r>^rt' x'^^'^^i:^ LIBRARY OF ie85_l056 HISTOIRE NATURELLE DES INSECTES. HISTOIÏIE NATURELLE DES INSECTES, Composée d'après Réaitmur, Geoffroy > Degeer , RoESEL , Linnée , Fabricius , et les meilleurs ouvrages qui ont paru sur Cette partie j Rédigée suivant la méthode d'OLiviER ; Avec des notes , plusieurs observations nouvelles , et des figures dessinées d'après nature. Par F, M. G. T. DE TIGNY , Membre de U Société d'Histoire naturelle de Paria. TOME III. IJÈ L^IMPRlMERlE IDE CRAPELET. A PARIS, Che^ DETERVILÏ.E, rue du Battoir^ n'^ i6, AN X. HISTOIRE NATURELLE DES INSECTES. CARACTERES DES GENRES B£ L'ORDRE D ES H YME N OP T ÈRE S. iPRE»ïlÈRE SECTION. Bouche sans trompe. h OURMI. — Antennes filiformes , brisées ; premier article tics-long et cylin- drique. Quatre antennules courtes, fili- formes ; les antérieures un peu plus longues, composées de six ar- ticles égaux, les postérieures de quatre . Ventre attaché au corselet par un pédicule ; petite écaille sailr lante entre deux. Insectes. III. % U HISTOIRE NATURELLE Point d'ailes dans les mulets. Ti-ois petits yeux lisses. MuTiLLE. — Antennes courtes, filiformes } premier article long. Quatre antennules inégales ; les antérieures nu peu plus longues , composées de six articles , dont le troisième conique et assez gros , le dernier cylindrique et plus mince ; les postérieures composées de quatre articles moniliiormes , dont le dernier plus petit. Aiguillon simple et très - fort caché dans l'abdomen. Point d'ailes dans les mulets. Trois petits yeux lisses. FrÉlox. — Antennes courtes , filiformes ; premier article long et cylindri- que , les autres très-courts. Quatre antennules inégales ; les antérieures composées de six arti- cles, dont le second, le troisième et le quatrième gros et coniques ; les postérieures composées de qua- tre articles , dont le premier très- mince à sa base. Aiguillon simple , pointu , caché dans l'abdomen. Trois petits yeux lisses. DES HYMÉNOPTÈRES. S Guêpes. — Antennes filiformes , brisées ; premier article long et cylindri- que ; le second , long et prescjue conique, Quatre antennules filiformes; les antérieures un peu plus longues , composées de six articles ; les pos- térieures de quatre , dont le der- nier très- court et très-petit. Aiguillon simple et très-pointu, caché dans l'abdomen. Corps rase. Trois petits yeux lisses. Leucopsis. — Antennes courtes, droites , un peu plus grosses par le bout j articles courts , peu distincts. Quatre antennules courtes ; les antérieures composées de quatre articles , les postérieures de trois. Ventre attaché au corselet par un pédicule court. Aiguillon triple , recourbé, re- levé et appliqué sur Iç ventre da.ns la femelle. Trois petits yeux lisses, Chrysis. — Antennes courtes , filiformes ; premier article un peu plus long , les autres courts et égaux. Quatre antennules filiformes , 4 HISTOIRE NATURELLE inégales ; les antérieures une fois plus longues, composées de cinq articles ; les postérieures de qua- tre, dont le premier à peine dis- tinct. Ventre attaché au corselet par un pédicule court. Aiguillon simple , pointu , ca- ché dans l'abdomen. Trois petits yeux lisses. TiPHlE. — Antennes courtes , filiformes , roulées en spirales ; premier article un peu plus gros et plus long. Quatre antennules inégales, fili- formes ; les antérieures un peu plus longues , composées de six articles égaux , les postérieures de cinq. Ventre attaché au corselet par un pédicule court. Aiguillon simple, caché dans l'ab- domen. Trois petits yeux lisses. EvANlE. — Antennes filiformes , assez lon- gues ; premier article très-long, presque cylindrique , les autres courts , égaux , peu distincts. Quatre antennules inégales; les antérieures plus longues, filifor- mes, composées de six articles j BES HYMENOPTERESa 5 les postérieures de quatre , dont le dernier en masse. Ventre comprimé, presque trian- gulaire, attaché au corselet par un long pédicule. Aiguillon très-petit, caché dans l'abdomen. Trois petits yeux lisses. IcHNEUMON. — Antennes sétacées , longues, vibratiles ; articles nombreux, très- courts, peu distincts. Quatre antennules inégales, fili- formes } les antérieures un peu plus longues , composées de six arti- cles , les postérieures de quatre. Ventre attaché au corselet par un pédicule long et mince. Aiguillon flexible , long et divisé en trois pièces dans la femelle. Trois petits yeux lisses. TTrocere. — Antennes filiformes ; articles courts , égaux, cylindriques et dis- tincts. Quatre antennules très- courtes, inégales ; les antérieures compo- sées de deux articles égaux ; lei postérieures do quatre articles ^ dont les derniers;^ plus gros» Veat-i'e y^ml îm cmseî-et j, et tet' b HISTOIRE NATURELLE miué par une pointe forte , un peu aiguë. Aiguillon dentelé, caché sous une gaine creusée en gouttière dans les femelles. Trois petits yeux lisses. CiMBEx. —Antennes en masse , un peu plus courtes que le corselet. Quatre antonnnlcs filiformes: les deux antérieures un peu plus lon- gues , composées de cinq articles , les deux postérieures de quatre. Ventre joint au corielet. Aiguillon dentelé, caché dans l'abdomen, dans les femelles. Trois petits yeux lisses. Ti^NTHRÈDE. — Antennes filiformes , plus longues que le corselet; articles égaux , distincts , cylindriques. Quatre antennulcs inégales, fili- formes ; les antérieures plus lon- gues , composées de bix articles, les postérieures de quatre. Ventre joint au corselet. Aiguillon dentelé , caché dans l'abdomen. Trois petits 5'eux lisses. DiPLOLÈPE. — Antennes filiformes , Ion- DES HYMENOPTERES. f gués ; quatorze articles cylindri- ques , égaux , très-distincts. Quatre antennules courtes ; les antérieures filiformes , composées de cinq articles égaux ; les posté- rieures de trois , dont le dernier en masse. Ventre un peu comprimé. Aiguillon caché entre deux lames du ventre. Trois petits yeux lisses. CiNiPS. — Antennes filiformes , brisées ; premier article très-long et cylin- drique , le second petit , les autres courts, égaux, peu distincts. Quatre antennules courtes , iné- gales , presque en masse ; les an- térieures un peu plus longues , composées de six articles, les pos- térieures de cinq. Ventre un peu comprimé. Aiguillon courbé et caché entre deux lames du ventre. Trois petits yeux lisses. « HISTOIRE NATURELLE SECONDE SECTION. Bouche avec une trompe. Chalcts. — Antennes courtes , filiformes , un peu plus grosses par le bout j premier article plus long et cylin- drique. Quatre antennules filiformes ; les antérieures un peu plus lon- gues , composées de six articles presque égaux , les postérieures de quatre. Ventre presque globuleux , at- taché au corselet par un long pé- dicule. Aiguillon cachédans l'abdomen. Cuisses postérieures renflées. Trois petits yeux lisses. Sphex. — Antennes un peu plus longues que le corselet , filiformes , en spi- rale ; onze articles égaux > cylin- driques , distincts. Quatre antennules filiformes ^ presque égales ; les antérieures un peu plus longues ^ corap osées do six articles ;j les postérieures de quatre. DES HYMENOPTERES. ^ Ventre attaché au corselet par un pédicule plus ou moins long. Aiguillon pointu , simple , ca- ché dans l'^abdomen. Trois petits yeux lisses. ScoLiE, — Antennes épaisses , filiformes ^ un peurenflées au milieu ; premier article alongé , les autres à peine distincts , courts, égaux et cylin- driques. Quatre antennules courtes , un peu plus épaisses à leur base ; le antérieures composées de six arti- cles, les postérieures de quatre. Ventre attaché au corselet par un pédicule court. Aiguillon simple, très-fort, très- pointu , caché dans l'abdomen. Trois petits yeux lisses. TniNifE, — Antennes courtes, cylindriqueè;, premier article court , gros , pres- que rond , les autres égaux, peu distincts. Quatre antennules égales , fili- formes j les antérieures composées de quatre articles , les postérieures de trois. Ventre attaché au corselet par un pédicule court. 10 HISTOIRE NATURELLE Aiguillon petit , simple , caché clans l'abdomen. Bembex. ■— Antennes filiformes, courtes j premier article long et cylindri- que , les autres courts et égaux. Quatre antennules courtes , iné- gales , filiformes ; les antérieures composées de six articles , c^out le pénultième très-court ; les posté- rieures composées de quatre , dont les deux derniers plus courts que les autres. Ventre attaché au corselet par lin pédicule court. Aiguillon simple et pointu, ca- ché dans l'abdomen. Tarses antérieurs ciliés. Trois petits yeux lisses. AndrÈne. — Antennes courtes , filiformes ; premier article , long , mince à sa base ; le second très-petit , les au- tres égaux, cylindriques. Trompe divisée eu trois pièces ; suçoirs enfermés dans une gaine. Quatre antennules filiformes , inégales ; les antérieures compo- 6ées de six articles , les postérieu-» les de deux. Ï3ES HYMENOPTERES. H Aiguillon simple caché dans l'ab- domen. Trois petits yeux lisses. Abeille. — Antennes filiformes , courtes , brisées; premier article très-long , les autres courts , égaux. Trompe divisée eu cinq pièces ; suçoirs libres , enfermés à leur base dans une gaine. Quatre antennule3sétacées,très- courtes ; les antérieures composées de six articles , les postérieures de cinq. Aiguillon simple, très-pointu, caché dans l'abdomen. Trois petits yeux lisses. EucÈRE. — Antennes longues , filiformes ; articles égaux , presque cylindri- ques. Trompe divisée en sept pièces 5 suçoirs libres. Quatre antennules courtes , fili- formes , inégales ; les antérieures un peu plus longues , composées de six articles , les postérieures de deux. Aiguillon simple et pointu , ca-; ché dans l'abdomen. Trois petits yeux lisses. 12 HISTOIRE NATURELLE lïOMADE. — Antennes filiformes , courtes ; premier article um peu plus long que les autres. Trompe divisée en cinq pièces 5 suçoirs libres. Quatre antennules filiformes , très-courtes j les antérieures com- posées de six articles , et les pos- térieures de quatre. Aiguillon simple , pointu , ca- ché dans l'abdomen. Trois petits yeux lisses. DES HYMÉNOPTÈRES. l5 ORDRE TROISIEME. DES HYMENOPTERES. JLes insectes les plus industrieux , les plus courageux, les plus intéressans, sont place's dans l'ordre nombreux des hyménoptères ; c'est sur- tout parmi ces animaux que se rencontrent ces espèces remarquables par un instinct voisin de l'intelligence j c'est ce qui les a fait e'tu- dier de tous temps avec plus d'attention , et ce qui a rendu plusieurs d'entr'eux l'objet d'une admiration devenue quel- quefois exagérée. Les abeilles, les guêpes, les ichneumons , les sphex , les cinips , n'ofifrent-ils pas assez de faits singuliers et vrais , pour piquer la curiosité de l'homme le plus indifiPérent aux phéno- mènes de la nature ? Falloit-il rendre U Insectes. III. a l4 HISTOIRE NATURELLE vérité suspecte, en l'enveloppant de tons les ornemens de la fable ? Nous allons présenter l'histoire des hyménoptères dépoiiillée de tons ces ornemens étrangers et inutiles : nous espérons qu'il restera encore assez de faits singuliers pour intéresser l'homme le plus léger , et faire méditer celui qui est accoutumé à réfléchir sur les phéno- mènes de la nature. Quoique plusieurs hyménoptères aient des couleurs métalliques assez éclatan- tes , ce ne sont cependant pas les plus Iprillans des insectes : ils n'aj^proclient point, par cette qualité, des papillons •et des coléoptères. Dans les plus petits animaux comme chez les hommes , l'é- clat extérieur se trouve rarement réuni dans le même individu, avec de giandes qualités morales. Les abeilles , les four- mis , les bombices à soie , ne sont point couverts de l'or ni des brillantes cou- leurs que l'on voit sur les lourdes cétoi- iies,surlesbuprestes;les cantharides^ &c. DES HYMENOPTERES. i5 La vertu , l'esprit , ne sont pas une suite nécessaire des grandes richesses ; c'est une consolation que la nature semble avoir réservée pour le pauvre , et dont elle lui offre sans cesse des exemples parmi les animaux. Les plus brillam- ment habillés sont rarement les plus industrieux ou les plus utiles. Mais si les couleurs de la plupart des hyménoptères sont ternes , leurs mem- bres sont déliés, ce qui rend leurs mou- vemens légers et faciles. Ils ont quatre ailes membraneuses ! les nervures qui soutiennent la mem- brane mince et transparente qui forme ces ailes, sont moins nombreuses, moins anastomosées que dans les névroptères^ elles partent de la base de l'aile en di- vei'geant , et forment seulement entre elles quelques anastomoses. C'est cette structure de leurs ailes qui leur a fait donner le nom ^'hyménoptères , qui veut dire , ailes membraneuses par ex- cellence. C'est aussi un des carâctèjres ïG HISTOIRE NATURELLE distinctifs de ces insectes. Les limites sont difficiles à établir , il est vrai , en- tre ces deux structures des ailes ; mais aussi ce caractère n'est pas le seul , comme nous le verrons. Ces quatre ailes sont de grandeur bien différente. Les inférieures, qui sont aussi un peu pos- térieures , sont beaucoup plus petites que les supérieures : elles sont l'une et l'autre étroites , rétrécies à leur inser- tion, et peu grandes relativement à celles des névroptères ; ce qui n'empê- che pas ces insectes de voler avec légè- reté et rapidité , et beaucoup mieux que certains névroptères à grandes ailes > tels que les panorpes , myrméléons , ascalaphes , perles , &c. La tête des hyménoptères est gi'osse , souvent plus large que le corselet ; les yeux sont saillans, siu'-tout ceux à ré- seau ; des petits yeux lisses , au nombre de trois , sont placés sur le sommet de cette tête. Les antennes sont rarement filifor- DES HY31EN0PTERES. Ij mes ; elles sont peu longues et presque toujours coudées , comme brisées dans leur milieu. Les différentes parties qui composent généralement le corps des insectes , sont ici très-distinctes. La tête, dont nous venons de parler , est tronquée net postérieurement , et ne tient au corselet que par un tube grêle, et fort court. Le corselet est souvent bombé , quel- quefois comme partagé lui-même en deux parties :1a partie la plus mince est postérieure : elle n'est séparée de l'an- téi'ieure que par un sillon transversal assez profond. L'abdomen est presque toujours ovoïde et alongé , formé d'anneaux ecailleux très-distincts, qui sont à re- couvrement les uns sur les autres. Dans quelques hyménoptères, cet abdomen long et étroit , très-mobile , et cependant susceptible d'une action assez forte , ne tient au corselet que par un iS HISTOIRE NATURELLE pédoncule si délié , qii'oii peut le com- parer à un iil. Il est ainsi dans quelques guêpes , quelques sj)liex , quelques ich- neuinons.Onconçoitdilïicilement qu'un tiiyau si grêle puisse donner passage à l'ésopliagc , à des nerfs , à des vaisseaux aériens et à des tendons qni doivent être forts et assez nombreux, puisque les mouvemens de cet abdomen sont très-variés. , Cette di&position donne aux hymé- noptères cette sorte de grâce qui accom.- pagne presque toujours la légèreté et la vivacité. Ces facultés sont augmentées par la forme et la position des pattes : elles sont toujours assez longues et semblent partir d'un même point, de la partie postérieure du corselet. Cette pièce des pattes que nous avons nommée la lian- clie , est plus longue et plus visible dans les li3"ménoptères que dans la jîlupart des autres insectes. Les pattes sont dé- liées ; les postérieures sont quelquefois DES' H Y M É N O P T È R E S. la un peu renflées ; clans d'autres espèces , ce sont les antérieures qui sont dilaLées ; et on doit deviner quelle est la cause ou la suite de cette disposition., d'après ce que nous en avons dit dans le discours préliminaire. La dilatation des pattes antérieures ne se voit que dans les mâles de quelques espèces , et sert à faciliter l'accouplement de ces insectes. Le ren- flement des cuisses postérieures donne aux cinips et aux clialcis qui les ont ainsi , la faculté de sauter. Alix. parties que nous venons de dé- crire , s'en ajoute une qui ne se trouve dans aucune autre espèce d'insectes , et qui devient , par cela même, un très- bon caractère distinctif des hyménoptè- res; c'est l'aiguillon souvent très-piquant que les femelles de tous ces insectes por- tent à l'extrémité de leur abdomen. Nous avons déjà décrit d'une manière générale la structure de cet aiguillon : nous n'y reviendrons point. Nous novis Eontenterons de répéter que dans les 20 HISTOIRE NATURELLE hyménoptères, il est tantôt caché dans l'intérieur de l'abdomen, et son princi- pal usage est d'être alors une arme dé- fensive ; que dans d'autres espèces il reste constamment visible , et qu'il est quelquefois même fort alongé. 11 sert alors de canal conducteur des œufs. C'est à l'aide de cet instrument , dont la forme et la position varient , que les hymé- noptères entament les végétaux , per- cent la peau des animaux ou pénètrent dans les trous et les fentes profondes , et dans tous les autres lieux où ils veulent déposer leurs œufs. D'après ce que nous venons de dire, on se i-eprésente facilement la plupart des hyménoptères ayant un corps léger et mobile , porté sur de longues jambes , enlevé par des ailes dont la rapidité des mouvemens supplée à l'étendue ; on con- çoit combien la longue et bonne vue dont ils sont doués , et l'aiguillon poi- gnant dont leur abdomen mobile est armé, doit augmenter leur hardiesse. DES HYMENOPTERES. 21 Voyons actuellement quel usage ils font de ces membres pour la conservation et la multiplication de leur espèce ; car les animaux n'ont point d'autre but. Us ne font servir les moyens qu'ils ont reçus de la nature , qu'à satisfaire les besoins peu nombreux qu'elle leur a donnés. On a fait l'histoire d'un animal , quand on a dit comment il se conserve et se multi- plie. Les alimens des hyme'noptères sont , comme ceux de presque tous les autres insectes, de deux sortes, animaux et végétaux-, mais tous ne les prennent pas de la même manière. Les uns les prennent solides , tandis que d'autres les prennent liquides : cela établit dans leurs organes de la manducation deux modes de structure différens. Mais comme les hyménoptères for- ment un ordre d'insectes très-naturel , et qu'il est bien reconnu que la bouche est un organe assez important pour ne point différer considérablement dans les 22 HISTOIRE NATURELLE insectes de même ordre , la nature a su adapter celles des hyménoptères à des usages qui paroissent opposés , sans ce- pendant changer le principe sur lequel elle a construit la bouche de ces insec- tes. Ainsi , quoiqu'il y ait réellement de ces insectes qui mâchent leurs alimens , tandis que d'autres les prennent liqui- des , ils n'ont cependant pas pour cela les uns une bouche à mâchoires , et les autres une bouche à trompe ou à suçoir. La bouche de tous est composée des mêmes parties : ces parties seules sont modifiées , comme nous allons le voir , en prenant d'abord une guêpe pour exemple. On voit à la partie supérieure , ou plutôt antérieure , une lèvre supérieure concave-, ensuite deux mandibules très- fortes et dentelées -, au-dessous sont deux mâchoires presqu'entièrement membra- neuses sur leur dos, et dans une échan- crure trèa-sensible , sont les palpes an- térieures j enfin la bouche est fermée DES HYMÉNOPTÈRES. 23 postérieurement par la partie qite nous avons nomme'e la lèvre inférieure ; elle est aussi presqu'entièrement membra- neuse, et porte à son extrémité les pal- pes postérieures. Jusqu'à présent cette bouche ne pa- roît pas difiPérer de celle des insectes à mâchoires nommés coléoptères. Maison remarquera dans les hyménoptères , que les mâchoires et la lèvre inférieure sont soudées par leur base, et forment par ce moyen une espèce de canal. La différence qui existe entre la bou- che des abeilles qui lèchent pour ainsi dire les matières sucrées dont elles se nourrissent, et celle des guêpes, semble énorme au premier moment. Les pre- mières paroissent avoir une longue lan- gue ou trompe. Ce n'est point ici le lieu de décrire la structure curieuse de la bouche des abeilles ; mais nous verrons alors que cette différence n'existe que dans les proportions des mâchoires et de kl lèvre inférieure, qui sont très-alon- 24 HISTOIRE NATURELLE gées dans les hyménoptères qui, comme les abeilles, semblent avoir une langue. Quoique tous les hyménoptères ne se nourrissent point de matières solides, ainsi que nous venons de le dire , tous cependant ont des mandibules cornées très-fortes. Mais si elles ne leur servent point à broyer leurs alimens, ils en font usage pour préparer les matériaux dont ils se servent dans ia construction de leurs nids. L'accouplement de la plupart des hy- ménoptères est très-peu connu ; et l'i- gnorance où l'on est,à cet égard, est d'au- tant plus fâcheuse , que cette fonction doit présenter certainement des singu- larités remarquables dans une classe d'insectes dont les femelles , souvent plus grosses que les mâles, sont armées d'aiguillons dangereux ou incommodes. Elles sont aussi presque toujours beau- coup moins nombreuses. La nature mul- tiplie ordinairement ses productions en raison des difficultés qu'elles doivent DES HYMÉNOPTÈRES. 25 éprouver à remplir l'objet pour lequel elles sont créées , et de l'importance qu'elle met à le voir exécuté. Elle sem- ble donc nous indiquer, par cette mul ti- plicité des mâlesparmi plusieurs espèces d'hyménoptères , que la réunion des sexes éprouve, chez ces insectes, plus de difficulté que chez les autres animaux. Les femelles sont, en général, re- marquables par leur grosseur , la peti- tesse de leurs yeux et de leur tête. Les mâles , au contraire , ont la tête et les yeux plus forts ; mais ils sont constam- ment privés de l'aiguillon dont les fe- melles sur-tout sont très -bien armées. Si le soin que l'on prend des objets est souvent une suite des difficultés que l'on a trouvées à les acquérir, la na- ture semble encore nous donner une indication des entraves qui existent dans l'accouplement des hyménoptères , par la prévoyante et industrieuse ten- dresse qu'elle a inspirée aux mères de beaucoup de ces insectes pour leurs en- lasectes. III. 5 26 HISTOIRE NATURELLE faiis. C'est en eûet parmi les hyménop- tères , et peut - être seulement parmi eux, que l'on trouve clans les mères une tendresse presqu'e'gale à celle que nous observons avec plaisir chez les animaux à sang chaud. Nous aimons à retrouver en eux ce sentiment , parce qu'il sem- ble fait pour amener le bonheur , et qu'il y paroît même si inhérent , que les chagrins qui résultent de son excès, portent souvent avec eux leur consola- tion. " La plupart des hyménoptères femelles s'occupent non-seulement de chercher lin lieu où leurs larves puissent vivre ^ans l'abondance et la tranquillité ; mais elles leur construisent des habita- tions aussi curieuses que solides, et pro- pres aux usages auxquels elles sont des» tinées. Une femelle toute seule , privée par conséquent de tout secours, n'ayant ponr instrument que ses dents et ses pattes , jette les fondemens d'une habi- tation s2?acieuse qui doit un jour nous DES HYMENOPTERES. 27 étonner par sa l'égularité et par sa struc- ture. Tantôt c'est dans de semblables habitation Sj dont nous connoissons quel- ques-unes sous le nom de ruclie , que cette mère laborieuse dépose ses œufs : tantôt^ plus coarageuse qu'industrieuse, c'est dans le corps d'autres insectes , ou dans l'intérieur des végétaux , qu'une mère d'une autre espèce va déposer ses œufs. Qïi peut établir , comme une règle à laquelle je ne connois peut - être point d'exception réelle, que jamais les œufs des hyménoptères ne sont déposés à découvert; et les tenthrèdes ne seroient point ceux qu'on pourroit citer contre cette espèce de loi , ainsi que nous le verrons. Mais si dans ce cas, ces hymé- noptères n'établissent point d'excep- tion , ce sont aussi presque les seuls dont les larves s'éloignent de celles des autres hyménoptères. Les larves des insectes de cet ordre Bout la plupart privées de pattes , ou 28 HISTOIRE NATURELLE quand elles en ont, elles sont si foibles, qu'elles ne peuvent leur être d'aucun usage. On conçoit que ces animaux , dépourvus de tous moyens de se mou- voir^ privés du secours de leurs parens, qui, suivant la loi établie pour tous les insectes , meurent avant la naissance de leurs petits; on conçoit, dis-je , qu'ils seroient morts de faim si la nature n'a- voit pourvu à leur subsistance par des moyens nouveaux, même inattendus, et qui nous prouvent encore la fécon- dité de ses ressources. On remarque parmi plusieurs genres d'hyménoptères , des individus plus pe- tits que les autres, mais armés, comme les femelles, d'un aiguillon ; lorsqu'on les dissèque, on les trouve privés d'organes sexuels, et lorsqu'on les observe, on voit bientôt qu'ils ne remplissent ni les fonc- tions de mâles ni celles de femelles. Ces individus^ que l'on a nommés mulets ou neutres y ne pouvant jouir des plaisirs DES HYMENOPTERES. 2^ qui épuisent si promptement les insec- tes pourvus de sexes, puisqu'ils meurent peu après les avoir goûte's , ont une vie plus longue, et peuvent voir se succéder plusieurs ge'ne'rations de mâles et de fe- melles. La nature, en les privant du plai- sir de donner l'existence à de nouveaux êtres , leur a confié le soin de les élever et de les mettre en état de remplir leur place dans l'univers. Ce sont eux qui remplissent les véri- tables et honorables fonctions de la pa- ternité, puisque ce sont eux qui ont toutes les sollicitudes de la tendresse paternelle , et tous les soins de l'éduca- tion. Ces individus appartieîinent aux espèces d'hyménoptères qvii vivent en société , et qui construisent de grandes liabitations. Ce sont eux qui travaillent à ces constructions , ce sont eux qui vont chercher des alimens pour les lar- ves qui , privées de pattes , ainsi que nous l'ayous dit ; ne peuvent sortir de 3o HISTOIRE NATUHELLlî la place où leur mère a déposé l'œuf qui les conteuoit; ce sont eux aussi qui les défendent et les soignent avec tous les signes de l'attachement le plus vif. Tel est le premier mcj-'en employé par la nature pour nourrir les larves apodes de plusieurs hyménoptères. Le second est plus simple , et se retrouve chez des insectes d'autres classes : il consiste à placer les larves au milieu même de la substance qui doit leur ser- vir de nourriture. Les hyménoptères obtiennent ce résultat de deux maniè- res. Les uns percent la peau d'un insecte mou , ou l'écorce d'un végétal : ils dé- posent dans ces lieux des œufs d'oi\ sortent de petites larves qui se nour- rissent des sucs qui les environnent ; elles font périr Tinsecte qui les leur fournit , ou font naitre sur les végétaux des excroissances où ces sucs viennent s'épancher plus abondamment. D'autres mères , douées d'une pré- voyance encore plus admirable , vcn - DES HYMÉNOPTÈRES. 3t ferment leurs oenfs dans des cellules so- lides qu'elles construisent exprès. Elles remplissent ces cellules de la nourriture végétale ou animale qui doit convenir et suffire à la larve qui naîtra pour at- teindre son entier accroissement. Ellesr referment la cellule hermétiquement , et meurent après avoir pourvu , par cet ingénieux moyen , à la nourriture de petits incapables d'aller clierclier des alimens que personne ne peut leur ap- porter. Il résulte de ce que nous venons de dire, que les larves des hyménoptères _, à l'exception de celles des tenthrèdes et genres semblables , sont des espèces de vers mous , blanchâtres , ovoïdes et apodes ; que leur bouche est ordinaire- ment une simple ouverture , un simple suçoir ; que presque toutes , par consé- quent, se nourrissent de matières liqui- des qu'elles trouvent dans les corps où leur mère les a déposées , ou dans ceux qu'elle a mis en provision à côté d'elles^, 32 HISTOIRE NATURELLE ou enfin qu'elles vivent d'alimens éga- lement liquides, qu'une troisième sorte d'individus nommés neutres , leur ap- jx)rte et leur dégorge dans la boueîie , après leur avoir fait subir une altération convenable. Les lai'ves de quelques hyménoptères ont la faculté de se filer une coque com- posée d'une soie très-fine et toujours peu épaisse. D'autres se changent en chrysalide à nu. Leiu- chrysalide est de Tordre de celles qui sont immobiles, mais dans lesquelles les parties de Tin- secte parfait sont non-seulement visi- bles , mais encore tiès-distinctes et sé- parées les luics des autres , quoiqu'cn- veloppées dans une pellicule commune. La métamorphose des hyménoptères est donc complète dan s Tacception que nous sommes convenus de donner à ce mot. Les hyménoptères sont peu abondans au printemps : la plupart des espèces se repeuplent chaque année au moyen de mères fécondées qui ont passé Thiver DES II Y M EN OPTE RE S. 33' cachées dans quelques trous. Il faut donc qu'elles aient eu le temps de construiro à elles seules une habitation , d'y pon- dre , d'élever leurs petits , pour que ces insectes puissent paroître en nombre remarquable. Aussi est-ce à la fin del'été qu'on les voit en grand nombre voltiger eurles fleurs, dont la plupart sucent la matière sucrée , ou auprès des fruits qu'ils dévorent ; aucun ne se nourrit de matières corrompues ou desséchées. Cet ordre est fort nombreux en espèn ces. LéCs genres sont dilficiles à caracté- riser, et les espèces privées de couleurs tranchées et distinctives le sont encore plus. Ce qui ajoute à la difficulté, et ce qui a produit un grand nombre d'er- reurs et de doubles emplois, ce sont les dilTérences très-singulières qui existent entrele s mâles , les femelles et les mu- lets. Ces erreurs seront encore pendant long-temps difficiles à éviter ; car l'ob- servation de ces insectes est pleine da 54 HISTOIRE NATURELLE difficultés : nous ne pouvons en appor- ter de plus fortes preuves que l'histoire des abeilles. Depuis plusieurs siècles, les hommes les plus instruits , les plus patiens, les meilleurs observateurs étu- dient les abeilles, insectes domestiques^ que l'on a enfermes comme on a voulu dans des maisons de verre : cependant leurs habitudes ne sont point encore parfaitement connues. H s'élève tous les jours des doutes sur divers points de leur histoire, et leur génération est en- core envelopjDée des voiles du mystère, quelques efforts qucRéaumur, Scliirac, Hubert , &c, aient faits pour les lever. BES FOURMIS. 55 ORDRE TROISIÈME. LES HYMÉNOPTÈRES. SECTION P R L. M T E R E. Bouche sans trompe. X X I V^ GENRE. FOURMI. (fàractèr es génériques. Antennes filiformes, coudées; premier article très- long. — Mandibules grosses,multidentées.— Trom- pe très-courte , formée de trois pièces presque écailleuses. — Quatre autennules filiformes , les antérieures compofées de six , et les postérieures de quatre arti- cles. — Pédicule de l'abdomen alongé , noduleux , ou muni d'une écaille droite , élevée. — Trois petits yeux lisses. li E s fonrmis ont deux antennes fili- formes , coude'es. Le premier article , fort long , les distingtic des tipliies. Les 56 HISTOIRE NATURELLE «lâles et les femelles portent quatre ailes membraneuses, veinées , inégales ; l'abdomen est uni au corselet par un pédicule long, noueux ou muni à sa partie supérieure d'une pièce écailleuse droite. Ces insectes ont beaucoup de rapports avec les mutilles ; mais ces dernières ont le premier article des antennes plus court , le pédicule de l'abdomen sans écaille ni nodosité , et l'anus armé d'un aiguillon très-fort, caché dans le ventre. Les antennes composées de onze ou douze articles, dont le premier très- long et les autres courts, cylindriques, presque égaux , sont insérés à quelque distance des yeux , et forment un angle droit à la réunion du premier et du se- cond article. La lèvre supérieure est courte , co- riacée -, les mandibules cornées , gran ^ des , fortes et arquées. La tête est de moyenne grandeur dans Iss mâles et dans les femelles : elle pa- DES FOURMIS. 3j roît beaucoup plus grande dans le mu- let ; effet produit par la forme du cor- selet, que celui-ci a très-étroit et sou- vent épineux , tandis que les premiers l'ont large et convexe. L'abdomen est ovale et composé de cinq ou six anneaux distincts. Les pat- tes sont simples , de moyenne grandeur^ les tarses sont composés de cinq arti- cles, et terminés par deux crochets. Les fourmis vivent en société; elles ressemblent en cela aux abeilles et aux guêpes : elles travaillent comme elles d'un même accord à des ouvrages qui ont pour but l'utilité générale de la pe- tite république dont elles sont mem- bres. Les habitudes de ces insectes qui vi- vent en société ne pouvoient manquer d'exciter la curiosité : aussi ont-elles eu beaucoup d'historiens , dont quelques- uns se sont laissé entraîner par l'amour du merveilleux. En donnant quelques détails sur leur manière de vivre, nous Insectes. IIIr> 4 38 HISTOIRE NATURELLE chercherons à écarter le faux , sans nuire à l'admiration que doivent exci- ter les procédés industrieux de ces pe- tits insectes. Les fourmis , ainsi que la plupart de leurs habitations , sont connues de tout le monde. On trouve parmi elles des individus de trois sortes , des mu- lets , des mâles et des femelles. Les pre- miers sont chargés de tous les détails du travail , comme parmi les abeilles ; aussi est - il plus que probable qu'ils sont, comme dans ce genre, de vérita- bles femelles privées de toute faculté génératrice,ainsi que l'indiquent les rap- ports existans entre les organes sexuels extérieurs des fourmis reconnues pour fécondes , et ceux de celles que Ton nomme improprement des mulets. Ils sont de la plus petite taille et dépour- vus d'ailes. Les mâles , qui sont ailés , sont plus grands , moins cependant que les femelles , qui sont de la plus grande taille , et dont Tabdomen est très-gros» DES FOURMIS. ô'^ Celles-ci portent aussi des ailes moins faciles à arracher , et qui leur manquent très-souvent après l'accou^plement. Les fourmis placent leurs habitations dansdifférens endroits. Les unes élèvent dans les bois des cônes de deux pieds environ de hauteur -, d'autres creusent des souterrains assez profonds. Le cen- tre pourri d'un arbre , ou les fentes d'une vieille muraille , servent de de- meures à celles-ci j celles-là la trouvent sous une pierre. Là vient aboutir cette longue suite de fourmis que l'on voit toujours en activité ^ et suivant toutes le même chemin. Les unes reviennent chargées de fardeaux immenses ; les autres par- tent siu" les traces de celles-ci pour aller prendre leur part du butin. Cependant les femelles restent dans l'intérieur occupées seulement à pon- dre , et n'en sortent jamais que pour s'accoupler. Cet accouplement a lieu dans différentes saisons, selon les espèces. 4o HISTOIRE NATURELLE Il varie depuis le printemps jusqu'à la fin de l'automne. On n'a pas encore la certitude que cette sortie donne lieu à des essaims comme dans les abeilles. L'accouplement fini, les mâles meu- rent, ou au moins ne rentrent plus dans la fi)urmilière. Les femelles , au con- traire , y rentrent au moins en partie : les ouvrières alors leur arraclient leurs ailes pour les fiircer , en quelque sorte , à ne point abandonner la république , et à y faire leur ponte. Elles se chargent de nourrir les larves qui sortiront de leurs œufs , et de les défendre des atta- ques extérieures. Ces œufs sont très- petits, arrondis, d'un blanc jaunâtre, rassemblés par tas. Ceux qui ont été dé- posés dans l'arrière -saison , n'éclosent qu'au printemps. Les larves qui en sor- tent sont de petits vers blancs, apodes, gros , courts , de douze anneaux. Ce sont ces larves que l'on appelle ordi- ïiairement œufs de fourmis. Leur tête. DES FOURMIS. 4i è'il faut donner ce nom à une partie menue , recourbée sur la poitrine , est munie de deux dents, de quelques cil» et d'un mamelon mou, rétractile , par lequel la larve reçoit la becquée. La fourmi ouvrière dégorge dans ce canal des sucs nécessaires à sa croissance. Ce- lui des fruits, et la liqueur mielleuse qui se trouve auprès des pucerons, pa- roît en faire la base. Au bout de quelque temps , cette lar- ve se change en une nymphe , sur la- quelle on apperçoit, comme dans les chrysalides des coléoptères , toutes les parties de l'insecte parfait. liCS nymphes et les larves sont inca- pables de tout mouvement; mais la fourmilière est-elle attaquée par l'hom- me ou par quelqu'autre ennemi , lea ouvrières emportent aussi-tôt dans les souterrains les plus reculés de leur ha- bitation , ces précieux gages de la pros- périté future de l'état. On croit commu- nément que les matériaux entassés par 42 HISTOIRE NATURELLE les fourmis sont destinés à leur servir de nourriture pendant l'hiver ; en con- séquence , on a beaucoup loué leur in- dustrieuse prévoyance. Cependant c'est un fait connu aujourd'hui, et confirme par les meilleurs observateurs , que le froid engourdit les fourmis de manière à ne point leur laisser la faculté d'user de ces provisions. C'est donc à tort qu'en leur attribuant nos vertus, on les a comparées au père de famille qui sème et recueille dans la belle saison pour les besoins de l'hiver , ou à l'homme sage qui profite de sa jeunesse pour se procu- rer , par son travail , de quoi soutenir sa vieillesse. Il est également probable qu'exemptesdenosdéfautsjce n'est point une avarice mal entendue qui les engage à faire ces énormes amas. Il se peut que des observations suivies découvrent un but utile à ce rassemblement informe de matériaux ; mais la nature ne prodigue point SCS secrets à ceux qui veulent la deviner sans sortir de leur cabinet. DES FOURMIS. 43 Les liqueurs sucrées, légèrement aci- dulées, que certains arbres laissent échapper des parties intérieures de quel- ques insectes, paroissent être particu- lièrement du goût des fourmis , et leur fournir leurpiincipale nourriture. Mal- heur au hanneton ( melolontha ) qui tombe au milieu d'elles , au carabe ( ca- rahus ) étourdi , qui traverse leur sen- tier. Attaqué de toute part, il succombe bientôt sous une multitude de plaies ; il périt, et ses débris sucés entièrement, vont accroître le monticule qu'habitent les vainqueurs. C'est ainsi que l'union triomphe de la force. Quelques expériences faites sur les fourmis se mbleroient faire croire, contre ce que nous avons dit , que le sens de l'odorat réside dans les antennes ; si Ton passe le bout du doigt sur le sentier suivi par ces insectes , elles se trouvent dérou- tées, nereconnoissentplus leur chemin. Alors on les voit toujours porter sur la terre le bout de leurs antennes;et ce n'est 44 HISTOIRE NATURELLE qu'après avoir cherche de tout côté de cette manière qu'elles franchissent len- tement l'espace sur lequel a passé le doigt , pour retrouver leur trace habi- tuelle. Si l'on fait l'amputation de cette partie à une fourmi , elle paroît étour- die et erre çà et là, sans pouvoir re- trouver son chemin. Les espèces comprises dans ce genre sont nombreuses et ont entre elles des différences remarquables. En effet, les nymphes de quelques-unes sont nues, tandis que celle de quelques autres res- tent au moins quelque temps enfermées dans une coque d'un blanc mat. Cette coque ne paroît point composée de fils comme celle des bombices; on n'y dé- couvre aucun tissu , elle ne paroît être qu'une pellicule. Il paroît que les ouvriè- res la déchirent peu avant la transfor- mation. Il ne reste plus à l'insecte qu'à se défaire d'une pellicule fort mince qui enveloppe immédiatement toutes sgs parties. DES FOURMIS. 45 Quelc[ues espèces de fourmis ont un aiguillon assez fort pour percer notre peau , et déposent dans la plaie une li- queur acide qui occasionne ane douleur assez forte. D'autres sont prive'es de tout aiguil- lon : celles-ci seringuent une liqueur rouge transparente, qui s'attachant à la peau de l'observateur inconsidéré, y cause des pustules douloureuses ressem* blant à celles qu'occasionne la piqûre dé l'ortie ( urtica ). Au reste , toutes sont munies de for- tes mâchoires qui pincent assez forte- ment. Les espèces de ce genre sont nombreu- ses. Nous en décrirons quelques-unes. Fourmi Céphalote , Formica Cephalotes, Cette espèce est entièrement d'un brun marron. La tête est échancrée en dessus et a deux épines postérieurement. 46 HISTOIRE NATURELLE liC corselet est couvert de poils ronssâ- tres. Celui des mulets a deux épines an- térieures , deux latérales et deux posté- rieures. Le pédicule de l'abdomen a deux nodosités dans ceux-ci: il est court dans les mâles et les femelles. Cette espèce se trouve en Amérique, où elle porte le nom àe fourmi de visite , et avec raison. Ces fourmis marchent par troupes et comme une grande armée. Quand on les voit paroître , on ouvre tous les coffres et toutes les armoires àes maisons, elles entrent et exterminent rats , souris , kakerlacs ( espèce de blatte de ce pays ) , enfin tous les ani- maux nuisibles , comme si elles avoient une mission particulière de la nature pour les punir et en défaire les hom- mes. Les historiens de ces insectes pré- tendent que si quelqu'un étoit assez in- grat pour les fâcher , elles se jetteroient sur lui , et mettroient en pièces ses bas et ses souliers. Le mal est qu'elles ne tiennent pas , poui' ainsi dire , leurs DES FOURMIS. 4/ grands jours assez souvent; on voudroit les voir tous les mois , et elles sont souvent trois ans sans paroître dans les habitations. Elles ne font cependant pas toujours un aussi bon usage des grandes mâclioi- res dont elles sont armées ; elles dé- pouillent souvent en une seule nuit les arbres de leurs feuilles, tellement qu'on les prend alors plutôt pour des balais que pour des arbres. Les unes coupent les feuilles , d'autres les attendent "à terre et les emportent dans leur nid. Ces fourmis creusent dans la terre des caves qui ont quelquefois huit pieds de profondeur, et qu'elles façonnent aussi bien que les hommes pourroient le faire. Quand elles veulent aller quel- que part où elles ne trouvent point de passage , elles forment une espèce de pont de la manière suivante : la pre- mière se place , s'attache à un morceau de bois qu'elle tient serré entre ses dents j une seconde s'attache derrière la 48 HISTOIRE NATURELLE première , et ainsi de suite : de cette manière , elles se laissent emporter au vent, jusqu'à ce que la dernière atta- chée se trouve de l'autre côte' , et aussi- tôt un millier de fourmis passent sur celles-ci , qui leur servent de pont. Ces fourmis sont toujours en guerre avec les insectes du pays : elles dévorent en un instant les plus grosses araignées. La Fourmi Hercule , Formica Herculeana, Cette espèce est grande ; les antenneg et la tête sont noirâtres ; le corselet de même couleur , et testacé en dessus j le pédicule de l'abdomen porte une écaille perpendiculaire élevée ; l'abdo- men est ovale et noir ; les pattes sont d'un fauve testacé ; les ailes sont trans- parentes veinées de noir. Cette fourmi n'a point d'aiguillon. Cette espèce se trouve aux environs d.ç Paris : elle fait son nid dans les troues To7n .JZl. 1^ ^ '> 3 Tliermes Fatale ^^^T. z- F. 3olf. 1. F. Hercule . a.2, . F. FaxLvc . 3 . . Sa, Coq^ae 4,. T. Fatale . J, Sa NmipliLe DES FOURMIS. 49 pourris des vieux arbres. Ce nid est composé d'un grand nombre de cham- bres , sépare'es par des cloisons de bois. La Fourmi fauve , Formica rufa. Cette fourmi est de grandeur moyen- ne. Les antennes sont d'un brun noi- râtre -, la partie supërieuie de la tête est noire, et l'inférieure est fauve ; le corselet et les pattes sont fauves ; l'ab- domen est ovale , noir , luisant. Cette espèce se trouve aux environs de Paris , dans les champs et dans les forêts. Elle fait son nid dans la terre , et le recouvre d'un monticule de dif- férentes matières. Insectes. III. 5o HISTOIRE NATURELLE X X V G E N R E. M U T I L L E. Caractères génériques. Antennes courtes , filiformes, premier article long. — Quatre antennules inégales j les antérieures un peu plus longues, composées de six arti- cles,dont le troisième conique, assez gros, le dernier cylindrique , assez gros ; le* postérieures composées de quatre arti- cles raoniliformes , dont le dernier plus petit. — Aiguillon simple et très-fort ca- ché dans l'abdomen. — Trois petits yeux lisses. Les mutilles ont deux antennes fili- formes , point coudées ; les antennules postérieures à quatre articles les distin- guent des tipliies qui en ont cinq à ces mêmes antennules. Ils ont souvent quatre ailes membra- neuses, veinées, inégales, quelquefois ils n'en ont point. L'abdomen est imi fiu corselet par un pédicule court, qui DES MUTILLES. 5l n'est jamais chargé d'écaillés ; caractère qui peut servir à les distinguer des fourmis. Les antennes sont insérées au milieu du front , et rapprochées. La lèvre supérieure est avancée , de consistance cornée , presque conique ; les antennules sont insérées sur son ex- trémité. La tête est petite , ronde , penchée ; l'abdomen sessile renferme un aiguil- lon piquant. Les tarses sont composés de cincj articles. Le corps des mutilles est toujours velu. La France ne produit que peu d'es- pèces de ce genre. Faute d'observation f nous ne pouvons ri^a dire de leurs mœurs ; tout ce qu'on sait , c'est qu'ils se trouvent courans dans les sablon- nières , ou cachés sous des pierres , ou même sur les fleurs. Ces derniers sonf les individus ailés : ceux-ci sont mâles 5a HISTOIRE NATURELLE on femelles. Plusieurs auteurs ont re- gardé les mutilles aptères comme des mulets. Cette assertion a été contredite par d'autres. On n'en trouve que trois ou quatre espèces aux environs de Paris. Nous ne ferons connoître que la sui- vante. Le Mutille européen , Mutilla europœa, Lalète de ce mutille est noire; son corselet roux , un peu noir dans sa par- tie antérieure -, l'abdomen est noir, mais sa base et le bord des segmens sont d'un blanc brillant ; imitant presque l'or. Tom .JZ£. Fat/- à 2. BaraZ'un^i tù/. Miinie.r ifculp. i- M. Eui'opeexi, 3.1'. Crible'. 5 . G . J'relon A[. 4<. G. Frelon F. S . G. CominuTie DES FRELONS. 53 XXV r GENRE. FRELON. Caractères génériques. Antennes filiformes, guère plus longues que la tête, composées de douze articles. — Mandibules arquées , minces, cornées, très- dures, terminées par trois dents. — Trompe très- courte , presque cornée , composée de trois piè- ces. — Quatre antennules j les antérieures composées de six articles , dont les trois premiers plus gros , presque rhomboï- daux 5 les postérieures de quatre articles. — Trois petits yeux lisses. — Corps rase. Les frelons ont beaucoup de ressem- blance avec les guêpes ; mais les mandi- bules des guêpes sont larges , voûtées , obliqiiement tronquées et multidentées; celles des frelons sont , au contraire , minces et terminées par trois dents iné- gales. Les ailes supérieures des guêpes sont pliées , et celles des frelons sont étendues. 54 HISTOIRE NATURELLE Les antennes des frelons sont filifor* mes, guère plus longues que la tête , et composées de douze articles, dont le premier est cylindrique , un peu plus gros et un peu plus long que les autres ; le second est très-court-, le troisième est alongé , un peu plus mince à sa base j les autres sont cylindriques , égaux ) peu distincts : elles sont rapprochées et insérées à la partie antérieure de la tête. La bouclie est composée d'une lèvre supérieure coriace, courte , très-large; de deux mandibules, d'une trompe, et de quatre antennules. La tête est ordinairement grosse , un peu plus large que le corselet auquel elle est unie par un col très-mince -, les yeux sont grands, ovales, peu saillans*- au sommet de la tête , on apperçoit trois petits yeux lisses , arrondis , saillans , disposés en triangle. Le corselet est convexe , assez gros, simple. L'abdomen est ovale, plus ou moins DES FRELONS. 55 oblong, et composé de six anneaux dis- tincts ; il est armé d'un aiguillon fort , semblable à celui d'une guêpe ; l'insecte le fait sortir à son gré. La piqûre en est douloureuse comme celle des abeil- les et des guêpes. Les ailes sont membraneuses-, vei- nées , inégales ; les supérieures sont étendues , une fois plus longues que les inférieures , et dépassent un peu l'ab- domen : elles ont leur attache à la par- tie latérale du corselet. Les pattes sont de longueur moyenne, les cuisses simples , les tarses à dnq ar- ticles^ Il est à regretter que les mœurs de ces insectes n'aient point été observées. La conformation remarquable de plusieurs d'entre eux , paroît annoncer des parti- cularités intéressantes. Ne pouvant en donner aucun détail , nous passons à la description de quelques espèces de c© genre nombreux» 5G HISTOIRE NATURELLE Le Frelon criblé , Crahro cri- brarius. Ce frelon a les antennes noires , nn peu renfle'es, et comprimées au milieu, avec le premier article aminci à sa base; la tête est noire , un peu relue , avec un léger duvet argenté sur la lèvre supé- rieure ; le corselet noir a deux lignes interrompues, l'une à sa partie anté- rieure , l'autre sur Fécusson ; l'abdo- men est oblong , noir , luisant ; le pre- mier anneau porte une bande jaune , ainsi que les deux derniers ; le second , deux taches presque réunies , et le troi- sième , deux taches transversales de même couleur. Les pattes sont d'un jaune fauve et les cuisses noires ; la jambe des pattes antérieures est large , difforme , termi- née par une lame écailleuse , concave , et parsemée de petits points transpa- rens , et qui au premier coup-d'œil pa- DES FRELONS. 67 roissent comme percés. M. Rolander les croyant réellement percés, a sup- posé que c'est dans la concavité de ces lames que ce frelon , qu'il appelle , ainsi que Degéer, guêpe - ichneumon , ras- semble les poussières des étamines des fleurs de toute espèce , et que ces pous- sières leur servent de nourriture. Il dit avoir vu que le plus fin de cette pous- sière farineuse passe parles petits trous, et tombe sur les pistils des fleurs en forme de petite pluie, pour les féconder apparemment. Cette hypothèse pour- roit paroître plausible aux amateurs des causes finales , qui , sans consulter la nature , veulent assigner un usage à tout, et expliquent ses intentions dans leur cabinet. Ce bel édifice s'écroule par sa base. Les lames de notre frelon ne sont point percées , mais parsemées de points transparens , ainsi qu'un exa- men moins superficiel en a convaincu Degéer , qui soupçonne qu'elles ont été données au mâle pour tenir sa femelle 58 HISTOIRE NATURELLE plus étroitement embrassée au moment de l'accouplement. Quoique les tarses de ses pattes anté- rieures aient le même nombre de pièces que ceux des postérieures , leur singu- lière conformation les fait paroi tre pres- que monstrueux : ils sont comme corn < primés ou raccourcis , et gagnent en largeur ce que ceux des autres ont en longueur. La première partie de ce tarse singulier , la plus longue de toutes, est torse ou com'bée : les trois suivantes «ont de la même largeur que la précé- dente l'est à son extrémité \ elles sont courtes , et aboutissent vers un des cô- tés en pointe assez longue. La cinquième et dernière partie a une figure très-ir- régulière j c'est à elle que sont attachés les deux crochets et l«s deux pelotes qui sont comme la plante du tarse : l'un des deux crochets est fort court , mais l'autre est long et comme difforme. Ces jattes autéï"ieurea sont très-garnies d« DES FRELONS. 5g poils, excepté la lame ëcailleuse. Cet insecte a enviroji sept lignes de long. Le Frelon à bouclier , Crabro clypeatus. Cet insecte n'a guère que quatre li- gnes de long -, les antennes sont noires avec un peu de jaune au - dessous du premier article ; la tête est noire , avec un léger duvet argenté sur la lèvre su- périeure ; elle n'est pas si grande que dans les espèces précédentes , et se termine en cône postérieurement ; le corselet est noir, légèrement velu, marqué d'un petit point jaune de chaque côté au- devant des ailes ; l'abdomen est noir , avec une tache transversale de chaquo côté sur les trois premiers anneaux ( quelquefois ces taches forment des bandes par leur réunion), et une bande sur chacun des autres : ces taches et ces bandes sont jaunes-, les pattes sont jau- nes, avec un peu de noir sur les cuisses^ 6o HISTOIRE NATURELLE et les tarses bruns ; la jambe antérieure est un peu dilatée , ciliée et terminée par une lame écailleuse, concave , d'un jaune blanchâtre^ sans points transpa- rens. Cette pièce , dans cette espèce , n'est que la dilatation du premier arti- cle du tarse. Le Frelon triàent y Crabro tridejis, La forme de ce frelon est absolument différente de celle des précédens j il n'a que deux lignes de long , mais il est plus large en proportion que ceux que nous venons de décrire ) sa tête est noire; sa 1 è vre es t bordée d'un léger duvet argenté; le corselet est noir sans tache. L'écusson est armé de deux petites dents de cou- leur jaune , et en dessous d'une pointe plus grande , canaliculée , noire ; l'ab- domen est noir , glabre ; tous les an- neaux ont de chaque côté une tache jaune -, les pattes sont rousses ; et l9£ cuisses noires. DES GUÊPES. 61 X X V I P GENRE. GUÊPE. Caractères génériques. Antennes filiformes, presque coudées ; premier article alongé, cylindrique. — Mandibules cornées, den- tées.— Trompe courte, formée de trois pièces ; celle du milieu , trifide ; division intermédiaire large , échancrée. — Qua- tre anteunules filiformes; dernier article plus mince. — Yeux entaillés. — Ailes plissées. — Trois petits yeux lisses. — Corps rase. Les guêpes diffèrent des abeilles par le corps moins velu, et la trompe très- courte j des bembex, par la lèvre supé- rieure plus comte , et les mandibules larges et dentées. Les frelons se distinguent des guêpes par leurs mandibules minces , la tête ordinairement grosse , et par les trois premiers articles des antennules larges et presque rliomboïdaux. Insectes, III. 6 €2 HISTOIRE NATURELLE Les antennes sont filiformes , com- posées de douze articles : elles sont in- sérées à la partie antérieure de la tête au-devant des yeux. La bouche est composée d'une lèvre supérieure coriacée , assez grande , ar- rondie , ou un peu anguleuse et ciliée à sa partie antérieure , de deux mandi- bules , d'une trompe courte , de deux antennules antérieures , composées de six articles , et de deux postérieures , composées de quatre. La tête est à-peu-près de la largeur du corselet, et unie à celui-ci par un col très-mince •, les yeux oblongs peu saillans , un peu entaillés à leur par- tie antérieure -, la partie supérieure porte trois petits yeux lisses disposés en triangle. Le corselet proprement dit , désigné par quelques entomologistes sous le nom d'épaulettes , est très -court, et s'élargit un peu sur les côtés -, le dos ç»t uii peu convexe; de forme ovale. DES GUÊPES. 63 li'abdomen est oblong : il renferme un aiguillon caché très-piquant; le pé- dicule qui uni l'abdomen au corselet est quelqiief ois court, quelquefois alon- gé eu forme de poire. Les pattes sont minces, assez lon- gues ; la liancbe grande -, les jambes an- térieures terminées par une épine droi- te , et les autres par deux. Les ailes sont membraneuses , vei- nées , de grandeur inégale ; les supé- rieures sont plissées longitudinalement dans leiir milieu. Quelques guêpes , ainsi que les four- mis et les abeilles , vivent en société. Comparables à celles-ci par leur indus- trie , elles se rapproclient des autres par leurs ravages. L'abeille, continuel- lement occupée de ses travaux , ne vit aux dépens d'aucun être , et l'aiguil- lon terrible dont elle est armée , n'est pour elle qu'une arme défensive et protectrice de ses foyers. La guêpe ^ au contraire , est féroce , et ne vit 64 HISTOIRE NATURELLE que de rapines et de brigandages. Son aiguillon est une arme offensive , un moyen d'opprimer les animaux plus foibles qu'elle. Cependant elle n'en est pas moins policée, ni moins remplie de tendresse pour ses petits. Réunies dans «ne seule république , les guêpes n'é- pargnent ni soins , ni travaux ; les ou- vrages qu'elles exécutent font honnciir à leur patience , à leur adresse , à leur industrie. Elles ont leur architecture particulière , et vraiment digne d'ad- miration. D'autres espèces sont solitaires , et exécutent également d'admirables tra- vaux , mais plus difficiles à remarquer, parce qu'elles vivent iso:ées : elles ont moins excité la curiosité de ''obser- vateur, et les habitudes de plusieurs sont restées inconnues. Nous allons passer à la description de quelques espèces de ce genre nombreux. On a divisé ce genre en deux familles : la première est composée des guêpes DES GUÊPES. 65 dont l'abdomen tient au corselet par un long pétiole en forme de poire ; la se- conde, de celles dont le pétiole est très- court. niEMlèRE FAMIÏiLE. Pétiole alongé en forme de poire. La Guêpe rétrécie , F'espa coaro- tata. Cette guêpe a la tête noire , avec un point jaune à la base des antennes , et une tache de même couleur à la base de la lèvre supérieure ; les antennes noires, jaunes à la base ; le corselet est noir, avec des tacbes jaunes antérieurement, postérieurement et sur les côtés ; le pétiole est alongé , noir, avec deux points, et l'extrémité jaune ; le pre- mier anneau de l'abdomen est très- grand , renflé , noir , avec une bande oblique jaune de chaque côté ; les au- G6 HISTOIRE NATURELLE très anneaux sont très-courts , bordés -de jaune; les pattes sont jaunes, avec ojnpeu de noir aux cuisses; les ailes sont noirâtres , avec un point jaune à leur base. Elle habite l'Europe : on la trouve aux environs de Paris. Cette guêpe construit sur les tiges des plantes , principalement sur les bruyè- res, de petits nids spliériques, avec de la terre : elle remplit de miel chacun de ces nids par une ouverture qu'elle laisse en haut , elle y dépose un œuf, et le ï-eferme ensuite-, la larve qui sort de l'oeuf se nourrit avec le miel, et ne sort de son nid que sous la forme d'insecte parfait , par une ouvei'ture qu'elle fait à un des côtés. La Guêpe Mexicaine , P^espa Mexicana, Cette espèce a près d'un pouce de longueur; sa tète est noire, large, ap- DES GUÊPES. 67 pïatie en devant : on y voit en dessous , dans une cavité , deux petites pièces e'cailleuses , recourbées, terminées en pointe , dont l'extrémité est dirigée vers le corselet , et qui forment à l'in- secte une espèce de trompe. Les anten- nes sont noires , de la longueur du cor- selet ; le corselet est noir en dessus , un peu roux sur les côtés ; le pétiole est alongé, renflé, d'un brun rougeâtre ; l'abdomen est noir , alongé , conique -, le premier anneau est très-grand ; les pattes sont noires ; les ailes d'un bleu foncé noirâtre. On la trouve à Cayenne et à Suri- jiam. La Guêpe échancrée , F'espa emarginata* Cette guêpe , ainsi que la précédente , difiFere un peu pour la forme , de celles des guêpes d'Europe, sur-tout par la longueur du pétiole ; elle a, les antennes fi8 HISTOIRE NATURELLE ferrugineuses , noirâtres à î'extre'mité, de la longueur du corselet -, la tète d'un b) un noirâtre , la lèvre supérieure fer- rugineuse , le corselet d'un brun fer- rugineux , l'abdomen brun , alongé , conique , le premier anneau beaucoup plus grand que les autres -, le pétiole long, arqué, un peu renllé à l'extré- mité : il a en dessous , vers son milieu , deux petites pointes peu visibles -, les ailes sont d'un brun violet. On la trouve dans l'Amérique mé- ridionale et à Surinam. DEUXIÈME FAMILLE. Pétiole très- court. La Guêpe Frelon, J^espa Crahro» Cette espèce a les antennes obscures, avec la base ferrugineuse ; la tête est ferrugineuse , pubesccnte , et la lèvre supérieure jaune j les mandibules sont D E s G U È P E s. ^9 jaunes , avec rextrémité noire ; le cor- selet est noir , pubescent : sa partie an- térieure , et quelquefois J'écusson , sont d'un brun ferrugineux ; le premier an- neau de l'abdomen est noir , avec la base ferrugineuse , etle bord légèrement jaune ; les avitres anneaux sont noirs à la base , jaunes à l'extrémité , avec un petit point noir latéral sur chaque an- neau : ce point est contigu au noir de la base. Les pattes sont d'un brun fer- rugineux ; les ailes ont une légère teinte roussâtre. Cette espèce vit en société : elle fait son nid dans le creux des vieux troncs d'arbres. Ces sociétés sont composées d'individus de trois sortes : les mâles, les femelles et les ouvrières. Ces der- nières ont environ un pouce de long ; la taille des mâles et des femelles va jusqu'à quatorze lignes. Le nid de cette espèce de guêpes est couleur feuille morte , ou plutôt de cette couleur jaunâtre qu'ont assez souvent 70 HISTOIRE NATURELLE les poudres d'un bois à moitié pourri. Dans difiPërentes saisons de l'année , on trouve quelquefois une grande quan- tité de menues branches de frêne, dé- pouillées en partie de leur écorce, et l'on entend voltiger autour un grand nom- bre de nos frelons , probablement oc- cupés à récolter les filamens de cette écorce , qui broyés par leurs mandibu- les , fourniront la matière la plus pro- pre à la construction de leur nid. Ils y récoltent en même temps une liqueur claire et sucrée qui s'écoule des endroits nouvellement rongés. Nos frelons semblent savoir que la matière dont leur guêpier doit être fait, ne résisteroit pas à de grandes pluies ni à de forts vents. Ils le construisent à l'abri , soit dans des greniers , soit dans les trous de quelques vieux murs, mais le plus souvent dans de gros troncs d'ar- bre dont l'intérieur est pourri. Là , ils parviennent sans peine à faire une grande cavité , en détachant des frag- DES GUEPES, 71 mens d'un bois prêt à tomber en pous- sière. Le trou , qui est la porte pour y arriver , n'a souvent qu'un pouce de diamètre , et ne laisse pénétrer , par conséquent , que très-peu d'humidité. La grosseur des frelons leur donne une grande supériorité sur la plupart des mouches qu'ils attaquent j mais ce qui sauve beaucoup de celles-ci , et en particulier beaucoup d'abeilles , c'est que le vol des frelons est un peu lourd; il est accompagné d'un bourdonnement qui doit également avertir leur victime de les fuir. Les frelons sont armés d'un aiguillon très-fort; leur piqûre est très- douloureuse ; mais i]*s ne se jettent sur l'homme que lorsqu'ils sont inquiétés. Revenons à la description de leur nid; en le prenant dès son origine , pour mieux faire sentir son développement et sa construction. Au printemps , les femelles frelons , ranimées par la clia- Jeur de l'atmosphère , sortent de leur retraite, etsemettenten quête d'un en- 72 HISTOIRE NATURELLE droit convenable pour y établir leur guêpier. Ce lieu trouvé , elles y posent les premiers fondemens de l'édifice , c'est-à-dire un premier pilier gros et solide , de même matière que le reste , mais beaucoup plus dur et beaucoup plus compacte. Il est toujours placé dans la partie la plus élevée de la voûte. A ce pilier , elles attachent une espèce de calotte de même matière, qui doit ser- vir de toit à l'édifice, et empêcher que les ordures qui se détacheroient de la voûte ne tombent sur les gâteaux. C'est en dedans de cette voûte qu'elles posent un deuxième pilier, qui n'est en quel- que sorte que la continuation du pre- mier ; c'est celui qui va servir de base au premier gâteau de cellules. Ces cel- lules sont hexagones, et leur ouverture est tom-née par en -bas. La mère en construit quelques-unes. Comme on ne trouve au printemps que des femelles, il est probable qu'elles ont été fécon- dées avant l'hiver. Ce qui est certain , DES GUÊPES. 73 c'est que nos femelles commencent leur ponte dès qu'elles ont quelques cellules à leur disposition. Bientôt ces œufs ëclosent, et la mère nourrit de sa chasse les petits vers qui en sortent. Ceux-ci , après avoir pris tout leur accroissement, tapissent de soie leur cellule lorsqu'ils se disposent à la transformation et la bon- client d'un couvercle de soie. C'est sous cette enveloppe qu'ils subissent leur mé- tamorphose; ils en sortent insectes par- faits , c'est-à-dire avec leurs ailes de - veloppées. Ces premiers nés sont de ceux queRéaumur et les anciens auteurs ont regardés comme privés de sexe, et qu'iJs ont appelés mulets. L'analogie nous porte à croire que ce sont des femelles dépourvues d'ovaires. Au reste , ce sont les ouvrières , c'est-à-dire , que ce sont elles qui s'occuperont dorénavant des travaux de construction , et de la nour- riture des vers. La femelle contiimant à pondre , la famille s'augmente , et le logement se trouvant trop petit , n^- Insectes. III, 7- 7'* HISTOIRE NATURELLE cessite des augmentations : les ovi\Tiëre3 augmentent l'enveloppe et le gâteau qu'il contenoit ; et quand celui-ci est poussé jusqu'au bord de cette enveloppe, un 'autre est sur-le-cliamp commencé. Ce dernier est attaché au premier par un ou plusieurs piliers. Bientôt l'enve- loppe est achevée , de nouveaux gâ- teaux la remplissent ; alors il ne reste plus qu'une ouverture au nid qui cor- respond à l'ouverture du trou où il est logé. Ce n'est que dans le mois de sep- tembre et dans le commencement d'oc- tobre , que de jeunes femelles et de Jeunes mâles quittent leur état de nym- phe. Toutes les guêpes de ces deux sor- tes , et celles de la troisième , c'est-à- dire les ouvrières , qui ne pourroient . j)aroîtj:e hors des gâteaux que vers le commencement de novembre , sont or- dinairement mises à mort avant la fin d'octobre , sur- tout si les froide ont com- Jîiencé à se faire sentir. - Les frelons ; au lieu de continuer à DES GUEPES.' j5 nourrir les vers , ne s'occupent alors qu'à les arracher de leurs cellules , et â les jeter hors du nid ; ils ne font pas. plus de grâce aux nymphes. Les mu-r- lets et les mâles périssent eux-mêmes journellement ; de sorte qu'à la lin de l'hiver , il ne reste que des femelles qui ont passé cette saison engourdies au fond du nid. On rencontre en automne les mâles et les femelles sur les arbres d'où décou- lent des liqueurs acides et sucrées. Elles ne retournent plus au nid , et périssent misérablement aux premiers froids; Ainsi finit cette société , dont la pin? grande population n'excède guère cent à cent cinquante individus. La Guêpe commune , T^espa vulgaris» La femelle a de huit à neuf lignes de long-, les antennes sont noires^ la tête est noire ; avec le tour des yeux et la 7S HISTOIRE NATURELLE lèvre supérieure d'un jaune obscur ; les mandibules sont jaunes, avecl'extrë- mité noire ; le corselet est noir, légère- ment pubescent , avec une tache oblon- ^le irrëgulière, de chaque côté, au-de- vant des ailes ; un point calleux à l'origine des ailes , une tache au-dessous et quatre sur l'écusson , jaunes. L'ab- domen est jaune , avec la base des an- neaux noire, et un point noir distinct de chaque côté ; le premier a une ta- che noire en losange au milieu , et les autres ont une tache presque triangu- laire , contiguë au noir de la base ; les pattes sont d'un jaune fauve, avec la base des cuisses noire. Le mâle est plus petit , et a une for- me plus alongée -, les antennes sont plus longues que le corselet , et le point la- téral de chaque anneau est souvent réu- ni au noir de la base. Cette espèce , qui fait son nid sous terre , n'est pas seulement avide de fruits j elle est au rang des insectes les DES GUÊPE S. 77 plus carnassiers. Elle fait une guerre cruelle à toutes les autres mouches j mais sur-tout à celles du genre des abeilles. On les voit souvent auprès des ru- elles se saisir d'une abeille prête à ren- trer dans son habitation , et la porter par terre. Elle sépare ensuite l'abdonien du corselet , et emporte celui-là, ap- paremment comme plus succulent , en ce qu'il renferme le miel et les intes- tins. Elles ne se contentent pas du petit gibier que leur chasse leur peut four- nir, nos viandes les plus solides sont à leur goût ; elles savent trouver les lieux oii nous allons les prendre : elles se ren- dent en grand nombre dans les bouti- ques des bouchers de campagne. Là, chacune s'attache à la pièce qu'elle aime le mieux : après s'en être rassasiée , elle en coupe ordinairement un morceau pour le porter à son guêpier. Ce mor- ceau surpasse souvent en volume la 78 HISTOIRE NATURELLE moitié du corps delà mouche. Les bou- cliers sont oblige's de leur abandomier un morceau de rate ou de foie , pour les empêcher de gâter leurs autres viandes. Après avoir pris un bon repas , et s'être chargées de proie, elles retournent à leur nid. La porte qui y conduit, est un conduit d'environ un pouce de dia- mètre : il va rarement en ligne droite, et n'est pas toujours de la même lon- gueur , parce que le guêpier est tantôt plus près , tantôt plus loin de la sur- face de la terre, Il est rare cependant de trouver des guêpiers dont la partie supérieure soit à moins d'un demi-pied ; les bords extérieurs de ce conduit sont comme labourés. Ce trou est le chemin qui conduit à une petite \'ille souterraine, qui n'est pas bâtie dans le goût des nôtres , mais qui a sa syméti'ie : les rues et les loge- mens y sont régulièrement distribués ; elle est entourée de murs de tous côtés , pur« de papier; mais forts de reste pour. DES GUEPES. 79 les usages auxquels ils sont destinés, et qui ont quelquefois plus d'un pouce et demi d'épaisseur. Cette enveloppe extérieure a diffé- rentes figures et grandeurs , selon celle des ouvrages qu'elle renferme ; leur figure extérieure la plus commune, est celle d'une boule de treize à quatorze pouces de diamètre. C'est un papier, avons-nous dit, qui sert à la former : et en effet, l'on con- noît peu de matière à qui elle ressemble davantage , quoique ce papier diffère un peu du nôtre. Sa couleur dominante est un gris cendré, mais de diverses nuances; quelquefois elle tire sur le blanc , et quelquefois elle approche du brun ou du jaunâtre; ces couleurs , dis- posées par bandes, donnent une singu- larité à tout l'extérieur du guêpier. La surface de cette boule creuse est raboteuse ; elle paroit faite de coquilles bivalves , cimentées les unes sur les au- So HISTOIRE NATURELLE très , de façon qu'on iie voit que levir extérieur convexe. Quand cette enveloppe est finie , elle a au moins deux portes qui ne sont que deux trous ronds. Les guêpes entrent continuellement dans le guêpier par l'un de ces trous , et sortent par l'autre •, en sorte qu'elles n'éprouvent aucun retard dans leurs travaux. L'intérieur est occupe par plusieurs gâteaux , parallèles et à-peu- près hori- zontaux. Ils ressemblent à ceux des mou- ches à miel, en ce qu'ils ne sont qu'un assemblage de cellules hexagones très- régulièrement construites; mais ils en diiïerent par beaucoup de circonstances. Ils sont faits de la même matière que l'enveloppe du nid , et la cire n'y entre pour rien. En outre , les gâteaux des abeilles ont deux rangs de cellules qui ont leurs ouvertures les unes opposées aux autres ; celles de nos guêpes n'en. ont qu'un rang , et leurs ouvertures sont dirigées en bas. Les gâteaux de 3 DES GUEPES. 81 abeilles sont perpendiculaires à l'hori- zon, tandis que ceux-ci sont horizon- taux. Les guêpiers ont quelquefois jusqu'à quinze ou seize gâteaux d'un diamètre proportionné à celui de l'enveloppe. Tous ces gâteaux sont comme autant de planchers disposés par étages qui four- nissent de quoi loger un nombre prodi- gieux d'habitans. Ils laissent enti*e eux des chemins libres. Ces intervalles sont décorés par mi grand nombre de colon- nes, qui ne sont autre chose que les liens nécessaires pour soutenir les gâteaux. Ici les fondemens de l'édifice sont à sa partie la plus élevée ; c'est toujours en descendant que nos guêpes bâtissent. Ces liens , faits de même matière que le reste des gâteaux, sont massifs, leur base et leur chapiteau ont plus de dia- mètre que le reste. Ilfalloit aux guêjjes des chemins pour arriver à ces étages. Ces chemins ont été réservés entre les bords des gâteaux et 82 HISTOIRE NATURELLE les parois intérieures de l'enveloppe : celles-ci ne tiennent qu'en quelques en- droits à la circonférence des gâteaux. Après avoir pris une idée grossière de l'édifice , il est temps de voir comment les guêpes le bâtissent, de quel usage il leur est , et à quoi elles s'occupent dans son intérieur. Mais ce sont des mystères qui se passent sous terre , et qu'il a été impossible de dévoiler , sans les tirer des lieux oii elles ont fait leurs établis- semens. Mais il est facile d'enlever le guêpier , et de le transporter sous une ruche vitrée. Un dérangement plus considérable encore , ne fore eroit point les guêpes à l'abandonner : une fois mi- ses dans une ruche , elles sont pacifiques , elles n'attaquent point l'observateur qui se contente de les regarder. Après qu'elles ont été logées, elles commencent par travailler à réparer les désordres qui ont été faits au guêpier. Elles transportent toutes les ordures qui peuvent être tombées dans la i-uche, DES GUÊPES. 83 attachent solidement le nid contre les parois de cette ruclie, et travaillent à en réparer les brèches , à le fortifier et à augmenter considérablement l'épais- seur de son enveloppe. Cette enveloppe est un ouvrage par- ticulier à nos mouches ; il mérite une description plus étendue. Son épaisseur a souvent un pouce et demi : mais elle n'est point massive -, elle est formée de plusieiu^s couches qui laissent des vides entr'elles , de petites vodtes mises les unes sur les autres. Chacune de ces voûtes est aussi mince qu'une feuille de papier. A mesure que les guêpes épaississent cette enveloppe , elles bâtissent une autre couche sur celles qui sont déjà formées , et le nombre de ces couches excède quelquefois quinze ou seize. Cette envelojîpe est une espèce de boîte , faite pour renfermer les gâteaux. Rien n'est plus amusant que de voir nos guêpes travailler à l'étendre ou l'é- paissir ; un grand, nombre sont occupées 84 HISTOIRE NATURELLE à cet ouvrage qu'elles font avec la plus grande célérité et sans confusion. Elles vont cberclier, dans la campagne , les matériaux nécessaires : la guêpe qui les a ramassés, revient chargée d'une petite boule faite d'une pâte molle -, elle la tient entre ses mâchoires. Arrivée dans le guêpier , elle la porte à l'endroit où elle veut travailler , et l'y applique aussi-tôt. La guêpe marche à reculons j à chaque pas qu'elle fait , elle laisse devant elle une portion de la boule, sans la détacher du reste qu'elle tient entre ses deux premières pattes. Lors- qu'elle l'a appliquée entièrement , elle l'unit, en repassant plusieurs fois des-^ sus de la même manière. Les maté- riaux qu'elle emploie sont des filamen.s du bois qu'elle enlève avec ses mâ- choires-, elle les humecte et les pétrit avant de les mettre en œuvre. Les guêpiers , de même que les ru- ches des abeilles , renferment trois sor- tes d'individus , qui sont les mâles, les D E s G U Ê P E s. 85 femelles et les ouvrières. Ces dernières sont incapables de contribuer à perpé- tuer leur espèce : leur nombre surpasse de beaucoup celui des mâles et des fe- melles , les plus grands travaux roulent sur elles. Ce sont elles qui bâtissent , qui nourrissent les mâfes ; les femelles et même les petits. Celles qui sont char- gées de l'approvisionnement , sont con- tinuellement à la chasse : les unes attra- pent de vive force des insectes qu'elles portent quelquefois tout entiers au guê- pier ; les autres pillent les boutiques des bouchers ; d'autres ravagent les fruits de nos jardins ; elles les rongent ^ les sucent, et en rapportent le suc. Toutes font part de ce que leurs courses leur ont produit , aux mâles , aux femelles et même à d'autres ouvrières qui , pour avoir été occupées dans l'intérieur > n'ont pu aller chercher de quoi vivre. Dès qu'une de celles qui sont chargées de l'approvisionnement est arrivée, plu- sieurs guêpes s'assemblentautour d'elle , Tns-3ctes. IIî. S 86 HISTOIRE NATURELLE chacune prend sa part de ce qu'elle ap- porte , mais tout se fait de gré à gré sans combat. Celle qui n'a trouvé que des fruits ne pouvant rapporter une nourriture solide , régale quelques lia- bitans du guêpier de deux ou trois gout- tes d'une liqueur sucrée qu'elle fait eortir de sa bouche. Les ouvrières sont les plus petites , les plus vives et les plus actives ; les femelles sont les plus grosses et les plus pesantes ; dans de certains temps, il n'y en a qu'une seule dans le guêpier 5 mais quelquefois il y en a plus de trois cents. Les mâles sont de grosseur moyenne : ils sont aisés à reconnoître par leurs an- tennes, qui sont plus longues que celles des mères et des ouvrières , et recour- bées à l'extrémité ; leur abdomen est composé de sept anneaux , celui des mères et des ouvrières n'en a que six. Les mères ne volent dans la campa- gne qu'au printemps et en automne; pendant l'été, elles sont renfermées dans DES GUÊPES. 87 iintérieur du guêpier, occupées à pon- dre , et sur-tout à nourrir leurs petits. Un guêpier qui a tous ses gâteaux , contient ordinairement quinze à seize mille cellules, dont chacune est rem- plie par un oeuf, un ver ou une nym- phe. Ce sont les vers qui occupent prin- cipalement les guêpes qui se tiennent dans l'intérieur du guêpier : celles-ci les nourrissent de la même manière que les oiseaux nourrissent leurs petits , en leur donnant de temps en temps la bc- quée , après avoir ramolli dans leur bouche les alimens que les vers ne pour- roient digérer. Vingt jours après que les œufs ont été pondus , les vers sont prêts à se mé- tamorphoser en nymphes ; alors ils bou- chent l'ouverture de leur cellule avec un couvercle de soie qu'ils filent, com- me font les chenilles en construisant leur coque. Là, ils se changent en nym- phes , et restent sous cette forme huit ou neuf jours , au bout desquels les 88 HISTOIRE NATURELLE guêpes se débarrassent de leur enve- loppe : dès qu'elles l'ont quittée , elles font usage de kurs dents pour se faire un passage en rongeant le couvercle de leur cellule : après l'avoir détaché, elles le poussent en dehors , et sortent aussi- tôt. La cellule ne reste pas long-temps vacante : dès qu'elle a é té abandonnée , une vieille guêpe la nettoie , et la rend propre à recevoir un nouvel œuf. Les cellules destinées à recevoir les œufs d'où doivent sortir les ouvrières > rie se trouvent jamais placées parmi celles qui renferment les œufs , qui donnent les mâles et les femelles : de* gâteaux entiers sont composés de ces premières, qui sont plus petites que les autres. Mais tout l'édifice des guêpes, qui est un ouvrage de quelques mois , ne doit durer qu'une année : cette habita- tion si peuplée pendant l'été , est pres- que déserte pendant l'hiver , et entiè- rement abandonnée au printemps j le DES GUÊPES. 89 plus grand nombre de ses habitans pé- rit en automne -, quelques femelles des- tinées à perpétuer l'espèce , passent l'hiver engourdies, et au printemps sui- vant, cliacnne d'elles devient la fonda- trice d'une nouvelle république , dont elle est la mère. Alors elles n'ont pas une seule ouvrière à leur disposition. C'est à elles à creuser, ou à trouver sous terre un trou , à y bâtir des cellules propres à recevoir leurs œafs , et à nourrir les vers qui éclosent , jusqu'à ce que quel- ques-uns de ceux auxquels elles ont donné naissance , soit devenu insecte ailé , et puisse les seconder dans leurs travaux. Comme les ouvrières sont les plus utiles , ce sont elles qui-^naissent les premières : les mâles et les femelles ne paroi ssent que vers la fin de Tété ; et au commencement de l'automne , leur accouplement a lieu dans le guê- pier même où ils sont nés. L'occupation des mâles dans le guê- pier se borne à le nettover et à en enle- 90 HISTOIRE NATURELLE ver les corps morts. De même qtie les mâles des abeilles , ils sont privés d'ai-^ gnillon ; il n'y a que les mères et les ouvrières qui en soient pourvues : celui des mères est plus long que celui des ouvrières , et la piqûre de ces armes est beaucoup plus forte , et cause une dou- leur plus vive que celle des abeilles : la violente cuisson dont elle est suivie , est produite par une liqueur vénéneuse très-limpide introduite dans la plaie. La paix ne règne pas toujours dans les républiques des guêpes : il y a sou- vent des combats entre les ouvrières , ou entre celles-ci et les aiâles. Ces der- niers , quoique plus grands , sont plus foibles ou plus lâches : mais les combats y vont rarement à mort. Enfin lorsque les premiers froids se font sentir , nos guêpes , de même que les précédentes, de mères si attentives qui nourrissoient avec tant de soins leurs petits , deviennent des marâtres impitoyables. Elles arrachent de leurs J'ai/, gi Tom . IlL ?^:;.=?^s^f©' •■•V* E^vw^w- ,,:v-;.':% M^^ffl^ [M^?^ ^MffiS^' Hara/ianti dei ^iKej- ifci/Ip ■ 11- Guêpier delà 2 . L . Dorsiçere . Giiépe Cai'toiuiiere 3 . Chry. enflainnie DES GUEPES. gi cellules tous les vers qui ne s'y sont pas encore renferme's , les ouvrières et les mâles les portent hors du guêpier j rien n'est épargné , le massacre est gé- néral. Il paroît qu'elles craignent que leurs petits ne puissent supporter le froid et la faim pendant cette saison , 011 elles trouvent à peine vuie nourri- ture peu solide. Elles finissent elles- mêmes par mourir les unes après les autres , et de cette nombreuse famille, il ne reste au printemps que quelques mères. Elle habite l'Europe : elle est très- commune aux environs de Paris, La Guêpe cartonnière , V^espa cartaria. Cette espèce a environ cinq lignes de longueur -, elle est noire , elle a seule- ment un peu de jaune à la lèvre supé- rieure , à la base des mandibules , der- rière les yeux , à la partie antérieure 93 HISTOIRE NATURELLE du corselet , derrière l'ëcusson et aux bords des cinq premiers anneaux de l'abdomen : ses pattes et ses antennes sont noires. Elle est très-commune à Cayenne. Ces guêpes vivent en société , dans un guêpier qu'elles bâtissent sur une petite branche d'arbre à laquelle il tient par une espèce de tuyau placé à sa par- tie supérieure. La forme de ces guêpiers^ est un peu conique. Celui que nous dé- crivons a sept pouces de longueur , et douze de circonférence ; mais on en trouve de beaucoup plus grands. Ils sont entièrement recouverts d'une espèce de carton, fait de filamens de bois ramol- lis par les guêpes j elles forment avec ces filamens différentes couches qu'elles col- lent parfaitement les unes sur les au- tres» Ce carton a plus d'une demi-ligne d'épaisseur j il est d'un blanc jaunâtre marbré de brun. C'est sous cette enve- loppe que sont renfermés les gâteaux ^ui contiennent les cellules : le nombre DES GUÊPES. 93 de ces gâteaux varie suivant la gran- deur du guêpier : on en trouve qui en contiennent dix ou douze. Chaque gâ- teau est convexe en dessous -, c'est sur ce côté que sont placées les cellules. Ces gâteaux ne tiennent point les uns aux autres , il se trouve un espace vide en^ tr'euy. ; mais leurs bords sont solide- ment attachés à la couverture dont ils paroissent faire partie. Chaque gâteau est bâti à mesure que la république aug- mente : la partie inférieure de l'enve- loppe est la base sur laquelle sont pla- cées les nouvelles cellules après que les guêpes ont prolongé l'enveloppe de ce côté. Une seule ouverture donne entrée aux guêpes : elle est placée à la partie inférieure du guêpier , qui se termine en pointe mousse, lies moeurs de ces guêpes ne nous sont pas connues ; mais on peut présu- mer qu'elles diffèrent peu de celles des guêpes d'Europe , qui vivent eu société; 9^ HISTOIRE NATURELLE X X V 1 1 F C; E N R E. LEUCOPSIS. Caractères génériques. Antennes courtes , droites , un peu plus grosses par le bout; articles courts , peu distincts. — Quatre antennules courtes; les antérieures com- posées de quatre articles , les postérieu- res de trois. — Ventre attaché au corselet par un pédicule court. — Aiguillon tri- ple , recourbé , relevé et appliqué sur le ventre dans la femelle. — Trois petits yeux lisses. Les leticopsis ont les antennes cou- dées , placées au-devant de la tête , dau.s une petite cavité qui se trouve entre les deux )'eux : elles sont composées de dix articles , le premier beaucoup plus long que les autres; elles voutengi'os- sissant de la base au sommet ;, et sont presque de la longueur du corselet. La tête est applatie , de forme trian- gulaire , placée verticalement , appli- quée contre le corselet. DES LEUCOPSIS. 95 Le corselet e.st grand , convexe en dessus : il paroît formé de deux pièces -, l'antérieure est plus large que longue; la première paire de pattes y est atta- chée. Les leucopsis sont très-faciles à dis- tinguer des guêpes par la forme de leur abdomen , qui est comprimé , renflé vers le milieu , obtus à l'extrémité. Il paroît n'être composé que de deux an- neaux , dont le premier est beaucoup plus court que le dernier , et attaché au corselet par un pédicule peu visible. Mais ce que l'abdomen des leucopsis a de plus remarquable, c'est la séparation de ces deux anneaux dans la plus grande partie de leur circonférence : ils ne sont joints ensemble qu'en dessous par une espèce de charnière , qui laisse à l'in- secte la facilité de mouvoir son dernier anneau à volonté. Cette séparation n'est visible que lorsqu'on cherche à la voir, parce qu'ordinairement l'extrémité du premier anneau recouvre entièrement 96 HISTOIRE NATURELLE la partie antérieure du dernier ; de sorte que ces deux anneaux paroissent réu- nis. On remarque à la partie supérieure du bord du dernier une échancrui'e assez profonde. La conformation de l'aiguillon de ces insectes n'est pas moins singulière que celle de l'abdomen au-dessous duquel il est placé. Il prend naissance près de sa base ; il y est appliqué et recouvert par une pièce étroite qui se termine au^ delà de l'extrémité de l'abdomen , où l'aiguillon se recourbe sur le dos , et s'étend jusqu'au corselet. Dans cette partie , il est renfermé dans une espèce de gaine composée de deux pièces. La femelle est en outre pourvue d'une ta- rière de la longueur de l'aiguillon , qui a également son insertion au-dessous et près la base de l'abdomen : elle est re- couverte à son origine par une pièce membraneuse qui s'étend jusques vers le milieu de l'abdomen. Cette tarière DES LEUCOPSIS. 97 est filiforme , et recourbée sur le dos de même que l'aiguillon. Les ailes supérieures sont à-peu-près de la longueur du corps j les inférieures sont plus courtes. Les pattes antérieures sont courtes , les postérieures sont plus longues -, les cuisses postérieures sont très - larges , applaties intérieurement, convexes ex- térieurement : elles sont dentées et ar- quées. La manière de vivre de ces insectes n'est point connue. Ce genre ne renferme que trois es- pèces.No us décrirons celle qu'on trouve aux environs de Paris. La Leucopsis Dorsigère , JLeu- copsis Dorsigera, Elle a les antennes noires, jaunes à la base , la tête noire , le corselet noir, aveo deux lignes jaunes à sa partie an- térieure, une à sa partie postérieure au- Insecies. III. 9 98 HISTOIRE NATURELLE dessus de l'ëcusson, et une de même couleur au-dessous de la base des ailes. L'abdomen est presque sessile , com- primé , obtus , d'un noir brillant , avec deux bandesjaunesobliques^la première interrompue dans son milieu , deux ta- ches de même couleur entre ces deux bandes , et l'extrémité jaune ; les pattes sont jaunes, les cuisses postérieures très- larges; dentées , jaunes , avec une grande tache noire , les autres cuisses sont noi- res ; les ailes sont brunes. Elle habite l'Italie et les départemens méridionaux de la France. On la trouve vers le milieu de l'été aux environs de Paris. Des deux autres espèces qui compo- sent ce genre , l'une se trouve sur la côte de Coromandel , et l'autre en Alle- magne. Elles ont beaucoup de ressem- blance avec la leucopsis dorsigère. DES C H R Y S I S. 99 X X I X^ GENRE. C H R Y S I S. Caractères génériques. Antennes courtes , filiformes ; premier article un peu plus long , les autres courts et égaux. — Qua- tre antennules filiformes , inégales ; les antérieures une fois plus longues, com- posées de cinq articles ; les postérieures de quatre , dont le premier à peine dis- tinct.— Ventre attaché au corselet par un pédicule court. — Aiguillon simple , pointu , caché dans Tabdomen. ^ Trois petits yeux lisses. Les chrysis diffèrent des guêpes par la forme de leurs antennes qui sont filiformes, vibratiles, guère plus lon- gues que la tête , au-devant de laquelle elles sont insérées ', elles sont coudées , rapprochées à leur base , composées de douze articles ; le premier long et cy- lindrique , les autres presque égaux. La tête est un peu plus large que 100 HISTOIRE NATURELLE le corselet contre lequel elle est ap- pliquée. Le corselet est plus long que large, un peu renflé ; il paroît composé de plusieurs pièces jointes ensemble; de chaque côté de sa partie postérieure il est armé d'une pointe saillante. L'abdomen est joint au corselet dans toute sa largeur; il est convexe en des- sus , arrondi , un peu applati en des- sous ; dans le plus grand nombre des espèces l'anus est denté. Celui des fe- melles renferme une tarière, composée de plusieurs tuyaux de différentes lon- gueurs, qui glissent les uns sur les autres, lorsque l'insecte l'alonge. Cette tarière contient un aiguillon composé de trois pièces, qui sert à la femelle pour déposer ses œufs. Quoique cet aiguillon soit très-pointu , on peut toucher à ces in- sectes sans craindre d'en être piqué. Les pattes sont de longueur moyenne. Les ailes ne sont point pliées comme celles des guêpes ; les supérieures sont BBS C H R Y S I S. ÏOI un peu plus longues que les infé- rieures. Nous ne connoissons paint les moeurs ni les larves de ces jolis insectes , aux- quels on a donné le nom de chrysis , à cause de la beauté de leurs cauleurs , qui ont le brillant et l'éclat des pierres pré- cieuses ; mais on présume que leurs habitudes et leurs métamorphoses ont beaucoup de rapports avec celles des spliex et des ichneumons. On les trouve pendant l'été sur les murailles et autour des vieux bois, quelquefois sur les fleurs ; ils sont très- vifs et ont le vol léger. Quand on le» prend , ils se mettent en boule , cour- bent leur ventre en dessous , et portent son extrémité jusqu'à la tête, en même temps ils appliquent leurs pattes et leurs antennes contre le corselet, et renferment toutes ces parties dans la cavité de leur ventre. Ce genre est composé d^une trentaine d'espèces j la plus ^ande partie habite 102 HISTOIRE NATURF.LLE 1 Europe -, on en trouve dix ou douze aux environs de Paris. Nous allons pas- ser à la description de c]uelcj[ues es- pèces. . Le Chrysis enflammé, Chrysis ignita. Il a les antennes noires , la tête d'un vert-doré brillant, tout le corps est finement pointillé , le corselet d'un vert - doré brillant antérieurement , bleu postérieurement , l'abdomen est convexe en dessus, composé de quatre anneaux , le second est le plus grand , le troisième est couronné de pointes fines et serrées ; lanus est terminé par quatre dents;- il est d'un rouge pourpre cuivreux en dessus , d'un vert brillant en dessous. Les pattes sont vertes , les tarses noirâtres. Les ailes ont une lé- gère teinte de brun avec les nervures obscures. Il habite dans les trous des murs et DES CHRYSIS. io5 dans les vieux bois; il est très-com- mun en été aux environs de Paris. On le trouve dans toute l'Europe. Le Clirysi^ brillant , Chrysis micans. Il a environ trois lignes de longueur. Les antennes sont noires. Le corselet est grand , chagriné , l'abdomen est lisse , composé de trois anneaux , arrondi , l'anus est entier. Il est entièrement de couleur bleue verdâtre , à l'exception des deux premiers anneaux de l'abdo- men , sur lesquels est une grande tache ovale , noire , très - brillante ; les ailes ont une teinte noirâtre depuis le milieu jusqu'à l'extrémité ; elles sont trans- parentes depuis leur origine jusqu'au milieu \ les nervures sont noires. Degéer, qui a trouvé cette espèce dans une galle résineuse du pin, pré- sume que sa larve s'est nourrie d'une chenille j il n'a trouvé an fond de la 104 HISTOIRE NATURELLE galle qu'une coque vide , d'une soie lâ- che , que le chrysis avoit percée pour en sortir , et les excre'mens de la che- nille. Il se trouve en Suède. Le Chrysis lucide , Chrysis luciduJa, Les antennes et les yeux sont noirs , la tête est verte, avec un peu de rouge à sa partie postérieure ; le corselet est chagriné , vert d'un rouge cuivreux sur le milieu. L'abdomen est finement poin- tillé, d'un rouge cuivreux brillant en dessus , noirâtre en dessous \ l'anus est entier, les pattes sont vertes, les tarses noirs. Les ailes obscures. Il se trouve au midi de l'Europe : il est très - commun aux environs de Paris. DES TIPHIBS. 105 X X X" GENRE. T I P H I K Caractères génériques. Antennes courtes , filiformes , roulées en spirale ; premier article un peu plus gros et plus long. — Quatre antennules inégales , filiformes ; les antérieures un peu plus longues, com- posées de six articles égaux , les posté- rieures de cinq. — Ventre attaché au cor- selet par un pédicule court. — Aiguillon simple , caché dans l'abdomen. — Troia petits yeux lisses. li E s tipliies ont les antennes courtes , placées près de la bouche. Le premier article gros , un peu conique , les au- tres amincis à leur base , d'égale lon- gueur. La tête est large, très- obtuse, ar- rondie postérieurement. Les yeux sont petits , ovales. Le corselet est tronqué postérieurement -, l'abdomen est de for^ me ovale j le premier anneau est pyri- lO^ HISTOIRE NATURELLE forme -, il est attaché au corselet par vm pédicule court. Les pattes sont courtes, les cuisses grosses , comprimées ; les jambes cour- tes , les tarses renflés , épineux. Le corps est un peu velu. Les fe-' melles ont iin aiguillon caché dans l'abdomen. Les ailes sont plus courtes que l'ab- domen. Les mœurs de ces insectes sont en- tièrement inconnues. Ce genre renferme dix-huit ou vingt espèces : huit habitent l'Europe, et une seule les environs de Paris. Nous ne décrirons que peu d'espèces. LaTiphie à grossescuisses, Tipliia feniorata. Cette espèce est entièrement noire- Ses antennes sont courtes , roulées en spirale , le corps est un peu velu, l'ab- domen est attaché au corselet par un Torn.Hl. l'ai/ . zod. 1.1". a çiTos ses -cuisses 4'- l'icli- jaunati'e. 2 . E . Appendiffastre . ô . l'icli . peloionne 5 ..l'Jcli. attra\^aiii. DES T I P H I E S. 107 pétiole très-court; les derniers anneaux vont en diminuant ; les cuisse de la deuxième et de la troisième paire de pattes sont fauves; les postérieures sont renflées ; les ailes sont plus courtes que l'abdomen. La femelle a une tarière cacliée dans l'abdomen. On la trouve en Angleterre et aux environs de Paris. , La Tiphie à trois bandes, Tiphia tricincta. Elle a les antennes, la tête et le cor- selet noirs , l'abdomen noir avec trois bandes transversales fauves , et l'extré- mité ferrugineuse ; les pattes ferrugi- neuses. On la trouve dans l'Amérique mé- ridionale. 108 HISTOIRE NATURELLE La Tiphie ponctuée , Tlpliia punctata. Elle a la tête et le corselet jaunes avec des points noirs, l'abdomen conique, jaune , avec l'extrémité noire , les cuisses postérieures renflées , dentées , les ailes blanches sans taches. Elle habite l'Europe. SES ÉVANIES. 109 XXX r GENRE. É V A N I E. Caractères génériques . Antennes filiformes, assez longues ; premier article très-long , presque cylindrique , les autres courts , égaux , peu distincts. — Quatre anten- nules inégales; les antérieures plus lon- gues, filiformes, composées de six arti- cles ; les postérieures de quatre , dont le dernier en masse. — Ventre compri- mé , presque triangulaire , attaché au cor- selet par un long pédicule. — Aiguillon très-petit , caché dans l'abdomen. — Trois petits yeux lisses. Les évanies ont les antennes vibra- tiles , rapprochées , insérées près de la bouche , composées de onze articles ; le premier long , cylindrique ; le second très-court -, les autres presqu'égaux. La tête est un peu applatie , un peu moins large que le corselet auquel eil# Insectes. III. 10 110 HISTOIRE NATURELLE tient par une espèce de cou mince assez court. Le corselet est grand , convexe ; les pattes y sont attachées. L'abdomen est très-petit, comprimé , triangulaire, composé de cinq ou six anneaux-, il est joint au corselet par un pédicule très-long , mince , arqué , in- séré sur la partie supérieure du corselet. L'aiguillon est court , renfermé dans l'abdomen. Les quatre pattes antérieures sont de grandeur moyenne ; les postérieures sont très-longues. Les ailes sont moins longues que l'ab- domen. Ces insectes diffèrent beaucoup des iclmeumons , parmi lesquels Réaumur etDegéer ont placé la seule espèce qu'ils ont connue. Le genre éranie ne contient que quatre espèces : on n'a point encore ob- servé les mœurs de ces insectes , et leurs krves sont inconnues. Nous dé- DES ÉVANIES. 1 M crirons les deux espèces qvii se trouvent en France. Les deux autres espèces ha- bitent , l'une l'Amérique méridionale , et l'autre l'Angleterre. *b" L'Evanie Appendigastre , Evania Appendigaster, Elle est noire ;, les antennes sont longues, la tête et le corselet sont rabo- teux ; l'abdomen est lisse d'un noir brillant, les anneaux sont peu distincts, l'anus est placé à l'extrémité de l'angle supérieur. Les ailes sont courtes , trans- parentes , blanches , avec les nervures noires, et un point de même couleur au milieu du bord extérieur des su- périeures. Les pattes postérieures sont très-longues. On la trouve dans les départemens méridionaux de la France , en Italie , en Afrique et dans la Nouvelle - Hol- lande. 112 HISTOIRE NATURELLE L'Evanie naine , Evania minuta. Elle n'a qu'une ligne de longueur j elle ressemble beaucoup à la précédente; tout le corps est très-noir , la tête et le rorsejet sont raboteux, l'abdomen très- petit, noir, lisse, les ailes sont blan- ches , transparentes , veinées de noir à leur base. On la trouve aux environs de Paris* DES ICIINEUMONS. l iJ XXXir GENRE. ICHNEUMON. Caractères génériques. Antennes sétacées , longues , vibratiles j articles nombreux , très-courts, peu distincts. — Quatre an- tennules inégales , filiformes ; les anté- rieures un peu plus longues , composées de eix articles , les postérieures de qua- tre.— Ventre attaché au corselet par un pédicule long et mince. — Aiguillon flexi- ble , long et divisé en trois pièces dans la femelle. — Trois petits yeux lisses. t. ES ichneumans ont quelques rap- ports avec les sphaX) ; on les distingue facilement de ces insectes par la forme de leur-s antennes : les sphex. les ont roulées en spii^ale, celles des iclmeu- monssont longues, droites, filiformes, vibratiles , insérées au milieu du front. La tête tient au corselet par un col court et mince. Il4 HISTOIRE NATURELLE Le corselet est très -court, le dos grand et convexe. La forme de l'abdomen n'est pas la même dans toutes les espèces; dans les^ unes il est ovale , gros et court ; dans d'autres il est alongë , cylindrique en forme de fuseau; d'autres l'ont com- primé , applati des deux côte's , re- courbé en faucille ; enfin dans quelques espèces il se termine en masse ; il tient au corselet par un pédicule plus ou moins long.Dans la plupart des femelles, il sort de l'extrémité du ventre une ta- rière plus ou moins longue composée de trois pièces. Les quatre pattes antérieures sont de longueur moyenne -, les postérieures plus longues. Les ailes sont membraneuses; la plu- part des nervures sont longitudinales ; les supérieures plus longues que les in- férieures. Dans l'état de repos ces in- sectes les agitent assez souvent , de même que leurs antennes , ce qui leur DES ICHNEUMONS. Ii5 a fait donner , par quelques auteurs , le nom de mouches vibrantes. Quelques autres , à cause de la longue tarrière des femelles , les ont nommes musca tripilis. Les Naturalistes ont donné à ces in- sectes le nom d'iclmeumon , qui est celui d'un petit quadi'upède, décrit par les anciens , qui se trouvoit sur les bords du Nil , et que les Egyptiens adoroient parce qu'il cas soit les oeufs du croco- dile , ou le faisoit mourir lui-même en s'introduisant, à ce qu'ils pre'tendoient, dans le corps de cet animal , pour lui ronger les intestins. Les iclineumons , dont nous allons parler , sont , pour les insectes en général , et principalement pour les chenilles, des ennemis aussi redoutables que l'ichneumon quadru- pède l'étoit alors pour le crocodile. Les femelles de nos iclineumons ne tuent point les insectes , mais elles déposent leurs œufs dans le corps de ceux qui sont encore sous leur première forme- Il6 HISTOIRE NATURELLE Nous avons dit que ces femelles sont armées d'une tarière , qui est un ins- trument propre à percer. Pressée du besoin de pondre , la femelle va se poser siu- une chenille ou sur un ver , dont le corps est quelquefois beaucoup plus grand que le sien -, elle le parcourt , le perce dans Fendroit qui lui convient, et laisse ensuite un ou plusieurs œufs au fond de la plaie. Quelques espèces déposent vingt ou trente œufs dans le corps d'une chenille , d'autres n'y en introduisent que deux ou trois , quel- quefois qu'un seul, suivant la grandeur de l'espèce. Quelques espèces d'iclineumons sont assez petites pour qu'un de leur œuf soit logé à l'aise dans Tœuf d'un papil- lon de grandeur médiocre , et pour que la larve qui en sort y trouve sufSsam- n3«nt d'aliment pour la faire vivre jusqu'à ce qu'elle se change en nymphe. Après y avoir subi sa dernière méta- m.orphose , elle perce la coque , et en DES ÎCHNEUMONS» II7 sort sous la forme d'insecte parfait. Ces petits ichneumons vont à leur tour percer les œufs de différens insectes avec leurs petites tarières , qui vient à bout de pénétrer dans l'intérieur , malgré la consistance et la dureté de la coque. Environ quinze jours après que l'œuf a été déposé, la larve a déjà changé de forme : elle a pris celle de nymphe , et cinq à six jours après elle passe à l'état d'insecte parfait. D'autres ont une manière plus sim- ple de placer leurs œufs ; ils se conten- tent d'en coller un ou plusieurs sur le corps de l'insecte qu'ils ont choisi pour alimenter les petits qui doivent en sor- tir. Enfin d'autres savent pourvoir à la subsistance de leur postérité d'une ma- nière dil^rente. Ils sont à l'affût des nids, que la jdupart des insectes pré- parent pour y déposer leurs œufs. Quel- ques soins que ces insectes prennent pour les rendre inaccessibles , les ichneu- mons se jouent d© la prévoygjice et Il8 HISTOIRE NATURELLE des précautions des mères , malgi'é les enveloppes solides dont celles-ci les re- couvrent. Avant qu'une femelle qui construit un nid, ait eu le temps de le fer- mer, pendant qu'elle va chercher dans la campagne les matériaux qu'elle est obli- gée d'y employer, souvent un ichneu- mon se glisse dans le nid , et y pond un œuf à côté de celui qui y a été déposé. L'insecte qui vient achever de bouclier l'ouverture , ignore que lorsque le petit qui est l'objet de ses soins, sera né, il en naîtra un autre auprès de lui qui le dévorera peu à peu. D'autres ichneu- mons, qui ne sont pas instruits à trom- per la vigilance de l'insecte , qui , par nécessité, abandonne pour quelques ins- tans le nid auquel il travaille, parvien- nent , par une autre voie , à loger leur œuf à côté de celui qui est déposé dans un nid. Ils font pénétrer leur longue tarière dans des nids qui ont d'épaisses enveloppes , composées de bois , de sa- ble , de terre ou de mortier le plus DES ICHNEUMONS. I19 compacte , et y déposent leurs œufs. Nous avons vu que , parmi les iclmeu- mons , il y en a d'assez petits, pour que l'œuf d'une clienille de médiocre gian- deur suffise à nourrir une larve jusqu'au moment oii elle n'a plus besoin de man- ger. A d'autres il ne faut qu'un seul puceron. Les clienilles velues ne sont pas plus épargnées que celles qui sont rases; leur poil ne les garantit point des piqûres de ces insectes carnassiers j toutes sont également exposées à deve- nir la proie de leurs larves. Les iclmeumons offrent de grandes variétés, tant pour la grandeur que pour la forme et les couleurs, et la longueur de leur tarière : dans quel- ques espèces cet instrument est très- long, dans d'autres il est très-court ; il n'est pas visible dans de certaines es- pèces. Réaumur a été le premier à re- marquer que des trois soies dont la ta- rière est composée , deux sont destinées à conserveï* celle du milieu ; qui est k 120 HISTOIRE NATURELLE véritable tarière, et à lui servir d'étui. Le côté intérieur de chacune de ces deux soies est creusé en gouttière -, le côté extérieur est convexe ; le filet du milieu est lisse , assez arrondi dans la plus grande partie de sa longueur j il «st applati près de l'extrémité , et se termine par une pointe quelquefois faite en bec de plume. Avec le secours de la loupe , on distingue à cette extré- mité des dentelures qui font juger que , malgré sa finesse, le filet est un ins- trument analogue à la tarière dont sont pourvues les femelles des cigales. Quoiqu'il paroisse délicat et flexible , les ichneumons savent l'introduire dans des corps très-durs. Mais dans les temps où l'insecte n'en fait pas usage, il est renfermé dans l'étui ; alors cet instru- ment paroît n'être composé que d'une seule pièce -, quelquefois la tarière n'est lo^ée que dans une moitié de son étui, cl il paroît composé de deux pièces. Ainsi l'iclmeumon, vu en âlSéienê DES ICHNEUMONS. 12l' temps , a pu fournir à quelques Natu- ralistes , les noms de mouches à un , à deux et à trois poils , que quelques-uns ont cru donner à des espèces diffé- rentes. Si on observe au microscope la partie de la tige de la tarière qvii est épaisse , large et un peu applatie, on y découvre une espèce de fente , une espèce de can- nelure qui partage en deux une de ses faces, depuis la base jusqu'à l'extré- mité. Il semble que la tige puisse se di- viser en deux parties , et que les deux bords de la fente ne tiennent l'un à l'autre que par une membrane qui leur permet de s'écarter, dans le temps où. l'œuf doit être porté dans le fond du trou , ouvert par la pointe de l'instru- ment. On apperçoit aussi , au bout de la tarière , une ouverture qui sujfîît pour lui donner passage , et en même temps on voit que des parties molles et charnues remplissent l'intérieur de ja tarière. C'est près de son extrémité Insectes. III. il 122 HISTOIRE NATURELLE qu'on voit mieux que par- tout ailleurs la membrane • au-dessous de cette mem- brane , et de chaque côte du bout de la tarière , s'élève une rangée de cinq à six dents, semblables à celles des scies ; au moyen desquelles l'instrument agit avec succès. Nous allons voir , avec Réaumur, une femelle à longue ta- rière en faire usage. Dès qu'un terrein convient à cer- tains insectes pour y élever leurs petits, ce même terrein attire ceux qui veu- lent nourrir les leurs de gibier. Des en- duits de sable , étendus sur un mur , invitent les guêpes solitaires à y faire leurs nids , qui deviennent peuplés de leurs larves ; ces nids ont une infinité d'issues, dont les entrées ne restent ja- mais ouvertes. Dès qu'un ichneumon à longue tarière reconnoît un endroit aussi propre à fournir des alimens aux larves qui doivent sortir de ses œufs , il va se poser sur l'enduit, sous lequel tant de petits animaux sont cachés. Il DES ICHNEUMONS. 123 traîne aj)rcs lui sa tarière , qui ne pa- roit alors composée que d'une seule pièce. Mais bientôt il la hausse , la baisse , la contourne dans difTérentes portions de sa longueur. Enfin il par- vient à la faire passer sous son ventre, et en porter la pointe en devant. Quoi- que l'ichneumon soit quelquefois assez haut monté sur ses pattes , et qu'il le soit dans ce moment autant qu'il est possible , comme chaque patte n'est pas posée perpendiculairement au point d'appui , et qu'elle n'ait pas la moi- tié de la longueur de la tarière , l'ichneumon est obligé de la recourber , et de la plier pour en ramener le bout sous son ventre. Lorsqu'il y est arrivé, l'ichneumon la conduit le plus loin qu'il lui est possible , en applique le bout contre l'enduit; il fait alors des mou- vemens alternatifs de gauche à droite , et de droite à gauche. Il paroi t que cette opération est difficile, car il faut à l'insecte environ un quart -d'heure 124 HISTOIRE NATURELLE pour qu'elle soit achevée. Pendant que l'ichneunion perce , la pointe de la ta- rière est constamment placée en devant de la tête : quelques espèces ont alors ïa tête tournée en haut , d'autres en bas. Des ichneumons de même taille que ceux - ci , et d'autres beaucoup plus grands , à très - longue tarière , savent trouver des larves de dijBPérentes espèces que leurs m ères ont cru loger bien sû- rement , en les faisant naître au-dessous de l'écorce épaisse de fort gros arbres , et dans l'intérieur du bois même. Les iclmeumons rôdent autour des arbres , comme les autres autour des murs. Réaumur en a surpris un dont la ta- rière étoit enfoncée en partie dans le tronc d'un gros orme , où le bois com- mençoit à se pourrir. Cette tarière n'étoit pas dirigée comme celle de l'es- pèce précédente : elle l'étoit en arrière ; l'insecte l'a voit fait entrer le moins obli- quement qu'il lui avoit été possible dans DES ICHNEUMONS. 125 le tronc ; elle ëtoit entièrement hors de ses deux fourreaux ; ceux-ci étoient pa- rallèles entr'eux ; et soutenus en Tair dans la ligne du corps. Les ichneumons ne ti-ouvent pas au- tant de difficultés à percer le corps des chenilles; aussi sont-elles plus sujettes que les autres insectes à renfermer de leurs larves. Les chenilles de la plus belle des espèces qui vivent sur le chou , sont de toutes les chenilles celles qui nour- rissent le plus ordinairement des larves d'ichneumons qui vivent en socie'té , et sur-toutune espèce qui file de très-jolies coques , que ces larves attachent les unes auprès des autres. Ce sont ces lar- ves que Gœdaert , et beaucoup d'autres avant lui , ont regardées comme les vrais enfans des chenilles ; ils ont même cru voir que la chenille s'intéressoit pour ses enfans nouvellement nés ; que dès qu'ils étoient sortis de son corps , elle filoit pour les envelopper de soie. Les vers qui paroissent naître des clie- 126 HISTOIRE NATURELLE nilles n'ont pas trompé les observa- teurs, qui avoient de plus justes idée» de l'invariabilité des productions de la nature , tels qu'ont été Swammerdam, Leuwenhoek , Valisnieri et autres. Il a dû paroitrc certain que les larves qui s'étoient élevées dans le corps des che- nilles qui en sortaient , et qui ensuite se transformoient en mouches, dévoient leur naissance à des mouches sembla- bles à elles. Sur quoi seulement il devoit y avoir de l'incertitude, c'est sur la manière dont ces larves étoient entrée* dans le corps de la chenille. Toutes ces larves , tant celles qui vivent en société que celles qui vivent solitaires , doivent subir les mêmes métamorphoses. Réau- mur appelle larves qui vivent en socié- té , celles qui sont en grand nombre dans le corps d'une chenille , et qui en sortent ensemble pour se métamorpho- ser les unes auprès des autres. Les lar- ves solitaires sont celles dont on ne trouve qu'une ou deux dans le corps DES TCHNEUMONS. 12/ d'une chenille. Il y en a de plusieurs espèces , tant de celles qui vivent en société que de celles qui vivent solitai- res , qui se filent des coques de soie pour se métamorplioser , et d'autres qui se transforment sans se renfermer dans des coques. Il arrive tantôt que les lar- ves sortent du corps de la clienille , tantôt qu'elles sortent de la chrj^salide, selon que l'accroissement de la chenille étoit plus ou moins avancé lorsque les oeufs ont été déposés dans son corps. Les larves qui vivent dans l'inté- rieur des chenilles du chou , sont rases et sans pattes. Dès qu'elles sortent du corps de la chenille , et souvent avant d'en être entièrement sorties, elles com- mencent à filer : leur filière est placée comme celle des chenilles , à la lèvre inférieure. Toutes celles qui sortent d'un des côtés de la chenille , descen- dent du même côté sans s'éloigner les unes des autres , ni du corps de la che- ïiille -j elles continuent à filer quelques 128 HISTOIRE NATURELLE fils qu'elles placent en diflerens sens. Il se forme de ces fils nnc petite masse cotonneuse , qui sert de base à la coque de chaque larve. Chacune d'elles s'en fait une d'une belle soie qui difiPère peu pour la forme de celle du ver à soie. Cette soie est très - forte , d'un beau jaune , ou très-blanclie , selon l'espèee. Réaumur a observé des larves qui étoient sorties du corps d'une chenille de Fa- ristoloche : lorsqu'il les vit, elles étoient presque toutes fixées sur une tige de cette plante , peu éloignées de la che- nille. Elles avoient travaillé à se faire clîacune une petite coque : celles qui sortoi;pnt se rendoient auprès des au- tres , et prenoient la coque commen- cée pour point d'appui de celles qu'elles Rlloient faire. Ainsi c'est la bourre que chaque larve file avant de faire sa co- que , et qui tient à celle que chaque larve a filée , qui forme cette masse co- tonneuse qui enveloj)pe la totalité des coques. La, vitesse avec laquelle ces DES ICHNEUMONS. 12^ larves filent est étonnante : en moins d'une demi-heure , la masse est com- mence'e et finie. Quand on voit tant de larves sortir du corps d'une chenille , on a peine à concevoir comment elles ont pu y être contenues , et comment elles ont pu y vivre sans la faire périr. Non -seule- ment cette chenille ne périt pas , elle croît elle-même, pendant que tant d'en- nemis si terribles se nourrissent de son intérieur. Tant que les larves doivent croître , jusqu'à ce qu'elles soient prê- tes à se transformer , elles ne portent pas d'atteintes mortelles à la chenille : elles savent aussi épargner les parties qui lui sont essentielles; jamais elles ne percent ni n'attaquent le long canal qui est composé de l'œsophage, de l'estomac et des intestins ; elles trouvent moyen de vivre à ses dépens , sans 1 ai faire des blessures mortelles : c'est le corps grais- seux , dont le volume est considéra- ble , et qui paroît être une partie plus l3o HISTOIRE NATURELLE essentielle à l'insecte , sous la forme de chrysalide, qu'elle ne lui étoit lors- qu'il avoitla forme de chenille , que les larves d'ichneumons attaquent. Les parties intérieures de la chenille ne sont pas autant ménagées par toutes les es- pèces de larves , qu'elles le sont par les espèces dont nous venons de parler. Une larve ou deux font quelquefois périr la chenille pendant qu'elle est encore jeu- ne. C'est que celles-ci , pour preudre tout leur accroissement , n'ont pas be- soin que la chenille ait pris totalement le sien. On trouve sur toutes sortes de plan- tes des masses de coques semblables à celles des tiges de Taristoloclie , princi- palement sur les tiges du gramen. Les ichneumons qui en sortent , sont ex- trêmement petits. D'autres larves ar- rangent leurs coques les unes auprès des autres , de manière qu'elles forment ensemble une espèce de petit gâteau, terminé par deux plans parallèles. On DES ICHNEUMONS. loi trouve ces gâteaux sur les brandies d'arbres et d'arbrisseaux. Parmi les coques d'ichneumon , on en trouve qui sont de deux couleurs , disposées par bandes : les unes ont une bande jaune ou blanche dans le milieu, et le reste de la coque est brun ; d'au- tres ont plusieurs bandes de l'une de ces couleurs. Nous verrons par la suite comment ces larves parviennent à faire des coques semblables.Toutes les larves ont leur filière place'e comme celle des chenilles , et on sait que la matière de la soie contenue dans les réservoirs de la chenille , est quelquefois de deux couleurs ou de différentes nuances de la même couleur ; de là il arrive que l'extérieur d'une coque est quelquefois de soie blanche , ou d'un blanc jaunâtre, et que l'intérieur de la même coque est d'un beau jaune. Nous avons vu ailleurs que la qualité des feuilles dont se nour- rit une chenille , et la disposition où elle est elle-même, peuvent iniluer sur l32 HISTOIRE NATURELLE les couleurs que prend la matière à soie ; et comme celle c[ui se trouve dans le milieu du i-ëservoir n'est filée que quand la portion de la matière soyeuse qui la précède l'a été , il s'ensuit qu'une par- tie de la coque est d'une couleur, tandis que le reste est d'une autre -, mais ja- mais par bande. Si la variété de la dis- tribution des couleurs des coques de nos larves dépendoit précisément de cette cause j il faudroit que certaines portions de la matière à soie fussent alternati- vement blanches , et d'autres alternati- vement brunes; mais avec des variétés incomparablement plus grandes que celles que la coque même fait voir. Il n'y a ici , ni tant d'art de la part de l'insecte , ni autant de préparatifs faits par la nature, que l'extérieur de ces coques semble en demander. Tout se réduit à ce que la larve peut faire sa co- que de deux couleurs , et que la soie qui sort la première de la filière est blanche j et à une circonstance de plus. DES ICHNEUMONS. l35 qui est celle qui donne le dénouement. C'est que qaand la larve commence sa coque , la solidité de son ouvrage exige qu'elle donne plus d'épaisseur à cer- tains endroits qu'à d'autres. Le milieu d'une coque commencée doit être sou- tenu par un cerceau de soie plus épais que le reste ; d'autres parties de la même coque ont besoin d'un pareil cerceau près de chaque bout. Supposons que la matière blanche qui sort la première ne peut suffire qu'à ébaucher la coque, qu'elle ne sauroit fournir la soie néces- saire pour lui donner l'épaisseur con- venable y et que la matière contenue dans les réservoirs donne de la soie brune ; cela supposé , il s'ensuit que tout l'intérieur de la coque sera brun, et tout l'extérieur paroîtra à-peu-près de cette couleur, dans les endroits qui ne sont faits que d'un réseau de soie blanche , mince et transparente ; mais la coque paroîtra toujours blanche dans k's endroits qui ont été fortifiés par des Infectes. lU, 12 l34 HISTOIRE NATURELLE couclies de soie assez épaisses pour être opaques. Il est aisé de se convaincre que c'est de-là que dépend la variété exté* rieure des couleurs des coquesdout nous parlons. On en a une preuve décisive , en ratissant avec la pointe d'un canif quelques portions d'un endroit blanc , la portion qu'on gratte devient brune à mesure qu'on enlève ce qu'elle avoit de plus d'épaisseur que les autres en- droits. La soie de ces coques est d'une finesse extrême ; elle a un brillant et un éclat pareil à celui des vernis , ou des corps durs les mieux polis. On trou- ve ces coques au commencement de l'automne sur le genêt ; les larves qu'el- les renferment sont d'un blanc verdâ- tre. Après être sorties du corps de la clienille , elles passent l'hiver dans leur coque sans se métamorphoser. Les chenilles qui se renferment dans des coques pour se métamorphoser, ne sont pas plus exemptes que les au- tres d'être mangées par les larves de* DES ICHNEUMONS. l35 iciiiieumons. Pendant qu'elle se pré- pare à sa transfoimation , la larve vit et croît dans son intérieur ; elle sort par la suite du corps de la chrysalide ; et lorsqu'elle est de l'espèce de celles dont nous venons de parler , elle se file une jolie coque dans celle de la che- nille. Ainsi le travail même de la che- nille qu'elle a dévorée , sert à la mettre plus à couvert. Il y a des larves de différentes espè- ces qui ne filent point de coque dans le corps des chenilles ou des chrysalides ; elles s'y transforment en nymphes , et n'ont pour toute enveloppe que la peau de la chenille, ou celle de la chrysa- lide. On trouve sur le chêne une espèco de coque qui mérite de fixer l'atten- tion : elle est suspendvie par un fil de soie , dont un des bouts est attaché à un de ceux de la coque , et l'autre à une petite branche ou à une feuille. Cette l36 HISTOIRE NATURELLE toque est de même forme que celles dont nous avons parlé , mais un juni moins alongée : elle a dans son milieu une bande d'une coulour biancliàlic. Ces coques ont offert à Ruaumur un phénomène qui l'a surpris. Celles qu il a détachées et renfermées dans des boî- tes, y sautoient assez souvent. On les détcrminoit à faire ce mouvement en les posant sur la main-, elles faisoient des petits sauts qui ne les portoient qu'à huit lignes de l'endroit d'où elles étoiciit parties , et quelquefois elles sautoient à trois ou quatre pouces, en sVMevant à une hauteur égale. Nous allons ren- dre compte du moyen que Réaumur a imaginé , et auquel il a cru que cette lai've doit avoir recours pom' faire sau- ter sa coque; c'est celuid'un ressort qui se débande. Représentons - nous , dit Réaumur , la larve logée à Taise daii-î sa coque , et couchée sur un de ses cô- tés , qu'elle se recourbe ensuite peu à peu , de façon que le milieu de son do* DKS ICHNEUMONS. 15/ soil le milieu de la convexité de la courbure qu'elle a prise , que la partie la plus convexe touche la suriacc in- térieure et la plus élevée de la coque, mais que son ventre ne touche pas la partie intérieure et inférieure de la même coque -, que cette dernière soit seulement touchée par la tête et par le derrière de l'insecte. C'est dans cet état que Réaumur a vu la larve dans le mo- ment où elle alloit faire sauter sa co- que. Accordons, ajoute-t-il , à cette larve un principe de force et de mou- vement , par lequel elle peut donner à son corps, et très -subitement , une courbure contraire à celle que nous ve- nons de lui voir , que le milieu de son ventre qui étoit concave se redresse , qu'il devienne convexe , le ventre va être porté vers le bas de la coque, le derrière de la tête sera porté vers la partie supérieure de la même coque. Mais supposons que la partie supérieure de la coque soit frappée brusquement, 3 3S HISTOIRE NATURELLE a\^ant que le ventre soit parvenu à tou- cher la partie inférieure^ les deux coups donnés par la tête et par la queue , pous- seront la coque en haut , l'élèveront , la feront sauter , et la détermineront à s'élever obliquement ,"Tà aller en avant, en s'élevant selon la direction composée qui résulte de l'obliquité avec laquelle les deux coups ont été donnés. On ne voit pas trop , ajoute Réaumur , quels avan- tages peut tirer un ver du talent de sa- voir faire sauter une coque , qui dans l'état naturel est suspendu en l'air par une petite corde. Cependant , si l'on considère que la situation qui lui con- vient le mieux est d'èlre dans cette position , puisque c'est celle dans la- quelle on la trouve ordinairement, et que le vent ou d'autres circonstances peuvent la déplacer et la porter sur une feuille ou sur un autre corps , on ne doutera pas qu'il est nécessaire à notre larve de savoir sauter, pour se remet- tre dans sa position naturelle. Héaumur DES ÎCIINEtTMONS. 1^9 a vu que la larve fait effectivement sau- ter sa coque lorsqu'elle se trouve dé- range'e -, mais il n'a pu savoir quel étoit ïe véritable habitant de cette coque , parce que de celles qu'il a trouvées au printemps , il en est sorti les premiers beaux jours de l'année suivante un icli- iieunion de ciiacune. Ayant ensuite ou- vert deux autres coques , il y a trouvé des mouches à quatre ailes , dont le corps étoit court et d'un bleu noir, l'ab- domen gros , les antennes assez courtes. Ainsi l'un des deux insectes est venu d'une larve qui avoit mangé l'autre. Nous avons vu que la nature a donné aux femelles des ichneumons un ins- trument propre à percer les corps durs qui renferment des alimens convena- bles à leurs petits ; elle les a douées en même temps d'une intelligence admi- rable qui leur fait découvrir les insectes les mieux cachés -, elles savent trouver les chenilles plieuses, rouleuses et mi- neuses des feuilles des arbres , les habi- 1 \o HISTOIRE NATURELLE tans des galles, les teignes des pellete- ries renfermées dans leurs fourrures. Les araignées même tapies dans leurs trous, malgré leurs toiles , c|ui sont des espèces de pièges toujours tendus , si dangereux pour les insectes ailés, et qui semblent devoir les mettre à l'abri de la tarière des iclineumons , subissent le sort commun , et deviennent , comme les autres insectes , la proie de leurs larves. Les iclineumons , et quelques autres insectes , paroissent donc desti- nés à détruire la plus grande partie des animaux de leur classe , qui sans douie finiroit par devenir nuisible aux ani- maux des autres classes, par leur pro- digieuse fécondité. Ce genre renferme plus de trois cents espèces divisées en six familles , qu'en distingue par les antennes et l'écus- son. Première famille , écusson blanc ou jaune , antennes ave« un anneau blan- châtre. DES ICHNEUMONS. l4l Deuxième famille, écussoii blanc ou jaune, antennes entièrement noires. Troisième famille , écusson de la cou- leur du corselet , antennes avec un an- neau blanc. Quatrième famille , e'cusson de la couleur du corselet , antennes entière* ment noires. Cinquième famille , antennes jaunes 6u fauves. Sixième famille , corps très -petit, antennes filiformes , abdomen ovale , sessile. On trouve une grande quantité d'ich- neumons aux environs de Paris. Nous allons passer à la description de quelques espèces de ce genre nom- breux. l42 HISTOIRE NATURELLE PREMIÈRE FAMILLE. Ecusson blanc ou jaune , antennes avec un anneau blanc. L'Ichneumon salure, Ichneiimon saturatorius. Sa tête est jaune antérieurement, noire postérieurement ; les antennes noires avec un anneau blanc. Le corse- let noir avec un point blanc sur l'écus- son, et trois de cLaque côté. L'abdo- men noir avec une tache blanclie à l'extrémité. Les pattes sont ferrugi- neuses , avec les jambes postérieures noires. Il habite l'Europe. Degéer a trouvé la larve de cet ichneu- mon dans le corps de la chenille du Bomhix vinula. DES ICHNEUMONS. i43 DEUXIÈME FAMILLE. Ecusson blanc ou jaune , antennes entière- ment noires. L'Ichneumon attrayant, Iclmeu- mon persuasorius. Il a la tête et les antennes noires , le corselet et l'abdomen noirs , avec des taches d'un blanc jaunâtre en dessous et sur les côtés ; les quatre pattes an- térieures sont d'un jaune rougeâtre, les postérieures noires avec les cuisses d'un jaune rougeâtre , les ailes blanches et transparentes. ïl habite l'Europe. L'Ichneumon dessinateur , Ichneumon dessinator. Cet ichneumon est un des plus grands qu'on trouve en Europe -, ses antennes .sont presque de 1^ longueur du corps , l44 HISTOIRE NATURELLE sa tête est noire avec le devant du front jaune, et une ligne de même cou- leur derrière les yeux -, le corselet est noir avec deux taches jaunes à la base des ailes ; une ligne et une élévation de même couleur sur le milieu; l'abdomen est d'un jaune fauve avec les trois der- niers anneaux noirs ; les pattes sont jaunes, les cuisses postérieures ont une -tache noire, les ailes ont une teinte jaune et l'extrémité brune. Il habite l'Europe. Sa larve vit dans l'intérieur de la chenille du sphinx oculé , et dans celle du troène. TROISIÈME FAMILLE. Ecusson de la couleur du corselet , an- tennes avec un anneau blanc. L'Ichneumon compagnon , Ichneunion coniitato?\ Il est entièrement d\in brun foncé , ses antenneg sont noires avec un au- DES TCHNEUMONS. i4 neau blanc au milieu ; ses ailes sont obscures. Il se trouve en Europe dans les nids des guêpes maçonnes , nous renvoj^'ons aux Géne'ralitës de ce genre, pour voir comment la femelle introduit ses œufs dans les nids. QUATRIEME PA MILLE. Ecusson de la couleur du corselet , antennes entièrement noires. L'Ichneumon manifestateur , IcJuteumon manifestator. Cette espèce est entièrement de cou- leur noire, à l'exception des pattes qui sont fauves , avec les jambes et les tarses postérieures qui sont quelquefois noirâtres-, les ailes sont transparentes avec un point marginal obscur. Il habite l'Europe j on le trouve daiië les bois. Réaumur a vu la femelle qui avoifc Initeetes. IIL i5 l4S HISTOIRE NATURELLE sa tarière enfoncée dans le tronc d'un. gros orme. L'Icliiieumon jaculateur, Iclineu- jnonjaculator. n a environ six lignes de longueur •, ses antennes sont grosses et courtes -, sa tête est grande ; elle est jointe au cor- selet par un cou long et mince j elle est noire ; le corselet est noir , applati vers les côtés j l'abdomen est alongé , aminci , comprimé , un peu renflé à son extré- mité, noir, terminé, dans la femelle, par une longue tarière ; les pattes an- térieures et les intermédiaires sont courtes , les postérieures fort longues , les jambes sont renflées , noires , avec les articulations blanches j les ailes sont petites et transparentes. Il habite l'Europe. DES ICHNEUMONS. 14/ L'Ichneumon arroseur _, IcJineU' mon irrorator. Il a les antennes noires , la tête et le corselet de même couleur, chagrines , un peu velus ; l'abdomen noir , un peu velu , chagriné , couvert de poils d'un janne doré soyeux à l'extrémité ; il pa- roît n'être composé que de trois an- neaux ; le dernier est gros , arrondi ; les pattes sont noires avec les jambes pos- térieures brunes ; les ailes ont une lé- gère teinte de brun , avec l'extrémité d'un brun foncé opaque. On le trouve dans toute l'Europe. Llchneumon devin , Ichneumon ariolator. Sa grandeur est celle d'une mouclie domestique ; ses antennes sont noires avec un anneau blanc; sa tête est noire avec deux lignes blanches j son corselet l48 HISTOIRE NATURELLE est roux , armé postérieurement de deux épines courtes , blanches ; l'abdo- men est noir avec quatre bandes trans- versales blanches ; les pattes antérieures et intermédiaires sont fauves avec des taches noires , les postérieures sont noires avec un anneau blanc à la jambe, et une ligne fauve sur la cuisse -, les ailes sont transparentes 3 les supérieures ont deux grandes taches obscures, l'une vers le milieu , l'autre vers l'extrémité. On le trouve à Cayenne et à Su- rinam. L'Ichneumon pugillateur, Ichneu- mon puglllator, n a environ sept lignes de longueur ; ses antennes sont longues , noires ; la tête et le corselet sont de même cou- leur; l'abdomen est fauve à sa base jus- ques vers le milieu , noir dans le reste de sa longueur , mince à son origine , comprimé, tronqué à l'extrémité, muni DES ICHNEUMONS. l^ d'un aiguillon très-court -, les pattes an- te'rieures sont fauves, les autres noires avec le milieu des jambes blanc ; les ailes ont une légère teinte de brun. Il habite l'Europe. Sa larve file une coque ovale de cou- leur brune d'un tissu très-serré. CINQUIÈME PAMILIiJEL, Antennes jaunes. L'^Iclmeumon Jaunâtre, Ichneu- mon luteus. Cet iclineumon varie beaucoup pour la grandeur : il a depuis cinq jusqu'à neuf lignes de longueur ; il est d'un jaune fauve ; les antennes sont d'un jaune fauve à leur base , brunes dans le reste de leur longueur \ les yeux sont d'un vert-bronzé , les yeux lisses sont placés sur une tache brune -, l'abdomen est mince à sa base, renflé dans son milieu , comprimé. L'extrémité de ce- l5o HISTOIRE NATURELLE lui du mâle est brune ; les ailes sont transparentes avec les nervures brunes; les supérieures ont, vers le milieu du bord extérieur , une tache alongée jaune. On le trovive dans toute l'Europe. La femelle de cette espèce dépose ses œufs sur le corps des chenilles -, les larves qui en sortent sucent la substance de la chenille, sur laquelle elles vivent et croissent; le derrière de la larve resie efngagé dans la coque de l'œuf où elle a pris naissance : l'œuf lui-même est at- taché et implanté dans la peau de la chenille, au moyen d'un pédicule assez long et très-miiice. DES ICHNEUMONS. l5l SIXIÈME FAMILLE. Corps petit, antennes filiformes, abdomen ovale , sessile. L'Ichneumon pelotonné, Iclineu- mon glomeratus. Cette espèce est très-petite , entière- ment noire; les antennes sont plus lon- gues que le corps; les pattes sont d'un jaune foncé; les ailes supérieures ont une taclie marginale noire. Les larves de cette espèce filent des coques ovales d'un beau jaune citron , qu'elles placent les unes auprès des au- tres , et qu'elles enveloppent d'une masse cotonneuse de même couleur. Il habite l'Europe. Llchneumon globulaire, Iclmeu-- mon globatus. n est très-petit , noir ; les antennes sont de la longueur du corps , le dessous l52 HISTOIRE NATURELLE de l'abdomen est verdâtre , les pattes sont d'un jaune foncé. Les larves de ces ichneumons vivent en société dans le corps des chenilles ; parvenues à leur accroissement , elles en sortent, et vont ordinairement se placer sur une tige de gramen ; elles y filent chacune une coque blanche qu'elles placent les unes à côté des au- tres j ces coques se trouvent enveloppées par une masse cotonneuse , blanche , que ces larves filent en commun. On les trouve en Europe et aux en- virons de Paris vers le milieu de l'été. L'Ichneumon des Araignées, Ichneunion Aranearum, Cette espèce est très-petite ; les an- tennes ont la longueur de la moitié du corps, la tête est noire , le corselet est de la même couleur ; il a en dessus deux lignes longitudinales jaunes , l'abdomen est alongé ; un peu ovale j le dessous est DES ICHNEUMONS. i53 d'une couleur verdâtre , terminé, dans» la femelle , par nn aiguillon court ; les pattes sont fauves ; les ailes supérieures ont une tache marginale noire. Degéer a trouvé la larve de cet iclineu- mon sur le corps d'une araignée , de laquelle elle s'est nourrie ; parvenue au terme de son accroissement , elle a filé sa coque au milieu de la toile que l'arai- gnée avoit filée avant de mourir. An bout de huit jours elle en sortit sous la forme d'insecte parfait. Il habite l'Emope. li'Ichneumon alvéoliforme , Ichneinnon alpeariformis. Les antennes de ce petit ichneumon ont les deux tiers de la longueur du corps. Il est noir -, l'abdomen tient au corselet par un pédicule extrêmement mince ; ses pattes sont brunes ; il porte ses ailes posées sur le corps parallèles au plan de position. l54 HISTOIRE NATURELLE Les coques de cette espèce sont toutes posées les unes à côté des autres dans leur longueur, et forment des espèces de tablettes des deux côtés. Sur chaque face on voit les extréiintés de ces pe- tites coques cylindriques, qui sont ou- vertes lorsque l'i nsecte en est sorti , et qui représentent les cellules d'un rayon d'abeilles. Ces coques sont tantôt grises, tantôt brunes. On le trouve aux environs de Paris. L'Iclineumon des Pucerons , Ichneiunon Apliidmn, Il a un peu plus d'ïine ligne de lon- gueur; les antennes sont aussi longues que le corps -, la tête est noire avec un peu de jaune près de la bouche \ le cor- selet est noir, sans tache j l'abdomen est d'un brun noirâtre , les pattes sont brunes , les ailes de couleur changeante avec une tache marginale d'un brun jau- DES ICHNEUMONS. i55 nâtre : la tarière de la femelle est cachée dans l'abdomen. La femelle de cette espèce dépose ses œufs un à un dans le corps d'un puce- ron , qui suffit à nourrir la larve qui en sort jusqu'au moment où elle cesse de mander. Parvenue à son dernier desré d'accroissement, elle perce la peau vide du puceron en dessous , et l'attache à la. feuille sur laquelle il se trouve , au moyen d'une plaque de soie ; ensuite elle tapisse l'intérieur du puceron d'une couche de soie blanche , qui lui sert de coque , et s'y transforme en nymphe -, elle passe l'hiver dans cette coque, et en sort vei's le milieu du printemps suivant , sous la forme d'insecte par- fait , après avoir fait une ouverture cir- culaire à la peau près des cornes. On trouve aussi des larves dans les pucerons pendant l'été : celles-ci se changent en insecte parfait avant la fiu de la belle saison. l56 HISTOIRE NATURELLE Il habite l'Europe ; on le trouve aux environs de Paris. L'IchneniiJon des Teignes , Ichneumon Tinearuni, Cette espèce est plus petite que la précédente -, les antennes sont fauves , un peu plus longues que le corselet; la tête et le corselet sont noirs ou d'un In un noirâtre; l'abdomen est ovale, un peu verdâtre en dessous \ les antennes et les paties sont fauves ; la tarière est de la longueur de l'abdomen. Degéer a trouvé cet icbneumon dans \\n poudrier qui renfermoit des teignes des pelleteries ; il paroît que sa larve vit aux dépens de ces teignes. L'Ichneumon à paties blanches, Iclineumon alhipes» Il a près d'une ligne et demie de long, son corps est noir et lisse, ses an- DES ICHNEUMONS. 15/ tennes sont de la longueur du corps , ses pattes sont blanchâtres , ses ailes transparentes avec un point au bord extérieur. Suivant le cit. Geoffroy cet iclmeu- mon est sorti des têtes d'un chardon où habitoient des larves de charanson , dont il avoit fait périr quelques-unes- L'ichneumon de Degéer , cité par le cit. Olivier , pour être le même que ce- lui du cit. Geoffroy , a été trouvé par le Naturaliste du nord , dans des che- nilles rouleuses du lilas. L'ichneumon cuXané , IchneumoTz suhcutaneus. Il a une ligne de longueur ; il est en- tièrement noir , ses antennes sont très- longues, composées d'un grand nombre d'articles, garnis de poils; l'abdomen est ovale , alongé , les ailes supérieures ont une tache marginale noire en forme de croissant. Il a le corps, les pattei| Insectes. IIl* li l58 HISTOIRE NATURELLE et les ailes couverts île quelques poils. Sa larve vit daus l'intérieur des che- nilles mineuses , qui minent en galerie les feuilles du rosier. Il habite l'Europe. Li'Ichneumon pectinicorne , Ichnewnon ptcti?iicornis. Cet ichneumon a une demi-ligne de longueur \ il est d'un brun noirâtre ; son corps est alongc , ses antennes sont branchues , ou garnies de ramifications , composées de huit articles inégaux ; le dernier est de figure conique : il part du troisième , quatrième et cinquième article mie branche , chacune de ces branches est longue , articulée , garnie de poils assez longs. Il porte ses ailes croisées sur le cor})s , et mai'che avec beaucoup de vitesse. Il habite l'Europe ; sa larve vit dans les chcnilks mineuses des feuilles du «hêne. DES ICHNEUMONS. l5^ L'Ichneumon agile , Ichneumon agilis, H est très -petit; les antennes sont fauves, son corps est noir avec une bande fauve, peu marquée à la base de l'abdomen ; les pattes sont fauves. La femelle de cette espèce a été trouvée joar Degéer : elle est sans ailes. Ce Na- turaliste l'a vu introduire sa tarière dans la peau d'un puceron , qui con- tenoit une larve d'une autre espèce d'iclineumon ; il présume que la larve de celui-ci aura vécu aux dépens de la première. Il habite l'Europe. L'Ichneumon vésiculaire^ Ichneu-^ mon vesicularif>\ H est très -petit; ses antennes sont longues , brisées , terminées en masse ; il est d'un noir verdâtre , bronzé , lui- sant , l'abdomen est ovale , en forme de l^O HiSTOmE NATURELLE boule très-alongée -, la tarière est place'e au-dessous de Tabdomen ; elle est d'un jaune pâle avec l'extrémité noire j les pattes sont d'un jaune brun. La femelle est sans ailes ; mais elle a deux espèces de moignons renflés, coniques , terminés en pointes, attachés au-dessus de la partie postérieure du corselet , dirigés en ai-rière , mobiles à leur base : l'insecte les remue con- tinuellement quand il marche. Cet ichneumon , qui n'a pas la faculté de voler, a celle de sauter foit loiu; quoi- c[ue ses cuisses ne soient pas renflées comme celles des insectes sauteurs. De- géer n'a pu parvenir à voir comment il exécute ce mouvement ; il croit que c'est en courbant le ventre, et en le poussant avec force contre le plan de position. Cette singulière espèce habite la Suède ; cette femelle est sortie d'iuie galle ligneuse des tiges d'une espèce de potentille. DES UROCÈRES. l6l XXXII r GENRE. UROCERES. Caractères génériques. Antennes filifor- mes ; articles courts , égaux, cylindiiques et distincts. — Quatre antennules très- courtes , inégales ; les antérieures com- posées de deux articles égaux ; les posté- rieures de quatre articles , dont le der- nier plus gros — Ventre joint au corselet, et terminé par une pointe forte , un peu aiguë. — Aiguillon dentelé, caché sous. une gaine creusée en gouttière dans les femelles. — Trois petits yeux lisses. Les urocères ont les antennes com- posées d'un grand nombre d'articles égaux j elles sont placées à la partie an- térieure de la tête, rapprochées à leur base. La tête est grosse, arrondie antérieu- rement , appliquée contre le corselet. Le corselet est grand , un peu éclian- cré antérieurement. l62 HISTOIRE NATURELLE L'abdomen est d'égale grosseur dans toute sa lougueur, intimement joint au corselet, terminé par une pointe dentée. Au-dessous de celui des femelles est une longue tarière qui a son origine vers le milieu ; cette tarière est renfer- mée entre deux lames écailleuses ; elle se prolonge au-delà de la pointe de Tab- domen. , Les quatre pattes antérieures sont de longueur moyenne ; les postérieures ^ont jilus longues. Les ailes sont membraneuses , de la longueur du corps. Les mœurs de ces insectes nous sont inconnues. Ils ont été décrits sous le nom de sirex par Linnée et M. Fabri- cius , et sous celui d'urocère par les ci- toj^ens Geoffroy el Olivier. Mais com- me ce dernier n'a pas encore décrit les espèces qui composent ce genre, et que nous ignorons s'il y comprendra toute.s celles du genre sirex, nous nous borne- rons à décrire seulement celles que nous Pa^.jjyô Torn . 7/1. 1.1 'Uro o'caJit 2 et 3 . Ciiu leiiîoral DES U R O C È R E S. 1 65 avons sous les yeux. Le genre sirex de M. Fabricius est composé de vingt-six espèces. L'Urocère géant, Urocerus gigas. Ses antennes sont jaunes , sa tête est brune , avec une grande tache jaune de chaque côté , derrière les yeux •, le corselet est brun , sans tache , un peu velu ; le premier anneau de l'abdomen est brun, bordé de jaune; le second est entièrement jaune \ les quatre suivans sont bruns , les autres jaunes ; le der- nier se termine par une pointe assez longue. La femelle a une longue tarière placée en dessous , qui prend naissance vers le milieu de l'abdomen , où elle est recouverte par deux lames écailleu- ses ; elle s'étend au-delà de la pointe de l'extrémité de l'abdomen. Les pattes sont jaunes , avec les cuisses brunes ; les ailes sont transparentes , avec les nervures jaunes ) les supérieures beau- l64 HISTOIRE NATURELLE coup plus grandes que les inférieures. 11 habite les pays froid de l'Europe : il a été trouvé à Paris sur un petit vais- seau qui venoit du Havre. Xi'Urocère spectre , Urocerus spectruin. Il a près d'un pouce de longueur ', les antennes sont noires , plus courtes que le corps ; la tête et le corselet sont noirs , un peu velus j le devant du corselet est tronqué , il a une petite éminence pointue de chaque côté , et deux lignes d'un brun jaunâtre ; l'abdomen est noir , terminé par une pointe écail- leuse , et intimement joint au corselet. Celui de la femelle a une tarière d'en- viron un pouce de longueur , insérée en dessous -, les pattes sont d'un jaune rougeatre; les ailes blanches ; avec les nervures brunes. H habite la Suède, DES UROCÈRES. l65 L'Urocère jeune , Urocerus juvencus. Il a environ dix lignes de longueur 5 il est d'un noir bleuâtre luisant ; les antennes sont d'un brun jaunâtre à la base , noires à l'extrémité, plus cour- tes que le corps ; la tête et le corselet sont un peu velus , celui-ci est un peu tronqué antérieurement avec une poiu' te de chaque côté ; l'abdomen est ter- miné par une pointe courte ; la tarière a environ cinq lignes de longueur et elle est insérée sous l'abdomen; les pattes sont d'un jaune foncé, les ailes ont une légère teinte de brun. Il habite la Suède. L'Urocère chameau , Urocerus camelus, La tête est portée sur un cou long et mince ) elle est noire , avec deux ligues 1^6 HISTOIRE NATURELLE longitudinales jaunes sur le front, et une transversale de même couleur de chaque côté , derrière les yeux •, les an- tennes sont courtes et noires, le cou est jaune en dessus , creusé en gout- tièie , noir en dessous ; le corselet est noir , chagriné , tronqué antérieure- ment , renflé , avec une petite tache jaune à la base des ailes, et une de même couleur à la base de l'écusson ; l'abdo- men est noir , lisse ; les côtés des an- neaux ont une petite tache jaune , à l'exception du dernier , qui est entiè- rement noir j il est terminé par deux petites pointes courtes éloignées l'une de l'autre ; la tarière de la femelle est moins longue que celle des espèces précédentes ; les pattes sont biunes , avec une tache jaune aux jambes ; les ailes sont jaunâtres , avec les nervures brunes. On a trouvé une douzaine d'indivi- dus de cette espèce à Paris , dans un endroit qui renfermoit du bois à brûler. DES UROCERES. iGj L'Urocère corrupteur, Urocerus tabidus. Il est noir ; les antennes sont presque aussi longues que le corps , elles vont en grossissant de la base au sommet -, l'abdomen est comprimé , noir , avec deux points jaunes , et trois lignes de même couleur ; les ailes ont la bordure extérieure noire. Il est très-commun aux environs de Paris. l68 HISTOIRE NATURELLE XXXI V^ GENRE. C I M B E X. Caractères génériques. Antennes en masse , un peu plus couites que le corselet. — Quatre antennules filiformes ; les deux antérieures un peu plus longues , com- posées de cinq articles , les deux posté- rieures de quatre. — Ventre joint au cor- selet.— Aiguillon dentelé, caché dans • l'abdomen , dans les femelles. — Trois petits yeux lisses. Les cimbex ont les antennes compo- sées de sept articles , le premier arron- di , assez gros ; le second, long et fili- forme ; les autres plus courts , les trois derniers en masse ovale : elles sont in- sérées au-devant de la tête assez près des yeux. Linnée et M. Fabricius ont placé ces insectes parmi les tentlirèdes, dont ils difiPèrent par la forme des an- tennes. Le cito^^en Geoffroi en a fait un genre sous le nom de crabro. DES CIMBEX. 169 Ils ont la tête arrondie antérieure- ment, les yeux ovales, peu saillans , et place's à la partie latérale de la tête. Le corselet est convexe, assez grand, sillonné en dessus , avec deux tubercu- les à Fée usson, couvert d'une peau dure écailleuse j les ailes y sont attachées , elles sont membraneuses, veinées, iné- gales ; les supérieures beaucoup plus grandes que les inférieures, avec les ner- vures plus marquées. L'abdomen est de forme ovale, aussi large à sa base que le corselet auquel il paroît joint, un peuconVexe en dessus, ^Si'élargissant vers le milieu des côtés, arrondi à l'extrémité , composé de neuf anneaux : il renferme la tarière de la femelle. Cette tarière diffère peu de celle des tentlirèdes : elle est logée entre deux pièces écailleuses, plates, en forme de lames concaves du côté intérieur : ces pièces s'appliquent exactement l'une iur l'autre, elles forment une espèce Insectes. III. i5 1/0 HISTOIRE NATURELLE de boîte qui renferme la tarière. En pressant l'extré mité du ventre, ces deux lames s'écartent et laissent la tarière à découvert , qui sort entièrement de sou fourreau et se redresse. Des observations ont fait voir que la taHère est double , composée de deux lames dentelées sem- blables à de véritables scies ; le dos de chacune de ces scies est couché dans une coulisse formée par deux pièces écail- leuses. Dans l'inaction , cet instrument est placé de façon que les coulisses oc- cupent le fonddu fourreau: ce sont elles qui s'appuient alors contre le corps. C'est avec cette scie que les tentlirèdes entaillent les branches du rosier pour y pondre leurs œufs ; le côté des scies où sont les deutelures, est concave dans presque toute sa longueur , à-peu-près comme l'est le tranchant d'une faulx. Ce n'est que proche de leur origine que les dents sont placées sur une ligne convexe. Mais on voit tout le contraire »ur les scies du cimbex j c'est vers leur DES CIMBEX. 171 origine que le coté oui sont les dents est concave : dans tout le reste de son éten- due y il est convexe ; les dents y sont place'es sur une ligne convexe. L'ex- trémité des scies qui se termine en pointe , est dirigée vers l'anus , cour- bée en arrière ; ce qui fait que l'instru- ment entier paroît arrondi ail bout.C'est donc le dos des scies, placé dans les cou- lisses , qui est concave dans la plus grande partie de sa longueur , et ce dos n'a point de dentelures. Après avoir ôté les scies de leurs cou- lisses, on voit qu'elles sont contour- nées en forme de S alongé. Du côté ex- térieur , elles sont garnies d'un grand nombre de dents : chaque scie est large, mais plate. Une espèce de bande, en forme de tendon, s'étend dans toute sa longueur depuis la base jusqu'à la poin- te , et elle communique à un véritable tendon. La moitié la plus large de la scie , ou celle qui a les dentelures , est comme divisée transversalement en plu- 172 HISTOIRE NATURELLE sieurs articulations qui forment autant de zones, et chaque zone est garnie dune dent. Ces dents , qui ont leur attache proche du bord même de l'instrument, sont d'une toute autre l'orme que celles des mouclies à scie du rosier : elles sont de figure un peu ovale, ou presque ar- rondie , bordées tout autour de très- petiles dentelures. Cet instrument ne fait pas seulement l'olFice d'une scie, mais il est en même temps une râpe. A sa surface extérieure , on remarque un grand nombre de dents longues et dé- liées, placées à-peu-près comme les dents d'un peigne, et dirigées avec leurs poin- tes vers l'origine de la scie. Le dos de celle-ci est uni, maisle long de son bord, il y a une suite de poils dirigés vers son origine. Les pièces écailleuses qui servent d'appuis aux scies , ou qui sont garnies de coulisses dans lesquelles les scies sont logées , ont des bandes transversales d'un brun obscur 3 elles sont convexes en DES CIMBEX. 173 dehors et concaves du côté des scies : le dos des scies a de même une cavité tout du long, qui appliquée contre le dos des coulisses, forme un canal ouvertou une espèce de tuyau. Ce canal est proba- blement le conduit des œufs que l'insecte doit pondre dans l'entaille qu'il fait avec sa scie dans l'écorce ou le bois des ar- bres. Les cimbex mâles ont à l'extrémité du ventre deux parties coniques écailleuses en forme de crochets , avec lesquelles ils s'accrochent au corps de la femelle dans l'accouplement, et entre lesquelles est placée la partie qui caractérise leur sexe ; ils peuvent aussi pincer avec ces deux crochets. Les insectes désignés sons le nom de mouches à scie , qui sont les cimbex et les tenthrèdes , viennent de larves con- nues sous le nom de fausses chenilles , parce qu'elles ont beaucoup de ressem- blance avec les véritables chenilles. Elles ont, comme elles, le corps alongé , à- 174 HISTOIRE NATURELLE peu-près cylindrique, divisé en plu- sieurs anneaux. Leur tête est arrondie, écailleuse; elles ont un plus grand nom- bre de pattes membraneuses que les clienilles. Celles qui en ont le plus , en ont vingt-deux en tout , seize membra- neuses et six ëcailleuses , placées de ma- nière que le quatrième anneau en est dépourvu. Ces pattes diffèrent encore de celles des chenilles j en ce qu'elles ne sont point armées de crochets. La tète des fausses chenilles est ordi- nairement plus arrondie, plus spliéri- que que celles des chenilles : sa partie supérieure est composée d'une calotte séparée par une cannelure très - Une , comme celle des chenilles, et d'une pièce écailleuse placée entre cette calotte et la lèvre supérieure. Entre ces deux pièces sont les antennes qui paroissent comme deux filets coniques et pointus ; la bouche est garnie de deux mâchoi- res dentelées assez semblables à celles des chenilles : elles servent àrinsecLc à cou- DES C I M R EX. 175 per les feuilles ; la lèvre inférieure est composée de trois pièces : c'est à l'ex- tre'mité de celle du milieu qu'est placée la filière qui donne passage à une soie grossière, avec laquelle la fausse chenille construit une coque dans laquelle elle subit SCS métamorphoses. Les pattes ccailleuses sont de figure conique ; elles sont composées de trois ou quatre pièces articulées , terminées par un crochet ; elles ont une certaine inflexion , une espèce de coude q u'on ne voit point à celles des chenilles, et du côté intérieur , elles ont souvent des ap- pendices charnus. Les pattes membra- neuses sont grosses et cylindriques 5 elles diminuent de grosseur vers l'extrémité , oi\ elles sont coniques et ordinairement fendues au bout. Le corps est divisé en douze anneaux , comme celui des chenilles ; mais les an- neaux sont souvent difficiles à distin- guer, parce qu'ordinairement la peau est toute couverte de plis et de rides 176 HISTOIRE NATURELLE transversales, qui coufondciit les inci- sions ou séparations des véritables an- neaux ; les pattes et les stigmates aident cependant à les recoiinoître. Ces stig- mates sont au nombre de dix -huit, neuf de chaque côté du corps , et placés sur les mêmes anneaux que dans les che- nilles. Les fausses chenilles , qui ont exté- rieurement tant de ressemblance avec les chenilles, sont aussi intérieurement conformées à-peu-près de même. Les parties qui diffèrent le plus entr' elles , sont les vaisseaux à soie. Ceux des faus- ses chenilles sont moins volumineux; ils s'étendent de la tête jusqu'au der- rière, sans faire de courbures considé- rables; tandis que ceux des chenilles, après avoir parcouru une partie du corps, se replient sur eux-mêmes, et remontent vers la tète, et ensuite redes- cendent vers le derrière. Les vaisseaux des fausses chenilles sont porportionnés à la quantité de soie dont l'insecte a DES C IM B E X. 177 besoin ; il ne doit filer qu'une fois dans sa vie , tandis qu'il y a des clienilles qui filent presque toujours ; telles sont les rouleuses, les plieuses, celles qui vivent en société et qui construisent des toiles en commun. Les fausses chenilles qui no filent que pour construire leurs coques n'ont pas besoin d'avoir des vaisseaux d'un volume égal à ceux des chenilles. La plupart des fausses cheniJles en- trent dans la terre pour s'y métamor- phoser. Nous parlerons plus en détail de ces insectes , qui sont bien plus intéres- sant sous l'état de larve que sous celui d'insecte parfait , en faisant la descrip- tion des espèces les plus remarquables. Les cimbex ont le vol lourd : en vo- lant , ils font entendre un bourdonne- ment assez semblable à celui des abeilles et des guêpes. Des seize espèces qui com-^ posent ce genre , plusieurs habitent les environs de Paris. 178 HISTOIRE NATURELLE Le Cimbex jaune, C'unhex lutea, n a la tête et le corselet d'un brun jaunâtre, un peu velus; les antennes d'un jaune brun; l'abdomen d'un jaune foncé, avec les trois ou quatre premiers anneaux d'un noir violet, et la sépara- tion de chaque anneau de même cou- leur ; le dessous a des taclies d'un brun obscur ; les pattes sont d'un jaune brun ; les ailes sont transparentes : elles ont une légère teinte de brun jaunâtre, avec les nervures noires; elles paroissent cbiffon- nées : dans l'état de repos , elles recou- vrent le corps. On trouve sa larve à la fin de l'été et au commencement de l'automne sur le saule et l'osier, arbres qui, dans les pays du nord, sout très-peuplés d'in- sectes de différens genres : elle est une des plus grandes larves des cimbex; elle a deux pouces de longueur et quatre li- gnes de diamètre. Dans l'état de repos , Toni .7/1. ^ i /"^ ^.^rf^"" "^ % y A^^ De.reiH' (M. Leff/Zter ifcii/p- I (\jainio. r) . Sa Cocjue • •i Sa Larve , ^ . Aiiiip^aiix de la Larve DES C I M B E X. 179 elle a le corps roulé en spirale, de façon que l'extrémitc se trouve au centre du cercle , et elle est couclie'e sur un des cô- tés : elle se tient aussi cramponnée au niojT^en des crochets des pattes écailleu- ses contre les feuilles et les brandies , et ne quitte cette attitude que quand elle Meut manger les feuilles. Elle est d'un jaune orangé mêlé d'un peu de vert : elle a , depuis la tête jus- que près de l'extrémité du corps , une raie assez large d'un bleufoncé, bordée de noir des deux côtés : elle est moins large aux deux extrémités que dans le milieu. La couleur du corps est plus claire des deux côtés de cette raie qu'ail- leurs. On voit sur toutes les parties du corps , principalement près des pattes , un grand nombre de petits points blau es , qui, vus à la loupe, paroissent comme des tubercules élevés j coniques et poin- tus. Les stigmates , qui sont noirs, sont placés chacun sur une tache triangulaire bleuâtre. Tout le corps est garni d'un l8o HISTOIRE NATURELLE grand nombre de plis et de rides trans^ •versales et longitudinales , qui font pa- roître la peau raboteuse. La tête est gros- se, arrondie , plate par-devant , lisse , d'un jaune blanchâtre lorsque la larve est jeune, et ensuite devient rouge-, les pattes sont de même couleur et subis- sent le même changement. Elles sont au nombre de vingt-deux , six écailleuses et seize membraneuses ; le quatrième anneau est le seul qui en manque ; les membraneuses sont fendues à l'extré- mité 5 elles peuvent se gonfler et s'af- faisser alternativement. A la fin de l'été, les larves de cette espèce ont acquis la grandeur qu'elles doivent avoir ; elles n'entrent point dans la ten^e ; elles filent une coque de forme ovale, qu'elles fixent le long de quelque corps. Cette coque est moins longue que la fausse chenille ; elle est composée d'une soie grossière et, éj)aisse -, son tissu est semblable à de la gomme j elle est dure comme du par- chemin. La la^ve passe l'hiver daniî DES C I M B EX. l8l cette coque , et n'en sort que Teté sui- vant , sons la forme d'insecte parfait , peu de temps après s'être changée en nymphe. Ces larves offrent un phénomène très-curieux : quand on les touche un peu fort , on voit sortir des côtés du corps plusieure jets d'eau, qne la fausse chenille seringue en ligne horizontale , à la distance de plus d'un pied. Ces jets d'eau sont très-fins , de la grosseur d'un fil ordinaire ; la liqueur qui les produit est claire : quand on la rassemble en gouttes , elle a une couleur verdâtre , et son odeur est désagréable. Ce n'est que quand on les prend sur l'arbre , que ces larves seringuent cette liqueur ; celles qu'on renferme ne peuvent plus pro- duire de tels jets. Il est probable que les feuilles fraîches entretiennent la pro- duction de cette liqueur : les feuilles qu'on leur donne dans des boîtes ne conservent pas assez d'humidité pour alimenter dans l'insecte la source qui U Insectes. III. 16 l82 HISTOIRE NATURELLE fournit. Les ouvertures qui donnent passage à celte liqueur, sont situées au-dessus des stigmates , au sommet d'une pièce charnue triangulaire sur la- quelle sont de petits points bruns en- foncés , d'où on peut faire sortir quel- qvies gouttes en y introduisant une épingle. La nymphe est beaucoup plus petite que la larve : nouvellement sortie de la peau de larve , elle est blanche , peu à- peu elle devient d'un beau jaune : ou lui voit très-distinctement toutes les parties que doit avoir l'insecte parfait. Le ventre est divisé en anneaux , et la nymphe le remue de temps en temps ; c'est le seul mouvement qu'elle se donne. Pour donner sortie à la nymphe , la peau de larve se fend sur la tête et sur la partie du devant du corps. Lorsque l'insecte parfait veut sortir de sa coque , il fait une ouverture à l'un de ses bouts , en détachant une grande pièce avec ses mâchoires. DES CIMBEX. l83 Cet insecte se trouve dans toute l'Eu- rope. Le Cimbex fémoral , Clmhex femorata. Ses antennes sont jaunes , son corps est noir , un peu velu ; le premier an- neau de l'abdomen est échancré ; il a une grande tache jaune demi-circulaire formée par une membrane ; les ailes sont transparentes , veinées, avec leurs bords extérieurs bruns et épais j les pattes sont d'un jaune brun^ les tarses d'un jaune fauve. Sa larve vit sur le saule et l'aune ; elle est de même grandeur que la pré- cédente : elle a vingt-deux pattes ; elle est d'un vert mat, un peu livide -, elle a le long du dos trois raies assez larges j celle du milieu est bleuâtre , les autres sont d'un jaune pâle , rapprochées les unes des autres. Les stigmates sont, comme dans l'espèce précédente , placés sur des l84 HISTOIRE NATURELLE taches triangulaires noires ; mais celle- ci a de particulier , qu'entre la ligne des stigmates et la raie jaune , à une dis- tance égale de l'une à l'autre , on veit de chaque côté du corps douze petites ta- ches cellulaires bleues , deux placées sur chaque anneau. La tête est blanchâ- tre , les pattes sont de la couleur du corps : le corps est tout couvert de plis et de rides transversales. Vers la fin de l'été , elle file une coque ovale d'une soie forte , d'un jaune brun ;, d'oih. l'in- secte parfait sort l'été suivant. Cette larve seringue aussi de l'eau de même que la précédente , par des ou- vertures placées de chaque côté du corps'; mais la liqueur qu'elle jette est d'un beau vert d'émeraude. On trouve cet insecte dans toute l'Europe. J*at/.y/fJ. Tom . m. 7)<\r alongés. Le corselet est presque cylindriqi(e , un peu plus élevé que l'abdomen , étroit à sa partie postérieure ; un peu obtus ou coupé. DES S P H E X. '27^ L'abdomen est de forme oA^ale , atta- ché au corselet par un pétiole très-long , quelquefois court. Les pattes antérieures sont courtes, attachées à la partie antérieure du cor- selet , très-près de la tête. Les larves de ces insectes sont incon- nues ; mais on sait que le plus grand nombre des femelles fait un trou dans un terrein sablonneux, tel que celui d'un chemin ; que ces femelles y déposent une chenille, une larve ou une araignée ; qu'elles pondent un oetif àcôté, et qu'en- suite elles referment le trou. Il est pré- sumable qu'un de ces insectes suffit pour nourrir la larve qui sort de l'œuf, jus- qu'au moment où elle n'a plus besoin de manger. En décrivant les espèces , nous verrons les moyens que ces fe- melles emploient pour creuser les trous qui doivent renfermer leurs petits. Ce genre renferme près de quatre- \ringts espèces : on en trouve peu aux environs de Paris. 2/4 HISTOIRE NATURELLE LeSphex du sable, Spliex sahulosa. H est noir ; les antennes sont de la longueur du corselet; la tête est très- large ; le corselet est gros , renflé ; les premiers anneaux de l'abdomen sont ferrugineux , les deiniiers noirs ; l'abdo- men est attaché au corselet par un pédi- cule très-long et mince , noir à sa base, ferrugineux à l'extrémité ; les pattes sont noires , les postérieures beaucoup plus longues que les autres ; les ailes transparentes , à peine de la longueur de la moitié de l'abdomen , couchées horizontalement sur le corps. L'aiguillon de la femelle est long, délié , courbé en dessous , de couleur brune , de substance écailleuse , com- posée de deux pièces fuies très-pointues à l'extrémité. Selon Degécr , il est sem- blable par la forme et le nombre des pièces , à celui des abeilles , excepté qu'il n'a point les dentelures qu'on voit Tont . m. A'^-^7^' 1 BccraianJ del. ffTardUu, i/eii^. 1 . Spli . du Sable . aSpli. azuré S.Spli. porie-epiue 4.. Se . à quatre tackes • â.Sc. des jai"tb.us. DES SPHEX. 275 à celui de ces insectes : il est placé à l'extrémité de l'abdomen entre deux demi-fourreaux écailleux, jaunâtres et transparens , renflés au milieu , arron- dis et ciliés à l'extrémité , garnis de poils sur les côtés. Ces deux demi-four- yeaux , ainsi que l'aiguillon , sont atta- cljiés aune masse de chair musculeuse et tejftdineuse, qui sert à donner du mouve- ment à l'aiguillon. Lorsque la femelle veut s'en servir , le dernier anneau de l'abdomen s'ouvre sur les côtés , où sont deux espèces de fentes : alors elle le pousse en dehors avec beaucoup d'agi- lité , et fait avec , des piqûres très- douloareuses. Cette femelle fait un trou en terre , va chercher une chenille , la tue et l'apporte dans ce trou ; pond un œuf à côté , et referme le trou avec du sable. Il habite l'Europe : on le trouve aux environs de Paris, sur les bords des chemins , dans la campagne. 276 HISTOIRE NATURELLE Le Sphex à lunule^ SpJiex lunata» n a environ dix lignes de longueur; les antennes sont de la longueur du cor- selet ; le premier article est renflé , jaune, les autres noirs ; la tête est noire, un peu velue-, le corselet est de la même couleur, avec six taches jaunes un peu ëleve'es , une à sa partie antérieure , deux sur le milieu , une à l'origine des ailes , et une près du pétiole ; l'abdo- men est ovale, terminé en poinLe, un peu velu, avec une grande taclie jaune sur le premier anneau : il est attaché au corselet j)ar un long pédicule d'un noir luisant. Les pattes sont jaunes, les cuis- ses des quatre pattes antérieures ont une tache noire , les postérieures sont noi- X'cs ; les ailes sont plus courtes que le corps et d'un brun obscur. On le trouve eu Pensylyanie. DES S P H E X. 277 Sue Spliex azuré, Spliex cyanea. Les antennes sont noires , de la lon- gueur du corselet \ tout le corps est d'un bleu foncé luisant ; la tête et le corse- let sont un peu velus , les yeux bruns, alongés j l'abdomen ovale, attaché au corselet par un long pédicule; les cuisses et les jambes de la couleur du corps ; les tarses noirs -, les ailes de la longueur du corps , brunes , avec une forte teinte d'un violet foncé brillant. On le trouve en Pensylvanie. I^e Spliex de Pensylvanie , Sphex Pejisylvanica, Il a environ quinze lignes de lon- gueur : il est entièrement noir ; les an- tennes sont de la longueur du corselet ; la tête est grande , les yeux sont bruns ; les mandibules sont très-grandes , poin- tues -, le corselet est velu , l'abdomen Insectes. III. 24 '^jS HISTOIRE NATURELLE ovale , pointu à l'exti émitë , attaché au corselet par un pédicule court; les ailes sont d'un \'iolet foncé très-luisant, bru- nes à l'extrémité. On le trouve en Pensylvanie dans les vieux bâtimens. Le Sphex bleu , Sphex cœrulea. Il est de la grandeur du précédent , d'un bleu foncé luisant ; les antennes sont de la longueur du oorselet , les cinq premiers articles sont noirs, les autres jaunes ; le corselet est un peu verdâtre; l'abdomen est ovale, alongé, attaché au corselet par un pédicule court : il est garni de poils à l'extrémité 5 les quatre pattes postérieures sont très- longues; les ailes de couleur rousse très- foncée , noires à la base , blanches à l'extrémité. On trouve cette belle espèce à Suri- nam. DES S P H E X. 5^79 Le Spliex porle- épine , SpJiex spinifex. Il est noir; le corselet est un peu velu, sans tache-, l'abdomen est globuleux, attaché au corselet par un pédicule très- long , de couleur jaune ; les pattes sont jaunes, avec des taches noires ; les ailes sont beaucoup plus courtes que l'abdo- men , de couleur rousse. On le trouve dans les départemens méridionaux de la France. Cette espèce, de même que plusieurs autres , fait un trou dans un terreiii sablonneux pour y déposer ses œufs. Nous trouvons, dans Réaumur, qu'aux environs de Luçon, on a observé une quantité de ces trous placés les uns à côté des autres ; que chacun d'eux se terminoit par une cavité , dont le dia- mètre n'étoit pas pins grand que le chemin par lequel on y arrivoit. Que dans quelques-unes de ces cavités , qui 28o HISTOIRE NATURELLE faisoieiit un angle droit avec le che- min, on a trouvé une coque de soie jaunâtre , faite en quelque sorte , en bouteille, avecune espèce de col court, bouché à son extrémité. La larve par laquelle cette coque avoit été filée, étoit renfermée dans son intérieur. Sa couleur étoit blanchâtre. Les frag- mens d'ailes et de pattes , trouvés dans le trou , ont fait voir qu'elle s'étoit nourrie d'insectes ailés. La coque de cette larve n'étoit point adhérente aux parois du trou. Si cette coque n'ap- partient pas aux Sphex-Spinifex , elle appartient à une autre espèce de ce genre. Ce qui le fait croire , c'est que Réaumar dit avoir trouvé dans les œuvres de Vallisniéri , à la planolio du premier volume de l'édition in- folio, une coque précisément sembla- ble à celle qu'on lui a envoyée de Luçon, d'où sort une mouche à quatre ailes, du genre des guêpes ichneumons, nom que Réaumur donne aux espèces DES S P II E X. 2S1 d^insectesqui composent le genre Spliex. Le même auteur a reçu de Saint- Domingue des nids de guêpes ichneu- mons et maçonnes , construite d'une ierre grise qui , quand elle est sèche , est friable. Chaque nid est composé d'un grand nombre de tuyaux , tous pareils les uns aux autres. La masse formée d© leur assemblage est souvent attachée au plancher d'une chambre. Les mou- ches qui bâtissent ces sortes de nids entrent hardiment dans les maisons. Toutes les cellules ou tuyaux ont leur ouverture en bas , ordinairement sur un même plan. Quelques-uns de ces nids ont deux ou trois rangs de trous , mais d'autres n'en ont qu'un. L'ou- verture de chaque trou est l'entrée d'une cellule : elles sont construites par la mouche les unes après les autres , et il semble que chaque cellule soit faite de cordons de terre appliqués les uns sur les autres , ou plutôt d'un seul cor- don, qui depuis la base de la cellule 2S2 IIISTOinE NATURELLE jusqu'à son entrée, a été roulé en spi- rale. Dans plusieurs de ces loges étoient des coques dont les mouches étoient sor- ties après leur transformation. Les co- ques sont brunes , plus cassantes qu'elles sembleroient devoir être , étant tissues de soie. Dans quelques-unes étoient des mouches qui , n'ayant pas eu la force d'ouvrir leurs coques , avoient péri dedans. Ces guêpes ichneumons atta- chent leur nid indifféremment contre toutes espèces de corps solides. On en trouve quelquefois d'attaché à des ha- bits. Ces guêpes ont le premier anneau de l'abdomen bordé d'une ligne jaune; et quelques petites taches de la même couleur sur le corselet et sur la tête, tout le reste est d'un brun noir. Réaumur a reçu aussi de l'Ile-de- France, des guêpes ichneumons, dont tout le corps étoitnoir, et l'abdomen attaché au corselet par un long pédicule aussi délié qu'un £1. Ces guêpes ont la DES S P II E X. 2^5 hardiesse de venir bâtir leurs nids dans les chambres les plus habite'es; elles les appliquent , comme les hirondelles ap- pliquent les leurs , contre une solive , dans le coin d'une fenêtre , ou même dans l'angle de deux murs. Elles donnent à chaque nid la figure d'une boule et la grosseur d'un poing ; il est fait d'une terre détrempée que la guêpe pétrit avec ses mandibules. Cette boule est un assemblage de douze à quinze cel- lules. A mesure que chaque cellule est constrviite , la guêpe porte dedans une certaine quantité de petites araignées qu'elle renferme avec l'oeuf qu'elle y dépose. Un de ces nids détaché et plu- sieurs cellules brisées , ont fait voir leur intérieur rempli de ces petites arai- gnées, dont la plus grande partie étoit vivante. D'un de ces nids , il est sorti «ne quinzaine de mouches qui étoient renfermées dans une pellicule rousse et très-fine , qui paroît être la coque dans laquelle se sont faites les transfor- 28 i HISTOIRE NATURELLE mations de la larve en nymphe , et d» la nymphe en monche. Nous avons cru devoir parler de ce nid , quoique nous n'ayons pas la cer- titude qu'il appartienne à un insecte du genre sphex y afin d'engager à ob- server les insectes qui construisent des nids semblables , ou analogues à celui- ci , pour tacher de découvrir la manière dont vivent les larves des sphex. Le Sphex Ichneumon , Sphex Iclineinnonea, Il a environ douze lignes de longueur; les antennes sont de la longueur du corselet. La tête est très-grosse , noi- re, couverte antérieurement de poils courts d'un jaune doré très-brillant. Le corselet est noir , il a en-dessus et sur les cotés des lignes , et des taches d'un jaune doré et velouté , formées par des poils courts. L'abdomen est ovale , renflé , conique à l'extrémité j les prc- DES SPHEX. 285 miers anneaux sont d'un rouge jau- nâtre , les derniers noirs ; il est attaeiié au corselet par un pédicule assez long, lies pattes sont rousses et épineuses. Les ailes sont d'un brun foncé , luisant , avec une teinte pourpre. On le trouve à Surinam. Le Spliex brun , Sphex fiisca, n a environ six lignes de longueur ; ses antennes sont grosses , noires , à peine de la longueur du corselet. La tête et le corselet sont noirs. L'abdomen est noir avec les trois premiers an- neaux rougcâtres , il est attaché au corselet par un pédicule court. Les pattes sont noires , les ailfes brunes. La femelle de cette espèce se sert de ses mâchoires et de ses pattes, pour creuser la terre dans l'endroit où elle veut déposer un œuf. Elle emporte avec ses dents tous les grains de sable «t les petites mottes de terre qu'elle 286 HISTOIRE NATURELLE rencontre dans son dieniin. Elle les jette à quelque distance , et rentre de nouveau dans le trou. Elle écarte et jette le sable et la terre en arrière , en gi'attant avec ses pattes postérieures, et parviejit en peu de temps , à creuser xin trou assez profond. Elle lui donne une direction oblique à la surface du terrein. Dès qu'elle Fa fini , elle s'en- vole pour aller chercher une araignée , qu'elle fait entrer dans le trou, ensuite elle comble la galerie qui y conduit, en y jetant du sable et de la terre qu'elle y fait entrer , en les poussant avec les pattes de derrière. Degéer a vu une de ces femelles apporter une araignée deux fois plus grande qu'elle , dont la couleur étoit grise , de l'espèce de celles qu'on voit marcher sur la terre et qu'on trouve souvent sous les pierres. JL'araignée ne paroissoit avoir aucune blessure , et elle étoit absolument sans mouvement et comme engourdie. Il paroît que le sphex sait la piquer de DES S P H E X. 287 manière à l'engourdir pour le moment et qu'elle meurt ensuite. Godeartavn une de ces femelles prendre une arai- gnée au milieu de sa toile , et lui cas- ser les pattes avant de la porter dans son nid. Nous trouvons, dans Dege'er, qu'un Naturaliste a vu le spliex sabulosa , porter, pendant plusieurs jours, des chenilles dans le même trou. Si celte observation est exacte , elle prouveroit que la larve de cette espèce est très- vorace. Le Sphex voyageur, Sphexviatica, 11 ressemble beaucoup au précédent. Ses antennes sont courtes, noires; sa tête est très-grande , noire , velue ; son corselet est long, renflé et velu; l'ab- domen est attaché au corselet par un pédicule court ; il a les deux ou trois p rcmiers anneaux d'un j aune rougeâtre , les autres noira 3 les pattes sont noires; 288 HISTOIRE NATURELLE les ailes ont une forte teinte de brun. La femelle , après avoir creusé un trou en terre , y porte une chenille , dépose vraisemblablement un œuf dans ce trou , et le referme ensuite. Il habite l'Europe : on le trouve aux environs de Paris. DES SCOLIES. 289 XL* GENRE. S C O L I E. Caractères génériques. Antennes épaisses , filiformes , un peu renflées au milieu ; pre- mier article alongé , les autres à peine distincts , courts, égaux et cylindriques. — Quatre antennules courtes , un peu plus épaisses à leur base ; les antérieures composées de six articles, les postérieu- res de quatre. — Ventre attaché au cor- selet par un pédicule court. — Aiguillon simple, très-fort , très-pointu , caché dans l'abdomen. — Trois petits yeux lisses. liEs scoîies ont le corps alongé, velu; ia tête arrondie , le front plat ; les yeux ovales, un peu ëcliancre's j les mâchoires très-grandes , arque'es , unidente'es , ci- lie'es extérieurement ; le corselet grand, coupé postérieurement; l'abdomenlong, un peu recourbé en dessous , attaché au corselet par un pédicule très -court; i'anus des mâles est souvent termine Infectes. III, 25 290 HISTOIRE NATURELLE par des pointes ; l'aiguillon des femelles est très- fort j il est caché dans l'ab- domen. Les larves et les habitudes de ces insectes étant entièrement inconnues , nous allons passer à la description de quelques-uns. Ce genre est composé d'une quarantaine d'espèces : on n'en trouve que deux aux e nvirons de Paris ; qvielques autres habitent l'Espagne et l'Italie, et le plus grand nombre se trouve en Afrique et en Amérique. La Scolie à quatre taches, Scolia quadrimaculala. Elle a les antennes noires , les yeux gris-, la tête et le corselet noirs, velus; l'abdomen alongé , un peu ovale , velu, de couleur noire , avec deux grandes taches d'un jaune rougeâtre sur les deux premiers anneaux ; il est attaché au corselet par un pédicule très-court j DES SCOLIES. 2g t les pattes noires , velues j les ailes d'iin violet foncé. Elle habite la Caroline et la Ca- la bre. La Scolie en ralissoire , Scolia r adula. Elle a les antennes filiformes , plus longues que le corselet , noires ; le corps légèrement couvert de poils jaunâtres ; la tête noire ; le corselet de la même couleur que la tête , avec deux lignes transversales jaunes sur le milieu, et une tache de même couleur à l'origine des ailes ; l'abdomen alongé , d'un noir bleuâtre , bronzé , luisant , avec quatre bandes transversales jaunes en dessus , et trois en-dessous ; les pattes sont noi- res , couvertes d'un duvet jaunâtre -, les jambes antérieures ont une ligne lon- gitudinale jaune, les ailes ont une teinte jaune j la bordure extérieure des su- 1^9^ HISTOIRE NATURELLE périeures est brune jusf^ues vers le milieu. Elle habite la Caroline. La Scolie des Jardins , Scolia Horloruni. Elle a tout le corps un peu velu ; les antennes un peu plus longues que la tête, noires; la tête et le corselet noirs j l'abdomen noir , avec deux taches jau- nes sur chacun des deux premiers an- neaux ; les pattes noires , velues -, les ailes épaisses , jaunes jusques vers le milieu , et l'extrémité d'un violet bril- lant. On la trouve en Espagne et aux en- virons de Paris , sur les fleurs dans les prairies. La Scolie à double ceinture, Scolia bicincta. Les antennes sont noires, tout le corps est velu, la tête et le corselet sont DES SCOLIES. 395 iioirs ; l'abdomen de la même couleur que la tête et le corselet , avec le dessus du deuxième et du troisième anneau jaune, bordé de noir-, les pattes noires , velues j les ailes violettes , brillantes ; les supérieures ont une tache brune vers le milieu du bord extérieur. On la trouve dans l'Amérique et à Fontainebleau. La Scolie à quatre ipustules y Se 0 lia quadripustulata» Elle est un peu moins grande que la précédente; les antennes sont de la longueur du corselet, noires-, la tête est noire , un peu velue ; le corselet est noir, pointillé, un peu velu-, il a sur sa partie antérieure des lignes d'un jaune rougeâtre, et sur le milieu une taclie de même couleur. L'abdomen est noir , un peu velu , avec deux taches d'un jaune rougeâtre sur les deux pre- miers anneaux ) le pétiole est noir à 294 HISTOIRE NATURELLE sa base , avec une grande tache jaune àrextrémitë j les pattes sont d'un jaune rougeâtre j les ailes jaunâtres avec un reflet violet. Elle habite la Caroline et le Ma- labar. X L r GENRE. T H Y N N E. Caractères génériques. Antennes courtes , cylindriques ; premier article court , gros, presque rond , les autres égaux , peu dis- tincts. — Quatre antennules égales , fili- formes ; les antérieures composées de qua- tre articles , les postérieures de trois. — Ventre attaché au corselet par un pédi- cule court. — Aiguillon petit , simple , caché dans l'abdomen. liES insectes de ce genre ont etë in- connus à tous les Naturalistes. M. Fa- bricius est le premier qui les a décrits j mais il ne sait rien sur leurs larves, leurs métamorphoses; ni sur les habi- DES THYNNES. 2()5 tildes de l'insecte parfait. Les quatre espèces qui composent ce genre se trou- vent à la Nouvelle-Hollande ; il paroît qu'ils y sont rares , ou que les Natura- listes voyageurs ont négligé d'en ap- porter en Europe , puisqu'on n'en trouve aucun dans les nombreuses collections de Paris. Comme le but principal de cet ou- vrage est de rassembler toutes les ob- servations faites par les plus célèbres Naturalistes , sur les insectes dont la manière de vivre offre de l'intérêt , plutôt que de donner des descriptions d'espèce , comme nous ne savons rien sur les habitudes des tliynnes, et que nous ne pouvons pas en donner de ligure , nous nous bornerons à en dé- ctire une seule espèce d'après M. Fa- bricius. 29^ HISTOIRE NATURELLE Le Thynne denté, Tliynnus dentatus. Il ressemble beaucoup à la guêpe vul- gaire. Il aies antennes droites, brunes, noirâtres à la base j la lèvre jaune , den- tée -, les mandibules jaunes , noires h. l'extrémité \ le corselet noir , strié an- térieurement et sur le milieu; l'écusson jaune; l'abdomen noir, lisse, avec la base du premier anneau jaune , et deux points de même couleur sur le deu- xième, troisième et quatrième anneau. L'anus est terminé par sept petites dents en forme de scie. Il habite la Nouvelle-Hollande. DES BEMBEX. Sgf, X L I r GENRE. B E M B E X. Caractères génériques. AntennesûViîoTmeSf courtes ; premier article lung et cylindri- que , les autres courts et égaux. — Qua- tre antennules courtes , inégales , filifor- mes ; les antérieures composées de six articles , dont le pénultième très-court ; les postérieures composées de quatre , dont les deux derniers plus courts que les autres. — Ventre attaché au corselet par un pédicule court. — Aiguillon simple et pointu , caché dans l'abdomen. — Tar- ses antérieurs ciliés. — Trois petits yeux lisses. Les bembex ont beaucoup de rap- ports avec les abeilles par la trompe qui est divisée en cinq pièces , avec les guê- pes par la forme de l'abdomen. Plusieurs Naturalistes les ont placés avec les in- sectes de ces deux genres , dont ils dififè- rent également et semblent faire le passage. ^9^ HISTOIRE NATURELLE Les bembex ont les antennes compo- sées de douze articles , coudées à la jonction du premier article avec le deu- xième ; elles sont placées à la partie antérieure de la tête, rapprochées à leur base. La tête est de forme triangulaire ^ elle a peu d'épaisseur, et est un peu plus large que le corselet; les yeux sont grands , ovales , saillans de chaque côté de la tête. Le corselet est arrondi, l'abdomen est conique , tronqué obliquement à sa partie antérieure, attaché au corselet par un pédicule très-court , glabre dans le plus grand nombre des espèces. Les pattes sont de longueur moyen- ne ; les tarses des pattes antérieiu'es sont ciliés le long du bord extérieur. Les ailes sont transjiarentes , étroites, moins longues que l'abdomen. Ces insectes ne vivent point en so- ciété ; la femelle dépose ses œufs sépa- rément , dans des loges qui n'ont au- J*a. Pnljoscciit . 3.Aiid. cItl Coquelicot. 4. Aitcl, A'erte . 5 .AnA. A'erdatre . DES BEMBEX. 299 cune communication. Elle fait ces loges en terre ou contre le tronc d'un arbre j elle les ferme après y avoir mis la pro- vision nécessaire à la larve pour la nourrir jusqu'au moment où. elle doit cesser de manger. Ces larves sont sem- blables à celles des abeilles et des guê- pes. On ne trouve point, parmi les bembpx , comme parmi les abeilles et les guêpes , trois sortes d'individus , il n'y a que des mâles et des femelles. On connoît dix-huit ou vingt espèces de bembex. Peu habitent l'Europe ; deux seulement les environs de Paris. Nous ferons la description de quelques-unes. Le Bembex de la Caroline, Bem- bex Carolina, Il a les antennes noires , avec le pre- mier article jaune en dessous ; la tête noire , la lèvre supérieure jaune ; le corselet noir, un peu velu, avec une petite tache jaune de chaque côté au- 5oO HISTOIRE NATURELLE devant de l'origine des ailes ; l'abdomeu est glabre , d'un noir bronzé , avec deux grandes taches jaunes sur chacun des deux premiers anneaux , et deux plus petites de même couleur sur le troi- sième -, le dessous de l'abdomen est noir, le second et le troisième anneau ont une tache jaune de chaque côté ; l'anus est terminé par des dents très -fortes; les pattes sont jaunes , les cuisses noires dans pres(jue toute leur longueur ; les ailes ont une teinte jaunâtre avec un reflet brun. On le trouve à la Caroline. Le Bembex pubesceut, Beinbex rostrata, H a les antennes noires, avec le des- sous du premier anneau jaune. La par- tie antérieure de la tête est jaune , avec quelques taches noires sur le front; près des antennes, le reste est noir ; le «orselet est ïioiv , couvert d'un duvet DES E E M B E X. OOI verdâtre ; l'abdomen noir , avec des bandes onde'es d'un jaune verdâtre ; celle du premier anneau est interrom- pue dans son milieu ; le dessous du |^ corps est un peu velu j les pattes sont f^ jaunes , les cuisses ont quelques taches noires ; les cils des tarses sont assez longs , de couleur fauve. Il habite le nord de l'Europe j il est commun aux environs de Paris. , . à p. Le Bembex bariolé , Bemhex varie gâta. Il a les antennes noires , avec un peu de jaune au-dessous du premier anneau \ la partie antérieure de la tête est jaune, le corselet est noir, avec une ligne transversale, jaune à sa partie anté- rieure , trois à sa partie postérieure , deux courtes sur le milieu, et deux obliques au-dessus et au-dessous de l'origine des ailes. L'abdomen est noir, luisant , avec quatre taches jaunes près Insectes. III. aô 3oa HISTOIRE NATURELLE ^e rextrémitë de chaque anneau, et une tache de même couleur sur les cô- te's du second , troisième , quatrième et cinquième anneau -, les pattes sont jau- nes avec des taches noires; les tarses «ont jaunes et noires ; les ailes ont uno teinte jaune. On le trouve à Cayenne. DES ANDRÈNES. 3o3 X L I I r G E N R E. ANDRENES. Caractères génériques. Antennes courtes, filiformes. — Le premier article , long , mince à sa base; le second très-petih, les autreségaux, cylindriques. — Trompe rlivi- sée en trois pièces ; suçoirs enfermés dans une gaîne. — Quatre antennules filifor-- mes, illégales; les antérieures compo- sées de six articles , les postérieures de deux. — Aiguillon simple caché dans l'ab- domen. — Trois petits yeux lisses. liEs andrènes ont été placées , par plusieurs Naturalistes , avec les abeilles et les nomades, dont elles différent par la trompe , la forme du corps et les tarses des pattes postérieures. Les abeil- les et les nomades ont la trompe com- posée de cinq pièces j celle des andrènes n'est que de trois pièces. Les andrènes ont le corps moins velu que celui des 3o4 HISTOIRE NATURELLE abeilles , et plus velu que celui des no- mades; elles l'ont aussi plus alongé. Les tarses de leurs pattes postérieures sont moins longs et moins chargés de poils que ceux des abeilles , et elles ne s'en servent point pour transporter la poussière des étamines. Les andrènes ont le dessous de l'abdomen velu, et c'est aux poils qui le recouvrent que s'attache la poussière que plusieurs es- pèces emploient à la construction de leurs nids , et pour nourrir leurs petits. Les antennes des andrènes sont un peu plus grosses à l'extrémité qu'à la "base ; celles des mâles sont composées de treize articles y celles des femelles de douze. Leur tête est ovale , de la largeur du corselet ; les yeux sont alongés. La trompe est composée de trois piè- ces : celle du milieu est une espèce de tuyau applati qui porte à son extrémité deux antennuîes , et une langue courte très-velue j les deux autres sont minces . DES ANDRÈNES. 3o5 concaves intérieurement , convexes extérieurement , terminées par une petite partie garnie de poils. Ces deux pièces latéiales forment un fourreau cylindrique , qui sert à garantir la trompe : elles sont coudées près de leur origine , et ont deux antennules insé- rées à leur courbure. La trompe des andrènes est dirigée en avant. Lorsqu'el- les n'en font point usage , elle est appli- quée contre la tête, sa partie anh^rieure placée près des mandibules , est recou- verte par la lèvre : pour la faire agir , l'andrène soulève sa lèvre , qui est mobile , et le fourreau paroît alors à découvert dans toute son étendue : elle alonge sa langue, et la retire ensuite dans le fourreau qui lui sert de gaine. Le corselet est obtus ; l'abdomen est alongé , attaché au corselet par un pé- dicule très-court. Les femelles ont un aiguillon semblable à celui des abeil- les, avec lequel elles piquent très-fort. Les andrènes ne vivent point en sor 3oG HISTOIRE NATURELLE ciétc : on ne trouve point parmi elles d'onvrières comme on en voit dans les republiques des abeilles et des guêpes. Les femelles sont seules cliargées de faire les nids et de pourvoir à la nour- riture des larves. La terre la plus bat- tue est celle que quelques espèces pré- fèrent pour y construire leurs nids ; d'autres creusent plus volontiers à-peu- près liorizontalenient les terres ou les sables qui s'élèvent au-dessus des che- mins, ou sur les bords des fossés. On trouve souvent une grande quantité de ces trous : ils n'offrent rien de particu- lier : les uns sont creusés en ligne droite, les autres font un coude vers le fond. C'est au fond de ces trous que la femelle dépose une masse de pâtée mielleuse destinée à nourrir la larve qui doit y cro>ître. Dès qu'elle y en a porté une provision suffisante , elle y pond un œuf, et bouche le trou avec la terre qu'elle en avoit ôtée. Si elle tardoit à en fermer l'ouverture , elle auroit inutile- DES ANDRèNES. 30/ ment pourvu d'aliment la larve qui doit sortir de l'œuf : le miel seroit bientôt pilie' par les fourmis qui rôdent conti- nuellement aux environs du nid : elles sont très-friandes de cette pâtée, et ne tarderoient pas à découvrir qu'au fond du nid il y en a dont elles peuvent aisé- ment s'emparer. Les larves des andrènes ressemblent à celles des abeilles; elles sont blanchâ-' très; leur corps est composé de treize anneaux; leur tête est dure et écailleu- se : elles sont placées au fond du nid coucliées surune pâtée qui est une sorte de miel noirâtre , légèrement sucré et d'une odeur un peu narcotique. Toutes les andrènes ne font pas des nids aussi simples que ceux dont nous venons de parler. Il y en a qui tapissent l'intérieur des leurs avec les feuilles de quelques arbustes. Réaumur s'est plu à décrire celui de l'andrène du pavot, qui est tapissé avec les pétales des fleurs de coquelicot. On ne Gonnoissoit point 3o8 HISTOIRE NATURELLE Tespèce qui construit ce nid , lorsque 1» citoyen Latreille , auteur de plusieurs ouvrages sur les insectes , dont un rem- pli d'observations intéressantes sur les fourmis , a trouvé plusieurs de ces nids et l'andrène à laquelle ils appartiennent. Nous ferons la description de ce nid en parlant de l'espèce. NoiLS trouvons , dans l'Encyclopédie , article Andrène , page i3i , qu'il y a deux générations de ces insectes par an , la première au printemps , et l'autre à la fin de l'été ; que les larves de la seconde génération passent l'hiver sous la forme de larve ou de nymphe. Qu'elles consom- ment peu à peu leurs j^rovisions y que leur accroissement se fait lentement, et qu'elles ne se montrent sous la forme d'insecte parfait qu'au commencement du printemps suivant. Qu'aussi - tôt que les andrènes sont nées , elles s'ac- couplent , tiavaillent à la construction de leur nid et font leur ponte. Qu'en juin ou en juillet il doit en sortir les DES ANDRENES. Sog insectes parfaits qui donnent la seconde génération , qui passe l'hiver , et qu'il est probable que les insectes parfaits nî eurent quelque temps après leur ac- couplement ou la ponte. Ce genre est composé d'une trentaine d'espèces , dont la plus grande partie habite l'Europe. On les trouve presque toutes aux environs de Paris. Nous al- lons passer à la description de quel- ques-unes. L'Andrène mineuse , Andrena succiticta* Elle a la tête et le corselet noirâtres, couverts de poils d'un roux cendré, l'abdomen brun, avec l'extrémité de chaque anneau bordée de poils blancs. Les pattes sont couvertes de poils fauves. On la trouve en Europe sur les fleurs. Cette andrène construit dans la terre des nids de forme cylindrique , com- posés de plusieurs cellules placées l'une 3)0 HISTOIRE NATURELLE au boutde l'autre. Chacune a la figure d'un dé à coudre. Son extrémité circu- laire est enchâssée dans l'ouverture de l'autre 5 on ne trouve quelquefois que deux cellules ensemble , souvent trois ou quatre : chaque cellule a environ deux lignes de diamètre. Le cylindre qu'elles forment a des bandes trans- versales rouges et blanches , la couleur blanche est placée à la jonction des deux cellules. La couleur rouge paroît due à la matière qu'elles renferment et qu'on apperçoit au travers des parois qui sont extrêmement minces. Ces cy- lindres sont couchés horizontalement et semblent composés d'une matière analogue à celle de la soie. Selon Réaumur, il y a deux générations de cette espèce dans l'année. DES ANDRÈNE5. 3ll L'Andrène du Coquelicot ^ An- drena Papaveris. Latreille. Elle est un peu velue , sa tête est noire , avec des poils courts , d'un gris cendré à sa partie antérieure , et rous- sâtre sur le front. Le corselet est noir, légèrement couvert de poils roux sur le milieu , et grisâtres sur les côtés. L'abdomen est noir avec l'extrémité des anneaux bordée de poils d'un gris jaunâtre, le dessous de l'abdomen est légèrement couvert de poils courts de la même couleur. Les pattes sont noires avec quelques poils d'un gris jaunâtre. L'anus du mâle est bidenté. On la trouve aux environs de Paris. Cette andrène fait en terre un trou^ en ligne droite , d'environ trois pouces de profondeur. Elle va ensuite couper des morceaux dans les pétales des fleurs du coquelicot, avec lesquels elle en ta- pisse l'intérieur. Les premiers morceaux 012 HISTOIRE NATURELLE sont placés au fond du trou, au-dessus de ceux-ci elle en étend d'autres , et successivement jusqu'à ce qu'elle soit parvenue à couvrir entièrement ses pa- rois, et une petite partie du bord exté- rieur de l'ouverture. Lorsqu'elle a don- né à son nid une certaine épaisseur, elle y porte une quantité de pâtée néces- saire pour nourrir la larve qu'il doit renfermer et y dépose un oeuf. Elle détend ensuite toute la tapisserie qui se ti'ouve depuis le bord du trou jusqu'à la pâtée , la pousse à mesure vers le fond où elle la plie , de sorte que ce nid qui avoit trois pouces de hauteur , se trouve réduit, après cette opération , à onze à douze lignes , et elle bouche le vide qu'il laisse avec de la terre. La larve subit toutes ses métamorphoses dans son nid , et Tinsecte parfait en sort en s'ouvrant un passage dans la terre qui le recouvre pour arriver 4 la surface. DES A N D R È N E S. 3l3 L'Andrène verte , Andrena viiescens. Elle a les antennes noires , la tête et le corselet d'un vert brillant, l'ab- domen d'un vert brillant en dessus, brun en dessous, légèrement couvert de poils sur les côtés ) on voit aussi quelques poils courts , jaunâtres sur la tête et le corselet. Les pattes sont brunes , cou- vertes de poils roux. Les ailes sont obscures. On la trouve en Amérique. L'Andrène pubère , Andrena puhescens. Elle ressemble beaucoup à l'abeille commune. Son corps est moins velu. L'abdomen est lisse et luisant à sa par- tie supérieure -, le premier anneau est arrondi près du corselet , les pattes sont très-velues. Elle est plus alongée que Fabeille , à laquelle elle ressemble. Insectes. III. 27 Ol4 HISTOIRE NATURELLE On la trouve en Europe et aux en- virons de Paris , sur les fleurs. Elle varie beaucoup par la grandeur. L'Andrène verdâtre , Andrena œnea. Elle a environ trois lignes ; elle est peu velue , d'un vert cuivreux , le bord des anneaux de l'abdomen est couvert de poils blancs. Les pattes sont brunes , couvertes de poils jaunâtres. Elle habite l'Europe , on la trouve aux environs de Paris, sur les fleurs. Elle fait son nid dans la terre. L'Andrène cuivreuse, Andrena cuprea. Elle a quatre lignes de longueur ; ses antennes sont noires , un peu plus lon- gues que la moitié du corps. La tête et le corselet sont couverts de poils gris- jaunâtres. L'abdomen est alongé; lisse^ DES ANDRÈNKS. 3i5 d'un brun noirâtre. Le bord de chaque anneau est couvert de poils fauves qui forment des bandes. Les pattes sont jaunes , les cuisses noires à la base. Elle fait son nid dans la terre, on la trouve aux environs de Paris j, sur les fleurs. L'Andrène annulaire, Andrena albipes. Elle a environ quatre lignes de lon- gueur. La tête et le corselet sont noirs, légèrement couverts de poils roux. L'ab- domen est lisse , noirâtre , un peu Iiron- zé ; le bord des anneaux est d'un brun rougeâtre et forme des bandes transver- sales. Les pattes sont noires avec quel- ques poils de la même couleur. Elle habite l'Europe; on la trouve aux environs de Paris, sur les fleurs. 3i6 HISTOIRE NATURELLE L'Andrène porte - anneau , Andrena annulata. Elle a environ trois lignes de lon- gueur 5 elle est noire , avec la lèvre su- périeure jaune. Le corselet a une petite ligne transversale jaune à sa base , et un point de même couleur àl'origine des ailes. Le bas des jambes et des tarses postérieures ont quelquefois un peu de jaune. . Elle est très-commune aux environs de Paris , oii on la trouve en été sur les fleurs. DES ABEILLES. ^17 X L I V^ GENRE. ABEILLE. Caractères génériques. Antennes filiformes, courtes, brisées; premier article très- long , les autres courts , égaux. — Trompe divisée en cinq pièces ; suçoirs libres , enfermés à leur base dans une gaine. — Quatre antennules sétacées, très-courtes ; les antérieures composées de six articles , les postérieures de cinq. — Aiguillon sim- ple, très-pointu, caché dans l'abdomen. — Trois petits yeux lisses. Les abeilles ont la tête triangulaire , un peu applatie , attachée au corselet par un cou très-court , charnu et flexi- ble; les yeux sont ovales, ceux du mâle occupent tout le front , ceux des femel- les et des ouvrières sont moins grands. La bouche est composée d'une lèvre supérieure , de deux mandibules , et d'une trompe coudée , plus ou moins longue , repliée sur elle-même lorsque 3l8 HISTOTr.K NATURELLE l'insecte n'en fait point usage , et cachée en dessous des mandibules : elle est composée de cinq pièces , dont deux extérieures , grandes , larges , concaves intérieurement, coudées vers leur mi- lieu, terminées en pointe ; elles servent de fourreau aux trois antres qui pa- roissent réunies à leur base jusqu'à la courbure de la trompe , et sont séparées dans le reste de leur longueur. Les deux pièces latérales sont larges , applaties , et se terminent en pointe : elles recou- vrent celle du milieu qui est cylindri- que, un peu applatie , couverte de poils dans toute sa longueur, terminée par un petit mamelon presque cylindrique, cilié sur ses bords, et qui paroi t percé dans son milieu. Outre cette ouveituro presque insensible , qu'on a prétendu être à l'extrémité de la trompe , les abeilles ont une bouche très -grande, difficile à appercevoir , parce qu'elle est fermée par des chairs qui la bordent ; elle est placée à la partie ajitéxicure de DES ABEILLES. 3l^ la. trompe , au-dessous des mandibules , et cachée par une espèce de languette charnue , large à sa base , qui quelque- fois la couvre entièrement. Mais si on tire la trompe en avant , autant qu'elle peut l'être, et qu'on la courbe en bas, on apperçoit cette bouche. Lorsqu'une abeille entre dans une fleur épanouie pour recueillir la liqueur mielleuse qu'elle contient , elle alonge sa trompe , en applique l'extrémité contre les nectaires des fleurs : alors le bout de la trompe est dans une action continuelle ; elle se raccourcit, s'alonge ensuite, se courbe, se contourne; tous ses mouvemens sont très - prompts et très- variés, mais il n'est pas facile de voir la manière dont la trompe opère pour faire passer dans l'intérieur la liqueur qu'elle enlève à la fleur. Swammerdam a cru, et Réaumur même, pendant un certain temps , que la trompe est une espèce de corps de pompe , que son ex- trémité est percée d'un trou par lequel là 020 HISTOIRE NATURELLE liqueur peut être aspirée , et qu'il y a dans le corps de la trompe des pistons ou des parties équivalentes propres à faii'e l'aspiration. Rcanmur a eu recours à un expédient très-simple pour voir cette partie en action; il a quelquefois enduit d'une légère couche de miel quelques endroits d'un tube de verre de quatre à cinq lignes de diamètre , dans lequel il a introduit et renfermé des abeilles: aussi-tôt il a vu ces abeilles sucer le miel , non pas avec l'extrémité de la trompe, mais en l'alongeant et en la frottant contre les parois du tube, à diverses reprises, avec beaucoup de vi- tesse, en faisant une infinité d'inflexions différentes. Si la couche de liqueur qui a été offerte à l'abeille est épaisse, si elle ren- contre une goutte de miel , alors elle fait entrer la partie antérieure de sa trompe dans la liqueur ; mais il semble que ce soit pour l'y faire agir, comme un chien qui lape quelque liquide fait DES ABEILLES. 521 agir sa langue. Dans la goutte de miel même, l'abeille plie le bout de sa trom- pe , l'alonge et la raccourcit alternati- vement , l'en retire d'instant en instant, et lui fait faire des sinuosités , et sur- tout rend de temps en temps sa surface supérieure concave , comme pour don- ner une pente vers la tête à la liqueur dont elle est chargée. Enfin, selon Réau- mur , la trompe paroît agir comme une langue , et non comme une pompe. Le bout de la trompe, l'endroit où on a prétendu, qu'est l'ouverture , est sou- vent au-dessus de la surface de la liqueur dans laquelle l'abeille puise. Le corselet est gros , arrondi , velu ; l'abdomen est oblong , composé de six anneaux , il est attaché au corselet par une espèce de pédicule très-court : il est terminé dans les femelles et les ouvriè- res par un aiguillon très-pointu, ré- tractile \ l'insecte le fait mouvoir à vo- lonté au moyen des muscles qui y sont attachés. Cette arme est accompagnée à 322 HISTOIRE NATURELLE sa base de deux corps blancs, oblongs , arrondis par le bout , creusés intérieu- rement en gouttière; ils forment une espèce de boîte dans laquelle l'aiguillon est renfermé. En pressant le ventre de l'abeille , on le fait sortir d'entre ces deux corps qui s'écartent l'un de l'autre, et laissent voir l'aiguillon. On apperçoit à son extrémité une petite goutte d'une liqueur extrêmement transparente, à laquelle une autre succède aussi-tôt, si on enlève la première. Cette liqueur limpide est un poison acre que l'abeille introduit dans la plaie qu'elle fait. La loupe fait voir que cet aiguillon n'est pas simple -, il est solide , épais à sa base, très-pointu à son extrémité. Malgré la finesse de sa pointe , il y a des circons- tances où elle paroît mousse , et on en voit quelquefois une autre s'élever au- dessus de celle-ci ; ce qui fait alors juger que ce corps si délié qu'on avoit pris pour l'aiguillon, n'en est que la gaine. Si on examine attentivement ce qu'on a DES A B F. I L L E S. 5 j3 pris pour raigtiilion, on remarque qu'il est arrondi , tini vers le dos et sur les côtés ; mais qu'en - dessous il a une es- pèce de fente, une cannelure qui va en ligne droite de sa base à sa pointe ; en- fin , que ce tuyau est fendu dans toute sa longueur. Pendant qu'on touche ce tuyau , il arrive souvent qu'on voit suinter de la liqueur en différens en- droits de la rainure , et se former des gouttes à sa base. En introduisant une pointe fine dans cette rainure , on par- vient à en faire sortir l'aigaillon, qui est composé de deux filets écailleux , qui ont près de leurs extrémités, sur cha- cun de leurs côtés, des dentelures fines, dont la partie la plus large est tournée vers la base. Ce sont ces dentelures, au nombre de quinze ou seize sur chaque aiguillon, qui l'empêchent de sortir des chairs dans lesquelles l'abeille l'a intro- duit , et où il lui arrive souvent de le laisser avec toutes ses dépendances, lors- c^u'elle yeut le retirer avec trop de pré- 324 HISTOIRE NATURELLE cipitation ; mais dans ce cas , la blessure qu'elle a faite lui coûte la vie , car elle meurt peu après avoir perdu son ai- guillon. Cette arme , quoique séparée du corps de l'abeille , ne laisse pas de péné- trer plus avant dans les chairs , parce que les muscles destinés à la faire mou- voir agissent encore pendant un certain temps. Nous avons vu que les abeilles ne se contententpas de piquer avec leur aiguil- lon , qu'elles insinuent en même temps une liqueur dans la plaie. Cette liqueur est renfermée dans une vessie , placée à la base del'étui de l'aiguillon, et elle est portée dans l'étui par un vaisseau qui ter- mine la vessie de ce côté. Swammerdam a cru que l'autre extrémité de la vessie est terminée par deux vaisseaux aveu- gles. Mais Réaumur pense que ces deux vaisseaux s'insèrent en quelqu'en droit du canal des alimens , ou dans quelque partie oih. se fait la sécrétion d'une li- queur qui est apportée au grand réser- DES ABEILLES. 3'25 voir , et que ce réservoir est peut-êti-e pour les abeilles ce qu'est la vésicule du fiel pour les grands animaux. Les abeilles ont les pattes de gran- deur inégale , les antérieures sont les plus courtes , les postérieures les plus longues, les jambes de ces dernières pattes sont larges , applaties ; elles ont une cavité dans laquelle l'abeille place la matière de la cire qu'elle transporte à son nid. Ces pattes sont plus ou moins chargées de poils selon les espèces. Les premiers articles des tarses des mêmes pattes , sont grands , applatis , striés transversalement dans les ouvrières , et ciliés sur leurs bords , ainsi que les jambes. Les ailes supérieures sont plus lon- gues que les inférieures ; les quatre ailes de la femelle sont beaucoup plus courtes que l'abdomen. En volant , les abeilles font entendre un bruit qu'on nomme bourdonnement -, il est occasionné par Insectes. III. a8 32G HISTOIRE NATURELLE une forte vibration des ailes supé- rieures. Les abeilles sont plus ou moins ve- lues selon les espèces. Les poils dont ces insectes sont couverts, leur servent à ramasser la matière à cire qu'ils trou- vent dans les fleurs , sur les étamines. Lorsqu'une abeille veut faire sa ré- colte, si elle trouve une fleur épanouie elle entre dedans , frotte son corps le long des étamines ; et lorsque ses poils sont chargés de la poussière qu'ils en ont détachée , elle part avec son butin, et dirige son vol vers le nid. Toutes les abeilles n'arrivent point à leur nid chargées de cette poussière , elles ont soin , avant d'y retourner , de l'enlever de dessus leurs poils avec leurs pattes postérieures , dont elles se servent com- me de brosses, et d'en former deux petites pelottes qu'elles placent à cha- cune de leurs jambes postérieures. On trouve , parmi quelques espèces^ d'abeilles, des individus de trois sortes. DES ABEILLES. ^27 qui sont des mâles, des femelles et des ouvrières. Celles-ci ne sont point des- tinées à reproduire leur espèce ; cepen- dant , en parlant des abeilles domesti- ques , nous verrons qu'il y a de cer- tains cas où des ouvrières sont fécondes : elles sont chargées de tout le travail; ce sont elles qui vont à la récolte de la cire et du miel , qui construisent les nids , et qui nourrissent les petits. Il y a des abeilles qui ne vivent point en société \ parmi celles-ci on ne trouve point d'ouvrières : les femelles seules font les nids, et pourvoient à la nour- riture de leurs larves. Les unes cons- truisent des alvéoles de différentes for- mes , déposent un œuf dans chacune , placent auprès une sorte de miel que Réaumur nomme pâtée , recouvrent soigneusement ces nids, et ne s'occu- pent plus de leurs petits. Les autres construisent leurs nids dans la terre ou dans les trous de quelques murs. Mais avant de parler de celles-ci , nous allons 328 HISTOIRE NATURELLE nous occuper de celles qu'il nous im- porte le plus de connoître , ce sont les abeilles domestiques. Ce n'est pas seu- lement par leur industrie qu'elles doi- vent nous intéresser , mais encore parce qu'elles travaillent utilement pour nous. Les abeilles qu'on peut appeler do- mestiques, vivent en grande société, qu'on a nommée république -, on ignore quels sont les lieux qu'elles habitent naturellement. On en trovive de sau- vages dans diflPéren tes parties de l'Asie , en Italie , et dans les départemens mé- ridionaux de la France. Mais ce sont celles qui vivent sous nos yeux que nous allons examiner. Réaumur et M. Huber nous fourniront les faits in- téressans qu'elles nous offrent. Ce der- nier auteur a enrichi l'histoire des abeilles d'un grand nombre d'observa- tions , d'autant plus importantes que , sans lui , on ignoreroit encore comment l'abeille mère est fécondée. Jusqu'à lui DES ABEILLES. ^29 on n'a parlé de la fécondation des reines que par conjectures. Réaumur est le seul qui ait cru qu'il devoit y avoir un accouplement ; mais malgré toute sa sagacité il n'a pu s'en convaincre. Une ruche est ordinairement habi- tée par une seule femelle , par des mâles au nombre de deux cents à huit cents, et par quinze à seize mille ou- vrières , souvent davantage. Les fe- melles qui ont été décorées par plu- sieurs Naturalistes des noms de rois et de reines , ont l'abdomen beaucoup plus alongé que celui des mâles; mais ceux- ci l'ont plus gros. L'aiguillon des fe- melles est plus long que celui des ou- vrières , et un peu recourbé sous le ventre. Elles vivent renfermées dans l'intérieur de la ruche , et n'en sortent que dans deux circonstances : elles y sont occupées à pondre. Les ouvrières sont plus petites que les mâles et les femelles; ce sont elles, comme nous l'avons dit , qui sont chargées du tra- 53o HISTOIRE N\TURELLE vail ; elles construisent les gâteauxdont les ruches sont remplies. Ces gâteaux sont composés de cellules de figure hexa- gone, appliquées les unes contre les autres ; chaque côté des gâteavix con- tient à -peu-près un nombre égal de cellules ou alvéoles , dont les unes ser- vent à conserver le miel , les autres à contenir les œufs que la femelle y dé- pose , et dans lesquelles les larves doi- vent prendre leur accroissement et su- bir leurs métamorphoses. On trouve dans les ruches des cellules de grandeur difiFérente; celles qui doivent renfer- mer les mâles sont plus spacieuses que celles qui ne doivent contenir que des larves d'ouvrières. Les abeilles placent ordinairement leurs gâteaux parallèle- ment les uns aux autres , et laissent entr'eux un chemin d'une largeur suf- fisante pour que deux abeilles puissent y marcher à-la-fois. Chaque gâteau ne tient souvent au haut de la ruche que par une espèce de pied qui a peu d'éten- DES ABEILLES. 35l due. Lorsqu'elles construisent de î^rands gâteaux, les abeilles y ménagent des ouvertures, afin d'aller d'un gâteau à l'autre , sans être obligées de faire toute la longueur du chemin. La matière que ces ouvrières emploient dans la fabri- cation des gâteaux, est la poussière que nous leur avons vu ramasser sur les étamines des fleurs ; elles parviennent à transformer cette poussière , qui est de la cire brute, en véritable cire. Quel- ques auteurs ont pensé qu'elles y mê- loient du miel : Swammerdam a cru qu'elles l'humectoient avec la liqueur vénéneuse qu'elles ont en provision dans la vessie dont nous avons parlé ; mais il paroît que c'est dans leur esto- mac que cette poussière se convertit en cire. Chaque abeille mange celle qu'elle a ramassée en petite pelotte sur cha- cune de ses jambes : ce n'est point par la trompe que passe cette matière, c'est par la bouche qui est placée au- dessus, et immédiatement au-dessous 352 HISTOIRE NATURELLE des mandibules. Souvent une ounière n'est pas seule à consommer la provi- sion de cire brute qu'elle rapporte à la ruche; assez ordinairement, lorsqu'elle y rentre , trois ou quatre de ses com- pagnes l'entament et l'aident à la man- ger. Mais dans les temps où la récolte de cette cire est abondante , où chaque abeille en trouve plus qu'elle n'en peut consommer , elle est mise en réserve dans des alvéoles destinés à cet usage. L'abeille qui rentre à la ruche chargée de ces deux pelottes les dépose dans un alvéole ; une autre abeille va en- suite pétrir ces deux petites masses , les humecter d'une liqueur mielleuse , et les arranger de manière à ce qu'elles n'occupent qu'une partie de l'alvéole , afin de laisser à d'autres de la place pour y déposer les leurs. C'est cette cire bru Le que les abeilles mangent , et qu'elles dé- gorgent après qu'elle a été suffisamment ramollie : lorsqu'elle est devenue de DES ABEILLES. 333 véritable cire, elles l'emploient à la construction des gâteaux. Les abeilles ont des besoins qui exi- gent qu'elles fassent une autre récolte que celle de la cire brute ; leur habita- tion ne doit avoir que des ouvertures qui tiennent lieu de portes , par - tout ailleurs elle doit être close. Elles doi- vent se garantir des insectes qui en veulent à leur cire , à leur miel et à elles-mêmes, et se mettre à l'abri des intempéries de l'air. Aussi leur premier soin, dès qu'elles s'établissent dans une nouvelle ruche , est d'en boucher toutes les ouvertures. Elles ne font point usage de cire pour cette opération : la nature leur a enseigne à se servir d'une ma- tière qui y est plus propre , qui s'étend et s'attache mieux. Cette matière n'a pas été inconnue aux anciens , qui l'ont appelée propolis. Les abeilles tirent cette matière des jeunes bourgeons du peuplier, du saule et d'autres arbres, avant que les boutons soient épanouis. 554 HISTOIRE NATURELLE Elles ne se contentent pas de boucher les trous de la ruche avec la propoUs , elles en enduisent les bâtons qui sou- tiennent les gâteaux , et souvent elles en étendent sur les parois intérieures. Une récolte plus importante pour les abeilles que celle de la propolis , est la récolte du miel. Nous savons qu'elles mangent de la cire, mais ce n'est pas-là leiH" seul aliment. La liqueur miel- leuse qu'elles enlèvent aux fleurs , avec leur trompe, est conduite par cet or- gane dans la bouche , oii se trouve la langue, qui pousse dans l'œsophage le miel qui y a été apporté, et qui, à son tour , le fait passer dans l'estomac. Lors- qu'une abeille a rempli de miel son es- tomac, elle retourne à sa ruche, et dès qu'elle y est entrée , elle cherche une cellule pour Vy dégorger. Souvent une de ces abeilles est rencontrée , dans son chemin, par quelques-unes des ouvriè- res qui n'ont pu aller à la récolte, alors elle s'arrête, redresse et étend sa trompe, DES ABEILLES. 355 et pousse du miel à l'ouverture de sa bouche ; les autres y portent le bout de leur trompe et le sucent ; souvent elle rend le même service à celles qui sont occupées dans l'intérieur de la ruche. Parmi les cellules qui ont été rem- plies de miel, les unes contiennent celui qui est destiné à la consommation jour- nalière , les autres celui qui doit nour- rir les abeilles dans un temps où elles iroient inutilement en chercher sur les fleurs. Ce dernier est renfermé dans des alvéoles , qui ont chacun un cou- vercle de cire , et les abeilles n'y tou- chent que dans les cas de nécessité; l'autre reste à découvert. TflU DU TOMi: TROÏSliMS* <