préfenter mieux les idées & le fyftème de ce Philofophe fur les Comètes. SENTIMENS des Modernes fur les Comites. Le fentiment des Chaldéens , des Pythagoriciens & de Sénèque fut long-temps oublié, parce qu’Ariftote & l'ignorance Lib, Ip ; & dominoïient feuls dans les écoles ; cependant nous voyons Cardan férilirare. Rice, Alm 2 27: , füivi de plufieurs autres, fe déclarer pour ce fentiment. | DESCARTES / D ES S GIE NC E;S 9 DESCARTES renouvela dans l'Europe le goût de Ja Philo- fophie, non-feulement par des étincelles de génie, comme l'avoit fait Bacon en Angleterre, mais par une Géométrie profonde &une Phyfique toute nouvelle ; il eut des Comètes une idée plus jufte que les Aftronomes même les plus célèbres & les plus occupés de l'étude des Aftres, quoiqu'il ne les eût étudiées lui- même que comme une branche de l'Univers & de la Nature, dont fa Philofophie embrafloit la plus vafte étendue. Defcartes fuppofe qu'un Aftre placé d’abord dans un tour- billon quelconque, foit plus. folide que les parties du. fecond élément qui forment ce tourbillon : cet Aftre s'éloigne alors du centre & pafle dans les limites d’un autre tourbillon ; pendant qu'il fe meut vers la circonférence du tourbillon , il acquiert affez d'agitation pour avoir fa force de paffer au-delà & d'entrer dans un autre tourbillon, -& continue ainft de l'un à l'autre; ces Aftres qui paflent ainfr d'un tourbillon dans un autre, font ceux qu'on nomme des Comètes. Cette hypothèfe de Defcartes fur les Comètes, étoit un accefloire de celle que le mouvement des Planètes lui avoit fait adopter, & qui ne pouvoit pas le conduire à déterminer la règle de leurs mouvemens ni Ja période de leurs retours; du moins il comprit parfaitement qu'elles étoient non des météores , mais des Aftres comme les autres, qui faifoient des À HMS de tous côtés, dans l'efpace immen{e qui eft entre le Soleil & les étoiles fixes. On népgligea pendant plufieurs fiècles lobfervation des Comètes, parce qu’ ‘on les regardoit comme des météores que perfonne-ne croyoit nécefaire d'examiner ; quel fruit elpérer de l'obfervation exaéte d’un amas de vapeurs flottantes qui ne laiflé aucunetrace , &. ne fuit aucune loi ; e Peuple les craignoit ; J'Aftronome les méprioit ; c'efhainfi que l'elprit de fyflème égare trop fouvent les génies Jés plus obfervateurs ; l'avantage des fiècles éclairés eft de né jamais négliger des faits, quelque ifolés où indifférens qu'ils paroiffent ; tout s'enchaïîne dans la Nature: un, jour nous pourrons fuivre ce fil, dont nous ne voyons que des parties, en apparence fi détachées. Mém. 1759. B Defcartesrap. pclle {1 bonne Phyfique, Principes de la Phibofophie , art, 127 Tbid, art, 40. La première Comète obler- vécexaétement, Remarque importante d’Apian, Tycho obferve les Comètes. De Comeris &belliz , aurore Joan. Keplero , anguflæ vindeli- corum, I Ô 19% 10 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE La Comète de 1472, pañla fi près de la Terre , avec un mouvement fi rapide, une queue fi terrible, qu'elle fembla menacer la Nature d’une confufion univerfelle ; a defcription même que Longomontanus en a donnée fut le fruit de cette erreur, & c’eft à elle que commence la lifle des Comètes obfervées avec foin. Un Aftronome d’Ingolfladt, nommé Pierre Apian, le même à qui nous devons les obfervations de la Comète qui paroît aujourd'hui, fut l’auteur de la première remarque importante qui ait été faite fur les Comètes ; il obferva que les queues des Comètes étoient toujours dirigées vers l'oppofite du Soleil, ce qui lui parut dès-lors une preuve bien évidente que le Soleil produifoit l'éruption de la queue des Comètes ; il n’obferva même notre Comète en 1531, que pour s'aflurer {1 vérita- blement la direction étoit conftante; en forte que ces obfer- vations dûrent leur origine à l'envie de confirmer la première découverte que lon eût faite fur les Comètes ; c'eft auffr Ja première qui , fans effrayer la terre par fa forme, eut l'avantage d'être obfervée avec quelque foin. Tycho-Brahé donna une nouvelle face à toutel’Aftronomie; rien dans le ciel ne lui fembla indigne d'attention, & les Comètes qui parurent de fon temps , furent obfervées avec le même foin que les plus belles étoiles : fi la théorie de leur mouvement n’en étoit pas mieux connue, c'étoit du moins un acheminement bien für à de nouvelles découvertes. Képler aperçut que le mouvement des Comètes, rapporté au Soleil, approchoit de la régularité d’une ligne droite, & que fans erreur fenfible , on y pouvoit repréfenter la perite portion de leurs cours, qu'on étoit à portée d'apercevoir : à la page 85 de fon ouvrage, il établit comme une propofition que le cercle ne fufhit pas pour repréfenter le mouvement de la Comète, & que celle dont il parle a eu un mouvement rectiligne. Cometæ mots apparentes per circulum non falvari. Cometæ monm fuiffe rettilineum. C'eft dans ce même livre que Vauteur rend compte des obfervations qu'il avoit faites lui- même à Prague fur la Comète de 1 607 , la même qui reparoït DES $SCci1ENCESs. La aujourl'hui; il laperçut le 1.6 Septembre au foir, étant occupé à voir des réjouiffances, il fuivit cette Comète jufqu'au 26 Otobre : voici comme il s’en explique page 25 : die = Sépiembris feria 4° Pragæ cælo fereno cum ad fpeélaculum ignium artificialium noëts hora dimidia fupra oéfavam a meridie , in ponte - Jubflitiffem finitifque Jpeclacuhs intra dimidiam horam. rogante amico vultum ad flellas convertiffem , vidi ffellam fub urfe , majorem cæteris per perfpicilla intuitus que æquale cæteris fixis lumen mihi fine perfpicilis diffundere videbatur , caudam ipfe nullam vid, ed rogari cæreri fe videre affrmabant. .. fequenti mane hora 3, Cauda clare apparut 7 fatis longa, p. 27. Cette Comète fut auffi obfervée par Longomontanus le 18 Septembre, vieux ftyle, Affronomiæ danicæ appendix , de afcitisis cœli phœnonreuis , uenipe de flellis novis & Cometis , amore Chriff. Severini f. Longomon- tano , fol. Amflelodami, 1640, W dit, page 25 , qu'elle étoit à la vue de la groffeur de Jupiter, quoique d'une lumière plus obfcure & plus pâle ; que la queue étoit affez longue & plus denfe que ne font les queues des Comètes, mais d'une lumière auffr pâle que la Cométe même: il dit auf, que certainement le 14 Septembre elle ne paroïfloit pas encore; & qu'enfin le 14 Oétobre elle étoit devenue fort obfcure: Die 18 Sep- tembris adverti Comeram caudatum in Septeurrione | quippe qui magnitudine fua ferc jovem ipfum quoad vifum æmulabatur, Jed obfcuriare colore hoc eff fublivide ipfum Sarurmun ; caudam etia Jatis longam denfamque obrinuit quam diredte radi folares in aver: Jam a Je regionem depulerunt.….. fuit quoque cauda Comet denfa 4 dixi € fortafle magis quam relique folem compatta, ac ejufdem cuns ipfo capite coloris nempe hvidi & fubfaturnini. J'ai rapporté ici tous ces paflages pour en tirer quelques confé- quences dans la fuite de ce Mémoire. see + Ainfi jufqu'au temps de Képler; on ne favoit prefque rien Hévaiss du mouvement des Comètes : Hévélius me paroît être celui rot J / Q ñ Fr es orbites des qui, dans cette théorie, fit d'abord le plus grand pas, puilfqu'il Gomètes font trouva le premier ,nou-feulement que la route des Comètes étoit ds paraboles. courbée vers le Soleil, maïs encore que cette courbure étoit para- bolique. Je crois qu'à cette occafion on me vena avec plaifir Bi 12 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE réparer une injuftice que plufieurs auteurs modernes ont faite à ce grand homme: une brochure Allemande d'un nommé Doërfeld , imprimée en 1 68 r , pale pour être le premier livre où l’on ait démontré que la parabole pouvoit repréfenter le mouvement des Comiètes ; Doërfeld appliqua en effet cette méthode à la Comète de 1681, mais il en conclut une dif- tance périhélie dix fois plus grande qu'on ne l'a trouvée depuis , c'eft à lui enfin qu'on veut donner l'honneur de cette théorie & c'ett lui que l'on fait à cet égard le précurfeur de Newton. On en juge bien autrement lorfqu'on ouvre la Cométographie d'Hé- vélius, imprimée dès l'an 1668 , c'eft-à-dire treize ans avant la date de Doërfeld ; Hévélius obferve d'abord que tous les pro- jeciles décrivent des paraboles , omne projelum & explofum motu parabolico progreditur, p. 6 60 , & qu'il n'y a de différence qu'à raifon de la réfifance de Fair , ab acris renfxu pauxillum a mou perfeélo parabolico feducuntur, p. 661 : décompole enfuite cette parabole pour faire voir qu'elle eft le réfultat d'une double impreflion : mots parabolicus ex duobus motilus contrariis oritur ibid. Lareflemblanceentre les projectiles que nous voyons fur la terre & les Comètes , lui paroït évidente ; il voit de part & d'autre une gravité , une tendance vers un centre commun , qui eft le centre du Soleil pour les Planètes, & celui de la Terre pour les corps terreftres, de part & d'autre un mouvement d'explofion, de projection en ligne droite, qui fe combine avec la gravité pour former une parabole, en forte que la Comète abandonneroit la parabole pour fuivre une tan- gente, fi la gravité cefloit d'agir fur elle; comme elle retom- beroit vers le Soleil fi la force de projection ne l'en éloignoit pas: Cometæ in nulla aka quam parabolca moventur lnea... am cum is omnibus ita comparanum eff in athere, (fuo tamen modo ) quam cum projects commotifque in aëre... Cometam vide- licer æternis caufis neceffitate manantibus , partter ac globus e tor- mento explofus, vel aliquid aliud virtute feu motu extrinfeco pro- pulfum , in line parabolica ommino commoveri ae trajici..… alter autem ( motus } pariter naturalis © intrinfecus eff, non quidem ex eo quod Cometis æque ac terrefiribus gravitatem attribuam , DAY SK SICILE NN: CE 5 13 fed alia huic non prorfus difimilis appetentia eis competat , ex qu& Cometæ omunes erga Solem tanquam centrum mundi atque Plane- tarum orbes ceu iflius centri peripherias ; cujus propenfonis ‘inffinéu alterum larus planum à expanfum Cometarum nullo uon tempore ex infita vi à virtute quæ haud caret rationibus congruis partim jam detedis partim infra fuperaddendis Solem verfus ranquam ad centrum univerfi, alterum vero rurfius directe Plancrarum orbium Jpæras verfus exponunt atque obvertunr, Jub qua direcfione fe deinceps confervant quando nempe Cometæ atmofphærä liberi exeunt, vel ex e& in ætherem expelluntur, ejiciuntur fui que juris fiunt , cujus videlicet univerft ætheris Sol centrum eff, p. 666. Hévélius va plus loin encore , il confidère la nature de fa parabole , il voit les inégalités de vitefle que les Comètes doivent y éprouver: ce n'eft, dit-il, ni au commencement de leur cours ni à‘a fin que leur viteffe eft la plus grande, mais c’eft lorfqu’elles parviennent au point de leur orbite où le rayon eft perpendiculaire à Ja courbe , c'eft-à-dire au fommet de leur parabole : ab inrroitu trajecfionis morus eorum non eff omnium velociffimus , nec in extremitate , Jed eo in cafu perperuo fub media itineris via ad verticem parabole , hoc eff ut menrem * meam relle aperiam , ubi radius ex centro Jolis ad trajettoriam perpeudiculariter deducitur ibidem dico motum efle celerrimum , p. 669: | Je ne prétends donner aucune valeur aux hypothèfes que Hévélius employoit pour expliquer la formation des Comètes dans l'atmofphère de Saturne ou de quelqu'autré Planète, & : le mouvement de projeétion qu'elles y reçoivent ; tout cela n'avoit trait qu'au phyfique, & laiffe tout le mérite de la partie . géométrique & aftronomique de cet ouvrage ; on croiroit voir : dans les expreflions d'Hévélius, que je viens de rapporter , le principe même des forces centrales que Newton calcula depuis avec tant de fuccès , & il n'eft rien de plus clair que cette découverte d'Hévélius fur a trajectoire des Comètes ; il ne lui manquoit plus que d'y appliquer la loi. de Képler des aires proportionnelles aux temps. Enfin parut la Comète prodigieufe de 1680, qui eflraya de nouveau l'Univers, réveilla les ; B iij Comète de 1680. Elle occafionne les découvertes de Newton. Réflexions judicieufes de M.Cafini. » 14 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Philofophes, produifit les réflexions ingénieufes de Bayle, & les fublimes recherches de Newton ; celui-ci les eut bien-tôt aflujéties à ne faire plus qu'une fuite de fon fyftème général. M. Caflini, à qui toutes les branches de l’Aftronomie dûrent une fi grande partie de leur progrès dans le dernier fiècle , fut le premier qui s'occupa à chercher dans les anciennes obfervations les routes des Comètes pour en déterminer les retours. S'il lui fût venu à l'efprit de les rapporter au Soleil avant de faire cette comparaifon; s’il eût pu fe perfuader , avec Hévélius, que le Soleil étoit leur centre, il ne refloit plus rien à faire, & fans devoir rien au Newtonianifme, il alloit joindre cette décou- verte intéreffante à celles qu'il avoit déjà faites. Pour voir combien M. Caffini avoit mis de fagacité dans fes recherches fur les Comètes, on peut confulter les livres qu'il publia fur la Comète de 1665 & fur celle de 1681, & fur-tout les Mémoires de l'Académie, année 1699, p. 361. « Quand nous trouvons , dit-il, qu'une Comète a tout enfemble les mêmes nœuds, la même inclinaifon à l'écliptique, & les mêmes degrés de vitefle apparente qui ont été oblervés dans une autre qui a paru auparavant, nous avons de gragds fondemens pour juger , par l'analogie aux Planètes , que ce peut être la même Comète. Toutes ces conformités fe trouvent entre la Comète de 1680 & celle de 1577, qui coupèrent l'écliptique aux mêmes degrés H gs avec la même incli- naifon de 294, paflant par les mêmes conftellations, & qui eurent le même degré de vitefle à pareilles diftances de leur périgée ; il y a auf le même rapport entre la Comète de 165 2, dont nous obfervames le mouvement , & celle de Septembre 1698»... M. Caflini cherchoit encore f1, par des périodes de mouvement de nœuds, de variation d’excentricité & d'inclinaifon à lécliptique, on ne pourroit pas accorder la feconde Comète de 1665 & celle de 1677 avec celles de 1680 & de 1577, qui avoient eu prefque les mêmes degrés de viteffe & avoient paflé par des routes peu difiérentes, & celles qui, ayant paflé par les mêmes conftellations, avoient eu différens degrés de vielle comme celles de 1 690 &ed 1698, DES SN C'TIENN CES 1 de 1472 & de 1 556. On n'avoit guère vu de Comète qui fe fût détournée d’un grand cercle autant que celle de 1 664 ; cependant M. Caffini étoit parvenu à repréfenter cette irré- gularité par le moyen d’un mouvement particulier de fesnœuds, comme on le voit dans le livre qu'il publia à Rome, au fujet de cette Comète en 1665. ; C'eft ainfi que M. Caffini employoit tout ce qu'il y avoit de plus délicat dans l'Aftronomie de fon temps, pour parvenir à prédire le retour des Comètes ; mais toutes fes prédiétions ne pouvoient fe vérifier, parce que les reflemblances qu'il apercevoit entre les Comètes obfervées n'étoient qu'apparentes , & n'avoient rien de réel. C’étoit en les rapportant au Soleil qu'il falloit tenter cette comparaifon, & M. Halley fut le premier qui lentreprit. Newton ne sétoit point borné à donner aux Comètes de véritables paraboles pour orbites, il comprit bien qu'elles n'étoient paraboles qu’à peu-près dans la partie la plus bafle & la plus petite, & feulement à raifon de la reflemblance qu'il y a entre une parabole & une elliple , lorfqu'on ne prend que la partie voifine du fommet: dans la première édition de {es Principes, publiée en 1687, il finit en difant qu'on connoîtra les axes des elliples que les Comètes décrivent , lorfqu'on aura pu obferver plufieurs révolutions d’une même Comète. D'après la théorie de Newton, M. Halley forma des pro- cédés commodes pour le calcul d'une Comète dont la parabole eft donnée; il les appliqua d'abord aux Comètes qui avoient été les mieux obfervées, peu à peu il étendit fes recherches à toutes celles dont il put découvrir quelques oblervations, jufqu'à ce qu'en 1705 il fe trouva avoir formé une table de vingt-quatre Comètes, qu'il publia dans les Tranfactions philofophiques. Ceie Cométographie fut aufli imprimée féparément l’année fuivante, elle a été inférée dans le 2.4 tome de l’Aftronomie de Grégori, édition de 1726, & dans les T'ables de M. Halley, publiées en 1 749, je viens d'en donner une édition nouvelle avec des augmentations confidérables. / Tables aftronomiques de M. Halley pour les Planètes à les Comères , augmentées de Découverte de Newton. Haley calcule les orbites de vingt - quatre Comeètes. N'297 Prédiétion de M. Halley, 16 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE plufieurs Tables nouvelles pour les Satellites de Jupiter & les Etoiles fixes , avec des explications détaillées &r l'hifloire de la Comète de 1759; à Paris, chez Durand, 17 S9) s DÉCOUVERTE DE M. HALLEY fur Le retour de la Comère de 1682 à fes anciennes appariions. EN comparant entr'elles ces vingt-quatre Comètes , M. Halley aperçut que celles de 1531, de 1607 & de 1682, avoient des orbites fort approchantes les unes des autres, la reflèm- blance fe trouva même aflez frappante pour lui faire efpérer qu'on reverroit encore cette Comète en 1758 , ac fane mulræ me fuadent ut credam Cometam anni 1ÿ31 ab ArrANo obfervatum eundem fuiffe cum illo qui anno 1607 deferipius eff a KEPLERO € LONGOMONTANO , quemque ip{e iterum reverfurt vidi ac obfervavi anno 1682 ; quadrant elementa omnia , ac fola inæqualitas periodorum adverfari videtur ; hæc autem 1anta non eff ut caufis phyficis non poffir attribui. Avec quelle timidité ne fe livroit-il pas à une propofition fi étonnante & f1 nouvelle? il a juftifioit comme s’il eût craint qu'on ne la prit pour l'effet de l’enthoufiafme, à peine ofoit-il lui-même s’abandonner à tant de confiance : trop de prédictions avoient été hafardées avant lui & démenties par l'évènement , pour ne pas le mettre en garde contre ce que la fienne même avoit de féduifant. M. Halley avoit été ébranlé quelque temps par les différences qu'il aper- cevoit entre les deux périodes , fa confiance s’accrut lorfqu'il entrevit la raifon qui avoit pu produire une année de différence entre ces deux intervalles ; enfin tranfporté d’un fuccès fi flatteur que fa conftance méritoit , mais qu'il avoit à peine efpéré, M. Halley , dans fes Tables imprimées quelques années après *, interpelle, pour ainfi dire, la poftérité de fe fouvenir que c’eft à un Anglois que l'on en doit la découverte. Toutes les chofes neuves & importantes dont l'Académie venoit d'enrichir nos Sciences , les micromètres, le pendule , la propagation de la * Halleii Tabulæ affronomicæ, Lond, 1749. Tables aftronomiques de M. Halley, Paris, 1759. lumière, DES SCIENCES. 17 Jumière, la grandeur de la Terre & fa figure, les fatellites de Saturne, &c. étoient peut-être les caufes qui infpiroient au Phi- lofophe Anglois tant de précaution pour s'aflurer une part à l'étonnante révolution que venoient d'éprouver les Sciences dans le xvrr.° fiècle. C'eft donc à l’heureufe idée qu'eut M. Halley de drefer cette Table des vingt-quatre Comètes , que nous devons la découverte qui nous étonne : que ne pouvons-nous trouver dans lhifloire des fiècles pañlés de quoi prolonger encore cette Table nous compterions peut-être déjà toutes ces Planètes qui nous font inconnues ; nous les verrions décrire des orbites dont la plus petite ( incomparablement plus petite que toutes les autres ) a cependant onze cents millions de lieues de diamètre; c'eft ainfr que lAftronomie déploiera, au moins fucceflivement , fes merveilles à ceux qui nous fuivront, & que plus elle fera cultivée, plus elle offrira d'objets à notre admiration. Depuis 1705 jufqu'en 1742, ila paru fept Comètes affez vifibles, fans que lon { foit occupé à en examiner la théorie & à en perfectionner les calculs ; mais la Comète de 1742, & plus encore celle de 1744, une des plus belles que l'on eût vu, rappelèrent encore une fois l'attention du Public & le courage des Aftronomes fur cette partie. M. Bradley, M. Maraldi & M. l'abbé de la Caille s’occupèrent les premiers à en fimplifier les calculs *, en forte que depuis ce temps-là le nombre des Comètes bien obfervées & bien calculées s'eft accru jufqu'au nombre de quarante -cinq. De ces quarante-cinq il faut en retrancher plufieurs , 1.” celles de 1607 & de 1521, qui font la même que celle de 1682 ; 2.° celle de 1532 qui paroït coincider avec celle de 166 1 , & qui probablement reviendra dans trente ans, fa période étant de cent vingt- neuf ans : enfin celle de 1264, dont la defcription , trouvée récemment dans un ancien manufcrit, reffiemble beaucoup à celle de 1556, & pourroit par conféquent reparoïtre en 1848, au bout d’une période de deux cents quatre-vingt-douze ans. * M. de l'Ifle & M. Struik calculèrent auffi plufieurs orbites ; M. le Monnier publia la méthode de M. Bradley. Théorie des Comètes, 17431 Voy. M. de la Caïlle , Zntrod, aux Ephémér. de 1765 , p, 42: Mém, 1759. C Grandeur de Ia plus petite des orbites come- taires. Mén, Acads 1740 Mém. de Trév. Nov. 17$7+ Anciennes apparitions de la Comète de 1759- Thear. Con. 18 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Je ne dis rien de la Comète de 1680, que M. Halley croit être celle qui parut à la mort de Céfar, fa période étant de cinq cents foixante-quinze ans: j'ai déjà remarqué ailleurs que cette identité étoit beaucoup moins évidente. Revenons à celle dont il s'agit aétuellement ; j'ai dit qu'elle fut obfervée par Képler & par Longomontanus en 1607, cela eft évident par fa reffemblance de leurs orbites. On ne fauroit encore la méconnoître dans les obfervations qu'Apian nous a laifiées de la première Comète de 1531, quoiqu'elle ne parut que peu de jours. Une feconde Comète fe montra quelques jours après & fut obfervée le matin par Fracaftor ; mais on ne fauroit la confondre avec la précédente, qui étoit fituée de manière à ne pouvoir paroître le matin , après avoir paru le foir. En 1456, la même Comète fe montra auffi d'une manière très- remaiquable : Cometa inaudiræ magnitudinis toto menfe Junii apparuir cum pralongä candé ita ut duo fere figna cæli ferrée henderir, J'avoue que j'ai peine à comprendre une queue de 6od pour cette Comète qui vient de nous paroître fr petite: cependant je vois qu'en fuppofant qu'elle eût paflé par fon périhélie au commencement de Juin, elle devoit fe montrer le foir vers le milieu du mois, ayant environ God d'élongation , & une latitude fort boréale , {a diflance à la Terre étant moindre que la moitié de celle du Soleil ; ainfr il faut croire que dans cette pofition , qui elt en effet des plus avantageules ,elle a pu paroître avec tout l'éclat queles Chroniques lui attribuent ; il pourroit aufli fe faire que par du figna on eût voulu exprimer l'étendue de deux conftellations , fouvent beaucoup moindres que deux fignes de l'écliptique. En 1379 & 1 380, on trouve deux Comètes mentionnées par Alftedius & par Lubieniecius, mais fans aucun détail fur Je temps ni fur la forme de leur apparition. En 1305, notre Comète fe retrouveencore fous une forme terrible, dans toutes les chroniques de ce temps- à, Comera dorrendæ magnitudinis vifs eff circa ferias pafchais , quem fecuta eff peflileutia maxima. M pourroit bien {e faire que Fhorreur DES SCIENCES. 19 de la peñle ait augmenté beiucoup celle qu'infpiroit la Comète; mais enfin comme elle pañloit cette année-là fort près de la Terre, il eft aifé de croire qu'elle dut avoir une longue queue ; car la proximité y contribue beaucoup. Pour peu qu'on ait envie de faire remonter plus loin lhif toire de cette Comète, il faffit de confülter les auteurs qui ont compilé tous les fragmens d’hifloire où il eft parlé des Comètes : tels font Ætflormius, Ricciok, Affledius , & fur-tout le grand ouvrage intitulé Zhearrum Cometicum Sraniflai Lubieniecii ; où Jon trouve quatre cents quinze Comètes jufqu’à année 1 66 $ feulement , dont cinquante remontent au-delà de l’'Ere chré- tienne, | Dans ce nombre, on en voit une de l'année 12 30, qui paroït être celle dont il eft adtuellement queftion ; une autre en 1005, trois périodes plus 1ôt; on la retrouve en 030 & plus haut en 550, marquée avec la prife de Rome par Totila. À l'année 309 , tous les Hifloriens de l'Empire parlent d'une très-grande Comète, qui pouvoit être encore li méme, Cometa fuit Prodigiolæ magnitudinis | horribilis afpedlu Comant ad terram ufque demittere vifus. ÿ [ Une Comète avoit encore paru dans le figné de la Vierge, foixante-feize ans auparavant, fan 323; enfin je pourrois re- monter, fans quitter les mêmes périodes, jufqu'à celle qui parut, fuivant le rapport de Juftin, à la naiflance de AMihri- date , cent trente ans avant J. Ç. fr je ne craignois detomber dans ces Comètes fabuleufes dont on avoit peut-être coutume d’embellir l'hifloire de tous les règnés fameux. Il faut d'ailleurs convenir que les intervalles entre différentes apparitions de Comètes ne fufhfent pas pour en prouver l'i- dentité ; ils ne peuvent tout au plus que venir à l'appui d’une démonftration fondée fur leur mouvement & für les circonftances de leurs apparitions ; & de plus, ces com pilations immenfes de Comèëtes n’ont pas été faites avec tout le foin que l'on y eût apporté fi, Jorfqu'on les a faites , on leur eût foup- çonné l'avantage que nous cherchons à en tirer. L'auteur du Theatrum Cometicum paroit n'avoir eu en vue que de comparer Ci Recueil de quatre cents quinze Comèt. 0 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE les évènemens qui ont fuivi les apparitions des Comètes , pour prouver qu'elles ne préfageoient rien , tout ainfi que fes prédéceffeurs les avoient compilées pour en faire remarquer les funeftes augures. Ne foyons donc pas furpris fr des quatre cents quinze Comètes dont parle cet auteur, il s'en trouve près de quatre cents dont on ne peut rien tirer que la date de leur apparition ; plufieurs même fe rapportent à des années fi voifines qu'on pourroit aifément s'y méprendre , parce qu'il y a des temps où les Comètes font très-fréquentes. Par exemple, depuis l'an 1298 jufqu'en 1 305$ , où notre Comète parut, nous en voyons fept confécutives , une à chaque année; dans les apparitions de 1380 & de 1454, nous en trouvons deux chaque fois, & fans aller plus loin, depuis deux ans que l’on s'occupe du retour de celle-ci, on en a obfervé trois autres que l'on ne cherchoit pas, & qu'on auroit | pu prendre pour la Comète attendue , fi les circonflances de leur mouvement ne nous avoient mieux inftruits ; la pre- mière fut obfervée dans plufieurs pays au mois de Novembre 1757 ; M. Pingré nous en a donné le calcul; la feconde a été vue au mois de Septembre 1758 par M. de la Nux, Correfpondant de l'Académie à l'ifle de Bourbon, dans la Conftellation d'Orion ; la troifième a été vue par plufeurs Aflronomes, & fur-tout par M. fer, chez M. de file, vers le mêmetemps, dans la conftellarion du Cocher. Un fait, qui eft même encore plus fingulier, s’il eft bien réel, c'eft que Fibf. Traf. M. Struick, en difcutant les obfervations qui furent faites en 17490492, ?: og. divers pays fur la Comète de 1748 , a trouvé qu'au mois de Mai de cette année, on obferva dans une même nuit trois Comètes différentes. Ceci autoriferoit un foupçon dont quelques perfonnes auront peine à { défendre, favoir que les Comètes de 399, de 1305 & de 1456, qui fe font montrées d’une manière fi remarquable, ‘ont pu être très-dif- férentes, & que celle d'aujourd'hui, quoique defcendue peut- être dans les mêmes années, n'aura point été remarquée pour lors , à caufe de fa petitefe. DPF NGIRE NT CE Se 21 Lorfque notre Comète defcendit en 1682, elle trouva l'Europe encore frappée de l'impréffion qu'avoit laiffée dix- huit mois auparavant celle de 1 68 1 ; mais elle n'attira qu'une partie de fattention que ln première avoit furprife : on ignoroit que la plus petite alloit devenir la plus intérefiante, & qu'elle féroit célèbre pour jamais , lorfque nous aurions appris , par elle, à connoître toutes les autres. Le 2 3 Août, des Jéfüites d'Orléans l'aperçurent pour la première fois , comme M. Caffini l'avoue dans fon Épitre au Roi, qui fut imprimée en 1682, M. Caflini l'obferva dèsle 2 6 au matin, & M. de Thuri vient de publier ces précieufes obfervations ; il devoit cet hommage à fa mémoite de fon illuftre ayeul: le même jour un domeftique d'Hévélius 'aperçut à trois heures du matin ; ce fameux obfervateur avoit toujours des fubaltgrnes occupés à con- templer le ciel, pour l'avertir des moindres chofes: depuis ce jour-Rà , Hévélius continua de l’obferver jufqu'au 1 7 Septembre. Le même jour encore elle fut vue à Léipfick par M. Kirch ; M." Flamfiéed & Halley l'obfervèrent en Angleterre, M. Zimerman à Nuremberg, M. Baërt à Toulon, M. Montanari à Padoue. Elle fuivoit prefque la route qu'elle avoit tenue dans fes dernières apparitions, aufi cette reflemblance avec la Comète de 1607 & avec celle de 1531 , n'échappa point aux Aftronomes; M. Picard en fit la remarque à l'égard de R première, & Montanari le remarqua für-tout à l'égard de celle de 1531, dans une lettre écrite en Italien & imprimée à Padoue, in-4.° en 1682, comme sil eût voulu nous dire que c’étoit des retours d’une même Comite, il fe fervit même de cette reffemblance contre les Aftrologues Italiens, qui fe préparoïent à en tirer des préfages funefles, mais il n'é- tendit pas plus loin fes conféquences. M. Halley, qui calcula enfuite tes élémens de cette Comète, n'employa que les obfervations de Flunftéed , peut-être qu'on ÿ pourroit faire quelques changemens en calculant les obfer- vations de M. Caffini , celles de Picard & celles d'Hévélius : on ne pourra guère fe difpenfer d'entrer dans cette nouvelle difcuffion , pour juger mieux de faccord qu'il y a entre la Ci Notre Comète reparoït cn 1682, Elle eft aperçue par L14 domcftique d'Hévélius. Annus climacte- ricus, 168$ Alta eruditorum Sept, 1 6828 Mari 1 683. Hifl de l' Acad, On foupçonne fon retour. Différence de cinq cents quatre = vingt- cing Jours entre les deux périod. 22 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE ROYALE théorie & l'oblérvation ; mais en attendant, je fuppoférai les élémens tels que M. Häalley les a donnés, je paîfe donc à l'apparition actuelle de 1 Comète qui nous occupe. Du retour de cette Comère en 1759, à des calculs qui l'ont précédé. La plus importante remarque qu'on ait à faire fur le retour actuel de cette Comète, tombe fur l'inégalité de fes deux périodes précédentes, nous avons dit qu'entre 1 $ 31 & 1 607, elleavoit employé foixante-feize ans dans fa révolution, & foixante- quinze feulement entre 1 607 & 1 682 ; la période qui vient de finir en 1759, a eu près de foixante-feize ans & demi. Parlons plus exactement, en 1 s 31 elle paffa par fon périhélie le 25 Août; en @éo7, le 26 Octobre, nouveau ftyle, à 4h du foir; en 1682, le 14 Septembre, à 7° 48’ du foir; & cette année elle y a pañlé le 13 Mars vers les 2P du matin ; de forte qu’en comptant avec exactitude , la révolution précédente fut de vingt-fept mille trois cents cinquante - deux jours, & celle-ci a été de vingt-fept mille neuf cents trente-fept, c'eft-à-dire cinq cents quatre-vingt-cinq jours plus longue. M. Halley avoit déjà remarqué la différence entre les deux périodes précédentes, & il en avoit été fi ébranlé qu'à peine auroit-il ofé prononcer fur l'identité de ces trois Comètes, sil navoit trouvé dans l'hiftoire, celles de 130$, 1380 & 1456 *. M. Hälley fe demandoit enfuite fi la période qui alloit fuivre feroit de foixante-quinze ou de foixante-feize ans, c’eft-à-dire fi Ja Comète reparoïtroit en 1757 où 1758. M remarquoit d'abord à l'égard des trois dernières apparitions, que la période avoit été alternativement de foixante - quinze & de foixante- feize ans, d’où il fembloit naturel de conclure que la pro- chaine {&roit de foixante-feize ans, parce que la dernière venoit * Verum cum periodorum 7 inclinationum diverfitas aliquanto nimia. . . Contentus era conceptus hos meos aliqua faltem probabiliratis fpecie fulros ändicafe ; poftea vero... Priorem fententian paulo audentius tueri cæpt, DES SCIENCES. 23 d'être de foixante-quinze; mais cette induétion étoit bien vague, & n'étoit guère concluante. Il vit aufli que dans l'été de 1 68 r la Comète en defcendant vers le Soleil, s’étoit trouvée pendant plufieurs mois fi proche de Jupier, que, fuivant la théorie de la gravitation , elle en étoit attirée avec une force quiétoit environ — de celle qui portoit la Comête vers le Soleil, il remarqua que la Comète , en defcendant vers fon périhélie, avoit été follicitée par les forces réunies de Jupiter & du Soleil, & avoit été plus long-temps foumife à ces forces accélérantes , qu'elle n'avoit été retardée quelques mois après en repaffant entre Jupiter & le Soleil, parce qu'alors fa vitefie, aux appro- ches du périhélie, devenue plus grande:, avoit dü la fouftraire plus 1ôt à cette force retardative ; il en conclut que la vitefle propre de la Comète dans fon orbite avoit été augmentée, qu'ainfi fa période en feroit alongée, & que probablement elle ne paroitroit qu'au bout de foixante-feize ans & plus, c’eft-à-dire, vers la fin de l'année 17 5 8 , où le commencement de la fuivante. M. Halley , qui ne vouloit point que l'on prit ces paroles pour le réfüuitat d’un calcul, ou pour une décifion, avertit expreflément que ce n’eft qu'une lépère remarque, que la courbe rélultante de l'attraction de Jupiter eft fr compolée, qu'elle furpafle les forces de la Géométrie. M. Halley étroit même fr. éloigné de pouvoir expliquer de pareilles inégalités, qu'il avoue dès le commencement de fon ouvrage qu’elles lui auroient Ôté la confiance, s’iln’avoit vu dans l’hiftoire trois autres Comètes femblables avant celle de 1 5 3 1, &il finit par déclarer qu'ilabandonne une ff favante difcuffion aux recherches de ceux qui auront vu l'évènement confirmer la prédiétion. En effet, à confidérer la chofe d'une manière aufir vague que M. Hälley, il y avoit beaucoup à objecter à fon raifonnement ; il eft vrai qu'une augmentation dans la vitefle propre de la Comèté en lui faifant décrire une plus vafte orbite devoit augmenter Ia durée de fa révolution ; mais c'eft en fuppofant la pofition de lorbite toujours fembiable , & les élémens invariables , ce qu'il étoit impoflible d'accorder à M: Halley. Secondement, cet auteur ne faifoit point attention , à ce qu'il Incertitude de M. Halley file temps du retour. 24 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE paroît, qu'en 1 68 3 la Comète, après avoir paflé {on périhélie ; {& retrouva dans une fituation toute oppolce à celle où elle s'étoit trouvée en 1681, prefque aufli proche de Jupiter, & de manière à être retardée par la même raifon qu'elle avoit été accélérée dans la circonftance précédente ; par-là l'eflet produit en 1681 paroifloit devoir fe détruire en 1683, & tout rentroit dans la même uniformité que fi la proximité remar- quée par M. Halley, entre Jupiter & la Comète, n'eüt pas eu lieu. Ce n'eft pas à cette proximité momentanée de Jupiter que l'on auroit pu devoir le retardement de li Comète pour toute une période, c’eft la durée non interrompue des attractions de Jupiter & de Saturne fur le Soleil & fur la Comète, pen- dant les deux révolutions entières , qu'il falloit confidérer , attraclion variable par les diflances de Jupiter, de Saturne, de la Comète, foit entr'eux, foit par rapport au Soleil, & par les inégalités de tous trois, c'eft ce que le calcul a démontré clairement. Ainfi la prédiétion de M. Halley , quant à la fin de 1758 ou le commencement de 1759, tirée d'une confidé- ration vague de quelques mois, fe réfutoit par un triple argu- ment, lui-même n’y avoit aucune confiance, & les Géomètres ne penfoient pas en devoir même tenir compte, Bien éloigné de-à, M. Newton paroifloit l'annoncer pour 17 57 , comme je le dirai dans un moment, & un Géomètre célèbre par {es travaux & par fes fuccès dans toutes les parties de la Géo- mètrie, parut lattendre encore plus tôt par une confidération toute différente; la période finie en 168 2 étoit moindre d’un an que celle qui l'avoit précédée, il crut que la réfiftance du milieu en étoit caufe , il en concluoit que la Comète devoit accélérer encore, en forte qu'elle pourroit pafler par fon périhélie dès année 1756. Cette réfiflance de Ja matière éthérée, qu'on crut d’abord apercevoir dans tous les corps célefles, {embloit déjà annoncer des fuites funeftes pour l'humanité ; en effet, fi elle avoit eu lieu dans toutes les Planètes, & en par- ticulier dans le mouvement de la Terre , il s’enfuivoit que lorbite de la Terre devenant plus petite, la force centrale devoit rer sn PS CRE NiceE:s. à devoit gagner de plus-en plus ; fa diftance au Soleil alloit don diminuer fans cefle, & la Terre defcendre par degrés juque vers le Soleil, pour y être un jour confumée après que Mercure & Vénus auroient fucceflivement difparu : j'ai démontré ail- leurs * quelle fyfième de l'accélération univerfelle n’avoit rien de réel , du moins en confultant les obfervations les plus anciennes , & que la Terre en particulier n'en avoit éprouvé fenfiblement aucune jufqu'à ce jour. On ignoroit doncabfolument dans quel temps devoit paroître la Comète ; M4 Wiflon & de Chefeaux, chacun en fuivant des hypothèfes différentes, Favoient annoncée pour 1 7 s7 sauflt dès, }’année 1757, tout le monde l'atendit & la chercha : M. de l'Ifle & M: Klinkemberg , Secrétaire des États-généraux , tracérent la route apparente qu'elle tiendroit dans différentes fuppolitions ; M. Pingré fit une multitude de calculs pour fe préparer à la-trouver ; M: Jamart donna la Carte célefte, & M. Buache la Carte géographique de fes dernières apparitions ; & j'annonçai dans les Mémoires de: Trévoux *, dans quelle confiellation il falloit alors. la chercher , parce que la Terre dans ce mois-à fe trouvoit au point de fon orbite, qui eft Je plès voifin de celle. de la Comèté.. Je. m'étois formé. pour cètté prédiétion une méthode graphique dont je donnerai le détail,däns un autre, Mémoire, parce qu'elle eft très - bonne pour trouver à peu-près & fans calcul les élémens d’une Comité par trois obfervations. Ce fut alors. que M. Clairant conçut le defiein de caleuler rigoureufêment ce que 'attraétion de Jupiter avoit pu faireen 1681 &:168 3, dans les temps où il avoit pafé fi-près de a Comète; il m’engagea à l'aider dans cette! pénible entréprile,, qu'il, n'auroit ofé entreprendre feuls je l'y portai moi -même avecenipreflement & je me chargeai de calculer les Tables des élongations &-des diflances entre : Jupiter & Ha Comète avec les forces de Jupiter fur la Comète, pour chaque degré d'anomalie excentrique. Quand: M. Clairaut auroit voulu fuppofer, avec MsiHalley ; qu'il étoit permis de * Mém Acad, 17S7: * Ner, 17574 négliger l'action de Jupiter fur la Comète, dans les années où : il en étoit à de grandes diflances, il n'auroit pas tardé à être Mem. 1759. * Mém. Acad. 1701 , page 264: Journal des Savans, Janr. 1759: + » 2 26 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE diffuadé ; les premiers calculs lui firent voir que dans le temps même où 11 Comète étoit à unediftance prodigieufe de Jupiter, fon orbite ne laifloit pas d’en être troublée; fur-tout par l'action de Jupiter fur le Soleil, qui, en déplaçant de Soleil d'une etite quantité, donne à forbite de la Comète un foyer dif- férent. Il trouva le moyen de déterminer par une fynthèle fort élégante la quantité qui devoit réfulter , dans le mouveinent de la Comète, de cette action fur le Soleil ; le refte fe fit par une analyfe très - compliquée & des: quadratures approchées d’une multitude de courbes, dont j'avois calculé les ordonnées à peu-près comme je l'ai expliqué dans mon Mémoire fur les inégalités de Mars *. La fuite du calcul fit voir enfuite que l'effet de Jupiter étant fr grand, celui de Saturne ne pouvoit pas être négligé; il faut entreprendre ce nouveau travail, je calculai de nouvelles Tables, je quarrai de nouvelles courbes : enfin le calcul devenant énormement compliqué, & les ap- proximations renfermant toujours un certain degré d'impér- feétion , il fallut calculer, par la même voie, les actions de Jupiter & de Saturne dans la période de 1531 à 1607, pour voir fi les méthodes repréfenteroïent avec une exactitude fuffifante la différence de près d’un an qu'on y avoit remarquée; je continuai de fournir à M. Clairaut les élémens du calcul , les fituations & les forces de Saturne ; le calcul fe ‘trouva différer d'environ un mois de l'obfervation; c'étoit une précifion aflez grande, eu égard à l'immenfité de l'objet, pour que M. Chiraut dût s'applaudir de fes fuccès : il publia donc enfin au mois de Novembre fon réfultat qui donnoit environ fix cents dix-huit jours pour l'excès de la période actuelle fur la période précédente , d'où il fuivoit que la Comète devoit fe retrouver dans fon périhélie vers le milieu d'Avril de cette année ; mais il y mit une reftriétion modefle, & qui devient aujourd'hui très - remarquable, voici fes termes: «On fent avec quels ménagemens je préfente une telle annonce, puifque tant de petites quantités népligées néceflairement par les mé- thodes d'approximations, pourroient bien en altérer le terme d'un mois comme dans le calcul des périodes précédentes ». DUDMENS He Si CAT E UC LES 27 M. Clairaut demandoit un mois de grace, en faveur de fa théorie; le mois s’y efttrouvé exaétement, & la Comète eft defcendue, après une période de cinq cents quatre - vinat-fix jours plus longue que la dernière fois. trente-deux jours ayant le terme qui lui étoit fixé; mais qu'eft-ce que trente-deux jours fur un intervalle de plus de cent cinquante ans, dont on avoit à peine obfervé groflièrement la deux centième partie, & dont tout le refte s'étend hors de la portée de notre vue? w'eft-ce que trente-deux jours pour toutes les autrésattraétions du fyflème folaire, dont on n'a point tenu compte, pour toutes les Comètes dont nous ignorons la fituation & les forces , pour la réfiflance de la matière éthérée, qu'on ne peut appré- cier, & pour toutes les quantités qu'on ef forcé de. népliger dans approximation du calcul? Il eft fans doute fingulier que M. Halley , s'exprimanten nombres ronds d’une manière vague, fans aucun calcul , fans aucune recherche fur les inégalités de cette Comète, ait fait une prédiction {1 approchée; mais if feroit imjufte de n'en pas croire M. Halley Jui-même, & de comparer malgré [ui une détermination faite à vue de pays, avec deux années des plus profondes recherches & des travaux les plus pénibles. Une différence. de cinq cents quatre-vingt-fix jours , entre … Diférence les révolutions de cette même Comète, dirence produite par “Au Fr les forces perturbatrices de Jupiter & de Saturne , devient une jours. ñ démonftration plus frappante qu'on n'eût jamais ofé l'efpérer du grand principe de f'attraction, & il met cette loï au nombre des vérités fondamentales de la Phyfique dont if n'eft pas plus poffible de douter actuellement que de lexiflence même des corps qui la produifent. AR 1 paroit aflez que M. Newton, tout occupé, tout convaincu qu'il étoit de Fattraction, n'ofoit encore s’en promettre des preuves. fi viétorieules & de fi grands dérangemens dans la Nature; il n’adoptoit qu'avec réferve des différences d’une année que l'on avoit abfervées, il femble qu'il aimoit mieux foup- çonner de l'erreur dans les anciennes déterminations de cette orbite , que de croire à de pareils dérangemens , du D j « Princip. Marh, Gb. 111, prop. 42, TomelIII, page 667 da Commentaire des PP. Jacquier le Seur. Obfervations decette Comète cn 1759+ 28 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE moins il n'en parle qu'avec une efpèce d'incertitude : ff li duo Comete fucrint unus dr idem revolvetur hic cometa Jpaïie annorum 7ÿ. Au moyen de ces foixante-quinze ans, la Comète auroit dû reparoître au mois de Septembre 1757 ; mais là Géo- métrie, méme celle que Newton avoit créée, ne pouvoit pas atteindre encore à des problèmes de cette force ; une orbite fr éxcentrique, des diftances fi variables , des vitefles fi inégales, tout cela jetoit dans le calcul une complication infurmontable, Ïl a fallu encore bien des années de tentatives & d'effais pour perfectionner cette partie de la Géométrie; nous devons nous applaudir de trouver dans cette différence de cinq cents quatre- vingt-fix jours , entre les deux révolutions de la Comète, un point fixe donné dans la Nature, d'où lon pourra partir déformais pour eflayer les méthodes, pour juger de leur mérite, de l'exac- titude de leur application, ou pour découvrir, lorfqu'on fe fera afluré de leur exaditude!, s’il faut chercher hors de notre fyftème planétaire la caufe de ces trente-deux jours , dont l'évènement à devancé la prédiction, ou plutôt des vingt-deux jours que M. Clairaut a trouvé enfuite par un calcul plus exact *. Je pañle aux obfervations que j'ai faites depuis que cette Comète paroît ; fuivant mes calculs inférés dans les Mémoires de Trévoux, qui ont paru à la fin du mois dernier, en fup- pofant que la Comète püt devancer d'un mois le calcul de M. Cliraut, cétoit près de la queue du Capricorne qu'il falloit la chercher le 1% Avril au matin; ce fut-là en effet qu'elle fut obfervée , le ciel s'étant éclairci à Paris pour la pre- mière fois depuis que les nouvelles particulières de Saxe nous avoient annoncé fon apparition ; elle me parut le 2 à 4h dw matin, comme une étoile de la troifième grandeur, fituée à 264 du Verfeau, avec 44 + de latitude féptentrionale : un Écrit allemand, qui parut à Léipfick fur la fin de Janvier, * Le calcul refait avec un peu plus de précifion, s’eft trouvé approcher encore plus de l'obfervation. Voyez /a Théorie du mouvement des Comites, par M. Clairaut , in-8.°, Mars 1760, pages 159 d7 229, où il ne & wouve que vingt-deux jours de différence entre l'obfervation & le calcul. D'E SE SCT E AGE ELEO M 2N 59 _plufieurs Lettres d'Allemagne, une éntraütrés que j'ai rèçue de M. Mayer, célèbre Aftronome de Gottingen , aflürent qu'un Payfan de Drefde , nommé Palitsh, l'aperçut le premier , dès le 25 Décembre dernier, deux mois & demi avant fon périhélie ; ‘quoiqu'alors elle füt 1rès-éloïignée de Hal Terre, elle avoit une fort grande élongation , de forte qu'au miliew de la nuit elle pouvoit fe faire remarquer dans un lieu ‘du ciel où il n’y a aucune étoile, même de la quatrième grandeur, & dans un pays qui, étant fablonneux , froid & fc, jouit plus que nous des avantages d’un beau ciel. Un Aftronome de Léipfick (que je crois être M. Gæriner où M. Winkler ) en profita pour l'obferver quelque temps ; je ne fai fi Aa nouvelle tranfpira ; mais M." de l'Ifle & Meflier l'obfervèrent à la fin de Janvier , avant que la Comète fe plongeät dans lés rayons du: Soleil, d'où elle n’eft reflortie qu’à la fin du mois de Mars. Pour tâcher de apercevoir tous les matins, j'abañdonnai: ke dôme du Luxembourg, où j'ai coutume d’obferver ; mais, dont Fhorizon eft trop borné, pour m’établir dans l'appartement: de M. le Chevalier de Lorenzi ; fes lumières & fon zèle pour: les Sciences, déjà connusde l'Académie, me procurèrent toutes: les facilités poffibles pour mes obfervations; mais le mauvais. temps, le crépulcule, la lumière de a Lune, furent des obf- tacles prefque continuels , & jeine vis la Comite que trois fois, le 2,le 7 & le 8 : ces oblervations d'ailleurs , dans lefquelles. je n'ai pu comparer la Comète à aucune Étoile fixé , font peu exactes en comparaifon de celles qui ont fuivi; elles me fuffrent cependant dès-lors pour voir qu'en empruntant des : obfer- vations de 1682, la diftance périhélie & F'inclinaifon , je repréfentois affez bien les pofitions qu'elle avoit eues pendant le mois d'Avril, fuppofant le paflage par le périhélie au 1 2 Mars à 12 heures; Ôtant 3 $' du lieu du périhélie ; & les ajoutant au lieu du nœud, après les avoir réduites par la pré- ceflion des équinoxes à l'année 1759 : ces corrections très- petites, étoient aufli très-naturelles ; car! dans une Planète rétro. grade , les nœuds doivent être directs & les aphélies rétrogrades ; mais les obférvations m'avoient déjà manifefté cette double D iij Découverte par un Payfans de Saxe, 3a MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYaALeE correction , avant que j'eufle remarqué qu'elle étoit. véritable- ment d'accord avec les autres phénomènes du même genre. Je rendrai compte à la fin de ce Mémoire, des obfervations fur lefquelles j'ai formé un.réfultat très-exact , qui s'eft trouvé diflérer peu.de celui que jaffignai dès - lors à l'orbite aétuelle de la, Comète., à :: > Dé la liniière & de la queue de cetre Comére. :: L'hifloire de cette. Comète exige encore quelques réflexions fur le degré de lumière , fur f'atmofphère, & fur J'efpèce de queue-qu'on ÿ a oblervée. te D à Le2 Avril au matin, un vent de Nord ayant rendu J'atmofphère d'une pureté peu cornmuné à Paris, 1 Comète paroiffoit très -bien à la vue fimple , & comme une étoile de la troifième grandeur ; je l'obfervai avec un Télefcope de deux pieds le noyaa très-lumineux , mais mal! terminé, paroifloit d'un diamètre égal prefque à la moitié de celui de Jupiter; H étoit environné d'une atmofphère fort denfe.en forme de nébulofité ovalé, dont la hauteur du côté du Soleil étoit double du diamètre du noyau, & quadruple environ du côté oppolé ; il eft bien naturel. de croire que cet alongement dans la partie oppolée au Soleil ne pouvoit avoir d'autre origine que la caufe générale dela queue des Comètes ; mais d'où provient cette petitefle ‘qui reflemble fr peu à la même Comète obfervée autrefois ? On en peut donner plufieurs explications tirées de fa diftance, de fà fituation, &c. Qu'il me foit permis d'y infifter un peu , puifqu'il femble ‘que quelques perfonnes aient douté de fon identité avec les Comètes de 1531, de 1607 & de 1683, qui ont toujours paru avec des queues fort étendues ; if y a deux fameufes explications de la queue des Comètes, celle de Newton , tirée de leur atmofphère propre, & celle de M. de Maïran, prife dans l'atmofphère du Soleil ; la plupart des Comètes font environnées d'une atmofphère très-grande & très-fenfible, dont:la hauteur eft fouvent dix fois plus grande que celle du noyau folide de la Comète, c'eft un fait qui devoit d'abord rendre très-naturelle &. très-plaufible l'explication SAT @ENSMÈSUCATE NE GEsSoMÈM gx que Newton a donnée de: la queue des Comètes, & c'effun fait primitif qu'il ne faut, point hercher à expliquer , dont if faut plutôt fe fervir pour expliquer les autres ;_ fi cependant la foibléfle de nos idées ne nousiavoit appris depuis ong- temps: à nous défier des caufes finalés, &: à lesregarder comme les produits de notre témérité , je pourris: croite! que les Comètes deftinées à. paffer d’une raréfaction & d'unechaleur terrible à un froïd:inconcevable: pour vous; devant étre aufir d'une extrême denfité ont reçu cette:atmofphère fi vafte & fi épaifle pour! adoucir:'aridité. qu'on :y éprouve , «maintenir, fomenter la circulation, Ja fluidité, de mouvement .& la vie. Si au lieu de prendre avec Newton: cette atmofphère:pour caufe de la queue des ‘Comètes, nous: prenons';avec M.de Maïrau , la matière :zodiacale; nous ytrouvérons d'abord L'avan-- tage.de pouvoir écarteride da Phyfique toute, erainté d’embia- fement ou de déluge : toujours couverte des Aurorèsihortéales, là Norvège nen:eft:pas)moins glacée) & lorlqw'elles béiflent déstoutes parts, onn'y voit ni la mere groflir, hi lés:fléuves {& déborder. L’explication de M.de Mairah mé paroît. même beaucoup plus naturelle: maïs enfin il eff aifé, ce me fémble, dé concilierces deux Philolophesi&c de:laiffèr à Péxplication de Newtom&h celle de M: dé Mairan-le degré de vraïfem- aus Fer qui-convient ‘à: chacune: :1] peut fe faire que, la matière propre. de l'atmofphère: de-lpGomète, raréfiée & dilatée par la chaleur:, s'éloigne-du::Soleil : ou par dim pulfion de la lumière, comme Képler de préténdit,;:ou:par Ja légèreté, qu'elle acquiéru par -sappottoà;, lalimaière «éthérée, comme d'atiure M: Newton; il) peur bien: es fairetiauffi que lorfque: des Comètes defcehüenit dans là partie-fi plus: dérife dél'atmofphère duSoleit; elles s'abreuveint &c: fe: chargentd'une partie «le la matière: qui da compole; plongées comnie_elles 4e font pendait longtemps, dans: cet océan de matière: ténue, que: nous:adimirons tamêt fous: le mom de Jumière. zodiacale, lonfqu'au commencement de Mars elle brille aprèside ‘couché du Soleil; tantôt fous Je nom. d'Aurore boréale, fuivant M. de Mairan , Joxfqelle, fnonde notre atmophéère ous. mille * Trairé phyf. è lues de L' Aurore boréale, par M. de Mai- ran, chap. VII, 4731:175# 32 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE formes. Quoi qu'il en foit, on fait que la matière zodiacale ; celle des Aurores boréales & des queues des Comètes , n'a qu'une, très - légère confiftance,, & que la foibleffe de fa lumière ne réfifte guère accelle du crépulcule; qu'elle paroït diflcilement lorfqu'elle ett en fr petite quantité & dans un ft grand'éloignement ; cette caule a :dù fufhre dans ce mois-ci pour nous empêcher d’apercevoir la queue de la Comète. On fait que l'atmofphère du Soleil eft fujette à des changemens, à des-diminutions,, à des reprifes,, la matière zodiacale n'a pas étértoujours, vifible:, on a:vw des. fiècles entiers fans Aurores boréales dans les pays où..elles font actuellement les plus com- ‘munes. *, Cette caufe ne: peut “elle pas produire des différences “marquées entre les apparitions-d'une même Comète, même dans des poñitions ide. la Terre également avantageufes ? & la Comète n'a-t-ellé pas pu fé trouver dans une de cés circonflances poû. favorghles. À. 29h SrSru0 gyojuol |: squi 1: 0On fait auffr que la queue:des Comètes,, quoiqu'oppofée au Soleil, décline ‘cependant! vers la régiom que: la Comète ‘abandonne! j'ai obfervé que le 2 Avril, où la queue de fa Comète me parut être fi petite, la digne de direétion du mou- vement de la Comète étoit. prefque dirigée vers notre œil, en fürte -que la queue, fi elle eût, participé ‘beaucoup _de ce mouvement ,auroit pu-être couchée dans la direction du rayon vifuel, par conféquent être: invifible quant, à:fa longueur , & ne f montrer ànous que fur la feétion; de-là venoit peut- être Ja forme alongée fous laquelle fonatmofphère fe montroit: ieft donc pofñhble que l'éloignement: &:h fituation de cette Comète nous aient-dérohé| la: vue de: laqueue pendant lermois d'Avril * Pendant le mois de Mai, la queue a paru fi foible, que pour moi. je n'y airemarqué autre chofe qu'une nébulofité affez épaifle étendue autour de la Comète, feulement à quel ques minutes du noyau, c:neft plus la lumière du crépufcule que lon. peut apporter: pour raifon de ‘cette petitefle , nous J'avons: obfervée dans des :nuits aflez obfcures, ce in'eft pas * J'ai appris depuis ce temps-là » qu'à l'Ile de France on avoit vu notie Comte avec une: queue très-confidérable à [a fin d'Avril. : ! 1 même #8 DES SCIENCES, 33 même fa diftance à la Terre, elle n’étoit éloignée que d'environ trois parties , dont on fippole toujours dix à la diftance du Soleil : mais Je crois que la diftance de la Comète au Soleil a pu être une des principales raifons : car enfin quelle que puifle être la caufe de la queue d'une Comète, elle dépend toujours de fa proximité au Soleil. Eft-ce une atmofphère diffrpée par la chaleur ? mais le Soleil ne peut. agir fi puiflamment qu'en agiflant de près ; eft-ce une portion de la matière zodiacale? mais l'atmofphère du Soleil a fes bornes , elle s'étend peu & rarement au-delà de l'orbite de la Terre: or, la Comète en étoit fortie depuis long-temps, lorfqu'au commencement de Mai elle reparut à nos yeux. Voyons maintenant quelle a été fa poftion en 1607 & en 1682, où la même Comète a paru incontef- tablement avec une queue très-remarquable ; le 28 Septembre 1607, Longomontanus la vit avec une queue fort denfe & affez étendue, c'étoit vingt - huit jours avant fon périhélie ; elle étoit éloignée de la Terre feulement de deux parties & du Soleil de 8 + Le 29 Août 1682, fuivant l'Hifloire célefte , page 265, M. Picard vit Ja rene avec une queue de 30 degrés, Hévélius lui en donne 1 6 degrés. C’étoit feize joursavant le périhélie, elle étoit éloignée de nous de 3 + & du Soleil de 6 +; ainfi dans les deux cas on aperçoit une combinaifon de fa diffance au Soleil & de fa diflance à la Terre, plus favo- rable que celle qui a eu lieu cette année pour Paris : éloignons donc comme une abfurdité toute réflexion qui tendroit à faire croire que cette Comète peut n'être pas celle de 1682, fon indlinaifon, fon périhélie, fes nœuds, fa diflance au Soleil, le retardement mème que l'attraction lui a caufé, fi bien d'accord avec le calcul, tout cela forme une démontftration fi frappante, que jai honte account de en arrêter à de femblables difficultés ; cependant comme l’Académie doit au Public 1e fruit de fes travaux , & que les doutes, même les moins fondés, tendent toujours à ‘fufpendre les progrès de l'efprit, jai cru qu'on me permettroit de répondre à des objetions qui femblent avoir eu du crédit, quelque peu fondées qu’elles fuient, Mém. 1759. E Annus climacte- TiCUS , pe 123» Les obfervat, réduites à la parabole. 34 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Cazouz des Élémens de la Comète de 1 7 $9. Paflage au périhélie le 12 Mars 13" 50° 24", temps moyen, ou 1 3h49" 30",temps vrai à Paris, lieu du périhélie 10f 34 8° 10", lieu du nœud afcendant 11 234 45° 35", inclinaifon de l'orbite 174 40" 1 4", logarithme de la diflancé périhélie 9,7670848 , & la diftance elle-même 0,58490 ; Jai fuppofé dans le calcul de ces élémens, vingt-huit mille foixante-dix jours pour la révolution de la Comète ; je rap- porterai dans un inftant les obfervations elles-mêmes. Suivant ces réfultats, le lieu du périhélie eft moins avancé de 8 minutes que dans ceux que M. Fabbé de la Caïlle m'a com- muniqués, le lien du nœud moins avancé de 3° +, Fincli- naïifon plus grande d’une minute, & fa diftance périhélie plus grande de 0,00 F4; enfin le paffage par le périhélie eff arrivé plus tard de 18° + Ces petites différences ne font point fürprenantes , parce que M. l'abbé de la Caiïlle a fait entrer dans fon calcul une obfervation du 24 Janvier, que M. de Fffle luia communiquée ; & {ur-tout parce qu'il a fuppolé la révo- lution de vingt-fept mille fept cents jours, quantité moyenne entre les trois dernières périodes , au lieu de vingt-huit mille foixante-dix jours que j'emploie. Pour calculer ces élémens par trois obfervations:, je les a réduits à la parabole, par les méthodes connues pour cela *'; j'ai calculé ces trois obfervations, foit dans-une parabole, foit dans une ellipfe qui ait la même diftance périhélie , la difié- rence que l'on trouve entre les longitudes & les latitudes géocentriques, dans ces: deux füppofitions, étant: appliquée aux: longitudes & aux latitudes obfervées, elles fe: trouvent telles: qu'on les auroit obférvées, fr à Comète eut eneffet décrit une parabole, au lieu de fon elliple; & dès-lors le calcul fe’ trouve ramené à là fimplicité de’ lhypothèle parabolique. Mais pour faire cette réduction de’ l'elliple à la parabole, * Voyez Mifcellaneous traéts. by T.. Simpfon, 1757: p. 59 : M: de. Ja Caille, Leçons Elémentaires d’Aftronomie, 1761, p. 292;,& mo ASTRONOME, livre XIX, ‘ DOPP UE GUN EU NC E. à nous ferions én danger de commettre uné erreur fenfible, fi M. Clairaut, à qui j'avois expol cette difficulté, n'eut trouvé dans fa théorie de quoi les diminuer. H à reconnu que l'elliple la plus propre à repréfenter les obfervations de la Comte, faites aux environs de fon périhélie , étoit celle que la Comète auroit décrit naturellement avec fa viteffe périhélie , en ne confidérant les perturbations de Jupiter & de Saturne qu'à raifon de l'altération caufée à cette viteffe périhélie; en confé- quence il a trouvé que dans les réductions de ces obférvations, il falloit fuppofer Fellip{e que la Comète décriroit en vingt-huit mille foixante- dix jours ou environ, fr c’eff pour cette année ; en vingt-huit mille deux cents foixante pour 1682 , en vingt- fpt mille fept cents quatre - vingt - feize pour les obfervations de 1607, & vingt-fept mille neuf cents quatre - vingts jours pour celles de 1 53 r. J'ai reconnu la néceffité d'une fembläble confidération dans les calculs de cette année, car ayant calculé la différence des anomalies vraies de l'ellipR & de fa partbole, répondantes à une même anomalie moyenne. dans différentes fuppofitions , j'ai trouvé des rélultats affez différens. Les trois obférvations que jai choiftes pour en tirer {es réfultats rapportés ci-devant, font celle du 16 Avrilan matin, faite par M. d’Arquier à Touloufe; celle du. r. Mai > faite par M. Bradley à Londres; & celle que j'ai faite moi-même le 21 Mai, au palais du Luxembourg à Paris. J'ai employé la première, parce qu’elle fut faite dans. des cir- conftances très-favorables, la Comête fe trouvant ce jour-là très- proche de y duCapricorne, & par M. d’Arquier, Corréfpondant de l’Académie, dontle mérite eff.très-connu. Excepté l'obfer- vation du 14, faite à Paris par M. l'abbé de la Calle, nous n'en avons eu aucune au mois d'Avril qui ait été auffi heu- reufe , &. comme M. l'abbé de fa Caille a déjà fait ufage de Ka fienne, j'ai penfé qu'il falloit auffi calculer l'autre: l'ob- fervation du 1.” Mai, füivant lès détails. que j'en. ai eus, fut faite à un Télefcope équatorial, décrit dans les Tranfactions philofophiques, & l'on y compara la Comète à trois Étoiles: différentes, circonftances qui me l'ont fait préférer à celle que E i Choix des trois obfcrvations Première obfervation. Seconde oblervation. Troïfième obfervation, 36 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE je fis le même jour; mais où je me contentai de comparer fa Comète à une des étoiles y de F'Hydre. Enfin celle du 21 Mai éft une des plus exactes de toutes celles que j'ai faites pendant le mois de Mai; elle n'eft ni trop voifine des deux autres, ni trop éloignée du périhélie, ce qui la rendroit moins concluante. Le 1 6 Avrilà 4h 36" 5 6” du matin, temps vrai, à Tou- Joufe , M. d'Arquier trouva la Comète plus orientale de of 1” 58", & plus boréale de 30 minutes que l'étoile x à la queue du Capricorne; j'ai trouvé, par le Catalogue britannique, l'afcenfion droite apparente de cette Étoile, touteréduétion faite, de 3 2 24 17° 32°, & la déclinaifon 194 56’ 27" méridionale; d'où jai conclu que le 15 Avril à 16" 40° 23", temps moyen à Paris, la longitude apparente de la Comète 10! 184 2’ 24", & fa latitude apparente 44 29° o", il faut ôter 7" de Ja longitude & ajouter 9" à la latitude, à caufe de l'aberration ; enfin, à raifon de la parallaxe horizontale, qui étoit alors de 26", il a fallu ôter $" de la longitude & 25” de la latitude obfervée , pour les avoir dans l'état où l’on doit en faire ufage. Ainfi Ja longitude eft 1of 184 52° 12", & la latitude 44 28° 44", le lieu du Soleil, pour le même temps, calculé avec la plus grande précifion par les nouvelles Tables de M. l'abbé de la Caille, eft 2f 254 51° 7" & le logarithme de fa diflance 0,002011. Le 1. Mai à 8° 45", temps moyen à Greenwich ou 8b- 54 16" à Paris, l’afcenfion droite de la Comète a été trouvée de 15455", & fa déclinaifon 254 52’; d’où il fuit que la longitude apparente étoit 5! 224 36’ 20", & la latitude 314 33° 7"3il faut ôter 1 3" de la longitude & 12" de la latitude pour l'aberration ; & pour la parallaxe horizontale, qui étoit alors de 40" +, il faut ôter 39” de la latitude, en forte que nous emploieroris la longitude 5° 224 36° 7", & ia latitude 314 32° 16", le lieu du Soleil étoit alors 1f 114 5° 47”, & le logarithme de fa diflance 0,00 38 13. Le 21 Mai, à oh 42° 18" 2 de temps vrai, j'obfervai le paflage du centre de la Comète au fil vertical de mon LFOD EM OLGMIENN CSM 3 inftrument des paflages, dont je trouvai l'azimuth $44 44 s 1", par deux étoiles 8 du Lion &:« de fHydre ; obfervées au même inftrument , l’une au-deflus, l’autre au-deffous, de la Comète, toutes trois dans l'efpace d’une heure & demie; la hauteur vraie de la Comiète au même inftant étoit de-204 "5", conclue de plufieurs ‘hauteurs que j'ai réduites au même inftant, de-fà fuit que le 2 1 Mai à 9P 28° 38", temps moyen, la longitude de la Comète étoit de sf 74 31° 52", &lalatituder $43" 20", il n’y a pour l'aberration qu'une feconde à Ôter de la longitude obfervée, & 4" de la latitude. b Ayant d'abord calculé ces trois obfervations dans l'ellipfé, Différences avec les élémens de M. l'abbé de fa Caiïlle , ils m'ont donné Sr pour fa première obfervation 2° 25" de plus en longitude, & 2° 15" en latitude; pour fa feconde obfervation 4° 29" de moins en longitude, & 2°.1" de plus en latitude; enfin pour. la troïfième, je trouvois 28" de plus en longitude , & 33" de plus en latitude que par Fobfervation, Par un premier calcul , fait fur ces trois obfervations, & avec la période moyenne de vingt-fept mille fept cents jours, je trouvai le pañlage par le périhélie le 12 Mars à 13° 47’, temps moyen, le périhélie à 10f 34 9°, le nœud à 7! 323 45 +, linclinaifon 174 40" 35", la diflance périhélie 0,58485. Avec ces mêmes élémens j'employaï la période de vingt-huit mille foixante-dix jours, je trouvai le demi-axe 18,07 57 59, l'excentricité 17,49001 , la diflance aphélie 35:56667, & je calculai les mèmes obfervations , tant dans l'ellipfe que dans la parabole , en voici le réfultat, par lequel je trouvois 2° & 33" de moins pour le 14% Mai dans la réduction de la parabole à l'ellip{e, LONGITUDE Dans LATITUDE| LATITUDE) LoNGIiTUDE LATITUDE Correction Correction dans l'ellipfe. |LA PARABOLE.| dans l’éllipfe: | dansla parabole. oblgrvée. 8 obfervée. à faire. SU DM S. | D. Me SN Di M D | SD. Mis l DOME | D NN .| 10. 17.24.156.| 4.26. 47. "31e 14. (LOL 18. 52e 12e|— 1.26, 5.| 428. 44.|+0.4.27. $:26, 3-37-131.31.557|30.30.41+| 65.22.36. 7.|+ 3:25.14.131.32.16.|—1.1.144 $+ 9+ 3-30./15. 3.22. {14 57.54. | 5. 7.31.$1.] 1.30.46.|15. 3.16, —0. 5.28. Eij 8 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Ayant füppofé dans les deux dernières obfervations les angles à là Comète de différentes quantités, & les faifant varier chacun féparément , je trouvai que le premier augmenté de 45" ou le fecond diminué de 36%, augmentoient l'intervalle entre les deux obfervations de oj,022 , & qu'en les dimi- nuant tous deux enfemble, lun de 45", l'autre de 36", je diminuois de 3° 23" la longitude géocentrique. pour la troi- fième obfervation; la marche ainfi connue, if devient aïfé de calculer les élémens. Le procédé que j'ai fuivi fe trouveexpofé dans le plus grand détail à la fuite de la nouvelle édition des Tables de M. Halley, que j'ai publiée en r759 à Paris, pour les Planètes & les Comètes * ; en voici feulement un extrait, Dans l’obfervation du 1. Mai, l'élongation de la Comète où la longitude obfervée & réduite à une parabole, moins la longitude du Soleil, étoit de 4f 144 +5 5" 33", & dans lob- férvation du 2: Mai, elle étoit de 3° 84 38” 18"; jai fuppofé que les angles à la Comète étoient de 37d'27" 20° & 424 43° 20", de-là j'ai conclu fucceflivement les angles de commutation ou les angles au Soleil, les diftances de {a Comète au Soleil, les latitudes & longitudes héliocentriques de à Comète réduites à l'écliptique ; le mouvement vrai de la Comète fur fon orbite, dans. l'intervalle des deux obfer- vations, le lieu du périhélie, la diflance périhélie, enfin les temps qui répondent aux deux anomalies vraies ; & j'ai trouvé dans cette fuppofition 2oj,022 pour l'intervalle entre les deux obfervations , en jours & millièmes de jours, au lieu que , füivant l'obférvation , cet intervalle de temps eft de 20j;030 ; ainfr la füppofition des deux angles à la Comète que j'ai employés dans ce calcul, donne un intervalle de temps: trop petit de huit millièmes de jour , ce qui m'oblige à faire une feconde fuppofition. J'augmente d'une minute le premier angle d'élongation 37 27. 20", fans. changer l'autre, je recommence les mêmes calculs dans cette fuppofition, & je * JI le fera d’une manière encore plus détaillée dans le x1x.° Livre de Mon Aftronomie , qui s'imprime en même temps que ce Volume des Mémoires de l'Académie. (Janvier 1764.) D Es SorEN 6 # 5 gation, 374 27’ 37° & 424 À CH 20 “ donne pour intervalle prémiér , & jé frouvé par deux éffais, pareils à ceux que j'ai indiqués ci-deflus, qu'il falloit fuppoler le fecond angle de 42% 45" 7 , Pour de cét ahgle, avec le premier de 3 De psp} longitude que celle qui a été déduite de l’obfervation , & m'a fait connoître les véritables élémens’dé le parabole que je cherchois ; tels qu’ils font rapportés cisdefus pére. 4. Je n'ai point calculé Bieetiorf, il me fufffoit de voir fur ces élémens mes autres R par moi-même qu'après avoir a de mettre entre trois ob{er- vations toute la diverfité des temps, des lieux, des inftrumens, des circonftances , je retrouvois fans aucune différence fenfible les mêmes élémens que l’on avoit conclu des obfervatious faites à Paris feulement. 40 MÉMOIRES, DE L'ACADÉMIE ROYALE MC O AE LOUP T'ON Nous n'avons donc plus rien à defirer pour la confirmation de cette belle théorie; 1 Comète, fi long-temps attendue , a paru aufli long-temps qu'on pouvoit le fouhaiter & de manière à ne faiffer plus lieu à aucun doute, même pour les élémens de fon orbite. Cette Comète eût pu nous échapper fans doute, paffer par fon périhélie dans des mois où fa diftance à la Terre eût été très- grande, elle pouvoit defcendre dans les temps , où enfeveli dans les brouillards, le ciel cefle d’exifter pour nos yeux, alors nous euffions été réduits à la feule confiance qu'infpire une connoiflance approfondie de Vordre naturel , à une pérfuafion qu'en vain peut-être nous nous ferions efforcés de faire pair dans le Public; nous euflions vu renaître les queftions dans les Colléges , les dédains parmi les ignorans, & les terreurs parmi le Peuple, le retour que nous venons d'annoncer nous affranchit de ces incertitudes ; il met une barrière éternelle entre les hypothèfes des tourbillons, dont une Phyfique naiflante s'étaya pour quelque temps, & les heureufes découvertes dont elle s'eft accrue depuis; enfin cette Comète, je ne crains pas de le dire, eft venue aflurer le iomphe de l'Aftronomie & la gloire de Fefprit humain. OBSERVATIONS D EIMISAC/ ENTER SuNM 4n COUDE, R FA Ed OuUNS DE ME) Bug don Par M. Ep le A af fe part que plufieurs Membres de cette Académie ont prife à un accident qui m'eft arrivé depuis peu ; & l'envie qu'ils m'ont paru avoir que je le décrivifle & que j'en com- muniquafle la defcription à l’Académie, ont été pour moi des motifs preffans d'exécuter ce qu'en quelque forte on exigeoit; je l'aurois dû faire quand je n’aurois pas eu d'autre raifon que celle qu'a tout Médecin, de recueillir ce qu'il peut remarquer de fingulier dans l'exercice de à profeffion. Platon a dit * qu'il feroit à fouhaiter que les Médecins euffent paflé par toutes les: maladies : ils feroient en effet plus en état de reconnoitre e reflentent les malades qui les appellent à leur fecours La bien déterminer les accidens qui peuvent furvenir dans leur maladie, & en conféquence appliquer à propos les remèdes convenables. S'il y auroit une certaine cruauté à exiger laccomplife- ment de ce fouhait, il froit du moins très avantageux que chaque Médecin décrivit lui-méme les maladies dont il peut être attaqué. Perfonne n’eft plus en état qu'eux de dire exactement ce qu'ils ont reffenti, & quelles font les parties qui ont été affetées : les connoiffances préliminaires qu'ils prennent de l'Anatomie, & par conféquent de la pofition‘des vifcères, les éclairent fur fefpèce de ceux qui font le fiége de la douleur, & ils peuvent mieux que pérfonne les bien défigner. : r . NUE! . 2 Toutes ces raifons m'ont déterminé à vaincre la répugnance que j'avois à parler d'une chofe qui m'étoit perfonnelle 3: mais comme tout doit céder à l'utilité publique , & que les moindres évènemens qui peuvent l'intérefler ne doivent Mém. 1759. Ai F * Plaro, lib, 3, de republ, 42 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE pas être négligés, j'ai cru que ce feroit une faufle délicateffe de ma part, que de ne pas me rendre à ce motif péremptoire , d'autant plus que l'accident qui m'eft arrivé dépendant dune très-petite caufe, & qui peut fe trouver tous les jours, il eft bon qu'on en foit averti, pour qu'én puifle la prévenir. Pour rendre encore ce Mémoire plus utile, j'ai cru devoir ajouter à la defcription de ce que j'ai reflénti, deux autres obfer- vations qui ne paroitront pas, à ce que je crois, moins im- portantes ; l'une pourra peut-être engager à entreprendre une opération de Chirurgie, qui feroit le feul moyen de foulager &. de fauver même le malade; l'autre pourra faire connoitre de quelle importance la faignée peut être dans des cas où elle ne fembleroit pas aufli bien indiquée qu'elie Pet réellement. PREMIÉRE OBSERVATION Sur une pofiion horizontale , caufe d'un effet fingulier, dr qui pouvoit être mortel. L2 Le mercredi 28 du mois de 17$9, métant mis, à mon ordinaire, dans mon fauteuil pour faire la méridienne après mon diner, je plaçai mes jambes horizontalement & appliquai les pieds aflez près de la plaque; il y avoit dans la cheminée un affez bon feu; je m'endormis dans cette attitude, & le fommeil dura environ une demi-heure ou trois quarts d'heure; lorfque je m'éveillai, je fis un eflort pour me remettre fur mon.féant dans le fauteuil; ce mouvement ne put s'exé- cuter fans que l'os facrum & les dernières vertèbres des lombes ne portaffent fur la traverfe du fauteuil, dont le couffin qui eft mobile, avoit été repouffé dans le fond de ce fiége ; dans l'inftant de cette preffion je reflentis une douleur des Plus violentes ; croyant qu'elle pafferoit, je reflai quelques fecondes dans la pofition horizontale où j’étois encore , n'ayant pu à caufe de la douleur me relever; la douleur continuant à être aufli vive, je fs un fecond effort en appuyant les mains fur les montans. du fauteuil, je me redreffai, mais ce ne fut pas fans occafionner FAN ODE FA SNCSINEINOC ES OmAM 42 une douleur auf violente que la première ; je me jetai alors: fur un des bras du fauteuil, non fans une augmentation de douleur qui prit encore quelqu'accroiffement , Jorfque je voulus tirer, comme je fis, le cordon d'une fonnette pour fairé venir. quelqu'uf lors de ce dernier mouvement, Je devins ffoid comme marbre depuis la tête jufqu'aux pieds; jé perdis le mouvement de toutes les parties inférieures, c’eft-à-dire depuis lé baffin: jufqu'au bout des pieds, &. je fentis une foibleffe confidérable dans les bras ; la perfonne qui étoit venue au bruit de la fonnette me trouva penché fur un des côtés du fauteuil, les bras pendans & ne pouvant remuer ; elle me fouleva en me prenant par deflous les aiffelles, je lui embraflai le cou avec peine, & dans cette attitude elle me traina jufqu'à mon lit, où je m'étendis fur le dos; mais ne pouvant lever mes jambes , on me tourna fur le ventre, comptant qu'au moyen de mes mains je pourrois me tirer fur le lit; mes mains me refufant le fervice on m'y jeta du mieux qu'on put ; étant alors étendu ou plutôt recourbé, & comme replié, je fentis le froid s’affgmenter par tout le corps d’une manière étonnante, la refpiration devint difficile, & ne s'exécutoit que par fanglots ; la foibleffe des bras devint plus grande , & des picotémens fe firent {entir jufque dans le bout des doigts , il fembloit qu'on me les piquoit avec des épingles. ; Je fus alors couvert, quoique tout kabillé, de deux cou- vertures ; lon mit dans le lit une baflinoire remplie de feu , lon me plaça aux pieds un fer à repaffer , échauffé & enve- loppé d’un linge; on m'étendit fur la poitrine uné ferviette chaude, & on m'enveloppa les mains & le vifage de {er- viettes également chaudes, on les renouveloit lorfqu'elles fe refroidifloient ; avec ces ecours la chaleur revint , & avec elle le mouvement des jambes & des bras, les fanglots diminuoient, & les picotemens des doigts cefloient ; on me propofa de prendre de l'élixir de Garus, du vin d'Alicante, ce que je refufai, craignant que ces liqueurs ne me fiffent foulever le cœur, fentant quelques mouvemens dans l'eflomac capables d'exciter le vomiffement ; j'appréhendois que cette évacuation ne Fi 44 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fe fit dans le temps du froid , il ne pouvoit qu’en être augmenté; on s'en fent ordinairement faifr, même aux approches & dans le temps des naufées ; aïinfr je dévois craindre pour moi de sien faire qui püt l'augmenter. Tant qu'il dura, le pouls refla très- petit, concentré &c prefqu'infenfible ; le vifage étoit verdâtre & défiguré ; ce froid fe failoit fentir même au travers des bas & du bonnet ; tout ceci me fut confirmé par plufieurs perfonnes qui {e trouvèrent autour de moi, & principalement par M. le Brun, garçon-apoti- caire du Palais royal ; la douleur des reins exifloit encore lorfque la chaleur fut revenue, mais elle étoit très-fupportable , & elle ne fe renouvéloit que lorfqu'on me remuoit où que je voulois faire quelque mouvement: pendant le temps que le froid dura, ma tête fut un peu embarraflée, je ne perdis cependant point connoiflance, les fonctions de l'ame étoient feulement affoiblies , je fentois le danger de mon état, je n'en étois pour- tant point effrayé de façon à occafionner le froid que la frayeur produit fouveñt ; je croyois pouvoir mourir ou refter au moins paralytique des parties inférieures , & je le difois, mais fans en être agité: je fais ces remarques, pour qu'on n'attribue pas le froid dont je fus faifi à la craime de mourir. Enfin ce froid s'étant diffipé environ une heure & demie après que j'en eus été faifi, il ne me refla qu'une foiblefle dans toute Fhabitude du corps, & la douleur très-fupportable de la région des reins; cet état a duré pendant le refte du jour ; je me levai quelques heures après la ceffation du froid , je ne marchois qu'avec quelque peine; la nuit füivante je dormis très-bien, je foupai même avant de me coucher ; je fortis le lendemain, mais je rentrai un peu fatigué, la douleur étoit diflipée le fur- lendemain ou n'étoit prefque plus fenfible, mais la foiblefle a duré plufieurs jours; le lendemain de mon accident m'étant alongé un peu fur mon fauteuil, je fentis la foiblefle augmenter très-peu, & une douleur fe manifefta intérieurement vers le fommet de la tête, elle n'eut pas de fuite. A quelle caufe attribuera -t-on ces différens accidens? je penfe qu'ils n’ont été occafionnés que par une extenfion violente Po DES SCIENCES. 45 des mufcles, des nerfs & de la moelle épinière; les mufcles qui ont été diflendus ne peuvent être que ceux du dos, des lombes & des parties inférieures ; un de ceux qui doivent l'avoir principalement été, c'eft Ze rés-long du dos, encore n’eft-ce que très-peu ; le dos portoit fur le fiége du fauteuil, & fes mufcles étoient par conféquent dans un état de relichement : il n’en étoit pas ainf du mufcle appelé Z long des lombes, du facro- lombaire, du demi-épineux & de ceux des parties inférieures ; les premiers portoient fur la traverfe de la chaife, principale ment, lorfque je voulus me relever ; ceux des cuiffes & des jambes avoient toujours été dans une extenfion violente pendant le fommeil, me trouvant machinalement obligé de les tendre fortement & de preffer même des pieds Te fond de la cheminée À pour ne pas tomber dans le feu. Cette extenfion violente des mufcles ne pouvoit fe faire fans que les nerfs qui s'y répandent, ne fuflent violemment tirés’; quoique cette extenfion düt être confidérable pendant le fom- meil, elle le fut encore beaucoup plus lorfque je voulus me relever, & füur-tout lorfque l'os /acrum & la dernière vertèbre des lombes furent comprimés par la traverfe du fiége ; alors les nerfs des lombes qui viennent de la moelle épinière, dûrent violemment s'étendre. L’Anatomie nous a appris que ces nerfs fe diftribuent dans les unes ou dans les autres des parties infé- rieures ; que celui qui s'étend dans une partie de la cuifle & dans la jambe, eft le plus gros de tous les nerfs du corps: Anatomie nous a encore appris que la huitième paire des nerfs a une communication par fes branches avec plufieurs de celles des nerfs lombaires : les diftributions de ceux-ci ne peuvent par conféquent être diftendues, fans que celles de la huitième paire ne le foient aufli. Au moyen de ces connoiffances, on peut facilement expli- - quer les différens fÿmptômes qui £ manifeftèrent pendant tout le temps que mon accident dura ; les parties inférieures reftèrent paralytiques , paree que l'action des nerfs qui s’y diflribuent, fut interrompue ; & que le fuc nerveux ne put plus y couler librement; l'eftomac reffentit des foubrefauts, parce que le rameau F ii 46 Mémoires DE L'ACADÉMIE Royale que ce vifcère reçoit de la huitième paire fut incommodé: c'eft auffi ce qui arriva à celui qui fe rend au diaphragme, ce qui fut caufe de la refpiration fanglotante, & par une femblable _cufe le mouvement du cœur ne put qu'être très - interrompu ; les fluides du cœur & des nerfs étant ainfi confidérablement dérangés dans leur cours , il ne pouvoit que s'enfuivre un froid exceflif, une pâleur confidérable & un relâchement dans les mufcles de la face qui devoit la défigurer ; comme les nerfs des bras navoient pas apparemment autant fouflert que les autres, le mouvement de ces parties n'étoit pas autant diminué & les picotemens des doigts n'exifloient que parce que le fang failoit des efforts pour {e débarrafler & continuer fon mouve- ment ; la douleur ne fut auffi violente qu'elle l'a été dans l’en- droit de la compreffion, que parce que l'os facrum & la dernière des vertèbres des Iombes furent comme diftendus & éloignés l'un de l'autre, écartement qui occafionne la diftenfion ou du moins la compreffion de la moelle épinière. En un mot, le tiraillement des nerfs étant admis pour caufe de tous ces fymptômes , il eft facile de les expliquer d'une manière très - fatisfaifante; je ne crois pas qu'on puiflé raifonnablement les regarder comme la fuite d’une indigeftion : j'ai appris qu'une perfonne éclairée en Médecine, & qui l'exerce, vouloit que c'en füt une ; les indigeftions, il eft vrai, peuvent bien occafionner un froid général ; mais je ne crois pas que ce froid puifie être aufli exceflif qu'étoit celui que j'ai reffenti; outre cela les indigeftions ne font point perdre le mouvement , n'occafionnent point de fanglots & des picotemens dans les extrémités des doigts; &, ce qui eft fans replique, c’eft que je ne m'aperçus point de rappoits, ni que Feftomac fût chargé ; les foulèvemens de cœur que j'eus ne furent pas longs, & je ne me reflentis nullement de leflomac par la fuite: il faut donc avoir recours pour l'explication de ces fymptômes à une caufe plus aétive & plus forte, & je ne crois pas qu'on puifie en trouver une plus propre à éclairer que celle que j'admets; je dirois même que le froid qu'on reffent dans certaines ivrefles, que celui dont on eft quelquefois DES SCIENCES 47 fabitement fifi en buvant des liqueurs rafraîchiffantes /4), lorfqu'on a extrêmement chaud & qu'on eft couvert de fueur (b), ne peuvent guère être, fur-tout le premier, auffi violens & aufii cuifans. Ce n'eft pas cependant que je veuille dire que le froid dont j'ai été faifi dans le cas dont il s'agit, foit le plus grand qui puiffe fe faire fentir ; je fais qu'il eft très-grand dans les deux états dont je viens de parler ; je fais de plus qu'il eft violent dans le friffon des fièvres intermittentes, dans la fièvre épiale, foit qu'il s'y faffe reflentir extérieurement, foit que ce loit intérieurement (c), & quelquefois dans les gangrènes internes, (a) Je connoïs une perfonne qui pour avoir, comme l’on dit, fabré un verre de liqueur après avoir bu largement du vin dans un diner, tomba dans une ivrefle profonde, refta très- long - temps entièrement froide & fans trop de connoiffance; elle n’en fortit qu'au moyen de l’at- téntion qu’on eut de la réchauffer. (6) Ün cas à peu pres femblable m'arriva pour avoir bu deux verres de bière dans un moment où j'avois trés-chaud & où la fueur me ruif feloïic par tout le corps : j’avois dans la plus grande chaleur d’un jour d'été, fait quatre lieues à pied; engagé maloré moi par une perfonne avec laquelle je voyagcois, à me rafraichir de quelques verres de bière ; je n’eus pas avalé le premier qué je me fentis pris d’un froid uni- verfel; le fécond verre que je re- fufois de boire, & que je bus par complaifance, l’augmenta confidé- rablement , & je perdis peu après prefqu’entièrement Ja connoiflance ; un petit verre d’eau-de-vie que mon compagnon me fit prendre environ deux heures après , dans lepréjugé où il étoit , avec bien du monde, que cette liqueur fait paffer la bière par les urines, me jeta dans une efpèce de lé- thargie, pendant laquelle j’étois froid commemarbre, & dont je ne fortis que plus de quatre ou cinq heures ap'ès, encore ne fut-ce que parce qu'on s’imagina de m'appliqer à ou fur la plante des pieds, des fers à repañler qui étoient très-chauds. (c) Une perfonne, dont je prends foin dans lesmaladies dont elle eft atta- quée, m'a fourni l’occafion d'ob- férver deux fois le fait fuivant; ce fait. doit être raré, je ne l'ai du moins trouvé rapporté que dans les Ouvrages de Fernel, quoique j'aie confulté beaucoup de ceux qui ont été écrits fur la Médecine-pratique : cette perfonne aflligée à deux re- prifes d’une fièvre continue, feplai- gnoit d’un très-grand froid dans les inteftins, & demandoit qu'on la couvrft plus qu’elle ne l’étoit, quoi- qu'elle le fût déjà beaucoup ; lui ayant touché la peau & l'ayant trouvée d’uné chaleur au - deflus même de la naturelle, je repréfentai à la malade ce que j'obfervois ; mais elle, infiftant fur le froid qu’elle ref . fentoit intérieurement , on la chargea de couvertures & de hardes plus qu'elle ne l’étoit; je lui fis niême appliquer des linges chauds fur Ja peau; au moyen de ces fecours le froid fe pafla. Ce froid eft un fymptôme de la 48 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dont je donnerai un exemple fingulier dans la troifième ob- fervation ; je veux feulement dire que je crois qu'il n'eft guère auffi violent dans ces difiérentes maladies , que dans d'accident dont il eft queltion. Au refte, je n'examinerai pas ici quelle eft la caufe qui peut occafonner le froid dans ces différentes maladies ; je fais qu'on en apporte différentes; peut-être ne feroit-il pas difficile de faire voir que l'affeétion irrégulière des nerfs eft la feule vraie ; mais un pareil examen feroit déplacé ici; je me contenterai donc pour le préfent de dire un mot fur fa cure qu'on doit fe propofer dans un cas pareil à celui que je viens de détailler. On doit avoir principalement en vue de rétablir la circula- tion qui eft interrompue; il faut à cet effet employer tout ce qui peut ranimer ; le premier objet qui fe préfente eft de ré- chaufler au moyen des linges chauds, des baflinoires remplies de feu, de fers échauflés , de boules pleines d’eau chaude ; les frictions fur l'épine du dos ne peuvent qu'être très-utiles, de même que les liqueurs, les élixirs un peu fpiritueux , pris in- térieurement ; tes faignées qui fembleroient être indiquées à caufe de l'efpèce de paralyfie qui furvient, me paroïtroient fièvre épiale; mais il ne s’obferve pas aufli communément que celui qui eft fon inverfe , c’eft-à-dire celui qui fe manifefte par un grand froid des parties externes, & par une grande chaleur des parties internes : il me paroît que dans ce dernier cas le froid n’eft occafionné que parce que la circulation eft très- gênée à lhabitude extérieure du corps, & il me femble que dans le premier il avoit pour caufe une crif- pation des nerfs ou un mouvement fpafmodique ou vaporeux , d'autant plus que lx perfonne malade étoit ‘une perfonne du fexe. Fernel attribue ce [ymptôme « non à une pituite » vitrée & acide, mais à ce que la » matière de la fièvre ife jetant fur » le cœur’, y caufe un froid qu'on x appelle horreur, & à ce qu'elle porte Ja chaleur naturelle à l'extérieur ». Cette explication étoit bonne pour le temps de Fernel ; elle pourroit peut-être s'expliquer dans les prin- cipes de cet Auteur, & fe concilier avec celle que j'ai admife, mais je ne marrêterai pas à faire cette conciliation. Je ferai feulement remarquer que dans ces trois cas, favoir l’ivrefle, Pufage des liqueurs froides & la fièvre cpiale, il n'y a pas une cef- fation réelle du mouvement de quelques parties , comme dans l'ac- cident qui m'eft arrivé ; & que fi les nerfs font aflectés , ils ne le font pas à un point capable d'interrompre le mouvement du fluide qui y cir- cule ; ce qui paroît être arrivé dans mon accident. plutôt | DES, S$ C1 E N:C E-S, plutôt funefles qu'avantageufes ; il eft vrai que le fing circule alors bien lentement: mais les faignées ne pouvant dans cette occafion qu'affoiblir encore un peu dans l'inflant qu'elles féroient faites, il me paroït qu'il y auroit à craindre un affaifièment fubit ou au moins une diminution de force, & conféquemment une augmentation de froid dont les fuites ne pourroient qu'être très-dangereufes ; ft lon vouloit employer la faignée, il me femble qu'elle ne devroit être placée Que lorfque la chaleur naturelle fe feroit rétablie ; elle ferviroit à réfoudre les embarras que le fang pourroit avoir occafionnés dans quelques parties par fon rallentiffement ; {a moelle épinière, par exemple, ayant une communication f1 intime avec le cerveau , il pourroit y avoir à craindre que le cerveau n'eût reçu une forte de com- motion , & que les vaiffeaux déliés qui y rampent ne fe gor- geaffent de fang, de façon à y former quelque dépôt ; il feroit peut-être pour cette raifon prudent de faire une faignée ou deux du bras où même du pied: je ne les ai pas fait faire & ne m'en fuis pas mal trouvé; Je laiffe à la prudence des Médecins plus éclairés que moi, à juger fi j'ai bien ou mal fait, & à fe conduire en conféquence fi jamais ils font appelés pour fecourir quelques malades attaqués d'un pareil accident, SECONDE OBSERVATION Sur une tumeur enkiflée du Joie, caufe de mort. Je fus appelé le 24 Août 1751, pour voir une jeune fille âgée d'environ huit ans, nommée Laforeff ; elle fe plaignoit de douleurs dans le ventre, & dont la violence augmentoit par intervalles, au point qu'elle en tomboit prefqu’en foibleffe; le ventre étoit gonflé & tendu , il fe déchargeoit fouvent d’une affez grande quantité de matières verdâtres & blanchâtres, qui nageoient dans une autre qui étoit féreufe & abondante ; e pouls étoit élevé, très-prompt , & ilannonçoit une fièvre violente; {a malade avoit été faignée trois fois & avoit reçu des lavemens émolliens; il paroiffoit que ces remèdes avoient apporté quelque foulagement dans le temps qu'on les avoit adminiftrés. Mém. 1759, G 59 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE M'étant informé de ce qui pouvoit avoir occafionné cetté maladie, j'appris que cet enfant portoit dès fes premières années une groffeur qui s'étendoit du côté droit, depuis en- viron a partie antérieure des faufles côtes jufqu'à la moitié ou environ de leur longueur ; on me dit encore que cette tumeur avoit difparu tout-à-coup dans une chute que l'enfant avoit faite für le pavé de la rue , pouffée par un homme qui marchoit affez vie, & qui par-l lui occafionna une chute rude & violente ; Faction sen fit principalement fentir fur la partie affectée ; dans le moment de cette chute, l'enfant avoit été attaquée de douleurs dont elle fe plaignoit encore, & le ventre étoit devenu libre prefque dans le même temps. . Ce rapport ne pouvoit me faire penfer que deux chofes au fujet de la tumeur; je ne pouvois la regarder que comme une tumeur du foie où une du colon; les fympiômes for- moient cependant quelque difficulté contre fune & fautre opinion. En plaçant la tumeur dans le foie, il étoit aflez difficile d'expliquer d'où pouvoit provenir cette grande quan- tité de matières que cet enfant rendoit par les felles : il me fembloit qu'elle ne pouvoit venir du foie dans les inteftins, à moins que ce ne füt par le canal choledoque; mais ce canal auroit-il pu donner un paflage libre à une auffi grande quantité de matières qui paroïfloient lui être étrangères? il étoit plus naturel de penfer qu'elle venoit des inteflins & qu'elle couloit de la tumeur qui s’étoit formée dans le colon ; mais ce qui m'arrétoit, c'eft qu'une pareille tumeur auroit dû rétrécir l'inteftin de façon que l'enfant, dans fon état de fanté; auroit dû fouffrir des douleurs vives & prefque continuelles , principalèment dans le temps de la digeftion ; il efk vrai qu'on m'aflura qu'elle s'en plaignoit aflez fouvent, & qu'elle étoit toujours dans un mal-aife qui augmentoit dans certains temps; que cela arrivoit principalement lorfque le ventre devenoit plus tendu & plus élevé qu'à l'ordinaire, & que l'appétit de l'enfant diminuoit ou ’augmentoit confidérablement felon les viciflitudes où elle étoit expoée: Dans ces incertitudes fur la caufe de la maladie, je penfai CR ES DUC TEUN: € 4B; Se si à calmer la violence des fymptômes : les remèdes qu'on avoit déjà adminiftrés ayant eu un heureux fuccès, je confeillai de les répéter, & de plus, je fis appliquer fur le ventre une fomen- tation de lait chaud , renfermé dans une veflie de cochon, & ordonnai une potion antifpafmodique , qu'on faifoit prendre à la malade de temps en temps & par cuillerée : ces remèdes agirent pour quelque temps heureufement ; les douleurs dimi- nuèrent, & le foir , du jour que je fus appelé , la malade étoit affez tranquille; mais la nuit fuivante les douleurs fe réveillèrent, devinrent convulfives, & la malade périt dans ces douleurs. : Curieux.de m'affurer de la caufe d’une mort fi douloureufe & fi prompte, je demandai à faire l'ouverture du cadavre; après les difficultés qu'une fauffe délicateffe fait ordinairement faire aux parens, on confentit à ce que je demandois , & on y acquiefça d'autant moins difficilement que la mère de l'enfant étoit, à ce qu'on medit, morte d'une maladie affez femblable, L'ouverture fut donc faite : j'étois accompagné d’un Chirurgien fort habile & qui avoit travaillé très-long-temps fous M. Hunauld, de cette Académie, pour lequel il préparoit les Démonftrations anatomiques qu'il failoit à fes écoliers. À la première infpeétion , lorfque le ventre fut ouvert, nous remarquames une fente longitudinale de plus de trois à quatre pouces de longueur, & placée à la partie inférieure &c convexe. du grand lobe du foie; ayant écaté les bords de cette fente, nous tirames d'une cavité qui s’étoit formée dans le foie , un kifte qui la tapifioit intérieurement, & qui toit d'une ligne ou environ d’épaifleur, & ouvert d’ane fente fem- blable à la précédente : ce kifte étoit entièrement vide; la cavité qui le renfermoit ne contenoit également aucune autre matière, ni vélicules , ni hydatides. Bien différente en cela de celle que M. Littre trouva dans un grand lobe du foie d'un malade qu'il ouvrit, celle-ci étoit remplie d’un grand nombre de véficules ovales qui contenoient une liqueur tranfparente & vifqueufe. (. l'Hifl. de l Acad, royale des Scienc. an. 17 0 dj. Notre première attention fut alors de voir ce que pouvoit, être devenue la matière que le kifle avoit renfermée ; nous G ÿ ç2 MÉMoIREs DE L'ACADÉMIE ROYALE n'en trouvames point dans la capacité du ventre qu'on put foupçonner être celle du fac ; il n’y avoit que quelques férofités qu'on rencontre toujours dans les cadavres, & qui font dûes aux parties que l'on coupe dans cette opération. Nous ouvrimes enfuite les inteflins, qui étoient diftendus, gonflés & blancs, ils contenoient de fair dilaté; ïls étoient nets de toute matière, & comme s’ils euflent été lavés ; nous ne remarquames rien d’extraordinaire dans fes autres vifcères, ils étoient tous bien conditionnés. La caufe de fa maladie étant connue, nous ne nous amufames point à ouvrir la poitrine ni la tête, nous l'aurions fait à pure perte; mais ce qui nous furprit Fun & l’autre, fut de ce que nous n'avions point trouvé dans le ventre la matière qui avoit rempli la tumeur formée dans le foie; après y avoir bien penfé, nous ne pumes que conclure qu’elle avoit été pompée par les inteflins, & rendue dans les felles abondantes que la malade avoit eues. Il eft vrai que la tumeur n'ayant que trois ou quatre pouces de diamètre en longueur , & environ autant en largeur , ce qui fait neuf ou douze potces de circonférence, ne pouvoit con- tenir la quantité de matière qui étoit fortie par les felles; mais comme cette matière en paflant par les inteftins ne pouvoit que les irriter, elle occafionna, après Îa fortie des gros excré- mens , une expreflion de la férofité que les glandes des inteftins fourniflent à ces parties : cette férofité étoit probablement celle où nageoit la matière verdâtre ou bjanchäâtre , qui me paroïffoit être celle que le kifte contenoit. ” J'admettrois d'autant plus volontiers cette explication, qu'on fait que les inteftins étant retournés & remplis d'eau , laiflent pafer à travers leurs tuniques l'eau dont on les a remplis; ce qui femble prouver que ces parties font également perméables par leur furface interne & externe, & que par conféquent les liqueurs peuvent les pénétrer, fur-tout dans une cavité exactement fermée, telle qu’eft la capacité du ventre, où les liqueurs qu'elle renferme s’échauffent à un degré qui doit leur donner une force d’extenfion , capable de pénétrer des corps plus compaétes que les inteftins. Inyens Se" 1 eNrCIESS 48 En admettant cette explication, on peut aifément rendre rain des fymptômes & des douleurs cruelles que la malade reffentit : la matière renfermée dans la tumeur en étant fortie, ne pouvoit qu'agacer les inteftins, & par-là occafionner des convulfions qui ont dû caufer les douleurs , exprimer fubitement les excrémens & enfuite les férofités abondantes que la malade a rendues, fur-tout Jorfque la matière de la tumeur eut pafié dans les imeftins. : Je winfifterai pas davantage fur cette explication; ä fera peut-être: plus utile de faire quelques remarques fur la cure qu'on pouvoit faire de la tumeur avant la chute qui en occa- fionna l'ouverture ; qu'eft-ce qu'on {e propole communément dans da cure de ces fortes de tumeurs? deux chofes, de les fondre & de les mettre par-là en état d'être repompées & enfuite évacuées par les felles ou par les voies des’ autres ex- crétions , & même par celles des fecrétions: ces vues font certainement juftes, mais elles ne peuvent avoir un fuccès heureux , que lorfque ces tumeurs font commençantes , qu'elles ne font pas parvenues à un état auf avancé que l'étoit celui de la tumeur en queftion. En effet, que peuvent faire alors les tifanes apéritives , les bols fondans , les eaux minérales, les purgatifs & la faignée ; les deux derniers remèdes ne peuvent agir que comme palliatifs, les purgatifs en vidant les inteftins & donnant par-li plus de jeu au foie ; la faignée, en diminuant a quantité du fang , fa- cilite la circulation dans les vaiffeaux du foie qui n'y peut être que très-génée par le volume de la tumeur : ces. remèdes ne peuvent être curatifs; les rifanes & les autres remèdes dont j'ai parlé ne peuvent l'être davantage ; peut-on efpérer qu'ils rendent la matière, contenue dans le kifte, affez fluide pour qu’elle puille le pénétrer ? ces fortes de kiftes ont ordinairement de la dureté & ne font pas organifés , comme les parties qui ne font point contre nature ;: & cela étant, la liqueur extravafée pourroit-elle être repompée par les vaiféaux lymphatiques du foie ou par les vaifeaux biliaires ? il n’en eft pas ici comme des obflructions du foie ; ces obftructions fe font dans les G i MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE glandes de ce vifcère ou dans les vaiffeaux biliaires ; fi dans ce cas on peut parvenir à difloudre la matière qui les ebitrue & à la rendre fluide, ces vaifieaux font prêts à la repomper, ils ont une aétion vitale; au lieu que dans la tuméur dont if s'agit, la liqueur eft extravafée , elle efb contenue dans un kifte qui n'eft point organifé & qui n'a point d'aétion vitale: l'ab- {orbition de cette matière me paroît donc, impoflible, 8. il ne refte plus de reflource que dans l'opération chirurgicale. Je penfe donc qu'il n'y a pas d'autre parti dans cette oc- cafion, que de faire faire la ponction ; cette opération ne peut s être difficile, douloureufe ni beaucoup à craindre pour les fuites; la difficulté ne pourroit venir que dela profondeur de la tumeur S& de fon péu d'apparence à l'extérieur ; mais dans le cas dont il s’agit elle avoit un volume confidérable , elle fe manifeftoit au dehors & étoit très-bien circonfcrite ; il n’étoit pas difficile de s’affurer parde taét, fi la matière étoit fluide ou dure; elle devoit céder à la preffion : circonftance qui rend cette - obfervation intéreflante, vu la difficulté qu'il y a à reconnoiître les tumeurs enkiflées du foie ; difficulté qui eft telle, qu'elle a fait dire à M. Monro le fils, dans fon Effaï fur l'Hydropifie , qu'il n'efl pas aile de recounoftre les kiffes formés dans la fubffance du foie ou de la rate : cette difficulté ne peut venir dans de pareils cas, que de celle qu'il y a à s'aflurer de la fluétuation de la matière que ces kiftes contiennent ; cette difhculté ne doit cepen- dant pas être infurmontable, malgré l'épaifleur des tégumens, Jorfque la tumeur eft aufli confidérable qu'elle l'étoit dans la malade dont il s'agit, & lorfqu’elle eft fituée, comme celle-ci, à a partie convexe de cette partie ; en preffant fortement cette tumeür on devoit fentir aflez aifément que la matière cédoit à la preffion & prenoit différentes figures ; qui font, à ce qué je penfe, les marques auxquelles on peut reconnoître les tumeurs enkiftéés , dont la matière n’eft pas encore un fféatome ou feulement un wé/ceris. IL étoit donc aifé dé favoir où il falloit porter l'inftrument ou le trois-quart; l'opération ne pouvoit pas non plus être bien douloureufe : l'on fait par des obfervations journalières LNATOS ESA SL6A EU és iM à; que la ponétion du ventre dans l'Hydropifie afcite, ne l’eft pas beaucoup, les malades la fouffrent affez tranquillement ; celle du foie ne peut guère l'être davantage; on na que les mêmes tégumens à percer, & la fubflance même du foie n'eft pas des plus fenfibles ; outre cela l'ouverture qu'on a déjà faite plus d’une fois d'abfcès fitués dans la plus grande épaifleur du foie, doit donner beaucoup d’efpérance pour la réuflite de lopération dans le cas dont il s’agit : ici la tumeur eft à 'ex- térieur de ce vifcère; elle eft très - apparente au dehors ; la matière qu'elle contient peut. plus aifément s'évacuer ; les in- jections déterfives peuvent fe faire plus commodément , & la plaie doit promptement fe conduire à cicatrice. 1 2190 Les fuites de la cure ne peuvent pas tre beaucoup à craïndre ; le régime, la diète blaache , l’ufage des tifanes déterfives & apéritives , les purgatifs répétés, les eaux minérales& l'exer- cice du cheval, font des fecours qui ne peuvent qu'être très- utiles alors, conduire à une guérifon radicale & obvier à tous les inconvéniens qu'il y auroit à craindre paï rapport à la régénération d’une pareille tumeur , ou au reflux fur une autre partie de la matière qui pourroit infecter le fang. TROISIÉME OBSERVATION.. Sur une gangrène de la rate, caufe de la ceffation prefque entière du mouvement des arieres. Le mois de Septembre de la même annééique je fis Fob- fervation précédente, j'eus occafion d'en fairé une autré, qui né nva pas paru moins intéreffante : un parent! * de l'enfant dont il a été parlé ci - deflus, fe trouvant dans-unétat dés plus trifles, me fit appeler après quelques jours de fa ma- ladie ; je le trouvai avec tout fon bon fens , répondant très- bien à. tout ce qu'on lui demandoit , & ayant fair d'une per: fonne qui n'étoit pas malade, fe’ donnant dans fon lit tous les mouvemens d'une perfonne en fanté, c'eft-ä-dire, fe mettant * Nommé #7. Chevalier, î l pars rod \ 56 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE {ur fon. féant, fe. retournant à droite & à gauche, avec facilité, enfin n'ayant, au premier coup d'œil, pour marque de maladie qu'une pâleur répandue fur le vifage. Malgré cet état, ce malade étoit à la mort ; il reffentoit un froid général, & Jorfqu'on le touchoit, ce froid étoit femblable à celui qui fe fait fentir lorfqu'on touche un corps moit; il étoit outre cela couvert d'une fueur froide & gluante, Frappé de ce trifte état, je me fis expliquer par le Chi- rurgien, le commencement de la maladie ; eile avoit com- mencé , ainfi que le Chirurgien , le malade & les affiftans me l'affurèrent, par une fièvre continue légère, & qui avoit de légers redoublemens, pendant lefquels il n’y avoit pas de mal de tête, ni d'autres douleurs, qu'une, qui étoit fourde & peu fenfible, vers la région de la rate ; les premiers affauts de la maladie s'étoient fait fentir au retour de la chaffe, où le malade avoit, été & où il alloit affez fouvent , ayant une efpèce de paffion, pour cet exercice : on me dit de plus, qu'il s'étoit fouvent plaint de gonflemens de rate, occafionnés par la promptitude avec laquelle il marchoit lorfqu'il étoit en fanté, & par les voyages qu'il étoit obligé de faire {ouvent de Paris au château de Bellevue, qu'on bâtifoit alors & où il étoit employé en qualité de Sculpteur. Il avoit été faigné deux ou trois fois, avoit pris des lave- mens purgatifs, obférvé une diète févère & fait ufage de tifane ordinaire; au moyen de ces remèdes, la fièvre s’étoit calmée. Alors le Chirurgien avoit purgé le malade avec de la cafe & de la manne ; la médecine eut l'effet attendu; mais l'après midi du jour de cette médecine, le malade tomba dans le froid que j'ai décrit ci-deflus; c'eft dans ce moment que je fus.appelé. x | Après que j'eus fait les queftions dont il eft parlé plus haut, je cherchai à m'aflurer de l'état du pouls, il me fut impofhble de le trouver aux deux poignets, ni à la jugulaire ; je ne pus même apercevoir le moindre mouvement du cœur en appliquant fa main fur fa région ; il n'y eut que l'artère tem- porale qui fe fit fentir & encore très-foiblement ; eflrayé cs a HAAT OP MISES 10 LE ENT © 1 56 1 à M là fituation mortelle où étoit le malade ; fannonçaï qu'il n'étoit pas trop poffible de l'en retirer , qu'il falloit fadminiftrer promp- tement , lui faire faire ufage d’une potion cordiale , le frotter chaudement & lemmailloter de linges chauds ; tout ceci fut exécuté ponctuellement. 14] H jriéréts Étant retourné quelques heures après chez ce malade je le trouvai dans le même état, c'eft:à-djre avec lemême bon fens, la même facilité à fe mouvoir’, auffr froid & les artèrés aufli peu fenfibles; réfléchiffant fur tout ce que je voyois , je penfai qu'il. devoit y avoir! dans quelqu'endroit \du: bas-ventre une partie qui fe gangrenoit , &-dont la gangrène n'étoit peut- être déjà que trop avancée, & que cette gangrène avoit été occafionnée par un engorgement de fang qui ne s'étoit pas réfout. Sur ces principes je penfai qu'il falloit faire au malade une faignée du bras, & lui faire prendre des infufons de quinquina ; lR propofition que je fis de la faignée iétonna le malade & les afliftans ; j'infiftai & expliquai mes raifons, on parut s'y rendre; mais je ne fus pas plutôt forti, qu'on eut recours à un ancien Médecin qui, ne pouvant pas venir, en fubflitua un jeune à fa place : ce jeune Médecin jugeant apparemment de l'état du malade comme j'en avois jugé d'abord, rejeta la faignée &c ordonma une nouvelle potion cordiale ; elle n'eut-pas plus de fuccès que la première. 2 UE Eye . Ce malade m'intéreflant d'autant plus qu'il étoit cher & utile à fa famille, je retournai le voir le foir ; il étoit toujours dans le même état : fans m'arrêter à ce qu'on n'avoit point fait la faignée, je la propofai de nouveau & les infufions de quin- quina , je fupprimai da potion cordiale; le: malade fut faigné, & il fit ufage du quinquina: le lendemain matin, je trouvai que le pouls s'étoit un peu rétabli , & qu'il fe faifoit fentir au bras, je propofai une nouvelle faignée, qui fut faite ; à midi, lé pouls étoit un peu plus fort , da chaleur étoit un peu revenue, je voulus infifter {ur a faignée; les affiftans s'y opposèrent &c me proposèrenf'une confultation , que j'acceptai très-volontiers. Le Médecin qui. fut appelé, & qui étoit un ancien Pra- Mém, 17 5 9. H 58 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ticien, voyant le fuccès que les deux faignées avoient eues, fut, ainfi que moi, de Favis qu'on en fit une troifième ; le malade la foutint très-bien & avec courage ; le lendemain matin le pouls étoit aflez bon, la tête du malade n'étoit nul- lement affectée; je voulois qu’on en revint à la faignée; l’ancien fut pour une potion cordiale : je cédai au droit de l'ancienneté ; on fe-retrouva chez le malade, vers les une ou deux heures du foir, le malade avoit une refpiration forte & génée, if refpiroit de façon que les mufcles du bas-ventre faifoient des ondulations : je fus d'avis qu'on ceflât tout remède, affurant que le maladé mourroit dans peu ; l’ancien propofa un apozème fimple; je l'aflurai que le malade n'en boiroit pas, parce qu'il feroit mort avant que l'apozème füt fait; en effet, nous ne fumes pas fortis que le malade expira. Je n'avois porté un tel pronoftic, que parce que j'avois déjà obfervé plufieurs fois que la refpiration forte & ondulante étoit, dans les maladies inflammatoires, un fymptôme mortel, & j'ai eu depuis occa- fion de confirmer cette obfervation encore plus fouvent. Le malade étant mort, je fus averti par le Chirurgien, auquel j'avois fait fentir que je frois bien aife de faire l'ou- verture du cadavre; il m’intérefloit d'autant plus de la faire, que j'avois, contre l'avis de Fancien, prétendu que le fiége de la maladie étoit dans le bas-ventre, & que la partie afledtée tendoit à la gangrène ou étoit gangrenée , au lieu qu'il préten- doit, qnoique le malade confervât toujours fa tête, que le cerveau étoit la partie afleétée, & qu'on devoit regarder cette maladie comme une fièvre maligne. Je trouvai encore quelques difficultés de la part des parens, elles ne furent pas grandes cependant, & leur confentement ayant été donné, le Chirurgien * & moi nous procédames à cette ouverture; nous la commençames à l'ordinaire par le bas-ventre; nous ne trouvames rien à l'eftomac, au foie, aux inteflins, toutes ces parties étoient belles & bien conflituces , ainfi que la veflie & les autres parties contenues dans cette L2 * C'étoit celui avec qui j'avois fait l'ouverture du corps de l'enfant, dont il a été queftion dans la feconde oblervation. DhENSMISI COR E MÜCErSOMAM 99 cavité; pour la rate elle étoit entièrement pourrie , elle tomboit par lambeaux lorfqu'on vouloit la prendre, les doigts paffoient au travers, il étoit prefqu'impoflible d'en retenir quelques Morceaux. lon QD Nous cherchames‘enfüite À nous affurer s'il n'y avoit pas dans la poitrine quelque partie ainfi gangrenée ; tout y étoit en bon état & bien conditionné, le cœur n'étoit en aucune façon endommagé ni embarraffé; nous n’y trouvames ni- concrétions ni polypes, ni dureté ; il en étoit de même par rapport au poumon ; les vifcères de la tête étoient également fains ; le cerveau étoit fans engorgement, fans inflammation , fans con- crétion & fans pourriture. La feule caufe de la mort du malade étoit donc la gangrène de la rate; cela fufffoit fans doute: mais que la gangrène de Ja rate ait prefqu'entièrement arrêté la circulation du fang, &c à un point que le mouvement ne f failoit point fentir, c'eft ce qui paroîtra peut-être affez fingulier ; ce n'eft même que cette fingu- krité qui m'a engagé à rapporter ici cette obfervation ; en effet, il eft affez extraordinaire qu'une ‘partie comme la rate ait pu occafionner un pareil embarras; il eft vrai que ce vifcère reçoit une grande quantité de fang, mais cette quantité n’eft pas telle que lorfque le fang s'y porte & qu'il ne peut yentrér, i-ne dui {oit facile de refluer dans le foie & dans les autres vifcères du bas-ventre ; il arrive mêmerque la rate fe durcit & s’oblitère prefqu'entièrement , comme je l'ai obfervé une fois dans une perfonne âgée de plus de quatre-vingts ans, & qui étoit morte d'une hydropifie de poitrine, ce cas arrive, dis-je, fans que la circulation foit interrompüé, comme elle l'étoit dans de cas dont il s’agit, mais ceteffet eft plutôt dû aux parties du fang de la rate, qui étoient gangrenées & qui pafoient dans le refte de la mafle du fang, qui ie gangrenoient lui-même & ralentiffoient ainfi fon mouvement , en agiflant fur les vaifleaux mêmes. On objeétera peut-être qu'il arrive fouvent que-d'autres vifcères fe gangrènent ainfi, fans cependant que la circulation du fang s'arrête d’une façon: fi marquée ; je répondrai à cela qu'il y a peu de vifcères qui aient des vaiffeaux aufli gros & auf abondans que l-rate, H ji 60 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & qui, étant gangrenés, puiflent fournir au fang autant de parties gâtées, & capables par conféquent d'agir auffi prompte- ment fur le fang. On objectera peut-être encore que je n'ai pas trouvé d’autres parties tombées en gangrène, comme il auroit dû arriver s’il étoit vrai qu'il eût paflé dans la mafle du fang des parties gangrénées , fournies par la rate; je répondrai en {econd lieu que la maladie a été trop prompte pour que cette gangrène fe manifeftàt; le fang pouvoit porter de ces parties capables d'agir fur le mou- vement des vaifleaux fanguins , de façon à en arrêter ou à en fufpendre l'aétion, mais pas afez abondantes pour le gangrener, & les vifcères qu'il traverfe, dans un temps fi court. Aurefte, quoiqu'il foit important de favoir que la rate gan- grenée peut occalionner un tel fymptôme, il le feroit fans doute encore beaucoup plus de connoître ce qui peut occafionner une gangrène aufli prompte ; & ce qui le feroit encore beaucoup plus, comment on peut la guérir. Il peut fans doute y avoir plufieurs caufes de gangrène de la rate; je ne chercherai pas à les détailler ici, Je rapporterai feulement ce que je penfe pouvoir Yavoir occafionnée dans ce cas-ci. Je crois trouver cette caufe dans la façon de vivre de la perfonne dont ‘il s'agit : c’étoit un homme fort & robute, d'un tempérament vif & d'un très-bon embonpoint : il marchoit toujours très-vite & beaucoup ; il aimoit , comme je l'ai dit, la chaffe à pied , il faifoit fouvent des voyages de Bellevue à Paris, ou de Paris à Bellevue, & les faifoit très- promptement, Un pareil exercice ne pouvoit qu'agiter confi- dérabl:ment de fang &. le raréfier ; &. comme la rate eft un vifcère qui na pas une action bien vive, le fang devoit y flagner facilement, s'y dénaturer par fon féjour , s'y gâter & tendre par-là à la gangrène. Il eft d'expérience que le fang qui eft dans un état de flagnation , fur - tout dans une partie interne & échauffée , s'y pâte promptement & s'y dénature ; par conféquent il n’a pas fallu beaucoup de temps au fang ralenti dans la rate, pour pañler à cet état & y occafionner tout le ravage que jai rapporté. DES SCIENCES. . 61 - Cette ætiologie établie , il eft facile d’en déduire l'explication des fymptômes ; la douleur a été peu confidérable , parce que la rate étant peu fenfible d’elle - même, elle n’a pas dû faire reffentir de grandes douleurs; en outre les parties gangrenées perdent tout le fentiment ; la fièvre n'a pas dû être bien con- fidérable, ce fymptôme tombant même lorfqu'une partie en- flammée qui en occafionnoit une violente, tourne tout-à-coup à la gangrène ; il n’eft donc pas étonnant que la fièvre foit , dans la maladie dont il eft queftion, tombée après deux ou trois faignées; & quoiqu'on ne puiffe pas dire que le purgatif que le malade a pris ait augmenté la gangrène, on peut cependant penfer qu'il fa un peu accélérée ; l'abbatternent des forces que tout purgatif occafionne ordinairement , du moins pour quelque temps, ne pouvoit que ralentir encore la circulation , & par .contre-coup rendre la gangrène beaucoup plus prompte. Qu'y avoit-il donc de plus efficace à faire? je crois qu’on ne peut douter que ce ne füt des faignées répétées coup fur coup dans le commencement de la maladie; ce remède étoit le feul qui pouvoit être d’une efficacité plus prochaine; c'eft ce qui m'engagea à les propofer, dans la penfée où j'étois que le froid & le ralentiflement de la circulation n’étoient occafionnés que par la gangrène de quelque partie ; je penfois , il eft vrai, qu'il étoit bien tard pour efpérer beaucoup, mais dans de pareils cas if faut toujours agir plutôt que de refter oifif ; les reffources de la Nature font fi grandes , que fouvent pour peu qu'on l'aide, elle fait fe dégager des embarras qu'elle trouve dans fes opéra- tions : l’heureux fuccès du peu de faignées que je fis faire, me confirme dans cette penfée ; fi j’ordonnai du quinquina , c'eft que dans des cas fi défefpérés il faut tout mettre en œuvre, fur-tout les remèdes qui paflent pour être auffi utiles que le quinquina a coutume de l'être dans ces fortes de maladies ; ce n'eft pas cependant que j'y eufle autant de confiance que dans la faignée: ce remède promptement employé me paroît le feul qui puiffe guérir dans ce cas , comme dans toutes les maladies inflammatoires : on aura beau prôner les antifeptiques, les purgatifs , les relâächans , les délayans, je ne les reparde que il] 6> MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYaALr comme des remèdes auxiliaires de la faignée : ces remèdes ne peuvent agir que lentement , au lieu que la faignée dégorge promptement & efficacement ; il eft vrai qu'il faut la placer plutôt dans le commencement des maladies , que lorfque la maladie a fait du progrès; mais fr cette maladie eft de nature à faire gangrener les parties, ces parties le feront avant que les remèdes, pris intérieurement, aient eu le temps d'agir , comme il eft arrivé dans la maladie due je viens de décrire. D E15:1 S'QALE UN cons 63 MÉMOIRE SUR | L'OBSERV AT. JON DES LONGITUDES EN MER, PAR LE MOYEN DE LA LUNE, Par M. l'Abbé DE LA CAILLE. D:: le deflèin que jai de publier tout ce que mes expériences & mes réflexiofis m'ont fourni de con- noiflances , fur la détermination des Longitudes en mer, par les obfervations de la Lune, objet qui mérite toute l'attention de l’Académie, j'ai cru ‘en devoir compofer deux difcours. Dans lun, qui m'a paru propre à être inféré dans les Mémoires de l'Académie, fi on l'en juge digne, j’expofe aux Aftronomes ce que la Théorie m'a pu fournir à cet égard de plus exact & de plus expéditif. J'y difcute ce qui a été propofé jufqu'ici fur ce fujet, & je démontre les conftructions des Problèmes, fur lefquels je fonde les pratiques de la Méthode que je crois devoir recom- mander aux Navigateurs , préférablement à toutes les autres. Le fecond difcours, dreffé en fgrme d’'Inftruétion , eft un ouvrage à part, dans lequel j'expofe en détail ce que dans différentes circonftances, un Marin , que je fuppole peu inftruit dans la Théorie, doit faire pour réuffir dans la recherche de fa longitude *. J'ai penfé que cette Inftruétion devoit étretouteen +72, Expofr. explications de pratiques, fans aucun mélange de difcuffion , ni 4C/eul aftron, de raïfonnement mathématique ; mais que je pourrois renvoyer ? “77 le Lecteur, curieux de la Théorie, à mon premier Mémoire, PREMIÈRE. PARTIE Qui contient différentes Remarques générales fur l'obfer- vation des Longitudes en mer, par le moyen de la Lune. I y a déjà long-temps que lon eft convaincu que F'Aftro- nomie ne pouvoit offrir aux Navigateurs d'autres moyens de 64 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE déterminer eur longitude, qu’en y employant des obfervations de la Lune, comparées aux calculs de fes mouvemens. Voici l'idée générale de cette Méthode. Le mouvement propre de la Lune, pendant les vingt-quatre heures d’un jour moyen, eft un arc de grand cercle de 134 10° 35", en pre- nant un milieu entre fa plus grande & fa plus petite quantité, Par le calcul des Tables de la: Lune, on peut déterminer les deux points du ciel où aboutifient les extrémités de Farc que la Lune doit décrire, depuis un inflant de midi, compté fous le Méridien pour lequel les Tables ont été conftruites, jufqu'au midi du jour fuyant, un Navigateur peut obferver en quel point de cet arc la Lune eft placée , à un inflant compté fous le Méridien inconnu, où il fe trouve actuelle- ment. Il peut donc favoir, en comparant fon obfervation au calcul, quelle portion de l'arc de fon mouvement diurne {a Lune a parcourue à cet inflant. Aïnfi, en fuppofant les mou- vemens de la Lune uniformes, cet arc entier eft à la portion mefürée par le Navigateur, comme vingt-quatre heures, font au temps vrai que l'on comptoit fous le Méridien des Tables, à l'inflant où le Navigateur obfervoit la Lune; ce temps vrai comparé avec celui que le Navigateur comptoit à cet inflant, donne la différence entre fon Méridien, & celuipour lequel les Tables ont été conftruites. L'arc du mouvement diurne de fa Lune, qui eft renfermé entre les limites de 11 &:.de 15 degrés, répond donc aux 360 degrés de longitude ; d'où lon voit que la petitefle de cet arc eft caufe que les moindres erreurs commifes dans les ebfervations de la Lune, faites par le Navigateur, & dans les calculs des Tables, doivent produire des erreurs environ vingt-huit fois plus grandes dans fa détermination des Lonpgi- tudes; de forte que la feule méthode que l’Aftronomie puifle fournir , feroit une foible reflource pour les Marins, fi on ne leur indiquoit des moyens fürs de mettre une précifion fufifante dans leurs obfervations, & fi on ne leur donnoit des calculs, ou des Tables de la Lune, qui foient de la dernière exactitude. Avant que de mettre cette méthode en pratique, il falloit donc DIE, SH SLCQU ER NC ES: 65 donc que les Aftronomes fuffent affurés d’avoir de bonnes Tables des mouvemens de la Lune; mais d'un côté celles qui ont été publiées fur des hypothèfes purement géométriques , & indépendantes du fyftème de la gravitation univerfelle, font fi peu d'accord entr'elles & avec le ciel, qu'elles font abfo- lument infuffifantes pour fervir à une recherche auffi délicate ue celles des Longitudes : d’un autre. côté les premiers eflais de l'application de ce ce fyflème aux mouvemens de la Lune, avoient fait fentir de fi grandes difficultés à en conftruire des Tables uniquement fondées fur ce principe, qui paroît être le {ul fur lequel on puifle établir des Théories exaéles , qu'il n'y avoit guère d'apparence qu'on y pût réuflir de long-temps. Dans cet embarras, M: Halley, le plus inftruit des Aftro- nomes de fon temps, & aufli zélé pour l'avantage. de la Navigation, que pour la gloire de fa Nation , avoit pris un parti, qu'on peut bien regarder comme la dérnière reflource d’une caufe prefque défefpérée. Sachant donc que l'on ne pour- roit jamais déterminer les Longitudes fur mer, fi l’on m'avoit avant tout des calculs fürs des mouvemens de la Lune, & fentant la difficulté prefque infurmontable de les avoir par une méthode direéte , il crut devoir y fuppléer en introduifant Tufage de certaines Equations empiriques , déterminées par les différences entre les vrais lieux de la Lune, obfervés à terre avec tout fe foin poñlible, & les lieux calculés fur les meil- leures Tables. Ces différences, ou erreurs des Tables, devoient être périodiques, & revenir fenfiblement dans le même ordre & de la même quantité au bout de dix-huit ans dix ou onze jours; cette période mife autrefois en ufage par les Chaldéens , pour prédire le retour des éclipfes,a été appelée Saros. Cette idée de M. Halley ( à l'exécution de laquelle il a travaillé fans. relâche pendant les vingt dernières années de fa vie eft aflez connue des Aftronomes : elle étoit excellente dans lhypothèfe de M. Halley ; mais aujourd'hui que R Théorie de la Lune eft un problème réfolu, l'ufaige du faros eft devenu auffi inutile qu'incommode, dans la recherche des Longitudes, Men. 1759: I 66 MÉMOIRES DÉ L'ACADÉMIE ROYALE principalement à caufe des inconvéniens auxquels cette méthode eft fujette. +. | 1.” La période fur laquelle eft fondé le retour des mêmes équations empiriques, ne rétablit pas afféz exactement les élémens du calcul de fa Eune’, car fans parler du mouvement de l'apogée du Soleil, a révolution annuelle de cet Aftre exigeroit que le faros fût de dix-huit ans & un demi-jour; le mouvement de a Lune en longitude, qu'il fût de dix-huit ans dix jours +; celui de fon apogée, qu'il füt de dix-fept ans & deux cents cinquante-Quatre jours ; celui de fon nœud, u'il fût de dix-huit ans & deux cents vingt-quatre jours. Par ce défaut d'accord, la combinaifon des erreurs particulières qui répondent à chacun de ces élémens, varie à chaque retour , & par, non-fulement elle eblige l'Aftronome à recom- mencer fans cefle fes périodes d'obfervations, & fes regiftres d'équations émpiriques ; mais il eft encore évident, qu'elle ne peut donner des corrections fort préciles. 2.9 ‘Cette méthode d'employer les calculs de la Lune, reclifiés par ces équations, fuppofe un trop grand nombre d'opérations faites fans erreurs ; (on a vu que dans fa re- cherche des Longitudes , la moindre erreur d'obfervation ou de calcul, eft d'une extrème conféquence ) car pour chaque pofition rectifiée de la Lune, il faut une obfervation corref- pondante faite fans erreur dans la période précédente, il faut un calcul'exaét de toutes les réduétions de cette obférvation, il faut un calcul du lieu de a Lune felon les Tables aftrono- miques, pour en‘avoir l'erreur par la comparaifon de l’obfer- vation au calcul ; il faut enfm un calcul de la pofition de Ja Lune dont on a befoin pour la reétifier (à peu près) par Y'érréur trouvée précédemment. Or quoiqu'il ne foit pas fort difficilé de rectifier de cette manière le calcul d'une éclipfe de Soleil ou de Lune, ce feroit un travail immenfe ( quand même il feroit toujours poffible } que de l'entrepréndre pour faire des Tablés des vrais lieux de la Lune ainf corrigés ou rectifiés, pour tous les jours de l'année, comme il eft nécéffaire den avoir pour la recherche des Longitudes fur mer. ATOD HIS SO /NIEIN CmSMÈIM EX 3. Cette méthode afferviroit les Aftronomes à faire tou- jours ufage de l'unique forte de Tables, à laquelle l'Obfervateur de la période auroit comparé fes obfervations; ces Tables peuvent n'être pas dreffées d'une manière aflez füre ni affez commode pour le calcul, & elles deviendront fûrement d'autant plus imauvaifes que l'Aflronomie fe parfectionnera dâvantage. … 4.° Ils'en faut de beaucoup que dans nos climats ün même Obfervateur puiffe déterminer les lieux de la Lune affez fouvent, pour avoir une quantité {ufffante, de corrections empiriques pendant une période 4 puifqu'il arrive fort communément qu'il fe. pale des femaines entières fans qu'on puifle voir la Lune dans le Méridien;"ainfr, quand même il n'yauroït pas d'autre moyen d'avoir des calculs exacts de la Lune, que de les rec- tifier par cette méthode, il eft évident que le faros ne pourroit être fufffamment rempli que dans un pays où Je Ciel eft auf chair que dans celui des Chaldéens ; mais que dans ce pays-ci on peut le comparer au tonneau des Danaïdes, qu'on préten- droit remplir en y verfant de temps en temps un peu d'eau. Aujourd'hui donc, que grâces aux recherches profondes des Géomètres, & fur-tout aux travaux infatigables de M. Clairaut , nous fommes affurés de tenir la vraie loi des mou- vémens de la Lune, & qu'il ne tient prefque plus à rien que nous n'en ayons d'excellentes Tables; tout cet appareil de périodes ou de /uros eft devenu un échafaudase inutile, & nous pouvons avancer hardiment que les calculs de fa Lune ne forment plus d’obftacle à la détermination des Longitudes fur mer. : Dans cette confiance, nous pouvons nous occuper dès-à- préfent à chercher les moyens.les plus fimples de faire ufage de ces calculs, & tâcher de mettre la pratique des Longitudes à la portée des Navigateurs ordinaires; c'efl le but que je me propole ici, pour contribuer en quelque chofe au bien général qui en doit réfulter; la connoiffance que j'ai de ce qui peut s'exécuter en Mer, & celle de quelques reffources de calcul, donneront peut-être une forte de mérite à ce travail Ii 68 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE REMARQUES fur la précifion des mefures ab[olues des arcs ® célefles, faites en mer avec le quartier de réflexion. Pour réuffir dans la détermination des Longitudes , il ne fuffit pas, comme je l'ai fait voir au commencement de ce difcours, d'avoir des calculs exacts des. mouvemens de Îa Lune, il faut encore qu'un Navigateur puiffe mefurer avec une grande précifion les arcs qu'elle parcourt dans le Ciel, & Von peut dire que c’eft-là la plus grande difficulté. Pendant plus de huit mois que j'ai refté en mer, dans les années 1750, 1751, 1753 & 1754, jai fait un très- grand nombre d'expériences avec plufieurs inftrumens de dif- férentes conftructions, faits les uns en France, & les autres en Angleterre, pour m'aflurer de la précifion fur laquelle on pouvoit compter dans la mefure abfolue d'un arc célefte, & jen ai réduit le rélultat à cette propofition: Par une [eule obfervation faire avec tout le Join poffible, à l'aide d'un bon quartier de reflexion de 20 pouces de rayon , on ne peut répondre de la quantité abfolue d'un arc celefle, qu'à 4 minutes près *, En effet, fi on examine fans préugé toutes les circonf- tances qui entrent néceffairement dans les oblervations faites en mer, on en conclura aifément que cette propofition n'a rien d'étonnant. Je fuppofe un quartier de réflexion de 20 pouces de rayon (ils n'en ont ordinairement que 16 à 18); on fait qu'à caufe de la réflexion des miroirs, les divifions de cet inftru- ment ne font proprement que celles d’un cercle de 10 pouces de rayon: or dans un tel cercle, arc d'une minute répond à - de ligne, quantité à peine fenfible à la vue fimple, & qui par conféquent peut fe trouver én excès ou en défaut dans plufieurs des divifions du meilleur inftrument lorfqu'elles font marquées , non par des points, mais par des traits qui, peur être vifbles fur un inftrument de mer, ne peuvent être d’une * Cette propolition doit être beaucoup reftreinte ; fr Ja Chaire marine de M. Irwin a lieu, on pourra alors compter fur environ 2 minutes. D BIS SIG EN 6 6 & 69 . fineffe extrême; ainfi r.° on peut être trompé d'une minute, par l'erreur de quelqu'une des divifions de l'inftrument. 2.7 En eftimant la coïncidence du trait de F'alidade qui fert d'index, avec le trait qui marque une divifion de l'inftrument, on ne peut pas répondre de ne fe point tromper de 5% de ligne qui vaut une demi-minute ; on doit donc fe méfier d’une demi-minute d'erreur dans une pareille eftime, foit én vérifiant le parallélifme & la difpofition refpective des miroirs, foit en comptant fur le limbe de f'inftrument, à l'aide de 1a divifion de romnius , les degrés & minutes d’un arc mefuré. 3° En f fervant d’une funette qui ne peut agrandir plus - de trois fois les diamètres des objets, fans être trop incom- mode ; un arc d’une minute paroît fi petit dans le ciel, & le mouvement continuel du Vaifleau, triplé par l'effet de la lunette, permet fr peu de donner toute l'attention néceffaire , + qu'il n'eft pas poflible de s’affurer d’avoir évité l'erreur d’une minute dans 4 concours des deux images qu'on réunit, foit en vérifiant le parallélifme des miroirs, foit en mefürant l'arc célefte dont on a befoin. ÿ Voilà donc cinq fources d'erreurs , dont la fomme eft de 4 minutes, dont il eft impofhble que le plus habile obfervateur fe flaite de s'être garanti, s'il ne veut fe faire illufion à lui- même, ou aux autres : or c'efl un principe incontefhible qu'on ne doit fe conduire en mer, d'après le réfultat d'une opération, ue lorfqu'on a apprécié toutes les erreurs commiffbles, pour {e défier de la fomme de leurs effets ; on ne doit ainfi compter que fur 4 minutes de précifion, dans la mefure abfolue d’un. arc célefte. ; | L'ufage des loupes , pour agrandir les intervalles apparens- des divifions du limbe d’un inftrument, qui eft fi propre fur terre à diminuer les erreurs dans les eftimes, eft dangereux fur mer, par la conftruction aétuelle des quartiers de réflexions; car comme l'étendue de la divifion de romius ne permet pas de fixer une loupe fur l'alidade, laquelle n'eft arrêtée für le limbe de l'inftrument que par un léger frottement ; il'eft à craindre que par le mouvement du Vaifleau , la loupe ne Hi 70 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaALe choque & ne dérange l'alidade, à moins qu'elle ne foit fixée par une vis cle rappel, exempte de tout jeu d'engrénage, & même dans ce cas, une loupe ne pourroit fervir qu’à diminuer un_peu l'incertitude des deux eftimes de la correfpondance de l'index de l'alidade , avec les divifions du limbe incertitude que nous avons fuppofée de = de ligne à la vue fimple, & qu'on ne peut taxer d'exagération. Apiès tout , dire qu'un obfervateur peut fe tromper de 4 minutes dans chacune des mefures abfolues des arcs qu'il fait fur mer, à l'aide d'un ofant, efl-ce dire autre chofe, finon qu'il peut y avoir £ de ligne d'erreur dans le réfultat de quatre opérations différentes, faites fur un plancher irrégulièrement mobile , avec un inflrument divifé par un ouvrier, qui ne peut être qu'un homme; réfultat qui dépend de la réunion de toutes ces quatre opérations, & non d'un milieu pris entre chacune? Si ceux qui promettent une fr grande précifion dans Îes méthodes qu'ils propofent , avoient fait de longues routes fur mer, & examiné ce qui fe pañle dans l’obfervation da plus facile de toutes, & à laquelle les marins font le plus exercés, je veux dire, celle de là hauteur méridienne du Soleil ; ils auroient remarqué fouvent, que deux bons obfervateurs, munis d'exceliens quartiers de réflexion .bien re@ifiés , différent entr'eux de 5, 6 ou 7 minutes, lorfqu'ils obfervent éhacun à part, & que dans le cours des hauteurs qu'ils prennent aux environs de midi, pour avoir la plus grande, ils ne fe communiquent pas à chaque äinftant , celle que leur inftrument leur indique ; car quand ilsle font, comme c'eft l'ordinaire, les obfervateurs qui diffèrent entr'eux , font difpolés à croire qu'en effet:ils pèchent un peu, l'un par excès, autre par défaut ; de forte qu'ils fe rapprochent , & comme une minute ou deux {ont à peine fenfibles fur leurs quartiers, lorfque midi eft paffé, ils femblent s'accorder parfaitement fur la plus grande hauteur, ou ne différer entreux que d'une ou deux minutes. On ne peut donc difconvenir, que dans les plus beaux temps, dans les plus belles mers , la hauteur méridienne du Soleil déter- iminée par: un feul obfenvateur , avec un excellent inftrument, M | DÉS SCT ENCE S 71 n'eft jamais füre qu'à 3 minutes ou environ: elle nee feroit qu'à 4 ou $ minutes près , fi elle ne réfultoit que d'une feule hauteur prife dans un inftant, & fans y regarder à plufieurs fois, comme on a le temps de le faire à midi. Je fais bien.que de ce qu'il eft poffible qu'un obfervateur habile fe trompe dans quelque détermination , il ne s'enfuit pas qu'il fe trompe néceflairement ; je fais encore que parmi les combinaifons poffibles des cinq fources d'erreurs que j'ai détaillées, il y en a un très-grand nombre , où leur effet fe réduit prefque à rien, par leur compenfition : je fais enfin qu'il y aun moyen affez für de détruire une partie de l'effet des erreurs commiffibles dans les obfervations , favoir, en les recommen- çant à plufieurs reprifes, & en prenant un milieu entre leurs différens réfultats. J'avoue que par ces trois raifons , un obfer- vateur doit toujours fe faflurer, & être moins inquiet fur La certitude de fes opérations ; auffi ninfifté-jé fur le peu de précifion des obfervations faites en mer, que pour reftreindre le trop de confiance que nous fommes naturellement portés de donner aux meéfures que nous avons prifes, & pour faire entendre combien on doit fe défier de ceux qui prétendent faire des obfervations fi exactes, avec l’inftrument dont ils fe fervent. Je fuis même tellement convaincu, par le grand nombre d'effais que jen ai faits en mer, de Futilité réelle des obfervations des Longitudes par la Lune, dans les voyages de long cours, que je crois qu'on ne fauroit trop engager les Navigateurs à S'y appliquer , ni employer trop de moyens pour leur en faciliter l'ufage. Ceux qui vont aux Indes orientales favent auffi très-bien, qu'il leur feroit fouvent d’une extrême importance, de connoître leur Longitude à quarante lieues près, quelque groffière que cette détermination paroifle. REMARQUES fur le choix des Mérhodes propres à déterminer les Longitudes fur mer. Les erreurs dont les obfervations faites en mer font fuf- ceptibles, jointes au peu de viteffe de la Lune dans fes 72 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE mouveinens , doivent nous conduire naturellement à ces réflexions. 1° Qu'on ne peut être trop fcrupuleux, foit en faifant des obfervations, foit en les appliquant au calcul de la Longitude. 2.° Qu'on ne peut être trop attentif fur le choix d'une méthode, par laquelle {es erreurs commiffibles dans les obfervations:, influent le moins qu'il eft poffible fur la déter- mination de la Longitude : c'efl fur quoi nous devons infifter dans ce Mémoire, La bonté d’une méthode de pratique, fondée d’ailleurs fur une théorie exacte, ne dépend pas du plus petit nombre d'opérations qu'elle exige, mais principalement du plus petit nombre d’oblervations qui aient befoin d’une grande précifion ; ainfi tous les ares mefurés dans le ciel avec le même inftru- ment, étant fuppolés fufceptibles chacun d’une erreur égale, come de 4 minutes, la meilleure de toutes les méthodes, & par conféquent celle qu'on doit adopter par préférence, eft celle qui n'exige eflentiellement qu'une feule obfervation de cette efpèce. Telle et celle que je me propole d'expliquer dans ce Mémoire. On peut décider encore, par un principe qui eft particulier à la recherche des Longitudes, quelle eft là meilleure méthode qu'on y puifle employer ; Car, puifque la détermination de la Longitude dépend uniquement de la comparaifon d’une portion de Farc du mouvement diurne de la Lune, mefurée par le Navigateur, avec cet aïc entier, déterminé par le calcul, il eft évident que la plus fimple de toutes les méthodes eft celle où l'on mefure immédiatement cette portion d'arc ( c’eft auffi celle dont il s'agit ici); & que toutes les autres méthodes qu'on pourroit imaginer , qui ne feroient connoître cette portion d'arc que par le calcul de plufieurs obfervations, fujettes chacune à des erreurs aufli grandes que celle à laquelle la mefure im- médiate de cette portion peut être fujette ; toutes ces méthodes, dis-je, doivent être cenfées indirectes, défectueufes & par conféquent rejetées, quelque faciles qu'elles paroïffent dans la praique, REMARQUES D'E's ISICrE N'CE's. 73 REMARQUES fur les principaux Écrits modernes, où l'on parle des Longüudes obfervables en mer, par le moyen de la Lune. Parmi ceux qui ont écrit depuis quelques années fur lob- fervation des Longitudes en mer, par le moyen des diflances de la Lune au Soleil ou à quelqu'étoile , les uns l'ont furchargée de circonftances inutiles, les autres lui ont attribué une facilité & une précifion, dont elle eft fort éloignée d’être fufceptible; on en doit attribuer la principale caufe à leur peu d'expérience fur ce qui eft praticable en mer. Les premiers ont dit qu'il falloit obferver Ia diflance de la Lune à deux étoiles différentes, dont la pofition dans le ciel fût bien établie par les Aflronomes, afin d'avoir un triangle fphérique, dont le calcul fervit à déterminer la longitude & la latitude de la Lune, qu'on compareroit enfuite à celles qu’on auroit calculées fur les meilleures Tables. Cette méthode, fort bonne dans la fpéculation , eft comme impoffible dans la pra- tique, tant par la grande difficulté d'oblérver fur mer, dans l'efpace de quelques minutes de temps, la diflance de la Lune à deux étoiles différentes, que par la longueur énorme & par la complication des calculs, que l'Obfervateur feroit obligé de faire avant que de conclure fa longitude ; calculs d'ailleurs qui exigeroient une connoiflance approfondie de la T'rigonométrie _fphérique ; cette méthode , fans être plus exacte que celle que je me propofe d'expliquer, eft donc capable de rebuter le Navigateur, & de lui faire perdre le fruit de fon obfervation , dont il ne pourroit avoir le réfultat que fort long-temps après qu'elle auroit été faite; & il ne pourroit en être affuré qu'au- tant qu’il le feroit, qu'il n'auroit fait aucune erreur de calcul, aflurance qu'on ne peut acquérir qu'après avoir refait tout ce calcul. Un autre s'exprime ainft : Quand on obferve en mer la diflance de la Lune au Soleil où aux Etoiles fixes , fi l'on fe Jert du #ouveau quartier de réflexion , on ne s'aperçoit plus du mouvement Mn. 1759. MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE du Vaiffeau, à" par conféquent on peut déterminer mieux qu'à sne minute près, par diverfes opérations réitérees , le vrai lieu de la Lune, On it encore dans un autre: que Æ contact des difques de deux afhres , eff par la nature du quartier de réflexion indépendant du mouvement du Vaiffleau ; ce qui me paroît pré- fenter cette idée, que lorfqu’on eft parvenu (en réuniffant les images des deux aftres dans le champ de la lunette } à dif pofer l'alidade de forte qu'elle marque fur le limbe farc de leur diftance, ces images paroïflent déformais adhérentes , non- obflant le mouvement du Vaifleau, pourvu que ce mouve- ment ne les faffe pas fortir du champ de la lunette: fi ce n'eft pas là ce que ces Auteurs ont entendu, j'avoue que je ne comprends rien dans ces expreflions ; mais fi j'ai bien expofé leur penfée, rien n’eft moins exaét, puifque la réunion des images ne peut fubfifter , dès que le plan de linftrument cefle de paflèr par l'œil & par les deux aftres dont on obferve la diflance; or il eft certain que le mouvement continuel du Vaifléau ne permet pas à l'Obfervateur , quelqu'exercé qu'il fit, de maintenir le plan de fon inftrument dans une même polition pendant deux ou trois fecondes de temps; de forte qu'on ne peut réellement faifir qu’au vol la réunion des images des objets dont on obferve la diftance, & qu'on ne saflure qu'elle eft fenfiblement exacte que lorfque par l'effet du mou- vement ofcillatoire du Vaifleau , ou par celui d'un balancement procuré à finftrument par lOblervateur, les deux images viennent à fe toucher en pañlant l’une auprès de l'autre, Ce qui a pu faire illufion à ces Auteurs, c’eft que lorfque lon prend la hauteur méridienne du Soleil , le bord de fon image paroîit toujours toucher le bord de l'horizon de Ja mer, tant que le plan de Finfirument n’eft pas fort éloigné de la fituation verticale; il femble donc que cette réunion eft indé- pendante du mouvement du Vaifleau, mais il eft facile de s'en défabufer , en faifant attention qu’à mefure que l'inftrument participe du mouvement du Vaifleau, le point de contact du Soleil & de l'horizon change, & que leur réunion ne paroît conflante , que parce que les diflances du Soleil aux différens DES SCIENCES. oints de l’horizon, qui font voifins de fon vertical, font d'autant plus fenfiblement égales entr'elles , que le Soleil eft plus élevé; cet accord feroit bien moins apparent, fi l'inftrument pouvoit faire diftinguer une différence d’une minute dans ces diftances. REMARQUES fur la Méthode pour laquelle l État du Ciel de M. Pingré avoit été principalement calculé. Pour engager les Navigateurs à obferver en mer les Lon- gitudes par le moyen de la Lune, M. Pingré, l'un de nos ‘ Académiciens, s’eft donné la peine pendant quatre années de fuite, de publiér une efpèce de Calendrier marin, intitulé V'État du Ciel, qui contient des calculs très-détaillés , & faits avec tout le foin poflible, des mouvemens du Soleil & de la Lune; fon zèle en cela étoit d'autant plus louable, qu'il m'étoit intéreflé que par l'envie de faire le bien de la Navi- gation ; mais la méthode principale pour laquelle il a dreffé fes Tables de calculs dans les trois dernières années, n'étoit que fpécieufe dans la théorie; il eût été très-dangereux qu'un Na- vigateur y eût mis quelque confiance: comme quelques per- fonnes mieux intentionnées qu'éclairées pourroient fouhaiter qu'on reprit ce travail, je me crois obligé d'entrer âci dans quelque détail , pour prouver ce que je viens d'avancer. Voici en quoi confiftoit cette méthode : Il falloit obferver Ja hauteur méridienne de la Lune, en marquant à une monte le temps de cette obfervation ; par la hauteur du pôle, fup- pofée connue, on en concluoit la déclinaifon de la Lune; deux , trois ou quatre heures avant ou après le paffage de la Lune au méridien, il én falloit obferver une hauteur, en mar- quant à la mêmé montré lé moment de lobférvation ; par l'intervalle des temps marqués à la montre, & par les mou- vérnéns de la Luné én déclinaifon, tirés des calculs de M. Pingré , on avoit la déclinaifon de la Lune au moment de la hauteur prife hors du méridien ; au défaut de l’obfervation de la hauteur méridienne, on pouvoit tirer direétement ceîte décli- maifon des calculs de FÆjar du Ciel ( & c'étoit fe meilleur K à 76 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE parti dans tous les cas) ; alors on avoit les trois côtés d'un triangle fphérique , formé par le pôle , le zenit de l'Obfervateur & la Lune; en calculant l'angle au pôle, on avoit la diflance de la Lune au méridien du Navigateur, pour le moment où la hauteur de la Lune avoit été prife ( ce moment devoit étre connu d’ailleurs en temps vrai, par des obfervations par- ticulières faites exprès, & à peu près felon les méthodes que nous donnerons dans la fuite JE enfin, en comparant cette diflance au méridien, ou cet angle horaire de la Lune avec celui que les calculs de V Era du Ciel indiquoient pour le mé- ridien de Paris, au même inflant de temps vrai que celui de Tobfervation *, on trouvoit la différence des méridiens ou la longitude cherchée. Cette méthode paroît extrèmement fimple dans la théorie & encore plus dans la pratique, puifqu’il femble que les ob- fervations efféntielles fe réduifent à prendre une ou tout au plus deux hauteurs de la Lune; mais pour peu qu’on l'examine, on verra facilement que la détermination de l'angle horaire de la Lune dépend de trop de quantités fujettes à erreurs, dont l'influence eft elle-même très-variable , puifqu'elle dépend des circonflances où fe trouve la Lune à l'égard de l'équateur & du méridien, & de celles où fe trouve l'Obfervateur fur la furface de la Terre. En effet, dans le triangle qui donne Fangle horaire de {a Lune, l'un des côtés, qui eft la diftance de la Lune au pôle, dépend de deux obfervations, fi on ne veut pas l'avoir par * Au lieu demettre dans l’État du temps, plus ou moins l’angle ho- Ciel les angles horaires de la Lune, il me femble qu’il eût mieux valu y mettre fimplement fon afcenfion droite vraie, parce que l’angle ho- raire de la Lune étant donné par obfervation , on conclut facilement l’afcenfron droite de la Lune qui en réfulte ; laquelle eft égale au temps vrai de l’obfervation, réduit en degrés ( à raifon de 15 par heure )-plus lafcenfion droite du Soleil à ce même raire de la Lune, felon qu’elle eft à lorient ou à l'occident ; aïnfi en comparant cette afcenfion droite avec celle qui auroit été marquée dans l'Etat du Ciel pour le même temps à Paris, on cüt eu la différence des méridiens , d’une manière qui me paroït plus directe & plus facile à comprendre que celle qu’on a donnée dans ce livre, quoiqu’elle revienne après tout au même. AND ESS C UE NOCIE;S. 77 le calcul, il dépend de la hauteur méridienne de Ia Lune & de la hauteur du pôle: donc pour avoir les trois côtés de ce triangle, il faut quatre obfervations faites ou réduites avec toute la précifion poflible, favoir la hauteur du pôle & celle de la Lune au temps de fon pañlage au méridien, la hauteur du pôle & celle de a Lune en un temps éloigné de deux heures au moins du pañfage au méridien. Or r.° quand même on feroit certain d'avoir déterminé la hauteur du pôle à midi, à 2 minutes près, on ne pourroit cependant s’affurer de lavoir qu'à 4 ou $ minutes près, à quelqu'heure un peu éloignée de midi, à caufe de l'incertitude des rédutions qu'il y faut faire & qui ne font fondées que fur l'eflime vague de la dérive du Vaiffeau, fur celle de la longueur du chemin du Navire & fur fa direction obfervée à la bouflole. 2. Il s'en faut de beaucoup qu'on puifie obferver fur mer les hauteurs de la Lune avec quelqu’exaétitude pendant la nuit, à moins que cette hauteur n'excède 6o degrés, ou ne foit au- deffous de 20: car la furface de la mer fait à l'égard de l'ob- fervateur l'effet d’un miroir inégal & mal poli, une traînée fort longue & fort large d'images dela Lune s'y peint dans le vertical de cet aftre ; l'éclat de tous ces reflets efface tellement le terme de l'horizon de la mer, lequel n'eft guère au delà, à moins que la Lune ne foit fort haute, qu'on ne peut le dif tinguer avec aflez de certitude, & qu'ainfi on ne peut s'en fervir pour prendre la hauteur de la Lune que par l'eftime, fufhfante pour bien des recherches, mais trop groffière pour celle dont il s'agit ; ces reflets lumineux ne viennent fe terminer à l'horizon même, que lorfque la Lune eft au-deffous de 20 degrés, en fuppofant l'œil élevé de 1 $ à 20 pieds au-deffus de la furface de la mer. I fe préfente encore bien d’autres inconvéniens dans la pra- tique de cette méthode : car 1. comme le calcul de a Longitude y eft fondé fur la différence des mouvemens du Soleil & de la Lune en afcenfion droite, cette différence eft en 24 heures toujours plus petite que n’eft l'arc du mouvement diurne de la Lune; elle n'eft quelquefois pas de 9 degrés 11] 78 Mémoires DE L'ACADÉMIE RoYALE complets, tandis que celui-ci n’eft jamais au-deffous de 11 degrés : 2.° fi fon veut avoir tous les côtés de fon triangle par obfervation, la méthode eft impoffible toutes les fois que la Lune paffe au méridien plus de deux heures avant le coucher du Soleil, ou après fon lever, car alors la lumière de la Lune eft trop foible pour qu'on en puifié prendre a hauteur méri- dienne: 3.° ft la Lune eft couverte de nuages au moment de fon pañfage au méridien, if n'eft pas poflible d'avoir la Longitude pour ce jour-là. J'ai dit plus haut que dans tous les cas il valloit mieux employer la déclinaifon de fa Lune calculée par les Tables, ue de fe fervir de celle qu'on auroit obfervée en mer; la raifon en eft claire, on peut fe tromper d'environ 8 minutes fur la détermination direéte de la déclinaifon de la Lune par fa hauteur méridienne, mais le calcul par les Tables eft toujours aflez jufte, fur-tout lorfque la Lune eft vers les points folfti- ciaux : il n'eft pas également für vers les points équinoxiaux, où le mouvement de fa Lune en déclinaifon eft fort rapide, & où indépendamment des erreurs des Tables de li Lune on commettroit environ autant de minutes d'erreurs dans le calcul de la déclinaifon, qu'on commettroit de degrés d'erreur dans là longitude qu'on eft obligé de fuppofer connue pour faire ce calcul, cependant on ne peut guère craindre que cette erreur monte à 8 minutes. Enfin pour faire voir d'un coup d'œil le danger auquel un Navigateur s'expoleroit, en fuivant avec une parfaite fécurité & une confiance aveugle, la route qui lui feroit mdiquée par cette méthode réduite au cas le plus fimple, qui eft celui d'une feulé obfervation de la hauteur de la Lune hors du méridien, j'ai calculé la Table fuivante für les fuppofitions que je vais détailler. J'ai fuppolé, r.° obfervateur placé fous trois parallèles différens, fous fa Ligne, à 30 & à 60 degrés de latitude; 2.° j'ai fuppofé la Lune dans trois parallèles diflérens, favoir dans l'équateur & à 24 degrés de déclinaifon de part & d'autre; 3.° j'ai fuppolé que fon obfervât la hauteur de fa Lune à quatre différentes diflances du méridien, à 30 ,à 50, DES SION ENGE & 79 à 70 & à 90 degrés; 4.° j'ai fuppolé qu'il y eût 4 minutes d'erreur, tant dans la hauteur obfervée de la Lune, que dans celle du pôle , réduite au moment de lobfervation ; 5.° j'ai fuppofé qu'il y eût 2 minutes d'erreur dans la déclinaifon de la Lune & autant dans fon afcenfion droite , calculées par les Tables; 6.° j'ai fuppofé qu'il n'y eût aucune erreur dans les Tables du Soleil, qui fervent à calculer fon afcenfion droite ; 7 j'ai fuppofé que l'incertitude dans la détermination du temps vrai, n’en caufoit une dans a longitude que de 8 mi- nutes conflamment : or pour peu qu'on maccorde les propo- fitions que j'ai avancées ci-deflus, on conviendra que les fuppofitions que je fais ici, ne font rien moins qu'exagérées. Enfin, pour évaluer en degrés de longitude l'incertitude qui réfute de la fomme des quantités dont chaque erreur fuppolée peut influer dans le calcul de l'angle horaire de la Lune, j'ai réduit le mouvement horaire moyen de la Lune au Soleil en longitude, qui eft de 30° 28” au mouvement horaire moyen en afcenfion droite, lequel eft de 28° o” quand la Lune traverfe l'équateur fous un angle de 23%2,& de 33° 21" quand la Lune eft vers les points folfticiaux, & qu'elle a 24 degrés de déclinaïfon. Rien ne fera plus propre que la Table fuivante , à faire voir combien il y auroit peu à compter fur la Lune pour trouver les Longitudes en mer, fi l’on n'avoit d'autre méthode que celle des angles horaires; on doit donc regretter fincèrement le temps confidérable qu'un Aftronome habile a employé pendant plufieurs années à calculer ces angles horaires, les afcenfions droites de la Lune, & tout ce qui en dépendoit. Il eft vrai qu'alors il n'y avoit prefqu'aucun Navigateur qui füt capable de faire ufage des calculs de l'Etat du Ciel; mais sil y en avoit eu, ils auroient bientôt aperçu l'imperfection de la méthode qu'on leur avoit propofée. 80 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE TABLE DE L'INCERTITUDE MOYENNE DES LONGITUDES, obfervées en mer felon la méthode des angles horaires. Hauteur | Dif. | Diflance Err. caufée| Err. caufée | Err. cauféc| Erreur Somme | fcertitude | InCert. du Pole Le da par celle | par celle | par celle dans l’Afc. | des Erreurs, 2 en a NE de 2 min.|de 4 min.|de 4 min.|dr.dela €,|ou Incertit. la Longit. lieues l'Obfer au dans dans "dans calculée de comeris [marines de : fa déclinaif.| la hauteur | la hauteur fur l'Angl. hor. d SRE à2o AS ‘de la Lunc.| du Pôle. |de fa Lune. [les Tables. | de la ste au dey: DRCPRERETAEZ GEEERLE A Œ SURESNES Des. | Deg M: 18 . | Deg 3134 | 2 JD | EEE Oo. 10/2. 20| 67. 3 34 2e . 43 I T4. 0. 45 2. 20/2 152 59: (SF MO) e] o|12 + 20 154 0: 45 2.202 2 4 0. 19 aps |[2 S71N 29% 70. 6.116 o. o|2. 20| 6 ie Oo. 19! 1. 5412. S7| 79 eee eee = 54 Oo. 46 0272. 38 = sale 4. Noj2: 6|140. . 20 . 32 |2% 2, I F4 | + 73 1l1 80 o. 02012 + 36 De Te 36 2 . 46 sr A || e ol O. 1 SNA . 3 I o. 50 : 48 3 2. 45 . 8 | 4 9 & 23 T|120. 22 6. 5814. 23l11857 3|190. 3 3: 47| 8.43| 3.29 41002 viol 4. 32] 9.52] 5.47 O|130- 1 22108-00082 25| 64. 3 3 FE 3. 4211852532, 302; o| 90. Go REY reel re 8 Ln2 10-4012 3| 70. — moycnne en licues, à 20 au degré. ................ | 07: MAIRE s0- 30 de | s H 54| 4. s 70. TA IMAS AT ë 3 re . 18 à Us. ; LS 90. | 1. 10 } . 482. 24) T0 Or. Fe S 8lr 2 ENTREE ER REREE TON R RE EREETE EE | Je laifle au Lecteur à faire fes réflexions fur cette Table, j'ajouterai DE SU SECHE, NL GUESS. 8r j'ajouterai fulement que dans un réfultat moyen entre différens calculs de longitude conclue de plufieurs. hauteurs de la Lune, obfervées de fuite, les erreurs ne feroient prefque pas compen- fées, parce que dans le calcul de toutes ces hauteurs, les incer- titudes fur la vérification de l’inftrument, fur la hauteur du pôle, fur les pofitions de a Lune en afcenfion droite & en déclinaifon, tirées des Tables, fubfifteroient toujours les mêmes & y influeroient de la même manière ; ainfi toutes ces hauteurs donneroient des Longitudes qui ne différeroient guère entre elles, & leur milieu n'en feroit pas moins fujet à prefque toute l'incertitude marquée dans la Table précédente. Il eft vrai qu'en prenant dans un même jour les hauteurs de la Lune à lorient, & enfuite à l'occident, & à peu près à égale diftance du méridien , la plupart des erreurs dans la Lon- gitude déduite du calcul des hauteurs orientales , feroient égales & en fens contraire aux erreurs dans la Longitude déduite des hauteurs occidentales; de forte qu’en prenant un réfultat moyen, on auroit beaucoup plus fürement la Longitude pour l'heure où la Lune auroit paflé au méridien *; mais en gagnant de l’exac- titude par ce moyen, cette méthode ainfi reétifiée perd prefque toute fa poffibilité dans la pratique, & garde plufieurs de fes inconvéniens. 1. Elle ne fauve ni l'incertitude des pofitions de la Lune en afcenfion droite, tirée des Tables aftronomiques , ni celle du temps vrai de l'obfervation (à moins qu'il ne foit auffi déduit des hauteurs orientales & occidentales d'une même étoile , prifes à égale diflance du méridien ou à peu près), ni enfin l'inconvénient qu'il y a de fe fervir de la différence d’afcenfion droite entre la Lune & le Soleil, inconvénient qui lui ul rend fort incertains les calculs des Longitudes, pendant * Je ne fais cependant fr un Na- vigateur feroit bien fatisfait d’une Méthode, felon laquelle il fe trou- veroit , d’après une obfervation faite à lorient par le travers du pic des Açores , & felon une autre, faite quelques heures après, à l’entrée de Mém, 1759 la rivière de Lifbonne : le cas eft très-poflible dans les fuppofitions de la Table précédente, quand même on obferveroit la Lune à trois heures de diftance de part & d'autre du méridien. à L 82 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ks trois ou quatre jours confécutifs où la Lune eft voifine de l'équateur , & fur-tout lorfqu'elle eft en même temps près de fon apogée. | 2. Cette méthode ainfi corrigée en devient compliquée du double, tant pour les obfervations que pour le calcul. 3 Elle eft prefque toujours impraticable ; car outre qu'elle exige un temps ferein à heures à peu près égales, avant & après le paflage de la Lune au méridien , il y a d'abord dix où douze jours de fuite chaque mois, favoir les cinq ou fix derniers jours de la lunaifon, & les cinq ou fix premiers de la fuivante, où il eft impoñhble d’obferver la Lune à une dif- tance raifonnable à lorient , puis à l'occident du méridien ; &c à l'égard des autres jours, s’il arrive qu’on puiffe l'obferver d’un côté pendant le jour ou pendant le crépufcule, il faudra prefque toujours l'obferver de l'autre côté pendant la nuit clofe , temps auquel il n’eft prefque jamais pofflible de prendre des hauteurs exactes de la Lune. On ne peut donc pas raifonnablement propofer cette mé- thode corrigée, comme praticable par le commun des Naviga- teurs, on.pourroit tout au plus l'indiquer à ceux qui , pour varier leurs opérations, feroient en état de profiter d'une occafion qui f préfenteroit , de faire toutes les obfervations qu'elle exige ; cette occafon pourroit tomber au temps de la pleine Lune. REMARQUES fur la Méthode expliquée par M. Bouger. “Li 173 M. Bouguer, dans fon Traité de Navigation *, a expliqué chan, 8, une manière, propolée déjà plufieurs fois, de trouver la Lon- * gitude fur mer par le temps vrai obfervé du pañage de la, Lune au méridien du Navigateur , comparé au temps calculé de fon paffage à un méridien connu, tel que celui de Paris: pour avoir ce temps vrai, il fuppofe qu'on fe ferve d’une hor- loge à reffort, ou d'une montre paffablement bien réglée, & qu'on obferve des hauteurs correfpondantes du Soleil & de La Lune; en forte que celles du Soleil fervent à trouver les deux midis vrais confécutifs, entre lefquels fe trouve le pañage de la Lune, deftiné à la recherche des Longitudes. DES SCIENCES. 83 M. Bouguer étoit trop éclairé pour faire un grand fond fur la précifion de cette méthode, & trop fincère pour ne pas faire l'aveu de fon incertitude ; de forte que je ne me croirois pas obligé d'en dire davantage pour en faire rejeter l'ufage, fi elle n'avoit pas été propofée tant de fois , & fi cette difcuffion méntroit dans ie plan de mon Mémoire; voici donc ce que _ je dois faire remarquer : 1. Elle exige un trop grand nombre de momens de Ciel ferein, comme M. Bouguer l'avoue. 2. Elle n'eft pas plus praticable que là méthode des angles horaires, corrigée par des obfervations orientales & oc- cidentales, c'eft-à- dire qu'on ne peut prendre des hauteurs correfpondantes de la Lune dans prefqu'aucun jour du mois, parce qu'il en faudroit prendre d’un côté où pendant un trop grand jour, ou pendant la nuit clofe. 3.° Le mouvement réglé par un reffort fpiral n'eft pas affez fûrement uniforme fur mer, pour ne pas craindre l'erreur d'une demi - minute de temps dans l'intervalle du midi au temps du paflage de la Lune au méridien, intervalle qui n'eft guère moindre que de cinq ou fix heures ; or une demi-minute d'erreur en caufe une de fur les 360 degrés de l'Equateur, ce qui répond à 3 degrés + dans là Longitude, à 4 Cette méthode fuppofe que dans l'intervalle de 28 à 30 heures, néceffaire pour avoir deux midis confécutifs par des hauteurs correfpondantes du Soleil, le Navire fafle une même route avec une même vitefle; ou bien il faut faire aux obfervations des réductions aufli vétilleufes qu'incertaines , ce qui complique la méthode, & la met hors de la portée du commun des Marins. Ii fuit de ces deux dernières remarques, qu'il feroit peut- être plus für de déterminer , en calculant de bonnes hauteurs abfolues du Soleil & des Étoiles, le temps vrai au moment du paffage de la Lune, trouvé par des hauteurs correfpondantes , que d'y employer deux midis vrais confécutifs, conclus par des hauteurs correfpondantes du Soleil. Li 84 MÉMOIRES DE L ACADÉMIE ROYALE 5.” Pour obferver des hauteurs correfpondantes de la Lune, unique moyen d'avoir fur mer le temps de fon pañage au méridien, on ne peut guère fe fervir de fon même bord , fi ce n'eft le jour de l’oppofition ; mais, ou il faut obferver la hauteur de fon centre, qu'on ne peut déterminer que par eftime, ou bien il faut prefque toujours obferver d'un côté th des bords , & l'autre de l'autre côté, parce que le bord éclairé qui étoit le bord fupérieur à lorient , devient prefque toujours le bord inférieur dans les hauteurs occidentales; il faut donc en ce cas y faire une réduétion, de forte que quelque parti qu'on prenne, il y a un inconvénient joint à quelqu'incertitude. 6. Enfin le$ temps déterminés par les obfervations des hauteurs correfpondantes , ne font indépendans que des erreurs qu'on auroit pu commettre dans la vérification du parallélifme des miroirs, & dans les divifions de l'inftrument ; mais ils ne le font pas des erreurs commiffibles dans l'obfervation même, & qui deviennent très-fenfibles, tant à caufe de la petiteffe des divifions du cadran d’une montre & de celle du rayon de l'inftrument , que parce qu'il ne faut que 8 fecondes d'erreur dans le temps du paflage de la Lune au méridien, pour en faire une d'un degré entier dans la Longitude. : REMARQUES fur la Méthode que j'ai donnée dans l'In- troduction au fecond rome de mes Ephémérides. Dans l'introduction au tome des Éphémérides pour les an- nées comprifés entre 175$ & 1765, j'ai inféré un Difcours fur la manière d'obferver les Longitudes fur mer, à peu près felon la méthode propofée par M. Halley. J'avois envoyé en 1753 à l'Académie un projet de ce Difcours, que je com- pofai à l'ifle de France dans mes heures de loifir, où j'en laiffai une copie; je voulois faire voir aux Officiers du Vaifleau fur lequel je devois revenir en Europe, que cette méthode n'étoit pas fi difficile dans la pratique, pourvu qu’on füt muni de calculs préliminaires, & tant foit peu exercé à manier le quartier de réflexion. La néceflité où je me fuis trouvé à mon DES SCtrENCES 85 retour à Paris (à la fin de Juin 1754) de publier ces Éphé- mérides avant les derniers mois de cette même année, ne m'a pas donné le loifir d’y faire quelques changemens pour en per- fetionner la pratique. L'importance de la matière m'a fait faire enfuite de nouvelles recherches, & je compte maintenant être parvenu au point, qu'il ne me paroît guère pofflible de trouver des moyens plus fimples 88 plus fürs de déterminer les Longitudes fur mer par les obfervations de la Lune. Cette méthode, qui eft la même que celle que je propofe encore, eft la plus directe de toutes, puifqu’elle confifte à me- furer immédiatement les portions d'arcs des mouvemens diurnes de la Lune; elle eft la moins fufceptible d'erreurs, puifqu'elle n'exige qu'une feulesobfervation faite avec la plus grande pré- cifion poflble, & que sil s'y trouve 4 minutes d'erreur, cette erreur influe de la même manière fur le degré de la Longitude, en quelque climat que foit l'obfervateur. Cette erreur eft toujours à celle de la Longitude, comme le mouvement diurne de la Lune eft à 360 degrés, & par conféquent de 14 49" lorfque le mouvement diurne de la Lune eft de 13% 10° 35"; cette méthode fuppofe encore deux autres obfervations, comme je le détaillerai dans le commencement de la feconde partie de ce Mémoire; mais 7 ou 8 minutes d'erreur dans chacune, ne peuvent jamais former enfemble une incertitude de 15 minutes fur la Longitude. Enfin, en fuppofant 2 mi- nutes d'erreur dans les calculs tirés des Tables de la Lune, elles en cauferont ue d'environ $4 minutes dans la Longitude ; ainfi dans les.cas les plus malheureux, l'incertitude de chaque détermination de Longitude conclue par un feul calcul des trois obfervations néceffaires, ne fera jamais que d'environ 3 degrés, c’eft par conféquent 60 lieues marines fous la Ligne, 52 fous le parallèle de 30 degrés, 30 lieues fous celui de 60 degrés, & ainfi à proportion. Cette incertitude fera beau- coup diminuée, f1 le Navigateur petit dans le même lieu réitérer deux ou trois fois les obfervations néceflaires, pour avoir autant de déterminations différentes de fa longitude, & fur-tout s'il peut employer à chacune de {es déterminations, autant L ii 86 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE d'inftrumens d'une égale bonté à peu près; alors en prenant un réfultat moyen, il pourra compter d'avoir fa longitude avec une précifion d'un degré & demi, ou d'environ 25 ou 30 lieues marines. En expliquant cette méthode dans le, Difcours que j'ai cité, je faifois différentes fuppofitions qui en reftreignoient l’ufage, mais qui n'ont plus lieu dans les pratiques que je vais détailler. Je fuppofois qu'on n'obfervät la Lune que dans le voifinage de l'horizon, c'eft-à-dire, au-deflous de 20 degrés de hauteur ; j'avois pour cela deux raifons, la première que le terme de l'horizon de la mer, dont il faut fe fervir pour oblerver la hauteur de la Lune, laquelle entroit dans le calcul de mes réductions, m'avoit paru trop difficile à diftinguer pendant la nuit clofe, fi ce n'eft lorfque la Lune eft au-deffous de 20 degrés; la feconde raifon étoit, que pour fimplifier certaines règles de calcul, j'avois fuppofé que le cofinus de la hauteur de la Lune, ne différoit pas fenfiblement du rayon. Je fuppofois encore qu'on n'employät que le calcul trigo- nométrique dont je donnois les règles néceflaires, pour les cas qui ont lieu dans la recherche des Longitudes; mais quoi- ue cette Voie foit fans contredit la plus exacte & même la plus expéditive, elle a toujours l'air un peu trop fcientifique pour le commun des Navigateurs, qui ne font pas encore familiarifés avec les Tables de fmus & de logarithmes; j'emploie mainte- nant des opérations graphiques fort courtes & femblables à celles dont les Marins ont coutume de fe fervir pour trouver les amplitudes du Soleil, qui fervent à calculer la variation du compas. Les figures dont j'explique la conftruétion, ne font que des projections ortographiques de la fphère; j'en ai rendu les règles plus commodes & plus uniformes, en fup- primant les petits cercles de la fphère, qu'on devoit tracer & divifer en degrés, felon les pratiques enfeignées dans les Traités de projeétions. Je rapporte tout au feul grand cercle qui renferme la figure entière, ce qui donne beaucoup plus de précifion dans les réfultats; je ne confeille cependant ces opé- rations qu'à ceux qui ne pourroient faire leur calcul par les logarithme, DESUSICHENCE & 87 SECONDE PARTIE Qui contient l'expofirion de la Méthode qui me parotr Ja meilleure pour la recherche des Longiudes , à les démonflrations des opérations qu'elle exige. | E fuppofe qu'on choififfe fept ou huit des plus belles Étoiles zodiacales, telles que + de Pégafe, « & @ du Taureau, « & R & même y des Gemeaux, Regulus, l'épi de la Vierge, le front & le cœur du Scorpion, pour fervir, exclufivement à toutes les autres, à la mefure des arcs décrits dans le Ciel par h Lune. Je fuppofe encore qu'on dreffe un Calendrier marin ou un Amanach nautique , deftiné à marquer de 4 en 4 heures de temps vrai pour chaque jour du mois (excepté les trois ou quatre jours où la Lune eft trop près du Soleil) l'arc de diflance du bord éclairé de la Lune à celle de ces Étoiles, qui fe trouvera fituée plus avantageufement pour l'obfervation. Qu'on y ajoute pour chaque jour la parallaxe horizontale de la Lune à midi, & le temps vrai du paffage de l'Étoile au méridien, le tout aflujéti à un méridien fixe comme celui de Paris. Je donnerai à la fin de ce Mémoire un modèle de ces fortes de calculs, à l'aide defquels la recherche des Longitudes en mer devient très - praticable au commun des Navigateurs, fans exige d'eux aucune connoiflance d’Aftronomie, (pas même celle des Étoiles dont ils doivent faire ufage dans cette méthode) ni plus d'une heure de travail à ceux qui y feront le moins éxercés. Je renvoie aux inftructions dont j'ai parlé, le détail de tout ce qu'il faut faire pour réuflir & pour acquérir de fhabitude dans la pratique de la méthode dont il s’agit ici. J'expoferai feulement dans cette feconde Partie, l'ordre & le nombre des obfervations qu'il faut faire dans le cas le moins favorable, qui eft celui d'une nuit clofe; j'expliquerai enfuite {a théorie des réductions qu'il faut faire à ces obfervations, pour parvenie à la conclufion de la Longitude, 88 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Ordre des Obfèrvations. Je fuppofe que l'Obfervateur ait vérifié fon inftrument ; lequel pour être plus commode, doit être un quartier de ré- flexion, conftruit felon les principes de M. Hadley , & garni d’une lanette , dont je donnerai à part les dimenfions. Je fup- pofe encore que par les moyens que j'indique, l'Obfervateur ait reconnu dans le Ciel l'étoile dont il doit fe fervir. Je fuppofe enfin, qu'à l'aide de la lunette il fe foit affuré que le terme de thobn qui eft dans le vertical de l'étoile, eft fuffifama ment vifible. Après tous ces préparatifs , l'Oblérvateur doit commencer par prendre , le plus exactement qu'il pourra, la hauteur de cette étoile, en marquant à une montre ordinaire l'heure , la minute & la fraction de minute qu’elle indiquoit au moment de cette obfervation, & en faifant relever avec un compas azimutal la pofition du vertical de l'étoile, fr elle ne fe trouve pas trop haute, pour pouvoir faire ce relèvement à un demi- rhumb près, Auffitôt que la hauteur de l'étoile a été prife, l'Obferva- teur doit melurer fa diftance au bord éclairé de la Lune, en marquant de même à la montre l’inftant degette opération. Enfuite, fans perdre de temps , il doit prendre la hauteur du point & bord éclairé de la Lune, que l'Étoile aura rafé dans l'obfervation précédente, fans qu'il foit nécéflaire de s'attacher à prendre la hauteur de ce point avec beaucoup de fcrupule , fur-tout fi le bord de l'horizon n'eft pas aifé à dif- tinguer ; il fufht alors de Favoir à 8 ou 10 minutes près ; il doit marquer à la même montre le temps de cette troifième obfervation , & faire cependant relever à la bouflole la fituation du vertical de la Lune, opération toujours facile à l'aide des reflets de la Lune, & qui n’exige qu'un demi -rhumb de précifion. Je fais par un très-crand nombre d'expériences que tout cela . peut être exécuté dans l'intervalle de 10 minutes de temps, pour peu qu'on y foit exercé , & dans celui de 5 à 6 minutes, lorfqu'on ra. 1 ilot Rs IDE, SAS GA E M @EiSonaM 89 Jorfqu* on y. a acquis plus d'habitude ; on.peut même .les faire toutes dans le même:inftant . (& par-là fe paffer de montre & de bouffole)), lor fque l'on peut, partager ces opérations En tre trois Centers | - De la FE nil faur appliquer aux quarniers d LLARBARE. ON AA de réflexion. ‘D yoi M2 ) 13 Voici les DOI qui me paroiflent les meilleures : fon objectif doit étre un verre convexe de 10 pas de foyer, & de 29à 30 lignes de diamètre; loculaire doit être un verre plan concave, de 3, pouces + où 4 pouces de foyer, & d’un pouce de diamètre Lie on ; jet tuyau, pour être plus léger, doit être de bois couvert de ch dgrin ou de rouffette, noirci en dedans: l'ouverture de l'objectif doit être de 26429 lignes de diamètre, & celle de l'oculaire de 2 à 2 + lignes tout au plus. . L'oculaire doit être placé HE un tuyau mobile , tenant à un frottement | un peu rüde , afin qu'étant alongé au point qui ‘convient à la vué de TObkr vateur,, il ne s'enfonce pas én choquant contre fon vifige , comme il arrive néceffairément par l'irégularité des mouvemens du Vaiffeau. = L'objééfif doit être centré, autant qu'il eft poffible , flon Jaxe du tuyau, lequel doit être arrêté für linftrument , de forte que fon axe foit- parallèle au plan de f'inflrument, & qu'il pafle par le milieu de fa ligne qui féparé Ja partie étamée du petit miroir de fa par tie tranfpar ente, ou par le milieu de la fente tranfparente du petit miroir, s’ n'a qu'une fente non étamée. Cette lunette a cinq avantages confidérables, & qui Ja rendent préférable aux unettes à deux verres convexées qu'on a appliquées jufqu'ici à ces fortes d'inftrumens. 1. Elle a un champ d'environ 10 degrés d'étendue; ce qui. eft extrêmement commode Pour ne pas perdre de vue les images des objets qu'il faut réunir pour obferver leur dif tance, & que le mouvement continuel & irrégulier du Vaifeau SA à faire écarter, malgré les efforts de l'Obfervateur. ® Dans cette te de 10 deorés, les imapes font Min 1759 ÿo MÉMOIRES DE L'ACADÉMIÉ RoYaLe varchées het, nullernent défigurées ni bordées d'nis, fi ce neft vers les éxtrémités du champ dé fa lunette, où l'on com- mencè à apercevoir quelqu'irrépulærité dans les figures, & quelques couleurs lorfque fes objets font vivément éclairés, comme la Lune près de.fon plein; mais ce Iéer inconvénient ne peut nuire à là précifion des oblérvatiohs, qui ne fe font que par une réunion d'iragés dans le champ du petit miroir qui répond au milieu de celui de la lunette; on voit au refle que dans cette lunette les images ne doivent être ni fenfible- inent défigures , ni entourées de franges colorées, parce que les rayons de lumière réfraëtés paï l'objedif, fe trouvent inter- ceptés par l'oculaire , avant qu'ils fe foient fenfiblement féparés en faifceaux colorés | & que là figure fphérique du verre ait contraint les rayons, partis du même point de l'objet , à former différens foyers qui troublent l'image de ce point. 3.° Comme-cette lunetté tranfmet à l'œil de l'Obfervateur une quantité prodigieufe de lumière, on peut toujours prendre hauteur par-devant, avec l'inftrument auquel elle eft appliquée, parce que le terme de l'horizon de la.mer qui paroît prefque toujours embruméau-deflous du Soleil, & clair-fin à l'oppofite , fera toujours aifé à diftinguer à l'aide de cette lunettè. Je m'en füuis afuré , en appliquant à un quartier de réflexion une lorgnette d'opéra fort commune , avec laquelle j'ai toujours obfervé par- devant, lorfqu’avec les inftruméns à fimple vifière on étoit obligé d'obferver par-derrière, opération incommode fur-tout avec le quartier de M. Hadléy, & d’ailleurs peu füre, à caufe de la difficulté des vérifications & des réductions qu'il faut faire. 4 Pour peu que l'horizon foit éclairé par les Etoiles ou par la Lune, & qu'il foit dégagé de nuages, on doit toujours le diftinguer en mer pendant Ra nuit clofe, fur-tout fi Fon fe tient dans dés endroits du Vaiffeau les moins élevés qu'il eft poffible. On peut donc prendrealors les hauteurs ‘des lanètes & des Étoiles avec beaucoup plus de facilité avec cette lunette, qu'avec les autres, & par conféquent cette lunette étend pro- digieufement te nombre des cas où les obfervations en mer . font poflibles. LR 14108 Si SC E Ac mHONIM ge 5 On voit diftinctement dans fe champ de cette Hunette le petit miroir, fon cadre & fa monture, quoïqu'ils foiens tout auprèside l'objeétif, ce qui eft fort commode pour: donner à d'inflrument les mouveinens néceffires pour faire arrives les images. des objets vus par réflexion ; fur tel point qu'on veut du champ du petit miroir. 1 1 2017 1 4 D Si cetté lunette n'amplifie qu'environ deux fois & demi eu trois fois le diamètre &. objets, c'elt un inconvénient com- mun à toutes les lunettes appliquées à des inftrumens deftinés aux obfervations de imer, parce que la vitelle apparente des mouvemens du Vaifleau eft qugmentée dans te même rapport que le diamètre des objets, & par confquent elle devient d'autant plus incommode dans l'ufage des inflrumens. Du Calcul de l'heure vraie de lobfervarion dela Lune. Quelques nombreufes recherches qu'on ait faites à f’occalori dur Prix propofé par l’Académie len 1745 8 1 747; fur da meïleure manière de trouverliheure en mer, left certain qu'on n'a imaginé vien de praticable dans des mers comprifes entre les deux polaires; qui foit préférable: à 4a méthode oïdinaire, qui eonfifle ‘à° obferver Ja hayteur d'un-aftre à une difance raffonnable 4u'Iméridien, »& à ‘calculer eetté” difance par le moyen: de a déclinaifon de cet aftre 6c' de là hauteur du pôle qu'on fuppole connues. eos HON | USED OCT TX AA * Ea'précifion avec laquelle on-peut:avoir deitemps vrai pu cette méthode, dépend nonféulemeir de la dédinaifon de l'aftre! 80 1de ‘fa! diflance/ au méridien, imais : principalement de Fexaétitudel avec daqueHle à hautaur.:& ‘celle duipôle font déterminées, Si:on fappoé | cornme ipqut uw cis extrême, 8 minutes d'ertgur dans une feule hauteur d'Étoile zodiacale, Se 4'minttes dans la hauteur du pôle, on’ trouvera facilèment , à l'aide de la Table inférée dans ha: première: partie: de ce Mé> moire, lerreur"qui en réfuhter dans le caléul: du temps vrais il fffra de doubler!'les nombres marqués dans da fixième colonne, delles ajouter enfuite à ceux de la cinquième, & de M ij 92 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE; ROYALE convertir la fomme en temps. Ainfi en prenant un milieu‘entre les réfultats marqués pour les différentes hauteurs du pôle & pour les diflérentes diftances d’un aftre zodiacal au méridien, on trouve: que la plus grande incertitude feroit de 43 fecondes fous la Ligne, de 54 fecondes fous le parallèle de 30 degrés, & de 1° 38" fous celui de 60; en les réduifant en lieues marines, on a 3 lieues & demie fous la Ligne, 4 à la hauteur du pôle de 30 degrés, & un peu plus de 4 à celle de 60 degrés. Or comme il y a un très-grand nombre de circonflances où lon peut être affüré d'avoir la hauteur d'un aftre avec plus de précifion qu'à.8 minutes près, on peut regarder la méthode ordi- maire de trouver l'heure en mer, comme fufffamment füre du côté des obfervations qu'on emploie pour en faire le calcul, A l'égard de ce calcul, celui qu'on fait par les règles de la Trigonométrie. fphérique, eft fulceptible de la plus grande exaétitude. Mais voici une méthode plus facile. Je fuppofe qu'un Maïin qui fe propofe de déterminer l'heure enmer-par des hauteurs du Soleil & des Étoiles hors du méridien, ait préparé: à loifir un ou plufieurs cartons fins & lifés, fur-lefquels il ait décrit & divifé en tous fes degrés un cercle de 17,à 18 pouces de diamètré; pour en faire ufage lorfqu'il voudra éherchér l'angle horaire de faflre obfervé, voici ce-quélprefcrivent les règles-ordinaires de la projection orthographique. H tirera fur ce ceréle, un diamètre à volonté . HR (fig. 1) pour défigner Fhorizon, if marquera. le zénith Z, le pôle P.felon-fà hauteur; de, diamètre :£Q à. 90 degrés de P, pour défigner l'équateur; la corde X% pour l'alimieantarat de l'aftre, & a corde, ZT ;1pour repréfertér fon parallèle; fur TY comme diamètre sil faut déctire: lé -demi-cercle TZ FT, & du point À; où le parallèle, & l'almicantaratis’entrecoupent, il faut élever à 7Y ‘la perpendiculaire 4 Æ; qui, détermine Farc TE de: Ja diftance. de l'aftre au !méridien, dont il faut par conféquent mefurerlé nombre de deurés par quelque machine, ou en divifant réellemerit le Idemi-cercle Z°Æ:Y en fes degrés. Cette méthode ft: fimple! dans la théorie, mais elle: eft fouvent fufceptible: dé, peu d'exaétitude, parce que le demi- AA DES SCUMRE NuCcE Se {| 93 cercle TFY eft d'un rayon, d'autant plus petit que la décli- naifon de laftre eft plus grande, & par conféquent la mefure de l'arc 7 F enteft d'autant plus fujette à erreur. … Je fupprime donc ce petit cercle, j'abaiffe du point À fur V'équateur £Q la perpendiculaire AG. Je tire le rayon CF, qui coupe en Z cette perpendiculaire; avec le compas je porte Clen CK, & par le ponit Æ je fais -pañler la corde BS perpendiculaire à £Q. L'arc B ES qu'elle foutend, eft fe double de la diflance de faftre au méridien, qu'il eft facile de connoitre par les divifions du cercle HER préparé pour ces opérations. xl Pour le démontrer, j'abaifle de C fur T'Y la perpendicu- hire CAL, & alors il eft clair que l'arc £S du grand cercle eft fmblable à l'arc 7°F du petit cercle, puifque leurs cofinus CK, MA font dans le rapport des rayons C7, MT, comme on le voit par les triangles rectangles femblables 7 CA, T IA, qui donnent k proportion CZ ou CX: MA::CT : MT. Mais on peut réduire cette opération à celle-ci qui eft plus fimple encore: Prenez la fomme & la différence de da hauteur de l'équateur & de la déclinaifon de l'aflre ; d'une fera fà hauteur méridienne, l'autre fon plus grand enfoncement {ous l'horizon ; marquez-en fes points en 7° & Y ( fg. 2), & joignez TT Fig. 2. -qui fera le parallèle de fafre ; par le point T° de la hauteur méjidienne , tirez. le diamètre 7’X'; tirez l'ahnicantarat NX; & du point À où il coupe le parallèle, élevez à ce parallèle la perpendiculaire À /; portez avec le compas la diftance C7 en CF; prenez l'ouverture FI, & portez-là deux fois de fuite fur les divifions du cercle, pour favoir le nombre de degrés qui auront été embraffés. de la forte ; ce nombre fera “celui d'autant de minutes de temps dont il s'en faudra que la diftance de l'afre au méridien ne foit de fix heures, ou, ce qui revient au même, ce nombre de degrés fera le quadruple du complément de arc horaire; car, puifqu'on vient de voir que CZ étoit le cofinus dé l'arc horaire, fon double Æ7 eft la corde de deux fois le complément de farce, horaire ; donc M ii} Fig. 3. 94 . MÉMmoiREs DE L'ACADÉMIE ROYALE FT porté deux fois doit embraffer le quadruple de ce: com- plément. Cette figure, conftruite avec foin, doit donc donner fe: temps avec une précifion fort approchante de celle du calcul trigonométrique, où Fon aurait négligé les fécondes de degré. De là manière de réduire la diflance obfervée de la Lune & une Étoile, à la diflance vraie qui doit fervir au calcul de la Longitude. Pour réduire la diftance apparente de la Lune à une étoile, à Ra diflance qu'on eût obfervée s'il n'y avoit point eu de parallaxe ni de réfraétion, il faut imaginer un triangle fphérique ZEL (fg.3), formé par le zénith Z, la Lune L & l'étoile £; foit Le da réfraction de l'étoile, L/ celle de la Lune, & /x fa parallaxe de hauteur, il eft vifible que la diflance oblervée EL doit être réduite à la diftance eÀ. Pour cela, du point Z où les arcs Æ L, ex s'entrecoupent, je décris les arcs er, Ap, qu'on peut prendre pour de petites droites, tirées des points e, À perpendicuhirement fur arc obfervé ÆL; & dans les triangles fenfiblement reétilignes Eer,xEp, & rectangles en r,p, on a Er & Lp pour les deux corrections qu'il faut faire à l'arc £'L , afin de le réduire à ex ; or il eft évident que dans le triangle Er, la correction Er eftà fa réfraction £e de l'étoïle, comme le cofinussde l'angle e Er ou ZE L eft au rayon; de même dans le triangle rectangle À p L, la correction p L et à La /1— LI, ceftà-dire , à fa parallaxe de la Lune moins H'réfraftion , comme le cofinus de l'angle PL A où £ LZ eftau rayon. Il fuit de-lx que pour faire les corrections dont il s'agit, Faut réduire les hauteurs obfervées de l'Étoile & de la Lune, À celles qu'on eût trouvées à l'inftant où lon a pris leur dif tance; puis dans le triangle fPhérique LZE, dont les trois côtés font connus par l'opération précédente, il faut calculer les angles en £ & en L'aux cofimus defquels les deux cor- redtions dont il s'agit font proportionnelles & additives ou DIEM ISAOR E NICLE! 5 s fouftractives , felon l'efpèce des angles en Æ ou en Z, favoir ; la correction de la réfraction de l'Étoile eft additive fi l'angle en £'eft aigu, & fouftraétive s'il eft obtus; au contraire, celle de a parallaxe moins la réfration de la Lune eft addiive fi Fangle L eft obtus, fouftraétive il eft aigu. Pour réduire la hauteur de l'Etoile à la hauteur de la Lune à celles qu'on eût obfervées dans le moment où l'on a mefuré leurs diflances. Cette réduction n'a pas lieu, lorfque trois Obfervateurs ont fait de concert, & en moins d'une minute de temps, les ob- ervations néceflaires pour la Longitude; elle fe fait par une fimple proportion, fi l'on a obfervé plufieurs hauteurs de lE- toile & de la Lune; mais fi lon n'a qu'ane feule ‘hauteur avec le relèvement du vertical où l'aftre étoit alors, on la réduira à celle qu'on eût obfervée quelques minutes avant ou après, à l'aide d'une Table fort courte & fortcommode, fondée fur les formules différentielles des triangles fphériques & qu'on peut repréfenter par une échelle ou treillis. Dans le triangle ZPE /{ fig. 7) où P eft le pôle, Z le zénith, Æ un aftre quelconque, fi on fuppofe les côtés Z P & E P conftans, l'incrément de ZE eft à celui du temps, marqué par Fangle P, comme fin. Z P x fin. Z, éft au carré du rayon; étant donc données la hauteur du pôle (à 2 ou 3 degrés près) le quart de rhumb dans lequel on a trouvé le vertical de l'aftre & l'intervalle de temps entre linflant où l'on a pris Ja hauteur de faftre, & l'inftant pour lequel on veut avoir cette hauteur , on trouve dans cette ‘Fable de combien l'aftre s'dt élevé ou abaïffé dans cet intervalle. On peut toujours faire le relèvement du vertical de Ha Lune, mais fi l'on na pu faire celui de l'Étoile, on trouvera Yamplitude de fon vertical, en tirant quelques lignes de plus dans Ja figure qu’on aura déjà conitruite, pour avoir fa diftance horaire au méridien. Fig. 7. Reprenant donc ici les principaux points de la fz, 4 du point Fig. 4, Fig. s. 6 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE À, où { fait l’interfeétion du parallèle & de l'almicantarat de l'Étoile, j'abaifle fur ÆZR la perpendiculaire AL, je tire CX qui coupe cette perpendiculaire en quelque point comme D; je porte CD en CO, par-le point O jéiève fur ÆZR la per- pendiculaire ON, qui rencontrera le méridien quelque+part en AV, & Farc Z AN fera l'amplitude du vertical cherché. On peut remarquer que quoique le mouvement diurne. de la Lune foit plus lent d'environ que celui du Soleil, & que fa parallaxe altère fon mouvement dans le fens vertical, cependant la différence eft trop petite dans l’efpace de quelques minutes de temps; & les réductions dont il s’agit ici, n'exigent pas tant de précifion pour qu'il foit néceflaire de compliquer les calculs en prefcrivant l'ufage des différentes Tables, conf- truites les unes pour les Etoiles, d'autres pour le Soleil, & d'autres pour la Lune, : Pour réduire la diflance obfervée de la Lune à l'Etoile, à celle qui n'auroit été aliérée ni par la réfraction, ni par la parallaxe. Cette réduction n’eft d'aucune difficulté dans le calcul tri- gonométrique, après la théorie que j'en ai donnée fur la fig. 2: mais voici comme on la peut faire graphiquement. Sur le cercle deftiné aux opérations graphiques , tirez à volonté un diamètre D À ( fig. Fa J5 marquez un point Z à 90 degrés de ce diamètre, prenez les arcs D M, AG égaux chacun à fa hauteur de la Lune réduite par les opérations précédentes ; prenez de même les arcs D Æ, À J égaux chacun à la hauteur de l'Étoile, réduite aufli au moment de l'obfer- vation de la diftance ; marquez le point © à la droite du point Z, de forte que l'arc AO foit égal à la diftance apparente de la Lune à l'Étoile, telle qu'elle a été oblérvée; tirez ZX, MG & le diamètre O B, marquez de même vers Z le point P à 90 degrés des points ©, B ; prenez les arcs OS, BR égaux chacun à la hauteur de l'Étoile, & les arcs OF, BE du chacun à la hauteur de la Lune (ce qui fe fait en portant DNENSI USA CAEN, CE: 5: 97 portant l'arc À Zen OS & BR, & arc AG enOF&BE); tirez FE, RS & le rayon CP, alors LH exprimera la correction de la parallaxe de la Lune & celle de fa réfraction ; la correction de la parallaxe eft additive quand le point 74 tombe entre lés points ZL & Æ, ou à gauche du point Z par rapport à CP; elle eft fouftractive quand le point Æ tombe entre L & F; celle de la réfraction eff au contraire fouftrac- tive dans le premier cas, additive dans le fecond ; la droite Q N eff la correction de la réfraction de l'Étoïle, laquelle ef additive quand le point tombe entre Q & S', & fouftractive quand il tombe entre Q & À. Pour le démontrer, il fuffit de faire voir que LH exprime le cofinus de l'angle à la Lune entre le zénith & l'Étoile, & que Q N exprime le cofinus de l'angle à l'Etoile ; ff donc dans le triangle fphérique 6£ x (/fig. 6), on fuppofe que le zénith foit en «, le pôle en À, & que &A foit un arc du méridien, qu'enfin £ foit un aftre quelconque, alors l'angle à la Lune qu'on a cherché dans opération graphique précédente, fera comme l'angle horaire du point Ë, l'arc ex comme une hauteur d'Équateur , & £ À comme une diftance au pôle: or felon la conftruction du problème pour trouver l'angle ho- raire de l'Étoile rapportée ci-deflus & appliquée à la fg. ÿ, D A repréfente l'horizon, Z le zénith, O B l'équateur ( puifque lon a pris O A—eA), À repréfente falmicantarat du point £, & Æ£ F fon parallèle; fi donc de l'interfetion A on élève la perpendiculaire A/T,, terminée à la circonférence du demi-cercle décrit fur Æ #", larc Z°F° mefurera l'angle horaire du point Z , & LH en fera le cofinus. On démontre de même que Q N feroit le cofinus d’un angle horaire du point £, fi on regardoit le point À comme le zénith, le point 6 comme le pôle, & l'arc A comme une portion du Méridien. À l'égard de la mefure de ces lignes , il eft fi ailé d'imaginer des échelles propres à cet ufage, que je ne m'y arréterai pas. On en peut voir le détail dans l'Éxpofition du Calcul aftro- nomique, page 173. Mém, 1759: N Fig. 6, Fig. $ & 64 98 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE MODÈLE DE CALCUIS POUR UN ALMANACH NAUTIQUE, felon la méthode expliquée dans ce Mémoire. Pour les derniers jours de Mai 17 A S Temps vrai | Parall. $ ; ê Nom 4 du ee horif. HEURES pour lefquelles les diftances ont été calculées. à |des Étoiles] de J'Étoie € = nl au à | L éridi idi “7e 8 |. ei Lee er NA) ie RU ali bi de ba H MS. M. | D. M. | D. M. | D, M. Dee Ds M 25 Régulus, 5.46. 3|157:7|42. 4,6139.48,8|37.33,113$.170|33. 1,0 26 5-42. 0|$8,0128.28,9|26. 12,923. 56,7|21. 40,6 30.45,0 28. 28,9 19.24,4|17. 8,2|14. 51,9 27 Le Sokil| o. o. o 58,353: 15055. 24,3 | 57: 33:6|59.43,0| 61. 52,3|64. 1,766. r1,1 28 o. o 0|58,6166. 11,1168.21,0|70. 30,8|72.40,7|74. 50,6|77. o,7|70. 11,1 27] L'Épi del 8.5426|58,3|68. o,5|65.40,0/63.20,2|61. 1,0|58.40,2|$6.20,0|53. 59,7 28| laVierge.| 8. 50.24158,6|53. 59,71 51. 39,5|49. 19,2146.58,5|44. 38,8 |42.19,4|40. o,5$ 29 8.46.21158,9|40. 0,5/37.41:7135.21,7133. 0,3|130.38,5|28.:15,5|25. 51,0 30 8.42. 18|59,0|25.51,0,23.26,0|21. 1,8 18. 39,6116. 17,613. 54,5 |11.30,1 311 Antarés. 12.309.361 $0,01 57. 31,31 $$: 10,61 $2. 50,250. 30,0[48. 9,7|45.49,7|43. 20,8 CERTAINS ECTS OREMRCE SERRE D C9 | LEE LIEN EIRE CETTE TS DD DEN CNE RE ROUE à Be D TL DORÉ OT L’explication des calculs de cette Table & leur ufage fe trouveront dans la Connoiflance des Temps de 1761, dans celle de 1762, dans l'Expofition du Calcul Aftronomique, par M. de fa Lande, & dans la feconde édition du Traité de Navigation de M. Bouguer, #1-8,” qui va paroître dans peu «le temps. Mem.de UAc. R.des de. 1769 Pag-98. Plz2: Des SCctTENCES 99 OBSERVATIONS Sur une efpèce de Limaçon terreftre, dont le [ommer de la coquille Je trouve calfé, fans que l'animat en fouffre. Px M BRrRIssSson. à He coquilles de tant d’efpèces différentes, que les Curieux > Décembre en ce genre de produétions de la Nature, font entrer 1759- «dans les belles collections qu'ils en forment , leur paroiffent d'autant plus dignes d'y avoir place, que les chocs qu’elles ont eu à effuyer pendant qu'elles étoient habitées par.un animal, ‘ou depuis qu'elles ont ceffé de l'être, leur ont moins fait perdre, qu'elles font reftées plus entières; il y en a au con- raire une efpèce qui a de quoi s’'attirer l'attention des Phyficiens & des Naturaliftes , précifément parce qu'ils la voient toujours très-frufle, s'ils ne l'obfervent dans des temps peu éloignés de celui où elle a été mife au jour , ou pendant qu'elle eft encore - extrêmement petite. La coquille, remarquable par cette fingu- larité, eft celle d’un limaçon terreftre *, qui eft un turbinite * Fig. tu alongé ; quand elle eft parvenue à fon dernier terme d’accroif- fement, elle auroit près de deux pouces de longueur, fi à mefure que fa partie antérieure acquiert de nouveaux tours de fpirale, fa partie poftérieure ne perdoit pas des fiens ; lorfque: e limaçon n'a plus à croître, elle n'eft longue que de treize à quatorze lignes ; & au lieu de treize tours de fpirale qu'elle auroït à montrer , fi elle avoit confervé tous ceux qu'elle a. acquis fucceflivement, elle eft réduite à n’en avoir que quatre & demi. Pourquoi les coquilles de cette efpèce {e trouvent - elles conftamment ainfi mutilées fur l'animal vivant? & comment fe fait cette mutilation , qu'on à lieu de croire utile à ce N j * Fig. 3e 100 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE limaçon , pendant que les fraétures faites aux coquilles des autres efpèces font dangereufes pour l'animal ? ce font des faits propres à exciter la curiofité d'un Phyficien naturalifte, & dont feu M. de Reaumur defira de connoître les caufes. Le limaçon dont il s’agit ne fe tient que dans des pays plus chauds ue le climat de Paris ; on le trouve aux environs de Mont- pellier, d'où M. de Reaumur pria M. l'abbé de Sauvages de lui en envoyer de vivans par la Pofte; il en reçut cinq au commencement de Juillet 1752, qui ne furent pas trop fa- tigués du voyage; il me les remit, en me recommandant d'en avoir foin, de les obferver attentivement , pour tâcher de dé- couvrir tout ce qui avoit quelque rapport à la mutilation de leur coquille, Je ne tardai pas à les mettre dans un grand poudrier que javois rempli à moitié de terre fraiche, je les nourris avec des feuilles de laitue, plante à laquelle je connus qu’ils don- noient la préférence; mais il faut pour cela qu'elles foient telles que nous les demanderions pour nous, c'eft-à-dire, douces & tendres; car auffi-tôt que la laitue commence à monter, & que fes feuilles font devenues amères, ils mour- roient de faim auprès, plutôt que d'en manger. Lorfqu'ils eurent réparé les forces que le jeûne qu'ils avoient”fouffert pendant leur route, leur avoit fait perdre , leur coquille prit fon dernier accroiffement ; elle fe trouva alors avoir cinq tours & demi de fpirale, elle en perdit un. Peu de jours après leur accroiflement complet, c'eft - à - dire vers la mi- Juillet, ils commencèrent à faire leurs œufs, ils les déposèrent en terre à une profondeur d'environ un pouce & demi ou deux pouces ; ces œufs * font tout-à-fait ronds & blancs, ils ont une ligne & un tiers de diamètre, & leur coque eft aufli friable que celle des œufs ordinaires de poule ; elle Feft même davantage, & cela, parce qu'elle n'a pas autant d'épaifleur. Je ne m'étois point encore aperçu que mes limaçons. fe fuflent accouplés; ce ne fut que l'année fuivante que je parvins à les prendre fur le fait. Depuis le temps où les œufs furent dépofés jufqu'à celui DE SUMSRONT EN CES Tor de la naïflance des petits, il ne fe pafla rien de fingulier. Mes limaçons mangèrent & jeünèrent alternativement ; car après avoir paflé quelques jours à manger, ïls paflent de même quelques jours dans Finaction: leur attitude affez ordinaire, pendant ce temps de repos, eft d'être enfoncés prefque tout- à-fait en terre , la bouche de la coquille en enbas & le fom- met eu enhaut, & dans une pofition prefque verticale ; ils fe cachent auffi quelquefois tout-à-fait fous terre, & on en trouve alors dans toutes les inclinaifons, depuis celle qui eft près de k verticale jufqu'à l'horizontale. C'eft auffi dans ce temps de repos qu'ils veulent que leur porte foit fermée, pour cela ils fe forment à l'entrée de la bouche de leur coquille,ou à quelque diftance de fes bords, une efpèce d'opercule d'une matière blanche & demi-tranfpa- rente * ; cet opercule n'eft point du tout adhérent au corps” Fig. 2, de l'animal, il left feulement tout autour de l'ouverture de la coquille P. Lorfque l'animal trouve que fon jeûne a été affez s Fig. 10,0. long, il cherche à fe défaire de fon opercule, il n’a befoin que de poufler pour ouvrir fa porte, il fort alors de fa coquille, fon opercule étant comme collé à la partie inférieure de cette efpèce de queue que l'animal traîne après lui lorfqu'il marche, & qu'on appelle l'erpartement ; il tient pendant quelques mi- nutes cette partie de fon corps & l'opercule dans une direc- tion perpendiculaire au plan de pofition ; enfuite lorfqu'il veut marcher plus à fon aife, il fe défait entièrement de fon oper- cule; pour cela il plie en gouttière cette efpèce de queue ou lempattement, qui cefle alors d’être adhérent à l'opercule, excepté par fes bords, il le ramène dans une direction paral- lèle au plan de pofition; & un petit grain de la terre fur 1a- quelle il avance & auquel il Faccroche, achève de le détacher: il n'étoit collé à lempattement que par la matière vifqueufe que répand l'animal, cette même matière le colle à quelques petits grains de terre, defquels il eft très-diffcile de le détacher entier; car il eft fr fragile & fi friable, que la moindre fecouffe ke fait tomber en pièces. Les œufs qui avoient été dépofés vers la mi-Juillet, don- Ni x0o2 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE nérent des petits vers la mi-Septembre fuivant, de forte qué leur efpèce d’incubation dura au moins deux mois; mais la faifon déjà trop avancée, empècha les nouveaux nés de croître auffi vite que je l'aurois voulu, & força mes jeunes limaçons de s’'enfoncer en terre, pour y demeurer jufqu'au Printemps ; ce ne fut que dans l'année fuivante que j'eus des petits de meilleure heure, que je pus les obferver comme je le fou- haitois. Ce font donc les obfervations de 175 3 dont je vais donner le détail. Vers la fin de Mars , mes limaçons fortirent de la léthargie dans laquelle ils avoient paflé tout Fhiver; auffi-tôt que je m'aperçus qu'ils fe ranimoient, les laitues leur furent prodi- guées, & ils les mangèrent avec grand appétit. Dans le commencement d'Avril, je trouvai mes vieux Jimaçons dans l’accouplement ; cet accouplement n'a rien de particulier , il fe pale précifément comme celui des limaçons ordinaires des jardins; les deux bouches des coquilles font appliquées lune contre autre, Fune ayant fa convexité en enbas, & fantre l'ayant en enhaut, & les deux coquilles formant enfemble un angle d'environ foixante degrés; je ne fais pas combien dure l’accouplement, je n'ai jamais pu voir le même commencer & finir, Le 16 Avril, je trouvai dans le poudrier dans lequel étoient mes vieux limaçons, un nid dont les œufs paroifloient au travers du verre, ce nid contenoit à peu près une quarantaine d'œufs, ils étoient en terre à la profondeur d'environ deux pouces ; felon les apparences, il y avoit peu de temps qu'ils étoient pondus, car ils étoient encore très- humides, malgré cela leur coque étoit dure & friable. Deux jours après j'a- perçus un fecond nid, & depuis le 16-jufqu'au 26 Avril, j'en trouvai fucceflivement cinq , lequel nombre eft égal à celui des limaçons que j'avois alors en état de multiplier Jeur efpèce ; de forte que chacun avoit fait le fien : ces limaçons confervent toujours un trou pour aller à leur nid fur lequel ils fe tiennent fouvent comme s'ils vouloient couver leurs œufs; j'en ai une fois remarqué un qui sy tint plufieurs jours de fuite après Dress (SHC ESNX CEE! 10 Ja naiffance des petits, mais avant qu'ils fuffent {ortis du trou, du moins avant qu'ils le fuflent tous. Le 3 Juillet, je trouvai des petits de nés, & en peu de jours toutes les couvées furent éclofes; l'incubation de ces der- niers fut un peu plus longue que celle de ceux de Fannée précédente, elle dura environ deux mois & demi. Lorfque les petits limaçons cherchent à fortir de leur prifon, & que pour cela ils commencent à caffer la coquille de l'œuf qui les renferme, ils ont trois tours entiers de fpirale *, ils rempliffent à peu près toute la capacité de l’œuf & font prefque ronds en naiffant : ils ne le font cependant pas tout-à-fait, leur plus grand diamètre eft celui de leur largeur, celui dont les extrémités fe terminent aux deux côtés de la plus grande volute ; mais fi-tôt qu'ils ent commencé à croïtre, fi-10t que leur coquille eft augmentée d’un tour de fpirale feulement P; le rapport de ces dimenfons change , & leur plussgrand diamètre eft celui de leur longueur, celui dont les extrémités fe terminent, lune au fommet de la coquille, & fautre à la bouche: cette quatrième fpire *, dont leur coquille eft augmentée alors, a prefqu'autant ‘épaifleur que les trois autres enfemble ; cette augmentation ne demande pas beaucoup de temps, les cinq à fix premiers jours après leur naifflance fuffifent pour cela, Les jeunes limaçons, comme ceux qui font dans un âge avancé, pañlent alternativement quelques jours à manger, & en paffent de même quelques-uns à fe repoler , pendant lequel temps, comme les grands, ils s'enfoncent en terre à une pro- fondeur proportionnce à leur taille, & y font à peu près dans les mêmes directions; ils ont auffi le foin de fe faire un petit opercule de cette mätière blanche, demi-tranfparente & friable, dont ils fe défont de la même manière dont nous avons déjà vu que les grands fe défont du leur. Pendant ces jours de jeûnes qu’ils obfervent avec la plus grande exactitude, l'animal ne prend aucun accroiflement : le nombre des fpires de fa coquille n'eft point augmenté, non plus que le volume de fon corps; mais le temps qu'il pafle à manger, compenfe bien celui qu'il fmble perdre pendant {on repos. En moins de deux * Fig. 4- Fig. s. S Fig. $;&. 5 Fig. 6. bFig, 6, a. 104 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE mois , il éft parvenu à avoir neuf tours entiers de fpirale *; c'eft alors qu'il eft arrivé au terme où il va perdre pour la première fois une partie de fa coquille. Le 25 Août, je pris fix de ces limaçons qui étoient prêts d'arriver à ce terme d'accroiflement & les plaçai féparément dans un poudrier, je les deftinai à m'inftruire de la manière dont ils caflent leur coquille, & ils m’apprirent ce qui fuit. Pendant l'accroiflement de la neuvième ou dernière fpire, l'animal retire peu-à-peu le bout de fon corps du fommet de la coquille , & parvient à laifler vuides trois {pires entières b, On s'en aperçoit aifément en mettant la coquille entre la lumière & l'œil, on voit alors que ces trois fpires font demi-tranfpa- rentes, tandis que tout le refle de la coquille eft opaque, opacité qui n'eft caufée que par le corps de l'animal qui le remplit. L'abandon de ces trois fpires fait par le corps de Fanimal, ne demande que trois ou quatre jours ; on ne fera pas étonné de cette promptitude, lorfqu’on fera attention que les animaux qui habitent les coquilles font de la clafle de ceux dont le corps eft capable d'un mouvement de contraétion & d'ex- tenfion ; on jugera même que le bout de fon corps, quoique fortant d'une fpire beaucoup plus petite que celle dans laquelle il va déformais être logé , doit remplir exaétement a capacité de cette dernière, parce qu'en diminuant en longueur, ül augmente dans le même rapport en grofleur ; il gagne d’un côté ce qu'il perd de l'autre ; il faut cependant pour cela que le ligament , qui attache l'animal à fa coquille, ait changé de place, qu'il fe foit avancé vers la bouche au moins d'autant de tours de fpirale que l'animal en abandonne; aufli Fa-t-il fait, & lon verra dans la fuite qu'il faut l'aller chercher, même beaucoup plus loin; mais le déplacement de ce ligament ne fe fait pas aufli promptement que l'abandon des trois {pires ; fe fait au contraire très-lentement , & l'animal y emploie autant de temps qu'il en emploie à croître. Lorfque le bout du corps de animal s'eft retiré autant qu'il le doit , lorfqu’il a atteint la quatrième fpire , al s'y fixe, & en peu de temps il eft à couvert ; la coquille ef refermée en DES SCIENCES. 105 en cet endroit ; il fe forme une cloifon * qui fépare la cavité * Fig. 13, « que l'animal a laiflée vide, de celle qu'il occupe & remplit ; alors les trois fpires abandonnées lui deviennent inutiles ; auffi ne tarde-t-il pas à s'en défaire; la coquille cafe d'abord fur le côté de la plus grande volute abandonnée P de celle qui Fig. 9,r. eft fa plus près du bout du corps de Fanimal ; le refte tient encore à la coquille, mais très - foiblement , & le plus léger frottement eft capable de le détacher ‘ l'occafion favorable ne tarde pas à fe préfenter ; le raboteux du terrain fur lequel il marche lui offre tout ce qui lui eft néceffäire pour cela; un petit grain de terre, contre lequel il appuie la partie de fa coquille qui doit être emportée , va finir l'opération ; il avance alors en tournant, comme s'il vouloit faire décrire à fa coquille un arc d'ellipl; le fuperflu de la coquille demeure accroché à ce même grain de terre; & de neuf tours de fpirale qu'il avoit auparavant , il demeure avec fix feulement “. Dans les ‘Fig. 7. derniers jours d’Août & les premiers de Septembre, les fix limaçons que j'avois mis féparément dans un poudrier le 25, parvinrent tous à cafler ainfi leur coquille. Tous ceux de la coquille defquels j'ai trouvé le bout café, fe font trouvés en même temps avoir leur coquille refermée dans l'endroit de la rupture ; on ne peut donc pas voir par quelle manœuvre fe fait cette clôture , fi on laïffe la coquille fe cafler d'elle-même, il faut ufer de violence ; je pris donc deux de ces limaçons , qui avoient commencé à retirer le bout de leur corps du fommet de leur coquille ; ils n’avoient encore abandonné que deux fpires; ces deux feules étoient tranfparentes, je les caffai, & dans Finftant l'animal retira le bout de fon corps & abandonna deux autres fpires; ce qui prouve que le ligament qui attache l'animal à fa coquille étoit déjà avancé au moins au-delà de la quatrième fpire ; je caffai de rechef ces deux dernières fpires abandonnées , & le bout du' corps de Vanimal fe trouva par-là à découvert, il étoit alors dix heures du matin ; à une heure après midi le bout du corps de l'animal étoit couvert d'une quantité affez confidérable d’une liqueur vifqueufe ; cette liqueur f deflécha peu à peu à la manière Mém. 1759. 106 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE des vernis, & à peu près comme celle qui fuinte des crifa- lides, & qui forme leur enveloppe ; cette liqueur féchée fait alors partie de la coquille, & ferme exactement l'ouverture qui a été faite par la rupture; dans les premiers momens cette efpèce de croûte ; formée par la liqueur féchée, eft auffi mince qu'on puifle limaginer, & fr fragile, que le plus léger attou- chement de la pointe d'une épingle eft capable de la rompre; peu à peu elle s'épaiffit, felon les apparences, par une addition de matière ; le lendemain , à fix heures du matin, elle étoit devenue auffi folide que le refte de la coquille , avec laquelle elle faifoit corps. Le commencement de Septembre eft le temps où M. de Reaumur ne manquoit jamais de partir pour fe rendre à fa Terre en Poitou ; j'eus l'honneur de fy accompagner, & mes fimaçons furent auffi du voyage ; ils n'avoient fervi trop à mon gré, pour que je les abandonnafle, & j'étois trop curieux de les voir parvenir à leur dernier terme d'accroiffement, pour ne les pas fuivre jufque-là ; le poudrier dans lequel je les- avois mis, fut placé de façon à ne point foufhir pendant la. route, & j'eus grand foin pendant tout ce temps - à de leur fournir la nourriture qui leur étoit néceffaire; les laitues ne leur furent pas épargnées, & ils en profitèrent ; ils avoient, comme je lai dit ci-deflus, fix tours de fpirale lorfque nous partimes , & à notre arrivée à Reaumur, ils {e trouvèrent en avoir fix tours & demi; de façon que pendant dix jours de route leur coquille avoit été augmentée d'un demi-tour ; après: être arrivés ils fe reposèrent pendant quelques jours, & re: commencèrent enfuite de nouveau à manger & à croitre.. Dans l’efpace d'environ quinze jours, c'efl-à-dire, dans les premiers jours d’Oétobre , les fept tours de fpirale fe trouvèrent complets; ce fut alors qu'ils fe préparèrent à caffer leur coquille pour la feconde fois; ils fe conduifirent cette fois précilément comme ils sétoient conduits la première ; ils commencèrent à retirer le bout de leur corps de la fpire dans laquelle il éoit logé, & en trois jours & demi ils parvinrent à en abandonner deux & demie; ces deux fpires & demie DES Sicon E wmicEis. To7 abandonnées devinrent fi fragiles, que le plus léger frottement étoit capable de les détacher du refte de la coquille ; elles fe rompirent fur le côté, comme la première fois, & dans l'endroit le plus «près du corps de animal *; un petit grain de terre auquel .elles furent accrochées par la même manœuvre qui avoit été employée à la première rupture, acheva de les détacher ; & -de Sept tours de fpirale qu'avoit l'animal cette feconde fois, äl ne fe trouva plus en avoir que quatre & demi b, Le 8 Oétobre, mes fix petits limaçons étoient réduits à ce petit nombre de fpires : on voit par-là qu'à mefüre que l'animal avance en âge , de volume de fon corps augmente , &c le nombre de-fes fpires diminue. Mes petits limaçons recommencèrent à manger & à croître, & ne mapprirent rien de plus pendant le refte de notre féjour à Reaumur ; nous en partimes le 22 d'O&obre, à notre or- dinaire, & arrivames à Paris la veille de la Touffaint ; je pris en-retournant les mêmes précautions que j'avois prifes en allant, & mes Jimaçons continuèrent à fe bien porter ; le lendemain de notre arrivée je n'eus rien de plus preffé que de leur rendre vifite; je des trouvai confidérablement crûs; leur coquille étoit augmentée ‘de trois quarts de tour de fpirale ; cette augmen- tation paroït. confidérable, parce que da dernière fpire fait préfque la moitié du volume de la totalité de da coquille ; quelques ‘jours après, 4e:tour de: fpirale ajouté à la coquille depuis la dernière rupture, étoit devenu:complet , & l'animal f trouva ‘en’ avoir cinq: & demi ; il {e prépara à caffer fà coquille pour la troifième fois ; il retira le bout de fon Corps, comme ilavoit fait précédemment, &'en trois jours il laiffa une fpire vide *; il { fixa alors, en peu de temps fa coquille fütiréfermée : «cette fpire abandonnée devint très - fragile & très -caflante , :& le plus. petit frottement Ja détacha foit. en entier, foit «par morceaux : cette troifième! fois , comme Ja {e- eonde , (a coquille avoit été. augmentée d’une -fpire ; mais au lieu de trois qu'elle.avoit perdues à la première , &cide deux & demie:qu'elle avoit perdues à la feconde ; elle n’en perdit qu'une cette dernière fois, 8&c1fe trouva en avoir, comme: après ka O ÿ LI = e Fig. 9, r. b'Fie. 8e ° Fig. 9, f * Fig. 10. BFig, 11: S Fig: 12. 108 MÉMoIREes DE L'ACADÉMIE ROYALE feconde rupture, quatre & demie * ; le 1 3 Novembre, mes fix Hmaçons eurent tous café leur coquille pour la troifième fois. Ils continuëèrent à manger encore pendant quelque temps, & enfin, au commencement de Décembre ils s’'enfoncèrent en terre, pour ren plus fortir qu'au printemps fuivant. Vers la fin de Mars 1754, mes limaçons commencèrent à donner des fignes de vie, je leur fournis les alimens né- ceflaires pour entretenir leur vigueur, & ils ne tardèrent pas à m'apprendre, par l'appetit avec lequel ils mangèrent, qu'ils avoient trouvé leur jeüne affez long: il eft bon de remarquer que j'avois toujours eu foin ( & c’eft une précaution néceffaire } de tenir leur terre dans une fraicheur convenable, en l'arrofant légèrement de temps à autre; ils mangèrent & fe reposèrent alternativement, comme ils avoient toujours fait, & dans l'ef- pace d'un mois ils accrurent leur coquille d'un tour entier de fpirale ; ils fe trouvèrent en avoir cinq tours & demi; ils caf- sèrent alors leur coquille pour la quatrième fois, ils s’y prirent de la même façon dont ils s'y étoient pris à la troifième ; ils abandonnèrent une fpire entière , laquelle fut rompue peu de jours après par les frottemens qu’elle effluya. A la fin d'Avril, mes fix limaçons furent réduits à n'avoir plus que quatre {pires &c demie ; ils continuèrent à croftre, & leur coquille fut encore augmentée dans l'efpace d'environ un mois d'un tour de fpirale, & diminuée d'autant par une cinquième rupture; de forte qu'au commencement de Juin ils fe trouvèrent encore réduits à quatre fpires & demie ©; ce fut-là leur dernier terme d'accroiflement , celui auquel ils font en état de multiplier leur efpèce ; peu de jours après ils s'accouplèrent & firent leurs œufs. | En fuivant tous ces différens termes, on-voit que depuis :le moment où leurs œufs ont été pondus , jufqu'à celui de leur accroïfement parfait, il s'eft écoulé treize mois & demi. durée que je ne préfume pas devoir être auffi longue, lorfque ces liinaçons font libres. dans la campagne, &. fur-tout dans le pays qui. leur eft propre , dans lequel ils ont un deyié de: chaleur fupérieur à.celui du pays que nous habitons. où mis X 82108 E INT SI SO NM: 109 Si nous faifons la récapitulation des obfervations précédentes, nous verrons que le jeune limaçon en fortant de fon œuf, a trois tours entiers. de fpirale * ;: que dans: tout le cours de fa vie fa coquille eft augmentée de dix fpires, & conféquemment qu'elle parviendroit à en avoir treize, fi Panimal la confervoit toute entière, auquel cas elle auroit un pouce onze lignes de longueur ; qu'il caffe cette coquille à cinq fois différentes b ; que lorfqu’il la cafle pour la première fois, elle a été augmentée de fix fpires ©, & qu'elle ne left plus que d'une à chacune des quatre autres fois qu'elle eft rompue ; que la première fois, dis-je, que fa coquille eft cafe, elle a neuf fpires entières 4, qu'elle en perd trois & en conferve fix *; que la feconde fois elle en a:fept,. qu'elle en perd deux & demie, & en.conferve uatre & demie !; que la troifième fois-elle en a cinq & demie, qu'elle en perd une & en conferve quatre & demie À, &c ainfi de la quauième À & cinquième fois * ; qu'enfin rendue au terme de fon accroiflement parfait , elle n'a plus que quatre tours & demi de fpirale !, qu'elle en a perdu huit & demi , & que fa longueur n'eft plus alor: que de treize à quatorze lignes. Le grand nombre de limaçons que j'avois eus de mes cinq couvées, & que je ne laiflois. pas d'obferver de temps en temps, m'a appris qu'il y avoit quelque variété dans ces dif- férens progrès : les uns ont café leur coquille un peu plus tôt, c'eft-àdire avant d'être parvenus à avoir neuf fpires entières, & d'autres un peu plus tard ; les uns ont perdu la première fois plus de trois fpires, & d'autres moins, & ainfi du refte;. mais, comme le plus grand nombre s'efl conduit de même que les fix auxquels je m'étois fixé, j'ai regardé cette progreffion comme la: plusordinaire, & c'eft celle que je me fuis attaché: à décrire. Jai voulu effayer une expérience qui ne m'a réuffi qu'en. partie, jai tâché de faire par. artce que la Nature fait en dif-- férentes efpèces de coquillages, favoir des coquilles chambrées;: fi javois pu réuflir à empêcher quelques - uns de mes: lima- gçons de cafler leur coquille, je {rois parvenu à en avoir qui: aurojent eu fix chambres ; j'ai penfé que je n'avois: befoin que O ii, ? Fig. 4 PEig.7,8,. 10, 11 &. 12. ° Fig. 6. 4Fig. 6. < Fig. 7> f Fig. 8. 8 Fig. 0. b Fig. 10. Fig. 11. k Fig. 12. Fig. 1. & 12. 110 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE de fortifier la coquille, où même feulement la partie qui doit fe rompre; pour cet effet, j'ai-pris un jeune limaçon qui n'a- voit que huit fpires :& qui n'en avoit pas encore daiffé de vides , je l'ai enduit de plufieurs couches de vernis qui ont donné du corps & de: la folidité àfa coquille. L'expérience a commencé par réuffir ; mais elle n'a pas été auflr loin que je Faurois fouhaité, elle n'a empêché qu'une feule fois la coquille d'être rœaffée. Le jeune limaçon qui'auroit dû perdre à da fin d’Août, jou au commencement de Septembre trois de fes pires, eft demeuré entier, Sc ce ne fut que dans les premiers jours d'Octobre que fa coquilie fut rompue pour la première fois :ilavoit alors dix fpires entières, & il en perdit tout d’un. coup plus de cinq, de forte -que cette perte fut équivalente aux deux premières de celle des autres ; fe morceau de coquille rompu le fut de telle façon qu'il me füt impoflible de voir s'il s’étoit réellement formé une cloifon éntre la troifième & h quatrième fpire; & fi, dans e'cas où fa coquille fe füt confèrvée entière elle eut été chambrée. Je ne fais fi c'eft : prévention; mais il m'a femblé que ce limaçon qui ‘avoit confervé une ‘portion de coquille qui lui étoit devenue inu- tile, ne marchoit pas avec autant d'aïfance que les autres; fr cela étoit réellement , comme je l'ai au voir, & qu'on püt faire en forte que le limaçon neicaflàt jamais fa coquille, ilfe pourroit faire qu'en le forçant à conferver les huit fpires &-demie dont il doit {e défaire pendant le temps de fon raccroiffement ; on le miît hors d'état de porter fa coquille, & conféquemment de maïcher, auquel cas la perte de cette partie de fa coquille feroit effentielle»à fon ‘bien-être. Si M. Klein avoit obfervé cette coquille (on pourroit dire même, s'il en avoit obfervé quelqu'une, de quelqu'efpèce de limaçon qu'elle fût ) il n’auroit pas avancé dans: fon ouvrage für la formation © l'accroiffement des coquilles, publié en 1753, premièrement que es jeunes coquilles ont autant de ‘tours de firale que lès aduhes de la même ‘efpèce (a). Mauroit vuique a) Jacobi Th. Klein Lucubra- | ‘cobribus tefiarum . ê7c. p. 17. In tidricula de formatione éremento-27 | hac cochlide (fafus-longus ) dfarrmm D'EINrSaCULE NIcEEIS0 MIN. art celle-ci fort de l'œufavec trois tours de fpirale feulement *, * Fig. 4. qu'elle en a quatre & demi lorfque Fanimal eft adulte, que »Fig.1&12. depuis le moment de fa naifance jufqu'à celui de fon accroif- fement parfait, elle en perd huit & demi; & qu'elle en auroit treize, fn elle les confrvoit tous, ce qui eft un nombre aflez différent de trois pour s'en apercevoix ‘aifément. Ea même chof arrive dans toutes les autres efpèces de coquilles, quoi- que le plus fouvent dans une moindre proportion, ce qui ne prouve pas moins fon peu d'exactitude dans obfervation. Secondement , il n'auroit pas avancé encore: que Ls premières Jpires des jeunes coquilles font plus petites que les premieres fpires des adules (b) ; auwroit vu que lorfque notre coquille eft pe cafiée pour la première fois * le morceau féparé 4 eft parfaite: à FR. & à ment égalen toutes fes dimenfions à une jeune coquille fortant de l'œuf, & conféquemment if n'auroit point avancé troifiè- mement que: Æs coguilles croiffenr proportionnellement en tous ns (c). La nôtre eft bien propre à prouver le contraire : lorf qu'elle fort de l'œuf *, comme je l'ai dit ci-deflus, fon plus < Fig. 4 grand diamètre eft celui de fa largeur, celui dont les deux extrémités fe terminent aux deux étés de la plus grande volute & dès fon premier accroiflement , dès qu'elle a été augmentée d’un tour de fpirale feulement f, fon plus grand diamètre eft r pig. s. celui de fa longueur, celui dont les deux extrémités fe terminent, Fune au fommet de la coquille , & l'autre à la bouche, ce qui ne peut arriver fans un changement total dans les proportions. veltrium linegrum , quâ partent pofe | -annorum,; flve illius diameter: [cru terioremt, nec plures, nec pauciores | pulym, five huj{s diameter uncias: Jint Jpiræ 7 feéliones, quan in fi | adæquerconfequenter dia priores fpi-- mili cochlide longirudinis pedulis, » ræ cochleæ juvenis minores funt prio=- 1 Pag. 28. Minima cochlèa in ovo.| ribus fprris duchus cochleæ adulræ. . tovidem habet fpiras, quot haber ad (c) Idem, pag. 292. Mammæ —- proveétan æratem cochlea devolura. | ex ovo — fi conferantur cum aduttiss.- Pag. 209. Cochlea ‘adulra non | deprelindemus ipforum turbines cum plures nunerabic cirumvoluriones,, | ventre. ita Je habere ad. adulrgrum Lim cochlea:ex incunabuls. | zurbines ventrefque, prour Je habent (D) Hem, pag.17. Hnfiniré itaque | ‘corpus pedefque fwrus hümani duo- (ut ita cim vuloo loquar) minôres | rum vel situ menfitun , érot gigan=- Jnt fpiræ ex Gr. cochleæ èx ovo, | tèin, in cujns moleméxchfus færus: Pre Jpiris cochleæ trium vel-quaruor | tandem excreyit. cu 112 MÉMoires DE L'ACADÉMIE ROYALE M. Klein avance encore que dans towes les coquilles l'animal demeure confflamment attaché à la premiere fpire, à quelqu'äge qu'il for, quelque longue que Joit fa vie, für-elle même de cent ans (a), & que la vie de l'animal dépend de la confervation de cette premiere fpire (b). Le contraire de ces deux propofitions eft prouvé évidemment par la coquille dont il eft queftion, car premièrement elle perd non-feulement fon premier tour de fpirale, mais elle en perd huit & demi dans tout le cours de la vie du limaçon, & cela fans que l'animal en fouffre en aucune façon, fa vie ne dépend donc pas de la confervation de la première fpire. Secondement, cette perte de la plus grande partie de la coquille ne peut fe faire fans un déplacement confidérable du ligament qui attache l'animal à la coquille, il ne faut donc pas toujours le chercher à la première {pire, à quelqu'âge qu'ait l'animal; nous avons vu de plus qu’il faut le chercher béaucoup plus loin pour peu que l'animal ait pris de l'accroiffement , puifque lorfque j'ai caffé la coquille de mon limaçon avant le temps où elle devoit fe rompre d'elle-même, l'animal s'eft dans l'inflant retiré, & a aban- donné deux fpires , auxquelles il n'étoit fürement pas attaché, Mais ce déplacement du ligament n’eft pas particulier à notre coquille; il lui eft commun avec le plus grand nombre des autres efpèces. Pour peu qu'on en ait obfervé, on aura vu qu'il n’y a aucun lieu de douter que le ligament qui attache l'animal à fa coquille n'augmente en volume, & ne change continuellement de place à mefure que l'animal croît. Ce fait eft prouvé très-évidemment par le limaçon dont il s’agit, qui dès la prémière fois que fa coquille fe cafle, perd au moins (a) Idem, pag. 39. Mufculus — in cochlea, æquè ac in aliis auima- libus teffaceis, non habitä æratis ratione, conffanter in Jpira teflæ prima quærendus, Idem, pag. 40. Mufculus vel Jfuniculus à punéo extremo dependet , non aliundè; pofterior illa corporis pars autem exquifitè fpiralis eft, ut neceffario in punélum primæ fpiræ , teflæ incurrat ; linc impoffibile pror- Jüs eft quod illud fpiræ mollis punc- tun, non aliundè dependens , tranf= cendere poffit fpiram teflæ fecundam, etfi centum annos vixerit animal, (b) Idem, pag. 41. 4b ill iraque quod dixänus punéum prime fpiræ , ejufque falute , vita animalis, gufque vegetatio dependet. toute PE EEE: DES SCIENCES. 113 toute celle qu'il avoit en naiflant, & qui perd par conféquent la partie de la coquille à laquelle fon ligament étoit attaché lors de fa fortie de l'œuf. Mais comment ce déplacement fe fait-il? c’eft ce que j'ignore entièrement, & ce qu'il me paroît impoffible d'apprendre par l'obfervation , car pour cela il fau- droit caffer la coquille & devant & derrière l'endroit où le ligament eft attaché, ce qui feroit encore une précaution inu- tile, puifqu'alors l'animal feroit dans un état de langueur, qui l'empécheroit de croître, & il demeureroit tranquille jufqu’à ce ue les deux fractures fuffent fermées, ce qui inettroit les yeux de l'Oblférvateur dans le même cas où ils étoient avant la rup- ture de la coquille. Voilà cependant comment j'imagine que ce déplacement peut fe faire. Je fuppole que le ligament croifle en avant, c'eftà-dire, du côté de la bouche de la coquille, de l'épaiffeur de deux cheveux, & que dans le même-temps il diminue, ou pour mieux dire il fe defléche en arrière, c'eft- à-dire, du côté du fommet de {a coquille , de l'épaiffeur d'un cheveu , de façon que dans un temps déterminé fon volume fera augmenté de l’épaiffeur d'un cheveu, & la totalité du ligament fera avancée d'autant vers la partie antérieure, vérs Îa bouche, & ainfi de fuite jufqu’à ce que l'animal foit rendu au terme de fon accroiffement parfait. Ce ne font-là à la vérité que des conjeétures, mais qui font du moins fondées fur un double fait, favoir que le ligament qui attache animal à fa coquille aug- mente en volume à mefure que Fanimal croît & qu'il cccupe une plus grande furface fur les parois intérieures de la coquille, & que ce même ligamént fouffre un déplacement confidérable. EXPLICATION DES FIGURES. our 1. Le Limaçon rerdu au terme de fon accroiffement parfait. Fig. 2. Son opercule. Fig. 3. Son œuf. Fig: 4. Le jeune limaçon fortant del’œuf: il n’a alors que trois tours de fpirale. Mém. 1759. p 114 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Fig, ÿ+ Le jeune limaçon , dont la coquille eft augmentée d'un tour de fpirale; 4, cette dernière fpire a prefqu'autant d'épaif- feur que les trois autres enfemble. Fig. 6. Le limaçon , dont la coquille a été augmentée de fix fpires, elle en a neuf; 4, les trois fpires abandonnées par le bout du corps de l'animal, & qui paroïfient demi-tranf- parentes. Fig. 7._Le limaçon qui a caffé fa coquille pour la première fois, il ne lui refte plus que fix fpires. Fig. 8. Le limaçon qui a caffé fa coquille pour la feconde fois, il ne lui refte plus que quatre fpires & demie. Fi. 9. Le limacon qui commence à caffer fa coquille pour la troi- ge 9 ES nr CRE taie à É pe É fième fois, il a cinq fpires & demie ; f, la fpire abandonnée par le corps de l'animal ; 7, commencement de larupture. Fig. 1a. Le limaçon qui a café fa coquille pour la troifième fois, il ne lui reite plus que quatre fpires & demie , la bouche de fa coquille eft fermée par fon opercule ; 0 , l'opercule. Fig. 11. Le limaçon qui a caffé fa coquille pour la quatrième fois, il ne lui refte que quatre fpires & demie. Fig. 12. Le limaçon qui a caffé fa coquille pour la cinquième & dernière fois , il ne lui refte encore que quatre fpires & demie; le voilà rendu au terme de fon accroiffement parfait. Fig. 13. Le limaçon de la fg. 12 vu par le bout, afin de faire voir la cloifon formée entre la partie de la coquille qui de P "re demeure , & celle qui a été rompue ; «, cette cloifon. | Meèm.de lAc.R.des Je.1769. Pag n4.Pl 3. DYELSL:S CIRE 'N CES 11$. ME MOT R'E SUR LA COMÉÈTE DE 175, Dans lequel on donne les périodes qu'il eff lesplus à propos d'employer , en faifant ufage des obfer- vations faites fur cette Comète dans les quatre dernières apparitions. Par M. CLAIRAUT. ] ORSQUE l'on ne connoît pas le temps de la révolution 50 Juin d’une Comète, on prend pour une parabole là petite 1752: paitie de fon orbite pendant laquelle on l'a obfervée; & dans cette fuppofition on en détermine Ja théorie par des méthodes connues aujourd'hui de tous {es Aftronomes. On fe contente de cette détermination dans fhypothèfe parabolique, parce que les obfervations pendant une feule ap- parition ne fourniffent pas le moyen d'en employer une plus exacte, & que d'ailleurs elle ne peut pas écarter. fort fenfi- blement de la vérité. _ Dans le cas où nous fommes maintenant, qui eft le même que celui où Halley fe trouva après la précédente apparition de Ja Comète de cette année, il eft permis d'être plus difficile à contenter, & de vouloir faire entrer dans l’ufage des obfer- vations , Fhypothèfe elliptique qui eft la vraie: mais il faut pour cela faire quelques changemens à la méthode ordinaire dont le fondement eft cellé de Newton. . M. abbé de la Caille qui avoit déjà perfc@ionné cette méthode pour lhypothëfe parabolique, propof il y a quelque temps un moyen de Ja rendre propre à l’hypothèle elliptique, en faifant quelques corrections aux obfervations par lefquelles elles deviennent celles que l'on auroit eues, fi la Comète sétoit mûe dans une parabole dont les élémens feroient les mêmes | Pi 116 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE que ceux de l'orbite réelle. On a déjà fait avec fuccès quel- ques tentatives de cette ingénieufe méthode, Halley avoit eu le même problème à réfoudre, lorfqu'après avoir calculé les élémens de la Comète de 1682 par lhypothèle parabolique, il les a rectifiés en employant la belle découyerte qu'il venoit de faire de la période de cette Comète ; il n'a point donné la méthode qu'il avoit employée pour faire cette correction, que M. F'abbé de la Caiïlle fait d’une manière fi fimple; mais il avertit feulement qu'il a employé une ellip{e, dont la période étoit de 75 + ans, c’eft-à-dire, moyenne entre es deux périodes qu'il avoit conflatées par les obfervations. On voit affez qu'en fubftituant l'ellipfe de 7$ Z ans à la parabole, la détermination des élémens &tous les calculs doivent en devenir plus exacts; mais efl-ce cette période qu'il eft le plus naturel d'employer, & dont on doit efpérer le plus de juftefle dans les circonftances préfentes? eft-on fondé même à croire que c'étoit la meilleure qu'Halley püt prendre en employant fes obfervations , & celles de 1 $ 31 & de 1607! On me répondra peut-être qu'il n'importe guère qu'on prenne pour la vraie période celle de 75 + ou 76, ou 76 + ans, puifque dans la fuppofition mème d'une période infinie ou de la parabole, les élémens ne font pas déterminés d'une manière fort défectueufe. A cela je répondrai que, comme les Aftronomes de ce fiècle, & fur-tout ceux de l’Académie, ont pouflé très-loin le fcrupule dans leurs obfervations & dans l'ufage qu'ils en font, il eft convenable de concourir à leur précifion, en examinant celle de toutes ces périodes qui doit en apporter le plus dans le calcul, J'ai donc cru faire une recherche agréable aux Aftronomes , en examinant cette queftion par les principes que j'ai établis dans ma théorie des perturbations des Comètes, Cet examen m'a coûté peu de travail, parce que les calculs que j'avois faits pour déterminer , par la théorie, les inégalités des périodes , renfermoient prefque tous ceux dont j'avois befoin D'E SI. S0C'LE NC Æfs:0 Ml! 147: dans cette nouvelle queftion ; voici la manière dont je l'ai, traitée. | D Après avoir vu, foit par ma théorie, foit par des confidé- rations générales fur les perturbations mutuelles des corps cé: leftes, que les planètes de Jupiter &de Saturne ne pouyoient; pas produire de grandes altérations à l'arc que la Comète décrit, pendant le temps où l'on peut l'obferver utilement ; Jai reconnu que cet arc pouvoit être pris , fans erreur fenfible, poui celui de l'ellipfe qui auroit lieu , fr la Comète en partant du périhélie avec la vitefle réelle qu'elle y a, n'étoit plus attirée ni par Jupiter ni par Saturne. La queftion ft donc réduite à trouver la vitefle réelle de: Ja Comète au périhélie, ce qui peut fe:tirer facilement de ma théorie; car, puilque j'ai enfeigné à trouver la quantité dont les planètes de Jupiter & de Saturne altéroient chacune des trois révolutions, il eft évident; qu’en retranchant faltération. d'une période quelconque, du temps entier de cette période qui eft donnée par les obférvations, il vient ce qu'elle auroit été fans la perturbation, ou, ce qui revient au même, Ja ré- volution düe à la feule vitefle du périhélie & à {a force du Soleil. Ayant donc trouvé par mes calculs, que l'action totale de Jupiter pendant la période de 15 31 à 1607 avoit été de la raccourcir de 8,4 jours, & que celle de Saturne avoit été une accélération de 177,4 jours, j'ajoute ces deux quantités, & j'ai environ 186 jours pour l'accélération totale que les deux aftres ont produit pendant toute cette période ; mais cette période a été, fuivant ce que les obfervations nous apprennent, de 76 ans & 52 jours. Donc la période cherchée, ou celle qui auroit eu lieu fans aucune action étrangère, eft de 7.6, ans + 5 2 jours + 186 Jours, ou 76 ans + 238 jours; donc la période à employer pour faire l'ufage le plus convenable des obfervations de 1531, eft celle de 76 ans & environ 4 mois, fauf les erreurs qui peuvent réfulter de la détermination des périhélies de 1531 & 1607 , dés négligences daps le calcul de la perturbation, P ii 118 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & de la fuppofition: qu'il n’y a d'autres caufes d’altérations, que les forces de Jupiter & de Saturne, Quant à la période qui auroit lieu fi la Comète partant avec la vitefle qu'elle a eue au périhélie de 1607, n'avoit plus été f6ümile qu'à l'action du Soleil, elle fe peut tirer des mêmes calculs par lefquels j'ai déterminé Faction de Jupiter & de Sa- turné pendant la même première période ; car les opérations, par lefquelles j'ai, à chaque inflant de cette période, Faltéra- tion qui a eu lieu depuis le périhélie jufqu'à cet inflant , m'ap- prennent en même temps la quantité dont le mouvement moyen à été alteré, ou, ce qui revient au même , le diamètre, & la période de la nouvelle ellipfe que la Comète eft prête à décrire dans ce même inflant. Par ce calcul, j'ai vu que l'effet total de l'action de Jupiter pendant toute la première période avoit été de diminuer Ja moyenne diflance de la quantité qui répond à une accélération de 30,5 jours fur toute la période; j'ai vu de même que l'aétion de Siturne avoit acceléré le moyen mouvement , de manière à rendre la feconde période plus courte que la première de 152,7 jours ; donc, en vertu de cette double accélération , la feconde période cherchée doit être plus courte que la première, de 183 jours: mais nous venons de voir que la vitefle au pé- rihélie de 1531 étoit telle, que la période naturelle eût été de 76 ans & 238 jours ; donc celle qui feroit dûe à la vi- teffe du périhélie de 1 607, eft de 76 ans + 238)— 183), c'eft-à-dire, de 76 ans + $ 5 jours. J'ai une feconde détermination de cette même période, ui am’eft fournie par le calcul des altérations caufées pendant la période de 1607 à 1682 ; l'eflet de la première de ces deux planètes eft une accélération de 420 jours ; celle de la feconde, une accélération de 8 ; ce qui fait une accélération totale de 428 jours; mais la durée de cette révolution a été 7 $ ans — 42 jours; ajoutant donc 428 jours à cet intervalle, nous aurons 7 6 ans —- 21 jours pour la révolution cherchée , dûe à la viteffe dans le périhélie de 1607. Cette feconde détermination diffère de 34 jours de la DES Y8 C4 JE ANG 25 y 4 re M 419 première ; quelque peu importante que puifle être cette dif- férence fur l'objet total , j'en diminue l'incertitude en prenant un milieu & en faifant la période cherchée de 76 ans & 38 jours. Il me paroït affez naturel de faire la même cowetion de 17 jours au temps de la période qui convient au périhélie de 15,313 donc on peut prendre pour cette période , celle de 76 ans +- 221.jours. Pour déterminer la période relative au périhélie de 1682, je fuis le même procédé , en faifant ufage du calcul de l'action des deux plinètes de, Jupiter, & de Saturne pendant l'efpace de 1682 à 1759, & de la révolution obfervée de 76 ans —- 180 jours; or, comme les aétions de Jupiter & de Sa- turne ont été très-fortes pendant cette période, & que leur fomme eft montée à 309 jours d'accélération ; la période cherchée eft donc de 76 ans + 489 jous, c’eft-à-dire , de 77 ans + 124 Jours; je recalcule enfuite cette miêmé ré- volution par la feconde méthode, en partant de h révolution qui convient au périhélie de 1607, à laquelle j'ajoute l'alté- ration totale que lé mouvement moyen a reçu pendant toute la période de 1607 à 1682, laquelle altération, par -ma théorie, fe trouve être de 493 jours; par ce moyen j'ai 77 ans +149 jours pour la feconde valeur de fa période cherchée,. d'où, par un milieu, 77 ans +- 136 jours font la période quil faut employer pour les obfervations faites en 1 682. Venons maintenant à la période dont il eft à propos de faire ufage pour les obfervations de cette année: nous n'aurons pas, comme dans les cas précédéns , deux méthodes différentes. pour le même objet, parce que le retour prochain n’eft pas encore calculé & encore moins obérvé ; il y à même un autre défavantage plus confidérable pour le préfent ,. c'eft que Le calcul que j'ai fait .pour Faétion des planètes dans les dernières paities dé l'orbite, celle qui eft comprife depuis: le point où la Comète étoit à f& moÿenne diftance en 1 75 T4. jufqu'au périhélie dernier, eft aflez défectueux , parce qu'en calculant l'action de Jupiter, javois fuppofé le péihélie au 15 Avril, & que dans le même calcul pour Saturne que: 20 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE. javois fait beaucoup plus anciennement, j'avois fuppofé 1é périhélie au milieu de l'année 175 8 ; or ces fuppoñitions qui n'ont pas pu caufer d'erreur fort fenfible dans l'altération des dernières parties de la période paflte, peuvent influer beau- coup plus confidérablement fur la durée de la période fubfé- quente; cependant je ne puis pas croire qu'avec tous ces in- convéniens, il y ait deux mois d'erreur à craindre dans la révolution que j'ai trouvée en partant de mes anciens calculs : j'en vais donc donner le réfultat en attendant que je revienne fur cette partie de travail , ainfi que fur quelques ütres, dont la perfection peut rendre toute ma théorie plus complette & plus d'accord avec les obfervations qu'elle n'a encore été. Ce réfültat que j'offre maintenant aux Aflronomes , fmon comme le plus exact, du moins comme plus conforme à la Nature, que ne peut l'être la période de 7 $ + ans, donne 76 ans & plus de 10 mois, ce qui fait une’ différence d'environ 16 mois, & mérite, ce me femble, qu'on y ait égurd, RENC- ALBELOT Ut LS ATH TION. Les elipfes qu'il eft le plus à propos de fubflituer à la parabole , en employant les obfervations, font celles dont les révolutions font les fuivantes : En 1531, de 76% + 221% En 1607, de 76 + 37: En r1082,4d 77 + 136. En 1759,, de.76.... 1 311e MEMOIRE / DES SCIENCES, 250 ‘4 M É MOIRE .SUR LE CARACTÉRE SPÉCIFIQUE ; DES MPLANTES Par M. GUETTARD. | dé s Botaniftes fe font toujours beaucoup plus appliqués à déterminer quelles font les parties des Plantes qui peuvent fervir à en établir le caractère générique, qu'ils n'ont tourné leurs yeux vers celles qu'on devoit employer pour fixer la vraie marque à laquelle on doit diftinguer une plante d’une autre qui lui eft congénère: on diroit même qu'ils ont regardé cette partie de la connoiffance des Plantes, comme une conféquence de la première, & qu'il étoit facile à toute perfonne de tirer d'après fes propres réflexions; ils ont, pour ainfi parler, laifé à chaque Botanifte la liberté de déterminer ce caractère à fa fan- taifie: on pourroit dire qu'ils ont penfé qu’il ne dépendoit pas plus, d'une partie que d'une autre; la plupart même femblent avoir cru qu’il étoit indifférent de fpécifier les Plantes par une pro- priété qui fût de leur effence, ou par une qui leur fût commune avec beaucoup d'autres fubftances entièrement différentes. I leur a femblé peu important qu'une plante fût reconnue par telle ou telle partie, qu'elle le fût par une qualité interne ou par une externe , qu’elle le fût par la qualité du terrain où elle fe trouve, qu'elle le füt même par la place qui lui auroit été affignée dans leur ouvrage; ils ont, à ce qu'il paroit, regardé la marque à laquelle on devoit reconnoître une plante comme une chofe indépendante de toute règle exaéte, & que tout gne qui pouvoit rappeler l'idée d’une plante dans la mémoire d'une perfonne qui auroit déjà vu cette plante, avoit tout ce qui. étoit néceffaire pour être adopté, & qu'il étoit inutile de s'arrêter à.une exactitude philofophique qu'on pouvoit, qu'on Re UT | - 21 Juillet 1759-- 122 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE devoit même dans cette occafion regarder comme une vraié minutie. IL s'agit, ont-ils dit, de-connoitre les Plintes; &c qu'importe que ce foit d’une façon ou d’une autre? qu'on fuive en cela les règles d'une mémoire artificielle ou celles d’une fcience {cru- puleufe & didaétique ; y a-t-il plus à gagner d’un côté que de l'autre; connoïtra-t-on mieux la plante d'une manière que de l'autre? Il y en a même qui ont été jufqu'à avancer qu'il feroit beaucoup plus utile de décrire dans le plus grand détail chaque plante en particulier, & de donner à ces plantes un nom indépendant de toute marque extérieure & de toute propriété ou vertu intérieure, Qu'on diftingue, ont-ils dit, la bétoine qui fe trouve le plus communément dans notre pays, de celle qui vient dans les Alpes, par cette feule différence d'être de lune ou de l'autre contrée? qu'un iféron foit appelé /féron conmun où liferon purgaïif, ces dénominations ne font-elles pas: plus que fufffantes, pourvu qu'elles fervent à ce que lon fe propofe en les admettant ? D'autres Botaniftes ont été plus loin encore, ils ont avancé qu'il feroit à fouhaiter qu’on eût fait entrer, dans les dénominations des plantes, leurs propriétés, plutôt que celles qui défignent les parties de ces plantes : n'eft-ce pas, ont-ils fouvent répété avec emphale, un avantage des plus grands, que de favoir fi une plante éft commune ou fr elle eft rare, {1 elle eft du pays qu'on habite ou fi elle n'en eft pas, fi elle ft purgative ou céphalique, ou fi elle a quelqu'autre vertu ? & n’eft-il pas d'une très-grande utilité d'apprendre ces qualités, en fe fixant dans la mémoire une dénomination de ces plantes? Toutes ces raifons peuvent, à quelques égards, être bonnes; mais {ont-elles les meilleures , & doit-on les préférer à celles que donnent les Auteurs qui veulent qu'on caraétérife les Plantes par des propriétés indépendantes du pays, des vertus; de la culture ou d’autres objets femblables? Ces derniers rai- fonnent ainfr : il faut avoir égard à une feule chofe, en formant le caraétère fpécifique d'une plante; on ne doit fe propoler que de mettre toute perfonne, qui ne Fa jamais vue , dans Js x | DE su :8/C LE N.C.E.S. Tan cas de la pouvoir reconnoître au caractère qui lui à été afligné; conféquemment à ce principe , ils demandent fi la propriété étre des Alpes ou des environs de Paris, d'être émolliente. ou cauftique, de fervir à faire des balais ow d'entrer dans teinture , peut tre de quelqu'utilité à quiconque voit la plante en queftion pour la première fois. On donne au Leéteur, par ce moyen, une idée com- plexe au lieu d’une idée fimple & difcrète qu’on devroit lui fournir ; quellés traces ces mots peuvent-ils laifler dans le cerveau ? s'ils y en laïflent, ce n'eft certainement pas par eux-mêmes ; elles ne font dûes qu'aux autres propriétés qu'on aura peut-être fait entrer dans les dénominations de ces plantes, ou à celles qui auront frappé l'imagination en examinant ces mêmes plantes ; on fe rappelle, au moyen de celles-ci, que es plantes qu'on revoit de nouveau, font celles qu'on a défi- be par les propriétés qui leur font communes avec bien d’autres; on fe rappelle que telle plante qui eft en partie ca- raétérifée par ces dernières qualités, a auffi celle d'être purgative, céphalique , antihyftérique ou cauftique , a celle de fournir des parties colorantes ou de n’en point avoir ; de plus, fi l'on n’a fait entrer dans les dénominations que des propriétés intérieures , ou que de celles qui font en quelque forte étrangères aux plantes, fera-t-il trop poffible de reconnoître ces plantes par la fuite ? à quoi peut fervir à cet effèt la dénomination de cette efpèce de geneft, qu'on a appelé geuef?, qui fert à tcindre dr qui efl d'Allemagne ! que peuvent laïfler ces mots dans la mémoire? ne faut-il pas qu'en même 1emps la perfonne à laquelle on dit cette phrafe , fe repréfente une plante dont les feuilles font étroites, oblongues, & dont les fleurs. font réunies au bout des branches en forme d'épi ferré. N'eft- ce pas au moyen de ces dernières propriétés, que cette perfonne fe rappelle, dorfqu'elle revoit ce genelt, que c'eft celui qui a été nommé geneff, qui Jens à tindre 7 qui eff d'Allemagne ! pourquoi ne lui pas donner d’abord l'idée de la chofe même, & laiffer à fa curiofité le foin de procurer les autres qui doivent tou- jours fuppofex la première. 1 faut dans la sn: À comme = 124 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE dans toutes les autres Sciences, procéder du fimple au compolé. Il feroit, à ce que je crois, fuperflu d'objecter qu'il eft plus utile de donner en même temps plufieurs idées, que de n'en procurer qu'une; cela feroit vrai, fi cette pluralité d'idées pouvoit réellement fervir à fixer celle qui doit faire cohnoître la plante, mais ces propriétés étant , fi on peut parler ainfr, immatérielles , elles ne peuvent faire reconnoître le corps auquel on les attribue comme caraétère fpécifique; on peut même dire plus: ces dénominations font plutôt propres à jeter la confufion dans Fefprit qu'à l'éclairer, à mettre dans l'incertitude qu'à fixer l'idée de celui qui trouve pour la pre- mière fois ces fortes de plantes; s'il rencontre, par exemple, dans les environs de Paris le geneft des Teinturiers, & qui vient en Allemagne , n'eft-il pas auffitôt embarraflé; il a dû penfer en apprenant la dénomination de ce geneft, qu'elle n'avoi été faite ainfi, que parce que ce geneft étoit propre à l'Alle= magne, de-là il avoit dû en quelque forte l'exclure des autres pays ; il doit donc être, dans le cas préfent, en une forte d'em- barras fur la détermination de cette plante; il ne s'y trouveroit pas sil avoit d'abord eu dans la mémoire un caraétère qui n'eût été formé que des propriétés extérieures & invariables des parties de cette plante. Ce feroit-là fans doute l'avantage le plus grand, & quiconque pourroit le procurer aux Botaniftes , auroit atteint la perfection dans cette partie de la connoïffance des Plantes ; mais rien en ce genre de plus difficile , cette difficulté eft immenfe, elle eft telle qu’elle a fait prefqu'abandonner à certains Botaniftes le deffein d'y travailler, & les a portés à defirer que chaque plante eût un nom propre, & même que ce nom n’eût aucun rapport de convenance avec quelque partie de la plante ; ils s’'appuyent fur ce principe, vrai en Îui-même, qu'il eft difficile, pour ne pas dire impoffible, d'afligner à une plante quelconque un nom relatif à une partie de cette plante, qui ne puiffe l'être à E DES Se NE Nic ES; Mes admettré des milliers de noms plus barbares les uns que les autres? qu'eft-ce qui voudroit entreprendre de mettre dans fa tête au moins cinq à fix mille mots qui n’auroient aucun rapport les uns avec les autres, & que la vue des Plantes ne pourroit pas rappeler à la mémoire. Il en feroit à peu près de ce projet, comme de celui par lequel on propoferoit de donner à toutes les Étoiles connues des noms particuliers , au lieu de les arranger fous différentes conftellations, qu'on défigne par des noms qui peuvent avoir un rapport plus ou moins éloigné avec quelque chofe de connu : quel travail pénible & probablement infruétueux , M. l'abbé de la Caille * nauroit-il pas donné aux Aftronomes, fi, au lieu * 1. 45 4e. de ranger fous quatorze confiellations un grand nombre des . bee neuf mille huit cents Étoiles qu'il a obfervées au Cap de amé 1751, Bonne-Efpérance, il eût donné à toutes ces Étoiles un nom Fe si SEE propre, feroit-il poffñble de tirer d’un travail auffr utile que 6 é le fien, tout l'avantage que Aftronomie doit en attendre? ne fera-t-il pas plus aifé, en retenant les quatorze noms qu'il a aflignés à ces conftellations, & Ieur pofition dans le Ciel, de retrouver les Étoiles qui les compofent, qu’il n’auroit été de débrouiller ces Étoiles & de les diftinguer les unes des autres, s’il {e fût contenté de les nommer toutes, & de fixer l’endroit du Ciel où elles font placées ? quand il l'auroit fait, fon travail auroit encore cet avantage au-deflus de celui du Botanifte, qu'il auroit déterminé le point où ces Étoiles feroient aifément re- trouvées, au lieu que le Botanifte ne pourroit fe flatter d’un avantage pareil; les Plantes étant répandues çà & là fur la furface de la Terre, on fe trouveroit continuellement plongé dans un cahos impraticable. Le projet de donner à chaque Plante un nom , au lieu de la caraétérifer par quelques-unes de fes propriétés invariables , en réduifant les noms à ceux des genres, eft donc, à ce qu'il me paroît, un projet auflr peu propre à éclairer & à faciliter la Botanique, que le feroit pour l'Aftronomie celui dont je viens de parler ; encore , fi les Botaniftes fectateurs de cette prodigieufe nomenclature , vouloient des noms qui défignaffent : Q ii 326 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE quelques propriétés des Plantes auxquelles ils auroient été donnés, on pourroit peut-être foufcrire, du moins en partie, à leur fentiment, mais il s'en faut de beaucoup qu'ils penfent ainfi, &, comme je l'ai dit plus haut, ils peuvent avoir raifon dans bien des cas. En effet, il y a peut-être peu de noms auffi heureufement trouvés que celui de cette plante que nous connoiffons depuis peu en France, & que les Efpagnols appellent zeroruna ; ce nom ne lui a été donné que parce que fon fruit eft contourné comme left un tire- bourre; cependant toute perfonne qui fauroit ce nom fans connoître la plante qui le porte & le pays d’où elle vient , pourroit très-aifcment l'appliquer au fruit de nos luzernes, qui ont aufli la forme de cet inftrument : il eft vrai que ce fruit eft moins alongé que celui de la rerortuna, mais cette différence ne pourroit empêcher l'application, puif qu'il y a, comme tout le monde fait, des tire-bourres qui ont un plus grand ou un plus petit nombre de pas de vis ; nom eft donc équivoque, & doit être plutôt rejeté qu'admis, puifqu'il peut occafionner une confufion toujours très à craindre dans tout genre de Science, & fur-tout en Botanique où l'on eft obligé d'en apprendre un nombre déjà fi confidérable , & qu'il feroit à fouhaiter qu'on pût le réduireau lieu de l'augmenter, comme if paroît qu'on seforce de faire, Après ces exemples il eft, à ce que je crois, inutile d'en rapporter au fujet des propriétés médicinales , propriétés qui ne dépendent que d’un ufage reconnu par des expériences. répé- tées. Au fujet de celles qui ne font düûes qu'au terrain ou au pays dans lequel ces Plantes naiffent , qu'à la rareté ou à l'abondance avec lefquelles on les rencontre, qu'à la culture ou à la non- culture qu'elles ont trouvées dans les foins des hommes ; tous les mots qui défignent ces propriétés font au moins fuperflus dans les dénominations des Plantes : il n’y a pas de doute-que moins les dénominations feront longues, & fr elles font longues, plus elles feront compofées de mots qui exprimeront des propriétés fenfibles & permanentes , plus elles feront faciles - & pour les Botaniftes habiles & pour les Commençans. DES SCIENCES. 127 Tout le monde convient de cette vérité, même les Partifans des dénominations qui ont les défauts dont on vient de parler ; mais après cet aveu , il faut auffi en faveur de ces derniers, que les premiers conviennent de toute la difficulté qu'on trouve dans leur fentiment, pour moi j'en fuis déjà convenu plus haut : on eft en effet dans un très-grand embarras , lorfqu'on cherche à découvrir quelle eft cette propriété déterminée qui doit fixer idée qu'on doit prendre d’une plante, lorfqu’on la voit pour la première fois. s Cette propriété eft auffi difficile à fixer que left celle qui nous fait diftinguer une perfonne d'une autre : il y a dans les plantes un certain je ne fai quoi, qu’on, peut appeler te port de la plante, comme on a appelé ce je ne fai quoi qui dif- tingue un homme d'unautre, le port, la preftance d’un homme; c’eft ce port, cette preftance qu'il faudroit tâcher de peindre , fr on peut parler ainfr , dans les dénominations qu'on donne de chaque plante; & comme il ne confifte peut-être que dans un trait, c'eft ce trait qu'il feroit néceffaire de découvrir & d'arrêter, toute perfonne qui aura étudié la Botanique , avouera fincèrement . qu'il eft difficile à faifir : je fens cette difficulté autant & peut-être plus qu'un autre ; j'avouerai même que je ne prétends pas tant faire voir dans ce Mémoire quel ileft, que de montrer quel il n'eft pas, je veux dire, que je ne déterminerai pas tant quelles font les propriétés des plantes qui doivent défigner 1e caractère fpécifique, que celles qui ne le doivent pas, mais ce fera déjà avancer vers le but qu'on doit fe propofer d'atteindre, que d'écarter une partie des obflacles qui peuvent empécher d'y parvenir. | | * Les Auteurs qui fe font attachés à chercher dans les parties feules des plantes, les propriétés qui peuvent les caraétérifer , ont fait choix de la figure de ces parties, de leurs dimenfions, de la pofition qu'elles ont relativement les unes aux autres, ou à celles de quelques autres efpèces du mêmegenre ou d’un genre différent , des accidens qui pouvoient-leur arriver, & de quelques autres propriétés , comme d’être fucculentes , sèches; crénelées, dentelées, liffes, velues & autres fmblables ; ce font Pinus, Pin. Taxus , 1f. Gramet, Chiendents, * 128 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ces chofes qu'il eft bon d'examiner, de rapprocher du vrai & d'apprécier, autant qu'il eft poflible de le faire. Cet examen feroit cependant trop vafte pour être fuivi ici dans toutes fes parties , il feroit plutôt le fujet d'un Traité que d'un Mémoire; je me-borneraï donc à n'examiner maintenant que les dernières propriétés dont je viens de parler, qui peuvent avoir rapport au travail que j'ai fait fur les glandes des plantes ; je renverraï pour le refte à l'Ouvrage de M. Linnæus, intitulé Philofoplie botaniques Les glandes , & fur-tout leurs fi'éts ou vaifleaux excréteurs, ont fouvent fervi à caractérifer les Plantes ; mais rien n'a jeté dans un plus grand embarias que ces phrafes où l'on fait principalement entrer pour marque fpécifique la propriété d'être ou de n'être pas velue, cotonneufe, rude, äpre, piquante, épineufe ; toutes ces qualités dépendent des glandes où de leurs vaifleaux excréteurs, mais ces glandes & ces vaifleaux variant fouvent , non dans l'efpèce, mais en plus ou moins d'apparence, &. en plus ou moins grande quantité dans les mêmes individus, il eft fouvent arrivé qu'on a pris pour des efpèces différentes des plantes qui n'étoient que des individus différens de la même efpèce , ou qu'on a attribué à une efpèce ce qui étoit commun à toutes les efpèces du même genre; je vais en donner des exemples tirés de mes Mémoires imprimés, enfuite je rap- porterai des obfervations dont je n'ai pas fait ufage, & quien feront encore des preuves complètes. M. Linnæus défigne en partie les pins dont il parle dans fon Ouvrage fur les fynonymes des Plantes , par des propriétés tirées des glandes de ces arbres ; il veut que Jeurs feuilles foient liffes ou rudes, dentelées ou fans dentelures, ou avec deux lignes de petits points. J'ai fait voir dans un de mes Mémoires que les arbres de cette clafle qui avoient de ces lignes, étoient des ifs, que les dentelures appartenoient à tous les pins, & que tous en général étoient liffes, par conféquent attribuer à lune ou Fautre efpèce, l'une ou l'autre propriété, c'eft parti- cularifer ce qui eft commun à plufieurs. J arrive aux glandes milliaires des chiendents, de fe gonfler quelquefois DES SCIENCES. 129 quelquefois fi confidérablement , qu'elles rendent rudes au toucher les parties où elles font : j'ai obfervé cette fingularité dans plufieurs efpèces de la claffe des chiendents, & principa- lement dans les efpèces dont nous mangeons les grains; c'eft, à ce que je penfe , fur une femblable remarque que M. Linnæus a fait entrer dans le caractère du pied de poule à larges feuilles, de Gafpard Bauhin , la propriété d'avoir la guaine des feuilles - pointillées: cet effet pouvant arriver à tous les-chiendents, je peufe qu'if faut fouftraire cette circonftance de la dénomination que M. Linnæus a donnée de ce chiendent. Les millepertuis dont j'ai parlé dans mes Mémoires fur les glandes des Plantes , ont tous des glandes véficulaires & des mamelons noirs qui bordent les calices ou les pétales ; ces parties ne peuvent par conféquent fervir à dénommer lune ou l'autre de ces Plantes ; il me paroît donc fuperflu de les faire entrer dans toutes ou dans la plupart des dénominations de ces Plantes, comme M. de Haller a fait, ou de les attribuer feulement à quelques-unes, avec M. Linnæus, qui a même défigné Ja figure des mamelons, figure qui eft peu conflante, & qui varie beaucoup dans la même efpèce de Plante. On trouve encore des glandes véficulaires dans les orties, mais comme elles y font beaucoup plus petites que dans les millepertuis , elles n'ont pas frappé ceux qui ont fait des dé- nominations pour ces Plantes, de façon à les faire entrer dans ces dénominations; par une raifon contraire, toutes les orties étant plus où moins piquantes , on s'eft aifément aperçu qu'elles avoient toutes des efpèces d'épines ; on en a implicitement conclu qu'on ne devoit pas s'attacher à ces parties pour dé- nommer Îes orties : une propriété de lortie, qu'on appelle chanvre de la Chine , étant de jeter une liqueur qui fe condenfe en une efpèce de coton blanc & aflez abondant pour le faire aifément remarquer, on a fait entrer cette propriété dans fon caractère fpécifique ; malgré cette différence frappante , je ne m'attacherois pas cependant à cette propriété, elle peut aifément changer, la culture pourroit peut-être aifément faire perdre à cette Plante fon duvet, & il n'eft pas fans exemple que cela Mm. 1 759 Hypericum ; Millepertuis, { Urrica , Ortie. Morus, Müricr. Chenopodium; Patte-d'oie. Limontun , Starice. 130 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE foit arrivé à plufieurs autres Plantes; on tomberoit alors dans le cas de regarder les individus de fa même efpèce de Plante, comme faifant réellement deux efpèces bien diflinétes & bien caractérifées. Ce n'eft en quelque forte qu'accidentellement que les mûriers blancs & noirs ont des glandes véficulaires ; comme ils perdent facilement les filets dont ils peuvent être garnis dans certains temps, les glandes qui portoient ces vaifleaux excréteurs font alors plus apparentes & comme tranfparentes ; il arrive de plus qu'elles grofhffent dans certaines circonflances; les feuilles deviennent par-Rà plus rudes au toucher; ces effets étant acci- dentels, ils font par conféquent infuffhifans pour bien défigner ces Plantes, & inutiles dans la dénomination qu'on en donne: il me paroït qu'il en faut dire autant des filets que j'ai vus dans quelques müûriers étrangers , dans lefquels ils fubfiflent pour l'ordinaire, & qui refflemblent en cela à plufieurs autres müriers que M. Linnæus défigne par ces parties. J'ai déjà averti dans mon quatrième Mémoire fur les Glandes, ue la matière véficulaire qui fort des glandes des vraies efpèces de chenopodium où patte-d'oie, fe voient généralement fur toutes les efpèces de ce genre, & que conféquemment elles ne pouvoient fervir à caraétérifer une efpèce plutôt qu'une autre, comme M. de Haller fa prétendu. Je crois devoir rappeler cette remarque intéreffante pour ce dont il s'agit ici; en effet ces veffies ne font pas plus abondantes dans les efpèces pour le caraétère fpécifique defquelles M. de Haller lesemploie, que dans les autres, dans les dénominations defquelles il n'en fait pas mention. La matière qui fuinte des glandes véficulaires des Æmonium , a aufli été regardée comme une propriété qui pouvoit fervir à en carattérifer quelques efpèces ; cette matière eft dure & d'un bel argenté, elle samaffe en forme de plaque fur les glandes qui fa fourniflent ; le grand nombre de ces plaques donne aux Plantes qui en font chargées une certaine roideur qui fe fait fentir fous les doigts, & les feuilles en paroifient ” 5 . . . A comme couvertes de tubercules: c'eft ce qui a fait dive à mir ss SIG IEUN cs 131 plufieurs Auteurs, que les feuilles d’une efpèce étoient parfe- imées de bulles, & c'et pour la même raifon que M. Linnæus la caraétérifée en partie par les tubercules de fes feuilles ; mais comme ces tubercules ne conviennent pas feulement à cette efpèce, & que même tous les Æmonium & les flatice ont des glandes véficulaires qui peuvent dans certaines circonftances fe gonfler , fe charger de la matière dure & argentée, & former par conféquent des tubercules femblables, il eft mieux de ne pas ainfi fingularifer ce qui eft déjà commun à plufieurs efpèces, & qui pourroit le devenir à plufieurs autres. : \ H me feroit facile de rapporter encore quelques autres exem- ples tirés de ce que j'ai obfervé fur les glandes fimples, & que j'ai infrés dans mes Mémoires fur cette matière; mais, pour abréger , je pafle aux glandes compofées ou qui portent des filets ou vaifleaux excréteurs. . Comme les filets font ordinairement beaucoup plus apparens que les glandes, on les a beucoup plus employés dans les dénominations que les glandes; de-là ce nombre de phrafes obd'on a fait entrer les noms de calices , fleurs , tiges, feuilles velues , cotonneufes , vifqueufes, gluantes, âpres., rudes, épi- neufes & autres femblables propriétés; mais ces propriétés convenant ordinairement à toutes les efpèces du même genre, ce font-là des mots à retrancher de ces phrafes. Les cynogloffes , déterminées par M. Linnæus, en peuvent. _ Groghfim, fournir un exemple; la commune n'a pas les feuilles plus co- Fe tonneufes elle les a même moins que celle de Crète, elle ne doit pas par conféquent être défignée par cette propriété plutôt que autre: Vomphalodes que M. Linnæus prétend être life, n'eft qu'un peu moins velu que les cynoglofies , & le plus ou, le moins ne doit pas déterminer à faire mention de cette pro- pritté dans des dénominations fpécifiques. Indépendamment de ce que j'ai dit dans un de mes Mé- _ Prrraria, moires, que les blattaires & les bouillons-blancs pouvoient Vars former deux genres, vu la différence de leurs filets, ceux des. Bouillon-blanc, blattaires étant à cupules, & ceux des bouillons- blancs en houppes ; indépendamment, dis-je, de cette. différence il me R j Indigo, Fndigotier, Origanum ; Origan, 132 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE femble que quand on ne voudroit pas ladmettre pour diffé- rence générique, on ne devroit pas tirer les caractères des efpèces d'avoir-ou de ne point avoir de velu. M. Linnæus défigne plufieurs blattaires par la propriété de manquer de ce velu, & plufieurs bouillons-blancs d'être velus ou chargés de duvet ; ce velu ou ce duvet n'a pas été en général plus accordé à une efpèce qu'à une autre dans les deux genres ; toutes les blattaires ont des cupules , & tous les bouillons-blancs ont des houppes baflés ou élevées ; c’eft donc bien gratuitement que l'on fait entrer cette propriété dans la dénomination d’une efpèce plutôt que das celle d’une autre; on aura beau fe retrancher à dire que des efpèces en ont beaucoup plus, & les autres beaucoup moins; comme la qualité d'être pius ou moins co- tonneufe peut changer & change réellement dans ces plantes, je crois qu'il eft effentiel pour lexaétitude, de ne fe point attacher à une propriété auffi variable que celle-ci. Ce font les changemens qui arrivent dans la quantité de ces filets qui ont été caufe que M. de Häller a caraétérifé quelques bouillons - blancs par la rugofité de la furface des feuilles, mais comme cette rugofité ne vient que de ce que cette furface avoit perdu en grande partie fes houppes, lorfque les feuilles avoient été entièrement développées, il arriveroit que toute perfonne qui trouveroit cette Plante dans un temps où elle ne feroit pas aufli avancée, n’y remarqueroit pas cette ru- gofité qui a frappé fi fingulièrement M. de Haller. La couleur argentée des filets en navette, dont les indi- gotiers font chargés fur prefque toutes leurs parties , a attaché plufieurs des Auteurs qui ont dénommé celles de ces Plantes que nous connoiflons ; mais il eft inutile d'attribuer ces navettes aux filiques d’une efpèce plutôt qu'à celles d’une autre, puifque toutes les filiques des vrais indigots en font recouvertes de façon à en être plus ou moins argentées. H J'ai propofé dans un de mes Mémoires fur les Glandes, de former un genre du diétame de Crète, comme l'avoient penfé M." Boërhaave & Vaillant; je n'y ai été engagé que parce que fes fileis font branchus, & qu'ils font fimples dans les DES SCIENCES 132 origans ordinaires. Quand on ne rétabliroïit pas ce genre, il ne faudroit pas dénommer les efpèces des origans en partie par les filets, car, quelque figure qu'ils aient , les Plantes que M. Linnæus regarde comme des origans, même celui du mont Sypile, en font chargés; il eft vrai qu'ils font moins abondans & plus courts dans ce dernier, mais il ne peut pas être re- gardé comme étant life, puifque fes feuilles en ont affez abondamment; fi on vouloit qu'on ne parlât alors que rela- tivement à ce que peuvent en avoir les autres efpèces, je ne ferois pas pour cela plus porté à admettre ces dénominations, la comparaïfon des idées relatives ne pouvant ordinairement fe faire que lorfqu'on connoît les deux objets qui ont été com- parés Fun à l'autre; mais comme il arrive fouvent en Bota- nique , qu'on a la connoiffance de quelques efpèces des Plantes dont des Auteurs parlent fans avoir celle des autres, on fera arrêté , s’il arrive précifément que la Plante qu'on aura dit être life, eft réellement chargée de filets plus courts & moins abondans que ceux de quelqu'autre efpèce qu'on n'aura jamais vue, & qui auront fervi de terme de comparaifon à l'Auteur qui en aura fait les dénominations. Si les différences que j'ai obférvées dans les filets des chà- taigniers & des hêtres ne peuvent pas fervir à féparer ces deux genres, dont M. Linnæus n'a fait qu'un, & qu'il appelle du nom de hêtre, ces différences fervent du moins pour em- pêcher d’appeler les uns à feuilles nues en deflous, & les autres . à feuilles cotonneufes: il y a des temps où les feuilles des châtaigniers ont des houppes , fur-tout en deffous, cette furface en eft même alors très-blanche ; il n’y auroit donc pas d’exac- titude à dire, avec M. Linnæus, que les feuilles de cet arbre font fans filets en deffous, il vaut par conféquent beaucoup mieux chercher à ces arbres une autre marque caractériftique. Entre les ceratoides que M. Linnæus appelle du nom gé- nérique axyris, la première efpèce eft défignée par fes feuilles cotonneules , ce cotonneux n’eft formé que par des houppes ; la feconde, fuivant que M. Linnœus le remarque dans une note, a fur ces feuilles des filets étoilés; les feuilles de la R ii Î Caflanea ; Chätaignier. Fagus, Hètre. Ceraroides ; Ccratoides, Solanunt , Mordlie. 134 Mémoires DE L'ACADÉMFIE ROYALE troilième font plus rudes que celles de la feconde. M. Linnæus ne fait pas entrer ces propriétés dans les dénominations de ces deux Plantes, & je crois qu'il a en cela raïfon , mais il n’auroit pas fallu parler du cotonneux de la première efpèce, qui n’eft réellement formé que par des houppes, ces houppes ne font autre chofe que ce que M. Linnæus appelle des poils étoiles, & par conféquent le cotonneux appartient à ces trois efpèces ; & fi les feuilles de {a troifième font rudes, cela vient ou de ce que ces filets font moins doux dans cette efpèce, ou de ce qu'ils tombent entièrement ou en bonne partie, & que les mamelons qui les portent font plus fenfibles au toucher : c'eft donc s’expoler à quelqu'équivoque, que d'avoir recours à ces parties pour caractérifér les ceratoides. C'eft encore fur ce principe que je ne crois pas que les dénominations de plufieurs morelles foient juftes : on peut di- vifer ces Plantes en morelles épineufes & en morelles qui ne le font pas; M. Linnæus a fuivi cette divifion, il a cependant rangé avec celles qui n'ont pas d’épines la morelle à fleurs de papas , quoique, fuivant lui- même, la tige en ait un peu; J'ai de plus fait voir que toutes les morelles épineufes avoient des houppes, au lieu que celles qui étoient fans épines , n'avoient que des filets coniques fimples. Ces obfervations, répétées plu- fieurs fois, me perfuadent qu'il eft inutile de faire entrer dans la dénomination de ces Plantes, ni les épines ni les houppes, puifqu'elles font communes à toutes ces morelles. | Je ne défignerois pas même les parties qui ont des épines, car fouvent une partie qui n’étoit pas épineufe, le devient , tandis qu'une autre qui portoit des épines, les perd: c'eft ce qui arrive principalement à Ja morelle à fleurs de papas, il y a des temps où la tige eft plus épineufe que dans d'autres, ce qui a été caufe que M. Linnæus la placée avec les morelles qui font fans épines , quoïiqu'elle en ait, & que, comme je l'ai obfervé, on y trouve des houppes , beaucoup plus rares il eft vrai que dans les autres. Un moyen d'abréger les dénominations de ces plantes , feroit donc d'ôter du genre des morelles , toutes celles de ces Plantes 4 DAENS AL SAONE. Nr GENS |, | 135 qui font épineufes , de les réunir aux mélongènes , qui toutes font épineufes, & chargées de houppes, ou d'en faire un genre mouveau , puifqu'il y a quelques différences entre les fruits des morelles & des mélongènes, & que celles -ci ont des glandes à cupule que les morelles épineufes n'ont pas ; je re- garderois comme vraies morelles celles qui ne font pas épi- neufes, & qui n'auroient ni houppes ni cupules. Les Ycoperficon qui ont les cupules & les filets coniques, conftitueroient toujours un genre ; par-là on débarrafferoit les dénominations des mots de tige, de feuilles & de calices épineux ou cotonneux , les épines & fes cotonneux fe trouvant dans toutes les efpèces du genre, & variant fouvent quant aux parties fur lefquelles ils fe trouvent dans les individus de fa même -efpèce : par ce moyen on ne froit pas obligé de dire dans les dénominations que les vraies morelles font fans épines ; il en feroit de même pour les Hcoperficon , & on ne feroit pas dans le cas de faire remarquer que l'efpèce, appelée/par le P. Plumier, Hcoperficon à feuilles de pimprenelle, eft un peu velue ; ‘lle left autant que le fcoperficon ordinaire, & ce velu .eft principalement formé par des glandes à cupule, femblables à celles de ce dernier. s - Les houppes dont les vraies phlomis font couverts, font une marque caractériftique ,-bien propre à déterminer quelles font des efpèces de ce genre. M. Linnæus réunit aux phlomis de M. de Townefoit, des Plantes qui n'ont pas ces houppes : outre cela ils ont, par la fleur , autant de rapport aux genres où ils étoient placés qu'aux phlomis; je ne détruirois donc pas ce qui a été fait, & regardant comme phomis toutes celles de ces Plames qui ont des houppes, on ne feroit plus obligé d’avoir recours à la propriété d’être ou de n'être pas cotonneux , pour déterminer ces efpèces : une feule de toutes celles que Jai examinées, n’eft pas garnie de houppes & de goupillons; ce neft pas qu'elle ne le foit de beaucoup de filets, mais les fiens font coniques & articulés, par conféquent quels que foient ces filets, ce que je viens d'établir dans cet article par rapport aux caraétères fpécifiques , {era toujours vrai ; j'ai fait mes obfer- Phlemis, 136 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE vations fur un afléz bon nombre de ces Plantes , pour pouvoir conftater quelque chofe. J'ai examiné toutes les efpèces citées par M. de Tournefort dans fon Corollaire aux Inftituts, toutes celles de ce dernier Ouvrage, excepté la troifième & la feptième ; de plus j'ai obfervé les fuivantes, démontrées au Jardin royal , & dénommées, l’une ghlomis d'Orient à feuilles d'hormin blanches en deflous, & à fleurs purpurines ; l'autre, hormin à tête de grandes fleurs jaunes du jardin d’Elthame ;. deux autres font de l'herbier de M. Vaillant, favoir Le phlomis d'Orient pourpre, à filique longue de lunaire; celui d'Orient qui s'élève en arbrifleau rameux, & qui a la fleur jaune, fuivant M. Sherard. Tous ces phlomis conviennent en ce qu'ils ont des houppes & des coupillons fur toutes les parties, de façon qu'elles en font plus ou moins drapées ; il n'y a que les,côtés de la lèvre fupérieure de la fleur & les étamines qui aient des filets fimples & articulés, le refte de l'intérieur de cette fleur eft rempli de glandes globulaires, communément roufsâtres; de plus les houppes font à quatre, cinq, fix filets horizontaux où même plus; du milieu du point où ils fe réuniflent, fort un long filet articulé, conique, qui communément s'évafe en cupule & jette de la liqueur ; j'ai du moins vu cette liqueur fortir dans les efpèces que j'ai examinées fur pied. Je n'en ai point vu où ces glandes à cupule fuflent plus communes que dans le phlomis d'Orient, qui eft bas & à feuille arrondie & très-blanche, du Jardin royal; il avoit fur les feuilles, les tiges & les pédicules des fleurs, un nombre infini de ces glandes ; les unes étoient blanches, les autres jaunes : il y en a qui font fi bafies , qu'on diroit qu’elles ne font que des glandes globulaires , les autres ne font qu'on peu plus élevées ; d’autres filets beaucoup plus longs jettent des branches, & finiflent par une houppe. Sans ces filets à houppes qui rapprochent cette Plante des autres efpèces, je-placerois ce phlomis avec celui d'Orient, à feuilles découpées : celui-ci n'a que des filets coniques arti- culés, parmi lefquels on remarque en deflous des feuilles de peuts Fra pbersi Sie ahe) N° CUE IS N I tits tubercules ou glandes olobulaires, blancs & criftallins, l'intérieur de la fleur eft garni de glandes à cupules rondes & tranfparentes; les glandes globulaires s’obfervent encore dans quelques autres efpèces ; elles peuvent faire les fonctions des glandes à cupule, ou ne font peut-être que des mamelons qui nont plus de houppes. Si la crapaudine de Perfe & odorante de Zanoni n'avoit rien dans la fleur qui s'éloignät des phlomis , je la rangerois, ‘avec M. Vaillant, au nombre de ces Plantes : fes houppes font à filets horizontaux; de leur centre de réunion il s'élève un fong filet dans celles qui font fur les nervures; je n'y ai vu que peu de goupillons , & point de glandes globulaires. Aucun genre ne peut mieux faire fentir combien il ef fuperflu de faire entrer la propriété d'avoir les feuilles co- tonneufes ou velues dans les dénominations des Plantes, que celui du welafloma; toutes les efpèces de ce genre ont aufñi des houppes, & ces houppes dans plufieurs efpèces tombent affez promptement, ou elles peuvent facilement en être déta- chées par le frottement ; par conféquent il y auroit à craindre de multiplier les efpèces, fur-tout {1 on formoit les caractères fpécifiques fur des Plantes defléchées & confervées dans des herbiers. Je penfe dénç que l'efpèce que M. Linnæus défigne en paitie par le velu de ia-tige, ne l'eft par comparaifon avec les aûtres, que parce que celles- ci avoient apparemment perdu leurs houppes, lorfque M. Linnæus les à examinées : if peut en être de mème pour ce qui regarde celle dont il dit que les feuilles font foyeufes en deflous; celle qu'il caractérife par fes feuilles rudes au toucher, ne les avoit probablement ainfr, que parce qu'elles avoient perdu leurs houppes, & que les mamelons qui les portoient, étoient alors plus apparens, &fai- foient impreflion fous les doigts, impreffion qui étoit émouftee, lorfque les mamelons étoient chargés de leurs houppes. Les glandes véficulaires de laubour, du kajan & de quelques Melaflome. Alburnam ; autres Plantes qui ont du rapport à celles-ci par les fleurs, Aubour. {m'avoient fait penfer qu'on pourroït établir le genre d'aubour, 542" Mém, 1759: prifus, Cytile, . Saxiffaga; Saxilrage, Leucoïunr. Girofiée. Aerri 138 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaLË£ & fuivre en cela M. Rivin & Boërhaave : l'on na point admis ce genre, & l'on a toujours renfermé l’aubour & le kajan fous le genre des cytifes: en foufcrivant fi l'on veut à ce fentiment , je ne puis voir, fans en avertir, que la pro- priété que le Kkajan a d'être cotonneux , & celle d'être velu, que M. Linnœus attribue à quelques cytifes, ne peuvent, par plufieurs raifons déjà rapportées ci-deflus, entrer dans le carac- tère fpécifique de ces Plantes, fans jeter dans l'embarras par rapport à beaucoup d'autres qui font auffi cotonneufes & aufit velues que ces efpèces-ci, qui ne le font au refle , comme les premières , que par la grande quantité de leurs filets cylin- driques. Lorfque les généralités que j'ai tâché d'établir par rapport aux glandes, le font aufli bien que celles qui s'obfervent dans les faxifrages, je crois qu'il eft inutile de défigner une efpèce plutôt qu'une autre par cette propriété; c'eft cependant ce qu'a encore-fait M. Linnœus au fujet de cette efpèce de glande que les faxifrages ont au bout des découpures de leurs feuilles où fur la circonférence de ces feuilles : on remarque dans plufieurs faxifrages que ces glandes ont une certaine dureté, qu’on pourroit comparer à celle des cartilages ; c’eft cette dureté qui a fouvent fait dire que les feuilles de ces Plantes font à découpures ou à circonférence caitilagineufe, mais cette propriété eft plus ou moins fenfible dans toutes les efpèces , ainfi je crois qu'il n'eft pas exact d'en faire mention dans les dénominations de ces Plantes. A Il ne faut pas toujours s’en rapporter au premier coup-d'œil pour déterminer fi une Plante eft life ou fr elle eft velue; la finefle des filets eft fouvent telle, qu'elle échappe à qui n'exa- mine pas avec foin certaines Plantes ; c'eft une erreur dans lquelle on tombe facilement au fujet des giroflées qui ont porté ke nom de keiri; ces Plantes ont des filets en navettes horizontaux & petits ; malgré cette remarque , dont j'ai averti dans un de mes Mémoires, M. Linnæus a encore caraétérifé ces Plantes par la prétendue propriété d'être liffes : l'exaétitude demanderoit qu'on n'en fit pas mention, puifqu'elles ne le \ DES SCIE N CE s. 139 font réellement pas ; j'avouerai que fi ce n'eft que par com- paraifon avec les giroflées ordinaires, qu'on attribue aux Keiri la propriété d’être lifles, il pourroil y avoir quelque raifon, mais indépendamment de ce que j'ai dit plus haut au fujet de ces Li comparaifons , il faut avouer de plus qu'elles font toujours fus. tives, & ne peuvent avoir lieu dans un Ouvrage où l'ôn cherche l'exactitude qu'on demande maintenant en Botanique. On doit dire la même chofe pour ce qui regarde les ju- liennes , elles ont toutes des filets en y-grecs, & fouvent une partie de quelques - unes de ces Plantes pourroit n'en point avoir que parce qu'ils féroient tombés lorfqu'on examineroit ces Plantes. (SE Les exemples que j'ai rapportés jufqu’ici pourroient à la rigueur fufhre pour faire fentir combien il eft important de ne faire entrer dans les caractères fpécifiques des Plantes, que des propriétés qui ne fuffent pas générales à toutes les efpèces, ou qui ne fuffent pas fujettes à des changemens & à des variations $ cependant, comme dans une pareille matière on ne doit pas craindre de jeter trop de lumières, j'ai cru devoir en joindre à ceux-ci plufieurs autres, tirés des obfervations dont je n'ai pas encore fait ufage; je donnerai encore par-là à connoître d'autres généralités qui pourront perfectionner le fyflème des glandes des Plantes, & porter de plus en plus du jour dans cette matière curieufe & intéreffinte pour la Botanique. Un genre d'arbre, dont quelques efpèces portent en Amé- rique le nom de bois de Capitaine, bois de M. Hanfelin ou biga- rotier de la Guadeloupe , n'eft fr connu dans ce pays , que parce que les feuilles {ont chargées, fur-tout en-deffous, de filets en £ navettes qui fe détachent facilement & entrent dans les doigts, de façon à béaucoup incommoder celui qui les touche ; curiofité à laquelle on poufle ceux qui arrivent dans ces Ifles pour la première fois, & qui a valu le nom de M. Hanflin à l'efpèce qui porte fon nom : rien n'eft plus propre à faire revenir de #mblables curiofités , que les navettes qui font répandues fur les parties de ces arbres : elles font groffes, ouvertes par le bout, comme jai cra lavoir abfrvé dans les plus groffés, S ij Héfreris ; Julienne. TMalpighia, la Malpighi. Bois de Ca- pitaine. Bois de Han- Elm. Bigarotier de la Guadeloupe, ‘ 740 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE remplies d'une liqueur qui apparemment contribue à augmenter la démangeaifon de la peau, en s'infinuant dans les petites bleflures que les filets y font en sy introduifant. Ces arbriffeaux font appelés par les Botaniftes du nom de malpighia : une de ces efpèces qui reflémble au grenadier, ne diffère, du côté des navettes, de la mabpighia à feuilles larges o1 à feuilles étroites, du P. Plumier, que parce que fes na- vettes font petites & blanches; elles font plus confidérables dans la petite à feuilles de chêne vert qui porte le Kermès ; ce que cette efpèce a de fingulier eft d'être hériffée fur les tiges de navettes très-groffes, portées fur un mamelon pourpre; la groffeur de ces navettes & leur élévation fur le mamelon pour- roient les faire comparer à ces marteaux à deux pointes qui fervent à certains Ouvriers pour piquer les pierres; les den- telures des feuilles finiffent par une longue pointe qui a beaucoup de rapport à ces groffés navettes. La malpighia , à grandes feuilles de houx, avoit au lieu de navettes un, bon nombre de glandes véficulaires roufsitres ; ces glandes n'étoient peut-être formées que par les mamelons qui avoient porté les navettes ; comme ces filets tombent facilement Jorfqu'on manie ces Plantes, il peut très-bien fe faire que lorfque j'ai examiné cette Plante, elle les eût perdus; il y a lieu de le penfer, puifque les pointes des découpures de fes feuilles approchent par leur figure de celles de l'efpèce précédente : outre les navettes, j'ai encore obfervé dans deux efpèces, favoir dans celle à feuilles larges, & dans une qui a été démontrée au Jardin du Roi, fous le nom de mabpighia à petites feuilles de cognaffier ; j'ai, dis-je, obfervé dans ces deux Plantes que chaque découpure du calice a une grofle plaque, oblongue, épaïfle & d’un blanc fale de chaque côté ; ces plaques fe dé- tachent aifément , & ne femblent être qu'appliquées deflus ; elles groffiflent beaucoup & font vifibles à la vue fimple ; je ne fais pas f1 les autres efpèces ont de femblables plaques , ne les ayant pas vues en fleur ; ces plaques pourroient être regardées comme étant analogues aux navettes. On peut, à ce que je crois, conclure des obfervations DES SCIENCES. I4T précédentes, que les mapighia font garnies de filets en navettes; Je le penfe d'autant plus volontiers que quelques efpèces que je n'ai pas vues, & dont M. Linnæus parle dans fes fynonymes, font , fuivant lui, garnies d’un duvet en déflous des feuilles; il y à tout lieu de penfer que ce duvet eft dû à de femblables filets ; quant à celle que M. Linnæus dit être life, il peut fe faire que, lorfqu'il l'a examinée , elle fût dans le cas de celle dont j'ai parlé plus haut , c’eft-à-dire que, vu le peu d’adhérence des navettes à leurs mamelons, ces navettes fuffent alors tombées. Toutes les Plantes, excepté une, que M. Vaillant avoit rangées fous le nom de /ermannia , ont des houppes fur toutes leurs parties, excepté les pétales & les étamines : ces houppes n’ont de différence qu'en ce que leurs filets font quelquefois un peu plus longs dans certaines efpèces que dans d’autres, qu'ils y font peut-être un peu plus ou un peu moins abondans; on remarque outre cela que ces filets, fur-tout celui du milieu, jettent un peu de liqueur par leurs pointes, & que la furface des feuilles eft quelquefois parfemée de petits grains blancs ; -qui ont apparemment fuinté des feuilles, ou qui ne font peut- être que des mamelons dont les houppes font tombées. Ces petites différences ne doivent pas faire ici de difficulté; on peut dire que toutes les Plantes de ce genre font à peu près également cotonneufes, & qu'il ne faut pas, à l'exemple de M. Linnæus, attribuer cette qualité à une efpèce plutôt qu'à une autre. Les efpèces qui étoient dans lherbier de M. Vaillant, font les quatrième, fixième, feptième des fynonymes de M. Linnæus, Hernrannia} la Herman. & l'elpèce qui eft citée dans les Inftituts de M. de T'ournefort; . de plus M. Vaillant plaçoit fous ce genre celle que Boërhaave défignoit par fes feuilles velues douces, femblables à celles de la guimauve , & par fa tige velue; M. Vaillant y plaçoit encore les quatre fuivantes, favoir la mauve d'Afrique couchée fur terre, à feuilles de bétoine, & dont les plus petites découpures font élégamment frangées, de Plukenel ; le cifte d'Afrique à feuilles. S ii} Nux, Noyer, 142 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE d'aune , fimples & étroites ; & T’hermannia à feuilles rondes & crénelées : ces deux dernières font fans citation. Celle-ci a des houppes horizontales, argentées fur les feuilles, jaunes au haut des tiges & fur les calices ; elles approchent beaucoup des y-grecs rayonnés des alyfons, par leur forme & par l'argenté des houppes des feuilles: une qui a été démontrée au Jardin du Roï,fous le nom de hermannia à très-orandes feuilles de mauve & à grandes fleurs rouges, en avoit dont les filets étoient droits, verdâtres & roides; elle eft une de celles qui m'ont fait voir des grains fur les feuilles ; une autre qu'on ca- ractérifoit par {es feuilles de grofeillier velues & petites, & par fa propriété de s'élever en arbrifeau , jetoit beaucoup de liqueur par fes filets; la mauve d'Afrique qui s'étend fur terre, qui a les feuilles d'un grofeillier épineux & entièrement vertes, & la fleur jaune, felon Friamphetti , eft la feule de toutes les efpèces mifes par M. Vaillant au nombre des /ermannia, qui ne m'ait fait voir que des filets coniques courts ; mais les houppes n'étoient-elles pas tombées, ou cette Plante eft- elle une efpèce de ce genre? Le peu de temps que les houppes reflent fur es parties qui en font chargées, a été caufe que M. Linnæus a fait entrer la propriété d'être life, dans la dénomination qu'il a faite du noyer; mais il eft un temps où l'on ne pourroit pas dire ue les feuilles de noyer font fans filets; c'eft celui, fur-tout pendant lequel les feuilles ne font pas entièrement développées, ou qu'elles le font depuis peu; dans celui-ci du moins on ne pourroit être für fi cet arbre feroit celui que M. Linnæus auroit examiné, fi on s’arrêtoit à cette propriété: il peut même arriver, & je crois que le cas exifte quelquefois, que l'expofition & la nature du fol font que les feuilles gardent beaucoup plus long-temps leurs houppes ; l'incertitude par çonféquent aura lus fouvent lieu ; pour l'éviter, le mieux eft de n'avoir pas égard à ce qui peut concerner le velu de ces arbres. Outre Le noyer ordinaire, j'ai examiné celui qui eff tardif à donner fon fruit : fuivant M. Linnæus, celui-ci n'eft qu’une variété de l'autre; pour moi j'y ai vu la même chofe dans es DES) SCUUILE N CE s 147 houppes , & je penfe qu’on doit auffi trouver ces houppes dans ceux qui ont les noix très-aroffes ou recouvertes d’une coquille tendre & fragile, ou qui les portent deux à deux : M, Linnæus les regarde également comme des variétés de l'ordinaire : j'ajou- terai qu'il faut peut-être mettre de ce nombre celui dont le fruit eft très-dur, & celui qui a les feuilles découpées; fi cela eft, comme il y a lieu de le penfer, on pourra dire que tous ces arbres ont des houppes de même que le noyer ordinaire, les variétés ayant les propriétés générales du genre dont elles font. Le noyer commun & fes variétés ne font point au refle les feuls noyers où j'aie obfervé les houppes ; je les ai trouvées dans celui d'Amérique à petit fruit, de figure d'olive, elles y étoient petites, mais abondantes & compofées de quatre, cinq ou fix filets d'un blanc fale ; ces filets étoient plus longs dans le noyer d'Amérique, dont la noix eft comprimée ; les houppes font rares dans le noyer noir de Virginie, mais on y obferve une quantité de filets courts qui portent une goutte de liqueur gluante, fans couleur, mais brillante; celui dont le fruit eft oblong & fillonné profondément, a les feuilles chargées de houppes autant que celui-ci de filets, & ces houppes font longues & blanchâtres : tous ces noyers ont été démontrés fous ces phrafes au Jardin du Roi: un autre du Canada, à feuilles de châtaignier, de l’herbier de M. Vaillant, ne diffère guère, par rapport aux houppes, de celui de Virginie, J'ai encore obfervé dans tous ces noyers , qu'ils ont de petites glandes ordinairement dorées fur le deflus & le deffous de leurs feuilles & fur les jeunes pouffes: ces glandes font arrondies, en fe féchant, elles s'aplatifient & reffémblent alors à celles des caflis ; il y a, comme l'on voit, un rapport entre les noyers, du côté des glandes, qui eft grand , qui ne varie pas beaucoup, mais dont les variations cependant, quelque petites qu’elles foient, Jetteront dans l'embarras, fi on sy attache pour caraélérifér. ces arbres. Il me paroît que cette raifon que j'ai fait valoir dans plufieurs cas, doit auffr avoir lieu au fujet des ceiba ou fromagers ; ces arbres ont des houppes, mais dans quelques-uns de ceux que Céiba, Fromages. "“ 144 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE jai examinés, elles tombent apparemment très-vite; il m'eft arrivé même de ne plus trouver für les feuilles du fromager épineux, à feuilles de virex, que des grains réfineux ou gom- meux, brillans, mais fans couleur, & qui fortoient de petites cavités ou glandes véficulaires. La feconde efpèce de ceiba du P. Plumier, qui eft celle dont la tige eft life, perd également vite fes houppes : je n'ai vu à lombilic des feuilles que quelques filets longs , roides, dont quelques - uns faifoient la houppe ; dans Farbre de Ma- Jabar, qui a une petite fleur, & qui reflemble au cotonnier, fuivant Pétiver, & que M. Vaillant plaçoit avec les ceiba, il y avoit une grande quantité de houppes fur les pédicules des fleurs, fur leurs calices, & je crois même fur les pétales ; ces houppes étoient plus grandes les unes que les autres, & com- pofées à l'ordinaire de plufieurs filets ; je mai vu que les feuilles du cotonnier foyeux de la Jamaïque, elles étoient lifles. Quoique ces obfervations ne foient pas complettes , il paroît bien cependant que ces arbres ont des houppes fur feurs feuilles, & que fi on les examinoit avant qu'elles fuflent entièrement développées , on les trouveroit cotonneules, & que par con- féquent cette épithète ne pourroit guère entrer dans le caractère fpécifique de ces arbres, étant très - propre à occafionner des équivoques. Il eft vrai que l'efpèce de ceiba à graines vertes ou rouffes, conferve plus long-témps ces houppes, & qu'ainfi on pourroit préférablement aux autres a caractérifer par cette propriété ; mais comme il pourroit auffi lui arriver dans certains cas ce à quoi les autres efpèces font fujettes, il fera toujours très-incertain de déterminer {on caractère fpécifique par ce moyen. Outre cela, cette efpèce a des glandes véficulaires noires ; &' des rouges qui font plus petites, je n'ai point trouvé ces glandes aux autres œiba ; cette différence pourroit engager à placer cette efpèce avec les vrais cotons ; les glandes véficulaires noires s'y obfervent non-feulement fur les feuilles, mais encore fux les pétales, les houppes font blanches & abondantes fur les à DA El Si SIC LEEN GE: & 145 les jeunes pouffes, le calice en eft drapé, elles y font jaunâtres, toutes ont des filets longs. Les autres cotons font garnis de houppes & de glandes véfi- culaires noires, comme celui-ci, qui a des houppes blanches, entre lefquelles on voit les glandes véficulaires ; celles des fruits font beaucoup plus groffes que les autres, plus même que celles des feuilles découpées qui embraffent les fruits, quoiqu'elles foient plus confidérables que celles des autres feuilles : Le Bombax de Madras à fleurs pourpres & à petites feuilles de Pétiver, eft garni de petites houppes à courts filets ; les filets coniques fimples y font plus longs & plus abondans que dans plufieurs autres efpèces; le bombax de Madras à fleurs pâles & à petites feuilles d'érable, de Pétiver , ne diffère du précédent qu'en ce que fes houppes font peut-être encore plus petites ; l'efpèce qui eft herbacée & qui a des graines blanches, en fait voir de moyenne grandeur, & une aflez grande quantité de filets coniques ; celle qui s'élève au contraire en arbre, a une grande quantité de houppes blanches à filets longs & doux ; à chaque aiffelle des côtes eft placée une glande plate , grande & noire comme celles du milieu des maïlles ; en deffus des feuilles il y a des grains blancs & d’autres qui font d’une belle couleur de cerife : ces diflérentes couleurs font un effet affez joli par le conftrate du vert des feuilles & de ces couleurs; on remarque les mêmes chofes fur les tiges & es pédicules, lorfque ces parties font jeunes, les houppes de la furface fu- périeure des feuilles tombent promptement. «- Le beau coton d'Amérique à femences verdâtres, de M, Lignon , ne diffère de celui-ci que parce que les filets du deflüs des feuilles reftent plus long-temps, & qu’il n’a pas de glandes véficulaires de couleur de cerife. Les houppes de celui que Plukenet appelle Sioux: , font à longs filets, d'un blanc roufsître fur les feuilles, qui font les feules parties de cette Plante que j'aie été à portéed’examiner; je n’y ai pas vu les glandes véficulaires noires, mais quelques véficules tranfparentes. Toutes ces obfervations , tant celles que j'ai faites fu Les Mëm. 175 9: 146 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RorALE cotonniers que fur les æiba ou fromagers , concourent à établir que ces derniers ont des houppes comme Îes premiers , mais qu'ils manquent de glandes véficulaires noires, & que par conféquent ces glandes pourroïent fervir très-avantageufement à reconnoître d’abord de quel genre feroient les unes ou les autres dé ces Plantes, dont on auroit à déterminer le caraétère générique. Quoique j'aie déjà fait remarquer dans un de mes Mémoires fur là matière dont il s'agit dans celui-ci, que le duvet ou le coton au milieu duquel les graines de ces Plantes font plongées, n'eft formé que par une matière qui fuinte en forme de liqueur de toute la furface de ces graines, & qui fe durcit en féchant; je crois qu'il eft bon de rappeler ici ce fait, & de dire encore une fois combien il froit important de trouver quelque réfme ou gomme réfine qui püt fe durcir à Pair, prendre {a confif tance & fa flexibilité du coton , car tout le monde connoït les ufages immenfes auxquels nous l'employons. Je ne poufferai pas plus loin dans ce Mémoire mes obfer- vations ; je me contenterai de le finir par quelques réflexions qui fe tirent naturellement de tout ce que j'ai rapporté jufqu'ici ; on ne peut, à ce que je crois, difconveñir que quiconque cherchera à être exaét, ne s'attachera pas aux glandes lorfqu'il voudra former les caractères fpécifiques des Plantes, qu'il ne feroit pas même für de le faire quand on fe ferviroit de termes comparatifs pour fignifier les propriétés de ces glandes, puifqu'il faut avoir les deux objets de comparaifon pour juger de l'un ou de l'autre, Jorfqu'on a un des deux à connoître. Il eft difficile, pour ne pas dire impoflible, de fixer le terme fur lequel on peut melurer la grandeur & la quantité de ces paties ; rien métant plus changeant que ces pro- priétés, rien ne peut être plus équivoque que les caraétères établis par leur moyen ; la fituation & la proportion que ces parties peuvent avoir entr'elles, feroient encore très-équivoques ; fouvent l'on trouve dans certaines Plantes des glandes qui ne font point placées précifément dans les endroits où elles £ voient DES SICLENCES :: 147 commynément; elles ne font pas même toujours proportionnel- lement femblables comme elles F'étoient les années précédentes. On eft obligé cependant d'avouer que ces deux propriétés dans les glandes peuvent être regardées comme celles qui varient le moins; les glandes qui fe trouvent dans les aiflelles des feuilles fur leurs pédicules ou fur leur circonférence , s'y rencontrent communément, il eft très - rare qu'elles difparoiflent ; je ne voudrois cependant pas me trop attacher à défigner exactement l'endroit où elles fe voient, je ne le ferois pas fur-tout pour celles qui font autre part que dans les aifielles des feuilles ; il arrive fouvent qu'elles font placées fur les pédicules, plus ou moins près de l'origine de.ces pédicules ; celles de la circonférence :des feuilles varient fouvent , mais c'eft plutôt du côté de la grandeur & de la grofleur, que du côté de Ja fuuation ; ces glandes forment fouvent la pointe des dentelures de cette cir- -conférence ; une pareille fituationeft caufe que, fi les glandes -groffiffent ou s’alongent , les feuilles, de ferraturées qu'elles pourroient être, deviennent crénelées & même dentelées, c'eft- à-dire que ces efpèces de petites découpures, en forme de dents qui bordent la circonférence des feuilles , deviennent plus longues “& plus grofles, & font par conféquent varier la forme de la 1feuille; d’où il réfulte qu'il peut arriver qu'on prenne pour des “efpèces différentes, des Plantes qui ne font réellement que des >variétés. Ces remarques doivent nous rendre très-circonfpects fur l'em- ploi des glandes dans le caraétère fpécifique des Plantes ; il n’en *eft pas de même de celui qu'on-en peut faire pour leurs carac- . tères génériques : je crois avoir démontré cette vérité dans mes -Mémoires fur cette matière : en.effet , les glandes qui ont été -affignées à tel ou tel genre de Plantes, fe trouvent, conflam- ument dans toutes les efpèces de ces genres, comme je l'ai fait “voir; on peut, à ce qu'il me paroît, s’en fervir très-utilement “pour les bien conffater ; ce n'eft.pas cependant que je pré- -tende qu'il faille y avoir plus d'égard qu'aux parties de Ja ‘fleur ; ce font toujours celles-ci qu'on devra ,. préférablement à ‘toutes autres, employer pour les: établir ; mais, comme je l'ai L'iante 148 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dit autre part, les glandes fervent beaucoup à confirmer ce que l'on aura découvert dans les fleurs : on ne peut trop fe fervir de tout ce qui conduit à des connoiffances füres & in- variables. Ceux qui ne veulent pas qu'il y ait un fyfième établi par la Nature , ou qui prétendent que les règles que les Obfer- vateurs ont découvertes , ne font que des productions de leur imagination, qu'ils ont introduites en Hifloire naturelle; ces Auteurs , qu'on pourroit appeler anomaux , diront que c'eft encore par-là rendre l’établiffement des genres plus difficile qu'il ne left, & éloigner du but qu'on fe propofe d'atteindre, c'eft-à-dire de former un fyflème général de Botanique, ou plutôt de découvrir celui que les Méthodiftes veulent que la Nature ait fuivi. Je fuis bien éloigné de penfer ainfi ; je crois au contraire que plus on découvrira de rapports entre les efpèces des genres des Plantes, & plus ces genres feront bien déterminés & bien établis, & plus on fera en état de développer le fecret de la Nature, & fi on peut parler ainfr, de lui arracher ce fecret; les difficultés ne doivent point rebuter; plus on en furmontera, plus on approchera de la vérité, & s'il n'eft pas accordé à nos eflorts de connoître ce fyflème danis fon entier, on faura du moins qu’on l'aura dévoilé en grande partie, motif qui doit nous porter à ne rien négliger de ce qui peut être eflentiel aux Plantes, & à ne pas nous arrêter à des propriétés variables & changeantes, comme ont fait tant de Botaniftes. à On fait depuis long-temps que les couleurs & la grandeur des Plantes ne peuvent que jeter dans beaucoup d'embarras, & que les mêmes genres en renferment qui séloignent inf- niment de ce côté; on n'ignore pas même maintenant que le nombre des parties de la fleur, que quelquefois même leur figure, ne fufhfent pas, & tout Botanifte qui s'arrêteroit à de femblables proprictés, prouveroit au moins qu'il n'eft pas entré dans le vrai fentier qui conduit à la découverte du fyflème général: les vrais Botaniftes, c'eft-à-dire les Nomenclateurs & les Méthodiftes , laiflent aux Amateurs des fleurs le vain > + | DES Sc3ENCES 14 amufemént de clafler les Plantes par des propriétés qui ne peuvent que multiplier ces prétendues efpèces à l'infini, & de façon à ne les plus reconnoître d’une année à Fautre, les fleurs changeant de couleur prefque toutes les années : les Botaniftes imitent les Lithologiftes éclairés , qui ne s'occupent pas de la couleur & de [a dureté des pierres pour en déterminer les genres, ils portent leurs vues plus loin, ils regardent ces moyens comme n'étant propres qu'à conduire de purs Jouailliers , dont tout le but eft de fatisfaire leur cupidité en fourniffant des alimens à Ja vanité de certains hommes en état ,. par leur opulence , de remplir l'une & l'autre: importe-t-il en eflet à un Naturalifte qui confidère en grand les productions de la Nature, de def . cendre jufqu'à des nuances infenfibles de couleur & de dureté que les pierres peuvent avoir ? à l’exemple des grands Géomètres il tâche de découvrir les füix générales, de conftruire, pour ainft dire, l'équation ou la formule fur laquelle les êtres ont été formés & arrangés ; il laifleau Naturalifle minutieux ou plutôt à l'Ama- ‘teur toujours fuperficiel , à en tirer les petites conféquences, indignes en quelque forte de fon attention : il le laifle fe dé- + battre avec le Marchand, pour favoir ff un diamant, fi un rubis font d'une plus belle eau, où s'ils font d’un brillant plus vif & plus précieux que les autres ; il lui abandonne a déci- fion importante de déterminer fi une pierre eft d'Orient ou d'Occident , ou fi elle n'en eft pas; il fe foucie peu qu'une pierre foit mife au nombre des pierres précieufes, ou qu'elle foit regardée comme de peu de valeur; toutes font précieufes à fes yeux, elles font des productions de la Nature, cela lui fuffit, il les confidère toutes du même œil, il les place à leur rang, & lorfqu'il eft affez heureux pour leur en donner un ,-qui eft celui que la Nature leur a afligné ou qui en approche, if eft content , fon objet eft rempli; pour y parvenir il ne néglige, à la vérité, rien, il cherche à s'étayer de toutes les convenances -qui ont été mifes entre les êtres, & lorfqu’il les a découvertes, il pole les principes généraux qu'il a trouvés, & trop heureux d'avoir fait un pas, il {e flatte qu'un autre avancera davantage, & qu'enfin ceux qui nous fuivront, aidés-de nos travaux, Ti. 150 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE tireront entièrement, ou ‘du moinsiplus que nous n'avons fait, le rideau que la Naturea mis fur fes ouvrages; bien éloigné de penfer que les êtres font répandus fur la Terre fans vues & fans ordre, il reconnoît que tous ont été produits fuivant certaines loix & certains principes, & que tout ce que les Naturalifles ont à faire, eft de les découvrir & non de prendre leurs idées pour celles de la Nature; il ne s'attache pas plus à une propriété qu'à une autre pour fe conduire dans fes recherches, il les embraffe toutes, mais il fait déterminer enfuite fi ces propriétés font eflentielles ou accidentelles, il rejette celles-ci & admet les autres, il n'ignore point qu'il ne peut connoître que des individus, mais aufli il ne doute point que lorfqu'il connoîtra bien un certain nombre de ces individus, il pourra découvrir les rapports qu'ils auront entre eux, & que de ces rapports il réfultera-en quelque manière, malgré lui, un ordre d'autant plus approchant du naturel qu'il y mettra moins du fien. Afin de n’y faire entrer que des obfervations ‘exactes, il décrit avec foin les corps qu'il examine , mais il ne fait entrer dans fes defcriptions que les propriétés qui ne changent point, il n'a point égard à la longueur , à la largeur, ni à là groffeur de ces corps; ces propriétés peuvent varier à l'infini ,-elles ne font pas plus effentielles que a couleur , fa pefanteur & la dureté : la connoiffance de ces propriétés ne pourroit être utile, qu’autant -qu'il auroït à décrire plufieurs individus de chaque efpèce ; & à faire voir que les parties de ces individus augmentent & décroiffent felon certaines loix proportionnelles ; fans cela, fes defcriptions deviendroient trop longues , trop vagues & très- propres à jeter dans de doute, & conduiroient à ne pouvoir déterminer fi le corps qu'on chercheroit à connoître , feroit réellement de l'efpèce de celui qui auroït été décrit. Quiconque , par exemple , feroit entrer pour caraétère fpé- cifique dans da defcription de la topaze du Brefil la couleur de cette pierre , qui eft d’un jaune foncé & quelquefois prefque noir, fe trouveroit très -embarraffé fi on lui préfentoit cette -pierre lorfqu'on Fa-paffée au feu & qu'elle y a pris un beau -æouleur de cerife, la placeroit-il alors au nombre des rubis DES) SCUHENCES | 54 balais dont elle approche dans cet état, ou da laifféroit-il avec les topazes ; pour avoir changé de couleur a-t-elle changé de nature? ne faut-il point par conféquent quil y ait un autre caractère plus für & plus conflant, qui foit de la nature des topazes : il en eft fafle que cette pierre de même des. autres pierres auxquelles on a ainfi ôté la couleur primitive ; qu'on ne dife pas qu'on dénature ces pierres par cette opération, elles reftent, fi le feu n'eft pas de la dernière violence |, comme pourroit être celui du miroir ardent, auffi dures & auffi pefantes qu'elles l’étoient avant qu'elles l'eufent foufiert, elles ne fe défigurent point ; enfin elles reftent, à fa couleur près, ce qu'elles étoient en fortant de la terre. On en doit dire autant des Plantes : Jorfque par la diffillation en leur a enlevé toutes les parties qui peuvent s’extraire par cette opération chimique , elles reflent a vec toutes les parties externes, fi délicates qu'elles foient, qu'elles avoient lorfqu'elles étoient fraîches: ce ne font que les fucs qui remplifloient les vaifleaux, & dont fans doute leur couleur, fleur odeur & leur faveur dépendoient, qui fe font évaporés; mais les parties qui font leur caraétère eflentiel, fubfiftent en entier & dans les pro- portions, là fituation & la place qu'elles , aifément les reconnoître dans cet état ; ont naturellement. Un homme verfé dans la connoiflance des Plantes peut le port extérieur qui - au premier coup d'œil fait fouvent rapporter les Plantes à leur claffe & même à leur genre, n’a point été détruit ; CE qui confti- tue la plante telle ou telle efpèce d'un genre quelconque, n'a point changé; quiconque auroit pu antécédemment bien conflater fon caraétère fpécifique, la détermineroit encore à ce caraère, indépendamment des propriétés qui peuvent s'évanouir dans la diftillation ; il y en a donc d’autres qui éludent cette a&ion & qui conduiront toujours les Naturaliftes méthodifles, & mettront es Nomenclateurs en état de les dénominer. Ce font ces parties qu'il faut principalement faire entrer dans les defcriptions des Plantes: il ne faut y parler des autres que comme d'accidens qui peuvent changer très-fouvent, & qui réellement changent aflez communément : la {cience du 152 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Naturalifte au refle ne confifte pas féulément, comme on voudroit nous le faire croire, à décrire les productions natu- relles, mais en s'acquittant bien de cette partie de la connoif fance des Plantes, à fe fervir des defcriptions comme d'autant de fecours qui peuvent nous conduire à mettre ces produétions à fa place qui leur convient dans le fyflème général de la Na4 ture, & à les reconnoître de façon à pouvoir les nommer aifément lorfqu'il eft befoin de le faire : c'eft ce qui ne lui fera pas bien difficile lorfqu'il aura fu tirer de ces defcriptions la marque eflentielle qui conftitue les efpèces des Plantes dont il aura les defcriptions. Il ne fera pas néceffaire alors qu'il ait recours à un moyen aufir difhcile qu'eft celui qui dépend de la connoiflance de la reproduction de ces Plantes , que quelques Philo- fophes ou Métaphyficiens ont prétendu être indifpenfable pour bien déterminer les efpèces des Plantes, de même que celles des animaux; fuivant ces Auteurs on ne peut favoir au jufe fi une Plante ou un animal qu'on a à comparer avec quelques autres , eft réellement une efpèce diftinéte de celles-ci, à moins qu'on ne fache fi ces Plantes ou ces animaux peuvent ou ne peuvent pas fe reproduire les uns par les autres, & fi la Plante ou l'animal qui, dans le cas qu'ils pufent fe reproduire, ‘ en proviendroient , feroient eux-mêmes féconds ou incapables de cette reproduction. : Dans quel embarras & dans quel cahos de difficultés & d'obfcurités ne tomberoit-on pas, fi on étoit obligé d'avoir recours à de femblables obfervations pour pouvoir déterminer les vraies efpèces des différens êtres ;-on le pourra, indépen- damment de la connoiffance que ces Auteurs demandent, fr on fuit les principes dont j'ai parlé plus haut, & qui font ceux des vrais Naturalifles : en effet, dans la fuppofition que tous les êtres qui font maintenant fur terre, euffent été créés en même temps, & qu'ils euflent dû toujours exifter les mêmes fans fe propager, il auroit donc été impoflible de déterminer ceux qui étoient d’une efpèce ou d’une autre; on m'auroit pu favoir fi le chêne n'auroit pas été une moufle , la rofe un chardon, ci RAT ag SU NES NE Et 81 0 15% chardon, lœillet-une ortie; &--par rapport aux animaux, fr Thomme n'auroit pas été. un finge , le lion une fouris, l'aigle une allouette, le brochet une carpe ; admettre de pareilles idées, c'eft tomber dans les imaginations ridicules de T'eliamed, qui fait {ortir les hommes du fein dé Ja mer, & qui veut que nous ayons tous été des poiflons ; c'eft embraffer un pyrrho- nifme honteux & effrayant. : - … C'eft donc le caractère d'un vrai Naturalifte de s'attacher aux principes des Méthodiftes, & de travailler à perfectionner les méthodes appuyées fur des obfervations bien faites , de les com- biner lesunes par les autres ; ce travail le mènera à développer de plusen plus d'ordre général, ille mettra en état de reconnoitre _ ce qui a été découvert, & fera pour lui un fil qui le conduira à d'autres découvertes; if aura ainfr les vraies loix de J'Analogie, il pourra par leur moyen, fans connoître tous les êtres de Ja Nature, ce qui eft impoflble : if pourra ; dis-je, en embrafer l'énfemble, ou entrevoir au moins ce que cet enfemble peut. être, avantage auquel les Imméthodiftes ne peuvent atteindre; toujours fixés à chaque individu qu'ils ne placent pas dans un ordre fyftématique, ils font arrétés par les moindres variétés: elles font pour eux autant d'obflacles qui les empéchent d'arriver à la connoiflance du plan que là Nature à fuivi : con- _noiffance qui eft le but vers lequel tous nos efforts doivent à k di xs Novemb. 1759: Comète vue 2 Rome les 26, 27 & 28 Jan- vier 1758. Comète vue à Londres le 1 8 Juin 1758: 54 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE MÉMOIRE SUR LA COMÉTE DE 1758. Par M DE L'ÉSYLE. | à ee u15: que les Aflronomes attendent la Comète prédite par M. Halley*, on eft: plus: attentif que jamais à tout. ce qui paroït dans le ciel; Fon: a: vu à cette occafon:une nou- velle Eomète-aux: mois de: Septembre:& d'Otobre de l'année dernière: 17 577; dans les conflellations des Gemeaux, du Cancer & du Lion; mais lon a reconnu qu'elle n'étoit point celle dont nous attendons le: retour: depuis ce temps-là, les nou- velles publiques: de: difftrens, endroits. ont: annoncé l'arrivée d’une: autre: Comète-que: pappelerai la: Comète de 175 8;, & qui ferx l’objet de: ce: Mémoire. La. Gazette: françoï de Vienn& rapportoit: # article: de: Rome, du 8: Kévrier:demier, qu'il avoit paru fur l'horizon de: cette villeles 26, 27 &:28 Janvier, une:Comète que l'on: croyoit: être lx mêmeiquisparat en: 1 682 ; mais l'on n'avreçui à Paris aucun autre détail de cette: Comète , l'onignore même: l'endroit du ciel & la conftellation dans laquelle elle s'ef fait voir; la reffemblance foupçonnée avec celle de 168 2 ne s'eft point vérifiée, & n'étoit probablement qu'une fimple con- jetture. Fe" L'on a été un peu mieux informé de celle qui a commencé à paroître à Londres le 1 8! Juin; une gazette de Londres, du 27 de ce mois, ayant donné avisque depuis quelques jours elle avoit été vue entre une &g,d£ux heures, qu'elle avoit une queue, qu'elle étoit vers le nord-nord-eft dans la conftellation du Cocher, tès-proche de horizon apparent ; qu’elle diminuoit alors & n'étoit que comme une étoile pâle, ce qui étoit caufé * La Comête prédite par M. Halley eft ceile de 1759, annoncée ci- devant page 1, DES SCIENCES 165$ par Ja lumière du jour, de manière qu'on ne pouvoit. plus la voir à la vue fimple ::ce font les termes de la Gazette angloife que je n'ai pas vue, mais qui ont été rapportés dans une Ga- zette holiandoife, dont je n’eus connoiffance que le 2.5 Juillet. ; … M. Meffier, employé par la Marine, fous:ma direction, aux obfervations Aftronomiques à l'Hôtel de Clugny, dans l'ob- fervatoire de la Marine où il obferve affidument depuis cinq ans, étant fort curieux d’apercevoir des premiers da-Comète promife par M. Halley, la cherchoit toutes les fois que le ciel étoit ferein , au moyen d'un planifphère .célefte fur lequel jai marqué , il y a plus d'un an, les lieux du :ciél où cette Comète doit commencer, à paroïîte en quelque temps de l'année qu'on. la veuille chercher ; il ignoroit {1 la Comète annoncée n’étoit point celle qu'on attend avec tant d'impatience; & dès que je reçus l'avis de da Comète vue à Londres , ou plutôt le Jendemain, 26 Juillet au matin, M. Meffier chercha cette Comète avec une petite lunette difpofée à cet eflet. Cette lunette n'a, à la vérité, que deux pieds de longueur, Limette mais elle diffère des lunettes ordinaires dela même longueur, employée à : ë Une à chercher en ce qu'elle a de fort larges oculaires qui fervent à faire dé- {$ Comètes, couvrir dans le ciel un efpace de cinq à fix degrés détendue; cette lunette eft d’ailleurs fort claire, faifant voir toutes les plus petites étoiles dans un temps fort ferein, lorfque le fond du ciel eft obfcur, ce qui la, rend.très- bonne, non-feulement pour reconnoitre dans le ciel s’lparoît quelque lumière diffé rente de celle des Étoiles fixes, comme le font ordinairement les Comètes, les Etoiles nébuleufes , &c. mais encore pour marquer promptement la fituation du nouveau phénomène que Yon apercevroit à l'égard des plus petités étoiles voifines qui f trouveroient en même temps dans le gtand champ de cette lunette ; de plas cette lunette ef montée fur-un pied de:bois, .conftruit exprès pour li mouvoir aifément & doucément dans de fns horizontal & vertical ; l'on peut même :mefurer la ntité de ces deux mouvemens , c'efl-à-dire marquer les ifférens degrés d'azimut & de hauteur des: points du ciel anxquels on dirige, à la main cette lunete, ce iqui {E marque V ÿ 756 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE für un cercle azimutal de cuivre, fixé fur le pied & divifé en degrés, & d'un quart-de-cercle pour les hauteurs, auffi de cuivre, attaché au-deflous de la lunette & qui fe meut avec elle; l'on voit fur ce demi-cercle les degrés de la hauteur des points du ciel‘, auxquels la lunette eft dirigée ; if y a pour cela un index fixe qui marque ces degrés. Par cette conftruction, en mettant les mains fur les axes de deux petits cylindres, autour defquels paflent des cordes fans fin, & faifant tourner à la main ces axes fur eux-mêmes... Yon peut mouvoir la lunette autant que lon veut dans le fens horizontal & vertical, pour lui faire parcourir tel efpace du ‘ciel que l’on fouhaite. M. Meffier ayant promené cette lunette ‘für la conftellation du Cocher & aux environs, jufqu'à une affez grande diftance , le 26 Juillet au matin depuis minuit jufqu'à deux heures, if ne put apercevoir de Comète ni aucune autre lumière extraordinaire, quelqu'attention qu'il y donnât, quoi- qu'il pût voir très-diftinétement toutes les plus petites étoiles. vifibles. dans tout cet efpace; mais comme le fond du ciel étoit alors fort éclairé par ln Eune qui devoit arriver à fon dernier quartier le lendemain, M. Meflier crut que c'étoit ce qui l'empêchoit de voir la Comète, quoiqu'elle pût être encore. à portée d’être vue, Après deux jours de temps couvert, le 27: & le 28"; fe- ciel s'étant éclairci de 29 au matin, il ne parut encore rien d'extraordinaire; ceque M: Meflier attribua de même à la Lune, qui n'avoit paffé fon dernier quartier que depuis deux jours, & qui étoit fort: brillante &. voifine de l'endroit du ciel où la Comète pouvoit paroître; ainf M. Meflier défefpéra de la. pouvoir trouver, quoiqu'elle pût être encore fur l'horizon: jufqu'à ce que lalumière de la Lune n'y causat plus aucun obftacle : ïl fallut:attendre pour cela jufqu'au 11 du mois d'Aoûtau matin; que le ciel fût fort ferein., Ja Lune étant fous Fhorizon. Pendant cet intervalle la gazette de Bruxelles du 1 r Août. 1758, arrivée à Paris le 14 ,. donna l'avis fuivant à l'article de Leipfick du: 31 Juillet. « On voit:uneettre écrite de Dolkowitz,. vis-à-vis de DÉS SAGIMENN C'E's rs7 Drefde, par M. Chrétien Gartner, en date du 27 de ce mois, qui contient ces mots: Avant hier ( 25 Juillet) grand matin, je découvris de mon nouvel Obfervatoire une Comére qui eff encore fort obfcure ; elle paroët à une heure du marin dans la conflellation du Chartier etre [es jambes, au vingtième degré dés Gemeaux, au-deffus de la corne du Taureau: hier ( 26 Juillet) / zerps pluvieux empêcha de la difcerner, mais aujourd'hui, à une heure du matin elle a reparu , à elle avoit un peu avancé ; on ne peut pas encore la voir de l'œil, mais à l'aide d'un 1é- lejcope de deux pieds on la diflingue aifément.» Sur cet avis M. Meffier redoubla. fon attention dès la nuit du r4au 15 (Août), en fe fervant de kr petite lunette dont j'ai parlé ci-devant, & en parcourant un grand efpace du ciel i rencontra la nébuleufe qui eft au pied de Caftor, qu'il prit d'abord pour la Comète, & il en marqua la hauteur avec cette lunette; s'étant enfuite fervi d'une bonne lunette catadioptrique Newtonienne de quatre pieds & demi, qu'il emploie dans {es obfervations des éclipfes des fatellites de Jupiter, il découvrit enfin pour la première fois cette Comète le 1 5. Août à deux “heures du matin, ayant une hauteur différente de la nébuleufe des pieds des Gemeaux; mais il:ne put alors voir long-temps: ki Comète à caufe des nuages qui furvinrent auffi-tôt. Une heure & demie après, le ciek étant devenu fereir,; M. Meffier rechercha de nouveau cette Comiète avec 11même lunette catadioptrique de quatre pieds & demi, elle lui parut- extrêmement foible & fort difficile à apercevoir, fans doute à caufe du crépufcule qui éteit déjà très-confidérable; if Ja füivit pendant un quart d'heure, jufqu'à ee que la lumière du jour la lui fit difparoître entièrement.. Son noyau ne fe diftingucit du corps de la Comète que par une plus grande blancheur au centre du total , & le difque ou la chevelure de la Comète égaloit à peu près le diamètre de Jupiter ;: mais il étoit d'une extrême rareté, & on ne pouvoit. . que très-difficilement en marquer l'étendue à caufe de la foi- -bleffe de fa lumière qui aloit en diminuant & fe perdant vers: “les extrémités. Vi « Cometevue à < Dolkowirz, «& Vis-à-vis de Drefde, les 25 & 27 « Juillet 17583. Première dé- couverte de:la Comète à Paris par M.Meffier, le 15 Août , au: matin. Explication de la Carte qui eft jointe à ce Mémoire, 158 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE M. Meflier ne put obferver alors le lieu de cette Comète, qu'en marquant fa fituation apparente à l'égard de trois petites étoiles télefcopiques qui formoient un triangle prefqu'équilatéral, dans lequel étoit la Comète, & qui lui parurent propres à déterminer fon lieu dès le premier jour de fon apparition, lorfqu'il auroit connu par obfervation la pofition exacte de ces petites étoiles entr'elles & à l'égard des cercles de la fphère, c'eft ce qu'il fe réferva de faire par da fuite. Pour mieux entendre l’hiftoire que je fais ici des obfervations de cette Comète, il faut confulter la carte jointe à ce Mémoire, où j'ai fait graver fa route apparente dans le ciel; M. Meffier l'a deflinée & conflruite exaétement fur fes obfervations, il y a marqué toutes les plus petites étoiles de cette route; la pofition de la Comète qui y répond à chaque obfervation ;*eft marquée fur cette carte par un point noir entouré d'un petit cercle; les nombres écrits vis-à-vis de chaque pofition de la Comète, défignent les temps des obfervations ; ces nombres marquent les jours aftronomiques où cette Comète a étéoblervée, ce que l'on a fait pour éviter l'embarras d'y diftinguer fi les obfervations font du matin ou du foir ; l’on verra dans la lifte des politions de la Comète, Zable IV, à la fin de ce Mémoire , une obfervation du 14, quoique cette Comète n'ait paru que le 1$ au matin, comme je viens de dire; & l'on trouvera dans la Table que les obfervations qui ont donné cette polition, ont été faites à 15" 37° de temps vrai, ou 15" 41° temps moyen. On voit fur la carte les trois petites étoiles les plus voifines de la Comète, qui forment le triangle prefqu'équilatéral, au dedans duquel fe trouvoit fa Comète le premier jour qu'elle a été vue à Paris : outre ces trois petites étoiles, M. Mefer deffina encore ce même jour au matin la configuration d’une douzaine d’autres petites étoiles qui étoient au nord des trois étoiles dont je viens de parler; ce qu'il fit par précaution pour pouvoir reconnoître dans la fuite, par le moyen de toutes ces étoiles, le mouvement de l1 Comète, ou pour pouvoir com- parer plus aifément fes obfervations avec celles des autres Aftronomes qui auroient vu la Comète avant lui, fuppolé ‘Su DES SGIENCES 159" qu'ilseuffent marqué fa fituation apparente , à l'égard des mêmes étoiles, fans les connoître; une des plus feptentrionales de toutes ces petites étoiles eft double, ce qui parut à M. Meffier affez commode pour les reconnoître toutes plus aifément dans. le ciel,. & pour pouvoir remarquer dans: la fuite fe moindre changement qui feroitarrivé à la Comète dans fon mouvement, Pour défigner plus: facilement toutes les moindres étoiles obfervées à! l'occafion de cette Comète, M. Meffier les a dé- fignées par des chiffres qu'on trouvera dans la Züdle I LL Comme ces étoiles font rangées fuivant {a: quantité de leur: afcenfion. droite, il. eft arrivé que ce font les derniers numéros. qui ont été affignés aux étoiles employées dans les premières obfervations, parce que le mouvement. apparent de la Comète a été rétrograde ;, ainfr lesitrois petites étoiles qui compofent. le triangle prefqu'équilatéral, au dedans duquel. la Comète fe: trouvoit: le, 1.5; Août. au. matin; ces trois petites étoiles, dis-je, font défignées dans la Z/2° Table ci-après, par lesnombres 104, LIL & 120 : lon n'a pasicru devoir faire graver ces numéros: fur la. Carte. pour éviter. la. confufion ;. mais. il fera: aifé de les. reconnoitre. par la quantité. de. leur, afcenfion droite & de leur déclinaifon. marquées dans la Table LIL | . Le 16, & le:r;7 au, matin, le’ ciel ayant: été entièrement couvert, l'on:ne put. faire d’ebfervations.. Le: 15, au matin, le:ciel afléz ferein, ayant permis de voir la. Comète, depuis. 2h + jufqu'à 3P#, M. Mefier rémarqua. qu'elle: avoit, changé, confidérablément. de fituation. à, l'égard desitrois-étoiles, au milieu) defquelles elle avoit été.vue le x S “matin.; elle s'étoit. avantée: vers. le fud. étant, hors: du. triangle, en. dedans duquel elle étoit le 1 s, & elle formoit avec les deux étoiles les:plus auftrales de,ce, triangle un nouveau triangle.prefqu'i-ofcèle ,, dont! elle:occupoit la pointe, & dont: les côtés. qui: fe. terminoient à.elle ,, prefqu'égaux , étoient les deux. tiers du: troifième côté.on: de. la. bale ; lafituation‘de. la Comète:ce jour-là fe.voit au. point: où l'on. trouve écrit fur: la. carte; Xe. 17 Août: La Comète parut ce jour-là d'une lumière plus foible. 160 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALr ue le 1$ au matin, ce que M. Meffer attribua à la grande lumière de la Lune, qui étoit fort voifine de fon oppolition ; la chevelure & le noyau f diftinguoient auffi ce jour-là, quoi- qu'avec peine, tant que a Lune refla fur l'horizon ; mais après fon coucher, la chevelure devint plus fenfible, & le noyau s'y diftinguoit mieux, quoique cependant fans être terminé; le crépufcule qui furvint & qui étoit déjà bien fort à 3h À, di- minua ces apparences , & fit perdre entièrement la Comète de vue, le ciel fut aflez ferein cette matinée, quoiqu'il eût pu l'être davantage, Le 19 au matin, le ciel fut couvert avec beaucoup de pluie. Le 20 au matin, le ciel étant ferein, M. Meffier chercha la Comète dès minuit & demi fans la pouvoir trouver, quoi- qu'il reconnût les étoiles auprès defquelles il avoit obfervée les jours précédens; ce qu'il crut venir de ce qu'elle n'étoit pas encore affez élevée au-defus de l'horizon, & de ce que la Lune étoit alors dans fon plein; mais une heure après, ou vers une heure & demie du matin, la Comète commença à paroître d'une umière très-foible & prefqu'éteinte; elle étoit alors plus avancée vers le fud que le 18 , & elle formoit avec deux étoiles les plus voifines , placées au fud d'elle, un triangle prefqu'équilatéral, dont il eftima le rapport des côtés, afin d'y avoir égard lorfqu'il auroit déterminé le lieu de ces étoiles dans le ciel par le moyen d’autres étoiles connues. Cette pofition de la Comète eft marquée fur la carte au 19 Août, & les deux étoiles qui lui font méridionales, & avec lefquelles il a comparé Ja Comète, font les étoiles 108 & 1 13 de la Tabléh III ci-après. ) A mefure que la Comète s’élevoit fur l'horizon, elle paroïfloit mieux, quoique toujours difficilement, & lon avoit de la peine à en voir le noyau ; fa chevelure ne paroïfloit pas aufft étendue quê#les jours précédens, à caufe de la lumière de la Lune qui en diminuoit la largeur ; mais dans le crépufcule le noyau fe diftinguoit un peu mieux; elle fut vue jufqu'à 4 heures, U Le BL ELSIE SCI E IN. CÉES. 161 Le ciel fut couvert le 21, mais le 22 ayant été ferein toute la nuit, la Comète commença à paroître trois quaits d'heure après minuit, à la hauteur d'environ 1 $ degrés +; on R voyoit aflez bien , c'efl-à-dire, mieux que les jours précé- dens, tant la chevelure que le noyau ; quoique la lumière de la Lune fût fort grande, le noyau fe diftinguoit aufi mieux, même dans le crépufcule qui affoiblifloit & rétrécifloit la lumière de la chevelure. | Cette lumière de [a Lune, & enfüuite celle du crépufcule, furent d’ailleurs avantageufes pour mieux faire apercevoir les fils que l'on avoit mis au foyer de la lunette catadioptrique , afin de déterminer la fituation de la Comète à l'éoard des étoiles voifines ; on marqua auffr cette nuit plufieurs nouvelles étoiles qui fe trouvoient autour de la Comète, & l'on oblerva exactement fa fituation à l'égard des quatre plus confidérables qui l’entouroient , entre {efquelles étoient les deux étoiles avec lefquelles la Comèteavoit été comparée le 20 au matin, comme on l'a dit ci-devant ; la pofition de la Comète pour ce jour-là répond fur de deflein au 21 Août , & eft plus füre & plus ‘exacte que les précédentes ; à caufe de la quantité des étoiles avec lefquelles on la compara, comme on le verra dans le détail des obfervations. | Outre les fils que lon avoit mis au foyer de la lunette catadioptrique, qui formoient entr'eux desangles de 45 degrés, & qui pouvoient s’incliner fuivant le parallèle de la Comète & des étoiles, afin de déterminer leurs différences d’afcenfion droite par les temps de leurs paflages par ces fils ; outre cela, dis-je, le pied de la lunette étoit difpofé de manière que l'on pou- voit mouvoir cette lunette horizontalement & verticalement ; & l'on pouvoit marquer la quantité de fon mouvement dans {es deux fens, c'eft-à-dire, la différence des azimuts & des hau- teurs des différens points du ciel , auxquels elle étoit dirigée, _& cela par le moyen d’un arc de cercle azimutal , attaché ferme- ment fur le pied ; cet arc étoit tracé fur un rayon de 20 pouces Z5 - & l'autre cercle qui montroit les différences de hauteurs, n’avoit ‘pas moins de 16 pouces + de rayon. Mém. 1759: : X. Téfefcope de quatre pieds, avec lequel om a obfervé cette Comiète, 162 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE : L'on avoit difpofé le pied de cette lunette catadioptrique de k manière que lon vient de dire, pour pouvoir obferver la diftance & la fituation de la Comète à l'égard des étoiles les plus apparentes du ciel, qui en auroïent été confidérablement éloignées, & dont la trop grande diflance ou la pofition à l'égard de la Comète, n'auroit pas permis de fobferver autrement, en fe fervant de cette lunette catadioptrique. Pour cet effet, M. Mefier avoit attaché fermement au- deffus du tuyau de la lunette catadioptrique, la petite lunette de deux pieds dont on a parlé ci-devant, avec laquelle on ne pouvoit pas apercevoir la Comète, mais que lon pouvoit diriger aux étoiles les plus confidérables que l'on auroit voulu choifir, & auxquelles la lunette catadioptrique fe trouvoit dirigée en mème temps, parce qu'on avoit eu foin de rendre les axes de ces deux lunettes exactement parallèles entr’eux, avant d’affermir la petite fur le tuyau de la grande ; ainfr ayant commencé par placer la Comète au milieu du champ de la lunette catadioptrique, lon marquoit fa hauteur & fon azimut, indiqués par les cercles dont on a parlé ci-devant; après quoi lon dirigeoit promptement la petite lunette à telle étoile con- fidérable du ciel que lon vouloit, dont on marquoit de même la hauteur & l'azimut; ainfi il ne s’agifloit plus enfuite que de comparer enfemble les azimuts & les hauteurs de la Comète & de l'étoile choifie, pour en condure leurs différences de fituation dans le fens du cercle vertical & du cercle hori- zontal, quelque grande que fût la diffance de la Comète à l'étoile; ce qui fe pouvoit déterminer avec toute la précifion dont on pouvoit eftimer les parties de degré fur les deux cercles, l'un azimutal & l'autre vertical , qui étoient attachés fur Je pied de la lunette catadioptrique , que l'on fuppoloit n'avoir point varié pendant le temps que l'on avoit fait mouvoir la lunette ; en répétant plufieurs fois de fuite la comparaifon de la Comète avec la même étoile , l’on pouvoit non-feulement s'aflurer davantage de leur fituation refpective, mais encore obferver la variation continuelle des azimuts & des hauteurs de la Comète & de l'étoile, caufée par le mouvement du D'E SU STE N C'E'S 163 premier mobile, afin d'y avoir égard, fi l'on avoit employé trop de temps, dans chaque obfervation, à marquer les degrés de hauteur & d'azimut de l'étoile, après ceux de la Comète. Ce moyen de déterminer le lieu d’une Comète à l'égard des étoiles les plus confidérables du ciel, eft très - expéditif & peut fervir non-feulement pour marquer promptement & du moins à peu-près le lieu d'une Comète à l'égard de telle étoile confidérable que l'on voudra; mais aufir pour reconnoître quelles font les moindres étoiles auprès defquelles la Comète fe trouveroit, & que l'on ne pourroit pas voir en méme temps dans le champ de la lunette, pourvu que ces moindres étoiles puffent être vues facilement par la petite lunette , attachée fur la grande. Dans les obfervations de la préfente Comète, l'on fit ufage de ces deux méthodes le 28 Août, pour déterminer fa fituation à l'égard des deux cornes du Taureau, dont la boréale étoit éloignée de la Comète de plus d'un degré 2, & l'auftrale de plus de $ degrés L; cette méthode fervit encore à s'affürer f une moindre étoile , avec laquelle on avoit comparé la Comète, étoit marquée dans le catalogue & für les cartes de Flamfiead : Jon ne rapportera pas le détail de ces obfervations, ce que l’on vient de dire n'étant que pour donner une idée des inftrumens employés dans les obfervations de cette Comète, qui ont fervi à s'aflurer de fon mouvement à ‘égard des étoiles fixes marquées dans le catalogue & fur les cartes céleftes de Flamftead Le ciel qui avoit été entièrement couvert le 23 Août, ne fe découvrit le 24 qu'à 3" + du matin; & n'étant refté clair que durant quelques minutes, M. Meffier n'eut pas le temps d'obferver exactement la fituation de la Comète avec les étoiles voifines , il fe contenta d'en marquer à la hâte la con- figuration à l'égard des deux étoiles avec lefquelles il lavoit comparée le 2 2. Le 25 au matin, le ciel n'ayant été découvert: que dans le temps du plus fort crépufculé, lon ne put voir la Comëte, non plus que les deux matinées füivantes des 26 &c 27, dans lefquelles le ciel fut totalement couvert , avec pluie le 27; X ï 164 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE mais Je 28, le temps étant devenu plus favorable, on put commencer à la voir vers minuit , lorfqu'elle n’étoit encore élevée que de 12 degrés fur horizon ; il n'y avoit alors que quelques minutes que la Lune s'étoit levée. Vers minuit & demi lon commença à déterminer la fituation de la Comète dans le ciel par le moyen des deux cornes du Taureau , fuivant la méthode dont on a parlé ci-devant, par la différence de leurs azimuts & hauteurs ; & ces obfervations étant rapportées fur la carte de l'Atlas célefte de Flamftead, qui repréfente la conftellation du Taureau, ont fait reconnoître la fituation de la Comète , non-feulement à l'égard de ces deux étoiles, mais encore à l'égard d'une moindre étoile fort voifine de la Comète, & qui eft aufft marquée fur la carte de Flamfead ; je ne rapporterai pas ici la fituation de la Comète déterminée de cette manière, fon verra dans le détail des obfervations fon lieu déterminé plus exactement pour cette matinée du 28 , par fes différences d’afcenfion droite & de déclinaifon avec plufieurs petites étoiles voifines , & fur-tout avec l'étoile que l'on avoit reconnue fur la carte de Flamftead. | Pendant ces obfervations, qui durèrent plus d’une demi- heure, le ciel refla ferein; la Lune qui avoit pañié fon dernier quartier depuis trois jours, étoit aflez brillante ; mais comme elle étoit fort éloignée de la Comète, le fond du ciel aux environs de là Comète n'étoit pas aflez éclairé pour y aper- cevoir les fils placés au foyer de la lunette, avec lefquels on devoit obferver les différences de paflage de la Comète & des plus petitesétoiles, ce qui obligea M. Meffer d'éclairer le fond du ciel à cet endroit par la lumière d’une petite bougie; mais quelque foible que fût cette lumière pour faire apercevoir les fils, elle diminuoit cependant de beaucoup celle de là Comète, que l'on ne pouvoit apercevoir que bien difhicilement. M. Meffier profita encore du temps ferein le 28 au matin pour obferver plufieurs petites étoiles qu'il n'avoit pas marquées les jours précédens, & qui ne fe trouvent ni dans le catalogue ni fur les cartes céleftes de Flamftead ; il y compara cependant la Comète de la manière que je viens de rapporter. DA SN AISTCAIVE NiCIE ES: 165 Ce qu'il y eut de plus remarquable cette nuit, fut qu'en parcourant de ciel avec la lunette catadioptrique aux environs de la corne méridionale du Taureau, marquée £ par Bayer, M. Meffier y découvrit une lumière à peu près femblable à celle de la Comète, mais qui étoit cependant plus vive, plus blanche & un peu plus alongée que la Comète qu'il obfervoit alors: cette Comète lui avoit paru toujours à peu près ronde dans fa cheveluré, fans apparence ni de queue ni de barbe. Comme la découverte de cette nouvelle lumière ou étoile nébuleufe ne fe fit que vers la fin des obfervations de cette matinée, avant que le ciel fe couvrit, M. Meffñer n'eut pas le temps d'en déterminer la fituation exacte à l’écard des étoiles voifines de la corne méridionale du Taureau: l'on rapportera dans le détail des obfervations , &’on marquera le lieu précis de cette nouvelle nébuleufe , fa grandeur & le degré de fa lumière comparée avec celle de la Comète de 1758, afin que ceux qui n'ont pu trouver cette nouvelle Comète avec les lunettes qu'ils y ont employées, puiflent juger par limpreffion de cette nébuleufe ce qui les en aura pu empécher, fuppofé que cette nébuleufe ne change point de grandeur. Le 29 au matin, le ciel fut en partie couvert par les nuées ; il y eut cependant un intervalle de temps clair après 3P2, dont on fe fervit pour marquer la fituation de la Comête à l'égard d'une étoile avec laquelle on l'avoit comparée la veille ; le crépufcule étant trop fort dans ce temps-là pour pouvoir marquer diftinétement les apparences du corps de la Comète. Le 30 au matin, le ciel qui avoit été entièrement couvert jufqu'à 3 heures, s'étant un peu éclairci, quoiqu'avec un léger Brouillard qui empêchoit de bien voir la Comète & les petites étoiles voifines, on crut cependant la voir dans le lieu qu'elle devoit occuper fuivant fon mouvement des jours précédens ; mais n'ayant pu obferver exactement fa fituation à l'égard de ces étoiles, on fe contenta de mefurer la diftance de deux étoiles qui la comprenoient , & d’eftimer à peu près fa diftance à chacune de ces deux étoiles, dont une avoit déjà fervi la veille à comparer la Comite, X ii Découverte d’une nouvelle nébuleufe. 166 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Le 31 Août au matin, le ciel ayant été ferein depuis minuit jufquà 2" £, fon commenca dès minuit À à comparer la Comète avec quelques petites étoiles voifines, mais principalement avec celle dont on a parlé ci - devant (le 28 Août) qui eft dans le catalogue & fur Îes cartes céleftes de Flamflead ; Ton a aufli comparé la Comète avec quelques autres petites étoiles quiavoient fervi les jours précédens. Le beau temps a fans doute été caufe que fa Comète à paru plus diftinétement qu'à l'ordinaire , fa chevelure étoit plus étendue que les jours précédens, & fon noyau s'y diftinguoit mieux; peu après 2 heures + le ciel commença à fe couvrir. Occultation d'une petite étoile par 1 Comètc, Le 1.” Septembre, le ciel fut entièrement couvert tout le matin avec pluie, de même que le 2 jufqu'à 1 heure Z du matin, auquel temps le ciel commença à séclaircir dans l'endroit où devoit être la Comète, & même ïl fut dans cet endroit plus ferein qu'à l'ordinaire; mais ce qu'il y eut de plus remar- quable, fut que la Comète fe trouva alors précifément vis-à-vis d'une petite étoile qui avoit été obfervée les jours précédens, & fur laquelle on avoit jugé par les obfervations antécédentes qu'elle devoit fe trouver: elle en fut effectivement fr voifine , que le noyau de la Comète fut confondu avec cette étoile, & que l'on ne put reconnoître la Comète que par fa chevelure qui paroifloit d'une lumière extrêmement foible , répandue également autour de l'étoile. Le ciel ayant encore été découvert un quart d'heure après avec une égale férénité, là Comète étoit encore confondue, comme on vient de dire, avec l'étoile; ce qui peut fervir à déterminer exactement le lieu de la Comète pour ce temps-là, par celui de l'étoile fuppofé connu. Le même jour 2 Septembre au foir , le ciel ayant été ferein lon commença à apercevoir la Comète à 11" À, lorfqu'elle m'étoit pas encore élevée de 1 3 degrés fur l'horizon; elle fe voyoit déjà aflez bien, & plus elle s’élevoit fur Phorizon , plus fa chevelure devenoit apparente, mais le noyau ne s’y diftinguoit pas comme auparavant, il fembloit confondu avec la lumière environnante, AIDE Si SC UE AN, CE. 167 L'on profita de ce beau temps pour comparer la Comète à l'étoile avec laquelle elle avoit été en conjonction le matin, afin de connoître le mouvement qu'elle avoit eu à l'égard de cette étoile pendant l'intervalle de 22h +; Jon profita auffi du beau temps qui dura toute la nuit, pour comparer cette étoile avec plufieurs autres dont on s’étoit fervi les jours pré- cédens, & pour les lier toutes enfemble & même avec les deux cornes du Taureau par le moyen de leurs différences d'azimuts & de hauteurs, de a manière que l’on a dit ci-deffus ; le 3 Septembre à 4h + du matin, Ja force du crépufcule fit difparoîïtre la Comète, Le ciel fut entièrement couvert la nuit du 3 au 4 avec pluie ; mais le 4 il commença à fe découvrir vers minuit , & il devint tout -à - coup ferein, la Comète paroifloit affez bien , fon noyau {e diftinguoit mieux qu'il n’avoit encore fait ; pour fa chevelure elle étoit à peu près la même, & l’on n'y remarquoit aucune apparence de queue; cette férénité du ciel ne dura pas plus d’un quart d'heure, intervalle de temps trop court pour pouvoir déterminer le lieu de la Comète : mais le ciel ayant commencé à redevenir ferein peu après 3h1, & ayant demeuré tel pendant une heure environ, M. Meffier en profita pour déterminer le lieu de la Comète, en a com- parant encore à l'étoile avec laquelle elle avoit été en conjonction deux jours auparavant, LS Le ciel fut entièrement couvert la nuit du $ au 6, avec une abondante pluie le 6, vers quatre heures du matin. La nuit du 6 au 7; le ciel fut découvert, mais il y avoit du brouillard répandu dans fair qui afloiblifloit Ja lumière des étoiles, de même que celle de la Comète : on ne la diflinguoit du fond du ciel que par une lumière très-foible , au milieu de quelle paroïfloit le noyau qui étoit auffi fort mal diftinct : ce temps dura toute {a nuit, cependant la Comte commença à paroïtre dès le 6 à 1 1° 2 du for, lorfqu'elle n’étoit encore élevée que de 1 14 1; mais elle étoit fifoible qu'elle difparoifloit Par intervalles; en s’élevant für l'horizon elle devenoit plus 2pparente & affez claire pour la pouvoir comparer avec des 168 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE étoiles voifines ; mais on êut beaucoup de peine à éclairer les fils cette nuit-là comme il le falloit ; la plus foible lumière d’une petite bougie fort éloignée, dont on fe fervoit pour éclairer le fond du ciel afin d'y apercevoir les fils, étoit capable de faire difparoître les plus petites étoiles & la Comète ; on la compara cependant avec plufieurs petites étoiles la même nuit, & lon compara les étoiles entrelles comme on favoit fait les nuits précédentes ; ce qui dura jufqu'à 4} + du matin, ce fat alors que la force du crépufcule fit entièrement difparoître la Comète, & enfuite les petites étoiles. Le ciel fut entièrement couvert le 8 , avec pluie par in- tervalles jufqu'au o vers 2h + du matin, que le ciel fe découvrit par intervalles , fendroit où fe devoit trouver la Comète étant ferein , la Comète y fut vue plus apparente que de cou- tume, le noyau y parut aufli plus gros, quoique toujours un peu fombre ; cet intervalle du ciel n'ayant pas refté long-temps ferein, M. Mefier n'eut que le temps de déterminer à la vue fimple quelle étoit la configuration de fa Comète avec les étoiles les plus voifines; mais peu après, vers 2h 40", le ciel étant encore devenu ferein à l'endroit où fe trouvoit la Comète, M. Meffier put déterminer fa fituation affez exactement à l'égard de deux petites étoiles avec lefquelles il ne l'avoit pas encore comparée, mais qu'il lia dans la fuite avec les autres étoiles, dont il avoit déjà déterminé les fituations; pendant ce fecond: intervalle de temps clair qui ne dura pas fort long-temps , la Comète parut avec la même diftinction qu'elle avoit paru dans le premier intervalle. Pendant la nuit du 9 au 10 Septembre , le ciel ayant été médiocrement ferein, quoique chargé de légères vapeurs , la Comète parut dès le 9 au foir vers 1 1"+, n'ayant que 1 $ à 16 degrés de hauteur, on ne la voyoit d'abord que difficilement , le noyau étoit prefqu’entièrement confondu avec la lumière en- vironnante ; ce que l'on pouvoit attribuer aux vapeurs qui étoient fort confidérables à l'horizon, & s'élevoient en diminuant de denfité jufqu'à la hauteur de la Comète ; mais à mefure que la Comète s'élevoit, elle paroifloit mieux & fon noyau étoit plus , HDLE ISMSNCME N C-E.S 169 plus diftiné ; il étoit cependant toujours mal terminé, & fe perdoit infenfiblement avec la lumière de la chevelure; la lumière de ce noyau, dans fon plus fort, n’étoit pas à beaucoup près fi forte ni. fi vive que celle des plus petites étoiles: M. Meflier a remarqué cette nuit, comme il l'avoit déjà remarqué , qu'au commencement du crépufcule, lorfque la Comète eft confi- dérablement élevée , fon noyau eft plus fenfible, & il a été cette nuit fi différent des autres jours , que M. Mefier crut que la Comète augmentoit; il fe fervit de cette circonftance pour melurer le 10 Septembre au matin le diamètre apparent de la Comète dans le commencement du crépufcule , par le moyen du micromètre adapté à la funette catadioptrique de 4 pieds +; le diamètre de la chevelure fut trouvé de 3° 40”, autant ue M.Meffier put diftinguer les limites de cette lumière fur le fond du ciel; à l'égard du noyau, il n'avoit que douze fecondes de diamètre, comme cela parut en le comparant avec 'épaifleur d’un des fils du micromètre, dont on a meluré enfuite {a valeur avec un microfcope. M. Meflier détermina encore cette nuit la fituation de la Comète à l'égard des étoiles voifines, & la fituation de ces étoiles entrelles, ce qu'il fit principalement vers le com- mencement du crépufcule, afin de mieux apercevoir les fils: . du micromètre, avant que la lumière du jour naïffant fût trop forte pour faire difparoître les étoiles & le noyau de la Comite; il a auffi déterminé exactement le 1 0 au matin la pofition de la Diamètre de la chevelures Diamètre du noyau, nébuleufe, qu'il avoit commencé à apercevoir le 28 Août au matin auprès de la corne méridionäle du Taureau. Les obfervations durèrent jufqu'à 4h 2 du matin, que la force du crépufcule fit difparoïtre la Comète. La nuit du 10 au 11 Septembre fut auffr propre aux obfervations que fa précédente, la Comète parut dès minuit du 10 , & l'on obferva les mêmes phénomènes que la nuit précédente, ce qu'il eft par conféquent inutile de rapporter. La nuit du 1rau 12, le ciel fut afez ferein pour laifler voir la Comète depuis minuit jufqu'à 4h À du 12 au matin; mais elle ne parut pas auffi diftinétement que les deux jours Mém. 175 9. Différence des apparences de la Comète & dela nouvelle nébulcufe, Diamètre de la chevelure. 170 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE précédens ; quoique le ciel fût affez ferein, l'on avoit de Ia peine à en diftinguer le noyau ; ayant comparé l'apparence ou la lumière de la Comète avec celle de la nébuleufe de la corne méridionale du Taureau, l'on y trouva bien de la différence , la lumière de cette nébuleufe étant ce matin confidérablement plus forte que celle de la Comète; au lieu que les jours précédens ces deux lumières approchoient davantage l’une de l'autre, celle de la Comète étant toujours la plus foible , ce qui fervira à faire connoître quelle a été la lumière de li Comite préfente à ceux qui voudront regarder cette nébuleufe avec de bonnes lunettes ou télefcopes, fuppolé que cette nébuleufe conferve toujours le même degré de lumière. Il eft inutile de dire que lon profita auffi ce matin du beau temps pour déterminer Ja fituation de la Comète & des étoiles entr’elles. À Dans la nuit du 12 au 13, le ciel fut encore ferein, & Ja Comète parut fort diflinétement depuis une heure du matin jufqu'à près de 4h À; elle étoit même plus apparente cette matinée que la précédente, ce qui vient peut-être de ce que le ciel étoit plus ferein ; l'on mefura dans le commencement du crépufcule le diamètre de la chevelure, comme on avoit fait le 10 au matin, mais on ne le trouva cette fois que de 2° 40", & par conféquent d’une minute plus petit qu'on ne l'avoit trouvé le 10; ce que l’on a attribué à la force du crépufcule dans lobfestation du 13, qui étant plus grand que le 10 a pu diminuer d’une minute l'étendue de cette chevelure. Le beau temps permit auffi de faire ce jour-là bien des obfervations pour la fiuation de là Comète & des étoiles entr'elles. Le 14 & le 15 Septembre au matin, le ciel fut entiè- rement couvert dans le temps que la Comète auroit pu paroître; mais le 16 étant fans nuages, lon put voir la Comite, quoiqu'avec peine & feulement lorfqu' elle étoit fort haute ; la trop grande lumière de la Lune qui devoit être pleine dans deux jours, affoiblifloit extrêmement celle de la Comète ; de forte qu'elle échappoit de temps en temps, & que l’on fut DES SICM'EN CES RL: obligé d'attendre que la Lune fut prête à fe coucher, pour déterminer le lieu de 11 Comète à l'égard des étoiles voifines ; cette circonflance n'empêcha pas d'obferver la fituation des étoiles entr'elles, la clarté de la Lune au contraire ayant été favorable pour faire mieux apercevoir les fils, lon s'en fervit pour repafier & lier toutes les étoiles enfemble, en commengçant par celles avec lefquelles 1a Comète avoit été comparée le 15 Août au matin, premier jour de fon apparition. Depuis le matin du 16 Septembre, la Comète a été treize jours fans être vue, tant à caufe des temps couverts que du clair de Lune, cependant on fa cherchée attentivement toutes les fois que le ciel étoit affez ferein pour cela, & que la lumière de la Lune & celle du crépufcule ne paroïfioient point y devoir faire obflacle; ce que l'on a fait principalement R nuit du 26 au 27, mais fans pouvoir Fapercevoir ; ce n'a été que le 29 au matin que l'on a commencé à la revoir ; elle avoit alors paflé de beaucoup l'écliptique, & elle étoit fort éloignée de la fituation qu'elle loccupoit le 16 au matin, la dernière fois qu’elle avoit été vifible. La Comète ayant fort avancé pendant ces’treize jours qu'elle avoit été invifible , elle fe trouvoit , le 29 au matin, entourée de nouvelles étoiles que l'on ne connoifloit point encore ; il falloit un nouveau travail pour les lier enfemble & avec celles qui avoient été déterminées précédemment ; c'eft ce qui a occupé M. Meffer prefque toute cette nuit : la Comète lui a paru avoir beaucoup diminué de lumière depuis le 16 ; fon noyau ne pouvoit {e diftinguer que par une lumière un peu plus … forte qui occupoit le centre de la chevelure; cette chevelure _ étoit elle-même fort rétrécie & d’une lumière confidérablement plus foible qu'elle n’avoit paru la dernière fois. - Le ciel a été couvert une partie de la nuit du 29 au 30 Septembre , & entièrement couvert la nuit fuivante; mais fe ciel ayant commencé à fe découvrirle 1.” Oétobre vers minuit & demi, lon a pu voir encore la Comète dès ce temps-là, elle paroïffoit de la même façon qu'on lavoit vue trois jours auparavant ; on j'a comparée ce matin avec une étoile voifine; Y ÿ 172 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE lon a auffl marqué la fituation de plufieurs autres étoiles, parmi lefquelles il s'en eft trouvé trois qui font marquées dans le catalogue de Flamftead, dont l'une eft de la quatrième grandeur & les deux autres de la fixième; la Comète fe trouvoit au milieu de ces trois étoiles. Le ciel a été couvert la nuit du 2 au 3 OGtobre; mais étant devenu ferein le 3 au foir, la Comète a commencé à paroïtre vers 10" 15, lorfqu'elle n’étoit encore élevée que d'environ 18, degrés; mais elle paroiïffoit alors fi foible qu'elle échappoit à la vue; cependant en s’élevant & f dégageant des vapeurs, elle fe voyoit le 4 au matin beaucoup mieux, fon noyau paroifioit d'une lumière plus vive que les jours précédens, & de la grandeur des plus petites étoiles télefcopiques ; ce noyau étoit environné d’une lumière très-foible, La Comète continua de paroître dans cet état jufqu'à $P+ malgré le crépufcule qui étoit déjà affez confidérable: je ne fais fi je dois dire ici ce que M. Meffier a remarqué, qu'il s’'élançoit du noyau une elpèce de petite flamme qui paroifloit, par intervalles, plus ou moins vive; car il ne fait pas s’ilne doit pas attribuer cet effet à la contention avec laquelle il regardoit cet objet. Il eft inutile de parler des étoiles avec lefquelles la Comiète a été obfervée ce matin: mais comme quelques-unes de ces étoiles pouvoient être vues au méridien, on n'a pas manqué d’en faire l’obfervation avec un inftrument des paffages; mais cet inftrument, quelqu'avantageux qu’il foit pour d'autres fortes d’oblervations , on ne pouvoit pas s'en fervir ce jour-là pour obferver le paflage de la Comète au méridien, parce qu'elle n'y auroit pas été vifible : je donnerai dans la fuite la defcription de cet inftrument avec le deffein, parce qu'il me paroît le mériter à caufe de fa conftruétion fingulière & de la grande quantité d'obférvations exactes auxquelles il a fervi. Pendant la nuit du 4 au $ OdGobre, le ciel a été ferein jufqu'à une heure du matin le $ ; vers 2 heures il y avoit une petite ctoile de la huitième ou de la neuvième grandeur, fort près du noyau de la Comète, & qui étoit déjà enveloppée dans fa chevelure; la Comète devoit s'en approcher encore L'HANODTE S' SiconE Nic Bison 73 plus près uné où deux heures après mais le ciel qui Set couvert peu après 2 heures, a empêché d'obferver le temps de leur conjonétion ou plus proche diftance, à «! Depuis le $ Octobre au matin jufqu'au 10, le ciel a été entièrement couvert avec un vent d'oueft violent pendant: la nuit du 8 au 9 , lequel a fait defcendre le mercure du baro: mètre à 27 pouces $ lignes ; mais, le’ vent seft appaifé le 9 au matin, & le'ciel s'eft découvert vers 11 heures du foir, il eft refté ferein pendant deux heures entières , ce' qui a permis de voir la Comète qui étoit alors voifine d'une étoile de {a fixième grandeur, marquée dans le catalogue de Flamftead javee laquelle on l'a comparée ;: mais il a été fort difficile-de le faire, parce que la Comète étoit {1 foible que la moindre lümière dont on fe fervoit pour éclairer les fils, la failoit difparoître. Quoïque pendant toute la nuit du ro au 1 1 Oétobre: le ciel ait été fort ferein , la grande clarté de la Lune a.empêché d'apercevoir à Comète ; il a fallu attendre que: la Lune für . couchée pour la pouvoir obferver , ce qui n'éft arrivé qu'après une heure du matin le r 1; on a pu la comparer avec l'étoile de la fixième grandeur du catalogue de Flamftead, dont on a parlé dans l'article précédent , & avec une autre plus petite ‘étoile ; la Comète paroifoit toujours très-foible & très-difficile à voir, & ce na été que par lamultiplicité des obfervations que l'on a pu s'aflurer de fa fituation avec les deux étoiles dont je viens de parler. :: lo niénobnot 31 Pendant da nuit du 11 au 12 ; le ciel a été entièrement couvert avec pluie depuis minuit jufqu’au jour ; la nuit fuivante le ciel a été prefqu'entièrement couvert ; mais dans celle du 1 3 ‘au 14) le ciel ayant'été entièrement:ferein , l'on ‘en a profité pour obferver la Comète , que l'on n'a: pu cependant apercevoir qu'après le coucher de la Lune , c'eft - à- dite après «3 heures du 14 au matin jufqu'au commencement. du crépufcule ; la Comète étoit toujours extrémément foible : elle n’étoit pas cependant. fort différente de ce qu'elle avoit paru, les jours- précédens : on la comparée avec les étoiles, voifines » tant du catalogue. de Flamftead que d’autres. , S Y ii Le 174 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Depuis le 14 Oétobre jufque vers la fin du mois , il n'y avoit guèré d'efpérance de revoir la Comète, principalement par fa grande clarté de la Lune qui devoit être pleine le 16 au foir, aufli la chercha-t-on inutilement les jours fuivans ; lorfque le ciel étit le plus ferein ; if fallut attendre pour efpérer de la révoir, que la Lune fe levät tard; fon crut en avoir trouvé l’occafion le 22 au foir, la Lune ne devant fe lever qu'à 9h +, & le ciel étant extrémement ferein, c’eft pourquoi, un peu avant neuf heures, on chercha la Comète qui étoit déjà fufffamment élevée au-deffus de l'horizon pour pouvoir être aperçue , fi la lumière de fa Lune, prête à fe lever, n'en eût pas empèché; & effeétivement il fut impofñlible de l'aper- cevoir, ce qui fit craindre qu’elle ine pourroit plus reparoître ; on employa la férénité du ciel à obferver la nouvelle nébuleufe, découverte le 28 Août auprès de la corne méridionale du Taureau , & à fa comparer avec la nébuleufe connue , fituée au bout du pied du Caftor, l'un des Gémeaux : ces deux né- buleufes different entr'eles , en ce que celle du pied de Caftor n'eft qu'un amas de petites étoiles, dont l'affemblage produit une lumière foible, qui a trois ou quatre fois plus d'étendue que la nébuleufe de la corne du Taureau, dans laquelle il n'y a point d'étoile, & qui ne paroït que comme une lumière blanchätre , au milieu de laquelle cependant M. Meffier a eru apercevoir un très-petit corps lumineux. Le lendemain 23 Oétobre au foir, la Lune devant fe lever une heure plus tard que la veille; favoir, vers 10h À; & le ciel étant extraordinairement ferein & pur à caufe de la pluie abondante qui étoit tombée l'après-midi, & qui avoit abaiflé les vapeurs; M. Meflier fit de nouvelles tentatives ne heure avant {e lever de la Lune pour ‘chercher la Comète, & il eut le boneur de da retrouver ; elle avoit paflé de 2 degrés + Aldebaran , qu'elle avoit laiffé au fud, & elle étoit déjà un peu au - delà de l'étoile double des Hyades, de a cinquième grandeur , marquée par Bayer de la lettre grecque 9 ; & enfin elle fe dirigeoit vers la première des Hyades, de la troifième grandeur , dont elle étoit éloignée d'environ 1 degrér. * * DES: NO LE NT ET So à M L7 Ce fut vers 9h 45’, que la Comète put être vue dans Vendroit que je viens de dire ; elle étoit extrêmement foible & fe perdoit de temps à autré; il falloit, pour l'apercevoir, regaïder avec une grande atiention dans, Fendroit Précis où. elle étoit: ce n'étoit plus qu'une lumière rare ,: très-peu-étendue & die milieu de laquelle fe noyau fe diftinguoit encore, quoique prefqué confondu avec cette foible lumière. FE sh L'on peut bien juger avec quelle difficulté on à pu com- parer la Comète avec les étoiles voifines püique: la-moindre lumière dont on pouvoit {e {érvir pour éclairer les fils; da faifbie difparoître ; il fallut pour cela recourir à l'expédient de couvrir & découvrir alternativement & promptement lapetite lurnière dont on fe fervoit pour éclairer le chanp de l4 lunette, un moment devant ou après les pafages de la Comite ou des étoiles par les fils: M. Mefier put en: venis À bout & déter- miner par ce moyen affez-exaétement là fitüation de la Comète : avec l'étoile double dont je viens de parler, & avec ‘d'autres plus petites étoiles voifines ; il Jui fot plus aifé enfuite de dé- terminer la fituation de ces étoiles des Hyades entr'elles, pour - S'affurer de leur fituation réfpetive, quoique l'on en connoiffe _ déjà aflez bien a plus grande partie qui fe trouvent marquées . dans les defféins & für les cartes particulières que l’on a fiütes de cette petite confiellation., : #5. | YÉTQUE La Comète put être vue ce foijufqu'à r 1 heures +, quoique JR Lune füt levée depuis trois quarts d'heure ; mais peu après 11 heures Z, if fut abfolument impoflible de lapercevoir:à cufe de Ja lumière de la Lune qui venoit de päñer on premier Quartier depuis 2 à 3 heures. : Ron: s1'eiser esrivan .…. Pendant la nuit du 24/au. 2,5, le ciel fut entièrement:couvért; avec pluie; le 25 au foir; vers 9: heures le: ciel s'éclaircit un peu, mais il étoit chargé de vapeurs qui empéchèrentd'aper- cvoit la Comète; à! 10 heures le ciel fe couvrit entièrement, € qui dura toute: fa nuit avec plüie. 1 Éd | -nLe :26:Oétobre il tomba: de fa pluie tout, le jour , ‘&.le ciel ne commença à s’éclaircir que verso heures du foir; une demi-heure après il étoit entièrement découvert, mais il reftois: x76 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE un brouillard répandu dans air qui ne permit de découvrir la Comète que vers 10 heures Z, le ciel étant plus ferein ; on la chercha auprès de la première des Hyades , qui eft de la troifième grandeur où elle devoit fe trouver ; & effectivement elle ÿY parut former un triangle équilatéral avec cette étoile & une autre petite étoile télefcopique, qui n'a été jugée que de la dixième grandeur ; on n'eut alors que le temps d’eftimer à peu près la fituation de la Comète à l'égard de ces deux étoiles, comme je viens de le dire; le ciel qui commença à fe couvrir vers ro heures +, le fut entièrement une demi-heure après. Commé on ne défefpéra pas que le ciel ne püt f découvrir, on attendit jufqu'à 2 heures du matin qu'il redevint ferein; il n'ycavoit que quelques minutes que la Lune étoit levée, mais comme elle étoit fort en décours , elle ne pouvoit pas empêcher la Comète de paroître ; on eut cependant bien de la peine à l'apercevoir, mais cela venoit de ce qu'elle étoit trop proche de la première des Hyades, dont la grande lumière effaçoit celle de‘la Comète; ce ne fut qu'avec bien de la peine que d'on put apercevoir la foible lumière de la Comète & obferver fi fituation avec cette étoile des Hyades, & avec la petite étoile avec laquelle elle avoit paru former quatre heures auparavant un triangle équilatéral: on détermina auffi la fituation de cette plus petite étoile avec la première des Hyades, pour pouvoir faire ufage de l’obfervation faite quatre heures au- paravant. Le 27 au foir, le ciel fe découvrit encore entre 10 & 11 heures; mais le brouillard empécha de voir la Comète jufqu’à 2 heures du matin, que ce brouillard s'étant diflipé en partie, & la Comète étant dans fa plus grande hauteur, on commença à l'apercevoir, quoiqu'avec grande peine, parce qu'il reftoit encore quelque légère vapeur dans le ciel, dont le fond étoit blanchtre; elle paroifloit & difparoïfloit par intervalles, ce qui n'empêcha pas cependant d'en fixer la pofition en la com- parant avec la première étoile des Hyades. Le 28 Oûtobre, le ciel qui avoit été ferein tout le jour, continua DES ScrENCEs. 177 continua de même le foir, & devint même d’une parfaite fé- rénité fans aucune vapeur, le fond du ciel étoit obfeur , & les étoiles brilloient avec tout eur éclat ; cependant la Comite ne paroïfloit que foiblement, mais plus apparente que ce matin, fans doute à caufe de la pureté du ciel; on fe fervit de cette circonflance pour fixer fa pofition , en la com parant avec une petite étoile de la féptième grandeur, qui eft marquée für les cartes céleftes de Flamftead & dans fon Catalogue, laquelle eft à l'orient de la première des H yades d'environ un degré. Entre onze heures & minuit le ciel commença à fe couvrir, & bientôt après il devint entièrement couvert. Le 29 O&@obre, le ciel fut entièrement couvert avec pluie, de même que le 30 pendant tout le jour: il ne fut qu'en partie ferein R nuit du 30 au 31, Ce qui nous fit défefpérer de revoir la Comète; M. Meflier & moi allames à Verfailles le 31 au matin, pour préfenter au Roi une carte où étoit tracée la route que la Comète avoit tenue pendant toute fon appa- rition aux mois d'Août, de Septembre & d'Octobre: c'eft celle qui eft jointe à ce Mémoire ; M. Meier’ y à marqué toutes les nouvelles étoiles qu'il avoit déterminées dans le pañlage de cette Comite. Sa Majefté eut la bonté d'applaudir à ce travail, & écouta favorablement l'ex Plication que j'eus l'honneur de lui en faire, Le ciel fut couvert le refte de la journée du 3 1 , de même que les r.* & 2 Novembre , dans les heures où l'on auroit pu “chercher la Comète fi elle eût encore été vifible; mais le 2 au {oir, entre 11 heures & minuit, le ciel étant devenu extrémement ferein, M. Meffier put encore revoir li Comète, toujours extrêmement foible ; elle m'étoit voifine que de petites étoiles qui ne fe trouvent point dans Je catalogue ni fur les cartes célefes de Flamftead, ainfi M. Mefier fut obli gé d'en déterminer BR pofition par une étoile de la quatrième grandeur, qui eft dans la poitrine du Taureau » & par ce moyen il eut encore une pofition de la Comîte Ia nuit du 2 au 3 Novembre; c'eft la dernière obfervation qu'on en aït faite à Paris, Min. 1759. y. Route de Ia Comète tracée . {ur une grande Carte célefte , Préfentée au Roi le 13 Oûobre 1758, Dernière apparition de ha Comète à Paris, 178 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE --On verra dans les Tables fuivantes le réfultat de toutes les obfervations dont je viens de parler. ÉLÉMENS de la Comète de 1758, calculés par M. Pingré d'après les obfervations dont on vient de parler. Longitude du nœud afcendant de l'orbite de la \Comete EIRE t 2er +. 71 201 50° Inclinaifon de fon orbite fur l'écliptique 4” 68. 19. Longitude du périhélie. . .. +. * CNNINS. 27.05 8€ Logarithme de Ja diftance périhélie.. .. 9,333148. Diflance périhélie, en fuppofant 100000 pour celle du Soleil à la Terre, dans le temps de fes moyennes diftances.... 21535. Temps moyen du pañlage par le périhélie, LOU QE Fe DPI CURE SIPER .,1 3h, 27" à Paris. La Comète étoit directe, c'eft-à-dire que fon mouvement étoit dirigé d’occident en orient , vu du Soleil. Les détails qui précèdent pourront paroïtre , quant à préfent, un peu longs , mais il faut confidérer qu'un jour les Aftronomes obferveront le retour de cette Comèête, comme nous avons obfervé en 1759 celui de la Comète de 1682, alors on cherchera, avec le plus grand foin, tout ce qui aura été ob- fervé dans l'apparition dont je viens de rendre compte; rien n'y paroîtra inutile, parce que ces obfervations feront le feul terme de comparaifon qu'on aura pour déterminer fa période & les élémens de {on orbite; c’eft ce qui me détermine à placer ici les tables fuivantes , où l’on verra, dans un affez grand détail, les réfultats des obfervations & les pofitions d'étoiles qui ont fervi à conclure celles de la Comète; par ce moyen les Aftro- nomes feront à portée de pouvoir juger de leur exactitude, Dre: s USNCNTIENN c'e: s 179 PAR BTE ET LIEUX DES ÉTOILES DU CATALOGUE DE FLAMSTE 4D, qui ont fervi à la détermination des lieux de la Comète de 1758; pour le commencement de l'année 1690. Dans la Confiellation du TAUREAU. Ordre e É oN DÉCLINAISON | LONGITUDE. feptentrionale, Flamf. | Let, d de ASCE NE ION Bay. droite. Lis 3 | 2) VEMSN TD TIUES, | — À ———_—_—__— | ——— 1 |72. 29. 40|19. 57. 30 + 59 74e TG TO|2 7e 53.5 UT 5. 22. safe 48. 4 16. 14. 5811. 3. 3 18.42. 5611. Sr. 14 B 20. 3. 55/0 40. 32 6 20.27. 2812. 14. 21 A| 3 21. 6. 7|2.29. 23 B| 4 Dans la Confillaion du CoCHERr . ; 25. des 9. ol31. 54. 40[H19. 50.20[8. 50. 43 B|s. 6 26./:.179. 42. o|30° 15. Ls] 21. ‘2.467: 5. 24 6 Z ÿ 9 180 Mémoires DE L’'ACADÉMIE ROYALE TL A BOPPEN MENT LIEUX DES ÉTOILES DU CATALOGUE DE FLAMSTEAD, réduits au temps des obfervations de la Comère de 175€. Dans la Confillation du TAUREAU. Augment. ‘fon loneiude, | E Oo NG1TUDE|ASCENSION|DÉCLINAISON Ë depuis . | l’époque en 1758. ‘| de 1690. © nn On Perse | ÙN R N NN O ww Dans la Confiellation du TAURE AU. | 25.[X {57 3 [H20.47.23|79. 15. 19[31. 58. is 26.1-.157. 7 | 21.509. 53|80. 47. 13130. 18.14] 6 ARRETE SRE SRLIE SGELE HET DES ScrENCES r8E REA EL: ER Id LIEUX DEs ÉTOILES AIoUTÉES Au CATALOGUE DE FLAMSTEAD, avec leur difference d'afcenfion drone à de déclinaifon , obfervées entr'elles © avec les étoiles du Catalogue de Flamfiead, réduirs au temps des. obfervations de la Cométe de 1758. È Nanre Lieux des nouvelles Étoiles. | Différ. en afcenfion si Différ. en déclin. des Pan. POSE le. PA le. AS | Num, |Grand: | Ler. d LASCENSION DÉCLINAISON Étoiles, Num 1 droite. feptentrionele. Étoil. | Bay re TT Cv] easn| vez s. | 2. M. S ; 12, se 11+| 35|... 10| 2 12e 53 I 10 12-035 4e 23+|... 2 9 o. de PE ee 3 9 5. o| 7- 38-- 10| y o. 5715. 15— rh o| 8 13. 19ÏSI: 15— 13 9 6. ssirt O— 9 10 59: 14j24e 30— | ri 10 2.23] 3- ©— II 10 1: 3212400 o— 14 10 18. 18. 34] 2: 30—|...| 13 9 15. 12/13. 53—|...| 1414 5) 8 1. 722 20— 211$: 9—! 9 Ë : 7e OMG ot. rfi 5341" rod: D 16 168 24. 13/17. 48. 14114 30—|... 2128 2" oh Dore pente PEUT | 68.27.2817. 19 00x |. {2x8 57e |. ro 18 |68. 32. 28/18: o. 331 6: 15—|...| 21/15: 43—|l' r10|: | 19 |68. 33. 28118. 18. 56] 5. 15—|...| 21] 2. 404| r0| 20 168, 34. 5118. 6, 2x8 4 38—1]...| 21] 9 ss—] ro 182 MÉMorrEs DE ra ROYALE Numérol Lieux des nouvelles Étoiles. | Différ. en afcenfon dr. Différ. en déclin. des | me - Étoiles ASCENSION| DÉCLINAISON re Le droite. {eptentrionale. Étoil. | Bay. ccm | RAR SUR | FESSES Re MERS DE do RES) MS | D PE TO 4 ee Le 21 168. 38. 43|18. 16. Ze 19—| 9|7 22 |68. 44. 36 De LARMES 23 DM 8 O0. 4+| 10| 7 24 |69. 3.28 ao. 10| 7 2$ [69.29.17 8. 5+| 10 26 |69. 31. 28 3 UT O)|87 27 169. 33. 58 9. 40+| 10| 7 28/6052 T Be 27 4 2+| 8] 29 |7o. 12. 58/18. 56. 25l10 36+| 8 30 |71. 40. 25|19 3- 477] 10 31 |71. 46. r1ol19 33110. 12—| ro 7 Te 52.292120 6. 14— 9 33 [72 0.40l20 26. 29—| 10 40/72. 0632 [20 20. S1—| 9 ss 2. 29. SO|21x 4 23+| 7 36 [72 30. 2/29 one Mona (ee #72 LÉc 37 (72. 45. ro|2 55 8—| 9 381172. 51. Anar 9. 33-20 39 |72. 51. 320 ; | 5* 134] 10 40 |72. 54 920 ; : 9. 47+| 9! /E- NI RS 49! . . 3e PART Me z [73e 14. 34/20. 15. | 12. 17] 10| / 43 |73. 34. 39/21. 8. : CAEN (LE -CRR à de) DIRE: 44 |73. 41. 19|z0o. 9. ; k (HABITENT eee: 8 45 [73 43: 49/20. - FGSBEEN » 9 46 173: 49. 19/20. 13. - Han 47 |74 4. 58/2 : = 2. o+| 10 48 [74 6. 36l20 À , 8. 17—| 10 DES SCIENCES. ME dr à CT ES Re er mme mme. À Numéro! Lieux des nouvelles Etoiles.| Différ. en afcenfion dr.| Différ. en déclin. des NS Ce SN E ASCENSION droite. Grand. des Etoil. Lers de DÉCLINAISON Étoiles, 2 \ feptentrionale. 78. 39. 13124 O0 1. 78+ 55. 24/23. 33. sol19. o+|...| 73lr1. 18—| o 76 [78 57. 14124. 36, 57127. 6+|118 184 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE À Numéro Lieux des nouvelles Étoiles} Différ. en afcenfion dr.| Différ. en déclin. des 22 ASCENSION| DÉCLINAISON Num. Grand, Etoiles. TE N ; droite feptentrionale Fine ges s 15 EE Flamf Étoil. EEE VE PENSE PET | DETENTE ET | TONI | COR | een mans RON EC ES ju s Te ER 81 |79. 32. ro|25. 39. 30133. 21—| 89} 2. 10+.| 8 82 |79. 35. 4/24. 11. 10/29. 19— 90! 6. 214+| 8 8. 9+ 81;25. 13—| 10 83 179.40. 19/25. 14. 17] 84 |79. 40. 33|24. 25. 28; 85 179.49. 5825.23. 51] 9. 39+|...f 83| 9 86 179. 54 39|24. 41. 914. 45—|... 2;À. 46 87 |79- 54. 39/24. 40. 5014. 45—|...] 92! 6. 2r—| 10 88 |80. 71.24|24. 53. 34 8. |... 6 6 90 |8o. 4.23l24. 4.49] 6. o1 |80. 6. 49/27. 23.48 26. NE 2 |80o. 9. 24124. 47: 20]28. 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MAUR LATIN, TABLE des lieux de la Comète de 1758, découverte le 15 Août au matin ; obfervée. jufqu'au 3 Novembre, tirée de fa fiuation à l'égard des Etoiles comprifes dans les Tables II à IIL Pa M MESSIE R.u A Îp Dirrér. Me id Re fee ON Diem ME ES CA SCENS. ÉCLIN. 3 LS Ter] Temps! boréale [FONGIT. LATIT. “Ho ERA e vrai. moyen. obfervée. | obfervée. & par tt | 5. F obfervée, | obfervéce. P fes Étoiles le Ne les Étoiles, ® | M. -<: -- |: 4 Tres clone zr alice ie R w| #4 msg D m s|p M s|p , Sp. MS] D». m | m ». B F2 24 1": 37] 37l1s.41. 9|81.17. 3 $- 5-40|eflimée à l'égard de trois Étoiles nouvelles. ls 7 7\15 11.37 gi. 13. 28! 27. 553522: 13 eflimée à l'égard de deux, LILOAILEEESE 81. 9.59|27. 40. 18/23 cflimée auf à l'égard de deux. 14.0 5 re 7-36 181. 6 . étoile. ,d'# 46 1448.55 8e 6. 123. + $e . 9. 2. . . étoile, 15. 4l15. 6.35|8r. 6 . étoile. 15. nuls, 3.358. 6 . étoile. .42 |eftimée à Me dé deux étoiles. 32/21: sl 13:25—| 98| #7|nouv. +21! 6.$1—| 3.224109! 7 1S., 19 19e 17. 4181. 1. | ! . Gs7lar. 59. , _)ts. ofrs. 1 180.51. | + 29+ - 48. 71. ol15. 1 1|8ocsr. 126. 28. - 48. 28 |15. 55115. 55.43 | 80.46. 18/26. 21. °43- étoile UE nouv. étoile. 29 15: 0115. L°7 24 4|du Taureau | L'ART 9 3357 1|22:59+|125 13: 9113: 9- 9 13.45+|20. 8+1 96 0. © o. © 96! Sept. 1 | 2 Le 20 12.19. 6.38— l 15-51 15.49. 16, 21r1600. 16. 12 16870: 55 2 . 11/20. 56.11|2. 2 .21/20. 56. 4 6 13 11 13. 9. .26/20.41.26|1.47. 16,12.16, 9. DEL SUN S "CITE NICELS: E 187 EEE] 2 ASCENS.| DÉCLIN. L | À Mons Dirrér| 5 |2 Temrs| TEMPS k ; Pomene) LA Dr he AR ET técnnltO droite boréale pa HALc roite. Le 5 [ts . D + , É Et | 96 PO | 'oblérvée, | obfervée. | + UE) pe de Eole! à | 5 les Etoiles. LS À ER Re a = ————— ee 20. $0 APE D 4 te Le 39| 3-15+-| 9:50—| 79] 10|nouv. étoile. 20.42|24.35$.41|20. 19. LR 28.57] o.45+| 9.50— 80| ro|nouv.étoile, 13.20|12.16.55|79-10.59|24.27« 3|[20. 9 UE 0/29.34—| 1.35+ 84 8 | nouv. étoile. 9416-.22/16. 18.53 179. 10. 14/24. 27. sol20. 8. 56|1.21.$0|13. o+| 9. 7—| 76| 9 |nouv.étoile. 16.22|/16.18.$3|79- 10. 0|24.27.22|20. 8.46|1.21.23|30.33—| 1.54+ 84| 8 |nouv.ci-def. 14. $6|14. 52. 34178. 59. 14/24. 19 419 8.22|1.13.51| 2, o+|17.53 76| olnouv.ci-def. e 15°27|15.23.3317 à 3.43 “| 8 |nouv. étoile. TS TALIMEEDEE 10.39—| 84! 8 |nouv.ci-def. 15-52|15.48.33 9.11+| 78| 10|nouv. étoile, 12, $5[12. 51.14 8. 3+| 74 10 |nouv. étoile. 15-1815. 1411 6.54+| 74| 10o\l1 même. DTA 1 28frserge rs 0.3a+| 78| 1o|ci-deffin. 16.30|16.26. 12 62641 74| 10o|ci-defu. 13-40|13.35.51 74) 10|nouv. étoile, 12/13-53|13.48.51 12.59] 73| 10|nouv.étoile, 16. 1 15: 56.53 74| 10|nouv.ci-def. 15113. 15 13. 9.5$0 7o| g|nouv.étoile, 48| ro|nouv.étoilé. 431 8]|nouv.étoile. 40| o|nouv.étoile. .53—|29.24—| 34] 9lnouv. étoile. + 0+|23.40—| 32] o|nouv.étoile. .$3+| 2.10+4| 33| 10|nouv. étoile. L +30] o. Er 33| rolla même. 31| 10|nouv. étoile. 8. ee 38| 8]|nouv. étoile. 10. u 2$| 10|nouv.étoile. 10.31—| 29] S|nouv.étoile. .34— 1] 8.54+| 97| 6|1du Taur. 8.37+|11.14—] 23] ro nou. étoile. A a ij = PCT” > . # LU ASTON Eten HAE es en S +" 188 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE SN fee ET DiFré Z ASCENS., DÉCLIN. FÉRlDirrér.]| 5 | Temrs| TEMPS LonGiT:ILaTIT.] 7 afenf | Lu | 5 [5 Q : PEN . de déclin, | 2 Ni ï droite boréale LE : droite. 5 |t15 vrai. moyen, , ALe oblervée. | obfervée. par mt | & à obfervée, | obfervée. Pl es role | SES les Étoil CAR leu 1) D CS, 2 D. M. s|2. M, S| D. 4. x A. 8. 51.46|13.59-36 .ÿo.sr|4 o. 1 [#. M. s|D. M SD M S 1758. 16.47 nel. 17. S1.13:6 OR 139 17. 4e 17. 28. 9167: STE 7:45—| 9:56— PS 8.12— 23 |ro. | 09.47.2663. 7.21|15.35.57 8.52.26|5.28.43|10. o+|15. 1 + ne 10.29. 7|61.35.40/14 58.53] 2.29.21]$.48.48| 4.$o+| 1.32— 3ol 2.24. 511$.50.21| o.4$+| 3.55— 15-34/15.18. S|6r. 1.206114 56: | 27 |1417|14 Le o|61. 4.18|14.41.52| 1.56. 95.59.41 se A PA SE ï EE 1432. 7 1.28.44|16. 4.13| 6.35+|13. 2— | È Ov. 2/11 32/1n. 15.491658. 8. 2113.20.18 28.51. 1|6.44.52|12.2$—|19.19+ 28/10. 8] o.51.58 60. 37:35 —_—————— ji Éteile nébuleufe découverte le 21.4$5-27|20.43-30|1.23.28 28 Août 1758... 80. 0.33 amd LL Mem.de LAe.R.dar Se. dy Pons 208 PI D € &i © | ROUTE de Ia ctobre et Novembre 7 M° MESSIER ; Hem és el a L' Acadenue } du 15 Novembre 1788 L'ISLE Astronome Ga & 2 DU 0 = de Clagry { ù RSS SS \\ À = NL =7 | À = \ | LENS : NN 2 ; = SS À 4 - 1 Ne {1 A {tt l LL AN }— = Â) 1 A : = ET | nn _— D ee à 7. EL = - : are par Dheulland Darsenatur et Graveur de le Dlarrne . ne . . re per” TA Alcenfion Pied du ) “| | rss s d( 1° ÇCocheï N Grandeur des Ltoiles Bots tt: : ps: 6 b # à | #4 05 b2 on 8 79 ‘ 78 7 CA Ê. 4 2 7 ROUTE dela COMETE obéérveet PARIS ECO en Août. Joplem do à tobre et Novembre 1708 dans l'Observatoire de la Marine, 4 L'Hôtel d, Clagn 1 à) ü: M'MESSIER ; ÂMembre de la VJocité. Royale de Londre« ON in A | Presentee au ROY &% Octobre, el & V'Academme Royale des $« 1ences da son Assemblee Publique du 15 Novembre 1:58 | N Par M' DE LISLE Astronome Géoyraph de lx Marine et de l'Academie Royale des Sciences &2 . | 6 75. î 7 uw] 72. _74 70 69 | 68 67 66 68 } bo mn] 28 : 57e Gb 55 x à £ : - — ———— = - =—- droite N en 8 A & +— By] à _—_— { : ale Séptentrion: [NX s +) — ù ] x F | N ÎILes Hyades fé #2 : & eu. his D GE, dy DES SCIE NC E.sSs 189 MÉMOIRE Sur les accidens des Coguilles foffiles, comparés à ceux qui arrivent aux Coquilles gu'on trouve: maintenant dans la Mer. Par M. GuETTARD. U NE idée fingulière de M. Bertrand , auteur de plufieurs Ouvrages fur FHiftoire naturelle de la Suifle fa patrie, m'a fourni le projet de ce Mémoire : on la trouve, cette idée, dans fon Efai fur l'ufage des Montagnes ; M. Bertrand S'y énonce de la manière fuivante : « Ï[ ne me paroît pas, dit-il, que les pierres figurées, dont Voyez plufieurs repréfentent fi exaétement des parties d'animaux & « AS de végétaux, des coquillages & des poiflons, que celles du « montagnes, . moins qu'on trouve dans les lits de terre entiers & non dé- « PRES. > rangés, y aient été introduites par quelqu'accident, & ne « ME Puiflent pas être mifes au nombre des foffiles propres, pri- « mitifs & effentiels à la terre; ne peut-on pas fuppoler qu'il « y en a eu de cette forte dès fon origine, & que Dieu pour « mettre plus d'harmonie dans fes œuvres, plus de correfpondance « entre les chofes qui font dans les eaux & fur la terre , à fait « des êtres qui, avec plufieurs différences, ont cependant quelques « rapports: il femble que par cette fappofition il y a plus de « continuité, & par-là même plus de beauté dans les ouvrages « de Ia création, l'échelle eft mieux fuivie, la gradation mieux « obfervée ; on prévient, par cette fuppofition, un faut & une «. forte de Ziatus qu'il y a entre les divers règnes; enfin la terre « ainfi compofée de tant de corps figurés & réguliers, qui font « entrés primitivement dans fa ftruéture ou dans fà compofition, «. eft fans doute plus variée & plus belle que lorfque ces corps «. figurés & réguliers n'y Kroient pas : fuivant cette idée, fi même «. Aa ii 190 Mémoires DE L'ACADÉMIE RoyareE » ces corps refflémblent aux animaux où aux végétaux, ils n’en » furent cependant jamais; ils ne devoient pas en être, mais ils » furent faits pour être & demeurer foffiles, & faire comme le » point de réunion entré le règne minéral & Jes autres règnes ; » ce ne font cependant là que des hypothèfes conjeéturales que » nous abandonnons fans peine à qui pourra les renverfer, ou qui voudra les attaquer. » Ce n'eft certainement point dans la vue d'attaquer ce que M. Bertrand peut penfer & même conjeéturer, que je me fuis propolé de rapporter dans ce Mémoire plufieurs accidens des coquilles foffiles ; j'ai feulement voulu faire voir que ces idées font réellement des conjedures qui ne font appuyées fur aucun fait, & contre lefquelles au contraire les faits parlent évidemment. Ceux que je détaillerai dans ce Mémoire font, à ce qu'il me paroît, de cette nature : avant de les rapporter , il convient que j'examine le paffage qu'on vient de lire, il renferme plufieurs traits qu'il faut éclaircir ; fans cet examen on feroit en droit de me demander ces éclairciflemens : il fera même plus commode pour les Lecteurs de les trouver ici, que de les chercher dans l'Ouvrage même de M. Bertrand, d'où Fon pourroit peut-être les tirer. La première queftion qu’on feroit en droit de faire, feroit de favoir quels font les lits de terre que M. Bertrand regarde comme primitifs & non dérangés, & dont les coquilles elles-mêmes font des foffiles propres, primitifs & eflentiels à la terre ; un pañlage tiré encore de l'ouvrage de M. Bertrand éclaircira cette queftion : « La feule règle, fuivant cet Auteur, à laquelle on » peut diftinguer ordinairement les corps originaires de la terre » avec les advenaires, & qui peut nous guider à cet égard, eft la » fuivante : out ce que l'on trouve dans la terre vierge, dans » des couches entières, dans des lits fuivis, liés & non rompus, » femble devoir appartenir à la terre primitive, & venir de la » création; ce qui fe rencontre dans les fentes ou les coupures » perpendiculaires des lits, dans les interftices horizontaux des » couches, où bien des fédimens ou dépôts détachés de la fuite » des affifes générales dans des monticules adjacens ; tout ce qui DES SCIENCES. rot reffent la fubverfion & le dérangement particulier , tout cela, « continue M. Bertrand , peut avoir des changemens particuliers « à la formation primitive du globe. » Conféquemment à ce principe, les coquilles & les autres corps foffiles qu'on regarde communément comme ayant ap- partenu à la mer, & qui fe trouvent dans les bancs dont les montagnes font compolées , & qui n’ont point été dérangés , n'ont réellement point appartenu à la mer : il eft difficile de fe rendre à ce fentiment, fi on examine avec attention les différens corps qui entrent dans la compofition de plufieurs de ces bancs ; ceux-ci renferment non - feulement des coquilles entières, mais encore des coquilles fruftes ou brifées , de façon qu'elles font en pouffière, & forment une efpèce de fable femblable à ceux qu'on voit de nos jours s’accumuler dans plufieurs endroits de nos côtes; ces coquilles ainfi broyées font mélées à de vrai fable qui ne diffère pas effentiellement de celui des bords de la mer; de plus, ce fable des montagnes eft fouvent rempli de cailloux, connus fous le nom de galets ou de cailloux roulés : dira-t-on, avec M. Bertrand, que ces cailloux, ce fable, & celui qui n’eft que de coquilles brifées, ont été créés ainfi? il n’eft pas au contraire néceflaire d'avoir recours à cette raifon, lorfqu'on peut expliquer ces faits par tout ce que nous voyons fe paffer journellement fur nos côtes. On rencontre de temps en temps quelques-uns de ces. cailloux qui renferment dans leur intérieur lempreinte d'une coquille *; il faut bien que ces fortes de cailloux fe foient formés d'une came à ftries longitudinales ; cette empreinte eft parfaite tant en * On conferve un de ces cailloux dans le cabinet de S. A. S. M. le Duc d'Orléans, l’empreinte qui eft dans l’intérieur de ce caillou, eft celle d’une came ou d’un peigne ftrié Jongitudinalement;l'empreinte n'étant pas parfaite , on ne peut pas trop bien caractérifer la coquille à laquelle elle eft düe: j'ai vu un femblable caillou dans le cabinet de M.Clozier, Apothicaire à Étampes, & Corref- pondant de cette Académie; l’em- preinte qui eft dans ce caillou eft relief qu’en creux ; ces deux cailloux ont été trouvés par M. Clozier, parmi ceux qu'on avoit tirés d'une fouille faite pour creufer un puits dans la rue de la Juiverie, à Étampes®? j'ai appris de M. Renard, In- génieur pour les ponts & chauflées , qu'on en voyoit fouvent de pareils parmi ceux dont les poudingues des environs de Compieane font com- pofés. 192 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dans l'intérieur de quelques montagnes qui renfermoient des coquilles marines, & que ces cailloux aient été enfuite arrachés de ces montagnes & balottés par les flots de la mer, qui leur ont donné la figure arrondie qu'ils ont maintenant , confé- quemment les coquilles parmi lefquelles nous les trouvons maintenant, font de celles qui vivoient fur les côtes où ces cailloux étoient roulés par les vagues de la mer. Ï eft vrai que ces cailloux annoncent une deftruction de montagnes antécédemment formées à celles où l'on trouve maintenant ces fortes de cailloux: ‘on ne peut difconvenir de ce fait; mais ces montagnes ont 4es couches entieres, des lits Juivis, lies € non interrompus, & font par conféquent des montagnes primitives , fuivant larègle établie par M. Bertrand, comme celle à laquelle on peut reconnoître les montagnes. primitives &c qui exiftent depuis la création; ainfr de deux chofes lune , ou la règle donnée par M. Bertrand n'eft pas jufte, ou fon opinion fur la formation des coquilles fofliles eft fauffe ; il faut que les coquilles fofliles qui font mêlées avec ces cailloux , aient été dépofées par la mer, ou qu'elles foient de celles qui ont été arrachées des montagnes que la mer dégradoit ; y a-t-il lieu de croire qu'elles foient de celles-ci, & qu'elles aient pu être auffi bien confervées qu'elles le font encore maintenant; ces coquilles ayant été dans le fentiment de M. Bertrand créées avec les montagnes , elles devoient, lors de la dégradation de ces montagnes, avoir fouflert de façon à ne pouvoir pas réfifler aux chocs des flots de la mer, &il devoit leur arriver alors ce que rous voyons arriver fur nos côtes aux coquilles qui font renfermées dans les falaifes que les flots dégradent peu à peu; ces coquilles font en peu de temps brifées & mifes en poudre, à moins qu'elles n'aient été changées en agathe ou en pierre à fufil ; encore arrive-t-il alors que ces coquilles fe déforment beaucoup ; perdant leurs pointes, leurs mamelons & la plupart de leurs attributs, au lieu que les ;coquilles qui fe rencontrent avec les cailloux roulés des montagnes, font communément afez bien confervées, &c qu'il ne leur manque fouvent que leurs couleurs ; Les ue es DRE :, DES SCIENCES 193 des montagnes ont été altérées par l'eau & les matièrés ron- geantés qui circulent dans la terre, elles font devenues fragiles , il n'eft pas befoin de les remuer ni de les balotter beaucoup pour les brifér entièrement ; au lieu que celles qui font dans la mer ayant toute {eur dureté , leur tiflu n'étant point défuni , elles font plus en état de réfifter aux mouvemens & aux chocs qu'elles peuvent fouffir ; par conféquent, celles que nous trouvons maintenant dans les montagnes où il y a des cailloux . roulés, doivent être plus entières & mieux confervées qu'elles ne Îe feroient, fi elles étoient de celles qui, fuivant M. Ber- trand , ont été créées avec les montagnes, dans la fuppofition qu'il y en eût de femblables, Le Mais en voilà aflez für {a première queftion , -je pañle à a fconde : on peut demander s’il eft vrai que les corps foffiles n'ont réellement que quelques rappors & phifieurs différences avec ceux qui ne le font pas; il fuffit de renvoyer à la com- paraifon qu’on peut faire des différentes coquilles foffiles avec celles qu'on tire maintenant de Ja mer , pour faire voir le peu de folidité de cette idée *: [es premières ont, généralement parlant, tout Je port & les attributs des coquilles qui { tirent actuellement de la mer: il ne leur manque que Îes couleurs pour qu'elles foient entièrement femblables ; on en trouve de toutes les claffes, de tous les genres, & même beaucoup d'efpèces de celles que nous connoiffons & qu'on pêche de nos jours : qui peut méconnoître les rouleaux, Îles pourpres, les rochers, les huîtres, les porcelaines & tant d'autres coquilles foffiles ? Î: un Peintre habile s'amufoit à appliquer fur certaines coquilles qu'on trouve dans {a terre » es couleurs qu'on voit briller fur celles que les mers des Indes, fur-tout, fourniffent maintenant ; ne parviendroit-i[ pas fouvent à redonner à ces coquilles tout l'extérieur & f'éclat qui rendent celles - ci fi précieufes ; il faut vouloir fe cacher à foi-même la vérité, pour jeter des doutes fur un fait auffi bien prouvé qu'eft fa reflémblance des coquilles foffiles avec celles qui ne le font pas. Müis, pourroit-on demander en troifième lieu, {a continuité, 7 Je ferai cette Comparaïfon dans un autre Mémoire. Mim, 1759. Bb 194 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE la beauté des ouvrages de la création ne font-elles pas mieux établies dans le fentiment de M. Bertrand, & n'évite-t-on pas, en l'adoptant, le faut où Fhiaus dont il parle? On peut fürement , fans avoir recours à fon opinion, prouver ce qu'il fe propofe d'éclaircir : la terre a des plantes & des coquilles qui vivent fur fa furface, & qui font des preuves de cette beauté & de cette continuité dont M. Bertrand parle; ces plantes & ces coquilles lient aflez bien les corps femblables qui vivent dans la mer, avec ceux qui tirent leur aliment de la terre; il ne feroit pas en général trop difficile de prouver cette propofition , & faut-il qu'il y ait dans le fein de la terre des plantes & des coquilles, pour que cette chaïne foit com- plette; eft-il néceffaire, pour qu'elle exifle, que la terre renferme des corps qui n'annoncent que la deflruétion & la privation de la vie? {1 cela étoit, ïl faudroit, par raïfon de conformité, que la mer renfermât des plantes & des animaux terreftres , ce qui feroit, pour ne rien dire de plus, très - difficile à admettre. N'eft-il pas vrai, dira-t-on en quatrième lieu , que la terre eft plus belle & plus variée en renfermant des coquilles &c autres corps fofliles, que fi elle n’en renfermoit pas? pour plus variée, cela pourroit être, & on pourroit en convenir, fi on favoit fürement que la compofition de la terre a toujours été telle qu'elle eft maintenant dans les endroits où l’on trouve les coquilles foffiles, & que nous fuffions qu'il n’y a jamais eu dans ces cantons des corps qui y occafionnoient autant de variété: de plus eft-il néceflaire , pour que le globe terreftre foit infmiment varié, qu'il y ait des coquilles & d'autres corps marins dans le fein des montagnes? Au refte, quand on avoueroit que la terre en eft plus di- verfifiée, pourroit-on dire qu'elle en feroit plus belle ; ceux qui ne reconnoiffent dans la terre, compofée comme elle eft maintenant, que des bouleverfemens & des ruines , ne foufcri- ront pas facilement à ce fentiment : la beauté de la terre fe peut-elle en effet tirer d’accidens aufli peu frappans & aufli peu confidérables, À DE St SAQUTUE rt GE SM LT 25 Enfin peut-on dire avec M. Bertrand , que malgré la ref- femblance des corps fofliles avec ceux qui ne le font pas, les premiers ne furent jamais des animaux à des végétaux, qu'ils ne furent fais que pour être à demeurer foffiles , 7 faire comme le point de reunion entre le règne minéral © les autres règnes: j'ai déjà répondu plus haut à cet article ; j'ajouterai ici qu'il n'eft pas trop poffible d'admettre: que des corps qui ont une fi grande reffemblance avec ceux de la mer, quand on ne voudroit pas qu'elle fût entière, n'ont point eu vie ou n'ont point été la demeure d'animaux qui les ont animés. * Penfer ainfi, c'eft vouloir replonger dans fobfcurité une vérité qui a été fr bien & fr fouvent démontrée : j'aimerois autant faire revivre le fentiment de ceux qui regardoient ces corps comme des productions de la terre, & qui prétendoient auffi , en foutenant cette opinion, faire voir une plus grande liaifon & une conformité plus entière entre la terre & la mer. Quoique les réponfes que je viens de donner aux queftions qu'on pourroit faire conféquemment à l'opinion que M. Bertrand embraffe, puiflent, à ce que je penfe, fufhre pour défendre celle qui eft maintenant généralement reçue , je crois cependant devoir encore appuyer cette dernière de nouvelles preuves, en faifant faire plus d'attention aux accidens qu'on remarque aux corps foffiles , qu'on ne l'a fait jufqu'à préfent, par rapport du moins aux preuves de fait qu'on en peut tirer pour appuyer le fentiment adopté de nos jours : ces accidens me paroifient prouver que les fofliles ont appartenu à des corps qui ont eu vie; jai déjà dit quelque chofe à ce fujet & comme en paflant, dans mon Mémoire fur les Encrinites, mais je m'y fuis f1 peu étendu , que j'ai cru devoir retoucher cette matière, qui, en ce genre, eft curieufe & intéreflante. Les accidens que j'ai jufqu'à préfent reconnus dans les co- quilles foffiles , fe réduifent à quatre fortes; is regardent leurs attaches, leur confervation, leur deftruction ou leur déformation : ces quatre façons de confidérer les coquilles foffiles , m'ayant fourni un grand nombre de faits plus variés les ans que les autres, j'ai été obligé de divifer mon Mémoire en trois parties ; Bb ji Voy. les Mém de l’ Acad. royal. des Scienc. an. T7SS PI. I, fig. 1. \ 196 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE je renfermerai dans la première ce que j'ai obfervé fur leurs attaches ; j'examinerai dans la feconde ce qui regarde leur con- fervation ; dans la troifième, ce qui a rapport à leur deftruction & leur déformation, & je finirai cette partie par quelques remarques au fujet des Plantes & des Poifons foffiles. PREMIÈRE PARTIE. Des attaches des Coguilles foffiles. L ES Coquilles qui s'attachent fur d'autres coquilles ou fur tout autre corps, font des bivalves , ou de celles qu'on appelle multivalves ; les premières font ordinairement des huîtres de différentes efpèces ; les fecondes font des conques anatifères ou glands de mer, auxquels on pourroit peut-être ajouter les tuyaux vermiculaires. L’adhérence des huïîtres fe fait fur des huitres de même ou de différentes efpèces, fur des coquilles de claffe ou de genre différens , fur des coraux, fur des branches d'arbres ou fur des cailloux & autres corps femblables. Les groupes d'huîtres de même efpèce ne font pas rares; on en trouve aufli d'efpèces qui diffèrent entr'lles ; le cabinet de S. A. S. M. le Duc d'Orléans en renferme des unes & des autres : un de ces groupes a été trouvé dans les glaifes à potiers des environs de Paris ; il n’eft compolé que de deux de ces coquilles ; l'une eft beaucoup plus confidérable que l'autre dans toutes fes dimenfions ; la première a cinq pouces & demi de longueur fur trois de largeur dans fa partie la plus étendue; elle eft lifle, mais ridée tranfverfalement ; fon talon ou l'endroit où eft placée la charnière , eft recourbé latéralement de dedans en dehors; c’eft à ce talon que F'autre huïtre eft attachée, ou plutôt anaftomofée ; les lames de ces deux co- quilles fe font entrelaffées les unes avec les autres; celles de la plus groffe fe font détournées dans cet endroit , & elles forment par cet écartement une cavité où la petite eft placée, elle y eft attachée par fon talon qui n’eft pas recourbé , elle LAN MDNENS US EUTUE UN: C'RS | 197 a plus d'un pouce & demi de longueur, & plus de deux’ & demi de largeur. Malgré ces différences, je penfe cependant qu'elle eft de la même efpèce que l'autre; ces différences ne viennent que de l’état de contrainte où cette huître s’eft trouvée en croiffant = il y a lieu du moins de croire que cette caufe peut y entrer pour beaucoup ; en effet, le talon de cette coquille n'a pu fe contourner comme celui de la grande, ne pouvant pas faci- Iement s'étendre, puifqu'il étoit borné par celui de l'autre huître: elle a par conféquent dû augmenter en largeur, & devenir proportionnellement plus large que longue; ce que je remarque en paflant, doit faire fentir combien on doit être circonfpeét à caractérifer ces fortes de coquilles par leur figure. Si l'attache ne fe fait pas de façon que le talon de l'une foit implanté fur le talon de autre, cette partie doit prendre la même forme dans les deux huîtres : c'eft ce qui eft, à ce que je crois, arrivé à un groupe d’huîtres , femblable au précédent . pour le nombre de celles qui font réunies, & pour l'endroit où cette réunion seft faite; la petite huître eft auffi placée au talon ou à la charnière de la grande, mais elle y eft prife tran{verfalement & par toute la furface du principal battant ; elle a deux pouces & un quart de longueur fur deux pouces de largeur, fon talon eft recourbé, cette partie eft prefque détruite dans la grande; malgré cette deftruction, il y à lieu de penfer qu'elle étoit femblable à celle de la petite ; elle eft au refte large d'environ quatre pouces & demi , longue d'un peu plus de cinq, & ftriée ou feuilletée tranfverfalement ; on remarque auffi ces feuillets dans la petite, quoiqu'ils y foient moins fen- fibles ; ces huîtres font de Soulaines en Champagne : on trouve dans ce même endroit d'autres huîtres qui font de la même efpèce que les fuivantes ; elles s’attachent également les unes aux autres, à en Juger par une qui porte une portion dure autre , dont {a furface fupérieure lui étoit attachée. Les coquilles d’un autre groupe venant de Vitry-le-françois, étoient encore femblables entrelles, & comme je viens de le dire , de fefpèce de ces dernières, elles approchent beaucoup x Bb ii 193 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE des huîtres communes, & font fort irrégulièrement liées les unes aux autres : cette adhérence s’et faite par les furfaces des battans, mais le groupe que j'en ai vu eft trop mutilé pour pouvoir le bien décrire. C'eft encore de cette façon que l’attache s’eft formée dans un groupe, peut-être de même efpèce, qui vient du banc d'huitres foffiles des environs du Havre *, dont il eft parlé dans l'Ouvrage de M. du Bocage de Bleville: ces huîtres peuvent avoir quatre pouces de longueur & autant de largeur , leur charnière eft oblongue, creufée d'une fmnuofité longitudinale dans fon milieu, & flriée tranfverfalement dans toute fa longueur ; vers le milieu des battans où un peu plus bas il y a une légère cavité ainfr flriée, qui eft endroit où l'animal étoit en partie attaché. On trouve d'autres huîtres qui font adhérentes es unes aux autres de la même manière que les précédentes; elles le font par une partie de leur furface ou par prefque toute cette fur- face; il y en a où cette attache s’eft faite au fommet des coquilles; dans d'autres, c'eft un peu plus haut où un peu plus bas que le milieu ; ces coquilles diffèrent des précédentes, en ce qu'elles font beaucoup plus petites ; elles n'ont que depuis un pouce de longueur fur un demi de largeur, ou tout au plus deux pouces dans la première dimenfion, & un dans la fèconde ; elles font fouvent {triées longitudinalement fur le dos, leur couleur eft blanche ou noire ; une différence plus confi- dérable confifte dans la charnière ; outre celle du talon qui a la finuofité longitudinale & les ftries tran{verfales , elles en ont une qui forme une petite crénelure fur les bords de la circon- férence du battant principal, vers le fommet & près du talon. Ces huïtres fe rencontrent à Courtagnon, à Chaumont en * J'ai vu ce banc & l’ai trouvé | des Vaches-noires; j'ai remarqué de très-cenforme à la defcription que | plus, qu'il eft à peu près, pour M. du Bocage en a donnée; j'ajou- | ne pas dire tout-à-fait, femblable terai feulement à cette defcription, | à celui que j'ai trouvé à Orcher, qui qu’il m'a paru qu’on auroit lieu de | eft fur la droite du Havre: là où il y croire qu'il traverfe la mer & a com- | a une fontaine, dont l’eau incrufte æuniçation avec celui des coquilles | les plantes fur lefquelles elle coule, DAEMSMNSACUR.E NE CI ENS 199 Vexin, dans les fablonnières de l'abbaye du Val, où jen ai * vu beaucoup qui n'étoient pas groupées, & qui n’ont guère que quelques lignes dans toutes leurs dimenfions: ce qu'il y a de fingulier dans celles qui font groupées , c'eft que de même que dans la plupart des autres, de quelques efpèces qu’elles foient, une des huîtres aïinf attachée efl plus petite que l'autre, & que la plus petite paroït être celle qui s'eft implantée fur la plus grande. C'eft ce qu'il eft encore facile de remarquer dans des huîtres foffiles des environs du petit Jeurre, hameau qui eft à une lieue d'Étampes : ces huîtres font jaunes ou blanches, & flriées our Pordinaire longitudinalement ; leurs dimenfions font peu différentes des précédentes, la charnière du talon eft à peu près femblable, mais il paroitroit qu'elles en auroïent une autre longitudinale , formée par des finuofités longues creufées fur les bords-de la circonférence , dans l'endroit où la charnière crénelée des autres eft placée. Une huïtre, qui eft des Vaches-noires, & qui a beaucoup de rapport avec celles qu'on appelle communément areaux, porte fur un de fes côtés un morceau d’huître de la même efpèce; elle y eft attachée très-intimément & par toute fa fur- face; fes battans font canelés longitudinalement , quelques-unes des canelures fe ramifient, les battans s’engrainent fun dans Yautre par leur circonférence en queue d’aronde, comme les futures du crâne humain : j'ai encore vu une femblable co- quille chargée d’une autre pareille, attachée par toute la furface d'un de ces battans; elle avoit été trouvée dans les environs des haras du Roï en Normandie, ; Les huîtres dont j'ai parlé jufqu'à préfent , font attachées de façon que leurs fommets font placés dans la même direction ou un peu plus obliquement: quelquefois ces fommets font oppofés, c'eft ce que j'ai remarqué dans un groupe d’huîtres de [a Palu, dans le comtat d'Avignon; le talon de ces huîtres eft très-alongé & creux en dedans : on pourroit appeler ces huîtres & celles qui leur reffemblent par cette propriété , Auétres en cabochon ; celles de la Palu font jaunâtres & comme tuilées ; PI, & 3 IL, fig. 2 200 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE elles peuvent avoir deux ponces & demi de Jongueur fur un peu plus de largeur; les groupes de ces huîtres & ceux des autres dont il a été queftion ci-deflus, font chacun com- pofés d'huitres fmblables & de même efpèce; ceux que je vais décrire font faits d’huîtres d’efpèces différentes ; ils {e trouvent à la fuperficie de la montagne de S.° Michel, dans les environs de Toul : un de ces groupes eft formé par une efpèce de très-grande huïtre, & affez femblable à celles qu'on appelle mére -perle ; elles ont plus ou moins d’un demi-pied en longueur & en largeur; elles portent fouvent des huîtres courbées en forme d'oreille , qui n'ont guère que trois, quatre, cinq ou fix lignes de longueur, fur quelques lignes de moins en largeur; quelques autres de ces grandes huîtres, auxquelles font également attachées de ces dernières, en ont, outre celles-ci, d'autres qui font prefque circulaires, & qui peuvent avoir deux pouces de diamètre: on trouve encore dans le même endroit une autre efpèce de grande huître, de trois pouces & plus de longueur , fur au moins quatre de largeur, & qui ont un talon recourbé en dedans, comme certaines efpèces des coquilles connues fous le nom de cœurs de bœuf; cette huitre eft quelquefois chargée de petites huîtres en oreille & d'une autre efpèce dont je n’ai pu déterminer la figure , les morceaux qui en font reflés étant trop mutilés pour que je pufle le faire exactement. Quelle que foit la façon dont les attaches décrites jufqu'icr, foient faites, elles font d'huitres fur huîtres, de la même ou de différentes efpèces: celles dont il va être maintenant queftion, font d’huîtres {ur des coquilles de genre bien éloignés , puifque les unes font des /Æpas ou yeux de boucs, & les autres, des turbinites : {es lepas que j'ai vus & qui avoient des huitres attachées fur eux, s'appellent communément pas cabochons; cette efpèce eft conique, fa pointe eft le plus fouvent de dehors en dedans; en général, ce lepas eft peu confidérable par la grandeur ; un des plus grands que j'aie jamais vu, avoit environ un pouce & demi de longueur , fur un pouce de largeur à fa bafe ; le plus petit étoit long de fept lignes, & fa bafe avoit quatre DES SCIENCES 20r quatre lignes de largeur; entre ces deux grandeurs, il yen a Baucoup d'autres intermédiaires, mais quelles qu'elles foient, l'ouverture de ces coquilles eft oblique , c’eft-à-dire qu'elle ne forme pas un cercle, mais une autre fection conique, dont le fommet approche plus ou moins du fommet de la coquille ; de forte que le plus grand diamètre de cette ouverture eft dans la longueur & non dans la largeur de la coquille: ces coquilles font lifes, fulement un peu ridées en travers ; quelques-unes ont vers {eur bafe de petites ftries longitudinaies ; celle qui portoit des huîtres, en avoit deux fur fa fürface extérieure, ou plutôt deux battans de petites huîtres , qui paroiffent ap- procher des battans plats des huîtres communes, On trouve de ces Æpas à Courtagnon , à Hermonville en Champagne, à Thuri en Valois, & à Chaumont en Vexin; il y en a du moins dans le cabinet de S. A. S, M. le Duc d'Orléans , qui viennent de ces endroits. Une des turbinites auxquelles j'ai vu des huîtres attachées, eft du nombre de celles qui portent le nom de xccin; les huîtres que celle-ci porte, font de celles dont le dos eft ftrié & la charnière crénelée: lattache s’eft faite , Comme dans plufieurs des précédentes , par toute l'étendue d'un des battans; trois de ces coquilles du cabinet de S. A. S. ont ces huîtres für l'efpèce de long tuyau , qui forme un prolongement confi- dérable au corps de la coquille : je fais cette remarque, non pas que je fois dans la penfée que ces huîtres affectent cette place plutôt qu'une autre; ce n'eft feulement que pour être plus exact en rapportant les faits , que je parle de cette circonftance : il eft fans doute indiflérent aux huîtres d'être attachées à un endroit ou à un autre, puifque ces attaches ne fe font pro- bablement que pour que les huîtres aient des points d'appui qui leur font néceffaires, pour qu'elles puiffent plus facilement éviter les effets des mouvemens qui agitent les eaux de la mer. Une autre turbinite, & une des plus grandes que l'on connoïfle, peut-être même la plus grande, puifqu'elle a plus d'un pied ou un pied & demi de longueur & une groffeur Proportionnée, eft chargée de plufieurs de cette efpèce d’huitres, Mémn, 1759. Cc PI. IL, fig. re 202 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE qu'on appelle communément pere d'oignon ; elles y font dif- tribuées çà & là fur toute fa longueur, il feroit prefqu'impoffible de les en détacher; comme ces coquilles font des plus minces & des plus flexibles , elles ont pu facilement prendre les contours de la partie qu'elles ont choifie, & s’y étendre de manière à la toucher dans un plus grand nombre de points, & augmenter ainfi leurs attaches : ces coquilles font prefque plates , au lieu que les autres font de différentes courbures, & par-là différemment propres à avoir une adhérence plus ou moins forte avec celles auxquelles elles s’attachent ; ces mêmes huïtres fe trouvent aufli portées par quelques autres turbinites, comme par des fufeaux ftriés circulairement & fans mamelons, ou par celles qui ont de ces mamelons : on en a trouvé de pareilles à Courtagnon & à Chaumont en Vexin. IE y a dans le cabinet de S. A. S. une huïître qui eft d'Efrechi, village à deux lieues d'Etampes, qui a l'empreinte d’une petite vis grenue ; cette vis s'eft détruite, fa contexture n'étant pas apparem- ment aufli propre que lhuître à rélifter aux eflets du temps ou des fluides qui fe font trouvés dans cet endroit; en un mot, il n'eft pas rare de trouver des huîtres adhérentes à différentes autres efpèces de coquilles. Mais nous ne trouvons prefque point de groupes de ces coquilles faits fur des cailloux roulés, & jamais faits fur des corps düs aux Arts que les hommes ont imaginés : un groupe de cette dernière forte feroit fans doute des plus curieux & des plus intéreflans; il feroit certainement le monument le plus antique des Arts: il femble cependant que dans la fuppo- fition de ceux qui veulent que la mer détruit & reproduit fucceflivement la terre, il devroit fe rencontrer quelquefois de ces corps dûs à l'induftrie humaine, mélés avec les co- quilles foffiles dans des bancs qui n'auroient pas encore été ouverts. Nous tirons maintenant du fond des mers des pièces qui probablement y auroient été recouvertes par les fables & les glailes, & auroient laiflé aux fiècles à venir des veftiges des arts de la Verrerie & de la Poterie, fi on ne les eût pas pêchées; DES SCIENCES. 203 & il eft à préfumer que le fond de la mer en renferme beaucoup d'autres femblables qui ne feront jamais mifes au jour, que Jorfque la mer aura abandonné fon lit pour regagner les terres qu'elle peut avoir quittées | & qu'elle laiflera aux Naturaliftes futurs des nouvelles recherches à faire, & de nouvelles terres à ouvrir & à fouiller. Puifque nous voyons maintenant dans les cabinets d'Hif- toire naturelle /a) des fourneaux ‘de terre cuite, des pots d’une terre femblable, recouverte de plufieurs groupes d’huîtres communes où d'huîtres épineufes, de tuyaux marins & autres corps de cétte nature, puifqu'on y conferve des bouteilles de verre qui senferment des coraux ; on peut très -bien conjec- turer que des corps auffi incorruptibles que le verre & les terres qui ont pañlé par le feu, pourront, de même que les coquilles, braver les effets deftructeurs du temps, & fe retrouver enfévelis dans le fein des montagnes élevées par la mer; je n'en dis pas autant de ces groupes de tuyaux faits autour de longues cordes /b), de ceux formés par des glands de mer & qui recouvrent des morceaux de pieux fc); ces fubftances peuvent trop aifément fe pourrir, pour qu'on puifle croire qu'ils fe confervent, les cordes du moins , car les morceaux de bois pourroient très-bien fe pétrifier | comme je le prouverai plus bas. | Les cailloux roulés &-chargés d'huitrés, de tuyaux vermi- cukares, de glands de mer ou d'autres coquilles, fémblables à ceux qu'on garde dans les cabinets /4), pourront également être retrouvés dans l'intérieur des montagnes : fans doute qu'il eft plus que probable que ceux-ci ne foufiriront rien de l'action (a) Voyez les cabinets de M." de Paulimy, Boisjourdain, Davila | & autres. (b) On en voit une dans le cabinet de M. de Boisjourdain. (c) On en voit un dans le ca- binet de S. A. S. M. le Duc d'Orléans , de M. de Boïsjourdain & autres. , (d) y a dans celui de M. de Boisjourdain un caillou qui porte un groupe d'huîtres pourpres où blanches , & une huître grvphite ; une de ces huîtres a le talon très- alongé; cet alongement à été pro- bablement occafionné par la prefiron du caillou; on conferveencore dans ce cabinet une pyrite ferrugineufe, informe, à Jaquelle une luitre commune eft attachée. ‘ Cc i 204 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE des temps, puifque nos montagnes nous font voir tous les jours de ces cailloux roulés ; ce qu'il y a cependant de fingulier , c'eft que ceux que nous trouvons maintenant , ne font jamais chargés de corps marins, du moins je n'en ai jamais vu de fermblables. Je n'ai pas vu non plus d’autres pierres qu'on pût regarder comme des débris des anciennes montagnes, & qui fuflent chargées de quelques-uns de ces corps: je n'ignore cependant pas qu’on à déjà dit qu'on avoit trouvé des coraux attachés à des rochers, qui probablement avoient été des bords de quelques mers; il y a même dans le cabinet de S. A. S. un morceau de pierre calcaire qui porte un petit champignon marin, & qui a été envoyé comme un morceau qui méritoit quelqu'attention, & qui avoit du rapport avec celui dont je viens de parler, mais ces morceaux ne font pas convaincans : on fait que les pierres fur lefquelles ces corps font attachés, font des pierres calcaires, qu'elles ont été dans un état de molleffe , & que lorfqu'elles fe font durcies, elles ont enclavé tous les corps marins qui fe trouvoient dans les endroits où elles fe font formées; par conféquent une coquille ou gland de mer, un corail, un champignon ou tout autre corps foffile, peut être porté par un morceau de pierre , a formation de cette pierre étant de beaucoup poftérieure à la coquille ou aux autres corps qui y font adhérens. On auroit beau dire que les rochers où lon a rencontré ces corps attachés n’étoient pas dans l'intérieur des montagnes, mais qu'ils en hérifloient le fommet ou les côtés, & qu'ils étoient en plein air; cette obfervation ne me convaincroit pas davantage, j'y répondrois que les montagnes fe dégradant tous les jours, il peut arriver & il arrive réellement que des rochers fe découvrent par l’éboulement des terres, & reftent ainfi à nu, & que malgré la reffemblance qu'ils ont avec les bords de la mer, ils n’ont jamais été rien moins que cela, & que par conféquent les corps marins qu'on y voit adhérens, ne s’y font point attachés lorfqu'ils étoient dans la mer, mais y ont été enclavés dans le temps de la formation de ces pierres , qui D ENS E ISIGIT EN eE\8 0) NN 20 en fe détruifant peu à peu, ont mis au jour les corps qu'elles renfermoient. Si jamais amas de coquilles groupées avoit l'air d'être porté par un caillou roulé, c’eft un que j'ai trouvé dans la fablonnière de l'abbaye du Val; le caillou eft de forme oblongue, comme ceux qui ont été roulés par la mer, il eft de la nature du grès, les coquilles y font intimement collées {es unes aux autres , elles y ont pris une fituation oblique, tranfverfale ou perpen- diculaire, fituations qui font femblables à celles qu'ont prifes les coquilles foffiles des groupes dont il a été queftion plus haut. Quoique cette obfervation ait beaucoup de vraifemblance, cependant comme le petit caillou eft de grès, que les grès fe forment journellement, que j'ai principalement trouvé dans les endroits où fe voient les coquilles foffiles de l'abbaye du Val, des cailloux fmblables à celui-ci, qui étoient plus ou moins formés , qu'ils étoient pour la plupart remplis de petites pierres numifmales ; je n'ofe pas trop afiurer que le caillou qui eft chargé d’huîtres, ne foit pas de ceux-ci, & que dans le temps de fà formation, il n'ait pas feulement fixé ce groupe qui étoit déjà fait: je le penferois même très - volontiers, quoiqu'il n'ait pas dans fà fubflance des pierres numifmales, ni d'autres coquilles qui puiffent prouver une compofition poftérieure à la iaifon des huîtres; j’embrafferois d'autant plus aifément ce fentiment, que ce caillou refflemble entièrement à une infinité d’autres du même endroit, qui font auffi des grès, & qu’on ne peut méconnoître pour être de nouvelle date. On doit, à ce que je crois, penfer de la même façon au. fujet de certains morceaux de pierre à chaux qu'on rencontre quelquefois parmi les cailloux roulés » & qui font chargés de coquilles ; les cailloux étant fouvent mélés avec des coquilles, & ces coquilles étant afléz communément détruites en partie, elles donnent naïffance, par leur deftruction, à de petites mafles de pierres qui, en {€ compofant, incruftent, en total ou en partie, des coquilles que l’on diroit s'y être attachées d'elles-mêmes : j'ai trouvé un femblable morceau dans les fables d'un endroit des environs d'Étampes, appelé Sainr- Lagare c ii 206 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE lon y a coupé depuis peu une élévation qui eft le long du grand chemin de Paris, on a découvert par cette coupe le lit de cailloux que j'ai dit dns mon Mémoire fur les Poudingres, fe continuer dans la vallée où Étampes et place; ce banc ce cailloux roulés renferme quantité d’huîtres, de cames & autres coquilles femblables ; beaucoup de ces coquilles font en partie détruites; c'eft du détriment de ces coquilles que s'eft formé, à ce que je crois, la pierre en queflion ; on reconnoit encore dans fa fubflance des morceaux de ces coquilles, & un de fes côtés eft chargé d’huïtres à talon recourbé de côté, & à dos flrié longitudmalement; ces huitres y font attachées de tous fens: ce qui prouve qué cette pierre s'eft formée dans cet endroit, c'eft qu'une de ces coquilles, à qui le couvercle: manque, eft prife dans la pierre par fa concavité, ce qui prouve qu'elle n’étoit pas attachée lorfque l'animal étoit vivant. Si l'on ne vouloit pas que la pierre qui eft chargée de ces coquilles, eût été compolée dans cet endroit, on ne pourroit la regarder que comme ayant été arrachée des rochers déjà compofés lorfque Hi mer couvroit ce pays, & dans ce cas elle auroit du rapport aux cailloux roulés, dont j'ai parlé au com- mencement de ce Mémoire, qui ont intérieurement des em- preintes de coquilles qu'ils avoient prifes fur des coquilles foffiles renfermées dans les montagnes où ils s'étoient formés; jaimerois cependant mieux admettre pour cette pierre une compolition de beaucoup poflérieure à celle des anciennes montagnes , d'autant plus que cette pierre eft plate, & qu'elle ne paroît pas avoir été roulée comine les cailloux. : Ce feroit donc une découverte en ce genre, que de trouver un caillou ou toute autre pierre qui auroit toutes les marques d'avoir été anciennement roulée par la mer, chargée de coquilles foffiles; cette découverte n’eft certainement point impoffble, on doit du moins y compter autant que fur celles des groupes d’huîtres portés {ur des branches d'arbres, telles que peuvent l'être maintenant les huîtres auxquelles on a donné le nom d’hwitres- feuilles, & qui s'attachent aux branches du manglier, lorfque ces branches traînent dans la mer; les branches de ces arbres D HIS ISLE E NI CES 207. devant fe pourrir promptement lorfqu'’elles font détachées & balottées par les flots, & quittant par conféquent les huîtres qu'elles portent, on doit trouver très-rarement de ces morceaux parmi les foffiles: je n'en aï jamais vu qu'un, ce qui refte de la branche, attaché à la coquille, eft même pétrifié ; circonf- tance qui rend ce foffile très-intéreffant pour ceux qui admettent la pétrification des bois, qui eft encore combattue par quelques Naturaliftes ; ce foffile fait partie de la collection que M. le Curé de Sainte-Marguerite à Paris, a formée des foffiles qui fe trouvent en Lorraine, L’huître qui eft ainfr attachée, eft une huître-feuille; elle a trois pouces neuf lignes de longueur fur deux pouces trois lignes de largeur dans l'endroit le plus large; elle eft à groffes côtes; ces côtes font dans le mème battant beaucoup plus groffes d’un côté que de l'autre; cette différence ne vient que de ce que l'huître n’a pas précifément été attachée par le milieu de ce battant, qui a par conféquent pris plus d'extenfion du côté qui étoit moins comprimé par a branche : cette branche a occafionné une fmuofité qu'elle remplit encore, elle n'a pas confervé fa rondeur, ce n’eft plus que l'écorce qui seft dé- tachée de a partie ligneufe, & qui, comme les écorces, eft creufe en dedans; fa pétrification eft fr parfaite, qu'on n'y diftingue plus les fibres ; tout eft confondu & ne forme plus qu'une agate jaunâtre & très - dure, Sa figure prefque cylindrique & fa courbure, prouvent, à n'en pas douter , que c'eft un morceau de bois devenu pierre ; on ne voit point que Îles coraux fe lèvent ainfi par couches, même en fe détruifant ; leur fubftance eft trop compacte, & s'ils font compofés de plufieurs couches , ces couches font trop intimement unies, pour qu'elles puiflent fe détacher les unes des autres; elles reflemblent en cela au corps des arbres qui tombe plutôt en vermoulu, qu'il ne fe lève par couches lorfqu’il fe détruit; il n’y a guère alors que l'écorce qui fe détache ainfr: on pourroit peut-être imaginer que l'écorce mem- braneufe des coraux feroit la partie qui fe feroit pétrifiée dans le cas dont il s'agit, mais cette écorce eft fi mince & fi déliée, PI. II, fg. 2. 208 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE qu'on a peine à croire quelle ait pu fe conferver aflez de temps dans la terre, fans fe pourrir, pour qu'on doive lui attribuer la formation de cette pétrification. On ne peut pas non plus raïfonnablement dire que c'eft un caillou qui s'eft formé après coup dans la finuofité du battant de l'huitre dont il s’agit; ce caillou auroit dû en la rempliffant, y former un corps cylindrique folide, & non pas une fimple gouttière : je penfe donc qu'il n'eft pas trop poffible de douter que ce flex ne foit le bois auquel cette huïtre a été adhérente, & qui s'eft pétrifié. Les autres huîtres qui, comme celle-ci, ont été portées ar des arbres, qui fe trouvent maintenant dans la terre, & que Jai pu voir, n’ont qu'une hcune affez large, düe aux branches auxquelles elles étoient adhérentes : la comparaifon que j'ai faite de ces huîtres avec celles qu'on apporte des Indes , encore attachées aux branches de manglier, m'a convaincu que les huîtres fofliles avoient ainfi vécu {ur des branches de cet arbre ou d’autres arbres fembiables. En effet, ces huîtres, comme celles du manglier, ont une charnière tranfverfale, un petit talon légèrement creufé, une attache vers le milieu de leur longueur & un peu de côté, enfin des ftries fur le dos ou des efpèces de feuillets ; elles varient, de même que les premières, par la grandeur, & on peut en général les regarder comme de la moyenne grandeur : la plus grande que j'aie vue, de celles qui font fofliles, eft d'un peu plus de deux pouces de longueur fur un pouce & fept ou huit lignes de largeur; la plus, petite avoit un pouce trois lignes dans la première dimenfion, & huit à neuf lignes dans la feconde, Quelques lignes de plus ou de moins font toute Ja diffé- rence qu'il y a entre ces coquilles fofliles & la plupart de celles qui font attachées à une branche de manglier , que j'ai examinée, Cette branche, qui eft du cabinet de M. de Boisjourdain , en a plufeurs qui font plus grandes qu'aucune des foffiles que DRE, SR, SIC DE NC, ES 209 que j'aie vues; mais on a tout lieu d'efpérer que, puifque lon trouve de ces coquilles foffiles de différentes grandeurs, on en rencontrera probablement qui feront plus confidérables ou plus petites que celles qu'on a découvertes; elles font de l'efpèce de celles dont j'ai parlé plus haut, & dont les dimenfions {ont plus grandes ; par conféquent il y a lieu de penfer qu'on _ pourra découvrir de celles-ci avec la lacune, qui eft la marque à laquelle on peut reconnoître qu’elles ont été attachées à des branches d'arbre. Il n’eft pas fans doute de l'effence de ces huïtres, de vivre ainfr fur des arbres ; ce n'eft certainement qu'uné fuite de cer- taines circonflances qui leur procurent cette attache, comme elles en fourniflent à beaucoup d'autres fur des pierres ou fur des coquilles. I n’eft pas même effentiel aux unes ni aux autres de s'attacher, puifqu'on en trouve beaucoup d'ifolées parmi celles qui de nos jours vivent dans la mer: fi après toutes ces obfervations on doutoit encore que les coquilles foffiles dont il s'agit, aient eu des branches d'arbres pour fupport, je crois que ce doute s'évanouira, fi lon fait attention que Îa lacune de ces co- quilles eft précifément de la même largeur dans les unes & dans les autres, lorfqw'elles font elles-mêmes de même grandeur ; j'en ai mefuré une dont la lacune eft de dix lignes de largeur, comme celle d'une autre qui n’eft pas foffile; ces lacunes font un peu plus où un peu moins fuperficielles ; une ligne ou deux font toute leur profondeur, & celles qui paroiffent avoir été faites fur de petites branches, font un peu plus pro- fondes, ce qui les rend un peu plus courbes ou un peu plus” arrondies ; outre cela plufieurs de ces coquilles, indépendamment de leur attache aux arbres, font collées les unes aux autres, ce qu'on obferve dans les fofliles & dans celles qui vivent maintenant dans la mer ; tout par conféquent concourt à éublir la reflemblance entre les unes & les autres. On nous apporte encore des Indes une autre efpèce d’huîtres- feuilfes ; elles font, comme les précédentes , canelées longitu- dinalement fur le dos, mais elles font plus étroites; & ce Min. 1759: 210 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE qui les diftingue principalement des premières, c'eft que fur les bords de la lacune de celles qui font attachées à des branches d'arbres, il y a de chaque côté une où deux efpèces de griffes longues & courbes, qui embraffent la branche & la retiennent de façon qu'ordinairement on ne peut Fôter, fur-tout lorfque les bords de la lacune fe font eux-mêmes recourbés en dedans, fe font ainfi beaucoup rapprochés lun de lautre: je mai pas encore vu de femblables coquilles tirées de la terre; mais puifqu'on rencontre des premières qui vivent maintenant fur les mêmes parages, il y a tout lieu d’efpérer qu'on fera dans les terres la découverte des fecondes. Quoique j'aie jufqu’à préfent rapporté un affez grand nombre d'obfervations qui ont rapport à l'attache des huîtres, je ne puis cependant encore nrempêcher de faire mention d’une qui mérite de n'être pas pafée fous filence : il eft affez fingulier que les coquilles foffiles qui forment les groupes, foient toujours du genre des huitres /4); car fi quelques coquilles font adhé- rentes à ces huîtres, il eft manifefle que les premières fervent feulement de fupport à celles-ci, & non pas les huîtres aux autres coquilles ; le dérangement paroît être plus confidérable dans les huîtres que dans les autres coquilles auxquelles elles font jointes. On obferve la même chofe dans les groupes qu'on pêche de nos jours /4); il y a peu de coquilles des autres genres qui aient cette propriété, la plupart ne Sattachent fur les ., (@ On tire cependant quelquefois de la mer des moules groupées ; on conferve du moins dans le cabinet de M. de Boisjourdain une moule blanche , attachée à une moule com- mune , qui eft prife prefque par toute la furface d’un de fes battans. (b) Ces groupes varient à l’in- fini: je vais en rapporter plufieurs exemples tirés du cabinet de M: de Boisjourdain , dans lequel on en voit peut-être plus que dans tout autre; M. de Boiïsjourdain ayant fn que l’adhérence de’ces différens corps marins, ne pouvoit fe former fans occafionner dés accidens propres à jeter des lumières fur la façon dont elle fe fait, s’eft particulièrement appliqué à en compofer une fuite étendue & recherchée ,. qui indé- pendamment du coup-d'œil agréable qu’elle occafionne dans fon cabinet, ne peut qu'inftruire beaucoup au füjet des accidens qui dépendent de Vadhérence de ces différens corps ainfi groupés. De ces groupes, les uns font fim- plement compolés d'huitres, d’autres D ES coquilles , les pierres ou fur les d'une façon fuperficielle, ou plut appliquées , c’eft ce qu'on obfer lpas; aufli eft-il rare de voir dans {es le font d'une huître & d’une coquille de genre différent ; des troïfièmes le font d’huîtres réunies avec plüfeurs Corps, de clafle & de genres bien éloignés. Je ne parlerai pas des huîtres communes qu'on nous apporte tous les jours à Paris; un chacun peut avoir remarqué que beaucoup de ces huîtres font attachées en tous fens les unes avec les autres, qu'elles le font tantôt par le talon, tantôt Par une partie de la furface d’un de eurs battans , ou par toute cette furface ; que ces battans font placés dans le même fens, longitudinale- ment, tranfverfalement ou obli- quement; on peut encore avoir fait attention au dérangement qui arrive alors aux parties qui fe touchent ; le talon fe contourge ; s’alonge, s'étend, s’évafe ou s’élargit plus ou moins ; les feuillets fe chiffonnent, perdent leur figure ordinaire, fe ré- -tréciffent ou s'étendent fuivant cer- taïines circonftances 3 les furfaces s’aplatiffent, s’alongent ou fe bom- ent différemment ; en un mot, les huîtres communes peuvent fournir quantité d'exemples de ces déran- &emens occafionnés par leur adhé- rence mutuelle. Ce queles huîtres communes nous offrent en ce genre , fe remarque auff dans les groupes formés d'huîtres épineufes de Malte, de Port-mahon d'Amérique; il y en a dans le cabinet de M. de Boisjourdain , qui font compofés des premières qui font Voir plufieurs de ces dérangemens ; Comme ces huîtres font hérifiées de pointes plus ou moins longues , il arrive fouvent qu’elles prennent dif: me SCHTLEUN CES. ETUX autres corps femblables sh Ôt elles n’y font que légèrement ve dans les yeux de bouc ou cabinets d'Hifloire férens contours » füivant qu’elles ont été preflées & entrelaflées les unes dans les autres : toutes ces variétés jointes à la belle couleur Pourpre, jaune ou blanche de l’un ou de l’autre des battans de ces co- quilles , font du tout un enfemble qu'on ne voit qu'avec plaifr. Les autres groupes, quoique moins gracieux à l’œil, n’en font pas moins intéreffans : par exemple, une huître Commune qui et adhérente à un buccin, rayé de bandes jaunâtres, & qui eft d’une moyenne grandeur, une autre huître commune de [a Méditerranée, qui left à une moule ordinaire, font une preuve diftinéte que les huîtres font, dans ces groupes, les coquilles qui prêtent le plus à la compreflion. C'eft ce ‘qu’on diftingue encore très-bien dans un petit burgos qui porte une petite huître appelée pe/ure d'oignon, & qui eft brune ; on le voit encore dans un groupe formé de petits tuyaux contournés & d’une fem- blable pelure d'oignon; dans un qui eff fait de gros tuyaux femblablement Contournés , & d’une huître com- mune; dans un troifième qui a de pareils tuyaux & une huître de Malte; dans trois autres , dont deux font compofés de buccins & d'huîtres communes, & le troïfième, d'un buccin appelé maflue, à tête heriflée de pointes & d’une huître ; enfin |, dans trois autres , dont le premier eft d’une faufle hirondelle & d’un madrépore oculé ; Je fecond, d'une, portion d’huître & d'une Branche .de corail rouge; Je troi- fième,. d'une huître-feuille jaunâtre & d’un madrépore fort léger. di 212 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE naturelle des groupes où il entre de ces coquilles ; je n’en ai du moins trouvé qu'un dans le cabinet de M. de Boisjourdain ; ce groupe eft compofé d'une petite pinne marine canelée longitudinalement & brune, elle porte un Æpas cabochon L'’attache de ces différentes co- quilles étoit faite indifféremment, c'eft-à-dire que les huîtres étoient adhérentes aux autres coquilles , aux coraux & aux madrépores, de ma- nière que ces coquilles étoient tantôt obliques par rapport au corps de Fhuître, tantôt leur pointe ou le côté de la charnière, regardoit lun ou l’autre des côtés de ces coquilles, tantôt leur bouche regardoit le bas de l’huître; toutes au refte étoient adhérentes par leur dos; on en trouve cependant quelquefois, dont lattache eft dans l’intérieur des coquilles ; il faut fans doute alors que la coquille ou l’huître qui eft attachée für vide, Jorfque l’huître s'y eft implantée ; il en pouvoit être ainfi d’un buccin qui portoit une huître commune fur la partie intérieure de fa grande lèvre. L'on peut bien penfer, fans doute, que cela varie pour le moins autant dans les groupes qui font faits de plus de deux de ces corps; leur nombre a dû occafionner beaucoup de variétés dans leur pofition réci- proque : on peut s'en affurer , en examinant ceux de ces groupes qui font partie du cabinet de M. de Boisjourdain; il y en a deux com- pofés de madrépore étoilé, de tuyaux vermiculaires & d’huîtres; un autre Y'eit d’une huître épineufe de l’ A mé- rique, de tuyaux & d’une male de pierre chargée de corail; un troifième left de corail oculé , d’huîtres épi- neufes , d’huitres feuilletées chargées d'huîtres d’un jaune citron; un qua- | trième l’eit d’une huître commune, fur laquelle il y a un gros tuyau contourné & un rocher ftrié longitu- mo dinalement d’huîtres pelure d’oignon, d’un petit peigne & d’un madrépore ordinaire & branchu de la Médi- terranée; le tout eft porté par une éponge commune ; un cinquième leit d’une huitre épineufe , chargée de madrépores branchus , petits, communs & de la Méditerranée, d'un gros tuyau contourné & percé par de petites dates ; la bafe eft d’une pierre calcaire garnie de tuyaux communs; un fixième eft fait d’une huître commune , feuilletée d’une mafle de tuyaux évalés en trompette, & d’une branche de fucus ou varec. On voit encore dans le cabinet de M. de Boisjourdain, plufieurs autres groupes qui ne font pas moins cu- rieux ; le fuivant fur-tout eft fingulier par la façon dont les coquilles font arrangées ; lt bafe cit formée d’une moitié d’un gros cœur de bœuf, life & commun; elle porte fur un de ces côtés un groupe en étage d’huîtres communes & petites, & d'une grande qui termine le groupe, & fur laquelle il y a des huîtres femblables & beaucoup de tuyaux ordinaires, petits & moyens; un autre groupe eft fait d'un buccin appelé buccin de Columma, devenu prefque noir, d’huîtres noirâtres & de tuyaux communs contournés cir- culairement & étendus fur les huîtres; un troifième eft d’un gros buccin, de tuyaux triangulaires & ‘ de quelques pelures d’oïgnon grandès * & petites; un quatrième enfin eft d’une nérite à bouche demi-ronde, de pelures d’oignon en nombre, de tuyaux & de manchette dé Neptune dure, qui recouvre la nérite.. DES SCIENCES. 213 jaunâtre & des tuyaux ; d’autres coquilles ne s’attachent jamais à aucun corps, elles entrent dans le fable, dans la vafe, ou bien elles percent la fubflance d'autres coquilles pour s’y nicher & fe mettre fans doute à l'abri des attaques qu'elles pourroient avoir à fouffrir de la part des infeétes, des poiffons & même des animaux qui habitent auffi des coquilles ; c’eft apparemment dans les mêmes vues qu'il y en a qui fe chargent de cailloux, de coquilles ou de madrépores, & fe font ainfr une efpèce de cuiraffe ; elles font en quelque forte des coquilles teignes ; de même que plufieurs infeétes qui vivent dans l'eau douce, elles s’hériflent de coquilles, de cailloux & probablement des autres corps qu'elles rencontrent dans les endroits où elles croiffent; mais ce feroit anticiper fur la feconde partie de ce Mémoire, que de parler davantage des adrefles que les coquilles emploient pour leur confervation , je reviens donc à ce qui regarde leur adhérence aux différens corps fur lefquels on en trouve d'at- tachées, & je dis que l’adhérence des Æpas n'eft pas affez forte pour fubfifter des fiècles entiers ; cette adhérence ceffe même ordinairement dès que l'animal eft mort, elle n’eft que l'effet d'un air diaté, & non celui d'un arrangement de parties qui s'uniffent avec celles du corps fur lequel la coquille s'applique, ou qui en prennent tout le contour, y multiplient ainfi des crampons, dont la force eft peut-être augmentée par une ma- tière dont la ténacité forme un enduit fur le fupport, qui rend . Funion plus grande & plus difficile à rompre; il n’eft donc pas étonnant qu'on ne trouve pas maintenant en terre des: lepas attachés à des pierres ou à des corps marins. Si les huîtres font probablement les feules des coquilles: proprement dites qu'on trouve attachées à d'autres coquilles, “elles ne font pas cependant les feuls corps marins qu'on ren- contre encore adhérens à ceux qui'leur fourniffoient cette efpèce de fupport ; les conques anatifères ou glands de mer, recouvrent fouvent les furfaces externe & interne de plufieurs efpèces de: ,goquilles; plus fouvent aufli les furfaces de ces coquilles. fe trouvent garnies de tuyaux. vermiculaires. Les coquilles fur lefquelles j'ai vu des conques anatifères, PI.IE, fr, Dd ïj PLU, fig.2. 214 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE font du genre des huîtres; elles font de l'efpèce de celles que j'ai dit pouvoir être appelées huîtres en cabochon , leur talon étant alongé & creufé plus où moins profondément en deflous : j'ai trouvé deux fortes de ces huîtres ainfr chargées de conques anatifères; elles ont beaucoup de rapport entrelles, & font probablement de la même efpèce; leur grand battant eft en quelque forte feuilleté fur le dos; j'ai du moins bien déterminé ce fait dans celles qui font ifolées & qui ne forment pas un groupe; mais lorfqu'elles font adhérentes les unes aux autres, & qu'elles font fur - tout prifes par toute la furface du dos, il n'eft pas alors facile de décider fi elles ont des feuillets ou fi elles en manquent ; c'eft le cas où je me fuis trouvé par rapport à une des deux fortes d’huîtres que j'ai vues chargées de glands de mer; on peut néanmoins conjecturer par la forme de ces huîtres & par quelques petits feuillets qui fe montrent près de la cir- conférence des battans, qu'elles font aufli réellement feuilletées; quoi qu'il en foit, les unes & les autres de ces deux fortes d'huîtres font, en plus ou moins grande quantité, parfemées de la petite efpèce de glands de mer. | Ceux qui font attachés aux huîtres groupées, diffèrent beaucoup entreux par la grandeur ; il y en a qui n'ont pas plus d'une ligne de largeur fur autant de hauteur, tandis que d’autres en ont plus de fix dans ces deux dimenfions; plufieurs autres font d’une des grandeurs intermédiaires à celles-ci ; ils font au refle tous canelés extérieurement , fuivant la longueur, & compofés de plufieurs lames appliquées les unes contre les autres. Ces corps font moins variés en grandeur fur les huîtres ifolées que j'ai vues : le plus grand de ceux-ci égale à peine le plus confidérable des premiers ; une différence non moins fingulière qu'on remarque parmi ceux dont il s'agit, confifte dans la figure; plufieurs paroiffent avoir une bafe conique & non circulaire comme les autres : ce qui le fait penfer, c'eft que ces glands ne font pas feulement appliqués fur les huïîtres , mais qu'ils pénètrent leur fubflance, & y occafionnent des trous de plufieurs lignes de diamètre; de ces trous, les uns DES SCIENCES. M. eus font vides , d’autres à demi tapiffés de quelques portions de a bafe des glands, & des troïfièmes remplis chacun par un gland entier. Ë ; Il pourroit cependant fe faire que malgré cette différence de figure, tous ces corps fuffent dela même elpèce ; ils pourroient bien , étant ainfi enfermés dans des trous qui font coniques, prendre par leur bafe la forme de ces trous; fi Jon ne trouvoit de ces trous que fur le deffus des battans des huîtres, on pourroit dire que la bafe de ces glands n'eft co- nique que parce que les lames des coquilles fe feroient élevées en groflifflant, auroient embraflé ces glands,. & les auroient ainfi enclavés par leur’ bafe ; mais comme l'intérieur des battans des huïtres eft quelquefois troué , il n’y a pas lieu de croire que ces trous fe foient ainfi faits, mais que les glands s’y font nichés, y ont crû & les ont remplis; il n'eft pas probable que les glands puiflent vivre fur les furfaces internes des huîtres, lorfqu'elles font vivantes elles-mêmes , affez de temps fur-tout pour y croître au point d'y remplir des trous auffi grands que ceux dont ces huitres font percées: on demandera peut - être à quelle caufe je penfe qu'on puifle attribuer la térébration de ces coquilles , c’eft ce qu'il eft très-difficile, pour ne pas dire impoflible de déterminer; fr tous ces trous étoient en deflus- des coquilles, on pourroit penfer qu'ils font de ceux: que font certains buccins qui percent beaucoup de coquillages pour fe nourrir de l'animal qu'ils renferment ; mais il faut que ces trous aient été percés, lorfque ces animaux étoient morts & que la coquille étoit vide, & je ne crois pas que les buccins foient aflez mal-adroïts pour percer de femblables coquilles ; il n'eft pas ordinaire aux animaux de fe méprendre ainfi, ils ne font que ce qu'ils doivent faire, & le font toujours fans trop fe tromper ; il n'eft donc guère poffible de déterminer la caufe de ces trous; on ne peut même les attribuer aux animaux des &lands de mer ; la bafe de ces coquilles étant fermée, il n’eft pas probable que les animaux qu'elles renferment percent les coquilles fur lefquelles ils font attachés. Au refle, quoi qu'il en foit de la caufe qui a produit cestrous,. Ibid, fig. 3: 216 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Voyez Alioi, a différence de figure des glinds de mer ne vient probablement, Opereplie comme l'a très-bien remarqué M. Allioni dans fon Oryéto- pag.22 à 23, graphie du Piémont, que de la façon dont ils croiflent , de P el la grandeur qu'ils acquèrent, & de la quantité de lames dont © ils font compolés : en effet, fi ces glands font en croiflant plus ou moins prefiés les uns contre les autres ou par quelqu'autre corps ; ils s'alongeront, {e rétréciront & fe rapprocheront par leurs parties fupérieure & inférieure, & multiplieront leurs lames ; par conféquent ils ne feront que de la même efpèce , malgré leurs différentes figures, & il y a tout lieu de penfer que cela eft ainfi, du moins pour les Æpas communs , qui font ceux dont il s’agit dans l'ouvrage de M. Allioni. Mais quelle que foit la figure de ceux que j'ai trouvés, ils ne font guère plus gros les uns que les autres; ils font également ftriés, compofés de lames & percés dans leur intérieur de tuyaux longitudinaux qui paroiffent s'étendre depuis la bafe jufqu'au fommet , propriété qui n’eft point particulière à ceux-ci, les tuyaux étant eflentiels à ces corps; j'en ai vu qui n'étoient pas foffiles *, dont toute la bafe étoit criblée de trous dans toute leur circonférence ; la lame qui les recouvroit avoit été enlevée, & laifloit par conféquent très-ailément voir que ces trous n'étojent que l'extrémité de tuyaux qui pénétroient Îa fubftance même de ces glands. La couleur de ceux qui font foffiles & que j'ai vus, n'eft pas la même dans tous; ceux des coquilles ifolées étoient d'un gris terreux ou glaifeux , aufli-bien que les huîtres auxquelles ils étoient attachés, ceux des huîtres groupées, & ces huitres, étoient jaunes ; cette différence de couleur n’eft certainement qu'accidentelle , elle vient de celle du terrain où ils ont été enfévelis; les huîtres groupées font des environs de Befançon, les autres de la montagne de Pontchartrain, où pafle le grand chemin de Paris à Dreux; je n'ai pas vu l'endroit où les premières ont été trouvées, mais comme j'ai décrit la mon- tagne de Pontchartrain en paffant par cet endroit, je puis faire *# Ils font du cabinet de M. de Boïsjourdain. 4 connoitre DIE SV SLGMEUN CE 217 connoître 1 nature du banc où les autres ont été enfermées, & donner ainfi quelques raifons de ce qui peut les avoir colorés. Cette montagne eft un amas de fable jaunâtre , rougeitre ou blanc; ce fable commence après la terre végétale, dont le Jit eft peu confidérable au haut de la montagne; celui de ces fables qui y eft gras & de l’une ou de l'autre de ces trois couleurs, renferme des pierres meulières , dont certaines font aflez grofles pour qu'on en pôt faire des meules; ces pierres font de la couleur de la veine de faible où elles ont été formées ; au-deflus de ces pierres meulières il y a des grès qui y forment une efpèce de banc horizontal ; entre les unes ou les autres de ces pierres, eft pofée une efpèce de rouflier femblable à la prétendue mine d'or de Pontoife ; le refte de la montagne eft de fable blanc ou jaunâtre, deflous ce fable eft placé le banc d’huîtres qui peut avoir deux ou trois pieds d'épaifieur. On y en trouve depuis la grandeur d’un pouce au plus, jufqu'à celle de trois à quatre; quantité de ces huîtres font couvertes non-feulement de glands de mer, mais encore de tuyaux vermiculaires qu'on trouve auffi difperfés dans la maffe du banc; la terre dont ce banc eft formé eft glaifeufe, blan- châtre ou bleuâtre ; cette dernière couleur eft celle des glands de mer & des huîtres qui s’y rencontrent & dont j'ai parlé plus haut, quelques-unes de ces coquilles font cependant blan- châtres ; cette variété de couleurs ne vient fans doute que de celle qu'a a veine de glaife où les coquilles font enfévelies. C’eft probablement dans une pareille glaife que font enfé- _velis les glands de mer des environs de Pézenas : ceux que Jai vus & qui avoient été ramaflés dans ce canton, étoient du moins entourés d'une terre glaifeufe grife; ils ne diffèrent de ceux dont je viens de parler, que parce qu'ils font un peu plus gros; un d'eux a une fingularité à fa bafe ; cette bale eft parfemée de petits tubercules qui n'avoient apparemment été formés que pour augmenter les attaches de ce gland qui pouvoit s'être implanté fur un corps raboteux; jai encore facilement remarqué dans un de ces glands les tuyaux longitu- Mém. 1759. EE Payez POrytographie du Piémonr, page 24: 218 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dinaux & intérieurs; jy ai de plus vu qu'ils étoient féparés les uns des autres par des cloifons longitudinales qui s'étendoient dans toute la longueur du gland , & formoient par conféquent ces tuyaux. Quant aux glands mêmes, ils n'étoient adhérens à aucun corps, ni entr'eux ; il s’en rencontre cependant fouvent dans ce dernier cas lorfqu'ils font dans la mer *, auffi en trouve-t-on parmi les foffiles qui font collés par un de leurs côtés; plufieurs * Ces glands s’attachent à toutes | font les plus communs ; un autre l’eft fortes de corps, ils choififfent or- | de pelures d'oïgnon garnies de glands; dinairement les rochers ou les pierres | il y a encore fur une nérite, une qui s’en font détachées; on en trouve | oreille de mer ordinaire , une qui cependant auffi beaucoup fur des | eft verte & rouge; une nérite des coquilles, des madrépores ou des | plus communes eft fur un wwvrex à coraux ; on en conferve dans le ca- | bouche large & aurore; la nérite binet de M. de Boisjourdain qui le | n’en porte qu’un, lemurex, plufieurs; font fur les uns ou fur les autres de ces | une olive verdatre et dans ce dernier corps : un corail rouge finit par un | cas, les glands dont elle eft garnie, gland qui eft recouvert de la matière | font ftriés & violets; dans le nombre du corail; un panache & un litho- | des buccins, on en remarque qui en phite font parfemés de glands qui | font plus ou moins chargés en dehors font ainfi incruftés de la fubitance | & même en dedans ; les grands eux- qui revêt leurs branches; les glands | mêmes ont fouvent leurs parois in- qui font portés fur un lithophite ren- | térieures garnies de tuyaux, & ils ferment des tuyaux triangulaires, & | font aufi fouvent en même temps un autre contient une volute à pas | groupés avec des huîtres pelures larges: j'ai vu dans d’autres cabinets | d’oignon; les huîtres communes & de ces /epas aïnfi incruftés; & nom- | celles qui font épineufes & qui mément dans celui de M. le Duc | viennent de Malte, en font auf d'Orléans, où l’on garde un grand | plus ou moins recouvertes, & outre panache verant de l’ifle de Bourbon, | ces glands, elles portent quelquefois qui en a plufieurs dans cet état. des buccins mélés avec ces glands Ces glands ne font cependant pas | qui font blancs ou violets. toujours recouverts, quoiqu’attachés Un de ces groupes eft traverlé. à des panaches ou à des madrépores: | d'une branche de lithophite; une- une mafle de madrépore percée de | huître gryphyte, appelée crête de- tuyaux vermiculaires en porte un | cg, & qui eft rouge, porte un gros de l’efpèce qu'on appelle ordinaire- | gland violet ; celle qu’on nomme: ment culorte de Suiffe; un très-grand | l’hirondelle, en a un qui eft garni madrépore branchu, à grandes étoiles | en dedans d'un petit tuyau : on en & ftrié, en eft chargé de plufeurs | garde encore, non-feulement dans qui font pourpres ; ces deux madré- | le cabinet de M. de Boisjourdain, ores font du cabinet de M. de | maïs dans plufieurs autres qui re-- Boiourdain: parmi les coquilles de | couvrent des morceaux de boïs, qui ge même cabinet, on voit un gros | probablement ont été des pieux de lepas qui eft recouvert de ceux qui | parcs à huitres, ou de. ceux qu’on ———_—_—_—__————Z DES SCIENCES. 219 de ceux que j'ai décrits & qui font portés par des huîtres, fe touchent & s'anaftomofent en quelque forte les uns avec “es autres: un de ceux que M. Allioni appelle, d'après Rum- phius, le grand balanus de mer, en forme de tulipe ou de cloche, & que j'ai recu de M. Allioni , porte fur fes côtés . des fragmens de quelques autres de même efpèce qui s'y étoient attachés ; ce gland de mer fe trouve dans les collines d’Arri- gnani en Piémont; il eft des plus grands que j'aie vus; il approche beaucoup de celui qu'on appelle communément culotte de Suife. : Je n'en ai point encore trouvé ni vu dans les foffiles de France qui fuffent de cette grandeur ; on a méme jufqu'à préfent peu rencontré de ce foffile dans ce royaume ; l’Auteur de lOryétologie a été obligé d'emprunter de Bayer la figure de celui qu'il a fait graver; les Curieux pourront maintenant s'en procurer facilement, ceux de Paris du moins, puifqu'il eft commun fur les coquilles de la montagne de Pontchartrain. Les tuyaux vermiculaires foffiles, dont j'ai maintenant à parler , fe trouvent dans beaucoup plus d'endroits que les glands de mer ; outre la montagne de Pontchartrain dont jai déjà fait mention , il ÿ en a une quantité d'autres qui en renferment: je ne parlerai cependant ici que de celles où l'on en découvre qui font attachés fur des coquilles, fur d'autres corps, ou qui sentrelaffant les uns dans les autres forment des groupes différemment contournés. Une de ces montagnes eft des environs de l'abbaye de Molefme en Champagne; elle en contient des uns & des autres; les coquilles en font recouvertes fur une des deux lante dans la mer pour y étendre Fe filets, lorfqu’on veut faire cer- taines pêches ; enfin les glands qui font confervés dans le cabinet de M. de Boïsjourdain, font attachés non- feulement fur des coquilles ou des corps qui leur font trés-étrangers , mais il yen a qui le font fur ceux qui leur font congénères , & même fur des sas de même efpèce; un pouffe-pied en à plufieurs ; un gros gland eft porté par plufieurs petits , de façon qu’il paroït que c’eft lui qui s’y eft attaché, & non les petits à lui ; un qui eft en forme de tulipe, a fa bouche entourée de plufieurs autres plus petits que lui. Eeï Voyez l'Hif, Natur, éclairie, Past 395, PLXXXIII, ge 24, Paris, 1742, in-4.° PL IV. PET, Ge. r. Ibid, fig. 3. Jbid. fig. 4. 220 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIÉ ROYALE furfaces de leurs battans ou fur les deux également ; ces coquilles font du genre des huîtres ou des moules ; les huîtres approchent beaucoup de nos huîtres communes ; elles égalent pour le moins kes plus grandes de celles-ci dans toutes leurs dimenfions ; comme elles ont fur le dos des efpèces de feuillets tranfverfaux, la charnière eft fillonnée dans ce fens , -& elles ont vers le milieu de leur concavité un endroit fuperficiellément creux, où s’attachoit le corps de l'animal; elles font blanches , couleur qu'elles n'ont probablement prife que dans la terre ; l'intérieur a confervé le lifle des huîtres nouvellement tirées de la mer. Les tuyaux qui les recouvrent extérieurement , font égale- ment blancs, leur forme eft cylindrique, ils f contournent différemment en plufieurs fens, ils n'ont point où très-peu de ces rides circulaires qu'on remarque dans plufieurs autres efpèces ; les ftries de quelques autres leur manquent ; ils ont confervé intérieurement un peu du lifle qu'ont ceux qui con- tiennent l'animal. Les tuyaux dont les moules font chargées , ne différent en: rien de ceux-ci; il y en a cependant quelques-uns qui font plutôt triangulaires que cylindriques, mais cette figure trian+ gulaire ne fe remarquant que dans ceux qui font prefiés les uns contre les autres, je crois qu'elle a dépendu de là com preffion latérale que ces tuyaux ont foufferte, lorfqu'ils étoient dans un état de molleffe ;. les tuyaux de ces deux fortes de coquilles reflemblent encore à ceux qui garniflent prefqu'en- tièrement un battant de Coutelier, que je crois être aufli dés curières de Molefime ; tous font à très-peu près de la même groffeur, le diamètre de leurs ouvertures n'a guère qu'une ligne. C'eft là ou à peuñprès la groffeur des tuyaux qui font répandus fur de grandes huîtres de la montagne de Saint-Michel , qui eft entre Verdun & Toul en Lorraine; ceux-ci ne m'ont. paru qu'un peu moins gros; ils fe contournent en différens fens comme les précédens, & n’en diffèrent que par leur couleur jaunâtre & terreule ; les huîtres font plutôt bleuâtres en dehors; elles ont confervé en dedans un. peu de leur couleur nacrée; DEN She ST ent E Ni CEA Sr LM asp il paroît qu'elles donnent des perles plus communément que les autres ; celles qui font foffiles, ont quelquefois, comme je l'ai déjà remarqué, un demi-pied de longueur & un peu plus de largeur , & font conféquemment prefque rondes ; des fragmens de quelques autres de la même efpèce, ont plus d'un pouce ou deux en fus de ces dimenfions ; les coquilles auxquelles ils ont appartenu devoient être beaucoup plus grandes : l'on fait, au refte, qu'il y a des huîtres confidérables par leur grandeur ; il fe rencontre encore de ces huîtres chargées -de tuyaux aux environs de Befançon: j'en ai trouvé ainfi re- couvertes fur une butte appelée 47 Merairie , qui eft peu avant Lignières, village de Normandie, fur le chemin du Melleraut à Cizai; les montagnes qui bordent le chemin qui a été ouveit, il y a quelques années, entre Pont-à-mouffon & Dieulart, renferment différentes: efpèces d'hutres: qui ont auf plus ou moins de tuyaux fur leurs battans ; j'enaisvu dans la collection de M. le Curé de Sainte - Marguérite ,. qui avoient été tirées de cet endroit; une de ces huîtres, qui eft fort groffe & qui approche par la figure des huîtres communes, eft chargée de rateaux & de tuyaux vermiculaires; une autre qui diffère de celle-ci en ce qu'elle n'eft pas comme l'autre en quelque forte ondée, & qu'elle n'eft pas coudée fur un, de fes côtés, eft recouverte d'huîtres qui approchent des pelures d'oignon , & qui font mélées avec des tuyaux vermiculaires. Toutes les huîtres ont cela de commun, de fervir de point: d'appui aux tuyaux vermiculaires : comme elles s’attachent elles- mêmes à d'autres corps , elles. peuvent aifément leur procurer ce point d'appui, & elles doivent ÿ être plus fujeites que cellés dont les animaux nagent &c marchent ;. elles doivent être plus expofées à recevoir les œufs des: vers, qui forment les tuyaux, à moins que les autres n'aient perdu les animaux qui y habitent, & qu'elles ne foient par conféquent dans. l'éiat des corps inanimés & immobiles, Les coquilles qui portent le nom de poules, sattachent. aux corps qu'elles rencontrent, par la partie qu'on appellé bec, c'et-à-dire l'endroit où la charnière eft phicée: j'en ai vu. Ee il 222 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE plufieurs ainfi adhérentes à un madrépore confervé dans le cabinet de M. de Reaumur, & qui avoit été pêché dans la Méditerranée; j'ai de plus vu une autre efpèce de ces coquilles, ou qui n'en diffère que parce qu'elle n'a pas de bec , ou qu'elle en a un qui eft très-court & qui eft ouvert dans cet endroit ; elle fait fortir par cette ouverture un pied ou un mufcle, au moyen duquel elle s'attache à diflérens corps marins. On con- ferve dans le cabinet de M. de Boisjourdain & dans celui de M. le Duc d'Orléans, de ces fortes de poulettes; elles font lifles, à battans égaux, environ demi-circulaires & d'un brun: jaunâtre; elles font attachées à des maffes de pierres qui portent différens corps marins ; elles ont été auffi tirées de la Médi- terranée. Ces différentes efpèces de coquilles & celles qui font de ce genre, font donc très-fouvent dans un état de tranquillité &c d'immobilité, très-propre à faciliter lattache des tuyaux; auffi en trouve-t-on fur des poulettes foffiles; trois de ces coquilles, du cabinet de M. le Duc d'Orléans, en ont quelques-uns fur Jeur furface extérieure ; les tuyaux de lune font canelés lon- gitudinalement, ceux des deux autres font liffes ou fans ces canelures ; tous font très-petits , n'ayant guère qu'une demi-ligne d'épaiffeur ; ils fe contournent un peu, leur petiteffe femble être proportionnelle aux coquilles, qui font, au refte, toutes trois de celles qui font canelées longitudinalement , ondées à leur bafe ou qui ont une lacune profonde dans leur milieu : elles ont été trouvées dans les environs de Vereft près Tours. Quoique je ne doute point qu'il n’y ait parmi les coquilles dont les animaux nagent , beaucoup d’efpèces qui puiflent fe trouver chargées de tuyaux, puifqu'on en conferve dans les cabinets un grand nombre de celles qu'on pêche maintenant, qui en font plus ou moins couvertes; il me paroît fingulier que l'on trouve en terre peu de femblables coquilles fur lefquelles il y en ait ainfi d'attachés *: j'ai cependant vu une des plus * On en trouve cependant dans | dans le cabinet de M. de Boïsjour- Ja mer plufieurs efpèces garnies de | dain, une nérite ondée de pourpre, tes tuyaux: j'ai vu, parexemple, | qui en a de circulaires & ridés cir- Dimsu:8 CRE NGCESs 223 grandes vis trouvée à Mecringe en Brie, qui en a plufieurs, ces tuyaux font très-petits, ne font qu'un tour, font canelés lon- gitudinalement, & reffemblent à un petit Jimaçon aplati; ils paroiflent ètre femblables à ceux dont les Jucus qu'on pêche de nos jours, font quelquefois prefque recouverts ; ils font renfermés dans d'intérieur de la coquille foffile ; cette circonf- tance prouve, à ce qu'il me paroît, que cette coquille étoit vide » Jorfque les tuyaux sy font formés, & qu'elle étoit dans le cas où fe font trouvés le coutelier & la moule dont j'ai parlé ci-deflus, & qui en ont les furfaces internes & externes chargées d'une grande quantité : on ne pourroit autrement expliquer comment les animaux de ces tuyaux auroient pu: s'introduire dans ces coquilles & y vivre fans y périr, Ce n'eft que fur leur furface extérieure que les coquilles vivantes peuvent porter ainfr des corps qui leur font étrangers, & ce neft que fur cette partie qu'on fes trouve dans ces fortes de coquilles : pour en avoir une preuve qu'on peut f procurer tous les jours , il fuffit de fe rappeler ce qu'on obferve journellèment dans les huîtres que l'on mange à Paris; beau- coup de ces huîtres forment des groupes compolés de plufieurs. huîtres, dont les animaux de chacune font vivans : outre cela, quelques-unes de ces huîtres ainfi groupées ou de celles qui ne le font pas, font garnies de tuyaux vermiculaires ou de glands de mer; de plus, on voit dans plus d’un cabinet d'Hif toire naturelle, quantité de groupes d'huîtres de Malte, de -Port-mahon ou de l'Amérique, qui font toutes fi bien. con- fervées dans toutes leurs parties , qu'il ny a guère lieu de douter que quelques-unes de ces huîtres, Jorfqu’on les a pêchées, ne renfermaffent pas l'animal qui les a formées; plufieurs de culairement , un gros cœur à volute qui en porte unde l'efpèce commune; une came brune. de la Méditerranée qui en eft recouverte, une grofle came de, la même mer, à laquelle deux font attachés ; ils fe croifent & forment comme une efpèce de ordinaire qui en eft garni, de ceux- qui, à l'extérieur, font coupés dans leur longueur par des diaphiagmes , ce qui les fait en quelque forte reflembler à des tuyaux de lunettes ; enfin deux ourfins recouverts en dehors & en dedans de ceux. qui. manche à cette coquille, un buccin | {ont les plus communs. PLIV, fig.2. 224 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ces huîtres font, de même que les communes, quelquefois recouvertes de plus ou moins de tuyaux , & percées même de dates, comme je le dirai dans la feconde partie de ce Mémoire ; il n'y a donc pas lieu de douter que les coquilles dont les animaux vivent, puifient être chargées de corps étrangers, & mème être percées par d'autres coquilles. Ce qui peut encore prouver cette vérité, font les groupes formés feulement de tuyaux vermiculaires ; ces tuyaux font contournés les uns dans les autres, de façon qu'ils fe touchent dans plufieurs endroits de leur longueur, & ils font ainfi en quelque forte anaflamofés : on pourroit citer en preuve de ce que j'avance, les groupes formés par de femblables tuyaux qui fe voient dans prefque tous les cabinets d’Hifloire naturelle qui {ont à Paris ; il y en a peu où l'on n’en conferve quelqu'un *; on en trouve de fofliles dans plufieurs endroits de la France, mais je n'en connois point qui en fourniflent d’aufli beaux que ceux qu'on tire des carrières de Molefme: on en conferve dans le cabinet de M. le Duc d'Orléans plufieurs différemment formés; un de ces groupes eft d'environ trois pouces de hauteur fur autant de largeur à fa bafe ; un autre qui eft prefque d'une figure cylindrique un peu aplatie , eft long de près de quatre pouces , & large de deux; des troifièmes , qui forment des mafles irrégulièrement rondes, d’une groffeur intermédiaire entre les dimenfions des deux précédens; les tuyaux des uns & des autres font cylindriques; le diamètre de leur ouverture peut avoir plus ou moins d'une ou deux lignes, n'étant pas tous de la même groffeur ; ils font tous ridés circulairement & d’une couleur blanche. Les environs de la Ferrière de l'Arçon, fur les confins de la Touraine & du Poitou, en renferment des groupes aflez femblables pour la forme à ces derniers, mais beaucoup moins gros & compolés de tuyaux plus petits: on en trouve à Courtagnon, dont les groupes font encore.moins gros, quoique * Voyez ceux de M. le Duc | de M. Davila, de M."° Ja Préfi- d'Orléans, de M. je Marquis de | dente de Baudeville & plufieurs Paulmi, de M. de Boisjourdain, | autres. es D 'ÆNB SC LE IN CES TN 326 les tuyaux foient un peu plus confidérables par Ra groffeur ; les tuyaux de ces groupes, de même que ceux des précédens, font collés les uns aux autres dans plufieurs endroits de leur longueur ; par conféquent il n'y a pas lieu de douter que fouvent des coquilles dont les animaux vivent , ne s'attachent réellement les unes aux autres. On ne peut non plus, à ce que je croïs, fe refufer à cette vérité, que les coquilles foffiles n'aient réellement renfermé des animaux qui ont eu vie, puifque leurs accidens , leur attache ou adhérence annoncent une fucceflion de temps dans leur formation, & qu'elle ne peut s'être faite que de la manière dont fe fait celle des coquilles qu'on tire maintenant de {a mer, qui par ce côté reffémblent entièrement aux coquilles foffiles. On verra dans les feconde & troifième parties de ce Mémoire, que les autres accidens des coquilles foffiles ne font pas moins propres à prouver le fentiment contraire à celui que j'ai cru pouvoir foumettre à un examen fcrupuleux. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE L j IGURE f. Grande huitre à talon, ridée tranfverfalement, qui porte une petite huître de, même efpèce fur fon talon #. Fig. 2. Lepas cabochon, un peu ridé tranfverfalement à fa bafe, qui eft oblique & à fommet pointu &.un peu recourbé en arrière ; il eft chargé de deux battans plats d'une huître pelure d'oignon. Fig. 3. Le même /epas vu en dedans. Fig. 4. Huiwre à côtes tranfverfales , & à engrénure dentée, efpèce de rateau ; elle porte une portion # d'une fembläble coquille. Fig. 5. Huitre à côtes obliques, efpèce d'huître-feuille ; il y en a - deux adhérentes l’une à l'autre. ""PFz AN CHE LI Fig. 1. Buccin à bec alongé life, à fept tours de vis; il porte ä fa bouche des fragmens d'huîtres, Fig. 2. Huître oblongue à groffes côtes obliques ; huître-feuille , Min. 1759: ere … 226 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE elle eft encore attachée à une portion de Ja branche d'arbre qui Ia portoit , & cette portion eft pétrifiée & remplit la finuofité qu'elle voit occafionnée dans Ïa longueur du battant de cette huître qui étoit adhérent. Fig. 3: Huître arrondie feuillée ; fon talon a extérieurement une eavité qui paroît avoir été occafionnée par TE corps , fur lequel lle étoit attachée. “Fig. 4. La mème huître vue en dedans. PLAN GE E, DE Fig. 1. Groupe d'huître recouvert de glands de mer communs. Fig. 2. Huïtre qui reffemble beaucoup aux huîtres communes, recouvert: de glands de mer communs , dont la bafe de quelques- uns n’eft pas feulement appliquée fur l'huître, mais la pénètre, comme on le peut voir aux endroits marqués 4, 4, 4, 4. Fig. 3. Huître femblable vue par le dedans , & qui eft percée de trous de différentes grandeurs, & qui, probablement, font düs à de parcils glands de mer. 5 PLANCHE I V. Fig. 1. Huitre di reffemble ne aux huîtres communes , -& qui eft recouverte en dehors de tuyaux vermiculaires. Fig. 2. Groupe de tuyaux femblables , entortillés les uns avec les autres, sd: Fig. 3. Moule ee hr épices reconverte en dedans de pareils fuyaux, te gs A La Fig. 4: Manche nn couteau ou de Coutelier, Fecouver en dchons& en dedans des-mêmes tuyaux vermiculairess © - -« U à "4 . - . 5 Men. de UAER. dar Se. 1769: Pl.226, PL. Parké 1T Eu: 1 Inoramr fecit Mem dé lAc.R. der Je.1769.Pag:226. PL.E. — Hi 0 g notes Mem.de UA: R.der Or. 1799 Pag: 226 L1L.7 { Parle 17 JZ Zagram frcit (à Ë 1] ) Mein. de l'Ae. R. des Se. 1769: Pag . 226. PL.8. | Partie 127 Fig. 1. (DES SCIENCES, : 227 OBSERVATIONS SUR L'ÉTOILE CHANGEANT E % DU COU DU CFYGNE. Par M. LE GENTIL. D rat environ deux cents ans, les Aflronomes ont remarqué dans fe ciel plufieurs étoiles qui offrent des phénomènes tout-à-fait furprenans : elles Le font voir pendant quelque temps, elles difparoiffent enfuite, & elles font tellement cachées, pendant leur difparition, dans limmenf étendue des cieux, que le fecaurs des plus longues lunettes eft encore trop foible poux les. découvrir: Bientôt elles reparoiffent , difparoiffent enfüite, & ainf par des apparitions & par dés difparitions. fucceflives., il femble qu'elles ne foient faites que pour exercer les Aflronomes & ks Phyficiens. On trouve un ample Catalogue de toutes ces étoiles fine gulières, dans les Élémens d’Aflronomie de M.Cafini; mais les plus célèbres d'enelles font L'étoite du cou de la Baleine, dont Fabricius. découvrit les changemens en 1596, & celle du. cou du Cygne » dont Küch a découvert, les changemens .en 1686. . Ces deux étoiles ont des apparitions & des difparitions pée riodiques qui.ont été réglées par les, Aflronomes qui les ont ebfervées, à trois, cents trénte-trois ou-trois, cents,trente quatre jours pour Létoile de la Baleine, & à quatre cents quatre jours & demi, ou quatre cents cinq jours pour celle du cou du Cygne, eeft-à-dire que, lorfque ces étoiles fon parvenues à leur plus grand degré de clarté apparente, elles diminuent enfuite infen- fiblement | difparoiffent tout - à - fait + & :reparoiflent pour reprendre. Jeu degré de clarté apparente : &, cette période Sachève en trais cents trente-tiois, qu Wois. cents trenté-quatre Ff ÿ 24 Juillet 1759: 228 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE jours par l'étoile du cou de la Baleine, & en quatre cents quatre jours & demi ou quatre cents cinq jours par l'étoile du cou du Cygne. Outre ces changemens périodiques qu'éprouvent ces deux : étoiles, les obfervations en ont encore fait connoître d’autres, auxquels ces mêmes étoiles font fujettes: par exemple, elles n'arrivent pas à la même grandeur apparente dans toutes leurs révolutions ; quelquefois elles égalent les étoiles de la feconde ou de la troifième grandeur , & quelquefois elles n'occupent que le rang d'après; enfin on a vu qu'elles ont été pendant quelques années fans paroître, & qu'on les a cherchées envain, même dans des temps qui fuivant les révolutions ordinaires devoient être ceux de leur plus grande clarté apparente. Des phénomènes fi furprenans méritent bien l'attention des Aftronomes; c’eft auffi cette confidération qui m'a engagé à faire fur ces deux étoiles & fur la plupart des autres qui font fujettes à tant de changemens, les obfervations que j'ai cru les plus propres à nous les faire bien connoître: les peines que je prends pour parvenir à une connoiflance exacte de ces changemens, ne feroient de ma part comptées pour rien, fi elles étoient fuivies du plaifir & de la fatisfaétion d'en pouvoir feulement foupçonner la caufe. L'étoile du cou du Cygne eft de toutes les étoiles chan- geantes que j'ai obfervées, celle que j'ai le plus fuivie jufqu'à préfent, & c'eft par cette raifon que je me propofe d'entretenir aujourd’hui la Compagnie fur cette étoile: je vais donc examiner ici deux chofes fur l'étoile du cou du Cygne. La première, de combien de jours eft fa révolution pé: riodique , en comptant cette révolution comme ont fait les Aftronomes mes prédécefleurs, qui ont obfervé cette étoile, c'eft-à-dire, de l'inflant où l'étoile eft arrivée à fa plus grande clarté apparente , à F'inftant où elle y revient après avoir pañlé par {es décroiffémens & fes accroiflemens ordinaires; cet examen nous fera voir fi la période de ces changemens contient le même nombre de jours qu'elle contenoit il y a environ foixante ans. La feconde chofe que nous examinerons, ef fi cette étoile - DES ScrENcCcESs. 229 n'auroit point quelque mouvement propre fenfible à nos yeux, d'où pourroient dépendre les énormes changemens que nous lui voyons fubir tous les ans, & fi elle ne feroit point fujette à a parallaxe: entrons en matière. M. Kirch, de la Société Royale de Berlin, décrit dans les Mémoires de cette Académie, imprimés en 1 710, ce qui fut l'occafion de fà découverte fur l'étoile dont J'entreprens de parler. En 1686, il chercha dans le ciel l'étoile voifine de la tête du Cygne, que l'illuftre Hevelius avoit obfervée en 1670 & 1671, mais qui depuis ce temps n'avoir pu être aperçue par aucun Aftronome : M. Kirch { fattoit de découvrir dans cette étoile des changemens femblables à ceux que Fabricius avoit remarqués, comme nous avons dit, en 1 596 dans une étoile du cou de la Baleine. Dans cette flatteufe efpérance, M. Kirch fit tous fes efforts pendant plufieurs belles nuits du mois de Juillet 168 6, pour apercevoir l'étoile qui étoit & qui devoit être l'objet de fes veïlles, mais il ne vit rien ; cependant il fut dé ommagé de fes peines par la découverte qu'il ft d'un autre phénomène qu'il ne cherchoit pas, l'étoile du cou de la même conftellation que Bayer avoit mife dans fes Cartes en 1600 > & qu'il avoit défignée par la lettre grecque y, étoit difparue, En vain M. Kirch eflaya de la trouver le 11 de Juillet 1686, il ne la put voir, quoiqu'il apportât Îe plus grand foin. à confronter les Cartes de M. Bayer avec le ciel : ce ne fut pas. _ de même le mois d'Odtobre fuivant ; en effet, l'étoile fe fit. voir à M. Kirch le 19 de ce même mois » & il l’aperçut fort diftinétement fans autre fecours que celui de fes propres yeux EX il la vit augmenter enfuite fenfiblement jufqu'à un certain point, décroitre peu à peu & difparoître après cela, de façon qu'il lui fut impoffible de a voir, quoiqu'il employât une lunette, afronomique de huit pieds de longueur. D NAS Elle fut invifible jufqu'au 16 d'Août de l'année füivantel 1687, que M. Kirch la retrouva aidé de fa lunétte de hüit' pieds; mais elle étoit, dit-il, fort petite, & ce à fut que le iij 230 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE 2 de Novembre fuivant, qu'il put la diflinguer à la vue fimple;, elle devint de jour en jour plus fenfible jufqu'au 6 de Dé- cembre , après lequel elle commença de croître, & elle difparut enfuite totalement comme elle avoit fait l'année précédente. M. Kirch trouva par ces obfervations, que d’une apparition à l'autre apparition il s'étoit écoulé un an un mois & une femaine environ, c'eft-à-dire quatre cents deux ou quatre cents trois jours: d’autres obfervations qu'il fit dans la fuite, lui confirmèrent que la période de cette étoile étoit aflez conflante, quoiqu'elle lui parût d’ailleurs fujette, comme nous l'avons dit à ne pas atteindre tous les ans le même depré de clarté apparente. Cet Aftronome ne s'en tint pas là; il füivit fon étoile affi- dûment pendant les années 1686, 1689 & 1 690; & après avoir obfervé plufieurs de fes apparitions & difparitions, il les trouva fort régulières, de forte qu'il en fixa la révolution à quatre cents quatie jours & demi. Feu M. Maraldi, de cette Académie, a fait untravail fuivi fur cette étoile qu'il a obfervée pendant plufieurs années, & fur-tout pendant les années 1692, 1694 & 1695; il en xélulte que la révolution de l'étoile étoit alors de quatre cents cinq jours. Enfin , par les obfervations de l'année 271 $, comparées à celles de l'année r69 $ , on trouve que cette étoile à eu dix-huit révolutions de quatre cents cinq jours chacune , conformément à ce qui avoit déjà été trouvé par M. Maraldi / Mémoires de l'Académie, annee 17 à ÿ. Elémens d'Afironomie de M. Caffni, page 72) | Depuis ce temps on n'a plus parlé de cete étoile, fait que les Aftronomes aient négligé de l’obferver, foit qu'ils l'aient obfervée & qu'ils n'aient pas publié leurs obfervations: pour moi je vais rapporter toutes les miennes telles que je les ai faites jour par jour. DES SCIENCES 231 JOURNAL d'obfervations fur l'Étoile x dans le cou du Cygne. ANNE) ra . Vers la fin de cette année, l'étoile devoit paroître dans fa plus grande clarté apparente , & je me déterminai à la chercher ; je l'aperçus le 22 OGobre fort diftinétement à la vue fimple; elle étoit ce jour-là-un peu moins groffe que fa voifine, que Flamftead met de la cinquième grandeur. Le 23 d'Octobre, les deux étoiles n'avoient pas encore la même grandeur apparente, & la changeante étoit encore un peu plus foible que f voifine ; la différence étoit cependant bien légère. ARTE ENS He ù Le 2 de Novembre, a changeante avoit angmenté de clarté apparente, elle furpañloit fi voifine, c’eft-à-dire qu'elle opccupoit le rang entre les étoiles de la quatrième grandeur & celles de Ja cinquième. : : Le 16 de Novembre, quoique la Lune fût dans fon plein; elle nempêcha pas que je ne viflé mon étoile fort diftinc- tement, mais fa voifine avoit difparu à l'approche de la trop nde clarté de cet aftre. | PUR Le 28 de Novembre, la changeante étoit fort-diminuée, & voifine paroifloit fort diftintement. Le . Le 4 de Décembre, je perdis. mon étoile de vue. : En combinant enfemble ces obfervations, il paroît que l'étoile étoit au point de fà plus grande clarté apparente le 11 de Novembre, ss 4 if un toi: JOURNAL Zobfervations Jar l'Étoile x dans le cou : du Cygne. : CRE Neuf ans après ces premières obfervations que je viens de rapporter , c'eft-à-dire en 1756 , l'étoile parut pendant tout le mois de Septembre : je J'ai obfervée pendant ce temps, & 232 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE fon plus grand accroifflement me parut pouvoir être fixé entre le 10 & le 14 de ce même mois; dans cet état elle égaloit l'étoile n du milieu du cou, qui eft de la troifième grandeur. En comparant cette oblervation avec la précédente, on trouve que du 11 de Novembre 1747 au 1 2 de Septembre 1756, l'étoile a eu huit révolutions de quatre cents trois jours chacune. JOURNAL d'obfervaions fur l'Étoile % dans le cou du Cygne. ANNÉE 17$7: J'aperçus mon étoile à la vue fimple le 18 de Septembre 1757, mais elle étoit très-foible, Le 27, vers les 9 heures du foir, par un très-beau temps & la Lune étant dans fon plein, je n'ai pu apercevoir l'étoile changeante, quelqu'eflort que j'aie fait; l'étoile voifine étoit vifible. Le 3 d'Ofobre, le temps étant devenu ferein vers les 7h +, la changeante me parut plus groffe que fa voifine. Le 4 à 6h À ou un peu plus, j'ai vu la changeante fort diftinétement; le crépufcule qui ne finifloit ce jour-là qu'à 7h +, m'empéchoit de voir fa voifine. Le 8 à 7" £ du foir, la changeante étoit plus belle que l'étoile @ de la racine du cou du Cygne, qui eft de Ja cinquième grandeur ; la changeante étoit encore moins groffe que l'étoile n du milieu du cou , qui eft de la troifième grandeur. Le 11 à 10 heures du foir, le temps étant très-beau, j'ai obfervé la changeante avec beaucoup d'attention, mais je n'ai -pu décider fi elle a augmenté depuis le 8, ou fi elle a refté dans un état fixe: il eft certain qu'elle n'égaloit pas encore l'étoile n du milieu du cou, & qu'elle étoit plus grofle que celle de la racine du cou ; ainfi elle étoit de la quatrième grandeur Qu à peu près. | Le 12 à 6" L précifes du foir, le crépufcule étoit encore Uès-fort ; j'ai vu wès-diflinétement les étoiles 8 du bec, « de | DUR DES SCIENCES 233 fa queue, À & 4 des ailes, & » de la poitrine du Cygne, fans en pouvoir diftinguer aucune autre de cette conftellation, excepté la changeante que j'ai auffi vue fort diftinétement , mais petite en comparaifon de l'étoile du bec, de celles de la poi- trine & des deux ailes. La changeante étoit donc ce jour-là plus groffe que l'étoile fa voifine, & que celle de la racine du cou. Le 15 fur les 7 heures, j'ai regardé attentivement fa chan- geante , elle m'a paru avoir augmenté depuis le 12, étant bien plus brillante que fa voifine & que celle de la racine du cou , mais elle n'égaloit pas encore l'étoile x de la poitrine. Le 17 fur les 7h 2, la changeante approchoit de l'étoile de la poitrine en grandeur apparente. ÿ Le 18 à 7" + ou un peu moins, l'étoile changeante m'a encore paru moindre qué l'étoile de fa poitrine. Le 19 à 6h?, la Lune étant fort brillante, l'étoile de la poitrine étoit encore plus groffe que la changeante, & l'étoile du cou plus petite ; le clair de la Lune effaçoit fa voifine de la changeante, | Le 20, pendant que le crépufcule étoit encore très- fort, jai obfervé le Cygne, dont j'ai diftingué l'étoile de la queue feulement : je voyois auffi l’'Aigle & la Lyre, - Le crépufcule venant à diminuer , j'ai vu l'étoile » de fa poitrine du Cygne fans en avoir pu diftinguer d’autres de cette conftellation; enfm, le crépufcule étant devenu plus foible encore , j'ai vu, outre les étoiles nommées ci-deflus, celles des ailes, celle du bec & la changeante; fa voifine & l'étoile @ de la racine du cou ne paroïfloient point encore. Le même jour, vers les 8h ?, [a Lune étant dans le cercle horaire de deux heures ou à peu près, j'ai obfervé encore une fois la changeante; il m'a paru qu'elle étoit un peu diminuée, que fa différence de grandeur apparente avec n étoit plus grande que je ne l'avois obferyée le 17 & le 18, & moindre avec @ que je ne l'avois pareïllement obfervée le 17 & le 18: Le grand clair de Lune effaçoit la voifine de la changeante. Le 21 vers les 10 heures du foir ou 9" ?, le temps m'était. Min. 1759: Gg 234: MÉMOIRES DE, L'ACADÉMIE ROYALE pas fort beau, & il y avoit autour de la Lune un cercle dont: le diamètre égaloit quatre ou cinq fois ou environ celui de cet aftre; le refte du ciel étoit prefque tout couvert d'un nuage rare & délié: cependant je vis à travers ce nuage la queue, les ailes & la poitrine du Cygne fort diftinétement; je vis auffr l'étoile changeante, mais elle étoit bien plus foible que celle de la poitrine; on ne voyoit ni la voifine de la changeante, ni l'étoile de la racine du cou. Cette obfervation fait voir que la changeante avoit diminué, à moins que l'endroit du ciel où elle fe trouvoit, ne füt plus chargé de nuages que l'endroit où fe trouvoit n, ce qui ne me parut pas; d'ailleurs ces efpèces de nuages étoient très-tranfparens. Le 22 fur les 7 heures & par un très-beau temps, la chan- geante étoit aflez vifible, cependant bien moins que l'étoile de la poitrine; & il eft certain qu'elle étoit diminuée, puifque fa différence de grandeur apparente avec l'étoile » étoit confi- dérablement moindre qu’elle n'avoit paru être le 17 & le 18 de ce même mois; le grand clair de la Lune effaçoit la voifine de la changeante, ainfi que l'étoile de la racine du cou : il eft donc certain que dans cette révolution la changeante n'a point égalé l'étoile n de la poitrine en grandeur apparente. Le 23 à 9" 2, par un temps un peu nébuleux j'ai obfervé Je Cygne, dont j'ai vu la queue très-diftinétement , les ailes & la poitrine; la changeante n'étoit pas fi apparente: il m'a paru que je voyois l'étoile @ de la racine du cou, & par con- féquent la changeante étoit encore plus groffe que l'étoile @ de la racine du cou. Le 24 fur les 9 heures & par un fort beau temps, l'étoile changeante étoit plus groffe que l'étoile @ de la racine du cou que je voyois fort diftinétement ; la voifine de la changeante ne paroifoit point, parce que la grande lumière de la Lune lavoit fait difparoitre. Le 29 fur les 9 heures, la changeante étoit encore plus groffe que l'étoile @ de la racine du cou, puifque je ne voyois pas cette dernière, & que je diftinguois bien la changeante qui étoit fort brillante, A ES ISIC NT E MCE: 235 Le 31 vers les 9 heures, la Lune étant levée dépuis environ deux heures; l'étoile changeante: du Cygne étoit devenue prefqu'égale à l'étoile @ de la racine du cou que je diftinguois très -bien. ILE SR à - Le 7 de Novembre für Jes 6 heures ou environ, j'ai regardé foit long-temps 1a changeante par uni très-beau temps & par un vent de nord; elle étoit encore plus groffe que fa voifine, mais elle l'étoit moins que l'étoile @ de la racine du cou. Le 10, après beaucoup de pluie & par un vent de nord, la changeante étoit encore plus grofle que. fa voifine. Le 1 r, la changeante étoit encore plus grôfle que fa voifine. Le 12, je n'ai pu décider fi la changeanté étoit plus groffe que fa voifine, ou fi elle lui étoit égale ;'en effet , il m'a paru qu'il y avoit fi peu de différence entre les deux pour Ja grandeur apparente, que fr elles n’étoient pas encoreiépales, elles devoient au moins le devenir le 13 ou le 143 c'eft ainfi que: J'en ai jugé, parce que je ne crois pas qw'ellés fufléntencore tout à-fait égales, {a changeante me paroïflant avoir’ encore quelque chofe de plus apparent que fa voifine. 1p Tineg St HE CHos di Le 14, la changeante nv'a paru, après une longue com- paraïfon, un peu plus foible que fa voifine; Ja différénce’ au refle étoit fort petite. v Le 28, la changeante étoit très-foible , mais je ne V'ai pas fuivie plus loin, parce que les obfervations précédentes m'ont paru plus que fufhfantes pour fixer le temps de fa plus grande äpparition. | En comparant donc enfemble toutes ces obfervations , je érois que le terme du ‘plus grand éclat de l'étoile eft tombé dans cette révolution , au 19 d'Oftobre 1 7 57° Cetté époque comparée à celle du 12 Septembre 1756, donne quatre cents trois jours pour Îa révolution de l'étoile ; mais, parce qu'il eft difficile qu'il n'y ait pas l'erreur d'un jour, & même de deux jours, dans la détermination de cette période, én nemployant uniquement que les deux époques qui la renferment, voyons ce que donne un plus grand nombre de révolutions, Gg 236 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE Nous avons vu ci-deflus que l'étoile avoit été dans fa plus grande clarté apparente le 11 de Novembre 1747. . Du 11 de Novembre 1747 au 19 d'Oétobre 1757, il y a eu neuf révolutions de quatre cents deux jours, & demi chacune. Ce réfultat ne diffère des précédens que d’un demi-jour. JourNAL d'obfervations fin l'Étoile x dans le cou du Cygne. ANNÉE 1758. L'année fuivante 175 8, je fis encore quelques obfervations fur cette même étoile. Le 18 de Novembre de cette année, vers les 6 heures du foir , la changeante me parut un peu plus groffe que fa voifine. Le 23, vers les 6 heures du foir, la changéante me parut bien plus groffe que fa voifine, mais elle n’avoit pas encore tout-à-fait atteint la grandeur apparente de l'étoile x du milieu du cou; il me parut que la changeante n'étoit pas éloignée du terme de fa plus grande clarté apparente. Le 24, la changeante me parut encore plus groffe que fa voifine, & plus foible que l'étoile du milieu du cou. : Le 25, la changeante me parut à peu près comme hier, le ciel étoit un peu brouillé Le 26, la changeante me parut plus groffe que l'étoile g de la racine du cou; mais bien moins groffe que celle du milieu du cou, puifqu'à $P le crépufcule étant encore très- fort, je diftinguois fort bien l'étoile du milieu du cou ,& que je doutois fi je voyois la changeante; il faifoit très-beau | temps, je jugeai que la changeante n’augmentoit plus en gran- deur apparente, fi plutôt elle ne diminuoit pas. Le 29, vers les 7 heures du foir, la changeante étoit en- core plus groffe que fa voifine; mais il eft certain qu'elle étoit diminuée, fa différence de grandeur apparente avec fa voifine me parut à peu près comme elle m'avoit paru le 18 de ce même mois, DES SCIENCES. 29% Le $ de Décembre, le ciel s'étant découvert versles 7 heures, je vis la changeante qui étoit encore plus grofle que l'étoile fa voifine, & que celle de la racine du cou. Le 7 de Décembre, la Lune étant fort brillante & dans fon feptième jour, la changeante me parut encore tant foit peu plus groffe que fa voifine & que l'étoile g. | Le 11 de Décembre, vers les 6 heures, par un très-beau temps, & la Lune entrant dans fon douzième jour, je vis en- core fort diftinétement la changeante du Cygne; fa voifine & ‘étoile g de la racine du cou ne paroifloient pas, le grand clair de Lune les effaçoit. Le 12 de Décembre, par un très-beau temps & par un grand clair de Lune, je cherchaï en vain la changeante. Le 18 vers les 6 heures, le ciel étant très-beau, la chan- geante me parut encore un peu plus grofle que l'étoile fa voifime & que l'étoile @ de la racine du cou. Le 23, vers les 6 heures, je trouvai que la changeante du Cygne étoit bien diminuée, elle me parut même tant foit peu plus petite que fa voifine. Suivant ces obfervations, la changeante du Cygne a acquis le degré de fa plus grande clarté apparente le 2 ; 2 de Novembre, cependant elle n'a point égalé comme elle le fit en 1756 ‘étoile n du milieu du cou; elle a même été éloignée du degré de clarté que je lui trouvai en 1757, lorfqu'elle étoit dans le temps de fa plus grande apparition. En comparant l'époque que nous venons de trouver du 25 + de Novembre 175 8, pour celle de la plus grande ap- parition de la changeante du Cygne en cette année, avec l’époque que nous avons trouvée en 17 57 pour celle de la plus grande appparition de la même étoile.en cette année, on trouve quatre cents deux jours & demi pour la révolution de l'étoile. En comparant de même l'époque que nous avons trouvée du 12 de Septembre 175 6 pour celle de la plus grande ap- parition de la changeante du Cygne en cette année, avec l'époque que nous avons trouvée en 17 5 8 pour celle de la plus grande apparition de la même étoile en cette année, on trouve deux Gg i 238 MÉmoir£s DÉ L'ACADÉMIE ROYALE révolutions femblables à la précédente, favoir de quatre cents deux jours & demi chacune. Enfin, en remontant jufqu'au 1 1 de Novembre de l'année 1747, & en comparant cette époque au 2 $ + de Novembre 1758, on trouve dix révolutions de quatré cents trois jours chacune. ’ Il faut maintenant comparer la révolution de cétte étoile que nous venons de trouver, avec les révolutions de la même étoile, que l'on a déterminées il y a cinquante ou {oixante ans: pour le faire avec ordre & méthode, nous joindrons ici trois Tables. La première repréfente les révolutions moyennes de notre étoile, telles que M. Kirch & Maraldi les ont déduites dé eurs obfervations. La féconde Table repréfente les révolutions moyennes dé a méme étoile, telles que je les ai obfervées depuis l'année 1747 jufqu'à l'année 17 $ 8 inclufivement, Enfin la troifième Table repréfente les révolutions de a même étoile, telles que je les ai trouvées par les obfervations de M. Maraldi, comparées aux miennes. Taies Lo XL De la révolition moyemme de l'Étoile ÿ dans le cou du Cygne, telle qu'elle a été obfervée par M" K1RCH d MARALD I. ANNÉES ou ÉPOQUES des obfervations. NOMBRE DE JOURS COMPRI dans chacune des révolutions, 1 nee Par M. K1R CH. Par les années 1686, 1687, 1688, 1689, 1690, comparées mioyate olesepolere se eee sssses 404 2 Par l'année 1695, 1." Sept. Par M. MARALDI. comparée à l'année 1712 , 20 z D'ES SCIENCES. 239 TABLE IL De la révolution moyenne de l'Étoile x, dans le cou du Cygne, sêlle qu'elle a été obfervée pendant les onge années qui fe font . écoulées depuis 1747 jufqu'à l'année 175 8 inclufivemenr. SE à NOMBRE ANNÉES ot ÉPOQUES Ut des jours des révolutions! compris des obfervations. dans chacune desrévolutions. RE moyennes. Par l'année 1747, comparée à l'année 1756........ tbe Par l'année 1747, comparée à l'annéel ns Par l'année 1747, comparée à l'année 15758. . Par l’année 1756, comparée à PANNE ES 077 Mae rm re Par l'année 1756, année 1758 :....,...0 rlrelei2e- en lec- 402 Par l'année 1757, comparée à Fannée 1758042, Juifs. crise got INDIE o Ps mise dei Die Ale et 2 TRAIT à AMEN ‘0402 240 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE LAB PE TEE De la revolution moyenne de l'Étoile % dans le cou du Cygne, telle qu'elle réfule des obfervations de M. MARrALD1I, [A oImpar es aux nienties. e EE NOMBRE des jours compris dans chacune desrévolutions. NOMBRE ANNÉES ox ÉPOQUES ESA des révolutions des obfervations, moyennes. Par l'année 16 95 , comparée à Inn AS GEL EC: SE No Drocr Par l'année 169$, comparée à l'année 17574. 500 be Si Par l'année 169$, comparée à lannéc 12581 ice Lis Bu Par l'année 1712, comparée à l'année 1756..... eo OS 04 En jetant un coup-d’œil fur les deux premières Tables, on voit que la révolution moyenne de notre étoile a été de deux jours ou de deux jours & demi plus courte pendant les onze années qui viennent de s'écouler, qu’elle ne paroît avoir été pendant l'intervalle de vingt - neuf ans, entre les années 1686 & 1715. fur le temps de la révolution de cette étoile, eft d'autant plus à remarquer, qu’il eft ailé de fixer le temps de fa plus grande apparition à deux jours près ou à trois jours tout au plus; mais pour faire une erreur de deux jours ou de deux jours & demi fur la longueur de fa révolution de cette étoile, en la déduifant d'intervalles de huit, de neuf & de dix années, il faudroit ne pouvoir fixer le temps de fa plus grande apparition, qu'à dix ou douze jours près. Pareillement, pour faire la même erreur de deux jours ou de deux DES SCIENCES 24 deux jours & demi fur la longueur de la révolution de cette étoile, en la déduifant d’intervalles de vingt & de vinet-neuf ans, comme ont fait M. Maaldi & Caffini, il faudroit ne pouvoir fixer le temps de fa plus grande apparition qu'à vingt ou trente Jours près. me femble donc qu'on pourroit conclure d'après les deux premières Tables, que la révolution moyenne de l'étoile x du Cygne eft plus courte aujourd'hui d'environ deux jours & ‘demi qu'elle ne l'étoit il ÿ a cinquante ou foixante ans. Si au conuaire on jette un coup d'œil für 12 troifième Table qui renferme les réfultats dé M. Maraldi, comparés aux miens, on remarque que pendant un intervalle de plus de quarante & de cinquante ans, les révolutions moyennes de notre étoile paroiïflent plus grandes d'environ un tiers de Jour que les révolutions moyennes de la même étoile, déterminces par M. Maraldi, de forte qu'elles font auffi plus grandes de près de trois jours que celles que j'ai rapportées dans la première Table, d'après mes feules obfervations. Il y a donc toute apparence que l'étoile x dans le cou du Cygne éprouve quelqu'inégalité dans la fongueur de {es diffé- rentes périodes, il eft-du moins certain par les obfervations ‘que nous venons de rapporter, que la période du retour de cette étoile eft tantôt plus grande & tantôt plus courte de plufieurs jours. x M. Caffini a rémarqué la même chofe far l'étoile du cou Voyez Éléinens de la Baleine; mais avant que nous puiflions fixer les limites Pire de ces inégalités, fi elles font réelles, il nous faut encore un £ bien plus grand nombre d’obférvations. C'eft un travail que je me propofe de continuer dans les temps & les faifons convenables à ces recherches. Voyons maintenant fi cette étoile n’auroit point quelque mouvement propre, c'eft le fujet de la feconde partie de ce Mémoire, Les Aftronomes font encore partagés fur la caufe des viciflitudes auxquelles plufieurs étoiles fixes paroiflent être aflüjéties. Quelques-uns, avec M. de Maupertuis, fuppofent que ce Mn, 1759. HR Poy. Jon Trairé de la figure des Affres, Voy, fon Traité Jr l'éoile du vou de la Baleine, Paris, 1667. Voyez Élémens d'Afironomie de M, Caffini , gage 68, 242 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE font autant de foleils confidérablement aplatis , il ne peut mieux les comparer, quant à leur forme, qu'à des meules de moulin, qui peuvent être vues tantôt par leur grande furface, & tantôt par leur feule épaifleur ; or ces étoiles étant à des: diflances, pour ainfi dire, infinies, on conçoit aifément qu'elles. doivent cefler de paroïtre lorfqu'elles nous préfentent le tran- chant , ou ft on aime mieux le côté, à peu près comme nous voyons qu'il arrive à l'anneau de Saturne. D'autres Aftronomes penfent, avec Bouillaud, que ces oiles font des globes dont la plus grande partie Pas des furfaces eft obicure & l'autre partie eft lumineule ; que ces globes ont un mouvement de rotatioh, & nous préfentent tamôt leur partie lumineufe & tantôt leur partie obfcure. Ces deux opinions ont à peu près le même défaut, & je ne crois pas, avec M. Caffini, qu'une fimple révolution. autour d'un axe puiffe fufhre pour expliquer toutes ces va- riations des étoiles changeantes dont nous avons parlé au commencement de ce Mémoire. Il feroit donc mieux de joindre à ce mouvement de rotation un mouvement de tranflation & particulier aux pôles de la révolution de ces étoiles autour de leur axe ; mais je doute encore que cette hypothèfe nous mette en état de fatisfaire à les phénomènes que préfentent ces étoiles. En matière de fuppofitions, il eft aifé de détruire, mais ïl n'eft pas toujours aufli facile de bien établir : I ne faut donc point atténidre ici de moi, avec fi peu d'obfervations que nous avons fur les étoiles changeantes, d'explication de leurs appa- rences. Mon but aujourd'hui eft de faire voir que dans celle du cou du Cygne, fur laquelle j'ai entretenu jufqu'ici la Compagnie, je n'ai pu remauquer ni mouvement ni paral- laxe fentibles. Pour m'en affurer, j'ai voulu faire ufage des obfervations de cette étoile au méridien; mais à peine les ai-je eu commencées,, que j'en ai reconnu linfufhfance pour des recherches aufli dclicates que le font celles dont il eft ici queftion; Je jugeai donc alors que fi avec l'aide d'une grande lunette je pouvois DES SCIENCES 247 découvrir quelques petites étoiles dans le voifmage, où tou auprès de mon étoile, elles me feroient d'un plus grand fecours pour remplir mon objet. Le 2 de Novembre de l'année 1747, à la faveur d'une lunette de dix-huit pieds de longueur, je découvris, comme je l'avois defiré, deux très-petites étoiles tout auprès de Ia changeante du Cygne, & qui formoient avec elle un triangle ifocèle dont la bale étoit repréfentée par la diftance que ces deux petites étoiles paroifloient avoir entre elles ; j'ai reconnu enfuite ces deux étoiles dans un deffein du cou du Cygne dont M. Kirch accompagne fon Dilcours fur les diverfes ap: Vip. ds Mn; parences de la même étoile; ces étoiles forment dans Îe Es re deffein de M. Kirch, à très-peu de chofe près, la même confiant 7710; guration avec la changeante que celle que je venois de re: =° marquer, de forte que je fus déjà en état de conclure que LT QE _cette étoile occupoit en 1747 le même point dans le ciel; æmé 1714, que du temps de M. Kirch *. ik pi PA En 1756 ,1e 24 de Septembre, douze jours après la plus grande apparition de l'étoile, je cherchai à reconnoître mes deux petites étoiles avec une excellente lunette de quinze pieds de longueur, mais je n'en aperçus qu’une; celle-ci étoit exac- tement dans une même ligne droite avec la changeante & une autre étoile beaucoup moins grofle que la changeante, qui paroifloit vers le bas de la lunette. _ En1:757, le 4 & le 8 d'Oftobre, douze ou quinze jours environ avant la plus grande apparition denotre étoile; & après avoir donné à l'objectif de la lunette de quinze pieds de lon- gueur, dont je viens de parler, une ouverture double de celle que j'étois dans lufage de lui donner, je reconnus les deux petites étoiles que j'avois remarquées en 1747, elles occu- poient par rapport à l'étoile changeante la méme pofition que M. Kirch leur a affignée dans fon deffein; je remarquai encore que la changeante n'avoit point quitté la ligne droite dans * Je néglige ici la petite différence | qu’on peut fort bien l’attribuer à un qui fe trouve entre nos deux con- | léger défaut, foit dans le defféin, #gurations ; parce qu’elle eft fi petite |! foit.dans notre façon d'avoir jugé. h ij 244 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE Royare kquelle (comme on vient de le voir il n’y a qu'un inftant }, je l'avois laiffée en 1756 le 24 de Septembre. Outre ces trois étoiles qui étoient dans le voifinage de fa: changeante, j'en remarquai encore trois autres qui n'étoient pas éloignées de la même étoile: ces fix étoiles forment entre elles & avec la changeante des triangles aifés à reconnoître, & dont la figure ne pouvoit manquer d'être altérée pour peu. que la changeante eût le moindre mouvement ou la moindre parallaxe fenfible *. Le 28 de Novembre, cinquante-un jours après l'obfervation: précédente, & quarante jours après a plus grande apparition. de notre étoile, qui ce jour-à paroifloit à peine à la vue fimple, tant elle avoit perdu de fa clarté apparente; cette même étoile paroifioit toujours au même point du ciel, gar- dant conflmment fon même rang vis-à-vis les fix étoiles. voifines. Le 1 r de Décembre, foixante- quatre jours après ma première obfervation, & cinquante-trois jours après la plus grande appa- rition de la changeante, cette étoile navoit pas plus changé de pofition dans le ciel que les fix étoiles fes voifines; elle formoit avec elles les mêmes configurations, & elle me parut. toujours dans la même ligne droite avec les deux étoiles avec lefquelles je l'avois trouvée en ligne droite le 24 de Septembre. Cfa. taf, 17 56 & les autres jours que je lavois obfervée, on ne ce finr ls deux voyoit plus cette étoile à la vue fimple. GE Enfin le 11 de Janvier 1758, notre étoile, que l'on cefloit. de voir à la vue fimple depuis un mois, n'avoit point changé de pofition dans le ciel; mais je ne fai pas fuivie plus loin, les mauvais temps qui furvinrent pendant plufieurs jours, laifsèrent à la conflellation du Cygne le temps de fe mêler avec les vapeurs de l'horizon dans les heures qu'il auroit été convenable de lobferver.. Au refle, ces obfervations font fufhfantes pour faire voir que * Je donne à la fin de ce Mé- | telles que je les ai eftimées pendant moire une figure qui repréfente ces | plufieurs jours de fuite, où du 4, étoiles & leurs diftances refpedtives, | d'Octobre au 8 du même mois. DVENSMSTGUIRE: NEC HE Si 245$ notre étoile n'a ni mouvement ni parallaxe fenfibles. En effet, pendant un intervalle de près de cent jours, qui fait en- viron le quart de la révolution de cette étoile, je n'ai pas re- marqué qu'elle ait en aucune façon changé fa pofition, pas même d'une feconde de degré; de plus, elle a gardé conftam- ment la même pofition pendant plus de cinquante ans, c'eft- ä-dire, depuis M. Kirch jufqu'au jour que je parle; il n'en faut donc pas davantage pour prouver que cette étoile n'a ni mouvement ni paraliaxe fénfibles avec une lunette de quinze pieds de longueur qui groffit foixante-quinze fois, quoique cette étoile foit fujette d'ailleurs à des apparitions & à des dif paitions périodiques. . J'ai accompagné ce Mémoire d'une Table dans laquelle on: voit quels feront pendant le refte du fiècle courant les mois. dans lefquels l'étoile en queftion fera le plus vifible, & le jour. de ces mois auquel doit arriver la plus grande apparition de- la même étoile. Cette Table que je n'avois d’abord faite que pour mon propre ufage, pourra être de quelque fecours à ceux qui voudront dans la fuite obferver cette étoile. On a fuppofé dans la conftruétion de cette Table la période moyenne de Fapparition & de la difparition de l'étoile , de quatre cents: cinq jours trois dixièmes. On y trouvera plufieurs années où jai marqué deux mois de fuite, l’un dans lequel l'etoile com- mencera de paroître dans fon plus grand éclat, l’autre où elle parviendra au maximum de fa lumière; mais il n’y a que le fecond où j'aie ajouté le quantième de mois, parce que c'eft. celui où finit chaque période de quatre cents cinq jours &. “trois dixièmes ; par le moyen de cette Table, il fera facile à eux qui calculent des Ephémérides , telles que la Connoiffance des Temps *, d'avertir les Aftionomes de l'apparition de cette étoile, & par-là de nous en procurer de nouvelles obfer- vations. È r * Ce livre eft intitulé, Connoiffance des mouvemens cékeflés, depuis: année. 1762. Hh iÿ 246 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE TEA RE EN CMP V Des mois dans lefquels on doit voir le plus diflintement l'Étoile k. dans le cou du Cygne pendant le courant du fiècle prefent, 7 du jour de ces mois auquel doit arriver la plus grande clarté de le même Etoile, en fuppofanr fa révolution moyenne comme elle efl dans la troifième Table, favoir de quatre cents cing jours & zrois dixièmes. ANNÉES ou ÉPOQUES. Jours Mors.|de la plus grande clarté de l'Étoile, Décembre Janvier . . Février... . IMATS ptet Avril. Mai... 1764, biffextile. .… .. June TAGS = -latalnirier ce ape Dulet elec Août. DARCOS, Sem DATA PEER Octobre... 1768, biflextile..... Novembre ..... 20. Ad MORE QE NE Décembre ete 30. 17 0heiele ele telee Janvier rare EU CARE LE R CL E IC EC RTL PAPE ge 11772 1DHTEXTIE.… s101e Mars... |"... 20: 47 OO CIN COICIENE Avril... .|. 29: Mai. 177 A eee ele cire ne CU AODE Set ï en COM COMME Juillet... |..... DA 127706), bifextile- Re Août lente et De 1777 Pis RSR RUES + SOobrc. v'yTe D Es SCIENCES GE mo CCE ; Jours ANNÉES ou ÉPOQUES.| M o 1 5. [de la plus grande clarté de l'Étoile. Novembre|..... mGE Décembre |..... 26. Janvier. FENTE TRE 3 2 NS RE PIC Mars....|..... 16 + NERO EAP Avril. |..... 25 1784, biffextile. . ... Mai.....|..... 24 Juin. 1785....:.,..... Mnillets aa 4. TZ 0 OL Sale ee LU Août....[..... I EAU 4% Septembre! SR De Octobre. 1788 , biffextile. . ... Novehbrele 15.14! “ BARS ER nl Ut) Décembre |. .... 10. NCUIE SANS MERIPEr ACIDE Ab ee MO E Janvier ..|+--.. 20 2792 , biffextile. .... Mars,...|l-:-.: JE TNA BE Avril... |... 7 DZ OM Us late (ner ele la (ei 2 Mai... |... el 7 ONE ES ET ET à Je : Hullétis. LOUE A, 9: 1796, biffextile. .... Août....|-..., 17. 15710774 Septembre|.....26. ARR PAPA er "77° )Novembrel: .... 6. REZ 00 it Lre tte Sent HA Etes 16. MODO ane ete AB Ge a NE NET Janvier MW à 21e E 347 248 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE CoNFIGURATION de l'Étoile changeante X, dans le con du Cygne, 7 de quelques Étoiles voifines , vues avec une lune de quinze pieds de longueur. ga HE" &U L'étoile marquée C, eft la changeante + dont il s'agit ici L'étoile e eft plus petite que l'étoile f; : & 4 font éoales ; a elt plus petite que d, & plus groffe que 2 ; D ef plus grofe que f, & plus petite que d; ainfi e & f font les plus petites. Le côté ab eft un peu plus petit que le côté bc. L'angle Cd eft un peu obtus. Le côté ef eft égal ou à peu près, à 42. Le côté eC eft double ou à peu près, de ef. L'angle Cef eft prefque droit, de forte que le petit triangle Cef n'eft pas tout-à-fait ifocele. La changeante €, l'étoile f & l'étoile ; font exaétement dans la même ligne droite. &, 50% DESCRIPTION DES SCIENCES. 249 DESCRIPTION D'une nouvelle efpèce de Ver qui ronge les Bois © les Vaiffeaux , obfervée au Sénéval. Par M ADANSON *. I L y a fort long-temps qu'on connoît le Ver marin qui perce les bois & les vaiffeaux: mais ce n’eft que depuis les dé- gâts qu'on a remarqué que cet animal fait dans nos ports de mer, & en particulier fur les côtes de Hollande, que l'on peut dire qu'on a penfé à l'étudier férieufement. Le fujet a paru d'a- bord affez intéreflant à quelques Savans, qui, autant pour fatisfaire leur curiofité fur un animal qui jufqu'alors avoit été négligé, que pour avoir la gloire d'en parler les premiers, fe font empreflés d'en faire l'examen, & de produire, comme à l'envi, leurs obfervations. Les uns en ont fait une machine hy- draulique, un tuyau de pompe dont le “pifion apporte fa liqueur qui doit miner le bois; d'autres lui ont donné des pieds pour marcher & fortir de fa coquille, d'autres enfin ont prétendu ÿ découvrir une copulation femblable à celle des - limaçons; mais ce en quoi tous fe font accordés, c’eft à donner Je nom de queue à ce qui eft proprement la tête de l'animal, & au contraire à appeler du nom de tête ce que j'ai reconnu en être véritablement le pied.Ce font autant de points particuliers que je me propofe d'examiner, en donnant une Detcription plus exaéle d'une nouvelle efpèce de ver rongeur de bois que j'ai obfervé au Sénégal; & après avoir fait connoître le genre de coquillage auquel il a te plus de rapport, j'en ferai Ja * L’Auteur n’étoit que Corref- | qu’il a été admis au nombre de fes © pondant de l’Académie, lorfqu’il lût | Membres, il l'a relû pour être im- ce Mémoire dans une de fes Affem- | primé dans les Mémoires, fuivant blées de l'année 1756 ; mais depuis | l'ufage reçu dans cette Compagnie. Mém. 1759. li 250 MÉMOIRES DE L'ACADÉNMIE ROYALE comparaifon avec les vers rongeurs de vaifleaux qui ont été obfervés fur les côtes d'Europe. Ce ver rongeur de bois, qu'on peut appeler, fi l'on veut avec moi, du nom de saret , fe trouve abondamment dans les racines des mangliers & des fanars qui bordént le fleuve Niger, le Gambie & les autres rivières de la côte du Sénégal, qui font füujettes à recevoir les eaux falées de la mer, finon continuel- lement, du moins pendant un certain temps de l'année. Le Manglier eft aflez connu dans les deux Indes par fà fingularité de porter fes racines en manière d'arcades au-deffus des eaux; le fanar ef un arbre de l'efpèce de ceux qu'on nomme palerunier, en Amérique, & dont je compte donner la Defcription dans l'hiftoire des Plantes du Sénégal. Le Taret ne fe manifefte au dehors que par l'extrémité fupérieure de fa coquille AC D (fig. 1) qui déborde fort peu la furface extérieure du bois: il faut, pour le découvrir en entier, couper le bois dans fa longueur; alors on voit fà coquille qui eft compofée de cinq pièces fort inégales, dont la plus grande a fa forme d'un tuyau A2 blanchâtre, d'une grande dureté, & qui enveloppe les quatre autres. Ce tuyau, dont la fubflance ne diffère en rien de celle des autres coquilles, peut être confidéré comme un cylindre ouvert par les deux bouts, & qui va en grofliffant infenfiblement de l'extrémité fupérieure à l'extrémité inférieure: on en voit de différentes grandeurs. La proportion qui fe trouve entre leur grand & leur petit diamètre, eft comme un à vingt, c’eft-à-dire, que lorfque leur largeur eft de fix lignes, leur longueur eft environ vingt fois plus grande, ou, ce qui revient au même, elle équivaut à dix pouces du pied de Roi, ce font les plus grands tuyaux que j'aie obfervés. Il eft rare qu’ils foient parfaitement droits, & il ne m'eft pas arrivé d'en trouver aucun qui fût tourné en fpirate. Ils tiennent, pour ainfi dire, le milieu entre ces deux formes, & prennent de légères courbures dont la direélion n'eft jamais conftante & n'a fouvent d'aure règle que la volonté de l'animal, ou la gène où le mettent les nœuds & les autres irrégularités du bois qu'il perce. , DES SCIENCES. 251 Leurextrémité fupérieure eft quelquefois droite ou verticale, quelquefois courbée horizontalement flon que là coquille fort par le haut ou par les côtés de la racine dans laquelle elle eft enchäffée : ce dernier cas étant le plus ordinaire, on voit aufli beaucoup plus de coquilles dont cette extrémité eft prefque horizontale , que d'aucune autre manière, L'ouverture de l'extrémité inférieure eft ronde , égale au diamètre du tuyau, & deux fois plus grande que celle de l'ex- trémité oppofée; celle-ci a la forme d’une eliple, dont le grand diamètre eft double du petit ; elle eft comme étranglée dans fon milieu, ou divifée en deux parties égales, par deux groflés côtes longitudinales qui s'élèvent intérieurement, lune à {on bord d'en haut, & l'autre à celui d’en bas, où elles fe terminent en deux angles faillans. Quoique j'aie dit que ce tuyau étoit ouvert par les deux bouts, il y a cependant un temps où il fe ferme par le bout d'en bas, c'ef lorfque l'animal devenu vieux & parvenu à fon dernier point d’accroiffement n'a plus befoin de creufer pour fe loger. L'extrémité inférieure Æ du canal creufé dans le bois eft toujours arrondie en hé- mifphère, & l'on y découvre à fa loupe des impreflions parfaitement femblables à celles qu'y auroit fait une lime fine en paflant defus. La plus grande épaiflèur du tuyau eft dans l'extrémité fupé- rieure. Ellea près d'une ligne, & va en diminuant in{enfiblement jufqu'à l'extrémité oppofée, où elle s'anéantit de manière qu'on auroit de la peine à la diftinguer de la fubflance du bois que l'animal à creufé de quelques lignes au delà, fi fon poli n'aidcit un peu à fa reconnoître. Ce poli eft généralement répandu fur tout le refte de {a furface intérieure. Sa furface extérieure eft pareillement liffe, parce qu'elle eft (parée du bois par une efpèce de tuyau femblable extrémement fin & luifant, que Fanimal a d'abord collé contre fes parois. I arrive cependant quelquefois que ce premier tuyau mince n’eft point diftingué ni détaché degéelui qui enveloppe immédiatement le corps de l'animal , pour lors fa furface extérieure porte les impreffions des fibres du. bois, qui y font autant de petites cannelures ; ces Li i 252 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE cannelures s'étendent de Iongueur fur le tuyau, parce qu'il + fuivi les fibres parallèlement. Ù De toutes les fituations différentes que prennent les racines des mangliers, if ny en a aucune qui plaife davantage aux tareis que la verticale, & jamais je n'en ai vu qui fuiviflent l'horizontale, du moins dans toute leur longueur : cependant, comme ils ne quittent jamais le fil du bois, il s'en trouve toujours quelques-uns qui font repliés & couchés comme le bois, mais de manière que l'extrémité du tuyau qui en fort, foit plus élevée que l'extrémité oppofée qui eft cachée dans fon épaifleur ; les pieux, les perches & autres morceaux de bois femblables, n'en font pas plus exempts que les racines des mangliers, pourvu qu'ils foient piqués comme eux dans l'eau fur le rivage à une petite profondeur , car on n'a point d'exemple que ces animaux aient endommagé ces longues perches. que les Nègres pêcheurs plantent à quinze ou vingt pieds de pro- fondeur , {oit que le courant foit trop vif ou que la hauteur: de l'eau foit trop grande dans ces endroits. La hauteur à laquelle ils s'attachent aux bois du rivage, n'eft pas bien conflante; on peut cependant la déterminer à peu de.chofe près : j'ai remarqué, par exemple, qu'ils s'élèvent. à peine de fix pouces au-deflus du fond de l'eau dans les raz cines des mangliers, qui n’ont communément qu'un ou deux pouces de diamètre, au lieu qu'on en- voit jufqu'à deux & même trois pieds de hauteur au-deflus du même fond dans les gros pieux de‘fix pouces & davantage de diamètre ; dans les uns & les autres ils pénètrent fouvent au-deflous de la terre du lit du fleuve. Le dernier. point de 'abaiflement des eaux de la mer dans le temps du reflux, eft communément le terme au-delà duquel les tarets ne percent plus le bois: j'en ai vu cependant quelques-uns qui font exception à cette règle; ce font für-tout ceux qui rongent les racines du manglier fort proche de la terre; les eaux s'abaiffent quelquefois de fix pouces au-deffous d'eux, fans cependant qu'ils périfient. Une autre fingularité encore plus remarqtable; c’eft que ces animaux qui femblent faits pour vivre dans l'eau falée , fe DES SCIENCES. 25% plaïfent encore dans les eaux les plus douces : de lit du Niger n'en roule pas d’autres, du moins vers les bords où font les zarets, pendant la moitié de l'année ; ces eaux s'étendent même affez loin dans la mer qu'elles adouciflent : les pholades, les couteliers, les balanus, les peétoncles , les tellines & quelques autres coquillages que l'on obferve {ur le rivage du fleuve, à une petite profondeur, font dans le même cas que le zaret; ils vivent pendant près de fix. mois dans l’eau douce; ils changent, pour ainfi dire, d'élément, fans qu'il paroiffe que la race en fouffre :. il n'y a pas encore dix ans que les Européens recueilloient fur les mangliers du même fleuve , des huîtres qui éprouvoient les mêmes viciflitudes ; fans doute que les deyrés prefqu'in- fenfibles, par lefquels pañle l'eau falée avant que de devenir tout-à-fait douce, & au contraire ceux par où pafie l'eau douce avant que de devenir falée, facilitent à ces animaux les- moyens de s’y accoutumer; la longueur du temps qu'il faut pour opérer ce changement qui fe fait rarement en moins de huit jours, favorife peut-être cette habitude ; peut-être encore eft-ce une propriété que cette race a acquife à la longue, & ‘qu'il n’y a qu'un paflage fubit de l’une à l'autre extrémité, de Yeau douce à l'eau falée, ou réciproquement , qui puiffe leur. ôter la vie, + L'ordre que je me fuis propofé de fuivre dans le dévelop- pement des parties les. plus apparentes du zarer veut qu'après avoir parlé de la coquille qui forme l'enveloppe extérieure, je paffe 1.” à l'examen de l'animal qu'elle contient, 2.° des tuyaux. ‘charnus par lefquels il refpire leau & prend fa nourriture, 3° enfm des quatre autres petites pièces de coquilles qui font attachées à fes extrémités... Son corps a la longueur & à peu près la forme de la co-. uille; c'eft une efpèce de fac cylindrique membraneux fort -mollaffe, MK (fige), & d'une fubftance à peu près femblable à la chair des moules ou des huîtres, mais infiniment plus délicate; pour mettre en évidence la nature & l'ufage de ce fac, il faut retracer ici devant les yeux les connoiffances que Yon a des parties analogues qui fe trouvent dans tous les: Li if, 254 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE coquillages bivalves, & auxquelles M. de Reaumur a donné le nom de membranes du corps : fi Yon fe rappelle ce que cet illuftre Académicien a écrit fur la nature & la figure de ces parties dans le Zavignon (a), le fourdon , le coutelier (b}, la pho- lade, érc on verra que la même membrane qui dans les premiers eft divifée en deux lobes, dont chacun recouvre les parois intérieures de chaque battant, fe réunit en une feule pièce dans le couteher & la pholade, pour former une efpèce de fac ou de tuyau qui enveloppe les parties intérieures du corps. Cette membrane, ce fac, ce tuyau que j'appellerai déformais le manteau de l'animal , eft femblable dans le zaret , la pholade & le coutelier; il eft attaché vers fes deux extrémités fort oche des deux bouts de la coquille par deux mufcles, dont le fupérieur AT eft circulaire , beaucoup plus ample & plus fort que l'inférieur M: celui-ci n'eft qu'un léger renflement du manteau, femblable à une petite plaque orbiculaire ; ce font ces mufcles qui retiennent l'animal dans fa coquille & qui lempêchent d'en fortir, & même d’avoir aucun mouvement fenfible de haut en bas ou de bas en haut, quoique le mufcle inférieur puifle fe détacher facilement ; dans l'intervalle compris entre les mufcles, le manteau eft libre & comme flottant dans le tube de la coquille lorfqu'il eft vide, mais lorfqu'il eft plein d'eau , il la remplit exaétement & eft appliqué contre fes parois, comme on s’en aperçoit lorfqu'on la cafie fans l'endommager. Les deux extrémités du corps, qu'on peut regarder comme la continuation du z#anteau , en font cependant bien diftinguées par leur forme & par la féparation qu’en font les deux mufcles. L'extrémité fupérieure eft compofée d'un tuyau divifé en deux à fon extrémité, & de deux pièces de coquille en forme de palette; les zuyaux ne font qu'un même corps avec le manteau, dont ils font le prolongement ; ils font charnus & mollaffes comme lui, cylindriques, fort courts, d'une ligne de diamètre, & ne fortent guère plus de deux lignes hors de la coquille pendant que l'animal eft vivant ; celui qui eft deflous ou le (a) Vovez les Mém, de l'Acad. de 1710, pages 439 & fuiv. (b) Idem de 1712, pages 146 & fuiv. DES SCrTENCES, 25$ plus bas 7 /fg. 1), eft un peu plus grand que l'autre; il fe fait remarquer par une frange très-delicate, compofte de qua- rante filets charnus & très-fins, diftribués fur trois rangs ; le rang intérieur n'a que neuf filets, mais ils font une fois plus longs que les autres ; l'autre yau r'eft fimple & fans ornement:: C'eft par ces deux organes que le tarer fe procure les alimens néceffaires à la vies le tuyau frangé 7 attire & infpire l'eau du dehors pour remplir le manteau ; cette eau eft, à proprement parler , le véhicule des parties terreufes & limoneufes qui doivent fervir à fa nourriture ; fa féparation en étant faite, elles entrent dans Feflomac par un orifice particulier, pendant que l'eau fort. par l'autre tuyau z qui {ert auffi de paflage anx excrémens. De l'origine de ces tuyaux. & du mulele circulaire 27, qui unit le manteau à la coquille, fortent deux petites pièces de coquille femblables, que je nomme les palertes à caufe de leur figure ; en eflet elles font comme compofées de deux parties, dont 1x fupérieure eft prefque ronde, aplatie , quelquefois 1é- gèrement échancrée à fon extrémité, unie au dehors, un peu creufe en dedans & portée fur un pied cylindrique affez mince ; ces deux pièces font adoffées verticalement fur chacun des. tuyaux, & ont la facilité de fe mouvoir latéralement : elles Sécaitent comme on les voit en PP ffg. 2 & 3), pendant. que les tuyaux fortent de la coquille, mais elles ne peuvent les accompagner & paroître au dehors, parce que l'ouverture trop étroite ne le permet pas ; lorfque les tuyaux rentrent, les. palettes fe rapprochent par leur fommet, &. leur êtent toute: communication avec l’eau du dehors. A l'extrémité inférieure du corps font-attachées deux autres: pièces de coquille parfaitement égales , auxquelles je donne le nom de bartans, parce qu'elles reflemblent en quelque forte: aux bartans de la coquille de la pholade ; ce font deux efpèces de croutes DG (fig. 3), aflez dures, quoique fort minces, creufées en portion de {phère & d’une grande blancheur; par leur réunion elles forment un cylindre, dont la longueur. n'excède pas d'une quatrième partie fa largeur; ce cylindre ef: toujours ouvert par fes extrémités, parce que les battans. fonti ; 256 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE trop irréguliers pour fe joindre exactement ; le contour de leurs bords reprélente une figure Ro de dont les quatre côtés HJIK, KNS, SRQ,QOAH (fig. 2), {ont inégaux & échancrés plus ou moins dans leurs milieux / N RO; leur partie fupérieure AJ/X N eft life, un peu aplatie & recou- verte d'une membrane fort mince qui fait corps avec le manteau; à l'endroit où fe termine cette membrane, on remarque une efpèce de côte fort légère AS qui les traverfe obliquement; mais le refte de leur furface 0 Q RS eff convexe, arrondi & relevé d'un grand nombre de petites dents quarrées ou en lofange, diftribuées fur vingt-cinq lignes longitudinales, ce qui ES donne tout l'air d’une lime CEE La plolade, à laquelle j'ai comparé le raret, eft celle que jai obfervée au Sénégal, & dont on trouvera la defcription dans un Traité de coquillages que je me propofe de publier ; je l'ai fait repréfenter avec fon animal aux figures 9 & 10. Pour découvrir le rapport qu'il y a entre les battans de leur coquille, il fuflira de les rapprocher, alors on verra que les quatre côtés HJK, KNS, SRQ, QOH des battans du zaret, répondent aux quatre côtés femblables BAM, MDS, SCP, PNB de la pholade (fig. 9), dont les échancrures ADCN font beaucoup moins grandes; l'éminence S qui fait le fommet de la coquille dans la pholade, Veft pareillement dans le raret ; la côte tranfverfale AS qui eft en relief dans celui-ci, eft en creux dans l'autre ; enfin, les vingt-cinq rangs de dents du raret fe voient au nombre de vingt dans la pholade , & lui donnent pareillement läpreté d’une lime. Si lon confidère l'intérieur de ces deux coquilles, on leur trouvera encore une reflemblance parfaite; la côte S A du dehors /fig. 4), eft aufi marquée en dedans, mais d’une façon contraire, étant creufe dans le saret & relevée dans la pholade SB (fig. 10); on remarquera de plus dans les battans de l'un & de l'autre un long crochet C qui fort de la char- nière ; il eft vrai que l'on trouvera dans le saret deux parties qui manquent à Ja pholade; la première eft une dent D qui part du fommet de chaque battant ; celle du battant droit ci plus DES ScrEenNces B7 plus grande que l'autre & croife par-deffus ; fautre partie eft une efpèce de côte ou d'apophyfe ftyloïde FX, qui attache fortement les battans au manteau de l'animal, & qu'on peut Comparer au bord SD de la pholade : maïs ces parties excé- dantes ne font pas capables de balancer le grand nombre de rapports que nous. avons remarqué, & ne détruifent point la convenance fingulière qu'il y a entre les coquilles de ces deux animaux ; fi lon veut même poufler la comparaifon plus loin, on reconnoîtra que les deux palettes PP (Îg 28 3) ré pondent aux deux pièces 1 & 2 (g: 10); & le tuyau AB, (fig. 1 ) à la pièce 3 de la figure 10. Les deux battans du zarer, font non-feulement fémblables à ceux de la pholade, ïls ont encore le même ufage ; l'efpèce de lime dont leur extrémité eft armée, indique affez qu'il s'en fert pour percer le bois, comme Ja pholade fe fert des fiens pour pénétrer dans le fimon; cependant , fi l'analogie feule ne fufft pas pour appuyer un fait dont les yeux femblent ne pouvoir être témoins, on ne peut refufer de fe prêter aux Preuves que fourniflent les fillons qu'on aperçoit dans les morceaux de bois dont on a récemment tiré l'animal ; ces fillons font parallèles aux lignes des dents des battans: c'eft ce que j'ai obfervé dans plufieurs trous de tarets, & qui fe voit encore aflez bien dans quelques morceaux que je conferve : la manière même dont s’exécutent les mouvemens des battans, pourroit s'expliquer par la direction des fillons imprimés au bois ; il femble qu'ils ont été formés par un mouvement cir- culaire des deux battans für le mufcle V (fig. 2), qui en les . fixant à la coquille , leur auroit fervi de point d'appui ; la mem- brane du -manteau qui enveloppe là moitié fupérieure des baitans , faifoit fans doute au point 4 l'office d'un levier qui, à chaque fois qu'elle fe gonfloit, en infpirant l'eau de la mèr, écartoit les battans par en haut & les obligeoit de (e toucher par en bas, & qui au contraire laifloit les mufcles les reffèrrer par en haut & les écarter par le bas toutes les fois qu'elle fe vidoit en rendant l'eau qu'elle avoit reçue : l'expérience s'accorde parfaitement avec | conjecture ; car on s'aperçoit que ces deux Men, 759° 258 MÉMoIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE mouvemens alternatifs font naturels aux battans, lorfque le manteau qui étoit plein d'eau vient à fe vider. Quoique le corps du taret femble fe terminer à la partie fupérieure AJ K des battans, il s'étend bien au-delà, pafle au milieu d'eux, les unit fortement enfemble en tapiflant leurs parois intérieures, & va fe rendre à leur extrémité Q RS; cette partie du corps eft, comme je l'ai dit plus haut, une conti- puation du manteau; elle eft percée d’une ouverture ronde O qui communique avec les deux tuyaux 77 par un canal CEJ, qui n'eft autre chofe que le vide que laifle le manteau fur le devant de l'animal en enveloppant les inteftins : ce n'eft point par l'extrémité inférieure À des battans qui font trop proches Fun de l'autre, mais un peu vers le côté O que l'on voit celte ouverture; on y remarque une petite éminence femblable à un mamelon P (fe. 3), charnu, grisitre ou cendré, qui déborde un peu en la bouchant aufli exactement que feroit un bouchon ; c'eft ce qu'on peut appeler le pied de l'animal, il eft un peu vifqueux , d’une grande délicateffe & de même figure que celui qu'on voit à la pholade en P (fig: 9 ), mais un peu plus petit; fon mouvement eft peu fenfible & ne lui permet pas de rentrer de plus de deux lignes en dedans du corps, ni de fortir davantage hors de l'ouverture ©, quoique fa lon gueur foit fuffante pour cela. L’ufage de ce pied eft probable- ment de tirer par la vifcofité ou l'humidité qui lui eft naturelle, la fciure du bois, & de la conduire dans le canal EC du manteau, d'où l'eau qui y circule continuellement la rejette bientôt au dehors par le tuyau 7, ou bien de laifler pañfer l'eau. pour enlever la rapure du bois, comme fait la pholade poux nettoyer fon canal du limon que fes battans ont détaché, La membrane du manteau qui enveloppe comme dans un fac les parties intérieures, eft {1 tranfparente que l'on diftingue au travers, l’eflomac JE B K & deux longs inteftins 48, CE cendrés, tirans fur fe noir; dans celui qui eft plus proche du doigt on diftingue facilement la petite ouverture À, par où pañlent les excrémens; on voit encore dans le finus que fait le pied en fe joignant avec le corps de l'animal, une petite DES SCIENEESs - 259 ouverture comme un fillon tranfverfi, qu'on peut regarder comme fa bouche ou plutôt comme l'orifice de leflomac ; celui-ci eft prefque toujours rempli d'une matière noirâtre og verdätre, qui, examinée à la loupe, ne laiffe aucun doute far fa nature: on voit que c’eft un limon mélé de quelques grains de fable que l'animal a infpiré avec l'eau ; mais il ne s'y trouve rien qui ait la couleur ou l'apparence de la fciure de bois, f fine qu'on la puifle fuppofer. À l'égard de la génération des 1urets, H ne m'eft jamais arrivé de les voir en accouplement ; comme ils ne peuvent plus fortir de leurs trous dès qu'ils y font une fois entrés, & qu'il eft fort rare qu'ils foient aflez proches les uns des autres pour fe communiquer , il eft probable qu'ils n'ont pas befoin de ce fecours pour engendrer; ils reffembleront par cet endroit aux coquillages appelés communément £ivahes, qui, comme Ton fait, font hermaphrodites , je veux dire qui produifent fans le concours de leurs femblables : Eh pourquoi en différe- roient-ils en ce point, ces animaux qui leur reffemblent fi par- faitement à tous les autres égards? Voilà tout ce qu'un examen attentif du tre n'a offert de plus remarquable ; je ne me fuis point engagé dans une plus longue defcription anatomique des parties intérieures, autant par une jufte défiance de moi-même, qu'à cufe du peu de fonds que je fais qu'on doit faire fur ces fortes d’obfervations; il ne faut que lire l’ Anatomie de 11 moule de rivière, par M. Heïde (a), Yexcellent Mémoire de M. Méry , fur la moule d'étang (b); les Obfervations manufcrites fur l'anatomie de lhuître, par M. de Tournefort : celles de Lifler, de Swam- merdam (c) & de plufieurs autres Savans pour en être plei- nement convaincu : malgré les foins & les peines que ces grands hommes fe font donnés , ils n’ont rien pu déterminer fur les parties intérieures des coquillages bivalves : ils ne { font pas (a) Antonit de Heyde M. D, (€) Martini Lifler hiftoria Cons anatome ÆMytuli, Amitelodami , | chyliorum, èrc. Londini » 1685, 1684, in-12, fig. in-folio, petit papier, tables 195 (b) Mém. de l'Acad, 1710, 196. pages 408 & fuivantes, KK ÿ 260 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE même accordés dans les noms qu'ils ont donnés à ces parties, faute d'en favoir l'ufage, qui, vraifemblablement , échappera encore long-temps à nos connoiflances. Les Auteurs qui les ont fuivis, fans chercher à les concilier, fe font abandonnés à de longues defcriptions, qui par-Rà font devenues auffi ennuyeufes qu'inutiles : c'eft pour éviter cet écueil, que je me fuis borné à ce petit nombre de parties intérieures faciles à déterminer, les autres parties extérieures étant plus que fufifantes pour faire la comparailon que je me fuis propofte, de cet animal avec celui des côtes d'Europe. Quoique le raret habite une coquille en forme de tuyau, on ne peut néanmoins le rapporter à ce qu'on appelle com- munément vers à tuyaux & dentales , parce que de ceux-ci les uns font remplis par des fcolopendres de mer, & les autres par des pinceaux de mer ou des polypes, animaux , comme lon fait, fort différens des théthyes qui habitent les coquilles bivalves; cependant, malgré ces différences notables, il n'y a peut-être pas de coquillage qui ait été auffr confondu que celui-ci: un Obfervateur //) même de nos jours, qui pique de méthode, y a été trompé au point de le ranger parmi les dentales, & de lui donner un tuyau membraneux : le tarer dont il s'agit ne peut être comparé qu'à une efpèce qu'on a obfervée fur les côtes de FOcéan & de la Méditer- ranée, & dont plufieurs Auteurs ont donné la defcription. 1! paroït que les Anciens en ont eu connoiffance du temps de Théophrafte; les premiers des Modernes qui en ont parlé, font Bonanni (e), Vallifuieri /f) & M. Deflandes /g); ils ont été fuivis par M.° Rouflet {4), Mafluet /i), (d) Car: Einnæi Fauna Suec. | des. Sciences, année 1720 , in-4.° pag- 380, num. 1329. pages 26 à 29. (e) Recreatio mentis ê7 oculi, (1) Obfervations fur l'origine , l& edit. Rom. latinè, 1684, in-4.° | confhrution, è7c. des Vers de mer, P- 30, fig. 6—10. La Haye, 1733, in-12, fig. (f) Raccolta di varj Trattati, | {i) Recherches intéreffantes fur in Venefia, 1715. Italicè, in-4.° | l'origine, la formation, è7c. de di- PL 70) lp 21000. verfes efpèces de Vers à tuyau. Amft.. (8) Hilloire de l Académie Roy. À 1733, in-12, fig. ét. à DES SCIENCES. 26r SeHius /4), Seba /7) & Janus Plancus {52 ); mais la plupart fe font bornés à la defcription de la coquille, négligeant l'animal qu'elle contient: je n'en connois que cinq qui aient traité de Yun & de l'autre, favoir, Vallifnieri, M. Deflandes, Mafluet, Rouflet & Sellius; ce font auffi les feuls dont je vais difcuter les divers fentimens. R La première chofe qui m'a frappé dans ces Auteurs, c'eft la fituation qu'ils donnent à leur saret; Sellius le place prefque toujours horizontalement, le pied quelquefois plus haut & quel- quefois plus bas que les tuyaux; il paroît que M. Deflandes Le met dans la même fituation , de manière qu'on pourroit croire - qu'il lui eft indifférent de percer en montant ou en defcendant ; il n'eft pas douteux que cet animal étant accoutumé à füivre ke fil du bois, il fe trouvera difpofé verticalement lorfque le bois où il eff entré fera vertical ; que lorfque le bois fera couché horizontalement, fon tuyau fera aufli à peu près horizontal, mais toujours de manière que dans ces deux fituations l'extré- mité du tuyau qui communique avec l'eau , foit plus élevée que celle qui eft enchäffée dans le bois ; c’eft une remarque que j'ai eu occafion de faire dans quelques mâts de fapin couchés horizontalement fur le rivage du Niger, où j'ai obfervé les tarets des racines du manglier, & je fuis fort furpris que cette particularité, qui ft conflante au Sénégal & qui me paroît devoir être commune aux tarets d'Europe ; ait échappé à ces Obfervateurs ; il n'eft pas moins furprenant que quelques-uns. d'eux ayant trouvé de ces tuyaux difpofés verticalement dans le bois, leur aient donné une fituation renverfée, comme il eft arrivé à Vallifnieri, à M. Rouflet &: Mafluet , qui en prenant . Le pied de l'animal pour la tête le placent en haut, & mettent en bas les tuyaux qu'ils appellent /s queues. « Le ver, dit M. Roufet, en entrant dans un pilier enfoncé perpendiculairement dans le fol , perce horizontalement jufqu’à ce qu'il ait rencontré (À) Hiff: natural, Féredinis. Trajeéti ad Rhenum, 1733, in-4.° fig. (L) Conchæ nuinus notæ littoris Ariminenris, Venetiis, 1739 in-4.° pag. 17. (m) Locuplriffini rerum naturalium thefauri , ê7c. Amftelodam.. in- folio., fig. | KK ijj « Page 223 LS 262 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE »une veine ou plutôt une couche de bois qui lui convienne, » alors il tourne vers le haut perpendiculairement, jufqu'à ce qu'il » rencontre le tube ou la niche d’un autre ver qu'il ne perce point, mais il fe détourne pour prendre une autre couche, &c. » il y a bien de l'apparence que cet Auteur a pris le bout fu- périeur du morceau de bois qu'on lui a apporté pour le bout inférieur , & l'a fait repréfenter de cette manière dans fa figure, qui donne au taret une fituation entièrement oppofée à celle que prennent ordinairement tous les coquillages bivalves. Une autre différence qui fe trouve entre le taret d'Europe & celui du Sénégal, c'eft qu'il n'a point la petite couronne frangée au bord des tuyaux, & qu'il les alonge confidéra- blement, comme on en peut juger par ce qu'en dit M. Rouffet ; Page 1 7. Voici fes expreffions : « entre les deux pattes ( c'eft-à-dire les » palettes) font deux petites queues, dont l'une eft droite & » ouverte, & l'autre un peu courbe vers l'extrémité, & fermée >» en guife de corne; chacune de ces queues a un quart de » ligne de diamètre; l'infeéte les aplatit, les gonfle, les retire, » les alonge füivant fes beloins; je l'ai vu alonger quelquefois, l'une près d’un pouce , mais l'autre toujours moins ». M. Sellius Page 4, Saccorde affez avec M. Rouffet : « Ce ver, dit-il, fait fortir » deux tuyaux charnus, quelquefois pâles, mais ordinairement rou- » geûtres à leur extrémité; l’un d'eux eft plus court & couché fur » l'autre; il eft percé à fon extrémité d'une ouverture affez grande, » qui eft infenfible & paroït manquer dans le dernier ; la longueur » de ces tuyaux n'eft pas conflante ; fouvent ils ont fix lignes de longueur, rarement moins, mais quelquefois davantage : » c'eft à ce peu de mots que fe réduit la defcription des tuyaux par ces deux Auteurs , d'où on peut conclure qu’ils n'ont aperçu aucune forte de frange, qui certainement n’auroit pas échappé à M. Sellius, puifqu'il y a découvert une infinité d'animaux microfcopiques beaucoup plus petits. Les palettes, que Vallifnieri appelle /es lames ou les nageoires, Page ÿ. & que M. Sellius compare à la femelle d'un foulier de femme, dont on auroit enlevé le talon, font affez femblables aux nôtres; Page 17, mais celles que M. Roufet repréfente dans fa figure, & qu'il DES 8€ ME MN CES 263 dit être fendues en pied de chèvre, séloignent beaucoup de celles du Sénégal, que j'ai dit être ordinairement arrondies à leur extrémité, quoique quelquefois marquées d'une échan- crure fort légère ; cette échancrure n’eft même jamais auffi pro- fonde ni auffi large que celle que M. Sellius a donnée à fes palettes groffies à la loupe, à la figure fixième de la feconde planche. Il n'y a pas moins de différence entre leurs battans : c'eft ce que ma fait connoître Finfpection de ceux qui ont été envoyés d'Hollande, & qu'on voit parfaitement bien confervés dans le Cabinet du Jardin du Roi; car il n’eût pas été poffible de s’en aflurer autrement , les Auteurs n'ayant fait mention ni du nombre, ni de la figure de leurs cannelures : M. Sellius, le feul qui les ait examinces, dit « qu'elles reffemblent toutes à Pages 2 8: de petites côtes, dont les unes font verticales & les autres « horizontales, & que dans les fillons qui féparent ces côtes on « voit de petits points agréablement & fymétriquement AlTANGÉS; » mais un examen attentif me les a fait apercevoir différemment & même avec quelques particularités de plus. Pour rendre mon obfervation plus fenfible, j'ai fait reprcfenter ces deux battans dans la fituation qui leur eft naturelle dans animal vivant , fous trois alpes difiérens, (figures Jr C& 7); la figure $ les repréfente tels qu'on les voit de côté dans leurs proportions, & de grandeur naturelle: elle répond , comme f'on voit, à ceux du Sénégal / g. 2): la figure 6 montre ces mêmes battans: par le dos, & on les voit en face dans la figure 7, qui répond. aufli à a figure 3° du taret du Sénégal ;. les lignes AO, marquées dans ces trois figures, repréfentent les cannelures ho- rizontales, & les lignes VE défignent les cannelures verticales » Jai compté trente à trente-deux des premières, & jufqu'à Quarante-trois des dernières; au point où les unes & les autres viennent { réunir, elles forment une petite ligne courbe FO: (fig. 5) légèrement relevée , qui fe rend de l'angle F au fommet O; les cannelures horizontales font toutes fort ferrées, un peu courbées par en bas & plus longues que les verticales : leur longueur eft ués-inégale & diminue à proportion qu'elles 264 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE font plus balles ; chacune d'elles vue à la lentille de demi- ligne de foyer, paroït fous la forme d'une côte demi -cy- Jindrique ou arrondie, relevée d’un nombre prefqu'infini de petites cannelures tranfverfales, auffr demi-cylindriques, fort ferrées, & qui paroiflent avoir dx fois plus de longueur que de largeur, telles qu'on les voit dans la côte HO (fig. 8 ); les cannelures verticales font d'autant plus courtes & moins ferrées, qu'elles approchent davantage du fommet; au lieu d'être arrondies ou demi-cylindriques comme les horizontales, elles forment une côte un peu aiguë, relevée aufli de petites cannelures, mais qui ne font guère fenfibles que fur la vive-arête, où elles paroiffent comme autant de petites dents marquées dans la côte O Æ ; cette côte ou cannelure verticale eft droiïte par-tout , excepté dans fon extrémité inférieure Æ qui fé courbe un peu en remontant vers le fommet; ce n'eft pas feulement par les cannelures que les battans du taret d'Europe diffèrent de ceux du Sénégal, ils font encore un peu plus longs, plus ouverts & moins larges d'en bas. Je ne crois pas qu'il y ait aucun Naturalifle, far-tout de ceux qui ont obfervé fcrupuleufèment les coquillages , qui re- garde les vers de mer de M. Deflandes comme une vraie efpèce de ceux qui ont été décrits par M. Vallifnieri, M. Rouflet, Mañuet, Sellius & quelques autres Obfervateurs; je ne puis même me perfuader que je fois le premier qui ait aperçu l'erreur dans laquelle eft tombé ce Savant , en donnant à l'Académie la defcription d'une fcolopendre de mer, au lieu de celle du taret: cépendant, comme il y a des cas où un préjugé détruit a autant d'utilité qu'une découverte, & que d’ailleurs une erreur qui fe trouve dans des ouvrages auffi authentiques que ceux de l'Académie, pourroit être adoptée, je penle qu'il ne- fera pas hors de propos d'examiner ce qui peut y avoir donné lieu; on connoît fous le nom de fcolopendres de mer plufieurs elpèces de ver de mer, dont le corps eft compolé d'anneaux qui ont des deux côtés un grand nombre de jambes: on fait que ces vers {ont fujets à percer non-feulement fes bois, mais même les pierres & les coquilles les plus dures, foit pour s'y loger, 2 DES ScrEenNceEes. 265 loger, foit pour quelqu'aatre cauf ; on voit tous les jours que ces animaux fe logent & fe retirent dans les tyaux de plufieurs animaux marins: ne feroit - il pas poffible que c'eûtiété une de ces {colopendres que M. Deflandes eût rencontré ; cela paroît évident lorfqu'on lit {a defcription qu'il en fait: « tout leur corps, dit-il, eft compolé de. différens anneaux ; ils ont des deux côtés du ventre une infinité de petites jambes toutes armées de crochets, (& peu après) ce ver emploie la prodi- gieufe multitude de fes jambes ou leurs crochets à fe cram- ponner aux fibres du bois, afin qu'étant bien appuyé ibtravailie . de fa tête avec plus de force. ... quatre crochets qui fortent d'entre les deux pièces de fon cafque, de même figure & de même confiflance que les jambes, mais trois fois plus longs, lui fervent à fonder l'endroit par où il peut attaquer le bois plus avantageufement » ; peut-on rien de plus précis que ces termes? eft-il quelqu'un qui à ces caradtères des jambes & des quatre crochets de la tête, ne reconnoiffe auflitôt la fcolopendre de mer: c'eft donc une fcolopendre de mer que M. Deflandes a obfervée dans des trous percés par d’autres vers : on ne peut douter qu'il nait auffi trouvé au fond de ces trous les deux battans du taret, lorfqu'on lit cet endroit où il dit « ce qu'il y a de fingulier, c’eft {a tête, elle eft couverte de deux co- quilles toutes pareilles , placées des deux côtés, pointues par le bout comme le fer d’un vilebrequin de Menuifier, ou d’une vrille, & qui peuvent jouer féparément & différemment l'une de l'autre ; cette efpèce de cafque qui enveloppe la tête du ver, eft très-dure en comparaifon du refle du corps qui eft fort mollffe, qui fe sèche bientôt à l'air & fe réduit en pouffière; il n'en demeure que la tête, qui a été préfervée par fon cafque. C'eft elle qui fait tout le travail du ver, qui fournit à f nourriture & à fon logement: elle perce le bois par le moyen de fes deux coquilles qui fe difpofent en fer de vilebrequin, & comme elle eft plus groffe que le refte du corps, le paflage qu'elle a ouvert fuffit toujours. » M. Deflandes a donc obfervé dans ces trous deux animaux au lieu d’un, mais dans des états bien différens, çar ä ne Min. 1759. L1 ie l'Hifloire de l’ Académ. se anrée1 720, « PLe 26. c A À . Page 28. P26% 27 Fuge 28, » T. 1,7, 132 > x > ÿ ÿ > 266 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE refloit que les deux battans du taret après la dettruction de fon corps, au lieu que la fcolopendre étoit entière; il paroit même qu'elle étoit occupée à travailler ou à manger dans les battans, c'eft ce que l'Auteur fait entendre clairement par ie paflage que j'ai déjà cité: « quatre crochets qui fortent d'entre les deux pièces de fon cafque . . lui fervent à fonder l'endroit par où il peut attaquer le bois. » Ma conjecture eft encore appuyée par une remarque que fait Seba en parlant des tarets des digues de Hollande, dont il fe contente de promettre la defcription : « leurs tuyaux, dit-il, font remplis par des millepieds, dont la tête arrondie eft armée de deux dents en forme de pinces ; lorfque cette efpèce de ver eft une fois entrée dans les trous des tariers, elle les déchire en morceaux & les tue pour fe nourrir de eur chair. » I me paroït affez prouvé, par les paffages rapportés ci- deflus de M. Deflandes, que fon prétendu ver de mer eft un compofé de la fcolopendre de mer & du taret : cependant , s'il paroifloit refter encore quelque vraifemblance fur la poffibilité de l'exiflence d’un taret, tel que l'a décrit cet Auteur, je pourrois ajouter qu'il a oublié de nous apprendre deux chofes effentielles ; il ne nous dit point fi l'animal qu’il a obfervé étoit enveloppé d'un tuyau pierreux où membraneux ; il ne fait pas même mention des deux tuyaux charnus qui caraétérifent le taret , c'eft pourquoi je me crois aflez fondé à avancer que le ver décrit par M. Deflandes, non-feulement ne reflemble point aux tarets dont il eft queftion, quoiqu'il puifle s'en trouver de plufieurs efpèces bien diftinguées, mais même que ce qu'on reconnoît dans fa defcription ne peut être attribué qu'à une {colopendre de mer qui s’étoit gliflée dans des trous, dont il n'a vraifemblablement examiné qu'un très-petit nombre. Après avoir fait la comparaifon du taret d'Europe avec celui du Sénégal, il convient d'examiner les divers fentimens. que les Auteurs ont eus, tant fur {on origine, que fur fes mœurs. & fa façon de vivre. Vallifnieri ne doute point qu’il ne perce le bois avec fes deux battans ; cela eft évident par fes propres Page 139, Paroles : « Les deux vis concaves & en forme de croifiant, dont DE S'éTEN CES 26% Ja tête du taret eft armée , lui fervent à ronger continuellement le bois: » mais il le fait auparavant humeéter par l'eau de la mer: «l'eau de la mer, continue-t-il, entre par un canal droit de Ja longueur du dos, qui en approchant de la tête fe courbe un peu & fe décharge dans la bouche, d'où elle fort afin d'humecter le bois ; & en effet, dans la cavité creufée devant la bouche, on trouve toujours de cette eau de mer qui fert encore de véhicule, par le moyen duquel animal abforbe les petites parcelles du bois qui a été rongé. » M. Rouffet croit, comme M. Deflandes, « que les deux coquilles percent le bois, & que leurs pointes font difpofées de manière que l'infecte tournant fa tête d'un mouvement femblable à celui que fait la fpirale d'une montre de poche , elles décrivent deux difiérentes lignes, & fcient circulairement l'une un peu plus bas que l'autre, » M. Mafluet garde fur cet article un profond filence; mais M. Sellius , loin d'adopter ce fentiment généralement reçu par les Obfervateurs qui l'ont précédé, fe croit aflez fondé à le re- jeter par les railons fuivantes ; « la première ef tirée de la foibleffe des battans du taret comparée à la dureté des bois, tels que Faune, le chêne & le fapin qu'il a à percer ; la feconde, dit-if, c'eft que cette manière de percer fuppoferoit dans cet animal un jugement qu'on ne peut lui accorder ; la troifième naît de la figure même du trou percé dans le bois , & auquel il pente que les coquilles feules ne peuvent donner cette rondeur exacte qu'on y obferve; enfin cet Auteur trouve que l'ouverture même des deux battans eft trop grande pour que l'endroit du bois qui lui eft oppoé, foit fujet à leur ation. » La foibleffe & le peu de folidité de ces raifonnemens font fi apparens, que je me crois difpenfé de les réfuter ; ils tombent aflez d'eux-mêmes par la feule defcription que nous avons faite de ces parties: l’Auteur en conclut cependant, comme d’aprèsautant de preuves, qu’il faut néceffairement que le taret emploie un autre moyen pour percer le bois: « il a d'abord recours à une liqueur cor- rofive qui fort de cette partie que j'ai appelée Le pied, &c à laquelle il donne le nom d'ampoule vifqueufe ; mais, reconnoiffant l'in- fuffifance de ce moyen, il change de fentiment, & compare Lili L<4 Page r4êx na À n n Page2n 8 A A A n La n EN L44 » » , 268 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE le taret à une machine hydraulique ; tantôt c'eft par une efpèce de fuccion qu ‘il Jui fait percer le bois, en y appliquant fon pied & le retirant enfuite avec force ; tantôt c'eft par le moyen de fear qui entre dans fon corps par Îes tuyaux, & produit en ‘fortant avec tout l'air qui y étoit contenu, un re dont la continuité & Îa violence minent le bois à peu près comme l'eau mine les pierres , en tombant deflus goutte à goutte; » telle eft l'explication du mécanifme par lequel M. Sellius fait percer le bois au taret; mais comment fe perfuader qu'une partie auf délicate que le pied & tout le corps mème de l'animal, foient capables de réfifler à la force de limpulfion que reçoit l'eau, foit lorfqu'elle entre, foit lorfqu'elle fort avec tout Fair qui y étoit contenu; cela ne s'accorde nullement avec l'expérience, car, lorfque l'animal fait fortir fes tuyaux, on voit qu'il attire eau par le plus g oros, & la rend par le Je petit avec {1 peu d'action, qu'on a beaucoup de peine à diftinguer la différence de ces deux effets; & lorfqu'il rentre dans à coquille, il n'a aucun mouvement fenfible, Il eft donc plus naturel d'admettre, avec Vallifnieri, M. Rouflet & Deflandes, l’action des deux battans, pour expliquer de quelle manière le taret perce le bois; il ef vrai qu'il n'eft pas néceflaire de fuppofer un mouvement auffi grand que celui que fait le reflort fpiral d'une montre de poche, comme le penfe M. Roufet, ui fuflit que les deux battans par- courent un efpace d'une ligne & demie au plus, pour limer 4 bois dans l'endroit oppolé à leur ouverture, qui a tout au plus trois lignes de diamètre; ce petit mouvement peut s'exé- cuter par le feul jeu du manteau à chaque fois que l'animal le vide ou le remplit d'eau, comme je ai expliqué ailleurs. L'objection que font les partifans de l'opinion contraire fux Ja foibleffe des battans, ne peut avoir lieu ici, fi la force de leur action ne tombe pas précifément fur leurs pointes, mais fur toute leur furface en même temps ; c'eft ce que démontre évidemment leur parallélifme avec la concavité du bois, paral- Ilifme duquel elles ne peuvent guère s'écarter, étant à peu: piès hémifphériques comme cette cavité : de quelque fens qu'ils DL EU SMMSINCUELE NU CG EN EI 269 reçoivent leur mouvement , foit horizontalement, foit verti- calement , ils agiront de la même manière que feroit une lime fohérique mûe dans un globe creux de même diamètre, Au refle, ce n'eft pas une fuppoñition, c'eft un fait prouvé par les fillons obliquement verticaux , qu'on découvre avec Îa loupe dans les trous que l'animal a percés récemment ; fur-tout dans les racines du manglier, dont Je bois extrêmement dur, fait voir ces impreflions avec aflez de netieté. Enfin, fi l'on a encore quelque peine à fe rendre à ces faits, que l'on con- fidère les bénitiers de nos églifes , qui, quoique formés d’une pierre très-dure & des plus compaéles , telle que le marbre, font cependant ufés confidérablement en peu d'années par le " . . by: EL . P . feul frotrement des doigts, c'efl-à-dire, d’une peau qui cer- tainement n'approche pas de Fipreté & de la dureté de fa coquille des zarers en queftion; {1 enfuite on fait réflexion que le mouvement d'un des battans.du taret ef} répété autant de fois que l'eau qui entre dans fon manteau y excite de fyftoles & de diafloles, dont chacune dure tout au plus une feconde, ce qui fait environ quatre-vingt-fix mille quatre cents coups de lime par jour, on conviendra facilement qu'il eft inutile d'avoir recours, comme ont fait quelques Savans, à une liqueur acide & corrofive qui détruirôit en peu de temps leur coquille, ni à aucun des autres moyens que j'ai cités, & auxquels l'expérience s'oppole. On peut donc affurer avec aflez de certitude, que c'elt par une mécanique femblable que les pholades. & fi date creufent non-feulement le limon folide, mais même le teft des coquillages & les rochers les plus durs; le frottement feul d'un corps très-lifle & d'un beau poli, pourvu qu'il foit répété fouvent, fuffit, fuivant l'expérience, pour ufer les pierres les plus dures; auffr la ‘coquille “de la date, quoique chagrinée, n'a aucune afpérité ; mais le frottement ful, fans. äpreté, ne feroit qu'ébarber les fibres du bois fans les corroder ; c'eft ce que la Nature femble avoir prévu, en armant la coquille du taret d'un grand nombre de petites dents difpofées comme celles d’une lime très-fine. À Tégard de la direétion dans laquelle Le taret perce le bais, : LA üif "« 270 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE ROYALE il n’y a aucune difficulté entre les Auteurs ; & il paroit que tous les tarets connus fuivent parallèlement fes fibres, peut-être parce qu'il eft plus facile à leurs battans de les limer dans ce fens, ou parce qu'ils font moins fujets que dans l'autre fens à enlever des petits filets qui feroient capables de les blefler en pafant par le canal du manteau : j'ai vu un nombre infini de petites racines de manglier, d’un pouce au plus d'épaiffeur , dans lefquelles fe trouvoient deux, trois & quelquefois quatre tarets dont les tuyaux fe touchoient à peu de chofe près & fe croifoient, fans que leurs battans fe fuffent brilés, & fans que l'animal en | eût fouflert, comme paroït en être perfuadé M. Deflandes Fage 27. Jorfqu'il dit: « Puifque ce ver fuit toujours le fil du bois, les routes & les excavations de différens vers doivent être parallèles, & elles le font effedtivement à peu près autant que les fibres du bois, fi les détours nécefaires des vers n’ont quelquefois altéré ce parallélifme; ces détours peuvent être tels que deux vers fe rencontreront tête pour tête, & alors ils périfient tous deux, parce que les pointes de leurs cafques fe brifent l’une contre l'autre; » c'eft ce que les obfervations ne m'ont pas encore appris, & qui me fait foupçonner que la Nature a pourvu à la confervation de cet animal, en fui donnant un fentiment , un tact extrêmement fin, comme aux moules, aux nérites , à quelques pucelages, & fur-tout à une petite efpèce de coquillage terreftre appelée élégante flrice *, qu'un contact même fort léger de fair fait rentrer auffitôt dans fa coquille; cette propriété dont l'éÆgante ffrice n’eft redevable qu'à l'habitude où elle eft de refter enfouie fous la terre & dans les brouflailles qui la mettent à l'abri, fe trouve fans doute pour la même raifon dans les tarets qui font toujours enfermés ; le mouvement qu'une érofron voifme excite dans le bois, les avertit de l'endroit où ils doivent fe détourner pour creufer ; & c'eft pour cela qu'on trouve rarement leurs battans endommagés , quoique l'expérience fafle voir qu'ils fe font quelquefois approchés affez pour fe toucher. > ÿ > ÿ ÿ 2 LA » ÿ y Ÿ * Cochlea terreffris turbinata è7’ ftriata, Fabii Columnæ Purpura. Romæ, 1616, in-4.° pag. 10 & 18. DE Sy EL ENCHERES 271 Le point que les Auteurs f font le moins embarraffés d'éxa- miner, eft celui qui regarde la manière dont le taret £ pro- curé fà nourriture; ils ont admiré fon travail & ont Jugé par fa continuité, que le but de l'animal étoit de fe fournir les alimens néceflaires à f fubfiflance: mais on peut dire qu'ils ont décidé trop légèrement & fur une fimple apparence, que la rapure du bois eft fa ropre nourriture, s'il et vrai quelle eft rejetée au dehors FA entrer dans l'eflomac ou dans les in- teflins ; c’eft ce que je vais prouver en rappelant auparavant ce que Jai dit de la ftructure & de lufage du manteau : on a vu que c'étoit une efpèce de fac membraneux ouvert par les deux bouts: c’eft par l'ouverture inférieure placée au milieu des battans que doit paflér toute la rapure du bois qu'ils ont limé ; cela s'exécute vraifemblablement par le moyen du pied qui la ferme exactement : lorfque l'animal veut chaffer Ja rapure ï retire fon pied en haut, ou bien, ce qui revient au mème, il relâche & dilate l'ouverture de manitre que l'eau pénètre jufqu'ai bois : comme par cette intromiffion l'eau fait écarter les battans du bois, elle les nettoie des parcelles de rapure ex- trêmement fine qui étoit engrainée entre leurs cannelures ; ces: parcelles font foulevées & portées dans le canal du manteau : réçues dans le canal, elles n'y fjournent pas, parce que l'eau qui y circule continuellement en «entrant par un des tuyaux, & fortant peu après par l'autre, les enuaine au dehors avec elle, Comme il n'eft pas poffible de voir ce qui fe pafle à cét égard dans l'intérieur de l'animal, & que d'ailleurs la fnefe de }a rapure ‘ne peut s’apercevoir- que difficilement lorfqu'elle fort avec l'eau, on pourroit cioire qu'au lieu d’être portée au dehors, elle entre dans l’eftomac par fon orifice, qui eft placé près de l'ouverture inférieure du manteau ; c’eft le fntiment de Vallifnieri que M. Roufèt seflorce de prouver en difant , 72 :37- « que leftomac ef rempli d'une matière qu'on voit aflez être Fagesr 88 1 gi l fiure du bois, & qui reflémble à de la grofie farine de « frrafin ; » mais certainement tous deux s’en font rapportés aux apparences , fans fe donner da peine d'examiner ces matières à 272 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE la loupe ; s'ils l'avoient fait, ils auroient reconnu qu'elles ne font qu'un compolé de limon, de couleur ordinairement cendrée, mêlé avec beaucoup de fable, qui fe fent affez lorfqu'on le met fous la dent : j'ai même trouvé dans ceux de Hollande, ob- fervés par M.° Rouffèt, Mafluet & Sellius, un bon nombre de petites lames rondes très-fines, luifantes & argentées, qui reffembloient fort à du talc ou à de 1g nacre de coquilles brifées, matières qui dénotent la nature du fond de la mer où ont vécu ces animaux. Si cette preuve n'étoit pas la plus complette qu'on püût ap- porter à ce fujet, je pourrois oppofer contre l'opinion des Auteurs qui penfent que le taret ne vit que de {a fciure du bois qu'il creufe, je pourrois, dis-je, oppofer cette quantité de matières dont fon eflomac fe remplit, non-feulement une fois, mais peut-être jufqu'à deux & trois fois par jour ; quantité telle que l'animal ne pourroit en raper autant en plufieurs mois, & qui, comparée à la capacité du canal ligneux qui l'environne , eft immenfe, puifqu'elle en égale fouvent la ving- tième partie: j'en ajouterois encore une aufli concluante pour moi, & tirée de la coquille mème de fanimal, qui parvenu à un certain période de grandeur, & fe trouvant logé aflez fpacieu- fement , la bouche entièrement par fextrémité inférieure ; il cefle par conféquent de ronger le bois, cependant il vit, & on lui trouve fon eftomac auffi rempli qu'auparavant, Que deviennent donc encore dans ce cas les prétentions de ces Auteurs, qui d'un commun accord foutiennent que cette extrémité eft la tête de l'animal? diront-ils qu'il lui arrive alors un changement, qu'elle va fe placer ailleurs, point du tout ? l'expérience prouve le contraire, & fi l'on en excepte la ceffation des fonétions du pied & des battans, les chofes fubfiftent comme auparavant, parce que ce n'étoit pas par cet endroit que lui parvenoient Îes alimens ; il n'y a de réforme à faire que dans leurs idées ; ils doivent reconnoître que ce qu'ils ont regardé jufqu'ici comme la tête, doit être appelé le pied, s'il na pas les fonétions qu'ils lui ont attribuées, & ft ce qu'ils connoiflent {ous le nom d'ampoule vifqueufe , eft réellement | DAENSN SIGNE NÜCHS Lac réellement le pied de l'animal; ceft ce que prouve facilement T'analogie que cette partie a avec le pied de la pholade & du coutelier , tant par fa figure que par fa fituation & fes ufages, comme on a vu par la comparaifon que j'en ai faite ailleurs ; d'un autre côté, s'il y a quelque partie qu'on puifle appeler du nom de tête dans un animal qui n’a rien de comparable à celle des autres animaux , ce fera fans doute celle qui fe trouve oppofée au pied , fur-tout fi c’eft par elle qu'il prend’ fa nour- riture ; les tuyaux feront donc regardés comme la tête, puifque ce font eux qui s’acquittent de ceite fonétion, & que d’ailleurs ils font placés à l'extrémité fupérieure du corps oppofte au pied: j'ai dit tant de fois que le plus grand de ces tuyaux recevoit l'eau pendant que l'autre la renvoyoit au dehors, qu'il eft inutile d’infifter fur une chofe affez prouvée & commune à tous les coquillages bivalves ; mais, s'il étoit nécefaire de faire voir que l'animal ne peut recevoir l'eau , & par conféquent fa nourriture, que par cet endroit , je pourrois le prouver non- feulement par l'analogie qu'il a avec les autres bivalves, mais même par celle qu'il a avec la tethye. Les Obfervateurs favent que c'eft un animal mou, femblble à un cylindre alongé, creux en dedans, percé feulement de deux ouvertures en forme de tuyaux adoffés Fun contre l'autre, & placés à fon extrémité fupérieure ; l’extrémité oppofée eft un peu plus groffe , arrondie & entièrement formée ; elle tient lieu de pied à Fanimal, & fert à l'attacher aux rochers: il n’a donc d'autres ouvertures dans tout fon corps que les deux tuyaux dont je viens de parler; celui qui eft placé en devant eft le plus gros & attire l'eau , ce fera, fi l’on veut, la bouche ; l'autre au contraire laiffe fortir cette eau , il donne auffi pañlage aux excrémens, ce, fera l'anus ; il ne fe pafle, comme l'on voit , en cela rien de différent de ce qu'on obferve dans les bivalves ; il y a plus, c'eft que fi Yon couvre cette tethye de deux coquilles, on rendra fa ref- femblance parfaite aux coquillages bivalves; fi. on fui donne cinq coquilles, ce fera une pholade; enfin, fi la cinquième coquille a la forme d’un tuyau, ce fra un taret ; l'analogie eft donc réelle entre tous ces animaux; c’eft donc gratuitement Mém. 1759. Mm Page 149 Page 140: 22 Page jo, Fge 28, Jde, 274 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE que lon voudroit fuppoler pour la nourriture du tarèt un canal différent de celui que à Nature nous fait voir clairement & en Jui & dans toutes les bivalves qui lui font analogues : depuis que j'obferve de ces fortes d'animaux, je nai pas rencontré la moindre difhculté qui m'ait donné lieu d’en foupçonner un autre, & il me paroit fort étonnant que M. Sellius qui trouve une certaine analogie entre le taret & la pholade, foit tombé dans une telle méprife, que de lui faire prendre les alimens par le pied plutôt que par les tuyaux. A l'égard du mouvement dont cet animal eft fufceptible dans fa coquille, les Auteurs, & fur-tout M. Mafluet & Rouflet , le font monter & defcendre librement d’un bout à l'autre; mais c'eft lui en accorder beaucoup plus qu'il n'en a réellement, car il eft attaché, comme l'on a vu, très-fortement vers fa partie fupérieure, de manière qu'il ne peut defcendre en bas; & quand même le mufcle de l'extrémité inférieure ne lempècheroit pas de remonter en haut, quand même il fe détacheroit, il fe trouveroit bientôt arrêté par la feule largeur de fes battans dans le tuyau qui, comme l'on fait, va en di- minuant de bas en haut. La dernière remarque que je ferai, fera fur la génération du taret: M. Sellius fe range du fentiment de Vallifnieri, qui «le met au nombre des animaux qui engendrent fans la jonction d'un mâle, & qu'on nomme #ermaphrodites; » vous deux font fuivis par M. Mafluet qui fe fonde avantageufement fur une obfervation de M. Mery : « qui fait, dit-il, fi ces vers ne font pas hermaphrodites, & même de lordre de ceux qui mul- tiplient indépendamment des autres animaux de leur efpèce, & qui font feuls le père & la mère de ce qui vient d'eux ; ce feroit, à la vérité, une idée de l'animal tout-à-fan fmgulière, mais néanmoins elle ne ferait pas nouvelle, puifque la moule d'étang à ce privilége. » M. Rouflet croit avoir vu un accou- plement, cependant il en doute encore & ne le regarde que comme vrailemblable, quoiqu'il ne convienne pas de Fer- maphrodifme , admis par Vallifnieri: à l'égard de la conjecture de M. Deflandes, « {ur l'exiftence de quelques vers de même je SU ASAGUKIE NUCLE:S 27 efpèce, habitans de la mer, qui ayant été fécondés par un accouplement fait dans l'eau, s'approchent du bois pour y dé- pofer leurs œufs; » non-feulement elle n’a pas le moindre degré de probabilité, elle eft encore entièrement oppolée à toutes . Les notions que nous avons des métamorphofes des animaux, de la reflemblance ou diffemblance des individus dans la même efpèce, & de leur propagation : pour nous arrêter aux coquillages, dont il eft ici queftion, que l’on faffe l'énumération de tous ceux qui font connus , on verra que lorfqu'une efpèce eft cou- verte de deux pièces de coquilles, non-feulement toutes les efpèces, mais même tous les individus d'une même efpèce le font aufli: a-t-elle plufieurs pièces, tous les individus en ont un pareil nombre; c'eft une règle que la Nature fuit in- variablement.. Le fexe n'eft pas aufli conflant, fur - tout dans les coquil- lages qu'on appelle wnivabes ; il eft partagé dans quelques-uns & réuni dans d'autres, de manière cependant que, quoique n Le A & chaque individu ait tout à la fois les parties du mâle & celles - de la femelle, ils ont befoin de la communication réciproque pour ètre fécondés ; mais ceux qu'on appelle 4ivabes , ou pof- sèdent les deux fexes, ou au moins la faculté de perpétuer leur efpèce fans aucune forte d'accouplement ; ce font de vrais hermaphrodites en ce fens: depuis fort long-temps que je nourris des moules de rivière de toutes les formes, de toutes. les grandeurs & de toutes les couleurs qui pourroient faire foupçonner une différence de fexe , il ne m'eft pas encore arrivé de les voir en copulation; Heide, Lifter & beaucoup d'autres. Obfervateurs expérimentés qui ont cherché à les furprendre, n'ont pas eu d'autres réfultats que moi. Nous avons une infinité d'exemples d'autres animaux qui ont les deux fexes à la fois, ou tout au moins qui en font les fonétions; telles font toutes les efpèces d'huitres , les fpondyles & la plupart des coquillages qui font appliqués & collés toute leur vie à certains corps, fans pouvoir communiquer avec leurs femblables : Zhermaphro- difme r'eft donc plus une merveille aujourd'hui ; c’eft une pro- priété commune à tous les coquillages bivalves ; il ne fera donc m ij 276 MÉMoIREs DE L’ACADÉMIE ROYALE plus étonant que le taret jouifle de cet avantage, étant de la même famille, & nous devons le regarder comme un vrai hermaphrodite dans le fens que j'ai expliqué ci-deffus. Lorfque je fis la comparaifon du taret du Sénégal avec celui d'Europe, je n’avois pas encore eu connoiffance d’une troifième efpèce qui fe trouve dans Fnde. M. de Reaumur qui, par la defcription que je lus des deux premières à l Académie , jugea que celle qu'il avoit reçue de Pondicheri étoit fort différente, m'engagea à l'examiner; c'eft ce que j'ai fait il y a peu de jours, & j'ai reconnu qu’en effet cette efpèce en différoit non par la figure & la grandeur du corps, mais par les battans & les palettes ; les battans / fig. 11) ont abfolument les mêmes proportions que ceux du taret du Sénégal, c'eft-à-dire que leur longueur eft à peu près égale à leur largeur ; mais ils ont des cannélures horizontales & verticales, femblables à celles du taret d'Europe, à cela près qu'elles font plus fines , plus ferrées, en plus grand nombre , & que la ligne qu'elles forment à leur réunion eft creufée comme un fillon au lieu d’être relevée’; jai compté plus de foixante-dix de ces cannelures: les palettes AB (fig. 12) font les parties qui fe font le plus remarquer dans cet animal, & qui le diftinguent le plus des deux autres efpèces ; elles ont environ un pouce & un quart de longueur, on peut les comparer pour la forme à une plume d'oifea qui feroit ofleufe & caflante fans flexibilité ; fa tige eft nue depuis fon origine jufqu'au tiers, & un peu davantage de f longueur ; du refte elle eft comme compofée d'environ vingt articulations étroitement emboïîtées les unes dans les autres, comme les vertèbres de certains poiflons, & qui diminuent de grandeur à mefure qu’elles approchent de l'extrémité de la pa- ltte; ces articulations ne font pas rondes, mais aplaties & à peu près triangulaires, un peu plus larges que longues, & ter- minées fur les côtés par une épine roide en forme de loie affez longue; lorfqu'on les regarde en dedans de la palette 2, elles paroiflent terminées en haut & en bas par une ligne droite; au lieu que lorfqu'on les regarde au dehors A, Les lignes paroïffent former un triangle dont les cornes s'élèvent DES SCYENcErSs. 277 en Haut; le tuyau qui enveloppe cet animal eft femblable à celui du taret du Sénégal. I réfulte des remarques que nous avons faites fur le taret d'Europe, comparé à celui du Sénégal, que les Auteurs qui en ont parlé, ont oublié plufieurs chofes effentielles, & que ce qu’ils en ont dit eft fi imparfait & fi confus, que l’on pourroit croire qu'ils ont décrit trois ou quatre animaux différens au lieu d'un; on voit encore que cet animal, regardé par les uns comme un corps ifolé dans la Nature, & confondu par les autres avec toutes les efpèces de vers à tuyaux, en ef réellement fort diflingué, & que c'eft un vrai coquillage de la famille des conques multivalves, mais qui, par le nombre des pièces de fa coquille, .a beaucoup plus de rapport avec la pholade qu'avec tous les autres. Il ne s’agit quelquefois que de rapprocher deux objets pour découvrir entreux une analogie fingulière , qu'on n'auroit pas foupçonnée en les regardant comme ifolés; & il eft à préfumer que bien des corps ne reflent ainfi ilolés, ou pour me fervir des termes ordinaires, ne font une clafle à pat, que faute d'avoir été foumis à une exaéte comparaifon. EXPLICATION ADES VEIGURE S Taret di Sénégal. LA figure 1 repréfente un bout de racine de Manglier, dans: lequel font renfermés plufieurs tarets de l’efpèce 1a plus commune du Sénégal: on a coupé cette racine dans fa longueur, afin de montrer un tuyau de ces animaux en entier. Celui qu'on voit en 4 B eft de grandeur naturelle : la lettre À défigne fon ouverture fupérieure; B eft ouverture inférieure ; 77 montrent les deux tuyaux charnus, feules parties que l'animal fait fortir hors du bois dans fon état naturel. On a fuppofé dans cette figure que la partie inférieure du corps de l'animal, placée dans l'extrémité B, étoit remontée dans le tuyau afin de laïffer voir la rondeur F du canal qu'il a creufé dans le bois. € & D font voir de quelle manière les tuyaux fortent hors du bois. La fig. 2 fait voir l'animal tiré de fa coquille & étendu fur le côté;, T, tuyau frangé par lequel entre l'eau de la mer ; 2 , autre petit tuyau par lequel fort la même eau avec les excrémens; P P,, offelets en. forme de palettes qui partent d'un mufcle circulaire A7 M, avec lequel, le corps étoit attaché au haut de Ja coquille ; 41 M HK, membrane: Mn ii} 278 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE du manteau qui enveloppe le corps de l'animal, elle eft f mince qu'on voit au travers l'eftomac JKE B & les deux inteftins CE, A B: Ta lettre À défigne l'ouverture de l'anus par où fortent les excrémens ; Veft un petit mufcle en forme de plaque ronde qui attache l'autre extrémité du corps vers le bas de la coquille ; les lettres HJKNSRQO marquent le contour d'un des battans vu de côté, S en eft le fommet; les lignes Æ Q défignent les vingt-cinq cannelures verticales , dont leur furface cft ornée ; O eft l'ouverture inférieure du manteau. La fig. 3 repréfente le même animal couché fur le dos, dé'ma- nière qu'on ne voit en 7° que le tuyau frangé, lautre étant caché derrière lui; PP font les palettes, A1/M le mufcle circulaire, D eft le battant droit & G le battant gauche , vus en face ; O montre Touverture inférieure du manteau, par laquelle paffe le pied P. La fig. 4 fait voir les battans du méme taret ouverts & regardés en dedans; S A, canal creufé légérement; SX, apophyfe ftyloïde ; CC, crochet; D D, dents qui forment Ia charnière. Taret d'Europe. Les fig. $, 6 & 7 montrent les battans du taret d'Europe, dans Ia fig. 5 ils font vus de côté, dans la 6.7* par le dos & en face, dans la 7."° les lettres AO marquent les cannelures horizontales , & les lettres VE défignent les verticales. Dans la fig. 8 on voit une de ces cannelures horizontales exprimée : par la ligne HO, à laquelle eft réunie au point © une cannelure verticale OEËE, dont le bord eft denté en forme de fcie. Pholade du Sénégal. A a fig. 9 eft une pholade du Sénégal ; les lettres 7'£ font voir les deux ouvertures de fon tuyau, BA MDSCPN eft le contour de leurs battans vus de côté ; S, fommet des mêmes battans , IV eft une partie du manteau , de laquelle fort le pied P. La fig. 10 montre la coquille de la même pholade ouverte & vue en dedans ; elle eft compofée de cinq pièces , les deux battans DSCB ont chacun une petite côte relevée SD, & un petit crochet C en dedans du fommet; les trois autres pièces font défignées par les chiffres 1, 2 & 3. ; Taret de Pondicheri. La fig. 1 r préfente les battans du Taret de Pondicheri,.que l'on voit dans le cabinet de M. de Reaumur. Les palettes du même animal font repréfentées dans la fg. 12, Ia lettre À en fait voir le côté extérieur, & la lettre B, le côté intérieur. R des Je. 1769: lag.278 PL 9. Mem. de l'A. = = RS Teen pr Fr 27,12: al Battans ce Paletar du Taret de Pentéher voit chex A de Raunur. que re vué en dedart- € Le è. LRO # Core . VIN . ve 4 DES SCIENCES. 279 Re TR RL OBSERVATIONS DE LA COMÉTE QUI A PARU EN 1759, Et dont M. Halley avoit prédit le retour. Par. M. MaRaALDr. Où ne trouvera ici que des obfervations faites au mois de Mai, quoique la Comète ait été vifble longtemps auparavant, & que Je l'aie aperçue plufieurs fois au mois d'Avril; mais elle fe levoit alors dans le crépufcule du matin, & la lumière du jour f'effaçoit bientôt, inconvénient qui m'a fait manquer toutes les obférvations que j'ai tenté de faire avec une lunette de fix pieds montée fur une machine parallaétique , parce que les étoiles , que le champ de ma lunette permettoit de comparer à la Comète, en étoient trop éloignées, de forte qu'il étoit grand jour avant le temps du pañfage de la Comète par les fils de la lunette, une feule obfervation que jai faite le 17 Avril de la hauteur de la Comète & de fon azimuth n'eft pas exate, parce qu'on. ne diflinguoit point les fils de la lunette du quart-de-cercle, & lorfque je voulus les fire éclairer , je ceflai de voir la Comète. Le beau temps qu'il a fait au mois de Mai, & la com- modité d'obferver la Comète pendant une grande paitie de Ja nuit, en ont rendu les obfervations plus faciles & plus exactes. Je me fuis fervi d'une lunette de trois pieds, pofée für une machine parallactique, & garnie au foyer commun des verres d'un réticule rhomboïde, conftruit fur le modèle de celui dont M. de la Caille s'eft fervi pour déterminer Ja pofition des étoiles auftrales , qui eft préférable dans ces cir- conflances à celui qui eft compofé de fils qui & croifent au centre , & font inclinés de 45 degrés, parce que le réticule rhomboide permet de profiter de tout le champ de la lunette. 18 Juilfex 1759: 280 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Le verre objectif de ma lunette a fon foyer à 28 pouces, & loculaire Ja à trois pouces 6 lignes, de forte qu'elle ne groffit que huit fois, mais elle a un grand champ ; le dia- mètre du réticule comprend dans le ciel 24 41° de grand cercle : j'en ai reconnu tout l'avantage non-feulement dans les premiers jours de Mai , que le mouvement de la Comète en déclinaifon étoit confidérable, mais pendant tout le temps de mes obfervations , parce que j'ai eu la facilité de comparer la Comète à la même étoile pendant huit jours de fuite; on voit d’ailleurs, par le moyen de cette lunette, les étoiles de la: fixième & feptième grandeur avec la plus grande netteté. Le premier jour de Mai, pendant que je me préparois à obferver loccultation de l'étoile A des H par la Lune, M. Caffini de Thury aperçut la Comète dans l'intervalle de quel- ques nuages qu'il y avoit alors proche de Fhorizon, & qui {e diffipèrent bientôt; elle paroïfloit à la vue fimple plus grande que les étoiles de la première grandeur, environnée d'une grande chevelure; fa lumière étoit peu éclatante, & femblable à celle des étoiles ou des planètes , lorfqu'elles font proche de Fhorizon chargé de vapeurs ; mais elle a dû être affoiblie par la lumière de 1 Lune, qui a probablement em- péché auffi de faire une eflimation exacte de fa grandeur de la Comète ; avec une lunette de fix pieds on voyoit un noyau mal terminé au milieu d’une grande nébulofité. Après l'immerfion de # des H fous le difque de la Lune, qui eft arrivée à 8h 54° 1 3”, temps vrai, j'obfervai le paffage de la Comète & de plufieurs étoiles par les lames du réticule de ma lunette; M. de Thury détermina le 3 de Mai l'af cenfion droite & la déclinaifon de prefque toutes ces étoiles, par l'obfervation de leur pañlage au méridien ; on en trouvé trois dans le catalogue que M. de {a Caille a donné des étoiles auflrales dans les Mémoires de l’Académie de l’année 1752+ Par mes obfervations, j'ai trouvé qu'à oh 3° 45", temps vrai, la Comète étoit plus occidentale de 44 20” 42", & plus feptentrionale de 14 6° 4" qu'une étoile de l'Hydre, qui, dans le Dies) SIC INT NACLENS 281 le catalogue de Flamftead , eft la $ 1° de cette confiellation ; fuivant M. de la Caille, l'afcenfion droite de cette étoile eft de 164% 16° 30", & la dédinaifon de 26446" 53" méri- dionale. A la même heure, la Comète étoit plus occidentale de ‘264 20'19", & 4' 45" plus féptentrionale qu'une étoile, dont M. de Thury a déterminé fafcenfion droite de 1 864 45’ 20", & la déclinaifon de 25447’ 47". A la même heure, la Comète éroit plus occidentale de 284 59° 31", & plus feptentrionale de 3 3° 1 5" qu'une étoile, dont f'afcenfion droite eft de 1884 ç 5 17", & la déclinaifon 2044613: : À la même heure, la Comète plus occidental: de 294 2° 27", & plus méridionale de 17° 2" qu'une étoile, dont l'afcenfion droite eft de 1894 47’ 39", & la déclinaifon de PA EN CUIR A la même heure, la Comète plus occidentale de 3 14 o" 10", & plus méridionale de 34° 1 3" qu'une étoile, dont Y'afcenfion droite eft de 190 54’ 50", & la déclinaifon de 25488"; d'où j'ai conclu, en prenant un milieu, l'afcenfion droite de Ia Comète de 1504 55° 15", & la déclinaifon méridionale de 2 $4 42° 15”. Le 2 de Mai, le ciel fut couvert. L Le 3 de Mai à 8h 31°, j'ai trouvé la Comète plus occi- dentale de 3422" 3", & plus méridionale de 2 1” 54” qu'une étoile, dont f'afcenfion droite eft de 160% 51” si", ia déclinaïfon méridionale de 194 13’ 43"; donc l'afcenfion droite de la Comète eft de 1 574 29° 48", & la déclinaifon méridionale de 194 38° 17". . On voyoit à lorient de 1 Comète une grande traînée de lumière foible , interrompue par intervalles, que je pris pour des petites parcelles de nuages blancs parfemés dans le ciel, qui n'étoit pas parfaitement ferein; mais ayant vu la même lumière dans les jours fuivans, que le ciel étoit plus frein, je crus que ce pouvoit être la queue de la Comète afloiblie & effacée en partie par la préfence de la Lune ; le 16 & le 17 Mn, 1759. Nan 282 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE de Mai, avant le lever de la Lune, le ciel étant parfaitement férein, j'ai vu fort diftinétement là Comète avec une queue qui pouvoit avoir 2 degrés de longueur ; fr ce que j'ai vu le 3 Mai & les jours fuivans étoit Ja queue de la Comète, elle avoit plus de 15 degrés de longueur. Le $ Mai à 8h 28, la Comète étoit plus orientale de 24° 2416", & plus feptentrionale de 2° 2 1” que x de l'Hydre, l'afcenfion droite de cette étoile eft de 1534 36° 38", & la déclinaifon de 154 36* 42" méridionale; donc l'afcenfion droite de la Comète 1 564 14", & la déclinaifon 1 $4 35'46" méridionale. Le 6 à 9% 21° 33", la Comète plus occidentale de 34 56" 18", & plus feprentrionale de 57” 14" que » de l'Hydre, dont l'afcenfion droite eft de 1 59% 26" 10", & la déclinaifon de 144 55° 58" méridionale; donc l'afcenfion droite de la Comète 1554 29° 52", & la déclinaifon 134 58° 44" mé- ridionale, Le 7 Mai à 9 52° 29", la Comète plus occidentale de md 43" 58”, & plus féptentrionale de 46" 43" que Ÿ de 1 Coupe, dont l'afcenfion droite eft de 1 664 49° 41", & la déclinaifon de 134 28" 17" méridionale ; donc l'afcenfion droite de la Comète 1554 5° 43", & la déclinaifon 1 24 41° 34" méridionale, Le 8 à 9" 18° 13", la Comète plus orientale de 45" feulement, & plus feptentrionale de 40" 3 5" qu'une étoile, dont l'afcenfion droite eft de 1 549 47° 9", & la déclinaifon de 114 40° 38"; donc l'afenfion droite de la Comète 1 5 44 47 54", & la déclinaïfon 114 40° 28". Le 9 à o" 13' 3", la Comète plus occidentale de 44 48’ 48", & plus feptentrionale de 28” 0” que À de l'Hydre, dont l'afcenfion droite eft de 1494 42° 1 5", & la déclinaifon œ1409" $2"; donc f'afcenfion droite de lh Comète 154 1° 3", & la déclinaifon 104 41" $2". Le 10 & le 11 de Mai, le ciel a été couvert. Le 12 à 0" 23° 35",la Comète plus orientale de 1 si 3° 4, & plus méridionale de 56" 14° que & de l'Hydre, DES SCIENCES. 28 dont l'afcenfion droite eft de 1384 56 25”, & la déclinaifon de 74 27° 33”; donc l'afcenfion droite de la Comète 1 5 34 59° 29", & la déclinaifon de 84 3 3° 47". Le 13 Mai à 99 19° 11”, la Comète plus orientale de 27° 27", & plus méridionale de 24 15° 59" qu'une étoile dont j'ai déterminé lafcenfion droite de 1534 26° 26”, & la déclinaifon de $4 $ 1° 0”; donc fafcenfion droite de a Comète 1534 53 53, & la déclinaifon de 84 6’ s9". Le 14 Mai à 8h 57° 51”, la Comète plus orientale de 144 48° 40", & plus feptentrionale de 7° 11° que à de” T'Hydre ; donc l'afcenfion droite de la Comète 1 5 3448" 29", & la déclinaifon 74 38° 22" méridionale, Le 15 à 8" 49’, la Comète plus orientale de 144 48" 40", & plus feptentrionale de 29° 43" que à de l'Hydre; donc fafcenfion droite de la Comète 153% 45° $", & la déclinaifon 74 8" 10". Le 16 à 10h 41° 26”, la Comète plus orientale de 16° 25", & plus méridionale de 51° 41” que l'étoile à laquelle je l'ai comparée le 1 3; d’où j'ai conclu lafcenfion droite de la Comète de 1534 42° 51”, & la déclinaifon de 64:42" 41" méridionale. Dans cette obfervation, les vapeurs’ de horizon rendoient la Comète plus confufe, & le paflage par le réticule plus difficile à déterminer. À 9h 45° étant fur le Pont-royal, j'ai vu fort diftinétement la Comète avec une queue; j'ai eftimé la longueur de 2 degrés ; fa lumière étoit fans éclat & d’une couleur rougeätre. Le 17 Mai à 8° 59° 14”, la Comète plus orientale de 149 44 25", & plus féptentrionale de 14 18° 1” que à de PHydre; donc l'afcenfion droite de la Comète 1 $ 34 40° 50", & la déclinaifon 64 19° 32" méridionale. Le 18 Maià oh 18° 12", la Comète plus orientale de 144 43° 17", & plus feptentrionale de 14 38” 8" que « de PHydre ; donc lafcenfion droite de la Comète 1 $ 34 39° 42", & la déclinaifon 5 59° 25". Le 19 Mai à 9h 3° 58", la Comète plus orientale de u2° 55", & plus féptentrionale de 8” 30” que ue à laquelle n i) 284 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE elle a été comparée le 1 3 & le 1 6 de Mai, dont j'ai dit que l'afcenfion droite eft de 1 534 26° 26", & la déclinaifon de d 51° 0"; donc f'afcenfion droite de la Comète 1 5 34 38 21", & la déclinaïfon $4 42° 30”. Le 20 Mai à 9" $o' 43", la Comiète plus orientale de 13° 4", & plus feptentrionale de 24’ 43" que la même étoile; donc l'afcenfion droite de Ja Comète 1 5 34 39° 30”, & la déclinaïfon $4 26° 1 7" méridionale, Le 21 Mai à oh 27° 29", la Comète plus orientale de 13°20", & plus feptentrionale de 40" 6" que la mémeétoile; par conféquent l'afcenfion droite de la Comète 1 $ 34 39° 46", & la déclinaifon $4 10" 54" méridionale. Le 22 Mai à o" 27° 27", la Comète plus orientale de 15° 20", & plus féptentrionale de 52" 2" que la même étoile ; donc f'afcenfion droite de la Comète r $ 3141" 46", & la déclinaifon 44 48" 5 8". Le 23 Mai à 9° 42° 24", la Comète étant plus orientale de 16° 52", & plus feptentrionale de 14 $"$" que la même étoile ; donc l'afcenfion droite de la Comète 1 53443" 18”, & la déclinaifon 44 45" 5 5" méridionale, Le 24 Mai à 9" 42° 50”, la Comète plus orientale de 19° 56”, & plus fptentrionale de 14 1 6° 29” que la même étoile ; donc l'afcenfion droite de la Comte 1 $ 3446 22", & la déclinaifon 44 34° 31”. Le 25 Mai à 106" 52", la Comète plus orientale de 23°17", & plus feptentrionale de 14 26° 4" que la même étoile ; donc l'afcenfion droite de la Comète 15344943", & la déclinaifon 4% 24" 56". Le 26 Mai à 9°45'43", la Comète plus orientale de 26" 33", & plus feptentrionale de 14 37° 6" que la même étoile ; donc l'afcenfion droite de la Comète 153% 52° 59”, & la déclinaifon 44 13° 54". Le 27 Mai à 0" 46" 20", la Comète plus occidentale de 149" 53" & plus feptentrionale de 44’ 17" qu'une étoile, dont l'afcenfion droite eft de 1 55% 5’ 40", & la déclinaifon de 4% 49° 55"; donc l'afcenfion droite de là Comète 1 5 3° 55 47" & la déclinaifon 4 5" 38". D FE SU2S: CLÉ N\C:E 8 285 Le 28 Mai, j'ai vu la Comète pour la dernière fois; elle étoit plus occidentale de 14 15° 57", & plus feptentrionale de * 59" qu'une étoile, dont l'afcenfion droite eft de 1 5 54 16’ o”, & la déclinaifon méridionale de 44 7° 40"; donc l'afcen- fion droite de la Comète 1 5 34 0° 3”, & la déclinaïfon 34 59° 41" méridionale, M. de Thury a encore vu la Comète le 29 de Mai; mais les nuages qui la cachoïent de temps en temps, l'ont empéché d'en faire aucune bonne obfervation. La Comète a toujours été fr mal terminée & fi confufe, qu'il a été fort difficile d'eftimer le temps de fon paflage par les lames du réticule , de forte que je n'ai jamais ofé efpérer une grande précifion dans la détermination du lieu de la Comète, & fur-tout dans la déclinaifon fur laquelle l'incertitude de l'obfervation a dû influer toute entière. Pour éviter une partie des erreurs, j'af comparé plufieurs fois dans la même nuit la. Comète à a même étoile, & lorfqu’il s'eft trouvé de la différence, j'ai pris un milieu; mais j'ai remarqué que Îa plus grande différence n’eft pas dans mes obfervations répé- tées ; j'ai jugé la feconde & la troifième fois à peu-près comme la première; la plus grande différence eft entre les obfervations de M. de Thury & les miennes, & fouvent elles montent à deux minutes dans la déclinaifon. Pour déterminer ,. par les obfervations de cette dernière apparition de la Comète, les élémens de fà théorie, j'ai profité des réflexions que M. de la Caïlle a communiquées à l’Aca- démie, & jai fuivi fi méthode, qui eft fort fimple ; elle confifte à réduire trois lieux géocentriques de la Comète ob- fervés réellement dans l'ellip{e, qui eft l'orbite de la Comète,” à ceux qu'on auroit obfervés, fi la Comète avoit décrit une parabole, & fe fervir de ces lieux ainfi réduits pour calculer les élémens de la Comète dans la parabole : je n’entre pas dans un plus grand détail de cette méthode, parce qu'on la trouvera dans le Mémoire de M. de la Caïlle, & dans la nouvelle édition de fes Leçons d’Aftronomie; M. de la Lande a promis de {a donner auffi dans la traduétion des_Tables de M. Halley, J'ai choifi l'obfervation de M, de la Caïlle, du 13 Avril, Nan ii 286 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & mes oblervations du 1.” & du 18 de Mai, pour avoir un plus grand intervalle entre la première & la dernière obfervation, & des intervalles à peu-près égaux entre celle du milieu & les deux extrêmes. J'ai fait le calcul des réductions & des élémens deux fois ; dans le premier calcul, j'ai employé les élémens de M. Halley , avec la même diflance périhélie dans la parabole & dans l'ellipfe ; dans le fecond calcul des réductions, Jai employé les élémens que j'ai trouvés par le premier, & J'ai fuppoté la révolution de la Comète de vingt-fept mille fept cents jours qui eft le tiers de l'intervalle entre le pañlage de la Comte par le périhélie en 1 63 1&en175S9. Voici les élémens que j'ai trouvés par le dernier calcul : La longitude du Nœud afcendant. . ..... OT EN SR RONA ITS LÉ aUIpeRhEe MIN RENE I- Ie :.) TO.W3:Nr6.120 Le pañage de la Comète par le RE le 12 4 MAtS A ItempS MOYEN Dia eee eee er Else x2h 57 36” Éncinrafondes 1h COL EUR ANRT : 172 351207 La diftance périhélie de 5836 parties, dont le rayon de l'orbe annuel eft 1,0000 Et en fuppofant la même révolution de la Comète de 27700 jours, j'ai trouvé la moitié du grand axe de l'ellipfe de.... 17,9166 Tadiffance aphélie EME MR TION 35:2496 PExCeRtTICILÉ AGENT ENTRE LUTTER 17,3 330e Je me füis fervi de ces élémens pour calculer dans l'ellipfe toutes mes obférvations, on en verra l'accord ou la différence dans la Table füivante ; il y a une feule obfervation de la Longitude qui s'éloigne du calcul de 3° 12", toutes les autres s'accordent à la théorie à moins de 2 minutes, plufieurs font dans la minute, A l'égard de la Latitude, il y a une dif- férence de 6° 10" dans l'obfervation du 13; mais on voit évidemment , par l’obfervation précédente & par la fuivante, qu'il s'eft glifé une erreur dans lobfervation, je penfe qu'il en eft de même de trois autres qui s'éloignent de Ja théorie d'un peu plus‘ de 3 minutes, parce que je fais que l'obfervation de M. de la Caiïlle, du 3 Mai, & lobférvation de M. de Thury, du 15, s'y accordent beaucoup mieux. DÉS: SCIENCES 287 TABLE DES OBSERVATIONS. La s|TEmPs (GITUD Eu LONGITUDE | LONGITUDE Différence LATITUDE | LATITUDE Différence ii ARE obfervée, calculée. obferv c, calculée. | à Paris. : A: M. SNS D. M. Sec.|S D. M. Sec D. M. S D. M.S. 9. 33.45.1522. 31: 36.15. 22° 31. 10.|— 0.26.|31.24. 8.M 31.24. $1.M|+ 0.43. 8. 30.58.15 17.15.18.|5.17.12. G.]— 3.12./26. 51.42. |26.48.41. |— 3. 1. 8.28. o.|5.13. 58. 17.|5. 13: 56. 24.|— 1. 53.23.41. 55. |23. 38.47. |— 3. 8. Du 21: 33.5: 12.49. 24.15.12. SI ANA 1. 40. 22.26. $7. 122.26. 27: — 0.30. 92 52-29. 5, 11. 4 37.15; 11.54 4]— 0 33-21 2$+ 3e 21.24. 2. |— 1, 1. 918. n3.| sets 11. 11h11. 10:38. — 0.43./20 35.25:0|20. 32, 57 > ren De 13e 3./5- 10.30. 53.15. 10.32. $2.| 1. 59.| 10.47.45. |ro.47. 34 nn 9-23 35.15. 9. 9. 815. 9. 7.39-.|— 1-29.118. 1. 3, |18. 0.38. | o.2s. 9. 19.11.15. 8.52.13.1$. 8. 52. 39.|— o. 14.17.38. 10 U7e32. © |— 6. 10. 8. 57 51.15. 8. 33.36.15. 8.35. 2. + 1. 26.|17. 6.12 LENCO EPS 9.27. 15.5. 8.21, $o0.|$. 8.20.35.|— 1 15-116. 46, 49 16.43.25. — 3.24. o.41.26.|5 8. 9.345 8. 8. 1]— 1.335.116. 24. 4 16:21.27.. |— 2.37. 8. 59.14.15. 7. 58.41.|$. 7. 58.42. + o. 1.116. 3.20. |16. 3.34. So 14 9-18. 12.15. 7. $o. 10.15. 7.50. 12.-+ 0. 2.l16.45. 7. l15:45.42. + 0.35 9 3-58.1$. 7.42. 1.15. 7.43.13.) + 1.12.115.20:52. |15.29.3s. |+ o 17 20[ 9-50-43.15. 7.37-47-15: 7:37 13] ©: 34.]15 15, 48. 1ÿa14 7e [— 1.4: 7°32:49.|+ 1:33. 14 59. 59. 15. 0.30. + 0.31. 7: 29-19. 0.43.| 1448. 10. 14.47.33. |— 0. 37.À 7:26: 30.4 1.24.l14. 35:23. 14 35-23, CHE 77-25-17. + 1:35. 14. 23.444 14,24. 9. 2 0.25. 7-24 3. 0.48. | 14 1337. 1413.32. [— o, s. 7e 2340.| + 7 + 7 .| + 25 Avril 1759 288 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE MÉMOIRE Dans lequel on prouve que les aubes des Roues mües par les courans des grandes rivières , feroienr beaucoup plus d'effer fi elles éoient inclinées aux rayons , qu'elles ne font érant appliquées contre les rayons mêmes, comme elles le font aux moulins pendans à aux moulins fur bateaux qui font fur les rivières de Seine ; Marne , Loire, dc. Pi M. DEPARCIEU x. Ï L femble que depuis le temps qu'on a penfé à employer la force de feau pour faire tourner les moulins & les autres machines, on devroit avoir épuifé toutes les recherches qu'il pouvoit y avoir à faire fur ce fujet, & connoître dans tous les cas la meilleure manière d'employer l'action de ce fluide; cette matière étoit aflez importante, vu Îles grands avantages que les hommes en retirent ; néanmoins il fe fait encore de temps en temps des remarques aflez effentielles qui avoient échappé aux Savans qui ont écrit fur cette matière. Les premiers Mathématiciens qui fe font occupés des ma- chines hydrauliques, ne fe font guère appliqués qu'à en per- feétionner le mécanifme ou là conftruction intérieure ; aucun que je fache, avant le commencement de ce fiècle, n'avoit porté fes vues du côté de la force qui les meut, quoique ce foit un des points qu'il importe le plus de connoître lorfque : Jon a quelque machine hydraulique à conftruire. Depuis que les Sciences ont pris une nouvelle face, & qu’on a appliqué les nouveaux calculs à toutes les Sciences Phyfico- mathématiques, les Savans du premier ordre ont porté leur attention fur les machines müûes par l'eau pour déterminer la quantité de force qui les entretient en mouvement , mais ils n'ont DES SCIENCES 289 n'ont pas aflez confüulté l'expérience qui auroit dû fervir de bafe à leurs raïfonnemens; ils ont cru pouvoir expliquer par les feules Joix du choc tout ce qui concerne le mouvement des machines, & par-là ils ont quelquefois induit en erreur ceux qui fe font trop fiés à fapplication de ces principes, en re- gardant cette application comme démontrée. Ces Savans, prévenus qu'un même agent ne peut jamais produire que la même quantité d'effet, fe font fans doute perfuadés que de quelque manière qu'on fit agir l'eau d’une chute, il n'en réfulteroit que le même produit, ne penfant pas que les différentes manières de faire agir l'eau puffent donner différens réfultats. ; Jai fait voir en 175 3 *, que l'eau d’une chute eft toujours *Mén. Acar, capable d'un effet beaucoup plus grand en agiffänt par fa pe- *”"* ‘77%: fanteur , qu’en agiffant par le choc; & j'ai eu la fâtisfaction de voir dans un Mémoire qui a remporté le prix de l’Académie _de Gottingen en 1754, que M. Jean - Albert Euler , fils du célèbre Géomètre de ce nom, penfoit comme moi fur les deux propofitions contenues dans mon Mémoire. Ayant fait voir, comme je viens de le dire, l'avantage de l'action de la pefanteur fur celle du choc, je conclus alors que les roues à auges devoient être préférées aux roues à aubes, lorfque la chute le permet & qu'on fe trouve dans le cas de ménager l'eau ou de chercher à en tirer le meilleur parti poffible; j'en conclus auffi que les aubes des roues qui tournent dans des courfières, doivent être inclinées aux rayons comme elles le font prefque partout plus où moins, pour mieux recevoir l'effet de la pefanteur de l'eau, & non en prolongement de rayon, pour mieux recevoir le choc, comme l'enfeignent plufieurs Auteurs. Il eff vrai que jufqu'alors la pofition des aubes placées für le prolongement des rayons, que je nommerai aubes en rayon, paroifloit devoir être préférée à la pofition inclinée; perfonne, que je fiche, n'ayant encore fait voir que l'ation de la pefanteur füt plus avantageufe que celle du choc; & en ne confidérant que cette dernière, il eft démontré que les aubes en rayon Min. 1759. O9: 290 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE en reçoivent davantage que les aubes inclinées; mais l'aétion de la pefanteur étant bien plus confidérable que celle du choc, l'avantage des aubes inclinées fur les rayons fe trouve démontré pour les roues qui tournent dans des courfières, parce qu'elles portent une plus grande partie du poids de l'eau pendant tout le temps qu'elle eft entre les aubes & la courfière, ou bien elles tendent beaucoup plus à faire l'effet des augets que ne font les aubes en rayon, l'eau étant retenue par les côtés & par-deflous quand-la roue & la courfière font bien faites. Les mêmes raifons fubfifient pour les aubes des roues qui font dans le courant des grandes rivières, parce que l'eau qui paffe aux côtés & par-deflous, forme elle-même une efpèce de courfière, qui empèche que celle qui vient de frapper l'aube ne s'échappe après avoir choqué, auffi aifément qu'elle feroit sil ny avoit point d'eau à côté ni deffous ; car il faudroit que : l'eau füt libre & fans autre effet après avoir choqué, pour que les raifonnemens des Géomètres qui ont traité cette matière fuflent vrais. - On peut déjà apercevoir par cette feule réflexion que la péfanteur de l'eau agit fur ces fortes de roues aufli-bien que fur celles qui tournent dans des courfières, & par-là que les aubes inclinées doivent être préférées aux aubes en rayon, tant pour les roues qui tournent dans les courans des grandes rivières, que pour celles qui tournent dans des courfières : je vais le faire voir encore plus paiticulièrement avant de parler de mes expériences. Long-temps avant que j'eufle démontré l'avantage de l’action de la pefanteur fur celle du choc, j'avois fouvent confidéré ces fortes de roues en mouvement, je veux parler des roues des moulins pendans & de ceux fur bateau ou des machines du pont Notre-Dame & de la Samaritaine, & il me paroitloit toujours que fi les aubes avoient été inclinées aux rayons, elles auroient reçu de la part du courant un effort plus confidérable, qu'étant difpolées en rayon comme elles le font par-tout ; mais les aubes en rayon étoient établies, & ne connoiflant pas alors d'eflort plus grand que celui du choc , leur difpofition plus: DES HN CNE NICE LS Lt 2Ot avantaseufe me parut démontrée par le Mémoire que M. Pitot 2. Aobne en 1729 : je crus donc, comme les autres, que les aubes en rayon devoient être préférées aux aubes ee & je n’y penfai plus. Depuis que j'ai fait voir que l'action de la pefanteur eft beaucoup plus avantageufe que celle du choc, mes doutes {e {ont renouvelés toutes les fois que j'ai vu à ces fortes de roues eau monter rapidement fur les aubes dans l'inftant qu'elles fe plongent dans le courant ; j'ai toujours cru voir très-clairement que la pefanteur de l'eau devoit y entrer pour beaucoup, & qu'elle y feroit plus d'effet fi les aubes étoient plus favorablement difpofées pour laifér monter l’eau le long du plan incliné qu'elles forment & pour la fupporter, c'elt-à-dire dans une fituation qui les difposât davantage à être parallèles à la furface du courant lorfqu’elles commencent à s’y plonger, pourvu néanmoins qu'elles commencent toujours à fe plonger dans l'eau par leur extrémité extérieure avec plus ou moins d'in- clinaifon, fuivant la vitefle du courant ; car, fi l'aube étoit tout- pu parallèle à fa furface du courant dans l'inftant qu elle entre, ou qu'elle commençât à à { plonger par fa partie inté- rieure ou la plus près du centre , il eft clair qu’elle éprouveroit une réfiftance à entrer à ue de l'eau qu'elle auroit à dé- placer, ce qui diminueroit fon effet; mais il y a une inclinaifon d’aubes , qui jointe à une vitefle de roue relative à celle du courant doit faire produire le plus grand effet à la machine. . Suppofant donc que les aubes, foit en rayon comme AR, foit inclinées comme A7/, commencent à fe plonger par leur extrémité extérieure À, le courant allant de S vers if eft clair que l'eau qui eft derrière Paube vers NW, tendant à s'en aller avec plus de vitefle que n'en a aube même, ne fait aucune réfitlance ou en fait très- peu à l'entrée de Wibe . dans l'eau ; il eft aifé de fentir que dès le premier inflant qu'une aube À / ou AR fe plonge, fr elle eft plus inclinée (comme left A7 à la furface SF du courant ) que ne féroit une aube en rayon A2, l'eau par fa vitefle y monte plus aifément, & ÿ ft plus long-temps foutenue par les lames qui fuivent. Oo ji 292 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Ces premières lames agiffent par toute leur pefanteur , tandis que les lames fuivantes agiflent en partie par le choc & en partie par leur pefanteur , parce que la fituation des aubes les favorife , & que l'eau qui eft derrière l'aube coulant avec plus de vitefle que n’en a l'aube dans fon mouvement, a peu d'action en arrière ; l'on y peut même toujours remarquer un vide ou enfoncement plus ou moins grand, fuivant que le courant eft plus ou moins rapide; l'eau qui eft derrière l'aube s’oppole par conféquent très-peu à l'aétion de la pefanteur de celle qui eft far l'aube, & d'autant moins que le courant a plus de viteffe. Tandis que les aubes qui entrent dans l'eau reçoivent l'aétion de la pefanteur de celle qui monte le long de leur plan incliné, les aubes qui font déjà avancées & qui approchent du derrière de la roue comme D X, s'oppofent plus perpendiculairement au courant , au lieu que celles en rayon D 4, arrivées au même endroit, fe prêtent par leur inclinaïifon en arrière à laïffer couler Veau par-deïlous ; les mêmes aubes en rayon étant tout-à-fait arrivées vers le derrière de la roue & prêtes à fortir comme L E,, favorifent par leur inclinaifon le paffage de l'eau en deflous; de plus elles font obligées de pouffer & de déplacer l'eau qui eft derrière aux environs de O, & elles l'enlèvent quand elles vont un peu vite, ce qui eft un obflacle au produit de la machine , au lieu qu’étant inclinées aux rayons de la roue comme PE, elles reçoivent mieux l'effet de la pefanteur de l'eau quand elles entrent; étant parvenues vers le derrière de la roue, elles fe dérobent moins à l'aétion qui refte encore à l'eau, & fortant en montant prefque d'äplomb, elles ne pouffent point l'eau qui eft derrière, ou Ja pouffent moins; elles n'en déplacent point & fortent par conféquent fans obftacle. Telle eft la fuite d'un raifonnement qui me fit croire que mes premiers doutes contre les aubes en rayon étoient bien fondés, mais la queflion étant des plus importantes pour les machines müûes par les courans des grandes rivières, & étant d’ailleurs des plus fufceptibles d'expérience j'y ai eu recours pour achever d'établir mon opinion, ou pour m'apprendre fi elle étoit mal fondée, k DES 4/8: CT E NIC'E1S., 293 Je fis faire pour cela une roue, qui n'a que trente-deux pouces de diamètre ou environ, parce qu'il falloit qu'elle pôt être tranfportée fans embarras, & que je puffe la manier aifément: elle a douze aubes qui ont huit pouces de hauteur fur fept pouces & demi dans le fens parallèle à l'axe ; elles font attachées en charnière à la circonférence de la roue, pour leur donner toutes les différentes inclinaifons que je voudrois, fans diminuer le diamètre de la roue. H y auroit plufieurs moyens pour faire prendre à ces aubes toutes les différentes inclinaifons dont je pourrois avoir befoin, celui qui m'a paru le plus fimple, & dont j'ai fait ufage, confifte en un cercle ou plutôt une couronne de cercle, placée au milieu entre les embrafures mobiles autour de l'arbre de la roue qui lui fert d'axe, & retenu en place par des équerres de part & d'autre, qui ne lui laiflent d'autre liberté que celle de tourner. Sur le bord de cette couronne, dans une circonférence qui a pour centre le milieu de arbre, font percés autant de trous qu'il y a d’aubes, & également efpacés entr'eux , d’où partent autant de crochets de même longueur , qui vont obli- quement prendre en charnière le haut de chaque aube. Sur une autre circonférence , tracée parallèlement à fa précédente, mais plus près du centre, font percés d'autres trous , qui font tels, que le premier convenant avec un feul trou, percé dans une des équerres, toutes les aubes tendent au centre de arbre ou font difpoltes en rayon; fi on fait convenir le fecond trou de cette deuxième circonférence avec le trou de l’équerre , les aubes féront inclinées de 10 degrés, le troifième trou les fait incliner de 20 degrés, le quatrième: de 30 degrés, & l'on fixe à chaque fois ce cercle mobile à la place où on l'a mis, en paflant une petite broche de fer dans le trou de l'équerre, & celui de la couronne qu'en y a fait convenir. Cette roue eft portée par un chaflis ou chevalet, quipofe au fond de l'eau, fur lequel on peut mettre l'arbre de la roue Oo ii 204 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE à la hauteur qu'on veut, par le moyen de deux boîtes mobiles de long des jambes du chevalet, qu'on fixe où l'on veut avec une vis de preffion. Chaque boîte porte une efpèce d'oreille, au milieu de laquelle eft une entaille où entre un des tou- rillons de l'arbre de Ja roue. L'arbre eft rond par un bout, pour fervir de treuil, autour duquel s'enveloppe la corde qui monte le poids, par le moyen d'une poulie de renvoi placée au-deflus du chevalet à hauteur fuffante, pour que la roue puiffe faire fept à huit tours ou davantage avant que le poids foit en haut : on fa repréfentée ici attachée au haut du chevalet, mais en faifant les expé- riences, elle étoit attachée au haut d'une longue & forte perche, qui étoit elle-même attachée au chevalet. Le courant dont j'avois befoin, pour faire ces expériences, devoit être indifférent, grand ou petit, pourvu qu'il für beau- coup plus large que la roue, & plus profond que ne devoit defcendre l'extrémité des aubes, afin que le canal ne devint pas courfière pour la roue, & le courant le moins rapide étoit celui qui devoit prouver le mieux pour ce que j'avois à voir. J'ai fait mes expériences fur la rivière de Bièvre, dans la cour du Moulin de Croule-barbe au faubourg S.° Marcel, où j'ai trouvé plus de commodité & moins d'importunités que je n’en aurois eues fur la Seine, la roue étoit placée dans le canal par lequel l'eau arrive au moulin, à huit ou neuf pieds de la vanne qui donne l'eau à la roue; le canal a en cet endroit environ cinq pieds de largeur aflez uniforme , & l'eau avoit alors (le $ Mai 1758 ) environ. deux pieds de profondeur, & une vitefle de treize pouces par feconde ; elle a été affez conflamment à la même hauteur tout le temps que mes expé- riences ont duré, ce qui m'arrive pas toujours à caufe des moulins qui font au-deflus, qu'on arrête & qu'on remet en voie {lon le befoin qu'en ont les Meuniers. On voit dans la Table fuivante les réfultats de ces expériences, que je ne prétends pas donner pour fervir de règle certaine dans tous les cas ; elles ne font pas à beaucoup près aufli complètés, ni auffi détaillées qu'il eft néceflaire qu'elles le foient ; je ne les donne que pour UT NE SNS CURE NI GIE: S: . 295 faire voir qu'elles font d'accord avec le raifonnement ; telles welles font, elles avertiffent qu'il y a beaucoup à gagner à incliner les aubes aux rayons, au lieu de les appliquer contre les rayons mêmes & jufqu'à ce que ces expériences foient faites avec tout le foin & toutes les précautions néceffaires pour fervir de règle dans tous les cas; ceux qui fe piquent de bien faire ce dont ils font chargés, pourront faire eux-mêmes les expé- riences néceflaires pour connoître l'inclinaifon qui conviendra le mieux au courant de rivière où ils auront à travailler , ayant égard à la grandeur de la roue , au nombre d'aubes qu’on voudra y D Attren & à la quantité dont elles devront plonger dans l'eau. Ces mêmes expériences nous font voir combien les moulins pendans & ceux fur bateau , les machines du pont Notre-Dame & de la Samaritaine qui font fous nos YEUX , font encore éloignées du point de perfection où il feroït à fouhaiter qu'elles fufent , & où elles peuvent être portées. EXPÉRIENCES. La roue ayant deux aubes dans l'eau, quand les deux aubes voifines de celles-là, ou la précédente & la fuivante entroient & fortoient. 1. Le poids à enlever étant de 32 onces. Les aubes étant en rayon, la roue faifoit un tour en. . . . 16” Les aubes étant inclinées de 10 degrés, un tour en .... 15 dE RE dep ent i els anis dénoncent. TA déLaR SN en). SA UE 2. Le poids à enlever éant de 36 onces. Les aubes étant en rayon, Ja roue faifoit un tour en . . .. 24°. incinées de TON der e . -e - NeN Lie 8 ALLO PE PAIN T ANEt et PU rer at CI ee SP O dONON NT IA Ten). AUS TES de40 ...4..,.....en...,17 296 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE 3. Le poids à enlever étant de 40 onces. Les aubes étant en rayon, la roue faifoit un tour en inclinées de 10 degrés ...... °.. en det20 ME TER ANT l'en OT AO RE de ONE SRE I CE Tien 4 Le poids à enlever étant de 42 onces. un tour en Les aubes étant en rayon, la roue faifoit inclinées de 10 degrés ..., M MOGE Detonci oh HERO pe ete — do to PE tee ep ... ce LEIL .. en .. en .. en . 39° 25 19 18 20 Trois aubes étant dans l'eau quand les deux voifinés entroient & fortoient ; dans ce cas-ci la roue étoit plongée de la moitié de fon rayon. 1.” Le poids à enlever étant de 88 onces. Les aubes étant en rayon, la roue faifoit un tour en inclinées de 10 degrés, en ......... de 20/degrés, en 41. & . del} Ooidenrés, (CHE Tele Mie dei 2% Le poids à enlever étant de 96 onces. Les aubes étant en rayon, la roue faifoit un tour en , inclinées de 10 degrés, en.......... de 20 degrés, en, ..... 4... 3° Le poids à enlever étant de 100 onces. Les aubes étant en rayon, la roue faifoit un tour en inclinées de 10 degrés,.en ........, der2o deprCSPNERISI. Ce ie { 4 Le poids à enlever étant de 104 onces: Les aubes étant en rayon, la roue failoit un tour en.... 42 , 38" 25 D 20 Lu inclinées de 15 degrés, en. . ,. ....... + 25 5 Le poids à enlever étant de 108 onces. Les aubes étant en rayon, la roue faifoit un tour en . : .. 44 inclinées de 15 degrés , en ..,,......... 30 Ayant DES SCIENCES. 297 ‘Ayant fait ces expériences dans un courant fort lent, & ayant trouvé les aubes inclinées bien plus avantageufes que celles en rayon, on pouvoit déjà conclure qu'à plus forte raifon elles le feroient dans un courant plus rapide; ne pouvant pas avoir dans l'endroit où j'étois un courant plus rapide, mais ayant pu en avoir un quatre ou cinq toifes au-deflus encore plus lent que le premier, j'y ai répété les mêmes expériences, ce qui revient au même que fi je les avois faites dans un courant plus rapide, parce que le premier empla- cement devient plus rapide par rapport au fécond. Dans ce dernier endroit, où le canal étoit plus large & plus profond & où l'eau avoit par conféquent moins de vitefle, Jy ai toujours vu les aubes inclinées avoir l'avantage fur celles €n rayon; je n'en donne pas les réfultats, je les crois inutiles après ceux que je viens de rapporter. Pour mieux varier l'expérience, j'ai fait difpofer fix aubes de cette roue, prifes alternativement de manière qu'on peut les ôter & les remettre à volonté, afin d'avoir une roue à fix aubes ou à douze, comme je la voudrois; j'ai trouvé que quand les roues à douze & à fix aubes font plongées de la même quantité, & qu'elles enlèvent un même poids, celle à douze aubes tourne plus vite & d'un mouvement plus uni- forme que celle à fix aubes. J'ai encore fait l'expérience fuivante : la roue à fix aubes étant plongée de la moitié du rayon, qui eft auffi la hauteur des aubes, & les aubes étant miles en rayon, j'ai augmenté le poids juqu'à ce qu'il ait été en équilibre avec la force du courant ; la roue s'eft arrêtée, ayant deux aubes également plongées dans l’eau ou à peu-près, fi je la mettois de manière qu'une de fes aubes fût verticale, & par conféquent en état de recevoir le plus grand choc, le poids la faifoit rétrograder & la ramenoit toujours au point où elle avoit deux aubes également plongées, ce qui prouve que le plus grand effort de l'eau n’eft pas dans l'inftant où une aube eft perpendicu- lire au courant, comme on l'a toujours cru, & ce qui feroit sil ny avoit que le choc à.confidérer. Mn. 1759. Pp 298 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE On lit auffi dans plus d'un Auteur, que quand deux aubes font plongées à la fois dans l'eau , éGalement ou inégalement, toute la partie du courant qui choque l'aube d'amon devient nulle pour. l'aube d'aval; de-là que quand deux aubes font également plongées dans le courant, lune avant la verticale & l'autre après, celle d’aval ne reçoit aucun effort : voici une expérience qui prouve évidemment le contraire. J'ai défait le crochet de lune des aubes, je Fai retenue dans Ja même pofition que les autres par le moyen d'une ficelle, & lai amenée à être celle d'aval de deux aubes également longées & en équilibre avec un poids, comme ci-devant ; ayant laiflé le poids & le courant fe contrebalancer pendant quelque temps, & voyant qu'aucun d'eux ne lemportoit fur Fautre, jai, avec des cifeaux, coupé la ficelle qui retenoit Vaube d'aval; elle a pris la direction du courant, & 1 roue a retrogradé jufqu'à ce que deux autres aubes aient arrêté la defcente du poids; ce qui prouve que les aubes reçoivent toujours quelqu’effort de la part du courant, quoiqu'elles ap- prochent du derrière de la roue, & que d'autres fe mettant devant elles, paroiflent recevoir tout l'effort. Ce font-là toutes les expériences que j'ai cru devoir faire avec une aufi petite roue, elles font, je crois, fufhfantes pour faire voir que tout ce qu'on a conclu jufqu'à préfent, pour déterminer la quantité de force qui fait mouvoir les Machines ui font dans les courans des grandes rivières, eft encore bien éloigné de la vérité, faute d'avoir pris l'expérience pour bafe. Fout ce que je viens de faire voir, avoit d'autant plus befoin d'être prouvé & confirmé par l'expérience, que le contraire pafloit pour être démontré : l'avantage qui en réful- tera pour les Machines qui ont des roues de la forte, comme les moulins fur bateau, les pompes de Ia Samaritaine, du pont Notre-Dame & autres femblables , fera d'autant plus grand , lorfqu'on fera ufage des aubes inclinées, que les aubes de ces roues font aétuellement plus défavantageufement placées que fi elles étoient en rayon; car elles font inclinées en fens. contraire , attendu qu'il sen faut dé la moitié de l'épaifieur 0 27 -1. Céométrale vue & en face et en prehl . € - Pre Mem.de L'Ac.R des Se. 1769. Pag.208.P 10: “nue a Perspechve DES SCrIENCES 299 des embrafures & de toute l'épaiffeur de la planche de Yaube, que la furface choquée ne tende au centre de l'arbre. Il feroit à fouhaiter que ces expériences fuffent faites en grand dans cinq à fix courans de vitefles différentes, en détaillant davantage les inclinaifons des aubes pour déterminer, par l’obfervation même, l'inclinaifon d’aubes propre à chaque vitefle de courant aufli approchant que l'expérience pourroit les donner : le calcul achèveroit de déterminer l’exacte incli- naifon propre à chaque viteffe de courant, relativement au rayon de la roué, à la quantité dont elle devroit être plongée dans l'eau, & au nombre d'aubes qu'on voudroit lui donner : on détermineroit encore la viteffle de la roùe convenable à chaque vitefle de courant , relativement à toutes les autres circonflances, pour que la machine produifit le plus grand effet; car ce n'eft plus le tiers de la viteffe du courant que le centre d'impulfion doit prendre, comme l'avoient trouvé. M. Parent en 1704, & M. Pitot en 1725, parce qu'ils p'avoient confidéré que le choc, c’eft un objet des plus intéreflans de fa Mécanique-pratique , qui vaut bien la peine d'être mis en état de fervir de règle à ceux qui ont à établir dés machines dans les courans des grandes rivières. Pp i 300: MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE MÉMOIRE SUR UL A CLR. CG U LA TT ON. DU FLUIDE NERVEUX. Par M BERTI N: Fe NT de traiter cette importante queflion, je me crois: obligé de rapporter plufieurs paflages tirés des ouvrages: du célèbre M. Haller. Comme il eft le feul Auteur, parvenu à ma connoiflance, qui ait touché une partie de la queftion: que je me propofe de traiter, il fera le feul que je citerai. J'avoue de bonne foi qu'il a vu avant moi, ou du moins qu'il a conjecturé que le fluide nerveux retourne au cerveau par des veines nerveufés ou des. nerfs veineux, qui prennent naiffance ou qui font la continuation des nerfs qui apportent le fluide nerveux du cerveau dans les mufcles: mais, fi dans: quelques endroits, M. Haller femble établir une circulation du fluide nerveux, dans d'autres, ilabandonne l'idée de cette cir- culation, & il dit formellement que le fluide nerveux ne retourne pas au Cerveau. Quoique je convienne qu'une partie des idées que je vais. foumettre au jugement des Savans, a été aperçue par M. Haller, j'attefte avec fincérité que les ouvrages de ce favant Médecin ne m'ont fervi que d'appui pour ofer produire au jour mon travail, & que ce que je vais propoler eft à moi perfonnel- lemerit: il n'eft pas étonnant, il n'eft pas même rare, que dans un même fiècle deux hommes occupés d'une matière, y faffent les mêmes découvertes. Je vais d'abord rapporter les différens paffages de M. Haller: qui femblent établir la circulation du fluide nerveux; j'y joindrai- enfuite ceux où M. Haller femble revenir au fentiment des Auteurs qui imaginent des routes différentes des nerfs par D B:S } SC NENN GES 30€ lefquelles le fluide nerveux s'échappe après avoir opéré le mouvement mufculaire. ? «Il ne paroït pas, dit M. Boërhaave, que les efprits re- tournent au cerveau par les mêmes routes qui les ont apportés: fur quoi M. Haller replique (a): Pourquoi ne feroit -il pas probable que cela eft ainfi? les chemins des fenfations qui font portées des organes extérieurs. jufqu'au. cerveau, ne femblent-ils pas l'infinuer? qu'eft-ce qui empêche qu'un nerf entier ne foit compolé-d'artères motrices & de veines {enfi- tives qui { joignent par leurs extrémités ? où vont donc les efprits qui ont gonflé un mufcle, s'ils ne rétrogradent pas vers le cerveau?» Le même Auteur dit /b): « Les fenfations peuvent fe faire par des tuyaux. nerveux diftingués des nerfs moteurs , quoique renfermés dans les mêmes enveloppes, & qui, à la manière- des veines, reportent au cerveau le fluide nerveux que les nerfs moteurs avoient apportés. Je donne ici des conjectures un peu plus férieufes que des fonges ». ‘ M. Haller , dans un Ouvrage imprimé plufieurs années après limpreffion de fes Commentaires fur la Phyfologie de Boër- have, s'exprime ainfi /c): « Que devient le fluide nerveux dont labondance eft prouvée par la grande quantité du fang qui aborde au cerveau avec viteffe, comparée avec l'abondance (a) Cur improbabile? nonne videntur | generare fanguis copiofifimus celeriter confentire itinera fenfationum ab or- | motus., Ji compares cn uberrima ganis exterioribus ad cerebrum ! quid | fecrerione lentioris Janguinis à corde impedit ne nervus totalis fiar arteriis | remotioris, ia minori veuali aut me- motricibus ; venifque féntientibus quæ | fenterica- arteria exhalare per nervos 2n ipfis finibus conjungantur; quonam | curaneos non ef improbabile ; in I." Paffage, « IL Paffages. L44 LOS abir fptritus qui mufculum infludit, | cavitates varias Corporis , ventriculnn nifi retrocedit, Comment, Vol. IL, | irreflinamutris placuit; in venas fan- pag: 626. guinis redire non valde analogum (b) Senfus fieri poflunt per ff. | viderur, nifi minimas venas fupponas, zulas diverfas à motoriis, éT ad modum | quæ lente in magnas confluane : ex venarum ad cerebrum révehentes quod | caviratibus vero reforberi nihil re- fiflulæ motrices advexerant ; conjec- PuSnat, an in cerebrum redit, ur venæ zuras pono , fed paulo magis férias Jprrituefæ Jint in éodem nervo, ut Jomniis. Idem, pag. 604. arteriæ ; an inde fenfus ! Primæ: (c) Quonam abit liquor nervofus , | lineæ Phyfiol. page 142. guem magna copia non pote? non - PPp üij, 302 Mémoires DE L'ACADÉMIE RoYyaLeE » des fluides épais & vifqueux qui fe féparent dans les reins & » dans les inteflins de l'artère venale & de l'artère méfentérique, » plus petites que celles du cerveau? il n'eft pas hors d'appa- » rence qu'il s'exhale par les ouvertures des nerfs de la peau: » plufieurs ont prétendu qu'il penètre en différentes cavités du » corps, dans les inteflins, dans leflomac; il n'eft guères » vraifemblable qu'il revienne dans les veines fanguines, à » moins qu'on ne fuppofe de petites veines qui fe raffemblent » peu à peu dans de grandes ; il ne répugne point qu’il foit pompé » des grandes cavités: retourne-t-il au cerveau, de façon que » dans le même cordon de nerfs il y eût des veines fpiritueufes ainfi qu'il y a des artères, eft-ce là l'origine des fenfations? » Tels font les paflages où M. Haller a femé quelques idées d’une circulation du fluide nerveux ; mais il eft aifé de voir que cette circulation n’y eft indiquée que comme une con- jeéture qui n'eft appuyée d'aucune preuve, que comme une hypothèle à laquelle il ne donne pas plus de certitude qu'à toutes celles qui ont été propofées avant lui, fur les routes incertaines que fuit le fluide nerveux, après qu'il a gonflé les mufcles. Car premièrement, pour ce qui regarde le premier paflage, voici ce qu'il ajoute: « Le fluide nerveux tombe-t-il dans de » petites cavités cellulaires? mais dans ce cas la perte en feroit » énorme; retourne-t-il par le même nerf qui l'a apporté! en » vérité, ajoute M. Haller, il n'y a ici quobicurités & in- certitudes. » Secondement, M. Haller dans un autre endroit /d) ne fait » » (d) Zno vera graviffima difficultas | diftenfio faëta fuiffe, an fiflitur in eff quid fiat de accerforia illa fluidi | viis cœcis ? non potefl : in immenfur nervi copia, à qua nunc maxime | enbin augeretur contraio mufculorum motus mufcularis fa@us ef? ; anredit | 7 craffities. An exhalat ! idem ref- ad cerebrum , fèd refiflunt immenfa | pondeo quod de venis dixi , à fihæc vi uovi qui fuccedunt fpiritus ? an | ratio videtur magis probabilis, Ji exit in venas quæ ex ümis veficulis | ponas poros valde exiguos qui non Jive finibus fibrarum exeant ? quare | impediant repletionem fibræ motricis; non in co ipfo exiit tempore quando | &T eadem olim fuit fententia Santo- inflabantur fibræ à copia nova fpiri- | rini. An in tendines tanquam în zuum Si vero tunc exiit nulla potuit | promptuaria emigrat ; uti Valifius DE) SICITE Weiss... 307 plus mention des veines nerveules ; il ne reconnoît plus qu'une direction dans le mouvement du fluide nerveux, & c’eft du cerveau aux extrémités ; le retour du fluide nerveux eft tout- à-fait impoffble, car voici comme il s'explique : « II eff très-difficile de dire ce que devient le fluide nerveux après qu'il a opéré R contraction du mufcle : retourne-t-il au cerveau! mais les nouveaux efprits qui fuivent, oppofent une réfifance immenfe : entret-il dans des veines qui naîtroïent au fond des véficules? mais pourquoi ne feroit-il pas forti * des véficules par ces mêmes veines dans le temps qu'il rem- plifloit les véficules ? que fi on dit qu'il en foit réellement forti, comment les véficules ont-elles pu fe gonfler? s'arrête-t-if dans des cavités borgnes? cela eft impoñlible ; car, fi cela étoit, Ra contraction & l'épaifleur des mufcles augmenteroient im- menfement: fe diffipet-il en exhalaifons? la même difficulté que j'ai dit au fujet des veines qui s’ouvriroient dans les véficules, fe préfente, quoique cependant cette raifon paroiffe plus pro- bable, pourvu qu'on fuppofe que les pores exhalans font ex- trêmement petits, & c'eft le fentiment de Santorini (n° 29): fe retire-t-il dans les tendons comme dans des réfervoirs , ainfi que Willis l'a fuppofé? mais il n’y a pas de tels réfervoirs dans les tendons, & plufieurs mufcles n’ont point de tendons: fe détruit-il, ainfr que Borelli l'a avancé en parlant de fes athlètes? mais rien de ce qui eft créé ne retourne dans le néant; & cependant, s'il n’eft pas détruit & s’il ne ceffe pas d’être corps, il diftendra toujours le mufcle. » Suivant le paflage que je viens de citer, il n’y a plus de veines nerveufes; le fluide nerveux ne peut plus retourner au cerveau par les nerfs; s’il y retournoit, il faudroit que ce fût par le même canal qui la apporté, & ce retour eft im- poflible, parce que a colonne du fluide qui coule du cerveau, oppofe une réfiftance immenfe. puit. Deeff fpatium in tendine, | ente in nihilum regreffio nulla eff ; neque omnes mufculi rendines naëi | 7 nifi perüt , nifi definit corpus effe » Sunt. An perit deffruda quod de | fémper diftender, Comment, t. I LL, athletis füis dixit Borellus À Sed ex | pag. 127. L>2 2» # Aph 1009: 304 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Enfin, M. Haller dans un autre endroit /e) nie formel- Jement le retour du fluide nerveux au cerveau: « Le feul repos, dit-il, peut bien foulager nos paities folides, mais ce repos fans les alimens ne rétablit point nos forces: donc, dit-il, les efprits ne retournent point au cerveau comme Defcartes l'a avancé. » Il fuit de ces différens paflages comparés les uns aux autres, que ce que M. Faller a avancé fur l’exiflence des veines nerveules ou des nerfs veineux, ne porte point le caractère d'une décifion fur cette matière; l'Auteur y propofe le pour & le contre : il dit dans un endroit qu'il eft probable qu'il y a des veines nerveufes, & dans un autre endroit il nie l’exiflence de. ces veines : ici il avance que le fluide nerveux retourne au cerveau, & dans un autre endroit, il prononce formellement que ce fluide ne retourne point au cerveau, S'il m'étoit permis de demander à tous ceux qui ont porté Je plus loin leurs recherches fur les caufes du mouvement mufculaire & des fenfations, ce qui s'eft paflé dans leur efprit quand ils fe font demandés à eux-mêmes ce que devient le fluide nerveux après fa contraétion des mufcles, je fuis perfuadé qu'ils me diroient, nous avons defiré des veines propres à reporter ce fluide à la fource d’où il découle; c'eft fans doute ce qui eft arrivé à M. Haller *, mais il ne paroït pas que ce defir ait été aflez vif pour fixer tout-à-fait fon attention à chercher les moyens d'établir le retour du fluide nerveux au cerveau, car il ne l'a point empêché de fuivre le torrent, & même de nier le retour du fluide nerveux au cerveau; le temps auquel il étoit réfervé de voir naître une aflértion fuivie & foutenue d’une certitude égale à celle qui établit lexiflence de ce fluide, n'étoit pas arrivé: on a fouillé dans l'Anatomie la plus recherchée les preuves de la fecrétion du fluide nerveux, de fon cours du cerveau dans (e) Sola quies folida poteft folari; | ut Cartefio vifum. Comment. t. IL, vires abfque alimento non reddit: | pag. 62. €rgo non ad cerebrum redeunt fpiritus, toutes DE ES 2 SC AE NIQUE 6: 305 toutes les parties du corps, & on s'eft perfuadé avec raifon que lexiftence de ce fluide & fon cours du cerveau dans tout le corps, font la folution des plus grandes difficultés; & on n'a pas fenti que tout ce qui a été dit pour établir l'exif- tence & le cours de ce fluide, fert également à en établir le retour: chofe étrange que l'efprit ait vu tant de fois des milliers de canaux dans les nerfs pour le porter du cerveau dans tout le. corps, & qu’il n'en ait pas vu un feul pour le rapporter. Pour développer uné queftion qui a pour objet 11 con- noiflance du cours & du mouvement de {a caufe qui anime nos mufcles & qui excite les fenfations, je me trouve obligé de rapporter fommairement les opinions les plus reçues fur le fiége des fenfations & de la puiflance qui anime les mufcles. Cette digreflion m’éloigne un peu des preuves que je rap-- porterai dans la fuite pour établir la circulation du fluide nerveux, mais elle eft néceflaire; je vais donc rapporter le plus fuccinétement qu'il me fera poflible les opinions qui ont réuni le plus de fuflrages fur la caufe phyfique & immédiate de nos mouvemens & de nos fenfations. Trois opinions partagent les Savans fur la cauf de nos mouvémens & de nos fenfations; une de ces opinions fuppofe que lame eft préfente par tout le corps, & principalement dans les organes où le fentiment paroït réfider & où le mou- vement s'exécute, c'eft-à-dire dans les organes des fens & dans les mufcles. : La Nature, difent les_partifans de cette opinion, a voulu -que lame éprouvât une certaine fenfation à l'occafion d'un certain mouvement dans les nerfs, mais elle a voulu en même temps qu'elle ne fût fenfible dans les extrémités qu'autant qu'il y auroit une liaifon entre ces extrémités & le cerveau: ce Vo, Phyfol. de qui fe pafle dans l’épine, at-on ajouté, doit nous perfuader 47 Senac , pags cela; les nerfs qui en fortent ne fe céntinuent pas, felon Pa quelques-uns, jufqu'au cerveau, il n'y a nulle apparence par conféquent que les impreffions que font les objets aux extré- mités inférieures, aïllent jufqu'au cerveau par le moyen de la moelle épineufe; cependant fi on là fépare du cerveau, le Mém. 1759. Qq Voy. Tome 1, du - Toucher, 2-S21Ÿ 592 306 MÉMoiREs DE L'ACADÉMIE ROYALE mouvement périt : tout cela ne dépend que des loix du Créateur, qui a voulu que les endroits qui feroient féparés de la partie principale & où le fuc nerveux ne paroît pas être envoyé, fuflent infenfibles. j Ces mêmes Phyficiens fondent encore leur opinion fur ce que le fluide nerveux ne peut pas revenir fur fes pas: il ne faut pas s'imaginer, ont-ils dit, qu'un fétu qu'on paflera par Ja plante du pied où il fera une impreflion très-fenfible, puifle faire monter de fuc nerveux dans le cerveau: mais toutes ces: idées, fuivant M. Senac, font chimériques & ne méritent pas qu'on les réfute. Je ne m'arréterai point à rapporter ici toutes les. raifons qui renverfent cette opinion, dont M. Perrault eft un des partifans. Ce qu'il y a de contraire à la Phyfique & à l'Anatomié dans ce fyflème, n'eft pas tout-à-fait de dire, que l'ame eft par tout le corps où il fe fait des fenfations & où le mou- vement s'exécute: s'il étoit permis de comparer une fubftance créée avec fon Auteur, ne pourroit-on pas dire que l'ame exifte dans toutes les parties du corps, de même que Dieu exifte dans l'immenfité des efpaces, & quoiqu'il exifle en effet. dans ces efpaces, s'enfuit-il qu'il n'exifte pas plus fpécialement dans le: féjour de f gloire & dans les lieux où il veut que nous l'adorions fous de foibles apparences : l'ame exifle dans tout le corps, oui fans doute; mais opère-t-elle dans tout Île corps toutes ces merveilles qu'elle opère dans le cerveau? bien plus, en opère-t-elle aucune fans que le mouvement d'un fluide préparé dans le cerveau, pouffé du cerveau dans les nerfs & des extrémités des nerfs vers le cerveau, foit la caufe phyfique là plus prochaine de fes opérations. Je dirois donc volontiers, avec M. Perrault & fes fectateurs, que lame exifle dans tout le corps: nous ne connoiflons pas, il eft vrai, la manière d'exifter des efprits, nous favons feulement qu'ils exiftent; mais il n'eft pas moins vrai-femblable que ame, ou quelques-unes de fes facultés, exiftent dans toute l'étendue de là machine à laquelle il a plu au Créateur de l'unir; que DRASS OIL E NC ES 307 dans les origines prefqu'infiniment nombreufes des canaux nerveux, qui font les endroits où elle exerce le plus fon empire, ces origines font femées çà & là dans une infmité d’endroits de la fubftance du cerveau, du cervelet, de 1a moelle de Fépine: car les adverfaires les plus outrés de M. Perrault doivent néceffairement convenir que le pouvoir de l'ame réfide aufli-bien au bas de la moelle de l'épine que dans le cerveau. Quoique les liens phyfiques qui uniffent l'ame au corps ne foient pas tous connus, les phénomènes les plus importans de léconomie animale , l'analogie, la ftruéture même des parties nous forcent de convenir que le mouvement d’un fluide très-fubtil, lancé du cerveau dans les organes du mouvement, repoufié des organes du fentiment vers le cerveau, eft le nœud phyfique de cette union ; que ce mouvement s'arrête, les effets qui dépendent de l'union du corps & de lame font fufpendus; que ce mouvement fe rétablifle, les effets de cette même union, c’eft-à-dire les fenfations & les mouvemens mufculaires, recommencent de nouveau. I faut cependant convenir, avec les Phyficiens les plus exacts & les plus modernes, que l'ame, s'il eft permis d'af figner un lieu à une fubflance qui n'a point de parties, réfide plus fpécialement dans la fubflance médullaire & dans tous les lieux de origine des nerfs, que dans ceux où les nerfs fe ramifient : car premièrement, quand nous voulons exercer toute la force de notre efprit, nous faifons taire nos fens. Secondement , il eft certain que dans le fommeil, où le cerveau n'eft qu'afloupi, l'ame n'aperçoit aucune fenfation, quoïque les objets extérieurs faffent fur les fens des im preffions aflez vives; l’impreflion des objets fur les nerfs {enfitifs ne fuffit donc pas pour que l'ame exerce fes facultés. Troifièmement, c'eft à l'origine des nerfs que admirable burin d'une main invifible, je veux dire l'action du fluide nervêux repouflé au cerveau par l'action des objets extérieurs, écrit ces précieux caractères, ces traces qui entrent par le fecours des fens , qui forment & enrichiffent notre mémoire d'un tréfor Q qi 308 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYaAtzE incpuifable de connoiflances : lame ne voit rien de tout cela dans l'organe, ni dans ki longueur du nerf depuis l'organe ; fans l'organe, fans le nerf, fans le fluide dont il eft rempli, elle ne verroit prefque rien, & cependant ce qu'elle voit n'exifte très-fouvent point, ni dans le nerf, ni dans l'organe, ni dans l'objet ; elle voit par une faculté qui lui eft propre & qui n'a aucun rapport avec la matière, quelle couleur a amour ou la haine qui s’infinuent par les fens : quel rapport y at-il entre la douleur de la brülure & la divifion de quelques fibres que le feu excite dans la peau? mais cependant elle ne voit point qu'autant qu'une matière prefqu'éthérée, contenue dans nos nerfs, eft mile en action par les objets extérieurs. Quatrièmement enfin, c'eft que {es dérangemens du cerveau portent conflamment du trouble dans les fonctions animales, ainfi que je le dirai plus bas; c'eft que quand ces dérangemens font très-grands, les fonétions animales font abolies; c'eft que les dérangemens du cerveau ceflant , il arrive très-fréquemment que les fonctions animales fe reproduifent ; c'eft que la feétion ou la ligature d’un nerf abolit le fentiment ou le mouvement au-deflous de la ligature, quoiqu'ils perfévèrent dans toutes les parties fituées entre la ligature & le cerveau ; c'eft qu'enfin, f vous Ôtez la ligature , le fentiment & le mouvement fe réta- bliffent dans les parties fituées au-deffous de la ligature. Une feconde opinion établit l'empire ou le fiége principal des facultés de l'ame dans le cerveau /f); mais elle exclut des nerfs toute efpèce de cavités ; ils ne font que des filets folides ; les nerfs, dit-on dans ce fentiment, font des corps folides fufceptibles de mille & mille vibrations, & ils portent l'ébran- lement ou les vibrations qu'ils reçoivent des objets extérieurs aux lieux où s'exercent les facultés de l'efprit, ceft-à-dire aux endroits de leur origine; voilà pour ce qui regarde les fenfations. Quant aux mouvemens mufculaires en conféquence d’une action de la volonté, l'origine des nerfs eft ébranlée, & cet ébran- lement eft dans l'inftant porté aux mufcles auxquels les nerfs (CF) I faut remarquer que je comprends fous le nom de cerveau le cerveau proprement dit, le cervelet & la moelle de l’épine. DIEISVISITATIE NIC:E!S 309 fe terminent. Cette hypothèfe a été réfutée tant de fois & par des raifons fi folides, que je ne crois pas devoir m'arrêter à en montrer les défauts : je vais pafer rapidement au fentiment qui de nos jours réunit prefque tous les fufrages. Dans la troifième opinion , l'ame eft affectée dans le cerveau de toutes {es fenfations ; elle y forme fes idées: il eft le magafin de fes connoiffances , le fiége de fes réflexions, le lieu de fes méditations ; il eft un afflémblage admirable d’une infinité de vaifleaux d’une fineffe incompréhenfible ; il eft ia fource d’un fluide, dont la ténuité & la mobilité peuvent être comparées à celles du: premier élément. Ce fluide étonnant eft cet être moteur phyfique qui anime tous nos reflorts ; toujours mobile, toujours agité il eft le chef-d'œuvre de la Nature mis en mouvement ; fa fource eft la male du fang ; fon laboratoire eft le cerveau; il eft pouffé perpétuellement dans quarante paires de filets, dont chacune eft l’aflemblage d'une multitude furprenante de petits canaux qui font des prolongemens de la fubflance du cerveau ; enfin il eft, sil m'eft permis de me fervir de cette expreffion , ce feu facré qui entretient perpé- tuellement nos jours; il eft le flambeau qui éclaire notre ame, la fource de nos affections & de nos defirs, la caufe phyfique la plus prochaine de nos fenfations: examinons les fondemens de cette doctrine. Premièrement, le cerveau eft compofé de deux fubftances, dont l'une, à raïfon de fa couleur, eft appelée cœndrée (3), & la feconde eft nommée médullaire ; la première eft enve- loppée d’une membrane toute vafculaire /4), qui s'infinue par plufieurs plis & replis dans le cerveau, & elle s'appelle la pée- mére ; tous les vaifleaux de cette membrane, les artériels ainfr - que les veineux, fe plongent dans la fubftance cendrée, & il eft démontré par l'Anatomie, que cette fubftance en eft compolée, & même qu'elle n’eft compolée que de ces vaiffeaux. (g) Cette dénomination n’eft pas (h) La. feconde left auffi dans exacte, car dans une infinité d’en- | tous les endroits où la fubftance- dioits la fubftance corticale eft re- | corticale eft recouverte de la {ub£- couverte de la fubitance blanche. tance médullaire. Q q ü 310 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & de quelques fibres médullaires qui s'entremélent avec eux. Secondement, les plus petits rameaux de la fubflance grife, cendrée ou corticale, dégénèrent en'des vaiffeaux d’une finefle extrême, d’une blancheur de lait, qui par leur affemblage forment la feconde fubftance du cerveau. Froifièmement, la plus grande partie des filets ou vaifieaux blancs, dont la fubftance médullaire n'eft qu'un affemblage, fe raflemblent en quatre-vingts faifceaux nerveux ou quarante paires de nerfs, qui portent le fluide nerveux dans toutes les parties du corps. Quatrièmement, ce fluide pouflé le long des nerfs, en conféquence d'un ordre de la volonté, dans les mufcles vo- lontaires, eft la première caufe de leur action , il eft auffi la première caufe phyfique de l’aétion des mufcles, fur lefquels la volonté n’a pas d’empire; repouffé des extrémités des nerfs au cerveau, il eft la caufe phyfique la plus prochaine des fenftions. ä Cinquièmement, le fluide nerveux remplit continuellement les nerfs, mais tantôt plus, tantôt moins abondamment : quand les nerfs portent ce fluide dans une certaine abondance &c avec un certain degré de célérité dans un mufcle quelconque, il durcit, fe gonfle & {& raccourcit, & cet état eft appelé érat de contrattion du mulile : quand le fluide nerveux cefle de couler avec cette abondance & cette célérité requifes pour gonfler, durcir & raccourcir le mufcle, cet organe fe reliche, & cet état eft appelé rekichement du mufcle. Sixièmement , il eft des mufcles, tels que ceux de la ref- piration, qui peuvent agir & qui agifient en effet fans que le fluide nerveux y foit envoyé en conféquence d'un ordre exprès de la volonté, mais où la volonté peut l'envoyer aufÎr & où elle l'envoie très-fouvent, tels font les mufcles inter- coftaux, le diaphragme, les mufcles du bas-ventre, &c. Septièmement, un aiguillon quelconque, une caufe irritante appliquée aux nerfs moteurs, y accélère le cours du fluide nerveux, & ce fluide met en action les mufcles auxquels les nerfs ivités {e diftribuent; c'eft ainfi que leflomac, les inteflins, DES SCIENCES. 311 la veffie, les fibres mufculaires des artères fe contraélent fans que la volonté y ait aucune part ; c'eft ainfi que les mufcles de la refpiration agiffent fans que la volonté y prenne part & même contre le gré de la volonté. Tel fut le fentiment de l'immortel Galien, tel eft le fen- timent adopté de nos jours ; il eft & il doit être en effet le feul qui foit reçu, car il eft le feul qui foit fondé fur des preuves anatomiques, fur l'analogie de la ftruéture du cerveau & des nerfs avec celle de tous les orgagnes où il fe fait des fecrétions & où la liqueur filtrée eft conduite plus où moins loin pour des utilités; enfin fur l'impoflibilité où l’on eft, fi on le rejette, d'expliquer les plus nobles & les plus importantes fonctions de l'économie animale, car j'ofe avancer que fi on rejette le fyflème du fluide nerveux, la Phyfiologie devient un champ prefque flérile, & on fe trouve forcé d'aller à tout inflant contre les notions les plus fimples des loix du. mouvement. C'eft aufli ce fentiment que je me propole d'éclaircir au- _jourd'hui & d'amplifier; mais mon principal objet eft de l'ériger en un fyftème de circulation, moins appuyé fur les fens que celui de la circulation du fang, mais du refte fondé fur des raifons aufi folides. ! Les inventeurs de la circulation du fang ont été conduits à cette découverte fi tardive pour la gloire de la Médecine & le foulagement des malades, par un procédé différent de celui. qu'ont fuivi les inventeurs du fyflème du fluide nerveux & de l'action de ce fluide; les premiers n'ont eu, pour ainii dire, que la peine de defcendre des caufes aux eflets; la ftructure du cœur, celle des artères, le fang jailliflant des cavités ouvertes du cœur des animaux, des cavités ouvertes des arières, la diflribution des artères & des veines par #8fit le corps, leur terminaifon au cœur comme à une fource commune, les valvules des veines, celles du cœur & des artères, le gon- flement entre {a ligature d’une artère & le cœur, celui de la: veine entre la ligature & l'extrémité, étoient & feront toujours: des objets capables de frapper tous les yeux.. 312 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE La marche de lefprit humain dans le développement des ufages des nerfs & du cerveau, n’a pas été tout-à-fait la même; prelqu’entièrement abandonné des fens dans la recherche des caufes, il n'a pu y parvenir que par l'examen d’une infinité d'effets qui étonnent la raifon; l'efprit a faifi des effets admi- rables & infiniment variés, eflets où le corps & l'ame coopèrent_& fe difputent une dépendance & une priorité alternatives; ces eflets, fuivant les plus fimples notions «des chofes, ne peuvent être produits que par telles & telles caufes invifibles ; & on a conclu, donc ces caufes exiftent, quoique des fens ne puiflent pas les apercevoir. On peut dire encore avec raifon, qu'un attrait fecret a porté, dañs tous les temps qui fe font écoulés depuis Galien jufqu'à nous, les plus célèbres Phyfiologiftes à regarder le cerveau comme le fiége des fenfations & de la caufe de nos mouvemens : tout homme en général, par une efpèce de fen- timent intérieur, rapporte à cet organe les plus nobles opérations de fon être; une perfuafion fecrette, indépendamment du raifonnement, lui fuggère fans ceffe que l'ame a befoin de da tête pour remuer nos reflorts, pour {entir, penfer , juger, raifonner, réfléchir, fe reflouvenir; enfin que c'eft principale- ment par cet organe, que s’exécutent les fonctions qui ont l'ame pour principe. Parcourons les principaux effets qui ont fortifié ce fentiment intérieur, & qui ont découvert à Galien des vérités qui l'ont rendu fupérieur à tous les fiècles qui fe font écoulés depuis lui jufqu'à nous; car, en vérité, on ne peut fans ingratitude refufer à Galien d'avoir le premier trouvé le fil qui devoit un jour nous mener à la découverte de la circulation des efprits, de même qu'il a trouvé celui qui a conduit les Colombus, les Fra - Paolo, IC éflpin , les Harvei, à la découverte de la circulation du fang: premièrement , ces effets que je vais rap- porter ont été développés pur des expériences ; fecondement, ces effets font des maladies furvenues, ou par des caufes ex- térieures ou par des caules intérieures, à une multitude prefque infinie de perfonnes qu'on a vu perdre, ou tout-à-coup ou ls DES SCIENCES. 313 -par degrés, la faculté d'agir & de raifonner; maladies qui n'étoient autre chofe que des dérangemens de la fubftance du cerveau, ainfr que l'ouverture de la tête Fa prouvé. Certainement nous avons des obfervations fans nombre, & c'eft ce qui fair que je n’en citerai aucune; qui prouvent inconteftablement: _ Premièrement, que le cerveau étant obftrué, enflammé, coupé, fuppuré, foit par des coups, des chutes où par quelque caufe extérieure que ce puifle être, foit par l'engorgement ou la rupture de fes vaifleaux ; tantôt le mouvement s'afloiblit, fe détruit, & tantôt le fentiment, & fouvent l'un & l'autre à la fois. Secondement , que cet affoibliffément du mouvement & du fentiment eft plus ou moins grand, fuivant que la caufe qui obftrue, qui comprime, eft plus ou moins grande, Troifièmement, que le mouvement & le fentiment ceffent tout-à-fait quand la caufe qui comprime, agit avec un certain degré de force & pendant un certain temps. Quatrièmement, que le mouvement, le fentiment & tout ce qui entre dans l'ordre des idées, fe rétabliffent à mefure qu'on diffipe les caufes qui preffent le cerveau. | Cinquièmement , que cet organe étant abfolument détruit, nous. perdons fur le champ la vie & le fentiment. Nous voyons certainement dans les faits, fur lefquels font fondées de telles vérités, un rapport entre le cerveau d'une part, & entre le mouvement & le fentiment d'autre part, tel que celui de la caufe à l'effet, tel que celui que nous defirons pour aflurer que tel ou tel organe produit telle ou telle fonction. Tous ces faits rapportés par Galien & vérifiés par fes fuc- cefleurs & par nous-mêmes, répandent tant de lumières fur les ufages du cerveau, que quand même nous ne verrions pas les liens phyfiques qui uniffent le cerveau à tous les organes fufceptibles de mouvement & de fentiment, nous ferions raifonnablement fondés à aflurer qu'il eft la fourée phyfique du mouvement & du fentiment; la force des obfervations nous y obligeroit, quand même nous n’aurions aucune connoiflance Mém. 1759. Rr De Hiyp, à Platon, decreris , 1, VH, 314 MÉMOIRES DE L’AGADÉMIE ROYALE des quatre-vingts produétions que le cerveau envoie dans toutes les parties du corps, & qu'il a plu aux Anatomiftes d’appeler des nerfs. Ce que je viens de rapporter fur les faits qui fixent les ufages du cerveau, devoit, ce femble, découvrir à tous les efprits éclairés l'erreur d’Ariftote, qui confifte à regarder le cœur comme le fiége des fentimens & des paffions; cependant. on peut dire avec vérité, que cette erreur s'eft perpétuée- jufqu'à nous, & qu'elle fubfifte encore chez prefque tous les. Auteurs de la DialeGtique; depuis le père de l'ancienne Phi-- lofophie jufqu'à M. Blanchet, prefque tous les Philofophes fe. font exprimés comme fi en eflet le cœur étoit le fiége du fentiment & des paflions; ces expreflions ne peuvent être reçues que dans ün fens métaphorique, & c'eft dans ce fens qu'on doit entendre différens paffages de l'Écriture qui femblent établir le fiége des paflions & du fentiment dans le cœur. Galien voyant tous les nerfs naître du cerveau & ne les voyant naître d'aucun autre vifcère, d'aucun autre organe, aura dit, ces filets font les liens qui uniflent le cerveau à toutes les parties du corps; l'infpection anatomique m'autorife à l'avancer; ne feroit-ce point par eux que cet organe donne à toutes les différentes parties du corps la faculté de fentir &c de fe remuer? cela doit être ainfi: car autrement, comment le- dérangement du cerveau afloibliroit-il, détruiroit-il dans toutes ks parties du corps le mouvement & le fentiment. Müis il falloit, pour que Galien affermit Fufage qu'il avoit. donné au cerveau, & pour qu'il mît en évidence les ufages des nerfs, qu'il s’aflurât fi en liant & en coupant les nerfs, les parties auxquelles ils fe diftribuent perdroient le fentiment & le mouvement, & fi en déliant les nerfs, elles reprendroient leur mouvement & le fentiment; & c'eft à quoi if a réuffr, car il a obfervé que la ligature des nerfs prive la partie au- deffous de la ligature du mouvement & du fentiment, & qu'en. déliant les nerfs, le mouvement.& le fentiment fe rétabliffent, Cette expérience, je veux dire la ligature du nerf, qui a été réitérée cent & cent. fois depuis Galien, prouve Cal. 2 DES SCIENCES. CE évidemment que c'eft par les nerfs que le cerveau anime les organes des fens & du mouvement. Si les bornes d’un Mémoire académique me permettoient de rapporter les expériences qu'un grand, nombre d’Auteurs ‘célèbres ont faites, pour développer, à l'exemple de Galien, Jufage des nerfs, celles que j'ai faites moi-même, il me feroit facile, mais très-inutile, d'en citer plufieurs ; la fimple obfer- vation des paralyfies & flupeurs momentanées que nous donnons aux mufcles & aux parties de Favant-bras & de la main, en comprimant le nerf qui paffe auprès du coude, quand nous appuyons le coude fur un corps dur, où de celles qui arrivent à la jambe & aux pieds, lorfqu'étant affis fur un corps dur, le poids de notre corps prefle le nerf fciatique, la reproduétion du mouvement & du fentiment auffitôt que la caufe qui prefloit le nerf du bras ou celui de la cuiffe ceffe d'agir; cette obfervation, dis-je, qui a été faite par tous les hommes, prouve inconteftablement que c'eft par les nerfs que le cerveau entretient le. mouvement & le fentiment. Voilà donc l'ufage du cerveau & des nerfs mis en évidence. Quel mérite pour un feul homme, d'avoir développé Ie premier ces ufages admirables ! car enfin c'eft avoir levé le voile qui cachoit aux yeux des Philofophes, les plus im- portantes , les plus fublimes fonctions de l'ame & du corps : mais Galien ne s’eft pas borné à dire, à prouver que le cerveau & es nerfs font les rênes dont fe fert l'Auteur de {a Nature pour régir notre être & pour le rendre fufceptible de mouvement & de fentiment, il a voulu découvrir comment & par quel agent ces merveilles font opérées, & ravi de Ja multitude, de la précifion, de la netteté de nos idées, de a multitude de nos fenfations, de la force, de la célérité, de la variété, de la jufteffe de nos mouvemens, il a dit, & à cet égard nous ne pouvons pas dire plus que lui, que c'eft par des fluides très-fübtils filtrés dans le cerveau & coulans du cerveau par Îes nerfs dans toutes les parties du COrps, ‘aux- quelles, à raifon de leur ténuité imperceptible , il a donné le nom d'efprits. Rri 316 MÉMoiIREs DE L’ACADÉMIE ROYALE Ici Galien & toute cette antiquité choïfie qui a marché für fs traces s'arrêtent; Galien & fes feétateurs n'ont point déve- loppé les loix que fuivent les efprits dans leur cours, & à cet égard Galien avoit pénétré beaucoup plus loin dans la découverte de la circulation du fang: en effèt, ni Galien, ni fes fe‘ateurs n'ont dit que les efprits circulent, & Galien & plufieurs de fes fectateurs ont avancé que le fang circule, & peu s’en faut qu'ils n'aient raffemblé toutes les parties du fyftème de la circulation. Mais ce qui eft furprenant, c'efl que tous les Philofophes anatomiftes, depuis Galien jufqu'à nous, mont pas porté la matière des efprits beaucoup au-delà du terme où Galien Fa laiffée : quelques-uns en ont douté, les moins favans les ont niés, prefque tous les ont adoptés; ceux-ci nous ont laifé : d’excellens Ouvrages fur l'économie animale, fans avoir porté far la matière des elprits leurs connoïffances beaucoup au-delà du terme où Galien les avoit fait arriver. Cependant ce que je viens de dire fur le peu de: progrès qu'on a fait fur les loix du mouvement des efprits depuis Galien jufqu'à ce fiècle, n'a rien de furprenant par rapport aux Anciens, c'eft-à-dire de ceux qui ont paru depuis Galien jufqu’au temps du renouvellement de lAnatomie fous Carpi, & même long-temps après Carpi; ces Anciens n'étoient pas, & je n'en excepte pas Galien, aflez verfés dans la fine Ana- tomie pour que la connoiflance de l'exiflence & du cours des efprits fût le fruit d'une idée complette de fa fhuéture du cerveau, des nerfs & des organes des fens & du mou- vement: fr Galien, fi les plus célèbres Médecins qui font venus. après lui, ont établi l'exiftence & le mouvement des efprits, c’eft en partie parce que frappé d'étonnement en confidérant la célérité extrême & l'exactitude merveilleufe avec laquelle les mouvemens de nos parties & les fenfations s'exécutent, ils ont imité les Phyficiens, qui fondent quel- quefois la vérité d'un principe, r1.° fur ce qu'il ne répugne point, 2.° fur ce qu'il eft une fource de corollaires utiles 8. qu'il tranche des difficultés inexplicables par tout autre principe, & j'avoue que cela éft bien fufhfant, DES SCIENCES. 317 Quel eft donc le mérite des Modernes dans fa matière que nous traitons? s'il me convenoit de m'ériger en arbitre de leurs Écrits , je dirois , non pas qu'ils ont porté leurs connoïffances beaucoup plus loin que Galien & les Anciens fur l'exiflence & le cours des efprits, mais qu'ils ont mieux vu le cours, la nature & lexiftence des efprits, qu'ils n'ont pas donné dans les écarts que Galien n'a pu éviter, & qu'enfin læ doctrine des efprits me paroît dans leurs Ouvrages le fruit d’une mé- ditation profonde, d'une connoiffance complette de la plus. fine Anatomie & des loix de la Phyfique: que de recherches n'ont-ils pas faites, que d'expériences n'ont-ils pas tentées pour répandre de nouvelles lumières fur une doétrine obfcure, mais dont ils étoient charmés, pour rendre fenfible, sil étoit offible, un fluide à l'aide duquel on explique, d’une ma- nière capable de fatisfaire des. efprits éclairés, les fonctions {es plus myftérieufes de l'économie animale? Is ont examiné avec la plus grande attention, la flruéture des organes où Galien leur apprend que les efprits font féparés de la maflé commune des fluides, & celle des filers qui portent, felon Galien, les efprits dans toutes les parties du corps pour le mouvement & le fentiment; da ftruture du cerveau bien développée, les a convaincus qu'il eft un organe fecrétoire, que la fixième partie au moins de la mafle totale du fang & la portion la plus fluide de cette mañe y eft portée avec beaucoup de célérité; qu'il ne fort pas d’autres canaux excréteurs du cerveau, du cervelet & de la moelle de l'épine, que quatre-vingts paires de nerfs qui fe répandent dans toutes les parties du corps. Sur cette infpection, on a été fondé à dire, un fluide fubtil, auquel Galien donne le nom d'efprits, eft réellement filtré dans le cerveau, & les nerfs qui paroiflent folides à nos yeux, font l'aflemblage d’une multitude de canaux qui -conduifent dans toutes les parties du corps les efprits qu'ils reçoivent du cerveau; car fi cela n'étoit pas ainfr, il feroit néceflaire que tout le fang qui aborde au cerveau retournât: au cœur par les veines jugulaires, fans avoir en rien contribué Re ii 318 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE aux avantages généraux de l'économie animale : or une telle idée eft contraire aux voies que fuit la Nature dans la conftruction de tous les organes fecrétoires du corps humain. L'art des injections eft venu au fecours de Ia raifon, ïl nous a fait réuflir à démontrer que la moitié au moins de la fubftance du cerveau, eft l'affemblage d'une grande mul- titude de vaifleaux dont la fineffe & Île nombre annoncent la plus abondante & Ha plus fubtile des fecrétions. Mais au premier coup-d'œil la fubflance grife du cerveau paroît - elle vafculaire? non, fans doute, elle ne le paroït guère plus que la fubflance même des nerfs; ce n'eft qu'à faide des injections & par l'examen des cerveaux enflammés, w'on réuflit à fe convaincre & à démontrer qu'une fubftance qui ne paroît d'abord pas plus organifée à nos foibles fens que de la graifle figée, qu'une matière cafeufe, eft toute vafculaire; ajoutons que l'œil aidé des verres, a vu qu'il fe fait une fecrétion d'une liqueur pure & tranfparente comme le criftal par des artérioles blanches criftallines , dont une autre fubftance plus blanche encore & qui forme les nerfs, eft une continuation : fi nous pouvions, avons-nous dit cent fois en nous-mêmes, faire paffer nos liqueurs colorées dans la fubftance même des nerfs, foumettre aux regards des hommes les cavités où il eft à préfumer que l'ame réfide, il femble qu'il n'y auroit plus rien d’obfcur dans l'économie animale. Nous voyons des yeux du corps, & fans le fecours des verres, la fubftance blanche, prendre naiffance de la fubflance coïticale par des filets diftinéts; & la raifon preffée par les difficultés nous dit, que chacun de ces filets qui paroît fimple à nos yeux, eft l'aflemblage de plufieurs petitsiconduits placés les uns auprès des autres, fans que la cavité de fun commu nique avec celle de l'autre; fuppofition dure, mais néceffaire; car fans elle nous n'aurions que des fenfations confufes , que des perceptions compliquées & obfcures que l'efprit ne pourroit faifr à la fois, & nous ne pourrions nous empêcher de mettre en action plufieurs mufcles quand nous voudrions n'en faire agir qu'un. DES :S CTEN er s 319 S'il eft prouvé par l'Anatomie, ainfi que je viens de le- dire, que la fubflance corticale qui ne paroifloit point orga- nifée, avant les recherches de l’Anatomie moderne, eft en effet un affemblage de vaiffeaux , d'abord fanguins, dans la pie- mère, & qui dégénèrent dans une multitude de petits tuyaux criftallins; il eft raifonnable d’affurer que la fubftance mé- dullaire, c’eft-à-dire la fubftance des nerfs, étant la conti- nuation de ces canaux tranfparens que l'art des injections. démontre dans la fubftance corticale, en eft compofée, & que fi on ne peut faire pénétrer la cire & les liqueurs colorées: dans les conduits de la fubftance des nerfs, c'eft que leurs cavités font plus petites que celles des vaifleaux de la fubftance corticale. S'il étoit poffible de fuppofer folides les filets dont la: fubftance médullaire eft l'affemblage, il faudroit donc que ces fluides fubtils qui circulent évidemment dans la multitude innombrable d'artérioles Iymphatiques que nous découvrons dans la fubftance corticale, revinfient fur leurs pas: fi cela étoit ainfr, pourquoi verrions-nous la fubftance corticale donner: par-tout naiffance à la fubftance médullaire. Si cette ‘dernière fubflance eft nourrie, entretenue, augmentée par la fubftance corticale, ainfi qu'il eft prouvé par Finfpeétion ; il eft donc certain que les artérioles & les venules corticales fe prolongent. dans la fubflance médullaire. L’Anatomie nous découvre, à quelques différences près. tirées principalement du volume de la mollefle du cerveau & de l'extrême ténuité de fes vaiffeaux , une grande reflemblance entre la flruéture du cerveau & celle des reins; car de même- que dans le rein la fubftance corticale donne naiffance à a. fubftance tubuleufe, de même dans toutes les parties du cerveau A fubflance corticale donne naiffance à la fubftance médullaire ; le rein, comme le cerveau, n'eft compolé que de deux. fubflances , de mème que dans le rein on voit naître la fubf- tance tubuleufe de tous les points de la fubftance corticale, de imême dans le cerveau on voit la fubftance médullaire naître: de tous les. points.de la fubflance corticale ;, de. même que: 320 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE dans le rein on voit les différentes portions de la fubflance tubuleufe, éparfes çà & là, choifir, pour ainfi dire, leur origine, & enfuite fe raflembler comme autant de rayons convergens pour former ies papilles, de même dans le cerveau on voit les différentes portions de la fupftance médullaire fe rafflembler, devenir convergentes pour former les trois cordons nerveux. Cette reflemblance dans la flruéture de deux organes différens, annonce des rapports dans la circulation des fluides qui les arrofent ; & on elt très-fondé à dire que, de même que dans le rein, la fecrétion de l'urine fe fait dans la fubf tance corticale, de même la fecrétion des efprits fe fait dans la fubflance corticale du cerveau ; & de même que dans le rein les fluides filtrés dans la fubftance corticale coulent con- tinuellement de cette fubflance dans la fubftance tubuleufe & dans les papilles, de même dans le cerveau les efprits filtrés dans la fubitance corticale coulent continuellement de cette fubftance dans la fubftance médullaire & dans les nerfs: mais dans le rein les fluides filtrés font excrémentitiels & ne doivent plus rentrer, au lieu que les fluides filtrés dans la fubftance corticale du cerveau font le foutien de notre vie & les agens phyfiques des fonctions animales, & par conféquent les vaiffeaux médullaires du cerveau & des nerfs ne font point, ainfr que nous le dirons plus amplement dans la fuite, des canaux excré- toires, mais un affemblage d’artérioles & de venules qui font la continuation des artérioles & des venules tranfparentes de la fubflance coïticale, artérioles & venules où la portion a plus précieufe de nos fluides coule du cerveau aux extrémités par les artères, & revient des extrémités au cerveau par les veines médullaires, & du cerveau au cœur par les veines jugulaires pour recommencer une circulation nouvelle. A ces différences près, l'analogie entre le cerveau & les autres organes où il fe fait des fecrétions, eft fi folidement établie, qu'il n'eft pas poffible qu'il ne s'y fafle pas une fecrétion proportionnée à la quantité du fang que le cœur y envoie. Si nous joignons à l'analogie ce que nous avons dit fur Ja truéture du cerveau, nous ferons folidement fondés à dire premièrement, | Dets ASC E NU C.En 5 327 premièrement , la partie rouge du Rang circule dans les artères & dans es veines rouges de da pie-mère. Secondement , la fubflance corticale étant compofée, ainfr que les injeétions le démontrent, d'une infinité d'artérioles & de vénules qui font les rameaux de celles de la pie - mère ; & ces artérioles & vénules étant lymphatiques & tranfparentes, des fluides beaucoup plus ténus que la paitie rouge du fing, coulent dans la fubftance corticale, T'roifièmement, les artérioles & les vénules de Ja fubflance corticale fe continuant avec la fubftance des nerfs, il fuit que les filets de cette fubflance font des artérioles & des vénules, telles que celles de la fubftance corticale; muis, de même que les artérioles & les vénules de la fubflance corticale font plus ténues que celles de Îa pie-mère, de même auffi les artérioles & les vénules de la fubfiance médullaire font plus ténues que celles de la fubflance corticale: & comme la découverte des cavités de ces vaiffeaux de la fubflarice coiticale eft le dernier terme de la force des yeux aidés des verres, il fuit que, fr nous ne voyons pas les cavités des artérioles & des vénules de la fubftance médullaire, c’eft que nos fens font trop foibles pour les apercevoir , quoique l'exiflence de ces artérioles & de ces vénules foit Aie certaine que celle de leurs petits trous répandus dans la fubflance côfticale. Ainfr toute la partie rouge du fang qui eft apportée au cerveau, excepté quelques petits courans qui traverfent le fubftance médullaire, circule dans la pie-mère ; des fluides plus ténus , crlalite & tranfparens circulent dans les artères & les JéQulES de la fubftance corticale ; & des fluides beaucoup plus fins encore circulent dans {a fubflance des nerfs: ce font les efprits que fon diftingue en trois clafles différentes ; favoir €h efprits vitaux, efprits naturels & efprits animaux, Les efprits vitaux font ceux qui animent les mufcles né- ceflaires à la vie, Les efprits naturels font ceux qui animent Îles mufeles qui ont un rapport beaucoup plus éloigné avec la vie: ces deux Mer. 1759. Sf 322 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE fortes d'efprits ne reconnoiffent point l'empire de la volonté, ou du moins nous ne fenions point cet empire. Les efprits animaux font ceux qui fervent aux fonctions du corps & de lame; mais on doit diftinguer deux fortes d'efprits animaux, favoir les efprits animaux moteurs, & les efprits animaux fenfiifs, Les efprits animaux moteurs font ceux qui en conféquence d'un ordre de la volonté animent nos mafcles; les efprits animaux fenfitifs font ceux qui portent au cerveau les impreflions des objets ; les efprits animaux fenfitifs font, s’il m'eft permis de parler de la forte , Les efpions de l'ame, c’eft par eux qu'elle s'inftruit ; les efprits animaux moteurs font les miniftres & les exécuteurs de fes ordres. Les Auteurs qui ont le mieux écrit fur le mouvement des efprits animaux , penfent qu'ils rempliflent les cavités des nerfs dans le temps du repos des mufcles comme dans le temps de leur action, avec cette différence que dans le temps du repos ou relichement , il y en a beaucoup moins que dans le temps de la contraction ; pour la contraction d'un ou de plufieurs mufcles il fe fait, fuivant le fentiment le plus reçu , un épan- éhement d’efprits plus abondant dans les nerfs de ces mufcles ; cet épanchement fe fait avec plus ou moins d'abondance , plus ou moins de célérité, fuivant, l'effort plus ou moins grand que le mufcle doit produire, & fuivant le plus ou le moins de vitefle avec laquelle nous voulons le contraéter ; mais les efprits coulent-ils dans les nerfs par un mouvement continuel & progreflif? c'eft ce qu'on ne dit point : quelques-uns même prétendent que lés nerfs font bouchés où fermés à leurs ex- trémités, afin qu'il ne f fafe pas une dépenfe inutile d'efprits. Ce que je viens de dire ne regarde que lé mouvement des elprits dans les nerfs moteurs où mufculaires: venons au mouvement des efprits dans les nerfs fenfitifs. Suivant ce que J'ai pu recueillir de la leéture des Ouvrages des Phyfologiftes, k mouvement des efprits dans les nerfs fenfifs ne diffère en riea du mouvement des efprits dans les nerfs moteurs ou muf- cukires, dans le temps du relichement des mulcles; ces nerfs DES SCIENCES 323 étant une fois remplis, le fluide nerveux y eft dans une’elpèce de repos jufqu'à ce que l'impreffion d'un objet extérieur lui donne un ébranlement ou efpèce d’ondulation qui le fait refluer,, ou du moins qui le repoufle un peu vers le cerveau, & c'eft cette ondulation ou efpèce de reflux qui porte au éérveau les impreflions des objets extérieurs, & qui burine dans la fubf. tance de cet organe cette multitude infinie de traces ou caractères imperceptibles, à chacune defquelles lame attache un certain nombre d'idées. Mais il n'eft pas poffible que les efprits croupiffent dans es nerfs fenfitifs; il faut que nos fluides foient fans cefle renouvelés: mais, dira-t-on, ils font renouvelés parce qu'ils tranfpirent à travers des pores imperceptibles ; mais c'eft une fuppofition que rien n'appuie, & qui n'empécheroit pas les tuyaux’nerveux de perdre avec le temps leurs cavités (à); car c'eft une loi générale dans l'économie animale, que quand les fluides qui arrofent un canal, ceffent de couler le long du canal, fes parois fe collent & il devient un corps folide. Le féntiment des Auteurs qui regardent les nerfs comme des canaux fermés à leurs extrémités, eft donc infoutenable: d’ailleurs , ainfi que je le dirai ci-après , il répugne que les efprits pouffés vers Je cerveau par limpreflion des objets , refluent paï le même canal qui les a apportés. Que deviennent les efprits qui coulent dans les nerfs moteurs, dans le fentiment reçu fur le mouvement des ef, prits? Javoue que dans tout ce qui a été écrit à ce fujet, je ne vois rien de fatisfaifant ; les uns, tels que Boërhaave, fuppofent que les nerfs moteurs fe terminent par des efpèces de cul: de-facs ou cellules, & qu'une partie des efprits s'échappe ; après la contraction du mufcle, par des pores imperceptibles, tandis qu'une autre partie des efprits eft reprife par des vénules qui les conduifent dans les veii.:s fanguines: d'autres avancent qu'ils refluent vers le cerveau par les canaux qui les ont (3) La tranfpiration de nos fluides dans les artères ne les empêche pas de devenir des corps folides, ‘quand elles ceffent d'être parcourues par le fang. Sf ÿ 324 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE apportés; d'autres, qu’ils trouvent .des réfervoïrs dans les tendons; d’autres, qu'ils fe diflipent par la peau & dans les. grandes cavités du corps. Tel eft le terme de nos connoiflances fur le mouvement des efprits, & on voit qu'il efl à peu près le même que celui où Galien avoit porté les fiennes: nous ne fommes donc pas plus avancés fur le cours des efprits, que l'étoient les Ana- tomiftes depuis Hippocrate jufqu'au temps de Columbus, fur a circulation du fang; on ne doutoit point dès-lors que le: fang n'eût quelque mouvement, mais par une efpèce de flux & de reflux , il retournoit à fa fource par le même canal : de même aujourd’hui perfonne ne doute que les nerfs ne con- tiennent les efprits & que le cerveau n'en foit la fource, mais perfonne ne dit qu'ils circulent ; tous les Phyfiologifles cé- kbres avancent que les efprits entrent des artères corticales: du cerveau dans la fubflance des nerfs, mais perfonne, que. je fache, ne dit que les efprits foient rapportés au cerveau ar des nerfs: on dit bien que dans l'inftant de la contraétion mufcuhaire les efprits coulent, & qu'ils coulent même avec. une extrême célérité du cerveau le long des tuyaux nerveux ;; mais dans le temps du relâchement mufculaire, les efprits continuent-ils de couler le long des nerfs, ou bien {eur cours: eft-il fimplement ralenti ou tout-à-fait fufpendu? ce font des: queftions fur lefquelles on ne s'explique point. Il paroît ce- pendant que dans cette efpèce d'incertitude, on eft plus porté à fuppofer le repos des efprits moteurs dans les nerfs moteurs, qu'un mouvement progreflif, mais ralenti, le long de ces nerfs. Pour ce qui regarde le mouvement des efprits dans les: nerfs fenfitifs, on penfe unanimement qu'ils font. repouflés. vers le cerveau par les mêmes canaux qui les portent du: cerveau aux organes des fens. C’eft ce mouvement que je vais développer & aflüjétir d’abord aux mêmes loix que fuit le fang dans les artères & les veines, &c enfuite à celles qui lui font impofées par les ordres de la volonté & par l'actiom de la matière qui agit fur nos corps, D'E;S SC: E N CES 325 MÉMOIRE SUUIER LA HAUTEUR SOLSTICIALE DU SOLEIL AU SOLSTICE D'ÉTÉ DE 1763. Par M. CaAssiNI DE THURY. A difficulté de déterminer avec fa dernière précifion les: hauteurs abfolues des Aftres, foit qu'on les obferve avec des quaïts de-cercle ou des gnomons, parce qu'elles dépendent non-feulement de la divifion exacte des inftrumens que l'on emploie, mais encore des variations qu'ils éprouvent par la. différente température de l'air, m'a engagé à fuivre une mé- thode abfolument indépendante de la divifion & de l'état des inftrumens , pour reconnoître la quantité dont la hauteur folf- ticiale peut changer. . J'ai publié dans les Mémoires de l'Académie de 1740, les obfervations que j'avois faites au folftice d’été avec le fecteur que j'avois employé à Bourges, à Rhodès & à Perpignan pour les obfervations des étoiles, & j'en avois conclu l'obliquité de Vécliptique de 234 28° 21". : Ayant vérifié en 1742, les mêmes obfervations avec un: quart-de-cercle de fix pieds de rayon, j’avois trouvé lobliquité de l'écliptique de 2:34 28° 30", plus grande de 9 fecondes, quantité qu'on ne pouvoit attribuer entièrement à fa variation de l'obliquité de F'écliptique, ni au défaut des obfervations,. dont les réfultats les plus éloignés ne différoient que de deux à trois fécondes, mais én partie aux divifions des inftrumens,, &. en partie à l'état aétuel des deux quarts-de-cercle, qui change continuellement , & qu'il eft difficile de bien établir ; mais toutes: les difficultés s'évanouiffent lorfque Fon Re le même: ST ïij : 326 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE inftrument, & le même point de divifion pour déterminer des. différences de hauteur, ou de déclinaifon. J'ai rendu compte en 1748, des raifons qui m'avoient déterminé à comparer toujours le même bord du Soleil à Ardurus , étoile de {a première grandeur que l'on peut obferver dans le crépufcule au folftice d'été. J'ai publié fucceflivement les obfervations que j'ai faites depuis 1744, des hauteurs du Soleil , priles plufieurs jours avant & après le folflice, & com- parées à la hauteur d'Aréurus ; les deux inftrumens que nous employons pour cette recherche, font de la même grandeur, & quoique leur état, par rapport à horizon , ne foit pas le même, & ait confidérablement varié depuis plus de vingt années que nous avons commencé les obfervations, on doit toujours trouver, par les deux quarts-de-cercle , la même dif- férence entre le bord du Soleil & l'étoile, ce qui fournit un moyen de vérifier, & de comparer les obfervations corref- pondantes. Le temps n'a pas toujours été également favorable au folftice d'éé de cette année ; nous avons commencé les obfervations le 14 Juin; les jours fuivans le Soleil n'a pas toujours paru au moment précis de fon paffage au méridien, de forte que les hauteurs ont été prifes quelquefois un peu avant où après, Voici ce que donnent les obfervations faites avec les circonf-. tances requifes : Dift. d'Arétur. au bord | RÉDUCTION, | Diflance folfliciale; 14 Juin 4124070200 ul een 08 35, Juin...13.:10, 16.24 & 13.13 08329} 25 Juin..-|3 154 40. ---E| 2 PE Pi: -.|3e 18. 28. ni Judlete LE. Son cs tlEo, 227, LS tt 2 2 Juillet..|2 : Sd Sur 23e 23h03 ES 8. 3 Juillet. ,|2 +128. 8...../3 18. 26. Pan Un HMIIEU 27e à 2 2e LR ME 4 L A [e] ; = ©O Les obfervations de: 1 753 ont été faites par un temps très - favorable & en très- grand nombre; je Îes rappor- térai ici: HT 2% DEN SICILE N GES 327 Difl, d'Ar&tur. au berd.| RÉDUCTION. | Diflance folflciales 14 Juin...|3* 5 14*...+| 9° so” 2 US | 4 15 Juin...13. 7. 50....+| 7. 13. ZUNE C 19 Juin..:|3. 14. 15....+|] o.46.. 3.115. 4. 201 Juin: 13148 152.. UF) ot T2), 3-04 22 %Juin:.3 14052 22 lo rise. FNDSANES 24 Juin. EUR 2 PAIE CEE D RE TRS CHROME PT SA JU IE SEAT Tera ARE] 200. A ns or Pan an ralenti de RAR OU 2H AR \ Les obfervations de 1754 ne laifient rien à defirer ; Le Soleil a paru le jour du folftice, & les jours qui l'ont précédé, Difl. d’Ar@ur. au bord, | RÉDUCTION. | Diflance folfliciale, To dun gd 425 LE Nat 156 2 amis 2 sol Juin tie ns MALE) ar 3e 20% 21 Juin...[3. 15. 16 ...+| o 1.....|3.15$. 17. DATE NEEDS MO A EIMOR ose lat S. Te7. 240Juin SRG Met 42 NL TS 5. 18. Par:un/milieus.#5032.10% 17 21.P ARS ON Je ne rapporterai pas ici les autres obfervations faites depuis 1744; on les trouvera dans les Mémoires de l'Académie, des années 1743, 1748 & 1752. Pour déterminer la quantité dont Aréurus a dû s'éloigner du bord f{olfticial du Soleil par fon mouvement apparent en dé- clinaifon & par fon mouvement vrai en latitude > j'ai employé Tes mêmes obfervations que mon père a rapportées dans les Mémoires de l’Académie de 1738, qui donnent un réfuitat peu différent des obfervations de M. le Monnier, rapportées . dans fa théorie des Comètes /page 117). Mon père ayant calculé la latitude d’Aréurus par les obfer- vations de 1738, en fuppofant la déclinaifon de cette étoile de 204 33° 50", a déterminé fa latitude de 304 5 5" 26”; ayant comparé cette obfervation à celle de 1672, déduite des obfervations de M. Picard en 1 669, il a trouvé la déclinaifon de la même étoile en 1672 * de 204 $4’ 45", & fa latitude de 3od 58° 4", ainfi la variation d’Ar@urus en déclinaifon a été de 20" 55" en foixante-fix années, à raifon de 5" 42" pour dix-huit années, & la variation en latitude de 2° 38"; # Cette déclinaïfon étoit trop grande, parce que l’inftrument de M, Picard donnoit les hauteurs trop grandes de 30 fecondes pour la hauteur du folftice, ou celle d'Ardurus, 328 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE M. le Monnier a déterminé par des obfervations le mou- vement d'Ardurus en latitude de 2° 5” en cinquante-cinq ans, plus petit que celui qui réfultoit des obfervations de mon père comparées à celles de M. Picard ; j'ai pris un milieu entre ces deux réfultats, & toutes réductions faites , j'ai trouvé que l'obli- quité de l'écliptique n'avoit point changé fenfplement *, ce qui s'accorde aux obfervations de M. le Monnier , faites au gnomon de Saint - Sulpice, © Je ne crois cependant pas, malgré tous les foins que j'ai pris pour donner à nos obfervations toute l'exactitude dont elles font fufceptibles , en devoir conclure que l'obliquité de l'écliptique n'a pas changé; car ne pouvant répondre de plus de deux à trois fecondes dans chaque réfultat d’obfervations , fi les deux erreurs étoient dans le même fens, il en réfulteroit une quantité peu différente de celle que l’on a foupçonnée dans la variation de lobliquité de l'écliptique; mais ilkme fmble qu'il eft également incroyable que toutes les erreurs foient toujours dans le même fens, & que l'on puifle en éviter une partie dans des obfervations auffi délicates ; d'ailleurs l'on remarque tous les jours dans la pofition des étoiles, que l'on regardoit comme fixes, des variations dont nous connoiffons la plus grande partie, ainfi es obfer- vations ne peuvent changer, mais les réfultats qui dépendent de différentes équations peuvent varier, & l'on ne fauroit trop exhorter les Aftronomes à publier les obfervations qu'ils auront fait correfpondantes aux nôtres ; elles ferviront à nous donner quelqu'éclairciffement fur une queftion que lon doit regarder comme indécife, car nous favons que les obfervations des meilleurs Aftronomes de l'antiquité, celles de Tycho & de Waltherus à Nuremberg, ne donnent rien de favorable à la variation dé l'obliquité de l'écliptique. J'ai fait des tentatives dans mon dernier voyage en Allemagne, pour joindre Nu- yembeyg à la fuite de mes triangles, & connoïtre plus exac- tement la latitude de cette ville; mais les Troupes pruffiennes s'étant emparé de cette ville lorfque j'en ‘approchois, je n'ai pu terminer la fuite des triangles que j'avois commencés. * J'ai fuppofé $ minutes 26 fecondes pour la quantité dont Ardlurus s'eft éloigné du bord foliticial du Soleil. FEU MÉMOIRE DES SCYENCES 329 MÉMOIRE Sur les accidens des Cogquilles foffiles , comparés à ceux qui arrivent aux Cogquilles qu'on trouve maintenant dans la Mer. Par M. GUETTARD. SRPOUNADÉE \PIANIR TI VE. L s'agira dans cette feconde partie, des accidens des Coquilles qui ont rapport à leur confervation. Les adreffes que les coquilles emploient pour fe conferver & fe prémunir contre ce qu'ils ont à craindre des autres animaux avec lefquels ils vivent dans fa mer, peuvent fe réduire à celles-ci : les coquillages entrent dans le fable ou dans la vafe, ils percent les madrépores, les pierres , es coquilles & les bois, ou bien ils fe chargent de cailloux, de coquilles ou d’autres corps marins qui font à-{eur portée. On retrouve maintenant dans Ja terre des vefliges de toutes ces adreffes; il n’eft pas cependant trop aifé de diftinguer parmi les coquilles qui font dans les fables, quelles font celles qui sy font introduites de leur vivant, ou qui y ont feulement été apportées & amon- celées par les flots de la mer. On pourroit cependant dire que la plupart des amas d’huîtres qu'on rencontre dans les terres, femblent avoir été originai- rement des bancs d'huîtres , qui font encore dans la place où ces coquilles avoient pris naiflance ; beaucoup de ces amas ne font mélés d'aucune ou de prefque d'aucune autre efpèce de coquilles , elles font Le plus fouventt dans des glaifes ; celles qu'on trouve parmi des amas d’autres coquilles, ny font qu'en une très-petite quantité, fi on les compare à la prodigieufe variété Mém. 1759° Tt 330 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE de celles avec lefquelles on les trouve mêlées ; il femble mêmé que les vrais bancs’ d'huitres font quelquefois d’une grande étendue ; j'ai fait remarquer dans une note de la première partie de ce Mémoire, que celui qui eft aux environs du Havre paroiffoit communiquer avec le banc de coquilles des Vaches- noires, & avec celui d'Orcher qui eft fur la droite du Havre. Peu avant d'arriver à Soifions, on pafle fur un de ces bancs d'huîtres qui pourroit bien n'être qu'une continuation de celui qu'on trouve en allant de Reims à Soiflons, & ces deux - ci ont peut-être une communication avec les endroits des en- virons de cette dernière ville où lon rencontre encore des huîtres : entre la Jonquière & Remi, villages de Picardie, le chemin eft fait dans un banc de différentes efpèces d’huîtres ; on en trouve encore dans les paroifles de Mortemer, de Pierre - de - ville près Noyon, il ne s'agiroit peut-être que de s'aflurer fr on ne découvroit pas des huîtres dans les endroits intermédiaires à ceux-ci, pour établir la continuité de ces dif férens bancs, & faire voir qu'ils n’en forment qu'un d'une très-srande étendue ; mais comme on trouve dans quelques" uns de ces endroits des cailloux roulés & plufieurs autres ef pèces de coquilles mêlées avec les huîtres , il ne feroit peut-être guère poffible de bien détérminer fi ce banc d’huiîtres en feroit un qui n'auroit pas été formé par des attériflemens. De toutes les adreffes que les coquillages emploient pour leur confervation, celles dont on peut retrouver des traces bien conflatées & indubitables parmi les coquilles foffiles, ne font donc que celles qui confiftent à percer les autres coquilles , les pierres, les madrépores, les bois, ou bien à fe charger de différens corps; puifque toutes les coquilles fe font indiffé- remment confervées dans la terre, on devoit en trouver qui renfermaflent dans leur fubflance de celles qui sy nichent, c'eft auffi ce qui arrive quelquefois ; on découvre, par exemple, de ces efpèces de bivalves auxquelles on a donné le nom de dates , elles font placées dans l'épaifieur des parois des coquilles qu'elles ont trouées ; on reconnoît facilement celles qui le DES SCTENCES 327 font , Jeur furface eft à l'extérieur plus qu moins criblée de petits trous que les dures entretiennent toujours ouverts, pour pouvoir apparemment profiter de l'air & de l'eau qu'elles ref. pirent, & des infectes dont elles ont befoin pour vivre. Comme ces coquillages ne percent pas les coquilles pour s'en nourrir, mais feulement pour fe mettre à l'abri des animaux qui peuvent les attaquer , tout autre corps marin dur & pierreux peut en renfermer; on peut par conféquent en trouver dans des mafles de coraux & de madrépores , & on en rencontre réellement d'ainfi percés qui font de différentes efpèces ; un de ceux que l'on conferve dans le cabinet de S. A. $. M. le Duc d'Orléans, left de plufieurs trous coniques confidérables par leur grandeur, ils ont plus de deux pouces de longueur fur dix lignes de largeur à leur ouverture, & cinq dans le fond; ils ne font pas tous dirigés dans le même fens, il y en a de per- pendiculaires , d'obliques, d’horizontaux, en un mot en tout fens: un de ces trous contient encore une portion de la co- quille qui y a habité; le madrépore eft à étoiles de deux lignes de diamètre, ces étoiles font apparentes fur les parois des trous comme fur la furface extérieure de la mafe, elles font rondes dans fa plupart des trous, dans d'autres elles font plutôt ob- longues, & l'on remarque des unes & des autres dans des troifièmes trous. Ces différences pourroient faire penfér que le madrépore étoit déjà entièrement formé lorfque les dates S'y. font introduites, & que {lon que la feétion a été horizonta- lement ou obliquement faite, ces étoiles font circulaires ou plus approchantes de quelques autres {ions coniques ; la coquille qui a percé ces trous n'étant que frufte dans ce madrépore, il ne m'a pas été poffible de la décrire, mais elle me paroît être femblable à la dare qui a fait ceux du madrépore dont il va être queftion. Cette coquille eft life & cannelée circulairement , le ma- drépore eft à étoiles de trois lignes de diamètre; les trous dûs aux dates ont cinq lignes dé longueur fur trois de largeur, dans fendroit où cette dimenfion ef plus confidérable ; ces trous font oblongs, un peu plus larges dans le fond & {ur-tout Et Vory. PI. I, fig. 3 & 6. Voy. PI. I, figure 2. 1. partie. Zbid. fig. x. 332 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE dans le milieu , qu'à l'ouverture ; fa forme eft celle de la co= quille. Ce madrépore & celui qui vient d’être décrit ci-deflus, fe trouvent à une lieue au nord de Dax en Gafcogne; ils font enfévelis dans un banc de coquilles, où ils ont été découverts par M. le Préfident de Borda, avec quantité d’autres foffiles plus finguliers les uns que les autres. Des dares que je crois encore femblables à celle-ci, percent plufieurs efpèces de turbinites ; les grandes dont j'ai parlé dans la première partie de ce Mémoire, en font fouvent garnies dans leur épaifleur; un buccin, de l'efpèce de ceux qu'on appelle des fufeaux , & qui ont une efpèce de longue queue ou pointe qui leur a fait donner ce nom , eft auffi troué par plufieurs de ces coquilles ; une de ces turbinites qu'on appelle VIS , qui eft longue & finit par une pointe fine, l'eft d’une prodigieufe quantité de trous extrêmement petits; ces trous n'ont proba- blement été faits que par des coquilles du genre des dates , fi elles ne font pas de la même efpèce que celles qui ont percé les turbinites & les madrépores dont je viens de parler ; les coquilles qu'on trouve dans cette vis font bivalves, de même que les dues , elles font f1 petites qu'il faut avoir recours à la loupe pour les bien diflinguer ; elles m'ont paru unies & lifles, & avoir la courbure & la forme des autres dates dont il a été queftion jufqu'à préfent ; la prodigieufe quantité de trous de la vis où j'ai trouvé de ces coquilles, donne naturellement occafion à la réflexion fuivante: fi ces dates eufent vécu affez de temps pour croître & acquérir leur grandeur naturelle, comment auroient-elles pu trouver toutes à fe loger dans la vis qui, quoiqu'aflez grande, n'auroit certainement pas été affez confidérable pour les contenir, puifque les trous font fi près les uns des autres, qu'ils fe touchent prefque tous; efl-ce que ces dates ne font jamais plus grandes , ou ces dales fortent- elles de leurs trous lorfqu'elles croiflent, qu'elles ne peuvent plus être contenues dans leurs trous, ou qu'elles trouvent des obflacles à les agrandir! ou ces coquilles fe détruifent - elles mutuellement, lorfqu’en creufant leurs trous elles fe rencontrent les unes & les autres! ce font-là des queftions qu'il n'eft guère DES ScrENCES 33- poffible de réfoudre, qu’en obfervant exactement les dures que Von trouve maintenant dans la mer: je ne m’arréterai donc pas ici à donner des raïfons ou des conje@tures qui puffent fournir quelques probabilités à ce fujet, il eft plus fage, à ce que je crois, de Jaiflèr à ceux qui vivent fur les bords de la mer, à nous éclaircir ces points curieux de l’hifloire des ares ; M. Fougeroux qui a donné un Mémoire {ur les dates de la Méditerranée &c qui percent les pierres, prétend que ces dates sattaquent les unes & les autres dans cette circonflance. Quoiqu'il foit aflez fmgulier que des animaux d’une fubflance aufi molle que left celle des animaux des dates puifient trouer des coquilles, il doit le paroître encore plus que ces mièmes animaux puiflent faire des trous dans des pierres très-dures pour s'y loger & y vivre; le mécanifine que ces coquilles emploient a été très-bien développé dans le Mémoire de M. Fougeroux, on ne doit par conféquent plus douter de ce fait qui a long- temps paru très-difficile à croire ; ce fait, bien conflaté, diffipe les doutes qu'on pourroit avoir au fujet de certaines pierres qu'on trouve quelquefois dans la terre, & qui font percées d’une quantité de trous, dans plufieurs defquels font nichées des co- quilles du genre des dates , & que jufqu'alors on auroit pu croire s'être introduites dans ces trous, lors du temps de la formation de ces pierres; on ne peut plus douter que ces pierres n'aient autrefois fait partie de rochers des bords ou du fein de la mer: Jai vu de ces pierres dans le Cabinet de feu M. Muflat, dans celui de M. de Boisjourdain & dans fa colleétion de M. Clozier, Apothicaire à Étampes ; a figure que je donne d’une de ces pierres , eft même de cette colleétion. M. Clozier m'a - afluré avoir trouvé cette pierre dans les champs des environs d'Étampes , qui font près d’un endroit appelé Temple. Cette pierre eft calcaire, d'un jaune fale, elle eft criblée dans toute fa fubflance de trous coniques, dont le fond a trois, quatre, cinq ou fix lignes de diamètre , & l'ouverture quelques lignes de moins; les coquilles qui font reftées dans quelques-uns de ces trous, font toutes pofées de la même façon, leur talon Voy. PI. I fo. 4 & 5. €ft dans le fond, & le bout oppofé regarde louverture ; elles 7: fig. s. Tt ii 334 Mémoires DE L'ACADÉMIE RoYaLE font ridées tranfverfalement fur le deflus de leurs battans, leur couleur naturelle eft probablement perdue; elles font toutes maintenant du blanc que les coquilles prennent ordinairement dans la terre ; leur grandeur ef communément égale à celle des trous où elles font ; enfin tout concourt à prouver que cette pierre n’eft ainfi percée de trous que parce qu'elle a été taraudée par les coquilles qu'elle renferme maintenant. Une autre pierre d’un gris verdâtre, grainue & calcaire, trouvée parmi les coquilles des montagnes de Chaumont en Vexin, paroït encore être dans ce cas; elle a du moins un trou conique d'environ un pouce & demi de longueur fur un demi-pouce d'ouverture ; ce trou eft tapifié d'une portion de coquille qui a probablement fait partie d'une date où d'un tuyau marin; la fuperficie de la pierre eft garnie de quatre battans d'huîtres qui font fortement attachés par toute leur furface; cette adhérence eff fi intime, qu'il y a tout lieu de croire qu'elle s’eft formée dans le temps que les huîtres vivoient ; il pourroit très-bien fe faire que cette pierre eût été roulée par Ja mer, elle eft arrondie; dans cette fuppofition on pourroit la regarder comme une forte de caillou roulé; elle feroit alors une exception à ce que j'ai dit dans la première partie de ce Mémoire, au fujet de ce qu'on ne rencontre point de ces cailloux qui foient chargés de coquilles. La térébration des pierres par les datés porteroït peut-être à faire penfer que ces animaux ne percent ainfi que des corps inanimés ; la conféquence en paroït d'abord aflez jufte , il faut pour que ces animaux puiffent tarauder les corps où ils veulent sintroduire , que ces corps foient affez immobiles pour donner un point d'appui fixe à ces animaux , pour qu'ils puiflent agir facilement & commodément tout le temps qu'ils en ont befoin ; malgré cela cependant je penfe que les dues peuvent aufir bien attaquer des corps animés, comme peuvent être les co- quillages & les coquilles foffiles dont j'ai parlé, qui renfermoient peut-être leurs animaux lorfqu'ils ont été attaqués par les dates, peut - être aufli étoient - elles vides alors, & cela doit même arriver fouvent ; ce qui m'empèche cependant de me décider s DES ScrTENCGES, 335 pour l'une ou autre opinion , &m’oblige de penfer que les deux peuvent être vraies, c’eft une obfervation que j'ai faite dans le Cabinet de M. de Boisjourdain. Ÿ On conferve dans ce Cabinet des groupes d'huîtres épi- neufes de Malte bien confervées, & qui n'ont aucune marque de deftruétion; une de ces huîtres fur-tout ef percée par une date de lefpèce qui fe trouve communément dans la Médi- terranée; cette huître s'eft arrondie dans l'endroit où elle eft percée comme pour former ce trou ; l'Auteur de la Conchy- liologie en a fait graver une percée de fmblables dates, & repréfentée à la Table 111, fig: À de fon Appendix. On peut donc conclure de ces obfervations, que les coquil- lages peuvent auffi bien être taraudés que les coquilles elles- mêmes. On pourroit peut-être objeéter que les coquillages dont je viens de parler étant des huîtres, & les huîtres étant ordinairement attachées à d’autres corps marins, elles fourniffent un point d'appui aux dates, mais qu'il n'en eft pas ainfr par rapport aux turbinites qui nagent & ne sattachent point à d'autres corps. Je répondrois à cette objection , fi on la failoit, que les dates étant probablement très-petites lorfqu'elles coin- mencent à attaquer les coquilles où elles veulent s'introduire, les coquilles qui renferment des animaux, même dans le temps qu'ils marchent ou qu'ils nagent, peuvent fuffifamment fournir un point d'appui à des coquilles auffi petites que les dates lorf. qu'elles commencent à travailler dans la fubilance de ces co- quilles: il eft probable qu'elles le font dès en fortant de l'œuf * elles doivent alors être très-petites, & elles doivent facilement _ être portées par les coquillages fans les incommoder & fans en être incommodées ; peut-être même que les œufs ou les Jeunes coquillages font dépofés fur ces coquilles, qu'ils y font attachés par une glue aflez ordinaire aux œufs des animaux marins 1 que ces œufs font portés par les coquillages jufqu'à ce qu'ils foient éclos, & que les dates qu'ils renferment en foient forties & aient pénétré la fübflance des coquillages qu'ils veulent attaquer : il n’y a rien que de très-pofhble en tout ceci: mais, quoi qu'il en foit , il eft toujours prouvé par les obférvations Voy. PI II, fig. 1. Thid, fig. s. s 336 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE faites fur les huîtres percées de dares, que les coquilles qui renferment leurs animaux, peuvent être & font réellement taraudées par les dates. Ces coquillages ne font pas les feuls animaux marins qui percent ainfi d’autres Corps; les animaux des tuyaux vermiculaires ont également recours à cette adrefle, c'eft du moins ce que je penfe au fujet de tuyaux dont quelques madrépores & quelques bois pétrifiés du Cabinet de $. A. S. M. le Duc d'Orléans font percés; un de ces madrépores me paroît être de ceux qui font à étoiles, mais ces étoiles ont été détruites par les frottemens qu'il peut avoir fouffert ; toute fa fubflance eft fpongieufe & femblable à celle d’un autre madrépore qui eft traverfé par des tuyaux à cellules, dont il fera parlé plus bas. Celui dont il s'agit maintenant eft percé de tuyaux qui ont depuis un pouce jufqu'à un pouce & demi de fongueur fur un peu plus où un peu moins de quatre lignes de largeur ; ces trous font tapiffés d’une lame blanche, dont la fubftance : eft analogue à celle des tuyaux marins: je penfe d'autant plus volontiers qu'ils en font, que les trous font un peu coniournés comme la plupart des tuyaux vermiculaires , & que la lame dont ils font tapiffés dans tout leur pourtour y eft adhérente, qu'elle n'y balotte point comme les dares qu'on peut aifément tirer des trous qui les renferment, fi on en élargit un peu l'ouverture; on ne pourroit détacher les tuyaux que très-dif- ficilement, il feroit même impoffible de le faire fans les brifer ou les corps dans lefquels ils fe font introduits, quand ces tuyaux féroient même de ceux qui ne sétendent pas aufit exactement fur toute la furface des trous qu'ils tapiflent ; un de ces tuyaux contient dans fon fond un corps oviforme qui le remplit exaétement. J'ai remarqué une portion d'un femblable tuyau, mais qui étoit cannelé fuivant fa longueur, dans un trou formé par une petite dare, de l'efpèce de celles qui ont percé l'avant-dernier des madrépores à étoiles dont j'ai parlé ci-deffus. De quelques fortes que ces tuyaux {oient , je ne leur ai point trouvé d'efpèces de chambres où de cellules dont fent coupés les tuyaux qui ont DES SCTENCESs 337 ont pénétré le madrépore fuivant : ces cellules ne font pourtant Voy. PL II, . en un fens qu'accidentelles ; Je n'explique, on obferve dans fig: 2: plufieurs de ces tuyaux un, deux ou trois corps ronds ou de l figure d'un œuf, lorfque ces corps ont été caflés par la moitié, les portions qui reflent attachées aux tuyaux les coupent en deux, en trois ou en quatre longues chambres ou cellules ; fr l'on examine à la foupe Les portions de ces corps fphériques qui font reftés dans les tuyaux , elles paroifient intimement unies avec les parois de ces tuyaux & faire corps avec eux, de façon qu'il n'eft pas poffible de {es détacher fans les caffèr.- Qu'eft-ce que font ces corps ronds? doit-on les regarder 75:14, fig. 6. comme les œufs des animaux qui habitent les tuyaux, ou plutôt comme des efpèces de diaphragmes ou de valvules qui coupent les tuyaux en plufieurs fetions? c’eft une queftion à laquelle il n'eft pas facile de répondre; ces corps ne font point ouverts par un de leurs bouts, comme font ceux que l'on trouve fi communément parmi les coquilles de Courtagnon, & qui font féparées de tout autre corps; le trou qu'a chacun de ces corps fait penfer qu'il n’eft dû qu'à fa fortie des animaux qui font éclos de ces efpèces d'œufs: mais comme aucun dé ceux dont il s’agit ici n'a ce trou, on ne peut les regarder comme des œufs, à moins qu'on ne voulüt que les animaux qu'ils contenoient n’en foient pas fortis, y foient morts & Sy {oient deféchés. Je crois qu'on ne pourra bien réfoudre ces queftions, que lorfqu'on pêchera dans la mer des tuyaux femblables ; l'on pourra alors s’affurer fi ces corps renferment chacun un animal $ s'ils ne {e trouvent dans les tuyaux que lorfque l'animal qui habite chacun de ces tuyaux , eft mort; où s'ils y font du vivant même de l'animal, s'il ÿ en a alors un ou plufieurs, & f1 le nombre augmente à proportion que le tuyau salonge, ce qui me fembleroit alors prouver que ces corps ronds feroient des efpèces de diaphragmes dont animal boucheroit le fond de fontuyau , qu'il alonge & qu'il ne veut pas laiffér vide, Je dis qu'on ne pourra réfoudre ces queftions, que lorfqu'on pêchera dés tuyaux femblables dans {a mer & qu'on les exa- Mém. 1759. Vu Voy. PL II, fo. 3. 333 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE minéyra, pendant que les animaux mêmes feront encore vivans; “car les tuyaux vides n'éclaireroient pas plus que les tuyaux fofliles , il faut voir les animaux dans les tuyaux pour s’aflurer s'ils font au-deffus ou au - deflous de ces corps, autrement on reflera toujours dans l'incertitude ; c’eft ce qui m'eft arrivé, en voyant un de ces tuyaux tiré de la mer, & qui fait partie du Cabinet de M. de Boisjourdain , ce tuyau eft bouché à fon bout extérieur par un de ces corps oviformes : ce corps eft adhérent aux parois du tuyau, & fr intimement qu'on ne pourroit pas plus le détacher fans le caffer, que ceux qui font dans les tuyaux foffiles ; au refte, quels que foient ces corps, les uns & les autres font entièrement femblables, & cette pro- priété établit très-bien une fimilitude entre les tuyaux fofliles & ceux qui ne le font pas. Si chacun de ces corps avoit un petit trou, comme en ont ceux qui divifent en chambres cette efpèce de cératite con- tournée en corne d'ammon qu'on apporte de l'Amérique, & qui eft gravée dans l'Ouvrage que Gualteri a donné fur les Coquilles , il froit prouvé que les tuyaux en queftion font du genre de cette ceratite ; mais je crois n'avoir point vu de femblables trous à aucun des corps qui font dans les tuyaux fofliles, ni à celui qui bouchoit le tuyau péché dans la mer; on ne peut donc point imaginer que le corps des animaux qui habitent ces deux fortes de tuyaux, pañle à travers ces corps ronds, comme il y a lieu de croire que celui de la sératite traverfe les diaphragmes dont fa coquille eft coupée. Ne pouvant réfoudre les difficultés qui regardent les tuyaux dont il s’agit, je me bornerai à les décrire exaétement , de même que le madrépore où ils font enfermés ; ces tuyaux ont de longueur depuis cinq à fix lignes jufqu'à un pouce & plus, leur ouverture eft d’une ou deux lignes de diamètre, ils font à l'extérieur ridés circulairement ; l'intérieur eft blanc life & de la nature des coquilles ; ils font cylindriques, un peu courbés & fermés par leur partie inférieure qui eft mouffe & arrondie: les corps ronds qu'ils renferment font proportion nellement d’un diamètre égal à celui des tuyaux qui les CRC CE DES SCIENCES. 29 contiennent: ces tuyaux & ces corps ronds font femblables à ceux de l'avant-dernier madrépore que j'ai décrit plus haut, ce qui me fait penfer que les uns & les autres ne diffèrent que par leurs dimenfions, Les madrépores me paroiffent auffi de la même efpèce, le premier na cependant point d'étoiles, mais, comme je l'ai dit, ces étoiles ont été emportées par des frottemens; je ne le penfe que parce que celui-ci les a perdues dans une partie de fa furface, & que dans cette partie il n'eft que fpongieux comme l'autre; les étoiles qui font reftées font très - petites, elles ne peuvent fe bien diffinguer qu’à la loupe ; on remarque très-facilement avec cet inftrument, qu'elles font à’ quatre ou “cinq pans, & que de leur pourtour il part huit à dix rayons qui vont { réunir au milieu de l'étoile comme à un centre commun: ce madrépore & les autres dont Jai parlé, font des environs de Dax en Gafcogne. Ce que j'ai rapporté des tuyaux qui pénètrent la fubflance des madrépores, conduit à faire penfer que les animaux qui . habitent ces tuyaux , percent ces corps auffi aifément que ta- raudent les bois ceux qui rongent les planches des Vaiffeaux & les digues faites dans certains pays pour contenir la mer dans fes bornes*, ou les pieux des parcs qu'on conftruit pour y engraifler des huîtres ou pour y prendre du poiffon. C'eft peut-être à de femblables vers que font dûs ces trous dont font percés ces efpèces de bois pétrifés qu'on trouve affez communément aux environs de Soiflons : fi cela étoit, on pourroit regarder ces morceaux comme des portions d'arbres qui auroient été plantés far quelque bord de la mer, ou qui auroient reflé dans les eaux affez de temps pour être attaqués par les vers ; quoi qu'il en fit, ces bois pétrifiés {ont aflez curieux pour être décrits ici. Un de ces morceaux qui font dans le Cabinet de M. le Duc d'Orléans, eft fillonné fur une de fes furfaces, de finuofités * On voit de ces morceaux dans les Cabinets de M. de Boisjourdain, de M. le Marquis de Paulmy & de plufieurs autres ; Ces bois ont fait partie des digues de Hollande. Vuïÿ _ 340 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE qui ont dix lignes de longueur & trois de largeur, d'autres font longues de plus d'un pouce & large de quatre lignes, des troifièmes font beaucoup plus courtes, toutes prennent un peu de courbure ; il y-en a outre cela qui ne font plutôt que de petits trous fuperficiels, fémblables à ceux des bois ver- + moulus ; les fmuofités étoient fans doute des trous longs qui pénétroient l'épaiffeur du bois, ou qui étoient entre l'écorce & le bois; elles ne font à découvert que parce que l'écorce ou une partie du bois a été enlevée ; il y a d'autant plus lieu de le penfer, que l'intérieur de ce même morceau de bois pétrifié eft percé de trous femblables à ces finuofités, il ref- femble en cela à certains bois des digues de Hollande, ou à certains morceaux de pieux qui ont été employés fur les bords de la mer à quelques ouvrages; ceux-ci laïflent fouvent à nu une partie des tuyaux qui les percent , tandis qu'une autre les pénètre jufque dans leur épaiffeur; cette différence ne vient que de ce qu'une partie du bois a été, indépendamment de l'action des vers, rongée & détruite par l’eau de la mer. On ne voit dans les trous du morceau de bois pétrifié aucun veflige de tuyaux; ces trous font feulement remplis d’une terre qui s'enlève avec facilité, & qui eft de ka nature de celle où la pétrification a été trouvée; d'autres morceaux ont leurs trous remplis d'une matière brune, de la nature de Ja pierre à fufil ; elle a très - exactement pris la forme de ces trous, & eft entourée d’un cercle blanc , que je regarde comme le tuyau propre pétrifié ou plutôt devenu ex, aufli dur que celui qui remplit le refte des trous, & qui n'en diffère que par la couleur; celle du morceau de bois eft en général d'un blanc moins vif, elle eft dans quelques endroits d'un brun femblable à celui d’une pierre à fufil ; ces trous ont trois lignes de diamètre , je ne puis en déterminer la longueur , parce qu'ils entrent dans l'épaifleur du morceau de bois; une fracture m'a cependant permis de voir qu'un de ces tuyaux qui éft contourné en demi-cercle, pouvoit avoir un pouce quatre lignes de lon- gueur, la direction de ces trous eft en tout fens, ils fe croifent tous, DE IST ISNCNE EIN CES. 34T Cet arangement ne pouvoit qu'occafionner un grand déla- brement dans les fibres du bois, fi ces bois pétrifiés ont appartenu à des arbres vivans dans le temps que les vers les ont percés ; c'eft ce que j'ai particulièrement obfervé dans le premier morceau; on y diflingue aifément que les fibres du bois fe font détournées dans le voifinage destrous, qu’elles fe courbent à droite ou à gauche, fuivant la proximité des trous; on voit très - bien que la concavité de Ja courbure des ou reparde les trous, & que les fibres les entourent plus où moins. Je fens bien qu'on objectera que cette direétion des fibres “m'eft que l'effet de la térébration du ver dans du bois mort, & qu'elle a produit ce qui arrive, lorfqu'on perce du bois avec une vrille ou qu'on y le un clou ; enfuppofant que ce dernier fait arrive, je répondrai que l'action d'un ver qui mine peu à peu , ne peut pas être aflez forte pour obliger les fibres du bois intermédiaires aux trous à fe rapprocher, & à fe preffe ér, pour ainfi dire, les unes fur les autres; fr ce fait arrive, ce ne peut être que dans un arbre qui végète encore; les fous en paffant par ces endroits étroits & fe trouvant plus au large lorfqu'ils les ont dépafiés , doivent dilater & étendre les fibres du bois dans les endroits où ils font dégagés dela 1preffion où ils étoient dans les efpaces qui féparent les trous. C'eft ce qu'on diftingue fort bien dans le premier morceau de bois pétrifié dont il s’agit ici : la couleur de fon intérieur eft d'un brun noiïrûtre; obfervé à la loupe, il paroit compofé de fibres circulaires un peu moins brunes & d’une partie in- - termédiaire qui. eft de l'autre couleur ; cette différence eft caufe qu'on diftingue plus aifément la draione & l'arrangement de ces fibres; on voit très - bien que l’efpace qui les fépare eft beaucoup moins large entre les trous que dans les endroits où il n'y en a pas; les fibres font des efpèces de faifceaux dont les parties font divergentes, de plus la loupe fait encore dif. “tinguer que l'efpace qui eft entre les fibres eft divifé par trois. ou quatre autres fibres moins apparentes , coupées par d’autres petites fibres tranfverfales qui forment ainfi un parenchyme dont on diftingue très-bien les véficuüles.. Vu ii 342 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Ces obfervations me paroiffent prouver que cette pétrifi- . cation eff réellement celle d’un morceau de bois, & que ce bois devoit encore végéter, lorfqu'il a été percé de vers; on ne peut pas dire que ce foit un morceau de madrépore : les madrépores qui ont tranfverfalement des James qui coupent celles qui font perpendicuiaires, n'ont pas les premières fi régu- lièrement arrangées ; les cellules formées par ces lames ne font pas non plus d’une régularité auffi parfaite , elles font au con- traire très-irrégulières. E On ne diftingue pas, dans les madrépores percés par les dates où par les vers à tuyau, que le dérangement qui sy fait foit occafionné en conféquence de certaines loix indépen- dantes de l'agent qui le procure ; au contraire tout s’y pafle confufément, comme dans les madrépores; les animaux qui les compofent, & ceux qui percent les maffes qu'ils forment, peuvent être déterminés à agir les uns & les autres, felon qu'ils feront plus où moins embarraffés ; on reconnoît dans le dérangement qui arrive aux maflés des madrépores , que ce dérangement dépend de caufes qui peuvent fe déterminer à une chofe ou à une autre; au lieu que dans les bois la caufe qui le produit, ne pouvant toujours fuivre certaines loïx que de la même façon, elle n'eft dérangée dans fes mouvemens qu'en fuivant fervilement ces loix; on doit par conféquent toujours trouver de la régularité, lors même qu'elle n'y eft pas complette. P Je ne crains donc pas de dire qu'il y a des bois pétrifiés, & que, sil eft vrai qu'on prenne fauflement pour des bois pétrifiés certaines pétrifications qui font dûes à des madrépores, on ne peut pas trop admettre fans reftriction que tout ce qu'on prend pour bois pétrifiés foit réellement des madrépores qui ont acquis, par leur féjour dans la terre, encore plus de du- reté qu'ils n’en avoient naturellement. J'ajouterai encore ici une réflexion au fujet des madrépores : ces corps marins n’ont point d'écorce , ils ne font point re- couverts, comme les arbres, d’une couche fenfiblement différente du refte de leur mafle; il y en a bien cependant qui font * DES SCiENCESs. 343 compofés de plufieurs couches qui s’emboitent, pour ainfi dire, les unes &.les autres comme des calottes fphériques; on en conferve de ceux-ci dans le Cabinet de S. A. S. M. le Duc d'Orléans, mais ces couches font toutes femblables, également dures & parfemées de petits mamelons étoilés. Parmi les corps qu'on regarde comme des bois pétrifiés , on en trouve au contraire qui font formés de deux couches bien différentes ; l'extérieur ou l'écorce eft d’un tiflu plus lâche, moins ferré & moins compaéte ; l’intérieur ou le corps eft plus uni, d'un grain plus fin & mieux lié; j'ai vu un de ces mor- ceaux qui étoit des environs de Soiflons , il eft d'autant plus curieux, qu'il eft percé dans toute la longueur de fon écorce par des tuyaux de vers bien formés & en grand nombre, devenus flex & remplis d'une matière femblable : les vers de: : ces tuyaux avoient apparemment trouvé plus de facilité à percer cette écorce que le bois même; aufii n'avoient-ils attaqué que Técorce, & l'on n’en voit aucun dans l’intérieur du morceau. C'eft ce qu'on remarque aufli très-fouvent dans des pieux des bords de la mer : on y rencontre des morceaux qui, dans toute la longueur de leur écorce, font criblés de trous qui contiennent chacun un tuyau vermiculaire , le bois en étant entièrement dépourvu, foit que les vers n'aient pas encore eur le temps de percer le bois, foit que ce bois foit trop dur; pour que les vers puiflent le pénétrer ; fi des reffemblances auffi frappantes ne prouvent pas l'identité de ces faits, je ne fais point quelles preuves on peut defirer pour conftater ceux qui dépendent des caufes phyfiques. : IL'n'y a point de minéral qui pût auflr bien en impofer & fe faire mettre au nombre des bois pétrifiés, que certains fpaths- fibreux qui fe trouvent à Chatelguyon en Auvergne, & plus encore ceux de Sézanne en Brie; ces derniers ont même été pris, par l'auteur de l'Oryétologie *, pour des bois devenus +} 0,4 fpatheux ou, comme ül dit, d'une nature blanche , tendre àr gi, pag 397 Jéléniteufe ; les premiers font également tendres, mais d’un “in Le blanc lavé de jaune; ils forment des mafles, du moins les : morceaux , que j'ai reçus de M. du Tour Correfpondant de cette: 44 MÉMOIRES DE L’'ACADÉMIE ROYALE Académie, d'un demi-pied de longueur fur trois ou quatre pouces de largeur ; ils font compofés de fibres inclinées les unes aux autres, ce qui difingue très-bien ces fibres de celles des bois pétrifiés qui font parallèles; outre cela les fibres des fpaths font courtes, ne s'étendent pas ordinairement d’un bout à l'au- tre de la pierre, mais forment des efpèces de pinceaux dont les parties fe divergent depuis le-point où elles font réunies, jufqu'à leur extrémité, en forte qu'une maffe de ce fpath n'eft qu'un amas de pinceaux ainfi formés & difpofés, de façon qu'ils font inclinés, & que fouvent ils s’enclavent les uns dans les autres. On obferve un femblable arrangement dans les fpaths de Sézanne : une fmgularité qu'ils ont dépend encore de la di- rection de leurs fibres ; le point où elles fe réuniflent s'élève affez pour former des mamelons radiés qu'on prendroit pour des étoiles de madrépore; mais en les examinant un peu atten- tivement, on diftingue aifément qu'ils font bien différens des étoiles de ces derniers corps ; dans celles-ci les rayons font horizontaux, au lieu qu'ils font inclinés dans celles des fpaths ; outre cela le centre des étoiles fpatheufes reflemble à un faifceau de fils qu'on auroit liés par le bas, & qui formeroit par ce moyen un mamelon qui ne feroit dû qu'à l'étranglement occafionné par la ligature. Une remarque que j'ai encore faite fur les fpaths, & qui tombe autant fur les bois pétrifiés que fur les madrépores , c'eft que les mafes de fpaths font fouvent coupées horizonta- lement d’une ou de plufeurs lignes qui les féparent en plufieurs plans femblables : on ne trouve point de bois pétrifiés & de madrépores ainfi féparés ; les mafles de fpaths ne font ainfi compolées de plufieurs plans, que parce qu'elles fe forment probablement à plufieurs reprifes dans les fentes des mon- tagnes ; la crûe des bois, au contraire , dépendant d'une caufe fucceflive, mais qui ne fait que développer des parties déjà exiftantes, ne doit pas donner des plans indépendans les uns des autres; les couches des madrépores quoiqu'également diftinétes, ont beaucoup d’autres différences que j'ai rapportées plus il ! DES SICTEN CES 345 ‘plus haut , qui doivent empêcher de confondre ces corps avec les fpaths ; on diftingueroit probablement , quand ils {eroient devenus fpatheux, les cellufes qu'on reconnoït dans ceux même qui font pétrifiés, ou qui font de la nature du quartz ou de la pierre à fufil. Par toutes ces réflexions, je ne prétends pas néanmoins vouloir faire croire que les bois pétrifiés, & même les madré- pores, ne peuvent pas être changés en fpaths; je fuis bien éloigné de penfer ainfi: puifqu'il y a des bois changés en /fex, en pyrite, peut-être en amianthe, on ne peut guère refufer d'admettre qu'ils peuvent fe fpathifer ; tout ce que j'ai voulu dire ici, c'eft que les fpaths dont j'ai parlé, & dont une forte a été regardée comme du bois métamorpholé en fpaths, ne font réellement & primitivement que du fpath, lors même qu'ils ont acquis une dureté telle qu'on peut en tirer du feu au moyen du briquet, comme il arrive quelquefois à ceux de Sézanne. N'ayant au refte parlé ici des bois pétrifiés que par occafon, je ne m'étendrai pas davantage pour le préfent fur ce qui pour- roit regarder ces corps dont la pétrification a été en outre démontrée , autant qu'elle peut l'être, par M. Fougeroux , de cette Académie, dans un Mémoire curieux fur le changement des bois en pierres; il ne s'agiroit maintenant que de bien déterminer les efpèces de bois qui fe font ainfi pétrifiés, mais ce fera Rà une connoiffance toujours très-difficile à acquérir. Je pafle à ce qui regarde une des plus induftrieufes adrefies que les coquillages emploient pour fe précautionner contre les attaques de feurs ennemis ; elle confifte à charger leur coquille de cailloux , d'autres coquilles, de madrépores. & V.PILIIL, probablement d'autres corps marins. Depuis long-temps je fs: 1, 2, 3 connoiflois , avec tous les Naturalifles, une efpèce de turbinite 5 dont le toit eft aplati ou peu élevé, & dont chaque pas de vis eft régulièrement creufé de petites cavités, dont la grandeur eft proportionnée à celle du pas de vis fur lequel elles font placées ; cette régularité me faifoit penfer qu'il falloit apparem- ment que ces cavités fuffent une propriété efléntielle à cette Mén. 1759. X x V. PI IE, fig. 3 & 4. 346 MÉMoiREs DE L’ACADÉMIE RoYALE forte de turbinite, lorfque j'eus connoiffance de quelques-unes de ces coquilles dont les cavités étoient remplies par quelques morceaux de différentes autres coquilles, ce qui leur a fait donner le nom de fripieres ; cette connoiffance ne m'éclaira pas encore fur ce qui pouvoit être caufe de la régularité de ces cavités dans leur pofition: comme les coquilles que je connoiffois étoient fofliles , j'étois porté à attribuer les corps qui y étoient attachés, à quelques-uns de ceux parmi lefquels elles fe trouvoient dans la terre. On tire fouvent de la terre des co- quilles bien confervées , dont la fuperficie eft plus ou moins chargée d’éclats de quelques autres coquilles qui y font attachées par un léger fédiment, ce qui me faifoit penfer qu'il pourroit être de même par rapport à ceux dont la coquille fripiere étoit garnie; j'ai refté dans cette erreur jufqu'à ce que j'euflé vu dans le Cabinet de M. de Boisjourdain deux de ces turbinites péchées dans la mer, aux environs de la Martinique, ces deux coquilles font très-bien confervées l'une des deux eft chargée de ailloux & l'autre de coquilles, ce qui leur a fait donner le nom de coquilles galeufes : je ne les eus pas vues, que tout ce qui concernoit celles qui font foffiles me devint très-facile à expliquer, & left en effet ; pour bien faire entendre ce que j'ai à dire à leur occafion, je-crois devoir les décrire d'une façon particulière. Je connois trois de ces coquilles, deux font du Cabinet de M. de Boisjourdain, la troilième, de celui qui eft au Jardin du Roi; l’une de celle qui et dans le premier, eft chargée de cailloux roulés, l'autre porte des cames cannelées longitu- dinalement; celle du Cabinet du Roi eft recouverte de ma- drépores : n'ayant point eu celle-ci en ma difpofition, je n'en dirai rien de plus ; la première des deux autres, celle qui eft chargée de cailloux roulés, peut avoir environ deux pouces de diamètre à {a bafe, & un pouce de hauteur perpendiculaire ; les cailloux dont elle eft garnie font de groffeur & de couleur difkrentes, les plus petits font placés vers le fommet, & plus ils approchent de cet endroit, plus leur groffeur diminue ; les plus gros font à la circonférence de la bale; les plus petits DES SCIENCES. 347 de ces cailloux ont environ deux lignes de longueur fur un peu moins de largeur , les plus gros peuvent avoir un pouce deux lignes dans la première dimenfion, & un demi-pouce dans la feconde , les autres approchent plus ou moins de ces dimenfions ; la couleur de ces cailloux eft noirâtre ou tire fur le brun , le jaunâtre ou le rougeâtre , leur nature eft de celle de l'agate ou de la pierre à fufil, leur nombre monte environ à une vingtaine. Celle qui eft chargée de coquilles, eft à peu près de la grandeur de la précédente, les coquilles qu'elle porte font ar- rangées dans Pordre des cailloux, c’eft-à-dire que les plus petites font vers le fommet, & les plus grandes à la circon- férence de la bafe; les plus petites peuvent être de quatre lignés de largeur fur prefqu'autant de longueur, les plus grandes de dix lignes dans le fens de la première dimenfion, & de huit dans l'autre, les grandeurs des autres font intermédiaires à celles-ci, toutes n'ont qu'un battant qui eft attaché à fa co- quille fripiére par le dos ou par leur convexité; fi ces coquilles n'ont qu'un battant, cela vient ou de ce que le battant qui manque à chacune, a été détaché par les frottemens qu'elles ont foufferts des mouvemens de la mer, ou parce que ces coquilles avoient perdu ce battant avec l'animal qu’elles renfermoient avant qu'elles euflent été attachées par la coquille fripicre. - Lorlqu'on voit des coquilles auffi peu confidérables que celles qui font ainfi garnies d’autres coquilles, & fur-tout de cailloux , on ne peut qu'être furpris du poids dont elles {ont chargées; un feul des gros cailloux pèfe probablement plus que la coquille même; il faut que la force de l'animal renfermé dans une femblable coquille foit bien grande pour pouvoir fe charger d'un poids pareil & n'être pas gêné dans fes mouvemens ; il eft vrai que l'animal. vivant dans l'eau, ce poids doit perdre beaucoup de fa pefanteur, mais il faut auffr avouer que l'efpèce de cuirafle que cet animal f fait, outre celle dont il eft naturellement couvert, doit lui être bien né- ceffaire pour qu'il fe charge ainfi; elle ne lui eft fans doute utile que pour fe mettre à l'abri des attaques des poiffons ou X x i] 348 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoyaLe des autres animaux qui vivent dans l'élément où il fe trouve; l'attention qu'a la fripiére de ne fe charger que de petits cailloux ou de petites coquilles lorfqu'elle eft petite, & d'en choifir de grandeurs différentes à proportion qu'elle grandit, efl encore une fingularité digne de remarque. Une autre fingularité regarde la façon dont ces corps font implantés fur ces coquilles; ils ne font pas liés par des fils, comme le font les coquilles, les brins de bois ou les graviers qui recouvrent les tuyaux des teignes d'eau douce; ce n'eft qu'au moyen de là coquille même qui fe creufe dans les endroits où font placées les coquilles & les cailloux, & em- brafle en partie ces corps, ce qui demande que l'animal travaille à fe les attacher, lorfque fa coquille eft dans un état de mol- lefle; ce ne doit être que dans le temps de chaque crüe; alors l'augmentation qui s'en fait eft membraneufe & propre à fe plier & à fe mouler fur les corps durs que l'animal trouve autour de lui. Mais comment cet animal s'y prend-il pour placer aufir régulièrement ces corps fur le dos de fa coquille? cet animal charge-t-il fon pied ou la partie poftérieure de fon corps , de ces cailloux ou de ces coquilles, & fait-il, en retournant ce pied , arranger ces différens corps fur la partie membraneufe de fa coquille? a-til plutôt l'adreffe de faire paffer cette partie deffous les cailloux & les coquilles, de façon à fe les attacher, ou fe retourne-t-il fur le dos pour appliquer fur ces corps la partie de fa coquille qui croit actuellement ? ila probablement recours à quelques-uns de ces moyens; mais quel eft précifé- ment celui qu'il emploie , c'eft ce qui ne peut être déterminé que par un obfervateur attentif qui fe trouvera à portée de voir ces.animaux dans le temps où ils travaillent à fe faire cette efpèce de cuirafle. Ce ne peut être au refle que par une de ces manœuvres que ces coquillages peuvent parvenir à fe la faire, car de dire qu'il fufht qu'ils s'introduifent dans des trous remplis de co- quilles, de cailloux ou des corps qu'on leur trouve ainfi attachés DES SCIÉNCES 349 pour que ces corps puiffent s'y implanter fans que l'animal qui eft dans ces coquillages y ait d'autre part, ce n’eft pas réfoudre la difficulté, mais en faire plutôt naître plufieurs autres; on pourroit, par exemple, demander à ceux qui foutiendroient ce fentiment , comment il arrive que ces cailloux ou les autres corps qui font adhérens à ces coquillages, font proportion- nellement plus gros, felon qu'ils font plus près de la bafe de la coquille fripiére ; pourquoi ces caïlloux font placés fuivant leur grand axe , ce qui devoit être pour qu'ils fuflent arrangés plus commodément, & que ceux d'un pas où d'un tour de la coquille ne paffent point fur ceux d’un autre, pourquoi les battans des coquilles dont des fripieres font chargées , font tous attachés par le dos? pourquoi , lorfque ce font des turbinites qui font ainfr collées, ces turbinites le font de façon qu'elles font couchées fuivant la longueur de la coquille frpiere, plutôt que fuivant la hauteur. S'il fufhfoit donc que ces coquillages fe fourraffent dans des amas de coquilles, de madrépores, de cailloux, &c. poux qu'elles fe chargeaffent de ces corps, ceux - ci devroient être placés indifféremment & fans ordre, au lieu qu'ils le font avec une efpèce de régularité; feroit-ce donner une raifon valable , que de dire qu'il n'en eft ainfi que parce que, lorfque l'animal eft petit , il n’y a pas de place pour que de gros corps sattachent fur fa coquille; mais fi petite qu'elle foit, f1 l'animal ne favoit pas faire choix de ce qui lui convient, cette co- quille pourroit aufli-bien fe trouver attachée à un de ces gros corps qui y font adhérens lorfqu’elle ef parvenue à une grandeur capable de fournir des endroits propres à les y placer; il faut donc que l'animal foit porté à choifir ceux qui lui conviennent, & quil les place de la façon la moins génante ou la plus commode pour lui. Je dis la plus commode pour lui, c'eft-à-dire, qui ne puifle pas le gêner dans fes mouvemens lorfqu'il veut marcher & nager, car je ne penfe pas qu'il foit de ceux qui reftent immobiles ; il n’a pas de ces corps fur fa coquille féulement, parce qu'il y demeure fixé comme tant d’autres coquilles qui X x il] }à 350 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE font adhérentes à ceux fur lefquels on les trouve attachées ; les cailloux, les coquilles, les madrépores, &c. dont les fri- pières {ont chargées, ne fufhroient certainement pas pour les mettre à l'abri des effets qu'ils ont à craindre des mouvemens de la mer. Il n'en eft pas, à ce que je crois, de ces coquillages comme de tant d'autres coquilles , dont les attaches fur les rochers font très-fortes ; les corps qui recouvrent les fripières font mobiles, ils doivent par conféquent être facilement ba- lottés par les flots de la mer, fr confidérables que foient les amas qui en font formés ; de-là les coquilles fripières qui feroient cachées dans ces monteaux, devroient être également, em- portées, & leur attache ne pourroit pas être trop folide ni permanente : je crois donc que ces coquillages ne fe couvrent ainfi de diflérens corps, que pour fe garantir des infultes de leurs ennemis, & non pas fe procurer un point fixe qui puifle leur faire éluder les agitations de la mer ; que peut faire en eflét une maffe auffi peu confidérable que le total de ces corps, quelque grande qu’elle foit par rapport à Fanimal ; que peut-elle, dis-je, faire contre les flots qui, dans les grands foulèvemens de la mer, arrachent & entrainent fouvent des quartiers de pierres énormes, & qui les réduifent en pouflière à force de les rouler & de les choquer les uns-contre les autres. I paroit, fi j'ofe le dire, trop d'at & trop d'attention dans arrangement de ces corps fur les coquilles fripiéres , pour que cet arrangement ne foit dû qu'au hafard, & né foit feu- lement fait que pour procurer à ces coquillages un point fixe, au moyen duquel ils puiffent fe défendre des agitations de la mer; les autres coquillages qui, pour cet effet, s'attachent à quelque corps , en choififlent qui font immobiles & ils ne s'en chargent pas: les pas, par exemple, s'appliquent par leur bafe {ur les rochers, les huîtres s’y attachent par le dos de leur battant fupérieur , mais aucune de ces coquilles ne fe couvre d'autres corps dans cette vue; & fi elles fe groupent fouvent les unes avec les autres, ce n’eft que parce que quélques- unes de celles-ci peuvent être elles-mêmes adhérentes à des rochers, où que, parce qu'elles font toutes par leur réunion DES) \S Ch E NICE S, 357 une maffe confidérable qui ne doit pas être facilement-enlevée par les flots agités, il n'en feroit pas de même pour les co- quilles fripières , quand elles feroient cachées fous des amas de cailloux, de coquilles, de madrépores, &c. ces corps font facilement remués par les flots, fouvent ils font tranfportés d’un lieu en un autre, comme on le voit arriver fur les côtes du Havre & de Dieppe, malgré le folide énorme que ces caiHoux forment fur ces parages; de quelle utilité feroit alors pour ces coquilles l’efpèce de cuirafle dont elles font couvertes, _ pourroit - elle leur fervir de point fixe capable de les retenir, & {eroit - ce en fe chargeant ‘de cailloux que ces coquilles pourroient s’oppofer dux bourrafques qui fouièvent la mer? dira-t-on que ce poids eft fufhfant pour les retenir toujours dans fon fond; ce poids pourroit-il les empêcher d'être en- levées par les flots, & d’être roulées comme tant d'autres corps immenfement plus gros, qui le font fi facilement ? il faut done que ces coquilies foient ainfi recouvertes pour une autre railon. Ce qui le prouve encore , c’eft qu’elles font les feules, que je connoifle du moins, qui font ainfi recouvertes; pourquoi dans le grand nombre des autres coquillages, dans tant de buccins, de pourpres, de rouleaux , de limaçons, &c. dans tant de cames, de tellines, de moules, &c. n'en trouve-t-on. point qui foient ainfi encuiraflés ; eft-ce que ces coquilles ne fe voient jamais parmi des cailloux roulés, parmi. des co- quilles, des madrépores qui foient amoncelées? if faut donc que ces coquillages n'aient pas befoin d'être ainfr munis de corps étrangers: leurs animaux favent apparemment fuir à leurs. ennemis par d'autres adrefles; ils entrent fans doute dans le fable, ou bien ils fe fourrent dans des endroits inacceffibles à: ceux qu'ils doivent éviter. En effet, fi larrangement des corps qui recouvrent les. coquilles fripieres , n'étoit dû qu'au pur hafard , pourquoi les autres coquillages n'en feroient-ils pas auffi chargés, leurs co- quilles font dans les différentes crûes qu'eiles acquièrent, auffi: memnbraneufes & aufli chargées de parties glutineufes que les: 352 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE coquilles fripieres ; rien n'empêcheroit donc que ces corps ne s'y attachaflent, s'il fufhfoit pour leur adhérence qu'ils fe trouvaflent portés fur ces coquilles, & que par leur poids & la glue qui fuinte de ces coquilles, ils puffent s’y coller: pour moi je penfè que, quoique ces deux chofes concourent beaucoup & eflentiellement à former cette adhérence, il faut que l'animal y apporte auffi du fien, & qu'il lui ait été accordé une adrefié que nous ne connoiffons pas; il faut qu'il fiche, comme certaines teignes aquatiques , dont parle M. de Reaumur dans fon Ouvrage fur les Infeétes, choifir ce qui lui convient, & attacher de la manière la plus commode; les teignes aqua- tiques qui font entrer dans fa compofition de leurs tuyaux des petits morceaux de bois, & qui les arrangent fuivant la lon- gueur de ces tuyaux , ne les placent jamais autrement ; on ne les y voit point dans une fituation tranfverfile comme dans les tuyaux de quelques autres efpèces de ces teignes ; celles qui f fervent indifléremment de toutes fortes de corps, ne fe bornent pas ordinairement à un feul; celles qui coupent _des feuilles vertes pour recouvrir les leurs, n'emploient point des feuilles mortes ou des bâtonnets de bois mort; celles qui font des tuyaux avec du gravier, n'y font point entrer de ces autres COrps. Ji en eft de même des teignes terreftres, celles qui rongent les étoffes ou les pelleteries , ne cherchent point des feuilles, des brins de bois ou des graviers, & celles qui font ufage de ces matériaux, n'ont point recours à ceux qui font em- ployés par les autres; de quelque matière au refle que ces in- {fees fe fervent, ils la mettent en œuvre avec une forte d'intelligence qui ne tient rien du hafard. La coquille fripière eft dans ce cas, ce qu'elle exécute, elle Je fait avec ordre & fymétrie, & je ne vois pas pourquoi on lui refuferoit cet inftinét, puifqu'on ne le refufe pas plus à ces autres animaux qu'aux oifeaux par rapport à fa conf- truction de leurs nids, où tout le monde trouve une adrefle & une prévoyance admirables : concluons donc qu'il a été accordé aux coquilles fripiéres de {e charger de corps étrangers pour D ESS: 1 EN EE: 6: : LUE pour leur confervation, & qu'elles s’en couvrent avec choix & de la façon qui‘leur eft la plus avañtaseufe, If leur eft fans doute indifférent d'y faire entrer les uns ou les autres de ces corps, il eft cependant affez fingulier qu'on ne trouve point fur les coquilles fripières dont j'ai parlé, des cailloux mêlés avec des coquilles, des madrépores ou d'autres corps femblables, & que les coquilles adhérentes à l’une d'elles foient de la même efpèce; cela ne peut probablement dépendre que de ce que ces coquilles fipiéres ont vécu dans des endroits qui navoient que les uns ou les autres des corps dont elles font recouvertes ; fi elles euffent été dans quelque endroit où il y en eût eu un mélange, elles feroient probablement garnies indifféremment des uns & des autres D A On peut du moins l'inférer de ce que j'ai obfervé dans une femblable coquille foffile du Cabinet de M. de Boisjourdain; - cette coquille qui eft à peu près de la grandeur des précédentes eft chargée de morceaux de bivalves & de quelques-uns qui ont fait partie de buccins ; ces morceaux y font attachés de la mème façon que les cailloux & les coquilles le font fur celles qui ne font pas foffiles ; lorfque ces morceaux en font détachés, la coquille n'eft plus qu'en quelque forte ,cifelée en creux fur toute fa furface extérieure; ces circonvolutions font fuperficiellement creufées d'efpace en efpace, & ces creux “font plus ou moins profonds & grands, fuivant qu'ils font près ou éloignés du fommet où de là bafe de la coquille, & que les Corps qui les ont occafionnés étoient plus ou moins gros. C'eft dané ce dernier état que l’on rencontre ordinairement ces coquilles dans la terre; il eff beaucoup plus rare de les trouver chargées de quelques corps étrangers ; je n'en ai même jamais vu qui le fufent de cailloux ou de madrépores: les Cabinets d'Hiftoire naturelle en renferment beaucoup qui font nues; on y en voit rarement de celles qui font garnies de * Depuis la compofition de cé cames, & de buctins qui avoicnt Mémoire, j'ai vu une Jripière qui | été’ confidérables par la grandeur : étoit dans ce cas; elle étoit chargée | j’en ai vu une autre où les coquilles de morceaux fruftes de différentes étoient mêlées avec des cailloux. Mém. 175 0. Yy PLIIL fg.s. 354 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ces corps ; il s’en conferve néanmoins quelques-unes de celles-ci dans le Cabinet de S. A. S. M. le Duc d'Orléans, mais il y en a beaucoup plus des premières; les fecondes font plus petites que celle que j'ai fait repréfenter {a), & elles varient même entrelles pour là grandeur, On trouve de ces coquilles nues ou chargées de corps étrangers à Courtagnon, à Grignon & à Chaumont en Vexin; celles qui ne font pas fofliles & qui font du Cabinet de M. de Boisjourdain, ont été, comme je l'ai dit, pèchées dans les environs de la Martinique. J'aurois certainement pu placer avec raïfon fous la fetion des adrefles que les corps marins emploient pour leur con- fervation , ce qui concerne leur façon de s'attacher ; ils ne fe cramponnent ainfi les uns fur les autres & für des corps qui leur font étrangers, que pour être plus en état de réfifter aux flots de la mer; mais comme ces attaches n’annoncent pas autant un deflein prémédité que les autres induftries que j'ai décrites, j'ai cru devoir en faire une fection particulière : ce- pendant, comme quelqu'un pourroit penfer différemment de moi à ce fujet, & croire que cette adhérence de certains corps marins ne fe feroit que dans les mêmes vues, j'ai réfervé à dire ici un mot fur ce que j'ai obfervé au fujet de quelques efpèces de madrépores foffiles qu'on trouve encore ainfi attachées. J'ai obfervé que les uns ou les autres des groupes de tuyaux marins dont j'ai parlé plus haut & qui viennent des carrières de Molême , étoient parfemés de petits fragmens de madrépores qui reflemblent à celui qu'on appelle communément manchettes de Neprune ; on en trouve dans la mer fur des cailloux, des bois & différentes coquilles (4), mais ce n'eft guère fur elles (a) Jai préféré celle-ci qui eft du Cabinet de M. de Boisjourdain, parce qu’elle eft plus grande, que les morceaux de coquilles dont elle eft garnie font plus gros, & qu’il y en a un qui a fait partie d'un buccin. (b.) Le Cabinet de M..de Bois- jourdain en fournit plufieurs exem- ples; on y voit une branche de corail rouge qui eft embraflée par un madrépore, une oreille de mer qui eft recouverte d’une couche de madrépore plat à mamelons ovifor- mes; entre le madrépore & la co- quille, quelques endroits font garnis de tuyaux vermiculaires; on y voit DES, SCGHENCES. 355 . & fur des tuyaux qu'on en rencontre parmi les fofliles , je n'en ai du moins vu que fur de femblables corps; plufieurs des coquilles foffiles univalves ou bivalves du Cabinet de S. A. S. M. le Duc d'Orléans en ont quelques portions; un peigne à cannelures fimples & comme un peu feuilletées’ par le bas, de fa collection de M. le Curé de Sainte-Marguerite, porte fur un de fes battans quelques petits madrépores oculés ‘ou polypiers branchus, qui y font étendus horizontalement parmi de petites huîtres, pelure d'oignon, qui font auffr attachées à cette coquille. Il éft bien plus commun de trouver de ces manchettes de Neptune, des petits madrépores branchus & même de ceux : qui font aflez grands, dans l'intérieur de beaucoup de cailloux : J'ai même vu un madrépore plat {ur l'extérieur d’un caillou , des pierres à chaux en ont quelquefois des plaques confidérables ; mais ces pierres & ces cailloux ayant probablement enclavé ou collé ces madrépores lorfqu'ils fe formoient eux - mêmes dans la terre, on ne peut pas trop regarder ces’ madrépores comme une preuve de ceux qui fe font’ appliqués fur d’autres Corps Jorfqu'ils étoient dans la mer. = LEE 3 * encore deux nérites garnies de ma- drépore lichen blanc, ramifé ou © fans branches, un |imaçon alongé, ondé & pourpre ,' prefqu’incrufté d’une couche de madrépores a ma- melons ronds, qui s'élève & fe ra- mifie, & qui porte un tuyau ver- miculaire ; un buccin approchant des grimaces, recouvert de madré- pore lichen äfbranches’ coniques ou! fans branches, ou qui n’a que de petits cornichons; un buccin pourpre, . # pla à U AU, g | ridé & fans pointes, attaché alune branche: de corail rouge , une came incruftée en dedans &,.en dehors de madrépore , Zchen qui.fe ramifie en branches coniques; la coquille a f [£ PRES KE F n fl UG-2871 11}, 2HAMIL EEE changé prefqu’entièrement de fubf tance, & a pris celle du madrépore, quoiqu’elle ne foit pas déformée; la charnière de cette coquille porte en dedans un tuyau vermiculaire’ de forme triangulaire ; de plus, ily a encore, dans ce Cabinet une oreille de mer qui eft prefque changée en un madrépore fémblable ; une arche : de Noë,enveloppée d’une fubftance également de madrépore; enfin un petit peigne blanc épineux, fans oreilles , qui eft rempli d'une ma- tière fpongicufe qui a pris tous les contours & la forme de l'intérieur de la coquille. F porntalt ; Yyi 356 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE EXPLICATION DES FIGURES. PL TAUN :CHHMEM TE l IGURE 1. Vis percée d'une quantité de petits trous faits par de très - petites bivalves. Fig. 2. Fufeau à quatre grands pas de vis & dont la queue eft fxiée circulairement , percé de trous faits par des efpèces de dates, Fig. 3. Madrépore étoilé, dans l'épaiffeur duquel il y a des trous düûs à des dates. Fig. 4. Pierre criblée de trous faits par de femblables coquilles ; cette pierre eft calcaire & d'un jaune fale. Fig. 5. Petite bivalve du genre des dates, qui a percé la pierre de la fe. 4. Fig. 6. Date qui a percé le madrépore de la fig. 3. PLANCHE IL Fig. 1. Madrépore à très -petites étoiles, qui eft en partie détruit, & dont l'épaiffeur eft percée de longs trous faits par des vers à tuyaux, & dans le bout inférieur d'un defquels il y a un corps globulaire. Fig. 2. Madrépore femblable, criblé de tuyaux vermiculaires moins gros que œux du madrépore de la fig. 7, & qui font divifés en longues cellules par des corps globulaires plus petits que ceux des tuyaux précédens. : Fig. 3. Tuyau vermiculaire contourné , qui à l’une de fes extré- mités eft bouché d'un femblable corps globulaire; ce tuyau n'eft pas toffile. Elu * Fig. 4. Vertèbre d'un poiffon recouverte de battans d'huitres qui s'y étoient attachées. | , Fiy. $: Corps globulaire d'un-des tuyaux vermiculaires du ma- drépore de la fig. 1. Fig. 6. Corps'globulaire d'un des tuyaux de la fig. 2. Fig. 7. Échinite, dans l'intérieur duquel il y a le noyau d'ne bivalve & celui de l'animal qu'elle rentermoit, le pied & la fiange du bord du corps de cetanimal font fortis hors de la coquille. Fig. 8. Deflus de l'Échinite de la fig. 7, où la contre-partie du noyau de la bivalve renfermée dans l'Échinite , eft très-bien empreinte ” en Cieux. 42 Ne à FL La 14 \ Ve ua +" Mem. de L'Ac.R. des Se. 1789- Pay: 387. Plu. RSS Parue 2° Fig. Men .de lAc R. des Se -1769Pag. 357. Pl2. JL Inoram fc Mende lAc R.dar Je:1769. Pag. 857. Pl18. Partie 2° Pla.nr. DES SCIENCES. 357 SPrane me Li Fig. 1. Coquille fripiére non foffile, recouverte de bivalves can- -_ nelées longitudinalement, Fig. 2. La même coquille vue en deflous. Fig. 3. Coquille fripiere de la même efpèce, recouverte de caïlloux. Fig. 4. La ême coquille vue en defous. Fig 5. Er fripière os le purée de portions de le coques bivall cs. Five 6. Collie fripière foffi JL femblable, mais plus Dande, & qui eft char gée de re de coquilles bivalves & de buccin. LA ï Yy iÿ 11 Janvier 1764. 358 MÉMOIRES DE L'AGADÉMIE ROYALE MÉMOIRE Sur le danger dr l'infuffifance des épreuves ufitées pour les Canons de fonte de fer; fur la quantité de fonte la plus convenable à l'Artillerie , 7 fur les moyens les plus certains de la reconnoître. Par M. le Marquis DE MONTALEMBERT. Be quantité confidérable de Canons néceflaires à Ja Marine, a mis de tout temps dans le cas d'avoir recours aux canons de fonte de fer pour armer les Vaiffeaux,, le haut prix de ceux de fonte de cuivre, joint à quelques inconvéniens affez confidérables attachés aux canons de ce métal, ont prefque entièrement décidé en faveur de ceux de fer. Un examen des différentes qualités de la fonte de fer, un choix de la plus propre à réfifter aux plus grands efforts, un moyen enfin de la reconnoître & de l'éprouver, font les objets de ce Mémoire, L’honneur de la Nation, ainfi que la confervation de l'hu- manité, dépendent de la bonté de l’Artillerie: quels motifs plus puiffans pourroient nous exciter à acquérir des connoiflances dans ce genre? Perfonne de ceux qui ont été à portée de pratiquer les forges à fondre du fer, ne doute qu'il n’y ait de très-grandes différences dans les fontes qui fortent du même fourneau : l'on fait qu'il y en a de très-poreufe, très-brune, très-tendre, qu'on appelle foutre bourrue, & qu'il y en a de plus compacte, plus blanche & plus dure, que les Ouvriers qualifient de fonte qui a toute fa mine : Von fait de même qu'il y en a qui tiennent plus ou moins de ces deux qualités, mais peu de Maïtres de forges ont peut-être fait attention que la fonte brune, à volume 29: 388 .Pl.14 C- 1759. Pi ‘ 4e.R. dar Mem.de L Ze Ingrun Jeufp. Zee HE FER RU: saû Mem. de l'Ac.R de Sc.1759. Pag. 398. PL 15 JL Inorum Seulp. ET uk DES SCIENCES. 359 égal, eft plus lécère que la fonte blanche, ce qui dénote plus de parties folides dans lune que dans l'autre, & établit une difiérence confidérable entre ces efpèces de fonte; de-là il fuit qu'elles ne doivent pas être également propres aux mêmes ufages, & qu'il feroit très -avantageux de pouvoir connoitre laquelle il convient mieux d'employer à la fabrication des canons. De tout temps les canons ont été fondus indifféremment de toutes efpèces de fontes , telles que les fourneaux les ont données, excepté des premières fontes provenantes de la première femaine d'un fondage. Ces fortes de fontes qu'on qualifie plus particulièrement de fonte bourrue, ont toujours été regardées d’une qualité trop inférieure; mais après la première femaine, le fourneau étant devenu un peu plus chaud, & les Ouvriers y ayant mis plus de mine, la fonte devient moins brune, & les Maîtres de forges n’ont jamais manqué de lemployer en canons, parce qu'elle leur étoit payée fur un pied plus avantageux; de-là, fi le fourneau va bien, il s'échaufle de plus en plus, reçoit chaque jour plus de mine & fait en conféquence de la fonte plus compacte jufqu'au point où il eft, ce qu'on appelle aminé en terme de l'art: alors il fait de la fonte ferrée, pefante & dure: l’habileté du fondeur eft de maintenir fon fourneau dans cet état, dès qu'il pafle ce point le fourneau s'embarraffe, la fufion n'eft plus parfaite, il faut l’hacher de mine tout-à-coup pour éviter de mettre hors ; cela veut dire, porter beaucoup moins de mine, afin de ne pas ceffer tout-à-fait de fondre, & l'on eft plufieurs jours à ainer le fourneau au même point. Quelquefois on n’y réuffit pas, l'on ne fond plus ce qu'on appelle à profit, & l'on eft peu de temps après forcé de wetire hors ; fi tous les charbons étoient de même force & toutes les veines de mine également fondantes, il n’y auroit aucun art au Fondeur de tenir fon fondage au même point; mais les différentes qualités du bois, les différens degrés de cuiffon des charbons , peuvent les altérer confidérablement. Les bons Ouvriers doivent connoître toutes ces différences, alors ils y ont égard & tout va bien; mais les habiles gens font rares, % 360 MÉMoIREs DE L'ACADÉMIE ROYALE & fur-tout les Ouvriers attentifs; d’ailleurs, fi cès différentes caufes fe”r'uniflent à la fois, il eft bien difficile que le fondage ne s'en reflente; il règne donc de cette façon une variété dans la qualité des fontes qui en proviennent , qui toutes font éga- lement employées à fabriquer des canons; de-là la différente dureté que les Foreurs ont toujours trouvée en alaïfant les canons avant qu'on eût tenté de les couler fans noyau. Mais comme les accidens dont il vient d’être fait mention, font affez rares, heureufement pour les Maîtres de forges, il arrivoit précédemment que la plus grande partie des canons de chaque fondage étoient de fonte æinee, 'étoit l'intérêt des Fournifieurs, & ils y apportoient la plus grande attention. Aïnfi, tant qu'ils ont été les maîtres, on peut être für qu'ils ont fourni des canons de cette qualité, à l'exception de ceux coulés dans les premiers temps du fondage ou après quelques dérangemens dans le fourneau, qui fe trouvoient , à leur grand regret, d'une fonte moins aminée & quelquefois très-bourrue. Telle a donc été prefque généralement la qualité de la fonte employée à la fabrication de l'atillerie de la Marine jufqu'à Ja fin de l'année 1755. Mais le fieur Marits ayant obtenu au commencement de cette même année la création, en fa faveur, d’une nouvelle charge, fous le titre d'Infpecteur général des fontes de la Marine , ayant fait agréer précédemment au Miniftre que fes machines à forer les canons de fonte de cuivre fuflent établies dans toutes les forges, a cru devoir changer à cet égard les ufages, & s’eft attaché à faire fabriquer tous fes canons d'une fonte très-tendre & très-poreufe ; ce qui eft toujours facile, en obligeant les Ouvriers à porter moins de mine que le fourneau ne pourroit en fondre, & les Maîtres de forges s'y font conformés, non - feulement par les ordres qu'ils en ont reçus, mais par l'obligation où ils ont été de tourner extérieu- rement les canons, & de fe fervir, pour les forer, des ma- chines du fieur Marits: on verra plus bas que ces machines foreroient difficilement des fontes d'une autre qualité, mais cette matière eft affez intéreffante pour mériter un examen détaillé D Ch C + r + DES SCIENCES. 361 détaillé des motifs que le fieur Marits allègue , & pour difcuter la folidité de fes principes. Au refte, fi je les combats, ce ne fera qu’en leur oppofant ou des faits prouvés par l'expérience, ou des raifonnemens rigoureux, tels que amour du vrai & la plus grande impartialité peuvent les dicter. * « Le fieur Marits paroït fonder fon opinion en faveur des canons de fonte tendre, fur ce que ( dit-il) la fonte tendre eft de la fonte douce ; que tout métal doux ef liant & difficile à rompre; ainfi des canons d'une fonte tendre fe rompront d'autant plus difficilement qu’ils feront d’une fonte plus tendre, donc ils feront meilleurs; mais c'eft ici fur quoi il peut y avoir une erreur confidérable. La comparaifon qu'on fait des métaux qu’on appelle doux, comme for , l'argent, le plomb, Yétain, le cuivre & même le fer forgé, ne paroît applicable en aucune facon à la fonte du fer tendre qu'on appelle douce ; car il faut obferver que la douceur de ces différens métaux a pour propriété eflentielle, la facilité de s'étendre fous le marteau, & même de pouvoir être pallé à la filière ; leurs parties longues & crochues les rend fufceptibles de fe plier en tout fens, & ce n'eft qu'avec beaucoup de peine qu'on parvient à les rompre; mais la fonte de fer la plus tendre, c’eft-à-dire celle qu'on lime le plus aifément & qu'on appelle douce , eft bien éloignée . d'avoir aucune de ces propriétés qui caractérifent la ductilité des autres métaux ; les coups de marteau {a caflent par morceaux, elle n’eft point fufceptible d'aucune extenfion, ainfi la fonte, de quelque nature qu'elle foit, ne peut donc jamais être com- parée à ces métaux malléables, & le mot de fonte douce eff un mot impropre qui ne peut qu'induire en erreur; d'où il fuit que toute fonte de fer tendre où dure eft toujours un métal caffant, qui ne fe plie ni ne s'étend jamais. Cette obfervation importante (& fur laquelle je ne penfe pas qu'il y ait rien à objeéter), étant faite, la queftion {e réduit * Tout ce qui fe trouve ici avec | & eft rapporté mot pour mot, afin des guillemets, a été tiré d’un Mé- | de fervir de preuve que mes opinions moire que j'ai fait imprimer pour | étoient dans ce temps-là les mêmes mes affaires particulières en 1758, | qu’elles font aujourd'hui. Mém. 1759. , Zz 362 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE feulement à examiner, laquelle des deux fontes de fer fe caffe le plus aifément, de la fonte tendre ou de la fonte dure, & la première aura de ce côté de fortes inductions contre elle. On a déjà vu que cette efpèce de fonte eft beaucoup plus porcufe & plus légère à volume égal, que la fonte dure; les Fondeurs favent qu'elle contient moins de fer, ils l'appellent de /a fonte bourrue , c’eft le terme de Fart: ce font les premières fontes u’on tire d’un fourneau qui commence à fondre, comme il a été dit, & qui n'eft point encore à fon degré de chaleur; on met dans ces commencemens peu de mine & beaucoup de charbon; on en ufe de même lorfqu'il eft furvenu quelque embarras dans le fourneau, ce qui donne toujours de la fonte bourrue & très-tendre, de la fonte peu eflimée. Mais voici contre cette fonte un fait aflez concluant: dans les foreries que j'avois imaginées & fait exécuter pour le fo- rage d'une grande quantité de canons que j'avois fait couler pleins, & qui ont été forés avec mes machines avant que le fieur Marits eût fongé à établir les fiennes dans mes forges ; les boîtes qui tenoient le foret ou langue de carpe aflujettie à l'arbre, furent faites de fonte de fer; celles qui avoient été coulées avec de la fonte bourrue ne réfiflèrent pas un inflant, elles fe limoient comme du plomb, mais elles éclatoient au moindre effort. à Celles qui étoient fondues lorfque les fourneaux étoient plus en train ou mieux aminés, étoient plus difhciles à couper & réfifloient davantage ; il falloit cependant en changer fouvent, quoique de cette dernière qualité: mais ayant fait réflexion que les boîtes les plus difficiles à limer étoient celles qui ré- fifloient le plus; je fis refondre de la fonte de fer dans une cuiller au feu d’une forge de Serrurier, afin de la rendre plus compacte, & ces boîtes fondues avec cette fonte refondue qu'on avoit foin d'empêcher qui ne fe trempät, fe trouvèrent fi bonnes qu'on a continué de s'en fervir pour forer plus de quatre cents pièces de canons des plus gros calibres, qui ont été forés à mes machines. Cependant elles pouvoient toujours fe couper au cifeau DES SCIENCES. 363 & fe limer, quoique beaucoup plus dures que les précédentes. : Ona vu de ces fortes de boîtes s'être ufées avant de cafler. Un autre fait connu de tout le monde , auffi concluant , c'eft que les enclumes des forges à battre le fer, qui ont à “foutenir les efforts redoublés d’un marteau pefant un millier, & qui font de fonte de fer, fe fondent toujours avec la fonte l plus dure; on choifit le temps où le fourneau eft le mieux aminé & le plus échauffé, & c'eft alors qu'on les coule. L’ex- périence à appris que fi on les couloit au commencement du fondage avec cette fonte Lourrue, avec cette fonte très-tendre appelée fonte douce, elles {eroient dans peu de jours mifes en morceaux par le marteau; or rien ne reffemble plus à l'effet que doit faire l'effort fubit de Ja poudre, que le coup très- violent d’un marteau de forge qui frappe fur fon enclume; que l'on foit auprès d’un canon qui tire, ou près d'un marteau qui frappe, on reflent le même frémiflement de la terre fous les pieds. 11 femble donc qu'on pourroit croire que la fonte la plus propre à réfifter long-temps aux coups d'un marteau de forge, doit être auffi la meilleure pour des canons. La fauffe comparaifon qu'on à faite des propriétés des métaux qui fe liment facilement, à la fonte de fer la plus tendre, n'eft peut-être pas la feule erreur qui a induit à préférer la fonte tendre: on voit tous les jours que les pots de fer & les plaques de cheminées font très-faciles à cafler, & que la plupart font prefqu'impoffibles à limer; d'où l'on a conclu, avec aflez - d'apparence, que la fonte dure étoit très-caflante; donc la fonte dure neft pas bonne pour les canons; donc, a-t-on dit, la fonte la plus tendre doit être la meilleure : mais on fait fouvent une fauffe application d'un principe vrai, & felon toute apparence c'eft ici le cas: la fonte mince qui eft prefque toujours très- dure & qui ne peut abfolument fe limer, eft en effet très- caflinte, comme les pots de fer, les contrefeux & généralement tous les uflenfiles qui ont peu d'épaifleur ; mais l'on n'a pas fait attention qu'on ne peut rien couler de mince en fonte, fans que la fonte ne fe trempe fur le champ; lorfqu'on coule An canon avec là fonte la plus tendre & la plus éourrue ; la Zz ij L<4 L<4 LC LS a Led LA œ cc LC L<4 LS < LCA « L°4 LS4 L<4 œ LCA LC » » 364 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYyaALE fonte qui fe répand ä terre, qu'on appelle fer clair, étant mince, eft caffante & fe lime difficilement; fi l’on fait un contrefeu avec le refle de la même matière, il fera trempé parce qu'il eft mince, & fera de même caffant & dur, tandis que le canon fe trouvera très-tendre: tous les canons durs ou tendres ayant le bout de leurs coulées mince, il eft toujours caffant parce qu'il eft trempé: il eft donc très - démontré que la trempe rend toutes les fontes caffantes & dures, c'eft par la même raifon qu'elle rend toutes fortes de fers caffans; mais un canon ne peut jamais fe tremper à caufe de fa grande épaifleur , & parce qu'il fe refroidit très-lentement. Le plus ou le moiñs de dureté d'un canon a donc né- ceffairement une autre caufe, & dès que la dureté de la fonte n'eft plus l'effet de la trempe, cette dureté pourroit être prife avec plus d'apparence pour un indice de force, que pour un figne de fragilité, ainfi l'erreur peut être très-grande, en jugeant les canons durs comme on juge de la fonte durcie, par la trempe; d’ailleurs cette dureté eft extrémement différente , la lime ni le cifeau ne peuvent mordre fur la fonte durcie par la trempe, & le canon le plus dur fe lime & { fore; il ne s'agit que du plus ou du moins detemps, & d'y employer des outils qui y foient propres. Mais après avoir fait voir l'erreur dans laquelle on a pu tomber en confondant des chofes fi différentes, il convient d'examiner fi la caufe de la dureté des canons paroït plus fa- vorable pour eux que celle qui rend les canons tendres, afin d'éclaircir d'autant plus une matière qui ne fiuroit l'être trop. L'on a déjà dit que dans les commencemens de chaque fondage , l'on porte très-peu de mine dans les fourneaux, & qu'alors on a de la fonte de tout temps peu eftimée, qu'on appelle fonte bourrue , & qui {e coupe très-facilement; à mefure que le fourneau s'échauffe on augmente la mine, & lorfqu'il eft aminé Von a de la fonte plus denfe, de la fonte devenue plus pefante à volume égal, moins poreufe & plus dure. I} eft évident que cette dernière fonte contient plus de fer que la première; mais en continuant à porter dans le fourneau D'ELS SC IE NICE) S. 365 moins de mine que fa chaleur n’en peut fondre, on peut pendant quatre, cinq ou fix mois que dure le fondage , avoir toujours de la fonte de cette première qualité, alors on aura des canons fort tendres & fort faciles à forer ; feront -ils meilleurs ? c’eft la queflion. Voici ce qu'ils ont contre eux en apparence: 1.” ils ont tout ce qui a déjà été obfervé fur la foibleffe de la fonte tendre en général; mais de plus, il faut encore aux . canons fondus avec cette qualité de fonte, des fauffes rêtes fort hautes & fort grofiés, avec des coulées très-fortes, afin qu'ils {e trouvent fans cavités à la bouche après qu'on a fcié la faufie tête, parce que cette qualité de fonte étant extrêmement Kgère & poreufe, en fe refroidiffant elle fe retire beaucoup; i sy fait une quantité confidérable, de trous qui vont quel- quefois jJufqu'à deux pieds de profondeur, fi ces cavités entroierit dans la bouche du canon, il feroit rebutable, & il s’en eft trouvé plus d’un dans le cas : la fonte des fauffes têtes de ces canons eft quelquefois fi légère, fi divifée, fi atténuée par l'action du feu, que les trois quarts de l'intérieur des faufles têtes deviennent , en fe refroidiffant , de la poudre de fer beaucoup plus légère que la limaille, qui tombe en remuant le canon & qui s'envole au vent; cependant, lorfque les faufies têtes font aflez hautes, de femblables canons fe trouvent fains après être dévapirés & forés; mais ces canons, quoique fains , font toujours d’une fonte très-légère, très poreufe, dont on ne pourroit faire une bonne enclume de forge à battre: n'eft-il pas à pré- fumer qu'ils participent toujours de la foibleffe de cette fonte? & puifque la fonte tendre, quoiqu'appelée fonte douce, fe cafie par morceaux tout auffi net qu'une fonte plus dure , & que les expériences déjà citées prouvent qu'elle eft moins forte; il fuit qu'elle doit être jugée d’une qualité inférieure. La fonte de la feconde efpèce, au contraire, c'eft-à-dire celle qui a route Ja mine, felon Vexpreffion des Ouvriers ;- eft plus compaéte, plus pefinte à volume égal, plus dure & plus forte ; une fauffe tête de cinq ou fix pouces de haut fuffit , parce que cette fonte ne fe retire prefque point, & qu'il ne s’y Louve aucune cavité confidérable, ni jamais de poudie de fer, Zz ii » » L2] v Ÿ y Ÿ Ë 366 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE Ainfi, fi l'on veut ceflèr de regarder {1 fonte tendre comme un métal participant de la qualité des métaux malléables, puifqu'il eft aifé de démontrer que la fonte de fer n'a aucune des propriétés de ces métaux; fi l'on veut diftinguer la dureté occafionnée par la denfité de la matière, il me femble qu'on ne pourra refufer la préférence aux canons de fonte dure. Enfin, en examinant avec attention la nature de la fonte de fer, elle paroït plutôt comparable à du marbre qu'à aucun métal (faifant abftraction toutefois de l'aétion du feu fur la fonte de fer}, car elle eft dure & caffante ainfi que lui; d'où il fuit que fi l'on peut foutenir qu'un canon de fonte tendre eft plus fort qu'un canon de fonte dure, on foutiendra éga- lement qu'un canon de marbre feroit moins fort qu’un canon de pierre : il eft certain qu'on choifiroit une pierre homogène, compacte & dure pour faire un canon de pierre, de préférence à une pierre poreufe & tendre, Malgré toutes les raifons de préférénce qui font rapportées ici en faveur des canons de fonte de fer dur, je fuis très- éloïgné de prétendre décider une queftion de cette importance; il me fufhit d'avoir fait connoître qu'on s’expole à juger très- légèrement, quand on ne faifit que l'apparence des choles , & qu'on pourroit être tombé dans une erreur très-préjudiciable ; car depuis année 175$, que la nouvelle forme d’infpection a été établie dans toutes les forges, on exige qu'il ne foit employé en canons que de la fonte très-tendre; & fi cette fonte eft d'une qualité inférieure’, tous les Ports fe trouveront remplis de mauvais canons *. * Tous les Ports fe trouveront remplis de mauvais canons ; cette prédiétion ne s’eft malheureufement que trop accomplie; la Marine s’eft déjà trouvée plus d’une fois dans le cas de fe plaindre de la nouvelle artillerie : depuis quelques années, nombre de canons font crevés tant aux épreuves qu'à bord de différens Bâtimens du Roi. Voici une note du nombre de ces canons crevés récemment dans le feul département de Toulon. ; Au mois de Juin 1763, dans un Port de l’ifle de Corfe, où M, du Boufquet Commandant, faifoit feu fur un Bâtiment des Rébelles qu'il avoit ordre de détruire, il creva, fur lé chébeck du Roi le Séduifanr ; deux canons de huit coulés, pleins par le fieur Marits, & tournés & forés fuivant fes méthodes. tue e. HMS : ji du ER : cf 4 Se Le" | DE) SNS CMSE NC LE Ÿs. 367 Lorfqu'on les couloit tous avec des noyaux , ils euflent été criblés de chambres, fi lon eût employé une femblable fonte, auf poreufe & auffi lévère; ce n'étoit d'aucune façon l'intérêt du Fourniffeur, puifqu'il auroit fallu confommer beaucoup plus de bois en faifant beaucoup moins de canons, & en rifquant d'en avoir beaucoup plus de rebutés ». Ces faits nétoient fans doute pas connus de ceux qui ont décidé en faveur de Ia fonte tendre, ils n'étoient point initiés dans les détails du Maître de forge ; d’ailleurs les forets des nouvelles machines faits pour percer du cuivre, ont beaucoup de défa- vantage en perçant le fer, par la grande étendue de leurs parties expofées à un frottement qui n'eft rien, du fer contre le cuivre, mais qui eft beaucoup, du fer contre du fer. De plus, le point d'appui de fes forets qui font des demi-cylindres de huit à neuf pouces de longueur, fe trouvant dans le bas de la circonférence . de l'ame de la pièce, empêche la limaille de fortir ; il faut un Ouvrier continuellement occupé à retirer cette limaille avec un crochet, & à féringuer de l'eau dans l'ame de la pièce pour rafraichir le foret qui fe détremperoit en très-peu de temps fans ces précautions, par la chaleur du frottement. Tous ces foins étoient inutiles dans les foreries que J'avois fait exécuter, la limaille fortoit d'elle-même, & l'outil ayant peu de frottement on ne féringuoit jamais d’eau. L'expérience a prouvé de plus que ces fortes de forets à demi -cylindre, emploient plus du double du temps à forer un canon, que les forets à langue de carpe dont on fe fervoit à mes foreries, & des canons d’une fonte amine feroient inforables avec les outils à demi-cylindre des nouvelles machines. Il a de plus été ordonné de tourner Cet accident donna lieu de faire à Toulon une épreuve de cinquante- fix pièces pareilles à celle du chébeck Je Séduifant, & du même calibre de huit, fur lefquelles il en creva. quatre. Sur le chéheckle Requin, com- mandé par M. de Thorène, envoyé en Corle au mois de Juillet fuivant avec la même commiffion, il y creva encore un canon du même calibre ; & dans une nouvelle épreuve faite à Toulon au mois d'Octobre fuivant, de cinquante-deux pièces de dix-huit forées & tournées par Le fieur Marits, il en éft crevé trois. Ce qui fait en total dix pièces de canons crevées en quatre mois dans le feul département de Toulon. LS A (4 A (4 na (4 368 MÉmoirfs DE L'ACADÉMIE ROYALE extérieurement les canons de fer, ce qui neft poflible qu'en les faifant couler d’une fonte tendre : toutes ces raifons ont fans doute concouru à faire préférer la fonte tendre, tandis u'elles ne doivent être d'aucune confidération fi la fonte dure eft plus forte, & fur-tout s'il y a d'autres outils capables de la forer; & quand le tour deviendroit avec ces fortes de fontes une opération trop longue & trop chère, je ne penfe pas qu'il y eût rien à regretter. La fonte de fer eft un métal poreux que la rouille pénètre d'autant plus facilement, que fes pores font plus ouverts, & les canons tournés ont ce grand défa- vantage fur ceux qui ne le font pas, puifque cette opération enlève tout autour une enveloppe de plufieurs lignes d'épaiffeur, toujours beaucoup plus compacte, plus dure & plus ferrée que la fonte de l'intérieur de Ja pièce : la première pellicule même qui fe trempe contre le moule, eft fi dure que foutil du tour n'y peut rien; il faut l'enlever à la main à l'aide du marteau & du cifeau, ceft ce que les Ouvriers appellent eever le Jeu. Or il efl évident que l'humidité ou la rouille, s'introduit , plus difficilement & plus lentement dans une croûte de fonte auffi ferrée que dans une plus poreufe; le canon non tourné fe confervera donc plus long-temps fain, car la rouille eft proprement Ja cangrène du fer, elle le détruit à mefure qu'elle le pénètre ; & fi les vieilles pièces de fer font fi dangereufes à tirer, c'eft qu'elles font pénétrées de rouille à une profondeur confidérable; d'où il fuit que la méthode de tourner les canons pourroit ètre très- préjudiciable à leur durée par cette feule raifon ; mais cette raifon acquiert un nouveau degré de force, lorfque pour les pouvoir tourner, on eft forcé d'employer la fonte la plus poreufe, fi cette fonte eft la plus foible; & l'on a fi bien fenti la force de cette objection, qu'on a depuis quelque temps donné des ordres de pafler une couche d'huile fur tous les canons, afin de remplir les pores de la fonte, Mais un enduit femblable peut-il fuppléer à cette croûte compacte enlevée par le tour, & ne fera-t-il pas bientôt détruit par le fervice de la pièce? Le motif d'avoir des canons d'une forme extérieure plus régulière, & qui n'aient exactement que k matière qu'ils ù doivent DES SCIENCES 369 doivent avoir, eft fans doute un motif fouable, mais ne peut-on perfectionner aflez les mouleries, pour que cette forte de défectuofité devienne de peu de confidération. J'avois fait éprouver dans les derniers temps une façon de les mouler en fable, qui a donné plus de deux cents canons aufli beaux que s'ils euflent été tournés. La moulerie des pièces de fer a été juiqu'à préfent abandonnée à de fimples payfans, & ce qu'on appelle un Maïtre mouleur dans toutes les forges à canons, n'eft qu'un Ouvrier de même elpèce qui a travaillé quelques années plus que les autres, & qui le plus fouvent ne fe diftingue que par fon entêtement à fuivre fes ufages : fi cette partie tombe jamais entre les mains de quelqu'un d'intelligent , elle pourra être fort perfeétionnée , en étant très-fufceptible; & je ne crains point d'avancer que les chofes peuvent venir au point de voir fortir de ces mouleries des canons aufli exactement figurés que ceux qui ont été tournés, avec cette différence, qu'ils front vraifemblablement d’une beaucoup plus longue durée. Mais un pas très-confidérable que l'Artillerie de fonte de fer a fait du côté de la perfection, c'eft de pouvoir couler ces fortes de canons fans noyaux , ainfr que l’ufage s’en étoit établi depuis enwiron une trentaine d'années pour les canons de fonte de cuivre, Dès le commencement de fannée 17: 2, je tentai avec fuccès cette opération dans mes forges de Périgord, & jen fis part alors à M. Roüillé, Miniftre de la Marine, en linformant que je mavois trouvé aucune chambre dans les canons coulés pleins. qui venoïent d’être forés; & cet avantage, le plus grand qu'on puifle efpérer dans ce genre, s’eft toujours foutenu. Rien n'eft plus rare, depuis cette époque, que de trouver des chambres dans l'ame des pièces; autrefois, non- feulement il sy en rencontroit plus ou moins dans toutes, mais il s'y en trouvoit qui ne {e déclaroient qu'après l'épreuve, & d'autres fur {efquelles l'épreuve ne pouvoit rien; & ces der- nières étoient les plus dangereufes, puifque n'étant point vifibles elles ne pouvoient être une caufe de rebut, & qu'elles n'en afloiblifloient pas moins la pièce. Les épreuves avec de fortes charges dépoudre pouvoient frvir alors à faire découvrir du Mn, 1759: Aaa 370 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE moins les chambres qui approchoient le plus de la furface in= térieure de l'ame , & peut-être devoit-on employer ce moyen dans ce temps, au rifque même d'altérer la pièce; mais les chambres n'exiflant plus dans les canons coulés pleins , les épreuves ne pourroient plus avoir pour objet que de faire connoître les canons les plus foibles ; cependant, f: pour un canon qu'elles font connoître de cette -efpèce, elles peuvent en altérer cent autres: cette méthode eft très-nuifible & doit être rejetée, fur-tout s'il y a quelqu'autre moyen de connoître cette mauvaife efpèce de canons fans inconvéniens pour les bons; or ce moyen, on la dans fa différence des pefanteurs fpécifiques des différentes fontes : mais comment l'épreuve de la poudre nuit-elle aux bons canons qui lui réfiflent? c’eft ce qui demande à être plus développé. Nous favons par ce qui a été dit, que les canons de fer font fondus de fonte plus ou moins poreufe, plus ou moins dure:: fuppofons que la fonte la plus poreufe foit la plus foible, celle qui eft poreufe à un certain point fe rompra avec éclat par les coups d'épreuve à forte charge, & lon connoitra feulement . par-R celle qui aura ce degré de défeétuofité; toute autre qui: J'aura tant foit peu moins réfiflera à l'épreuve, mais non fans être beaucoup altérée ‘par un fi grand eflort ; il s’y fera dans une infinité d’endroits de petites fentes que l'action du reflort fait difparoître , en rapprochant après le coup les parties défunies. - Les canons de cette efpèce ayant fubi épreuve, ils feront. portés à bord du Vaifléau, & partiront par éclats aux premiers coups qu'on leur fera tirer, de même qu'on voit des pots de terre félés par le choc de quelque corps dur, refler entiers & fe brifer enfuite au moindre eflort. Il y aura peut-être tels de ces canons qui auroient été long-temps d’un très-bon fervice fans le défordre produit par l'eflort de l'épreuve; d'où il fuit que dans le nombre de tous les canons éprouvés avec la poudre, il doit y en avoir une certaine quantité qui feront devenus. très-dangereux par l'effet de l'épreuve, & il s'en trouvera. plus où moins , {lon que la fonte avec laquelle ils auront été fondus , approcher davantage de la qualité k plus foible;, DES SCTENCE S 371 , x our —= —— (Tr) & comme eft prefqu'égal à 7, gr rr + bb cette quantité ne fera qu'un peu plus que la moitié de ce que M. Sympfon a trouvé, ce qui réduit auffi la préceffion à un peu plus que la moitié de celle qu'il trouve, & cadre avec toutes les autres circonftances ; car fi on fuppofe à —o, c'eft- ä-dire le fphéroïde infiniment aplati, on trouvera que la préceffion de ce plan où d'un anneau , fera la même que celle d'un Satellite placé à Équateur. Je n'infifterai plus fur cet objet ; il me paroît fuffifamment démontré, que fi on peut foupçonner quelqu'erreur dans l'une des folutions , c'efl-à-dire dans celle de M. Newton & de M. Sympfon, c'eft fürement dans celle de ce dernier, Hhh iÿ CR 430 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE MÉMOIRE SUR LES "SO 1 $ PAT RIAENPÉNS Par M. Foucrroux DE BONDAROY. 21 Août E NTRE les objets infiniment variés que fournit l'Hifoire 1756. naturelle, il s'en trouve qui font aflez intéreffäns par leur forme, leur couleur, leur poli, pour attirer l'attention de ceux même qui, ne voulant pas fe donner férieufement à l'étude des productions de‘ la Nature, fe bornent à être ce qu'on appelle Amateurs ou Curieux. Les vrais Naturaliftes n'ont garde de fe plaindre de ce goût, qui, depuis quelques années, a fait bien du progrès; car, outre que la fimple curiofité conduit quelquefois à une étude férieufe, & qu'on a vu des Amateurs devenir des Naturaliftes fort inftruits; les collections qu’on trouve dans les Cabinets de ceux qui ne cherchent qu'un fimple amufement, deviennent d'autant plus utiles aux Naturaliftes, que les Amateurs témoignent ordinairement de la fatisfaction quand les gens reconnus pour inftruits trouvent dans leurs Cabinets des morceaux rares qui méritent leur attention. Tout ce qu'on pourroit defirer , c'eft que ceux qui n'épargnent point la dépenfe pour fatisfaire leur goût, vouluffent ne pas fe borner aux morceaux brillans, & que, fans trop s'attacher à ce qui forme fpetacle, ils eflayaffent de former des fuites qu'ils rendroient les plus complètes qu'il leur feroit poflible ; l'un fur les infeces, l'autre {ur les coquilles, es madrépores; d'autres fur les oifeaux, les poiflons, les fofliles ou les minéraux : chaque Cabinet offriroit ainfi une collection complète dans fon genre, & les Naturalifles y trouveroient une fource d'inf- tructions très-propres à étendre leurs connoiffances. Le Cabinet de M. du Hamel, dont je puis difpoler, m'a offert en quelques genres des fuites affez étendues, qui m'ont D ES 49. CALTENN) GES 421 fait naître des idées que j'ai cherché à confirmer ou à re@ifier par des morceaux analogues qu'il m'a été permis d'examiner dans d’autres Cabinets. Mes vues fe font principalement portées fur des corps foffiles étrangers à la terre, fur ces corps qu'on ne peut douter qui n'aient d'abord appartenu au règne animal ou végétal. Quoique dans ce nombre il s’en rencontre encore plufieurs dont on ignore l'origine, parce que les analogues végétaux ou animaux nous font inconnus; j'ai cru que cette partie, qui ne fait. ordinairement pas le principal objet des Cabinets, où l’on ne cherche que la décoration , méritoit, par cette raifon même, une fingulière attention; mais je me bornerai dans ce Mémoire à préfenter un examen des bois pétrifiés. | Comme on trouve dans la terre des morceaux de pierre, qui, par leur forme extérieure ou par la difpofition de leurs parties internes, portent quelques marques de lorganifation du bois, il y a long-temps que les Naturaliftes ont admis le . Changement des bois en pierres ; & n’héfitant point de regarder comme bois pélrifiés quantité de pierres fibreufes ou feuillées qui, au premier coup d'œil, montroient quelque reffemblance avec certains bois, la claflé des bois pétrifiés s'étoit beaucoup augmentée; mais des Naturaliftes plus attentifs ayant remarqué que ces prétendus bois fe rencontroient dans la terre, difpofts par lits ou par bancs d’une étendue confidérable comme toutes les autres pierres , ils ont trouvé dans l'examen des carrières plus de preuves qu'il ne leur en falloit pour s'aflurer que ces pierres filamenteules & feuillées n'avoient jamais dû leur ori- gine à aucun bois. De-R il eft arrivé que quelques-uns de ces Naturaliftes , revenus de cette erreur , fe font portés à un autre excès en refufant d'admettre aucun bois pétrifié. J'avoue bien qu'il faut prendre garde de confondre avec les bois pétifiés, les madrépores & les os fofliles, & même des pierres qui leur reffembleroient feulement par une forme extérieure; mais je ne fais fur quel fondement on a prétendu retrancher de cette claffe les morceaux mêmes qui avoient confervé les marques les plus évidentes de l'organifation propre aux végétaux; 432 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE je conviens que quand on confidère cette tranfmutation de bois en pierre, on fe trouve fort embarrafé de donner des raifons phyfiques de tout ce qui s'offre aux yeux d'un Obfer- vateur exact; mais fi on s’en tient au fait, il n’eft pas plus difficile de concevoir la pétrification d'un morceau de bois que celle d’un os, d'une coquille, & il l'eft beaucoup moins que de voir une crabe où une échinite prendre la dureté & le caractère d’un caïllou ; nos Cabinets en font remplis, & per- fonne ne peut les révoquer en doute, fur-tout maintenant qu'on Woféroit attribuer ces produétions à l'effet du hafard, & les taxer de jeux de la Nature, Il eft feulement permis de regarder comme tels certaine pierres qui, par leur forme extérieure, repréfentent un éclat de bois ou ufe branche d'arbre, lorfqu'elles n'ont point d'autre caractère déterminé ; car, fi on s'arrétoit à ces indices fuperficiels, on feroit expolé à fe tromper comme ceux qui croient trouver dans une carrière de cailloux des pains, des melons, des poires, dés pommes , des figues , des raïfins pétrifiés, &c. parce qu'ils aperçoivent dans ces cailloux des formes qui approchent de ces fruits *, S I neft pas auffi commun de voir prendre pour de vraies pétrifications de fimples incruflations : lon fait que les eaux de quelques fontaines dépofent un fuc pierreux , & qu'elles en entourent différens morceaux que l'on jette dans leur cours ; mais on ne tarde pas à s'aflurer qu'elles ne font que les encroûter, quand en caffant ces morceaux on trouve au milieu ce qui fervoit de noyau, ou bien on voit le milieu de f'incruflation vide, fi par l'efpace du temps la plante ou le bois qui lui fervoit de noyau, s'eft détruit : il n'en eft pas de même d’une autre incruflation formée par certaines eaux; il s'en rencontre qui font très-propres à faire illufion ; on trouve dans les Cabinets des morceaux qui offrent toute l'apparence d’une planche de fpin ; on y voit les veines du bois, les fibres longitudinales, les nœuds, jufqu'aux traits de la fcie, & en les rompant on * Voyez les defcriptions & les figures qu’Aldrovande en a données. Ulif: Aldroyand, muf. mer, pag. 476, in-fol, k voit ME 48 LISTCOAIVÉ NC ES voit que ces pierres font formées par des couches diftinétes les unes des autres ; mais M. Guettard nous apprend, dans les Mémoires de l'Académie *, que ces prétendues planches de fapin pétrifiées ne font que des incruflations pierreufes, qui fe moulent exactement fur des planches de cet arbre qu'on emploie pour conduire de l'eau à des moulins; le fédiment qui forme ces pierres s'étant donc moulé très-exactement {ur les planches de la conduite, en repréfente tous les détails du côté où ce fédiment portoit fur la planche, & comme il s'efl dépofé peu à peu, il eft aufli formé de couches qui font très- propres à faire illufion. . Î ne faut donc pas s'en tenir à des indices fuperficiels pour décider qu'une pierre a dû fon origine à un morceau de bois, il convient de.Joindre aux marques extérieures un examen de Fimierieur pour y chercher des veftiges de l'organifation qui eft propre aux végétaux : fi donc on aperçoit des branches, des nœuds, des fragmens d'écorce qui recouvrent le cylindre ligneux & les couches qui le forment ; fi fur la coupe longi- tudinale on voit les fibres du bois qui changent de direction ‘aux bifurcations des branches &' aux approches des nœuds ; fi ces changemens des fibres plus ou moins ferrées, que l'on appelle veines dans les bois, y font fenfibles; fi l'on y découvre fur la coupe tranfverfale les couches concentriques , les lignes rayonnées , l'extrémité des vaiffeaux qui ont fervi à porter la sève à la plante; fi vis-à-vis l'éruption des jeunes branches on voit l'émanation du tiflu cellulaire; enfin , fi 'organifation d'un morceau de bois fe montre fenfble dans une pierre de. même groffeur, je ne crois pas qu'on puifle refufer de con- venir qu'elle tire fon origine du règne végéal , qu'elle a été bois avant que d'être pierre; & nous urouvons dans les Cabinets quantité de pierres qui portent quelques-uns de ces caractères d'organifation d’une façon fi fenfible qu'il eft impotlhble de les méconnoitre. On peut joindre à ces marques caraclériftiques plufieurs * Ce Mémoire avoit été Iù à l'Académie, maïs il n’étoit pas encore imprimé ; il fe trouve année 1754. Mém. 1759. - lii 434 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE autres indications: certains morceaux ont des formes qui tendent à faire foupçonner qu'ils avoient été travaillés lorfqu'ils étoient bois pour fervir à quelques ufèges: nous en avons qui font percés les uns par ces petits vers qui vérmoulent le bois, & d'autres qui paroïflent avoir été percés dans l’eau par de gros vers à tuyau; leurs loges font fouvent remplies par la même matière criflalline qui a formé la pierre, mais elle eft plus chire que la pétrifiction du morceau de bois, parce qu'elle eft plus pure & n'eft mêlée avec aucune terre, Mais ce qui ne laiffe aucun foupçon fur l'exiftence des bois pétrifiés, c'eft la découverte qu'ont faite M.* du Hamel & Clozier de gros troncs d'arbres pétrifiés, garnis de leurs racines; on peut s'inftruire des obfervations que M. Clozier a faites fur Farbre qu'il a trouvé aux environs d'Etampes, en confultant les Mémoires préfentés x l'Académie par les Savans étrangers; je crois qu'on ne me blimera pas de rapporter ici celles que M. du Hamel a faites fur le tronc qu'il a découvert aux environs de Rochefort, telles qu'il me les a communiquées. Comme M.du Hamel faifoit efcarper une côte pour affeoir des tuyaux qui étoient deftinés à conduire des eaux à Rochefort, les Ouvriers l'avertirent qu'ils avoient rencontré une groffe pierre dans un lit d'une efpèce de glaife ou de vale, où il ne s'en trouvoit point d'autres. M. du Hamel s’y tranfporta avee M. Garavaque, Ingénieur de la Marine, qui étoit chargé de la conduite de ces travaux, & ayant reconnu que cette pierre fe montroit fous l'apparence d’un tronc d'arbre, ces Meffieurs firent fouiller le fable tout autour, & ils découvrirent plufieurs racines. qu'il fallut rompre pour tirer le tronc, qui eft formé par des couches d'une pierre blanchâtre & d’un grain aflez fin; quoiqu'elle {oit aflez dure, elle fe rompt aifcment par couches épaifies, dans lefquelles lorganifaion du bois n'eft pas fort apparente, de forte que fi en n'en avoit qu'un petit morceau, on pourroit : douter que cette, pierre dût fon origine à un tronc d'ubre pétrifié, fon ignoroit qu'il s'eft wouvé dans un lit de glaife où il n'y avoit D ms 2 810 /TENN CE: 435 ° point d’autres pierres, & que ce tronc étoit accompagné de fes racines. Tout ce tronc étoit couvert d’un couche de terre brune d’un quart de ligne d'épaiffeur; elle étoit fort différente de la pierre & de la terre marneufe qui l'environnoit & paroifloit femblable à du terreau formé de bois pourri. Ce tronc d'arbre étoit à mi-côte fur la montagne de Fo- rangeard auprès de ‘Tonnai-charente, laquelle eft actuellement couverte d'arbres. Comme on efcarpoit cette montagne au fud-eft, dans fa vue d'affeoir les tuyaux & les regards des fontaines de Roche- fort, M. du Hamel fe trouva en état d’obférver les différens lits dont elle eft formée; une couche de terre noire & légère d'un pied ou deux d'épaifleur en occupe le deflus ; elle recouvre un lit de petites pierres dures & blanches, de neuf à dix pouces d'épaiffeur; enfin on voit fous celui-ci un lit fort épais de glaife ou de vafe dans lequel s’eft trouvé l'arbre dont il s'agit ; fous cette vafé on pouvoit remarquer un fable affez femblable à celui qui da recouvroit, excepté qu'il étoit plus jaunâtre : M. du Hamel remarqua encore qu'il y avoit dans cette vale çà & là des amas, les plus gros d’un pied carré, d’une fubf- tance blanche demi-criftalline, qu'on pourroit comparer pour fa blancheur au lac Lunæ: cette fubflance n'étoit point du tout mêlée avec la terre qui l'environnoit; elle étoit pure & par grains de figure fort irrégulière; il en a rapporté une petite quantité à Paris, où il a effayé inutilement d’en diffoudre quelque chofe, en la broyant dans un mortier de bronze avec de l’eau bouillante; fous le dernier lit de fable eft une. carrière de pierre fort dure qui s'étend jufqu'au pied de la montagne. Enfin, M. du Hamel eflime que cet arbre étoit à dix ou dy pieds en terre; mais il ne faut prendre ceci que comme une eftime, car les efcarpemens étant faits, il étoit plus difficile de prendre des mefures exactes. J'étois à portée de faire fur ce tronc les obfer vations que je defrois , puilque M. du Hamel en a fait venir à Paris deux morceaux qui pèfent environ dix-huit cents livres. . Jii ij 36 MÉMOIRES DE L'ACAPÉMIE ROYALE J'ai dit que l'organifation, prife en détail, n'étoit pas fort apparente ; on n'y découvre point clairement les couches ligneufes , les infertions, les trachées ; néanmoins indépen- damment des circonftances qui ont accompagné fa découverte, il porte encore des caraétères qui ne permettent pas de douter de fon origine. Ceci me fournit l'occafion de faire remarquer que comme il y a certains bois , tels que le peuplier , le faule, le tremble, dont la fabflance ligneufe femble uniforme, puifqu'on n'y aperçoit que très-difficilement les cercles concentriques , les infertions & les fibres , ces bois doivent conferver après la pétrification ce caractère d’uniformité, & on n'y doit point apercevoir des vefliges d’organifation auffi fenfibles qu'on les découvriroit dans un morceau de chène ou d'orme qui auroit été pétrifié; d'ailleurs la couleur & la dureté des bois pétrifiés provenant , comme nous le prouverons dans la fuite, autant de la qualité du fuc lapidifique que de l'efpèce de bois qui aura reçu ce fuc, il faudra d'autant moins compter fur l'exactitude des noms qui eur auront été déterminés, qu'il aura été facile de varier fur un grand nombre de genres & d'efpèces très-différens. Les arbres qui croifflent communément dans les endroits où lon trouve des bois pétrifiés, ne peuvent pas plus fervir à en reconnoitre lefpèce; car on fent bien que puifque nous trouvons dans la terre des coquilles de mer; on peut aufli y trouver des bois pétrifiés étrangers au lieu d’où on les tire. On ne manque donc pas d'obfervations qui prouvent que le bois peut fe convertir en pierre, au moins auffi aifément que plufieurs autres fubflances qui éprouvent inconteftablement cette tranfmutation; mais il n'eft pas aifé d'expliquer comment elle fe fait: j'efpère qu'on me permettra de hafarder fur cela quelques conjeétures; mais je tàcherai qu'elles {oient appuyées fur des obfervations. On trouve des bois, qui étant, pour ainfr dire, à demi pétrifiés , s'éloignent peu de la pefanteur du bois; ils fe dix ifent aiment par feuillets ou même par filamens , comme certains bois pourris; d’autres plus pétrifiés ont le poids, la dureté &. DES SCIENCES. 437 —Topacité de la pierre” de taille ; d'autres, dont Ja pétrification eft encore plus parfaite, prennent le même poli que le marbre, pendant que d'autres acquièrent celui des belles agates orien- tales; j'ai un très-beau morceau qui a été envoyé de la Mar- tinique à M. du Hamel, qui eft changé en une très - belle fardoine ; enfin on en trouve de converti en ardoife. Dans ces morceaux on en voit qui ont tellement confervé l'orga- nifation du bois, qu'on y découvre avec la loupe tout ce qu'on pourroit voir dans un morceau de bois non pétrifié. Nous en avons trouvé qui font encroûtés par une mine de fer fableufe, & d'autres font pénétrés d’une fubftance qui étant plus chargée de foufre & de vitriol, les rapprochent de l'état de pyrites ; quelques-uns font, pour ain dire, lardés par une mine de fer très-pure, d’autres font traverfés par des veines d'agate très-noires. Voilà des faits dont l'explication phyfique devient embar- raffante, du moins à l'égard de quelques circonflauces : je vais eflayer de le faire apercevoir, L'idée la plus commune fur la formation des pierres fe réduit à fuppofer qu'une fubftance pétrifiante, que l’eau charie fans doute, ou l'eau elle-même chargée d’un diffolvant, s’infinue dans des mafles de fable ou de terres argileufes, holaires, cré- tacées, &c. & qu'uniffant les unes aux autres ces molécules terreufes , elle forme une mafle de pierre; fi le dépôt du fuc péuifiant eft peu abondant, l'union n'étant pas intime fa pierre fera tendre, mais elle augmentera de dureté à mefure que la fubftance pétrifiante fe dépofera en plus grande quantité, & que l'eau qui la tenoit en diflolution s'évaporera. Sans s'écarter de ces principes, on aperçoit forigine de beaucoup d'eljèces differentes de pierres; car d’abord les fucs péirifians peuvent être de diffcrente nature; es Chimiftes font dans leur laboratoire des félénites, qui font des productions criftailiues propres à pénétrer & à unir en maflé les molécules. terreules, Par la combinaifon du feul acide vitriolique avec un grand nombre de fubflances terreules , je fuis parvenu à formex Lii jj 438 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE des concrétions criflallines qui différoientaffez confidérablement les unes des autres. Je ne rapporte ces produétions de l'art que pour donner une idée de ce que la Nature peut opérer fucceffivement dans l'intérieur de la terre, où l’on trouve du criftal de roche, du quartz, du fpath , des félénites , des flalaétites, des gyps diffé remment criflallifés ; car je crois qu'on peut regarder toutes les fubftances criflallines comme capables de convertir en pierres les différens corps qui en feront pénérés; & füuivant qu'ils Fauront été par lun ou l'autre de ces fucs, il eft naturel de croire qu'il en réfultera des pétrifications de nature différente: ce n'eft pas tout, chacun de ces fücs pétrifans peut acquérir différens caraétères fuivant les alliages fulfureux où métalliques qui fe peuvent faire dans l'intérieur de la terre, & on conçoit que dans certaines circonftances la dureté & a couleur des . pierres peuvent dépendre de ces alliages; j'ai vu changer la couleur des félénites artificielles que font les Chimiftes par un petit alliage, tantôt de fer, & tantôt de cuivre; ainfi on aperçoit que ces différens mélanges qui f font avec les fucs pétrifians, doivent occafionner beaucoup de variété dans Îa pétrification. Je conclus de ce qui vient d’être dit, des obfervations de M. de Reaumur & des autres Phyficiens naturaliftes, fur la for- mation des pierres : 1. que dans la pétrification d’une même fubftance il doit réfulter beaucoup de variétés, fuivant labon- dance du fuc pétrifiant, les différentes fubftances dont il peut s'être chargé dans la terre, & la différente nature de ces fucs ; 2. que les différences infinies qu'on obferve dans les corps qui font expolés à la pétrification, doivent encore influer beaucoup fur la nature des pierres; les terres, les fables de difiérens grains, de différente couleur, plus ou moins péné- trables par les fucs périfians , tantôt purs, tantôt alliés avec des molécules métalliques ou pyriteufes ; les amas des parties qui appartiennent au règne animal ou végétal, coquilles, os, dents, morceaux de bois, toutes ces chofes doivent affurément influer auffi fur la nature des pierres & en multiplier les efpèces. É D. ES) SV CH E NN QUE 6e 439 Ces idées générales paroïffent fuffhfantes pour expliquer toutes les obfervations qu'on peut faire fur les pierres ; néanmoins quand on examine plus en détail les pétrifications, on trouve bien des chofés dont il eft difficile de rendre raifon. Pour ex- pofer clairement les difficultés qui regardent les bois pétrifiés, je me trouve obligé de dire quelque chofe des coquilles foffiles ; mais comme cette matière eft étrangère à mon Mémoire, je me bornerai à ce qui me paroîtra abfolument néceflaire pour l'intelligence de ce que j'ai à dire fur les bois. Les coquilles étant de leur nature plus liées & moins fujettes à fe corrompre que les bois, elles peuvent fe conferver plus long-temps dans la terre fans efluyer de changement; nous en trouvons aufli qui femblent n'en avoir prefque point éprouvé; on y voit là nacre & les couleurs, qui vraifemblablement étoient propres à la coquille; il n’a fallu pour en pétrifier d’autres que le fecours d'une fimple infiltration du fuc pierreux , mais celles qui font renfermées dans les pierres offrent d'autres difficultés; on en trouve dont l'intérieur eft exactement rempli par une fubflance plus ou moins dure, qui forme un noyau figuré exactement comme l'intérieur de la coquille qui lui a fervi. de moule. | .! En examinant avec attention ces coquilles:, j'en ai trouvé qui étoient beaucoup plus dures que la: fubflance du noyau ;. cela offre rien de furprenant, car, fi le fuc pétrifiant s'eft fixé dans une coquille, fubftance plus folide que la terre qui lui fervoit de noyau, cette coquille endurcie par le fuc pierreux aura dû former un obflade à f'introduétion du fac pétrifiant dans la partie terreufe, qui aura {acquis peu de folidité fi elle a reçu peu de ce fuc ; maïs on voit des coquilles dont, le noyau forme une belle agate ou une matière criflaline pure , pendant” que la fubflance de la coquille femble être reftée dans fa première nature; J'ai verfé de l’eau forte fur. ces moules, & il s'en eft trouvé que cet acide n'attaquoit que foiblement ; dans ce cas. il eft aflez naturel d'imaginer que la fubflance du noyau étant: plus rare que celle de la coquille, le fuc pétrifiant s'y étant accumulé en plus grande quantité, y aura formé une agate: 440 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE plus parfaite que celle de la coquille; enfin on trouve dans une terre molle & marneufe, des moules agatifiés qui ont été formés dans des coquilles : on en peut encore attribuer la caufe au fuc criftallin qui fe fera filtré à travers la terre, & fera parvenu jufqu'à la coquille qu'il aura remplie de cette matière pure, propre à former l'agate la plus tranfparente. Mais il fe trouve de ces coquilles interpofées entre une pierre fort dure & un noyau agatifñié, lefquelles font moins dures ue les coquilles fraiches, & que les acides diflolvent : cette obfervation eft fort embarraffante; car il femble que la coquille devroit avoir au moins la dureté de la pierre dans laquelle elle étoit renfermée. On ne peut pas dire ici que pour former une union parfaite & un corps dur, il faut une affimilation de parties, un certain rapport entre le fuc pétrifrant & la fubftance qui fe pétrifie, puifqu'on trouve des coquilles con- verties en agite; de plus, l'Académie peut fe rappeler une obfervation encore plus fingulière, prife dans le règne végétal ; je veux parler de ces noix qui furent trouvées en terre, dont l'intérieur du cerneau étoit pétrifié pendant que le bois n’avoit oint du tout changé de nature. Ces obfervations ne conduiroient-elles pas à imaginer qu'il faut que les corps offerts à la pétrification foient dans un certain état pour fa recevoir, peut-être même la pofition du corps & une certaine direction de fes fibres pourroit-elle être néceffaire ? la coque de la noix & les coquilles foffiles n'étant pas dans cet état & dans cette pofition , la matière criftalline fe fera introduite dans leur intérieur par quelques ouvertures, &c aura formé dans la coquille un moule d'agate & dans l'enve- loppe du cerneau, qu'elle aura encroûtée, une criftallifation ou une vraie flalactite, fur lefquelles les acides mordent encore: mais ceci n’eft qu'une conjeéture; je reviens aux bois pétrifiés. On trouve des morceaux de bois dont une partie efl con- vertie en pierre & l'autre en agate; la partie qui n'eft convertie qu'en pierre eft tendre, tandis que l'autre a la dureté des pierres précieufes ; dans ce cas on peut dire que la partie qui a été convertie en agate, s'eft trouvée plus expofée que le refle au \ DES SCIENCES. A4T au courant du fuc pétrifiant, & peut-être que dans la fuite tout fe feroit agatifié ; néanmoins j'inclinerois à penfér qu'il y a certains corps qui ont plus de difpofition à fe pétrifier que d'autres; j'en ai déjà rapporté des exemples, & il s’en trouvera encore d’autres dans la fuite : car, quand on voit un même morceau de bois d’une fubftance uniforme, converti partie en pierre, partie en agate & partie en fardoine, on eft porté à en chercher la caufe dans la différence des fücs pétrifians ou dans leur abondance; mais lorfque dans certains morceaux entièrement agatifiés on diftingue facilement la tiflure différente du bois formé de l’aubier & de l'écorce, il me femble que cette obfervation prouve affez bien que les différentes fubftances qui { pétrifient, contribuent, ainfi que le fuc pétrifiant , à faire des pierres de nature différente, Mais comment certains morceaux, quoique convertis en agate très-dure, confervent-ils des caractères d'organifation très- fenfibles , les cercles concentriques, {es infrtions , l'extrémité des tuyaux deftinés à porter la sève, a diftinétion de l'écorce de f'aubier & du bois? fi on imaginoit que la fubflance vé- gétale fût entièrement détruite, ils ne devroient repréfenter qu'une agate fans les caractères d’organifation dont nous parlons; Î1 pour conferver cétte apparence d’organifation on vouloit que le bois fubfflät, & qu'il n’y eût que les pores qui fuffent remplis par le fuc pétrifiant, il femble qu'on pourroit extraire de l'agate les parties végétales: cependant je n'ai pu y parvenir, quoique j'aie employé tantôt les acides & tantôt une calcination modérée ; {je dis une calcination modérée, car un feu trop violent auroit vitrifié mes agates) mais un feu fuffifant pour réduire en charbon toute la fubftance végétale, n'a point altéré la couleur & le poli de mes bois agatifiés; je penfe donc que les morceaux dont il s’agit ne contiennent aucune partie qui ait confervé la nature du bois; & pour rendre fenfible mon idée, je prie qu'on fe rappelle que fi on diftille à la cornue un morceau de bois , le charbon qui reftera après la difillation ne pèféra pas un fixième du poids du morceau de bois; fr on brüle le charbon, on n'en obtiendra qu'une très - petite Mém, 1759. Kkk 442 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE quantité de cendres, qui diminuera encore quand on en aura retiré les fels lixiviels. Cette petite quantité de cendre étant la partie vraiment fixe, lanalyfe chimique dont je viens de tracer l'idée, prouve affez bien que les parties fixes d’un morceau de bois font réellement très-peu de chofe, & que la plus grande portion de la matière qui conftitue un morceau de bois, eft deftructible & peut être enlevée peu à peu par l'eau , à mefure que le bois fe pourrit : il n'eft effectivement point rare de trouver des morceaux de bois pourris qui ont perdu prefque tout leur poids; quand ils font defléchés, les parties en font fi peu liées les unes aux autres, qu'on peut les réduire en poudre en les froiflant entre les doigts, & cette poudre n’eft autre chofe qu'une terre légère & poreufe; mais quand ils n'ont été expolés à aucune preffion, les molécules terreufes reftent dans la même polfition refpective où étoient les fibres ligneufes: fi on prend les précautions né- ceffaires pour ne rien déranger, on aperçoit les couches liyneufes, les infertions & même les orifices des vaifleaux féveux, quoique tout cela ne foit formé que par une terre fine où une efpèce de pouflière qui n’a prefqu'aucune confiftance. Maintenant, fi lon conçoit que la plus grande partie du bois eft détruite, que le fquelette ligneux qui refte eft formé par une terre légère & perméable au fuc pétrifiant, fa con- verfion en pierre, en agate, en fardoine, ne fera pas plus difhcile à concevoir que celle d’une terre bolaire, crétacée ou de toute autre nature: toute la différence confiftera en ce que cette terre végétale ayant confervé une apparence d’organifation , le fuc pétrifiant fe moulera dans fes pores , s’introduira dans fes mo- lécules terreufes, en confervant néanmoins le même caractère; & comme nous avons dit plus haut, que la différente nature des matières qui f pétrifioient ; entroit pour quelque chofe dans les caraétères particuliers à chaque pierre, il en peut ré- fulter cette différence qu'on aperçoit enwe l'écorce, l'aubier & le bois. Pour fuivre cette idée, il faut donc imaginer que le bois, dans un temps favorable, eft offert au fuc lapidifique qui s'infinue D £:Ss SC TE IN CESR 443 dans les pores : on trouve cependant du bois pétrifié dans des “endroits où ce fuc ne paroït pas avoir paflé, du moins où if n'a produit aucune pétrification; ce feroit une vraie difficulté à laquelle il me feroit difficile de répondre, fi on prouvoit que les morceaux qu'on cite ont été pétrifiés fur le lieu qu'on -défigne, & qu'ils n'y ont point été tranfportés par des bou- leverfemens femblables à ceux qui ont apporté à une fi grande diflance de la mer & à une f1 grande profondeur dans nos terres des coquilles de toute efpèce, qui ont été formées dans cet élément. D'ailleurs je prie qu'on fafle attention que dans l'endroit où M. du Hamel à trouvé cet arbre dont j'ai parlé, & qui probablement y avoit changé de nature, il a obfervé une carrière à peu de diflance & à peu-près du même grain; & comme nous avons prouvé que la qualité du fuc, la diffé- rence du fujet qui fe pétrifie, peut en occafionner dans la pétri- fication, on ne devroit pas être furpris quand le bois pétrifié différeroit par la couleur ou le grain des pierres voilines; mais leur conformité ou refflémblance ajoute à la probabilité de la conjecture. Enfin on pourroit me demander pourquoi le fuc lapidifique dans fon paflage, n’aura pas lié le fable comme les parties du bois pourri & n'en aura pas formé des pierres? Ceite queftion tenant davantage à la formation des pierres en général qu'à celle des bois pétrifiés , j'aurois pu la regarder comme fortant du fujet que j'ai voulu traiter: d'ailleurs, j'avoue que cette matière n'étant pas fufceptible d'expériences, je n'y peux répondre que par des conje@ures ; mais par la grande quantité de parties étrangères qu'on trouve dans les pierres, n'eft-il pas permis de croire qu'il y a différentes efpèces de terre? une, par exemple, qui eft compofée de la deftruétion des paties végétales & animales, & que celle-ci principalement pourroit être liée par le fuc lapidifique & lui fervir à formet les pierres; pendant que l'autre, qu'on peut regarder comme la terre première, n'y feroit pas toujours auffi propre. Si on me demande quelle eft 1 vertu qui a été refufée à celle- ci Kkk ïj 444 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE pour produire le même effet? je répondrai que je ne la connois pas davantage que celle qui fait produire à la combinaifon de l'acide vitriolique avec certaines terres , différentes félénites & avec d'autres difiérens fels; que je crois cependant, fans en connoître la caufe, que nous insitons par ces combinaifons artificielles, ce que la Nature opère fecrettement dans la terre en formant les pierres; & qu'ainfi je compare le fuc criflallin à l'acide vitriolique ou à une eau qui s'en fera chargée plus ou moins, qui formera différentes pétrifications fuivant fa nature de fa bafe ou fa combinaifen avec les différentes terres qu'elle aura liées, auxquelles elle aura fait prendre corps; que je crois le fuc criflallin lui-même un compofé qui peut varier, qu'il forme des fubflances différentes fuivant la bafe avec laquelle il fe combine. Quand il fe fera joint à une matière très-pure , if aura produit une concrétion pierreufe très-épurée & très-par- faite; joint avec une autre bafe de nature différente & plus épurée , il produira un pur criflal; avec une autre moins fine, il donnera un fable dont les grains ne font eux-mêmes que de petits criflaux; enfin par la combinaifon de la même eau avec différentes terres de nature très-différentes, & fuivant, comme je l'ai dit, que le fuc lapidifique sy fera diflout en plus ou moins d'abondance, il en réfultera des pierres d'un grain plus où moins fin ou plus ou moins dur, dont les couleurs varieront encore fuivant que plus ou moins de matières cui- vreufes ou ferrugineules s'y feront introduites. De même fi le fuc lapidifique réunit des pierres déjà formées ou des cailloux, ce nouvel alliage fera plus dur, fuivant la nature des matières qui y feront entrées, & fuivant la qualité du fuc criftallin qui les aura liées; ce qui aura dépendu du plus où moins de terre, qui, mêlée avec lui, pourroit l'empêcher de prendre de Ja confiftance : enfin de même qu'avec l'acide vitriolique & cer- taines terres, on ne peut produire ni félénites ni fls, de même aufli avec celles-là le fuc lapidifique ne produira aucune pétrification. La plupart des auteurs qui ont traité de la formation des pierres, ont parlé du fuc pétifiant fans le définir ni prouvex piieus 1 SLC:IVE NECiE 8. 445 Ton exiftence ; ne pourroit-on pas me faire le même reproche dans l'explication que je donne ici des bois pétrifiés? Voici les remarques d’après lefquelles j'ai cru pouvoir admettre un gluten, un fuc criflallin ou pétrifiant, comme on voudra l'appeler, qui raflémble & ne fait qu'une mafle d'une terre propre à fervir de bafe à la pétrification : dans tous les cas où l'expérience ne peut fervir de guide, lobfer- vation doit y fuppléer, quoiqu'elle ne nous mène fouvent qu’à des probabilités. Je crois avoir vu le gluten très-fenfiblement dans les terres grafles, bollaires & argileufes, dans celles qui deviennent tenaces dans l’eau; les acides attaquent le gluten de ces terres, ils les décompofent & les dénaturent. Je le reconnois encore dans certaines pierres dans lefquelles, dès leur première création , il s'eft rencontré des coquilles ou quelques corps étrangers ; lon trouve le plus fouvent l’intérieur de ces coquilles rempli d'une matière plus pure & plus claire que le rette de la pierre, parce que le fuc criflallin n'a point trouvé dans ces coquilles de terre propre à fe joindre avec lui; ce qui a occafionné une pétrification différente du morceau dans lequel on fa rencontre. Certains bois dont j'ai parlé qui ont été percés, étant en nature, par ces vers à tuyaux dont les loges font remplies d'une matière d’agate, m'ont fervi encore de preuves. Ces amas de matière criflalline qui accompagnoient arbre périfié de M. du Hamel, me paroiffent avoir été formés par l'abondance du fuc criftallin , & pouvoir fervir à prouver fon exiflence & fa néceflité dans les pétrifications. A J'extérieur de certains morceaux de bois pétrifiés, il paroït. quelquefois une exudation de ce fuc criftallin, fort reconnoifiable par fa pureté, Enfin j'attribue encore au fuc pierreux certaines efpèces de criflallifations qui le rencontrent dans prefque toutes les pierres. Le fuc criflallin fe trouve en moindre quantité dans les: grais &c. dans certaines autres pétrifications ; auffi. dans celle-là. Lunion des parties qui les conftituent eft-elle moins parfaite. Kkk ii 446 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE L'eau eft, je crois, le diflolvant de ce fuc criftallin; fes eaux de certaines fources qui dépolent & encroûtent les fubf tances qui font expofées dans leurs cours, font des preuves de cette affertion & aufli de fexiftence du fuc pétrifiant. Ce fuc eft moins pur & moins criftallin que quelques-uns de ceux que nous venons de citer, parce que dans ces derniers il fe trouve probablement mêlé avec une terre ; auffi forme-t-il avec elle une pétrification moins parfaite. Je dirai la même chofe des félénites ; mais la difficulté, remarquée par ceux qui ont le plus étudié cette partie, fubfifte toujours. Ne fembleroit-t-il pas, puifque l'eau eft le diffolvant du fuc criftallin, qu’elle pourroit, une fois dépolé, s'en charger de nouveau. Je ne peux encore répondre à cette queftion , qu'en expofant un fait très-connu dans les laboratoires, qui vient, je crois, ici d'autant plus à propos, que l'effet du fuc criftallin paroît lui reflembler davantage. Quand on fait une combinaifon d'un acide avec certaines terres, elle produit de vrais fels ; avec d'autres terres de nature différentes, elle produit des fels pierreux ou des félénites, qui changent de forme autant que varie l'acide ou la terre qui leur fert de bafe: ces combinaifons une fois formées, elles fe fondent & fe diffolvent très-difhicilement dans l'eau ; quelques- unes y font même tout-à-fait indiflolubles; n'eft-ce pas ici une copie du travail de la Nature? Le fuc criftallin admis, fa nature n'eft pas auffi aifée à définir; diroit-on que c’eft l'eau pure? mais il diffout les pierres déjà formées, & de cette nouvelle combinaifon viennent les flalactites, & l'eau pure n'a point cette propriété ; les flalaétites ou les pierres ayant été calcinées, broyées, il eft impoflible avec de l'eau de les reformer: le fuc criftallin feroit-il donc une eau chargée d'un acide particulier, ou un de ceux que nous connoiflons qui auroit fouffert quelque modification particu- lière? l'expérience & les obfervations nous l'indiqueront peut- être un jour. Revenons à la pétrification des bois : fi l'on admet l'expli- cation que j'en viens de donner, je me trouverai en état Ses) Scies ces 447 d'expliquer un des plus finguliers morceaux que j'aie vu en ce genre. M. du Hamel ayant fait fcier un morceau de bois agatifié qu'il avoit rapporté de Rochefort, a découvert au milieu un Morceau de fer que le Lapidaire avoit divifé en deux, comme la pierre; ce corps étranger paroït au premier coup- d'œil de vrai fer régulifé & forgé en clous; néanmoins il n'eft prefque point attirable par laimant ; il ne paroît point dudtile, & le burin, au lieu d'enlever fur ce morceau des fragmens ou d'y tracer un fillon comme fur un fer régulifé, n'en enlève que de petites parties réduites en grains. Je crois que ces obférvations qui conviennent à la mine de fer, ne font pas fufhfantes pour décider que le morceau dont il s'agit n'a pas été originairement du fer forgé; car l’on fait que le fer expofé long-temps à d'air, perd fouvent cette qualité: M. du Hamel a rapporté de Rochefort un morceau de fer d'un quart de pouce en quarré, & de quatre à cinq lignes d’épaifleur, qu'il a rompu des barreaux d'une grille qui couronne la fontaine royäle qui eft à l'entrée de la rade; ce morceau qui vient tès-certainement d’un barreau de fer forgé, n’eft point atti- rable par Faimant, & il a perdu fa dudiülité ; il fe rompt en morceaux plutôt que de fe prêter aux coups de marteau: les barreaux qui ont fourni ce morceau, ne font mouillés par l'eau de la mer que quand des vents font confidérables, mais ils font toujours expofés à l'air de da mer, & pendant l'été à un foleil fort vif. Si ces circonftances ont fuffi pour dépouiller de fon flogiftique du fer forgé, & le rendre femblable à prefque toutes les mines de fer, il eft probable que le fer qui s’eft trouvé dans le bois agatifié auroit pu fouffrir les mêmes changemens par le long féjour qu'il a fait dans la terre; mais je fuis porté à le regarder comme une mine de fer très-pure, non-feulement parce que la loupe fait apercevoir de petites veines métalliques qui s'étendent de côté & d'autre, mais encore parce que je polsède des morceaux de bois du même endroit qu'on voit fenfiblement ardés d’une mine de fer très- pure ; il refte néanmoins une difficulté, pourquoi dans notre morceau de bois agatifié, aperçoit-on des changemens de. 248 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE direction dans les fibres qui avoifinent le corps étranger ferrugineux ; pourquoi les fibres longitudinales paroiffent-elles comprimées en ces endroits? un clou enfoncé avec force dans un morceau de bois auroit pu produire cet effet, mais il femble que l'écoulement d'une fubftance métallique dans une cavité ne peut rien produire de femblable; néanmoins fi on fe rappelle ce que nous avons dit de l'état d’un morceau de bois pourri réduit en terre fine, qui n'a prefque pas de confiflance, on pourra concevoir que la moindre preffion de l'écoulement métallique pourra produire le changement de direction dans les fibres que nous nous fommes propofés d'expliquer, & les morceaux que nous avons décrits, où plufieurs filets de cette mine paroillent réunis & fous la forme dépouillée de clous, ferviront à prouver le fait & à faire regarder les morceaux dont nous venons de parler comme l'effet d’une même caufe; fi la matière métallique avoit été en plus grande quantité, le bois entier auroit été converti en fer & feroit devenu femblable à des morceaux de bois changés en mine de fer, dont on lit la defcription dans plufieurs Auteurs. Je vais terminer ce Mémoire par un fait qui eft plus difficile à expliquer que tous ceux que nous venons de rapporter : M. du Hamel pofsède une branche de bois pétrifié, d'environ cinq pouces de longueur , fur à peu près deux pouces & demi de diamètre ; elle eft fendue en deux fuivant fa fongueur, & elle a été polie à un de fes bouts fur une meule de lapidaire ; on diftingue aifément dans l'intérieur du morceau tous les carac- tères de l’organifation la plus marquée, les fibres longitudinales, les couches concentriques, les infertions des portions d'écorce, des nœuds, en un mot tout ce qui peut conflater que cette pierre a été originairement un morceau de bois : cette pierre eft blanche, & a le grain d'une pierre à raloir; quoiqu'elle foit beaucoup plus dure fans être entièrement convertie en agate, puifqu'elle ne prend pas un beau poli, cependant même dans la partie tendre, elle ne peut être attaquée par les acides, On aperçoit entre les fames qui, par leur pofition dans L bois, devoient être l'aubier, une couche noire de deux, trois ou ‘ D ES 1 SC LVE AN GE) S ou quatre lignes d’épaifleur, & qui s'étend für toute fa furface du corps ligneux : ce fingulier morceau a été trouvé au fond d'un puits où fe ramaflent les eaux des baflins de conftruétion de Rochefort, M. du Hamel en a vu un pareil qu'on avoit trouvé au même endroit, & que M. du Puy, Médecin de la Marine, conferve dans fon cabinet : ce morceau eft traverfé dans toute fa longueur par une veine noire qui s'étend entre les fibres longitudinales ; dans un très-beau morceau converti en fardoine, ue j'ai obfervé dans le cabinet de M. du Hamel, une couche noire , femblable à celle dont je viens de parler, paroît être interpofée entre l'écorce & le bois. Enfin nous avons reçu de la Martinique un morceau qui eft prefqu’entièrement formé de cette fubftance noire, de forte qu'il ne refte plus qu'une petite quantité de fibres blanchâtres qui fufhfent pour faire croire que tout le morceau a été ori- ginairement du bois. Tous ces faits m'ont engagé encore davantage à faire de nouvelles obférvations fur cette couche, & à en mettre des parties à diflérentes épreuves pour connoître mieux fa nature, s'il étoit poflible : quoiqu’elles n'aient pas encore répondu à mes vues autant que je le defirois, j'efpère qu'on voudra bien me permettre de Îles rapporter ici. Toute la partie que j'examine eft d’un beau noir de jais; elle entoure, comme je l'ai dit, tout le morceau; on en voit une couche très-mince qui fépare l'écorce du bois, & une autre de trois ou quatre lignes, qui eft fituée entre les James qui devoient former l'aubier; fon épaifleur n'eft pas par-tout uniforme; dans la coupe du morceau , fuivant fa longueur, on voit qu’elle a deux lignes, en d’autres endroits jufqu'à quatre; il femble encore qu'elle s’eft raffemblée en plus grande quantité aux nœuds & aux branches. ù ; Comme cette matière paroifloit avoir quelque reflemblance avec le jayet par fa couleur, & comme elle n'avoit confervé ; ainfi que le jayet, aucune marque d'organifation, on pourroit en conclure que cette matière avoit été fluide & pouvoit devoir Mém. 175 9. LIl 450 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE Royazr fon origine, comme on le penfe du jayet, à une réfine. J'ai cru devoir comparer ces deux fubflances & les mettre aux mêmes épreuves ; elles m'ont appris que le jayet reflemble aflez à notre couche par la couleur, qu'il eft cependant d'un noir plus brillant ; que ces deux matières tiennent encore plus June de autre, en ce que l’on n'aperçoit fur les deux aucune marque d’organifation , & en ce qu'elles ne font point fufcepti- bles d'être attaquées par les acides, l'efprit de nitre que j'ai verfé deflus notre couche n'y ayant produit aucune eflervefcence; mais auffi elles diffèrent en ce que notre couche eft beaucoup plus dure, prend'un bien plus beau poli, & eft, par cette raïfon, bien plus difficile à travailler. De plus, j'ai expofé des morceaux de ces deux matières dans des creufets à un feu le plus violent que j'aie pu produire avec un fourneau de réverbère, où mes creufets reftèrent rouges pendant plufieurs heures, j'ai trouvé le jayet confumé & mon morceau navoit fubi qu'un très- léger changement, qui lui avoit fait prendre une couleur plus brillante, indiquant un commencement de vitrification. J'aurois defiré pofléder davantage de cette matière noire pour en pouvoir faire une analyfe plus exaéte, Je crois donc pouvoir la regarder comme une vraie agate noire, que les acides n'attaquent point & qui fe vitrifie au lieu de fe calciner; mais je fuis encore très - embarraflé pour conflater fon origine; car en voyant cette couche & fa polition dans le morceau de bois, on efl porté à croire qu'elle eft produite par un amas de réfine formé dans les parties d’un bois réfineux; j'aurois même eu plufieurs raifons pour appuyer cette conjecture; car, dès que l'on convient que le jayet eft une réfine foflile, (& on eft plus porté à le croire , depuis qu'on fait qu'il s'en trouve beaucoup de mêlé avec des parties d'arbres détruits, & fur-tout dans les mines de charbon) on pouroit n'attribuer les différences que je viens de faire remarquer entre notre couche & le jayet, qu'à une moindre pétrification dans ce dernier, qui étant devenue plus parfaite dans l'autre auroit pu rendre le jayet plus dur & moins com- buftible , & par conféquent l'auroit rendu plus femblable à notre D'E S,S,C IE IN.C ES 451 couche. J'avoue qu'il eft affez difhcile d'expliquer comment une réfine s’eft pétrifiée; car, pour qu'elle {oit parvenue à cet état, il a fallu que le fuc lapidifiqué en ait été le diffolvant, qu'il fe foit mêlé avec elle, & que s'y étant incorporé il ait rendu a couleur noire à peu près uniforme dans tous les morceaux; peut-être ces difficultés engageroient-elles à avoir recours à d’autres explications: en effet, ne pourroit-on pas dire qu'une matière étrangère fe feroit mélée avec le fuc lapidifique, & que cette matière, à caufe de fon opacité, auroit fait dif paroître l’organifation, & que n'ayant pu pañler qu'à travérs certains filtres ou certaines lames du bois qui fe feroient dé- truites les premières, cette matière fe feroit placée, comme on la voit, dans le morceau dont if eft queflion ; mais j'avoue que ces explications ne me paroïflent pas encore bien fatisfaifantes, ainfi j'attends, pour appuyer une décifion, que quelques morceaux intéreffans dans ce genre nous procurent de nou- velles lumières. J'ai préfenté ce Mémoire à l'Académie en 1756, avant que j'euffe l'honneur d'en être Membre ; je crois devoir feu- lement ajouter aujourd’hui, en relifant ce Mémoire à la Com- pagnie, un fait nouveau qui paroit s'accorder très-bien avec l'idée que jy donne de la pétrification des bois. Peu de temps après la leéture de ce Mémoire, M. de Parcieux, Membre de cette Compagnie, lui préfenta, au retour d'un voyage qu'il avoit fait à Calais, des morceaux de bois qui failoient partie de l'ancienne digue de ce port, appelée digue de Céfar ; Xe fer qui lioit les pièces de bois de cette digue, sétoit détruit par une efpèce de rouille; cette rouille étant venue à couler fur le bois pourri, Favoit converti en bois ferrugineux , conformément à l'explication du bois foflile que jai donnée dans ce Mémoire; on reconnoiffoit encore l'orga- nifation du bois fur les parties ferrugineules de ces morceaux qui ne brûloient plus, tandis que celles qui avoient confervé leur nature de bois, fe confumoient. Une découverte plus récente, mais qui ne Haiïfleroit plus LIT ïj 452 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE aucun doute fur l'exiftence des bois pétrifiés, s'ils n’étoient pas tous diflipés; c'eft l’infpeétion de deux morceaux dont M. le Comte de Lauraguais, de cette Académie, & M. le Baron d'Holbach, font pofeffeurs, qui réuniffent en certains endroits toutes les propriétés de la pierre, & en d’autres confervent toutes celles des bois: je dois à la complaifance de M. de Juffieu, l'examen de ce dernier morceau fur quelques fragmens qui en ont été détachés, & qu'il a bien voulu me commu niquer. Memde Lie R' des 1759. Pare 492. 21. 20. Mende Lite R\ dar P2g So Page 452. PL. 30 NO VE SA PSNEN DIE NI GNE)S 452 REMARQUES SUR DESVÉMONLES NÉBULEUSES Par M: LE GENTIL. dite préfenté à l’Académie le 3 Décembre 1749 , UN 26 Juillet Mémoire fur üne étoile nébuleufe, que j'avois découverte 1758. 4e 29 Octobre de la même année à côté de celle d'Andro: mêde *. J'ai donné dans ce Mémoire la defcription {a Plus *7 2 11 ‘exacte qu'il m'a été poflible de cette nouvelle nébuleufe , non “E Mie drag feulement pour fervir à la reconnoître, mais encore pour voit NEA _ fi dans la fuite elle ne feroit point fujette à quelque variation, foit dans fa figure, foit dans fà pofition ; enfuite japporte les raifons qui m'ont fait penfer qu'elle pourroit bien être comme ces étoiles qui paroiffent & difparoifient alternativement , où bien encore qu'elle féroit nouvellement apparue, ce qui prou veroit des changemens confidérables dans les cieux. Les remarques dont je fais part aujourd'hui à l'Académie, pourront fervir à répandre un nouveau degré de lumière fur la matière des nébuleufes; & les Aftronomes qui les obfer- véront dans la fuite trouveront, dans ces remarques, la matière de quelques comparaifons & peut-être de quelques condufions mais je crois devoir les avertir auparavant qu'ils doivent avoir foin d'employer des lunettes de longueur pareille à celles dont fe feront fervis ceux qui auront obfervé les nébuleufes avant Eux, parce que j'ai remarqué qu'elles paroiflent toutes plus ou moins denfes & plus où moins obfeures, felon qué les lunettes dont on fe fert pour les regarder font plus où moins longues. La plus fongue lunette dont je me füuis frvi pour ces obfervations eft celle de l'Obférvatoire royal, de trente - deux -pieds, dont l'objectif eft de -Cumpani , comme le favent tous Lil ii 454 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE les Aflronomes de cette Académie. Avant que M. Caffni eût fait raccommoder cette lunette, je n'en avois employé que de quinze à dix-huit pieds de longueur, & je defirois toujours de regarder quelques-unes des nébuleufes avec fon excellent objeétif ; enfin lorfqu’elle fut en état, je fatisfis parfaitement ma curiofité; ce fut pendant les mois de Septembre & d'Oc- tobre 175$ 1 que j'obfervai avec cette lunette. Premièrement , lamas d'étoiles qui eft dans la voie ladtée proche arc du Sagittaire, proche de flécliptique, & dans lequel je découvris en 1747, une petite nébulofité femblable à la queue d'une Comète: cet amas d'étoiles me parut très- nombreux ; mais j'eus affez de peine à diftinguer la nébulofité, parce qu'elle paroïfloit fort fombre ; en me fervant au contraire de lunettes de douze & de quinze pieds de longueur feulement, elle paroifloit très-femblable aux endroits les plus tranfparens & les plus blanchâtres de la voie laétée. Ce qui eft encore digne de remarque, c'eft que la prinei- pale Etoile qui touche à la nébuleufe , & qui m'a fervi à déter- miner fa pofition, eft beaucoup plus groffe que l'étoile double d’Ariés; cependant l'étoile double d’Aries fe diftingue très-bien à la vue fimple {e/e eff de la quatrième grandeur) , & pas une feule des Étoiles qui compofent cet amas n'eft vifble à la vue ; on aperçoit feulement un petit nuage blanc affez femblable à la nébuleufe du Cancer. L'étoile double d’Ariés paroît à la vérité dans fa lunette bien plus brillante & plus étincelante que cette Etoile dont je viens de parler; car elle ne jette aucuns rayons de lumière : au contraire, par fa pâleur, elle reflemble à Swwrue, lorf- qu'on le regarde avec une lunette d'un pied. Secondement , je vis avec la même lunette la nébuleufe d'Andromède, décrite par Simon Marius en 1612 ; fa figure me parut aflez ronde, quoique très-mal terminée ; elle jette de tous côtés des rayons de lumière, & elle eft d'une égale denfité dans toute fon étendue; de forte que je n'ai point remarqué que fon centre füt plus clair ou plus tranfparent que le refle de fon corps; on peut joindre à cela que je a voyois DES lONC'IENN CE. 455 alors beaucoup plus fombre que lorfque je la regardois avec une lunette de quinze à dix-huit pieds. J'ai reconnu aufli, à peu de diftance de cette nébuleufe, celle que je découvris en 1749 ; elle eft un peu plus oblongue dans la direction du nord au fud ou environ, & elle m'a paru exactement de Ja même denfité que l’ancienne ; elle peut occuper dans le ciel la huitième partie de l'efpace que l’ancienne ÿ OCCUPE, J'ai dit dans mon Mémoire fur cette nébuleufe, qu'elle avoit environ une minute de diamètre; mais felon cette obfervation elle en auroit au moins trois: cette différence vient de la difficulté d'eflimer au jufte, fans inftrument, l'étendue d’un efpace célefte quelconque, & fur-tout des Étoiles nébuleufes, qui, comme on le fait, font très-mal terminées. Je dis ceci afin que l'on ne prenne point à la rigueur ce que j'ai avancé dans mon premier Mémoire touchant le diamètre de cette nébuleufe, & qu'on n’en tire aucune conféquence. Pour revenir à celle dont on attribue la première décou- verte à Simon Marius, & qu'on diftingue aifément à la vue; il eft certain, par un Écrit de Bouillaud, qu'elle a été remarquée plus de fix cents ans avant AAarius, & fi elle a difparu dans cet intervalle de temps, ou fi les Aftronomes ou les Aftro- logues qui ont exifté dans ce même intervalle de temps ont oublié de la marquer fur leurs cartes, c'eft ce qu'il eft très-difficile de décider ; en effet, on n’a pas remarqué qu’elle ait difparu depuis Bouillaud, ni même qu'il lui foit arrivé de changemens bien confidérables, fi ce n’eft que M. Caffini dit dans fes Élémens d’Aftronomie, qu'elle eft triangulaire, & u’il eft très-certain qu'elle eft ronde actuellement. A l'égard de FÉcrit de Bouillaud, que je viens d'annoncer, je crois devoir en faire ici une efpèce d'extrait, d'autant mieux que tous ceux qui ont parlé de la nébuleufe d’Andromede, ne paroïffent pas avoir eu connoiffance de ce Traité, L'imprimé de Bouillaud, porte pour titre: « Avertiflement aux Aftronomes, à l’occafion de la nouvelle Étoile qui aété vue « 456 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE » il y a quelques années dans le cou de à Bakine , & fur la né- » buleufe de fa ceinture d’Androméde , qui a reparu depuis deux ans, par /maël Bouillaud ; à Paris, 1 667 ». {maëlis Bullialdi ad Aflronomos monita duo ; primum de flella nova, que in collo Ceti ante annos aliguot via eff; alterum de nebulofa in Andromedæ cinguh parte borea ame biennium üterum orta. Pariis, anno 1667. Dans cet imprimé, Bouillaud femble penfer que la: nébuleufe d'Androméde paroît & difparoît alter- nativement, à peu-près comme fait l'Étoile du cou de Ja Baleine. Ce fut la Comète qui parut vers la fin de 1 664, laquelle donna occafion, felon lui, de remarquer la nébuleufe d’Au- droméde : tous les Aftronomes n'ayant plus pour lors les yeux tournés que vers le ciel, aperçurent cette nébulofité, que la plus grande partie prit pour une autre Comète; mais Bouillaud trouva que c'étoit la nébuleufe d’Andromede, décrite en 1 61 2 par Simon Marius, & il rapporte à cette occafion la defcription que cet Auteur en donne dans la préface de fon Aundus jovialis , imprimé en 1614. J'ai cru que je ne ferois pas mal de la mettre ici telle que je la trouve dans l'imprimé de Bouilland, parce que le livre de Simon Marius étant fort rare, ainfi que l'imprimé de Bouillaud *; ce texte m'a paru mériter d'être confervé. « J'ai découvert, dit Simor Marius, avec le fecours d’une lunette, le 15 Décembre de l'année 1612, une étoile fixe ” ou efpèce d'étoile d'une figure furprenante, & telle que je n’en ? puis point découvrir de pareille dans le ciel ; elle eft proche de la troifième ou de la plus boréale de celles de la ceinture » d'Andromede. ”.. A la vue fimple, on la voit comme une nébulofité, mais » avec la lunette on n'y remarque aucune étoile, bien différente » en cela de la nébuleufe du Cancer & des autres nébuleufes ; » celle-ci n'eft au contraire compofée que de rayons (de lumière } » blanchâtress qui font plus clairs, plus on approche de {on r21 * L'imprimé de Bouillaud eft à la Bibliothèque du Roi, centre; NS trétésr # DES SCIENCES. centre; & ce centre eft marqué par une lumière pâle & trouble. Cette nébuleufe occupe dans le ciel environ la quatrième partie d'un degré, & elle reflemble affez à la lumière d’une chandelle allumée que l'on verroit de loin pendant fa nuit à travers de la corne tranfparente; elle a auffr la figure de da & Comète que Zycho-Brahé a obfervée en 1 586. M'étant trouvé le mois de Septembre ‘de l'année dernière 1613, avec le célèbre Brunnius, Mathématicien de l'Éledteur de Saxe, je lui fis voir cette étoile merveilleufe un foir que la beauté du ciel invitoit à le regarder, & il l’a obfervée avec beaucoup d’admiration. Je ne puis aflurer fi elle eft nouvelle ou non, je laifle à d'autres la liberté d'en juger : ce qui me furprend le plus, c'eft que Zÿcho, avec une vue admirable, n'ait point vu cette nébuleufe, quoiqu'il ait-déterminé la longitude & la latitude de la boréale des trois qui font à la ceinture d’Andromede, & qui eft très - proche de notre nébuleufe *, ; On voit, par la defcription de Simon Marius, que cet Auteur s'étonne que Zychko n'ait point déterminé la pofition de Ja nébuleufe d'Androméde , quoiqu'il ait marqué Ja longitude & la latitude de la boréale de la ceinture de cette conftellation * Zater illa primum eff quod , me- diante perfpicillo, a die 15 Decemb, anni 1612, invenerim d7 viderim fixam, vel ffellam quandam admi- randæ figuræ , qualem in toto cælo deprehendere non poffum. Ea aurem eft prope tertiam à7 borealiorem in cinoulo Andromedæ; abfque inffru- mento cernitur ibidem quædam quafi nebula ; at cum inférumento nullæ videntur ftellæ diftinlæ, ut in nebu- Lofa Cancri à7 in aliis ftellis nebulofis, Jed faltem radii albicantes, qui quo | propriores funt centro, eo clariores evadunt ; in centro eff lumen obtufinn ê7 pallidum ; ‘in diamerro quartam- fère gradus partem occüpat ; fimilis fère fplendor apparet , Ji a longinquo candela ardens per cornu perlucidum de note cernatur, Non abfimilis Mém. 1759. videtur Cometæ illi, quem Tycho- Brahe anno 1 5 86 obfervavit : menfe Septembri anni fuperioris 16131, quando, mecum erat doétiffimus vir M. Lucas Brunnius, #uffriffini Eledoris Saxonici Marlematicus , inter alia tunc mathematica colloquia, quia Je offerebat grata ferenitas , etiam hanc ipfi flellam monftrofan cominonftravi, quam fumma cuin ad- miratione vidir ; an autem nova Jit, necne ceérto ‘affèverare nequeo ; dif- piciant êT dijudicent id ali; de oculatiffimo D. D, Tychone riror, qui borealiori fixæ in cingulo An- dromedæ , inffrumentis fuis locum Jecundum longum &7 latum præfinivit, hanc tamen nebulofan intafam re- linquie. Mmm y ÿ 458 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE qui en eft très-proche ; cette remarque jointe à d’autres ob- fervations, confirme Bouillaud dans fon opinion , favoir que cette nébuleufe paroït & difparoït alternativement ; il trouve qu'elle avoit été remarquée long-temps avant le fiècle dans lequel il écrivoit, par un Aflronome anonyme, & il avertit qu'il cite le témoignage de cet Auteur avec toute la bonne foi & la fincérité poflibles, Le célèbre M.de Thou (a), Ambaffadeur en Hollande, apporta de ce pays, dit Bouillaud, un manufcrit fur une peau de par- chemin , qui renfermoit le Catalogue des étoiles fixes; on y avoit joint les figures des conftellations , & on avoit mis à la tête de l'Ouvrage la note qui fuit : « Quelques-uns croient que les étoiles des conflellations décrites par Ptolémée, & que l'on a inférées plus bas dans ce livre, ont été réduites pour le fiècle du roi Alphonfe ; d'autres croient que cela s'eft fait avant ce mème fiècle; ce qui fait voir qu'il faut avoir attention d'ajouter au moins fix degrés à la longitude des étoiles marquées dans ce Catalogue, pour la réduire à l'année préfente 1428: à l'égard de la latitude de ces mêmes étoiles, elle eft invariable felon Ptolémée; cependant Thebir & les autres Auteurs ne difent point fi la latitude varie ou ne varie pas, ce qui eft très- furprenant /b). » Les conflellations qui accompagnent ce Catalogue , fe reffentent un peu, dit Bouillaud, de à groflièreté du fiècle dans lequel elles ont été figurées: ce qu'il y a de plus fingulier, c'eft que la conftellation d'Andromède a trois repréfentations différentes dans le planifphère; d'abord elle eft repréfentée feule dans une figure; une feconde figure la fait voir avec (a) Jacques - Augufte, fils de Jacques - Augufte de Thou, Pré- fident au Parlement de Paris. A20- reri. (b) Nota qued ab anno, quo æquatæ Sant flellæ imaginun, contentæ 7 fignatæ infra in hoc Gbro, quod creditur a quibufdam. fuilfe tempore regis Alphonfi; a quibufdam, vero credicur fuiffe ante, ufque ad annum præfentem S. 1428: addendi int ad minus fex gradus fupra loca lon- gitudinum ipfarum ftellarum, pofita in cabulis ujus libri ; latitudo vero non mutatur fécundum Ptolemeum ; alii aurem Auclores ut Thebit, 7 ali quod varietur latirudo necne nullan penitus faciunt menticnem ; de quo valde mirandum ef. D'EASIIS CRE NICE IS 459 deux poiflons attachés à fa ceinture; enfin, dans fa troifième figure un des poiflons eft repréfenté à l'un de fes pieds, & Y'autre poifion eft à l'autre pied. Tel que puiflé avoir été Auteur de cette Carte *, il eft certain qu'il vivoit vers la fin du dixième fiècle. Premièrement, l'avertiffement qui eft à la tête, dit qu'on la croyoit du temps du roi Alphonfe, & mème avant ce Monarque. Secondement , ayant comparé la longitude de plufieurs étoiles de ce Catalogue, avec celle que ces mêmes étoiles ont de nos jours, j'ai trouvé qu’il froit de fept cents foixante ou fept cens foixante-dix ans plus ancien que le milieu de ce fiècle ; ce qui donneroit pour époque l'an 995$ ou 985, d'où il eft aifé de conclure que la nébuleufe d’Andromede, dont il eft fait mention dans le Catalogue & dans la Carte, a été vue long-temps avant Simon Marius. Quand même on fuppoferoit que l’Auteur de lavertiffement qui eft à la tête de la Carte, eût marqué la nébuleufe fur cette Carte, comme ayant été oubliée par ceux qui l'avoient fait ; on en concluroit encore que cette nébuleufe a été aperçue en 1428, c'eft-à-dire cent quatre-vingt-quatre ans avant l'époque de fa découverte par Simon Marius. Or, comme elle n'a été marquée ni par Æpparque , ni par Tycho, ni même par Bayer, Bouillaud en conclut qu'elle paroït & difparoit alternativement ; il appuie cette conféquence de {es propres obfervations. Le mois de Novembre 1666, temps auquel il écrivoit fon avertiffement, la nébuleufe étoit beaucoup diminuée de clarté, quoiqu'elle eût été très-brillante deux ans auparavant. Tel eft le précis que j'ai cru devoir faire de f'avertiffement de Bouillau fur la nébuleufe d’'Andromede ; il a eu foin de faire graver la figure de la confiellation d’Androméde avec la pofition des étoiles qui la compofent. * Je l’aï cherchée en vain à [a Bibliothèque du Roi, dans laquélle je foupçonnois qu’elle pourrait être. : Mmm ij 460 MÉMoIREs DE L'ACADÉMIE ROYALE aStellatio AN DROMEDÆ, © jam vocatur mulier catenata, &° nominatur mulier quæ non vidit maritum. LoNGITUDo.| LATIT. | 1.1 Que eff inter duas fpatulas. . ‘[248 30’ 2.1Que eff in fpatula dextra. 6 ; 27. 00. 3.|Que eff in fpatula finiffra................ “2.380 0: 4.| Meridiana trium que funt fuper adjutorium dextrum\o. 6.22.| 32. oo. S. Séptentrionalis earum.. . .. 2.133. 30. 6 77 Media aim MM 132. 20. .|Meridionalis trium quæ funt fuper extremitatem fpatulæ dextræ....... A Ur CRE o. 8. | Medic: enrain NAME ARE res 1 Oo. 9. Scptentrionalis DIU NRA UE RAS. AA TEE ls o. ro.|Que eff fuper adjutorium.. ............... o. 11.1Queæ eff fuper cubitum finifirum .….., 2... :.. . |o. U12. Meridionalis trium quæ efl fa (milar) 1. e. GATE APE OS à ROME o. 13. Media earum................... ON CRE 14.|Septentrionalis trium.................... o. 1 5.|Que eff fuper pedem finiflrum, àr cf ( alamac)...|o. T6 Que. hi pr tar EN Oo. m7 5. eff declivior hac ad meridiem.. .......:. o. 18. | Dectivior duarum quæ funt fuper occultam partem : 1. e, inferiorem genu finiftri ad feptentrionem. . . . |o. 2 19.1 Declivior earum ad meridiem.. ............. o.2 20.|Quæ eff fuper genu dextrum......... Ride aie 0.22 21.|Septentrionalis trium que funt in [ua inflita, à efl Juper extremitatem (adhil).............. o. 22.| Declivior earum ad meridiem . ............. o. 2 3.| Egrediens præcedens tres quæ funt in palma dextra|o. RIRES ZX - DUMAS UE ETIENNE AT 52 ESTONIE DE DECUETISE AE NET TOR Îlarum ergo 23 fiellarum in magnitudine fecunda eff x , in terlia 2, in quarta IS, in quinta JÉ DES ScTeNces. 461 Conflellation d'ANDROMÉÈDE, Es: Sclon | © BAYER.| à : Ieshdeux épaules :04). 020 RP PMARERR ÿ FE 2 Dansilépeute droite. Mi "en NANt one r |. 3-| Dans épaule gauche. MER MER AT Eh 4.|La méridienne des trois du bras droit......... . s- 5-|La boréale des trois. ,..,...,........,.... 8 |. OAI dE neue NT TRES CNE SUN ? s 7-|La méridienne des trois de la main droite....... Enr fe UNIES Ee Le late sale e le Res nt eue Le Tale US x? VAR DA Pa féptentrionaleste sl ER NON MASON 2 | 4 ee qui eft fur le bras gauche. ..... CRT IN t'A 11.|Celle qui eft dans le coude gauche. .......... n |4. 12.|La méridienne des trois de la ceinture {mifar)...| p |2. 1 3-|Celle du milieu, ........ ROSE ARTE. - RU de 0 14-|Latfeptentrionale ee MIE NOR r |a 1 5.|Celle du pied gauche (almiat) NN OCEAN » | 3. n6=| Céllerdurpied droite. SERRE TER AT rer CN EE - qui s’en écarte vers le midi............ £ |4. 18.| La boréale des deux du genou gauche... ...... CARE NC 1192] L'autralerdesidéux IRAN MI SF BA SA 20.|Celle du genou droit. .,.,................ A s! 21.| La boréale des trois à la bordure de la robe (adhil Der AAC: 22.) Celle qui décline au midi (adhil dans Bayer)... .| ÿ | 6. F2 3. | Celle qui précède les trois qui font dans la main droite| , | 4. 2 Parmi les vingt-trois étoiles rapportées dans ce Catalogue, il s’en trouve une de la feconde grandeur , deux de latroifième, quinze de la quatrième, & cinq de la cinquième. La defcription que Simon Marius nous a laiffée de la nébu- leufe d'Andromede, ne s'accorde guère avec mes remarques. Selon lui, les rayons de lumière qui la compofent, deviennent plus clairs plus on approche du centre ; de forte qu'elle ref- femble à la flamme d'une chandelle vue de loin à travers de Mmnm ii 462 MÉMOIRES DÉ L'ACADÉMIE ROYALE la corne tranfparente. Pour moi, après l'avoir foigneufement examinée pendant plufieurs années , je l'ai toujours vue de la même denfité dans toute fon étendue. Y feroit-il en effet arrivé quelque changement, ou ne pourroit-on pas attribuer cette grande différence dans les différentes defcriptions qui ont été faites jufqu'à préfent de fa denfité , aux différentes longueurs des lunettes dont on fe fera fervi depuis Simon Marius ! Pour chercher à éclaircir ce doute, il eft bon de fe remettre devant les yeux que la découverte des lunettes d'approche n'a pas précédé de beaucoup l'obfervation de ce Mathéma- ticien fur la nébuleufe d'Androméde ; par conféquent il eft vraifemblable que Simon Marius s'eft fervi de lunettes très- courtes, & même aflez mauvaifes. C'eft ce qui m'a engagé à employer Les plus courtes & les plus longues lunettes que j'ai pa avoir à ma difpofition, pour comparer enfemble les différens effets que j'en pourrois tirer. Lorfqu'on regarde cette nébuleufe à la vue fimple, on voit un petit nuage qu'on prendroit aifément pour une Comète, fi on n'toit pas au fait du ciel; en le regardant même un peu fixement, il y a des momens pendant lefquels on croit apercevoir vers le milieu une très-petite Étoile, ou du moins une efpèce de noyau un peu plus clair & plus tranfparent que tout le refte de la nébuleufe. On remarque à peu-près la même chofe avec une lunette d’un ou de deux pieds de longueur ; mais lorfqu'on emploie une lunette de huit ou neuf pieds de foyer, c'eft alors qu'on aperçoit une différence : la nébuleufe paroït d'une égale denfité dans toute fon étendue; les rayons de lumière qu'elle jette de tous côtés vont fe perdre dans le refte du ciel; & comme ils ne font compolés en apparence que de filets très - déliés & aflez détachés les uns des autres, leur extrémité fe confond aifément avec le refte du ciel. Cela fuffit donc pour la faire paroïwe plus claire ou plus lumineufe vers fon centre que vers fes bords, lorfqu'on la regarde à la vue fimple ou avec une très-petite lunerte. Ainfi nous avons tout lieu de croire que la plus grande DES SCIENCES. 463 partie de la différence qu'on trouve entre la defcription de Simon Marius & celle que j'ai faite de la nébuleufe d’Ar- dromêde , vient de la différente longueur des lunettes dont nous nous fommes férvis ; cependant fi j'étois für que Son Marius eût employé des lunettes de huit à neuf pieds de longueur, je pourrois être autorifé à juger qu'il feroit arrivé quelque changement à la nébuleufe ; au furplus je laiffe à ceux qui l'obferveront dans la fuite à juger par eux-mêmes de cette différence. Ce qui me furprend plus, c'eft que Bouillaud dans fon avertiffement , imprimé, comme je l'ai dit, en 1667, ne dit point avoir remarqué que le centre de la nébuleufe fût marqué par un noyau plus clair & plus tranfparent que le refte de fon diamètre; foit qu'il n’y ait point fait affez d'at- tention, foit qu'elle lui ait paru comme à Simon Marius, & qu'il n'ait point jugé à propos de le répéter ; c'efl ce que je n'oferois aflurer. Tout ce qui vient d’être dit fur la nébuleufe d'Andromede, avoit été rédigé fous cette forme depuis trois ans ou environ: je n'y ai point voulu faire de changemens, quoique de nou- velles oblervations m'en aient fourni matière; j'ai penfé qu'il feroit fuffifant, fi je rapporte ce que m'ont appris ces nouvelles obfervations, ce fera, fi l’on veut, une fuite à ce que j'aurai déjà dit de cette nébuleufe. Une chofe fur laquelle Simon Marius & Bouillaud n'ont pas infifté, c'eft fur la forme de la nébuleufe d’Androméde ; ils fe font très-fcrupuleufement attachés , principalement le premier de ces deux auteurs, à parler de fa denfité & de fa clarté; mais ils ont négligé de nous laifier un deffein de la figure ou de la forme extérieure de cet efpace lumineux ; ils n'ont pas même laifié à entendre par leurs defcriptions quelle pouvoit être alors cette forme. Dans le deffein de fAftronome anonyme, que Bouillaud nous a confervé, cette nébuleufe eft ovale & fait un angle avec le cercle de longitude. M. Caffini * dit que fa figure eft * 7. Et, à peu-près triangulaire ; je lai vu ronde, comme je l'ai dit Sa plus haut, pendant plufieurs années ; je lui trouvai la même * Mém des Savans érang Tlp137. 464 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE figure en 1749, lorfque je fis la découverte de fa voifine *; aujourd'hui elle eft ovale, & elle reffemble, à peu de chofe près, au deffein que l'Aflronome anonyme nous en a laillé, & dont on a vu plus haut la defcription. Le 29 Novembre 1757, à la faveur d'un très - beau temps, je vis à la vue fimple la nébuleufe d'Androméde , dont la clarté, jointe à la forme ovale, me frappèrent d'autant plus que je ne l'avois pas encore vue fous cette figure, ni avec cette clarté, & que je ne penfois à rien moins qu'au deffein de l'Aftronome anonyme; les deux bouts de cette nébuleufe étoient un peu affilés, & elle paroifloit faire un angle avec le méridien. Le 7 Janvier 1758 , je me fuis fervi d’une lunette de trois pieds pour obferver cette nébuleufe; j'ai donné à l'objectif une ouverture capable de laiffer entrer quatre fois plus de lumière que je n'ai coutume d'en laiffer entrer dans une lunette de cette longueur. Après avoir refté quelque temps dans l'obfcu- rité, ayant f'œil à la lunette, je voyois aflez bien les fils du micromètre à la faveur de la nébuleufe, pour mefurer les dimenfions de ce phénomène ; en vain j'ai cherché dans cette nébuleufe la figure ronde que je lui avois vue quelques années auparavant, ou la figure triangulaire que M. Caffini ai attribue ; elle reflembloit au contraire à deux cornes ou piramides de lumière, oppoltes par leur bafe, & dont les deux pointes étoient éloignées entrelles d'environ cinquante minutes de degré; je dis environ , parce que les pointes de ces pyramides étoient d’une lumière fr rare, qu'il m'a paru impoñlible de déterminer , à quelques minutes près, de combien elles s’éle- levoient au-deffus de leur bafe : l'autre dimenfion fe pouvoit mefurer avec plus d'exaétitude, parce qu'elle étoit bien moins irrégulière; je ai trouvée, à plufieurs reprifes, de 20 minutes & quelques (econdes ; c'eft-à-dire , que la bafe commune de ces deux pyramides lumineufes n’excédoit prefque pas 20 minutes ; la ceinture d'Androméde étoit pour lors au méridien, & la nébuleufe formoit avec ce cercle un angle de 40 degrés au moins , en allant du fud-oueft au nord-eft, Je DES SCIENCES. 465 Je penfe donc actuellement que la nébuleufe d'Androméde change de figure ou de forme extérieure, & qu'elle change auffi de clarté; nous avons vu que Bouillaud, d'après fes propres obfervations , a eu le mème fentiment fur la clarté de cette nébuleufe , ainfi je ne crois pas qu'il refte aucun doute maintenant {ur cela : paflons à la nébuleufe d'Orion. Cette nébuleufe, découverte par M. Huyghens , eft de toutes celles que lon connoït, la plus fingulière par fa figure; on ha voit aifément avec une lunette de 8 à 9 pieds, & c'eft ce qui a fait penfer à M. de Mairan, dans fon Traité fur l'Aurore boréale, que fa denfité varie, parce que, {elon un paflage de M. Æuyghens tiré de fon Syffema Sarurnium , cette nébuleufe ne fe diftinguoit bien de fon temps qu'avec de très-grandes lunettes, comme de 20 ou de 24 pieds de foyer ; M. de Mairan fe fonde encore fur un deflein de M. Picard, dans lequel la forme extérieure de cet elpace lumi- neux diffère aflez de celle que M. Huyghens nous a laiflée du même efpace. J'ai obfervé cette nébuleufe depuis plufieurs années , & j'ai remarqué que, quoiqu'elle f voie aifément avec une lunette de 8 ou 9 pieds, fa forme varie confidérablement , en em- ployant pour la voir des inftrumens dont l'effet foit beaucoup au-deflus de celui que produit une lunette de 8 à 9 pieds de longueur ; ce que je vais rapporter [à - defius eft un fait qui paroïtra fmgulier, & il left en effet, Le vendredi 10 Mars 1758, j'allai à Sainte-Gencviève avec M. de Joy, pour obferver Venus & la nébuleufe d'Orion avec le télefcope Grégorien de 6 pieds de longueur, qui appartient à M. Pingre ; il étoit près de 8 heures du foir. . La nébuleufe d'Orion nous parut avoir la figure de la gueule de quelqu'animal qui {e feroit ouverte, telle qu'elle eft marquée dans la figure de M. Huyghens, mais avec les différences fuivantes dans le refte de la nébuleufe. J'ai aperçu vers loueft une extenfion de lumière qui formoit un rectangle ; cette lumière étoit très-rare, cependant elle fe diftinguoit aflez bien, je l'ai fait remarquer à M. de Mém. 1759. Nan 466 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Jo & à M. Pingré, qui l'ont vue très -diftinétement ; elfe étoit totalement détachée du corps de la nébuleufe, & elle n'y tenoit que par l'angle Æ; de plus cette feconde nébuleufe (je peux lappeller de ce nom) alloit en safloibliffant, & {es extrémités fe perdoient infenfiblement dans le ciel. Une lumière à peu près femblable à celle-ci & au nord de la nébuleufe s'eft offerte à mes yeux. M. Pingré & M. de Jo} Vont aperçue enfuite comme ils ont fait la première, ‘étoile dont il eft parlé dans le livre de M. de Mäiran, fur J'Aurore boréale, m'a paru, comme à cet illuftre Acadé- micien, environnée d'une nébulofité très-fenfible ; mais nous obfervames une chofe beaucoup plus digne encore de remarque que ces deux extenfions de lumière dont je viens de parler. Les trois étoiles que M.” Huyghens, Picard, & après eux M.% Godin & de Fouchy ont vues en ligne droite dans ce que j'appelle la wrachoire inférieure | nous ont paru totalement détachées de la nébuleufe ; elles étoient fur une même ligne droite, & elles faifoient un angle confdérable avec la mâchoire inférieure. Je fis différentes réflexions fur cette dernière remarque ; & le réfultat fut de vérifier dans les jours fuivans cette obfer- vation à l'aide de lunettes de 8 pieds & de 15 pieds de lon- gueur : c'eft ce que j'exécutai le 1 $ Mars vers les 8 heures du {oir. Les trois étoiles dont il eft ici queftion m'ont exactement paru placées comme elles le font dans la figure que M.* Huyghens & Picard nous ont laiffée de là nébuleufe d'Orion. D'après ces obfervations, je fis deux différens deffeins de cette nébuleufe: un qui la repréfentoit telle que je favois vue avec le télefcope Grégorien de 6 pieds; & un autre qui la repréfentoit telle que les lunettes me l'avoient fait voir. I falloit après cela confronter ces defféins au ciel, afin de corriger les défauts qui pouvoient s'y être gliflés, comme il ne manque jamais de s'en gliffér dans les deffeins faits d'idée quelques jours après que les chofes ont été vues; mais les mauvais temps & les clairs de Lune me furent un obftacle pendant quinze jours. DES SCIENCES. 467 Enfin le 3 Avril, par un très - beau temps, nous diri- géames vers les & heures du foir le télefcope de M. Pingre à la nébuleufe d'Orion, & j'obfervai à loifir cette nébuleufe. Je trouvai que l'ouverture que j'ai comparée ci -deflus à Ja gueule de quelqu'animal qui feroit ouverte, étoit à peu de cho!e près de 65 degrés; & que les trois étoiles qui, dans les figures de M.* Æuyghens & Picard font dans la mâchoire inférieure, failoient avec elle un angle d'environ 40 devrés, c'eftä-dire, que l'angle ABC étoit d'environ 65 degrés, & angle C D g d'environ 40 degrés. Le refte de la nébuleufe me parut comme je la vis le 10 Mars. Je ne dois pas omettre une dernière remarque que nous avons faite la prerhière fois que nous avons obfervé cette nébuleufe avec le télefcope de M. Pingré. Les quatre étoiles qui font au milieu de cette clarté nous ont paru d’un brillant extraordinaire; cette remarque a déjà été faite par M." Æuyghens & Derlam, & par plufieurs autres qui ont parlé de cette nébuleufe d'Orion : je la fis encore le 3 Avril. x Je ne trouvai pas à beaucoup près la même clarté, ni le même brillant dans l'éroike qui a paru à M. de Mairan, comme fi elle étoit entourée d’une nébulofité, & qui eft au nord-nord-eft de la nébuleufe. La lumière de cette étoile eft pâle & fanguiflante ; elle n'étincelle point, & on diroït qu'un brouillard léger la couvre perpétuellement (l'on peut con- fulter à ce fujet le Traité fur Aurore boréale). La nébuleufe _ qui précède le pied droit d'Antinoüs, & qui a été remarquée pour la première fois par M. Kick en 1681, n’eft autre chofe, felon les obfervations de M. Derham , qu'un prodigieux amas de très-petites étoiles. Je lai obfervée plus d'une fois avec des lunettes depuis 8 jufqu'à 20 pieds de longueur, & avec un télefcope Newtonien d'environ 3 pieds: il m'a paru que M. Derham, & ceux qui après lui ont parlé de cetie nébuleufe (comme M. de Mauperuis) fe font trompés quand ïls om dit que la nébuleufe d’Anrinoüs (u'efl certainement pas une nébuleufe, nn i 468 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE mais pluôt un affemblage d'étoiles à peu près femblables à celles de la voie la) ils ont vraifemblablement pris pour {a nébuleufe de M. Kirch un nuage blanchâtre à la vue, & qui n'eft réellement qu'un amas d'étoiles, mais dont l'extré- mité du côté du nord confine à une vraie nébuleufe que je préfume être celle de M. Xirch. Je vais rapporter ce que je trouve fur mon regifire d'obfervations au fujet de cette nébuleufe, Du 9 Juillet 1749. À côté d'Antinoüs , dans la branche de la voie laétée qui mène à l'Aige, on voit un nuage très- blanc, & qui le paroït plus qu'aucun autre endroit de la voie laëtée : ce nuage vu avec une lunette de 22 pouces de lon- gueur difparoît entièrement, & n'offre plus qu'un amas d'étoiles, au bout duquel, du côté du nord, il paroït une petite nébuleufe. de la même denfité que le nuage paroït à la vue, Du 19 Juillet 1749. Au-deflous d'un des pieds d’Ami- noïs , y a un prodigieux amas de très-petites étoiles qui forment à la vue un grand nuage blanc. Les principales étoiles qui le compofent , forment au nombre de fix un grand V confone à peu près femblable à celui que forment les Hyades, avec cette différence que celui dont je donne la defcription a fon ouverture tournée du côté du midi. Au- deffus de ce nuage, c'eft-à-dire vers le nord, il fe voit une nébuleufe un peu plus tranfparente que celle qui fe trouve entre la tête & Farc du Sagittaire; mais elle n'eft pas fi étendue dans le ciel que celle du Sagittaire. Environ au centre de cette nébuleufe, on découvre, avec le fecours du télef cope, une aflez groffe étoile. Du 1 o Otobre 1749. J'ai obfervé la nébuleufe qui précède le pied droit d'Axinois ; elle eft très-mal terminée du côté du couchant ; de forte qu'elle imite affez bien de ce côté la chevelure d’une comète, M. de Maupertuis, dans {on livre Sonde ét. de la figure des Aflres *, en parlant des taches blanches qui EE aroiffent femées dans diflérens endroits du ciel, dit que (celle d'Antinoüs n'efl plis qu'un amas d'étoiles , fi l'on Je fert pour loblerver d'une lmerre à réflexion de huit pieds) ; mais DES SCIENCES. 469 Jayant obfervée avec une lunette de 20 pieds de longueur ui groffifloit cent fois, je n'ai aperçu au milieu qu'une étoile brillante, que l'on aperçoit aufli avec une lunette de 8 pieds de longueur. Ayant continué de jeter tous les ans un coup d'œil fur cette nébuleufe & fur le nuage qui la touche, je nai rien trouvé à changer à ma defcription antérieure. M. de Cefeaux a obfervé la plupart des nébuleufes rap- portées dans les Tranfactions philofophiques par M. Derham , & après lui dans le livre de la figure des Aftres par M. de Maupertuis , lefquelles M. Derham a tirées du catalogue des étoiles fixes d'Æevelus, & de celui des étoiles auftrales de M. Falley. : M. de Chefeaux s'eft fervi d'un télefcope Grégorien de 2 pieds, & d'une lunette de 25 pieds de longueur. Il a envoyé à M. de Rcaumur, par M. de Croufas, un catalogue de vingt nébuleufes obfervées, foit au télefcope, foit feulement à la vue, en les rangeant par ce moyen dans deux claffés. Dans ce catalogue * la nébuleufe d'Arinoüs a fa place à la queue de celles qui, vues par le télefcope, fe trouvent être de fimples amas d'étoiles. C’eft ainfi qu'il s'en explique. ((Quatriémement enfin, dit-il, un prodigieux amas de très-petites étoiles près d'un des pieds d'ANTINoOùS ). Or comme le télefcope de 3 pieds & la lunette de 20 pieds de longueur dont je me fuis fervi, faifoient au moins autant d’effet que le télefcope Grégorien de 2 pieds & la lunette de 25 pieds de M. de Chefeaux ; il eft vraifemblable que M. de Che- feaux a confondu le nuage dont j'ai parlé plus haut avec la vraie nébuleufe qui en eft voifine, & dans laquelle je n'ai aperçu qu'une feule étoile, non plus que M. Krch, pendant que je voyois dans le nuage voifin un amas étonnant de très - petites étoiles, Je finirai mes remarques en difant un mot de a nébuleufe qui eft entre l'arc & la tête du Sagittaire. à - # Il a été Iù à l’Académie par M. de Reaumur le 6 Août 1746. Nnn il 470 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Elle m'a toujours paru très -irrégulière dans fa figure, chevelue & répandant des efpèces de rayons de lumière tout autour de fon diamètre. Le 29 Août 1747, vers les o heures du foir, j'ai obfervé cette nébuleufe par un très - beau temps avec une lunette de 18 pieds de longueur. J'aperçus aflez près de cette nébuleufe trois étoiles, dont une à peine étoit vifible, mais les deux autres étoient aflez apparentes. J'en ai pris la configuration le plus exactement qu'il m'a été poffble, afin qu'elles puiffent fervir de comparaifon pour les autres obfervations que l'on fera dans la fuite fur cette nébuleufe, On peut confulter la figure 3, dans laquelle Ja nébuleufe forme avec les trois petites étoiles À BC un parallélogramime, La nébuleufe étoit un peu au - deflus de la ligne tirée de À en B, favoir, de la moitié de fon diamètre ou de trois minutes tout au plus. Elle paroïfloit encore être plus proche de Z que de À; de forte que fa diflance à l'étoile À pouvoit égaler une fois & demie fa diflance à l'étoile B. Le 17 Juillet 1749, j'obférvai cette même nébuleufe avec le télefcope Newtonien d'environ 3 pieds, dont j'ai parlé, & qui appartient à M. de /'Jfle. Je ne vis point la petite étoile G& que j'avois remarquée le 29 Août 1747, mais je reconnus les deux autres qui formoient avec la nébuleufe exactement la même figure que celle que j'avois obfervée le 29 Août 1747. | Depuis ces deux époques, j'ai regardé de temps en temps cette nébuleufe, & je n'ai pas trouvé le moindre change- ment à faire dans ma configuration des années 1747 & 1749. IH ne paroît donc pas que cette nébuleufe ait eu de mouvement ni de parallaxe fenfbles, ni qu'il foit arrivé de variation dans fa figure. : Telles font mes remarques fur les nébuleufes. Je les fou- mets au jugement de la Compagnie, & à celui des Aftro- nomes qui travailleront fur cetie matière. Si des obierva- tions ultérieures m'en apprennent davantage, je donnerai de mème la fuite de mes remarques, JT roram, fécit 2 DES SCIENCES. 471 EXPLICATION-DES-FIGURES. F 1GURE 1. Nébuleufe d'Orion fuivant M. Huyghens. Fig. 2. Nébuleufe d'Orion , telle que je l'ai vue le 10° Mars & le 3 Avril 1758 au foir, avec un télefcope de 6 pieds de longueur; ouverture À Bc m'a paru de.6 5 degrés environ, & les trois étoiles inférieures paroifloient faire, avec le côté c D, un angle de près de 40 degrés. Fig, 3: Nébuleufe du Sagittaire, telle qu'elle a paru en 1747 & 1749 dans le mois de Juillet & avant, avec une lunette de 18 pieds, s Fig. 4. À, Nébuleufe d'Androméde obfervée par Marius en 1612, dans la forme où ‘lle m'a paru pendant les mois de Décembre 1757: & Janvier 1758, à la vue fimple & avec une lunette de 8 pieds. B, nébuleufe découverte au mois de Novembre 1749, Fig. ÿ. Nébuleufe d'Orion fuivant M. Picard. Fig. 6. Nébuleufe d'Orion , telle qu'elle a paru le 11 Mars 1752 a 7 heures du foir, avec une lunette de 18 pieds, & le 12 Mars 1758 à 8 heures, ayec une lunette de 8 pieds. Pr QE RES 7 Décemb. 27590 472 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE MÉMOIRE SUR L'ALUN,. Par M. FoucErroux DE BONDAROY. O N fait depuis long-temps que l’Alun eft un fel neutre, formé par la combinaïfon de l'acide vitriolique avec une bafe terreufe ; la Chimie offre peu d'objets fur lefquels on puiffe prononcer plus hardiment , puifque ce fel étant aifé à décompoler, on peut examiner féparément {es principes, & qu'en combinant de nouveau , avec F'acide vitriolique la terre qu'on en a retirée, on parvient à régénérer un alun tout fem- blable au premier. On a d'abord cru que la terre de l’alun étoit de la nature de la chaux , de la craie & des autres terres abforbantes ordi- maires ; mais comme depuis on s'eft afluré que ces terres & quantité d’autres, formoient avec l'acide vitriolique des fels pierreux , pendant que la terre retirée de l’alun , régénère fon {el, ces expériences ont fuffi pour faire connoître qu'on avoit décidé fur fa nature avec trop de précipitation, & qu'il avoit une différence entre la terre retirée de l'alun & les terres abforbantes : il reftoit à établir plus pofitivement en quoi elle confiftoit. Plufieurs routes paroifloient conduire à ce but ; elles ont été fuivies ou au moins frayées par différens Chimiftes : les uns fe font attachés à travailler fur l’alun même, & ils l'ont combiné avec différentes fubftances ; d’autres, après avoir précipité la terre de l'alun , l'ont examinée à part : enfin quel- ques-uns ont effayé de faire un alun en combinant avec l'acide vitriolique différentes terres, dans f’efpérance qu'il s’en trou- veroit qui feroient ou entièrement , ou en partie, femblables à celles de l'alun, C'eft cet effai des différentes terres qui a principalement fixé mon attention ; ainfr je me füis propofé d'examiner plus attentivement qu'on n'a encore fait, ce qui rélulteroit de la combinaifon de lacide vitriolique avec différentes terres abforbantes, DES SCIENCES. 47 abforbantes. Quand on fera attention que les {els formés d’un même acide, varient beaucoup fuivant la nature de leurs bafes, & qu'il y a des différences affez confidérables entre les terres qui font connues fous la dénomination générale de terres abfor- bantes ; on jugera que je pouvois efpérer des chofes intéreffantes d’un travail que je me propofois de fuivre avec foin. J'efpère offrir une recherche un peu complète fur cette matière; mais aujourd’hui je n'en extrais que quelques faits qui ont un rapport plus immédiat avec l'alun. On voit dans les Mémoires de l'Académie, dans le Traité de la fonte des métaux de Schlutter, publié par M. Hellot, & dans plufieurs autres ouvrages, que lalun fe trouve tout formé dans quantité de fubflances de natures aflez différentes ; il eft quelquefois fi abondant , qu’il fleurit à la fuperficie de la terre ; on le trouve raffemblé en pierre ou en roche, & on l'en retire par la calcination, des pierres & leurs lavages ; on le trouve encore dans des terres combuftibles, dans le charbon foffile, &c. dans une pierre bleuâtre aflez femblable à l'ardoife qui fe trouve en Angleterre; enfin dans des pyrites blanchâtres lorfqu'elles ont fleuri à Fair. Il y a plufieurs de ces matières que je n'ai pu me procurer; mais en retirant de lalun de celles dont je pouvois difpofer, j'ai été à portée d'obferver que quand j'avois bien lavé certaines laves & des pyrites ferrugineufes qui avoient fleuri à l'air, pour en retirer tout le vitriol & Falun que ces fubflances contenoient, j'obienois de nouveaux criflaux d’alun , lorfque javois verfé de l'huile de vitriol fur ces terres lavées. Je crois pouvoir expliquer ce fait par une exception à la Table des affinités de M. Geofiroy, qui a déjà été remarquée par M. fon frère, On fait qu'en projetant de la Jimaille de fer doux dans une forte folution d’alun, l'acide vitriolique contenu dans l'alun abandonne fa bafe pour fe jeter fur le fer qu'il diflout *, * M. Pott à découvert depuis que la même chofe arrivoit dans le mélange du zinc & de l’alun; l’acide vitriolique abandonne la bafe de T’alun pour former , avec la bafe métallique du zinc, un vitriol de zinc. Mém, 175 9. O0 474 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Je foupçonne, pour cette raïfon, que dans mes pyrites, acide vitriolique s’eft jeté préférablement fur le fer, & qu'il refloit une portion de terre propre à faire de l'alun , qui étoit dépourvue d'acide; fi-tôt que je lui en ai eu fourni, elle fe l'eft approprié, & m'a procuré lalun que j'ai retiré; &, fi l'on remarque qu'en lavant certaines pyrites, les premières lotions donnent du vitriol & les autres de l'alun , il me femble qu'on en peut conclure que l'union de l'acide vitriolique fe fait plus difficilement avec la terre de lalun, qu'avec la fubftance métallique, mais qu'elle eft plus intime & auffr moins faciie à fe laiffer difloudre par l’eau. Henckel, & tous les Auteurs qui, comme lui, ont foumis les pyrites à l'examen, après en avoir retiré les {els neutres, les différens métaux , la terre métal- lique, enfin toutes les fubftances différentes qu'elles contiennent, & en plus grande quantité fuivant les efpèces de pyrites, ont toujours trouvé une terre non métallique qui entroit dans leurs compofitions, & dont ils ont fait mention ; mes obfervations m'engagent à croire que cette fubflance terreufe eft en grande partie la bafe de 'alun dépourvue de fon acide, qui, lorique je lui en préfentois, comme dans l'expérience que je viens de décrire, me reproduifoit ce fel. J'ai fait encore quelques expériences fur la précipitation de l'alun par dés terres abforbantes , plus alkalines que celle qui lui eft propre. Lorfque l'on jette certaines terres calcaires, certains fpaths, &c. dans une forte diffolution d'alun, il fe fait une vive effervefcence, & en même temps une nouvelle combinaifon, qui forme, comme on le fait, des félénites ; elle ne peut avoir lieu que par une plus grande affinité de ces fubftances avec l'acide vitriolique , & fans , en même temps, qu'il ne fe précipite une partie de la terre de l'alun, puifque fon fait que l'acide dans le fel de l'alun n'y eft point furabondant ; c'eft une pierre de touche pour oblerver les différens degrés d'alkalicité des terres par rapport à l'alun, qui m'ont paru mériter d'être fuivis, mais {ur lefquels je ne fuis pas encore en état de prononcer. DES SCtTENCrES. ; J'avois précipité beaucoup de terre de Y'afun par des fels alkalis, Je l'avois bien édulcorée & l'avois combinée avec différens acides ; mais M. Pott & M, Margraff, dé l Académie de Berlin, ayant exécuté & publié les mêmes expériences, il féroit inutile de rapporter mon travail, qui ne pourroit fervir qu'à confirmer ceux de ces habiles Chimiftes qui n'ont aflurément pas befoin de l'être; ainfi je me contenterai de faire remarquer que M. Margraff infifte fur la difficulté qu'il a eue à criflallifer l'alun régénéré, ce qu'il attribue à une graiflé ou à une matière gommeufe qui accompagne cette terre & qui fait un grand obflacle à fa crifallifation : j'avoue que la même chofe m'eft arrivée plufieurs fois, mais fouvent auf les criflaux fe font très-bien formés, quoique j'employaffe la même terre qui avoit formé la fubflance gommeufe, ce qui paroît annoncer que Ja différence que M. Margraff & moi avons obfervée dans la criflallifation , dépend plus des dofes que de la nature dé la terre : quoi qu'il en foit, M. Margraff a mélé avec fa terre un péu de fel alkali pour la dégraifler & faciliter la crifalliation : je fens bien qu'on pourra m'objeéter que malgré l'attention que Jai apportée à bien édulcorer ma terre d'alun précipitée, il pouvoit y refter une impreffion d'alkali, qui tenoit lieu de celui que M. Margraff croit qu'il eft à propos d'y ajouter ; mais outre que la terre d’alun qui fe criftallifoit fi difficilement dans les expériences de M. Margraff, avoit été comme la mienne précipitée par un fel alkali, il fuffit qu'avec la même terre j'aie eu la matière gommeufe, & qu'en changeant les dofes je fois parvenu à obtenir de beaux criftaux , pour en conclure que le phénomène dont il s'agit dépend plus des dofes que d'une qualité particulière à cette terre: je pourrois rapporter des exemples d'autres fels qui, quand on manque les dofes, forment pareillement une matière gommeufe, & je crois pouvoir appuyer mon fentiment de Yautorité de M. Baron * & de plufieurs autres Chimiftes qui penfent que l'urine pourrie, la chaux, la potaffe, &c. qu'on emploie dans quelques fabriques d'alun pour faciliter la préparation de cé fe, ne férvent qu'à # Chimie de Lémery. Ooo ïj 476 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE abforber une fürabondance d'acide qui, dans ce cas, nuit à fa criftillifation. Dans l'ufage de l'alun pour la fabrique des teintures, celui qu'on employe y réuflit plus ou moins bien fuivant lune de ces matières qui a été employée à fa préparation, ce qui paroït prouver que ces fubflances entrent pour beaucoup dans la formation de l'alun *, Ce fait, dont je conviens, fembleroit être contraire à ce que je viens d'avancer; mais comme j'ai introduit fouvent avec l'alun des matières étran- gères, qui cependant changeoïent fa criflallifation & même fes propriétés; je crois aufli que celles dont on fe fert dans la préparation de quelques aluns, quoiqu'utiles pour fe le procurer plus promptement & plus facilement, peuvent ne point entrer néceffairement dans fa formation, puifqu'il eft d'expérience qu'on peut fe procurer de Falun fans leur fécours. Celui de Rome, des environs de Pouzolles, &c. la pierre grisâtre de la Tolfa qui contient beaucoup d'alun n'a befoin que d'être calciné, lavé & enfuite d'être jeté dans l'eau pour s'y fondre. On filtre la liqueur, & le fel fe crif- tallife fans aucune addition, parce que dans ces aluns il ne fe rencontre pas, je crois, une furabondance d'acide. J'ajouterai à ce que je viens de dire fur la terre de l'alun, qu'elle fe diffout en entier par l'acide nitreux, & qu'elle forme avec l'acide du fel marin une efpèce de beurre qui fe fond dans l’eau, mais avec lequel on ne peut former de gros criflaux. Étant donc bien perfuadé, par mes propres expériences & par celles de M. Margraff, que la terre de l’alun eft d'une nature fingulière & fort différente de la plupart des terres alkalines; je me propofai de faire quantité d'épreuves pour effayer de trouver une terre qui füt de la même nature: c'eft, comme je l'ai dit plus haut, la partie principale de mon travail, dont je me contente d'extraire aujourd’hui deux feules * Celui d'Angleterre altère toujours la couleur que l’on veut donner aux étoffes, par Ja petite portion d’urine qu’il conferve. D'E’s Se EN Ge s: À A7 expériences qui me paroiflent mériter quelque attention, & que j'ai affez répétées pour y avoir confiance. On fe rappellera que M. Geoffroy dit, dans les Mémoires de l'Académie, avoir obtenu quelques criftlaux d’alun par le mélange de Facide vitriolique avec des fubflances terreufes de natures foit différentes. Certains verres, des terres propres à faire de la fayence, des terres cuites, des teflons de pots, des os calcinés, même des cendres de foyer: toutes ces fub£- tances ont donné quelques criflaux d'alun, après avoir refté lono-temps en digeflion avec l'acide vitriolique ; mais , quoique les os & les cendres ne lui euflent donné que très- peu d'alun, il foupçonna que la terre propre à former Ja bafe de ce fel, devoit tirer fon origine de la deftruction de différentes parties animales ou végétales ; & que, fuivant que ces terres fe trouvoient méêlées en plus où en moindre quantité avec celle qu'il éprouvoit, elles fournifloient auffi plus ou moins d'alun. J'avoue qu'en rédigeant mon travail fur l'alun, & con- fultant ce que M. Pott a donné fur cette matière , les réfültats de mes expériences fe font trouvés femblables à ceux de cet habile Chimifte. Les os, les coquilles d’huitres & plufieurs autres matières que cite M. Geoffroy, ne m'ont donné que des filets foyeux : les produits de quelques autres n'avoient pas tous les caractères de lalun; enfin certaines terres m'en ont offert fi peu, que la conclufion du Chimifte françois fur la bafe de l'alun , ne me parut pas encore aflez établie. Je ne citerai point les Auteurs qui ont dit avoir obtenu de f'alun par la combinaifon des mätières d’une nature encore moins propre à pouvoir en fournir /a). Les produits des différentes terres que j'ai miles en expé- rience, s'accordent mieux avec le fentiment de M. Hellot *, Pott & Margraff, qui en ont tous obtenu quelques criftaux, : (a) Ceux, par exemple, qui ont dit en avoir obtenu avec la craie & lacide vitriolique : l'on fait que cette combinaifon, quand la craie eft pure; ne donne qu’une félénite, O00 ii * Mén, ça 1739» 478 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE en combinant avec l'acide vitriolique les terres qui appro- chent le plus des fubflances bollaires & argileufes, fans que je veuille dire que ce foient les feules fubftances avec fefquelles la terre propre à l'alun puiffé fe rencontrer. M. Margraff, qui, comme je viens de Ie citer, a obtenu quelques criftaux d'alun en mélant l'argile & l'acide vitrio- lique, a ajouté à cette combinaifon un peu de fel alkali; mais perfonne, à ce que je crois, n'eft parvenu à trouver une terre qui ne contienne point d'alun, & qui avec l'acide vitriolique, fans aucune addition, donnät une grande quantité de ce fel. C'eft une de ces terres que je me propole de faire connoître aujourd'hui. Il y a quelques années que M. Abeille, Correfpondant de l'Académie, lui envoya des échantillons d’une terre fine, légère, couleur de citron, qui fe trouvoit dans une carrière de tripoli aux environs de Rennes *. Quelques indices très - incertains, mais principalement le but que je m'étois formé d'examiner le produit des mélanges de l'acide vitrio- lique avec différentes terres abforbantes, m'engagèrent à com- biner cette terre avec cet acide ; l’effervefcence fut lente & modérée, quoiqu'il s'excitât dans le vafe une grande chaleur: ces circonftances augmentèrent mes efpérances, parce qu'elles font affez analogues avec celles qui accompagnent le mé- Jange de l'acide vitriolique avec la terre de l'alun ; au lieu qu'avec les terres abforbantes qui forment des fels pierreux, l'effervefcence eft très-vive, quoique la chaleur paroiïfle moins confidérable ;.& j'ai reconnu depuis que ces circonftances peuvent fervir à diflinguer d'avance les terres qui font propres à fournir de Falun, de celles qui ne donnent prefque que des fels pierreux. Quoi qu'il en foit, fans addition de fels alkalis, & en affez peu de temps, plus de la moitié de ma terre forma de beaux criflaux octaèdres très-gros & bien réguliers, qui fe diflolvent afflez promptement & entièrement dans l'eau, * Voyez une lettre fur le tripoli, inférée dans le III.‘ volume des Savans étrangers , envoyée à M. B. de Juflieu par M. de Gardeil, D'E S$ SC'ISE N) C'EUS. 479 qui ont fur la langue un goût aftringent & fliptique, qui ne tombent point en dlquium à air, qui bourfouflent fur la pelle rouge, & dont on peut précipiter la terre par un {el alkali fixe ou voltil, enfin à tous égards un vrai alun. Il faudroit s’aflurer fi en mélant fimplement cette terre avec des glaifes ou des pyrites, qui contiendroient de acide vi- triolique, on n'obtiendroit pas de l'alun, ce moyen qu'on ne pourroit eflayer que fur le lieu feroit naître, s'il réuffifloit, une branche de commerce qu'il feroit avantageux de s'approprier*. Je remarquerai encore que fi pour quelques préparations délicates, on avoit beloin de la terre de l'alun bien pure, on pourroit préférer celle qu’on auroit précipitée par un alkali vo- latil; car d'abord il y a lieu de préfumer que cette terre feroit exempte de tout mélange métallique ; 2.° qu'il eft d'expérience que la terre précipitée par cet alkali volatil ef réduite en molécules plus fines, parce que probablement le mélange de l'acide avec lui eft plus intime ; enfin, parce que fi lon foupçonnoit qu'il y fût refté un peu d'alkali, outre le lavage, on pourroit l'enlever par une chaleur douce & long- temps continuée. Je paflé à l'autre expérience qui offrira quelque chofe de plus fingulier. On fait qu'un même acide forme des {els très - différens , étant mêlé avec différentes bales alkalines ; l'acide du vitriol, mêlé avec le fel de tartre ou avec celui de la foude, ou avec ha craie, ou avec fa bafe de lalun, ou avec les fubftances métalliques , forme des fels qui varient beaucoup dans leur criftallifation. Ces faits tout communs qu'ils font, me firent penfer qu'il devoit y avoir des différences dans la criffallifation des aluns qui auroient pour bafe différentes terres, & déjà je me propofai de prêter une fingulière attention à la forme des criftaux que je pourrois efpérer de mes différentes combinaifons, Nous lifons dans différens Auteurs qui ont pailé de Falun, * Je crois à propos de dire ici que M. Abeille a bien voulu me procurer des tripolis de cette carrière, de différentes qualités, & que je les ai joints avec l'acide vitriolique, fans en avoir pu obtenir le moindre {el d'alun. 480 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE que fà criflallifation naturelle, ou que lon fe procuie par la diflolution & évaporation des fubftances qui le contenoient, varie infiniment; les uns fe féparent par feuillets, d’autres fe criftallifent par aiguilles fines comme des cheveux , d’autres reflemblent à une éponge, d'autres à de la farine; & M. Tournefort parle, dans fon Voyage du Levant, d'un aiun liquide qui ne fe criflallifoit point; je n'ai pas été à portée d'examiner fr les fels que citent ces Auteurs, étoient de vrais aluns, j'avoue même que par les defcriptions quils nous en ont laiflées, l'on peut douter que les bafes de tous ces fels fuffent parfaitement terreufes; mais prefque tous s'accordent fur la defcription d’un alun en filets, que la criflallifition feule fait différer beaucoup de f'alun ordinaire, ce qui lui a fait donner le nom d'alun de plume ; on le trouve aujourd’hui dans quelques Cabinets où on le conferve à caufe de fà rareté : c’eft cet alun que quelques Auteurs ont confondu avec l'amiante, quoique leurs caraétères ne fe reffemblent en rien, & qu'ils diffèrent effentiellement par la facilité que l'alun de plume a à fe fondre dans l'eau, au lieu que l'amiante n’y éprouve aucun changement, & parce que amiante n'a point le goût ftiptique que cet alun a de commun avec l'alun ordinaire. Je crus que cette même dénomination donnée à l'amiante & à l'alun de plume, pouvoit avoir eu quelque fondement ; cette conjecture & l'envie que j'avois de m'inftruire davantage fur la nature de la pierre qui le donne, m'engagèrent à la foumettre à l'épreuve. J'avois une petite quantité d'amiante de Chypre *; je féparai la pierre grife fur laquelle cette amiante prend naiflance : je la pilai & la mélai avec un peu d'acide vitriolique fans aucune autre addition ; le mélange s'échauffa, mais ne m'offrit point d’effervefcence confidérable. Je fis encore un autre mé- lange d’une partie d'amiante ou lin incombuftible,. dans le même acide; je ne fus point furpris au bout de quelque temps de trouver celui-ci dans le même état où je l'avois mis, * Amiantus fibris mollioribus parallelis, facile féparabilibuss Linum montanum, Afbertus de Wallerius, : JE »- DhE S/"S ch E N°C'E's 481t je le regardois comme une efpèce particulière de {els pierreux, & j'avois vérifié, d'après tous les Auteurs qui en ont parlé, que les acides n’avoient aucune prife fur lui; mais j'eus lieu d'être fatisfait quand je vifitai mon mélange de la terre d'a- miante. Ma première conjecture fe trouva alors appuyée für plus de fondement ; je trouvai dans mon verre prefque toute la terre changée en cryftaux qui avoient la forme d'un paral- klépipède alongé, ou en des prifmes carrés à vive-arête, ter- minés par une pyramide très-différente de ceux de la criftal- lifation de alun commun. Je ne me füuis point contenté de ces premiers criflaux , quoique faits naturellement , je les ai encore fait difloudre dans l’eau où ils fe fondent aifément : & après avoir filtré & fait évaporer la liqueur, j'ai toujours obtenu la même forme de criftallifation. Quand je n'ai laiflé précipiter qu'une partie de mon fel, j'ai eu des criftaux bien diftinéts en prifmes alongés & féparés les uns des autres; mais quand j'ai laiflé criflallifer toute ma liqueur très - chargée de fls, j'en ai obtenu une mafle où il étoit toujours aifé de diftinguer des filets foyeux comme dans les premières crif- tallifations. Cet alun artificiel , excepté la forme de fes criftaux dif férens de ceux de l'alun' ordinaire, me parut avoir tous les caractères communs avec lui ; il bourfoufle fur les charbons & y dépofe une terre ; je lai précipité, de même que ce fel naturel, par un alkali ; la feule différence que j'ai cru apercevoir, c'eft que la terre précipitée m'a paru demeurer toujours plus grife que celle de Falun ordinaire précipitée par le même moyen. Je n'oferois aflurer avoir imité parfaitement l'alun de plume ; mais fon avouera que celui-ci diffère beaucoup, par f criftal- lifation , de l'alun ordinaire, & qu'il reflemble affez à la def cription que quelques auteurs nous ont donnée de f'alun de plume; & comme il a tous les caraétères communs avec l'alun ordinaire, j'ai cru devoir lui conferver le rom d’aun. Ce fera donc une pierre qui, réduite en petites parties, fe change avec l'acide vitriolique prefque toute en alun, dif- férent feulement, par fa criftallifation, de celui que nous avons Mém, 175 9° Ppp 482 Mémoires DE L'ACADÉMIE ROYALE le plus communément. Malgré cette différence , connoiffant la nature de la pierre de l'amiante de Chypre, qui paroît être, fuivant Wallerius, de première origine, cette expérience ne doit-elle pas confirmer l'idée que j'ai que la conjecture qui fait provenir la terre propre à l'alun , du débris de parties animales ou végétales, demande encore à être mieux conftatée. J'aurois defiré pofféder une plus grande quantité de cette pierre pour la foumettre, ainfi que le fel qu'elle m'a produit, à différentes épreuves, & je finis par rapporter l'examen que la petite provifion que j'avois, m'a permis d'en faire. J'ai expofé à un feu affez violent la pierre, avec les filets d'amiante qui la divifent ; l'amiante en eft forti très -brillant, & caffant, ce qui prouve qu'il avoit fouffert une efpèce de calcination : ceci s'accorde parfaitement avec ce que dit M. Pott dans fa Lithogeognofie de Lalumen fciffile petræum, que je traduis par amiante, pour Ôter le nom d’alun à toute fubftance qui ne porte aucun des caraétères de ce fel ; fuivant M. Pot, l'amiante s’eft réduit en plâtre par la calcination. Je lai mêlé ,ainfi calciné, avec l'acide vitriolique, & je n'en ai prefque point obtenu d’alun. J'ai donné à la pierre un degré de feu bien plus fort, fans parvenir à lui procurer le moindre commencement de vitri- fication ; en lui ajoutant un fondant , je n'ai eu qu'un verre terne & imparfait; avec du verre, j'ai eu un émail peu tranf- parent. Camillus Leonardus /a),Wolterfdorff /&) & plufieurs auteurs, regardent cette pierre comme réfiflante au feu de verrerie; ce n'eft pas le fentiment de M. Poit, qui la donne comme une pierre auffi aifée à fondre que le fable; peut-être n'étoit-ce pas l’efpèce de pierre dont je parle aujourd’hui, qui a fervi à l'examen de ce Chimifle; ce que je puis dire, c'eft que pour avoir un objet de comparaifon , j'avois expolé au même feu du tripoli, qui, comme on fait, fe vitrifie difficilement , dont (a) Lib. de Lap. cité dans la Collection académique, #. 211, p. 55 2. (b) Woltersdorff, Syflema mineral, Berlin. D'æÆs SCIILEN CiE:S 483 la furface s'étoit vitrifiée, pendant que ma pierre n'avoit fouffert aucun changement. L'examen que M. Margraff a donné de la bafe de l'alun, avec les épreuves que je viens de détailler de la pierre qui donne naïflance à famiante de Chypre, me paroïflent {e rapprocher aflez pour croire que la plus grande partie de la bafe de cette pierre eft femblable à celle de l'un; il faut cependant qu'elle en diffère en quelques points, puifqu'avec le même acide, la forme de la criftallifation de ces deux fels {e refflembloit fi peu : cet exemple eft affez commun, Combien y a-t-il de fels dont les bafes paroiffent les mêmes, & qui ne le font pas ? combien y a-t-il de chofes fur lefquelles il nous refle encore nombre de connoiflances à defirer ! Pppÿ Lüû dans J’Aflemblée publique du 25 Avril 1759- 484 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE PROJET D'OBSERVATIONS ASTRONOMIQUES Er HYDROGRAPHIQUES, Pour parvenir à former pour la mer Méditerranée , une fuite de Cartes exales, accompagnées d'un Portulan, fous le titre de Neptune françois, Second volume. Par M. DE: C 4 APRECR T: Ï la rectification des Cartes des grandes mers eff effentielle _ pour la Navigation de long cours, on peut dire que pour le cabotage, la rectification de celles des mers moins étendues, des grands golfes, des archipels & des côtes les plus fréquentées, eft encore plus néceflaire. Indépendamment de ce que les routes y font plus courtes, les vaiffeaux fouvent obligés d'approcher de fort près des côtes, foit pour y croifer plus avantageufement, foit pour profiter des vents de terre en les prolongeant, font expofés à de fréquens dangers par l'embarras où les jette la variété qu'ils trouvent entre les diverfes Cartes, par rapport à la figure de ces côtes. C'eft fur ce principe que, vers la fin du dernier fiècle, lon forma le projet d'y travailler efficacement, & lon com- mença de l’effectuer par les opérations fuivies , qui furent faites par ordre du Roi fur les côtes occidentales de l'Europe, & particulièrement fur celles de France; le recueil de Cartes, publié en 1693 , fous le titre de Neprune françois, L° volume, en eft le fruit. Cet Ouvrage excellent , à bien des égards, & dont l'utilité a été depuis ce temps généralement reconnue, devoit être continué par rapport à la Méditerranée au commencement de ce fiècle. On defiroit depuis long-temps, d'avoir des Cartes de cette DES, SCIENCES. 485 mer; on avoit travaillé à recueillir les matériaux néceffaires ; . M. Colbert avoit envoyé pour cela à Toulon des ordres en 1678. Ce Miniftre s’étonnoit en effet dès:lors, que. cette mer, le plus ancien théatre de la Navigation & dh Commerce maris time, & Ja plus fréquentée par l'effet de fa fituation, avanta- geufe entre l’Europe, l'Afie & l'Afrique, à qui elle fert de communication , fût la plus imparfaitement tracée. A peine en avoit-on en France quelques repréfentations manufcrites, qui ne méritoient pas le nom de Carres, puifque dans la plupart il ny avoit pas feulement une échelle de Jati- tude, & que fans s'embarraffer de la fituation des différentes terrés par rapport au ciel, elles étoient placées à peu-près dans leurs diftances groffièrement eflimées, & dans leurs directions, füuivant la bouffole , dont la déclinaifon étoit mal connue, ou abfolument ignorée. Ce qu'on voyoit par rapport à a Méditerranée dans l'Eu- rope marine, petit Atlas, publié en Hollande en 1658, chez Ulas Bloem, & dans le Monde aquatique, autre Aths auf publié en Hollande en 1670, chez Pierer Goos, non plus que dans les Portulans italiens de Bartolomeo Crefcentio Romano en 1607, & de Francefco - - Maria Levamo en 1664. , wétoient encore, quoique gravés, que des tableaux informes decette mer. Auffi n’ofoit-on pas s’y fier pour faire canal, c'eft-à-dire, pour perdre la-terre de vue dans les traverfées; ce que l'on évitoit-autant qu'il étoit poffible, à 1Des Hydrographes démontroient en vain l'utilité des règles du Pilotage; elles étoient .abfolument négligées dans la; Médi- terrance, faute de Cartes fur lefquelles on. püt les rapporter. L'expérience feule des Pilotes-côtiers décidoit du fuccès de la -navigation , leur incertitude & leurignorance, affez communes aux gens de leur état, expoloient un Capitaine habile aux -plus cruelles perplexités, & fouvent au péril fe plus évident; ‘enfin en, fuppofant de l'habileté à ces fortes de Pilotes, elle fe ornoit à un petit nombre de côtes, ‘il falloit en avoir pour chaque pays où fon devoit aller. Ppp F1 486 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE. Il paroït d'abord fingulier que dans le même temps, les Cartes des pays les plus éloignés fuffent déjà affez exactes pour fervir feules de guide à la plupart des Navigateurs; la raifon en eft cependant {enfble, Dans l'impofhibilité de trouver des perfonnes qui en commuflent les côtes, on les parcouroit avec incertitude; mais les Pilotes, loin d'abandonner, à la vue de la terre, comme dans la Méditerranée, la fuite de leurs routes & des obfervations qu'ils avoient pratiquées fr utilement pour traverfer l'Océan, redoubloient alors de foin pour en tenir le compte le plus circonftancié ; on traçoit enfuite fur le papier ces routes, avec les remarques des terrès fuivant les mêmes principes d’après lefquels on les avoit faites. C'eft ainfi que par les feules règles du pilotage, on drefla, peu de temps après la découverte du Nouveau-monde, des Cartes de fes côtes, très-fufceptibles d'être perfeétionnées. Pour débrouiller ce cahos que la routine entretenoit dans Ja géographie de la Méditerranée, les perfonnes les plus éclairées du département de Toulon, furent confultées, & convinrent unanimement qu’il falloit condamner toutes les efpèces de cartes que l'on avoit eues jufqu'alors de cette mer, & envoyer le long des côtes, pour en lever les Cartes, des Officiers dont la capacité en ce genre füt reconnue. On fixa les moyens que lon regardoit comme fufffans pour fe procurer en peu de temps une Carte excellente; ils confiftoient à prendre hauteur fur les principaux caps, à eftimer les diflances d’un cap ou d'une pointe à l'autre, & leurs directions fuivant la bouflole, dont on obferveroit la vañation , à lever les plans des ports & des mouillages, & für-tout à defliner les vues des montagnes & autres objets qui fervent de reconnoïffance. M. de Cogolin & M. Chevalier, tous deux Capitaines de vaifleaux, & en partie rédaëteurs du projet, furent d'abord employés à fon exécution, On leur joignit M." Pène & Pétré, Ingénieurs, pour faire les defféins &' pour lever à terre Le détail des’côtes. ls commencèrent en 16709 ‘à par- courir, lun la Catalogne & eSfles Baleares, Yautre l'Aahe. DES SCIENCES. 487 On continua de faire de femblables opérations fur d’autres côtes pendant encore quelques années. M. de Cogolin fut en 1685 dans l'Archipel avec M. Razaud, Ingénieur, M. de la Moithe - d'Airan y fut aufli. M. de Beaujeu avoit été au royaume de Naples & dans le golfe Adriatique ; & en 1 686 M. Plantier, Ingénieur, fut en Syrie, dans File de Chipre & jufqu'aux Dardanelles. On forma de leurs ouvrages des recueils magnifiquement deffinés, dont la plus grande partie font confervés au Dépôt des cartes, plans & journaux de la Marine. Ces travaux donnèrent des connoiffances de plufieurs côtes & des matériaux pour former des portulans. Ils accou- tumèrent plufieurs Navigateurs de cette mer à ne plus fe rapporter éntièremént aux pilotes-côtiers; mais il s’en falloit bien qu'on remplit par-là le projet de faire une Carte géné- rale & exacte de la Méditerranée. Ceux qui avoient formé ce projet ne l'envifageoient que comme marins & caboteurs, nullement comme Géographes, encore moins comme Aftronomes. Ils étoient perfuadés, comme prefque tous les Officiers de Marine de ce temps-R, que rien ne pouvoit mieux fatis- faire aux befoins des Navigateurs, qu'une Carte uniquement dreflée fur les pratiques de leur métier, & fur-tout fur les obfervations de latitude faites avec les mêmes inftrumens dont ils fe fervoient en mer, tels que l'aftrolabe & l'arba- lftrille, quoique très-défeétueux de leur propre aveu. Hs regardoiïent une telle Carte comme préférable à celle où feroient employées des latitudes obfervées à terre avec d'excellens inftrumens; prétendant que lorfqu'ils venoient du large pour chercher une côte, ils ne trouvoient plus leur compte à rapporter leur point fait d’après leur latitude prife en mer fur une Carte dreflée fuivant la latitude prife avec des inftrumens autres que ceux de mer. Il paroît étonnant qu'ils ne fentiffent pas que ce prétendu avantage confiftoit dans un accord fuppolé entre les diffé- rentes obfervations de latitude d'un même lieu faites avec des inftrumens fi imparfaits, 488 MÉMoiREs DE L'ACADÉMIE ROYALE Un préjugé fi évidemment faux étoit cependant accrédiié au point que les Officiers de la plus grande diftinction pen- foient de même. M. le Chevalier de Tourville, depuis Maréchal de France, dans une lettre qu'il écrivoit au Miniflre le 22 Décembre 168$, fur la navigation de la Méditer- ranée, foutenoit qu'il n’y avoit pas d'autre moyen de faire de bonnes Cartes pour naviguer dans cette mer. Ce fut au contraire la principale caufe des erreurs que Yon reconnoît dans les Cartes particulières qui réfultèrent de ces premières opérations; & comme prelque tous les pilotes ont continué de penfer ainfi, la contrariété qui fubfifte encore dans toutes les Cartes qu'ils ont faites de la Méditerranée en eft également la fuite. Michelet & Therin, de concert, furent les premiers pilotes qui publièrent à Marfeille une Carte gravée de la Méditer- rance, en 1689 (du moins c'eff la plusancienne que j'aie vue). Quatre ans après, Berthelot fit paroître la fienne, dont il y a eu enfüite trois ou quatre éditions : cette Carte de Berthelot atoujours été regardée comme la moins mauvaile, quoique dans les temps de fes différentes éditions il en ait paru plu- fieurs de Michelot & autres. Toutes ces Cartes étoient des Cartes plates : les pilotes de cette mer n'en ont jamais fait, ni voulu connoîtré d'autres, malgré le vice de leur conftruction ; puifque R rondeur de la Terre y eft fuppofée infenfible par rapport à l'étendue de pays qu'elles contiennent, & qu'on y repréfente les méri- diens parallèles entreux & en même temps les degrés de latitude égaux. On voit le défaut qui doit fuivre néceffairement une telle füppofition , lorfqu'il s'agit d’une Carte générale de la Méditer- ranée, qui comprend environ quinze deorés en latitude. On pourroit du moins éviter cette caufe certaine d'erreur, en faifant des Cartes réduites, dont la projection eft vraie, d'autant que ce n'efl guère qu'en apparence que les plates font plus fimples ou plus commodes dans la pratique. - Ces premières Cartes étoient d’ailleurs pleines de défauts. Dans D E!s : 5, CT ENN C E:s 439 Dans beaucoup d'endroits, ces défeuts en latitude alloient à plus d'un demi-degré, j'en ai dit la raïfon; & en longitude, ou dens le fens de l’eft à l'oueft, ils étoient encore plus confidérables. On comprend que les erreurs d’une eflime groflière dans les dif. tances d’un cap à l'autre, venant à s’'accumuler , pouvoient aller loin dans une longueur telle que celle de la Méditerranée : . mais croiroit - on que jufqu'alors cette mer eût été prefque toujours repréfentée trop étendue de l'occident à lorient d’un féptième ,:& même d'un quart de fa longueur totale. M." Gaflendi & de Peirefc l'avoient découvert d'après l'examen des obfervations d’écliples de Lune que des Miffion- naires avoient faites au Caire & à Alep. : Dans ces circonftances, il étoit important qu'un homme vraiment habile détruifit les préjugés des Navicateurs de la . Méditerranée, les éclairât dans les pratiques de leur métier, leur montrât l'avantage des obfervations de latitude faites à terre avec de bons inftrumens pour corriger les Cartes, ap- pliquât enfin à la Géographie de cette mer Îe nouveau moyen que l’Aftronomie venoit de fournir pour changer fa face de la Géographie du monde entier, & dont Académie s’étoit fervi tout récemment avec fuccès pour déterminer les méridiens de plufieurs villes & ports de France. Je veux dire les obfer- vations des éclipfes des Satellites de Jupiter, très-fréquentes &c fupérieures à celles de Lune, qui avoient été feules pratiquées jufqu'alors , & qui étoient rares : quoique cependant ces éclip{es des Satellites ne comportaffent pas encore autant de juftefle que les moyens dont nous parlerons dans la fuite. M. de Chazelles, Hydrographe des Galères depuis 1685, & qui avoit auparavant cultivé l'Aftronomie fous M. Caflini ,en avoit formé le projet dès le temps de fon arrivée à Marfille. Il s'embarquoit en conféquence toutes les années fur les Galères, il failoit beaucoup d'Obfervations de latitude & des Remarques fur les côtes qu'elles parcouroient; mais il avoit fur-tout à cœur d’aller à l'extrémité orientale de la Méditer- ranée, pour vérifier & conftater fa longueur par des ober- yations aftronomiques, Mn, 1759 Qqq 490 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE M. le Comte de Ponchartrain ayant réfolu de faire tra- vailler à un /écond volume du Neptune François, qui comprit Ja Méditerranée, chargea de ce foin M. de Chazelles, dont il connoiffoit le mérite par la grande part qu'il avoit eue aux opérations du premier volume de cet ouvrage; il Fenvoya au Levant en 1693. Son travail fur fes côtes d'Égypte, de Syrie, de Chypre & de Turquie fut auffi utile qu'on l'avoit efpéré ; & l’on ne peut en faire un plus grand éloge, qu’en rappelant l'honneur qu'il lui procura d’être reçu dans cette Académie. M. de Chazelles ne ceffa de recueillir, autant qu'il put, des matériaux pour remplir les vues du Miniftre jufqu’en 1701; c'eft alors qu'il donna à l’Académie le Profpedus de ce fecond volume du Neprune François, où Porulan de la Méditerranée , qui , fuivant ce qu'il annonçoit, devoit être un Portulan raifonné, compofé de trente-deux Cartes. Les obfervations de latitude & de longitude faites en 1700 & 1701, par le P. Feuillée, dans l'Archipel & à Tripoli fur la côte d'Afrique , rapportées dans les Mémoires de l'Académie de 1702, furent encore une augmentation pré- cieufe de matériaux pour M. de Chazelles: mais il s'en faut bien qu'il en eût aflez de ce genre, pour pouvoir en faire, füuivant fon projet, la bafe de fon ouvrage. | D'ailleurs, il trouva, fans doute, moins de facilités qu'il ne l'avoit cru dans la réunion en un feul corps qu'il comptoit de faire de toutes les Cartes particulières levées par les divers Officiers de marine & Ingénieurs, & des journaux ou mé- moires qu'il avoit recueillis, puifque, malgré tout fon zèle pour la formation de ce Portulan; il n'en avoit encore rien produit lors de fa mort, arrivée en 1710. En voici une autre preuve. En 1737,M. le Marquis d'Albert, alors chargé du Dépôt, & au zèle duquel on doit un grand nombre de Cartes ma- rines qui en font émanées & reconnues pour les meilleures , effiya de faire reprendre le projet de M. de Chazelles en- tièrement oublié jufqu'alors. { = - + 3 ke LS J =] >” 1 } D'Æ15 YIBCALIEN EiEte 495 OBS AR OA TE OUN.S BOTANICO-MÉTEOROLOGIQUES, Faites au château de Denainvilliers, proche Pithiviers en Gétinois, pendant l’année 175 #. Par M. pu HAMEL. ANR NANTUIUS VS VENMI EN) T: ES Obfervations météorologiques font divifées en fept colonnes, de même que les années précédentes. On s'eft toujours fervi du thermomètre de M. de Reaumur, & on part du point zéro, ou du terme de la glace: la barre à côté du chiffre indique que lé degré du thermomètre étoit au-deflous de zéro; quand les degrés font au-deflus, il n'y a point de barré: o défigne que la température de fair étoit précifément au terme de la congélation. Il eft bon d’être prévenu que dans l'Automne, quand il a fait chaud plufieurs jours de fuite, ïl gèle , quoique le thermomètre, placé en dehors & à l'air libre, marque 3 & quelquefois 4 degrés au-deffus de zéro; ce qui vient de ce que le mur & la boite du thermomètre ont confervé une certaine chaleur; ceft pourquoi on a mis dans la feptième colonne, Geke. Les Obfervations ont été faites à huit heures du matin, à deux heures après midi, & à onze heurés du foir. ‘ 496 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE J'ASN FA TENR. Ton THERMOMÈTRE du | VENT. | a | Baromètre OTPAMDNDADIAGANENLE Mois. Matin | Midi. ET Degrés. He F I NE: 2: 1+|couvert 2 S. En |— Et 4r beau temps. 3 S. +7 [+11 +5 . beau temps. 4 Se AO 1 |çouvert & variable avec pluie. Lo S: A D 0) 7 |2 3 |couvert. D G SEE 200 VS 9 |2 6 7 Fe / - Ù té : beau temps. Ü o 1e 6 8 3112707 Do | S. E o 6 | 3 |27. 8 |beau, couvert & gelée blanche. 11 S. 3 8 |, 6 |27. 9 [couvert & bruine. TE) S: 6 9 s |27. 7+|bruine & grande pluie. BINS:0; 3 s 3 |27. 7 |couvert. 14 (OË 3 s 3 |27<: 3 [variable fans pluie. dl, s N. 3 3 L26e à Kgrande pluie la nuit & le jour. 16 N. E. O |—1 |—2 |27. 6 |couvert & frimat. D 17 N. —1}—15|—4 |27. 71|variable, neige la nuit, 18 NF 227007 nlcouvert 19 NE. |—1 |—1 |—3 |27. 41lgrande neige. 20 | N.E. |—7 |—3i—Sil27. $ |beau foleil. 21 NE ro 6 8427. 41 variable. 22 | N.E. |—11|—6 |—71l27. 42|variable. 23 N. 3 |[—1 |—52\27. 6 |beau & nébuleux, à 24 | N. E. |— 61/3 |—4 |27. 8 |beau foleil. 2H NN. E: o [+2 |[—1 |27. 81:|variable & nébuleux, DOMINER OW2T 10 27 N. o © |[—1 |27. 10+ couvert. 28 N.O. |— <+ril— +128 ”! 29 | N.E. |[—$s+i—11—5:128 3 |beau temps. | 30 S. E 62) Mo;|28m 4 | beau temps. Sr N EEE oO le 11|couvert. DES SCIENCES. Le commencement de ce mois a été doux; vers le milieu du mois, la gelée a été affez forte; & le 22, le thermomètre defcendit à 11 degrés au-deflous de zéro: mais comme Ja terre étoit couverte de neige, cette gelée ne l'a pas pénétrée, & on na pas pu employer les chevaux à voiturer, parce que la terre étoit trop molle, & les chemins impraticables. Vers le commencement du mois, il y eut des fontes de -pituites qui ont duré quatre & cinq jours, avec une falivation continuelle; {es malades avoient le vifage & la langue enflés; à la fin de la maladie, la peau de la langue tomboit par Jambeaux, Mem. 1759. Rrr 498 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE FÉVRIER. Tite THERMOMÈTRE: du | VENT. | | Baromètre Matin | Midi. | Soir. Degrés.| Digrés. | Degrés.| pouc. lign. I N.E. |—r |— 2] 71 |28. 1+ 2 S: —2 (e) Oo |27. 10 3 S.1® HN nr |27 Myz AU IN: ER o 5 OM 27. QU8 = S N. E. |—4 O |—3:|27. 10 6 | SE. |—2 oO oMIL27. "Br 7 S SI O |27. 101 8 O. () S O |27. 11 DNS AO: (°) 6 4 |27. 10 1011 "SO. 3 4 32127. 7 II SAO! 3 4 22]27. 03 NE ISSN 0 E I 6| 7 |27 « MINS A10: 3 620 52702 140|US. FE: o 3 3 12707 15 S. ©. 2 S 2 |27. 4: 16 S 10! 25007 6 |26. 101 17 SO: 2e 127 NET 18 S; = fa O0 |27. 4 19 12 nm NN EE NET 20 E, 4 | 11 FMETMINE 21 S. 1 6 2272000 220 /S NO. E7x 7 27. 3 28 NIMSNO: 2 5 2127 14 22 SO: o 4 M2. 4 9 25 S:10. () 2 2 1127.24 26 910: 2 4 0127413 SAINS :LE: 3 4 15127 7 28 S. o 7 4 127. 8 ÉTAT DU CIEL. couvert & bruine. couvert & brouillard, couvert. nébuleux. beau fixe. beau temps avec givre & brouillard. couvert. variable avec vent. couvert & vent. couvert & bruine. variable avec pluie, vent & grêle. pluie, vent & neige. beau & venteux. gelée blanche & brouillard. variable avec grêle. pluie & grand vent. variable & vent. il neige la nuit, beau le jour. beau & venteux. variable avec pluie & vent. ie avec nuages. variable avec brouillard & givre. gelée blanche, pluie & neige. couvert. pluvieux. beau temps, gelée blanche. DES SCIENCES. 499 Ce mois a été froid, il a gelé de temps en temps; fe matin, le thermomètre n'a été qu'une fois à 4 degrés au- deflous de zéro, & à midi il a été rarement à 7 degrés au- deflus de zéro: ces petites gelées n'ont pas fait plus de tort que celles du mois précédent. A la fin du mois, les blés qui avoient été couverts de neige pendant tonte la gelée, étoient très-verts; les perdrix commencèrent à s'apparier: le vent ayant ramaffé la neige dans les bas, la pointe des blés étoit découverte fur les fom- mitres, & les perdrix n'ont point fouffert. Rrri oo Mémoires DE L'ACADÉMIE RoYALE MARS, THERMOMÈTRE. VENT, | | Baromètre É TANT VD UMONEL, Matin | Midi, | Soir. Degrés. | Degrés.| Degrés. | pour. lign. 6 :[27° 1 [couvert & grand vent. 27+ 2%|beau avec nuages & vent. 12127. 43| beau temps, petite gelée blanche. 27. 1%] beau & petit brouillard, = N D | ET | 2126. 11 |couvert. S'10: ) 26. 1 |beau avec nuages. SE 4 O 126. 3 |neige & grêle. NÈRES © |— 1 |26. 6 |beaucoup de neige. USE z—1 |26. 6%|couvert. NE 12|—12126. 4 |neige. . E. |— 2 |—1:126. 4 HE + Oo |26. ion avec nuages. Un 26. 3 ; 26. 12|couvert. 4 |beau avec nuages. 26. 6 |beau avec nuages. 26. 3 |variable, grand brouillard & pluie. BA TOR {pluie & vent de tempête. mi = = +R & Om © e b 26. 11 {couvert & variable. a CRC O D Oo [l h aa6 4 couvert. 27. 1! |beau, grand brouillard. a a nu au BB Oo 0 E où où © NU œ BR O N NO O " O O NB = W bi D NN co o où o co MB NN oo 1 NN NN 0 © œn 2127. # |pluie, tonnerre, vent & grêle. à 11 5127. 4 [grande pluie par averfes. 0) 6 +127. 4 |variable avec pluie & grêle. 6 27. 8+|beau avec nuages 7 27. 10 [pluvieux & couvert. ; 10 1270000 ne 127 27e. 9> RE 14+ 27. 9 pbeau fixe, NE: 2| 16 27e WT E: 2| 16 270010 DES ScrTENCE®% soi Le commencement de ce mois a été froïd; fur la fin il y a eu de beaux jours, il a même fait chaud, puifque le 30 & le 31 à midi, le thermomètre étoit à 1 6 degrés au-deflus de zéro. Les blés étoient très-verts, & vers le milieu du mois on avoit commencé à femer les avoines; maïs des pluies qui tombèrent depuis le 17 jufqu'au 2$ du mois, rendirent {a terre {1 molle, qu'il fallut difcontinuer ces travaux. La violette commença à fleurir le 1 s ; fur la fin du mois, les pêchers & les amandiers étoient en pleine fleur, mais il y avoit peu de fleurs: à en juger par les boutons, les pom- miers promettoient beaucoup de fruit; les abricots avoient été: gelés dès Fhiver, ainfr que quelques vignes dans l'Orléanois,, ce qui faifoit augmenter le prix du vin. Les abeïlles commençoient à faire leurs récoltes fur les: pèchers. l Rrr ii 502 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoryaLr NA LE RER DA CES ESS TL MAN 2 MN VO CPE EE 2 Jours THERMOMÈTRE. du | VENT. Le | Baromètre ÉTAT DU CIEL. Mois. Matin | Midi, | Soir. Degrés.| Degrér.| Degrés, |pouc. ligm I S. 731 17 1 10 |27. S |beau fixe. 2 N. 8 | 17+ 5127. 6 |variable avec tonnerre & pluie. 3 0. 81] 115] 4:27. 4+1|beau avec nuages. 4 ©. 4 6 3127. 23|[variable avec vent froid. s O. I 6 |—1 |27: 3 Igiboulée, neïge & glace. 6 ©. o 7 2 |27. 5 |gelée à glace. 7.| N°. E: o | 10 3 [27 5z|beau temps, gelée à glace, 8 N. SALUT $ 127 6 |beau temps, gelée à glace. 9 | NE 43| 145] 7 |27. 6 [beau temps. 10 E: 8Tl 162] 8 27. 67 TAN. LE SUNETS 9 |27- 5 (beau avec nuages. 12 E> 81] 18211 10 |27. 5 13 | N. E 8:| 16 8 |27. 4 |beau temps, vent orageux. AN INeNE I s 1 |27. Ÿ|grand vent, gelée à glace. 15 | N.O I 6 2 |27. 32|couvert, variable & gelée à glace. 16 | N.E 2 12] 1 |27. 6 |oelée à glace & neige. 17 | S:O I 8 3 |27- 6 |beau temps, gelée à glace, NOMNNS EE 6 | 10 CM 27- 005 19 S: SR TETNT 6 |27. $ \variable & beau. 204510. 8 | r2 81127. 5 21 SRE 9 | 174] 10 |27. +|beau avec nuages. 22 NE. (rx 17 13 |27. 2+{beau avec nuages 23 Es 13 | 173] 11 |27. 4 |variable avec pluie. BAN SAOMINTO | 13 | 10 |27. 4:|pluvieux. 2 5.10: 8 | 10 7 |27. 7 {brouillard humide. 26 S. (OA EE 9 |27. 62|couvert & brouillard. 27 0. 11 | 1451 8 !27. S$ [variable & petite pluie. 24 S NO: 811 1331 8 |27. S$ |variable, petite pluie; iltonneauloin. 29 N. 6 9 $ [27 7 [variable & pluvieux. 30 N. $ 7 43127. 8 [variable & couvert fans pluie. DES SCIENCES ‘503 Quoique le thermomètre ait quelquefois monté fur le midi à 17 degrés, ce mois peut néanmoins paflér pour froid, puifqu'il a gelé à glace le 5, le 6, le 7, le 14, le 15, le 16 & le 17; quand le foleil n’a pas paru dès le matin, ces gelées n'ont pas fait grand tort aux produétions de la terre, mais celles du 7 & du 15 ont gelé quelques vignes & broui les feuilles des arbres qui étoient expolés au vent. Le 1.” on vit des hirondelles; le 10, le 11 & le 12, on entendit chanter le roffignol & le coucou; la terre étoit fort sèche, on fouhaitoit de l’eau pour faire lever les avoines & pour faciliter les femailles des menus grains. Le 13, au foir , le temps paroiffoit difpolé à l'orage; il s'éleva un ouragan qui dura toute la nuit. Le 24, on vit quelques hannetons. Le 27, les pommiers étoient en pleine fleur, & les poiriers. défleurifloient. f s0o4 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE M À L Tous THERMOMÈTRE, hd: du [VENT | TT | Baromètre ÉTAT DU CIEL. Mois. Matin | Midi. | Soir, Degrés.| Degrés. | Degrés. | pouc. lign. 1 N 4 10 $ |27. 8 |beau, grand vent & froid. 2 N 4 9 S 127. 8|beau, grand vent & froid. 3 N. SA U2 9 |27. 8 |beau avec nuages. 4 E 8 ! 15 | 10 |27. 6:|couvert. s S, 12 | 182| 11 |27. 7 |variable avec nuages. HO 0 SE 13 | 212] 14 |27. 6 |beau avec nuages. 7 S: 141| 19% 1332 . 6+|beau avec nuages. 8 E> 13 | 19 | 132127. 6+|variable avec pluie. E. | 14£| 212] 15 |27. 6+|beau temps, tonnerre fans pluie. 14#| 125| 12 |27. 8 :|beau avec nuages. 9 + | beau avec nuages & brouillard, 112| 17 1127. de beau avec nuages. 11 | 175] 10 |27. 7+|beau avec nuages. 12 ANTON 16 027 beau avec brouillard fec. 15 MIATOMIPNLE Ale; Fe AMAR avec tonnerre, fans pluie. Z222Z Him ë b| b x PA H22222220 72 D D N beau avec brouillard fec. 2 93 E 20 . 12 LM rONI27. Mo 21 À 13 | 19 | 122|27. 8 \beau temps. 22 Ê 12 | 21 132127 47 23 : HENRI A 27.7 SANININPE | ns tl25 = ns 211 beau temps avec nuages & éclairs 4 6 5 7 8 ÿ 6 variable & tonnerre fans pluie. variable avec petite pluie. +| variable avec tonnerre. z| variable & tonnerre avec pluie. z| couvert. variable avec pluie. variable avec ondées de pluie. D SL Les 1 HDHE 8) AS e CII EAN 20 LE 505 Les premiers jours de ce mois ont été très-froids, & en général il peut pañler pour fec; quelques endroits n'ont pas eu une goutté d'eau, & dans d’autres elle ne tomboit que par petites ondées: cette fécherefle a empêché de labourer, & nuifoit aux blés qui étoient dans les terres légères; mais dans ‘les bonnes terres, ils épioient bien & ils étoient aflez verts: il y a eu quelques brouillards fécs qui les auroient rouillés, fi la feuille n'avoit pas été endurcie par la féchereffe. Le 25, on commença à couper les fainfoins; ils étoient bas, mais affez garnis, on vit auffi les cantarides : les hannetons ne paroifloient plus; il y en a eu très- peu, aufli-bien que des chenilles, : Mn. 1759. Sf1 506 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE HPCDEL PIN, re THERMOMÈTRE. du | VENT. | mr | Baromètre ÉPT AT, DIU ONE: Mois. Matin | Midi. | Soir. DU Degré] Dares | Degré | pou Han RE 1 S 15 185] 121/27. 13 |variable, pluie, tonnerre au loin. 2 N 10+| 10 | 10+27. 6:\pluie continuelle. 3 N. 10 | 14 | 10 |27. 9 +|variable avec nuages fans pluie. 4 O 103| 17 | 13 |27. 9+|beau avec nuages. S SHC 15 | 20+| 15 [27 8 |beau avec nuages. 6 S. 173| 23 17 |27. 7+|beau avec nuages & tonnerre. 7 | SE. | 18 | 2 19127. 7 8 N. 16 | 25 18 |27. 8 in temps. 9 S: 227% |N2 0027.08 10 CHL0) 15 | 25 | 16+]27. 8 |variable & tonnerre. II SE 15 | 22 | 16 |27. 61|variable. T2 NS oO 15 | 18 | 14 |27. 8 |variable & grand vent. 13 S. O 13 17:| 124/27. 9+|beau avec nuages. 141 ]0S. O 24 | 20 | 13 |27. 8 |beau avec nuages. 15 S: 15 | 16:! 13-127. 9 :|variable avec bruine. 16 | S.O. | 135] 17 | 132127. 8 [beau avec nuages. | 17 O. 125| 1 { 9 |27. 7 [pluie par averfes. 18 | N. O. 1! 13 | 1Q |27. of|couvert, vent froid. 19 | S-O. | 102! 14 | ri 2 9 4 [beau & variable avec bruine. 20 N. LEA] 16 272 OA AT 21 N. 12 | 19 | 14 |27. 10 B 7 N. 13 | ro | raifaz g (peu avec nuages. 23 N. 1300 191112027008 24 Se 15 | 24 | 15 |27 7 | variable avec pluie. ERARRNPE: 0 re 14 |27. 7 |variable avec pluie & tonnerre. 26 N. 17 | 21 | 15 |27. 8 |variable, orage au loin. 27 N. 14%| 21 | 14 |27. 7 |beau avec nuages. 28 | N.E. | 142] 192] 11 |27. 61|beau avec nuages & bruine. 29 | N.E. | 10 | 152] 115|27. 6 |beau & froid. 30 S. 13 | 17 | 115127. 42|beau avec nuages. } DES SCIENCES, S07 Ce mois a été variable, il a fait très-chaud au commen- cement & très-froid fur la fin; le ciel a fouvent été couvert, & il eft tombé de temps en temps quelques petites pluies qui ont été avantageufes aux biens de la terre, fur-tout aux menus grains. Au commencement de ce mois; on vit quelques fleurs d'orange; la vigne entra en fleur, & le 8 elle étoit en pleine fleur. A la fm du mois, les raïfins étoient en gros verjus ; mais il y avoit dans quelques cantons de l’Orléanois, des vers qui coupoient beaucoup de raifins: les feigles furent en état d'être coupés le 15. On a labouré les terres, mené les fumiers, & les vignerons ont accolé les vignes & donné la façon du binage; on a auff travaillé à arracher l'oignon de fafran, & on a commencé à le replanter. On a fervi des fraifes jufque vers la fin du mois, & le 1 ss on commença à fervir des fruits rouges, qui ont été abondans & de bonne qualité. Le 20 du mois, on vit voler de petits perdreaux, & on ceffa d'entendre le roffignol. 508 MÉmoires DE L'AcCADÉMIE RoyYaALe ANIME ENT THERMOMÈTRE. 1,| VENT. TM | Baromètre ÉTAT DU CIEL. Matin | Midi. | Soir. Degrés. Pret De pouc lign À HE I SAC? 145] 17 | 112127: *$ : [lvariable-avéc bruine. F SE 10 92] 82:27. 6%|pluvieux. | 3 O. 1 123] 18 |27. 7 |variable avec pluie & grêlez 4 O. 93127. S |grande pluie continuelle, s SAO: # 113127. 3 |grande pluie continuelle. 6 O. 15 11 127. 3, [grande pluie par averfes. PAIN SE 15 | 11 127. S$ |variable & pluvieux. CIS CE 14 | 11 127. S +|variable avec pluie & vent. 0. SOI 12 | 10 |27. 6+|couvert & pluvieux par ondées. Too 10 16 >|: 12327. 7. couvert. II S. O. | 112] 143] 14 |27.: s+|pluvieux. 12 Se re | ER lpluvieux , tonnerre. 13 S$ 15 19 |27. S$2|variable avec pluie & vent. 14, Se 18 13 |[27. 6+|variable. 15 S. 14 | 16:|27. 6 |vent forcé, pluie par ondées. To SO: 14 | 103127. 62+| variable avec pluie & vent. 17 ©. 115| 13 10 |27. 42|pluvieux. 18 N:'O-MIir2 17 | 10 |27. 3 |variable. 19 N. 12 | 15 | 10 127. 3 |variable avec pluie. 20 0. JE OR RUE EE 3 [variable avec pluie. 21 S:10 14 | 17 | 11 |27. 1 2|variable avec pluie & tonnerre. 22 S: 13 TOMATE. = pluvieux. 23 SNO 112] 15 10 |27. PE ARE toute la journée. 24:| S. O. 14 | 152] 12:|27. 4 pluvieux. 2 S. O. | 132] 15 | 13 |27. 8 [pluvieux par grandes ondées. 26 SEL 14 Ÿ 17 | 13 [27. 7 |variable fans pluie. 27 | S.O. | 15 | 18 | 13 |27. 73:]variable avec pluie & tonnerre, 28 SO 13+| 19 13312 8 +| variable fans pluie. 2 NE. | 13 | 18 | 125127. 7 |beauavec nuages. 30 E. 14 | 22 | 17 |27 S$ |variable avec pluie & tonnerre. 31 S. 14 | 14 | 11 (27. 4 [pluie continuelle. s AMC w Te Ô a Eu 2 K321O MP st SC Ir EN CE 4 509 Ce mois a été prodigieufement humide, & afléz froid pour quonait été obligé de fe chauffer: on avoit commencé à couper les feigles, mais comme les pluies ne permettoient pas de les ferrer, on prit le parti de les faire manger par les brebis; celles qui avoient été nouvellement tondues, ne pou- vant pas fortir à caufe des pluies froides, il falloit les nourrir dans les bergeries où elles pâtifloient ; les feigles qui étoient reftés fur pied germoient, | Les vents forcés qui ont foufflé pendant ce mois, ont égrené quelques fromens; mais les orges & Îes avoines qui avoient pâti pendant la féchereffe, ont profité des pluies qui retardoient la moiflon, & ces menus grains font devenus très-beaux. Vers la fin du mois, les melons périfloient fur les couches. \ Sff il 510 MÉMOIRES DE L' ACADÉMIE ROYALE A 00 SU Far THERMOMÈTRE. du VENT. | a | Baromètre ÉTAT DU CIEL. Mois Matin | Midi. | Soir. m2 nu Hi tm O I ou BR ON = no < an pyounpumu 10 II 12 13 14 ns 16 602 #hocboo0ooo Z . im 21 À 22, E 23 S. 2ANIMSUE 2$ S. 26 S: Az] (S°O; 28 10 29 S10: 300| SL. 31 SO: Degrés.| Degrés.| Degrés.| pouc. 13 |17 | 13+27. 420 NsN27e 15 214 15 127. ANIME IN NS SR 17 | 21 173|27: 16 | 182] 14 |27. 14 120") 140127. 15 |:22! | 16/27. 16 19 14 |27. T3 16| 11 |27. 125| 13 11:|27. 11H) 10 INR | 27. 13 ITS NNTEN|27- 151IU7-|Nee 27: 14 | 20 | 14 |27. PSS IA 14 |27. 14090 us 027. 132119: | x3: |27. 12{ 162 Tr 27. 12/7) lens ule: 14 | 19+| 14 |27. 15 | 233] 36 |27. 15+| 18 | 14:|27. CA PA CO EE CN EE 13 15-19 27. 12%) MS INA Ie 14.| 172] 12527. 10 | 15+| 11 |27. 123| 15 1X |27. 12LPALS PIE Tr. 132102080027: lign, = = nn an an OO Où © ON m = 00 © NI 0 NN NI NI 6 |beau avec nuages & tonnerre. 72|beau avec nuages. 1 7 <|beau avec nuages. 6 |variable, il éclaire. z| variable avec pluie & | variable avec pluie & tonnerre. 72 | variable avec brouillard. 7 _|beau avec nuages. 6:|beau avec nuages. 6 N a avec pluie & tonnerre. LI beau avec nuages. beau avec nuages. variable. bi brouillard, beau avec nuages. variable , pluie & tonnerre. variable avec pluie. beau avec nuages. variable, petite pluie. couvert. beau temps. beau temps. couvert & pluvieux. variable. Ni= Ni bin LC Din Ne |pluvieux. pluvieux. variable. grande pluie. variable avee pluie. variable. variable avec ondées. biI= Ni DÉS SCIENCES. “sir Ce-mois a été froid & humide, il a plu prefque tous les jours, mais feulement par ondées. On a profité des intervalles de beau temps pour faire la moiflon ; comme les blés étoient fort bas, on a été obligé d'en faucher une partie, fur-tout dans les terres lécères : ils étoïent plus beaux dans les terres noires & fortes que dans _ les terres blanches, qui font communément les meilleures pour le froment; en général, les avoines ont été belles, & la ré- colte des plus abondantes, mais le grain étoit léger. Les vers ont coupé beaucoup de vérjus, & l'humidité a fait tomber des feuilles; ce qui a empêché le fruit de parvenir à une parfaite maturité, $12 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE SEPT E MB R' E. D 2 à TOuts THERMOMÈTRE: du | VENT. | a | Baromètre ÉTAT DU, CIEL. Mois. Matin | Midi. | Soir. CET Degré. | Degrés. | Degré. poue. | lign. TRES 1 | S. O. | 132] 162] 121/27. 6 [variable avec grande pluie. 2 N. 11 16 | 10 |27. 9 [beau temps. 3 N. 10 | ‘15 | 12 |27. 6% variable avec nuages. A1 |U SO: 12 j'i7z| 127 [270$ |Variable: S SD 135| 1621] 131]27. : 7 |variable. 6 S. O:.| 132| 16: | 4121 272,8] couvert: 7 | N°. E. | 10Ë| 162] 11 |27. 721|couvert & brouillard. SN SCO), 112| 15 | 11 |27. 6 |grande pluie le (oir. 9 | S. O. | 10%! 1411 10 |27. 9 |variable avec grandes averfes d’eau. 10 N. z| 15+| 11 |27. 0+|beau avec nuages. If N.E. |! 1025] 16 | 10 |27. 8 |beau avec nuages. 12 NE; 5 17 | 101]27. 821 ISA ANNE M INTOp|RTéE ere | 270078 FAR PRIS BR DE 1 Mere TES De 0 AS ns SIN EN TON Er om. 10 16: | S.E: 10 | 19 | 14 |27. 4+]|variable & bruine. 17 | SO. | 12 | 14 | 114]27. $+|variable. 18 SO: D 122] 82:12 6 couvert. TOMRNSE. 8 | 14 9+[27. 42|beau avec nuages. 2OMIEN,IE. Co) SE 65127. 3 |beau avec nuages & vent. pi NE; (SA) Mie 6 |27. 6 |variable avec pluie. 22 NUE S 11 $ |27. 6 |variable, gelée blanche. 2 IN°NE SRI RS 72127. 8 |beau temps, gelée blanche, 24 N. 72 7 |27. 92+{beau & vent froid. 2 N. 20 rise) S |27. 10 |variable avec nuages. 26 | N.O. SHOT S |27: 10 |beau temps, gelée blanche, 2 IN. ©: S 13 72 |28° beau temps. 31e) IN PM 2 6%| 15 81128. 1 |beau temps. ZONMN.'E: 6 | 14 Fes A {beau avec nuages, 30h | INSEE. 8 15 10 Fe variable. DERRESER LORIE SRE NPA NN EINRE EN ARR TRE ZESRENE PERSON ZA PEN PRET COCLPERR TPE DEP TPS ER ONR E PE DES SCIENCES sr3 Le temps a été très-beau. pendant tout ce mois, ce qui étoit avantageux pour faire mürir les raifins; mais le vent ayant prefque toujours été au nord, il a fait aflez froid. On a commencé la vendange par un très-beau temps; vers le 18, les fleurs du fafran commençoient aufi à paroître : les poires de beurré & de Saint-Michel, qui font les fruits de cette faifon, avoient peu de goût, Mn, 1759: Ttt 14 MÉMoiREs DE L'ACADÉMIE ROYALE - OCR O"EPRE. Tones THERMOMÈTRE. du | VENT. | a | Baromètre ÉVRAUTAD UAICILEL. Mois. Matin | Midi. | Soir. FE Dégrés, F7 Degrés.| pouc. lign. 1 N.E 8 122] 10 |27. 11 |variable fans pluie. 2 NPNE, 6:| 132] 9 |27- 10 |beau & venteux. 3 NE; 8 14 9 |27. 8 |beau & venteux. 4 12E 43| 145] 9 |27. 81|beau temps. s ©. 5 14 | 10 |27. 9 |grand brouillard, beau temps. 6 O} 7 us 10 |27. 9 |beau temps. 7 SO 9 15 9127. 7 |couvert. ra S. 10 | 16 14 |27. 272|variable avec vent. 9 5, 8 | 11 7 |27- 33lgrand vent & grande pluie. Ho S MO AMIE 3427. 7 |beau temps. II S. ©. 2%) x 6 |27. 6+|beau temps, gelée blanche. 12 | AUS: 6= 9+| 81/27. 4:|pluvieux. 13 ÎN.E. 4 | 10 | 4 |27. 7 |beau & venteux. 14 | N. E. s | 1 72:27. 6-+|couvert. 15 NE: sil 11 8 |27. S+|variable & couvert. 16 N. Dr 2 |28. »* |beau fixe. 17 N. is 3 Es: 7=|gelée à glace. 18 N. 21|. 6 1 |28. 6 couvert, aurore boréale le foir. 19 N. HMNPET 43128. 7 |couvert. 2OMINe EE. 1 9 3 |28. 7 |beau temps, gelée à glace. 21 ES 2| 10 s 28. 5 |beau temps, gelée blanche. 22 E 8 14 8 |28. 2+4'beau avec nuages. 23 S. 8 | 14 9 |28. »+|pluvieux. 24. St 7 9il 8 |26. 10 |pluvieux. 25 N. 6 9 6 |26. 32|pluvieux & variable. SGA IN: EE: $ 8 31/26. 721|grande pluie le matin. DA INCPE 4 6 21126. 61|couvert. 28 Ex 22|114 g |26. > |beau temps, gelée blanche. 29 Se 8 10 OS 6 NZ pluvieux. 30 SO: $ 10 6 |26. $ j|couvert. 31 S. ©. 8 10 8 |26. 4+ pluvieux. QE IE EL SN RARE NE NNENETRNE SEE : DES SCIENCES. st$ Ce mois a été variable & froid, le thermomètre a del- cendu jufqu'à un demi-degré au-deflous de zéro. On a entonné les vins, qui ont peu bouilli & qui ont jeté une écume pâle. Le commencement du mois a été favorable pour les {e- müilles, & la fin pour la levée des fromens: on a ceflé de voir les hirondelles dès le commencement du mois, 1e ter CE pe à Jodes THERMOMÈTRE. du | VENT. | a | Baromètre Mois. Matin | Midi. |: Soir. pi “He Degrés. | Dègrés: igns I S*0, 8 | 1141 181127. 6 2 S. ©. GAME ECO 42 II 5 8” || oh, 7227006 4 S° 71 = ae) SE 0 S Se 4%| 10 6U27-106 6 Se 5 II 7 |27: 47 7 S. 8 | 14 ONETUNE 8 Se 10 | 13 ÿ 0 ES CRE, 9 S. GARE 677 10 EF S 13 AND UZ II FE: SNL SM2T7- 10 EMI IN dE NIET 9 s 1272409 1h |: NF s 7elle308 7009 14 | N° E. o s 11127. 6 15 N. 2 3 32127. 2 16 S. 2 4 INIE7e 17 où o S 1 |27. 18 S: | ns) ES SN 19 EX — 2 3 OMIETTS 5 ONE ENIE 2 (RSS 9 5x 00 21 N. |—:1 2 1 |27. 62 22 N. 2 S I ë am) 23 NME I=x 4 |—: [27-10 240 NE. = 25 Mn Ê 9 25 ÉPUISÉ 2l—2 |27 7 26 | NE. |—31l 1 |—r5l27. 6 27 E —3 | 2 |27. 6 28 | N.E. |—2 I o |27. 6 29 FE? = AMOR DIET US | 30 | E. o | 3 | © 27. 52 en nn CC | 516 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE RoYyaLe N'OVIE MB RE. ÉT A TMD U 'CTEL. variable. variable. pluie. beau temps. beau temps. beau avec nuages. beau avec nuages. variable , éclairs & tonnerre au loin. ee temps. Q grand Pélard & variable, beau avec nuages. beau temps. pluie froide. 4 |beat temps. 6 |beau temps, gelée blanche. grand brouillard, beau temps. beau & couvert. brouillard & variable. grand brouillard. variable & couvert. beau temps. beau avec nuages. couvert. beau temps. couvert: ME SN SUCIMEIN CES: SIT Ce mois a été fort beau, fec & très-froid, le thermomètre ayant defcendu à 3 degrés & demi au-deflous de zéro; on a achevé de femer les blés tardifs, ceux qui étoient déjà femés, continuoient à bien lever. Les vignerons commençoïent à donner aux vignes Île Jabour qu'on nomme parer, mais les gelées les ont obligés de dif- continuer. ce travail. | Ttt üf 518 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE DÉCEMBRE. Le es À Tonrs THERMOMÈTRE. | du VENT. | Te | Baromètre EUXA AMDUAGTEN, Mois. | Matin | Midi. | Soir, FE Degrés.| Degrés.| Degrés.| pouc. lign. | MINE o sl 27 ue AN. ENTIER 2522 brouillard & couvert. EMIRNNES CRIS 1216400 4 S. 7 91] 7 |26. 7+|grande pluie & humidité. s e s 72) Rs ë 9 pluvieux & couvert. 6 N. s 7 1 |27. 3 |pluvieux. 7 N. oO 2 |— 12/27. 10 |beau temps, gelée blanche. 8 N, |—4 DE 128. o |beau temps. D IN ONE 2|— 11/27. 10 |beau temps. 10 | SO M7 2 4 |27. s |pluie froide & grand vent. 11 SO: 7 7:| s [27 6 [beau avec nuages. 12 SH 9 9 $s 127. az |pluie & vent. 13 0. S S {| 27. 61|beau avec nuages. NON. EE, fi 3 [—1 |[28. 9 |beau temps, gelée blanche. 15 S. [—:1 3 1]28. 1 |gelée blanche. 16 S. = 3 1%)27: 010 “ À %: : : on % beau temps. 19 S.E. o 62]" 2°127..,.6 20 S: 3 8 72127. 6 = E N 5 DE SSI CIE UN GES 525 RECHERCHES ANATOMIQUES SAUPR L'A LSUIRUCTURE ET) L'USAGE DD NET M UNS Pa M MoRrAND le fils. E Thymus ef cette partie qui fe préfente d'abord à Ia vue, lorfque l’on ouvre la poitrine d’un fœtus, & qui femble occuper une aflez grande partie de fa capacité. / Voyez Ja planche 1). Dans les veaux, & dans quelques autres animaux, elle s'étend quelquefois hors de cette cavité, fa partie fupérieure formant un appendice étroit qui pafle fous l'os de la fourchette, monte le long du cou, & fe termine dans le tiffu cellulaire; quelquefois elle fe prolonge jufqu’à la glande tyroïde, & même jufqu'aux glandes maxillaires ou aux parotides, auxquelles elle femble continue, Dans le fœtus humain , fon étendue, quoiqu'indéterminée: en général, fe borne pour l'ordinaire à la poitrine | dans laquelle on trouve le thymus immédiatement fous le fternum, entre les deux lames du médiaftin, appuyé fur lé tronc de Taorte & dela veine-cave fupérieure, de manière que dans un enfant nouveau né, cette partie remplit prefque toute la partie fupérieure du thorax (planche 1 ); on Va vu quel-- quefois s'étendre hors de cette cavité, jufqu'à los hyoïde, en fuivant les parties latérales de la trachée artère. On remarque que dans l'adulte & dans les vieillards, on en retrouve rarement des vefliges, ou que le peu qui enrefle, paroït d’une nature différente de ce qu'il étoit dans le foctus, - für-tout pendant les premiers mois; mais il n'eft pas exac- tement vrai, comme favancent la plupart des Anatomiftes ,. que le thymus s'oblitère fitôt que l'enfant ère ; au contraire, , Vuu fi, DEC 1759 526 MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE ROYALE dès ce moment cette partie augmente confidérablement de volume, & en acquiert fenfiblement davantage dans les pre- mers temps. Je penferois volontiers que cet accroifiement , dont tout le monde peut aifément fe convaincre, eft proportionné à l'ac- croiffement général du corps , que l'on fait étre alors aflez rapide, & en quelque forte furprenant, & que le thymus ceffe d'augmenter lorfque les organes de la digeftion , étant accou- tumés à leurs fonctions, les voies de la nutrition par ces or- ganes font établies, les parties ayant acquis le développement néceflaire pour que le corps puifle fe maintenir dans les dif- férens états par lefquels il doit pafier. Je donnerai une raifon de cette conjeQure, en expli- uant Je décroiffement du thymus ; au refle, en étendant fon ufage au-delà du terme de neuf mois, que l'enfant refte dans le ventre de fa mère, je ne prétens pas moins le regarder comme une partie propre du fœtus, ainfr qu'on le verra par da fuite. | | Quoiqu'au premier afpect le thymus ne paroïfe qu'une feule & même mafle, il n'y a perfonne qui n'ait remarqué qu'il eft formé de plufieurs lobes , dont il y en a toujours au moins deux qui font confidérables, & que l'on pourroit, par cette raifon, diftinguer en grand & en petit /a, b, planche I), ou par rapport à leur fituation , en droit & en gauche /D,a, planche 1), fans parler d’autres lobes /cce, planche 1 ) beau- coup moindres , qui les accompagnent toujours , dont le nombre, fa grandeur & la figure varient beaucoup ; ils font tous attachés les uns aux autres par une expanfion du médiaftin, qui s'infimue dans leurs divifions , & qui leur fert d'enveloppe commune. Sur la finface du thymus'on aperçoit quelques ramifications de vaifléaux fanguins, mais qui ne font pas fenfibles dans fa fubflance ; ils ne partent pas toujours des mêmes troncs ; tantôt l'artère thymique communique avec la mammaire interne, elle maît quelquefois de la partie antérieure moyenne du tronc commun de là fous-clavière & de ha carotide; le thymus reçoit, DE S'S'CTENCE S. 527 auffi des rameaux de la mammaire interne , de fa veine-cave, des jugulaires, & de l’'intercoftale fupérieure. Pour ce qui eft des nerfs, la paire vague & l’intercoflale lui fourniffent quelques filets, mais imperceptibles; Warthon les fait partir de la fixième paire & du plexus-fous-clavier *, L'ufage du thymus n'eft pas plus connu que fa flruéture : ce n'eft pas que beaucoup d’Anatomiltes éclairés n’en aient fait l’objet de leurs recherches ; mais chacun s'eft contenté d'avancer fes conjectures particulières , fans trop chercher à les établir. Le plus grand nombre des Phyfologiftes n’a pas fait difficulté de sgparder le thymus comme une glande, quoiqu’ils n’y aient point trouvé de canal excréteur ; Ruyfch * prétend en avoir trouvé un fur le thymus d'un bœuf. Muniks * eft le feu qui fañle mention de ce conduir, encore c’elt d’après Ruyfch: Verreheyen le nie formellement ; & l'obfervation rapportée par YAuteur d'un nouveau traité d'Adénologie, n'a pas encore pris faveur. ; Quelques-uns ne s'embarraffant pas de l'abfence d’un canal excréteur, croient pouvoir mettre le thymus au nombre des- glandes, d'après un fimple -examen de fa contexture qu'ils difent glinduleufe, & ils s'y croient fuffamment autorifés par l'exemple des mamelles des enfans nouveaux nés, defquelles on peut exprimer une férofité laiteufe, & qu'on croit étre un compolé de glandes, quoique l'infpection n'en faffe apercevoir aucune dans leur fubftance. Le fuffrage de deux célèbres Anatomiftes modernes, M. Winflow ? qui regarde le thymus comme un corps glanduleux, & M. Heïfter* qui dit pofitivement que le thymus eft une vraie glande conglomérée, feroit feul capable d'en impofer en faveur de ce fentiment, pour peu qu'il füt foutenu de preuves; cependant comme le refpect que méritent des noms aufii illuftres ne doit pas interdire tout examen, je ne craindrai * Cet Auteur entend vrai-fem- | forme d’anfe; & la huitième paire, blablement par le plexus fous-clavier, | autrefois appelée Ja fixièmne , explique le rameau du nerf intercoftal, qui | la différence apparente de la névro=- smbraflé l'artère fous-clavière en | logie du thymus.- * Fred À, Ads an, dica, III, JE. 7: ? Anar, M 3; C 1j: 3 Expofs artats #Cvmpend,-anats - r 528 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE point de propofer une idée différente, que je foumets d'ail- leurs, ainfi que la démontftration que j'en donnerai, au jugement de l'Académie, Sans m'arrèter à tous les différens fentimens qui ont partagé les Anatomiites {ur la ftruéture & fur les fonétions du thymus, fans faire mention de ceux qui aflignent à cette partie des ufages peu importans où qui s'éloignent de a vraifemblance, _ * Gafad comme de fervir de couverture & de défenfe au cœur ", de TE, " préparer & de former un fuc nourricier à lufage des nerfs? ; oh, ou de féparer l'humeur du péricarde? ; il fuffira d’expofer en a abrégé les opinions plaufibles qui fe rapprochent davantage de excre php anar. Celle que je vais propofer #e 4 Vorchyem, On pourroit en diftinguer deux effentielles, par rapport à Anar, fypl Yefpèce de fluide admis par les uns ou par les autres dans le thymus, & fur lequel les Auteurs ne s'étant pas accordés ; ont dû néceflarement fe partager aufli, quant à l'ufage de cette partie. 5 ang than Quélquesuns ? y admettent feulement une 1ymphe ou férofité anaton. lb 111, à Jiquelle le thymus fert d'entrepôt. ; EAP TE NVercelloni lui fait faire l'office d'une éponge qui pompe des carotides da frofité du fang, dont Fabondance dans les enfans pourroit gêner la dilaation des ventricules du cœur; il fait reprendre cette humeur par des canaux 1yÿmphatiques par- ticuliers, qui la portent dans la trachée artère & dans les poumons, € Morgagni ad, D'autres $, qui conviennent de Ja préfence d'une humeur Dre 13: chyleufe dans le thymus, le regardent comme un réfervoir c 7+ Hojlus, dans lequel le chyle féjourne quelque temps, pour y dévenir Harvæus Rs plus fluide par le mélange de la lymphe qui a été atténuée aat, 1 ad 0h Ve - ñ = +2 p.19, Scidr, & divifée dans cette partie: c'eft dans ce fens que Heifler 7 ar enr avance que le thymus, à l'inflar des glandes du méfentère, 7 Compare ana, Altre à 1ymphe :& la verfe par les vaiffeaux Iymphatiques fa 250. dans le canal thorachique, pour donner de là fluidité au fang & au chyle. Quelques-uns enfin regardent le thymus comme un entrepôt néceflaire au chyle qu'ils y font venir par le canalthorachique, afin Fa 19446 te iii OT « | DE :Sh1Q-Ch ls: EN CE: Sem à 529 afin qu'il ne furcharge point par fon abondance le fœtus encore foible *. Pour déterminer plus précifément lufage de cette partie, j'appuierai mes conjectures {ur quelques recherches particulières que jai faites {ur la flruéture du thymus, que je crois avoir un peu plus développée; enfuite je chercherai à déduire de mon fentiment de quoi expliquer plufieurs phénomènes qui concernent le fœtus, & pour lefquels on avoit été obligé de recourir à des chofes incertaines ou douteufes, où même fup- polces : il eft donc à propos de rappeler ici en peu de mots ce qui a été remarqué généralement par tous ceux qui ont travaillé à développer la flruéture du thymus. 1.” La différence que cette partie acquiert dans différens âges, fon oblitération même, dans les veaux & dans quelques autres animaux où néanmoins cette partie a un volume confidérable, 2. L'humeur laiteufe qu'on y trouve communément dans un fœtus nouveau né, laquelle eft fenfible dans les chiens & dans les chats, long-temps après que l'animal a commencé à refpirer, & dont la préfénce communique au thymus une couleur extrêmement blanche. 3." La quantité de vaiffeaux [ymphatiques qui arrofent cette partie, lefquels contre ce qui fe voit ordinairement dans es canaux de cette efpèce, font entièrement dépourvus de val- vules, à en juger par la facilité avec laquelle on fait paffer une liqueur dans la maffe du thymus, par le canal thorachique. 4 Enfin l'infertion de ces vaiffeaux dans le canal thora- chique ou dans la veine fous-clavière, démontrée par les in- jections anatomiques. | Il n'eft guère poffible d'aller plus loin fur la ftrudure par- ticulière du thymus; du refte, tous les Anatomiftes au milieu d'une incertitude aufli variée que générale, fe réuniflent à dire que fon ufage n'eft point connu ; en effet, c'eft lignorer en- tièrement que de n'avoir fur. ce point que les différentes opi- nions qu’il eft libre à tout le. monde; d'avancer, fans vouloir les garantir. Je penfe cependant que la ftruéture du thymus, telle.qu'on Mém. 1759. - Xxx * Wérchcyen, Guill. Cowyur. arat, corp, Punn tab, XXI, 530 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE la connoît, feroit fuffifante pour établir une idée raifonnable touchant la fonction de cette partie; mais comme après un certain temps elle commence ordinairement à décroître dans l'adulte, & qu'infenfiblement elle s’oblitère entièrement , il paroît démontré par cela feul que fon ufage concerne le fœtus; il faut donc chercher une explication qui ait rapport à la vie & à la confervation du fœtus. Pour entendre celle que je vais expofer, & que j'efpère prouver par PAnatomie, il eft néceffaire de faire attention à l'état & à la nature du fang dont le fœtus tire fa nourriture. Ce fluide lui vient du placenta, dont les racines pompent de la propre fubftance de la matrice où il eft implanté, une matière laiteufe qui s’y filtre; le fang ainfi chargé de ce fuc nourricier, pafle prefqu'immédiatement de la veine ombilicale au finus de la veine-porte, de-là par le canal veineux à la veine-cave, enfin au cœur: il n'a, dans ce trajet, été préfenté à aucun couloir, de-là il femble permis d’inférer qu'il n’eft point encore épuré & qu'il a befoin de quelqu'élaboration particulière, afin d'acquérir le caractère effentiel d’un fang bien conditionné, fonétion opérée dans l'adulte par les poumons; mais ces vifcères font fans action & n'ont aucun jeu dans le fœtus, où la fanguification paroît toute auffi néceffaire, les fibres tendres & déliées de fon petit corps exigeant pour fa confervation, que les parties qui compofent le fang dont il fe nourrit, foient atténuées & exaétement mélées pour pouvoir les pénétrer. , Les Anatomiftes ont fenti la néceffité de cette élaboration, ils ont cru pouvoir l'attribuer au placenta ; l'opinion commune fur l'ufage de cette mafle vafculeufe , eft qu'elle fert non- feulement à attacher le fœtus à la mère, mais encore à fuppléer à lation des poumons; mais eft-il bien prouvé que l'éla- boration du fang dans le placenta réunifle toutes les qualités requifes pour la nutrition des parties de toute une machine, qui ne font pas encore totalement développées? La divifion à Tinfini des rameaux de la veine & des artères ombilicales, eft-elle capable de fuppléer, par le broyement , aux défauts BE 8" S)C/T.E NT CES l'ss3 qui doivent fe trouver dans le fang du fœtus, à raifon de la lenteur du mouvement de ce fluide, à raifon de {a foibleffe de la diaftole & de la fyftole du cœur, &c? Je ne le crois , & les Anatomifles montrent aflez qu'ils en ont foupçonné J'infüfffance, en faifant concourir d’autres moyens à cette importante opération. Je me détermine donc à affigner au thymus l’ufage d'opérer directement la nutrition dans le fœtus: c'eft la vraie filière dans laquelle le fang artériel fe dépouille d’une partie de la matière laiteufe dont il eft chargé; de ce réfervoir, elle en- file les vaifléaux lymphatiques, qui l portent toute épurée dans le torrent de la circulation. Cette efpèce de chylification, qui femble bien avoir été entrevue par quelques Anciens, n'a été annoncée que comme une fimple conjecture ; elle n'a pas été plus foutenue de preuves que toutes les opinions contra- diétoires que j'ai remifes fous les yeux ; les réflexions fuivantes, jointes à l'examen que j'ai fait de la ftrudture du thymus, éclairciront l'idée que je préfente fur fa fonction ; elles mon- tréront que mon opinion en elle-même ne préfente rien de choquant , & que quelque détournée que puiffe d'abord paroître cette voie pour la nutrition du fœtus, il »y a aucune raifon de la rejeter abfolument. Quelques Auteurs penfent que dans les oifeaux le chyle paffe dans les veines méfaraïques ; au moins n'eft-il pas douteux qu'une portion du chyle pafle du méfentère dans les veines de cette partie, de-là dans le foie. Bilfius a démontré ce paf- fage, en liant l'artère méfaraïque dans un chien qui vient de prendre beaucoup d’alimens ; pour lors les veines méfa- raïques fe trouvent remplies d’une liqueur cendrée ; cette expérience a été détaillée par Gliflon , confirmée par Swam- merdam , & démontrée par quelques modernes : f Anatomie comparée prouve auffi que dans les ovipares, le fuc des alimens digérés , paffe de la cavité des inteftins dans les vaifleaux méfaraïques. L'abord de la matière faiteufe avec le fang dans le thymus n'eft pas plus abfurde ni plus difficile ; au contraire cette liqueur X xx ij Tratt, & fet. uatrit, Londini , anno 1717. 532 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE ramaffce dans les cellules qui compofent cette partie (pl. 17, fig. 2), eft plus direétement à portée d'être verfée dans le canal thorachique & dans la veine fous-clavière. Pourquoi exigeroit-on pour cela des tuyaux particuliers? Il paroit conflaté que le lait vient du fang immédiatement clans les mamelles, & jufqu’à préfent on n'a pas cru qu'il foit befoin de conduits laiteux , aperçus par un feul Anatomifte; les rameaux coœ- liaques dépofent dans le pancréas l'humeur pancréatique ; les parties d'urine font contenues dans le fang & ne fe montrent fous la forme qui leur appartient qu’au fortir des mamelons, dans les baflinets des reins. L'analogie autorife donc raifonnablement à penfer qu'une portion de la matière laiteufe, que le fang d’un enfant nouveau né charie en abondance, eft portée de la même façon par les artères, dans les cellules du thymus, & que les vaiffeaux lymphatiques de cette partie, ayant fourni de quoi donner au lait une modification qui lui eft néceflaire , font l'office de tuyaux excrétoires, & qu'ils portent l'humeur filtrée dans le canal thorachique ou dans la veine fous-clavière. Des vaifleaux lymphatiques, devenus pour un moment vaifieaux laétés, ou fervans de conduits à d’autres liqueurs, ne préfentent aucune difculté contre le mécanifme que j'établis ; les vaifleaux lactés font eux-mêmes lymphatiques, ainfi que le canal thorachique, & dans les cadavres des animaux morts d’épuifement, on ne les trouve remplis que d’une liqueur aqueule tranfparente. L'abfence de valvules dans les veines lymphatiques, qui font très-nombreules dans le thymus, concourt à établir cet abord d'un fluide qui y ef contenu , dans la mafle du fang , -& la nutrition par ce moyen eft plus fenfible, on pourroit dire plus démontrée que par des conduits imaginés par Bellingerus, qu'il prétend aller aux glandes maxillaires, aux amygdales & dans la bouche, mais que perfonne n'a vus. .Il eft aifé de voir maintenant par ce détail, que je veux envifager le thymus comme fuppléant aux poumons, lorf qu'ils font fans action , en tant qu'ils opèrent dans le fœtus la fanguification. DE SUSVGALUE IN GAY A - 523 - M. Baflius regarde, à la vérité, le thymus comme rem- pliffant les fonétions des poumons; mais cette idée eft énoncée vaguement & bien différemment de la manière dont je l'en- tends; c'eft, felon lui, en ce qu'il fouette, qu'il atténue le fang & lui donne de la fluidité*. Parmi les Anciens, Diemerbroeck pourroit être réputé celui dont je parois me rapprocher davantage , quoique ce qu'il avance ne foit pas plus développé que toutes les différentes idées des auteurs , auxquelles perfonne n'a cru devoir s’en tenir. Je crois avoir fait plus qu'aucun ‘de ceux qui ont dit ce qu'ils penfoient du thymus ; outre un mélange direét d’un fuc nour- ricier bien épuré avec le fang que je lui affigne, je fuis en état de démontrer f'analogie du thymus avec les poumons, par la ftruéture du thymus même, dans la plupart des animaux, Il eft facile de la connoîtré, en mettant tremper dans l’eau un thymus de fœtus humain ou d’un animal; en peu de temps il fe gonfle fenfiblement, de manière que fon volume augmente du double, & que la diftenfion qu'occafionne la préfence de l'eau , fait apercevoir alors bien diftinétement les cellules qui compofent la maffe de chaque lobe. (Voyez la planche 1, & fig. 1 de la planche 11). On peut saflurer de fexiftence de ces cellules par une expérience bien fimple, qui a échappé aux Anatomiftes, & qui fait connoître indubitablement la ftruture de cette partie; elle confifte à faire lune petite incifion à un des grands lobes d'un thymus; alors fi on vient à le fouffler, fur - tout après l'avoir laiflé quelque temps macérer dans l'eau, pour relâcher fon tiflu & lui permettre de céder facilement à Fair qu'on y introduit , il fe gonfle extraordinairement ; on réuflit même à gonfler de cette manière de très-petits lobes / planche 1 à 111, figure 1), & en y retenant l'air par une ligature, pour les faire fécher ; on voit par la diffeétion qu'ils font * Quamvis pulmones hancin alio- | tendanr , ideoque per indireéumn -nemnon directe confpirent cunthymi | lymphæ tenuitatem è7 fubriliratem, ufu, tamen in, eo congruunt quod &7 ;|. Henr. Baflius, obferv. anat. chirurg. thymus 7 puhno , aftenuationem | med. tcruoris vitalis, © fluxilitatem in! X xx ii Diemerbroeck , anat, corp, hum LIL, « 17, MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE compolés de cellules, {planche 117, fig. 2; à planche 17, fig. 2 & 3). C'eft auffi de cette façon , lorfqu'on à fait une incifion à un thymus de chat ou de chien, né depuis trois femaines ou un mois, & macéré pendant quelques heures dans l'eau, que l’on reconnoît évidemment la préfence d’une humeur laiteufe dans toutes les cellules qui en compofent la mafle ; cette liqueur détrempée , par le féjour que le thymus a fait dans l'eau, s'écoule en aflez grande abondance par une ouverture qu'on y fait, & on la prendroit pour une légère eau de favon. La couleur blanche du tiffu celluleux, qu'on découvre dans un thymus de veau ou de mouton, après l'avoir foufflé, paroît annoncer auffi que la liqueur qui y eft contenue eft véritablement laiteufe. Voilà ce qu'on obferve fur les thymus des jeunes chiens ou des jeunes chats ; mais ce n'eft pas précifément la même chofe dans ceux du fœtus humain , dans lefquels il eft aifé de remarquer plufieurs différences qu'il eft à propos de rapporter ici, pour faire une comparaifon entre les uns & les autres. 1. Il ne s'y trouve jamais une aflez grande quantité de liqueur, & pour l'ordinaire , elle n'eft pas d'une couleur aflez blanche pour donner aucune teinture fenfible, ce qui fait que ces parties, dans le fœtus humain, font d’une couleur de chair pâle, au lieu que dans les chiens & dans les chats, fur-tout ceux de ces animaux qui ont tété pendant quelque temps, ils font d'un blanc de lait, & on peut dire qu'ils en font remplis ; cela n'empêche cependant pas que la petite quantité d'humeur laiteufe , renfermée dans le thymus de fœtus humain, ne s'aperçoive; mais il faut un peu preffer fa fubftance, 2. La texture du thymus de fœtus humain eft auffi dif- férente de celle du thymus d'autres animaux , tels que ceux qui ont fervi à mes recherches ; on y remarque beaucoup moins de cellules { p£. 11, fig. 2; € pl. 111, fig. 1, 2 © 2); mais à la place on y trouve des vides où cavités confidé- rables ; cela fe rapporte avec lobfervation de Bartholin, .en remarquant cependant qu'elle n'a été relevée depuis par aucun DE si S°cUPE N'C'EUS 525 Anatomifle, foit qu'elle ait échappé à leurs recherches, foit … Anar. rfirm. qu'on l'ait regardée comme peu exaéte ou comme extraordi- RAC naire : au furplus, Bartholin fui-même ne tiroit aucun parti de fa propre obfervation, puifque fans avoir égard à cette cavité, il ne donnoit au thymus d'autre ufage que celui de fervir d'appui aux troncs afcendans de l'aorte & de la veine-cave, & à leurs rameaux, de les garantir du contact des os du fternum. Parmi les Modernes, l’Auteur du traité d’Adénologie, que j'ai cité plus haut, eft celui qui a le mieux entrevu la texture du thymus, en avançant qu'il paroïit quelquefois cellulaire & femblable au poumon; mais Obfervateur s'en eft tenu à ce qu'il lui a paru quelquefois, & dans tous les articles où if traite du thymus, il regarde cette partie comme une glande. Je n'examinerai point fi on doit la ranger dans cette clafle, cette difcuffion exigeant préliminairement que les Anatomiftes foient convenus que la dénomination de glande appartient à tout corps fpongieux ou véficulaire, ou formé d’entrelacemens de vaiffeaux fanguins & lymphatiques, ou qu’on doit nommer ainfr toute cavité d'où lon voit fortir quelque liqueur. Ce que j'ai détaillé précédemment, fournira des explications très-raifonnables de phénomènes phyfiologiques qui concernent le thymus; premièrement du décroifflement & de l'oblitération de cette partie dans l’âge adulte, L'augmentation de la mafle des liqueurs, & fur -tout du fang, que produit néceffairement dans un enfant à la mamelle Yabord d'un vrai chyle formé dans les organes deftinés à cette fonction, avoit dans les premiers temps occafionné une extenfion furprenante dans les fibres, dans les vaiffeaux- & dans les cellules du thymus, qui fe trouvoient (comme dans tout le corps de l'enfant) flexibles & imbues de fluides ex- trèmement ténus & fubtils; mais peu de temps après, ce même fang, compolé de parties plus groflières, plus nourrif- fantes & moins liquides, n'eft plus propre à pénétrer dans les tuyaux extrêmement déliés du thymus, ni à leur conferver cette flexibilité qu'ils avoient. Ces derniers, en conféquence, réfiftent à l'impulfion des fluides & au mouvement du cœur; Programme 2, 536 MÉMoIREs DE L'ACADÉMIE ROYALE non-feulement elles ne s'étendront plus, mais encore elles fe *durciront, comme il arrive à toutes les fibres du corps dans fa vieillefie : auflr dans les fujets où il réfte des traces de cette partie, elle eft dure & racornie. Dans ce même temps, le paflage du fang par les poumons, qui eft la voie la plus directe, étant abfolument libre par l'oblitération du trou ovale, le fang ne fe porte plus en auffi grande quantité dans la carotide , ni daris l'artère thymique ; la fubflance du thymus doit alors fe trouver dépourvue de cette même quantité de fucs qu'elle avoit coutume de recevoir. Le thymus doit donc s'affaifier, & cette raifon pourra fuffre toute feule; le jeu des poumons ne fera que fubfidiaire, quoiqu'il paroïfle concourir en quelque chofe à l'oblitération du thymus, en comprimant cette partie qui commence à devenir dure & compacte; ce qui en exprime le fang & le fait rentrer en partie dans la carotide, empêche qu'il n’en aborde de nouveau, d'où le thymus diminue infenfiblement, par la même raifon ué le trou ovale fe ferme, Cet ufage du thymus donne encore une raifon naturelle de ce que l’on obferve dans des petitsanimaux nouveaux nés, lefquels vivent quelquefois très-long-temps, quoiqu'on leur ait intercepté l'entrée de l'air dans les poumons par une forte com- preffion de la trachée artère. IL eft reconnu que la circulation du fang fe continue par 11 communication du trou ovale, qui n'efl pas alors entièrement ancantie; mais on conviendra aifé- ment, d'après ce que J'ai dit, que la chylification ou la nutrition fe foutiendra par le thymus, dans lequel }e fang fe portera, ce fluide étant obligé alors de forcer le diamètre des vaifleaux du thymus; on n'aura plus befoin du fentiment bizarre de Bohnius, qui penfe que le fœtus dans le ventre de la mère tire par fon mamelon une lymphe nourricière qui va fe dé- pofer dans l'amnios. Je me ferois bien gardé de préfenter à Académie une pure hypothele; ce n'eft qu'après avoir fait beaucoup de recherches {ur la ftrudure du thymus, & avoir même ajouté à ce qui en étoit connu, que je me fuis cru fondé à lui afligner un 1 ufage RE NN RL RRQ N NN NES AS K NS N N ù & À Ÿ Ÿ RAR NE N KS NR NS J'Ingram del er Seulp- NS ES SES NS NS Ÿ NS KES UNREE s 1 {oem dues ak rat, & ù "2 "ta + SOA A L Re a 9 1 Mer. de LAe.R. des Se. 1769. Pag 686: PL.28. Pla.Il. mir Z. Ingram del.el J'eulp , Dem. de UAe.R. dar Jz.176g. pag: 886: PL. 24. Pla.1r. JIngram del. ot deulp. ; DES ScrENCES. s37 nfage moins vague que tous ceux qui ont été préfumés par différens Auteurs jufqu'à préfent. EXPLICATION DES FIGURES PLANCHE I. Capacié de la poitrine d’un fœtus à terme, ouverte pour y voir Je thymus en place. Au moyen de ce que cette partie eft remplie d'air qu'on ya retenu par une ligature , fon volume eft plus marqué que dans l'état naturel, & elle paroît diftinétement renflée dans plufieurs endroits de fa mafe, PNA MNRCUHUE SAINT Figure 1. Thymus du fœtus repréfenté dans la planche I, détaché de fa poitrine. Fig. 2. Lobe d’un thymus de fœtus humain à terme, defféché après avoir été foufilé, & partagé en deux portions pour faire apercevoir les cellules qui le compofent. Fig. 3. Grand lobe d’un thymus d’un poulain mort-né, préparé comme celui du fœtus humain, Pb A NICE AIERTE Fig. 1. Lobe d'un thymus de “he de chat, renflé par Pair qu'on y a introduit, & qu’on y a retenu ouvert, après avoir été féché, Fig. 2. Lobe d’un thymus de fœtus de chien, foufflé, féché & féparé en deux parties. Fig. 3 Ÿ 4 Portions de ris de veau, ayant fubi les mêmes préparations, Mêm, 1759. Yyy 538 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE MÉMOIRE SIUTROL TA MINÉRALOGIE DE L'AUVERGNE. Par MA GUETTA R D! Le idées avantageufes que j'avois prifés de la Minéra- logie de l'Auvergne, en paflant par cette province, ne pouvoient qu'exciter de plus en plus ma curiofité & le defir d'augmenter mes connoiflances fur cette matière : une province qui, dans le fyflème que je me fuis fait fur l'arran- gement des foffiles dans la terre, eft toute entière ou prefque toute entière d’un terrain de la nature de ceux qui annoncent un pays fertile en mines, ne pouvoit que m'intéreffer beau- coup ; aufli ai-je depuis mon voyage cherché à acquérir de nouvelles lumières fur ce fujet. J'ai déjà tâché, par un Mémoire fur le tripoli de Menat, de mettre le Public en état de profiter des acquifitions que j'avois faites de nouveau , & que je devois à M. Grangier de Vedieres, Confeiller au Préfidial de Riom *; je vais aujourd’hui lui préfenter des recherches dûes à M. du Tour, Correfpondant de cette Académie, qui s'eft porté à remplir mes defirs avec ce zèle que lui donne l'amour de la * J'ai outre cela décrit la mon- tagne à plâtre de Montpenfier, dans un Mémoire fur les environs de Paris, & j'y ai comparé cette montagne avec les carrières qui fourniflent le plâtre à cette capitale: je dirai de plus ici, qu'on tire de la pierre à plâtre à un villige nommé Saint- Maurice, auprès de Vic-le-Comte, & peu éloigné d'Ifloire ; ce plâtre étant cuit, elt fort blanc & fort ef timé : on en trouve de tranfparens à Mirefleur & près d’Artonne. J'ai de plus pailé des pierres à meules de cette province, dans un Mémoire fur les pierres meulières de la Ferté- fous-Jouarre. Jai appris depuis qu’à Coudes & Montperoux, à deux lieues d'Ifloire, fur la grande route de ces deux dernières villes, il y a des carrières d'une pierre d’un gris- blanc très-pefante ; on les taille pour des portes , des fenêtres, des angles de maïlon ; mais leur grand ufage eft de fervir à faire des meules à moulins. Ces carrières font fur le bord de l’Allier; on en trouve aufi à la Peze, une demi-lieue au cou- chant de Saint-Gervais. \ D'E S (SCIENCES: S39 Phyfique, & ce goût pour tout ce qui la regarde , qui n'eft -puifé que dans la Nature même, lorfqu'on en eft affeété d’une façon auffi particulière qu'on peut dire que l'eft M. du Tour. J'aurois fouhaité qu'il eût rédigé lui-même fes obfervations ; le Public y auroit fans doute gagné à plufieurs égards ; mais M. du Tour mayant fait le plaifir de m'infhuire, veut que je publié moi-même fes remarques. Il s’en explique ainfi dans une des lettres qu'il nva fait l'honneur de m'écrire: « Les recherches fur les foffiles de nos cantons où je me fuis engagé, Monfieur, à votre infligation , ont été entreprifes unique- ment pour vous, & vous pouvez en faire l'ufige que vous jJugerez à propos ; le parti que vous me propolez de vous donner la peine de les raffeinbler dans un Mémoire eft fort de mon goût, &c. » | Je crois ne pouvoir en faire un meilleur emploi que de les mettre fous les yeux de l’Académie, & par elle fous ceux du Public; comme je ne peux trouver une occafion plus fayorable que celle-ci, où je puifie à plus jufte titre employer les obfervations que j'ai faites fur la même matière dans mon voyage d'Auvergne , je joindrai ces obférvations à celles de M. du Four. Je n’oublierai pas non plus de faire entrer dans cé même Mémoire celles que je dois à d’autres Obfervateurs *. Ce Mémoire renfermera ainfr plus de faits, & fera encore mieux connoître la Minéralogie de ? Auvergne qu'elle ne left, & il pourra engager quelqu'amateur en ce genre d'étude à per- feétionner ce travail. Les environs de Riom feront plus détaillés qu'aucun autre endroit ; ce motif m'engagera à commencer par décrire ce qui regarde ce canton, & je le ferai fuivant les vues que M. du Tour s'étoit propolé de fuivre dans fon travail. Voici ce plan tel qu'il me l'annonce dans une de fes {ettres. « J'ai cru, dit-il, que pour fournir fur notre Minéralogie des * M. de Montigny & feu M. le | Auvergne; M. Guithon, Curé de Comte de la Galiflonière, tous deux | Kontanes; le R. P. Alexis, Capucim Membres de cette Académie; M. | à Clermont. Ozy , Apothiçaire de Clermont en | Yyyj ÿ 540 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE connoïflances plus développées & mieux conflatées, il con- viendroit de renfermer dans fa Carte que je m'étois propofé de tracer fur ce fujet, une étendue de pays plus confidérable que je ne favois projeté d'abord; je voudrois qu'en latitude elle allât depuis Harment jufqu'à Évaux, & en longitude depuis Sermur jufqu'à une lieue à lorient de Thiers ; ce qui féroit une longueur de vingt à vingt-deux lieues, fur une hauteur de douze à quatorze ». Conféquemment à ce plan, continue M. du Tour, les pierres apportées de différens endroits circonvoifins de Riom, indiquent que le terrain de la Limagne ne contient que des pierres calcaires, tandis que ceux qui la bornent à lorient & à l'occident, n'en ont que de vitrifiables où qui ne fe calcinent pas, c'eft-à-dire, des quartz, des granits, &c. & que dans ces dernières, il y a des bandes d’une étendue confidérable, affectées prefque généralement à une efpèce particulière, en- trautres une bande qui donne par-tout des pierres talqueufes qu'on ne trouve point ailleurs. Il y en a une autre dans le canton de Salvert; elle eft de uartz blanc & d’une étendue en longueur au moins de deux mille toifes: fa direction eft à peu-près du nord-nord-oueft au fud-fud-eft, elle fe prolonge beaucoup du côté du fud-fud- efl; elle s'étend au moins du côté de Roche-d’Agout jufqu'à une petite butte qui eft auprès de la paroifle de Biolet: à cette butte on trouve une peloufe prefque continue, & la route eft comme tracée par une fuite de petits rochers du quartz en queftion; étendue qui jointe aux deux mille toifes, en donne plus de dix mille, peut-être aufii va-t-elle du côté oppolé & dans la même direction jufqu'à l'Efpau , ce qui ajouteroit à la première étendue environ huit mille toifes. On pourroit en quelque forte divifer cette chaîne en trois portions plus remarquables; l'une {eroit à la butte du bois de Roche, l'autre fur une côte qui eft au nord de l'églife de Chiteau-fur-Cher, & la troifième qui eft la plus étendue des trois, dans le bois de Roche-d'Agout. La première portion forme une butte qui peut avoir deux cents toifes de long fur un D ESS CIRE NC ENS S4r trente de large & quinze de hauteur; elle eft formée par de grandes mafles de rochers qui font difpofés les uns au-deflus dés autres, comme fi on les avoit entaflés à defféin; fi ce n'étoit le poids énorme de ces maffes, on pourroit croire que ce feroit un ouvrage fait de la main des hommes. Les rochers de la feconde portion font très-efcarpés & placés fur une côte fituée dans un endroit où la rivière de Cher coupe la chaîne. La troifième portion qui eft à une lieue & demie du bois de Roche, forme dans celui de Roche-d’Agout une butte qui eft à peu-près d'une demi-lieue de longueur, fans avoir une lar- geur bien confidérable. Tous les rochers qui font à droite ou à gauche de la chaîne, font des granits, & on ne trouve que de ces pierres dans une étendue de plus de huit lieues, depuis Chätelguion jufqu'à Salvert, excepté dans un canton voifin d'un puy appelé le Puy-de-Thufer, far lequel on ramañle des pierres ponces. Les environs font couverts d’une pierre dont la couleur eft noire & femblable à celle qu'on trouve autour des carrières de Volvic: en divers endroits elle eft par tas qui reflemblent à des ruines; auffi l'afpeét de ce canton eft-if affreux, Ces généralités font confirmées par toutes les obfer- vations que j'ai reçues de différentes perfonnes qui les ont faites à ma demande, ou qui s’en étoient amulées d'’elles- mêmes, & par celles que j'ai pu recueillir moi-même dans mon voyage d'Auvergne: elles concourent toutes à confirmer cette idée; il ne s'agit que de les rapporter, pour en donner une forte preuve. Voici d'abord celle que je dois à M. du Tour. On trouve un banc de fpath flrié *, ou filamenteux & blanc, dans une gorge formée par des monticules qu'on peut regarder comme les premiers deorés de la chaîne de montagnes qui bordent (e) la Limagne & Auvergne du côté du couchant: cette gorge ef * J'en dois un à M. de Mon- | foyeux, forment des pinceaux dont tigny, de cette Académie ; il l’avoit | les fibres partent d’un même centre, pris fur la montagne de Gergovie, | & vont fe réunir par leur fommet peu éloignée de Clermont. Ce fpath | avec ceux d’un autre pinceau, & eft fingulier en ce qu’il eft fibreux, | font des angles aigus. . & que ces fibres qui font d’un blanc d Ney pri 542 MÉMmoiREs DE L'ACADÉMIE RoYALE précifément au-deffous de Châtelguion, village connu par fes eaux minérales, & qui eft environ à une lieue au nord du bourg de Volvic : ce banc occupe principalement un chemin creux, dont la direction eft du fud-eft au nord-ouefl, & en ce fens il a environ cent pas de longueur; ils font croifés Fun & l'autre par un ruifleau qui coule de loueft-nord-oueft vers l'efi-fud-eft. On à toujours employé ici cette pierre flriée à faire de la chaux , deflinée fur-tout à blanchir les murailles; & le blanc en eft admirable: elle fert moins que la chaux ordinaire, & elle eft plus coûteufe, attendu qu'il faut plus de temps & de charbon pour la eEnere ; ce qui eft caufe qu'on en fait peu d'ufage : aufi na-t-on creufé nulle part pour en avoir. On fe contente de ramafler les morceaux qui fe détachent , foit du fol du chemin , {oit des rochers qui le bordent ; on voit par les rochers , que ce fpath y eft difpofé par couches mélées parmi d'autres d'une efpèce de pierre graveleufe & grisätre. Dans l'un des rochers qui a quatorze à quinze pieds d'é- Jévation au-defus du terrain, les couches de ce fpath ont deux ou trois pouces & plus d'épaiffeur érelles de la pierre grifatre en ont huit, & même douze, II n'y a que la partie inférieure de ce rocher qui foit difribuée par couches fur une hauteur de fept à huit pieds, La partie fupérieure eft compofce de pierres & de cailloux arrondis, dont plufieurs font de la groffeur de la tête ; ils font liés par une matière pierreufe dure, blanchâtre & parfemée de petits graviers de toutes fortes de couleurs : cela la fait reffembler à du mortier, de forte qu'on prendroit aifément cette mafle pour un pan de muraille. Dans la réalité, elle n'eft qu'un bloc de poudingues. La face de ce rocher qui eft découverte, eft coupée pref- qu'à plomb, & tournée à peu près vers le nord. Les couches qu'on y diftingue , ne font pas tout-à- -fait horizontales : mais elles s'inclinent un peu, & s'abaiflent de l'eft à l'oueft. Les couches d’un autre rocher moins élevé & placé vis-à-vis le premier, dont il eft féparé par le ruifleau, font beaucoup plus inclinées & dans un fens contraire; elles vont en s'abaiflant de l'oueft vers 'eft, B'E SPSLCUNEIN eiEls 543 Le lit du ruifleau & fes bords font formés par un banc de granit rougeâtre très-dur, ferré, pointillé de gris & parfèmé d'un peu de paillettes talqueufes, argentées & brillantes ; il diffère auffi par le grain de la pierre grifâtre qui forme celui qui s'étend le long du chemin creux ; on y trouve, de même que dans celle-ci, des veines de fpath, avec cette différence, qu'elles y font moins épaifles & moins communes. On en remarque de diflance à autre, fur une longueur d'environ deux cents pas, en tirant du côté de la fource, à compter du point où le ruiffeau & le chemin creux fe croïfent. À ce point de rencontre, ce fpath eft abondant; mais à mefure qu'on sen éloigne davantage, en remontant le ruiffeau , les veines de ce fpath deviennent de plus en plus rares. Ces veines ou couches n'ont aucune direction conftante » on en voit qui s'inclinent naturellement lune vers autre, & qui venant à fe joindre, n'en forment qu'une même. II en a de verticales; on remarque dans un endroit du lit du ruifleau une bande de cette pierre rougeâtre qui le traverfe obliquement, & qui a fes différentes couches difpofées de façon que les plans qui les féparent font perpendiculaires à Vhorizon : cette bande nef pas plus élevée que le refte du lit du ruiffeau. Le fpath pris dans le ruifleau, paroït plus dur que celui qui eft tiré du banc du chemin_creux ; il a même une efpèce de tranfparence. On prétend dans le pays, qu'on ne trouve point de cette pierre flriée dans aucun endroit des environs de celui qu'on vient de décrire. Les rochers ne font pas rares dans ce canton: les fommets & les pentes des monticules qui s'élèvent tout autour en font hériffés à trois quarts de lieue de-là du côté du levant; & dans la plaine qui eft dans le voifinage de Davayat , eft placé un canton aflez étendu , dont le fond eft d’une pierre à chaux excellente pour bâtir : ceft dans une partie de ce dernier canton qu’on trouve des pierres plates calcaires, fur la furface defquelles font difperfées des taches circulaires, dont la cir- conférence eft noire, & qui ont dans leur centre un point de cette couleur, ce qui les fait refflembler à une fection- d'entroques. 544 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Les taches circulaires pénètrent la pierre; le centre ef un petit trou qui eft quelquefois rempli de petits criflaux de fpath ; la figure des taches eft communément ronde; il y en a d'irrégulièrement circulaires ; Faire de ces taches eft de a couleur & de la fubftance de la pierre : on voit dans le Cabinet de S. A. S. M. le duc d'Orléans, une ardoife qui renferme de la mine de cuivre, & qui a des taches vertes régulièrement circulaires; mais l'aire de la tache n'efl pas formée par le fond de la pierre qui eft grifatre. On trouve encore dans les environs de Davayat quelques cailloux , parmi lefquels il y en a de tranfparens, & deux autres efpèces de pierres, dont lune eft du genre des pierres à chaux, & fautre d'un grain graveleux lié par de l'argile, Les carrières dont elles proviennent font dans le voifinage ; celles des pierres à chaux paroiflent être compolées de a manière fuivante, f1 on peut du moins juger de toutes par la defcription d’une. Après la terre végétale, on en trouve une autre mêlée de débris pierreux, au-deffous de laquelle eft placée ” une marne sèche, blanchâtre & friable ; elle précède une marne plus dure & plus compacte, de couleur brune. Le banc qui la fuit eft d'une pierre blanche feuillette, que les carriers appellent du Gorgue ; après ce banc, on rencontre une pierre qui viendra pierre à chaux, ainfi que s'expriment les chau- fourniers, qui veulent dire que ce même lit doit donner plus loin de la pierre à chaux. Enfuite de ce banc, on trouve une marne d'un brun clair & aflez compacte; elle porte fur une autre marne qui eft d'un brun jaunätre & plus friable que la précédente : enluite reparoît la pierre blanche feuilleice ; elle s’exfolie à l'air; les environs des fouilles où on la jette en deviennent beaucoup moins fertiles. On pourroit la regarder comme du tuf, quoiqu'elle ne foit pas trouée ; caractère que certains Naturaliftes demandent pour qu'une pierre puifle être placée avec les tufs, mais qui ne paroît pas effentiel à cette forte de pierre : celle qui eft feuilletée porte fur un banc de pierre à chaux, qui eft porté lui-même par un de marne blanche & friable ; celle-ci fait le fol de la fouille, qui DES SCIENCES. 545 qui peut avoir feize à dix-huit pieds de profondeur. Toutes ces marnes, aufli-bien que Ia pierre feuilletée & la pierre défignée fous le nom qui deviendra pierre à chaux, font efférvefcence dans l'eau-forte. De plus, toutes ces mêmes matières s'exfolient ou fe réduifent en pouflière dans l'eau commune; la marne sèche, blanchâtre & friable, la pierre qui devient pierre à chaux, & fur-tout celle qui eft feuilletée, y excitent un fiflement ; la marne d'un brun jaunâtre eft propre à engraifler les terres. M. du Tour ayant fait creufer un canal, on en trouva dans cette fouille jufqu'au fond; on la répandit dans un champ voifin. Depuis ce temps, on diflingue aifément les endroits où elle a été répandue, aux marques de fertilité qu'ils donnent ; on remarque que plus le terrain eft élevé, & plus il faut creufer profondément pour parvenir au lit de pierre à chaux. Il s'en rencontre quelquefois plufieurs bancs dans la même fouille; ces bancs font comme ifolés & fort peu étendus. On n'abandonne guère une fouille , qu'on ne les ait épuifés; mais ces différens bancs fembleroïent en quelque façon fe communiquer & faire un même lit avec celui de la pierre que les ouvriers difent devenir pierre à chaux. Entre Gimeaux & Beauregard-Vandon, il y a une grande étendue de terrain qui eft parfemée de rochers à fleur de terre, & qui font de la nature des pierres à chaux : cette pierre fe diffout promptement & avec force dans les acides; l'action de ces liqueurs neft pas auffi vive fur une qui fe tire d'un banc qui eft à deux pieds de profondeur, entre Davayat & Saint-Bonnet. Les fuivantes fe diflolvent plus ou moins promptement aux acides ; l’une elt de Machal, fitué fur le bord oriental de l'Allier, entre Pont-du-château & Dallet: une autre vient du rocher qui eft fur fe bord occidental de cette même rivière & vis-à-vis de Dallet. Une troifième fe tire des carrières qui font entre les Martres - d’Artières & Pont-du- château ; celle-ci semploie dans les bâtimens au lieu de imoellons. Celle de Machal ef tendre, fine, blanc-bleuâtre & pleine; Mém, 1759: Zzz 546 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE celle du rocher qui eft vis-à-vis de Dallet, eft gris-de-fer, fine, dure & également pleine; pour celle des Martres-d’Artières elle diffère de la précédente en ce qu'elle eft grainue. Une autre qui fe diflingue de celle-ci par une très-grande quantité de paillettes talqueufes, fe tire d'une carrière fort étendue, fituée entre Ravel & Lezoux , appelée carrière de Salmerange. E petite ville de Lezoux en eft entièrement bâtie ; cette pierre fe diflout à l'eau-forte, à l'exception des paillettes talqueules. Je n'ai jamais vu de pierres calcaires qui en continffent une auffi grande quantité. Les carrières de Chatufat en fourniffent encore une qui eft auffi brillante; mais ce bril'ant eft dû à des parties écailleufes de fpath : ces paillettes difparoiffent dans l'eau-forte, & ne fe dépofent pas. La pierre eft gris-jaunâtre & grainue; elle eft très-propre étant taillée : on en fait de beaux pavés pour les falons à manger, des chambranles de cheminées, des tours de fenêtres, & autres ouvrages de cette nature; elle J'empoïte fur la pierre de Volvic pour le coup-d'œil, mais non en folidité. Une autre qui eft de Montaclier , dans la paroiffe de Gimeaux, convient avec celle de Chatufat, en ce qu'elle a des écailles fpatheufes ; mais elle eft grife, rouille- de-fer, & paroit plus dure que la précédente. On en trouve une à Diu, paroifle de Celule, qui eft dure, unie, aflez fine, & fans corps étranger, & d'un gris terreux ; celle-ci a de fingulier qu'elle fe difiout lentement à l’eau-forte, & qu'elle le fait par jets. Enfin on fait de la chaux à Chauriat, Mezet, Vañfel, Bouzet, Marcillac, Cournon, Beauregard & Bullion; les pierres qu'on y emploie fe tirent de fes environs. On en fait encore à la Sauvetat * qui eft à moitié chemin de Clermont à loire & Billom , diftant de quatre lieues de Clermont : la pierre dont on fe fert à cet ufage dans tous ces endroits, ft prefque femblable, c'eft-à-dire que c'eft une pierre plus ou moins tendre qui fe lève par tables, & qu'on cafe aifément à coups de marteau en morceaux propres à mettre dans le four; la chaux de Mezet eft la plus blanche & celle qui abonde davantage au mortier, auffi la vend-on * Suivant une lettre du P. Alexis, Capucin à Clermont. DEN SUISRENMVE NN C'ENSN 1 547 uelque chofe de plus que les autres ; la pierre de la Sauvetat eft parfemée de quelques veines de pierres qui tiennent de {a pierre à fufil. Les environs de Petit-plauzat, d’Anterat, bourgs voifins de la Sauvetat, fourniflent une femblable pierre ; il ne faut que creufer un demi-pied pour.la trouver; on l'exploite en tables plus où moins confidérables, fuivant l'ufage qu'on en veut faire ; elle eft plate : quoique tendre, au fortir de fa carrière, elle fe durcit à l'air & fait des bâtimens qui durent long - temps ; Bar près Brioude , donne encore de la pierre propre à être calcinée, Les rochers de cette pierre ne fortent point hors de terre *, il faut creufer à la profondeur d'environ deux pieds pour la découvrir ; les fofles dont on la tire ne fe creufent ordinai- rement que jufqu'à la profondeur de fept à huit pieds; les fourneaux dans lefquels on la fait cuire, font en forme de prifme , dont chaque côté peut avoir fix pieds de largeur & autant de hauteur ; ils font chacun percés d’une ouverture par le bas: le fourneau eft découvert par le haut; quand on veut faire cuire la pierre, on met une bonne couche de charbon de terre dans le fond du fourneau; fur ce charbon qu'on allume, on jette les morceaux de pierre, & on en remplit le fourneau jufqu'au haut ; à mefure que ces pierres fe cuifent, on les retire, par les ouvertures qui font fur les côtés, avec une ufne de fer recourbée & attachée au bout d’une perche ; on remet, par l'ouverture d’en haut, de nouvelles pierres & du charbon, de façon qu'un fourneau demeure fans cefle allumé un ou deux ans, fuivant la quantité de chaux qu'on veut faire; les premières piérres qu'on met fur le charbon ne font pas plus de cinq à fix heures à cuire ; les pierres à chaux, dont il a été parlé plus haut, ne font pas à beaucoup près auffi dures que celles dont on fait la chaux de Bar; leur chaux eft par conféquent inférieure à celle-ci. La pierre de Bar reffemble beaucoup aux pierres des environs de Paris; elle n’en diffère que parce qu'elle eft * Selon M. Guithon, Curé de Fontanes. Zzzij 548 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE beaucoup plus dure; elle a beaucoup de rapport, par cette dernière propriété, au marbre de l’Auriac, paroiffe de Beau- mont ; elle a feulement un peu moins de dureté: le marbre de lAuriac forme de grands rochers, auffi-bien qu'un, qu'on trouve à Vernafal, paroiïfle de Bourlonde , dont Bar dépend aufli ; ces marbres font moins des marbres qu'une pierre à chaux commune, On les a employés à faire de la chaux; mais comme ils donnoient beaucoup de peine à rompre, & qu'il falloit beaucoup de bois pour les calciner, on leur a préféré la pierre de Bar. Il faut cependant avouer que le marbre de Vernafl eft un peu plus beau que celui de l'Auriac: il s'en trouve quel- ques morceaux qui ont des veines rouges, mais il eft difficile de rencontrer de ces morceaux ; & ce ne feroit qu'en rom- pant de fort gros rochers, dont on détache les pierres, ou en faifant jouer la mine, ou fimplement en fe fervant de gros. marteaux de fer & du cifeau, qu'on pourroit s'en procurér ; manœuvres qui deviendroient coûteufes: il y en a aufli qui paroît à fleur de terre, & qu'on ne tire qu'en là creufant. La différence en dureté qui eft entre la pierre de Bar & ces marbres, ne vient, à ce qu'il paroit, que de ce que ceux- ci font ordinairement hors de la terre, au lieu que fa pierre à chaux de Bar fe tire, comme on l'a dit, du fein de la terre. Au refte, à parler exactement, ces différentes pierres font de la même forte; il y a d'autant plus lieu de le penfer, que Bar n'eft éloigné que de deux cents pas de l'Auriac. Lau- dine, paroiffe de Saint-Juft, fournit aufli une pierre femblable à celle de Bar. ; On en trouve une à la Chomette qui ne diffère pas beaucoup. d’une terre durcie au foleil, elle n'a guère plus de folidité; on: s’en fert néanmoins à faire des fenêtres, des portes de maifons & même des autels dans les églifes; elle fe c;%e &c fe taille facilement : cette pierre approche infiniment d’un tuf qui eft formé par de la terre détrempée dans l’eau d’un petit ruifleau qui coule fur le chemin de la Voute à Pouliaguet: on fève. ce tuf par tables, & on en rencontre dans les terres de cet A x / ME SISCrEN CES s49 endroit, que l'eau a fait ébouler; elles y font pofées les unes fur les autres. Pour parler des pierres qui font beaucoup plus près de Clermont, je dirai qu'on trouve encore de la pierre à chaux fur un côteau du vignoble nommé Chanturgue, à Mer- zeix, village qui eft au-delà de la rivière d’Allier, à trois lieues de Clermont, & dans plufieurs autres qui font défignés dans la carte qui eft jointe à ce Mémoire, & auprès du nom defquels on a placé la marque des pierres calcaires. Dans le nombre des pierres dont j'ai donné fa defcription, il n’y en a point qui maient fait voir de coquilles fofliles, fi l'on excepte peut-être celles de Davayat; qui ont des taches rondes qui pourroient être dües à des portions d’entroques ou de bélemnites. I doit paroître aflez fingulier qu'un auffi grand canton de pays n'en renferme point de vefliges : il eft étonnant qu'il ne sen foit pas confervé au moins quelques- unes dans les pierres; ce n’eft pas cependant qu'on n'ait pas trouvé de coquilles foffiles dans l Auvergne. Je fais par un Mémoire dû à M. Ozy, Apothicaire de Clermont, qu'on en a découvert dans quelques endroits, mais ces endroits font fort rares; il faut même qu'ils le foient beaucoup, puifqu'une perfonne de celles avec qui je fuis en correfpondance, m'a mandé que toutes les perquifitions qu’on a faites en Auvergne pour découvrir de ces fortes de fofliles, avoient été inutiles. M. du Tour m'a afluré qu'il n’en avoit jamais trouvé. Il eft rapporté dans le Mémoire de M. Ozy, qu'on en a remarqué fur la partie méridionale du Puits-de-Mur; elles font attachées à de grandes tables de pierre; il y eft encore dit qu'on a trouvé des huïtres dans la partie feptentrionale de Clermont en creufant à la profondeur d'environ trente pieds; elles forment un banc d'à peu-près trois à quatre pieds d’épaiffeur. Si les bois pétrifiés font des corps qui ont crû dans la mer, ou qui ont végété fur fes bords, on peut encore les mettre au nombre des fofliles qui ont été laiffés, par cet élément lorfqu'il a abandonné les terres. On connoît en Auvergne quelques endroits qui en renferment ; on en a rencontré quel- ques morceaux dans le territoire de Clermont, fur le chemin Zzz üf ÿ5o Mémoires DE L'ACADÉMIE RoYaLe qui conduit aux vignes de Chanturgue, ou en allant au ter- ritoire nommé XÆs Côres, près de Clermont, fur la côte de Mirabel près de Riom. Un morceau qui m'a été envoyé par M. du Tour, eft moins curieux par lui-même, que par une obfervation intéreffante qu'il a procurée à M. du Tour, & qui mérite d'être rapportée ici. Ce morceau qui étoit couvert de pouffière, fut mis par M. du Tour, dans de l'eau pour être nettoyé; il y fut lité” quelques heures; au bout de ce temps, l’eau avoit pris une teinte telle que la pouffière n'auroit pu la lui donner: en effet, ce morceau ayant été bien efluyé, il fut remis dans de nou- velle eau, il lui communiqua encore la même teinte. Après cette efpèce de leflive, ce bois fembloit être moins dur, & frappé par Facier, donner moins d'étincelles qu'il n'en donnoit auparavant. Si l'on ne plonge ce morceau qu'à moitié dans Veau, elle s'y élève au-defius de fon niveau, comme elle le feroit dans un tube capillaire ou dans une bande de drap qui y trempéroit par un bout. Il réfulte de cette expérience, que les fibres de ce bois pétrifié, qui fmblent collées les unes contre les’autres, & ne former qu'une mafle continue & fans interflices, font cepen- dant féparées les unes des autres par des intervalles qui permettent à l'eau de s'y infinuer; autrement elle ne devroit pas monter {ur une furface unie, elle ne s’éleveroit pas fur celle d'un caillou ordinaire, La hauteur à laquelle elle a monté dans moins d'un demi-quurt d'heure, étoit de. plus d'un pouce: elle auroit fans doute monté plus haut, mais le morceau en fut retiré, de peur qu'il ne saltérât à certains égards, & qu'il n'en devint, par exemple, moins propre à donner des étincelles. 1 On pourroit encore, ce femble, conclure de l'expérience dont il s'agit, que le bois pétrifié feroit fujet à fe décompoler, à perdre les parties foit ligneufes, foit pierreufès, qui entrent dans À compofition. L'eau feroit-elle capable de f'aléer ainfi? pourroit-elle le remettre dans fon premier état, ou bien lui enlever ce qui lui refle de ligneux , & le rendre pure pierre? Ces queftions que M. du Tour me faifoit à Ja fuite du DRE SAMSIIGRR ELN GES: SE détail de l'expérience, méritent beaucoup d'attention: variées comme elles le peuvent être, elles ne doivent que jeter beau- coup de jour fur la compofition des bois pétrifiés. Je n'ai répété qu'une fois l'expérience de M. du Tour, & fur une portion du bois pétriñé qui lui avoit fervi; le réfultat a été le mème, l'eau seit colorée en citron chir, & cette eau mélée avec des acides minéraux ou avec 1 diffolution de mercure, n'a donné aucune marque d'effervefcence ni de précipité; mais Je reviens à ce qui regarde les pierres à chaux que renferme l'Auvergne. Si ces pierres font, comme on le penfe ‘communément, formées par des coquilles détruites & en quelque forte fondues, la mer a dû en dépofer abondamment dans la portion du terrain qui eft rempli de ces fortes de pierres; mais il eft aflez fingulier que ces coquilles aient été tellement déna- turées qu'on en rencontre maintenant f1 rarement dans un efpace de terrain fi confidérable : cet efpace l'eft beaucoup , puifqu'il paroïit, fuivant les obfervations de M. du Tour, comprendre toute la Limagne; les remarques de M. du Tour & celles que Jai rapportées, d’après d’autres Obfervateurs, concourent à Je prouver ; celles que j'ai eu occafion de faire en traverfant ce pays, viennent auffi très-bien à l'appui de cette vérité, Depuis Vichy jufqu'à Gannat en Bourbonnois , je n'ai vu que de a pierre blanche calcaire & beaucoup de cailloux roulés, même fur le haut des montagnes de Gannat à Chatufat, & de cet endroit à Aigueperfe , je n'ai encore obfervé que des pierres blanches propres à faire de la chaux; il eft vrai que depuis Aigueperfe jufqu'à Riom, on pale dans un terrain noir de très-bon rapport , & qui eft fablonneux mélé de petits graviers blancs noirâtres ; mais les bords des foflés font voir de mau- _vaife marne, & ce terrain m'a paru fe continuer jufqu’à Cler- mont ; de cetté ville jufqu'à Thiers, on retrouve 11 pierre blanche à Pont-du-éhâteau , à Vezou, & prefque jufqu'au bas de la montagne de Thiers. Tout concourt donc à conf. tater Fobfervation de M. duTow, obfervation qui ne peut \ $52 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE que donner un grand jour fur la Minéralogie de l'Auvergne, & avancer beaucoup Îe plan général qu'on en peut donner. Suivant cette idée, tout le refte du terrain de cette province ne fera plus rempli que de pierres vitrifiables ou réfraaires ; c'eft-à-dire, de granits, de fchites, de quartz , de pierres talqueules, de pierres de volcans, de bitumes, &c. Les endroits qui donnent des bitumes, femblent cependant ‘ demander une efpèce de reftriction ; les pierres qui compofent les monticules d'où ils fortent, paroïffent tenir de une & de l'autre efpèce de pierres ; on y en trouve qui font entièrement calcaires & qui fe diflolvent en total dans l'eau-forte ; mais d'autres n'en font que très-peu attaquées : cette fingularité demande que j'entre dans un détail à ce fujet avant de rap- porter ce que j'ai à dire fur l'autre partie de l'Auvergne. Les monticules de cette province les plus connus pour donner du bitume, font ceux de Crouelle & du Puy-de-Pege ; celui-ci eft féparé en deux têtes, dont la plus haute peut avoir douze à quinze pieds, & l'autre un peu moins; le plus petit fournit plus de bitume que l’autre; deux ou trois endroits le donnent liquide; ce monticule regarde le nord , il eft compolé d'une pierre plus ou moins tendre, bleuâtre, parfemée de taches noires, qui font de bitume; le tour de ces taches eft blanc ou jauntre ; quelques-unes de ces pierres font noirâtres fans taches; d'autres ne font qu'en partie tavelées & en partie noirâtres : il y a des morceaux d'un brun roufsätre avec des taches circulaires gris-de-fer foncé; des morceaux font incfuftés de bitume dur & brillant; d'autres le font d’une matière jau- nâtre, fpatheufe & prefque criftallifée; plufieurs font parfemés de points pyriteux d'un jaune particulier aux pyrites. A côté de ce monticule, il y a une petite élévation d'environ trois pieds de hauteur fur quinze de diamètres if paroit, feion M. Ozy, que cette élévation n'eft formée que du bitume qui fe defsèche à mefure qu'il fort de la terre; la fource eft au milieu de cette élévation ; fi l'on creufe en différens endroits autour & en deflus de cette mafle de bitume autant qu'il eft poffible, on ne trouve aucune apparence de rocher. Parmi D'E;S/S CN E.N CE:S 553 Parmi les pierres du premier, il y en a qui renferment des efpèces de rognons ou de boules de pierres d'un brun-noirâtre & qui ne font pas tavelées; les murs de clôture d’une ferme peu éloignée du monticule, appartenante à l'Hôtel-Dieu de Clermont, font faits de boules femblables ; on les a, felon toutes les apparences, tirées du Puy-de-Pège ; on ne trouve du moins aucune carrière dans tout ce canton; la fuperficie du rocher qui forme le monticule, eft femblable & tombe par écailles comme ces boules ; fi on laifle à l'air les pierres qu'on détache de ce rocher, elles s’écaillent au bout d'un certain temps, pour peu qu'on les gratte, Le Puy-de-Crouelle qui n'eft pas beaucoup éloigné du précédent, eft compolé de la même manière, mais il eft un peu plus élevé; il peut bien avoir trente ou quarante pieds de hauteur. Le bitume y eft folide; on en voit des morceaux durs entre les crevafles des pierres, ce qu'on remarque auffi dans celles de la partie la plus élevée du Puy-de-Pège. La bafe du Puy-de-Crouelle eft faite d'une pierre blanchâtre marneufe; cette pierre eft tendre, fine & uniforme: parmi les autres pierres, il y en a d'un blanc cendré, mélé de parties nojrâtres, comme bitumineufes, & de petits graviers blancs & criftallins, d’autres font blanchâtres & ardoifées: elles ren- ferment quelquefois des rognons de pierres à moitié flex, blanchîtres en dedans, ardoifés en dehors & bruns dans l’en- tredeux de ces couches. Outre ces pierres, il y en a encore dans ce monticule qui font cendrées & qui ont des plaques circulaires gris-de-fer, de graveleufes incruftées de bitume & qui font aufli cendrées, de couleur d’un jaune rouille-de-fer plus ou moins vif, avec des taches petit gris-de-fer; d’autres enfin font d'un verdätre glaifeux & graveleufes, & parfemées de taches circulaires auflr gris-de-fer. * Toutes ces pierres fe diffolvent un peu aux acides miné- raux, un peu plus ou un peu moins lentement, & elles reftent enfuite fans donner des marques de diflolution, quand même on verferoit deflus de nouvel acide. Celle qui m'a paru donner plus promptement & plus abondamment des marques qu'elle Mém. 1759: | Aaaa MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALr fe diflolvoit, eft la pierre blanchâtre de la bafe du monticule de Crouelle: pour les bitumes purs, liquides & folides, ils ne fe diflolvent, comme omwle penfe bien, en aucune façon. J'ai eu le mème réfultat par rapport à une pierre grisitre, recouverte un peu de bitume folide, & qui fe trouve à Cornon près le Puy-d’Anol, & d’une qui vient de Pont-du-château, de même que d'une qui refflémble plutôt à une terre grife, & qui eft du même endroit ; celle-ci eft une de ces matières qui donne le plus abondamment des fignes de diflolution. Il paroït donc par ces expériences , que toutes ces pierres font un compolé de matières bitumineufes, de matières cal- cinables, peu abondantes , & de terres ou pierres glaifeufes ; il pourroit même très-bien fe faire que les pierres qui con- tiennent des parties bitumineufes, fuffent ordinairement ainft compolées : j'ai du moins obfervé de femblables phénomènes dans l'examen que j'ai fait d'une terre noirâtre & bitumineufe de Glangas, endroit fitué à quatre ou cinq lieues de Limoges, & où il y a une mine de plomb qui a été abandonnée. La pierre puante du Canada, qui efl noire, & dont on fait des pierres à rafoir, donne les mêmes réfultats: elle fe diflout d'abord avec vivacité & refle enfuite fans jeter les moindres bulles ; d'où il fembleroit qu'on pourroit condure qu'il entre dans la compofition des bitumes, des matières animales mêlées à des parties terreftres & glaifeufes. Il paroît que la compofition des monticules que j'ai décrits, concourt à donner cette idée. Ne feroit-ce pas trop l'étendre, que de dire que toutes les pierres qui donnent une odeur forte & puante, ne l'ont que parce qu'elles contiennent des parties de bitume très-ténues & difperfées dans leur maffe, & qui le font quelquefois à un point, que ces parties fe diffolvent entièrement dans les acides, comme il arrive aux rochettes de Vichy, lors même qu'elles ont pris une folidité telle qu'on les regarderoit comme du Jilex, & qu'elles prennent très- bien le poli? Ces pierres, dont j'ai parlé dans mon Mémoire fur les volcans éteints de PAuverone, étant frottées, jettent une odeur très - défagréable ; propriété que je ne leur aï connue que lorfque j'en ai été averti par M. de Ia Tourette, de l'Académie de‘Lyon. Di FISNUS CUT E LIN CHE, 555 … Au refte, je reviens à ce qui regarde les pierres bitumineufes de l'Auvergne: ces pierres fe trouvent dans des endroits qui forment une fuite de monticules pofés dans le même aligne- ment ; il eft aifé de s’en aflurer par la Carte topographique des environs de Clermont, par M. Lefcuyer de la Jonchère, Seigneur des Voignes & Ingénieur. Depuis Cornon qui eft au bas du Puy -d'Anol jufqu'à Clermont, il y a une fuite de puys qui font dans la direction de celui de Crouelle; ces puys font ceux de Dane, le Pelon, la montagne de Gandaille; celui de Pège eft un peu plus au nord, & eft plutôt dans la direction de Pont-du-château. Il ne pourroit étre que très- curieux d'avoir une defcription de ces puys, & d'en bien connoïtre les pierres, pour s’aflurer de ce fair. Peut-être même que quelques recherches fuivies feroient connoître plufieurs autres endroits qui renfermeroient des pierres femblables. Je fais déjà par le Mémoire de M. Ozy, qu'on a trouvé du bitume fur le puy de Pelon. Suivant lui encore, Chamalière, bourg fitué auprès de Clermont, & au pied des montagnes à l'oueft, a des .caves qui font des moffettes femblables à fa grotte du Chien en Italie ; les exhalaifons de ces caves lui paroiffènt être.de la nature des acides minéraux: il y a expofé des animaux qui ont péri en peu de temps, après avoir refpiré cette vapeur. L'huile de tartre par défaillance, bien préparée, a donné en moins de trois femaines de beaux crifiaux de fl neutre de difitrentes figures. J'ai parlé dans mon Mémoire fur les volcans éteints de l'Auvergne, du bitume des caves dés Bénédiétins de Clermont ; j'ajouterai ici que dans le fond de ces caves, d'où découle de l'eau en temps de pluie, on ramañle une terre argileufe d'un brun- foncé, & qui elt recouverte d'une pouffière jaune foufrée. La pierre du roc où les caves font creufées, eft brune, ou brun-jaunâtre, ou tavelée de blanc; le bitume recouvre ces pierres en partie : il eft fec, noir & brillant. Enfin il y a encore à Machaul, hauteur qui eft à un quart de lieue de Riom für la route de Clermont & à gauche de cette route, une fource de poix, dont les payfans fe fervent pour graifler les eflieux de leurs chars, Aaaa ji > Ÿ > LA y ÿ » 22 M 556 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE Les obfervations que M. du Tour a déjà faites dans fon canton, font outre cela entrevoir que l'étendue du terrain bitu- mineux, peut être confidérable ; car indépendamment de ce que j'ai déjà rapporté du bitume de Pont -du- château, voici ce que M. du Tour me marque dans une de fes lettres fur une pierre des environs de cet endroit. « La pierre du roc ou banc, dit-il, fur lequel eft conftruite l'éclufe de Pont-du- château, & où font les fondemens d'un ancien pont, eft argileufe, gris- verdâtre & parfemée de taches noires & rondes, & qui paroiflent bitumineufes : cette pierre fe durcit extrêmement au feu; on la diroit femblable à l'argile qui de- vient pierre, & dont Vallerius fait fa vingt-cinquième efpèce: » on la fcie aifément, & il paroïît qu'elle fe travailleroit pour toutes fortes d'ouvrages ; par cette propriété & par fa couleur verdâtre & une efpèce de poli dont elle eft fufceptible, elle a quelque rapport avec la pierre ferpentine ; cependant avant que d'avoir pañlé par le feu, elle eft moins compacte que la pierre ollaire de Salvert, dont il fera parlé ci- deffous, & beaucoup moins par conféquent que celle du Canada, qui l'emporte à cet égard fur celle de Salvert : on y remarque des points brillants comme du verre. Si on la laïfle quelque temps dans l'eau, elle s’en imbibe & devient friable: aufli cette pierre at-elle au premier coup-d'œil plutôt l'air d'une terre argileufe que d’une pierre; elle fe diflout en une très-petite partie aux acides ; fa couleur naturelle efluie au feu des chan- gemens très-apparens ; elle y devient d’un blanc-fale, rougeâtre à la furface, & bleue dans l'intérieur, & les taches noires s'y confondent avec le fond & difparoïffent : le feu confume le bitume qui formoit ces taches noires & coloroit la pierre. Les carrières de Queriaux, qui font encore près de Pont- du - château , fourniflent une pierre grainue qui eft d’un gris blanchâtre, avec des petites taches blanches & des points brillans; ces points brillans paroïffent fur-tout lorfqu'on a expolé la pierre au feu; elle fe diflout très-peu & lentement à l'eau-forte, Si on la met dans l'eau, il s’en élève des bulles d'air avec un fifHlement aflez violent ; fr on l'y laifle quelque DE s' S\C HE-N-C Es S57 témps, elle sen imbibe; fi on la traite par les lotions, on reconnoit qu'elle eft compofée d'une terre pétrifiable ou argile, & d'une terre non pétrifiable ou fable ; enfin elle durcit au feu. En tout cela, elle reffemble à la pierre du tombeau de la fameufe momie trouvée depuis peu dans ce pays, quelle pierre eft auffi argileufe ; outre des points brillans, elle a des taches blanches de la même efpèce que celle de la première; mife aux mêmes épreuves , elle offre aufli les quatre phéno- mèñes qui ont été fpécifiés ci-deflus. Cependant la pierre du tombeau diffère de celie de la carrière de Queriaux par le fond de fa couleur qui eft d'un gris cendré ou bleuatre, & par des points noirs que je nai pas vus à celle de Queriaux; on ne rencontre pas non plus dans celle-ci de ces nœuds noi- râtres, & d’une matière fr dure que les inftrumens de fer ne peuvent y mordre, qu'on trouve dans celle du tombeau. Malgré ces différences, il y a lieu de préfumer qu'il y a beaucoup d'affinité entre ces deux pierres, & que fi celle du tombeau ne provient pas de la carrière de Queriaux , elle a du moins été tirée de quelqu'une qui eft dans le voifinage ; ce qui autorife cette conjecture, c’eit que Luffat, endroit où étoit le tombeau , eft peu éloigné de Pont-du - château , & qu'il y a apparence que pour Îe faire on n'a pas été chercher au loin ce qu'on avoit fous fa main. M. Grangier de Vedière femble penfer un peu différemment: M. Grangier ayant fait bêcher à deux pieds de profondeur ou environ & à quatre ou cinq de diflance de la foffe d’où le tombeau de la momie a été tiré, trouva feulement à l’orient de ce tombeau quantité d'éclats qui font certainement de la même pierre que celle du bac renfermé dans ce tombeau ; ces éclats étoient f tendres que la bêche les coupoit aifément ; quand on creufe à des diflances plus confidérables de la fofe, es pierres qu'on rencontre font d'une efpèce toute différente & reffemblent à celles qui voient dans les lieux circonvoifins; les éclats paroiffent être ceux qui ont été détachés lorfqu'on a taillé le bac fur la place même où il a été déterré. Pour moi, je crois que cette pierre a beaucoup de rappoit Aaaa ii 558 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE RoYALE avec celle qui fe trouve au haut du Puy -de- Dome, du Mont- d'or & de Volvic, & que j'ai dit, dans mon Mémoire fur les volcans, reflembler beaucoup à de Ia cendre qui fe feroit à la longue darcie & qui auroit fait corps; ce qui me le fait principalement croire, ce font les points noirs & les parties bril- jantes & noirâtres qui s'obfervent dans les nœuds pierreux du bac ; ces points noirs font fembiables à ceux qu'on remarque dans les pierres de volcans, & les parties brillantes & noirâtres reflemblent entièrement à ces grains vitrifiés , dont plufieurs pierres vomies par les volcans font parfèmées, Au refle, de quelqu'endroit que cette pierre ait été tirée, -cet endroit ne peut pas être bien éloigné de Lufat, quand elle feroit même une pierre de voléan ; l'Auvergne en étant remplie à quelques lieues de ce canton, cette pierre en aura peut-être été apportée ou par ceux qui auront fait conftruire le tombeau, ou peut-être par les crûes de l'Allier, qui coule affez près de Luflat & qui pafle à Pont-du-château ; cette rivière, qui eft confidérable & rapide, peut très-bien rouler des quartiers de pierre d'un volume capable" de donner un bac tel que celui de la momie; les environs de Tiflonières, qui eft proche de l'Allier & de Pont-du-château, font parfemés de pierres de volcans que je crois y avoir été apportées par cette rivière: ainfi de façon où d'autre, la pierre du bac poufroit avoir été tranfportée à Luflat & y avoir été travaillée, comme le pen{e M. Granyier. ; Quoi qu'on doive juger de la pierre du bac, qu'elle foit de la nature des pierres glaifeufes ou non, il paroit néanmoins que celles-ci fe trouvent dans une continuité de terrain aflez grande dans ce canton de l'Auvergne; car outre les pierres dont j'ai déjà parlé, je crois qu'on peut encore placer une de Rouzat avec elles, & même avec celles qui font bitumineules : celle-ci répand une odeur défagréable lorfqu'on ia frotte; elle ne fe diflout pas aux acides ; une autre qui fe tire d'une car- rière peu éloignée de la précédente, convient avec elle par ces deux propriétés; elle n'en difiére que parce qu'elle eft graveleufe, & que l'autre eft finie, douce & unie; on J'emploie dans la conflruction de différens bâtimens. DIBSIMBNIÉNL'E Ne CES. 559 De toutes ces pierres glaifeufes ou qui le font en plus grande partie, la plus fingulière & celle dont on pourroit tirer parti pour les Arts, eft la pierre de Salvert, dont on a dit un mot plus haut ; cette pierre eft une vraie féatite ou pierre ollaire, c'eft-à-dire de celles qui, comme la pierre de Côme, peut tourner & être employée pour des vaiffeaux propres à aller au feu: les expériences & les obfervations que M. du Tour a faites à ce fujet, font trop intéreflantes pour ne pas les rapporter ici telles qu'il me les a décrites dans une de {es Lettres : les voici : : « Cette pierre, dit M. du Tour, eft douce & comme grafle au toucher, aflez. pefante, & fufceptible d’être fciée, & « de couleur de cendres ; expofée à un feu ouvert, elle blanchit « & rend une odeur femblable à celle qu'exhale de la pâte mile « fur des charbons ; elle y durcit : plongée dans l'eau , elle s'y « imbibe ; pulvérifée & détrempée avec de d'eau, elle fe laiffe « pétrir aifément & prend un peu de confifiance au feu. J'ai « remarqué, par le procédé des lotions, indiquées par M, de « Reaumur *, que cette pierre ft compofée d’un peu de fable « x gg de, vitrifiable mêlé avec beaucoup de terre pétriffable ou d'argile. « æmé1730, J'en ai fait faire au tour quelques vafes, ayant mis de l'eau «7° *77 dans un de ces vales, je m'aperçus , apres un certain intervalle « de temps, qu'elle fuiñtoit par des petites fentes que je n'avois « pas aperçuës auparavant; je verfai l'eau, & lorfque celle qui « s'étoit engagée dans les fentes eut achevé de s'évaporer, ces « fentes difparurent; je revins à la même épreuve, & elle eut le « même fuccès; les fentes, lorfque j'eus mis de l'eau dans le vale, « fe rouvrirent, & elles fe refermèrent après qu'elle en eût été « ôtée : il étoit aifé de concevoir que l'eau qui s'infmuoit dans « des fentes qui font ferrées dans l'état naturel, les diflendoit « par une action toute femblable à celle, en vertu de laquelle « elle gonfle le bois dont elle pénètre les pores, & que jai.« tâché d'expliquer dans un Mémoire inféré dans le deuxième « volume des Savans étrangers « Quoi qu'il en foit, je cherchai alors un moyen pour rendre « mon vafe impénétrable à l'eau. Pline dit de la pierre dont on « » » y Ÿ «60 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE faioit les vafes à Siphne, exca/falus oleo nigrefcir, durefcitque natura molliffimus (lib. XX XVI, cap. 22). Je plongeai mou vafe dans de l'huile d'olive, & l'y ayant laifé pendant vingt- quatre heures, on le mit dans un four d'un Boulanger pen- dant la cuiflon du pain; ce procédé a réufir; les fentes du vafe ne fe font pas rouvertes quand on y a verfé de l'eau ; ce qui provient fans doute de ce que l'huile qui a pénétré & qui occupe les pores, & les fentes imperceptibles qui fe rencontrent dans l'épaiffeur des parois du vale, les rend inac- ceflibles à l'eau, & c'eft en cela, ce femble, que confifte Ra propriété que Pline paroît attribuer à l'huile, d’endurcir les vafes de fa pierre de Siphne. L'action du feu qui eft capable de durcir cette efpèce de pierre, ne fuffit pas feule pour ref- ferrer les fentes, au point d'empêcher l'eau de s’y infinuer, J'ai laiflé pendant douze heures dans le four du Boulanger, un autre de ces vafes qui n'avoit encore reçu aucune liqueur, & ayant enfuite verfé de l'eau, je ne tardai pas à y apercevoir des fentes que l'eau rendoit fenfibles en les diftendant, & à travers defquelles elle fe filtroit. J'ai appris depuis d'un faifeur de Baromètres, qui me dit être de Côme en ltalie, & que j'interrogeai au fujet des chau- dières de pierre qu'on y fait, qu'avant d'en faire ufage, & pour les empêcher de perdre l'eau, on les expole au feu après les avoir enduites d’une efpèce de pâte faite avec de la farine, du vin & des œufs. J'ai éprouvé de plus, que la fléatite de Salvert eft très- bonne pour détacher: je fis couler exprès des gouttes d'huile fur un morceau de drap, & ayant mis à l'envers de la pouf fière de cette pierre bien pilée, elle s'imbiba de l'huile prefque dans le moment, & les taches d'huile difparurent. Si l'on compare ce que je viens de dire de la fléatite de Salvert, avec ce que M. Pott rapporte de celle de Bareuth, dans un Mémoire inféré dans le volume de l'Académie de Berlin pour lannée 1747, on verra que ces deux pierres conviennent entr'elles à prefque tous égards: je ne fais fi on en connoît d'autres carrières en France, » Pour DES SA CIRE NC ES s6r Pour moi qui n'en connoifois . point de celte nature dans I royaume, j'écrivis à M. du Tour, que je ne croyois pas ue cette découverte eût été faite. M. du Tour me fit cette réponfe. « Je fuis bien aif d'avoir eu le bonheur de trouver une efpèce de pierre inconnue jufqu'à préfent en France. J'ai eu occafion d'éprouver par moi-même que la pierre des calu- mets eft du même genre. Un de mes amis en a un qui fui a été envoyé, il y a long-temps, du Canada, & dont la couleur eft d'un aflez beau rouge; on la ratifle fort aifément avec un couteau: peut-être trouvera-t-on des. variétés de celle de Sal- vert. Je me rappelle que près de l'endroit d'où lon a tiré celle-ci, il y en a un autre banc dont je ne voulus pas prendre, parce que les morceaux étoient plus petits, d'une forme plus irrégulière & moins propre, me fembla-t-il, à fe laifler tra- vailler ; peut être s’en rencontrera-t-il dans ce banc ou dans d'autres, qui varieront par la couleur. » La découverte en eft déjà faite, sil eft vrai que les pierres dont j j'ai parlé plus haut, & qui ne fe diflolvent aux acides qu'en très-pelite quantité , tiennent de la nature dé celle-ci, quoique les acides n'agiffent en aucune façon fur elle. Ces pierres ne font pas toutes colorées de [a même façon ; il eft vrai qu'aucune n'eft de ce rouge foncé qu ont les pierres à calumets, mais qu'elles font plus ou moins grifes, cendrées ou verdâtres. Il ne s'agit peut- être que d’être attentif à ramafler exactement les pierres qui peuvent être renfermées dans cêtte fuite de terrain de l'Auvergne, rempli de pierres glaifeufes, pour. en rencontrer de couleurs plus vives, plus agréables ; au refle, qu'y feroit la couleur, fi la pierre de Shen peut être d’un ufage fembiable à celui de la pierre ollaire d'Italie ou des calumets du Canada? Celle de l'Auvergne demande, il eft vrai, encore des expériences & peut-être du choix ei les parties de pierre qu'on devra employer; car M. du Tour avoue, que les vafes faits de cette pierre, & qu'il avoit pré- prés; fe. font fendus à la longue : cet accident n'eft point arrivé à celui que jai recu de M. du Tour, quoiqu'il y ait près de :trois ans qu'il me fait envoyé ; ; il pourroit {e faire Men. 1759: | “Bbbb 562 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE qu'il füt d'un moïceau d'une pierre plus fine & en quelque forte plus fibreufe que celle du quartier dontil à fait faire ceux dont il s’eft fervi dans fes expériences. Quel que foit au refle l'ufage qu'on pourra retirer de cette pierre pour les Arts, je crois qu'elle doit être rangée fous le venre des pierres glai- feules, être répardée comme une ftéatite, & fervir par la po- fiion de ces carrières, à former la chaîne des pierres glaileufes de l'Auvergne. Cette chaîne, ce que j'ai déjà obfervé, eft intermédiaire aux pays de pierrés calcaires & à ceux de pierres vitrifrables : fi on ne vouloit pas ladmettre, & qu'on voulüt la regarder comme appartenante à l’une ou à l'autre chaîne, puifqu'on trouve des glaifes dans toutes les deux, je penferois qu'on devroit plutôt la faire entrer dans la feconde que dans la première; les pierres qu'elle renferme ont plus de rapport avec les fchites qu'avec les pierres calcaires. Les fchites offrent, traités par les acides ou par le feu, les mêmes ou à peu-près les mêmes phénomènes que les ftéatites; ils doivent par conféquent être rangés avec ces pierres plutôt qu'avec celles qui font calcaires: fuivant cette idée, je comméncerai par les fchites l'hiftoire des pierres qui appartiennent à la chaîne des pierres vitrifiables de l'Auvergne. Son étendue comprend le refte de cette province; il y a du moins tout lieu de le penfer, d'après fes obfervations de M. du Tour & celles que j'ai pu recueillir d'ailleurs : il paroît encore que cette chaîne peut fe fubdivifer, que’ certains cantons font remplis de fchites, d'autres de granits, d'autres de quartz; c'eft ce qu'on pourra entrevoir par la fuite de ce Mémoire, Je commence par les fchites. Parmi les cailloux roulés que M. du Tour a reçus d'une quinzaine de paroïfles qui font dans la plaine arrofée par la rivière d’Allier, & dans l'étendue defquelles on ne trouve pas de pierres propres à bâtir; parmi ces cailloux, dis-je, plufieurs font des fchites, il y en avoit d'un jaune net: cette obférvation prouve déjà que Auvergne doit contenir de cette efpèce de pierres ; ce qui eft plus pouf, c’eft que les environs de Mazayes en fournifient a ra TD ESS QUE IN G ES if 563 un qui eft gris, tirant fur le bleuitre &. rouille-de-fer; ce fchite eft net & fans autres matières étrangères. Un qui vient de Jofe eft bleuâtre ou gris-de-fer, avec des points. crif- tallins &. blancs : cette pierre eft Emblable à celle de Viterbe en Italie, du Mont-d'or & de fIfle de France, dont il ef parlé doisison Mémoire für les volcans éteints de l'Auvergne, Un troifième vient d'Youx, il eft dur, verdâtre & couleur de rouille-de-fer, & parfemé de paillettes ralqueues argentées, fuivant te Mémoire dû à M. Ozy, que j'ai déjà cité: on en trouve un près de Maffiat, qui eft truité, & l'on rencontre fur le chemin du pont de Lempde à Maffiat, une efpèce de pierre noie, Si cette pierre n'eft. pas plus douce & plus fine qu ue dont:la carrière.eft, proçhe le domaine de Lavau, fitué à peu de diflance de la petite rivière de Marun, elle ne doit être regardée que comme un fchite noir; on en voit de brun foncé, de-verdâtre &de blanchâtre dans les environs de Pont- Gibaud. On pourroit peut-être placer aü nombre des {chites une efpèce d'amiante fibreux & d’un blanc-file, qui fe trouve dar la Côte-rouge, entre Murat & Saint-Viélor, fur e grand chemin de Clermont à Befle: je connois du moins plufieurs fchites fbreux qui fe rapprochent beaucoup de cet amiante, & jen ai vu de femblable à plufieurs égards, attaché à de h pierre fchiteufe. Les:obfervations.que j'ai pu,recueillir au fijet des granits, font beaucoup plus, multipliées que celles que j'ai eues fur les fchites: Voici celles que jai extraites des différentes Lettres de M. du Tour : dans le canton de Davayat, le fond da terrain ei de-marne, mais. la: fuperficie en. eft toute parfemée de ‘pierres du, genre des: granits ,. qui y viennent d'ailleurs. Dans les débordemens: deb. du mois de Novembre 1755, un ruifleau:qui pafle tout près du village, en avoit charié une quantité imenfe : à l'égard de celles du même genre, qu'on voit dans des endroits beaucoup plus élevés que le lit du ruif- feau ,: comme ces endroits font eux-mêmes. dominés par. d'autres où M, du f'our a reconnu enfuite que les granits abondent, ibeft aifé Id'imaginer bien des caufés qui en auront occafonné Bbbb ij 364 MÉMOIRES ,DE L'ACADÉMIE ROYALE le tranfport : l'envie d'avoir des éclaireiflémens exa@s für cet objet a engagé M. du Tour à chercher le magafin de ces granits ; il ne pouvoit à cet égard avoir dé meilleur guide à prendre que le ruiffeau qui en avoit tant amené. Si on le côtoie, comme a fait M. du Tour, en remontant vers fa fource , lorfqu'on eft arrivé ‘à un grand quart de lieue de Davayat & à la hauteur du village de Prompfat , qui donne fon nom à ce ruifleau, on entre dans un vallon étroit & profond , dont les collines efcarpées qui le bordent font for- mées de rochers de granits; plus on avance & plus on trouve le lit du ruifleau rempli des débris de ces rochers, que les eaux pluviales en détachent; l'efpace d’une demi-lieue que M. du Tour a parcouru dans ce vallon fourniroit, dit-il, de quoi bâtir une ville ; il ne lui fut pas poflble d'en voir le bout, parce que le pays n'eft pas praticable; de l'endroit où il s'arrêta, il peut y avoir une demi-lieue jufqu'à la fource du ruiffeau. La plupart de ces rochers font couverts d'un Zchen, qu'on ramafle pour en faire de l'orfeille, de plus on obferve que dans un endroit la chaîne méridionale de ces rochers efl inter- rompue fur un efpace de plus de deux cents pas par un terrain qui eft coupé prefqu'à plomb, & qui peut avoir douze à quinze pieds de hauteur ; il eft compolé d'argile dont une partie tire fur le vert, & l’autre eft d’un rouge foncé; lune & l'autre font mélées avec du fable ou des débris de cailloux & avec du mica ; il femble ne manquer à ces mélanges que d'être plus durcis & mieux liés pour être des maffes de granits, on en trouve même des portions qui ont une certaine confiftance ; il y a par conféquent lieu de croire que ce font les mêmes matières qui entrent dans la compofition des granits de ce canton: ce qui favorife cette idée, c'eft que l'argile verdätre cft mêlée avec une beaucoup plus grande quantité de fable que l'argile rouge, qui ‘eft plus tenace que l'autre, & le granit rougeûtre eft beaucoup plus compa“te, & a fes parties mieux liées que le granit qui tire fur le vert. Si l'on rapproche ces oblérvations de celles que j'ai rapportées d'après M. du Tour, DAEMS!); SCIE NC ES. 565 au commencement de. ce Mémoire, on aura pour ce côté de l'Auvergne une affez grande étendue de terrain rempli de granits. . C'eft de ces montagnes que M. du Tour penfe qu'une efpèce d'obélifque, élevé à Davayat, a été apporté ou plutôt entraîné naturellement par les averfes d’eau, puifqu'elles charient les cailloux dont on vient de parler. Qu'on ne s'attende pas, dit M. du Tour, que cet obélifque , qui eft de’granit, foit aufli merveilleux que ceux qu'ont fournis les carrières de l'Éeyrte; il n'étoit pas deftiné à figurer ni à Memphis, ni à Rome , ni à Paris; ce n'étoit, fi lon peut parler ainfi, qu'un obélifque de Province & dont il paroït que la Nature a fait tous les frais, foit pour le travailler, foit pour le mettre en place : une des faces eft altérée par l'injure de fair, les autres font plus compactes, & il feroit affez difficile de les entamer. Cet obélifque eft groflièrement arrondi par le haut, il a Voy. la PI, quatre faces; celles qui font tournées vers l'eft & le fud, font figure 1. à plomb ou perpendiculaires à l'horizon ; les deux autres font inclinées vers l'axe de l'obélifque, la face du côté de l’oueft eft bombée , les trois autres font planes, rez-de-terre, la face oueft a quatre pieds cinq pouces de largeur ; la face fud, deux pieds neuf pouces ; la face eft, quatre pieds deux pouces; & la face nord, deux pieds neuf pouces ; ainfi l'obélifque a de tour dans le bas quatorze pieds un pouce : en haut à l'endroit marqué DD, il a de tour huit pieds huit pouces, fa hauteur de Ben A eft de onze pieds dix pouces, de À en €, d'un pied fix pouces ; la hauteur totale eft donc de treize pieds _ quatre pouces, cette hauteur n'eft probablement pas celle de tout.cet obélifque , elle n’eft peut-être que celle d’une portion beaucoup moindre que ce qu'on peut imaginer que la terreen eache , au moins eft-il für qu'il a, pour ainfi dire, des racines; il feroit intéreffant de voir jufqu'où elles s'étendent, & fur quelle bafe elles portent *. * Depuis la lecture de ce Mémoire, M. du Tour a fait creufer le trou où: la pierre eft enterrée à la hauteur de deux pieds; cette colonne porte fur an terrain graveleux & mêlé de paillettes talqueufes dorées. Bbbb ij 66 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE La connoiflance de ce fait le feroit certainement indépen damment de cellé qu'on acquerroit au fujet du volume que les granits de Frahce peuvent avoir, & de quelle maffe les quartiers qu'on én pourroit tirer peuvent être, & dé favoir par-là fr ces maffés ne fercient pas comparables à celles qu'on a tirées des carrières de granits de l'Égypte : indépendamment, dis-je, de cette connoïfiance, il féroit curieux de s'affurer, aw moyen de cette recherche, fi cet obélifque eft attaché à un rocher de même nature que lui, fi ce ne feroit pas un rocher qu auroit été taillé plutôt par la main des hommes que par la \ature, & s'il n’y auroit pas eu quelque deffèin dans la taille qu'on en auroit faite, & qui pourroit tenir de celui que certains auteurs prétendent avoir donnéoccafion aux obélifques d'Égypte, qu'ils regardent comme des efpèces de gnomons, dont les faces font dirigées vers les points cardinaux du monde. Lé canton où eft placé cet obélifque communique fans doute avec les environs de Volvic; la bafe de la montagne dans cet endroit qui a brûlé, eft compofée de granits de différentes couleurs ; j'en ai apporté un blanc jaunâtre & gris, qui a des grains de moyenne groffeur & bien liés, & un peu de paillettes talqueufes d'un argenté brillant ; un autre eft blanc, pointillé de noir, à grains moyens & ferrés, & paillettes talqueufes brunes ou noires ; il reflémble beaucoup au carreau de Saint-Sever en Normandie ; un troifième éeft encore blanc, mais fouetté de jaunâtre & pointillé de brun & de noir; ces grains font de moyenne grofféur, ferrés , & les paillettes talqueufes brunes & petites ; les deux fuivans font jaunes, le premier ‘eft lavé de blanc, pointillé de brun & de noir, ces grains font peu diés, de moyenne groffeur & fes paillettes brunes; on y remarque outre cela des plaques qui ont un coup d'œil de {path ; le fecond eft jaune rouille-de:fer, pointillé de ‘blanc, à grains moyens, très-peu liés, & à paillettes petites & brunes ; eùfin de deux autres, lun eft noir &’couleur de chair, à grains ferrés & petits, mélés.d’un peu de talc qui eft brun, l'autre eft couleur de cerife foncée & brune, à grains moyens, & un peu ferrés, & à paillettes talqueufes d'un brun tirant fur ke noir, DES SCTENCE S 567 : J'ai trouvé encore de cette efpèce de pierre le Jong du chemin qui conduit de Clermont au Mont-d'or; j'y en ai obfervé qui étoient d’un blanc jaunâtre, où les grains étoient très-ferrés & fans mélange de paillettes talqueufes ; ces granits étoient traverfés par des veines de quelques lignes d'épaiffeur d'un quartz d'un blanc fale & demi -tranfparent ; d’autres étoient couleur de cerife vif, fouetté de brun avec quelques paillettes talqueules d'un brun brillant, d'autres étoient jaunâtres & bruns, avec des paillettes talqueufes d’un brun doré, ou bien ils étoient gris -blanc, avec de très- grandes plaques blanches de quartz. Cette pierre fe rencontre aufii fur la route de Clermont à Pont-Gibaud, dans lesenvirons de cette dernière ville, à Rojat, de long du chemin de Rochefort à Pont-Gibaud, dans lesenvirons de Clermont & du Puy-de - Dome, dont la bafe eft faite de cette pierre, à Gergovie, où il paroït être décompolt; j'en ai reçu plufieurs variétés, qui m'ont été envoyées par M. Ozy & par M. Delarbre, Médecin à Pont -Gibaud. Je ne décrirai pas ces variétés, la defcription en pourroit paroître ennuyeufe ; je dirai feulement en général que ces granits étoient de l’une ou de l'autre couleur de celles qui s’obfervent dans les précédentes; que, comme ceux-ci, ils font plus ou moins durs & ferrés, & -qu'ils ont plus ou moins de paillettes talqueufes, qui varient par la couleur ; la commanderie de la Salvatat près d’Aurillac, -en renferme dans fes environs ufqui eft rouge: j'ai appris que toutes les montagnes du canton de Courpiere, ville qui eft du côté de Brioude , étoient compofées en grande pautie de sgranits remplis de talc blanc & jaune. Les granits {e trouvant affez communément dans des cantons qui ne font pas éloignés de ceux qui renferment des fchites, äl eft aflez ordinaire d'y trouver des fchites durs remplis de grains de la nature de ceux dont les granits font formés ; auf ai-je reçu de ces fortes de pierres, qu'on pourroit regarder comme des demi-granits. M. Delarbre m'en a envoyé des environs de Pont-Gibaud quelques variétés, l'une étoit blanche avec des taches, des points & des petites lignes; une autre 568 MÉmoIREs DE L'ACADÉMIE ROYALE . étoit variée de jaune, de gris & de noir; une autre tiroit fur le gris-verdâtre & gris-ferrugineux : ces derniers demi -granits n'avoient pas de paillettes talqueules , les trois fuivans en con- tenoient , les paillettes du premier étoient chatoyantes & chan- geantes comme la gorge de pigeon; pour lui, ilétoit varié de rougeâtre, de jaune rouille-de-fer, de gris-de-fer & de noir; le fecond étoit varié de noir, de jaune rouiile-de-fer, & avoit des paillettes d'un brun doré ; le troifième, qui venoit du chemin de Pont-Gibaud à Rochefort, étoit à grains blancs ou ver- dâtres , mêlés avec beaucoup de paillettes d’un brun noirâtre , & changeantes , le fond étoit lavé d’un jaunâtre rouille-de-fer. La figure de ces demi-granits eft rhomboïde, comme tous les fchites, ce qui les approche beaucoup plus des vrais {chites que des granits, quoique cependant on rencontre quelquefois de ces dernières pierres qui affeétent aufii cette figure ; les paillettes talqueufes, dont ces pierres & les granits font par- femés, mettent encore en quelque forte de analogie entre ces pierres & les vraies pierres talqueufes, c'eft-à- dire celles qui {ont entièrement ou à très-peu-près compolées de wica ou de grandes lames de talc. Il eft du moins ordinaire de trouver des pierres talqueules dans les cantons qui renferment des granits ou des pierres {hiteufes ; auffi en ai-je eu une des environs de Pont-Gibaud, qui étoit d'un brun rillang & changeant, & traverfée d'un filet de quartz blanc ; une autre étoit jaunâtre, tachetée de brun ; une troifième ne différoit de celle-ci que parce qu'elle étoit un peu argentée & brillante ; une quatrième tenoit du {chite, dure par fa confiflance, & étoit variée dé gris & de blanc ; enfin une cinquième avoit des grains blancs & des paillettes d’un brun noñâtre & changeant où tirant fur un rougeâtre cuivreux ; les environs de la Chaife- Dieu en ren- ferment plufieurs fortes. Dans les defcriptions que je viens de faire des granits & des fchites, j'ai quelquefois parlé de veines de quartz qui traverloient ces pierres ; il n'eft pas étonnant qu'il s'y en trouve : les pays qui ont des unes ou des autres, renferment. affez fouvent v : DES SCIENCES. s69 fouvent des rochers de quartz, ou avoifinent œux qui en font remplis: il froit par conféquent plus fingulier qu'il ne s'en trouvt point de mêlé dans ces pierres. Les quartz ne font pas rares en Auvergne; car indépendamment de cette chaîne qui n'eft que de quartz, & dont j'ai parlé d'après M. du Tour, au commencement de ce Mémoire, j'ai reçu de cette éfpèce de pierre de M. Delarbre qui lavoit ramaflée dans les en- virons de Pont-Gibaud. J'en ai vu le long du chemin de Cler- mont au Mont-d'or; j'ai fu que les maifons en étoient bâties dans le canton de la Sauvetat, dont j'ai parlé plus haut: cette pierre eft ordinairement d’un blanc pius ou moins vif, mais elle eft aufii aflez fouvent veinée de rouge, de rouille-de-fer, de violet ou de plufieurs autres couleurs. Un des morceaux les plus finguliers que j'aie recu d'Au- vergne, & que j'aie même jamais vu, eft celui que M. du Tour a trouvé dans fon jardin de Davayat; ce quartz eft en petits parallélogrammes plus où moins alongés & quelquefois à très- peu-près cubiques; il y en a de 6, 7, 8 & 9 lignes de lon- gueur, fur 3 ou 4 de hauteur, & 4, 5 & 5 + de largeur; quelques - uns ont leurs angles obliques de façon qu'une ou deux des furfaces qui les terminent {ont inclinées aux autres: on en trouve auflt, mais très-rarement, dont un des bouts eft échancré, ce qui fait que le bout fmblable d'un autre auff échancré, s’enclave dans celui-ci. Le quartz eft, füuivant beaucoup de Naturalifles, ia pierre où le criftal & les autres pierres qui s’y rapportent, fe forment, ou comme difent les Naturaliftes, le quartz en eft la matrice; ainfi il ne doit pas être rare de trouver des criftallifations en Auvergne: j'en ai vu qui venoient des environs de Pont- Gibaud, elles formoiïent des mafes affez jolies, La groffeur des criftaux qui les compofoient, n'étoit. pas confidérable , ils étoient au contraire aflez déliés, les plus gros m'égaloient guère que la groffeur d'une plume de cygne, ou ceile d’une plume de pigeon; il y en a mème de plus petits, & ïil s'en voit beaucoup de grandeurs différentes entre ces deux extrèmes: ils étoient prefque tous tranfparens, quelques-uns Mëm. 1759. Cccc 570 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE opaques, bruns ou jaunâtres, ordinairement très-diftingués les uns des autres, fouvent hériflés de beaucoup d'autres très-petits, parmi lefquels il y en avoit plufieurs d’un beau rouge de grenat ; ces mafles de criflaux étoient attachées à un quartz ou bien à des granits qui varioient pour la couleur. J'ai trouvé des criftaux femblables fur plufieurs des quartz qui {e voient le Iong du chemin de Clermont au Mont-d'or, j'en ai vu de blancs ou de jaunâtres; leur couleur étoit affez communément celle des quartz où ils étoient attachés. Les environs de Roche-d’Agout & de Joferan en donnent auf, faivant fe Mémoire de M. Ozy, de même qu'un banc de granits qui eft fur le chemin de Clermont au village de l'Étang, fitué à une lieue de Clermont. On en a de plus trouvé dans un endroit tout hériffé de rochers, appelé la Chaire, & . qui eft Gans le canton de Pont-Gibaud, fur la pente d'une montagne qui et fur le chemin de Clermont à Thède, à Royat qui eft à une lieue de Clermont, & dans plufieurs autres endroits *. Lorfque ces criflaux font violets, on leur donne en Auvergne le nom d'amehyfle ; y en a de pareils à * Tels que peuvent être une | eft à une lieue de Château-fur-Cher. carrière qui eft à une lieue de la Chaïfe-Dieu; la plaine qui eft au- deffus des montagnes qui dominent le chemin de Vernai à S.'-Germain- VA rmefon ; le chemin du Mont-d’or, qui eft au-deffous de l'endroit appelé Greve-neire ; Va montagne de Pru- delle, à une grande lieue de Cler- mont; le grand chemin ancien du Puy - de-Dome à Chamalière, vis- à-vis la montagne de Prudelle; les environs de la mine de charbon de terre de Braffac; les côtes de Gara- bie en delà & en deçà du pont de la rivière de Trueremont , fur le chemin de Moffiac; les terres qui bordent le grand chemin de Saint- Geniez : tous ces endroits font cités dans le Mémoire de M. Ozy. On co tire dans les montagnes de Cour- pierre dont il a été parlé à l’occafion des granits; le trou d'où on les tire. Les lits duterrain font dans cet ordre; 1.°il y a un lit de glaife, 2.° un de talc, 3.° un de pierre talqueufe, 4° un de quartz, $.° un de quartz plus parfait, 6.° celui de criftal de roche ; les canons font très-fins : la hauteur totale du trou eft de huit pieds. Enfin les environs de Cluzet, lieu voifin de Langeac, en donnent un qui eft tranfparent, d’un jaune ambré, & qui a à peu près léclat d’une pierre qui feroit relevée par une feuille d’or. J’en dois une mafle à M. de Montigny, de cette Aca- démie, qui avoit ramaflée fur la montagne de Gergovie: cette mafle eft compofée de petits criftaux op- pofés par leur pointe, formant ainff deux plans; un de ces plans eft tra- verfé de veines d’agates blanches & brunes. DES SCIENCE Ss 57 Brafac, à Vernai près d'Ufon, en allant de Vernai à Ifoire, au-deflus d'une auberge ifolée qu'on appelle Æs Durandes , dans les environs de Roche - d’Agout, fur fa montagne de Gergovie & proche de Château-fur-Cher , peu éloigné d'Ifoire, Si ces criftaux font verds, on les regarde dans ce pays comme émeraudes: on en a découvert près de la Chaife-Dieu. C'eft outre cela dans ces cantons qu'on trouve les volcans éteints dont je vais donner quelques exemples d'après des ob2 férvations que j'ai eues, depuis l'impreffion de mon Mémoire, fur les volcans de cette province. Le grand chemin de Clermont à Aubuflon, pafle fur le Puy-de-Dome & traverfe une grande plaine entre les pics. En montant au Puy -de-Dome, on trouve, fuivant M. de Montigny, de cette Académie, des granits & quelques laves mais les laves font plus abondantes du côté de l'ancien chemin: en graviflant le plus élevé des pics, on rencontre très-peu de pierres ponces & de morceaux de lhaves; on remarque à fa. cime une cavité très-petite & peu profonde, On peut douter que le pic ait vomi, mais un autre pic voifm de celui-ci & moins élevé, fitué à lorient, n’eft qu'une mafle énorme de pierres ponces rouges, noires & grifes: fa bouche eft parfai- tement bien marquée. Si l'on cafle fur différens pies quelques rochers de ces mêmes couleurs, qui paroiflent au premier coup-d'œil folides & compacles, comme les rochers ordinaires, leur intérieur fe trouve tout criblé de trous comme les ponces: il eft prefque für que les petites ponces arrondies ne font que des débris de ces rochers. On rencontre fur quelques pics une afiez grande quantité de pierres grifes, qui ne paroiflent point avoir été attaquées par le fu, & dont l'intérieur eft femé d: petits criftaux hexagones : les pierres ont peu de dureté {ur les pics qui n'ont point de bouche; elles paroiflent beaucoup plus compactes & plus dures fur ceux qui portent des veftiges des embrafemens, On découvre diftinétement cinq bouches du haut du grand Pic; j'ervai , dit M. de Montigny, vilité trois, & un quatrième qui na point de bouche, où les pierres font affez blanches Cecc ji s72 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE & les ponces très-rares: on y trouve des pierres grifes mélées de criftaux & de talc; celui-ci eft à l'occident du grand pic. Les laves font en quantité dans les plaines au bas du Puy- de- Dome, fur-tout du côté de Pont-Gibaud; près de ce bourg on a entamé autrefois une mine de plomb tenant de l'argent : depuis Pont-Gibaud jufqu'à Aubuffon, on ne voit que fchites & granits pleins de talc; en général, les granits de ces cantons paroiffent fort tendres & de la nature de ceux qu'on trouve à l'entrée de Ha Bretagne, foit par Angers, foit par Alençon. La pierre noire des volcans finit à une lieue au-delà de Pont-Gibaud, & paroît être d’autant moins poreufe ou moins vide, qu'elle eft plus éloignée du Puy-de Dome: on remarque dans les coupes de cette montagne, de grandbs lits de fable noir, attirable par l'aimant. Le lit de l'Allier, qui coule à deux lieues de ces volcans, eft rempli de fer attirable: M. de Montigny s'en eft affuré à Cormon & à Pont-Gibaud. Les environs du bourg d'Orcival, éloigné de deux lieues du Puy-de-Dome, font remplis, flon M. Grangier de Ve- dière, de pierres de volcan: ce bourg eft bäti dans le fond d'un cône renverié, car par quelqu'endroit qu'on y arrive, on eft obligé d'y aborder par des defcentes très-rapides, & lon n'aperçoit la pointe du clocher, quoique fort élevé, que lorf- que l'on eft prêt à defcendre: au milieu de ce bourg coule une petite rivière qui prend fà fource dans les montagnes voifines, J'ai eu occafion, dit M. de Vedière, de voir dans plufieurs titres du Chapitre de cet endroit, écrits en latin, & qui font du x11.7"* fiècle, qu'Orcival y eft dénommé indiftinétement Orcivallis où Urcivallis. Seroit-ce trop hafarder de penfer que cette dénomination peut tirer fon origine de quelqu'éruption dont l'époque s'eft perdue dans l'obfcurité des temps, mais dont les effets nous font retracés par la quantité des pierres calcinées qui couvrent les environs de ce lieu, fur-tout du côté de lorient. A plus de deux lieues à la ronde les pierres, font toutes de la même efpèce. 0 D-E SSL E °N CAS 73 La pierre des carrières de Langeat ne diffère de celle de Volvic, qu'en ce qu'elle eft un peu moins belle; on en fait cependant de fort beaux bâtimens & d'autres ouvrages , comme des croix pour les places publiques, des colonnes, des pié- deftaux ; c'eft la pierre la plus eftimée à quatre lieues à la ronde de Brioude. En allant de la Voute à Pouliaguet, l'on ren- contre communément des pierres calcinées ; elles ne font point attachées à la terre; il y en a qui ont près de deux pieds de diamètre ; leur légèreté les rend fort propres à bâtir des voûtes; ces pierres ne font probablement apportées dans ce canton, que parce qu'elles font roulées par Allier ou par la Savoire & le Doulon, rivières qui, après s'être réunies, fe jettent dans V'Allier : fi ces pierres ne prouvent pas qu'il y ait un volcan éteint dans cet endroit, elles prouvent au moins qu’ y en a un dans quelque canton affez éloigné de ceux que nous connoiffons maintenant. Je fai que les environs du Puy-en-Vélai en renferment un, que je ferai mieux connoître dans une autre occafion ; je dirai feulement qu'il y a un endroit peu éloigné de l'Allier, & à quelques lieues du Puy, qui s'appelle Pom-Gibel; il ne doit peut-être ce nom qu'à ce qu'il s'eft allumé dans ces environs des feux femblables à ceux que le mont Gibel vomit de nos jours : il paroït, comme l’on voit par les oblervations que j'ai rapportées dans mon Mémoire fur les volcans, & par celles-ci, que beaucoup de montagnes de l Auvergne ont anciennement été des volcans allumés; & il y a lieu de croire que plus on mulüpliera les obfervations, & plus on découvrira de ces fortes de montagnes. Si à toutes les obfervations rapportées dans ce Mémoire, on joint ce que j'ai dit fur les volcans éteinis de l’Auverune, dans celui que j'ai donné en DAS 166 defcription des mines de tripoli de Menat, inférée dans le volume pour l'année 4755; fi on‘y rapporte fur-tout les obfervations dont M. Hellot a donné une fuite à la tête du premier volume de la Traduction de la fonte des mines, par Schlutter, cette col- lection d'obfervations, dis-je, ne peut que confirmer le plan [à ccc iij 574 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE de Minéralogie pour l'Auvergne , dont j'ai parlé d’après M. du Tour, au commencement de mon Mémoire, & jeter un grand jour fur celui que j'ai donné, en 1746, fur la Minéra- logie de la France. En eflet, c'eft dans la partie de l'Auvergne qui n'a plus de pierres à chaux , que les carrières d’ardoifes de Prunet & de Murat fe trouvent ; celles de charbon de terre, ouvertes à a Fofle, à Braflac près Brioude, à Sainte - Florine, à Frugères, endroits peu éloignés de Brioude ; entre Fontanes & la Motte, il y a un petit terrain dont la furface eft d'une terre noire, mélée de petits morceaux de charbon de terre; les fouilles qu'on y a faites n'ont découvert que des petits bancs de charbon, infuffifans pour dédommager des frais. IL y a des mines d'antimoine près de Langeat & de Brioude, à Chaffignol, à Pradot & à Montel, paroifles d'Aly, à Mer- cœur, à la Fage, fitué à trois lieues de Brioude ; de fer à Compans ; de plomb à Combres, qui eft à deux lieues de Pont-Gibaud , à Rabelle, à Roule, qui eft fur la rivière de Sioule, dans la paroïfle de Chades, entre Riom & Pont- Gibaud ; des mines de cuivre à Sins - Andon près de Saint- Amand; d'argent à Rouripes, peu éloigné de la montagne du Puy; & d'azur proche le château d'Uffon. Tout concourt donc à prouver la vérité des deux affertions énoncées ci-deflus, & fi j'ofe le dire, les pierres que les rivières de l'Auvergne charient des montagnes, peuvent être apportées en preuve : ces pierres ne font, dans les endroits où les rivières ne coulent pas encore dans des cantons de pierre à chaux , que des granits, des fchites, des pierres talqueufes, des quartz, des laves & autres pierres de volcans; les pierres à chaux ne fe trouvent mêlées à celles-ci que lo:fque les rivières ont atteint les pays qui en renferment ; l'Allier apporte du côté de Fontanes, de Cougeac, de Vieille-Brioude, de la Vouté, de Conade, de Vouliandre, &c. des pierres remplies de tale, des quartz, du marbre, & des pierres de volcans ; on les y ramafle für le gravier dans les champs. voifins. On {€ fert communément de ces pierres pour bâtir à Brioude D'E SNS ic 1 E NÜC'E 8 & dans les villages nommés plus haut ; les unes font très-dures, blanches & tranfparentes à différens degrés ; les autres font grifes & remplies de petites paillettes talqueufes & brillantes; d’autres font gris-de-fer ou gris-blanc & fans paillettes ; leur groffeur eft plus ou moins confidérable ; les unes peuvent avoir un pied & demi de diamètre, les autres un pied, & d'autres un demi- pied ; on n'en rencontre guère qui aillent jufqu'à deux pieds : jai rapporté aïlleurs celles que la Dorgogne entraîne du Mont-d'or. Il ne s'agiroit , pour perfectionner ce plan de Minéralogie de l'Auvergne , que de bien déterminer le cours des montagnes, & la nature des pierres & des minéraux qui les compolent: fi ces montagnes s’enclavent les unes dans les autres, on expli- queroit les variétés qui peuvent { trouver; on verroit pour- quoi il y a quelquefois des cantons de pierres graniteufes, | comme du côté de Saint-Myon *, qui entrent beaucoup dans les terrains à pierres à chaux ; on conflateroit aifément, fi ce prolongement n’eft pas feulement une continuité de montagnes qui forment une efpèce de cap, fi on peut parler ainfi. Lorf qu'on Jouira entièrement de la belle Carte de la France, par M. de Caffini , le premier point fera éclairci, & la certitude du fecond fera dûe aüx recherches des Minéralogiftes ; il y a d'autant plus lieu d’efpérer que ce travail fe perfeétionnera , que Clermont polsède une Aflemblée de Savans, qui ont fait entrer dans leur plan d'étude les recherches d'Hifloire natu- relle, & le goût que M. du Tour a pris pour cette partie intéreffante de la Phyfique, ne peut qu'accélérer ce travail, qu'il a fi heureufement & fi avantageufement commencé. Je n'ai rien dit dans ce Mémoire des eaux minérales de l'Auvergne , quoique cette province en pofsède un bon nombre & de différentes efpèces ; je n'ai rien obfervé de * Saint-Myon eft placé au bas | branchues , fur lefquelles M. du d’une chaîne de montagnes, dont | Toura donné un Mémoire, depuis une eft tout près de cet endroit; | la lecture de celui-ci, fe trouvent on trouve au fommct de cette mon- | à demi-lieue de Saint-Myon fur le tagne une terre crétacée ; les pierres | chemin de Beauregardà Saint Myon. 576 MÉMOIRES DE L'ACADÉMIE ROYALE, &e. culér fur celles de ces eaux que j'ai pu voir ; je dirai feulement que les eaux chaudes font celles de Chaudefaigues,,. dans la haute Auvergne, celles du Mont - d'or ; les eaux aci- dules font celles des Martres-de-Veyre, du Mont-d'or , de Jaude à Clermont, de Chatel-Guyon près de Riom, de Saint-Pierre à Clermont, du Vernet près Saint - Nectaire, de Saint-Myon, de Saint - Floret près de Saint Cirgues, de Pont - Gibaud. Plufeurs autres rapportées dans l'ouvrage de M. Chomel, fur les eaux minérales de Vichy, font ou aci- dules ou: ferrugineufes. EXPLICATION DE S PARC ERNE ri 1. Pyramide dont il eft Mpatté , & qui eft décrite a la page SÉS* CAT Figure 2. Cette figure cft .celle d'une flatue dci , ‘trouvée a quatre ou cinq cents pas dela foffe où étoit enterrée {a momie dont il eft queftion à la page S 57. Figure 3. Celle - ci repréfente une figure humaine aflife fur fes talons , trouvée au même endroit ; ces deux figures font travaillées jort groffiérement. Mem. de Lace R.des Se .1769+ Pag. 876. Pl25 2 Zara Seule Men de VAE R. des 59. Pawo 576. Pl.26 ler Chaumettar ps eo A Maurice > Ê Pont Mérnet É i he à a Maiac LS à Lubillat | EL Flour # K À) AIGUES Garbrrnicre Pérre Mauhére © |E+ Coquil are | $ Cuivre 7 A Bergerens Läux Moéraler A Mararat ges minérale À chaude SP1G Guru L' 1 “is : “à ‘4 Pas 0 os Br Las K d M *: $ MORTE TE 22: r L dé [TA Ps