HISTOIRE NATURELLE DES OISEAUX D'AFRIQUE: PAPA HN COES _LEV ALLAN TOME SE CO N D: = >= F. >< ESS Eee = A PARIS: Cuez J. J. FUCHS; cigrarre, RaüE DES MAraueiss, À TN HÔTEL DE CLUNY. DE L'IMPRIMERIE DE H. L. PERRONNEAU, RUE DES GRANDS AUGUSTINS. AN VII oc za KR. F. (1799). doute 2: Plonehe 50. PS Pot Nas P° 2) 0774 D de s 224 Cuyriuetie 72 Lauplis. œ V de Passat? oeuf Da, dt | HISTOIRE NATURELLE DES OISEAUX D'AFRIQUE. COR, B FA TC LE COR BIMAU, Non Ü x oiseau d'Afrique analogue au corbeau par la forme de son corps, par celle de ses pieds, de ses doigts, dont celui du milieu est uni par une membrane avec l'intérieur, jusqu'à la première articulation, et dont les plumes de la base du bec sont tournées en avant et couvrent les narines; mais trés-différent de ce même corbeau par son bec, par la longueur de ses aîles et par sa queue étagée, c'est le Corbivau. Get oiseau me semble rem- plir une partie de l’intervalle que laissent entre eux le genre des corbeaux et celui des vautours. Le Corbivau est cependant dans tout son ensemble, plus voisin des premiers. Ilse rapproche seulement des vautours d'Afrique que j'ai décrits, par la dimen- sion de ses ailes qui, pliées, dépassent la queue de trois pouces; par sa queue étagée et par la forme de son bec comprimé 6 EPS PORN EMNEMUrENEMEMENE. latéralement, convexe en dessus, très-courbé et arrondi, c’est- à-dire, se relevant comme celui du caffre et de l’oricou, à mesure quil se prolonge, en méme tems qu'il se courbe progressivement : ces caractères distinguent le Corbivau de tous les corbeaux décrits. Si quelques voyageurs nous apportent à l'avenir plusieurs espèces analogues au Corbivau, on pourra tirer le nom spécifique de celle-ci, de la tache blanche qu’elle porte sur la nuque, et qui tranche fortement sur le noir lustré qui est la couleur unique de tout le reste de son plumage, si l'on en excepte un trait blanc qui part des côtés de cette large tache blanche du derrière du cou, et qui ceint la poitrine. Ce cordon, très-peu apparent, n'est formé que par une seule rangée de plumes blanches, ou mi-partie de blanc dont on ne voit que les bords extérieurs. La gorge est d’un noir moins prononcé que le reste du corps, et toutes les plumes qui la couvrent sont fourchues, les barbes dépassant leurs tiges comme si on en avoit coupé la pointe; caractère fort remar- quable et que je n'ai vu que dans peu d'oiseaux. La queue du Corbivau, comme je l'ai dit, est étagée, les plumes des côtés étant les plus courtes. Les pieds sont noirs, ainsi que le bec qui l'est entièrement à l’exception de son bout qui est blanc. L'iris est d’un brun noisette. La taille du Corbivau est inférieure à celle de notre grand corbeau, et tient le milieu entre cette espèce et la corneille mantelée, vulgairement nommée corbeau gris. J'observerai encore que les ongles du Corbivau sont plus forts et plus crochus que ceux des corbeaux en général. La description que je viens de faire du Corbivau montre que ce genre de corbeaux, si je puis m'exprimer de la sorte, a quelques rapports de forme avec les oiseaux de proie. Les observations que j'ai faites sur ses mœurs et sur sa manière de vivre vont présenter les mêmes traits d'analogie. DSI D'Ü/C'ONR.B TANT. 7 Vorace, criard, bardi, social et immonde, il imite le corbeau par son goût pour la charogne, dont il fait le fond principal de sa nourriture, et se réunit en troupes quelquefois très-nom- breuses et très-bruyantes. Ces oiseaux poussent des cris rauques et graves, les mêmes à peu près que ceux du corbeau, et qui concourent singulièrement avec sa forme et ses mœurs, à l’idée d'un étre sauvage, dur et dégoûtant, que nous nous formons des coriacées en général, d’après l'ensemble de leurs attributs déplaisans et lugubres. Aux habitudes dont je viens de faire mention, le Corbivau joint un appétit marqué pour une proie vivante : il attaque et tue les agneaux, les jeunes gazelles, et les dévore après avoir commencé par leur arracher et les yeux et la langue: on le voit poursuivre les troupes de buffles, de bœufs et de chevaux, enfin le rhinocéros, et l'éléphant lui-méme. Le goût de la chair et du sang le conduit à la poursuite de tous ces grands quadru- pèdes, sur le dos desquels ils sont continuellement perchés en grand nombre. Le Corbivau seroit pour ces animaux un oiseau de rapine meurtrier et dangereux, s'il avoit la force nécessaire pour les égorger; mais impuissant contre leur cuir robuste et solide, il se borne à plonger son bec dans les plaies de l'animal, dans les parties suppurantes de son corps, où le cuir est entamé par les pustules qu'ont fait les poux de bois et sur-tout les taons en déposant leurs œufs dans l'épaisseur de leur peau. Si ces quadrupèdes souffrent ainsi le Corbivau perché sur leur dos, cest que réellement c'est un service que son instinct san- guinaire leur rend; service qu'ils recoivent avec une sorte de plaisir, puisqu'ils le souffrent et lui permettent d'enlever à coups de bec ces larves développéeset pleines de sang, dont le nombre est quelquefois si grand sur certains animaux, que jen ai vu plusieurs d'entre eux périr de maigreur. 8 HISTOIRE NAT URELDLE Le Corbivau vole avec force, plane et s'élève trés-haut, au moyen de ses longues aîles. Il niche en octobre, construit son nid dans les grands buissons ou sur les arbres : ce nid vaste et creux est composé de branches, et garni intérieurement de matières douillettes. La ponte est de quatre œufs verdâtres , tachés de brun. Le Corbivau n'est point un oiseau de passage, il séjourne constamment toute l’année dans le canton qui l’a vu naître. Je l'ai trouvé généralement partout dans le cours de mes voyages en Afri ique ; il est cependant des cantons où il est plus commun que dans d’autres; comme, par exemple, chez les Grands Namaquois. Il est plus rare aux environs de la ville du Cap, mais se trouve abondamment dans le Swarte-Land, où on le voit se mêler avec une autre espèce très-commune dont Je parlerai sous le nom de corneille à scapulaire blanc. Les colons nomment le Corbivau ring-hals-kraaï (corbeau à collier). La femelle est un peu plus petite que le mâle; le blanc de son collier est moins étendu; son noir est aussi moins lustré et paroît en général plus rembruni. LE Plauche 81. Gr clome 2: D Lfrente Rauol) P° (Ve TP) o/e 1 UV) Q te L'AOSC AM OC. 24 3 Q ? D loluptuuere de re A € DU GR A ND-CORBE' AU: 9 er LE GRAND-CORBEAU, N° 5: Lx corbeau de cet article a tant de rapport avec notre corbeau de la grande espèce, celle décrite par Buffon sous le nom pur et simple de corbeau, et dont il a donné une mauvaise figure dans les planches enluminées de son ouvrage, N°. 495, que je suis trés-porté à croire qu'il n’est qu'une simple variété de Îa même espèce. Ce corbeau étant généralement répandu dans toutes les différentes parties de l'Europe, il ne seroit point étonnant qu'il se retrouvât au Cap de Bonne-Espérance. J'ob- serverai cependant qu'en Afrique cet oiseau est un peu plus grand, qu'il a le bec plus fort et plus recourbé; mais comme d’ailleurs tous les autres caractères se rapportent à ceux de notre corbeau, que leurs mœurs sont aussi absolument con- formes, et que d'un autre côté, on aremarqué que dans plusieurs pays ces oiseaux étoient plus grands ou plus petits, et que leur bec étoit aussi plus ou moins renflé, nous laïsserons ce Grand- corbeau du Cap à côté du nôtre, comme une simple variété de l'espèce européenne. C'est dans les montagnes des environs de la baie de Saldanha que J'ai vu le plus communément ces corbeaux. Ils vivent en petites troupes isolées, sans se mêler avec les autres espèces du même genre. Ils recherchent les voieries, se nourrissent de toutes sortes de charognes, de vers de terre, de limacons, de Tome IT. B en deg 10 HISTOIRE NATURELLE tortuesterrestres, et même d'insectes. En troupes ils attaquent quelquefois les jeunes gazelles, et viennent à bout de les tuer. On assure qu'en Europe cet oiseau se nourrit de fruits et mème de grains. Je n'ai pas remarqué que ceci ait lieu en Afrique, n'ayant jamais trouvé dans leur estomac que les différentes nourritures dont j'ai parlé, quoiqu'il me soit arrivé d'en tuer plusieurs dans les terres labourées d’un colon nègre dont l'habitation étoit placée dans les montagnes des environs de la baie de Saldanha, et qui récoltoit beaucoup de grains. Ce colon m'a assuré que ces oiseaux n étoient pas de passage, et qu'il les voyoit toute l’année dans les mémes cantons. J'ai également appris de lui que c’étoit dans les rochers qu'ils pondent et élèvent leurs petits; que les œufs, au nombre de quatre ou cinq, sont d'un verd sombre, tachetés de brun. Dans les cantons de la colonie où se trouve cette espèce de corbeau, les colons la distinguent des autres par le nom de Groote-kraai (Grand- corbeau). Ce nom est également celui que le peuple a donné au même oiseau dans les différentes provinces de la France où il est connu. 4> La couleur générale de cet oiseau est d’un noir décidé, luisant sur les ailes et la queue, sans cependant avoir aucun reflet ou en vert ou en pourpre, comme dans le freux. Les yeux sont d'un brun foncé; les pieds, le bec et les ongles sont d’un beau noir, La queue est très-peu étagée, et les ailes pliées s'étendent à peu près jusqu'aux trois quarts de sa longueur. La femelle est un peu plus petite que le mâle; elle est aussi d'un noir plus rembruni. Je n'ai jamais vu au Cap notre petite espèce de corbeau, ou celle que Buffon nomme la corbine ou corneille noire; notre corneille mantelée, nommée vulgairement corbeau gris, nes y trouve pas non plus. 1 Pl auébe 52. CE eJoute 2. (lo ‘ 0 # 79 o/" Jbcht (@ . -. 1 er 2 Da 4 D DS net a) 7e 7A l'ehupuuetie De NES 7e) € € DELA CORNEILLE DU CAP. 11 PACORNEILLE DU CAP, N°5 ÀL se trouve très-communément au Cap de Bonne-Espérance une espèce de corneille à laquelle les colons ont donné le nom de koorenlandhraaï (corbeau ou corneille des terres labourées). Cet oiseau est absolument semblable en tout point à notre freux ou frayonne, à l'exception du devant de la tête quil n'a point, comme elle, nud et dégarni de plumes depuis les yeux jusqu'aux narines. S'il est vrai, comme le prétend Montbeillard, en parlant de la frayonne, que ces oiseaux ne doivent la nudité d'une partie de leur tête qu'à la manière dont ils vivent, la corneille dont il est question dans cet article est de la même espèce, car elle a la méme taille, les mêmes couleurs et la méme manière de vivre; mais elle n’a point le caractère de la nudité de la tête; probablement parce que trouvant dans cette partie du monde une nourriture plus abondante, elle n’est point forcée de fourrer son bec dans la terre pour y puiser, pour ainsi dire, sa subsistance. Je suis moi-méme très-porté à croire que c'est le frottement seul qui cause cette callosité delatéte de la frayonne, car 1l m'est arrivé detueren Europe, danslesmois de septembre et d'octobre, des corneillestout à faitsemblables aux frayonnes, mais elles avoient le devant de la tête entièrement emplumé ; c'étoient probablement de jeunes frayonnes de l'année. J'ai vu aussi dans les premiers jours de l'hiver, passer en Lorraine des volées très-considérables de ces mêmes corneilles qui avoient B 2 12 MES MANO TR EN ANNUEL EE la face couverte de plumes. J'en ai tué plusieurs, et elles m'ont paru absolument n'être point d'une autre espèce que le freux. D'ailleurs, il seroit très-facile de vérifier si cet oiseau perd naturellement les plumes de sa tête, ou si cette nudité n'est produite que par le frottement continuel qui tient à sa manière de vivre. Il suffiroit pour cela de garder une jeune frayonne en cage pendant une année entière, et si alors on remarquoit le même effet, il seroit certain que c’est-là un caractère constant dans cette espèce, comme dans beaucoup d'autres sortes d’oi- seaux. Et dans ce cas, la Corneille du Cap, dont il est question, seroit malgré sa ressemblance avec notre freux d'Europe, une autre espèce. Alors ces corneilles dont j'ai parlé et que j'ai vues et tuées en Lorraine, n'en seroient peut-être pas moins de jeunes frayonnes; car, ainsi que Je l'ai observé à l'égard des vautours dont la tête est nue, elles pourroient bien de méme avoir cette partie emplumée dans leur jeune Âge; sinon elles seroient de la même espèce que celle de l'Afrique; espèce dont aucun naturaliste n’auroit fait mention, ce qui n'est pas pro- bable. Je me propose de vérifier ce fait quand l’occasion s'en présentera. Cette Corneille du Cap est plus commune dans la: colonie que dans les déserts; elle s’est rapprochée des lieux habités, parce qu'elle trouve une nourriture plus abondante dans les terres cultivées où on la voit fondre en grandes troupes, parti- culièrement quand elles viennent d'être fraîchement remuées. Elles sont peu farouches et suivent le laboureur à mesure que le soc de la charrue sillonne la terre, pour y chercher leslarves, les vers et tous les insectes que le fer met à découvert. Elles se nourrissent aussi de charogne, ce que fait également le freux en Europe, n'en déplaise à ceux qui prétendent que ces oiseaux n'y touchent jamais. DE DA CO NNETELE)"D'ENCAEP 19 Le plumage de cet oiseau est généralement d’un noir lustré, richement nuancé de pourpre ou de bleu, suivant que les coups de lumière le frappent plus ou moins obliquement. La queue est un peu étagée; les aîles en repos n’atteignent pas tout à fait son extrémité. Le bec est noir ainsi que les pieds et les ongles; les yeux sont d'un brun foncé. Le mâle est un peu plus grand que la femelle; celle-ci n'a pas son plumage aussi brillant, {ls construisent leur nid sur les grbres ou dans les rochers. 14 ÉLRSAPO LIRE IN A 'PIUNERN EN EURE LA CORNEILLE A SCAPULAIRE DEAN NO IN 05 Crrre Corneille d'Afrique est très-abondante et fort répandue au Cap de Bonne-Espérance, depuis la ville jusque dans les cantons les plus reculés où j'ai pu pénétrer dans cette partie du monde. La méme espèce habite probablement une grande étendue de l'Afrique, puisqu'on la retrouve au Sénégal ; du moins le même oiseau est décrit dans Buffon sous le nom de corneille du Sénégal, ce qui suppose qu'elle s'y rencontre en effet. Mais comme cette espèce ne se trouve pas seulement au Sénégal, puisqu'elle est très-commune au Cap de Bonne-Espé- rance; J'ai cru pouvoir lui donner un nom propre qui ne fasse pas croire qu'elle n'appartient qu'au climat du Sénégal. Cette Corneille est plus abondante et plus multipliée que toutes les autres espèces de ce genre qu’on trouve répandues depuis la baie Falso jusque chez les Grands Namaquois d'un côté, et chezles Caffres de l’autre. On ne voit pas une habitation, pas une horde sauvage où ces oiseaux ne soient domiciliés et comme domestiques. Îls viennent même jusqu aux portes des boucheries de la ville, et se mélent fréquemment avec l'espèce dont j'ai parlé sous le nom de corbivau, pour dévorer les cada- vres. Les colons nomment cet oiseau Bonte kraar (corbeau Pc V7 77) Crecbl AReao = pr : « Aeut PAU PP de l'olmptumetre Ve VPN Free 7 EL Jlanche 53. DE LA CORNEILLE A SCAPULAIRE BLANC. :15 tacheté ou mélangé); parce qu'en effet son plumage est régu- Liérement marqué de noir et de blanc qui sont ses deux seules couleurs. Le blanc forme une espèce de scapulaire qui, par devant s'étend jusqu'au bas du sternum, et n'embrasse que le cou par derrière, tandis que la tête est entièrement noire, ainsi que la gorge sur laquelle le noir s’avance sur le devant du cou. L'out lé reste du plumage est absolument noir. Les scapulaires et les recouvremens des ailés ont un reflet bleuâtre. La queue est arrondie; les ailes s'étendent jusqu'à plus des trois quarts de sa longueur (1). Les yeux sont d'un brun noisette; le bec, les pieds et les ongles sont noirs. La femelle est plus petite que le mâle ; son noir est moins lustré, son blanc est plus sali et ne s'étend pas tout à fait si loin par en bas. Ces oiseaux construisent leur nid dans les arbres ou dans les buissons les plus feuillus. La ponte est de cinq ou six œufs, dont la couleur est d’un vert päle, tacheté de brun. Comme le corbivau cette Corneille se perche sur le dos des grands animaux et du bétail, pour enlever et dévorer les insectes parasites qui s’attachent après leur peau. J'ai plus d'une fois, dans mes voyages , dû la conservation de mes attelages au service que ces bandes de corneilles rendoient à (1) La figure que Buffon a donné de cet oïseau dans ses planches enluminées, N°. 327, est dé'ectueuse en ce que les aîles y paroïssent beaucoup plus courtes qu’elles ne doivent être, et dépassent à peine la naïssance de la queue. Voilà ce aui arrive quand on s’en rapporte aux caractères pris sur les oiseaux préparés, et qu’on ne S'y connoît pas assez pour rectifier ces erreurs qui ne sont que trop fréquentes dans les cabarets d'histoire naturelle, parce que la plus grande partie des personnes qui Pre éparent et conservent les dépouilles des oiseaux, les estonien en leur coupant les ailes et les pattes pour avoir De de facilité à les remettre à leur place. Ces mauvaises préparations ont produit des méprises sans nombre dans tous les ouv rages publiés sur l’ornithologie; puisqu'on y voit le même oïseau décrit, d’après ces faux carac- tères, dl cc trois foïs de suite comme trois espèces de ae heureux encore quand ils sont rangés dans le même geure , ce qui n'arrive pas toujours. 16 ELLS TR OTRE -N'AMPUNENE EEE mes bœufs, en les débarrassant des poux de bois dontilsétoient tellement couverts, que sans le secours de ces oiseaux, il me seroit arrivé dans plus d'une occasion de les perdre tous infail- liblement. Aussi les Hottentots et les colons du Cap révèrentils ces corneilles bienfaisantes par rapport aux services qu'elles rendent à leurs troupeaux. LE da, donc 2. ; 7) Ce DE 2 Rauol) L SP : æ Lohaspisiuerse De D 7 ot. Ù 4 Pianebe ot. je É Ta asset clap 5 ER 4 D'ESrP ILES LE RAP D A GR NN. 52 J'AI donné le nom de Piapiac à la seule espèce de pie que j'aie trouvée dans mes voyages en Afrique, et encore ne l’ai-je rencontrée que dans le canton le plus reculé du pays des Grands Namaquois. Cet oiseau me paroit étre de la même espèce que celui qui se trouve décrit dans Buffon sous le nom de pie du Sénégal, et figuré sous le N°. 538 des planches enluminées de son ouvrage; mais Je crois que l'individu qui a servi de modéle au dessinateur et à la description de Buffon, ést un jeune oiseau dont tout le développement n’étoit point encore achevé; car sa queue n’est ni aussi longue, ni aussi étagée; et d'après l'indication de Buffon, son oiseau paroit non- seulement plus petit, maisil a la queue et les aîles plus brunes: caracteres qui tous conviennent au Piapiac lorsqu'il est dans son Jeune âge, ce qui fortifie bien plus encore mon opinion sur l'unité d'espèce eutre sa pie du Sénégal et celle du payé des Namaquois. Cet oiseau ne se trouvant donc pas seulement au Sénéoal, je me suis cru permis de lui donner un autre nom, Homes C 18 HISTOIRE NATURELLE qui lui convient mieux et qui doit être adopté, par la raison qu'il est analogue au seul eri que je lui ai entendu faire, et qu'il répète aussi distinctement que nous le prononcons. Ces pies se perchent sur le haut des grands arbres, où elles se réunissent quelquefois en petites troupes d'une vingtaine d'individus. Les mâles ont la queue fort longue; elle surpasse même celle de notre pie d'Europe, et elle est très-étagée, mais moins large, les pennes en étant plus étroites et très-pointues. Cet oiseau, quoiqu'aussi alongé que notre pie, est cependant moins fort qu'elle par le volume du corps;il est enfin plus svelte et vole mieux, ayaut les pennes de l'aile proportionnellement 1oÏins courtes. Le Piapiac, comme nos pies, bâtit son nid au sommet des arbres les plus élevés, le ferme entièrement d'épines, et n'y laisse qu'un trou par où il pénètre dedans. Ses œufs, au nombre de six à huit, sont d’un blanc bleuâtre sur lequel se trouvent parsemées des taches brunes, plus larges et en plus grand nombre vers le gros bout. Les Sauvages m'ont assuré que ces oiseaux n'arrivoient qu'en certains tems de l’année, dans le canton où je les ai trouvés. Il est singulier que, volant aussi bien ,ilsn nc pénétré dans des contrées plus voisines du Cap, et pas méme ju isque sur les bords de la Grande-Püuvière, où du moins je n'en ai jamais appercus mi entendus. Cette pie est entiérement d'un noir lustré, moins foncé sur le ventre que sur le dos; les premières pennes des aîles et les latérales de la queue ont un teinte rembrunie. Les pieds et le bec sont d’un noir pur comme dans notre pie d'Europe, et les yeux sont d'un brun noisette. La femelle est absolument D'ÜU:P'Tr A PIX CC: 19 semblable au mâle, sinon qu'elle est un peu plus peute et que sa queue est plus courte. On voit dans le riche cabinet de M. Ray deBreukelerwaard, à Amsterdam, un oiseau de la même espèce, lequel a été eu- voyé du Sénégal, à ce qu'on m'a assuré; mais cet individu a uue particularité bien remarquable : l'une des pennes de sa queue est double; du moins il part du mème tuyau une tige sans barbe qui est absolument de la même dimension que celle de la plume à laquelle elle est accolée en dessous, dans toute sa longueur (1); du reste il n’a rien qui le distingue de ceux que jai vuschez les Namaquois ; et quant à cettetige nue dont j ai fait mention, elle ne doit certainement être considérée que comme une variété accidentelle, un simple jeu de la nature, occasionné par une surabondance de la matière qui s'étant portée au dehors a produit une double plume, sans barbes cependant. Ceci ne feroit-il pas naitre l'idée que la matière qui forme les barbes des plumes est d’une nature diflérente de celle qui produit la tige? Au reste il n’est pas rare de voir des plumes doubles sortir entièrement formées du même tuyau. (1) Voyez la figure 2 de la planche enluminée de cet ouvrage, N°. 54, où j'ai fait graver cette piume. 20 HISTOIRE NATURELLE ESSPRE N CULOTTE DE PEAU Ne 2 Cour nous ignorons les mœurs de cet oiseau, absolument nouveau, je le place à côté de la pie d'Afrique, espèce à laquelle je trouve qu'il ressemble le plus par la forme de son corps et celle de sa queue étagée; cependant par son bec plus foible que celui des pies, il paroît se rapprocher davantage d’un autre genre d'oiseaux, dont les espèces très-nombreuses en Afrique, ont généralement été mal examinées par des ornithologistes, scrupuleusement méthodistes, qui les ont confondus avec les merles et avec les grives; oiseaux dont ils diffèrent totalement par leurs habitudes, qui les rendent bien plus voisins des étour- neaux et des martins, vu qu'ils en ont en effet les mœurs et la manière de vivre. Cet oiseau est tiré de la superbe collection de M. Ray de Breukelerwaard, et je ne l'ai point vu ailleurs : il se trouve, dit-on, dans les iles de la mer du Sud. Sa taille égale à peu près” celle de notre merle commun; mais satrès-longue queue étagée, forme à elle seule une fois et demie la dimension de la longueur totale du corps de l'oiseau, et elle n’a que huit pennes : carac- ière qu'on ne trouve dans aucun autre oiseau que jeconnoisse, et qui d'abord m'avoit fait soupçonner qu'il étoit tombé au. moins deux plumes de la queue de celui-ci; mais après le plus scrupuleux examen, je me suis convaincu que leur nombre u Planche 99. Tone 2 : n D HA 54) 1 Hu 71) ÿ = = x f0 f 7 : y ) V/NIRT. } leccht Auot} LUE (le cfesmsat/ © | CA 4 D 5 LC CNT de G PILE 721 ) D, de l'ofuptuetrce 72 Jauglois . DE LA PIE A CULOTTE DE PEAU. 21 étoit complet, et que l'individu n’en avoit jamais eu davantage. Tout le dessous de son corps, la tête, le cou, les scapulaires, ainsi que la poitrine, sont d'un noir luisant sur lequel Îles différens coups delumière donnentdes teintes bleuâtres. Deux des moyennes pennes du milieu de l'aile ont leurs barbes exté- rieures d’un roux foncé, et les autres sont absolument noires , ainsi que celles de la queue. Les plumes qui recouvrent les flancs, le ventre et les jambes sont du même roux clair que celui de notre huppe; les reconvremens du dessous de la queue sont de cette même teinte, mais ils portent quelques traits d'un brun noirâtre. Le bec, les pieds et les ongles sont d'un noir foncé. 23 EPISODE, NAMUR IEEE DE UE NTTA Ne 66 Vorcr encore une espèce nouvelle qui a beaucoup de rapport avec nos pies par la forme de son bec; elle paroït même s'ap- procher davantagede ce genreque l’oiseaude l'article précédent, auquel nous avons donné le nom de pie à culotte de peau . nous ignorons absolument les mœurs, les habitudes, la manière de vivre , la ponte, etc., et même la partie de l'Inde où se trouve cet oiseau, très-rare dans nos cabinets d'histoire naturelle. Celui-ci fait partie de la magnifique collection de M. Temminck, trésorier de la Compagnie des Indes, à Amsterdam. J'ai les plus grandes obligations à cet amateur, très-zèlé pour les pro- grès de l'histoire naturelle; il a non-seulement eu la bonté de me permetre de décrire tous les oiseaux rares de son cabinet, mais m'en a fait faire les dessins, que je communiquerai au public dans le cours de cet ouvrage, à mesure que je parlerai de ceux d'Afrique qui leur sont analogues; je lui en témoigne ici publiquement mes remercimens. Je dois beaucoup aussi à NENL. Ray de Breukelerwaard (1), Holthuysen (2), Ameshof (3), Gevers Arnst (4) et W.S. Boers (5), etc. etc. etc., lesquels ont (1) A Amsterdam. (:) À Amsterdam. (5) À Amsterdain. (4) À Rotterdam. (5) À Hasserswoude, près de Leyde. (PP 7 J 1" l’auche 26. — = eJoute 2. Ve 72] à ET. cbrecbe e Rico? 12 D 4 ht 0) RE © Loue p, ? 2 Pe l'oDuptiuerce de Lœugtoi . DACOMNE NPA 23 tous coopéré à completter cette Ornithologie, en me fournissant les espèces nouvelles, qui formeront le complément de cet ouvrage que je n'avois d'abord destiné qu'aux oiseaux d'Afrique. L'oiseau que j'ai nommé Temia a le corps de la grosseur de celui de notre mauvis d'Europe , mais il est un peu plus alongé; sa queue, composée de dix plumes, est très-étagéeet fort longue; les quatre pennes du milieu seulement ont la même grandeur; les autres sont successivement un peu plus courtes. Le bec, les pieds et les ongles sont noirs; toutes les plumes du corps sont longues, fines et à barbes soyeuses, très-douces au toucher : à faux jour elles paroïissent noires; mais elles ont un reflet ver- dâtreoupurpurinsuivantles coupsde lumièrequ'ellesreçoivent. Le front et l'espace compris entre l'œil et le bec, ainsi que la gorge, sont couverts de petites plumes si serrées qu'elles paroissent d’un noir mat,sans aucun reflet, et imitentlevelours à certain aspect. Les pennes de l'aile sont noirâtres; les quatre plumes du milieu de la queue sont verdàtres; les autres n'ont que leurs barbes extérieures de cette couleur; de sorte qu'en dessous la queue est noirètre, et en dessus elle est d'un verd sombre. 1} Cet oiseau a été envoyé de Batavia à M. Temminck ; mais comme cette ville est l’entrepôt général de tous les vaisseaux qui passent aux Indes, il pourroit bien y avoir été apporté de quelqu'autre partie du monde. 2 À HISTOIRE NATURPLLE PU DLE B LE U Es "NN Ex comparant la figure que j'ai donnée de cette magnifique Pie de la Chine, avec celle que lon voit dans les planches. enluminées de Buffon, N°. 622, laquelle représente le même oiseau sous le nom de gear à bec rouge de la Chine , on ne sera pas peu étonné de Îles trouver si peu conformes l’un à l’autre car non-seulement dans la planche que j'ai indiquée, la couleur est très-mal rendue, mais la queue est aussi absolument défec- tueuse, en ce que les deux longues plumes du milieu y sont rctranchées : raisons qui m'ont paru plus que suflisantes pour m'autoriser à publier une bonne figure de cette belle espèce. Au reste, c'est en confrontant cet oiseau (que jai dans ma collection}, avec l'individu du Cabinet National, qui a servi de modèle à la description et à la figure qu'on en à donné, que je me suis convaincu qu'ils étoient tous deux de la mémeespèce, mais que celui du Cabinet National étoit un oiseau mutilé au- quel il manquoït une partie de la queue; ce dont il eût été bien facile de s° SRE Leo) pour peu que l'auteur eùt voulu y faire attention, ou au'ii se füt du moins plus exercé à l'étude des oiseaux. D'ailleurs, malgré cette imperfection de la queue, il n'est pas pardonnable à Montbeïllard d'avoir fait un geai de cette espèce, et encore moins d'avoir avancé qu'il n'étoit peut- être même qu'une varièté de notre geal d'Europe , tandis qu'incontestablement cet oiseau appartient au genre de la pie; et Dh | 2: Jlauche 5 \ CloFessard cheule. \ | 7" Lbiecbe Raoto Ÿ Va C7? Q Hloue DS de Célupriuete de Aauytou DE CAN PP REED L'EUrE 25 et quand bien méme, au reste, on voudroit s’entéter à en faire un geai, il est encore trés-certain qu'il ne seroit pas pour cela une variété du nôtre; car on ne peut trop répéter à nos savans de cabinets, que les couleurs d'un oiseau ont beau varier de teinte, n'importe par quelle influence, les caractères généraux n'en restent pas moins constamment les mêmes; et comment ne pas se rendre à l'évidence, lorsque mille et mille exemples de cette vérité se renouvellent chaque jour sous nos yeux. Cette belle Pie se trouve à la Chine; du moins six individus de cette espèce que J'ai tous examinés, avolent été envoyés de cette partie du monde; j'ignore si elle ne setrouve point ailleurs. Elle est un peu plus petite de taille que notre geai, c'est-à-dire moins grosse, car elle est beaucoup plus alongée, par rapport à sa queue, qui elle seule a près d'une fois et des la dimen- sion du bec à l'anus : le bec et les pieds ne sont pas rouges, comme il est dit dans Buffon, mais d'un jaune orangé ;le front les joues, la gorge, le devant et les côtés du cou sont d’un noir décidé; tout le dessus de la tête est couvert de plumes d’un gris bleuâtre, qui étant longues et larges, lui forment une espèce de huppe perdait Le manteau et les scapulaires sont d’un gris roussätre, nué d'un bleu violet; maïs cette couleur change de nuance plus ou moins bleue, aie ou roussàtre, suivant les incidences de la lumière. Les ailes, dont toutes les penres se terminent de blanc, sont en général, d’un beau bleu d'outre- mer. Les plumes du dessous du corps, depuis la poitrine jusqu'aux recouvremens du dessous de la queue, sont longues, flexibles et blanches. La queue est composée de dix pennes fort étagées ; celles du milieu sont très-longues et entièrement bleues, à l'exception de leur pointe otr elles prennent un peu de noir et finissent par se terminer par un bout Au ue blanc. Les autres pennes sont € lome II. ga alement terminées de noir et 26 HISTOIRE NATURELDPE par une large tache blanche; leurs barbes extérieures sont d'un beau bleu, le que les intérieures sont blanches; de manière que la queue est blanche vue en dessous et bleue vue par dessus. Les deux plumes du milieu de la queue ont un caractère parti- culier et fort remarquable; c’est que vers leur extrémité les barbes se relèvent de chaque côté de leur côte en forme de gouttière. Nous n'avons rien à dire sur les mœurs de cet oiseau dont nous ignorons jusqu'aux moindres particularités. J'ai vu deux de ces oiseaux dans le cabinet de NL. Temminck, à Amsterdam, et un chez M. Boers, à Hasserswoude ; ces trois oiseaux étoient en tout point pareils à celui que j'ai dans ma collection et dont j'ai donné le portrait : j'ai vu également dans le cabinet du C. Gygot-Dorci, un individu de cette même espèce, mais il avoit aussi la queue mutilée, comme celui du Cabinet National, dont j'ai parlé, et qui d'ailleurs étoit entière- ment dégradé; on ne doit donc pas être surpris que la figure qu’en a donnée Buffon soit si mauvaise et ressemble si peu à celle que je publie. Au reste, si les planches enluminées de Buffon sont en général si défectueuses et si peu conformes à la nature, c'est que les oiseaux du Cabinet National, qui ont servide Le pourles graveretles colorier, étoient eux-mêmes pour la plupart dégradés et avoient changé de couleurs par les continuelles fumigations de soufre qu’on y employoit autrefois pour préserver les oiseaux de la voracité des insectes destruc- teurs (1). Un grand service à rendre à l'histoire naturelle seroit (1) On ne peut trop répéter aux amateurs d'histoire naturelle combien ce procédé est nuisible aux oiseaux, puisqu'il l’est beaucoup plus que le dégât même que peuvent y faire Les insectes qui les rongent ; dégât auquel il est toujours facile de remédier quand on s’y prend à tems, tandis que celui des fumigations de soufre, ne laisse aucun moyen de réparation , parce qu’elles dénaturent les plumes , les charbonnent, outre qu'elles leur font perdre leur éclat et les changent absolument D'EAU P TER LE UE: 25 / de refaire toutesles planches coloriées de cet ouvrage immortel, malgré les erreurs dont il est rempli. de couleurs en très-peu de tems: ce moyen qu’on a malheureusement fait employer trop longtems, et par pure obstination, dans notre Cabinet public, nous prive aujourd’hui de beaucoup d’objets précieux que l’on regrettera peut-être longtems. Au reste, si on retrouve encore parmi les vestiges de l’ancien Cabinet du roi quelques pièces rares en animaux , il est vrai de dire que le public ne les doit qu'aux soins inappréciables du C. Lucas, seul chargé alors de la conservation d’un objet aussi considérable , et qui même dans ce tems-là auroit demandé plutôt dix hommes qu'un ; mais loin de se rebuter d’une occupation aussi pénible, on n’a jamais vu ce citoyen infatigable se lasser un instant d’un travail aussi dégoutant que mal- sain. Puisse cette vérité qui m’'échappe ne pas trop blesser la modestie d’un homme estimable que ses qualités morales rendent d’ailleurs cher à tous ses concitoyens, 28 HISTOIRE NATURELLE ne BLEUE À TELE NOIRE, Ne V'orcr encore une jolie espèce de pie de la Chine, ou qui du moins a été apportée depuis peu de cette partie du monde; elle est à peu près de la taille de l'espèce précédente à laquelle elle ressemble beaucoup par ses couleurs principales; mais elle n’a point la queue à beaucoup près si alongée, et elle n’est point si fortement étagée non plus; elle l'est enfin plus dans le genre de celle de notre pie d'Europe; oiseau dont les formes extérieures -ont beaucoup d'analogie avec celles de l'espèce dont il est question dans cet article. Elle a le front, le dessus de la tête, les joues et la gorge d'un noir mat; les plumes de la tête sont longues et forment une huppe couchée, que l'oiseau a sans doute la faculté de relever à volonté; le cou par derrière, le manteau, les scapulaires et les aîles sont d'un beau bleu, plus foncé sur les petites couvertures du poignet des ailes ainsi que sur les barbes extérieures des grandes pennes. Les pennes de la queue sont pointues; elles ont une belle teinte d’outre- mer, et se terminent toutes de blanc. Le cou par devant, les recouvremens du dessous des aîles, et généralement tout le plumage inférieur, jusqu'aux couvertures de la queue, sont [e) d'un blanc orisâtre; le bec, ainsi que les ongles, sont noirs, et les pieds bruns. Beaucoup de méthodistes n’auroient pas man qué de faire un pe c P} 3 oJoute 2 Tlomche 58 ; D] ] D . à A < TE Sbhecét oReruol) LS CL e/esatd olexte EL 7) 7) ( ( ! 1 re Le e Éue Œlle HO C. 2 # à : 2] va le d'Érespriiuete de Laugloi 2 DE LA PIE BLEUE A TÊTE NOIRE 29 geai de cette Pie, comme Montbeïllard en a fait un de l'oiseau de l’article précédent, et cela d'abord par rapport à la huppe qu'il porte, et secondement parce qu'il a du bleu dans son plumage; mais comme nous savons positivement que dans tous les genres d'oiseaux il existe réellement des espèces qui sont huppées et d'autres qui ne le sont pas, nous croyons devoir rejeter le caractère de la huppe comme générique : d’ailleurs notre geai d'Europe n'est point huppé à proprement parler; il ne l’est pas plus que beaucoup d’autres oiseaux qui ont comme Jui la faculté de relever les plumes plus ou moins longues de leur tête, et quant aux couleurs, elles peuvent encore moins servir de règle pour distinguer les genres. Au reste, les natu- ralistes ont cru remarquer entre les geais et les pies beaucoup d'analogie, et peut-être beaucoup plus qu'il n’en existe réelle- ment; leurs mœurs étant certainement bien différentes, puisque les premiers sont autant frugiveres que mangeurs d'insectes ; tandis que les autres ne touchent jamais aux fruits, et sont mêmes carnassières puisqu'elles fréquentent les voiries, et cherchent leur nourriture, comme les corbeaux, dans la terre, le fumier et tous les lieux infects ; ce qu'on ne voit jamais faire au geai. Le bec des pies à aussi plus de rapport avec celui des corbeaux; :1l est plus court et plus comprimé sur les côtés; enfin plus épais que large, pendant que les geais l’ont, au contraire, plus épaté. Les pies ont aussi généralement le tarse plus long que les geais; enfin leur vol est encore très-différent; les pies battant de l’aîle en volant, tandis que les geais semblent glisser plus légèrement dans l'air, parce que leurs aîles sont moins arrondies et plus longues. Le blanche-coiffe ou geai de Cayenne, décrit par Brisson et Buffon (1), est bien certainement une pie et non un gea. Ce (1) Voyez les planches enluminées de Buffon , No. 573, et l’@rnirholesie de DE p le Brisson, tome II, page 52. 30 HISTOIRE NATURELLE dernier s’est également trompé à l'égard du prétendu geai à ventre jaune ou garlu, dont il a donné la figure dans son N°. 249; cet oiseau n'ayant pas le moindre rapport avec les geais, appar- tient à un autre genre très-voisin des tyrans. Âu reste, cette même espèce est encore décrite par Buffon pour une pie-grièche, comme nous le ferons remarquer en parlant de ces oiseaux. mire (e} le D'ENBRAP PENRO/USIS'E LA PIE ROUSSE No D'arris la conformation extérieure de cet oiseau, nous avons cru devoir le rapporter au genre de la pie, malgré la petitesse de sa taille, qui ne surpasse pas de beaucoup celle de notre pie-grièche grise d'Europe; au reste, la figure coloriée que j'en ai donnée le représente à peu près dans toutes ses dimensions. Nous trouvons à cette espèce infiniment de rapport avec les pie-grièches, et on pourroit méme la regarder, avec beaucoup de fondement, comme formant la nuance entre les pies et les pie-grièches : oiseaux qui d'ailleurs ont ensemble beaucoup plus de traits d'analogie que de dissemblance, non-seulement dans plusieurs des caractères de leur phisionomie, mais bien plus encore parle port,les mouvemens, les différentesattitudes, et même dans quelques-unes de leurs habitudes. Nous obser- verons qu’en parlant des traits de ressemblance qui se trouvent entre les pies et les pie-grièches, nous n’entendons parler que des espèces qui véritablement sont de ce genre, et non de tous ces oiseaux différens qu'il a plû très-gratuitement aux nomen- clateurs d'y placer indistinctement, et qui n'appartiennent absolument point au genre des pie-grieches. La petite Pie dont nous parlons s'est trouvée dans un envoi arrivant du Ben gale : j'ignore le rom qu'elle porte dans son pays natal, et qu'on lui rendra si quelque voyageur nous l'apprenoit 32 HISTOIRE NATURELTVE par la suite. Quant à ses mœurs, je n’en puis rien dire non plus, n'ayant reçu aucun renseignement quelconque à cet éoard ; 5 l æ) 2) ainsinous nous contenterons simplement de décrire les couleurs de cet oiseau, en attendant que nous ayons quelques indices certains sur sa mamère de vivre, sur la construction de son nid et sur sa ponte, La Pie rousse est, comme je l'ai dit, plus forte que notre pie- grièche grise d'Europe, et approche de la taille de notre litorne. Son bec est d’une couleur de corne; il est très-fort proportion- nellement au volume de son corps; la téte et le cou sont entièrement d'un noir lavé tirant sur le brun, légèrement nué de roussâtre : le reste du plumage du dessous du corps, y compris les recouvremens inférieurs de la queue, est d’un roux clair; le manteau est d’un brun de terre d'ombre; le croupion _etles couvertures du dessus de la queue sent du même roux que le ventre; les pennes de l'aile sont d’un noir brun ; les dernières seulement ont leurs barbes extérieures d'un joli gris blanchâtre, qui est également la couleur des petites et grandes plumes qui recouvrent les aîles. La queue est composée de dix pennes étagées absolument comme celles de notre pie; elles sont en grande partie d'un noir brun surleurs bords extérieurs, et prennent toujours un peu plus de gris blanchâtre à mesure que la plume devient plus longue; de sorte que les deux du milieu sont celles quisont le plus entièrement de cettecouleur: ioutes portent de plus à leur extrémité une tache qui en dessus est roussâtre et en dessous plus blanche. Les pieds et les ongles sont bruns; les aîles pliées s'étendent un peu plus loin que l'origine de la queue. Les narines sont recouvertes de petites plumes dirigées en avant, et on remarque aussi quelques poils au coin de la bouche. LA P/! | oute 2. Plaaie 6e 4 Je 0 y ) - » ) Fr = 0" debicehr hero) CU CPessat) deu. € Ha: C (@ fe Gegrihe. PRESS ; ) 7e 72 l'Zupameite de laug lots. € L'A PIE PIE-GRIÉCHE. 33 EN PIE PIS-CRIÉCEHE, Ne 6e La Pie de cet article est un peu plus petite que la précédente, et paroît même se rapprocher encore davantage du genre des pie-grièches, ce qui m'a fait adopter de préférence le nom com- posé que je lui ai appliqué pour la distinguer; elle sera, si l'on veut, le dernier chainon par lequel ia famille des pies paroît tenir à celle des pie-grièches, comme l'oiseau que j'ai décrit au N°. 78, peut être considéré comme la première pie-grièche , celle enfin dont l'espèce paroît se rapprocher le plus du genre de la pie. La Pie pie-grièche est à peu près de la longueur de notre pie-grièche grise d'Europe, mais elle est un peu plus épaisse de corps. Un noir décidé, ainsi que le blanc le plus pur, ornent son plumage ; et quoiqu'elle n’ait pas d’autres couleurs, elles se trouvent si agréablement disposées et si régulièrement distri- buées, qu'elles lui forment un habit distingué, qui plait et qui lui-fait tenir un des premiers rangs parmi les jolis oiseaux dont sont ornés nos cabinets d'histoire naturelle. Elle a la tête, le cou et la poitrine d’un beau noir lustré; les plumes du haut de la poitrine sont longues, étroites et se détachent toutes en pointes séparées, sur le blanc pur de tout le plumage du reste du dessous du corps, jusques y compris les couvertures du dessous de la queue; le manteau est en partie du même blanc; les ailes Tome IT E 34 HISTOIRE NATURELLE sont noires et portent des taches blanches. Le croupion et les recouvremens du dessus de la queue sont également d’un blanc éblouissant, et tranchent admirablement bien sur le noir foncé des dix pennes étagées de la queue, qui toutes sont terminées par une tache blanche. Le bec est court et épais; sa couleur est d'un noir luisant qui est aussi celle des pieds et des ongles. J'ai vu cette Jolie espèce d'oiseaux dans plusieurs collections différentes : un dans celle de M. Raye de Breukelerwaard, à Amsterdam; j'en ai vu un autre chez M. Holthuysen, dans la sème ville : feu le C. Mauduit en avoit un dans son cabinet, à Paris; le quatrième appartenoit à l'abbé Aubry; un cinquième au OC. Gygot-Dorci, et j'en ai aussi un en ma possession. Dans plusieurs cabinets cet oiseau passe pour étre originaire de la Chine. C'est ce que je ne contredirai point absolument, quoique j'aie de fortes raisons pour en douter, car l'individu qui se trouve chez moi, et que j'ai préparé moi-même, est arrivé dans une caisse d'oiseaux envoyée directement de Cayenne. Îl est vrai qu'on pourroit m'objecter qu'un oiseau de la Chine pourroit bien avoir été mis dans une caisse d'oiseaux arrivant de Cayenne, mais je pense avoir de grandes présomp- tions pour le croire plutôt de Cayenne, par la raison qu’il étoit absolument préparé, écorché et préservé de la méme manière que tous ceux que nous recevons journellement de cette colonie : méthode que je n'ai point encore vu employer dans aucun des envois faits d'autres pays. AU ARCS 4 w LR = oJoute LE 2 2] . o7/. 2 eltecbt Biol) De Dee ( LT CN TT er 21, ; ? 2 2 le tepEuteiute e L'qugléis : , 2 rebe or D ; Gr a foule ; D'UN DS CAE CN CG? DES PIE-GRIECHES. DE CRSU E n TJ'apnes les différens caractères dela conformation extérieure par lesquels la nature semble avoir voulu distinguer en Afrique les nombreuses espèces de pie-grièches qui se trouvent parse- mées sur son sol, nous nous sommes cru obligés de diviser ce genre d'oiseaux en trois sections différentes; distinctions que les ornithologistes n'ont point adoptées, à la vérité, mais que nous suivrons cependant, parce que le port, les habitudes etles mœurs des espèces de chacune de ces divisions, offrent des différences assez considérables pour nécessiter cette séparation que nous n'avons établie, au reste, que pour suivre, en quelque sorte, les lignes de démarcation que la nature semble avoir indiquées elle-même, et qui peut-être auroient exigé que nous ‘en formassions trois genres, Dans toute la partie de l'Afrique où j'ai pénétré, je n'aitrouvé que trois espèces de pie-srièches de la première section, et dans ces trois espèces, il en est même deux qui appartiennent éga- D] __s 36 HISTOIRE NATURELLE lementàäune grande partiede l'Europe, et se trouventrépandues sur toute l’étendue de la France. Quant aux deux autres sections, hous ne connoissons en France et même en Europe, aucun oiseau qui puisse y entrer; pendant que dans les trois autres parties du monde, elles contiennent, au contraire, un grand nombre d'espèces, dont plusieurs ont été confondues avec d'autres oiseaux. Il règne à cet égard, dans l'histoire des pie- grièches étrangères beaucoup de fautes grossières, les métho- distes ayant décrit plusieurs pie-grièches de la seconde division pour des merles, pendant qu'en méme tems ils nous donnoient des merles pour des pie-grièches. Nous verrons aussi souvent le méme oiseau décrit ici pour un merle et plus loin pour une pie-grièche : erreur que nous releverons à mesure qu'il sera question des espèces qui y ont donné lieu. La pie-crièche qu'au Cap de Bonne-Espérance on nomme Fiskaal (Fiscal), et à laquelle je conserverai ce nom plutôt que celui de pie-grièche du Cap, est celle dont Buffon fait mention sous cette dernière dénomination , en la confondant avec notre pie-grièche grise, et dont il donne une fort mauvaise figure dans ses planches enluminées, N°. 477, fig. 1. Cetoiseau ne se trouvant pas seulement au Cap de Bonne-Espérance, puisqu'on lerencontre encore au Sénégal et dans tout l’intérieur de l'Afrique, j'ai cru devoir lui conserver le nom propre par lequel il est généralement connu dans le pays d'où je l'ai S rap porté. Je n'ai, ainsi que Je l'ai dit plus haut, trouvé dans toute la partie méridionale de l'Afrique où j'ai pénétré, que trois espèces de pie-grièches, qui toutes trois appartiennent à ma première division : savoir, 1°. celle de cet article, dont le mâle est représenté de grandeur naturelle dans les planches zn-4°. et er el o/oute TS only Rsark) P° ) JE. ro sc D, à : e 71 (q Zu Autette æ ) 7. Lauglots , Z BAUME D SCAN 37 in-folio de cet ouvrage, N°. 61; 2°. la pie-grièche rousse, et 3°, l’'écorcheur : ces deux derniers oiseaux sont absolument les mêmes que ceux du même nom que nous trouvons répandus dans toute l'Europe, et dont tous les ornithologistes ont parlé. Il faut bien se garder pourtant de croire que ces deux espèces parcourent tous les ans l'immense barrière qui sépare le Cap de Bonne-Espérance de l'Europe, car elles ne sont nullement voyageuses et n y sont point de passage, mais habitent toute l'année les mêmes cantons, y sont domiciliaires, et nichent là comme chez nous, y font leurs nids de même, pondent le même nombre d'œufs, et viventenfin absolument de la même manière qu'en Europe. C'est-à-dire, que la pie-grièche rousse et l'écor- cheur n'ont point du tout varié en Afrique, ni par leur taille, ni dans leurs mœurs, ni pour leurs couleurs; car en les con- frontant avec les mémes espèces tuées en Europe, je ne leur ai pas trouvé la plus légère différence, et c'est ce dont le lecteur pourra se convaincre en examinant les planches coloriées de cet ouvrage, N°. 63 et 64, où j'ai fait représenter ces deux oiseaux tués en Afrique. J'ai vu aussi deux individus des mêmes espèces, qui ont été rapportés du Sénégal, et je me suis con- vaincu, en les comparant tous ensemble, qu’ils n’ont pas subi non plus, dans cette partie de l'Afrique, la moindre altération, ni en plus ni en moins. Quant à la pie-grièche du Cap, celle dont il est question dans cet article, je suis bien éloigné de la regarder comme une simple variété de la pie-grièche d'Europe, comme l’assure Buffon; il faut même n'avoir jamais comparé deux oiseaux ensemble pour avoir confondu ces deux espèces. Au reste, tout le monde a déja dù s’appercevoir que la grande manière de Buffon et de son coopérateur Montbeillard, étoit de rapporter ainsi toutes les espèces étrangères à celles de l'Europe et de considérer souvent non-seulement les diffé- rentes espèces d’un même genre comme sorties de la même 58 ENS TOY DRE CN ANDIDMEMEMEPUE souche, mais maintefois deux oiseaux de genres différens pour n'étre que des variétés de la même espèce, produites par l'influence du climat. C'est ainsi que, d’après les indications les plus vagues et les plus suspectes, et des descriptions les plus imparfaites, ils ont souvent conclu kardiment que telle ou telle espèce étoit commune à plusieurs parties du monde, sans s’embarrasser si l'oiseau dont ils parloient étoit seulement du genre de celui auquel ils le tr ansportoient. Si, en quelque sorte, Buffon est excusable d’avoir regardé cette on du Cap comme une variété de celle d’ Fu ope, attendu qu'en effet ces deux oiseaux ont plusieurs traits de ressemblance qui ont pu l'induire en erreur, ne connoissant point les habitudes naturelles de celui d'Afrique, etne les ayant sûrement jamais confrontés l’un avec l'autre, je ne puis lui par donner d’avoir encore donné comme simple variété de la pie- grièche grise d'Europe, la pie-grièche bleue de Madagascar (1), la pie-sgrièche de Cayenne (2), la pie-srièche de la Louisiane (3), la pie-grièche grise du Sénégal (4), etle dial-bird ou cadran des ‘Indes lo décrit par AI bin, Le Fiscal ou la pie-crièche d'Afrique a la queue si différem- ment construite de celle de notre pie-grièche grise d'Europe, qu'il n'est pas douteux que ces deux oiseaux sont d'espèces différentes; celle d'Europe a chaque plume de la queue du double (1) Voyez les planches enluminées de Buffon, N°. 296, fig. 1. CC: TZ IN 07 te 2. (3) I y a ici erreur dans le renvoi de Buffon à ses planches enluminées, No. 476, qui représente le tinamon, espèce de perdrix d'Amérique, au lieu de cette pie- grièche, figure à laquelle il renvoie encore à l'article du grand tinarmnon ou magoua de Cayenne. GOMOLZ EN 200 hein: D AN TO OUIE 39 plus large que celle d'Afrique; elle a en outre la queue si peu étagée, que la plus courte plume de chaque côté n’a pas plus d'un demi-pouce de moins que celle du milieu : caractère que je désigne par queue arrondie, parce qu’en l’étalant son extré- mité forme un demi-cercle parfait; tandis que celle du Fiscal a précisément la forme d'un fer de lance, parce que les plus longues plumes du milieu de la queue sont au moins près du double plus alongées que la plus courte de chaque côté, et les autres plumes s'alongeant successivement,forment précisément la queue de notre pie d'Europe. Le Fiscal n’a que sept pennes de laile marquées de blanc, et la pie-srièche grise en a quinze; ce blanc occupe aussi plus de longueur sur chacune de ses plumes. | La pie-erièche bleue de Madagascar est près d'une grande 5 5 Î 5 moitié moins volumineuse que notre pie-srièche grise, et sa queue n'est point étagée:caractère qui la distin gue absolument et de cette pie-grièche d'Europe, et de celle a qui l'ai laissé le P'e-8 PE» qui ] nom de Fiscal ; d'ailleurs elle appartient à la troisième section des pie-scrièches d'Afrique, dont je parlerai immédiatement Ï 5 que» Jeu apres les deux premières. Au reste, la preuve la plus convain- cante que ces deux pie-grièches africaines ne peuvent en même fi À Qu 72 9 , : e d'Europe, c’esi tems être toutes deux des variétés de celle dE pe, c'est que je les ai trouvées dans les mêmes cantons du pays des Grands Namaquois, ce qui prouve bien évidemment, je crois au moins, que l’un de ces deux oiseaux n'est point une variété de notre pie-grièche grise d'Europe; car la même espèce ne peut avoir produit dans le même canton deux variétés tellement différentes qu'elles aient changé totalement de couleur, de ramage, de caractère et de mœurs. Voyez à l'article de la pie-grièche bleue son portrait et comparez La pie-grièche de Cayenne, du N°. 207, fig. 2, appartient 4o HISTOIRE NATURELLE aussi à ma troisième division; elle a absolument les caractères et les formes de la pie-grièche bleue, et elle est moitié moins forte que la pie-grièche grise. Quant au dial-bird d'Albin, l'ornithologiste le moins exercé et qui se seroit donné la peine de regarder cet oiseau, l'auroit reconnu pour un merle, bien loin de trouver qu'il n’étoit qu'une variété de notre pie-grièche grise d'Europe. Au reste, j'ai dans ma collection cet oiseau, que j'ai rapporté d'Afrique et qui est fort commun dans les cabinets de la Hollande, et certainement je puis assurer qu'il n'a pas le moindre rapport avec les pie- grièches, cequ'il est bien facile de voir en consultant la planche N°. 109. Pour ce quiestde la pie-grièche du Sénégal, celle du N°.297, fig. 1, des planches enluminées de Buffon, c'est un oiseau dont les caractères sont si différens de ceux de la pie-grièche grise d'Europe, qu'il ne faut que comparer leurs portraits l’un à l'autre pour être convaincu de l'erreur qu'a commis Buffon en le rapportant à l'espèce de la pie-grièche grise. Il reste maintenant la pie-grièche de la Louisiane, du N°. 476, que Buffon rapporte encore à notre pie-grièche grise d'Europe; espèce sur laquelle } je ne prononcerai pas, puisque je ne la connois pas, et que je n'en ai pas trouvé la figure; mais il est bien difficile de croire que la pie-grièche grise, qui n’est point voyageuse, ait traversé les mers pour se fixer en Amérique. Afin d'appuyer ce système de variation supposée dans l'espèce de la pie-grièche grise d'Europe, Buffon nous dit que, puisque dans notre climat la pie-grièche grise varie, à plus forte raison doit- elle varier daus des climats plus éloignés, tels que ceux de l'Afrique, de l'Amérique et des Indes..., Mais cette pie-grièche prétendue DAUN EN SACMAME; PA prétendue d'Italie (1), dont la poitrine et le ventre sont mêlés d'une teinte rousse, n’est très-certainement point une variété de notre pie-grièche d'Europe, et forme au contraire, une espèce distincte ; si Buffon s'étoit seulement donné la peine de voir les figures auxquelles il renvoie son lecteur, il se seroit convaincu lui-même de son erreur. Quant à ces pie-grièches toutes blanches qui se trouvent dans les Alpes, ce sont de ces jeux de la nature que l’on ren- contre sur le globe entier et dans les climats brülans de la zône torride, tout aussi bien que dans les frimats du nord (2). Âu reste, encore une fois, les oiseaux ont beau changer de couleur, soit accidentellement, soit naturellement, comme cela arrive régulièrement à beaucoup d'espèces, leurs caractères ne chan- gent point pour cela; c’est ce que j'ai vérifié mille et mille fois: mais cenest pas chez nos méthodistes qu'il faut chercher ces vérités, c'est dans la nature. Nous avons vu que la pie-grièche rousse et l'écorcheur, qui se trouvent également au Sénégal, au Cap de Bonne-Espérance eten Europe, n'ontpassubi, dans ces trois climatstrès-différens, la moindre altération; pourquoi donc la pie-grièche grise auroit- elle varié au point de changer même le caractère de sa queue? Et s’il étoit même présumable que ce changement se füt opéré, pourquoi ces mêmes pie-grièches qui prennent, suivant Buffon, un beau bleu à Madagascar, n'ont-elles pas pris toutes la même couleur, sur-tout dans le même pays; et comment enfin trou- veroit-on dans le même canton deux variétés si différentes de (1) Voyez les planches enluminces de Buffon , N°. 32, fig. 1. (2) On verra que j'ai trouvé dans l’intérieur de l'Afrique plusieurs oiseaux d'espèces différentes , devenus entièrement blancs. Tome Il. F A2 HIS T OLR EE NA RURIET EE la même espece? Giestije crois trop m'arrèter à combattre des fautes qui sont si grossières qu'elles ne méritent pas la peine d’être relevées. Nous allons maintenant donner une description parfaite des mœurs de la pie-grièche d'Afrique à laquelle je conservele nom de Fiscal, qu'elle porte dans toute la colonie du Cap de Bonne- Espérance. Ce nom lui a été donné par l’analogie que les colons ont cru trouver entre ses habitudes et les fonctions du fiscal, lequel, au Cap, est chargé de la police correctionnelle de la Colonie. Il y a pourtant cette différence, que la pie-grièche fait ses exécutions elle-même; ainsi le nom de bourreau lui auroit mieux convenu que celui de Fiscal. Quand cet oiseau appercoit une sauterelle, une manthe ou un petit oiseau, il fond dessus, et l'emporte aussitôt pour l'empaler à l'épine d’un arbre, s’il s'en trouve d’épineux dansle canton qu'il fréquente, et il est si adroit dans cette exécution, que l’épine passe toujours au travers dela tête de l'oiseau oude l'insecte qui reste ainsi suspendu. S'il n’y trouve point d'épine, 1 assujettit la tête de l'oiseau entre une enfourchure de deux petites branches, et cela avec la même adresse que le feroit un homme. Il fait exactement la méme opération à tout ce qu'il peut attraper. Enfin, tous les instans de sa journée sont marqués par quelques meurtres nouveaux, puisqu'il chasse continuelle- ment; et l'on croit méme que c’est plutôt par l'envie de nuire que par le besoin de nourriture qu'il commet tant de cruautés, car 1l lui est impossible de consommer toutes ses provisions. On le voit habituellement se percher sur le haut des arbres, et toujours de préférence sur les branches sèches, d’où il se jette indifféremment sur tout ce qui se présente à sa. portée; quand il a faim, il va visiter ses gibets, et en décroche ce qu'il préfère. DU, FF SCA TE. 43 Les Hottentots prétendent que n'aimant point la viande fraîche, cet oiseau conserve sa nourriture pour la laisser se putréfier. Ce qu'il y a de certain, c’est que rarement il dévore la proie dont il vient de se saisir. Il est heureux qu'à des mœurs aussi sanguinaires et si malfaisantes, la nature n'ait point allié la force; car alors cet oiseau, s’il avoit eu, par exemple, la taille de nos grands aigles , seroit devenu le fléau de la race des animaux. Il suffit de guetter un instant cette pie-grièche pour avoir le plaisir de lui voir faire tout son petit manège; et pour peu que l’on veuille se donner la peine de chercher dans l'endroit qu'elle fréquente, on est sûr de trouver sur chaque buisson ou sur chaque arbre les victimes qu'elle ÿ a accrochées, et dont souvent la plus grande partie est même hors d'état de luiservir denourriture, tant elles sont desséchées;ce quiprouve, comme je l'ai dit, que c'est plutôt par un instinct destructeur que pour satisfaire son appétit qu'elle chasse sans discontinua- tion. Comme cet oiseau est peu farouche, il est très-facile d'observer tous ses mouvemens. Aussitôt qu'il s’estemparé d'un animal quelconque, il cherche bien vite un endroit commode, sur un arbre ou sur un buisson dont il choisit ou l’épine ou la petite fourche qui convient à son expédition; et quand il a fini son opération, il repart promptement pour se remettre en quête. Il suffit alors d'aller à la place où on l’a vu s’arréter, on est sûr d'y trouver l'animal pendu ou empalé. Cette pie-grièche est hardie, vindicative et très-criarde; elle ne souffre aucun oiseau de rapine dans son domaine, et chasse courageusement tOlS Ceux qui pourroient vivre à ses dépens, en partageant sa chasse; il est cependant beaucoup d'oiseaux qui savent très-bien profiter de ses provisions, si éparses qu'elle ne peut les conserver toutes. Ceite haine s'étend jusqu’à son espèce, car les mâles se livrent entre eux des combats cruels , F 2 44. HE S TOLR E "NAMUR EIRE qui finissent quelquefois par la mort de l'un d'eux, sur-tout quand il s’agit de se disputer une femelle. Le ramage de cet oiseau est très-varié, et souvent il babille des heures entières sans discontinuer, en faisant mille gestes différens et en volant d'arbre en arbre, notamment dans la saison de l'amour. Son vol est bas etse fait toujours en plongeant et en remontant, mais jamais en ligne directe. Le mäle et la femelle ne se quittent point; on les apperçoit rarement l'un sans l'autre : il est un peu plus fort qu'elle, et son noir et son blane sont plus purs. Ces oiseaux construisent leur nid dans l'enfour- chure des branchesd'arbres; ilest composé de racines flexibles, de mousse, et ils le garnissent en dedans de laine ou de plumes. La femelle y dépose cinq œufs, mais souvent quatre seulement que le mâle couve aussi bien qu'elle. Ils soignent leurs petits avecune attention admirable, et ne les abandonnent que quand ils sont déja très-forts. Dans son jeune âge cette pie-grièche n'a du blanc que sut les bords des scapulaires et sur le ventre; le reste du plumage est d'un gris brun, finement rayé d'une teinte plus foncée ; enfin, dans cet âge elle ne porte pas un atôme de noir, et paroït être absolument d’une autre espèce: voyez la planche coloriée N°. 62. Adulte, cette pie-grièche est de la grosseur de notre pie-grièche grise d'Europe, mais elle est un peu plus alongée. Son bec, ses pieds et ses ongles sont noirâtres; elle a toute la tête, le cou par derrière et le manteau d'un noir brun; Îles scapulaires sont blancs et le croupion est grisâtre. Les pennes de l'aile sont noires, à l'exception d'une partie de celles du milieu où plusieurs d'entre elles ont du blanc; les dernières son bordées de blanc. Les quatre plumes intermédiaires de la queue sont noires ; les autres portent successivement plus de DUT FES CALE: 45 blanc, jusqu'à la dernière de chaque côté, qui est entièrement de cette couleur dans ses barbes extérieures. La gorge, le cou par devant, la poitrine et tout le dessous du corps, sont d'un beau blanc; mais ce blanc prend une teintegrisâtre sur lapoitrine de la femelle. Les yeux sont d'un brun noir. Cette pie-grièche est très-commune au Cap de Bonne-Espé- rance; on la trouve dans la ville même où elle fréquente tous les jardins, et on la voit sur les arbres jusque dans les rues et sur les toits des maisons; je l'ai trouvée aussi par-tout dans l'intérieur des terres, jusque chez les Namaquois, contrée où elle n'a point varié du tout, ni dans sa manière de vivre, ni dans ses couleurs. Elle habite continuellement les mêmes cantons, se perche sur les mêmes arbres, où elle a des branches de prédilection sur lesquelles elle se tient de préférence et d’où on l'entend sans cesse répéter son ramage très-aigre et très-. discordant. Elle sait, en volant, se soutenir à la méme place, pour guetter les insectes quelle a vu se cacher sous l'herbe: ce que font généralement tous les oiseaux carnivores, qui épient fort souvent leur proie de la même manière, lorsqu'ils chassent en volant. 46 HISTOIRE NATURELLE LA PIE-GRIÈCHE ROUSSE, N°63, riæ Let Cr oiseau, tant par son port, son attitude et ses mœurs, que par sa conformation extérieure, appartient indubitablement au genre proprement dit de la pie-grièche, et entre, comme je l'ai déja fait remarquer à l'article précédent, dans la première des trois sections que J'ai cru être obligé d'établir dans la grande famille des pie-grièches pour les distinguer. Celle-ci ne se trouve pas seulement en Europe, mais habiteune grandepartie de l'Afrique, puisque je l’ai rapportée de l'intérieur des terres du Cap de Bonne-Espérance, et qu'Adanson l'a également rapportée du Sénégal. Je ne m'étendrai pas beaucoup sur cette espèce, puisqu au Cap comme en Europe elle vit absolument de la même manière, et qu'elle n'y a pas non plus changé de couleur ni de taille. Je renvoie donc mon lecteur aux descrip- tions qui en ont été faites par tous les ornithologistes, et plus particulièrement à celle de Brisson, qui a décrit le mâle et la femelle de la manière la plus détaillée et la plus exacte. Le lecteur peut, en consultant les planches où J'ai donné les figures d'un mâle et d'un jeune de cette espèce, que jai rapportés du Cap de Bonne-Espérance, et les comparant ensuite, soit avec les portraits qu'a donné Buffon de la même espèce tuée en Ge Di 3 cJowe 2. Slamche 63. A) JT DA CP À TL Brecht Rocuol) L _Peree (007/2 L 6) DO | oise Payriuhe G oufie na CR 2 - € Hemelle Ê ? : : 2] Ne de Le upiinerce de Lauglorz? “ d DE LA PIE-GRIECHE ROUSSE. 47 Europe (1), ou, ce qui vaut mieux encore, avec les oiseaux mêmes, puisqu'ils se trouvent dans presque toutes les collec- tions, se convaincre qu’en effet l'espèce n’a pas du tout varié au Cap. J'ai aussi dans mon cabinet une Pie-orièche rousse mâle, qui a été rapportée du Sénégal; et je puis assurer qu'il n’y a pas la plus légère différence entre ces trois individus, quoique tués à une si grande distance les uns des autres. Buffon prétend qu'en Europe ces pie-grièches sont voya- geuses,qu elles partent régulièrementen automne etreviennent au printems; je n'assurerai pas positivement le contraire, mais très-certainement ceci n’a pas généralement lieu pour tous les cantons de la France; car il est très-vrai que j'aitué en Lorraine des Pie-srièches rousses pendant l'hiver, et j'ai vu constamment au Cap des pie-grièches dans les mêmes mois où Buffon suppose qu'elles sont revenues en France pour y faire leur ponte. D'ailleurs, quand bien méme il seroit prouvé que les Pie- grièches rousses se retirent de certaines parties de la France pouraller habiter une température plus chaude ,ilseroitabsurde pour cela de supposer qu’elles traversent dans leurs migrations un aussi vaste terrain que celui qui sépare l'Europe de la pointe méridionale de l'Afrique, où on trouve aussi cet oiseau. Au reste, en consultantmes journaux, je vois que j'ai tué en Afrique de ces oiseaux dans toutes les saisons de l’année, ainsi au Cap comme en Europe, leurs courses ne paroissent pas s'étendre bien loin : d’un autre côté, j'ai observé maintefois qu'en général toutes ces pie-srièches fréquentent toujours les mêmescantons ; et si quelqu'un a vu un de ces oiseaux, soit la pie-grièche grise, (1) Voyez les planches enluminées de Buffon, Ne. 9, fig. 2, le mâle, et No, 51, fs. g. 1, la femelle. 48 HISTOIRE NATURELLE la rousse ou l'écorcheur, dans un endroit quelconque, il est bien certain de les y revoir tous les jours, à moins qu'elles ne s’appercoivent que l'on cherche à les tuer, ou qu'on les pour- suive avec trop d'acharnement. Elles partagent avec presque tous les autres oiseaux de proie cette méfiance et cette habitude des’approprier un domaine exclusif, où elles chassent, pondent et se tiennent de préférence à tout autre. Îl est, je crois, inutile de combattre Buffon sur l'idée où il est, ditil , que la Pie-grièche rousse pourroit bien ne former, avec l’écorcheur, qu'une seule et même espèce : il prétendaussi d'après ces mêmes principes, que toutes les pie-grièches étran- gères qui ont du roux dans leur plumage, ne sont pareillement que des variétés de ces mêmes espèces. Comment accorder ces idées avec les changemens que sans cesse il suppose que les oiseaux subissent dans les différens climats qu'ils habitent; et pourquoi le roux seul ne changeroit-il pas? La Pie-grièche rousse mâle est un peu plus forte que la femelle; celle-ci est facile encore à distinguer, en ce qu'ellene porte point sur la téte et tout le derrière du cou cette couleur d'un roux foncé , qui est l’attribut du mâle seulement, Dans son jeune âge cet oiseau est si différent de ce qu'il doit être par la suite, que dans cet état, il a été décrit par plusieurs ornithologistes pour une variété de l'écorcheur; erreur dans laquelle Brisson a été induit par Aldroyande, qui le premier a parlé de cet oïseau, sans s’appercevoir de ce qu'il étoit : voyez Brisson, tome II, page 154, qui décrit aussi cette variété d'âge sous le nom d'écorcheur varié, en avouant qu'il ne sait pas s’il n’est point la femelle de l'écorcheur. Je renvoie le lecteur pour le reste à la figure 2 de la planche 64, où 1l verra le DE LA PIE-GRIÉCHE ROUSSE. 49 le portrait de cet oiseau, qui est très-certainement une Pie- grièche rousse dans son premier âge, et non une variété de l'écorcheur; ce dont jesuis certain, ayant examiné et suivi, tant en Europe qu’en Afrique, plus de vingt couvées de cette espèce, et nourri plusieurs de leurs jeunes, Tome Il. G 5o HISTOIRE NATURELLE PE CORCHEUDER NP FIG. 1 et 2. Ccrrr petite pie-grièche dont la taille est, à celle de la pie- grièche rousse, à peu près dans les mêmes proportions que celle-ci est à la pie-grièche que] ai nommée fiscal,se trouve dans toute l'Europe aussi bien qu’en Afriqueoù elle esttrès-commune dans certains cantons, particulièrement à la eôte de l’est vers les rivières Sondag et Swarte-Kop, et sur la côte ouest vers le pays des Petits et des Grands Namaquois. Je l'ai aussi retrouvée dans plusieurs endroits de l'intérieur des terres; desorte qu'elle paroit habiter généralement toute la pointe méridionale de l'Afrique, à prendre d'une trentaine de lieues de distance de la ville du Cap, aux environs de laquelle on ne la rencontre pas, du moins j assure ne l'y avoir jamais vue n1 entendue. Et cette pie-grièche, ainsi que les précédentes, étant trop facile à dé- couvrir, par leur babil continuel et par l'habitude qu'elles ont de se percher toujours sur le sommet des arbres, il est à croire que celle-ci ne m'auroit point échappé si elle avoit habité les environs du Cap, où j'étois continuellement occupé à la chasse des oiseaux. Je me contenterai encore, à l'égard de cette espèce si genéralement connue, de renvoyer mon lecteur aux figures que j'ai données du mâle etde la femelle, et à l'Ornithologie de Brisson, où cette petite pie-grièche euro- — «| Pf 1 i oJoue %. Honmche 6%. ch PE LD) P < Te [a lube - Fe : 1) AN EE LE Cr nie Rs LC, CLCUIE ge 7 C - : ) De lAugpriueri e Laugloix 7} sin ra it Led mir D'ÉLP ENCIORR CIE EUR 51 péenne est décriteavecexactitude et d'une manière quine laisse rien à desirer pour la distribution de ses couleurs, qui sont absolument les mêmes en Afrique. Sicenaturaliste,au reste, s'est quelquefois trompé en donnant des variétés d'âge ou de sexe pour des espèces particulières, il est bien pardonnable; car à cet égard, chacun peut se tromper, sur-tout par rapport aux espèces qu'on n a pas été à même de suivre dans tous leurs différens âges. Il est vrai que l'œil exercé d’un homme habitué à voir les oiseaux, s’y trompe bien rare- ment; mais pour cela il faut s'être adonné et livré entièrement àla chasse, avoir parcouru les campagnes, franchiles montagnes et pénétré dans les bois, et avoir enfin, pour ainsi dire, suivi pas à pas ces êtres toujours mouvans. Mais cette manière de vivre, et les fatigues auxquelles elle entraîne, ne con- viennent pas égalemeut à tout le monde et à tous lestempé- ramens, et n'est pas enfin du goût de bien des hommes, qui d’ailleurs ne voient peut-être pas quel si grand but d'utilité présentent les observations de cette nature, et concoivent encore moins de quelle importance il est qu'elles soient si scru- puleusement exactes. .…. Jenerépondrai rien à ceux qui pensent ainsi, et laisse aux amateurs de la partie de l'histoire naturelle qui traite des oiseaux, le soin d'apprécier plus ou moins les peines de ceux qui se sont adonnés à cette branche d'histoire naturelle, qui au reste ne se trouve la moins cultivée que parce qu'elle offre beaucoup de difficultés et donne infiniment de peines par le travail immense et les soins qu'elle exige presque continuellement. On sent bien que je ne parle point ici de ces soi-disant naturalistes qui, ne connoïssant de cette science que le système de tel ou tel méthodiste, et qui n'ayant jamais com- paré deux animaux ensemble, se donnent le titre fastueux de professeurs de zoologie, et prétendent enseigner ce qu'ils ne ee 02 HISTOIRE NATURELLE connoissent pas eux- mêmes; ceux-là, tels que des frelons dévorateurs qui, bourdonnant par-tout, s’approprient le miel qu'a ramassé l’industrieuse et vigilante abeille ,tout en cher chant encore à la percer de leur dard aigu, savent bien, quand ils en ont besoin, tirer parti du travail, des découvertes et des sueurs des autres, tout en distillant sur eux le poison de leur bile envenimée. La femelle de l'Écorcheur est plus petite que le mâle, et elle n'a point le dessus de la tête et le derrière du cou d'un gris blanchâtre comme lui, mais bien absolument du même brun roussâtre que son manteau; Sa poitrine et ses flancs ont aussi une teinte moins forte de cette jolie couleur de rose tendre qui teint ces mêmes parties dans le mâle. Au premier âge, celui-ci ressemble entièrement à sa femelle. Ces oiseaux construisent leurs nids sur les arbres, dans les enfourchures proche le tronc. La ponte varie de quatre à six œufs, et souvent méme elle n'est que de trois. L'Écorcheur n’est point de passage en Afrique , on l'y trouve dans toutes les saisons : j'ai tué aussi de ces oiseaux pendant l'hiver, soit en Lorraine, soit dans les environs de Paris; ainsi ils ne partent pas tous en automne, de France, comme l'assure Buffon. Il est vrai qu'au printems et pendant l'été ils habitent les plaines où ils s'établissent sur quelques arbres isolés, et qu'à l'approche de l'hiver ils regagnent la lisière des bois, et notamment ceux qui Contiennent quelques sources. En Afrique la température étant beaucoup moins froide, ils y trouvent toute l’année de quoi vivre, ce qui fait qu'ils habitent constam- ment les mêmes cantons. Ils font là comme ici leur principale DE L'ÉCORCHEUR 53 nourriture d'insectes, et sur-tout de chenilles, et ils ne chassent etne prennent que les jeunes oiseaux hors d'état de se défendre. Ce qui prouve encore bien évidemment que non-seulement Buffon ne voyoit pas la plupart des oiseaux dontil parloit, mais qu'il ne regardoit pas même leurs portraits, c’est qu’en parlant de Hi ane , 1l donne encore comme une variété de cette espèce la pie-grièche de la Louisiane, qui est figurée sous le N°. 367 des déni coloriées deson ouvrage, en assurant que cet oiseau ressemble presqu en tout à la te de l'Écorcheur. Or,si Buffon avoitprisla peine de consulter cettefigureàlaquelle il nous renvoie, il est certain qu'il auroit vu (ou il n'auroit pas voulu voir) que cette pie-grièche de la Louisiane ne ressem- bloit absolument en rien au mâle ni à la femelle de l'Écorcheur, Le lecteur pourra se convaincre de tout ce que je viensde dire, en comparant lui-même les portraits de ces deux oiseaux avec celui de cette prétendue variété, qui n’est même assurément pas du genre des pie-grièclies. Nous voÿons encore, à l'article de l'Écorcheur, dans Buffon, un autre rapprochement tout aussi bien fondé : c’est la pie-grièche du Sénégal, dont il a donné la figure dans son N°. 479, fig. 1, et qu ilprétend encore n'être qu'une variété de F Horhon ou de la pie-grièche rousse. Cette pie-grièche du Sénégal se trouve également au Cap; je donne la description et les figures du mâle et de la femelle, sous le nom de tchägra, dans la seconde division que j'ai faite des pie-grièches d'Afrique : j'y renvoie mon lecteur. Quant à l'Écorcheur des Philippines que Buffon assure encore n'être qu'une variété de notre Écorcheur, nous n'avons pu consulter le N°. 476 de ses planches, auquel il renvoie; car c'est déja la seconde fois que ce même numéro est désigné pour être le portrait de deux pie-grièches différentes, tandis qu'il présente celui d'un tinamon de Cayenne, comme je l'ai déja 54 HISTOIRE NATURELLE fait observer ailleurs. Au reste, il est probable que ce rappro- chement sera tout aussi bien fait que tous ceux dont nous avons fait mention. Nous allons maintenant donner la description de plusieurs espèces de pie-grièches étrangères à l'Afrique, qui cependant par leurs formes extérieures et leurs caractères, appartiennent absolument à cette première division de ces oiseaux. , d, DE A] Ve Lbceht Recuot) KZ D) : LE € V4 7 JARHT ON / ane. 7 on p! : É 2] D. de le Tuprivete De —anglorr ? DE TL A PIE-GRIECHE ROUGE A PLASTRON BLANC. 55 LA PIE-GRIÈCHE ROUGE A PLASTRON BLANC, N°. 65. En parlant des oïseaux du genre de la pie, nous y avons remarqué deux petites espèces qui, participant également et des pies et des pie-grièches, remplissoient l'intervalle qui sem- bloit séparer ces deux genres voisins; voici maintenant une pie-grièche d’une forte taille, qui se rapproche elle-même beaucoup des pies, et qui par conséquent, dans une Ornitho- logie générale, pourra être placée à la tête de ces oiseaux, directement après avoir parlé des pies. Cette espèce a exacte- ment le même bec que la pie-grièche grise d'Europe, tandis qu’elle a les pieds plus alongés; sa queue est aussi absolument de la même forme que celle des pies, et son corps est plus court et paroît plus épais que ne l'ont ordinairement les pie-grièches, dont la taille est naturellement plus svelte. Elle seroit enfin une jolie pie, sans son bec plus alongé, moins épais et garni d’un crochet irès-apparent de chaque côté : caractere qu'ont, à la verité, beaucoup d’autres oiseaux, mais qui cependant est bien plus marqué chez les pie-grièches; ce qui n’a point empêché les naturalistes de confondre, dans ce genre, une quantité d'espèces dont les habitudes, les mœurs et la manière de vivre, comme nous l'avons fait remarquer, sont absolument différentes de celles de ces oiseaux. Il est enfin peu de genres dont les espèces aient été si confondues que celles des pie-grièches, et 56 EDS TOR E NAMUR TEMEMENE 0 il n'en est point cependant dont les caractères, tant physiques que moraux, soient plus faciles à saisir. L'histoire des oiseaux fourmille, à cet égard, de tant de fautes grossières, qu'il ne m est pas possible de les relever toutes dans le cours de cet ouvrage, où je ne me suis guère proposé que de parler des oiseaux que J'ai observés en Afrique, et de ceux non décrits que jai trouvés dans les différens cabinets de l'Europe. Je me bornerai donc à ne faire mention que des fautes qui auront quelque rapportavecles espèces dont j'aurai occasion de parler; me proposant de publier un jour, dans la forme d’un diction- naire, les notes que j'ai faites sur tous les oiseaux connus : ouvrage dans lequelje tâcherai de débrouiller le cahos où cette partie de l'histoire naturelle a été plongée, d'un côté, par le peu de connoiïssance qu'avoient, dans cette partie, beaucoup de voyageurs et de savans qui ont écrit sur ce sujet; et d’un autre, par les erreurs de nos méthodistes qui, au reste, parois- sent, en général, avoir bien plus cherché à assujettir la nature à leurs règles, et à resserrer ses productions dans les bornes étroites de leur système erroné, qu'à plier ou à étendre, au contraire, leurs préceptes à sa marche aussi uniformg dans son ensemble, que libre et varié dans ses détails. La Pie-orièche rouge à plastron blanc estde la taille de notre merle d'Europe; elle a la tête, le cou par derrière, le manteau, les scapulaires, le dos et les aîles d’un noir mat sans reflet; la gorge, le devant du cou et le sternum sont couverts de plumes d’un rouge des plus éclatans, sur lequel se détache un large collier blanc qui ceint la poitrine d'une aile à l'autre; un trait rouge qui borde deux des moyennes pennes de chaque aile, la traverse dans sa longueur. Le bas ventre et les recouvremens du dessous de la queue sont d’un fauve clair; un trait blanc borde de chaque côté de la joue la mandibule inférieure du bec. La DE LA PIE-GRIECHE ROUGE A PLASTRON BLANC. 57 La queue, très étagée, est composée de dix pennes, dont la couleur est d’un rouge vif en dessus, et d'un ton plus foible en dessous; elles ont de plus toutes leurs tiges blanches dans la totalité de leur longueur. Le bec est d’un noir foncé, ainsi que les pieds et les ongles. Cette belle espèce appartient, à ce qu'on m'a assuré, auxiles de la mer du Sud. De quatre individus que j'ai vus, deux avoient la barre de l'aile blanche au lieu d’être rouge; celles-ci seroient- elles des femelles? C'est ceque j'ignore, n'ayant eu à leur égard aucun renseignement quelconque, et n'ayant vu que les peaux rembourrées de ces oiseaux, Tome II. FH 58 HISTONRE N'APURLMIPE BE DEN DB EUR NEO ETC Ur. QE] L'orsrau que j'ai fait représenter planche 66, fig. 1, appartient indubitablement au genre proprement dit des pie-grièches ; mais j'ignore absolument son pays natal : je l'ai acheté à la vente du cabinet d'histoire naturelle de feu l'abbé Aubry; il faisoit partie de la riche collection de cet amateur, très-connu par son beau cabinet, l'un des plus nombreux de son tems. Cet oiseau portoit une étiquette attachée à l'un de ses pieds, sur laquelle on lisoit : « Pie-grièche des Indes; (et plus bas) elle vit d'insectes et de petits oiseaux qu’elle plume ou écorche avant de les dévorer; et quand elle a assouvi son appétit, elle accroche ce qui lui reste à une branche, pour le retrouver quand elle en a besoin. » D'après cette courte notice, il est clair que les mœurs de cette pie-grièche apprechent beaucoupde celles de l'espèceque j'ai décrite sous le nom de fiscal, et qui se trouve au Cap de Bonne-Espérance. Par l'habitude qu'a cet oiseau de pendre ou d’accrocher sa proie, j'ai cru pouvoir le désigner par le nom de Pendeur ; il est à peu près de la taille de la pie-grièche rousse. Il est caractérisé par deux bandes blanches, qui partent du coin de l'angle de la bouche, passent l’une au-dessus de l'œil et l’autre par dessous, en s'étendant ensuite toutes deux Do | ouute 2 anche 66. 55. ane: RS DTe SRE Dern ar PR RSS 72 c ) / ÿ 7) 3 ? DVI PDO _RÀ eree eule 2) CP? î L'ILE OC TICA LL |. l DÉUMEPYENN D'ETUMR: 59 le long des côtés du cou pour se joindre par en bas, et donnant à l'espace noir qu'elles encadrent, précisément la forme d'un trèfle coupé en deux parties égales, en suivant sa longueur. La gorge et le cou par devant sont noirs : cette couleur s'étend sur la poitrine, où elle se termine en pointe de mouchoir, jus- que vers le milieu du sternum. Le dessus de la tête, le cou par derrière, les scapulaires, et généralement tout le dos, sont d’un gris bleuâtre, qui s'éclaircit un peu vers le croupion et les couvertures supérieures de la queue. Toutes les pennes de l'aile sont noires; les premières sont liserées de gris blanchätre dans leurs barbes extérieures, et les six dernières seulement sont terminées de blanc. Les quatre plumes du milieu de la queue sont entièrement noires et d'égale grandeur; les autres, au nombre de quatre de chaque côté, sont trés-étagées et en partie blanches dans leur moitié extérieure et noirâtres dans l'intérieure; de manière pourtant que le blane occupe toujours plus d'espace à mesure que la plume se raccourcit davantage ; de facon que quand la queue est entièrement serrée, elle est toute noire en dessus, et par dessous elle paroît totalement blanche,avecune pointe noire que forme l'excédent des plumes du milieu, qui sont plus longues et débordent toutes les late- rales. Quand la queue est étalée, comme dans l’action du vol, elle a absolument la forme d’un fer de lance arrondi par le bout. Toutes les plumes de la partie inférieure du corps, tant celles du dessous des ailes que celles des flancs, du ventre et des couvertures du dessous de la queue, sont blanches. Le bec, les pieds et les ongles sont d’un noir de corne. N'ayant eu que la dépouille de cette pie-grièche, j'ignore quel étoit son sexe ; mais d’après les connoissances que m'a donné l'habitude de voir les oiseaux, je crois pouvoir assurer que l'individu doit être un mâle. 1500) 6o HISTOIRE NATURELLE DRE RO D SIS NE MAD N° GO FIG. 2, Crrre pie-crieche se trouve à l'île de Java, dans les environs de Batavia, d'où elle a été envoyée à M. Temminck, qui me l'a donnée. Elle est à peu près de la taille de notre pie-grièche rousse, avec laquelle il ne faut pas la confondre, malgré la couleur rousse d’une grande partie de son plumage; et l’on doit encore moins la regarder comme une simple variété de notre écorcheur, quoique Buffon nous assure que toutes les espèces de pie-grièches étrangères qui ont du roux dans leur plumage ne sont que des variétés de cet oiseau. On me dispen- sera sans doute de réfuter une pareille assertion, avancée avec d'autant plus d'inconséquence et de légèreté, qu'aucune expé- rience ne l’a fondée, et que loin de là, toutes les observations ont jusqu ici prouvé absolument le contraire. Le roux ferrugineux dominant sur le plumage de cette pie- grièche, je lui ai appliqué lenom de Rousseau. Si celui de pie- grièche rousse n’avoit pas déja été donné à un oiseau de ce genre, certainement 1l auroit plus convenu à cette espèce qu'à celle à qui on l'a appliqué, et qui n’a du roux foncé que sur la nuque et le dessus de la tête; au lieu que la pie-grièche de cet article atoute la partie supérieure de la tête, le derrière du cou, les scapulaires, le dos, le croupion et le dessus de la queue DU ROUSSEAU. 61 d'un roux ardent. Son front est ceint d’un bandeau blanc, qui, de chaque côté, se joint à une ligne blanche qui, après avoir couronné l'œil, redescend ensuite sur les côtés du cou et borde une longue tache noire qui, partant du coin de la bouche, entoure l'œil en s’avançant sur le cou. Le bord de l’aîle, à l'endroit où elle s'applique au corps, est blanchâtre; ses petites couvertures sont rousses; ses grandes ont de plus une bordure d'un roux clair, qui circonscrit également toutes les moyennes pennes de l’aîle dont le fond est noirâtre, ainsi que les direc- trices ou grandes pennes auxquelles on remarque aussi unlèger bord roussâtre. La gorge, le devant du cou, et généralement tout le dessous du corps, sont d’un blanc plus ou moins sali de roux clair, lequel teint cependant plus fortement les côtés de la poitrine qui répondent aux poignets des aîles, ainsi que les flancs, le bas des jambes et le milieu du ventre. La queue est un peu plus étagée que celle de la pie-grièche rousse et de l'écorcheur, et par conséquenñt moins que celle des autres pie-grièches dont nous venons de parler. Comme il n'y a que les deux plumes du milieu de la queue et les barbes extérieures des latérales qui soient rousses, pendant qu'intérieurement et par dessous elles sont d'un gris blanc roussäâtre, tout le dessous de la queue est de cette dernière teinte. Le bec est d'une couleur plombée, ainsi que les pieds et les ongles. Le défaut de renseignemens nous met dans le cas de ne pou- voir rien dire de plus sur cette pie-grièche ; nous attendrons que des naturalistes instruits nous donnent quelques connois- sances sur ses mœurs , sa manière de se nourir, sa ponte, etc. : détails sur lesquels se taisent généralement tous les voyageurs. De tous les oiseaux étrangers qui se trouvent décrits dans les 62 HISTOIRE NATURELLE ouvrages des ornithologistes sous le nom de pie-grièches , il en est beaucoup d'espèces sur lesquelles ils se sont trompés, et qui n'appartiennent absolument point à ce genre : l'erreur est venue souvent , à la vérité, par la faute du premier qui a décrit lespece,iet qui, s'étant trompé par ignorance, a également trompé ceux qui l'ont copié. Si chaque or Dibole ee n'avoit décrit que les oiseaux qu'il a vus et ceux qu'il connoît, sans mêler dans son ouvrage les descriptions qu'il a trouvées chez d'autres auteurs, et qu'il a toujours plus où moins changées pour les décrire à sa manière, cette partie de l’histoire naturelle ne seroit pas un vrai chaos indéchiffrable où le même oiseau se trouve décrit, par le même auteur, tantôt dans un genre et puis plus loin dans un autre.'Tl'el est celui décrit par Albin sous le nom de rouge-queue du Bengale, et dont il donne une figure fort reconnoissable, quoique mauvaise, comme le sont généra- lement toutes celles de son ouvrage. (Voyez Albin, tom. IF, pag. 24, fig. 56.) Brisson, dans son ornithologie, fait de cet oiseau sa pie-griè- che brune du Bengale, et plus loin il le décrit encore, sans s'en appercevoir, sous le nom de merle huppéde la Chine. J'ai cette espèce, qui est très-commune dans les cabinets de la Hollande, et qu'on trouve dans presque toute l'Inde. Lesplumes de sa tête sont en effet un peu alongées et forment une espèce de huppe, quand elles sont relevées; au reste j'assure que cet oiseau n’est point une pie-grièche, mais bien effectivement un merle. La pie-grièche jeune de Cayenne, du même auteur, n'est pas une pie-grièche non plus. Buffon décrit aussi le même oiseau, en lui appliquant le nom de bécarde à ventre jaune, et en donne la figure sous celui de pie-grièche à ventre jaune de Cayenne (1), pendant qu'un peu plus loin il fait encore (1) Voyez les planches enluminées de Buffon, N°. 296. D'UNPE OU. SISTE ANT 63 de la même espèce un geai à ventre jaune de Cayenne (1). Les deux oiseaux décrits par Brisson, l'un sous la dénomination de pie-grièche grise de Cayenne, et l’autre qui n’est quesa femelle, sous celle de pie-crièche tachetée de Cayenne, ne sont absolu- ment pas du genre des pie-grièches. Buffon fait également mention des deux mêmes oiseaux sous le nom de bécardes, et en donne deuxfigures très-mal colorées, sous les mêmes noms que Brisson leur a appliqués (2). Quant au vanga ou écorcheur de Madagascar, décrit et figuré par Brisson, tom. IE, planche 19, fig. 1, cet oiseau est vraiment une pie-grièche, et même l'espèce la plus grande que nous connoissions encore;et c'est très-gratuitement que Buffon l'a réuni avec ses bécardes. Si le lecteur, en consultant la plan- che enluminée de Buffon, N°. 228, qui représente aussi cette prétendue bécarde, sous le nom d’écorcheur de Madagascar, veut la confronter ensuite avec celles qui représentent les deux autres bécardes de Buffon, il s’'appercevra facilement que ces trois espèces n'ont aucun trait d'analogie ou de ressemblance, et appartiennent absolument à trois genres différens; mais en comparant ensemble, comme je l'ai fait, les oiseaux eux-mêmes en nature, on sera bien plus frappé des traits de dissemblance et des caractères de la conformation par lesquels ces oiseaux s’éloignent les uns des autres. Il est encore très-visible pour ceux qui connoissent les oiseaux et dont le coup-d'œil s’est exercé à les bien examiner, que les trois espèces décrites par Brisson, l’une sous le nom de pie-grièche de Manille, l’autre sous celui de pie-grièche rousse de Madagascar, et le dernier enfin sous celui de pie-grièche verte de Madagascar, ne sont (1) Voyez les planches enluminées de Buffon, N°. 249. (2) Ibid. N°. 304 et 377. 64 HISTOIRE NATURELLE réellement point des pie-grièches. On peut voir les figures coloriées de cesoiseaux dansles planches enluminées deBuffon, N°. 9, fig. 1, N°. 298, fig. 2, et le N°. 374, lequel les a décrit aussi ; le premier, sous le nom de langraien; le second, sous le nom de schet-bé, et le troisième sous celui de tcha-chert-bé ; noms qu'ils portent dans leur pays natal, et qu'il est bon de leur conserver. Buffon a douté, avec raison, tout en rangeant ces oiseaux parmi les pie-grièches, qu'ils appartinssent en effet à ce genre, et en cela il ne s’est pas trompé. Nous allons maintenant passer aux pie-grièches de la seconde de nos divisions. SECONDE oute 11. ! Plate s. L «1 ‘€ e 2 (CU cPossatd) C/eulp . e e DSL ro) CES L ) Z', Z QE ZEN O: Tome 0 LCA 7e c (COR nn 2 Z C 7, : 5 ? 7 De L up rue de fauglis. É D Ur BA CB A KAKT. 65 SE CON DE, DIV IS T'ON DES PRE CRI TIGE ES; LE BA CD ARR ANI MN 067 LEONE EEE Lzrs pie-grièches de la seconde section se distinguent de celles de la première bien plus encore par leurs habitudes et leurs ports que par leurs formes; cependant on remarquera dans les divers traits de leur conformation extérieure plusieurs caractères très-différens qu'il est facile de saisir au premier coup-d’œil. Elles ont le bec plus alongé et moins courbé; les tarses sont également plus longs,etleurs ailes moins amples et plus courtes; les premières grandes pennes, s'étendant moins en pointe, rendent enfin l'aile plus arrondie par le bout, aussi volentelles généralement moins bien. Ces caractères de la coupe de l'aile influant beaucoup sur la manière de voler des oiseaux, ceux-ci ne se rencontrent que très-rarement sur le sommet des arbres, Tome 11. I 66 HISTOLR EN AAU RYEMELRE où nousavons fait remarquer que les pie-grièches de la premiére section se perchoient toujours de préférence; il est même des espèces dans cette seconde division, que la nature exclut entie- rement de dessus les arbres élevés; elles cherchent leur nour- riture parmi les buissons bas ettouffus, dans le centre desquels elles se cachent soigneusement, et vivent principalement de chenilles, de vers et de toutes sortes d'insectes. La foiblesse de leurs ailes leur interdit toute espèce de chasse au vol, aussi quand il leur arrive de se saisir de quelques oiseaux, cene sont que des jeunes ou des individus blessés ou affoiblis par quelque accident. Enfin, jusque dans leur port et leurs attitudes on remarque de la différence entre ces pie-grièches et celles dont nous avons déja parlé dans notre première division, qui s'approchant davantage par leurs mœurs des oiseaux de proie, en ont pris l'attitude droite et presque perpendiculaire quand elles sont perchées; et comme eux, habitent constamment les mêmes cantons où elles se montrent à découvert pendant des heures entières, posées sur les mêmes branches, et où l’on est encore certain de les retrouver chaque jour; tandis que les pie- grièches de la seconde division se montrent très-rarement ; toujours cachées dans les buissons touffus, on ignoreroit leur présence si elles ne se trahissoient pas par leur ramage qui sans cesse les décèle. Etant toujours en mouvement et ne se tenant jamais tranquilles à la même place pour guetter leur proie, leur attitude est plus inclinée, pendant qu'elle doit nécessairement être droite et plus perpendiculaire chez les oiseaux qui ont l'habitude de se tenir perchés longtems sans bouger, et cela par rapport à l'à-plomb qu'ils sont obligés de prendre pour ne pas fatiguer leurs pieds par le poids du corps qui, dans tous les oiseaux, est bien plus considérable du côté de la poitrine que de celui du ventre. Enfin, nous avons vu que les pie-grièches de la première section se mettent en embuscade sur le haut des D'EUX B'A CEBEAKRIE ET 67 arbres, d'où elles guettent leur proie, et se jettent sur tout ce qui passe à leur portée; tandis que celles-ci sont continuellement en recherche et fouillent très-soigreusement tous les buissons d’un immense terrain, qu'elles parcourent régulièrement sans se fixer à une place choisie, et pas même dans un canton exclusif, à moins que ce ne soit au moment de la ponteetdel'incubation; tems où généralement tous les oiseaux se choisissent un lieu commode dont ils ne s'éloignent pas beaucoup, et où du moins ils reviennent plusieurs fois par jour. La pie-oriéche d'Afrique à laquelle nous avons donné le nom de Bacbakiri est, de toutes les pie-grièches d'Afrique, de la seconde division, celle qui paroït le plus se rapprocher, par sa forme, de celles de la première. Cette même espèce est celle que Brisson a décrite sous le nom de merle à collier du Cap de Bonne-Espérance, et dont il donne la figure dans le N°. 30, fig. 1, de son ornithologie, tome IT. Edwards a beaucoup mieux reconnu cet oiseau dont il donne aussi le portrait (1), et qu'il place, avec juste raison, parmi les pie-grièches; mais il s’est trompé sur son pays. Du moins s'il habite aussi l'ile de Ceylan, il est faux qu'il ne se trouve que là; caril est, au contraire, très- commun au Cap de Bonne-Espérance. Buffon, ou du moins Montbeïllard (car c’est lui qui dans l'ouvrage de Buffon a décrit cet oiseau) ayant remarqué que les deux naturalistes que nous venons de citer n’étoient point du même avis sur le genre de cet oiseau, et n ayant pu les mettre d'accord, s'est contenté de faire de la même espèce un plastron noir de Ceylan; nom quil lui donne dans sa description, pendant que dans ses planches, (1) Voyez les planches coloriées de l’Æisroire des oiseaux rares, par Edwards, No-527: 1 68 HIS TOME N\MUREPERE enluminéesilest figuré, N°. 272, sous le nom de merle à collier du Cap de Bonne-Espérance. Cet oiseau est très-commun sur toute la pointe méridionale de l'Afrique, et se trouve généralement par tout dans l’intérieur des terres de la Colonie hollandoise. Je luiai conservé le nom de Bacbakiri par lequel il est désigné et connu au Cap; on lui donne aussi dans différens cantons ceux de entje-bibi, et de ouit-couit,tous deux formés,comme le premier, par onomatopé. On lui applique encore assez ordinairement le nom de geele canart-byter, qui signifie mordeur de canaris, jaune; parce que au Cap on nomme canari presque tous les petits oiseaux gra- nivores, et par la même raison mordeurs de canaris les oiseaux quileur font la guerre. On lui donne encore je ne sais pourquoi, le nom d’eyland-vogel (oiseau d’île); c’est peut-être parce qu'il est en effet très-commun dans toutes les dunes et sur les bords de la mer où la marée haute forme de petits espaces entourés d'eau. Le Bacbakiri est très-multiplié dans toutes les terres; on le trouve répandu le long de la côte de l’est par tout jusque chez les Caffres; je lai aussi rencontré souvent dans l’intérieur des : terres, et dans beaucoup d’endroits à la côte de l'ouest. On en voit en abondance dans le Swart-Land sur-tout; il est enfin très-commun jusque dans les jardins de la ville du Cap. Cette pie-grièche, ainsi que toutes les autres espèces de ce genre, est très-babillarde; son ramage qu'on rendra assez bien par ces mots bac-ba-ki-ri, est très-facile à imiter, en le pronon- cant comme je le note ici (1); mais on contrefera bien plus a ———————û——û————— PDP (2) Dés Buc-ba-ki-ri. Bac-ba-ki ri. D'UP'P'A CPE EC EL 69 naturellement son chant, si on peut parvenir à l’exprimer par un sifflement. J'observerai de plus que les deux premières syllabes doivent être coupées d'une manière tres-distincte, chacune par un coup de langue , et prononcées d’un ton grave et.sonore, pendant que les deux dernières, bien plus aigues, s lient ensemble. Je remarquerai encore que fort souvent la première des deux dernières syllabes monte au fa, comme il arrive aussi quelquefois qu'elle ne va qu'à l'ut; mais dans tous ces cas la dernière est plus basse, et ne diffère de celle qui la précède que d’un semi ton. Aussitôt que le mâle entonne ce chant d'appel, qui n’appartient qu'à lui seul, la femelle, qui n'est jamais très-loin de lui, répond aussitôt, sur un ton moins élevé, cou-it, cou-it (1). Si on s'exerce à bien rendre ces diffé- rens cris, rien n'est plus facile que de faire venir à volonté ces oiseaux très-près de soi. J'étois parvenu à si bien les imiter, que je pouvois à mon gré faire approcher fort près de moi le mâle ou la femelle, etquand il m'arrivoit de tuer un mâle, si quelques minutes après je le contrefaisois, j étois sûr d'avoir aussi sa compagne; et la même chose avoit lieu dans le cas contraire. Au reste, ces pie-grièches sont peu farouches, etse laissent facilement approcher à la portée du fusil; elles se nourissent principalement de vers, de chenilles, d'araignées et de toutes sortes d'insectes: mais comme elles ne volent pas fort bien, par rapport à la petitesse de leurs aîles, elles ne se jettent que sur les jeunes oiseaux dont le vol n’est point encore assuré. J'ai pourtant remarqué quelles étoient d’un naturel sanguinaire et cruel ; enfermées dans une volière, elles mettent tout à mort; () Cou-it. Cou-it; Ru LS 2 70 AN STOTERE CN ACIEUMRMERENE du moins c’est ce que nous éprouvämes au Cap avec le fiscal Boers, un jour qu'étant l'un et l’autre absens, ses nègres prirent un Bacbakiri mâle qu'ils lichèrent dans une grande volière remplie d'autres oiseaux. À notre retour ces nègres, croyant nous apprendre une nouvelle qui nous feroit grand plaisir, nous annoncèrent la belle capturequ'ils avoient faite. A la description qu'ilsnous firent, je reconnus aisément l'oiseau dontils parloient, et me doutant aussitôt du ravage que devoit avoir commis ce nouveau prisonnier, nous nous transportämes bien vite à la volière, où nous appercümes le plus grand déoât, et trouvâmes tout dans l'effroi. Déja treize oiseaux avoientété tués et gissoient sur la terre; beaucoup d'autres étoient blessés, et tous les autres épouvantés à l'aspect de leur ennemi, s’étoient réfugiés dans tous les coins et tous les trous où ils avoient pu se fourrer, et où nous les vimes entassés les uns sur les autres. Ayant mis à mort l'oiseau destructeur, nous rétablimes le calme dans la volière, en recommandant toutefois aux nègres de bien se garder d'y lâcher par la suite des oiseaux avant que nous ne les eussions vus. Au reste, cette espèce, ainsi que celle que j'ai décrite sous le nom de fiscal, rodoit continuellement autour de la volière, et cherchoit à surprendre quelques oiseaux au mo- ment où ils s’'accrochoient avec leurs griffes après les treillages de laiton qui la garnissoient tout autour. Le Bacbakiri est, sans contredit, un des plus beaux oiseaux du genre des pie-grièches; celle enfin dont le plumage est le plus agréablement peint. Du gris, nué d’une légère teinte olivä- tre, occupe le dessus de la tête, le haut du derrière et des côtés du cou; un sourcil jaune qui commence aux narines, couronne l'œil; deux cordons noirs, dont chacun des bouts prend nais- sance au coin de la bouche et longe les côtés du cou, soutiennent un large plastron de la même couleur, qui, tombant sur la D'UPTB AC PB ACTU Gi poitrine, l'orne très-agréablement. L'espace compris entre les cordons et la plaque, ou autrement, la gorge et le devant du cou sont d’un beau jaune de jonquille, ainsi que tout le reste du plumage inférieur du corps jusqu'aux recouvremens du dessous de la queue. Le manteau, les scapulaires et générale- ment tous les recouvremens des aîles et du croupion sont d’un verd olivâtre, égayé par une riche teinte jaunâtre. Le bout des premières pennes de laile est d’un brun noirâtre; du reste, elles sont d’un verd olive dans leurs barbes extérieures, et d’un noir lavé intérieurement. La queue est étagée à peu prés de la même manière que celle de notre pie-grièche grise d'Europe ; c'est-à-dire que lorsqu'elle est étalée, son extrémité forme une portion de cercle et non un fer de lance comme celle du fiscal ou celle de notre pie d'Europe. Les deux plumes du milieu sont du méme verd que le dessus du corps; les autres sont en partie noires et du reste jaunes à leur pointe; mais le jaune occupe toujours plus d'espace à mesure que la plume se raccourcit; de sorte que c’est la dernière de chaque côté qui est la plus entiè- rement de cette couleur. Le bec et les ongles sont noirs, les pieds bruns. Les yeux ont une teinte d’un brun rougeûtre, Le Bacbakiri mâle est à peu près de la longueur de notre merle, mais il est cependant moins gros de corps. La femelle est un peu plus petite, et ressemble du reste absolument au mâle, à une légère teinte près, qu'elle a de moins foncée dans ses couleurs. Ainsi Montheillard s'est trompé à l'égard de la femelle de cet oiseau, qu'il assure n'avoir pas les cordons et la plaque noire du mâle. Quant à la figure N°. 358 des planches enluminées de Buffon, à laquelle il renvoie comme ressemblant beaucoup à cette femelle, il faut convenir qu'elle a donc été bien mal coloriée, car elle n’a pas le moindre rapport avec la description qu'il donne de cette prétendue femelle, qui, 72 HISTOIRE NATURELLE au surplus, est bien effectivement celle du Bacbakiri dans son jeune âge. Dans cet état, non-seulement le mâle et la femelle n’ont point le plastron noir et ses deux soutiens, mais il leur manque également ce joli gris olivätre de la tête et le beau jaune du corps et des sourcils; car tout le dessus de la tête, le cou par derrière, le manteau, les recouvremens des aîles, enfin tout le plumage supérieur est d’un vert olive; la gorge est blanchätre; le devant du cou, la poitrine, les flancs, le ventre et les couver- tures du dessous de la queue sont d’un jaune gris tirant sur l'olivätre. Le jaune de la queue est aussi plus terne. Enfin, je renvoie le lecteur à la planche #n-4°. cotée N°. 67, où je donne les portraits du mâle et d'un jeune de cette espèce. Le mâle et la femelle Bacbakiri se séparent rarement; ils nichent dans les buissons touflus; la ponte est de quatre ou cinq œufs qu'ils couvent tour à tour. Lorsque les petits sont éclos, ils suivent fort longtems le père et la mère qui en ont un soin particulier; ils forment alors une petite société dont les individus, vivant ensemble dans un accord parfait, ne s'isolent que lorsqu'ils peuvent se passer des secours du père et de la mere; et ce n’est enfin qu'au printems suivant, après avoir mué deux fois, qu'ils prennent leur beau plumage. Les Namaquois donnent à cette pie-grièche le nom d’hoëp, précédé d’un fort clappement de langue; et les Hottentots colons la désignent par le nom d'orép. ouLe” M . € #2 Lfrace OP) A? ) e ne los a 2 ? NZ DAC 7-1 e He 14 2. US Femelle 2 € De Luptinete de Luglois 2 à ? VE hessau) dcule . Le DIE CE ONU "BE TONU SI (ei! 1 E Be O U.B O. Ur iNan68t PGO ES 2" L'rsricr de pie-grièche dont il est question ici, et que j ai nommée, comme la précédente, par onomatopée, a déja, à ce que je présume, été décrite par Montbeillard, sous le nom de merle noir et blanc d’Abyssinie (voyez à l’article des merles étrangers, tome VI de l'Histoire des oiseaux de Buffon, édition in-12, p. 111, N°. 43). Cette description convient, à bien des égards, à l'oiseau dont il s'agit; cependant il n’est pas question du roux du ventre et de celui du dessous de la queue, qu'on remarque dans l'oiseau dont nous parlons, qui d’ailleurs n'est pas un merle. Un caractère dont cet auteur fait mention, en parlant de son merle d'Abyssinie, et qui me fait douter si en effet cet oiseau est de la même espèce que le Boubou du Cap de Bonne-Espérance, c'est qu'au sujet de la queue de son oiseau, il prétend qu'il l'a ronde et carrée par le bout. J'avouerai franchement que je ne connois point cette forme de queue carrée et ronde en même tems par le bout; car si elle est carrée, toutes les plumes sont d'égale longueur; et si elle est ronde, elles sont au contraire étagées comme l'oiseau dont je parle a véritablement la queue faite. Du reste, le ramage de ma pie-grièche se rapporte assez à ce u'il nous dit de celui de son merle, car elle chante sans cesse 2 Tome IT. K 7 A ETSTOTRE NANPU REL LE bou-bou—bou-bou; ce qui imite assez bien le cou-cou, ou, si l’on veut, une horloge de bois : il est vrai que la femelle, qui est toujours près de son mâle, répond aussitôt par un autre cri qu'on exprime très-bien par cou; et elle lui répond si à propos que trés-longtems j'ai cru que c’étoit le mâle seul qui chantoit ces syllabes bou-bou-coui. Si l'oiseau qu'a décrit Montbeillard est le même que le mien, il faut donc que celui qui l’a observé ait rencontré le mâle seul, et qu'il n'ait pas connu le genre de sa nourriture, car il ne se nourrit pas de fruits et d’herbages, comme nos merles, mais d'insectes, et se jette quelquefois sur les petits oiseaux, comme le bacbakiri; ce qu'ont bien observé les colons du Cap, quinomment cet oiseau swarte canari byter (mordeur de canaris, noir), ou bonte canari byter (mordeur de canaris, tacheté ). L'incertitude où nous sommes si le Boubou est de la même espèce que l'oiseau décrit à l’article 43 des merles de Mont- beillard, prouve d’une manière indubitable, qu’il est essentiel de ne rien omettre dans une description, et démontre combien la figure de l'animal que l’on veut faire connoitre est nécessaire pour ne pas confondre les différentes espèces, sur-tout quand elles ne sont pas décrites avec la plus grande exactitude et d’une manière très-détaillée. Il est vrai qu'une description sera d’au- tant plus ennuyeuse à lire qu'elle entrera dans de plus grands détails sur les couleurs et les nuances du plumage d'un oiseau; mais je répondrai à cela qu'un ouvrage dans ce genre amusera toujours assez celui qui veut s'instruire, et qu'une description d'objets d'histoire naturelle, n'a pour but que l'instruction et non l’'amusement du lecteur. Et malgré le ridicule que Buffon a souvent voulu jeter sur cette manière minutieuse de décrire, suivant lui, il est certain que l'histoire naturelle devra beau- coup aux grands soins qu'a pris Brisson, en dépeignant d'une DE LB OU" B'O'"U: 79 manière aussi détaillée qu'il l'a fait, tous les oiseaux qu'il a donnés : manière qui du moins n'induit point en erreur et le fait consulter avec fruit lorsqu'on cherche si une espèce est déja décrite ou non. Ce qui est très-difficile, pour ne pas dire impossible, lorsqu'on consulte plusieurs autres écrivains, et notamment ceux qui croient avoir décrit un animal en le désignant par une phrase qui souvent peut s'appliquer et convenir à plusieurs espèces en mème tems. Au reste, pour avoir décrit les oiseaux aussi fidellement que l’a fait Brisson, 1l faut certainement les avoir bien vus et bien examinés dans le plus grand détail; c'est ce dont on est bien convaincu lorsqu'on lit ses descriptions et qu’on les confronte avec les oiseaux dont il fait mention, et nous avons déja, dans plus d’une occasion, prouvé le contraire en citant d’autres ornithologistes. Le Boubou est de la taille de notre petite grive; il se recon- noîtra facilement par son vêtement noir dans toute la partie supérieure du corps, y compris les aîles et la queue. La gorge est d’un blanc pur;le devant du cou et la poitrine d’un blanc nué de fauve. Au dessous de la poitrine le blanc est sali d'une plus forte teinte fauve, plus foncée sur les flancs, le ventre et les couvertures du dessous de la queue. Les ailes sont trés-petites, encore moins étendues que celles du bachakiri, car elles dépas- sent à peine la naissance de la queue. Toutes leurs pennes sont d'un noir mat, sur lesquelles tranche une barre d’un blanc de neige qui coupe chacune des ailes, en la suivant dans toute sa longueur, et qui est formée par l'extrémité d'une partie de leurs couvertures moyennes et grandes, et par les bordures blanches de deux pennes voisines du corps, quise trouvent dans la direc- tion droite de ces couvertures. La queue est absolumentnoire et très-peu étagée; les yeux sont d'un brun foncé; le bec est noir; les pieds et les ongles sont d'un noir brunûtre. K 2 76 HISTOIRE NATURELLE La femelle est un peu plus petite que le mâle; tout ce que celui-ci a noir, elle l’a brunâtre, et tout le dessous du corps est presqu'entièrement fauve, à l'exception de la gorge et de la poitrine qui sont d’un blanc légèrement sali de roux. La barre qui traverse l'aile est aussi presqu'en entier roussâtre, excepté dans la partie des couvertures où le blanc est pur. Dans le jeune âge la femelle n’a pas un atôme de blanc, et plusieurs des couvertures des aîles sont bordées de roux ferru- gineux. Dans le même état, on prendroit le mâle pour une femelle tant il lui ressemble alors par les nuancesdeses couleurs. Cet oiseau est très-abondant dans toute la partie sud de l'Afrique, depuis le Cap de Bonne-Espérance jusque dans la Caffrerie, le long de la côte de l’est et dans tous les endroits où j'ai pénétré de ce côté; mais je ne l’ai jamais vu chez les Grands Namaquois, ni dans aucun autre canton de ceux que j'ai tra- versés dans mon second voyage. Au reste, on peut très-bien le reconnoître, quoiqu'on ne le voie pas, d’après son cri toujours suivi de celui de sa femelle, qui ne se fait jamais entendre si le mâle ne l’interroge. Mais, comme je l'ai fait observer, celui-ci, caché dans les broussailles épaisses, crie d'un ton interrogatif bou-bou; la femelle soumise lui répond incessamment d'une voix féminine cou; et dans ce colloque le bou-bou du mâle et le cou-i de la femelle se suivent de si près qu'on jureroit, quand ils sont dans le même buisson, que c’est un seul et même cri, qui en finissant s'octavie, ou que le même oiseau fait la demande et la réponse sur ces notes (1). Bou-bou- cou-i. D) ÜU, ONU /B TO 'U’ 77 Cette espèce niche dans les broussailles du plus difficile accès et parmi les épines. La ponte est de quatre ou cinq œufs; les petits sont couverts, quelques jours après leur naissance, d’un duvet roussâtre, mais sortent nuds de l’œuf, comme le sont généralement tous les oiseaux qui doivent séjourner dans le nid après qu'ils sont éclos; tandis que toutes les espèces dont le naturel est de quitter le berceau aussitôt qu'elles sont hors de la coquille, naissent avec un duvet très-fourré pour les pré- server. els sont en général tous les gallinacés, les canards, les faisans, les cailles, les perdrix, l'autruche, le casoar, les pluviers, les outardes, les cannes pétières, etc., oiseaux dont tous les jeunes non-seulement courent en naissant, mais mangent seuls et sont en état de distinguer ce qui est propre à leur servir de nourriture. 7 HISTOIRE NATURELLE LE CONOLEK. Ne; FIG. 1 ET 2. J # laisse à cet oiseau lenom de Gonolek qu'il porte au Sénégal, d’où Adanson nous l’a apporté le premier, en nous apprenant qu'il signifie dans la langue des nègres de cette partie de l'Afri- que, mangeur d'insectes. Brisson a décrit la mème espècesous le nom de pie-grièche rousse du Sénégal (1); maisil paroit que l'individu qui a servi à la description qu'il en a donnée étoit dégradé, car ces oiseaux n'ont point, comme il le dit, le dessus de la tête fauve, mais bien d'un beau jaune nuancé d'une légère teinte verdâtre; du moins le mâle a cette couleur, et la femelle a la même partie d'un vert d'olive. Buffon a également décrit cette espèce sous son nom africain de Gonolek, et en donne une figure trés-reconnoissable dans le N°. 56 de ses planches enluminées. J'ai retrouvé vers les confins du pays des Grands Namaquois ces mêmes oiseaux que J'ai, à mon retour, comparés avec plu- sieurs individus de la même espèce qui avoient été apportés du Sénégal par Geoffroi de Villeneuve à qui nous devons plusieurs belles espèces nouvelles de ces contrées, et je n'ai remarqué (1) Ornithologie de Brisson, tome 11, page 185, planche 17, fig. 2. . fa @ 7 « 72 (Ces f. ebucchl Roruot) BP 2 , : 1 CrobR V7 7. DL : : o 7, Ce Le lup tuerie de Langlois. Le € 22, CA D ne louche 60 M ain cheulr D'OFG ON OEM 79 aucune différence ni dans leurs couleurs respectives, ni dans leurs tailles. Le Gonolek est aussi long mais un peu moins épais de taille que la pie-grièche de l’article précédent, à laquelle j'ai donné le nom de boubou. Il est aisé, au premier coup-d'œil, de voir que ces deux espèces ont absolument les mémes caractères, et qu'elles sont du même genre; je remarquerai pour être plus exact, que le bec du Gonolek est cependant plus mince, et que les pennes de ses ailes s’alongent un peu plus, aussi vole-t-il moins mal. Le dessus de la tête, comme je l'ai déja fait observer, est chez le mâle d'un beau jaune très-lésèrement nué d’une teinte olivâtre; cette même couleur s'étend en pointe sur le derrière du cou et descend jusque sur le dos. Les joues, les côtés du cou, les scapulaires, le dos, le croupion, les ailes et la queue sont entièrement d'un noir pur sans reflet d'aucune autre cou- leur. La gorge est d'un rouge nuancé de jaune, et tout le reste du plumage, jusqu'au ventre, est d'un rouge vif des plus éclatans. Les plumes des jambes, du bas-ventre, et celles qui recouvrent le dessous de la queue sont fauves. La queue est très-peu étagée, et par conséquent s’arrondit par le bout. Le bec est noir, les pieds et les ongles sont bruns; les yeux ontune couleur qui approche du brun noisette. La femelle est un peu plus petite que le mâle; le dessus de sa tête seulement est d'un verd d'olive terni, et son rouge n’est pas aussi Vif. Je suis resté si peu de jours dans le canton où j'ai rencontré cette espèce, que je n’ai pu faire aucune observation suivie sur ses mœurs; d’ailleurs nous n'y avons tué que trois individus, dont deux mâles et une femelle; et ce fut mon brave Klaas qui 80 HISTOIRE NATURELLE le premier m'apporta un mâle et une femelle qu’il avoit tués du même coup. Nous étant transportés le lendemain dans le même canton, nous vimes encoreune autre couple de lamême espèce, dont je tuai le mâle seul, sans pouvoir joindre la femelle. Nous en cherchâmes d’autres pendant les deux jours suivans que nous restâmes dans l'endroit, mais nous n’en revimes plus. Je n'ai point entendu, ni Klaas non plus, si ces oiseaux avoient un cri ou un chant quelconque; il est vrai que la saison des amours étant passée quand nous les avons trouvés, ceux-ci se taisent peut-étre alors comme font généralement tous les autres oiseaux. Je n'ai trouvé dans l'estomac des trois individus que j'ai préparés que des débris d'insectes. LE Li: AO Cu AE PNR NN A TE : *« D Al ? € , Œlauche +0. = 5 À DZ nb AR Biuat) LY (V2 Ress O2. ques 72 are Le. 772 ae Di. 2 72 2e FE D /2 de de Tupuueue de 4 AU loc? D'UN TAC AIG EC A: 1 PEL AC HA CR A N°70, Fic. 1 ete, Ds ailes encore plus petites que dans les espèces précédentes, composées de pennes déliées, foibles et courtes, sur-tout dans la partie antérieure que vulgairement on nomme le fouet de l’äîle, excluent, pour ainsi dire, cette pie-grièche de la portion de l’atmosphère dans laquelle volent, en général, tous les oiseaux; des sommets des arbres où ils se perchent et des forêts dont ils fréquentent les toits entrelacés de feuillages. Confinée auprès des racines de ces arbres sur lesquels les autres prennent leur essor, celle-ci rase seulement la terre par un vol lent, court et pénible, à peu près comme un oiseau à qui on auroit rogné les ailes; les siennes, en effet, au lieu de s'étendre en pointe par le bout sont presque carrées dans cette partie, et s'étendent à peine, lorsqu'elles sont pliées, jusqu’à la naissance de la queue:1l en résulte en apparence une confor- mation vicieuse par laquelle cette espèce sort en quelque sorte du genre où je l'ai placée, en même tems qu'elle en diffère aussi par un bec plus alongé encore que celui du bacbakiri, et qui est plus aminci à sa pointe. En effet cet oiseau, par la nécessité physique de sa manière d'être, est peut-être moins pie-grièche encore que l'oiseau précédent qui, ainsi que nous Yavons fait observer, a déja le bec plus foible que les espèces dont nous avons fait mention dans les deux premiers articles Tome 11. ; 62 LS CORRE VNENIDOURMENENMRE des pie-grièches de la seconde division. Ainsi celle-ci sera, si l'on veut, le dernier chaïnon par lequel la nature passe des pie-srièches à un autre genre voisin. Il en est de même des différens genres d'oiseaux qui tous renfermant plus ou moins d'espèces dont les caractères physiques ou moraux paroiïssent éloigner d'elles les unes en même tems qu'ils en rapprochent les autres, forment autant d’anneaux qui, les liant à d’autres genres voisins, participent également des premiers et des derniers, tant par les rapports de leur conformation extérieure que par ceux de leurs habitudes et de leur manière de vivre. La foiblesse des aîles de cette pie-grièche lui interdit absolu- ment toute espèce de chasse au vol, aussi se contente-t-elle de chercher sur les arbrisseaux et parmi les plantes basses, les chenilles , les araignées et les insectes mous qui ne peuvent fuir en s’envolant, comme le font les menthes et les sauterelles dont la plus grande partie sait bien lui échapper. Ceci montre, comme tant d’autres exemples ; combien Îles habitudes dépendent desformes, et comment aussi la nature les modifie lorsqu'elle veut diversifier les mœurs; quand, par exemple, elle a besoin d'oiseaux de proie pour la plus basse partie de l'air et la surface de la terre. L’autruche, le casoar, le touyou, etc., destinés seulement à courir sur la terre sans la quitter jamais, ont tous les ailes dépourvues de pennes propres à les soutenir dans l'air, pendant que leurs pieds robustes et massifs , leur servent si bien dans les longues marches qu'ils sont obligés de faire. Il en est de même des manchots , qui, formés pour habiter les eaux, n’ont, au lieu d'ailes, non-seu- lement que des espèces de nageoires, mais dont les pieds sont encore tellement posés par derrière, qu'ils ne peuvent marcher quatre pas à terre sans tomber à plat sur le ventre. Nous voyons | 4 on + D'UX TG AG R A 83 par là que la prévoyante et sage nature, lorsqu'elle organisa les différens êtres par rapport aux besoins qu'elle en avoit pour la perfection de son ouvrage, tout en leur accordant à chacun en particulier les facultés nécessaires à ses grandes vues, a cepen- dant eu la prudence de leur retrancher en même tems ce qui auroit pu les écarter des fonctions auxquelles ïls étoient destinés. Grande et sublime leçon pour ceux qui parmi nous se mêlent de gouverner leurs semblables! Il ne suffit pas de faire des lois contre les méchans, mais il faut encore leur ôter jusqu'aux moyens de nuire. Le Tchagra est de la taille à peu près de notre pie-grièche grise d'Europe; sa queue n'étant qu'un peu étagée, elle est simplement arrondie par le bout. La partie supérieure de la tête est d’un noir bruni légèrement teint d'olivâtre; le derrière du cou et le dessus du corps sont d’un brun tanné, ainsi que les scapulaires; la gorge est blanchâtre. Une bande blanche prend naissance au coin de l'œil, et se prolonge au-delà avec une ligne noire par dessous qui lui est parallèle. Le cou par devant et tout le dessous du corps sont cendrés; les grandes couvertures des ailes et les bords extérieurs des pennes sont d'un roux ferrugineux; le reste en est brun avec une teinte verdätre par dessus; en dessous elles sont toutes cendrées. Les deux plumes du milieu de la queue sont d'un gris-brun rayé imperceptiblement d'une couleur plus foncée; les autres sont noirâtres ; toutes sont terminées de blanc. Le becest d'un noir de corne , ainsi que les pieds; l'iris est brun. Cet oïseau fréquente les endroits les plus touffus et les plus couverts; 1l seroit très-difficile à découvrir si son ramage ne le trahissoit sans cesse. Le mâle a un cri qui s'entend de loin, et qui s'exnrime très-bien par écha-1cha-tcha-gra, d'où j'ai tiré le 2 LM 84 HISTOIRE NATURELLE nom de cette espèce. La femelle est un peu plus petite que le. mâle, et elle n'a point le dessus de la tête noir : du reste ils se ressemblent parfaitement sauf une légère teinte plus foncée qu'on remarque sur le manteau du mâle et dans le roux des pennes de ses aîles. On trouve le nid de ces pie-srièches dans les broussailles; la ponte est de cinq œufs tachés de brun. Dans son jeune âge, le Tchagra a tout le dessus du corps d’un brun cendré beaucoup plus clair que ne le représentent les figures que j'ai données du mâle et de la femelle, et son blanc est roussâtre. Ce n’est encore qu'à un certain âge que le dessus de la tête du mâle devient noir. J'ai trouvé cette espèce dans les environs de la rivière Gamtoos et de là jusque chez les Caffres, mais je ne l'ai point vue dans mon voyage chez les Namaquois. Cette pie-grièche se retrouve encore au Sénégal; Brisson l’a décrite sous lenom de pie-grièche grise du Sénégal, tome IT, page 167. Buffon en fait aussi mention, et en donne une fort mauvaise figure, N°. 479 de ses planches enluminées, sous lenom de pie-srièche rousse atête noire du Sénégal; et comme ce naturaliste prétend que toutes les pie-grièches étrangères qui ont des couleurs rousses ne sont que des variétés de notre pie-grièche rousseet de notre écorcheur qui, suivant lui, ne sont aussi qu'une seule et même espèce, il ne donne cetoiseau que comme une variété de la pie-grièche rousse. Voyez dans Buffon la description de l'écorcheur. Ploarehenr ‘€ s DA WI TD?, Roiuot) P: C2 PR ) cHeube. 10 7 7 5 TZ es LL OCTO CSN 1. ; LUE De de loupe De Li Lug A Co Qt DU BRUBRU. PROISIEME DIVISION DES PIE-GRIECHES. LE BR Ü BRU. N°, 74) Fic. 1 ep 2, Lrs espèces qui composent cette troisième section des pie- grièches d'Afrique, se rapprochent de celles dont nous avons fait mention dans la seconde, par la forme de leur bec qui est plus alongé et moins courbé que ceux des pie-srièches de la première division. D'un autre côté, elles s’en éloignent et se rapprochent de celles de la première par leurs aîles plus amples et plus pointues; ce qui leur permet de s'élever sur le sommet des plus grands arbres, parmi les branches desquels elles cherchent très-soigneusement tous les insectes quileur servent uniquement de nourriture , sans jamais attaquer les autres oiseaux. Aussi ne les trouve-t-on que dans les forèts, où elles parcourent, en petites troupes composées de toute la famille, tous les arbres d’un vaste canton, sans se tenir en embuscade à » À ion) st "MU 86 HISTOIRE NATURELLE la méme place, comme nous l'avons fait remarquer à l'égard des premières pie-grièches dont nous avons parlé; elles sont aussi plus silencieuses et ne se font point entendre continuellement, comme notre pie-grièche grise d'Europe, ou comme le fiscal, la pie-srièche rousse et l’écorcheur, qui toutes ont un babil presque continuel; et point non plus comme celles de la seconde division, dont les mâles, ainsi que nous l'avons dit, appellent sans cesse leurs femelles, qui leur répondent aussitôt. Tout ce que nous venons d'observer à l'égard des caractères physiques et moraux par lesquels la nature a distingué les différentes branches de la grande famille des pie-grièches, prouve que ce n’est pas sans fondement que nous les avons partagées en trois sections, de chacune desquelles nous aurions préféré cependant, comme nous l'avons déja dit, faire un genre séparé; mais nous eussions vu s'élever contre nous toute la troupe scientifique de nos pédans en us, qui ne voient pas sans humeur proposer d’autres règles que celles qu'ils ont adoptées. J'ai remarqué qu'en général autant il est facile, par de bonnes raisons, de faire revenir d'une erreurl’homme qui, ayantétudié une science,s’est trompé en donnant ses propres idées , autant il est difficile de persuader et de faire revenir ceux qui, sans études, se sont approprié simplement les opinions des autres : enfin, rien de si obstiné, de si entêté et desiorgueilleux que ces demi-savans qui connoissent tout sans avoir rien vu, parlent de tout sans.rien savoir, jugent de tout sans rien entendre, et décident et tran- chent souvent même où l'homme instruit hésite ou doute. Les figures que j'ai données du Brubru, mâle et femelle, les représentent tous deux de grandeur naturelle. Le ramage du mâle exprime très-distinctement le mot bru, répété deux et trois fois de suite, en grassayant et traînant un peu sur fr. Enfin, il a absolument le même ramage que celui que fait DU BRUBRU. 87 entendrenotreverdier dansla saison desamours, lorsque, perché sur le sommet des arbres , il appelle sa femelle. Quant à ses couleurs, elles sont agréablement variées de noir, de roux et de blanc, et demandent à être détaillées pour en connoitre la distribution exacte. Le mâle est d’abord plus grand que la femelle : il a le dessus de la tète et le derrière du cou noir; le reste du plumage supé- rieur, c’est-à-dire le manteau, les scapulaires, le croupion et les recouvremens du dessus de la queue sont de cette méme couleur mais très-chamarrés de blanc; une ligne blanche borde le front près du bec, couronne l'œil, et se prolonge ensuite en s’élargissant dans le milieu du noir des côtés du cou. Sur l'aîle règne une large tache blanche qui appartient en partie aux couvertures et aux moyennes pennes de l'aile, dont Îa plupart sont bordées de blanc, ainsi que les grandes pennes. Les quatre plumes du milieu de la queue sont noires, les autres ont progressivement un peu plus de blanc, de sorte que la première de chaque côté est entièrement bordée de cette couleur; elles ont de plus chacune une tache blanche à leur pointe ; la queue est arrondie au bout par l'effet des plumes latérales qui sont un peu plus courtes que les autres ; les ailes pliées s'étendent environ à la moitié de sa longueur. La gorge, le devant du cou, la poitrine, le ventre et les recouvremens du dessous de la queue sont blancs; il règne sur les flancs une bande d'un roux ferrugineux, qui, de chaque côté, depuis la poitrine jusqu'aux jambes, borde l’aîle, quand elle est pliée et collée au corps. L’œil est brun et le bec noir. La femelle a tout le blanc de la partie supérieure du corps sali de roussätre, et le roux des côtés est d’une teinte plus foible; son noir a généralement aussi une teinte plus rembrunie. " : » F LA # | & 88 HISTOIRE NATURELLE Dans le jeune âge, le blanc est totalement roussâtre; même en dessous du corps. On trouve assez ordinairement ces oiseaux en petites troupes, excepté pourtant dans la saison des amours, où chaque couple vit isolé. J'ai trouvé le nid du Brubru sur les mimosas à l’enfourchure des branches; il est composé en dehors de mousse et de petites racines, le dedans est garni de laine et de plumes. La ponte est de cinq œufs tachés de brun sur un fond blanc. Je n'ai commencé à voir cette espèce que vers le vingt- huitième degré de latitude sud, sur les bords de la Grande- Rivière, où elle est très-abondante et peu farouche. Je n'ai jamais vu de ces oiseaux dans mon voyage à la côte de l’est, ni dans l’intérieur des terres à mon retour de chez les Caffres ; mais je les ai constamment trouvés par-tout depuis la Grande-Rivière jusque vers le tropique. LL? _— ë) olome 1. À Lopueclbe Raul) CE 2e (Lo cFessatd eut. NS ) Pre 26 5 D . Fomree 214 . . PAIE De d'oluptiuetie de 27 Quglois. [4 DAURACHUPBPETA 8 [Fe] Le /O LEUR LA. TS ÿ NW pic ui etre. L'Eesrice que j ainommée Cubla est dans le pays d'Auteniquois etsur toute la longueur de la côteorientale de l'Afrique, depuis la rivière Duyven-Ocks jusque chez les Caffres, le représentant de la pie-grièche de l’article précédent, que j'ainommée brubru d'après son ramage : ces oiseaux sont absolument de la méme taille; au reste, les figures que j'ai données du mâle et de la femelle, les représentent tous deux dans leur état parfait et dans leur grandeur naturelle et respective. On trouve ces oiseaux réunis en petites troupes, de six à sept individus, composées de toute la famille; ils ne s'écartent jamais les uns des autres, et prennent tous part aux petits accidens ainsi qu'aux plaisirs qui surviennent à l’un d'eux. Ils vivent ensemble dans la meilleure intelligence, et lorsqu'il arrive à quelqu'un de la troupe de découvrir une nichée de chenilles, dont ils sont très-friands, il appelle, par un cri, tous les autres pour leur faire part de sa découverte. En un instant, toute cette petite troupe d'êtres toujours agissans ont visité toutes les branches d'un très- gros arbre, dont ils enlèvent trés-bien, avec leur bec, les parties d'écorce, pour mettre à découvert les larves, les chrysalides et les insectes qui s’y réfugient, et dont ils senourrissent. Dans la saison des amours, toute la famille se sépare par couples, pour donner leurs soins à une nouvelle géniture; ils choisissent un Home M 464 Fa … Go HISTOIRE NATURELLE endroit tranquille, parmi les broussailles et les épines, où ils placent leur nid, composé de mousse entrelacée de racines flexibles. La ponte est de cinq ou six œufs. La femelle est plus petite que le mâle. Celui-ci a la tète, le cou par derrière et le manteau d'un beau noir; le bas du dos est couvert de longues plumes soyeuses très-déliées et d’un blanc éblouissant. Tout le dessous du corps, depuis la gorge jusqu'aux couvertures du dessous de la queue, est blanc et légérement mêlé d'une foible teinte grisâtre sur les flancs. Les scapulaires sont en partiemélangées de noir, de blanc et de grisâtre. Toutes les couvertures des aîles sont noires et en partie bordées de blanc; ses pennes sont également noires, et lisérées extérieu- rement par une ligne blanche. La queue, qui est noire, est arrondie par le bout, et chacune de ses plumes se termine de blanc; tandis que la plus latérale de chaque côté, porte dans ses barbes extérieures, une ligne de la mème couleur. L'oeil est d'un jaune vif; le bec et les ongles sont noirâtres. La femelle a son blanc sali de plus de grisâtre, et son noir est plus lavé. Dans le jeune âge, cet oiseau au lieu de blanc porte du gris ‘roussâtre, et son noir est d'un brun-roux. Par son ramage, le mâle exprime très distinctement les mots chà châ, entraînant beaucoup sur l'4. Quand il appercçoit ou un animal ou un homme, il hérisse toutes ses plumes, en écartant un peu les ailes, et s'approche de lui en répétant sans cesse son cri chà chä. {I sont, en général, peu farouches et très-communs, principalement dans les foréts d'Auteniquois. rrebe 3 7 a [D p 7 7 a 7 D DD F 7 7 Afrecbe Porno) L? CU ess aid 07/2 - A7 Cl, — | 4 nu De DRE L. ) LLC AA He. CPE JE : HE V7 Do Henelle DL INRA « 1 1? 7 : : 740 = de l oupunetie Ze AU lots 2 e . CA DE LA PIE-GRIECHE BLEUE: 91 D'PIE CRIDCHME BIT EUT, NA TON MEIC 1 2NetN 9; Quoique cette belle espèce ait été déja décrite et même figurée, cela ne m'empéchera pas de donner encore ici les figures du mâle, de la femelle et du jeune; on ne sera pas faché sans doute de voir dans cet ouvrage le portrait fidèle d’un des plus beaux oiseaux d'Afrique que nous connoissions; d'autant plus que celui qu'a publié Buffon, du mâle, dans le N°. 298 de ses planches enluminées , est très-peu correct et ne donne nullement l’idée de la beauté de son coloris, et bien moins encore celle de sa forme. Brisson décrit de la manière la plus exacte et la plus détaillée le mâle et la femelle de cette même espèce, sous le nom de pie-grièche bleue de Madagascar (1), qu’elle porte également dans l'Histoire naturelle des oiseaux, par Buffon, qui ne fait cependantque l'indiquer ,en la donnant comme une simple variété de la pie-grièche grise d'Europe (2). Nous avons déja eu occasion de relever cette méprise en parlant de la pie-orièche à laquelle j'ai conservé le nom de fiscal, qu’elle porte dans toute la colonie hollandaise du Cap de Bonne-Espérance; espèce que Buffon regarde aussi comme une (1) Ornithologie de Biisson, tome Il, page 197, planche 16, fig. 5. (2) Voyez l'Histoire naturelle des oiseaux de Buffon, tome IT, à l’article de Ia pie-grièche grise d'Europe, M 2 92 FUNSONMRE, N'ARU RE TL DE variété de la pie-grièche grise; il s'ensuivroit conséquemment que le fiscal et la Pie-grièche bleue de cet article ne seroient également qu'une seule et même espèce variée par l'influence du climat; ce qui est d'autant plus absurde à présumer que ces deux oiseaux, comme je l'ai déja dit, habitent le méme canton, vers les confins du pays des Grands Namaquois, où je les ai trouvés, et que, quoiqu'ils vivent sur le même terrein, ils ne se mélent jamais ensemble. Il sera facile de se convaincre, par un seul coup-d'œil de comparaison sur les figures que j'ai données de ces oiseaux, que bien loin d'avoir entre eux le moindre rapport de taille et de distribution de couleurs, àleurs nuances près, comme ledit Buffon, ils sont, au contraire, très-différens, non-seulement à cet égard, mais qu'ils s’éloignent l'un de l’autre parles caractères «le la queue, qui, dans la Pie-grièche bleue est carrément coupée à son extrémité; c'est-à-dire, que toutes les pennes qui la com- posent sont égales entre elle; au lieu que dans le fiscal elle est très-étagée. En comparant aussi le bec de ces oiseaux, on y trouvera une différence assez sensible. Aureste, c'est peut-être trop insister sur des erreurs qu'auroit détruit le premier coup d'œil sur les figures parfaites que j'ai données de ces deux pie-grièches; mais, quoique des erreurs de cette nature puissent paroître fort peu de chose en elles-mêmes, il n'en est pas moins vrai qu'elles sont dans le cas d'égarer et de conduire à des conséquences fausses, et par là tromper ceux qui, sans beaucoup d'examen, embrassent aveuglement les idées présentées avec le dehors séduisant d’une brillante élocution, et sur-tout encore quand elles sont appuyées par une grande réputation de savoir. Il étoit donc nécessaire de com- battre celles-ci d'une manière qui ne laissât pas le moindre ré Car DE'TL A PTE-CRIECHE PÉEUE.. O9 doute ; car dans les sciences il n’est point de faute indifférente, vu que les plus petites erreurs conduisent à de plus grandes ; celle de cette variation considérable, supposée dans les oiseaux qui habitent différentestempératures,estdela plus grande consé- quence, en cequ’ellenous conduiroit infailliblement à conclure quenon-seulementtous les oiseaux du même genre doiventleur origine à une seule et même espèce, mais que généralement tous les oiseaux sont sortis de la méme souche; enfin, qu'un seul couple a produit, par des variations successives, tout ce que nous voyons d'oiseaux sur le globe entier. Car, enfin, si notre pie-orièche grise d'Europe a pu, n'importe par quelle influence, produire la pie-crièche d'Italie, la Pie-orièche bleue de cet article, la pie-grièche grise du Sénégal, la pie-grièche rayée de Cayenne, ete. etc. etc.; il n'ya pas de raison pour qu’elle n'ait pas également produit, elle-même ou ses descendans, toutes les autres pie-grièches qui existent; puisqu'il n'y a certainement pas plus de différence, et ne peut même y en avoir davantage entre elles, toutes comparativement les unes aux autres, qu'il ne s'en trouve entre toutes celles qui, suivant Baffon, en proviennent, et dont nous avons donné l'énuméra- tion à l’article du fiscal, description à laquelle je renvoie le lecteur, pour ne pas répéter ici ce que Jai déja dit ailleurs. Or, si toutes les pie-grièches n'étoient que des variétés d’une seule et même espèce, on conçoit que la même conséquence pourroit s appliquer aussi et avec tout autant de fondement, à tous les autres genres, dont les différentes espèces, qui ne seroient plus ici que des variétés accidentelles, ont entre elles assurément tout autant de rapport que nous en avons trouvé entre les pie-srièches. Ainsi donc nous n'aurions plus dans chaque genre qu’une seule souche primitive, etc'estdechacune de ces souches que seroient sorties toutes les variétés supposées. 94 HISTOIRE NATURELLE La difficulté seroit seulement d'établir à laquelle on accordera les honneurs de la prééminence, ce qui peut-être ne seroit pas un sujet traité bien paisiblement par les savans; mais enfin, je les suppose bien d'accord à cet égard, et que chaque branche ainée soit bien duement constatée, tout aussi bien enfin, et par des raisons toutaussi solides que celles qui ont irrévocablement assigné pour père commun des différentes races canines, le laid mais très-actif et utile chien de berger. Ainsi donc un aigle aura produit tous les aigles, un vautour tous les vautours, un cor- beau tous les corinacés, un calao tous les calaos, etc. D'ailleurs, pourquoi non? car enfin bien des gens trouveront qu'il n’y a pas plus de différence entre le grand aigle, l'aigle commun, le petit aigle, le pigargue et tous Les autres aigles, qu'il n'y en a entre un chien de berger, un dogue, un levrier, un caniche, un roquet, etc. Ainsi donc, ceci étant bien posé, si nous com- parous ensemble un aigle avec un vautour, je ne vois pas de raison qui puisse empêcher de croire qu'ils ne sont pas sortis d’une même souche, et cela par un raisonnement bien simple que voici : Si le chien ture, dont le corps est nu, et l'épagneul qui, au contraire, l'a couvert d’un long poil fourré, ont tous deux une même origine, pourquoi l'aigle à la tête emplumée. et le chauve vautour (1) ne descendroient-ils pas d’un père commun ? Si nous comparons enfin, toutes les souches primi- tives les unes avec les autres, et que les faisant rentrer successi- vement l’une dans l’autre, suivant les convenances réciproques qu'on trouvera entre elles, et qui souvent sont même plus grandes entre un genre et un autre, qu'entre denx espèces du même genre, nous les réduirons encore de beaucoup. Qui ne conviendra pas, pour ne citer entre mille qu'un seul exemple, (1) Les méthodistes ont assigné, comme cCaracières invariables chez les vautours, Es nudité de la tête et d’une partie du cou. D'P L'ANPE -GRIE CHE PEEUr 95 que le calao à bec rouge du Sénégal (1), diffère bien plus du calao rhinocéros (2), quoiqu'ils soient du méme genre, que le grand aigle ne diffère d'une buse, ou que le grand duc ne diffère dela chouettecommune, quoiqu'ils soïentreconnuspour appartenir à des genres différens. Enfin, nous voyons que d'encore en encore, et en réduisant toujours, nous pourrions facilement conclure qu'il n'y avoit originairement qu’un seul oiseau, dont seroient descendus tous les autres oiseaux. On sent bien qu'en appliquant la méme théorie successivement aux quadrupèdes, aux poissons, aux insectes, etc. ; enfin à tous les différens ordres du règne animal, à qui nous trouverions bien certainement à chacun en particulier, entre tous les êtres qui les composent, les mêmes rapports que ceux que nous avons vus dans les oiseaux, on pourroit tirer la même conséquence à l'égard de chacun d’eux pris séparément. Ainsi donc l’autruche et l'oiseau mouche, chezles oiseaux, auroient la même origine ; comme la giraffe et la musaraigne, dans les quadrupèdes; le requin et le goujon, parmi les poissons ; le devin et la plus petite couleuvre, entre les reptiles; et enfin le crocodile et le plus petit lésard ; ainsi que le luth ou le caret et la plus petite tortue, dans la classe des quadrupèdes ovipares, etc. Comment nos théologiens n'ont-ils pas imaginé ce système nouveau qui les auroit tirés d’un grand embarras, en expliquant clairement la possibilité de loger et de nourrir dans l'arche, qui n'avoit, autant que je puis men rappeler, que trois cents coudées de longueur, toutes les espèces d'animaux qui existoient du tems du déluge universel, et qui, par une suite des mêmes raison- nemens que nous avons faits, ne devoient certainement pas, à beaucoup près, être dans ce tems là aussi nombreux qu'ils le (1) Voyez les planches enluminées de Buffon , N°. 260. G)Tbid,, N° 054. ‘ 96 EL ISO TRE NAMUR PE sont aujourd'hui? Et pour appuyer ceci, Montbeillard ne nous apprend-il pas encore, qu'il se forme chaque jour de nouvelles races d’animaux?et pour n'enciter qu'un seulexemple, la corbine et le freux n'ont-ils pas, suivant lui, produit ensemble, de nos jours, la corneille mantelée? Nous ne pouvons même en douter « car les anciens n'ont rien dit de cet oiseau , et il vole par troupes nombreuses comme le freux. Il n’est point une variété de ce dernier, car il ressemble à la corbine, dont il n’est point une variété non plus, puisqu'il vole par troupes, et change deux fois de demeure par an (1). » Ceci n'est:l pas bien clair? Nous bornerons ici toutes les réflexions que nous aurions pu faire encore sur la filiation des animaux, pour remonter à l'origine de leurs races primitives; ce qui auroit facilement pu nous conduire bien plusloin, et simplifier de beaucoupl'histoire de la création, que nous aurions pu réduire à un être seul ; l'homme, par exemple, qui a bien pu produire l'orang-outang, qui lui ressemble si fort; et celui-ci, par la succession des temps, par les différentes nourritures, par les dif/érens degrés de chaleur et de froid,et enfin peut-être parles diversescombinaisons des molécules orsaniques, ete., en a produit d'autres, qui eux-mêmes, par les mêmes lois et des mélanges fortuits, auront engendré d’autres variétés ; et, par degré, en descendant ainsi, par des nuances imperceptibles, à toutes les espèces de quadrupèdes, nous par- viendrions, d'un côté , aux phoques, aux morses etc., qui nous conduisent aux poissons; d’un autre, aux polatouches et aux chauve-souris, qui nous font passer aux oiseaux; et enfin aux pangolins et aux fourmilliers, qui nous mènent aux reptiles , etc. etc. etc. Au reste, nous laissons à de plus grands philosophes et à des génies supérieurs le soin d'étendre et de développer a —— (1) istoire naturelle des oiseaux de Buffon, tcme V, page 87 de l'édition in-12. des DE LTAPP MEGRAE CHE BTE E UE: 07 des vues aussi vastes, etauxquelles nous ont conduit cependant une simple variation supposée dans l'espèce de la Pie-grièche bleue, à laquelle nous revenons bien vite pour ne pas sortir de Ja sphère bornée où nous placent nos chétives connoissances, qui ne nous permettent pas d'embrasser des idées aussi hardies et aussi élevées. La Pie-snièche bleue est de la grandeur à peu près de l’écor- cheur; sa tête, le cou par derrière, les scapulaires, le dos et les couvertures du dessus de la queue sont d'un beau bleu d'outre- mer le plus pur et le plus brillant. Toutes les couvertures des aîles , ainsi que les barbes extérieures des pennes des aîles , les deux du milieu de la queue et le bord des latérales sont du même bleu que le dessus du corps; mais les extrémités des plumes de l'aile et de la queue , ainsi que leurs barbes intérieures , sont noirâtres. Entre les narines et les yeux, ainsi qu’à la naissance de la gorge, les plumes paroïssent d’un noir de velours. Tout le reste du plumage inférieur du corps, à l'exception du bord des jambes qui sont bleuâtres, est d’un blanc éblouissant. Les yeux sont bruns, le bec et les pieds noirätres. La femelle est un peu plus petite que le mâle; son blanc est moins éclatant, et le bleu prend une teinte verdâtre sur le croupion; elle n’a pas non plus de noirau devant des yeux et à la gorge, et elle n'a que le devant du cou d'un beau blanc, tout le reste du dessous du corps étant d'un gris cendré. Dans son jeune âge, cet oiseau a le dessus du corps d'un verd sombre, et tout le dessous absolument d’un gris blanchâtre; c'est-à-dire, que tout ce qui est bleu dans l'oiseau adulte se trouve alors d’un verd sombre, et que ce qui est d’unblanc pur est d'un gris cendré. Il nous paroït que la petite pie-grièche Tome LL. N ONE HISTOIRE NATURELLE verte de Madagascar, décrite et figurée dans l'Ornithologie de Brisson, n’est autre chose que cette jeune Pie-srièche bleue dont nous venons de parler, malgré la différence qu'il paroît y avoir entre les ailes de l’une et de l’autre; en effet celles de la Pie-orièche bleue ne s'étendent que jusqu'aux deux tiers de la longueur de la queue, tandis que dans la petite pie-grièche verte donnée par Brisson ( 1 ), elles paroissent aller jusqu’à son extrémité; mais ce caractère de la longueur des ailes pourroit bien être fautif encore ici comme il l'est dans beaucoup de descriptions de cet auteur, non-seulement à cet égard, mais généralement dans toutes les mesures qu'il a données, et qui, presque toutessans exception, sont fortinexactes, parce qu'elles ont été prises sur des oiseaux empaillés, et fort mal empaillés , ou, pour mieux dire, emplätrés, ou remplis de plâtre, comme l'étoient, je crois, tous les oiseaux du cabinet de Réaumur; du moins tous ceux qui subsistent encore de cette collection, et qu’on peut voir au Muséum d'histoire naturelle de Paris, sont, pour la plupart, préparéset conservés de cette manière, etoffrent tous devrais manuequins d'oiseaux très-baroques, et réellement hors de toutes proportions. On sent par conséquent combien peu on doit se rapporter aux mesures qui ont été prises sur des individus aussi mal soignés, et la figure que Brisson a donnée de la petite pie-srièche verte de Madagascar offre très-visiblement un grand défaut dans la manière dont les aîles ont été placées quand on a préparé l'oiseau; car le poignet ne répondant qu'au milieu de la longueur du sternum au lieu de déborder même son extrémité supérieure, Comme dans tous les oiseaux quand ils ont les aîles pliées pendant le repos, la pointe de l'aile a dû s'étendre d'autant plus vers l'extrémité de la queue, que le (G:) Crnithologie de Brisson , tome I1, planche 15, fig 3. D'EMÉNP PE C ET EC EME 'L'E UrE: G9 poignet a été rapproché des jambes. Ce défaut sera bien mieux senti encore, si l'on prend la peinede comparer cette figure avec celle qu'a donnée le méme auteur de la Pie-grièche bleue (1), dont les aîles ne s'étendent, suivant lui, qu'aux deux tiers de la queue ; et, en effet, elles ne vont que jusque-là; aussi s'appercoit-on facilement que dans la figure de cette Pie-grièche bleue, le poignet a été placé bien plus haut, et que par consé- quent la différence qu'il paroïit y avoir entre les dimensions des aîles de la Pie-crièche bleue et celles de la pie-grièche verte ,ne provient que du défaut de préparation; et ce qui le prouvera encore d'une manière bien plus convaincante, c'est qu’en mesurant la longueur des aîles dans les deux figures que j'ai citées, on leur trouvera absolument la méme dimension. Ces remarques critiques, que j'ai cru nécessaires ici, prouvent combien il doit exister de fautes dans la plupart des ouvrages sur lesanimaux, et particulièrement quandleurs auteurs n’ont point travaillé d’après la nature elle-même, et ne l'ont étudiée et vue que dans des cabinets d'histoire naturelle, où les oiseaux et les quadrupèdes offrent tous généralement de très - mauvaises caricatures et de fausses représentations de ce qu'ils sont dans leur état naturel. De là tous ces doubles et triples emplois du méme animal, qui se trouve décrit dans plusieurs ouvrages, et souventdans le même deux ou trois fois sous des noms différens et avec des caractères distinctifs, comme autant d'espèces ; et cela parce que chaque auteur a pris pour des caractères spéei- fiques les défauts de préparation ou les défectuosités acciden- telles : ce que nous aurons plusieurs fois eccasion de faire remarquer par des preuves convaincantes. Là A Je n’ai point été à même de voir le nid et les œufs de la Pie- (1) Ornithologie de Brisson , tome IF, planche 16, fig. 3. N 2 106 LS TOUR E IN ADIEU DIE grièche bleue, la saison dela ponte et de l’incubation étant déja passée depuis quelque tems lorsque j'arrivai dans le canton où j'ai trouvé ces oiseaux. Ils ne vivent absolument que d'insectes et sont très-farouches et difficiles à approcher, sur-tout le mâle, que lon voit assez ordinairement perché sur le sommet des buissons d’où il s'envole aussitôt qu'il se voit poursuivi. Comme cette espèce nese trouve pas à Madagascar seulement, je ne lui ai conservé que le nom de Pie-grièche bleue; d’ailleurs, en général tous ces noms de pays joints au nom des oiseaux pour les désigner sont très-incorrects, en ce que jamais nous n'avons vu encore une espèce habiter exclusivement une seule partie d'un pays. Il est cependant bon, il est même indispensable, dans un cabinet d'histoire naturelle, de noter et d’assigner à chaque oiseau le pays et même le canton du pays d’où il a été rapporté; et dans un cabinet destiné à l'étude générale , comme le sont les cabinets nationaux, ou du moins comme ils devroient l'être, il seroit même très-utile pour les progrès de la science, de rassembler, autant que possible, non-seulement dans chaque espèce, le mâle, la femelle, le jeune, les variétés, le nid et les œufs; mais if seroit même nécessaire de réunir les mêmes espèces prises dans des contrées éloignéesles unes des autres ; per exemple , notre martin-pêcheur se trouve non-seuleinent dans toute l'Europe, depuis les frimats du nord jusqu’en Italie, maisilse rencontre aussi en Egypte, à la Chine, au Bengale,etc. Si nous étions donc à même de comparer ensemble des individus pris dans chacun de tous ces différens climats, il est certain que nous pourrions avoir quelques notions précises sur les variations que peut subir cette espèce, par rapport aux diffé- rentes températures qu'elle habite, ainsi que par les diverses nourritures qu'elle y prend. Mais combien nos cabinets publics sont loin de présenter à l'étude de pareïlles ressources! Nous n'avons non-seulement pas l'histoire naturelle de notre propre DEL AT PTE GR IP'OEPE BLEUE 101 pays, mais, à la honte de qui il appartient, 1l nous manque celle des environs de Paris; et loin de là, nous ne possédons pas même l'histoire complette d’une seule, oui d'une seule éspeécen! : À quoi ceci tient-il?Jele dirois bien, mais il n'est pas bon de tout dire; et d’ailleurs à quoi cela serviroit-1l? à rien! Je me tais donc. Mais je dois avouer que je regrette beaucoup d’avoir vu sortir denotre pays la plus belle et la plus nombreuse collection d'oiseaux de France qui ait jamais été faite, et dont on ne reverra peut-être jamais l’égale; je veux parler de celle de feu Becœur, apothicaire à Metz. Ce naturaliste avoit passé cinquante ans de sa vie à rassembler tous les oiseaux du pays, et il possé- doit , dans ce genre, la collection la plus nombreuse, la plus complette et la mieux conservée que j'aie jamais vu; et cette collection , précieuse à tant detitres , avoitencore l'inappréciable avantage d’être préparée de manière à ne pas craindre qu'elle fût détruite par les insectes rongeurs, fléaux de toutes les collections d'oiseaux. À cet égard on doit au talent de Becœur un hommage queje me plais à lui rendre publiquement, malcré les sottes préventions de ceux qui, n'ayant jamais voulu appré- cier son mérite, ont feint de ne pas y croire, quoiqu'ils eussent en main la preuve la plus convaincante, qu'ilavoit effectivement découvert un préservatif avec lequel il écartoit les insectes rongeurs des animaux qu'il préparoit. J'ai cinq oiseaux qui, d'après leurs étiquettes, ont été préparés par Becœur, dans l'année 1742. Ces oiseaux furent donnés au savant cristallo- graphe Romé de Lisle, qui les a gardés exposés sur la corniche de sa bibliothèque à la poussière et à l'air libre pendant vinat- un ans , sans qu'on leur ait jamais touché. Il ÿ a quinze ans qu'ils m'ont été donnés par Jui, et qu'ils sont aussi exposés à l'air; et je puis certifier qu’on n'y appercoit pas la plus ke 102 HIS POTR Et NADUM EME dégradation. Il y a aussi au Cabinet national de Paris plusieurs oiseaux de Becœur, qui y sont depuis plus de trente ans : qu'on les examine, je suis persuadé qu'ils sont intacts du côté du dégât que peuvent y faire les insectes. Malgré tant de preuves, des gens qui ne se ‘sont jamais occupés un seul instant, dans tontle cours de leur vie, à chercherdes moyens de conservation, prétendent cependant qu'il n'en existe pas, et qu'il ne peut pas même y en avoir. Enfin, Becœur est mort en emportant son secret, et cela par une suite de l'injustice criante qui fut exercée à son égard lorsque, venant à Paris solliciter d'être employé au Cabinet (dans ce tems-là dit du roi), où ses talens l’auroient dû faire rechercher, il vit la place, qui n'avoit été créée que pour lui et qu'il sollicitoit, passer à un autre, par l'effet d’une basse intrigue. Becœur modeste, comme le sont généralement tous les hommes de mérite, s’en retourna paisiblement dans sa pro- vince, où il finitsa carrière. Depuis sa mort, son cabinet a passé chez le duc de Deux-Ponts, qui l'a payé un prix très-modique. Nous regrettons également de nous avoir vu enlever par l'étranger la belle collection d'oiseaux de Mauduit, et celle de minéraux qu'avoit rassemblée Forster : cette dernière est passée en Espagne. C'est ainsi que successivement et par degrés nous nousevoyons enlever tout ce que nous avons de précieux. L'indifférence de nos gouvernans , à cet égard, ne s'accorde ouère avec leurs grands mots et ces belles phrases contre le 8 vandalisme. EE C/OULe 1. ra < 7 (4 le CAessais 27/2 Llncense D, V2 ACL Da. JL, EE DL 07727777 æ Laugloi 5 > Ce DE LA PIEGRIECHE SILE NOTE USE Mo LA PIE-GRIÈCHE SILENCIEUSE NP7/APREIe Let 2; J'ar donné à cette espèce le nom de Pie-grièche silencieuse, parce que je ne me rappelle pas de lui avoir jamais entendu faire aucun cri quelconque; j'en ai cependant tué beaucoup, et cela dans toutes les saisons ; par conséquent si elle avoit ün ramage de quelqu espèce que ce soit, il est probable que je n'en serois apperçu. Cet oiseau est très-commun dans les forêts d'Auteniquois, et généralement sur toute la longueur de la côte de Natal. Je J'ai également trouvé dans plusieurs cantons de l'intérieur, mais principalement dans les pays boisés. Le mäle est un peu plus fort de taille que notre pie-sriéche rousse. Âu reste, la figure que] en ai donnée le représente dans toutes ses dimensions; 1l a le dessus de la tête, le derrière du cou, le manteau, les scapulaires, le croupion, les couvertures supérieures de la queue, la queue elle-même et les aîles d'un noir pur; outre une petite tache blanche qui appartient à quel- ques-unes des premières plumes de l’aîle, deux des moyennes pennes ont de plus leurs barbes extérieures blanches, ce qui produit une barre de cette couleur, qui longe l'aile, à peu près comme celle que l’on remarque dans l'espèce que j'ai nommée 104 HISTOIRE NATURELLE boubou, avec cette différence pourtant que dans la pie-grièche de cet article, la barre ne continue pas d’un bout de l’aîle à l'autre, puisque toutes ses couvertures, petites etgrandes, sont absolument noires. La queue est étagée et ses pennes latérales sont bordées extérieurement de blanc." Foutle dessous du corps, depuis la gorge jusque y compris les couvertures du dessous de la queue, sont blanches, les yeux sont bruns, les ongles noirs, les pieds brunätres et le bec couleur de corne. La femelle est un peu plus petite que le mâle; son noira une teinte rembrunie, et son blanc n'est pur qu'à la gorge, sur la tache et la barre des ailes; du reste, toutle plumage du dessous du corps est d’un blanc sali d'une teinte grisâtre. Il est rare de ue pas rencontrer le mâle et la femelle ensemble; ils ne vivent absolument que d'insectes, au moins j'assure que de cinquante- huit de ces oiseaux que j'ai tués et ouverts tous, je ne leur ai trouvé dans l'estomac que des débris d'insectes. C’est en novembre que ces oiseaux commencent leur ponte, et c'est sur les arbres qu'ils placent leur nid, qui est des plus artistement fait : ce sont seulementde petites branches flexibles et déliées qui le revètent extérieurement pendant quele dedans est douillettement tapissé de bourre ou d’une sorte de coton que fournissent plusieurs espèces de plantes d'Afrique, entre autres, celle du mesembrientemum, que les colons et les Hotten- tots nomment au Cap ana bossies. De cinq de ces nids que j'ai été à même d'examiner, dans l'un je n'ai trouvé que trois œufs ct dans chacun des autres, quatre : ils sont d'un verd pâle, et comme barbouillés d'une légère couleur roussätre. Au sortir du nid, tous les petits, soit mâles ou femelles, ressemblent absolument à la mere. L'OLIVA, as PC | 1 te Lauche js 7 Q/outre 11. NP NE PP PDO (eo Fessatd 7772 c) | 7 9 . ee ? , 2 ? { 1 er TR Gps. 2 a: HAL e TD 2° 2. SZ 22771020 He? (4 2 5 D 7e del rptiverce de Ll auglots - D'EFBENO EVE 105 UHl DU 12 N°70 r16. 1162; et N°76, Frc 1. Pour bien faire connoître cette espèce de pie-grièche d'Afrique, j'ai été contraint d'en donner trois figures, parce qu’elle est si différente dans ses divers âges, que rien ne seroit plus facile que de prendre chacune de ses variétés pour autant d'espèces particulières. La figure 1 du N°. 75 des planches coloriées de cet ouvrage, représente le mâle dans son état parfait et de grandeur naturelle; c'est-à-dire, quand il est parvenu à l’âge de deux ans:alors, il a toute la partie antérieure du corps, depuis la téte jusqu'aux recouvremens du dessus de la queue, ainsi que les couvertures des aîles, d’un verd olivâtre tirant sur le jaune. Les deux plumes du milieu de la queue sont de la même couleur ; les latérales sont en partie jaunes, mais le jaune occupe plus d'espace sur la dernière de chaque côté; du reste, elles sont noirâtres dans leurs barbes intérieures et d’un verd olive dans leurs bordures; toutes sont étagées de manière que la queue s'arrondit par le bout. Les pennes de l'aile sont noirâtres dans leur partie cachée quand l'aile est pliée, et dans celle qui se montre, du même verd que le manteau; mais elles ont toutes une bordure jaune. Le front est ceint d’un bandeau jaune ocré. L'œil est placé dans un espacenoir, qui s'étend assez largement dans toute la longueur du cou, et cette tache noireest bordée, Tome 11. ÔO 106 HISTOIRE NATURELLE dans sa partie supérieure, par un liseré jaune. La gorge, le devant du cou et la poitrine jusqu'au ventre, sont d’un beau jaune ocré, ainsi que les plumes des jambes qui avoisinent le talon. Les flancs, le bas-ventre et les couvertures du dessous de la queue sont d’un foible jaune nué d’un verd olive. Le bec est noir, lesyeux bruns roussâtres ; les pieds et les ongles sont d'un brun clair. Telle est la description parfaite du mâle, si j'ajoute que sa taille est celle de la pie-grièche rousse, La figure 2 de la même planche citée ci-dessus est également le portrait du mâle, mais dans un Âge moins avancé; enfin, depuis sa troisième mue jusqu'au moment où 1l prend la livrée aue je viens de décrire et dont il ne change plusles couleurs. À l’époque de cette troisièmemue, qui commence à sa seconde année, il a le front bordé d’un blanc roussâtre, la tête et le derrière du cou sont d'un gris nué d'une légère teinte d'olive, et la tache noire des côtés du cou, au lieu d'être bordée de jaune par en haut, l’est de blanc. Le verd de la partie supérieure du corps, des aîles et de la queue est d'une nuance plus terne, ainsi que le jaune qui borde les pennes. La gorge, le devant du cou et la poitrine sont d’une couleur où le jaune, le roussâtre et l’ocre semblent être fondus ensemble; cependant sur la poitrine cette couleur prend un ton plus analogue au brun roux foncé. Les plumes qui revétent le sternum, les flancs, le ventre et le dessous de la queue sont d’un blanc sali d’olivâtre. Quant aux yeux, aux pieds et au bec, ils sont pareils à ce que nous avons déja dit plus haut. Depuis la sortie du nid jusqu'au moment où l'oiseau mue pour la première fois, il a le bec et les pieds bruns. La tache noire des côtés du cou ne marque pointencoreetnes’apperçoit pas du tout. La tête est d’un verd d'olive foiblement nué de DECO: LrEVEA 107 gris; le liseré jaune des pennes des ailes n'existe pas encore seulement les dernières plumes sont terminées par une légère bordure blanchätre; le jaune de la queue n’a encore qu'une légère teinte isabelle, couleur qui est également celle de la gorge et de la poitrine. Quant au dessus du corps, on ÿ voit répandue une foible teinte d'olive; couleur qui teint aussi en une espèce de rayure, les plumes d’un gris-blanc qui recouvrent les flancs, le ventre et le dessous de la queue. Dans cet état, 1l ressemble absolument à la femelle; mais aussitôt qu'il a subi sa première mue, il est déja facile de le distinguer par le gris de la tête qui se prononce un peu plus fortement, ainsi que par le noir de la joue qui occupe déja l’espace qui entoure l'oreille. Quant à la femelle, la figure 1 de la planche 76 la représente fidèlement dans son état parfait; jene la décrirai point, puisque la description que j'ai faite du mâle, dans son enfance, lui con- vient également, comme la figure de la femelle peut aussi SeTVIr pour de uneidée du a dans sa pr emière jeunesse. Ainsi donc dans les premiers instans où ces oiseaux prennent l'essor et partent du nid, il est très-difficile de distinguer le mâle de la femelle; cependant, cette dernière est toujours un peu plus petite, et conserve constamment la même livrée, Dans beaucoup d'espèces d'oiseaux dont les mâles ne dif fèrent essentiellement de leurs femelles que par la taille, on seroit souvent sujet à se tromper, si sans autre examen on s’en rapportoit toujours à cette différence pour indiquer ou recon- noitre le mâle et la femelle, sur-tout quand ils se ressemblent du reste. Car il en est parmi les oiseaux d'une même espèce, comme parmi tous Les autres animaux et parmi nous : les mâles ou les femelles ne sont pas tous exactement de la même gran- deur. Je concois que des êtres d’une petite taille ne peuvent 2 << 108 EL SO MERE CNP ONE E différer entre eux d'une manière fort sensible ; mais enfin, pour que mon assertion soit juste, il suffit qu'ils diffèrent propor- tionnellement à leurs dimensions, et très-certainement cela a lieu entre les oiseaux, et peut-être méme à un degré plüs fort ue chez tous les autres animaux : on ne me niera pas, par exemple , qu'il y a entre deux oiseaux-mouches de la même espèce, et qui diffèrent l'un de l’autre d’une ligne, autant de différence qu'entre deux giraffes dont l'une seroit d'un pied plus haute que l’autre. Mais à cet égard il existe réellement parmi les oiseaux, des disparates bien plus considérables ; car j'ai des individus qui, ayant subi tout leur accroissement, ne sont cependant que moitié aussi grands que d’autres de la même espèce ; et cette différence tient particulièrement au degré d'abondance ou de disette dans laquelle vivent les oiseaux, et se trouve bien plus sensible dans ceux quise nourrissent de graines : aussi j ai toujours remarqué que, dans les cantons cultivés, l'espèce est beaucoup plus grande que dans les déserts arides ; et si des disproportions aussi considérables n’ont pas lieu en Europe, c'est parce que les petits cantons incultes qui s’y trouvent parsemés çà et là, ne sont pas assez éloignés des lieux cultivés pour que les oiseaux ne s'y transportent pas facilement: au lieu que dans nos colonies, pour de très-petites étendues qui s'y trouvent ensemencées, il existe de vastes pays qui ne produisent que des graines sauvages, qui ne sont jamais ui si abondantes ni si succulentes que celles que nous cultivons ; au reste , il y a bien plus de différence réciproque entre les différens terrains incultes , qu'il ne s’en trouve d'un canton cultivé à un autre canton qui l'est aussi. Il s'ensuit donc nécessairement une différence de taille très- sensibleentrelesindividus quihabitentun leuabondanten vivres et ceux qui se trouvent dans un pays où il sont plus rares. Ainsi D ML D LINE 109 donc l’ornithologiste qui n’est pas au fait de cela, et qui, dans un canton où il aura tué deux oiseaux, mäle et femelle, de la méme espèce, et dont ilse sera bien convaincu par l'inspection des parties de la génération ( seul moyen infailliblepourne pas se tromper }), lequel est le mâle ou la femelle, pourra, dans un autre canton éloigné, se tromper, s’il se rapporte, sans autre examen, à la taille seule, pour désigner ou l’un ou l’autre dela même espèce, principalement quand ils se ressemblent par le plumage. L'erreur dans laquelle on peut être induit à cet égard par un apperçu léger, n’a pas lieu seulement pour les oiseaux dont le mâle ressemble à la femelle par ses couleurs, mais peut encore arriver pour ceux qui sont très-différens de plumage ; car dans beaucoup d'espèces les femelles, à un certain âge, prennent le plumage de leurs mâles, et ceci arrive particuliè- rement quand elles ne pondent plus. Il est aussi des exemples où les vieilles femelles de certaines espèces, après avoir pris la livrée de leurs mâles, continuent encore d’être fécondes. Je conseille donc aux voyageurs, ainsi qu'aux personnes qui observent les oiseaux et qui les étudient, de ne pas toujours s'en rapporter simplement aux caractères extérieurs pour désigner leurs sexes, et de s’en assurer plus positivement en examinant les parties sexuelles, moyen qui ne trompe jamais, Il est telle espèce dont j'ai tué, je suis sûr, plus de douze cents individus, et cependant il ne m'est jamais arrivé, quoique reconnoissant au premier coup-d'œil les mâles des femelles, de ne pas m'en assurer plus positivement encore en les ouvrant. C'est à cette persévérance dans des observations répétées mille et mille fois, que je dois de me tromper rarement sur le sexe d'un oiseau et même sur son âge. L’habitude que j'en ai, me fait , au premier apperçu, voir si un oiseau est jeune ou vieux, et s’1l est mâle ou femelle; et me fait encore rapporter à leur 110 HISTOIRE NATURELLE espèce, les variétés d'âge ou accidentelles, quelques différentes quelles paroissent être par leurs couleurs. Au reste, je ne prétends pas donner ce talent comme bien méritoire; mais enfin il n’est peut-être le partage d'aucun autre ornithologiste,parce qu'aucun n a l'expérience que j'ai à cet égard, et n’a tué autant d'oiseaux que moi. L'Oliva mâle est de la taille à peu prés de notre écorcheur; la femelle est un peu plus petite. Ils construisent leur nid dans les buissons et sur les arbres. La ponte est ordinairement de cinq œufs, J'ai trouvé beaucoup de ces oiseaux dans les forêts qui avoisinent la baie Lagoa, ainsi que sur les bords du Gamtoos, du Sondag et du Swarte-Kop; mais je n’en ai pas rencontré près du Cap, ni dans aucun canton de ceux que j'ai visités dans mon second voyage, ac “à r E” At = ni CL eckt rm 2 . UE A 27/2 ) 4 10 ot 2 92, DD à. LLC COUT CARO de luguiuetie de 0772 lots D US OU R CTI ONE 111 1 E SOU LL CL PAO US, N76, FIc 2: J'ar trouvé cette pie-gnièche dans un envoi d'oiseaux qui me fut fait de la Guadeloupe; cependant comme il y avoit dans la même caisse plusieurs oiseaux de Cayenne, et qu’il y a en effet beaucoup de relation entre ces deux colonies, il pourroit bien se faire que cet oiseau füt de la Guianne : en tout cas, il paroit au moins très-certain qu'il est américain. Sa taille est à peu près celle de notre moineau; c’est-à-dire qu'il est aussi gros, car il n’est pas si long, et en tout, sa forme est écourtée, ce qui lui donne un air trapu. Son front est d'un roux ferrugineux qui occupe également tout l'espace compris entre l'œil et les narines, et passe ensuite au-dessus des yeux, en s'étendant par derrière en une espèce de vrai soureil. La tête et les joues sont d’un gris ardoisé; le manteau, les scapulaires , le dos , le crou- pion , les petites et grandes couvertures des aîles, les aîles et la queue sont d'un verd olivâtre. La gorge, le devant du cou et la poitrine sont de la même couleur, mais d’une teinte plus claire cependant. Tout le reste du dessous du corps, jusqu'aux recouvremens du dessous de la queue, est blanchâtre. Le bec, les pieds et les ongles sont bruns. La queue est carrément coupée par le bout; les ailes pliées passent un peu au-delà du croupion. J'ai vu un oiseau de la même espèce dans le cabinet du bailli Boers, à Hasserwoude près de Leyde ; Mauduit en avoit un aussi dans sa belle collection. 11 HISTOTRENATURELRDE Il paroït que cet oiseau est de la même espèce que celui que Buffon décrit sous le nom de verderoux(1), et qu'il donne pour un tangara. Îlest facile, au premier coup-d’œil, de voir d’ailleurs que cet oiseau n est point du genre des tangaras; du reste, la description de son tangara verderoux est absolument conforme aux couleurs de ma pie-grièche à sourcil roux. (1) Æist. naturelle des oiseaux de Buffon , tome VII, page 385, édit. 27-12, le verderoux, seconde espèce moyenne de tangaras. LE PP. “OURS \A,é alu 0 Lis 4 A 4 di. F0 0 @ CPE e . L E coute u. : j < ; Le Le? 7, TER cb ne) TZ de 472 TP P) 0272 ne LH (UE He. à ou ” 1 Cp Fe ER OLA, Da. LE CNOUPIE. : L 5 1 . : ? D. ce l'éfuspréuteice de Lauglis œ é D'ou pe PANCHERE AMI 113 LIE PÙ CHE TD, NP A7 ETC UE Cr oiseau est encore une petite pie-grièche de Cayenne, qui n'a point été décrite, que je sache, par aucun auteur, ou du moins sielle l’a été, elle ne l’est certainement pas parmiles pie- grièches, seul genre où elle auroit dû être placée. Je ne l'ai de mêmepointtrouvée décrite dans le nombre destangaras;oiseaux avec lesquels les savans ont souvent confondu les différentes espèces de petites pie-grièches, notamment celles dont j'ai fait ma troisième section; comme nous l'avons fait remarquer à l'égard de celle que j'ai décrite, dans l’article précédent, sous le nom de sourcirou, et dont Buffon a faitun tangara. Celle-ci est absolument de lamême taille:ellealedessus de latétenoir,ainsi que les aîles et la queue. Les petites etles grandes couvertures des ailes sont de la même couleur; mais toutes sont égayées par une tache blanche qui termine chacune d'elles. Les grandes pennes sont bordées extérieurement d’une ligne blanche qui, sur les trois dernieres, s’élargit davantage. Les deux plumes du milieu de la queue ont une très-petite tache blanche à leur extrémité; pareille tache se voit sur les autres, mais elle est toujours plus apparente à mesure que la plume devient plus latérale; les deux dernières de chaque côté, qui sont un peu plus courtes que les autres, portent de plus, dans le milieu de leurs barbes extérieures, une autre tache blanche. Les Tome IT. P 114 HISTOIRE NATURELLE couvertures du dessus de la queue sont également tachées de blanc. Tout le reste du plumage est d’un gris-noir, ardoisé sur le dos, et d’un ton plus blanchätre sur le dessous du corps. Les petites couvertures du dessous de l’aîle sont blanches. Le bec est noirâtre, ainsi que les pieds; les ongles sont d’un brun jaunâtre. J'ai donné la description de cette pie-grièche dans le plus grand détail, pour qu'elle soit bien reconnue et qu’on nese trompe point à son égard; parce que je la soupçonne beaucoup de ne non être une espèce particulière, mais simplement le jeune âge de la pie-grièche rayée de Cayenne décrite par Brisson, tome IT, page 187, planche 29, fig. 3, et figurée aussi dans Buffon ; N°. 297, fig. 2 de ses planches enluminées, ainsi que dans les Glanures d'Edwards, planche 226. J'ai comparé bien attentivement cette pie-grièche rayée de Cayenne que j'ai dans ma collection, avec celle dont il est question, et je leur ai trouvé des traits de physionomie siressem- blans, que j'ose croire ne pas me tromper dans ma conjecture, d'autant plus que je suis très-certain que l'oiseau que j'ai décrit est un jeune individu, qui porte encore ses premières plumes ; état sur lequel je ne me trompe jamais. Au reste, quelques voyageurs instruits nous apprendront peut-être par la suite si j'ai eu tort ou raison : en attendant nous laisserons à cet oiseau le nom de Fachet par lequel je le désigne, jusqu’à ce qu'il soit décidé à quelle espèce il appartient. D U/"RYOVU SISTEUT ! ne Lu Me NON re NA 770 EIGS 2: V orcr encore une autre petite pie-grièche que j'ai également recue de Cayenne, et qui étoit dans le même envoi que celle de l’article précédent : celle-ci est un peu plus forte, mais ses caractères sont absolument les mêmes ; même forme de bec, de pieds, etmême coupe d'ailes; mais c'est bien certainement aussi un jeune oiseau qui na point encore mué, et qui par consé- quent porte sa livrée de l'enfance. J'avouerai que je ne connois aucune espèce de pie-grièche de Cayenne, et pas même de l'Amérique, à laquelle je puisse, avecuneapparence decertitude, rapporter cet oiseau. Je ne vois dans toutes les descriptions que j ai consultées, que celle de la pie-8 orièche du Canada, décrite par Brisson, ee pag. 171, qui paroit, à la huppe près ,avoir quelques rapports de ressemblance avec lui; mais en consultant les figures qu’on a données de cette pie- one dans l'Orni- thologie de Brisson, tome If, planche 18, fig. 3, et dans les planches de Buffon, N°. 479, fig. 2, je ne reconnois plus les formes de mon oiseau, sur-tout dans le bec, qui, dans la pie- grièche du Canada, est bien plus fort, plus gros et plus épais que ne l'ont ordinairement les pie-grièches, même celles dont j'ai fait ma première division, à plus forte raison celles de la troisième, dont les becs sont bien plus effilés. Si j'avois vu en nature cette pie-grièche du Canada, j'aurois pu très-facilement 2 116 HISTOIRE NATURELLE et du premier coup-d'œil, décider si le Rousset de cet article est le même oiseau dans son jeune âge; mais je n'ai pu con- sulter que les figures que j'ai citées ci-dessus, et qui pourroient bien n'être pas plus exactes que beaucoup d’autres des mêmes ouvrages. Nous nous contenterons donc de décrire seulement cet oiseau en attendant que quelqu'un l'ait vu dans son pays natal, et nous apprenne à quelle espèce il appartient, et si dans un àge plus avancé il conserve les mêmes couleurs que celles que nous allons indiquer. Nous avons déja fait remarquer que cette pie-grièche étoit un peu plus forte que la précédente; au reste, nous renvoyons le lecteur à nos figures , où nous avons fait représenter les deux oiseaux de grandeur naturelle. Le Rousset a le dessus de la téte d’un roux ardent, qui est précisément celui de la nuque de notre pie-grièche rousse mâle. Les joues et la gorge sont d’un noir clair, varié d’un blanc roussäire, ce qui forme une espèce de tigré qui continue sur le haut du derrière du cou, où il forme une espèce de collier. L'espace compris entre les yeux et les narines porte les mêmes couleurs, mais plus finement variées. Le manteau, les scapu- laires, les petites et grandes couvertures des aîles, ainsi que les barbes extérieures de ses dernières pennes, sont d’un roux plus clair que le dessus de la tête, Les premières grandes plumes de l'aile sont encore d'un ton plus foible, pendant que toutes ont leurs barbes intérieures d’un noir lavé dans leur milieu, et sont bordées intérieurement d’un roux fort clair, qui est répandu en zigzag dans toute leur longueur. Le croupion et les couvertures du dessus de la queue sont couverts de plumes soyeuses tres- fines et d’une foible teinte roussätre, qui s'éclaireit encore davantage sur la poitrine, les flancs et les recouvremens du D U & O ÙU SS ET 7 dessous de la queue; la queue elle-même est d'un roux foncé, comme le dessus de la tête, et se trouve un peu étagée par l'effet de deux des plumes les plus latérales de chaque côté, qui sont plus courtes que toutes les autres; les aîles pliées s'étendent à peu près à la moitié de sa longueur. Le bec est d’un noir de corne, ainsi que les pieds et les ongles. Nous ignorons la couleur des yeux, n'ayant vu que la dépouille de cet oiseau. 116 HISTOIRE NATURELLE 1 CA ND RP EMPE CC PE ETES N°. 76. L'uisroiRe des pie-grièches dont j'avois à parler dans ma première division, étoit déja achevée et imprimée quand cette belle espèce m'est parvenue, et par conséquent trop tard pour être mise à sa place; mais comme elle est des plus intéressantes par rapport à ses caractères, qui la rapprochent bien plus encore du genre des pies que celle dont nous avons fait mention sous le nom de pie-grièche rouge à plastron blanc, figurée N°. 65, je me suis décidé à la placer ici, quoiqu'elle appartienne indubitablement à la première section des pie-grièches , où elle doitmême occuper lepremier rang, non-seulement par rapport à sa taille, qui surpasse celle de la pie-grièche de Madagascar, décrite par Brisson et Buffon, sous les noms de vanga (1) et d’écorcheur de Madagascar (2), (espèce qui étoit la plus grande que nous connussions de ce genre d'oiseaux), mais encore par les formes de son corps, de sa queue et de ses pieds, qui ont (1) Ornithologie de Brisson, tome II, page 191, planche 19, fig. 1. (2) Histoire naturelle des oiseaux de Bulfon, tome II, page 93, de l'édition 1-12; planches enluininées, N°. 298. TT C à k Slovire s4). CPfonele “8 e7. L} 7 Co (a Picot) : P a € Pr DD De l'Éuptimete de Leuglis. DE LA GRANDE-PIE-GRIECHE.: 115 une ressemblance étonnante avec les mêmes parties dans les pies, et notamment de l'espèce africaine que nous avons nom- mée piapiac; pendant que son bec est absolument semblable à celui de nos pie-grièches, par les deux crancs de la mandibule supérieure qui manquent aux pies. En consultant la figure exacte que j'ai donnée de cet oiseau, dans sa grandeur naturelle, on sentira facilement les rapports dont je parle. CetteGrande-pie-grièchedoitdonc, dansune histoire générale des oiseaux, prendre naturellement sa place après la dernière pie, ou à la tête des pie-grièches, puisqu'elle semble appartenir en même tems à ces deux genres voisins. Si cependant on trouvoit par la suite d’autres espèces semblables à celle-ci par leurs caractères ambigus, on pourroit en faire un petit genre intermédiaire, qui rempliroit l'espace qui semble séparer les pie-grièches des pies. Cette Grande-pie-grièche est de la taille de notre merie, par la grosseur de son corps; mais elle est plus alongée, par rapport à sa queue pointue qui est aussi longue quele corps pris du bec à l'anus. Sa queue est étagée et présente la forme parfaite d'un fer de lance. Les couleurs de cet oiseau n'ont rien de bien remarquable : c’est un gris cendré des plus uniformes, quiteint généralement tout son plumage, à l'exception d'un trait roussâtre, qui, de chaque côté de la tête, lui forme une espèce de sourcil. Cette même couleur se remarque aussi sur les barbes extérieures de ses grandes pennes, et se voit encore dans quelques parties des bouts de celles de la queue. Le bec est d'un jaune citron; les pieds sont brunâtres et les ongles noirs. J'ignore le pays natal de cet oiseau, que j'ai acquis chez un marchand d'histoire naturelle, à Paris. % 120 HISTOIRE NATURELLE Nous allons donner la description de deux espèces d'oiseaux de genres différens, et qui semblent pourtant tenir l’un et l'autre un peu de celui des pie-grièches ; mais qui cependant en différent trop , d'un autre côté, pour y être placées. OISEAUX HET PTE LT TON Dee 22772 POP DeC Ce OCT 7) D 4 - . (] 7. de le uptuteice De À œecglots 5 C4 DU BEC-D E-F ER. 121 O1 SEAUNX D'ON PAMENGENREMPAROIT SE RAPPROCHERS UN PET D'ENCPELLNUrI DES PIE-GRIECHES DE LA PREMIERE DIVISION. TRI BMAICe DUB CI) EUR N°70; Vorcrunebelle espèce, absolument nouvelle, et dont le genre me paroît neuf, en ce qu'il tient d’un côté un peu à celui des pie-grièches, en même tems qu'il serapproche par un autre, de celui des barbus, et notamment de l'espèce du barbican,auquel il ressemble beaucoup par la force de son bec, sa grosse tête et son corps épais ; enfin cet oiseau appartiendroit bien certaine- mentau genre des barbus si ses pieds, construits d'une manière absolument différente, ne l'en éloignoient; puisqu'au lieu d'avoir, comme eux, deux doigts dirigés en avant et deux par derrière, il n’en a au contraire qu'un par derrière et trois par devant, comme les ont la plus grande partie des autres oiseaux. Ses ailes et sa queue ont aussi plus de longueur que dans les barbus. Tome 11. Q 122 HISTOIRE NATURELLE Cet oiseau est donc encore une de ces espèces ambigues ; qui, se distinguant par leurs caractères mélangés, sont si propres à remplir les petits intervalles qui paroissent séparer les genres les uns des autres, et forment eux-mêmes autant de petits genres isolés et peu nombreux en espèces. Le bec de cet oiseau est d’une largeur et d’une épaisseur remarquable; la mandibule supérieure est très-convexe; elle se bombe dès sa naïssance, se termine en une pointe obtuse, et ses rebords sont échancrés de chaque côté. La mandibule inférieure est unie et fort évasée. La tête est ronde et d’une largeur et d'une hauteur analogues à la force du bec; elle porte une belle huppe composée de ice inégales et étroites, qui s’hérissent de dessus le front en se Cou Da en avant. Les narines sont obstruées par quelques poils roides dirigés en avant. Le cou est gros, le corps épais et robuste; les pieds sont forts et munis d'ongles crochus; les aîles pliées s'étendent plus loin que la moitié de la longueur de la queue; enfin, la queue est composée de dix plumes très-peu étagées, et de manière qu'elles lui donnent seulement une forme un peu arrondie à son extrémité. La langue est petite, triangulaire et collée au fond de la gorge. Après avoir bien établi les caractères, nous allons passer aux couleurs de cet oiseau dont la taille est à peu près celle de notre merle, sinon que le corps est plus gros. La gorge est d'un rouge vif qui, par en bas porte quelques traits jaunes ; les plumes qui la couvrent sontroides et dures. Le milieu du corps est traversé d’une large bande d’un beau jaune, flambé de quelques lignes rouges danslemilieu, et pointilléde noir surles côtés. Le croupion et les couvertures supérieures de la queue sont d’un jaune verdâtre. Les moyennes pennes de l'aile sont D'U BEC 'D'ECFAENTE 129 en partie blanches dans leurs barbes extérieures ; de manière que pour peu que l'aîle se déploie, on apperçoit le blanc qui forme alors autantde lignes blanches. Tout le reste du plumage est d’un noir pur, ainsi que la huppe, dont les plus longues plumes ont près de quatre pouces de longueur et sont creusées en gouttière. Le bec est d'un gris de fer ; les ongles sont noirs et les pieds bleuâtres. Nous ne connoissons pas les mœurs de cette belle et rare espèce, dont je n'ai vu que deux individus: l’un est dans le cabinet de M. Raye de Breukelerwaert, et l’autre chez moi. Ils ont été apportés des îles de la mer du Sud. On peut considérer cet oiseau comme formant la nuance entre les pie-grièches et les barbus; au reste il pourroit se faire qu'il existät dans le pays d'où ils ont été apportés, d’autres espèces analogues à celle-ci, et dont on pourroit par la suite faire un genre peut-être nombreux en espèces. La langue très- courte de cet oiseau me fait soupçonner qu'il ne vit que d’in- sectes. Au reste, il est bien certainement d’un genre nouveau, dont nous ne connoissons aucune autre espèce. 124, HISTOIRE NATURELLE EME CGMEPONMEMENR One NEUGo Emo Nous devons au C. Geoffroy de Villeneuve, la connoissance de cette belle espèce, à laquelle je donne son nom, puisqu'il est le premier, à ce que je crois, qui l'ait rapportée du Sénégal ; contrée de l'Afrique où ce jeune naturaliste a fait un voyage intéressant, par le nombre d'objets rares et précieux qu'il ya recueillis. Beaucoup de naturalistesregardentcet oiseau comme une espèce de pie-grièche, et c’est même sous le nom de pie- grièche huppée du Sénégal qu'il est indiqué dans la collection du Muséum d'histoire naturelle de Paris, où il se trouve aussi bien que dans plusieurs autres cabinets où je le connois. J'ai examiné à peu près vingt individus de cette même espèce, etje crois bien pouvoir assurer que cet oiseau n’est point une pie- grièche; je suis persuadé même que, par ses mœurs, il doit beaucoup différer des oiseaux de ce genre; et d’après les indices que jai eus, par l'examen que j'ai fait sur les différens oiseaux pareils qui m ont passé par les mains, je crois ne pas me tromper dans l’idée que j'ai qu'ils doivent vivre en troupes, comme Îles étourneaux; se nourrir de la même manière, et chercher enfin leur pâture dans les terres humides, où il est probable qu'ils enfoncent leur bec : ce que j'ai présumé d’après une couche terreuse que j ai toujours trouvée sur Le bec detous les individus que J'ai vus de cette espèce. | 1 (Pf < courte: 1". : Jlauche 80 DAT ACTE DE CS or C ) 7 ù LC CO OU e We CA: D C (Ca DA 1° é Do le lus Antec tte À Lange. or de MER RE EN ne MC in WU Puel : , Joue 1. Ylauche 01 fe” [OZ PE DINNEN GS o7. Der of) Per Dans ra ae C? c 4 M2 re De de’ (0e laprirrerre de Langlois. DU GEOFFROY. 129 C’est probablement le crochet très-marqué du bout de la mandibule supérieure du bec de cet oiseau, qui l’a fait prendre pour une pie-griéche; si cepen dant on considérela formedroite, alongée et tirée en avant de ce bec, ainsi que ses côtés applatis, on trouvera qu'il diffère beaucoup de celui de ces oiseaux. Tous ses autres caractères l'excluent encore du genre proprement dit des pie-grièches : nous allons les indiquer, car ils sont trés- faciles à saisir. Une large paupière déchiquetée se rabbat autour de l'œil; une partie des plumes qui se trouvent entre les yeux et le bec s'hérisse en méme tems que d’autres se prolongent en avant, et recouvrent entièrement les narines et la base du bec, qu'elles cachent en grande partie. La tête est ornée d’une huppe molle, qui se rabbat par derrière, et que l'oiseau a la faculté sans doute de relever à volonté. Les pennes de la queue sontioujours égales entreelles, parconséquent elle estcarrément coupée à son extrémité, et les aîles pliées s étendent à peu - près au milieu de sa longueur. Les plumes de l’avant-bec, ainsi que la huppe et les joues, sont d'un blanc pur. La tête et les plumes qui entourent les oreilles sont d'un noir lavé qui approche de la couleur du gris de fer. Le bas du cou par derrière, la gorge, le devant du cou, la poitrine, les flancs, le ventre, les couvertures du dedans des aîles et lesrecouvremens du dessous dela queue, sont d'un blancdeneige.Lemanteau,lesscapulaires et les ailes, sont d'un noir qui, à certain jour, paroït glacé de bleuâtre. Une large bande blanche, qui fait partie des grandes couvertures des aîles et des bords des plus longues scapulaires, ainsi que des dernières pennes les plus proches du corps, et qui finit par tacher seulement le bout de chacune des six pennes suivantes, traverse l'aile dans toute sa longueur. Les deux plumes les plus latérales de chaque côté de la queue, sont entièrement blanches; la troisième a un peu de noir à sa nais- sance, et les autres prennent successivement toujours un peu 126 HISTOIRE NATURELLE plus de noir, et ont par conséquent d'autant moins de blanc qu’elles approchent plus du milieu. Le bec est noir; les paupières sont jaunes, ainsi que les pieds et les ongles. Cet oiseau est de la taille de notre grive; enfin, la planche où je l'ai fait représenter indique sa grandeur naturelle. J'ai vu d’autres individus de la même espèce qui m'ont paru plus petits d'un sixième à peu près; ceux-ci avoient en outre une huppe plus courte; leur blanc étoit sali d’une teinte cendrée, et les paupières étoient aussi moins larges : c'étoient probablement des femelles. Un seul de tous ceux que j'ai vus se trouva encore plus petit que ces dernières ; sa huppe étoit encore moins apparente, et toutes les plumes du manteau et celles des scapu- laires portoient une bordure brunâtre. Le blanc étoit très-sali de cendré, et les paupières ne marquoient point encore : j'ai reconnu celui-ci pour un jeune oiseau. Voyez la planche N°, 81 où je l'ai fait dessiner. Nous avons placé les deux espèces dont nous venons de faire mention à la suite des pie-grièches, en attendant que des renseignemens certains nous mettent à même de connoitre leurs mœurs. % — Joue M . 1, HN V0 ” Ge (24 cube o 7 LOT EPP?) Pe à pi ; £ ? 7e De L 77 1447722222 de 40H AIS € < Zi Le (2 DIU STCR IN: 127 DES, CO UyG,As. TE SA CRE UNE N°. 82. Ox trouve dans l’ornithologie de Brisson, tome II, page 55, la description d'un choucas, figuré planche 2, fig. 3, que ce naturaliste dit se trouver au Cap de Bonne-Espérance, ou qui du moins aété envoyé de là à feu l'abbé Aubry, qui l’avoit dans son cabinet. J'ai vainement cherché en Afrique cet oiseau, que je connoissois, par sa description, avant mon départ pour le Cap; non-seulement je ne l'ai point trouvé dans aucune de mes courses, mais d'après toutes les informations que j'ai prises à son sujet, je n'ai point entendu dire quil ait été vu dans aucun canton de la colonie. Il paroît donc probable qu'on se sera trompé au sujet de cette espèce, comme cela est arrivé à l'égard de beaucoup d’autres oiseaux qui jamais n’ont habité les pays qu'on leur a assignés dans les ouvrages où il en est fait mention: erreur au reste bien pardonnable à celui qui, en Europe, décrit les oiseaux qu'on envoie des pays étrangers sans indication, 128 HISTOIRE NATURE ELLE Ainsi, cette espèce, dont il n'est pas possible de douter de l'existence, puisque Brisson l’a bien vue, habite, à ce qu'il paroït, un autre pays, où au moins un autre canton de l'Afrique que ceux que j ai parcourus, et d'où elle aura été envoyée au Cap de Bonne-Espérance, à celui qui l’a adressée à l'abbé Aubry. Les choucas se réunissant ordinairement en troupes nombreuses, il est plus que probable que l'espèce de celui-ci ne m'auroit pas échappé dans mes recherches, et d'autant mieux encore que, connoissant son existence, Je l'ai cherchée et demandée par-tout à mesure que J'avancois dans le pays. Il est également étonnant que je n'aie point trouvé, dans aucune partie de l'Afrique, une seule des espèces denos choucas d'Europe, pendant que nous y avons rencontré, comme on l'a vu, plusieurs de nos corbeaux, de nos chouettes, et deux espèces de nos pie-grièches; et ceci est d'autant plus remarquable, que nos choucas sont réellement des oiseaux voyageurs, qui, dans leurs courses, parcourent de vastes pays. Nos ornithologistes comptent en France deux espèces de choucas : Brisson a décrit ces deux oiseaux, l’un sousle nom pur et simple de choucas(1), et l’autre sous celui de choucas noir (2). Montbeillard a égale- ment décrit ces deux oiseaux, sous le nom de choucas (5) et de chouc (4); et quoique, d’après Brisson , il donne ces deux ciseaux pour deux espèces différentes, il a remarqué pourtant qu'il yavoitentreeux beaucoup d’analogie, etassez pour pouvoir, dit-il, produire ensemble avec succès. Ceci est d'autant plus vr al, qu'en effet ces oiseaux produisent réellement ensemble ; puis- (1) Ornithologie de Brisson , tome II, page 24. (2) Jbid, page 28. (5) Voyez les planches enluminées de Bufon, n°. 523. (4) j) ZJbid, n°. 822, qu'ils DAEMSETAIC HEIN 125 qu ils sont l'un le mâle et l’autre la femelle, et ne forment point deux espèces. N'est-il pas bien étonnant qu'on se soit mépris sur un oiseau aussi commun, aussi nombreux, et qu'il étoit aussi facile d'ob- server ? Je n’ai pas vérifié une fois, mais cent, que ces oiseaux étoient tous deux de la même espèce; enfin, que l’un étoit le mâle et l’autre la femelle, J’aitué, tanten Lorraine qu en Flandre plus de deux cents choucas, et quelquefois j'en ai abattu huit à dix du méme coup de fusiltiré dans leurs troupes nombreuses, et toujours il s’en trouvoit dans le nombre d’'entièrement noirs, et d’autres dont la tête et le cou étoient grisâtres. N'ayant jamais manqué de vériler leur sexe, jai constamment vu que ces derniers étoient des femelles et les autres des mâles. Il n’est certainement pasun habitant de campagne, et pas un enfant des cantons où se rassemblentces oiseaux,quin’eussent puinstruire nos savans de ce que j'avance ici, et ce dont je suis très-certain; mais il n° appar tenoit qu à ceux qui prétendoient nousinstruire, de nous égarer au contraire. Non seulement je n’ai point trouvé dans la partie méridionale de l'Afrique où j'ai pénétré, aucun des choucas dontnous avons fait mentivn, mais jen yai point vu d'oiseaux qui, à proprement parler, appartiennent à ce genre, à moins que je n’eusse voulu, à l'exemplede nos Ale. ornithologistes, ycomprendre comme eux, plusieurs espèces qui très-certainement ne sont point des choucas; tels sont le choucas chauve de Montbeillard (1), son colnud (2), le choucas des Philippines de Brisson, ou le balicase de Montbeillard (5), qui tous n'appartiennent 1) Voyez les planches enluminées de Euffon, No, 521. 2) Ibid, Ne. 600. 3) Ibid, No. Co3. Tome II. R ( ( ( 130 HISTOIRE NATURELLE absolument pas à ce genre d'oiseaux. Une seule espèce paroît au Cap approcher des choucas, oiseaux qui, au reste, sont bien du genre des corbeaux; mais comme elle tient de bien plus près à une autre grande famille d'oiseaux très-abondans en Afrique, et qui y remplacent nos étourneaux par leurs mœurs, nous la placerons à leur tête. Avant nous allons décrire une magnifique et rare espèce de choucas des Indes, à laquelle j'ai donnélenomdeSicrin, etque j'aiacquise chez un marchand d'histoire naturelle. J'ai vu à Hasserswoude, près de Leyde, dans la belle collection d'oiseaux de M. Boers, bailli du lieu, et parent de mon respectable ami Boers, le fiscal du Cap, un autre oiseau de la même espèce, et ces deux individus sont les seuls que j'aie vus. Le Sicrin est une espèce absolument nouvelle, et dont aucun naturaliste n'a fait mention encore; je l'ai placé parmi les choucas, parce que ce sont les oiseaux desquels je trouve qu'il se rapproche le plus, pour les formes de son bec, de ses pieds et de son corps. Au reste, si par la suite quelque voyageur nous apprend ses mœurs, que nous ignorons totalement, on lui don- nera une autre place, si on juge qu'elle lui convienne mieux. Quant à moi, je le crois un vrai choucas, et cela pour l'avoir comparé attentivement avec tous les oiseaux de ce genre; Je trouve même qu'il ressemble tellement au choquart (1) ou choucas des Alpes, que si on lui retranchoit les six crins et la huppe qui le caractérisent si bien, on en feroit absolument le même oiseau; il est aussi de la même taille, mais il m'a paru un peu plus gros de la poitrine : il est vrai que, n'ayant vu cet oiseail qu'empaillé, il pourroit se faire qu'il ne düt sa rotondité qu'à une plus grande extension de la peau; cependant elle ne ma mo QG) Ornithologie de Brisson, tome Il, planche 1, fig. 2. DIU NSYMCEAMIUN, Ke pas paru excessivement bourrée, puisque la peau n’étoit pas trés-tendue. Le bec est absolument semblable aussi à celui du choquart, sinon qu'il est un peu plus pointu et plus épais à sa base. La queue est de même carrément coupée par le bout, c'est-à-dire, que toutes ses pennes sont aussi longues les unes que les autres. Les ailes pliées s'étendent aux deux tiers de la longueur de la queue, qui a dix pennes. Cet oiseau est remarquable par les crins ou longues plumes sans barbes qui ornent les côtés de sa tête, (à peu près comme dans l’espèce d'oiseaux de paradis que Buffon a nommée le sifilet ), et par une belle huppe flottante qui, se couchant en arrière, ombrage la tête. Les pieds sont conformés comme ceux du choquart; le bec est d’un jaune de citron, et prenduneteinte d'orange sur son arête supérieure et vers les narines; celles-ci sont couvertes de poils ou plumes déliées, qui se dirigent en avant comme chez tous les oiseaux du genre des corbeaux. Les pieds et les ongles sont noirs. Le plumage du Sicrin est par-tout d’un noir luisant, et chan- geant sur les aîles et la queue en un vert sombre. [a huppe est composée de plumes fines et déliées; elle est fort ample; sa cou- leur est noire en dessus, mais de chaque côté, dans la partie où elle s'applique à latète, se remarque une ligne rousse qui en fait partie. Les trois crins ou filets qui partent de chaque côté en se dirigeant en arrière, sont implantés précisément au-dessous de l'œil, un peu sur Le côté, enfin, entre l'œil et les oreilles : celui de dessous est le plus court, il a sept pouces de longueur; sa couleur est roussâtre dans presque toute son étendue. Le second est de trois pouces plus long; il est noir depuis sa nais- sance jusqu un peu au-delà de sa moitié, et roux du reste. Le troisième est le plus long de tous; il dépasse la queue de sept y) 4 132 ÉLS MOPRE , N'AMDU/REMCRE pouces, et n'est roussätre qu à sa pointe. Ces filets ne sont, à proprement parler, que de vraies plumes, ou, pour mieux dire des tiges de plumes, car elles sont absolument sans barbes : on n’en appercoit même pas en les regardant au microscope. Ayant arraché à l'oiseau un de ces filets pour l'examiner et m'assurer de sa nature, je trouvai que toute la partie qui s’implantoit dans la peau avoit à peu près une ligne et demie de long, et cette partie étoit absolument de la mème nature qu'elle l'est dans tous les autres oiseaux, et formoit un tuyau creux : en dessous, ce filet étoitsillonné, dans toute sa longueur, par une petite rigole qui le partageoït en deux parties égales ; ilétoit aussi sillonné en travers par de petites excavations placées à une ligne les unes des autres, et qu'on sentoit fort bien en y passant les doigts: en dessus, toute la côte étoit luisante et polie, et comme gauffrée en largeur ; cette gauffrure étoit très-visible et pouvoit aussi se sentir avec la main. Il est plus que probable que ces oiseaux ont la faculté de redresser ces filets, et par conséquent de les resserrer contre le corps dans l'action du vol, dont ils géneroient les mouvemens s'ils balotoient au gré des vents : je présume du moins cette faculté, d'après la longueur du tuyau qui s’implantoit dans la peau, et qui étoit trop grand pour ne pas faire soupçonner qu'il devoit pénétrer dans un muscle extenseur, propre à le faire mouvoir au gré de l'oiseau : ce qui me le donnoit encore à penser, c'est que dans la partie de la joue où ils entroient, toute la peau étoit plus épaisse et plus dure que par-tout ailleurs, et qu'on y remarquoit très-distinctement une cavité profonde où se logeoit le tuyau du filet que j'avois arraché, comme on le voit sur la métacarpe et le croupion de tous les oiseaux, quand on leur détache une penne soit de l'aile ou de la queue. Je ne hasarderai point de désigner l'usage dont ces barbes peuvent DUT ESCORT N; 135 être à cet oiseau, ni quel buts’est proposé la nature dans cette singulière production, que je regarde, au reste, comme un simple ornement. Combien de fois nos philosophes ne se sont- ils pas trompés etn'ont-ils pas égaré lesautres hommes, lorsqu'ils ont voulu donner raison des causes que la nature avoit sans doute destinées à rester cachées aux foibles humains, d’un côté trop au-dessous de sa puissance pour les concevoir, et d’un autre trop audacieux peut-être pour être initiés, sans danger, dans ses mystères! O nature! il ya longtems, hélas! que les aveugles mortels auroient détruit ton ouvrage, et troublé cette belle harmonie de l'univers s'ils avoient pute suivre dans ta marche ette deviner un seul instant! 134 HISTOIRE NATURELLE DL SE AU XX QUI VIVENT EN TROUPES ET QUI PAR LEURS MOŒEURS ET PAR LEURS CARACTÈRES, SE RAPPROCHENT DES CHOUCAS, DES ÉTOURNEAUX ETVD'E S M 'ATR°TAIINIS: BE HO EP EUNON EN N°. 83 ET 84. Nous avons déja observé, dans l’article précédent, que nous n'avions trouvé au Cap de Bonne-Espérance aucune espèce d'oiseaux qui puisse se rapporter à nos choucas, proprement dits; cependant celui dont il est question ici paroît s'en rappro- cher un peu, mais comme il tient cependant de bien plus près à un ordre d'oiseaux dont les espèces, très-nombreuses dans les déserts de l'Afrique, semblent remplacer, dans cette partie du monde, notre étourneau, qui ne s y trouve pas, quoique Montbeillard l'assure, je ne sais d’après quelle autorité, nous le laisserons parmi ceux-là en le plaçant à leur tête, comme 83 Loutche Pf = TR ST) Pe ?) Pie ot © ? 2 btecht C a, C DE 7 0) Q NC 6) D Le ? ? QUFLOLA . 7 ce de ) 2777 (2277727 ?. e De Chcxlp = Déree 2 ? euglots Le ? 5 2e lolueptenetie e — € DUR O’UVP*'E N'N°E, 125 participant également et des couchas et des étourneaux, oiseaux entre lesquels on trouve d’ailleurs quelques traits d’analogie. L'un de nos plus grands ornithologistes a assigné, pour caractère distinctif du genre de l'étourneau, d’avoir le bec un peu plus large qu'épais, et obtus. Si la nature avoit, en effet, borné rigoureusement à cette forme de bec, ceux de tous les oiseaux étourneaux, certainement ceux dont nous parlerons après avoir décrit trois espèces qui paroissent se rapprocher encore plus que les autres des choucas, n’appartiendroient pas au genre de l'étourneau, et notre étourneau ne seroit lui-même pas vérita- blement un étourneau, puisque son bec n'a précisément point les formes prescrites, au lieu qu’on les trouve parfaitement chez plusieurs oiseaux de l'Amérique et des Indes, lesquels volent par troupes innombrables et fréquentent les bestiaux, comme nos étourneaux, et sont bien réellement aussi des oiseaux du même genre, mais qui paroissent se rapprocher des troupiales. Au Cap de Bonne-Espérance et dans les déserts de l'Afrique, les étourneaux dont nous avons à parler semblent, par la forme de leurs becs, tenir davantage au genre des merles et de notre litorne (1), ce qui a déterminé Brisson, qui ne connoissoit pas leurs mœurs, à lesrapporter parmi cesoiseaux. Notre étourneau paroît aussi se rapprocher davantage des merles que ceux d’'A- mérique : ceci n’a pas empêché nos méthodistes, si scrupuleux quelquefois dans l'examen de certains caractères dont ils ont fait choix à leur gré, de séparer notre étourneau des merles ou des grives, pour le mettre parmi ces oiseaux d'Amérique à becstrès-applatis et larges du bout; pendant que, dans plusieurs cas, ils ont donné ces mêmes oiseaux pour des merles, et sou- vent encore pour des troupiales. Ceci prouve combien chaque (1) La litorne est une grosse grive de notre pays, qu'on trouve en automne en très grandes bandes , mais elle ne vit pas toujours en troupes comme les étourneaux. 136 HISTOIRE NATURELLE méthodiste a su rejeter ou admettre à propos certains carac- teres, suivant le besoin qu'il en a eu pour classer les espèces dans les différens genres où il vouloit les ranger. [ci l’on voit la forme du bec et des pieds uniquement servir de caractèrés pour placer tel oiseau parmi tels autres; là c’est une huppe qui a fait exclure une espèce de tel genre, tandis que plus loin encore c'est la forme ou la longueur de la queue qui détermine à admettre une espèce dans un genre où elle n’appartient certai- nement pas, enfin, par-tout on voit la nature restreinte aux caprices du méthodiste, et jamais sa règle marcher d'accord, non seulement avec la nature, mais bien rarement avec elle- même. Tous les oiseaux dont nous allons parler n'ont point le bec applati et élargi par le bout, comme l'étourrieau-pie de Buffon, N°. 280 de ses planches enluminées, et qu'il dit faussement se trouver au Cap (1), ni comme le stourne (2) et la blanche-raie ou étourneau des Terres Magellaniques (3), et n'en sont pas moins des étourneaux, du moins le sont-ils bien certainement par les fonctions que la nature leur a départies, seules connois- sances qui, jointes aux caractères extérieurs, peuvent nous guider d'une manière plus certaine pour assigner invariable- ment la place que doit occuper dans la série des êtres chaque espèce d'animal; car la nature, libre dans sa marche, n’a pas connu de bornes, et ne s’est pas restreinte, dans l’organisation des espèces, au point de donner si précisément des formes = (1) Cet oiseau est figuré dans Edward, planche 187, et décrit par Brisson , tom. II, pag. 446, pl. 41, fig 3, qui le donne également pour être du Cap de Bonne-Espé- rance. Albin parle aussi du même oïseau , sous le nom de contra du Bengale, pays qu’il habite en effet. (2) Voyez les planches enluminées de Buffon , N°. 256, (3) Ibid, No, 113. parfaitement D'U MR ONU! PILE NaNrE; 197 parfaitement semblables aux animaux du méme genre, de maniére qu'on puisse croire qu'ils aient été jetés dans le même moule; loin de là, elle a varié à l'infinises modèles, quelquefois à la vérité, par des nuances imperceptibles, mais souvent aussi par des traits hardis ; comme si elle avoit voulu nous faire connoître sa puissance, et nous prouver qu'elle avoit plus d'un moyen pour parvenir au même but. Au reste, si nous considé- rons attentivement et avec réflexion, les formes qu’elle a employées pour caractériser chaque animal, nous trouverons toujours un accord admirable entre les moyens ou les facultés de chacun d’eux, et les fonctions qui leur sont attribuées, et la nature du lieu qu'ils habitent. Les étourneaux d'Amérique, destinés à vivre dans les savannes noyées du Nouveau-monde, ont des becs évasés et applatis par le bout, pour avoir plus de facilité à fouiller ia vase ou les terres humides dans lesquelles ils cherchent leur proie, tandis que ceux des déserts arides de l'Afrique ont le bec plus pointu, plus propre enfin à piocher un terrein plus solide. Il en est de même des perdrix d'Afrique, qui, vivant prin- cipalement d'une espèce de petite bulbe qu'ils déterrent à coups de bec, ont la mandibule supérieure beaucoup plus longue que l'inférieure et en forme de pioche, et n’en sont pas moins des perdrix cependant, quoique leur bec soit un peu différent de celui de nos perdrix d'Europe; il en est de même de ces oiseaux d'Amérique connus sous le nom de tinamous; lesquels sont bien effectivement des perdrix aussi, malgré leurs becs alongés et amincis, quoiqu en dise Buffon, qui, je ne sais par quels caracteres, leur trouve des rapports avec les outardes, et ne les regarde pas comme des perdrix (1). (1) Voyez dans Buffon la description de quatre espèces de ces tinamous, et leurs figures dans les planches enluminées de son ouvrage, N°. 476, 828 et 829: a Tome LL, 138 HISTOIRE NATURELLE Etudions les mœurs des animaux; suivons-les dans leur vie privée et dansleurs habitudes, c'est alors que les rapports qu'ils ont les uns avec les autres ne nous échapperont pas, et que nous connoîtrons leurs vraies places, celles que la nature leur a assignées. Beaucoup de nos modernes savans, je le sais, ne goüteront pas ces préceptes, qui ne s'accordent peut-être pas avec leur grand savoir. Au reste, il est naturel de voir des hommes qui n’ont besoin que d’un jour pour se mettre au fait d'une science qui coûte à d’autres des années de travail, rejeter des moyens qui demandent quelques études et beaucoup de persévérance. En effet, à quoi sert-ilde se donner tantde peine, quand la science leur coûte si peu à acquérir? Ces êtres privilé- giés et propres à tout ne devroient-ils pas, pour le bonheur et la prospérité de l espèce humaine, nous apprendre comment on devient, d’un jour à l’autre, un savant ornithologiste, un grand zoologiste, un profond antiquaire, etc. etc. ? Il suffit, en effet, à ces hommes universels, d'obtenir un emploiqui deman- de ces connoïssances, et aussitôt, sans les avoir jamais étudiées, ils vous les enseignent, comme par miracle et par un enchan- tement qui tient vraiment du prodige. Abaissons-nous et prosternons-nous devant ces étres doués d’un entendement aussi surnaturel, et dont le grand mérite n’étonne sans doute que les esprits assez bornés pour avoir besoin de consommer leur vie à s'instruire d’une seule science. L'oiseau à pennes rousses, que, par contraction j'ainommé Roupenne, est bien la même espèce que celle qu'a décrit B:isson sous le nom de merle du Cap de Bonne-Espérance (1). Mont- beillard a aussi placé cet oiseau parmi les merles, et le décrit (1) Ornithologie de Brisson , tome Il, page 309, planche 23, fig. 2, la cinquantc- deuxième grive. DU ROUPENNE. 130 sous le nom de jaunoir du Cap de Bonne-Espérance (1) : « Ce merle d'Afrique, dit-il, a l'uniforme de nos merles d'Europe, du noir et du jaune; de-là son nom de jaunoir. » Il faut bien se croire en droit d'abuser du don de faire des phrases, pour comparer le roux ardent des pennes de l'aile d’un oiseau au jaune citron du bec d’un autre; pour en conclure qu’ils ont le mème uniforme; et puis cependant, dans la description de ce méme oiseau, convenir que ce jaune est plutôt du roux; c’est, en effet, bien du roux, et du roux très-foncé, qui teint les onze premières pennes de l'aile de chaque côté, et non du jaune. Ainsi j'ai cru pouvoir changer ce nom de jaunoir en celui de Roupenne. Du reste, cet oiseau est entièrement noir; mais d'un noir changeant en vert sur le dessus de la queue et des aîles, et d’un noir luisant sur le dos. Le ventre seul et la queue en dessous sont d’un noir mat; les pennes rousses de l'aile sont terminées de noù-brun; le bec, les ongles et les pieds sont noirs; l'œil est brun, et l’aîle pliée s'étend vers le milieu de la queue. Cette description convient au mäle, dont la taille est celle de notre grosse grive ou drains. La femelle est un peu plus petite; son noir est moins lustré, et le roux de ses premières pennes est aussi moins foncé; mais ce qui la distingue particu- lièrement, c'est que, comme notre choucas femelle d'Europe, elle a la tête, le cou et le haut de la poitrine grisâtres, et flambés de quelques traits noirs, distribués en long sur le milieu de chaque plume. Voyez les planches de cet ouvrage, N°. 84 _ Ces oiseaux sonttrès-communs au Cap de Bonne-Espérance, (1) Histoire naturelle des oiseaux de Buffon, tome VI, page 52, 'de l'édition in-12; planches enluminées, N°, 190, D 2 140 HISTOIRE NATURELLE et notamment dans toute la colonie; ils volent en troupes innombrables, fréquentent les jardins fruitiers, et sur-tout les vignobles, où ils causent un grand dégat, parce qu'ils sont très- friands de raisins et de fruits; pourles conserver, les colons sont obligés de faire faire continuellement une sévère garde par leurs domestiques, qui écartent ces dangereux voisins à coups de fouet et de fusil; et s'ils manquoient à cette cérémonie, ils ne récolteroient rien, parce que, dans la saison où le raisin mürit, ces oiseaux se rassemblent dans les vignes en troupes de quatre ou cinq mille individus, et peut-être davantage; mais il est cer- tain que toujours ils sont en grand nombre. Le territoire de Constance et des environs, par rapport à leur proximité des montagnes, sont très-tourmentés par ces oiseaux, quise retirent tous les soirs etnichent dans les fentes des rochers, où on trouve tous leurs nids posés les uns à côté des autres; il m'est arrivé à la rivière Gamtoos de dénicher une fois plus de mille de leurs œufs, que nous mangeâmes et que j'ai trouvés très-bons. La couvée est de quatre, cinq et quelquefois six œufs, et la plupart des femelles font deux pontes par an, ainsi, on ne doit pas s'étonner de la grande multiplication de ces oiseaux, qui d’ailleurs sont un mets très-délicat, sur-tout dans le tems des fruits cultivés ou sauvages, car dans les déserts ils se nourrissent des différentes baies que produit le pays; mais j'ai remarqué que ceux qui se nourrissoient de raisins étoient infiniment meilleurs. Outre le fruit, ces oiseaux cherchent leur proie à terre, mangent les insectes et les vers, et suivent les troupeaux comme les étourneaux. Les colons du Cap nomment cet oiseau bers-spreuw (étourneau de montagne), ou rooye-vlerk-spreuw (étourneau à aîles rousses }. Je n'ai jamais rencontré cette espèce à la côte ouest plus loin DU ROUPENNE. 141 que les montagnes du Kamis; en revanche, elle est très-com- mune et fort abondante sur toute la côte de l’est et en beaucoup d’endroits dans l’intérieur des terres, et notamment à la rivière Gamtoos, où j'en ai vu des bandes si nombreuses, qu'il m'y est arrivé d’en tuer trente-deux d'un coup de fusil. J'ai cru inutle de donner ici une description plus détaillée de cet oiseau, d'autant que Brisson a décrit le mâle avec son exactitude ordinaire. D'ailleurs, un coup-d’œil sur les figures que j'ai données du mâle et de la femelle, suffira pour les connoître parfaitement. Je remarquerai seulement que le Rou- penne a douze plumes à la queue, que les cinq de chaque côté sont étagées et qu'elles forment un fer de lance, un peu arrondi cependant par le bout, au lieu d’être très-pointu, parce que les deux plumes du milieu débordent à peine les deux qui les suivent. Quand ces oiseaux volent ou sont perchés sur lesarbres, ils jettent de tems à autre un cri : pillio, pillio, ou kouëk, kouëK; et gazouillent absolument comme nos étourneaux. Nous allons donner, dans les deux articles suivans , la description de deux autres oiseaux étrangers à la partie de l'Afrique que j'ai parcourue ; et qui semblent beaucoup se rapprocher de celui-ci par leurs formes. ce 142 HISTOIRE NATURELLE ÉVOUL A TT AN UE & N°85; LE nom d'Eclatant convient sans doute à beaucoup d'oiseaux des pays chauds; mais comme il en faut un pour distinguer cette espèce nouvelle, autant vautle lui donner qu à toutautre; d'autant plus que son plumage, par sa richesse et son brillant, est en effet un des plus éclatans. Il domine sur toutes les plumes de ce bel oiseau, un ton vert nuancé de bleu, et de pourpre enrichi d’or; il semble enfin que toutes les couleurs fines aient été broyées et amalgamées de manière que chacune d'elles reparoisse à un certain jour et change de ton par les divers points de vue d’où on le considère, et suivant que le jour frappe plus ou moins directement sur les différentes parties de son plumage, qui au soleil est éblouissant. Dans le point de vue où j'ai fait représenter l'oiseau, le jour frappant directement dessus, le sommet de la tête et le cou par derrière sont d'un beau vert qui imite le brillant de l’'émeraude; le bas du cou où se termine ce vert luisant, est comme ceint d'un cordon pourpre étincelant d’or, qui s nl un peu sur les scapulaires qui sont d'un vert cuivreux jaunâtre, ainsi que la gorge, le cou par devant et la poitrine. Les joues jettent un feu pourpre violâtre, le dessous du corps dans l'ombre paroît — € 9 oJoute 2. É Phanche 85 TE Luce Pooruol) Pr (LR Sense 74 cuire AC) | € 4 : RE ( CAC CT € . D ; à ) 24 ce l'Aupienerse ce laugh. 3 L « D'EN L'E-C'DL AT'ATN T 149 alors noir, mais est réellement changeant aussi en vert cui- vreux. Les plus petites couvertures du dessus de l'aile et celles qui avoisinent le poignet, sont d’un beau bleu d'acier poli, ainsi que les couvertures du dessus de la queue; les grandes couver- tures des ailes sont d’une couleur de cuivre-rosette pointillé d’or. La queue, très-étagée, est d’un vert canard, changeant en pourpre ou en violâtre. Trois des moyennes pennes de l'aile, étant en partie blanches, forment une barre de cette couleur qui longe l’aile. Toutes les autres pennes sont d’un vert chan- geant dans leurs barbes extérieures et noirâtres en dedans et par dessous, ainsi que le revers de la queue. Le bec et les pieds sont noirs; les aîles pliées passent à peine la naissance de la queue. J'ai placé cet oiseau à la suite du Roupenne, parce que c’est l'espèce avec laquelle je trouve qu'il a le plus d’analogie, car il lui ressemble entièrement pour la forme et la taille. Quant à ses mœurs, je les ignore absolument; mais je parieroïs que cette espèce vit en troupes comme la précédente. J'ignore de même le pays d’où elle a été apportée; mais je me tromperois bien fort si elle n’étoit pas africaine. Voilà deux conjectures que j'ose hasa:der : avec le tems quelques voyageurs les confirmeront, ou nous apprendront plus positivement ce qu'il en est. Cette espèce est tirée du superbe cabinet de M. J. Temminck, à Amsterdam. 144 HISTOIRE NATURELLE IE CH'O'L Œ@A DORE: N°66! Au premier coup-d'œil, il seroit facile de confondre l'oiseau de cet article avec le précédent, auquel il ne le cède en rien pour la beauté de son plumage, qui est tout aussi brillant, aussi riche et aussi varié : on pourroit donc, d’après un léger apperçu et sans examen, prendre facilement l’un pour une variété de l’autre. Si cependant on veut considérer attentivement les caractères qui les distinguent, on sentira qu'ils appartiennent absolument à deux espèces distinctes et séparées. Non seule- ment le premier est plus fort dans ses proportions, son bec plus épais et ses pieds plus robustes; mais un caractère indélébile et que le climat ne change pas, lequel est bien différent ici, c'est que la queue est plus courte et composée de plumes égales entre elles à peu de chose près, les latérales n'étant que d'un demi- pouce plus courtes que celles du milieu; au lieu que l'éclatant, comme nous l'avons dit, a la queue très-étagée. Nous observe- rons de plus que les tarses de ce dernier sont aussi plus alongés. Quant aux couleurs, le Choucador n’a pas la barre blanche qu'on remarque à l’aîle de l’autre; mais du reste elles sont à peu près les mêmes : on y trouve cependantquelques différences sur-tout dans leur placement; ce que la description détaillée que nous allons en donner prouvera d’une manière plus sensible. Le ue a, Planete 86. 77 ) / ) ; k £ ee , ef. 2 ace (7 euol) SL 2e re 9 oO Passar0 27/2 ON) EE LOllCTC/Of.. 2, ; L ? 2. Ce J e «uptuuere e ali DU GO UC À D'O 145 Le Choucador a la tête, le derrière et les côtés du cou, ainsi que le poignet de l’aile, d’un vert doré très-brillant, les scapu- laires et le manteau sont d’un or pur des plus éclatans; les grandes couvertures des aîles sont d'un bleu d'acier poli, relevé de pourpre, variant du bleu d'outremer en un vert foncé d’émeraude ; les pennes des aîles, dont le fond est d’un noir pourpré, sont à leur origine d'un bleu violâtre changeant en pourpre, qui se termine par une riche couleur d'or le plus pur, couleur qui borde également les remiges dans leurs barbes extérieures; la couleur de cuivre-rosette se voit sur toutes les plumes de la queue, où elle semble répandue en une espèce de poussière fine, sur-tout sur celles du milieu, les latérales étant bordées d'un vert sombre qui, sur leurs extrémités, prend une belle nuance de bleu ou de violet, suivant qu'on varie leur position. Le devant du cou, la poitrine et le dessous du corps sont d'une couleur d’or violâtre, semblable à celle des scapu- laires, mais plus brillante cependant sur les parties hautes. Les couvertures supérieures et inférieures de la queue, ainsi que le bas-ventre, sont d'un vert sombre; le dessous de toutes les pennes est noir. Cette espèce est tirée du cabinet de M. Faye de Breukeler- waert, qui, en ayant deux individus, a eu la bonté de men donner un. J'ignore de quel pays ils ont été apportés. Tome IT. T CE 146 HISTOIRE NATURELLE,S WHEN ED LDORE No C'esr Brisson qui le premier nous a fait connoitre cette belle et rare espèce, dont il a fait sa cinquante-quatrième grive, et qu'il décrit sous le nom de merle vert à longue queue du Sénégal (1). Montbeillard a publié aussi, dans l’ornithologie de Buffon, la description de cette même espèce, sous le nom de Vert-doré, et en donne une figure très-imparfaite, qu'on peut voir N°. 220 des planches enluminées du même ouvrage. Je dis que cette figure est très-imparfaite, parce que non-seulement elle ne rend pas la couleur de ce bel oiseau, mais ne présente même pas du tout la forme de sa queue. Au reste, il paroïît que l'individu qui a servi de modèle pour la peinture de cette figure étoit très-défectueux; car non-seulement la figure est mauvaise, mais la description n’est pas exacte. Cependantnousne pouvons douter un seulinstant que l'oiseau de cetarticle ne soit le même que celui des descriptions que nous venons de citer. Comme j'ai été à même de voir cette espèce dans son état parfait, J'en donnerai une description plus vraie et une figure plus exacte. Je conserverai à cet oiseau le nom de Vert-doré, vu qu'il lui (1) Ornithologie de Brisson , tome Il, planche 31, fig. 1. de. ne 7 ) C7. leche Thot) 72 H 2 ?.. De l Aupriuerce del Guogtors. = € (Lte " « Phanche ad Cfeute D'U:Y ER TDORÉ 147 convient : quant à celui de merle vert à longue queue, du Sénégal, nous le réformons, parce que cette espèce n est pas un merle, et qu’elle n’habite pas exclusivement le Sénégal, puisque je l'ai trouvée vers l'extrémité du pays des Grands *Namaquois, contrée qui est très-loin du Sénégal. Le Vert-doré, par ses caractères physiques et moraux, doit être placé à côté des espèces dont nous avons fait mention dans les articles précédens et notamment près des deux premières, qui ont aussi leurs queues étagées. Il a, à la vérité, la queue beaucoup plus longue; ainsi, nous eussions dû commencer peut-être cette série d'oiseaux par l'espèce du Vert-doré, puis l'éclatant, le roupenne; et, en descendant ainsi successivement jusqu'aux dernières espèces de ce genre dont nous avons à parler encore, et qui ont la queue plus courte, nous fussions parvenus aux grives et aux merles proprement dits; genre d'oiseaux qui, par leurs mœurs, paroissent bien tenir un peu aux étourneaux par l'espèce de la litorne, qui, quoiqu'elle ne vive précisément pasentroupe, ne laisse pas que de s’assembler en très-grand nombre, pour parcourir ensemble et de com- pagnie le cercle de leur migration. C'est ainsi que, dans la nature, tout est lié par une gradation successive des rapports qui se trouvent entre les espèces et les genres, souvent même les plus éloignés, et qui tous tiennent les uns aux autres par des nuances plus ou moins fortes et souvent imperceptibles. Il ne s’agit donc, pour completter l'histoire des animaux, que de rassembler toutes les branches éparses de cette grande chaîne d'êtres différens; bien recon- noître leurs places , et en rejoindre après tous les anneaux dispersés sur la masse de l’univers entier. Mais cette grande tâche ne peut étre que l'ouvrage du tems, et n'appartient pas à me hk 148 HISTOIRE NATURELLE un seul homme; du moins il est impossible au même et de rassembler les matériaux et de bâtir l'édifice. Que chacun de nous se contente donc de ramasser de son côté et des matériaux et des faits, et qu’il ne prétende pas, d'après quelques observa- tions isolées et détachées, prescrire la marche de la nature. Commençons enfin par les fondemens, avant de couvrir le toit de la maison; car c'est ainsi que se perfectionne tout édifice qu’on ne veut pas voir crouler bientôt. Ramassons donc les pierres, sortons-les brutes de la carrière, mais gardons-nous bien de les polir; n'en retranchons pas même les rugosités ; présen- tons-les, enfin, telles que la nature les a formées, et sur-tout voyons bien avant d'établir; et ne voyons pas de telle manière, parce que tel a vu ainsi, ou parce que nous ne voulons pas voir comme tel autre a vu. Enfin, voyons d’abord des yeux et non de l'esprit, et nous verrons mieux. Je m'explique peut-être mal; mais, enfin, je voudrois que l’homme qui observe füt absolument neuf, et oubliât un instant tout ce qu’il sait des observations d'autrui sur le même objet. Tant d'hommes ont travesti la nature en voulant la décrire, qu'il faut croire qu'il est plus difficile qu'on _ne pense de la voir telle qu'elle est! Revenons à l'oiseau dont il est question, le Vert-doré : le mâle est, pour la grosseur de son corps, de la taille à-peu-près de notre choucas, mais il est en tout bien plus long, puisque sa queue seule a près de quinze pouces de longueur , ou une fois et demie celle du corps : du moins les deux plus srandes plumes de la queue ont cette étendue; les deux suivantes ont quatre pouces de moins, et les autres sont successivement de près de deux pouces moins longues, et cela jusqu'à la dernière, qui n'a tout au plus que cinq pouces; enfin, leur nombre est de douze, et la queue étalée a la forme à-peu-près de celle de notre pie. Les aîles sont trées-longues et dépassent le croupion de LA DU VERTDOR É. 149 quatre pouces, quand elles sont serrées; elles ont, enfin, huit pouces de longueur. Cette proportion de l'aile pourroit faire soupconner que le Vert-doré de Montbeillard ne seroit pas de la même espèce que celui de cet article; car il dit positivement que le vol de son merle vert-doré ne répond pas, à beaucoup près, à la dimension de sa queue, puisqu'elle est à proportion moindre que celle de notre merle d'Europe, qui, quoique beau- coup plus petit, a les ailes presque aussi longues. Les aïîles du merle d'Europe ont cinq pouces de longueur, ainsi elles diffe- rent beaucoup de celles du Vert-doré ; mais cependant comme nous ne pouvons douter de l'unité d'espèce dans l'oiseau décrit par Montbeillard et celui de cet article, nous croyons pouvoir conclure que l'individu qu'il a vu étoit dégradé et incomplet; peut-être au reste n'a-t-il vu que la figure de Buffon que j'ai citée , laquelle étant visiblement copiée d'après celle qu'a donné Brisson , et de plus coloriée aussi d’après la description de cet auteur, mais non d'après l'oiseau même, est des plus mauvaises, comme il sera facile de s’en convaincre. La tête, les joues et la gorge du Vert-doré paroissent noires à certain jour, mais sont réellement d'un vert sombre qui se dore plus eu moins suivant que le jour frappe droit ou oblique- ment dessus; la gorge estun peu plus dorée cependant que ces autres parties; on y remarque aussi une riche teinte de pourpre violâtre qui paroit la terminer. Tout le plumage de la partie supérieure du corps, c'est-à-dire, le cou, la poitrine, le manteau et les ailes, sont d'un beau vert jaunâtre très-brillant, lequel se dore ou se change en vert foncé suivant les différens points de vue d'où on regarde ce bel oiseau. Les grandes et petite couvertures des aîles portent la plupart une large tache qui, à certain jour, paroit d'un beau noir de velours, et semble plus ou moins se relever en bosse sur chaque plume; tandis que Cd pr 150 HISTOIRE NATURELLE d’après un point de vue différent elles disparoissent totalement. Tout le devant du sternum, depuis la poitrine jusqu’au ventre, est d’une belle couleur de cuivre rouge mélée de pourpre et de bleu : sur les flancs ces deux dernières couleurs paroissent fondues ensemble, ainsi que sur les jambes, le croupion et les couvertures de la queue. Mais c est principalement sur la queue de cet oiseau que paroît répandu le plus largement tout le luxe des brillantes couleurs dont nous avons parlé; les plus belles teintes de pourpre, de violet, de bleu et de vert s’y jouent ensemble, et sont tellement fondues l’une dans l’autre, que chacune d’elles paroït la dominante, suivant qu'on varie sa position. Mais ce qui prête encore un nouvel éclat à cette belle queue, c'est qu'elle paroît barrée en travers à distances égales les unes des autres, par des lignes d'une teinte plus sombre que la couleur qu'on apperçoit. Je dis que la queue paroît barrée, et c’est là vraiment le mot; car dans certaines positions, ces barres disparoissent toutes, ainsi que le noir de velours des couvertures des aîles dont nous avons fait mention. Ces mêmes rayures se remarquent aussi sur les couvertures de là queue. J'observerai encore que les plumes latérales de la queue sont moins pourprées que celles du milieu, et qu'en dessous elles sont toutes, ainsi que les pennes des ailes, Le bec et les pieds, d'un noir mat. La femelle est plus petite que le mâle; sa queue est propor- tionnellement plus courte, etses couleurs sont beaucoup moins brillantes. Ces oiseaux se réunissent par grandes bandes; ils se jettent sur les arbres qui produisent des baies, et cherchent les vers sur la terre, et les insectes dans les herbes; ils courent en sau- tant et en soulevant leur queue comme la pie. Tels que nos 48 D'UNUE RULADPO RAEMENT. 151 étourneaux, ils ont un criet un gazouillement continuel, quand ils sont perchés. Ges oiseaux sont très-farouches et se laissent difficilement approcher : ils sont de passage, à ce que m'ont assuré les Sauvages, et n'arrivent qu'au tems de la maturité d'un petit fruit en grappe, qui croit dans tout le pays des Namaquois, et dont tous les oiseaux, en général, sont tres- friands: ce fruit est en effet fort agréable à manger. Il paroît probable que ces oiseaux arrivent du côté du Sénégal où ils sont très-communs ; peut-être viennent-ils aussi de plu- sieurs autres contrées de l'Afrique, et se répandent-ils après dans toute la zone torride. Pour en être certain, il s'agiroit de savoir s'ils nichent au Sénégal, et quand ils en partent ou quand ils y arrivent. On m'a assuré qu'ils ne faisoient pas leurs petits dans les cantons où je les ai trouvés, qu'ils n’y séjournoient qu'un mois tout au plus, et qu'il y avoit même des années où on ne les voyoit pas paroître du tout. Il semble même qu'ils y . demeurent peu, et n'y restent pas un mois, mais que le passage dure un mois entier, et que ceux quon voit sont toujours quelques nouveaux venus; ce qui, au reste, me le confirme, c'est que je n'en ai vu que trois bandes, et qu'au premier coup de fusil elles délogeoient du canton : cela prouve seulement que ces oiseaux ne font que traverser cette partie de l'Afrique pour se rendre dans celle où ils s’établissent, soit pour y faire leur ponte ou passer la saison des pluies. 152 HISTOIRE NATURELLE HISTOIRE NATURELLE D E*S ÉTOURNEAUX D'AFRIQUE. Les oiseaux dont nous allons parler sont trèsmultipliés en Afrique, et paroissentencore plusse rapprocher des étourneaux que celui que nous avons nommé roupenne, lequel paroît tenir beaucoup plus aux choucas; notre étourneau d'Europe ne se trouve pas, comme je l'ai déja dit, dans cette partie du monde, ou du moins dans les cantons que j'en ai visités. Montbeillard, dans sa description de l’étourneau, nous assure pourtant, d'après le témoignage très-suspect de Kolbe, que cet oiseau a pénétré jusqu'au Cap de Bonne-Espérance. Non-seulement ilne s'y trouve pas, mais ce qui est certain, c'est que je n'y ai vu aucun oiseau dont le bec soit applati et arrondi par le bout, comme l’est un peu celui de l'étourneau d'Europe, DES ÉTOURNEAUX D'AFRIQUE. :53 d'Europe, et beaucoup plus celui de l'étourneau de la Loui- siane ou le stourne (1), et celui des terres Magellaniques (2). Il est vrai que de tous les oiseaux décrits par les nomencla- teurs sous le nom d’'étourneaux, il en est au moins les trois quarts dont les caractères du bec sont différens de ceux que nous venons de citer. Rien ne prouve si bien l'insuffisance des caractères donnés pour distinguer les genres, puisque ceux même qui les ont établis s’en écartent les premiers. Eu égard donc à la forme du bec, il ne se trouveroit point d’'étourneau, proprement dit, dans la partie méridionale de l'Afrique; cependant les oiseaux que nous allons faire connoître volent en troupes nombreuses et for midables, nichent dans les trous d'arbres ou dans les ravins des terres éboulées, et suivent les troupeaux pour chercherleur nourriture dans les excrémens des bestiaux. Leurs mœurs, comme on voit, sont bien en effet celles des étourneaux et non des merles, oiseaux avec lesquels tous les nomenclateurs les ont confondus. Ces erreurs ne se sont malheureusement que trop multipliées, et cela par cette manie de rapporter toujours les espèces étrangères à celles d'Europe : méthode très-sujette à erreur, et qu'ont adopté trop généralement tous nos naturalistes modernes, pour le malheur de la science. Dans le cas où, sans avoir égard aux mœurs et à la manière (1) Voyez les planches enluminées de Buffon , No. 256. Il est étonnant que Montbeillard n’ait pas vu que le stourne et son fer à cheval ou merle à collier d'Amérique , étoient le même oïseau; il est vrai que c’est Brisson qui a fait de cet oiseau un merle, et Montbeillard, qui n’a pas vu combien cette description convenoit au stourne, a commis la même erreur. (2) Ibid, No. 113, Tome 11, V 154 HISTOIRE NATURELLE de vivre des oiseaux dont nous allons parler, les ornithologistes répugneroient à laisser ces oiseaux parmi les étourneaux, au moins seroit-1l nécessaire d'en faire un genre intermédiaire entre les merles et les étourneaux, puisqu'ils se rapprochent des derniers par leurs mœurs, et ne tiennent aux premiers que par la forme du bec qui est courbé au bout, pointu et garni d’un petit crochet de chaque côté de la mandibule supérieure. SPIP) KZ De D) O 2) = C 2LIICO 2 De d Chrrprtnerce 22 Langlois 7 Planche 88. DU SPRÉO. 155 LU ENS RE On INF 66; Le Spréo est le même oiseau, à ce que je pense, que celui qui a été décrit par Montbeillard sous le nom de merle brun du Cap de Bonne-Éspérance; du moins le peu qu’il dit de ce merle brun s'y rapporte assez (1). D'ailleurs, je ne connois point d'autre oiseau au Cap de Bonne-Espérance à qui cette descrip- tion puisse convenir mieux qu à celui dont il est question. [l est de la grosseur du merle; sa couleur est, en général, d’un brun changeant en un vert brillant, principalement sur le cou et à la queue; le bas-ventre et les couvertures du dessous de la queue sont blancs. Le bec et les pieds sont brunâtres; l'œil est noisette; la base de la mandibule inférieure est jaunâtre, ainsi que la bouche. J'ajouterai pour être plus exact, que la queue est comme rayée transversalement de brun foncé, etque ces rayures disparoissent à un certain jour. Ces oiseaux sont très-communs au Cap de Bonne-Espérance et dans toute la colonie. On les trouve toujours à terre parmi les troupeaux. Ils volent en troupes quelquefois de plus de trois à quatre mille individus, et nichent sur les habitations, (1) Histoire naturelle des oiseaux de Buffon, tome VI, page 70 de l’édition i7-12. V 2 156 HISTOIRE NATURELLE dans les trous d'un mur, ou sous les toits entre les poutres, et souvent dans les granges : dans les déserts, ils placent leurs nids dans les trous en terre, avec les martinets et les guepiers, ou dans des trous d'arbres, comme les pics; et ce sont presque toujours les nids de ces oiseaux qu'ils s'approprient, en en chassant les propriétaires qui les ont établis. Je les ai vu aussi s'emparer des nids des hirondelles, et y pondre. Leurs œufs, au nombre de cinq ou six, sont verdâtres et tachetés de brun. Le mâle est un peu plus grand que la femelle. Îl est à remarquer que dans son jeune âge cet oiseau a son plumage plus brillant de vert changeant que dans l’âge fait. C'est là une exception assez singulière; car, en général, tous les oiseaux brillans le sont moins dans leurs premières plumes. Les colons du Cap nomment cet oiseau wit-gat-spreuw (étour- neau à cu blanc). Dans le tems de la maturité du raisin, ils font, comme le roupenne, beaucoup de dégât dans les vignes ; ils sont très-délicats à manger pendant cette saison; aussi leur fait-on une guerre ouverte sur toutes les habitations pendant le tems des vendanges. Le ramage du Spréo est à peu près le même que celui de notre étourneau. Joue 2. Plonche 89 Ce 7 ebtecht Reiuct) Ge CP oPessard eeuto. D AUS EN abtron. NS : ; DEEE De AO UAfD CO HUCEC. 2e Langlois. Fe 2 D'UN À BÈRO’P 157 CERN À B % R«O P: N°. 69. Cr nom, précédé d’un fort clappement de langue tel que les Hottentots l’expriment, est celui que ces peuples donnent à ce bel oiseau que, pour la première fois, Jai rencontré sur les bords du Gamtoos. Ceux qui ont lu mon voyage à la Caffrerie doivent se rappeler qu’en descendant, pendant la nuit, avec mon train de voyage, une montagne assez escarpée, je fus tout à coup arrêté par cette rivière, au bord de laquelle je fus forcé de camper, n’osant risquer de la traverser pendant l'obscurité ; que m étant couché dans ma voiture pour passer le reste de la nuit, Je fus éveillé, au soleil levant, par des chants d'oiseaux que je n avois encore jamais entendus ,et qui paroissoient partir de dessous mon charriot. Ces oiseaux étoient ceux dont il est question. Curieux de voir à quels nouveaux hôtes j'avois à faire, je relevai l’abat-jour qui bouchoit le devant de ma voiture, et vis avec surprise une bande de trois ou quatre mille de ces magnifiques oiseaux, qui avoient été attirés prés de nous par les excrémens qu'avoient laissé mes bœufs sur la place. Au mouvement que Je fis, ces oiseaux s’envolant tous dans une seule bande, serrés les uns contre les autres, étalèrent à mes yeux étonnés une belle nappe verte, d'une beauté vraiment admirable, et d'autant plus brillante que le soleil, qui étoit 158 HISTOIRE NATURELLE encore très-bas et devant moi, augmentoit l'éclat de cette belle couleur , en frappant obliquement sur cette nappe resplen- dissante, qui me renvoyoit dans les yeux tous ses rayons répétés autant de fois qu'il y avoit d'individus dans cette troupe d'oiseaux, dont les plumes lustrées sont autant de petits miroirs qui reflettent la luntière qu'elles recoivent. Cette belle espèce ne se trouve point dans les environs du Cap de Bonne-Espérance; mais en revanche depuis le Gamtoos jusque chez les Caffres elle est fort abondante. Dans l’intérieur des terres, j'ai encore vu ces mêmes oiseaux vers le Camdeboo. Dans mon second voyage, je les ai aussi trouvés sur le bord de la rivière des Eléphans, et de là jusque chez les Namaquois; de sorte qu'ils se répandent à peu près dans toute la partie sud de l'Afrique, à prendre cependant à une certaine distance du Cap, où ils ne viennent jamais à ce qu'il paroït; du moins ne les y ai-je jamais vus, et aucun colon ne n'a assuré les y avoir vus non plus. Au reste, ces oiseaux sont de passage et ne séjournent pas toute l'année dans le pays; ils partent tous pen- dant la saison des pluies. Ce qu'il y a de certain, au moins, c'est qu'à mon arrivée à la rivière des Eléphans, et dans toute ma traversée depuis là jusqu'à la rivière d'Orange ou Grande- Rivière je n’en vis pas un seul, et qu'en revenant il ÿ en avoit par-tout sur les bords non-seulement de cette rivière, mais sur le Kaussi, le Groene, le Swart-Doorn et l'Eléphant (1). J'ob- (1) On ne doit point être étonné de me voir toujours citer les rivières pour les cantons où se trouvent les oiseaux , car en Afrique, à l'exception du pays d’Aute- niquoi et de la Caffrerie, on ne rencontre d’arbres que sur les bords des rivières, et ce sont assez ordinairement les lieux que préfèrent la plupart des oiseaux , du moins tous ceux des genres qui n’habitent pas plus particulièrement les plaines, et qui, au contraire, ne se trouvent jamais dans les bois, tels que les caïlles, les outardes, les pluviers, les allouettes, etc, ; Du NA Pl POP: 159 serverai pourtant qu'ils sont en bien plus grand nombre sur les bords du Gamtoos, où j'en ai tué souvent soixante et quatre- vingts dans une seule journée, et cela en cinq ou six coups de fusil; carils y volent en troupes si considérables et sont si serrés les uns sur les autres, que si l'on choisit bien le moment favorable pour les tirer, on en tue un grand nombre à la fois: mais il faut avoir soin de charger son fusil avec du plomb au- dessus de la cendrée; celui dont les chasseurs se servent pour les premiers perdreaux est bon; celui qui est plus fin ne les abat point sur le coup, parce qu ils sont assez robustes pour aller tomber tres-loin, quoique fortement blessés, D'ailleurs, ils sont peu farouches et se laissent facilement approcher, sur- tout quand ils sont parmi les troupeaux, qu'ils recherchent beaucoup, et qu'ils suivent comme nos étourneaux. Il sufht aussi de se mettre sous un arbre et de frouer (1) sur une feuille, pour ÿ attirer la troupe, dont quelques individus descendent même jusque sur le chapeau du chasseur. Les colons africains des cantons où se trouve ce magnifique oiseau, le nomment groene spreeuw (étourneau vert). Outre les vers qu'ils cherchent dans les excrémens des bestiaux et dans les endroits humides, ils se nourrissent aussi de toutes sortes de baies, et se posent sur le dos des bœufs et des qua- drupèdes sauvages pour manger les poux de bois qui s'attachent à leur cuir. Ils nichent dans des trous d’arbres ou enterre, (2) Frouer est un art de la pipée, employé par les oiseleurs pour faire approcher les oiseaux; on l’exécute en soufflant d’une manière particulière sur le tranchant d’une feuille ou d’une lame de couteau, on bien sur une feuille d'herbe posée en travers sur les lèvres, et même sur le tranchant d’une faveur ou pelit ruban de soie placé entre les deux morceaux d’une petite branche fendue dans sa longueur ; c’est enfin une espèce de froissement qui se fait de la langue en soufflant sur un objet tranchant posé en travers sur les lèvres. Par ce moyen on fait approcher géné- ralement tous les oiseaux. 160 HISTOIRE NATURELLE comme les martinets et les guepiers. Leur ponte est de cinq ou six œufs d’un beau vert blevâtre. Les plumes du Nabirôp sont fines et soyeuses. Le vert et le bleu, enrichis d’or et de pourpre, sont les principales couleurs de cet oiseau ; mais leurs teintes sont si agréablement fondues et mélangées ensemble, qu'elles produisent un effet des plus charmans. Le vert nuancé d’un bleu d'acier poli changeant en pourpre occupe les joues, le haut du cou et le derrière de la tête; le vert pur se voit sur la poitrine, le cou, le ventre, le dos et les scapulaires; les aîles sont d’un vert éclatant, et si luisant qu'il imite et par son lustre et par son poli le paillon de cette couleur. Les couvertures grandes et moyennes des ailes sont, en partie, tachées à leur pointe d'un bleu foncé changeant en noir de velours, suivant qu'on expose l'oiseau plus ou moins à la lumière, et dans certains points de vue ces taches dispa- roissent toutes. L'or pur relevé de pourpre et de bleu, se remarque sur les petites couvertures de l’aile qui longe son pli, et sont cachées en partie par les scapulaires. La queue est en-dessus d’un beau vert foncé changeant, etse trouve comme rayée; en-dessous toutes ses pennes, ainsi que celles de l’aîle, sont absolument noires. Les couvertures du dessous de l’aîle sont d’un beau violet-pourpre changeant. Le bec, les pieds et les ongles sont noirs, l'œii est d’un jaune orangé. Dans cette espèce, le mâle, qui est de la taille de la litorne , est un peu plus grand que la femelle. Celle-ci n’a pas le plumage aussi brillant que celui du mâle, et les plumes d'or qui bordent le pli de ses ailes nesont ni en si grand nombre ni si éclatantes. Dans le jeune âge, les couleurs sont encore plus ternes. Le ramage de cet oiseau paroit exprimer pio-io, pio-io répété à DAUL NPA TA IOYE: 10E à plusieurs reprises : perchés, ils gazouiilent comme nos étourneaux. J'ai beaucoup tué de ces oiseaux, parce que je les ai trouvés très-bons à manger, sur-tout dans la saison où muürit l'espèce de baie nommée par les Hottentots goirée, laquelle est t.ès-commune vers le Gamtoos, ce qui probablement y attire ces oiseaux en si grande quantité, de même que beaucoup d’autres espèces qui s'en nourrissent également. Ces baies sau- vages, quoique pas plus fortes qu'un gros pois, sont cependant les meilleures que j'aie trouvées et mangées en Afrique; mais elles sont très-purgatives, et quand on en mange beaucoup, elles finissent par donner la dissenterie. Le Nabirôp seroit-il le même oiseau que celui décrit par Montbeiïllard et Brisson, sous le nom de merle vert d'Angola, ou encore le merle violet du royaume de Juida? Cependant il n'est question ni à l’un ni à l’autre de ces deux oiseaux, de ces plumes d’or et pourpre qui ici bordent le pli de l'aile, et qui sont très-1ema:quables : au reste les figures des planches enluminées de Buffon, N°. 540 et 561, qui représentent ces oiseaux, ne ressemblent point du tout, ni au Nabirôp, ni à - oiseau dont il est question ci-après, quoique leurs descriptions s'y rappoitent en grande paitie, à l'exception pourtant des couvertures inférieures de la queue qui, dans celle du merl vert d’Angola, sont d’un jaune olivâtre, et que les pennes de la queue, suivant Montbeillard, sont égales entre elles. Si ce caractère a été bien vérifié, il est indubitable que le Nabirôp est une espèce différente, car les deux pennes extérieures de chaque côté sont de plus d’un demi-pouce plus courtes que celles du milieu, et les suivantes s’alongent toujours un peu plus jusqu à la cinquième qui est aussi longue que la sixième; ajoutez à cela que les couvertures inférieures de la queue ne sont pas d’un jaune olivâtre, mais d'un beau vert foncé changeant en bleu violâtre, Tome II. X 162 HISTOIRE NATURELLE J'ai trouvé ces oiseaux si beaux que j'en ai rapporté un grand nombre d'individus. Enfin, moi et mes chasseurs nous en avons tués mille neuf cent vingt-trois en six semaines à-peu- près que nous séjournàmes sur le Gamtoos, et j'en ai préparé quatre-vingt-quato:ze, que jai tous rapportés en Europe; et bien loin de ressembler à ces égoistes qui n estiment les choses qu'autant qu'ils les ont uniquement dans leur collection, je me suis fait un plaisir d'en orner beaucoup de cabinets; aussi en est-il bien peu en Hollande et en France où on ne voie un de ces jolis oiseaux, ainsi que beaucoup d'autres espèces de ceux que J'ai recueillis dans mes voyages. En cela je crois avoir servi la science et étendu le goût de l'histoire naturelle, parce que les hommes s’occupant, en général, bien plus volontiers des objets qui offrent le plus d’attraits par leurs beautés, il est certain qu ils prennent d'autant plus de plaisir à les rassembler qu'ils sont plus flatteurs à l'œil, et à ce titre je crois qu'il n’est point de collection quine cèdele pas à une belle suite d'oiseaux, quand elle est bien soignée du moins, et ne présente pas un ‘ assemblage de peaux seulement rembourées et grossièrement estropiées. tel Courte 2. ) A IT techt 700) CP?’ £ : RER. _OUMMOQIO D). C de L'Ampumete de Cauglers 2 € 7 72e , / 2% Pessaro e/culp DIU COtULE GNT ON? 165 I OH NON N°. 9o. Quoiqu' au premier coup-d'œil cet oiseau paroisse beaucoup ressembler au précédent par ses couleurs qui sont bien effecti- vement, à peu de chose près, les mêmes en général; cependant il est indubitable qu'ils sont d'espèces différentes, ce que nous allons nous attacher à prouver d'une manière sensible, en indiquant avec précision et quelques détails, les caractères distinctifs qui les séparent. Non-seulement l'oiseau de cet article estplus petit que l’autre, mais il a proportionnellement la queue beaucoup plus courte aussi, ce qui fait que l’aîle s’avance plus quand elle est ployée vers son extrémité. Un autre caractère bien facile à saisir, c’est qu'il a en outre les plumes de la tête, du cou et toutes celles du dessous du corps d’une nature plus courte, plus dure et moins flexible enfin que celles du nabirôp qui, comme nous l'avons fait observer, les a soyeuses et déliées; aussi ses cou- leurs sont-elles bien plus vives et jettent un bien plus bel éclat que celles du nabirôp. Maintenant si on examine avec queîque attention les couleurs de ces deux oiseaux, on leur trouvera encore quelques différences bien marquées, et l'on sentira aisément, si on prend la peine de les comparer l’un à l’autre, ou même seulement leurs portraits, qu'il y a en effet une différence bien remarquable: X 2 104 HISTOIRE NATURELLE Le Couïgniôp a la téte, le haut du cou, la gorge et tout le dessous du corps, depuis la poitrine jusqu'aux recouvremens du dessous de la queue, d’un beau bleu bronzé d'acier poli des plus brillans, changeant ou en vert sombre ou en pourpre- violet, suivant qu’on le tourne au jour. Le bas du cou par derrière prend une teinte plus verdätre. Le manteau, les sca- pulaires, les grandes couvertures des aîles et les aîles elles- mêmes, sont d'un vert jaunâtre , lustré ; les plumes du croupion et celles qui recouvrent le dessus de la queue sont arrondies en écaille de poisson, et changent du bleu au violet-pourpre. Les pennes de la queue, qui sont toutes, à peu de chose près, égales entre elles, sont du plus beau pourpre violâtre qu'il soit possible de voir, et ont l'air d’être des lames de paillon. Les plus petites couvertures des aîles, c'est-h-dire celles qui sont précisément au poignet, sont d’un beau bleu d'acier poli chan- geant en violet; enfin les plus grandes couvertures des aîles ont chacune à leur extrémité une tache d’un noir de velours, qui disparoît à certain aspect. Les yeux sont d'un jaune orangé; le bec et les pieds sont noirs, ainsi que le dessous des plumes des aîles et de la queue. Nous voyons, d'après cette description , que l'oiseau dont il est question n’a point le long du pli de l'aile ces belles plumes d'or ou couleur de cuivre-rosette qu'on remarque à l'autre. Get oiseau vit en grandes troupes et arrive dans le fond du pays des Grands Namaquois où il ne fait que passer sans s'arrêter longtems. Les Sauvages le nomment Couigniôp, en précédant ce mot d’un clappement de langue de la seconde espèce, c'est-à-dire celui quise fait en appliquant la langue contre le milieu du palais, et la retirant en même tems qu’on prononce la première syllabe. D'U-COUIGNIOP 165 Ces ciseaux ne s’avancent jamais du côté des Petits Nama- quois, au moins j'assure ne les y avoir jamais vus. Il paroît qu'ils ne nichent pas dans le pays où je les ai trouvés; tandis que les autres y viennent pour faire leurs petits; ils'y séjour- nent par conséquent bien plus de tems, et s’avancent beaucoup plus vers le Cap, puisque je les ai trouvés sur les bords de la rivière des Eléphans. Au reste, j'ai observé que dans les cantons où on voit les deux espèces en même tems, beaucoup de Sauvages ne les différencient pas, et qu'ils les nomment indistinctement Couigniôp ou nabirôp, et que presque tous les confondent : ce que les savans pourront également faire s'ils le jugent à propos. Cependant, d’après tout ce que j'ai dit, il me paroît bien évident que ces oiseaux forment deux espèces assez distinctes pour devoir être séparés, et ce qui vient encore à cet appui, c'est que ce dernier paroît tres-abondant au Sénégal et dans toute l'étendue de la Côte-d'Or; du moins j'en ai vu beaucoup d'individus qui avoient été rapportés de ce côté là, tant par le C. Geoffroi-de-Villeneuve, dont j'ai déja eu occasion de parler, que par le chevalier de Boufflers, par le C. Blanchot et par d'autres voyageurs ; mais jamais je n'ai vu arriver du même côté l’autre oiseau. Il paroït donc que le Sénégal est réellement la patrie du Couigniôp, et que cette espèce ne fait que traverser le pays où je ne l'ai vue qu'en passant, et après avoir fait sa ponte plus du côté de la ligne. Je dis après avoir fait sa ponte, car j'ai remarqué que les femelles avoient couvé il n'y avoit pas bien longtems; ce qu'on observe très-bien à une couche farineuse qui couvre le ventre des oiseaux quelque tems après l'incubation, et qui n’est autre chose que l'ancienne peau qui tombe en 166 HIS OMR EN ANMUNRNENR APTE poussière pour faire place à une nouvelle. D'ailleurs, d’un autre côté, j'ai remarqué aussi dans le nombre de ceux que j'ai pu tuer, plusieurs jeunes oiseaux : ceux-ci ne sont pas, à beaucoup près, aussi brillans que les vieux; leurs plumes étant seulement d’un vert canard assez sombre et rembruni sur les ailes. . La femelle est un peu plus petite que le mâle, et ses couleurs ne sont pas aussi vives que les siennes. C'est encore ici le cas de demander si cet oiseau est le même que celui qu'ont décrit Brisson et Montbeillard sous le nom de merle vert d'Angola, ou bien si c'est celui que ce dernier nous donne pour un merle violet du royaume de Juida? Cette question me paroit difficile à résoudre; d'abord, en ce que ces descriptions ne sont pas parfaitement conformes aux oiseaux dont j'ai parlé, et qu'outre cela la description du merle vert d'Angola de Brisson diffère aussi de celle du même oiseau par Montbeillard. Cependant si je puis hasarder mon opinion, je dirai que je penche très-fort à croire que le merle vert d'Angola de Brisson et celui de Montbeillard sont non-seulement de la même espèce, mais que le merle violet du royaume de Juida est encore le même oiseau, et qu'enfin le Couïgniop de cet article est également de la même espèce, parce que tous sont, suivant leurs descriptions, de la même taille, et quil est tres- probable que l'individu décrit comme un merle vert d'Angola étoit une femelle ou un jeune, et que celui qui a servi pour la description du merle violet étoit un mâle. Au reste il n’est pas étonnant que les descriptions de ces oiseaux différent un peu les unes des autres, car leurs couleurs sont du nombre de celles qui s’altèrent beaucoup par les préparations, et sur-tout par les fumigations de soufre; et comme les oiseaux du cabinet de DU COUIG NIO!P. 167 Réaumur et ceux du Cabinet national de Paris, qui ont servi à ces descriptions ont subi nombre de fois cette opération, ilne faut pas être surpris que l’altération des couleurs ait produit des différences dansles détails qu'on en a donnés. D'ailleurs, toute description qui n'aura été faite que d'après un seul individu qu'on aura vu par hazard , sera toujours imparfaite et insuffisante pour bien reconnoître une espèce, puisque ce n’est que d’après des comparaisons multipliées et réitérées à plusieurs reprises , et dans les différentes saisons, sur un grand nombre d'oiseaux de la même espèce, qu’il est possible d'établir des données certaines sur les couleurs constantes de l'oiseau parvenu à son état parfait, sur celles deson-enfance, sur la différence qui existe entre le mâle et la femelle, et enfin sur les variations constantes ou accidentelles qu'éprouve l'espèce: connoissances sans lesquelles l'histoire des oiseaux sera toujours confuse et remplie d'erreurs. 108 HISTOIRE NATURELLE MIE NA PO URI O NES N°91: ÎL est peu de ressemblance plus frappante entre deux oiseaux de différentes espèces, que celle que l'on remarque au premier apperçu, entre celui que J'ai décrit sous le nom de roupenne, n°. 83 de cet ouvrage et celui dont il est question ici. Je lui ai conservé le nom de Nabouroup, qui est celui par lequel les Namaquois le désignent. Nous allons indiquer les différences qui se trouvent entre ces deux espèces, afin qu'il ne plaise point à quelque naturaliste de les confondre gratuitement. Nous avons vu que le roupenne mâle est de la taille de la draine ; le Nabouroup n'est pas plus gros que notre merle d'Europe; ils diffèrent enfin de plus de deux pouces dans la longueur du bout du bec à celle de la queue. Un autre caractère bien frappant dans leur conformation, c'est que le premier a la queue étasée, de manière que les premières pennes de chaque côté sont de deux pouces plus courtes que les deux du milieu, qui sont les plus longues, et toutes sont graduellement étagées ; au lieu que le Nabouroup les a presque toutes d’'égale longueur , car la plus courte de chaque côté n’a que huit lignes de moins que les plus longues ; et de plus, il n’a que la première et la seconde latérales des deux côtés de la queue qui o fl u QC Joue DS Phanehe .91- 6 JO. LP DIE à, TMS Ébrecht e Kernel) Ge UE onto. Mol LP. pr ; Ze l'efnipriunetre Pe = auglots UT DPUN NAN ON EMRr Of URE: 16 qui soient étagées, les huit plumes du milieu étant égales entre elles. Les yeux du roupenne sont bruns, ceux du Nabou- roup sont d'un beau jaune aurore; et quoique ces oiseaux soient tous deux noirs en général, et qu'ils aient du roux aux pennes des aîles, on remarque que les plumes du Nabouroup sont plus soyeuses, plus longues, plus luisantes et changent en violâtre, et que les aîles ont une légère teinte purpurine, ainsi que le dos ; tandis que les plumes du roupenne sont plus courtes, moins lustrées et changent en verdâtre. Outre toutes les différences dont nous avons fait l'énumé- ration, il en existe encore de grandes dans le roux des pennes, par où ces oiseaux se ressemblent le plus, sur-tout quand Îles ailes sont en repos et qu'on ne les voit qu'extérieurement. Mais si on veut prendre la peine de les examiner et de Îles comparer, on trouvera, 1”. qu'extérieurement le roux s'étend beaucoup plus vers la pointe des pennes dans le roupenne, au lieu que chez le Nabouroup il n'occupe que le milieu du bord de l'aile. 2°, Dans le premier toutes les côtes ou tiges de ces pennes rousses , ainsi que leurs barbes intérieures, sont du même roux, pendant que dans l’autre elles sont blanches. 3°. Leroux ne teint au Nabouroup que les barbes extérieures des six premières pennes, etintérieurement elles sont blanches; les trois suivantes sont entièrement de cette dernière couleur : de sorte que tout le dessous de l’aile est blanc, tandis que dans l'autre il est roux; ce qui se remarque fort bien lorsque ces oiseaux volent. Enfin la femelle du Nabouroup ne diffère en rien du mäle, Tome 11. Ne 170 HISTOIRE NATURELLE sinon qu'elle est un peu plus petite, et nous avons vu que le roupenne femelle avoit la tête, le cou et une partie de la poi- trine grisätre. Le lecteur me pardonnera sans doute d'être entré dans de si grands détails de comparaison entre ces deux espèces; mais j ai cru ne pouvoir trop m'étendre lorsqu'il s’agissoit de diffé- rencier deux oiseaux aussi semblables, et qui pouvoient par conséquent être facilement confondus, ou au moins regardés comme une simple variété l’un de l'autre. Le Nabouroup habite le pays des Petits et des Grands Namaquois. J'ai commencé à les voir sur le Nameroo, vers le trentième degré de latitude sud, et de là jusque sous le tropique j en ai constamment retrouvé. Ces oiseaux volent en troupes, et ont précisément les mœurs des espèces précédentes; ils sont très-friands des baies que produit une espèce d’ébènier, très- commune dans tout le pays des Namaquois. Le Nabouroup a une sorte de chant ou de cri soutenu, dont les accens sont très-agréables. J'ai trouvé ces oiseaux assez délicats pour être mangés rotis; aussi en ai-je tué un grand nombre. Le nom hottentot Nabouroup se prononce par ces peuples en le faisant précéder du premier clappement de langue, c'est- à-dire en appliquant la lan gue contre les dents. Le bec est noir ainsi que les ongles ; les pieds sont brunätres et les yeux d’un beau jaune aurore. Je n’ai jamais vu les œufs ni les nids de ces oiseaux; mais les Sauvages m'ont assuré D'U-ANVA B OU R'O' UP. 171 qu'ils pondoient dans les rochers. Les colons hollandois qui habitent le Nameroo et le mont Kamis, où se trouvent ces olseaux, les nomment witte-vlerk-spreuw, étourneau à ailes blanches, parce que les revers des pennes de laïle sont blancs, comme je l'ai fait observer. 172 EPRSPOTRE N'XTURELEE PAICRAVWVATE FRHISTE, N 102 Voter un oiseau étranger à l'Afrique, qui par sa conformation extérieure , semble se rapprocher beaucoup et tenir de bien près à ceux dont nous avons fait mention dans les articles précédens; il possède cependant un caractère bien particulier et qui doit lui faire supposer des mœurs et surtout une manière de se nourrir différente de celle de ces oiseaux : sa langue se partage à sa pointe en un certain nombre de petits filamens qui la terminent en pinceau, à-peu- près comme celle de la plupart des sucriers, oiseaux qui vivent en pompant le suc des fleurs. Cependant j'observerai que le nombre des filamens est ici plus considérable, car j'en ai compté seize, au lieu que les sucriers n'en ont ordinairement que deux et trois au plus. Get oiseau se nourriroit-il de la même manière? c'est ce que nous ignorons parfaitement. Je crois pourtant pouvoir assurer qu'il n'a pas la faculté d'avancer cette langue hors de son bec, pour la darder dans le calice des fleurs, comme le font les sucriers ; car l'ayant ramollie jusqu’au fond de la gorge où elle tenoit, je n'ai pu l’étendre au-delà du bout du bec qu’autant qu'on le voit indiqué dans la planche où je l'ai fait représenter. J’observerai de plus que la langue des oiseaux sucriers est creusée en rt Di | Planche 92 - [a O7OULe 2. R> LS à ÿ S à à À à S S À È dursrre: È È à RŸ S à S “4, L ©), 7 : , Y, DA L PL TRI) CA 6 () D. D) F « L'ADUEC'[lt1SCe É D. Dash e l'oZuprinetce de MP DE AY CRAVATE DIR ISRIE. 175 gouttière, ce que je n’ai point remarqué dans celle de la Cravate frisée, qui, au contraire l'avoit applatie. J'ai vu ce magnifique oiseau chez le C. Gigot-Dorcy, à qui M. Woodfort l’avoit envoyé de Londres avec pulsieurs autres oiseaux très-rares, pour les faire peindre. Le GC. Dorcy n’a pu me rien dire de particulier sur cet individu, sinon qu'il avoit été apporté d’une des îles de la mer du Sud. Nous le laisserons donc à la suite des oiseaux d'Afrique dont nous venons de faire mention, en attendant des renseignemens certains sur ses habitudes naturelles. Au reste, cet oiseau n'est pas le seul dans son pays natal qui, par sa langue en pinceau, diffère des autres espèces de son genre. Nous savons que quelques perro- uets des mêmes climats ont aussi la langue partagée en plusieurs filamens ; puisque Buffon nous apprend, d’après Commerson , que l'arimanon ou petite perruche bleu d'Otaiti a la langue pointue et terminée par un pinceau de petits poils courts et blancs, qu'il ne se nourrit que du jus des fruits, et refuse toute espèce de nourriture plus solide. Il est vraisem- blable que par poils on a voulu parler des filets dans lesquels se partage la langue de cet oiseau; car si c'étoient vraiment des poils, ce qui n’est nullement probable, cela seroittrès-différent. Le docteur Sparmann nous parle aussi d'une perruche bleue d'Otaiti différente de l’arimanon, qui avoit pareillement sa langue terminée en pinceau, et qui probablement se nourrissoit de la même manière; il pourroit donc bien se faire que l'oiseau dont il est question dans cet article ne vécüt également que du jus des fruits, ce que suppose au moins la forme particulière de sa langue. Nous avons vu cependant nombre de fois combien il étoit téméraire d'établir des faits sur de simples conjectures; aussi nous garderons-nous bien d’assigner ici la manière de 174 HISTOIRE NATURELLE vivre de cet oiseau, auquel nous n'avons appliqué au reste le nom de Cravate frisée que parce qu'il est des mieux caractérisé par une belle fraise, composée de plumes conformées d’une manière très-particulière. Elles naissent au bas de la gorge, et ornent une partie du devant du cou, en s'étendant jusque sur ses côtés. La forme de ces plumes est des plus singuliéres : étroites d’une ligne et demie à leur naissance, elles diminuent insensiblement de largeur jusque vers lemilieu deleurlongueur, au point de n'avoir plus là que l'apparence d’un cheveu ; puis s'élargissant tout à coup en se creusant et en se retournant par un crochet, elles forment autant de petits godets et se montrent toutes de cette manière en entourant presqu'entièrement le cou. Ces plumes sont verdâtres à leur naissance et blanches comme la neige à leurs extrémités saillantes; de manière que la fraise est d’une blancheur éclatante. J’ai fait dessiner à côté de l'oiseau une de ces plumes pour mieux faire concevoir leur forme. Toutes celles du bas du cou par derrière se terminent en pointes chevelues blanches , et elles sont aussi contournées la plupart enS. Les moyennes couvertures sont d’un beau blanc, sur toute la longueur du pli de l'aile, où elles forment une large bande qui la traverse diagonalement dans son milieu. Le reste du plumage de ce bel oiseau est d’un vert brillant à reflet bleu, plus éclatant sur les petites couvertures de l'aile, sur les ailes elles-mêmes, sur la poitrine, la queue et la tête; et plus sombre dans tout le dessous du corps, depuis la poitrine jusqu'aux recouvremens du dessous de la queue. La tête et la gorge sont aussi d'un vert brillant à reflet bleuâtre. Le bec, les pieds et les ongles sontnoirs. Les ailes ployées s'étendent un peu au-delà de la naissance de la queue, dontie nombre des pennes 4% DE LAS CRAVATE) PRISE. 175 étoit de douze; les deux latérales seulement sont d’un pouce plus courtes à-peu-près que les autres, qui toutes sont égale- ment longues entre elles. L'oiseau est de la taille de notre merle; au reste, la planche coloriée le représente de grandeur naturelle. Cet oiseau est encore très-rare dans nos cabinets, car je n’en ai jamais vu que ce seul individu. 176 ES OMR EN AMP U RSA E OISEAUX D'AFRIQUE QUMSEMBEENT SE RAPPROCHER DES MA TN AE Les oiseaux d'Afrique dont nous allons parler vivent en troupes et se nourrissent de même que ceux dont nous avons fait men- tion depuis l'espèce du roupenne jusqu'ici. Comme eux ils fréquentent également les troupeaux et les animaux sauvages, pour chercher dans leurs excrémens les insectes qui s’y multi- plient; ils en diffèrent cependant un peu par la forme de leur bec, dont la mandibule supérieure est munie d’un renflement qu'on y remarque précisément au-dessous des narines; endroit où elle recouvre l'inférieure en s'avançant tant soit peu par dessus ; caractère commun à beaucoup d'autres espèces aux- quelles les Européens ont donné dans l’inde généralement le nom de martin (1). Ces oiseaux, par leur forme plus ramassée (1) On donne dans l’Inde non-seulemient le nom de martin à l'espèce que Buffon décrit sous ce nom; mais on v appelle ainsi sénéralement tous les oiseaux qui vivent 5 VREN S 1 en troupes et même les mainates. Il est bon d'observer ici que martin est le nom favort que DES OISEAUX DAFRIQUE u77 que celle des merles,paroissent encore se rapprocher davantage de notre étourneau d'Europe que les espèces dont nous avons parlé précédemment. Au reste, les naturalistes ont tous con- fondu ces oiseaux soit avec les merles et les grives, soit avec les étourneaux, et souvent avec les troupiales. Le kinck de la Chine décrit par Buffon appartient au genre dont nous parlons et non aux troupiales, et encore moins aux merles. que le peuple donne, en général, dans une grande partie de la France, de l’Alle- magne et de la Hollande , aux étourneaux qu'ils élèvent en cage ; comme il donne celui de margot aux pies, et celui de jacquot , diminutif de Jacques, aux perroquets. Ainsi il n’est pas étonnant que les premiers Européens qui dans l’Inde virent des oiseaux dont les mœurs étoient absolument les mêmes que celles de notre étourneau, leur donnèrent le nom de martin. Le nom d’étourneau, qui dérive d’estourneau, d’es- tournelle , que porte cet oiseau dans plusieurs départemens, vient de son habitude de tournoyer dans les airs, comme celui de sansonnet dérive de chansonnet, qui lui est encore donné parce qu’il apprend très-bien à chanter. Tome II. Z 175 HISTOIRE NATURELLE EAP OR T'E-T AMP E AU N°95, rie. 1 et2, N° 094, Fic. 1 et. L'Esrèce du Porte-lambeaux est toute nouvelle, n'ayant été figurée par aucun naturaliste ancien ou moderne: elle porte un de ces caractères tranchans qui sont si faciles à saisir au premier coup-d'œil, et qui la distinguent particulièrement; ce sont des espèces de lambeaux ou de crètes noires qui ornent la gorge et latête sans les surcharger; caractère qui paroïtroit rapprocher cet oiseau du genre des mainates, quoique les crètes jaunes de ceux-ci soient différemment placées, ce qui ne seroit pourtant pas une raison de les séparer l’un de l’autre, s'ils ne différoient pas d’ailleurs beaucoup par les formes de leur bec, qui est bien plus fort. Mais, d'un autre côté, il est vrai de dire que les mainates ont eux-mêmes beaucoup de conformité et de rapport avec les étourneaux, ayant absolument la même manière de vivre. Âu reste, on pourroit, avec beaucoup de fondement, réunir tous ces oiseaux sociétaires dans un seul etmême ordre, en les distinguant ensuite par genres. Le Porte-lambeaux se rassemble en bandes nombreuses et bruyantes ; ils recherchent les troupeaux de buffles, très- communs dans le canton où je les ai trouvés. Ils se nourrissent de baies, d'insectes et de vers qu'ils ramassent sur la terre Do j ee Jlanche clone 2. 29 £ 2 2) CT 2 tech£ Res F 2 (CP ohesra à entre COAST n) 2) ©) ) GPO 17e 17 4 nn DRE, PE 2, ; : ) pi de L 0772 trureure de À. augloit . x € sk Joue %. 11} 0) NT in 11)) _—— Garetd cheap - ? Z 7 l c) o | LS 220 } | ur / 4) S 2) V7 1 OTUE LANOCAUX 72) « : tele CU x7 Dog le LnbeulX ? C 2 pr y : à 2] p. 227 C/upriue te e DOS £ » € ACT Hlecke -Reiuol? CS 2 DU PORTE-LAMBEAU X. 179 dans des lieux humides. Leur naturel sauvage les rend trés- iméfians; aussi est-il fort difficile de les aborder à la portée du fusil, sur-tout quand ils en ont éprouvé l'effet meurtrier, et qu'ils ont remarqué le chasseur, dont ils conservent longtems le souvenir, à ce qu'il paroît; car une fois que javois tiré un coup de fusil dans une de leurs bandes, il m’étoit impossible de la rejoindre sans beaucoup de ruse et sans me cacher avec grand soin ; tandis que ceux d'entre mes Hottentots qui n étoient pas armés de fusils les approchoient facilement. C'est sur les bords du Gamtoos que j'ai vu, pour la premiere fois, cette espèce d'oiseaux ; et de là jusque chez les Caffres, j en ai rencontré plusieurs bandes, mais jamais je n'en ai vu à la côte de l’ouest. IL paroît cependant qu'ils entreprennent quelquefois des courses lointaines, puisque depuis mon retour en Europe, le colonel Gordon a envoyé à mon ami Temminck plusieurs de ces oiseaux qui avoient été tués sur le Koeberg, près de la ville du Cap, où ils étoient arrivés en très-grand nombre; ilest probable que quelque grand vent de nord les avoit conduits jusque-là, car c’étoit la première fois qu'on les eût vu si près de la pointe sud d'Afrique. Le mâle est un peu plus grand que notre étourneau d'Europe; sa femelle est un peu plus petite, et lui ressemble beaucoup pour les couleurs; mais elle en diffère par les crètes dont j'ai parlé, lesquelles ne sont qu'indiquees chez elle, au lieu qu'elles sont si apparentes dans les mâles qu'on reconnoît ceux-ci même d'assez loin quand ils sont rassemblés sur les arbres, où ils font un caquetage continuel, mêlé par intervalles d'un cri aigre et déchirant. Le lambeau double du dessous du bec embrasse toute la gorge et pend ensuite de la longueur d'un pouce en se séparant à son extrémité, où ilse termine en deux VAE 180 HISTOIRE NATURELLE pointes. Sur le front s'élève en travers une espèce de crète de quatre lignes de haut, et dont la forme est ovoide; sur le milieu du dessus de la téte se dresse encore une autre crète plus haute, arrondie et échancrée sur le haut, comme la partie supérieure d'un cœur ; celle-ci est posée perpendiculairement sur celle du front, par conséquent dans un sens contraire. Toutes ces peaux sont nues et d'une couleur noire, ainsi que toute la face de l'oiseau, qui est également dégarnie de plumes; le derrière de la tête l’est aussi; mais dans cette partie la peau est roussätre. Le bec est jaune, ainsi que les pieds, et les yeux sont bruns. Quant aux couleurs de cet oiseau, c’est un gris roussätre , plus foncé sur le derrière du cou, sur le manteau et plus elair dessous le corps. Les aîles et la queue sont d'un noir à reflet bronzé, jouant entre le noir, le vert et le poupre. La queue est coupée carrément, et les ailes ployées atteignent à-peu-pres le milieu de sa longueur. La femelle est, comme je l'ai déja dit, un peu moins forte que le mâle. Sa face, nue et sans plumes, est d’un noir moins foncé, et elle n’a guère que la crète de la gorge qui soit remar- quable ; mais elle ne descend point au-delà de l’espace où elle y est adhérente. Quant à celles du dessus de la tête, elles sont peu apparentes, sur-tout celle du milieu. Son plumage estaussi moins lustré dans les pennes des aîles et de la queue. Dans son jeune âge cet oiseau est si différent de ce qu'il devient par la suite, qu'il seroit très-facile de le donner pour une autre espèce, puisqu'alors il ne porte pas la plus légère apparence des appendices dont nous avons fait mention; tandis que sa tête, au contraire, est entièrement emplumée. Dans cet DU PORTE-LAMBE AU X. 181 état, le bec est d'un brun jaunâtre, et les pieds sont bruns, ainsi que les premières pennes des ailes et toutes celles de la queue, qui alors n'ont encore aucun reflet. Les moyennes plumes de l’aîle, ses couvertures, les scapulaires, le manteau, le cou, la tête et la poitrine sont d'un gris-brun, tandis que le ventre, les jambes et les recouvremens du dessous de la queue sont blanchâtres. Je n'ai point été à même de voir les œufs de ces oiseaux, n'ayant jamais trouvé leur nid; j'ignore même s'ils nichent dans le pays où je les ai trouvés, ce que je ne crois cependant pas, puisque les Sauvages n’ont pu rien m'apprendre à l'égard de leur ponte. Je sais seulement d'eux qu'ils arrivent pendant la chaleur, et s’en retournent lors de la saison des pluies. Au reste, je ferai observer que j'avois déja séjourné sur le Gamtoos plus de trois semaines avant d’en avoir vu un seul, et que tout- à-coup j'en vis paroître plusieurs bandes, et comme J'ai tué de jeunes individus dans les mêmes bandes, il est certain qu'ils , Q à QU AZ A ñn arrivent dans ces parages qu apres leur ponte. Dans l’une des troupes que je vis de ces oiseaux, j en remar- quai plusieurs qui étoient presqu'entièrement blancs : je crus d’abord qu'ils étoient d’une autre espèce, car il arrive souvent aux oiseaux qui vivent en bandes de se méler avec d’autres bandes d'oiseaux différens ; mais ayant eu le bonheur de tuer un de ceux-ci, je vis qu'il étoit de la même espèce, et que son plumage étoït seulement varié de presqu'autant de plumes blanches que de grises. J'ai aussi remarqué que cet individu étoit un jeune oïseau de l'année, et il est probable que tous ceux que je vis ainsi variés de blanc dans la même troupe pro- venoient d’une seule nichée : du moins il est rare que dans celles où il se trouve un oiseau blanc, toute la couvée entière 102 ISO EN AT ONCE L'RE ne soit pas plus ou moins variée de cette même couleur. Ceci tient à des circonstances dont nous ignorons absolument les causes; cependant beaucoup d’oiseleurs prétendent avoir des moyens infaillibles pour faire éclorre des oiseaux entièrement blancs, ou pour faire changer leur plumage en blanc; j'ai souvent, je l'avoue, payé libéralement ces prétendus secrets qui ne mont pas réussi, et qui n'ont servi qu à me prouver que dans tous les états de la vie sociale il y a des charlatans. Au reste, les naturalistes sont, en général, bien dans l'erreur, lorsqu'ils attribuent à l'âge et sur-tout à la grande vieillesse, la blancheur du plumage des oiseaux ; puisqu'au contraire, tous ceux qu'on trouve blancs ou variés de blanc, sont presque toujours des jeunes oiseaux qui ne conservent méme pas long- tems cette livrée accessoire, qu'ils quittent à la seconde mue, pour reprendre la couleur ordinaire et propre à leur espèce. Ceci est une vérité de fait et non une conjecture. J'ai examiné en Europe, tant en oiseaux entièrement blancs que variés de blanc, onze moineaux francs, trois friquets, neuf merles, deux rouge-corges, cinq perdrix, une bécasse, deux bécassines, sept hirondelles, trois pincons, cinq corneilles, trois pies, quatre cailles , vingt-deux alouettes, deux draines, deux rousseroles, un geai et un gros-bec. En Afrique, j'ai également vu plusieurs oiseaux variés de même en blanc, et tous, sans exception, étoient des jeunes oiseaux. Dans le nombre de tous ceux dé- nommés ci-dessus, j'ai nourri en cage des moineaux, des aloueites et des merles, dont la plupart des plumes étoient blanches, espérant qu'ils deviendroient par la suite entièrement blancs; mais loin de là, toutes les plumes qui étoient de cette couleur sont peu-à-peu tombées, et ont successivement été remplacées par celles de leur livrée ordinaire. Je ne prétends pas pour cela dire qu un oiseau ne puisse DU PORTE-LAMBEAU X. 18) devenir blanc en vieillissant, mais au moins cela est-il infini- ment moins ordinaire. Il est encore bon de faire remarquer ici que lorsqu'un oiseau change de couleur, ce n’est jamais qu'en changeant ses plumes; car une plume ne devient pas effecti- vement d’une autre couleur, et ce n'est enfin qu'en muant qu'un oiseau en prend une différente. Il arrive seulement que lorsqu'un oiseau est parvenu au point de vieillesse où il ne mue plus, ses plumes s'usent par le frottement, et ses couleurs s’effacent en changeant de nuance, par l'effet de l'air et sur- tout du soleil qui,surles couleurs éclatantes, commelerouge, l'orange, le jaune ou le vert tendre, produit un effet trés- sensible, même dans l'espace d'une mue à l’autre; à plus forte raison quand le plumage ne se renouvelle plus, comme cela arrive à tous les oiseaux d’un certain âge. Aussi les oiseaux ne sont-ils jamais si beaux, si purs et si éclatans qu'immédiatement après qu'ils ont mué, et quand leurs plumes ont encore la fraicheur de la nouveauté. Cet avis ne doit pas être perdu pour les ornithologistes qui sont curieux d’avoir une collection pure et d'un beau choix. Au printems la couleur des oiseaux semble encore reprendre un éclat nouveau; mais comme l'amour excite des combats entre les mâles, leurs plumes, dans cette saison, sont quelquefois mutilées et arrachées. bn ÿe EoA 184 HISTOIRE NATURELLE LE MARTIN-BRAME, NO FIG Cer oiseau, qui est très-commun dans plusieurs parties de l'Inde, où on le nomme Martin -brame, doit probablement vivre aussi dans quelques cantons de l'Afrique, puisque j'en ai rencontré dans cette partie du monde, des troupes considé- rables qui traversèrent de l’ouest à l’est , sous le vingt-septième degré de latitude sud, le canton où j'étois campé lorsque je tuai la première giraffe. Leur passage dura six jours; mais ils ne s'arrétèrent point du tout, et ne firent que passer d'un vol rapide à une certaine distance en l'air, et même toujours absolument hors de la portée ordinaire du fusil. Je n’en joignis qu'une seule bande, qui ayant découvert une fontaine auprès de laquelle nous étions campés, s'y abattirent pour s’abreuver, ce qui me donna l’occasion de leur tirer un coup de fusil à portée, qui ne m'en procura que deux, lesquels se trouvèrent être deux mâles. | Aucun des Sauvages de ma caravane ne connoissoit cette espèce, qui, suivant toutes les apparences, se rendoit par [a partie où nous nous trouvions, dans des pays situés plus à l'est, pour y faire sa ponte; et ceci est d'autant plus probable, que nous entrions dans la saison où tous les oiseaux qui ne viennent — 2 # eloute 2). } } x Rhuebe 99. — ; ®) ; : ÿ : , DÉLAI Reraol) De C£ CONTE td 0e fetes _ 2) / : 42) ; A, y le à he LE DR 2e He 2 gt Le + € y U : ? p de L Ampriuetee. de // uolori 2. È DU MARTIN-BRAM_E. 189 viennent dans ces parages que pour y passer l'été arrivoient de toutes parts : tels étoient les guepiers, les sucriers et ces jolis oiseaux dont nous avons parlé sous le nom de nabirôp, et quitous, ainsi que beaucoup d'autres espèces, arrivoient par bandes, pour se répandre dans les différens cantons où chacune d'elles se proposoit de se fixer; de sorte que de jour en jour nous remarquions de nouveaux hôtes que nous ne con- noissions pas encore, et dont la plupart m'étoient absolument inconnus. Le Martin-brame est dela taille de notre étourneau européen, etilest modelé absolument sur les mémesproportions. Saqueue, qui est un peu étagée, l'est seulement de manière qu'elle s'arrondit en s'étalant ; les aîles ployées s'étendent à-peu-près vers son milieu. Les plumes du dessus de la tête sont longues, étroites et pointues ; elles s'étendent sur le derrière en pointes détachées, et forment à l'oiseau une jolie huppe d’un beau noir violâtre. La gorge, les joues, le cou et la poitrine sont couverts de plumes fines déliées et se terminant toutes en pointes détachées; leur couleur est un fauve roussâtre, relevé par quelques traits plus clairs ; sur la poitrine, les flancs et le ventre, cette cou- leur s’éclaircit beaucoup, et toujours davantage à mesure qu’elle s'approche du dessous de la queue , où les couvertures sont entièrement blanches, ainsi que les plumes des jambes. Le manteau, les scapulaires, les recouvremens du dessus de l'aile, les moyennes pennes de l'aile, le dos, les couvertures du dessus de la queue et les deux plumes du milieu de la queue, sont d’un gris roussätre. Les grandes pennes ou remiges sont noirâtres extérieurement, et se terminent toutes en un brun treés-clair, qui est la couleur de leurs revers ou barbes intérieures. Les couvertures du dessous de l’aîle sont blanches, et forment sur son bord une bande blanche qui la longe jusqu’à la naissance des Tome 11. A.a 186 HISTOIRE NATURELLE premières pennes. La plume la plus latérale de chaque côté de la queue est presqu entièrement blanche, et porte une large tache noire dans la moitié supérieure de ses barbes intérieures: dans la suivante, le noir s’étend un peu plus bas, et marque aussi une partie de ses barbes extérieures. Enfin, le noir s'étend toujours un peu davantage, en s’éclaircissant à mesure que la plume s'approche plus du milieu ; de sorte qu’elles ont successi- vementtoujours moins de blanc jusqu'aux deux intermédiaires, qui n'ont que leur pointe de cette couleur. Le bec, les pieds et les ongles sont d’un beau jaune, et les yeux d'un brun roussâtre. N'ayant tué que deux mâles de cette espèce, je ne sais sil existe aucune différence entre ceux-ci et leurs femelles; mais j'ai vu dans plusieurs cabinets, des individus dont les couleurs du plumage m'ont paru être d’une teinte plus foible, et la huppe moins longue; il pourroit donc se faire que ceux-ci fussent des femelles. DU MARTIN GRIS-DE-FER. 197 LE, MAR DIN. GRIS-DE-MER, N°05 Er Me; Czr oiseau est encore un de ceux que le hasard seul m'a procurés, et que je n'ai point trouvés dans le lieu où l'espèce fait sa résidence ordinaire, ne l'ayant rencontré que dans le moment de leur migration. Ce fut le 6 octobre, me trouvant campé aux pieds de Bruyntjes-Hoogte, sur les bords d’une petite rivière nommée par les colons Vogel-Kivier (Rivière des Oiseaux) , que nous apperçümes le passage de ces oiseaux, que je pris d’abord , à leur cri, ainsi qu'à leur manière de voler par pelotons, pour être de l'espèce de nos étourneaux. Ils arrivoient du côté de l’est, et sembloient prendre leur route vers le nord-ouest. M'étant caché sur un endroit élevé dans la direction du passage, j'en abattis plusieurs, et vis que je m'étois trompé sur leur espèce; j'observerai aussi que tant que nous n’eûmes point franchi les hauteurs de Bruyntjes, nous vimes passer des volées considérables de ces mêmes oiseaux, mais qu'une fois que nous eùmes traversé ces montagnes nous n’en appercümes plus, et que depuis cet instant je ne les ai revus nulle part. Cet oiseau est absolument de la taille du précédent Quant Aa 2 188 ES YRO DRE N AU PERLE à sa conformation, par les caractères du bec, des pieds, etc., on reconnoîit , au premier coup-d'œil, que cette espèce, ainsi que celles dont nous venons de faire mention sous les noms de porte-lambeaux et de martin-brame, appartiennent au même genre. Comme ce dernier, celui dont nous parlons a le dessus de la tête noir; mais les plumes de cette partie, quoique poin- tues et effilées, ne forment point une huppe. Ce noir s'étend sur les joues, où il est séparé de celui du sommet de la tête par les yeux et par une peau nue, d’une couleur orangée, qui s'avance en pointe sur le derrière de l’œil. La gorge, le cou, la poitrine et les flancs, ainsi que tout le dessus du corps, jusqu'aux recouvremens du dessus de la queue, sont d’un gris- de-fer légèrement nué de fauve sur les parties supérieures du devant du cou, et d’un brun plus foncé sur la nuque. De la poitrine au ventre règne une bande longitudinale d’un demi- pouce de large, qui suitle milieu du sternum dans toute sa longueur, et dont la couleur est absolument d'un fauve qui imite la couleur du bois de hêtre poli. Les recouvremens du dessous de la queue et ceux du revers des ailes ont la même teinte. Toutes les pennes des ailes sont noires; les dix premières seulement sont, à leur origine, marquées de blanc, mais ce blanc est caché en-dessus par les couvertures de cette partie , lesquelles sont couleur de bois, ce qui forme, dans cet endroit une tache triangulaire. Les moyennes pennes ont un reflet brillant, changeant en vert ou en pourpre sur leurs bords extérieurs. Les pennes de la queue sont d’un noir brillant; les quatre les plus latérales de chaque côté sont tachées, chacune à leur pointe, de la même couleur, qui est aussi celle de ses couvertures inférieures, mais ces taches sont plus grandes sur la première que sur la quatrième penne. La queue est courte et arrondie à son extrémité; les aîles en repos atteignent plus des trois quarts de sa longueur. Le bec est d’un orangé vif; les DU MARTIN GRISDE-FER 189 pieds et les ongles d’un jaune citron, et les yeux d’un brun- rouge foncé. Dans cinq individus que j'ai tués de cette espèce, il s’est trouvé trois femelles et deux mâles. Ces derniers, seulement un peu plus grands, ne différoient des femelles par la couleur, qu'en ce que chez eux le noir de la tête, des aîles et de la queue étoit un peu plus brillant, et que le jaune des pieds approchoit aussi davantage de la couleur orangée du bec, particulièrement sur le devant du tarse. J'ai remarqué, au reste, que le dessus des plumes de la queue et des scapulaires étoit élimé et comme usé par le frottement; ce qui prouve, ce me semble, que ces oiseaux se retirent aussi dans des trous pour pondre et pour se coucher : ce que pratiquent généralement tous ceux de cette tribu. 190 PONS TIOT RE N'APUR ELLE IE ARIOMS EN TN: N°. 96. Prassous tous les naturalistes qui ont écrit sur les oiseaux ont parlé de celui-ci sous le nom de merle couleur de rose, et tous se sont trompés sur son genre, en le rangeant parmi les merles ou les grives, desquels il diffère absolument par ses mœurs, qui le rapprochent bien plus des étourneaux. Ceci prouve qu'aucun des ornithologistes qui l'ont décrit, n'avoit observé l'espèce dans son état naturel et libre, et qu’ils n’ont fait tous que copier ce nom d'après leurs prédécesseurs. Cependant Aldrovande, qui est le plus ancien des auteurs qui ait décrit cet oiseau, nous dit très-positivement que les oiseleurs des environs de Bologne, où il passe, le nomment étourneau de mer, et qu'il fréquente les tas de fumier. De combien de faits vrais l’histoire naturelle des animaux ne seroit-elle pas enrichie si les savans qui nous ont transmis les secrets de la nature, qu'ils n'ont souvent étudiée que dans leur cabinet, avoient au moins daigné consulter ces hommes simples qui, vivant immé. diatement sous son influence, la contemplent journellement ; ils ne les auroient pas trompés ceux-là; car ne cherchant à acquérir aucune espèce de gloire dans leurs observations, ils n'ont remarqué absolument que ce qui est. Mais malheureuse: ment pour beaucoup de nos érudits, la science de l'histoire GE. } U JS Joue 2 Pour be 90 , Ye 22 G ) L 7) ES 3 LA lebiecht eKerol) Pre Cée € Fssat fc ( À ES CKodeloh e Hit : L : ; : ? DE 22 Lfuprire tee > 7 «que. l (EE 4 < DU BIOS ELHN: TL naturelle n’est point l'histoire de la nature. Une nomenclature sèche et aride des productions de la nature, pourvu toutefois qu'elle soit arrangée d’après un ordre systématique, voilà ce qui constitue l'essence de la science; et la méthode füt-elle d’ailleurs incohérente et fausse dans ses principes, contrariät- elle même toutes les lois de la nature, elle prévaudra chez une certaine classe de savans : et de deux méthodes encore, dont l'une seroit publiée en latin ou en grec, et l’autre dans une langue vulgaire, il n’y a pas de doute que la dernière ne soit, par cette seule raison, rejetée par eux. Hélas! combien d'hommes dont tout le savoir ne consiste qu'en plus ou moins de mots retenus, et qui, incapables de traduire une ligne d'Homére ou de Virgile, affectent de farcir leurs ouvrages et leurs lecons de citations grecques ou latines, et de mots barroques et inin- telligibles pour les quatre-vingt-dix-neuf centièmes de ceux qui les écoutent ou les lisent en baïllant. Il ne faut point se lasser de dire à ceux-là que la science n’a point un langage particulier qui lui soit propre. Non! le pédan- tisme et l’orgueil seul de quelques hommes vains, ont pu intro- duire une pareille maxime pour en imposer et masquer leur. ignorance par l'usage d’unelangue peu usitée, afin de substituer par ce moyen les mots aux choses. La vraie langue d'une sciénce est celle qui en facilite l'étude, en mettant ses principes à la portée de tout le monde. Je le répète, l'homme dont le desir est de perpétuer à ses semblables les connoïissances qu'il a acquises, les explique clairement, d'une manière simple et dans des termes aisés à concevoir et à retenir. Le pédant seul quine cherche qu’à en imposer et non à enseigner, surcharge ses leçons de termesinutiles,etsème à chaque pas des difficultés qui finissent par dégoûter celui que son inclhination portoit naturellement à l'étude, et qui y auroit pris goût si on lui avoit 192 HISTOIRE NATURELLE applani les routes de la science, au lieu deles hérisser d’épines: manière que n'ont adopté, au reste, nos petits charlatans scientifiques que pour éblouir les sots qui, entendant des mots qu'ils ne comprennent souvent pas, regardent ceux qui les débitent comme des êtres doués d’un savoir supérieur, pendant qu'ils n’ont tout au plus qu'un peu plus de mémoire qu'eux, et ne cherchent qu'à cacher leur ignorance crasse sous une apparence de savoir factice (1 ). (1) Qui ne se rappelle avec respect le célèbre Romé-de-Lisle, ce savant cristal- lographe que la science regrettera longtems ? Ses leçons, qu’il donnoïit gratuitement à tous ceux qui les demandoient, étoient marquées au coin de la plus rare complai- sance. Se mettant de niveau avec le commençant, il avoit plutôt l’air de chercher à s’instruire lui-même avec vous qu’à vous enseigner. Lui proposoit-on quelques doutes, il les écoutoit avec cette tranquillité modeste qui caractérise si bien l’homme vraiment instruit, qui, loin de prétendre tout savoir, croit au contraire, avoir encore quelque chose à apprendre , et desire acquérir plus de connoissances qu’il n’en a. Vos ob- jections naissoient-elles d’une lecon antérieure mal saisie ou mal comprise, il vous y ramenoit naturellement, et finissoit par vous convaincre si vous aviez tort. Il étoit loin celui-là d'employer avec affectation des termes étrangers, quand il les avoit dans la langue de son pays; aussi n’étoit-il pas du nombre de ces charlatans qui démontrent chaque jour une science nouvelle! aussi n’a-t-il pas obtenu des places! aussi est-il mort pauvre ! Le cabinet d'étude de ce savant, qu’auroit dû acquérir le gouvernement, nousa encore été, je crois, enlevé par l'étranger , ou tout au moins dispersé. J’ai vu avec douleur, dans toutes les ventes publiques qui se sont faites depuis plusieurs années, tous les morceaux rares et précieux passer dans les mains des étrangers ou des particuliers où ils restent enfouis, lorsqu'ils auroïent dû être achetés par le souver- nement pour servir à l'instruction de tous. Il est vrai que presque toujours les fonds manquent et sont même refusés pour ces sortes d’achats. Cette économie, que les circonstances actuelles peuvent excuser en général, n’en est pas moins, dans certains cas particuliers, d’une parcimonie blämable et mal-entendue. Je ne puis m'empêcher de rapporter ici un trait dont j'ai été témoin, et qui honore infiniment les membres attachés à l’école des mines de Paris : n'ayant pu obtenir des fonds pour faire, à la vente de l’abbé Rolin, quelques achats, j'ai vu plusieurs d’entre eux, plutôt que de laisser échapper des morceaux d'étude, les D'après DU RTOS EL TN 195 D'après le témoignage des naturalistes, il paroït que ce prétendu merle couleur de rose, que j'ai nommé Roselin pour lui ôter le nom de merle qui ne lui convient pas, habite plusieurs contrées de l’ancien continent. Aldrovande en a vu à Bologne; il n’est donc pas surprenant qu'il se trouve aussi en Espagne, comme on peut le croire d'après le rapport de Klein. Linné nous apprend qu'il habite la Laponie et la Suisse; Edwards en a vu deux qui furent pris en Angleterre ; et Montbeillard assure qu'il en a observé plusieurs qui avoient été pris en Bourgogne dans le tems du passage. Cette dési- gnation du tems du passage de ces oiseaux, prouveroit qu'ils arrivent régulièrement à certaine époque en Bourgogne. J'ai pourtant questionné tous les Bourguignons que j'ai été à même de voir, et pas un n'a pu me rien dire de positif sur leur existence dans cette partie de la France; d’ailleurs, s'ils y arrivoient en effet régulièrement, on les auroit vus dans quel- ques endroits voisins, car il est probable qu'ils ne tombent pas du ciel dans le canton de la Bourgogne où Montbeillard les a vus, et qu'il ne nous indique même pas. Au reste, il paroît que tous les individus qui ont été observés dans le nord de l'Europe, et qui y avoient été pris vivans, étoient des oiseaux évarés et dispersés de leurs bandes par quelqu’accident, puisqu'aucun des ornithologistes qui en ont parlé, ne nous apprend rien sur leurs mœurs, sur leur manière de vivre, sur leur ponte et sur la différence qui existe entre le mâle et ù payer du fruit de leur économie , pour les placer dans la callection de cet établissement précieuxet utile. Un pareil trait de dévouement fait beaucoup d'honneur aux personnes qui peuvent s’en glorifier, et prouve que , dans le choix qu’on a fait d’eux, on a eu égard au mérite. Cet exemple sera loin d’être imité par ces hommes qui n'ayant obtenu une place que par leurs intrigues, croient n’y être que pour en calculer et toucher les émolumens. Tome II. Bb 194 HISTOIRE NATURELLE la femelle. C'est à quoi je vais obvier en partie, ayant observé l'espèce en Afrique, pays où ces oiseaux se montrent régu- lièrement tous les ans, à la hauteur du vingt-quatrième degré de latitude sud, et où ils séjournent quelque tems pour con- tinuer ensuite leur route droit au nord, et passent sans doute par l'istme de Suès pour se rendre en Barbarie, où plusieurs voyageurs n'ont appris qu'ils étoient très-communs. Peut-être les mêmes se rendent-ils aussi au Bengale, car je sais très- positivement que cette espèce s'y trouve, et qu’elle y est fort abondante; j'en ai même sous mes yeux, dans le moment où J'écris, un individu femelle qui m'est parvenu de cette partie de l'Inde. En le comparant avec trois autres femelles que j'ai tuées en Afrique, je n’ai trouvé aucune différence remarquable entre elles. Le mâle est à-peu-près de la taille de notre merle commun, puisqu'il a neuf pouces et quelques lignes de lon- sueur, du bout du bec à l'extrémité de la queue. La tête est surmontée d'une huppe de plumes flexibles, qui se jettent par derrière, et dont la couleur est d’un noir violâtre : cette même couleur teint le cou, en s'avançant un peu sur la poitrine, où elle se termine circulairement. De la poitrine au ventre, le plumage est d’une couleur de rose, ternie à l'extrémité de chaque plume, et plus foncée à leur naissance; de sorte qu'en regardant l'oiseau de la tête à la queue, il est d’une teinte moins vive qu'en le voyant dans le sens contraire. Les scapu- laires, le dos et le croupion sont de la même couleur, mais d'une nuance moins rose encore; les plumes de ces parties étant la plupart salies d'un brun clair à leurs pointes, et le milieu du dos taché de noirâtre. Les petites couvertures des aîles qui avoisinent le poignet, les plumes des jambes, des flancs et les couvertures du dessus et du dessous de la queue sont d’un noir à reflet verdâtre, et sont toutes terminées par une bordure d’un rose fané ; celles du dessous de l'aile sont DU SR /OSÆE'L TN: 195 noires et ont leur bordure blanche. Les grandes pennes des ailes sont noirâtres; les moyennes ont un reflet d'un vert brillant, qui domine également sur toutes ses moyennes et grandes couvertures. Un petit filet blanc dessine le contour de toutes les plumes des aîles, ce qui produit un effet très- agréable. Les pennes de la queue sont toutes d'égale longueur, et ont aussi un ton vert brillant. La mandibule supérieure est d'un brun clair, et l'inférieure jaunâtre à sa base. L’œil est brun ; les pieds et les ongles sont roussâtres. Les aïîles ployées s'étendent jusqu'au milieu de la longueur de la queue. La femelle diffère du mâle en ce qu’elle est un peu plus petite, que les plumes de la huppe sont plus courtes et moins fournies, et qu'elle n’a que le dessus de la tête et le devant du cou quisoient d'un noir violâtre; les plumes des joues, des côtés du cou et de la nuque étant d’un brun grisâtre; effet produit par leurs bordures qui sont de cette couleur. Quant à la couleur du reste du plumage, son rose est beaucoup plus terne, parti- culièrement sur le dos et les scapulaires, et le vert des aïles et de la queue est aussi moins brillant. Dans le jeune âge, tout ce qui est couleur de rose est d'un brun clair. Ces oiseaux se rassemblent en grandes bandes, fréquentent les troupeaux et volent absolument comme nos étourneaux. Ils se nourrissent de vers, d'insectes et de baies. J'ai trouvé dans l'estomac de ceux que j'ai tués près de mon troupeau, beaucoup de poux de bois, qu'ils avoient avalés tout entiers, et qu'ils détachoient étant posés sur le dos des bestiaux. Leur ramage est une espèce de sifflement entrecoupé de moment à autre par un criaigre et trainant. Bb : 196 HISTOIRE NATURELLE Ces oiseaux ne faisant que passer par le canton où je les ai trouvés, je n’ai pu être instruit de la manière dont ils nichent, et du nombre et de la couleur de leurs œufs. La description qu'a donné Montbeillard du merle couleur de rose, se rapporte entièrement à celle que je viens defaire, à quelques petits détails près, qu’il a cru devoir omettre sans doute; et il n’y a pas de doute assurément que le merle couleur de rose des naturalistes ne soit de la même espèce que mon Roselin; il suffira, pour en étre persuadé, de lire toutes les descriptions de cet oiseau, et de les comparer avec la figure que j'en ai publiée. Mais, d’un autre côté, si on l’oppose à la figure du même oiseau, dans les planches enluminées de Buffon, N°. 251, on trouvera que celle-ci en diffère beaucoup; mais on se convaincra facilement, en même tems, que la figure que j'ai citée ci-dessus, ne se rapporte pas même à la description de l’auteur, et que ce portrait peu fidèle a été outré et dans les formes et dans les couleurs; l’oiseau n'ayant point le bec couleur de rose, la langue et les paupières rouges, la tête si grosse et la dope si ample; ni moins encore les ere du ventre et du dos d’une couleur de rose aussi vive, et celles des ailes, de la queue, du venire et de la tête d’un noir foncé, et les pieds orangés; il est enfin tel que Montbeillard l’a décrit lui-même. Au reste, en comparant, l'individu qui est au Muséum d'histoire naturelle de Paris, lequel a probablement servi de modèle et pour la figure et pour la description dont j'ai parlé, jai vu que le peintre s’étoit plu à orner le portrait qu'il en a fait, et que l'oiseau lui-même ne diffère pas de ceux que j'ai rapportés d'Afrique : c’est ce dont tout le monde pourra s’assu- rer par ses propres yeux. Je puis certifier aussi que de tous les oiseaux de cette espèce que j'ai vus dans les différens cabinets de l'Europe, pas un seul ne ressembloit à la figure publiée D'U'R O1SLE EL'E NN 197 par Buffon, et que tous étoient colorés et conformés comme celui dont j'ai donné la description. D'après ce que j'ai observé de la manière de vivre de cet oiseau, je me suis cru fondé à le retirer du genre des merles, oiseaux, en général, très-solitaires, et qui ne vivent jamais en société. Il tient donc bien plus naturellement sa place dans l'ordre des oiseaux dont les mœurs sont plus sociales; enfin, parmi les étourneaux, et notamment parmi les martins auxquels il ressemble absolument par les formes. 198 HISTOIRE NATURELLE LE PIQUE-BŒUEF, NA 07 Car oiseau dont l'espèce est, jusqu'à ce moment, la seule dans son genre qui soit connue, a déja été décrit par Brisson; du moins, d’après ladescription que ce naturaliste en a donnée, il y a tout lieu de croire que ceux que j'ai vus dans la partie méridionale de l'Afrique appartiennent absolument à la même espèce; quoique le seul individu que ce naturaliste ait été à méme de voir, (lequel avoit été rapporté du Sénégal par Adanson, ce célèbre voyageur à qui l’histoire naturelle doit les découvertes les plus intéressantes) paroisse en différer un peu par les teintes du plumage; mais ces différences ne nous paroissent pas assez considérables pour devoir les séparer. Cependant, d'après la figure d'un Pique-bœuf du Sénégal, donnée dans Buffon, N° 293 des planches enluminées, on seroit très-tenté de faire deux espèces de celui-ci et de ceux que jai tués dans le pays des Grands Namaquois, unique canton de l'Afrique où je les aie rencontrés; mais nous avons tant de fois été à même de nous convaincre du peu de fidélité des figures de l’ornithologie de Buffon, quenous aimons mieux nous en rapporter à la description que Brisson a faite de cet oiseau, et quiaureste ne me paroît différer un peu des miens, que par l'idée peut-être que je me suis formée de la couleur D. Jouve Ü @ / N ? uiueue de Lauo ? P > Lo/utp 7 VA y CSS Riuo 7 Lg De ? D ? LAEChC © 22 (2 ? = D U 2T Q U'E-B OEUF. 199 qu'a voulu indiquer ce naturaliste ; puisque notre langue est bien loin encore d’avoir les termes nécessaires pour exprimer d'une manière fixe toutes les nuances des couleurs; cela est même si vrai, que je suis très-persuadé que si l’on donnoit en même tems à vingt peintres différens un portrait d'oiseau à faire d’après la meilleure description, chacun d'eux feroit un dessin qui ne ressembleroit non-seulement point à l'oiseau décrit, mais qu'il n'y auroit pas mème deux de ces dessins qui se ressembleroient. Et beaucoup d'oiseaux des planches coloriées de Buffon ont visiblement été peints d'après les descriptions des auteurs qui en ont parlé, et non d’après la nature, ce qui les rend le plus souvent, non-seulement inutiles pour la science, mais dangereux à consulter pour établir des principes d'après leurs comparaisons. La manière de vivre du Pique-bœuf se rapproche assez de celle des étourneaux; c’est donc avec juste raison que Brisson a compris cette espèce dans le même ordre,et je suis persuadé, que si ce naturaliste avoit eu des renseignemens certains sur les mœurs des mainates, ainsi que de beaucoup d'autres oiseaux qu il a rangés parmi les merles, il n’auroit pas commis cette erreur. Le Pique-bœuf mâle est, à peu de chose près, de la taille de notre plus petite grive; Brisson le compare, pour la gros- seur , à l'alouette huppée, et lui donne cependant huit pouces six lignes de longueur : dimension que n'a certainement pas l'alouette huppée ou le cochevis; et ceci paroït d'autant plus une erreur d'impression, que ce naturaliste ne donne que six pouces neuf lignes de longueur à son alouette huppée; mesure qui d'ailleurs est assez exacte, parce qu'elle aura été prise sans doute sur uu oiseau entier, et non d'après une peau rembour- 200 HISTOIRE NATURELLE rée, qui s'étend toujours plus ou moins, suivant l'adresse de celui qui la prépare. Enfin , la mesure d'un Pique-bœuf, prise sur un individu mâle au moment où je l'ai tué, se trouve être de huit pouces, et celle de la femelle de sept pouces cinq lignes. La tête, le cou en entier, le manteau, les scapulaires et les couvertures des aîles sont d’un brun roussâtre (et sui- vant Brisson, d’un gris brun). Les ailes sont d’une teinte plus sombre dans leurs barbes extérieures, et fauves intérieurement. Les plumes de la queue, au nombre de douze, sont toutes étagées et fort pointues : les deux du milieu, qui sont les plus longues, sont entièrement du même brun que les aîles ; les autres n’ont que leurs barbes extérieures de la même nuance de brun, étant roussätres intérieurement. La poitrine, le ventre , les flancs, les couvertures du dessous de la queue et le croupion sont d'un fauve clair, qui s’éclaircit cependant encore vers le bas-ventre, où il prend un peu de blanc, ainsi que dans les recouvremens inférieurs de la queue (et dans Brisson ces mêmes parties sont d'un jaunâtre sali et rembruni). Le bec est d'un rouge de vermillon à sa pointe, et jaune à sa base ; les yeux sont d'un brun rouge, et les pieds et les ongles brunâtres. Les aîles ployées s'étendent vers le milieu de la. longueur de la queue. La femelle ne diffère du mâle que par les couleurs du bec, qui chez elle sont plus ternes, et par la taille; du reste, elle lui ressemble en tout. Les deux mandibules du bec de cet oiseau se renflent cha- cune en même tems à leur pointe, et forment un bout obtus, qui lui donne une grande force et qui étoit très-nécessaire à cette espèce pour lui faciliter les moyens d'enlever, du cuir des quadrupèdes, les larves des iaons qui y sont déposées et y croissent : DU PIQUE-BOE UF. 201 croissent : manière de vivre que la nature assigne à ces oiseaux, et qu'ils emploient souvent pour subvenir à leurs besoins : aussi recherchent-ils avec soin les troupeaux de bœufs, de buflles et de gazelles , et de tous les quadrupèdes sur lesquels ces mouches taons déposent ordinairement leurs œufs. C’est en se cramponant fortement sur le cuir robuste de ces animaux, qu'à grands coups de bec, et en pinçant fortement le cuir dans l'endroit où l'oiseau sent une élévation qui indique la présence d’une larve, qu’ils la font sortir avec effort, comme nous pourrions le faire nous-mêmes avec nos doigts. Les ani- maux accoutumés au manège de ces oiseaux, les souffrent avec complaisance, et sentent apparemment le service qu'ils leur rendent en les débarrassant de vrais parasites qui ne vivent qu'aux dépens de leur propre substance. D'ailleurs, les Pique-bœufs ne sont pas les seuls oiseaux qui se perchent sur le dos des quadrupèdes ; nous avons déja vu que plusieurs autres oiseaux de l’ordre des étourneaux ont la méme habitude; mais beaucoup de ceux-là se contentent d'enlever seulement les poux de bois qui s’attachent sur le cuir des animaux, n'ayant pas, dans leur bec, la force nécessaire pour extirper ces larves qui sont sous la peau : office que l'espèce seule du corbivau partage avec les Pique-bœufs. Aussi remarque-t-on dans la construction des mandibules de ce corbeau Pique- bœuf (1), une forme analogue à celle de l'oiseau dont nous parlons, et dont la force du bec est vraiment surprenante vu sa petitesse. Au reste, je n’en parle qu'avec connoiïssance de cause, ayant été à même d'éprouver, à mes dépens, à quel point ils peuvent pincer vigoureusement. Un jour m'étant saisi (1) Voyez la description et la figure de ce corbeau dans les planches coloriées de cet ouvrage, N°. 5o. Tome IL. Cc 202 HISTOIRE NATURELLE d'un de ces oiseaux, auquel mon coup de fusil n’avoit cassé A . , . . . > que l’aîleron; il m'empoigna le pouce si fortement qu'il coupa le morceau qu'il tenoit dans son bec. q Les Pique-bœufs sont assez ordinairement plusieurs ensem- ble; mais jamais cependant ils ne volent en grandes bandes; il m'est rarement arrivé d'en voir plus de six à huit dans le même troupeau, soit de bœufs ou de gazelles. Ils sont très- farouches et ne s'approchent pas facilement; aussi lorsqu'il en venoit auprès de mes troupeaux, ne pouvois-je les aborder qu'en me cachant derriere quelques bœufs , que je faisois avancer lentement du côté de ceux sur le dos desquels ils étoient perchés, et toujours j'étois obligé de les tirer en volant, à moins que je neusse voulu risquer d'estropier le bœuf sur lequel j'aurois pu les tuer. J'en remarquai un jour à-peu-près une douzaine parmi un grand troupeau de buffles que nous chassions dans une plaine du pays des Grands Namaquois, mais n'ayant avec moi d'autre arme que ma carabine chargée à balle, je ne pus en tuer un seul. Outre les larves des taons dont ces oiseaux sont très-friands, ils mangent aussi les poux de bois lorsqu'ils sont pleins de sang, et généralement toutes sortes d'insectes. Je ne leur ai jamais entendu exprimer d'autre ramage qu'un cri aigre, que chacun d'eux jetoit au moment où il s'envoloit du dos de l'animal. Je n'ai point été à même de connoître la maniere dont ces oiseaux construisent leur nid et où ils le placent, ni de rien DU "Pr QUE P'OEUrE 203 savoir sur leur ponte et sur le tems de l'incubation. Il est vrai que j ai très-peu séjourné dans le pays où je les ai trouvés, et que d’ailleurs nous n'étions pas alors dans la saison où les oiseaux sont en amour. Je n’ai vu le Pique-bœuf dans aucun des cantons de la colo- nie; et ce qui me fait croire qu'en effet il ne s’y trouve nulle _ part, c’est qu'aucun des Hottentots de ma caravane ne connois- soit ces oiseaux et ne les avoit jamais vus : il en étoit de même des Namaquois des bords de l'Orange. La DL E DES OISEAUX CONTENUS DANS CE VOLUME. LES CORBEAUX Le Corbivau, page 5 Le Grand-Corbeau, 9 La Corneille du Cap, 11 La Corneille à scapulaire blanc, 14 DES PIES. Le Piapiac, 17 La Pie à culotte de peau , à 20 Le Temia , 22 La pie bleue, 24 La Pie bleue à tête notre, 28 La Pie rousse, 31 La Pie pie-grièche , 33 DES PIE-GRIÉCHES. Le Fiscal, 35 La Pie-grièche rousse, | A0 L'Écorcheur, bo La Pie-grièche rouge à plastron blanc, 55 TABLE DES OISEAUX, etc. 205 Le Pendeur , Page 58 Le Rousseau , 60 SECONDE DIVISION DES PIE-GRIÉCHES. Le Bacbakiri, O 5 Le Boubou, LÉ Le Gonolek, 78 Le Tchagra, ô1 TROISIÈME DIVISION DES PIE-GRIÈCHES. Le Brubru, 85 Le Cubla , 89 La Pie-grièche bleue, g1 La Pie-grièche silencieuse , 103 L'Oliva, 109 Le Sourcirou , 111 Le Tachet, V12 Le Rousset, 115 La Grande Pie-grièche , 118 OO TISPE AA U'X DONT LE GENRE PAROIT SE RAPPROCHER UN PEU DE GE LU DES PIE-GRIÈCHES DE LA PREMIÈRE DIVISION. Le Bec-de-Fer , 121 Le Geoffroy, 124 DES CHOUCAS. Le Sicrin ; 127 M: M » È À 7h va sé LE Due TABLE DES VO GE À UX rec OU S E HO à QUI VIVENT EN TROUPES ET QUI, PAR LEURS MŒURS ET PAR LEURS CARACTÈRES, SE RAPPROCHENT DES CHOUCAS, DES ÉTOURNEAUX ET DES MARTINS, Le Roupenne, Page 134 L'Eclatant , 142 Le Choucador , 1 44. Le Vert-doré, 146 Histoire naturelle des Étourneaux d'Afrique , 152 Le Spréo , 155 Le Nabirop , 157 Le Couigniop, 163 Le Nabouroup , 168 La Cravate frisée , 172 Oiseaux d'Afrique qui semblent se rapprocher des Mainates, 176 Le Porte-lambeaux , 178 Le Martin-brame, s 104 Le Martin gris-de-fer , 197 Le Roselin , 190 Le Pique-bœuf, | 198 FIN DU TOME SECOND.