à NT Soereg ES SSSSS 7 NS NS = IR T ue ne HISTOIRE NATURELLE CÉTAGES DES MERS D'EUROPE Extrait des tomes XXXVIIT, XL, XLI, XLIII des Mémoires couronnés et autres Mémoires publiés par l’Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique. — 1889. © HISTOIRE NATURELLE DES DÉTACÉS DES MERS D'EUROPE PAR P.-J. VAN BENEDEN MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE BRUXELLES, F. HAYEZ , IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE rue de Louvain, 108 1889 AVANT-PROPOS En publiant ce volume nous croyons remplir une véritable lacune; chaque fois qu’un Cétacé échoue quelque part, on trouve des difficultés à le déterminer; c’est que la nomencla- ture est loin d’être fixée et les caractères distinctifs des espèces sont en général très vaguement indiqués. Nous avons fait le relevé de toutes les espèces observées dans les mers d'Europe et, à côté de la partie historique sur chacune d’elles, nous avons établi leur synonymie avec les noms locaux, nous avons indiqué les caractères propres qui les distinguent, les mœurs de chacune d’elles, la mer ou les mers qu’elles fréquentent, les Musées qui en renferment des squelettes, les dessins qui les représentent, enfin, nous avons fait le relevé des parasites ou des commensaux qui les hantent. (wi) Nous avons divisé les Cétacés en trois groupes bien distincts les uns des autres par leur organisation, chacun de ces groupes présente d’ailleurs une distribution géographique spéciales : les Baleines, avec leurs fanons, sont confinées les unes étroi- tement dans des mers bien limitées, les Baleines véritables, les autres, les Mégaptères et les Balénoptères se rendent libre- ment d’un océan à l’autre; les Ziphioïdes, avec leurs dents à la mâchoire inférieure seule, sont tous orbicoles, à l'exception de l'Hyperoodon; les Delphinides, qui possèdent des dents à la mâchoire supérieure aussi bien qu'à la mâchoire inférieure, sont disséminés dans toutes les mers et quelques formes ancestrales sont confinées dans les fleuves des régions tropi- cales en Amérique, en Asie et en Afrique. Pour faciliter la connaissance des espèces, nous ajoutons un tableau indiquant leurs principaux caractères distinctifs. ({ vH) 2910 : sounef sapueq J9 uorJserd & | sndueas + ER SSI node ! € 99 arggdeutqdpog * * * ‘ ‘ ‘ ‘ ‘ououerq EST IOpTaSd 2.27: EAU SO NU SE A RELE 9ITEJUQUIPILUI 204 onurod S Ç Ge anbuÂytougSeT : 08 2p surd SO1{QIOA =. . D Q D *SQuIYdOPOIG ‘08 2P SUTOU SSINUIRESURS | steçed : S09U20[MS Ÿ JaUTJSIP 294 uou SUULIUepOA 2 "7" * SOINUIPI LR sonbruoo : SJU9pP UD IA U LE er RU er Te ‘2sna[n{of OCR 990JANS EI R S99490][INS ‘UMOSIEN * RÉ ER p SJJWTIdUWO9 SUap / “UOIIIAOLDIN : ‘* ‘ OINOHIQIUL OOUIBUL E[ 9P ININSUO] EL 9P NOIIUL NE aagenp no *UOPOOIO * © © ‘* ‘ ‘ saynod sJuap XN9pP AUNOTIQIUT OIOUILUL EI 9P JN0G ne *sutqd17 * * :‘ : ‘ Sa]sNqOi SJU9P "JOpPy2r) : RE se : 9109 onbeyo op oureJéura oun HTNADUOIRT 0 m P-C + SOp OT ANs:911099PU ‘29109 PJ Snos stp e RON EE; ERA EE ER EEE) * SOP AJ ANS ossoq TON PRES Se SR En D Let 28108 e[ snos stçd sues : kr prurydo | : SOITOUD | QUI XN9P XNE SHLNOGOLAI : SJU9P PR sono JUAU9 [N9S 29 FUT 2IOUOEU EIR | SAGINTIVI NO SHLAIOIVLSAN : SUOURJ R SHIVLAHI ! Le HN] Y A A ARE) COOP OR HISTOIRE NATURELLE DE LA BALEINE DES BASQUES (BALÆNA BISCAYENSIS), PAR P.-J. VAN BENEDEN, MEMBRE DE L' ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE Extrait du tome XXXVIIT des Mémoires couronnes et autres Mémoires publiés par l’Académie royale de Belgique. — 1886. Bruxelles. — [Imprimerie de F. Hayez, rue de Louvain, 408. AVANT-PROPOS. Nous avons eu l'honneur de communiquer, dans une des dernières séances de la Classe des sciences 1, la liste des Cétacés observés dans les mers d'Europe. Parmi ces Cétacés se trouvent six Balénides, quatre Ziphioïdes et douze Delphinides. Nous nous proposons de publier successivement une mono- graphie de chacune de ces espèces et nous commençons par la Baleine que les Basques ont chassée depuis le IX° siècle et qui fait encore de temps en temps une apparition : en Europe, dans le golfe de Gascogne, aux États-Unis d'Amérique sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre. Nous nous proposons de faire suivre l’histoire de la Baleine des Basques de l’histoire de la Baleine franche /Balæna mysti- celus), quoique nous n’ayons pas compris cette dernière espèce ! Bulletin, 5° série, t. X, p. 707 (séance du 5 décembre 1885). (#0) dans la liste que nous avons publiée. Nous n'avons voulu faire mention dans ce relevé que des Cétacés qui, tôt ou tard, peuvent échouer depuis les côtes de Norwège jusqu’au détroit de Gibral- tar, ou se perdre dans les mers intérieures, soit la Baltique, soit la Méditerranée et la mer Noire. Nous savons aujourd’hui que la Baleine franche, que les naturalistes ne connaissaient pas avant le XVII siècle, ne quitte jamais les glaces polaires, tandis que la Baleine des Basques, qui était seule l'objet d’une pêche régulière, n’abandonne jamais les eaux tempérées. HISTOIRE NATURELLE DE LA BALEINE DES BASQUES (BALÆNA BISCAYENSIS),. LITTÉRATURE. Du Hamel du Monceau, Zraité général des pêches. Paris, 1769. Lacepède, Histoire naturelle des Cétacés. Paris, l’an XII de la répu- blique. P. Camper, Observalions anatomiques sur la structure intérieure de plusieurs espèces de Cétacés. Paris, 1820. Eschricht, Sur une nouvelle méthode de l’étude des Cétacés, COMPTES RENDUS DES SÉANCES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES DE Paris, 12 juillet 1858. Eschricht, Sur les Baleines franches du golfe de Biscaye, COMPTES RENDUS DES SÉANCES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES DE Pauis, 1860, p. 924. Eschricht, Recherches sur la distribution des Cétacès dans les mers boréales, ANNALES DES SCIENCES NATURELLES, À 864, t. 1, p. 201. P.-J. Van Beneden, ÂVotice sur la découverte d’un os de Baleine, à Furnes, BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 2° série., t. XXII, n° 1, 1867. Fischer, Documents pour servir à l’histoire de la Baleine des Basques, ANNALES DES SCIENCES NATURELLES, A871. Capellini, Della Balena di Taranto. Bologna, 1877. (6) Francesco Gasco, /ntorno alla Balena presa in Taranto nel Febbraio 1877 (Sunto dell’ Autore), RENDICONTO DELLA REALE ACCADEMIA DELLE ScrENzE Fisicxe E MaremarTicue pi NAPOLI, CON NOVE TAVOLE, fascicolo 19, dicembre 1877. P.-J. Van Beneden, Un mot sur une Baleine capturée dans la Médi- terranée, BULLETIN DE L’ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, t. XLIIF, 1877. Fr. Gasco, La Balæna (macleayius) australiensis du Musée de Paris, comparée à la Balæna biscayensis de l’Université de Naples, Compres RENDUS DES SÉANCES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES DE Paris, 9 sep- tembre 1878. P.-J. Van Beneden et Gervais, Ostéographie des Célacés vivants et fossiles. Paris, 1868-1879. Mariano de la Paz Graells, Exploracion cientifica de las Costos del Departemento maritimo del Ferrol…., Madrid, 1870, in-8e. P.-J. Van Beneden, Sur la Baleine de Charleston, BULLETIN DE L'ACAD. ROY. DE BELGIQUE, mai 1880. P. Fischer, Cétacés du Sud-Ouest de le France, ACTES DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE BORDEAUX, t. XXXV, 1881. Southwell, On the Occurrence of the Atlantic Right Whale, on the East coast of Scotland, PROGEEDINGS OF THE NATURAL HISTORY SOCIETY OF GLascow, febr. 1881. P.-J. Van Beneden, Vote sur des ossements de la Baleine de Biscaye au Musée de la Rochelle, BULLETIN DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, 5e sér., t. IV, novembre 14882. Joseph Bassett Holder, 7he Atlantic Right Whales, BULLETIN 0F THE AMERICAN MUSEUM OF NATURAL HISTORY, may 1885. L’ATHENAEUM BELGE, 15 septembre 1885. Guldberg, Sur la présence aux temps anciens et modernes de la Baleine de Biscaye, BULLET. DE L’ACAD. ROY. DE BELGIQUE, 1884. Southwell, Balæna biscayensis on the East coast of Scotland, Trans. Norr. AND Norw. nar. soc., vol. III, p. 228; Foruann Soc. sc. CmRis- TIANIA, DL. (Te HISTORIQUE. Au XIe siècle les Islandais se livraient déjà à la pêche de la Baleine et ils distinguaient parfaitement celle qui hante les régions tempérées, c’est-à-dire l'Atlantique septentrionale et la mer du Nord, de celle qui ne quitte point les glaces polaires et qui ne vient, par conséquent, jamais dans les eaux de l'Islande. A la première, disaient-1ls avec raison, s'attachent des coquillages (des Cirripèdes du genre Coronule) sur la peau de la tête et sur les nageoires; à la seconde ne s’attachent jamais de ces coquillages et la peau est toujours lisse et parfaitement unie. Au IXe siècle, dit M. Guldberg, Orasasius parle déjà de la pèche de Baleines qui se pratiquait régulièrement sur les côtes septentrionales de Norwège et qui devait avoir pour objet l'espèce qui nous occupe. Au XIIE siècle (12092) on fait mention de fanons de Baleine; c'était un panache de fanons de Baleine qui ombrageait le casque du comte de Boulogne à la bataille de Bouvignes!. On ne connaissait pas encore la Baleine franche à cette époque. | Rondelet, le premier, fait mention d’un animal de 23 mètres de long qui portait des Coronules sur la tête : c’est évidemment la Baleine de Biscaye. Paul Gervais a reproduit ce passage de Rondelet dans les Comptes Rendus de l'Académie des sciences de Paris, séance du 5 juin 1871. Dans son Historia animalium in Scotia, Rob. Sibbaldo parle de la Baleine, The Common Whale, qui ne peut être également que la Balæna biscayensis. I s'exprime ainsi : Prope Leogum insulam tanta capitur Balænarum copia, ut aliquando (uti seniores narrant) viginti septem, partim prægnantes, partim minuseulæ, decimarum nomine sacerdotibus sint exhibitæ 2. 1 ANT. DESMOULINS, art. Cétacés, Dictionnaire classique, vol. IN, p. 416, 1825; LEssow, Histoire naturelle des Célacés, œuvres complètes de Buffon, complément, p. 455. Paris, 1898. = Ros. Siggazno, Scotia illustrata…., in-fol. Edinburgi, 1584. (8) Du Hamel du Monceau, en écrivant son Traité général des pêches, n’ignorait pas qu’il existe, outre la Baleine du Groën- land, une Baleine que les baleiniers français appellent Sarde et les Hollandais Nord-Caper ; que la Baleine du Groënland est plus grande, qu'elle a plus de lard, qu’elle est moins farouche et plus facile à capturer. Du Hamel fait mention d’un usage établi parmi les baleiniers qui vont au Spitzherg, de se dédom- mager sur les Sardes, quand la pêche des grasses Baleines n’a pas été heureuse. Il est à remarquer que Du Hamel ne faisait pas de distinction entre les Balénoptères et les Baleines; il parle d’une Baleine de 72 pieds, échouée dans la baie de la Somme, au cap du Hardel, et qui s'était nourrie de poissons. On sait positivement aujourd'hui que les Baleines véritables ne mangent pas de poisson, et l'animal de 72 pieds, dont il est question ici, ne pouvait être qu'une Balénoptère, sans doute la Balænoptera Sibbaldii où plus probablement la Musculus. Les deux autres espèces n’attergnent pas une aussi grande taille. Frédéric Martens, chirurgien hambourgeois, dans son Voyage au Spitzberg, imprimé en 1671, avait déjà dit que les Baleines qui se prennent près du Cap nord, et qu’il désigne sous le nom de Nord-Caper, ne sont pas aussi grasses, qu’elles donnent moins de lard et sont plus dangereuses à capturer. Cette même Baleine était connue de Lacepède, qui adopte le nom de Nord-Caper donné par les baleiniers hollandais, et il reproduit, comme nous le verrons plus loin, un dessin de Bachstrom. Toutefois Lacepède la confond comme Du Hamel avee les Balénoptères, puisqu'il annonce qu’on a trouvé leur estomac plein de poissons; quant à la Baleine prise, d’après lui, sur la côte de la Corse, on ne peut plus rejeter cette asser- tion, depuis que nous en avons vu une se perdre dans le golfe de Tarente. Lacepède admet avec tous les baleiniers une Baleine au nord et une autre au sud qui est nommée Sarde par les Français, Nord-Caper par les Hollandais, dit-il, parce qu’on la trouvait sans doute jusqu’au Cap nord. Ce nom de Nord-Caper a ensuite été appliqué non seulement (9) à différentes Balénoptères, mais même au Cachalot. Fr. Martens dit avec raison que ce nom ne devaits’appliquer qu’à une Baleine différente de celle qu’on péchait au Spitzberg et qu’on ren- contrait au Cap nord, soit en allant soit en revenant du Spitzherg. Pierre Camper connaissait fort bien ces deux espèces de Baleines : il est fort explicite à ce sujet, puisqu’en parlant de la Baleine franche il dit : Ces animaux restent confi- nés aux latitudes presque inaccessibles des pôles; ils vivent en société sur les côtes du Groënland, aux environs du Spitz- berg, dans la baie de Hudson et par toute l'étendue de la mer glaciale. Dans un autre endroit, où il met en opposition la Baleine franche avec la Baleine sarde ou le Nord-Caper, Pierre Camper fait cette observation : La première espèce est confinée au voisinage des pôles, la seconde paraît s'approcher moins des hautes latitudes ; elle fréquente les mers boréales, les rivages de l'Écosse, de l'Islande, de la Norwège et les bords de la mer glaciale, depuis le Cap nord jusqu’aux terres arctiques. Le savant naturaliste hollandais était bien renseigné et ses successeurs ont eu tort de ne pas le croire sur parole. On comprend fort bien comment de nombreuses erreurs se sont ainsi introduites dans la science et comment il se fait que Pierre Camper connaissait mieux ces animaux que Cuvier. Le grand naturaliste du Muséum s’est laissé induire en erreur par Scoresby, baleinier anglais, qui a écrit un livre remar- quable sur la pêche de la Baleine franche. A l’époque où Scoresby a commencé cette pêche, la Baleine dite Nord-Caper était, pour ainsi dire, exterminée, et il n’en a naturellement pas rencontré sur son passage, en se rendant à la grande pêche. Scoresby ne fait connaître que ce qu’il a vu et Cuvier a une confiance entière dans ses assertions, confiance du reste entiè- rement justifiée. Cuvier ne connaissant de notre hémisphère que la seule tête de Baleine qui se trouvait à Londres et le Muséum de Paris, ne possédant que le squelette de Baleine rapporté par De la Lande du Cap de Bonne-Espérance, le grand (10) naturaliste ne put admettre le Nord-Caper comme espèce dis- tincte, et le nom fut tour à tour attribué à tous les grands Cétacés du nord de l'Atlantique. La Baleine pêchée dans le golfe de Gascogne, la Manche et la Mer du Nord était précisément celle dont il n’existait ni tête ni Os séparés dans les Musées, à l’époque où Cuvier a écrit ses Recherches sur les ossements fossiles. Aux yeux de Cuvier, la grande Baleine du Nord était un animal qui avait fui devant les pêcheurs et pour la rencontrer, il fallait se rendre, disait-il, jusqu'au milieu des glaces du Spitzherg et du Groënland. Fréd. Cuvier, qui n’a su distinguer les Baleines, même celles dont le squelette est conservé au Muséum, rapporte le nom de Nord-Caper à une Balénoptère. L'opinion de Cuvier a prévalu jusqu’au jour où Eschricht a démontré que le Nord-Caper était une espèce différente de celle qui ne quitte Jamais les glaces polaires, la même que les Basques chassaient depuis le IX° siècle sur leurs côtes, dans la mer du Nord et dans l'Atlantique jusqu’au Cap nord. Le Nord-Caper est bien la Baleine chassée régulièrement par les Basques et Eschricht a eu raison de lui donner le nom de Balæna biscayensis, qui à été adopté par tous les natu- ralistes. Toutes les observations faites depuis ont confirmé l'opinion du savant cétologue de Copenhague. Une dizaine d'années avant sa mort, Eschricht apprend, accidentellement (c'était en 1854), qu'une Baleine, accompa- gnée de son baleineau, venait de visiter le golfe de Gascogne et que ce dernier était capturé par des pêcheurs. Il fait immé- diatement ses préparatifs pour aller étudier le squelette du baleineau qui était conservé à Pampelune. En passant à Paris, il y fait une lecture à l’Institut sur cette capture; il espère obtenir sur les lieux des renseignements sur les côtes que fréquentait autrefois cette Baleine et il revient d'Espagne avec la certitude que la Baleine des Basques est, comme il l'avait soupçonné, toute différente de la Baleine franche. Depuis (11) lors d’autres captures ont été faites et ont pleinement confirmé les déterminations d'Eschricht 1. Pour éclaircir plus complètement encore l’histoire de la Baleine des Basques, Eschricht avait écrit un questionnaire (Soc. Linn., Bordeaux, 1° juin 1854) pour savoir si, en certaines saisons, on ne trouvait pas dans le golfe de Biscaye certains mollusques Ptéropodes ou d’autres mollusques de petite taille ou des Crustacés des rangs inférieurs c’est-à-dire une pâture quelconque semblable au Manger des Baleines. Il recommande de conserver avec soin les coquilles des Coronules ou des Tubi- cinelles, si on en découvre sur la plage; ces Cirripèdes pouvant servir à distinguer les espèces de cétacés qui les ont hébergés, dit-il. Il demande dans ce même questionnaire si ce sont des Marsouins ou des Dauphins qu’on rencontre dans la baie d'Arcachon. Le D' Fischer a répondu à cette dernière question que ce sont des Dauphins qui pénètrent dans cette baie et le pro- fesseur Mariano de la Paz Graells a répondu à la première en publiant en 1870 une Exploration scientifique des côtes d'Espagne, dans laquelle 11 fait mention de diverses observa- ! Dans une lettre datée de Copenhague, 51 mars 185$, Eschricht m'informe de son départ pour Louvain et du but principal de son voyage qui estl'Espagne* le but principal, dit-il, c’est Pampelona, ou j'espère trouver le Squelette dont l'étude décidera de ma théorie de la division et de la distribution des vraies Bateines. À son retour d’Espagne il m'écrit de Copenhague (2 septembre 1858): Le squelette du baleineau n'est pas proprement un squelette, puis- que je n'y ai trouvé qu’un AMAS LOS SÉPARÉS, qui en parlie ne pourraient Jamais être unis de manière à en furmer un SQUELETTE MONTÉ, SURTOUT QUANT AUX DOIGTS; CEPENDANT JE SUIS PABVENU A Y TROUVER lous les os de la téte, de les mettre en Grdre, de sorte que les formes de la jeune Baleine se sont bien destinées au point de pouvoir déterminer l'espèce. Ma satisfaction a élé parfaite. C'est en effet une Baleine franche, appartenant au groupe de mes Niobe-Mesobaleines ou comment les appellerais-je ? Mais ensuite c’est evidemment une espèce différente de la Baleine du Cap et de la Japonica ; c'est donc une espèce nouvelle pour les Zoologistes (mais point du tout pour les anciens Islandais), c'est la Baleine « Sletbaker » ou BaLæxa BISCAYENSIS. tions qui se rapportent à l’époque de la grande pêche de cet animal. Il cite, entre autres, un registre conservé à Lequitio dans lequel on fait mention du nombre de Baleines que les pêcheurs de la localité ont capturées pendant une partie du XVIe et du XVIT siècle. En général, ils en prenaient deux ou trois, dit le professeur de Madrid, et il fait remarquer que leur apparition avait lieu le plus souvent en janvier et février. En 1871, le Dr Fischer publie dans les Annales des sciences naturelles un article d’un haut intérêt sous le titre : Documents pour servir à l'histoire de la Baleine des Basques. Du temps de Rondelet, cette Baleine était encore assez com- mune sur la côte de Bayonne, dit le D' Fischer. Lorsque les Basques eurent détruit les Baleines, qui arrivaient en hiver dans leurs parages, ils cinglèrent vers l’ouest et atteignirent en 4372 le banc de Terre-Neuve. Ils y trouvèrent la Baleine en abondance et la crurent différente de celle du golfe de Gascogne; ils imposèrent à celle-ci le nom de Baleine de la grande Baie. Celle de Terre Neuve ils la nommèrent Sardaco baleac, Baleine de troupe. Nous supposons que la Baleine de la grande Baie était le Mysticetus, qui, à cette époque, descendait peut-être jusqu’au golfe St-Laurent au milieu des glaces. En dehors du Mysticetus, le Dr Fischer croit à l'existence de deux espèces dans les régions tempérées de PAtlantique. Le professeur Cope a publié À Brief Account of the osteolo- gical characters of a species of Whale-bone Whale, the Black Whale of our coast, dit-il, dans les Proceedings of the Academy of natural Sciences of Philadelphia, for 1865. Il a rapporté le squelette de ce Cétacé, capturé sur les côtes des États-Unis d'Amérique, à une espèce nouvelle qu'il a appelée Balæna cis- arctica. Le savant professeur de Philadelphie ajoute toutefois : This species may readily occur on the European coast; and is no doubt allied to or the same as the species pursued by the Biscayan Whalers. Une Baleine est capturée en 1877 dans le golfe de Tarente; un naturaliste éminent supposait que c'était une Baleine venue (13) de l’autre hémisphère, mais je n’hésitais pas à dire que c'était, au contraire, la Baleine des régions tempérées, la même qu’'Eschricht avait appelée Balæna biscayensis et qui, au lieu de se rendre dans le golfe de Gascogne, comme elle le faisait pério- diquement autrefois, était allée se perdre dans la Méditerranée. Deux mémoires intéressants ont été publiés sur cet animal, lun du professeur Capellini, l’autre du professeur Gasco, et ce dernier a confirmé mes suppositions, à la suite d’un voyage fait exprès à Copenhague pour y étudier sur place le squelette du baleineau de Pampelune. Le savant professeur de Gênes a fait également une étude comparative des caisses tympaniques conservées aux Musées de Paris, de Londres, de Copenhague et de Louvain, et cette étude l’a conduit au même résultat. Au mois de mai 1880 nous avons signalé à l’Académie royale de Belgique ! lexistence d’une Baleine de 50 pieds qui venait d’échouer sur les côtes de Charleston, État de la Caroline du Sud; nous disions que cette Baleine devait être de la même espèce que celle qui était venue se perdre dans la Méditerranée en 1877. C’est par un journal illustré, Harper's Weekly Journal of civilisation, publié à New-York, que nous avions été informé de cette capture. Le docteur J.-B. Holder, Curateur du Museum de Zoologie à New-York, a confirmé cette opinion quelques mois après, dans une publication intéressante où il fait mention en même temps d’autres squelettes de la même espèce qui sont con- servés aux États-Unis. Nous voyons, en effet, dans l'American Museum of natural history ?, qu'il y est fait mention du sque- lette de divers individus qui ont été capturés sur les côtes Est de ce pays. Les squelettes de chacune de ces captures, au nombre de cinq, ont été conservés, à l'exception de celui de animal qui est venu à la côte de New-Jersey. ! Bullelin, …. 2e série, t. XLIX, p. 515, séance de mai 1880. = J.-B. Hoover, The Atlantic Right Whales, BULLETIN OF THE AMERICAN MUSEUM OF NATURAL HISTORY (Central Park), New-York, 1885. (HAS J. B. Holder figure la tête avec les fanons, pendant en dehors de la mandibule, et il donne un dessin de l’animal complet vu de profil et d'en haut, de la tête avec la bouche ouverte vue de face, du squelette complet et de la région cer- vicale séparée. M. Holder cite un passage de John Smith, extrait des Annals of Salem (Mass.\, d’après lequel la pêche de la Baleine sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre, c’est-à-dire la capture le Iong des côtes, serait antérieure à 1614; que vers 1660 les baleiniers ont commencé à se rendre dans les eaux profondes et que ce n’est qu'en 1700 que l’on a poursuivi jusqu’au nord la pêche de la Baleine franche. M. Guldberg, conservateur au Musée zootomique de Chris- tiania, a communiqué une Notice, publiée dans le Bulletin de l’Académie royale de Belgique (1884), sur la présence, aux temps anciens et modernes, de la Baleine de Biscaye sur les côtes de Norwège. A l’ouest du Cap Nord, il a recueilli, au milieu de plusieurs ossements, un humérus semblable à celui que nous avons trouvé au Musée de la Rochelle et dont nous avons fait mention dans le même Bulletin. M. Guldberg a reconnu des noms hollandais, qui sont conservés sur diffé- rentes côtes du nord de Finmarken, depuis l’époque de la pêche du Nord-Caper dans ces parages. Les naturalistes qui s'occupent de l’histoire des Cétacés ne seront pas peu étonnés d'apprendre que la Baleine des Basques, autrefois si commune sur les côtes d’Espagne, est loin d’être aussi près d'être exterminée qu’on le supposait; le professeur Mariano de la Paz Graells a exploré la côte, depuis le département maritime de Ferrol jusqu’à la frontière française et il fait remarquer qu’en 1869 on en a vu encore à la fin du mois d'avril dans les eaux de Biarritz. Dans une lettre que je viens de recevoir, mon savant con- frère de Madrid m'informe que ces Baleines visitent encore régulièrement les rades et les estuaires de ces parages ; qu'en 1884 un de ces géants est entré dans le port de Saint- Sébastien, jetant l’épouvante dans l'âme des baigneurs, et (15) qu'après une courte visite le monstre a pris paisiblement le large et a disparu. Pendant une exploration océanique de ce même département en 14882, à bord d’un vapeur de l’État, notre savant confrère a rencontré fréquemment ces Cétacés. Ce ne sont pas les Baleines qui manquent, dit M. de la Paz Graells, ce sont les pêcheurs qui ont signé une paix inexplicable avec ces géants de la mer. L'année dernière, une tentative a été faite par les pêcheurs de Zarauz pour relever cette antique industrie : ils ont essayé de harponner celles qui viennent à la côte, mais ils n’ont, paraît-il, ni le courage ni l'adresse de leurs fameux ancêtres. M. Mariano de la Paz Graells fait aussi mention dans sa lettre d’un de ces Cétacés qui est venu échouer vers 1880 à la Via d Vigo, à l'endroit qu’on appelle Son. Les pêcheurs s’en sont emparés et, après en avoir utilisé l'huile et les fanons, ils l'ont vendu à l’Université de Santiago pour le squelette qui est complet: notre savant confrère l’a examiné en place au Jardin botanique de l'Université de Galice. SYNONYMIE. La Balæna biscayensis d'Eschricht c’est le Sletbag (Baleine à dos lisse) des anciens baleiniers islandais, le Nord-Caper des baleimiers hollandais, la Sarde des baleiniers français (Du Hamel). Nous ne croyons pas que les baleiniers anglais aient donné un autre nom que celui de Blackwhale, sous lequel ils désignent encore aujourd’hui diverses espèces. C'est le même animal auquel le professeur Cope de Phila- delphie a donné le nom de Balæna cisarctica et le professeur Capellini celui de Baleine de Tarente, Balæna tarentina {Balæna Van Benediana). La Balæna Svedenborgii aussi est synonyme de cette espèce {. 1 LiLLyEBORG, On two Subfossil Whales, discovered in Sweden. Upsala, 1867. (46% Le mot Nord-Caper a été introduit dans la science à une époque où les espèces étaient fort mal connues et ce nom a donné lieu aux confusions les plus singulières. Nous pouvons dire aujourd’hui que le Nord-Caper est la Baleine du Gulfstream comme le Mysticetus est la Baleine des glaces polaires. CARACTÈRES. La Baleine des Basques est plus petite que la Baleine franche : la tête est proportionnellement moins volumineuse ; ses fanons sont plus courts et leur surface est moins lisse, ce qui leur te de leur valeur commerciale. La peau de la tête surtout se couvre de Cirripèdes {Coronula), ce qui n’a jamais lieu pour la Baleine franche. On trouve des caractères distinctifs dans chaque os du sque- lette et particulièrement dans la caisse du tympan. Il y a :56 vertèbres. Les côtes sont au nombre de 13, en général très épaisses, surtout à leur extrémité inférieure. Cette Baleine des Basques est aussi plus farouche que la Baleine franche, pius difficile à capturer et fournit moins d'huile. La taille atteint une cinquantaine de pieds. ORGANISATION. On peut consulter pour le squelette le mémoire du profes- seur Capellini, celui du professeur Gasco et la notice que vient de publier le docteur Holder sur le squelette conservé à Charleston. Nous ferons remarquer que dans la notice du docteur Holder le carpe, tel qu'il est figuré, est entièrement artificiel ; 11 y a évidemment des pièces qui ne lui appartiennent pas. On voit par les épiphyses que le squelette provient d’un jeune animal. Dans l'Ostéographie des Cétacés, que nous avons publiée avec ( 47) la collaboration de feu notre ami Paul Gervais, qui s’est chargé des Ziphioïdes et des Delphinides, nous avons consacré plu- sieurs pages à l’histoire et à la description des os connus de cette espèce! et nous avons reproduit par le dessin quelques-uns de ceux qui lui sont attribués. Depuis lors nous connaissons le squelette de lindividu qui est venu se perdre dans la Méditer- ranée et les squelettes de ceux qui ont été capturés sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre. Il existe aujourd’hui dans les Musées des États-Unis d’Amé- rique quatre squelettes de cette Baleine, et le docteur Holder les a comparés entre eux; il a trouvé le même nombre de côtes (quatorze) et de vertèbres ; en comparant les omoplates il a remarqué une légère différence dans la hauteur et la largeur, ce qui peut dépendre de l’âge et du sexe, comme le dit le pro- fesseur Flower. Dans la figure publiée par M. Holder les fanons sont placés de manière que l'extrémité inférieure se trouve en dehors des mandibules : c’est une erreur qui a été commise également à Paris quand on a monté le squelette de la Balænu antipodum dans la cour du Muséum. Le professeur Cope a eu l’obligeance de nous envoyer de Philadelphie une caisse tympanique avec le rocher d’un animal adulte, et sur notre invitation le professeur Reinhardt la com- parée à celle du squelette de Pampelune qui est à Copenhague. Quoique le premier os soit d’un animal adulte et le second d’un jeune animal, il n’est pas douteux, d’après le professeur Reinhardt lui-même, que ces os ne présentent entre eux d’au- tres différences que celles provenant de l’âge. Ce qui saute également aux yeux, c’est la grande différence qui sépare cette caisse tympanique de celle du Mysticetus et sa grande ressem- blance au contraire avec la caisse des autres Baleines des régions tempérées. Les os et les fanons du côté droit sont, paraît-il, sans excep- tion plus larges que ceux du côté gauche (be Luca, Comptes rendus, 9 septembre 1878). 1 Ostéographie des Cétacés, p. 90, pl. VIT. (18) MOEURS. Les mœurs de ces animaux sont encore bien incomplète- ment connues. On ne possède que quelques renseignements sur Ja pâture et sur les rapports des sexes entre eux. Tous ceux qui ont eu l’occasion d'observer les deux sortes de Baleines s'accordent à dire que la Baleine du Sud, c’est-à-dire le Nord-Caper, est plus agile et plus dangereuse à capturer que celle du Nord, la Baleine franche. L'espèce qui nous occupe ne se nourrit, comme toutes les vraies Baleines, que de mollusques de petite taille et de Crustacés de même dimension, qui se propagent par nuages en pleine mer 1. Fréd. Cuvier reproduit en toutes lettres l'erreur commise par plusieurs naturalistes au commencement de ce siècle, d’après laquelle la Baleine appelée Sarde, c’est-à-dire le Nord-Caper, ne serait qu’une Balénoptère mal décrite. Cest en confondant la Baleine des Basques, le Nord-Caper, avec les Balénoptères, que l’on a pu croire le Nord-Caper ichthyophage. Nous avons tout lieu de croire que les Baleines sont appariées pendant l’époque des amours. En effet, la plupart des captures faites sur les côtes d’Espagne consistent en deux individus, lun mâle et l’autre femelle, et souvent on trouve un baleineau avec la femelle. La même observation a été faite sur la Baleine franche, capturée au nord de la mer de Baffin. Nous nous sommes donné la peine d’annoter les sexes des individus capturés, jour par Jour dans le détroit de Barrow et le golfe de Boothia, et nous avons remarqué qu'après une ! Nous savons depuis peu que certaines Balénoptères, comme la Balæ- noptera Sibbaldii, se nourrissent exclusivement de Crustacés et, comme l'espèce qui forme sa pature ordinaire a fait défaut cette année (1885) sur les côtes de Finmarken, on n'a capturé qu'un très petit nombre d'individus de cette grande Balénoptère. Par contre, on a vu arriver en graud ombre une des deux petites espèces, la Balænoptera borealis. (19) femelle, qui est le plus souvent la première prise, on capturait généralement un mâle. Il en résulte que les Baleines vivent par couples et l’on n’ignore pas jusqu'où va ensuite l’amour mater nel de ces animaux : les baleiniers savent parfaitement que si l'on s'empare d’un Baleineau on prend pour ainsi dire sûre- ment la mère. Celle-ci ne connaît plus le danger du moment où son Baleineau se trouve en péril. Il paraît que ces Cétacés à fanons ne sont pas plus muets que les Cétacés à dents. Ambroise Paré dit en parlant de la Baleine des Basques : « Quand elle crie on peut lentendre d’une lieue » 1. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. La Baleine des Basques est propre à l’Atlantique boréale et la limite qu’elle atteint au Nord était déjà connue en 890 dans le premier voyage au Cap Nord par Octher, puisqu'il y est dit que l’on a navigué encore trois jours au delà du point d’où les Baleines retournent. Toutes les recherches faites depuis les travaux d’Eschricht ont confirmé les observations du savant cétologue de Copen- hague, à savoir que la Baleine du Spitzherg est une espèce différente qui n’a été connue des naturalistes qu’au commen- cement du XVIE siècle. Cest un des principaux mérites de feu notre ami d’avoir soutenu, à l'encontre de Cuvier et de Scoresby, que la grande Baleine n'avait pas fui devant les pêcheurs pour aller se réfugier au milieu des glaces polaires et d'avoir fourni la preuve, avec son savant collègue le professeur Reinhardt, que cette espèce ne quitte jamais les eaux glacées. Ces Baleines visitent encore aujourd’hui assez régulière- ment les côtes des États-Unis d'Amérique. On peut dire que la Baleine des Basques est la Baleine du Gulf-stream ; au nord elle se rend à travers l'Atlantique jusqu’à ! Histoire naturelle des Célarés, dans les suites à Buffon, p. 508. (20 ) l’île des Ours, à peu près au point où le courant polaire fait sentir ses effets, tandis que la Baleine franche, au contraire, ne quitte pas le courant polaire 1. La Baleine des Basques ne quitte pas plus le Gulf-stream que la Baleine du Japon n’abandonne le courant noir (Kurosiwo) du nord du Pacitique, et toutes les deux se rendent du sud au nord jusqu’à la limite méridionale atteinte par la Baleine franche. La limite méridionale de lune est en effet la limite septentrionale de l’autre, au nord de l'Atlantique comme au nord du Pacifique. Tout en vivant dans le voisinage l’une de Pautre, ces espèces ne se mélent pas plus au nord du Pacifique qu'au nord de l'Atlantique. C’est ainsi que les baleiniers hollandais, allant au Spitzhberg chasser la Baleine franche, rencontraient au Cap nord la petite espèce, le Nord-Caper, et les baleiniers améri- cains, en poursuivant au nord du Pacifique la Baleine du Japon, y rencontrèrent l'espèce des régions polaires, c'est-à- dire le Bowhead, qu'ils sont allés chasser ensuite dans le détroit de Bering, puis dans la mer Arctique. Le Bowhead est bien la Baleine franche répandue sur toute la calotte polaire et qui pénètre, soit dans la mer de Baflin, soit dans les eaux du Spitzberg, soit dans le détroit de Bering. Si ces Baleines ne portaient déjà un nom, on pourrait, comme nous l'avons déjà dit, appeler la Baleine des Basques Baleine du Gulf-stream, la Baleine du Japon Baleine du courant noir et la Baleine franche la Baleine polaire. Ces animaux étaient très abondants et très confiants à l’époque où l’on a commenté à les poursuivre; la guerre sans trêve qu’on leur a faite en à partout diminué le nombre; dans plusieurs parages on les à même à peu près exterminés. Ce qu'il y a de remarquable, c'est ‘Au nord de Jean Mayen et de l’île des Ours l’eau est plus froide que le poiut de glace. Un voyageur qui se rendrait en janvier de Philadelphie au Cap nord de l’Europe se maintiendrait toujours sous la même latitude isothermale de 2 à 5 degrés. En allant directement au nord, dans la baie de Bafio, il trouverait sous le même parallèle une température moyenne de — 25 degrés. (Éisée Reczus, Nouvelle Géographie universelle., p. 15, vol. IV.) (21) que là où quelques individus se sont conservés, ils font encore leur apparition à la même époque de l’année et dans les mêmes conditions qu'autrefois. Cest ainsi que l’on en voit apparaître encore de temps en temps sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre depuis le cap Cod jusqu'aux îles Bermudes et, en Europe, dans le golfe de Gascogne depuis Biarritz jusqu’à la côte de Galice : ce sont des lieux de prédilection correspondant sans doute avec l’époque des amours et de la parturition. Un fait qui paraît acquis aujourd'hui, c’est que la Baleine des Basques apparaît dans le golfe de Gascogne en hiver, mais ilne paraît pas aussi bien démontré qu’elle fasse son apparition en été sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre. Des deux côtés de l'Atlantique il y a toutefois un endroit préféré. La saison du passage des Baleines sur les côtes de la Guienne et de Biarritz commence, disait l’auteur des Coutumes de la mer, après l’équinoxe de septembre et dure presque tout l'hiver. Dans l'Atlantique australe vit également une Baleine qui ressemble beaucoup à la précédente et qui passe également d'un côté de lAtlantique à l’autre; elle porte le nom de Balæna australis. On sait que les Baleines ne passent pas la ligne, comme le font les Mégaptères et les Balénoptères. En faisant le relevé des observations recueillies dans l’Atlan- tique méridionale sur l’époque de l’apparition de la Baleine australe, il paraît que ces voyages à travers l'Atlantique se font de la même manière, c’est-à-dire d'Afrique en Amérique et d'Amérique en Afrique, avec cette différence toutefois que, pendant que la Balæna biscayensis se dirige de l'est à l’ouest pour gagner Terre-Neuve, la Balæna australis va de l’ouest à l'est pour gagner le cap de Bonne-Espérance. Il ne sera pas hors de propos de faire remarquer que cer- taines dénominations anciennes ne permettent point de douter que des Baleines visitaient autrefois régulièrement des parages qu’elles ont depuis longtemps à peu près abandonnés. En Espagne on reconnaît encore aujourd’hui, sur différents (22) points du littoral, des restes de tours qui servaient autrefois de vigie, et des fours pour fondre le lard. Il n’y à pas moins de six villes sur les côtes d’Espagne, notamment Fontara- bie, Guetaria, Matrico, dont les armoiries représentent des Baleines, et quelques-unes d’entre elles montrent mème le harpon et le câble. C’est bien un signe de l’ancienneté de cette industrie. À Lequeitio, province basque, la devise de la ville est une Baleine en pleine mer, harponnée…. et l'on conserve à la fabrique de l’église un registre qui indique le nombre des Baleines capturées depuis 1517 jusqu'à 1661. Il résulte de cette liste que les seules dates indiquées pour la capture sont aux mois de janvier et de février, que la plupart des captures consistent en deux individus, sans doute mâle et femelle, et que les femelles sont souvent accompagnées de leurs jeunes f. Dans les Asturies il existe encore, à Llanes, des Casas de Ballenas, où l’on s’occupait surtout des affaires concernant les Baleines, et à Gijon 1l y a encore une rue appelée Whale-Lane. Parmi les Sceaux des Flandres nous en trouvons un sous lequel on lit : Biarritz et sur lequel figure un Dauphin à la place d’une Baleine. Le sceau de Fontarabie représente une barque montée par des pêcheurs qui harponnent une Baleine. On trouve également encore des traces de cette pêche au nord de la Norwège. Hammerfest est située au fond d’une baie sur une île déserte appelée Kvalo, c’est-à-dire Ile de la Baleine. La crique de Rosekop (Norwège) était la Baie de la Baleine; les habitants conservent encore des os abandonnés sur la plage. Léopold de Buch fait mention du cimetière de Hasnik (Lapo- nie), qui était entouré d’une barrière formée d’ossements de Baleines. Au nord-ouest du Spitzherg on connaît le Biscayers Hoek (coin des Basques). On parle également de la Baie des Franchois où pêchaient les Basques de Saint-Jean de Luz. 1 MarkHa, Proceedings of the Zoo'ogical Society of London, 1881, p. 971. ( 93 } PÉCHE. On parle généralement de la pèche de la Baleine comme s'il n'y avait qu'une seule espèce que lPon eût commencé à chasser sur les côtes d'Espagne et qui eût fui successivement jusqu’au milieu des glaces du pôle devant les Baleiniers. C'est là, comme il est reconnu maintenant, une erreur : il s’agit de deux pêches différentes, et celle du nord n’a commencé qu'après qu’on eût découvert la Baleine franche en cherchant le passage par le nord-est. Les deux espèces ne se rencontrent jamais dans les mêmes eaux; nous l’avons déjà dit, les limites septentrionales de lune sont les limites méridionales de lautre. Ces limites sont si bien tranchées que, pendant tout un siècle, pas un Mysticetus n’a dépassé dans la mer de Baftin le 64 degré. Les Baleines qui se rendent de la côte Ouest du Groënland à la côte Est doivent faire le tour par le nord. Elles ne doublent pas le cap Farewell, On n’a jamais vu la Baleine franche dans les eaux de l'Islande. Le Norwégien Octher, dont nous avons déjà mentionné le voyage, dit avoir vu pratiquer la pêche de la Baleine près du cap Nord ; il a navigué, dit-il, encore trois jours au delà du point où les Baleines retournent et il a vu des Morses dans ces nouveaux parages. Il doit avoir été tout près de Pile des Ours. Cette expédition date du IX° siècle. Les Islandais s'étaient établis déjà à cette époque sur les côtes ouest du Groënland, et 11s connaissaient par conséquent la Baleine franche. Dans divers chapitres des Grägäs, il est question de certains droits réservés pour le cas où une Baleine, déjà attaquée par des pêcheurs, est capturée par d’autres et pour celui où l’on découvre un cadavre en mer ou sur la plage 1. ! Codeæ juris Islandorum antiquissimus qui nominatur Grägäs, in-4e. Havnia, 1829. Les Islandais n’ignoraient pas que la Baleine franche, leur Nordwall, ne portait pas de Coronules sur la peau comme leur Hauswall et ils ne pouvaient par conséquent pas confondre ces animaux. Les Islandais avaient également un nom pour désigner les diverses espèces de Balénoptères ainsi que la Mégaptère. Leur Baleine était fort commune dans rAtlan- tique septentrionale et ils n’ignoraient pas qu’elle avait une station en Europe dans le golfe de Gascogne, aux États-Unis d'Amérique, au cap Cod et jusqu'à la Caroline du Sud. Avant d’avoir été l’objet d’une pêche régulière au harpon, ces Baleines étaient communes des deux côtés de l'Atlantique. Il est à remarquer que les pêcheurs des côtes visitées par ces animaux à l'époque de leur abondance sont devenus en Europe comme en Amérique les premiers baleiniers. Il en a été de même de la Baleine des Japonais, qui à formé les premiers baleiniers au nord du Pacifique. Au XIIIe siècle, Albert le Grand et Vincent de Beauvais nous transmettent le récit de la pêche de la Baleine par les habitants de la Basse-Allemagne. Les chroniqueurs rapportent qu’en 1004 plusieurs navires périrent dans la Manche par le choc de Baleines 1. Nous allons passer en revue les principales phases par les- quelles a passé cette industrie. Comme nous venons de le voir, au XIIe siècle, les deux Baleines étaient fort bien connues des Islandais, qui avaient même un nom distinct pour les deux espèces : ils appelaient l'une Hushval (Hauswall) Baleine de la maison, c’est-à-dire de chez eux, ou Sletbag, Baleine à dos lisse, par opposition à la Baleine du Groënland qu'ils appelaient Nordwall. C'était en effet le Nordwall pour eux. Depuis le IX® siècle cette pêche avait lieu dans le golfe de Gascogne et les Basques en ont eu le monopole jusqu'au commencement du XVII siècle. Ce n'est qu'à cette époque, 1608, que l’on a découvert la Baleine franche. Les animaux étaient tellement abondants pendant ces pre- ! Fiscuer, Cétacés du sud-ouest de la France, p. 25 (1881). (25) miers siècles de chasse, que les habitants du littoral dans le golfe de Gascogne faisaient des clôtures de jardin avec leurs côtes et leurs mandibules. Rondelet, en consignant cette observation, y ajoute la remarque qu’en hiver les marins et les pêcheurs font le guet pour voir venir ces animaux. On se formerait difficilement une idée de l’état florissant de cette industrie à ces époques reculées, et de sa décadence rapide, dit le D' Fischer : jusqu’au milieu du XVII siècle, 1l partait tous les ans de S'-Jean de Luz vingt-cinq à trente vaisseaux, du port de 25 à 500 tonneaux, équipés de cinquante à soixante hommes, et, vers le milieu du XVITE siècle, St-Jean de Luz n'avait plus un seul navire baleinier. Ce n’est plus qu’à de très longs intervalles que l’on voit encore de temps en temps une de ces Baleines apparaître sur les côtes d'Europe. Vers la fin du XIVe sièele (1372) les Basques cinglèrent vers l'Ouest jusqu’au golfe S'-Laurent et virent le nombre de ces animaux augmenter notablement en approchant des bancs de Terre-Neuve. Un pilote de Zarauz, Matias de Echeveste, est le premier Espagnol qui ait visité les bancs de Terre-Neuve, et, d’après les mémoires écrits par son fils, il a fait de 1545 à 1599 (année de sa mort) vingt-huit voyages. D’après quelques écrivains, la première expédition des Basques au cap Breton pour la pêche de la Baleine n’aurait eu lieu qu’en 1594. Un baleinier rapporte cette année sept à huit cents fanons de la Baie S'-Georges. La petite ville de Lequeitio est habitée encore aujourd’hui par de nombreux pêcheurs et d'excellents pilotes; elle l’était il y a deux siècles, par des baleiniers qui ont laissé des archives intéressantes, dont nous avons parlé déjà, sur la présence de la Baleine dans les eaux de leur voisinage. Nous trouvons dans l’exploration scientifique des côtes du dépar- tement de Ferrol, par M. Mariano de la Paz Graells, publiée en 1870 et dont nous avons parlé plus haut, divers renseigne- ments intéressants sur le Cétacé à fanons qui nous occupe. Les côtes de Galice étaient également visitées périodique- ment par la même Baleine. I paraît qu'au mois d'avril 1855, le secrétaire de la commission permanente de pêche Fr.-Xav. (26) de Salas a vu encore cinq Baleines dans ces parages. M. Mariano de la Paz Graells assure qu’à la fin d’avril 1869 l’une d'elles s'est montrée dans les eaux de Biarritz. La pêche de la Baleine franche n’a commencé que dans les premières années du XVII siècle. Les Anglais, ayant rencontré des Baleines au nord de File des Ours en 1607, ont commencé l’année suivante la pêche du Mysticetus qu'ils ne connaissaient pas; ils engagèrent des Bas- ques comme harponneurs. Les Hollandais, qui avaient découvert l’île des Ours, n’ont commencé cette même pèche qu’en 1612, en s'adressant, comme les Anglais, aux Basques pour apprendre à harponner. Barendtz a fait mention, dans son journal de bord, de la ren- contre d’une Baleine morte deux jours avant d’avoir découvert la terre du Spitzberg. On ne peut dire au Juste à quelle époque la pêche de la Baleine a commencé sur les côtes des États-Unis d'Amérique. On sait seulement que c’est surtout au Cap Cod que ces Cétacés se rencontraient le plus abondamment et que ce sont les pêcheurs de ces parages qui sont devenus les premiers baleiniers. On se bornait d’abord, comme en Europe, à les poursuivre le long de la côte et insensiblement à leur faire la chasse en pleine mer. On peut donc dire que la pêche a com- mencé par quelques chaloupes , mais la profusion des Baleines permettant de réaliser un bénéfice considérable, on a vu jusqu’à sept cents navires montés par quinze mille marins se hvrer à cette Industrie. A la fin du XVI: siècle, les parages de Terre-Neuve étaient visités par des baleiniers de toutes les nations et, l'on y voyait jusqu’à trois cents vaisseaux, parmi lesquels se trouvaient des anglais, des français, des espagnols et des portugais. Le capitaine Maury a publié, en 1852 1, une carte dans laquelle 11 figure les lieux où l’on a capturé des Baleines, et 1 Whale chart of the World, 1852. (27 ) il représente mème le nombre relatif d'individus capturés aux diverses époques de l’année. On y trouve non seulement lindi- cation de leur abondance ou de leur rareté dans chaque endroit, mais aussi l’époque de l’année pendant laquelle elles sont le plus abondantes. Une seconde carte, publiée en 1853 1, par le capitaine Maury, représente en même temps les parages visités par les Cacha- lots et par les Baleines. On y voit très distinctement que les Cachalots sont des animaux des régions tropicales, tandis que les Baleines qui nous occupent ne hantent que les eaux tempérées. Maury n’a pas tenu compte de la Baleine franche ou des glaces, que l’on ne pêche plus guère au Spitzberg et que de rares baleiniers écossais poursuivent encore dans la mer de Baffin. Il représente comme moyenne équatoriale de la Baleine une ligne qui part du détroit de Gibraltar, passe devant l'île de Madère, atteint le 34 degré, puis se dirige au devant de Terre- Neuve jusqu’au golfe de S'-Laurent. L'auteur n’envisage cette question qu'au point de vue des baleiniers, sans se préoccuper _de l'espèce de Baleine qui habite cette partie de l'Atlantique 2. Il est évident, pour tous ceux qui se sont occupés de la ques- tion au point de vue zoologique, que cette Baleine n’est autre que la Black whale des Américains, la Sarde des Français, le Nord-Caper des Hollandais, la Balæna biscayensis du premier cétologue de l’époque, Eschricht. Un autre travail remarquable a été entrepris par la commis- sion de pêche des États-Unis d'Amérique en 1878; nous y trouvons l’histoire de la pêche de la Baleine sur ces côtes depuis le début. Après l'introduction, l’auteur, Alexander Star- buck, divise cette histoire en différentes périodes : la première de 1600 à 1700: elle commence par le Cap Cod; la deuxième de 1700 à 1750 ; la troisième va jusqu'à 1774; la quatrième jus- qu'à 1816 et la dernière période jusqu’en 1876. 1 À chart showing the favorite resort of the sperm and right hate, 1855, ? Maury, Courants et mouvements généraux de la mer. (28) L'auteur, traitant cette question uniquement au point de vue industriel, ne fait pas de distinction entre la pêche de la Baleine et la pêche du Cachalot. Tous ceux qui s'intéressent à cette ques- tion trouveront dans ce rapport des renseignements du plus haut intérêt. CAPTURES ET ÉCHOUEMENTS. Quoique très souvent on ne sache reconnaitre dans les récits, même ceux des zoologistes, si les Baleines dont ils font men- tion ne sont pas des Balénoptères ou des Mégaptères, nous pouvons cependant signaler quelques captures sur les côtes d'Europe qui ne laissent point de doute sur la nature de l'espèce. En Europe le lieu le plus fréquenté par la Balæna bis- cayensis est le Golfe de Gascogne; en Amérique c’est la côte Est des États-Unis, depuis le Cap Cod jusqu’à la Caroline du Sud. Nous signalons ici les captures et les échouements qui ont eu lieu durant les derniers siècles, particulièrement depuis l’époque où la pêche de cette Baleine était presque complè- tement abandonnée. C'est probablement d’une Balénoptère qu'il est question dans divers auteurs qui parlent d’une vraie Baleine de 100 pieds qui aurait péri sur le littoral de Corse en 1620; à en juger par la taille et la quantité de lard que l'animal a fournie (73 barriques), il est à supposer que c’est une Balænoptera musculus. On n’a pas encore vu de Balænoptera Sibbaldii dans la Méditerranée 1. Vers la fin du XVII siècle (1680) Segnette, médecin de La Rochelle, fait mention d’une Baleine véritable échouée à La { Du Hamez. Bonnaterre et Lacépède parlent de cet animal qui avait donné 75 barriques d'huile. La Balænoptera Sibbaldii en produit de 80 à 90, la Baleine franche de 150 à 200, la Mégaptère de 55 à 40. (29) pointe des Baleines, près du Phare du même nom, au nord-ouest de l’île de Ré, au mois de février ; elle avait, dit-il, #7 1/9 pieds et la tête surtout était couverte de Coronules. On sait que les Balénoptères ne portent Jamais les parasites 1. M. Southwell, dans la liste des mammifères de Norfolk, mentionne une femelle, accompagnée de son petit, qui aurait fait son apparition en 1682, en Écosse à Peterhead. Le Balei- neau, parait-il, a été seul capturé, Du Hamel, dans son livre sur la pêche, dit qu'il en parait presque tous les ans sur la côte de Bayonne et même jusqu’au cap Finistère. Du Hamel n'ignorait pas qu'en Amérique elles apparaissent pendant l'été. En 1741 on en aperçut une, à une lieue au-dessus de Pont-Saint-Esprit 2. En 1764 une autre vint échouer avec son petit sur la côte de Saint-Jean de Luz 3. Le 8 juillet 1784 un jeune animal a péri près de Yarmouth; malheureusement rien n’en a été conservé, dit M. Southwell qui fait mention de cette capture dans la liste des mammifères de Norfolk dont nous parlons plus haut. D’après le même auteur, en octobre 1806, une autre femelle accompagnée de son Baleineau aurait péri sur les côtes d'Écosse. En février 1811, une Baleine entièrement pourrie, mais sans tête, fut jetée par la mer sur la plage de l'Herbaudière #, En 1844 on en a harponné une en vue de Zarauz, mais elle s’est sauvée avec deux harpons et trois lances dans le corps. Le 25 juillet 1850 une autre s’est aventurée près de Guetary, mais elle a également échappé aux poursuites des baleiniers. Une autre Baleine décapitée a échoué sur la côte du dépar- tement de la Gironde (entre la pointe de Grave et le vieux Soulac) le 24 février 1852. Le corps a été brûlé par ordre de M. Haussman, alors préfet de Bordeaux. Il n’en a été conservé 1 SEGNETTE, Zodiacus medico-gallicus. ? Du Haez, vol. Ill, p. 9. Du HameL, vol. II, p, 25. F. Pier, Recherches sur l'ile de Noirmoutiers, 2° édil., 1865, p. 243 (Dr Fiscner). o1 = ( 30 } qu'un fragment d’une épiphyse vertébrale. Il paraît qu’elle avait 15 mètres de longueur. Eschricht devait cette communication à M. Muset, directeur d’un Institut, à Toulouse 1. Le Dr Fischer rapporte que, à la fin de décembre 1853, une Baleine avec le dos couvert de coquillages à été aperçue au large par le gardien du phare de Biarritz 2. La capture la plus importante est celle de 1854. C'était au mois de février : une femelle, accompagnée de son Baleineau, s’est montrée sur les côtes de Biarritz, et le Baleineau seul a été capturé. La mère, ce qui est bien rare, a échappé. Feu notre ami Eschricht est allé étudier ce squelette, à Pampelune, et c’est au savant distingué de Copenhague que l’on doit la connais- sance de cette intéressante Baleine des Basques. Le squelette est conservé au Musée de Copenhague. D’après M. H. Drouët, l’on a capturé aux Açores deux ou trois Balemes prétendues franches : on sait que cet archipel est fréquenté régulièrement par des baleiniers américains et açoréens 3. On entend également par baleiniers ceux qui se livrent à la chasse au Cachalot : c’est surtout, si pas exclusive- ment, ce dernier qu’on y capture. M. Markham a vu, vers 1860, un maxillaire provenant d’une Baleine trouvée morte sur la plage, à Luyando, village de pêcheurs, sur les côtes des Asturies. Thiercelin rapporte qu’en 1862 il a observé près des îles du Cap Vert une Baleine Nord-Caper #; mais 1l serait difficile de dire qu'il s’agit ici d’une baleine véritable. A en juger par ses évolutions et sa sortie de l’eau, il est plus probable que ces prétendues Baleines sont des Mégaptères. D’après M. Southwell, que nous venons de citer, une Baleine aurait fait son apparition sur les côtes d'Écosse en octobre 1872. Nous avons ainsi trois échouements sur ces mêmes côtes 1 Escaricar, Soc. linn. de Bordeaux, 1°* juin. 1859, t. XXII, 4 livraison ÉMPISCHER, (OC. CUL., p:111e Éléments de la faune Açoréenne, p. 113. (1861). 4 Journal d'un baleinier, vol. p. 58 (1866). [2] (31) d'Écosse (1682, 1806, 1872); deux femelles dans les mêmes conditions dans la baie de Peterhead, toutes les deux au mois d'octobre. Le témoignage des baleiniers qui ont aidé à les capturer ne laisse guère planer de doute sur la nature de Pespèce 1. Un véritable événement pour les cétologistes fut lappa- rition en 1877 d’un Nord-Caper dans le golfe de Tarente. Le 9 février dans la matinée, une Baleine de 12 mètres s’est échouée dans cette baïe. Elle a été l’objet de deux mémoires importants, l’un de la part du professeur Capellini de Bologne, l’autre du professeur Gasco de Gênes. Capellini supposait d’abord que c’était un animal égaré venant du Sud de PAtlan- tique. Le professeur Gasco a fait le voyage de Copenhague pour comparer la Baleine de Tarente à celle de Pampelune et il est résulté de cette comparaison que les deux individus appartiennent bien à une seule et même espèce, la Balæna biscayensis. Le fait de la présence d’une Baleine dans la Méditerranée n'est pas du reste un fait unique. Le D' Fischer, dans son intéressant mémoire sur les Cétacés de l’ouest de la France, signale la capture faite par Robert Guiscard ? d’une autre Baleine au XIe siècle également dans la baie de Tarente. Guillaume Apulla, en parlant de cette capture, signale la ressemblance qu’elle présente avec celle que Pon harponnait alors sur les rivages de la Normandie ; mais elle était Imconnue aux pêcheurs italiens. Il y a tout lieu de croire que ces animaux sont venus sur nos côtes d'Europe à l’époque ordinaire de leur migration, et que les derniers, au lieu de se rendre dans le golfe de Gascogne, ont pénétré le détroit de Gibraltar. Il est reconnu maintenant ! Taom. SOuTHWELL, On the occurrence of the Atlantic Right Whale on the East Coast of Scolland, PROGEEDINGS NATIONAL HISTORY SOCIETY OF GLASGOW, febr. 1881. * Robert Guiscard, gentilhomme normand, un des fils de Tancrède de Hau- teville, devint duc de Pouille et de Calabre (Dr Fischer). (32) que ces animaux, tout en étant presque exterminés, reviennent encore périodiquement dans les mêmes eaux. Le squelette de la Baleine échouée en 1877 est interné au Musée de Naples. C'est le premier squelette que l'on possède en Europe d’un animal adulte. Nous avons vu plus haut qu'en février 1878 on a capturé encore un Nord-Caper sur les côtes d'Espagne entre Guetary et Zarauz, dont le squelette de 48 pieds de long avec les fanons en place est conservé au petit Musée de Saint-Sébastien. Gue- tary est le lieu de naissance de Sébastien del Cano, qui a fait le premier voyage autour du monde. Vers 1880, un cadavre de cette espèce a échoué sur les côtes de Galice et son squelette est conservé au Musée de Santiago. M. Mariano de la Paz Graells l’a examiné en 1882. Il est exposé au Jardin botanique de cette ville. Il a 18 mètres de long. Le même auteur aflirme avoir rencontré en 1882 plusieurs Baleines sur les côtes de l'Océan; comme nous lPavons dit déjà, il a même pu les suivre avec le vapeur qu'il montait, afin de les observer de plus près. En 1884 les baigneurs de Saint-Sébastien ont vu pénétrer dans la rade un de ces géants de la mer; mais Panimal n'a pas tardé à prendre de nouveau le large. M. Mariano de la Paz Graels dit qu’en 1885 les pêcheurs de Zarauz, voyant les fréquentes visites des Baleines à leurs côtes, ont essayé de les harponner, mais sans résultat, soit qu'ils aient perdu leur ancienne adresse, soit qu'ils n'aient plus le courage de leurs ancêtres. De l’autre côté de l'Atlantique, on signale également dans les mêmes parages qu’autrefois leur apparition et plusieurs échouements ou captures. Les Baleines étaient abondantes à l'embouchure du fleuve Delaware, dit le professeur Cope, et il ajoute qu’en 1633 on en captura onze dans ces parages. De 1770 à 1780, les baleiniers américains ont fait avec avan- tage la chasse des Nord-Capers dans le Brede-Fiord et à Faxe- Bay, sur la côte ouest de l'Islande. ( 33 ) Eschricht cite également l'exemple d’un Nord-Caper qui a été harponné en 1783, entre Terre-Neuve et l'Islande, par un balei- nier danois f. Sur les côtes des États-Unis d'Amérique, des individus de la même espèce vont échouer de temps en temps ou se faire cap- turer exactement comme dans le golfe de Gascogne. Ce sont les eaux favorites de ces Cétacés, et leur apparition périodique dans ces parages est la cause de l’origine de cette pêche des deux côtés de Atlantique. En Europe les Basques en ont eu pendant des siècles le monopole; en Amérique ce sont les pêcheurs des côtes de la Nouvelle-Angleterre qui ont les pre- miers pratiqué cette pêche. Le nombre de Baleines y a diminué comme en Europe, mais tous les ans, là aussi, on en voit paraître encore de temps en temps. Il n’est pas sans importance de faire remarquer que, dans les environs de Terre-Neuve, divers endroits portent encore des noms de différentes localités du pays des Basques, notamment des environs de Bayonne, dit Cuvier ?. M. Cope signale depuis quelques années trois captures sur les côtes Est des États-Unis d'Amérique : la première vis-à-vis de Philadelphie (vers 1868), une autre dans la baie de Reho- both (Delawarre) et une troisième dans la baie de Mobvyack (Virginie). j; Deux Baleines de grande taille ont été aperçues aussi sur les côtes de Maryland. Depuis on en a vu échouer une femelle de 39 pieds sur les côtes de Long-Island; en 1862 une autre est venu échouer non loin de là; on en cite également une cap- turée au cap Cod. L’avant-dernière est une Baleine de 50 pieds environ qui a été prise après une chasse improvisée, le T jan- vier 1880, à Charleston, Caroline du Sud et dont un journal illustré américain a longuement rendu compte. L'animal a été photographié, couché sur le dos, avec la nageoire pectorale 1 Escaricar et ReIXHARDT, On the Greenland Right Whale, p 45. ? Hist. des sc. natur., p. 269. Paris, 1841. (3#) droite élevée. La disposition de la lèvre inférieure fait recon- naître que le rostre est en dessous 1. Joseph Bassett Holder, comme nous venons de le dire, en a fait mention dans une notice insérée dans le Bulletin of the American Museum of natural history, vol. I, n° 4, 1883. M. Holder comme nous le verrons plus loin, à propos des collections où l’on conserve des restes de ces animaux, passe en revue, dans cette notice, les squelettes qui sont conservés en Amérique et accompagne sa notice de deux planches repré- sentant l’animal et le squelette, et d’une planche reproduisant séparément la tête avec les fanons. Il est question dans le Canadian Magazine, note 1, d’une Baleine échouée au milieu de septembre en 1823 dans le Saint- Laurent, vis-à-vis de Montréal. Elle avait 42 pieds 8 pouces. ! Trois remorqueurs, accompagnés de 50 ou 60 embarcations et de nom- breux bateaux, ont donné la chasse au Cétacé. Gette chasse a commencé le matin Un harpon, lancé par une main habile, est venu frapper l’änimal à la queue, et s’y est logé; mais la Baleine a cherché avec une grande prestesse à s’en dégager et a entraîné l’embarcation qui tenait le harpon avec des cordes. Une autre embarcation lui lançait pendant ce temps des coups de harpon. Ce fut ainsi que l'animal arriva près du fort Johnston, James-Island, où les eaux sont basses. Il fallut couper les cordes du harpon, tant l'animal faisait d'efforts vigoureux, lesquels eussent anéanti l'embarcation. La Baleine resta ainsi dans les eaux bass®s toute l'après-midi, où l’on tenta une seconde fois de s'emparer d'elle. Un remorqueur, après l'avoir harponnée,tàcha de la tirer à lui; mais la corde cassa. Tous les bateaux et vapeurs, en passant près du monstre, lui décochaient des coups de harpon, ou lançaient des cordes autour de ses nageoires. L'animal faisait des bonds désespérés et des culbutes effrayantes : il s'enfonçait la tête dans l’eau; sa queue seule dépassait de 4 ou 5 pieds la surface de l’eau. Il s’avança ainsi jusqu'à White Point Garden, où il se trouva sur la vase. Le schooner Mi inehala, passant près de lui, essaya de le prendre à la corde ; mais l’animal exécutant le mouvement que nous venons de décrire ,-agitait sa queue au-dessus de l'eau. À chaque coup que l'animal frappait sur l'eau, on eùt dit un coup de canon, le navire en tremblait, puis il reparaissait à la surface pour respirer et lançait d'énormes jets d’eau de ses narines. La poursuite se continua ainsi jusqu'au soir, où l'un des matelots, le même qui avait lancé le matin le premier coup de harpon, porta un coup mortel à l'animal. (35) Enfin on fait encore mention d’une femelle de 48 pieds qui est venue mourir au printemps de 1882 sur les côtes de New-Jersey et dont malheureusement le squelette n’a pas été conservé. OSSEMENTS TROUVÉS SUR LES COTES. On trouve assez fréquemment des ossements de cette espèce épars le long des côtes qui étaient fréquentées autrefois par animal : en Europe sur les côtes d’Espagne et de Portugal, de France, de Belgique, des Pays-Bas, d'Angleterre, de Dane- mark et surtout au nord de la Norwège, où on leur faisait régulièrement la chasse à l’époque de la grande pêche; en Amérique on en découvre également surtout sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre. Depuis longtemps on en a recueilli à Biarritz jusque dans les caves de vieilles maisons, et plusieurs d’entre eux sont heu- reusement déposés aujourd’hui au Muséum d'histoire naturelle à Paris, grâce aux soins de M. le Dr Fischer. Le marquis de Folin de Biarritz a communiqué au Dr Fischer un fragment de côte recueilli dans ces parages, qui dépasse de beaucoup en épaisseur les côtes correspondantes des Mystice- tus, des australis et des antipodum. Le Musée de La Rochelle (Charente -Inférieure) possède quelques ossements de cette espèce, entre autres des vertèbres et un humérus, que nous avons tout lieu de croire recueillis dans les environs de cette ville. Nous avons reproduit le dessin de l’humérus de grandeur naturelle dans le Bulletin de l'Aca- démie 1. Nous avons vu à Bordeaux une côte de Balæna biscayensis, recueillie à Verdun (Gironde) sur les dunes S'-Sébastien. A Paris, on voit au Muséum d'histoire naturelle plusieurs ossements séparés recueillis dans les environs de Biarritz et qui ont été donnés, comme nous venons de le dire, par le D: Fischer. ! Bulletin de l'Acad. roy. de Belgique, 5° série, t. IV, 1882. (36) Le Musée de Haarlem possède les os trouvés dans la rue Dauphine à Paris et dont la description se trouve dans les Recherches sur les ossements fossiles, par Cuvier. Ce sont sans doute les os d’un Mysticetus, rapporté du Nord par quelque baleinier. Nous avons vu une omoplate au Musée de Lisbonne, à l’École polytechnique, trouvée sur la plage, couverte de jeunes huitres encore attachées à sa surface et qui provient sans doute de la Baleine des Basques. Au Musée de St-Sébastien et à Gijon, Jovellanos Institut, on conserve des os isolés, trouvés à Deva, dans le sable. Nous conservons à Louvain une omoplate d’un Baleineau d’origine inconnue. Nous savons seulement qu’elle a été long- temps exposée dans une abbaye comme objet de curiosité. Elle provient d’un animal vivant et nous avons tout lieu de croire qu'elle a été recueillie sur nos côtes. Nous possédons également à Louvain trois vertèbres provenant de la collection de Paret de Slykens, collection qui a été presque entièrement formée avec des objets recueillis sur les côtes d'Ostende ou dans les dunes. À Gand existent deux vertèbres trouvées dans les décombres d’une ancienne abbaye des environs d’Alost. Une mandibule dont lorigine est inconnue est exposée au Musée de Marseille. Le Musée de Vannes renferme une vertèbre caudale qui avait été abandonnée sur la plage. La côte trouvée dans un terrain sablonneux à Montreuil-sur-Mer, à la profondeur de 12 pieds et à 2 lieues de la mer, dont parle Cuvier dans ses Recherches sur les ossements fossiles, provient sans doute de cette même Baleine. On conserve à Bordeaux une autre côte qui a été recueillie sur la plage en 1876. Nous l'avons déjà dit, M. l'ingénieur Debray a fait mention à la Société géologique du Nord 1 de trois vertèbres fort inté- ressantes, découvertes près de Dunkerque, dans les déblais, à côté de coquilles marines encore vivantes (Cardium, Lutra- ria, Donax, Tellina, Pholas), et qui appartiennent aussi sans 1! Ann. Soc. géolog. du Nord, vol. HI, 16 févr. Lille, 1876. — GossELET, vol. X, 1885. (37) doute à la Baleine qui nous occupe. Les vertèbres ont été trouvées dans les fondations de la culée aval du pont établi sur le Madyk-gracht pour la traversée du chemin de fer de Calais à Dunkerque, entre Bourbourg et Dunkerque. Elles se trouvaient à 0,24 au-dessus du niveau moyen de la mer à Calais; ces vertèbres gisaient sous la seconde couche de tourbe ; la coupe du terrain indique trois couches d'argile grise et bleue séparées par deux couches de tourbe. On a trouvé depuis à Calais, en 1880, dans les fortifications, des ossements de Cétacés, parmi lesquels nous avons reconnu la Balæna biscayensis et le Globiceps melas. Nous devons ces renseignements à M. Debray, ingénieur, qui a bien voulu nous envoyer plusieurs vertèbres et une côte. On a mis à nu également dans les environs de Lille, dans les tourbières de la commune de Guemps, à 3 mètres de pro- fondeur 1, une côte ou plutôt un fragment de côte qui a tous les caractères d’une côte de Baleine. Il est à remarquer que dans la couche de tourbe qui recouvre ces ossements de Baleine, on rencontre des restes de Cerf, de Cheval, d'Écureuil, de Castor, etc., etc., avec des ossements humains et des objets de l’industrie humaine, arc, canot, etc. Nous en avons signalé également à Furnes, qui étaient enfouis à plusieurs pieds de profondeur dans le sable marin. Le Dr de Man, de Middelbourg, a figuré dans une Notice sur le Mammouth pêché dans les environs de la Zélande (Zeeuwsch Genootschap der Wetenschappen, p. 114, 1875), une vertèbre de Baleine de sa collection (une sixième dorsale) qui provient sans doute de la Balæna biscayensis. Elle est cou- verte d’une petite balane. Le D' de Man a bien voulu nous en envoyer le contour. Dans une autre province des Pays-Bas, à Leeuwaarden on a recueilli également de grandes vertèbres qui n'ont pas d'autre origine. Il en existe aussi en Angleterre dans l'argile qui repose sur 1 Etude géologique el archéologique de quelques tourbières du littoral flamand et du département de la Somme, pp. 27 et 25. Paris, 1875. (38) le: crag. On a parlé d’une colonne vertébrale de Baleine, de 31 pieds, découverte dans l'argile qui recouvre le sable, au- dessus du Crag rouge, à 8 pieds de profondeur. Le profes- seur Flower à examiné ces os, mais le savant directeur du British Museum rapporte les vertèbres de la région cervicale plutôt à la Baleine franche et les lombaires à la Balænoptera musculus. Il n’est pas impossible que la région cervicale ait été rapportée par quelque baleinier et que les autres os proviennent de quelque animal échoué sur les côtes f. Dans le Forest Bed des falaises de Norfolk on est tombé, dit Lyell, sur des vertèbres de deux Baleines distinetes accompa- gnées d’ossements de Morse et de Narval 2. Il paraît que, à l'Est comme à l'Ouest du cap Nord, il persiste de nombreux vestiges de l’ancienne pêche qui se faisait dans ces parages. Dans une des îles du nord de la Norwège M. Guld- berg, conservateur du Musée zoologique de Christiania, a trouvé des ossements de Baleine qui ne laissent point de doute sur leur nature; ce sont des os des membres avec l’omoplate, des vertèbres réunies de la région cervicale, un morceau de maxil- laire supérieur qui se rapportent positivement à la Baleine des Basques. M. Guldberg en possède un humérus qui est tout à fait semblable à celui du Musée de La Rochelle que nous avons figuré dans le Bulletin de l’Académie. Ces restes de Balæna biscayensis sur la côte de Finmark proviennent très probable- ment de l’époque où les pêcheurs qui n'étaient pas suffisam- ment outillés pour se livrer à la grande pêche au Spitzberg s’arrêtaient au Cap Nord pour faire la chasse au Nord-Caper. Sur les côtes de Loffoden, M. Rabot a dégagé d’une épaisse couche d'argile des ossements de Baleine, à 800 mètres de la plage actuelle et à une altitude de 10 mètres $. 1 Brit. assoc. Rep. 1868, Trans. sect, p. 61. PREsSTWwICH, traduit par Mourlon, p 62. ? LyELL, Ancienneté de l'homme, trad. p. 224. 5 Revue scientifique, décembre 1884, p. 784. En corrigeant celte épreuve, je reçois le n°167 du Quarterly Journal of the Zoological Sociely, er j'y trouve une note intéressante de M. G. T. Newton, sous le titre : À contribution to \ (39) A diverses reprises on à mis au jour des ossements, même des squelettes, gisant assez loin des côtes actuelles et qui pro- viennent évidemment de la Baleine qui nous occupe; nous en avons cité plusieurs dans notre Ostéographie et nous avons eu l’occasion d'étudier à Upsala un squelette presque complet, que le professeur Lilljeborg a fait connaitre sous le nom de Balæna Svedenborgii. H à été déterré en 1705 à 80 lieues de la côte et à 330 pieds au-dessus du niveau actuel de la mer, en Gothland (Suède); parmi d’autres ossements se trouve une tête plus ou moins complète. Des découvertes ont été faites dans les mêmes conditions en Amérique, au Canada. J. W. Dawson 1 a trouvé dernièrement des fragments de squelette de Baleine dans un bon état de conservation à 400 pieds au-dessus du niveau actuel de la mer. Il sera fort intéressant de comparer ces os avec ceux de espèce qui nous occupe. MUSÉES QUI RENFERMENT DES OSSEMENTS DE CETTE BALEINE. Il n’est pas sans importance, pour celui qui veut s'occuper des Cétacés, de connaître les collections qui renferment le squelette ou les ossements de telle ou telle espèce. On ne peut guère demander ces objets en communication pour les com- parer; 1l faut généralement les étudier sur place. Parmi des objets que nous avons achetés à la vente publique de Vandermaelen, nous avons trouvé deux caisses tympa- the Celacea of the Norfolk Forest-bed. À côté des Balénoptères, des Physeter macrocephalus, des Monodon monoceros, des Delphinus delphis et des Tursiops, M. Newton cite la Balœæna biscayensis, d’après une région cervicale) trouvée à Overstrand, près de Cromer, conservée dans la collection de M. Jos. Backhouse d'York. Ostende, 18 août 1886. The Canadian naturalist… Montréal, vol. X, n° 7, 1885. (4) niques sans aucune indication de provenance, l’une de Balæna biscayensis, l’autre de Balæna mysticetus. Ces caisses sont aujourd’hui au Musée de Louvain; nous possédons, en outre, une caisse t{ympanique envoyée par Cope, une omoplate et trois vertèbres. Nous avons vu il y a quelques années une côte dans le Musée Vrolik qui est sans doute aujourd'hui au Jardin zoologique d'Amsterdam et qui provenait d’une Baleine d’après sa cour- bure. La partie inférieure était remarquable par son épaisseur. Le Musée de Lund renferme une côte de vraie Baleine que Malm rapporte à la Balæna biscayensis. Au Musée de lUni- versité d’Upsala on conserve le squelette presque complet de la Balæna Svedenborgü. Les Musées de Stockholm et de Gothenburg possèdent également quelques ossements de cette Baleine. La région cervicale de Lyme Regis, nommée par Gray Balæna britannica en 1870, Macleayius britannica en 1873 1, provient sans doute du même animal. M. le professeur Gasco rapporte cette région à la Balæna biscayensis, comme la région cervicale de Pexemplaire du Jardin des plantes, que Lacepède avait attri- buée à la Balænoptera musculus ?. Les squelettes de Balæna biscayensis connus actuellement en Europe sont : 1° celui du Musée de Copenhague, provenant du Baleineau capturé en 1854 dans le golfe de Gascogne; 2 celui du mâle adulte conservé à Naples et provenant du golfe de Tarente; 3° un troisième squelette, connu en Europe, est celui qui a été préparé en 1878 et qui provient de la Baleine de 48 pieds capturée entre Guetary et Zarauz. Il se trouve au petit Musée de Saint-Sébastien ; 4° à l’Université de Santiago (Galice) on conserve depuis peu le quatrième squelette provenant de l'individu qui a échoué vers 1880, à la Via il Vigo, dont nous avons parlé plus haut. Aux États-Unis d'Amérique on possède aujourd’hui, comme ! Proceedings of the Zoological Society, 21 janvier, 1875. ? Fr. Gasco, /ntora1o alla Balena presa in Taranto. Napoli, 1878. (4) en Europe, plusieurs squelettes complets. Le premier est celui du Musée Central-Park, à New-York; il provient d’un animal de 35 pieds de longueur capturé sur les côtes de Long-Island ; le sexe n'est pas connu. Un autre est conservé au Musée de Cambridge; il est complet aussi et provient d’une femelle capturée au cap Cod. Al. Agassiz l’a vu en chair et a présidé à sa préparation. C'est le plus grand. On sait que c’est au cap Cod surtout que se faisait anciennement la pêche de ces ani- maux ; c’est le New-Jersey spécimen. Il en existe un troisième squelette (Cope’s specimen, dit Holder) qui est conservé au Musée de l'Académie de Philadelphie ; il provient d’un animal échoué en 1863; il a 31 1} pieds de longueur. Un quatrième provient d’un mâle capturé en janvier 1880 dans le havre de Charle- ston, Il est monté au Musée de cette ville (City College). H parait que lanimal dont provient le squelette était appauvri, sans doute par défaut de nourriture. Les os du bassin sont perdus. Sa longueur était de 40 pieds 4 pouces, en chair. La tête a 9 pieds 8 pouces. Une Baleine femelle de 48 pieds de longueur a été capturée sur les côtes de New-Jersey au printemps de 1882, mais, nous l'avons dit plus haut, son squelette malheureusement n’a pas été conservé. Le Musée national de New-York possède enfin, si nous sommes bien informé, un quatrième squelette provenant d'un individu faisant partie de la gamme qui est venue à la côte au commencement de l’année 1885, après un grand froid. Une tête est conservée à Raleigh, capitale de la Caroline du Nord, où on conserve aussi plusieurs os séparés de divers individus. Les ossements de Zalæna Svedenborgii ou Hunterus Sveden- borgii, sont conservés en grand nombre, puisqu'on y trouve presque tout un squelette, au Musée de l'Université d’Upsala et quelques-uns au Musée de l’Académie de Stockholm. (4) DESSINS. La première figure de cet animal été publiée par LACEPËDE, Hist. nat. des Cétacés, pl. IF et IIT, d’après un dessin fait par Bachstrom en 1779 et qui lui a été envoyé par Sir Joseph Banks, président de la Société royale de Londres. Nous avons ensuite celle du Dr Monedero qui à été publiée à part 1. Puis viennent les figures de CaPELLINI, Della Balena di Taranto, 1877, et de FR. Gasco, Intorno alla Balena presa in Taranto, nel febr., 1878. M. Holder a fait dessiner les squelettes qui sont conservés aux États-Unis d'Amérique et publie une figure de la femelle qui a été capturée en 1882 sur la côte de New-Jersey, en même temps que le squelette qui est conservé à New-York. Les planches qui accompagnent le mémoire de M. Holder sont au nombre de quatre : la première représente la femelle avec son bonnet très développé en avant du rostre; il est intéressant de comparer ce dessin à la figure du D' Monedero, que nous avons reproduite dans lOstéographie des Cétacés, et aux dessins publiés par MM. Capellini et Gasco. La deuxième planche reproduit séparément la tête vue par dessus, et vue de face avec les fanons en place la bouche ouverte; à côté de ces dessins l'auteur à figuré l'extrémité caudale, les fosses nasales et la cavité de la base du rostre, les os nasaux, la région cervicale et deux vertèbres, l’une de la région lombaire, l’autre de la région dorsale. Les os nasaux sont remarquables par leur complète ressemblance avec ceux de la Baleine de Tarente. La troisième planche représente le squelette complet au musée de New-York; c’est la plus intéressante. Il ne manque que le sternum, le bassin et les dernières caudales. La quatrième et dernière planche reproduit la tête isolée, vue de profil avec les ? Dr Moxerero, Copia al natural del Balenalo muerlo en la playa de S.-Sebastian ei 17 de Encero de 1854. (43 ) fanons en place, d’après la Baleine capturée à Charleston en janvier 1880. Le Harper’s Weekly Journal du 31 janvier 1880, publié à New-York, reproduit une photographie de cette Baleine cou- chée sur le dos. Nous avons reproduit dans notre Ostéographie la planche du D' Monedero et nous avons publié le dessin de quelques os, les seuls qui fussent connus alors. Nous possédons aujourd’hui non seulement la figure de l’animal tout entier, mais comme nous venons de le voir, la description complète des divers os du squelette. COMMENSAUX ET PARASITES. Les commensaux et les parasites ne sont pas sans jouer un rôle important dans l'histoire de chaque espèce. La Baleine des Basques héberge deux espèces de commen- saux, des Cyames comme la Baleine franche, et des Cirripèdes du genre Coronula, que Chemnitz a distingués sous le nom de Diadema balænaris 1. Darwin a également décrit et repré- senté cette espèce 2. D’après Steenstrup, la baleine qui nous occupe porte, en outre, des Tubicinella. La Baleine échouée à Tarente logeait dans certaines régions de la peau des Cyames qui ont été heureusement conservés. M. Gasco les a soumis à l'examen du professeur Lutken, à Copenhague, qui a fait une belle monographie de ces Crustacés. D’après l’avis du profes- seur de Copenhague, les Cyames trouvés sur la Balæna bis- cayensis sont les mêmes que ceux qui hantent la Balæna Japo- nica et la Balæna australis. M. Lutken n’a pas vu de différence en comparant les individus que le professeur Gasco a soumis à son examen à Copenhague. * Cnemxirz figure cette Diadema balænaris, Conchyl. cab, vol. VIH, p. 519, pl. LIX, fig. 8435-44. ? Darwin, Balænidæ, p.417, pl. XV, fig. 5, et pl. XVL, fig. 1, 2, 5. (44) Ainsi les trois Baleines des régions tempérées, malgré la distance qui les sépare, hébergeraient le même commensal. Il y a longtemps déjà qu'il a été fait mention de ces Cirrhi- pèdes, hantant certains Cétacés et, comme nous l'avons vu plus haut, les Islandais avaient déjà remarqué que la Baleine des régions tempérées porte seule ces coquillages. Rondelet fait déjà mention des Coronules trouvés sur la Baleine de 25 mètres, dont il parle dans son Histoire des poissons et qui est bien la Baleine qui nous occupe. Paul Boccone, à propos des Penella de l'Espadon et de son prétendu parasite qui n’est autre chose que le mâle de ce Ler- néen, fait mention également des Cirripèdes qui hantent la peau de la Baleine; il en figure même auxquels il donne le nom de Poux de Baleine. Il y a lieu de se demander si ce n’est pas l'espèce de la Balæna biscayensis. H les a reçus, dit-il, d’un ami qui s’est procuré ces curieux organismes sur les côtes d'Écosse. Il ajoute que ces Poux s’établissent autour des organes sexuels de la Baleine et qu’il s’en trouvait onze ensemble 1, ce qui fait supposer que ce sont des Cyames. On a vu déjà qu’au dire du Dr Fischer le gardien du phare de Biarritz aurait aperçu au large, à la fin de décembre 1855, une Baleine couverte de coquillages, ce qui veut dire de Cirri- pèdes. La Baleine capturée le 7 janvier 1880 à Charleston (Caroline du Sud) portait également des Crustacés logés dans la peau de la tête, au bout des mandibules et du rostre. M. Lutken a fait remarquer que sur la planche qui repro- duit la figure de la Balæna biscayensis, Monedero à fait dessiner un Picroyonon au lieu d’un Cyame. Nous ne connaissons pas encore de vrais parasites chez cette Baleine. ? Natuurkundige naspeuringen, pl X. ‘s Gravenhage, 1745. HISTOIRE NATURELLE DE LA BALEINE FRANCHE (BALÆNA MYSTICETUS), PAR P.-J. VAN BENEDEN, MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE (Présenté à la Classe des sciences dans la séance du 6 novembre 1885.) (Extrait du tome XL des Mémoires couronnés el autres Mémoires publiés jar l'Académie royale de Belgique. — 1887.) HISTOIRE NATURELLE DE LA BALEINE FRANCHE (BALÆNA MFSTICETUS). LITTÉRATURE. Frid. Martens, Spitzbergische oder Groenlandische Reise- Beschrei- bung gethan à. j. 1671, Hamburg, 1675. Zorgdrager’s, Bloeyende opkomst der aloude en hedendaagsche Groen- landsche visschery,’s Gravenhage, 1727.— La première édition est de 1720. Scoresby, Account of the Balæna mysticetus. TRANSACT. 0F WERNERIAN Socrery, vol. I, 1811. Scoresby, An Account of the Arctic Regions, Edinburgh, 1820. Pierre Camper, Observations anatomiques sur la structure intérieure et le squelette de plusieurs espèces de cétacés..…. , Paris 1820, F. Eschricht 0g 3. Reinhardt, Om nordhvalen, Kjobenhavn, 1861. (48) WW. H. Flower, Recent memoirs on the cetacea, London. Published for the Ray Sociery, 1886. Bob. Brown, On the Mammalian Fauna of Greenland. Proc. zook. Soc. 1868 !. Charles M, Seamimon, Zhe marine animals... San Francisco, 1874. Struthers, On the ones, articulations and muscles of the rudimentary hind-limb of …… Balæna mysticetus. JOURN. OF ANATOMY "AND PHYSIOLOGY, april 1881. Van Beneden et P. Gervais, Ostéographie des Cétacés vivants et fossiles. Paris, 1868-1880. Paul Gervais, Remarques sur l’anatomie des Cétacés de la division des Balénides. NouveLLes ArcHives Du Muséum, Mémoires, t. VII, 1871. P.-J. Van Beneden, Sur l'articulation temporo-maæillaire chez les Cétacés. ArcHives DE BioLo@ts, fascicule IV, vol. 3, 1882. 1 Reprinted by permission from the Proc. zool. Soc. march, 1875. HISTORIQUE. Nous connaissons aujourd’hui parfaitement l’histoire de la découverte de la Baleine franche. Les Islandais qui étaient établis, avant le XITe siècle, sur la côte ouest du Groënland, et qui avaient même remonté la côte jusqu’à l’île Disco, avaient parfaitement connu cet animal; ils l’appelaient Nordwahl, par opposition à leur Hauswahl, Baleine de la Maison. Après les pêcheurs islandais, le premier qui ait vu une Baleine franche, c’est William Barendtz; en 1596, il cherchait un passage nord-est par le Pôle, et deux Jours avant de décou- vrir Spitzebergen, 11 aperçut le corps flottant d’une Baleine franche entouré d’une nuée d’hirondelles de mer. Quelques années plus tard (1610), Stephen Bennet et Jonas Poole, à la recherche de nouvelles stations de Morses, plus au nord de Beereneiland, que Barendtz avait cru nommer Jammerberg, observèrent à leur tour une Baleine dans ces eaux. En six ans (de 1603 à 1609), les Morses avaient si fort dimi- nué en nombre sur les côtes de l’Ile des Ours qu’on devait en - chercher ailleurs. Un seul équipage avait tué près de mille morses en moins de sept heures. Que l’on juge de l'abondance de ces animaux dans certaines régions boréales par une note de Nordenskiôld : en parlant de l'ile Mufhin, le célèbre voyageur nous dit : On croyait voir de loin une montagne blanche de nature calcaire, qui n’était autre chose que des Morses couchés sur des falaises. C’est à la suite de la rencontre de ce corps de Baleine, par Bennet et Poole au nord de Beereneiland, que la Société mos- covite, qui avait son siège à Londres, envoya deux navires pour faire la chasse à ces animaux. La première année (1611), les Anglais étaient seuls dans les eaux de Spitzberg: l’année suivante, ils s’y trouvaient en pré- sence des Hollandais. ( 50 } Des habitants de certaines villes de Hollande s'étaient cotisés, en 1611, pour envoyer un navire au Spitzberg, que leurs compatriotes avaient découvert longtemps avant les Anglais. Les Hollandais, comme les Anglais, avaient pris des harpon- neurs basques à leur service : c’est une nouvelle pêche qui commence pour les uns comme pour les autres. Le début ne fut pas heureux, pas plus pour les Anglais que pour les Hollandais; mais sans se décourager, la Société Moscovite et nos frères du Nord envoyèrent de nouveaux navires et revinrent avec de bons chargements. Le succès allait grandissant d'année en année : en 1618, on se partagea les baies pour la pêche. Bientôt les diverses nations maritimes y prirent part. L'époque de la grande pêche commence. A la fin du siècle, le nombre des Baleines conimenea à diminuer sensiblement; Baflin venait de découvrir la mer qui porte son nom. Le navigateur anglais avait reconnu, en cherchant un passage par l'Ouest, que les Baleines abondent dans ces parages; il proposa même de nommer une des baies : baie des Baleines. Beaucoup de baleiniers abandonnent alors les eaux de Spitzhberg pour aller à la mer de Baffin (1719) et la pêche dans ces nouvelles eaux est activement poursuivie jusqu’à la fin du X VITE siècle. En 1721, les Danois établissent des colonies sur les côtes ouest du Groënland, depuis le 63° degré jusqu’au 73; ils y font de précieuses observations sur la date exacte de chaque capture et ces dates ils les consignent avec le plus grand soin dans des registres parfaitement tenus. lei aussi les Baleines diminuent en nombre au bout de quel- ques années et, à la fin du siècle (XVIII), le produit de la DER. ne compense plus guère les dépenses. Quand on considère le nombre des Baleines qui ont été capturées certaines années, on n’est plus surpris de voir que la pêche ait bientôt cessé de donner des bénéfices : de 17149 à 1778, les baleiniers hollandais n’ont pas pris, dans la mer de (51) Bafin seule, moins de 6,986 baleines. De leur côté, les Anglais en ont capturé, de 1827 à 1830, 3,391 1. Aussi les baleiniers vont-ils chercher fortune au Sud; en poursuivant le Cachalot, ils découvrent la Baleine australe dans les régions tempérées de l'Atlantique méridional; ils con- tinuent ensuite dans la mer des Indes, puis en Australie; abandonnant successivement ces parages, ils se rendent au nord de l'Océan Pacifique, où de tout temps les Japonais se sont livrés à l’industrie lucrative de la pêche des grands Cétacés. Pendant que les baleiniers pêchent la Baleine du Japon, une nouvelle espèce de Baleine, nouvelle au moins pour les balei- niers, apparaît plus au Nord; ils lui donnent le nom de Bowhead. Ils poursuivent ce. Bowhead plus au Nord; ils passent même le détroit de Bering et entrent dans la mer Arctique, où une nouvelle ère s'ouvre pour la pêche de la Baleine. C’est en 1848 que le capitaine Royce, commandant la barque Superior, de Sag Harbor, passe le premier le détroit de Bering et se trouve au milieu de Baleines peu farouches et faciles à approcher; en 1849 passe l’Ajax du Havre. Les naturalistes ont reconnu, depuis, que ce Bowhead est la même Baleine franche que l’on a pêchée pendant deux siècles au Spitzberg et au Groënland et dont l'aire géographique s'étend sur toute la calotte boréale. Aujourd'hui la pêche de vraies Baleines ne s'exerce. plus guère que par les Américains dans la mer Arctique. Il ne reste plus en Europe, pour la pêche de la mer de Baftin, que la flotte de la ville de Dundee (Écosse) qui, en 1882, se composait encore de 8 vapeurs; cette flotte a capturé pendant la dernière campagne 75 Baleines. La campagne de 1885 dans ces parages n’en a donné que 27, tandis que la pêche au détroit de Bering en a donné au delà de 200. 1 DE Jonc, KoseL, SALIETTE, De Walvischvangst…, tweede deel, bl. 115. LESLIE, JAMESON and Murray, Narrative of discovery and adventures on the Polar seas and regions ; Edinburgh, 1832. (52) Ce qui est digne de remarque, c’est que certaines années, bénies pour les baleiniers du détroit de Bering, ont été calami- teuses pour les baleiniers de la mer de Batlin. Les naturalistes ont peu profité des observations faites par les baleiniers pendant cette longue période; il est vrai, les récits de ces derniers sont souvent incomplets et même con- tradictoires et s'ils rapportaient parfois quelque mandibule ou quelque os tympanique comme trophée, ils ne se doutaient pas, comme cest du reste le cas général, que des animaux si communs pour eux et de si grande taille pussent ne pas être parfaitement connus des naturalistes. Le premier qui nous ait laissé une description et une figure de cet animal, c’est Fred. Martens de Hambourg; dans son Voyage au Spitzberg (1671) il en publie un dessin qui a été constamment reproduit, il est loin d’être aussi mauvais qu'on l'a dit. Fred. Martens distinguait parfaitement la Baleine franche du Nord caper et c’est plus tard que les Gibbar, les Finnfisch, les Jubarte, les Balæna boops, les Baleines à tuyaux, les Baleines à tête de brochet et les Baleines à sillons ont été si bien confondues avec les vraies Baleines, que Cuvier lui-même n'est pas parvenu à les distinguer les unes des autres. Tel était l’état de nos connaissances sur les Baleines au commencement de ce siècle. Martens avait dit avec raison que les Baleines qui se prennent auprès du Cap Nord ne sont pas aussi grosses que celles du Spitzberg et qu’elles donnent moins de lard; c’est qu’elles appartiennent réellement à une espèce distincte, la Baleine du cap Nord, Nord caper Wallfisch. Du Hamel, Linné, Pierre Camper et plus tard Lacépède se sont successivement occupés de ces géants de la mer; mais Pierre Camper seul a eu des pièces de la vraie Baleine franche entre les mains; les autres ne les ont connues que par des figures ou les récits des voyageurs. [ls admettent cependant ( 55 ) deux sortes de Baleines, une que les Hollandais ont appelée Nord caper, autre la Baleine franche, Les baleiniers hollan- dais, qui n'étaient pas outillés pour la grande pêche pendant la première période de l’histoire de cette industrie, s’arrêtaient au cap Nord et se bornaient à capturer la Baleine de ces parages. De là son nom de Nord caper. Cuvier, en écrivant ses Recherches sur les animaux fossiles, se fie peu au récit des voyageurs en général et n’a guère de confiance que dans les pièces qu’il a sous les yeux ; 1l ne con- nait que la tête de Baleine qui est conservée à Londres et, confiant dans les observations de Scoresby, qui a exercé la pêche au Spitzberg pendant plusieurs années, 1l émet l’avis que la Baleine chassée par les Basques depuis le IX° siècle a fui successivement devant les pêcheurs et qu’elle s’est réfugiée au milieu des glaces, où on doit aller la chercher aujourd’hui. Scoresby, tout en ayant assisté personnellement à la prise de trois cent vingt-deux Baleines, n’a pu parler que de Ja Baleine franche par la raison que l’autre, le Nord caper, était pour ainsi dire exterminée, à l’époque où il a commencé Ja pêche au Spitzberg. Cette opinion de Cuvier a été généralement admise jusqu’au jour où Eschricht a exprimé des doutes à ce sujet; les observa- tions faites à la côte du Groënland par les stations danoises ayant démontré que la Baleine franche ne quitte jamais les glaces et ne descend jamais en deçà du 64° degré de latitude, il fallait bien admettre que la Baleine que l’on chassait jadis dans les régions tempérées n’est pas la même espèce. Bientôt le jour se fit sur cette intéressante question ; 1854 est une année mémo- rable dans l'histoire des Baleines. Cette année Eschricht apprend qu’une Baleine s’est présentée dans le golfe de Gas- cogne et que son baleineau a été capturé; 1l part pour Pampe- lune où le squelette du jeune animal est conservé et il s'assure que cette Baleine est différente de la Baleine franche; il l'appelle Baleine des Basques. Eschricht et Reinhardt ont publié sur la Baleine franche un livre fort remarquable qui a été traduit en anglais par le pro- (52% fesseur Flower. Eschricht a reçu pendant plusieurs années du gouverneur du Groënland des matériaux importants, des squelettes des deux sexes de tout âge et des fœtus de toutes les grandeurs. Aussi le travail le plus complet qui ait paru sur la Balæna mysticelus des auteurs est-il celui que ces deux naturalistes de Copenhague ont publié en commun sousle titre Om Nordhvalen. Dans cette publication les savants naturalistes danois consacrent d’abord un chapitre à la répartition géographique de l'animal; ils relatent les observations faites au Groënland pendant une période de trente-six ans, relativement aux époques de son arrivée et de son départ; un second chapitre est consacré aux caractères extérieurs, à l'étude de l’organisation et plus parti- culièrement à la description des diverses parties du squelette ; la plupart des os sont représentés séparément. Dans un appendice à la traduction, M. Flower décrit et figure les fosses nasales, la coupe des vertèbres cervicales et le bassin d’une femelle provenant de Holsteinsborg (Sud-Groënland), envoyé en 1863 et conservé aujourd’hui au Collège royal des chirurgiens. Quelques années avant sa mort, Eschricht avait commencé une publication importante qu'il laissa malheureusement ina- chevée; quand la mort vint le surprendre, il en était à la cinquième feuille d'impression. Milne Edwards a reproduit, dans les Annales des sciences naturelles, le chapitre IIT de cet ouvrage, celui qui traite /a distribution des Cétacés, dans les: mers boréales et européennes 1. Eschricht avait donné à cette publication letitre de Recherches sur les Cétacés des mers boréales. Je conserve un exemplaire des cinq feuilles imprimées et une partie du texte manuscrit. Feu mon ami m'écrivait, le 4 août 1857, qu’il voulait faire connaître la distribution des Cétacés et leur pêche, qu'il se. proposait de publier un mémoire sur les fœtus de cet ordre de Mammifères, un mémoire sur les vraies Baleines, un autre sur ! Annales des sciences naturelles, 1864, p. 201, ( 55 ) les Baleines à bosse (Megaptera), un sur les Baleines à aileron (Balenoptera), un sur les Cétacés à bec-d’oie (Hyperoodon) et enfin un mémoire spécial sur les Platanistes. Peu de temps après la mort de notre savant confrère de Copenhague, M. Brown a publié des observations intéressantes sur la Baleine franche de la mer de Baffin, dans un article sur la faune des Mammifères du Groënland 1; il traite de l’histoire de la pêche de cette Baleine, de sa distribution géographique, de la place qu’elle doit occuper dans l’ordre des Cétacés, de la synonymie et de ses mœurs. Ce que Scoresby a fait pour la faune marine du Spitzberg au commencement du siècle, un baleinier américain, Charles M. Scammon (Captain U. S. revenue marine), l’a fait pendant ces dernières années pour les Mammifères marins des côtes ouest de l'Amérique septentrionale. Charles Scammon a publié d’abord dans les Proceedings de l'Académie des sciences naturelles de Philadelphie (1869) un résumé de ses observations et en 1874 il a publié, à San Fran- cisco, un volume in-4°, avec de nombreuses planches, repré- sentant la plupart des espèces ; un chapitre spécial est consacré à la Baleine franche qu'il désigne sous le nom de Bowhead ou de great polar Whale, qu’il identifie avec la Balæna mysticetus des auteurs ?, En 1869, le professeur Edward D, Cope s'était fait l’éditeur de ce travail de Ch. Scammon sous le titre On the Cetacea of the Western coast of North America 3. La Baleine connue d’abord sous le nom de Bowhead pré- sente tous les caractères de la Baleine du Spitzberg et les natu- ralistes la considèrent généralement aujourd’hui comme iden- tique à cette dernière. Cest bien la même Baleine, dit le capitaine Scammon, que l’on a chassée pendant deux siècles au Spitzherg d’abord, au Groënland après. 4 Proc. Zool. Soc., 1868. 3 The martne mammals ofthe North- Western Coast of North America ; San Francisco, 1874, 5 Proc. Acad. nat. sciences; Phil., 1869. ( 56 ) Le Bowhead ou la Baleine franche se conduit, du reste, exacte- ment dans le nord du Pacifique comme au Nord de l’Atlan- tique, c’est-à-dire qu'il ne quitte pas non plus les courants glaciaires et ne pénètre pas dans les eaux fréquentées par l’autre espèce. Le Bowhead ne se comporte pas moins exacte- ment à l'égard de la Balæna japonica que la Baleine franche à légard de la Balæna biscayensis, en ce sens que la limite méridionale de laire géographique de la Baleine glaciaire est la limite septentrionale de la zone qu’habitent les Baleines tempérées. SYNONYMIE. La Baleine franche est ainsi nommée, paraît-il, parce que le cadavre reste flotter à la surface de la mer, tandis que celui des autres Baleines va au fond jusqu’au moment où les gaz résul- tant de la putréfaction le ramènent à la surface. On commence à voir clair dans sa synonymie, grâce aux pro- grès accomplis dans ces derniers temps sur son aire géogra- phique, sur la connaissance de son squelette, et il ne peut plus rester aucun doute sur les caractères propres de cet animal. La Baleine du Spitzberg et du Groënland habite toute la mer Arctique jusqu'au détroit de Bering où on la désigne sous le nom de Bowhead. Les Islandais, au XI: siècle, la connaissaient sous le nom de Nordwahl et les Groënlandais sous celui de Arbek. Les Japonais la désignent sous le nom de Ko-kuxira ; Sebi- kuzira est le nom de la Baleine de leurs côtes (Bal. japonica). La Baleine du Spitzherg comme la Baleine du Groënland, comme le Bowhead de la mer de Bering, ne quittent jamais les glaces, pas plus au Nord de l'Atlantique qu’au Nord du Paci- fique. C’est la Balæna mysticetus des naturalistes, la plus célèbre des Baleines proprement dites, la grande Baleine des mers du Nord. Le cap. Maury a exprimé il y a longtemps cette opinion : il lui parut probable que la Baleine qui vit au Nord du Pacifique peut passer au Nord de l'Atlantique et il invoqua même cette possibilité pour établir l'existence d’une mer polaire libre. Le nom de Balæna lamanoni qui ne repose que sur des osse- ments trouvés dans la Rue Dauphine, à Paris, comme celui de Balæna tannenbergü, établi sur des ossements du Musée de Kônigsberg, sont à supprimer. Ces os sont de Baleine franche et ont été probablement apportés à l’époque de la grande pêche. Les noms populaires, dit R. Brown, c’est-à-dire le nom des baleiniers anglais, sont Right Whale, Greenland Whale ou Common Whale. CARACTÈRES. La Baleine franche (Balæna mysticetus) se distingue par le grand volume de sa tête, par la forte courbure parabolique de son rostre, par la longueur de ses fanons noirs et lisses,.son corps relativement court, trapu et massif. La peau est noire chez l'adulte, bleuâtre chez le jeune, disent les baleiniers, à l'exception de la face inférieure de la tête qui est, surtout au voisinage de la symphyse de la mandibule, d’un blanc sale légèrement jaunûâtre. Martens fait mention de Baleines moitié blanches et d’autres entièrement blanches. Le plus souvent la peau est marbrée, dit-il 1. On connaît divers exemples d’albinisme dans les Cétacés. Le professeur Giglioli a vu une Balénoptère albinos dans la mer des Indes, près du détroit de la Sonde. Différents Cétacés sont régulièrement et naturellement blancs. Tous les marins qui ont visité les régions polaires connaissent la Beluga et depuis 1751 Peter Osbeck a signalé un Dauphin blanc comme neige dans les eaux de Canton; le professeur Flower a fait connaître le squelette de cet animal, qui habite les eaux fluviatiles et présente tous les caractères des Sotalia. La taille varierait beaucoup à en croire les baleiniers et nous t Loc. cit. p. 42. (98 ) ne savons pas si ces variations dépendent exclusivement de l’âge ou du sexe. Les baleiniers américains se servent du mot Bull pour le mâle, de Cow pour la femelle, du mot Suckers pour les jeunes, de Sfunts pour les Baleines de deux ans, de Calf ou Cub qui correspond au mot Baleineau. Pour désigner l'animal qui n’a pas atteint l’âge adulte et completils ontencore le mot Scragq. Il y a encore des noms particuliers qui pourraient induire des naturalistes en erreur, d’après la quantité d'huile qu’on en tire. Ce qui montre combien peu l’on connaissait les Baleines, à l’époque où Lacépède a écrit son Histoire naturelle des Cétacés, ce sont les afhirmations de cet auteur concernant la taille que ces animaux peuvent atteindre. La Baleine franche n’a pas moins de 100 mètres de longueur, dit-11; en la dressant, par la pensée, auprès d'une des tours du principal temple de Paris, un tiers de l’animal s’élèverait au-dessus du sommet de cette tour. Et cependant Lacépède croit qu’il faut mettre parmi les fables l’histoire de ce monstre hyperboréen, que des pêcheurs ont nommé Âraken et qui, long de plusieurs milliers de mètres, s’'agitant en polype gigantesque, relève des bras nombreux comme autant de mâts démesurés et agit comme un volcan sous-marin. Scoresby a navigué pendant des années dans les eaux de Spitzbergen à la poursuite de la Baleine franche et n’accorde pas plus de 60 pieds à cet animal. Rob. Brown pense que Scoresby est resté au-dessous de la vérité en ne lui attribuant que 60 pieds. Louis Giesecke fait mention d’un individu, pris à Godhavn en 1815, qui me- surait 65 pieds. Et le capitaine Alex. Deuchars dit en avoir vu en 1849, dans le détroit de Davis, de 80 pieds. — Nous croyons plutôt à l'attestation de Scoresby, d'autant plus que Ja taille qu'il attribue à l'animal est bien celle que possèdent les squelettes que nous connaissons. Le squelette de la femelle conservée à Londres mesure 14,63; celui de la femelle qui est à Louvain mesure 15,98. (59) Il n’y aurait rien d’étonnant à ce que la Baleine franche, comme c’est le cas pour d’autres animaux auxquels on fait une guerre acharnée, n’atteigne plus sa taille primitive. Sur les côtes de Finmarken, on fait depuis quelques années la chasse aux Balénoptères et l’on y a remarqué que les Balenoptera Sibbaldii de 80 pieds deviennent plus rares d’année en année. Personne n’ignore que les grands individus des diverses espèces d’Otaries de l'hémisphère austral ont, pour ainsi dire, disparu. — Malgré l’insistance qu’il a mise à chercher à se procurer de grands exemplaires de ces animaux, le British Museum n’a reçu à la fin qu’un squelette de Pinnipède un peu plus fort que les autres. On prétend que le Phoque à trompe (Cystophora proboscidea) atteignait jusqu’à 8 et 9 mètres de longueur. D’après le capitaine Scammon, le Bowhead, qu'il a eu si souvent sous les yeux, atteint rarement 65 pieds, et il recon- nait qu'un individu de 54 ou 55 pieds compte parmi les grands (Stout-Whale). Cela s'accorde parfaitement avec les observations d’autres baleiniers qui ont exercé leur industrie dans la mer de Bering. Le capitaine Smith accorde au mâle (Bowhead) 45 pieds et le capitaine Paole donne 47 pieds à la femelle. D’après le même observateur le mâle aurait des fanons longs de 9,16 pieds, la femelle de 10,5. Le mâle compte 308 fanons, ajoute le capitaine Paole, la femelle 330. Robert Brown fait remarquer que la Baleine du Spitzherg est moins grande que celle de la baie de Baflin, que l’on en a trouvé de 65 pieds de longueur, et que le capitaine Alex. Deu- chars en a capturé une en 1849, dans le détroit de Davis, de 80 pieds, dont la nageoire caudale avait 29 pieds d’un bout à l'autre et les fanons 14 pieds. On a parlé aussi de races de Baleines vivant dans les mêmes eaux et différentes de taille; mais ne juge-t-on pas trop d’après les noms que l’on a donnés à ces animaux suivant leur âge? nous 60 ) ferons remarquer qu’à l'époque actuelle nous ne voyons plus, comme aux époques géologiques précédentes, des individus de petite taille, avec tous les caractères de l’âge adulte, à côté d’autres individus également adultes, mais beaucoup plus grands. Nous avons fait remarquer aussi que les Cétacés fossiles vont en grandissant jusqu’à l’époque actuelle, et que la Baleine qui nous occupe présente, aussi bien par la taille que par son confinement dans les eaux froides polaires, des caractères qui ne sont rien moins qu'archaïques. Les Ziphioïdes orbicoles ont précédé les Cétacés marins confinés. ORGANISATION. Un des premiers qui se soit, occupé de l’organisation de la Baleine qui nous occupe, c’est Pierre Camper ; il a disséqué un fœtus femelle bien conservé dans la liqueur et il a fait connaître les divers os du crâne et de la face ; il consacre ensuite un cha- pitre à la description de l'appareil digestif, circulatoire et sexuel. Un fœtus de sexe mâle a été étudié ensuite par Arnold Bennet 1. Sandifort a eu également deux fœtus à sa disposition et il a fait connaître particulièrement la composition du larynx 2. Un autre fœtus a été étudié par le D' Knox, qui a pu com- parer le Mysticetus avec la Balenoptera rostrata; le savant ana- tomiste écossais s’est occupé surtout des fosses nasales et des mamelles ; les fosses nasales sont dans l'impossibilité physique d’évacuer l’eau de la bouche par les narines, dit-il un des pre- miers, si pas le premier, et les glandes qui se trouvent au fond ? Natuurk. Verhandel. Kon. Maatsch. Wetensch., Haarlem, 5 deel, 1 stuk; Amsterdam, 4809. . ? Nieuwe Verhandel. eerste Kl. Konig. Nederl., INSTITUT vAN WETENS. Amsterdam, Derd. D. Eerste St.; Amsterdam, 1851. ( 61 ) d’un repli de la peau à côté de l’anus sont bien, pour le D: Knox, des glandes mammaires 1, Depuis cette époque, Eschricht a fait connaître plus particu- lièrement la structure du cœur, dont il a publié un dessin au tiers de la grandeur naturelle, et il a représenté séparément la valvule mitrale. Il est reconnu que la Baleine peut élargir ou rétrécir à volontéles deux orifices de ses narines ; en plongeant, elle peut même les oblitérer complètement, comme les phoques, pour empêcher l’eau d’enfrer. Cette disposition est sans doute propre à tous les Cétacés, qu’ils aient deux orifices distincts comme les Baleines ou un seul en travers comme tous les autres. C'estaussi un fœtus de Baleine franche qui a fait découvrir à Geoffroy-S'-Hilaire la présence de dents fœtales et l’on sait que ces organes rudimentaires sont résorbés quelque temps avant la naissance 2. Aujourd’hui le squelette de Mysticetus est connu dans tous ses détails, grâce aux derniers travaux d’Eschricht et de Reinhardt. Après Pierre Camper, Pander et Dalton ont fait connaitre les caractères de la boîte cränienne et la disposition des os de la face et nous avons eu l’occasion de nous occuper plus particu- lièrement de l'articulation temporo-maxillaire; nous avions obtenu du professeur Reinhardt une tête de fœtus qui pouvait avoir la moitié de sa croissance et dont les parties molles, sur- tout la peau et les muscles, étaient suffisamment conservées 3. Les os du crâne, comme du reste tous ceux du squelette des vraies Baleines, sont faciles à distinguer de ceux des autres Cétacés; chaque os de la face ou de la boîte crânienne, comme t [la communiqué le résultat de ces observations à la Société royale d'Édimbourg le 17 mars 18534. * M. Flower a retrouvé ces dents. — M. Julin a constaté leur présence dans les Balénoptères. — MM. Pouchet et Chabry se sont occupés de nouveau, dans ces derniers temps, de l'évolution des dents des Balénides. 5 Sur l'articulation temporo-maæillaire d’un fœtus de Balæna mysticelus. ARCHIVES DE BIOLOGIE. 5 (62) -chaque vertèbre, chaque côte et chaque os du membre, a ses caractères propres, bien reconnaissables au premier coup d'œil. Entre les Baleines véritables et les Balénoptères, les différences sont beaucoup plus grandes que cela ne paraît au premier coup d'œil. Mais de tous les os, ceux qui portent le mieux les caractères distinctifs de l'espèce ce sont les caisses tympaniques. Aussi avons-nous recommandé aux baleiniers et aux voyageurs, 1l y a 50 ans de cela, de recueillir et de conserver ces os avec soin pour les collections; ce sont, du reste, de toutes les parties du squelette, les pièces que l’on se procure le plus facilement sur les lieux. Nous avons pu comparer les caisses tympaniques des diverses espèces de Baleines : celle de la Baleine franche se distingue facilement par sa forme aplatie et carrée. Elle mesure en hauteur 120 mm., en longueur 160 mm. et n’a que 85 mm. d'épaisseur. La première description des os adultes a été donnée par Eschricht. La Baleine franche, comme du reste toutes les vraies Baleines, a les sept vertèbres du cou toujours réunies et quelquefois même la première dorsale est complètement soudée à cette région ; on en voit un exemple dans une région cervicale conservée au Muséum d'histoire naturelle de Paris, qui a été figurée par Lacépède; une autre région cervicale de Baleine, qui présente cette soudure, a été trouvée à l’état fossile en Toscane; elle a été figurée par Capellini. On voit aussi des exemples de la septième cervicale libre. La région de ces os réunis a fait l’objet d’une communication spéciale de la part du professeur Struthers, à la section de biologie de l’Associa- tion britannique à Aberdeen, en 1884. Le professeur Struthers est en possession de sept régions différentes qui lui ont été rapportées de la mer de Baïfin par les baleiniers d’Aberdeen. On remarque que les apophyses transverses inférieures man- quent toujours aux trois dernières vertèbres cervicales. La première vertèbre dorsale des vraies Baleines a une apo-- physe transverse qui nait vers le tiers inférieur de l’arc neural et t LEE (ur pe 0 coludhne À 2 sé w Made it ere à HE e : (63 ) s'incline légèrement depuis la base jusqu’à la surface arti- culaire. La deuxième dorsale a une apophyse transverse naissant plus bas et s'élevant davantage. Dans la quatrième lapophyse naît vers le milieu du corps de la vertèbre par son bord externe et s'élève au-dessus des précédentes. Les apophyses transverses naissent ensuite insensiblement plus bas et dans la première lombaire elles se distinguent -par leur direction comme par leur longueur. Dans la dernière lombaire, l’apophyse transverse naït encore au milieu de la hauteur du corps, puis descend insensiblement au-dessous des précédentes, de manière que la dernière lom- baire à ses apophyses transverses abattues. Depuis la quatrième dorsale jusqu’à la huitième, la facette articulaire des vertèbres, correspondant au capitulum de a côte, est assez prononcée. Neuf côtes ont le capitulum articulé. On compte de 54 à 55 vertèbres. - Dans chaque nageoire pectorale on trouve deux rangées d'os carpiens, mais ces os ne sont pas constants. Il n’existe que deux os carpiens dans un des membres de notre squelette de Mysticetus, l'intermédial et le troisième carpale. Le deuxième carpale manque. Malm s’est occupé spécialement de la composition du carpe et du bassin des Cétacés. : Jusqu'en 1865, on croyait les nageoires ect les sans mus- cles et sans tendons. M. Flower en à découvert dans un Rorqual de 67 pieds. Il a mis à nu des fibres rouges de muscles sur Pavant-bras ainsi que des tendons à la face palmaire. M. Struthers a reconnu ensuite, chez la même espèce, trois muscles distincts d’un côté, correspondant par leurs attaches au musele fléchisseur carpi ulnaris, le fléchisseur profond des doigts et le long fléchisseur du pouce de l’homme; et, du côté opposé, l’extenseur commun des doigts. Dans les Célacés à dents ces muscles sont plus où moins atrophiés. (64) Le professeur Struthers a reçu depuis des matériaux que les baleiniers écossais lui ont rapportés et il a fait connaître dans deux mémoires (1877 et 1881) la disposition des muscles rudi- mentaires des doigts de la nageoire pectorale, les os, les arti- culations et les muscles rudimentaires des os du bassin 1. Le professeur de l’Université d’Aberdeen fait remarquer que les muscles des membres antérieurs sont développés dans la Baleine franche comme dans la Balænoptera Sibbaldii, et aussi que les os du bassin et les muscles du Mysticetus. sont plus complets dans la Baleine franche que dans aucun autre Cétacé. M. Struthers accompagne son mémoire de quatre planches représentant le fémur et le tibia; les muscles sont en rapport avec les organes voisins ? et il donne la mesure de ces os. Nous pouvons résumer ainsi les observations sur lesquelette: 4° La courbure du rostre est très forte ; 2 Les vertèbres dorsales ont des apophyses transverses qui s'élèvent de manière à éloigner la tête des côtes du corps des vertèbres ; 3° Les côtes sont cylindriques et courbées de manière à former la moitié d’un cercle; 4 Les vertèbres lombaires et caudales sont peu épaisses; ÿ° La ceinture du bassin est formée de deux ischions aux- quels se joignent un fémur et un tibia; 6° La main est formée de quatre doigts; le pouce n’est représenté que par un métacarpien. Parmi les organes les plus importants de la Baleiné, il faut compter les fanons, et nous avons eu l’occasion de les examiner © SrRuTHERs, Account of rudimentary finger muscles found in the Green- land Right- Whale. (Jourx. oF ANAT. AND Puys , VOl. XII, 1877.) STRUTHERS, On the bones, articulations and muscles of the rudimentary hind-limb of the Greenland Right- Whale. (Jour. OF ANAT. AND PHYs., vol. XV, 1881.) * La découverte de ces os a été faite par Reinhardt en 1843 dans une femelle de Baleine franche nouvellement née. en place dans un fœtus, conservé au sel, qui était arrivé pres- que à la moitié de sa croissance. Aristote connaissait la disposition des fanons dans la bouche de la Baleine, ou plutôt de la Balénoptère, car il n’a pu voir qu’une Balénoptère. Les Baleines ont la bouche garnie de soies, à dit le philosophe de Stagire : en regardant la rangée de fanons à l’intérieur de la cavité buccale, ces appendices ont, en effet, l’air d’une brosse formée de soies comme le dos de maint Mammifère. On ne leur reconnait, de ce côté, aucune disposition lamellaire. Nous reproduisons d’après le fœtus une coupe du palais et des fanons en place vers le tiers antérieur de la cavité de la bouche. Z CZ TU du RCE TER NT (ul | il | Il | Il a Hell | 1e NI | il ii Se IS Coupe du palais; les fanons a sont en place. Les fanons, au lieu d’être des dents cornées, correspondent plutôt aux papilles plus ou moins développées qui couvrent le palais dans divers groupes de Mammifères. Ce sont des organes ( 66 ) épidermiques. Chaque fanon renferme cependant une forte papille dermatique en forme de lame; elle est formée d’un tissu conjonctif richement vascularisé. Du bord libre de cette papille lamelleuse partent de nombreuses papilles secondaires fili- formes, insérées sur la papille primaire comme les dents d’un peigne sur la tige. Ces papilles secondaires s'engagent profon- dément, chacune séparément dans de longs canaux creusés plus ou moins parallèlement les uns aux autres dans le tissu corné du fanon proprement dit. Ces fanons sont disposés en deux rangs le long du bord des maxillaires supérieurs; chaque rangée s’unit en avant avec la rangée du côté opposé, tout près du bout du rostre chez les Balénoptères, tandis qu'ils sont séparés dans les vraies Baleines par la largeur du palais. En arrière, les fanons diminuent insensiblement de longueur; dans les Balénoptères, chaque rangée se recourbe en dedans en s’enroulant à son extrémité postérieure, tandis que, dans les vraies Baleines, chaque rangée se termine en arrière Comme en avant, en s’incurvant à peine en dedans. Vers le bout du rostre comme vers le fond du gosier, ces organes sont comparativement étroits; ils s’élargissent assez rapidement en s’approchant du milieu du maxillaire. Chaque fanon du fœtus que nous possédons a, vers le milieu du maxillaire, de 4 à 5 centimètres de largeur et de 8 à 9 cen- timètres de longueur; il est coupé en biais à son extrémité libre aux dépens du bord interne. Les fanons sont tous formés de fibres longitudinales qui se détachent facilement les unes des autres : les internes surtout sont toujours séparées et donnent un aspect chevelu aux fanons vus du côté de la bouche. Par suite de la conformation de la lèvre qui descend du bord du maxillaire supérieur, les fanons semblent implantés dans une rainure le long du palais. Les auteurs sont loin d’être d’accord sur le nombre de fanons que porte la Baleine franche, mais les divergences sont plus apparentes que réelles. (67) -Le nombre est estimé à autant de lames qu’il y a de jours dans l’année, disent les marins. Le nombre n’augmente pas avec l’âge, mais l’espace qui les sépare devient plus grand. Ils s’accroissent en largeur et en épaisseur. Scoresby ne les estime pas au-dessus de 200 de chaque côté, mais il est clair que ce sont 200 fanons marchands 1. D’après Zorgdrager on en enlève deux cent cinquante de chaque côté (Maethaerden) et les autres sont abandonnés. Ce chiffre s'accorde parfaitement avec celui du fœtus que nous avons eu l’occasion de disséquer. Quand Zorgdrager parle ailleurs de quatre cents fanons que fournissent les plus grands sujets, nous croyons qu’il s’en rapporte à la foi d'autrui. Nous venons de le dire, ces organes n’augmentent pas en nombre avec l’âge. P. Camper en a compté au moins trois cents, dit-il, sans y comprendre ceux que la petitesse l'empêche de bien distin- guer ?. À moins qu'on nait affaire à une autre espèce, le chiffre d’Anderson de 700 et même de 1000 est évidemment exagéré. Van Marum dit en avoir observé trois cent vingt dans une jeune Baleine. Nous avons cité plus haut le capitaine Paole qui accorde 308 fanons au mâle et 330 à la femelle. Nous avons examiné avec soin la tête de notre fœtus et nous en avons trouvé deux cent quatre-vingt-seize. Chaque Baleine franche fournit en somme quatre cents fanons pour le commerce. La Baleine australe produit le même nombre. ! In each side of the mouth are about 200 laminæ of whale bone, dit-il. Account of the Balæna Mysticetus, Transact. Wernerian Society, vol. I, 1811. A ÉOC Ci p.05. ( 68 ) Les pêcheurs groënlandais estiment les fanons d’après leur longueur. Ceux des Baleineaux qui sont encore sous la protection de leur mère n’ont que quelques pouces de lon- gueur. Les plus grands fanons mesurent de 10 à 14 pieds anglais; rarement on en voit de 15 pieds, dit Scoresby. La plus grande largeur est d’un pied. Le capitaine Paole accorde, comme nous l'avons déjà dit, 10,5 aux fanons de la femelle, 9,16 à ceux du mâle. Le capitaine de l’Arctic donne également la mesure de la longueur des fanons des mâles et des femelles, et la plus grande longueur est de 41,9 et de 11,7. Ce sont es fanons de femelles. Nous trouvons ensuite 41.0 pour les fanons d’un mâle 1. Nous voyons encore le chiffre de 10 (10,6, 10,4, 10,4, 40,2, 10,0) pour les fanons de cinq individus, dont quatre proviennent de femelles et un de mâle. | Le 5 juillet le capitaine de lArctic prend dans Barro Strait une femelle et un mâle, l’un et l’autre ayant des fanons de 2,6, par conséquent de jeunes individus qui ne fournissent en- semble que trois Cuts de fanons et sept tonnes d'huile, tandis qu’une seule femelle adulte fournit une tonne cinq Cuts de fanons et vingt tonnes d'huile. À en croire certains baleiniers, les fanons des femelles seraient plus courts que ceux des mâles, mais plus larges. M. Holder a pu comparer les fanons de la femelle de Balæna biscayensis capturée à New-Jersey à ceux du mâle du Musée de Charleston, et il ne trouve guère de différence dans leur longueur. Les fanons du milieu sont les plus longs, surtout à l’âge 1 Toutes ces mesures sont en pieds et pouces anglais : 1159950 57e 11,7 — 5,52; 11,0 = 5m,55; 10,0 6,05. ERP AE (69) adulte: dans notre fœtus nous ne trouvons pas une très grande différence entre eux. Les fanons sont disposés le long du palais depuis le bout du rostre jusqu’au fond de la cavité de la bouche. Ils diminuent insensiblement en avant, en longueur et en largeur. Ils diminuent de la même manière en arrière, et les derniers fanons sont situés sur la même ligne à peine courbée. La peau du palais, en arrière surtout, est couverte de papilles d'autant plus grandes qu'elles s'approchent davantage des fanons. Elles disparaissentau delà des limites des fanons. Dans les Balénoptères, les deux rangées de fanons s’u- nissent, comme nous l’avons déjà fait remarquer, de ma- nière à former un fer-à-cheval en avant, tandis qu’en arrière elles se recourbent en dedans en tire-bouchons, laissant un certain espace entre elles au milieu du palais. Les der- niers fanons méritent à peine de conserver ce nom; ce sont de simples filaments, d’une grande ténuité, et qui res- semblent plus à des poils qu’à des fanons. one Différents naturalistes ont Palais d'un fœtus de Baleine franche, en été dans le doute il ya quel- arrière, pour montrer la manière dont , : ‘les fanons se terminent à l'entrée du ques années, sur la question RER de savoir si les fanons pen- daient dans la cavité de la bouche, si les bouts libres flottaient en dehors ou en dedans des mandibules. 11 ne peut y avoir de doute : les fanons sont placés en dedans des mandibules. Ce qui avait induit en erreur, c’est l'observation des courts (TO) fanons des Balénoptères qui se dirigent de dedans en dehors sans atteindre la mandibule. On avait eu tort de conclure des Balénoptères aux Baleines. Dans le fœtus que nous avons eu l’occasion d'étudier, la peau forme une lèvre de 7 à 8 centimètres et c’est en dedans de cette lèvre que sont situés les fanons. Cest à peine si dans notre fœtus les fanons dépassent les lèvres. TI 1 1} li Bulbe d'un fanon avec vaisseaux. Les fanons de la Baleine franche sont les plus grands, les plus propres naturellement et les plus estimés dans le commerce. , Les fanons forment aujourd’hui un article de commerce fort important. Les 400 fanons que fournit une Baleine franche ne sont pas estimés moins d’une vingtaine de mille francs. Les fanons des autres espèces sont loin d'atteindre ce prix. Il n’est pas rare de voir les bouts des fanons de Mysticetus mangés par des Orques, ce qui diminue naturellement leur valeur. Le capitaine Gray a publié dans Land and Water, décembre 1877, une description fort intéressante des fanons de la Baleine du Groënland et de leur usage. (TA) Les marchands de fanons à Paris connaissent quatre qualités de fanons qui proviennent d'espèces différentes : 4° les Po- laires ; 2 les Okotsch ; 3° les Sud ; 4° les Nord-Ouest. - Les fanons n° 1 et 2 ont entre eux une grande ressem- blance et sont également estimés ; leur surface est lisse, unie, toujours luisante ; on les reconnaît facilement à première vue; ce sont les Polaires; ils sont plus longs que les autres et toujours plus propres. Ils proviennent de la Baleine franche et de la Baleine du Japon. Les n°3 et 4 ont également une grande ressemblance entre eux; ce sont des fanons courts, étroits, épais, à surface terne, toujours crasseux et bien moins estimés pour le travail. [ls proviennent de la Balæna australis ou de PAntipodum. D’après le D' Gray on trouve dans le commerce à Londres trois sortes de fanons, qui sont désignées : la première sous le nom de Groënland, la deuxième sous le nom de South-Sea ou Black fish whale fin, la troisième sous le nom de North-West coast ou American Whale fin. Ces derniers n’ont été introduits dans le commerce que vers 1840 1. Nous avons pu prendre quelques notes à Vienne sur les fanons du nord du Pacifique que le professeur Steindachner avait rapportés de San Francisco; ils lui avaient été remis par le capitaine Scammon. Le fanon le plus important pour nous était celui du Bowkhead; par sa longueur, sa forme, sa couleur noire ? et sa surface propre et luisante ce fanon ne diffère pas de celui de Groënland. Il y avait ensuite plusieurs fanons de différents âges de ! Ceux qui font commercedes fanons distinguent parfaitement ces différences et reconnaissent les fanons des Mysticelus ou des Japonica aussi facilement que le menuisier distingue le chêne du hêtre. Il est probable que l'étude mi- croscopique fera Connaître également les distinetions. Eschricht s’en était déjà occupé, mais il n’a pas fait connaître le résultat de ses observations. ? On trouve des fanons entièrement blancs dans la Balæna mysticetus comme dans les autres espèces; on en voit aussi qui sont striés dans toute leur longueur. (72) Balæna japonica. Un de ces fanons avait 8 pieds 2 pouces; d’autres avaient 2 pieds; c’étaient les plus nombreux. Un fanon était marqué Sibbaldius sulfureus : il se distinguait par sa largeur, à la base surtout, et par sa couleur noire lui- sante; c’est tout à fait notre Balænoptera Sibbaldii. Une série de fanons jaunes, dorés, courts, fort épais et espa- cés, ce sont des fanons de Rhachianectes. Les fanons de Megaptera, sous le nom de Versabilis, étaient remarquables par leur forme, par leur teinte noire bleuâtre uniforme; il y en avait un avec une bande pâle, comme on en voit souvent dans les Balænoptera musculus. A côté des fanons ii y avait des Coronules, dont deux prove- naient de Megaptera. Les fanons comme les Coronules ne nous présentaient ren qui püt les faire rapporter à une espèce dif- férente de notre Megaptera boops. La peau de la Baleine franche fait saillie sur le chanfrein; les baleimiers quelquefois la coupent et la conservent comme trophée. Ils lui ont donné le nom de bonnet, Whale’s bonnet des baleiniers américains. Cette saillie est naturelle puisque nous l’avons trouvée déjà dans un fœtus. Ce n’est pas, comme on l’a cru, une portion de peau déformée par ses commen- saux Ou par toute autre cause externe. Fréd. Martens et Zorgdrager en avaient déjà fait mention et ils avaient reconnu également les poils qui le recouvrent. Schlegel en a fait mention dans la Fauna japonica, pl. XXVIHI et XXIX, en indiquant comme une forte proéminence teinte de blanc. Pierre Camper a parlé du muffle de la Baleine franche et c’est probablement le bonnet qu’il désigne sous ce nom. Martens lui a donné le nom de wrelst; quelques baleiniers l'ont nommé krone. En 1884 le D' Gray a fait connaître cette prétendue excrois- sance que les baleiniers connaissent sous le nom de Whale’s bonnet, et il a introduit le mot dans la science. Par l’intermédiaire de M. Holdsworth, Gray avait reçu des (73 ) îles Sandwich ce morceau de peau détachée de la tête d’une Baleine 1. Ce bonnet existe également dans la Baleine australe et est plus particulièrement développé dans la Balæna japonica ?. Il est souvent couvert de poils. C’est évidemment un bonnet de Baleine, couvert de Cyames, qui a fait croire au D' Brandt qu'il avait entre les mains un morceau de peau de Rythina avec ses parasites ou plutôt ses commensaux. Nous avons eu ce bonnet entre les mains, au Musée de St-Pétersbourg. Le Direc- teur désirait avoir notre avis sur sa nature. Le bonnet n’est donc ni une excroissance, ni une lésion de la peau, ni le résultat de la pénétration de quelques commen- saux comme on l’a cru. Quant aux poils on en voit, indépendamment de ceux qui recouvrent le muffle, en série le long des lèvres, et on sait que le nombre de ceux qui composent cette série varie d’après les espèces. Deux cétacés d’eau douce, les 7nia de l’Amazone comme les Platanista, du Gange, conservent leurs poils pendant toute la vie. Leur séjour dans un fleuve comme la persistance des poils après la naissance viennent corroborer l'opinion des naturalistes qui regardent ces genres fluviatiles comme les précurseurs des Cétacés marins. Les cétacés ont évidemment pour ancêtres des animaux terrestres. Nous avons parlé de la langue dans une notice qui est insérée dans le Bulletin de l’Académie 3. Cette langue, disions- nous, à pour ainsi dire une forme carrée; elle occupe les deux tiers de la longueur de la cavité buccale. Il existe un filet très court qui est en rapport avec le peu de mobilité de cet organe. Elle est adhérente dans toute sa longueur, de manière qu’elle offre fort peu de mobilité pour une langue de mammifère, et elle remplit presque tout l’espace entre les deux mandibules. ! Proc. Zool. Soc., april, 1864. ? Dans la Fauna japonica, pl. XXVIII et XXIX, ce bonnet est indiqué comme une forte proéminence teinte de blanc. 5 2e série, tome XXVI, n° 8, 1868. (120 D’après Ravin, la langue n’occupe dans les Balénoptères qu’une très petite partie de cette vaste surface !: La langue n'est pas sans ressemblance, sous le rapport de son étendue, avec la langue rudimentaire des Crocodiles. Malgré le peu de mobilité, elle est pourvue d’une épaisse couche de muscles, qui agissent surtout d'avant en arrière, pour retirer la langue en arrière ou bien transversalement, pour la gonfler et l’élever jusqu'au palais. Les fibres longitudinales prennent leur insertion au milieu de l'os hyoïde ; les fibres transverses croisent les précé- dentes et forment une couche épaisse dans toute son étendue. Nous n'avons pas vu de papilles calicinales à la surface ni au fond de la cavité, ni en avant. Ravin signale dans les Balénop- tères une foule de papilles qui forment une bordure autour de cet organe, excepté en avant. La peau qui recouvre la langue est fort mince et n’est point doublée d’une couche de graisse. Quand on parle de la quan- tité plus ou moins grande d’huile que recèle la langue, il faut prendre cette observation comme un récit de pêcheurs; la langue proprement dite, pas plus que la peau qui la recouvre, ne contient de lhuile; mais la peau qui réunit les deux man- dibules, et que lon enlève du cadavre en même temps que la langue, cefte peau a sa couche de graisse, comme celle des autres régions du corps. MOEURS. Nous avons à nous occuper dans ce chapitre, d’abord du régime de cette Baleine, c’est-à-dire des animaux qui lui ser- vent de pâture puisqu'elle est carnivore, puis de ses rapports avec le milieu ambiant et les autres Cétacés et enfin de toutes les questions qui se rattachent à la conservation de lespèce : rapports des sexes, accouplement, gestation, mise-bas, allai- tement, premiers rapports du Baleineau avec sa mère, durée de ces rapports, adolescence et âge adulte. 1 Ravin, Observalions sur les fanons. (ANN. DE SC. NAT., mai, 1856.) Pa 1 n. F TN c NI CU. Sr œ RE 5.2 à 1 La de + L'A (75) - Les mœurs de la Baleine franche ont attiré l'attention de plusieurs baleiniers parmi lesquels nous pouvons citer surtout Scoresby, Rob. Brown et Charles Scammon. : La pâture de la Baleine franche est désignée sous le nom de Maidre; elle consiste surtout en Ptéropodes (Clio borealis) et en Crustacés entomostracés (Cetochilus arcticus et septentrionalis, ainsi que Arpacticus Kroni), d’après Robert Brown. Une Baleine qui rencontre un banc de manger avance dou- cement et, nageant la bouche ouverte, l’eau s’engouffre, la mächoire se relève avec ses lippes, la langue s’élève à son tour et l’eau est chassée à travers les fanons, pendant que la pâture, amassée dans la bouche, forme un bol, qui pénètre ensuite dans l’'œsophage, La Baleine franche, comme les autres Balénides et probable- ment les Cétacés en général, ne reste jamais longtemps dans une région ; elle change de place d’après la saison et on connaît différentes stations de l’espèce qui nous occupe. Ce que lon ne connait pas aussi bien, ce sont les lieux où elle se réfugie dans lesrégions septentrionales. On a remarqué que les années qui sont favorables à la pêche, au détroit de Bering, sont au contraire des années mauvaises pour la pêche à la mer de Baflin. Un point sur lequel les baleiniers sont d'accord, c’est qu’elle parait en troupes en hiver sur la côte occidentale du Groënland, entre le 69% et le 65° degré de latitude, et qu’au printemps elle retourne au nord. On sait aussi que pendant les hivers rigou- reux elle se rend plus au sud que pendant les hivers doux, mais sans dépasser certains degrés que cet animal, essentielle- ment polaire, ne franchit jamais. On ne voit jamais la Baleine franche que près de la lisière de la glace compacte, ou dans les espaces libres entre les glaces flottantes. On a fait cette même observation dans la mer de Baflin comme dans les eaux de Spitzherg et le détroit de Bering. Les baleiniers s'accordent à dire que la Baleine qui nous occupe ne quitte pas les glaces et, si elle se rend plus au Sud, (76) à l'Ouest qu’à l'Est, au détroit de Davis, c'est que les glaçons flottent plus abondamment le long de la côte d'Amérique que le long de la côte du Groënland. Elle ne quitte pas non plus les eaux profondes et les pêcheurs disent qu’elle se tient de préférence dans une eau noirâtre. Une eau encombrée de glace, sans en être entièrement cou- verte, est une condition d'existence pour ces Mysticètes, dit Eschricht. La Baleine franche en venant à la surface y reste rarement plus de deux minutes, puis elle plonge et reste de 5 à 45 minutes sous l’eau. Elle peut plonger aussi et rester jusqu’à une demi-heure sans venir respirer. Le capitaine Scammon parle même d’une heure à propos du Bowhead, qu'il a par- ticulièrement observé dans la mer de Bering. D’autres disent qu’elle respire sept à huit fois en 10 ou 42 minutes, puis plonge pendant 35 ou 40 minutes, descendant jusqu’à la profondeur de 400 brasses, pour remonter ensuite de nouveau. D’après Scoresby la Baleine franche reste de 45 à 20 minutes sous l’eau, mais étant harponnée elle peut rester jusqu’à 56 minutes. On possède aussi quelques observations sur la rapidité avec laquelle elle nage. Lacépède parle de onze mètres par seconde, ce qui lui permettrait, dit-il, de faire le tour du monde en 47 jours, en suivant l'équateur. En général les baleiniers sont d'avis qu’elle parcourt un espace de 3 à 4 milles anglais en une heure, c’est-à-dire de cinq à sept kilomètres. Il y en a qui estiment à 3 lieues, c’est-à-dire de 8 à 10 milles, l’espace qu’elle peut parcourir en une heure. La rapidité de sa marche est grande surtout quand elle est blessée : le capitaine Graville rapporte le cas d’un individu blessé sur la côte Est du Groënland qui aurait gagné le lende- main l’embouchure de Omenak-Fiord sur la côte Ouest du Groënland. D'où il faudrait conclure qu’un bras de mer sépare le Groënland au milieu, comme du reste on en voit des indica- tions sur de vieilles cartes. CAEN) Dans le détroit de Davis cet animal se tient par petites bandes (schools) de trois ou quatre individus, dit M. Rob. Brown, et d’après cet observateur, qui a assisté régulièrement à cette pêche, on les voit rarement approcher des côtes. Elles se réunissent au contraire en grand nombre, dit-il, pendant leurs pérégrinations : quand elles passent d’un bord de l'Océan à l’autre, elles forment des gammes nombreuses dont quelques- unes ne comptent pas moins d’une centaine d'individus. Le nombre de Baleines diminuant toujours dans la mer de Baffin, les baleiniers écossais sont entrés à leur poursuite dans le détroit de Lancaster et de Barrow, puis dans le Golfe de Boothia, où ils ont fait d'assez bonnes prises. Les Baleines semblent s’y retirer; presque toujours en capturant un animal d’un sexe on capturait l’autre sexe peu de temps après. Il y a tout lieu de croire que ces animaux y vivent par couples et y passent peut-être la saison des amours. Se réunissent-ils par schools après? ou restent-ils par couples jusqu’après la mise- bas de la femelle? Tout tend à faire admettre cette dernière supposition. On a remarqué, partout où l’on chasse ces animaux, que lon prend plus de femelles que de mâles dans le voisinage des côtes ; le mâle reste au large, pendant que la femelle se rend dans les baies pour y mettre bas. Les baleiniers basques ont fait depuis longtemps cette même observation sur la Baleine de leur côte. Si la Baleine franche voyage et stationne par couples, au moins dans certains parages et dans certaines saisons, il n’est pas moins certain qu’elle vit aussi par bandes nombreuses à certaines époques. Bessels, pendant son voyage forcé à bord d’un baleinier, raconte qu'il a vu des gammes de trente et même de cinquante individus qui fuyaient devant lui. Une observation assez intéressante a été faite par les balei- niers qui vont à la mer de Bering et à l'Océan arctique, c'est que, jusqu’à présent, ils n’ont pas vu une seule de ces Baleines, 6. (78) qu'ils chassent avec tant d’acharnement, accompagnée d'un baleineau, ni dans le détroit ni dans l'Océan. Ils ont également fait observation que, en approchant de Ja Mer arctique par le détroit de Bering, les premières Baleines qu'ils ont aperçues étaient très peu farouches; insensiblement elles sont devenues craintives, au point qu'aujourd'hui elles ne se laissent plus que très difficilement approcher. Aussi tous les baleiniers sont unanimes à dire que la Baleine franche est un animal sauvage (shy) en même temps que timide; cest ainsi que s’exprime le capitaine Scammon. Comme tous les Cétacés, la Baleine franche dort à la surface de la mer. De diverses observations il résulterait que cet animal est monogame, sans doute comme les autres Balénides, que la femelle ne porte qu'un jeune à la fois, que le baleineau tête et suit sa mère pendant deux ans. Tout en étant unipares on connaît comme dans les autres ordres de mammifères qui sont unipares, on connaît, disons- nous, plusieurs exemples de Jumeaux; on a vu également des jumeaux parmi les Balénoptères et parmi les Delphinides. Il paraît acquis aujourd'hui que les Cétacés s’accouplent debout dans l’eau; nous entendons les Cétacés proprement dits et non les siréniens, qui accomplissent cet acte dans une position horizontale. Nous avons à peu près la certitude que l’accouplement de la Baleine franche a lieu en hiver au milieu des glaces; Holbüll a constaté le fait pendant qu’il était gouverneur du Groënland. Des baleiniers ont vu le Mysticetus s’accoupler à Godhavn le 13 janvier 1780. La Baleine australe paraît accomplir cet acte pendant la saison correspondante, c’est-à-dire pendant l'été, entre Île mois de mai et le mois de septembre. On ne connaît pas d’une manière certaine la durée de gestation, mais il y a tout lieu de croire qu’elle est de 14 à 15 mois. (T9) Robert Brown ne l’estime qu’à 9 ou 10 mois et elle met bas, d’après lui, au mois de mars ou d'avril. C’est la même durée de neuf à dix mois que l’on accorde à la gestation de la Balæ- noptera rostrata. Le capitaine Scammon fait mention d’un fait curieux relatif à la gestation : 1l a capturé une femelle avec son baleineau qui pouvait avoir tout au plus un an d'âge; en faisant l’autopsie de la mère il a observé qu’elle était de nouveau grosse. Si ce n’est pas une mère qu’accompagnait un baleineau étranger, cette observation n’exclut pas la supposition que la Baleine peut mettre bas tous les deux ans, tout en portant de 14 à 15 mois. La durée de la gestation est inconnue, dit Charles Scammon en parlant du Bowhead, mais il suppose qu’elle est d’un an. Il avoue que l’on ignore complètement où cet animal met bas et dans quels parages il passe son quartier d'hiver. Il est à remarquer qu'il est question ici de la Mer arctique et de la mer de Bering. Reinhardt après de longues recherches dans les inventaires des baleiniers danois n’en sait pas davantage; 1l ne pense pas, dit-il, que la baleine visite la côte de Groënland pour y mettre bas; on n’y voit pas d’ailleurs plus de femelles que de mâles. Nous trouvons toutefois l’exemple d’une femelle, accom- pagnée de son baleineau (a new-born Cub), qui apparaît le 18 mars 1807 près de Dogs Island, à embouchure de Disco- bay; le baleineau fut heureusement capturé et les pêcheurs disent qu’il n’était pas plus gros qu'un Beluga. Ce baleinceau n'était évidemment pas venu à terme. Le Mysticetus doit avoir une vingtaine de pieds en venant au monde. On s'accorde généralement sur ce point que, pendant la station d'été, les Baleines qui nous occupent mettent bas au milieu des glaces et que la mère, accompagnée de son balei- neau, prend ensuite son quartier d'hiver dans la mer de Baftin, entre le 78° et 65° degré de latitude nord. Scoresby, qui a fait la chasse pendant des années sur Îles côtes de Spitzberg, pense que la Baleine franche met bas en ( 80 ) février ou mars. Ot. Fabricius, qui a séjourné sur la côte de Groënland, parle du mois d'avril. Parit mense aprili pur plerumque unicum, dit-il. Scoresby a capturé un baleineau, en avril 1811, qui portait encore une partie de son cordon ombilical. Eschricht et Reinhardt sont également d'avis que c’est entre la fin du mois de mars et le commencement du mois de mai que la parturition a lieu. A en croire la plupart des baleiniers, ce serait donc à la fin de mars ou dans le courant d'avril que le Mysticète met bas au nord de l'Atlantique et la gestation serait de 13 à 14 mois, de manière que la femelle peut produire un baleineau d’une année à l’autre. Il est reconnu que les Balénides recherchent les mêmes baies pour accomplir cet acte important ; au Spitzhberg comme sur la côte d'Afrique on connaît des parages où l’on trouve régulière- ment, du moins pendant la saison propre, des femelles pleines ou des baleineaux. C'est sans doute ce qui explique la quantité énorme d’osse- ments que l’on rencontre dans certains endroits. On a reconnu des ossuaires de Cétacés sur les côtes d'Afrique, sur les côtes du Brésil et dans certaines baies de Tasmanie. La baie de Howard-Town est un cimetière de Cétacés océaniens, dit le comte de Beauvoir. On sait que le plus grand ennemi de la He et le seul dangereux, c’est l’Orque 1. Ce Cétacé, avec ses fortes dents et nageant toujours par petites bandes de quatre à cinq individus, attaque les nageoires de la Baleine d’abord, puis la langue. Il n’est pas rare, disent des baleiniers, de trouver des cadavres flottants de Baleines dont la langue est mangée par ces redou- tables carnassiers et dont le bout des fanons est mordu. Rien n’est comparable au spectacle d’une Baleine aux prises : Les baleiniers et les voyageurs le désignent souvent sous le nom de Siweerd fish, ce qui a donné lieu déjà à de singulières méprises, même de la part de zoologistes qui ont pris ce Cétacé pour un poisson. (81) avec un Orque; au bout de quelques instants la mer n’est qu’une mare de sang, disent les marins. La voracité de l’Orque n’est pas moins grande que sa cruauté. Eschricht a trouvé dans l'estomac d’un individu échoué sur la côte de Jutland, quinze Phoques à côté de treize Marsouins et une peau de phoque retournée dans la bouche. Nilsson avait trouvé dans un Orque de sept mètres de long, quatre Phoques à côté de plusieurs Saumons entiers. Les fèces des Mysticètes sont rouges de couleur, sans doute par les Cetochiles qui leur ont servi de pâture. Les Thalassothériens ont de la voix comme les Géothériens. On a reconnu de tout temps que les Phoques comme les Otaries se font entendre par un bruit rauque qui leur est propre, mais en est-il de même des Cétacés ? On a recueilli aujourd'hui un assez grand nombre de faits pour dire oui : les Baleines comme les Dauphins font entendre un mugissement quand ils sont jetés sur la plage ou quand ils sont blessés. Rondelet parle déjà des mugissements des Cétacés attaqués, en parlant de la Baleine franche dans les environs de Terre-Neuve. Le Microptère de Sowerby, échoué près d’Ostende il y a quelques années, a poussé des mugissements comme une vache, dit du Mortier, dans la description qu’il a donnée de cet animal. Il a poussé des lamentations pendant deux jours qu’il a vécu sur la grève, me disait Paret, qui a recueilli animal sur la plage. Divers auteurs comparent le cri des Cétacés au mugissement d’une vache. On a cité le Delphinide qui est venu échouer en 1778 près de Fréjus, dans la Méditerranée, et on cite de même les Grindewalls (globiceps) qui sont venus expirer en 1788 auprès de Honfleur; ils mugissaient comme des tau- reaux, disaient les témoins. Un Hiyperoodon rostratum, échoué dernièrement sur la grève d'Hillion, fit entendre un bruit insolite en venant à la côte, dit un témoin. Il était six heures du matin, vers le milieu de décembre 1879 ; deux hommes se rendirent sur les lieux, cha- (8) cun armé d’un fusil, et ils aperçurent un grand animal qui se débattait en beuglant. Il n’est mort que vers 10 heures. Les Dauphins attaqués en 1787 auprès de Saint-Tropès, dans la Méditerranée, firent entendre des sifflements aigus qui avaient été précédés de mugissements effrayants. On les en- tendit jeter des cris. On a entendu également mugir des Cachalots. Un témoignage important est celui de Holbôll qui a passé plusieurs années sur les côtes du Groënland comme gouver- neur, et à qui Eschricht devait ses plus beaux squelettes de Cétacés. Il a vu une mère qui exprimait également sa dou- leur par des mugissements. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Des observations faites avec soin pendant un siècle nous apprennent que cette Baleine, qu’on pourrait appeler Polaire, ne dépasse pas le 64° degré de latitude nord et ne pénètre jamais dans PAtlantique. Les Baleines pêchées au Spitzhberg d’abord, au Groënland après et depuis 1847 dans la mer de Bering, appartiennent à une seule et même espèce que les naturalistes désignent sous le nom de Baleine franche ou Balæna mysticetus. Elle visite périodiquement les mêmes eaux, habite toute la calotte glacée du pôle arctique, peut communiquer par le détroit de Smith avec la mer de Baflin, visite à l'Est cômme à l'Ouest les eaux du Spitzherg et la mer de Bering par le détroit du même nom; sa limite géographique méridionale est la limite septentrionale de la Baleine des Basques dans l'Océan glacial, de la Baleine du Japon dans le Pacifique. Nous ferons remarquer que l’on ne connaît pas jusqu’à présent de Baleine antarctique, correspondant à la Baleine arctique, quoique l’on connaisse dans les deux hémisphères des Balé- noptères et des Mégaptères, identiques ou similaires. L'on sait que la ligne de l'équateur est une mer de feu, comme l’a dit le capitaine Maury, que les Baleines véritables ne franchissent pas. t (83) Nous avons ici un exemple des plus remarquables de cette place, qui est assignée à chaque espèce, pour remplir son rôle dans ce grand spectacle de la nature. Eschricht et Reinhardt ont constaté, d’après des observations recueillies pendant près d’un siècle, que le 64° degré de lati- tude n’a jamais été dépassé par cette espèce, du moins sur la côte ouest du Groënland, où des colonies danoises sont établies depuis le commencement du siècle dernier. Leur station d'hiver est entre le 75e et le 78° degré et, chose assez remarquable, c’est vers le 77e degré que se trouve la baie que Baffin a appelée Baie des Baleines, à cause du grand nom- bre de-ces Cétacés que l’illustre marin y avait rencontrés. Ne remontent-ils pas plus haut que le 78 degré? On a recueilli depuis longtemps quelques faits qui méritent de prendre place ici: on a remarqué, par exemple, que des Baleines, blessées par des harpons lancés à l’ouest de Groën- land, ont été pêchées ensuite dans les eaux de Spitzhberg, por- tant encore le harpon dans leurs flancs avec la marque des lieux et de la date! On a capturé de même dans la mer de Baflin des Baleines avec des harpons lancés dans les eaux de Spitzberg! Les baleiniers ne se rendent à cette pêche que pen- dant l'été et ils doivent gagner alors les latitudes élevées pour les rencontrer. En fuyant au nord de la mer de Baflin jus- qu'aux eaux de Spitzberg, il y a lieu de croire que ce sont leurs blessures qui rendent les Baleines parfois affolées et les pous- sent dans des régions qu’elles ne visitent pas habituellement. Il est inutile de faire remarquer que c’est bien par le nord qu’elles ont dû doubler le Groënland, puisqu'elles ne peuvent doubler le cap Farrewell au sud, qui est beaucoup trop méri- dional. Ce qui paraîtra plus surprenant c’est qu’on a trouvé, au nord du Pacifique, des Baleines percées de harpons lancés par des baleiniers de Spitzberg. Eschricht a fait un tableau indiquant la répartition du Mysti- cetus aux diverses époques de l’année et aux divers degrés de latitude dans la mer de Baffin; ce tableau montre que, (84) de septembre à juillet, cette Baleine descend jusqu’au 65° de- gré et que pendant les mois d'été elle remonte jusqu’au 18° degré. Il est certain que des troupes entières viennent tous les ans hiverner sur la côte occidentale du Groënland, entre le 69e et le 65e degré de latitude. D’après des observations suivies pendant trente-cinq ans par les colonies danoiïises des côtes de Groënland, l’arrivée des premiers Mysticetus a lieu du 12 novembre à la seconde moitié du même mois, et le départ depuis la fin d'avril jus- qu’au mois de mai et de juin. En moyenne la durée de leur séjour dans ces parages, pen- dant plus d’un quart de siècle, a été de 177 jours ou la moitié de l’année à peu près. La Baleine franche passe ainsi six mois d'hiver entre Godhavn 169014") et Holsteinborg (66°50"); après le mois de mai ou de juin, elle se rend au nord. Quand l'hiver est plus rigoureux on la suit jusqu’au 65° degré et même jusqu'au 64°. David Crantk ne cite toutefois qu'un exemple d'un Mysticetus observé à cette latitude 1. De juillet en septembre on en voit entre les 70° et 73° degrés; elles disparaissent ensuite entre le T° et le 78°, qui paraît être encore leur station d’été. Il n’est guère douteux que ces animaux ont dans la mer polaire leur breeding et leur feeding ground. En ont-ils plu- sieurs ? Ils ont évidemment des côtes où de préférence ils vont mettre bas et des places où ils trouvent de la pâture à certaine époque de l’année. Les baleiniers américains signalent, comme breeding place surtout, le voisinage de Tschantar Bay. Ces animaux deviennent tous les jours plus rares; M. Malm- gren, dans son voyage à Spitzherg, dit n’avoir pas rencontré une seule Baleine ; aussi n’y at-il plus de baleiniers dans ces parages où, il y a deux siècles, on en voyait de toutes les nations. Nordenskjüld n’a vu pendant un de ses voyages qu’une seule 3 Hislorie van Groenland, 1, p. 855. ( 85 ) fois une Baleine franche ; c'était le 23 juin 1884 sur la côte ouest de Spitzbergen, à la latitude de 78° 1. Clavering et Sabine en ont vu encore au nord de Spitzherg le 17 août 1893; ils en aperçurent plusieurs au grand étonnement des pilotes groënlandais. I faut croire qu'il en existe encore dans les hautes latitudes au nord de Spitzberg; Peyer et Wevyprecht disent qu’elles y sont encore abondantes à l’est, mais dans des parages peu visités. Mainte journée ils en ont eu constamment en vue. Dans la mer de Baffin on voit encore tous les ans quelques baleiniers écossais, surtout du port d’Aberdeen, pénétrer par la mer de Baflin et le détroit de Lancaster dans le golfe de Boothia, où la Baleine franche semble faire un séjour régulier. C'était surtout depuis Godhavn jusqu’au ny Sukkertop que se faisait anciennement cette pêche. Nous avons dit plus haut que le D' Bessels, qui avait été recueilli après le naufrage du Polaris, à bord de lArctic, a assisté involontairement à cette pêche, et qu’à l'entrée de la Baie Prince Regent il a vu jusqu’à 50 Baleines apparaître à la fois 2. Il a aperçu également trois Baleines près du cap Garry; dans les eaux qui conduisent à Fury-Beach, lieu célèbre par le souvenir de Parry, les Baleines se montrèrent en grand nombre, dit-il, et il fait remarquer que la côte était encore couverte de caisses, de cordages et d’ossements abandonnés par Parry. L’Éclipse parti de Peterhead (Écosse) le 20 avril 1886 a ren- contré, vers le milieu du mois de mai, des Baleines franches, revenant sans doute du sud-ouest, dit Rob. Gray; des Calanus finmarckicus remplissaient la mer; dix jours après le départ d'Écosse, l'équipage a aperçu cinq Baleines de taille ordinaire et une vingtaine de petite taille à côté de Narvals 3. D’après des observations suivies, la Baleine, après chaque 1 NorDenskJn, Die Umsegelung Asiens und Europa. Deus. AusG. 1881, [, p. 145. 2 Polaris expedition. 5 Rob. Gray. Voy. 1886. The Zovulogist, fevr., 1887. ( 86 ) voyage, revient à la station d’où elle est partie, comme les hirondelles reviennent à leur nid, les saumons à leur lieu de . naissance. Les habitants de différentes côtes en citent plusieurs exemples, dont quelques-uns sont fort remarquables : pendant l'hiver de 1812-1813 une Baleine s'était fait remarquer dans les eaux de la côte de Groënland à sa nageoire caudale, qui était complètement déformée, et, à la campagne suivante, elle fut capturée dans la même baie. Le 15 mai 1837 les baleiniers anglais capturèrent une baleine à une lieue de Godhavn, qui est la résidence des Danois, et, en la dépeçant, ils trouvèrent, dans les chairs, un fragment de harpon qui avait été lancé dans les mêmes parages par les colons danois le 26 février 1833. On pourrait en citer d’autres exemples. Les baleiniers s'accordent à dire que là où il y a des Baleines il n’y a pas de Balénoptères; la pêche est finie, d’après eux, quand ils voient apparaître des Finnfish, Balénoptères. Il paraît que pendant les mois d'hiver, de novembre en avril, deux autres Cétacés, que l’on peut qualifier comme le Mysticetus, d'espèces glaciaires, le Narval et le Beluga, se rendent aussi régulièrement que la Baleine vers le sud et qu'ils descendent encore un ou deux degrés plus bas que le Mysticetus. La Megaptera boops, d’après le même tableau d’Eschricht, se rend au nord pendant les mêmes mois que la Baleine franche, mais sans dépasser le 76° degré de latitude. La pêche de la Baleine se fait aujourd’hui surtout au nord du Pacifique dans les eaux du Japon, et depuis 1847 plus particulièrement dans la mer de Bering et la Mer arctique. Voici quelques renseignements sur la présence de cette Baleine dans le détroit de Bering et l'Océan arctique, où se fait la grande pêche depuis une quarantaine d'années. D’après le récit de tous les baleiniers les Baleines apparaissent quand la glace commence à fondre. Cest du 15 au 25 mai qu'on a vu le plus de Baleines dans ces parages. A la fin de l'été et en automne les Baleines du détroit se ( 87 ) rendent toutes vers le nord, dit Pechuel, et elles se réfugient jusqu’au 72 degré de latitude au milieu des glaces. Pechuel en a poursuivi jusqu'à cette latitude, mais plus loin il les a perdues de vue. Pechuel n’a vu que le Bowhead du Pacifique et il ne peut affirmer que c’est la même espèce qui habite Atlantique ; 1l affirme ensuite qu'il n’a pas vu de Baleineaux dans le détroit de Bering tandis que Crooker en a aperçu sur les côtes de Kamschatka. Les baleiniers ont observé que les Baleines de la mer d’Okhotsk ne traversent jamais le passage des Kuril-Islands et que celles de la Mer arctique ne pénètrent jamais dans la mer d’Okhotsk. Cela leur a paru naturellement étrange; mais si lon songe que la mer d'Okhotsk n’est fréquentée que par la Baleine du Japon !, qui ne quitte jamais les courants tempérés, comme l’autre ne quitte pas les courants glacés, il n’y a rien que de fort naturel de voir une des Baleines du nord du Paci- fique se comporter envers le Bowbead comme la Baleine de Biscaye se comporte au nord de l’Atlantique envers la Baleine franche. Nous avons lu dernièrement dans un rapport du lieutenant P. Henry Ray 2? que, à l’est du détroit de Bering, à la pointe de Barrow, côte d’Alaska, on voit apparaître des Baleines vers la mi-avril; elles y arrivent quand les glaces se fondent, isolées d’abord, puis insensiblement en nombre. Ce rapport nous apprend que bien des Baleines furent capturées en 1882 entre Point Barrow et Return Reef et que cette même année plusieurs baleiniers stationnèrent au Point Barrow jusqu’à la fin de septembre. Trois Baleines furent capturées pendant les deux saisons que l'expédition y passa. Une femelle trouvée flottante le 1°° sep- tembre 1882 renfermait un fœtus de 3 pieds. 1 Nous ne parlons pas des Rhachianectes, que l’on ne peut confondre ni avec le Bowhead ni avec l'espèce du Japon. ? Report of the international polar expedition to point Barrow, Alaska. Washington, 1885, p. 100, ( 88 ) Les indigènes poursuivent également cet animal; ils Jui lancent des harpons auxquels sont attachées des outres de peaux de phoque et en nombre tel qu’à la fin l’animal ne peut plus plonger. Le lieutenant Ray fait remarquer que l’on trouve abondam- ment des mandibules, des vertèbres et même des crânes de ces Cétacés et qu’on découvre même de leurs os jusque dans les tombes. Ils doivent avoir été autrefois excessivement abon- dants dans toute cette partie de la mer Arctique, puisque, à l’ouest du cap Tschukotskoiï, les habitants ont bâti une espèce de tour avec des côtes de Baleine (Wrangel). Cest le Oostcap du détroit de Bering. Il paraît que les ossements du Morse y sont tout aussi abondants. Nordenskjôld a rapporté, de son voyage par la Vega, des ossements fort intéressants que Malm a fait connaître; outre des os de Mysticetus 1, il y en avait de Berardius, d'Orca, de Delphinaptère et de Rhachianectes. Ces animaux sont loin d’être également abondants pendant la saison de pêche : on fait l’observation, comme nous l'avons dit plus haut dans la partie historique, que les années qui sont mauvaises pour la pêche à l’ouest du Groënland sont, au contraire, heureuses pour la pêche au détroit de Bering. Y a-t-il ici une simple coïncidence? De temps en temps il y a une année bénie et une année calamiteuse et on a remarqué que les années bénies pour les pêcheurs de la mer Arctique sont des années malheureuses pour les pêcheurs de la mer de Baffin. Ainsi l’année 1867 est citée comme une de ces années excep- tionnelles ; elle a été heureuse pour les pêcheurs américains qui se sont rendus au détroit de Bering et, cette même année, les douze vapeurs du port d’Aberdeen ont fait une perte de cent mille livres sterling. Ces douze vapeurs n'avaient capturé que deux Baleines pendant toute la campagne de 1867, tandis que, des trois cent 1 Squelettdelar of hval. (89) quarante-deux navires américains qui ont visité cette année le détroit de Bering, huit ou dix d’entre eux en ont capturé cha- cun de neuf à dix-sept. C’est l’année de la découverte de la terre de Wrangel. Indépendamment de la rareté des Baleines pendant certaines saisons de pêche, les baleiniers courent encore le risque de voir leurs navires saisis et écrasés dans les banquises. Il y à quel- ques années il y en a eu quatorze de perdus par les glaces. Un phénomène de distribution géographique bien remar- quable, dont nous avons déjà signalé l'importance, est celui de la distribution de deux espèces de Baleines, l’une au nord de l'Atlantique l’autre au nord du Pacifique, qui se comportent de la même manière à l'égard de l'espèce polaire. Le capitaine Scammon a été frappé de ce qu’on ne voit jamais de Jeunes Bowheads sortir de la mer d’Okhotsh; ce qui nous paraît tout naturel, puisque le Bowhead est une espèce essentiellement polaire. Le savant baleinier estime que le Bowhead se rend au sud dans le détroit de Bering jusqu’au 55° degré; c’est précisément l'extrême limite jusqu'où s'étendent les glaces. L’aire géographique, que nous assignons à la Baleine franche, peut paraître bien étendue à quelques naturalistes ; une même espèce qui habite à la fois la mer de Baffin et la mer de Bering n’est toutefois pas un fait isolé; nous voyons, en effet, au nord du Pacifique comme au nord de l'Atlantique, la même Megap- tera et les mêmes Balenoptera et, sans parler d’autres Cétacés comme le Cachalot, nous voyons des deux côtés les mêmes Phoca barbata et Groenlandica et, parmi les Mammifères ter- restres, les mêmes Ours blanc et brun, la même Loutre. Nous ne parlons pas d’autres mammifères, de plusieurs oiseaux et* d’un grand nombre d'animaux appartenant aux autres classes. MUSÉES. À l’époque où Cuvier écrivait ses Recherches sur les osse- ments fossiles, le Muséum de Paris ne possédait pas un os de (90 ) Balæna mysticetus, si ce n’est des mandibules et un fœtus; Laurillard dut se rendre à Londres pour prendre le dessin de la tête qui devait figurer dans les Recherches du grand naturaliste du Muséum. A l'exception de quatre ou cinq fœtus, de trois ou quatre têtes plus ou moins complètes, de quelques os séparés surtout des mandibules et des os tympaniques, rien n’a été conservé de ces milliers de Baleines capturées pendant deux siècles au Spitzberg et au Groënland par des baleiniers de toutes les nations maritimes. Nous indiquons ici les pièces connues. SQUELETTES:. Les difficultés d’avoir un squelette de ces animaux ont toujours été grandes et le sont encore aujourd’hui; Hunter qui ne reculait devant aucune dépense n’a pas réussi à s’en procurer un pour son Musée, même en mettant à ses frais un chirurgien à bord d’un baleinier. . C’est grâce aux recommandations les plus pressantes d’Esch- richt à son ami Holbôll, gouverneur du Groënland, que le premier squelette a été recueilli pour le Musée de Copenhague. C’est en vain que le roi de Suède avait fait la promesse d’un squelette de Baleine franche au Muséum de Paris. Aucune recommandation n’avait abouti et le squelette du Musée de Copenhague a été longtemps unique dans les collections. Le deuxième squelette, provenant d’un mâle, a été envoyé également à Copenhague et Eschricht, après lavoir comparé au premier, de sexe femelle, l’a cédé pour compléter, par des échanges, sa collection d'animaux terrestres ; il est conservé aujourd'hui au Musée royal d'histoire naturelle de Bruxelles. Le troisième est celui qui appartient aujourd’hui au Musée de l’Université catholique de Louvain et que nous avons obtenu également par l'entremise d’Eschricht. Il provient d’une femelle comme le premier. Le professeur Reinhardt a reçu le quatrième squelette de (91) \ Mysticetus, de femelle également : il est conservé au Musée du Collège royal des chirurgiens, à Londres. Le cinquième squelette est au Muséum d'histoire naturelle à Paris; M. P. Gervais a négocié un échange avec le profes- seur Reinhardt, directeur du Musée de Copenhague, pour obtenir cette dernière pièce. Il provient d’un mâle adulte, capturé en 1869 à Holsteinborg. Il est à remarquer que tous ces squelettes proviennent des côtes du Groënland. Il existe aujourd’hui également un squelette à Stockholm et un autre à Berlin qui n’est pas tout à fait adulte; nous en ignorons le sexe. Le dernier a été acheté en 1874 par l’entre- mise du Gouvernement à un marchand norwégien. Nous ne savons s’il provient de Groënland comme les autres. Il est placé provisoirement à l’Aquarium en attendant sa place ua nouveau Musée. Le Musée de Stockholm, comme celui de Kônigsberg, pos- sèdent tous les deux le squelette d’un jeune animal; ils viennent également des côtes de Groënland. Celui de Kôünigsberg est d’un fœtus qui n’a que 12 pieds de long. TÊTES. Il se trouve des têtes isolées dans quelques Musées. Celle de Londres, qui est exposée au British Museum (South Kensing- ton), est, si nous ne nous trompons, la propriété du Musée du Collège royal des chirurgiens. C’est celle que Cuvier a fait dessiner par Laurillard. Nous avons vu au Musée impérial de Vienne une tête com- plète, rapportée du Groënland par Giseke, avec divers autres objets. A Édimbourg nous avons vu au Musée deux têtes et une région cervicale dont la septième vertèbre est libre. À Berlin on possède, outre le squelette dont nous venons de parler, la tête d’un jeune animal au Musée d'anatomie. Une tête de 5 pieds est conservée à Leyde. Le Musée de Hambourg renferme également une très grande tête, mais on 7h ne connaît rien de certain sur leur origine. A Kiel, il existe également une tête adulte et divers ossements, ainsi qu’à Gro- ningue. Toutes ces pièces ont été rapportées probablement de Spitzberg à l’époque de la grande pêche. MANDIBULES. Il n’est pas rare de trouver dans des musées particuliers, ou chez des pêcheurs, des mandibules qui ont servi à divers usages : les mandibules que l’on conserve dans beaucoup de villes ma- ritimes sous divers noms ont été apportées comme trophées par les baleiniers en témoignage de leur admiration pour ces géants de la création; elles sont encore assez communes en Hollande comme en Allemagne, en Danemark et en Suède. Les baleiniers rapportaient assez souvent ces ossements séparés, que l’on fichait dans le sol sous le nom de côtes de Baleines. Il en existe encore au milieu de prairies dans les localités où l’on trouvait anciennement des marins pour la grande pêche du nord comme à lile de Norderney. On rapportait aussi, ce qui est plus facile, des caisses tympaniques ou des vertèbres isolées. Nous nous rappelons d’avoir vu de prétendues côtes de Baleines au milieu de pelouses, dans des parcs où on avait réuni tout ce qui pouvait exciter l'intérêt des visiteurs. Nous avons vu trois mandibules au Musée de S'-Pétersbourg sans indication d’origine. Au Musée de Berne on conserve une mandibule, qui a été, d’après l'étiquette, apportée en Europe au XVIHE: siècle. Le Musée de zoologie de Berlin renferme également des mandibules isolées qui y sont conservées depuis longtemps et sur lesquelles on ne possède pas de renseignements. Nous avons trouvé, dans le Musée impérial de Vienne, des mandibules de cette Baleine et une omoplate qu'on avait attribuée à la Megaptera. Nous avons reçu deux mandibules du D' Van Raemdonck, dont les extrémités ont été sciées; elles ont été primitivement (9% ) fichées dans quelque prairie en Flandres et elles ont servi plus tard de poutre dans une habitation, à en juger par les trous qui y ont été forés. A Lyon on conserve des fragments d’une mandibule de grande dimension, trouvés à Pantin, qui ont sans doute la même origine que les ossements trouvés dans la rue Dauphine à Paris. Au Muséum à Paris, on voit, indépendamment des deux paires de mandibules placées à l'entrée du Musée d'anatomie comparée et dont on ignore la provenance, des vertèbres (T cer- vicales, 4° dorsale et 6 lombo-caudales) envoyées de Drontheim (Norwège) par Noël de la Morinière et deux caudales dont l’origine n’est pas plus connue que celle des mandibules. On y conserve également les os du fœtus sur lequel Geoffroy S'-Hilaire a découvert les dents. CAISSES TYMPANIQUES. Nous ne citons pas les Musées qui renferment des caisses tympaniques par la raison qu’elles sont trop répandues dans les collections. Du moment où l’on trouve, dans une galerie, un os de Cétacé quelconque, on peut compter y découvrir cet os de Baleine. CÔTES. Il est fait mention par Collini, dans les Acta Academiæ pala- tinæ (1784), d’une côte de Baleine, déterrée en 1720 entre la ville de Mannheim et ia citadelle et qui a sans doute été rap- portée par quelque baleinier à l’époque de la grande pêche du Spitzberg 1. A l’athénée de Bruges on conserve une véritable côte (la hui- tième de gauche) qui mesure 3",48 ; la même côte du squelette du Musée de Bruxelles ne mesure que 3,20. La côte correspon- dante du squelette de femelle de Louvain ne mesure que 2,88. KiniAN, Die fossile Walfisch-Kinnlade zu Mannheim. (AcHTER JARRES- BsRICAT DER MANNHEIMER VEREINS, Mannheim, 1841.) he (94) Au bout distal la côte de Bruges n’est pas plus large qu’au bout proximal, tandis que celle de Louvain, qui lui correspond cependant, a l'extrémité distale deux fois aussi grosse que l’autre. Il faut admettre de grandes variations individuelles. Cette côte aura été rapportée par quelque marin d’une expé- dition au Spitzberg. C’est évidemment une côte de choix pro- venant d’une Baleine de très grande taille. OSSEMENTS DIVERS. On possède des ossements séparés dans plusieurs Musées. A Bordeaux on voit au Musée plusieurs ossements de vraie Baleine (omoplate, humérus, radius). Nous ne savons si l’ori- gine en est bien connue. Nous avons vu deux vertèbres lombaires au Musée de Gand, une adulte et une autre jeune, qui appartiennent à une Baleine peut-être à l'espèce des régions tempérées. La première a été . trouvée dans les décombres d’une abbaye des environs d’Alost; nous avons reçu une omoplate qui avait été conservée dans une autre abbaye et que nous avons attribuée à la Baleine des Basques. Le Musée de Stockholm possède, indépendamment d’un beau squelette, une région cervicale, des vertèbres, des omo- plates, des côtes et des os de membres, qui ont été rapportés par Nordenskjôld et Smith en 1868. Ce Musée possède, en outre, une côte de Baleine de l’époque glaciale provenant de Halland et une mandibule recueillie dans le sable du fond de la Baltique, à Arnäs. Le Musée de Lund renferme également deux omoplates. Rathke parle aussi d’une omoplate, appartenant sans doute au Musée de Kônigsberg, de 4 pieds 1 1} pouce de largeur, de 3 pieds à pouces de longueur { et qui ressemble à lomoplate de la Baleine australe. Aug. Muller attribue avec raison cet os à l’espèce qui nous occupe. 1 RaTuxe, Preuss. Prov., BI. 18, Bd. 1837, p. 562. ( 95 ) Au Musée de Carolinska-Institut de Stockholm se trouvent une omoplate et une vertèbre lombaire qui ont été déterrées dans une église; ces deux os sont fort intéressants : l’omoplate indique un animal de très grande taille et ce qui la distingue surtout c’est sa grande largeur en dessous de l’acromion, ainsi que sa longueur dans sa partie supérieure. L’épaisseur de Pos est fort grande, tant sur son bord libre supérieur qu’à son bord _ antérieur et à son apophyse. Cet os mesure d’un angle à l’autre de sa plus grande largeur 1,23. Du bord supérieur à la base de l’acromion 1",03. Cette partie inférieure de los est cou- verte d’une couche de couleur. On dirait au premier abord que cette partie de l'os est artificielle. La surface articulaire mesure d'avant en arrière 0,35. Cet os est sans doute de Baleine franche. La vertèbre ne présente pas moins d'intérêt : Le corps mesure en hauteur 0",30, en largeur 0,36 et il n’a que 0",18 d'épaisseur, avec une apophyse épineuse fort élevée, des para- pophyses fort larges et distinctes. Or, si nous comparons cette vertèbre à une caudale de Mysticetus, nous trouvons que les ver- tèbres chez lesquelles les apophyses sont encore si développées, l'épaisseur du corps, c’est-à-dire le diamètre antéro-postérieur, est au moins le double. Cela revient donc à dire que les vertè- bres de la région lombaire et caudale sont fort peu épaisses dans la Baleine qui nous occupe. Le canal vertébral de cette vertèbre a encore en hauteur 0,07. Si cette vertèbre appartient au même animal que l’omoplate, nous avons ici deux os d’une espèce bien différente de toutes celles que nous connaissons et qui se rapprochent plus des Baleines australes ou de la Biscayensis que de la Baleine du Groënland. Nous ne connaissons aucune Baleine qui ait une vertèbre aussi courte avec une apophyse supérieure aussi longue et des zygapophyses aussi développées. Au Congrès de l'Association britannique, à Brighton, le pro- fesseur Struthers a exhibé deux sternum-énormes et un ischion provenant de l’espèce qui nous occupe et qui appartient, si je ne me trompe, à l’Université d’Aberdeen. Ces deux sternum montrent combien ces os peuvent varier d’un individu à l'autre (9%) dans une seule et même espèce. On voit également au Musée d’Aberdeen onze bassins avec fémur et tibia, de quatre mâles et de sept femelles, et plusieurs régions cervicales. Le Muséum de Paris a reçu en 1877 une région cervicale de la mer de Bering, que nous avons tout lieu de croire de Ba- læna Japonica. FŒTUS. On conserve des fœtus de cette espèce dans plusieurs Musées. Nous ne savons si les os de l'embryon disséqué et figuré par Pierre Camper 1 ont été conservés. Nous avons vu un fœtus conservé dans la liqueur à Haarlem, à Groningue, à Hull, à Liverpool, et le D' Wyman fait mention d’un fœtus de six pouces appartenant au Musée de Boston 2. Au Musée de Stockholm on possède un fœtus de seize pouces et demi. A Kônigsberg on a reçu un fœtus de douze pieds dont on a préparé le squelette; il en est fait mention plus haut. Il prove- nait du professeur Reinhardt. Nous avons reçu à Louvain une tête d’un fœtus conservé dans le sel, de la même grandeur à peu près, dont nous avons préparé le squelette. Cette tête provient également du profes- seur Reinhardt. A Peterhead (Écosse) on conserve un fœtus dont le moulage est conservé au Muséum à Paris. Le D' Knox était en possession d’un fœtus qu'il a disséqué; il a communiqué le résultat de ses observations anatomiques en 1834 à la Société royale d'Édimbourg. Les préparations du savant docteur sont sans doute conservées au Musée d’ana- tomie. ! P1ERRE CAMPER, Observations anatomiques. .... , Paris, 1820. 3 Proc. Boston Soc., vol. II, p. 355, 1851. DESSINS. On a été fort longtemps sans posséder une figure passable de la Baleine franche. Il n’est pas aisé de reproduire exacte- ment le contour d’un animal de 60 pieds de longueur, même lorsqu'il est encore frais et étendu convenablement sur la plage. La première figure qui a été publiée est celle de Fréd. Mar- tens, de Hambourg. Elle a été souvent reproduite. Cette figure a été évidemment faite de souvenir. Pendant longtemps on n’en à pas connu d'autre {. Sous le nom de Nord caper, un dessin de Baleine, dû à Bacstrom, est publié dans Lacépède. Si ce dessin est fait, comme le dit Lacépède, dans les mers du Groënland, ce n’est pas un Nord caper, mais bien une Baleine franche qui y est figurée. La figure qu’il donne de la Baleine franche, planche I, figure 1, est mauvaise 2. Pierre Camper a dessiné un fœtus la bouche ouverte; il a dessiné aussi les principaux viscères en place. Les six pre- mières planches de son atlas sont consacrées à ce fœtus ; les planches VIIT et IX reproduisent les caractères des os qui com- posent l’oreille; la planche X, la mandibule 3, Hans Egede (1741) a publié une figure de Baleine (Hval- fish) à côté d’une figure de Balénoptère (Finnefish) et d’un Orque (Sverdfish). Il donne aussi le dessin d’un Narval et d’un Beluga #. l F, MarTens, Spitzbergische Reisebeschreibung, Hamburg, 1875, 40, * LACÉPÈDE, Hist. natur. Cétacés, Paris, an XII. BacsTROw, Account of a vuyage to Spitzbergen in the jear 1782, THE PHILOSOPHICAL MAGAZINE, july, 1799. 5 Observations anatomiques sur la structure des Cétacés (1829). * Hans Ecene, Det gamle Grünlands nye Perlustration eller Naturel- Historie, Kiobenhavn, 1741. ( 98 ) J.-B. Bennet 1, G.-H. Borowski 2, Fr. Krauss 3 en ont publié également, ainsi que le D' Fischer. Le D' Fischer reproduit le dessin d’un fœtus d’après Camper avec les dimensions et fait mention de la taille d’un fœtus moulé d’après un exemplaire conservé à Peterhead #. Pander et D’Alton publient le dessin d’une jeune tête du Musée de Berlin et d’une tête adulte du British Museum. La première bonne figure a été donnée par Scoresby 5. On trouve également une bonne figure dans la collection des voyages de Harris 6, et qui est accompagnée d’une fidèle description. La meilleure figure du Bowhead ou de la grande Baleine polaire est celle du capitaine Seammon. Il reproduit non seu- lement l'animal complet, mais ajoute un bon dessin des Cyames qui habitent la tête et les nageoires (pl. X, fig. 2). I figure en même temps la Baleine du Japon. Le squelette est figuré par Eschricht dans ses Om Nordvalen 7 et par nous dans l’Ostéographie des Cétaces. Malm a donné le dessin de la partie postérieure du crane, de la caisse tympanique, de los hyoïde, de la mandibule, de vertèbres de diverses régions, de côtes, de lomoplate, de l’hu- mérus, du radius et du cubitus, d’après des os rapportés par Nordenskjüld de son expédition par la Vega 1878-1880 8. Paul Gervais a publié la coupe du crâne {pl. IV, fig. 1), los lacrymal (pl. VI, fig. 4), les os du bassin (pl. VE, fig. 5) dans 1 J.-B. Benxver, Natuurk. Verhandl. kon. Maaitsch. d. Wetcnschap. te Haarlem, Vde deel, Iste stuk, 1809, pl. I-IT. 2 G.-H. Borowsxi, Natuurg. d. Samtl. Wallfischarten, Berlin. ...,1780, pl. H4-I1B, * Krauss, Das Thierleben in Bildern., 1851, pl. XLIIL, fig. 5. * Fiscner, Mélanges célologiques, 1869. 5 ScoresBy, Account ...., 1811; an account ...., 1820. 6 Collection of Voyages and travels, London, 1744. 7 Escuricat et ReixHaRDT, Om nordhvalen, 1861, pl. I (fœtus). 8 À. MaLm, Skeletdelar of hval insamlaude under expeditionen med Vega, 1878-1880. Stockholm, 1883. ( 99) ses Remarques sur l'anatomie des Cétacés de la division des Balénides 1. COMMENSAUX ET PARASITES. La Baleine franche ne porte jamais de Cirripèdes; les balei- niers islandais, au XII° siècle, l'avaient déjà remarqué. Les premiers colons de la côte du Groënland avaient eu l’occa- sion de voir la Baleine franche; ils avaient pu s'assurer que la Baleine des régions tempérées porte toujours des Coronules, tandis que la Baleine du Groënland n’en héberge jamais. Le capitaine Scammon a porté aussi son attention sur ces commensaux et 1l a constaté que le Bowhead du détroit de Bering est toujours sans Cirripèdes comme la Baleine de Spitzhberg et de Groënland. Mais si ces Cétacés ne logent pas des Cirripèdes comme les autres Baleines, ils se couvrent comme elles de Cyames 2. Le professeur Lutken à comparé les Cyames connus et il a fait connaitre le résultat de ses observations dans un mémoire spécial. Une même espèce de Cyame peut habiter différentes espèces de Baleines, ce qui ne permet pas de dire que le parasite est le pavillon de l’animal. Le professeur Lutken montre aussi que le Dr Monedero a figuré un Picnogonon au lieu d’un Cyame, sur la planche qui représente la Baleine du golfe de Gascogne, capturée en 1854. Il paraît que le Cyamus mysticeti habite de préférence la tête et les membres antérieurs. Comme endoparasite, on a signalé PEchinorhynchus mysti- ceti, dans l'intestin. C’est jusqu’à présent le seul vrai parasite connu de ce Cétacé. 1 Nouvelles Archives du Muséum, Mémoires, t. VII. ? The arctic Bowhead is comparatively free from parasitic crustaceans, as wel as Barnacles, dit Scammon (p. 57); occasionally however, ajoute-t-il, a species of cyamus is present about the head or fins. ——-SÉsn— HISTOIRE NATURELLE DE LA BALEINE À BOSSE (MEGAPTERA BOOPS), P.-J. VAN BENEDEN, MEMBRE DE L'ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE {Présenté à la Classe des sciences dans la séance du 8 janvier 1887.) vod (Extrait du tome XL des Mémoires couronnés el autres Mémo publiés par l'Académie royale de Belgique. — 1857.) HISTOIRE NATURELLE DE LA BALEINE A BOSSE (MEGAPTERA BOOPS). LITTÉRATURE. ©. Fabricius. Fauna groenlandica, in-8°, Hafniæ et Lipsiæ, 1780. Pierre Camper, Observations analomiques sur la struclure intérieure et le squelette de plusieurs espèces de Célacés. Paris, 1820. Rudolphi, Ueber Balæna longimana, ABu. D. K. AKADEM. D. WISsEN- SCHAFTEN Z. BERLIN FÜR 1829, tab. 4-5. 3.-E. Gray, The Zoology of the voyage of Eresus and Terror, 1844-48. Eschrieht, Die nordischen Wallthiere, in-fol. Leipzig, 1849. Schlegel, Fauna Japonica, 1850. (Sous le nom de Balænoptera antarctica.) (104) P.-J. Van Heneden. Le Rorqual du cap de Bonne-Esptrance et le Kiporkak des Groenlandais, Buzz. AcaD. ROY. DE BELGIQUE, 2° série, t. XVIII, 1864. €h.-H. Scammon., 7he marine animals. San-Francisco, 1874, in-4°, Haast, Jul. von, Notes on the skcleton of Megaptera lalandii, Trans. NEW. ZeaL. INsr., vol, XV, p. 214-216. G. ©. Sars, Fortsatte Bidrag til Kundskaben om vore Bardehvaler ; CaRiISTIANIA, VIDENSKABSSELSk. Foru., 1880. MH. Gervais, Comptes rendus des séances de l’Académie des sciences de Paris, décembre 1885. Gustav A. Guldberg, Zur Biologie der nordatlantischen Finwalarten, Zoologische Jahrbücher, Zerrscarirr FÜR Svsr. GEOGR. UND BIOLOGIE DER Tuiere. Jena, 1886, p. 127. ( 105 ) HISTORIQUE. David Cranz, missionnaire, a donné le premier, après une année de séjour au Groënland, 1761-1762, une longue des- cription des Megaptera, sous le nom de Kipporkak. Otto Fabricius se rendit ensuite au Groënland, également comme missionnaire, et s'établit à la Colonie de Godthaab, où il fut à même d'observer de près la pêche de la Baleine. Il y a séjourné de 1768 à 1773. II a désigné lanimal qui nous occupe sous le nom de Balæna boops, le croyant identique avec la Balæna boops de Linné. I est à regretter que Fabricius ait cherché à identifier les espèces qu'il avait observées avec celles de Linné, que l’on ne connaissait que par des descriptions vagues. Fabricius dit que, en hiver, cet animal se dirige vers la haute mer, et que, en été et surtout en automne, il retourne vers les côtes du Groënland. G. Cuvier n’a pas eu l’occasion de réunir les matériaux nécessaires pour distinguer les Mégaptères des Balenoptères; les prétendues Balénoptères à ventre lisse, nommées Gibbars, dont il est question dans le Règne animal, comme dans les Recherches sur les animaux fossiles, n'existent pas. Depuis le commencement du siècle On connaît cependant la Mégaptère du cap de Bonne-Espérance que le grand natu- raliste du Muséum a décrite sous le nom de Rorqual du Cap, d'après un squelette rapporté par Lalande et que l’on a vu également sur les côtes de Madagascar et au Port Natal. Les Mégaptères ont donné lieu aux plus grandes méprises de la part des naturalistes ; Cuvier, comme son frère, n'ayant d’autres renseignements que les rapports souvent vagues et incomplets des baleiniers , n’est point parvenu à jeter du jour dans ce chaos d'espèces réelles et imaginaires. Cependant Pierre Camper avait fort bien reconnu déjà le vrai ( 106 ) caractère de ces Cétacés à longues nageoires pectorales ; il avait très bien distingué les Baleines qui portent des tubérosités sur le dos de celles qui portent, à leur place, une véritable nageoire. Les baleiniers distinguaient du reste mieux ces grands Céta- cés que les naturalistes, puisqu'ils avaient déjà et qu’ils ont encore le nom de Humpback, pour les Mégaptères, celui de Fin ou Vinfisch pour les Balénoptères, et celui de Right Whales pour les vraies Baleines. En novembre 1824, une Mégaptère échoua à l'embouchure de l’Elbe et fut l’objet d’un mémoire écrit par Rudolphi, qui avait eu l’occasion d'étudier peu de temps avant 1819 un autre grand Cétacé échoué sur les côtes de Holstein. Rudolphi reconnut en elle la Balæna boops de Linné et de Fabricius et proposa néanmoins le nom spécifique de Longimana, pour sortir de cette inextricable nomenclature. Le squelette de cette Mégaptère est conservé au Musée de Berlin. iudolphi reconnaît parfaitement qu’il existe des aflinités entre la B. Longimana qu'il décrit, le Rorqual du cap de Cuvier et certains grands Cétacés des îles Bermudes, qui sont connus aujourd'hui pour de grandes Mégaptères, auxquelles les baleiniers américains ont fait régulièrement la chasse dans le cours du siècle dernier. La description de Rudolphi est accompagnée de cinq planches représentant le squelette complet, sa tête vue de deux côtés, les os du bassin, et l’animal vu sur le côté. On voit les plis sous la gorge s'étendre jusqu’au delà de la moitié du corps. Gray, en décrivant les Cétacés, dans le voyage Erebus and Terror (1844) proposa, pour le Mystacocète à grandes nageoires pectorales, le nom générique de Megapteron et, peu de temps après, Eschricht, tenant compte de la bosse qui occupe la place de la nageoïire dorsale, proposa le nom générique de Kyphobalæna (1849). Le nom de Gray a été adopté parce qu’il a la priorité. C’est cette bosse qui lui a fait donner le nom de Gibbar et de Jubarte, puis celui de Humpback, sous lequel le connaissent aujourd’hui tous les baleiniers. Schlegel, dans la faune du Japon (1850), reconnaît parfaite- (EL OP) ment que l’animal pris sur les côtes méridionales du Japon et dessiné sur les lieux même, est le même que le Rorqual du Cap et la Balæna longimana décrite et figurée par Rudolphi ; mais il désigne cet animal, si remarquable par le développement extra- ordinaire de ses nageoires pectorales, sous le nom de Bale- noptera antarctica. Schlegel admet une Balenoptera arctica, dis- tincte de la précédente par ses petites nageoires. Le savant Directeur du Musée de Leyde confond encore les diverses espèces de Balénoptères. Eschricht s’est longuement étendu sur les caractères de la Baleine à bosse : le savant Cétologue a publié, dans ses nordis- chen Wallthiere, une gravure, faite à bord de la Corvette Galathea par Christian Thornam et intercalée dans le texte, qui fait parfaitement reconnaître à distance cet animal en pleine mer. Le premier échantillon de Megaptera que Eschricht a reçu de Groënland par son ami Holbôll, était un fœtus de 1,176 de long, qui lui a permis de constater que la Megaptera était désignée au Groënland sous le nom de Keporkak. Depuis il en a reçu huit squelettes, plus ou moins adultes, qu'il a échangés ensuite avec divers musées. Peu de naturalistes ont eu cet avantage de pouvoir comparer plusieurs squelettes entre eux et sur place. Le premier cerveau complet de grand Cétacé provenait du cétacé qui nous occupe et a été préparé par Holbôll pour son ami Eschricht 1. En 186%, nous avons écrit une note sur le Rorqual du cap de Bonne-Espérance et le Keporkak des Groënlandais ; nous avons signalé la différence qui existe entre l’omoplate de droite et de gauche dans le squelette du Cap, les moditications principales du sternum d’après l’âge de la Mégaptère, et nous avons signalé des différences assez notables dans certains os ; nous ne croyons pas ces différences assez grandes, aujourd’hui surtout, pour séparer spécifiquement ces animaux. Nous ne " Escaricar, Fecherches sur les Cétacés des mers boréales, p. 60. ( 108 | connaissons jusqu’à présent qu'un seul squelette complet du Cap, et cela ne sufhit pas pour juger si les modifications de certains os sont ou non des dispositions individuelles. Au mois d'octobre 1870, dans un chargement d'os de Céta- cés recueillis au cap de Bonne-Espérance, et parmi lesquels se trouvaient beaucoup d'os de Humpback, M. le professeur Sir Turner à pu comparer un atlas de Megaptera de la Nouvelle- Zélande avec celui du Cap et, à l’exception du sillon qui sépare les deux surfaces articulaires, correspondant aux con- dyles de loccipital, qui est un peu plus large, 11 n’a pu voir aucune différence bien appréciable entre eux. L’atlas du Cap est seulement un peu plus grand 4. Dans son rapport sur les ossements de Cétacés rapportés par le Challenger, le savant professeur d'anatomie d’Édimbourg trouve que les différences entre la Megaptera boops et la Lalandii ne sont pas d’un carac- tère bien marqué (are not of a strongly-marked character). Le capitaine Scammon a largement contribué à faire con- naître le Humpback de l'Océan pacifique. On le reconnaît faci- lement à de grandes distances par ses évolutions à la surface de la mer et il ne nage Jamais longtemps en ligne droite dit-il. Le savant baleinier fait connaître les baies principales où il se tient. Il a vu des individus de tout âge prendre leurs ébats, depuis ceux qui venaient d’être mis au monde jusqu'aux adultes. Les Mégaptères du nord du Pacifique ont été étudiées avec le même soin que les autres Cétacés; le capitaine Scammon signale quelques différences dans la couleur de ces animaux, dans la longueur des membres et dans la forme des nageoires, mais il est à remarquer que ces différences s’observent dans des individus de la même gamme, et que tous héber- gent les mêmes Coronules et Oftions dans les mêmes con- ditions. Dans un intéressant travail Sur les Cétacés du sud-ouest de : The zoology of the Voyage of H. M.S. Challenger. REPORT BY PROFESSOR TURNER, p. 51. | ! | : ( 109 ) la France, le D' Fischer fait mention de la Megaptera qui nous occupe ; il fait un exposé complet de ce que l’on connaît de cet animal; il ne néglige ni la synonymie, qui a tant contribué à embrouiller son histoire, ni ses émigrations, n1 les commen- saux crustacés qui les hantent si régulièrement, que les Groënlandais les croient venir au monde avec eux. Peut-être toutes les Mégaptères appartiennent-elles à une même espèce, disait le Dr Fischer dans son mémoire sur les Cétacés, après avoir comparé des ossements provenant des Antilles avec le Rorqual du cap de Bonne-Espérance décrit par Cuvier. Dernièrement M. H. Gervais a publié une note sur les Mégap- tères dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences, à propos d’un squelette provenant de la baie de Bassora (golfe persique). M. H. Gervais croit que le nombre d’espèces de Mégaptères doit être porté à trois: la Megaptera boops, de l’hé- misphère boréal, la M. Lalandii du sud de l'Océan atlantique, et la M. indica du golfe persique. M. H. Gervais donne la descrip- tion du squelette et fait remarquer combien le sternum et la caisse tympanique de la Megaptera indica diffèrent de ces mêmes os des autres Mégaptères. M. H. Gervais nous a montré le squelette de ce Cétacé et, en plaçant les principaux os à côté les uns des autres, nous avons dû reconnaitre qu’il y a des différences qui dépassent en impor- tance les modifications individuelles. Nous avons vu également au Muséum d'histoire naturelle de Paris une tête des îles Poncotau, donnée en 1876 par le Musée des colonies, et qui se rapporte, nous semble-t-il, à une forme également distincte, aussi bien par la direction droite des intermaxillaires que par la forme élargie de la portion écail- leuse de l’occipital; mais il est prudent d'attendre de nou- veaux matériaux du sud du Pacifique avant de se prononcer sur la valeur de ces caractères. Au moment de communiquer ce travail à l’Académie, M. Gus- tav-A. Gulberg fait paraître dans le Zoologische Jahrbücher un article fort intéressant sur la biologie des Balénoptères et (410:) qui traite en même temps de la Mégaptère. M. Guldberg a assisté pendant trois ans à la chasse de ces animaux sur la côte de Finmark, et il a eu l’occasion de faire des observations fort inté- ressantes sur leur apparition le long de ces côtes, sur leur nom- bre, leur taille et surtout sur la gestation, en prenant pour guide les fœtus des femelles capturées. SYNONYMIE. Les naturalistes sont d'accord aujourd'hui pour désigner cet animal sous le nom de Megaptera boops. La Megaptera boops est évidemment le Cétacé à fanons que les baleiniers français ont appelé quelquefois Gibbar ou Jubarte, souvent Baleine à bosse, et qw'ils désignent aujourd’hui générale- ment sous le nom de Humpback. Cest la Baleine noueuse de Lacépède. Les Groënlandais, qui connaissent parfaitement cet animal, appellent Keporkak. Cest la Balæna boops de Fabricius, qui a eu l’occasion de la voir en vie pendant son séjour au Groënland. Rudolphi lui a donné le nom de Balæna longimana. C’est le même Cétacé que le D' Gray a appelé en 1844 Megap- teron longiman«. En 1849, Eschricht proposa le nom de Xyphobalæna boops, parce que, comme nous lPavons dit plus haut, au lieu d’une nageoire 1l porte une bosse sur le dos, d’où lui était venu le nom de Jubarte où Gibbar. CARACTÈRES. Nous pouvons résumer ainsi les caractères distinctifs : Les Megaptera ont une bosse sur le dos à la place d’une nageoire, des plis sous la gorge comme les Balénoptères, des fanons courts et les deux rangées réunies en avant sur la ligne médiane; une lèvre Ci) inférieure peu élevée, un rostre presque droit, des nageoires pectorales de la longueur du tiers de l'animal, quatre doigts, sept vertèbres cervicales séparées les unes des autres, un sternum court et terminé en pointe en arrière; les apophyses transverses des vertèbres dorsales moîins élevées que dans les Baleines, mais plus que dans les Balénoptères ; la muqueuse des intestins gréles alvéolée et ceux-ci séparés des gros intestins par un cœcum. DESCRIPTION. La nageoire pectorale a la longueur du Baleineau en venant au monde, c’est-à-dire le quart de l'animal adulte. [l paraît qu'il y a de grandes différences dans la taille de cet animal: Fabricius lui accorde de 50 à 54 pieds; Holbôll va jus- qu'à 60 pieds: 14 en naissant et 30 en quittant la mère, c’est-à- dire, quand il est sevré. Eschricht fait remarquer qu'un sque- lette de 45 pieds n’a pas encore ses disques aux vertèbres soudés. Nous trouvons, dans les Philosophical transactions, une note d’un marin sur la taille de ces Cétacés pêchés aux îles Ber- mudes, qui estime leur longueur à 88 pieds. [l y a un peu d’exagération sans doute, mais à en juger d’après plusieurs os que nous avons vus à Paris, à Stockholm et à Bordeaux, cette exagération n’est pas grande. Les Danois, établis dans les colonies de Groënland, s’ac- cordent avec l’auteur de la note des Philosophical transactions, en leur donnant également de 70 à 80 pieds. A la latitude de 21° sud et 174 longitude ouest, Scammon a mesuré un individu qui avait T5 pieds. [ semble toutefois que, dans les mers de l’Europe, cet animal atteint que rarement cette taille, et si nous voyons dans'les Musées de Paris et de Stockholm des os d’une dimension extraordinaire, nous devons croire que les marins qui ont apporté ces pièces, ont eu à choisir les os les plus remar- quables par leur grandeur. En général les baleiniers ne leur accordent pas une taille (112) supérieure à celle des Balenoptera musculus, c'est-à-dire 60 pieds. La plupart de ceux que l’on capture aujourd’hui sur la côte de Finmarck n’ont pas même cette taille: M. A. Cocks donne la mesure de trois màles qu'il a vu prendre; le plus petit n'avait que 30 pieds, le second 40 et le plus fort 44. En général leur taille varie sur les côtes de Norwège, entre 42 et 45 pieds, dit Guldberg. Une Megaptera de 50 pieds a été trouvée morte en mer en 1883 sur les côtes de Finmark; on en a conservé le squelette. Les pêcheurs la considéraient comme un grand Imdividu. En avril 1846, on a capturé autour de l'ile S'-Hélène, une mère de 45 pieds qui avait un fœtus de 14. Le capitaine Scammon donne la mesure d’un mâle du détroit de Béring et d’une femelle des côtes de Californie; le mâle mesurait 49 pieds 7 pouces, la femelle 48 pieds. Il parle ensuite d’un autre Humpback de 46 pieds, dont il ne dit pas le sexe, puis d’une femelle de 52 pieds. Sur les côtes d’Écuador, où l’on capture un assez grand nombre de Mégaptères, les baleiniers font une grande diffé- rence entre les mâles et les femelles; ils disent que les mâles ne donnent que 20 barils d'huile tandis que les femelles en donnent 59. Guldberg estime la longueur de l'animal en naissant entre IL et 15 pieds. On lui a donné cependant déjà 18 pieds. Nous connaissons le cas d’une femelle morte en mettant bas sur la côte près de Stavanger et dont le fœtus mâle de 14 pieds pendait par la queue hors du corps de la mère. Une femelle, capturée en avril 1846 sur les côtes de Fin- marken, avait 45 pieds et son fœtus de sexe mâle en avait également 14, M. Guldberg a recueilli dix fœtus et 1l a observé qu’en juin ils ont un quart de mètre et dans la seconde moitié de juillet un demi mètre; 1l pense que le fœtus d’Eschricht qui avait 1%,90 avait été recueilli au mois d'octobre. La mise bas a lieu (143) pense-t-il, au printemps, et le fœtus à maturité mesure de 4 à 4 1/9 mètres. Les Groënlandais leur accordent de 14 à 16 pieds en venant au monde, 30 quand elles quittent leur mère et 60 à l’âge adulte. D’après les relevés de Guldberg, l’époque des amours aurait lieu à la fin d'avril ou au mois de mai. On n’a pas encore vu l’accouplement d’après lui. Les fanons des Mégaptères sont d’un beau noir avec des bords un peu plus pâles qu'au milieu; les barbes sont également noires, elles atteignent deux pieds de longueur, eton en compte jusqu’à 240. Comme dans les Balénoptères, les rangs des fanons se réunis- sent en avant sur la ligne médiane. Dans le commerce, on distingue aussi fort bien les fanons des Megaptera. Les Anglais les connaissent sous le nom de Ber- muda finner, parce que les baleiniers ont fait pendant un cer- tain temps la chasse à ces animaux aux /les Bermudes. Nous trouvons une note fort intéressante à ce sujet dans les Tran- sactions philosophiques. La couleur de l'animal est noire; sous la mandibule en avant, elle est toute blanche où marbrée dans la profondeur ; entre les replis, elle est rougeâtre. La nageoire caudale est noire en dessus, blanche en dessous, entourée d’un bord noir; ses bords sont ordinairement découpés. Les nageoires pecto- rales sont blanches des deux côtés. La partie postérieure de la bosse est d’un blane pur. La grosseur, pour ne pas dire la bosse, qu'il porte sur le dos, est désignée sous le nom de Hump par les baleiniers anglais, et de là le nom de Fiumpback. La bosse existe déjà dans le jeune âge. Une jeune Megaptera non sevrée, mais déjà plus grande de taille que la Balenoptera rostrata, avait une protubérance dorsale en tout semblable à celle de sa mère qu’elle accompagnait encore, dit Holbôll, et (114) cette ressemblance était aussi complète pour la forme que pour la place qu’elle occupait. Le zélé gouverneur du Groënland fit cette observation en 1833 sur un animal capturé tout près de Godthaab. Pechucl représente exactement la bosse comme le capitaine Scammon. De gros tubercules recouvrent régulièrement la peau des mandibules et une partie du rostre. Ces tubercules sont gros comme une petite orange et formés dans l'épaisseur de Ja peau. Ils rappellent, mais en gros, le bulbe des poils qui recouvrent le rostre des autres Cétacés. On a trouvé des restes des poils dans quelques-uns d’entre eux, et au Muséum de Paris on a même trouvé au fond de l’un d’eux une Coronula diadema. X y a lieu de se demander sil y a des rapports entre ces tumeurs et les poils. Indépendamment de la largeur plus grande des os du bras et de l’avant-bras, on peut dire que tous les os du squelette se distinguent par des caractères propres. Les os de la face ressemblent à ceux des Balénoptères et on peut les confondre avec eux, mais les maxillaires supérieurs sont plus larges vers le milieu de leur longueur. Les caisses tympaniques surtout sont caractéristiques; au lieu de ressembler à celles des Baleines par leur bord com- primé, elles sont arrondies, et le diamètre vertical ne diffère guère du diamètre transversal. Les vertèbres se répartissent comme il suit : cervicales sept, dorsales quatorze, lombo-caudales trente-deux, c’est-à-dire cinquante-trois en tout. Les vertèbres cervicales sont distinctes de celles des Balénop- tères, par l’ossification plus tardive de leurs apophyses trans- verses supérieures et inférieures. Les apophyses transverses forment parfois un anneau complet; nous en avons vu un exemple intéressant dans un axis du Musée de Bordeaux, pro- venant des Antilles. Comme dans les Balénoptères, les cervicales sont toutes séparées, mais on trouve toutefois des squelettes où certaines (115 ) vertèbres de cette région sont soudées entre elles. Dans une région cervicale conservée au Musée de Bordeaux, les quatre premières vertèbres sont dans ce cas; l'individu du Cap, au Muséum, a son axis soudé par le corps à la troisième cervicale. Un axis rapporté de la Nouvelle-Zélande par le Challenger est soudé à la troisième et à la quatrième cervicale. L'omoplate est reconnaissable à l'absence des apophyses acromion et coracoide. Le D' Fischer accorde 65 centimètres à l’humérus avec un trochiter bien marqué, dit-il; les radius de deux individus ont lun 1 mètre et 2 cent., l’autre 1 mètre 4 cent. de longueur. Ces os viennent de Bermudes. Struthers à fait connaître les muscles des doigts de Ja Megaptera. Dans l'adulte 11 y a trois phalanges à l’index, sept aux deux doigts suivants, deux au petit doigt. Le bassin des Megaptera a été étudié par le professeur Struthers. Il est d’une structure rudimentaire : vestige of a more complete limb possessed by ancestors. Il s’est également occupé du carpe, dont il possède plusieurs beaux échantillons. Guldberg a fait des coupes d’un fœtus de Megaptera, au labo- ratoire de zoologie de Liège, pour étudier avec soin tout le système nerveux de ces Cétacés. Les fœtus des Mégaptères se distinguent déjà aussi bien que les adultes, si pas mieux, des fœtus des Balénoptères, et les jeunes ont à peine suivi leur mère, qu’ils logent déjà les com- mensaux Coronules sur la tête et les mandibules. MOEURS. C’est à Holboll et aux capitaines Scoresby et Scammon que l’on doit surtout la connaissance du genre de vie de ces animaux. La Mégaptère est si peu sauvage que les Groënlandais l’ap- prochent aisément dans leurs kayaks et même de très près, quand elle mange des Mallotus arcticus. Quand elle est poursuivie, dit Guldberg, elie fait entendre un ( 16) sourd hurlement et bat l’eau de la mer avec sa large nageoire caudale. En plongeant, elle frappe Pair avec cette même nageoire, comme la Baleine franche. Les Balénoptères ne se conduisent pas ainsi quand elles plongent à de petites profondeurs. Quand un animal est tué, son compagnon ne l’abandonne que quand le cadavre est amarré et remorqué par le navire. On a fait la remarque que le mâle est toujours plus sauvage que la femelle. Le Humpback est toujours plus ou moins dangereux à har- ponner, disent quelques baleïniers; une fois qu’il se sent piqué, au lieu de plonger comme la Baleine franche, il reste entre deux eaux et nage avec une telle rapidité qu’à bord des meil- leures embarcations, même celles des Américains, les balei- niers sont souvent obligés de couper leur ligne et d'abandonner leur proie. Comme nous l’avons vu plus haut, la manière dont le Humpback se conduit dans la mer permet de le distinguer de tous les autres grands Cétacés : par un temps calme comme par un temps orageux on le voit s’'élancer hors de Peau, au point que tout le corps devient visible; 1l se retourne en Pair, retombe sur le dos, pendant qu'il se bat les flancs avec ses immenses nageoires. C’est ainsi que parle également Fabricius des Mé- gaptères des côtes du Groënland. Cest ce que les habitants des côtes de la baie de Vadsü ont pu voir aussi en 1881 quand la baie était littéralement envahie par elles et qu’elles venaient évoluer entre les navires. Le capitaine Scammon observe les mêmes phénomènes dans le Pacifique ; elles montrent hors de l’eau non seulement leurs immenses nageoires pectorales, mais même tout le corps. Nous l'avons dit plus haut, le capitaine Scammon, et avant Jui Eschricht, a publié un dessin qui reproduit parfaitement ces atutudes. Burmeister a fait les mêmes observations : cet animal est irrégulier dans ses mouvements et rarement 1l nage en ligne droite pendant un certain temps. (417) La nourriture des Megaptera, d’après ce que nous à appris Holbôll, qui a été à même d'observer ces animaux de près sur la côte de Groënland, consiste non seulement en poissons (Mallotus arcticus, Ammodytes tobianus, et Gadus agilis\, mais aussi en crustacés et en mollusques, comme la Limacina arc- tica, qu’elles avalent en immense quantité 1. Sars cite aussi le Mallotus arcticus comme nourriture principale de ces animaux aux Iles Loffoden. On trouve pendant l'été, sur la côte de Finmark, des mil- liards de crustacés dans leur estomac, surtout des Thysanopoda inermis. On voit les Mégaptères chasser en compagnie des Balénop- tères. On ne connaît rien de positif ni sur la durée de la gestation ni sur l'époque de la mise bas. Le capitaine Scammon estime, comme M. Guldberg, la durée de gestation à dix ou douze mois. On prétend que c’est pendant leur séjour dans la mer des Antilles que ces Cétacés s’accouplent. Le D' Goes dit qu'ils apparaissent à l’île Saint-Bartholomew au commencement de mars ou même en février et qu'ils y restent jusqu'à la fin de mai; qu'en avril et mai ils sont en chaleur et qu’on les voit alors debout dans l’eau et accouplés. Quand ces Mégaptères quittent ces parages au printemps, c'est en familles composées du père, de la mère et du petit d’un ou de deux ans; tout fait supposer que les femelles viennent mettre bas dans les mêmes lieux où elles ont passé la saison des amours. Au mois de juin, une femelle de 52 pieds, capturée sur les côtes de Finmark, portait un fœtus d’un pied. Le capitaine Stavers a pêché une jeune Megaptera (Kalb) près de Sainte-Hélène. La chair est bonne et a été mangée plus dune fois comme une délicatesse. Les colons danois des côtes de Groënland partagent le même avis sur la qualité de la chair. . * Escaricar, Loc. cit, p. 150. (148) DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Les baleiniers comme les marins ont rencontré des Æump- backs (Megaptera) dans les deux hémisphères, dans l’Atlantique sud et nord jusqu’à la mer de Baflin, dans la mer des Indes et le Pacifique jusqu’au détroit de Behring. On connaît d'une manière non douteuse quelques stations de cet intéressant Balénide et, en coordonnant leur apparition périodique dans certains parages, leur séjour, leur départ et les échouements dont on a tenu compte, on peut tracer le séjour d'été et le séjour d'hiver, au moins dans l'Atlantique sep- tentrionale, avec une probabilité qui approche de la certitude. Si nous ne nous trompons, c’est le premier grand Cétacé, après la Balæna mysticetus, dont on peut apprécier l'habitat aux différentes époques de l’année. La Megaptera boops fait tous les ans son apparition sur les côtes nord et nord-est de Norwège, particulièrement à la fin de l'hiver et au printemps. Il y a des années, qu’on en voit en quantité prodigieuse. On cite l’année 1881; en quelques jours au mois de mars le nombre de balénides était si grand dans le Varanger-Fiord, que tout le fiord était en ébullition. étaient principalement des Megaptera. Dans ces dernières années on n'en à plus vu dans ce fiord. M. Alfred Cockx pense que les premières Megaptera arrivent sur les côtes de Finmark au mois de février et il a vu la dernière le 16 septembre. Scoresby signale la Megaptera dans les eaux de Spitzherg. Depuis le siècle dernier, et même antérieurement, on avait remarqué leur apparition aux Iles Bermudes, vers le mois de mars et d'avril, et les baleiniers du cap Cod avaient même organisé une pêche regulière dans ces parages. Il est à remarquer que la Mégaptère arrive avec non moins de régularité dans les eaux d'Islande et sur les côtes de Fin- (AMP) mark : elle y est accompagnée surtout de la Balenopiera Sibbaldii. Sophus Hallas fait mention de la capture de six Megaptera, de quinze Balænoptera Sibbaldii et de deux Baltæ- noptera musculus, du 21 avril au 15 septembre (1867). La pêche des Balénoptères sur la côte de Finmark se fait depuis un quart de siècle et elle nous apprend que, dans le nombre de Balénoptères qu’on capture, 1l y a toujours des Mégaptères. Pendant la campagne de Pété dernier (1886) un baleinier à capturé quatre Mégaptères sur une trentaine de Balénoptères. M. Alfred Cocks donne quelques renseignements fort impor- tants sur cette pêche 1! : il rapporte que, sur quatre cent six Cétacés à fanons capturés en 1883, 1l y avait cinquante Mégap- tères ; sur quarante captures faites par un seul pêcheur, il y avait dix-neuf B. Sibbaldii, huit Megaptera et les autres étaient des B. Musculus. Tous ceux qui ont fait des observations sur les divers Balé- nides qui fréquentent les côtes du Groënland s'accordent à dire, avec Rob. Brown, que le Humpback n'apparaît dans ces parages que pendant les mois d'été; il arrive si régulièrement au détroit de Davys et à la mer de Baflin pendant l'été, qu'Eschricht a pu le comprendre dans son tableau de réparti- tion des diverses espèces de ces parages. Nous voyons dans ce tableau qu’au mois d'août les Mégaptères s’observent depuis le 62€ degré de latitude Jusqu'au 76° et qu'à la fin de l'été elles abandonnent ces parages pour se rendre au sud. A défaut de Baleines véritables dans la baie de Baftin, souvent les baleiniers se rejettent sur les Humpback pour com- pléter leur chargement. On cite le capitaine Walker qui, dans une seule campagne, captura quinze Mégaptères dans la baie de Disco. Les baleiniers s'accordent à dire, avec les habitants des côtes, que le Keporkak, c’est le nom que les Groënlandais donnent à la Mégaptère, est le plus commun des Cétacés à fanons, surtout ! Arr. Cocxs, loc. cit., p. 20. ( 120 ) dans le détroit de Davis à la latitude de 65 degrés, qu'il y fait son apparition chaque année à la fin du mois d'avril et ne quitte ces parages qu’au mois de novembre. Holbôll dit de son côté que cet animal est abondant dans la baie de Baflin jusqu’à Disco-Bay. À Frederikshaab (62%) le Keporkak a même fait, dans le temps, l’objet d'une pêche régulière (Eschricht). Cet animal a ses stations si bien déterminées, son apparition est si constante dans certains parages, que les pêcheurs ont reconnu le même individu apparaissant plusieurs années de suite à la même place. On en cite qui étaient reconnus à certaines blessures portées à l'extérieur et visibles à de grandes distances; on en désignait même par un sobriquet, comme on fait parfois pour des sangliers solitaires. On connaît aujourd’hui diverses captures de cette espèce et des échouements qui ont eu lieu au nord de l'Atlantique dans la Mer du Nord, la Baltique et la Méditerranée. Nous allons faire mention de ces prises avec la date et le lieu de leur apparition. Malheureusement on n’a pas toujours tenu compte des détails de leur capture. En 1757 une Mégaptère, dont les Coronula ont été conservées au Collège royal des chirurgiens à Londres, a échoué sur les côtes de Norwège. Un autre animal, de 12 1}; mètres de longueur, est venu échouer sur la côte de Suède près de Gôteborg, en 1803; son squelette est conservé au Musée de cette ville. En novembre 1824, un échouement intéressant eut lieu près de Vogelsand, à l'embouchure de lPEibe. C'était un mâle de 43 pieds de longueur; le corps fut acquis pour le Musée de l'Université de Berlin, et Rudolphi, dans un mémoire spécial ?, en a fait connaître tout ce qu'il offrait d’intéressant. Un autre mâle de 43 pieds de longueur a été trouvé mort sur les côtes d'Islande, le 18 juin 1867. C’est probablement un animal qui y à expiré à la suite de ses blessures. ! Akad.d. Wissenschaften, 25 juillet 1829. En avril 1846, une femelle pleine est venue à la cc'e près de Stavanger (Norwège). Elle portait un mâle de 14 pieds de lon- gueur ; elle en avait 45. Nous avons quelques exemples d'individus échoués plus au sud. Le 6 janvier 1877 un cadavre de cette espèce, de 15 mètres de long, est venu à la côte au sud de File de Noirmoutier (département de la Vendée), à la Barre-de-Morts, en pleine putré- faction. Il a été examiné par M. Dufour, directeur du Musée d'histoire naturelle de Nantes {. Le D° Fischer en fait mention dans son mémoire sur les Cétacés du sud-ouest de la France. On en a vu venir à la côte en Ecosse. Le professeur Sir Turner parle de lun d'eux dans le Naturalists Library ?. En janvier 1884, un mâle de 44-mêtres de long a fait son apparition dans l'estuaire de la Tay et, après avoir été mortel- lement blessé, il a été remorqué à Stonehaven près d’Aberdeen. Son squelette est conservé au Musée de l'Université de cette ville. Le professeur Struthers a entretenu de cette capture la section de biologie, à l'Association Britannique de 1885, à Aberdeen. Dans lestuaire de la Dee, une Jeune femelle de 31 pieds est venue échouer, dont le squelette est conservé au Musée de Derby, à Liverpool. Eschricht ne connaissait que trois exemples de Mégaptères échouées sur les côtes d'Europe : celui de 1824, à l'entrée de l'Elbe, celui de Johnston, près de Newcastle, et enfin celui de la baie de Firth of Forth. Il y a aussi quelques exemples de Mégaptères qui ont péné- tré dans la Baltique ; on n’en connaît qu'un seul dans ja Méditerranée. On cite une Megaptère qui a échoué au mois de mars 1545, près de Greifswald ; une autre en mai 1578 sur la côte de Cour- land ; enfin une de 60 pieds près de Stettin en 1628. En 1847 " Annales de la Société académique de Nantes, 1S7G ? Mammalia, vol. 6, pl. VIT. (12%) un individu fit son apparition dans la Baltique, v séjourna, a-t-on prétendu, pendant quatre ans, puis vint échouer sur les rivages des îles Wrangelsholm et Rammesaar, d’où on le remorqua jusqu'à Reval 1. C'était un mâle de 51 pieds 3/,; le squelette à été acheté par l'Académie des sciences de Saint- Petersbourg 2. Il n’est pas monté jusqu’à présent, mais les os sont bien conservés. Dans la communication que nous avons faite à l’Académie, à la séance du 5 décembre dernier, nous avons fait mention d’une Mégaptère trouvée morte dans la Méditerranée. M. le pro- fesseur Marion nous en avait informé à la date du 25 novembre, Cette détermination a été confirmée par M. le professeur Pouchet, dans la séance du T décembre 1885 3. Le corps est conservé au Muséum de Paris. Nous supposons que ce jeune animal, accompagné de sa mère, a pénétré accidentellement dans la Méditerranée par le détroit de Gibraltar. Sans doute la mère et le jeune allaient prendre leur quartier d'hiver sur les côtes d'Afrique. Eschricht a figuré dans un même tableau l’aire géographique de la Baleine franche et celle de cette espèce dans le détroit de Davys et la mer de Baflin pendant les douze mois de l’année. Comme nous venons de le dire, au mois d'août et de septembre ie Keporkak remonte dans la mer de Davis depuis le 62° degré jusqu'au T° et même le 76° degré, avec la Balenoptera Sibbaldii et disparaît de ces parages pendant les mois d'hiver. Tous ces faits s'accordent: la Mégaptère se trouverait au mois daoût et de septembre dans les hautes latitudes et au mois de ‘ Dr vox Eicuwazn, Analekten aus der Paleontologie und Zoologie Russlands. Moscou, 1871. ? Hüexer, Carl W. Th. Popular-Naturhistorisches über das am 9 april TR51 bei der ôstlich von Reval unweit der Kuste Ehstlands gelegenen Insel Ram- imusaar ausgebrachte, am 15 april bei Reval gestellte, am 19 april av die Keis. Akad. d. Wissenschaften in St.-Petersburg verkaufte, und am 50 april 1851 dorthin gesandte Wallthier. Langhändiger Wallfisch Mannchen mit Abbild. Reval, 1852. © Comptes rendus....., Revue scientifique, 12 décembre 1885, p. 762. novembre au sud pour retourner de nouveau au nord après l'hiver. De novembre à février nous savons simplement qu’elle se rend au sud, mais nous ne savons positivement où ? Au mois de février seulement elle reparaît en nombre à l’archipel des Bermudes; en partant de là en mai, une partie se rend de nou- veau dans la baie de Baflin, une autre à la mer de Barentz. Il faut croire que les individus se divisent ainsi en deux camps à cause de la pâture qu'ils poursuivent jusque dans les régions qui avoisinent ou dépassent légèrement le 70° degré. Les observations positives nous manquent sur les lieux de leur séjour pendant les trois mois d’hiver, mais les baleiniers ont fait connaître leur présence en hiver sur les côtes d'Afrique dans les parages du Cap Vert. Parmi les principaux lieux de pêche dans le courant du siècle dernier, on a même cité les iles du Cap Vert pendant l'hiver. On a vu échouer également des Megaptères de l’autre côté de PAtlantique et nous possédons quelques renseignements sur leur présence dans ces parages. La Mégaptère, dont le squelette est conservé au Muséum de Niagara falls, a été trouvée morte en mer à 14 milles du phare de Petit Menan sur la côte de Maine (Etats-Unis d'Amérique). Elle avait 50 pieds de longueur. Lacépède reproduit une note qui lui a été remise par le vice- amiral Pleville-le-Peley, et qui se rapporte sans doute à cet animal : « La Baleine, poursuivant à la côte de Terre-Neuve la morue, le capelan, le maquereau, inquiète souvent les bateaux, dit-il; la mauvaise odeur de l’eau pourrie est sentie de loin et la fait fuir. » Les anciens baleiniers des côtes de la Nouvelle-Angleterre, après avoir chassé la Baleine des Basques, qui visitait régulière- ment leurs parages, se sont mis à poursuivre la Mégaptère, quand la Baleine est devenue plus rare et ils ont exercé leur industrie pendant plusieurs années aux îles Bermudes. Nous trouvons, dans les Transactions philosophiques du XVIIe siècle (1665), que l’on chassait la Baleine sur les côtes de (12%) la Nouvelle- Angleterre pendant huit ou neuf mois de l’année, et la Baleine à bosse, c’est-à-dire la Mégaptère, de février à mars et avril aux îles Bermudes 1. C'est aussi au mois de février et de mars qu’on voit apparaître la Mégaptère aux Antilles, à l’île Saint-Bartolomez, où elle reste, comme nous lavons dit plus haut, jusqu’au mois de mai. Les baleiniers signalent également la présence des Mégap- tères dans les eaux de l’île de la Trinité (Petites Antilles) et le: golfe de Para. On cite même ces endroits parmi les prinei- paux lieux de pêche. Le professeur Cope fait mention de leur présence sur la côte de San-Domingo et dans d’autres parages de la mer des Antilles ; c'est aux mois de février et de mars, dit-il, qu’on les voit faire leur apparition, et il paraît qu’elles y restent jusqu’au mois de mai. Le docteur Goess a recueilli à San-Bartholomez divers osse- ments de grande taille qui se rapportent à ce Cétacé; 1ls sont déposés au Musée de Stockholm. Nous avons pris la mesure, entre autres, d’un métacarpien qui n’a pas moins de 22 centi- mètres de longueur et 12 centimètres de largeur; un sternum mesure 45 centimètres en largeur; ce sont sans doute des os choisis à cause de leur dimension extraordinaire. Malm a fait connaitre ces ossements. Le docteur Goess à envoyé au Musée de Philadelphie un squelette de 32 pieds qui provient des côtes de San-Domingo. Le professeur Cope lui a donné le nom de Megaptera belli- Cos«. Les observations du D'Goess confirment complètement celles des baleiniers sur apparition de la Mégaptère dans ces parages : cet animal fait son apparition autour de Pile San-Bartholomez en février et mars, dit-il, et il y demeure jusqu’à la fin de mai. En juin, il va plus avant dans le Golfe du Mexique et retourne t New american Walefishing about Bermuda. PHILOSOPHICAL TRANSAC- TIONS, 1663, p. 11, 152. ? Proc. Acad. nat. Srienc. Plhil., octobre 1870. (125 par l’est en automne !. En mai et en avril, on voit assez souvent des individus debout dans ces eaux pour s’accoupler et on les voit fréquemment retourner par groupes de trois mâles et de trois femelles, accompagnés d’un baleineau d’un ou de deux ans. Le Musée de Bordeaux a reçu, de la Martinique, une quantité d’ossements de Mégaptères, consistant en fragments de tête, en mandibules, en vertèbres, en omoplates et en divers os de la nageoire pectorale. Tous ces os avaient été rapportés comme lest et destinés à la fabrication de noir animal 2. Le D' Fischer a eu l’occasion d'étudier toutes ces pièces et il lui est impossible de décider, dit-il, si la Megaptera des Antilles ou des Bermudes diffère ou non de la Mégaptère du Groënland. Peut-être, ajoute- t-il, toutes les Mégaptères appartiennent-elles à une seule et même espèce, dont la distribution géographique serait universelle. La Megaptera boops est commune sur les côtes de Massa- chusetts, dit M. Allen, et les baleiniers ly poursuivent à l’occasion; 11 prétend que la mère de la Megaptera boops a plus d'affection pour son petit qu'aucune autre espèce de Cétacé. A la Nouvelle-Orléans on a trouvé à 16 milles de la côte et à 75 pieds de profondeur dans le sable, une tête qui ne pèse pas moins de 1700 livres. Il en à paru une lithographie 3 que nous avons mentionnée dans l'Ostéographie des Cétacés. Eschricht a maintes fois exprimé l’avis que les grands Cétacés n'échouent pas dans leurs émigrations normales, et que ceux qui se perdent ainsi sont des individus égarés ou répudiés par leur gamme. Nous ne croyons pas que ce soit toujours le cas; il se peut que ces ossements proviennent de Cétacés harponnés par les pêcheurs et dont les corps ont été abandonnés. ? Copr, on Megaptera bellicosa, AMERICAN PHILOSOPHICAL SOCIETY, october 1870. ? Gervais, Journal de Zoologie, t. VI, nos 4 et 5, 1877, p 279. 5 Bayxrs et Harris, Litho. clements Lare, Lombard, St. Cette lithographie représentant la tête et dessinée par Scharf porte pour inscription : Fret os an enormous head of an unknown animal, found in Net Orlans, 160 miles from the sea and 75 feet from the earl's surface En résumé, ces Cétacés arrivent aux îles Bermudes vers la fin de février, et y restent jusqu’à la fin d'avril ou au com- mencement de mai; pendant l'été, de mai à septembre, ils se rendent sur la côte du Groënland et dans la mer de Bafñlin jusqu’au 76° degré ; on les voit apparaître également, dès le mois de mai, sur les côtes de Finmark. A la fin de l'été, au mois de septembre, on les voit quitter la mer de Bafhin et les côtes de Finmark et nous avons tout lieu de croire que les Mégaptères du nord de l'Atlantique ont leur station d'hiver sur la côte d'Afrique; nous l'avons vu plus haut, il yen a de temps en temps qui échouent sur les côtes d'Europe, c’est-à- dire à l’est de l'Atlantique, et nous ne doutons pas que ce ne soit en se rendant du nord au sud pour prendre leur quartier d'hiver. A leur retour au nord, c’est-à-dire au printemps, ils se trouvent à l’ouest de l'Atlantique. Il y a quelques années, Eschricht exprimait l'avis que ces ani- maux qui viennent parfois échouer dans nos parages viennent du nord; Shlegel au contraire les faisait venir du sud. Ils ont sans doute raison tous les deux. Après l'hiver ils viennent du sud, à la fin de l'été ils viennent du nord, et le D' Goess est parfaitement d'accord avec les pêcheurs, en disant que les Mégaptères des îles Bermudes viennent d'Afrique, en passant par le détroit de Floride. Ces grands Cétacés caractérisés par leur rostre tuberculeux sont également bien connus au nord du Pacifique. Les Mégaptères habitent également l’autre hémisphère; elles sont bien connues au cap de Bonne-Espérance, à la Nouvelle-Zélande et sur les côtes du Chili. Il serait difficile de dire si ces animaux ont actuellement des rapports quelconques avec les précédents ; on sait qu'ils peuvent passer la ligne, mais la passent-ils régulièrement et hantent-ils les pôles? Nous avouerons que nous inclinons fortement à penser, avec le D° Fischer, que la Megaptera boops mes. à est un animal cosmopolite. En attendant que nous ayons des matériaux suflisants pour trancher cette question, exposons simplement les faits que nous avons pu recueillir. Il existe en effet des Mégaptères dans le Sud-Atlantique. Le Muséum de Paris a reçu, du temps de Cuvier, le magni- fique squelette du Rorqual du Cap, e’est ainsi que Cuvier le nommait, et qui a été envoyé par Lalande. . Le capitaine Jouan a vu également des Mégaptères à la Plata, sur les eôtes de Patagonie, à S'e-Hélène et au cap de Bonne- Espérance. M. H. Bolau rapporte qu'on les à reconnus autour de S'e- Hélène dans les eaux profondes, et que les pêcheurs ne les voient pas avec plaisir parce qu’elles mettent les poissons en fuite. Dans certaines baies du cap de Bonne-Espérance, les osse- ments de ce Cétacé et d’autres encore doivent être fort abon- dants ; le professeur Sir Turner nous rapporte que, en novembre 1870, un chargement d’ossements importé du Cap à Leith, renfermait de nombreux ossements de Megaptera (Humpback) parmi lesquels se trouvaient plusieurs atlas. Il n’a pas trouvé de différence entre cette Mégaptère et celle du Nord, si ce n’est que dans PAtlas {he furrow between two anterior articular surface is somewhat broader and deeper in the Cape specimen. Nous avons fait mention plus haut de cette légère différence. On en voit aussi sur la côte du Chili, à en Juger d’après les Cirrhipèdes commensaux que lon a trouvés au milieu de leurs os. Burmeister a fait connaître la présence de la Megaptera sur les côtes de l'Amérique méridionale. Reinhardt a aussi rapporté du Brésil des ossements de Megap- tera; ls sont déposés aujourd’hui au Musée de Copenhague. Au Muséum de Paris il existe un humérus de grande taille recueilli, d’après l'étiquette, non loin de Buenos-Ayres. IE sy trouve également une omoplate énorme d'origine inconnue, qui ne mesure pas moins de 1",52 en longueur et 0,97 en hauteur. On a trouvé du reste tout un squelette de Megaptera enfour sur les côtes du Brésil, dont la caisse tympanique a même été conservée, et que Gray a proposé de nommer Megaptera Bur- meistert. Voici à ce sujet une note qui m'a été communiquée par mon fils à son retour de Buenos-Ayres : Il y a quelques années, on découvrit dans l’une des îles de Rio de la Plata, située au point de réunion du Panama et de l'Uruguay, près de Conchas, par conséquent dans l’ancien Delta du fleuve, des ossements que leur dimension colossale aussi bien que leur structure spon- gieuse firent reconnaitre pour des os de quelque Mysticète. Is se trouvaient à 18 pouces (pulgados) sous la surface du sol dans le terrain d’alluvion ; leur enfouissement était donc de date relativement récente, et il est clair que ces os ont appar- tenu à quelque animal de l’époque actuelle. Quelques vertèbres et une caisse tympanique furent conservées et déposées au Musée national de Buenos-Avres. Burmeister chercha à déterminer l'espèce à laquelle ces osse- ments avaient appartenu et, en l'absence de toute pièce de com- paraison, il dut se borner à consulter, pour arriver à la déter- mination, les figures récemment publiées par Gray. L'examen comparatif qu'il put faire de cette manière le con- duisit à soupçonner que ces ossements pourraient bien être ceux de quelque Mégaptère. Il écrivit dans ce sens à Gray. Une Mégaptère des côtes orientales de l'Amérique méridionale devait être une espèce nouvelle, et M. Gray jugea qu'il était urgent de lui donner un nom. Il la dédia au célèbre directeur du Musée de Buenos-Ayres, et le nouvel animal fut appelé : Megaptera Burmeisteri. M. Burmeister exhiba ces ossements dans la séance du 11 juillet 1867 de la Société de paléontologie de Buenos-Ayres, et 1l en est fait mention dans les Anales del Museo publico de PBuenos-Ayres. Burmeister chercha à déterminer l’âge approximatif de ces ossements : se basant sur les observations faites relativement à la formation des terrains d’alluvion du Nil, desquelles il résulte que la puissance de ces couches d'alluvion s'accroît de trois pouces par siècle, d’un pied environ en quatre cents ans, il conclut que, si la rapidité de formation des dépôts de la Plata est la même, l'animal doit avoir été enfoui il y a six cents ou huits cents ans. Mais comme l'embouchure du Rio de la Plata est probablement plus large que celle du Nil, il suppose que la formation des dépôts doit être moins rapide et que les os peuvent avoir été déposés il y a un millier d'années. A cette époque, au lieu d’une île, il devait exister à embouchure du Parana un immense banc, une sorte de plage semblable à celle qui s'étend aujourd'hui devant Buenos-Ayres, qui, couverte d’eau en temps ordinaire, se met complètement à sec par les vents du sud ou du sud-ouest. En février 4840, Alcide d’Orbigny communiqua à la Société géologique de France 1, une lettre qu'il avait reçue du directeur du Musée de Montevideo, M. Vilardebo, par laquelle ce natu- raliste faisait connaître la découverte d’un ossement fossile, qui, par sa taille comme par ses caractères, ne peut être qu'un humerus de grand Cétacé, probablement de Mégaptère. Il a été trouvé dans l’Arrogo-Negro, à plus de 120 lieues de la mer. L’Arrogo-Negro est au-dessus du confluent de l’'Uruguay et de la Plata. Les Mégaptères sont parfaitement connues au nord de l'Océan Pacifique, et elles y sont assez abondantes dans certains parages pour y être l’objet d’une pêche régulière. Le capitaine Beckerman en a vu, en août et en septembre, de 15 pieds de long sur les côtes de Upper California Bay of Monterey. Pallas a reconnu la Megaptera au nord du Pacifique, et Steller a donné la description d’une femelle de 50 pieds qu'il a eu l’occasion d'étudier pendant son naufrage sur les côtes de Pile de Behring. La tête avait le quart et la nageoire pectorale, le ! Bulletin de la Sociélé géologique de France, fevrier, 1840, p. 156. (130) cinquième de la longueur totale du corps. Ce qu'il dit de la tôte circa capul scruposa, multisque acetabulis prominentibus, ne laisse pas de doute que c’est bien d’une Megaptera qu'il s’agit. On la voit représentée également dans les livres japonais, et Chamisso nous en a reproduit une figure très reconnaissable. Middendorf parle de trois espèces de Cétacés à fanons qui hantent la côte sud de la mer d'Okhotsch, dont une atteint la longueur de 70 pieds. Dans le courant de l'été, dit-il, il en est venu échouer sept, dont lui-même à pu en observer deux. Il pense que c’est la Megaptera boops. I a vu les plis sous la gorge d’un de ces animaux échoués 1. M. Léopold von Schrenk fait mention également de trois espèces de Mysticètes sur les côtes des Amourlanden, une Megaptera et deux Balæn«. En septembre 1886, le capitaine Bedfield a capturé dans la mer de Behring une Megaptera de 49 pieds T pouces, dont la nageoire pectorale avait 15 pieds 7 pouces 2. Les Esquimaux aussi bien que les Indiens, habitants des côtes nord-ouest d'Amérique, font la chasse aux Mégaptères; les baies principales pour cette chasse étaient celles de Magdalena, de Balena et de Monterey, disent les baleiniers. Les fumpbacks visitent régulièrement les mêmes localités qui correspondent avee les baies où les femelles mettent bas. A l'approche de l'hiver, ces Cétacés se rendent en masse au sud et en été ils se dirigent au nord, disent plusieurs baleiniers qui exercent leur industrie dans la Mer Pacifique. Le capitaine Scammon parle des mêmes individus qui sont connus dans les localités où l’on pèche ces animaux ; comme dans l'Atlantique et surtout sur les côtes du Groënland, on reconnaît si bien les mêmes animaux qui reviennent tous les ans, que plusieurs d’entre eux portent des sobriquets. 1 Minpexnorr, Sibirische Reise, Bd. 11, p. 125. 2? Core, On the Cetacea, 1869, p. 59. (4947) Les Megaptera s'approchent également de l’Équateur et le passent même. Le capitaine Scammon a vu des Megaptera sous l’Équateur sur les côtes du Pérou, d’autres au nord de l’Équa- teur, côtes de Californie: il en a rencontré au sud allant mettre bas dans les baies, puis s’en retourner avec leurs jeunes. Le savant baleinier américain fait une observation fort inté- ressante sur la taille de ces animaux, observation faite déjà par le capitaine Jouan sur des Mégaptères de la Mer des Indes : il a observé des différences chez des individus de la même gamme sans qu'on puisse lattribuer à l’âge. Nous avons déjà fait cette remarque à plusieurs reprises, sur des Cétacés fossiles de notre grand ossuaire des environs d'Anvers. Il résulte de cette observation, que les limites de variation de taille sont très grandes dans les Mégaptères, et, sans songer à des espèces distinctes, nous devons admettre que certains indi- vidus atteignent une taille extraordinaire sans qu'on puisse l'attribuer au grand âge de l'animal. Les baleiniers font mention d'une pêche de Megaptera, entre trois degrés sud et trois degrés nord, entre le Golfe de Guayakil et la côte d'Ecuador (Pacifique). Le capitaine Scammon parle de leur apparition en juillet et en août. D'après le produit d'huile par individu, ces animaux sont petits comparativement, puisqu'ils ne fournissent que de 20 à Jo barils. La Megaptera se distingue par le même genre de vie dans le Pacifique comme dans l'Atlantique. En 1842 et en 1855, dit le capitaine Scammon, une quantité de Humpbacks étaient réunis dans le Golfe de Guayaquil, sur la côte du Pérou, pour mettre bas. C'était pendant les mois de juillet et d'août. On voit la même chose au nord de l'Équateur. Dans la baie de Valle de Banderas, côte de Mexique (lat. 20°,30"), Scammon a vu au mois de décembre des Humpbacks avec leurs jeunes, âgés de quelques jours. Dans la baie de Magdalena, côte de la basse Californie (environ lat. 24°,30°), il en vit en nombre semblable, dont quelques-uns étaient également accompagnés de leurs jeunes (large Calves, while others were very small). À Tonga- (132) taboo (une des Friendly Islands, lat. 21° sud, long. 174 ouest; c’est en août et septembre qu'on les observe. Les Mégaptères se trouvent également dans la Mer des Indes: le capitaine Jouan en a vu à la Réunion, aux îles Comores, dans la Mer d’Oman. Eiles hantent également les côtes des îles de la Sonde; le Musée de Leyde a reçu de Java une tête d’un animal de 45 pieds de longueur quiavait échoué près de Pekalongan (Mer de Java). Comme au nord la Mégaptère pénètre dans la Baltique, ici elle pénètre également dans le Golfe Persique. Il y a quelques années un câble (de Gwadur à Kirrachee) se rompit et, en le relevant, le corps d’une énorme Baleine, entortillée dans le câble, fut amené à la surface. La queue était couverte de coquillages, ce qui nous fait supposer que c’est une Megaptera. Du reste, nous avons la certitude aujourd’hui que des Mégap- tères pénètrent dans ce golfe. Le Musée de Paris a acheté un squelette de Mégaptère, rap- porté par des marins, du Golfe Persique, mais il diffère de la Megaptera boops, dit M. H. Gervais. Comme nous l'avons dit plus haut, M. H. Gervais à fait connaître ce squelette et il exprime l'avis qu'il existe trois espèces dans ce genre : celle du nord (boops), celle du Cap (Lalandii) et celle des Indes (indica). Nous avons vu le squelette de cette dernière Mégaptère, et nous avouons que les os du crâne, y compris surtout los jugal et lacrymal, tympanique et mandibule, et principalement le sternum, présentent des différences assez grandes pour justifier l'opinion de l’aide naturaliste du Muséum. HolbGIT à cru voir également une autre espèce de Mégaptère dans un animal que les Groënlandais appellent Kiperkarnak, mais dont 11 n’a pu se procurer un squelette 2. ! Naluurk. Tydschr., voor Nederland. Indie, 1864, pp. 425 et 443. * Escaricur, Nordische Wallthiere, supplément, p. 197. | (133 ) Les Mégaptères comptent parmi les Mystacocètes les plus communs de la Nouvelle-Zélande, dit M. Hector, directeur du Colonial Muséum de Wellington. Il faut croire cependant que le Musée de notre savant confrère de Wellington n’en renferme pas un grand nombre d'osse- ments, puisque nous n'en trouvons auçun dans une photogra- phie qu’il a eu l’obligeance de nous envoyer; nous y voyons figurer une tête, avec ses fanons, de la Neobalæna marg'nata, l'atlas, l'axis et une côte du Sulfurbottom, qui est sans doute notre Balænoptera Sibbaldii; mais les autres têtes et squelette sont de Ziphioïdes et de Delphinides; sauf la Neobalæna, on croirait voir des ossements de Cétacés de notre hémisphère, M. Hector a reçu toutefois, pour son Musée, deux têtes de Mégaptère et divers ossements {, et il exprime l'avis, que ces restes se rapportent à la même espèce qui fréquente le Cap de Bonne-Espérance. Dieffenbach fait également mention des Megaptera qui se rencontrent tout autour des îles de l’Océanie, à la côte orien- tale d'Australie, à la Nouvelle-Calédonie, même dans linté- rieur des récifs et sur les côtes du Chili. Le capitaine Jouan ? a passé trois ans dans ces parages, entre la Nouvelle-Zélande, l'Australie et la Nouvelle-Calédonie, etil a vu pendant ce temps deux Black Whale (Balæna antipo- dum ?), un ou deux petits Cachalots (Berardius peut-être) et pas mal de Humpback (Megaptera). Parmices Humpback de lhémisphèresud, le capitaine Jouan, qui s’est toujours intéressé à ces animaux, en à vu dans fa même gamme de très petits qui lui paraissaient adultes comme les autres, et il se demande si ces petits ne constituent pas une espèce naine. Parmi les ossements envoyés d'Australie à la grande Expo- sition de Paris, nous avons reconnu des caisses tympaniques de Megaptera en tout semblables à celles de la Boops. ! Trans. New Zealand Institute, vol. X, 1878. # Jouax, La chasse et la péche des animaux marins, p. 44, 1882. 10 (134) Le professeur Sir Turner 1 a reconnu, dans les collections rapportées par le Challenger, des vertèbres (atlas, axis et les vertèbres cervicales suivantes) qu'il attribue à la Megaptera, et qui proviennent d’un animal eapturé dans les eaux de la Nou- velle-Zélande, probablement dans Queen Charlotte Sound. L’axis est soudé à la troisième cervicale et celle-ci à la quatrième. Le savant professeur d’Edimbourg exprime la même opinion que M. Hector au sujet de la détermination de cette Megaptera ; il n'ya pasde raisons d'adopter la nomericlature de Gray, dit-il, et le squelette, comme les ossements d'Australie, se rapporte à la même espèce qui habite le Cap de Bonne-Espérance ainsi que la côte du Groënland. Schlegel a exprimé le premier l'opinion, que la Mégaptère du Cap ne diffère pas de la Mégaptère Boops, mais cette suppo- sition avait été ébranlée par suite de l'opinion, qui a régné quelque temps, que les Balénides ne passent pas la ligne, ce qui n'est vrai que pour les Baleines véritables. Dans les eaux de Rosmary-fle, côte nord-ouest de la Nou- velle-Hollande, il paraît que cette espèce y arrive assez régu- lièrement de juin à octobre pour que lon y ait organisé une pêche régulière; il parait que c’est aussi l’époque de la mise bas dans ces baies. Le Muséum de Paris a reçu en 1876 une tête de Megaptera, venant de Tahiti (Iles Pomotou). Jacquemont a rapporté de l'Ile de Found des caisses tympa- niques, que nous avons vues entre les mains d'un marchand à Paris. Nous n'avons rien trouvé dans ces pièces qui justifiät l'établissement d'une espèce nouvelle. D'après Andr. Murray il y aurait trois ou plutôt quatre sta- tions principales où l’on chasse régulièrement ces Cétacés ; ce sont les Iles Bermudes, les ectes de Finmark, le Cap de Bonne-Espérance et les Iles de la Sonde. Nous pouvons y ajouter d’autres stations où l’on exerce cette industrie : 1° la 5 The voyage of I. M, S. Challenger, REPORT ON THE BONES OF CETACEA, oy W. TURNER, M, B. (135 ) côte ‘ouest du Groënland; % dans le Pacifique, le Golfe de Guayakil; 3° à la Nouvelle-Hollande, Rosmary-[le, côte nord- ouest; 4 les îles du Cap Vert. Nous pouvons ajouter encore les côtes d'Ecuador jusqu'à Esmeraldo, où lon fait la chasse dés Mégaptères, de février à mars, vers le nord, et de juillet à août, vers le sud. D'après ce que nous venons de dire, la Mégaptère du nord de l'Atlantique passe l'hiver sur les côtes d'Afrique, ie prin- temps dans la mer des Antilles, l'été dans la mer de Baftin où elle remonte jusqu'au 76° degré, ou bien elle passe à l'est par l'Islande jusqu'aux côtes de Finmark, et retourne ensuite au sud pour y passer son quartier d'hiver, C'est aussi l'opinion que le capitaine Scammon exprime au sujet des Mégaptères qui habitent le Pacifique : 1l pense que dans notre hémisphère, ces animaux se rendent au nord à l’ap- proche de l'été et retournent au sud, à l'approche de l'hiver 1. Le printemps serait pour les Mégaptères, comme pour les mammifères terrestres en général, l’époque des amours. Si nous en croyons quelques renseignements, ce seraient aussi les lieux de leurs amours qui seraient les lieux de leur mise bas, et les mères arriveraient à peu près à la même époque de leur grossesse dans les mêmes parages, ou accompagnées de leur Baleineau. La différence de taille dans les fœtus recueillis à la même époque dans les mêmes eaux dépendrait du moment où la fécondation a eu lieu. Est-ce la même espèce qui hante le nord de l'Atlantique et du Pacifique? Tout nous fait croire que oui! Il y a tant de Cétacés, maintenant connus, qui hantent à la fois le nord de l'Atlantique et du Pacifique; on connait aujourd'hui un si grand nombre d'espèces aquatiques de tous les ordres qui sont dans ce cas, qu'il n’y aurait plus lieu de s'étonner .de l'identité spécifique des Megaptera de ces parages. Nous ne sommes pas éloigné de croire que la Megaptera boops est un Mysticète cosmopolite, qui passe la ligne dans le ‘ Loc. cit., p. 42. { 136) Pacifique comme dans l'Atlantique et l'Océan indien et qui se rend, comme nous l'avons dit plus haut, tantôt vers le pôle, tantôt vers l'équateur selon l'époque de l’année. C’est du moins ce que l'on peut supposer d’après les faits connus jusqu’à pré- sent. MUSÉES. La plupart des Musées, possédant des squelettes de Cétacés, comptent dans le nombre des ossements de Megaptera. Esch- richt a reçu par son ami Ho:bôll plusieurs squelettes complets des côtes occidentales du Groënland, qu'il a pu céder ensuite, après les avoir étudiés. On trouve aujourd'hui des squelettes de cette espèce à Copenhague, Stockholm, Bergen, Gôteborg, Lund, Londres, Liverpool, Aberdeen (Ecosse), Berlin, Paris, St-Pétersbourg, Bruxelles, Liège et Louvain. À Paris, on conserve au Muséum les deux squelettes rap- portés par De Lalande et décrits par Cuvier sous le nom de Rorqual du Cap. Le professeur Pouchet a rapporté un squelette de mäle et un de femelle de Varanger-Fiord. Le méme Musée renferme encore le squelette d’un jeune mäle de 7,50, qui a échoué au Bruce, près de S'-Nazaire (Var), une tète recueillie à une quinzaine de degrés su sud de l'équa- teur, dans l'océan Pacifique, et une autre tête près de Tahiti îles Pomotou) en 1876. Nous y avons vu également une omo- plate, un humérus et un rocher provenant d'un animal d’une taille extraordinaire, mais d’origine inconnue. M. H. Gervais à fait connaitre récemment, comme nous l'avons dit plus haut, un squelette acheté à Marseille, provenant du golfe Persique, qui est également conservé au Muséum. M. H. Gervais rapporte ce squelette à une espèce nouvelle. Outre le Muséum de Paris nous pouvons citer, en France, le Musée de Bordeaux qui a reçu un grand nombre d'ossements de Mégaptères de la Martinique, que l’on destinait à la fabrica- tion du noir animal. Ce sont des débris de tète, des man- dibules, des os des membres, des vertèbres cervicales, etc. (137) Les squelettes de Louvain et du Musée royal de Bruxelles proviennent des côtes de Groënland par l'entremise d'Eschricht. Nous avons reçu une omoplate du D' Guldberg, remarquable par sa dimension et que ce savant a recueillie à Vadsô. Le Musée de l'Université de Liège possède un beau squelette provenant des côtes de Norwège. M. Flower a publié en 1885 la liste des espèces de Cétacés du British Muséum; on y voit, pages 4 et 5, les os nombreux de Megaptera conservés dans ce Musée : un squelette complet, à peu près adulte, du Groënland, une tête de Californie, une autre de la Nouvelle-Zélande, des caisses tympaniques et un fœtus du Groënland, dans la liqueur. Les caisses tympaniques de la Nouvelle-Zélande sont en tout semblables à celles de notre hémisphère. Le Musée de Liverpool (Derby Museum) renferme le squelette de la femelle qui a péri dans l'estuaire de la Dee, en 1865, et qui n'avait que 51 pieds de longueur. Le squelette du mâle de 40 pieds de long, capturé dans l'estuaire de la Tay, le 11 janvier 1884, qui se trouvait au Musée de Dundee, est aujourd'hui, si nous ne nous trompons, au Musée de l'Université d’Aberdeen 1. Malm a fait le relevé des ossements de Cétacés conservés dans les Musées de Stockholm : Riksmuseum, Carolinska insii- tutets anatomiska Museum, Veterinär-institutets Museum, de Lund et de Gôteborg. Le Musée royal de Stockholm possède une portion de crâne de Mégaptère avec condyle et trou occipital, et des caisses fympaniques trouvées en Scanie, sur le bord de la mer, à 2 ou 3 pieds de profondeur, près de la ville de Cimbrisham ; il contient, en outre, de nombreux ossements provenant d'indi- vidus, de très grande taille, qui ont été apportés de l’île Bar- thélemy par le D° Goess. On v voit des humérus, des radius, des os carpiens et métacarpiens, des côtes et des sternums de grandeurs extraordinaires, de Buenos-Avyres. * The Dundre Advertiser, 26 janvier 1886; Report of the British Associa tion, 1886, p. 1053. À: (138 ) On trouve également une tête au Musée de Christiania, mais dont on n'a pas indiqué l’origine. Ils’ vtrouve également un fœtus A Lund (Suède) il y a également un squelette obtenu par l'entremise d'Eschricht. On conserve dans le Musée de Copenhague des squelettes de tout äge venant du Groënland. Eschricht a reçu, indépendam- ment des viscères et des fœtus, six squelettes complets qu’il a pu échanger ensuite avec divers Musées. On y conserve égale- ment des ossements de Megaptera rapportés du Brésil par Reinhard. Ce Musée renferme le plus grand nombre de fœtus. Eschricht fait mention de deux mâles et de six femelles, longs de 35, 45 et 74 pouces. Le D' Guldberg a rapporté à Hambourg, en 1884, un sque- lette de Megaptera boops de 54 pieds, provenant d’un animal trouvé mort entre les côtes de Norwège et de Russie. Il se trouve encore à Hambourg. Le Muste de Kœnigsberg possède la portion postérieure de crane dont Auguste Muller à parlé et qu'il rapporte à une Balénoptère. Le Musée de Berlin possède le squelette de lindividu qui a échoué, en 1824, à l'embouchure de l'Elbe et qui a été décrit par Rudolphi. Le Musée de l'Académie des sciences de S'-Pétersbourg pos- sède le squelette d’un mäle qui a péri dans la Baltique, à l’est de Reval. Le même Musée a reçu de l'océan Pacifique deux squelettes à peu près complets qui ne sont pas montés. Le squelette de la Megaptera longimana du Musée de Niagara, dans le Canada, provient d'un animal trouvé mort en mer, à 14 lieues du phare du Petit Menan sur la côte de Maine. I lui manque le sternum, les os du bassin et les caisses tympa- niques. L'animal avait 50 pieds de longueur. Le Musée de Philadelphie possède également un squelette de cette espèce. Au Musée de Wellington (Nouvelle-Zélande) se trouvent deux têtes ct plusieurs ossements; une de ces têtes provient d'un individu capturé à Kaïkoura-Peninsula. L'autre, plus petit, vient du nord de Cook Strait. ( 139 DESSINS. Il existe plusieurs dessins de la Megaptera boops; ce Cétace est toujours facilement reconnaissable au grand développe ment de ses nageoires pectorales. Nous avons trouvé, dans un ouvrage chinois, un dessin qui représente fort bien cet animal, avec le grand développement de sa nageoire pectorale, avec les replis sous la gorge et sous le ventre. Le professeur Giglioli en à publié un dessin sous le nom de Poescopia Lalandii. I est mauvais pour ce qui regarde la nageoire pectorale comme la nageoire dorsale. Cet animal porte une bosse sur le dos en arrière et n’a pas de nageoire dorsale proprement dite. Cope en a reproduit un dessin, d'après un animal du Paci- fique (Megapteru versabilis\. Rudolphi reproduit le dessin du mâle qui a échoué à l’em- bouchure de PElbe. Burmeister a figuré la Mégaptère des côtes de la République argentine. Schlegel a figuré une Megaptera, dans sa faune du Japon (1850) pl. XXX, sous le nom de Balænoptera antarctica. La figure est bonne, sauf la bosse, qui est représentée comme une nageoire. Dans le Naturalists library, Mammalia, vol. VE, pl. 7, figure un jeune individu échoué en Ecosse. Brandt et Ratzeburg (Medicinische Zoologie, pl. XV, fig. 7, et pl. XV, fig. 2) reproduisent un dessin original de Muller. Le professeur Sars a publié en 1880 un bon dessin d’une femelle adulte de 14 mètres capturée dans l'établissement de Vardô ; il a ajouté le dessin d’un fœtus de grandeur naturelle, pl. HE (Christiania vidensk. Selsk. Forh., 1880). Pechuel en a publié un bon dessin d’après un animal de Atlantique. Il porte de nombreux tubercules sur le côté du rostre et les plis sous la gorge sont bien marqués. ( 440 ; Eschricht a publié, dans ses Nordischen Wallthiere, un dessin représentant la muqueuse de l'intestin (pl. IE, fig. 3-4, un fœtus de 34 pouces de long (pl. IH, une mandibule avec les dents (pl. IV), la bosse du dos (pl. V, fig. [). Nous avons reproduit le squelette avec la caisse tympanique dans notre Ostéographie 1. Malm a figuré des ossements de Megaptera du Musée de Stokholm, pl. I, fig. 4a-h et pl. IV, fig. 28 (os du carpe). Sous le nom de Megaptera versabilis, Fred. True donne un dessin dans ses Suggestions by the Keepers, Washington, 1884, pl. X, fig. 28. Les figures les plus intéressantes sont celles publiées par le capitaine Scammon. Indépendamment d’une bonne figure de animal adulte, il représente l'animal, tel qu'on le voit en pleine mer, se livrant à des évolutions qui le font facilement reconnaître de loin. Il n’y a pas un de ses congénères qui se montre à la surface de la mer comme lui, s’élevant dans l'air et se laissant tomber ensuite à plat ventre 2. Scammon représente, pl. IX, une femelle donnant à téter à deux jeunes, et pl. VIIL, leurs allures dans l'eau. COMMENSAUX ET PARASITES. Nous ne connaissons pas d'animaux plus intéressants par les commensaux qu’ils hébergent que les Mégaptères ; elles logent sur la tête, et sur les nageoires surtout, des Cirripèdes, qu'elles conduisent d'une mer à l’autre et des Cyames, qui ne perdent pas plus leur liberté que les Coronules. La présence de ces Cirripèdes est tellement régulière, que les Groënlandais ne doutent pas que des Baleines ne viennent au monde avec eux. Coronula diadema où Diadema balænaris est le nom sous lequel les zoologistes désignent ce commensal. Ellis fait déjà mention de ce curieux Crustacé, qui a passé HPIEXNITE * Loc. cit., pl. VII et IX. ( 141 }) si longtemps comme Mollusque. Il figure ce Whale barnacte, called pediculus ceti, just as it was cutt off the Whales lip, mith the naked barnacles (Otion), pl. XI, fig. 7 et Ta 1. Pailas a également connu ce Whale barnacle, comme l’ap- pelle Ellis, sur des Mégaptères de la mer Glaciale. Mais ce qu'il y a de plus intéressant, c'est que le plus souvent, sur ce commensal sessile, vit un autre Cirripède pédiculé connu sous le nom générique de Ofion ou Conchoderma auritum. Le Musée du Collège royal des chirurgiens de Londres possède, dans la liqueur, une Bernacle qui porte des Otions, et on lit sur l'étiquette : probablement de la lèvre d'une Baleine de la côte de Norwège, échouée en 1757. La Mégaptère qui a échoué à l'embouchure de l'Elbe, et dont le squelette est conservé au Musée de Berlin, portait des Diadema avec des Otions comme les Mégaptères des côtes de Norwège. Ils ont été conservés par les soins de Burmeister. La Baleine échouée près de Vogelsand portait des Diadema balænaris, également avec des Otions. Le capitaine Scammon ?, qui a fait tant de bonnes observa- tions sur les Cétacés, figure également un Otion implanté sur un Diadema. (Otion Stimpsoni, Dall, sur la Megaptera versabilis, Cope.) Il cite aussi, sur la même Mégaptère, un Cyame qui porte le nom spécifique de diffusus 3. M. Cocks a trouvé sur les Mégaptères capturées sur les côtes de Finmark des Coronules avec des Otions auritum ; des Cyames avaient pénétré par milliers jusqu’à la profondeur de deux pouces dans Ja peau. La Mégaptère mäle, qui est venue à la côte au sud de l'Islande le 18 juin 1867, portait également des Coronula avec des Otions, et des Cyames libres. Ces Cétacés sont également couverts de parasites sur les ‘ Euus, On Sever. Rare Species of Barnacles, Puis. TRaxs., vol. L, 1758. ? Casrres M. Scammow, The marine mammals, Sau Francisco, 1874, pl. X, lig 5. 5 Proc. cal. Acad. Sc., décembre 1872, (442 | côtes de Finmark, dit M. Guldberg : ce sont des Coronula diadema, des Conchoderma auritum et des Cyamus boopsis. Darwin n’a pas trouvé de différences spécifiques entre Îles Coronula diadema, Lamk, des côtes d'Angleterre, de Scandi- navie, des États-Unis, des Bermudes; M. le Dr Fischer a com- paré en outre dix exemplaires du Cap de Bonne-Espérance et du Chili et n’a pas trouvé de différence non plus. Le Conchoderme (Otion) auritum est également le même ainsi que le Cyame (Cyamus subfusus). Ainsi, dans l’Atlantique comme dans le Pacifique, ce sont les mêmes Cirripèdes : le même Otion sur le même Diadema. Holbôll a pu s'assurer que les jeunes Mégaptères logent déjà des Coronula avant d’être sevrées. Les Cyames se tiennent surtout à la tête et aux nageoires. Îl paraît que la peau devient sèche dans les endroits où ils abondent. Le professeur Lutken a spécialement étudié ces Crustacés parasites et fait remarquer que de jeunes Cyames, pris sur des Cétacés inconnus ou plutôt indéterminés de l'océan Pacifique, près des îles Tonga et Rarotonga, se rapprochent exactement de lespèce qui habite la Mégaptère de la mer des Indes 1. On sait que les Balénoptères, si voisines des Mégaptères et vivant dans les mêmes eaux, ne portent jamais ni Cirripèdes ni Cyames, tandis qu’on trouve régulièrement des Cyames sur les vraies Baleines. On trouve ainsi sur les Megaptera trois sortes de Crustacés qui vivent en commensaux : des Coronules, des Otions et des Cyames. Nous ne connaissons, jusqu’à présent, pas de véritables parasites de Mégaptères. # Lurken, Sur les cyames ou poux de Baleines, Copenhague, 1875. ÈS — HISTOIRE NATURELLE DES BALÉNOPTÈRES, P.-J. VAN BENEDEN, MEMBR: DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE. (Présenté à la Classe des sciences dans la séance du 40 mai 1887.) : #” (Extrait du tome XLI des Mémoires couronnés el autres Mémc publiés par l'Académie royale de Belgique. — 1887.) HISTOIRE NATURELLE BALÉNOPTÈRES. LES BALÉNOPTÈRES. De tout temps, les baleiniers ont fait la distinction entre les Baleines, les Mégaptères et les Balénoptères, c’est-à-dire entre £ | les Right wales, les Humpback et les Finback, qu’on appelle aussi Vinfisch. Les naturalistes n’ont connu ces distinctions que fort long- temps après les baleiniers. Les récits de ceux qui avaient observé ces animaux étaient généralement incomplets, et les musées, même les plus importants, étaient dépourvus de restes de ces animaux. Linné confondait, dans le genre Balæna, tous les grands Céta- cés qui portent des fanons. Lacépède a proposé le nom de Balénoptère pour ceux qui ont une nageoire sur le dos. Cuvier croyait à l'existence de deux espèces de Balénoptères : l’une, de la Méditerranée, représentée par le squelette de l’ani- mal échoué en 1798 à l’ile S'e-Marguerite et dont la tête, avec quelques os, est conservée au Muséum de Paris; l’autre, de la mer du Nord, d’après un animal jeté, en 1819, sur la côte du Holstein, et dont le squelette complet est conservé au Muséum de Berlin. Le troisième squelette, que Cuvier connaissait éga- ( 146 }) lement, est celui qui est conservé à la maison de ville de Brême; et comme il provient d’un animal de petite taille, échoué à l'embouchure du Weser, Cuvier le croyait un jeune de l’espèce précédente. [l y avait pour Cuvier un Rorqual de la Méditerranée et un Rorqual du Nord. Le grand naturaliste avait préféré le mot torqual, donné par les Norvégiens à des Baleines qui portent des tuyaux sous la gorge; il croyait à l'existence d’une Jubarte, espèce supposée sans plis sous la gorge. Cuvier n'avait pas assez de matériaux à sa disposition quand il a écrit ses Recherches sur les ossements fossiles des Cétacés, et ce n’est que quelques années plus tard, que feu mon ami Eschricht a commencé ses intéressantes publications sur les Cétacés. Gräce surtout aux précieux et nombreux squelettes et fœtus que son ami Hollbôll Iui envoyait du Groënland, le savant naturaliste de Copenhague a fait connaître les prinei- pales espèces de Balénides, en même temps que les caractères sur lesquels elles reposent. Eschricht à fait faire un pas immense à la Cétologie, en démontrant que le nombre de vertèbres est le même dans le jeune äge qu’à l’âge adulte, que celles-ci ne se soudent pas à un äge avancé, après avoir été séparées d’abord, et que tous les caractères de l'adulte se trouvent déjà dans le fœtus. En même temps le savant naturaliste de Copenhague a fait voir, ce que l’on semblait également ignorer, qu’il existe une Balénoptère de petite taille, ne dépassant pas 30 pieds de longueur, qui n’a pas plus de quarante-huit vertèbres, qui a des fanons jaunes et des nageoires pectorales à moitié blan- ches, et que c’est elle qu'Othon Fabricius a eu l'occasion d’ob- server en vie pendant son séjour au Groënland. Depuis les travaux de Cuvier, il a été reconnu également que la Balénoptère de la Méditerranée est lPespèce commune de Atlantique, et, dès 1836, nous avions signalé sa présence sur la côte d'Islande, d’après des caisses tympaniques que Gaimard avait rapportées de son voyage au Nord. Nous voilà done en présence de deux espèces bien distinctes, (4470) la Balænoptera musculus et la Balænoptera rostrata, auxquelles vient s’en joindre une troisième de taille moyenne que Cuvier avait cru être la seule espèce du Nord : c’est la Balænoptera borealis. Les deux premières pénètrent de temps en temps dans la Méditerranée, surtout la seconde. Comme nous le verrons plus loin, ces Balénoptères se distinguent parfaitement les unes des autres par leurs caractères extérieurs, aussi bien que par leur genre de vie et leur taille. On connaît aujourd'hui une quatrième espèce, la plus grande de toutes, que Pierre Camper avait déjà mentionnée sous le nom de Steypireydr, et qui fréquente les courants glaciaires à côté de la Baleine franche; c’est l'espèce qui atteint la plus forte taille puisqu'elle a jusqu’à 80 pieds de longueur; Gray à proposé de la nommer Balænoptera Sibbaldi. Après Eschricht, c’est à M. Flower que nous devons les prin- cipaux progrès accomplis dans cette étude. Le savant directeur du British Museum s’est occupé particulièrement des mdividus échoués sur les côtes d'Angleterre, et il a largement contribué à faire disparaître les nombreuses erreurs qui avaient été intro- duites dans la Cétologie. M. Flower a fait connaitre aussi divers faits anatomiques intéressants, parmi lesquels nous devons citer la composition du bassin de ces animaux et les caractères propres aux os nasaux. Schlegel ne croyait pas devoir admettre plus d’une espèce dans les mers septentrionales. On trouvera plus loin le nom de ceux qui ont également contribué à mieux faire connaître ces Cétacés. Le genre Balænoptera peut se caractériser par la nageoire que l'animal porte sur le dos, par les membres pectoraux qui sont petits, par les fanons qui sont courts et par des tuyaux ou plis que l’animal porte sous la gorge et qui s'étendent jusqu’à l'abdo- (148) men. Il se distingue en même temps par la tête, qui a le quart de la longueur du corps, par le rostre qui est très peu courbé, comme par les vertèbres cervicales qui sont toutes séparées. Comme caractère distinctif des espèces, nous croyons pou- voir accorder une grande valeur aux fanons : la Balænoptera Sibbaldii a les fanons d’un noir bleuâtre uniforme; la Balæ- noptera musculus à les fanons verdâtres ou päles, avec des lignes pâles dans toute la longueur; la Balænoptera borealis a les fanons noirâtres avec les barbes blanches et soyeuses; la Balænoptera rostrata a les fanons d’un jaune pâle. La femelle des Balénoptères est en général plus grande que le mâle, comme dans les autres Cétacés à fanons. L’accouplement, comme la parturition, a lieu en hiver; la gestation parait être de dix à douze mois. En venant au monde, le jeune a le quart de la longueur de la mère 1. Le jeune accompagne sa mère jusqu’à ce qu'il ait la moitié de sa taille. La Balænoptera Sibbaldii parait faire exception pour la durée de la gestation aussi bien que pour l’époque de l'accouplement et de la parturition. D'après une observation faite au détroit de la Sonde, par le professeur Giglioli, les Cétacés qui nous occupent seraient également sujets à l’albinisme. Le système nerveux, à l’âge embryonnaire, a été l’objet de recherches importantes au laboratoire de zoologie de lUniver- sité de Liège, par le D' Guldberg ? de Christiana, et le cerveau de l’adulte à été étudié avec soin par M. Beauregard 3. Cette 1 Les vraies Baleines, comme les Cétodontes, ont le tiers de la longueur de la mère en naissant, ? GuLp8erG, Ueber das Centralnervensystem der Bartenwale. Christiania, 1885. (Christiania videnskab Forhandlinger, 1885, n° 4.) -— GULDBERG Ueber die Grüssen- und Gewichtsverhälinisse des Gehirns bei den Barten- walen… Meddelelser fra den Naturhistoriske Forening ? Kristiania, 1885. 5 Journal d'analomie et de physiologie, t, XIX, 1883. (149 ) étude a conduit l’aide naturaliste du Muséum de Paris au même résultat auquel Broca était arrivé, c’est-à-dire, que les Cétacés, par la conformation du cerveau, se ramènent à un type peu différent de celui des Solipèdes et des grands Pachydermes. Les Balénoptères, comme les autres Cétacés à fanons, se distinguent par le développement de leur lobe olfactif des Cétacés à dents. Le larynx des Balénoptères présente également un caractère qui ne se trouve pas chez les Cétodontes, mais qui leur est commun avec tous les Cétacés à fanons : il est pourvu d’une poche, sac laryngé, qui peut au besoin se remplir d'eau et dont le calibre est assez grand pour avoir été confondu avec l’intes- tin. Ce sac laryngé semble représenter les poches des évents des Cétodontes et l’eau qu'il renferme peut se mêler à Pair au sortir des évents. L’intestin des Balénoptères se distingue aussi par un cœcum qui n'existe pas dans les vraies Baleines, et, dans ces derniers temps, MM. Beauregard et Boulard ont fait connaître les parti- cularités de leur appareil génito-urinaire 1. Chez certaines Balénoptères il existe une tendance particu- lière à la bifidité de la première côte. C’est à tort que des zoologistes avaient cru devoir accorder une certaine importance à cette disposition qui est purement individuelle. Les pêcheries de la côte de Finmark ont fait connaître en partie les mœurs de ces animaux. Le régime n’est pas le même dans les différentes espèces de Balénoptères; les unes poursuivent surtout les bancs de Mal- lotus, de Harengs ou de Gades : la Balænoptera musculus et la Balænoptera rostrata ; les autres se repaissent de Crustacés assez petits, leur estomac en est toujours plein sur la côte de Finmark : dans la Balænoptera Sibbaldiü, on trouve l'Euphrasia ? Journal d'anatomie et de physiologie, 1862. inermis (Thysanopode), dans l'autre, la Balænoptera borealis, le Calanus finmarchicus. Les baleiniers s'accordent à dire que la voracité des Balé- noptères est si grande que, quand elles se trouvent au milieu d’un banc de Mallotus, elles ne s'occupent pas plus d’un stea- mer qui approche que du vent qui ride la surface de la mer. Il est à remarquer que ces dernières espèces de Balénoptères ont des fanons noirs : la Balænoptera borealis avec les barbes toutes fines et blanches, la Balænoptera Sibbaldii avec les mêmes barbes grosses et noires. Chaque espèce souffle et respire à sa manière, et les baleiï- niers distinguent fort bien à distance les espèces qui apparais- sent sur l'horizon. En général, on peut dire qu’elles se tiennent dans une position horizontale en venant à la surface, qu’elles respirent trois ou quatre fois, puis plongent en levant la queue hors de l’eau. Les baleiniers disent que c’est la Balænoptera Sibbaldii qui relève le plus la queue, la Balænoptera musculus, le moins. Sur les côtes de Finmark on voit ordinairement la Balæ- noptera Sibbaldii dominer ; mais en 1885, c'était la Balænoptera borealis. Cette dernière ne compte dans les années ordinaires que pour un sixième. Les Balénoptères émigrent toutes périodiquement. Les Balénoptères, comme les Harengs, et sans doute comme bien d’autres animaux marins, émigrent à la même époque de l'année, mais ne pénètrent dans certaines régions que pour autant qu’elles y trouvent certaine pâture dont la présence dépend de la température de l’eau. On a fait depuis longtemps l'observation, que les Baleines franches descendent plus bas sur la côte de Labrador que sur la côte du Groënland; les glaces sont plus abondantes du côté de l'Amérique que du côté opposé, On a observé que les Balénoptères atteignent une latitude plus élevée dans POcéan glacial, en automne, quand les eaux sont chauffées pendant les mois d'été, qu’au printemps. En mai on ne les voit pas au delà de 75,45, tandis qu'en septembre elles remontent jusqu’à 78° (Leslie). (11) M. Alfred Cocks a rencontré des Balénoptères en automne 1882, au 1e septembre, tout près des glaces (la température de l’eau était de 1.3° au-dessus de zéro). Elles n'étaient que trois ou quatre; le3 septembre suivant, il en aperçut encore deux à la latitude de 75°,28", l’eau était à peine au-dessus de zéro. M. Alfred Cocks ne sait dire le nom de lespèce qu'il a eu sous les veux; cela peut être la Balænoptera Sibbaldiü et les moins grandes des Megaptera, dit-il. Nous avons publié une Notice sur la distribution géogra- phique des Balénoptères, dans les Bulletins de l'Académie, en tenant compte surtout des échouements, qui ont eu lieu depuis les côtes de Norvège jusqu'aux côtes de Portugal, comme à l’intérieur de la Méditerranée et de la Baltique. Mais ces échouements ne nous ont rien appris; en général, comme la dit Eschricht, ces animaux n’échouent que sur les côtes qu'ils ne visitent guère. On voit apparaître les Balénoptères tous les ans vers le mois de mai dans l'Atlantique; elles se rendent, les unes vers la mer de Baflin, les autres vers l'Islande et la mer de Barentz, où elles restent pendant les mois d'été; au mois d'août elles abandonnent ces parages pour se rendre dans des eaux plus méridionales. On a remarqué que la Balænoptera musculus arrive la première sur les côtes de Finmark et la Balænoptera Sibbaldii la der- nière; la B. musculus se montre parfois déjà à la fin de hiver. Sophus Hallas a indiqué, dans une intéressante notice, les observations qu’il a eu l’occasion de faire sur les Cétacés des eaux d'Islande. [la vu la Balænoptera Sibbaldii, que les Islandais appellent Steypireydr, depuis le 16 juin jusqu’au 15 septembre, et une autre espèce dont il ne dit pas le nom et qui est proba- blement la Balænoptera musculus. 1 2e série, t. XLV, mars, 1878. On a longtemps pêché les Baleines sans songer à faire la chasse aux Balénoptères ; on ne poursuit guère les Balé- noptères, observait Holbôll, gouverneur du Groënland ; leurs fanons sont sans usage, l'animal donne peu d'huile et leur pêche est diflicile. Les vraies Baleines ayant considérablement diminué par- tout, on a songé à mettre à profit les steamers et la poudre pour faire la chasse aux Balénoptères, et, en 1865, une Compa- gnie anglo-américaine a commencé la pêche de ces Cétacés dans les eaux de lIslande. Cette Compagnie a poursuivi cette industrie pendant 1865, 1866 et 1867. Le capitaine Bottemanne, qui dirigeait cette pêche, m'écrivait, à la date du 17 juillet 1868, qu'il se trouvait quatre espèces de Balénoptères dans les eaux d'Islande, dont une lui était moins bien connue que les autres, qu'il avait préparé le squelette de celle qui est connue sous le nom de Steypireydr. Vers cette époque, un pêcheur norwégien, M. Sven Foyen, après avoir fait la chasse aux phoques dans les eaux de Jan Meyen, où 1} avait capturé jusqu’à 22,000 individus en une saison de deux mois, a commencé la chasse aux Balénoptères sur les côtes de Finmark, et, grâce aux perfectionnements qu’il a apportés successivement aux projectiles, il existe aujour- d'hui des établissements sur toute l'étendue de la côte de Finmark. Les steamers sortent le matin, soit de Vadsô, soit d’un autre port des environs, et ils reviennent le même jour; rarement ils quittent les lieux de pêche sans avoir capturé une Balé- noptère. Ils remorquent le corps jusqu’au chantier, où l’on enlève ses fanons, sépare la graisse, et transforme ce qui reste en guano de Baleine. Au début de cette pêche on ne chassait que la grande espèce, la Balænoptera Sibbaldii ; aujourd’hui on ne néglige même pas la Balænopiera musculus, qui donne le moins de profit. Les premières années qu'on se livrait à cette chasse dans le Varanger-Fiord, ces animaux y étaient si abondants pendant les mois d'été, que la surface de la mer paraissait par moments (183) en ébullition; les navires osaient à peine se hasarder au milieu de cette surface vivante, qui s’étendait à perte de vue. On y prenait régulièrement des individus qui n'avaient pas moins de quatre-vingts pieds de longueur. En même temps, ces Cétacés se laissaient tous approcher sans fuir, comme partout ailleurs où les animaux se trouvent pour la première fois en face de l’homme. Aujourd'hui ces Cétacés ne pénètrent plus guère dans ce Fiord, et ceux que l’on chasse à l'entrée n’atteignent plus guère toute leur taille ; ils sont devenus très farouches; on ne les approche que bien difficilement, mais les engins sont plus per- fectionnés et les steamers mieux appropriés a leur destination. Pendant l'été de 1871, le capitaine Sven Foyen a capturé 38 Balénoptères, en 1875, 45, en 1879, ce nombre s'élève à 81, en 1881, il atteint 104. M. Alfred Cocks rapporte que, sur 406 Balénoptères capturées en 1583 sur les côtes de Finmark, il y avait 175 B. Sibbaldü et le restant moitié B. musculus et B. borealis. Indépendamment de ces trois espèces, on voit de temps à autre dans ces mêmes parages la petite espèce, la Balænoptera rostrata et la Megaptera boops. On a remarqué, avons-nous dit plus haut, que c’est la grande espèce qui remonte le plus haut, puisqu'on la trouve jusqu’au milieu des glaces à côté de la Baleine franche. Ces différentes espèces sont-elles confinées dans ces parages, comme le sont les vraies Baleines, où les voit-on encore dans d’autres mers ? Nous venons de voir que, dans notre hémisphère, la grande Balénoptère n’a guère été observée que dans les parties les plus septentrionales de l’Atlantique. Mais est-elle confinée dans ces régions ? Contrairement aux Baleines véritables, les Balénoptères sont probablement toutes cosmopolites, et on trouve les quatre formes de nos régions septentrionales, aussi bien dans lAtlan- (154) tique méridionale, que dans l’océan Pacifique, la mer des Indes et l'océan Austral. On voit des Finbacks dans toutes les mers, dit le capitaine Jouan t. Nous en avons rencontré, dit-il, dans l'Atlantique nord et sud, dans la Méditerranée, en grande quantité aux environs des Iles Malouines, à la côte du Chili, au Cap de Bonne-Espérance, dans les eaux de Madagascar, dans la mer d’Oman, dans le golfe de Bengale, au Japon, ete. Le capitaine d'Urville et, plus récemment, le professeur Moseley, en signalent un grand nombre dans les mers du pôle austral. Partout on parle de quatre espèces différentes par la taille aussi bien que par les caractères extérieurs. Depuis longtemps nous avons été frappé de voir une petite Balénoptère, décrite et figurée par le capitaine Scammon, hanter l'océan Pacifique, ayant tous les caractères de notre Balænoptera rostrata. La taille, la couleur et tout le squelette sont si semblables, que nous n'avons pu nous empêcher de dire que notre petite Balénoptère se trouve également dans la mer Pacifique. Nous avons été étonné ensuite de voir cette petite espèce dans l'océan Austral avec tous les mêmes caractères. Et si une espèce est répartie dans les deux hémisphères, les autres, sans en excepter la Megaptera, ne peuvent-elles pas être dans le même cas? Nous connaissons déjà le Cachalot qui hante les deux hémi- sphères, comme plusieurs Ziphioïdes et certains Cétodontes; parmi les Ziphioïides nous pouvons citer, outre le Cachalot, le Ziphius cavirostris comme le Micropteron Sowerbyi (Oulodon); parmi les Cétodontes, le Globiceps melas et l Eudelphinus delphis. Partout où, jusqu’à présent, on a réuni des observations sur les espèces de Balénoptères, nous le répétons, on à remarqué qu'il y a quatre formes, différentes par la taille et par les carac- tères extérieurs et intérieurs, et qui correspondent aux quatre formes de l'Atlantique septentrional. 1 H. Jouax, La chasse et la péche des animaux marins, Paris. (453 ) Le capitaine Scammon parle de quatre Balénoptères au nord de la Californie, dont la petite, comme nous venons de le dire, a tous les caractères de notre petite espèce, et la grande, ceux de notre Balænoptera Sibbaldii. La petite espèce y est désignée sous le nom de Balænoptera Davidsoni, la grande, sous celui de Sulphurbottom (Sibbaldius Sulfureus, Cope). Cette dernière se trouve aussi bien dans l'Atlantique que dans le Pacifique, dit le capitaine Scammon. La Balænoptera musculus % porte le nom de Balænoptera velifera. M. Burmeister a recueilli, pour son Musée de Buenos-Ayres, des squelettes qui se rapportent également à trois de nos espèces. Mon fils avait remarqué trois squelettes de différentes Balé- noptères au Musée de Buenos-Ayres, et avait reconnu l’analogie qu'ils présentent avec ceux des Balénoptères de nos parages !. La grande espèce correspond à notre Balænoptera Sibbaldii; elle y est désignée sous le nom de Balænoptera intermedia ; la Balænoptera musculus y est représentée par la Balænoptera patachonica, et la troisième, la Balænopterarostrata, par la Balænoptera bonærensis. Les squelettes du cap Horn qui se trouvent aujourd’hui au Muséum de Parisse rapportent aussi parfaitement à nos espèces européennes. Nous en dirons autant pour les squelettes que M. Anderson a réunis pour son Musée à Calcutta. M. Anderson distingue trois espèces de Balénoptères dans la baie de Bengale : outre la grande, de 84 pieds (Balænoptera indica), 1 en connaît une de 60 pieds (Balænoptera blythii), et une de 40 pieds (Balænoptera edenii). Il est question aussi d’une tête et de vertèbres d’un animal de 30 pieds, conservées au Musée de la Société asiatique 2. * Sile sternum de la Balænoptera rostrala à des caractères particuliers, ces Caractères ne sont que des exagérations de dispositions qui se trouvent déjà dans notre Balænoptera rostrata. ? Calcutta asiatic Society's Museum. Tête et vertèbres d'une Balénoptère de 50 pieds de long (par G. Swixtox, 1856) Ainsi ces quatre formes se retrouvent également dans la mer des Indes, et parmi elles figure l'espèce qui dépasse 80 pieds comme notre Balænoptera Sibbaldii. M. Anderson accorde à la grande 84 pieds et fait mention d’un individu capturé en 1851 à la latitude de 19° N, on Jugqu or Amherst Islet, qui porte au Musée de Calcutta le nom de Bal. indica. On a cité un individu de la même taille dans la mer Rouge. Dans ces dernières années, le Muséum de Paris a reçu des squelettes du Japon, que nous avons pu comparer avec les nôtres, et nous n'avons aucun doute sur la présence de la petite et de la grande espèce dans les eaux du Japon, la Balænoptera rostrata et la Balænoptera Sibbaldii. Le Muséum a reçu égale- ment du Japon une tête et des fanons qui se rapportent fort bien à notre Balænoptera musculus. Quant à la quatrième espèce de ces mêmes parages, nous en connaissons depuis longtemps les squelettes, dont on a fait la Balænoptera Schlegelü. Nous trouvons également quatre formes dans l’océan Austral, qui correspondent parfaitement aux nôtres par la taille comme par les autres caractères. M. James Hector 1 et d’autres naturalistes de la Nouvelle- Zélande ont fait la même observation sur ces Balénoptères, et, depuis longtemps, nous avons fait remarquer que la petite Balénoptère (Balænoptera huttoni) de la Nouvelle-Zélande a tous les caractères de notre petite espèce. À Melbourne, on conserve, dans les collections de l’Univer- sité, les fanons et le squelette d’une Balénoptère de 90 pieds, qui a été jetée sur la côte de Vittoria. Les fanons sont noirs, larges de 18 pouces et longs de 98 (Giglioli). Ce sont bien les caractères de notre grande espèce. Sur la côte sud-est d'Otago, une autre Balénoptère de très grande taille a échoué en 1875. Le capitaine Hutton en fait men- tion dans les Transactions de la Nouvelle-Zélande (vol. VIN. M. Knox fait mention de trois espèces de tailles différentes, 1 Trans. New Zealand Institute. (157) dans les eaux de la Nouvelle-Zélande, qui correspondent par- faitement aux nôtres: une de 80 à 100 pieds, que l’on a désignée sous le nom de Rorqualus major, une de 30 à 35 pieds, le Sul- fur-Bottom, et une troisième de 25 à 50 pieds, le Rorqualus minor 1. J. von Haast a fait mention de la petite Balénoptère, dont un mâle a échoué le 8 février 1880, on the Summer Beach, et qu'il n'hésite pas à rapporter à notre Balænoptera rostrata. Du reste, nous en avons pu comparer un squelette qui est conservé au British Museum. Les squelettes et les ossements séparés de la Nouvelle- Zélande, reçus dans ces derniers temps au British Museum, confirment complètement ces appréciations. Le capitaine F. W. Hutton, en parlant de la flore et de la faune de la Nouvelle-Zélande, dit que l’une et l’autre sont si particulières sous ces régions australes, qu’elles forment une province distincte du reste du monde; cela peut être vrai pour les plantes et les animaux terrestres, mais cela n’est pas exact pour les animaux marins, pas plus pour les Cétacés que pour les poissons. Nous venons de voir les mêmes Balénoptères éga- lement au nombre de quatre, et à celles-là, nous pouvons ajouter le Cachalot, le Ziphius cavirostris, le Micropteron Sowerbyi, le Globiceps melas, les Eudelphinus delphis, auxquels, il est probable, nous pourrons en ajouter bientôt d’autres. Nous sommes loin de l’époque où le capitaine Hutton écrivait : sur treize Cétacés de ces parages, se divisant en six familles, les deux tiers appartiennent exclusivement à la Nouvelle- Zélande. Le Challenger arapporté divers ossements recueillis au milieu du Pacifique, dans une station remarquablement riche en restes de Cétacés 2; parmi eux se trouvent plusieurs caisses tympa- niques, et le professeur Sir Turner n’a pas hésité à les rapporter, ! Kxox, Proc. New Zealand Institute. ? Station 286, lat, 35°29’ S., long. 133°22’ W., 16 octobre 1875, à 2,555 brasses. (158) les unes à la Balænopterarostrata, les autres à la Balænoptera Sib- baldii. I y a des os d’une troisième espèce encore indéterminée. Et ce n’est pas seulement à l’époque actuelle que nous voyons ces différentes formes se répéter dans la mer de nos antipodes comme ailleurs; si nous remontons de l’époque actuelle à celle qui nous à précédés, nous voyons le même phénomène se reproduire ; à la fin de l’époque tertiaire, ces quatre formes principales ont laissé leurs ossements dans le Crag des environs d'Anvers, et les ossements fossiles recueillis dans les environs de Buenos-Ayres offrent la plus complète ressemblance avec eux 1. Mon fils a rapporté des vertèbres avec une caisse tympanique que l’on ne saurait distinguer de celles de notre Crag. Dans les Enchaînements du monde animal, nous trouvons une observation semblable faite sur des Mammifères terrestres : en parlant des Hyènes, M. Albert Gaudry fait remarquer que l’Hyène tachetée des temps actuels correspond à l’Hyena perrieri du Pliocène, l’'Hyène brune, à l'Hyena exümia de Pikermi, et l’'Hyène rayée, à l'Hyena arvernensis de Perrier. Les Balénoptères sont peu hantées par les commensaux et les parasites ; elles n'hébergent ni des Cyames ni des Cirri- pèdes; on ne trouve sur elles qu'un Copépode du genre Penella, sertie par la tête dans l’épaisseur de la peau, et un autre Copépode, du genre Balænophilus, sur les fanons. Comme parasites, nous ne connaissons qu’un Echinorhynque assez commun dans l'intestin, et nous possédons un Botrio- cephale recueïli également dans l'intestin, mais dont nous ne connaissons pas encore le Scolex. Il est assez remarquable que la Baleine franche ne se couvre que de Cyames, la Mégaptère de Diadema, les Balénoptères de Penella. 1 Bulletin de P Académie royale de Belgique, ?* série, t. XXXV,1875,p. 775. BALÆNOPTERA ROSTRATA. LITTÉRATURE. Chemnitz, Von der Balæna rostrata. Berlin, Beschäftign, 4 Jahr., 1779. Oth. Fabricius, Fauna groenlandica. Hafniæ et Lipsiæ, 1780. John. Hunter, Observations on the structure and œconomr; of Whales. Puisos. Transacrions, vol. 77, 1787. 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DE BioLoGrr, tome [, 27 novembre 1885. (161) HISTORIQUE. La Balænoptera rostrata de Fabricius, qui n’est pas la Balæna rostrata de Linné, comme nous le verrons plus loin, est connue depuis les temps les plus reculés ; il en est fait mention dans les plus anciens manuscrits des Islandais. Le mot Tika- gulik, sous lequel les Esquimaux la désignent, correspond assez bien avec celui de Tschikagulik, que les habitants de l'Amé- rique russe donnent à une petite Baleine du détroit de Behring; cette analogie de noms est intéressante à plus d’un titre : elle semble indiquer des relations anciennes entre les populations du Groënland et celles qui occupent aujourd'hui les régions de l'Alaska; elle montre clairement, en outre, que les habitants des côtes de l'Amérique russe ont cru retrouver, dans la petite Balénoptère du détroit de Behring, le même animal qui vit dans les eaux du Groënland et que Fabricius a fait connaître sous le nom de Balænoptera rostrata. Mais si les pêcheurs distinguaient bien cette espèce des autres Balénoptères, 1l n’en était pas de même des naturalistes. La confusion la plus complète a régné dans les livres, jusqu’au jour où l’on a commencé à conserver les squelettes de ces animaux en vue de pouvoir les comparer. Cuvier et surtout Eschricht ont été les premiers à reconnaitre que la connaissance des Cétacés n’était possible qu’à cette con- dition; les matériaux qu'il reçut du Groënland permirent à Eschricht d’aflirmer que la Balænoptera rostrata de Fabricius n’est pas la Balænoptera rostrata des auteurs; il put définir nettement les caractères distinctifs de l’espèce et empêcher ainsi toute confusion ultérieure. Linné n’a pas connu cette Balénoptère; mais O. Fabricius, pendant son séjour au Groënland (1768-1775), ayant eu l’occa- sion de l’étudier et croyant reconnaître en elle la Balæna ros- trata de Linné, l’a désignée sous ce nom. C'était une erreur de la part de Fabricius, mais le nom qu’il a attribué à cette espèce de Baleine lui est resté. (18 ) Fréd. Martens a parlé ensuite de cet animal sous le nom de petite Baleine (kleine Walvisch); mais c’est à John Hunter que l'on doit les premières observations anatomiques. Le savant anatomiste anglais a eu l’occasion de disséquer une femelle, qui avait été capturée au Doggersbank dans la mer du Nord; John Hunter a fort bien reconnu que cette petite Baleine est la même que 0. Fabricius avait connue au Groënland. Bonnaterre a fort bien caractérisé cet animal d’après les écrits du savant missionnaire danois, et Lacépède en a parlé également sous le nom de Balénoptère à museaupointu ; Lacépède avait connu un jeune animal qui avait été pris, en 1791, dans la rade de Cherbourg. C’est la moins grande des Balénoptères, dit Lacépède, et elle ne parvient qu’à une longueur de 8 à 9 mètres. La gravure, dont Lacépède accompagne le texte, est faite d’après un dessin que sir Joseph Banks lui avait envoyé de Londres. Cette figure de Lacépède représente un gonflement extraordi- naire de la langue et de la cavité de la bouche, dû sans doute à la poche du larynx que l’on a comparée à une vessie natatoire. A l’époque où Cuvier s’occupait des Cétacés, on ne possédait aucun ossement de cette espèce dans les collections, et la Balénoptère à museau pointu fut considérée à tort comme un animal n'ayant pas atteint toute sa croissance. On voit clai- rement Ici les services que les collections doivent rendre à la science. Les directeurs des Musées sont les conservateurs des archives qui sont mises à la disposition du public. A la séance du 21 avril 1834 de la Société royale d’Édim- bourg, le D' Knox fit un rapport sur la dissection d’une jeune Balænoptera rostrata, et ajouta des observations fort intéres- santes sur l'anatomie d’un fœtus de Mysticetus 1. M. Knox eut l’occasion d'étudier un jeune animal de 9 à 10 pieds de longueur, capturé près de Queensferry (Baie du Forth); il reconnut facilement, par le nombre de ses vertèbres, l'espèce que 0. Fabricius avait désignée sous le nom de rostrata. 1! Journal l'Instilul, 1854, p. 556. ( 163 ) Depuis le siècle dernier, on possède à Bologne une tête bien conservée, dont Mondini et d’autres avaient fait mention. Le professeur Capellini en a fait l’objet d’un travail spécial et il a cru devoir en faire une espèce nouvelle, qu'il a dédiée à Mondini. Postérieurement aux recherches du professeur Knox, d'Édim- bourg, Eschricht reçut de son ami Holbôll, gouverneur du Groënland, des matériaux immenses se rapportant à la plupart des animaux marins qui visitent la côte du Groënland, et parmi lesquels se trouvaient plusieurs squelettes d'adultes et sept fœtus, dans l'alcool, dont deux mâles et cinq femelles de la Balænoptera rostrata; ces fœtus variaient en longueur depuis 8 jusqu’à 78 pouces. Dès ce moment la cétologie entre dans une phase nouvelle; ce qu'on ne peut voir dans le ventre ou la poitrine d'une Balénoptère, sans le secours d’échelles et de marchepieds pour arriver aux viscères, on peut le disséquer dans son cabinet quand on a un fœtus sous la main; aussi Eschricht démontre d’abord que, sous le même nom, on a désigné des espèces bien différentes les unes des autres, que la B. rostrata ne dépasse pas 30 pieds de longueur, que Fabricius l'a très bien connue, qu’elle n’a pas plus de 48 vertèbres dans sa colonne vertébrale, que son sternum est en croix latine, que ses fanons sont de couleur jaune, et que la nageoiïre pectorale porte un chevron blanc sur un fond noir. On peut dire que c’est depuis les travaux de lillustre céto- logue de Copenhague que cette Balénoptère a été définitive- ment reconnue. En 1884, nous avons fait connaître qu'une nouvelle Balæ- noptera rostrata venait d'être capturée dans la Méditerranée. A la séance du 21 novembre 1885 de la Société de biologie de Paris, M. Beauregard a communiqué une note sur une jeune Balénoptère, capturée près de Fécamp. C'est le même animal dont J'avais entretenu l’Académie à la première séance du mois de septembre. La Balénoptère de Fécamp est une femelle de 3,15. (164) Le Muséum de Paris a reçu un très bon moulage de cet animal, et son squelette est conservé au Musée du Havre. M. Perrin, démonstrateur d'anatomie au King's College à Londres, a décrit une Jeune femelle, capturée en avril 1870 à Neumouth, dont la longueur était de 13 pieds 8 1, pouces. Il ajoute deux dessins représentant les nageoires pectorales avec leurs muscles en place, vues du côté dorsal et du côté opposé f. M. Julin à publié un travail fort intéressant sur l’ossification du maxillaire inférieur et la constitution du système dentaire du fœtus 2. Au mois de novembre 1860 a échoué, au sud-est de Crower, une Balénoptère de 25 pieds de longueur, que le professeur Flower a fait connaître 3. C’était un mâle. Son estomac était plein de débris de poissons, qu’il croit être des cod-fish (Gades). Il était presque adulte, à en juger par les épiphyses. Tout le squelette est décrit avec soin par le savant Directeur du Bri- tish Museum. M. James Hector fait mention de deux têtes provenant du nord de Cook street et qui ressemblent, dit-il avec raison, à celle de la Balænoptera rostrata. I accorde 7 pieds de longueur à la mandibule. C’est la Balænoptera Huttonii de Gray. Dans le courant de l’année, M. Guldberg a publié un mémoire intéressant sur la biologie des Balénoptères du nord atlantique; ce travail renferme plusieurs observations intéressantes sur cette espèce. Nous avons mis ces nouveaux faits à profit, notam- ment dans le chapitre où nous traitons du genre de vie et des phénomènes de la parturition. Le professeur Burmeister a réuni, dans son Musée de Buenos- Ayres, les squelettes de différentes Balénoptères, parmi les- quelles nous en trouvons une petite qui a tous les caractères de notre petite espèce si bien décrite par Fabricius. 1 Perrin, Notes on the anatomy of Balænoptera rostrata. Proc.zooL.Soc., décembre 1870. ? Archives de Biologie, vol. 1, 1880. 5 On a lesser Fin-Whale (Balænoptera rostrata, Fabr.), recently stranded on the Norfolk coast. Proc. Zoor.. Soc., may 1864. ( 165 ) En 1873, une Balénoptère de 16 1} pieds, ayant 48 vertè- bres, les fanons blancs et le sternum en croix, à été capturée sur les côtes de la Nouvelle-Zélande (Otago Heads). Le profes- seur Hutton en a donné une figure et, plus tard, le professeur von Haast en à publié une description en joignant à la descrip- tion une figure du sternum. Gray lui avait donné le nom de Balænoptera Huttontü, et J. von Haast a rapporté ce mêmeani- mal à notre Balænoptera rostrata. I résulte de ces faits que la petite Balénoptère, à 48 vertèbres, habite également les deux hémisphères. Le capitaine Scammon a décrit une petite Balénoptère du Pacifique, sous le nom spécifique de Davidsonii qui, dans notre opinion, est synonyme de Balænoptera rostrata. SYNONYMIE. Cette espèce, la plus petite de toutes, est désignée sous les noms les plus différents. Nous pourrons les énumérer ainsi : Balæna rostrata, O. Fabr. Balænoptera aculo-rostrata, Lacépède. Rorqualus minor, Knox. Pterobalæna minor, Eschricht. Balænoptera rostrata, Gray. — Eschrichtü, Rash. — Davidsonii, Scammon. — Mondini, Capellini. — Bonœrensis, Burmeister. = de Huttoni, Gray. Cette même espèce est encore désignée par des noms vul- gaires : Baleine d’élé. Côte de Norwège. Piked Wahle. Pennant. Little Finner Pike Whale des balciniers anglais. Tikagulik, des Groënlandais. Vaagehval, des Norwégiens. Zwergwhal, des Allemands. (166) La Balænoptera Davidsonii de Scammon est bien, comme il le soupçonne, semblable à la Balænoptera rostrata d'Europe, quoiqu’elle habite les côtes de Californie. « This species is evi- » dently congeneric with the Balænoptera rostrata » dit avec raison le capitaine Scammon 1. La troisième Balænoptera musculus de Pallas, qui n’a que . 22 1/, pieds de longueur, est sans doute une Balænoptera ros- trala. La Balénoptère à museau pointu de Lacépède (pl. VID est bien l’espèce désignée sous le nom de Balænoptera rostrata. La Balænoptera Huttonii de Gray n’est qu'une rostrata. La Balænoptera rostrata est regardée, sur les côtes de Massa- chusetts, comme une jeune Balænoptera musculus. CARACTÈRES. Il n’y a pas d'espèce plus facile à caractériser ; elle ne dépasse guère 30 pieds de longueur, quoiqu'on en ait vu de 36; la nageoire pectorale a un chevron blanc; les fanons sont toujours de la même couleur jaune päle ; la colonne vertébrale compte 48 vertèbres; le sternum est en croix latine; les côtes sont au nombre de 11. On la reconnaît toujours parfaitement à l’extérieur au che= vron blanc qu'elle porte sur les nageoires pectorales. Dans un certain nombre de squelettes, on voit des coales- cences entre les corps ou les apophyses de quelques vertèbres, le plus souvent entre les cervicales; mais ces dispositions n’ont aucune valeur sous le rapport systématique. Parmi les individus quisont venus à la côte, nous en trouvons un qui n’a que de 9 à 10 pieds, cinq qui ont de 15 à 17 pieds, quatre de 24 à 95 pieds et un seul de 29 pieds. Le premier, de 9 à 10 pieds, vient de naître, et les autres, de 14 à 15 pieds, 1 Cap. Scammow, On a new species of Balænoptera. Proc. of the cal. Aca- demy of sciences, octobre 1 872. (167 ) c’est-à-dire la moitié de la taille de la mère, viennent sans doute de la quitter. Les jeunes se séparent de la mère à l’âge de deux ans. Ils ont encore la moitié à gagner pour atteindre la taille adulte. Le squelette le plus fort que nous ayons vu, est celui du Musée de Stockholm, qui a été obtenu par échange du Musée de Bergen. Un autre squelette d’un animal très fort se trouve au Musée de lUniversité de Liège. Il vient également de Bergen. On accorde généralement 30 pieds de longueur à cette espèce; mais, à en juger par la longueur du jeune en venant au monde, longueur qui est de 9 pieds d’après Eschricht, cet animal, à l’âge adulte, doit atteindre jusqu’à 36 pieds. Nous avons vu, du reste, certains squelettes qui confirment cette dimension comme taille naturelle. ORGANISATION. M. Charles Julin a consigné, dans les Archives de Biologie, des observations du plus haut intérêt sur la constitution du système dentaire d’un fœtus de cette espèce. Les dents rap- pellent plus ou moins les dents adultes des Squalodons. Nous avons compté dans un fœtus quatre bulbes pileux à la mâchoire supérieure et cinq à la mâchoire inférieure. La colonne vertébrale se compose généralement de T cervi- cales, 11 dorsales, 13 lombaires et 17 caudales, en tout 48. Il y a quelques squelettes dans lesquels il y en a plus et d’autres, en plus grand nombre, où il y en a moins. Dans le mâle du Musée royal du collège des chirurgiens à Londres, on voit les apophyses transverses, de la troisième à la sixième cervicale, séparées, ne pas former un anneau complet. Le mâle de Buenos-Ayres (Balænoptera bonaërensis) n’a que 32 pieds et 48 vertèbres comme notre espèce. Dans le squelette de Hunter, les apophyses transverses supé- rieure et inférieure de l’axis ne sont pas non plus réunies. ( 168 ) La sixième cervicale de l'individu de Norfolk Coast, conservé au Musée royal du Collège des chirurgiens, a un anneau com- plet d’un côté, incomplet de l’autre. Il y a aussi parfois coalescence entre les corps de deux ver- tèbres qui se suivent. Nous en avons vu dans les régions cervi- cale et caudale. Nous avons vu des squelettes qui ont le corps de l’axis soudé à la troisième cervicale. C’est ce que l’on observe dans un sque- lette du Collège des chirurgiens, et dans un autre, du Colonial Museum de Wellington (Nouvelle-Zélande). Les trois dernières caudales sont également réunies dans un squelette que nous avons eu sous les yeux. Nous avons déjà fait la remarque que la Balænoptera borealis montre habituellement la première côte bifide; nous en avons cité un cas remarquable, en 1868, dans les Bulletins de l'Aca- démie 1; dans le squelette de Balænoptera rostrata du Musée de Cambridge, nous voyons également des traces de fusion des deux premières côtes. Cette bifidité de la première côte a souvent été vue chez Fhomme; elle a été signalée dans un squelette de Globiceps melas du Japon, qui est à Leyde, et dans un Delphinapterus leucas du Musée du Collège royal des chirurgiens de Londres. Le cas le plus intéressant est celui que nous avons signalé dans un marsouin (Phocæna communis). La côte supplémentaire est développée des deux côtés 2. Le sternum est caractéristique par sa forme en croix latine. La Balænoptera bonærensis 3 de Burmeister présente cette même forme, mais présente en outre, en avant, deux saillies formant une sorte de fourche que nous avons retrouvée en miniature dans des sternums très adultes. Le sternum de la Balænoptera borealis, à âge fœtal, présente cette mème fourche, sans avoir le bout xiphioïde allongé. ! 2e série, t. XXVI, n° 7. ? Bulletins de l'Académie, 2e série, 1. XXVE, n° 7. 5 Atlas de la description physique de la république Argentine, pl. V, fig 5. (169) Les fanons de cette espèce sont toujours faciles à reconnaitre à leur longueur ainsi qu’à leur couleur jaune pâle. Les plus longs fanons ne dépassent pas 2 pieds. MOEURS. Le capitaine Holbôll à eu l’occasion d'observer cette petite Balénoptère sur la côte du Groënland, et il fait remarquer qu'on la voit au milieu des grandes Baleines. Il n’en est pas de même de la Balænoptera musculus, dont les baleiniers con- sidèrent l'apparition comme un indice certain de la fin de la saison de pêche. Quand on ne les voit pas au milieu de grandes Baleines, ces Balénoptères sont isolées ou à deux et trois ensemble, Comme les autres Balénoptères vivent par couples et qu’à Bergen on voit souvent des mâles et des femelles, dont les dernières seules approchent des côtes, il y a tout lieu de croire que l'espèce qui nous occupe mène le même genre de vie. Cette petite espèce poursuit les poissons comme la Balænop- tera musculus et borealis. Hunter a trouvé dans l'estomac des restes de divers poissons, surtout du Dog-fish. Une femelle capturée à Weymouth avait l'estomac vide; il y avait au lieu de pâture dix cailloux dans son premier estomac et autant dans le second (Perrin). Motzfeld à vu à Juliane haab, côte du Groënland, cette Balénoptère avaler des Mallotus arcticus, fermer la bouche au-dessus de l’eau et rejeter ensuite l’eau de la bouche en jets d’écume des deux côtés; puis, après un moment de repos, il a vu l’haleine sortir des narines comme chez tout autre animal qui respire. On a vu souvent cette Balénoptère entourée de Tursiops tursio, au moins au nord de l’Atlantique. Ils poursuivent sans doute la même pâture. (170) D’après Eschricht la gestation n’est que de dix mois; en naissant l'animal a 9 pieds de long, c’est-à-dire, comme dans les autres espèces, à peu près le quart de la longueur de la mère. Melchior a vu un fœtus de 8 pieds 2 pouces qui n’était pas à terme. On a recueilli à Bergen des fœtus de différentes tailles, et les femelles arrivent cependant à la même époque de l’année. Eschricht a vu plusieurs exemples de jumeaux. Sur les côtes de Finmark on recueille également des fœtus de tailles différentes à la même époque. En faisant le relevé des côtes où des individus sont venus échouer et où on a tenu compte des dates de leur capture, on ne peut pas dire qu'il y ait quelque part un passage régulier, si ce n'est sur la côte de Norwège et à l'entrée de la mer de Baflin. Nous connaissons leur apparition périodique dans les Fiords de Bergen en été, comme dans le détroit de Davis, mais nous ignorons complètement, comme pour les autres Balé- noptères, le lieu de leurs quartiers d'hiver. Il est à remarquer qu’il n’y en a pas une seule, de celles qui sont venues vagabonder sur nos côtes tempérées, qui ait dépassé ou même qui ait atteint 30 pieds. Grâce aux nombreux fœtus que lon a pu recueillir, en tenant compte de la date de la capture de la mère et de la taille du fœtus, en faisant ensuite la comparaison des jeunes animaux capturés pendant les différents mois de l’année, on a pu constater de combien par mois les fœtus grandissent dans le corps de la mère et de combien les baleineaux s’accroissent par mois pendant la première année de leur vie. On a recueilli un grand nombre de fœtus et on a heureuse- ment tenu compte de Ja date de la capture de la mère et de la taille des fœtus. Eschricht est arrivé à ce résultat, confirmé par Guldberg, que le développement commence dans les pre- miers mois de l’année et continue jusqu’en novembre; en avril il a reçu un fœtus de 0,090 et en septembre un autre de 1,624. (171) Comme la taille, à la naissance, est, d’après Eschricht, de 2u,8, il y a lieu d'en conclure que la mise-bas a lieu en hiver. Le Dr Knox a signalé un jeune animal capturé au mois de février 1834 qui avait 9 pieds 11 pouces. C’est un peu plus que la taille du baleineau au moment de la naissance. If avait pro- bablement un peu plus de deux mois. Le 18 février ou mars 1878, un individu long de 3",50 a été capturé près de Villefranche. En février 1861, un de 3 mètres a échoué sur les côtes de Bretagne. En avril 1791, on en a pris dans des filets, près de la rade de Cherbourg, un individu qui avait 14 à 15 pieds. La jeune femelle que M. Perrin a décrite a été capturée en avril 1870; elle était longue de 13 pieds 8 1/9 pouces. Le 15 mai 1885, un de 9,62 a été capturé en mer par le Gaulois, de Fécamp. Le 27 septembre 1863, un de 8",60 à Saint-Jean-de-Luz. Le 15 septembre 1878, un Vaagevhal a été pris dans le Fiord de Christiania ; il avait 14 1) pieds. En novembre 1860, un mâle de 25 pieds a échoué au sud-est de Crower (Flower). D’après un manuscrit sur les pêches, cité par M. Guldberg, le temps de la mise-bas du Vaagevhal serait le commencement de novembre. Guldberg eroit que cette époque est un peu trop avancée, et la fixe entre la fin de novembre et le commence- ment de Janvier. La gestation serait, comme Eschricht l’a estimée, de dix mois. L'accouplement aurait lieu pendant les premiers mois de l'année. Reste la question de savoir où ils se réfugient pour mettre bas et de connaître les lieux où ils s’accouplent. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE ET PÉCHE. Pendant l'été on les voit communément sur les côtes de Finmark, mais on ne les y chasse généralement pas. Guldberg a trouvé tout près de Vadsô, dans le Varanger- fiord, le squelette d’un individu qui s’y était perdu pendant l'hiver. Nous allons citer d'abord les parages où des imdividus sont venus se perdre, en faisant remarquer que les Cétacés n’échouent généralement, comme l’a dit Eschricht, que sur les côtes qu'ils ne fréquentent pas régulièrement. Le plus ancien exemple connu date du XVIT siècle. Le 8 mai 1699, une petite Baleine vient se perdre dans le Weser et son squelette est conservé à Brême. La ville de Brême en a fait exécuter une peinture à l’huile. Cuvier en parle, mais en prenant cet animal pour un jeune Rorqual; le grand naturaliste n'avait pas de matériaux pour débrouiller cette histoire. Nous en connaissons deux exemples en Belgique. Le 10 juillet 1838, une jeune femelle de 5 mètres a été trouvée morte en mer près d'Ostende. Son squelette est au Musée de l'Université de Gand. En 1865, au mois d'octobre, un mâle de 16 pieds a remonté l'Escaut et s’est fait prendre en amont d'Anvers. Son squelette est conservé à Bruxelles, au Musée royal. Sur les côtes océaniques de France on a vu se perdre plu- sieurs individus. En avril 1791, un jeune Rorqual de 14 à 15 pieds de long, dont le milieu des nageoires pectorales était blanc, est venu se perdre dans des filets de pêcheurs, près de la rade de Cher- bourg. Un médecin de Valogne en a envoyé une description à Lacépède, et c’est d’après cet animal que ce naturaliste a établi la Balénoptère à museau pointu. La bande blanche des nageoires pectorales, dont parle le médecin de Valogne, ne laisse pas de doute sur l'espèce à laquelle appartient ce jeune animal. (173) Le 10 mars 1827, un individu de 7 mètres de long a été cap- turé sur les côtes d’Oleron ; nous en avons vu les ossements au Musée de la Rochelle. Le D' Fischer croit que c’est par erreur qu’on a annoncé la capture d’une petite Balénoptère en juin 1850 sur les côtes du Morbihan; mais il n’est pas douteux qu'en 1852 on en a pris une à l'embouchure de la Seine, et dont le dessin est conservé dans les Vélins du Muséum 1. Le 26 août 1835, un mâle à échoué dans la Charente; son squelette est conservé au Musée de l’École de médecine de Rochefort; sa longueur était de T mètres 48 centimètres. Un autre individu a été capturé sur la côte de la Gironde, dont le squelette n’a pas été conservé (Fischer). Au mois de février 1861, un individu de 3 mètres a échoué sur les côtes de Bretagne. Vers 1879, M. Quillau a envoyé un squelette imcomplet au Muséum de Paris, qui provenait sans doute de cet animal. Un autre encore, de 6 mètres 60, a échoué à Saint-Jean-de- Luz le 27 septembre 1865. Au Musée de Lille on conserve le squelette d’un individu échoué sur les côtes de Montreuil-sur-Mer (Fischer), et un autre à Brest, provenant d’un animal reconnu par Rochon. A Bordeaux on conserve le squelette d’un animal qui a échoué à Boulogne. Le 15 mai 1885, un bateau de Fécamp (Le Gaulois, patron Deshayes) a capturé en mer une Balænoptera rostrata, longue de 3 mètres 62 pieds. M. Leunier, directeur du Muséé du Havre, en a donné le dessin d’après l’animal étendu sur le pont ?. On a été longtemps dans le doute sur la question de savoir si la petite Balénoptère pénètre dans la Méditerranée. Ce doute est levé maintenant. On en connaît aujourd’hui des exemples bien constatés, mais ? Ce dessin, le plus beau que nous connaissions de cette espèce, a été reproduit par P. Gervais dans les Annales du Muséum, Mémoires, t. VIT, pl. 5. ? La Nature, 7 novembre 1885. (174) en tout cas ce sont des apparitions bien rares; un squelette est conservé depuis le siècle dernier au Musée de Bologne, provenant, paraît-il, d’un animal capturé en 1771 dans l’Adria- tique; il a été décrit par Mondini, et le professeur Capellini a cru devoir lui donner le nom de Balænoptera Mondini 1. L'abbé Ranzani avait envoyé à Cuvier un dessin de la tête, conservée au Musée de Bologne, et Cuvier avait cru qu'elle était semblable à celle du Rorqual, de manière, dit-il, qu'il n’y a pas lieu de douter que la même espèce de Rorqual ne vive dans la mer du Nord et dans la Méditerranée ; mais en même temps il existe dans cette dernière mer une autre espèce, celle qui a échoué aux [les Sainte-Marguerite, et que le grand natu- raliste croyait propre à cette mer intérieure. Le 18 mars ou février 1878, un autre individu, long de 3,50, a été capturé par les pêcheurs de Saint-Hospice, au petit port de Saint-Jean, près de Villefranche (dép. des Alpes maritimes) 2. Le corps a été acheté par les frères Gall, de Nice. Le squelette est conservé à Florence. Nous ferons remarquer que la Méditerranée ne possède aucun Cétacé qui lui soit propre, pas plus que la Baltique et la mer Noire, et qu'il ne pénètre même aucun Cétacé à fanons dans cette dernière mer intérieure. Il y a eu des Cétacés à fanons dans la mer Noire à la fin de l'époque tertiaire, en même temps que des Siréniens et même des Squalodons; mais aujourd'hui on n’y voit plus que trois Cétacés, tous les trois à dents : le Marsouin, le Tursio et le Dauphin ordinaire, qui viennent de l'Atlantique. On connaît aussi quelques individus qui sont venus à la côte en Hollande. Le 20 décembre 1862, après un violent orage, une femelle de 5 mètres de long est allée échouer dans lY. Le squelette en est conservé au Jardin zoologique d'Amsterdam. 1 Gervais, Journal de zoologie, 1877, p. 167. 2 P. J. Van BENEDEN, Un mot sur quelques Cétacés échoués sur les côtes de la Méditerranée. BüLLET. ACAD. ROY. DE BELGIQUE, février 1880. (175 ) M. Max Weber annonce, en 1861, qu'un animal de 30 pieds de long est venu se perdre dans la Zuiderzée, sur les côtes de Vlieland, mais il ne dit pas l'époque de l’année, ni si le sque- lette est conservé 1. On connaît plusieurs exemples de Balænoptera rostrata échouées sur les côtes d'Angleterre et d'Ecosse. En 1765 les pêcheurs ont pris, dans la mer du Nord, au Doggersbank, une jeune femelle de 16 à 17 pieds ; John Hunter l’a disséquée, et le squelette en est conservé dans son musée, aujourdhui le Musée du Collège royal des chirurgiens. Le 14 novembre 1808, une femelle de 17 pieds a été capturée aux Orcades, dans Scalpa-Bays. En février 1834, une jeune femelle de 9 à 10 pieds, la plus petite que l’on ait encore vue se perdre, est allée échouer dans le Firth of Forth. Son squelette est conservé au Musée d'Édimbourg. Il y a tout lieu de croire que l'animal venait d'être mis au monde. Un mâle mort, mesurant 25 pieds, est venu à la côte en novembre 1869, près de Cromer (Norfolk). Son squelette est conservé au Musée du Collège royal des chirurgiens à Londres. Son estomac était plein de cod-fish, Gadus œæglefinus. Le 8 mai 1865, un Jeune individu de 10 pieds 2 pouces est venu se perdre Jrish Coast off Cloger-Head. H n’a que 46 ver- tèbres. (AI. Carte et A. Macalister). Le squelette d’une femelle capturée à Yarmouth, ainsi qu'une tête et une omoplate d’un animal qui a péri à lIsle d'Islay en 1866, sont conservés à Cambridge. Une jeune femelle de Balænoptera rostrata de 15 pieds et quelques pouces a été capturée en avril 1870 à Weymouth, et a été achetée par M. Gerrard. M. Perrin, demonstrator of ana- tomy, King's College, à Londres, l’a disséquée et a publié les résultats de ses recherches dans les Proc. Zool. Soc., décembre 1870. Le premier et le second estomac contenaient des petits ® Verslagen der Nederl. Dierkund. Vereeniging, Tydschrift der Nederl Vereeniging, 2: serie, af. 5 et 4, 1886. 15 (176) cailloux. Il ajoute deux dessins représentant les nageoires pecto- rales avec leurs muscles en place, vues du côté dorsal et du côté opposé. Le 16 mai 1887 une jeune femelle s’est perdue à Plymouth. Un jeune animal de 9 à 10 pieds a été capturé près de Queensferry (Firth of Forth). A la séance du 21 avril 1834 de la Société royale d'Édimbourg, le docteur Knox fait un rap- port fort intéressant sur la dissection de cet animal 2. Une jeune femelle de 14 1/, pieds est venue échouer vivante sur la côte d’Aberdeen, en juillet 1870. Son squelette est conservé au Musée d’Aberdeen, dirigé par le professeur Struthers. Un autre encore a échoué en septembre 1871 à Dunbar (Firth of Forth). Le professeur sir Turner en fait mention. M. Flower a signalé, en 1880, une jeune femelle de 15 pieds qui est allée échouer sur les côtes de Cornouailles. On en a vu périr également sur la côte de Norfolk, dit M. Southwell. En 1837, sur la côte ouest de Jutland, près de Vardo, est venu échouer un individu de 22 pieds ; son squelette a été envoyé à Eschricht. Il n’est pas complet. A l’est du Jutland, un animai de 18 pieds est venu à la côte en juillet 1824. Le Musée de Halle en possède le squelette. On a enregistré aussi quelques exemples d'individus égarés dans la Baltique. En 1845, un animal, dont le dessin est conservé dans l’église Sainte-Marie à Greifswald, est venu échouer dans le voisinage de cette ville (an der Wiek). Un autre est venu à la côte à l’île de Rugen; son sque- lette est conservé à Breslau 3; il a 25 pieds de longueur et 48 vertèbres. On conserve au Musée de Stockholm une mandibule trouvée ! BLakwiLz, The Zoologist, july, 1857. ? Journal l'Institut, 1854, p. 356. 5 Ernst Roll. (477) dans la marne de l’époque glaciaire (Halland) !, que nous rap- portons à cette espèce. Nous avons attiré l’attention des naturalistes sur une tête de cette même espèce, conservée au Musée de Brême; elle a été pêchée dans la mer du Nord, et l’on avait cru pouvoir Pattri- buer un instant à un animal fossile. D’après les pêcheurs de Brême, les ossements de ces animaux ne sont pas rares dans certains endroits de la mer du Nord ?. Le 2 juillet 1840, un animal de 16 pieds est venu à la côte près de Christiania. Un autre, un mâle de 14 1/, pieds, est venu échouer dans les mêmes parages en septembre 1878. Le professeur Sars en a publié un dessin. Nous avons vu une omoplate de cette même espèce sus- pendue dans la cour d’un des principaux hôtels de Christiania. Il est évident que toutes ces visites sont purement acciden- telles ; mais il n’en est pas de même de celles qui se font dans les Fiords de la côte de Norvège, dans les environs de Bergen. Dans ces derniers parages, on en voit arriver périodiquement, le plus souvent depuis le mois de mai jusqu’en décembre ; ce sont généralement des femelles qui entrent dans les Fiords pour y mettre bas; sur onze individus qu’on avait capturés dans un temps déterminé, il n’y avait qu'un seul mâle. On à remarqué du reste partout, que les mâles de toutes ces espèces se tiennent au large, pendant que les femelles approchent des côtes. Depuis longtemps on sait que la Balænoptera rostrata entre dans ces baies et que les pêcheurs des alentours les empri- sonnent à l’aide de filets. L'animal, enfermé comme dans un aquarium, est attaqué à coups de flèches empoisonnées; il perd immédiatement, après ses blessures, de son activité ordinaire et devient facilement la proie des pêcheurs. La flèche est empoi- sonnée par le pus de la capture précédente et, depuis des temps ? ANGELIN, Ofvers. af k. Vet. Akad. Forh , 1867, p. 81. ErDmanx, Pidr. till känned.om Sveriges Quartära Bildingar, p. 158. ? Van BENEDEN, Journal de Zoologie, t. IV, 1875. (178) fort reculés, on prépare ainsi des flèches qui ne doivent servir qu'à la campagne suivante. Tous les ans, dit le docteur Armauer Hansen,aux mois d'avril et de mai, les pêcheurs attendent la Balænoptera rostrata à l'entrée d’un Fiord très étroit, nommé Skogsväg, à 50 kilomètres de Bergen. Dès qu’un animal est entré, ils ferment Fembou- chure au moyen d'un filet et ils l’attaquent à l’aide de flèches. Ils empoisonnent leurs flèches en baignant la pointe dans la chaire gangrénée et ils la laissent sécher. Il paraît que la forme des arcs dont ils se servent date de l’époque des anciens guerriers, ies Vikings. M. Armauer Hansen a trouvé des bacilles dans la chair gangrénée, et croit que la flèche empoisonnée inocule aux Ba- lénoptères les germes qui produisent la septicémief. La petite Balénoptère a été vue également dans le détroit de Davis, mais seulement pendant les mois d'été 2; on la voit paraître aussi sur les côtes d'Islande, aux îles Loffoden, sur les côtes de Finmark et, comme nous venons de le dire, pério- diquement sur les côtes de Norvège. On en a vu également dans la mer Blanche; Nordenskjôld la même observée dans la mer de Kara, à côté de Beluga, et Scoresby 3, comme Malmgren # et Sluyter l'ont reconnue dans les eaux du Spitzherg ÿ. ! ARMAUER HANsEN, La seplicémie inoculée à des Baleines par les flèches dont se servent les pécheurs, ARCHIVES DE BIOLOGIE, (. VI, fasc. HIT, 1885, p. 85. ? Cette même petite Balénoptère, dont nous possédons un squelette envoyé par Holbôll du Groënland, se trouve également plus au nord, mais en moins gränd nombre toutefois que dans la partie méridionale; elle arrive au mois d'avril à Godhaab, dit Holbôll, et ne quitte qu’au mois de décembre. La Balænoptera rostrata aurait ainsi, comme du reste nous l'avons fait remarquer déjà pour la Megaptera boops, plus d’une station d'été. 5 Scoresby fait mention d'un individu de 17 ‘/, pieds, capturé au mois de novembre 1808, dans la baie de Scalpa; il a été figuré par Watson. An Account of the arct.reg., 1. 1, p.485, pl. IN, fig. 2. 4 Malmgren a vu, pendant son voyage au Spitzberg, des individus de cette espèce pendant le mois de mai. 5 Jl n'est pas sans intérêt de faire remarquer que Ruyter, en gagnant des WÉTOR) Avant Nordenskjôüld, des baleiniers norvégiens en avaient déjà signalé dans la mer de Kara. On en a vu en abondance dans les parages de Godthaab (Groënland). Tous les baleiniers s'accordent à dire que la petite Balénoptère arrive en été au détroit de Davis et à la baie de Baflin. De l’autre côté de l'Atlantique, on a constaté depuis longtemps la présence de cette même Balénoptère; le Musée de Stuttgard a reçu un squelette de la côte du Labrador et, depuis, on a fait mention d’un animal de 18 pieds capturé dans la baie de New- York (D' Kay). M. Allen cite la Balænoptera rostrata avec un signe de doute, comme animal propre à ces parages, mais ce doute est évidem- ment levé. On trouve dans l'Atlantique méridional, comme dans lAtlan- tique septentrional, dans le Pacifique et mème dans les eaux de nos antipodes, des Balénoptères qui correspondent à notre Balænoptera rostrata par leur taille, par leurs fanons ainsi que par l’ensemble de leur organisation Il y en a qui sont telle- ment semblables à l'espèce de nos parages, que, si on les trou- vait sur les côtes d'Europe, on ne songerait pas à en faire des espèces distinctes. Telle est la Balénoptère du nord du Paei- fique à laquelle, comme nous Pavons déjà dit, le capitaine Scammon a donné le nom de Balænoptera Davidsonii. Cette aflinité n’a, du reste, pas échappé aux naturalistes américains : Balænoptera Davidsonii is evidently congeneric with the Balæ- noptera rostrata, dit le capitaine Scammon. Nous avons eu l'occasion de voir à Vienne des fanons, rapportés de San Fran- cisco par le professeur Steindachner, en tout semblables aux fanons de notre espèce naine. A l'embouchure de la Plata du Mediano, près de Belgrano, à 10 miles de Buenos-Ayres, flottait, le 3 février 1867, un regions de plus en plus septentrionales, a vu successivement disparaitre les Marsouins, puis les Tursio, et ce n’est qu'après celte disparition qu’il à vu apparaître, au 60€ degré, la Balænoptera rostrala. ( 180 ) cadavre qui a été recueilli par les pêcheurs, et dont le squelette est conservé aujourd'hui au Musée de Buenos-Ayres. C'était un mâle. La taille ne dépasse pas 32 pieds; les vertèbres cervi- cales 2, 5 et 4 sont réunies par le corps; les apophyses trans- verses supérieures des sixième et septième cervicales sont réunies à gauche dans toute leur longueur. Burmeister l’a décrit sous le nom de Balænoptera bonaérensis{. I possède le squelette et en a fait connaître les divers caractères, qui sont la repro- duction de notre Balænoptera rostrata. nv a que le sternum qui diffère par une bifurcation qu'il présente sur son bord antérieur, mais le squelette montre jusqu'au nombre de ver- tèbres (48) si caractéristique de cette espèce. Le British Museum a reçu également de l'île Formosa, par le consul anglais Swinhoe, des fanons, avec les barbes jaunes de la grandeur des fanons de l'espèce qui nous occupe, ou même un peu plus petits, et qui proviennent sans doute de la même Balénoptère, si pas d’une espèce similaire. Ces fanons sont conservés dans un bocal; il n’y en a qu’une rangée. Nous avons fait mention de cette Balénoptère dans notre Ostéo- graphie, sous le nom de Balænoptera Swinhoei. Pallas fait mention d’une Balénoptère de 22 pieds de long, avec une nageoire pectorale blanche, observée par Merle sur la côte du Kamschatka, et qu'il rapporte avec raison à la Ba- lænoptera rostrata de Fabricius. Le Muséum de Paris a reçu du Japon un squelette qui a tous les caractères de cette espèce; il a deux ou trois vertèbres de plus que le nombre normal de 48, mais on trouve de sem- blables variations dans des squelettes d'Europe. Près de l’île Kerguelen, on a capturé une Balénoptère de 30 pieds de long qui appartient sans doute à cette même espèce. On n’en a malheureusement rien conservé. * H. Bunmeister, Prelim. descript. of a new species of Finner whale (Ba- Iænoptera bonaërensis). — Proceed. Zool. Soc., 1867, p. 707. — Annales del Museo publico de Buenos-Aires, 1868. — Vax BENEDEx et PauLz Gervais, Osteograpliie des Célacés. ( 181 ) La mer de nos antipodes nourrit également, à côté de Balé- noptères de grande taille, une petite espèce qui ne dépasse pas la nôtre en dimension; elle atteint à peine 30 pieds de longueur. En octobre 1873, écrit-on de la Nouvelle-Zélande, on a cap- turé une petite Balénoptère dont le squelette a été envoyé au British Museum. En recevant la lettre d'envoi, le docteur Gray croyait d’abord, d’après les dimensions, que c'était un squelette de Neobalæna marginata 1. Le squelette de cette Balénoptère est complet et ses fanons d’un jaune pâle {cream colour) sont con- servés. Il a 48 vertèbres, un sternum en eroix latine, et les fanons semblable à ceux de notre espèce. Nous ne doutons pas que, si ce squelette avait été expédié du nord de Atlantique, personne n'aurait hésité à le désigner sous le nom de rostrata. Gray a publié le dessin que le professeur Hutton, conserva- teur du Muséum d’Iotago, lui a fait parvenir 2. M. James Hector fait mention de deux têtes, provenant de Cookstrait, et qui ressemblent, dit-il avec raison, à celle de la Balænoptera rostrata. HN accorde T pieds de longueur à la man- dibule. Jul. von Haast fait également mention d’un jeune mâle, échoué on the Summer beach, le T février 1873; il a 23 pieds de long, et le Directeur du Musée de Canterbury n'hésite pas à le rapporter à la Balænoptera rostrata d'Europe, tout en reconnaissant que cest la Balænoptera Huttoni de Gray. Il représente le sternum et un fanon 5. Nous trouvons dans nos notes : le squelette de la Balænop- tera Huttoni, conservé au British Museum, a la taille, le nom- bre de vertèbres et le sternum de notre Balænoptera rostrata ; le sternum est en croix latine, mais un peu plus petit que celui de notre rostrata. Les fanons sont jaunes, avec une bande * En mai 1874 Gray m'écrivait : « Le squelette de Ja petite Baleine de la Nouvelle-Hollande est arrivé. C’est une Balænoptera voisine de la Balænop- tera rostrala, maïs bien distincte, et pas une Neobalæna. » * Gray, Ann. nal. hist., 1870, vol, V, p. 224; 4874, vol. XII, p. 516, pl. XVI. 5 Philosophical Institute of Canterbury, 50 décembre, 1880. (182) noire à l'extérieur; les vertèbres sont au nombre de quarante- six ; sans doute les deux dernières manquent. >armi les caisses tympaniques, rapportées par le Challenger et recueillies par la sonde au milieu du Pacifique, à quelques degrés au sud de lPéquateur, le professeur Sir Turner en a trouvé qui se rapportent à la Balænoptera rostrala 1. En somme, la Balænoptera rostrata à été observée en Europe sur les côtes du Groënland et du Spitzberg, d'Islande et de Nor- vège, de Suède, de Danemark, d'Allemagne, des Pays-Bas, de Belgique, de France, d'Écosse, d'Angleterre, et enfin dans la Méditerranée et la Baltique. On l’a vue aussi dans la mer Blanche et dans la mer de Kara. En dehors de l'Europe, elle a été observée sur les côtes du Labrador et des États-Unis d'Amérique. Dans le Pacifique on l’a vue au détroit de Behring, sur les côtes du Kamschatka, dans les parages des îles Aléoutiennes, et elle est connue sous le nom de Balænoptera Davidsonii sur les côtes de Californie. Dans l'hémisphère antarctique on reconnait une petite Balé- noptère à 48 vertèbres, sur les côtes de la Plata, de Kerguelen et dans les eaux de la Nouvelle-Zélande. On ne connaît que deux parages où la petite Balénoptère apparait périodiquement : ce sont le détroit de Davis et les Fiords de Bergen. De l’un comme de lautre côté elle n'appa- rait qu’en été. Où se trouve-t-elle pendant le restant de l’année ? Pendant l’été de 1878, les naturalistes du Willem Barents ont fait quelques observations intéressantes sur les Cétacés. M. Sluyter rapporte que, au delà du 60° degré de latitude, ils ne découvrirent plus de Marsouins, mais deux espèces de Dauphins, le D. Steno ? rostralus et le D. (Tursiops) fursio. Le premier n’est pas abondant; l’autre vit par petites gammes, qui disparurent à la hauteur de lile Jan Meyen. A l'ile des Ours et à la côte de la Nouvelle-Zemble ils parurent de nouveau. Ils ! Tuner, Report of the bones of Celacea, THE Z00LOGY OF THE VOYAGE or H. M.S. Challenger, 1880. (183) ont vu une gamme d’une centaine de Beluga. Des Balænoptera rostrata ont fait leur apparition dans ces parages pendant les mois d'été 1. MUSÉES. La Balænoptera rostrata est représentée dans le plus grand nombre de musées, soit par des squelettes complets, soit par des têtes ou des os isolés. On connait aujourd’hui des squelettes de cet animal, prove- nant de la mer Blanche, des îles Loffoden, des côtes d'Islande et du Groënland, des côtes du Labrador et des États-Unis, de la côte de Norvège, de la Baltique, de la mer du Nord, de la Manche et du canal St-Georges, des côtes de Bretagne, du golfe de Gascogne, de la Méditerranée et de l’Adriatique. La ville de Brême en a possédé le premier squelette, qui a été décrit par Albers; après lui, e’est le musée de Hunter, aujour- d'hui le Musée du Collège royal des chirurgiens à Londres, qui est entré en possession du second exemplaire. On en trouve des squelettes dans les villes suivantes : A Aberdeen (Écosse), d’un animal qui a péri en 1870; à Amster- dam, d’un animal qui a échoué dans V’Y ; à Bergen (Norvège) il y en a plusieurs et le Musée en a fourni à divers autres éta- blissements; à Berlin, un squelette des Fiords de Bergen; à Bordeaux, un crâne d’un animal qui a échoué sur la côte de la Gironde; à Bologne, un crâne d’un animal de l’Adriatique (4771); à Boulogne-sur-Mer; à Brest; à Brême, le squelette dont nous venons de parler ; à Bruxelles, le squelette d’un animal pris dans l’Escaut, un autre de la côte du Jutland et un troisième du Cap-Nord; à Breslau, le squelette de 25 pieds de l'animal échoué en 1895 à l’île de Rügen (Baltique); à Buenos-Ayres, le squelette de l'animal capturé sur les côtes de la Plata ; à Cam- 1 SLUYTER, Verslag en Zoologische onderzoekingen gedaan gedurende den tocht van « de Willem Barents » in den zomer 1878, TYDSCHRIFT VAN HET AARDRYKSKUNDIG GENOOTSCHAP, n° D, 1879. (184) bridge (Musée de l’Université), la tête et une omoplate d’un animal qui a péri sur les côtes de l’île d'Islay en 1866, et un squelette complet; à Christiania, un squelette de 16 pieds, d'un animal capturé dans le Fiord de la ville; à Copenhague ; à Édimbourg, une tête de grande taille, d’un animal échoué sur les côtes d'Écosse; à Florence, le squelette de l'individu cap- turé à Villefranche le 18 février 1878; à Gand, squelette d’une femelle capturée près d’Ostende le 10 juillet 1838; à Giessen ; à Gôthemburg (Musée d'histoire naturelle); à Gôtingue; à Greifswald, des os, surtout un occipital, d’un ani- mal échoué en 1845, au mois de mars, près de la ville ; à Halle, squelette de 18 pieds d’un animal échoué en juillet 1824, à l'est du Jutland, provenant du Musée de Meckel ; au Havre, celui d’une jeune femelle capturée à Fecamp; à Hull; à Heidelberg; à Leide, un squelette des Fiords de Bergen; à Londres, au Musée Britannique (squelette du Groënland, de la collection de Brandt et un autre de Ja Tamise)1; au Musée du Collège royal des chirurgiens (squelettes de mâle adulte, de 25 pieds, des côtes de Norfolk, 1862, et d’une jeune femelle du Doggersbank, de 16 pieds, de la collection de Hunter) ; à Lou- vain, squelette du Groënland et une tête séparée, d'origine inconnue, mais probablement de nos côtes ; à Liège, un sque- lette de grande taille provenant des Fiords des environs de Bergen; à Lund (Suède); à Munich; à New-York; à Oxford; à Paris, squelette des Fiords de Bergen, rapporté par Gaïmard, et un autre d’un animal capturé à l'embouchure de la Seine et étudié par Gratiolet; on y conserve un très bon moulage de la jeune femelle échouée à Fecamp en 1885 ; à Rochefort, on conserve le squelette d’un mâle, qui a échoué le 26 août 1835 dans la Charente ; à la Rochelle on trouve divers ossements, sans doute du mâle qui a échoué en août 1835 à Vergeroux; à Rouen ; à Stockholm, Musée royal anatomique de Carolinska Institut; à Stuttgard (squelette des côtes du Labrador); à Upsala ; à Wurzbourg, squelette envoyé par les missionnaires ; 1 From Brandt's collection, dit Gray, Catalogue... (185 ) à Washington, Musée national, la tête de la Balænoptera Davidsonii, de Scammon 1. il existe un grand nombre de fœtus de cette espèce dans divers musées d'Europe, et qui viennent sans doute tous de Bergen. Le Musée de cette dernière ville en possède sept. DESSINS. En 1675 à paru le dessin de la Balæna mysticetus èt d'une Balænoptera, par Martens de Hambourg. Sibbald, dans sa Phalainologianova, a représenté des Balénop- tères avec leurs évents et les plis sous la gorge. Hans Egede en a aussi publié un dessin. A Greifswald, on conserve une peinture faite d’après un individu échoué à l'embouchure du Weser, en mai 1699, et dont le squelette est conservé à la maison de ville de Brême; c’est cet animal que Cuvier a mentionné sous le nom de jeune Rorqual du Nord. John Hunter a publié une bonne figure de cette Balénoptère en 1787, d’après une femelle de 17 pieds, capturée au Doggers- bank. Lacépède en a publié un dessin qui lui a été envoyé par Sir Joseph Banks. Fred. Cuvier l’a reproduit sous le nom impropre de Rorqual Jubarte (pl. XX, fig. 1) 2. Ce dessin figure aussi dans le grand atlas de Goldfuss, sous le nom de Balænoptera boops. Scoresby en publie également un dessin 5. Dans le New-York Museum, de Kay, a figuré, pl. XXX, fig. 1, la Balénoptère qui a péri aux Orcades en 1808. Dans les actes de la Société Linnéenne de Bordeaux, nous en trouvons également un, d’après un individu échoué dans le golfe de Gascogne en août 1835. ? On a new species of Balænoptera. Proceed of the Californ, ACADEMY 0F SCIENCIES not. IV, part. V, Jan. 1875; San Francisco, 1875, p. 269. ? FRep. CuviEr, Mist. nat. de Célacés, pl. XX, fig. 1. 5 ScorEsBy AÀn account of thesarctic reg., L 1, p.485, pl. XI, fig. 2. (186) ’ Rosenthal à également publié celui d’un mâle, qui a été reproduit par Brandt et Ratzeburg dans leur Zoologie médicale (pl. XV, fig. 4). Il existe encore un dessin à la Bibliothèque royale à Bruxelles, provenant de notre confrère le vicomte du Bus, d’après l'animal qui a été tué dans l’Escaut, au mois d'octobre 1865, en amont d'Anvers. On vient de publier un dessin de l'individu pêché en mer par Le Gaulois de Fécamp. Le professeur Hutton a publié, dans les Annals and Magazine of natural history (ser. 4, vol. XIE, pl. XVI), le dessin d’un animal de 16 pieds 2 1/, pouces capturé en octobre 1873 à la Nouvelle-Zélande. Le professeur Julius von Haast a figuré le sternum et un fanon dans les Trans. N. Z. Institute, vol. XIE, pl. I, fig. 1 et 2. Eschricht a figuré un fœtus 1. Fischer à publié un dessin assez grossier d’après un journal illustré qui représente l'animal échoué à S'-Jean-de-Luz. Sars à publié un dessin fait d’après un mâle de 14 1} pieds capturé près de Christiania en septembre 1878. Lesson a donné une bonne représentation de cette Balénop- tère mâle, échouée dans la Charente, le 26 août 1835. Le plus beau dessin est celui que P. Gervais a publié d’après une planche, faite d’après nature, en 1861, et qui est conservée dans les vélins du Muséum d'histoire naturelle de Paris. Le capitaine Scammon a reproduit un bon dessin (pl. VI, fig. 2), sous le nom de Balænoptera Davidsonii. C'est sans doute une Balénoptère de la même espèce, que Anderson a figurée dans Yunnan expedition, pl. XLIV, et dans Anat. and Zoolog. Researches, London, 1878, sous le nom de Sittang Whale ? On conserve à Paris, au Muséum, un modèle en plâtre d’après l'animal qui a échoué en février 1861 sur la côte de Bretagne. ! EscuricaT, Nord. Wallthiere, pl. VI et VIT. (187) PARASITES. On a trouvé divers parasites, d’abord : Le Distoma goliath. Van Ben. 1, qui habite le foie. Eschricht n'avait donné des exemplaires de ce Trématode, et plus tard j'en ai trouvé moi-même dans l'animal qui a péri dans l'Escaut, en novembre 1865. Ensuite le Filaria crassicauda, Creplin, qui vit dans le canal de lurètre ou le corps caverneux. Enfin l’Ascaris angulivalvis ; Creplin l’a observé le premier; Koren en a remis trois exemplaires à Oscar Schmidt; Krabbe pense que c’est le même (Ascaris simpleæx) qui habite le Beluga, PHyperoodon, le Narval et le Lagenorhyneus albirostris 2. Il parait que l’intestin renferme également lEchinorhyncus porrigens, Rud. W a été vu déjà par plusieurs naturalistes. On a trouvé, à diverses reprises sur la peau, des Penella Balænopteræ, sur lesquelles on a trouvé un Cirripède, le Con- choderma virgata. Cette Penella se loge surtout autour des organes sexuels. La Balænoptera rostrata, capturée à Villefranche en 1878 et dont le squelette est conservé au Musée de Florence, héber- geait une Penella. On a trouvé entre la peau et les muscles de cette même Balénoptère, comme dans certains Dauphins, des parasites enkystés, dont la nature n’est pas bien déterminée. ! Bullet. de l’' Acad. royale de Belg., 2° série, 1. V, 1858. ? Bullet. Acad. roy. des sc. danoise, . .. . 1878. BALÆNOPTERA BOREALIS. LITTÉRATURE. Rudolphi. Einige anatomische Bemerkungen über Balæna rostrata; ABHanD. D. KÔNIGL. AKADEMIE D. Wissenscuarr. Berlin, 1820-1821. Lesson, Aisloire naturelle générale et particulière des mammiferes et des oiseaux (Cétacés). Paris, 1828. J. E. Gray, Zoology of the Voyage of the Erebus and Terror, p. 20. W. Lilljeborg, Sveriges och Norges Ryygrodsdjur, Upsala, 1874. Van Beneden ct Gervais, Ostéographie des Célacés, p. 198, 1870. &. Zaddach, Beschreibung eines Finnwales, ARCHIV FUR NATURGE- scHIiCurE, 1875. Paul Gervais, Remarques sur les Balénides des mers du Japon. Comptes rendus ….… novembre 1875, JourNaL DE zo0LoG1e, t. V, p. 1, 1876. Menge, 4, Scelel d. Breitküpfigen l'innwals, Plerobalæna laticeps. Dantzig, Narurr. Ges., 1876, 80. P. Fischer, Sur une Balénoptère boréale, échouée à Biarritz en 1874. Courtes rExpus, 1276, ( 190 ) W. Turner, À specimen of Balænoptera borealis, caplured in the Firth of Forth. JourN. 0F ANAT. AND PHysi0L., VOl. XVI, april 1882. Flower, On a specimen of Rudolphis Rorqual (Balenopt. borealis) lately taken on the Essex coast. Proc. zcoL. Soc., nov. 20, 1885. Guläberg, Sur l'existence de la quatrième espèce du genre Balænoptera dans les mers septentrionales de l’Europe. BuLL. ACAD. ROY. D. SCIENCES DE BELGIQUE, 1884. Guldberg, La Nature, novembre 1885. Alfr.3, Cocks, Notes on the Finwhale fishery of the north European Coast. Tae Zoococsr, vol. 9, p. 107, 1886. Bunker, Bal. borealis at goole. NaturaLisTe, Londres, vol X; ZooLo- cisr, vol. VIE. mobert Collett, On the External Characters of Rudolphis Rorqual (Balænoptera borealis). Proc. zoo. Soc., march and april 1886. (491) HISTORIQUE. Cette espèce a été longtemps confondue avec les autres : sa petite taille, comparativement à celle du Musculus et du Sib- baldii, Va généralement fait prendre pour un animal incom- plètement développé. Grâce aux recherches de M. Guldberg, faites sur les côtes de Finmark, cette espèce est établie aujour- d’hui sur des caractères aussi certains que les autres Balénop- tères. Cuvier, comparant le squelette décrit et figuré par Rudolphi avec celui de la Balénoptère de la Méditerranée, crut que ce squelette provenait d’un animal qui fréquente seul la mer du Nord, et proposa de lui donner le nom de Rorqual du Nord, par opposition au Rorqual qui fréquente la Méditerranée. Lesson, dans son histoire naturelle des Cétacés (1828), admet les trois espèces de Cuvier, et donne le nom de Balænoptera borealis au Rorqual du Nord. C’est ce même animal que Gray proposa, dans le Voyage d'Erebus and terror, de désigner sous le nom de /aficeps. Ce nom n’est pas heureux, puisque le rostre est moins large que celui des autres espèces ; mais Gray avait en vue les os nasaux qui, en effet, sont plus larges que dans la Balænoptera physalus, cest-à-dire du Musculus. On se figure naturellement que le mot laliceps s'applique à l’ensemble de la tête, et par consé- quent au rostre. Quelques années avant sa mort, V. Baer nrécrivait de Dorpat (14-26 juin 1869) : « Dans votre distribution géographique des Balé- noptères, je n'ai pas trouvé l'espèce qui est si commune au cap Nord et au nord de la mer Glaciale. J'ai rapporté moi-même à Saint-Pétersbourg une tête de cette Balénoptère à travers la Laponie. Je vais la faire dessiner et vous envoyer le dessin. Peut-être connaîtrez-vous l'espèce d’après le dessin ». Cette tête appartient sans aucun doute à l'espèce qui nous 14 (492 ) occupe; malheureusement je n’ai pas reçu le dessin que V. Baer me promettait, et je n’ai pu découvrir la tête au Musée de Saint- Pétersbourg. Il parait que depuis longtemps l’espace faisait défaut dans le Musée de l’Académie, et les pièces de grande dimension recevaient difficilement une place convenable. C’est ainsi que le superbe squelette de Balænoptera Sibbaldii, connu sous le nom de Baleine d’Ostende, dont un magnat avait fait cadeau à l'Académie, a été relégué au Jardin zoologique, où tout est exclusivement organisé pour l’amusement du publie. En 1876, M. Menge a fait un travail sur le squelette d’une femelle échouée le 23 août 1874 dans la baie de Dantzig; il la désigne sous le nom spécifique de laticeps. M. Menge donne une description détaillée du squelette et accompagne sa notice de quatre photographies représentant fort bien le squelette. Le professeur Zaddach de Kônigsberg en a donné une description dans les Archives de Wiegmann, avec une figure de l’animal, vu de profil et vu en dessous; mais 1l ne partage pas l'avis de Menge, qui considère cet animal comme apparte- nant à l'espèce Borealis. À propos d’un animal capturé dans le Firth of Forth, le professeur Sir Turner a publié, dans les Proc. roy. Soc. d'Édim- bourg (1881-82), un mémoire comprenant la partie historique complète. Le professeur Flower a communiqué a la Société zoologique de Londres (20 novembre 1883) des observations sur une Balæ- noplera borealis capturée en novembre 1883 dans Crouch-River (Essex) !. Le savant directeur du British Museum a publié un dessin du sternum de cet animal, qui présente un haut intérêt. L'animal est encore jeune. Le squelette en est destiné au British Museum. Une nouvelle capture d’un individu de cette même espèce a été faite, en septembre 1884, sur les côtes de Lincolnshire et, en décembre de la même année, un mâle a été pris aux Orcades. J. Muller avait attiré l'attention sur la bifidité de la première ! Proc. Zool, Soc., novembre 1883. (193 ) côte du squelette de Berlin, disposition à laquelle plus tard le D: Gray avait attaché tant d'importance. On peut dire que dans cette espèce la première côte a une tendance particulière à devenir double ; mais on ne peut pas faire un caractère spéci- fique de cette disposition anormale et en tout cas accidentelle. Nous avons montré que, dans plusieurs Cétacés, la côte de la septième cervicale correspond avec l’absence de lapophyse transverse inférieure de cette vertèbre. Le professeur Sir Turner a publié une notice fort intéressante sur ce sujet 1, MM. Chr. Aurivillius et C. Forsstrand sont allés, pendant l'été de 1877, étudier les Cétacés à l’établissement de M. Sven Foyn ; ils en ont rapporté beaucoup de matériaux. Celui qui a le plus contribué à nous faire connaître cette espèce, c'est M. Guldberg, conservateur au Musée zootomique de l’Université de Christiania. M. Guldberg a communiqué à l'Académie de Bruxelles, pendant son séjour à Liège pour y suivre les travaux du Laboratoire de zoologie, une notice, ren- fermant plusieurs observations précieuses qu’il a recueillies sur les côtes de Finmark, pendant les mois d'été de 1883. M. Guldberg croit que c’est seulement en 1878 que l'attention a été fixée sur la Balænoptera borealis, et que les premiers travaux sur cette espèce n’ont été publiés qu’en 1881. Nous ferons remarquer que, déjà du vivant d'Eschricht, notre atten- tion a été fixée sur cette Balénoptère; Eschricht m'avait cédé un squelette vers 1858, squelette que j'ai abandonné à mon tour à M. Du Bus, pour le Musée royal d'histoire naturelle de Bel- gique 2. Tandis que la pêche au nord de la Norwège a principalement en vue la Balænoptera Sibbaldii, elle s’est exercée en 1885 { Cervical ribs, and the so-called bicipital ribs in man, in relalion Lo corresponding structures in the Cetacea. JOURNAL OF ANATOMY AND PHysi0- LOGYy, vol. XVII. 3 Nous avons fait mention, en 1868, de ce squelette, à cause de la curieuse conformation de sa première côte, Bullet. de l’Acad. royale de Belg, 2° série, t. XXVI, 1868. (19) presque exclusivement sur la Balænoptera borealis. La B. Sib- baldii n'y a paru qu'en fort petit nombre cette année. On a cap- turé presque exclusivement des Borealis, et un établissementest aujourd'hui érigé à Drammen, par la Christiania preserving Ce, pour la préparation de la chair de cette espèce comme aliment !. On tire également partie des mandibules, dont on fait des aiguilles à tricoter. M. Robert Collett a publié, en 1886, un travail intéressant sur les caractères extérieurs de la Balænoptera borealis, et a accompagné sa Notice de deux planches représentant le mâle et la femelle 2. Après l'exposé des caractères extérieurs, R. Collett décrit sommairement les caractères distinctifs des quatre espèces de Balénoptères qui hantent le nord de l'Atlantique. Ce travail renferme des détails fort intéressants sur les carac- tères distinctifs propres à cette espèce; 1l fait connaître ses parasites et ses commensaux, sa capture, ses habitudes, son âge adulte et fœtal, et même ses monstruosités. SYNONYMIE. Balænoplera borealis, Lesson. Balæna rostrata, Rudolphi. Borqual du Nord, Cuvier. Sibbaldius laliceps, Gray. Langrür où Saaiwahl, Seichval, Seje, Cadwhale, Sildehval, des pêcheurs finmarkois. CARACTÈRES. Les individus qui échouent atteignent communément de 30 à 40 pieds; cette dernière longueur est même rarement atteinte. * Les Chinois aiment la chair des Cétacés à fauons, et préfèrent la chair des Baleines véritables à celle des Balénoptères. ? On the External Characters of Rudolph s Rorqual (Balænoptera borea- lis). Proc. Zoo. Soc., 1886, p. 245. (195) Les fanons sont noirs avec les barbes blanches et soyeuses. La nageoire dorsale est élevée, courbée et pointue. La nageoire pectorale est noire à sa face externe, blanche à sa face interne, pointue à son extrémité. En 1885, on a fait observation que les nombreux individus capturés sur les côtes de Finmark, ont les nageoires pectorales noires des deux côtés. Les flancs sont couverts de taches blanches (spotted with while) et le dessous blanc (with a faint reddish tinge). Si l’on tient compte de la taille, du nombre de vertèbres (55 ou 56), de la couleur des fanons, de la forme de latlas et des autres cervicales, on ne peut confondre cette espèce avec aucune autre Balénoptère. La Balænoptera rostrata a quarante- huit vertèbres, les fanons jaunes, et ne dépasse guère 30 pieds; la Balænoptera musculus a plus de 40 pieds et a toujours les fanons foncés avec des stries blanches, et près de soixante ver- tèbres. La Balænoptera Sibbaldii a plus de 80 pieds, des fanons noirs et fort larges à la base. La Balænoptera Schlegelii des îles de la Sonde, ainsi que la Balénoptère qui a été envoyée du Japon, ont si bien les caractères de notre Balænoptera borealis, que MM. Flower, Turner et Paul Gervais ont été frappés tous les trois de cette ressem- blance. R. Collett donne la mesure en longueur de divers individus : les six imdividus qu’il a mesurés ont de 45 à 49 1% pieds. I] signale même un individu de la longueur de 52 pieds. I donne de 35 à 37 pieds aux plus petits individus qu’il a vus pendant l'été 1885 sur les côtes de Finmark (14.7 mètres). Le squelette de Berlin n'indique qu’une longueur totale de 31 à 32 pieds; celui de Leyde, de 32, comme le squelette du cap Nord, qui est à Bruxelles. Sars en a même vu aux Iles Loffoden dont la taille varie entre 20 et 30 pieds; mais ce sont de jeunes individus 1. # G. O0. Sar4, Om individuelle variationer hos Rorhvalerne. Vidensk. Selsk. Forhandlinger for 1868. (196 ) M. Flower a étudié le squelette de Leyde, et trouve une lon- gueur de 29,7 pieds, en ne tenant pas compte de l’espace inter vertébral. Il provient de l'animal capturé au Moniken-Dam dans la Zuyderzée. La longueur moyenne des individus capturés pendant le mois de juin sur les côtes de Finmark en 1885, était de 45 pieds. Il faut conclure de cette différence detaille, ou qu'il y a deux races, quiprennent peut-être chacune une direction différente, ou, ce qui paraît plus probable, que les individus qui viennent se perdre dans la mer du Nord, sont tous jeunes. ORGANISATION. M. Collett a compté dans une femelle adulte, de chaque côté, le long de la mandibule, onze bulbes pileux avec des poils de 10 millimètres, et derrière eux encore deux autres, ce qui fait vingt-six en tout. Dans un fœtus de 1 1/, mètre, il existait de nombreux poils, mais très courts. Dans un autre fœtus de 2.50 mètres, les : poils formaient trois rangs le long de la mandibule, la supé- rieure et l’inférieure comprenant trois poils, celle du milieu, onze, ensemble dix-sept poils de chaque côté, A la mâchoire supérieure d’un fœtus, il n’y avait que sept poils placés sur un rang, les deux premiers plus éloignés lun de l’autre que les suivants. Les fanons de l'animal dont le squelette est à Édimbourg et qui a 37 pieds de long, were black, striped with grey and white, andthe hairs projecting from the lower free border were greyish white (Turner). M. Collett a publié des détails fort intéressants sur les fanons qu’il a observés sur les lieux de la capture de ces animaux. Les deux rangées de fanons s'unissent en avant sur la ligne médiane ; Gaimard avait déjà figuré cette disposition. Les fanons sont noirs comme ceux de Sibbaldii, mais, en dedans et en avant, ils sont d’un jaune pâle. Les barbes sont extraordinairement fines et toutes blanches. La forme des (197) fanons, surtout des derniers, les rapproche de ceux des vraies Baleines par leur longueur et leur étroitesse à la base. À ne considérer que les fanons, cette espèce se trouverait entre les Baleines et les Balénoptères. Les fanons frais ont une couleur jaunâtre (horngelb), dit Zaddach, mais desséchés, ils sont en partie d'un gris bleuâtre et même noirs. Si nous passons en revue les os du squelette, nous remar- quons que cette espèce se distingue par la largeur des os nasaux ; par l'os frontal, qui n’est pas plus large à sa base qu’au- dessus des orbites; par les vertèbres, qui sont proportionnel- lement petites et au nombre de cinquante-cinq ou cinquante- six; par les os en général, qui sont délicats et moins spongieux que dans les autres espèces; enfin par la première côte qui a, comme nous l’avons déjà dit, une tendance particulière à la bifidité, Cette observation, faite d’abord par 3. Muller, a con- duit plus tard le docteur Gray à établir des subdivisions mul- tiples, tant parmi les Baleines que parmi les Balénoptères. La caisse tympanique a la plus grande ressemblance avec celle de la Balænoptera musculus, en différant toutefois par se forme aplatie et par ses extrémités pointues. L'individu dont parle Zaddach a la troisième vertèbre cervi- cale unie à la quatrième; ce n’est guère que dans la Balænop- tera rostrata que l’on a vu jusqu’à présent ces coalescences. La réunion de certaines vertèbres cervicales a été observée également par Guldberg. Par cette tendance des cervicales à la soudure, comme par les fanons, cette Balénoptère se rapproche des vraies Baleines. Dans un squelette du Musée de Leyde, provenant d’un ani- mal échoué près du Moniken-Dam (Zuyderzée), et qui à été décrit par Schlegel, nous trouvons la colonne vertébrale divisée en : sept cervicales; treize dorsales; seize lombaires, et vingt caudales ; en tout : cinquante-six. Nous avons trouvé, dans l’exemplaire qui est à Bruxelles, à droite, une côte supplémentaire, attachée par des parties molles à la première côte dorsale, et à gauche, une côte (198) soudée. Le squelette provient d’un jeune animal 1 capturé sur les côtes de Finmark, et dont les ligaments étaient encore tous en place au moment de son arrivée à Louvain. La première côte est également bifide des deux côtés dans le squelette de Leyde, provenant du Moniken-Dam, et elle s'articule avec la dernière cervicale et la première dorsale. La Balænoptera borealis, de la côte d’Essex (1883), a la pre- mière côte bifide des deux côtés, une partie articulée à la pre- mière dorsale, l'autre aux apophyses de la dernière cervicale. La bifidité de la première côte a été reconnue dans presque tous les individus, excepté dans celui qui a été décrit par le professeur Sir Turner (Journ. anat. et physiol., avril 1889). Le squelette de Dantzig, décrit par Menge et par Zaddach, montre une petite côte rudimentaire de forme triangulaire. M. Flower a observé sur un Tursiops tursio deux côtes, chacune de 52 millimètres de long, articulées aux apophyses transverses de la septième cervicale. Nous connaissons aujourd'hui le sternum de quelques sque- lettes, ainsi que les dernières vertèbres, qui manquaient à celui dont nous avons donné la description dans notre ostéographie. Le sternum est élargi comme celui du Musculus, mais latlas et le bassin ont des caractères particuliers et res- semblent beaucoup à atlas et au Bassin de la Balénoptère de Scheveningen, qui est au Musée royal de Bruxelles. Dans le squelette de Leyde, le sternum est plus large que long et affecte la forme d’un disque à contour irrégulier. M. Flower à publié une figure intéressante du sternum de Panimal qui a échoué en 1883 (Proc. de la Société zoologique de Londres). I est petit, en partie cartilagineux, long de 7 pouces et un peu moins large que long. La première côte de ce squelette est également biceps. Les deux os du bassin ne se ressemblent pas, dit Guldberg; celui de droite à 0,250 de largeur ; l’autre est renversé en S et un peu tordu; la largeur est de 0,220. 1 Bullet. de l’'Acad. roy. de Belq., 2e série, & XXVI, pl. I. ( 199 ) D’après le professeur Struthers, le trapezoïde du carpe manque dans la Balænoptera borealis, tandis qu'il existe dans la Balæ- noptera musculus 1. On connaît quelques fœtus de cette espèce. En 1885, le 28 juin, on à trouvé une femelle pleine avec un fœtus de 5 1} pieds anglais (Cocks). Le marquis de Wavrin a rapporté de Vadsôü, en 1885, trois fœtus, un de 1,96, un autre de 1",87 et un troisième de 1",27. M. Guldberg fait mention de quatorze fœtus, presque tous recueillis au mois de juillet; ils ont de 1%,550 à 3",03%. Si l’on en juge par la taille des adultes, le Baleineau doit avoir 4 mètres en naissant. La taille moyenne de l'adulte complètement développé est, comme nous l’avons dit plus haut, de 15 mètres environ. MOEURS. En général cette espèce est rare et, dans les eaux visitées par les Balénoptères, on n’en trouve qu’en très petit nombre au milieu des autres. Dans les individus capturés sur les côtes de Finmark, on a trouvé l'estomac plein de Crustacés, comme celui de la grande espèce. Nous supposons qu'il y a une erreur dans l'observation de Pindividu qui aurait renfermé 600 gades (Dorsche). Il se nourrit, comme nous l'avons dit déjà, d'un Thysano- pode (Euphausia inermis); en 1885, M. Collett n’a trouvé dans Pestomac que le Copépode connu sous le nom de Calanus finmarchicus, Mull. La chair de cette espèce est si différente de celle des autres Balénoptères, dit M. Guldberg, qu'on la conserve pour la table; il y a une pêche particulière près du cap Nordyd’où l’on expédie la chair sous forme de boudins. Les mandibules sont travaillées sur les lieux en aiguilles à tricoter, dit M. Cocks. ! Report, Brinsh Association, 1885, p. 1056. ( 200 ) DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. La Seichwal n'arrive qu’en juin sur les côtes de Finmark. Le meilleur moment de la pêche de cette espèce est du milieu de juin jusqu’à la première moitié de juillet (Guldberg;. Plusieurs baleiniers assurent qu'habituellement elle dispa- raît quand les autres espèces se montrent. Le dernier individu de la saison exceptionnelle de 1885 a été tué le 28 août. Collett dit qu'on en a vu encore le 8 sep- tembre. D’après les observations recueillies sur les lieux de la pêche, cette Balénoptère fait ordinairement son apparition à la fin du mois de mai, à la distance de 10 à 15 lieues des côtes de Finmark, et n'entre dans les baies que pendant le mois de juin et de Juillet, Son apparition correspond avec celle du Gadus virens, ce qui lui a fait donner le nom de Seichval (Guldberg). Elle arrive périodiquement au cap Nord venant de l’ouest, et, jusqu'en 1855, elle n'avait guère dépassé le cap Nord. Cette année, les Balænoptera Sibbuldii faisaient défaut, et les Balænoptera borealis sont arrivées en grand nombre, continuant leur route jusqu’au Varanger-Fiord. Malmgren cite cette espèce sur les côtes ouest du Spitzhberg et à la Nouvelle-Zemble; Brown ne croit pas à sa présence sur la côte ouest du Groënland. Elle fréquente aussi la mer Blanche. L'illustre V. Baer en a envoyé un squelette à St-Pétersbourg. Der von Baer mityebrachte Schädel gehürt Balænoptera laticeps zu, m'écrivait Brandt, le 2 janvier 1872. M. True signale la présence de la Balænoptera borealis, sous. le nom de laticeps, sur les côtes des Etats-Unis d'Amérique. Le capitaine Scammon distingue trois Balénoptères dans le Pacifique, l’une sous le nom de Balænoptera sulfureus, c’est notre grande espèce, la Balænoptera Sibbaldü; Vautre la Balæ- ( 204) noptera velifera, est bien notre Musculus, et sous le même nom il réunit sans doute aussi la Borealis. La troisième espèce, à laquelle il donne le nom de Balænop- tera Davidsoni est notre Rostrata. La Balænoptera borealis est également représentée dans la mer du Japon. Le Muséum d'histoire naturelle de Paris en a reçu un squelette complet, accompagné de ses fanons. Le Musée de Leyde en a reçu un squelette des îles de la Sonde. Il a été rapporté à une espèce nouvelle sous le nom de Balæ- noptera Schlegelii. M. Flower, en étudiant les Cétacés du Musée de Leyde, a par- faitement reconnu les affinités de cette nouvelle espèce avec la Balænoptera borealis. Si ce n’était l’origine de ce squelette, je croirais avoir affaire à une Balænoptera borealis, dit-il. Le pro- fesseur sir Turner fait remarquer que les côtes de ce squelette des Iles de la Sonde correspondent à celles de la Balænoptera borealis. Paul Gervais avait reconnu également que le squelette du Muséum, provenant de la mer du Japon, ressemble beaucoup à celui de Leyde, connu sous le nom de Balænoptera Schlegelii. Nous ne serions pas surpris de voir un des squelettes, envoyés de l’île Formose par le consul anglais, M. Swinhoe, rapporté également à cette espèce. Nous venons de voir que pendant longtemps la Balænoptera borealis ne dépassait pas le cap Nord; c’était donc à l’ouest qu’on péchait principalement cette espèce. En 1885 c’est la Balænoptera borealis qui a été le plus abondante sur toute la côte de Finmark. Les baleiniers prétendent que le Crustacé qui forme la pâture ordinaire des Sibbaldii faisait défaut cette année. En 1883 il y avait à l'Ouest cinq baleiniers qui n’ont guère capturé que des Balænoptera borealis ; cette même année dix-neuf baleiniers ont capturé à l’est de ces mêmes parages 406 Balénoptères de différentes espèces, dont 50 Megaptera, 90 Borealis, et le restant, moitié Balænoptera Sibbaldii et moitié Balænoptera musculus. Le nombre le plusélevé par bateau était de 40. Guldberg pense que la Borealis est plus méridionale que les autres espèces ; nous pensons, au contraire, que les Balænoptera musculus et rostrata sont les plus méridionales et que les deux autres sont au contraire les plus boréales. Les Balænoptera musculus et rostrata sont les seules espèces que l’on ait vues jusqu’à présent dans la Méditerranée. Ce n’est qu’en 1878 que l'attention des baleiniers fut attirée sur cette espèce, dit Guldberg, et il pense que c’est en 1881: que les premiers exemplaires furent pêchés. Depuis 1882, on en a pris tous les ans à la station de Sôrvär (10° 1) N.-E.), près de Hammerfest. L'année 1884, sur 35 Balénoptères de différentes espèces, on a compté, d'après un relevé, 3, d'après un autre relevé, » Borealis. En 1885 leur abondance a été telle qu’on en a capturé 750, pendant la campagne de l’année 1; pendant le mois de juin, on en a capturé jusqu'à 4 par Jour. M. Guldberg nous apprend que, en 1886, il y a eu peu de Balænoptera borealis, mais plus de Balænoptera Sibbaldii que l'année précédente. On a pris en tout 932 Balénoptères et Mégaptères, la plupart des Balænoplera musculus. On connaît plusieurs individus qui sont venus échouer sur les côtes des mers d'Europe : un des premiers dont les annales fassent mention, est celui qui est venu à la côte en 1811, dans la Zuyderzée, près de Moniken-Dam, et dont le squelette est conservé au Musée de Leyde, Van Breda en possédait le dessin. 1 O0. H. Cocxs, The Finmvhale fishery of 1855 on the North european coast. Tue ZooLocisr, april, 1886. ( 203 ) En 1816 un autre a pénétré également dans la Zuyderzée. Le 21 février 1819, une Balénoptère a échoué sur la côte du Holstein et son squelette est conservé au Musée de Berlin. Rudolphi à décrit ce squelette sous le titre : Einige anato- mische Bemerkungen über BALÆNA ROSTRATA 1. C'est cet animal que Cuvier a regardé ensuite comme Balé- noptère du Nord et auquel il a donné le nom de Rorqual du Nord, par opposition à la Balænoplera musculus, qu'il croyait propre à la Méditerranée. Cest le type de la Balænoptera borealis. Les individus qui se sont perdus n’ont guère plus de 28 à 29 pieds de longueur, mais on compte au moins d4 ver- tèbres. C'était sans doute une Balænoptera borealis qui est venue échouer près de Rugen en 1825, et que Rosenthal a nommée Rostrata species major.” Le 5 avril 1826, les pêcheurs de Wyk-aan-Zee trouvèrent en mer, flottant à une lieue de la côte, le corps d’une Balénoptère femelle, dont Schlegel a donné une description, accompagnée de deux planches représentant ce Cétacé, vu par ses trois faces 2. En 1840, un individu a été capturé à Charmouth, Dorsets- hire. Était-ce un Borealis ou un Musculus? Le squelette est perdu. à En juin 1861, à l’ouest de Finmark, dans Altenfiord, un individu de 50 pieds a échoué; son squelette est au Musée de Bergen. Entre Bidart et Biarritz (Basses-Pyrénées), un jeune mâle de 7 à 8 mètres a échoué le 29 juillet 1874. Son squelette est con- servé au Musée de Bayonne 3. Près de Bergen, dans Skogsvaag, a échoué en juillet 1883 un ! Mém. de l’ Acad. des sciences de Berlin, 18 20,,.. * SCHLEGEL, Verhandeling over eenen, in het jaar 1826, aan de Noord- hollandsche kust gestranden vinvisch. 5 Fiscner, Comptes rendus de l'Acad. des se., décembre 1876. — Revue scientifique, janvier 1877, p. 688. ( 204 ) animal, apparemment de cette espèce, dont le squelette n’a pas été préparé 1. Le professeur Sars fait mention d’une Balénoptère de cette espèce, ayant 30 pieds de long, et qui s'est fait capturer le 45 juin 1865 aux îles Loffoden 2. Dans ces dernières années, trois individus ont été capturés sur les côtes d'Angleterre ; le premier dans le Firth of Forth en septembre 1872; son squelette est conservé au Musée anato- mique de l’Université d'Édimbourg. En novembre 1883 une autre capture est faite sur les côtes d’'Essex; M. Flower en à fait part à la Société zoologique de Londres. Le squelette a été acheté pour le British Museum 3. On vient de voir échouer au mois de septembre dernier (1884) un autre individu sur les côtes de Lincolnshire, et dont le squelette est destiné à un Musée d'Australie. En septembre 1884, on en a vu périr un à l'embouchure du Humber. Un mâle de 36 pieds a été capturé en décembre, également en 1884, dans la baie de Widewall (Orcades). Le squelette a été exhibé à l'Association Britannique de 1886, à Aberdeen #. Le 23 août 1874 a péri, dans la baie de Dantzig, une Balé- noptère dont M. Menge a fait connaître le squelette. Du 17 au 48 août on avait vu l’animal dans la baie; les trois derniers coups de lance, donnés dans les poumons, le foie et l'estomac, l'ont achevé. M. Menge a accompagné sa notice de quatre photographies, représentant le squelette complet et les divers os séparément. La longueur est de 34 pieds 10 pouces. Il reste aux yeux de quelques naturalistes, des doutes sur la nature de cette Balénoptère. Nous trouvons aussi quelques exemples de captures faites de l'autre côté de l'Atlantique. Dans la baie de Mob Jack (Virginie), 1 Lettre de Koren à Lilljeborg. NDeskiivelse p25. 5 Proc. Zool. Soc., novembre 1883. 4 Report of the british Association, 1886, p. 1053. ( 203 ) en mai1866,on a pris un Mysticète qu’on a désigné sous le nom de Sibbaldius tuberosus, et qui paraît appartenir à cette espèce, Je crois que les os en sont conservés au Musée de Philadel- phie. L’animala été décrit par le professeur Taliaferro. M. Cope croit que ce Cétacé est une Balænoptera de l'espèce qui nous occupe !. MUSÉES. Le squelette de cette espèce était encore excessivement rare, il y a quelques années; il sera bientôt aussi répandu que celui de la petite espèce, grâce à la pêche des Balénoptères sur les côtes de Finmark et de leur extrême abondance pendant Pété de 1885. La tête de Balænoptera, rapportée par v. Baer de la mer Blanche pour le musée de S'-Pétersbourg, appartient, d’après le Dr Brandt, à la Balænoptera borealis. Le Musée de l'Université de Berlin possède depuis long- temps le seul squelette connu, provenant de l'individu échoué en 1819 sur les côtes du Holstein et décrit par Rudolphi. Le Musée de Leyde possède le squelette de l'animal échoué à Moniken-Dam. On fait aussi mention d’un squelette au Musée de Leyde, provenant d’un Jeune individu échoué dans la Zuyder- zée, vers 1816, et qui a été acheté par un marchand d'huile d'Amsterdam. Les deux apophyses transverses de l’axis ne sont pas jointes. La première côte est biceps. Les caractères de ce squelette ont été donnés par le professeur W. Flower 2. Le Musée de Bergen possède deux squelettes, un des îles Loffoden, donné par le D' Daniellsen, l’autre d’un animal échoué dans le voisinage de Bergen, en juillet 1863. Le Musée royal de Bruxelles à fait l’acquisition d’un sque- lette préparé au cap Nord et que Eschricht nous avait cédé. LProceed...... Acad., 1866, n.8- ? Traduction du mémoire de Lilljeborg sur les Cétacés des côtes scandi- naves. ( 206 ) Nous avons vu, au Musée anatomique d'Édimbourg, des ossements fort intéressants d’un animal capturé dans le Firth of Forth. Le Musée du Collège royal des chirurgiens à Londres ren- ferme divers os d’un animal de taille ordinaire, provenant des côtes d'Angleterre; parmi eux nous avons remarqué une pre- mière côte bifurquée, fort large, du côté du sternum surtout, ainsi qu'un atlas et un axis provenant d’un animal bien adulte. Au British Museum on conserve le squelette de Panimal qui a été capturé dans la rivière Crouch, en 1883 1. Si je suis bien informé, le squelette de Panimal capturé vers ia même époque, également sur les côtes est d'Angleterre, a été acheté pour un musée d'Australie. Le Musée de Leyde possède un squelette envoyé de Java et que M. Flower n'aurait pas hésité à rattacher à Pespèce qui nous oceupe, S'il ne venait pas de ces parages. Il est connu sous le nom de Balænoptera Schlegeli. Le Muséum de Paris a reçu un squelette du Japon qui se rapproche, par tous les caractères tirés des os, de la Ealænop- tera qu'on a nommée Schlegelii. I a de 11 à 12 mètres de longueur, et la tête a la même dimension que celle de notre Balænoytera borealis. Au Musée de Christania, M. Guldberg a déposé un fœtus de 4n,355, dont il a donné la description dans les Bulielins de l'Académie Ce Bruxelles (janv. 1884). Le mémc Musée renferme un crâne, une omoplate, une troisième cervicale, les os du bassin, los tympanique. M. Guldherg est en possession des trois premières cervicales d’un animal très vieux, capturé près du cap Nord (Fufjord). Ces trois vertèbres sont soudées par leur bord inférieur, tout en laissant un certain espace entre le corps des vertèbres. Nous trouvons un squelette complet au Musée de Dantzig 1 List of the specimens of Cetacea in the Zoological department of the British Museum. London, 1885. ( 207) dont le crâne est photographié. Il provient d’un animal échoué dans la Baltique. A Bayonne on trouve le squelette de l’animal capturé à Biarritz, en juillet 1874; 1] a été signalé par le D" Fischer 1, M. Gerrard, à Londres, est, au moment de mettre cette page sous presse, en possession d’un squelette provenant d’un animal qui a échoué dans la Tamise, près de Tilbury, au mois d'octobre dernier (1887). Le Musée de Cherbourg est en possession de sept fanons d’un animal de cette espèce, que je croyais d’abord devoir rap- porter à la Balænoptera Sibbaldii à cause de leur couleur noire luisante; je n’avais pas remarqué d’abord les barbes blanches. On ne connaît rien de positif sur leur origine. Peut-être ont ils été apportés par un des navires de l’État, qu’on envoie au Nord protéger la pêche d'Islande : la corvette La Recherche à été envoyée en 1834 à la recherche du brig La Lilloise. Plusieurs Musées du Nord ont des fanons de cette espèce; nous en avons à Louvain d’un jeune animal et d’un animal adulte que nous devons à M. Guldberg, et nous en possédions un depuis longtemps, qui nous avait été envoyé par le capi- taine Jouan. DESSINS. Cette espèce a été rarement représentée; nous en trouvons un dessin dans Brandt, Medicinische Zoologie (1827-1834), planche XV, figure 3, dessin qui a été exécuté par Von Mathiesen en 1819, à Hambourg, d’après l'animal échoué sur les côtes du Holstein; le squelette est au Musée de l'Université de Berlin. C’est la même Balénoptère qui a été décrite par Rudolphi et que Cuvier avait confondue avec les autres espèces sous le nom de Balénoptère du Nord. ! Comptes rendus, 27 décembre 1876. et Journal de Zoologie, vol. V, p. 462, 1876. TouE XLI. 15 ( 208 ) Le professeur Van Breda possédait le dessin de l'animal qui a été capturé en 1811 dans la Zuider-Zee. Nous ne savons entre les mains de qui il se trouve aujourd’hui. Le Dr Fischer a publié un croquis, fait par MM. de Folin et E. Moreau, d’un jeune mâle qui est venu à la côte, entre Bidart et Biarritz (Basses-Pyrénées), en 1874. Sars en à publié un dessin d’après un animal des îles Loffoden. Le D' Guldberg m'a montré un dessin fait grossièrement sur place au cap Nord ; 1l reproduit la forme du corps, mais sans la queue. R. Collett vient de publier un beau dessin du mâle et de la femelle encore en chair. L'individu échoué dernièrement dans la Tamise a été pho- tographié. Le squelette et la tête surtout ont été dessinés plusieurs fois. Nous trouvons d’abord Fun et l’autre dans le Mémoire de Rudolphi, et Cuvier n’a fait que reproduire le dessin de la tête, dans ses Recherches sur les ossements fossiles. Brandt et Ratzeburg ont ensuite reproduit le dessin du sque- lette de cette espèce, comme plus tard Pander et d'Alton. La même tête avec la première côte ont été reproduites encore par Gray et plusieurs autres naturalistes. Nous avons inseré un dessin du squelette dans l'Ostéogra- phie que nous avons publiée avec la collaboration de Paul Gervais, planche X et XI, sous le nom de Balænoptera laticeps. PARASITES. Les fanons, surtout ceux du milieu, se couvrent de Crustacés Copépodes en prodigieuse quantité. On trouve d’un côté des jeunes en voie de développement, et de l’autre côté des adultes, parmi lesquels nous avons vu des femelles portant leurs œufs dans des ovisacs de forme ovale. Ce parasite ou, pour mieux dire, ce commensal, puisqu'il ne peut se nourrir aux dépens ( 209 ) de son hôte, a été décrit et figuré dans les Mémoires de l’Aca- démie de Stockholm {1879)sous, le nom de Balænophyllus uni- setus, par M. Aurivillius. Nous l’avons trouvé en abondance sur des fanons que M. Guldberg a bien voulu nous donner. Ce même Balænophyllus vit aussi sur les fanons de la Balæ- noptera Sibbaldi. M. R. Collett a trouvé dans l'intestin de tous les individus qu'il a ouverts, des milliers d'Échinorhynques, qu'il rapporte à deux espèces différentes : l’une à l'Echinorhyneus porrigens, l'autre à une espèce voisine de lEchinorhyncus brevicollis, décrite par Malm en 186%. M. Collett suppose que ce dernier Échinorhyncus est nouveau, qu'il est introduit par une pâture que la Balénoptère prend dans une autre saison et probable- ment dans d’autres parages. M. R. Collett lui donne le nom de Echinorhyneus ruber ; il publie une bonne figure de animal, de grandeur naturelle, et du rostre grossi. M. le marquis de Wavrin a arraché de la peau d’une Balæ- noptera fraichement capturée sur la côte de Finmark, que nous supposons être la borealis, un parasite qui ne peut être qu’une Penella, d’après la description qu'il nous en a donnée. BALÆNOPTERA MUSCULUS. LITTÉRATURE. Van Beneden, Votice sur une Baleine prise près de l’île Vlicland, et dont le squelette est monté au Jardin royal de zoologie d’ Anvers. BuLLer. DE L'ACAD. ROYALE DE BELGIQUE, t. XXIV, 1857. Paul Gervais, Sur la Baleine de la Méditerranée. BuLrer. DE L’ACav. ROYALE DE BELGIQUE, 2° série, t. XIV. D' Murie, On the anatomy of Physalus antiquorum. Procsen. ZooL. Soc., 1865, p. 206. VW. H. Flower, Observations upon a Fin-whale (Physalus antiquorum, Gray) recently stranded in Pevensey Bay. Proc. Zoo. Soc. of London, novembre 1865, G. 0. Sars, Beskrivelse af en ved Lofoten indbjærget Rohrval Balæ- noplera musculus. SOERSKILT AFTRYKT AF VID-SELSKABETS FORHANDLINGER for 1865. Chev. Prof. w. biorio, Z{ Celaceo di S. marinella. ATri DELL’ ACCADEMIA PONTIFICA DEI NUOVI LINCEI, AS66. Malm, Om cit à Zoologiska Rick:museum Skelett af Balænoptera mus- culus frän Finmarken. OrversiGr Ar KonGt. VETENSK. AKAD. FÜnnaNDL., 1868. WW. Hi. Flower, noles on four specimens of the common Fin-Whale (Physalus antiquorum, Gray; Balœænoptera musculus, Aucr.), stranded on the south coast of England. Proc. Zoo. Soc. or Lonpox, december 1869. p &ou WA } LM (22) Doùmet-Adanson, Vote sur le Rorqual, capluré aux environs de Palavas, le 23 septembre 1870. ANN. Soc. D'HORTICULTURE ET D'HIST. NAT. pe L'HérauLr, Montpellier, 1870. Van Boeneden, Mémoire sur une Balénoptère, capturée dans l'Escaut. Mém. AcaD. ROYALE DE BELGIQUE, 1871. . Thom. Dwight, Description of the Balænoptera musculus. ME. oN THE Boston SOCIETY OF NATUR. HisTORY, VOI. ÎI, part. If, n° 11, 1871. Fried. Braeutigam, Eïinige Zoologisch-Zootomische Beiträge zur Walthierkunde. INauG. DisserTATIioN, Berlin, 1874. Van Heneden, Une nouvelle Balænoptera rostrata dans la Méditer- rance. BULLETIN DE L'ACADÉMIE, t. VIII, 1884. Yves de Lage, Histoire de la Balænoptera musculus, échouée sur la plage de Langrune. ARCHIVES DE ZOOLOGIE EXPÉRIMENTALE, 1886. + éditées ht à (243) HISTORIQUE. La Balænoptera musculus est la Balénoptère la plus com- mune : elle échoue sur les côtes d'Europe depuis la Laponie jusqu’au fond de la Méditerranée. Elle est aussi la plus anciennement connue : Aristote parle d'elle sous le nom de Mysticetus ; 1 lui met dans la bouche des poils qui rappellent, dit-il, les soies du porc, ce qui ne peut s'appliquer qu’à un Cétacé à fanons. Pline cite les paroles d’Aristote et donne à l'animal le nom de Musculus, nom que cette espèce porte généralement aujour- d'hui. Dans son Systema naturæ, Linné a réuni les observations faites sur ces animaux tant par les naturalistes que par les baleiniers et les voyageurs. Mais comme on ne possédait point de squelettes dans les Musées et que les descriptions laissaient beaucoup à désirer sous le rapport de l’exactitude, il n’est pas possible de dire si le naturaliste suédois a appliqué le nom de Musculus à l'espèce de Balénoptère qui nous occupe. D'ailleurs, si Linné s'était rendu au Groënland, il aurait eu de la peine à reconnaitre lui-même les animaux auxquels il avait donné des noms. Un élève de Linné, Fabricius, a eu l’occasion d'étudier les Cétacés qui vivent sur les côtes de Groënland ; mais trop con- fiant dans la science de son maître, il a voulu se servir des noms linnéens pour désigner les animaux qu’il connaissait. Il en est résulté une certaine confusion, qui heureusement touche à son terme. On connaît aujourd’hui positivement les espèces que Fabricius a dû voir sur place; mais on est loin d’être d'accord sur celles que Linné n’a connues que par des descrip- tions incomplètes et souvent erronées. Ce qui montre combien nos connaissances sur la structure des Cétacés étaient peu avancées, c’est que, en 1835, Vrolik disait, dans sa Notice sur l'anatomie d’une Balénoptère, « si on (214) examine attentivement les ouvrages antérieurs de Hunter, de Camper et de Cuvier, il ne peut y avoir de doute que tout notre savoir ne va quère plus loin que le squelette, le larynx, l'œil et l'oreille. » Ce sont en effet les parties que Pierre Camper avait étudiées. Les naturalistes sont d'accord aujourd’hui pour conserver le nom de Musculus à l'espèce de Balénoptère qui atteint une longueur moyenne de 60 pieds, qui a les fanons d'un gris ver- dâtre, rayés de blanc, soixante-deux vertèbres, un sternum court et large en avant, et dont le fœtus à terme atteint le quart de la longueur de la mère. C'est le Cétacé à fanons qui pénètre le plus souvent dans la Méditerranée. Ce n'est que depuis peu que l’on connaît deux exemplaires de Balænoptera rostrata, un de Balæna biscayensis et un de Megaptera boops, qui ont pénétré accidentellement dans cette mer intérieure, tandis que la Balænoptera musculus x est assez fréquente, au point que Cuvier la croyait propre à la Méditer- rance; aussi, pour le grand naturaliste du Muséum, c'était le Rorqual de la Méditerranée, tandis que les autres espèces n'étaient que des âges différents du Rorqual de la mer du Nord. Nous l'avons déjà répété, toutes les Balénoptères qui pénè- trent dans les mers intérieures d'Europe sont prepres à Atlantique, et nous pouvons même ajouter à l'Atlantique septentrionale. Ïl est vrai, on a capturé dans ces derniers temps un Musculus assez Jeune (5%, 25) pour supposer qu'il est né dans la Médi- terranée; mais quand cela serait vrai, il n’est pas démontré que ce n’est pas une mère grosse, qui, approchant des côtes pour chercher une baie propice à la parturition, a penétré accidentellement par le détroit de Gibraltar et dont le balei- neau à peine né a été capturé. On a d’ailleurs capturé dans la Méditerranée d’autres femelles accompagnées de leur baleineau ou qui y ont mis bas. En 1583, on en a vu une avec son jeune, au Nord-Ouest du (215) OC cap de Creux, et le 3 septembre 1870 une femelle, presque à terme, a été capturée sur les côtes du département de l'Hérault. On cite encore la capture d’une autre femelle accompagnée d’un Baleineau de 6 mètres. Sur la plage de Monte-Rosso une femelle, en état de gestation, a été trouvée morte en 1878. La taille des deux baleineaux (5. 25 et 6.) indique à peu près leur âge : le jeune musculus à tout au plus à mètres en venant au monde. Schlegel a publié différents mémoires sur les animaux qui nous occupent; pour le directeur du Musée de Leyde, il n’y avait qu'une Balénoptère pour tout l'hémisphère arctique, et la Megaptera du Japon passait pour la Balénoptère antarctique ; il n’y avait également pour lui qu'une seule espèce de Baleine dans chaque hémisphère. Lorsqu’en 1834, Paul Garmard rapporta de son voyage en Islande quelques caisses tympaniques de Balénoptères, 1l ne nôus fut pas difficile de reconnaitre l'identité de ces os avec ceux de la Balénoptère qui fréquente la Méditerranée; confiant dans la science de Cuvier, le Rorqual s'étend, disions-nous, jusqu'en Islande, tandis qu'en réalité cette espèce est un animal boréal qui va se perdre quelquefois dans cette mer. Ce n’est pas moins Cuvier qui a établi la cétologie sur sa véritable base, en n’admettant que ce que les squelettes ou ies crânes connus lui avaient appris; et, de son côté, Holbüll, gouverneur du Groënland, faisait des observations sur les Cétacés qui fréquentent ces côtes; il recueillait en même temps tout ce que les pêcheurs lui rapportaient, et envoyait à son ami Eschricht squelette, fœtus et toutes les parties qui pou- vaient être conservées. Il existe, en dehors des Baleines, cinq espèces de Cétacés à fanons, disait Holbôll ; une est connue aujourd’hui sous le nom de Megaptera, et les quatre autres sont les Balénoptères des naturalistes actuels. Celle qui nous occupe était connue des pêcheurs sous le nom de Keporkarnak. Eschricht a mis à profit tous ces matériaux, et on peut dire que c’est lui qui a fondé la Cétologie des naturalistes. (216 ) Le professeur O0. G. Sars, de son côté, a beaucoup contribué à étendre nos connaissances sur ces animaux; ayant passé plusieurs années aux Iles Loffoden, il a fait des observations intéressantes sur la Balænoptera musculus, comme sur les autres espèces, et il a comparé avec soin les divers os de leurs squelettes. Son travail spécial sur la Batœnoptera musculus est accompagné de trois planches qui reproduisent fidèlement leurs caractères extérieurs. Le professeur de Christiania a publié ensuite, en 1868, une notice sur les variations des Balénoptéres, une autre en 1874 sur la Balænoptera Sibbaldii, en 1878 une nouvelle sur les caractères des diverses espèces de ce genre. Le professeur Flower a beaucoup contribué à faire connaître l'espèce qui nous occupe, en publiant divers mémoires, parmi lesquels nous pouvons citer surtout celui qui a pour objet l'individu qui a péri dans la baie de Pevensay (Sussex) en 1865. C'était un mâle de 67 pieds de longueur, dont l’état de conservation laissait beaucoup à désirer. C’est dans ce cadavre que le directeur du British Museum a reconnu la véritable composition du bassin des Balénoptères. Le savant directeur du British Museum a eu l’occasion d'étudier également deux autres individus capturés, l’un à Margate, l’autre à Falmouth, et le superbe squelette conservé à l'Ile de Wight (Blac Gang Chine) provenant d’un animal échoué près de Ventnor. On a beaucoup écrit sur cette espèce, comme nous venons de le voir; on a donné des détails sur son organisation; on s’est occupé de ses caractères extérieurs, du nom qu'elle doit porter, des parages qu’elle fréquente, des lieux où des indi- vidus sont venus échouer ; mais ce n’est que depuis la pêche des Balénoptères, organisée sur une grande échelle sur les côtes de Finmark, que l’on a commencé à la reconnaître défi- nitivement. Parmi les auteurs qui ont le plus contribué à éclaircir l’histoire de cette espèce, nous devons citer, par ordre de date, Knox, Schlegel, Vrolik, Eschricht, Flower, Sars, et, dans ces derniers temps, Yves Delage et Guldberg. (27) SYNONYNMIE. Cette Balénoptère a été désignée sous un grand nombre de noms, et il y a lieu d'espérer que le nom de Balænoptera musculus lui restera. Nous croyons que la science n’a rien a gagner à former une liste complète de tous les synonymes; ilest préférable, pensons- nous, de faire un choix et de ne donner des synonymes que pour éviter la confusion. Mysticetus, Aristote Musculus, Pline. Rorqual de la Méditerranée, Cuvier. Physalus antiquorum, Gray. Dterobulæna communs, Eschricht. Le Tunnolik ou Keporkarnak des Groënlandais. Le Sitdreki des Islandais. Le Razorback des baleiniers américains. Le Finnfisch et Vinwall des baleiniers en général. Le Rohrval des Norvégiens. On l'appelle encore Lodde et Capelan Whale. La Balénoptère que James Hector fait connaître sous le nom de Physalus australis, Gray, correspond parfaitement, d’après les fanons, à notre Balænoptera musculus ; elle a aussi 60 pieds de long. Les vertèbres sont au nombre de 62, divisées en 7 cer- vicales, 15 dorsales, 15 lombaires et 25 caudales. La Balænoptera Patachonica de Burmeister doit aussi être assimilée au Musculus. CARACTÈRES. La face inférieure du corps est blanche; les fanons sont d’un gris pâle verdâtre, souvent parcourus dans leur longueur par des stries blanches; les vertèbres sont au nombre de 62 et les côtes de 15 paires ; le sternum est large en avant etterminé en pointe. 218) La nagcoire dorsale est placée au-dessus de l'anus, vers les trois quarts de la longueur du corps ! ; elle est assez grande. Le corps est mince et allongé comme s’il était appauvri, très comprimé au-devant de la nageoire caudale 2, Il y a une sorte de pleuronectisme dans la Balænoptera musculus, dit M. G. Pouchet 3, en ce que la face du corps est souvent plus pâle d’un côté que de l’autre. Cette observation a d'abord été faite par Sars 4; Guldberg à croit que cette cou- leur blanche d’un côté se trouve tantôt à droite, tantôt à gauche. Les fanons n’ont Jamais cette couleur noire de la grande espèce, mi la couleur jaune de paille de la petite espèce ; ils sont généralement verdâtres et portent des stries; ils ont moins de valeur que ceux de la Balænoptera Sibbaldii. Cependant ils n'ont pas toujours la même couleur : l'individu échoué à Palevas avait les fanons blancs, nuancés de vert, teinte qui passait même au noir sur le bord concave ou interne. La longueur moyenne de l'animal complètement adulte est d'environ 60 pieds. M. Guldberg leur donne de 60 à 70 pieds. Le professeur Sars pense de même que leur longueur peut atteindre jusqu’à 70 pieds, mais on peut se demander s'il n’y a pas confusion avec la B. Sibbaldii. La femelle est plus grande que le mâle. M. A. Cocks a mesuré à Vardô un mâle qui avait 64 pieds 6 pouces (anglais). M. Cocks à vu à Vardô, au mois d'avril, un fœtus de 1 pied 41/9 pouces, et le 13 juin, à Eretiki, un autre de 4 pieds 6 pouces. Mais c’est surtout à Guldberg que nous devons des rensei- gnements intéressants sur la taille des femelles, sur les fœtus, et sur leurs mesures aux divers mois de l'été. ! Dans la Balænoptera Sibbaldii, la nageoire dorsale est placée sur les quatre cinquièmes de la longueur du corps et elle est encore plus élevée. ? Cet animal est si mince, si allongé et si tranchant en arrière, que les marins Anglais l'ont appelé Razorback. | 5 G. Poucuer, De l'asymétrie de la face chez les Célodontes, Paris, 1880- # Vidensk., Fôrhandl., 1880. ® Bullet. de l'Acad. royale de Belgique, avril 1884. La plupart des mères mesuraient de 65 à 68 pieds, et dépas- saient donc la moyenne que nous avons donnée. Les mères, pendant la gestation, sont recherchées par les baleiniers, à cause de la graisse qu’elles ont au cœur, au mésentère et aux reins. La mesure des fœtus, trouvés dans le sein de mères cap- turées depuis le mois de mars jusqu’en août, et observés pendant quatre ans, présente une certaine régularité. En mars, M. Guldberg a mesuré un fœtus qui avait 126%; en avril, quatre avaient de 300 à 787, et un 2,510; en mai cinq fœtus avaient de 325 à 975"; en juin, six avaient de 1,135 à 2,037; en juillet, quatre mesuraient de 1,700 à 3,100; à la fin de juillet, deux jumeaux atteignaient chacun 2 mètres. On n’a pas capturé de Balénoptère à terme. Les nouveau-nés sont estimés à 6 mètres ou 18 pieds, et peut-être faut-il réduire cette taille à 16 pieds. M. Guldberg a vu également des baleineaux accompagnant leur mère : au mois d'avril, un avait de 18 à 19 pieds; un second, 18 pieds; un troisième, 21 pieds, et, au commencement de mai, il en a vu un quatrième de 40 pieds. En 18583. à la fin de mai, les pêcheurs ont observé pendant deux à trois Jours, à l’Est de Finmark, une gamme de balei- neaux, dans le Voranger-fiord, sous la conduite d'individus adultes : les plus jeunes avaient 20 pieds. En juin on a aperçu encore d’autres petites gammes de baleineaux, accompagnées d'individus adultes. Le 24 juillet 1883, une femelle, accompagnée de son balei- neau, y fut encore tuée; ses mamelles contenaient plusieurs litres de lait. On n’a pas indiqué la taille du jeune. ORGANISATION. Il existe une poche du larynx comme dans la Balénoptère de Sibbald, et sans doute dans les diverses espèces du genre. Du (220) Hamel la connaissait : on m'a assuré, dit-il {, que les Baleines ont au-dessous du gosier un grand réservoir d'air, qui équivaut aux petites vessies à air. Cette poche a fait commettre bien des erreurs. Ainsi F. Cuvier 2, qui n'avait sans doute jamais vu de cadavre de Balénoptère, parle d’une vessie qui, après la mort, remonte dans la bouche de lanimal et force les mâächoires à s'écarter Pune de l’autre. W. Vrolik s’est trouvé en présence d’un cadavre de cette espèce sur les côtes de la Hoïlande et a confondu cette poche avec un intestin, qui va, d’après lui, du menton jusqu'à Pombilie $. Au lieu de se trouver dans la cavité abdominale, comme chez les autres mammifères, les intestins sont placés, dit-il, en dehors. On ne dira pas cependant que W. Vrolik, comme son père, nétait pas un véritable anatomiste. Pour expliquer la présence des sillons dans les Balénop- tères, Vrolik suppose qu’il sont en rapport avec la nécessité de dilatation de l’œsophage, quand lanimal avale de gros poissons, comme il a l’habitude de le faire, dit-11. — Jamais on n’a trouvé, que je sache, des restes de gros poissons dans l'estomac des Balénoptères; ce sont des poissons comme les harengs, les capelans ou les petites espèces de gades dont elles se nourrissent. Nous avons fait dessiner cette poche et ses rapports avec le larynx dans les Bulletins de l'Académie, 8° sér. t. II, 1881. Le professeur Sir Turner a fort bien représenté cette même poche en place dans un fœtus de Balænoptera Sibbaldii. Le Dr Ravin a publié quelques observations anatomiques sur les fanons d’un animal de 41 pieds de long, échoué en 1829 sur la côte du département de la Somme #. L'étude du fœtus a fait connaître que l'intestin grêle et le 1 Traité des Péches, vol. IV, p. 6. Hist natur. Célacés, p xv. Ann. Sc. nal., 1858. 4 Ann. Sc. nat., 1856, p. 266, pl. 11. +9 LA] gros intestin sont séparés l’un de l’autre, et qu’il existe un cœcum peu développé. Le professeur Struthers a publié une notice intéressante sur quelques faits d'anatomie de cette espèce : il fait connaître avec soin la composition de la nageoire pectorale avec ses muscles fléchisseurs et extenseurs. Il décrit et figure en même temps le bassin, composé de los ischion et d’un rudiment de fémur avec des cartilages et des ligaments, le sternum et la manière dont il s'articule avec la première côte! . La découverte du fémur rudimentaire dans les Balénoptères à été faite en premier lieu par le professeur Flower 2. Il parait qu'il reste toujours rudimentaire dans cette espèce. Le squelette de l'individu échoué à Pevensey-Bay, en 1865, a une apophyse transverse inférieure fort courte à la sixième cervicale et une seizième côte supplémentaire. Le professeur Struthers a fait connaître également l'existence d’une petite côte supplémentaire dans un mâle de cette espèce. Nous avons publié la description du squelette dans l'Ostéo- graphie des Cétacés. Malm donne la description du squelette et la figure des prin- cipaux os, sauf la tête, d'après un squelette de Finmark. MOEURS. La Balénoptère qui nous occupe est ichtyophage; au Nord ce sont surtout les Loddes, Mallotus, c'est-à-dire, Osmerus arcticus qu’elle poursuit. Ce poisson apparaît surtout en abondance au printemps autour de l'Islande et au nord de la Norwège. Des pêcheurs assurent en avoir trouvé jusqu’à huit cents dans un seul estomac de Balénoptère. 1! Joux STRUTHERS, On some points in the anatomy of a great Fin-wahle (Balænoptera musculus); on (he cervical vertcbræ and their articulations. JOURNAL OF ANATOMY AND PHYSIOLOGY, VOl VI, novembre 1871 et vol. VIT, 1872. ? Proc. Zool. Soc. of London, novembre 1865, p. 704. (22) Sur les côtes d'Islande, d'Écosse et de Norwège, ce sont surtout les bancs de harengs que cette Balénoptère accom- pagne. On cite encore parmi les animaux dont elle fait sa pâture : les Gades (Small cod, disent les pêcheurs) et au besoin des Schrimps. Les Balénoptères que lon capture sur les côtes de Finmark ont toujours leur estomac plein, tandis que les individus échoués ont ordinairement l’estomac vide. J. Murie a trouvé dans un animal échoué des débris de Méduses et des restes d'Entomostraces !. On a trouvé aussi, dans le premier estomac, des algues qui avaient sans doute été avalées à défaut de proie. Cette espèce souffle très haut, comme le Slätbak ( Balæna biscayensis), dit M. Malmgren,; elle n’est pas farouche et approche des chaloupes en les côtoyant pendant des heures. C’est l'espèce la plus facile à observer. Elle est sans doute moins farouche parce qu’on ne la pour- suit guère. D’après Guldberg, la fécondation et la mise bas ont lieu en hiver; la gestation est de dix à douze mois; le jeune accom- pagne sa mère jusqu'à ce qu’il ait atteint la moitié de sa taille. PÉCHE. Les baleiniers qui allaient jadis à la pêche de la Baleine franche dédaignèrent souvent de harponner la Wusculus. Fred. Martens aperçut en 1671, le 9 mai, une Baleine, à laquelle il aurait fait la chasse, dit-il, s’il n'avait pas aperçu sa nageoire dorsale. R. Brown la considère encore comme sans importance à cause du peu de lard et de la difficulté de la capturer. Il se rappelle que les baleiniers trouvant un jour un cadavre flot- tant, qu'ils avaient pris pour un Mysticetus, l'abandonnèrent 1 Proc. Zool. Soc., fur. 1865, p. 211. ( 293) aussitôt qu'ils aperçurent que c'était un Finfish; d’autres l'avaient également abandonné. Aujourd’hui on leur fait régu- lièrement la chasse; avant la découverte des bateaux à vapeur on ne pouvait y songer. Une Société anglo-américaine a organisé cette industrie dans les eaux d'Islande en 1865; elle a cessé ses opérations en 1867. C'est au commencement de 1870 que Svend-Foyn a com- mencé la chasse avec des steamers et des canons chargés de bombes-lances et de harpons. Il existe aujourd'hui une pêche de Balénoptères, régulière- ment organisée, sur les côtes de Finmark, et parmi les espèces que l'on capture, pendant l'été, figure la Balænoptera musculus. La saison de cette pêche commence au mois de mai et finit au commencement d'août. Nous avons fait remarquer plus haut que c’est la Balænop- tera musculus qui arrive la première dans ces parages, et la Balænoptera Sibbaldii, la dernière. Le dernier animal capturé à Vardd en 1884 était une Muscu- lus ; le 22 août on en vit encore une à Eretiki; le 24 août on captura la dernière à 30°30” M. À. Cocks n’a pas vu de Balénoptère dans la mer Blanche. En partant d'Arkhangelsk le 7 septembre, il a aperçu des Balænoptera musculus à Gorodetsk Point. Après la Balænoptera Sibbaldii c'est la Musculus qui est généralement la plus abondante sur la côte de Finmark. En 1885 néamoins c’est la Borealis qui a été la plus commune dans ces parages. Les principales factoreries sont à Vardü, à Vads6, à Bôle, et à Far-Fyord. Dans ces dix dernières années, on en a pêché sur les côtes de Finmark, en 1878, quarante; en 1879 également, quarante ; en 1880 et en 1881, cinquante ; (capitaine Sôrensen, Guldberg.) Depuis 1881, on en a tué tous les ans plusieurs centaines. En 1886 on a capturé au moins cinq à six cents individus. Le plus grand nombre ont été péchés aux mois d'avril et de mai, 16 (224) DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. La Balænoptera musculus habite à l’est et à l’ouest du Groën- land, visite périodiquement l'Islande, les Loffoden, double le cap Nord, pénètre même dans la mer de Kara; elle arrive régulièrement, avec d’autres espèces, dans ces parages aux mois de mai et de juin, et passe de nouveau le cap Nord au mois d'août ou de septembre, pour se rendre de l’autre côté de l'Atlantique ou à l’ouest du Groënland. Partout sur ce passage on a vu échouer, tantôt des mâles, tantôt des femelles, sans qu’on ait pu remarquer aucune pério- dicité dans leur apparition. En partant d’Arkhangelsk, M. A. Cocks a vu des Balænoptera museulus à Gorodetsk Point, le 2 septembre, la dernière Megaptera boops le 16, la dernière Balænoptera Sibbaldii le 18, à Eretiki. On en voit parfois se rendre au sud vers la mer du Nord, pénétrer dans le Kattegat ou bien entrer dans la Manche, longer les côtes ouest de France, les côtes d'Angleterre, d’Espagne et de Portugal, pénétrer même dans la Méditerranée et parcourir toute cette mer intérieure jusqu'au fond de Adriatique, sans dépasser toutefois le détroit des Dardanelles : elle ne pénètre Jamais dans la mer Noire et bien rarement dans la Baltique. Il est probable que c’est la température de l’eau et la pâture qui déterminent ces animaux à se rendre, à l'approche de l'été, de l’ouest à l’est, et, en automne, en sens opposé. Les individus qui visitent nos parages ou qui se rendent dans la Méditerranée sont des animaux dévoyés ou blessés, ou affolés par la poursuite des harponneurs. L'animal qui est venu se perdre, il y a quelques années, à l'entrée de l’Escaut, avait reçu dans la nageoire pectorale une balle explosible qui lui avait fracturé complétement les os de l’avant-bras. En décembre 1870, un officier de garde d’une corvette de guerre (Prinx Frederic Karl) dans la mer du Nord, crut aper- ( 295 ) cevoir la nuit une torpille; mais on découvrit ensuite que c'était un corps de Balénoptère commune, flottant à la surface de la mer. Le docteur Fr. Braeutigam a eu l’occasion d'étudier ce cadavre et en a fait le sujet d’une dissertation inaugurale. Nous avons publié un plan des côtes des mers d'Europe et marqué les lieux où des individus avaient échoué. Tout ce que lon peut en tirer, C’est que des individus de cette espèce sont allés mourir à peu près sur toutes les côtes des mers d'Europe. La Balænoptera musculus forme à peu près le quart des Balénoptères qui échouent dans les mers d'Europe. Nous voyons assez souvent des individus d’une quarantaine de pieds; ce sont sans doute de jeunes Balénoptères qui ont quitté leur mère depuis peu de temps; le plus grand nombre n’atteignent pas 60 pieds; comme nous l’avons vu plus haut c'est à peu près la taille ordinaire de l'adulte. Nous pouvons faire remarquer qu'il n’y a guère, parmi les Balénoptères échouées, des individus véritablement adultes. On avait même soupçonné que dans cette espèce les épiphyses des vertèbres ne se soudaient pas complètement. Nous allons faire l’'énumération, par dates et par lieux, de quelques individus dont l’échouement a été signalé de manière à ne laisser aucun doute sur la détermination de l'espèce. Du Hamel, Bonnaterre et Lacépède parlent d’une vraie Baleine, qui fut jetée sur le littoral de la Corse, en 1620; à en juger par la taille considérable et le nombre de barils d'huile qu'elle a fournis, le D' Fischer pense que c'était la Balænoptera musculus ; la Balænoptera Sibbaldii n’a jamais été vue dans la Méditerranée. En 1624, le 28 janvier, un individu est venu à la côte de S. Marinella, et, au mois de février suivant, un autre à S. Severa. En 1789, une Balénoptère de 60 pieds s’est perdue sur le littoral de la Méditerranée {sans indication de lieu). Le crâne du Muséum de Paris, dont parle Lacépède, pro- vient d’une femelle capturée à l'Ile Sainte-Marguerite, arron- dissement de Cannes (Var), en mars 1797 ou 1798. (2% | En décembre 1827, un individu a péri sur les côtes de Corse. (Paul Gervais). Un autre individu a péri dans la Méditerranée, le 27 septembre 1828, dans les environs de Saint-Cyprien; il a été décrit par Companyo et plus tard par Farines et Carcassonne. Il avait 15,60. Son squelette est conservé au Musée Saint-Pierre, à Lyon. Il était mentionné d’abord sous le nom de Balænoptera aragous. Le squelette n’a que 53 vertèbres, 7 cervicales, 14 dor- sales, 15 lombaires et 17 caudales. Il y en a donc 9 qui man- quent. En août 18929, il échoue à l’Escale, tout près du golfe de Rosas, un animal de 45°,50 en pleine putréfaction ; la mâchoire inférieure a été conservée, dit M. Campanyo, qui la désigne sous le nom de Balænoptera Jubarte 1. La même année, dans le même golfe, une Balænoptera mus- culus a échoué, dont le squelette est conservé au Musée de Madrid. Il n’est pas monté, m’écrit M. Mar. G. Graells. En 1833, un individu a été capturé à Civita-Vecchia. La même année, un autre individu de la même espèce a été capturé, dit P. Gervais, près de Saint-Tropez (Var). Le 21 mai 1840, une Balænoptera musculus a été capturée dans une madrague à Thone, près de Saint-Tropez, à ia suite d’un coup de vent de N.-0. 2. ! Coupanyo, Histoire naturelle du Département des Pyrenées orientales, tome II, p. 81. ? Nouslisons dans les Annales maritimes et coloniales, 1. 1,4840 : « Par le coup de vent de N.-0. du 21 mai, une Baleine s’est introduite dans les filets de l'une des madragues de Saint-Tropez (Var). Comme c'est la première fois qu'un Cétacé de cette espèce a été pris dans notre golfe, et peut-être même dans la Méditerranée, du moins depuis plusieurs siècles, l’aflluence des curieux de la ville et des environs a été prodigieuse. Pendant quelques heures, nous avons été dans l'incertitude de savoir si c'était réellement une Baleine, attendu que quelques braves marins, habitués à ne voir que des Baleines franches, soutenajent que ça n'en était pas une; mais, après un mûr examen, il a été reconnu que c'était la Balænoptera physalus, d’après la classification de Lacé- pède. » (227) Au Muséum à Paris se trouve un squelette d’un animal de 14», qui a péri en 1847 sur les côtes de Saint-Vigor. Le 10 novembre 1854, un animal de 19,40 a été pris à Bordigliera. Son squelette est conservé à Turin. Une femelle de 20 mètres, accompagnée de son Baleineau, a été capturée près de Port-Vendres, en 1859, après avoir essuyé plusieurs coups de feu. La mère avait 20 mètres, le petit 6. Un squelette, conservé à l'hôpital de Saint-Mandrier, à Toulon, provient d’un animal capturé en décembre 1860 (Gervais). Gervais cite également une capture faite sur la côte de la Catalogne, en 1862 1. Nous pensons que c’est son squelette que nous avons vu à l’Université de Barcelone et au sujet duquel nous n'avons pu avoir aucun renseignement sur les lieux. Le 17 juin 1863, une femelle de 19,50 a fait son apparition au nord-ouest du cap de Creux (au delà du département des Pyrénées-Orientales, côtes d'Espagne). Elle était accompagnée de son petit et, pendant plus d’un mois, elle est restée en vue de la côte. Elle a été capturée dans la suite et le corps a été remorqué à Llanza. En 1864, un animal a été capturé près de Cannes. Son squelette incomplet est conservé au Musée de Grenoble. Le 4 mars 1866, une femelle de 22 est venue à la côte de Civita-Vecchia. Le squelette est conservé à Rome (chev. v. Diorio). Il a, en tout, 58 vertèbres, 15 côtes, et les deux doigts externes ont cinq phalanges, les deux internes, six 2. Le 23 septembre 1870, des pêcheurs de Thons des environs de Palavas, département de l'Hérault (Méditerranée), relevant leurs filets par le travers du Grau de Palavas, ne furent pas peu surpris de trouver dans un d’eux un Rorqual vivant du sexe femelle de 19",40 de longueur. Amarré par la queue, il a été Gervais, Mém. Acad. royale de Belgique. * Prof. Vincenzo Diorio, 1! Celaceo di S. Marinella, ATTI DELL’ ACADEMIA PONT. DEI NUOVI LiNCEI. Marzo, 1866. ( 298 ) remorqué vivant dans le port de Cette, où l’on a pu s'assurer pendant plusieurs jours que les jets lancés par l'expiration sont formés d'air et d’eau pulvérisée- L'appareil est disposé comme un vaporisateur. C'était une femelle qui a mis bas un fœtus de 2,25. Comme les Cétacés avortent facilement par la moindre commotion, cette fausse couche a été causée évidemment par la capture 1. L'Illustration de Paris (1870, n° 1424) fait mention d’une Balénoptère prise à Marseille, aux environs du château d’If, 26 mai 4870, et en publie un dessin. On fait mention d’un individu capturé en décembre 1872, à Solenzana (Corse). Un animal a échoué près d’Ajaccio, à la fin de l’année 1877 ou 1878; son squelette est conservé. En octobre 1878, une Balænoptera musculus a été trouvée morte sur la plage de Monte-Rosso, à une petite distance entre Spezzia et Levanto; c'était une femelle de 22 mètres de lon- gueur, en état de gestation. Le fœtus est conservé à Gênes. Dans les derniers jours de novembre 1884, une Balénoptère a été capturée dans le golfe de Cavalaire, quartier de Giova, près de St-Tropez (département du Var) par les douaniers du poste de Cavalaire; ils l'ont tuée en mer, à une distance de 600 à 700 mètres ; une seule balle, qui à pénétré dans la tête, a suffi pour la tuer : c'est le jeune individu dont nous avons déjà parlé. Il n’y avait rien dans les intestins, et M. Beauregard soupçonne que c’est un jeune animal qui n’avait pas plus de vingt jours d'existence. L'animal a été dépecé et tout a été envoyé au Muséum à Paris. MM. Pouchet et Beauregard en ont fait connaître les parti- cularités de structure 2. Nous en avions parlé dans les Bulle- 1 Notice publiée à l’occasion de la réunion de l'Association pour l’avance- ment des sciences. DoumET-Apaxsox, Ann. de la Soc. d'horticulture et d’hist. nat. de l'Hérault. 2 Poucrer, Acad. des sciences, séance du 2 février 1885 (Revue scientifique, 7 février 1883, p.188). Compte rendu, Société de Biologie, t. II, janvier 1885. (229) tins de l’Académie d’après des renseignements incomplets. Ce n'est pas la Balænoptera rostrata, comme nous l’avions soup- çonné, puisqu'elle à soixante-deux vertèbres, mais une jeune Balænoptera musculus, comme M. Beauregard l’a dit. Cornalia fait connaître onze cas d'échouements sur les côtes d'Italie, dont un dans l’Adriatique et un sur les côtes de Sar- daigne. On na guère tenu note des nombreux échouements qui ont eu lieu sur la côte d’Espagne. On cite seulement une Balænop- tera musculus, de grande taille, échouée au cap de Ras, entre Calère et Lianza, dont nous avons parlé plus haut. En 1811 une Balénoptère fut jetée à la côte près de Bayonne. Au Muséum à Paris on voit le squelette d’un jeune animal qui a péri, en 1823, devant l'embouchure de l’Adour, près de Bayonne. On a signalé plusieurs exemples sur les côtes ouest de la France. On en cite deux d’abord au XVIT: siècle : le premier est une Balénoptère de 47 pieds, capturée ou échouée en 1680 près de la Rochelle; le second est un individu, dont on ne donne pas la taille, qui est venu à l’île Sainte-Anne le 5 octobre 1682. À Boulogne sont conservés des fragments de crâne d’un animal qui a péri, le 7 février 1812, à l'embouchure de la Somme; d’un autre qui a péri, en 1827, à la même embou- chure 1. L'année 1812 une femelle de 56 pieds est venue se perdre également sur les côtes ouest (Souty). Le 16 août 1829, un mäle de #1 pieds a échoué près de Cayeux. Ravin en a fait mention dans les Annales des sciences naturelles, mai 1836. Le squelette est conservé à Rouen 2. Un dessin accompagne cette notice. ! G. Poucuer, Des derniers échouements de Cétacés sur la côte française, Comptes rendus... 2 février 1885. ? F. Ravix, Observations anatomiques sur les fanons, ANN. SC. NATUR, mai 1886. ( 230 ) En janvier 1842, on a vu à Berg (Pas-de-Calais) un cadavre flottant en mer (Blainville et Gervais). En 1845, un individu a échoué sur la côte de Saint-Malo, et en 4847, un autre au Havre, dont la peau bourrée est conser- vée au Muséum de Paris. A Saint-Brieux nous avons vu un squelette de mäle de 54 pieds, monté sous la direction de M. Nimier. Un animal de 43 mètres est capturé à Saint-Vigor, à l’em- bouchure de la Seine, en 1847 ; la même année un jeune, mais de grande taille,. échoua à Barre-des-Monts (Vendée); une Balænoptera musculus de 12 mètres de longueur a échoué près du Havre le 41 octobre 1852, sur la plage de l'Eure. La peau a été préparée et exposée au public. Le 10 février 4857, les pêcheurs de Tréport ont trouvé, à l'entrée de la Manche, une Balénoptère de 60 pieds, en pleine putréfaction. Le Dr Fischer parle d’un mâle de 7 à 8 mètres capturé en 4874 sur les côtes de Bayonne. Le 6 janvier 1877, un individu de 15 mètres sans la tête est venu dans le golfe de Gascogne. Nous en faisons mention sans pouvoir assurer qu'il appartient à cette espèce. Le 10 février 1878, les pêcheurs de Dunkerque ont remorqué un mâle de 23 mètres, dont le squelette est conservé à Lille, au Musée de l’Université catholique. Une femelle pleine, de 20,80 de longueur, a été trouvée morte en mer, au large de l'île de Groix (à 12 miles sud-ouest), le 29 juillet 1879. Le fœtus avait 1",20. Le squelette de la mère est au Musée de Bordeaux, celui du fœtus au Muséum à Paris. Le 21 décembre 1881, la mer a rejeté sur la côte de Porge, au nord du bassin d'Arcachon, un Cétacé de 15",20 ; le bout du rostre avec les fanons sont conservés au Muséum à Paris. Les fanons ont, paraît-il, la couleur de ceux de Rostrata. Une femelle, à l’état de cadavre, a été amenée à l'ile de Sein le 19 août 1881. Elle avait 14 mètres de longueur. Le corps flottait dans le Ras-de-Sein. Une autre femelle, de 9»,50, a échoué à Seignasse, près du ( 231 ) cap Breton (Landes), le 25 juin 1884. Le squelette est conservé au Muséum à Paris. Dans la nuit du 13 au 14 janvier 1885, un mâle est venu échouer sur la plage de Langrune. M. Yves Delage en a publié la description, dans les Archives de Lacaze-Duthiers. Le pro- fesseur de la Sorbonne a étudié avec beaucoup de soin la struc- ture et la formation des fanons f. Le corps de cette Balénoptère a été vendu. D’après une ordonnance de Colbert (1681), les poissons à lard, c’est-à-dire les Cétacés, doivent, dans certains cas, être vendus publiquement. On s’est conformé à cette ordonnance, ce qui a empêché de commencer la dissection le jour même de l’échouement. L’ani- mal a été mis aux enchères le 20 janvier ; de la mise à prix de ù francs, on est monté à 1,101 francs, et il a été adjugé à la ville de Caen pour le Musée. Dans l'intérêt de la Caisse des gens de mer, On avait poussé jusqu’à 1,100 francs. L'observation rigoureuse de ce règlement pourrait avoir comme conséquence, dans le cas qu’une espèce rare vint échouer sur les côtes de France, qu’un Musée étranger pour- rait venir faire une concurrence aux naturalistes français et faire prendre à l’animal le chemin de l'étranger. L'Association française a accordé, en 1885, 1,200 francs à M. Yves Delage, pour subvenir aux frais de la reproduction héliographique des parties intéressantes de cette Balénoptère. Le 5 février 1885, une barque, montée par des pêcheurs de Gravelines, a rencontré, en face de Douvres, à une assez forte distance au large, le cadavre flottant d'une Balénoptère, qui a a été remorquée jusqu’à Ostende. C’est un mâle de Balænoptera musculus, dont le squelette est aujourd’hui au pensionnat de Melle. Les journaux de la localité l’avaient désigné sous le nom de Cachalot. Le corps en chair a été exposé quelque temps au public. Nous pouvons citer plusieurs exemples d’échouements sur les côtes britanniques. ! Comptes rendus, 6 juillet 1885, Archives de Zoologie expérimentale. DAAAX LA (232) On en cite deux d’abord dans le Firth of Forth dans le XVII: siècle, l’un, le 17 septembre 1690, l’autre, en septembre également, en 1692; Sibbald en parle dans sa Phalainologia. Scoresby en cite un dans le Humber, en septembre 1750, et un en 1752, de 52 pieds, sur la côte de Berwickshire, Walker en cite un autre, le 40 juin 1761, de 48 ‘pieds, dans le Firth of Forth. Sur les côtes de Cornouailles, on en cite un, le 18 juin 1797, de 70 pieds. + Le 28 octobre 1808, une femelle, de 43 pieds, a échoué dans le Firth of Forth (Pat. Neil). En 1830, un animal de 63 pieds est venu à la côte à Brighton. Un autre, de 38 pieds seulement, a été capturé dans le canal Saint-Georges; le corps a été remorqué à Liverpool. Son squelette est au British Museum, à Londres. C’est de lui que Gray avait fait le genre Benedenia. En février 1840, une femelle de 41 pieds a péri sur les côtes % de Yarmouth !. Sweeting fait mention d’un animal de 18 pieds, capturé sur les côtes d'Angleterre, à Charmouth, en 1840. En 1842, un individu très adulte a été capturé à File de Wight; son squelette est conservé dans l’île. Le 28 décembre 1850, une Balénoptère a été capturée à Margate; son squelette est en partie à Londres et en partie à Cambridge. On mentionne aussi une femelle de 50 pieds qui est venue à la côte aux Orcades, en mars 1856 (Heddle). On possède à Londres un crâne d’une Balénoptère, capturée à Yarmouth, en 1857. Un mâle de 60 pieds s’est perdu dans la Tamise, en 1859; le squelette est conservé à Rosherville garden (Murie). Une Balænoptera musculus, échouée en novembre 1865 sur la côte de Sussex, a été l’objet d’une notice fort importante 1 Proc. Zool. Soc. 1840, } :/ CE / \ 233 ) dans laquelle M. Flower décrit le squelette avec l’os du bassin et le rudiment de fémur 1. En 1869, M. Flower communique des notes à la Société de Zoologie sur quatre Balénoptères de cette espèce, échouées sur les côtes sud de l'Angleterre. Il accompagne cette notice d’un dessin représentant un mâle de Balænoptera musculus de 61 pieds 2. Une Balénoptère a échoué dans Pevensey-Bay, en 1865 3. Le 20 novembre 1869, un mâle a été trouvé mort dans la Manche, près de Portsmouth. Le corps était en pleine putré- faction. Il avait 61 pieds de longueur #. Le 4e mars 1875 et le 9 août suivant, on a trouvé sur les côtes de Happisburg (Norfolk), un animal mort (in the Lynn Roads), dit M. Southwell. En avril 1880, une femelle de forte taille a péri sur les côtes d'Écosse (Baie de Forth). Une autre a été trouvée morte en mer le 30 août 1884 (.. floating in the sea off Bervic) 5. Sur la côte de Kerry, une Balénoptère de 63 pieds a été cap- turée par les gardes des côtes. Un mâle de 50 pieds a échoué à Nairn (côtes d'Écosse) en décembre 1884; son squelette a été exhibé en 1886, à l’Asso- ciation britannique à Aberdeen 6. Une femelle de Balænoptera musculus est venue morte à la côte, le 15 janvier 1885, à Littleton Pill, sur la Severn; le corps a été acheté par un fabricant et le squelette a été préparé pour le Musée de Bristol 7. Sous le nom de Common Rorqual, M. Blakwill signale une 1 Proc. Zool. Soc., novembre 1865. * Proc. Zool Soc., décembre 1869. “ FLower, Observations upon a Fin-Whale recently strandedin Pevensey- Bay. Proc. ZooL. Soc., novembre 1863. # Proc. Zool. Soc., décembre 1869. 5 Penny illustrat. paper., 30 août 1884, $ Report of the British association, 1888, p. 1033. 7 The Zoologist, IX, p.107. ( 234) jeune Balænoptera musculus, de 47 pieds, qui a péri le 3 avril 1887 à Skegness 1. Les échouements sur les côtes de Belgique et des Pays-Bas sont assez fréquents. On cite un échouement dans l’Escaut, le 2 juillet 1577, d’une Balénoptère qui appartient probablement à cette espèce. On fait mention d’une autre de 42 pieds, qui aurait péri également dans l’Escaut, le 13 décembre 1603. Le 14 mai 1869, on a vu paraître à l’entrée de l’Escaut, vers le milieu de la nuit, un énorme Cétacé qui a jeté l’épouvante dans l'esprit de tous ceux qui l'ont aperçu. Un habitant des côtes lui a envoyé une balle, puis l'animal a disparu. On la trouvé, peu de temps après, échoué sur la plage dite Calloot, à Borselaer, près de Flessingue 2. Le cadavre a été vendu publiquement et un industriel de Terneuzen l'a acheté par spéculation. Il a été exposé à Terneuzen ; le squelette est conservé au Musée de l’Université de Liège. Un individu non adulte, puisqu'il n'avait que 52 pieds, échoua, en 1595, à Zantvoort; un autre le 2 février 1598, à Bergey, entre Katwyk et Scheveningen (Clusius). En 1601 ïl en échoua un à Beverwyk et un en 1629 à Noortwyk. Le 18 novembre 1791, une femelle de 52 pieds est venue échouer à Katwyk-aan-Zee; c’est la femelle que Blumenbach a décrite et figurée. Un squelette du Musée de Leide provient d’un animal cap- turé, en 1811, dans la Zuyderzee. Il a été préparé par Rein- wardt. Il y a eu encore une femelle perdue sur ces mêmes côtes, le 17 septembre 1835, et dont Vrolik a fait l'anatomie 3. 1 The Zoologist, mey, 1887. 3 Van BENEDEN, Mémoire sur une Balénopière caplurée dans l'Escaut en 1869. MÉu. AcADÉM., 1871. 5 Vrouix, Note sur l'anatomie d’une Balénoptère, 18355, échouée près de Wyk-aan-Zee. ANx. Sc. NAT., 1858. { 235 } En septembre 1836 et en septembre 1840 échouèrent deux femelles, la première de 51 pieds, la seconde de 65 pieds, toutes les deux à l’embouchure de la Meuse (Schlegel). En décembre 1841, un mâle de 40 pieds est venu à la côte à Katwyk-aan-Zee; il a été acheté d’abord par un particulier de Scheveningen; son squelette est conservé aujourd’hui à _ Leyde. Il a été étudié par Schlegel et Flower. Un autre mâle de 40 pieds est venu se perdre sur les mêmes côtes en 1844 (Schlegel). Un mäle, dont le squelette est au Jardin Zoologique d'Anvers, a échoué à Pile Vlieland, le 23 novembre 1851. En 1862, un individu de 50 pieds est venu à la côte à Wick. En mars 1866, une Balénoptère de cette espèce a été cap- turée au Nieuwen-Dam, et, en avril 1866, une autre de 47 pieds au Texel. En novembre 1866, une femelle de 47 pieds a été trouvée flottante en mer par les pécheurs de Scheveningen; le sque- lette est au Musée de Bruxelles. Sur les côtes d'Allemagne, les échouements paraissent être moins nombreux. Une Balænoptera musculus de 60 pieds a échoué en janvier 1721, pas loin de Brême; on l’a désignée sous le nom de Palmfisch. En décembre 1870, un cadavre flottait dans la mer du Nord et fut pris, comme nous l’avons dit plus haut, pour une torpille. Nous trouvons aussi quelques exemples d’échouements sur les côtes de Danemark, de Suède et Norwège. Une femelle de 32 pieds est venue se perdre sur les côtes du Holstein en 1819. Le 21 septembré 1841, un mâle de 61 pieds a été capturé sur les côtes de Nord-Zélande; le squelette en est conservé à Copenhague. (Baers Bazar, 1874.) En 1836, un individu de grande taille a échoué sur les côtes du Jutland; tout le squelette était ensablé quand on l’a décou- (236) vert. Son crâne seul est retiré. Il est à Louvain, grâce à Eschricht. Un autre individu, de 68 pieds, échoua sur les côtes de Nor- vège, en 1837; son squelette est à Christiania. Le 21 septembre 1841, un mâle pourri est venu échouer dans le Kattegat. Au printemps de 1846, un mâle de 62 pieds est capturé à Farsund. En novembre 1858, un mâle de 56 pieds périt sur la côte de Norvège; son squelette est au Musée de Bergen. En 1872 un autre a péri sur les côtes de Norvège; le pro- fesseur Struthers en possède latlas et l’axis. En février 1867, on en a vu dans le Fiord de Christiania. On signale la présence de Balénoptères et de Mégaptères dans la Baltique, mais s’il faut en croire le professeur Münter, la Balénoptère qui nous occupe ne pénètre pas, comme nous l'avons déjà dit, dans cette mer intérieure. En tous cas, elle y est rare. Nous sommes en droit de citer un animal de ce genre qui y a péri en août 1874, près de Dantzig. Le professeur Zaddag en a publié une description 1. [l suppose que cet animal a pénétré dans la Baltique à la poursuite des harengs; son estomac était plein de poissons. Il y a aussi quelques observations faites en mer sur cette espèce : le professeur Sars en a vu pendant tout l’été autour des îles Loffoden. s M. A. H. Cocks raconte que, le 15 août, il a vu prendre à Vardô la dernière Balénoptère, un mâle de Balænoptera musculus, de 64 pieds. Le 22 août, il a vu plus à l’est un Musculus et un Sibbaldiü; après le 2 septembre il a aperçu à Eretiki le dernier Musculus de la saison, en mème temps que la Balænoptera Sibbaldii et la Megaptera boops. 1 Zapoacn, Beschreibung einer Finwaler, Balænoptera musculus. Erica- son’s ARCHIV, 1879. { 237 ) En 1883, sur 406 Balénoptères capturées sur les côtes de Finmark, il y avait 90 Balænoptera musculus. M. Brown fait mention de cette espèce dans sa faune des mammifères du Groënland ; il cite les endroits où elle stationne et indique les Gades (Cod) comme leur nourriture. Ce n’est pas seulement sur les côtes d'Europe que l’on voit de temps en temps échouer des Balénoptères qui ont les carac- tères de l'espèce qui nous occupe; divers auteurs en ont signalé à la Nouvelle-Angleterre; on en voit aussi'sur les côtes est et ouest, tant de l'Amérique septentrionale que de l'Amérique méridionale. Le Musée de Stuttgard en a reçu une tête de la Guyane, et le Musée de Buénos-Ayres en possède des ossements provenant de la République Argentine. Burmeister ! désigne sous le nom de Balænopterapatachonica une Balénoptère des côtes du Brésil, qui correspond à notre Balænoptera museulus. Le Muséum de Paris a reçu des squelettes incomplets de la côte de Patagonie : le sternum d’un de ces squelettes et les os naseaux sont semblables aux mêmes os de notre Musculus ; mais l’omoplate est beaucoup plus allongée que celle de notre espèce commune. — Cest bien l’omoplate la plus éloignée par sa forme de celle des Mysticètes ; les deux premières côtes sont toutes les deux franchement bifides. Les marins qui ont rapporté ces ossements prétendent que les Italiens ont séjourné dans ces parages avant eux et qu’ils ont emporté plusieurs os de ces squelettes 2. ? Dans les Proc. Zoo!. Soc., feb. 1865, Burmeister publie une notice « On a New-Whalei» sous le nom de Balænoplera patachonica. I reproduit un dessin de latlas, axis, 4e et 6° cervicales, côte omoplate et mandibule. ? L'expédition de la Romanche a rapporté deux squelettes de Balénoptères ; l'un d’un animal trouvé échoué au Neutw Yeor Sound, l'autre était abandon- né sur la plage; le premier a été préparé avec soin à bord. Parmi les osse- ments nous avons vu au Muséum deux vertèbres de la région lombaire, qui ne semblent pas appartenir à ces deux squelettes. Il a été question de la mission scientifique aë Cap Horn dans la Revue Scientifique, décembre 1855. ( 238 ) Nous croyons aussi reconnaître cette espèce parmi les Balé- noptères signalées par le capitaine Scammon, dans l’océan Pacifique. Cet habile baleinier y a distingué trois espèces de ce genre et on ne peut pas ne pas reconnaître leur ressem- blance avec les nôtres. Le British Museum possède un squelette de l’île Formose qui a tous les aractères d’un Musculus. Cette espèce vit aussi dans la mer des Indes ; elle y est connue sous le nom de Balænoptera Blythiüi ; elle ne semble pas y dépasser 60 pieds. M. Heuglin écrit du Caire, le 30 septembre 1851, qu'il a découvert une mandibule de Balænoptera dans la mer rouge. — Dans l'archipel de Dahlak, dit-il, se trouve ce cétacé, qui se tient dans les profondeurs et qui se nourrit de poisson. — Quelquefois un poisson scie pénètre dans sa gueule et le blesse mortellement. Le cadavre est jeté sur la côte d’Abyssinie. Les habitants ne le chassent pas, mais quand il y en a qui échouent, les habitants des côtes tirent parti de leur graisse. — La man- dibule a 13 pieds de longeur 1. Dans l'océan Austral cette même espèce porte le nom de Balænoptera antarctica. Parmi les Balænoptères d'Australie j'ai signalé : 1°, un animal de 67 pieds, possédant 62 vertèbres, un sternum de musculus, capturé le 20 avril 1881 à 5 milles de Christ-Church; le squelette ressemble si complètement dans toutes ses parti- cularités ostéologiques à celui de la Balænoptera musculus, que ce serait extraordinaire si les deux n’appartenaient pas à la même espèe, dit Jul. von Haast ?. 2, un autre avec 64 vertè- bres, de New Brighton; ce doit être notre Sibbaldü; enfin 3, une autre forme dont le squelette est à Londres et qui a tous les caractères de la Balænoptera rostrata. 1 Sitzungsberichte der Math.-Naturw. Classe d. k. Ahkademi? d. Wis- sensch. 8'er 1851. Ce Poisson-scie. Schwerd-fish, est sans doute un Orque. 2? Prof. Juzius vox Haasr, Notes on a skeleton of Balænoptera australis. Proc. Zoo. Soc. 1885, p. 592. ( 239 ) Une Balænoptera du sexe mâle, de 67 pieds de long, le côté et le dos of a thush-back tint, dont la colonne vertébrale est formée de 62 vertèbres, qui a 15 côtes, le sternum semblable à l'espèce commune d'Europe, ainsi que le bassin, capturée dans les eaux de la Nouvelle-Zélande, a tous les caractères de l’espèce qui nous occupe 1. En résumé, au sud comme au nord de l'Atlantique, dans le Pacifique, dans l’océan Austral comme dans la mer des Indes, on signale plusieurs Balénoptères, différant entre elles de taille, et parmi lesquelles il n’est pas difficile de reconnaitre une espèce qui correspond parfaitement à notre Balænoptera musculus. La Balænoptera borealis n’a été reconnue définitivement en Europe que dans ces derniers temps. Partout ailleurs, comme en Europe, il parait que c’est aussi la plus rare des quatre, et, par conséquent, la dernière à être reconnue. MUSÉES. C’est l’espèce dont le squelette est le plus commun dans les Musées. Un des plus beaux, par son développement complet, est celui du Musée de Stockholm, provenant d’un animal capturé sur les côtes de Finmark; celui de l’île de Wight (Black Ging Chine), échoué au nord de cette île, est fort inté- ressant aussi par son état adulte. Nous allons énumérer, par ordre alphabétique, les villes où lon conserve des squelettes ou des os séparés. À Aalesund (Norvège), on possède un atlas, un axis, une omoplate, un radius et un maxillaire inférieur d’un animal échoué sur ces côtes en 1872. À Aberdeen, on voit le squelette d’un mäle de 65 pieds, capturé, en juin 1869, près de Wick (Caithnesshire); il appar- ParkER, T. Serrery, Notes on a skeleton and Baleen of a Fin-Whale (Balænoptera musculus), recently acquired by the Otago University Museum. New ZEALAND Journ. Sc., vol. Il, n° 7, p. 351. 17 ( 240 ) tient à la collection du professeur Struthers; puisqu'il a plus que la taille moyenne de l’espèce, on ne peut pas dire qu’il pro- vient d’un jeune animal. Le Jardin royal de Zoologie d'Anvers possède le squelette complet d’un animal échoué à l’ile Vlieland (23 novembre 1851). A Barcelone, au Musée de l'Université, on conserve le squelette de l’animal échoué le 11 juin 1863, à l’est de la ville. Au cabinet d'histoire naturelle de l’Académie des sciences et arts de la même ville, existent les restes d’un animal très jeune, qui a péri en Juillet 1835 à la plage de la Barcelonet (M. P. Graells). A Bergen, on conserve plusieurs squelettes complets d’indi- vidus échoués dans les fiords des environs. A Berlin, le Musée anatomique de l’Université possède un squelette complet des côtes de Norvège ; un autre, provenant d’un mâle de 45 pieds, échoué à l'embouchure de lElbe en novembre 1824. Un troisième d’une femelle trouvée morte en mer, en décembre 1870, et qui avait été prise d’abord pour une torpille. Au Musée de Bristol se trouve le squelette d’une femelle qui a échoué dans la Savern, en janvier 1885. A Bordeaux, on conserve le squelette d’une autre femelle de 20",80, qui a été capturée au large de l’île de Groix, le 17 juillet 1879. Cette femelle portait un fœtus de 1,20, qui est conservé au Muséum, à Paris. A Bologne, on possède un squelette non monté. A Boulogne-sur-Mer, on voit, au Musée, des ossements séparés qui ont été trouvés dans les fondations du bassin du Chatillon. A Saint-Brieuc (France) on conserve un squelette d’un ani- mal d’une quarantaine de pieds, qui a été capturé dans la baie de ce nom. Le Musée royal de Bruxelles possède le squelette d’une jeune Balénoptère qui est venue à la côte, à Scheveningen, en avril 1860. © (21) A Buenos-Avyres, on conserve le squelette d’un animal recueilli à 10 milles de cette ville, le 3 février 1867. Le 14 janvier 1885, un mâle de 18",85 a péri sur les côtes du Calvados, à Luc-sur-Mer, dont le squelette est conservé au Musée de Caen. À Cadix on possède un squelette monté. Le Musée de l'Université de Cambridge renferme le squelette d’un mâle de 67 pieds, qui est venu à la côte dans la Manche, à Pevensay-Bay, en 1865; la moitié d’un autre squelette, dont le restant est au Collège royal des chirurgiens, à Londres, et une tête avec ossements divers provenant de Margate. A Calcutta, au Musée de la Société asiatique, on conserve également un squelette qui a tous les caractères de cette espèce. À Christ-Church, Canterbury Museum (Nouvelle-Zélande), on possède un squelette complet. A Christiania, on voit, au Musée anatomique, des ossements de trois ou quatre individus différents. Un de ces squelettes provient d’un animal capturé dans Christiania-Fiord, en février 1867. Au Musée de l’Université de Copenhague, il y a un squelette complet d’un mâle de 65 pieds, qui a été capturé, le 21 sep- tembre 1841, à Nord-Zeland. Dantzig possède le squelette d’une femelle prise en 1874 près de la ville, et dont Zaddach a donné une description. Un squelette complet avec bassin, étudié par le Dr Knox, en 1831, se trouve au Musée d’Édimbourg. Il a été longtemps exposé au Jardin Zoologique. Plusieurs caisses tympaniques, recueillies dans l'argile, à Stirling, sont conservées dans le même Musée par les soins du professeur Sir Turner. A Gênes se trouve le fœtus d’une femelle qui a échoué entre la Spezzia et Levanto. À Gloucester, on conserve le squelette d’une Balénoptère, capturée près de la côte, le 15 octobre 1870. Gothenbourg possède un squelette complet provenant de la côte de Finmark. (2%) Le Musée de Grenoble renferme le crâne et quelques vertèbres d’une Balénoptère échouée près de Cannes le 44 avril 1864. Au Musée du Havre, on voit un squelette de femelle pro- venant d’un animal capturé en 1885 par les pêcheurs de Fécamp. Le Musée de l’Université de Kiel possède aussi un sque- lette. Le Musée royal de Leyde possède une tête et des squelettes d'individus échoués sur les côtes des Pays-Bas. À Leeuwaerden (Friesland) on voit, au cabinet provincial, des vertèbres et divers os recueillis dans lalluvium. Liège possède, au Musée de l’Université, le squelette d’un jeune animal échoué à l'embouchure de l’Escaut, en mai 1869, et un autre fort adulte des côtes de Norvège. À Lille on conserve, au Musée de la Faculté catholique, le squelette d’un mäle de 23 mètres, trouvé en mer par les pêcheurs de Dunkerque en février 1878. A Londres, au Collège royal des chirurgiens, on conserve la tête d’un individu qui est venu à la côte à Yarmouth en 1857; on y conserve en outre un demi-squelette dont l’autre moitié est à Cambridge. Au British Museum on voit le squelette d’un jeune animal qui à péri dans le canal Saint-Georges en 1846; un autre squelette, d’un animal remorqué à Plymouth en 1831. On y conserve aussi plusieurs caisses tympaniques et des vertèbres cervicales séparées. A Londres encore, a été exposé à Alexandra Park le ‘sque- lette d’un animal qui a été capturé en 1863 près de Falmouth ; au Rosherville garden, on possédait le squelette d’un mâle, de 60 pieds, qui a péri en mai 1859 à Gravesend. Nous possédons au Musée de l’Université de Louvain la tête d’un animal, estimé à 70 pieds, qui a échoué en 1863 sur les côtes du Jutland et dont le restant du squelette est resté enseveli. On conserve à Lyon, au Musée d'histoire naturelle, le sque- ( 243 ) lette très adulte de la Balénoptère qui a été capturte à Saint- Cyprien le 27 novembre 1898 1, et un autre, provenant d’Ajaccio, d’un animal capturé à la fin de 1877 ou au com- mencement de 1878 ; le premier a été exposé à Barcelone par M. Companyo, m'écrit M. P. Graells. Il a 60 vertèbres; c’est le premier squelette de Balénide que le sénateur de Madrid ait vu. Le Musée de Madrid possède le squelette, non monté, d'un animal échoué le 28 juin 1832 sur la plage du port de l’Escala, Golfe de Rosas. Au Musée de la ville de Marseille, on conserve un squelette dépareillé qui a été longtemps exposé au Jardin Zoologique. On y voit, en outre, des os provenant au moins de quatre individus différents. A Melle, près de Gand, on possède le squelette de l'animal rencontré en face de Douvres, le 5 février 1885. Il a été exposé à Ostende où les pêcheurs avaient conduit le corps. À Milan on conserve au Musée un squelette qui n’est pas monté. À Munich, on conserve au Musée la tête d’un animal capturé en 1831 dans l’Adriatique, près d’Ancone, et divers ossements séparés. A Paris, il existe au Muséum la tête de l'animal échoué en 1797 à l’île Sainte-Marguerite, en face de la ville de Cannes ; le squelette provenant d’un animal capturé à l'embouchure de l'Adour en 1893; un autre, d’un exemplaire échoué en 1827, à l'embouchure de la Somme; un troisième, d’un individu échoué en 1847 à l'embouchure de la Seine, et un squelette d’origine inconnue. Il s'y trouve en outre des os séparés, parmi lesquels ceux d’un animal qui a échoué le 21 décem- bre 1881 dans le voisinage d'Arcachon. Le squelette de la jeune femelle (5,30) qui a été capturée dans la Méditerranée, dans le golfe de Cavalaire, le 28 novembre 1884, y est égale- ment conservé. { Companyo, Histoire naturelle du Dép. des Pyrénées-Orientales,t. WT, p. 81. Au Muséum à Paris, on conserve également un beau sque- lette des côtes de Patagonie, et une tête de Balænoptera reçue du Japon; cette dernière a tous les caractères de notre Balé- noptère ordinaire. Nous avons cru d'abord devoir la rapporter à la Balænoptera borealis, mais les os nasaux surtout indiquent une affinité plus grande avec la Balænoptera Musculus 1. Nous ignorons ce que le squelette de la femelle capturée aux environs de Palavas est devenu. M. Doûmet-Adanson dit qu'il est entre les mains de M. Demay. Pise conserve le squelette d’un animal capturé sur la côte de l’île d'Elbe. À Pontevedra (Espagne) se trouve un squelette non monté. A Rome on conserve le squelette de la Balénoptère de S. marinella. À Rennes on conserve une tête trouvée dans la tourbe du marais de Dol. Elle a de 5 à 6 mètres de longueur (Cap. Jouan). À La Rochelle on voit la peau d’un jeune animal capturé dans le golfe de Gascogne. Rouen possède le squelette complet d’un animal échoué au Tréport. Le Musée de l’Académie de Saint-Pétersbourg conserve des os séparés de cette espèce, dont nous ignorons l’origine. À Santiago (Galice) on conserve le squelette de l'animal que l’on avait pris pour une Baleine ; il a un peu moins de 60 pieds de longueur. On en conserve aussi à Séville. Le Musée de l’Académie de Stockholm possède un superbe squelette d’un mâle de 58 pieds, des côtes de Finmark. Le Carolinska Institut de Stockholm possède un autre sque- lette. Le Musée de Stuttgard a reçu la tête d’un animal qui a 1 Le Museum a reçu, en même temps que la tête, une série de fanons qui ne sont pas éliquetés et que l’on croyait devoir attribuer au borealis. Ils sont verdâtres et striés de blane. Paul Gervais a publié le dessin de la tête, vue debout, la mandibule et la caisse tympanique, dans sou Journal de Zoologie vol. V, (18761 pl, ft et 11. (245 ) échoué, en 1877, sur les côtes de la Guyane hollandaise, à l’em- bouchure du fleuve Maroni. A Turin, on voit au Musée le squelette monté, de 19 à 20 pieds, d’un animal échoué, en novembre 1844, sur la plage de Bordighera (côtes de Ligurie). A Toulon, on voit le squelette d’un animal qui a échoué près de la ville en décembre 1860. A Toulouse se trouve un beau squelette bien conservé d’un individu échoué près d'Alger en 1883. L'Université de Valence possède le squelette monté d’un animal trouvé le 17 février à la plage de Burriana 1. A l’île de Whigt (Black Ging Chine) on conserve le squelette monté d’un animal très adulte échoué sur les côtes de l’île. DESSINS. Comme cette Balénoptère a été souvent capturée, elle a été aussi très souvent figurée. Il existe un grand nombre de planches représentant, sous le nom de Baleines, des Balénoptères et des Cachalots. Une des plus anciennes reproduit un animal qui a péri dans l'Escaut le 5 juillet 1577; une autre date de 1595, d’après un animal échoué à Zandvoorde; puis une de 1598 représentant un animal échoué entre Scheveningen et Katwyk, et une de 1601, d’après un animal échoué sous Beverwvk 2. Il y a encore deux Balénoptères figurées, une de 1629, près de Noortwyk, et une de 1791, entre Wyk-aan-Zee et Zant- voorde. On lit le nom de Vinvis sur la dernière. Martens donne une figure de cette Balénoptère, mais il ne ? Les renseignements sur les squelettes conservés en Espagne m'ont été donnés'par le sénateur Mariano P. Graells. * Ces diverses planches ont fait partie d’une collection appartenant à feu le Dr Huurkamp van der Vinne. Biblioth. Ichtyol. et piscatoria. Haerlem. 1873. (246) reproduit pas les replis sous la gorge, ce qui est évidemment le résultat d’une négligence. Brandt et Ratzeburg ont reproduit ce dessin, pl. XV, fig. 1, sous le nom de Balænoptera physalus. On en voit un dessin dans Lacépède 1, qui a proposé le nom générique de Balænoptera, pour les Baleines à aileron. On voit, dans les Vélins du Muséum à Paris, le dessin d'un animal qui a échoué au Havre en 1852. Blumenbach à fait graver le dessin d’un animal de 52 pieds qu’il avait vu en Hollande 2. Un dessin de cette même Balé- noptère a été vendu à Leeuwaerden et acheté par Van Breda. C’est probablement le dessin de lPanimal qui a échoué le 48 novembre 1791, entre Katwyk-aan-Zee et Zandvoorde ; une gravure, portant Vinvisch, est conservée à la Bibliothèque royale de Belgique. Schlegel a publié dans ses Abhandlungen, pl. IX, le dessin d’un mâle de 40 pieds, capturé en 1841; d’une femelle de d1 pieds échouée en 1836 également sur les côtes des Pays-Bas, et un autre d’une femelle de 37 pieds échouée le 5 avril 1826 à Wyk-aan-Zee dans ses Nieuwe Verhandlungen 3: Nous en trouvons encore un dessin dans Zaddach # et dans Rosenthal 5. Un dessin médiocre du même animal a été publié par Van Breda 6. Ravin a publié la figure du mâle qui a échoué sur la côte du département de la Somme, en 1829 7. 1 LacÉPÈDE, Hist. nat. des Célacés, pl. 1, fig. 2, et pl. IV, fig, 2. 3 BLumensaca, Abbildungen naturhist. Gegenstaende , 8t:r Heft ; Güttin- gen, 1805. 5 SCHLEGEL, Abhandlungen . .... , Pl. VI, fig. 1. Nieuwe Verhandlungen nederl. Institut, 1818, IN, pl. I et II, et 1898, II, pl. [, I et IX. 4 Zanpacx, Beschreibung eines Finwales. 5 FR, RosENTHAL, Ein. naturh. Bemerkung. tiber die Walle, Greifswald, 1827 (Balæna rostrata, Fabr. var, major). 6 Alg. Kunst en Letterkunde, 1827. L'animal est placé sur le dos. 1 Ann. Sc. natur., 2° sér., 1. V, 1856. (247) M. le professeur Flower a publié un très bon dessin d’un mâle sous le nom de Physalus antiquorum 1. M. Sars figure un mâle, de 40 pieds et demi de long, capturé dans les eaux de Lofoden en 1865 2, et un autre mâle adulte de Varanger Fiord, pl. I 3. M. Braeutigam publie le dessin de ia femelle trouvée morte, en pleine mer du Nord, en décembre 1870 #. M. Southwell a également reproduit un dessin de cet animal. Le professeur Yves Delage vient de publier l’histoire de la Balænoptera musculus échouée sur la plage de Langrune, et un atlas de 23 planches, dans les Archives de zoologie expérimen- tale de Lacaze-Duthiers. Il existe une photographie du squelette de Santiago, qui avait été pris pour celui d’une Baleine. Le professeur Giglioli a publié différents dessins de Balé- noptères qu’il a aperçues pendant son voyage. Nous trouvons aussi quelques bons dessins de Balénoptères dans l’intéressant livre du capitaine Scammon, sur les animaux marins de la côte Nord-Ouest de l'Amérique du Nord. Jul. von Haast a reproduit le dessin du sternum et du bassin de la Balénoptère qui a été capturée à peu de distance de Christ-Church (nouvelle Zélande.) COMMENSAUX ET PARASITES. Le professeur Sars et Sophus Hallas ont trouvé des Penella Balænopteræ, enchassées par la tête, dans l'épaisseur de la peau ; ? FLower, Notes on four specimens of the common Fin- Whale (Physalus antiquorum), Proc. Zoo. Soc., pl. XLVII, 1869, ? Sars, Beskrivelse af en ved Lofoten indb. Rohrval Balænoptera mus- culus. AFTRYKT AF Vip-SELSKABETS FORHANDL., for 1885. 5 Fortsaste (1880), pl. I, # FR. BRAEUTIGam, Ein. Zool.-Zoot Beiträge zur Walthierkunde. IxAu- GURAL-DISSERTATION, 29 juli, 1874. (248 ) ils les ont observées aux îles Lofoden et sur les côtes d'Islande. Sars a vu des Penella d’un pied, avec la partie antérieure du corps plongée dansla couche graisseuse ; sur la partie extérieure ‘du corps vivait un cirripède, Cineras vittata. Le D: Murie signale des Echinorhynchus en abondance dans l'intestin. Il reste à déterminer s'ils se rapportent à l’Echinor- hynchus porrigens de Rudolphi, ou à l'espèce de la Balænoptera Sibaldii, que Malm a désignée sous le nom spécifique de brevicollis. BALÆNOPTERA SIBBALDII. LITTÉRATURE. Sibbald, Phalainologia nova, Edinburgh, 1692. Rosenthal und Hornschuch, £pist. de Balænopteris quib. Gry- phiæ, 1825. Van Breda, Eenige byzonderheden omtrent den Walvisch, die den Dden november 1827 by Oostende gestrand is. ALGEm. KüuNST-EN-LETTER- BODE, 14827, n° 48. Du Bar, Ostéoyraphie de la Baleine échouëée à l’est du port d’Ostende, le 4 novembre 1827. Bruxelles, 1828. P.-L. Vanderlinden, Votice sur un squelette de Balénoptère, exposé à Bruxelles en juin ct juillet 1828. Bruxelles, 1828. Ch. Morren, Over de Balænoptera rostrata van Fabricius en beoor- deeling des werken, welke over een dier dezer soort, den 4 november, ter oosten van de haven van Oostende gestrandt, uitgeyeven zyn. BYDRAGENTOT NATUURKUNDIGE WETENSCHAPPEN, 1829, pp. 52-84. P.-L. Vanderlinden, Quelques observations en réponse à un article de M. Ch. Morren, sur la Balénoptère échouée près d’Ostende.. Messager des sciences et des arts, publié à Gand. Bernaert, Sur la Baleine échouée près d’Ostende, 1827. Paris, 1829, 8°, 62 pages. D'. KHobert Knox, Anatomy of the Rorqual, Proc. Roy. Soc., Edin., march 18, 1835. Gray, Proc. Zooz. Soc., 1847. Flower, On Physalus Sibbaldii, Proc. Zoor. Soc., W., 1865, p. 470. A. WW. Malm, Vagra Blad om Hvaldjur à allmänhet, och Balænop- tera Carolinæ isynnerhet. Gôteborg, 1866. A. W. Malm, Monographie illustrée de la Balénoptère trouvée le 29 octobre 1865 sur la côte occidentale de Suède. Stockholm, 1867. JS. Reinhardt, Vogle Bemäürkninger om Islœndernes steypireydr ; aftryk af videnskab. MEeDDELs. F. D. NATURH. Foren, 1867, nes 8-11, Kiobenhaven, 1868. Sophus Hallas, Oplegnelser om nogle paa et hvalfangst Toc……. VIDENSK. MEDD. FRA DEN NATURHIST. Foren for, 1867. Ÿ WW. H. Flower, On the probable idently of the Fin-Whales, described as Balænoptera Carolinæ. Proc. Zoor. Soc., mars 1868. W. Turner, An account of the great Finner-whale (Balænoptera Sibbaldii) Stranded at longniddry. TRANSACT. OF THE ROY. SOC. CF EDIN- BuRGH, vol. XX VI, 1870. G. ©. Sars, Om Blaahvalen, Christian. Vid-Selskabs Forhandlinger for 1874. P.-J, Van Beneden, ÂVotice sur la grande Balénoptère du Nord, d’après les notes tirées du Journal de voyage du docteur Otto Finsch, de Brême. BuLLET. AcAD. ROYALE DE BELGIQUE, 2° série, t. XXXIX, juin 1875. Julius Munter, Ueber Zwei, im 19 Jahrhunderte bei Greifswald zur Section gelangte männliche Individuen von Balænoptera Sibbaldii Van Ben, Greifswald, 1877. Sars, Bidrag til en noiere characteristik af vore Bardehvaler. Vid- Selsk., Forh, 1878. P.-J. Van Beneden, Une page de l’histoire d'une Baleine, .... BuLLETIN …., 9° sér., t. II, 1881. ( 251 ) Tycho Tullberg, Bau und Entwickelung der Barten bei Balænoptera Sibbaldii, Nov. acr. REG. Soc. Sc1ENTIAR., Upsaliensis, Ser. tert. vol. XI, 18385. Burmeister, Allas …. de la République argentine... in fol. Buenos- Ayres, 18385. Prof. Môblus, Ueber einen bei Sylt gestrandeten Blauwal (Balænop- tera Sibbaldii). SchRIFT. D. NATURWISS. VERENS FÜR SCHLESWIG-HoL- sTEIN, Bd, VI, Kiel, 1885. G. Smets, ÂVoles sur la tête d’un fœtus de Bal. Sibbaldii. Ann. Soc. ScienTir. DE BRUXELLES, 9° année 1885. D: Gustav Guldherg, Zur Biologie der Nordatlantischen Finwal- arlen. ZoorociscHEr JAHRBÜCHER, novembre, 1886. Robert Gray, Votes on a Voyage to the Greenland Seas in 1886. Tue ZooLoGisr, april, 1887. HISTORIQUE. Le terme générique de Balénoptère est de Lacépède. Il est généralement adopté aujourd’hui pour les Baleines qui ont une nageoire sur le dos. Les baleiniers les désignent sous le nom de Finnfish. Le mot spécifique de Sibbaldü, proposé par Gray pour la plus grande espèce animale, c’est-à-dire pour la Balénoptère, qui dépasse parfois 80 pieds en longueur, a été introduit par le savant directeur du British Museum, en 1847. Il est à regretter qu'il n'ait pas toujours été aussi heureux en proposant des noms nouveaux. Gray a proposé ce terme spécifique de Sibbaldii en voyant le jeune squelette de 4T pieds de long qui est conservé au Musée de la Société philosophique de Hull; on doit lui rendre cette justice que, s’il n’a pas connu les caractères distinctifs ou spé-: cifiques de l’animal, il a reconnu au moins ses aflinités avec les autres Balénoptères, que Sibbald avait décrites à la fin du XVIIe siècle. En effet, en 1692, sir R. Sibbald avait fait connaitre deux alénoptères échouées sur les côtes d'Écosse; l’une, un mâle, de 18 pieds de long, l'autre, un animal de 46 pieds de long; tous les deux s'étaient perdus dans la même baie de Forth. La première se rapporte sans aucun doute à l’espèce que nous désignons sous le nom de B. Sibbaldü. Sous le nom de Physalus, Pallas avait déjà parlé de Balé- noptères de 84 pieds, qu'il avait observées dans les mers du Nord en 1740. Il n’est pas douteux que la Balæna physalus de Pallas, qualifiée de vulgatissima species, in mare boreo et oceano orientali, ne soit l'espèce qui nous occupe, car c’est la seule qui atteigne cette taille !. Du reste, les caractères des fanons indiqués par l’illustre voyageur, sufliraient pour la reconnaitre. 1 PazLas, Zool. Ross. 4s., p. 290. Le même naturaliste fait mention également d’un squelette de Finnfish, c'est-à-dire de Baleine à nageoire dorsale, rapporté par Petrus Kargin au Musée de St-Pétersbourg. L'animal a 84 pieds anglais de longueur, dit-il, des fanons d’un noir bleuâtre; mais il accorde à ceux-ci une longueur de 10 à 12 pieds. Il y a évidemment une erreur à ce sujet, puisqu'il ny a pas de Baleine à nageoire dorsale avec des fanons de plus de 4 ou 5 pieds. Cette Balénoptère de la mer glaciale, à en juger par la taille ainsi que par la couleur des fanons, est, sans aucun doute, de la même espèce; les Islandais la con- naissent sous le nom de Steypireydr. Mais on a cru longtemps, avec Cuvier, que toutes ces diffé- rences de taille devaient être attribuées à des différences d’âge. Le célèbre naturaliste du Muséum admettait un Rorqual de la Méditerranée, dont l'individu de Pile S't-Marguerite était le type, et un Rorqual de la mer du Nord, dont le squelette de Berlin était l’autre type. Le 4 novembre 1827, les pêcheurs d'Ostende rencontrèrent en mer le corps flottant d’une grande Balénoptère dont les fanons étaient enlevés. [ls remorquèrent l'animal jusque dans le port d’Ostende. Un particulier en fit l’acquisition ; l'animal fût dépecé, le squelette monté et exhibé à Ostende, à Bruxelles, à Paris, à Londres, à S'-Pétersbourg, ensuite dans d’autres villes de l'Europe. Il échoua à la fin à Kazan; un magnat l’acheta et en fit don à l’Académie des sciences de St-Péters- bourg. Le Musée de l’Académie n'ayant point de place, la fait mettre au Jardin Zoologique où il se trouve encore. Au milieu des festivités, célébrant l’heureux échouement de la Balénoptère, à Ostende, au milieu de laffluence de milliers de visiteurs venant contempler le squelette du géant des mers, la science ne fut pas négligée : Dubar, chirurgien à Ostende, publia une description du squelette et figura les principaux ossements. Divers naturalistes cherchèrent à déterminer l'animal : Van Breda, Vanderlinden, Morren, s'en occupèrent et Vanderlinden émit l’avis que cet animal n’était pas connu; il proposa de (254) le nommer la Balénoptère d’Ostende. Vanderlinden avait raison. Si l’on suivait les errements généralement adoptés aujour- d’hui, cette espèce devrait porter le nom de Balénoptère d'Os- tende, ce nom ayant la priorité sur celui de Gray, qui n’a été proposé qu'en 1847. Si l’échouement d’Ostende a fait progresser l’ostéologie des Balénoptères, il a peu servi à la connaissance des espèces, faute surtout de matériaux de comparaison dans les Musées. Aussi en 1841 Schlegel ne reconnaissait parmi les Finn- fische 1 que la Balæna sulcata arctica et la Balæna sulcata antarctica. En 1847 Gray fit part, à la Société Zoologique de Londres, de ses observations sur un squelette de Balénoptère qu'il avait observé au Musée de la Société philosophique de Hull; ce sque- lette provenait d’un jeune animal, qui n’avait pas moins de 50 pieds de longueur, et qui ne se rapportait pas à une espèce connue. Il provenait d’un animal échoué dans le Humber, Yorkshire. Gray proposa de Le désigner sous le nom spécifique de Sibbaldii, pour rappeler le nom du naturaliste Écossais qui avait écrit sur ces animaux à la fin du XVII: siècle. Plusieurs cétologistes remarquaient, à cette époque, que certains os de Balénoptères dépassaient considérablement les dimensions des mêmes os dans l’espèce ordinaire (Balænoptera musculus). Le Musée de Copenhague possédait une nageoire pectorale des côtes du Groënland à dimensions extraordinaires. De mon côté J'avais observé quelques os extraordinaires par leur dimension, et ces ossements provenaient-ils d’une espèce nouvelle ou appartenaient-ils à une Balænoptera musculus géante? Les cétologistes étaient dans le doute. Pendant un voyage que je fis à Copenhague en 1856, il nous parut, à Eschricht comme à moi, que ces os ne pouvaient provenir que d’une espèce distincte, de grande taille, et qu'il fallait la nom- mer Balænoptera gigas. 1 Abhandlungen ...., Leyden, 1841. ( 258 ) Dans le ‘courant de l’année 1825, une Balénoptère pénétra dans la Baltique et fut capturée le 5 avril sur la côte occidentale de l’île de Rügen; elle avait 44 pieds 10 pouces de longueur. Rosenthal et Hornschuch nous en ont laissé une description 1. En 1862, une seconde Balénoptère, morte dans le Kattegat, fût entrainée par le courant dans la Baltique jusqu’à la côte ouest de lile de Rügen, où les pêcheurs la découvrirent à la fin du mois de Juillet. Le professeur Jul. Muntér eut l’occasion d'étudier les sque- lettes de ces animaux à Greifswald. Il était d'accord avec Sigism. Schulze sur leur identité spécifique, mais, ne sachant à quelle espèce il fallait les rapporter, il fit une visite au Musée de Leyde; 1l se persuada bientôt que cette Balénoptère était nouvelle pour la science et proposa, à la réunion des natura- listes allemands, en 1865, à Stettin, de la désigner sous le nom de Balænoptera gryphus 2. Plus tard, le professeur de Greifs- wald visita les musées de Hull et d'Édimbourg et il s’assura que sa Balænoptera gryphus ne différait pas de l’espèce que Gray avait désignée sous le nom de Balænoptera Sibbaldii. Ces Balénoptères ne furent décrites, sous leur vrai nom, par Jul. Münter, qu’en 1877 3. Il est à remarquer que la Balénoptère de Hull avait à peu près le même âge que les deux individus de la Baltique, à en juger par leur taille, qui ne dépassait pas cinquante pieds. En 1863, le professeur Flower, visitant la collection de Lidt de Jeude, à Utrecht, fût frappé de la largeur du rostre d’une tête de Balénoptère, provenant d’un animal capturé sur les côtes de Hollande; il n’hésita pas de la rapporter à une espèce nouvelle pour la science et il proposa de la désigner ? RosexrnaL et Hornsenuca, Epistola de Balæropteris quibusdam, Gry- phiæ, 1825. ? Tageblatt der 58 Versammlung deutscher Naturforscher und Aerlzle, in Stellin, 1865. \ % Juz. Müxter, Uber Zwei im 19-Jahrhunderte bei Greifsiwe'dménnlihe Individuen von Balænoptera Sibbaldii, Greifswald, 1877. 18 ( 256 ) sous le nom de Balænoptera latirostris, nom qui aurait dû lui rester 1. Peu de temps après, M. Flower reconnut que la tête d'Utrecht appartenait à la même espèce que le squelette de Hull, et il abandonna le nom qu'il avait proposé 2. Le 29 octobre 1865, une nouvelle jeune Balénoptère, luttant, pour se sauver, sur les côtes de Suède, près de Gôteborg, fut heureusement capturée; elle a été l’objet d’une monographie illustrée, avec dix-huit planches, contenant vingt-neuf photo- graphies, deux planches lithographiées et trois gravures en bois dans le texte. L'auteur, A.-W. Malm, a décrit cet animal dans tous ses détails et, comme il lui paraissait nouveau pour la science, il a proposé de le nommer Balænoptera Caroline. Le terme spécifique était le nom de madame Malm. L'année suivante, M. Flower publia une note : On the pro- bable identity of the Fin-Whales described as Balænoptera Caro- linæ. M. Flower avait parfaitement reconnu lespèce 3. En 1868, on commence à faire la pêche aux Balénoptères dans les eaux d'Islande. Hallas, médecin à bord d’un des baleiniers, qui y a fait la chasse à ces Cétacés durant deux ou trois ans, est un des pre- miers qui ait bien fait connaitre l’espèce que Pon chasse; il a envoyé une tête et des ossements à Copenhague, et Reinhardt a publié les documents et la description des principaux os du squelette. Il a figuré la tête, l’atlas, les os nasaux et los hyoïde #. A la même époque, le Musée de Leyde reçut du capitaine Bottemanne plusieurs pièces importantes du squelette dun individu de cette espèce, capturé dans les mêmes eaux, parmi 4 Notes on the Skeletons of Whales in the principal Museum of Holland and Belgium, Proc. Zoo. Soc., november, 1864 p. 410. ? On Physalus Sibbaldii, Proc. Zoo. Soc., june, 1865, p. 470. 5 Proc. Zool. Soc. of London March, 1866. # J. ReinaaroT, Nogle Bemaærkninger om Islændernes Steypireydr., Co- penhague, 1868. Videnskab. Meddels. fra den naturhistoriske Forening for 1867. lesquelles se trouvent un sternum, des vertèbres cervicales et d’autres ossements. Bottemanne dit que les Islandais connais- sent cet animal sous le nom de Steypireydr, et qu'il n’atteint pas moins de 80 pieds de longueur ; sa coloration est foncée, dit-il. Le 3 novembre 1869, une Balénoptère femelle pleine, de espèce qui nous occupe, vint échouer dans la bâie de Forth ; elle fut l’objet d’un travail fort intéressant de la part de Sir W. Turner, professeur d'anatomie à l’Université d'Édimbourg. Le fœtus mâle avait 19 pieds 6 pouces. Il s’étendait dans le corps de Ja mère en avant Jusque tout près des condyles du maxillaire inférieur. Pour avoir une idée de l’organisation de la Balénoptère qui nous occupe, il faut recourir à ce beau mémoire. Le professeur Sars, fils, pendant un séjour de plusieurs années aux iles Lofoten, a fait de son côté des observations intéressantes sur les différentes espèces de Balénoptères, et 1l distingue parfaitement la grande espèce. En 1874, il publia également une notice sur cette même Balénoptère, d’après des matériaux recueillis sur les côtes de Finmark. Cette notice est accompagnée d’un bon dessin, représentant un fœtus, d’un pied et quelques pouces de longueur. En 1873, le D' Otto Finsch se rend à Vadso pour assister à la pêche des Balénoptères, et 1l en rapporte une tète de fœtus, conservée dans la liqueur. D’après les notes et les dessins faits sur les lieux par le savant naturaliste de Brême, nous avons décrit les caractères extérieurs de l’animal dans les Bulletins de l'Académie 1. Dans la suite la tête du fœtus a été étudiée avec un soin particulier par M. l'abbé Gérard Smets; 1l a fait connaître toutes les particularités des os, du crâne et de la face ?. Le professeur Môbius a publié une notice sur une Balæ- noptera Sibbaldii, échouée, le 26 juin 1881, entre les îles Sylt et Führ (mer du Nord, côte occidentale du Jutland). L'animal était encore en vie quand il est venu à la côte. 1 Notice sur la grande Balénoptère du Nord, Bulletins de l'Académie, 1875, ? Ann. Soc. scientif. de Bruxelles, 1885. Plusieurs naturalistes se sont rendus dans ces dernières années au nord de la Norwège, pour y assister à la pêche des Balénoptères; 1ls en ont rapporté de précieux matériaux pour l’histoire de la grande espèce : en 1877, MM. Aurivillius et Forstrand, et depuis, MM. Tycho-Tollberg, Éd. Van Beneden, Pouchet, Guidberg et, en dernier lieu, M. O0. Cooks. M. Tycho-Tollberg à publié un travail intéressant sur la struc- ture et le développement des fanons de la grande espèce. Ils sont larges à la base, noirs comme du jais avec un teint bleuâtre. Des expositions, comme celle qui vient d’avoir lieu à Ham- bourg (1884), ont, dans une large mesure, contribué au progrès de la cétologie. Ce n’est que dans des occasions pareilles qu’on peut comparer les squelettes de ces grands mammifères, dont on trouve bien rarement plus d'un exemplaire dans un musée. M. Guldberga rendu compte de cette exposition dans le journal anglais Nature 1, et, à cette même occasion, le D' H. Balan a publié une notice sur les Baleines principales de locéan Atlantique et leur distribution dans cette mer 2. Ce qui a le plus contribué à nous faire connaître les diverses espèces des Balénoptères, et surtout celle qui nous occupe, ce sont les pêcheries que l’on a établies d’abord dans les eaux d'Islande et que l’on a continuées ensuite sur les côtes de Fin- mark, où elies ont pris une grande extension dans ces der- nières années. SYNONYMIE. Comme nous venons de le voir, c’est le même animal qui est désigné sous le nom de Balæna physalus, par Pallas; Cuvierius et Physalus Sibbaldii, par Gray; Pterobalæna gigas, par Eschricht; Plerobalæna gryphus, par Jul. Münter; Balæ- noptera lalirostris, par Flower ; Balænoptera Cuvierius ou Caro- linæ, par Malm. 1 No 599, 19 fév. 1885. 2 Segelhandbuch für den Atlantischen Ocean. XIV kapitel. ( 259 ) Les Groënlandais le connaissent sous le nom de Tunnolik ; les Islandais sous celui de Steypireydr ; les Norwégiens sous celui de Blaahval. Sars avait attribué le nom de Hushvai à la Balænoptera Sib- baldii. M. Guldberg, conservateur du Musée zootomique de l'Université de Christiania, croit que Sars s'est trompé; le Hushval ferait son apparition dans ces régions à une autre époque que le Sibbaldii, qui ne se montre qu'en été. Dans notre mémoire sur la Baleine des Basques 1, nous avors d’ailleurs dit que ce nom était donné à la Balæna bis- cayensis. Le Physalus antarcticus de Malm, dont nous avons vu des vertè- bres au Musée de Stockholm, provenant du détroit de Magellan, représente sans doute le Sibbaldii dans l'hémisphère austral. Parmi les ossements provenant de l'expédition française au Cap Horn et qui sont conservés au Muséum à Paris, il yen a sans doute qui se rapportent à cette même espèce. Les baleiniers américains et anglais parlent souvent d’une Balénoptère sous le nom de Sulfurbottom; c’est, d’après eux, un animal de grande taille et qui hante l'océan Pacifique et la mer des Indes. Ils lui accordent une taille de 80 pieds et des fanons fort larges et d’un noir luisant. Nous avons ainsi plusieurs raisons de croire que ce Sulfurbottom est aussi syno- nyme de B. Sibbaldii. Ce qui nous confirme dans ce rapprochement, c'est l'examen, que nous avons eu l’occasion de faire à Vienne, des fanons désignés sous ce même nom par le capitaine Charles Scammon et que le prof. Steindachner avait lui-même rapportés de San- Francisco. CARACTÈRES. Cette espèce se distingue des autres Balénoptères par le rostre, qui est fort large, surtout sur le milieu de sa longueur ; ® Histoire naturelle de la Baleine des Basques ; Mémoires de l'Académie, 1886, p. 21. | 260 ) par les os nasaux tronqués en avant, et par les palatins fort larges; le maxillaire supérieur est dépassé par le maxillaire inférieur, et l’apophyse coronoïde est haute et pointue; les vertèbres sont au nombre de soixante-trois ou soixante-quatre; les côtes sont au nombre de quinze ou seize paires; le sternum est large et court, les métacarpiens et les phalanges sont com- parativement longs. Les fanons sont courts et fort larges à leur base, d'un noir foncé à reflets bleuätres 1. La nageoire dorsale est petite, pointue et rapprochée de la nageoire caudale. Elle est placée au-dessus de l’anus, vers les quatre cinquièmes de la longueur du corps. Les nageoires pec- torales sont longues et pointues. La peau du dos est d’un brun foncé tirant sur le vert. La peau du ventre est grisâtre, argentée. Des poils, au nombre d’une trentaine, sont placés au menton dans un espace circulaire (Malm). Le caractère si important de la largeur du rostre, qui lui avait valu le nom de /atirostris, ne se trouve cependant bien prononcé que chez l'adulte. Nous avons été à même de comparer des photographies de têtes de fœtus, de jeunes et d'adultes, et nous avons pu nous assurer que la largeur des maxillaires, vers le milieu, se montre seulement après la nais- sance. La taille de l'animal adulte dépasse 80 pieds. Pallas lui accorde 84 pieds. La femelle de 1827, trouvée morte en mer, avait 85 pieds : (26®,60). Scoresby en accorde 82 à une Balénoptère venue à la côte à Shetland pendant l'hiver 1817-1818. I1 n'indique pas le sexe de l'individu. ? Les fanons sont noirs aussi dans la Balænoptera borealis, maïs leur forme les fait ressembler plutôt à des fanons de Baleine qu'à des fanons de Balénoptère; ils sont en effet très étroits à leur base. Les barbes sont blan- ches et fines dans la Balænoptlera borcalis, noires et épaisses dans la Balæ- noptera Sibbaldii. ( 261 ) Celui de Sibbald, capturé en 1692 à l'entrée du Firth ot Forth, était un mâle de 78 pieds. | Un autre individu, de sexe femelle, capturé également dans le Firth of Forth, avait 80 pieds, et le fœtus qu’elle portait en avait près de 20. Knox accorde 84 pieds à un animal capturé le 5 octobre 1831 près de Nort-Berwick et dont le squelette est au Musée d'Édim- bourg. Un animal échoué sur les côtes à Plymouth mesurait 79 pieds. La Balénoptère, dont la nageoiïre pectorale avait été envoyée par Holbôll à Copenhague, avait été prise dans la baie de Baflin le 12 août 1843. Elle avait 34 aunes danoises. A en juger par sa taille, c'était sans doute une femelle. M. Guldberg estime la taille au moins à 75 pieds à l’âge adulte. Les plus forts individus qu'il ait vus avaient 84 pieds. On en cite de 86 et même de plus grands. Le Dr Finsch a vu prendre à Vadsô une femelle pleine qui avait 84 pieds. Un pêcheur des côtes de Finmark a capturé en 1885 : 1 12 juillet, une femelle de 85 pieds; le 24 juillet, une de 82; le 9 août, une de 81; le 6 juin, une de 72 et le 24 août, un mâle de 75 pieds. Ainsi, le 24 août il prend un mâle et une femelle, et la femelle a T pieds de plus quele mâle. Il paraît que l’on ne prend plus de si grands individus. Dans ces derniers temps, six individus capturés dans les eaux d'Islande ne mesuraient que de T0 à 80 pieds. La Balænoptera Sibbaldi est l'espèce la plus commune dans ces parages. M. Alfred Cocks rapporte que sur 406 cétacés à fanons, capturés en 1883 sur les côtes de Finmark, il y avait 175 Balænoptera Sibbaldii, et sur le restant à peu près la moitié Balænoptera borealis et musculus. Sur 40 individus capturés par un seul pêcheur, il y avait 49 Sibbaldii, 8 Megaptera et le restant des Musculus 1. Les cétacés en naissant ont à peu près le tiers ou le quart de 1 Azrr. Cocxs, loc. cit, p. 20. ( 262 ) la longueur de la mère. Les Phoques, si l’on en croit le témoi- gnage de quelques naturalistes, sont dans le même cas, et on cite même des exemples de jeunes animaux de cet ordre qui, en naissant, auraient eu à peu près la moitié de la taille de leur mère. Ce sont donc les mammifères dont la taille, relative- ment à la mère, est la plus grande à la naissance. La grande Balénoptère, Balænoptera Sibbaldii, a été étudiée par le professeur Sir Turner : le savant professeur d'Édimbourg a vu une femelle de 80 pieds, échouée sur les côtes d'Écosse, qui renfermait un fœtus à terme de près de 20 pieds; c'était donc le quart de la taille de la mère. M. Henri Berd a vu sur les côtes d'Islande un fœtus qui avait 48 pieds. Le Musée de Leipzig a reçu de Vadsô un fœtus de 18 pieds également. Un fœtus recueilli sur les côtes d'Islande et envoyé par le capitaine Bottemanne au Musée de Leyde, avait 17 pieds. Le D: Finsch a trouvé dans une femelle, à Vadsô (Finmark), entre le 7 et le 10 juillet, un fœtus de T pieds et un autre de 41/9. Le 7 août, on a trouvé dans une femelle, capturée à l’est du cap Nord, un fœtus de 9 à 10 pieds. La mère avait 75 pieds norwégiens, ou 78 pieds 2 pouces anglais. M. Alfred Cocks a observé sur les lieux (également Finmark), le 21 juillet, un fœtus de 3 pouces, à Eretiki; un second de 9 à 10 pouces, le août, à Jarfiord ; un troisième de 15 pouces, à Vardô, le 14 août, et un quatrième de 15 pieds 6 pouces, du 15 au 17 août (1884). On connaît plusieurs autres fœtus. La plupart viennent de Vadsô. On voit des différences de taille assez grandes dans des fœtus recueillis à quelques jours d'intervalle. Il est à remar- quer que l’on ne commence la chasse qu’au mois de mai sur les côtes de Finmark et que tous ces fœtus sont recueillis pendant les trois mois d'été. Sars a figuré un fœtus de 1 pied 4 pouces. Guldherg a rassemblé la mesure de 28 fœtus, mais on n’a malheureusement pas tenu note de la date de leur capture. ( 263 ) Tycho-Tollberg a eu un embryon de 1 mètre, un de 2 mètres, un de 3 mètres et un de 455. Le fœtus de Longniddry avait au delà de 19 pieds, Guldberg cite un fœtus de 23 pieds, qu’il considère comme étant à terme. Il croit devoir fixer la taille de la Balænoptera Sibbaldii, en naissant, entre 23 et 24 pieds, ou 7 1/3 à 8 mètres 1. ORGANISATION. Plusieurs travaux importants ont paru sur l’organisation de la Balénoptère de Sibbald, et parmi eux nous pouvons citer particulièrement le beau mémoire de Sir W. Turner, qui a eu à sa disposition une femelle de T8 pieds 9 pouces en chair et un fœtus de 19 pieds 6 pouces, La tête du fœtus deT pieds, conservée dans la liqueur avecles Vue de la partie antérieure de la tète du fœtus, conservée à Louvain. * Pour donner une idée de cette différence de taille, nous ferons remarquer que la petite Rostrata a, d'après Eschricht, 9 pieds de longueur en venant au monde, et la grande qui nous occupe en a 20. ( 264 ) parties molles, nous a montré combien le maxillaire inférieur dépasse le bout du rostre; une double rangée de bulbes à poils garnit la lèvre supérieure, et une double rangée se montre également sur le bord et au-dessous de la mandibule infé- rieure. En disséquant la tête du fœtus, nous avons observé une dis- position bien curieuse dans la cavité de la bouche. La langue forme en avant une saillie; mais en arrière, au lieu de s’élever et de s’insérer sur le corps de l’os hyoïde, elle se déprime et il se forme une véritable excavation. La caisse tympanique mesure 13 centimètres en hauteur; la grande apophyse, 24 en longueur. La colonne vertébrale de B. Sibbaldii compte un plus grand nombre de vertèbres que celles des autres Balénoptères, mais il est à remarquer que l’on conserve bien rarement les dernières caudales. Il n’y a que les naturalistes qui attachent de l'impor- tance à conserver tous les os, petits ou grands, ossifiés ou car- tilagineux. Knox à compté soixante-trois vertèbres, qu'il répartit en cervicales, sept; dorsales, quinze; lombaires, seize ; caudales, vingt-cinq. C’est le même nombre que dans le jeune squelette de Gôten- borg, seulement il y a une lombaire de moins et une caudale de plus. Cette différence peut dépendre de la dernière lombaire, qui est comptée quelquefois avec les caudales. Pallas n’accorde que soixante et une vertèbres à la Balæna physalus, comme il appelle la Sibbaldii. Un squelette du Musée de Stockholm, provenant de Vadsô, montre soixante-deux vertèbres, d’après une lettre de M. Smith. Ce même nombre se trouverait dans une mère et dans un fœtus. Le squelette de Hull, de 50 pieds de long, a soixante-quatre vertèbres (7 cervicales, 16 dorsales, #1 lombaires et caudales). La femelle échouée dans les sables de l’île d’Oleron, en 1827, et qui n'aurait aussi que 54 pieds, portait, d'après les suppo- sitions, soixante-trois vertèbres (46 présentes et 17 qui man- quaient dans la queue). ( 265 ) Le squelette d'Édimbourg a soixante-trois vertèbres (7 cerv., 45 dors., 16 lomb. et 25 caud.). Celui de la Balænoptera Carolinæ de Gôtenborg, en a cin- quante-six (15 dors., 15 Iomb, et 26 coccygiennes). Sans doute, elles ne sont pas toutes conservées, puisque le nombre ne s'accroît pas avec l’âge, pas plus que celui des fanons. Une femelle de 13 mètres, du Musée de Kiel, a également soixante-quatre vertèbres (7 cerv., 16 dors., 15lomb. et 26 caud.). L’atlas de la femelle de Stockholm présente à sa face posté- rieure tous les caractères que MM. Flower et Reinhardt ont attribués à cette espèce. Pour se faire une idée de la taille des vertèbres, nous ferons remarquer que l’axis mesure, d’un bout de ses apophyses à l’autre, 4",95. Nous avons vu au Musée de Stockholm une vertèbre lom- baire du détroit de Magellan, dont les apophyses n'étaient pas soudées et dont le corps mesurait en largeur 49 centimètres, en hauteur 39 et en longueur 27, avec une apophyse épineuse, mesurée de sa base, de 77 à 78 centimètres. Malm a écrit sur l'étiquette de cette vertèbre du Musée de Stockholm : Physalus antarcticus ; elle est figurée dans son mé- moire {. Une autre vertèbre, de grandeur colossale également, une dorsale, la onzième, du même Musée, mesure en travers 48 cen- timètres, en hauteur 39, en longueur 16, avec une apophyse transverse, mesurée depuis le canal vertébral, de 54centimètres. Les épiphyses sont soudées. Nousavons tout lieu de croire que ces vertèbres proviennent de l'espèce représentative de notre Sibbaldii, ou de la Sibbaldii même. Nous venons de recevoir une omoplate d’un individu, qui avait près de 80 pieds et qui mesure un mètre soixante, de angle antérieur à l'angle postérieur de l'os. ? Hvaldjur à Sveriges Muzeer. Kongl. Svenska Vetenskaps-Akademiens handlingar. Stockholm, 4871, pl. 1,7, c. ( 266 ) Le sternum de jeune animal le plus intéressant est celui du Musée de Leyde. Il consiste dans un large disque, sans échan- crure en avant et sans appendice en arrière, ayant en travers de 39 à 40 centimètres, et d'avant en arrière 25 à 26 centi- mètres. Le sternum du jeune mäle de Gütenborg présente la même forme. Le sternum adulte de Leyde se termine en arrière en pointe arrondie, et mesure en travers 67 à 68 centimètres. Celui d’Ostende lui ressemble aussi bien qu'au sternum d'Édimbourg. Sternum d'une femelle, du Musée de Stockholm. Le sternum de la femelle de Stockholm se termine de la même manière postérieurement, mais, en avant, le bord n’est pas arrondi comme dans les autres; il y a pour ainsi dire un second étage. D’après ce que nous venons de dire, cet os n’est point échancré en avant dans l'espèce qui nous occupe, corame il l’est dans d’autres espèces. Le sternum représenté par sir Turner, provenant d’une femelle adolescente, ne ressemble pas complètement aux autres. Le professeur de l’Université d'Édimbourg a publié aussi la figure du sternum d’un fœtus mâle, fort intéressant ; 1l est formé d’un cartilage qui ressemble au sternum de l'animal adulte, et d’un second cartilage fort petit, placé derrière l’autre sur la ligne médiane, et qui semble devoir former la pointe postérieure de cet os. ( 267) Le squelette a seize paires de côtes quand elles sont toutes conservées. La dernière se perd souvent. Nous en comptons seize dans le squelette de Hull et dans quelques autres squelettes. Un fœtus femelle du Musée de Stockholm n’en a que quinze. Dans la Balénoptère qui nous occupe, on voit souvent cette première côte formée de deux pièces plus ou moins complè- tement soudées. Dans le squelette d’Ostende, la première côte est réellement bifurquée, comme nous l’avons déjà fait remarquer, et celui qui la monté a attaché cet os à la dernière cervicale et à la première dorsale; c’est ce qui avait fait dire à Dubar, qui a décrit ce squelette, qu'il n’y avait que six vertèbres à la région cervicale, La première côte du squelette d’un jeune mâle de Gôtenborg est simple, ainsi que la première du squelette de Stockholm, Un radius des Antilles, au Musée de Bordeaux, mesure plus d’un mètre de longueur. Dans le squelette de Hull, nous voyons les phalanges des doigts au nombre de 4, 6, 5 et 3. Dans celui de Gôtenborg, décrit par Malm, ils sont 5, 8, 8, 4. Dans celui de Copenhague, qui vient de la baie de Baflin, nous avons compté 6, 6, 7, 4. Il est à remarquer que les doigts des adultes sont rarement complets, ce qui paraît dépendre des luttes que ces animaux ont eu à soutenir avec les Orques. Les bords des nageoires sont très souvent rongés, aussi bien des nageoires caudales que des nageoires pectorales. Le dessin publié par Schlegel dans la Fauna Japonica montre bien comment ces organes sont entamés sur leurs bords. D’après le fœtus de Longniddry, le nombre de rangs de fanons serait de trois cent trente-cinq. L'espace qui les sépare est d’un dixième de pouce. Chaque rang de fanons compte vers le milieu jusqu’à sept, huit et même neuf lames en avant, seulement cinq en arrière; le nombre s'accroît jusqu’à trente, mais dans ce cas les derniers sont à peine distincts. Les fanons du fœtus n’ont pas cette belle couleur noire des adultes. (268 ) Quand le fœtus a 2 mètres, les fanons sont en voie de for- mation. M. Tollberg a figuré les fanons d’un fœtus de 3 mètres, et d’un autre qui avait atteint 4 1}, mètres. Dans ces dernières années, un beau travail a paru sur la for- mation des fanons de la Balænoptera Sibbaldü, par Tycho-Toll- berg !. Sous le rapport morphologique, les fanons correspondent aux papilles du palais des Ruminants ; leur origine est épi- dermique. Lorsque l'embryon a 2 mètres de long, l’épithélium du milieu du bord du maxillaire s’épaissit, et cette épaisseur s'étend ensuite en avant et en-arrière. Comme Eschricht lavait déjà remarqué, le nombre de fanons ne change pas dans le cours du développement. MM. G. Pouchet et Chabry ont exposé le résultat d’observa- tions intéressantes sur l’évolution des dents de la Balænoptera Sibbaldii, dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences ?, M. Planteau a fait connaître des observations sur la muqueuse de l'utérus, d’après des pièces rapportées de Vadsô par le professeur Pouchet 5. MOEURS. Chaque espèce de Cétacé se comporte d’une manière parti- culière en mer, et les pêcheurs les reconnaissent à distance sans se tromper. La Balénoptère qui nous occupe est recon- naissable non seulement à sa nageoire dorsale, qui est très petite et placée fort en arrière, mais également à son high spout and conspicuous size, comme disent les baleiniers anglais. 1 TozLserG-Tycno, Sur la structure et le développement des Baleines (Bal. Sibbaldii), ARCHIV. ZOOL. EXPÉRIM., L. III, n° 5, notes, p. xxx1x. Nov. act. Reg. Soc. Scientiar., Upsaliensis, vol. XI, 1885. 2 90 février 1882: 8 PLANTEAU, Muqueuse de l'utérus de Balænoptera Sibbaldii. Jour. D’ANAT. ET DE Puys., juillet, 1881, p. 277. ( 269 ) La Baleine franche parcourt un espace de 9 à 10 milles à l'heure, et les Balénoptères, surtout la” grande, nagent encore plus vite; le capitaine sir Turner accorde à la Balænoptera Sib- baldii, qui atteint 89 pieds, une vitesse de 12 milles à l'heure, comme au Cachalot. Le professeur Sir Turner, dans une conférence donnée der- nièrement à Édimbourg, a parlé de la force des grands Cétacés. Il estime la force de la Balænoptera Sibbaldii, qui parcourt 12 milles à l'heure, dont le poids est de 70 tonnes et l’envergure de la queue de 18 à 20 pieds, il estime cette force, d’après M. Henderson, à 145 chevaux. Les Balénoptères sont généralement considérées comme ichtyophages, ainsi que les Mégaptères, mais l’espèce qui nous occupe ne paraît guère manger que des Crustacés. Le Crustacé qui fait sa pâture principale est un mysidé, que l’on désigne sous le nom de Roeger ; c'estune Thysanopoda, qui porte maintenant le nom de Euphrasia inermis. C’est le Krill des pêcheurs !. La. Balénoptère poursuit ces Crustacés schizopodes jusque dans les Fiords, dit Sars. Ce petit crustacé paraît en si grande abondance à l’est du cap Nord, pendant les mois d'été, qu’elle sert de pâture non seulement aux Balæ- noptera Sibbaldii et borealis, mais également au Gadus virens et aux nombreux oiseaux marins qui descendent comme des nuages sur cette proie. _Collett a trouvé communément de 3 à 400 litres de Thysano- poda dans leur estomac. Mon fils en a ouvert à Vadsô en 1889, qu’on venait de capturer et il a trouvé leur estomac également plein de ce petit crustacé. C’est par erreur, sans doute, que Holbôll cite le Mallotus arcticus, et Pallas, les Loligo et les Méduses, comme nour- riture principale de cette Balénoptère. D’après le D' Guldberg, la Balænoptera borealis poursuit la même pâture et ne se rend cependant pas autant à l’est que la Balænoptera Sibbaldii. 11 faudrait en conclure que ce n’est pas 1 Nalurw. Vercin., mai 1885. (270) exclusivement la recherche de la pâture qui les guide dans leurs pérégrinations. Le Cestode, que nous possédons à l’état de strobile, provient sans doute de ce crustacé Schizopode. Ces Cétacés vivent par couple et la femelle atteint une taille plus forte que le mâle. Malmgren a vu deux grandes Balénoptères, sans doute mâle et femelle, à la latitude de 79,45. En septembre 1881, on a trouvé une femelle morte sur les côtes près de Plymouth, et le 2 novembre suivant, on a vu échouer un mâle à peu près sur les mêmes côtes. Comme les autres espèces, la Balænoptera Sibbaldii s’apparie sans doute à certaines époques de l’année et les sexes, comme les individus qui composent les bandes, se prêtent assistance en cas de danger. Les pêcheurs ont plus d’une fois remarqué que des Balénop- tères vont au secours des individus capturés, et continuent leurs évolutions autour du cadavre remorqué, jusqu’à ce que le danger d’être prises elles-mêmes devient trop éminent. Y a-t-il une époque des amours, ou ces cétacés s’accouplent- ils à toutes les époques de l’année? Est-ce dans l’Atlantique pendant lhiver, ou dans la Mer de Barentz pendant l'été? Qu'elle est la durée de gestation ? Y a-t-il un lieu de prédilection pour la mise bas? Ce sont autant de questions auxquelles 1l est encore difficile de répondre positivement. Nous n'avons encore que des observations isolées. L'accouplement se fait, d’après Guldberg, en étésur les côtes de Finmark et de Laponie et il cite un exemple à la date du 15 juillet (1883). On a vu un mâle etune femelle tous les deux sur les flancs, s'approcher lentement l’un de l’autre, puis se tourner ventre contre ventre. Le vapeur tira sur le mâle, qui lâcha la femelle sans être blessé. Le lendemain on captura une femelle de 70 pieds. A lautopsie, la muqueuse vaginale était rouge et injectée. L’impression était que la femelle était fécondée. Guldberg n’a pas trouvé de spermatozoïdes dans les mucosités utérines. (271) Mais à en juger par la taille des fœtus que l’on recueille assez régulièrement pendant l’époque de la pêche, laccouple- ment doit avoir lieu également ailleurs et en d’autres temps; ainsi cette Balénoptère n'aurait pas d’époque fixe pour l’accou- plement, par conséquent non plus pour l’époque de la partu- rition. Dailleurs M. Guldberg est arrivé à la même conclusion, comme il ressort d’un de ses derniers travaux f{. La durée de la gestation dure au delà d’une année, et sans aucun doute elle varie d’une Balénoptère à l’autre. La Balænoptera Sibbaldii se reproduit tous les trois ans; les Balænoptera musculus et rostrata semblent se reproduire tous les deux ans environ. La taille des fœtus, recueillis à Vadsô et dans les ports voisins, est très variable, comme nous l’avons déjà dit plus haut. Au commencement de juillet 1883, on amena à Svartneæs, près de Vardô, une grande femelle, avec les mamelles pleines de Jait et une matrice énorme; il a semblé au conservateur du Musée Zootomique de Christiania, que cette femelle avait mis bas depuis peu de temps. La femelle de la baie de Forth, ainsi qu'une autre citée par le professeur d'anatomie de l’Université d'Édimbourg, auraient au contraire mis bas au mois d'octobre ou de novembre. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Cette Balénoptère fait régulièrement son apparition sur les côtes d'Islande et de Finmark au printemps, et elle disparaît à la fin de l'été, Quelle direction prend-elle alors pour passer les mois d'hiver? Traverse-t-elle l’Atlantique pour se rendre à la côte de Labrador? Nous fondons grand espoir sur l'initiative, © G. À. GuLDBERG, zur Biologie des Nordatlantischen Finwhälarten. ZOOLOGISCHE JAHRBÜCHER, JENA, 1866. vol. 1], fase. I, pp. 126-174. 19 ( 272 ) qui vient d’être prise par la commission de pêche de Was- hington, d'inviter les habitants des côtes d'informer par télé- graphe le professeur Sir A. Baird, le secrétaire de l'institut Smithsonien de Washington, chaque fois qu’un Cétacé de quelque importance apparaîtrait. Pour faciliter cette tâche, M. Fréd. True, curateur des mam- mifères du Musée national, a publié une notice intéressante, avec dessin au trait, des différents Cétacés qui pourraient faire leur apparition sur les côtes des États-Unis d'Amérique 1. Quant à l'époque de lapparition de la grande Balénoptère, nous avons recueilli quelques faits qu’il s'agira de coordonner quand ils seront assez nombreux. Sophus Hallas, qui à pris part à la pêche des Balénoptères sur les côtes d'Islande, dit que leur apparition dans les eaux d'Islande à lieu vers le 21 avril. D’après les pêcheurs, les Balænoptera Sibbaldii et musculus, ainsi que la Megaptera boops, apparaissent dans le voisinage du cap Nord en même temps que la Muallotus villosus, ia nourri- ture favorite des Gades. Des millions de Larus (Larus glaucus et eburneus) suivent ces bancs de poissons. L'Éclipse, partie de Peterhead, le 20 avril 1886, pour la pêche à la Baleine, a rencontré, quatre ou cinq jours après son départ d'Ecosse, une Balænoptera Sibbaldii; du moins, R. Gray suppose, d’après la taille, que la Balénoptère qu’ils ont aperçue appartient à cette espèce. Le huitième jour, lÉclipse s'est approchée des glaces, et deux autres individus de la même espèce se sont montrés à l'horizon. Le capitaine de l’Éclipse a vu ensuite des Balænoptera Sib- baldii à côté d'Hyperoodon, et même dans des eaux qui avaient une température au-dessous de deux degrés: et demi, à côté des Wysticetus. Nordenskiold croyait que les Sibbaldii n’entraient pas dans des eaux au-dessous de cette température. * Fren. TRUE, Suggestions Lo the keepers of the U. S. Life-Saving stations .….. {9 the best means of collecting and preserving specimens of whales and porpoises. Washington, 1884. (273 | À 790, 150 N., le capitaine Gray a vu encore une Balænoptera Sibbaldii avec deux jeunes. Avec les baleiniers, on peut dire qu’elles sont Cold water whules. Il n’est pas douteux que cette même Balénoptère ne se montre de l’autre côté de l'Atlantique. Le professeur Cope cite quatre espèces, dont une est connue des baleiniers sous le nom de Finbach whale, et mesure au moins T4 pieds, à en juger par un squelette du Musée de Cambridge. C’est le Sibbaldius sul- | fureus de Cope. Guldberg cite le cas d'un individu capturé en Europe, qui portait un harpon semblable à ceux qu’on emploie de Fautre côté de l'Atlantique, probablement des côtes du Labrador. Nous savons que cette Balénoptère apparaît régulièrement au printemps au détroit de Davis, quand la Baleine franche l’a quitté, et elle se rend dans la mer de Baflin à de hautes lati- tudes. C’est l'espèce la plus boréale du genre, dit F. Gray. Les Esquimaux, comme les baleiniers, ne distinguent pas la Balæ- noplera Sibbaldii de la Balænoptera musculus, dit R. Brown t. Nous connaissons un exemple intéressant de cette capture, faite le 12 août 1843 dans la baie de Baflin : c’est celle de la femelle de 34 aunes danoises, dont la nageoiïre pectorale avait été envoyée à Eschricht. Le ventre de cette Balénoptère était noir et gris, disait Holbôll; souris-foncé entre les plis et la nageoire dorsale petite ?. Celles qui doublent le cap Nord longent la côte de Finmark et se dirigent vers l’est. M. À. Cockx a vu des Balænoptera Sibbaldii jusqu’au 18 septembre à l'entrée de la mer Blanche. Déjà en 1852, 0. Heuglin avait signalé à la Société royale de géographie de Londres 3 que ces animaux sont extrêmement abondants dans la mer Blanche, et il avait même exprimé l’es- poir de voir l’industrie de Ja pêche s'établir dans cette mer, si 1 The Zoologist, février 1887. EscuricuT, 5° Traité, p. 151. 5 Journ.roy. geogr. Society, vol. XXII, p. 129. L2 : (274 ) peu connue alors. Il prétend aussi que les côtes de cette mer intérieure sont couvertes d’ossements de ces Cétacés. Elle se rend dans les eaux de Spitzhbergen, comme dans la mer de Baffin, à de hautes latitudes. Malmgren rapporte qu'il a vu, comme le capitaine Gray, le 17 septembre 1861, deux Balénoptères de grande taille, à 79,45’ latitude nord, entre l’île d'Amsterdam et le Spitzhberg. Leur navire y était à l'ancre. On sait que cette Balénoptère est également commune à Beeren-Eïland et sur les côtes de la Nouvelle-Zemble. Dans le courant du mois d'août, ces animaux abandonnent ces régions, et la première espèce qui quitte les côtes de la Laponie, c’est la Balænoptera Sibbaldii; la seconde espèce, c’est la Balænoplera musculus. La Megaptera reste la dernière, paraît-il (A. Cockx). l Le 18 septembre, on a vu encore un individu de cette espèce à Eretiki. M. Guldberg a fait le relevé des Balénoptères de cette espèce capturées depuis dix ans : en 1876, il y en a eu 42; en 1877, 22 seulement, c’est le plus petit nombre; en 1878, il y en a eu 10; en 1879, 84; en 1880, 62; en 1881, 221. C’est le plus haut chiffre que l’on ait atteint. En 1889 et 1883, on estime le nombre à 200; en 1884, les animaux étaient grands, mais moins abondants; en 1885, on n’en a pris que 58. On a capturé à la place une centaine de Balænoptera borealis. En 1886, on en a capturé une centaine. La Balænoptera borealis était rare cette année, mais la Balænoptera musculus, par contre, fort abondante. M. Alfred Cockx estime que sur 406 captures faites en 1883 sur les côtes de Finmark, il y avait 175 Balænoptera Sibbaldii. La Balænoptera Sibbaldii a été rare en 1885 sur les côtes de Finmark. Le Crustacé qui forme sa pâture, la Thysanopoda inermis, a fait défaut, et le Seje ou Cod whale des Norwégiens a paru à sa place. À cause de son énorme taille, cette espèce est plus exposée à échouer que les autres, et nous avons plusieurs exemples d'individus trouvés flottants en mer. (275 ) Ascanius signale exemple d’une femelle de GG pieds qui est venue se perdre sur les côtes de Norwège. Le 28 juillet, on a vu sur les côtes est de l'Islande un Sfey- pireydr flottant en mer. Un animal de 80 pieds a échoué sur les côtes de Hollande (Oosten et Sluysche Gal) le 1% mai, nous ne savons de quelle année. Le commissaire De Witte fait mention des fanons noirs, d’une aune de longueur, et dont il estime le nombre à deux cents 1. Une des captures, dont on s’est le plus occupé, est celle faite en 1827 d’une femelle trouvée flottante en mer et remorquée par les pècheurs jusqu’au port d’Ostende. L'animal mesurait, comme nous l'avons dit plus haut, 85 pieds, et son squelette, après avoir été exhibé dans les principales capitales de l'Eu- rope, est conservé, dans un triste état, au Jardin botanique de St-Pétersbourg 2. C’est la propriété du Musée impérial de l’Académie des sciences de St-Pétersbourg. Cette même année, au mois de mars {le 10), une jeune femelle, qui n'avait que 54 pieds, a échoué dans le sables de l'île d’Oleron, et on peut se demander si ce n’est pas un Balei- neau qui avait accompagné la Balénoptère dont nous venons de parler. Le D" Fischer donne des détails fort intéressants sur cette Balénoptère : le sternum était petit et plat, les ver- tèbres, au nombre de quarante-six, sans celles de la queue, qui sont au nombre de dix-sept, ce qui fait en tout soixante- trois vertèbres. Les os n’ont malheureusement pas été conservés. Le D' Fischer fait mention d’une autre Balénoptère qui a échouéen avril 1863 sur les côtes de Dunkerque, et qu mesu- rait 30 mètres. ‘ Le 1‘ mai est venue échouer une Baleine : « na myne gissinge omtrent 200 git zwarte lande, een elle langh ende breed, groot van muyle, daer wel eene gemeene schuyt ingaen soude,in der waerheyt een monster der hellen. » * « Das grosse Skelet der bei Ostende gestrandeten, welches Europa durch- wanderte, ist jetzt Eigenthum unseres Museums, » m'écrivait le Dr Brandt dans une lettre datée de St-Pétersbourg le 1er janvier 1872, (976) On cite encore un animal, rejeté par la mer à l’état de cadavre sur la plage de Soulac, dans le golfe de Gascogne. C'était le 13 juillet 1879. On ne voyait flotter qu’une masse informe de chair en putréfaction ; la tête et la queue étaient séparées; il y a lieu de croire, nr'écrit le capitaine Jouan, que, sous limpul- sion des vagues, qui sont terribles sur cette côte, le corps aura été replié en deux. Le corps a été mis en vente, et c’est la com- mune de Soulac qui l’a achété pour 99 francs. L'animal avait 24 mètres de long 1. On en a observé à diverses reprises sur les côtes d'Écosse et de Shetland. Sibbald, qui a fait tant de bonnes observations sur les grands Cétacés des côtes d'Écosse, parle d’un mâle de 75 pieds qui a. péri en 1690 dans la baie de Forth. C'était un individu de la grande espèce. C'est encore sans doute un animal de cette espèce qui a échoué à l'entrée de l'Humber, au mois de septembre 1750, et dont Scoresby fait mention. Neill fait mention également d'un grand individu, dont le sexe n’est pas déterminé, qui à péri dans la même baie en 1808. Scoresby parle d’une Balénoptère de 82 pieds qu’il a vue sur lescôtes de Shetland pendant l'hiver de 1817-1818. Elle était venue y échouer. Arthur Jacob fait mention d’une femelle de 70 pieds, venue à la côte, à l’ouest de l'Irlande, au mois d'avril 1895. Un jeune animal de 51 pieds, dont le squelette est conservé au Musée de Liverpool, a échoué dans la Dee. Une femelle trouvée morte en mer, a été remorquée à PIy- mouth le 27 septembre 1831 ; elle était longue de 79 pieds (Couch) et son estomac renfermait une grande quantité de Pilchards. D’après sa taille, ce serait une Sibbaldii, mais cette espèce se nourrit-elle de Pilchards? N'y a-t-il pas de l’exagération dans la longueur? C’est ce que nous croyons plutôt. © Mc. Soc. Linn. de Bordeaux, séance du 6 août 1879. (277) En octobre 1831, un individu a échoué à l'embouchure de la baie de Forth; son squelette est au Musée des sciences et des arts à Édimbourg. Il avait 76 pieds (Knox). En 1833, une bonne capture a été faite dans le Humber, près de Hull; le squelette de l'animal est conservé au Musée de cette ville. Le professeur Sir Turner, qui signale eimq échouements, parle d’un individu échoué à l'entrée du Firth of Forth en 1858. Une Balænoptera Sibbaldii, prise, le 9 novembre 1869, à l'entrée de ce fleuve, et qui heureusement est tombée dans de bonnes mains, nous fournira des renseignements bien importants. Elle s'était montrée en spectacle aux habitants de . Ja côte pendant quatorze jours. Cétait une femelle sur le point de mettre bas, et dont l’acquisition a été faite de manière à être utilisée complètement pour la science. Le professeur Sir Turner a d’abord publié une première notice dans les Proceedings de la Société royale d'Édimbourg, puis, dans une notice particulière, il a fait connaître le sternum 1, le placenta ainsi que l'os du bassin de la mère et du fœtus mâle qu’elle portait. Le fœtus n'avait pas moins de 20 pieds 6 pouces ; la mère mesurait 78 pieds 9 pouces. Dans cette notice, il fait savoir qu’au mois d'octobre 1869 une autre femelle avec son jeune, appartenant à la même espèce, a été capturée sur la côte de Shetland, mais il ne nous apprend pas si cet animal a été conservé pour la science. Le même savant parle encore d’un autre individu échoué à Wick (Caithness) en 1871. La Balænoptera Sibbaldii pénètre dans la Baltique. Nous avons déjà parlé de deux mâles rencontrés dans cette mer intérieure, le 8 avril 1825 et en juillet 1862, et que Jul. Münter a fait connaitre. Le 29 octobre 1865, un individu mâle, non adulte, a été cap- Turner, On the sternum .... of the longniddry Whale ( Balænoptera Sibbaldiïi). JOURN. OF ANATOMY AND PHYSIOLOGY, vol. IV. (978 ) ‘turé près de Gôüteborg, et a été décrit par M. Malm sous le nom de Balænoptera Carolinæ. C’est le professeur Flower qui reconnut le premier que ce jeune mâle est une Balænoptera Sibbaldii. Son squelette est conservé au Musée de Gôteborg. Le 26 juin 1881, entre les iles Sylt et Fôhr (Baltique), les douaniers aperçurent une femelle Balænoptera Sibbaldiü de 50 pieds, échouée sur le sable; elle fut tuée à coups de hache. Le Dr' Môbius acheta le squelette pour le Musée zoologique de Kiel. Le bassin manque f. Nous ne croyons pas que la Balænoptera Sibbaldii soit con- finée dans l'Atlantique septentrionale, comme les autres espèces du genre; elle hante le Pacifique comme l'Atlantique, et se répand même dans les eaux de nos antipodes. On parle, en effet, sous des noms divers, d’une grande Balé- noptère, répandue dans l’Atlantique comme dans le Pacifique, dans la mer des Indes comme dans la mer du Japon, et dans les eaux de nos antipodes, comme nous l'avons déjà dit dans les généralités sur le genre. Les baleiniers américains et anglais parlent souvent d’une Balénoptère sous le nom de Sulfurbottum ; c’est un animal de grande taille et qui hante l'océan Pacifique et la mer des Indes. Nous avons plusieurs raisons de croire que ce Sulfuwr- bottum appartient à l'espèce qui nous occuppe. [ls accordent en effet à ce Sulfurbottum une taille de 80 pieds et des fanons fort larges et d’un noir luisant. _ Au mois d'août 1871, une jeune Balénoptère a échoué près de l'embouchure du Rio de Lozan, un des affluents du Rio de la Plata. À en juger par ses fanons noirs, par la face inférieure du corps, également noire, un peu plus claire que le dos, mais pas blanche, nous croyons que c’est une Balænoplera Sibbaldii. Son squelette est conservé. Burmeister lui a donné le nom de Balænoptera intermedia. A. Smyth a vu des Balénoptères de 95 pieds à Table Bay. 1 Prof. Môsius, Ueber einen bei Sylt gestrandelen Blautval (Balænoptera Sibbaldii). NaTURwISS. VEREINS FÜR SCHLESWIG-HoLsTEIN, Bd. VI. Kiel, 1865, Os nasaux, sternum et partie distale de la première côte. 19 ) Le Muséum d'histoire natu- relle de Paris a reçu de Patago- aie des squelettes quiserappor- tent à la Balænoptera Sibbaldii et à la Balænoptera musculus. Nous reproduisons ci-contre la première côte qui est bifide, les os nasaux et le sternum. Un de ces squelettes a été trouvé sur la plage dans le New- Year-Sund, à la Terre de feu. L'animal dont il provient avait échoué sur la plage, et les Fue- giens s'étaient empressés d’en- lever la chair pour la manger. MUSÉES. Jusque dans ces dernières années, on ne connaissait dans les Musées aucun squelette bien authentique de cette espèce, et quelques os séparés de grande taille pouvaient être attribués à des géants de l'espèce com- mune. Aujourd’hui le doute n’est plus possible, surtout depuis que l’on possède des ossements et des squelettes des Balénop- tères recueillis aux pêcheries d'Islande et de Finmark. Nous allons indiquer par ordre alphabétique les Musées qui possèdent des restes authentiques de cette Balénoptère. Au Musée de l’Université de Breslau, on conserve le squelette d’un jeune animal qui a péri, en 1862, au Sund. Le Musée de Bruxelles possède aujourd’hui un squelette complet, provenant des pêcheries de Vadsô. Il est d’une remar- ( 280 ) quable conservation pour les membres comme pour les os du bassin. Il possède également une vertèbre isolée, dont l’origine n’est pas connue, et qui se rapporte sans doute à cette espèce. Le corps est haut de 82 centimètres, large de 39 centimètres, mesuré au milieu du disque; l’apophyse épineuse mesure »2 centimètres depuis le corps de la vertèbre, et elle est loin d'être complète. C'est une des dernières lombaires. Le Musée de Copenhague possède une tête et divers osse- ments provenant de la pêche en Islande (1866). Le professeur Reinhardt a publié une notice intéressante sur ces dernières pièces, avec de bonnes figures. Depuis 1843, on y conserve également le squelette d’une nageoire pectorale d’un animal capturé au mois d'août dans la mer de Baffin. Cette pièce a été envoyée à Eschricht par le gouverneur Holbôll. Au Musée de l'Université de Christiania on conserve un squelette d'un mâle de 77 pieds, préparé par Guldberg, en 1881. L'Indian Museum de Calcutta renferme plusieurs ossements importants. On trouve dans la ville d'Édimbourg des ossements de quatre individus différents : il y a d’abord un squelette complet d’une. femelle qui a échoué en octobre 1869 sur les côtes de Shet- land. Il est monté au Musée de l’Université. Ce squelette fut déposé d'abord au Jardin zoologique d’Édimbourg. II s'y trouve ensuite des vertèbres cervicales, dorsales et lom- baires, avec des côtes et une omoplate recueillies sur les côtes de Shetland. Le squelette d’un individu de 84 pieds trouvé flottant en mer près de North-Berwick, le 5 octobre 1831, étudié par Frederick Knox, est conservé dans le Département d'histoire naturelle du Musée des sciences et des arts. Le Musée de Gôteborg renferme un squelette d’un jeune mâle qui a échoué, le 29 octobre 1865, non loin de cette ville, et dont Malm a donné une belle description, sous le nom de Balænoptera Caroline. (281) On conserve un squelette de mâle au Musée de l’Université de Greifswald, recueilli à l'ile de Rügen en 1895, Un squelette est conservé à la Société philosophique de Hull, provenant d’un animal de 47 pieds de long, qui a été capturé en 1853 dans le Humber. Le squelette d’une femelle de 13 mètres de longueur qui a péri, en juin 4881, sur les côtes du Jutland, est conservé au Musée de l'Université de Kiel, grâce aux soins du professeur Môbius. A la Rochelle, on possède deux vertèbres, dont l’origine est inconnue, et qui proviennent sans doute de cette Balénoptère. Le Musée de Leyde renferme également deux premières côtes d’un mâle de 78 pieds anglais, un sternum, un atlas et un axis, puis quelques os provenant de la pêche d’'fslande, donnés par le capitaine Bottemanne. A Leipzig, on conserve un fœtus de 18 pieds, conservé dans le sel, que l’on a reçu du cap Nord. Le Musée de l'Université de Liège est en possession de deux beaux squelettes, l’un de mâle, l’autre de femelle, tous les deux adultes; ils proviennent d'individus capturés dans l'établisse- ment de pêche de Vadsô. Le même Musée possède également des fœtus, dont un a une dizaine de pieds de longueur. Le Musée de Liverpool possède des vertèbres, des côtes et des fanons rapportés d'Islande par M. Henri Baird en 1868. Nous avons à Louvain la tête, les nageoires pectorale et cau- dale d'un fœtus de 7 pieds de long, que le D" Finsch a rap- porté de la pêcherie de Vadsô, ainsi que l'omoplate dont nous avons déjà parlé. Le British Museum possède également un squelette; il pro- vient de la collection de Lidt de Jeude d'Utrecht. Cest la vue de ce squelette qui avait frappé M. Flower en 1864; son coup d'œil exercé lui fit reconnaître une forme nouvelle, à laquelle il donna le nom de Balænoptera latirostris. On conserve aujourd'hui un autre squelette au British Museum, qui provient d'une femelle de 79 pieds, capturée à ( 282 ) Plymouth; des caisses tympaniques et des fanons de la Nou- velle-Zélande. Au Muséum de Paris se trouve aujourd’hui un squelette de mâle et un autre de femelle, tous les deux rapportés des pêche- ries de Vadsô par le professeur Pouchet. Il s’y trouve également depuis longtemps une omoplate et un atlas de grande taille dont l’origine est inconnue. Le même Musée est en possession aujourd’hui d’un sque- lette provenant du cap Horn 1. Le plus ancien squelette est celui de l'animal qui a été trouvé, en 1827, mort en mer, par les pêcheurs, et qui a été remorqué jusqu’à Ostende. Comme nous Pavons dit plus haut, cesquelette, après avoir été exhibé dans les principales capitales de l'Europe, est allé échouer au Jardin zoologique de Saint-Pétersbourg. Pallas parle d’un squelette de 84 pieds de long (pieds anglais), provenant d’un animal capturé dans la mer Glaciale, sous le nom de Balæna physalus ; il a été envoyé par Petrus Kargin, en 1740, au Musée de S'-Pétersbourg. La taille et la couleur des fanons ({aminis atro-cœruleis) ne laissent guère de doute sur l'espèce. Personne n'a pu nous donner des renseignements sur ce squelette pendant notre séjour à S'-Pétersbourg. On voit encore au Musée de St-Pétersbourg un atlas et trois vertèbres lombaires, provenant des côtes de la Nouvelle-Zemble, que nous attribuons à cette espèce, A la fin de 1878, le Musée de Stockholm a reçu de Vadsô un squelette de Balænoptera Sibbaldii femelle et de son fœtus à peu près à terme 2. Au Musée de l’Académie des sciences de Stockholm, nous avons vu en outre une vertèbre dorsale (deuxième), rapportée par le D' Kinberg des côtes de Patagonie (détroit de Magellan); ! La Revue scientifique, dans son n° du 29 mars 1884, rend compte de l'expédition scientifique au cap Horn et fait mention de ces ossements qui ont été rapportés par la Romanche, 2 ,Smirr, Ueber Balænoptera Sibbaldii. ZooLociscnErR ANZE1GER, 16 dé- cembre 1878 ( 283 ) elle est d’une dimension extraordinaire. Nous n’en avons pas vu de plus grande. M. Malm rapporte encore au même animal plusieurs autres vertèbres, dont deux lombaires. M. Malm a fait le relevé des Cétacés conservés dans les Musées de Suède; il a donné à cette espèce le nom de Physalus antarcticus. Nous connaissons aussi quelques squelettes conservés dans des Musées hors d'Europe; ils sont généralement désignés sous d’autres noms. À défaut de pièces assez nombreuses de com- paraison, nous ne pouvons pas affirmer avec certitude que c’est la même espèce qui vit aux deux hémisphères, mais nous pou- vons assurer qu'elle représente notre grande Balénoptère par tous les caractères essentiels, la taille, la forme de la face, la couleur des fanons, le nombre des vertèbres et des côtes, etc. IL existe un squelette de Balénoptère de 74 pieds au Musée de Cambridge (État-Unis) et qui appartient sans doute à cette Balénoptère. C’est l’espèce la plus grande et la plus commune, dit le professeur Cope. On en cite une autre de 84 pieds, capturée en 1851, à la lati- tude de 19 N, on Juggu or Ambherst Islet. Quelques-uns de ses os sont conservés au Musée du collège médical de Calcutta, sous le nom de Balænoptera indica 1. En 1873, une Balénoptère de très grande taille a échoué sur la côte sud- est d’Otago ; ses fanons, d’après le D' Coughtrey, sont semblables à ceux «le la Balænoptera Sibbaldii des mers arctiques ? et ont la largeur et la couleur de la Balænoptera Sibbaldii d'Europe. Le squelette décrit et figuré dans les Trans. of the New-Zea- land Institute, sous le nom de Physalus australis, par M. Hector, provient d’un animal capturé au sud de Cook’s Strait; il a soixante-quatre vertèbres 3; il est conservé au Musée de Wel- lington. ! Bcyra, Journal of the Asiatic Society of Bengal, xxvin, 4860. ? Captain F. H. Hurrow, Trans, n. Zel. inst., vol. VIT, p. 266. * Le texte porte 57, mais M. Hector a mis 64 dans un tiré à part qu'il a eu la bonté de me faire parvenir, ( 284 ) Un squelette d’un animal de 90 pieds, dont les fanons avaient 28 pouces de longueur, 18 de largeur, et tout noirs, est conservé au Musée de l'Université de Melbourne. L'animal a échoué sur la côte de Vittoria 1. On conserve des fanons bien authentiques de cette espèce à Édimbourg (de Shetland), à Liège (de Finmark), à Louvain (de Shetland), à Vienne et à San Francisco, de Sulfurbottum (du Pacifique). DESSINS, Il existe quelques anciennes figures de Balénoptères, mais comme l’espèce n'a été définitivement reconnue que dans ces dernières années, on n’a pu donner des figures authentiques que dans ces derniers temps. La plus ancienne figure, pensons-nous, est celle que Rob. Sibbaldus 2 à publiée dans sa Phalainologia nova. Van Breda en a publié une d’après le corps recueilli en mer en 1827 par des pêcheurs d’Ostende, et dont le squelette se trouve à S'-Pétersbourg 5, Différentes gravures et deux lithographies de grand format sont conservées à la Bibliothèque royale, à Bruxelles. Nous trouvons cette espèce représentée dans le grand atlas de Goldfuss, vol- 4, pl. 332 #. Fried. Rosenthal a publié une lithographie de lindividu échoué en 1825 dans la Baltique. Le professeur Münter publie deux planches représentant Panimal vu des divers côtés 5. Eschricht possédait un dessin de la Balænoptera Sibbaldii. 4 Gigloli Cetacei osservati, p. 51. * Phalainologia nova. Edinburgi, 1692, pl. HT. 5 Van Bren4, A/beelding van den op à nov. 1827 gestranden Walvisch te Oostende. Lettcrbode. 4 Goupruss, Atlas, vol. LV, pl. CCCXXXIT. 5 Münrer, Ueber Zwei in 19 Jahrh, bei Greifswald männlichs Individuen von Bal. Sibbaldii. Greifswald, 1877, Nes “62 à ( 285 ) Burmeister a figuré l'animal, vu de profil, par sa face infé rieure et par le ventre, faisant ses évolutions dans l’eau 1, sous le nom de Balænoptera intermedia. Sars a publié d'abord, en 1865, le dessin d’un mâle et des détails sur le squelette 2, puis celui d’un animal adulte 8 et d’un fœtus mâle de 1 pied 4 pouces de long. En 1874, le zélé professeur de Christiania a publié le dessin d’une femelle adulte des côtes de Finmark. Le dessin de la planche III représente un individu capturé à l'établissement du capitaine Foyn. La pianche IV représente un fœtus de 9 pieds et demi {. Le D' Malm a publié plusieurs photographies faites d’après le jeune mâle qui est allé échouer dans le voisinage de Gôten- borg, le 20 décembre 1865. [1 reproduit vingt-deux photo- graphies sur dix-huit planches, deux planches lithographiées et trois gravures sur bois ÿ. Le savant Directeur du Musée de Gôteborg figure également la région cervicale avec les deux premières dorsales, atlas et Paxis, les quatre premières côtes avec l’hyoïde, et le squelette du membre pectoral. Le professeur Sir Turner en a donné aussi une très bonne figure 6. Nous avons publié un dessin de cetanimal, d’aprèsles extraits du Journal de voyage et les croquis que le D' Finsch avait rapportés de Vadsô, en 1878 7. ? Allas de la Descriplion physique de la république Argentine. Buenos- Ayres, 1885. 2 Vid-Selskabets Forhandl., for 1865. 3 Vid-Selskabets Forhandl., for 1878. + Sare, Om Blaahvalen (femelle adulte), Christiania Vid-Selskab. For- HANDL. for 1874. Sars, Forsatte Bidrag til kundskaben om vare Bardehvaler. CHRISTIANIA VIDENSKAPELSE. ForHanpL., 1880. 5 Mary, Monographie illustrée de la Balénoptère .... Stockholm, 1867. $ Turner, On account of the great Finner Whale (Balænoptera Sibbaldii), Trans. Roy. Soc. Énixeuren, vol. XXVI, pl. V, 1870 et {{lust. London News, 1869, n° 1567. T7 Vax BENEDEN, Notice sur la grande Balénoptère du Nord (Balænoptera Sibbaldii), Buzc. AcaD. ROY. DE BELGIQUE, 2e sér., t. XXXIX, 1875. ( 286 ) Le cap. Scammon a publié un dessin du Sulfurbottum, ou Sibbaldius sulfureus Cope, pl. XHL. Comme Burmeister, il représente l'animal faisant ses évolutions dans l’eau. Du Bar a publié plusieurs planches représentant grossière- ment le crâne, vu de trois côtés différents, les mandibules, l'os hyoïde avec la caisse tympanique, le sternum, la colonne ver- tébrale, l’atlas, une première côte avec deux autres, l’os du bassin, l’omoplate et les os de la nageoire pectorale. Le professeur Reinhardt a reproduit quelques bonnes figures, représentant la tête avec les os nasaux, l’atlas et le corps de l'os hyoïde, d’après les pièces conservées au Musée de Copenhague, provenant d'individus capturés dans les eaux d'Islande, Gray a figuré l’atlas et cinq cervicales. Reinhardt a également publié une figure de l’énorme atlas rapporté par Hallas des côtes d'Islande, | Nous avons reproduit dans lOstéographie, pl. XIL et XIIL, fig. 25 à 34, la tête vue d’en haut, la région cervicale, la nageoïiré pectorale, le sternum et latlas avec laxis, vus de face. Ces dessins sont faits d’après des pièces du Musée de Copenhague et de Güteborg. M. Smitt a eu l’obligeance de me faire parvenir des photo- graphies de la tête d’une femelle et du fœtus, de Patlas, du sternum, de l’hyoïde, des côtes et des membres conservés au Musée de Stockholm, pour faire la comparaison avec les mêmes os provenant de diverses localités. PARASITES, On connaît sur cette Balénoptère de petits Cirripèdes et deux Copépodes à l’extérieur, un Monostome, un Filaire, un Échi- norhynque et un Cestode dans l'intestin. On a trouvé des Penella sur une femelle de 13 mètres, cap- turée sur Ja côte du Jutland, le 26 juin 1881, et sur quatre individus capturés, en avril 1867, sur les côtes est d'Islande. Les Penella sont des Crustacés parasites qui s’implantent par la tête dans l'épaisseur de la peau, et qui se déforment si com- (287) plètement qu’à moins de les avoir étudiés, ou d’avoir étudié les Copépodes, qui minent sous tant de formes différentes la peau des poissons, on ne saurait les prendre pour des animaux. Un autre commensal est celui que lon a trouvé d'abord sur les fanons de la Balænoptera borealis, et qui vit également sur les fanons de la Balænoptera Sibbaldii. Il est à remarquer que les Crustacés, dont ces deux Balénop- tères se nourrissent, sont les mêmes, d’après quelques natura- listes qui ont assisté à la pêche. Creplin a trouvé des Filaria crassicanda et des Monostomum plicatum dans l'œsophage et dans l'intestin grêle. On trouve communément dans les intestins l'Echinorhynchus, dont Malm avait eru devoir faire une espèce nouvelle, sous le nom spécifique de Brevicollis. Le professeur Sir Turner à trouvé également cet Echi- norhynque dans lindividu qu'il a disséqué. Cette Balénoptère nourrit en même temps un Cestode, sans doute nouveau pour la science, mais que nous n'avons pu déterminer à défaut de scolex. A en juger par les proglottis, c'est en tout cas un animal voisin des Bothriocéphales. Ce Cestode a été recueilli a Vadso, il y a quelques années, et nous né savons si l’on n’en a pas trouvé depuis d’autres exem- plaires complets. 20 LES HIPHIOIDES DES MERS: D'EUROPE, PAR P.-J. VAN BENEDEN, MEMBRE DE L'ACADEMIE ROYALE DE BELGIQUE (Présenté à la Classe des sciences dans la séance du T janvier 1888.) Mémoi — 1888.) F2 é ; ulres és et a gique. ’ émoirés couronn ” . xtrait du tome XL] iles M CE ce = AE L=] © a HA _ 5 = © = œ S e 2 Er = on = = = LES APPFHIOlDES DES MERS-D'EGKOPE. GÉNÉRALITES, Au commencement du siècle, en creusant les bassins d'Anvers, les ouvriers terrassiers mirent au Jour des rostres de Cétacés véritablement pétrifiés ; vers la même époque, sur les bords de la Méditerranée, on découvrit une tête légèrement mutilée, plus ou moins fossile, avec un rostre solide; ne pouvant la rapporter, pas plus que les rostres d'Anvers, à un Cétacé vivant des collections, Cuvier proposa pour les désigner Je nom de Ziphius. Ce nom de Ziphius avait été employé, par quelques auteurs du moyen àge, pour un Dauphin qu'ils n'ont point clairement déterminé. Les Ziphius, disait Cuvier, ne sont ni tout à fait des Baleines, ni tout à fait des Cachalots, ni tout à fait des Hyperoodons; ce sont, dit-il, probablement des restes d’une nature détruite æt dont nous chercher:ons en vain aujourd’hui les origines. La Cétologie a fait bien des progrès depuis le jour où le grand naturaliste à écrit ces ligres, mais ses prévisions ont recu (299 ) une éclatante confirmation : le genre Ziphius est devenu le type d’une famille dont quelques espèces, encore en vie, errent à l'aventure dans les divers Océans comme s'ils n'avaient plus de patrie. Ils sont originaires des régions chaudes, mais ils se rendent indifféremment vers le nord ou vers le sud, fréquen- tant le pôle arctique comme le pôle antarctique. On trouve, en etfet, le Cachalot dans les eaux du Groenland et du Spitzberg comme dans celles de la Tasmanie et de la Nouvelle-Zélande. Blainville qui avait également au plus haut degré le senti- ment des affinités, avait distingué de bonne heure les Cétacés, qui se groupent autour des Ziphius, sous le nom de Heteru- dontes. Eschricht avait fort bien reconnu les aflinités des Ziphius avec les Hyperoodons et les Micropterons; il proposa de nonnmer les premiers Chænocetus, Entenwall, d’après un ancien nom danois. Ces travaux d'Eschricht ont donc à leur tour confirmé l'opinion de Cuvier 1. Le savant professeur de Copenhague réunit différentes espèces autour des Ziphius, et il propose de les désigner sous le nom de Rhynchoceti. I prend Y'Hyperoodon pour type et fait remarquer que le régime de tous ces animaux est le même; tous se nourrissent de Céphalopodes. En 1850, un Ziphius vint échouer sur la plage des Aresquiers, non Join de Frontignan. Paul Gervais profita de cette occasion pour montrer que le Ziphius cavirostris se trouvait encore parmi les espèces vivantes ; il proposa de réunir certains Céta- cés, intermédiaires entre les Dauphins et les Cachalots, sous le nom de Ziphioïides. Duvernoy, qui avait à cette époque la direction des collections d'anatomie comparée du Muséum, fût chargé par l'Académie des sciences de faire un rapport sur le mémoire de Gervais; 11 passa en revue les nombreux squelettes conservés dans les galeries du 14 Der Entenwall (Hyperoodon) und der Kleinflosser (Micropteron) stellem sich uns deinnach als spärliche Ueberbleibsel einer vorwelllicher gosse Abtheilung der Wallthicre dar, ur. d warscheinlich stehen sie eben deswegem jetat so isolirt da :, dit EScHRICAT. / Gi ( £6 Muséum et plaça le Cétacé de la plage des Aresquiers, non dans le genre Ziphius, comme Gervais l'avait fait, mais parmi les Hyperoodons; les Cétacés étaient partagés en cinq familles par Duvernoy et ilréunissait, sous le nom de Hétérodontes, les genres vivants et fossiles que nous regardons comme Ziphioïdes. On: ne connaît bien dans cette famille des Hétérodontes, ajoute Duvernoy, que les espèces du genre Hyperoodon f. Le professeur Flower s'exprime, comme Cuvier et Eschricht, au sujet de l'ancienneté des Ziphioïdes : la rareté de ces Cétacés à l’époque actuelle contraste singulièrement avec leur abon- dauce à l’époque de la formation du crag, et fait croire, ajoute je savant Directeur du British Museum, que les Ziphioïdes actuels ne sont que des survivants d'anciennes familles 2. Dans la liste des Cétacés du British Museum, publiée en 1855, M. Flower admet, à côté de la famille des Balénides, une famille de Cachalots dans le sous-ordre des Cétodontes et réu- nit dans une sous-famille les Ziphiinæ, les Iyperoodon, les Ziphius, les Mesoplodon et les Berardius. Nous ne comprenons pas les motifs de cette séparation des Cachalots; ces Cétacés partagent, avec les autres Ziphioides, les mêmes caractères et le même genre de vie. La taille seule diffère. Nous avons depuis longtemps exprimé l'avis qu'il n’y a pas de raisons de séparer les Cachalots des véritables Ziphioïdes, bien qu'ils aient de nombreuses dents au maxillaire inférieur. Les Cétacés forment à notre avis trois familles distinctes parfaitement caractérisées, par toute leur organisation, et spécialement par leur squelette, par leur genre de vie, comme par leur répartition géographique. * Ann. scivnc. nalur., 5" série, t, IV, 1851. ? « This comparative rarity at the present epoch contrasts greatly with whal once oblained on the earth, especially in the period of the deposition afthe Crag f6rmations, and leads to the belief, that the existing Ziph'o'ds are ihe survivors of an ancient family …. » W.H, FLower, On the recent Ziphioid Haies, Taixs. Zoo, Soc. or Loxpox, vol. VIT, 1871. 294) Chez les Ziphioïdes, les os de la face s'allongent pour for- mer un véritable rostre; les veux sont placés fort en arrière; la fente buccale est petite; les narines s'ouvrent à gauche et forment un croissant dont la convexité est en avant; la tête est peu symétrique, surtout les os qui encadrent les fosses nasales ; le crâne s'élève parfois tout droit et surplombe souvent au- dessus des orifices des narines. En général, les os lacrymaux ! et mastoïdiens sont séparés ; les mandibules sont toujours symphisées sur une grande longueur. Il y a souvent quelques dents rudimentaires non alvéolées à l’une ou à l’autre mâchoire; dans le Cachalot elles sont cachées sous la peau au palais et complètement déformées. À la mâchoire inférieure elles sont alvéolées et varient quant à leur nombre, quant à la place qu’elles occupent et enfin quant à leur forme. Les os de l'oreille ont des caractères communs à toutes les espèces de cette famille : les Baleines, les Balénoptères et les Mégaptères ont l’apophyse qui les attache au crâne insérée sur le rocher; les Ziphioïdes ont cette apophyse insérée sur la caisse tympanique même; les Cétodontes n’ont pas cette apophyse développée. Chez ces derniers, la caisse ne tient au crâne que par les parties molles. Le corps de los hyoïde ainsi que les cornes sont très larges. Les vertèbres sont allongées et peu nombreuses (45 à 50); les nageoires pectorales, fort petites, sont en disproportion avec la taille de l'animal: les doigts sont au nombre de cinq; les côtes s’articulent au sternum par des cartilages, comme le professeur Flower la fait observer en premier lieu chez les Cachalots, les Hyperoodons, les Ziphius et les Berardius. Les dernières côtes sont seulement insérées sur les apophyses transverses, comme dans tous les Cétacés. Entre l'estomac et l'intestin, il y a une suite de six compar- timents. 2 JIs n'existent pas séparément dans les Cachalots. N'y (295 ) Le tube digestif présente une muqueuse, diversemént alvéc- lée selon les genres, et une portion de lintestin suflit pour distinguer l'espèce dont il provient. Le cœæcum manque. Plusieurs Ziphioïdes présentent des différences sexuelles très grandes : les Cachalots diffèrent entre eux surtout par la taille, les Hyperoodons par la conformation de la tête, les Micropterons et les Ziphius, par la dimension des dents. Jusqu'ici on ne connaît guère le spermaceti que dans les Cachalots ; nous avons tout lieu de croire que tous les Ziphioïdes en produisent ; nous en avons reconnu depuis longtemps dans les Hyperoodons, et nous venons d'apprendre qu’un mâle de Berardius, capturé en 1862 dans le port de Porirua (Porirua harbour), d'une longueur de 27 pieds, a produit, outre 240 gallons de fine sperm oil, une quantité considérable de spermaceti logée dans la partie supérieure de la tête. La famille des Ziphioïdes se distingue non moins bien par le régime: depuis longtemps Eschricht a fait la remarque que ces Cétacés poursuivent surtout les Céphalopodes, et il a pro- posé de les appeler Theutophages, de Theutis, Calmar. On trouve, en effet, toujours des becs et des cristallins de ces Mollusques dans leur estomac. Vrolik a trouvé jusqu’à dix mille becs dans lestomac d'un Hyperoodon !. Jul. v. Haast a ouvert l'estomac d’un Berardius qui contenait un demi bushel de becs cornés d’Octopus, tous de la même grandeur 2. Parmi les caractères propres aux Ziphioïdes, on peut encore citer les sillons qu'ils montrent sous la gorge et qui corres- pondent avec la longue symphyse de leur mandibule. Blainville avait déjà observé chez le Micropteron, et Haalland chez PHyperoodon, deux paires de sillons sous la gorge entre les deux maxillaires. Plusieurs Ziphioïdes gémissent où beuglent quand ils sont échoués sur la plage : la femelle de Micropteron qui est venue * VRoLiKk, loc. cit. 2 V. Hassr, Ann. 4. Mag nat. hist. Octobre 1870. ( 296 ) à la côte à Ostende, poussait de véritables gémissements. L'Hy- peroodon qui a péri sur la côte en Bretagne, à Hillion, en 1880, beuglait de manière à effrayer la nuit les habitants à une grande distance 1. Le Ziphioïde dont Jul. Haast a parlé dans une notice, reproduite par M. Flower, et qui se rapporte sans doute à un Berardius, beuglait par moments comme un tau- eau (bellow like a bull). Ces animaux vivent généralement par schools composées surtout de femelles. Les Cachalots capturés isolément ou échoués sont généralement du sexe mâle. Les Ziphioïdes vivent surtout dans les mers profondes des régions équatoriales, où ils rencontrent en abondance les Céphalopodes. On compte que ces Mollusques figurent dans ces eaux pour 65 pour cent; dans les régions tempérées, ils ne sont qu'à 30 pour cent, et dans les régions froides, on n’en compte plus que 6 pour 100. Ces Mollusques, à l’exception des poulpes, vivent toujours au large. La différence de conforma- ton du corps indique bien lanimal pélagique et lanimal côtier. Les Ziphioides qui ont été signalés dans les mers d'Europe sont : le Cachalot, l'Hyperoodon, le Ziphius cavirostris, le Micropteron de Sowerby. On ne connaît qu'un seul individu de l'espèce qu'on a nommée Micropteron europæus. Les Kogia que l’on a signalés d’abord au cap de Bonne-Espé- rance, puis en Australie, ont été trouvés dans ces derniers temps dans la mer des Indes, au Japon, et dans l'Atlantique sur la côte de New Jersey et à l’est des Florides. Les Berardius signalés d’abord à la Nouvelle-Zélande, puis au nord du Pacifique, ne sont représentés en Europe qu’à l'état fossile. À en juger par les ossements de Cétacés que Stejneger a rapportés du nord du Pacifique, surtout de l'Ile de Behring, les Cétacés Ziphioïdes ne doivent pas être rares non plus dans ces parages ; le courageux voyageur que nous venons de citer, ! Bulletins, 2° sér., t. XLIX, 1880. (6997) à rapporté, au Musée de Cambridge, des restes de Berardius, de Ziphius et de Micropteron. Nous ferons remarquer aussi que parmi les descendants des Liphioïdes, autrefois si abondants à la fin de l'époque tertiaire, dans l'Ancien comme dans le Nouveau Monde, plusieurs semblent s'être réfugiés particulièrement dans les eaux de nos antipodes. Il semble y avoir un contraste entre les Cétacés vivants des régions chaudes et des régions froides ; les premiers, habitant des régions équatoriales, sont généralement cosmopolites : le Cachalot visite le Groënland comme la Nouvelle-Zélande; le Ziphius que nous avons d’abord cru propre aux Indes est le même que celui que Cuvier avait cru fossile et qui visite encore Ja Méditerranée; le WMicropteron de Sowerby, reconnu d'abord sur les côtes d'Angleterre et de Belgique, se retrouve également aux antipodes, tandis que les espèces véritablement polaires, comme la Baleine franche, le Narval et le Beluga, ne quittent jamais les glaces. On dirait que ces derniers ont fait leur apparition après les autres et qu'ils hantent seuls les régions glacées des pôles. Les Ziphioïdes sont généralement mal représentés dans les Musées, et il n’y a qu'un petit nombre de bons dessins des ani- maux et de leurs squelettes. Les Ziphioïdes n'ont pas été assez souvent étudiés en chair, dans des conditions favorables, pour connaître leurs commen- saux et leurs parasites. LE CACHALOT (PHYSETER MACROCEPHALUS). LITTÉRATURE. Dudiley, Aa essay upon (he nat. history of Whales … (Ambre gris found in the spermaciti Whale), Prin. Trans, XXXIIT, n° 587, 1725, p- 256. Sibbald (Kob), Phaluinologia, Sive observationes de rarioribus qui- busdam Balænis in Scotia liltus nuper ejectis…. Cum 5 tab. Edinb., 1775. Hobertson, Description d’un Cachalot, Trans. Puiros, 1770. Fabrieius Othon., Fauna groentandiea, in-8°, Lipsiæ, 1780. Pierre Camper, Osléologie du cräne des Cachalots, OBsERvaTIoxs ANAT. SUR LES CÉTACÉS, p. 88. Alderson, 3, 4x account of « Whale of the Spermaceli Tribe, cast on shore on the Yorkshire coast, 1825. Marecl de Serres, Aunal, science. nat, 1855, V, p. 195. Thomas Beale, À few observations on the natural history of the sperm Whale, in $°, London, 1855. Kennett, F.D,, On lie natural history of Plhyseter macrocephalus, Proc. Zoor. Soc., IV, 1856. Blainville, Sur les Cachalots, ANX. FRANCAISES ET ÉTRANG. D'ANATOMIE ET DE PHYSIOLOGIE, L. I, 1558. D' Jackson, J.&.s,, Dissection of «à spermaceti Whale, Boston, Jounx. or ar. nisr., vol, V, 1845. { 300 |) owen, À history of Brilish Jossil mammals, London, 1846. William S. Wall (Mneleay), /Listory and description of th: skelelon of a new sperm Whale, Sydney, 1851. owen, Skull of a fœætal Cachalot. Descript. of the osteol. series in the Museum of the Roy. Coll. of surgeons of England, t. W, 1853. Haeckel, Bericht über die am 15 aug. bei Citta nuova gestrandeten Potwalle (Physeter.….), Srrz. Ben. cu. Aka. wiss., Wien, XI, p. 765, 1855. Flower, On the osteology of the Cachalot or sperm W'hale, Tuass. Zoot.. $oc, London, v. VI, part. VI, 1868, Huxley, À manuel of the anatomy of vertebrated animuis, Hiy. 106, London 1871, La tête d’un fœtus. Turner, On (he capture of a sperm Whale on the coast of Argyteshire . Proc. Roy. Soc. or EvixsurGu, p. 565, session, 1870-1871. Turner, Add. notes on the occurence of the sperm Wlale …, Proc, Roy. Soc. Enineurcu, 1871-1872. Turner, Délails sur le sternum du Cachalot échoué à Skye, en 1871. Proc. Roy. Soc., Eninsureu, 1871-1872. Fischer, Note sur les Cachalots échoués sur les côtes océaniques de France, JOURNAL DE Z00L0GIE, t. 1, p. 256, 1872. Turner, Moles on some rare prints of stranded Whales, Jourxar 06 ANATOMY AND Puysiococy, vol. XIE, july 1878. Van Bencden CLP. Gervais, Ostéographie des Cétacés. Paris, 1880, p. 905. Leone De Sanctis, Monographia Zool. anatorn. sul Capidoglio arenate a Porto S. Giorgio, R. Acanemia pet Lancer, atti, 5, IX, avee 7 pl. Roma, 1581. Pouchet, Sur la boîte à spermaccti, Compres RENDUS..., 4 août 1884. Pouchet, De la symétrie de la face chez les Cétodontés, in 4°, Paris, 1886. (301 | HISTORIQUE. Le Cachalot a été connu des anciens, mais fort incomplète- ment au point de vue de ses atlinités zoologiques. La place véritable de ce Cétacé, à la tête des Ziphioïdes, n’a été proposée que dans ces dernières années. Presque tous les naturalistes qui se sont occupés de Cétacés, lui ont consacré un chapitre particulier, tantôt à côté des Baleines à cause de sa grande taille, tantôt à côté des Cétodontes ou parmi eux à cause de ses dents. Le Cachalot est, parmi les Ziphoïdes, ce que les Baleines et les Balénoptères sont parmi les Balénides, c’est-à-dire, que ces animaux ont continué à grandir Jusqu'à l'époque actuelle. Les Géothériens, au contraire, ont atteint leur grande taille à des époques antérieures; partout ils sont visiblement à leur déclin sous le rapport du nombre et de la taille, Albert un des premiers parle de deux Cétacés qui ont échoué en Hollande, et comme ils ont fourni du blanc de Baleine, ce sont, selon toute probabilité, des Cachalots dont il fait men- tion. Belon et Rondelet en font également mention, mais trop vaguement pour être certain qu'ils ne les ont pas confondus avec d'autres Cétacés. Il en est de même de Gesner. Ambroise Paré parle de cet animal d’après un individu qui a échoué dans l’Escaut, près d'Anvers, en 1577. IT en donne un dessin, mais qui est loin d'être exact. En 1598, un individu, échoué non loin de Scheveningue, à été l’objet d’une description faite par Clusius. Un siècle plus tard, Sibbald a fait mention du Cachalot, d’après un animal du sexe mäle, à 42 dents, qui a péri en 16859 dans la baie du Forth, et d'une femelle qui a péri deux ans auparavant dans les mêmes conditions. Le premier Cachalot connu aux États-Unis d'Amérique, est, dit-on, un animal qui avait été jeté sur la côte sud de Nantucket !. Vers 1712, un baleinier poussé au large par un vent violent au milieu d’une gamme de Cachalots, en captura un, et c’est depuis lors que l’on à commencé la pèche en pleine mer 2. Dans les Transactions philosophiques ‘de 1725, Dudley fait la description d’un Cachalot qu'il a eu sous les yeux. Anderson croit devoir admettre quatre espèces de Cachalots, se fiant trop aux descriptions souvent incomplètes ou fautives des auteurs. Artedi en admet également quatre (1738) et Brisson (1756) en admet même sept. Linné, comme on le comprend bien, n'a pas pu éclaireir l’histoire des Cachalots. Fabricius (1780) a vu le Cachaiot pendant son séjour sur les côtes du Groenland et à laissé une bonne description de l'animal. Déjà en 1789, les baleiniers américains du Cap Cod se rendent dans la mer des Indes, pour faire la chasse à ces ani- maux; on rapporte qu'un gentleman du Cap Cod en avait aperçu, à son retour des Indes, un certain nombre et avait engagé ses compatriotes à les poursuivre dans ces parages. En septembre 1791, Joseph Russel et fils et Corn. Howland doublèrent le cap Horn à la recherche des Cachalots, et revinrent heureusement du Pacifique avec un plein charge- ment. C'est, si je ne me trompe, le commencement de la grande pêche dans le Pacifique. On prétend toutefois que le premier baleinier qui s'est rendu dans cet Océan pour faire la chasse à ces animaux, a été envoyé, en 1787, par la Nantucket Colony of Whalingmen from England. ! The first sperm whale known in Nantucket was found decd, and ashore on the soutbwest part of the Island. ? The first spermwhale taken by Nantucket whaleman, was captured by Christopher Hussey, about the year 1712, and the capture, destined to effect a radical change in the pursuit of this business, was the result of #n acci 'ent. (303 ) Pierre Camper a fort bien connu le Cétacé qui nous occupe : « La forme du crâne, dit-il, celle des os de la face, la Sstruc- ture des dents, leur emplacement dans les seules mâchoires infé- rieures, l'ouverture impaire des fosses nasales, la structure diffé- rente des vertèbres cervicales, sont autant d'anomalies qui ne per- mettent pas de les confondre avec d'autres. » Nous citons ce passage pour montrer la justesse de coup d'œil du savant anatomiste hollandais. Les Cachalots n'ont de ressemblance avec les Baleines, disait-il, que par les proportions de leur volume 1. Il figure toutefois une région cervicale de Baleine pour une région cer- vicale de Cachalot. Lacépède (1804) figure le même animal sous le nom de Physale cylindrique, de Cachalot macrocéphale et de Cachalot trompo. Lacépède n'avait pas vu les cétacés qu'il décrivait, pas même leurs os, et il a dû nécessairement commettre de nom- breuses erreurs. En parlant du Cachalot microps, il confond le vrai Cachalot avec l’Orque, et une partie de son récit se rapporte à l'ennemi de la Baleine. Cuvier, après avoir passé en revue ce que l’on avait fait avant lui, se demande si ce ne serait pas une grande témérité à lui de prétendre qu'il n’y a encore qu'une seule espèce de Cachalot. Après ce préambule, il fait la descrpition des os du sque- lette qu’il avait acheté à Londres, en 1818; malheureusement, ce squelette était défectueux et, ce qui est plus grave, en le constituant avec des os de divers individus, le marchand lui avait donné plus de vertèbres que le Cachalot n’en possède réellement. Cuvier aurait dù s'apercevoir que ces vertèbres ne se suivaient pas régulièrement. Les mandibules différentes, dont parle Cuvier, sont, d’après ce que nous savons aujourd'hui de la taille des sexes, des mandibules de mâle et de femelle. On sait que la taille des mâles a le double de celle de la femelle. 1 CAMvER, loc. cit, p. 17 (304 ) Fred. Cuvier parle du Dauphin de Bayer, Delphinus Bayeri, et à la fin de sa description il ajoute que, d’après lui et son frère, le Dauphin de Bayer de Risso est un Cachalot. D’après la figure qui se trouve dans les Actes des curieux de la nature, on voit parfaitement que c’est un Cachalot qui y est représenté, mais le dessinateur a déplacé lorifice des évents, croyant sans doute corriger Poriginal. Brandt et Ratzeburg ont reproduit tout ce que lon a dit du Cachalot, avant 1899. Thomas Beale a fait paraître à few observations on the natural history of Sperm Whale ; London, 1835. Il accorde 80 pieds aux plus grands individus et publie un chapitre sur leurs habitudes. Thomas Beale prétend que les Cachalots forment des gammes distinctes, les unes de femelles, les autres de jeunes mâles, et que ces derniers se subdivisent d’après leur âge. Ces gammes sont appelées Schools par les Anglais, et Thomas Beale dit qu’il en a vu de 500 à 600 individus. Dans chaque gamme il y a toujours quelques grands mâles fort jaloux de leurs droits, ajoute-t-il. Les mâles adultes sont souvent isolés, à la recherche de leur pâture ; ils sont toujours plus faciles à attaquer. Le même auteur mentionne les places favorites de leur capture, depuis la Nouvelle-Guinée jusqu'à la Nouvelle-Hol- lande, le Chili, la Californie et la mer de Chine: En 1838, Blainville publie une note sur les Cachalots ; il ne sait si on doit admettre plus d’une espèce : aucun peut-être, sauf le CACHALOT MACROCÉPHALE, n'est suffisamment caractérisé pour être décidément admis comme tel. Dans cette note il fait connaître le Physeter breviceps, aujourd'hui Kogia, d'après une tête rapportée du Cap de Bonne-Espérance 1. En 1851 il a paru à Sidney une notice sur l'histoire et la description d’un squelette de Cachalot monté à lAustralian Museum; elle est accompagné de deux planches. — Cette * Annales françaises el étrangères d'Anatormie et de Physiologie, Paris, tome second, 1858, p. 33à { 305 ) notice vient d’être réimprimée, et M. William S. Wall à ajouté la figure complète de la nageoire pectorale avec les os carpiens, d’après une photographie. En 1853, Maury a publié une carte indiquant à la fois les lieux fréquentés par le Cachalot et les Baleines, sans tenir compte naturellement des côtes que ces Cétacés visitent acci- dentellement. Il y a quelques régions où lon trouve en même temps des Baleines et des Cachalots. On voit, par ce tableau, que ce Cétacé ne dépasse guère, au Nord, le 50° degré de lati- tude, et, au Sud, le 60, de manière qu’on doit le considérer comme un animal des régions chaudes. Nous avons également des publications de Claas Mulder et de Van Bemmelen sur des individus qui sont venus se perdre sur les côtes de Belgique et de la Néerlande. Cornalia, dans sa Faune d'Italie, a fait connaître deux Cacha- lots qui se sont perdus dans la Méditerranée. Le professeur Sir W. Turner à publié une note fort intéressante, sur quelques gravures rares, représentant des Cachalots échoués. Dans les Proc. de la Société royale d'Édim- bourg, il a publié, en 1870-1871, une notice sur la capture du Cachalot sur les côtes d'Écosse et, l’année suivante, une note additionnelle dans le même recueil. M. le Docteur Fischer a communiqué, en 1872, dans le Journal de Zoologie de Gervais, un travail intéressant sur les Cachalots qui ont échoué sur les côtes océaniques de France. M. Flower a fait connaitre, avec le soin qu'il met dans toutes ses publications, le squelette de ce curieux animal; ilen a eu plusieurs à sa disposition, les uns provenant d'individus échoués sur les côtes d'Angleterre ou du continent européen, les autres provenant des mers de nos antipodes; le Musée du Collège royal des chirurgiens de Londres en possède trois des côtes de Tasmanie. Après un exposé historique de ce que l’on sait sur Île squelette, le Directeur du British Museum donne quelques notes sur l’histoire des caractères généraux et des conditions dans lesquelles se trouvent : 4° le squelette de Tasmanie, qui 99 { 306 ) est au Musée du Collège royal des chirurgiens; 2 le squelette de l'animal qui a péri, en juillet 1863, près de Thurso, dans ls comté de Caithness et qui est au British Museum; 3° le squelette de Yorkshire, qui provient d'un individu qui a péri en 1895 à Tunstall, et qui est conservé dans le parc de Burton Constable. M. Flower décrit ensuite séparément le crâne et les divers os, et il accompagne Ja description de sept belles planches. Notre savant confrère a bien voulu nous autoriser à reproduire la planche principale dans notre Ostéographie. Mon collaborateur, Paul Gervais, énumère les captures cpérées, dans la Méditerranée, dont on a conservé le souvenir; il fait mention ensuite de cinq échouages sur les côtes ouest de France, de divers échouages sur les côtes de Belgique, de Hollande, des Iles Britanniques, et reproduit le tableau des dix captures publié par Sir W. Turner, sur les côtes écossaises ; eatin il cite les Cachalots dont la présence à été constatée sur ies côtes de Suède et de Norwège. D'après Allen, 1l indique aussi les côtes des États-Unis, les parages des Iles Aléoutiennes, la mer du Japon et d’Okhotsk. Gervais expose ensuite la composition du cräne et le système dentaire. I décrit également les ossements fossiles du Pliocène, de la Gironde et du département des Landes. En 1874, un Cachalot a échoué, le 10 mars, sur les côtes c'alie et a été l’objet d'un intéressant mémoire de M. Leone de Sanctis. Ce travail est accompagné de sept planches. MM. Pouchet et Beauregard ont publié, dans les Comptes rendus (août 1884), une notice sur la boîle à spermaceli; on serait en présence d'une sécrétion non glandulaire d'un ordre particulier, d'après ces savants. Pendant la campagne scientifique de l’Hirondelle (K887), le professeur Pouchet a eu l’occasion, durant un séjour de trois semaines aux Açores, d'étudier un Cachalot fraîchement tué. Nous espérons qu'il rendra bientôt compte du résultat de ses ebservations. Tulled Newton fait mention de deux dents de Physeter : (307 ) macrocéphale du Forest bed, à Norfolk, et d'une région cervi- cale de Balæna. Ces déterminations auraient besoin d’être con- firmées, la première surtout 1. SYNONYMIE. Physeler macrocephalus. Catodon macrocephalus, (Gray). Cachalot, des Français. Sperm Whale, des Anglais, Pott Fisch, des Hollandais. Capidoglio, des Italiens. Le Cachalot porte le nom de Kigutilik sur la côte de Groën- land, s'il faut en croire Fabricius qui en a donné une description. CARACTÈRES ET DESCRIPTION. Le Cachalot à la taille des Baleines, mais au lieu de fanons au palais, il a le maxillaire inférieur garni d’une vingtaine de furtes dents coniques, assez espacées. Le mâle à une taille beaucoup plus forte que la femelle, aussi est-il plus redoutable. La femelle ne dépasse guère 30 pieds, le mâle en atteint jusqu’à 60 et même plus. La taille paraît très variable ; les solitaires ou les vieux mâles deviennent beaucoup plus grands. La gamme qui à péri dans l'Adriatique en 1854 ne se composait que de petits individus, probablement femelles. Les Cachalots d'Audierne, qui étaient tous femelles, avaient, dit-on, une longueur de 12 à 16 mètres. Eschricht connaissait cette différence de taille et croyait 2 Ann. a Mag. nat. hist. Vol! XIX, 1687, p. 229. Proc. GÉoL: Soc. 1887, P Q2— . |. { 308 ) devoir attribuer à la femelle seulement la moitié de la longueur du mâle, Cette différence du mäle rappelle les ruminants qui vivent aussi par bandes, et chez lesquels les mäles ont à défendre le troupeau. Le capitaine Gray a vu, au mois de mai, une femelle pleine qui n'avait que 29 pieds et qui contenait un fœtus de 10 pieds. C’est donc à peu près le tiers de la mère. Les Cétacés en général se distinguent des autres mammifères par le défaut de symétrie, et ce défaut se fait plus particu- lièrement sentir chez les Cachalots, comme M. le professeur Pouchet le fait remarquer dans un mémoire qu'il m'a fait l'honneur de composer, à l’occasion de mon cinquantenaire de professorat 1. Les Cachalots ont une tête énorme avec un museau carré et tronqué, à l'angle antérieur et supérieur duquel sont placés les évents; elle est renflée par suite de laccumulation du spermaceti. La tête osseuse se distingue par sa forme excavée qui la fait ressembler à un canot. La mandibule s'éloigne complètement de celle des Baleines ; les deux branches se réunissent sur une grande longueur comme dans les Cétodontes à longue symphyse. On connaît plusieurs mandibules de Cachalot dont l’extré- mité antérieure est recourbée; il y en a une au Muséum à Paris ; Beale en cite deux cas; M. J. Murie en cite trois et M. Flower en cite encore un autre. Le D' Fischer ? a cherché la cause de cette déformation qui se produit assez souvent, et qui commencerait presque après la lactation ; 1l suppose que la déformation est due à une ostéite, et il termine son article en disant qu'il ne comprend pas clairement comment une ostéite seule a pu produire des incurvations aussi considérables, à moins que la maladie ne soit congénitale ou presque congénitale. * PoucneT, M. G. De la symétrie de la face chez les Célodontes, in-4°. Paris, 1886. ? Note sur une déformation pathologique de la mdcho re inférieure du Cachalol. JOURNAL DE L'ANATOMIE ET DE LA PHYSIOLOGIE, n° 4, PI. XI. ( 309 ) Ne serait-ce pas plutôt l'effet, non d’un arrêt de dévelop- pement, mais d’un défaut, d'un obstacle à l'épanouissement du bout de la mâchoire. Nous avons sous les yeux un maxil- laire de fœtus de Baleine franche : cet os a le bout antérieur parfaitement replié sur lui-même, ce bout est comme une feuille de papier qu’on a pliée et qui doit s'étaler ensuite; au moindre obstacle à son redressement, il conserverait la défor- mation, en apparence pathologique, qu'on remarque à ces mächoires des Cachalots. C'est un arrêt d’épanouissement et non pas de développe- ment. L'arrêt est dû à une cause externe. Nous avons publié dans notre ostéographie la figure d’une mandibule recourbée sur un de ses côtés et dont nous citons plusieurs exemples, Les Cachalots n'ont point d’os lacrymal séparé, d’après les observations de M. Flower; ce qui n’est pas une raison sufli- sante pour les exclure de la famille des Ziphioïdes. Cet os est probablement uni avec l'os malaire. Les dents de Ziphioïdes diffèrent de celles des Delphinides par l'absence d’une couche d’émail. Elles manquent dans tous les Cétacés de cette famille à la mâchoire supérieure. Dans le Cachalot, il en existe toutefois au palais, mais elles ne percent pas les gencives. Elles sont irrégulièrement développées dans la peau du palais et ne correspondent aucunement à des alvéoles. M. Flower a figuré une de ces dents 1. Owen fait mention d’une femelle dans laquelle: Bennett à trouvé huit dents semblables de chaque côté du maxillaire supérieur 2. Jäger de Stuttgart a décrit et figuré une de ces dents dans un journal russe, imprimé à Moscou en 1857 3. D’après Bennett, les dents subissent certaines variations; il-a trouvé les nombres suivants : 21-20 ; 93-91 ; 99-99; 94-94; 29-23; 24-26; 23-24; 29-24; 19-20. 1 On the Osteologie ofthe Sperm-whale, p. 520. ? Owex, Odontographie, Tab. 89, fig. 5-4. 5 Bem-rkungen ....{(Narval et Cachalot) Moscou, 1857. (310) Les Cachalots, comme tous les Ziphioides, ont un petit nombre de vertèbres ; leur formule est : cervicales 7, dorsales 8, lombaires 11, caudales 24, en tout 50. Les Cachalots ont leur atlas séparé et les six autres cervicales réunies. La dernière cervicale a ie corps à peine plus épais que celui des vertèbres précédentes; dans la Baleine, le corps de cette même vertèbre est notablement plus épais que celui de la sixième et de la septième. L'Hyperoodon présente sous ee -rapport les mêmes dispositions que le Cachalof. Les vertèbres cervicales, à commencer par l’atlas, ont un talon qui passe au-dessous du corps de la vertèbre suivante, et ces talons donnent une grande solidité à cette région. Ces talons existent également dans plusieurs genres de Cétacés fossiles, comme les Balænula et les Balænotus. Les vertèbres dorsales, au nombre de huit, ont toutes la face inférieure du corps carénée et leur épaisseur n’a pas plus de la moitié de l'épaisseur des lombaires. Elles portent toutes sur le corps la facette articulaire correspondant à la côte. Les apophyses transverses diminuent en longueur, régulièrement d'avant en arrière. Les lombaires ont, comme toujours dans les Cétacés, le Corps plus développé que celles des’autres régions. Dans les caudales, les zygapophyses sont très éloignées du corps de la vertèbre. Toutes les vertèbres ont des caractères particuliers qui les distinguent ; les apophyses transverses sont courtes dans toutes les régions et particulièrement élevées dans la région dorsile. Le sternum de l'animal adulte ne forme qu'un seul 6s, allongé d'avant en arrière, élargi en avant, rétréci au milieu, et se terminant en arrière par une languette régulièrement arrondie. Il reste un trou en avant sur la ligne médiane. Dans le sternum plus jeune, on voit la réunion presque complète des deux pièces antérieures, qui constituent presque tout le sternum ; puis une pièce en arrière encore séparée de la précé- dente, et sur la ligne médiane on voit des traces de leur soudure. (DES LE Es Le bassin est représenté par un seul os de chaque côté, comme dans les Delphinides. M. J.-C. White a fait une communication sur deux débris de Cachalot, un maxillaire inférieur d’un grand individu et une dent fort intéressante 1. Le professeur Ercolani de Bologne s’est occupé de la strue- ture du pénis de ces Cétacés et croyait devoir admettre plusieurs espèces de Cachalots. MOEURS. Les Cétacés qui nous occupent sont essentiellement péla- giques et descendent à de grandes profondeurs dans la mer. Le capitaine Gray assure avoir vu des Cachalots rester deux heures sans venir à la surface et dérouler jusqu’à 700 (fathoms) brasses de corde. Le capitaine Scammon en a vu plonger pen- dant 50 minutes et même une heure et quart. Les mouvements de ces animaux sont très brusques et vio- lents et ils nagent avec une rapidité plus grande que toute autre espèce de leur ordre. Le même capitaine Scammon estime la rapidité de leur course à trois milles à l'heure. Le Cachalot tient sous plusieurs rapports de l'Hyperoodon ; comme lui, en plongeant on le voit disparaitre seul et en revenant un instant après à la surface, on le voit entouré de plusieurs. Les Cachalots ont de la voix; on assure avoir entendu des mugissements d'individus blessés à plus de quatre kilomètres de distance. Les Cachalots, qui sont venus échouer à Audierne sur le sable, ont vécu vingt-quatre heures avant d’expirer et, comme nous Pavons dit plus haut, ils poussaient de véritables mugissements. L'air expiré du Cachalot a une odeur d’une fétidité extraor- dinaire; cette opinion paraît très répandue ; il n’est pas rare 1 Proceed. Boston Soc., 1860, p. 222 (312) de trouver des marins soutenir avec assurance, que le contact de l'air expiré suflit pour soulever la peau aussi facilement et plus rapidement qu’un vésicatoire. Le capitaine Jouan dit également que leur souffle à une odeur si fétide qu’elle provoque des nausées quand on la sent de près. Les pêcheurs disent que les Cachalots nagent par bandes qu'on appelle schools ou gammes, dans les régions tropicales et subtropicales, et on cite comme une de leurs stations favorites le côté sous le vent des Iles Galapagos. Ils visitent aussi régulièrement la baie de Bengale, et les schools y sont formées généralement de femelles, accompa- gnées de leurs jeunes (Calves). Ces derniers ont de vingt à trente pieds, disent les pêcheurs, en confondant les femelles avec les jeunes. Ces schools sont formées de quinze, vingt et jusqu'à deux cents individus; ils vont au secours les uns des autres. C’est le motif pour lequel on prend souvent plusieurs individus dans une troupe. On s'accorde assez généralement sur le rapport des mâles et des femelles dans les schools. Les mâles qui accompagnent ces schools sont les défenseurs naturels de la bande; aussi, au lieu de fuir à la première attaque, comme les Baleines, les Cachalots se défendent vigou- reusement; on cite, dans les annales des baleiniers, plus d’un exemple d'individus qui se sont vengés sur les pirogues et sur les hommes qui les conduisaient. M. Nougaret raconte, dans la Revue des deux mondes, qu'il a vu un solitaire sur la côte Est du Groënland se retourner brusquement après l’attaque, se jeter sur la pirogue, la saisir par le milieu et la broyer sous sa formidable mâchoire. Les baleiniers disent que ce sont les femelles qui se réunis- sent et que les vieux mâles vivent généralement isolés. La bande qui a péri au siècle dernier à Audierne était exclusi- vement formée de femelles, disent les témoins; deux de ces femelles ont mis bas après leur échouement sur la plage. Une ns (313) d'elles donna même deux petits, l’autre un seul. Ces jeunes Cachalots avaient une longueur de trois mètres et demi. Comme les mâles vivent plus souvent isolés, 1ls semblent aussi échouer plus souvent que les femelles et c’est sans doute la raison pour laquelle, à l'inverse des Baleines, les Cachalots mâles viennent plus souvent à la côte que les femelles. Le capitaine Gray a comparé les sexes des individus capturés en plein Océan, et pour 65 femelles il a compté 96 mâles adultes et 51 jeunes. Les gravures conservées à la Bibliothèque royale de Belgique ne représentent que des mâles. Il y en a sept ou huit. Il n’y a qu'un dessin représentant un Cachalot dont le sexe est douteux. Sur huit individus échoués sur les côtes d'Écosse, il y avait -cinq mâles et on n’a pas tenu compte du sexe des trois autres. (Sir Turner). On a fait depuis longtemps l'observation que les Cachalots qui échouent dans l'Atlantique septentrionale, sont le plus souvent des solitaires égarés dans le Gulfstream à la recherche de leur pâture. Ces animaux ne trouvent plus que de rares Cépha- -Jopodes et vont mourir de misère sur l’une ou l’autre côte. Les baleiniers rapportent que leur mode d’accouplement est le même que celui des Baleines : les Cachalots s'unissent debout dans l’eau, la tête au-dessus de la surface. Nous ne savons s’il y a des époques fixes pour leurs amours: on voit leurs breeds at any season of the yaer, dit Jackson, qui a fait plusieurs bonnes observations sur ces Cétacés. Le capitaine Colnett rapporte que les environs des Iles Gala- pagos sont, au printemps, le rendez-vous de tous les Cachalots des côtes du Mexique, de celles du Pérou et du golfe de Panama; qu'ils s’y accouplent et qu’on y voit de jeunes Cacha- lots qui n’ont pas 2 mètres de longueur. C’est bien petit, 2 mètres, puisque nous avons vu des femelles de la plage d’Audierne mettre bas des jeunes qui avaient déjà 3 mètres au moins. La pâture des Cachalots est celle de tous les ziphioïdes : Eschricht les avait appelés avec raison Theutophages, du genre Theuthis, Calmar. t314) Toute leur pâture consiste en. Cuttle fish, dit Atwood 1, et on sait que les Cuttle fish des marins sont des Calmars. Tous les baleiniers s'accordent du reste à dire que l'estomac des Cachalots renferme toujours de nombreux restes de Cépha- lopodes. Hunter, Baussard, Eschricht et d’autres ont fait les mêmes observations sur des individus qu'ils ont eu l’occasion l'observer. Les Cachalots de la gamme qui a péri en 1853 dans l'Adria- tique, avaient encore tous des becs de Céphalopodes dans leur estomac. L'ambre gris, autrefois très estimé comme article de parfu- merie, est le résidu de la digestion des Cachalots; son odeur musquée provient du Poulpe dont ils font leur pâture. On a souvent trouvé dans l’ambre gris des becs de Céphalo- podes et des cristallins, ce qui explique parfaitement leur origine. Ainsi un Cachalot capturé, en 1715, sur les côtes de Sardaigne, renfermait de lambre gris dans lequel se trouvaient des becs de Sepia. On tirait l’'ambre gris des Molluques, de Madagascar, des Maldives, des Antilles et même de Chine. Les Japonais le con- naissent sous le nom d’excrément de Baleine. Albert le Grand et avant lui Marco Polo connaissaient par- faitement son origine, que l’on avait attribuée tantôt à des oiseaux, tantôt à des Phoques ou à des Crocodiles, et on avait même été Jusqu'à supposer qu'il provenait d’une fontaine bitu- mineuse sous-marine. Les Cachalots produisent encore une autre substance sur l'origine de laquelle on à été également dans le doute; nous voulons parler du blanc de Baleine. Le blanc de Baleine ou Spermaceti est la Cétine des chimistes c’est un palmitate de cétyle, c’est-à-dire une combinaison de l'acide palmitique avec l’éthal (alcool céthylique). Cette substance grasse est surtout formée sous la peau du front et du rostre de ces animaux; nous avons déjà dit, que les 1 Arwaon, Prec. Boston Soc., VIT, 1860, p. 226. \ ( 315 ) Hyperoodons en produisent également, et, comme leur huile est plus estimée, les Hyperoodons ont été l’objet d’une chasse spéciale depuis quelques années. On sait qu'après avoir ouvert le front du Cachalot, on puise à seaux le spermacéti à l’état fluide, disent MM. Pouchet et Beauregard, et ils supposent, après l'examen de pièces envoyées des Açores, sous le nom de Racines de la boîte, que le sperma- ceti est le produit d’une sécrétion particulière non glandulaire, qu'on pourrait rapprocher de la cire des abeilles f. PÈCHE. Il n’est pas sans intérêt de jeter un coup d'œil sur l'époque et les lieux où cette pêche a pris naissance; quoiqu'on désigne sous le même nom les pêcheurs qui s'occupent de la Baleine et du Cachalot, il y a cependant de très grandes différences dans ces deux industries. On s’est livré pendant longtemps à la pêche de la Baleine avant de songer à la pêche du Cachalot. On pratiquait la première industrie dans les régions septentrionales, où l’on ne voit que bien rarement un Cachalot. On raconte que, en 1712, un baleinier de Nantucket, Chris- topher Hussey, poussé au large par un vent violent, se trouva devant une school de Cachalots, en captura heureusement un, et, si l'animal n’avait pas de fanons, il avait des couches de graisse qui lui donnaient une valeur commerciale non moins grande que la Baleine; aussi on apprécia bien vite l'importance de cette nouvelle graisse qui se fige à la température ordinaire et dont on était loin de soupçonner la nature; on crut d'abord que c'était le sperme de ces animaux et les droguistes lui don- nèrent le nom de spermaceti. De là les baleiniers anglais ont fait le nom de spermwhale. C'est l’origine, paraît-il, de cette pêche sur les côtes des États- ! Poucner et BEAUREGARD, Sur la boîte à spermaceli. COMPTES RENDUS DES SÉANCES DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES. AOÛ, 1884. (316) Unis d'Amérique. On exploita d’abord l'Atlantique et, en 1787, la Nantucket Colony of Whalingmen from England, envoya le premier baleinier dans la mer Pacifique. Peu de temps après, en 1789, les baleiniers du cap Cod se rendirent pour la première fois dans la mer des Indes pour y faire cette chasse. On prétend qu'un gentleman du cap Cod, à son retour des Indes, avait vu de nombreux achalots dans la mer des Indes, et son récit avait déterminé quelques indus- triels à se constituer en société. La première campagne de 1791 fut fort heureuse. On cite Joseph Russel et fils et Corn. Howland, qui revinrent du Paci- tique (1791) avec un chargement complet. On ne connait pas de véritable station du Cachalot dans les mers d'Europe ; on ne connaît que des échouements ; les seules stations connues, où les pêcheurs se rendent encore, ce sont les régions équatoriales du Pacifique, de l'Atlantique et de la mer des Indes. On cite particulièrement les Iles Galapagos dans lPocéan Pacifique, les Açores dans l'océan Atlantique, le golfe de Bengale dans la mer des Indes. Le commandant Maury ne figure cependant pas ces régions d’une manière particulière sur sa carte et, dans ses lettres publiées en 1850, il fait remarquer qu'on harponne également le Cachalot sur les côtes du Japon. On fait également cette pêche sur les côtes méridionales et orientales de la Nouvelle-Hollande. La carte du savant commandant américain représente cet animal sur toute la largeur de locéan Pacifique, des deux côtés de l'équateur. On voit seulement sur cette carte une tache blanche à l'Est et une autre à l'Ouest des [les Sandwich. Ces animaux sont-ils régulièrement cantonnés ou visitent-ils les divers océans, sans tenir compte des lieux ou des saisons ? Nous avons plusieurs preuves que ces animaux parcourent de grands espaces en mer : on a cité des individus, harponnés dans l’Atlantique, qui portaient encore des harpons lancés dans le Pacifique, et le commandant Maury fait mention d’une cap- ture d'individus sur les côtes du Chili qui portaient encore le (317) harpon japonais dans leurs chairs. Un autre Cachalot qui s’était enfui avec un harpon lancé sur les côtes du Pérou, a été pris au large sur la côte orientale des États-Unis d'Amérique, Ces Cétacés parcourent ainsi toute l'étendue du Pacifique et se rendent même du Pacifique dans l’Atlantique. Maury indique leur présence jusqu’au 60° degré de latitude sud au devant du cap Horn. Sur les côtes d'Europe on n’a vu que des animaux égarés, tantôt seuls, tantôt réunis en schools, mais il n’y a pas une seule côte à l'Est comme à l'Ouest de l'Atlantique où l’on n’en ait vu échouer. Et ce n’est pas seulement le plein océan qu'ils hantent, ils fréquentent également les mers intérieures, la Méditerranée comme la Baltique. Jusqu'à présent on n’en à pas vu pénétrer dans la mer Noire pas plus que les Baleines et les Balénoptères. M. Mengaret raconte, dans la Revue des deux mondes, que, au mois de septembre 1865, un Cachalot apparut dans le cercle polaire, entre l’île Jan-Meyen et la côte orientale du Groenland. La vigie signala le souffle du Cachalot et aussitôt on lança quatre pirogues à sa poursuite. Cette pêche a lieu principalement dans l'océan Pacifique, mais il existe encore quelques baleiniers qui viennent tous les ans poursuivre le Cachalot dans l’Atlantique. Le Muséum de Paris a reçu récemment un squelette et il attend les parties molles d’un animal qui ont été préparées pour ses collections, par le professeur Pouchet; après avoir été chercher des squelettes de Balénoptères sur les côtes de Finmark, le suc- cesseur de Cuvier a voulu remplacer les ossements de la cour des galeries d'anatomie comparée par un squelette complet. Le rapport de la Commission américaine, qui a fait le relevé des produits de la pêche introduits aux États-Unis d'Amérique, depuis le 1° janvier 1804 jusqu’au 31 décembre 1876, estime, d’après la quantité de spermaceti apportée aux États-Unis, qu’il y a eu, pendant cette période, 225,521 Cachalots capturés. Il 1 Revue des deux mondes, 1. LXXXIH, p. 707, 1869 (418) compte, d’après Scammon, que chaque Cachalot fournit : 25 barils de spermaceti. Comme on le pense bien, partout le nombre des Cachalots a considérablement diminué et il n’y a plus que fort peu de balei- niers qui se livrent encore à cette industrie. On citait comme places principales : les environs des Açores, d'août à novembre; les îles Bahama au nord, le golfe de Mexico, entre-28° et 3% N. et 48 et 57° W., de mars à mai: les Iles du Cap Vert, en hiver, près Fernando P5, entre Sainte-Hélène et la côte d'Afrique et la côte Sud-Amérique f. Il paraît que lon capturait encore tous les ans vers 1860, environ 150 Cachalots dans les eaux des Açores ? tandis qu'au- jourd'hui, d’après ce que m'écrit M. Franc. Aff. Chaves, de Ponta delgada, S. Miguel, ce nombre ne dépasse pas einq ou six. Ï n’y a plus guère que les Américains qui se livrent encore à cette industrie. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Il est reconnu que c'est un animal des régions tropicales, que l’on trouve surtout dans le Pacifique, mais qui est répandu depuis l'Équateur, au Nord jusqu'au Groënland, au Sud jusqu'à la Nouvelle-Zélande. Les squelettes reçus d'Australie au Musée du Collège royal des chirurgiens de Londres, et si bien étudiés par le professeur Flower, ne laissent guère de doutes sur l'identité spécifique de ces animaux : on a capturé des Cachalots dans toutes les mers et on a pu comparer à Londres des squelettes de l'Australie avec des squelettes du nord de l'Atlantique, sans qu’on ait trouvé entre eux la moindre diffé- rence. Du reste, déjà à l'époque où Cuvier s'occupait des Cétacés, le grand naturaliste ne voyait pas de différences entre les 1 ANDERSON, Nachrichten ron Island, 1746, p. 221. * Drouer, £léments de la faune Açoréenne, p. 112 (1861). 4" À (319) individus provenant des mers les plus éloignées les unes des autres. Il est généralement admis, dit Lesson, que les grands Cétacés les plus connus sont répandus dans toutes les mers du globe, et que la Baleine et le Cachalot des mers du Nord sont iden- tiques dans le Grand Océan, soit dans la partie qui baigne les côtes Nord-Ouest de l'Amérique, soit dans les mers du Cap Horn ou du Sud de la Nouvelle-Hollande. Les Baleines, ajoutait-il, se trouvent, comme les Cachalots, aussi bien sous le soleil de l'Équateur qu'entre les glaces du cercle polaire. La science à enregistré beaucoup de faits nouveaux depuis le jour où Lesson a écrit ces lignes, et ce savant ne s’expri- merait plus aujourd'hui de la même manière. Ce que Lesson dit du Cachalot est exact, mais ce qu'il dit de la Baleine ne l'est pas. Sur sa carte intéressante de la répartition du Cachalot dans les divers océans !, le commandant Maury figure aussi la dis- tribution géographique de la Baleine, ou plutôt des Baleines. Des deux côtes de l'Equateur, on voit, dans le Pacifique surtout, jusqu’au 30° degré au Sud et au Nord, le domaine du Cachalot: puis au Nord et au Sud on voit le domaine de la Baleine; le: premier habite les régions chaudes, la Baleine les régions tem- pérées; Maury n'a pas tenu compte de la Baleine franche, ni dans les eaux du Spitzhberg, ni dans la mer de Baflin. Le savant commandant représente, sous une couleur spé- ciale, pourpre, les endroits, également au Nord et au Sud de l'Équateur, où l’on a trouvé des Baleines et des Cachalots, nageant dans les mêmes eaux. Le docteur R. M Cormick, à propos des explorations à faire dans l'hémisphère antarctique, en parlant des richesses que possède la région du pôle sud, parle d’une quantité de Baleines de la plus grande espèce et de la plus grande valeur, particu- lièrement, dit-il, de l'espèce appelée Spermaceti. I est à désirer ! A chart schowing the favorite resort of the Spcrm and Right Whale: { 320 ) que l'exploration anglaise au pôle sud ait lieu, pour savoir s’il existe, au milieu des glaces de ces régions, à côté des Cachalots passagers, une espèce de Baleine représentant la Baleine franche du pôle antarctique. Ilest donc définitivement acquis que le Cétacé theutophage qui nous occupe, vit principalement au milieu de l'Atlantique et du grand océan Pacifique et qu'il ne trouve, au Nord comme au Sud, d'autres limites que les glaces polaires. On l’a reconnu dans les parages du Spitzherg, auprès du cap Nord et des côtes de Finmarck ; dans les mers du Groën- land comme dans le détroit de Davis, dans la plus grande partie de l'Océan Atlantique septentrional jusqu’à l'ile Jan- Meyen (Nougaret), sur les côtes des Iles Britanniques, à lem- bouchure de l'Elbe (1720), auprès de Terre-Neuve, aux environs de Bayonne; non loin du cap de Bonne-Espérance; près du canal de Mozambique, de Madagascar et de Plle de France; dans les eaux qui baignent les rivages occidentaux de la Nou- velle-Hollande; sur les côtes de la Nouvelle-Zélande; près du cap de Corientes, du golfe de Californie; le cap San-Lucar (Californie); les Iles Kingsmill, Marshall {capit. Jouan); à peu de distance de Guatemala ; autour des Iles Galapagos; à la vue de l’He Mocha et du Chili; dans la mer du Brésil; et enfin, sur toutes les côtes du continent européen, même dans les mers intérieures, la Méditerranée, la Baltique et Adriatique. Le Cachalot est donc un animal orbicole ou cosmopolite; M. Flower a reçu d'Australie, pour le Musée du Collège des chirurgiens, à Londres, des squelettes de Cachalots, accom- pagnés de Globiceps et de Delphis, qui ne présentent aucune différence avec les nôtres, de manière que la faune aquatique d'Australie ne correspond aucunement, pour les Cétacés au moins, avec la faune terrestres ; nous ajouterons qu’il en est de même pour certains poissons plagiostomes. La faune aquatique ne possède, sous aucun rapport, un facies propre. Seulement certains types, qui ont disparu en Europe depuis les âges géologiques, semblent s'être conservées jusqu’à présent chez nos antipodes. En tenant compte de tous les faits, on voit que le Cachalot estgénéralement répandu dans le Pacifique comme dans PAtlan- tique entre le 60° degré de latitude Sud et le 60° degré de latitude Nord. Ce sont les limites indiquées par Maury et par Berghaus. Si le Cachalot a été observé au delà du 60° degré de latitude Nord et Sud, à ces latitudes on n’a vu que des individus isolés, des solitaires. Il n'a pas été vu au delà du détroit de Bebring. Il n’est pas sans intérêt de passer en revue les individus qui sont venus échouer sur les côtes en Europe, et dont il à été tenu compte par quelques naturalistes. Les anciens ont déjà parlé de Cachalots capturés ou échoués dans la Méditerranée. « La première année du règne de Claude (an 4#), un Cacha- lot (Orca) échoua sur le rivage. Il serait mort par le seul fait de son naufrage; mais l'empereur qui se mit à la tête des cohortes prétoriennes combattit avec eux le monstre marin. Pline, témoin de cette lutte absurde, dit-il, vit une barque submergée par l'eau dont le SouFFLE du Cachalot lavait rem- plie. » Strabon parle comme Pline du Physeter et, dans plusieurs villes du littoral, on conserve encore des mandibules, des côtes, des vertèbres et d’autres restes de ces Cétacés. Rondelet en a vu, dans le courant du XVE siècle, des osse- ments qui étaient destinés au palais d’un duc de Florence. Paulus Jovius parle de deux individus qui auraient péri sur les côtes de l'Estrurie. Ranzani parle d’un mâle de 55 pieds, qui a été exposé dans le port de Pesaro en 1715. La même année, un Cachalot a été capturé sur les côtes de Sardaigne, mais il n’a été fait mention que de lambre gris qu'il renfermait et dans lequel se trouvèrent des becs de Sépia. 93 st 322 | Cornalia !, dans sa F'auna d'Italia, cite onze cas de Cachalots qui ont péri sur les côtes d'Italie : en 1715, 1768, et 1775 en decà d’Ancône, en 1805, un au-dessus d’Ancône près de Fermo et un autre en 1874 à Porto-San-Giorgio, en 1810 un à Chioggia, en 1715, un près de Venise; en 1753 et 176% sur la côte de Dalmatie à Rovigno, en 1767 près de Zara et en 1750 près de Sebenico. a Sur la côte de Nice il signale sept échouements : en 1798, 1833, 1852, 1854, 1860, 1863 et en 1864. De Gênes à Civita- Vecchia on en a vu échouer trois, le premier en 1865, à la Spezzia, le second entre Livourne et Civita-Vecchia, le troisième à Civita-Vecchia même. Dans les Actes des curieux de la nature il est question d'un Cachalot, échoué à S'-Hospice, près de Villefranche (Alpes- Maritimes), le 10 novembre 1726 ?. Un autre aurait péri près d’Ascoli 5. Mon collaborateur, F. Gervais, en cite huit échouements dans la Méditerranée. L'Hyperoodon, échoué près de Piètri sur la côte de Toscane, dont parle Fr. Cuvier #, est un Cachalot, puisqu'il avait 50 pieds de long et qu'il n’y a pas d'Hyperoodon de cette taille. En 1838, Th. Kotschy a vu, à la côte près d'Alexandrie, un Physeter que l’on a rejeté à la mer à cause de lPinfection qu'il répandait autour de lui. L'échouement le plus remarquable est celui de 1855, le 15 du mois d'août ; entre Pola et Trieste, sur la côte d’fstrie, une petite gamme est allée se perdre : d’abord un jeune, puis d’autres plus grands, de 36 pieds. Le 16, le gouverneur du littoral en vit encore deux jeunes qui lançaient, disait-il, des jets d’eau par les narines. Le 19, la nouvelle de la prise de plusieurs Cachalots arriva à Vienne, et Heckel partit le 20 pour arriver sur les lieux le 24. 1 CorxALiA, Fauna d'Italia. Milano. 2 Bayer, Act nat. cur , 1755, Hle vol. 5 Element. di Zoo! ,t.lI,p. 6£6 Hist, nat, des Cétacés, p. 381. > Les cadavres étaient dépécés, mais les squelettes étaient malheureusement méêlés; le professeur Roth parvint à en reconstituer un. Deux têtes furent sauvées pour le Musée d'anatomie à Vienne ; une tête est restée, comme souvenir, à Citta Nuova. Dans le golfe de Saint-Nazaire (Var), un sujet de moyenne taille a été pris en 1856. Une moitié de la mandibule en est conservée dans le cabinet des Pères Maristes, à la Seyne, près Toulon 1. Un mâle est venu se perdre, dans la nuit du 10 mars 1874, à Porto-San-Giorgio et a été l’objet d’une monographie zooto- mico-zoologique ? par le docteur Leone de Sanctis. On en a vu échouer un tout près de Venise. Le dernier a été capturé en 1874 près d’Ancône. Dans la Bibliothèque de Ravenne, on conserve deux parties d'un crâne, sans indication d’origine. En Italie, M. Rob. Lawley a signalé des portions de maxil- laires et des dents ayant des caractères de Physeter provenant de Volterra et de Orciano 5. Sous le nom de Physeter antiquus, Gervais a signalé un nouveau Cachalot dont 1l a trouvé la mandibule dans les sables marins de Montpellier. Cette mandibule est déposée au Muséum à Paris. Elle rappelle fort bien le Cachalot d'aujourd'hui. Le professeur Turner a écrit une notice intéressante à pro- pos d’une gravure fort rare qui représente un Cachalot, capturé le 25 février 1601, dans le port d’Ancône. C'était un mâle. On lui accorde 56 pieds de long. [ faitmention aussi d’une dent, mise au jour dans des galeries, à l'ile de Sh. Ronaldsay, dont lenfouissement date peut-être de Pépoque de la premiere occupation par les Norwégiens #. 1 P. Gervais, Comptes rendus hebd., 1844, p. 877. ? Sul Capidogho arenato a porto S. Giorgio, in-4°, Roma, 1881. 5 Ros. Lawiey, Pesi et Altri vertebrati fossili del Pliocene Toscuno Pisa, 1875, p. 11. # Proc. of the Royal Society of Edinburgh, session, 1871-72, p. 658. (324) En 1715, un Cachalot, long de 48 pieds, a échoué dans l’Adriatique. On en conserve des os à Sinigaglia. Sous le règne de Louis XIV, un Cachalot de 60 pieds de long vint échouer à la Selva près Collioure. M. Guyon à même recueilli en Algérie des ossements de Cachalot, sur la rive gauche de lOued-Ger, qui pouvaient fort bien se trouver là naturellement, puisque nous avons reconnu des os de Balénoptère dans les mêmes conditions. Ils ont été élevés au-dessus du niveau de la mer à la suite de soulèvements. Paul Fischer à publié une Note sur les Cachalots échoués sur les côtes océaniques en France, dans le Jowrnal de Zoologie de Gervais 1. Ces échouements ont eu lieu surtout en hiver et au printemps, de janvier à avril. Les principaux par ordre de date sont : k Le 1% avril 1744, il y en a un de 49 pieds qui se perd près de Bayonne 2. Un dessin en est conservé dans la collection des vélins du Muséum. Fr. Cuvier l’a fait copier dans son histoire naturelle des Cétacés. A quatre lieues de Boulogne-sur-Mer, un individu a échoué le 5 mars 1761, dont un dessin est conservé à la Bibliothèque de cette ville 5. Le 19 janvier 1769, un autre périt dans la baie de la Somme près Saint-Valery 4. Rien n'en a été conservé. En 178%, le 1 # mars, une school entière, composée de trente- deux individus, vint se perdre sur la côte occidentale d’Au- dierne5, Une tête provenant de cette bande a été donnée à lPAca- démie de La Rochelle par M. Donnadieu, négociant en cette ville, qui l'avait fait venir d'Audierne 6, Une tête de sujet adulte, ! Journal de Zoologie, à 1, 1872, p. 256. ? Hist. de l’Acad. roy. des sciences pour 1741 (1744). 5 Fiscner, Journal de Zoo'ogie, 1. 1. # Baiccox, Catal. des Fertébres de la Somme. (ME. Soc. R. D'ÉMULATION D'ABBEVILLE, 1853. ? Leltre de M. Le Coz, insérée dans le Mercure de France, détails cités par Lacépède, p. 205, et par Pierre Camper, p. 98. 6 Extrait du Journal Éphémérides, de M. Lambertz, négociant à La Rochelle. , de une colonne vertébrale, une portion d'os hyoide, un sternum, une omoplate et quelques os des nageoires pectorales, en sont conservés au Muséum d'histoire naturelle à Paris. Nous ne parlons pas des cinq Cachalots qui se sont montrés à l'entrée de la Loire, au mois de juillet 1863, et qui sont restés, d'après les journaux de Nantes, engagés dans le sable au reflux. Quoiqu'ils aient été exhibés à S'-Nazaire, rien n’en a été con- servé et nous n'oserlons aflirmer que ce sont des Cachalots. Un d'eux mesurait, disait-on dans les journaux, 6,60. Vers le milieu de novembre 1872, un mâle, de 12 mètres, est venu échouer près du phare de Biarritz. Il était en putréfaction avancée et le squelette n'a pu être conservé, malgré les soins de M. Souverbie, directeur du Musée de Bordeaux f. En 1875, deux imdividus ont été vus dans les parages de Guethary (Basses-Pyrénées). Le mâle seul a été capturé; son squelette est conservé au Musée de Bayonne; il a plus de 11 mètres de longueur. Le professeur espagnol Graëlls de la Paz m'éerit qu'il a mis les pêcheurs à contribution, depuis le détroit de Gibraltar jusqu’à la frontière française, pour connaître les grands Cétacés qui fréquentent ces parages; ce sont la Balæna biscayensis, la Balænoptera museulus et le Cachalot qui sont les plus connus. On a enregistré plusieurs exemples de Cachalots qui sont venus se perdre sur les côtes de Belgique, des Pays-Bas, d'Allemagne, de Danemark, de Suède et de Norwège. Claas Mulder estime à vingt le nombre de Cachalots connus qui se sont perdus sur les côtes des Pays-Bas; il fait avec raison la remarque que peu de restes en ont été conservés dans les Musées. Le plus anciennement connu a échoué en 1531 sur les côtes des Pays-Bas. Houttuyn en fait mention. Il avait 68 pieds et les mandibules mesuraient 13 pieds ?. 3 Gervais, Journal de Zoo'ogie, 1. |, p. 557. 2 De Vies, Groot hist. schouivtoneel, , p. 385, Amsterdam, 1695. (326) Le 11 mars 1566, une femelle est venue à la côte à Zand- voort. Le 19 septembre 1576, il en échoue un de 14 pieds de lon- gueur sur la même côte. Ambroise Paré fait mention de trois Cachalots capturés le 2 juillet 1577, dans l’Escaut : un à Flessingue, un à Saffinghe, et un troisième à Hastinghe, au Doel f. L'étaient bien des Cachalots d’après ce qu'il dit des narines et des dents. Il leur accorde 58 pieds. La mandibule avait de chaque côté 25 dents et on voyait autant de trous à la mâchoire supérieure dans lesquels les dites dents pouvaient se cacher. Ambroise Paré en donne une figure, qui a été copiée par Aldrovande et par Johnston. De 1598 à 1614, cinq Cachalots ont été vus sur les côtes des Pays-Bas. Quatre d’entre eux ont été dessinés et gravés. Emmanuel de Metteren fait mention d’un animal de 53 pieds de long qui est venu à la côte en 1601. En 1606, on en cite un qui a péri à Springerplaat (île Schouwen). | Le 28 décembre 1614, un mâle a péri à Noordwyk-aan-Zee. On en conserve la gravure 2. En 1617, au mois de janvier, un autre mâle de 60 pieds est venu à la côte entre Scheveningen et Katwyk. C’est de lui que provient la tête qui est conservée dans une église à Scheve- ningen. Le 14 février 1619, un mâle a péri à l'embouchure du Rodan; il en existe une gravure : la nageoire pectorale est représentée comme un pavillon d'oreille. Le 12 mai 1620 on en a vu échouer un sur la côte de Pomé- ranie (bei Carmin); un autre le 15 octobre 1640. Le # janvier 1629, un mâle est venu à la côte à Noordwvyk- ! OŒŒEuvres complètes d'Ambroise Paré, t. HE, p. 779, Paris, 1841. ? Por-Wazviscu, Gestrandt by Nocrttoyck-op-Zce, den 28 dec. 1614. Door Es. Van D x VELDE, in-folio, 7 (327) aan-/ee; en 1635, un à Scheveningen, et en octobre 1641, a péri le dernier de ce siècle. Une gravure de ces deux derniers est conservée à la Bibliothèque royale. ‘En 1721, au mois de janvier, un animal de 60 pieds est venu à la côte non loin de Brême, et en 1723, un échouement de plusieurs a eu lieu dans le même endroit. Lacépède fait men- tion de dix-sept Cachalots qu'une tempête violente avait poussés cette année dans l'embouchure de l'Elbe. Les moins grands avaient 13 ou 14 mètres. Il y avait huit femelles et neuf mâles 1. | En 1755, une autre school a péri sur la côte de Mecklem- bourg. Au siècle dernier, nous voyons encore quelques animaux se perdre dans les mêmes parages : en décembre 1761, il y en a deux ou trois qui viennent échouer sur File ou le banc 1. Grind, près de Harlingen. La caisse tympanique de l'un d'eux a été envoyée à Pierre Camper 2. Il en existe un dessin sur lequel on lit : ce poisson a 75 pieds de long et 18 de haut; c'est un Cachalot, échoué à l'ile Grin. Ce dessin se trouvait entre les mains de Mulder et a été exécuté par P. Idserdts. On fait mention d’un autre qui serait venu se perdre égale- ment en décembre 1761, à Everland. On cite encore un individu échoué en 1762, à Terschelling, et un à Vlieland à la même époque de l’année. Un Cachalot échoué entre Zandvoort et Wyk-op-Zee, en 1762, 20 février, a été figuré par H. Spilman. Il en existe une gra- vure à la Bibliothèque royale, sur laquelle on lit: Cagelol, lang 61 voeten, den 20 februari 1762, tusschen Zandvoort en Wyk-0p-Zee aangedreven. Nous ne croyons pas que ce soit un de ceux qui sont indiqués ci-dessus. D'après un dessin de C. van Noorde, un mäle aurait péri encore en 1764, * LacEPÈèDE, Hist. Nat. Cétacés, in-4", p. 254. ? Camper ‘s kl. Schriften, 1 B, 2 st. Bus. ANAT....,p. 407, pl. XXI. (328 ) Un animal de 84 pieds, que l’on a dit femelle, a échoué le 4 décembre 1783, sur les côtes, près de Middelbourg. On en possède des os dans cette ville et on en conserve un dessin à Dornburg 1. La mandibule porte quarante-huit dents. Ainsi, au XVI: siècle, une vingtaine de Cachalots se perdent dans ces parages : trois sont reconnus comme mäles, un comme femelle, et on est sans renseignements sur le sexe des autres. Au XVIIe siècle, il s'en perd une vingtaine, mais les rensei- gnements laissés sur leur sexe sont bien incomplets. Au XVIII: siècle, il vient en échouer encore sept. Nous ne connaissons que deux exemples dans le courant de ce siècle : le premier, en 1819, sur les côtes du Holstein, e4 un, en 1825, sur les côtes de Rügen. Il y a deux ans, à la suite d’une rupture de digue, on a trouvé près de Heyst une tête presque entière de Cachalot. Elle est déposée au Musée de Bruxelles. On ne connaît pas la date de la perte de cet animal. Malm cite des exemples d'individus capturés sur les côtes de Suède. Linné en a cité sur les côtes de la Norwège. Au nord de la Norwège, le professeur Sars cite le Cachalot parmi les espèces vues aux îles Loffoten (1865). On connaît aussi plusieurs exemples d'individus qui se sont perdus dans la Baltique. Le conseiller d’État Hensche a fait le relevé des Cachalots observés dans cette mer intérieure et de quelques Mysticètes dont on ne peut que deviner la nature spécifique ?. Le plus ancien connu, un animal de 58 pieds de long, échoué en 1291 sur la côte de Weichtelmunde, a été conduit à Dantzig. En 1364, un autre de 26 pieds, a été également conduit à Dantzig. 1 Zelandia illustrata, middelburgische courant, le 6 décembre 1784 et Notulen, 4 avril, 1849. 2? Hexscur, Schriflen d. Physik. Ak. gesells zu Künigsberg, Jahrg, 1, Heft. IL, ( 329 ) Le 15 octobre 1452 ou 1453, un de 35 pieds a été pris vivant et conduit encore à Dantzig. Il avait été vu pendant 3 jours. C'est sans doute une femelle. Le 15 avril 145, un autre de 66 pieds de long fut jeté sur la côte, nähe dem Buigaschen Tief. En 1561, un Jeune animal sous le nom de Baleine, long de 9 klafter, fut jeté sur la côte am alten Tief. Le 19 septembre 1576, un animal, décrit sous le nom de Physeter, de 1% pieds, se perdit encore dans cette mer; mais on peut se demander si c’est bien un Cachalot. Plusieurs Cachalots sont allés mourir sur les côtes des Iles Britanniques. Les plus anciens ont été signalés par Sibbald : il parle d’abord d’une femelle qui a péri aux Orcades, en 1687; puis d’un mäle de 52 pieds, capturé, en février 1689, à Leine Kilns, au nord de l'embouchure du Forth. La mâchoire portait 42 dents. IT fait mention également de toute une school, de 102 individus, qui a péri sur les côtes d'Écosse, mais, à en juger par la taille qu'il leur accorde, ce ne sont pas des Cachalots. Un mâle de 52 pieds a échoué ensuite à l'embouchure du Forth vers la même époque; sa mandibule portait 48 dents. Au siècle suivant, en 1756, un autre mâle de 54 pieds est venu mourir également dans le Forth (côtes ouest de Ross- Shire) et un en 1769 dont le sexe n’est pas indiqué. James Robertson signale Péchouement d’un mäle, en 1770, également dans le Forth. En 1762, un individu, long de 54 pieds, avec dix-huit dents de chaque côté, a été pris à Blythsand. En 1769, on cite encore un mäle de 54 pieds qui a péri au même endroit. La même année, 1769, un Cachalot a été capturé sur la côte de Kent; vers la même époque, un autre sur celle de Nortolk. * H. Woo», Mag. of nat. hist., 2e ser. t. II, 1829. (330 ) En 1825, un Cachalot mäle adulte est venu à la côte à Tunstall, Yorkshire coast. Le squelette a 50 pieds de longueur. Le 16 février 1829, un mäle de 62 pieds s’est perdu à l'en- trée de la Tamise, à Whitstable, Kent. En attendant que les tribunaux eussent décidé qui était le propriétaire de cette épave, la marée a eu raison de ce cadavre et les os ont été dispersés. Dans le courant du mois de mai de la même année, un Cachalot fut aperçu en mer et bientôt capturé et remorqué dans la baie de Dunstaffnage (Écosse). Il avait 60 pieds, mais le sexe n'est pas indiqué. La mâchoire inférieure est conservée au château de Dunstaffnage. On cite également un Cachalot qui a péri sur la côte de Cor- nouailles en juillet 1835 1. Dans la Faune des Orcades, par le Rév. George Low (1813), il est question de divers Cachalots qui ont visité cette ile. Le dernier observé sur ces côtes est un animal de 60 à 70 pieds, en pleine décomposition, près de Thurso, au mois de juillet ou août 1863, dont le squelette est au British Museum. C'est lui qui a servi à M. Flower pour la description des os ?. Au mois de juillet 1871, un Cachalot mâle adulte a échoué à l'île de Sky. Son squelette est conservé à Édimbourg. La man- dibule et le sternum sont très remarquables par l'âge de l'animal. Le professeur Turner fait le relevé des Cachalots connus qui ont péri sur les côtes d'Écosse. Il en cite dix : un du XVI siècle, quatre du XVII siècle et cinq du XIX° siècle. Sur huit individus, dont le sexe a été reconnu, il y avait cinq mâles. Le Cachalot étant un Cétacé équatorial, on a douté quelque- { ALDERSON, J., An account of «a Whale of the spermaceli tribe, cast on shore où the Yorkshire coast, 1825. Traxsacr. Cumsr. Puil. Soc., 1827. Ferussac, Bull. scien. nat., 1829. Isis, 1855, p. 1006. Transact. of the nal. histor. of Northumberland, vol. 1,1851. 2 Report Brit. Assoc. for the advancemeunt of science held at Newcastle, p. 106. (331) fois de sa présence sur les côtes du Groënland. Les côtes nord de l'Écosse ont été souvent considérées comme limite septen- trionale de cet animal. Nous avons le témoignage de plusieurs marins que ces ani- maux visitent parfois l’ouest et l’est du Groënland. En 1718 et 1719 quelques Cachalots ont été pris, dit Zorg- drager, auprès du Groënland et auprès du cap Nord. Le plus remarquable avait 70 pieds environ et dans sa tête on a recueilli vingt-quatre tonnes de spermaceti 1. R. Brown ne fait mention que d’un seul Cachalot, capturé en 1857 près de Groven (72 L. N.) Nous avons aussi le témoignage du gouverneur du Groën- land : Le Cachalot est extrêmement rare sur la côte ouest du Groënland, dit Holbôll 2. 11 n’a vu, pendant ses nombreux voyages, qu'une seule fois cet animal remarquable, et de sou- venir d'homme, on n'en a vu échouer dans ces parages. Les Esquimaux, qui ont visité Paris et Bruxelles en 1877- 1878, avaient des dents de Cachalots avec eux ; ces dents étaient exhibées avec celles de Narval, de Morse et d’autres Delphinides. A l’est du Groënland, apparaît aussi parfois cet animal. Nous lavons déjà dit plus haut, M. Naugaret l'a rencontré aux environs de l’île Jan Meven 5. Ilest fort curieux de comparer le nombre de captures ou plutôt d’échouements de Cachalots des siècles précédents avec ceux des temps actuels. Si l'on considère la rareté actuelle des Cachalots échoués et le nombre d'individus dont la capture est indiquée dans des livres anciens, on doit se dire que ces animaux doivent être bien près d’être exterminés. Il y à aussi quelques exemples de Cachalots capturés ou * Zorgdrager, Ed., 2.(1827), p. 112. 3 Escuricur, Nord. Malth, p.195. * Revue des deux Mondes, 12° octobre 1869. (332) échoués de l’autre côté de l'Atlantique, dans l'océan Pacifique, dans la mer des Indes et dans les eaux de nos antipodes. Onze individus, la plupart jeunes, sont venus à la côte à l’est de la Floride, près du cap Canaveral, pendant l'hiver de 1882, Le 29 mars 1842, un jeune animal de 16 pieds a été capturé près de Boston, New Bedford, U.S. Le à décembre 1849, on a trouvé la carcasse d’un mâle qu'on à remorquée au port Jackson ; c’est le squelette de cet animal que M. Macleay a décrit. Le corps d’une femelle échouée a été remorqué à Botanv- Bay. Sur les côtes de Tasmanie on a capturé un individu mâle, en 186%, dontle squelette se trouve au Collège royal des chirurgiens à Londres. On en connaît trois spécimens de Tasmanie dans ce remarquable Musée. Ce sont ces squelettes qui ont autorisé M. Flower à se pro- uoncer sur l'identité du Cachalot d'Australie et celui d'Europe. MUSÉES. On a été longtemps sans connaître d'autre squelette de Cachalot que le squelette défectueux, dont nous avons parlé plus haut, et qui était monté à la cour du Muséum à Paris; Cuvier l'avait fait acheter à Londres, en 1818 1. Ce squelette, que personne ne regrette d’avoir vu disparaître, sera bientôt remplacé par un autre. Paris possède également une tête d’un animal adulte, pro- venant de Ja bande échouée à Audierne, en 1784, avec une colonne vertébrale, des mandibules et un os hyoïde. Il se trouve également au Muséum à Paris des mandibules d'un mâle capturé à Bayonne. On y possède encore la tête d’un jeune animal qui a péri à Rochefort. 1 D'après une note du mémoire de M. Flower, ce squelette est probable- ment le même qui a figuré au Musée Backstrow, Fleet street, décrit dans un ancien catalogue comme The Astonishing and complete Skeleton of a fuli- grown Sperma-celi Whale. ADN 2 > (333) Mais, de toutes ces pièces, la plus remarquable est le squelette que le Muséum a reçu récemment par les soins du professeur Pouchet, et qui provient des îles Açores. On conserve aujourd'hui, au Musée à Bayonne, le squelette d’un mâle qui a été capturé en 1875. A Londres, au Musée du Collège royal des chirurgiens, on possède de riches matériaux pour l'étude du Cachalot. I s’y trouve deux squelettes, un jeune et un adulte, qui ont été envoyés d'Australie. Ce sont ces pièces qui ontété figurées dans le beau mémoire du professeur Flower. Le British Museum possède un autre squelette complet d’un animal capturé sur les côtes des Iles Britanniques. Le British Museum possède en outre la tête d'un mâle très adulte et qui s'y trouve depuis fort longtemps; on ne connaît pas son origine, si Je ne me trompe. Pendant longtemps le seul squelette complet de Cachalot adulte se trouvait à Burton-Constable Castle, près de Hull (Yorkshire). Il a été décrit par Beale. A Cantorbéry, on conserve quelques ossements d’un animal échoué à l'embouchure de la Tamise. Pendant qu’on se dispu- tait la propriété du corps, la marée dispersait les os du sque- lette. Le Musée d'anatomie de l'Université d'Édimbourgh possède la mandibule d’un jeune mâle, capturé dans l’Atlantique, à la latitude des Açores. On possède en outre à Édimbourg le sternum et la mandi- bule d’un animal très adulte qui a échoué, en 1871, à l'ile de Skey. Le sternum est énorme. Edimbourg possède aussi une mandibule rapportée des îles Bauda (Archipel des Moluques), avril 18#3, par des baleiniers, et sur laquelle se trouve un dessin du Cachalot que le profes- seur Turner a cru devoir reproduire. Au Musée de Bologne on conserve un squelette qui a été obtenu par échange du Musée de Naples. A Pise on conserve un squelette dans le vestibule du Jardin Botanique. (334) On voit également une tête au Musée de Turin, mais dont nous ne connaissons pas l’origine. On en possède des ossements à Pise, à Florence, à Bologne, et à Ravenne, parmi lesquels il y a une portion de crâne. Les ossements des divers individus qui sont venus échouer en 1853 dans l’Adriatique, à Castel Nova, ont été pour la plu- part conservés, mais ils ont été malheureusement mélés : à Berlin, à Munich, à Trieste, on en conserve une tête ; à Vienne un squelette, mais on n’a pas tenu compte ni du nombre de côtes ni du nombre de vertèbres, et il est fort douteux que les os de chaque squelette appartiennent au même individu. A Scheveningue (Hollande) on conserve une tête fort grande dont nous avons parlé plus haut dans une église située au pied des dunes. Dans le cabinet de Camper se trouvaient : deux mandibules de 12 pieds et à vingt et une dents; une omoplate de 3T pouces de long et 26 pouces de haut avec une partie du membre (humérus, radius, cubitus) d’un animal de 63 pieds. — CI. Mulder pense que ces os proviennent de Cachalots capturés en 1762. — Ils sont actuellement conservés au Muséum de l’Académie de Groningue. Le Musée de Bruxelles possède un atlas dort l’origine est inconnue. [1 provient du cabinet du prince Charles de Lor- raine. On y possède également une mandibule et une région cervicale, avec une côte mutilée, ainsi que la tête dont nous avons parlé plus haut. Il n'est pas impossible que Patlas pro- vienne d’un des Cachalots qui ont péri dans lEscaut le 2 juillet 1577, et dont Ambroise Paré a fait mention. Au Musée de Sydney on voit un squelette qui a été décrit par Macleay en 1851. Au Muséum de Washington, on possède le squelette d’une femelle capturée sur la côte de New-Jersey et qui portait un fœtus d’un mètre environ de grandeur ; on a monté l'animal. (335) DESSINS. Il y a peu de Cétacés aussi souvent reproduits par le dessin que le Cachalot, mais pendant longtemps on n'en a possédé que de très défectueux. Aujourd'hui on en connaît plusieurs bonnes tigures. Tous les os du squelette sont également bien représentés. Cet animal est même assez fidèlement reproduit sur des plaquettes en os par les pêcheurs des côtes d’Alaska. Paul Gervais a figuré dans la Nature une plaquette d’os de Cachalot, sur laquelle on voit d’un côté un Cachalot, de l’autre côté une Baleine. Le professeur sir Turner a reproduit également un dessin de Cachalot, qui se trouve sur une mandibule de ce Cétacé, conservée au Musée d'anatomie d’Édimbourg. On conserve à la Bibliothèque royale de Bruxelles un cer- tain nombre de gravures qui ont été réunies dans un porte- feuille par Du Bus. Ces gravures sont faites d’après des individus échoués sur les côtes de Belgique et de Hollande. Le plus ancien est un Cachalot, capturé dans PEscaut en juillet 1577; nous lisons sur la planche qui le reproduit : Het waerachtig conterfeytsel en afmetinghe van desen walvisch, gevan- _gen den 2 july 1577 ; ce dessin accompagne un manuscrit ToG#, Chronyck van Antwerpen, door CANKERCKEN. Un texte explicatif, imprimé en flamand, latin, français, dit que la Baleine a été trouvée « tusschen Haeften gelegen in den Doel ende Saeftinghe in de Schelde, ontrent Antwerpen. » La Bibliothèque royale possède une autre gravure, repré- sentant un Cachalot échoué, d’après l'inscription, la même année (1571) à Terheyden. C’est probablement le même que le précédent. Une autre gravure de la Bibliothèque royale représente un mäle, qui à péri, entre Katwyk et Scheveningen, en 1598. Il avait 52 pieds de long. Nous en trouvons également un dessin ( 336.) dans Bor 1. Cette gravure ne paraît être qu'une copie et porte pour inscription : Een walvisch lang 70 voeten, gestrandt op de hollandsche zeekust, tusschen Scheveningen en Katwyk, in sprokkelmaend, 1598. Cet animal fut vendu publiquement pour 126 florins. Le rostre (Bek) fut donné au comte Jean de Nassau et envoyé à Dillenburg. D'après Clusius, les grands os sont conservés à la Maison de ville de La Haye. Ambroise Paré reproduit le dessin d’un individu qui a péri dans l’Escaut 2; Clusius également en reproduit un qui est meilleur. Johnston en donne aussi une figure >. Le professeur Sir Turner est en possession d'une gravure, représentant un Cachalot de 60 pieds de longueur, capturé en 1601 dans le port d'Ancône #. Le savant professeur de l'Université d'Edimbourg a écrit une Notice intéressante à propos de cette gravure, qui n’est pas connue des naturalistes. Sibbald à publié un dessin d'un mäle de 52 pieds de long, qui a péri dans une baie du Forth en 1689. Ce dessin est loin d’être un modèle. Le dessinateur a représenté une tête de Baleine avec des évents au front. Ce corps de 52 pieds, auquel il a mis un pénis, semblable à celui de la Balénoptère qui figure à côté, pourrait bien être le corps de la femelle, échoué en 4687, et non celui du mâle. Le Cachalot, échoué en 1614 près de Noortwyk-op-Zee, a été reproduit par une gravure conservée à la Bibliothèque royale ; elle porte l'inscription suivante : Anno 161%, den 25 december, is gestrant dexen vis, lanck synde, 58 vocten. E. Vandevelde, fc. Une autre gravure représente également un mâle qui a péri, d’après linseription, à l'embouchure du fleuve Rodan, le 14 février 1619. ! Bon, Nederl. histor. Amst-rdam, in-fol., 1679, p. 455, 4° par. 2 AMBROISE PARÉ, 25e livre de ses OEurvres. 5 Historia naturalis de Piscibus et Cetis, Amstlodami, 1657. Tab. XLHI. “ Notes on som rare prints of stranded Sperm-Wha!es. Jourx. or Anatomy AND PuYsioLocy, vol. XII, 1878. Nous y trouvons aussi une gravure d’un Cachalot de 62 pieds échoué en 1629. Un autre, échoué en 1762 entre Zantvoord et Wyk-aan- Lee, est figuré trois fois; des gravures en sont conservées à la Bibliothèque de Bruxelles. Nous lisons sur l’une : Cachelot gestrandt tusschen Zandvoort en Wyk-op-Zee, 1762. I. Augus- ini, door H. Spilman, folio. Brux. Sur l'autre : Cagelot, lang GL voeten, den 20 febr. 1762, tusschen Zantvoort en Wyk-op- Zee aangedreven. Door Vander Vinne, 4°, mâle. On trouve à la même Bibliothèque deux gravures représen- tant un Cachalot mäle de 60 pieds échoué vivant près de Egmond-op-Zee. Cagelot, Potwalvisch, Egmond-op-Zee, levend gestrandt den 15 febr. 1764, van 60 voeten. La Bibliothèque royale de Bruxelles possède également une belle gravure d'un Cachalot mâle de 60 pieds, qui a échoué à Beverwy. On conserve, à Boulogne-sur-Mer, un dessin d’un Cachalot qui a péri près de la ville le 5 mars 1761. Un mâle, dont nous avons parlé plus haut, est représenté dans les Act. nat. curios. Vol. TT. (1733), Tab. 1; il a péri à Villefranche, le 10 novembre 1716. Le Cachalot mâle de 48 pieds, échoué le 4° avril 1744 ou 1741 dans le golfe de Gascogne, a été dessiné également ; Despelette, chirurgien-major de lhôpital militaire de Bayonne, en a envoyé la figure à La Feyronie; e’est sans doute ce dessin qui est conservé dans la collection des vélins du Muséum. Fr. Cuvier la fait graver dans son Histoire naturelle des Cétacés. Nous en avons parlé plus haut. Il existe deux autres dessins d’après le même animal, l'un dans la Bibliothèque, l’autre dans les registres des délibéra- tons du conseil municipal de Bayonne. Du Hamel 1 à publié aussi le dessin du mäle de 48 pieds, ? Do HaueL, Hist. nat. des Péches, part. 9, sect. X, pl. XV. ) (338) tué près de Bayonne en avril 1741. Il en a publié encore un autre dit Paul Gervais. Tous ces dessins sont faits avec peu de soin et on peut dire, avec le Dr Fischer, qu'ils sont fautifs. Pennant fait figurer, dans sa Zoologie Britannique, un mâle de 54 pieds qui avait été pris à Bhythsand, en le considérant encore comme poisson (1760) !. Alderson représente l’animal entier, sa tête, son œil, ete. 2, On trouve une copie d’un dessin de Valentin Cary à la Bibliothèque de Boulogne, fait d’après un Cachalot échoué le 5 mars 1761, à 4 lieues de la ville. Lacépède a figuré le Cachalot sous le nom de Physale cylin- drique, Cachalot macrocéphale et Cachalot trompo. Bonnaterre a figuré une femelle de la bande d’Audierne. Le capitaine Scammon a publié un bon dessin de Panimal; on voit que le dos n’est pas pourvu d'une nageoire dorsale, mais de bosses, comme la Mégaptère. À côté du dessin il repré- sente la coupe de lanimal qui est aplati du côté du dos, aminei du côté du ventre et arrondi sur les flancs. Il représente sur une planche distinete l'animal nageant la bouche ouverte. Du Hamel représente une machoire de Cachalot, pl. IX, hg. 7, et un mâle entier, pl. XV, fig. 3. Pierre Camper a reproduit la tête 3. Cuvier a fait graver la tête et plusieurs os dans ses Re- cherches *. W. Wall a figuré le squelette complet en 1851. En 1868, le professeur Flower a publié un mémoire dans lequel se trouve une description complète de tous les os du squelette, accompagnée de sept belles planches. 1 PENXANT, vol. II, pl. VL. À few observation of the natural history of the Spcrm Whale. P. Camper, Célacés, pl. XVII, XIX et XXVII. “ Ossem. foss., 1. V, 1re part., pl. XXIV. L7 a set PRES T4 Les principales parties du squelette sont figurées dans notre Ostéographie, pl. XVILE et pl. XIX, d’après les figures publiées par M. Flower. Pander et d’Alton ont figuré une omoplate. Le sternum du Cachalot adulte de Pile de Skye est figuré dans une notice de Turner 1. Parmi les dessins, nous devons faire mention de celui de la tête d’un fœtus, publié par R. Owen, dans la Description du catalogue des squelettes du Musée royal du collège des chirur- giens ?, et de la caisse tympanique ©. Huxlevy a figuré le crâne d’un fœtus de Cachalot #. Au Musée d'Édimbourg on voit sur une mandibule de Ca- chalot un dessin du même animal, fort bien exécuté. On en connaît aussi des figurines en bois et en os taillés par les habitants des côtes d’Alaska et des [les Aléoutiennes. COMMENSAUX ET PARASITES. Le Cachalot est encore bien incomplètement connu sous le ‘apport de ses commensaux et de ses parasites; Debell Bennet est le seul naturaliste que nous sachions, qui fasse mention de l'Otion Cuvierii trouvée sur sa lèvre inférieure.et des Oniscus logés sur sa peau. il y est également fait mention de Cysticerques, trouvés dans des kystes de la peau 5, et Foster a trouvé des parasites qu'il & ! Additional Notes... Proc. Roy. Soc. of Edinburgh. Session 1871-72, pp. 656-657. ? Tome II, n° 2417. # British fossi! Mammals, p. 526, fig. 20. * Manuel of the anatomy of vertebrated animals, p. 404, fig. 106, Londres, 1871. ® Desecz BENNET, Proc. Zool. Soc., 1857, p. 50. (340 ) envoyés à Sibbald, mais dont nous ne connaissons ni le nom ni la nature. Sur les Cachalots, capturés en 1853, sur les côtes d’Istrie, on a trouvé des Balanes, mais on ne dit pas lesquelles f. * Turner, Addilional Notes on the Occurence of the Sperm-WWlale, 1871-72, p. 644. MIN 27 "+ HYPEROODON ROSTRATUM. LITTÉRATURE. Silas Tallor, /istory and antiquities of Harwich, and Dover-court wilh notes and observations relating to natural history. London, 1750, in-4o. E. Pontoppidan, 7e natural history of Norway. London, 1755. Chemnitz, Beschäftiqungen der Berlinischen Gesellschaft Naturforcher, 4775-1779, t. IV, 1779. John Hunter, Observalions on the structure and æconomy of Whales. PaicosopwicaL TRANSACTION, vol. LXXVII, 1787. 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Ann. sc. nalur., 5° sér., tÙ XV, dE 6] , p. 44, 1851. John Struthers, Account of rudimentary finger muscles found in a toothed Whale (Hyperoodon bidens). Journ. of anatomy and physiology, novembre 1875. Thom. Southwell, 07 a Skull of Hypcroodon lalifrons. The Zootogist, 1881, p. 258. Fischer, Cétacés du sud-ouest de la France, 1881. Flower, On the Cranium of a new spccies of Hyperoodon.…. Proc. Zoo. Soc., may 1882. Fiower, On (he whales of the genus Hyperoodon. Proc. Zoo. Soc., déc. 1882, Thom. Southwell, On the beaked or bottle-nose whale (Hyperoodon). TRANS. NORF. AND NORW. NATURALISTS’ Soc, vol HI, 1882. David Gray, Noces on the characters and habits of the Botltlenose Wale (Hyperoodon rostratus). Proc. Zoo. Soc., déc. 1872, n° 726. Hr A. Gerstücker, Das Skelet des Düglings, Hyperoodon rostratus, Pont. Leipzig, (887. (343) HISTORIQUE. Les pêcheurs de Färoër et d'Islande ont connu l'Hyperoodon longtemps avant les naturalistes. Is le désignaient sous le nom de Dügling. Au commencement du siècle précédent, deux Hyperoodons échouent en Angleterre sur les côtes d’'Essex; il en est fait mention dans une fistoire des antiquités de Harwich, avec des notes sur l'histoire naturelle, par Dale. L'un, de 1% pieds, sé perdit en 1717 près de Malden; l'autre, de 21 pieds, près de Bradwel, à peu près en même temps que le précédent. En 1755, E. Pontoppidan publie une histoire naturelle de Norwège et il décrit l'Hyperoodon sous le nom de Balæna rostrala, nom spécifique qui a produit pendant longtemps une grande confusion. Fabricius a donné le même nom à la petite espèce de Balénoptère. Chemnitz fait mention, en 1779, sous le même nom de Balæna rostrata, d'un mâle, capturé dans les eaux de Spitzberg, dont les principales parties du corps ont été apportées à Copenhague. En 1783, un Hyperoodon est capturé dans la Tamise, près de London-Bridge ; il tombe heureusement dans les mains de Hunter, qui, tout en ne connaissant pas bien l’animal, n’en à pas moins parfaitement exposé son organisation. Ce travail n’était pas seulement classique pour l’époque où il à paru, dit Eschricht, mais c’est la collection de faits anato- miques la plus remarquable sur les Cétacés; on y trouve tout ce que l’on sait sur les Hyperoodons, dit-il. Mème le dessin de Hunter est un des meilleurs qui existent de cet animal, dit le savant professeur danois. Deux années après la publication de Hunter, Baussard, un officier de marine, publia des observations sur deux femelles, l’une de 23 1} pieds, l’autre de 42 !,, qui venaient d’échouer / à Honfleur, à embouchure de la Seine. La description de la (344) peau qui tapisse le palais, a fait croire à Lacépède que ces animaux portaient des dents au palais; c’est l’origine du mot Hyperoodon, qui est accepté aujourd'hui par tous les cétolo- gistes. L'Hyperoodon n'était pas encore représenté par son sque- lette au Muséum de Paris, à l'époque où Cuvier écrivait ses Recherches sur les ossements fossiles et la description qu’il en donne est faite d’après le squelette de Hunter. En 1841, Wesmael publia une notice zoologique sur un Hyperoodon, à propos d'un animal échoué le 16 septem- bre 1840 sur un banc de sable près de Ziericzee. M. Wesmael cherche à mettre d'accord les divers auteurs qui se sont occupés de cet animal. On a fait avant lui presque autant d’espèces qu'il est échoué d'individus, dit-il avec raison, et il exprime l'opinion, qu’il n’y a qu’une espèce d'Hyperoodon, à laquelle il conserve le nom spécifique de rostratum, proposé par Pontoppidan. En 1845, le D' A. Jacob a publié à Dublin le résultat de ses observations anatomiques et zoologiques sur ce même animal. A l'occasion d'un Hyperoodon échoué en 1846 à Zantvoord, W. Vrolik publie, en 1848, un mémoire fort intéressant sur ce Cétacé et ne néglige pas d'étudier l'animal sous le rapport anatomique. Le savant anatomiste d'Amsterdam passe en revue J’appareil respiratoire, digestif, circulatoire, sexuel femelle, l'œil, la peau, et décrit avec soin le squelette sans négliger les os du bassin. Quinze belles planches accompagnent ce mémoire. Il parle avec raison du temps, de l'argent et des efforts extra- ordinaires que l’on doit faire pour obtenir un mince résultat dans l'étude d'un Cétacé. En 1849, Eschricht fait paraître ses Nordischen W'allthiere, et consacre un chapitre à l’histoire du Cétacé qui nous occupe. Nous lisons en tête de ce chapitre : « Ueber die Schnabelwalle » (Rhynchoceti, die Zahnlosen Delphine, Schlegels, Hyperoo- » dontina, Gray’s)imalgemeinen und den Entenwall(Chænocelus » rostralus, Hyperodon rostratum, auctorum) im besondern. » Il expose : 1° ce qui est connu de ces animaux; 2° leur répartition aux hautes latitudes et la connaissance que les habitants de ces régions avaient d'eux; 3° leurs caractères extérieurs; 4° leur dentition; 5° leur cavité de la bouche; 6° leur estomac; 7° leur muqueuse intestinale; 8° leur ostéo- logie; 9 leur place systématique dans l’ordre des Cétacés ; 10° la comparaison de ces faits avec les observations des auteurs les plus récents. Les Rhynchoceti ne comprennent que deux genres : Chœæno- cetus ou Hyperoodon, et Micropteron. On a beaucoup écrit sur les Hyperoodons depuis Eschricht, mais, à l'exception des observations sur la différence des sexes qu'Eschricht soupçonnait, nous ne trouvons rien de bien important à ajouter. On a été, jusque dans ces derniers temps, dans le doute sur l'existence d’une seconde ou de plusieurs espèces de ce genre dans nos mers. On avait pêché un Hyperoo- don avec des maxillaires très élevés au milieu du rostre et se joignant même sur la ligne médiane; Gray lui avait donné le nom d'Hyperoodon latifrons. Eschricht avait émis l'opinion que cette forme extraordinaire pouvait bien indiquer le mâle; les individus capturés dont on avait constaté le sexe étaient à peu près tous femelles. Eschricht avait raison, comme nous le ver- rons plus loin. Un médecin islandais, Haalland, a envoyé à Eschricht ! les principales parties du corps d’un Hyperoodon conservé dans le sel et dans l'alcool, et lui a fait part de plusieurs observations intéressantes faites sur deux individus, dont un fut capturé. Eschricht à reconnu que, dans la description qu'il avait donnée de l’estomae, il avait été induit en erreur par la mauvaise conservation de la pièce qu'il avait eue d’abord sous les yeux. Dans le fœtus, l'estomac présente déjà tous les caractères de l'adulte. Le professeur Struthers (1871) a publié le résultat de ses observations sur les muscles des doigts d’un Hyperoodon échoué sur les côtes d'Écosse. { Escaricur, Nord. W'allt., p. 26. ({ 546) En 1882, M. W. Flower! a fait connaître un crâne d'Hyperoo- don, trouvé au nord-ouest de l'Australie, à Pile Lewis. Quoique mutilé, il appartient évidemment à ce genre, mais il présente des caractères assez particuliers pour ne pas le con- fondre avec l'espèce de notre hémisphère, dit M. Flower, qui le désigne sous le nom d’AHyperoodon planifrons. A la séance du 19 décembre de cette même année, M. W. Flower ? communiqua une note dans laquelle il fit l'historique de l'Hyperoodon latifrons proposé par Gray, et fit connaître les observations de David Gray, commandant du baleinier l'Éclipse, d’après lequel le prétendu Hyperoodon latifrons est tout simplement, comme Eschricht lavait soupçonné depuis trente ans, un Hyperoodon ordinaire du sexe mâle. Le capitaine de FÉclipse fait connaître en même temps les faits les plus intéressants sur le séjour de ce Cétacé à l’est du Groenland. Au mois d'avril 1884, M. Southwell, de son côté, a publié des faits d’une grande importance sur la pêche des Hyperoo- dons. Le Docteur-professeur Gerstäcker vient de publier une monographie du squelette des Cétacés, traitant surtout de l'Hyperoodon rostratus. Au commencement du mois de février 4877, un individu est venu se perdre la nuit sur un banc de sable sur les côtes de la Baltique. M. Gerstäcker étudie d’abord la tête et s'étend longuement sur l'os lacrymal, que P. Gervais a bien déerit, dit-il ; il étudie ensuite la colonne vertébrale et consacre un chapitre à la région cervicale, un autre aux vertèbres dorsales, aux côtes et au sternum. À propos des os lacrymaux, 1l fait remarquer que, contrairement à l'avis de Stannius et de Flower, ces os existent dans les genres Delphinus, Phocæna, Lagenorhynchus, 1 FLower, On the Cranium of a new species of Hypcroodon.…, Proc. Zoo. Soc., London, 1882. ? Frower, On the Whales of te genus Hyperoodon, Proc. Zoor. Soc., déc. 1882. ( 347 ) Tursiops et Globiceps, comme dans les Hyperoodons. Il s'étend ensuite sur les rapports morphologiques des côtes et des apophyses transverses des vertèbres dorsales. Après avoir passé en revue les autres parties du squelette et fait remarquer le peu de développement des nageoires pecto- rales, si bien exposées par Vrolik, il compare la colonne ver- tébrale des Cétacés à la colonne vertébrale des autres ordres de mammifères. Les figures qui accompagnent ce travail montrent fort bien la différence fondamentale qui existe dès l’origine entre les diapophyses et les parapophyses. Les dernières dorsales des Hyperoodons sont, sous ce rapport, très instructives. SYNONYMIE. Delphinus diodon. Hunter. Hyperoodon diodon. Lacépède. —— rostratum, Chemnitz. — latifrons, Gray. Butzkopf, Entenwall, des Allemands. Dügling, des habitants de Färoër. Bottlenose Whale, des Anglais. Andvhalar où Andarnefia, des Islandais. Anarnak, des Groenlandais. Le Dauphin diodon de Lacépède est l'Hyperoodon ; on lui a donné successivement les noms de Delphinus diodon, d'Eden- tulus, de Monodon, d’Ancylodon, d'Aodon, d'Hétérodon et d'Hyperdon; celui qui lui est conservé, Hyperoodon, repose, comme nous l'avons ditplus haut, sur une erreur d'observation. L'Hyperoodon latifrons est bien, comme Eschricht l'avait montré, basé sur un crâne de mâle : il avait trouvé déjà des différences sexuelles semblables dans d’autres Cétacés, parmi lesquels il cite le Globiceps. L'Hyperoodon semijunctus de Cope est un Ziphius caviros- tris 1. CARACTÈRES ET DESCRIPTION. Après le Cachalot, c'est la plus grande espèce de Ziphioïde. On la reconnait facilement à ses petites nageoires pectorales et à l'absence presque totale de dents aux deux mâchoires. Nous disons, absence, parce que les deux, ou quelquefois les quatre dents du bout du maxillaire inférieur, ne percent que faible- ment les gencives. On ne peut confondre l'Hyperoodon avec aucun autre Cétacé ; il à la tête tronquée comme le Cachalot, les dents manquent complètement à la mâchoire supérieure, et, à la mâchoire inférieure, on en trouve, tout au bout antérieur, une ou deux paires assez petites. La tête osseuse a surtout de remar- quable, que les maxillaires s'élèvent verticalement comme deux ailes qui convergent l'une vers l’autresur la ligne médiane, et qui, chez les mâles, se touchent au milieu du rostre. Ils ont deux sillons sous la gorge. Ces sillons sont bien représentés par Gray, planche IT, d’Erebus and Terror ; Vrolik les représente aussi dans son dessin. Blainville les à signalé, sous le menton du Micropteron. Le capitaine Scammon a reconnu ces mêmes sillons, même plus prononcés, dans le Rhachianectes glaucus, du Pacitique. La couleur de la peau varie du noir au jaune pâle, chez les jeunes, au jaune brun, chez les adultes ; le rostre et le front deviennent blanc avec l’âge, et on voit apparaître une bande blanche autour du cou. La coloration est, comme dans les autres cétacés, plus claire en dessous qu’en dessus. La graisse renferme, comme celle du Cachalot, une cer- taine quantité de spermaceti ou blanc de Baleine ?. 1 Fev. Trur, À note upon the Hyperoodon semijunctus of Cope. Proc. UXx. Sr. NAT. Museum, 1885. ? Elle à plus de valeur commerciale que celle des autres Célacés. (349 ) La colonne vertébrale n’a que quarante-cinq vertèbres, sept cervicales, neuf dorsales, dix lombaires et dix-neuf caudales. Les cervicales sont réunies comme dans les vraies Baleines. L'articulation de la sixième côte est fort intéressante ; elle s'articule encore supérieurement, à l'arc neural et à l'apophyse transverse, tandis que la septième ne s'articule plus qu'avec l’apophyse transverse, comme les suivantes. On compte, dans la nageoire pectorale, une phalange au pouce, einq à l'index, cinq au médian, quatre à l’annulaire et deux au petit doigt. L’estomac est formé de sept poches qui se suivent; il y en à encore plus dans le Mésoplodon. Je trouve dans mes notes que cetestomac existe déjà avec les mêmes caractères dans le fœtus. Eschricht doutait encore s’il existe une communication directe entre ces chambres; Je la lui ai montrée à laide d’un stylet sur un fœtus pendant mon séjour à Copenhague en 1856. Le professeur John Struthers a fait connaître les muscles des nageoires pectorales à la section de Zoologie de l'Associa- tion britannique à Aberdeen. L'Hyperoodon a au moins 6 pieds en venant au monde ; les jeunes qu’on a trouvés en compagnie de leur mère avaient de 8 à 16 pieds. La femelle atteint de 27 à 28 pieds. On ne sait si le male devient plus grand. La taille des individus capturés en Europe varie entre 8 et 28 1} pieds: les individus de 8 à 16 pieds suivaient encore leur mère. David Gray accorde 30 pieds à l'adulte et 10 pieds au jeune en naissant. Ce dernier chiffre est exagéré. On a donné la mesure de plusieurs mâles qui ont été cap- turés : un à Belfast qui avait 20 pieds, un autre décrit par Dale en avait 21; celui décrit par Chemnitz en avait 95; le plus grand est celui de Dunkerque, qui mesurait entre 27 et 28 pieds. On a capturé à peu près autant de femelles; leur taille varie de 1# à 28 pieds et demi. La femelle décrite par Dale (1717) ( 390 } n’en avait que 14; celle de Portoppidan, qui était pleine, portait un fœtus de 6 pieds; les femelles de Honfleur (1788), de Baussard, de Portland, de Zandvoort, avaient de 23 à 24 pieds; une seule, celle de Seignasse, en avait 28 et demi. I n’y à pas d'observation faisant voir que les mäles sont plus grands que les femelles, dit Eschricht. MOEURS. L'Hyperoodon vit par petites bandes ; lorsqu'on a commencé à le poursuivre, il était confiant d'abord, mais il est devenu craintif et méfiant. Aujourd'hui on a quelque peine à Fapprocher. Le moindre bruit le met en fuite. Les pêcheurs des Färoër savent que, pour atteindre l'animal, ils doivent placer leurs gants de laine entre la rame et le canot sur lequel elle s'appuie. Si l'on en juge par les individus qui sont venus se perdre sur les côtes et qui sont ordinairement deux, il y a lieu de croire que les Hyperoodons sont monogames. On voit parfois aussi un jeune mâle avec une femelle et un vieux mâle. On observe dans les eaux de Spitzberg que les Hyperoodons fréquentent Ja mer ouverte le long des glaces, en petites gammes de # à 10 individus, ayant un vieux mâle comme leader. La päture des Hyperoodons consiste principalement en Céphalopodes. On connaît le contenu de l'estomac de l’animal ouvert par Hunter, par Baussard, par Vrolik, et ce dernier estime le nombre de becs trouvés dans un seul animal à dix mille; il y en a parfois non seulement dans l'estomac, mais aussi dans le commencement de l'intestin. La fin de l'intestin n’en renferme pas. En 1841 Eschricht a signalé, d'après Haalland, dans leur estomac, des becs de Céphalopodes qu'il rapporte à l'Onichoteuthis Fabricii, à une Sépia, à un Loligo, des restes de poisson et une Holothurie. Ils trouvent ces nombreux mollusques surtout dans les srandes profondeurs. L’estomac d’une mère capturée en septembre 1788 à lem- bouchure de la Seine ne contenait que des becs de Céphalo- podes ; le jeune n'avait dans son estomac que de l'eau blan- châtre. L'individu de 24 pieds, capturé en septembre 1880 près de Bangor, ainsi que la femelle capturée en novembre 1880 sur la côte de Kent, avaient également l’estomac plein de bees de Céphalopodes. On n’a trouvé dans lestomae d’un autre individu eapturé que des morceaux de bois et des cailloux de la grosseur d’une grosse poire. Des baleiniers prétendent que cet animal peut rester deux heures sous leau. Il beugle d’une manière effrayante s’il échoue. On a souvent parlé de l'odeur infecte du cadavre des Cétacés en général. Eschricht n'écrivait en mars 1861 : je ne conçois pas comment tous les observateurs se plaignent de lodeur infecte d’un cadavre de Cétacé. Celui-ci (un Hyperoodon) était mort depuis trois mois; mais exviscéré, il ne puait pas beau- coup. Il est vrai que c'était en plein hiver. On prétend que le lard de ce Cétacé est purgatif !. DISTRIBUTION HYDROGRAPHIQUE. L'Hyperoodon semble se tenir pendant l'été dans les mers arctiques, où il vit par petites bandes, et en haute mer. En automne il se rend au sud en passant, ou sur les côtes d'Islande, ou sur les côtes de Färoër où 1l arrive à peu près à époque fixe. Dans cette dernière île, il est même l’objet d’une pêche régulière ; on en prend tous les ans vers la fin d'octobre cinq ou six, et chose curieuse, ce sont toujours des femelles. 1 MaLuçrex, Troschels Archir., 1864, p. 92, En 1886, le commandant de l'Éclipse part pour la pêche dans la Mer de Bafin; il quitte Peterhead (Écosse) le 20 avril et à cent milles des côtes il rencontre plusieurs Schools d'Hype- roodons ; quatre jours après 1l en rencontre encore et entre autres un Orque, très reconnaissable, dit-il, à sa nageoire dorsale, du moins le mäle. Le 26, le 27, il voit de nouveau l'Hyperoodon, et il apperçoit le même Cétacé jusqu'au dernier jour en approchant des glaces 1. Ces Hyperoodons se rendent sans doute à cette époque de l’année dans leur quartier d'été, comme plusieurs autres Cétacés. On peut considérer les profondeurs de l'Atlantique septen- trionale, de janvier à mars, comme station d'hiver des Hype- roodons, dit Eschricht. Cependant ils seraient très rares sur les côtes ouest d'Islande, dit Haalland, et, d’après Holbôll, ils le seraient également sur la côte ouest de Groënland. Ils sont sans doute rares à la latitude à laquelle Holbôll avait sa résidence, mais, à l’époque où Holb6ll gouvernait ce pays, les baleiniers ne croyaient pas les Hyperoodons assez importants pour leur faire la chasse; ils étaient confondus avec les autres espèces qui ne donnent aucun profit. On voit les Hyperoodons dans le détroit de Davis, jusqu’au 70e degré latitude nord, dans le détroit de Hudson, et dans la baie de Cumberland. On le voit aussi autour du cap Farewell, autour de l'Islande, de Jan Mevyen, jusqu’au 71° degré autour de Beereneiland, et jusqu’à la Nouvelle-Zemble. Is fréquentent la mer ouverte dans ces régions, le long des glaces, en petites gammes de 4 à 10 individus. Fréd. Martens cite l'Hyperoodon, sous le nom de Butskop, parmi les Cétacés observés au Spitzberg. Chemnitz, de même, a reconnu les Hyperoodons à la hauteur de Spitzberg à la fin de l'été en 1777. Malmgren a fait l’observation que l'Hyperoodon ne se trouve plus dans les eaux dont la température descend au-dessous 1 Ror. Gray, The Zoolugist, fév. 1887. de — 3°; il en a vu en allant et en revenant du Spitzherg, mais seulement dans les eaux d'azur chauffées par le Gulfstream. A son retour du Spitzberg, il en a vu reparaitre le 14 sep- tembre sous la latitude de 78° nord. Nous connaissons quelques exemples d'Hypéroodons perdus sur les côtes de Danemark, de Norvège et de Suède. Pontop- pidan cite deux échouements sur les côtes de Norvège; nous en avons parlé plus haut. Le 14 novembre 1838, quatre individus périssent sur les mêmes côtes, deux vieux, l’un de 24, l’autre de 27 pieds, et deux Jeunes, chacun de 8 pieds. Dans le courant du mois d'août 1846, dans l'intervalle de quelques jours, il en vient deux à Ja côte dans la baie de Chris- tiania, près de Frederichstadt. Vers la fin du mois d'octobre 1860, une petite school de cinq individus est venue se perdre sur la côte de Jutland (Dane- mark), après un très gros temps. Parmi eux se trouvait un nouveau-né qui a été malheureusement massacré, nr'écrivait Eschricht. Je me suis rendu sur les lieux, dit-il dans une lettre du 28 novembre 1860, mais il était trop tard pour étudier le nouveau-né, les débris en étaient dispersés !. En avril 1881, un Hypéroodon mäle a échoué aux îles Loffoden ; son crâne est conservé au Musée de Christiania. En draguant dans la mer du Nord, sur le great Fischer Bank, on a recueilli la tète d’un mâle adulte. Elle est déposée à Nor- wich. Nous avons fait connaître une tête de Balænoptera rostrata recueillie dans les mêmes conditions, également dans la mer du Nord. 1 Vo'ci comment Eschricht s'exprimait à ce sujet cn français : «L'orage qui a jeté au mois d'octobre une masse de navires sur nos côtes paraît ma‘ntenant éterde ses effets aux Hypéroodons. Il n’y en a pas moins de cinq qui viennent d’échouer sur nos côtes. Ce qui m'a fait le plus de peine, c'est qu'un nouveau-né se trouvait parmi eux et qu'il a été complètement massacré par ces …. Je vicns de donner ordre qu'on m'envoie les viscères qui sont enterrés ». (Lettre du 9 mars 1861.) CO 29) (354) L'Hypéroodon pénètre parfois dans la Baltique. Le 3 décembre 1801, un individu de sexe femelle se fait capturer dans la baie de Kiel. Le squelette est conservé au Musée de l'École vétérinaire de Copenhague. L'animal a été figuré dans Voigt !. Un autre individu a échoué en 1807 sur la côte de Holstein. I] a été acheté par le professeur Viborg @e Kiel. En avril 1893, un Hyperoodon s’est perdu près de Lands- krona (Oresund) dit Nilsson ?. Dans la nuit du 11 février 1877, un Hypéroodon est venu se perdre sur un banc de sable au fond de Ja Baltique (presqu'île der Zingst, 30° 40’ long. 54° 28' lat.). Les os sont conservés à Greifswald. Le professeur Mübius fait mention de cette capture. Un autre est venu à la côte à l’ouest de Rügen, en 188... Les côtes des Iles Britanniques nous en fournissent aussi plusieurs exemples : Deux Hypéroodons sont capturés sur les côtes d'Angleterre, au commencement du siècle dernier; Dale, comme nous l'avons dit plus haut, en fait mention dans un appendice de la Topographie de Harwich en 1730 et Dover-court; lun était du sexe femelle, dit Dale ; il avait 14 pieds; il a été capturé le 23 septembre 1717. L'autre, pris à quelques jours de distance, avait 21 pieds. Dale croit le dernier un mâle. Jacob et William Thompson ont connu l’échouement de seize Hypéroodons, dont neuf sur les côtes d'Irlande, deux sur les côtes d'Angleterre, un dans le Firth of Forth. En 1783, un animal de 21 pieds fut capturé dans la Tamise. On fait mention de plusieurs individus trouvés isolés sur les côtes d'Angleterre, dont un sur les côtes d’Essex (23 sep- tembre 18171, On cite un animal de 16 pieds, un jeune par conséquent, qui a été capturé au printemps de 1829 près de Dublin et dési- gné sous le nom de Delphinus diodon 5. * Frép, Cuvier, Histoire naturelle des Cétacés, p. 244. ? Naizxs Nirssox, Skandinavisk Fauna, Lund, 1885. 3 R-J, GRaves, Trans. roy irish. Acad. Dublin, 1825. Isis, 1898, p. 51. ( 359 ) Une vieille femelle de 24 pieds et une jeune de 16 pieds 5 pouces ont échoué au commencement du mois d'octobre (1845?), in Portland Roads. Dans la baie de Belfast, un Hypéroodon a été capturé en septembre 1857 !. Une mère et son jeune ont été capturés le 18 novembre 1860 à l'embouchure de la Tamise, à Whitstable (Kent) ?. Ils avaient une grande quantité de becs de Poulpes dans l'estomac. On a vu un individu échouer vivant, à Fraserburg, Aber- deenshire coast, le 17 août 1871. Il avait 20 pieds de longueur {Struthers). Le 16 septembre, dans la baie de Ballyholm, près de Bangor, un individu de 2% pieds est venu à la côte. A l’Association britannique d'Édimbourg, le professeur Struthers a fait mention d’un mâle de 20 pieds, venu à la côte, et qu'il a eu l’occasion de disséquer. Un jeune mâle a été capturé en novembre 1885 à Dunbar, côtes d'Écosse. Il avait des dents rudimentaires au maxillaire supérieur et inférieur 5, Plusieurs échouements ont eu lieu sur les côtes de Belgique et des Pays-Bas : en 1783, un individu, décrit ‘par Pierre Camper, dont le crâne est conservé à Saardam, est venu se perdre sur les côtes de Hollande. En septembre 1840, un individu à échoué près de Ziericzee ; il a été décrit et figuré par Wesmael. Un autre, de sexe femelle, comme le précédent, est venu à la côte à Zantvoort, le 24 juillet 1846. IT a été décrit par Vrolik. Un autre est venu se perdre dans l’Escaut, en 1873; son squelette est conservé à Liège. Une femelle de 7",90 est allé mourir à l'ile Texel, le 15 novembre 1884. ! Proceed. Dub'in univers. Zuol. and Bol. Association, vol.f, part. 1, p. 4. ? Procced. Zoo. Soc , 1860, p. 375. — /llustrated neus, 18 novembre 1860. 5 Prof. Turxer. Royal physical Society, January 20, 1886. ( 306) Plusieurs Hypéroodons sont venus échouer sur les côtes océaniques de France. On y a constaté huit fois des échouements d'Hypéroodon, dit le Dr Fischer en 1881. On en cite un exemple au siècle dernier. Le 19 sep- tembre 1788, une mère et son petit furent pris à Honfleur, à l'embouchure de la Seine; le petit avait 12 pieds, la mère, 93. L’estomac du petit ne contenait que de l’eau blanchätre; la mère avait des becs de Céphalopodes dans le sien !. Un autre a péri, le 12 octobre 1810, sur les côtes de la Gironde (Bassin d'Arcachon) ?; c’est le point le plus méri- dional à l’est de l'Atlantique, visité par cette espèce. Sur la plage de Lagraner, près de Caen, il en est échoué un autre encore en 1840. Eudes Deslongchamps fait connaître la perte d’un animal sur la côte de Normandie, en 1842. Son squelette est à Paris. Vers le 17 ou le 18 décembre 1879, une femelle est venue échouer vivante à Hillian (Côtes-du-Nord), dans le voisinage de Saint-Brieuc. Le squelette est au Musée de l'Université de Liège. Il est fort incomplet. L'animal se débattait en beuglant, disaient les habitants de la côte qui avaient entendu un bruit insolite pendant la nuit. Le 26 septembre 1880, une femelle, accompagnée de son Jeune, a été capturée à Aigues-Mortes (Gard) et une partie du squelette avec le crane du jeune sont au Muséum à Paris; ils moururent, peu de temps après leur prise; la mère, poussait des mugissements, disent les témoins de cette scène 3. Le 25 juin 1884, une femelle de 9,50 a échoué à Seignasse, près du cap Breton. Le squelette est au Muséum à Paris. ! Baussirn Mémoire sur deux Cétacés échouës vers Honfleur, JourNaL »E PHYSIQUE, 1789, p.201. ? Bull. polym.du Muséum d'instruction publ. de Bordeaux, décembre 1810. Fréo. Cuvier, ist. nat. Cet, p. 217. Bançuer, Act. Soc. linn., Bordeaux, t. XIII, 1845. 5 CLEMENT, Bulletin Sor. d'étude des Sc. nat. de Nîmes, janvier 1881. ( 307 ) Depuis lors, MM. Pouchet et Beauregard ont fait connaître un Hypéroodon, échoué à Rosendael, près de Dunkerque, le 24 juillet 1885. Il portait des harpons dans les flancs. Le cadavre a été acheté pour l'huile, et le squelette en est perdu. Le 19 août 1886, quatre Hypéroodons ont fait leur appari- tion à Saint-Vaast-la-Hougue. Deux ont été capturés. Tous les deux sont femelles. Une d'elles a expulsé un fœtus pendant qu'elle était étendue sur la grève. Il est conservé. Jusqu'à présent on n’a vu qu'un Hypéroodon pénétrer dans Ja Méditerranée. Il existe, il est vrai, un squelette au Musée d'Alexandrie, mais il est possible qu’il provienne de l'Atlantique. L'Hypéroodon de F.Cuvier 1, échoué sur les côtes de Toscane, en 1835, s'il a 50 pieds de long, n’est évidemment pas un Hypéroodon, c’est plutôt un Cachalot. Le seul Hypéroodon connu de la Méditerranée est celui d’Aigues-Mortes. Cet animal est également connu de l’autre côté de l’Atlan- tique : On en a vu venir à la côte en hiver (janvier 1869) à l’est des États-Unis d'Amérique (à Nort Dennis) et M. Allen, fait remar- quer que les Hypéroodons arrivent parfois par bandes, en automne, dans les baies de Massachusets 2. Reinhardt fait observer qu'un Hypéroodon a échoué sur la côte des États-Unis d'Amérique, sous le nom de Mesoplodon Sowerbyr. On a capturé un Hypéroodon dans le port de Newport (États- Unis), qui mesurait 27 pieds. Un second a échappé. Les os sont conservés. Un autre a eté pris au cap Cod, de 24 pieds de longueur. M. Cope reproduit le dessin d’un individu capturé sur la côte de Rhode Island. En faisant le relevé de la date à laquelle des individus ont échoué, nous n’en trouvons qu’un en été (24 juillet, Hollande); quatre en septembre (Essex, Belfast, Escaut et embouchure t F. Cuvier, Cél., p. 586. * Somelimes come into our bay in large schools. Allen. Mamm. Massachus, de la Seine); deux en octobre (Danemark et Portland road): un en octobre (Arcachon); un en novembre (dans l'Escaut, et le même mois 1838, à l'entrée du Petit-Belt); un en décembre dans la Baltique (Kieler Bucht) ; un en février (dans Ja Baltique, côtes de Holstein); un en avril (côtes de Landskrone). Dans le courant de 1882, M. W. Flower a fait connaître une espèce nouvelle de ce genre sous le nom de Hyperoodon plani- frons, habitant les mers australiennes, et qui est parfaitement distincte de l'Hyperoodon rostratum. Le savant directeur du British Museum a publié le dessin de la tête, qui est déposée dans ce riche Musée !. Cest bien le représentant de notre Hypéroodon dans les mers australes. C’est le seul genre de la famille des Ziphioïdes dont une espèce est confinée dans l'hémisphère boréal. PÉCHE. Depuis peu, on a reconnu que les Hypéroodons, sans doute comme tous les Ziphioïdes, fournissent du blanc de baleine, et on leur fait aujourd’hui une chasse très active sur les côtes est de Groenland, comme sur les côtes d'Islande. Un baleinier de Peterhead, après avoir fait la pêche de la Baleine, s’est mis en 1877 à faire la chasse à l'Hypéroodon sur la côte nord-est d'Islande, et le succès semble avoir couronné complètement son entreprise. En quelques années cette nouvelle pêche a pris d'énormes proportions; elle a eu un bon résultat, non seulement au point de vue industriel, mais également au point de vue de la zoologie; celui qui l’a entreprise a été à même de trancher une question qui tenait les zoologistes en suspens. L'Hypéroodon auquel on avait donné le nom spécifique de latifrons, à cause de énorme développement de ses crêtes sus-maxillaires, forme- * FLower, Of the cranium of à new species of Hyp'ro5don (planifrons }) Proc. Zoo. Soc., may 2, 1882. ( 359 ) t-il une espèce distincte, ou, comme Eschricht l'avait dit, est-il le mâle de lHyperoodon rostratum ? Les nombreux individus de tout âge et de tout sexe pèchés dans les mêmes parages et dont le capitaine Chieftain de Kerkealdy avait eu soin de distinguer les sexes, ont permis de trancher la question dans le sens du savant cétologue de Copenhague. En 1880, le capitaine David Gray !, commandant de l'Éclipse (Whaling steamer), harponna trente-deux individus et fit connaître les lieux où se tiennent principalement ces Cétacés : c’est, d’après lui, à l’ouest et à l’est du Groenland. Il cite particulièrement Hudson-Bay et le détroit de Davis jusqu'au 70° nord; autour et à l’est de Farewell, autour d'Islande, les côtes est du Groenland jusqu'au 77° nord, à l’ouest de Spitzberg, à l’est de l'Ile des Ours, à la latitude 72 et longitude 19° est, Strait-Belle-Isle, à l’ouest et à l’est de la Nouvelle-Zemble. En 1881, les baleiniers écossais seuls en prirent cent et onze, et en 1882 on a commencé la pêche aux Frobisher-Strait, où le capitaine Chieftain de Kerkealdy en captura vingt-huit. Pendant une seule campagne on en a pris jusqu'a quatre cent soixante-trois. Le 27 avril on avait capturé le premier animal, et au mois de juin on fut obligé de jeter du charbon pour faire de la place à bord. Un seul baleinier en à capturé, pendant les mois de mai et de juin, deux cent et trois individus, dont nonante-six mâles adultes, cinquante-six femelles et cinquante et un jeunes mâles. En 1883, onze navires ont pris cinq cent trente-cinq Hvpé- roodons, dont cent cinquante-sept par l'Éclipse seul. En 1884, le principal navire n’en a plus capturé que cin- quante-six. La même année (1884), deux schooners de Vardô, Haabet Company, se livrent à la pêche de l'Hypéroodon, en se rendant 1 Davin Gray. Proc. Zoo!. Soc., 1885, p. 726. ( 360 ) dans la direction de lIslande et capturent à la fin de la saison neuf individus, produisant neuf ou dix tonnes de lard. Cette pêche sera rapidement arrivée à son déclin. MUSÉES. Si, à l'époque où Cuvier a écrit ses Recherches sur les osse- ments fossiles, il n'existait pas un squelette d'Hypéroodon au Muséum de Paris, il n’en est plus de même aujourd’hui : on en trouve maintenant dans la plupart des musées. En effet, nous en voyons à Amsterdam, à Belfast; à Berlin un squelette des Feroë; à Bruxelles, d’un animal capturé dans l'Escaut en 1840 ; à Caen, des individus mâle et femelle qui ont échoué sur Ja côte de Calvados; à Cambridge, au Musée de l'Université; à Christiania, à Copenhague on en voit plusieurs squelettes des deux sexes, provenant des Feroë ; à Édimbourg, à Groningue, à Hambourg, à Hull, à Leide, à Lille, également des Feroë; à Liège des ossements des côtes de France (Hillion) et un squelette d’un animal de l’Escaut; à Liverpool, à Londres, au Collège royal des chirurgiens; au British Museum, la tête du mâle des Iles Orcades; à Louvain, à Lund, à Oxford; à Paris, le squelette de Solenelles de l'embouchure de l'Orne, et à Stutigardt, un squelette de Shetland. DESSINS. Il y a peu de Cétacés qui ont été aussi souvent figurés, et il n'y en à pas de plus facilement reconnaissables que celui qui nous occupe; et, ce qui est plus extraordinaire, c’est qu'un des plus anciens dessins, celui de Hunter, compte encore aujour- d'hui parmi les meilleurs. Thom. Pennant (1776) publie un dessin de l'animal, tout en le plaçant parmi les poissons, avec le Cachalot et les Dau- phins. Lacépède en donne le dessin, planche 13, figure 3. (361) Il en existe une figure coloriée par Voigt, d'après un indi- vidu femelle pris dans la baie de Kiel en décembre 1801. Fréd. Cuvier ‘en a publié aussi une figure. PI. XVIT, fig. 1. On en trouve également une dans Krauss ?, pl. XLIL, fig. 1. L’Ilustratedl News, le 17 novembre 1860, a publié un dessin, d’après l'animal échoué sur la côte de Kent. Comme nous venons de le dire, Hunter a publié un très bon dessin de l'animal. L’Hypéroodon a été figuré également par Dael, Pontoppidan, Wesmael, Vrolik, Otto Torell, Gray. Wesmael représente l'animal en chair, mais ne figure pas les sillons sous la gorge. Vrolik donne un fort bon dessin et reproduit les sillons. Une des bonnes figures est celle de Gray dans £rebus and Terror, qui reproduit également fort bien les sillons. Une autre bonne figure se trouve dans l'expédition suédoise au Spitzherg en 1851 sous la direction de Otto Torell. Malm- gren faisait partie de cette expédition. M. Cope figure l'Hypéroodon qui a été capturé sur la côte de Rhode Island. ILexiste, avons-nous vu plus haut, de très grandes différences dans la tête, surtout entre les mâles et les femelles. Les meil- leures figures du mâle, pour ne pas dire les seules, sont celles du capitaine David Gray, qui a observé lui-même les individus de différents sexes en chair. Les diverses parties du squelette ont été dessinées avec plus ou moins de soin : en 1783 Pierre Camper reçoit une tête d’un marchand de Saardam, qui était encore intéressé dans la pêche de la Baleine au Spitzherg, et la fait figurer dans son ouvrage posthume, publié par son fils avec des notes de Cuvier. Pander et d’Alton ont figuré également une tête d'Hypé- roodon. " Frén. Cüvier, Histoire natur. des Célacés, pl. XVU, fig. 1. * Frép. kRAUsS, Das Thierreich in Bildern, 1851, pl XLI, fig. 1. (36 ) Gray représente la tête du mâle dans Erebus and Terror. Eschricht a fait reproduire la tête du mâle, vue sous ses trois faces, et celle de la femelle; il a fait dessiner aussi le fœtus et son squelette, de grandeur naturelle. Vrolik reproduit, indépendamment de l’animal, le squelette et les principaux viscères (estomac, trachée-artère, cœur, intes- tins et appareil sexuel femelle). Les planches XVIII et XIX de notre Ostéographie représentent le squelette et les crânes des deux sexes. PARASITES. L'Hypéroodon héberge généralement des parasites et des commensaux. Il nourrit régulièrement, parait-il, l'Échinorhynchus tur- binella dans les intestins 1. Krabbe y a trouvé l’Ascaris simplex. Blainville fait mention du Monostomum delphini. Haaland a trouvé dans l'estomac, des Nématodes qui lui paraissent être des Strongles. Haalland à ouvert aussi les poumons pour voir s'ils ne con- tenaient pas des vers parasites. [Il n’a rien trouvé. Parmi les commensaux se trouve le Cyamus Thompsoni Gosse, qui s'établit sur la tête et s'y propage avec une abon- dance extraordinaire. Nous avons reçu, de notre ami M. Flower, la photographie d’un morceau de peau de la tête, sur laquelle les Cyames sont si serrés les uns contre les autres, que l’on dirait une peau de chagrin. Ils ont été recueillis sur une femelle, capturée en 1882, probablement dans la mer de Baflin. Ÿ DiesixG, Syst. helm., vol. I, p 54 ( 365 ) Ce Crustacé a été décrit par Gosse en 1855 !, et le professeur Lütken fait du Cyamus Thompsoni de Gosse, le Platycyamus Thompsoni ?. Ce Cétacé héberge également la Penella crassicornis, Stp. et Lutk. On a trouvé encore comme commensal le Conchoderma (otion: Cuvierti, qui semble hanter indistinctement la coque des navires ou le corps de certains Cétacés. 1 Gosse, On Some new or lille knoivn marine animals, Ann. Mag. Nat. hist., XVI, 1855, p. 50, 1. IIL fig. 2. 2 LüTken, Didr. till kundskab.. Cyamus. Copenhague, 1875. IP PTS CANTIROSTRTS: LITTÉRATURE. Cocco. 4. Su di un Delfino rinvenuto nello Strello di Messina (Delphinus philippii). Maurozico, Giorn. DEL GaBix. pr Messixa, 1841. Anast, Cocco, Ucber cinen in der Moeerenge von Messina gefundenen Delphin. Enicusox’s Arcniv, 1846, p. 104. Paul Gervais, Mémoire sur la famille des Cétacès ziphioïdes. ANNALES DES SCIENCES NATURELLES, 9° série, t. XIV, 1850. Duvernoy, Mémoire sur les caractères ostéologiques des genres nou- veaux ou des espèces nouvelles de Célacés vivants ou fossiles. ANNALES DES SCIENCES NATURELLES, 9° série, t. XV, 1851. P. Fischer, Sur un crâne de Ziphius trouvé à Arcachon (Gironde), COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES SCIENCES DE Paris, 6 août 1866. P.-J. Van Bencden, Mémoire sur une nouvelle espèce de Ziphius de La mer des Indes. MÉMOIRES COURONNÉS ET AUTRES MÉMOIRES PUBLIÉS PAR L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE, coll. in-80, t. XVI. Burmeister, launa urgentina. ANNALES DEL MUSEO PUBLICO DE Buexos-Ayres, in-4°. Buenos-Ayres, 1868. Entrega quinta. ( 366 ) Malm, /lvaldjur à Sveriges Muscer är 1869, KoniG SVENSKA VETEN- skAP-AkAD, HanpLiNGar. Band 9, n° 2. Stockholm, 4871. W. Turner, On (he occurence of ZipHius cAVIROSTRIS, ên the Shetland Seas. Edinburgh, 1872. Traxsacr. r. Soc. Ening., t. XX V, p. 759. 3. H. Scott and Prof. T. 3. Parker, Volice of memoir on a Whale of the genus Ziphius, recently oblainea near Dunedin, New-Zealand. Proc. Zoo. Soc., 1887, p. 542 (april). Prof. Julius von Haast, Further Notes on Ziphius (Epiodon) Novæ Zelandiæ. Proc. zoo. Soc,, 1835, p. 590. ver HISTORIQUE. En 1804, on trouva sur le bord de la plage, entre le village de Fos et l'embouchure du Galegon, une tête plus ou moins complète, très pesante et très dure, complètement pétrifiée en apparence. L'illustre auteur des Recherches sur les ossements fossiles la désigna sous le nom de Ziphius, terme employé par quelques auteurs du moyen âge. Le Ziphius cavirostris devint le premier et l'unique représentant de ce genre, et Cuvier croyait l'espèce complètement éteinte. Cette tête a été longtemps l'unique partie du squelette con- nue des naturalistes ; Desmoulins en reprit l'étude en 1825, et, en la rapprochant des Hypéroodons, il montra qu'il avait apprécié les véritables aflinités de ce nouveau genre de Cétacés. Paul Gervais trouva une seconde tête en 1850, également sur le bord de la Méditerranée, à Aresquiès ; (Hérault). Il par- vint non sans peine a débrouiller l'histoire du Ziphius caviros- tris : il rapporte les têtes de Fos et d’Aresquiès à une seule et même espèce encore vivante, et démontre que ce même animal a été désigné déjà sous deux noms bien différents, dans les eaux de Nice. Risso l’a connu et désigné sous le nom de Delphi- nus Desmarestii, et dans son Histoire naturelle, publiée en 1826, il figure une femelle venue à la côte. Cet animal n’est pas com- mun dans la Méditerranée, dit-il, — Nous en avons vu des restes dans son Musée à Nice. Sous le nom de Delphinus Philippii, le professeur Cocco a signalé le même animal dans le détroit de Messine vers 1840. Paul Gervais ne parvint pas sans peine à faire triompher son opinion et à y rallier l'adhésion des naturalistes. La tête décrite par Cuvier était toujours considérée comme fossile. Duvernoy, le successeur de Cuvier au Muséum, refusait d'admettre l'attribution de la tête de Fos et de celle d’Aresquiès à la même espèce animale. Pour justifier son opinion, Duvernoy passa en revue les squelettes des Cétacés voisins, conservés dans (368 ) les galeries du Muséum, et il rangea le Ziphius d'Aresquiès parmi les Hypéroodons, sous le nom de Hyperoodon Gervaisti. A l'époque où des doutes existaient enccre sur lidentité des têtes de Fos et d’Aresquiès, nous avons comparé avec soin les deux têtes réunies dans les galeries du Muséum, et nous trou- vons dans nos notes, qu'une partie du crâne d’Aresquiès a été sciée en dessus ainsi qu'une partie de la face à gauche. L'os propre du nez à droite manque. Le rostre est complet. Il est plus long que dans le Ziphius des Indes 1, et au bout il porte une espèce de rostrule qui existe exactement de même dans l'individu de Fos. Ce qui distingue particulièrement ce dernier, c’est que l'intermaxillaire, de droite surtout, est beaucoup plus excavé en dessous des fosses nasales, de manière qu’à la base du rostre, la partie supérieure de la face est profondément creusée; cette excavation ne serait pas moins grande, si les parties qui manquent étaient remises en place. Du reste, les intermaxillaires sont tous les deux complets dans cette région, ce qui était resté inaperçu, paraît-il. Une autre différence, c’est que le cartilage du vomer est, comme dans l’{ndicus, complètement ossifié dans le crâne de Fos, et peu dans l’autre. Dans les trous sous-orbitaires il existe également une dif- férence notable : le sous-orbitaire de gauche s'ouvre au fond d'un profond sillon dans celui de Fos, tandis que dans l'autre il s'ouvre superficiellement, de manière qu’on en voit même deux à l'extérieur dans ce dernier. On ne distingue de ce côté qu'un seul trou dans celui de Cuvier. La face indique ainsi de notables différences entre ces deux crânes, mais sont-elles sexuelles, individuelles ou spécifiques ? Les modifications du crâne des Hypéroodons semblent faire croire qu'il existe des différences individuelles assez grandes dans la tête des divers Ziphioïdes, et nous ne croyons pas que ces différences dépassent les limites des variations spécifiques. 1 Nous croyions à cette époque que le Ziphius des Indes ctait ure espèce distincte. Outre les exemples cités par Risso et Cocco, il y a également des Ziphius perdus sur les côtes de la Méditerranée dont la date et le lieu d’échouement ne sont pas cornus; la preuve en est que le Musée de Marseille possède la tête d’un animal sur l’origine duquel on ne trouve aucun renseignement. Depuis lors, d’autres individus sont venus se perdre sur les bords de là Méditerranée, puis dans le golfe de Gascogne, et même dans la mer du Nord; de plus, nous savons aujourd’hui que le Ziphius cavirostris, auquel appartient la tête de Fos, est une espèce qui vagabonde, non seulement dans les mers d'Europe, mais également dans les eaux de nos antipodes et dans l’océan Pacifique. On a été longtemps sans se douter que des Cétacés d’une même espèce pussent habiter à la fois les deux hémisphères; nous en connaissons cependant plusieurs exemples aujourd’hui, et nous pouvons même dire qu'aucun Ziphioïde, si ce n’est l'Hypéroodon, ne semble confiné, ni dans une mer intérieure, ni même dans un océan. Après 1850, le premier Ziphius qui échoue est un individu quise perd, en 1866, sur la côte de Villafranca, dans un moment où le professeur Haeckel y fait des observations sur les animaux marins. Le savant professeur de Iéna prépare le squelette, et, comme on le pense bien, cette belle pièce prend la route de léna, pour y enrichir les collections de l'Université. En septembre 1878, les pêcheurs de Villafranca en capturent un autre encore en vie, qui mesure ",45, et le squelette est acquis pour le Musée de Florence. En 1864, on découvrit une tête de Cétacé à Lanton, sur les bords de la baie d'Arcachon, provenant également d’un Ziphius cavirostris. C’est le premier exemple d’un animal de cette espèce trouvé hors de la Méditerranée. Le Dr Fischer en a donné la description et le savant aide naturaliste du Muséum fait connaitre en même temps les échouements connus dans la Méditerranée et à l’ouest de la France. Le professeur Sir Turner publie, en 1872, un intéressant 26 (370) travail sur la présence du Ziphius cavirostris sur les côtes de Shetland, et il passe en revue les Ziphius connus des natura- . listes; il fait mention de ceux des Bouches-du-Rhône et des autres qui ont été observés dans la Méditerranée et signale les individus observés à la côte ouest de France, au cap de Bonne- Espérance et sur les côtes de la République Argentine 1. Le professeur d'Édimbourg réunit le Pétrorhynchus, le Ziphius indicus et FÉpiodon chatamensis dans une seule et méme espèce. Sous le titre : Ziphioide fossile ?, le professeur Capellini a publié un mémoire accompagné de fort beaux dessins dans lequel il fait la description d’un crâne d’un Ziphioïde mis au jour, qui rappelle parfaitement le Ziphius cavirosire vivant encore dans les eaux de l'Italie. Parmi les collections, que Castelnau avait recueillies au cap de Bonne-Espérance et aux Indes, se trouvait une belle tête de Cétacé que nous avons décrite sous le nom de Ziphius indicus. Elle nous paraissait d’abord bien différente des espèces con- nues, mais nous sommes persuadé aujourd'hui qu'elle appar- tient à une seule et même espèce qui est dispersée dans toutes les mers. Depuis lors Burmeiïster dans sa Fauna argentina à fait men- tion de ce même Cétacé, qu'il a figuré d’après un animal qui a été capturé sur les côtes de la République Argentine au mois d'août 1885. Le savant Directeur du Musée de Buenos-Ayres en donne une excellente description anatomique. Il croit à l'existence de plusieurs espèces dans ce genre, dont il apprécie parfaitement les affinités, et il donne le nom d’Épiodon australe à l'animal qu'il décrit. Le professeur Cope a donné le nom de Hyperoodon semi- junctus à un Cétacé dont le squelette a été remis au Musée 1 Trans. roy. Soc. Edinburgh, vol. XX VS, 1872. ? CaPELLINI, Del Zifioide fossi'e, REALE AcADEMIA DEI Line, anno 1884- 1885. AE (371) national des États-Unis d'Amérique; M. Fred. True vient d’en faire mention dans les Proc. de ce Musée. Après la description du squelette provenant d’un jeune animal, M. True dit que nous avons eu raison, M. Flower et moi, de regarder cet ani- mal comme un Ziphius, plutôt que comme un Hypéroodon. Il donne les mesures en millimètres des divers os de la tête. Nous trouvons ensuite ce même Cétacé dans les eaux de nos antipodes, et il paraît même qu'il y est beaucoup plus abon- dant que dans les mers d'Europe. Sous le nom de Epiodon Novæ-Zelandiæw, le Dr Jules von Haast a fait connaître un Ziphioïde, qui n’est autre chose que le Ziphius cavirostris de notre hémisphère. Dans lIlustrated London News, de 1867, figure un Ziphius du détroit de Bass, qui se rapporte parfaitement au même animal. Le professeur Sir W. Turner a reconnu, parmi les ossements rapportés par le Challenger, des restes qui ont tous les carac- tères du Ziphioïde qui nous occupe f. On possède aujourd’hui à Londres une tête et un squelette de la Nouvelle-Zélande, qui se rapportent parfaitement au Ziphius d'Europe. M. le professeur Flower, après une étude des diverses têtes connues, n'hésite pas à se prononcer sur l'identité de ces Cétacés de la Nouvelle-Zélande et des côtes de la République Argentine avec les nôtres. Il ne trouve pas de différence, dit-il, ni avec le Ziphius indicus ni avec lEpiodon australe de Bur- meister 2. On a établi aussi l'Epiodon patachonicum ou australe, qui n’est également que le Ziphius dont nous nous occupons; c’est l'avis de MM. Flower et Paul Gervais, qui est partagé aussi par le professeur Sir W. Turner. 1 TurNER, The Zoology of the Voyage of H. M. S. Challenger, 1880, p. 27. ? Remarks upon Dr von Haasr's Communicalion on Ziphius Noveæ- Zelandiæ, Proc. Zoo. Soc., June, 1876. Caron) SYNONYMIE. Ziphius cavirostris. Delphinus Desmarestii, Risso. — Philippü, Cocco. Hyperoodon daumetii, Gray. == Gervaisiü, Duvernoy. Epiodon australe, Burmeister. — Novæ-Zelandiæ, v. Haast. — chatamiensis, Hector. — _ palachonicum, Burm. Ziphius indicus, Van Beneden. Petrorhynchus capensis, Gray. Hyperoodon semi-junctus, Cope. Ziphius Grebnitzkii, Stejneger. CARACTÈRES. La taille du Ziphius cavirostris est un peu inférieure à celle de l’'Hypéroodon. Cet animal est surtout reconnaissable aux deux dents relativement assez grosses qui percent les gencives au bout du maxillaire inférieur. Ces dents sont en même nombre dans l'Hypéroodon; mais, dans les Ziphius, elles sont beaucoup plus fortes, et en forme de fuseau, tandis que, dans les Hypéroodons, elles sont à peine plus grosses qu’une plume d’oie et sans renflement sen- sible vers le milieu de leur longueur. Dans la mandibule des Ziphius 1 y a des alvéoles, parfaitement distinctes, qu’on ne voit pas aussi distinctement chez l'Hypéroodon. Ses caractères extérieurs sont : la partie supérieure du corps est d’un noir bleuâtre, la partie inférieure blanche; cette partie supérieure est marquée de nombreuses taches de forme ovale, de deux à trois doigts de longueur, semblable à une peau de léopard, dit J. von Haast. L'animal porte un sillon de chaque côté sous la gorge. Nous ne pouvons pas bien juger d’après le dessin de Burmeister si les deux sillons forment un V comme dans le Micropteron. Ce sillon est indiqué dans la figure publiée dans les Archives d'Érichson, d’après l'animal capturé dans le détroit de Messine. La femelle échouée à New-Brighton, en 1878, avait égale- ment le sillon sous-maxillaire. Il existe des différences sexuelles comme dans les autres Ziphioïdes. On a remarqué que le Ziphius mâle de la Nouvelle- Zélande a les dents du maxillaire inférieur plus fortes que la femelle. DESCRIPTION. Nous ferons remarquer que Gervais a constaté la présence de petites dents à la mâchoire supérieure du Ziphius cavirostris d’Aresquiès ; il les a représentées de grandeur naturelle pl. XXE, fig. 3, de notre Ostéographie. Gervais en a vu encore à la mâchoire inférieure. Burmeister en a vu également en dessus et en dessous; von Haast a fait la même observation sur des Mésoplodons d'âge et de sexe différents. Ces dents sans alvéoles doivent être considérées comme des dents ancestrales. Les vertèbres sont peu nombreuses comme dans tous les Liphioïdes; nous en comptons ici en tout quarante-neuf : sept cervicales, dix dorsales, onze lombaires et vingt et une caudales. Les trois premières cervicales sont soudées entre elles. Burmeister a décrit et figuré l'animal en chair, le squelette isolé et en place, la tête vue sous ses trois faces, le cœur, la (374) surface interne de l'estomac et des intestins, la cavité de la bouche avec la langue, tout l'appareil respiratoire, y compris: le larynx. MOEURS. Nous ne connaissons rien des mœurs de cet animal. Il est probable qu’il ne diffère pas, sous ce rapport, des autres Ziphioïdes. Tout ce que nous en savons, c’est qu’il est teuto- phage comme les autres animaux de cette division. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Nous allons passer en revue les localités où la présence du Ziphius cavirostris a été constatée. La tête décrite par Cuvier, dans ses Recherches sur les ossements fossiles, a été découverte à Fos, sur le bord de la Méditerranée, en 1804. Vers 1820 un individu a été capturé près de Nice. En 1842 un individu a été vu flottant dans le détroit de Messine; un autre vers la même époque a été reconnu sur les côtes de la Corse. En 1850 on a trouvé sur la plage d’Aresquiès (Hérault) une tête provenant d’un ammal qui y a échoué au mois de mai f. Depuis lors d’autres individus ont été reconnus dans Ja Méditerranée; P. Gervais en cite des Bouches-du-Rhône, de Nice, de la Corse et du détroit de Messine. Tout récemment, en septembre 1878, on a fait encore une capture à Beaulieu (Villefranche). On connaît aujourd’hui les ossements de sept Ziphius difté- rents, recueillis sur les bords de la Méditerranée. 1 Gervais, Instilut, 9 octobre 1850. (375) On a constaté ensuite la présence de ce même Ziphius sur les côtes océaniques de France; en 1864, on a recueilli une tête à Lanton, sur les bords du bassin d'Arcachon. Cette tête a été remise à M. Fillaux. Le Dr Fischer en fait mention dans les Comptes rendus de l’Académie des sciences de Paris 1. Un mâle de cette mêmé espèce est allé se perdre ensuite sur les côtes d'Irlande, et nous en connaissons qui ont pénétré dans la mer du Nord; il en est venu à la côte aux îles Shetland; le Musée d'Édimbourg en possède la tête, et le professeur Sir Turner l'a parfaitement reconnu ; après l’avoir comparé avec les autres Ziphius, 11 fait remarquer que celui de Fos, découvert en 1804, appartient bien à la même espèce, qui a été trouvée dans des mers si différentes. La présence de ce Ziphius a été reconnue ensuite dans le Kattegat. Sur la côte de Suède, non loin de Gôtenborg, sont venus échouer, à quelques années d'intervalle, deux Ziphius de la même espèce, dont l’un est conservé au Musée de Gôtenborg et l’autre au Musée de Stockholm. Le premier de ces squelettes provient de l’animal échoué en 1867 à Bahuslän (Suède). Celui du Musée de Stockholm, qui est remarquable aussi par sa belle conservation, provient d’un animal perdu dans le voisinage de Marstrand (Suède), en 1872. Il a la huitième et la neuvième dorsale malades. En dehors des mers d'Europe on a reconnu ce Ziphius à plusieurs reprises. D'abord nous ne doutons pas que ce ne soit le même animal qui a été capturé par Castelnau, et que nous avons appelé Ziphius indicus ?, ainsi que le jeune mâle de embouchure de la Plata qui a été décrit et figuré par Burmeister. 1 Août 1866, p. 271. ? Ce n'est pas dans la mer des Indes, comme nous l'avons cru, mais au cap de Bonne-Espérance que cette tête a été recueillie; nous trouvons dans un album de Castelnau : L’'Hyperoodon du Cap a été jeté à la côte au fond de Table-Bay dans un ouragan en juillet 1846; il avait 27 pieds de long, (376) Gray et Owen ont fait connaître un second Ziphius du cap de Bonne-Espérance, que Gray a appelé Pelrorhynchus pour rappeler la solidité du rostre. D’après l’âge, le cartilage sus- vomérien est plus ou moins complètement ossifié, et le Petrorhynchus n’est qu'un individu adulte. L'océan Pacifique est également visité par ce Cétacé. Nous en avons vu deux têtes et trois mandibules au Musée de Saint- Pétershbourg, rapportées du nord du Pacifique par Wosnes- searki. Ce dernier renseignement nous a été fourni par le docteur Brandt, directeur du Musée de Saint-Pétersbourg. Von Nordmann fait mention, dans sa Paléontologie de la Russie méridionale, d’une tête de Ziphius de l'ile Saint-Paul, qui lui a été communiquée par le docteur Siemaschko. Est-ce encore le même animal dont Moseley a rapporté une grande partie du squelette des îles Falkland, sous le nom d'Épiodon ? (Challenger). Le Challenger a aussi rapporté plusieurs caisses tympaniques de Ziphius, retirées du milieu du Pacifique, au sud des îles Tahiti, à 2,335 brasses de profondeur. A propos d’un Ziphioïde du détroit de Magellan, Paul Gervais faisait l'observation suivante : « Pour dire toute ma pensée, je ne serais pas étonné qu'il en fül encore de même pour les Zipnius INpicUs et CAPENSIS, c’est-à-dire, que ces derniers ne fussent également de la même espèce que le Ziphius de la Méditerranée. » Nous partageons complètement cet avis aujourd'hui. Ce même Ziphius se rend ensuite jusqu'au nord du Pacifique : l’'Institution Smithsonienne a envoyé un naturaliste, Stejneger, à l’île de Behring, pour y chercher des restes de Stellère, et il a rapporté, avec plusieurs ossements intéressants de Cétacés, une tête de Ziphius cavirostris, parfaitement conservée. On lui a donné à tort un autre nom spécifique : Ziphius Grebnitzkü, Stejneger. Avec ce même animal se trouvait encore un autre était gris, a donné 500 bouteilles d'huile très bonne et à laquelle les gens du pays allribuent beaucou)2 de vertus médicinales. MOTTE) Ziphioïde que l’on ne connaissait qu’en Australie, le Berardius Bairdii. Nous le trouvons également dans les eaux de nos antipodes, et en plus grande abondance, paraît-il, que dans nos eaux d'Europe. En 1863, le professeur V. Haast fait part à la Société Zoolo- gique de Londres de la présence d’un Ziphius dans les eaux de la Nouvelle-Zélande 1, A la séance du mois de juin 1876 ?, M. le professeur Flower exprime l'avis, confirmé depuis, que le Ziphius Novæ-Zelandiæ ne diffère pas du Ziphius cavirostris et qu'il n’existe qu'une seule espèce vivante dans ce genre. Deux individus ont échoué, l’un le 17 novembre 1878 à New-Brighton, l’autre le 15 mai 1879 près de Kaïapoiï; ce sont deux femelles : la première avait 19 pieds, la seconde 21. En 1883, on a capturé encore un Ziphius cavirostris sur les côtes de New-Jersey. La dernière communication sur les Ziphius de la Nouvelle- Zélande est celle de MM. John H. Scott et T. Jeffery Parker, de l’Université d’Otago (Nouvelle-Zélande). Ils informent M. Flower qu'une jeune femelle de Ziphius a été capturée vivante à Warrington, au nord de Dunedin (Nouvelle-Zélande), en novembre 1884 5. L’Epiodon chatamiensis, décrit dans les Trans. New-Zealand Institute, vol. V, est un mâle de cette espèce. Le Ziphius cavirostris se rend également de l’autre côté de l'Atlantique : le professeur Cope a signalé sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre une femelle de 19 pieds 4 pouces, qui a été capturée en 1853, à New-Jersey. De manière que nous connaissons divers crânes et sque- lettes de la Méditerranée, un du golfe de Gascogne (1864), deux 1 Z.S. L. 4 décembre 1885. ? Professor FLower, Remarks upon Dr vox Haasr's communicalion on Ziphius Novæ-Zelandiæ, Proc. Zoo. Soc., June 6, 1876. 5 Zoo!. Soc., London, 15 mars 1887. (38 ) du Kattegat, deux du Cap, un du Brésil, un de la Nouvelle- Zélande, un des mers de Chine et au moins deux du Pacifique, et tous ces crânes se rapportent fort bien à une seule espèce, ce qui nous permet de dire que le Ziphius cavirostris est un animal cosmopolite comme le Cachalot. Indépendamment de ces divers Cétacés connus, nous pou- vons encore ajouter que le Challenger a rapporté des mers du Sud une tête de ce même animal. Nous avons vu également un rostre, provenant des Phos- phate beds de la Caroline du Sud, au Musée du Co:lège royal des chirurgiens, à Londres, mêlé à des ossements d'animaux terrestres, parmi lesquels se trouvait une dent de Megathe- rium (?) Ce rostre était perforé par des tarets. Nous avons vu un rostre, rongé de la même manière, qui était rapporté au Ziphius densirostris, et qui avait été recueilli sur la côte d'Afrique. On en a trouvé dans le sable d'Anvers plusieurs, rongés exactement de la même manière. En somme, nous connaissons aujourd'hui des restes d’in- dividus recueillis dans la Méditerranée, à Fos (Bouches-du- Rhône, G. Cuvier); à Aresquiès (Hérault, Gervais); en Corse (Doumet); au détroit de Messine, Villefranche (Haeckel); dans le golfe de Gascogne, à Arcachon (Fischer); aux îles Shetland (Turner); aux côtes de Suède, Kattegat (Malm); dans l’hémi- sphère austral, au cap de Bonne-Espérance (Van Beneden, Gray et Owen), dans la République Argentine (Burmeister); sur les côtes de Patagonie, aux États-Unis d'Amérique et à la Nouvelle-Zélande. MUSÉES. On conserve aujourd’hui des ossements de cette espèce dans plusieurs Musées. Le Muséum de Paris en possède deux têtes : l’une décrite par Cuvier, l’autre par Paul Gervais. Toutes les deux pro- viennent, comme nous l’avons vu plus haut, d'individus capturés dans la Méditerranée. (379) Le Musée de la ville de Marseille possède le squelette d’un animal qui a péri sans doute sur les côtes voisines, mais dont il n’est pas fait mention dans les livres qui traitent des Cétacés. On conserve encore des têtes et des squelettes provenant de Ziphius échoués sur les côtes de cette même mer intérieure, à Florence, à Pise et à Cette. Le squelette de Florence provient de l’animal capturé à Ville- franche en septembre 1878. Un squelette complet, préparé par le professeur Hæckel en 1866, est conservé au Musée de l’Institut Zoologique de Iéna. Au Musée de la Société scientifique d'Arcachon, on voit une tête de cette même espèce qui a été recueillie, en 1864, à Lanton dans la baie d'Arcachon. À Dublin on possède le squelette complet d’un animal échoué sur les côtes d'Irlande. On en conserve deux têtes à Édimbourg; une d'elles a été rapportée de Shetland par Couthey 1. Nous conservons, au Musée de Louvain, la tête qui a été rapportée par Castelnau de son voyage aux Indes orientales, et que nous avons décrite sous le nom de Ziphius indicus. À Gôtheborg, on conserve au Musée le squelette de l'animal qui a échoué, en 1867, à Bohuslän. - Le Musée de Stockholm renferme le squelette complet de l'animal qui est venu à la côte, en 1872, dans le voisinage de Marstrand (Suède). Nous avons vu deux têtes de cette espèce dans les galeries du Musée de Saint-Pétersbourg, toutes les deux de l'océan Pacifique. À Charleston on conserve le squelette de l'animal qui a été décrit sous le nom de Hyperoodon semi-junctus, Cope ?. # Turxer, On Ziphius cavirostris, TRANSACTIONS ROY. SOC1ETY, Édimbourg, t. XX VI, p. 750. ? Proc. Acad. Sc. Philadelphie, 1865 et 1869. ( 380 ) Au Musée de Washington on voit aujourd'hui une tête de cette espèce rapportée de l'ile de Behring, par Stejneger. On conserve également un squelette de cette espèce au Musée de Buenos-Ayres. Le savant directeur Burmeister en a donné une description. A Cbristchurch, Canterbury Muséum (Nouvelle-Zélande), on conserve le squelette de lanimal décrit par Jul. von Haast. Nous avons vu au Muséum de Paris un rostre de Ziphioïde fossile des côtes de Patagonie. On voit enfin au Musée du Collège royal des chirurgiens à Londres un squelette de Ziphius de la Nouvelle-Zélande. DESSINS. Risso à figuré ce Ziphius dans son Hist. nat. de l'Europe méridionale, vol. I, pl. If, fig. 3, sous le nom de Dauphin de Desmarest. L'animal entier est également représenté par Anast. Cocco dans les Archives de Troschel, 1846, pl. IV, d’après une femelle capturée dans le détroit de Messine. On voit également un dessin de cet animal dans la Revue de Zoologie, 1842, pl. I. Nous possédons aussi de bons dessins des Ziphius capturés sur les côtes de l'Amérique méridionale et de la Nouvelle- Zélande ; Burmeister a représenté l’animal complet et a figuré les principaux viscères; James Hector a publié un bon dessin de la tête, de la mandibule et des dents. Dans les Transact. de New-Zealand Institut, vol. V, Jul. von Haast a publié la figure d’une femelle de 19 pieds, échouée près de New-Brighton (Nouvelle-Zélande). Dans l’{lustrated London News, vol. I, 1867, p. 97, figure un Ziphius observé dans le détroit de Bass. Indépendamment de l'animal, les diverses parties du sque- lette ont été dessinées sur les lieux d’après des individus cap- turés dans les eaux de nos antipodes. (381) La planche XXII, fig. 4-11 de notre Ostéographie, représente la colonne vertébrale, le sternum ; planche XXL, les crânes des Aresquiès, de Buenos-Ayres, de Lanton (Gironde), de Fos (Bouches-du-Rhône), de Corse, du cap de Bonne-Espérance, de la mer des Indes. Nous avons figuré le crâne du Ziphius capturé par Castelnau, la dent, la caisse tympanique en place et isolée, dans les Mémoires de l'Académie royale de Belgique, coll. in-8°, t. XVI. Gervais a figuré les dents du maxillaire supérieur dans sa Zool. et paléont. franç., planche XXXIX, et planche XXI de l'Ostéographie. Jul. von Haast a figuré le squelette et le crâne d’un animal de la Nouvelle-Zélande. PARASITES ET COMMENSAUX. On ne connaît jusqu’à présent qu’un Cestode et un ver rond qui peut être un Nématode ou un Échinorhynque ; le premier est un Phyllobothrium agame, que le professeur Hæckel a trouvé dans l'épaisseur de la peau. Le second est un ver très long, logé dans l'estomac d’un Ziphius échoué sur les côtes de Suède en avril 1867 (Malm). Le professeur Sir Turner suppose que c’est un Échinorhynque; un nouvel examen est indispensable. Nous ne savons si cet animal a été conservé. CARRE TNA DEN nr RAA 1HUSAES pl A LS CERTES RÉ E NIET LES FA Vie * (et qe Ne Cm fai MICROPTERON SOWERB Y1I. LITTÉRATURE. Sowerby, British Miscellany, t. 1, 1806. Rafinesque, Précis des divouvertes somiologiques. Palerme, 1814. Hlainville, Nouv. Bullet. des sciences. Septembre, 1825, p. 159, (Bull. Soc. Philom., IV.) Risso, /ist. nat. Eur. mér., t. I, pl. 2, 1826. Fred. Cuvier, De l’hisloire nalurclle des Célacés. Paris, 1856. Du Mortier, Mémoire sur le Delphinorhynque microptère. (Nouv. Mém. Acan. Roy. DE BruxeLces, t. XII, 1859.) Kuxley, Proc. Gcol. Soc., 1846, p. 588. Eschrieut, Unters. über d. nordischen Watllthiere. Leipzig, 1849. 3. E. Gray. The Zoology of Le Voy. of IH, M. S. Erebus and Terror, p. 27, pl. V, fig. 9, 5. Paul Gervais, Zoologie et paléontologie françaises. Paris, 1859. Van Beneden, Sur un Dauphin nouveau ct un Ziphioide rare. MÉMOIRES COURONNÉS ET AUTRES Mémoires publiés par l'Académie royale de Belgique. Coll., in-8°, t. XVI, 1865. WW. Andrews, On Ziphius Sowerbiensis, captured in Brandon Bay, coast of Kerry, on the 9% of March, 1864. Eug. Deslongehamps, Observations sur quelques Dauphins appar- tenant à la section des Ziphiidés. Buze. Soc. Lixx. de Normandie, 1866. Agassiz, Boston Sociely of nal. hist., novembre, 1867. Julius von Hanst, On a new Ziphioid Whale. Proc. Zool. Soc. 1876, p. 7. Flower, « À further contribution to the knowledge of the existing Ziphioïd Whales of the genus Mesoplodon, containing a description of a Skecleton and Several Skulls of Cetaccous of that genus from the Scas of New-Zealand. » Proc. Zool. Soc., novembre 6, 14877, et Trans. Zool. Society, vol. X, 1878. J. Reinhardt, Mesoplodon bidens en tilvæxt til den danske Havfauna. Copenhague, 1880. Mali. Om Micropteron bidens, © Gôüteborgs Naturhist. Mus., I, Arsskr., 1881, p. 92. Malm, Gôleborgs nalurhistoriska Museum. Gôtcborg, 1882, p. 52. Prof. W. Turner, On a specimen of Mesoplodon bidens captlured in Shetland. JourN. oF ANAT. AND PHYS., t. XVI, april, 1882. Prof. W.'Æurner, Zhe index of the pelvic brim… The analomy of a second specimen of Sowcrby’s Whale. JourxaL oF ANATOM. AND Puysioz., octobre, 1855. Dr Carl Aurivillius, 7he ostcology and exterior conformation of Sowerby's Wlhale (Micropteron bidens Sow.), Stockholm, Académie des sciences, octobre 14, 1885. Fred. True, Descripl. of a new Species of Mesoplodon. Proc. or Uni. Sr. Nar. Museum, 1885. ©. H. Malm, On Sowerby’s Hval. (Mesoplodon bidens) Stockholm. Ofr. Vet.-Ak., 1885. Dr Carl Aurivillius, Carl W.S. Osleologie und äussere Erscheinung des Wals Sowerby’s (Micropteron bidens). Stockholm, 1886, in-8». Bihang k. Svensk, Vet.-Ak., Handl., 11 Band, n° 10. Thomas Southwell and William Eagle Clarke, On (he occurrence of Sowerby’s Wlhale. ANX. AND Mac, Nar. uisr., p. 59, January, 1886. ( 385 ) HISTORIQUE. C’est au commencement du siècle que Sowerby, le célèbre conchyliologiste anglais, fit connaître, sous le nom de Physeter bidens, un curieux Cétacé mâle, échoué sur la côte d'Elginshire, en Écosse, près de Brodie-House. Sowerby l’a fait figurer dans ses British miscellany. Après une visite faite en Angleterre, Blainville déerivit ce même Cétacé sous le nom de Dauphin de Sowerby, Delphinus Sowerbiensis. Lesson en a fait mention dans son histoire naturelle des Cétacés 1. Un Cétacé, échoué sur les côtes de Sicile vers 1790, attira en 1814 l'attention de Rafinesque, qui le fit connaître sous le nom d'Epiodon urganautus ?. Il a plusieurs dents à la mâchoire supérieure, dit Rafinesque, aucune dent à l'inférieure, et pas de nageoire dorsale. Nous avons tout lieu de croire que c’est une femelle de cette espèce, dont la nageoire dorsale rudi- mentaire, ainsi que la dent du maxillaire inférieur, n’ont pas été aperçues. Les dents de la mâchoire supérieure dont Rafinesque parle, sont des dents rudimentaires caduques sans aucune constance, ni dans leur nombre ni dans leur volume. Fréd. Cuvier fait mention de ce nouveau Cétacé dans la 33e livraison de l'Histoire naturelle des Mammifères, et en 1829 son frère, G. Cuvier, le cita dans le règne animal sous le nom de Microptère proposé par A. Wagner. En 1825, un Cétacé extraordinaire se perdit à embouchure de la Seine; c'était une femelle également. Blainville eut l’occasion de l’étudier et le fit connaître sous le nom de Lelphi- norhynchus Dalei. La peau en a été empaillée pour les galeries 1 Œuvres compl. de Buffon. Paris 1828, p. 127. ? RAFINESQUE. Précis des déco.vertes somiologiques. Palcrme, 1814. 27 (286) de zoologie du Muséum de Paris, et la tête a été conservée dans les galeries d'anatomie comparée. La même année, un autre individu vint échouer à la pointe de Sallenelles, embouchure de FOrne, côte du Calvados; son squelette fut préparé pour le Musée de Caen. Le 22 août 1828, une femelle de 11 pieds se fit prendre vivante au Havre, et on la tint en vie pendant deux jours. En 1849, Eschricht publia ses Untersuchungen über Nordische W'althiere et adopta également le nom de Micropteron, proposé par A. Wagner. Le nom générique a souvent été changé depuis, mais c'est le plus ancien, celui proposé par A. Wagner et adopté par Cuvier et Eschricht, que nous devons conserver. Le 31 août 1835, une jeune femelle est venue à la côte près d'Ostende et a fait le sujet d’un mémoire de feu B. Dumortier. Le squelette a été heureusement conservé par Paret et se trouve aujourd'hui au Musée de Bruxelles. En 1863, nous avons publié une notice sur ce squelette, dont nous avons figuré les principaux os. Duvernoy, comparant la tête du Physeter bidens mâle, de Sowerby, qui est au Musée d'Oxford, avec la tête du Muséum de Paris, provenant de la femelle du Havre décrite par Blainville, a cru devoir en faire deux espèces. (Mesodiodon Sowerbyi et Micropteron). I ne s’est pas douté que le mâle a une forte dent au milieu de Ja longueur de la mandibule et la femelle une très petite. | Depuis lors, un mâle a été capturé sur les côtes d'Irlande, dans la baie de Brandon, comté de Kerry, le 9 mars 1864. En 1869, M. Andrews a publié un mémoire sur cet animal qui est désigné sous le nom de Ziphius Sowerbiensis. M. Andrews fait remarquer qu'un autre mâle a été capturé déjà sur les mémes côtes d'Elginshire. Ce mémoire est accompagné d’une planche fort intéressante reproduisant une photographie de la tête avec sa forte dent et le sillon en V sous la mâchoire inférieure. Eug. Deslongchamps a publié quelques observations sur un Hyperoodon qui flottait à l'entrée de la mer de la Manche ct dont la tête est conservée au Musée de Caen. Cette même notice renferme des remarques sur le Micropteron de Sowerby, dont le squelette presque complet est conservé au Musée de Caen. L'auteur ajoute également une note sur le Dioplodon Ger- vaisti 1. En 1870, un autre individu de cette espèce a échoué à la même baie de Brandon, dont nous avons parlé plus haut, et le professeur Sir Turner l’a fait connaître dans les Transactions de la Société royale d’Édimbourg. Il fait aussi mention d’un squelette entier et adulte qui est conservé au Musée de la Société royale de Dublin. Le savant professeur d'Édimbourg résume dans ce mémoire tout ce qui est connu de cette espèce. Dans une visite faite au Musée de Christiania, nous avons trouvé une mandibule de femelle, sans aucune indication d’ori- gine, mais qui a probablement été recueillie sur les côtes de Norwège. Nous en avons fait mention dans les Bulletins de l'Académie 2. Une capture faite en 1869 rend probable l’origine scandina- vienne de la mandibule de Christiania. Au printemps de la susdite année, des pêcheurs suédois ont rencontré en mer un animal de cette espèce à Nordjän (Kattegat\. Il flottait à la surface ; ils l'ont remorqué et le squelette en a été heureuse- ment conservé au Musée de Gôthebourg. M. Malm en a fait mention dans sa notice sur les squelettes conservés dans les Musées de Suède. Il est venu encore un Microptéron à la côte dans ces mêmes parages septentrionaux à l’est de Jutland, le 3 février 1880 ; c'était un jeune mâle. Reimhardt a publié sur cet animal une notice, qu’il a accom- pagnée d’un tableau des captures connues avec l'indication des lieux et des sexes; il reconnaît cinq mâles et quatre femelles ! Euc. DesLoxGcHawps, Observations sur quelques Dauphins zyphidés, 1866. Buur. Soc. Lixx. DE NORMANDIE, tome X. 2 2e sér., L. XXII, 1866, ( 388 ) qui ont péri sur les côtes de France, des îles Britanniques, de la Scandinavie et de Belgique. Un exemplaire de cette espèce a fait son apparition en 1885 à Salto près de Lysekil (Bohuslän), et a été l’objet d’une étude de la part de M. Carl Aurivillius. Il a été capturé vivant. Nous avons trouvé, au Musée de Saint-Pétersbourg, un crâne fort incomplet, dont l’état de conservation nous fait croire qu'il provient d’une ancienne collection; il n’y a aucune indication sur son origine. Nous avons reconnu également le crâne d'une femelle au Musée d'anatomie d'Édimbourg. Le Micropteron Sowerbyi n'est évidemment pas un animal des mers d'Europe seulement; il est cosmopolite comme la plupart des Ziphioides. Sur les côtes des États-Unis d'Amérique, à l'île Nantucket, on a capturé un individu qui mesurait 16 pieds de longueur et dont le crâne est conservé au Muséum de Zoologie comparée de Cambridge. En 1867, Agassiz a montré la tête de cet animal au congrès de Boston. {I le regardait comme nouveau pour les côtes des États-Unis d'Amérique. Une autre observation en faveur de son cosmopolitisme a été fournie récemment par Léon Stejneger, qui a été à la mer de Behring; il en a rapporté une tête qui a été décrite sous le nom de Mésoplodon. M. Fréd. True en a communiqué une description et une figure dans les Proceedings du Musée national des États-Unis. Les légères différences signalées par M. True nous semblent des différences individuelles ou locales plutôt que spécifiques. Capellini a décrit et figuré des ossements de Mésoplodon ou Microptéron qu’il serait sans doute diflicile de séparer de l'espèce vivante f. Le Microptéron qui nous occupe, est également représenté 1 CapeLLixi. Resli fossili de Dieplodon e Mesoplodon. Bologna, 1885. Men. R. Acav. ni BoLoGxa. 1885. (389 ) dans les eaux de nos antipodes; nous en avons vu un squelette complet au Muséum d'histoire naturelle de Paris sous le nom de Oulodon Grayi, qui est si semblable à celui du Micropteron de nos mers que nous croyions avoir l'espèce ordinaire sous les yeux. Les affinités de lOulodon avec le Wesoplodon Sowerbyi sont remarquables, disait Paul Gervais, en parlant du squelette provenant d’un mâle assez Jeune qu'il venait de recevoir de M. von Haast, de Christchurch, Nouvelle-Zélande. Le nom d'Oulodon a été proposé à cause des dents fort petites de Ja mâchoire supérieure, qui se trouvent également dans les individus d'Europe. Depuis longtemps, Paul Gervais a reconnu ces petites dents non alveolées, indépendamment de la grande, dans la femelle qui a échoué au Havre-de-Grâce. Depuis cet envoi au Muséum, un second individu de la même espèce est allé échouer à Liüttle Bay entre Botany-Bay et Long-Bay, à une petite distance de Sydney. Ge second indi- vidu a été signalé par M. Kreft. Le professeur Flower pense que ce dernier est plutôt un Mesoplodon Layardi. Sous le titre de À further contribution to the knowledge of the existing Ziphioid Whales, Genus Mesoplodon, qui est synonyme de Micropleron, M. W. Flower passe en revue les différentes espèces établies par les auteurs, et compare entre eux les nom- breux et intéressants matériaux que les Musées de Londres ont reçus de leurs correspondants en Australie. M. Flower fait remarquer que les Mésoplodons, échoués il y à quelques années sur nos côtes, étaient considérés comme les seuls survivants des nombreux Ziphioïdes fossiles de nos sables d'Anvers; mais, si ces animaux sont devenus rares aujourd'hui dans nos mers d'Europe, des travaux récents nous ont appris qu'ils se trouvent en abondance dans la mer de nos antipodes,; ces Cétacés sont représentés par différentes espèces, dont quelques-unes vivent par gammes assez nombreuses, puisque, comme nous le verrons plus loin, on en à vu échouer jusqu’à vingt-cinq à la fois sur la même côte. Dans lOstéographie des Cétacés, mon collaborateur P. Ger- vais, chargé de la rédaction des Ziphioïdes, consacre un { 390 ) chapitre au Mésoplodon qui nous occupe et s'étend sur la partie historique, la synonymie, le squelette et le système dentaire. Il consacre les pl. XXIT et XXVI à la représentation du squelette et des dents. A. H. Malm a publié depuis une notice sur cette espèce dans le Bulletin de l'Académie royale à Stockholm. Il donne la description des divers os des deux squelettes qui sont conservés au Musée de Gôteborg, et il accompagne sa notice d’une planche représentant le crâne, la mandibule, los hyoïde et les os du membre du Hesoplodon, à côté de celui de Hyperoodon. Le dernier travail sur ce Cétacé est dû à la plume si exercée du professeur Sir Turnér. Il a reçu, en 1885, par un de ses élèves, un mâle adulte en chair, capturé aux îles Shetland, et à l’aide duquel il a fait connaitre plus en détail le squelette et les parties molles encore fort Imcomplètement étudiées. I a fait part de ses observations à l'Association Britannique, à Aber- deen, le 11 septembre 1885 !. Le travail a été inséré dans le Journal of anatomy and physiology, October, 1885. La dernière notice sur cet intéressant Cétacé est celle de Th. Southwell et de W. E. Clarke sur lapparition d’un indi- vidu du sexe mâle, échoué vivant à marée basse sur les côtes du Yorkshire, à l'entrée de la rivière Humber. On a reconnu trop tard l'importance de cet échouement; on n’a recueilli que l'huile et on a abandonné le cadavre à la mer, croyant que c'était un Hyperoodon. Cet échouement eut lieu le même jour que le professeur Sir Turner fit sa communication à l'Association Britannique, à Aberdeen, sur le mâle capturé aux îles Shetland. Au cap de Bonne Espérance, un Microptéron a reçu le nom de M. Layardi et le D' v. Haast a donné le nom de M. Floweri à celui de la Nouvelle-Zélande. Nous avons comparé à Londres une belle photographie du D' v. Haast, avec la tête du Cap, et il ne nous à pas paru, ni à M. Flower, ni à moi, que ces Liphoïdes appartinssent à une espèce distincte. L’habitat de ces 1 Report of The British Association, 1885, Aberdeen, page 1057. (159140) deux Ziphioïdes n'est pas une raison de croire à une différence spécifique, dit M. Flower; au contraire : 1l n’y a pas de barrière pour les Cétacés entre la mer du Cap et celle de la Nouvelle-Zélande, SYNONYMIE. Physeter bidens, Sowerby, British Miscellany, t. [, 1806. Delphinus edentulus, Schreber. Delphinus Sowerbyi, Dauphin épiodon, Desmarets, mammi/., p. 521, 1820. Delphinorhynchus Dalei, Blainville, Bull. Soc. philom. sep- tembre, 1825. Delphinorhynchus micropterus, Cuv. Règne animal, 1829. Dauphin de Sowerby, Fr. Cuvier, de l'Hist. nat. des Célacés, 1836, p. 218. Dioplodon Sowerbiensis, Gervais. Zool. et Paléontol. franc. tab. 30, fig. 1, 1859. Mesoplodon Sowerbiensis, Gervais, Ostéographie des Cétacés, p. 392, tab. 29 et 23, 1880. Mesoplodon Sowerbiensis, Van Ben. Mém. Acad. Bruxelles, (0) D. ren ES Ziphius Sowerbiensis, Gray, Catalog. of Seals and Whales, p. 900. Ziphius Sowerbiensis, Gray, Supplément, p. 101. Delphinorhynchus micropterus, Dumortier, Mém. Acad., Bruxelles, 1839. Diodon de Sowerby, Lesson, Cétacés, p. 127. Aodon de Dale, Lesson, Cétacés, p. 155. Mesodiodon Sowerby, Duvernoy, Ann. sciences natur. 1851, vol. XV, p. 55. Mesodiodon Micropteron, Duvernoy, Ann. se. natur., p. T7. Micropteron, Eschricht, Ann. May, nat. hist. 1852. Ziphius bidens, Lilljeborg, Sveriges och norges Ryggradsdjur, 2 vol., in-8°, Upsala, 1874. Micropteron bidens, Malm. Gôteborgs naturhiska Museum, II Arsskrift, p. 32, 1881. Mesoplodon bidens, Flower, À further contribution, 1878. Oulodon Grayi, v. Haast. Proc. Zool. Soc., London, 1876, DUT Micropterus et Micropteron sont les plus anciens noms géné- riques et c’est définitivement le nom de Microptéron proposé d'abord par Wagner que nous adoptons. Dans le complément des œuvres complètes de Buffon, R. F. Lesson a fait mention de l'Aodon de Dale !, et considère comme synonymes le Delphinus edentulus de Schreber et le Dauphin de Dale, de Blainville et de Fr. Cuvier. Le Dauphin de Desmaret, que Risso a mentionné le premier, est désigné sous le nom de Diodon Desmarest, dans le complé- ment; c'est le même animal. Le Diodon de Sowerby du même auteur est également syno- nyme, de manière que la même espèce figure sous trois noms différents. Desmarest cite également sous trois noms différents le même animal. Fr. Cuvier parle du Dauphin de Sowerby, puis du Dauphin épiodon qui est la même espèce. L'animal de la Nouvelle-Zélande auquel on à donné le nom de Oulodon Hectori, comme celui du nord du Pacifique et que M. True a dédié à Stejneger, se rapportent l’un comme l'autre à une même espèce, celle qui nous occupe. Le Mesoplodon Floweri, dont le D' von Haast a envoyé une photographie, n’est autre chose que le M. Sowerbiensis. M. Flower a eu à sa disposition le crâne du Mesoplodon Iectori, de Cook Strait, le squelette d’un adulte capturé dans Lyall Bay, le squelette du Mesoplodon Grayi, de la Nouvelle- Zélande, le rostre et la mandibule d’un vieux mâle; et 1l trouve encore ces matériaux insuffisants pour se prononcer sur leurs caractères spécifiques. * Escaricar, Untersuch. p. 50. (393) CARACTÈRES. A l’état adulte, la mandibule ne porte qu’une seule dent de chaque côté; elle est aplatie, logée dans une profonde alvéole vers le milieu de la longueur de los. Cette dent est beaucoup plus forte dans le mäle que dans la femelle. La longueur du mâle, depuis le bout du museau jusqu’au milieu de Ja nageoire caudale, est de 15 à 16 pieds (anglais). La largeur de la queue a 3 pieds 10 pouces. La nageoire pectorale mesure, depuis la tête de lhumérus, 1 pied 10 pouces et son plus grand diamètre est de 6 1/; pouces. On à vu des jeunes de 7 pieds de longueur accompagner leur mère. Le Micropteron Sowerbyi mâle a, sous la gorge, deux sillons qui s'unissent en avant et forment un V. M. Andrews repré- sente très bien cette disposition dans la figure 2 qui accom- pagne son mémoire. DESCRIPTION. Comme dans tous les Ziphioïdes, la nageoire pectorale est fort petite; elle ne dépasse pas la longueur de quatre vertèbres lombaires. L’humérus n’a pas la grosseur d’une vertèbre lombaire et ne dépasse pas sa longueur. L'avant-bras est long comme le bras et comme la main, y compris la région carpienne. Le premier rang des os carpiens a trois os dont le médian est le plus volumineux. Le second rang en a également trois. Le pouce ne compte qu’un seul os, un métacarpien; les métacarpiens des quatre autres doigts diffèrent peu entre eux. L'index et le médian ont quatre phalanges, l’annulaire trois et le petit doigt, un. Le premier squelette de cet animal a été décrit par Dumor- tier; il était mal monté par Paret. Plusieurs pièces n'étaient (394) pas à leur place. C'était Le squelette de la femelle venue à la côte d’Ostende. Dans la notice que nous avons publiée sur cette espèce, nous avons dessiné comparativement l'ouverture du canal des ver- tèbres dans les différentes régions du corps !. Nous trouvons dans la colonne vertébrale : sept cervicales, neuf ou dix dorsales, dix ou onze lombaires et dix-neuf ou vingt caudales, en tout 46. Les deux premières cervicales sont soudées dans POulodon du Muséum de Paris; dans le squelette d’une vieille femelle du Musée de Christchurch, les trois cervicales antérieures sont réunies. J. Murie a représenté l'estomac; nous avons fait dessiner la poche du larynx et ses rapports avec la trachée-artère. Le pro- fesseur Sir Turner a publié depuis lors un bon dessin de cette même poche, d’après un fœtus de Balænoptera Sibbaldii que l'on peut comparer avec celle-cr. MM. Ray Lankester et Turner ont fait connaître la structure de la dent qui est implantée dans une alvéole vers le milieu de la longueur de la mandibule; elle est remarquable chez le mâle par sa forme et son grand développement. M. C. Aurivilliers a étudié avec soin le point de réunion des deux lobes de la nageoire caudale, caractère qui n'avait guère attiré l'attention; généralement il y a une échancrure au milieu, tandis qu’au contraire iei est une saillie. Nous avons eu l’occasion de voir quelques parties molles que Paret avait desséchées, et dont les principaux caractères étaient encore conservés. Ainsi les intestins montraient, à leur face interne, les mêmes alvéoles à peu près que l'on observe dans lHyperoodon, et qui s'étendent sans doute sur toute la sur- face interne de la muqueuse intestinale; c’est, croyons-nous, une disposition commune à toute cette famille. La trachée-artère a le caractère général de la trachée-artère des Cétacés, c'est-à-dire, elle se bifurque, mais avant la bifur- 1 Loc. citat., p. 44. ( 395 } cation elle fournit une bronche latérale, qui compte les mêmes cercles cartilagineux que les deux troncs principaux. Depuis le larynx jusqu’à l’origine de cette bronche supplé- mentaire, nous comptons dix-sept cercles. Plusieurs d’entre eux se divisent à leur tour et s’élargissent au point de prendre le double des autres. Comme nous l’avons dit plus haut dans la partie historique, à la section de biologie de l'Association Britannique à Aber- deen, le professeur Sir Turner a entretenu ses confrères de l'organisation du Microptéron dont il a disséqué deux indi- vidus. MOEURS. Nous ne croyons pas que la visite de l’estomac ait fait con- naître la pâture habituelle de ce Cétacé, mais nous avons tout lieu de penser que ce sont, comme dans les autres Ziphoïdes, les Céphalapodes qui forment leur nourriture ordinaire. On possède un trop petit nombre d'individus pour savoir s'ils vivent par couples ou par schools. On ne peut rien conclure de la capture isolée de quelques animaux. Tous ceux que l’on a observés en Europe étaient isolés, tandis qu'on en a vu échouer plusieurs à la fois dans les eaux de nos antipodes. M. Malm fils reproduit le tableau des individus connus échoués ou capturés et sur treize d’entre eux il y a six mâles, quatre femelles et deux dont les sexes sont inconnus; on peut supposer que ces animaux vivent par couples, puisqu'il y en a à peu près un nombre égal de l’un et de l’autre sexe. La femelle qui s’est perdue sur les côtes d’Ostende étaitseule ; elle a été surprise par la marée descendante. Les pêcheurs du port la trouvèrent échouée vivante et, d’après le rapport de Paret, qui a recueilli animal sur la plage, elle poussa des mugissements pendant les deux jours qu’elle a vécu; il parait que sa voix sourde et caverneuse avait des rapports avec le beuglement de la vache. { 396 ) La femelle qui a péri le 9 septembre 1895, à un quart de lieue au-dessus du Havre, était dans le même cas; elle est venue à Ja côte en plein jour et vivait encore quand on la découverte, Ces Cétacés sont plus connus en Australie, et les naturalistes de Ja Nouvelle-Zélande nous rapportent que lon en a vu échouer sar les îles Chatam vingt-cinq individus ensemble; une autre fois quatre ont échoué à la fois sur les côtes de la Nouvelle-Zélande. Ceci ferait croire que ces animaux vivent plutôt par schools, au moins dans ces parages et à une certaine époque de l’année. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Le plus anciennement connu est celui qui a échoué dans la Méditerranée en 1790, sur les côtes de Sicile, et dont Rafinesque a fait mention ; nous n’en connaissons pas le sexe. Le second cas connu est celui d’un mâle qui a péri en 1800 ou 1804 sur les côtes d’Elginshire, en Irlande. Nous connaissons ensuite une femelle qui est venue à la côte en 1895, au Havre-de-Gràce, et dont Blainville a donné la description. La même année un mâle a péri sur les côtes du Calvados (Salenelles). Il n’est pas impossible qu'il formât un couple avee la femelle du Havre. Dix ans plus tard, le 21 août 1835, nous avons vu périr une femelle à l’ouest du port d'Ostende; Dumortier en a fait la deseription. En 1864, le 31 mai, un second mäle a péri sur les côtes d'Irlande (Brandon Bay, Coast of Kerry); cest celui dont M. William Andrews a reproduit la tête d’après une photogra- phie. Plus au nord nous voyons ensuite périr un autre mâle, le 15 juin 1869, à Nordsjän, sur les côtes du Kattegat ou du Ska- ger-Rak. Cette même année 1869, une femelle périt sur les côtes des États-Unis d'Amérique, la dernière à Rhode Island. (9917: ) Les côtes d'Irlande {Brandon Bay, Coast of Kerry), voient de nouveau périr un mâle en 1870, le 31 mai. Une autre capture est celle d’une femelle qui a péri le 3 février 1880 sur les côtes de Danemark, à Hevringholmstrand (Jutland). Un mâle a péri l’année suivante, en octobre 1881, sur les côtes de Suède, près de Marstrand. Le 23 mai 1884, un mâle a été vu sur les côtes nord-est de Shetland (in Voxter Voe). Un jeune de sept pieds l’accom- pagnait. Les marins l'ont attaqué et il est venu ensuite échouer sur la plage. C’est à peu près la même place où un individu a été capturé en avril 1881. Le professeur Sir Turner a reçu l’animal en chair et a fait connaitre le résultat de ses observa- tions anatomiques à l’Association Britannique à Aberdeen, comme nous l’avons déjà dit dans la partie historique. Le 6 août 1885, un jeune mâle a été pris vivant sur les côtes de Saltô (Bohuslän). Nous trouvons ce Microptère également hors des mers d'Europe. Il visite les côtes de PAmérique septentrionale : d’après un crâne trouvé dans les parages de Nantucket, on estime que l'animal mesurait 26 pieds de longueur. Agassiz a fait part de cette découverte à l’Académie de Boston en 1866. On trouve également ce Microptère au nord du Pacifique : l'Institution Smithsonienne a reçu de l'ile de Behring une tête recueillie dans ces parages par Stejneger, qui avait été chargé de collectionner des objets d'histoire naturelle dans ces con- trées. Le professeur Sir Turner reconnaît treize captures ou échouements de cette espèce, sur le continent d'Europe ou des États-Unis d'Amérique, dont trois sur les côtes d'Écosse et deux sur les côtes d'Irlande. Depuis lors on a vu encore un individu sur la côte d'Écosse et un sur les côtes d'Angleterre ; MM. Southwell et Clarke ont signalé ces apparitions. Le dernier échouement est celui d’un mâle adulte, qui a (398 ) échoué vivant à marée basse À l'embouchure du Humber (Angleterre), le 11 septembre 1885. Le Micropteron Sowerbyi visite également la côte de Nor- wège; nous en avons trouvé une mandibule dans les galeries du Musée de Christiania, que nous avons tout lieu de croire recueillie sur la côte du pays. Elle était sans indication d’ori- gine. Nous trouvons également ce Microptère dans la mer de nos antipodes. Il semble même beaucoup plus commun dans ces parages que dans notre hémisphère. Il se trouve également sur les côtes est de Patagonie et aux iles Falkland. M. Moseley en a rapporté le squelette d’un animal de 14 pieds, et il m'informe qu’il a reçu de Pandy-Point (détroit de Ma- gellan) une dent de Mesoplodon Layardi, en tout semblable à celles qui sont connues. Comme l'Hyperoodon est représenté chez nos antipodes par une espèce distincte évidemment du même genre, le Mierop- téron est représenté de même dans l’autre hémisphère par une espèce qui a les dents extraordinairement développées, le Micropteron Layardi. MUSÉES. Jusqu'à présent on ne connaît qu'un petit nombre d'indi- vidus capturés et dont le squelette ou le crâne sont conservés. A Paris on voit la peau empaillée de l’animal échoué au Havre, en 1895. A Caen on possède le crâne et la colonne vertébrale de celui qui a péri sur les côtes du Calvados, à Pembouchure de l'Orne. À Bruxelles se trouve le squelette de ranimal pris vivant près d’Ostende et préparé par Paret. A Dublin (Royal Dublin Society), le squelette d’un animal qui est venu à la côte en Irlande. Au Musée anatomique d'Oxford, on conserve la tête de (399) / l'animal qui a échoué sur les côtes’ d'Elginshire (Angleterre), et qui a été décrit par Sowerbvy, dans ses British Miscellany. A Edimbourg on voit, au Musée anatomique, un crâne dont l'origine n’est pas connue et le squelette d’un mâle adulte, capturé en 1884 ou 1885 aux iles Shetland. Il figure au Musée anatomique. A Gôteborg se trouvent deux squelettes de mâles du Kattegat (Nordjän). Au Musée de Christiana se trouve la mandibule d’une femelle. A Saint-Pétersbourg, au Musée de l’Académie, il existe une tête mal conservée provenant de quelque ancienne collection, d'origine inconnue. Au Musée du Collège roval des chirurgiens à Londres, on voit un squelette et des crânes de la Nouvelle-Zélande. Un squelette de jeune mäle à été offert par M. von Haast au pro- fesseur Flower pour le Musée de Hunter. Au Musée de Stockholm se trouve le squelette du jeune mâle qui a été pris vivant en 1885 à Saltô. Au Musée de zoologie comparée de Cambridge, on trouve le crâne, décrit par Agassiz, qui a été recueilli sur les côtés de Nantucket. La tête de l’île de Behring est conservée au Musée de Washington. A Christchurch (Nouvelle-Zélande) on conserve le squelette d'une vieille femelle qui a ses trois premières cervicales réunies. Au sujet des ossements de cet animal, A. H. Malm cite les Musées d'Oxford, de Paris, de Caen, de Bruxelles, de Dublin, de Christiania, de Harvard, de Gôteborg, de Dublin, d'Édim- bourg et de Berlin. DESSINS. Il existe plusieurs dessins qui représentent parfaitement cet animal. ( 400 ) Dumortier a figuré une femelle encore en vie, étendue sur la plage d'Ostende. Le dessin avait été fait d’après nature par un artiste qui habitait Ostende. Andrews a reproduit une fort bonne photographie de la tête du mâle. Nous trouvons un autre dessin de l’animal dans les Archives d'Erichson et dans l’histoire naturelle des Cétacés de Fréd. Cuvier. C. Aurivilliers a publié un dessin d’un jeune mâle capturé vivant à Salto. On voit un beau dessin de la tête dans le British Miscellany, tome 1°, et dans la Banksian Collection, au British Museum. Ce dessin est fait d’après la tête qui est conservée à Oxford. Le squelette, le crâne et la mandibule avec les dents figurent dans mon mémoire qui a pour titre : Sur un Dauphin nouveau el un Ziphioide rare !. Duvernoy a publié un beau dessin de la tète du Micropteron Sowerbyi male et femelle. Dans son mémoire sur les caractères ostéologiques des genres nouveaux ?, nous voyons un dessin de la tête avec la mandibule, sous le nom de Mesodiodon micropteron, et un autre de la tête d'Oxford, sous le nom de Mesodiodon Sowerbii. Paul Gervais a fait dessiner la tête qui est déposée dans les galeries du Muséum sous le nom de Dioplodon Sowerbiensis 5; il a fait figurer aussi une partie de la mandibule avec les dents sous le nom de Mesoplodon Sowerbiensis. Gray a publié un dessin de la tête du mâle avec mandibule et dent f. Le professeur Turner a publié le dessin de la queue et l’ana- tomie du membre thoracique de l'individu capturé en 1885. 1 Van BENEDEN, Mém. de l’Académie, coll, in-8°, tom. XVI, pl. 5. 2 Ann. des scienc. nat., 5° sér., t. XV,1851, pl. 2. 3 Zcologie et paléontologie françaises. 4 Erebus and Terror. (401 ) M. Malm fils a reproduit le dessin de la tête et de la mandi- bule du mâle. Dans l'Ostéographie des Cétacés nous avons représenté la tête, les mandibules, les dents, la caisse auditive du mâle de Salle- nelles (Calvados) pl. XXVI, fig. 1-4, le squelette de la femelle du Havre et de celle d’Ostende (pl. XXIL, fig. 1-3.) PARASITES ET COMMENSAUX. . Nous ne connaissons jusqu’à présent qu’un seul parasite, et il est encore bien incomplètement étudié. L'animal qui a échoué sur la plage de Sainte-Adresse en 1825 logeait sous la peau, dans l'épaisseur de la graisse, de nombreux kystes, dans lesquels se trouvaient des Trématodes ou plutôt des Cestodes, que l’on a pris pour des Monostomes, auxquels Blainville a donné le nom de Monostomum Delphini. Nous avons des raisons de croire que ce sont des scolex de quelque PAyllobothrium. 28 LACS VAN DIOPLODON EUROPÆUS. LITTERATURE. P. Gervais, Zoo!. et Palcont. franc., 1re édit., 1850. Eug. Deslongchamps, Obscervat. sur quelques Dauphins. (Buzz. Soc. LINN. DE NORMANDIE, t. X, 1866. Fischer. Nouv. archives du Muséum d’hist. nat., t. HI, p. 68. P. Gervais, Ostcographie des Cétacés. Paris, 1880, p. 405, pl. XXIV. in HISTORIQUE. Le capitaine Vautier, au retour d’un voyage aux colonies, aperçut flottant sur l’eau, à l'entrée de la Manche, le cadavre d’un grand Cétacé ; il fit enlever la tête, lamarra avec soin à une corde et la fit porter ensuite à Caen, où elle est conservée au Musée. Mon collaborateur P. Gervais a fait connaitre ce crâne en le désignant sous le nom de Dioplodon europæus. Les avis des naturalistes sont partagés au sujet de la déter- mination de ce Ziphioïde, jusqu’à présent unique; aux yeux de quelques naturalistes, ce Cétacé représente un vieux mâle de Microptère ordinaire, dont la dent, au lieu de se développer vers le milieu de la longueur de la mandibule, se serait déve- loppée près de l'extrémité antérieure. Tel est l'avis du D' Fischer et d’autres, qui pensent que cette pièce unique ne représente qu'une modification individuelle et qu’elle ne doit, par conséquent, pas figurer dans le relevé des espèces. Nous ne partageons pas cet avis; il n’est pas impos- sible que ce Ziphioïde soit propre à l’autre hémisphère et 11 se peut fort bien que jusqu’à présent il n’y ait eu qu'un seul individu capturé en Europe. N'avons-nous pas vu apparaitre une gamme de Pseudorques en 1861 que l'on n’a plus revue depuis et que l’on aperçut alors pour la première fois en Europe? Peu s’en est fallu qu’il n’y eût également qu’un seul individu de capturé ! SYNONYMIE. Dioplodon europœæus, E. Deslongchamps. Ziphius europœus. Mesoplodon europœus. Dioplodon Gervaisii. ( 406 ) CARACTÈRES. Ce Ziphioïde a la taille de l'espèce précédente et diffère surtout du Microptère par la dent ou la défense qui est placée près de l’extrémité antérieure de la mandibule. On peut dire en faveur de l'identité de l'espèce avec le Microp- teron Sowerbyi, que les dents des Ziphioïides semblent varier plus que celles d’autres Cétacés, et que l’on voit, dans une tête de Berardius, de chaque côté, une dent de moins qu'il ne devrait y en avoir. Dans l’Hyperoodon on voit également tantôt une dent de chaque côté, tantôt deux, quelquefois trois. M. Flower admet six espèces dans le genre Micropteron : le Micropteron bidens ou Sowerbyi ; le M. europœus ; le M. densi- rostris; le M. Layardi, du cap de Bonne-Espérance; le M. Hectori, de la Nouvelle-Zélande; et le M. Grayi ou l'Oulodon Grayi. En parlant de cette tête en 1871 dans son mémoire sur les Liphioïides vivants, M. Flower fait observer simplement que, jusqu’à présent, il n’y a qu’un exemplaire connu de cet animal. DESCRIPTION. Le rostre de la seule tête connue est solide et d’une forme un peu différente du rostre du M. Sowerbyi. Il n’y a qu’une seule paire de dents ct elles sont placées à quelque distance de l'extrémité de la mandibule. Ces dents montrent une partie radiculaire assez longue, dit Gervais, à peu près rectangulaire quoique un peu curviligne en arriére et faiblement oblique en avant, amincie au contraire dans le sens bilatéral. La couronne est triangulaire, très faible- ment convexe en dehors, un peu échancrée en arrière ct arquée en avant; elle est en partie couverte de cément et ce n’est que dans sa portion supérieure que l’ivoire est à nu. ( 407 ) MOEURS ET DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Nous ne connaissons rien ni de leurs mœurs, ni de leur distribution géographique, puisqu'on ne connait que l'animal qui a été recueilli à l’état de cadavre à l'entrée de la Manche. MUSÉES. La pièce unique connue est déposée au Musée de Caen. DESSINS. Gervais a figuré les seules parties que l’on en connaisse : la tête et les dents. PARASITES. On a trouvé un Conchoderma (Otion) Cuvierii, attaché à la dent de gauche; nous l’avons vu encore en place. La présence de ce commensal n'est-ce pas un indice que ce Cétacé est étranger à l’Europe ? k PL : ON DES E TE PRE ER AID ALAN LAURE PANNE ai RER 0 PAUL" Re. HAUT L Liver 1 î t HISTOIRE NATURELLE DELPHINIDEX NTÉRSSD'EUROPE P.-J. VAN BENEDEN MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE (Présenté à la Classe des sciences dans la séance du 3 novembre 1888.) (Extrait du tome XLIII des Me DNA el ne Mén _ publiés par l'Académie royale de Belsique — 1889. Je À 1 à À RE] PAT # + por Mn, L Te A dite ; Ve 74 s CR D LS ] Rue. RL TES FUNAT Ê re à CE ANNOTE "1 L 4 nn AR EQ las HR Je RP LPO US: PER HISTOIRE NATURELLE DELPHINIDES DES NDER SSD /E"EROPE Sous le nom de Delphinides, nous réunissons tous les Cétacés à évent unique et dont les dents alvéolées garnissent les deux mâächoires. Les premières notions anatomiques ont été fournies par Belon et Rondelet. Les travaux de Pierre Camper et de Cuvier marquent une époque dans l’histoire de ces animaux. Pierre Camper a fait connaître le squelette de plusieurs Cétacés avant les publica- tions de Cuvier. Le squelette des Delphinides se distingue par les os du nez, qui sont rudimentaires et refoulés contre le crâne ; les maxil- laires recouvrent les frontaux; les mandibules sont aplaties, symphysées et tronquées en arrière; le lacrymal n’est pas distinct ; la caisse ne tient au crâne que par les parties molles; elle ne tient au rocher que par suture harmonique ; le marteau est libre. Les vertèbres sont nombreuses; on en compte jusqu’à 90 (Lagenorhynques). Les cervicales sont diversement synostosées. (42) Les côtes ont une double facette articulaire ; plusieurs paires s’articulent avec le sternum: les côtes sternales sont ossifiées. Les doigts sont au nombre de cinq; le nombre de phalanges varie dans chaque doigt. On en compte jusqu'à douze dans un seul. Le sternum est formé de plusieurs pièces. Les Delphinides n'ont point de lobe olfactif. Leur estomac est divisé en quatre poches ; la première dépend de l’œsophage. Les Ziphioides en ont jusqu’à huit, sans la poche æsophagienne. La couleur de la peau est variable selon l'espèce; elle est blanche dans le Beluga, toute noire dans le Grindewall, tigrée dans le Narval, égratignée ou marbrée dans le Grampus ; elle est moitié blanche, moitié noire, dans deux espèces de l’autre hémisphère, le Dauphin cruciger et le Dauphin de Péron. Ils ont presque tous des poils aux lèvres, qui tombent en venant au monde et ne persistent que chez quelques-uns comme les Inia de lAmazone. Les sexes diffèrent souvent par la taille et par les dents. La taille de ces Cétacés varie depuis trois et demi (Pontoporia) jusqu’à vingt-cinq pieds. En venant au monde, ils ont le tiers ou la moitié de la lon- gueur de la mère. Ils voyagent par bandes (schools ou gammes) et émigrent comme les oiseaux. Nous connaissons aujourd'hui douze espèces de Delphinides dans les mers d'Europe; elles sont toutes marines. Plusieurs d’entre elles sont cosmopolites ou orbicoles (D. Delphis, Grindewall); d’autres sont étroitement confinées (Beluga et Narval). Les Delphinides sont, avec les Ziphioïdes, les plus anciens des Cétucés et plusieurs espèces de ces deux familles ont apparu en même temps à la fin de l’époque miocène; les Balénides, qui dépassent les autres en taille, sont les derniers. LE MARSOUIN (PHOCÆNA COMMUNIS.) LITTÉRATURE. Major, De analome phocænæ, vel Delphini septentrionalium. EPHEMER. MEDico-PHYSICORUM ANNUS TERTILS, AGG(. Ray, Observations on the analomy of the bloodvessels of the Porpess. Puiz. Transacr., vol. VI, n° 14671. Edw. Tyson, Phocæna or the anatomy of a Porpess, dissected at gresham colledge, 4°, London, 1680. Linné, l’auna svecica, 1764. Frisch, de Phocæna in Pomeraniæ lacu quodam inventa. MiscELLAN. Berolin, t. VI, 1740, p. 124. Gunner, 3.E. Vom Delphin oder Nisen (Phocæna). Der Drontheim. Gesells. Schrift. Th. 2, 1766. Paulsen, Sv. Anotomisk Beskrivelse over Delphinus phocæna. ScrivT. Naruruisr. SELSk. KiôBENu., 1795. Cuvicr, Sur les restes du Marsouin, Bu. pes Scienc. Soc. PuiLOMAT., 1797, p. 44. H. V. Siewald, Dissert, de cranio Delphini phocænæ, Dorpati, 1825, (M4) Eichwald, Observationes nonnullæ circa fabricam delphini phocænæ, aetatis nondum provectae, in : MÉM. Acap. DE S'-PérersBourG,t. IX, 1824. Karl Ernst von Baer, Ueber den Braunfish. Isis, 1826, avec planches. Lesson, Manuel de Mammalogie, Paris, 1827. Kuhn, Description de l’appareil mammaire du Marsouin. MECKEL’S Arcuiv, 14850, Ferussac. Bullet. Sc. Nat., t. XXII, 1850, Siewald, 4, De cranii formaltione in delphino phocæna, Dorpati, 1833. Geoffroy St-Hilaire, Analomie des glandes mammaires d’un Mar- souin. Insrirut, If, 1854. Leplez, Sur quelques points de l'anatomie du Marsouin. (Veine Azygos). Insrirur, IT, 1855, n° 99, p. 46. Mayer, Beiträge zur Anatomie des Delphins. ZEeirscuriFr Für Puvsio- LOGIE, V., pag. 111, 1854 ou 1855. Sharpey, W. Observal. on the analomy of the Bloodvessels of the Porpoise. Report Brit. Assoc. ADv. Sc. 4 meeting, 1854 (1855), p. 682. F.Cuvier, ist. nat. d. Cétacés, 1856. v. Baer, Ueber das Gefässystem des Braunfisches. Nov. Act. Acan. Leop. Caroz. Nar, Cur. t. XVII, 1856. v. Baer, Delphini Phocæœnæ anal. sect. prim. BULLET. SCIENTIFIQ. ACADÉMIE S't-PÉrersBour6, t. 1, 1856. Breschot, Âistoire d’un organe de nature vasculaire découvert dans les Cétacés. Paris, 1836. Breschet, Apercu descriptif de l'organe auditif du Mursouin. Mé- MOIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE, t. V. 1856. ANN. Des Sc. NAT. 2e sér. t. X, 1858. (43) Kutorga. Zur Naturgeschichte der Phocænæ communis, Buurer. Soc. ame. Narur. Moscou, 1839, p. 178. Stannius, Ueber den Verlauf der Arterien bei Delphin. phocæna, Muzzer's Arcuiv., AS41. Bazin, Sur l’anal. comp. du Syst. nerveux du Delphinus phocæna. Coupr. REND. Acap. Sc. Paris, t. XIV, 1849, Stannius, Ueber die Augennerven des Delphinus (Delph. phocæna). Müzzer’s Arcuiv, 1842, 3. E. Gray, Zoology of the Voy. of Ercbus and Terror, 1846. Stannius, Beschreib. d. Muskeln des Tümimiler’s Delphinus phocæna, Murrer’s Arcaiv. 1849. S. Nilsson, Skand Fauna, Däggdyuren, 1847. Sibson, fr. On the Blow-hole of the Porpoise. PuiLos. Transacr, 1848. Vrolik. Over het bekken van den Bruinvisch (Delphin. phocæna). Typs. voor Wis. EN Naruurk. WETENscu. 1851. Couch Ion, Observ. on the skcleton of a Porpoise, in 20 AN. REPORT R. Cornwazz. Pozyrecn. Soc. 1859. Burmeister, Descript of a New Spec. of Porpoise. 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Aussi, de tous les Cétacés, c’est le Marsouin qui a été le plus souvent examiné sous le rapport anatomique. Aristote signale déjà les mamelles du Marsouin 1. En 1601, Major reconnut parfaitement les mamelles d’un Marsouin capturé dans le port de Kiel, depuis cette époque, comme on le pense bien, ces mêmes glandes ont été l’objet de plu- sieurs études, notamment de la part de V. Baer, de Geoffroy- Saint-Hilaire, de Kuhn, de Rapp et de J. Muller. Un siècle plus tard, Gunner consigna quelques bonnes observations, faites sur un animal capturé sur les côtes de Norwège, dans le Recueil de la Société de Drontheim. Vers la fin du siècle dernier, Edward Tyson publia une Anatomie que l’on peut encore consulter avec fruit; il à fait connaître les plexus vasculaires qui ont été étudiés depuis par Sharpey, par Stannius, par Mackay, par Breschet et bien d’au- tres. Les artères de la tête et du cou avec leurs Rete mirabile font l’admiration de tous les anatomistes. La rate et l'appareil sexuel ont été étudiés par Cuvier. Le grand anatomiste, qui a ouvert la voie à lostéologie comparée, Pierre Camper, appréciait déjà au siècle dernier importance du fœtus dans les études anatomiques ; il reconnut aux lèvres supérieures du Marsouin deux poils fort distincts. Il a figuré le squelette de plusieurs Cétacés. Vers l’époque où les travaux de Pierre Camper furent publiés 1 Il n'est cependant pas certain que le philosophe naturaliste grec désigne sous ce nom l'espéce qui nous occupe ici. (A8) avec des notes de Cuvier, Siewald écrivit une Dissertation sur la formation des os de la tête du Marsouin (1893). Le squelette a ensuite été étudié par Pander et Dalton, puis par Couch. Le bassin du Marsouin a particulièrement attiré l'attention de Vrolik. Les muscles ont été surtout étudiés par Stannius. Eschricht a fait des observations fort intéressantes sur les nombreux fœtus qu’il a reçus des pêcheurs et sur les particu- larités de leur cerveau 1. Plusieurs naturalistes se sont occupés également de l'étude des nerfs du Marsouin. Bourjot-Saint-Hilaire, en 1834, décrit les nerfs crâniens et annonce que le nerf facial se rend aux muscles des évents 2. En 1836, apparaît à Tubingue une Dissertation inaugurale par Victor Bruns 3, aussi sur les nerfs cräniens. L'oreille a été étudiée également par plusieurs anatomistes : le premier, c’est Alex. Monro : il fait connaitre les canaux semi-circulaires, l’oreille moyenne et la trompe d'Eustache dans le Marsouin (1787. En 1896, V. Baer publie le résultat de ses observations sur le même appareil des sens du Marsouin, dans lIsis d'Oken; depuis, Breschet et Rapp # se sont occupés du même appareil. Breschet parle successivement du conduit auditif externe, de la conformation générale de los tympanique, de l'oreille moyenne, du tympan et des osselets, etenfin de l'oreille interne et du nerfauditif. Il représente la caisse tympanique en place et isolée, ainsi que les trois osselets. Breschet n’a pas connu la trompe d'Eustache. - 1! Vidensk. Selsk. Skr. 5 Kœkk. 1869. ? Archives yénérales de médecine, 1854. 5 Bruxs, De nervis celaceorum cerebralibus, Tubingue 1856. 4 BrescueT, Aperçu descriptif de l'organe auditif du Marsouin. Axx. sc. NAT. 2e série, t. X, p. 221, 1838. (419) Un autre appareil des sens a ensuite attiré l’attention de plu- sieurs anatomistes : nous voulons parler du sens de l’odorat; Blainville et Jacobson ! d'abord, puis Treviranus 2, V. Baer 3 et Mayer # s’en sont occupés successivement. Les nerfs des yeux ont été étudiés par Stannius 5. Albers a publié la description et le dessin du larynx. Eug. Dubois a étudié depuis le même organe dans le fœtus et dans l'adulte. Eichwald a décrit la structure d’un jeune Marsouin 6. Le D' Knox a publié sur l’anatomie du Marsouin des obser- vations très intéressantes dans son catalogue des préparations sur les Cétacés T. Pendant quelques années un jeune naturaliste, Lafond, s’est occupé de létude des Cétacés de la baie d'Arcachon; il a cité le Marsouin parmi ceux qui fréquentent cette baie. Ayant eu un grand nombre d'individus de différentes espèces sous la main, il a fait la remarque que, dans la même espèce, on trouve souvent des différences individuelles dans la coloration de la peau. Malheureusement il n’a pu achever son travail. Le professeur Leboucq s’est occupé de la nageoire pectorale et a montré combien les phalanges du même doigt diffèrent d’un individu à l’autre. Le troisième seul parait en avoir régu- lièrement trois 8. En s’occupant des Cétacés de la Manche et de la Bretagne, le docteur Fischer a étudié également l'espèce qui nous occupe. La pêche du Marsouin a eu lieu, dans la Manche, à l’aide de madragues par des pêcheurs réunis (Societates walmannorum), ? Bulletins des sciences de la sociéte Philomatique, décembre 1815, p. 195. ? Bio'ogie oder Philosophie der lebenden Nalur., Gôttingen, 1862. 5 Isis, 1826. + Frorier’'s, Votizen, 18290. 5 STANNiuS, Ueber die Augennerven des Delphins(Delph.phocænæ) MuLLer's ARCHIV,, 1842. 6 Eicawau», Observaliones nonnullæ. Méx. ne St-PérterseourG,t.IX, 1824. 7 K\ox, Catalogue of preparations relative to Whales, 1858. $ Analomischer Anseiger, 1887, p. 205. sur toute la côte de Normandie, depuis Tréport jusqu'à l’em- bouchure du Coesnon 1. Au XVIe siècle, on expédiait à Paris un nombre consi- dérable de ces animaux, et Belon a vu jusqu’à quatre fœtus le même jour aux halles. Il est probable que l’on désignait divers Delphinides sous le même nom, comme cela se fait encore sur plusieurs côtes. Des pêcheries existent depuis le XVIL siècle à l'entrée et à la sortie de la Baltique. SYNONYMIE Phocæna communis. Meerschwein, des Allemands. Marsouin, des Français. Porpoise, des Angjiais. Tuymelaer, Bruynvisch, des Flamands. Holbôll a parlé d’une espèce plus petite, à vertèbres et apophyses plus délicates et plus fines, mais qui n’est sans doute qu’une simple variété locale, On en conserve un squelette au Musée de Copenhague. Eschricht a proposé le nom de Phocæna Holbülli pour cet animal; nous en avons fait men- tion dans notre Zoologie médicale. Le Marsouin de la mer Noire est bien le même; Rathke en a rapporté un squelette, et Valdemar Czeniasky en a envoyé à Moscou plusieurs têtes qui ont pu être comparées avec celles du Marsouin de nos côtes. Le Phocæna Americana de Cope est sans doute aussi le Marsouin ordinaire. Le Phocæna spinipinnis de Burmeister est, d’après son aveu, sous plusieurs rapports, complètement semblable au Marsouin du nord de l'Atlantique ; Burmeister en fait mention en 1865 ? ? No, Histoire gén. des péches, 1815. : Proc. Zool. Soc. Februari, 1865. et il l’a figuré, dans les Annales du Musée de Buenos Ayres, Fauna argentina, planches XXIIT et XXIV. Camper avait déjà observé des crénelures au bord de la nageoire dorsale dans le Marsouin ordinaire. Le Phocæna vomerina du Pacifique a été comparé au nôtre: les dents sont étroites, aplaties et plus larges au sommet (thin, flat, and broadest near their summits). Les dents sont 26/9, dans une femelle de la côte de Californie, dans une autre 21/94. Des sept espèces citées par M. True, il n’y en a peut-être qu'une seule qui mérite d’être conservée. Le Phocæna pectoralis de Peale est un Lagenorhynque. Le Neomeris (Gray) phocænoïdes des eaux du Japon peut être considéré comme une espèce similaire de notre Marsouin, malgré l'absence de la nageoire dorsale. Malm a eu l’occasion de comparer quinze Marsouins de sexe et d'âge différents, ce qui lui a permis de faire quelques remarques intéressantes sur les limites de variation de cette espèce. CARACTÈRES. La longueur de l'animal est de 5 pieds; il mesure parfois au delà de 2 pieds en venant au monde !. C’est le plus petit de tous nos Cétacés. D’après Holbôll, il est moins grand sur les côtes du Groënland, et, à en juger par des crânes, il est plus grand sur les côtes de Van Couver. Les dents varient peu entre elles; la formule dentaire est de vingt-trois ou de vingt-quatre à la mâchoire supérieure, de vingt à vingt-trois à la mâchoire inférieure. Nous en avons trouvé jusqu’à vingt-six dans deux squelettes d'Ostende, dix-neuf dans deux squelettes de l’Elbe. Elles ont la couronne comprimée et sont régulièrement 1 Escuricur accorde jusqu'à 5 /, pieds à la femelle du Marsouin, au jeune Jusq . > AU ] en naissant 1 1}, à 2 pieds. (42) espacées chez l'adulte. On distingue quatre incisives, non d’après leur forme, qui est la même dans toutes, mais d’après leur insertion. Comme Pierre Camper l’a reconnu, le fœtus porte deux poils pour moustaches; Belon, en parlant de l’'Oudre, dit que le fœtus porte quatre poils et que le Marsouin en a deux. Ces cryptes pileuses sont figurées aussi par Klein f. Un caractère, dont on a exagéré l'importance, est tiré des aspérités de la nageoire dorsale ; Pline en avait déjà fait men- tion et Pierre Camper en parle également. Comme les Cétacés en général, les fœtus et les jeunes présen- tent souvent des couleurs et des dessins qui s’effacent plus tard. Chaque espèce a ses couleurs propres ; nous avons déjà signalé cette particularité dans les jeunes Globiceps. Eschricht à fait la même observation sur le Marsouin. — Il m'écrivait en novembre 1860: Ce qui m'a amusé beaucoup, C'est de voir ces pelits cochons de mer (Marsouins) en miniature, décorés d'une manière bizarre de lignes fantastiques en forme de lunettes attachées sur le nez. J'espère en donner un dessin. Cest ce qu'il n’a pas fait malheu- reusement. Lafond a fait des observations sur un grand nombre d’indi- vidus, de Marsouins et de Dauphins, de la baie d'Arcachon, et particulièrement sur quinze Marsouins. DESCRIPTION. Parmi les auteurs qui se sont occupés de l’organisation du Marsouin, le plus commun des Cétacés d'Europe, nous pouvons citer : Ray, Mayor, Albers, Tiedemann, Meckel, Breschet, Rapp, Monro, Pallas, E. Home, Buchanan, v. Baer, Carus et Otto, Pander et d’Alton, Blainville et Jacobson, Treviranus, Eichwald et bien d’autres encore. La colonne vertébrale se compose généralement de sept 4 Hist. piscium, pl. I, B (1740). vertèbres cervicales, douze ou treize dorsales, quinze lombaires et trente caudales. Les six premières cervicales se réunissent en une seule pièce, mais elles restent toutes plus ou moins distinctes ; les quatre dernières sont encore séparées par le corps et par les neurapo- physes, tandis que les trois premières sont complètement réunies à l’âge adulte. La cinquième et la sixième cervicale ont chacune une apo- physe épineuse latérale dirigée de dedans en dehors et d’arrière en avant; l’axis a souvent une apophyse assez forte dirigée, au contraire, de dehors en dedans, d'avant en arrière. La septième vertèbre est isolée; quelquefois son apophyse épineuse dépasse les autres; d’autres fois c’est celle de la première dorsale qui dépasse; d’autres fois encore c’est celle de la seconde dorsale. Nous avons eu l’occasion d'étudier le squelette d’un jeune Marsouin qui venait de naître : les deux premières vertèbres cervicales sont complètement réunies par le milieu du corps et par la périphérie; les trois suivantes ne sont réunies que par le milieu seulement; les deux dernières, septième et huitième, sont libres et sans épiphyses ossifiées. A l'exception des arcs de l’atlas et de l’axis, les arcs des autres cervicales sont encore séparés. Plus tard la sixième cervicale se soude à la cinquième; la septième reste séparée. L’apophyse épineuse des dorsales va en s’élargissant de vertèbre à vertèbre: les apophyses transverses s’allongent depuis la première jusqu’à la dernière. Le corps de ces vertè- bres s’allonge insensiblement depuis la première jusqu’à la dernière et insensiblement aussi la face inférieure de chacune d'elles devient de plus en plus carénée. La quatrième lombaire a une apophyse transverse placée toute droite en dehors. La neuvième de la même région a son apophyse épineuse toute droite. Nous comptons dix-huit vertèbres avec des os en V, mais (424) nous en avons vu jusqu'à vingt avec des chevrons. C’est le qua- trième qui est le plus long, le deuxième et le septième qui sont les plus larges. Les quatorze dernières vertèbres n’ont plus d’apophyse épi- neuse. Ces vertèbres s'amincissent régulièrement depuis la première, dans leur diamètre transversal, jusqu’à la dix-hui- tième ; les suivantes s’élargissent un peu, mais diminuent dans leur diamètre vertical, de manière que les quatre ou cinq avant- dernières sont deux fois aussi larges que hautes. C’est vers le milieu de la région caudale que les corps des vertèbres ont le diamètre vertical le plus grand. Les apophyses transverses diminuent régulièrement et on n'en voit plus de traces après la douzième caudale. Le sternum est formé d’une pièce unique à l’état adulte. A l'âge fœtal il y a quatre pièces distinctes qui se réunissent deux par deux, de manière que, dans le cours de lévolution du sternum, il n’y a que deux pièces : une antérieure et une posté- rieure, puis une coalescence complète. Mais les deux pièces antérieures restent séparées plus longtemps que les autres, de sorte qu'il existe trois pièces à un moment donné. Cinq paires de côtes aboutissent directement au sternum par une portion sternale osseuse. La première côte est parfois bifide comme dans plusieurs autres Cétacés ; nous en avons cité un exemple curieux !. Nous disons que cette première côte est supplémentaire et non pas que la région cervicale est composée seulement de six vertèbres ; il y a quatorze côtes au lieu de treize; tout rentre bien mieux dans la règle en prenant la première côte comme nous le faisons. L’omoplate est assez développée d'avant en arrière. Les deux apophyses ont une longueur égale. L’humérus est relativement petit et plus court que les os de ’avant-bras. Il est moins large que le radius. 1 Van BENELEN, La première côle des Cétlarés, etc. B{LLETINS ACAP, ROY. Bezc. 1868, tonie XXVI, 2e série, p. 7. — pl. 1, p. 16. Il existe cinq carpiens, déjà très distincts, quoique ceartilagi- neux, dans un fœtus d’un pied de longueur que nous avons sous les yeux. Dans ce fœtus les phalanges sont indiquées déjà, mais, à l'exception de l'index et du médium, aucune d'elle n’est encore ossifiée. Le pouce est formé généralement de deux phalanges, l'index, qui est le plus long, de sept ou huit, le médian de six ou sept, l’an- nulaire de trois, le petit doigt d’un ou deux. Nous avons représenté les os de la nageoiré pectorale adulte dans l’atlas de l'Ostéographie des Cétacés, planche LH. On a affirmé dans ces derniers temps, que le nombre de phalanges est plus petit dans certaines espèces à l'état adulte qu’à Main de fœtus. l'âge embryonnaire. MOEURS. Les mœurs du Marsouin diffèrent peu de celles des Delphi- nides en général : 1l se nourrit de poissons et on sait qu'il poursuit dans la mer du Nord les bancs de harengs. À Fischer a eu l’occasion de faire la visite de l’estomac de plu- sieurs individus et il n’y a trouvé que des débris de poissons. Ho]Jbôll y a trouvé, sur les côtes de Groënland, autant de restes de Crustacés et de Céphalopodes que de poissons véritabies. Eschricht a fait la visite d’un estomac de Marsouin, pris dans le Sund, qui ne renfermait que des restes de plantes marines. Les Marsouins pris à l'entrée ou à la sortie de la Baltique ne renferment, généralement, que des débris de harengs. Le Marsouin paraît vivre par bandes ou schools qui semblent émigrer périodiquement dans certains parages. A l'approche de Fhiver, 1l se rend à la Baltique et c'est aussi au milieu de hiver qu’on le pêche au fond de la mer noire. Les pêcheurs de Ja baie d'Arcachon disent que les Marsouins, 30 { 426 ) qu'ils appellent Pourquets, arrivent par bandes vers le mois d'avril et de mai, mais les migrations ne sont pas absolument constantes, dit Fischer. En dehors des Cétacés fluviatiles, qui vivent dans les fleuves des régions tropicales de ancien comme du nouveau monde, nous ne connaissons que le Marsouin qui visite parfois l’eau douce. G. Michaud affirme qu'il remonte la Charente en hiver, par troupes, jusqu'à la distance de huit lieues de l'embouchure t. En Hollande on en a vu pénétrer jusque dans les fossés de la ville de Leyde, et Van Bemmelen cite l'exemple d’un individu capturé dans le lac de Haarlem. On en a vu remonter l'Escaut, puis la Dyle jusqu'à Malines. En 1863 un Marsouin, capturé vivant à Folkstone, a été envoyé à l'aquarium de Regent’s Park à Londres, où il est mort peu de temps après son arrivée. Il paraît que le Marsouin n’a pas la vie aussi tenace que le Beluga. Quoique le Marsouin soit commun sur toutes les côtes en Europe et même sur celles de l'Amérique septentrionale, on ne connait pas plus l’époque de leurs amours que la durée de Ia gestation et les lieux &e leur mise-bas. On s’est même demandé si ce Cétacé ne s’accouple pas pendant toute l’année et s'il y a bien, comme pour les Baleines, une époque fixe des amours, et des lieux de prédilection pour la parturition. Aristote s’est déjà occupé de ces questions ; le philosophe de Stagyre n'ignorait pas que cet animal à des mamelles comme les Dauphins et qu'il allaite ses petits ; il savait pertinemment que le Marsouin vient vivant au monde et il fixait même la durée de la gestation à dix mois lunaires. Il ajoute ensuite que les jeunes viennent au monde vers l’équinoxe d'été. Il y a lieu de se demander cependant, comme nous l’avons fait remarquer déjà, si ces observations se rapportent bien au Marsouin, puisque cette espèce est loin d’être commune dans la Méditerranée. Pour connaître s’il y a quelque régularité dans leur dévelop- 1 Act. Soc, Linn., juin 1842 LT) pement et si la mise-bas a lieu à la même époque de Pannée, nous avons fait le relevé de la date de la capture de quelques mères et la taille des fœtus qu’elles renfermaient. Eschricht a assisté souvent à la pêche du Marsouin qui se fait régulièrement à l'entrée et à la sortie de la Baltique, et il m'écrivait à ce sujet en 1857 : Le Marsouin reste pendant trois mois dans la Baltique, du mois de novembre au mois de janvier, et pendant ces trois mois le fœtus croît de la longueur de quel- ques pouces à un pied. (Lettre du 30 janvier 1857.) Le 28 novembre 1860, il m’'informait que ce même jouril avait reçu un fœtus de 8 pouces, c’est-à-dire, de 22 centimètres. Mon savant ami a eu une douzaine de fœtus entre les mains, mais 1l n’a fait connaître ni leurs dimensions, ni la date de la capture de la mère. Les fœtus sont toujours vers le milieu de leur croissance dit-il ; on n’en trouve, ni de très Jeunes, ni d’approchant du terme. Il m'a fait cadeau d’un squelette de fœtus de 28 centimètres de long et dont la mère avait sans doute été capturée à son retour de la Baltique. Klein a figuré un fœtus de 20 !}, pouces (55 centim.); Rapp en a disséqué un de 2 pieds 4 pouces (71 centim.), mais ces auteurs ne nous disent malheureusement pas le mois de la capture de la mère. Ce dernier fœtus était évidemment à terme. Fleming dit dans ses British animals, qu’il a obtenu un fœtus mâle de Marsouin, qui avait 7 pouces de longueur et qu'il croyait à terme. Il était encore loin de là. Nous avons reçu de nos côtes une femelle pleine dont le fœtus, à peu près à terme, mesurait 65 centimètres. Nous n'avons malheureusement pas tenu note de la date de la cap- ture de la mère, mais il est probable qu'elle a eu lieu en été. Nous avons heureusement quelques dates certaines de diffé- rentes captures : Le 12 janvier 1879, une femelle pleine a échoué sur le rivage de la Hougue (Manche), qui portait un fœtus de 32 centimètres de longueur !. ? Jounpaix, Sur lu parturit'on du Marsouin commun. Cort REND, jazv. 1880, p. 158. {428 ) Le 15 mars 1855, une femelle échoua non loin de Noord- wyk, portant un fœtus presque à terme, dit M. Van Bemmelen; mais 1] n'en donne pas la longueur. Vers la fin d'avril (le 23), Malm a reçu, à Gotéborg (Suède), une femelle avec un fœtus également presque à terme ; la mère mesurait 1,672 millimètres, le fœtus 658 millimètres. Ainsi que nous l'avons fait remarquer, d’après les observa- tions d'Eschricht, au mois de novembre, une femelle, à son entrée dans la Baltique, peut nourrir un fœtus de 8 pouces (29 centimètres) et atteindra jusqu’à un pied (33 centimètres) avant la fin de janvier. Une femelle, capturée dans la Manche, porte un fœtus à peu près de la même taille (32 centimètres). Au mois de mars, une femelle, sur les côtes de Hollande, est à peu près à terme; une autre, sur les côtes de Suède, dans le même état; le fœtus mesure la moitié de sa longueur. Au mois d'octobre, un fœtus, recueilli à Concarneau, a 41 centimètres de longueur. Le D' Knox !, qui a fait beaucoup d'observations importantes sur des animaux de cet ordre, a reçu un fœtus, enveloppé encore de ses membranes, qui était pris dans la baie de Forth; il avait deux pieds six pouces (82 centimètres); la mère avait cinq pieds six pouces (1 mètre 65 centimètres). Il faut conclure de ce qui précède que laccouplement n’a pas toujours lieu à la même époque de l'année; que chez plusieurs il s’accomplit à la fin de l'été; que la parturition a lieu l’été suivant, et qu'en venant au monde, le jeune Marsouin a parfois la moitié de la longueur de la mère, comme Pierre Camper l’avait déjà fait remarquer. PECHE. Le Marsouin est un des rares Cétacés dont on fait encore la pèche, et, comme nous venons de le dire, deux pêcheries sont établies dans le grand et dans le petit Belt, c’est-à-dire, à l'entrée 1 Dr K\ox, On the dentition of the DuJong, pag 406. (429) et à la sortie de la Baltique ! ; ce Cétacé entre, chaque année, vers la même époque, à la poursuite des harengs, par le Sund, et sort par le petit Belt. Depuis la fin de mars jusqu’au commencement de mai, avec la pêcherie des harengs du printemps, des bandes de deux cents individus apparaissent à la fois à Isefiord, dit Eschricht. À Middelfahrt, dans l'ile de Feyen, il existe, depuis 1693, une corporation de pêcheurs qui se livrent, pendant l'hiver, à cette intéressante industrie, dit Irminger 2. Eschricht m'échvait à ce sujet : . CI y a plusieurs pêcheries à l’Jsefiord, dont la principale » st à Jagersprys, de cinq à six lieues de Copenhague. On y » prend de trois cents à quatre cents pièces par an, dans des » filets à compartiments. » Un second lieu de pêche est au petit Belt, sur l’île Fühnen; » dans le courant de novembre, les Märsouins commencent à » se rassembler dans la Baltique, passant le petit Belt, et on » les prend à leur retour. C'est comme la passe des oiseaux en » automne et au printemps. » Au 2 février, les pêcheurs s'associent; avant cette époque, chacun travaille pour son propre compte. De 1827 à 1828, on a capturé environ onze cents pièces ; de 1834 à 1835, le nombre s’est élevé à mille six cent quatre- vingt-quatre ; l'hiver suivant, il était de mille deux cent quinze; et de 1836 à 1837, de mille quatre cent seize. I y avait anciennement des pêcheries de Marsouins sur la côte de Norvège 5, qui n'existent plus, paraît-il. Ce n'est pas seulement à son passage de Ja Baltique qu’on capture le Marsouin ; Malmgren nous dit qu’on en prend en Ÿ Lyxégye, Von dem Fange der Meerschiwreine auf den Ferroeinse!n, Froriep’'s, not. Band 12, n° 43" * Inmixcer, Notice sur les péches du Danemark. $ Porpoise-Hunting in Norway in o!den Times. Zoologist, vol. 2, n° 21, septembre, p. 558. Poiuex, De Bruincisch (D, phocæna), ALG. VisscHEeRY- CobranT, 1871, n° 27-51. hiver également, au filet, sur les côtes de Finmark, etil assure qu'on voit des Marsouins pendant toute l’année dans ces parages. Il y a également des pêcheries de Marsouins hors d'Europe: Dans le fleuve Saint-Laurent, près de Petite-Rivière, il en existe une où l’on pêche depuis la fin de septembre jusqu’au commencement de novembre. On en connait également sur les côtes des États-Unis d’Amé- rique, une entre autres, à Long Island, et une au cap May, New- Jersey. Il existe également une pêcherie de Marsouins à Soukhom, au pied du Caucase, dans la mer Noire, et qui est même fort importante; on en prend régulièrement depuis le mois de décembre jusqu’en mars, et dans une seule saison on y pêche jusqu'à deux mille individus. M. Voldemar Czeniavsky, qui s’est occupé beaucoup de la faune de la mer Noire, a envoyé en 1879 à M. A. Bogdanoff jusqu'à deux cents têtes pour l'Exposition de Moscou. (Lettre datée de 14/26 janvier 1881.) En 1879, on captura dans la seule rade de Soukhom trois mille huit cents Dauphins, dit Élisée Reclus. Ainsi, dans la Baltique, comme dans la mer Noire, la pêche a lieu au milieu de l'hiver ; au Canada elle cesse en novembre. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Cette espèce est fort répandue et on la rencontre, comme nous venons de le voir, dans les différentes mers d'Europe, depuis les côtes de Finmark jusqu’au détroit de Gibraltar; elle se montre, quoi qu’on en ait dit, dans la Méditerranée comme dans la mer Noire, et, comme nous venons de le dire, pénètre, même périodiquement, dans la Baltique. On la trouve égale- ment sur les côtes du Groënland et des Etats-Unis d'Amérique. Belon fait mention de sa présence dans la Méditerra- née ; 1] fait remarquer qu'il entre tous les ans de la Méditer- (451) ranée, par la mer de Marmara, dans la mer Noire, et qu'il retourne ensuite à la Méditerranée f. Le Marsouin pénètre aussi dans l’Adriatique ; nous en avons vu un squeletteau Musée impérial de Vienne, qui portait l'indi- cation de son origine et le nom de Phocæna grisea. ._ Ilest assez remarquable que certains naturalistes aient pu douter de la présence du Marsouin dans la Méditerranée; Paul Gervais disait qu'il n'avait jamais entendu parler de Marsouins capturés sur les côtes de Provence ou de Languedoc, et Risso ne le cite pas non plus dans son Histoire naturelle de l'Europe méridionale. Sa présence dans la mère Noire n’est cependant pas plus douteuse que dans la Méditerranée, Rathke? ly à reconnu lors de son voyage en Crimée, et nous croyons qu'il en a rapporté un squelette pour le Musée de Kônigsberg. Elisée Reclus parle aussi, à propos de la Faune d° Egypte, de Marsouins qui poursuivent les poissons dans le Nil; mais iles probable que c’est le Tursiops qui est désigné sous ce nom *. On peut dire que le Marsouin a été capturé dans toute l'étendue de l'Atlantique septentrionale. Heuglin ne l’a point vu dans la partie est de la mer de Barentz, mais, nous venons de le dire, le Marsouin est commun sur les côtes ouest de Finmark. M.H. Drouet, dans ses Éléments de la Faune Acoréenne, le cite parmi les espèces communes autour de ces îles. 1! voyage par troupes, dit-il, qui viennent presque toujours visiter les bâtiments et récréer pendant quelques moments l'équipage et les passagers. Il en cite le nom vulgaire et le nom portugais. Les baleiniers qui exercent la pêche dans ces parages, citent, parmi les Delphinides ordinaires de ces côtes, le Marsouin et le ? Reco, Estranges poissons Cap. 59, p. 25, G. ? RarTakE, Den lebenden Balænop'eren verwanutes Thier, MÉm. D. sav. ÉTRANG. DE L'ACALEM. Iup. bE St-PÉrenseourG., t. Il. Escaricar, Nord. Wall- thiere, p. 14 en note. 5 Nouvelle Gévgraphie universelle, … vol. 10. p. 501. Grindewall. Il n’est pas probable qu'ils s’y trouvent pendant toute l’année. On a déjà pris des Marsouins sur les côtes de Livonie et aux Hébrides, au milieu de gammes de Grindewall (globiceps). Le Marsouin est particulièrement connu de l’autre côté de l'Atlantique ; à New-Jersey, on le voit régulièrement ; on lui a donné le nom de Phocæna americana 1. Allen le cite parmi les espèces propres des côtes de Massa- chusetts ?, On le voit aussi sur les côtes du Groënland; les Musées de Copenhague et de Paris en possèdent des têtes qui ont été rap- portées directement de ces régions. Nous savons par Holbôll, que le Marsouin arrive au prin- temps dans le détroit de Davis et qu'il y reste jusqu’en no- vembre, même Jusqu'en décembre, si le froid n’est pas trop rigoureux. Il ne dépasse pas la latitude de 67 à 69 degrés. C'est la limite septentrionale indiquée dans un tableau fait par Esch- richt. On en a vu toutefois, mais rarement, au 70° degré. Le Marsouin commun a été reconnu a Queen Charlotte's Island, par Robert Brown 3. Ces Cétacés habitent également les côtes du Brésil, mais ils y présentent une nageoire dorsale dont le bord est plus ou moins crénelé.' On voit assez souvent les Marsouins d'Europe présenter ces mêmes crénelures au bord antérieur de cette nageoire, aux- quelles on n'avait guère fait attention. Au Brésil, cette disposi- tion est beaucoup plus marquée et on a proposé d’en faire une espèce distincte sous le nom de Phocæna spinipennis #. On voit également des Marsouins au nord du Pacifique; le Bristish Museum en a reçu des restes de l’île Van Couver, qui 1! Core, Proc. act. nat sc. Philadelphia, 1866, p, 294. ALLEN, Mammals of Massachusels, p. 205, 1869. 5 Ann. nal. hist, janvier 1871, p. G4. # BURMEISTER, Ann. Mus. Bue:0s-Ayres, fase. VI, p.380, pl XXII, (433) indiquent, comme nous l'avons dit plus haut, une taille nota- blement plus forte que celle des Marsouins d'Europe. Aux îles Aléoutiennes et sur les côtes d’Alaska 1, il existe également un Marsouin très connu des habitants des côtes ; on le désigne sous un nom distinct; mais est-ce notre espèce ? On signale encore des Marsouins sur les côtes de Californie, du cap de Bonne-Espérance, de la mer des Indes, et de Pata- gonie. En résumé, le Marsouin est le seul Cétacé propre à nos côtes ; 1l s'étend au nord de l'Atlantique jusqu’à la mer de Baïlin et de Barentz; il habite les côtes d'Amérique comme celles d'Europe, et pénètre dans la mer Blanche, la Baltique et la mer Noire. MUSÉES. Il y a bien peu de musées qui ne possèdent, ou un squelette, ou une tête, ou quelques os séparés de cette espèce. Nous pouvons citer en particulier les musées des villes suivantes par ordre alphabétique : Amsterdam, Bergen, Bonn {six têtes), Buenos-Avyres, Cambridge (musée de l'Université), Copenhague, Dorpat, Gand, Giessen, Gôttingue, Gôteborg, Greifswald, Hambourg, Groeningue, Kônigsberg, Leide, Liège, Louvain, Londres (Mus. Brit. et Mus. roy. du coll. des chirurg.), Lund, Moscou, Munich, Orebron, Oxford, Paris, Stockholm, Upsal, Vienne (Autriche), Washington. Le British Museum possède un squelette de Cornouailles, de plus un jeune squelette, le type du Phocæna tuberculifera, plusieurs têtes dont une des côtes d'Amérique, une des côtes des Pays-Bas, une de lile Van Couver. On y conserve aussi un moule coloré à côté d’un moule de la tête d’une femelle de New-Jersey (Phocæna lineata, Cope). ! Les maxillaires supérieurs s'élèvent en crête comme ceux des Hyperdo- dons; sur les côtes du Japon une espèce de Marsouin n'a pas de nageoire dor- sale (Neomeris). (434) Nous l'avons dit plus haut, le Musée de Vienne (Autriche) possède le squelette d’un animal capturé dans Adriatique. A Kônigsberg, on possède la tête rapportée de la mer Noire par Rathke. A Moscou, on conserve plusieurs têtes provenant de la pêche de Souckom dans la mer Noire. Dans la collection Smithsonienne, à Washington, on con- serve des Marsouins des côtes de Californie, que l’on a appelés Phocæna vomerina. Les collections du Musée de Paris renferment, indépendam- ment de plusieurs squelettes de tout âge des côtes d'Europe, une tête de Phocæna dalli, des côtes de Californie (1879). Le Musée national des États-Unis d'Amérique possède une tête de Phocæna dalli, des côtes d’Alaska; ce Phocæna dalli, que M. Fréd. True à érigé en genre sous le nom de Xupho- cæna, aurait ainsi une aire géographique, très étendue au nord du Pacifique, semblable à celle du Phocæna communis, au nord de Atlantique; le même Musée renferme une autre tête de mâle capturé dans une gamme de cinq ou six individus, à leur passage à l’ouest de l’île Adakh, une des Aléoutiennes (13 août 1873) 1. M. Howes s’est occupé de cette dernière espèce, qui est évi- demment une forme particulière de Marsouin ?. On connait quelques ossements fossiles rapportés au Mar- souin: une région cervicale, au Musée de Dantzig, trouvée à 30 pieds de profondeur (dans un puits creusé pour l’ambre, près de Gluckau) dans le diluvium; M. Menge en fait mention dans sa notice sur le squelette de Balænoptera borealis. Huxley a décrit et figuré un humérus, rapporté par M. W. Mantell de la Nouvelle-Zélande, sous le nom de Phoccæ- nopsis Mantellii. ! Freb. TRUE, On a newsperies of porpoise, Phocæna dalli, from Alaska. L Peoc oF UN. Sr. NaTioNaL MUsEun, 1855. 2 Howes, On some points in the anatorny of Lie Porpoise. JOURN. OF ANA- , W! LIRNY AND PHYSIOLOGY, XIV, p. 417. DESSINS. Le Marsouin a été figuré dans la plupart des livres qui traitent des Cétacés et des animaux marins. Nous en trouvons une figure dans Tronheim, Selskab skrifter, vol. IE, t. IV; dans Pontoppidan, Norges Naturlige Historie, p. 244 (Springek); dans Lacépède, Histoire naturelle des Célacés, pl. XI, fig.5, et son squelette, pl. XIV, fig. 2 ; dans Schreber, Naturgeschichte der Säugethiere, taf. 372. Nous pouvons citer aussi les figures publiées par Geoffroy Saint-Hilaire et Frédéric Cuvier, dans leur Histoire naturelle des Mammifères, livre 53. On en voit également un dessin dans l'Histoire naturelle des Cétacés de Frédéric Cuvier, pl. XIE, fig. 1. Le D: Fischer publie un bon dessin de deux femelles adultes ; toutes les deux présentent le bord antérieur de la nageoire dorsale légèrement crénelé. Une de ces femelles fût capturée au Bec d'Ambès, le 18 août 1869, l’autre à Arcachon, le 12 avril 1870. I! reproduit aussi le dessin d’un mâle, pl. VE, fig. 2, d'après un animal pris à Arcachon, le 16 mars 1872. J. Murie à publié un fort joli dessin de Marsouin mâle, mon- trant la coupe du crâne et de la bouche, ainsi que de la cavité thoracique et abdominale avec les viscères en place 1. Malm publie un dessin d'un Marsouin dont le jeune à terme est encore attaché à la mère par le cordon ombilical, Le jeune a la moitié de la longueur de la mère. F. Camper a bien figuré le squelette, et après lui Pander et d’Alton. Cuvier a figuré la tête dans ses Recherches sur les ossements fossiles (pl. XXI, fig. 3 et 4). Eschricht a publié le dessin du cerveau (pl. IX). *Rapp a bien figuré tout le squelette (pl. V). Nous avons représenté les diverses parties du squelette d’in- 1 James MuRiE, Trans: of the Zoolog. Society of London, vol. VIL, 1867. ) g y ( 436 ) dividus pêchés sur les côtes de Bretagne, dans la Manche, dans la mer du Nord, dans les eaux du Groënland 1. Dans les Bulletins de l Académie ?, nous avons figuré la côte cervicale supplémentaire du coté droit et du coté gauche de animal. Albers (Icones ad. illustr. anat. comp., fasc. I) a figuré le larynx du Marsouin. Rapp figure l'estomac du fœtus, de Padulte et d’un jeune à la mamelle, C’est la poche formée par l’æsophage et non l’es- tomac proprement dit, qui prend du développement avec l’âge. Burmeister a figuré le Phocæna auquel il a donné le nom de Spinipennis 3. Schlegel a publié dans la Fauna Japonica # une figure du Dauphin noir (Neomerts), qui est bien un Marsouin sans nageoire dorsale. M. True donne le dessin du Phocæna dalli vu en dessus, en dessous et de côté; il représente séparément la tête vue, comme le corps, de trois côtés différents ©. PARASITES. En 1841, Eschricht a écrit, dans lfsis, un article sur le Mar- souin et ses parasites 6. On en trouve toujours dans le Marsouin, particulièrement des Nématodes. Les plus communs sont logés dans les voies respiratoires. Le Pseudalius (Prostecosacter inflexæus, Diesing) habite com- 1 Ostéographie des Cétacés… pl. XLIL, fig. 5-7, et pl. LV, fig. 1-4 ? Bulletins... 2e série, 1868, tome XXVI, pl. 2. 5 BuRMEIsTER, Annal. d. Museo publico de Buenos-Aires. Buenos-Avres, 1869 pl. XXII et XXIV. * Fauna Japonica, pl. XXV, Lugduni Batavorum, 1850. ’ > FRE». TRUE, On a new species of porpoise, Phocæna dalli, from Alaska Proc, Uxir. StTaTEs NaTioxaL Museum, 1885, p. 95. 5 Escuricar, Ueber das Meerschiwein u. dessen Eingeweidewürmer. Isis, 1841, p. 704. L DE." — 4 La ( 437 ) munément la trachée-artère; on le voit aussi dans les bron- ches, dans les sinus frontaux et jusque dans les anfractuosités de la base du crâne, dans la trompe d'Eustache et même dans la caisse du tympan. Rudolphi cite le même Nématode, trouvé sur le Marsouin et le Delphinus gangeticus (Plataniste), sous le nom d’Ascaris simplex . Blanchard fait mention d’un Hématozoaire sous le nom de Strongylus inflexus?, que nous supposons être le même Néma- tode qui passe à travers les parois des vaisseaux ou du cœur. Le Prostecosacter minor, Diesing, est une seconde espèce qu'on trouve dans les mêmes conditions 3. Le Proslecosacter convolutus, Diesing, est cité comme troi- sième espèce propre au Marsouin #. Von Siebold fait mention de ce Nématode sous le nom de Filaria inflexo (caudala) ; 1 la trouvé dans les poumons ÿ. Nous avons disséqué un certain nombre de Marsouins et nous avons toujours trouvé les voies respiratoires envahies par ces mêmes Nématodes 6. Poelmann les à également observés 7 dans les mêmes organes. Dans les voies digestives se logent des Trématodes : Cobbold a trouvé un Distoma (oblonga) dans les canaux biliaires 8. Eschricht avait déjà trouvé ce parasite 9. _ N. Schrift. d. Berlin. GESELL. NAT. FR. Il, p. 282. Dict. Encycl. sc. med. 5 DiesixG, Syst. helm., not. Il, p. 525. #2 # Diesixe, Dans le Phocæna communis, Diesing, syst. helm, vol. IF, p. 524 _ WiEGmanx,’s Archio, 1842, 2, p. 548. 6 Van BExEvEX, Mém. sur les vers intestinaux, pl. XXIV, fig. 1-9. PorLmax, Bull. Acad. r. de Begique, 2° série, t. XVIL, pag. 604. Cossozv, Transact, Linn. Soc, vol. XXII, 1855, p.176, 186, et £ntozoa, pag 54. 9 « Dans le Marsouio j'ai toujours trouvé, outre les Stronguylus ifleæus de ja trachée, des poumons où du cœur droit et de l'artère pulmonaire, un petil Strongylus dans les poumons; il à été décrit par M. Creplin. En outre j'ai œ (438) Cobbold signale aussi un Cestode dans les intestins, le Diphyllobothrium stemmtatocephalum. D’après Rudolphi, l'estomac renferme encore lAscaris sim- plex 1. Muray a trouvé dans l'intestin cinq Nématodes qu’il rapporte au Filaria inflexocaudata. Nous nous demandons si ces der- niers étaient bien en place. Nous ne les avons jamais observés que dans les organes en communication avec les voies respira- toires. observé dernièrement qu'il y a presque toujours un joli petit Distoma dans les canaux biliaires », m'écrivait Eschricht dans une lettre portant la date du 4 mai 1861. 1 Synopsis. . ... pag. we] Le Le) L'ORQUE CORCAMGLADIATOR) LITTÉRATURE, CI. Mulder, Over Delphinus Orca, den 15 april 1852 gevangen, Melchior, Den danske Slats of Norges Paltedyr, 1854. Willson, On den Tandval (Delph. Orca) Fürh. Skand. naturf. Slock- holm, july 1855. Nillson, ÂVolices hisloriques sur l’Orca, Froc. Auer. Assoc, Was- hington, 1854. Sundeval, Ueber einige Wallarten (D. tursio et Orea) Ofversigl vet. Akad, Fürh. 1861. Eschricht, Om Spackhuggeren (Delphin. Orca). Copenhague, 1862. Eschricht, On the specics of the genus Orca, inhabiting the northern seas. READ BEFORE Tue ROYAL Danisn SOciETY OF SCIENCES, may 1862. The Ray Society for the year 1866. Gray, Notes on the Skulls of (he genus Orca in the British Museum, and notice of a specimen 6f the genus from the Seychelles. Proc. 7001. Soc. London, janvier 1870, p. 70. Otto von Friesen, Aneikningar aengäende en Orca, som anträffats vid Bohuslänska Kusten, 1° déecmbre 1871, Orvenrs. 4r K. Ver. Acan. Foru., 1872. ( 440 ) Ssouverbie. Caplure d’un Orque en rade de Bordeaux. Acr. Soc. 9 Lixx. ne Borpeaux, 4° série, t. 1, 1876. Collett, Bemoerkninger om Norges Pattedyr. Nyr Mac. F. NaTURsK., 1876. Fischer, Sur une espèce de Célacë (Orca antarctica). JOURNAL DE Z00- LoGiE, 1876, p. 146. P.-J. Van Bencden, Mém. sur les Orques.... MÉuoiREs pe L'ACA- DÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE, t XL, pl. 1, 1879. Cu. &. Lütken, ÆAriliske Studier over nogle Tandhvaler af Slægterne Tursiops, Orca og Lagenorhynchus. Kiobenhavn, 1887. HISTORIQUE. L'Orque était plus ou moins connu de Pline 1; le naturaliste romain raconte que l’empereur Claude livra combat, dans le port d’Astie, à un Orque qui avait vomi des peaux ; on suppo- sait que ces dernières provenaient d’un navire naufragé, chargé de peaux et venant de la Gaule 2. Rondelet, dans son histoire des Poissons 3, fait mention de l’Orque et en publie même un dessin, entre une Balénoptère et un Cachalot. Rondelet prétend que le mot orque provient de la ressemblance du corps de l'animal avec un vase désigné sous ce nom particulier. Gunner l’a connu également sur les côtes de la Norwège et, comme Egede l’a fait avant lui, il en publie une description accompagnée d’un dessin #. Egede le désigne sous le nom de Schwerdtfisch. C’est de ce nom de Schwerdtfisch, poisson à épée, qu'est venue la confusion faite par plusieurs naturalistes, qui ont pris l'Orque pour un Espadon, c’est-à-dire ce Cétacé, redou- table par ses dents, pour un poisson armé d’une épée. L’Orque était connu également de Martens; le baleinier de Hambourg fait remarquer que la nageoire dorsale a trois fois la hauteur des nageoires dorsales ordinaires. Sir R. Sibbald a, comme Mertens, bien connu ce Cétacé : il fait mention de plusieurs individus échoués sur les côtes d'Écosse. En 1692, une gamme de différents grands Cétacés était venue se perdre dans la baie de Forth; les uns avaient 22 pieds de longueur, d’autres 18 ; leur mâchoire portait trente 1 Hist.nat., lib. IX, cap, 6. ? Eschricht à trouvé une peau de Phoque retournée dans la bouche d’un Orque, et dont le corps, encore en chair, se trouvait dans l'estomac. 5 Q. Roxnezeri, De Piscibus marinis. Lugduni, 1554. # Vom Stour-Vagnes oder dem Orca der alten (Delphinus Orex) Trond- hyemske selskabets skrifler, vol. IV, 1770. 9 y (44) fortes dents. Sibbald à parfaitement reconnu que c’étaient des Orques et 1l a distingué fort bien le mâle, qui n'avait pas moins de 24 pieds de long et dont la nageoire dorsale avait 3 pieds de hauteur. Dans la description qu'il fait de l'animal, on voit qu'il a parfaitement reconnu le système particulier de colora- tion de la peau f. Pennant, dans sa British Zoology, parle également de l'Orque ou Grampus et donne comme synonyme l'Épaulard de Bris- son 2. Oth.-Fred. Muller désigne le même Orque sous trois noms différents dans son Prodrome de la Faune danoise 3, Oth. Fabricius désigne le Cétacé qui nous occupe, d’abord sous le nom de Physeter microps, ensuite sous le nom de Del- phinus-Orca *. Le premier est le Ardluk des Groënlandais, le second le Ardlurksoak. Ce sont sans doute les deux sexes de la même espèce. Pallas >, et après lui Chamisso, citent l'Orque parmi les Cétacés du nord du Pacifique, qui fréquentent la mer de Chine et la mer d’Okhotsh. Pallas a vu également l'Orque dans la mer Arctique: cet animal vit par petites troupes, dit-il, et attaque la Baleine, les Phoques et les grands poissons. Tous ces ani- maux lui servent de pâture : Delphinus orca, mari ochotensi copiosissima… terror Balænarum, dit le célèbre voyageur. Une partie de ce que dit Lacépède du Physetere microps se rapporte à l’Orque et une partie au Cachalot véritable. Ce natu- raliste a confondu ainsi deux Cétacés qui n’ont rien de com- mun entre eux, si ce n’est d’appartenir au même ordre. L’ani- mal qu’il décrit sous le nom de Dauphin-Orque est véritablement l'Orque des naturalistes comme on peut le voir par le crâne qu'il figure planche XV[. L'animal est figuré planche XV. Lace- ! De Balænis minoribus in utraque mazxilla dentalis,quæ Orcæ vocantur, PHaLaiNoLoGiA Nova. Edinburgi, 1692 et 1775. ? Taom. PENNANT, Bristish 390ology, vol. LE, p. 72 (1776.) 5 Oru. Freo. MüiLer, Zoolog. danicæ prodromus. Hafniæ, 1776. # Oru. Fasricius, Fauna grœnlandica. Hafniæ, 1780. > Zoogr.russo-asiat., L. , p. 285. (443) -pède commence la description du Physetere microps en disant : Le microps est un des plus grands, des plus cruels et des plus dan- gereux habitants de la mer. Réunissant à des armes redoutables les deux éléments de la force, la masse et la vitesse, avide de car- nage, ennemi audacieux, combattant intrépide, quelle plage de l'Océan n'ensanglante-t-il pas ? Ce passage, rédigé d’après le récit des pêcheurs, ne peut évidemment se rapporter qu'à l’'Orque. La figure ?, planche XV, représente un mâle avec le pénis, mais l'artiste a ajouté cet organe et il n’a pas fidèlement reproduit la nageoire dorsale 1. Desmarest fait du Dauphin-Orque, du Dauphin-Ferès et du Dauphin-Épaulard trois espèces distinctes, et à propos du pre- mier il dit : Celle espèce, inconnue aux naturalistes de nos jours, n'est caractérisée que par la phrase d'Artedi que nous avons rapportée ?. Cuvier parle, dans ses Recherches, d’une espèce de Butzkopf qui se reconnaît à sa nageoire dorsale pointue et élevée, et si quelque Cétacé offre les caractères que les anciens attribuaient à leur Bélier de mer, dit le grand naturaliste, c’est bien sûre- ment celui-ci, par la tache blanche et arquée qu'il a au-dessus de l'œil. Martens et Anderson parlent de Butzkopf, à nageoire moins élevée que celle du Gladiateur dit encore Cuvier, sans se douter que le Gladiateur, à nageoire moins élevée, est tout simplement Ja femelle. Ce n’est du reste que dans ces derniers temps que lon s’est assuré des différences sexuelles des Orques, aussi bien que de celles des Hypéroodons. Les pêcheurs avaient bien remarqué déjà, dans la mème gamme, des individus à nageoire dorsale élevée, à côté d’autres à nageoire dorsale ordinaire, mais on ne se doutait pas que les premiers fussent des mâles, avec une sorte d'épée au milieu du dos. Lesson n'admet pas que l'Épaulard soit le même animal que l'Orque, il croit que l'Orque des anciens est un Cachalot. 1 Histoire naturelle des Célacés. Paris, 1805. 2 Mammalogie..… Paris, 1820, p. 517. (444) C’est le véritable Butzkopf de la plupart des peuples du Nord, dit-il !. Comme on le voit, par cet exemple, il ne suflit pas d’avoir fait de grands voyages en mer pour connaître ces ani- maux. Le mot Butzkopf ne peut évidemment pas s'appliquer à l'Orque, dont la tête n’est rien moins qu'aplatie. En 1836, Fréd. Cuvier, dans son flislowe naturelle des Cétacés ?, parlant du Cétacé qui nous occupe, avoue que les naturalistes ne peuvent composer l’histoire de cet animal, qu'en réunissant des notions éparses, qu'ils y rapportent plus ou moins conjecturalement. Il n’est même pas certain, d’après lui, que l'Épaulard se trouve dans la Méditerranée, quoique Pline en ait parlé et l'ait considéré comme un des plus grands enne- mis de la Baleine. Il est vrai, Fréd. Cuvier ne pense pas qu'une observation nouvelle ait été faite sur ces animaux; il n'a profité ni des collections ostéologiques formées par son frère, ni des travaux dont les Cétacés ont été objet. Schlegel a publié la description d’une femelle de 16 pieds environ de longueur, qui avait échoué en novembre 1841, près de Wyk-op-Zee. Cette description est accompagnée d’une fort belle planche supérieure à toutes celles qui ont paru, m'écrit Eschricht le 15 août 1861; nous ferons seulement remarquer que la tête est trop eflilée, à en juger par les photo- sraphies que nous en possédons. Le nom de Schwertfish donné à cet animal, ne provient pas, d’après Schlegel, de la forme de la nagcoire dorsale, qui ressemble plutôt à un sabre, dit-il, qu'à une épée, mais provient de ce que les nageoires pectorales ressemblent à cette partie des bâtiments qui naviguent dans les eaux intérieures et que l’on appelle Schwert. Pendant son séjour sur les côtes de Groënland, le gouverneur Holbôll a fait diverses observations sur l'apparition de lOrque : dans la mer de Baflin et sur ses mœurs sanguinaires; il a fait part à Eschricht de ses observations. Burmeister fait mention de lOrque dans ses publications et ? Lessox, Histoire naturelle (Cétzcés). Paris, 1828, p. 265. 2 Frép, Cuvier, /ist. nalur. des Célacés. Paris, 1826. le savant directeur du Musée de Buenos-Ayres désigne, sous le nom de Orca magellanica, un animal voisin de lOrca capensis, dont la tête a été trouvée sur la plage, près de l'embouchure de l’Arroyo de Christiano muerto !. Cornalia fait mention de l’Orque dans sa Faune d'Italie : La cattura di questo fu fatta nel Mediterraneo fra la Sicilia e Malta, dit-il 2, Tilesius a publié des détails intéressants sur le genre de vie de ces animaux : Ils nagent di-il, avec rapidité en colonnes de cinq individus, comme un escadron de hussards, la tête et la queue baissées, la nageoire dorsale, toute noire, dans lair. Ils attaquent les Baleines, et, celles-ci une fois blessées, sont harcelées jusqu’à ce qu’elles meurent ou échouent 5. Eschricht a consacré les dernières années de sa vie à l'étude des Orques; il a publié une première partie dans les Mémoires de l'Académie de Copenhague # et, après sa mort, le profes- seur Steenstrup à mis fous ses soins à la publication de la seconde partie à. Eschricht a porté toute son attention sur la forme de la tête, la composition de la nageoire pectorale et sur les différences des os du bassin dans les deux sexes ; il admet deux espèces dans les mers d'Europe, auxquelles Steenstrup croit devoir joindre une troisième, lOrca Eschrichtii, d’après des osse- ments provenant d'individus de petite taille envoyés des Féroë. Il existerait ainsi trois espèces au nord, dont une porterait une tache blanche de forme triangulaire, mais reliée au blanc de la partie inférieure du corps, derrière la nageoire pectorale ; c'est à cette espèce que Steenstrup a donné le nom d'Orca Esch- richli. Les deux autres espèces auraient pour types, l’une le squelette de Nilsson, l’autre les deux squelettes de Bergen. Ann. and Mag. nat. hist. Aoùt 1866. pl. IX. 2 CorxALiA, l'auna d'Italia. Isis ASS p:72n: * On the species of the genus Orca. KoxG. DaxskE VIDENSKAB. SELSKAB. Fornanoz. 1862, in-40, 5 Om spækhuggeren (Delphinus orea L.). Kiobenhavn, 1862. Agl. Danske Videnskab. Selskabs Forhandl., for 1862, in-8. (446) Peu de jours avant sa mort, Eschricht m'écrivait qu'il ne savait plus à quoi s’en tenir au sujet des espèces d'Orques, et son doute augmentait avec les matériaux qu'il recevait, disait-1]. Eschricht ne considère pas seulement l’'Orque comme un genre bien distinct, mais il propose d’en faire un groupe dis- tinct dans l’ordre des Delphinides, en opposition avee tous les autres Cétacés. Les Orca, contrairement aux autres Cétacés, se: nourrissent d'animaux à sang chaud, dit-il. Dans son mémoire inachevé sur les Épaulards, Eschricht est arrivé à ce résultat, dit le professeur Lütken, que dans les mers du Nord il n'existe pas moins de trois espèces *. I admet d’abord deux espèces, le Grampus gladiator, d’après l'animal de 24 pieds qui a échoué dans la Tamise en 1759, décrit et figuré par Hunter; le Grampus orca, d’après la femelle échouée à Wyk- aan-Zee, décrite et figurée par Schlegel. Le premier a douze paires de côtes, le second seulement onze. En considérant l’importance des travaux de feu notre ami Eschricht, sur les Cétacés, le professeur Flower a eu lheu- reuse idée de publier la traduction de ses recherches sur la Baleine franche et sur les Orques 2. Cette traduction est accom- pagnée d’une note de Reinhardt et d’un croquis de la petite forme d’Orque, dont trois individus ont échoué en même temps en 1858 aux Féroë, dans le Kollefjord. Steenstrup s'est également occupé des Orques. Le savant ? Il ne sera pas sans intérèt de faire connaitre la dernière opinion de feu notre ami : il m'écrivait le 50 décembre 1862, six semaines avant sa mort: Pendant deux ou trois mois, disait-il, j'ai été presque entièrement distrail par ces coquins d’Orques. Un zoologiste suédois, M. Lilljeborg, d'Upsala, à insisté de nouveau sur la différence du Gladiateur et de l'Orque commun à nageoire dorsale plus basse. J'avais supposé que ce n’était qu’une dillérence de sexe, car, en effet, les uns, autant qu'ils ont été décrits, ont tous été des mâles, les autres des femelles. Cependant il a bien fallu examiner de nouveau mes quatre squelettes et mes crânes et autres ossements venant des Féroë, Il me semble qu'il y a là, non deux, mais trois espèces. Enfin je m'y perds, comme dans l'examen des Balein’s & aileron. ? The Ray Sociely. London, 1866. Trad. ang. de Eschricht et Reinhardt, pe 187. ( 447 ) professeur de Copenhague admet comme espèce distincte, sous le nom d'Orca Eschrichtit, Vanimal qui a échoué dans le Kollefiord in Strümü et dans l'estomac duquel il y avait des poils et des griffes de Phoque avec des fanons de Balænoptera rostrala. Le savant directeur du Musée de Gôteberg, Malm, a écrit éga- lement sur les Orques, dans la Revue des Cétacés des Musées de Suède; il admet trois espèces, l'Orca gladiator, YOrca minor et l’Orca Eschrichtii 1. Malm a eu entre les mains les ossements de certains Cétacés rapportés par Nordenskiold, et il attribue quelques-uns d’entre eux à l’Orca Eschrichtii. Dans un mémoire sur les Orques, nous avons soigneusement comparé les quatre squelettes d'Orques qui ont échoué sur nos côtes; nous avons toujours attribué les faibles différences qu'ils présentent à l’âge ou au sexe. Nous n'avons pas vu plus de différences dans les individus qui ont été capturés sur les côtes de Hollande, ou qui ont péri sur la côte de Norwège, que dans ceux qui ont péri dans l'Océan glacial ou dans la Paltique. En 1870, le D'° Gray exprime la pensée que les quatre têtes d'Orques, recueillies sur les côtes d'Angleterre, se rapportent à deux espèces, dont lune a le rostre plus étroit que l’autre; il en fait l’Orca latirostris et VOrea stenorhynchus. L'Orque de l'océan Pacifique est encore bien différent, d’après lui, des espèces de nos côtes. Le savant directeur du British Museum admet en outre une espèce du Cap, une autre du détroit de Magellan, une du nord du Pacifique et une petite espèce intermédiaire :spec. intermedia) ?. Le capitaine Scammon cite l'Orque parmi les Cétacés des côtes nord-ouest de PAmérique du Nord et publie (pl. XVII) la figure de trois Orques, qu’il désigne sous les noms de Orea reclispina, Cope, Orca ater, Cope et Orca ater, var.? L'Orcarectispina est le mâle, les deux autres sont des femelles, 1 Man, Hvaljur i Sveriges Museer, 1869. 3 Proc. Zool. Soc. Janvier 1870. (448) et présentent naturellement bien peu de différences entre elles. Le capitaine Scammon avait bien remarqué que les individus à courte nageoire vivaient au milieu de ceux à longue nageoire dorsale, dans la même gamme, mais l’idée ne lui est pas venue, que les uns fussent des mâles, les autres des femelles d’une seule et même espèce : … {he high and low finned Orcas are found in the same school, dit-il *. Dans l’Ostéographie des Cétacés, mon collaborateur Paul Gervais admet, dans les mers d'Europe, deux espèces, l'Orca gladiator et l'Orca Eschrichtii. Les espèces, créées dans le genre Orque, devront sans doute être réduites au moins à quelques-unes seulement. On pourra admettre que la principale d’entre elles, c’est-à-dire l'Orca gla- dialor, possède une extension hydrographique plus grande qu'on ne l'aurait d’abord supposé, dit P. Gervais dans l’Ostéo- graphie des Cétacés, p. 543. Le D' Fischer décrit avec soin, après M. Souverbie, un jeune Orque màle, capturé dans la Garonne, à Lormont, vis-à-vis la rade de Bordeaux, le 11 juin 1876. La longueur totale n’est que de 3,250. Fischer le désigne sous le nom de Orea Duhamelii ?. Après avoir comparé les derniers Orques des mers d'Europe, le D' Fischer exprime l'avis que les résultats de cette compa- raison laissent encore des doutes relativement à la légitimité des distinctions spécifiques; il ajoute que nous n'avons pas encore assez de documents pour résoudre ces questions si ardues. M. Fred. True, dans son catalogue des mammifères aqua- tiques 3, dit que l’Orca n’est pas rare sur les côtes est et ouest; l'espèce atlantique est l'Orca gladiator, observé très souvent sur les côtes de la Nouvelle-Angleterre et qui entre parfois dans © Cu. Scammon, The marine mammals of the Nort-Westera Coast of Nort America. San Francisco, 1874. ? Fiscer, Célacés du Sud-Ouest de la France, 1881. 5 Washington, 1884. ( 449 ) les ports. On en a pris à Provincetown, dit-il, mais pas régu- lièrement. Les Orca de la côte de Californie se rapporteraient, d’après lui, à deux autres espèces, Orca atra et Orca rectispina. Le professeur Flower a publié, en 1885, la liste des Cétacés du British Museum, et sous le nom de Orca gladiator, il réunit Orca stenorhyncha, de Gray, l'Orca latirostris, VOrca capensis, Ophysia pacifica, qu'ils viennent des Seychelles, du cap de Bonne-Espérance ou du nord du Pacifique 1. Dans un travail tout récent, le professeur Lütken, qui avait sous la main tous les matériaux d'Eschricht, ne peut reconnaitre que deux espèces dans le nord, et l’une d’elle a encore besoin d’être étudiée sur de nouveaux matériaux, dit-il. Ce sont les expressions propres du savant zoologiste de Copenhague. M. Lütken fait remarquer avec raison que si lOrca gladiator a d4 vertèbres et 12 paires de côtes, et l’Orca minor respective- ment »2 et 11, c’est bien peu de chose pour les distinguer comme espèces, d'autant plus que, dans des animaux capturés dans le Limfjord, il existe 53 vertèbres et 12 paires de côtes. Outre Orca gladiator, M. Lütken ? admet une seconde espèce, Orca Eschrichtii, tout en reconnaissant la nécessité de se pro- curer de nouveaux matériaux avant de trancher cette question. - Aussi longtemps qu'on n'aura pas signalé des caractères plus précis sur le nombre des côtes ou d’autres différences aussi légères dans les autres os du squelette, nous croyons qu'il sera prudent de n’enregistrer qu’une espèce. Nous avons vu des têtes très grandes provenant des mers très éloignées les unes des autres, sans leur trouver aucun caractère particulier. Les trois dessins publiés par Schlegel, par nous et par Lütken, sont aussi ressemblants que peuvent l'être des dessins faits dans des conditions semblables et d’après des individus différents. ? FLower, List. of Cetacea, 1885. ? Cr. Lurkex, Critical studies upon some Odontocete of the genera Tursiops, Orca and Lagenorhynchus, AxN. AND MAG. OF NATURAL HISTORY, n° VIIL, aug. 1888. (450 ) L'Orque a aussi été l’objet de recherches anatomiques. Le professeur sir Turner s’est occupé de l'utérus de ce Cétacé, des membranes du fœtus, de la position et de la forme générale du fœtus, et de la comparaison du placenta avec celui des autres mammifères f,. SYNONYMIE. Orca gladiator, Lacépède. Orca Duhamelii, Lacép. Phocæna orca, Middendorf. Orca gladiator, Gray. Grampus orca, Liljeborg. Delphinus orca, Schlegel. Orca minor, Rhdt. Épaulard ou gladiateur, des baleiniers français. Grampus, des pêcheurs anglais. Spockhuggeren, des Scandinaves. Ardluk, des Groënlandais 2. Hvalhund où Wagnhund, au Nord. On a donné beaucoup de noms à des Orques d’origine diffé- rente, ou se distinguant par une vertèbre ou une côte de plus ou de moins, mais il serait difficile de bien caractériser des différences, et nous croyons que le moyen le plus simple est de donner à ces Cétacés, reconnus comme Orques, le nom spécifique le plus ancien et qui est resté le plus significatif, c’est-à-dire, celui de Orca gladiator. Dans des travaux ultérieurs qui deviennent tous les jours plus précis, on pourra distinguer par la suite des espèces, ou 1 M. Tuner, On the gravid ulerus. TRANS. ROY SOC. ÉoixeurGu, vol. XXVI, 1871. 2 Les Groënlandais donnent le nom de Ardluk à la femelle et celui de Ardlursoak au mâle, à cause de sa grande nageoire dorsale. des variétés d’après l'importance des modifications et les mers où on les découvre. Si l’on avait rencontré dans la même mer les divers Orques dont il est question dans les auteurs, il est probable qu'il ne serait jamais venu à l'esprit de personne de faire parmi eux des espèces distinctes. Non seulement nous croyons devoir rapporter tous ces Orques des mers d'Europe à une seule et même espèce, mais nous croyons de plus pouvoir y rattacher les Orques du Paci- fique comme ceux de nos antipodes. CARACTÈRES. L’Orque a une vingtaine de pieds, un peu plus de ÿ mètres, de longueur ; le corps est gros et trapu, la bouche peu fendue, les dents fortes et coniques, variant de dix à treize de chaque côté et à chaque mâchoire f. La nageoire dorsale du mâle est droite et très élevée ; elle est estimée à 1",96 en hauteur, et à la base d'avant en arrière, elle mesure 0®,316, d’après un animal échoué sur les côtes de Danemark. Bessels a vu ces Cétacés de près, dans la mer de Baflin, et il accorde à la nageoiïre dorsale du mâle même le tiers ‘de la longueur du corps. Le capitaine Scammon accorde 20 pieds de longueur au mâle, 15 à la femelle et 6 à la nageoire caudale. Leur nageoire pectorale n’est pas moins remarquable que la nageoire dorsale ; elle est excessivement large et ressemble plus à une spatule qu'à une rame. Les Orques ressemblent, sous ce rapport, au Narval et au Beluga et, si l’on adoptait la nomenclature de notre savant confrère Van Bambeke, les Orques se trouveraient parmi les Platyptères. L'Orque est parfaitement reconnaissable à son système de : Knorr et d’autres ont pris des dents canines d'Ours pour des dents d'Orque. Recueil des monuments des calastrophes … Nuremberg, 1775, vol. H, sect. Il, p. 207, pl. H, 1 fig. 2-4. (452) coloration : la peau est d’un beau noir en dessus, depuis le bout du museau jusqu’au bout de la nageoire caudale; en dessous, un plastron jaune, surtout dans le jeune âge, s'étend depuis le bout du menton jusqu’à l'anus et s'élève sur le côté jusqu’à la commissure des lèvres pour s’éteindre au-dessus de la nageoire pectorale ; au-devant de l'anus la bande s'étend de chaque côté sur les flancs sous la forme d’une feuille lan- céolée. Les habitants des Féroë ont observé, dans des Orques plus petits, que la couleur blanche ou jaune s’étenG en forme de coin derrière la nageoire pectorale, La face inférieure de la nageoire caudale est également jaune. Au-dessus et en arrière de Pœil, il existe une grande tache jaune, de forme allongée, qui a plus ou moins de ressemblance avec une corne de bufle; les anciens en ont fait mention et l'ont comparée à une corne de bélier; de là Ie nom de aries mars. La coloration est la même dans les deux sexes et c'est sur- tout dans les jeunes individus que les dessins sont le mieux accentués. Dans les vieux le jaune pâlit. Il y à quelques différences dans ces dessins qui s’étalent sur le corps noir des Orca, mais il est probable qu’ils sont pure- ment individuels. Le capitaine Scammon reproduit le dessin de deux femelles avec les couleurs pâles ordinaires et d’un mâle entièrement noir. Nous supposons que la coloration s’est plus ou moins effacée et qu’elle a échappé audessinateur. Scammon a observé également la coloration de la peau et trouve quelque ressemblance avec les bandes noires du tigre des Indes. Une strie pourpre a été signalée et figurée par Schlegel sur une femelle de 15 pieds ; elle manquait dans un dessin que Steenstrup avait entre les mains d’après un individu pris à Jutland (fév. 1855) ; le mâle de 21 pieds, observé par Eschricht, ne la présentait pas non plus. (453 ) Cette raie a été observée déjà dans un mäle capturé le 17 novembre 1830 dans le port de Lynn. Ainsi on a observé avec soin deux mâles : l’un a cette raie et l'autre pas ; n'est-ce pas simplement que l'attention n’est pas attirée sur elle? Il y a tant à voir quand on se trouve devant un pareil cadavre ! Nous ne voyons pas non plus la raie dans le dessin de Van Cuyck fait d’après un animal échoué près d’Os- tende. En comparant cette raie figurée par Lütken avec celle figu- rée par Schlegel, on voit les différences que ces dessins pré- sentent d’un individu à l’autre, mais cette différence peut même dépendre de la distance ou de la place où l’on se trouve en des- sinant l'animal. Cette même raie est reproduite dans deux figures d’Orque publiées par le capitaine Scammon. Le même dessin de l’Orque se reproduit chez un Cétacé du Cap, le Cephalorhynnchus heavisidii, que nous avions placé un instant, à cause de sa coloration, parmi les Orques. DESCRIPTION. La tête a une longueur à peu près double de sa largeur. La face supérieure des intermaxillaires est lancéolée au-devant des trous sous-orbitaires et sont moins larges que les maxil- laires qui les bordent. Les alvéoles de la mandibule, comme celles du maxillaire supérieur, sont larges et profondes; elles sont souvent con- fondues dans une même gouttière, avec des cloisons incom- plètes. Les dents sont fortes, arquées, leur racine est volumineuse, avec la couronne comparativement petite et aplatie à la face postérieure. Après celles des Cachalots ce sont les plus fortes dents que l’on rencontre parmi les Cétacés. Les plus grandes ont 10 centimètres de longueur; les premières et les dernières sont plus petites que les autres. Elles sont, en moyenne, au nombre de douze, en haut et en bas, { 454) Les dents varient entre <+ et +2. L'Orque de la Tamise a +, celui d’Algoa-Bay, +, celui du Chili, +; un d'Ostende, <=.. La colonne vertébrale est formée de sept cervicales, onze dorsales, neuf lombaires et vingt-quatre caudales, en tout ecin- quante-deux. Nous en trouvons cinquante et un dans un jeune squelette. Les côtes sont au nombre de onze. Les six premières s’unis- sent au sternum. Les trois premières cervicales sont, en partie, soudées par leurs apophyses épineuses, ou même les quatre premières. Nous avons trouvé une première côte biceps dans un sque- lette des côtes du Groënland. La nageoire pectorale est fort large et courte; elle fait con- traste avec la nageoire des Globiocéphales. Les os des membres sont forts, larges et courts. Les métacarpiens sont courts, ainsi que les phalanges. Les os du corps se solidifient très tardivement, de manière qu'on trouve dans les divers squelettes de grandes différences sous ce rapport. Le carpe des Orques est, de cette manière, remarquable par le petit nombre de pièces qui le constituent ; 1l n'y a souvent qu'un seul os, un tntermédial, Malm en cite un exemple : dans un squelette du Musée de Copenhague, on voit cependant, des deux côtés, cinq os carpiens bien distinets. Nous comptons, dans le pouce, une phalange; l'index, quatre ; le médian, trois; l’annulaire, trois; le petit doigt, une. Eschricht en figure six a l'index; quatre au médian; trois à lannulaire, et deux au petit doigt. Les os pelviens diffèrent notablement de l’un sexe à lautre; ils sont beaucoup plus forts dans le mâle. Eschricht en a figuré plusieurs. A3 MOEURS. Is nagent communément par groupes de quatre ou cinq individus, formant de petites colonnes, au milieu de laquelle on voit s'élever, de temps en temps, la nageoire dorsale du mâle comme une épée au milieu des flots. Souvent ils élèvent assez haut le corps pour que l’on distingue une partie du dos. C'est par gammes (schools) qu'on les voit onduler entre les vagues, dit le capitaine Scammon; leur longue nageoire dorsale ct les diverses couleurs de la peau leur donnent un air plus ou moins martial. | Middendorf dit avoir rencontré jusqu’à quinze Orquesréunis, dans la mer Arctique, et qui faisaient fuir toutes les Baleines vers les côtes 1. Tilesius a vu, assez communément, dans la partie septen- trionale du Pacifique, des Orques nageant par groupes de plusieurs individus, les uns à côté des autres, comme un esca- dron de hussards; de temps en temps on voyait des nageoires comme des sabres s'élever au-dessus de l’eau, puis disparaître. Bessels a eu la chance d’en rencontrer également pendant son voyage forcé à bord d’un baleinier : dans la nuit du 6 août, dit-il, devant Fury-Beach, une bande d’Orques fit son appari- tion. Il les appelle Nordcaper, d’après les marins, qui les désignent aussi sous le nom de Schwerdfische. Bessels leur accorde une vingtaine de pieds de longueur et il estime leur nageoire dorsale au tiers de la longueur du corps. Il compare la nageoire dorsale à une voile de canot (Boatsegel). Leur grande voracité a été constatée aussi par la visite de leur estomac. Hunter n’avait trouvé d'abord, dans un individu qui était venu se perdre dans la Tamise, qu'une queue de Marsouin, et Claes Mulder, dans un autre, échoué sur la côte des Pays-Bas, qu'un morceau de Raie. Mais dans un orque, capturé dans le Kollefiord, aux Féroë, H.-C. Muller a trouvé des poils et des ongles de Phoque, avec des fanons päles, provenant sans doute de la Balænoplera rostrata. Dans l'estomac d’un autre Orque, M. Collett a trouvé des restes de Marsouin et de Phoque. * Minpenporr, Sibirische Reise, vol. 2, part. 2, p. 125. ( 456 ) Le capitaine Scammon a ouvert l'estomac d’un Orque, pris à l'île de l’Ascension, qui était également plein de Phoques. Nillson, dans un animal de 7 mètres de long, capturé sans doute sur les côtes de la Suède, a découvert quatre Phoques encore en chair et, à côté d'eux, plusieurs Saumons encore entiers. Mais ces gloutonneries ne sont rien en comparaison de la découverte faite par Eschricht, dans un animal capturé sur la côte de Jutland ; cet Orque ne renfermait pas moins de quinze Phoques, à côté de treize Marsouins. Dans la bouche on voyait, en outre, une peau de phoque retournée, C'est ainsi que l’on trouve assez souvent des corps entiers écorchés dans l'estomac. On peut dire que l’Orque fait la police des océans. Il est la terreur de tous les grands animaux marins. Les Phoques le fuient à toute nageoire et aucun autre danger ne les arrête, dussent-ils se faire prendre dans les pièges des pêcheurs. Ils sortent de l’eau ne trouvant de sécurité qu’à terre ‘. Les autres Cétacés ne le craignent pas moins que les Phoques. Ils s’en prennent du reste à tous les animaux marins d'une certaine dimension, aux Poissons aussi bien q'aux Phoques, aux Dauphins ou aux Baleines. De l'aveu de tous les baleiniers, il n’y à pas de spectacle comparable à celui d’un groupe d’Orques attaquantune Baleine en pleine mer : à peine sont-ils aux prises avec cette proie, que le combat continue dans le sang. Ce n’est pas sans raison que Fabricius et Chamisso, qui ont été témoins de ce combat, les appellent l'ennemi et le tyran de la Baleine. Sur la côte ouest du Groënland, on a vu aussi des Morses aux prises avec des Orques. ! Aussi les pêcheurs tirent-ils parti de cette peur: ils imitent, en bois, leur uageoire dorsale qui a la forme d’une épée et à la vue de cette épée, dressée dans la neige ou au milieu des glaçons, les Phoques fuient dans la direction voulue par les pêcheurs. CAS (457 ) Quand les Orques attaquent la Baleine, ils l'entourent pour la mordre et lui enlever les nageoires; quand celles-ci sont en partie arrachées et que la Baleine a perdu ses principaux organes de fuite et de défense, l’Orque pénètre dans la bouche, toujours ouverte, pour manger la langue. Il n’est pas rare, disent les pécheurs, de trouver des corps de Baleines mutilées et sans langue, flottant à la surface de la mer. Le capitaine Scammon a vu trois Orques attaquer une femelle de Baleine avec son jeune. C'était le Rhachionectes. Hs livrèrent des assauts à l’un et à l’autre : le jeune succomba et alla au fond. L'eau avait une profondeur de cinq brasses. Is assaillirent la mère ; elle reçut des plaies profondes aux lèvres et à la gorge. Elle plongea ensuite et les trois Orques vinrent un instant après à la surface, dévorant avec avidité des lam- beaux de chair. Le capitaine Scammon cite l'exemple d’un cadavre de Baleine, suspendu au navire, qui fut enlevé, sous les yeux des baleïniers, par les Orques. En 1893, près de Holsteinborg, on vit une gamme d’Orques escorter une Baleine franche; quelques-uns d’entre eux lui avaient déjà mordu dans les nageoires caudale et pectorale, lorsque d’autres se jetèrent sur les fosses nasales. La Baleine pénétra dans la Riverts-Hafen et donna un coup de queue si violent sur la tête d’un des agresseurs qu'il descendit lentement jusqu’au fond, la tête en avant. En 1830, un Keporkak, c’est-à-dire un grand Mégaptère, fut attaqué par un Orque, et quand le corps fut abandonné, après le combat, les Groënlandais trouvèrent sur le champ de bataille encore environ 25 tonnes de lard flottant autour du cadavre. Ce n'est pas la langue, du moins celle des Mégaptères, que les Orques préfèrent, comme on le dit communément; les Keporkak abandonnés, que Holbôll a vus, avaient encore la langue intacte. L'attaque des Beluga est moins dangereuse pour les Orques ; en 1827, une gamme de Beluga fut chassée dans une baie de Godthaven par les Orques ; ils y furent tous massacrés et les * Groënlandais, présents à ce spectacle, eurent encore une bonne 20 )n part de cette proie, en chair et en graisse. Malgré leur glou- tonnerie, les Orques n'avaient pu avaler toutes leurs victimes. On cite aussi un combat d’un Orque avec le Morse, dans Ise- Fiord, et où l’Orque a péri. Au nord du Groënland, près de Nouksuak, quelques habi- tants voulurent attaquer un Morse, au moment où une troupe d’Orques se dirigea sur lui; en approchant, le Morse s’élança sur eux et mit toute la gamme en fuite, Les Groënlandais virent ensuite le plus grand Orque portant le Morse entre les dents. Il doit y avoir parfois une lutte semblable entre des Cétacés et certains Requins; nous avons trouvé au Musée de Bruxelles une vertèbre caudale dans laquelle est logée une dent de Squale, enfoncée aux trois quarts de sa longueur dans l'épaisseur de los. Nous ne connaissons rien des amours de ces Cétacés ni des Heux où 1ls mettent bas ; nous savons seulement qu'ils vivent en polyvgamie comme les Cachalots et nous n'avons que quel- ques exemples de femelles pleines capturées, mais en trop petit nombre pour apprécier à quel époque de l’année ils mettent bas et pour connaître les lieux où cette opération s’accomplit. Dans la gamme de dix-huit individus, qui s’est perdue au mois de février 1871 sur les côtes de Shetland, se trouvaient deux femelles pleines, dont un fœtus mesurait environ deux pieds. La mère ayant au moins dix-huit pieds, il y a lieu de croire que l’accouplement, ou du moins la fécondation, a eu lieu en automne et que la mise bas a lieu à la fin de l'été. Nous avons fort peu de détails sur l’époque de leur appari- tion dans les différentes mers; il n’y a guère que les côtes du Groënland qui nous soient connues sous ce rapport. [l est à remarquer que ces Cétacés, à cause de leur voracité, ne sauraient se maintenir dans les mêmes parages, que pour autant que la grosse proie y soit commune; s'ils n’ont point l’agilité des Dauphins et s'ils sont incapables de se livrer aux mêmes évolutions, aucun Cétacé n'est mieux fait pour couper les vagues en ligne droite et pour fondre sur sa proie. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. L'Orque ou l'Épaulard, que Fabricius qualifiait de Tyrannus Balænarum, et Chamisso de Formidabilis Balænarum hostis, se rencontre dans toutes les mers; en Europe, on l'a vu sur les différentes côtes, même dans les mérs intérieures; on en à vu échouer depuis le golfe de Gascogne jusqu'à l'entrée de la mer Blanche, et il n’y a plus de doute à exprimer au sujet de leur entrée dans la Méditerranée et la Baltique : plusieurs auteurs en citent des exemples dans la première de ces mers intérieures, et les musées de Greifswald et de Lund en con- servent des squelettes qui proviennent de la Baltique. Pendant un certain temps, on a admis plusieurs espèces d’après les localités, mais on peut se demander, aujourd'hui que l'on possède des matériaux de tous les points du globe, sil existe plus d’une espèce de ce genre ; nous savons positivement que le Grindewall de l'Atlantique ou Globicéphale se trouve, sans modification aucune, dans l'océan Pacifique comme dans l'océan Austral, et partout où l'on a observé ce Cétacé, on a reconnu également l'Orque. La distribution géographique de ces deux espèces est exactement la même: ce sont deux Ceétacés véritablement orbicoles. I n'existe nulle part des pêcheries de cet animal, de manière que les échouements et les captures fournissent les faits les plus importants de leur histoire. | Nous venons de le dire, l'Orque pénètre dans les mers inté- rieures ; nous avons vu plus haut que Pline a fait mention d’un individu capturé dans le port d'Ostie, et depuis cette capture on en connait plusieurs autres exemples; 1l est vrai que l’on à souvent confondu, par suite de récits incomplets, des Orques avec des Cachalots; les dents même ont pû contribuer à cette confusion. Une tête d’un jeune animal conservée au Muséum de Paris, provient d'un individu capturé près de Cette (Hérault). Un autre jeune individu a échoué sur la plage de Palavas (Hérault). Je ne connais sur nos côtes que deux captures certaines de ce Cétacé, disait Gervais dans sa Zoologie et Paléontologie fran- çaises : un exemplaire pris à Cette vers 1840 et un autre en face d’Elne (Pyrénées-Orientales) en 1857. Cornalia cite lOrque dans sa faune d'Italie, mais sans faire mention d’une capture, et on esttout étonné de voir Fréd. Cuvier exprimer des doutes sur la présence de l'Épaulard dans la Méditerranée. Plusieurs échouements ont eu lieu sur les côtes ouest de France. La plus ancienne obserservation est celle de Du Hamel : il fait mention d’un Orque échoué près de Vannes à l'embouchure de la Loire, qu'il désigne sous le nom de Cachalot d'Anderson. Nous ne comprenons pas comment Du Hamel a pu faire cette confusion. Heureusement il en a publié une figure qui le fait reconnaitre facilement. Le 11 juin on a capturé, dans les eaux de la Garonne, aux portes même de Bordeaux, un jeune animal du sexe mâle, dont le docteur Souverbie a publié un dessin et une description dans les actes de la Société linnéenne de Bordeaux t. Sur la côte de Plélan (Bretagne) on a trouvé échoué dans les vases, le 19 juillet 1864, un Souffleur, de 7 mètres de long, avec le‘ventre blanc, le dos noir et deux taches blanches sur le cou 2° M. Gadeau de Kerville fait mention d’un Orque Épaulard, capturé le 27 novembre 1883 à environ deux lieues de Tréport (Seine inférieure), qui était long de à mètres 50 et portait trente- deux grosses dents conico-aplaties, légèrement arquées 5. Un Orque adulte et un jeune ont été pris également sur les côtes de Boulogne, et dont les restes sont conservés au Musée de Ja ville. 1 Mon. 1, 1876, p.61. ? Courrier de Bretagne, juillet, 1864. 5 Comptes rendus, 51 décembre 1885, el Bull. Soc. amis sc. nat, Rouen, 1885, p. 105. ( 461 ) Nous connaissons quatre exemples d'Orques capturés sur les côtes de Belgique depuis le commencement du siècle; tous les quatre ont été préparés par les soins d’un amateur, Paret de Slykens, le même qui a préparé le grand squelette de Balænoptera Sibbaldii, dit Baleine d’Ostende. Ces squelettes d’Orques sont aujourd’hui à Bruxelles, à Gand et à Louvain. On a enregistré plusieurs exemples d’Orques capturés sur les côtes des Pays-Bas. Claas Mulder à publié en 1836 une notice fort intéressante sur ce sujet !. Il y en a un d’abord qui est venu à la côte en 1811 près de Ameland (Engelsche plaat); un autre le 15 avril 1832 sur la côte de Frise, près du Zwarte Haan. — Une femelle de 16 pieds est venue se perdre à Wijk-aan-Zee, le 30 novembre 1841 ; elle est figurée par Schlegel dans ses Abhandlungen ?. Le dernier échoué est venu se jeter sur la côte de Zélande, en avril 1874. Son squelette est au Musée de Liège. . On a enregistré aussi quelques captures faites sur les côtes britanniques : on en cite deux d’abord dans la Tamise, un mäle de 24 pieds, en 1759, une femelle? de 18 pieds, en 1772; cette dernière a été décrite par John Hunter. Un troisième Orque a été pris à Greenwich en 1793; il avait 31 pieds; Sir J. Banks en a envoyé un dessin à Lacépède. On en a vu apparaître aussi sur les côtes de Norfolk. Couch en a signalé de son côté sur la côte de Cornouailles. On en à vu échouer également près de Weymouth et sur la côte d’Essex, dont les crânes ont été conservés dans des musées publics. Une femelle a été capturéeà Aarhuns en 1855 (M. Thompson). Le 19 novembre 1830, un jeune mâle de 21 pieds a été har ponné dans le port de Lynn (Lynn Harbour à). ! CLaas Muzver, Jets over walvischaardige dieren, op de kusten van Nederland van tyd tot tyd gestrand of gevangen, LETTERBODE, 1X56. ALPoceit101MVILTe 5,.... London magazine of natural hystory, 4° vol. Il en est question dans Dewuursr, Nat, history of the order Cetacea. ( 462 } Les Orques se montrent de temps en temps aux îles Féroë: en 1858 Eschricht en a reçu trois têtes; une de ces têtes a été échangée et se trouve aujourd’hui au Musée de Stuttgard. Une gamme de dix-huit individus a péri sur les côtes de Shetland, en février 1871, parmi lesquels se trouvaient deux femelles pleines. Il en est venu se perdre un dans le Kattegat; il a été photo- graphié par les soins de M. Smitt; son squelette est au Musée de Stockholm. Un autre a été capturé en 1871, au mois de décembre, sur les côtes de Bohuslän et a été décrit par Otto von Friesen. Une femelle de 15 pieds de iongueur, la même taille que celle de la femelle observée par Schlegel, a échoué en février 1855 sur les côtes est du Jutland. En juillet 1861, M. le chambellan Benzon de Benzon en a trouvé un autre en mer, près de Randers (Jutland). Eschricht fait mention de quelques Orques dans les termes suivants : au mois de février 1870, après un gros temps, une gamme de dix-huit individus est poussée à la côte de Shetland ; ils avaient de 17 à 18 pieds de longueur, et parmi eux se trouvait une femelle pleine dont le fœtus n’a malheureusement pas été conservé; cette capture permit à Eschricht de constater que l'estomac de lun d'eux renfermait les restes de quatorze Phoques et de treize Marsouins, tant petits qu'adultes. Cet animal pénètre également dans la Baltique. Le 12 octobre 1630 on en a capturé un près de Hela, sous le nom de Grosser Schwertfisch. Le 23 janvier 1863, une femelle de 20 pieds de longueur s’est échouée dans la baie de Travemund; M. Meier ne déter- mine pas l'espèce, mais à en juger par la taille, cela ne peut être qu'un Orque {. Il paraît que les Orques arrivent régulièrement aussi sur les côtes de Norwège, accompagnant les bancs de Harengs. Les pêcheurs connaissent ces bancs, aux Mouettes qui volent au- ? MEIER, Archiv. des Vereins in Mecklenburg, 1865, p. 290, ( 463 ) dessus d’eux: les Orques se bornent à côtoyer les bancs comme des chiens bergers qui suivent les troupeaux de moutons; il est reconnu qu'au-dessous des Harengs se tiennent les Morues; les pêcheurs laissent tomber leur ligne à travers les bancs de Harengs pour prendre les Morues. Les eaux du Spitzberg sont également visitées par l’Orque; Fréd. Martens en parle et fait mention de sa nageoire dorsale qui est trois fois aussi haute que dans l'Hyperodon, d’après le baleinier de Hambourg. Nous savons aujourd'hui que le mâle seul a cette nageoire extraordinaire, qui lui a fait donner le nom de Gladiateur (Schweerdfish). Malmgren dit que POrca gladiator est parfaitement connu de tous les pêcheurs des côtes de Finmarken et de Spitzhbergen *. Il en a rencontré plusieurs sur son passage. Nous en avons vu d’une très grande taille au Musée de Stockholm qui provenaient de ces côtes. On en voit des squelettes au Musée de Lund et de Greifswald, provenant d'individus capturés dans la Baltique. Le 11 juillet 1869, v. Heuglin a vu, à la latitude de 75°, des Orques, à côté d'énormes Grindewalls et de Balénoptères. L'Orque visite aussi la Nouvelle-Zemble. Le Musée de Copenhague en possède plusieurs squelettes remarquables par la taille, de la mer Glaciale et de la mer Blanche. Nous savons, par Pallas, que l'Orque est non moins répandu dans le grand océan Boréal, et il cite sa présence dans la mer d'Okhotsk et dans la mer de Chine. Le savant voyageur russe parle de la couleur de ce Cétacé et de la grande taille de la nageoire dorsale. C’est, dit-il, le plus grand Dauphin de la mer d’'Okhotsk. Middendorf a signalé également la présence de l'Orque dans la mer Arctique. Nous savons par Malm que Nordenskiold a rapporté par la Vega des ossements d'Orque, et le savant naturaliste de Gothen- # Troschel's Archiv, 1864, p. 89. { 464 ) bourg a même proposé d’en faire une espèce nouvelle dédiée à Eschricht. On le voit aussi de l’autre côté de l'Atlantique; il y visite, pendant les mois d'été, les baies des côtes de Massachusetts, par small schools, dit M. Allen. D’après M. True il a été souvent observé sur les côtes de la Nouvelle- Angleterre. Bessels, pendant son voyage forcé à bord d’un baleinier dans le détroit de Lancaster, a vu une schocl de sept à huit têtes et il a été frappé de la longueur de la nageoire dorsale, qui n’a pas moins du tiers de la longueur totale de l'animal. Il ne fait mention que de la nageoire du mâle. L'Herminier a reconnu lOrque dans la mer des Antilles. Le Musée d’Edimbourg en a reçu des ossements de Terre- Neuve. Ot. Fabricius ne cite pas l’Orque parmi les Cétacés qui visitent la côte du Groënland, mais il est à remarquer qu’il le désigne sous un autre nom; son Physeler microps en a tous les carac- tères. La présence de cet animal dans ces régions est du reste reconnue par Holbôll ; l’Orque (Ardluk), comme le Braunfisch (Nisa), se trouvent au nord comme au sud du Groënland, dit-il ; il ne les a pas vus arriver avant le mois de mai et ils quittent seulement en hiver. Eschricht pense que ces animaux vont indifféremment là où ils rencontrent des Cétacés ou des Phoques. L'Orque se montre çà et là en petites troupes, dit le coura- geux gouverneur danois, et il ne vient pas souvent à la côte. Les récits des baleiniers s'accordent parfaitement sur le moment de l’arrivée de ce Cétacé, qui ne fait son apparition sur les côtes du Groënland, ainsi que nous venons de le voir, que pendant l'été. Comme nous venons de le dire, on y voit parfois de singuliers et sanglants spectacles : Holbôll a vu, près de Godhavn, toute une gamme de Beluga, acculée dans une baie par les Orques, et tous jusqu'au dernier furent littéralement mis en pièces. On a vu des Orques attaquer un canot peint en blanc pendant qu'on était à la pêche du hareng, le prenant pour un Beluga. L’Orque ne se tient pas uniquement dans les régions tem- ca ds | 465 ) pérées : Holbôll en a vu qui étaient gelés dans les baies. Il parle aussi de trous qu’on laissait ouverts dans la glace pour y attirer les Orques et les tuer sur place quand ils venaient y prendre l'air. Il ne fréquente généralement pas la glace, dit R. Brown, mais le Mysticelus s’y réfugie au besoin pour se soustraire à son ennemi. Les côtes ouest des Etats-Unis d'Amérique sont également fréquentées par l'Orque, et le capitaine Scammon à même cru devoir en faire deux espèces. Le savant baleinier parle d'un Orque du golfe de Georgia, au nord de l’île Van Couver, auquel il donne le nom de Orca atra. Il ne pense pas que ces Cétacés soient confinés dans la mer des latitudes chaudes, mais qu’ils émigrent aussi du nord au sud à lapproche de l'hiver. Le British Museum en a reçu également des ossements du nord du Pacifique. Tilesius fait aussi mention,de leur présence dans cet océan. Le capitaine James Colnett à rencontré l’Orque auprès du Golfe de Panama 1. Le professeur Steindachner a rapporté un superbe crâne des côtes de Californie pour le Musée de Vienne. Eydoux a reconnu la présence de l’Orque sur les côtes du Chili. On a trouvé un Orque au détroit de Magellan : Burmeister lui a donné le nom d'Orca magellanica ; il est voisin de l’Orca capensis, dit-il, mais plus grêle. Il à été trouvé près de l’em- bouchure de l’Arroyo de Christiano muerto. (Lat. s. 38°50°.) Le crâne et les nageoires sont conservés 2. Paul Gervais a eu l’occasion de comparer d’autres crânes du détroit de Magellan avec ceux d'Europe et de Tasmanie, et il fait remarquer qu'ils tiennent à la fois des uns et des autres. Ce qui veut dire qu'il n'existe pas de différences notables entre -eux à. * À voyage lo the South Atlantic, London, 1798. 3 Ann. nal hist, août 1866. 3 Journal de Zuologie, vol. 1, p. 69. ( 466 } Sa présence a été reconnue aussi au cap de Bonne-Espérance et sur les côtes occidentales d'Afrique. Viletti (1818), 3. Ver- reaux et Castelnau l’ont parfaitement reconnu dans ces parages. Castelnau a capturé une femelle le 30 septembre 1856, au cap Town (Afrique). Le British Museum en a reçu plusieurs crânes du Cap. L'Orque fréquente également la mer des Indes. M. Holsworth, qui a fait la pêche aux perles sur la côte ouest de Ceylan, a vu, le 7 avril 1868, un Cétacé de 25 pieds de long; le dessin, qu'il en publie, représente une nageoire dorsale droite et pointue comme un glaive au milieu du dos; cette nageoire n’a pas moins de à pieds de hauteur, et il accorde à l'animal 25 pieds 1. Blyth a reconnu également l’'Orque dans la mer des Indes. Le British Museum a reçu un beau crâne des îles Seychelles, Pendant le voyage au pôle sud de Dumont d’Urville, Dumoutier a vu, dans les parages des îles Powell et des Nou- velles-Shetland méridionales, des Souffleurs qui sont de véri- tables Orques, ayant un grand aileron dorsal droit, aigu, non courbé en arrière; Dumoutier dit dans ses notes : Nous les avons encore aperçus auprès de plusieurs Baleines, allant comme elles en petites troupes ou par couples, ce qui nous a fait penser qu’ils pouvaient bien être dans la saison de leurs amours ou dans la période de parturition ou de lactation. La coloration de ces Cétacés, dont Dumoutier parle dans ses notes, indique suffisamment que ce sont bien des Orques. La nageoire dorsale était très grande, triangulaire, très aiguë, plantée au milieu de la longueur du dos, haute de 2 à 3 pieds. Le Dr Fischer a publié une notice sur ces Orques observés durant le voyage de l’Astrolabe et de la Zélée ?. Seraient-ce aussi des Orques dont parle le capitaine Jouan, sous le nom de Delphinus feres, Blackfish, dont il a rencontré * Note on a Celaceean observed on the West Coast of Ceylan, Proc Zoo. Soc. april 1872, p. 585. ? Journal de Zoologie, vol. 5, p.146, 1876. (467) des individus, le 7 mars, sous l'équateur, par 31° longitude ouest, et 39° sud, aux.îles S'-Paul et Amsterdam 1? Nous n’oserions l’aflirmer, mais en tout cas c’est probable. L’Orque pénètre dans la mer d’Okhotsk, avons-nous dit plus haut. Middendorf y a vu une gamme de quinze individus qui poursuivait des Baleines le long des côtes. C'était le 13 juillet. Il a pu les suivre à l’aide d’une longue-vue 2. Le capitaine Scammon fait également mention de la pré- sence d'Orques dans cette mer. La fréquence de ce redoutable carnassier correspond sans doute avec la présence de la Baleine du Japon et du Rhachianecte glauque, qui visitent régulière- ment cette mer intérieure. Le savant baleinier américain a eu la chance d’en capturer un dans les parages de l'ile de PAscension, qui avait son esto- mac encore rempli de jeunes Phoques. La mer du Japon renferme également ce terrible carnassier ; Schlegel en fait mention dans la Fauna Japonica, et il ne le distingue pas de l’espèce ordinaire. L'Orca est si bien connu des Japonais, qu’on le nomme Sakamata-Kuzira, dit Schlegel, à cause de sa nageoire dorsale élevée et sa ressemblance avec une lame de sabre. Il le désigne sous le nom de Delphinus Orca. Chamisso le cite également dans ces régions. Le capitaine Scammon signale également la présence de lOrque dans le détroit de Behring et dans l'océan Arctique. . Le nom donné à un Cétacé des côtes d’Alaska, ainsi que Ja description qui en a été faite, ne laissent pas de doute que l’'Orque fréquente également les côtes de PAmérique russe. Moseley fait mention de Cétacés très communs, formant de petites gammes, près du cercle antarctique, que nous croyons devoir également rapporter à des Orques; ils ont une haute nageoire dorsale, dit-il, et la coloration de la peau est conforme 1 Mém. Soc. imp. de sc. nat. de Cherbourg, 1861. 3 Mippenvorr, Sibirische Reise, Bd. Il, p. 125, 1453. (468) à celle de ces Cétacés. (Smaller cetaceans probably of a Kind of GRAMpuS (Orca) very common, dit-il; il en a vu in Small Schools). M. Flower a reçu des restes d’Orque de Tasmanie, et le capi- taine Berard en a rapporté de la Nouvelle-Zélande pour le Muséum de Paris. En résumé, Villetti comme Verreaux et Castelnau l'ont signalé au cap de Bonne-Espérance, Blyth dans la mer des Indes, Holsworth sur les côtes ouest de Ceylan, Sicbold et Chamisso dans la mer de Chine, l’Herminier dans la mer des Antilles, Burmeister et d’autres dans le détroit de Magellan, Eydoux sur les côtes du Chili et du Pérou, Colnett dans le golfe de Panama, le capitaine Jouan aux îles S'-Paul et d'Amsterdam, Dumont d’Urville aux îles Powell, le capitaine Scammon à l’île de l’Ascension, le capitaine Berard à la Nou- velle-Zélande, Moseley près du cercle antarctique, Tilesius et Steindachner dans locéan Pacifique et sur la côte de Cali- fornie. Il semble résulter de tout ce qui précède que l'Orque n’a pas de station régulière, et qu'il ne visite le Groënland ainsi que la mer de Baflin que pendant l'été. MUSÉES. Les Orques sont généralement bien représentés dans Îles Musées, soit par des squelettes complets, soit par des têtes isolées. Nous allons passer en revue, suivant l’ordre alphabétique, les Musées des villes où l’on en conserve des restes. A Amsterdam, deux têtes d'Orque sont conservées au Musée Vrolik, aujourd’hui la collection du Jardin Zoologique. Il est probable qu’elles viennent des côtes des Pays-Bas. Le Musée de Bordeaux renferme, entre autres, le squelette d’un animal capturé à l'embouchure de la Gironde, qui a été étudié par M. Souverbie. ( 469 ) À Boulogne-sur-Mer on conserve divers ossements, notam- ment une tête, trouvée dans un terrain argileux ; on la suppose enfouie avant l'occupation romaine (Gervais). En Belgique, nous trouvons au Musée royal, à Bruxelles, un squelette d’adulte et un autre d’un jeune animal provenant d'individus échoués sur les côtes d'Ostende. Au Musée de Buenos-Ayres, on possède le crâne, avec une nageoire dorsale et une caudale, d’un Orque (Orca magellanica, Burm.) trouvé près de l'embouchure de la rivière Arrayo de Christiano muerto. Il existe aussi des restes d'Orque au Musée de Cambridge ; d’autres au Musée de Christiania. A Copenhague il y a quatre beaux squelettes d'Orques, dont deux de Feroë et de Jutland d’un très grand individu : on voit exceptionnellement cinq os carpiens fort distincts dans Ja nageoire pectorale de l’un d'eux. En recevant le squelette de celui qui contenait 15 Phoques et 13 Marsouins dans son estomac, le savant Directeur mr'écrivait : Voilà le quatrième squelette de mon Musée. Le Musée d'Édimbourg en possède un crâne d’énorme dimension, provenant de Terre-Neuve; le même Musée possède le fœtus figuré par le professeur Sir W. Turner. Gand possède un squelette des environs d’Ostende. À Gôteborg on conserve, au Musée, le squelette de l'animal qui a péri, le 18 décembre 1868, sur les côtes de Suède. Le Musée de Greifswald renferme le squelette d’un animal capturé dans la Baltique. Au Musée de Leyde on voit deux squelettes : l’un des deux provient de l’animal échoué, en novembre 1841, à Wyk-aan- Lee. On y voit également l’Orque du Japon et deux autres têtes sans indications d’origine. Au Musée de l’Université de Liège on trouve le squelette complet d’un jeune Orque capturé sur les côtes de Zélande. Le D' Gray a publié, en 1870, une note sur les crânes d’Orques conservés au British Museum. Il cite d’abord un beau crâne des îles Seychelles, qu’il rapporte à l’'Orca capensis ; un ( 470 } crâne d’adulte des côtes d’Essex et un autre sans mandibule, rapporté à l’Orca latirostris ; un crâne de la collection de la Société Zoologique, sous le nom d’Orca pacifica, du nord du Pacifique. Une tête d’Orque de ce musée provient de la collec- tion de Cross et une autre de la collection de Sir W. Turner. Le British Museum possède un autre crâne d’origine incon- nue, auquel Gray a donné le nom d’Orca intermedia; il comprend encore un squelette complet de 20 pieds de long, offert par M. R. Peara, provenant d’un animal capturé à Wey- mouth, puis un beau crâne du cap de Bonne-Espérance. Le Musée royal du Collège des chirurgiens possède le crâne rapporté de locéan Pacifique par le capitaine Delvitte. A Louvain, nous avons un squelelte d’un animal adulte recueilli sur les côtes d’Ostende. Au Musée de l'Université de Lund on conserve ua squelette du cap Nord, un de Helgoland, et un autre du mâle qui a péri en mars 1851, à Osters Jôün. On y conserve en outre une colonne vertébrale, des côtes et un radius. Au Musée de Marseille on conserve divers oSsements, surtout des vertèbres sans indication d’origine, provenant sans doute d’un animal qui a péri dans la Méditerranée. On voit aujourd’hui dans les galeries du Muséum de Paris un squelette de mâle et de femelle. Il est assez étonnant, comme nous l'avons fait remarquer déjà, que Paris ne possé- dait pas, il y a quelques années, un seul squelette de ce Cétacé. Le plus complet ne comprenait que le crâne et une partie de la colonne vertébrale; c'est le même qui est placé encore aujourd’hui debout au fond de Ja salle, à côté de la tête du Cachalot. Les dents sont +, quoique la figure donnée par Cuvier n’en représente que et 1. La main des Grampus ressemble à celle des Tursio, dit Fischer. (S14 L1Q Z MOEURS. Les individus échoués à l’Aiguillon (Vendée) poursuivaient des Muges ; à diverses reprises on en a pris dans des filets de pêcheurs, ce qui fait bien supposer que les Grampus poursui- vent les poissons. Le docteur Fischer a eu l’occasion de visiter l'estomac d’un mâle, capturé dans le golfe de Gascogne, et qui ne contenait que des restes de Seiches et de Calmars. Les observations ne sont pas encore assez nombreuses pour dire que ces animaux vivent par couples à une certaine époque de l’année, et par gammes pendant une autre époque; mais les faits connus jusqu’à présent semblent le faire supposer. L'animal pris dans une madrague, non loin de Nice, et qui a été dessiné par Laureillard, appartenait à‘ une gamme de onze individus. En 1864, Paul Gervais annonce à l'Académie qu'une bande, dont il ne dit, pas même approximativement, le nombre, a pénétre, en 1862, dans le port de Carry (Bouches-du-Rhône; 1. Le Grampus griseus vit en bandes très nombreuses dans la Méditerranée, dit M. Fischer. Le 27 Juillet 1881, se trouvant sur les côtes du Rif (Maroc) et à peu de distance du pénitencier espagnol de Penon de Velet, Fischer observait une bande de Grampus, composée d’une centaine d'individus, présentant les colorations les plus variées ; plusieurs petits nageaient à côté de leurs mères. Cet animal reste plus longtemps à la surface de l’eau que le Dauphin ordinaire; la pointe de son aileron se dresse sur les flots et décèle sa présence, dit auteur de cette note. M. Richiardi, directeur du Musée de Pise, rapporte que l’on a capturé, au milieu du mois de juillet 1879, sur la côte de Sicile, près de Palerme, quatre individus de cette espèce, et deux en mai 1881. ‘ Comptes rendus . .., novembre 1864. { 529 ) Il n’est pas douteux qu'ils vivent et voyagent aussi par couples. Le professeur Môbius fait mention d’un mâle et d’une femelle, capturés, comme nous venons de le dire, à deux jours d'intervalle, entre l'embouchure de l’Elbe et de lEider. La femelle, dont parle le professeur Flower, a été d’abord capturée seule et, après elle, on a capturé une autre femelle plus jeune que la première. Les mâles se sont sans doute tenus plus au large. Ainsi nous voyons un individu seul, capturé sur les côtes d'Alger, à la fin de janvier 1876; une femelle seule, dans un filet à maquereaux (28 février 1870), près du phare d’Eddystone à l’entrée de la Manche ; encore un autre, jeté seul sur la côte, dans la baie d'Arcachon, le 22 juillet 1867. On n’est pas éloigné de croire, d’après ces observations, que le Grampus griseus vit en compagnie (gamme) pendant une partie de l’année, et se réunit par couple à l'époque des amours, jusqu’à la mise bas. Il y a sans doute aussi des solitaires, des mâles répudiés, mais qui sont beaucoup plus rares. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Pour determiner la distribution géographique, nous ne pou- vons juger que d’après les captures et les échouements, puisqu'il n’y a pas de pêcheries de cette espèce. Nous connaissons aujourd’hui des captures sur tous les points de la Méditerranée, même dans l’Adriatique; nous en connais- sons également sur les côtes du Portugal, puis à l'entrée de la Manche, sur les côtes de France comme sur celles d'Angleterre ; nous en connaissons dans la mer du Nord jusqu’à la côte de Suède, et enfin de l’autre côté de l'Atlantique, sur les côtes des États-Unis d'Amérique, au cap de Bonne-Espérance, au Japon et dans les eaux de nos antipodes *. 1 Nous avons dit plus haut dans une note, qu'on vient de capturer un individu aux Açores. La présence du Grampus de l’autre côté de l'Atlantique a été reconnue par le professeur Copé, qui a signalé des captures sur les côtes de Massachusetts et de la Nouvelle-Angleterre, où il n’est même pas très rare f. On le voit ensuite sur les côtes ouest d'Afrique jusqu'au cap de Bonne-Espérance (M. Flower a reçu une tête du Cap), et on s’est demandé s'il ne tient pas son quartier d'hiver en Europe et son quartier d'été sur les côtes d'Afrique. La tête qui lui a été envoyée du cap de Bonne-Espérance a suggéré cette idée au directeur du British Museum. Le Dr Fischer croit, au contraire, que ce Cétacé vient prendre son quartier d'été dans le golfe de Gascogne, à l'inverse des Tursiops et des Marsouins qu’on n'y voit qu’en hiver. Le professeur Môbius ne partage pas l'avis que le Grampus se rend au nord pendant l'été; il croit que la côte du Holstein est jusqu’à présent le point le plus septentrional où l’on ait observé cette espèce. La présence du Grampus a été également constatée dans les eaux du Japon; Schlegel en fait mention dans la Fauna Japo- nica, et Gray assure qu'il doit y être assez commun, puisqu'il y est désigné sous un nom particulier (Sakamata). À. Murray, dans son livre sur la distribution géographique des mammifères, dit : The common Grampus tumbles through the heavy waves all the way from Britain to Japan, vid Nort-Westh passage. Depuis que le Muséum de Paris a reçu un squelette du Japon, il ne reste plus de doute sur l’identité de l'espèce. Le capitaine Scammon cite également le Grampus parmi les Cétacés de l'océan Pacifique. Voici en somme le relevé des captures faites en Europe : d'abord nous voyons quelques individus pris dans la Médi- terranée. Dans la baie Saint-Jean, près de Nice, les pêcheurs capturent un mâle et une femelle. 1 Core, Proc. acad. nat. sc. Philadelphia, 1876, p. 129, pl. HI ‘ o91 ) Pendant son séjour à Nice, Laureillard voit des individus des deux sexes pris dans des madragues. Celui dont parle Risso est pris par les pêcheurs de Ville- franche (13 juin). Un autre est signalé dans les environs de Palerme, par Rizzio, mais sans indication de date. Les côtes d'Alger ont été également visitées par une femelle qui a été prise en janvier 1876. P. Gervais a fait mention d’un Grampus pris à Carry (Bouches- du-Rhône). Au fond de lAdriatique, on en a capturé un à Chioggia (Venise), dont le squelette est conservé à Vienne (Autriche). Sur les côtes du Portugal, un individu a échoué en 1879, dont les os sont conservés au Musée de Lisbonne. Un jeune animal a été pris, 11 Y a quelques années, à Concarneau (Finistère), dont le squelette a été préparé par M. Guillou ; il est aujourd'hui au Muséum de Paris. Il possède trois ou quatre dents à la mandibule, mais qui sont encore toutes cachées dans les gencives. Au mois de juin 1822, quatre individus, trois adultes de 3,25 et un Jeune de 2,35 (d’Orbigny), échouèrent à l’Aiguillon (Vendée), à la poursuite du Wugis cephalus. Le dessin de Fr. Cuvier est fait d’après un de ces Cétacés; il porte le nom de Marsouin de d’Orbigny, Phocæna griseus. C’est la reproduc- tion de la figure qui accompagnait un mémoire de d’Orbigny, sur ces quatre prétendus Marsouins (Fischer:. Le 12 avril 1844, on en a trouvé un sur le rivage de Cazeaux (Gironde), et un autre a été signalé par Laporte. Celui dont parle M. Fischer a été jeté sur la côte dans le golfe de Gascogne, le 22 juillet 1867. Un Grampus griseus, isolé, a été capturé dans la baie de Saint-Michel (côtes de Normandie), le 3 août 1871. Le sque- lette se trouve aujourd’hui au Muséum de Paris. Le 17 février 1873, près de Bussum, côte ouest du Holstein, entre embouchure de l’Elbe et de l’Eider, un couple s’est fait A prendre à deux jours d'intervalle; la femelle d’abord, deux ( 532 ) jours après, le mâle. Celui-ci avait 98 centimètres de plus que la femelle et pesait 470 kilogrammes. Un autre Grampus est venu échouer sur les côtes de Suède, dont le squelette est conservé au Musée de Stockholm. La femelle, disséquée par le Dr James Murie et décrite par le professeur Flower, a été capturée dans un filet à maquereaux, le 28 février 1870, près du phare d’'Eddystone. Elle avait mis bas depuis peu de temps. Le 31 mars suivant, une femelle toute jeune fut prise dans la Manche; on ne connaît pas au juste le lieu de la capture. À laquarium de Brighton on a espéré pouvoir conserver en vie un Grampus pris dans un filet de pêcheur. On en à capturé également un à l'île de Wight. Si nous faisons le relevé de ces captures, nous voyons en janvier une femelle sur les côtes d'Alger ; en février un mâle à l'embouchure de l'Elbe ; le mâle est pris le 17, la femelle le 19, à peu de distance de là. A la fin de février, on prend, à l'entrée de la Manche, à Plymouth, deux femelles, dont une venait de mettre bas. Au mois d'avril, le 12, on en capture un à Caseaux (Gironde), en mai, deux, sur les côtes de Sicile, en juin, le 15, un à Villefranche, et le même mois trois adultes et un jeune sur les côtes de la Vendée. Au mois de Juillet, on en voit quatre sur les côtes de Sicile et on en prend un dans la baie d'Arcachon. Le 3 du mois d'août, il y en a un qui échoue sur la côte de Normandie (baie de Saint-Michel), et on en capture un au mois de septembre à Concarneau. Il est diflicile de voir dans ces diverses captures un indice quelconque de pérégrination périodique. Tout ce qu'on pourrait conclure de ce relevé, c’est qu'il semble y avoir une apparition plus ou moins régulière au printemps et en automne dans le golfe de Nice, ce qui corres- pond peut-être avec l'apparition de certains poissons dans ces parages. (533) MUSÉES. Les ossements de ce Dauphin, un des plus rares et des plus intéressants, a dit le Dr Fischer, sont répartis aujourd’hui dans divers Musées. Nous allons énumérer par ordre alphabétique les villes qui en conservent dans leurs collections. Le squelette de l'animal étudié par le Dr Fischer est au Musée d'Arcachon. Nous croyons avoir vu un crâne de Grampus au Musée de Brest. A Brighton on conserve le squelette d’un animal capturé vivant dans la Manche qui y a vécu peu de temps dans le grand aquarium de la ville. À Bruxelles nous conservons aujourd'hui au Musée royal d'histoire naturelle le squelette de la femelle capturée sur les côtes d'Alger. Giglioli en a vu des exemplaires à Gênes et à Zara. Les deux squelettes de mâle et de femelle, capturés sur les côtes du Holstein, sont au Musée de Kiel. Le Musée de Lisbonne renferme un beau squelette prove- nant d’un animal échoué vers 1879 sur les côtes de Portugal. Nous l’avons vu en 1880. Au Musée du collège des chirurgiens à Londres, se trouvent les squelettes des individus qui ont été étudiés par M. Flower. On y conserve également le squelette d’un animal capturé à l'île de Wight (1845). Au British Museum, on conserve le squelette d’une femelle adulte et celui d’une jeune femelle, toutes les deux prises dans la Manche. On y conserve en outre un autre du cap de Bonne- Espérance et un crâne d’origine inconnue. On en voit aussi des ossements au Musée de Lund. Il existe un squelette au Musée de Marseille d’un exemplaire tué en 1862, au milieu d’une bande, dans le port de Carry (Bouches-du-Rhône). A Nice, on conserve la peau et une partie de la mandibule de celui du golfe Saint-Jean. ( 094 ) A Paris, au Muséum, on possède depuis longtemps des osse- ments envoyés par Risso; on y voit aussi la tête de la femelle capturée à Brest, le squelette envoyé de Nice, par Laureillard, le crâne d’un animal pris à la Rochelle, un autre de Concar- neau, et, depuis peu, un squelette de Mont-Saint-Michel 1. Il existe un crâne au Musée de la Rochelle. Au Musée de Pise se trouve le squelette complet dont Richiardi a fait mention dans les Actes de la Société de Tos- cane. A Vienne, en Autriche, on conserve, comme nous l’avons dit plus haut, le squelette de l'individu capturé sur les côtes de Dalmatie. A ces squelettes des mers d'Europe, nous pouvons ajouter celui que le Muséum de Paris a reçu du Japon, ainsi que le crâne, rapporté du cap de Bonne-Espérance, qui est au Musée du Collège royal des chirurgiens, de Londres. Celui de la Nouvelle-Zélande est conservé au Colonial Museum de Wellington, sous le nom de Grampus Richardsoni. DESSINS. La première figure est de Hunter : elle accompagne son Mémoire sur les Cétacés ?. Bonnaterre l’a reproduite planche XIL, figure 2, sous le nom de Delphinus ventricosus 3. Gervais pense que c’est le même animal que Duhamel à représenté planche X, figure 5. Plüsieurs auteurs ont publié depuis des figures du même Cétacé ; Cuvier en a reproduit une, en 1812, dans les Annales du Muséum (t. XIX, pl. I, fig. 1-4); elle lui a été envoyée de Brest, avec le squelette. Cette figure a été copiée par Schreber. 1 [1 faut y ajouter encore celui d'un individu qui vient d'être pris aux Acores. 2 Phil. Transact., 1887, pl. XVIL. 5 Célologie, p. 25. rie ( 59 ) La figure 4 est faite d’après un dessin de Risso, par consé- quent, d’après un animal de la Méditerranée. Risso en a publié un dessin dans son Histoire naturelle de l'Europe méridionale, tome IT, planche L, fig. 1. Un autre dessin, fait par Laureillard pendant son séjour à Nice, en 1820, a paru dans l'Histoire naturelle des Cétacés, de Fréd. Cuvier, planche XII, figure 1. Cette figure a été publiée d'abord dans l'Histoire naturelle des Mammifères, de Fréd. Cuvier. La figure de l'individu pris près d'Eddystone a été publiée dans Rep. Plym. instit., IX 1. I. Murie a accompagné sa Notice sur le Grampus de Risso d’une planche représentant tout l’animal, et il a intercalé dans le texte le diagramme de l'ouverture des évents et la cavité du larynx. Le plus beau dessin est celui qui accompagne le mémoire ce M. Flower ; le squelette y est également représenté. Cuvier a publié le premier le dessin de la tête dans ses Recherches sur les ossements fossiles, volume X, planche XXI, figure 1-2. Gervais a donné le dessin du crâne rapporté par Laureillard, dans sa Zoologie et paléontologie françaises, planche XXXVIT, figures 1-2 et 5. Dans l’Ostéographie des Célacés nous avons publié le squelette. Planche LXIV, figures 4 et 4°, représente le crâne d’un jeune animal des côtes de Bretagne. Ce qui prouve la supériorité des dessins des os sur la repré- sentation de l’animal entier, ce sont les figures de G. Cuvier, de Risso et de Laureillard du même animal, et qui semblent indiquer trois espèces différentes. Il existe une photographie du squelette d’un individu cap- turé dans la Méditerranée 2. ? BackwiL, Risso's Grampus, Rep. Pix. Ixsr. IX, avec pl. ? Une belle photographie vient d’être faite aux Açores, par le lieutenant M. Francisco Affonso Chaves, de l’armée Portugaise, en garnison à Ponta Delgada. { 36 }) PARASITES. Le Grampus griseus des côtes d'Alger (1876) renfermait dans les voies respiratoires des Strongles voisins de ceux qui vivent dans le Marsouin, et que Diesing a désignés sous le nom géné- rique de Prostecosacter. Ce Strongle se termine en arrière, dans les deux sexes, en une massue ; les pénis sont fort courts et on voit, à la base de l'extrémité caudale du mäle, deux lobes médiocrement développés. Nous croyons ce ver nouveau pour la science et nous avons proposé pour Jui le nom de Strongylus nodosus. 11 à de 3 à 4 centimètres de longueur f. 1 Van BexEDEN, Bull. de l'Académie roya'e de Belgique, avril 1876. GENRE LAGENORHYNCHUS. Les Lagénorhynques ont été longtemps confondus avec les Dauphins véritables; ce n’est qu’en 1846 que Gray a proposé ce genre nouveau, sans en établir cependant les caractères distinctifs. Le genre Lagenorhynchus se distingue surtout par ses os palatins, comme M. Flower vient de le montrer. Ces os se font remarquer par leur grande largeur et par le quart de cercle qui forme le bord postérieur des deux os réunis. Les Lagénorhynques sont de tous les Cétacés ceux qui ont le plus grand nombre de vertèbres ; on en compte jusqu’à 94. Le Rostre est eflilé; à cause de ce caractère, ces Cétacés ont été confondus longtemps avec le Dauphin ordinaire. Deux espèces nagent par bandes nombreuses dans l'Atlan- tique septentrionale. Les poils des moustaches des fœtus sont au nombre de six ou sept. Les Lagénorhynques n’ont pas les caractères aussi nettement tranchés que les genres précédents ; nous n’oserions nous pro- noncer avec la même confiance au sujet de leur répartition géographique. Nous pouvons dire toutefois que les deux Lagé- norhynques de notre hémisphère sont plus méridionaux que le Beluga et le Narval ; les baleiniers assurent que ces derniers retournent à leurs régions polaires, quand les Lagénorhynques font leur apparition. Rob. Brown les à reconnus sur les côtes du Groënland, et depuis longtemps on les signale aux iles Loffoden ; ils font une apparition périodique dans la mer de Davis. Ils paraissent aussi périodiquement sur les côtes des Féroc. 31 ( 938 ) On en a vu souvent apparaître sur les côtes des iles Britan- niques et sur nos côtes continentales, celles de Norwège, de Suède et ils pénètrent jusque dans la baie de Kiel. On en a vu aussi entrer dans le Canal Saint-George. Les deux espèces d'Europe sont des espèces septentrionales plutôt que méridionales. Le Lag. albirostris serait plus com- mun dans le détroit de Davis et la mer de Baflin ; l’autre espèce serait, au contraire, moins septentrionale et répandue surtout aux Féroë. Le professeur Lutken vient de faire la comparaison des deux espèces septentrionales en comparant le crâne, les dents, la colonne vertébrale et les nageoires pectorales, et il signale des différences entre toutes ces parties du corps; les vertèbres du Lag. albirostris varient de 88-94, celles du Lag. acutus de 78 à 82. Il fait remarquer, en même temps, que Malm attribue à un squelette du cap Horn, le Lagenorhynchus clanculus, seu- lement soixante et onze vertèbres. Il en résulte, dit le profes- seur Lutken, que la diagnose du genre, basée sur le grand nombre de vertèbres, devrait être modifiée. On voit aussi les Lagénorhynques de l’autre côté de l’Atlan- tique; des gammes entières se sont perdues sur les eôtes de la Nouvelle-Angleterre ; le Musée Smithsonien en possède deux squelettes provenant de ces parages. On a signalé des Lagénorhynques également au cap de Bonne-Espérance et sur la côte de Californie ; mais ce sont des espèces particulières à ces régions. On à donné le nom de Lag. obliquidens à une de ces espèces qui fréquente ces parages. On conserve au British Museum les ossements de cinq espèces différentes : les Lag. albirostris et acutus, de l'Atlantique boréale ; le Lag. electra, de la mer des Indes; le Lag. fitzroyi (rostre et mandib.), de la côte de Patagonie: le Lag. elanculus, de l'océan Pacifique. > 20 fe il LAGENORHYNCHUS A LBIROSTRIS. LITTÉRATURE. 3. €. Gray, Zool. of the voyage of Erebus and Terror, p. 54. 1839- 1845. 3 E. Gray, Ann and Mag. Nat. Hist., vol. 17, p. 84. 1846. Th. Brightwell, Ann. and Mag. Nat. Hist., Are ser. vol. XVII. D.F Eschricht, Ayl. danske vid. selsk. Afhand, Bd., XI, p. 297. 1846. D.F. Eschricht, Comples rendus de l Acad. des sc , juillet 1858. M. Claudius, Dissertatio de Lagenorhynchis, Kiliæ. 1855. Van Benecden, Recherches sur la faune littorale de Belgique, Célacés, Méu. Acao. Rr. BezGique, t. XX XIE, pl. I. 1860. C. 3. Sundevall, Ofvers. of K. Welensk. Akad. Forh. 1862. Th J. Moore, On Lagenorh. albirostris, ANN. ax Mac. Nar. Iisr. p. 268, London, 1865. Cromer, Ann. Nat. Hist., vol. XVIII, 1866. J. Murie, Voles on the while-beaked botllenose, LiNNEAN Sociéry’s Journaz, ZoozoGy, vol. XI. Proc. Zool. Soc., vol. XI, 1571. A. WW. Malm, /valdjur à Sveriges Muscer, K. Wet. Akad. Handl. Bd, 1X, 1871. 3. Sparre Schnelder, Tromsô Museums Aarshefter. Tromsô, 1878. (540) JS. W. Clark, Proc. Zool. Soc., London, 1876, p. 686. R. Collet, Vyt Mag. for Naturvidenskab, 1876. Jul. Munter, Mitth. a. d. Naturwiss. Vereine von Neu- Vorpommern und Rügen (Jahrgang VII). 1876. D. J. Cunningham, Description of a young specimen of the Delphinus albirostris, Proc. Zoo. Soc., p. 679. J. Sparre-Schneider, 7romsû Museums Aarshefter. Tromsô, 1878. Southwell, Delphinus albirostris a Yarmouth. Tue ZooLocisr, octobre 1879. 3. W. Clark. Sur un Lagénorhynque qui a lé capturé récemment à Ramsgate, Proc. Zoo. Soc., april 1879. J. M. Campbell, On (he occurence of the Wlite-beaked Dolphin (Lagenorhynchus albirostris, Gray) on the east coast of Scotland, Tue ScorrisH NaruraLisT, Vol. 6, 1880. WW. Flower, Pruc. Zool. Soc., London, 1885, p. 489. Cleland, Journ. of Anat. and Phys, XVII, 1884. Van Bencden, Bulletins Acad. roy. Belg., t. VIH, n° 12. Thom, Southwelt, Votes on the Wlhite-beaked Dolphin (Lag. albiros- tris). Trans. NoRr. AND NoRw. NATURALIST’S SOCIETY, Vol. IV, 1885. Southwell, While-beaked Dolphin (Lagenorhynchus albirostris) of Lowestoft. The Zoologist, vol. 10, septembre 1886. Max Weber, Ueber Lagenorhynchus atbirostris. T'ydschrift der Nederl. Dierkundige Vereeniging, Deel 1, 9° série, Leyde, 1886-1887. Ch. Fr, Lütken, Kriliske Sludier over nogle Landhvaler af Slægterne Tursiops, Orca og Lagenorhynchus. Kiobenhaven, 1887. (54) HISTORIQUE. En 1846 Brightwell a décrit un Dauphin sous le nom de Tursio, d’après une femelle prise non loin de Yarmouth. — Peu de temps après, Gray vit dans ce prétendu Tursio une espèce nouvelle à laquellé il proposa de donner le nom d’A/bi- rostris, tout en élevant l'espèce nouvelle au rang de genre. — Il donna le nom de Lagenorhynchus à cette nouvelle division générique. L'année suivante Eschricht reçut un squelette de ce même Dauphin et, lui trouvant 94 vertèbres, le décrivit comme nou- veau sous le nom de Delphinus ibsenii. On voit que les Cétacés, même de nos parages, étaient encore peu connus 1} y a quarante ans. En 1852 un Dauphin est capturé dans le port de Kiel et le docteur Claudius en fait le sujet d’une Dissertation inaugurale ; Claudius y reconnait le Dauphin signalé par Gray et le décrit sous le nom spécifique d’Albirostris. Il fait remarquer que Schlegel distinguait parmi ces Dauphins, des Tursio, des Mar- souins et des Rhinodelphines et il en expose les synonymies, les caractères distinctifs et les lieux où ils ont été capturés. Il y a deux espèces dans ce genre, dit-il, le Delphinus Eschrichtii et le Delphinus albirostris. En 1851, à la fin du mois d'avril, les pêcheurs d’Ostende capturèrent une espèce de ce genre, longue de 2,33, qui se faisait remarquer par son rostre tout blanc, par sa tête assez large, ses dents aiguës et ses nombreuses vertèbres. Au mois de mai 1852 une autre femelle fut amenée par les mêmes pêcheurs, et nous en conservons le squelette à Lou- vain. Nous avons fait mention de ces captures en 1860, dans nos Recherches sur la Faune littorale de Belgique. En 1876 à paru un mémoire de Jul. Münter dans les Witth. a. d. naturw. Vereine von Neu-Vonpommern und Rugen, sur le Cétacé qui nous occupe. ( 042 } Depuis lors on a encore capturé divers individus sur les côtes d'Angleterre, à Ramsgate, à Yarmouth, à Great Grimsby, à Lowestoft et sur les côtes d'Écosse. Un mâle, capturé sur les côtes sud de l'Angleterre, a permis à M. James Murie d'étudier l’organisation de cet animal; le savant anatomiste fait connaître plusieurs appareils et représente la cavité de la bouche, une partie dela langue, les muscles et le globe de l'œil. | M. Murie pense que la capsule synoviale de la mandibule manque dans les Delphinides qui nous occupent, comme dans les Balénoptères. Il décrit séparément les reins, le pénis ainsi que les os du bassin. Max Weber a fait une communication sur un individu de cette espèce, à une réunion de naturalistes, tenue à Gorkum, le 11 juillet 1886; il a réuni dans cette notice à peu près tout ce que l’on connaît sur ce Cétacé, à propos d’un mâle échoué le 28 juin 1886 à l’île Vlieland près de Coksdorp. Il a annoncé le 29 novembre 1887 à l'assemblée scientifique extraordinaire d'Amsterdam, à propos de la prise de ce jeune animal, qu'on peut considérer dorénavant ce Delphinide comme une espèce propre à la Faune des Pays-Bas. SYNONYMIE. Delphinus (Lagenorhynchus) albirostris. Delphinus tursio, Brightwell, Ann. a. Mag. of nat. hist., vol. XVIT, 1846. Lagenorynchus albirostris, Gray. Ann. a. Mag. of nat. hist., vol. XVII, p. 84, 1846. Delphinus ibsenii, Eschricht, Kongl. Danske vid. Selskab., vol. XIT, Comptes rend. Acad. sc., juillet 1858. Delphinus albirostris, Claudius, Dissertatio de Lagenorynchis, Kiliæ, 1853. Delphinus albirostris, Van Beneden, Recherches sur la Faune littorale de Belgique, Mém. Acad. roy. de Belg., t. XXXIL, 1860. ( 943 ) D'après Max Weber, Sundevall à décrit le Lagénorhynque albirostre sous le nom de Tursio. Tonninck, des pêcheurs. CARACTÈRES ET DESCRIPTION. La tête se prolonge en une sorte de bec; depuis sa base, toute la tête, le dos, la nageoire dorsale, la base de la queue et le côté du corps jusqu’au milieu des flancs, la nageoire cau- dale et une grande partie de la pectorale sont du plus beau noir. — Le bec est d’un blanc jaunâtre. — Toute la face infé- rieure du corps est d’un blanc luisant, et une bande blanche s'étend sur les flancs, depuis le dessus des yeux jusqu'à la nageoire dorsale en se perdant sous l'abdomen. L'animal atteint trois mètres de longueur. Le mâle déerit par Brightwell ne mesure que # pieds 9 pouces. Le mâle décrit par Clarke, 5 pieds 5 1/ pouces. Celui décrit par M. Weber avait ? mètres 74 centimètres. Le mâle de l'embouchure de la Dee mesurait 9 pieds. M. Weber fait le relevé des mesures de sept mâles et de cinq femelles et trouve un mâle de 2",99 et la plus forte femelle 2,49. Il en résulte que les mâles sont plus grands que les femelles. Le nombre des dents est à peu près le même des deux côtés : le nombre le plus élevé observé par Claudius est de 27, en dessus et en dessous. Le même animal avait aussi le nombre le plus élevé de vertèbres. Le nombre de dents le plus bas est de 22. M. Weber en a observé 25 de son côté. J. Murie en a trouvé 22 et 25. Les dents du mâle adulte étudié par J. Murie, sont au nombre de 94, réparties de cette manière : 5%, 11 y a de plus deux denticules; le Dauphin étudié par Brightwell a le même nombre. Le jeune mâle de Great Grimsby en a davantage, puisque nous trouvons =. Les deux femelles que nous avons reçues d’Ostende en avaient £; Liljeborg en a compté # et Gray +. Les dents varient ainsi entre 22 et 27 en haut et en bas. Le squelette du Collège des chirurgiens provenant de Nor- wège en a 28. La colonne vertébrale compte sept cervicales, dont les deux premières sont soudées ensemble, quinze ou seize dorsales, vingt-trois lombaires et quarante à quarante et une caudales, ensemble quatre-vingt-dix vertèbres ; c’est aussi le nombre trouvé dans le jeune mâle d'Édimbourg et le mâle décrit par Clark. Le nombre ordinaire des vertèbres est de 90. — Claudius en a trouvé jusqu’à 92, Clark 91, Eschricht 94. L'individu de Claudius avait T cervicales, 15 thoraciques et 70 lombo-caudales. Les deux premières cervicales sont également soudées dans le squelette du mâle de Lowestoft décrit par Clark. Le sternum est échancré à son bord antérieur. Willy Kukenthal a figuré une nageoire pectorale de Lageno- rhynchus acutus, d'un embryon de 41 centimètres ; les pha- langes sont 3, 11, 7, 5 et 2; le premier doigt n’a pas de point d'ossification, le second en a six, le troisième quatre, le qua- trième un seul, le cinquième n’en a pas, comme le premier f. Les viscères avec l'estomac ont été décrits par le professeur Cleland 2. >: M. Clark et Max Weber font la description du tube digestif. L'estomac diffère de celui des Marsouins et de celui des Glo- biceps. Le professeur sir Turner vient de publier une notice sur l'estomac de plusieurs Ziphioïdes et Delphinides; il a eu locca- sion de comparer cet organe d’un Lagénorhynque adulte avec celui d’un nouveau-né, et publie le dessin de plusieurs esto- macs à. Nous avons décrit une partie des organes sexuels femelles et nous avons reproduit la face interne du vagin et des intestins grêles pour montrer la disposition alvéolaire de la muqueuse. 1 Anal. Anz , 17 novembre 1888, p. 912. ? Journal of anatomy and physiology, vol. XVII, 1884. 5 Journal of anatomy and physiology, vol, XXIV, après 1889. {545 ) Les moustaches à l’âge embryonnaire sont formées de six ou de huit poils. A en juger par les individus capturés, il y aurait à peu près un nombre égal de mâles et de femelles dans les bandes. D’après un relevé fait par M. Weber, sur douze individus échoués, il y avait quatre femelles et sept mâles. Nous ne connaissons guère de leurs mœurs que le résultat de la visite que nous avons eu l’occasion de faire dans leur estomac. Les deux individus que nous avons eu l’occasion de voir frais à Louvain, avaient leur estomac plein d’arêtes de pois- sons, au milieu desquels se trouvaient des pattes de Pagurus Bernhardii et des opercules de Buccinum undatum. W y avait au moins deux litres d’arêtes de poissons avec des Otolithes en proportion qui appartenaient sans distinction au Merlan (Gadus merlanqus). Ces deux individus, quoique pris l’un en hiver et l’autre en été, avaient lun et lautre l’estomac littéralement rempli d’arètes de la même espèce de Gadus. Sur les côtes de Groënland, les Lagénorhynques font la chasse aux Malotus arcticus et Gadus agilis, aux Céphalopodes et aux Crustacés, dit Holbôll. 11 paraît que ces Delphinides vivent par gammes de plusieurs centaines d'individus. Nous ne connaissons presque rien de précis au sujet de l’époque de leur parturition et des lieux où elle s'effectue. Une femelle, dont le docteur Joass fait mention, était grosse au mois de mai. En juillet 1862, deux femelles pleines, capturées sur les côtes de Suède {à Gullholmen in Bohuslän) portaient chacune un jeune de 3 pieds de longueur. Au mois de juin, Holbôll a vu, sur la côte de Groënland, des jeunes Lagénorhynques accompagnés de leur mère, et au mois d'octobre, dans les mêmes parages, des femelles pleines. En septembre 1881, on a capturé un jeune animal qui avait encore une partie de son cordon ombilical. D’après cela il faut (d46 ) croire que la parturition a lieu au milieu de l'été, sans doute en juin et juillet, dit le professeur Sir Turner. La pêche des Lagénorhynques se fait sur les côtes de Nor- wège. On en prend jusqu’à 1000 et 1500 à la fois. L’Albirostris est celui qui se pêche surtout dans le détroit de Davis. Cette année 1885, au milieu de l'été, on a capturé de 200 à 300 Lagenorhynchus acutus à la fois, près de Bergen. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Robert Brown cite les deux espèces de Lagénorhynques parmi les Cétacés propres aux côtes du Groënland. Il n’est pas douteux que fort souvent ces Dauphins ont été confondus avec d’autres espèces. Les baleiniers, comme les marins, s'accordent à dire que certains Dauphins vivent par bandes nombreuses dans la mer du Nord et lAtlantique septentrionale et qu'ils pénètrent méme dans la Baltique. Nous savons que les Lagénorhynques hantent aussi la mer Pacifique, comme d’autres Cétacés de l'Atlantique. Le cap. Scammon, sous le nom de Common porpoise, désigne un Lagénorhynque; il en a vu apparaître brusquement par milliers en octobre 1872, et pendant une heure on en voyait tout autour du navire aussi loin que l’œil pouvait porter. Eschricht nous apprend que cette espèce paraît régulière- ment dans le détroit de Davis à la suite des poissons passagers, en même temps que le Megaptera boops, les Balenoptera muscu- ius, rostrata et le Phocæna communis. C’est à l’époque où la Baleine et le Narval quittent leur quartier d'hiver pour retour- ner dans les régions polaires. Les marins font mention de gammes nombreuses qui appa- raissent près des côtes de Norwège. Holbüll fait mention du Dauphin delphis qui a paru au nord de Sukkertoppen ; il indique trois endroits où il est connu d'après lui : à Grädefiord, 63° 24, à l’île Stor, près de Frede- rikshaab et près de Nenortalik. On le trouve toujours en société, dit-il, et seulement pendant lété. C’est sans doute un Lagénorhynque qu’il a pris pour le Dau- phin ordinaire. Voici dans quel ordre les principaux Cétacés de la mer de Baftin et du détroit de Davis font leur apparition. Après la retraite des Beluga, des Narvals et des Mysticetus du détroit de Davis, pour reprendre leur quartier d'été au nord, arrivent dans ces mêmes parages plusieurs espèces du sud, qui viennent y faire leur quartier d'été. On voit arriver successivement du sud la Megaptera boops, que lon pêche à Frederichshaab au 64 degré de latitude, puis la Balenoptera Sibbaldii et, après ces deux grandes espèces, la petite Balenop- tera rostrata, puis je Marsouin et après eux le Lagénorhynque albirostre. Il paraît qu’en hiver ce sont les mollusques Hétéropodes et les Crustacés qui dominent dans ces parages, tandis qu’en été ce sont les poissons. Le Braunfisch, que les Groënlandais appellent Nisa, apparait à la fin d'avril sur les côtes du Sud-Groënland et quitte en novembre. Si le froid n’est pas trop grand, il reste Jusqu'en novembre. Ce Braunfisch ou Nisa des Groënlandais ne peut-être qu'un Lagenorhynchus. Holbôll la observé encore au nord de Godhavn, mais il ignore si on le voit encore à Upernavik. Il en a distingué de 6 1} pieds. On le voit toujours par gammes nombreuses. On en prend dans des filets de phoque. On le cite sur les côtes de Tromsoe !. D’après les renseignements fournis, surtout par les cap- tures faites plus ou moins accidentellement, cette espèce appa- rait régulièrement sur les côtes d'Angleterre, pendant les mois de mars et d'avril. 3 ScuxEIDER, Delphinus albirostris, Tromsoe Museums Aarsbftr., 1, avec une planche. _548) Nous avons fait le relevé des différentes captures qui ont été consignées dans les recueils périodiques : nous trouvons d’abord qu’en 1846 une femelle a été capturée sur les côtes de Norfolk, dont le squeletteest conservé au British Museum !. A l'embouchure de la Dee (canal Saint-Georges) on a capturé un mâle en décembre 1862. Un autre mâle a été pris à Liverpool. Un mâle a été également capturé au sud de l'Angleterre en 1871 (Murie) ; le squelette est au British Museum 2. = Un jeune mâle a été capturé aussi par les pêcheurs de Lowestoft (côte de Norfolk) le 26 mars 1867; il est décrit par Clark, P. Z. Soc., 1876, p. 686. On en a pris ég EU côtes d'Écosse 3. M. E. R. Alston n’en avait pas fait mention dans sa Faune d'Écosse 4. En septembre 1879 M. J. Y. Buchanan a pris un individu adulte appartenant à une school, in kilbrennan sound, Firth of. clyde. I musurait sept pieds neuf pouces. C'est le 19 capturé dans les eaux anglaises (British waters) et le premier dans les eaux d'Écosse. En septembre 1880 un jeune mâle a été pris à l'embouchure de la Tay; il a été envoyé a Glasgow (Kelvingrove museum). M. J. M. Campbell en a donné uné description 5. B. Cunningham a acheté de pêcheurs d'Édimbourg un jeune mâle, capturé à Great Grimsby, en septembre 1875. Au mois d'avril 1879, M. Clark a exhibé à la Société zoolo- gique de Londres, un dessin d’un Dauphin mäle non adulte, capturé à Ramsgate. Une femelle de à pieds 7 pouces a été capturée en 1885 sur la côte ouest d'Angleterre et amenée à Yarmouth 6. DONS EMISTE ? Ann.nal hist. 1846. 5 Hardiwicke science Gossip, 1880. 4 Fauna of Scotland. Glasgour, 1880. $ Natural history Society of Glasgow, november 1880, and Scottish naturalist, january, 1881. 6 Note son the Lay. albirostris, TRANS. NORF. NATURALIST'S SOCIETY, VOL. IV, 1885. ( 549 ) Un mâle capturé sur les côtes sud de l’Angleterre a été dissé- qué par James Murie 1. Cunningham fait le relevé des individus capturés et cite sur les côtes d'Angleterre, au sud, le mâle décrit par Murie, sur les côtes de Norfolk, une femelle à Yarmouth, un individu à Cromer (Upscher) et un autre à Lôwestoft (Clark), une jeune femelle à Great Grimsby et un individu dont le sexe n’est pas indiqué, à Hartlepool. Sur les côtes du continent, il cite les deux femelles d’Ostende, deux individus de Kiel, deux femelles à Gullholmen et un à Skanôr. M. Southwell cite vingt-trois cas de captures sur les côtes est et ouest d'Angleterre, de Ramsgate jusqu’à Bell Rock, et sur ce nombre il compte cinq mâles et sept femelles ; pas un seul n’a paru avant le 1° mars ni après le mois de sep- tembre ?. En 1881, Sir Turner a reçu de M. Brotherston, de Kelso, le crâne d’un adulte pris en juillet de la même-année à Berwick 3. En 1883, il a reçu du même naturaliste le crâne d’une jeune femelle, capturée en août, également à Berwick. En 1885, il a reçu du Rév. D'Joass, pour le Musée de l'Uni- versité, le crâne d’une femelle adulte de la côte de Sutherland. L'animal a été trouvé en mai 1882, sept miles à l’est de Galspie. Elle était pleine. En juillet 1888, les pêcheurs d'Édimbourg ont pris une femelle adulte et un jeune mâle sur les côtes du Kincardshire. Turner en a fait l’acquisition et pense que c’est une mère avec son jeune. La femelle mesurait 8 pieds 6 pouces, le jeune mâle 5 pieds 11 pouces. Il y a vingt-cinq ans, deux femelles ont été capturées par les pêcheurs d’Ostende : lune en hiver, l’autre en été. 1 Soc. linn. de Londres, vol XI. 2 SouraweLe, Notes on the White-beaked Dolphin (Lag. albirostris) Trans, norf. and norw. naluralists” Soc., vol. IV, 1885. & Land and water, 16 july 1881, sous le nom de Delphinus tursio. ( 590 ) Au mois de juillet 1862, on a capturé deux femelles pleines sur les côtes de Suède (à Gullholmen). Nous trouvons dans nos notes que pendant l'hiver de 1851- 1852 on a vu apparaître des gammes de cette espèce dans Ja baie de Kiel. Cette même année on y à pris l’animal qui a fait le sujet d'une dissertation de Claudius. Dans la même baie on a pris encore deux autres individus de la même espèce. On en a capturé sur les côtes de Bohuslän. Il paraît que ces Dauphins font des apparitions régulières sur les côtes des Féroë aussi bien que dans la mer de Baflin, et nous avons déjà dit que, dans cette dernière mer, ils appa- raissent avec les Mégaptères et les Balénoptères, à l'époque où les Baleines véritables retournent dans leurs régions polaires. Le Lagénorhynque décrit sous le nom spécifique de 1pseni a été pris sur les côtes du Groënland. Max Weber fait mention d’un Lagenorhynchus albirostris mâle pris vivant près de Cocksdorp {ile Vlieland), côtes des Pays-Bas. C'est le premier exemplaire mâle, dit-il. Le Lagénorhynque est également cité parmi les espèces qui fréquentent les côtes est de l'Amérique du Nord. Allen l’a signalé sur les côtes du Massachusetts. Nous pouvons conclure de ce qui précède que les Lagéno- rhynques sont des Delphinides du nord de lAtlantique qui passent leur hiver dans des régions tempérées, leur été dans les régions froides (mer de Baflin), qu'ils vivent dans ces parages par gammes de milliers d'individus, et que c’est à leur passage au printemps, et en automne surtout, que certains d’entre eux se font prendre par les pêcheurs. MUSÉES. Les squelettes de Lagénorhynques ne sont pas rares dans les Musées, mais ils ne sont pas toujours désignés sous leurs vrais noms. Au British Museum on conserve trois squelettes et une tête; parmi eux se trouve le squelette du mâle capturé sur les côtes sud de l'Angleterre et qui a été décrit par J. Murie (Journ. linn. Soc., 1871). On y conserve aussi la tête de la femelle capturée en 1846, décrite par Brightwell, et d'un autre individu capturé en 1866 et décrit par Cromer. Le Musée d'Édimbourg renferme le squelette d’une jeune femelle capturée à Great Grimsby. A Cambridge se trouve le squelette de l'animal capturé à Hartlepool en 1834. Dans d’autres Musées, en Angleterre, on voit encore des squelettes et des têtes, comme à Liverpool et à Norwich, dont l'origine n’est pas bien certaine. A Upsala on trouve deux squelettes de femelles, de Gull- holmen. A Bergen comme à Lund on conserve plusieurs têtes, et à Copenhague quatre squelettes et plusieurs crânes. À Louvain nous avons les squelettes de deux individus pris sur nos côtes. A Kiel, on voit les deux squelettes des individus décrits par Claudius. Au Muséum d'histoire naturelle de Paris, on possède plu- sieurs squelettes et des têtes. La collection smithsonienne comprend trois têtes de Lage- norhynchus, originaires des. côtes de Californie et qui portent le nom de Lagenorynchus obliquidens. DESSINS. Gray, dans le Voyage Erebus and Terror, pl. X, fig. 2, repré- sente cette espèce à côté du Tursiops et pl. XI, il figure la tête. Brightwell en a publié un dessin dans les Ann. a Mag. nat. hist., vol. XVII, 1846. Nous avons fait connaître celui d’une femelle capturée par * Fren. Taur, Suggestions (0 the keepers...., Washington, 1884. les pêcheurs d'Ostende, dans un mémoire sur les Cétacés (Mém. Acad. roy. de Belgique, vol. XXXIF, pl. 1 et 2). M. J.-W. Clark a fait exécuter un dessin d’après un mâle, à peu près adulte, capturé à Ramsgate. (P. Z. S. 1876, p. 686, pl. LXIV, fig. 2 et P. Z. Soc. 1879, p. 311.) M. D.-J. Cunningham a publié en 1876 une notice accom- pagnée d'un dessin sur un jeune animal, capturé à Great Grimsby, long de # pieds 2? pouces. — Sur la même planche figure un mâle capturé à Lowestoft et décrit par Clark. Si l’on compare ces diverses planches de Brightwell, de Clark, de Cunningham, avec celle du professeur Flower et celle de la femelle que nous avons publiée, on voit que ces animaux sont loin de se ressembler sous le rapport de leur coloration. J.-Sp. Schneider en a publié un dessin en 1878 dans Tromsô Museums Aarshefter. J. Murie a représenté l'animal, Journ. Linn. Soc. 1871, pl. V. Le professeur Lutken à publié une belle planche représen- tant une femelle de Lug. albirostris, pêchée dans les « Kalle- boder » près de Copenhague. Le squelette en est conservé au Cetaceum de cette ville. M. Lutken a fait reproduire également un dessin de Pomo- plate, du sternum, des vertèbres lombaires, de la nageoire pectorale de l’Albirostris et de l'Acutus. Max Weber accompagne sa notice d'une planche représen- tant l'estomac avec le pancréas et la muqueuse de la seconde poche de lestomac. Turner à publié une photographie de la tête du jeune mâle, avec ses quatre soies sur le rostre. PARASITES. Nous n'avons pas trouvé de parasites, ni à l’intérieur ni à l'extérieur, des deux femelles que nous avons eues sous les yeux. M. Clark, n’a pas été plus heureux que nous. LAGENORHYNCHUS ACUTUS. LITTÉRATURE. Schlegel, Abhandlungen aus dem Gobiete der Zooïtogie und verglei- chenden Anatomie... À H. Leiden, 1841, Claudius, Dissertatio de Lagenorhynchis, 4 Kiliæ, 1855. Pucheran, Revue et Mag. de Zoo'ogie, NoTices MaMMaLoG., 1856. Eschricht, Comptes rendus de l’Acad. d. sciences de Paris, juill., 1858. Poclman, Volice sur un Delphinus Eschrichtü, échouë à Flessingue, Buzzer. Acan. Roy. B:Lc., 2° sér,, & XVIII, 1564. Rasch, Nyt magaz. [. nalurvidensk. 4 B. p. 7, ANN. MAG. NAT. HIST., aug., 1864. Maïmgren, Peobachtungen und Anzeichnungen über die Säugethier- fuuna Finmarkens und Spilzbergens, TroscueL's Arcuiv, 1864, p. 65. Van Beneden, Picrre 3. Recherches sur les Cétacés, MÉM. Acan. &. SCIENCES, t. XX XII, 1860. WW. Hi. Flower. On the characters and divisions of the Family Delphi- nidæ, Proc. Zoou. Soc., novembre 1885. 1. W. Eiower, List of the specimens of Cetacca, in (he zoo. dep. 0f the British Museuin, London, 1885. Lutken, ÂAriliske studier . ... 1887. 39 HISTORIQUE. Il parait que la première mention du Lagenorhynchus acutus date de 1828 : Gray imposa le nom spécifique d’Acutus à un Delphinide, dont la tête est conservée au British Museum. En 1841, Schlegel désigna ensuite ce Cétacé sous le nom de Delphinus Eschrichtii, d’après un squelette qu'Eschricht avait envoyé à Leyde et qu'il avait reçu des Féroë. Les dents poin- tues et les nombreuses vertèbres, dit Schlegel, placent ce Cétacé dans une division particulière des Dauphins. Dans un mémoire qui a pour titre Recherches sur la Faune littorale de Belgique, nous avons fait mention de cette espèce, en 1560, et nous y avons donné la description d’un squelette provenant d’une femelle capturée par les pêcheurs d'Ostende. Malmgren à publié des observations intéressantes sur les mammifères marins des côtes de Finmark et de Spitzberg; il rapporte que, le T avril 1861, il a vu sur les côtes de Norwège à la hauteur des Lofoden une bande de Dauphins qu'il estime à un millier d'individus. Nous avons tout lieu de croire que ce sont des Lagénorhynques et non pas des Dauphins delphis, comme il le suppose : Le Dauphin ordinaire ne nage pas, que nous sachions, en si nombreuse compagnie, et on ne le voit guère à ces latitudes. . Poelman a publié une notice sur un jeune mâle de cette espèce qui a échoué à Flessingue en 1863; il avait une lon- gueur de 2,57, Comme les viscères étaient enlevés lorsque Poelman en fit l'acquisition, il ne se trouve dans cette notice que des détails sur le squelette et les dents. M. Flower, après des recherches nombreuses, exprime l'avis que cette espèce, nommée d'abord Aculus par Gray, est bien le 1). Eschrichtü de Schlegel et le D. leucopleurus de Rasch. SYNONYMIE. Lagenorynchus acutus. Phocæna acutus, Gray, Brookes’'s cat. mus. 39, 1828. Delphinus (Grampus) acutus, Gray. Spic. 2001. 2, 1828. Delphinus Eschrichtii, Schlegel, Abhandl., 1841. Delphinus leucopleurus, Rasch, Nyt magaz. f. Naturvilensk., 4 B., p. 97. Revue zoologique, 1843. Delphinus leucopleurus, var. Niülsson, Skand. Fauna, À, 598. Lagenorhynchus acutus, Gray, Zoo'ogie, Erebus and Terror. Delphinus Eschrichtii, Claudius, Dissert. de Lagenorynchis, 40 Kiliæ, 1853. Delphinus Eschrichtii, Eschricht, Compt. rend. Acad. sc., juillet 1858. Delphinus Eschrichti, Van Beneden, Recherches sur les Cétacés... MÉËm. Acap. Roy. p. BELGIQUE, t. XXXIT, 1860. Delphinus acutus, Gray, Catal. of Seals and Whales, 1866, p. 210. Le Lagénorhynque qui nous occupe est fort bien connu aujourd’hui des pêcheurs et des naturalistes. 1 porte le nom de Springer ou Hvidskiaeving, sur les côtes de Norwège, à cause de la couleur blanche des flanes. CARACTÈRES. Ce qui distingue cette espèce de la précèdente c'est l'absence du rostre blanc; cette partie de la face est moins large, la colonne vertébrale ne compte que de 82 à 83 vertèbres ; lomo- plate est plus étroite, il y a une phalange au pouce; la sixième cervicale seule à une apophyse transverse inférieure; les deux premières cervicales sont unies aux suivantes par leurs apo- physes épineuses. Il y a 15 côtes. La longueur du corps de l'individu capturé en Zélande est de 2,20; Schlegel accorde 7 pieds 7 pouces à son squelette des Féroë; Rasch lui accorde même jusqu’à 8 pieds et demi. ( dot) Du bout du museau au bord libre de la nageoire caudale d'une femelle, nous avons compté T pieds. Le jeune mäle d'Édimbourg ne mesure que 4 pieds 2 pouces. Il n’est évidemment pas adulte. La partie inférieure du corps, depuis l'extrémité antérieure du rostre jusqu'au delà des organes génito-urinaires, est d’un blanc luisant; la partie supérieure du rostre et de la tête est d’un beau noir ; une bande blanche, qui commence au-dessous de la nageoire dorsale va jusqu’à la base de la nagecire caudale, et s'étend sur les flancs. — Cette bande présente à sa partie supérieure et postérieure une nuance jaunâtre et ne se confond pas dans la couleur blanche de l'abdomen. {Poelman.) La queue se rétrécit plus brusquement que dans lespèce précédente. DESCRIPTION. On compte généralement de 30 à 35 dents de chaque côté à chaque mâchoire ; 34 à 35, dit M. Flower. Les dents du squelette de Gand sont seulement au nombre de 28 à 50, en dessus, dont six sont cachées dans les gencives en dessous ; il y en a 31 à 32, dont cinq sont cachées. On compte de 6 à T poils dans les moustaches du fœtus. Le squelette de Gand a 7 cervicales, 15 dorsales, 19 Ilom- baires et 39 caudales, en tout 80. Le squelette de Leyde en a 81. A Francfort un squelette de D. leucopleurus n’en a que 70 bien visibles, tandis que nous en comptons 79 sur un autre, indiqué sous le même nom. Un squelette acheté à Hambourg, qui se trouve aujourd’hui au Musée de Liège, en a 81. Le nombre de vertèbres varie selon les individus, entre 79 et 82, dit M. Flower ; le nombre de 80 et 81 est le plus commun. Le professeur Lutken fait varier le nombre entre 78 et 82. Les cervicales ont une tendance plus grande à se fondre l’une dans l’autre que dans d’autres Dauphins; les trois pre- mières sont souvent réunies par leur corps, les autres par leurs arcs neuraux. Cette disposition ne s'observe pas dans Palbirostre, dit M. Flower. Dans le squelette de l'Université de Gand, décrit par Poel- man, les deux premières vertèbres cervicales sont soudées par le corps et les apophyses épineuses, les deux suivantes sont soudées également aux précédentes, maïs seulement par les apophyses. Les dorsales sont au nombre de 15, les lombaires au nombre de 19, et les caudales au nombre de 39. — Nous aurons ainsi 7, 15, 19, 39, en tout 80. MOEURS. Tout fait supposer que le régime est le même que celui de la première espèce. Les mäles et les femelles se trouvent réunis dans les mêmes gammes, et quand il en est qui s’écartent et qui vont se faire capturer séparément sur quelque côte, on observe que ce sont souvent des mâles. Ce sont des solitaires. On a vu des bandes de ce Dauphin, formées de plusieurs cen- taines d'individus que l’on a confondus souvent au nord de la Norwège avec le Dauphin ordinaire. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Il résulte des faits connus que ce Dauphin est très répandu, puisqu'on en rencontre dans toute l'étendue de l'océan Atlan- tique et dans une partie du Pacifique. Il paraît toutefois qu'il doit être considéré plutôt comme espèce septentrionale ; elle serait, en effet, d’après Eschricht, plus commune dans le détroit de Davis, tandis que lautre serait plus commune surtout aux Féroë. Il visite régulièrement ces iles sans doute à son passage du cercle polaire aux régions tempérées de l'Atlantique. Entre les îles Lofoden et le cap Nord, Malmgren en a vu, le ( 559) 7 avril 1861, une bande qu'il estimait à mille individus. Il pensait que c'était le Dauphin ordinaire 1. Robert Brown le signale sur les côtes du Groënland. Fréd. True le cite parmi les Cétacés qu'on observe sur les côtes est de l'Amérique du Nord. Voici la date et le lieu de quelques captures ou échouements isolés : Le 21 août 1858, on a capturé un individu de cette espèce aux Orcades 2. Un mâle a été capturé à Middelbourg, en Zélande. Il est conservé au Musée de Gand. Dans ses chairs se trouvaient des Monostomes. Nous en avons vu, au Musée de Liverpool, un squelette de mâle d’un individu capturé dans le canal S'-George. Au mois de juin 1843, on a pris, dans la baie de Christiania, une bande de vingt-trois individus dont le professeur Rasch à donné la description. PÉCHE. Ce Lagenorhynque fait régulièrement son apparition en février par énormes bandes en vue des côtes de Norwège. I est l’objet d’une pêche régulière sur plusieurs points de la côte: on en prend par mille et quinze cents à la fois. [ls viennent à la suite des harengs. Devant la ville de Bergen on a établi une pêcherie où on les emprisonne dans les fiords dont on ferme le passage vers la mer avec des filets; souvent ils passent au-dessus. On en a vu les deux tiers échapper. Nous ne savons si les pêcheurs font une distinction entre les deux espèces. Cett pêche n’a lieu qu’en été. On a capturé en 1884, dans les fiords de Bergen, plusieurs 1 Trochels Archiv, 1864, p. 88. ? Ann. nat. hist. aug., 1864. | 360 } ‘emelles pleines et, avec des embryons à divers degrés de développement. Dans le courant du mois de juin 1843, on a vu une bande de vingt-deux individus pénétrer dans la baie de Christiania. MUSÉES. Nous en avons vu un squelette au Musée de Leyde et de Francfort, provenant des iles Féroë; un autre à Gand, des côtes de la Zélande et des cräres ou des squelettes d’origine inconnue dans plusieurs grands Mustes. On en conserve au Musée de Christiania un squelette, un crane séparé et une peau montée d'un individu de la côte. Nous en avons vu un squelette à Upsala. Nous avons, à Louvain, un squelette qui provient de Copen- nague et dont l'origine toutefois n’est pas bien certaine. Le Musée de Bruxelles possède un squelette d’une femelle capturée en hiver, en 1852, par les pêcheurs d’Ostende. Quatre squelettes et plusieurs cränes sont conservés au Musée de Copenhague. On trouve en somme des squelettes de cette espèce, plus ou moins bien conservés, à Bergen, à Greifswald, à Gand, à Leyde, à Paris, à Francfort, à Louvain, à Édimbourg, à Londres (Musée Brit.), à Philadelphie. Celui du British Museum est du Groënland. DESSINS. Poelman en à publié un dessin dans les Bulletins de l'Aca- démie, d’après un jeune mâle capturé dans les eaux de la Zélande, le 20 décembre 1863. Schlegel a donné un dessin des dents et de la tête (tab. Let I, fig. # (le crane); tab. IV, fig. V (dents). { 561 ) Il en existe aussi un dessin fait par Rasch, publié en 1843, sous le nom de Delphinus leucopleurus 1. Dans son intéressante notice sur la famille des Delphinides, M. Flower a reproduit le dessin du palais pour montrer les caractères des os ptérigoidiens. La tête a été figurée aussi par Gray 2. PARASITES. Poelman a retrouvé des Monostomes dans le tissu cellulaire sous-cutané. Sous le nom d’Ascaris simplex, Krabbe a signalé des Néma- todes dans les voies digestives. E Nyl magaz. [ nalurvü!ensk, ele., np. cit. ? Eregus and TERROR, 01 Celaceous animals, pl. VE, fig. 3-5. LE DAUPHIN BÉUDELPHINUS DELPHATS, LITTÉRATURE. Mayer, Beilräge zur Analomie des Delphins, TienEmaNN’s UND TRe- VIRANUS ZEITSCHRIFT. . .., VOI. D, 1855, p. 5. Stannius, Über der Bau der Delphingehirnes, m. 4 Taf, Hamburg, 1846. BP. Gervais, Remarques sur les Mammifères marins qui fréquentent les côtes de la France et plus particulièrement sur une nouvelle espèce de Dauphins, propre à la Méditerranée. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE pe L'HÉraucr, 2e série, t XX, 1855, pl. 1, fig. 5. Loche, Description de deux nouvelles espèces du genre Dauphin. D. algeriensis et D. mediterraneus, Revue Er MaAGaziN DE Z00L0G1E, novembre 1860. Flower, On the common Dolphin, Delphinus delphis. Proc. Zoo. Soc., april 1879, p. 582. Flower, On the external characters of two species of British Dolphinis (Delphinus delphis and Delphinus Tursio), Trans. Zooc. Soc., vol. XI, 1880. Reinhardt, Mois om en paa Os/kysten of Jylland fanget Delphinus delphis, Artryk Or ForeniNGs Vinexsk. Mennenezser. Nr. 10, 1860. { 64 } Fischer, Célacés du sud-ouest de la France, Act. Soc. LiNx. BoRDEAUXx, t. XXXV, 1881. Prof. Sir Wm, Turner, Volice of the capture of Delphinus delphis in the Lirth of Forth, Proc. Roxy. Soc. EnixeurGn, 1886-87, vol, IX. Professor Sir Wm. Turner, On lie stomach in lle Ziphioiïd and Delphinod Wliales. Journ. oF Anar. AND Paysioco@v, vol. XXII, april 13889. Chr. Fr. Lutken, Bidrag til Kundskab om de tre pelagiske Tandhval- Slœgler Steno, Delphinus og Prodelphinus. K. D. ViDnensk. SELsk. SkR., Arp. v.1. Kjobenhavn, 1889 (avec une planche et une carte). #7 D (565 ) HISTORIQUE. Le Dauphin delphs est sans doute l'animal le plus ancienne- ment connu du groupe des Cétodontes; c’est de lui que les Grecs on fait le Dieu de la mer. Pline raconte les histoires les plus merveilleuses au sujet de son intelligence, histoires qui ont dû frapper les anciens qui assimilaient les Dauphins aux poissons. Il rapporte entre autres l’histoire d'un individu lié d'amitié avec un enfant, qui lui donnait tous les matins une partie de son déjeuner. L’en- fant était obligé de faire un grand tour sur le bord de la mer, mais bientôt le Dauphin le prit sur son dos et le transporta de l’autre côté. L'enfant étant venu à mourir, Pline rapporte que leur liaison était si grande, que le Dauphin succomba à sa douleur quelque temps après. Le Dauphin est représenté sur des médailles, mais sous une forme de convention. Thomas Bartolinus a donné le premier une description anatomique du Dauphin (1654). Cuvier, en parlant du Dauphin ordinaire, dit : cette espèce est commune à l'Océan et à la Méditerranée, mais on n'a jamais déterminé dans quelles limites elle se renferme. Cuvier démontre que les anciens confondaient des Squales avec les Dauphins. 3 En 1835 Meyer, de Bonn !, a publié un mémoire sur l'anatomie du Dauphin; il passe en revue le squelette avec ses dépendances et les divers appareils; il s'occupe aussi de la question, à l'ordre du jour à cette époque, de savoir si les Cétacés tettent, si c'est de l’eau qu'ils projettent par les narines et s'ils ont de la voix comme les anciens l’ont prétendu. Lafont et Fischer se sont occupés des nombreuses variétés qui pénètrent dans la baie d'Arcachon. { Mayer, Bonn Leytr. zur Anatomie des Delphins, Tied. u. Trevir. Zeils, 1855, p. 3. i 566 ) C’est dans J’intéressant travail de M. Fischer sur les Cétacés du sud-ouest de la France que l’on trouve les détails les plus complets sur les variations de couleur et le nombre variable de certains os de cette espèce. — Le savant aide naturaliste du Muséum a pu observer divers Dauphins de la baie d'Arcachon, et il admet diverses races dans cette espèce. Lafont leur a même donné des noms. M. Fischer a fait dessiner le contour de la tête du fœtus. M. Loche a fait connaitre la description de deux Dauphins, capturés sur les côtes d'Alger, qu'il croit nouveaux pour la science (D. algeriensis et Mediterraneus). M. Flower a publié une notice sur une femelle qui a été capturée sur la côte de Cornouailles !, et il a coordonné en quelques lignes ce que l'étude des crânes, provenant de diverses mers, lui a appris. Cette espèce est cosmopolite, dit, avec raison, notre savant confrère. ; I existe, dans les grands Musées, un nombre considérable de squelettes et de crânes qui viennent de différentes mers et dont les animaux ne sont pas suflissamment connus pour Îles déterminer avec quelque certitude. — II y a toutefois un carae- tère précis qui les sépare en deux groupes; c’est le profond sillon qui s'étend de chaque côté le long du palais dans les uns et qui manque dans les autres; on peut se servir de ce caractère pour les répartir en deux genres, et mon collabora- teur Gervais a proposé le nom d’Eudelphinus, pour désigner les vrais Dauphins, qui ont le sillon, et le nom de Prodelphinus pour ceux qui ne l'ont pas. Eu mettant sous presse, nous recevons un mémoire inté- ressant du professeur Lutken sur les genres Steno, Eudelphinus et Prodelphinus. Le genre Prodelphinus est le type par excel- lence des Dauphins pélagiques, dit le savant professeur de l'Université de Copenhague, et comme son Musée ne renferme pas moins de dix-neuf squelettes, appartenant à ce genre, il a entrepris ce travail dans l'espoir de dégager l'histoire du genre des incertitudes qui l’obscureissent encore. WP 7. Sapril 189; SYNONYMIE. Delphinus delphis, Linné, Systema natur«. Deiphinus delphis, Cuvier, Rech. ossem. foss. Delphinus delphis, Fr. Cuvier, Histoire naturelle des Cétacés. Delphinus delphis, Gray, Erebus and Terror. Delphinus delphis, Nilsson, Skand. Fauna. Delphinus delphis, Liljeborg, Sveriges och norges Ryggrads- djur, Upsala, 1874. Delphinus delphis, Gervais, Zoologie et Paléontologie fran- (aises. Eudelphinus delphis, Van Beneden et Gervais, Ostéologie des Cétacés. Le Dauphin du cap Finistère, que Malm rapporte au Del- phinus major de Gray, doit être identifié avec le Delphinus delphis 1. , Le D: Fischer pense que le D. mediterraneus de Loche est un Dauphin ordinaire. Il admet cinq variétés auxquelles il donne les noms de Fusus, Souverbianus, variegatus, balteatus et moschalus. Meyer a donné le nom de Delphinus cœruleo-albus à un Dau- phin des côtes est de l'Amérique méridionale et qui n’est pro- bablement qu’un D. delphis ?. M. Flower pense que le D. bairdii pourrait bien être le Dauphin delphis, mais il faudrait le squelette de l'animal pour le décider. Nous partageons l'avis de différents auteurs, qu’il existe des races ou variétés innombrables, qui se distinguent par la taille, Ja coloration du corps, la longueur du rostre et le nombre de dents. C'est sans doute un exemplaire de cette espèce dont parle M. Chaves dans l’énumération des Cétacés des Acores et auquel il accorde # dents. * Mac, Kongl. Svenska. Vetensk. Akad., Handlingar, Bd. 2, n° 2, 1870, ? Nov. act. nat. cur., XVI, pl. 45, fig. 2. ( 568 CARACTÈRES ET DESCRIPTION. Ce qui distingue le Dauphin ordinaire, qui nous occupe. de tous les Dauphins de nos mers d'Europe, ce sont les gouttières assez profondes le long du palais entre la ligne médiane et les dents. Les os palatins, dont nous trouvons un croquis dans Flower, sont également caractéristiques. Reinhardt fait remarquer que les os intermaxillaires sont soudés. Ce Dauphin se distingue, également, par sa taille qui est en moyenne de deux mètres; un mâle capturé sur les côtes de Bretagne en mesurait 2",350mm, Les pêcheurs de Concarneau ont trouvé en mer un Dauphin delphis mâle de huit pieds de long, mort probablement de mort naturelle 1, Le Dr Fischer a eu de nombreux matériaux à sa disposition provenant d'animaux adultes de la baie d'Arcachon et il donne comme taille moyenne un peu plus de 2 mètres. Les sexes ne diffèrent point par leurs longueurs. Les dents varient de 33 à 50 et même à 59; d’après les têtes du Musée de Leyde elles varient de 50 à 53. Le professeur Flower donne la formule dentaire suivante aé—ss 48—47° Le Dauphin ordinaire a, en venant au monde, de 5 à 7 poils dans ses moustaches. Fischer à trouvé dans un fœtus mâle, probablement à terme, 6 à droite, T à gauche, longs de 5 à 10 millimètres. Dans un autre fœtus, long de 56 centimètres, une femelle, Fischer en a vu 5 de chaque côté. Comme nous l'avons déjà dit, c’est à Belon et à Rondelet que l’on doit les premières notions sur Panatomie du Dauphin. Le nombre de vertèbres n’est pas toujours le même. Cuvier neleur en accorde que 67; mais dans Ja seconde édition de son Anatomie comparée, le nombre est porté à 73 (ce. 7, d. 14, 1. 19;%e. 35). LE. Van BexEDEX, Sur un Scol:x de Cestode. Comptes-rendus … nov 1858. RE ( 569 ) Le Dr Fischer leur en accorde 74. Dans un squelette complet de Louvain nous comptons : CEE 922, c: 30 —=73:;"et 20 0s'en V. Dans le squelette du D. delphis d'Australie, conservé au Musée du Collège des chirurgiens, nous comptons : cervi- cales 7, dorsales 14, lombaires 21, caudales 31, ensemble 73. Les deux premières cervicales se soudent, les cinq autres restent libres. Les côtes varient de 14 à 16 et le nombre n’est pas toujours le même des deux côtés, chez le même individu. L’omoplate est fort remarquable par la soudure de lacro- mion avec le bord inférieur de la partie plate de los. M. Lefond a vu le nombre de vertèbres dorsales et caudales varier d’un individu à l’autre. Le nombre de phalanges varie ; nous avons trouvé : 1, 9, 6, 9, 4; Cuvier, 1, 8, 6, 3, 1 ; Flower et M. Weber, 2 à 3, 8 à 9, bà7,2à4,1à2. Le nombre de phalanges n'est pas constant dans le même doigt de divers individus; 11 existe le même nombre total que Cuvier a indiqué, mais lPindex à une phalange de plus dans celui que le professeur Leboucq a décrit et le troisième doigt a une phalange de plus dans celui de Cuvier. Dans les individus décrits par MM. Flower et Weber, les plalanges sont plus nombreuses à la plupart des doigts. Il est le même à l'index et au suivant |. Le professeur Meyer, de Bonn, a publié la description de plusieurs organes : le squelette de la tête, le bassin, la cavité de la bouche, les poumons, le cœur, le canal digestif, l'appareil urinaire et sexuel, le cerveau, lPœil, l'oreille, et envisage ensuite ces organes au point de vue physiologique. Le professeur Sir Turner a publié un dessin de l’estomac avec une description de la rate et du pancréas. Tiedemann ? et Stannius ont fait connaître le cerveau. 1 Lepouco, Anatom. Anzeiger, 1887, p. 205. ? TIEDEMANN ET TREVIRANUS, Zeitschrift für Physiologie, V, p. 3. 39 (570 ) MOEURS. En prenant le Dauphin pour un poisson, les anciens ont dü être naturellement émerveillés de la supériorité de cet animal ; aussi Pline raconte les histoires les plus extraordinaires de son attachement à l’homme et de ses qualités psychiques. C'est de tous les Cétacés celui dont les anciens ont pu le plus facilement étudier les mœurs. Leur nourriture consiste en petits poissons ; on en voit régulièrement sur les côtes de Bretagne qui poursuivent les bancs de Sardines. Sans citer l'espèce, Lesson dit qu'en a trouvé, dans leur estomac, des Poulpes et des Poissons volants. Pendant l'hiver le Dauphin pénètre régulièrement dans la baie d'Arcachon. Nous avons tout lieu de croire que le Dauphin, comme plu- sieurs autres Cétacés, vivent, au moins pendant une certaine époque de lannée, par couples. On a capturé, dans la baie d'Arcachon, le 6 juillet 1866 un mâle et une femelle, tous les deux adultes et avec eux une jeune femelle ; deux jours après on a pris deux autres individus, un mâle et une femelle égale- ment, mais tous les deux plus jeunes que le premier couple. On a fait l'observation sur la côte d'Écosse que dans une petite school de Dauphins la plupart d’entre eux nageaient par couples. On ne connaît rien de plus que ce qu’Aristote nous apprend au sujet de la gestation : la durée est de dix mois, dit-il, et la femelle met bas pendant l'été, ce qui rapporte en automne l'époque de l’accouplement. Dans la baie d'Arcachon on a capturé le 21 mars 1873 une femelle pleine qui portait un fœtus presque à terme; une autre femelle capturée le 2 mars 1868 nourrissait son petit. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Le Dauphin qui nous occupe appartient avant tout aux régions tempérées ; il est commun dans la Méditerranée, plus commun encore, paraît-il, dans la mer Noire, visite la Baltique, (51) se montre régulièrement dans la baie d'Arcachon, ne visite qu’accidentellement la côte d'Écosse et se rend dans l'autre hémisphère. Les pêcheurs de Cachalots aux îles de larchipel des Açores voient souvent dans les bandes (schools) qui approchent les iles, des Dauphins et des Marsouins. Nous supposons que les Dauphins appartiennent au D). delphis, mais nous ne savons si, sous le mot Marsouin, ils n'entendent pas un autre Cétacé que le Marsouin ordinaire. Le Toninha des Açoréens est peut-être le Dauphin delphis, mais il faudrait voir les rainures palatines, dit avec raison M. Lutken. D’après H. Drouet, sous le nom de Toninha, les Açoréens désignent le Marsouin. L'espèce qui nous occupe y porte le nom de Golfinho. I apparaît en été dans la mer des Açores, dit M. H. Drouet, et il assure qu'il y est assez abondant, qu'on le pêche dans ces eaux au filet et au harpon. S'il y avait un Cétacé propre à la Méditerranée, ce serait évidemment le Dauphin qui nous occupe; on le voit pendant toute l’année sur les diverses côtes de cette mer intérieure et il visite l'Adriatique comme la mer Noire et la Baltique. Rathke en a rapporté de son voyage en Crimée un squelette qui est heureusement conservé au Musée de Kônigsberg. El. Reclus rapporte (Nouvelle Géographie universelle, vol. VE, p.112), qu'en 1872 on captura 3 800 Dauphins dans la seule rade de Soukhoum (côte occidentale du Caucase), mais il est probable que sous ce nom on confond le Marsouin et le Tursiops. C’est le Dauphin sédentaire sur tout le littoral de France dans la Méditerranée, dit Paul Gervais. Celui-ci en possédait des exemplaires du golfé de Lyon, particulièrement de Cette (Hérault), de la Nouvelle et de Gruissan (Aude). Sur les côtes de Livourne et dans les eaux de Venise on le voit surtout en mars et en juin, dit le professeur Giglioli.. un poco mena frequente del D. Tursio, nel mare Tirreno, è invece piu abbondante di quella nel Mare Ligustico 1. ! GiGLiout, Elenro dei Mammiferi…. a pp. alla fauna italica, Firenze, 1880. (0122) On voit ce Dauphin assez communément sur les côtes d'Espagne et dans le golfe de Gascogne ; on le voit apparaitre régulièrement sur la côte de Bretagne pendant la pêche de la Sardine. Le pilote Guillou nous a assuré que dans sa jeunesse on ne voyait pas ce Cétacé à l’époque de cette pêche; il ne Pa vu apparaitre assez régulièrement, ajoutait-1l, que depuis quel- ques années. En mars 1879, on en a capturé une femelle dans les filets à Maquereaux sur les côtes de Cornouailles; on a capturé aussi un mâle dans le canal S'-Georges, à Holyhead. Visite-t-il le Nord et se rend-il jusqu'aux côtes du Groënland comme quelques naturalistes l’ont prétendu ? Malmgren assure en avoir vu en avril 1861 sur les côtes de Norwège (Westfiord) une gamme de plusieurs milliers d'individus ; ce sont sans doute des Lagenorhynques qu'il aura aperçus; le Dauphin ordinaire ne vit pas régulièrement en si grand nombre. Il est positivement rare sur les côtes d'Écosse et de Danemark et l’on peut aussi dire qu'il est rare dans la mer du Nord. Eschricht disait même qu'il ne visite pas cette mer. Pollas parle du D. delphis et fait mention de sa présence ‘ dans la Baltique. Il en existe au Rathhause de Dantzig une peinture qui a été faite d’après nature. Le professeur Reinhardt a publié une notice sur cette espèce, dans laquelle il constate sa présence sur les côtes de Danemark. Il parait même que l’on en prend tous les ans, dans les pêcheries du Marsouin, dans le grand et le petit Belt, où ce Cétacé est à la poursuite des harengs. M. Lilljeborg cite la présence de ce Dauphin sur les côtes scandinaves d’après des pièces conservées au Musée de Chris- tiania. Quoique lon connaisse quelques captures faites jusque sur différentes côtes de la mer du Nord, on peut dire, nous semble-t-11, que le Dauphin ordinaire n’est pas un animal ni de cette mer du Nord, ni de la Manche. A propos d’une capture faite sur les côtes d'Écosse, le pro- fesseur Sir Turner a publié une notice intéressante dans les CO (975 ) Proceedings de la Société royale d'Édimbourg !. Une school de six à huit individus a fait son apparition dans la baie de Forth au mois de février 1887, et les individus nageaient par couples. Un individu du sexe femelle fut capturé. Sir Turner fait remar- quer que la présence de cet animal dans ces parages est pure- ment accidentel. On conserve du reste depuis près de trente ans un Dauphin delphis empaillé au Museum of Science and Art d'Edinburg. Le professeur Flower exprime des doutes au sujet de sa présence sur les côtes du Groënland. Mais si ce Dauphin ne se rend pas régulièrement au Nord, il voyage vers l’Ouest, pour visiter les côtes de l'Amérique du Nord et se rend même dans l’autre hémisphère jusqu'aux eaux de nos antipodes. On le trouve positivement de lautre côté de l’Atlantique. Allen dit qu'il visite par petites bandes les baies de son pays ?. A l'Exposition internationale de la pêche qui vient d’avoir lieu à Londres, les États-Unis d'Amérique ont exhibé des squelettes qu'on a pu comparer à ceux de nos côtes, et M. Flower n'a pu découvrir la moindre différence entre eux ÿ. Il visite la côte occidentale d'Afrique et lon a reconnu sa présence au cap de Bonne-Espérance. On en voit, au Muséum de Paris, un squelette qui y a été envoyé du Sénégal par MM. Perrotet et Leprieur. Schlegel fait mention d’un squelette du Musée de Leyde qui a été envoyé du cap de Bonne-Espérance. * Il vit dans les eaux de nos antipodes. On voit, au Muséum de Paris, un squelette de Tasmanie, rapporté par J. Verreaux, et un autre par Hombrone et Jaquinot. Le Musée de Hunter a reçu de Tasmanie une série de sque- 1 Notice of the capture of Delphinus delphis, in the Firth of Forth, Proc. or THE Royaz raysicaz Society, Edinburgh, 1886-87, vol. IX. 2? Visits aus bay occasionally in smal! schools. Allen. Mamm. Massach. 5 FLower, On the Delphinidæ, p. 505. ( 574 ) « lettes qui sont en tout semblables à ceux de nos côtes, dit M. Flower. M. Flower a reçu également un squelette de la Nouvelle- Zélande qui ne laisse aucun doute sur l'identité de l'espèce. C'est aussi un Dauphin ordinaire que Quoy et Guimard ont observé à la Nouvelle-Zélande et dont ils ont publié une aescription et une figure dans le Voyage de l’Astrolabe, planche XXVIIL, fig. 1. Ainsi, d’après ce que nous venons de voir, le Dauphin delphis est répandu dans les deux hémisphères et, comme les Liphioïdes, il est cosmopolite, avec la restriction qu'il ne quitte pas les eaux tempérées. Newton a trouvé des ossements de D. delphis à Overstrand Norfolk), dans le Forest-Bed (Newton). MUSÉES. On connait des têtes, si pas des squelettes complets, dans presque tous les Musées où l’on conserve des squelettes de Cétacés : nous pouvons citer, par ordre alphabétique, les Musées de : Amsterdam, Arcachon, Berlin, Bonn (deux têtes), Bordeaux, Boulogne, Brest, Bruxelles, Cherbourg (plusieurs têtes), Copenhague, Dantzig, Dorpat, Florence, Giessen, Gôt- tingue, Groningue, Heidelberg, Kônigsberg, Leyde, Liège, Londres : British Museum et Collège des chirurgiens, Louvain, Paris, Pise, Stockholm, Upsala. A Kôünigsberg on conserve le squelette rapporté par Rathke de la mer Noire. À Oxford on conserve le squelette d’un mâle capturé à Holy- head. Au British Museum on voit un moule coloré de la tête de mâle et de femelle, un individu adulte et un autre jeune monté, des squelettes et des crânes de la mer du Nord, de l'expédition antarctique, de l'Atlantique australe, de Tasmanie, de la Nou- velle-Zélande, etc., etc. Au Collège royal des chirurgiens on voit un squelette com- plet d'Australie. (575) Mayer, dans ses Beiträge fur Anatomie der Delphinis, fait mention de six têtes de Marsouins, deux de Dauphin delphis et d’une de Tursiops au Musée de Bonn. DESSINS. On possède aujourd'hui de très bons dessins de cette espèce. Cest naturellement le Cétacé qui a été le plus souvent figuré. Les artistes représentent le Dauphin tout autrement qu'il n’est dans la nature. M. Flower a passé en revue les différents dessins qui ont été publiés par des naturalistes. Les premières figures, plus ou moins inexactes dans leur contour, sont d’abord celle de Belon (1551); vient ensuite celle de Rondelet (1554), puis celle d’Aldrovande (1613). Ces figures ont été souvent copiées, entre autres par Willugby. Rondelet représente un Dauphin mettant bas. On voit le fœtus dans ses enveloppes. La figure de Bonnaterre, reproduite par Lacépède, n'est pas celle d’un individu de cette espèce puisque l'animal, d’après lequel elle a été faite, avait 9 pieds de long. Hunter en a publié une bonne figure sous son véritable nom Î. On voit, dans Lacépède, un dessin qui représente le corps, planche XIIT, fig. 1, la tête, planche XIV, fig. 1. On en trouve un dessin dans le Grand dictionnaire des sciences naturelles, planche XCVIIT (Cétacés,, et dans l’/cono- graphie du règne animal (Mammifères, planche XLVIT, fig. 1, l'animal, fig. 1°, la tête). Il en existe un bon dessin dans les vélins du Muséum, qui a été reproduit dans le Règne animal illustré de Cuvier. Fréd. Cuvier en a également publié un dessin, Histoire natu- relle des Cétacés, 1856, tab. IX, fig. 4-5. 4 Encyclop. méthod. célolog., pl. X, fig. 2. ( 576 } Gray en à publié une figure dans le Voyage d'Erebus and Terror. Le Dr Fischer publie trois dessins d’une femelle, prise dans la baie d'Arcachon le 16 mars 1872, planche VI, figure I, et planche V, d’un mâle et d’une femelle pris dans la même baie, le mâle le 16 mars 1872, la femelle le 22 janvier 1809. Dans les Transactions de la Société royale de Zoologie 1 se trouve le dessin d’une jeune femelle capturée dans les filets à maquereaux sur les côtes de Cornouailles. M. Flower a publié le dessin d’un mâle qui à été capturé près de Holvhead, dont le squelette est au Musée d'Oxford. C'est une des meilleures figures ?. Une bonne figure de ce Dauphin a été publiée également par Reinhardt, d’après un individu capturé sur les côtes de [vtland. Il n’est pas en couleur. M. Clark en a également publié un dessin 3. Nous en trou- vons encore un dessin dans les Abhandlungen de Schlegel #, d’après un individu de grande taille. Le squelette et les divers os ont souvent été dessinés depuis la publication des Recherches sur les ossements fossiles de Cuvier. ; Le squelette entier est bien figuré dans Rapp (Die Cetaceen, pl AV: Paul Gervais a fait figurer le palais avec les os ptérygoïdes à côté du palais du Delphinus Tethyos où Prodelphinus, en 1853. Dans lOstéographie des Cétacés, 11 y a consacré plusieurs planches. Nous devons aussi aux soins du capitaine Jouan, de Cher- bourg, la photographie des diverses têtes qui sont conservées au Musée de cette ville. LEPPZAS STI) p- 682: ? Transactions de la Société Zoologique de Londres, en 1880, vol. XI, part. 1, pl. I 5 Ann. a. Mag. nat. hist. 1849. # Abhandl., pl. IV, fig. 2. PARASITES. Le Dauphin loge des parasites en transit (Xénosiles), qui restent agames, mais la plupart d’entre eux sont des vers arrivés à leur destination (Nostosites) et qui sont sexués. On trouve chez lui des vers des divers ordres : des Tréma- todes, des Cestodes, des Nématodes et des Échinorhynques. Ds se logent principalement dans les voies aériennes, dans les voies digestives et dans la peau. Ces derniers sont Xénosites. L’Ascaris simplex à été trouvé dans lestomac par H. Gervais 1 et Megnin ?. Nous l'avons également trouvé dans l'estomac. Lesson parle de Nématodes, sous le nom de Vers lombries, qu'il a trouvés adhérents aux parois du tube digestif de Dau- phins dont il ne cite pas le nom spécifique. Il ne cite pas non plus les lieux de capture de l'individu qu'il a eu l’occasion d'examiner sous le rapport de l’organisation 3. L’Ascaris mystax à été signalé sous la peau, par Villot #. Le Trichosoma delphini à été observé dans le poumon par H. Gervais. Diesing fait mention du Conocephialus typicus, dans l'estomac (Revision des Nématodes). Dans un Dauphin du Brésil, désigné sous le nom de Delphinus amazonicus, Diesiag signale, dans l'estomac, un autre Nématode auquel il donne le nom de Peritrachelius insignis. Ce ver a été trouvé par Natterer ÿ. Les Strongles que Von Baer a trouvés dans la veine azygos et dans l'artère pulmonaire, le premier de T pouces de lon- ! H. Gervais, Sur les Entozoaires des Dauphins, COMPTES RENDUS, 20 novembre 1871. # MEGniN, Sur le développement de l'Asc. simpleæ, SOciËTE DE Bi0LOGIE, de Paris. 5 OEuvres complètes de Buffon. Compiement par R. P. Lesson. Cétacés. Paris, 1828. * Archiv. Zoo! eæpérim., L IV, p. 467, pl. XII. 5 Diesinc, Syst. helm., vol I p 210. ( 0178) sueur, le second de 6 pouces, se rapportent sans doute au genre Prosthecosacter proposé par Diesing f. L'Echinorhynchus pellucidus à été trouvé dans l'intestin de cette espèce par Leuckart. On a signalé des Échinorhynques dans plusieurs autres Cétacés, même assez communément dans des Balénoptères ?. On a signalé plusieurs Trématodes dans le Dauphin ordi- naire qui sont tous nostosites. Un Distome nouveau a été observé par A. Loos dans les con- duits excréteux du foie et a été nommé par Leuckart Disto- man palliatum 3. Henri Gervais a aussi observé un Distome dans le Dauphin, pour lequel il a proposé le nom de Distoma delphini #. Le professeur Claus a vu un Trématode semblable à un Distome dans lintestin de notre Cétacé 5. Diesing fait mention également d’un Distome, sous le nom de Distoma lancea, qui a été recueilli au Brésil, par Natterer, dans les canaux biliaires du Delphinus tacushi 6, capturé ad Barra do Rio negro, dit l'étiquette. C’est peut-être le même Dauphin que Gray désigne sous le Steno tucuxi T. Blainville a parlé d'un Monostomum delphini enkysté dans la graisse d'un Dauphin indéterminé. On trouve aussi dans le Dauphin ordinaire des Cestodes zéno- sites, comme dans la plupart des poissons osseux, et l'on peut se demander, si ce ne sont pas des parasites égarés. Nous ne savons quels sont les animaux auxquels la chair des Dauphins pourrait servir de pâture. Depuis longtemps, Bose a signalé des Hydatides dans le lard ! Beiträge zur Kentniss der Nied. Thiere, p.560 ? Brev. anim. desrrip., 25, fi. 6, a, b. 5 A. Loos, Beiträge zur Kentniss der Tremaloäen, distomum palliatum, Nov sp, Zeirs F.wiss Zoo1., 41 vol., pl. XXII. # Comptes rendus, 20 novembre 1871. » LeuckarT, Die Parasiten des Menschen, en note, p 157 DiesixG, Syst. helin., vol. F, np. 554. 7 Gray, Catalogue of Seals...., p. 256. PHRASE du Dauphin, surtout dans le lard qui avoisine les parties géni- tales. L'espèce a beaucoup de rapport, dit-il, avec Phydatide du cochon, par sa forme aussi bien que par sa manière d'être, mais il fait remarquer qu’elle n’a pas de crochets. Il en donne un dessin !. C'est une ladrerie bien connue des pêcheurs bretons, sous le nom de Bécame. Leuckart a fait mention aussi d’un Stenotænia, enkysté dans le diaphragme. Rudolphi a fait également mention d’un Cestode ?, recueilli dans les viscères du Dauphin, pour lequel il a proposé le nom de Cephalocotyleum delphini. On a fait mention également d’un Cestode dans les intestins d'un Dauphin de la côte de Portugal. Mon fils a observé un Cestode dans un Dauphin capturé par les pêcheurs de Sardines à Concarneau, qu’il a désigné sous le nom de Phyllobothrium delphini 3. H. Gervais a observé dans des kystes de la peau du diaphragme et de l’épipicon des Cestodes qu'il propose de nommer Sfeno- tenia delphini #. ! Bosc, Hist. nat. des Vers, t.1, p. 524, tab. IX, fig 10-12. ? Rupozpai, Ent. hist, II, 265. Synopsis, 186. 5 Comptes rendus, Paris, 1868. : + Sur les Entozoaires des Dauphins, COMPTES RENDUS.. . , 20 novembre 1871. LE GRAND DAUPHIN TURSIOPS TURSIO: LITTÉRATURE. Pierre Belon., /istoire naturelle des étranges poissons marins ct description du Dauphin, À vol. in-4, 1551. Klein, Jac. Theod. Misloriæ piscium (... de lapillis in craniis piscium) anal. tursconium . . .. 1740, in-4°, 6 tab. Hunter, /’hilos. Transact., vol. LXXVIL, tab. XVIIE, 1787. Rüppell, Beschreib. mehr. neu. Säugethiere in d. zool. SAAMLUNG p. SENCKENB, NATURF. GESELLSCHAFT, Rüppell, Upon the suffolk coast, ANN. or. NAT. nisr., IV, aug. 1849, p. 100. Meier, Archiv. des Vereins in Mecklenburg, p. 290, 1865 (25 janv. 1865, Travemunder Bucht.) D'J E. Gray, Note on the Botllenosed Whales (Tursio). Proc. Zoo. Soc., 1865, p. 560. Van Bambeke, Sur un Dauphin échoué à la Panne, le 20 décembre 1874. BULLETIN DE L'ACAD. ROY. DE BELGIQUE, 2 série, t. XXXIX et 5° série, t. XV. True, The Porpoise l'ishery of Hatteras (Tursiops tursio), BuzL. u. s. FISH, COMM., vol. V, n° 1, p. 5. (58 ) Flower, On the external characters of two species of british Dolphns, Trans. Zoo. Soc., vol. XI, 1880. Fischer, Célacés du sud-ouest de la France, Act. Soc. Lixx. BoRDEAUx, vol. XXXV, 1881, pl. VII, fig. 1. Laver, /1. Pottle-nosed Dolphin (Delphinus tursio) in the Colm. Tue Zooocisr, 1882, p. 147. Gatcombe, Bottle-nosed Dolphin al Plymouth, Tue ZooLocisr, vol. VIII, 1884. , Chr. Eutken, Critical studies upon some Odontoceli of the Genera Tursiops, Orca and Lagenorhynchus, Tue ANNazs AND MaGaziNE 0r NATURAL HiISrORY, ser. 6, vol. IF, n° 8, aug. 1888. Kongelige Danske Videnskabernes Selskabs Skrifter, ser. 6, vol. IV, ( 583 ) HISTORIQUE. Aussi longtemps que les naturalistes, à défaut de squelettes, étaient obligés de s’en rapporter à des dessins, les noms d'Épau- lard, d’Orques, d'Oudre et bien d’autres étaient confondus dans les livres; les pêcheurs seuls ou quelques habitants des côtes savaient distinguer ces Delphinides entre eux. Un des premiers qui ait reconnu le Tursiops, t'est O. Fabri- cius, qui avait appris à connaître les Cétacés sur les côtes du Groënland où les pêcheurs distinguaient, l’espèce qui nous occupe, sous le nom de Nesarnak. Pierre Belon l'avait toutefois connu avant lé savant mission- naire, mais il eût été difficile à son époque de bien déterminer un Dauphin; Belon avait reçu à Paris une femelle pleine qui avait été capturée dans le voisinage de Tréport. Il a donné une description anatomique très remarquable et une bonne repré- sentation, dit le D' Fischer. C'est par Desmarets et Cuvier que l’histoire de cette espèce a commencé à être débrouillée : Nous recevons assez souvent sur nos côtes une espèce à bec, de taille plus grande que le Dauphin proprement dit, à laquelle nos matelots de Normandie ont altaché plus spécialement le nom de SOUFFLEUR, dit Cuvier. Sa longueur est de 9 à 10 pieds; elle porte de chaque côté, à chaque mâchoire, 21 à 23 dents coniques, émoussées par le bout. On la reconnaît bien dans l'Oudre de Belon, dit l’auteur des Jiecherches sur les ossements fossiles 1. Fréd. Cuvier, dans son Histoire naturelle des Cétacés, exprime encore des doutes au sujet de sa présence dans la Méditerranée : il ne croit pas pouvoir admettre ce que dit Risso du Nesarnak, comme d’une espèce qui se rencontre sur les côtes de Nice. Ce serait la confirmation de ce que dit Du Hamel, ajoute-t-il. Schlegel donne des détails fort importants sur le Tummler, 1 Recherches sur les ossem. foss. ...,V, p. 277. ou Delphinus tursio, et décrit le squelette, d’après les nom- breuses pièces que renferme le Musée de Leyde 1. Ed. Rüppell a décrit sous le nom de Delphinus abusalem un Cétacé de la mer Rouge, qu'il regarde comme identique avec le Delphinus hamatus d'Ehrenberg (Schreber’s Säugethiere, tab. 396), et que Schlegel avait déjà identifié avec le Tursiops tursio. Rüppell représente l'animal ?. En 1859, dans la Paléontologie française, Paul Gervais érige le Tursio en genre sous le nom de Tursiops ; on le pêche, dit-il, sur les côtes de l'Océan et de la Méditerranée. Ce nom géné- rique à été généralement adopté. Le professeur Flower, dans le catalogue des Cétacés du British Museum qui peut servir de guide à tous les cétologues, n'accepte dans ce genre que la seule espèce anciennement connue sous le nom de Grand Dauphin. Le savant directeur du British Museum à eu l’occasion de voir à l'Exposition inter- nationale des pêches à Londres, en 1883, des individus capturés sur les côtes des États-Unis d'Amérique, et qui y figuraient sous le nom de Tursiops subridens, True. M. Flower reconnait sous le même nom de Tursiops tursio un rostre avec une mandibule provenant des îles Seychelles et ne fait mention d'aucune autre espèce, ni d'Europe ni d'ailleurs. Le Dr Fischer a publié des détails du plus haut mtérêt sur cette espèce. Il a eu l’occasion de voir et d'étudier des individus des deux sexes capturés dans la baie d'Arcachon, et il fait men- tion des fœtus que M. Sowerbie a observés avec soin. Dans lOstéographie des Cétacés, H. Gervais, à mis à profit les notes de son père et cite la présence de ces Delphinides sur les côtes d'Afrique, dans les eaux de la Chine et au Japon, dans l'océan Indien et la mer Rouge, dans le Pacifique et la Nou- velle-Zélande, d’après les matériaux qui sont déposés au Muséum. M. H. Gervais pense que dans les eaux du cap de 1 Abhandlaus dem Gebriete der Zuologie... Leiden, 1841, p. 25. 2? Zoo!. Sammlung d. Senkenb. naturf. Gesells. (85 ) Bonne -Espérance il y a une forme distincte qu'il nomme Tursiops aduncus, et qu'il croit identique avec celle de la mer Rouge désignée sous ce nom par Hempbrich et Ehren- berg. Capellini a figuré dans son mémoire Della Pietra leccense, une tête et des dents qu’il importe de comparer au Tursiops des temps actuels f. Dans un mémoire intitulé : Del Tursiops cortesti, le savant naturaliste de Boulogne figure un autre crâne ?. Un troisième mémoire a pour titre : Delfini fossili del Bolo- nese 3. Nous ne croyons pas aller trop loin en disant que le Delphi- nus (Delphinapterus) cortesii est le précurseur du Tursio. Il y a quelques années, le professeur Steenstrup avait acquis à Trieste une peau et un squelette d’un Delphinide capturé dans l’Adriatique, et qu'il avait inscrit dans la grande collec- tion cétologique de Copenhague, sous le nom de Delphinus parvimanus. Le professeur Lutken a étudié cet animal; il a pu le comparer à vingt squelettes de Tursiops que possède le Musée de Copenhague, et, tout en ayant une tête de Tursiops véritable, il croit, à cause de différences dans les phalanges des doigts, conserver cet animal sous son premier nom de parvimanus. Au lieu du second doigt qui est le plus long dans le Tursiops véritable, c'est le troisième dans celui de PAdria- tique. Au lieu de 1-2, 7-9, 6-7, 2-8 et 1-2, le parvimanus a 248718: 3,1: Quant à son identification avec le Tursiops catalania, dit le professeur Lutken, il faut attendre le squelette authentique de cet animal, la tête ne suflisant pas, d’après lui, pour Îles réunir. ! Della Pietra lercese, Bologna, 1878. ? Del Tursiops cortesii, Bologna, 1882. Delfini fossili del Bolonese, Bologna, 1864. r Ci] 40 ( 580 } SYNONYMIE. Delphinus tursio, Fabricius, Fauna groenlandica. Tursiops tursio, P. Gervais, Zool. et Paléontol. françaises, p- 01. Delphinus abusalem, Rüppell. Bottle nose wale, des Anglais. Nesarnak, des Grœnlandais. Die Tummiler, des Allemands. Oudre, de Belon. Souffleur, des Français. Ce Cétacé est commun sur les côtes de France, où on l'appelle aussi grand Dauphin. Le Delphinus abusalem observé par Rüppell dans la mer Rouge est probablement le même animal, amsi que le Tursio aduncus d'Hemphrich et Ehrenberg de la même mer. Schlegel se demande si ce n’est pas encore la même espèce qui a été décrite par Wiegmann sous le nom de Delphinus hamalus de Hemphrich et Ehrenberg, et qui vient sans doute aussi de la mer Rouge f. Le Delphinus tursio du Brésil ne présente aucune différence avec celui d'Europe. Mon fils en possède deux squelettes venant de Rio Janeiro. Fischer ne trouve pas de caractères qui permettent de dis- tinguer, comme race, le Tursiops de la Méditerranée de celui de l'Océan. Le crâne d’un individu de la côte d'Afrique ne pré- sente pas une différence appréciable avec celui du golfe de Gascogne ?, le plus connu des Dauphins à teéte ronde ou le grand Dauphin, dit Cuvier 3. SCHLEGEL, loc. cil , p. 95. ? GATcON8E à signalé la capture d’un Tursiops dans la Manche, près de Plymouth. Bottle nose Dolphins at Plymouth, Zoococisr, vol. VII, p. 65. $ Recherches . :.., p. 280, pl. XXI, Big. 3 et 4. sx (587) CARACTÈRES. L'animal est plus robuste que le Dauphin ordinaire. La longueur totale du corps est de 3 mètres. À en juger par Ja dimension des individus capturés dans la baie d'Arcachon, la taille varie entre 2,35 et 3,10. La femelle a la plus forte taille. Un vieux mâle, de Cette, mesure 3,05. Le corps est cylindrique, relativement assez court et trapu, la queue peu comprimée, les nageoires pectorales arquées, l'aileron dorsal grand, arqué en arrière; la nageoire caudale large. Tout le corps est d’un noir intense, à l'exception d’une bande ventrale étroite, d’un gris clair chez le mâle, d’un blanc pur chez la femelle. Au-dessus de œil, il existe une tache grisâtre, arrondie sur le mâle et la femelle, capturés le 10 juin 1868 dans la baie d'Arcachon. On peut conclure de la comparaison des crânes que celui des mâles est plus grand que celui des femelles, dit Fischer. Les têtes des femelles sont également remarquables par la largeur du rostre, à sa base et à sa partie moyenne. Les dents sont coniques, lisses, appointées au sommet, au nombre de 21 à 25 au-dessus et au-dessous. La couronne est souvent usée Jusqu'au collet. Le fœtus compte quatre soies équidistantes dans les mous- taches; un fœtus capturé dans le port de Bordeaux en compte cinq à droite, sept à gauche. Dans les squelettes connus, le nombre de vertèbres varie de 62 à 65; généralement ce nombre est de 63 ou 64. DESCRIPTION. Le nombre de dents varie peu d’un animal à l’autre : dans un individu d'Helgoland nous avons trouvé ?*, dans un autre CT 10) d'Angleterre :?, dans un exemplaire de Gand ?*. Le 6 juin 1866 trois Tursio sont pris ensemble dans la baie d'Arcachon : un mâle et une femelle adultes et une femelle { 088 }) plus jeune. La formule dentaire est 122,255, 2i2+. Les caractères ostéologiques sont les mêmes. Nous avons vu au Musée de Brest un squelette fort intéres- sant quoiqu'il n’eût ni queue ni mains, dont les dents, au nombre de 22 dessus et 21 dessous, avaient la couronne com- plètement usée, ce qui donne à la tête une physionomie particulière. Ce n’est pas avec l’âge que les dents s’usent ; nous avons vu d'assez jeunes individus avec des dents sans couronne. Fischer cite également le crâne d’un mâle de la Méditerranée avec des dents très usées. Schlegel a eu l'occasion de comparer plusieurs crânes, et il fait l'observation que ces dents qui s’entrecoisent dans le jeune âge finissent par s'opposer les unes aux autres quand la cou- ronne s’use. Le nombre de vertèbres est de 63 ou 64, partagées en 7 cer- vicales, 45 dorsales 17 lombaires et 26 caudales ; nous trouvons une caudale de plus dans un des squelettes. Les vertèbres sont au nombre de 64 dans les trois squelettes de la baie d’Arcachon(c. 7, d.13 ou 14, 1 14, c. 20 — 64 ou 65). Les deux premières cervicales sont soudées sur tous les squelettes que M. Fischer a vus. La soudure des vertèbres cervicales varie beaucoup dans ce Dauphin : on voit tantôt les deux premières réunies, tantôt la troisième, quatrième et cinquième, en partie au moins; on les voit aussi se souder par leurs apophyses; c'est ainsi que dans un squelette d’un animal de Cette l’apophyse épineuse de la sixième vertèbre s’unit à la septième. Le mâle adulte de Cette a une phalange dans le pouce, deux dans le second doigt, six dans le troisième, deux dans le qua- trième, une dans le cinquième. Dans un autre squelette, complet également, nous trouvons : au premier deux phalanges, au second huit, au troisième six, au quatrième trois et au cinquième une seule. Les os du bassin du mâle du Musée d'Arcachon sont très arqués et longs de 80 millimètres. Ceux des deux femelles ( 589 ) adultes ont, dans l’une 122 millimètres, dans l’autre 100 milli- mètres. M. Fischer ne peut dire si ces os sont plus développés chez le mâle que chez la femelle. M. Van Bambeke a écrit une note intéressante sur des folli- cules rencontrés dans l’épiderme de la mâchoire supérieure ; ces follicules sont probablement des restes de poils fœtaux. MOEURS. La vie de cette espèce doit être assez dure, puisqu'on a trans- porté, il y a quelques années, un individu, capturé dans Île golfe de Saint-Laurent, à l'aquarium de Boston. Le régime des Tursiops est sans doute ichthyophage comme celui des Delphinides en général. Un mâle adulte, cité par Fischer, avait des arêtes de poisson dans l'estomac ; une femelle renfermait également des débris de poissons, un congre entier de la grosseur du bras, beaucoup d’anguilles et un os de Seiche. Rüppell rapporte que dans la mer Rouge ce Dauphin vit en petite famille comme celui des mers d'Europe. Sluyter en à vu à l'ile des Ours et sur les côtes de la Nou- velle-Zemble également réunis par petites gammes. Nous ne connaissons que deux observations sur leur déve- loppement : l’une est d’une femelle capturée sur la côte ouest de la France, le 2 avril, et qui portait un fœtus de 80 centi- mètres de longueur; l’autre est une capture de femelle faite au mois de mai, et qui renfermait un fœtus de 90 centimètres. (Ce dernier est celui de P. Belon). Dans le Journal de PAcadémie des sciences de Philadelphie, il est fait mention d’un fœtus recueilli sur les côtes de Rio de Janeiro, mais dont nous ne connaissons pas les dimen- sions f, ‘ Delplinus ncsarnak, fœtus de Rio de Janeiro. Voir Journ. Acad. sc. Philad., 1, 267. A l’époque des amours les Tursiops se séparent-ils par couples de la gamme, comme c’est le cas pour beaucoup de Cétacés ? Le 12 mars 1882, on a vu un couple isolé sur la côte de Colchester. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Le Tursio, que l’on s'accorde généralement à désigner sous le nom de Tursiops, nous offre un autre exemple intéressant de cosmopolitisme. En Europe, nous le considérons comme l’un des Cétacés les plus répandus; on le voit, en effet, dans la mer du Nord et dans PAtlantique; il visite la Méditerranée, Adriatique et la mer Noire; de l’autre côté il visite la Baltique; au nord on le voit à l’île des Ours et à la Nouvelle-Zemble; de l'autre côté de l'équateur, on le trouve des deux parties de l'Atlantique boréale et australe ; il fréquente le cap de Bonne-Espérance, la côte du Brésil et Pocéan des Indes, et il pénètre dans la mer Rouge. Puis on le connaît encore dans la mer de Chine et autour du Japon, sur les côtes des États-Unis d'Amérique, à l’est comme à l’oest et enfin à la Nouvelle- Zélande. Les Tursiops sont les Delphinides les plus communs sur les côtes de l'Atlantique, dit M. W. True en parlant des Cétacés des côtes d'Amérique. C'est un Cétodonte archaïque dont on trouve des restes fos- siles dans différentes localités. s Il existe dans l’Adriatique un Tursiops tursio nain; le pro- fesseur Steenstrup en avait rapporté un spécimen que Brin- kardt avait appelé Tursiops parvimanus. Le professeur Lutken a soumis ce squelette à un nouvel examen et, trouvant certaines différences dans le sternum et le nombre de phalanges, il croit devoir en faire une espèce distincte. Ratbke en a rapporté de la mer Noire un squelette qui est à Saint-Pétersbourg. (391) Parmi les Cétacés aperçus pendant un voyage au Spitzherg, Fréd. Martens cite le Tursio sous le nom de Tonyn ou Zee- Varcken (cochon de mer). Au milieu du dos on voit une nageoire comme une demi-lune, découpée du côté de la nageoire caudale. Le Tursiops, d'après Sluyter, ne dépasse pas la latitude de Beereneiland. Nous avons recueilli plusieurs observations sur la prise et l'échouement de quelques individus. Le Dr Fischer fait mention de plusieurs individus capturés ou échoués sur la côte ouest de France. Il signale d’abord trois individus pris le 6 juin 1866, à Audenge (bassin d'Arcachon) : un mäle adulte, une femelle adulte et une femelle jeune. Deux individus, un mâle et une femelle, sont capturés le 10 juin 1868, également dans la baie d'Arcachon. La femelle avait mis bas. En mars 1871, un mâle non adulte est pris à Arcachon; le 23 avril 1878, une femelle adulte à Bordeaux (Bacalan). Le 2 avril 1880, une femelle, en gestation, est prise également à Bordeaux. On en capture presque tous les ans dans le bassin d’Arca- chon et même dans la Gironde, dit Fischer. Nous avons cité plus haut l'exemple d’un individu qui a remonté la Gironde. Il y en a aussi qui ont remonté Ja Tamise. Le Bottle nose de Hunter est dans ce cas. Il à été capturé près de Berkeley (Glocestershire). Un Jeune et sa mère ont été également capturés près de Berkeley. M. Jenyns fait mention d’un autre, pris dans la rivière, à Preston (Lancashire). Un autre a échoué à Yarmouth en 18461. On en connaît plusieurs qui se sont fait prendre sur les côtes d'Angleterre et d'Ecosse. 1 Ann.of nal. hist, 184). ( 592 ) Clark à donné la description d'un animal capturé sur les côtes de Suftolk 1. M. Sluÿter a vu à bord du W. Barents, au sortir de Bergen, des petites gammes de Tursiops, qu’il désigne sous le nom de Noordcaper ; leur nombre à diminué à mesure qu’il s’éloignait du midi; en approchant de Jan Meyer on n'en voyait plus, dit-il, mais à leur place apparaissaient des Balwnoptera rostrata. En revenant de Spitsbergen le Tursiops reparut de nouveau en approchant de Beren-Eiïland, et disparaissait ensuite de nouveau en se rendant au nord 2. Le 17 septembre 1868, on a capturé un animal de cette espèce à Hernebay. En 1878, le 5 octobre, un mâle a été capturé près de Holy- head. Flower en a publié un dessin. Le 12 mars 1882, deux Tursio se sont présentés (in the Calne) sur les côtes d'Angleterre (Colchester); la femelle a été capturée. Elle avait T pieds 6 pouces 3. Le 20 décembre 1874, un individu, qu'il suppose du sexe mâle, a échoué à la Panne; M. Van Bambeke à donné des indications sur cet échouement à la séance du 9 janvier 4875 de la classe des sciences de l'Académie de Belgique #. Un individu à échoué en juin 1870 près de Labô, dans la baie de Kiel. Le squelette en est conservé à Kiel. Deux autres individus morts ont été trouvés, le même mois, dans la baie de Kiel (Môbius). Le squelette d’un individu, échoué auf Füne (Danemark), a été remis au Musée royal de Copenhague. Meier fait mention d’une femelle de 20 pieds qui a échoué le 23 janvier 1863 in die travemunder Bucht. Un Tursiops a été capturé à Bohuslän. Au Musée de Hanovre, on voit le squelette d’un Tursio qui a remonté l’Elbe jusqu’à Lunebourg. ‘ Ann. mag. nal. hist., sér. 2, vol. IV, p. 100, 1849. ? Tydschrift der nederl. diecrkundige Nercenig. Deel, IV, 1879, p. xLr. "kr 3 The Zoologist., april 1882, 4. Bulletin... .., 2e série, t. XXXIX, et 5° série, L XV. 7 ( 593 ) Un individu a été pris, en septembre 1885, dans la Baltique (Conventz-Danzig !). Newton a trouvé des ossements de Tursiops (Tursio?) à Overstrand (Norfolk) dans le Forest-Bed (Newton). Nous connaissons un certain nombre de Tursio observés hors des mers d'Europe. Il reste à savoir si tous ces animaux appartiennent bien à la même espèce, ou si quelques-uns d’entre eux présentent des différences assez grandes pour en faire des espèces vicariantes. A Paris on voit un crâne des côtes de Chine, un autre des îles Seychelles, un rostre de la Nouvelle-Zélande; à Bordeaux on en possède un du cap Vert et, à Liverpool, un des côtes de Gambie. Le Delphinus brocchii des terrains tertiaires d'Italie est un Tursio. Le capitaine Scammon fait mention du Tursiops (Turs. gillii, Dall). On fait mention d’une pêcherie établie à Hatteras. MUSÉES. Il existe des squelettes ou des crânes séparés dans la plupart des Musées ; nous pouvons citer particulièrement: Amsterdam, Anvers, Bordeaux, Bonn, Boston, Brest, Bruxelles, Copen- hague, Édimbourg, Florence, Gand, Gênes, Gæœttingue, Greis- wald, Groningue, Hanovre, Leyde, Londres (Coll. roy. chi- rurgiens), Louvain, Lund, Paris, Pise, Saint-Pétersbourg, Stockholm, Upsal. Le squelette du Bottle nose de Hunter se trouve au Musée du collèse des Chirurgiens. Le British Museum possède également des moules de la tête du mâle et de la femelle capturés sur les côtes des Etats-Unis d'Amérique, un squelette de mâle adulte, de femelle et de jeune de la baie de Forth, et plusieurs têtes, dont deux de Hernebay. ! Schriflen des Naturfarschenden gesellschaft in Danzig. Dantzig, 1888, [pe 28. (594) L'original du Delphinus abusalem est à Francfort. Le squelette du Musée de Copenhague est d’un animal cap- turé sur les côtes de Danemark. A Saint-Pétersbourg se trouve le squelette rapporté par Rathke de la mer Noire. A Paris on voit le crâne d’un animal de la Manche. A Louvain nous possédons des crânes d'individus capturés dans le canal Saint-George. Le Musée de Brest possède un squelette intéressant, quoique incomplet, par l'usure de ses dents. On n'en connait pas l'origine. Le Musée de Leyde possède le squelette du Tursio de 11 pieds qui a échoué vers 1820 sur les côtes de la province de Gro- ningue. Plusieurs squelettes et des cränes nombreux sont conservés aux Musées de Bordeaux et d'Arcachon (Fischer). Le Grampus du Musée de Bruxelles, dont il est question quelquefois, n’est qu'un Tursiops tursio qui a été empaillé et dont les dents, toutes artificielles, ont été ajoutées par le pré- parateur. On voit au Musée de Hanovre un squelette de 11 à 12 pieds, d’un animal pris à Lunebourg, dans l’Elbe. Il avait perdu ses dents. À Leyde on possède plusieurs squelettes et des crânes ; un de ces squelettes vient de la province de Groningue ; il a 11 pieds de long; à Dorpat on conserve un fœtus de 23 centimètres. Les Musées renferment, en somme, des crânes et des sque- lettes provenant de la mer Noire, de la Méditerranée, du canal Saint-George (Englesea), de la Manche, des côtes de Belgique et des Pays-Bas, d'Helgoland, de la Baltique. Le Dr Fischer a vu au Musée de Bordeaux un crâne de la côte occidentale de l'Afrique, et qui ne présente aucune diffé- rence appréciable avec les têtes osseuses du golfe de Gascogne. A Gand on possède le squelette du mâle échoué à la Panne le 20 décembre 1874. DESSINS. Rondelet figure le Tursiops (p. 474. Nous trouvons un dessin de ce Cétacé dans Belon, Hist. nat. des Poissons marins étrangers, chap. XLV, pl. XXX, fig. fol. 32 verso. Lacépède a publié un dessin du Dauphin ordinaire, pl. XITF, fig. 1, et de son crâne, pl. XIV, fig. 1. Bonnaterre reproduit la figure de Lacépède dans sa Cétologie, px T fie. Gray en donne aussi un dessin dans la Zoology d'Erebus and Terror, pl. X, d'après un jeune animal de 7 pieds 6 pouces, capturé au sud de l'Irlande en novembre 1898 ; il publie aussi le dessin de la tête d’un vieux mâle capturé dans le Firth of Forth dans les Proceedings de la Société zoologique de Londres en 1868. . Camper a donné le dessin de la tête, sous le nom de Dauphin vulgaire, pl. XXXV, XXXVI, XXXIX et XL. Nous trouvons ensuite une figure dans Schlegel, Abhand- lungen, pl. V, fig. 1 (d’après un animal échoué sur les côtes des Pays-Bas). Il est entièrement noir. Rüppell a donné un dessin de son Dauphin de la mer Rouge. Flower montre un dessin de Tursio d’après un individu cap- turé près de Halyhead en 1878. Z.S. L., mai 1879. La meilleure figure de cette espèce, dit Flower, est celle de Hunter, publiée dans les Philosoph. Transact., vol. LXXVIT, 1787, pl. XVIII. Ce dessin est fait d'après un jeune animal capturé avec sa mère près de Berkeley (Glocestershire). Il est décrit comme Delphinus delphis. Sous le nom de Another grampus, Hunter donne le dessin d’un animal capturé dans la Tamise lequel est sans doute un Tursio. (PI. V, fig. 2.) Un bon dessin du Delphinus tursio a été publié en 1880 par M. Flower dans les Transactions de la Société zoologique de L 596 ) Londres (vol. XI, part. 1, pl. D), d’après un animal capturé à Holyhead en 1868. Dans l'Ostéographie des Célacés, nous avons reproduit les sque- lettes d'individus capturés dans la Méditerranée, pl. XXXIV, fig. 3-6 et fig. 7-9 de la même planche des figures de Tursiops capturés dans la Manche. Gray, Erebus and Terror, on Celaceous animals. PI. X, fig. 1. PARASITES. Dans un individu capturé dans la Méditerranée, H. Gervais a trouvé un Phyllobothrium 1, et Pietro Marchi a observé dans les intestins grèles d’un autre animal de la même mer une quantité considérable de distomes, auxquels il a donné le nom de Distomum tursionis 2. ! Comptes rendus, 28 novembre 1871. ? Atti soc. ital, sc. nat., vol. XV, fase. IV. Milano, 1875 GENRE PRODELPHINUS. Parmi les Dauphins, voisins du Delphinus delphis, se trouvent des espèces qui n’ont point la gouttière bilatérale au palais ; en 1852, Gervais fit connaître un Dauphin à palais plat, pris sur la côte départementale de l'Hérault, qu’il désigna sous le nom de Delphinus tethyos. Douze ans après, Gray, trouvant le palais plat dans plusieurs autres Dauphins étrangers, propesa de réunir ceux-ci en un genre nouveau auquel il proposa de donner le nom de Cly- mène, qu'il transforma ensuite en Clymenia. C’est le nom d’une espèce dont il a fait un nom générique. Dans lOstéographie des Cétacés (1880,, Paul Gervais, à propos de la tribu des Delphinus, propose le nom générique d’Eudel- phinus pour le Delphinus delphis, et celui de Prodelphinus pour remplacer celui de Clymenia. H donne pour motif d'introduire plus de régularité dans la synonymie. Mon collaborateur fait remarquer ensuite qu'il existe au Muséum de Paris, dont il a la direction, plusieurs crânes de la même division, parmi lesquels se trouvent quelques types décrits par les auteurs ; il y en a du Sénégal, du cap de Bonne- Espérance, du cap Vert, de la mer des Indes, de la Vera-Cruz, des îles Honolulu, du détroit de Banca et de la Nouvelle-Gui- née. En 1885, le professeur Flower communique le résultat de ses recherches sur les Dauphins, sous le rapport de leurs caractères et de leurs divisions et il admet le genre Clymenia proposé par Gray, comme synonyme de Prodeiphinus de Gervais 1. 1 Proc. Zool. Soc', 1885, p. 495. ( 598 } L’année suivante, le savant Directeur du British Museum insère une note dans les mêmes Proceedings et propose de conserver le nom proposé par Gervais, parce que celui de Clymenia, substitué à celui de Clymene, a été donné déjà par Münter à un Céphalopode et par Savi à un Ver !. Il a comparé les crânes des divers Dauphins sans gouttières au palais, et les rapporte à plusieurs types : le premier, caractérisé par la largeur de la tête, est représenté par le Dauphin obscurus ; le second par le Dauphin tethyos ; le troisième, par celui qui est connu sous le nom de Dauphin Dubius et qui est rapporté, avec un signe de doute, au Prodelphinus doris de l'Atlantique; le quatrième type comprend les espèces à rostre étroit, comme le Dauphin longirostris de Gray (Spicilegia, p. 1, 1898), conservé dans le Musée de Brookes et qui est aujourd’hui à Leyde. M. Flower confirme les observations de Schlegel,que les sillons du palais manquent dans ce crâne et qu’on a eu le tort de le conserver, comme Gervais l’a fait, parmi les vrais Dauphins. Le savant cétologue anglais fait remarquer ensuite la rareté des squelettes de ce groupe dans les Musées qu'il a visités. Dans la lisie des espèces de Cétacés conservés dans le British Museum (1885), M. Flower admet dans le genre Pro- delphinus sept espèces de Prodelphinus : obscurus, euphrosyne, doris, attenuatus, alope, microps et longirostris. Le professeur Lütken, dans un intéressant mémoire qu'il vient de publier en danois avec un résumé en français, admet onze espèces dans ce genre, mais il avoue que les diagnoses laissent encore beaucoup à désirer sous le rapport de la préci- sion et de l'amplitude; ces espèces sont : P. doris, P. euphro- syne, P. euphrosinoides, P. clymene, P. obseurus, P. Petersü, P. Alope, P. attenualus, P. longirostris, P. Holbülli, P. tethyos. Il a accompagné son mémoire de deux cartes indiquant la partie de l'Atlantique où ces Cétacés ont été capturés. Le Prodelphinus tethyos semble répandu dans l'Atlantique septentrional, comme lObscurus et le Doris ou dubius, dont 1 Proc. Zoul. Soc., 188 p. 418: ) I ( 599 ) la présence a été signalée récemment par M. True, dans le golfe du Mexique. Le Cetaceum de Copenhague renferme dix crânes et dix-neuf squelettes appartenant à des espèces de ce genre. Les Prodelphinus semblent bien représentés, surtout dans le grand courant équatorial et la mer de Sargasse de l'Atlantique ; ce sont les Dauphins pélagiques par excellence, dit le profes- seur Lutken. En général, ces squelettes sont rares dans les Musées, fait remarquer également le savant professeur de Copenhague, par Ja raison qu'on voit bien rarement ce Dauphins échouer sur les côtes d'Europe. Les marins qui ont la chance de harponner un Cétacé en pleine mer ont rarement l'envie d'en conserver autre chose que la tête. x Een RAA + DAUPHIN DE TETHYS (PRODELPHINUS TETHYOS.) LITTÉRATURE. Gray, Erebus and Terror, 1859-45, PB. Gervais, Remarques sur les Mammuifères marins qui fréquentent les côtes de la France, BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'AGRICULTURE DE L'IJÉRAU LT, 2e série, t. XX, 1855, pl. I. Duvernoy, Aevue ct Magazin de Zoologie, 1854, p. 547. Pucheran, Revue ct Magazin de Zoologie. Notices mamma'ogiques, 1854. P. Gervais, Zoologie et Palcontologie francaises. Paris, 1859, p. 502. Gray, Calaloque of Seals and Whales in the British Museum, p. 251, 1566. Van Fencden et Gervais, Ostéologie des Célacés. Paris 1880, p. 604. Flower, On the Characters and Divisions of the Family Delphinide, Proc. Zooc. Soc., 1884, p. 466. Chr. Fr. Lütken, Pidrag til kundskab om de tre pclagiske Tandhval- Slæyter Steno, Delphinus og Prodelphinus. Vivexsk. Secsk. Skr , 6,Rœkke, Kjobcnhavn, 1889. 41 DE ! LU { 603 ) HISTORIQUE. Depuis longtemps Cuvier avait désigné sous le nom de Delphinus dubius, un Dauphin dont il existe quelques têtes au Musée d'anatomie comparée de Paris ; elles ne se rapportaient à aucune espèce connue, disait-il, et il les assimilait à un Dau- phin harponné par Dussumier à la hauteur du cap Vert. En décrivant les Cétacés du Voyage Erebus and Terror, Gray donna le nom de Delphinus Euphrosyne à un Dauphin de Norwich, dont la tête est conservée au Musée du Collège royal des Chirurgiens de Londres; il y rapporta également une tête du Leverian Museum et un crâne du Muséum de Paris, désigné sous le nom de Pelphinus dubius. A la fin de äécembre 1852, an Dauphin fut pris à Valras, sur les côtes du département de l'Hérault, à peu de distance de lembouchure de l'Orb; P. Gervais n'avait pu en recueillir qu'une partie de la colonne vertébrale et la tête osseuse; comme cet animal différait, par le palais surtout, du Dauphin delphis, mon ami proposa de le désigner sous le nom de fethyos. C’est done un Dauphin qui n’a pas la gouttière bilatérale au palais, comme le Dauphin ordinaire. Gervais, en comparant la tête du D. tethyos avec celle du Dauphin ordinaire, remarque qu’elle est un peu plus grosse ct que les dents lui paraissent un peu plus fortes, quoique sen- siblement de même forme; ce qui contribua à lui démontrer que ce n’était pas le Dauphin ordinaire; il fit part de ses observations à la Société d'agriculture de l'Hérault. En 1854, deux Dauphins échouèrent à Dieppe et furent envoyés au Muséum de Paris par le D° Guiton. Duvernoy fut frappé de même de l'absence de gouttière bilatérale au palais et fit connaitre le nouveau Dauphin dans la Revue et Magazin de Guerin, sous le nom de Delphinus marginaltus. l Annales du Muséam d'hist. nal., pp. 9 et LE ( 604 ) En novembre 1860, le commandant Loche publia, dans le Magazin de Zoologie, une note sur deux nouveaux Dauphins capturés sur les côtes d'Alger: lun y porte le nom de D. Alge- riensis, l’autre de D. Mediterraneus; les squelettes n’en ont pas été conservés et il serait difficile de dire à quelles espèces il faut les rapporter. Dans les Comptes rendus de novembre 1864, Paul Gervais fait mention d’un Dauphin capturé dans le voisinage de Port- Vendres (Pyrénées orientales) dont la.tête est heureusement conservée et qui montre également un palais sans gouttière bilatérale 1. Le Dauphin de Tethys parait beaucoup plus rare que le Dauphin ordinaire, dit P. Gervais en 186%; il ne lui est connu que par deux individus : lun pris à l'embouchure de l'Orb, en 1859, l’autre aux environs de Port-Vendres. Le seul crâne de la Méditerranée sur lequel Gervais a fondé son espèce tethyos, aujourd’hui au Muséum de Paris, est si semblable au D. marginatus, dit le professeur Flower, qu'il ne peut sempècher de n’y voir qu'une seule et même espèce. Le D° Fischer, dans son travail Sur les Cétacés du nord-ouest de la France, pense avec raison que le Clymene euphrosyne de Gray est peut-être identique avéc le Clymene marginata de Duvernoy. Il fait remarquer que M. Beltremieux considère comme Clymene marginata un Dauphin dont la tête osseuse est conservée au Musée de la Rochelle et qui provient d’un animal capturé dans les parages de la Charente-Inférieure. Il donne la description du squelette d’un mäle qui est conservé dans les galeries du Muséum. SYNONYMIE. Delphinus tethyos, Gervais, Bull. Soc. d'Agriculture «e l'Hérault, 1853. 1 Comptes rendus ..,., 28 novembre 1864, p. 867, et Axx. axD Mac. xar. uisT., 1865, p. 76. { 605 } Delphinus marginatus, Duvernoy, Revue et Mag. de Zool., 1854. Delphinus marginalus, Gray, Cat. of Seals and Whales, p.245. Delphinus Euphrosyne, Gray, Erebus and Terror, p.40, pl. 22. Prodelphinus tethyos, Van Beneden et Gervais, Ostéographie des Cétacés, 1880, p. 604. Clymene marginata, Fischer, Cétaces du sud-ouest de la France, 1881, p. 150. Le Delphinus marginatus de Duvernoy, établi d’après deux individus capturés à Dieppe, dont un squelette est monté au Muséum de Paris, est peut-être identique, comme nous l'avons dit plus haut, avec le Delphinus Euphrosyne de Gray, et le professeur Flower est tout disposé à rapporter à la même espèce le Delphinus tethyos de Gervais. Au Musée départemental de la Rochelle, on conserve une peau montée de la taille du Marsouin, toute noire, du moins dans l’état où elle se trouve, et qui est inscrite sous le nom de Dauphin bridé, Delphinus frænatus. Aucune partie du squelette n'a été conservée et On ne peut que soupçonner, puisqu'on n'en à pas fait un Dauphin ordinaire, on ne peut que soup- conner, disons-nous, que c’est un Prodelphinus. Le professeur Lütken admet onze espèces dans ce genre parmi lesquelles il compte le Prodelphinus obscurus et le Pro- delphinus Holbülli. CARACTÈRES ET DESCRIPTION. L'animal mesure ? mètres et quelques centimètres. A en juger par les crânes de Dieppe, les dents sont plus fortes que dans le Dauphin ordinaire et la formule est =; dans l'individu de la Méditerranée, recueilli par Gervais, la mâchoire supérieure avait, d'un côté, 45, de l’autre côté, 46 dents et la mâchoire inférieure 41 d’un côté, 42 de l’autre. Le D: Fischer leur en accorde jusqu’à #. Les nageoires pectorales présentent au pouce 2 phalanges, (606 ) à l'index 9, au médian 7, à l’annulaire 3 et au petit doigt 4. Le Dr Fischer leur accorde 1, 8, 6, 2. La formule vertébrale est : ce. 7, d. 15, 1. 29, c. 32 = 76. En somme, le squelette de Dieppe qui est au Muséum de Paris ressemble à celui du Dauphin ordinaire. Nous ne connaissons rien des mœurs de ce Cétacé. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Des individus de l'espèce qui nous occupe ont été capturés en Europe, mais, à en juger par le petit nombre de squelettes connus, il y a lieu de croire que ce Dauphin se trouve dans les régions chaudes de l'Atlantique septentrionale plutôt que dans les régions froides ou tempérées. Il est vrai, ce Cétacé doit avoir été souvent confondu avec le Dauphin delphis. Depuis longtemps Cuvier avait désigné sous le nom de D. Dubius des têtes du Muséum à origine douteuse et qu'il attribuait à un Dauphin harponné à la hauteur du cap Vert. Dussumier, avons-nous vu plus haut, a capturé en effet un Dauphin de cette espèce au cap Vert. Comme nous venons de le dire, en décembre 185%, un indi- vidu a été pris sur la côte du département de l'Hérault à Valras, à peu de distance de l’Orb. Quelques années plus tard, un autre a été pris à Port-Vendres !. Le professeur Giglioli fait mention d'un animal de cette espèce capturé au mois d’avril à Nice. On en a capturé, si nous ne nous trompons, sur les côtes ouest de France à la Rochelle et à Brest. M. Laval a envoyé, en 1850, de Brest, à Gervais, le crâne d'un animal pêché, lui a-t-on dit, à peu de distance de la rade. Nous avons vu plus haut qu'en 1854 on a capturé à Dieppe un beau mâle dont le squelette a été envoyé au Muséum de Paris. Duvernoy croyait ce Dauphin encore inconnu et proposa de lui donner le nom de Delphinus marginatus. On à fait men- tion d’un second capturé à Dieppe. 4 Revue dé Zoologie, 1856, p 545. ( 607) Nous en avons vu, dans des Musées, des crânes provenant des côtes d'Angleterre. M. Florman a constaté sa présence sur les côtes de Suède. On l'a vu pénétrer aussi dans le Kattegat. Le Musée de Lun possède une tête de ces côtes. Retzius a également signalé sa présence dans le Kattegat. Il se rend jusqu’au Groënland : on en a reçu un squelette. Gray cite non seulement la mer du Nord et les côtes d’An- gleterre et scandinaves, mais également l'Atlantique austral, d’après un animal signalé par Burmeister à l'embouchure du Rio de la Plata. Un Prodelphinus, sans doute de la même espèce, a été pris de l’autre côté de l'Atlantique, sur les côtes de New Jersey 1. MUSÉES. La tête de l'individu décrit par P. Gervais est déposée dans la collection de la Faculté des sciences de Montpellier. La tête de celui qui a échoué à Port-Vendres est conservée dans les collections du D° Pinchenat. Les squelettes de Dieppe sont au Muséum d'histoire naturelle à Paris. On en voit un crâne au Musée de Brest et un autre au Musée de la Rochelle. Il en existe trois têtes au British Museum, dont une provient de Chatam Museum. Un exemplaire conservé au Musée de l'Université de Lund provient d’un animal capturé dans le Kattegat. Le type du Delphinus Euphrosyne de Gray, originaire de Norwich, est conservé au Musée du Collège royal des Chirur- giens de Londres. On y conserve également, depuis 1806, une autre tête provenant du Leverian Museum. Le cräne du Dauphin rapporté des Moluques par Dumont 4 Proc phil. Acad nat.sc., 1865, p. 261. ( 608 ) d’Urville et figuré dans l’Astrolabe, pl. XXI, fig. 2, pl. XXI, fig. 3 et 4 (Prodelphinus roseiventris), est conservé au Muséum de Paris. DESSINS. P. Gervais reproduit la face inférieure du crâne pour figurer les os palatins et ptérigoïdiens, et représente, à côté l’un de l'autre, le palais du D. delphis et du P. tethyos. Il figure sur la même planche une dent supérieure et une inférieure de grandeur naturelle, ainsi que la mandibule avec ses alvéoles du côté gauche et une partie du côté droit. Dans l'Ostéologie des Cétacés figure (pl. XL, fig. 18-24, pl XXXIL, fig. 1) le crâne de l’individu capturé dans la Manche, et (pl. XXX VIT, fig. 2) ie crâne de celui qui a été capturé dans la Méditerranée. Cette espèce est figurée dans les Vélins du Muséum ; Desma- rets a reproduit ce dessin dans l'Encyclopédie du D' Chenu, Mammifères, vol. V, pl. XXIX, fig. 1. Voyez aussi Pucheran, Revue et Magazin de Zoologie, 1856, n° 4!, d’après les individus échoués à Dieppe en 1854. PARASITES. Ce Cétacé a été trop rarement visité à l’état frais pour con- naître les parasites qui le hantent. 1 Revue de Zoologie, 1856, pl. 25. DAUPHIN DUBIUS. (PRODELPHINUS DUBIUS). LITTÉRATURE. Cuvicr, Annales du Musée d'histoire naturelle, XIX, p. 14. Flower, List of Celacea Brit. Mus., 1855, p. 29. Cope, Proc. Acad. nat. sc. Philad, 1866, p. 296. Flower, On the Characlers and divisions of the family Delphinidæ, Proc. Zoo. Soc., novembre 1885, p. 499. Frederick W. True, On a Spolted dolphin apparently identical witte the Prodelphinus doris Gray. ANNuaL Rerort or NAT. Museum, 1884. ( 611 ) HISTORIQUE. En 1830 un Dauphin a été capturé à peu de distance de la rade de Brest, dont la tête a été envoyée au Muséum de Paris. Cuvier, ne pouvant la rapporter à une espèce connue, proposa de la désigner sous le nom de Delphinus obscurus. I en fit men- üon dans les Annales du Musée d'histoire naturelle, dans le tègne animal et dans ses Recherches sur les ossements fossiles. Fréd. Cuvier adopta le nom spécifique de son frère, dans son Histoire naturelle des Cétacés et prétendit que les premières notions sur cette espèce avaient été tirées de quelques têtes osseuses qui se trouvaient dans le cabinet d'anatomie du Muséum. Sous le nom de Prodelphinus doris, M. True a désigné dans ces derniers temps un Dauphin capturé dans le golfe du Mexique, dont il publie de fort bons dessins et une intéres- sante description. D’après ce que nous dit M. True, ce Dauphin est un des plus beaux Cétacés qu’il ait vus. Les lignes du corps sont très gra- cieuses et les teintes sur les flancs, comme les taches sur le dos, sont d’une grande délicatesse. Un des naturalistes qui a été à même de voir une school de Dauphins à peau tachetée, près de Hasteras, a informé M. True que les jeunes individus n’ont pas de taches sur le dos. M. True regarde ces Dauphins de Hasteras comme voisins du D. Per- nelyi, mais croit prudent de les laisser parmi les espèces douteuses. Dans le courant de cette année, le professeur Lütken a publié un intéressant mémoire dont nous avons déjà parlé, et qui a pour objet les Steno, les Delphinus et les Prodelphinus. L'espèce qu’il désigne sous le nom de P. doris nous semble identique avec le P. dubius de Cuvier. (612) Nous avons d'après cela comme synonymes, le P. Dubius de Cuvier et P. doris de Gray. Il n’est pas douteux que la même espèce ne soit encore dési- gnée sous d’autres noms. CARACTÈRES. M. True accorde à l’animal une longueur totale de deux mètres 15 centimètres. Si nous comparons l'espèce qui nous occupe avec le P. tethyos et le D. delphis, nous trouvons que le dernier, sous le rapport de la taille, occupe le milieu entre les deux : le P. tethyos est le plus grand, le P. dubius le plus petit. Le professeur Lütken lui accorde comme caractères distinc- tifs: museau pointu, assez long et étroit (avec une élévation plus ou moins accentuée de sa partie médiane supérieure, du moins chez les mâles) et 70 vertèbres; dents assez grosses (40 au plus); largeur des membres environ 1/; de celle de tout le squelette. Les dents sont au nombre de 37 dessus, de 34 dessous. La formule vertébrale est de c. 7; d. 14, I. et c. 48 == 69. L'atlas et l’axis sont réunis; les autres cervicales sont sépa- rées. Les cinq premières paires de côtes sont pourvues de facettes pour s'unir au corps des vertèbres. Il y a 19 os en V. Le sternum consiste primitivement en trois pièces, dont les deux premières sont synostosés. M. True fait remarquer que l’omoplate est semblable à l'omo- plate du tethyos à l'exception de l’acromion qui est notablement plus large. La formule des phalanges est de I, 2; LE, 9; I, 7; IV, 8; V,L. L'os ischyon a huit centimètres de long et ressemble plus ou moins au Sigma des Grecs. C'est un animal qui vit par schools. (613) On peut dire qu'il habite la partie chaude de l'Atlantique sep- tentrionale, dans toute sa largeur, depuis la côte d'Afrique jusqu’au golfe du Mexique. On en a harponné au cap Vert et à Fernando Po, accidentellement dans la Méditerranée et la Manche. Comme nous l'avons déjà dit, le crane de lanimal capturé dans la Manche se trouve au Muséum de Paris; au British Museum on conserve un autre cräne sans indication d’origine. Le squelette décrit et figuré par M. True est conservé au Musée de Washington. Gray a reproduit la figure de la tête dans Zoology, Erebus and Terror, pl. XX, sous le nom de Prodelphinus doris. La tête est vue par-dessus et de profil. Le Prodelphinus doris, avec sa peau tachetée comme st elle avait été aspergée d’eau sale, est figuré par Fréd. True sous le nom de Spotted Dolphin, d'après un individu du Golfe du Mexique. [1 représente l'animal vu de profil et en dessous, et consacre deux planches à la reproduction des caractères du crane! Lütken publie également (p. 34) une figure de Prodelphinus doris, surtout au point de vue de la distribution des couleurs, et une autre de Prodelphinus obscurus. Il figure aussi le crâne de plusieurs autres espèces, ainsi que le squelette de la nageoire pectorale. ‘ Frenericx W. True, On a Spotted Dolphin epparenthy identical with Prodelphinus doris of Gray. Report xar. mus , 1884. Science, vol. VI, ju'y, 1885, p. 41. LE STENO (SAENOROSTRATUS;) LITTÉRATURE. G. Cuvier, Rapport sur les Célacés cchouëés à Paimpol, ANN. Du Museun, t. XIX. Lessen, OEuvres complètes de Buffon, Céracés. Paris, 1898. G. Cuvier, Recherches sur les ossements fossiles, t. V, p. 278, pl. XXI, fig. 7 ct 8. Yan Ereda, Aunleckening omtrent eene nieuwe soort van Dolfin. NIEUWE VERIHANDEL. DER EERSTE KLASSE V. H, KoniGL. Ne. INsrirur TE AusTERDAaM, 1829, [le decl. fred. Cuvier, /Jisloire nalurelle des Célacés, 1856, p, 155, pl. X, fig hret 2. gisecher, Catalogue d’une Faune du Département de la Charente- Anféricure (Act. Soc. linn., Bordeaux, juin 1841.) Gray, Zoologie, Ercbus and Terror, 1845. Proc. Zoo. Soc. 1864. schlegel, Æbhandl., p. 27, pl. IV, fig. 8 (dents). G. Michaud, Catal. d'une Faune de lu Charente-Inférieure, Acr. Scc. LiNNÉENNE DE Bonpeatx, 50 juin 1842, avec figure originale. ( 616) Peters, Ucber die von S. M. S. Gazclle gesammellen Saügethiere. . , . Monarssericur KôN. Akao. Berlin, 29 juin 1876, p. 560, pl. 2 ct 5. Paul Gervais, Zoologie ct Palcontoloyie francaises. Paris, 1859, p. 501. Paul Gervais, Mémoires Acad. sc. Montpellier, t. V, p. 124, 1861. Van Bencden Ct Paul Gervais, Osléographie des Cétacrs, p. 549. Flower, On the Characters and divisions of the family Drlphinidæ, Proc. Zooc. Soc. London, novembre 1885. Flower, List of the specimens of Cetacea in the Zoolog. Departement of the Brit. Museum. London, 1885, p. 51. Chr, Fr, Lütken, Pidrag til kundskab om tre pelagiske Tandhval- Slægter Steno, Delphinus og Prodelphinus. Vinensk, SELSK. SKR. NATUR- VIDENSKABELIG …. Copenhague, 1889. HISTORIQUE. Cuvier semble être le premier qui ait distingué ce Dauphin de ses congénères. Le professeur du Muséum avait reçu, du professeur Van Breda, une tête accompagnée du dessin de l'animal. Le nom spécifique qu'il portait d’abord, Delphinus rostratus, qui Jui est rendu aujourd’hui, a été remplacé pendant quelque temps par celui de Delphinus bredaensis. Van Breda a publié une courte description avec une figure et un dessin de la tête, mais il ne donne aucune indication sur les lieux où 11 a été capturé. I rapporte seulement que, se trou- vant à Paris, Cuvier a pu voir les dessins et que le grand naturaliste du Muséum en fait mention dans ses Ossements {ossiles, t. V, 1e part., p. 400. Il rappelle, en même temps, que Lesson lui a donné le nom de Bredaensis. Le D° Gray, dans le Voyage Erebus and Terror, publié en 1847, propose d'en former le genre Steno à cause de ses dents et de la longueur de son rostre, et ce genre est généralement adopté aujourd’hui. En publiant sa Zoologie et Paléontologie françaises, Paul Ger- vais proposa de son côté le nom de Glyphidelphis, comme nom générique du même Delphinide, sans s'être aperçu que Gray lui avait déjà donné un nom. Paul Gervais s'était basé surtout sur la disposition guillochée des dents et la forme allongée du rostre, et il fait la remarque, que le nombre de dents est moindre dans l'espèce d'Europe que dans les espèces étran- gères, sans s’apercevoir que plusieurs de ces espèces étran- gères se rapportent à d'autres genres. Il considère avec raison le Cétacé qui nous occupe comme espèce méridionale qui apparait accidentellement sur les côtes d'Europe En 1584, Michaud en a fait mention dans un catalogue d'une faune de la Charente-Inférieure. Un individu avait été pris 42 : 618) dans la rade de l'ile d'Aix, à embouchure de la Charente. On l'avait rapporté d’abord au Delphinus santonicus de Lesson. Il existe, au Muséum de Paris, un crâne rapporté des Moluques par Dumont d’Urville, attribué au genre Sfeno, mais qui appartient plutôt à un Prodelphinus, d’après les obser- vations de Paul Gervais. Dans un travail récent sur la famille des Dauphins, M. Flower a fait connaître les caractères des os palatins, pour la distinc- tion des genres dans la famille des Delphinides et il les a appli- qués avec bonheur à celui qui nous occupe, ainsi qu'à un certain nombre de Cétacés dont la place était loin d’être bien établie. Nous avons tout lieu de croire que c’est le même animal dont il est question dans la Fauna Japonica, sous le nom de Delphinus longirostris. Il faudra également lui comparer le Steno attenuatus, cité par Burmeister, d'après un crâne de l'océan Atlantique que le savant directeur a eu sous les veux. Peters a fait part, en 1876, à l'Académie des sciences de Berlin, des observations faites par les ofticiers de la Gaxelle sur des mammifères de différents ordres ; parmi les Cétacés, il cite le Delphinus (Steno) perspicillatus comme espèce nouvelle et en donne un dessin. Cest une femelle qui a été prise, le 20 septembre 1874, dans l'océan Atlantique, 32°29'7"” latitude sud, 2°1° longitude ouest. Le directeur du Musée de Berlin fait mention en même temps de la Neobalæna marginala, de la Balæna australis et du Delphinus delphis, dont un mâle a été harponné, le 17 août 1874, près de l'ile de Ascension. Le Delphinus sinensis, dont on avait cru faire un Steno, est au contraire un Sofalia qui vit dans les eaux fluviales de la Chine et de Formose. Le professeur Lütken a publié dans le courant de l’année ses observations sur le Dauphin qui nous occupe, et il exprime l'avis que nous ne connaissons en somme qu’une seule espèce de Steno. | 619) SYNONYMIE. Delphinus frontatus, Cuvier (partim). Delphinus bredaensis, Cuv. Recherches sur les ossements fos- siles, tome V, Paris. Delphinus longirostris, Fréd. Cuvier. Histoire naturelle des Cétacés, Paris, 1836, page 156, pl. X, fig. 2. Delphinorhynchus de Breda, Lesson. Histoire naturelle des Cétacés, Paris, 1898. Glyphidelphis rostratus, Gervais. Zoologie et Paléontologie francaises, ® édition, Paris, 1859, p. 301. Delphinus (Steno) perspicillatus, Peters. Monatsbericht der Wissenschaften zu Berlin, 29 Juni 1876. Steno rostratus, Lütken. Vidensk. Selsk. Skr. naturvidensk. Copenhague, 1889. CARACTÈRES. Ce Dauphin se distingue des autres par son rostre allongé, ses dents au nombre de 22 en dessus et en dessous, et dont la surface est finement guillochée et granuleuse. Van Breda et 215204 Peters donnent la formule dentaire La longueur de l'animal est de 8 pieds. M. Flower a figuré les os palatins dans son dernier travail sur les Delphinides. DESCRIPTION. D'après le D' Studer, la femelle, harponnée par la Gaxelle, avait le dos noir, le rostre blanc et les flancs d’un blanc jau- nâtre, ainsi que la région des tempes et des yeux jusqu’au bout du rostre. Une strie blanche s'étendait de la nageoire pectorale au globe oculaire. L'œil était entouré d’un cercle brun d'où partait une strie noire qui s’étendait jusqu’au rostre et une strie semblable s'étendait en dessous du corps, se prolongeant de l’angle de la mâchoire jusqu’à la nageoire pectorale. Le squelette de cette femelle capturée dans l'océan Atlantique méridional a soixante-six vertèbres, divisées en sept cervicales, douze dorsales, quinze lombaires et trente-deux caudales. Le Steno observé par Pernetty possède soixante-cinq vertè- bres, dont treize dorsales, quinze lombaires et trente caudales. Le squelette de Copenhague compte soixante-six vertèbres, dont sept cervicales, douze dorsales, quinze lombaires et trente-deux caudales. Les deux premières cervicales sont réunies. Les cinq pre- inières dorsales ont une facette articulaire pour les côtes. Il y a douze paires de côtes : les trois premières s’articulent avec la partie principale du sternum, Ja quatrième avec la partie moyenne, les deux dernières avec la troisième partie. La pre- mière côte est comme toujours plus forte que les autres. Les vingt-cinq premières vertèbres caudales portent des os en V. Les deux pièces des trois premières et des trois dernières ne sont pas réunies sur la ligne médiane. La nageoire pectorale a un humérus fort court, une omo- plate longue d’avant en arrière; il ya trois os dans le procarpe et deux dans le métacarpe; il y a une phalange au pouce, deux à l'index, six au médian, huit à l’'annulaire et deux au petit doigt. Dans le squelette de Copenhague il y a également six et huit phalanges aux deux doigts du milieu. MOEURS. On ne connaît rien de leurs mœurs si ce n'est ce qu’en dit Sluyter, que les Steno ne vivent pas en grandes gammes, et l'observation de Dussumier, qui a trouvé, dans l'estomac du Dauphin bridé des îles du cap Vert, un grand nombre de pois- sons volants (exocets) et des restes de Calmars. DISTRIBUTION GEOGRAPHIQUE. Les restes de ce Delphinide sont très répandus dans les Musées, mais on ne connaît presque nulle part exactement les lieux de leur capture. Nous l’avons dit plus haut, Van Breda a montré la tête de cet animal à Cuvier, mais il ne dit pas d’où elle Jui vient, ni les lieux où le dessin a été fait. D'après Van Bemmelen 1, le Steno de Van Breda aurait été capturé à l'embouchure de l’'Escaut en 1829. Un individu a échoué à Brest; Cuvier l’a désigné sous le le nom de Delphinus rostratus. Fréd. Cuvier en fait mention; c’est sans doute l’assertion de celui-ci qui fait dire à Paul Gervais : espèce méridionale qui vient accidentellement sur les côtes de France. Dans la rade de l’île d'Aix et à l'embouchure de la Charente, on a capturé le Delphinide que Lesson a décrit sous le nom de Delphinus Santonicus ?. Il paraît qu’on en a capturé un exemplaire sur les côtes du Portugal. On a prétendu qu'il vivait dans la Méditerranée et qu'il quittait cette mer intérieure à la fin de l'hiver pour se rendre au nord. Nous ne trouvons rien qui justifie cette assertion. Le professeur Giglioli le cite dans son Elenco et des natura- listes assurent en avoir vu un échouer sur les côtes de Livourne. Sluyter croit lavoir rencontré en été au nord de l'Atlan- tique jusqu’au 63° degré, et il fait remarquer qu’il ne l’a jamais vu en grandes gammes. Il est bien différent, sous ce rapport, des Tursiops, dit-il. Hollbôll cite le Parnak comme un Cétacé très rare. On en a pêché un près de Frederikshaab, dit-il; le nom rappelle le bec du Merqus serratus, le grand Harle. Nous nous demandons si ce n’est pas le Sfeno. La plupart des têtes conservées dans les Musées proviennent d'individus capturés dans l’Atlantique, surtout dans la partie méridionale. C'est surtout la côte des îles du cap Vert que cet animal fréquente, et il se rend au sud jusqu’au cap de Bonne-Espérance et même jusqu'à la mer des Indes. Pernetty, dans son voyage aux îles Malouines, a également rencontré le Steno dans le voisinage du cap Vert. On a signalé à diverses reprises la présence du Sfeno hors des mers d'Europe. { Vax BEMMELEN, Lyst der zoogdieren.. ..,p. 249. 2 Act. Soc. linnéenne, Bordeaux, 1841. {022 ) Le Delphinus Bairdii de Dall que Scammon à figuré (pl. XIX, fig. 1), qui est long de 6 pieds et demi et qui vit au nord du Pacifique, pourrait bien être notre Steno. Il y a trois espèces de Dauphins qui fréquentent la côte nord-ouest de Ceylan, dit Holsworth 1, et parmi ces trois, il cite le Delphinus longirostris qui vit par gammes de deux cents individus. Il croit avoir vu des individus accouplés. Nous nous demandons si ce n’est pas de cette espèce qu'il s'agit ici. Dans la Fauna Japonica, il est question aussi d’un Delphinus longirostris, et Burmeister fait mention, sous le nom de Steno attenuatus, d’un Dauphin de l’océan Atlantique dont il faudrait pouvoir comparer la tête pour juger de ses véritables affinités. C'est une erreur, croyons-nous, de considérer la mer du Nord comme le séjour de ce Delphinide; c’est un animal mé- ridional et, s'il s’est montré dans la mer du Nord, ce n’est qu'accidentellement. Le professeur Lütken représente sur une carte, qui accom- pagne son mémoire, les lieux précis de plusieurs captures faites dans l’Atlantique, qui sont toutes méridionales. MUSÉES. . Il ya peu de Musées qui ne renferment des têtes de cet animal, mais, comme nous l'avons fait remarquer, on ne trouve guère des renseignements précis sur les lieux de leur provenance. Nous en avons trouvé une tête à Hambourg, entre les mains d’un marchand qui nous assurait lavoir reçue de l'Atlantique méridionale. D’après le professeur Giglioli, on conserve à Livourne une tête de Steno frontatus, recueillie sur les côtes d'Italie. Le Musée de Liège possède une tête complète et adulte achetée à Hambourg. Au Musée de Berlin on conserve le squelette de la femelle 03 Au Mae tx NA ( 664 ) \ Les DELPHINIDES. Le Marsouin (Phocæna communtis) .… :. : . . .-.". OAI L'Orque (O7eu gladiator) ES SRE AM ETS 139 Le Pseudorque (Pseudorca crassidens'. \. . . "Ni Le Grindewall {Globicephalus melas) ‘17, -.7.. LEON à Be Grampus ({Grampus qriseusi..2 50,02 1, NNSSNERNNRSRERRS Le Lagénorhynque albirostre (Lagenorhynchus albirostris). . 539 Le Lagénorhynque à flancs blanes (Lagenorhynchus acutus) .: 553 Le Dauphin (Eudelphinus delphis). .: .,. . . ©. "Nr Le GrandDauphin (Tursiops tursio) .. ... ! =... .NIESES Le Dauphin de Tethys (Prodelphanus tethyos) . . . . . . 601 Le Dauphin Dubius (Prodelphinus Dubius) . . . . . . . 609 LeSteno\(Sten0 TOSINIUS) MEME RE ENS ONE EEE Er (E Le-Beluga (Delphinapierus leucas) 5 LS ON OOMOE LeNarvaltMonodon MOnoceros M IN SENTIERS ART Te NPD: ra ae LT UP us ns TN th we Ed me dé, a rad, ap aus en re, ed rl ARTS hé 2 En Ro Se TU État. ve D ms ce 4 A , ET Re et ne ml GS an ne re cm 5 é va Dirt pu =4 À ire : LA DU Histoire naturelle des c:etac:es des mer