•V ^jk ^^^^^^T^B > l'^Wjfr' igt^^ or J <>/) (■f^-jj i^y < ir CD 1LJ Q>^) ILJ U * S^f%'w n -J ^^^^■Bhèé. h- CD 13 S^Hft LL_ 3 Il i^Er O ■ siu.1 X\ v >- Z ' r— JÊ^^m g u Q O (— o h 10 ^ïrf M «s uo O "*M y» u 3 o (D ^ £ ^3 UJ ni h z: _o^ ~~ aux Attagas j &c, I. La Gelinotte du Canada. . . 40^ II. Le Coq de bruyère à fraife , ou la groffe Gelinotte du Canada. , . 40 S IIL Gelinotte à longue queue. . . .41; Par M. de Buffon. HISTOIRE il H I S T O I R E NATURELLE. *V OUTARDE (a). Planche i d* ce volume\ JjA p:, e que l'on doit Ce propofer lorfqu'on entreprend d'éclair- e d'un animal, c'eft de taire * TV^r- tes planches enluminées, n.9 245, le mâle. . en Grec, O'tJ.- ; en Latin, Ans tard ; en Allemand, Trapp't en Polonois, Dropi 1 nlu- 1 X XIII, le n. wche lx x i r . !.. . , avec df Oifeauxj Tome lll% A 2 Hijloire Naturelle une critique févère de fa nomencla- ture, de démêler exa&ement les diffs- rens noms qui lui ont été donnés dans toutes les langues & dans tous îes temps , & de distinguer , autant qu'il eft poflîble, les efpèces différentes auxquelles les mêmes noms ont été appliqués-, c'eft le feul moyen de tirer parti des connoitfances des Anciens, & de les lier utilement aux découvertes des Modernes , & par cenféquent le feul moyen de faire de véritables pro- grès en Hifloire Naturelle; en effet, comment, je ne dis pas un feul homme, mais une génération entière, mais pîu- fieurs générations de fuite , pourroient- elles faire complètement l'hiftoire d'un feul animal ? prefque tous les animaux craignent l'homme & le fuient ; le caractère de fupériorité que la main du Très-Haut a gravé fur fon front, Borfnes figures enluminées. — Oftarde, Houtarde, Biibrde. liéton. Hijl. vat. des Oifeaux, page 235; & portraits d'oifeaux , page 56, a. — Otarde. Mé- moires pour fervir a THiftoire des Animaux, par- tie II, page 101. — L'outarde. BriiTon. Ornitholo- gie, tome V, page 18. xrât. 3 lir que Il les ent • - fûrs leur petit re, ce rendus plus h Lit foiblcflc ne, vivent chez ; • nous, fie nourriflent a nos . •- même de notre propi e nce , nous êtte mieux connus', &, parmi le grand ne nbre de claffes interméf .es entre ces ih\w dalles extrêmes, les uns K nt des re- r ?s fouterraines , les autres s'enfoncent dans la profondeur des eaux, d'autres fe perdent dans le vague des airs, & tous difparoxflênt devant le tyran de la Nature : comment d< ne pourtions- nous,dans un coim efpace de temps, voir tous les animaux dans toutes les foliations où il faut les avoir vus pour A \\ 4 Hijloire Naturelle connoître à fond leur naturel , leurs mœurs, leur initinct, en un mot, les principaux fairs de leur hiitoire ? On a beau raffembler à grands frais des fuites nombreufes de ces animaux , conferver avec foin leur dépouille ex- térieure, y joindre leurs fquelettes artiftement montés -, donner à chaque individu ion attitude propre & fon air naturel, tout cela ne repréfente que la Nature morte, inanimée, fuperficielle •, & iî quelque Souverain avoir conçu Tidée vraiment grande de concourir à l'avancement de cette belle partie de la fcience, en formant de vaftes mé- nageries, & réunifiant, fous les yeux des Obfervateurs , un grand nombre d'efpèces vivantes , on y prendroic encore des idées imparfaites de la Na- ture*, la plupart des animaux intimidés par la préfence de l'homme , impor- tunés par fes obfervations , tourmentés d'ailleurs par l'inquiétude in réparable de la captivité , ne montreroient que des mœurs altérées, contraintes & peu dignes des regards d'un Philofophe* J | ■■• «;• ; | : ' libfe, U1I (i l'on v i feule Lire. Il t., . ani- main (e t U i de i. ' . les ren : ; fonds > & fui en j .inc fl faui me ne en I, ranr, e de n'en erre point a] kï l'œil de l'Obfervareur, s'il n'eit en qu : Façon învifîble , agit fui le fiijet obfervé & l'altère réelfe- me il eft fort peu d\i- »ux, fur -tout parmi ceux qui font ailés, qu'il loir facile d'étudier ainfî, &: que les occalions de les voir agir d'après leur naturel véritable, & montrer le mœurs franches & pures de toute con- trainte, ne le préfentent que de loin en loin; il s'enfuit qu'il faut des fiîcles & beaucoup de halards heureux pour amafler tous les faits nécefoires , une .Je attention pour rapporter chaque . à . :n véritable objet , & A iij <$ Hijloire Naturelle conféquemment pour éviter ïa confu- fîon des noms qui, de toute néceffité, entraîneroit celle des chofes *, fans ces précautions, l'ignorance la plus abfolue feroit préférable aune prétendue fciencea qui ne feroit au fond qu'un tiffii d'in- certitudes & d'erreurs j l'Outarde nous en offre un exemple ftappant. Les Grecs lui avoient donné le nom d'ods ; Arif- tote en parle en trois endroits fous ce nom fbjj&c tout ce qu'il en dit convient exactement à notre outarde -, mais les Latins trompés apparemment par la relfemblance des mots, l'ont confondue avec ïotusy qui eft un oifeau de nuit. Pline ayant dit , avec raifon , que l'oi- feau appelé otis par les Grecs , fe nommoit avis tarda en Efpagne , ce qui convient à l'outarde , ajoute que la chair en eft mauvaife (c), ce qui convient à YotuSj félon Ariftote & la vérité, mais nullement à l'outarde-, & cette méprife eft d'autant plus facile (£) Hijloria Animalium , ïib. II, cap. XVlï; Sb. VI, cap. vi; & lib. IX, cap. XXXHI. (c) Hift. nat. lib. X, cap. xxiu VOutm 7 , dans le chapitra ifond évidemment l'< L'outarde avec b hibou. Alexandre Myndien , dam Athénée , tombe auffi dans la même erreur j en attribuant j Votus ou a VottSj qu'il pi nd pour un feul 8c même oHeau» de 1:. :l-à-flire velus» ce qui eft vrai de Yotusj hibou qui, comme [a plupart: des oileaux de nuit, a les jambes & les pieds velus, OU plutôt couverts julque fur les ongles de plumes effilées, & non de Yotis qui eft: notre outarde, & qui a non- feule- nt le pied, mais encore h partie inférieure de la jambe immédiatement au-dcllus du tarie, (ans plumes. Sigifmond Galenius ayant trouvé dans Héivckius le nom de pVçîr, dont l'application n'étoit point déterminée, ria de Ton bon plailir à i'ou- (d) Otis bubone minor efl, noftuis major, a-:ri- pùtmeis cmuidiitïbus undc nomen ilii. Hift. nat. lib. X, cap. SX m. . ".. nat. lib. IX. Aiv S HiJIoire Naturelle tarde (f); Se depuis M.rs Moehring 8c Briiîbn l'ont appliqué au dronte, fans rendre compte des raifons qui les y ont engagés. Les Juifs modernes ont détourné arbi- trairement l'ancienne acception du mot hébreu anapha^ qui fignifioit une efpèce de milan, & par lequel ils désignent au- jourd'hui l'outarde (g). M. BriiTon 5 après avoir donné îe mot (SiU comme le nom grec de l'outarde, félon Bélon , donne enfuite le mot oWiJ^a, pour fon nom grec, ielon Aîdrovande (h) ; ne prenant pas garde que o'tÏJ\o, eit l'accufatif de OV/V, êc par conféquent un feul & même nom-, c'eil comme s'il eût dit que les uns l'appellent tarda _> & Jes autres tardant, Scrrwenckfeîd prétend que le tetrix dont parle Ariftote (i)* & qui étoit ïourax des Athéniens , eft aufli notre (f) In Lexico Jymphono. (g) Pauï Fagius, apui Gefnerum, de Avibus, page 489. (h) Ornithologie, tome V,page 18. (i) Hifi. Animal. Iib. VI, cap. ï. pendant le peu i l'outarde; le ; routarde parmi blement it voulu e de plantes b i en fécond pli- i Philo . ■ Les oifc qui volent ; ii comme les perdrix « i rilles , ne font point de nids , ce - pondent à terre fut de petits oc de feuilles qu'elles ont amonce , L'alouette es: le tetrix font au(E« même. » Pour peu qu'on h:lle d'at- [àge, on voit qu'il eft K>rd queftion des oifeaux pefans : , qu'Ariftote parle enfuite de I : du tetrix > qui niellent à terre comme c< -aux qui volent peu , quoique apparemment ils foient moins pelans , puifque Ta- eft du nombre -, & que h • eut voulu parler de notre ou- fe fous le nom de utrix , il :;ée fans doute, comme oiieau pelant, (£) Jyiariu::. Ay i o Hijloire Naturelle avec les perdrix 8c les cailles, 8c non avec ïes alouettes qui, par leur vol élevé, ont mérité, félon Schwenckfeld lui-même, le nom de celipètes ( / ). Longolius (m) Se Gefner (n) pen- fent l'un 8c l'autre que le tetrax du poëte Néméfianus, n'eft autre chofe que l'outarde, & il faut avouer qu'il en a à peu près la grolïeur (o ) 8c le plumage (p) ; mais ces rapports ne font pas furfifans pour emporter l'identité- de l'efpèce , & d'autant moins fumfans, qu'en comparant ce que die Néméfianus de fon tetrax avec ce que nous favons de notre outarde, j'y trouve deux diffé- rences marquées ; la première , c'en; que le tetrax paroît familier par ftupi- dité , & qu'il va fe précipiter dans les (l) Aviarium Silefiœ , page 191» (m) Dialog. de Avibus. (n) De Avibusy liL III, page 489. (o) Tarpeiœ efl eufios arcis non corpore major. (j>) Perfîmilis cineri dorfum (collum forte) ma- culofaque terga Inficiunt pullœ cacaèantis (perdicis) ima- gine nota. VOuta i i ges qu'il .1 vu - qu'on dr< ; .m lieu que l'outarde ne ! tient pas l'afpeét de l'homme, cvc qu'elle s'enfuit fort vue, du plus loin qu'elle l'aperçoit (*'); en fecond lieu, le tetrax faifoh fon nid au pied du nt Apennin, au heu qu'Aldiovandc , qui écott [tauen9 nous allure poutive- ment qu'on ne von d'Outardes en Italie) que celles qui y ont été ap- portées par quelque coup de vent (I ); il eir vrai que Willulghby foupçonne elles ne lonr point rares dans ces , & cela lui ce qu'en partant par Modène,il en vit une au marche ; mais il me iemhle que cette outarde unique, aperçue au marché d'une ville comme ( q) Cum pediau ncefi fibi txmttmjlavtnt adjlans. Tmmemor ipfe fui tamtn in difpendia omit. (r) Neque hominem ad fe apprnp'mquanttm fufli- eum longinçuo cernant jîatim fagam itipcfiunr. Wflfulghby, Oruitholog. page - . (f) h aii a r.aflra hes apts ni fi fî tontm turbine advetfas non habet. Aidrov. QrnitA. tome 11^ page 92. A vj 1 1 Hifioire Naturelle Modène, s'accorde encore mieux avec le dire d'Aldrovande, qu'avec la con- jecture de Wiiluighby. M. Perrault impute à Ariftote d'a- voir avancé que Yods en Scythie (t) y ne couve point Tes œufs comme les autres oifeaux , mais qu'elle les enve- loppe dans une peau de lièvre ou de renard, & les cache au pied d'un arbre au haut duquel elle fe perche : cepen- dant Ariftote n'attribue rien de tout cela à l'outarde, mais à un certain oifeau de Scythie, probablement un oifeau de proie , puisqu'il- favoit écor- cher les lièvres & les renards , & qui leulement étoit de la groiTeur d'une outarde , ainfî que Pline (u) Se Gaza îe traduifent (x) ; d'ailleurs , pour peu qu'Ariftote connût l'outarde , il ne pouvoir ignorer qu'elle ne fe perche point. Le nom compofé de trapp - ganp^ _, (t) Mémoires pour fervir à Phiftoire des Ani- maux, partie II, page 104. (u) Nat. Hifloria , Mb. X , cap. x X X 1 1 1. (x) Hifî. Animalium , lib. IX, cap. x XX 1 1 1» de VO r * - 1rs AH cec l des J I irde qui > lorfqu'elle n'eft I : I il lui conviendi (I cette idée acceftbire de len- n'y ici oit point f, parce r un oife tu pac il rude de er, c'eft dire qu'il vole : A I du mot ganfi ., il c(t fufceptible d'équivoque ; ici il d ce qui en: contraire à ce qui a été dit de cet oiieau par tous les Naturalises , ex- cepté M. Barrcref/y); 2.0 que le duc, & non lJoutarde, a été en effet connu en Efpagne fous le nom d'avis tarda; & en Grec fous celui d'ctïs : aiTertion infoutenable & combattue par le témoi- gnage de prefque tous les .Ecrivains, Ce qui peut avoir trompé Bélon, c'eft que Pline donne fon fécond tetrao comme un des plus gros oifeaux après l'autruche ,- ce qui, fuivant Bélon, ne peut convenir qu'à l'outarde : mais nous verrons dans la mite que le grand tétras ou coq de Bruyère, furpaUe quelque- fois l'outarde en grofïeur ; & fi Pline ajoute que la chair de cette avis tarda (k) Plin. Nat. Bift. lib. X, cap. xxn. (I) Nota. M. Barrère reconnoît deux outardes d'Europe , mais il eft ïe feuf qui les donne pour des oifeaux des Pyrénées; & l'on fait que cet Auteur, né en Rouffiïlon, rapportoit aux mon- tagnes des Pyrénées tous les animaux des pro- vinces adjacentes. i 8 Hijloire Naturelle eft un mauvais manger, ce qui con- vient beaucoup mieux à Yotus hihou ou moyen duc, qu'à Yods outarde, Bélon auroit pu foupçonner que ce Natura- lise confond ici Yods avec Yotus > comme je l'ai remarqué plus haut , & qu'il attribue à une feule efpèce les pro- priétés de deux efpèces très-différentes, délignées dans fes recueils par des noms prefque femblablesj mais il n'au- roit pas du conclure que Y avis tarda . eft en effet un duc. Le même Bélon penchoit à croire que fon œdicnèmus étoitun oftardeau(m) ; 8c en effet, œz oifeau n'a que trois doigts, 8c tous antérieurs comme l'ou- tarde-, mais il a le bec très-différent > le tarfe plus gros, le cou plus court» 8c il paroît avoir plus de rapport avec le pluvier qu'avec l'outarde : e'eft: ce que nous examinerons de plus près dans la fuite. Enfin il faut être averti que quelques Auteurs trompés apparemment par la refïemblance des mots , ont confondu (m) Hiftoire naturelle des Oifeaux , lih V, de V Outarde. i 9 le nom de Jlarda qui , en Italien , fîgnifie une outarde , avec le nom de fiama qui, dans la même langue, fîgnifie perdrix (n). Il réfuîte de toutes ces difcuflïons, que Y otis des Grecs & non Yotus j eft notre outarde -, que ïe nom de PVpo* lui a été appliqué au hafard comme il Ta été enfuit e au dronte *, que celui â'anapha, que lui donnent les Juifs mo- dernes, appartenoit autrefois au milan j que c'eft Y avis tarda de Pline, ou plu- tôt des Efpagnoîs au temps de Pline, ainlî appelée à caufe de fa lenteur, 8c non, comme le veut Nyphus, parce qu'elle n*auroit été connue à Rome que fort tard > qu'elle n'eft ni le tetrix d'Ariftote , ni le tetrax du poëte Ne- mefianus 1 ni cet oifeau de Scythie, dont parle Ariflote dans fon Hïftoire des Animaux (o) , ni le tetrao alter de Pline, ni un oifeau aquatique, 8c enfin («) Petrus Jponens Patavinus feu conciliator ajjud Aldrovand. Ornith. lib. XIII, cap. x 1 1. (0) Lib. IX, cap. xxxnu zo HiJIoire Naturelle que c'eft la jlarda & non la Jlarna des Italiens (p). (p) Voici tous les noms fous lefqueïs les diffé- rais Auteurs en ont parlé. Otis, Tarda, Bi (larda. Gefn. de Avibus , pagi 484 — 4S6; & Icon Avium, pag. 67. Otis Jive Tarda. Jonfton, de Avibus , pag. 42. Oft's /£# 7Wa avis. Aldrovand. Ornitholog* tom. II, pag. 85. Otis, Tarda Bi Jlarda. Charlet, Ëxercit. pag. '82, n.°8. Ow Grsecis; Wa, Ifidoro; Bifcarda, Alberto ; Rzaczynski, Hijl. nat. Poloniœ, pag. 289 ; Û Auïïuarium ejufd. pag. 401. Otis, Tarda, Sibbaldi Scotia illuftrata, part. II, îïb. 111, pag. 16. Otis , Tarda. Wiiïughby, Ornith. pag. 129. Otis, Tarda. Ray, Synopjis Avium, pag. 58. Otis , jugtilo utrimque crijlato , Tarda. Linnaeus, Syjl. nat. edit. X, Gen. 85, Spec. 1. Tarda recentiorum. Schwenckfeld, Aviariam SUefi*, pag. 355. Tarda. Klein, de Avibus, pag. 18, n.° 1. Tarda Pywiaïca fulva, maculis nigricantibus; de V Outarde. 2 r Pour fentir combien cette difcufîion marginibus pemiarum rofeis. Barrère , Ornitholog. CM'. III, Gen. ix, Spec i. Nota. Ce ne font pas ïes bords des plumes , mais le duvet qui eft couleur de rofe. Tetrax feu Tarax Nemejiani. Longolio , Gefn. Tetraon. Longolio , Schwenckfeld, Charlet 5 . Klein. Tetrix, Ourax. Ariftote , Schwenckfeld. Erytrhontaon. Olaï Magni, Schwenckfeld, Charîet, Klein. Anfcr-trappa.1R.Zciczynshi,j4uciuarium, Hijl. nat. Polon. pag. 401. En François, Outarde. Albin, tome III, page 16. Edwards , planche lxxiii — lxxiv. Otarde. Mémoires pour fervir à FHiftoire des Animaux, partie II, page 101. Ojîarde. Bélon, Hijl, nat, des Oifeaux , page 236. Ojlarde, Houtarde , Bijlarde. Bélon, Portraits d' Oifeaux > page 56. En Hébreu, Alhabari. Gefn. AIdrov. Nota. II ne faut point confondre ce nom avec celui à'houbaary qui, en Barbarie, lignifie une petite outarde, dont je donnerai l'hiftoire. Clas , id ejl, Tarda avis Jylvatici. Gefn. pag. 484. Anaph% Pauti Fagii, Gefn. pag. 480. 22 Hiftoire Naturelle préliminaire éroit importante, il ne faut que fe représenter la bizarre & ridicule idée que fe feroit de l'outarde un com- mençant qui auroit recueilli, Tans choix & avec une confiance aveugle , tour ce qui a été attribué par les Auteurs à cet oifeau , ou plutôt aux ditférens noms par lefquels il lauroit trouvé défigné dans leurs ouvrages -, il feroit obligé d'en faire à la fois un oifeau de jour & de nuit, un oifeau de montagne 8c de vallée , un oifeau d'Europe & a Amé- En Grec, owk, a\h3 o'vrk. Gefn. — P'*?e« $igifm. Galenii. Gefn.^ag. 486. En Italien , jîarda. En Allemand , Trapp. Gefner , Rzaczynski ; Frifch. — Acher-trapp. Gefn. ■ — Trappe. Sehwenck- feki, Rzaczynski. — Acker-trappe. Schwenckfeïd. En Flamand, Trap-ganfa. Gefn. ■ — Trapp-gans* Schwenckfeïd. En Suédois , Trapp. En Poîonois, Drop , Trop. Rzaczynskh En Hlyrien , Drofa. Gefn. En Anglois, Bijïard. Gefn. — Bujîard. W3. îulghby , Charleton 3 Albin. EnÉcoffois. GuJlarde.Hco.or, Boeth, — Gujl&U. Aldrov. de V Outarde. 23 rique, un oifeau aquatique & terrefrre, un oifeau granivore & carnafïier , un oi- feau très-gros Se très-petit 5 en un mot, un monftre & même un monftre impoîlï- ble -, ou s'il vouloit opter entre ces attri- buts contradictoires , ce ne pourroit être qu'en rectifiant la nomenclature comme nous avons fait par ia comparaifon de ce que Ton fait de cet oifeau, avec ce qu'en ont dit les Naturaliftes qui nous ont précédé. Mais c'eft affez nous artêter fut le nom , il eft temps de nous occuper de la chofe. Gefnet s'eft félicité d'a- voir fait le premier la remarque que l'outarde pouvoit fe rapporter au genre des gallinacés (q) > & il eft vrai qu'elle en a le bec & la pefanteur-, mais elle en diffère par fa groiTeur, par (es pieds à trois doigts , par la forme de la queue , par la nudité du bas de la jambe , par la grande ouverture des oreilles , par les barbes de plumes qui (q) Quanquam gallinaceorum generi otidem aifen- hendam nemo adhuc monuerit, mihi tamen re&e ad il rejerri vidttur. Gefn. de Avibus, pag. 484. 24 Hifcoire Naturelle lui tombent fous îe menton , au lieu de ces membranes charnues qu'ont les gallinacés , fans parler des différences intérieures. Aldrovande n'eft pas plus heureux dans fes conjectures , lorfqu'il prend pour une outarde cette aigle frugivore > dont parle Elien (r) _, à caufe de fa grandeur (f) ., comme (î le feul attri- but de la grandeur fufrifoit pour faire naître l'idée d'un aigle j il me paroîc bien plus vraifemblabîe qu'Eiien vou- loir parler du grand vautour, qui efl un oifeau de proie comme l'aigle , & même .plus puilTant que l'aigle com- mun, & qui devient frugivore dans les cas de néceflité : j'ai ouvert un de ces oifeaux qui avoit été démonté par un coup de fufii , & qui avoit pafïë plu- fieurs jours dans des champs femés de blé*, je ne lui trouvai, dans les inteinns, (r) Lib. IX, de nat. Animal, cap. X. Cet aigle, félon Elien, s'appeloit aigle de Jupiter, & étoit encore plus frugivore que l'outarde , qui mange des vers de terre; au lieu que L'aigle dont il s'agit île mange aucun animal. (f) Ornithologie, tome II,j>age 03. qu'une de V Outarde. 2j qu'une bouillie verte, qui éroit évidem- ment de l'herbe à demi-digérée. On retrouveroit bien plutôt les ca- ractères de l'outarde dans le tecrax d'Athénée , plus grand que les plus . gros coqs ( & l'on lait qu'il y en a de très-gros en Aiîe), n'ayant que trois doigts aux pieds , des barbes qui lui tombent de chaque coté du bec , le plumage émaiilé, la voix grave, & dont la chair a le goût de celle de l'autruche avec qui l'outarde a tant d'autres rap- ports ( t ) ; mais ce tetrax ne peut être l'outarde, puifque c'eft un oifeau dont, félon Athénée , il n'eil fait aucune men- tion dans les livres d'Ariftote ; au lieu que ce Pniiofophe parle de l'outarde en pluiieurs endroits. On pourroit encore foupçonner , avec M. Perrault ( u) _> que ces perdrix des Indes dont parle Strabon , qui ne font (t) Gefner , de Avibus > pag. 487. Otis avis fidipes efî , tribus infiflens- digiiis , magnitudine galli- nacei majoris , capite oblongo , oculis amplis , rofird acuto , linguâ ojjèâ , gracia collo. (u) Mémoires pour férvir à FHiftoire des Ani- maux , partie II , page 102. U if eaux ^ 1 orne III. B z6 Hi/îoire Naturelle pas moins groftes que des oies , font des efpèces d'outardes •, le mâle diffère de la femelle par les couleurs du pîu^ mage, qu'il a autrement distribuées , 8c plus vives, par ces barbes de plumes, qui lui tombent des deux côtés fur ïe cou , dont il eft furprenant que M, Perrault n'ait point parlé , 8c dont mal- à-propos Albin a orné la figure de la femelle , par fa groileur prefque double de celle de la femelle, ce qui eft une des plus grandes difproportions qui ait été obfervée en aucune autre efpèce , de la taille de la femelle à celle du mâle (x )* Bélonfy)^ & quelques autres, qui ne connoiiToient ni le cafoar , ni le touyou 3 ni le dronte , ni peut-être ïe grirfon ou grand vautour , regar- doient l'outarde comme un oifeau de la féconde grandeur , 8c le plus gros après l'autruche : cependant le pélican s qui ne leut étoit pas inconnu ( \) * eft (x) Edwards, Hifl. Nat. of Birds , planche txxiv. (y) Ibidem, pag. 236. (i) Ibidem f pag. 153. de V Outarde. 27 beaucoup plus grand > félon M. Perrault -, mars il peut Te faire que Bélon ait vu une groflTe j outarde Se un petit pélican , & , dans ce cas , tout Ton tort fera , comme celui de bien d'autres , d'avoir a (Tu ré de l'efpèce , ce qui n'étoit vrai que de l'in- dividu. M. Edwards reproche à Willughby de s'être trompé groffièrement , & d'avoir induit en erreur Albin , qui l'a copié , en difant que l'outarde avoit foixante pouces anglois de longueur, du bout du bec au bout de la queue : en effet, celles que j'ai mefurées n'a- voient guère plus de trois pieds , ainiî que celle de M. Briffbn -, & la plus grande, qui ait été indurée par M. Edwards , avoit trois pieds & demt dans ce fens , Se trois pieds neuf pouces & demi , du bout du bec au bout des ongles (a) : les Auteurs de la Zoo- logie Britannique la fixent à près de quatre pieds anglois , ce qui revient à un peu moins de trois pieds neuf (a) Edwards , Hift. Nat. of Birds , planche LXXIII. Bij 28 Hijtoïre Naturelle pouces de France (b ) : l'étendue du vol varie de plus de moitié en difFérens fujets 3 elle a été trouvée de jfept pieds quatre pouces par M. Edwards , de neuf pieds par les Auteurs de la Zoologie Bri- tannique j & de quatre pieds de France par M. Perrault , qui aflfure n'avoir jamais obfervé que des mâles , toujours plus gros que les femelles. Le poids de cet oifeau varie aufîi conhdérabiement , les uns l'ont trouvé de dix livres ( c) _, & d'autres de vingt- içxfc(à) j & même de trente ^; mars, outre ces variétés dans le poids & la grandeur , on en a auiîi remarqué dans les proportions : tous les individus de cette efpèce ne paroiflent pas avoir été formés fur le même modèle. M. Perrault en a obfervé dont le cou étoit plus long , & d'autres dont le cou étoit plus court proportionnellement aux (b) On fait que le pied de Paris eft plus long que celui de Londres de près de neuf lignes. (c) Gefner , de Avibus, pag. 488. (à) Britifeh Zoology , pag. 87. (e) Rzaczynski, Audtuarium , pag. 401. de l'Outarde. 29 jambes ; & d'autres dont îe hèc étoïc plus pointu 5 d'autres dont les oreilles croient recouvertes par des plumes plus longues (f) ; tous, avoient le cou 8c les jambes beaucoup plus longs que ceux que Gefner & Aldrovande ont exa- minés. Dans les fujets décrits par M. Edv/ards, il y avoir, de chaque côté du cou , deux places nues , de couleur violette , & qui paroiiibïent garnies de plumes , lorfque le cou étoit fort éten- du (g ) ; ce qui n'a point été indiqué par les autres Observateurs. Enfin M. Klein a remarqué que les outardes de Pologne ne redembîoient pas exacte- ment à celles de France & d'Angle- terre (h) ; 8c en effet on trouve , en comparant les defcrrptions , quelques différences de couleurs dans le plumage , le bec , &c. (f) Mémoires pour fervir à ï'Hiftoire des Ani- maux , partie II , pages 99 — 102. (g) Edwards , Hijl. Nat. of Birds , planche LXXIV. (h) Hiflou dvium , pag, 18. Birj jo Hifioire Naturelle En général, l'outarde fe diftingue de l'autruche , du touyou , du cafoar & du dronte , par Tes ailes qui, quoique peu proportionnées au poids de fon corps , peuvent cependant l'élever & la fou- tenir quelque temps en l'air -, au lieu que celle des quatre autres oifeaux, que j'ai nommés , font abfolument inutiles pour le vol: elle fe distingue de prefque tous les autres par fa grolTeur , fes pieds à trois doigts ifolés , & fans membranes , fon bec de dindon , (on duvet couleur de rofe , & la nudité du bas de la jambe j non point par chacun de ces caractères, mars par la réunion de tous, L'aile eft compofée de vingt -fix pennes , félon M. BrifTon , & de trente- deux ou trente - trois , fuivant M. Edwards, qui peut-être compte celles de l'aile bâtarde. La feule chofe que j'aie à faire remarquer dans ces pennes, & dont on ne peut guère prendre une idée en regardant la figure , c'eft qu'aux troisième , quatrième , cinquième Se fixième plumes de chaque aile , les Barbes extérieures deviennent tout- à- de l'Outarde. 3 t coup plus courtes, 8c ces pennes con- féquemment plus étroites à l'endroit où elles fortent de defïbus leurs cou- vertures ( i). Les pennes de la queue font au nom» bre de vingt 3 8c les deux du milieu font différentes de toutes les autres* M. Perrault (k) impute à Bélon 3 comme une erreur , d'avoir dit que le deifus des ailes de l'outarde étoït blanc ( l) j contre ce qu'avoient obiervé M.rs de l'Académie 5 & contre ce qui fe voit dans les oiieaux, qui ont com- munément plus de blanc fous le ventre & dans toute la partie inférieure du corps > 8c plus de brun & d'autres couleurs fur le dos 8c les ailes j mais il me femble que fur cela Bélon peut être aïfément juftifié 5 car il a dit exactement , comme M.r* de l'Académie , que l'outarde étoit blanche par- dejfous le ventre & defjous les ailes; &.lorfqu'ii a avancé que le deff. -j (i) Koyq l'Ornithologie d« M. Brifîbn , tomeV, page 22. (k) Mémoires pour fervir à î'Hiitoiré des Ani- maux , partie II , page 102. (lj Bélon, Nature des 0 i féaux , page 235. Biv 3 2 Hijloire Naturelle des ailes étoit blanc , il a fans doute entendu parler des pennes de l'aile qui approchent du corps, & qui fe trouvent en errer au-deffous de l'aile, celle-ci étant fuppofée piiée & l'oifeau debout : or, dans ce Cens , ce qu'il a dit fe trouve vrai , & conforme à la description de M. Edwards ? où la vingt - iixième penne de l'aile & fuivantes jufqu'à la trentième , font parfaitement blan- ches (m). M. Perrault a fait une obfervation plus jufte : c'eft que quelques plumes de l'outarde ont du duvet, non -feule- ment à leur bafe , mais encore à leur extrémité-, en forte que la partie moyenne de la plume , qui eft compofée de barbes % fermes & accrochées les unes aux autres , fe trouve entre deux parties où il n'y a que du duvet -, mais ce qui eft très -remarquable , c'eft que le duvet de la bafe de toutes les plumes , à l'exception des pennes du bout de l'aile, eft d'un rouge vif, approchant du cou- leur de rofe , ce qui eft un caractère (m) Edwards , Hïjî. Nat. of Birds, planche LXXIII. de V Outarde. 33 commun à la grande & à la petite outarde : le bout du tuyau eft auffi de ïa même couleur (n). Le pied ou plutôt îe tarfe , & ia partie inférieure de la jambe , qui s'arti- cule avec le tarfe > font revêtus d'écaillés très - petites *, celles des doigts font en tables longues & étroites *, elles font toutes de couleur grife , Se recouvertes d'une petite peau , qui s'enlève comme îa dépouille d'un ferpent (0). Les ongles font courts , & convexes par-delïbus comme par-defïus , ainfi que ceux de l'aigle que Béion appelle hali&tos (p) ; en forte qu'en les cou- pant perpendiculairement à leur axe, la coupe en feroit à peu près circu- laire ( q). ■ M. Salerne s'eft trompé , en impri- mant que l'outarde avoit , au contraire , les ongles caves en de flous (r). (n) Mémoires pour fervir à l'Hiftoire des Ani- maux, partie II, page 103. ( 0) Animaux de Perrault, partie II , page 10^ (p) Bélcn , Nature des Oifeaux ■> ïib.II, cap. VII» ( q) Animaux de Perrault , partie II , page 104, (r) Crnitàologie , page 153. Bv 5 4 Hljhire Naturelle Sous ïes pieds , on voit en arrière un tubercule calleux , qui tient ïieu de talon (f). La poitrine eft groiTe & ronde (t) ; la grandeur de l'ouverture de l'oreille eifc apparemment fujette à varier ^ car Bélon a trouvé cette ouverture plus grande dans l'outarde que dans aucun autre oileau terreftre ( u ) ; & M.rs de l'Académie n'y ont rien vu d'extraordinaire (xj. Ces ouvertures font cachées fous les plumes -, on aperçoit dans leur intérieur deux conduits 3 dont l'un fe dirige au bec 5 8c l'autre au cerveau ( y )• Dans le palais & la partie inférieure du bec , il y a , fous la membrane qui revêt ces parties , pluheurs corps glan- duleux , qui s'ouvrent dans la cavité (f) Péîon , Nature des Oi féaux , page 235. — Gefner , de Aiihus , pag. 488 , &c. (t) Béîon, page 235. ( u ) ^n mettroit bien le bout du doigt dans le conduit. îbid. ( x) Animaux de Perrault, page 102» (y) Béion, Nature dis 0 i 'féaux , page 235*. de V Outarde. 3j du bec par plufîeurs tuyaux fort vi- ables (i). La langue eft charnue en dehors \ elle a au -dedans un noyau cartilagi- neux , qui s'attache à l'os hyoïde \ comme dans ïa plupart des oifeaux ; fes côtés font hériîTés de pointes d'une fubitance moyenne entre ïa membrane & le cartilage ( a) ; cette langue eft dure & pointue par le bout , mais elle n'eft pas fourchue , comme Ta dit M. Lirmxus > trompé fans doute par une faute de ponctuation qui le trouve dans Àldrovande , & qui a été copiée par quelques autres ( b ). Sous la langue fe préfente l'orifice d'une efpèce de poche , tenant environ fept pintes angloifes , Sz que le docteur DouglaiT, quiîa découverte ie premier, (l ) Animaux de Perrault 7 page 109. (a) Ibidem. (b ) Lingua ferrata > utrimque acuta.; au lieu de lingua ferrata utrimque, acuta. . Cette phraie i/eit qu'une traduction ae celle -ci de Bélon : fa langue cfl dentelée de chaque côté , pointue c? dure par ie bout; d'où l'on voit que Yutrimque doit fe 1 apporter k ferrata, & non au mot acuta, Bvj 5 6 ÎJijîoire Naturelle regarde comme un réfervoir que l'ou- tarde remplit d'eau pour s'en fervir au befoin , lorfqu elle fe trouve au milieu des plaines vaftes & arides , où elle fe tient par préférence \ ce fingulier réfer- voir eft propre au mâle (c) 3 & Je foupçonne qu'il a donné heu à une méprife d'Ariftote» Ce grand Natu-. ralifte avance que l'œfophage de l'ou- tarde eft large dans toute fa longueur (d) • cependant les Modernes , & notamment M,rs de l'Académie , ont obfervé qu'il s'élargiiToit feulement en s approchant du gêner (e). Ces deux aliénions , qui paroiflent contradictoires, peuvent néan- moins fe concilier , en fuppofant qu'A- riftote 3 ou les Obfervateurs chargés de recueillir les faits dont il compofoit fon Hiftoire des Animaux , ont pris pour l'œfophage cette poche ou réfervoir (c) Edwards , Hifl. Nat. of B'irds , planche Lxxm*. (d) Hifl. Animal* ïîî>. II , cap. ulîimo. ( e) Gefner , de Avibus , pag. 488. — Âldrov. Gmitholog. tome II , page 92. — ■ .Animaux de Perrault, partie II, page 106- de P Outarde. 37 qui eft en effet fort ample & fort iarge dans toute fon étendue. Le véritable œfophage , à l'endroit où il s'épaifîic , eft garni de glandes régulièrement arrangées : le gélîer , qui vient enfuite ( car il n'y a point de jabot ) , eft long d'environ quatre .pouces , large de trois *, il a la dureté de celui des poules communes , & cette dureté ne vient point, comme dans les poules , de répaiiTeur de la partie char- nue , qui eft fort mince ici , mais de îa membrane interne , laquelle eft très- dure, très - épaifte , & de plus godron- née , plirlée & repiiiTëe en dirférens fens , ce qui groiîit beaucoup le volume du géfier. Cette membrane interne paroît n'être point continue , mais feulement con- rigu'ë & Jointe bout à bout à la mem- brane interne de I'œfophage ; d'ailleurs celle-ci eft blanche, au lieu que celle du gé-ier eft d'un jaune doré (f). La longueur des mteftins eft d'envi- ron quatre pieds , non compris les czcum z (f) Animaux de.Perraiiît,./ame II, page 107. 5 8 Hljloire Naturelle. la tunique interne de Y iléon eft plïiîée félon fa longueur 3 Se elle a quelques rides tranfverfales à fon extrémité (g). Les deux c&cum fortent de l'inteftin à environ fept pouces de Y anus _> fe diri- geant d'arrière en ayant. Suivant Gefner , ils font inégaux félon toutes leurs dimen- iions , & c'eft le plus étroit qui eft le plus long dans la raifon de iîx à cinq (h). M. Perrault dit feulement que le droit , qui a un pied plus ou moins , eft ordi- nairement un peu plus long que le gau- che (i ). A un pouce à peu près de Y anus ^ Finteftïn fe rétrécit , puis ie dilatant , forme une poche capable de contenir un œuf, & dans laquelle s'insèrent les uretères Se le canal déférent : cette poche inteftinale , appelée bourfe de Fa- brice (k ) j a auffi fon cœcum long de deux pouces , large de trois lignes , & (g) Animaux de Perrault, partie II, page 107. (h) Gefner , de Jvikus , pag. 486. (i) Animaux de Perrault , partie II, page 107. (k) Du nom de Fabricius ah Jauapendznte, qui îe premier l'a obfervée. Ibidem. de V Outarde. 39 le trou , qui communique de l'un à l'autre , efl furmonté d'un repli de la membrane interne , lequel peut fervir de valvule (l). Il réfulte de ces obfervations , que l'outarde , bien loin d'avoir pluiîeurs eftomacs & de longs inteftins , comme les ruminans , a au contraire îe tube ïnteftinai fort court 8c d'une petite capacité , & qu'il n'a qu'un feul ven- tricule } en forte que l'opinion de ceux qui prétendenr que cet oifeau rumine (m) 3 feroit réfutée par cela feul : mais il ne faut pas non plus fe perfuader, avec Albert, que l'outarde foit carnaf- fière , qu'elle fe nourrifïe de cadavres , que même elle fafTe la guerre au petit gibier , & qu'elle ne mange de l'herbe & du grain que dans le cas de grande difette *, il faut encore moins conclure de ces fuppofitions qu'elle a le hec 8c les ongles crochus, toutes erreurs accu- (l) Animaux de Perrault , partie II, page 107. (m) Athénée ? Euftache ; voyei Geïher? page 484. 40 Hijïoire Naturelle mulées par Albert (n) , d'après un pa£ fage d'Ariftote mai entendu (oj j admifes par Gefner avec quelques modifications ( P ) _, mais rejetées par tous les autres Naturaliftes. L'outarde eft un oifeau granivore 5 elle vit d'herbes , de grains Se de toutes fortes de femences; de feuilles de choux , de dents de lion , de navets , de myfotis ou oreille de fouris , de vei^ce , d'ache , de daucus Se même de foin , Se dé ces gros vers de terre que , pendant l'été > l'on voit fourmiller fur les dunes tous les matins, avant le lever du foleilfqj ; dans le fort de l'hiver Se. par les temps (n) Voyez Gefner , de Avibus , page 485. (0) Nota. Aïdrovande prétend, que l'idée de faire de l'outarde un oifeau de proie, a pu venir à Albert de ce paffage d'Ariftote : Avis Schythica tju&dam que j'ai difeuté plus haut. Vbye^ Aidrovande , Ornithoïeg. toire II , page 90. Ce qu'il y a de certain , c'eft que ce n'eft pas d'après Pïnfpedîon de l'animal qu'Albert s'eft formé cette idée. (j) Gefrer, de Avibus , pag. 48c. f c) Britifch Zooidgy , page 88 , & prefque tous les autres Naturaliftes que j'ai cités dans cet article. de V Outarde. 41 de neige , elle mange l'écorce des ar- bres (r); en tout temps , elle avale de petites pierres , même des pièces de métal , comme l'autruche , & quelque- fois en plus grande quantité. M.rs de l'Académie ayant ouvert ïe ventre 'de Tune des (ix outardes qu'ils avoient obfervées , le trouvèrent rempli , en partie , de pierres , dont quelques- unes étoient de la grorTeur d'une noix, & en partie de doubles , au nombre de quatre - vingt - dix , tous ufés & polis dans les endroits expofés aux frotte- mens 5 mais fans aucune apparence d'é- rofion (f). Wïllulghby a trouvé dans l'efëomac de ces oileaux, au temps de la moifïon, trois ou quatre grains d'orge , avec une grande quantité de graine de cigue ( t ) _, ce qui indique un appétit de préférence pour cette graine , & par coniéquent ie meilleur appât pour l'attirer dans les pièges. (r) Gefner, de Avlbus , pag. 488. (f) Animaux de Per ault , partit II, page 107» (t) Omithoiogia , pag. 129. 41 HiJIoire Naturelle Le foie eft très-grand -, la véficule dii fiel , le pancréas , le nombre des canaux pancréatiques 3 ïeur infettion , ainfî que celle des conduits hépatiques & cyftiques > ' font fujets à quelques variations dans les différens fujets (u). Les tefticules ont ïa forme d'une petite amande blanche, d'une fubftance allez ferme *, le canal déférent va s'inférer à ia partie inférieure de ïa poche du recèum j ! comme je l'ai die plus haut , & l'on ! trouve , au bord fupérieur de Y anus y une petite appendice , qui tient lieu de verge. M. Perrault ajoute à ces obferva- tions anatomiques la remarque fuivante *, c'en: qu'entre tant de fujets qu'avoient dnTéqués M.rs de l'Académie , il ne s'étoit pas rencontré une feule femelle -, mais nous avons dit à l'article de l'au- truche ce que nous penfons de cette remarque. Dans la faifon des amours 5 le mâle va piarfant autour de la femelle & fait (u) Animaux de Perrault , page 105. de V Outarde. 43 une efpèce de roue avec fa queue (x ). Les œufs ne font que de la grofTeur de ceux d'une oie -, ils font d'un brun olivâtre pâle , marqués de petites taches plus foncées , en quoi leur couleur a une analogie évidente avec celle du plumage. - Cet oifeau ne construit point de nid, mais il creufe feulement un trou en terre (y) _> & y dépofe fes deux œufs , qu'il ; couve pendant trente jours, comme font tous les gros oifeaux , félon Ariftote^^. Lorfque cette mère inquiète fe défie des Chafïeuts , & qu'elle craint qu'on n'en veuille à fes œufs , elle les prend fous fes ailes ( on ne dit pas comment ) & les tranfporte en lieu sûr ( a). Elle s'établit ordinairement dans les blés qui approchent de la maturité , pour y faire fa ponte , fuivant en cela l'in(lin6t commun à tous les animaux , de mettre (x) Klein, Hifi. Avium , pag. 18. *- MeruU epud Gefn. de Avib\\s,pag. 487. (y) Britifch Zoology , pag, 88. (l) Hïjl. Anim. ïib. VI , cap. VI. (a) Klein, Hifi. Avium , pag. 18, 44 Hijîoire Naturelle leurs petits à portée de trouver en naif- fant une nourriture convenable. M. Klein prétend qu'elle préfère les avoines comme plus baffes , en forte qu'étant pofée fur fes œufs , la tête domine fur la campa- gne , & qu'elle purife avoir l'œil fur ce qui fe paiTe autour d'elle *, mais ce fait avancé par M. Klein ( b ) 3 ne s'accorde ni avec le fentiment général des Natu- ralises , ni avec le naturel de l'outarde, qui , fauvage & défiante comme elle ïeCi , doit chercher fa sûreté plutôt en fe cachant dans les grands blés, qu'en fe tenant à portée de voir les Chaiîeurs de loin , au rifque d'en être elle-même aperçue. Elle quitte quelquefois fes œufs pour aller chercher .fa nourriture -, mais fi pendant ces courtes abfences quelqu'un les touche ou les frappe feulement de fon haleine , on prétend qu'elle s'en aperçoit à fon retour, & qu'elle Its aban- donne ( c). L'outarde , quoique fort groffe , eft (h) Klein , Hijl. Avium , pag. 1 8.. (cj Hedlor Boeth, apud Gefn, pag. 488, de V Outarde. 4j un animal très ~ craintif , & qui paroit n'avoir ni le fentiment de ia propre force , ni l'inftinci: de l'employer : elles s'alTemblent quelquefois par troupes de cinquante ou foixante , Se ne font pas plus raflùrées par leur nombre que par leur force & leur grandeur , la moindre apparence de danger , ou plutôt la moindre nouveauté les eflraie , & elles ne pourvoient guère à leur conferva- tion que par la fuite : elles craignent fur -tout les chiens, & cela doit être, purfqu'on fe fert communément des chiens pour leur donner la chafle 9 mais elles doivent craindre auffi le re- nard , la fouine , & tout autre animal 5 fi ! petit qu'il foit , qui fera a(Tez hardi pour j les attaquer -, à plus forte raifon les anï- ; maux féroces , & même les oifeaux de proie contre lefqueîs elles oferoient bien moins fe défendre : leur puiillanimité efi: telle que , pour peu qu'on les bielle , elles meurent plutôt de la peur que de ïeurs blefïures ( d ). M. Klein prétend néanmoins qu'elles fe mettent quelque- fois en colère , & qu'alors on voit (d) Gefner? 4e, Avibus , pag. 48 S, 46 Hifioire Naturelle s'enfler une peau lâche qu'elles ont fous le cou. Si l'on en croit ïes An- ciens , l'outarde n'a pas moins d'amitié pour le cheval qu'elle a d'antipathie pour le chien j dès qu'elle aperçoit celui - là , elle , qui craint tout , vole à 1 fa rencontre", 8c fe met prefque fous fes pieds (e). En fuppofant bien conf- -tatée cette fingulière fympathie entre des animaux fi différens , on pourroit , ce me femble , en rendre raifon en difant que l'outarde trouve , dans la fiente du cheval, des grains qui ne font qu'à demi-digérés , 8c lui font une refleurce dans la difette (f). Lorfqu'elie eft chafîee , elle court fort vite, en battant des ailes, 8c va quel- quefois plusieurs milles de fuite 8c fans s'arrêter (g) ; mais comme elle ne prend fon vol que difficilement 8c lorfqu'elie eft aidée , ou fi l'on veut portée par (e) Oppïen, de Aucupio , lib. ni, (f) Otidibus amicitia cum equis quibus appropin~ quart & fimum dejicere gaudent. Plutarq. de Soc, jinimal, (g) Britifch Zoology , pag. $$. de V Outarde. 47 un vent favorable , & que d'ailleurs elle ne Te perche ni ne peut fe percher fur les arbres , foit à caufe de fa pefan- teur , foit faute de doigt poftérieur dont elle puhTe faifir la branche êc s'y fou- tenir , on peut croire , fur le témoi- gnage des Anciens & des Modernes (h) y que les lévriers & les chiens courans la peuvent forcer : on la chaiTe auflï avec l'oifeau de proie (i) ., ou enfin on lui tend des filets , & on l'attire où Ton veut en faifant paroître un cheval à propos , ou feulement en s'afFublant de la peau d'un de ces animaux (k). Il neft point de piège , fi groiiier qu'il foit, qui ne doive réufîir, s'il eft vrai, comme le dit Elien , que , dans le royaume de Pont, les renards viennent à bout de les attirer à eux en fe cou- chant contre terre & relevant leur queue , à laquelle ils donnent , autant qu'ils peuvent , l'apparence & les mouvemens du cou d'un oifeau -> les outardes qu; (h) Xénophon , Élien , Albin , Frifch , &c. (i) Aïdrov. Ornitholog. tome II , page 92. (k) Athénée, 48 Hifioire Naturelle prennent , dît -on , cet objet pour un oifeau de leur efpèce , s'approchent fans défiance , & deviennent la proie de l'ani- mal rvfèf IJ j mais cela fuppofe bien de la fubtilité dans le renard, bien de la ftupidité dans l'outarde 5 & peut-être en- core plus de crédulité dans l'Ecrivain. J'ai dit que ces oifeaux alloient quel- quefois par troupes de cinquante ou foixante ^ cela arrive fur- tout en au- tomne dans les plaines de la Grande- Bretagne -, ils fe répandent alors dans les terres femées de turnipes _, & y font de très -grands dégâts (m). En France, on les voit pader régulièrement au printemps & en automne , mais par plus petites troupes , & elles ne fe pofent guère que fur les lieux les plus élevés. On a obfervé leur pafïàge en Bourgogne 3 en Champagne & en Lor- raine. ( l ) iEIian , Nat. Animal. lib. V I , cap, XXiv. (m) Brkifch Zooîogy , pag. 88. — Nec ullam jpejlem odere magis oliiores , nain rapis ventrem fulcit , ntc mediocri prœdâ contentus effèjblet. Longoiiusapud Aidrov. Ornitholog. tom. IL, pag. 93. L'outarde de V Outarde. 49 L'outarde fe trouve dans îa Lybie, aux environs d'Alexandrie , félon Plu- tarque (n) ; dans la Syrie (o) ; dans ïa Grèce ( p ) ; en Efpagne ( <{) j en France, dans les plaines du Poitou & de ïa Champagne pouilîeufe (r) ; dans les contrées ouvertes de l'eft & du fud de ïa Grande - Bretagne , depuis la pro- vince de Dorfet jufqu'à celle de Mercie & de la Lothiane en ÉcofTe ( f ) ; dans les Pays-bas, en Allemagne ^/y) ; en Ukraine & en Pologne où , félon Rzaczynski, elle pa(Te quelquefois l'hiver (n) Si toutefois on n*a pas confondu V&tk avec l'otus, comme on a fait fi fouvent. (0) Gefner, de Avlbus , page 484. (p) Paufani£3 in Phocicis. (q) Plin. lib. X, cap. xxii. — Hi/panice otides producit. Strabon. (r) Ornithologie Je Saïerne,./^ 153. (f) Britifch Zoology, page 88. — Aldroy. Omitholog. tome II, page 92. (t) Nota. Frifch l'appelle ïa plus greffe de toutes les poules fauvages naturelles à l'Allemagne ; cela ne prouve pas que l'outarde foit une poule , mais bien qu'elle fe trouve en Allemagne. Oifeaux j Tome III. Q jq Hifloire Naturelle au milieu des neiges. Les Auteurs de la Zoologie Britannique aiîurent que ces oifeaux ne s'éloignent guère du pays qui îes a vu naître, & que leurs plus grandes excuriions ne vont pas au-delà de vingt à trente milles (u) ; mais Aldrovande pré- tend que, fur la fin de l'automne , ils ar- rivent par troupes en Hollande , & fe tiennent par préférence dans les campa- gnes éloignées des villes & des lieux habités (x). M. Linnarus dit qu'ils pâflent en Hollande & en Angleterre. Arit tore parie aufîi de leur migration (y)$ mais c'eft un point qui demande à erre éclairci par des oblervations plus exactes, Aldrovande reproche à Gefner d'être tombé dans quelque contradiction à cet égard, fur ce qu'il dit que l'outarde |en va avec les cailles (\) > ayant dit (u) Britifch Zooïogy, ^e 88, (x) Ornithologia , page 92- (y) Hifi. Jinmal. ïib. VIII. (l) Gefner, de Jvibus , page 484. Otidem de Ê'ià fcriho avolare puto cum coturnicitius , ftd corporis gravitate impeditum , perfeperare non poffe, & in fQçis proximis remontre. de V Outarde. 5 1 plus haut qu'elle nequittoit point la Suiiîè où elle eft rare , & qu'on y en prenoit quelquefois l'hiver ( a ) ; mais cela peut fe concilier, ce me fembîe, en admet- tant la migration des outardes 8c la re£- ferrant dans des limites , comme les Au- teurs de la Zoologie Britannique ; d'ail- îeurs celles qui fe trouvent en SuilTe, font des outardes égarées, dépayfées, en petit nombre, & dont les mœurs ne peuvent repréfenter celles de l'efpèce : ne pour- roit-on pas dire auiïi que Ton n'a point de preuves que celles qu'on prend quel- quefois à Zurich, pendant l'hiver, foient les mêmes qui. .y ont palïé l'été pré- cédent ? Ce qui paroît de plus certain , c'en: que l'outarde ne fe trouve que rare- ment dans les contrées montagneufes ou bien peuplées, comme la SuifTe, le Tyrol , l'Italie , plufieurs provinces d'Efpagne , de France, d'Angleterre & d'Allemagne -, 8c que , lorfqu'elle s'y (a) Otis magna , fi ea eft ' quam vulgo Trappum recant, non avolat nifi. falior ex nofîris remonibus f&fi lzeheti trentaine d'outardes à moitié gelées , qu'il amena ?: à la maifon, les prenant pour des dindons m qu'on avoit laiffé coucher dehors, & qu'on ne » reconnut pour ce qu'elles étoient que lorfqu'elies furent dégelées »»-. Ibidem. Nota. Je me fouviens moi-même d'en avoir vu deux, à deux différentes fois, dans une partie de la Bourgogne fertile en blé, & cependant mon- tagneufe; mais c'a toujours été en hiver & par un temps de neige.. de V Outarde. j) : ces prétendues outardes font des oifeaux aquatiques, comme je l'ai déjà remarqué plus haut, & abfoiument di£- fërens de la véritable outarde dont il eft ici queition. M. Barrère parle bien d'une outarde cendrée d'Amérique, dans fon Ejjai d'Ornithologie (page 33) s qu'il dit avoir obfervée ■■, mais, i.° li ne paroit pas l'avoir vue en Amérique $ puifqu'ii n'en fait aucune mention dans Ta France Equinoxiale ; i.° Il eït. le feul, avec M; Klein, qui parie d'une outarde américaine : or celle de M* Klein, qui. eit le macucagua de Marc- grave, n'a point les caractères propres à ce genre , puifqu'elle a quatre doigts à chaque pied (c.) > & le bas de- la jambe garni de plumes jufqu'à fon articula- tion avec le tarfe \ qu'elle eft fans queue 3 & qu'elle n'a guère d'autre rapport avec l'outarde, que d'être un oifeau pefanc qui ne fe perche ni ne vole prefque point (d). A l'égard de M. Barrère 5 fon autorité n'eft pas d'un allez grand (c) Klein, Ordo avium, page 18. (à) Marcgnvy, îUfl. mu Brafil. page 213.^ C rijj J4 Hijïoire Naturelle poids en Hiftoire Naturelle, pour que fbn témoignage doive prévaloir contre celui de tous les autres -, 3.0 enfin Ton outarde cendrée d'Amérique a bien l'air d'être la femelle de l'outarde d'Afrique , laquelle eft en effet toute couleur de cendre , félon M. Linnams ( e). On me demandera peut-être pour- quoi un oifeau qui," quoique pefant, a cependant des ailes, & qui s'en fert quelquefois, n'eft point paîîé en Amé- rique par le nord, comme ont fait plu- sieurs quadrupèdes : je répondrai que l'outarde n'y eft point pafiTée , parce que , quoiqu'elle vole en efret , ce n'eft guère que lorfqu'elle eft pourfuivie *, parce qu'elle ne vole jamais bien loin , Se que d'ailleurs elle évite fur- tout les eaux, feion la remarque de Bélon, à'oà il fuit qu'elle n'a pas dû fe ha- farder à franchir de grandes étendues de mer -, je dis de grandes étendues , car quoique celles qui féparent les deux continens du coté du nord, foient bien moindres que celles qui les féparent (t) Hift. nat. dit. X} pagt 155. de V Outarde. $j entre les tropiques *, elles font néan- moins considérables, par rapport à l'ef pace que l'outarde peut parcourir d'un feul vol. On peut donc regarder l'outarde comme un oifeau propre & naturel à l'ancien continent, & qui, dans ce con- tinent , ne paroît point attaché à un cli- mat particulier, puifqu'il peut vivre en Lybîe, fur les cotes de la mer Bal- tique , & dans tous les pays intermé*- diaires. C'efl un très-bon gibier*, la chair des jeunes , un peu gardée , eft fur- tout excellente j & fî quelques Ecrivains ont dit le contraire, c'eft pour avoir confondu Yods avec Yotusj comme je l'ai remarqué plus haut. Je ne fais pourquoi Hippocrate l'interdifoir aux perfonnes qui tomboient du mal ca- duc (f ). Pline reconnoît dans la graille d'outarde la vertu de foulager les maux de mamelles, qui furvienne :t aux nou- velles accouchées. On fe fert des pennes de est oifeau , comme on fait de celles d'oie & de cygne pour écrire, Se les (f) VU. Aidrovand. Omithologîa , page 95. C IV $6 Hijîoire Naturelle, &c. pêcheurs les recherchent pour ïes atta- cher à leurs hameçons, parce qu'ils croient que îes petites taches noires dont elles font émaillées , paroi (Tent autant de petites mouches aux poiilons qu'elles attirent par cette faufle appa- rence (g )* (g) Gefoer, de dvïbm, page 48 8 . ïm.nr. Pl.I.pcur.â'6'. 5 7 LA PETITE O UTARDE, VULGAIREMENT * LA CANEPETIÈRE (a). c et oiseau ne diffère de l'outarde que parce quïl efl beaucoup plus petit» * Voyei les planches enluminées , n.° Zy, le mâle / & n.° 10, la femelle. fa) Petite Outa1 de ou Canepetière. En Italien $ Fafanella. — Canepetière. Bélon , Hift. nat. des O l 'féaux , page 237. .... . Canepetière, nommée par aucuns, Olive. Idem. Portraits d'Cïfeaux, paga $6, b. — Petite Outarde. Edwards, Glanures, planche ccli , avec une bonne figure coloriée de ïa femelle. — La petite Outarde. Briiibn , Ornithologie y tome V, page 24 , avec une figure du maie & une de îa femelle , flanche 11. « Quant à Pétymologie (dit M. Saîerne, Hifil nat. des Gif aux , page 155), on ïe nomme u (cetoifeau) cajiepetière ou canepetKC£,.,i.0 parce " qu'il reflemble en queîque chofe à un canard u fauvage , •& qu'il vole comme lui; 1. °. parce u qu'il le plaît panni les pierres :' il y en a qui « penfent que ce nom lui vient de ce qu'il paît it « ibn aire ou fon repaire; d'autres d-ifent que <* C v 5 8 Hijtoire Naturelle 6 par quelques variétés dans le plu- mage : il a au (li cela de commua avec îJoutarde, qu'on lui a donné le nom de cane & de canard (b), quoiqu'il n'ait pas plus d'affinité qu'elle avec ïes oifeaux aquatiques, & qu'on ne le voie *> c'efi: parce qu'il pète ; mais je préfère ïa première » ëtymologîe, d'autant plus que les Orléanais ap~ ?» pelient le petit moineau de muraille , dit Friquet , un petmç ou peirat ». Nota. Cette étymoîogie de Canepetiêre, parce que cet oifeau pète , dit-on , ne paroît uniquement fondée que fur l'analogie du mot; car aucun Natu- ralise n'a rien dit de pareil dans Phiftoire de cet oifeau, notamment Béïon, qui a été copié par prefque tous les autres. D'ailleurs je remarque que ïe proyer, dont le même M. Saïerne parle aux pages 291 & 292, efl appelé péteux, quoiqu'une foit point dit dans fon hïitoire qu'il pète , mais bien qu'il fè pîaît dans tes prés , les fainfoins & ;es luzernes. Or la canepetiêre elt âuffi appeiée anas pratenfis. (h) Bélon , dans fon Hifîoire naturelle des Oi- jfèd£r#,page 237, i'appeiie canepetiêre. Gefner, de jivibus , page 705, l'appelle de même. Jonfton, anas campeftris , de Avibus , page 43. Charleton , idem , inExercit.ipage 83, n.° IX. Aldrovande, idem, in Omithol. tome II , page 96. Wilîùîghby, idem , in Ornithologia,page 129. Ray, idem, in fimpfi metk. Avium , ^2t%t 59, n.° 1 1 Albin, idenr, dans fon Jîifloire naturelle des 0 i féaux , tome III, page 17* Canard deb prés. de la petite Outarde. $ 9 jamais autour des eaux (~c). Bélon pré- tend qu'on Ta ainfî nommé , parce qu'il fe tapit contre terre comme font les canes dans l'eau (d)> & M. Salerne, parce qu'il relie cnble en quelque chofe à un canard fauvage , & qu'il vole comme lui ( e ) : mais l'incertitude & le peu d'accord de ces conjectures éty- mologiques , font voir qu'un rapport aufïï vague % & fur - tout un rapport unique , n'eft point une raifon fufrît fante pour appliquer à un oifeau le nom d'un autre oifeau *, car lî un lec- teur , qui trouve ce nom, ne faifîc point le rapport qu'on a voulu indiquer, il prendra nécessairement une fauiïe idée : or il y a beaucoup à parier que ce rap- port, étant unique, ne fera faiii que très- Tarement. La dénomination de petite outarde que j'ai préférée, neft point fu jette à cet inconvénient, car l'oifeau dont il sagk ayant tous les principaux carac- (c) Saïerne, Hifl. nat. des 0 i féaux } page 155. (à) Bélon, Hifl. nat. des Oifeaux , page 237, (e) Salerne, loco citato, C vj 60 Hiflàire Naturelle tères de l'outarde , à l'exception de la grandeur, le nom compofé de petite outarde lui convient dans prefque toute ïa plénitude de fa lignification , & ne peut guère produire d'erreurs. Bélon a foupçonné que cet oifeau étoit le tetrax d'Athénée > fe fondant fur un paffage de cet Auteur, où il le compare pour la grandeur au fpermo- logus ( f) * que Bélon prend pour un freux j efpèce de groMe corneille-, mais Aldrovande affure au contraire que le fpermologus eft une efpèce de moineau, Se M. BriiTon place fans difficulté le ftdla d'Aldro- vande, parmi les fynonymes de la pe~ tire outarde *, il femble même imputer à Charleton & à Wiliulghby, d'avoir penfé de même ( I)j quoique ces deux Au- teurs aient été fort attentifs à ne point confondre ces deux fortes d'oifeaux^que* félon toute apparence, ils n'avoient point vus (m). (i) Ornithol. Aïdrov. tome 1 1 , page 98. Arbitra- bar cum Bdloniauâ canepetière eamdem ejjè, fed ex collata utriufque deferiptione , diperfam ejje judicavi. (k) Voy. Ray, Synopfis met h. Avïum , page 59 > & Lalerne, Hifi. nat. des 0 1 'féaux , page 154. (I) Ornithoiogia , page 25. (m) Nota. Charleton en fait Jeux efpèces différentes, dont l'une , qui eft la neuvième de 6 2 Hifloire Naturelle D'un autre côté, M. Barrère, brouik ïant la petite outarde avec le ralle, lui a impofé le nom d'orrygometra mel'ma , & lui donne un quatrième doigt à chaque pied ( n ) ; tant il eft vrai que la multiplicité des méthodes ne fait- que donner lieu à de nouvelles erreurs, fans rien ajouter aux connoiflances réelles. Cet oifeau eft: une véritable outarde comme j'ai dit, mais conftruite fur une plus petite échelle , d'où M. Klein a pris occaiion de l'appeler outarde naine ( o) ; fa longueur, prife du bout fes PKytivor&s , eft ïa canepetière ; & l'autre , quj eft ia*clixième efpèce du même genre, eft Y avis Jîella: fur celle-ci il renvoie à Jonfton ; & il ne parle de l'autre que d'après Eéîon. A l'égard de Wiïlulghby , il ne dorme nulle part le nom de fiella à ia canepetière ( voyez fon Ornithologie , page 129}; ni le nom de canepetière à l'avis fiella (voyez la figure qui eft au bas de la planche X X x 1 1 , & qui paroît copiée d'après celle de Vavis fiella d'Aldrovande ; voyez aufll la Taille au mot Stella). (n) Spécimen Ornitholog. Claff. IIÎ?Gen. XXXV, page 62. (o) Tarda nana, an otis utï videtur feu tarda de la petite Outarde. 6 3 \ du hec au bout des ongles , eft de dix - huit pouces, c'eft- à-dire , plus d'une fois moindre que ïa même ditnen- iion prife dans la grande outarde : cette feuîe mefure donne- toutes les autres, & il n'en faut pas conclure; avec M. Ray , que la petite outarde foit à la grande comme un eu: à deux (p ) _, mais comme un eft à huit, puifque îes volumes des corps femblables font entr*eux comme ïes cubes de celles de leurs dimeniions iimpîes qui fe correfpondent \ fa grof- feur eft à peu près celle d'un faifan ( q ); elle a , comme la grande outarde , trois doigts feulement à chaque pied, le bas de la jambe fans plumes , le bec des gallinacés, & un duvet couleur de aquatica. Ordo Avium , page 18, n.° u. Nota. Voilà encore la petite outarde transformée expref- fément en oifeau aquatique. (p) Tardez perjimilis efi , fed dupb minor. Ray9 Synopfis rneth. Avium, page 59. (q) Qui voudra avoir ïa perfpecïive d'une canepetière, s'imagine voir une caiiïe beaucoup madrée , ( tachetée J auffi grande comme une moyenne faifane. Bélon, HiJL nat, des Oifeaux? page 238, 6 4 Hijlolre Naturelle rofe fous toutes les plumes du corps ;* mais elle a deux pennes de moins à la queue , une penne de plus à chaque aile, dont ïes dernières pennes vont, Fâfie étant pliée, prefque aulîi loin que les premières, par lefqueiles on entend les plus éloignées du corps : outre cela, le mâle n'a point ces barbes de plumes qu'a le mâle de la grande efpèce , Se M. Klein ajoute que ion plumage eft moins beau que celui de la femelle (r) > contre ce qui fe voit le plus fouvent dans les oifeaux : mais, à ces diiiérences près, qui font allez légères, on retrouve , dans la petite efpèce , tous les attributs' extérieurs de la grande , & même prefque toutes les qualités intérieures , le même naturel, les mêmes mœurs, les mêmes habitudes-, il femble que la petite foit éclofe d'un œuf de la grande % dont le germe auroit eu une moindre force de développement. Le maie fe difdngue de la femelle par un double collier blanc , & par quelques autres variétés dans ïes cou- leurs \ mais celles de la partie fupé^ (r) Klein, Ordo Jvlum, page 81. de la petite Outarde. 6$ rreure du corps, font prefque ïes mêmes dans les deux fexes, & font beaucoup moins fujettes à varier dans les dirlérens individus , ainii que Bélon î'avoic re- marqué. Selon M. Salerne , ces oifeaux ont un cri particulier d'amour, qui com- I mence au mois de mai: ce cri en: brout ou prout _, ils le répètent fur-tout la nuit, & on l'entend de fort loin, alors les mâles fe battent entï'eux avec achar- nement, & tâchent de le rendre maîtres chacun d'un certain difbridt •, un feul fuffit à pluiîeurs femelles , & la place du rendez-vous d'amour, e(l battue comme Taire d'une grange. La femelle pond au mois .de juin, trois, quatre & jufqu'à cinq œufs fort beaux, d'un verd luifant -, lorfque Ces petits font éclos, elle les mène comme la poule mène les fiens. Ils ne com- mencent à voler que vers le milieu du mois d'août *, & quand ils entendent du bruit, ils fe tapiiîent contre terre, Se fe laifferoienr plutôt écrafer que de re- muer de la place (f). ffj Salerne, Hlft. mu des Oifeaux, page 1:55. 66 Hifioire Naturelle On prend les mâles au piège, eni îes attirant avec une femelle empaillée,, dont on imite le cri-, on les chaiîe auffii avec roifeau de proie -, mais, en géné- ral , ces oifeaux (ont fort difficiles à I approcher, étant toujours aux aguets fur quelque hauteur dans îes avoines, mais jamais, dit-on, dans les feigles Se îes blés: Icrfque, fur la fin de la belle ùifon, ils fe rîifpofent à quitter le pays pour palier dans un autre, on les voit fe railembler par troupes j & pour lors il n'y a plus de dirîérence entre les jeunes & les vieux ( t). Ils le nourrifient, fuivant Béïon ( u)j Nota. L'auteur n'indique point îes fources où îï a puifé tous ces faits ; ils refièmbîent beaucoup à ce qu'on dit du coq de bruyère, qui s'appelle ïetrix ; ( voyez Hifi. mi. des Oifeaux, page 136) & comme on a donné le nom de tètrax à la petite outarde, on potirroït craindre qu'il n'y eût ici quelque méprife fondée fur une équr oque de nom , d'autant plus que M. Saîerne eit le feuï NatùTâliliê oui entre dans d'auffi grands détails fur la génération de la petite outarde , fans citer fes garans. (t) Voyez Saîerne, Hifi. nat. des Oifèaux, Pa8e 1S5- (n) iiélon, Hifi. nat. des Oifèaux, page 237. de ïa petite Outarde. 6 y ! comme ceux de ïa grande efpèce, c'eft-à- : dire , d'herbes 8c de graines \ & , outre cela, de fourmis, de fcarabés &de petites . mouches: mais, félon M. Sderne, les in- fectes font leur nourriture principale*, feulement ils mangent quelquefois au printemps les feuilles les plus tendres du ïaicron (x), La petite outarde eft moins répandue que la grande, 8c paroît confinée dans une zone beaucoup plus étroite. M. Linnxus dit quelle fe trouve en Eu- rope, & particulièrement en France (y) ; cela effc un peu vague , car il y a des pays très -considérables en Europe 8c même de grandes provinces en France i où elle eft inconnue : on peut mettre les climats de la Suède & de ïa Po- logne , au nombre de ceux où elle ne fe plaît point -, car M. Linnarus , lui- même, n'en fait aucune mention dans fa Fauna Sueclca^ ni le P. Rzaczynslci dans fon Hijtoire Naturelle de Pologne ; 8c M. Klein n'en a vu qu'une feule à Dant- (x) Salerne , Hifl. nat. des Oifeaux , page 155. (y) Linnaeus, Syft. nat. edit. X, page 154. 63 mjloirt Naturelle zrck, laquelle venoit de la ménagerie du Marcgrave de Bareith ^. Il faut qu'elle ne foie pas non plus bien commune en Allemagne y puifque, Frifch, qui s'attache* à décrire & repré3 Tenter les oifeaux de cette région l & qui parle afièz au long de la grande! outarde, ne dit pas un mot de celle-ci, & que Schwenckfeld ne la nomme feuiement pas. s Gefner fe contente de donner for*? nom dans ia lifte des oifeaux qu'il n'avok jamais vus, & il eft bien prouvé qu'en errer il n'avoit jamais vu celui-ci, puisqu'il lui fuppoie des pieds velus comme à l'Attagas (a) s ce qui donne lieu de croire qu'il e£fc au moins fort rare en SuiiTe. m Les Auteurs de la Zoologie Britan- nique, qui fe font voués à ne décrire aucun animal qui ne fut Breton, ou du moins d'origine Bretonne, auroient cru manquer à leur vœu , s'ils euifenc flJ Klein, Qrdo Avium , page 18. (a) Gefner , de Avium naturà , pages 715 & 795- de la petite Outarde. 69 décrit une petite outarde, qui avoit été ependant tuée dans la province de Cornouaiiles 3 mais qu ils ont regardée comme un oifeau égaré, & tout- à-fait étranger à ïa Grande-Bretagne (b); elle i'eft en effet à un tel point, qu'un ndividu de cette efpèce ayant été pré- senté à ia Société royale , aucun des Membres, qui étorent préfens ce jour-là, ne le reconnut , & qu on fut obligé irîe députer à M. Edwards pour (avoir !ce que c étoit ( c). D'un autre coté, Béîon nous amure que, de Ton temps, les AmbaiTadeurs de Venife, de Ferrare & du Pape, à qui il en montra une, ne la reconnurenE pas mieux, ni perfonne de leur fuite, & que quelques-uns la prirent pour une faifane -, .d'où il conclut avec raifon, qu'elle doit être fort rare en Italie ( d) ; & cela efl: vraifemblable , quoique M. Ray, paiïanc par Modène , en ait (b) Brïtifch Zoology, page 288. (c) Edwards, Glanures , planche CCLI.J (à) BéIon3 Hift. nat. des Oifiaux , page 237. 70 Hijloire Naturelle vu une au marché ( e) : voilà donc h Pologne, la Suède, îa Grande -Bretagne, l'Allemagne, la SuiiTe & l'Italie, à excep- ter du nombre des pays de ï'hurepe où fe trouve la petite outarde ^ & ce qui pourroit faire croire que ces exceptions font encore trop limitées , & que la Fiance eft le feul climat propre, le feul pays naturel de cet oifeau, c'en: que les Naturalises François font ceux qui pa- roilTent le connoître mieux, & prefqu< les feuls qui en parlent d'après leurs propres obfervations, & que tous les autres , excepté M. Klein , qui n'en avoir vu qu'un, n'en parlent que d'après Bélon. Mais il ne faut pas même croire que la petite outarde foit également commune dans tous les cantons de la Fiance -, je connois de très grandes provinces de ce royaume où elle ne fe voit point. M. Salerne dit qu'on la trouve allez communément dans la Beau ce (cù cependant elle n'eft que paiïàgcre), qu'on la voit arriver vers le milieu d'avril, & s'en aller aux approches de fej Ray. Synopfis method. Avium , page 59. de la petite Outarde. 71 l'hiver : il ajoute qu'elle fe plaît dans les ,terres maigres.& pierreufes, ragfon pour- quoi on l'appelle canepetrace _, & fes pe- •tics petraceaux. Ou la voit auiîi dans ïe Berry, où elle efl: connue fous le nom de [cqnepetrotte ( f ) : enfin elle dort être 'connue dans le Maine Se la Normandie, jpuifque Bélon , jugeant de toutes les au- tres provinces de France par celle-ci (qu'il connoiiïoit le mieux, avance qu'il n'y a payfan dans ce royaume qui ne la fâche nommer (g). La petite outarde ert naturellement ru- fée & foupçonneufe , au point que cela a 'parlé en proverbe, & que Ton dit des perfonnes qui montrent ce caraclère, ; qu'ils font de la canepetiere ( h). Lorfque ces oifeaux foupçonnent quelque danger, ils partent ck font un 1 vol de deux ou trois cents pas très- roide & fort près de terre*, puis,lorf- qu'ils font pofés , ils courent fi vite (f) Z alerne, Ht fi. nat. des Oifeaux , pkge 155, (g) Bélon, Hiji, nat. des Oifeaux, page 237. (h) Idem, ibidem. 7 2 Hijîoire Naturelle , Oc. qu'à peine un homme les pourroit atteindre fa). La chair de la petite outarde eft noire êc d'un goût exquis -, M. Klein nous allure que les œufs de la femelle qu'il a eus, étoient très-bons à manger, & il ajoute que la chair de cette femelle étoit meil- leure que celle de la femelle du petit coq de bruyères (k)^-Sc dont il pouvoit juger par comparaifon. Quant à i'organifation intérieure, elle eft à peu près la même, fuivant Bélon , que dans le commun des granivores ( l). (i) Bélon, Hift. nat. des G i féaux , page 237. (k) Kïein, Ordo Avium, page 18. (I) Bélon, Hift. nat. des Oijeaux, page 238. OISEAU À 7i OISEAUX ÉTRANGERS Qui ont rapport aux Outardes. I. . Le LOHONG ou l' OU TARDE huppée d'Arabie. JL/Oiseau que les Arabes appellent Lohong y & que M. Edwards a deffiné 8c dècnt le premier , eft à peu près de la grofîeur de notre grande outarde -, il a , comme elle , trois doigts à chaque pied , dirigés de même , feulement un peu plus courts -, les pieds , le bec Se le cou plus longs , & paroît en générai modelé fur des proportions plus lé- gères. Le plumage de la partie fupérieure du corps eft plus brun , & femblabïe à celui de la bécalTe, ceft- à-dire, fauve , rayé de brun-foncé , avec des taches blanches en forme de croifïant fur les Oifeaux j Tome III, D 74 HiJIoire 'Naturelle ailes *, le delïous du corps efl: blanc , ainfi que le contour de la partie fupé- rieure de l'aile \ le iommet de la tête , la gorge & le devant du cou , ont des raies tranfverfales d'un brun-obfcur fur un fond cendré -, le bas de la jambe , ïe bec & les pieds font d'un brun-clair & jaunâtre -, la queue ed tombante comme celle de la perdrix , & traverfée par une bande noire \ les grandes pennes de l'aile & la huppe font de cette même couleur. Cette huppe eft un trait fort remarqua- ble dans l'outarde d'Arabie \ elle eft poin- tue , dirigée en arrière , & fort inclinée à l'horizon s de fa bafe elle jette en avant deux lignes noires , dont Tune plus lon- gue palfe fur l'œil , & lui forme une efpère de fourcil*, l'autre, beaucoup plus courte , fe dirige comme pour embraffer l'œil par-deMous , mais n arrive point juf- qua l'œil, lequel eft noir, <5c placé au milieu d'un efpace blanc. En regardant cette huppe de profil, §c d'un peu loin , on croiroit voir des oreilles un peu couchées , & qui fe portent en arrière j & comme l'outarde des Oifeaux étrangers , &c. 7 j d'Arabie a été fans doute plus connue des Grecs que la nôtre, il eft vrar- femblable qu'ils l'ont nommée otis 3 à caufe de Tes efpèces d'oreilles , de même qu'ils ont nommé le' duc otus ou otos _, à caufe de deux aigrettes fembîables , qui le diftinguent des chouettes. • Un individu de cette efpèce , qui venoit de Moka , dans l'Arabie heu- reufe, a vécu pluileurs années à Londres, dans les volières de M. Hans Sloane 5 & M. Edwards , qui nous en a donné îa figure coloriée , ne nous a confervé aucun détail fur Tes mœurs 5 Tes habi- tudes , ni même fur fa façon de fe nourrir (a) : mais du moins il , n'auroît (a) M. Edwards Fappeïïe Ambiant Bujîard, planche xn. M. Linnseus , Otis Arabs auribus è redto aiflatis. Syft. liât. edit. X, Gen. lxxxv , Spec. 2. M. Klein , Tarda Mochaenfi Arabica. Ord& Avium , pag. 18 , n.° m. Nota. Les Arabes fui donnent ïe nom de lohong, félon M. Edwards; nom qui ne fe trouve point dans le texte anglois relatif à la planche xn , mais dans la traduction françoife , laquelle eft avouée de l'auteur. j6 Hijîoire Naturelle pas dû la confondre avec les gallinacés, dont elle diffère par des traits f\ frap- pans , ainfî que je l'ai fait voir à l'article de l'outarde. I I. L'OUTARDE d'Afrique. C'est celle dont M. Linnarus fait fa quatrième efpèce *, elle diffère de l'outarde a Arabie par les couleurs du plumage , le noir y domine , mais le dos efi cendré 8c les oreilles blanches. Le mâle a le bec 8c les pieds jaunes , ïe fommet de la tête cendré , 8c le bord extérieur des ailes blancs -, mais la femelle eft. par -tout de couleur cendrée , à l'exception du ventre & des cuifTes , ! qui font noires comme dans l'outarde des ïndes ( b). Cet oifeau fe trouve en Ethiopie , . félon M. Linnsus \ & il y a grande apparence que celui dont le voyageur le Maire parle , fous le nom (îautruche, f^.Lmnseus, Syfl. nat. edit. X, pag. 155. des Oifeanx étrangers > n'eft pas un oifeau différent : car , quoique ce Voya- geur en dife peu de chofe , ce peu s'ac- corde en partie, & ne difconvient en rien avec la defcription ci-dedus : félon lui, Ton plumage eft gris & noir , fa chair délicieufe , & fa grofleur à peu près de celie du cygne •, mais cette conjecture tire une nouvelle force du témoignage de M. Adanfon : cet habile Naturalise ayant tué au Sénégal , & par conléquent examiné de près , une de ces autru- ches volantes , nous allure qu'elle ref- fembîe , à bien des égards, -à notre ou- tarde d'Europe s mais qu'elle en diffère par la couleur du plumage , qui eft gé- néralement d'un gris cendré , par fon cou qui eft beaucoup plus long , &- par une elpèce de huppe qu'elle a derrière ïa tète ( d). Cette huppe eft fans doute ce que M. Linnxus appelle les oreilles _, & cette (c) ^oyage de le Maire aux ifles Canaries,. Cap-verd, Sénégal, &c. Paris, 1695, Paëe I0^ (d) Voyage au Sénégal , par M. Adanfon* Pans, 1757 , in- 4.0 j>age 160. D iij 7 8 Hi/Ioire Naturelle couleur gris - cendré eft précifément * celle de la femelle } & comme ce font-là I les principaux traits par lefquels rou- tarde d'Afrique de M» Linnsus Se l'aut ruche volante du Sénégal , dLïèrent de notre outarde d'Europe , on peut en i induire , ce me femble , que ces deux oifeaux fe refTemblent beaucoup , & > par la même ratfon, on peut encore étendre à tous deux 3 ce qui a été ob- fervé fur chacun en particulier ; par exemple , qu'ils ont à peu près la grofe feur de notre outarde > Se le cou plus long : cette longueur du cou , dont parle M. Adanfon , eft un trait de refîèm- bhnœ avec - l'outarde d'Arabie , qui habite à peu près le même climat s Se Ton ne peut tirer aucune conféquence contraire du liience de M. Linnaais, puifqu'il n'indique pas une feule dimen- iion de fon outarde d'Afrique j à Té- gard de la grolTeur, le Maire fait celle de l'autruche volanre 3 égaie à celle du cygne (c) ; & M. Adanfon à celle de fe) Voyage de le Maire aux ifles Canaries, fage 7a, des Oifcaux étrangers > &c. 79 l'outarde d'Europe , puifque ayant dit qu'elle lui reftembioit à bien des égards 3 & ayant indiqué ïes principales diffé- rences , il n'en établit aucune à cet égard (f) ; & comme d'ailleurs l'Ethiopie ou l'Abiiïïnîe , qui eft le pays de l'ou- tarde d'Afrique , & le Sénégal , qui eu: celui de l'autruche volante , quoique fort éloignés en longitude , font néan- moins du même climat , je vois beau- coup de probabilité à dire que ces deux oifeaux appartiennent à une feule & même efpèce, I I ï. Le CHURGE ou l'OUTJRDS moyenne des Indes» Cette outarde eft non - feulement plus petite que celles d'Europe , d'A- frique «Se d'Arabie , mais elle eft encore plus menue à proportion , & plus haut montée qu'aucune autre outarde : elle a vingt pouces de haut , depuis le plan (f) Voyage au Sénégal, Iqço cïtato. Dlr 8 o HiJIoire Naturelle de pofition jufqu'au fommet de la tête: Ton cou paroît plus court relativement à la longueur de Tes pieds , du refle elle a tous les caractères de l'outarde $ , trois doigts feulement à chaque pied, & ces doigts ifolés -, le bas de la jambe fans . plumes -, le bec un peu courbé , mais plus alongé } & je ne vois point par quelles raifons M. BrifTon Ta renvoyée au genre des pluviers. Le caractère diitinctif , par lequel les pluviers diffèrent des outardes, coniiite, félon lui , dans la forme du bec , que celles-ci ont en cône courbé, & ceux-là droit & renflé par le bout. Or l'ou- tarde des îndes dont il s'agit ici , a le bec plutôt courbé que droit , & ne fa point renne par le bout comme les pluviers \ du moins ceCt ainfi que l'a repréfenté M. Edwards (g) dans une figure que M. Briilon avoue comme exacte (h) : je puis même ajouter qu elle a le bec plus courbé & moins renflé par le bout, que Poutarde d'Arabie (g) Edwards, Glanures , planche ccl. (h) Briffon, Ornithologie, tome V , page 8.2. des Olfeaux étrangers x &c. 8 § 1 de M. Edwards (i) 3 dont la figure a | paru auffi très-exacte à M. Briflbn ( k ) y . Se qu'il a rangée fans difficulté parmi les outardes. D'ailleurs il ne faut que jeter les yeux fur la figure de l'outarde des Indes , 8c la comparer avec celles des pluviers, pour reconnaître qu'elle en i diffère beaucoup par le port total , 8c par les proportions 3 ayant le cou plus . long , les ailes plus courtes , & la forme du corps plus développée: ajoutez à cela qu'elle ert- quatre fois plus grofle que le plus gros pluvier , lequel n'a que feize pouces de long , du bout du bsc au bout des ongles ( l ) y au lieu qu'elle en? a vingt- fix ( m)9 (i) Edwards , Natural Hijloiy of un commom Birds , planche XII. (k) Briflbn,. Ornithologie , tome V7 page 30, (l) Briflbn , ibidem , page 76. (m) Ibidem, pâg. 82. Nota. Cela ne contredit pas ce que j'ai dit d-deflus, qu'elle avoit vingt pouces de haut depuis le pian de pofition jufqu'au fômmet de la tête , parce qu'en mefurant ainfi fï& hauteur , on ne tient compte ni de ia longueux du feec j ni de celle des doigts,. 8 2 Hijloire Naturelle Le noir , le fauve , ïe blanc 8c le gris , font les principales couleurs du plumage 3 comme dans l'outarde d'Eu- rope *, mais elles font diflribuées diffé- remment : le noir fur le fommet de la tête , le cou , les cuilïes 8c tout le défions du corps *, le fauve plus clair fur les côtés de la tète 8c autour des yeux , plus brun &: mêlé avec du noir j fur le dos , la queue , la partie des ailes la plus proche du dos , & au haut de la poitrine, où il forme comme une large ceinture fur un fond noir *, le blanc fur les couvertures des ailes les plus éloi- gnées du dos , le blanc mêlé de noir fur leur partie moyenne -, le gris plus foncé fur les paupières , l'extrémité des plus longues pennes de l'aile ( n) _> de quelques - unes des moyennes 8c des plus courtes ,- & fur quelques-unes de leurs couvertures *, enfin le gris plus clair 8c prefque blanchâtre fur le bec Se les pieds. Cet oifeau eft originaire de Bengale » eu on Fappelle charge j~ 8c où il a été (n) Comme à quelques outardes d'Europe* Voyei Animaux de. Perrault partie H, /âge 103.. des Oifeaux étrangers , &c. 83 deffiné d'après nature (0 ) : il eft à re- marquer que le climat de Bengale eft à peu près îe même que ceîui d'Ara- bie , d'Abiffinie & du Sénégal , où fe trouvent les deux outardes précédentes : on peut appeler celle-ci outarde moyenne ,■ parce quelle tient le milieu pour la grotfeur entre les grandes & les petites efpècesr I V. Le HOUBARA OU PETITE OUTARDg huppée d'Afrique* Nous avons vu que, parmi les grandes outardes , il y en avoit de huppées , & d'autres qui ne Tétoient' point , & nous allons retrouver la même dirîérence entre les petites outardes : car' la notre n'a point de huppe , ni même de ces barbes de plumes qu'on voit à ïa grande outarde d'Europe , tandis- que celles -ci ont non -feulement des huppes , mais encore des fraifes -, & il (0) Edwards 3 Qknum ? planche c cl r&me$r shagitro- x&r - Dvj 8 4 Hijïoire Naturelle eft à remarquer que c'eft en Afrique que fe trouvent toutes les huppées , foie de la grande > foit de la petite e£- pece. Celle que les Barbarefques appellent koubaara ., eft en errer huppée & fraifée ; M. Shaw , qui en donne la figure ( p ) _, dit poiitivement qu'elle a la forme & le plumage de l'outarde, maïs qu'elle eft beaucoup plus petite , n'ayant guère que la grolTeur d'un chapon \ par cette raifon feule , ce Voyageur , d'ailleurs habile , mais qui , fans doute , ne connoiffoit point notre petite outarde de France , blâme Golius d'avoir traduit le mot houbaary par outarde. Elle vit, comme la nôtre, de fubftances végétales & d'infectes , & elle fe rient le plus communément fur les confins du défert. Quoique- M. Shaw- ne lui donne point de huppe dans fa deferrption , il lui en donne une dans la figure qui y eft relative , & cette huppe paroît ren- ' (p) Travels or obfervations rdatingto fever al parts cf Barbary and th& Levant. By y. Thomas Shaw ^ -j>ag. 252. des Oifeaux étrangers? &c. 8 1 verfée eia arrière & comme tombante -, fa fraiie eft formée pat de longues plumes, qui naifîent du cou , et qui: fe relè- vent un peu & fe renflent , comme il ar- rive à notre coq domeftique lorfqu il efl en colère. Ce/l , dit Ma Shaw , une chofe curieufe de voir , quand elLe fe fenc menacée par un oifeau de proie , de voir , dis - je , par combien d'allées 8c de venues, de tours & de détours, de marches & de contre -marches -, en un mot , par combien, de rufes & de fou- plelfes elle cherche à échapper à Ton ennemi. Ce favant Voyageur apure qu'on re- garde comme un excellent remède contre le mal des yeux , & que, par cette raifon > l'on paie quelquefois très -cher fon fiel a. Se une certaine matière qui le trouve dans fon eftomae,, 8 6 Hiftoire Naturelle v. | Le RHAAD , autre petite O u tarde huppe'e d'Afrique. Le Rhaad eft diftingué de notre petite outarde de France par fa huppe, & du houbaara d'Afrique , en ce qu'il n'a pas , comme lui , le cou orné d'une fraife -, du refte , il eft de la même grof- feur que celui-ci j il a la tête noire , la- huppe d'un bleu - foncé , le deflus du corps & des ailes jaunes , tacheté de brun , la queue d'une couleur plus claire , rayée tranfverfalement de noir ,. le ventre blanc êc le bec fort , ainfi que les jambes. Le petit rhaad ne diffère du grand que par fa petitefïe ( n'étant pas plus- gros qu un poulet ordinaire ) , par quelques variétés dans le plumage, 8c parce qu'il eft fans huppe -, mais avecr- tout cela , il feroit pofîible qu'il fut de la même efpèce que le grand , & qu'il n'en difrérât que par le fexe j Je fonde des Oifeaux étrangers y &c. S j cette conje&ute , i»° fur ce qu'habitant le même climat , il n'a point d'autre nom-, 2.0 fur ce que, dansprefque toutes îes efpèces d'oifeaux , excepté les car- nafîiers , le mâle paroît avoir une plus grande puiflance de développement qui fe marque au-dehors par la hauteur de la taille , par la force des rnufcles , par l'excès de certaines parties , telles que les membranes charnues , les éperons , &c. par les huppes , les aigrettes 8c les fraifes qui font , pour ainfi dire , une furabon- dance d'organilation , & même par ïa i vivacité des couleurs du plumage. Quoi qu'il en Toit , on a donné au S grand 8c au petit rhaad le nom de Jaf-faf; rhaad fignifîe le tonnerre en langage Africain , & exprime le bruit que font tous ces oifeaux en s'éïevant de terre *, & faf-fafj celui qu'ils font avec leurs ailes lorsqu'ils font en pleia yol (q). (q) Voyei Thomas Shaw , Tranh, & ; en Latin, Gallus ; en Efpagnoï & en Italien , Gailo ; en savoyard , Coq r Gau I Geau ; en Allemand , Han ; en Polonois y Kur , Kogut; en Suède , Hoens , Tupi; en Angiois, Cok ; en vieux François , Gai, Gog. — Gallus gallinaceus. Gefner, Avi , pag. 394. — Coc, Coq., Gau , Geau , Gai , Gog. Bélon , Bip. I\at. des Oifeaux , page 242 ; & Portraits. d'Oifeaux , page 58 , a. — Le Coq & la Poule. Brilion, tome, I> fage 1660- du Coq. 89 des alimens s enfin fur les variétés des races diverfes qui Te font féparées plus tôt ou plus tard de la louche primitive. Mais Ci le Coq eft trop peu connu de la plupart des hommes 3 il n'eu: pas moins embarraffant pour un Naturalise ï méthode , qui ne croit connoître un objet que lorfqu'il a (u lui trouver une place dans Tes clafTes & dans Tes genres } par iî , prenant les caractères généraux le Tes diviiions méthodiques dans le îombre des doigts , il le met au rang les oifeaux qui en ont quatre *, que fera-t- il de la poule à cinq doigts , qui eft certainement une poule , oc même fort ancienne , puifqu'elie remonte juf- cju'au temps de Columelle , qui en parle comme d'une race de diftio&ion (b)? que s'il fait du coq une clafTe à part, caradfcérifée par la forme unguiière de fa x t •• 1 ° r queue -, ou placera -t-ii le coq fans crou- pion , & par conféquent fans queue , 8c qui n'en eft pas moins un coq ? que s'il admet pour caractère de cette efpèce d'avoir les jambes garnies de plumes (h) Generofïjfimœ crédita tur quœ. quinos hahcnt digi- tes* Çolumelle , lib. FIUt cap. iu ço Hijïoire Naturelle jufqu'au taîon , ne fera-t-il pas embar- railë du coq pattu , qui a des plumes jufqu'à l'origine des doigts , & du coq du Japon, qui en a jufqu'aux ongles? enfin s'il veut ranger les gallinacés à la cîalTe des granivores, & que, dans le nombre & la (tructure de leurs efto--| macs &r de leurs inteflins , il croie voir clairement qu'ils font en effet deitinés à Te nourrir de graines 8c d'autres, matières végétales -, comment s'ex-- pliquera- t-il à lui-même cet appétit de' préférence qu'il montre conftammencr pour les vers de rerre 5 8c même pour toute chair hachée , cuite ou crue , à i moins qu'il ne fe perfuade que la Na-- ture ayant fait la poule granivore par' fes longs inteftins & fon double efto- mac , Ta fait auffi vermivore , 8c même Carnivore par fon bec un tant foit peu crochu, ou plutôt ne conviendra- 1 -il pas, s'il eft de bonne foi, que les con- jectures que l'on fe permet ainfi fur les intentions de la Nature , 8c les efforts que l'on tente pour renfermer l'inépui- fabîe variété de fes ouvrages , dans les limites étroites d'une méthode particu- du Coq. 91 îrère , ne paroiffent erre faits que pour : donner elîor aux idées vagues & aux pérîtes fpéculatioas d'un efprit qui ne peut en concevoir de grandes , Se qui s'éloigne d'autant plus de ïa vraie marche de la Nature , & de ïa connoiiTance réelle de Tes productions ? Ainfî , fans prétendre affujettir la nombreufe famille des oifeaux à une méthode rigoureufe* ni la renfermer toute entière dans cette efpèce de filet fcientifîque dont, malgré toutes nos précautions , il s'en échap- peroit toujours quelques-uns , nous nous contenterons de rapprocher ceux I qui nous paroîtront avoir quelque rap- I port entr'eux , & nous tacherons de les [ faire connoître par les traits les plus caraclérifés de leur conformation inté- rieure , & fur - tout par les principaux faits âz leur hiftoire. Le coq ert un oifeau pefant , dont la démarche eft grave & lente , & qui, ayant les ailes fort courtes , ne vole que rarement , & quelquefois avec des cris qui expriment l'effort \ il chante indiffé- remment la nuic & le jour , mais non pas régulièrement à certaines heures , & 92 Hijloire Naturelle fon chant efl: fort différent de celui dq fa femelle, quoiqu'il y air auilï quelques ! femelles qui ont le même cri du coq,J c'eft-à-dire 3 qui font îe même effort du; gofier avec un moindre efret -, car leuli voix n'eft pas fi forte , 8c ce cri n'efl pas (i bien articulé -, il gratte la terre- pour chercher fa nourriture , il avale autant de petits cailloux que de grains,, & n'en digère que mieux -, ii boit en prenant de l'eau dans fon bec & levant: îa tète à chaque fois pour l'avaler $ ii dorr Le plus fouvent un pied en l'air (ci & en cachant fa-tête fous l'aile du mêmes coté*, fon corps, dans fa Situation natuM- relle , fe foutient à peu près parallèle am plan de position , le bec de même , le cou s'élève verticalement , le front eft orné d'une crête rouge & charnue , Se le deflous du bec d'une double mem- brane de même couleur & de même' nature: ce n'eft cependant ni de la chair ni des membranes , mais une fubftance ( c ) Nota. Par une fuite de cette attitude habi- tuelle, la cuifle qui porte ordinairement le corps efl ïa pkis charnue, & nos gourmands favent bien la diftinguer de l'autre dans ies chapons & les. poulardes. du Coq. 93 particulière, & qui ne refTemble à aucune autre. Dans les deux fexes , les narines font ( placées de part & d'autre du bec fripé- rieur, 8c les oreilles de chaque côté de la tête avec une peau blanche au- .delîous de chaque oreille -, les pieds ont ordinairement quatre doigts , quelque- fois cinq, mais toujours trois en avant ,;■& le refte en arrière *, les plumes fortent | deux à deux de chaque tuyau , carac- tère aiîèz ïîngulier , qui n'a été faifï que par très- peu de Naturalises -, la .queue eft à peu-près droite , & néan- , moins capable de s'incliner du côté du j :ou & du coté oppoie '■> cette queue , jpans les races de gallinacés qui en ont | une , eft compofée de quatorze grandes [ plumes , qui fe partagent en deux plans .égaux, inclinés l'un à l'autre , & qui 5 e rencontrent par leur bord iupérieur j ous un angle plus ou moins aigu j e pais ce qui diftingue le maie , c'efl hue les deux plumes du milieu de la jjqueue font beaucoup plus longues que Jj.es autres. , & fe recourbent en arc ; que s .es plumes du cou & du croupion font 94 Hijioire Naturelle longues & étroites, & que leurs pieds] font armés d'éperons : il eft vrai qu'il fe trouve aufîï des poules qui ont des éperons , mais cela eft rare -, &les poules! ainfi éperonnées , ont beaucoup d'autres! rapports avec le mâle j leur crête fea relève ainfi que leur queue , elles imitent | ie chant du coq, Se cherchent à l'imiter en chofes plus eflentieiles ( d) j mais cm auroït tort de les regarder pour cela' comme hermaphrodites , puifquetant" incapables des véritables fondions dm mâle , & n'ayant que du dégoût pour celles qui leur conviendraient mieux , . ce font , à vrai dire, des individus viciés », indécis , privés de l'ufage du fexe , 8c: même des attributs erTentiels de î'ef— pèce , puifqu ils ne peuvent en perpétuer aucune. Un bon coq eft celui qui a du feu: dans les yeux , de la fierté dans la dé- marche, de la liberté dans fes mouve— mens , & toutes les proportions qui; annoncent la force : un coq ainfi fait, n'imprimeroit pas la terreur à un lion, comme on l'a dit & écrit tant de fois, (d) ArifloL Hift. Aninn lib. IX ; cap. xlix. du Coq. 25 .mais il infpirera de ï amour à un grand (nombre de poules -, iî on veut le mé- nager, on ne lui en laiflera que douze ou quinze. Columelle vouloir qu'on ne lui en donnât pas plus de cinq-, mais quand il en auroit cinquante chaque jour , on prétend qu'il ne manqueroit à aucune ( e) ; à la vérité , perfonne ne peut affûter que toutes fes approchés (oient réelles, efficaces & capables de i féconder les œufs de fa femelle. Ses dehrs ne font pas moins impétueux que fes befoins paroiffent êcre fréquens. iLe matin, lorsqu'on lui ouvre la porte* giu poulailler où il a été renfermé pen- dant h nuit , le premier ufage qu'il fait kie fa liberté en: de fe joindre à fes boules ; il femble que chez lui le befoni de manger ne foit que le fécond ; & frorfqu'il a été ptivé de poules pendant Mu temps , il s adrefTe à la première |emelle qui fe préfente, fut -elle d'une fcipece fort éloignée (f) \ & mame il | fej Aïdrovande , tome II, lib. xiv. (f) Ex perdice & gallinaceo tertium Pemratur lW>d procèdent tempre feminœ ajimilatur. Ariftot, ïûco citaîo. ç 6 Hijïoire Naturelle s'en fait une du premier maie qu'il trouve en ion chemin -, le premier fait eft cité par Ariftote , & le fécond eft attelle par Fobfervation de M. Edwards (g) j & Par une *°* dont P31'6. P*U- tarque (h) j, laquelle condamnoit au feu' tout coq convaincu de cet excès de nature. Les poules doivent être afîorties au coq Ci Ton veut une race pure ^ mais1 fi Ton cherche à varier & même à; perfectionner lefpèce , _ il faut croifer ïes races. Cette obfervâtïon n'avoit point échappé aux Anciens -, Columelle dit pofitivement que les meilleurs poulets font ceux qui "proviennent du mélange d'un coq de race étrangère avec les poules communes j & nous voyons (o ) Nota. Ayant renfermé trois ou quatre jeu- nes coqs dans un ïieu où ils ne pouvoient avoir de communication avec aucune pouie , bientôt ils ae- Wient leur animofité précédente ; & au lieu de fe battre chacun tâchoit de cocher fon camarade, quoiqu'aucun ne parût bien aife d'être coché, ybyd Préface des Glanures , tome IL (h) Tra&atu NU m B RU TA ratio k e utax- dans'. du Coq. 9 7 dans Athénée , que Ton avoit encore r enchéri fur cette idée , en donnant un !coq - faifan aux poules ordinaires (i). Dans tous les cas , on doit choifîr celles .. qui ont l'œil éveillé', la crête flottante & rouge , & qui n'ont point d'épe- I rons*, les proportions de leur corps font 3 en général , plus légères que celles du , mâle , cependant elles ont les plumes t plus larges & les jambes plus baffes : les bonnes Fermières donnent la pré- t férence aux poules noires , comme étant ; plus fécondes que les blanches , 8c pou- vant échapper plus facilement à la vue I perçante de Toifeau de proie qui plane || fur les bafle-cours. Le coq a beaucoup de foin 3 8c f même d'inquiétude & de fouci pour [: fes poules *, il ne les perd guère de j vue j il les conduit , les défend , les (i) De Re Ruflicâ, ïib. VIII. cap. II. — Nota. I Longoiius indique la façon de faire réuffr cette I union du coq-faifan , avec les poules communes. I Gefner , de Avibus , pag. 445. Et l'on m'a allure I que ces poules fe mêlent auiïi avec le coq-pintade ^ I Jorfqu'on les a élevés de jeunefie enfemble ; mais <|ue les mulets, qui proviennent de ce mêiarige , font peu féconds. Qifeaux j Tome III. E 9 3 Hijloire Naturelle menace , va chercher celles qui s'é- cartent , ïes ramène , & ne fe iivre au l plailir de manger que lorfqu'ii les voit toutes manger autour de lui } à juger par les différentes inflexions de fa voix & par les différentes exprefîions de fa mine , on ne peut guère douter qu'il ne leur parle dirrérens langages : quand il les perd, il donne des fignes de regrets -, quoiqu'auffï jaloux qu'amoureux , ïï n'en maltraite aucune 5 fa jaloufie ne l'irrite que contre Tes concurrens j s'il fe pré- fente un autre coq , fans lui donner le temps de rien entreprendre , il accourt l'œil en feu , les plumes hérifTées , fe jette fur fon rival , & lui livre un com- bat opiniâtre jufqu'à ce que l'un ou l'autre fuccombe 9 ou que le nouveau venu lui cède le champ de bataille *, le deiir de jouir , toujours trop violent, le porte non- feulement à écarter tout rival , mais même tout obftacle inno- cent , il bat & tue quelquefois les pouf- fins , pour jouir plus à fon aife de la mère : mais ce feul defir eft-ii la caufe de fâ fureur jaloufe *, au milieu d'un ferai! nombreux & avec toutes les ref- du Coq. 99 fources qui! fait Te faire , comment pourroit-ii craindre le befoin ou la di- fette ? Quelque véhémens que foient fes appétits , il femble craindre encore plus le partage qu'il ne defire la jouif- 1 fance j Se comme il peut beaucoup , fa jaloufîe e(l au moins plus exeufabie 8c mieux fentie que celle des autres Sul- tans : d'ailleurs il a, comme eux, une | poule favorite qu il cherche de préfé- I rence ,' & à laquelle il revient pref- j qu'auiïi fouvent qu il va vers hs ï autres. Et ce qui paroît prouver que fa jaîouiie ne ïaiffe pas d'être une paillon réfléchie , quoiqu'elle ne porte pas contre l'objet de. fes amours, ceft que plu- sieurs coqs , dans une baffe-cour , ne cefient de fe battre , au lieu qu'ils ne battent jamais les chapons , à moins que ceux-ci ne prennent l'habitude de fuivre quelque poule. Les hommes qui tirent parti de tout3 pour leur amulement 3 ont bien fu mettre en œuvre cette antipathie invin- cible , que la Nature a établie , entre |un coq & un coq j ils ont cultivé Eij ï oo HlJIoire Naturelle cette haine innée avec tant d'art, que les combats de deux ciieaux de halle- cour font devenus des fpectacles dignes d'intéreflfer la curiofîté des peuples , même des peuples polis ; & en même temps des moyens de développer ou entretenir dans lestâmes cette précieufe férocité , Qui e& > dit- on , le geime de rhcro'iime -, on a vu , on voit ence tous les jours dans plus d'une contrée , Ces hommes de tous états accourir en foule à ces grotefques tournois *, fe di- vîfer en deux partis ; chacun de ces partis s'échauffer pour Ton combattant, joindre la fureur des gageures les plus outrées , à l'intérêt d'un (i beau fpec- racle , & îe dernier coup de bec de i'oifeau vainqueur, renverfer la fortune de plufîeurs familles -, c'étoit autrefois la folie des Rhodiens , des Tangriens, de ceux de Pergame ( k); c'eit aujour- id'hui celle des Chinois (l) ^ des habï- tans des Philippines , de Java , de (k) Pline, Bijl. Nat. Iib. X, cap. xx i. (I) Gemeïli Caréri , tomz V , page 36 , anciennes Relations des Indes & de la Chine. Tiaduftion d§ VM^Ç f page 105. du Coq. ici rifthme de l'Amérique > & de quelques autres Nations des deux contiueris (m ). Au relie , les coqs ne font pas les feuls oifeaux dont on ait airiii abufé ! les Athéniens , qui avoient un jour dans Tannée ( n) confacré à ces combats de coqs , employoient auflï les cailles au même ufage -, & les Chinois élèvent encore aujourd'hui pour ie combat , certains petits oifeaux refïembîans à des cailles ou à des linottes -, & par - tout la manière dont ces oifeaux fe battent eft différente , félon les diverfes écoles ou ils ont été formés, & félon la diverfîté (m) Navarete , D&fcript. de la Chine, page 40. (n) Thémiftode allant combattre les Perfes, & voyant que fes foldats montroient peu d'ardeur , leur fit remarquer l'acharnement avec ïequel des coqs fe battoient : « Voyez , leur dit-il , ïe courage indomptable de ces animaux ; cependant ils a n'ont d'autre motif que le defir de vaincre ; & « vous , qui combattez pour vos foyers , pour « ies tombeaux de vos pères , pour la liberté .... >» Ce peu de mots ranima le courage de l'armée , & Thémiftode remporta la victoire : ce fut en mémoire de cet événement que les Athéniens inf- tituèrent une efpèce de fête , qui fe célébrait par des combats de coqs. Voyt\ Éiien ? de varia Hifiorièi •~ Lib. H. Eii) 10 2 Hijloire Naturelle des armes orfeniîves dont on ïes affuble: mais ce qu'il y a de remarquable , c'efl | que les coqs de Rhodes , qui étoient plus grands , plus forts que les autres , Se beaucoup pius ardens au combat , rétoient au contraire beaucoup moins pour leurs femelles -, il ne leur falloit que trois poules , au lieu de quinze ou vingt , Toit que leur feu fe fût éteint dans la folitude forcée cù ils avoient coutume de vivre , foit que leur colère , trop Couvent excitée , eût étouffé en eux des pallions plus douces , & qui ce- pendant étoient , dans l'origine , le prin- cipe de leur courage & la fource de leurs difpofitions guerrières : les mâles de cette race étoient donc moins mâles que les autres, & les femelles, qui fouvent ne font que ce qu'on les fait , étoient moins fécondes & plus parefleufes , foit à couver leurs œufs , loit à mener leurs poufïîns : tant l'art avoit bien réufli à dépraver la Nature ! tant l'exercice des talens de la guette eft oppofé à ceux de la propa- gation ! Les poules n'ont pas befoin du coq • pour produire des œufs ; il en naît fans du Coq. i o 3 cette de la grappe commune de l'ovaire, lefquels , indépendamment de toute com- munication avec le mâle , peuvent y grolîir , & en grofîilïant , acquièrent leur maturité, fe détachent de leur calice & de leur pédicule , parcourent Yovi- duclus dans toute fa longueur , chemin faifant s'affimiient , par une force qui leur eft propre , la lymphe , dont la ca- vité de cet oviductus erb remplie , en compofent leur blanc, leurs membranes, leurs coquilles , & ne rerient dans ce vifcère que jufqu'à ce que Tes fibres élaftiques Se fenfihîes étant gênées , irritées par la préfence de ces corps , devenus déformais des corps étrangers , entrent en contraction , & les • pouffent au - dehors. le gros bout le premier, félon Ariftote. Ces œufs font tout ce que peut faire la nature prolifique de la femelle feule & abandonnée à elle-même -, elle pro- duit bien un corps organifé capable d'une forte de vie , mais non un ani- mal vivant femblabie à fa mère , & capable lui-même de produire d'autres Eiv 104 Hifioire Naturelle animaux femblables à lui \ il faut pour cela le concours du coq 8c le mélange intime des liqueurs féminales des deux fexes 5 mais, lorfqu'une fois ce mélange a eu lieu , les effets en font durables, Harvey a obfervé que l'œuf d'une poule féparée du coq depuis vingt jours , netoit pas moins fécond que ceux qu'elle avoit pondus peu après l'accouplement ; mais l'embryon qu'il contenoit netoit pas plus avancé' pout cela , & il ne falloit pas le tenir fous îa poule moins de temps qu'aucun autre pour le faire éclorre ; preuve certaine que la chaleur feule ne fuifit pas pour opérer ou avancer le développement du poulet, mais qu'il faut encore que l'œuf foit formé , ou bien qu'il fe trouve en lieu où il puiiie tranfpirer , pour que l'embryon qu'il renferme foit fufcep- tibie d'incubation -, autrement tous les œufs, qui refteroient dans Yoviduclus vingt-un jours après avoir été fécondés , .ne manqueroient pas ày éclorre, puif- qu'ils auroient le temps & la chaleur néceilàires pour cela 3 & les poules du Coq. 105 féroient tantôt ovipares & tantôt vivi- pares ( 0 ). Le poids moyen d'un œuf de poule ordinaire eft d'environ une once iïx gros j (i on ouvre un de ces œufs avec précaution , on trouvera d'abord fous la coque une membrane commune qui en tapûTe toute la cavité , eniuite le blanc externe , qui a la forme de cette cavité i puis le blanc interne , qui eft plus arrondi que le précédent , 6c enfin , au centre de ce blanc, îe jaune qui eft fphérique : ces différentes parties font contenues chacune dans fa membrane propre *, Se toutes ces membranes font attachées enfemble à l'endroit de ces chala^â ou cordons 3 qui forment comme les deux pôles du jaune \ la petite vé- /îcule lenticulaire , appelée cicatrieuh , fe trouve à peu près fur fon équateur 9. âc fixée folidement à fa fur face (p). (0) Nota. Je ne vois que ïe docteur .Miche! Lyzeruts qui ait parlé d'une pouïe vivipare; mais* les exemples en feroient plus frequens, s"iï ne falloie que def ia chaleur à un œuf fécondé pour écîorrè^ Voyci Épliémérides d'Allemagne ? Duc. 11 , ami. 4,. ç.ppend. uùfiir. xxvin. (j>) Nota, Bellini trompé par &$ expériences^ £ v 10-5 Hijloire Nature lie A l'égard de fa forme extérieure , elle eft trop connue pour qu'il ioit beloin de la décrire j mais elle eft allez fou* vent altérée par des accidens dont il eft facile , ce me femble , de rendre raifon , d'après l'hiltoire de l'œuf même & de fa formation. Il n'en: pas rare de trouver deux jaunes dans une feule coque j cela arrive îorfque deux œufs également mûrs fe détachent en même temps de l'ovaire , parcourent enfemble Xoviducius > & for- mant leur blanc fans le féparer , fe ou plutôt parles conféquences qu'il en avoit tirées, croyoit & avoit fait croire à beaucoup de monde, que , dans les œufs frais durcis à Peau bouillante , la cicatricuîe quittoît la furfàce du jaune pour fe retirer au centre; mais que, dans les œufs cou- ves , durcis de même , la cicatricuîe reftoit conf- tamment attachée à la furface. Les Savans de Turin, en répétant & variant ïes mêmes expé- riences , fe font affurés que , dans tous les oeufs couvés ou non-couvés , la cicatricuîe reftoit toujours , adhérente à la furface du jaune durci, & que le corps blanc que Beliinî avoit vu au centre , & qu'il avoit pris peur îa cicatricuîe , n'étoit rien moins que cela , & ne paroiifoit en effet au centre du jaune que lorfqu'il étoit ni trop ni trop peu du Coq. 107 trouvent réunis feus , ïa même enve- loppe. Si par quelqu'accident , facile à fup- pofer , un œuf détaché depuis quelque temps de l'ovaire , fe trouve arrêté dans (on accroiflement , & qu'étant formé autant qu'il peut l'être , il fe rencontre dans ïa fphère d'activité d'un autre œuf qui aura toute fa force 5 celui-ci f entraînera avec lui, & ce fera un œuf dans un œuf -(q)* On comprendra de même comment -on y trouve quelquefois une épingle ou tout autre corps étranger , qui aura pu pénétrer jufque dans Yoviducius (r). Il v a des poules qui donnent des œufs bardés ou fans coque , foit par le défaut de la matière propre dont fe forme la coque, foit parce qu'ils font chaiTés de Yoviducius _, avant leur entière maturité *, aulîî n'en voit -on jamais éclorre de poulet, & cela arrive, dit-on, (q) Coïïe&ion Académique , partie frarsçoîfe, tome I, page 388 ; & tome II , page 327 ; & partie étrangère , tome IV, page 327. ( t) Ibidem f partie françoife , tome I, page 3$$, E vj i o 3 Hijloire Naturelle aux poules qui font trop grades : des caufes directement contraires produifens ïes œufs à coque trop épaule & même des œufs à double coque : on en a vu qui avoient confervé le pédicule pan îequel ils étoient attachés à l'ovaire > d'autres qui étoient contournés en ma- nière de croiflant *, d'autres qui avoient la forme d'une poire ; d'autres enfin qui portoient fur leur coquille l'empreinte d'un foleiî , d'une comète (f) y d'une éclipfe, ou de tel autre objet dont on avoit l'imagination frappée \ on en a même vu quelques-uns de lumineux: ce qu'il y avoit de réel dans ces pre- miers phénomènes , c'eft - à - dire , les altérations de la forme de l'œuf , ou les empreintes à fa furface , ne doit s'attribuer qu'aux difrérentes compref- iions qu'il avoit éprouvées dans le temps que fa coque étoit encore allez fouple pour céder à l'effort, & néanmoins allez ferme pour en conferver i'impreiîion :. il ne feroit pas tout- à -fait il facile de- (f) Coîlecftîon Académique, partie étrangère* toms IV' , £a$z i<5o,. du Coq. ïqo, rendre raifon des œufs lumineux (i) ; un Docteur Allemand en a obfervé de tels, qui étoient actuellement fous une pouîe blanche , fécondée , ajoute- t-il , par un coq très- ardent : on ne peut honnêtement nier la poiïïbilité du fair \ mais, comme il eft unique, il eft pru- dent de répéter l'obfervation , avant de l'expliquer . A l'égard de ces prétendus œufs de coq qui font fans jaune , & contiennent. *. à ce que croit le peuple , un ferpent (' u) > ce n'eit autre chofe , dans la vérité > que le premier produit d'une poule trop jeune , ou le dernier effort d'une poule épuifée psr fa fécondité même , ou enfin ce ne font que des œufs impar- faits , dont le Jaune aura été crevé dans Yoviduclus de la pouîe , fait par quel- qu'accident , foit par un vice de con- formation , mais qui auront toujours confervé leurs cordons ou chaHàyt, j que (t) ÉphéméricTes des curieux de ïa Nature ^ Dec. il , an. 6 , append. obferv. XXV, (u) Collection Académique % partie françoife.^ tome. LU* i r o - Hijlcir* Naturelle les amis du merveilleux n'auront pas manqué de prendre pour un ferpent : c'eft ce que M. de la Peyronie a mis hors de doute , par la diiTedion d'une poule qui pondort de ces œufs *, mais ni M. de la Peyronie , ni Thomas Bartholin, qui ont diiïëqué de prétendus coqs ovipares ( x) _, ne leur ont trouvé d'oeufs , ni d'ovaires , ni aucune partie équivalente. Les poules pondent indifféremment pendant toute l'année , excepté pendant la mue , qui dure ordinairement (îx fe- maines ou deux mois fur la fin de l'automne & au commencement de l'hiver : cette mue n'eft autre chofe que la chute des vieilles plumes , qui fe dé- tachent comme les vieilles feuilles des arbres , & comme les vieux bois des cerfs j étant poufTées par les nouvelles *, les coqs y font fujets comme les poules*, mais ce qu'il y a de remarquable , c'eft que les nouvelles plumes prennent quelquefois une couleur différente de celles des anciennes. Un de nos Qbier- (x) CoHeôion Académique, partie étrangère, tome IV, page 225. du Coq. i 1 1 valeurs a fait cette remarque fur une poule & fur un coq , & tout le monde la peut faire fur plusieurs autres efpèces d'oifeaux , & particulièrement fur les bengalis , dont le plumage varie prefque à chaque mue -, & en général , prefque tous les oifeaux ont leurs premières plumes , en naiiTant , d'une couleur diffé- rente de celle dont elles doivent revenir dans la fuite. La fécondité ordinaire des poules confide à pondre prefque tous les jours > on dk qu'il y en a en Samogitie (y) j à Maîaca 8c ailleurs ( \) ^ qui pondent deux fois par jour. Arifcote parle de certaines poules d'iiiyrie qui pondoient jufqu'à trois fois , & il y a apparence que ce font les mêmes que ces petites poules adriènes ou adriatiques cfont fi parle dans un autre endroit 3 & qui étoient renommées par leur fécondité : quelques-uns ajoutent qu'il y a telle manière de nourrir les poules corn- (y) Rzaczynsky, Hifl. Nat. Polon. pag. 432. fl) Bontekce, Voyage aux Indes orientales, page 234* 1 1 z Hijloire Naturelle mimes , qui leur donne cette féeondîtd extraordinaires îa chaleur y contribue, beaucoup -, on peut faire pondre les poules en hiver , en les tenant dans une écurie où il y a toujours du fu* mier chaud fur lequel elles puiiTenti féjourner. Dès qu'un œuf efl pondu , il com- mence à tranfpirer, & perd chaque jour quelques grains de fon poids par î'éva- poration des parties les plus volatiles de fes fucs : à mefure que cette évapo- ration fe fait 5 ou bien il s'épaifïit , fe durcit & fe defsèche , ou hïtn il con- tracte un mauvais goût 5 & il fe gâte enfin totalement au point qu'il devient incapable de rien produire : l'art de lui conferver long -temps toutes (es qua=- lités , fe réduit à mettre obftacle à cette tranfpiration ( a), par une couche de » (a) Nota. Le JournaF Économique , du mois de mars 1755, fait mention de trois œufs, bons à manger, trouvés en Italie dans L'épaifieur d'un mur conftruit il y avoit trois cents ans : ce fait eft d'autant pîus difficile à croire , qu'un- enduit de mortier ne feroit pas fuftlfant pour conferver un œuf , & que les murs les plus épais étant fujeis à l'évaporation dans tous Lss du Coq. i ï 3 matière grafTe quelconque , dont on enduit exactement fa coque peu de . momens après qu'il a été pondu -, avec ; cette feuie précaution , on gardera pen- . daut plusieurs- mois , & même pendant ' des années , des œufs bons à manger , fufcepnbles d'incubation , & qui auront 5 en un mot, toutes ïes propriétés de? œufs frais (b ) : les habitans de Tonquin îes confervent dans une efpèce de pâte faite avec de la cendre tamifée , 8c de la faumure , d'autres Indiens dans l'huile (' c) : le vernis peut auffi fervîr à conferver les œufs que Ton veut manger -, mais la graille n'efl: pas moins bonne pour cet ufage , & vaut mieux pour conferver ïes œufs que Ton veut faire couver 3 parce qu'elle s'enlève points de leur épaiffeur , puifque ïes mortiers de l'intérieur , fe sèchent à ïa. longue , ils ne peuvent empêcher ïa tranfpiration des œufs cachés dans leur épaiffeur, ni par conféquent ïes cor>- ferver. (h) Pratique de Fart de faire çclorre ïes poulets P page 138. (c) Suite du Voyage de TâYernier^ tome V> pages 225 6* 22.6, i î 4 Hijîoïre Naturelle plus facilement que le vernis , 8c quïJ faut nétoyer de tout enduit, ies œuf:;] dont on veut que l'incubation réuffiffe ; car tout ce qui nuit à la tranfpiration .1 nuit auffi au fuccès de l'incubation. J'ai dit que îe concours du coqd étoit néceffaire pour la fécondation des> œufs , & ceft un fait acquis par unell longue & confiante expérience -, mais! les détails de cet acte fiefîentiel dans] rhifccire des animaux, font trop peu.1] connus -, on fait , à la vérité , que lai;! verge du mâle eCt double , Se n'eft: autre ebofe que les deux mamelons par îefqueîs fe terminent les vaifïeauxc Ipermatiques à l'endroit de leur in fer- | tion dans le cloaque *, on fait que la»1 vulve de la femelle eft placée au-defïus de l'anus, & non au -défions, comme- dans les quadrupèdes ( d) ; on fait que le coq s'approene de la poule par une efpèce de pas oblique , accéléré , baillant les ailes comme un coq - d'inde qui fait la roue , étalant même fa queue à (d) Rédi , deglî Animali vivmtl » &c. C ollec- tion Académique, partie étrangère, tomzïV ^ page 4203 & Régnier Graaf,/^ 243. du Coq. i i j demi , & accompagnant fon action d'un •certain murmure exprefîif, d'un mou- vement de trépidation & de tous les figues du defir preiTant *, on fait qu'il s'élance fur la poule", qui le reçoit en [pliant les jambes , fe mettant ventre à : terre, & écartant ïes deux plans de \ longues plumes dont fa queue efl com- ïpofée ; on fait que le mâle faifit avec fclon bec la crête ou les plumes du jfommet de la tête de la femelle , foît par manière de careffe, foit pour garder l'équilibre -, qu'il ramène la partie pofté- ; rreure de fon corps où eft fa double verge , & l'applique vivement fur la partie poftérieure du corps de la poule où eft l'orifice correfpondant -, que cet accouplement dure d'autant moins qu'il eil plus fouvent répété , & que le coq fembîe s'applaudir après par un battement d'ailes & par une efpèce de chant de joie ou de victoire \ on fait que le coq a des teftîcuïes , que fa liqueur féminale rélide , comme celle des quadrupèdes , dans des vaiiTeaux fpermatiques } on fait , par mes obser- vations , que celle de la poule réfîde ï i 6 Hijîoire Naturelle dans îa cicatricule de chaque œuf* comme celle des femeiles quadrupède dans îe corps glanduleux des tefticules* mais on ignore fi la double verge du coq , ou feulement Tune des deux'f pénètre dans l'orifice de la femelle , & même s'il y a intromiflïon réelle 09 une compreflion forte, ou un fimpîe contact j on ne fait pas encore quelle doit être précifément la condition d'un oeuf pour qu'il puifTe être fécondé , ni jufqu'à quelle diftance l'action da\ mâle peut s'étendre •, en un mot , malgré le nombre infini d'expériences 8c d'cbfervations que l'on a faites fur: ce fujet , on ignore encore quelques- unes des principales circonftances de la fécondation. Son premier effet connu eft la di- latation de la cicatricule & la forma- tion du poulet dans fa cavité , car c'en: la cicatricule qui contient le véritable germe , & elle fe trouve dans les œufs fécondés ou non , même dans ces prétendus œufs de coq dont j'ai parlé plus haut ( e ) ; mais elle efl (t) NGta. M. de ïa Peyronie a obfervé 5 dans du Coq. 117 plus petite dans îes œufs inféconds. Malpighi l'ayant examinée dans des • œufs féconds nouvellement pondus , & avant qu'ils euiTent .été couvés , vit, au centre de la cicatricule, une bulle nageant dans une liqueur, & reconn-ut, au milieu de cette buîle , l'embryon ^du poulet bien formé*, au lieu que • la cicatricule des œufs inféconds 8c -produits par la poule feule , fans com- :: ; munrcation avec le mâle , ne lui pré- fenta qu'un petit globule informe muni iid'appendices, remplies d'un fuc épais, \ \ quoique tranfparent , & environné de ' piulieurs cercles concentriques (f) ; on | n'y aperçoit aucune ébauche d'animal*, un de ces œufs , une tache ronde , jaune , d'une ligne de diamètre , fans épaifleur , iituce fur ïa membrane qu'on trouve fur la coque : on peut croire que cette tache, qui devroit être Manche, h'ëtoit jaune ici que parce que le jaune de l'œuf s'étoit épanché de toutes parts , comme on Pa reconnu par la difiection de la poule ; & il elle étoit fituée fur la membrane qu'on trouve fous ïa coque, c;eft qu'après l'épanchement du jaune, {a membrane, qui contenait ce jaune, étoit reftéo adhérente à celle de la coque. (f) Malpighi , Pullus in ovo, i i 8 Hijloire Naturelle l'organifation intime & complète d'une matière informe , neft que l'effet inltarn tané du mélange des deux liqueurs féminales 5 mais s'il ne faut qu'un mo- ment à la Nature pour donner la forme première à cette glaire tranfparente , & pour la pénétrer du principe de vie dans tous {es points , il lui faut beaucoup de temps & de fecours pour perfectionner cette première ébauche*, ce font principalement les mères qu'elle femble avoir chargées du foin de ce développement , en leur infpirant le defir ou le befoin de couver -, dans lai plupart des poules , ce defir fe fal îentir auiïï vivement 5 fe marque au- dehors par des figues aufli énergiques que celui de l'accouplement auquel il fijccède dans Tordre de la Nature , , fans même qu'il foit excité par la préfence d'aucun œuf: une poule, qui vient de pondre , éprouve une forte de tranfport que partagent les autres poules qui n'en font que témoins , & qu'elles expriment toutes par des cris de joie répétés (g) ; foit que la celTation (ubke (ë) Nota* Nous n'avons point dans notre langue du Coq. i i 9 ides douleurs de l'accouchement fort ;ou jours accompagnée d'une joie vive, (oit que cette mère prévoie dès - ïors tous les plaifîrs que ce premier plaifir lui prépare : quoi qu'il en fort , lorf- qu'elle aura pondu vingt - cinq ou :rente œufs , elle ie mettra tout de bon î les couver \ h on les lui ôte à mefure , *lle pondra peut-être deux ou trois llfbis davantage , & s'épuifera par -fa "écondrté même ', mais enfin il viendra : jjn temps où , par la force de finftincl:, ; die demandera à couver par un glouiTe- , oaent particulier , & par des mouve- , nens & des attitudes non équivoques *, llî elle n'a pas fes propres oeufs , elle Ibouvera ceux d'une femelle d'une autre j "fpèce , & même des œufs de pierre ],j îe termes propres pour exprimer îes differens cris Vile la poule , du coq , des poulets ; les Latins , _[l|.]ui Te plaignoient de leur pauvreté , étoient beau- coup plus riches que nous , & avoient des ex- Jbreffions pour rendre toutes ces différences. Voye% Ipefner, de Avibus , pag. 431. G allas cucurrit , pulll \w)ipiunt , gallina canturit , gracillat , pipat , Jïngultit; *ê| \rlociunt e, de membranes tranfparentes : la vie dm fœtus devient plus manifefte j déjà Ton; voit fon cœur battre & fon lang cir- culer. Le troiiïème jour , tout eft plus dis- tinct. , parce que tout a grofli : ce qu'il y a de plus remarquable , c'eft le cœur qui pend hors de la poitrine & bat trois i du Coq. ï 2 3 fors de fuite, une fois*en recevant par l'oreillette le fang contenu dans les veines , une féconde fois en le renvoyant aux artères , Se la troilième fois en le pouffant dans les vaiffeaux ombilicaux ; 8c ce mouvement continue encore vingt- quatre heures , après que l'embryon a été féparé du blanc de ion œuf: on : aperçoit auiîi des veines 8c des artères 'fur les véikules du cerveau, les rudr- | mens de la moelle de l'épine com- ) mencent à s'étendre le long des vertèbres ? ; enfin on voit tout le corps du fœtus, ] comme enveloppé d'une partie de la I liqueur environnante , qui a pris plus [• de confiftance que le refte. ILes yeux font déjà fort avancés le quatrième jour -, on y reconnoît fort bien la prunelle , le cryftaUin , l'humeur vitrée -, on voit , outre cela , dans la tête cinq véiîcuîes remplies d'humeur , {&[- quelles fe rapprochant & fe recouvrant peu à peu les jours fuivans, formeront enfin le cerveau enveloppé de toutes fes membranes *, les ailes croiffent , les cuilTes commencent à paraître 3c ïe corps à prendre de la chair. £ 2 4 Hijloire Naturelle Les progrès, du cinquième jour ;, confiftent , outre ce qui vient d'être dit y en ce que tout le corps fe recouvre d'une chair onctueufe -, que le cœur eft retenu au -dedans par une mem- brane fort mince , qui s'étend fur la capacité de la poittine, Sç que Ton voit les vaifteaux ombilicaux fortir de l'ab- domen (l). Le iixième jour , îa moelle de l'éV pine setant divifée en deux parties , continue de s'avancer le long du tronc \ le foie, qui étoit blanchâtre auparavant, eft devenu de couleur obfcure , le cœur bat dans fes deux ventricules , le corps du poulet eft recouvert de la peau , Se fur cette peau l'on voit déjà poindre les plumes. Le bec eft facile à diflinguer le Septième jour -, le cerveau , les ailes , les cuiiïes & les pieds ont acquis leur (l) Nota. Les vaifleaux qui fe re'pandent dans J ie jaune de l'œuf , & qui par conféquent fe trou- vent hors de Y abdomen du poulet , rentrent peu à peu dans cette cavité , félon la remarque de Stenon. Voye\ ColUâion académique, partie étrangère, tome Vr, I fa§e 572. du Coq. i 2 $ figure parfaire * les deux ventricules du cœur paroilTent comme deux bulles contrguë's & reunies par leur partie lu- périeure 3 avec le corps des oreillettes :' on remarque deux mouvemens fuccef- fifs dans les ventricules auffi-bien que dans les oreillettes , ce font comme deux I cœurs féparés. Le poumon paroît à îa fin du neu- | vième jour 3 & fa couleur e(l blanchâtre *, le dixième jour, les mufcles des ailes 1 achèvent de fe former , les plumes con- : tinuent de fortir , & ce n'efi: que le I] onzième Jour qu'on voit des artères , qui auparavant étoîent éloignées dii cœur , s'y attacher 5 & que cet organe fe trouve parfaitement conformé &. réuni I en deux ventricules. Le relie n'en: qu'un développement; II plus grand des parties qui fe fait juf- jjj qu'à ce que le poulet cafiTe fa coquille || après avoir pipé (m) _, ce qui arrive ordinairement le vingt -unième jour 5 (m) Hifïoire Naturelle ? tome III, page 175 &*! fuirantes. Fiij 12.6 Hijzoire Naturelle quelquefois le dix -huitième , d'autres- fois le vingt -feptième. Toute cette fuite de phénomènes y , qui forme un fpe&acle li intéreffant pour un Obfervateur , eft l'effet de 3'incubation opérée par une poule , & rinddflrie humaine n'a pas trouvé qu'il fut au - defïous d'elle a en imiter les pro- ■ cédés \ 'd'abord de fimples villageois d'E- ■ gyvze , & enfuite de Phyficiens de nos jours , font venus à bout de faire éclorre des œufs auiTi - bien que la meilleure ccuveufe , 8c d'en faire éclorre un très-" grand nombre à la fois -, tout le fecret cpnfî'fte à tenir ces œufs dans une tem- pérature qui réponde à peu près . au degré de ia chaleur de ïa poule , & à ïes garantir de toute humidité & de toute Êxhalâifon nnî/ih?*» . i&\{& **us cdls du charbon , de la braife , même de celle des œufs gâtés : en remplilTant ces deux conditions effentielles , & en y joignant l'attention- de retourner fouvent les œufs , & de faire circuler dans le four ou l'étuve les corbeilles qui les contien- dront , en forte que non - feulement du Coq. i 2 7 chaque œuf 5 niais chaque partie du mêaie œuf participe, à peu près égale- ment à ïa chaleur requife , on réuffira | toujours à faire éclorre de milliers de poulets. Toute chaleur efl bonne pour cela \ celle de, la mère poule n'a pas plus de privilège que celle de tout autre animal, fans en excepter l'homme ( n) j ni celle ; du feu folaire ou terrefere , ni celle I d'une couche de tan ou de fumier : le I point effentiei efb de favoîr s'en rendre maître, c'eft-à-dire, d'être toujours en j èz^t de l'augmenter & de la diminuer à fon gré : or il fera toujours pof- fibïe , au moyen de bons thermomètres , diftribués avec intelligence dans l'in- térieur du four ou de l'étuve , de favoir (n) Nota. On fait que Livie , étant greffe , imagina de couver & faire éclorre un œuf dans fon fein , voulant augurer du fexe de fon enfant par ïe fexe du pouffin qui viendroit ; ce pouffin fut mâle oc fon enfant aufii. Les Augures ne man- quèrent pas de fe prévaloir du fait , pour mon- trer aux pius incrédules la vérité de leur art: mais ce qui refte de mieux prouvé , c*eft que la chaleur humaine teft fuffifante pour ^incubation des eeufs. Fiv i 2 8 Hijloïre Naturelle le degré de chaleur de Tes différentes régions-, de ïa conferver en étoupantt les ouvertures & fermant rous les re- giftres du couvercle, de l'augmenter,, foit avec des cendres chaudes iî c'eft: un four, foit en ajoutant du bois dansi ie poêle fî c'eft une étuve à poêle , (oit en faifant des réchauds , fi c'eft une ; couche , Se enfin de la diminuer en ouvrant les registres pour donner accès i à l'air extérieur , ou bien en introduifanc dans ie four un ou pîufieurs corps froids , &c. Âii refte , qudqiiattention que Ton donne à la conduite d'un four d'incuba- tion , il n'en: guère pofTible d'y entrete- nir ccnitamment & fans interruption , le trente - deuxième degré , qui eft celui de la poule -, heureufement ce terme n'ert. point indivisible , & l'on a vu la chaleur varier du trente -huitième au vingt- qua- trième degré , fans qu'il en réfultàt d'in- convénient pour la couvée -, mais il faut remarquer qu'ici l'excès eft beaucoup plus à craindre que le défaut , & que quelques heures du trente -huitième Se même du trente- fixième degré, feroienc du Coq. ~ 129 ; plus de mal que quelques jours du vîngt- , quatrième •■, oc la preuve que cette quan- tité de moindre chaleur peut encore être diminuée fans inconvénient, c'eft qu'ayant trouvé, dans une prairie qu'on fauchoit , le nid dune perdrix , & ayant gardé 8c tenu à l'ombre les œufs pen- dant trente - fix heures qu'on ne pur : trouver de poule pour les couver , ils 1 écïorrent néanmoins tous au bout de trois ; jours , excepté ceux qui avoient été i ouverts pour voir où en étoient les perdreaux j à la vérité , ils étoient très- : avancés , Se fans doute il faut un degré de chaleur plus fort dans les commen- cemens de l'incubation que fur la fin de ce même temps , 011 la chaleur du petit oifeau fuflrc prefque feule à fou développement. A l'égard de fon humidité , comme elle eft fort contraire au fuccès de l'in- r cubation , il faut avoir des moyens sûrs . pour reconnoître (1 elle a pénétré dans j le four, pour la diiîiper lorsqu'elle y a E| pénétré , & pour empêcher qu'il n'en || vienne de nouvelle» L'hygromètre le plus lîmpïe Se le Fv i 3 o Hijloire Naturelle plus approprié pour juger de l'humidité de l'air de ces fortes de fours , c'eft un œuf froid qu'on y introduit & qu'on y tient pendant quelque temps , ïorfque le jufte degré de chaleur y eft établi-, fi , au bout d'un demi- quart d'heure au plus , cet œuf fe couvre d\m nuage îéger , femblable a celui que l'haleine produit fur une glace polie, ou bien à celui qui fe forme l'été fur la furfacfj extérieure d'un verre où l'on verfe des liqueurs à la glace , c'eft une preuve; que l'air du four eft trop humide , &> il i'eft d'autant plus que ce nuage efV. plus long- temps à fe diiîiper -, ce qui arrive principalement dans les fours à tan & à fumier , que l'on a voulu ren- • fermer dans un lieu clos : le meilleur remède à cet inconvénient eft de re- nouveler l'air de ces endroits fermés I en y é;abiiîïanc piufieurs courans par, le moyen des fenêtres oppofées , & , à| défaut de fenêtres , en y plaçant & agi-4 tant un ventilateur proportionné à l'ef-1 pace : quelquefois la feule tranipiratiorJ du grand nombre d'œufs , produit dansl le four même une humidité trop grande A du Coq. i 3 i \ & dans ce cas , il faut tous les deux ou ; trois jours retirer pour quelques indans , : les corbeilles d'œufs hors du four , & : l'éventer Amplement avec un chapeau qu'on y agitera en ditférens fens. Mais ce n'efl: pas allez de' diiïïper l'humidité , qui s'eft accumulée dans les fours , ii faut encore , autant qu'il eit , pofïïbie , . lui interdire tout accès par dehors , en revendant leurs parois exté- rieures , de plomb laminé ou de bon ciment, ou de plâtre ou.de goudron bien cuit , ou du moins en leur donnant plufieurs couches à l'huile qu'on lanTera bien fécher , & en collant fur leurs parois inférieures des bandes de veilles ou de fort papier gris. Ceft à ce peu de pratiques ailées que fe réduit tout l'art de l'incubation artificielle , & il faut y afïujettir la ftruc- ture & les dimenfions des fours ou étuves , le nombre , la forme & la dis- tribution des corbeilles , & toutes les petites manœuvres que la circonftance prefcrit , que le moment infpire , & qui bous ont été détaillées avec une immen- fité de paroles > & que nous réduirons F vj 132 Hïjloire Naturelle ici dans quelques lignes, fans cependant rien omecrre (o). Le four le plus (impie eft un ton- neau revêtu pardedans de papier collé, bouché par îe haut d'un couvercle qui l'emboîte 9 lequel eil percé dans Ton milieu d'une grande ouverture fermant à couInTe , pour regarder dans le four» 8c de plusieurs autres petites autour de celle - ià fervant de regiflre pour ie mé- nagement de ia chaleur , & à i'exclufîon de toute humidité. Lorfque les fournées font considé- rables & qu'elles vont bien , elles pro- duifent des milliers de poulets à la fois v & cette abondance même ne feroit pas fans inconvénient dans un climat comme îe notre > û. l'on n'eut trouvé moyen ï 5 4 Hijtoire Naturelle de fe palier cie poule pour élever les poulets, comme ou favoit s'en paiTeri pour ies faire éclorre ', 8c ces moyens fe. réduifent à une imitation plus ou moins parfaite , des procédés de la poule, îorique Tes poufîins font éclos, On juge bien que cette mère, qui a montré tant d'ardeur pour couver, qui a couvé avec tant d'ailiduité , qui a foigné avec tant d'intérêt des embryons qui n existaient point encore pour elle , . ne fe refroidit pas lorfque fes poufïïns font éclos -, fon attachement , fortifié par îa vue de ces petits êtres qui lui doivent îa naiffance , s'accroît encore tous les jours psr les nouveaux foins qu'exige leur foibieffe ^ fans cefïe occupée d'eux, elle ne cherche de la nourriture que pour eux ; h elle n'en trouve point > elle gratte la terre avec fes ongles pour lui arracher les aîimens qu'elle recèle dans fon fein , & elle s'en prive en leur faveur -, elle les rappelle Icrfqu'ils s'égarent , les met fous fes ailes à l'abri des intempéries, Se les couve une féconde fois -, elle fe livre à ces tendres foins du Coq. ï j y avec tant d'ardeur & de foucî, que fa conftitution en efr fenfiblement altérée , Se qu'il eft facile de distinguer de toute autre poule une mère qui mène fes petits, foit à fes plumes héritées & à fes ailes traînantes , foit au fon enroué de fa ; voix & à fes différentes inflexions toutes exprefïives , '&• ayant toutes une forte empreinte de foilicitude & d'arTe&ioii maternelle. Mais Ci elle s'oublie elle - même pour conferver fes petits , elle s'expofe à tout pour les défendre *, paroît-iî un éper- vier dans l'air , cette mère Ci fpible , Ci timide , & qui , en toute autre circons- tance , chercheroit fon falut dans h fuite 9 devient intrépide par tendreffe. ; elle s'élance au-devant de la ferre redou- table , & par fes cris redoublés , fes j battemens d'ailes & fon audace , elle en irnpofe fouvent à Toifeau carnaffier qui, rebuté d'une réfiftance imprévue s s'éloigne & va chercher une proie plus facile j elle paroît avoir toutes les qua- lités du bon cœur -, mais ce qui ne fait pas autant d'honneur au furplus de Cou i 3 6 Hljîoire Naturelle inftrnct , c'eft que Ci , par hafard , on lui a donné à couver des œufs de cane , , ou de rout autre oifeau de rivière, fom arfe&ion n'e/t pas moindre pour ces étrangers qu'elle le feroit pour fes pro- pres pouilins -, elle ne voit pas qu'elle n'eft que leur nourrice ou ieur bonne & non pas leur mère, & -lorfqu'Hs vont,, guidés par la Nature , s'ébattre ou fe plonger dans la rivière voifine, c'en: un, fpeéhcle fîngulier de voir la furprife,, les inquiétudes, les tranfes de cette pau- vre nourrice, qui fe croit encore mère ,, & qui, prefTée du deflr de les luivre aui milieu des eaux , mais retenue par une répugnance invincible pour cet élément,, s'agite , incertaine fur le rivage , tremble & fe défoie , voyant toute fa couvée- dans un péril évident , fans ofer lui donner de fecours. Il feroit impodible de fuppléer à rous. ïes foins de la poule pour élever (es petits , fi ces foins fuppofoient nécessai- rement un degré d'attention & d'arrec-- tion égal à celui de la mère elle - même>> il fumx, pour réuflîr , de remarquer. du Coq. 137 les principales circonftances de îa con- duite de la poule & Tes procédés à l'égard de fes petits , & de les imiter autant qui! elt poffible. Par exemple , 'ayant obfervé que le principal but des foins de la mère , efl de conduire Tes pouflîns dans des lieux où ils puhTent trouver à Te nourrir , & de les garantir du froid & de toutes les injures de i'air j on a imaginé le moyen de leur procurer tout cela , avec encore plus d'avantage que la mère ne peur le faire -, s'ils naiflenc en hiver, on les tienr pendant un mois ou fîx femaines dans une étuve échaufrée au même degré que les fours d'incu- bation , feulement on les en tire cinq ou fix fois par jour pour leur donner à manger au grand air , & fur-tout au foleil ; la chaleur de Tétuve favorife leur développement , l'air extérieur les for- tifie & ils profpèrent : de la mie de. pain , des jaunes d'œufs , de îa foupe , du millet font leur première nourriture*, fi c'eft en été , on ne les tient dans l'étuve que trois ou quatre jours, &> dans tous les temps, on ne les tire de Tétuve que pour les faire palier dans i 3 3 Hijtoire Naturelle la pouffinière : c'eft une efpèce de cagtl carrée , fermée pardevant d'un grillagd en fil- de- fer ou d'un "(impie filet , & pardeffus d'un couvercle à charnière: c'eit dans cette cage que les poufîinjJ trouvent à manger: mais ïorfqu'iîs om mangé & couru fufhfamment , il leuii faut un abri où ils puiilent le réchauffe! & fe repofer , & ceft pour cela que; îes poulets, qui font menés par une< mère , ont coutume de fe raffemblett alors fous fes ailes. M. de Réaumur a; imaginé , pour ce même ufage, une mèrtt artrfïc/el/e ; c'eft une boite doublée de^ peau de mouton , dont ia bafe efi: carrée: & le deiTus incliné comme le deiîus> d'un pupitre \ il place cette "boîte à l'uni des bouts de fa pouiîinière , de manière, que les poulets puiiTent y entrer de plein pied & en faire le tour au moins de trois côtés, & il réchauffe pardefTbusi: au moyen d'une chaufferette qu'oui renouvelle félon le befoin -, l'inclinai! on du couvercle de cette efpèce de. pupitre, offre des hauteurs différente^ pour les poulets de différentes tailles y mais comme ils ont coutume , iur-toutt du Coq. 139 btfquils ont froid , de fe preiTer Se ■même de s'cntatfer en montant les uns fur les autres , & que , dans cette foule , ies petits & les forbles courent rifque l'être étouffés , on tient cette boîte eu mère artificielle ouverte par les deux ,.)outs , ou plutôt on ne la ferme aux lieux bouts que par un rideau que le plus [petit poulet puiiTe fouîever facilement , ijifin qu'il ait toujours la facilité de fortir jorfquil fe fent trop preflfé *, après quoi, à peut , en faifant le tour , revenir par pâtre bout & choilîr une place moins jangereufe. M. de Réaumur tâche en- :ore de prévenir ce même inconvénient oar une autre précaution , c'eft de tenir je couvercle de la mère artificielle incliné (Tez bas pour que les poulets ne puHTent bas monter les uns fur les autres -, & à mefure que les poulets croifTent , il élève le couvercle en ajoutant fur le \:6iè de la boîte des haufïes proportion- nées : il 'renchérit encore fur tout cela , en divifant fes plus grandes poujjinières en deux par une cloifon tranfverfale a |5d de pouvoir féparer les poulets de pférestes grandeurs j ii les fait mettre î 40 Hijloire Naturelle auffi fur des roulettes pour ïa facili' du tranfport 5 car il faut abfolume. les rentrer dans la chambre toutes I nuits , & même pendant le jour lorfqi le temps eft rude ; & il faut que ceti chambre foit échauffée en temps d'hiver mais , au relie , il eft bon , dans h temps qui ne font ni froids ni pluvieux — d'expofer les pouffinières au grand ail & au foleil, avec la feule précautio de les garantir du vent j on peut mêmr en tenir les portes ouvertes , les pouiei apprendront bientôt à fortir pour aile, gratter le fumier ou becqueter Therb1) tendre , & à. rentrer pour prendre leui repas ou s'échaurler fous la mère ard fiel elle ; fi Ton ne veut pas courir I rifque de les îaifTer ainfi vaguer en li- berté , on ajoute au bout de la poufli nière une cage "à poulets ordinaire qui communiquant avec la première , leu fournira un plus grand efpace poui s'ébattre , & une promenade clofe 01 ils feront en fureté. Mais plus on les tient en captivité plus il faut être exad à leur fournir une nourriture qui leur convienne j outre k du Coq. 141 nilîet , les jaunes d'œufs , la Coupe & la jnie de pain , les jeunes poulets aiment ..uflï la navette , le chenevis & autres uenus grains de ce genre -, les pois , es fèves , les lentilles , le ris , Forge & avoine mondés , le turquis écrafé & e blé noir. Il convient , Se c'eft même jne économie . de faire crever dans l'eau bouillante la plupart de ces graines, ivant de les leur donner -, cette éco- nomie va à un cinquième fur le fro- ment , à deux cinquièmes fur l'orge 9 Il une moitié fur le turquis, à rien fur ''avoine & le blé noir j il y auroit de ija perte à faire crever le feigle , mais Beft de toutes ces graines celle que les Boulets aiment le moins. Enfin on Kent leur donner , à mefure qu'ils deviennent grands , de tout ce que ious mangeons nous - mêmes , excepté es amandes amères (p) Se les grains le café ( q) ; toute viande hachée , cuite (p) Voyci Ephémérides des Curieux de la Na- Are , Dec. 1 , an. 8 , obferv. 99. 1 ( q) Deux poulets ayant été nourris, Pun a^eç m café des ifies rôti , l'autre avec le même café on rôti P devinrent tous deux étiques & mou- 142, Hiftoïre Naturelle ou crue leur efl bonne, fur- tout le vers de terre -, c'efl: le mets dont et oifeaux , qu'on croit fî peu carnaiïiers1 paroifïent être le plus friands , & peut être ne leur manque- 1 -il 3 comme bien d'autres , qu'un bec crochu & dé ferres pour être de véritables, oifeau de proie. Cependant il faut avouer qu'ils H diffèrent pas moins des oifeaux de proi par la façon de digérer 3 & par la ftruc ture de l'eftomac , que par le bec & par les ongles -, l'eilomac de ceux-c efl: membraneux , 8c leur digeftioi s'opère par le moyen d'un difiolvant: qui varie dans les différentes efpèces* mais dont l'action efl: bien conftatée (r) au lieu que les gallinacés peuvent êtro regardés comme ayant trois eftomacs xurent, Fun le huitième jour & l'autre îe dixiêrrM après avoir confommé chacun trois onces de cafl les pieds & les jambes étoient fort enfles , & fol véficule du fiel fe trouva aufîï groflfe que celle dJun«i poule - d'inde. Mémoires de l'Académie royale dm Sciences , année 1 746 , pa ge I o I . (r) Voye\ Mémoires de l'Académie royale dei; Sciences, année 1752 ? page. 166, du Coq. 145 avoir, i.° le jabot , qui en: une efpèce Je poche membraneufe où les grains "ont d'abord macérés & commencent \ Te ramollir -, 2.0 la partie la plus évafée lu canal intermédiaire entre le jabot k le géfier , & la plus "voîiïne de ce- ui - ci -, elle efl tapiilée d'une quantité îe pentes glandes qui fourniilent un fuc -. dont les alimens peuvent auiîi Te pénétrer à leur pafTage -, 3.0 enfin le *éfier , qui fournit un lue manifestement \àdc y puïfque ce l'eau dans laquelle pfi a broyé fa membrane interne , devient une bonne prélure pour faire railler les crèmes -, c'eft ce troifième Kfcomac qui achève , par l'action puif- ante de fes mufcles , la d'geftion qui l'avoir été que préparée dans les deux Dremiers. La force de fes mufcles eft plus grande qu'on ne le croiroït s en noins de quatre heures, elle réduit en [poudre impalpable une boule d'un verre pilez épais pour porter un poids d'en- viron quatre livres-, en quaranre-huit heures, elle divife longitudinaieinent , en deux efpèces de gouttières , plufieurs tubes de verre de quatre lignes de diaz 144 Hljîoire Naturelle mètre 8c d'une ligne d'épaiffeur , dont au bout de ce temps toutes les parties aiguës 8c tranchantes fe trouvent émouf- fées & le poli détruit, fur- tout celui de la partie convexe -, elle ef; aufïi ca- pable d'aplatir des tubes de fer- blanc, & de broyer jufquà dix-fept noifettes dans l'efpace de vingt- quatre heures, &c cela par des comprefîions multi- pliées , par une alternative de frottement dont il eft difficile de voir la méca- nique. M. de Réaumur , ayant fait nom- bre de tentatives pour la découvrir , n'a aperçu qu'une feule fois des mouvemens un peu fenfîbles dans cette partie -, il vit dans un chapon , dont il avoit mis le géfier à découvert , des portions de ce vifeère fe contracter , s'aplatir & fe re- lever enfuire -, il obferva des efpèces de cordons charnus qui fe formojent à fa furface , ou plutôt qui paroidoient s'y former , parce qu'il fe faifoit entre-deux des enfoncemens qui les féparoient , & tous ces mouvemens fembloient le pro- pager comme par ondes 8c très- len- tement. Ce qui prouve que, dans les gallinacés, la du Coq. 145 )ïa dîgeftron fe fait principalement par \ l'action des mufcles du gélier , & non \ par celle d'un di-îolvant quelconque, c'eft que fi Ton fait avaler à l'un de [ ces oifeaux un petit tube de plomb s ouvert par les deux bouts , mais afîèz \ épais pour n'être point applati par • l'effort du géfier , Se dans lequel on j aura introduit un grain d'orge , le tube ; de plomb aura perdu fenfîblement de fon poids dans l'efpace de deux jours, ; & le grain d'orge qu'il renferme , fut-il î cuit & même mondé , fe retrouvera au i bout de deux Jours un. peu renne , mais aufîi peu altéré que fi on l'eût îaiiTé : pendant le même temps dans tout autre : endroit également humide 5 au lieu que ce même grain , Se d'autres beaucoup jplus durs, qui ne feroient pas garantis (par un tube , feroient digérés en beau- coup moins de temps. Une chofe qui peut aider encore à [l'action du géfier , c'eft que les oifeaux ' en tiennent la cavité remplie . autant ■qu'il eft po'Tible, & par -là mettent en jeu les quatre mufcles dont il eft cota- Ippféj à défaut de grains 9 ils le leftenc Oifeaux j Tome III, G i 4 5 Hijloire Naturelle avec de l'herbe , & même avec de pe- tits cailloux , Ïefquels , par leur dureté & leurs inégalités , font des inftrumens propres à broyer les grains , avec Ïefquels ils font continuellement froiifés -, je dis par leurs inégalités , car îorfqu'ils font polis ^ ils paflent fort vite ; il n'y a que les raboteux qui refcent : ils abondent d'autant plus dans le géfier qu'il s'y trouve moins d'alimens , & ils y fé-» joliment beaucoup plus de temps qu'au-i cune autre matière digeflible ou non digeftible. Et Ton ne fera point furpris que la membrane intérieure de cet eftomac Coici alfez forte pour réhiter à la réaction» de tant de corps durs , fur Ïefquels elle I agit fans relâche y ii Ton fait attentioaH que cette membrane eft en erlet fore épaifte , 8c d'une fubftance analogue à I celle de la corne ', d'ailleurs ne fait -on I pas que les morceaux de bois & les I cuirs dont on fe fort pour frotter , avec I une poudre extrêmement dure , les] corps auxquels on veut donner le I poli , rendent fort long- temps -, on peut | encore fuppofer que cette membranq du Coq, 147 Jure, fe répare de la même manière que îa peau caileufe des- mains de ceux qui travailleur à des ouvrages de force. Au refte , quoique les petites pierres puillenr contribuer à la digeftion , il n'eft pas bien avéré que les oifeaux ; granivores aient une intention b:en dé- : cldée en les avalant. Rédi ayant ren* 'fermé deux chapons avec de l'eau ëc [de ces petites pierres pour toute nour- riture , ils burent beaucoup d'eau 8c 'moururent , l'un au bout de vingt jours, l'autre au bout de vingt-quatre, f& tous deux fans avoir avalé une feule ; pierre. M. Rédi en trouva bien quelques- unes dans leur gélier -, mais c'étoit de 'celles qu'ils avoient avalées précédem- lœenc (f). Les organes fervant à la refpiration ,~ 'confident en un poumon fembîabîe à celui des animaux terreftres , & dix I cellules aériennes , dont il y en a huit idans la poitrine, qui communiquent (f) Rédi, des animaux vivons qui fi trouvent dans 1? les animaux vivons. Qi) 148 Hijîoire Naturelle immédiatement avec îe poumon , &: deux plus grandes dans le bas -ventre qui communiquent avec les huit pré- cédentes : iorfque, dans Finfpiration , le thorax efl dilaté , l'air entre par le larynx dans le poumon , paiie du poumon dans les huit cellules aériennes Supérieures , qui attirent auili , en Te dilatant , celui des deux cellules du bas -ventre , & celles-ci s'afraifTent à proportion *, iorfqu'au contraire le pou- mon & les cellules fup erreur es s'arïaif- fant dans l'expiration , preffent l'air contenu dans leur cavité j cet air fort en partie par le larynx, & reparle en partie des huit cellules de la poitrine dans les deux cellules du bas -ventre, lefquelles fe dilatent alors par une mécanique allez analogue à celle d'un foufîlet à deux âmes : mais ce n'eft point ici le lieu de développer tous les refîbrts de cette mécanique 5 il fufnra de remarquer que dans les oileaux qui ne volent point , comme l'autruche , le cafoar , & dans ceux qui volent pefamment , tels que les gallinacés , la du Coq. 149 quatrième cellule de chaque côté eH plus petite ( tj. Toutes ces différences d'organifation en entraînent nécerTairement beaucoup d'autres , fans parier des anches mem- braneufes obfervées dans quelques or- féaux. M. Duverney a fait voir fur un coq vivant , que la voix , dans ces oifeaux , ne fe formoit pas vers le larynx , comme dans les quadrupèdes , mais au bas de la trachée - artère , vers la bifurcation (u) ., où M. Perrault a vu un larynx interne. Outre cela , M. HériiTant a obfervé, dans les principales bronches du poumon , des membranes fémi- lunaires , pofées traniverfalement les unes au-defïus des autres, de façon qu'elles n'occupent que la moitié de la cavité de ces bronches , lairTant à l'air un libre cours par l'autre demi- cavité \ & il a jugé avec raifon , que ces membranes dévoient concourir à (t) Mémoires pour fervir à PHifloire des Ani- maux j partie II , pages 142 & 164. (u) Anciens Mémoires de l'Académie Royaîo ^es Sciences, tome XI, page 7. Giij ï 5 o Bijîoîft Naturelle la formation de la voix des oifeaux ; \ mais moins eiTentielîement encore quç la membrane de Tes de la lunette,, laquelle termine une cavité allez con-v iidérable qui fe trouve au-delius de- là partie fupérieure & interne de la poitrine, & qui a aufîi quelque com- munication avec les cellules aériennes. ! Supérieures ; cet Ànstomifle dit s'être aflure , par des expériences réitérées ^ , que îorfque cette membrane eft per- cée, la voix fe perd auffi -, & que, pour la faire entendre de nouveau , il faut boucher exactement l'ouverture de la membrane , & empêcher que l'air ne puiiTe forcir (x). D'après de fi grandes différences .rl obfervées dans l'appareil des organes de la voix, ne paroitra-t-il pas fingu- lier que les oifeaux, avec leur langue cartilagineufe & leurs lèvres de cornes, aient plus de facilité à imiter nos chants & même notre parole , que ceux d'entre I les quadrupèdes qui reliemblent le (x) Mémoires de l'Académie Royale année 1756, page 44. du Coq. i 5 j l'oifeau. L'aigle les a comme des pois > & un poulet de quatre mois ïes a déjà comme des olives j en général ■ leur grofïeur varie , non -feulement ■ d'une efpèce à l'autre 5 mais encore i dans la même efpèce , 8c n'eft jamais | plus remarquable que dans le temps ' des amours. Au refte , quelque peu \ coiiiidérable qu'en foit le volume , ils ; jouent un grand rôle dans l'économie j animale , & cela le voit clairement par les changemens qui arrivent à la fuite de leur extirpation. Cette opé- ! ration fe fait communément aux poulets qui ont trois ou quatre mois j celui qui la fubic prend déformais plus de |1 chair , Se fa chair , qui devient plus [j iucculente & plus délicate , donne aux f .Chymiftes des' produits diiïérens que i ceux qu'elle eut donnés avant la caf- | tration (a) ; il n'eu: prefque plus fujet (a) L'extrait tiré de ïa chair du poulet dégraiffé , eft un peu moins du quatorzième du poids total; au lieu qu'il en fait un dixième dans ie poulet y & un peu plus du feptième dans ïe coq : de plus , l'extrait de ïa chair du coq eft très - fec , au lieu que ceile du chapon eft difficile à fécher, Foy-ez G Y ij4 Hijloire Naturelle à la mue, de même que ïe cerf, qui eft dans le même cas , ne quitte plus fon bois; il n'a plus le même chant, fa voix devient enrouée , & il ne la fait entendre que rarement *, traité dure- ment par ïes coqs , avec dédain par ïes poules , privé de tous les appétits qui ont rapport à la reproduction , il eft non - feulement exclus de la fo- ciété de fes fembîables , il eft encore», pour ainfî dire, féparé de fon efpèce*,; c'eft un être ifolé , hors d'oeuvre , dont toutes les facultés fe replient fur lui-- même, &z n'ont pour but que fa con-- fervation individuelle -, manger , dormir i & s'engraiiïer , voilà .déformais fes principales fonctions , & tout ce qu'on peut lui demander : cependant , avec: un peu d'induftrie , on peut tirer parti de fa foïhlefte même , & de fa do- cilité , qui en ePc la fuite , en lui donnant! des habitudes utiles ; celle, par exemple, de conduire & d'élever les jeunes pou-- Sets; 2 ne faut pour cela que le tenir: Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, année > 1730, jrcge 231. du Coq. i j j pendant quelques jours dans une prifon ebfcure 3 ne l'en tirant qu'à des heures réglées pour lui donner à manger 9 8c l'accoutumant peu- à- peu à la vue & à la compagnie de quelques poulets un peu forts , il prendra bientôt ces poulets en amitié , & les conduira avec autant d'affection êc d'aiîîduité que le feroit leur mère-, il en con- duira même pkis que la mère , parce qu'il en peut réchauffer fous Tes ailes un plus grand nombre à la fois, La mère poule , dèbarraffée de ce foin 3 fe remettra plutôt à pondre (b ) j êc de cette manière les chapons , quoique voués à la ftérilité , contribueront encore indirectement à la confervation & à la multiplication de leur efpèce. Un fi grand changement dans les mœurs du chapon 3 produit par une caufe fi petite & fi peu fuffifante en apparence } eit un fait d'autant plus remarquable , qu'il eii confirmé par un très - grand nombre d'expériences (l ) Voyei Pratique de faire éiorre ies œufs ? &ç. G vj i j 6 Hijloire Naturelle ' que les hommes ont tentées fur d'autres efpèces , & qu'ils ont ofé étendre juique fur leurs femblables. On a fait fur les poulets un eflaîj beaucoup moins cruel , & qui n'eft peut-être pas moins intérefTant pour ia Phyiîque \ c'eft après leur avoir emporté la crête ( c) _, comme on fait ordinairement ,. d'y fubftituer un de leurs éperons naifïàns , qui ne font encore que de petits boutons -, ces éperons, ainn* entés, prennent peu-à- peu racine dans les chairs , en tirent de la nourriture , & croiffent fouvent plus qu'ils n'eu&ent fait dans le lieu de leur origine : on en a vu qui avoient à?ux pouces & demi de longueur, &: plus de trois lignes & demie de diamètre à la bafe -, quelquefois en croulant , ils fe recourbent comme les cornes de (c) Nota. La raifon qui fembïe avoir déter-l miné à couper ïa crête aux poulets qu'on fait" devenir chapons, c'efl qu'après cette opération, qui ne Tempe che pas de croître , eile cène de fe tenir droite, elle devient pendante comme celle des pouies; & fi on îa laiflbit, elïe les inconuno- deroit en leur couvrant un œil. du Coq. i j 7 bélier , d'autres fois ils fe renverfent comme celle des boucs ( d). C'efl une efpèce de greffe animale, dont le fuçcès a dû paroître fort dou- teux ïa première fois qu'on Ta tentée, & dont il eft furprenant qu'on n'ait tiré , depuis qu'elle a réuiTî , aucune connoirîance pratique. En général , !es expériences deftruàives font plus culti- vées , fuivies plus vivement que celles qui tendent à la confervation , parce que l'homme aime mieux jouir , 8c confommer , que faire du bien 8c s'infrruire. ; Les poulets ne nailîent point avec cette crête 8c ces membranes rougeâtres 3 qui les distinguent des autres oifeaux, ce n'eft qu'un mois après leur naiffance que ces parties commencent à le dé- velopper -, à deux mors , les jeunes mâles chantent déjà comme les coqs , & fe battent les uns contre les autres ^ ils fentent qu'ils doivent fe haïr, quoique le fondement de leur haine n'exifle pas (à) Voyez Anciens Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, tome XI, page 48. — Le Journal Économique j Mors, i^di , page 120. ï 5 8 ITiflolre Naturelle encore : ce n'eft guère qu'à cinq o irx mois qu'ils commencent à rechei cher les poules, & que celles- ci com mençent à pondre : dans les deux fexes le terme de i'accroiiîement comple eil à un an ou quinze mois -, îes jeune poules pondent plus , à ce qu'on dit mais les vieilles couvent mieux j et temps , necedaire à leur accronTement indiquer oit que la durée de leur vici naturelle, ne devroit être que de fepp ou huit ans, fi-, dans les oiïeaux, cette: durée fuivoit la même proportion que< dans les animaux quadrupèdes , mai< nous avons vu qu'elle eM beaucoup; plus longue > un coq peut vivre jufi qu'à vingt ans dans l'état de domefti-- cité, & peut-être trente dans celui de? liberté : malheureufemcnt pour eux nous n'avons nul intérêt de les laiiTer vivre long- temps-, les poulets & les\ chapons, qui iont deftrnés à paroître.1 fur nos tables , ne pafient jamais l'année,, & la plupart ne vivent qu'une faiion les coqs & îes poules qu'on emploie à la multiplication de l'efpèce , iont épurfés allez promptement , & nous ne du Coq. i j 9 donnons îe temps à aucun de parcourir la période entière de celui qui leur a été affigné par ia Nature ; en forte que ce n'eft que par des hafards fîngu- liers que Ton a vu des coqs mourir de vieiliefFe. Les poules peuvent fubfifter par- tout avec la protection de l'homme } au (Il font- elles répandues dans tout le monde habité : les gens affés en élèvent en Iflande , où elles pondent comme ailleurs (e) 3 :& les pays chauds en font pleins : mais Ja Perfe eft le climat primitif des coqs > félon le docleur Thomas Hyde (f) ; ces ; oifeaux y font en abondance & en grande neônii dération , fur -tout parmi certains [ Dervis , qui les regardent comme des horloges vivantes -, & Ton fan: qu'une . horloge eiï l'ame d'une communauté de | Dervis. (e) Horrebous, Defcription de V Islande, tome Ta- page 199. (f) Wfiorïa Religionis vetemm. Perfarum , &c- pag. 163. Remarquez cependant que l'art d'en- graifîer les chapons a été porté d'Europe en Perfe par des Marchands Arméniens. V&yei Tavernier y tome II , page 24- i6o HiJIolre Naturelle Dampier dit qu'il a vu & tué , dar j ïes ifles de Pouiocondor , des coqs fatl vages , qui ne furpalïoient pas nos coi . neilles en groiîeur , & dont le chant J aviez fembïable à celui des coqs de no ; balle- cours 5 étoit feulement plus ai gp-(g) ; 3 ajoute ailleurs, qu'il y ei a clans Fille Timor & à Sanjago , î'un< des ifles du Cap vert (h), Gemell Caréri rapporte qu'il en avoit aperçi dans Iqs ifles Philippines -, 8c MeroIIf prétend qu'il y a des poules fauvages ait royaume de Congo , qui font plus belles & de meilieur goût que ïes poules do- meftiques , mais que les Nègres eftiment peu ces fortes d'oiieaux. De leur climat naturel , quel qu'ai foit , ces oifeaux fe font répandus fa- cilement dans le vieux continent , depuis îa Chine jufqu'au Cap vert , & depuis l'Océan méridional jufqu'aux mers dm Nord : ces migrations font fort anciennes, (g) Nouveau Voyage autour du monde,, tome H, page 82. (h) Dampier, Suite du Voyage, de la nouvdJÀ Hollande, tome V> page 61, ; du Coq. i 6 1 k remontent au -delà de toute tradition îiftorrque -, mais leur ■ établifTement dans e nouveau monde , paroît être beau- :oup plus récent. L'Hillorien des Incas \i) afTure qu'il n'y en avoit point au ^érou avant la conquête 3 & même que es poules ont été plus de trente ans , ans pouvoir s'accoutumer à couver Mans îa vallée de Cufco. Coréal dit )oiicivement que les poules ont été pportées au Breiîl par les Efpagnols , fe que les Brahiiens les connoifToîent 1 peu , qu'ils n'en mangeorent d'au- une forte , & qu'ils regardèrent leurs èufs comme une efpèce de poifon : les labkans de Fille de Saint-Domingue l'en avoient point non plus, félon le éinoignage du P. Charlevoix 5 & pvïédo donne comme un fait avéré , Qu'elles ont été tranfportées d'Europe pn Amérique : il eft vrai qu'Acoita îvânce tout le contraire j il foutient [ue les poules exiîtoientau Pérou, avant 'arrivée des Efpagnols 5 il en donne )our preuves , qu'elles s'appellent dans a langue du pays gua/pa _, & leurs œufs (i) Hifïoire des Incas 7 tome II > page 239, i 6 2 Hifïoire Naturelle porno ; & de l'ancienneté du mot , i croît pouvoir conclure celle de la chofe comme s'il n'étoit pas fort iimple d< penfer que des Sauvages , voyant peu la première fois un oifeau étranger auront fongé d'abord à le nommer fort d'après fa reflemblance avec quel oifeau de leur pays , fort d'après quel qu'autre analogie -, mais ce qui doit ce me femble , faire préférer abiolumeq ïa première opinion , c'eft qu'elle ef confonre à la loi du climat -, cette loi : quoiqu'elle ne puiflTe avoir lieu, en gé- nérai, à l'égard des oifeaux , fur -tout l'égard de ceux qui ont l'aile forte . & à qui toutes les contrées font ouvertes eft néanmoins fuivie nécefiairement ceux qui , comme la poule , étant pefan: & ennemis de l'eau , ne peuvent ni tra- verfer les airs comme les oileaux qu: ont le vol élevé , ni palier les mers 01 même les grands fleuves , comme lei quadrupèdes qui favent nager , & font par conséquent exclus pour jamais de tout pays féparé du leur par de grandi amas d'eau, à moins que l'homme, qui va par - tout , ne s'avife de les tranfportet du Coq. i 6 5 wec lui : ainli , le coq eft encore un inimal qui appartient en propre à l'an- cien continent, & qu'A faut ajouter à ;.a lifte que j'ai donnée de tous les ani- naux qui n'exiftoient pas dans le nou- /eau Monde , lorfqu'on en a fait la iécouverre. A mefure que les poules fe font éloi- gnées de leur pays natal , qu'elles fe ont accoutumées à un autre climat , i d'autres alimens , elles ont du éprou- ver quelqu'altération dans leur forme, bu plutôt dans celles de leurs parties >jui en étoient le plus fufceptibles *, & le- là fans doute ces variétés qui conf- irment les différentes races dont je vais Hfcl'êr ? variétés qui fe perpétuent conf- ■animent dans chaque climat , foit par 'action continuée des mêmes caufes qui "es ont produites d'abord , foit par l'at- tention que l'on a d'affortir les individus leflinés à la propagation. ; Il feroit bon de dreiTer pour le coq9 comme je l'ai fait pour le chien , une îfpèce d'arbre généalogique de toutes !es races , idams lequel on verroît la fouche ramicive & fes différentes branches » i (34 Hijloire Naturelle qui repréfenteroient les divers ordwj d'altérations & de changemens relati à fes diùérens états j mais il faudra] avoir pour cela des mémoires plus exadbl plus détaillés que ceux que l'on trouv dans la plupart des relations: ainfï, j me contenterai de donner ici mon opi nion fur la poule de notre climat , q de rechercher fon origine, après avoi fait le dénombrement des races étran gères, qui ont été décrites par les Natu raliftes, ou feulement indiquées par le Voyageurs. i.° Le coq commun j le coq de nom climat a. 2°. Le coq huppé b , il ne diffère m coq commun que par une touffe cm plumes qui s'élève fur fa tête , & il j ordinairement la crête plus petite -, vrai- femblabîement parce que la nourritureJ au lieu d'être portée toute à la crête J en: en partie employée à l'accroilîemen des plumes. Quelques Voyageurs afïu- rent que toutes les poules du MexiqiM a Voye\ les planchas enluminées, n.° I. b Ibidem, n.° 49. du Coq. i 6 j ijSnt huppées : ces poules > comme ôutes les autres de l'Amérique , y ont •té traniportées par îes hommes , & tiennent originairement de l'ancien con- jfnent. Au refte , la race des poules puppées eft celle que les curieux ont H plus cultivée •, & , comme il arrive ■: toutes les choies qu'on regarde de fecs-près, ils y ont remarqué un grand pmbre de différences, fur -tout dans fes couleurs du plumage , d'après ïef- ruelles ils ont formé une multitude de [iaces diverfes , qu'ils eftiment d'autant [hlus, que leurs couleurs font plus belles |>u plus rares -, telles que les dorées & lés argentées •, la blanche à huppe noire, k la "noire à huppe blanche*, les agates Wz les chamois j les atdoifées ou péri- itettes j celles à écailles de poiiïon & les ■terminées -, la poule veuve , qui a de petites larmes blanches , {emées fur un lond rembruni r, la poule couleur de ieu -, la poule pierrée , dont le plumage fond blanc eft marqueté de noir ou de Ihamoîs , ou d'ardoiie ou de doré , etc. liais je doute fort que ces différences î 66 HiJIolre Naturelle (oient allez confiantes & a(Tez pro fondes pour conftituer des efpèces vrai ment difrérentes , comme le prétenden quelques Curieux , qui allurent que pli; iieurs des races ci -deilus ne propagen point enfemble. 3.0 Le coq fauvage de FJJie : c'el fans doute celui qui approche le plu de la Touche originaire des coqs ce I climat -, car , n'ayant jamais été gêné pa l'homme , ni dans le choix de la noue riture 5 ni dans fa manière de vivre» qu'eu: -ce qui auroit pu altérer en lu îa pureté de la première empreinte ? i n'eft ni des plus grands 3 ni des plus petit de l'efpèce , mais fa taille eft moyenoj entre les dirrérentes races.- II le trouve comme nous l'avons dit ci -de vaut, ei plufieurs contrées de l'A fie , en Afriqm & dans les iiles du Cap vert : noui n'en avons pas de description ailî exacte pour pouvoir le comparer notre coq. Je dois recommander ic aux Voyageuts , qui fe trouveront portée de voir ces coqs & poules Tau vages, de tâcher de faveir ii elles ton du Coq. i 6 7 les nids , & comment: elles les font. Vl. Lottinger , Médecin à Sar rebourg , jui a fait de nombreùfes & très-bonnes jbfervations fur les oiieaux , m'a allure jue nos poules , lorsqu'elles font en pleine liberté, font des nids , & qu'elles Y mettent autant de foin que les perdrix. 4.0 UAcoho ou coq de Madagafcar : les poules de cette efpèce font très- petites , & cependant leurs œufs font encore plus petits à proportion , puis- qu'elles en peuvent couver jufqu'à trente à la fois (k). 50. Poule naine de Java _, de la grof- feur d'un pigeon (l) : il 7 a queî- qu'apparence que la petite poule angioife pourroit bien être de la même race que [cette poule de Java , dont parlent les ^Voyageurs -, car cette poule angioife eft jjencore plus petite que notre poule (k) Hiftoire générale des Voyages ? tome VIII » pages 603 — 606. 1 (l) Collection Académique, partie étrangère 5 toim III, page 452. i68 Hïjloire Naturelle naine de France , n'étant en effet pas plus greffe qu'un pigeon de moyenne grofleur. On pourroit peut-être encore ajouter à, cette race , la petite poule du Pégu ? que les Voyageurs difent n'être pas plusj grofïe qu'une tourterelle, & avoir les pieds rogneux , mais le plumage très- beau. 6.° Pcule de tijikme de D arien > plus| petite que la poule commune : elle a un cercle de plumes autour des jambes, une; queue fort épaiiTe qu'elle porte droite, Se le bout des ailes noir-, elle chante avant le jour (m). j,° Poules de Camboge _, tranfportées] de ce royaume aux Philippines par îes Efpagnols : elles ont les pieds fiil courts, que leurs ailes traînent à terre ;[ cette race reflemble beaucoup à celle de la poule naine de France , ou peut" être à cette poule naine qu'on nourrit! en Bretagne à caufe de fa fécondité, [ & qui marche toujours en fautant : au refte , ces poules font de la grofleur (vi) Hiftoire générale des Voyages, tome VlU'è des du Coq. i 69 .des poules ordinaires, & ne font naines que par les jambes qu elles ont très- , courtes. 8.° Le coq de Bantam a beaucoup de rapport avec le coq pattu de France \ il a :de même les pieds couverts de plumes, .mais feulement en dehors \ celles des Jambes font très -longues & lui forment , des efpèces de bottes , qui defcendenc i beaucoup plus bas que le talon \ il efl [courageux, & fe bat hardiment contre I des coqs beaucoup plus forts que lui j il a Tiris des yeux rouge. On m'a allure que la plupart des races pattu es n'ont point de huppe. Il y a une greffe race de poules pattues qui vient d'Àngïe- : terre, & une plus petite que Ton appelle : le coq nain d' Angleterre j qui efb bien ' doré & à crête double. Il y en a encore une race naine , qui ne furpaiie pas le pigeon commun en ' groffeur, & dont le plumage eM: tantôt î blanc , tantôt blanc & doré. On com« [ prend auffi dans les poules pattues la * poule de Siam, qui efb blanche & plus petite que nos poules communes. 5>,° Les Holïandois parlent d'une O if eaux j Tome II L H I/O Hijîoire Naturelle autre efpèce de coqs propre à l'île de \ Java , où on ne les élève guère que pour ïa joute', ils l'appellent demi-poule \ d'Inde. Selon Willuîghby, il porte fa 1 queue à peu près comme le dindon. || C'eil fans doute à cette race que l'on doit rapporter celle de ces poules fîn- guîières de Java, dont parle Mandeflo (nj j lefquelles tiennent de la ' poule ordinaire & de la poule d'Inde, & qui fe battent entrelles à outrance comme les coqs. Le fieur Fournier m'a a fin ré que cette efpèce a été vivante à Paris (o) ; elle n'a, félon lui, ni crête, ni cravate \ la tête eft unie comme celle du faifan \ cette poule eft très haute fur les jambes j (a queue eft longue & pointue , les plumes étant d'inégale longueur-, & en général la couleur des plumes eft rembrunie comme celle des plumes du vautour, (n) Eiftoire générale des Voyages, tome II, ¥aBc 35°- (o) M. Fournier eft un Curieux , qui a élevât pendant plufieurs années pour lui-même, pour' S. A. S. M. le comte de Clennont, & pour plufieurs Seigneurs, des poules & des pigeons de toutes eipèces. du Coq. 171 ic.° Le coq d'Angleterre ne furpaiTe pas le coq nain en grolïeur , mais il efc beaucoup plus haut monté que notre , coq commun , & c'eû: la principale chofe qui l'en diftingue : on peut donc ._ rapporter à cette race ïe xolo j efpèce S de coq des Philippines, qui a de très- \ longues jambes (p). Au refte, le coq ; d'Angleterre eft fupérieur à celui de France pour le combat *, il a plutôt ; une aigrette qu'une huppe ; Ton cou & Ton bec font plus dégagés •, & il a ; au-deflTus des narines deux tubercules ; de chair, rouges comme fa crête. n.° Le coq de Turquie n'efl rernar- ; quabîe que par Ton beau plumage. ii.° Le coq de Hambourg ( q) * appelé auffi culotte de velours _, parce qu'il a les cailles & le ventre d'un noir velouté : fa démarche eft grave Se î majeftueufe ; Ion bec très - pointu j t; l'iris de Tes yeux jaunes , 8c Tes yeux i même font entourés d'un cercle de i (p) Gemeili Caréri , tome. V, page 272. (q) Coq ce Hambourg. Albin , tome III , page Hf) i 7 2 Hifloire Naturelle plumes brunes, d'où parc une touffe de plumes noires qui couvrent les oreilles ; il y a des plumes à peu près icmblables derrière la crête • & au - defïous des barbes, & des taches noires, rondes & larges fur là. poitrine j les jambes êc les pieds font de couleur de plomb, excepté la plante des pieds, qui e(V jaunâtre. 13.0 Le CCX7 /W/e dont les plumes fe. renverfent en dehors : on en trouve à Java, au Japon, & dans toute l'A fie méri- dionale : ians doute que ce coq appar- tient plus particulièrement aux pays chauds j car les pouffins de cette race font extrê- mement fenfibles au froid, & n'y re- firent guère dans notre climat. Le fleur Fournier m'a aiïuré que leur plumage prend toutes fortes de couleurs •, & qu'on en voit de blancs, de noirs, d'argentés, de dorés, d'ardoifes, &c. 14..0 La poule à duvet du Japon * , fes plumes iont blanches, Se les barbes des plumes font détachées &: relfemblentj giîez à du poil *, fes pieds on: des plumes en dehors jufqu'à l'ongle du doigt exté4 ff Voye\ Us flanches enluminées, n.° 98. du Ccq. i 73 rieur: cette race fe trouve au Japon , à la Chine, & clans quelques autres contrées de l'Alie. Pour la propager dans toute fa pureté , il faut que ie père & la mère forent tous deux à duvet, 1 5.0 Le coq nègre a îa crête, les barbes , Tépiderme & le période abio- lument noirs j fes plumes le font auiïï le plus fouvent , mais quelquefois elles font blanches. On en trouve aux Phi-* lippines, à Java, à Delhi, à Sanjago, Tune des îles du Cap - vert. Becmari prérend que la plupart des oifeaux de cette dernière île ont les os audl noirs que du jais, & îa peau de la couleur de celle des nègres (r): fi ce fait eft vrai, on ne peut guère attribuer cette teinture noire qu'aux aîimens que les oiieaux trouvent dans cette île. On eon- tîoît les erlets de ia garance, des caille- laits, des graterons, &c. & Ton fait qu'en Angleterre on rend blanche la chair des veaux en les nou raflant de farineux ■ & autres aîimens doux-, mêlés avec une certaine terre ou craie que Ton trouve (r) Dampier, tome III , page 23. Hiif 174 Hijîoire Naturelle dans la province de Bedfort ( f '). Il fercit donc curieux dchferver à San-' jago, parmi les différentes fubfrances' dent les oifeaus s'y nourrirent > quelle; eft celle qui teint leur période en noiri au refte, cette poule nègre eft connue. en France Se pov.noit s'y propager; mais comme la chair , lorfqu'elle efti cuite , eu noire 8c dégoûtante , . il eft ; probable qu'on ne cherchera pas à mul— tipiier cette race : lorfqu'elle fe mêle avec les autres, il en réfuîte des métis de différentes couleurs, mais qui con-- fervent ordinairement la crête & les cravates ou barbes noires, & qui ont: même la membrane qui forme î'oreiilon j teinte de bleu- noirâtre à l'extérieur. î 6,° Le coq fans croupion ou coq de Perfe de quelques Auteurs: la plupart des poulets 8c des coqs de Virginie r/ont point de croupion -, & cependant ils font certainement de race angloiie. Les habitans de cette colonie afturent que ïorfquon y tranfporte de ces oî- ieaux, ils perdent bientôt leur crou-. ( f) Journal Économique > Mai 1754, du Coq. 1 jj ■ pion (t). Si cela eft ainiî , il &udrojt I les appeler coqs de Virginie Se non de ■ Perfe , d'autant plus, que les anciens ne ; les ont point connus , Se que les Na- \ turalifles n'ont commencé à en parler , qn'après la découverte de l'Amérique* , Nous avons dit que les chiens d'Eu- - rope à oreilles pendantes , perdent leur voix ck prennent des oreilles droites 9 iorfqu'on les tranfpcrte dans le climat du tropique \ cette iingulière altération • produite par l'influence du climat 5 n'eft cependant pas auiîi grande que la perte du croupion & de la queue dans Tefpèce du coq : mais ce qui nous paroît être une bien plus grande fm- gularité, c'eft que dans le chien, comme dans le coq, qui de tous les animaux de deux ordres très-difrérens , ionz le plus domeftiques, c'eft-à-dire , le plus dénaturés par l'homme , il fe trouve légalement une race de chiens Tans queue 5 comme une race de coqs fans croii^- pion. On me montra , il y a plufieurs années, un de ces chiens né fans queue, (t) Tranfaclions Philofopbiques , n.° 206 > année 1693 , page 992, Hiv ij6 Hifloire Naturelle je crus alors que ce n'étoit qu'un indi- vidu viàé , un monftre , & c'efl pour cela que je n'en fis aucune mention dans l'Liftorre du chien : ce n'efl: que depuis ce temps que j'ai revu ces chiens fans queue, & que je me fuis affuré qu'ils forment une race confiante 8c patticu- lière comme celle des coqs fans crou- pion. Cette race de coqs a le hec 8c les pieds bleus -, une crête iimple ou dou- ble, & point de huppe*, ïe plumage eft de toutes couleurs -, & le fieur Foumier m'a aiïuté que, forfqu'élle fe mêle avec la race ordinaire , il en provient des métis qui n'ont qu'un demi-croupion, 8c fix plumes à la queue au lieu de douze : cela peut être , mais j'ai de la peine à le croire. i ;.° La ponté à cinq doigts eft , comme nous avons dk , une forte exception à la méthode dont les principaux caractères fe prennent du nombre des doigrs : celle» ci en a cinq a chaque pied , trois en avant & deux en arrière ^ 8c t[ y a même quelques individus dans cette race, qui ont fîx doigts. iS.° Les poules de Sanfevarre : ce du ^oq. ijy font celles qui donnent ces œufs qui fe vendent , en Perfe , trois ou quatre écus la pièce, & que les.Perfans s'amufent à choquer les uns contre les autres par manière de jeu : dans le même pays, il y a des coqs beaucoup plus beaux & plus grands , & qui coûtent jufqu à trois cents livres (u)* i5>.° Le coq de Caux ou de Padoùe: fon attribut dumictif eft la grorteur \ iï a fouvent la crête double en forme de couronne, & une elpèce de huppe qui cil plus marquée dans les poules , leur voix efl beaucoup plus forte, plus grave & plus rauque, & leur poids va jufqu a huit à dix livres : on peut rapporter à cette belle race , les grands coqs de Rhodes , de Perfe (x) , du Pégu (y )<>■ ces groupes poules de Bahia, qui ne corn* mencent à fe couvrir de plumes , que lorsqu'elles ont atteint la moitié de leur (a) Voyage de Tavernier, tome II, piges- 4^ & 44. (x) Chardin, tome II, page 24. (y) Recueil des Voyages qui ont fervî à ï'e- tâbïilfement de h Compagnie des Indes , tome IUfy gage 7.1, i 7 8 Hijloire Naturelle grofïeur (\) ; on fait que les poufïïns de Caux prennent leurs plumes plus tard que ies pouffirs ordinaires. Au refte , il" faut remarquer qu'un grand nombre d'oifeaux dont parlent les Voyageuis, fous le nom de coqs ou de poule , font de toute autre efpèee ; telles font les poules patourdss ou pa- lourdes, qui fe trouvent au Grand-banc, & font très- friandes de foie de morue (a) ; le coq , ou la poule noire de Mofcovie , qui font coqs & poules de bruyère *, la poule rouge du Pérou , qui a beau- coup de rapport avec les faifans *, cette grolïe poule à huppe , de la nouvelle Guinée, dont le plumage eft bleu cé- iefte , qui a le bec de pigeon -, les pieds de poule commune , qui niche iur ies arbres (b) _, & qui eft proba- blement le faifan de Banda -, la poule de Damier e , qui a le bec & les pieds (l) Nouveau voyage de Dampier , tome III, fage 68. (a) Recueiî des Voyages du Nord ? tome III, ï*& 15. (b) Hiftoire générale des Voyages , tome XI, fage 230. du Coq. 179 rouges, une petite marque fur îa tête, de la même couleur , Se le plumage d'un bleu - violet , ce qui pourroit fe rappor- ter à la grande poule d'eau \ la poule du Delta, dont Thévenot vante les belles couleurs, mais qui dirlère des gallinacés, non -feulement par la forme du bec 8c de la queue , mais encore par les habi- tudes naturelles, puifqu'elle le plaît dans les marécages -, la poule de Pharaon , que le même Thévenot dit ne le point céder à la gelinotte -, les poules de Corée , qui ont une queue de trois pieds de lon- gueur, &c. Dans ce grand nombre de races différentes que nous préfente Tefpèce du coq, comment pourrons -nous dé- mêler quelle en eft la fouche primitive? tant de circonffances ont influé fur ces variétés, tant de hafards ont concouru pour les produire ! les foins Se même les caprices de l'homme les ont fi fore multipliés , qu'il parcît bien difficile de remonter à leur première origine , Si de reconnoître , dans nos baffe-cours, la poule de la Nature, ni même la poule de notre climat : les coqs .fail- li vj 180 Hijîoire Naturelle vages, qui fe trouvent dans les pay9 chauds de l'Aile , pourront être re- gardés comme la tige primordiale de tous les coqs de ces contrées \ mais comme il n'exifte , dans nos pays tem- pérés, aucun oiieau fauvage qui reilem- ble parfaitement à nos poules domefti- qucs , on ne fait à laquelle des races ou des variétés l'on doit donner la primau- té ; car en fuppofant que le faiian , îe coq de bruyère ou la gelinotte, qui font les ieuis oifeaux fanvages de ce pays qu'on- puide rapprocher de nos poules par la comparaison, en forent les .races primitives -, & en fuppofant encore que ces oifeaux peuvent produire, avec nos poules , des métis féconds , ce qui ri e(t pas bien avéré , ils feront alors "de la même eipèce *, mais les races fe feront très anciennement iéparées , &• toujours maintenues par elles-mêmes, fans cher- cher à le réunir 9.vec les races domef ti- ques, dont elles diffèrent par des caractè- res eonitans-, tels que le défaut de crête», de membranes pendantes dans les deux fexes & d'éperons dans les mâles ; 8c pat confécruent ces races fauvages ne du Coq. i 3 r font repréfentées par aucune de nos races domeftiques , qui , quoique très- variées & très -différentes entr'eiies , à beaucoup d'égards. , ont toutes néan- moins ces crêtes , ces membranes 8c ces éperons qui manquent aux faifans , à ia gelinotte & au coq de bruyère ^ d'où Ton doit conclure qu'il faut regarder le faifan , le coq de bruyère & la gelinotte , comme des efpèces voî*- iines, & néanmoins dirrerentes de celle de la poule , jufqu'à ce qu'on fe foit bien aiïuré , par des expériences réité- rées, que ces oifeaux fauvages peuvent produire avec nos poules domeftiques^ nomfeuleinent des mulets ftériies, mais des métis féconds-, car, c'eft à cet effet qu'eft attachée l'idée d'identité d'efpèce : les races iingulières , telles que la poule naine, la poule frifée, ia poule nègre 3 la poule fans croupion , viennent toutes : originairement des pays étrangers y & quoiqu'elles fe mêlent & produifent avec nos poules communes , elles ne font 3 .aide la même race, ni du même climat y, en iéparant donc notre poule commune de. toutes les efpèces fauvages r qui i 8 2 Hijloirc Naturelle peuvent fe mêler avec elle, relies que ! la gelinotte , le coq de bruyère , le far- • fan, &c. en la réparant aulîî de toutes les poules étrangères , avec lefqueUes elle le mêle & produit des individus fé- conds, nous diminuerons de beaucoup le nombre de fes variétés, & nous n'y trouverons plus que des différences a(Iez légères -, les unes pour la grandeur du corps , les poules de Caux font preique doubles , pour la groiïeur , de nos poules ordinaires*, les autres =ponr ia hauteur des jambes , le coq d'Angleterre , quoique parfaitement reffemblant à celui de France , a les jambes & les pieds bien plus longs*, d'autres pour la longueur des plumes,, comme le coq huppé , qui ne diffère du coq commun , que par la hauteur des plumes du fommet de la tête ; d'autres par le nombre des doigts, telles que les poules Se coqs à cinq doigts î d'autres enfin par la beauté & la iin- gularité des couleurs , comme la poule de Turquie & celle de Hambourg. Or, de ces fix variétés auxquelles nous* pouvons réduire la race de nos poules ' du Coq. i 8 j communes', trois appartiennent, comme Ton voit , à l'influence du climat de Hambourg, de la Turquie & de l'An- gleterre , & peur- être encore la qua- trième & la cinquième-, car la poule de Caux vient vraiiembîabiement d'Italie , puifqu'on l'appelle aufîi poule de Padoue; & la poule à cinq doigts étoit connue en Italie dès le temps de Columelle : Iftinlî, il ne nous reliera que le coq commun & le coq huppé, qu'on doive regarder comme les races naturelles de notre pays : mais , dans ces deux races, les poules & les coqs font également de toutes couleurs -, le caractère conf- tant de la huppe paroit indiquer une efpèce perfectionnée -, c'eft-à-dire , plus ioignée & mieux nourries &? par con- féquent, la race commune du coq 8c de la poule fans huppe, doit être la vraie tige de nos poules } & fi Fou veut chercher , dans cette race com- mune, quelle ePc la couleur qu'on peut attribuer à la race primitive , il paroît que c'en: la poule blanche *, car , en fuppofant les poules originairement blanches 3 elles auront varié du blane 184 Hijloire Naturelle au noir, & pris fuccefïïvement toute! les couleurs intermédiaires. Un rapport très-éioig -té , & que perfonne n'a faiii , vient directement à l'appui de cette fuppofïtion, & femble indiquer que la poule blanche e& en effet la première de Ton efpèce , &: que c'efl: d'elle que toutes les autres races font iiïues ; ce rapport confiile dans la reiïemblance qui fe trouve aûez généralement entre ïa couleur des œufs qui ont différentes directions. On comprend bien que îe meilleur : mâle fera celui qui aura plus de force , I plus de vivacité , plus d'énergie dans | toute fon aclion : on pourra lui donner | cinq ou fîx poules d'Inde -, s'il y a ; plu (leurs mâles , ils fe battront, mais ; non pas avec l'acharnement des coqs •ordinaires: ceux-ci ayant plus d'ardeur I pour leurs femelles , font auflï plus |[ animés contre leurs rivaux , & la guerre | qu'ils fe font entr'eux eft ordînaire- • ment un combat à outrance -, on en a vu même attaquer des coqs dinde |ji deux fois plus gros qu'eux , & les : mettre à mort ) les fujets de guerre i$)6 Hyioire Naturelle ne manquent pas entre les coqs des deux efpèces -, h , comme le dit Sperling , îe coq d'Inde , privé de fes femelles, s'adrelïe aux poules ordinaires , & que les poules d'Inde , dans l'abience de leur .maie , s'offrent au coq ordinaire , & le follicîtent même allez vivement (c). La guerre, que les coqs d'Inde fe font entr'eux. eft beaucoup moins vio- lente -, îe vaincu ne cède pas toujours le champ de bataille-, quelquefois même il eit préféré par les femelles : on à; remarqué qu'un dindon blanc ayant été. battu par un dindon noir , prefque tous les dindonneaux de la couvée furent i blancs. L'accouplement des dindons fe faîtl à peu près de la même manière que celui des coqs j mais il dure plus long- temps *, & c'eft: peut-être par cette raifon qu'il faut moins de femelles au mâle , Se qu'il s'ufe beaucoup plus vite.] J'ai dit plus haut , fur la foi de Sperling, I qu'il fe mêloit quelquefois avec les poules] ordinaires -, îe même Auteur prétend! (cj Zoologia Hyfica, page 367, du Dindon. 197 que, quand il eM: privé de Tes femelles.; il s'accouple aufli , non - feulement avec îa femelle d'un paon ( ce qui peut être )3 mais encore avec les canes (ce qui me paroîc moins vraifemblahle ). La poule d'Inde neft pas aufli fé- conde que la poule ordinaire *, il faut lui donner de temps en temps du ' chêne vis , de l'avoine, du farraiin , pour l'exciter à pondre -, & avec cela , elle ne fait guère qu'une feule ponte par an , , d'environ quinze œufs -, lorfqu elle en fait deux, ce qui eft très -rare, elle commence la première fur la fin de \ ï hiver , & îa féconde dans le mois d'Août ; ces œufs font blancs , avec quel- I ques petites taches d'un jaune -rougeâtre, & du refle , ils font organifés à peu près comme ceux de la poule ordi- naire : la poule d'Inde couve aufli les œufs de toute forte d'oifeaux -, on juge qu'elle demande à couver , lorfqu'après avoir fait fa ponte , elle refle dans le nid *, pour que ce nid lui plaife , iï faut qu'il foit en lieu fec , à une bonne ] .r expofition , félon la faifon , & point trop en vue > car fon inflind la porte Iirj 198 Uijloire Naturelle ordinairement à fe cacher avec grand i foin lorfqn'eîle couve. Ce font les poules de l'année précé- dente qui, d'ordinaire, font les meilleures ; couveufes -, elles fe dévouent à cette occupation avec tant d'ardeur 8c plus ils deviennent , avec le temps , ro- bufles & capables de foutenir toutes les injures du temps : ils aiment à ie per- cher en plein air , & parlent ainfî les nuits les plus froides de l'hiver , tantôt fe foute n an t fur un feul pied , & re- tirant l'autre dans les plumes de leur ventre, comme pour le réchauffer ; tantôt, au contraire , s'accroupiifant fur leur bâton 5 & s'y tenant en équilibre -, ils fe mettent la tête fous Faile pour dor- mir, &, pendant leur foaameîl, ils ont le mouvement de la refpiration fenlible Se très - marqué. La meilleure façon de conduire les dindons devenus forts , c eft de les mener paître par la campagne, dans les lieux où abondent les orties Se autres plantes de leur goût , dans les vergers , lorfque les fruits commencent à tomber , de. les faire rentrer avant la chiite du ferein , 8c de les mettre à l'abri pendant îa plus grande chaleur des jours dété : tous les foirs, lorfqu'ils reviennent, on îeur donne îa pâtée , du grain ou quel- qu'autre nourriture , excepté feulement au temps des moiiïons , où ils trouvent furEfamroent à manger par îa cam- pagne *, comme ils font fort craintifs y (h) Voyc\ Hifioire de l'Académie Royale des Sciences de Paris, année 1748 , gage 84. . io 6 Hijïoire Naturelle ils fe îaiflent aifément conduire j il ne faut que l'ombre d'une baguette pour, en mener des troupeaux même très - con- sidérables, & fouvent ils prendront la fuite devant un animai beaucoup plus petit & plus foible qu'eux : cependant il eft des occaiions ou ils montrent du cou-^ rage , fur -tout lorfqu'il s'agit de fe dé- fendre contre les fouines & autres enne^J mis de la volaille', on en a vu mêmer quelquefois entourer , en troupe , un lièvre au gîte, & chercher à le tuer à: coups de bec (i). Ils ont dinérens tons , différentes in- flexions de voix , félon l'âge , le fexe, & fuivant les pallions qu'ils veulent expri- mer : leur démarche eft lente & leur vol pefant -, ils boivent , mangent , avalent de petits cailloux , & digèrent à peu près comme les coqs , & * comme eux , ils ont double eftomac , c'efl-à-dire , un jabot & un géfier -, mais , comme ils font plus gros , les mufcles de leur géfier ont aufïi plus de force. La longueur du tube inreftinai eft (i) Ornithologie de Êaîerne , page 132. du Dindon. zcy ■ à peu près quadruple de la longueur de ranimai , prife depuis la pointe du : bec jufqu'à l'extrémité du croupion*, { iis ont deux cœcum j dirigés l'un 8c l'autre d'arrière en avant , & qui , pris enfemble , font plus du quart de tout | le conduit inteitinal *, ils prennent naif- | fance allez près de l'extrémité de ce I conduit , 8c les excrémens contenus dans I leur cavité , ne diffèrent guère de ceux: j que renferme la cavité du colon 8c du Y rectum : ces excrémens ne féfournenr I point dans la cloaque commune , comme I l'urine, 8c ce Fédiment blanc , qui fe trouve [plus ou moins abondamment par -tout I où parle l'urine, & ils ont allez de con- | fiftance pour fe mouler en fortant par Y anus. . Les parties de la génération fe pré- fentent dans les dindons à peu près comme dans les autres gallinacés -, mais à l'égard de l'ufage qu'ils en font , ils paroi lient avoir beaucoup moins de puiiTance réelle , les maies étant moins ardens pour leurs femelles , moins prompts dans l'acre de la fécondation 3 8c leurs approches étant beaucoup plus rares y & , 2 o 8 Hifloire Nature lie d'autre côté , les femelles pondent plus tard , & bien plus rarement , du moins dans nos climats. Comme les yeux des oifeaux font, dans quelques parties , organisés diffé- remment de ceux de l'homme & des animaux quadrupèdes , je crois devoir indiquer ici ces principales différences! outre les deux paupières fupérieure & inférieure , les dindons , ainfi que la plupart des autres oifeaux , en ont en- core une troifième , nommée paupière interne., mcmhrana niBitans y qui fe retire & fe piiiTe en forme de croiflant dans le grand coin de l'œil , & dont les ciilemens fréquens & rapides s'exécutent par une mécanique mufcuîaire curieufe : là" paupière fupérieure eft prefqu'en- tièrement immobile \ mais l'inférieure eft capable de fermer l'œil en s'éievant vers la fupérieure -, ce qui n'arrive guère <[ue lorfque l'animal dort ou lorfqu'il ne vit plus : ces deux paupières ont chacune un point lacrymal , & n'ont pas des rebords cartilagineux -y la cornée transparente eft environnée d'un cercle oiTeux , compofé de quinze pièces plus du Dindon . 209 ou moins , pofées Tune fur l'autre en recouvrement, comme les tuiles ou les ardoifes d'un couvert-, le cryftallin eit plus dur que celui de l'homme , mais moins dur que celui des quadrupèdes & des poiiîons ( k) ^ & fa plus grande courbure eft en arrière (l) ; enfin il fort du nerf optique , entre la rétine & la choroïde , une membrane noire de figure rhomboïde , & composée de fibres parallèles , laquelle traverfe l'hu- meur vitrée , & va s'attacher quelquefois immédiatement par ion angle antérieur , quelquefois par un filet qui part de cet angle , à la capfule du cryftallin ', c'efr. à cette membrane fubtile & tranfparente que M.r3 les Anatomiftes de l'Académie des Sciences ont donné le nom de bourfe j quoiqu'elle n'en ait guère la figure dans le dindon , non plus que dans la poule , l'oie 3 le canard , le pigeon , &c. fon ufage eft , félon M, Petit , d'abiorber les rayons de lumière qui partent des objets qui font à côté ( k J Mémoires de l'Académie Royale des Scien- ces , aiw.éz 1726 , page 83. (I) Ibidem, année 1730 ? page 10. 2 i o Hijloire Naturelle de îa tête , & qui entrent directemei dans les yeux ( m ) ; mais , quoi qu'il eni Toit de cette idée , il efl certain que l'organe de îa vue eft plus compoft dans les oifeaux que dans les quadru- pèdes *, & , comme nous avons prouvé ailleurs que les oifeaux l'emportoient* par ce fens , fur les autres animaux (n ) j & que nous avons même eu occafio» de remarquer plus haut combien h poule dinde avoir la vue perçante , on ne peut guère Te refufer à cette conjec- ture fi naturelle , que la fupériorité de l'organe de la vue dans les oifeaux , eft due à la différence de la ftrudlure dç leurs yeux , & à l'artifice particulier de leur organifation ^ conjecture trcs-vran femblabie , niais de laquelle néanmoins îa valeur précife ne pourra être déter< minée que par l'étude approfondie dç< l'anatomie comparée & de la mécanique animale. (m) Mémoires de i 'Académie Royale des Scieiv» ces, année 1735, page 123. (n) Voyez Difcours fur la Nature des Gifiuux, tomelj page 6. du Dindon. 2 1 1 Sf l'on compare le témoignage des Voyageurs , on ne peut s'empêcher de reconnoître que les dindons font origi- naires d'Amérique & des ifles adjacentes» j '8c qu'avant la découverte de ce nouveau j continent , ils n'exiftoient point dans l'ancien. Le P. du Tertre remarque qu'ils I font dans les Antilles comme dans leur pays naturel, & que, pourvu qu'on en lait un peu de loin , ils couvent trois i à quatre fois l'année (0): or c'elt une :règîe générale pour tous les animaux , [[qu'ils multiplient plus dans le climat. :qui leur eft propre que par - tout ailleurs ; '«'ils y deviennent auïïï plus grands & ?pîus forts, 8c c'eft. précisément ce que 'l'on obferve dans les dindons d'Amé- •rique : on en trouve une multitude prodigieufe chez les Illinois, dîfent les ; Millionnaires Jéfuites j ils y vont par troupes de cent , quelquefois même de deux cents , ils font beaucoup plus gros que ceux que l'on voit en France , (g) Hiftoire générale des Antilles, tome II 9. page 266, 2 i 2 Hijloïre Naturelle & pèfent jufquà trente- fix livres (p) ; j Jcifelin dit jufquà ioixante livres ( q): ; ils ne Ce trouvent pas en moindre quan- tité dans le Canada ( où , félon le P. Théodat , Récollet , les Sauvages les appeîoient Ondettoutaques) _, dans le Mexique, dans la Nouvelle- Angleterre, dans cette vafte contrée qu'atrofe le MhTiffipi, & chez les Brafîliens , où ils font connus fous le nom de AngnanÀ oujfou (r). Le docteur Hans Sloane en a vu à la Jamaïque : il eft à remarquer que, dans prefque tous ces pays, les din- dons font dans l'état de fauvages , & qu'ils y fourmillent par -tout, à quelque diftance néanmoins des habitations, comme s'ils ne cédoient le terrein que pied à pied aux colons Européens. Mais (î h plupart des Voyageurs & témoins oculaires , s'accordent à regarder cet oifeau comme naturel , appartenant en propre au continent de l'Amérique , (p) Lettres Édifiantes , XXI IL* Rec.pagc 237. (q) Raretés de la Nouvelle- Angleterre. (r) Voyage au Brefil, recueilli par de Lerv, page 171. du Dindon. 2 r 3 fur- tout de l'Amérique feptentrionale , ils ne s'accordent pas moins à dépofer qu'il ne s'en trouve point , ou que très- peu , dans toute l'Afie. Gemelli Caréri nous apprend que non 'feulement il n'y en a point aux Philippines -, mais que ceux même que les Èipagnols y avoient apportés de la Nouvelle- Efpagne, n'av oient pu y prof- jpérer (f)P Le P. du Halde allure qu'on ne r trouve à la Chine que ceux qui y ont ■été tranfportés d'ailleurs \ il eft vrai que, ; dans le même endroit , ce Jéfuite iup- pofe qu'ils font fort communs dans les Indes orientales -, mais il paroîc que ce î n'eft en effet qu'une fuppoiition fondée \ fur des ouï - dire , au lieu qu'il étoit : témoin oculaire de ce qu'il dit de la - Chine ( t ). Le P. de Bourzes , autre Jéfuite , 1 raconte qu'il n'y en a point dans le I royaume de Madurc 5 fîtué en la pref* ( f) Voyages , tome V , pages 271 & 272. (t) Hiftoire générale des Voyages, tome VI, 2 î 4 Hijloire Naturelle qu'ifle en -deçà du Gange -, d'où il coni dut avec raifon , que ce font appa remuent les Indes occidentales qui on donné leur nom à cet oifeau ( u ). Dampier n'en a point vu non plu à Mindanao (x)9 Chardin (y) &\ Tavernier , qui ont parcouru l'Aile ( \)\ difent pofîtivement qu'il n'y a porn de dindons dans tout ce vafie pays félon îe dernier de ces Voyageurs , o font les Arméniens qui les ont porté en Perfe, où ils ont mal réuffi, comim ce font les Hollandois qui les ont porté à Batavia , où ils ont beaucoup mieu: prospéré. Enfin Bofman 8c quelques autre Voyageurs nous difent que fi Ton voi des dindons au pays de Congo , à I Côte -d'or, au Sénégal & autres lieud de l'Afrique , ce n'eft que dans îe (u) Lettre du 21 Septembre 1713 , parmi fei Lettres Édifiantes. (x) Nouveau Voyage , tome I , page 406. (y) Voyages de Chardin , tome II, page 29. (l) Voyages de Tavernier, tome II , page 22. i du Dindon, 2 1 j comptoirs & chez les Etrangers , ïes .naturels du pays en faifant peu d'ufage -, félon les mêmes Voyageurs , il e(i vihble que ces dindons font provenus de ceux que ïes ' Portugais & ancres Européens ^voient apportés dans les commencemens avec la volaille ordinaire (a). Je ne diiluiiulerai pas que Aldro- vande , Gefner , Béïon & Ray ont prétendu que les dindons croient ori- îginaires d'Afrique ou des Indes orien- tales *, & quoique leur fentiment foit Ipeu fuivi aujourd'hui , je crois devoir , k de Ci grands noms , de ne point le rejeter fans quelque difcuilion. Àldrovande a voulu prouver fort au (long que les dindons étoient les véri- tables méléagrides des Anciens , autre- fment les poules d'Afrique ou de Nu- midie , dont le plumage efl couvert de taches rondes en forme de gouttes ( ga Hindi, NumidicA guttata ) ; mais il eft évident , Se tout le monde convient aujourd'hui 3 que ces poules Africaines ne font autre çhofe que nos peintades3 (a) Voyages de Bofman , page 242, 2 i 6 Hijtoire Naturelle qui en effet nous viennent d'Afrique i & font très- différentes des dindons > ainfi , il feroit inutile de difcuter plu j en détail cette opinion d'Aldrovande qui porte avec elle fa réfutation , 3 que néanmoins M. Linnarus lembL avoir voulu perpétuer ou renouveler en appliquant au dindon le nom d< meleagris. Ray , qui fait venir les dindons d'A frique ou des Indes orientales, fembli s'être laifïé tromper par les noms j celu doifeau de Numidie , qu'il adopte, fup pofe une origine africaine , & ceux d< Turkey fid ha variam & florldam velutl coronamfloribus contextam ; caudavennas non inflexas habent j n'eque revofûtas m orbcm _, fed latas ; quas cum non erigunt utpavones trahunt : eorum penn/fma- \ragdi colorent ferunt. « Les -Indes pro- duifent de très- gros coqs dont la crêtes ?n eft point rouge, comme celle des nô-c* Rires, maïs de couleurs variées, comme ce feroit une couronne de fleurs j leur queue ce fna pas non plus de pïumes recour- ce jbces en arc -, lorfquils ne h relèvent cc- 'pas, ils la portent comme des paons, ce- [(c'èft-à-dire, horizontalement), leurs'» [pennes font de la couleur de fértïe-* fraude : ?> mais je ne vois pas que ce :pa%e foit appliquabïe aux dindons , fi.#La groiieur de ces coqs ne prouve point que ce foit des dindons -, car on fait qu'il y a en effet dans l'Afié , & Oifeaux j i orne III. K 2 i 8 Hijtoire Naturelle notamment en Perfe & au Pégu , de vé- ritables coqs qui font très - gros. 2.0 Cette crête, de couleurs variées, fufîiroit feule pour exclure les dindons qui n'eurent jamais de crête \ car il s'agit ici , non d'une aigrette de plumes , mars d'une crête véritable , analogue à celle du coq, quoique de couleur diitérente. 3.0 Le porc de la queue , femblable à celui du paon , ne prouve rien non plus , parce qu'Eiien dit positivement que l'oileau dont il s'agit , porte fa queue comme le paon , lorfeuil ne la relève point; 8z s'il l'eût relevée comme paon en faïfànt la roue , Elien n'auron pu oublier de faire mention d'un carao* tère auffi lîngulier , & d'un trait de relTemblance li marqué avec le paon auquel il le comparoit dans ce moment même. 4.0 Enfin les pennes , couleur d"éme< raude , ne font rien moins que fuffi« fantes pour déterminer ici Feipèce de: dindons , bien que quelques - unes di leurs plumes aient des reflets fma- ragdins, car on fait que le plumage d< du Dindon. 219 plufîeurs autres oifeaux a la même cou- leur & les mêmes reflets. Béion ne me paroît pas mieux fondé que Gefner, à retrouver les dindons dans les ouvrages des Anciens : Co- îumelle a voit dit , dans Ton livre de Re Rustica (c), Africana efi meleagridi jimïlïs , nïji quod rutilam galeam & crlf- tam capite gerit y qua utraque in méléa- gride funt cerulea. ce La poule d'Afrique re Semble à la méléagride , excepté» qu elle a la crête & le cafque rouge ce 'rutila j au lieu que ces mêmes parties ce font bleues dans la méléagride.' » Béion a pris cette poule africaine pour la peintade^ & la méléagride pour le din- don -, mais il eft évident , par le paflTage même , que Coîumelle parle ki de deux Variétés de la même efpèce , puifque les deux oifeaux dont il s'agit le reflemblent de tout point , excepté par la couleur , laquelle eft en effet fujette à varier dans la même efpèce, & notamment dans celle de la pein- tade , ou les mâles ont les appendices (c) Lib. VIII, cap. n. Kij z 20 Hïjloire Naturelle roembraneufes qui leur pendent aux deux cotés des Joues, de couleur bleue, tandis que les femelles ont ces mêmel appendices de couleur rouge : d'ailleurs comment fuppofer que Columelle , ayant à déiïgner deux efpèces auffi différentes que celles de la peintade & du dindon , fe fût contenté de les diltinguer par une variété aufli fuperficieile que celle de la couleur d'une petite partie , au lieu d'em- ployer âzs caractères tranchés qui lui lautoient aux yeux ? Cefl donc mai -à-propos que Bélon a cru pouvoir s'appuyer de l'autorité de Columelle , pour donner aux din- dons une origine africaine •, & ce n'eft pas avec plus de luccès qu'il a cherché à fe prévaloir du pafiage fuivant de Ptolo- rnée 3 pour leur donner une origine afîatiqne. Triglyphon Régla in quâ galli gallinacei barbati eJJ'e dkiintur ( d )* Cette Triglyphe eit en effet fituée dans la prefquîie au-delà du Gange \ mais on n'a aucune raiion de croire que ces (à) Geograjihia, Iib, VIII ; cap. II, Tabula XI» du Dindon. zzt coqs barbas foient des dindons *, car $ i.° îi n'y a pas jufquà fexiftence de ces coqs qui ne foit incertaine 5 puis- qu'elle n'eft alléguée que fur la foî d'un, on dit (dicuntur) ; 2.° on ne peut donner aux dindons le nom de coqs barbus , comme je l'ai dit plus haut y ce mot de barbe appliqué à un oïfeau ne pouvant (îgnifier qu'une touffe de plumes ou de poils places fous le bec , & non ce bouquet de crins durs que les dindons ont au bas du cou $ 3.a( Ptolomée éroit Aftronome & Géogra- phe , mais point du tout Naturalifte j & il eit vifible qu'il cherchoit à jeter quelqu'intérêt dans fes Tables géogra- phiques , en y mêlant , fans beaucoup de critique, les fingularités de chaque pays ; dans la même page , où il fait mention de ces coqs barbus , il parle de trois îles des Satyres , dont les habîtans avoîent des queues \ & de certaines îles Manxoles au nombre de dix, fîtué.es à peu près dans le même climat, où ï aimant abonde au point que Ton n'ofe y employer le fer , dans la conftrudion des navires f- Kiij : 222 HiJIoire Naturelle de peur qu'ils ne foieht attirés & re- tenus par la force magnétique -, mais ces queues humaines , queiqu'arteftées par des Voyageurs & par les Million- naires Jéfuites, félon Gemelli Carénfejj font au moins fort douteufes } ces mon- tagnes d'aimant ou plutôt leurs effets fur la ferrure des vaiiTeaux ne le font pas moins , 8c l'on ne peut guère compter fur des faits mêlés avec de pareilles incertitudes -, 4.0 enfin Ptolo- mée , à l'endroit cité , parle positive- ment des coqs ordinaires ( galli gclli- . nacei ) ; qui ne peuvent être confondus avec les coqs dinde, ni pour la forme extérieure , ni pour le plumage , ni pour le chant , ni pour les habitudes naturelles , ni pour la couleur des œufs, ni pour le temps de l'incubation , &c. Il efc vrai que Scaliger tout en avouant que la méléagride d'Athénée , ou plutôt de Clytus , cité par Athénée , étoit un oifeau d'Etolie , aimant les lieux aqua- tiques , peu attaché à ù couvée , & dont la chair fentoit le marécage , tous i (ej Voyage, tome V, page 6$. du Dindon. n 3 cara&eres qui ne conviennent point au dindon , qui ne fe trouve point en Etoiie, fuit les lieux aquatiques , a le plus grand arrachement pour Tes petits, & la chair de bon goût , il n'en pré- tend pas moins que la méléagride efï un dindon (f); mais' les Anatomiftes de l'Académie des Sciences qui , d'abord étoient du même avis loriqu'ils firent ïa defeription du coq Indien , ayant examiné les chofes de plus près , ont reconnu & prouvé ailleurs que la pein- tade étoit la vraie méléagride des An- ciens s en forte qu'il doit demeurer pour confiant , qu'Athénée ou Clytus, Elien, Columelle & Ptolomée, n'ont pas , plus parlé des dindons , qu'Ariilote & Pline , & que ces oifeaux ont été inconnus aux Anciens. Nous ne voyons pas même qu'il en foit fait mention dans aucun Ou- vrage moderne , écrit avant la décou-, verte ^fe l'Amérique : une tradition populaire fixe, dans le feizïème fiècie ? (f) In Cardan um exercit. 238. 224 Hijîoire Naturelle fous François I.er , l'époque de leur première apparition en France *, car c'eft I dans ce temps que vivoit l'amiral Chabot : les Auteurs de la Zoologie Britannique avancent , comme un fait notoire , qu'ils ont été apportés en Angleterre fous le règne de Henri Vllî, contemporain de François l.et fgj, ce qui s'accorde très- tien avec notre fentiment j car l'Amérique ayant été découverte par Chrifîophe Colomb , fur la fin du quinzième iîècle , & les rois François I.cr & Henri VIII étant montés fur îe Trône au com- mencement du feizième fiècle , il eft tout naturel que ces oifeaux apportés d'Amérique, aient été introduits comme nouveautés , foit en France , foie en Angleterre, fous îe règne de ces Princes, & cela eft confirmé par le témoignage précis de J. Sperling , qui écrivoit avant : 1660, ëc qui allure expreiTément qu'ils avoient été tranfportés des Nouvelles Indes en Europe , plus d'un iîècle au- paravant (h). (g) Bntifch Zoology , pag. S7. (h) Zoologia Phyjiça, pag. $66. du Dindon. n$ Tout concourt donc à prouver que l'Amérique eft le pays natal des din- dons j & comme ces fortes d'oifeaux font pefans 3 qu'ils n'ont pas le vol élevé & qu'ils ne nagent point , ils n'ont pu, en aucune manière, traverfer l'efpace qui fépare les deux continens , pour aborder en Afrique , en Europe ou en Aiie -, ils fe trouvent donc dans îe cas des quadrupèdes , qui n'ayant pu , fans le fecours de l'homme , parler d'un continent à l'autre, appartiennent exciufîvement à l'un des deux 5 & cette con/idération donne une nouvelle force au témoignage de tant de Voyageurs s qui attirent n'avoir jamais vu de din- dons fauvages , loir en Aiie , foit en Afrique, & n'y en avoir vu de domef- tiques que ceux qui y avoient été ap- portés d'ailleurs. Cette détermination du pays naturel des dindons , influe beaucoup fur la folution d'une autre queftion qui , au premier coup a œil , ne femble pas y avoir du rapport s J. Sperling , dans fa Zoologla Phyfica j pcig. 36c > prétend K v 226 Hlficïre Naturelle que le dindon efl: un monflre ( il au- roit dû dire un mulet), provenant du mélange de deux efpèces , celle du paon & du coq ordinaire-, mais s'il efl bien prouvé , comme je le crois , que les dindons foient d'origine américaine , il n'eft pas polîible qu'ils aient été pro- duits par le mélange de deux efpèces afiatiques , telles que le coq & le paon*, & ce qui achève de démontrer qu'en effet cela n'eft pas , c'eftque, dans toute l'Aiie , on ne trouve point de dindons fauvages , tandis qu'ils fourmillent en Amérique*, mais, dira -t- on, que li- gnifie donc ce nom de gallo - par vus (coq-paon), h anciennement appliqué au dindon ? rien de plus (impie ; le dindon étoit un oifeau étranger , qui n'avoit point de nom dans nos langues Européennes -, & , comme on lui a trouvé des rapports allez marqués avec le coq & le paon , on a voulu indiquer ces rapports par le nom compofé de gallo- pavus ; d'après lequel Speriing , 8c quelques autres , auront cru que le din- don étoit réellement le produit du du Dindon» 227 mélange de i'efpèce du paon avec celle du coq , tandis qu'il, n'y avoit que les noms de mêlés -, tant il eft dangereux de conclure du mot à la chofe ! tant il eft important de ne point appliquer aux animaux de ces noms compofés qui font prefque toujours fufceptibles d'é- quivoque ! M. Edwards parle d'un autre imiîet qu'il dit être le mélange de i'efpèce du dindon avec celle du faifan -, l'individu fur lequel il a fait fa deicripnon (i) ? avoit été tué d'un coup de fufil , dans les bois voiiins de Hanford ,. dans la province de Dorfet, où il fut aperçu au mois d'odobre 1759, avec deux ou trois autres oifeaux delà même efpèce : il éioit en effet d'une grofieur moyenne entre le faifan & le dindon , ayant trente- deux pouces de vol ; une petite aigrette de plumes noires afifez longues , s'éle- voit fur la bafe du bec fupérïeur , la. tëze n'étoit point nue comme c^ïle du dindon , mais couverte de petites plumes fort courtes *, les yeux et oient entourés (i) Gïanures , planche cccxxxvu* K vj 228 Uifcoire Naturelle d'un cercie de peau rouge , mais moins large que dans le faifan : on ne dit point fi cet oifeau reïevoit les grandes plumes de la queue pour faire ia roue •> il paroît feulement, par la figure, qu'il la portoit ordinairement comme la porte îe dindon lorfqu'ii eft tranquille : au refte , il eft à remarquer qu'il n'avoit la queue compofée que de feize plume? , comme celle du coq de bruyère -, tandis que celle des dindons 8c des faifans en a dix-huit : d'ailleurs chaque plume du corps étoit double fur une même ra- cine , Tune ferme Se plus grande , l'autre petite Se duvetée, caractère qui ne con- vient ni au faifan ni au dindon , mais bien au coq de bruyère Se au coq commun 5 fi cependant l'oifeau dont il s'agit , tiroir fon origine du mélange du faifan avec le dindon , il fembîe qu'on auroit dû retrouver en lui comme dans les autres mulets -, premièrement , les caractères communs aux deux efpèces primitives j en fécond lieu , des qualités moyennes entre leurs qualités oppofées , ce -qui n'a point lieu ici , puifque îe prétendu mulet de M. Edwards, avoit du Dindon, 229 des caractères qui manquoîent abfolu- ment aux deux efpèces primitives ( les plumes doubles ) , & qu' il manquok d'autres caractères qui fe rrouvoienr dans ces deux efpèces ( les dix-huit plumes de ïa queue ) j & fî Ton vouïoit abfolument une efpèce métive , il y auroit plus de fondement à croire qu'elle dérive du mélange du coq de bruyère 8c du din- don, qui, comme je l'ai remarqué, n'a que feize pennes à la queue, Se qui a les plumes doubles comme notre pré- tendu mulet. Les dindons iauvages ne diffèrent des domeftiques , qu'en ce qu'ils font beaucoup plus gros 8c plus noirs : du refte , ils ont les mêmes mœurs , les mêmes habitudes naturelles , ia même Rapidité j ils fe perchent dans les bois fur les branches feches , & lorfqu'on en fait tomber quelqu'un d'un coup cFarme à feu, les autres relient toujours : perchés, 8c pas un feul ne s'envole. Selon ;Fernandès, leur chair, quoique bonne 3 i eft plus dure & moins agréable que celle des dindons domeftiques *, mais '■ ils font deux fois plus gros : huçxolotl 230 Hijloire Naturelle eft le nom Mexicain du mâle ', & cihuatotolin _, îe nom de la femelle (k). Albin nous apprend qu'un grand nombre de Seigneurs Ànglois fe plaifent à élever des dindons f.uivages, & que ces o^feaux réuflifTenr allez bien par -tout où il y a de perits bois , des parcs ou aurres en- clos (l). Le dindon huppé n'e^ qu'une va- riété du dindon commun , femblable à celle du coq huppé dans l'efpece du coq ordinaire \ la huppe eft quel- quefois noire, & d'autres fois blanche, telle que celle du dindon décrit par Albin ( m ) : il étoit de la grolFeur des dindons ordinaires : il avoir les pieds couleur de chair-, la partie fupérieure du corps , d'un brun foncé ; la poi- trine , le ventre , les cuifles & la queue blanches , ain(i que les plumes qui for- moient fon aigrette -, du refte , il reiïem- bloit exactement à nos dindons corn- (k) Fr. Fernandès , Hifloria Avium nova Hif- f aiiia, pag. 27. (I) Albin, Liv. Il, n.° xxxin. (m) Ibidem» ■m ni- Pt.mpap. 2« ILE DINDON. du Dindon. 2jt ivuns , & par la chair fpongieufe Se gïanduleuie qui recquvroit la tête , Se la partie iupérieure du cou , & par le bouquet de crins durs naidant ( en ap- parence ) de la poitrine , & par les épe- rons courts qu'il avoit à chaque pied , & par Ton antipathie iinguiière pour le rouge , &c. z$i Hijîoire Naturelle * L A PEINTADE (a). Planche IV de ce volume. J_ l ne faut pas confondre la Peintadd avec le Pintado > comme a fait M. Ray, du moins avec le Pintado dont parle Dampier (b) ., lequel eft un oiieau de * Vbyei Us planches enluminées , n.° 108. (a) La Peintade 3 en Grec & en Latin , Mt- \ ïeagris ; en Italien , Gallina il Numidia; en Aile» Hiand, Perl-huhn; en Anglois, Pintado ou GuineaA hea : à Congo , Qûételé. — Meleagris vel gallus numidicus aut mauritanus pdveflris. Gefner , Avil pag. 480. — Poule de la Guinée. Bélon , Hifî. des Oifeaux , page 246. — Peintade. Mémoires pour fervir à PHiftoire des Animaux , partie II, : page 79, planche xlvii , avec une bonne figure. — Gallina Africana. Frifch , planche ex x V 1 > a^rec une figure coloriée. — La Peintade. Briflbn , tome I , page 176, avec une bonne figure, planche vjii. (b) Voyez fon Voyage aux Terres Aujlrales , tome IV de fon Nouveau voyage autour du Monde, page 23 , édition de Rouen. de la Peintade. 233 mer , eïe la grolfeur d'un canard, ayant les ailes fort longues, & qui rafe la fur- face de l'eau en volant y tous caractères fort étrangers à la peintade , qui eft un oifeau terreftre, à ailes courtes, & dont le vol eft fort pefant. Celle-ci a été connue 8c très-bien dé- ; /ignée par les Anciens. Ariftote n'en parie qu'une feule fois dans tous fes Ouvrages fur les animaux-, il la nomme méléagride _, Se dit que fes œufs font marquetés de pentes taches (c). Varron en fait mention fous le nom de poule d'Afrique -, c'eft , félon lui , un oifeau de grande taille, à plumage varié, dont le dos eft rond, & qui étoit fort rare à Rome (d). Pline dit les mêmes chofes que Varron , & fembîe n'avoir fait que le copier (e) ; à moins qu'on ne veuille • (c) Voyez Rifloria Jmmalium , îib. VI, cap. II. (d) Grandes , varice , gibberœ quas meleagrides nppellant Grœci. Varro, de ReRufiicà, Iib. III, cap. ix. fej Africœ Gallinarum genus , gihberum , variis /parfum plumis, Hift. nat. lié, X, cap. xxvu 2j4 Hiftoire Naturelle attribuer la reiïembîance des defcriptions à Yidemké de l'objet décrit : il répète i suffi ce qu'A riftote ave it d:r de la cou- leur des œufs (f) ; & il ajoute que les peiiitades de Numîdie étoient les plus eftimées (g) s d'où on a donné à i'ef- pèce, le nom de poule Numidique par excellence. Columelïe en reconnoiflbit de deux fortes, qui fe'refTembloiententout point, excepté que Tune àvok les barbillons bleus 3 & que l'autre les avoir rouges *, & cette différence avoit pâtu afïez con- iidérable aux Anciens , pour conftitueq deux efpèces ou races dé lignées pan deux noms diilincts : ils appeîlorent me-** léagride _, la poule aux barbillons rouges -, 8c poule africaine _, celle aux barbillons > bleus (hjj n'ayant pas obfervé ces' (f) dfricœ Gallinarum genus , gibbemm , variis Jparfum plumis. Hift. nat. lib. X, cap. LU. (g) Ibidem , cap. XLVin , quam plerique numidicam dicunt. Columelïe. (h) Africana gallina ejl meleagridi Jimilis nijî quoi Tutilam paleam & criftam capite gerit , quee u traque fiiht in meleagride cœrulea. Voyez Columelïe, de Ri Rufîicâ, lib. XIII, cap. n. de la Ftïntade. 235 Itfeaux d'adez près pour s'apercevoir jue la première étok la femelle, & la "econde, le mâle d'une feule & même ïfpèce , comme l'ont remarqué M.rs de 'Académie ( i ). Quoi qu'il en foit , il paroît que la qeincade , élevée autrefois à Rome avec :ant de foin , s'éroir perdue en Europe , puifqu'on n'en retrouve plus aucune :race chez les Ecrivains du moyen îge , & qu'on n'a recommencé à en parler que depuis que les Européens onr fréquenté les côtes occidentales de l'Afrique , en allant aux Indes • par le cap de Bonne- efpérance (k) ; non- ■ • (i) Voyex Mémoires pour fervir à ï'Hiftoife nàtu» relie des Animaux , dreiïés par M. Perrauîc , dèuxicmç \partie , page 82. (k) "Tout ainfi comme la Guinée, efl un pays dont les Marchands ont commencé à apporter « plufieurs marchandons, qui étoient auparavant « inconnues à nos François ; auffi , fans leurs Navi- <* gâtions , les poules ce ce pays-là étoient inconnues , «/ n'eût été qu'ils leur ont fait paffer ïa mer , qui « maintenant font j'a ti fréquentes es maifons des « grands Seigneurs en nos contrées , qu'elles nous a en font communes.» Koye^; Béïon , Wjhire naturdls. des Qifeaux, page 246. 2 j 6 Hijloirc Naturelle feulement ils l'ont répandue en Europe mais ils l'ont encore tranfportée ei Amérique : & cet oifeau ayant éptouv diverfes altérations dans Tes qualités ex térieures par les influences des diver climats ; il ne faut pas s'étonner fi le Modernes , (bit Naturalises , foit Voy^ geurs , en ont encore plus multiplié le] races que les Anciens. Frifch diftingue, comme Columell la peintade à barbillons rouges , de cdh à barbillons bleus (l) ; mais il reccnnoî «entrelles plufieurs autres dirTérencel félon lui, cette dernière, qui ne fe trouvj guère qu en Italie , neft point bonifl à manger , elle efc plus petite , elle f< tient volontiers dans les endroits mare-, cageux, & prend peu de foin de fe; •petits : ces deux derniers traits fe re- trouvent dans la méléagride de Civtu: de Milet j ce on les tient, dit-il, dm »ùn lieu aquatique, & elles montrent v>& peu d'attachement pour leurs pe« »tits , que les Prêtres commis à leui (l) Voyei fe Difcours relatif à la planche cxxvi dt Frifch, de la Peintade. 237 carde font obligés de prendre foin ce le ia couvée -, ^ niais il ajoute que eut groiTeur eft celle dune poule de belle race (m) : il paroît aufîî, par un 3aftage de Pline , que ce Naturalise regardoit la méiéagride comme un oi- -, "eau aquatique (n) ; celle à barbillons Lrouges eft au contraire , félon M. Frifch , dIus grofte qu'un faifan , fe plaît dans es lieux fecs , élève foigneuiement fes Ibetits , &c. Darnpier allure que, dans l'île de ■Vlay , l'une de celles du Cap- vert , il Wf a des peintades dont la chair eiî |iïtraordinairement blanche } d'autres Kpnt la chair eft noire , & que toutes (ont tendre & délicate (0 ) ; le P. Labat (m) Locus ubi aluntur , palujlris efl ; pullos fios uïlo amoris affecta h&c aie.; profequitur , & teneros WÀhuc negligit , quart à Sacerdodbus curam eorum geri mgoitet. V oyez Athénée, lib, XÏV, cap. xxvi. If ï (n) Menejïas A[vic caradtérifée par cet attribut (y) ., qui, comme nous venons de le voir , n'appartient pas moins aux peintades de Saint-Domingue qu'à ceïles de la Jamaïque. Mais , indépendamment des diiTem- blances , qui ont paru fumfantes pour admettre plufieurs races de peintades, j'en trouve beaucoup d'autres , en com- parant les descriptions & les figures publiées par diitérens Auteurs» lefqueiles indiquent allez peu de fermeté ,' foie dans le moule intérieur de cet oifeau , foit dans l'empreinte de fa forme ex- térieure , & une très - grande difpoiition à recevoir les influences du dehors. La peintade de Frifch , & de quel- ques autres ( \) * a le cafque & les (y ) Voyez l'Ornithologie de M. Briflon , tome I , xpage 180. MeUagris Peàore albo. ( lj « Le mâîe & la femelle , dit Béïon , ont même mad'u.e en plumes & blanc! eur autour « des yeux, & rougeur pardeiïous. » Voyez Hift* Nat. des Oi féaux , page 247. ■ — Ad iattia capitii *lbo , dit Marcgrave. . MJluria Rat. Brajil. pag. 192* Oijeaux j Tome ni. L 242- Hifioire Naturelle pieds blanchâtres , ïe front , le tour des | yeux, les cotés de la tête & du cou, dans /a partie fupérieure, blancs, mar- quetés de gris - cendré j ceile de Frifch a de plus , fous la gorge , une tache rouge en forme de croidant *, plus bas, un collier noir fort large, les fores, ou filets de x 'occiput _, en petit nombre , & pas une feule penne blanche aux ailes ; ce qui fait autant de variétés , par lefquelies les peintades de ces Auteurs carièrent de la notre. Ceile de Marcgrave avoit de plus) îe bec jaune (a) ; celle de M. Ballon l'avoir rouge à la bafe , & de couleur de corne vers le bout (h), M.rs de T Académie ont trouvé à quelques- unes une petite huppe à la bafe du bec , compofée de douze ou quinze foies ou filets roides , longs de quatre *— « La tae eft revêtue , dit le Jéfuite Margat *> d'une peau fporigieuie rude , & ridée , dont h couleur eft d'un blanc-bleuâtre. » Voyc^ Lettre! (gdiiiantes , Recueil XX, page 362 cV fui raines, (a) Rofirum jlâvum. Voyez Hijloria NoU BrajU, p&Ç. IÇ2. '* ( b) Voyzi Ornithologie, tome I, fax x$of de la Peintade. 243 I lignes ( c ) j laquelle ne fe retrouve que I dans celles de Sierra- Liona, dont j'ai \ parlé plus haut. I Le Docteur Cai dit que la femelle a la tête toute noire , & que c'ed la feule différence qui la diftingue du I maie (d). Aldrovande prétend au contraire que la tête de la femelle a les mêmes couleurs que celles du mâle *, mars que fon cafque eft feulement moins élevé & plus obtus (e). Roberts alfure qu'elle n'a pas même de cafque (f). Dampier ôc Labar , qu'on ne lui voit point ces barbillons rouges , & ces caroncules de même couleur qui , dans le mâle , bordent l'ouverture des narines (g). I (c) Voy&i Mémoires fur les Animaux , partie II , page 82. (i) Caius aj>ud Gefncrum , de Avïbus , p. 48 1. \ (e) Voyez Ornithologia Alirov. tome II ? p» 336. (f) Voyages de Roberts au Cap -vert & aux Mes , &c. page 402. (g) Nouveau Voyage de Dampier , w&> Vï% Li) 244 Hijloire Naturelle M. Barrère dit que tout cela eft plus pale que dans le mâle ( h ) , & que les foies de X occiput font plus rares , &. tels apparemment qu'ils paroilïent dans la planche CXXVI de Frifch. Enfin M.n de L'Académie ont trouvé, dans quelques individus , ces foies ou filets de l'occiput élevés d'un pouce , en forte qu'ils formoient comme une petite huppe derrière la tête (i). Il feroit difficile de démêler , parmi toutes ces variéïés , celles qui font allez, profondes & , pour ainii dire , allez- fixes pour conftituer des races diftindles;! & , comme on ne peut douter qu'elles ne foient toutes fort récentes , il feroit peut - être plus raifonnable de les regar- der comme des effets qui s'opèrent page 402. Nota. Il eft probable que la crête courte, & d'un rouge très -vif, dont parle le P. Cr.arlevoix, n'eft autre chofe que ces caro cules. Vo ez lbn Hiftoire de i'Isle Espagnole , tome I , page 28, fcc. (h) Barrère, Ornithologie Jpecimen , ClalT. IV, gen. ni , fpecies 6. ( i ) Voyt\ Mémoires fur les Animaux , partie IT, page. %Q% de la Peintade* 245 encore journellement par la domefti- \ cité , par ie changement de climat , 1 par la nature des alimens , &c. & de ne les employer , dans la defeription > que pour afîîgner les limites des varia- tions auxquelles font fujetres certaines I qualités de la peintade *, & pour remon- ter , autant qu'il en: poffible , aux cuifes ; qui les ont produites , jufqu'à ce que ces variétés , ayant fubi l'épreuve du i temps , & ayant pris la confiftance dont : elles font fufceptibles , purilènt fervîr ; de caractères à des races réellement dlC~ \ tindes. La peintade a un trait marqué de refTembiance avec le dindon, ceft de n'avoir point de plumes à ia tête ni à la partie fupérieure du cou } Se cela a donné lieu à plufieurs Ornitholo- giftes , tels que Bélon (k) , Gefner (l) 3 Aldrovande (m) & Klein (n) > de (k) Voyei Hiftoire Naturelle des OifeauXj page 248. (I) Voyez De Avibus, pag. 480 & fuiv. (m) Voyez Ornithologie, Iib. XIII, pag. 36, (n) Prodromus Hijîorics JLvium , page 112. Liij 246 Bifloire Naturelle prendre le dindon pour la méléagride i des Anciens } mais, outre les différences 1 nomhreufes & tranchées qui fe trouvent, loit entre ces deux efpèces , Toit entre ce que Ton voit dans le dindon , & ce que les Anciens ont dit de la méléagride ( o ) j il îufFit , pour mettre en évidence la faufleté de cette conjecture , de fe rappeler les preuves psr lesquelles j'ai établi > à l'article du dindon , que cet oifeau eft propre & particulier à l'Amérique qu'il vole peiamment , ne nage point du tout , & que par conféquent 3. n*a pu franchir la vafte étendue de mers fo) I a Méléagride étoit de la grofleur d'une \ poule de bonne race , avoit fur la tête un tuber- cule calleux , le plumage marqueté de taches blanches, femhïabies à des lentilles, mais plus grandes ; deux barbillons adhérens au bec fupé- lieur, la queue pendante, le dos rond , des mem- branes entre les doigts, point d'éperons aux- pieds, aimoit les marécages, n'avoit point d'attachement pour les petits , tous caractères qu'on cherche oit Vainement dans le dindon , lequel en a d'ailleurs deux très - frappans , qui ne fe retrouvent point dans la defeription de la Méléagride; ce bouquet de crins durs qui Lui fort au bas du cou , & fa manière d'étaler fa queue & de faire la roue autour de fa femelle. de la Peintade. 247 qui fépare l'Amérique de notre continent y d'où il fait qu'avant ia découverte de l'Amérique , il étoit entièrement inconnu dans notre continent , 8c que les Anciens nonr pu en parler fous le nom de méléagride. Il paroît que ceft auffi par erreur que le nom de Knor-haan s'efl glifïe dans la lifte des noms de la peintade donnée par M. Briflon (p) _, citant Kolbe ( q) ; je ne nie pas que la fîgurg (p) Ornithologie, tome I,page 177. (q) Defcription du cap de Bonne - efpérancé 5 terne J II, page 169. « Un oifeau qui appartient proprement au Cap , dit ce voyageur, eft le « Knor-ha.hu ou le Cocj-knor, c'eîl la fentineîle ** des autres oifeaux ; iîïes avertit ïorfqir'il voit « approcher un homme , par un cri qui reflembîe « au fon du mot crac , & qu^ii répète fort haut : « fa grandeur eft ceiïe d'une poule ; il a- le bec « court & noir comme les plumes de fa couronne ; « ïe plumage des aiies & du corps mêlé de rouge , <■< de bîanc & de cendré; les jambes jaunes, les « ailes petites : il fréquente les iieux foiitaires , & a fait fon nid dans ies buiflons; fa ponte e il de « deux œufs : on eftime peu fa chair ? quoiqu'elle *« foit bonne, -» Li? 248 Hiftoirc Naturelle par laquelle le Fnor- haan a été défî- gné dans le V >yage de Koibe , n'ait été faite d'après celle de la poule africaine de Marcgrave , comme le dit M. Brifïon -, mais il -avouera auffi qu'il eft difficile de reconno'tte dans un oifeau propre au cap de Bonne- ef- pérance , la pei:?tade qui eft répandue dans toure l'Afrique , mais moins au cap que par-tout ailleurs*, & qu'il eft encore plus difficile d'adapter à celle- ci , ce bec court & noir , cette cou* ronne de plumes , ce rouge mêlé dans les couleurs des ailes & du corps ; Se cette ponte de deux œufs feule- ment , que Kolbe attribue à fon Knor-. haan. Le plumage de îa peintade , fans avoir des couleurs riches & éclatantes, eft cependant très- diftingué : c'eft un fond gris-bleuâtre plus ou moins foncé, fur lequel font femées a(Tez régulière- ment des taches blanches plus ou moins rondes , repréfentant allez bien des perles ; d'où quelques Modernes de la Peintade. 249 ont donné à cet oifeau le nom de poules perlées ( r) 3 & les Anciens , ceux de varia & de guttaia (f) ; tel étoit du moins le plumage de la peintade dans fon climat natal \ mais depuis qu'elle a été tranfportée dans d'autres régions , elle a pris plus de blanc 3 témoin les pein- tades à poitrine blanche de la Jamaïque & de Saint-Domingue, & ces pefn- tades parfaitement blanches dont parle M. Edwards (t ) ; en forte que la blancheur de la poitrine dont M. BrifTon a fait le caractère d'une variété , n'eft qu'une altération commencée de la cou- leur naturelle 5 ou plutôt r/efl que le paflage de cette couleur à la blancheur parfaite. (y) Voyz\ Frifch , planche cxxvi, — Klein 9 Hiftoriœ Animalium prodromus , pag. 3. (f) Martial , EpigYamm. (t) « Depuis que les peintades le font multi- pliées ( en Angleterre ) , leur couleur s'eft aitéiée , « il s'y eft mêlé du blanc dans plufieurs; d'autres «< font d'un gris de perle clair, en confervant leurs <« mouchetures ; d'autres font parfaitement blanches. »? Voyez Glanum d'Edwards , trçifîème pajctjs ? page 269. Lv 2jo Hlflcire Naturelle Les plumes de la partie moyenne du cou font fort courtes , à l'endroit qui joint fa partie fupérieure , ou il n'y en a point du tout *, puis elles vont toujours croiiTant de longueur jufqu'à ïa poitrine , où elles ont près de trois pouces. Ces plumes font duvetées depuis leur racine jufqu à environ la moitié de leur longueur j 8c cette partie duvetée eft recouverte par l'extrémité des plumes du rang précédent , laquelle eft compofce de barbes fermes & accrochées les unes aux autres ( u). La peintade a les ailes courtes & îa queue pendanre , comme la perdrix -, ce qui, joint à ïa difpoiîtion de ïes plumes, la fait paroître boiTue ( Genus gibberum. Pline ) *, mais cette bolTe n'eft qu'une fauffe apparence , 8c il n'en refte plus aucun vertige Iorfque Toifeau eft plu- mé (x). fu) Voyez Mémoires pour fervir à FHiftoire des Animaux , partie. II, page 8i. Z (x) Voyez Lettres édifiantes , Recueil XX } ïoco citato. . de la Peintade. 2 j î Sa gro(ïeur eft à peu près celle de ïa poule commune j mais elle a la forme de la perdrix , d'où lui eft venu îe nom de perdrix de Terre -neuve (y ) ; feulement elle a les pieds plus élevés Se ie cou plus ïong Se plus menu dans îe haut:. Les barbillons , qui prennent naïf- fance du bec fupérieur , n'ont point de forme confiante , étant ovales dans les unes, Se carrés ou triangulaires dans ïes autres : ils font rouges dans la fe- melle Se bleuâtres dans le mâle -, Se e eft , félon M.rs de l'Académie (•{) Se M. Briiîon ( a ) _> la feule cliofe qui diftingue les deux fexes$ mais d'autres Auteurs ont afîigné , comme nous l'a- vons vu ci-deftus , d'autres différences tirées des couleurs du plumage (b) , (y) Voy^l Bélon f Hiftoire Naturelle des Oifeaux f page 247. (l) V°ye'{ Mémoires pour fervir à PHiftoire eïee Animaux ? partie II , page 83. (a) Ornithologie , tome I , page 1 79. (b) CaiuS apud Qefmrum, de Jvibus, pag. $%9 Lvj 2^2 Hijloire Naturelle des barbillons ( c) ^ du tubercule calleux de îa têce ( d ) _, des caroncules , des narines (c) 3 de îa grorîeur du corps (f) j des foies ou filets de l'occiput (g) , &c. foit que ces variétés dépendent en erlec de la différence du fexe *, foit que , par un vice de logique trop commun , on les ait regardées comme propres au fexe de l'individu où elles fe trouvoient acci- dentellement , & par des caufes toutes différentes. En arrière des barbillons , on voit , fur les cotés de la tête , îa très - petite ouverture des oreilles qui , dans îa plupart des oifeaux , eft ombragée par des plumes 5 & fe trouve ici à décou- vert : mais ce qui erl propre à îa peintade , c'eft ce tubercule calleux, cette efpèce de cafque qui s'élève fur (c) Columelle , Frifch, Dampier, &c. (à) Aldrovande , Roberts , Earrère , Dalechamp, &c. fe) Barrère , Labat , Dampier , &c. (f) Frifch. (g) Frifch, Barrère, &c. de la Peintade. 253 fa tête , & que Bélon compare , allez mal- à-propos , au tubercule, ou plutôt à la corne de la grrarTe (h) ; il eft femblabîe , par fa forme , à ia contre- épreuve du bonnet ducal du Doge de Venife , ou , Ci Ton veut , à ce bonnet mis fens devant derrière ( i) ; Ta cou- leur varie dans les différens fujets du blanc au rougeâtre , en paiTant par le jaune & le brun (k) ; fa fubftance intérieure eft comme celle dune chair endurcie & calleufe -, ce noyau eft: re- couvert d'une peau sèche & ridée , qui s'étend fur l'occiput êc Cm les côtés de la tête , mais qui eft. échahcrée. à l'endroit des yeux ( l ). Les Physiciens (h) Bélon , Nature des Oifeaux , page 247. (i) C'eft à caufe de ce tubercule que M. Linnaeus a nommé la peintade , tantôt Gallus vertice corneo. Svft. nat. edit. VI , tantôt Phafianus vihtce callofo jj edit. X. I ( k) II eft blanchâtre dans ïa planche cxxvi de Frîfch , couleur de cire , fuivant Bélon , page 247; brun , félon Marcgrave ; fauve - brun , félon M. Perrairft; rougeâtre dans notre planche. (I) Mémoires fur les Animaux , partie II , page 82, 2 5 4 Hijtoire Naturelle à caufes finales , n'ont pas manqué de • dire que cette calloiité éroit un cafque véritable , une arme défeniive , donnée aux peintades , pour les munit contte îeurs atteintes réciptoques , attendu que ce font des oifeaux querelieurs , qui ont ïe bec ttès-fort & le crâne très- foible (m). Les yeux font grands & couverts , îa paupière fupérieure a de longs poils noirs , relevés en haut , & le cryftallin c-ft plus convexe en dedans qu'en de- hors (n). M. Perrault affûte que le bec eft fembîable à celui de la poule -, le Jé- fuite Margat le fait trois fois plus gros, très- dur & très -pointu j les ongles font aufîî plus aigus , félon le P. Labat -, mais tous s'accordent , Anciens & Mo- dernes > à dire que les pieds n'ont point d'éperons. Une différence confidérabîe, qui fe (m) Voyez JSÏiJJl Jldroi-andi , Omithologia , tome II, page 37. (n ) Mémoires fur les Animaux , partie / J, page 87» de la Peintade. 2 5 j trouve entre la poule commune & la peintade, ceft que le tube inteftinal eft beaucoup plus court à proportion dans cette dernière , n'ayant que trois pieds , félon M.rs de l'Académie , fans compter les cœcum , qui ont chacun (îx pouces , vont en s'éiarghTant depuis leur origine , & - reçoivent des vaifteaux du méfentère, comme les autres inteftins: le plus gros de tous eft le duodénum y qui a plus de huit lignes de diamètre*, le géiier eft comme celui de la poule *> on y trouve aufîi beaucoup de petits graviers, quelquefois même rien autre chofe , apparemment iorfque l'animal , étant mort de langueur , a pailé les derniers temps de fa vie fans manger y la membrane interne du géiier eft très- ridée , peu adhérente à la tunique ner- veufe , & d'une fubftance analogue à celle de la corne. Le jabot , ïorfqu'il eft foufflé , eft de la groiTeur d'une balle de paume , le canal intermédiaire entre le jabot Ôc le géfîer , eft d'une fubftance plus dure & plus blanche que la partie du con- duit inteftinal qui précède le jabot > & z$6 Hijloire Naturelle ne préfehte pas , à beaucoup près , un fi grand nombre de vaiffeaux apparens. L'œfophage defcend le long du cou , à droite de la trachée -artère (o) ; Tans doute parce que le cou qui , comme je l'ai dit , eft fort long , fe pliant plus fou- vent en avant que fur les côtés , Tœfo- phage , prefTé par la trachée- artère dont les anneaux font entièrement ofleux ici, comme dans la plupart des oiieaux , a été pou (Té du coté où il y avoit le moins de réiifrance. Ces oifeaux font fujets à avoir dans le foie , & même dans la rate , des concrétions fquirreufes -, on en a vu qui n'avoient point de véfîcuîe du fiel -, mais, dans ce cas, le rameau hépatique étoit fort gros -, on en a vu d'autres qui navoient quun feul tefticule (p ) : en général , il paroît que les parties in- ternes ne font pas moins fufceptibles de variétés que les parties extérieures & fuperficielies. (o) Voyez les Mémoires pour fervir à PHif- toire Naturelle des Animaux, partie II , page #4 J (p) Voyez Idem , ibidem , pag. 84. de la Peintade. 257 Le cœur eft plus poin u qu'il ne l'eft communément dans les ôiieaux ( q) * les poumons font à l'ordinaire -, mais on a remarqué, dans quelques kijets , qu'en foufflant dans la trachée -artère pour mettre en mouvement les poumons & les cellules à air-, on a remarqué, dis -je» que le péricarde , qui paroifïoit plus lâche qu'à l'ordinaire , fe gonfloit comme les poumons ( r). J'ajouterai encore une obfervation anatomique , qui peut avoir quelque rapport avec l'habitude de crier , & à la force de la voix de la peintade \ c'en: que la trachée-artère reçoit, dans la cavité du thorax , deux petits cordons muicu* leux , longs d'un pouce , larges de deux tiers de ligne , îefquels s'y implantent de chaque côté (f). La peintade eft en effet un oifeau très-criard , Se ce n'eft pas fans raifon (q) Voyez les Mémoires pour fervir à PHifl* Nat. des Animaux , partie II , page 86 , &c. (r) Hiftoire de l'Académie des Sciences , tome I, (f) Mémoires pour fervir \ THiftoire des Am- maiix , loco citato. 2j8 Hijloire Naturelle que Browne l'a sppelée gallus clamo* fus ( t) ; fon cri efi: aigre & perçant ,• & à ia longue il devient tellement ii> commode que , quoique la chair de la peinrade foie un excellent manger, & bien fupérieur à la volaille ordinaire , îa plupart des colons d'Amérique ont i renoncé à en élever (u) ; les Grecs avoient un mot parapulitr pour expri- mer ce cri ( xj ; Élien dit que la mé-- iéagride prononce à peu près fon nom (y) y le Docteur Cai , que fon cri approche de celur de la perdrix, fans erre néanmoins auffi éclatant (\)i\ Eéion , eu il efi quafi comme, celui des petits poufflns nouvellement éclos ; mais: il allure pofitivement qu'il efi: differn*- blahle à celui des poules communes ( a) ; (t) Natiiîal Eiflcri of Jamh'ic. pag. 470. ( u) Lett'-vs édifiantes , Recueil XX, loco citàétk (x) KttyxttÇiti , félon F.oîiux. Voye\ Gefner, de Aiibus , pag. 479. (y) De Notera Animalium , lib. IV, cap. XLII. (\) ^cj'el Gefner , de Avions , pag. 481. (a) Hiftoire des Oifeaux, page 248. de la Peintade. 259 & je ne fai pourquoi Aldrovande (b) & M. Salerne ( c) * iui font dire le contraire. C'eft un oifeau vif , inquiet & tur- bulent , qui n'aime point à fe tenir en place , & qui fait fe rendre maître dans la baffe -cour \ H fe fait craindre des dindons même , &, quoique beaucoup plus petit , il leur en impofe par fa pétulance : ce La peintade , dit le P. Margar, a plutôt fait dix tours & donné» vingt coups de bec , q^.xe ces gros ce oifeaux n'onr penié à fe mettre en « Kpfenfè » : ces poules de Numidie femblent avoir la même façon de com- battre , que l'Hiftorien Sallufte attribue aux' cavaliers Numides : es leur charge, dit -il, eftbrufque&ïrrégulicre*, trou- es vent-ils de la réfiftance , ils tournent le es dos , Se un mitant après ils font fur t'en- ce nemi (d) » : on pourroit , à cet exem- ple , en joindre beaucoup d'autres qui (b) Ormthologia, tome II, page 338. (c) Hifioire Naturelle des Oifeaux, page 134. (i) Voyez Lettres édifiantes, XX.e Recueil, foco citato, z6o Hijloire Naturelle atteftent l'influence du climat fur îé" naturel des animaux , ainfi que fur le génie national des habitans : l'éléphant joint à beaucoup de force & d'indu!*- trie une difpofition à Tefclavage ; le chameau eft laborieux , patient & fobre j le dogue ne démord point. Eiien raconte que , dans une certaine iile , la méiéagride eft refpectée des oifeaux de proie ( e) ; mais je crois que, dans tous les pays du monde , les oi- feaux de proie attaqueront par préfé- rence toute autre volaille qui aura le bec moins fort , point de cafque fur là tête , & qui ne faura pas fi bien fe défendre. La peintade eft du nombre des oi- feaux pulvérateurs , qui cherchent dans la pouffière 3 où ils fe vautrent 3 un remède contre l'incommodité des in- fectes -, elle gratte aufîi la terre comme nos poules communes , & va par troupes très-nombreufes: on en voit à l'iile de May des volées de deux ou trois cents *, fej Voyez Hijîona Animalium , lib. V , cap. XXVII, de la Peintade. 261 les ïnfulaires les cha lient au chien cou- rant , fans autres armes que des bâ- tons (f) ; comme "elles ont les ailes fort courtes , elles volent pefamment } mais elles courent très - vite , oc , félon Bélon , en tenant la tête élevée comme ï la girarTe (g) ; elles fe perchent la nuit pour dormir, & quelquefois la journée, i fur les murs de ciotuie , fur les haies ■ & même fur les toits des maifons 8c fur les arbres -, elles, font forgneufes , l dit encore Bélon , en pourchaflTant leur : vivre (h) ; & en effet elles doivent confommer beaucoup , Se avoir plus (f) Voyei Dampier , nouveau Voyage autour du -Monde, tome IV , jage 23 ; & ie Voyage de Brue , dans ia nouvelle Relation de l'Afrique occi- dentale , par Labat. (g) Hiftoire des Oifeaux , page 248. (h) Nota. M. de Sève a obfervé, en jetant du pain à des peintades, que lorfqu'une d'entr'elles •prenoit un morceau de pain plus gros qu'elle ne ; pouvoit l'avaler tout de fuite , elle i'emportoit en 1 tu ant les paons & les autres volailles , qui ne vou- ; îoient pas la quitter ; & que , pour s'en d barralVer , ! elle cac oit le morceau de pain dans du fumier ou dans de la tene , où elle venoit le chercher &' 1 Je manger quelque temps après, 2(32 Hijloire Naturelle de befoins que les poules domefliques , vu le peu de longueur de leurs in- teftins. Il paroît , par le témoignage des An- ciens (i) & des Modernes (kj 3 & par les demi- membranes qui unifient les doigts des pieds , que la peintade eît un oifeau demi - aquatique j aufïi celles de Guinée , qui ont recouvré leur liberté à Saint-Domingue, ne fuivant plus que Fimpulfion du naturel , cher- chent de préférence les lieux aquatiques de marécageux (l). Si on les élève de jeunefTe 3 elles s'ap- privoisent très- bien. Brue raconte qu'é-- tant fur la cote du Sénégal, il reçut, en préfent d'une Princefiè du pays^ (i) Pline, Hifioria N attirails , lib. XXXVII, eap. il. — Clitus de Milet , dans Athénée , lib. XI K §ap. xx vi, (k) Gefner , de Avibus , pag. 478. — Frifch,j flanche c x x ri. • — Lettres édifiantes, Recueil, XX , &c. (I ) Lettres édifiantes , ibidem. • — J'entrai dans %in petit bofquet, auprès d'un marais, quiattiroit! des compagnies de peintades , dit M, Adanfon , j?age 76 de fon Voyage au Sénégal, de la Peintade* 26 $ deux peintades , Tune mâle & l'autre femelle , toutes deux fi familières qu'elles venorent manger fur Ton affiette j & qu'ayant la liberté de voler au rivage, elles Te rendoîent régulièrement fur ia barque au ion de la cloché qui annon- çoit le dîné 8c le foupé ( 0). Moore qu'elles lotit auffi farouches que le font les faifans en Angleterre (n) ; mais je doute qu'on ait vu des faifans auffi privés que les deux peintades de Brue, êc ce qui prouve que les peintades ne font pas fort farouches , c'eft qu'elles reçoivent la nourriture qu'on leur pré- fente au moment même ou elles viennent d'être prifes foj. Tout bien confédéré, il me femble que leur naturel approche beaucoup plus de celui de la perdrix que de celui du faifan. La poule peintade pond & couve a peu près comme la poule commune ; (m) Troifième Voyage de Brue , publié par Labat. ' (n) VuyziVÀÎtouQ générale des Voyages, tome III y . ïoj Longolius apud Gefimum, page ^7f? 264 Hifloire Naturelle mais il paroît que fa fécondité n'en: pas | la même en différens climats , ou du J moins qu'elle eft beaucoup plus grande j dans l'état de domeincité , où elle re- j aorge de nourriture , que dans i'etat de | fauvage j où , étant nourrie moins large- ment, elle abonde moins en molécules! prgàniques iuperflues. On m'a affûté qu elle eft fauvage àj Tille de France , & qu'elle y pond huit, J dix & douze œufs à terre dans les bois \ J au lieu que celles qui font domeftiques à j Saint-Domingue, & qui cherchent auilli ïe plus épais des haies & des broul- faiiles pour y dépofer leurs œufs, en! pondent jufqu'à cent & cent cinquante,! pourvu qu'il en relie toujours quelquun j dans le nid ( p ). Ces œufs font plus petits à propor-J tion que ceux de la poule ordinaire,! & ils ont aufli la coquille beaucoup plus dure : mais il y a une dirtérence! remarquable entre ceux de la peintade! domeftique , & ceux de la peintadel fauvage-, ceux-ci ont de petites tacnesj fv ) Lettres édifiantes , Recueil XX, KÏJ rondes S de la peintade.. \_ » 1 £ 5 rondes^ comme celîes du plumage / & qui n'avoient point échappé à Arif- tote (q ) ; au lieu que ceux de la pein- tade dpmeftique , font d'abord d'un rouge afïez vif , qui devient enfuite plus fombre j & enfin couleur de rofe fèche , en fe refroidifïant -, G. ce fait en: vrai , comme me l'a alïuré M. Fournier , qui en a beaucoup élevé ? il faudroit en con- clure que les influences de la domef- ticîté font ici affez profondes , pour altérer non-feulement les couleurs du plumage , comme nous l'avons vu ci- deffus , mais encore celle de , la ma- tière dont fe forme la coquille des œufs -, & comme cela n'arrive pas dans ïes autres efpèces , c'eil encore une raifon de plus pour regarder la nature de la peintade , comme moins fixe & plus fujette à varier que celle des autres oifeaux. La peintade a - t - elle foin ou non de fa couvée ? c'eft un problême qui n'eft pas encore réfolu; Bélon dit oui3 fqj Hifîoria Animalium, lib. VI, cap. n, Oifeaux j Tome III. M 266 Hi/Ioire Naturelle, fans reftnctïon (r) ; Friich eft aufïi pour l'affirmative à l'égard de fa grande efpèce , qui aime les lieux fecs , & il allure que le contraire eft vrai de la pecite eipèce, qui fe plaît dans les ma- récages j mais le plus grand nombre des témoignages lui attribue de rindifîé- rence fur cet article -, & le Jéfuite Mar- gat nous apprend quà Saint-Domingue, on ne lui permet pas de couver elle- même Tes œufs , par la raifon qu elle ne s'y attache point , & qu'elle aban- donne Touvent Tes petits j on préfère , dit - il 5 de les faire couver par des poules d'Inde , ou par des poules com- munes (f). Je ne trouve rîen fur la durée de l'incubation -, mais , à juger par la grof- feur de i'oifeau , & par ce que Ton fait des efpèces auxquelles il a le plus de rapport , on peut la fuppofer de (r) " Sont moult fécondes & foigneufes de t-> bien nourrir leurs petits » Hlfioire des Oifëauxl page 248. (fj Lettres édifiantes, Recueil XX, loco citato, de la Peintade. 26 7 trois femaines , plus ou moins, félon ïa chaleur de la faifon ou du climat, l'aiîï- duité de la couveufe, &c. Au commencement, les jeunes pein- tadeaux n'ont encore ni barbillons, ni fans doute de cafque-, ils reïîemblent alors, par le plumage, par la couleur des pieds & du bec , à des perdreaux rouges j & il n'eftpas aifé de difcinguer les jeunes miles des vieilles femelles ( t ) ; car ceft dans toutes les efpèces que la maturité des femelles reffemblè à l'enfance des mâles. Les peintadeaux font fort délicats 8c très - difficiles à élever dans nos pays feptentrionaux , comme étant origi- naires des climats brûlans de l'Afrique *, ils fe nourrifTent , ainii que les vieux à' Saint-Domingue , avec du millet, félon le P. Margat (u) ; dans l'île de May , avec des cigales & des vers qu'ils trouvent eux - mêmes , en grat- (t) Ceci nous a été affûté par le fieur Fourrier t que nous avons cité ci-devant. (u) Lettres édifiantes, Recueil XX, loco citatçt Mij 268 Hifioire Naturelle tant la rerre avec leurs ongles (x) ; 8c, félon Frifch, ils vivent de toutes forces de graines & d'infectes ( y )* Le coq peintade produit auiîi avec la poule domeftique \ mais c'en: une cfpèce de génération artificielle qui demande des précautions \ la princi- pale eft de ïes élever enfemblc de jeunefTe e, 8c les oifeaux métis , qui ré- sultent de ce mélange s forment une race bâtarde , imparfaite , défavouée , pour ainfî dire, de la Nature, & qui, rie pondant guère que des œufs clairs , n'a pu jufqu'ici fe perpétuer régulière- ment (i). Les peintadeaux des baffes - cours font d'un fort bon goût , 8c nullement in- férieurs aux perdreaux ; mais les fau- vages ou marrons de Saint-Domingue , font un mets exquis 8c au - deifus du faifan. (x) Nouveau Voyage autour du monde , de Dampier, tome IV ' , page ni. — Labat, tome II ^ page 326; 6* tome III , page 139. (y) Frifch, plancha cxxvi* i\) Selon M. Fournier. de la Peintade. 269 Les œufs de peintade font aulîi fort bons à manger. Nous avons vu que cet oifenu étoit d'origine africaine , & de - là tous les noms qui lui ont été donnés de poule africaine , numidique , étrangère 5 de poule de Barbarie , de Tunis , de Mau- ritanie , de Lybie , de Guinée ( d'où s'efl: formé le/ nom de Guinette), d'E- gypte 5 de Pharaon & même de Jéru- salem : quelques Mahométans s'étant avi- fés de les annoncer fous le nom de poules de Jérufaîem , les vendirent aux Chré- tiens tout ce qu'ils voulurent (a ) : mais ceux-ci s'étant aperçus de la fraude > les revendirent à profit à de bons Mu- fulmans , fous le nom de poules de la Mecque. On en trouve à l'île de France & à l'île de Bourbon ( 'b ) , où elles ont été tranfpïantées aiTez récemment , Se où elles fe font fort bien mùlci- (a) Longolius apud Geflierian , de Av'dus > pag. 479. (b) M. Aublet. M iij 270 Hifloire Naturelle pliées ( ' c) j elles font connues à Ma- dagafcar , fous le nom d'acanques ( d) ^ & au Congo, fous celui de quetèle ( e ) ; elles font fort communes dans la Guinée (f)j à la- Côte d'or , où il ne s'en nourrit de privées que dans îe canton d'Acra ( g) 3 à Sierra- Liona (h) y au Sénégal (i) _, dans Tïîe de Corée, dans celies du Cap -vert ( k)> en Bar- barie, en Egypte, en Arabie ( l) 3 3c (c) Voyagé autour du monde , de la Barbinais îe Gentil, tome XI , page 608. (d) François Cauche, relation de Madagafcar j FaSel33- (ej Marcgrave, Wftoria nat.BraJïl.ip. 192. (f) Margat, Lettres édifiantes, loco citato. (g) Voyage de Barbot , page 217. (h) Marcgrave , Hifioria nat. Brafilienf. loco citato. (i) Voyage au Sénégal , de M. Adanfon , page 7. (kj Dampier, Voyage autour du monde , tome IV, page 23. (I) Strabon, lib. XVL de, la Peïntade. 2 7 î en Syrie (m) ; on ne dit point s'il y en a dans les îles Canaries , ni dans celles de Madère. Le Gentil rapporte qu'il a vu à Java , des pouîes pein- tades (n) ; mais on ignore fi elles étoient domeftiques ou fauvages : je croirois plus volontiers qu' elles étoient domef- tiques , 8c qu'elles avoient été trans- portées d'Afrique en Ane , de même qu'on en a tranfporté en Amérique Se en Europe -, mais comme ces oifeaux étoient accoutumés à un climat très- chaud , ils n'ont pu s'habituer dans les pays glacés, qui bordent la mer Baltique-, auffi n'en eft-ii pas queftïon dans la Fauna Suecïca de M. Linnœus.- M. Klein paroît n'en parler que fur le rapport d'autrui , & nous voyons même, qu'au commencement du {iècîe, lis étoient encore fort rares en An- gleterre ( 0 ). (m) Mekagrides fert ultima Jyriœ Regio. Diodor , fîcul. (n) Nouveau Voyage autour du monde , tomelIT^ FaSe 74- (0) Voyei Gianures d'Edwards ? Troijième partie 7 page 269. Miv 2 7 2 Hijloire Naturelle Varron nous apprend que, de Ton temps, les poules africaines (c'efr. ainfi qu'il appelle les peintades ) , fe ven- doienr fort cher à Rome, à caufe de leur rareté (p ) ; elles étoient beaucoup plus communes en Grèce du cemps de Pau- fanias , puifque cet Auteur dit positi- vement que la méléagride étoit avec l'oie commune, l'offrande ordinaire des perfonnes peu aifées dans les myftères folennels d'Ifîs ( q) : malgré cela , on ne doit point fe perfuader que les pein- tades fuflent naturelles à la Grèce , puifque , félon Athénée , les Étoliens paflbient pour être les premiers des Grecs , qui eulTent eu de ces oifeauxi dans leur pays : d'un autre coté , j'a- perçois quelque trace de migration régulière dans les combats que ces or- feaux venaient fe livrer tous les ans en Béotie , fur le tombeau, de Mé- léagre ( r) j & qui ne font pas moins (p) De Ré Rujllcà , lib. III \ cap. IX. (q) Via. Gefnerum , de Avibus , pag. 479 , quorum tenuior efl res familiaris in celebribus Ifidii conventibus , anjeres atque aies meleagrides immolant. (7) Simili modo fnemj-e ut memnonides ayesj, JPi.IKvi L^ TEINTADE . de la PeintaJe. 273 cités par les Naturalises que par les My- thologiftes -, c'eiï de-là que leur efl; venu le nom de méléagrides (f)* comme celui de peincades leur a été donné moins a caufe de la beauté, que de l'agréable diftribution des couleurs dont leur plu- mage eft peinr. pugnant meleagrides in B&otia. Plin. Hift. nat. lib.X, cap. xxvi. (f) Nota. La Fable dit que les fœurs de Mé- iéagre , défefpérées de la mort de leur frère , furent changées en ces oifeaux, qui portent encore leurs larmes femées fur leurs plumages. M y 274 Hifloire Naturelle *LE TETRAS, o u LE GRAND COQ DE BRUYÈRE (a). Planche V de ce volume, i3 ï l'on ne jugeoic des chofes que par les noms , on pourroit prendre cet oifeau ou pour un coq fauvage , ou * Voye\ les planches enluminées , n °s 73 & 74. fa) En Grec , TirptÇ ; en Latin , Tetrao (Magnus) * en Latin moderne , Urogaiius ; en Italien , Gallo Cedrone; en Allemand , Or-han, Avtr-Han ; en Pofonois, Glufcec; en uédois, Kjaerfer ou Tjacder; en Norvège, Lieure ; en Ang'ois, Mountain Cock ; dans quelques provinces de France , Coq de Li- moges, Coq de bois, Faifan bruyant. — Tetrao. Béi. Obferv. pag. 11. — Urogaiius feu Tetrao. Af- drov. Avu tome II , page 59. — Tetrao, five Uro- gaiius. Frifch , Ta6. 107. Mit/I — Coq & poule noire des montagnes de Mofcovie. Albin. Terne II 9 jwge 22 . planche, xxix ; le mâle , planche xxx , h du Tétras. ij$ pour un faifan \ car on lai donne en plufieurs pays , & fur - tout en Italie , le nom de Coq faùvage , gallo alpejire (b) j felvatico ; tandis qu'en d'autres pays , on lai donne celui de Faifan btùyant & de Faifan fauvage ; cependant il diffère du faifan par fa queue , qui efl une fois plus coarte à proportion , & d'une toute autre forme ^ par le nombre des grandes plumes qui la compofent , par l'étendue de fon vol , relativement à fes autres dimenfions, par fes pieds pattus & dénués d'éperons , Sec. D'ailleurs , quoique ces deux efpèces d'oifeaux fe plaifënt également dans les bois, on ne les rencontre prefque jamais dans les mêmes lieux , parce que le fâïfatî , qui craint le froid , fe tient dans les bois en plaines , au lieu que le coq de bruyère cherche le froid & habite les bois qui couronnent le fommet des hautes femeïîe. Nota. La planche de Frifch eft bien colo- riée, & ceîïes d'Albin îe font fort mai, (h) Albin décrit le maie & la femelle , fous ïe nom de Coq & de Poule noire des montagnes de Mofcovie ; plufieurs Auteurs l'appellent Gallus fih'efms* M vj 276 Hijhire Naturelle montagnes 3 d'où lui font venus les noms de coq de montagnes & de coq de bois. Ceux qui, à l'exemple de Gelner & de quelques aunes , voudroient le regarder comme un coq fauvage , pour- roienc , à la vérité, le fonder fur quel- ques analogies -, car il y a en efret plufieurs traits de reiTembiance avec le coq ordinaire , foit dans la forme totale du corps , foit dans la configuration particulière du bec , foit par cette peau rouge plus ou moins faiilante 5 dont les yeux font furmontés, foit par la fingularité de fes plumes , qui font prefque toutes doubles , & forcent deux de chaque tuyau , ce qui , fuivant Béloh , eft propre au coq de nos balles-cours ( c) : enftn ces oifeaux ont aufîi des habitudes communes •, dans les deux efpèces , il. faut plufieurs fe- melles au mâle -, les femelles ne font point de nid , elles couvent leurs œufs avec beaucoup d'afîiduité, & montrent une grande affection pour leurs petits quand ils font éclos : mais (1 Ton fait attention que le coq de bruyère n'a (c) Bélon, Nature des Oifeaux, page 251. du Tétras. 277 point de membranes fous le bec 8c point d'éperons aux pieds *, que Tes pieds font couverts de plumes , & Tes doigts bordés d'une efpèce de dente- lure -, qu'il a dans la queue deux pennes de plus que le coq ; que cette queue ne le divife point en deux plans comme celle du coq , mais qu'il ia relève en éventail comme le dindon -, que la grandeur totale de cet oifeau eft qua- druple de celle des coqs ordinaires ( d) ; qu'il fe pîait dans les pays froids , tandis que les coqs profpèrent beau- coup mieux dans les pays tempérés j qu'il n'y a point d'exemple avéré du mélange de ces deux efpèces -, que leurs oeufs ne font pas de la même couleur : enfin , fi l'on fe fouvient des preuves par lefquelles je crois avoir établi que l'efpèce du coq eft originaire des contrées tempérées de l'Arle , où les Voyageurs n'ont prefque jamais vu de coqs de bruyère , on ne pourra guère fe perfuader que ceux-ci foient îa fouche de ceux-là , & l'on reviendra bientôt d'une erreur occafionnée , comme (à) Aïdrovande , Ornithologie , tome II 7 p. 61» 278 Uifloire Naturelle tant d'autres , par une faufle dénomma^ tion. Pour moi , afin d'éviter route équi- voque , je donnerai dans cet article , au coq de bruyère, le nom de terras, formé de celui de tetrao 3 qui me paroît être fon plus ancien nom larin , & qu'il conferve encore aujourd'hui dans la Sciavonie , où il s'appelle tetre^ ; or* pourroit auffi lui donner celui de cedron , tiré de cedrone , nom fous lequel il eft connu en plu (leurs contrées d'Italie *, les Grifons rappellent Jiol^o _, du mot allemand7?o/^ j qui lignifie quelque chofe de fuperbe ou d'impofant , &■ qui. eft' applicable au coq de bruyère , à caufe de fa grandeur & de fa beauté : par îa même raifon , les habrtans des Py- rénées lui donnent le nom de paon fauvage -, celui d'urogal/us y fous lequel il eft fouvent déligné par les Modernes qui ont écrit en latin , vient de ur j our _, urus s qui veut dire fauvage , & dont s'eft formé en allemand le mot auer- hahîiy ou ourh-ha hn _, lequel, félon Frifch, , défigne un oifeau , qui fe tient dans les lieux peu fréquentés & de dirriciie du Tétras. i-jy f accès *, il (ignifîe auiïï un oifeau de ■marais ( e) 3 & c'eft de - là que lui efl [venu le nom riet-hahn , coq de marais, ! qu'on lui donne dans la Souabe, & même fccn Eccffe (f). Ariftoce ne dit que deux mors d'un oifeau qu'il appelle te tri x ., & que les Athéniens appeloient ourax ; cet oifeau, dit-il , ne niche- point fur les arbres [ni fur la terre \ mais parmi les plantes balles & rampantes. Tetrix quam Athe- nienfesvocant xp&ya. , nec arbcri , necterr& nidum fuum committit _, fed frutici (g). Sur quoi il eft à propos de remar- quer que î'expreffion grecque n'a pas été fidèlement rendue par Gaza ; car , i.° Artftote ne parle point ici d'ar- brideau (frutici); mais feulement de plantes baffes (h) _, ce qui reffemble plus au gramen & à la mouffe , qu'à fe) Jue, défigne , félon Frifch , une grande pîac^ 'humide & bafle. ffj Gefner, de Avibus , pages 231 &477« (g) Hiftoria Animalium , lib. VI , cap. I. (h) Ev ?w? ^tf^a^»xo?s <*>vtq7ç in humilibus plantis* 280 Hijloire Naturelle des arbriffeaux -, 2.0 Ariftote ne dit point que le tetrix faffe de nid fur ces plantes baffes, il dit feulement qu'il y niche, ce qui peut paroître la même! chofe à un Littérateur , mais non à un Naturalise, vu qu'un oileau peut nî-i cher, c'eit. - à - dire , pondre & couver Tes œufs fans faire de nid *, & c'efl i précifément le cas du tetrix _, félon Arif-j tote Lui-même, qui dit, quelques lignes plus haut, que l'allouette & le tetrix \ ne dépoient point leurs œufs dans des. nids, mais qu'ils pondent fur la terre, ainli que tous les orfeaux pefans , & qu'ils cachent leurs œufs dans l'herbe' drue ( i). Or ce qu'a dit Ariftote du tetrix , dans) ces deux pafiages , ainfî rectifiés l'un 1 par l'autre , préfente pîufieurs indica-i tions qui conviennent à notre tétras J dont la femelle ne fait point de nid \ mais dépofe fes œufs fur la moufle , (ij O'uk h vicrliietiç . , «>.x' sv -rii yï . lTiYi\vyalûfA.*va. £x»v non in midis fid in terra obumbrantes plant s. Gefner dit précifément : nidum ejus congeftum potius quàm , conjlruftum vïdimus. De Avibus , lib, III , pag. 487. du Tétras, 2 8 1 & les couvre de feuilles avec grand foin lorfqu'elle eft obligée de les quitter ; d ailleurs le nom latin tetrao , par lequel Pline déligne le coq de bruyère , a un rapport évident avec le nom grec tctrix ^ fans compter l'analogie qui fe trouve entre le nom athénien ourax & le nom compofé ourh- ha h n _, que les Allemands appliquent au même oifeau , analogie qui probablement n'efl: qu'un effet du hafard. Mais ce qui pourroit jeter quelques doutes fur l'identité du tetrlx d'Arif- tote avec le tetrao de Pline , c'eft que ce dernier , parlant de fon tetrao avec quelque détail , ne cite point ce qu'A- rifrote avoit dit du tetrlx j ce que vrai- femblablement il n'eut pas manqué de faire, félon fa coutume, s'il eut regardé fon tetrao comme étanr le même oifeau que le tetrix d'Ariftote , à moins qu'on ne veuille dire qu'Ariftote ayant parlé fort fuperficiellement du tetrlx j Pline n'a pas dû faire grande attention au peu qu'il en avoit dit. A l'égard du grand tetrax _, dont parle Athénée ( lib. IX) j ce neft certaine- 282 Hïfioire Naturelle ment pas notre terras, puifqu'il a des! efpèces de barbillons charnus & fem-| blables à ceux du coq , lefquels pren- Il nent nailiance auprès des oreilles , & dcf-H cen dent au - delTous du bec *, caractère! abfolument étranger au tétras , &i qui défîgne bien plutôt la îréléagndel ou poule de Numidie , qui eft notre; j . -;:e. Le petit tetrax > dont parle îe même] Auteur , n'eft , félon lui , qu'un très- f petit oifeau, &,parfa petitede même ,1 exclus de toute comparaifon avec notre tétras _, qui eft un oifeau de la première! grandeur. A Fégard du ùtrax du poète Neme-J fiânus , qui mfiile fur fa ftupidité J Gefner le regarde comme une efpèce d'outarde \ mais je lui trouve encore un trait caracrérifé de reffemblance avec la méiéagtide \ ce font les couleurs de fon plumage , dont le fond eft gris- cendré , femé de taches en forme de gouttes ( k) ; c'eft bien - là le plumage! (k) Fragmenta lilrormn de Aucupio , attribués I] par quelques-uns , aupoè'teNemefianus, qui vi dans le troifième fiéde. du Tétras. 283 lie la peintade , appelée , par quelques-, ms , gallina guttata (l ). Mais , quoi qu'il eu foie de toutes ;es conjectures , il en: hors de doute [•Jue les deux efpèces de tetrao de Pline 5 pont de vrais tétras, ou coqs de bruyère p m ) : le beau noir luftré de leur plu- mage , leurs iourciîs couleur de feu, qui repréfentent des efpèces de flammes dent leurs yeux font furmontés : leur •féjour dans les pays froids & fur les hautes montagnes , la déiicatefïe de leur chair , font autant de propriétés qui fe rencontrent dans le grand & le petit I (l) Et piHa. perdrix , Numidicœçue guttate , Martial. C'eft auffî très - exactement le plumage de ces deux poules du Duc de Ferrare , dont Gefner parie à l'article de la peintade , totas clneho colore , éqquz albicante , citm aigris rotuxdifque maculis. De Avibus, pag. 481. I (m) Decet tetraonas fuus lûtor abfolutaque nigritia ? in Cuperciliis cocci rubor gigv.unt eos Alpes & ■feptemrwnalis Regio. Pline, lib. X , cap. xxn Le Tetrao des hautes montagnes de Crète, vu par Bé- ïon , relTemble fort à celui de Pline ; il a , dit i'Ob- fervateur françois, une tache rouge de chaque côté joignant les yeux, & de force qu'il eft noir devant l'eiiomac , fes plumes en reiuifent. Obfervations de Wjufieurs fingiilarités + &c. page il. 2 3 4 HiftftiK Naturelle tétras , & qui ne fe trouvent réunie dans aucun autre oifeau : nous aperce; vous même, dans la defcription de Pline; les traces dune fingularité qui n'a et connue que par très-peu de Modernes moriuntur contumaciâ j dit cet Auteur r fpiritu revocdto ( n) : ce qui fe rapport» à une obiervation remarquable , qu< Frifch a inférée dans l'hiftoire de ce oifeau (o) ; ce Naturalise n'ayant poin trouvé de langue dans le bec d'ui coq de bruyère mort , & lui ayan ouvert le gofier, y retrouva la langue qui s'y étoit retirée avec toutes fes dé- pendances \ & il faut que cela arrive U plus ordinairement , puifque ceft une opinion commune parmi les Chafïeurs: que les coqs de bruyère n'ont point de langue -, peut-être en eft-il de mêmi de cet aigle noir dont Pline fait men- tion (p), & de cet oifeau du Brefil dont (n) Capti animum d&fpondeuK. , dit Longoïius. (o) Frifch , dijlributionmétl I". CFIII. (v) Plin. lib. X, cap. m. (o) Frifch, difiribution méthodique des Oi féaux , îr'c. fig. CVIll. du Tétras. 285 parle Scaliger (q) * lequel pafToit aufîi pour n'avoir point de langue , fans doute fur le rapport de quelques Voyageurs crédules, ou de ChafTeurs peu attentifs , qui ne voient prefque jamais les animaux que morts ou mourans, & fur-tout parce qu'aucun Obfervateur ne leur avoit re- gardé dans le gofier. L'autre efpèce de tetrao , dont Pline parle au même endroit 3 eft beaucoup plus grande , puifqu'elle furpafle l'ou- tarde & même le vautour dont elle a le plumage , & qu'elle ne le cède qu'à j. l'autruche -, du refte , c'eft un oifeau (i ] pefant , qu'il fe laifïe quelquefois prendre à la main (r). Bélon prétend que cette 'efpèce de tetrao n'en: point connue des Modernes , qui , félon lui , n'ont jamais vu de tétras ou coqs de bruyère 'plus grands que l'outarde : d'ailleurs on pourroit douter que l'oifeau défigné dans ce partage de Pline , par les noms d'otls & d'avis-tarda j fût notre (q) J. C. Scaïiger, in Cardanum, Exercit. 228. (r) Cela eft vrai à la lettre du petit tétras , comm§ on le verra dans l'article luivant. z8 6 Hijloire Naturelle outarde , dont ia chair eft d'un fort bot goût ; au lieu que Y avis- tarda de Plm< étoit un mauvais manger : damnatas u\ cibis ; mais on ne doit pas conclure poui cela, avec Bélon , que le grand tetra.i neft autre chofe que Yavis-tarda _, puiij que Pline , dans ce même pailage nomme le taras Se Yavis-tarda _,. & qui les compare comme des oifeaux d'efpèce différentes. Pour moi , après avoir tout bien peféi j'aimerois mieux dire, i.° Que le premre tetrao dont parle Pline , eft le tétras d la petite efpèce , à qui tout ce qu'il éi en cet endroit eft encore plus applicabl qu'au grand : 2°. Que Ton grand tetrao eft notrj grand tétras , Se qu'il n'en exagère ps la groileur en difant qu'il furpaile l'ov tarde j car j'ai pefé moi - même un grande outarde , qui avoit trois pieç trois pouces de l'extrémité du hec celle des ongles , iix pieds & deiii de vol , & qui s'eft trouvée du poicl de douze livres j or Ton fait, Se l'o verra bientôt que > parmi les tétras dj du Tétras. 287 la grande efpèce , il y en a qui pèfent davantage. Le terras, ou grand coq de bruyère, a près de quatre pieds de vol -, (on poids eft communément de douze à quinze livres *, Aldrovande dit qu'il en avoit vu un qui pefoit vingt -trois livres , mais ce (ont des livres de Bo- ilogne , qui font feulement de dix onces *, en forte que les vingt -trois ne font pas quinze livres de feize onces. Le coq noir des montagnes de Mofcovie , idécrit par Albin , & qui n'eft autre œhofe qu'un tétras de la grande -efpèce , pefoit dix livres fans plumes & tout vuidéy & le même Auteur dit que les | Heures de Norvège , qui font de vrais terras , font de la grandeur d'une ou- barde f/J. Cet oifeau gratte la terre comme kous les frugivores 5 il a le hec fort & branchant (t) , la langue pointue, & (f) Aibin, tome I, page il. (t) Nota. Je ne fai ce que dit Longolius , en lavançant que cet oifeau a des barbillons. Voyei Gef- E^cr ? page 487 j y aur oit-il , parmi les grands tétras 9 28 8 Hifloire Naturelle dans le palais , un enfoncement propor- tionné au volume de la langue-, les pieds font aufli très-forts Se garnis de plumes' pardevant -, le jabot eft excelTïvement grand ; mais du refte fait, ainfi que le géfier , à peu près comme dans le coq domeftique (u) : la peau du gêner eft veloutée à l'endroit de l'adhérence dei| mufcles. Le tétras vit de feuilles ou de fonn mités de fapin , de genévrier , de cèdre ( x) ^ de faule, de bouleau , de peuplier blanc , de coudrier , de mir- tille, de ronce, de chardon, de pomme de pin , des feuilles & des fleurs duj; blé farrafin , de la gefle , du mille- J feuille , du pirTenlit , du trèfle , de là veile 8c de i'orobe , principalemem 1 une race ou une efpèce qui auroit des barbillons I comme cela a lieu à l'égard des petits tétras ? oïl bien Longolius ne veut-il parler que d'une certain»! difpoiition de plumes, repréfentant imparfaitemenl des barbillons , comme il a fait à l'article de la Ge-I linotte? Voyei Geiner , deAvibus^ pag. 229. (u) "Bélon , Nature des Oifeaux , page 251. (x) Idem, Ibidem. lorfquc du Tétras. 289 lorfque ces plantes font encore tendres -, car, lorfque les graines commencent à fe former, il ne touche plus aux rieurs, 8c il fe contente des feuilles *, il mange aufïï , fur- tout la première année , des mûres fauvages, de la faine , des œufs de fourmis , &c. On a remarqué au contraire que plufieurs autres plan- tes ne convenoient point à cet oifeau, entr'autres la livêche , l'éclairé , î'hiè- ble, l'extramoine, le muguet, le froment, l'ortie, &c. (y). On a obfervé dans le géfîer des tétras que Ton a ouverts , de petits ^cailloux fembîabïes à ceux que l'on voit dans le géiier de la volaille or- dinaire , preuve certaine qu'ils ne fe contentent point des feuilles & des fleurs qu'ils prennent fur les arbres > niais qu'ils vivent encore des grains qu'ils trouvent en grattant la terre. Lorsqu'ils mangent trop de baies de genièvre, leur chair, qui eft excellente, contracte un mauvais goût -, &, fuivant la remarque de Pline , elle ne con- ()') Jom'naï Économique. Mai 1765. Oi féaux , Tome III, N 2>-o Hifioire Naturelle ferve pas long-temps fa bonne qua- lité, dans les cages & les volières où l'on . veut quelquefois tes nourrir par curiofité ( i ). La femelle ne diffère du mâle que par la taille & par îe plumage , étant plus petite & moins noire ; au refce, eile l'emporte fur le mâle par l'agréable variété des couleurs, ce qui n'eil: ' point l'ordinaire dans les oifeaux , ni même dans les autres animaux , comme nous l'avons remarqué en faïfant l'hiitoire des quadrupèdes-, &, félon Willulghby, c'efl faute d'avoir connu cette excep- tion, que Gefner a fait de la femelle une autre efpèce de terras, fous le nom de grygallus major (a) _, formé de l'al- lemand grugel-hahn ; de même qu'il a fait auiïl une efpèce de la femelle du petit tétras , à laquelle il a donné (\) In aviariis fapGrem perdant. Plin. Iib. X, çap. xxii. (a) Nota. Gefner trouve que ïe nom de grand francoiin des Alpes conviendroit aiïez au grÀ gdlm major, vu qu'il ne diffère du franco fin que par fa taille , étant trois fois plus gros, 495. du Tétras, 291. îe nom de grygallus minor (b) ; ce- pendant Gefner prétend n'avoir établi ; les efpèces qu'après avoir obfervé avec grand foin tous les individus, excepté le grygallus minor 3 & s être ! a (Tu ré qu'ils avoient des didérences j bien caractérifées (c) : d'un autre coté3 Schwenckfeld , qui étoir à portée des montagnes, Se qui avoit examiné fou- vent & avec beaucoup d'attention le grygallus. j aîTure que :c'eii la femelle du tétras ( d) ; mais il faut avouer .que. ; dans cette efpèce , & peut-être dans ; beaucoup d'autres, ïes couleurs du (b) Nota. En effet , Gefner dit positivement que', parmi tous ïes animaux,' il n'ëit pas une l feule efpèce où les mâles ne l'emportent fur h ! femelle par ïa beauté des eouïèurs ; à quoi Aldro - | vande oppofe, avec beaucoup de raifort , I'e::emple de_s oifeaux, ce proie, & far-tout des. éperviers & : des faucons, parmi Je fqueîs les femelles nôrïrfeuîe- ! ment or.tle plumage pkis beau que les mâles, mais \ encore furpaffent ceux-ci en force & en groiïeur, | comme il a été remarqué ci-deffus dans l'hiftojre de : ces oiîeaux. Vàyé^ Aïdrôvande , de. Avïous, tome 1 1 9 P^e 72. . (c) Gefner, de Avïkus , lib. III ? page 493. , (d) .Scbwenckfeld, Avimum o%^page 371. Nij 292, Hifloire Naturelle plumage font fujettes à de grandes variétés, félon le fexe, lage, le climat 8c les diverfes autres circonftances : celui que nous avons fait defîiner , eft un peu huppé. M. EriiTon ne parle point de huppe dans fa defcription *, & des deux figures données par Al- drovande , Tune eft huppée & l'autre ne Felt. point. Quelques-uns préten- dent que le tétras lorfqifil eft jeune , a beaucoup de blanc dans fon plu- mage (e)^ & que ce blanc fe perd à mefure qu'il vieillit , au point que c'eft un moyen de connoître l'âge1 de l'oifeau ( fj ; il fembie même que ïe nombre des pennes de la queue ne foit pas toujours égal j car Linnxus le fixe à dix -huit dans fa ■ F aima Suecïca, Se M. Brilfon à feize , dans fon Ornithologie ; & ce qu'il y a de plus fingulier , Schwenckfeld, qui avoic (e) Le blanc, qui eft: dans la queue , forme avec celui des ailes & du dos lorfque l'oifeau fait la roue, un cercle de cette couleur. Journal Écono- mique. Avril 1753. (f) Schwenckfeld, Aviarium SiUJiœ, page 371, du Tétras. iy^ vu 8c examiné beaucoup de ces oi- féaux, prétend que, foit. dans îa grande, foit dans la petite efpèce, ies femeiles .ont dix-huit pennes à la queue & les pâles douze feulement -, d'où il fuie que .toute méthode, qui prendra pour carac- tères fpécifiques des différences auffi variables que le font les couleurs des plumes & même leur nombre, fera fu- jette au grand inconvénient de multi- plier les efpèces , je veux dire les ei- pèces nominales , ou plutôt les nou- velles phrafes •, de furcharger la mé- moire des commençans , de leur donner de fauffes idées des chofes *, 8c par confé- quent de rendre l'étude de la Nature plus difficile. Il n'en: pas vrai, comme Ta dit Encelius , que le tétras mâle , étant perché fur un arbre, jette fa femencé par le hec -, que fes femelles qu'il appelle à grands cris , viennent la recueillir, l'avaler, la rejeter enfuite , 8c que leurs œufs forent ainfî fécon- dés -, il n'eft pas plus vrai que de la partie de cette femence, qui n'eft point recueillie par les poules , il fe forme M iij 294 Hifloire Naturelle des ferpens, des pierres précieufes, des ef[ èces de perles ; il eft humiliant pour Tefprit humain qu'il fe préfente de pa- reilles erreurs à réfuter. Le tétras s'ac- couple comme les autres oifeaux*, & ce qu'il y a de plus fingulier, c'en; qu'Ence- lius lui-même, qui raconte cette étrange fécondation par le b^c , n'ignoroit pas que le coq couvroit enfuite fes poules , & que celles qu'il n'avoir point cou- vertes, pondoient des œufs inféconds: il favoit cela, & n'en perfifta pas moins dans fon opinion-, il difoit pour la défendre , que cet accouplement n'étoit qu'un jeu-, un badinage , qui mettoit hmi le fceau à la féconda- non , mais qui ne l'opéroit point , vu qu'elle étoit l'effet immédiat de la dé- glutition de la femence. ... En vé- rité, c'eft s'arrêter trop long-temps fur de telles abfurdités ! Les tétras mâles commencent à entrer en chaleur dans les premiers jours de. février j cette chaleur eft dans toute fa force vêts les derniers jours de mars , & continue jufqu'à la pouffe des feuilles. Chaque coq, pendant fa du Tétras. 295 chaleur, fe tient dans un certain canton d'où il ne s'éloigne pas *, on le voit alors, foir & matin, le promenant lue le tronc d'un gros pin ou d'un autre arbre, ayant la queue étalée en rond, les ailes traînantes , le cou porté en avant , la têts enflée , fàas doute par le redreiTement de Tes plumes , Se prenant toutes fortes de poftures ex- traordinaires , tant il efl tourmenté par le bstoin de répandre Tes molécules organiques fuperflues : il a un cri par- ticulier pour appeler Tes femelles, qui lui répondent & accourent fous l'arbre où il fe tient , & d'où il defeend bientôt pour les cocher & les féconder -, c'eft probablement à caufe de ce cri fin» gulier , qui eft très-fort & fe fait en- tendre de loin , qu'on lui a donné le nom de fa if an bruyant : ce cri com- mence par une efpèce d'explofion juivie d'une voix aigre & perçante , femblabie au bruit d'une faux qu'on éguife-, cette voix ceiTe & recommence alternativement, & après avoir ainfi con- tinué à plusieurs reprifes pendant une Niv 296 Hiftoire Naturelle heure environ, elle finit par une ex- plofion femblable à îa première ( gj. Le terras qui, dans tout autre temps , eft fort difficile à approcher , fe laiffe Surprendre très-aifément lorfqu'il eft en amour, & fur -tout tandis qu'il fait entendre fon cri de rappel*, il eft: alors fi étourdi du bruit qu'il fait lui- même, ou fi Ton veut tellement enivré 5 que ni la vue d'un homme, ni même les coups de fufil ne le déterminent: à prendre fa volée j il femble qu'il' ne voie ni n'entende , & qu'il ioit dans une efpèce d'extafe ( h) ; c'eft pour cela que l'on dit communément,) ôc que l'on a même écrit que le tétras eft alors fourd & aveugle -, cependant il ne l'eft guère que comme le font , en pareille circonftance, prefque tous les animaux fans en excepter l'homme j, , fgj Journal Économique. Avril 1753. (h) In tantum aucta ut in terra quoque imm»- bilis prehendatuT. Nota. Ce que Pline attribue ici 1 à la grofleur du tétras, n'en: peut-être qu'un effet de fa chaleur & de Tefpèce d'ivrefle qui l'accompagne. du Tétras. z a y tous éprouvent plus ou moins cette ex- tafe d'amour, mais apparemment qu'elle ' eft plus marquée dans le terras -, car en ; Allemagne on donne le nom d'auer ! hahn aux amoureux , qui paroiiTent avoir \ oublié tout autre foin, pour s'occuper i uniquement de l'objet de leur paffion (ï)^ & même à toute perfonne qui montre j une infenfibilité ilupide pour fes plus grands intérêts. On *uge bien que c eft cette faifon où les tétras font en amour que l'on j choifit pour leur donner la chafïe , ou pour leur tendre des pièges. Je donnerai, en parlant de la petite ëfpèce à queue fourchue, quelques détails fur cette chafïe , fur - tout ceux qui feront les plus propres à faire connoître les mœurs & le naturel de ces oifeaux: je me bornerai à dire ici que l'on fait ttès - bien , même pour ravorifer la multiplication de Tefpèce, de détruire les vieux coqs , parce qu'ils ne fouf- ;| frent point d'autres coqs fur leurs ! plaitirs, & cela dans une étendue de (i) J. L. Frifch, fur les Oifeaux, difcours rela- tif à la figure cru. Nv 298 Hifîoire Naturelle terrein affçz confiçTçrable *, en forte que» ne pouvant fervir à toutes les poules de leur d'itrict, plufieurs d'entr'elles font privées de mâles, & ne produilent que des œufs inféconds. Quelques Oiieleurs prérendent qu'a- vant de s'accoupler, ces animaux le pré- parent une place bien netre & bien unie fkjj & je ne doute pas qu'en erîet on n'ait vu des places 5 mais je doute fort que les tétras aient eu la prévoyance de les préparer y il eft bien plus finv-j pie de penfer que ces places (ont les endroits du rendez-vous habituel du coq avec fes poules , lefquels endroits doivent être au bout d'un mois ou deux de fréquentation journalière, cer- tainement plus battus que le refte du terrein. La femelle du tétras pond ordinai- rement cinq ou fix œufs au moins, Se huit ou neuf au plus -, Schwenck-i feld prétend que la première ponte eft de huit , & les fuivantes de douze , quatorze & jufqu'à feize ( l) ; ces œufs (k) Gefner, de Avibus, p:ic;e 492. (I) Av'miuiu SUefiœ, page 372. Nota. Cettfr du Tétras, 299 font blancs, marquetés de jaune, &, félon le même Schwenckfeld, plus gros que ceux des poules ordinaires -, elle les dépofe fur la mou (Te en un lieu Cec, où elle les couve feule & fans êcre aidée par îe mâle (m): lorfqu'elle eft obligée de les quitter pour aller chercher fa nour- riture s elle les cache fous les feuilles avec grand foin -, & , quoiqu'elle fc-it d'un naturel très-fauvage, (I on l'approche tandis qu'elle eft fur fes œufs , elle refte & ne les abandonne que très-dif- ficilement , l'amour de la couvée l'em- portant en cette occafion iur.ïa crainte du danger. Dès que les petits font écîos ? ils fe mettent à courir avec beaucoup de légèreté *, ils courent même avant qu'ils {oient tout-à-fait éclos , puifqu'orî en voit qui vont oc viennent ayant gradation eft conforme à Pobfervation d'Àriftote: ex primo coitu aves ova eduiit pauciora. Hift. animaL îib. V, cap. xiv. Iï me paroît feulement que le nombre des œufs eft trop grand, (m) frota. Je crois avoir ïû quelque part? qu'elle çouvoit pendant environ vingt-huit jours, ce qui eft aflez probable, vu la grofieur de 'oife&u, Nvj 3 00 HlJIoire Naturelle encore une partie de leur coquille adhé- rence à leur corps : îa mère les conduit avec beaucoup de follicitude & d'afrec- tion ; elle les promène dans les bois , où ils fe nourrirent d'œufs de fourmis , de mures fauvages , &c. La famille de- meure unie tout le refte de Tannée , faifan de montagne; on lui a même donné le nom de perdrix 3 de gelinotte ; mais dans le vrai c'en: le périt terras , c'eft le premier tetrao de Pline, c'eft le tetrao ou Xurogallus - minor de la plupart des Modernes : quelques Naturaliftes , tels que Rzaczynski , l'ont pris pour le tetrax du poète Nemeiianus \ mais c'eft fans doute faute d'avoir remarqué que la grofîeur de ce tetrax eft, félon * Voyei les planches enluminées , n.° 172 ? le mâle} & n.0 173, la femelle. du petit Tétras <, &c. 303 Nemefianus même , égaie à celle de l'oie & de la grue (a) ; au lieu que* félon Gefner , Schwenckfeld , Aldro- vande & quelques autres Obfervareurs qui ont vu par eux-mêmes , le petit tétras n*eft guère plus gros qu'un coq ordinaire -, mais feulement d'une forme un peu plus aîongée 3 & que fa femelle , félon M. Ray , n'eft pas tout-à-fait aufîi groile que notre poule commune. Turner, en parlant de fa poule morefque , aihfï appelée , dit-il , non pas à caufe de fon plumage,- qui ref- femble à celui de la perdrix 5 mais à .caufe de la couleur du mâle , qui efl noir , lui donne une crêce rouge & charnue, & deux efpèces de barbillons, de même fjbftance & de même cou- leur (b) ; en quoi Wifiulgbby prétend qu'il fe trompe j mais cela eft d'autant (a) Tarpeiœ efi eufeos Jrcis non corpore major I\ec qui te volucrs.s docuit, Palamede? figuras. Vide M. Aurelii Oïympii Nemsfiani i fragments de Auci.piOo (b) Voyez Geîiier? h 4mu$f page 477, 304 HiJIoire Naturelle plus difficile à croire , que Turnef parle d'un oifeau de Ton pays ( apud nos ejl) _, & qu'il s'agit d'un caractère trop frappant pour que Ton puifïe s'y méprendre : or, en fuppofant que Turner ne s'eft point trompé en eftet fur cette crête & fur ces barbillons , & d'autre part, considérant qu'il ne dit point que fa poule morefque ait la queue fourchue, je ferois porté à la regar- der comme une autre efpèce , ou il Ton veut, comme une autre race de petit tétras , femblable à la première par la groiTeur , par le ditiérent plu- mage du mâle & de la femelle, par les mœurs, le naturel , le goût des mêmes nourritures, &c. mais qui s'en diftingue par fes barbillons charnus & par fa queue non fourchue : Se ce qui me confirme dans cette idée , c'en: que je trouve dans Gefner un oifeau fous le nom de gallus fylveflris (c) , lequel a auffi des barbillons & la queue non fourchue, du refte fort reilem- blant au petit terras -, en forte qu'on peut, & qu'on doit, ce me femble* v (c) ybyei Gefner, de Jyiùus , page 477. du petit Tétras 9 &c. $cf le regarder comme un individu de la même efpèce que la poule morefque de Turner , d'autant- plus que ?/ dans cette efpèce, ïe mâle porte en Ecofle (d'où Ton avoit envoyé à Gefner la figure de l'oifeau), le nom de coq noir ^ Se la femelle celui de poule grife _, ce qui indique préciféraent îa différence de plumage, qui, dans les efpèces de tétras, fe trouve entre les deux fexes. Le petit tétras dont il s'agit ici, n'eft petit que parce qu'on -le compare avec îe grand tétras \ il pèfe trois à quatre ïivres , Se il eft encore après celui-là ïe plus grand de tous les oifeaux qu'on appelle coq de bois (d). Il a beaucoup de chofes communes avec îe grand tétras , fourcils rouges , pieds pattus & fans éperons , doigts dentelés , tache blanche à l'aile , &c. mais il en diffère par deux caractères très-apparens : il eft beaucoup moins gros , Se il a la queue fourchue non- feulement parce que les pennes ou grandes plumes du milieu font plus (d) Gefner, de 4vibmt page 493. 3 06 Hijloire Naturelle courtes que les extérieures -, mais encore: parce que celles-ci Te recourbent en dehors: de plus, le mâle de cette petite efpèce a plus de noir, 8c un noir plus décidé que le mâle de la grande efpèce, il a de plus grands fourcils -, j'appelle ainfî cette peau rouge & glanduleufe qu'il a au deiTus des yeux; mais la grandeur de ces fourcils eft fujette à quelque va- riation dans les mêmes individus en dil férens temps, comme nous le verrons plus bas. La femelle e(t une fois plus petite que le mâle (e ) 3 elle a la queue moins fourchue, & les couleurs de fon plu- mage font fi différentes , que Gefner seiï cru en droit d'en former une efpèce féparée, qu'il a deflgnée par le nom de grygallus minor j comme je l'ai remarqué ci- deiTus dans Thiftorre du grand tétras: au reite, cette différence de plumage entre les deiîx fexes ne fe décide qu'au bout d'un certain temps ; les jeunes maies font d'abord de la couleur de leur mère , & confervenc (t) Britifch Zoology* du petit Tétras, &c* 307 cette couleur jufqu'à la première au- tomne : fur îa fin . de cette faifon & •pendant l'hiver, ils prennent des nuances de plus en plus foncées jufqu'à ce qu'ils foient d'un noir bleuâtre, & ils retiennent cette dernière couleur toute leur vie , fans autres changemens que ceux que je vais indiquer -, i.° ils prennent plus de bleu à mefure qu'ils avancent en âge -, i.° à trois ans & non plus tôt, ils prennent une tache blanche fous le bec^ 3.0 îorfqu'iïs font très- vieux, il paroît une autre tache d'un noir varié fous la queue, ou auparavant les plumes étoient toutes blanches ( f ) : Charleton & quelques autres ajoutent qu'il y a d'autant moins de taches blanches à la queue que l'oifeau eft plus vieux -, en forte que le nombre plus ou moins grand de ces taches , eft un indice pour recon- noître fon âge (g). Les Naturalises, qui ont compté allez unanimement vingt - fîx pennes (f) Ades de Brelîaw. Novembre 1725, (g) Charleton 3 Exercitathnes , page 82, 3 g 3 Uiftoire Naturelle dans l'aile du petit tétras ne s'accor-j dent point entr'eux fur le nombre! des pennes de la queue, & l'on retrouve ici à peu près les mêmes variations dont j'ai parlé au fujet du grand tétras, j Schwenckfeld , qui donne dix -huit! pennes à la femelle . n'en accorde que ! douze au mâle. Willulghby, Albin,, M. BriiTon en affignent feize aux mâles comme aux femelles , les deux . mâles , , que nous confervons au Cabinet dui Roi, en ont tous deux dix-huit*, favoîr, fept grandes de chaque coté, 8c quatre dans le milieu beaucoup plus courtes : . ces différences viendroient- elles de ce que le nombre de ces grandes plumes eîl fujet à varier réellement ? ou de ce que ceux qui les ont comptées , ont négligé de s'aiîurer auparavant s'il n'en manquoit aucune dans les fujets fou- rnis à leur obfervatron ? au refte , le tétras a les ailes courtes, & par con- féquent le vol pefant , ck on ne le voit jamais s'élever bien haut ni aller bien loin. Les mâles & les femelles ont l'ou- verture des oreilles fort grande, les du petit Tétras , &c. 309 doigts unis par une membrane jufqu'à la première articulation- &■ bordés de den- telures (h) _, ïa chair blanche & de facile àigeftion, la ïangue molle un peu hérif- fée de pentes pointes & non divifée*, fous la langue une fubftance glandu- leufe , dans le palais une cavité qui ré- pond exactement aux dimenfïons de ïa langue, le jabot très-grand, le tube in- teftinaï long de cinquante-un pouces, & les appendices ou cœcum de vingt-quatre *, ces appendices font fiilonnées de iîx (tries ou cannelures ( i), La diiférence qui fe trouve entre les femelles & les maies , ne fe borne pas à ïa fuperficie , elle pénètre juf- qu'à i'organifation intérieure. Le docteur (h) Nota. Un guis medii digiti ex parte interiore ia aciem tenuatus , expreffion un peu louche de Willulghby ; car fi cela lignifie que l'ongle du doigt du milieu efl tranchant du côté intérieur, nous avons vérifié fur l'oifeau même que le côté exté- rieur & le côté intérieur de cet ongle font égale- ment tranchans; & de plus, cet ongle ne diffère que très-peu & même point du tout des autres par ce caractère tranchant ; ainfi . cette obfervation de Wiiïulghby nous paroît mal fondée. (i) Wiiïulghby, page 124. Schwenckfeld, JPaP 375- 3 i o Hijloire Naturelle Waygand a obfervé que l'os du Jlernum dans les mâles, étant regardé à !a lu- mière , paroifioit femé d'un nombre prodigieux de petites ramifications di couleur rouge, lefquelles fe croiiant et recroifant en mille manières 8c dans toutes fortes de directions ? formoient un réfeau rrès-curieux 8c très-fînguliecs au lieu que3 dans les femelles, le même os n'a que peu ou point de ces rami- fications *, il en: auiïi plus petit & d'une couleur blanchâtre (k). Cet oiieau voie le plus fouvent en rroupe , 8c fe perche fur les arbres à peu près comme le faifan (l) : il mue en été , 8c il fe cache alors dans les lieux fourrés ou dans des endroits ma- récageux (m) ; il fe nourrit principa- lement de feuilles & de boutons -rie bouleau, & ce bayes de bruyère, a où îui eft venu fon nom frsneois coq d& bruy 'ère , 8c fon nom allemand birk-han ± fk ) Voyei A des de Breflaw, 7710/5 Je Novembre ^ Brkifch Zooloc.y. f/n^ Actes de Breflaw, fôco ci'ami. du petit Tétras y &c. 3 1 1 qui lignifie coq de bouleau -, il vie aufïï de chatons de coudrier , de blé & d'autres graines: l'automne il Te rabat fur les glands , les mures de ronces , ies boutons d'aune , ies pommes de pin , les baies de myrtille (vitis id monte de tierce dans cette circonfhnce , & il y Joint un autre cri particulier , une ef- pèce de roulemenr de gofier très- écla- tant^ x ) ; ies femelles, qui font à por- .tée, répondent à' la voix des mâles, par un cri qui leur eft propre , elles fe raf- femblent autour deux , & reviennent très - exa&ement les jours iuivans au même rendez - vous ; félon le docleur Waigand , chaque coq a deux ou trois \ poules auxquelles H eft plus Spécialement affectionné (y ), ^ Lorfque les femelles font fécondées , elles vont chacune , de leur côté , faire leur ponte dans des taillis épais & un peu élevés ; elles pondent par terre 8c fans fe donner beaucoup de peine pour la conftrudtion d'un nid, comme Vont tous les oifeaux pefans : elles pondent £x ou fept œufs , feîon les uns (\J, (u) Ornithologie de SaIerne,7oco citato. (x) Frifch, ibidem, (y) A des de Breflaw. Novembre 1725. (l) BritifchZooIogy, ^^,85. Oii 3 i 6 Uijloire Naturelle de douze à feize, félon les autres (a) ; & de douze à vingt , félon quelques autres (b ); les œufs font moins gros que ceux des poules domeftiques , & un peu plus longuets. M. Linna:us allure que ces poules de bruyère perdent leur fumet dans le temps de l'incubation (c). Schwenckfeîd fembie infînuer que le temps de leur ponte eft dérangé de- puis que ces oifeaux ont été tourmentés par les ChatTeurs , & effrayés par les coups de fufilj êc il attribue aux mêmes caufes la perte qu'a fait l'Allemagne de pluiieurs autres belles efpèces d'oi- feaux. Dès que les petits ont douze ou quinze jours 3 ils commencent déjà à battre des ailes & à s'eilayer à vol- tiger -, mais ce n'ell: qu'au bout de cinq ou fix femaines qu'ils lont en état de prendre leur effor , & d'aller fe percher fur les arbres avec leurs (a) Schwenckfeîd, Avianum Silefîœ, pag. 373. (b) A&es de Brefîaw , ibidem. (c) Syft. nat. édit. X9]>ag. 159* du petit Taras 5 &c. 3 1 7 mères : ceft alors qu'on les attire avec un appeau ( d) 9 Toit pour les prendre au filet 3 foit pour les tuer à coups de lu fil -, la mère , prenant le fon contre- fait de cet appeau , pour le piaulement de quelqu'un de Tes petits qui s'eft égaré 3 accourt & le rappelle par un cri parti- culier qu'elle répète fouvent , comme font en pareil cas nos poules domes- tiques, Se elle amène à fa fuite le refte de la couvée qu'elle livre ainfi à la merci des ChaflTeurs. Quand les jeunes tétras font un peu plus grands , & qu'ils commencent à prendre du noir dans leur plumage , ils ne fe laiiTent pas amorcer fi aifé- ment de cette manière j mais alors 5 jufqu'à ce qu'ils aient pris la moitié de leur accroiiTement 3 on les chafle avec l'oifeau de proie. Le vrai temps de cette chaile eft l'arrière- faifon > ïorfque les arbres ont quitté leurs ; (d) Cet appeau fe fait avec un os de l'aile de l'autour, qu'on remplit en partie de cire , en ménageant des ouvertures propres à rendre le fon demandé. Voyei A te de Breflaw. Novembre Oiij 3 i 8 Hiftoire Naturelle feuilles*, dans ce temps, les vieux mâles choiiiflent un certain endroit où ils Te rendent tous les matins, au lever du fo- ïeil , en rappelant , par un certain cri , (fur -tout quand il doit geler ou faire beau temps ) , tous les autres oifeaux de îeur efpèce , jeunes 8c vieux , mâles Se femelles : ïorfquils font ralTemblés , ils volent en troupes fur les bouleaux , ou bien , s'il n'y a point de neige fur la terre , ils fe répandent dans les champs qui ont porté , l'été précédent , du feigie, de l'avoine ou d'autres grains de ce genre *, & c'elt alors que les oifeaux de proie dreilés pour cela , ont beau jeu. On a en Courlande , en Livonie 8c eu Lithuanie , une autre manière de faire cette chaiTe *, on le fert d'un tétras em- paillé , ou bien on fait un tétras arti- ficiel avec de l'étoile de couleur conve- nable , bourrée de foin ou d'étoupe , ce qui s'appelle, dans le pays , une balvanc ; on attache cette balvane au bout d'un Mton , 8c Ton fixe ce bâton fur un bouleau , à portée du lieu que ces oifeaux ont choifi pour leur rendez- du petit Tétras y &c. 3 î poufTés par les Gha ;eurs de la manière que j'ai dit , viennent droit à la hutte du petit Tétras , &c. 323 du Tireur, celui-ci peur juger , par une obfervation ticile ,. s'i;s s'y poleront ou non à portée de lui \ iï leur vol effc inégîl , s'ils approciicnr & s'éloignent alternativement en battant des ailes , il peur compter que , finon toute la troupe, au moins quelques-uns, s'a- battront près de lui , fi au contrai; e , en prenant leur eiïor non loin de fa hutte , ils partent d'un vol rapide 8c iourenu , il peut conclure qu'ils iront en avant fans s'arrêter. Lorlque les tétras fe font pofés à portée du Tireur , ii en efr averti par leurs cris réitérés Jufqu'à trois fois ou même davantage -, alors il fe gar- dera bien de les tirer trop brusque- ment > au contraire , ii fe tiendra im- mobile & fans faire le moindre bruit dans (à hurte , pour leur donner le temps de faire toutes leurs obfer varions & la reconnoiffance du tertein -, après: quoi , iorfqu'iis fe feront établis fur leurs branches , & qu'ils commence- ront à manger , il les tirera & les choiîîra à fon aife> mais, quelque nom* Ov) 324 Hijloire Naturelle breufe que foit la troupe , fût-elle de cinquante , & même de cent , on ne peut guère efpérer d'en tuer plus d'un ou deux d'un feul coup -, car ces oifeaux fe féparent en fe perchant , & chacun choiht ordinairement Ton arbre pour fe pofer -, les arbres ifolés font plus avantageux qu'une forêt pleine s & un Tireur bien pofté les raiTemble aifément avec fes ieuls appeaux , 8c fans qu'il foit bel oin de Chaffeurs pour les pouiTer du coté de la hutte. du petit Tétras , &c. 325 On prérend que , lorfque ces oifeaux volent en troupes 3 ils ont à ieur tête un vieux coq , qui les mène en chef expé- rimenté , & qui ieut fait éviter tous les pièges des Chafteurs ; en forte qu'il eft fort difficile , dans ce cas , de les pouffer vers la balvane , & que Ton n'a d'autres reffources que de détourner quelques traîneurs. L'heure de cette chafTe eft chaque jour depuis le foleil levant, jufqu'à dix heures -, & 1 après - midi , depuis une heure jufqu'à quatre : mais en automne , lorfque le temps eft calme & couvert, la châtie dure toute la journée fans interruption , parce que , dans ce cas 9 les tétras ne changent guère de lieu : on peut les chaffer de cette manière 5 c eft - à - dire > en les pouffant d'arbre en arbre jufqu'aux environs du fol£- tice d'hiver-, mais, après ce temps, ils deviennent plus lauvages , plus défians » plus rufés *, ils changent même leur demeure accoutumée , à moins qu'ils n'y foient retenus par la rigueur $i6 Hijîoire Naturelle du froid ou par l'abondance des neiges, On prétend avoir remarqué que lorfque les rerras fe poferït fut ia ci né des arbres & fur leurs nouvelles pouffes, ceil figne de beau temps -, mars qne, lorfqu'on les voit fe rabattre fur les branches inférieures & s'y tapir ', c'eft un ligne de mauvais temps : je ne feroîs pas mention de ces remarques des Chaffeurs , (i elles ne s'accordoienc avec le naturel de ces oifeaux , qui , félon ce que nous avons vu ci - deffus , paroiffent fort fufceptibles des influences du beau & du mauvais temps , & donc îa grande fenf bl.'iré à cet é^ard, pour- roit être fuppofée fans bieffer \jl vrai- femblance , au degré néceffarre pour leur faire preffentir la température du lendemain. Dans les temps de grande pluie , ils fe retirent dans les forêts les plus touffues pour y chercher un abri -, & comme ils font alors fort pefans & qu'ils voient dinHcilement , on peut les chaifer avec des chiens courans ? qui Tûtn. III. ■ ' ■ 1 EE PETIT TETRAS du petit Tétras y &c. 327 ïes forcent fouvenc & les prennent même à la courfe ( fj. Dans d'autres pays, on prend les tétras au lacet , félon Aldrovande ( g) ; on les prend aufïi au filet, comme nous l'avons vu ci-deiius-, mais il feroit curieux de fa voir quelle éroit h forme , Té- tendue & la drfpofition de ce filet , fous lequel le noble Polonois , dont parle Rzaczynski , en prit un jour deux cens foixante à la fois. (f) Actes de B^eflaw, Novembre 1725, page 527 if fuir an tes ; if page 538 if fuivavtes. JS'ota. Cette peianteur des tétras a été remarquée par Pline ; il eft vrai qu'il paroît l'att ibuer a ia grande efpèce % &.je ne doute pas qu'elle ne lui convienne aufîi- bien qu'à ia petite. (g) Aldrov. de Avihus , tom. II ? pag. 60. 328 HiJIoire Naturelle LE PETIT TETRAS A QUEUE PLEINE , &c. J 'ai exposé , à l'article précédent , les raiforts que j'avois de faire de ce petit tétras une efpèce ou plutôt une race féparée : Gefner en parle fous le nom de coq de bois ( gallus fyiveflris ) (cl) *. comme d'un oifeau qui a des barbillons rouges , & une queue pleine & non fourchue \ il ajoute que le mâle s'ap- pelle coq noir en Ecoife , & la femelle , poule grife ( greyhen ). Il eft vrai que cet Auteur , prévenu de l'idée que le mâle & la femelle ne dévoient pas dif- férer , à un certain point, par la cou- leur des plumes , traduit ici le greyhen par gallina fufca _, poule rembrunie , afin de rapprocher de fon mieux la couleur des plumages *, & qu'enfuite il fe prévaut de fa verlion infidèle , pour établir que cette efpèce eft toute autre que celle de la poule morefque (a) Gefner, de, Jvibus, pag, 477, du petit Tétras, &c. 329 de Turner (b) ^ par la raifon que le plumage de cette poule morefque dif- fère tellement de celui du mâle , qu'une perfonne peu au fait pourroit s'y mé- prendre , & regarder ce mâle & cette femelle comme appartenais à deux efpèces différentes. En effet , le mâle eft prefque tout noir , & la femelle 3 de la même couleur à peu près que la perdrix grife -, mais au fond , c'efl un nouveau trait de conformité qui rend plus complète la reffemblance de cette efpèce avec celle du coq noir d'Ecofïe , car Gefner prétend en effet que ces deux efpèces fe refTem- blent dans tout le refte. Pour moi , là feule différence que j'y trouve , c'efl: que le coq noir d'Ecoffe a de petites taches rouges fur la poitrine , les ailes Se les cuiffes •, mais nous avons vu , dans l'hiftoire du petit tétras à queue fourchue , que , dans les fix premiers mois , les jeunes mâles , qui doivent devenir tout noirs dans la fuite , ont le plumage de leurs mères, c eft-à-dire ? de la femelle -, & il pourroie (h) Idem, Iqcq citato* 3 j o Hljloire Naturelle fe faire que les petites taches rouges dont parle Gefner, ne fuilent qu'un refte de cette première livrée, avant qu'elle fe fût changée entièrement en un noir pur & fans mélange. Je ne far pourquoi M. BrilTon confond cette race ou variété , comme il l'appelle , avec le tetrao pointillé de blanc de M. Iinnzus ( c ) ; puisqu'un des caractères de ce tetrao _, nommé en Suédois , racklekane _, eft d'avoir îa queue fourchue -, & que d'ailleurs M. Linnaus ne lut attribue point de barbillons , randis que îe tétras dont il s'agit Jeu a îa queue pleine _, félon la figure donnée par Gefner } & que , félon fa defcrip- tion , il a des barbillons rouges à coté du bec. Je ne vois pas non plus pourquoi M. Briffon , confondant ces deux races en une feule , n'en fait qu'une variété du petit tétras à queue fourchue , puif- qu'indépendammeht des deux différences que je viens d'indiquer , M. Linnarus dit positivement , que ion tétras pointillé de blanc eft plus rare , plus fauvage y (c) Linnaeus, Fauna Succica ? n,° 167, du petit Tétras , &c. 331 & qu'il a un cti tout autre *, ce qui fup- pofe , ce me femble , des différences plus caractérises , plus profondes que celles qui d'ordinaire çpnftituenc une fimple variété. Il me paroîcroit plus raifornabîe de féparer ces deux races ou efpcces de petit tétras j dont Tune, caradtérifée par la queue pleine êc les barbillons rouges, comprend le coq noir d'Écode & la poule morefque de Turnerj 8c l'autre 3 ayant pour attributs fes petites taches blanches fur la poitrine , 8c Ton cri différent, feroit formée du racklehane des Suédois. Ainfi , l'on doit compter , ce me fémhle , quatre efpèces différentes dans le genre des terras ou coqs de bruyère -7 1.0 le grand terras ou grand coq de bruyère -, i.& le petit terras ou coq de bruyère à queue fourchue -, $,e le racklan ou racklehane de Suède 3 in- diqué par M. Lfnrueus \ 4.° la poule morefque de Turner , ou coq noir d'Ecofïe , avec des babillons charnus des deux côtés du bec 8c ïa queue pleine. 5}i Hijïoire Naturelle Et ces quatre efpèces font toutes originaires & naturelles aux climats du Nord y & habitent également dans les forêts de pins & de bouleaux \ il n'y a que la troifîème a c'efl - à - dire , le rackkhanc de Suède , qu'on pourroit regarder comme une variété du petit tétras^, fi M. Linnams n'afluroit pas qu'il jette un cri tout différent. LE PETIT TETRAS A PLUMAGE VARIABLE. Ï-JI.S grands tétras font communs en Laponie, fur - tout lorfque la difette des fruits dont ils fe nourrirent , ou bien l'excefTive multiplication de l'ef- pèce les oblige de quitter les forêts de la Suède & de la Scandinavie , pour fe réfugier vers le Nord (a) ; cependant on n'a jamais dit qu'on eût vu dans ces climats glacés de grands tétras blancs \ les couleurs de (a) Klein, Hift. Jvium, pag. 173. du petit Tétras y &c. 335 leur plumage font , par ïeur fixité & leur confiftance , à l'épreuve de la rigueur ^ du froid -, il en eft de même des petits tétras noirs, qui font aufïl communs en Courlande & dans le nord de la Pologne , que les grands le font en Lapponie -, mars le dodteur Weigandt^ j le jéfuite Rzaczynski ^c) & M. Klein (d) * aiïurent qu'il 7 a en Courlande une autre efpèce de petit tétras, qu'ils appellent tétras blancs ^ quoiqu'il ne foit blanc qu'en hiver , & dont le plumage devient tous les ans en été d'un brun rougeâtre , félon le docteur Weigandt (e ) ; Se d'un gris- bleuâtre , félon Rzaczynski (f) : ces variations ont lieu pour les mâles comme pour les femelles -, en forte que , dans tous les temps , les individus *^(b) Weigandt , A%es de Breslaw , mois de No- vembre , année 1725. (c) Rzaczynski , Audtuarium , Hifl. nat. Poloiu pag. 422. (i) Klein, Hifl. Avium prodromus ? pag. 173, (e) Weigandt , loco citato. (f) Rzaczynski, loco citato. 334 Hijloire Naturelle des deux fcxes ont exa£ten:ent îes mêmes couleurs : ils ne fe perchent point fur les arbres comme les autres tétras , Se ils fc plaifent , fur-tout dans les taillis épais & les bruyères , où ils ont coutume de choillr , chaque année , un certain efpace de terrein où ils s'affemblent ordinairement , s'ils ont été difperfés par les Chaffeurs, ou par l'oifeau de proie , ou par un orage -, c'eft. - là qu'ils fe réunifient bientôt après , en fe rappelant les uns les autres. Si on leur donne la chaiTe , il faut , la première fois qu'on îes fait partir , remarquer foigneufement la remife ^ car ce fera à coup fur le lieu de leur rendez - vous de l'année , & ils ne partiront pas fi facilement une féconde fois , fur - tout s'ils aperçoivent les ChaiTeurs j au contraire , ils fe ta- piront contre terre , & le cacheront de leur mieux s m^is c'eft alors qu'il effc facile de les tirer. On voit qu'ils diffèrent des tétras noirs , non - feulement par la couleur , 8c par l'uniformité de plumage du maie 8c de la femelle y mais encore par leurs du petit Tétras y &c. $ $? habitudes , puifqu 'ils ne fe perchent point ♦, ils diffèrent aufïï des lagopèdes , vulgai- rement perdrix blanches, en ce qu'ils fe tiennent non fur les hautes montagnes, mais dans les bois & les bruyères-, a ail- leurs on ne dit point qu'ils aient les pieds velus jufques fous les doigts , comme les lagopèdes j & j'avoue que je les aurois rangés plus volontiers parmi les francolins ou attagas , que parmi les tétras, iî je n avoîs cru devoir foumettre mes conjectures à l'autorité de trois Ecrivains infrruits , & parlans d un oîieau • de leur pays. 3 j S Hijloire Naturelle * LA GELINOTTE (a). Planche vu de ce volume. INous avons vu ci-defîus, que , dans toutes les efpèces de terras , la femelle dirîéroit du mâle par les couleurs du plumage, au point que plufîeurs Na- turaliftes r/ont pu croire qu'ils fufTent oifeaux de même efpèce. Schwenck- feld (b) _> & d'après lui Rzaczynski ( cjj eft tombé dans un défaut tout oppofé , en confondant dans une feule & même efpèce , la Gelinotte ou poule des * Voyelles planches enluminées , n.° 474 , le mâle \ y 475 ? la femelle. (a) Gelinotte. En Latin , Gallina corylomm , Gallina fih-atica; & de même en vieux François, Gelinotte des bois ; en Allemand , Hafel-hun , Hafel- henne; enAnglois, Hafel-hen ; en Suédois, Hierpe; en Polonois, Jai^abek. — Gallina corylomm feu Bonofa Alberto difta. Gefner, Avi. pag. 228. — La gelinotte. Brifibn, Ornithol. tomel, page 191. (b) Schwenckield, Aviarium Silefiee , pag. 279. (cj Rzaczynski 3 Au&uariumPohnia:, pag. 366. coudriers * de la Gelinotte. 337 coudriers, & le francolin , ce qu'il n'a pu faire que par une induction forcée & mal entendue, vu les nom- breufes différences qui fe trouvent entre ^ ces deux efpèces. Frifch eft tombé dans une méprife de même genre , en ne faifant qu'un feul oifeau de Yattagen & de fhajd-huhn J qui eft la poule des coudriers ou gelinotte , & en ne donnant , fous cette double dénomination , que l'hiftoire de la ge- linotte , tirée prefque mot à mot de Gefner; erreur dont il auroit dû, ce me fembïe , être préfervé par une autre -, qui lui avoit fait confondre , d'après Charïeton ( dj J le petit tétras avec la gelinotte , laquelle n'eil autre que cette même poule des coudriers: à l'égard du francolin , nous verrons , à fon article, à quelle autre efpèce il pour- roit fe rapporter beaucoup plus naturel- lement. Tout ce que dit Varron de fa poule (d) Charïeton, Exercitationes , pag. 82,11.° 7. O if eaux j Tome III, P 338 Hifloire Naturelle ruftique ou fauvage (e) _, convient très? bien à la gelinotte , & Bélon ne doute pas que ce ne Toit ïa même efpèce (f) , c'étoit , félon Varron , un oifeau d'une très -grande rareté à Rome , qu'on ne pouvoit élever que dans des cages, tant ii étoit difficile à apprivoiser , Se qui ne pondoit prefque jamais dans l'état de captivité ; Se c'eft ce que Bélon Se Schwenckfeîd difent de la gelinotte *, îe premier donne, en deux mots, une idée fort jufte de cet oifeau , & plus com- plette qu'on ne pourroit faire par la de[- cription la plus détaillée, ce Qui fe feindra , » dit -il , voir quelque efpèce de perdrix » métive entre la rouge Se la griie, Se obtenir je ne fais quoi des plumes du » faifan , aura la perfpe.c1:ive de la geli- notte de bois (g).* Le mâle fe diftingue de la femelle par une tache noire très -marquée qu'il a (e) Varron, de Re Rufticâ, lib. III , cap. IX. ffj Béîon, Nature des Oifeaux , page 253. fgj Idem, ibidem* de la Gelinotte. 339 fous la gorge , & par fes flammes ou fourcils , qui font d'un rouge beaucoup plus vif : la grofieur de ces oifeaux en; celle d'une bartavelle -, ils ont environ vingt-un pouces d'envergure, les ailes courtes, & par confisquent le vol pefant* & ce n'ell: qu'avec beaucoup d'effort 8c de bruit qu'ils prennent leur volée ; en récompenfe , ils courent très-vite ( hj* Il y a dans chaque aile vingt -quatre pennes , prefque toutes égales , & feize à la queue. Schwenckfeld dit quinze (ij ; mais c'en: une erreur d'autant plus grof-< ii ère , qu'il n'eft peur- être .pas un feu! oifeau qui ait le nombre des pennes de îa queue impair -y celle de la gelinotte cft traverfée , vers fon extrémité , par une large bande noirâtre, interrompue feu- îement par les deux pennes du milieu : je n'infifte fur cette circonftance , que parce que , félon la remarque de Willuighby , dans la plupart des oifeaux 3 ces deux mêmes pennes du milieu n'ob- (h) Voyei Gefner, page 229. ■ (i) Schwenckfeld, Aviarium $ikfi qu'on appelle avec une efpèce de iirîlec qui imite le cri très -aigu de la femelle j les mâles arrivent à l'appeau en agi- tant les ailes d'une façon fort bruyante ^ ôc on les tire dès qu'ils fe font pofés. Pv 34-6 Hifloire Naturelle Les gelinottes femelles , en leur qua- lité d'oifeaux pefans , font leur nid à terre 5 & le cachent d'ordinaire fous des coudriers ou fous la grande fou- gère de montagne : elles pondent or- dinairement douze ou quinze œufs , Se même jufqu'à vingt , un peu plus gros que des œufs de pigeons (t); elles les couvent pendant trois femaines , Se n'amènent guère à bien que fept ou huit petits ( u ) j qui courent dès qu'ils font éclos , comme font la plu- part des oifeaux brachy pures ou à ailes courus ( x ). (t) Schwenckfeïd, page 278. (u) Léonard Frifch , planche exil. (x) M. de Bomare , qui d'ailleurs extrait & copie ii fidèlement, dit que les gelinottes ne font que deux petits , l'un mâle & l'autre fe- melle. Voyez le Di&ionnaire d'Hiftoire Naturelle , à l'article Gelinotte. Rien n'eft moins vrai , ni même moins vraifemblable : cette erreur ne peut venir que de celle des Nomenclateurs peu inftruits , qui ont confondu la gelinotte avec l'oifeau œnas cî'Ariftote (vinago de Qazaj , quoique ce foient des efpéces très-éloignées , ï'cenas étant du genre des pigeons ? & ne pondant en effet que deux ceufs, de la Gelinotte. 347 Dès que ces petits font élevés , 8c qu'ils fe trouvent en état de voler , les. père & mère les éloignent du canton qu'ils fe font approprié , & ces petits s'aiïortnTant par paires , vont chercher, chacun de leur côté , un afyle où ils puiftent former leur établilfement (y ) * pondre , couver & élever auiïi des petits, qu'ils traiteront enfuite de îa même manière. Les gelinottes fe pîaifent dans les forêts où elles trouvent une nourriture convenable , & leur sûreté contre les oi- feaux de proie , qu'elles redoutent extrê- mement , & dont elles fe garantirent en fe perchant lur les baffes branches (\ ) : .quelques - uns ont dit qu'elles préfé- roîent les forêts en montagnes } mais elles habitent aufîi les forêts en plaines , puifqu'on en voit beaucoup aux envi- rons de Nuremberg : elles abondent aufîi dans les bois qui font aux pieds des Alpes , de l'Apennin & de là (y) Gefner, Ornithologia , pag. 23, (l) Idm, ibifcm, pag, 229 — 230, Pyj 548 Hijloire Naturelle > &c. montagne des Géans en Siléfie , en Pologne , &c. Autrefois elles étoient en Ci grande quantité , félon Varron , dans une petite ifle de la mer Liguf- tique , aujourd'hui le golfe de Gènes, qu'on Tappeloit , pour cette raifon , Xijlc aux gelinottes. "om ■ HT, /y. m.^u/. 349. H^l GELINOTE . 349 mtommamÊsmam LA GELINOTTE d'ÊCOSSE (a), ^ i cet oifeau eft le même que le gallus palujlris de Gefner , comme le -croit M. BrifTon , on peut alîurer que la figure qu'en donne Gefner , n'eft rien moins qu'exacte , puifqu'on nV voit point de plumes fur les pieds, & qu'on y voit au contraire des barbillons rouges fous le bec -, mais aufîi ne feroit-ii pas plus naturel de foupçonner que cette figure eft celle d'un autre oifeau ? Quoi qu'il en foit, ce gallus palujlris _, ou coq de marais j eft un excellent manger , & tout ce qu'on fait de fon hiftoire , c'eft qu'il fe plaît dans les lieux marécageux , comme fon nom de coq de marais le fait allez en- tendre (b). Les Auteurs de la Zoo- logie Britannique prétendent que la (a) Briffon , tome Is page 199 , planche xxiii , figure il (b) Gefner, de JSaturâ Av'wm, page 23. 3 5 o Hijloire Naturelle gelinotte d'EcoiTe de M. Brilïbn , n'efë autre que le ptarmigan dans Ton habic d'été , & que ion plumage devient prefque tout blanc en hiver ( c ) ; mais il faut qu'il perde auiïï en été les plu- mes qui lui couvrent les doigts *, car M. BrifTon dit pofitivement qu'elle n'a de plumes que jufqu'à l'origine des doigts, & le ptarmigan de la Zoologie Britan- nique en a jufqu'aux ongles -, d'ailleurs ces deux animaux , tels qu'ils font repréfentés dans la Zoologie , & dans M. BrifTon , ne fe reilemblent ni par le port , ni par la phyflonomie 5 ni par la conformation totale : quoi qu'il en foit , la gelinotte d'Eco ffe de M. BriiTon eft un peu plus grotte que la nôtre y Se a la queue plus courte j elle tient de la gelinotte des Pyrénées par la longueur de fes ailes , par fes pieds , garnis antérieurement de plumes juf- qu'à l'origine des doigts , par la longueur du doigt du milieu , relativement aux deux latéraux , & par la brièveté du doigt de derrière *, elle en dirlère en, ce que fes doigts font fans dentelures ? (c) Brkifcb Zoology, j>age 86% de la Gelinotte , &c. 351 êc fa queue fans fes deux plumes lon- gues & étroites , qui font le caractère le plus frappant de la gelinotte des Pyrénées. Je ne dis rien des couleurs du plumage -, les figures les reprélente- ront plus exactement aux yeux que ma defctrption ne pourroit les peindre à Tefprit : d'ailleurs rien de plus incertain ici, pour caraôtirifer les efpèces , que les couleurs du plumage , puifque ces cou- leurs varient considérablement d'une fai- fon à l'autre ? dans le même individu» 3J2 Hijloire Naturelle * LE GANGA, VULGAIREMENT LA GELINOTTE DES PYRÉNÉES fy Planche Vlli de ce volume. X uoique les noms ne foient pas les chofes , cependant il arrive fi fouvent , & fur-tout en Hiftoire Naturelle , qu'une erreur nominale entraîne -une erreur réelle, qu'on ne peut, ce me femble, apporter trop d'exactitude à appliquer 14 Voye.\ les planches enluminées mâle; & n.° 106 , la femelle. (a) Gelinotte des Pyrénées. En Efpagne , Ganga ; en Turquie, Cara. — Perdrix de Damas ou de Syrie. Bel' n , Hifi. Nat. des Oifeaux , pag. 259 ; & Portraits dVifeaux, page 63 . a. — Petit Coq de Bruyère aux deux aiguilles à la queue. Edwards , Glanures , flanche ccxlix , avec une très -bonne figure coloriée. du Ganga , &c. 55$ toujours à chaque objet les noms qui lui ont été impofés \ & c'efl: par cette raifon que nous nous Tommes fait une loi de redifîer, autant qui! feroit en nous , îa dilcordance ou le mauvais em- ploi des noms. M. BriiTon , qui regarde îa perdrix de Damas ou de Syrie de Bélon ( b ) ^ comme étant de îa même efpèce que fa gelinotte des Pyrénées , range parmi les noms donnés en différentes langues à cette efpèce 3 le nom grec S^srs'pJ/ç 5 8c cite Bélon , en quoi il fe trompe doublement ; car i.° Bélon nous ap- prend lui-même que Toifeau qu'il a nommé perdrix de Damas ^ efb une ef- pèce différente de celle que les Auteurs ont appelée fyroperdix _, laquelle a le plu- mage noir & le bec rouge ( c ) ; i.° en écrivant ce nom fyroperdix en caractères grecs , M. Brifïon paroît vouloir lui donner une origine grecque -, & cepen- dant Bélon dit expreffément que c'eft (b) Briffbn , tome I , page 195 ? Genre v? Efpèce 4. fcj Bélon , Nature, des Qifeaux > page 258, 3 $ 4 Hijloire Naturelle un nom latin (d) : enfin il eft difficile de comprendre les raifons qui ont porté M. Brriîon à regarder Yœnas d'Ariftote , comme étant de la même efpèce que la gelinotte des Pyrénées j car Ariftote mec ion ■ œnas ô qui en; îe vinago de Gaza, au nombre des pigeons, des tourterelles, des ramiers ( en quoi il a été fuivi par tous lesArabes); & il affure pofitive- ment qu elle ne pond , comme ces oi- feaux, que deux œufs à la fois (e): or nous avons vu ci-deiïus que les gelinottes pondoient un beaucoup plus grand nombre d œufs ; par conféquent Yœnas d'Ariftote ne peut être regardé comme une gelinotte des Pyrénées ; ou , Ci Ton veut abfoîument qu'il en foit une , il faudra convenir que la gelinotte des Pyrénées n'eft point une gelinotte. Rondelet avoit prétendu qu il y avoit erreur dans le mot grec ôW , & qu il falloit lire inas j dont la racine fignifie fibre _> filets & cela parce que cet oifeau (d) Bélon, Rature des Oifcaux , page 258. fej Ariftote, Hift. Jnimal. XXX>. VI, cap. (j du Ganga , &c. 355 a , dit - il , la chair , ou plutôt îa peau il fibreufe & fî dure , que, pour la pouvoir manger , il faut l'écorcher (f) ; mais s'il étoit véritablement de la même efpèce que la gelinotte des Pyrénées , en adoptant la correction de Rondelet, on pourroit donner au mot inas une explication plus heure-ufe Se plus ana- logue au génie de la langue grecque, qui peint tout ce qu'elle exprime , en lui faifant défigner les deux filets ou- plumes étroites que les gelinottes des Pyrénées ont à la queue , & qui font Ton attribut caraclériflique -, mais mal- heureufement Aridote ne dit pas un mot de ces filets , qui ne lui aur oient pas échappé , Se Béion n'en parle pas non plus dans îa defeription qu'il fait de fa perdrix de Damas : d'ailleurs îe nom d'oi/ias ou vïnago convient d'autant mieux à cet oifeau , que , félon la remarque d'Ariftote, il arrivoit tous les ans en Grèce au commencement de l'automne (g ) * (f) Gefner ? de Naturà Avium , pag. 307. (g) Ariftote? ffljl. 4nim«l. ftb.VIII, cap. in* 3 ; 6 Hijtcïre Naturelle qui efl le temps de ïa maturité des raifinsj comme font , en Bourgogne , certaines grives que , par cette raifon , on appelle , dans le pays , des vinettes. Il fuit de ce que je viens de dire , que ie fyroperdix de Eélon , & Yœnas cf Ariftote , ne font point des gangas ou gelinottes des Pyrénées , non plus que Yalchatcij Yalfuachat _, la filacotona j qui paroiflTent être autant de noms arabes de l'œnas 3 & qui certainement délignent un oiieau du genre des pi- geons (h). Au contraire Toifeau de Syrie , que M. Edwards appelle petit coq de bruyère j ayant deux filets à la queue fijj & que les Turcs nomment cata _, eft exactement le même que la gelinotte des Pyrénées : cet Auteur dit que M. Shaw l'appelle kittavlah j 8c qu'il ne lui donne que trois doigts à chaque pied -, mais il excufe cette erreur, en ajoutant que le doigt poftérieur avoit pu échapper à M. Shaw , . (h) Vbye% Gefnerj de Naturâ Avium , p. 307. & 311. (i) Edwards, Glanurzs, planche XLix. du Ganga y &c. 3^7 à caufe des plumes qui couvrent les jam- bes j cependant il venoit de dire plus haut , dans fa defcription , 8c on voit par fa figure, que c'eft le devant des jambes feulement qui eft couvert de plu- mes blanches , femblabïes à du poil : or il eft difficile de comprendre comment le doigt de derrière auroit pu fe perdre dans ces plumes de devant -, il étoit plus naturel de dire qu'il s'étoit dérobé à M. Shaw par fa petiteiïe -, car il n'a pas en effet plus de deux lignes de longueur : les deux doigts latéraux font aufîî fore courts , relativement , au doigt du milieu , & tous font bordés de pe- tites dentelures , comme dans le tétras. Le ganga, ou la gelinotte des Pyrénées, paroît avoir un naturel tout différent de celui de la vraie gelinotte ; car, i.° il a les ailes beaucoup plus longues, relati- vement à fes autres dimenfions : il doit donc avoir le vol ou rapide ou léger , & conféquemment avoir d'autres habitudes , d'autres mœurs qu'un oifeau pefant*rcar l'on fait combien les mœurs 8c le naturel d'un animal dépendent de fes facultés j 358 Hifloire Naturelle 2.0 nous voyons , par les obfervations du Docteur Rouilèl , citées dans la defcrip-- tion de M. Edwards , que cet oifeau qui vole par troupes, fe tient, la plus grande partie de Tannée, dans les déferts de îa > Syrie , & ne fe rapproche de la ville d'Alep , que dans les mois de Mai & de Juin , & lorfquil eft contraint, par la foif, de chercher des lieux où il y a de l'eau : or nous avons vu , dans rhiftoire de la gelinotte, que c'eft un oifeau fcrr peureux , 8c qui ne fe croit en sûreté, contre la ferre de l'autour , que lorfqu'il eil dans les bois les plus épais -, autre différence , qui n'eft peut-être qu'une fuite de la première , 8c qui , jointe à plufieurs autres différences de détail , fa- ciles à faiiir par la comparaifon des ngures 8c des deferiptions , pourroit faire dou- ter , avec fondement , fi Ton a eu raifon de rapporter à un même genre des na- tures auflî diverfes. Le ganga , que les Catalans appellent auffi perdix de Gar- rira ( k) _, eft à peu près de la grofleur (h) Earrère, Omithol. Clafî". IV, Genre xv, Efpèce 5. du Ganga , &c. 3^9 .d'une perdrix grife > elle a le tour des yeux noir , & point de flammes ou four- cils rouges au - deiîus des yeux -, le bec prefque droit , l'ouverture des narines à la bafe du bec fupérieur , & joignant les plumes du front , le devant des pieds couvert de plumes jufqu'à l'origine des doigts , les ailes allez longues , la tige des grandes plumes des ailes noire, les deux pennes du milieu de la queue une fois plus longues que les autres, & fort étroites dans la partie excédante -, les pennes latérales vont toujours en s'accourciilànt de part Se d'autre jufqu'à la dernière ( l). Il eft à remarquer que de tous ces traits, qui caraftérifent cette prétendue gelinotte des Pyrénées , il n'y en a peut-être pas un feul qui con- vienne exa&ement à la gelinotte propre- ment dite. La femelle eft de la même grofleur que le mâle -, mais elle en diffère par fon plumage , dont les couleurs font moins belles , & par les filets de fa (l) Foyei les deferiptions de M.rs Edwards & Bîiflbn , tant pour ce qui précède que pour ce qui fuit. 360 Hijîoire Naturelle queue , qui font moins longs : il paioît que le mâle a une tache noire fous la gorge , & que la femelle , au lieu de cette rache , a trois bandes de la même couleur , qui lui embrailènt le cou en forme de collier. Je n'entre pas dans ïe détail des couleurs du plumage , la figure enlu- minée les préfente avec exactitude i elles fe rapportent afTez avec celles de Toifeau connu à Montpellier fous le nom cXangels & dont Jean Culmann avoir communiqué la defcription à Gefner (m) ; mais les deux longues plumes de la queue ne paroifïent point dans cette defcription , non plus que dans la figure que Rondelet avoit en- voyée à Gefner de ce même angel de Montpellier , qu'il prenoir pour Yœnas d'Àriftote ( n) ; en forte qu'on (m) Plumis ex fufco colon in nigrum vergentibus , 6* luteis in ruffum > dit Gefner , en parlant de i'angel , page 307. Olivaceo , ftavicame nigro , & rufo varia , dit M. BrhTon, en parlant de la gelinotte des Py» rénées. (n) Voye\ Gefner , de Naturâ Jvium f p. 307. eft du Ganga , &c. 3 6 1 eft fondé à douter de l'identité de ces deux efpèccs ( i'angel & le ganga), mal- gré la convenance du lieu & celle du plumage , à moins qu'on ne fuppofe que les fujets décrits par Culmann, & deiïinés par Rondelet , étoient des fe- melles , qui ont les filets de la queue beaucoup plus courts , & par conféquent moins remarquables. Cette efpèce fe trouve dans la plu- part des pays chauds de l'ancien con- tinent -, en Efpagne , dans les parties méridionales de la France, en Italie, en Syrie , en Turquie & Arabie , en Barbarie , & même au Sénégal -, car l'oifeau repréfenté fous le nom de ge- linotte de Sénégal* j n'eft qu'une variété du ganga ou gelinotte des Pyrénées , il eit^ feulement un peu plus petit; mais il a de même les deux longues plumes ou filets à la queue , les plumes latérales toujours plus courtes par degrés, à mefure qu'elles s'éloignent de celles * Voyez hs planches enluminées, n.° 130. Oifeaux j Tome III. Q 362 Hijloire Naturelle du milieu , les ailes fort longues , les pieds couverts pardevant d'un duvet blanc , le doigt du milieu beaucoup plus long que les latéraux , & celui de derrière extrêmement court ; enfin point de peau rouge au - deiïus des yeux, & il ne diffère du ganga d'Eu- rope que par un peu moins de grof- feur & un peu plus de rougeâtre dans ïe plumage -, ce n'eft donc qu'une va- xiéré dans la même efpèce , produite par l'influence du climat ; & ce qui prouve que cet oifeau eft très -diffé- rent de la gelinotte , & doit par con- féquent porter un autre nom , c'eft qu'in- dépendamment des caractères diftinétirs de fa figure , il habite par -tout les pays chauds , & ne fe trouve ni dans les climats froids , ni même dans les tem- pérés ; au lieu que la gelinotte ne fe trouve en nombre que dans les climats froids. C'eft ici le lieu de rapporter ce que M. Shaw nous apprend du kitcaviah au Ganga y &c. 565 Ou gelinotte de Barbarie ( 0 ) j Se qui eft tout ce qu'on en fait, afin que ie lecteur puilTe comparer fes qua- lités avec celles du ganga ou geli- notte des Pyrénées, Se juger ii ce font en effet deux individus de la même efpèce. ce Le kittaviah , dit - il , efl un of- feau granivore , & qui voie par ce troupes : il a la forme Se ïa taille ce d'un pigeon ordinaire , ïes pieds ce couverts de petites plumes , Se point ce de doigt poftérieur j il Te plaît dans ce les terreins incultes Se dénies -, lace couleur de Ton corps eft un brun- ce bleuâtre tacheté de noir -, il a le» ventre noirâtre , Se un croifTant Jaune «s fous la gorge ; chaque plume de ce la queue a une tache blanche à es ion extrémité , Se celles du milieu ce (0) Nota. M. Shaw a cru qu'on pouvoit lui donner le nom de lagopus d'Afrique, quoiqu'il n'ait pas ïes pieds velus pardenbus comme ïe véritable ïagopède. Travds ..... of Barbary and ths, Levant, pag. 253. 3^4 Hifloire Naturelle , &c. v> font longues & • pointues , comme » dans le merops ou guefpier : du refte » fa chair eft rouge fur la poirrine \ » mais celle des cuiftes eft blanche , » elle eft bonne à manger ôc de facile digeftion. » Vem.m. PL rm.paa. 304. liE (xANG^V 36; UATTAGAS (a). Vj et oiseau eftïe francolin de Bélon, qu'il ne faut pas confondre , comme onc fait quelques Ornitholognles , avec le francolin qu'a décrit Oiina ( b ) ; ce font deux oifeaux très - dirïérens , foit par la forme du corps , foit par les habi- tudes naturelles : le dernier fe tient dans les plaines & les lieux bas -, il n'a point ces beaux fourcils couleur ■ de feu , qui donnent à l'autre une phy&ono- mie fi diftinguée -, il a le cou plus court , le corps plus rama-Té , les pieds (a) En Grec, At7^*?; en Latin, Attagas ou Attagen ; en Anglois , Redgame. — Attagen. Gefner , Avi. pag. 225. — Francolin. Bélon, Hifi. Mat. des Oifeaux , page 241. — Coq de Marais. Albin , tome 1, planche xxiil , le mâle ; & planche XXIV, la femelle. — Attagen, Frifch , planche ex 11 , a"vec une figure bien coloriée de la femelle. — La Gelinotte huppée. Briffon, tome I , page 209. (b) Qlina, Uccellaria, pag. 33. 3 6 6 Hijloire Naturelle rougeâtres, garnis d'éperons & fans plu- mes , comme les doigts fans dentelures , c'eft - à - dire , qu'il n'a prefque rien de commun avec le francolin dont il s'agit ici y 8c auquel , pour prévenir toute équi- voque , je conferverai le nom ÛAttagas j qui lui a été donné , dit -on , par onoma- topée , 8c d'après fou propre cri. Les Anciens ont beaucoup parlé de Yattagas ou attagen ( car ils emploient indifféremment ces deux noms ). Ale- xandre Aiyndien nous apprend , dans Athénée ( c) , qu'il étoit un peu plus gros qu'une perdrix , 8c que Ton plu- mage « dont le fond tiroit au rougeatre , étoit émailié de plusieurs couleurs. Arif- tophane avoit dit à peu près la même chofe*, mais Ariftote , félon Ton excel- lente coutume de faire connoître un objet ignoré , par fa comparaifon avec des objets communs , compare le plu- mage de Fattagen avec celui de la bé- calle {(Tv.QKcïïcf.1) (d). Alexandre Myndien (c) Athénée, lib. IX. (à) Ariftote , Hift. 49'mà* Ub. IX , cap. xxyi. deVAttagas. $6j ajoute qu'il a îes ailes courtes &> le vo! pefant; & Théophrafte obferve qu'il a la propriété qu'ont tous les oifeaux pe- fans , tels que la perdrix , le coq , le faifan , &c. de naître avec des plumes ," & d'être en état de courir au moment qu'il vient d'écîorre : de plus , en fa même qualité d'oifeau pelant , il efl encore pulvéràteur oc frugivore (e)3 vivant de baies 8c de grains qu'il trouve 9 tantôt fur les plantes mêmes , tantôt en grattant la terre avec fes ongles (f) ; & 3 comme il court plus qu'il ne vole , on s'eft avifé de le chaiTer au chien courant, & on y a réuffi (g). Pline , Étien & quelques autres , dî~ fent que ces oifeaux perdent la voix est, fe) Nota* Les Anciens ont appelé pulveratrias* îes oifeaux qui ont Pinfîind de gratter îa terre , d'é- lever ïa pouffière avec leurs ailes ; & en fe poudrant T pour ainiî dire , avec cette pouffière , de fe dé- livrer de la piqûre des infe&es qui les tourmen- tent, de même que les oifeaux aquatiques s'en délivrent en arrofant leurs plumes avec de l'eau* (f) Ariftote , Hifi. Animal. ïib. IX , cap. XLIX. (g) Oppien, in Ixenticis. Cet Auteur ajoute u'iîs aiment les cerfs, & qu'ils ont au contraire e l'antipathie pour les coq3. Qir l 3 tandis que toutes les latérales font noires-, les ailes font fort courtes, elles ont chacune vingt- quatre pennes, & ceà la troiiîème , à compter du b ut de l'aile , qui eft la plus longue de routes j les pieds font revkus de plumes jufqu'aux doigts, félon M. Briffon , & jufqu'aux ongles , félon Willulghby : ces ongles lont noirâtres, ainiï que le bec *, les doigts (a) Britifch Zooïogy , pag. 85. (b) Aldrovande , de Avibus , tome II , pag. 76, 5 74 Hljlcire Naturelle gris-bruns 5 & bordés dune bande mem- braneufe étroite & dentelée. Bélon afliire avoir vu , dans le même temps , à Ve- fiife , des francoiins ( ceft ainii qu'if nomme nos attagas ) > dont le plumage etoit tel qu'il vient d'être dit , & d'autres qui étoient tout blancs , & que les Italiens appeloient du même nom de francoiins , ceux-ci reffembloient exa&ement aux premiers , à l'exception de la couleur ; &, d'un autre côté, ils avoient tant de rapport avec la perdrix blanche de Savoie , que Bélon les regarde comme apparte- nais à l'efpèce que Pline a déhgnée fous le nom de lagopus altéra (c): félon cette opinion , qui me paroît fondée , I attagen de Pline feroit notre attagas à plumage varié * & la féconde efpèce de lagopus feroit notre attagas blanc , qui «Mère de l'autre attagas par la blancheur de fon^ plumage , & de la première eipece de lagopus y appelée vulgairement perdrix blanche 3 foit par fa grandeur y foit par fes pieds , qui ne font pas velus en - de flous. (c) Bélon j Nature des Qîftaux , page 242» deVAttagas. 37 f Tous ces oifeaux , félon Bélon , vivent de grains & d'infectes -, la Zoologie Bri- tannique ajoute les fommités de bruyère ( d) ■& les baies des plantes qui croiffent fur les montagnes. L'attagas e;t en effet un oifeau de montagne -, Willulghby aflure qu'il de(- cend rarement dans les plaines 8c même fur le penchant des coteaux (e ) j & qu'il ne fe plaît que fur les fommets les plus élevés -, on le trouve fur les Pyré- nées , les Alpes , les montagnes d'Au- vergne , de Dauphiné 3 de Suifle 5 du pays de Foix , d'Êfpagne 9 d'Angleterre:, de Sicile , du pays de Vicenfe , dans la Lapponie (f) j enfin fur l'Olympe , en Phrygie , où les Grecs modernes l'appel- lent , en langue vulgaire , tagïnari (g) * mot évidemment formé de Tèt-^pw^oir, que l'on trouve dans Suidas , & qui vient lui- même d'attagen ou attagas j lequel eft îe nom primitif. (âj Britifch Zooîogy , pag. S g. (e) Willuîghby, Gmithologia , pag. 128, (f) Voyez Klein, Hift. Avium , pag. 173, (g) Béïon r Nature des Oifeaux , page 242^ $j6 Hijloire Naturelle Quoique cet oifeau foie d'un naturel très-fauvage , on a trouvé , dans l'iile de Chypre , connue autrefois à Rome , le fecret de le nourrir d.ms des volières (h) > li toutefois i'oifeau dont parle Alexander Benediclus eil notre attagas -, ce qui m'en feroit douter , e'eft que le francoiin repréfenté planche CCXLVI d'Edwards , & qui venait certainement de Tille de Chypre , a Beaucoup moins de rap- port- au notre qu'à celui d'Oiina , & que nous favons d'ailleurs que celui-ci pouvoir s'élever 8c fe nourrir dans les volières (i). Ces attagas domeftiques peuvent être plus gros que les fauvages ; mais ceux-ci font toujours préférés pour le bon goût de leur chair -, on Les met au-deffys de la perdrix -, à Rome , un francollno s'ap- pelle , par excellence , un morceau de Cardinal ( k ): au refte, c'en: une viande qui fe corrompt très-promptement , & qu'il eM: difficile d'envoyer au loin ; auilî (h) Gefner , Nature Avïum , pag. 227. (i) Olina, Ucceliaria, pag. 33, (k) Gefner , page 228. de VAttagas. 377 les Chaffeurs ne manquent-Hs pas, dès qu'ils les ont tués., de les vider , & de leur remplir le ventre de bruyère verte (l).- Pline dit la même chofe du lago- pus (m) j & il faut avouer que tous ces oifeaux ont beaucoup de rapport les uns avec les autres. Les attagas fe recherchent & s'accou- plent au printemps : la femelle pond fur la terre , comme tous les oifeaux pefans ; fa ponte eft de huit ou dix œufs, aigus par l'un des bouts, longs de dix -huit ou vingt lignes , pointillés de rouge- brun , excepté en une ou deux places aux- environs du petit bout : le temps de l'incubation eft d'une vingtaine de jours \ la couvée refte attachée à la mère & la fuit tout l'été *, l'hiver , les petits ayant pris la plus grande partie de leur accroiiîement , fe forment en troupes de quarante ou cinquante , & deviennent iingulièrement fauvages : tant qu'ils font jeunes , ils font fort fujets à avoir les (l) Wiliuïghby , (m) Pline, lib, X, cap. xivuu 578 HîJIoire Naturelle inteftins farcis de vers ou lombrrïs ; quel- quefois on les voit voltiger , ayant de ces fortes de vêts , qui leur pendent de l'anus de la longueur d'un pied (n), Préfentement , fî Ton compare ce que les Modernes ont dit de notre attagas avec ce que les Anciens en avoient re- marqué , on s'appercevra que les pre- miers ont été plus exacts à tout dire -, mais en même temps on reconnoîtra que les principaux caractères avoient été très-bien indiqués par les Anciens*, &; Ton conclura, de la conformité de ces caractères , que Yattagen des Anciens êc notre attagas ., font un feul & même cifeau. Au refte , quelque peine que j'aie prife pour démêler les propriétés, qui ont été attribuées pêle-mêle aux dif- férentes efpèces d'oifeaux auxquelles on a donné le nom de francolin _> & pour (n) WflïttïgM>y , à Vcndroit cité ; & Britifch Zoology , pag. 86. Mais re feroit- ce pas la verge de ces oifeaux qu'on auroit prife pour un ver, comme j'ai vu des poulets s'y méprendre à l'égard de la verge des canards ? de VAttagas. 379 ne donner à notre attagas que celles qui lui convenoient réellement , je dois avouer que je ne fuis pas sûr d'avoir toujours également réuffi à débrouiller ce cahos , Se mon incertitude , à cet égard , ne vient que de la licence que fe font donnée plufieurs Naturalises , d'appliquer un même nom à des eipèces différences, Se pluiieurs noms à la même eipèce-, licence tout-à-fait déraifonnable, & contre laquelle on ne peut trop s'é- lever , puifqu'elle ne tend qu'à obfcurcir îes matières , & à préparer des tortures infinies à quiconque voudra lier Tes pro- pres connoiflances & celles de Ton (iècïe , avec les découvertes des hècles précédens. 380 Hijloire Naturelle L'ATTAGAS BLANC. Vj et oiseau fe trouve fur les mon- tagnes de SuifTe oc fur celles qui font -autour de Vicenfe : je n'ai rien à ajouter à ce que j'en ai dit dans l'hiftoire de l'attagas ordinaire , (înon que l'oiieau dont Gefner a fait la féconde efpèce de lagopus ( a ) _, me lembie être un de ces attagas blancs , quoique , dans fon plu- mage , le blanc ne ioit pur que fur le ventre & fur les ailes , & qu'il foit mêlé plus ou moins de brun & de noir fur le refle du corps ; mais nous avons vu ci-deflus que , parmi les attagas, les mâles avoient moins de blanc que les femelles •, de plus , on fait que la cou- leur des jeunes oiieaux , & fur -tout des oifeaûx de ce genre , ne prend guère fa confiftance qu'après îa première année *, & , comme d'ailleurs tout le refte de la defcription de Gefner femble fait pour caracxériler un attagas, fourcils rouges, (a) Gefner, Jlterum Lagopodis gcnus dejlvibut, pag- 579- de V Attagas y &c. 381 mis, arrondis & faillans -, pieds velus jus- qu'aux ongles , mais non pardeiïous j bec court & noir j queue courte audl -, habi- tation iur les montagnes de SuiîTe , Sec. je penfe que l'oifeau, décrit par Gelner , étoit un attagas blanc , & que c'étoit un mâle encore jeune, qui n'avoir pas pris tout fon accroi(Tement , d'autant qu'il ne pefoit que quatorze onces au lieu de dix -neuf, qui eft le poids des attagas ordinaires. J'en dis autant, & pour les mêmes raïfons , de la troifîème efpèce de lagopus de Gefner (b) j & qui paroît être le même oifeau que celui dont le Jéfuite Rzaczynski parle , fous le nom Polonois de Parowa (c). Ils ont tous deux une partie des ailes & le ventre blancs , le dos & le refte du corps de couleur va- riée *, tous deux ont les pieds velus , le vol pefant, la chair excellente, & fonrde ia grofTeur d'une jeune poule. Rzaczynski en reconnoît deux efpèces *, l'une plus ( h ) Gefner , Alterum Lagopodis genus de Avibus , P*g. 579- (c) Rzaczynski, Mctitarium Pofonia, pag. 410 & 411» 382 Hijîoire Naturelle > &c. petite , que j'ai ici en vue *, l'autre plus grofle , & qui pourroit bien être une efpcce de gelinotte : cet Auteur ajoute qu'on trouve de ces oifeaux parfaitement blancs dans le Palatinat de Novogtod. Je ne range pas ces oifeaux parmi les lagopèdes , comme a fait M. Briiïon de la féconde & de la troifième efpèce de lagopus de Gefner , parce qu'ils ne font pas en effet lagopèdes , c'en: -à- dire , qu'ils n'ont point les pieds velus pardef- fous , & que ce caractère eft d'autant plus décifif qu'il eft plus anciennement reconnu , & que par conféquent il paroît avoir plus de coniiftance. 3^3 * LE LAGOPÈDE (a). Planche IX de ce volume. Kj et oiseau e(t celui auquel on a donné le nom de Perdrix blanche _, mais très - improprement , puifque ce n'efl point une perdrix, Se qu'il rieft blanc que pendant l'hiver, & à caufe du grand froid auquel il eft expofé, pendant cette faifon , fur les hautes montagnes des pays du Nord , où il Ce tient ordinairement. Ariftote , qui ne connoiflbit point le lagopède , favoit que les perdrix , les cailles , les hirondelles ? les moineaux , * Voye\ les planches enluminées , n.° 129, avec fou plumage d' hiver ; & n.°494., avec fou plumage d'été. (a) Le Lagopède. — Lagopus. Gefner , Avi. pag. 576. Perdix aljafive Lagopus. Aîdrovande , Avu tom. II , pag. 143. — Perdrix blanche. Bélon ? JLifc. Naî. des Oifeaux , pag. 259. — Lagopus , Triich , planches ex & cxi /avec des figures colo- riées. — La Gelinotte Manche. Briflbri , Oniithologia,, iom.1, pag. 216. 384 Hifloire Naturelle les corbeaux & même les lièvres , les cerfs & les ours éprouvent > dans les mêmes circonftances , le même chan- gement de couleur ( b ). Scaliger y ajoute les aigles , les vautours , les éper- viers , les milans , les tourterelles , les renards (~cj ; & il feroit facile d'alon- ger cette lifte du nom de plufieurs oi- feaux & quadrupèdes , fur lefquels le froid produit ou pourroit produire de femblables effets -, d'où il fuit que la couleur blanche eft ici un attribut variable , & qui ne doit pas être em- ployé comme un caractère diftinctif de ï'efpèce dont H s'agit \ & d'autant moins que plufieurs eipèces du même genre, telles que celles du petit tétras blanc , félon le Dodeur Wergandt (d) &Rzaczynski(/£y>J & de Tattagas blanc, (h) Ariftote, de Coloribus , cap. VI ; & Hijl Animal, lib. III , cap. xn. ( c) Scaliger , Exercitationes in Cardanum , fol. 88 & $9. (d) Voyei A des de Breflaw , Novembre 1755 , Clajfe IV; art. vu , page 30 & fuivames. fej B-zaczynski, Auctuarium PolmU , pag. 421. félon du Lagopède. 3 S y félon Béion ( f) j font fujettes aux mêmes variations dans la couleur de leur plumage 5 & il eit étonnant que Frifch ait ignoré que Ton francolin blanc de montagne , qui efl notre lagopède î y (ût auili fujet j ou que l'ayant fu , il n'en ait point parlé : il dit feulement qu'on lui avoir rapporte qu'on ne voyoic point en été des francolin s blancs -, 8c plus bas 3 il ajoute qu'on en avoir quel- quefois tiré (fans doute en été) qui avoient les ailes 8c le dos bruns , mais qu'il n'en avoir jamais vu ; c étoit bien le lieu de dire que ces oifeaux n écoienc blancs que l'hiver , &c. (g)m J'ai dit qu'Àriilote ne connoifïbic pas notre- lagopède j &5 quoique ce foit un fait négatif , j'en ai la preuve pofitive dans ce paflage de fon hiftoire des animaux, où il allure que le lièvre eft le feul animal • qui ait du poil fous les pieds (h) ; certainement s'il eût (f) Béion , Nature des Oifeaux; page 242, (g) Léonard Frifch , planches ex 6* exu (h) Ariftoté, l'a. III, cap. xii, • Oifeaux j Tomellli Ji 3 8 6 Hifloire Naturelle connu un oifeau qui eût teu aufïï du poil Tous les pieds , il n'auroit pas manqué d'en faire mention dans cet endroit , où il s'occupoit en général , ielon fa manière , de la comparaifon des parties correfpondantes dans les animaux , & par coniéquent des plumes des oifeaux , ainfî que des poîis des quadrupèdes. Le nom de lagopède , que je donne à cet oifeau , n'eft rien moins qu'un nouveau nom -, c'eft au contraire celui que Pline & les Anciens lui ont donné (i) j qu'on a mal - à - propos appliqué à quelques oifeaux de nuit , lefqueîs ont le defïus , & non le deC- fous des pieds garnis en plumes (k) ; mais qui doit être confervé exclufive- ment à l'efpèce dont il s'agit ici , avec d'autant plus de raifon , qu'il ex- prime un attribut unique parmi les (i) Pline, Hifl. imtAih. X, cap. xlviii. (k) Si mens auritâ gaudet Lagope flacens. Martial. Il eft vifible que le poè'te entend parler du duc dans ce paflage ; mais le. duc n'a pas le pied veiu par- deiious. du Lagopède. 387 oifeaux , qui eft . d'avoir , comme îe ïièvre, le de(Tbus des pieds velus ( l). Pline ajoute à ce caractère diftin&if du lagopus ou lagopède , fa grofteur , qui eft celle d'un pigeon , fa couleur , qui eft blanche, îa qualité de fa chair, qui eft excellente ,. fon féjour de pré- férence , qui eft le fommet des Alpes : enfin fa nature , qui eft d'être très- fauvage & peu fufceptible d'être appri- voifé -, il dim par dire que fa chair fe corrompt fort promptement. L'exactitude laborieufe des Modernes â complété cette defcription à Tan- tique y qui ne préfente que les maiTes principales } le premier trait qu'ils ont ajouté au tableau , 8c qui n'eût point échappé à Pline , s'il eût vu l'oifeau par lui-même, c'eft cette peau glan- duleufe qui lui forme , au-deftus des yeux, des efpèces de fourcils rouges*, mais d'un rouge plus vif dans le mâle que dans la femelle j celle - ci eft aufïï plus petite , & n'a point fur la tête (l ) Voye\ Eélon , Nature des Oifeaux , page 259 , Willuighby, page 127 j & Klein, Prodrom. HiJI\ 388 Hifoire Naturelle îes deux traits noirs qui , dans îe mâle i vont de la bafe du bec aux yeux , Se même au-delà des yeux en fe dirigeant vers îes oreilles : à cela près , ïe maie & la femelle fe reiTemblent dans tout îe relie, quant à la forme extérieure -, & tout ce que j'en dirai dans îa fuite fera commun à l*un & à l'autre. La blancheur des lagopèdes n'eft. pas univerfelîe , & fans aucun mélange dans le temps même où ils font îe plus blancs , c'eit- à-dire , au milieu de l'hiver -, la principale exception en: dans les pennes de la queue , dont îa plupart font noires , avec un peu de blanc à îa pointe *, mars il paroît , par les deferiptions , que ce ne font pas conflamment îes mêmes pennes qui font de cette couleur. Linnarus, dans fa Faùna Suecica j dit que ce font îes pennes du milieu qui font noires (m) i il dît ( n) ± (m ) Tetrao re&ncibus albis , intemediis nigrh , apict afê/s.Faun.Suec. n.° 169. (n) Tetrao pedibus lanatis , remigibus albis, rz&ri- ifbusirigris, apice albis, ihiermediis mis albis. Syit^ *at.edit.X, pag. i59,n.°9i? ais.iv- du Lagopède. 589 avec M. JkHïbn & Willulghby (o), que ces mêmes pennes font blanches Se les latérales noires *, tous ces Na- tLiraliRes n'y ont pas regardé d'affez près : dans ïe fujet que nous avons ùAt deffinèr , & dans d'autres que nous avons examinés , nous avons trouvé la queue compofée de deux rangs de plumes l'un fur l'autre -, celui de deffus blanc en entier , & celui de deffous noir 3 ayant chacun quatorze plumes ( pj* Klein parle d'un oiféaia de cette efpèce qu'il avoit reçu de PruîTe , le 10 janvier 1747, & qui étôit entièrement blanc , excepté le bec , la partie inférieure de la queue Sz la tige de fix pennes de l'aile. Le Pafteur Lappon Samuel Rhéen , q^ïi cite , allure que fa poule de neige (0) Willulghby , page 127 , n.° 5. (p) Nota. On ne peut compter exa&ement ïe nombre de ces plumes , qu'en déplumant , comme nous l'avons fait , ïe deffus & le deffous du croupion de ces oifeaux ; & c'eft ainfi que nous nous fornmei allure qu'il y en a quatorze blanches en deffus & qua- torze noires en deflbus, Pv iij 5 5)0 HiJIoire Naturelle qui efr. notre îagopède , n'avoir pas une feule plume noire , excepté la femelle qui en avoit une de cette couleur à chaque aile (q) ; & la perdrix blanche dont parle Gefner (r) > étoit en effet toute blanche , excepté autour des oreilles , où elle avoir quelques marques noirçs \ les couvertures de la queue -, qui font blanches & s'étendent par toute fa longueur , & recouvrent, les plumes noires , ont donné lieu à la plupart de ces méprifes. M. Briiïon compte dix-huit pennes dans la queue , tandis que Willuîghby & la plupart des autres Ornithologïftes n'en comptent que feize , & qu'il n'y en a réellement que quatorze : il femble que le plu- mage de cet oifeau , tout variable qu il efl , eft fujet à moins de variétés que Ton n'en trouve dans les deferiptions des Naturalises (f) : les ailes ont vingt- quatre pennes , dont la troifième à (q) Klein, page 173. (t) Gefner, page 577. (f) Nota. Il n'eft pas étonnant que les Auteurs diffèrent du blanc au noir fur la couleur des plunxs du Lagopède. 391 compter de îa plus extérieure , eft ïa plus longue -, & ces trois pennes , ainfi que les trois fuivantes de chaque coté , ont la tige noire lors même quelles font blanches *•, le duvet, qui envi- ronne les pieds & les doigts jufqu4aux ongles, eft fott doux & fort épais-, & Ton n'a pas manqué de dire que îatérales de la queue de cet oifeau ; car , en déployant & étendant cette queue avec la main , on eft abfolu* ment ie maître de terminer les côtés par des plumes noires ou par des plumes blanches , parce qu'on peut les étendre & ïes placer également de côté. M. d'Au- bentonle jeune, a très-bien remarqué qu'il y auroit tïïcore uns autre manière de fe décider ici fur la contradfâion des Auteurs" , & de rëCCnnoître évi- demment que la queue n'eft compofée que de qui torze plumés toutes noires, à l'exception de la p'iu .extérieure qui eft bordée de blanc près de fon ori- gine , & de ïa pointe qui eft blanche dans toutes , parce que les tuyaux de ces quatorze plumes noires font plus gros du double que les tuyaux des qua- torze plumes blanches , & qu'ils font moins avancés, ne recouvrant pas même en entier les tuyaux des plumes noires ; en forte qu'on peut croire que ces plumes blanches ne fervent que de couvertures, quoique les quatre du milieu foient auffi grandes que les noires, ïefquelles font à très-peu près toute* également longues. * Voyelles planches enluminées , n.° 129. R iv 392. Hijloire Naturelle cétoit des efpèces de gands fourrés que la Nature avoir accordé à ces oifeaux , pour les garantir des grands froids auxquels ils font expofés-, leurs ongles font fort longs, même celui du petit doigt de derrière -, celui du doigt cîu milieu eft creufé parceiïbus , félon fa longueur , & les bords en font rran- chans , ce qui lui donne de la facilité pour fe creufer des trous dans la neigé. Le lagopède eft au moins de la grofleur d'un pigeon privé , félon -"Wiiïylghby -, il a quatorze à quinze pouces de long, vingt -un à vingt- deux pouces de vol; :) : Linn^eus com- pare font' ramage a un caquet babil- lard 8c à un rire moqueur. Enfin Wiiluîghby parle des plumes des pieds comme d'un duvet doux ( plumulis mollibus ) ; & Frifch les compare à des foies de cochon (y)* Or comment rapporter à la même efpèce , des oi- feaux qui diffèrent par la grandeur 9 par les habitudes naturelles, par la voix, (a) Bélon , Nature des Oi féaux , page 259. (x) Gefner, page 57%. (y) Frifch j Nature dss Qïjewx , planche Cl* 394 Hifîoire Naturelle par la qualité de leurs plumes \ Je pourrois encore ajouter par leurs cou- leurs , car nous avons vu que ceile des pennes de la queue n'eft rien moins que confiante ? mais ici les couleurs du plumage font fi variables dans le même individu , qu'il ne Cevok pas rai- sonnable d'en faire le caractère de l'efpcce: je me crois donc fondé à féparer le lago- pède des Alpes , des Pyrénées & autres montagnes fembiables , d'avec les oi- feaux de même genre , qui fe trouvent dans les forêts & même dans les plaines des pays feptentrïonaux, & qui paroifient être plutôt des tétras, des gelinottes ou des attagas/, & en cela, je ne fais que me rapprocher de l'opinion de Pline , qui parie de fon la go pus comme d'un oifeau propre aux .ilpes. Nous avons vu , ci deiïus , que le blanc étoit fa livrée d'hiver -, ceile d'été confîlTe en des taches brunes > iemées- fans ordre fur un fond blanc : on peut dire néanmoins qu'il n'y a point d'été pour lui, & qu^l efl: déterminé par fa Singulière organifatien à ne le plaire que dans une température glaciale ; «* du Lagopède» 395 car , à mefure que la neige fond fur ïe penchant d^s. mbntàgnes > il monte & va chercher fur les fommets les plus élevés, celle qui ne fond jamais; non-feulement il s'en approche , mais il s'y creufe des trous , des efpèces de clapiers , où* il fe met à l'abri des rayons du foleil qui parohTent i'orïuf- quer ou l'incommoder (^) : il feroit curieux d'obierver de près cet oifeau , d'étudier h conformation intérieure , la itru&ure de fes organes , de démêler pourquoi le froid lui eft fi néceîîahre , pourquoi il évite le foleil avec tant de foin , tandis que prefque tous les êtres animés le délirent , le cherchent , ïe faiuent comme le père de la Nature , & reçoivent avec délices les douces influences de fa chaleur féconde & bienfaifante -, feroit-ce par les mêmes caufes qui obligent les oifeaux de nuit à fuir la lumière ? ou les lagopèdes feroient-ils les chacrelas de la famille des oifeaux? (l) T&élage2S9. Rvj j 5) g Hijloire Naturelle Quoi qu'il en foit , on comprend bien qu'un oifeau de cette nature eft difficile à apprivoifer -, & Pline le dit expreiTé- ment comme nous l'avons vu : cependant Rédi parle de. deux lagopèdes qu'il nomme perdrix blanche des Pyrénées j êc qu'on avoit nourries dans la volière du jardin de Boboli j appartenant au grand Duc (a). Les lagopèdes volent par troupes , êc ne voient jamais bien haut , car ce font des oifeaux pefans : lorfqu'iis voient un homme , ils refrent immo- biles fur la neige pour n'erre point aperçus •, mais ils font fouvent trahis par leur blancheur , qui a plus d'éclat que la neige même. Au refte , foie fhipidité , foit inexpérience , ils fe fa- miiiarifent aiîez aifément avec l'homme *, fouvent pour les prendre, il ne faut que îeur préfenter du pain, ou même faire tourner un chapeau devant eux , & faifir le moment où ils s'occupent de ce nouvel objet , pour leur parler un (a) Voyez CoIIedion Académ. Part, Étrang. terne, I , page 520. du Lagopède. 397 lacet dans le cou , ou pour îes ruer parderrière à coups de perches (b ) ; on dit même qu'ils n'oferont jamais franchir une rangée de pierres alignées groffière- ment , comme pour faire la première afîïfe d'une muraille , 8c qu'ils iront conftamment tout le long de cette humble barrière , jufqu'aux pièges que les chaiTeurs ïeur onr préparés. Ils vivent des chatons des feuilles Se des jeunes pouffes de pin , de bouleau , de bruyère , de myrtille , & d'autres plantes qui croifTent ordinaire- ment fur les montagnes (c) ; & c'ed fans doute à la qualité de leur nourri- ture qu'on doit imputer cette légère amertume qu'on reproche à leur chair (d)3 laquelle e(t d'ailleurs un fcon manger : on la regarde comme viande noire, & c'eft un gibier très- commun , tant fur le mont Cenis , gue dans toutes . les villes & villages (h) Gefner, page 578. (c) Wiliulghby, page 127; Klein , page U& fi) Gefner ? page 578. ■ 3 9 8 Hijloire Naturelle à portée des montagnes de Savoie (c) ; j'en ai mangé , & je lui trouve beaucoup de reflemhlance , pour le goût, avec la chair du lièvre. Les femelles pondent & couvent leurs œufs à terre, ou plutôt fur les rochers ( f) ; c'eft tout ce qu'on fait de leur façon de fe multiplier : il faudroit avoir des ailes pour étudier à fond les mœurs & les habitudes des oifeaux . & fur tout de ceux qui ne veulent point fe plier au joug de la domefticité, & qui ne fe plaifent que dans des lieux inhabitables. Le lagopède a un ttès - gros jsbot , un gêner mufculeux , où Ton trouve de petites pierres mêlées avec les ali- mens *, les intefrins longs de 'rente-fix à trente- fept pouces-, de gros cœcum cannelés & fort longs , mais de lon- gueur inégales félon Rédi , & qui font fouvent peins de très-petits yers ( g ) ; les tuniques de Tinreitin grêle , pré- fe) Bélon, page 250. (fj Gefner, page 578 ; Rzaczynski, page 411. (g) Colledt. Acad. Part. Étrang. tome I,j>. 520* du Lagopède, 399 fentent un réfeau ttès- curieux , formé par une multitude de petits vaifTeaux , ou plutôt de pentes rides difpofées avec ordre & fymmétrie (h ) : on a re- marqué qu'il avoït le cœur un peu plus petit , & la rate beaucoup plus petite que l'attagas^i ,) ; & que le canal cyftique & le conduit hépatique alloient fe rendre dans ïes inteftins féparément, & même à une aiïez grande difrance l'un de l'autre ( k ). Je ne puis finir cet article fans re- marquer, avec Aldrovande , que, parmi les noms divers qui ont é"é donnés au lagopède , Gefner place celui d'urUan comme un mot Italien en ufage dans la Lomhardie -, mais que ce mot eft tout-à-fait étranger, & à la Lombardie & à toute oreille italienne : il pourrok bien en être de même de rhoncas 8c de herbey , autres noms que , félon le (h) Voyei Klein, page 117; & Willuïghby., page 137 , n. V. (ij Robert apud Kkifium, Hift. avi. p. 117. (k) Rédi, ColU&. Jcad. Part. Étrqng. tome J5 page 467. 400 ITi/ioire Naturelle, &c. même Gefner , les Grifons qui parlent Italien , donnent aux lagopèdes. Dans la partie delà Savoie, qui avoïu'ne îe Valais, on les nomme arbcnne > & ce mot, dif- féremment altéré par dirîérens patois , moitié SuifTe , moitié Griions , aura pu produire quelques-uns de ceux dont je viens de parler. ht ni. PI. IX.yag 40 LE LAGOPEDE 4ôr LE LAGOPÈDE DELA BAIE D'HUDSON(a). Su e s Auteurs de la Zoologie Brîtaiv wcpiêfb) font à M. BrLTon un jufte reproche de ce qui! joint 3 dans me même lifte (c) , le ptarmigon avec ïâ perdrix blanche de M. Edwards , flanche L X X 1 I j, comme-" ne failant qu'un feul & même pifeau , tandis que ce font en efe deux efpèces dif- férentes -, car la perdrix blanche de M. Edwards eft plus de deux fois (a) Perdrix. Anderfon , Hifl. d'Islande & de Groenland , tome I , page 77 ; & tome II , page 49. • — Perdrix blanche. Voyage de ïa baie d'Hudfon, tome T,page 41 , avec une figure. — - Perdrix blanche. Edwards, Hifl. nat. des Oifiaux , tome II, planche Lxxn , avec une figure bien coloriée. (h) Britifch, Zooïogy , paga 86. (c) Briflon , Ornithologie, to me I, pages 216 & 217. 4£ Bruyère A FRAISE, pu z,^ gro55£ Gelinotte de Canada fa). Je soupçonne ici encore un double emploi, & je fuis bien tenté de croire que cette groiTe gelinotte de Canada 3 que M. Brjiîori donne comme une eipèce nouvelle Se différente de fa gelinotte huppée de Peniylvanie , ell: néanmoins la même, c'eft - à - dire , la même que celle du ccq de bruyère à fraife , de M. Edwards : il eft vrai qu'en comparant' cet oiieau en nature , ou même notre planche enluminée , n? 104 j avec celle de M. Edwards , n><> 24S j il paroîtra au premier coup * Voyelles planches enluminées , n.° IC4. (a) BriiYon, tome I , page 207 La. Géîinctte huppée de Penfyrvanie. Idem, ibidem, pag. 214. — Coq de bruyère à fraife. Edwards , QUmins , planche ccxlyiiï, d'ceil des Oifeaux étrangers i &c. 409 d'oeil des différences très- considérables entre ces deux oifeaux -, mais fi l'on fait attention aux reflfemblances , & en même temps aux différentes vues des Deffinateurs , dont l'un , M. Edwards , a voulu repréfenter les plumes au-deilus des ailes & de la tête, relevées, comme il l'oifeau étoit iion - feulement vivant , mais en action d'amour; & dont l'autre , M. Mar- tinet, n'a deffiné cet oifeau que mort & fans plumes , érigées ou redreffées j la difconvenance des deffins fe réduira à peu de chofe, ou plutôt s'évanouira tout-à-fait par une préfomption bien fondée, c'eft que notre oifeau eft la femelle de celui d'Edwards : d'ailleurs cet habile Naturalise dit poiitivement qu'il ne fait que fuppofer la huppe à fon oifeau, parce qu'ayant les plumes du fommet de la tète plus longues que les autres , il préfume qu'il peut les redreffer à fa volonté , comme celles qui font au-de(Tus de fes ailes : & du refte , la grandeur 5 la figure , les * Voye% les planches enluminées , Xi.° 427. Oifeaux j Tome II L S 4 1 © Hiftoire Naturelle mœurs Se le climat étant ici les mêmes y je penfe être fondé à préfumer que la greffe gelinotte du Canada , la ge- linotte huppée de Penfylvanie de M. BrifTon , & le coq ' de bruyère à fraife de M. Edwards , ne font qu'une feule & même efpèce > à laquelle on doit encore rapporter le coq de bois d'A- mérique , décrit & repréfenté par Catefby (b). Elle eft un peu plus grofTe que îa gelinotte ordinaire, & lui refTemble par fes ailes courtes, & en ce que les plumes, qui couvrent fes pieds, ne def- cendent pas jufqu'aux doigts y mais elle n'a ni fourcils rouges , ni cercles de cette couleur autour des yeux -, ce qui îa caradtérife , ce font deux tourtes de .plumes plus longues que les autres, & recourbées en bas , qu'elle a au haut de la poitrine > une de chaque coté : les plumes de ces tourles font d'un beau noir, ayant fur leurs bords des reflets brillans qui jouent entre la cou- leur d'or & le verd j l'oifeau peut re- lever, quand il veut, ces efpèces de (h) Cavesby, Jj>j>tndix, figo i* des Oifeaux étrangers >&c. 4 1 î faufles ailes, qui, lorfqu'elles font pliées., tombent de part & d'autre , fur ia partie fupérieure des ailes véritables -, le bec * les doigts, les ongles font d'un brun- rougeâtre; Cet oifeau , félon M. Edwards , eft fort commun dans le Maryland 8c la Penfylvanie, où on lui donne le nom de faifan ; cependant il a , par fon na- turel 8c fes habitudes, beaucoup plus d'affinité avec le tétras ou coq de bruyère : il tient le milieu pour ïa grofïeur entre le faifan 8c la perdrix; fes pieds font garnis de plumes , 8c fes doigts dentelés fur les bords comme ceux des tétras-, fon bec eft fembiable à celui du coq ordinaire j l'ouverture des narines eft recouvert par de pe- tites plumes qui naiflènt de la bafe du bec^ 8c fe dirigent en avant -, tout le de (lus du corps , compris la tête , la queue 8c les ailes, eft émaillé de diffé- rentes couleurs brunes, plus ou moins claire, d'orangé 8c de noir-, la gorge eft d'un orangé brillant , quoiqu'un peu foncé*, l'eftomae, le ventre 8c les cuiffes ont des taches noires' en forme Si] 4 i 2 Hijioire Naturelle de croiflant, diftribuées avec régu- larité, fur un fond blanc, il a fur la tête Se autour du cou , de longues plumes, dont il peut, en les redreffant à fon gré , fe former une huppe & une forte de fraife, ce qu'il fait, prin- cipalement lorfqu il eft en amour ; il relève en même temps les plumes de fa queue en faifant la roue , gonflant fon jabot, traînant les ailes, Se accom- pagnant fon action d'un bruit fourd & d'un bourdonnement femblable à celui du coq d'Inde -, & il a de plus , pour rappeler fes femelles , un batte- ment d'ailes très-lingulier, Se affez fort pour fe -faire entendre à un demi-mille deTdlitance par un temps calme-, il fe plaît à cet exercice au printemps & en automne , qui font le temps de la chaleur, & il le répète tous les^ jours à des heures réglées -, favoir , à neuf heures du matin Se fur les quatre heures du foir -, mais toujours étant ppfé fur un tronc fec : lorfqu il commence, il met d'abord un intervalle d'envi- ron deux fécondes entre chaque batte- ment , puis accélérant la vîteiïe par des Qifeaux étrangers, &c. 4 1 5 degrés, les coups fe fuccèdent à la fin avec tant de rapidité , qu'ils ne font plus qu'un petit bruit continu , fem- blable à celui d'un tambour , d'autres difent d'un tonnerre éloigné : ce bruit dure environ une minute , êc recom- mence par les mêmes gradations > après fept ou huit minutes de repos \ tout ce bruit n'eil qu'une invitation d'amour que ïe mâle adrefTe à fes femelles, que celles-ci entendent de loin, & qui de- vient l'annonce d'une génération nou- velle*, mais qui ne devient àiilS que trop louvent un lignai de deilruclion : car les Chaleurs , avertis par ce bruit qui n'ett point pour eux , s'approchent de î'oifeau fans en être aperçus, 8c faiiirTent- le moment de cette efpèce de convuliion pour le tirer à coup sûr : je dis fans en être aperçus , car dès que cet oifeau voit un homme , il s'arrête auffitôt , fût-il dans la plus grande violence de fon mouvement , & il s'envole à trois ou quatre cents pas : ce font b:en-là les habitudes de nos terras d'Europe Se leurs mœurs 3 quoiqu'un peu outrées. Siij 4 1 4 HiJIoire Naturelle La nourriture ordinaire de ceux de Penfylvanie, font les grains, les fruits, les raifîns , &: fur-tout les baies de lierre, ce qui eft remarquable , parce que ces baies font un poifon pour pluiieurs animaux. Ils ne couvent que deux fois l'année , apparemment au printemps & en au- tomne, qui font les deux faifons où Je mâle bat des ailes: ils font leurs nids à terre avec des feuilles, ou à coté d'un tronc {qc couché par terre, ou au pied d'un arbre debout, ce qui dénote un oi- feau pefant : ils pondent de douze à feize oeufs, & les couvent environ trois fe- maines j la mère a fort à cœur la con- fervation de fes petits*, elle s'expofe à tout pour les défendre, & cherche à attirer fur elle-même les dangers qui les menacent*, fes petits , de leur côté, favent fe cacher très-finement dans les feuilles *, mais tout cela n'empêche pas que les oi- feaux de proie n'en détruifent beaucoup : ïa couvée forme une compagnie qui ne fe divife qu'au printemps de l'année fuivante. Ces oifeaux font fort fauvages , & des Oifeaux étrangers y&c. 415 rien ne peut ïes apprïvoifer ; fi on en fait couver par des poules ordinaires , ils s'échapperont & s'enfuiront dans les bois prefque auffitôt qu'ils feront éclos. Leur chair eft Hanche & très-bonne à manger $ feroit-ce par cette raifon que îes oifeaux de proie leur" donnent la chafle avec tant d'acharnement? Nous avons eu déjà ce foupçon à Toccaiîon des tétras d'Europe : s'il étoit confirmé par un nombre fuffifaht d'obfervations , il s'enfuivroit non-feu- lement que la voracité n'exclut pas toujours un appétit de préférences mais que l'oifeau de proie eft à peu près de même goût que l'homme , & ce feroit une analogie de plus entre ïes deux efpèces, I I I; L'oiseau d'Amérique qu'on peut appeler gelinotte à lougue queue, delîi- né & décrit par M. Edwards , fous le nom de heath cock ou grous j coq 4i 6 Hijîoire Naturelle de bruyère de ïa baie d'Kudfon , Se qui nie paroît être plus voifin des geli- nottes que des coqs de bruyère, ou des taifans dont on lui a aufïi donné le nom : cette gelinotte à longue queue, repréfentée dans la planche ex vil de M. Edwards , eft une femelle , elle a la grofTeur , la couleur 8c la longue queue du faifan ; le plumage du mâle eft plus rembruni, plus luftré, & il a des reF.ets à l'endroit du couj ce mâle fe tient auili très-droit , & H a ïa démarche fière -, différences qui fe retrouvent constamment entre le mâle & la femelle dans toutes les elpèces qui appartiennent à ce genre d'oiieau. M. Edwards n'a pas ofé donner des fourcils rouges à cette femelle , parce qu'il n'a vu que l'oifeau empaillé, fur lequel ce caractère n'étoit point aiTez ap- parent*, les pieds étoient battus., les doigts dentelés fur les bords, le doigt pofcérieur fort court. A la baie d'Hudfon, on donne à ces gelinottes le nom de faifan ; en effet , ils font , par leur longue queue 3 la des Oifeaux étrangers , &c. 4 1 7 nuance entre les gelinottes & les faifans; les deux pennes du milieu de cette queue excèdent d'environ deux pouces les deux fuivantes de part & d'autre 3 & ainlî de fuite : ces oifeaux fe trouvent auffi en Vir- ginie, dans les bois & lieux inhabités» Fin du troïfième Volume, &ïM 4 ■ > ':--r^i't.K i*!8^ ^< il A »j irJî M'A / '^^«^g^^^QÉc ^i !.. X V