Sllîf E m. mm îlibrar» Norttf (daroUtta &tatr This book was présentée! by Fred S. Barkalow WetAL COLLE:criON8 B79 v.lO This book must not be taken from the Library building. -MARCH 65 FORM 2 /? ^- ■J./i^'^- /O. HISTOIRE NATURELLE. Quadrupèdes, Tome VIL ÇiLoJmpfdss , Tome VIL A HISTOIRE NA TURELLE, GÉNÉRALE ET PARTICULIERE, Par m. le COMTE de BU FF ON, Intendant du Jardin du Roi , de , l'Académie Françoise et de celle des Sciences > &c. Quadrupèdes , Tom, Fil. 'f/Jrf AUX DEUX. PONTS, Chez SANSON & Compagnie. M. DCC. LXXXYIl. ï J^ /^SÎK. *JK ^ ^^ ^ ./vyK, ^^;;^^ ï HISTOIRE NA T 1/ R E LLE.' NOMENCLATURE DES SINGES. COMME endoâriner des Écoliers , ou par- ler à des Hommes, font deux chofes différentes ; que les premiers reçoivent fans examen & même avec avidité l'arbitraire comme le réel, le faux comme le vrai, dès qu'il leur eft préfenté fous la forme de docu- mens ; que les autres au contraire rejettent avec dégoût ces mêmes documens , lorsqu'ils ne font pas fondés; nous ne nous fervirons d'aucune des méthodes qu'on a imaginées pour entalfer fous le même nom de Singe ,une mul- titude d'animaux d'efpèces différentes & même très éloignées. J'appelle Singe un animal fans queue , dont A 3 6 Hïjîoirt Natîtrdh; îa face eft applatie , dont les dents y les mains^,, les doigts & les ongles reiî'emblent à ceux de ITiomme , & qui, comme lui, marche debout fur fes deux pieds : cette défini- tion tirée de ia nature même de l'ani> inaU& de fes rapports avec celle de l'homme-, exclut, comme l'on voit, tous les animaux: ?[ui onî des queues, j tous ceux qui ont la ace relevée ou le înufeaulong, tous ceux qui ont les ongles courbés , crochus ou pointus , tous ceux qui marchent plus volon- tiers fur quatre que fur deu:£ pieds. D'a- près cette notion fixe & précifé , voyons combien il exifte d'efpèces danimaux aux- quels on doive donner le nom de finge. Les Anciens n*en connoifToient qu'une feule; le fithezos des Grecs , \Qfimia des Latins,,, eft ua fmge, un vrai fmge, & c'eft celui fur le- quel Ariftote , Pline & Galien ont inftitué toutes les comparaifons phyfiques , & fonde toutes les relations du finge à l'homme ;, mais ce pithèque , ce finge des Anciens , il reffemblant à l'homme par la conformation extérieure, & plus femblable encore par l'organifation intérieure, en diffère- néan- moins par un attribut qui , quoique relatif en lui - même , n'en eft cependant ici pas moins effentiel, c'eft la grandeur ; la. taille de l'homme en général eft aa-deffus de cinq pieds > celle du pithèque n'atteint guère qu'au quart de cette hauteur; aufli ce Ange eût-il encore été plus reffemblantà l'homme, les Anciens auroient eu raifon de ne le regarder que comme un homoncule , ua Nain manqué, un Pigmée capable tout d^ Nomenclature du Singes, *f pîas de combattre avec Ie« grues , tandiJ que l'homme fait dompter réléphant & vain- cre le lion. Mais depuis les Anciens , depuis la dé^ couverte des parties méridionales de l'Afri* que & des Indes , on a trouvé un autre fmge avec cet attribut de grandeur, un finge auiîî hautjauffi fort que l'homme, au fli ardent pour les femmes que pour fes femelles ; un finge qui fait porter des armes , qui fe fert de pierres pour attaquer, & de bâtons pour fe défendre , & qui d'ailleurs reflemble en- core à l'homme plus que le pithéque ; car indépendamment de ce qu'il n'a point de queue, de ce que fa face eft aplatie; que fes bras, fes mains, fes doigts, fes ongles font pareils aux nôtres , &: qu'il marche toujours debout; il a une efpèce de vifage , des traits approchans de ceux de l'homme , des Oreilles de la même forme, des che- veux fur la tête , de la barbe au menton , & du poil ni plus ni moins que l'homme en a dans l'état de nature. Auffi les habitans de fon pays , les Indiens policés , n'ont pas héfité de Talfocier à l'efpèce humaine par le nom à' Orang-Outang , Homme fauvage i tandis que les Nègres prefque auffi lauvages, aulfi laids que ces finges , & qui n'imagi- nent pas que pour être plus ou moins po- licé l'on foit plus ou moins homme , leur ont donné un nom propre ( Pongo ^ , un nom de bête & non pas d'homme ; & cet orang- outang, ou ce pongo, n*eft en effet qu'un animal, mais un animal très fingulier, que l'homme ne peut voir fans rentrer en liiU A4 € Hijlolrc ncturelU, même, fans fe reconnoître , fans fe convaBi- cre que fon corps n'eft pas la partie la plu« efTentielle de fa nature. Voilà donc deux animaux , le pithéque & l'orang-outang, auxquels on doit appliquer le nom de fin^t , & il y en a un troifîème auquel on ne peut guère le refufer, quoi- qu'il foit difforme , & par rapport à l'hom^ me & par rapport au finge ; cet ani- rnal jufqu'à préfent inconnu , & qui a été apporté des Indes orientales fous le nom de phhon^ marche debout comme les deux autres ^ & a la face applatie ; il eft auffi fans queue : mais fes bras , au lieu d'être proportionnés, comme ceux de l'homme ou du moins comme ceux de Forang-outang ou du pithéque , à la hauteur du corps, font d'une longueur fi démefurée , que l'anirtial étant debout fur fes deux pieds, il touche encore la terre avec fes mains fans courber le corps & fans plier les jambes r ce firrge eft le troifièmeôi le dernier auquel on doive donner ce nom; c'eft dans ce genre une ef- pèce monftrueufe , hétéroclite, comme Teft dans l'efpèce humaine, la race des hommes à grofîés jambes, dite Saint-Thomas (iz). Après les finges , fe préfente une autre famille d'animaux , que nous indiquerons fous le nom générique de babouin', & pour les diftinguer nettement de tous les autres > nous dirons que le babouin eft un animai à (a) Voyez le rlifcours fur les variétés de refpèce humaine. Teint V de. cet ouvrag:^ Nomencîatun dis Singes, 9 fjueue courte, à face aîongée, à mufeau large & reievé , avec des dents canines plus greffes à proportion que celles de Thommc , & des cal- iofités fur les feffes : par cette définition , nous excluons de cette famille tous les fin- ges qui n'ont point de queue , toutes les guenons , tous les fapajous &. fagoins qui n'ont pas la queue courte, mais qui tous l'ont auiîi longue ou plus longue qu€ le corps , & tous les makis , loris & autres quadru- manes qui ont le mufeau mince & pointu. Les Anciens n'ont jamais eu de nom propre pour ces animaux ; Ariftote eft le feul qui paroît avoir défigné l'un de ces babouins par le nom de fimia porcarîa ( ^) , encore n'en don- ne-t-il qu'une indication fort indireâe ; les Italiens font les premiers qui l'aient nommé ha- bui/20',\QS Allemands l'ont appelle havion ; les François babouin; &. tous les Auteurs, qui dans ces derniers fiècles ont écrit en latin, l'ont dé- figné par le nom papîo ; nous l'appellerons fious • mkmQS papion pour le diftinguer des au- tres babouins qu'on a trouvés depuis, dans Jes provinces méridionales de TAfrique & des Indes. Nous connoiffons trois efpèces (?) Nota. Cette dénominatîcn j7m/a porcarîa qui n*e fe trouve que dans Ariftote , & qui n'a été errip'oyéè par aucun autre Auteur , étotr néanmoins une trèj bonne expreffion pour défignerle babouin : car j'ai trouvé ëans des Voyageurs, qui probablement n'avoiert jamais lu Arillote, la même comparaifon du mufeau du ba- bouin à celui du cochon ; & d'ailleurs ces deux ammaux fe reûTemblent un peu par U forme à^ cûrps. 10 Hijîoîn naeurtlle, de ces animaux i^. le papïon ou babouin pro» prement dit, dont nous venons de parler, qui le trouve en Lybie , en Arabie , &c. & qui vraifembbblement eft \q fimîa porcaria d'A- riftote. a^. Le mandrill qui eft un babouin encore plus grand que le papion, avec la face violette , le nez & les joues fillonnées de rides profondes & obliques , qui fe trouve en Guinée & dans les parties les plus chau- des de l'Afrique. 3^. L'ouanderou qui n'cd pas û gros que le papion, ni fi grand que le mandrill, dont le corps eft moins épais, & qui a la tête &. toute la face environnée d'une efpèce de crinière très longue & très épaifle ; on le trouve à Ceylan , au Malabar & îians les autres provinces méridionales de rinde. Ainfi voilà trois fmges & troi* babouins bien définis , bien féparés , & tous fix diftindement différens les uns des au?- très. Mais, comme la Nature ne connoît pas nos définitions , qu'elle n'a jamais rangé fes ouvrages par tas ,. ni les êtres par gen- res , que fa marche au contraire va toujours par degrés , & que fon plan eft nuancé par- tout & s'étend en tout fens , il doit fe trou- ver entre le genre du fmge {c) &, celui dti (c) Nota. Le gibbon commence déjà la nuance entre les finges & les babouins, en ce qu'il a de* callofités fur les fefles comme les babouins, & les ongles des pieds de derrière plus pointus que ceux de Torang-outang » qui n'a point de caUolités fur les fefles, & qui a les ong.!€s piats & arrondis comT.« fàomine» Nomenclature des Singes • T3 babouin , quelque efpèce intermédiaire quî ne foit préciiément ni l'un ni l'autre, & quï cependant participe des deux. Cette efpèce intermédiaire exifte en effet , & c'eft rani- mai que nous appelions magot; il fe trouve phcé entre nos deux définitions; il fait la nuance entre les fmges & les babouins , iî diffère des premiers, en ce qu'il a le mu- feau alongé & de grofTes dents canines ; iî diffère des féconds, parce qu'il n'a réelle- ment point de queue , quoiqu'il ait un petit appendice de peau qui a l'apparence d'une naiilance de queue; il n'eft par conféquenc ni finge ni babouin , Se tient ert même temps de la nature des deux. Cet animal qui eft fort commun dans la haute Egypte , ainfî qu'en Barbarie , étoit connu des Anciens r les Grecs & les Latins l'ont nommé cynocé» fhùlcy parce que fon mufeau reffemble aflez à celui d'un dogue ; ainfi , pour préfenter ces animaux , voici Tordre dans lequel oa doit les r^n^iv ;foran§-outaug ou pongo y pre- mier finge 'y'Xçpîthèque , fécond ftnge ;^le gibbon » troifième fmge , mais difforme i,le cynocéphale ou magot i quatrième fingé ou premier ba- bouin ; ^le papion, premier babouin;, le /n.w- dji/}) fécond babouin ;,r(?-'^n^;'(?w, troifième- babouin : cet ordre n'eft ni arbitraire ni ii6lif , mais relatif à l'échelle même de la Na- ture. Après îes finges Si les babouins ,. fe trou* vent les guenons ; c'eft aiafi que j'appelle ^ d'aprè»; notre idiome ancien, les animaux qui reffemblent aux fmges ou aux babouins» mais qui ont de longues queues , c'eft-à-dire 12 Uifîoin naturelle, des queues aufîi longues ou plus longues que le corps. Le mot guenon a eu dans ces derniers fiècles, deux acceptions différentes de celle que nous lui donnons ici; Ton a em- ployé ce mot guenon , généralement pour défi- gner les finges de petite taille i^d) , & en même temps on Ta employé particulièrement pour nommer la femelle du finge ; mais plus an- ciennement nous appelions finges ou magots les finges fans queue, & guenons ou mones ceux qui avoient une longue queue : je pour- fois le prouver par quelques paffages de nos Voyageurs {e) des feizième & dix-fep- tième fiècies. Le mot même de guenon ne s'éloigne pas , & peut-être a été dérivé de kébos ou képos , nom que les Grecs donnoient aux finges à longue queue. Ces kéhcs ou gê- nons font plus petites & moins fortes que ( d) Les différences des linges Te prennent en Fran- çois , principalement de leur grandeur ; car les grands font fimplenaent appelles finges , foit qu'ils ayent une ^ueue ou qa'ils n'en ayent point , ou foit qu'ils ayent le mufeau long comme un chien , ou qu'ils Payent court; & les finges qoi font petits , font appelles gue- nons. Mémoires pour j'ervir à Vjiijioire des Animavx » page izo. («) Il ya au 5én«ga1 plufieurs efpèces de finges, comme èss guenons, avec une longue queue, 6c des magots qui n'en ont pas. Voyage de ie Maire, p. Joi. — Dans les montagnes de l'Amérique méridionale , il fe trouve une efpèce de monts que les Sauvages ap- pellent cacuyen y de même grandeur que les communes, fans autre différence , (inon qu'elle porte barbe au menton, Avec ces monts fe trouvent force petites bêtes taunes nommées fagoin^. Singularitti de /a France anurâique ^ par Thevèt, p. ;oj. Nomenclature des Singes» ij les babouins ôc les finges; elles font ai- fées à diilinguer des uns & des autres par cette différence, & fur-tout par leur lon- gue queue. On peut auffi les féparer aifé- ment des makis , parce qu'elles n*ont pas le mufeau pointu , & qu'au lieu de fix dents incifives qu'ont les majcis , elles n'en ont que quatre comme les finges & les babouins. Nous en connoiffons neuf efpéces . que nous indiquerons chacune par un nom différent ^ afin d'éviter toute çonfufion. Ces neuf ef- péces de guenons , font, i^. les macaques ; a?, les patas ; 3^. les malbrouks ; 4^. les tnangabeys, 5^. Iamone;6^. le callitriche; 7°. le mouftac ; 8^. le talapoJn ; 9*^. le doue- Les Anciens Grecs ne connoiffoient que deux de ces guenons , la mone & le calli- triche , qui iont originaires de l 'Arabie $l des parties feptentrionales de i^Afrique ; ils n'avoient aucune notion des autres, parce qii'elles ne fe trouvent que dans les provinces méridionales de l'Afrique & des Indes orienta- les , pays entièrement inconnus dans le temps d'Ariftote. Ce grand Philofophe , & les Grecs en général , étoient fi attentifs à ne pas con- fondre les êtres par des noms communs & dès lors équivoques, qu'ayant appelle /^iMe'co/ le finge fans queue, ils ont nommé kébos la guenon ou finge à longue queue : comme ils avoient reconnu que ces animaux étoient d'efpèces différentes, & même affez éloignées, ils leur avoient à chacun donné un nom pro- pre , & ce nom étoit tiré du caraôère le plus apparent; tous les finges & babouins qu'ils connoiffoient, c'cff -à-dire, le fujiè^ue 014 t-4 Uifloln nature lU, tîn^e proprement dit , le cynocéphale ou magot ,' & le fimia -porcarla ou papion, ont le poil td'une couleur à - peu - près uniforme ; au contraire la guenon que nous appelions ici mont y & que les Grecs appelk)ient kékos^ a le poil varié de couleurs différentes : on l'appelle même vulgairement le fw^e varié \ c'étoit Tefpèce de guenon la plus commune & la mieux connue du temps d'Ariftote, & c'eû de ce caraftère qu'eft dérivé le nom de k^os , qui défigne en grec la variété dans les couleurs : ainfi tous les animaux de la claffe des fmges, babouins & guenons indiqués par Ariftote, fe réduifent à qua- tre , le pithécos , le cynocephalos , le Jimîa porc aria ^ le kébos , que nous nous croyons fondés à repréfenter aujourd'hui comme étant réel- lement le phhèque OU Jïnge proprement dit , ie magot , le papion ou babouin proprement dit, & la mone ; par ce que non- feulement les caraôéres particuliers que leur donne Ariftote leur conviennent en effet , mais en- core parce que les autres efpèces que nous avons indiquées, & celles que nous indiquerons encore , dévoient néceffaire- ment lui être inconnues puifqu'elles font natives & exclufivement habitantes des ter- res où les Voyageurs Grecs n'avoient point encore pénétré de fon temps. Deux ou trois fiècles après celui d'Arif- tote, on trouve dans les Auteurs grecs deux nouveaux noms, callithrïx & cercopïthe- cos , tous deux relatifs aux pienons ou finges à longue queue: à mefure qu'on découvroit la terre & qu'on s'avançoit vers ie midi, foiten Nomtndatun des Singes, iient que des variétés, & qui pourront de- venir propres & fpécifiques , fi ce font réellement des efpèces diftin^les & fépa- lées, A Toccafion de toutes ces bêtes , dont quelques-unes reffemblent fi fort à Thomme , confidérons pour un inftant les animaux de la terre fous un nouveau point de vue : c*eft fans raifon fuffifante qu'on leur a donné généralement à tous le nom de quadrupèdes. Si les exceptions n'étoient qu'en petit nombre, «ous n'attaquerions pas l'application de cette ^nomination : nous avons dit, & nous favons que nos définitions , nos noms , quelque géné- raux qu'ils puiffent être, ne comprennent ja- mais tout ; qu'il exifte toujours des êtres en-de- ^à ou au delà ; qu'il s'en trouve de mitoyens j que plufteurs , quoique placés en apparence au milieu des autres, ne lailTent pas d'échap- per à la lifte ; que le nom général qu'on vou- droit leur impofer eft une formule incom- plète , une femme dont fouvent Us ne font Komtnclalurt des Singes» il pas partie ; parce que la Nature ne doit jamai» être préfentée que par unités & non par aggré- gats , parce que l'homme n'a imaginé les noms généraux que pour aider à fa mémoire , & tâ- cher de fuppléer à la trop petite capacité de fon entendement; parce qu*enfuite il en a fait abus en regardant ce nom général , comme quelque chofe de réel; parce qu'enfin il a voulu y rappeller des êtres , & même des claffes d'êtres , qui demandoient un autre nom ; je puis en donner & l'exemple & la preuve, fans fortir de l'ordre des quadrupè- des , qui de tous les animaux font ceux que l'homme connoît le mieux , & auxquels iî étoit par conféquent en état de donner les dé- nominations les plus précifes. Le nom de quadrupèdes fuppofe que rani- mai ait quatre pieds \ s'il manque de deux pieds comme le lamantin , il n'eft plus qua- drupède ; s'il a des bras & des mains comme le finge , il n'eft plus quadrupède; s'il a des ailes comme la chauve-fouris , il n'eft plus quadrupède , & l'on fait abus de cette dénomination générale lorfqu'on l'applique à ces animaux. Pour qu'il y ait de la pré- cifion dans les mots, il faut de la vérité dans les idées qu'ils repréfentent. Faifons pour les maias un nom pareil à celui qu'on a fait pour les pieds, & alors nous dirons avec vérité & précifion , que l'homme eft le feul qui foit bimane & bipède, parce qu'il eft le feul qui ait deux mains &. deux pieds ; que le lamantin n'efl que bimane ; que la chauve-fouris n'eft que bipède ; & que le fmge eft quadrumane. Maintenant appii- It Hïfloirt naturel Le, quorrs ces nouvelles dénominations géné-^ raies à tous les êtres particuliers , auxquels elles conviennent ; car c'eft ainfi qu*rl faut toujours voir la Nature : nous trouverons que fur environ deux cents efpèces d'ani- maux qui peuplent la furface de la terre , & auxquels on a donné le nom commun de quadrupède, il y a d'abord trente-cinq ef- pèces de (inges , babouins , guenons , fapa- }ous , fagoins & matis , qu'on doit en re- trancher, parcequ'ils (ont quadrumanes; qu'à ces trente -cinq efpèces, il faut ajouter cel- les du loris, du farigue , de la marmofe^ du cayopollin, du tarfier , du phalanger , Ôic. qui font aufli quadrumanes comme les finges , guenons , fapajous & fagoins : que par conféquent la lifte des quadrumanes étant au moins de quarante efpèces ( f) , le nom- bre réel des quadrupèdes eft déjà réduit d'un cinquième : qu'enfaite ôrant douze ou quinze efpèces de bipèdes, favoir, les chauve-fou- ris & les roulTettes , dont les pieds de de- vant font plurôt des ailes que des pieds; & en retranchant auifi trois ou quatre gerboi- fis qui ne peuvent marcher que fui* les pieôB de derrière , parce que ceux de devant font trop courts ; en ôrant enxrore le lainantin qui n'a point de pieds de derrière, les mor- (/) Nota. Nous ne difons pas trop, en ne comptant ^iie qiiaranta. efpèces dai.s la lirte des quadr'jmanes ^ car i: y a dans les guenons , fapajoas , fagoins , farlgae^ ^c. p'ufieurs variétés qii pourroicnl bien être des-ef-- pèi.e& réellement diûin^es. Nomtndaturt des Sln^s, ijr ieff, le dugon^ & les phoques auxquels ir&- font inutiles, ce nombre des quadrupèdes fe trouvera diminué de prefque un tiers î; & fi on vouloir encore en fouftraire les ani* maux qui fe fervent des pieds de devant conrme de mains, tels que les ours, les marmottes» les coatis j les écureuils, les rats & beau-, coup d'autres , la dénomination de quadru- pède parorrra mal appliquée à plus de la^ moitié des animaux ; & en effet, les vrais quadrupèdes font les folipèdes & les pieds - fourchus ; dès qu'on deicend [à la claffe des fiffipèdes , on trouve des -quadru- manes ou des quadrupèdes ambigus , qui lé fervent de leurs pieds de devant comme de mains , & qui doivent être féparés ou diftingués des autres. îl y a trois efpè- ees de folipèdes , le cheval , le zèbre 6t rânej en y ajoutant l'éléphant, le rhinocé- ros , l'hippopotame , le chameau , dont leS' pieds quoique terminés par des ongles , font lolides , & ne leur fervent qu'à marcher , l'on a déjà fept efpèces auxquelles le nom de- quadrupède convient parfaitement; il y a un beaucoup plus grand nombre de pieds-four- chus que de folipèdes : les bcsufs , les bé = Tiers , les chèvres , les gazelles , les bubales , les chevrotains , le lama , la vigogne , la giraffe , Télan , le renne , les cerfs , les daims, les chevreuils, &c. font tous des pieds- fourchus & compofent en tout un nombre d'^environ quarante efpèces: ainfi voilà déjà cinquante animaux , c'eil-à-dire dix- folipè- des, 6: quarante pieds -fourchus , auxquels- le nom de qiiadrupède a été bien appliqué : 14 Hljïolre naturdU» dans les fîflîpèdes , le lion , le tigre , les pan* thères, le léopard, les lynx, le chat, le loup, le chien, le renard, rhyaene , les ci- vettes , le blaireau , les fouines , lesr belet- tds , les furets , les porcs-épics , les hériffons , les tatous , les fourmiliers Ôc les cochons , qui font la nuance entre les fîffipédes & les pieds -fourchus , forment un nombre de plus de quarante autres efpèces , auxquelles le nom de quadrupède convient aufli dans toute la rigueur de l'acception; parce que quoi- qu'ils ayentle pied de devant divifé en qua- tre ou cinq doigts , ils ne s'en fervent jamais comme de main : mais tous les autres fiiîî- pèdes , qui fe fervent de leurs pieds de de- vant pour faifir & porter à leur gueule , ne font pas de purs quadrupèdes ; ces efpè- ces , qui font auffi au nombre de quarante , font une clafîe intermédiaire entre les qua- drupèdes & les quadrumanes , &ne font pré- cifément ni des uns ni des autres : il y s donc dans le réel plus d'un quart des animaux auxquels le nom de quadrupède difconvienr^ & plus d'une moitié auxquels il ne convient pas dans toute l'étendue de fon acception. Les quadrumanes remplilTentle grand inter- valle qui fe trouve entre l'homme & les qua- drupèdes ; les bimanes font un terme moyen dans la diftance encore plus grande de l'hom- me aux cétacées (^); les bipèdes avec des (^) Nota. Dans cette phrafe & dans toutes les a»t- tre$ femblabîes , j« n'«nten qui de tous eft le plus long- temps à croître , & qui a befoin des fecours de fa mère pendant toute la première année , efl aufli le plus intelligent de tous ; le cochon d'Inde , auquel il ne faut que trois femaine^ d'âge pour prendre tout i fon accroiiTement & fe trouver en état d'engendrer , efl peut- être par cette feule raifon l'un des pïus^ ftupides j & à l'égard du fmge , dont il s'agit ici de décider la nature, quelque relîem- blant qu'il foit à l'homme , il a néanmoins une fi forte teinture d'animalité qu'elle fê' feconnoît dès le moment de la nailTance; caf il eft à proportion plus fort & plus formé' que l'enfant, il croît beaucoup plus \\iq ^ les fecours de la mère ne lui ibnt néceffai^ res que pendant les premiers mois , il n^ reçoit qu'une éducation purement individuels- lé , & par conféquent aufli ftérils que cellg? des autres animaux. Il eft donc animal, 5^ malgré fâ reffem> I)lance à l'homme ^ bien loin d'être' ïe fe-*- cond dans notre efpèce ^ il n'eft pas le pre'-' mier dans l'ordre des animaux , puifqu'iS ;a'eft pas le plus intelligent ;• c'eft unique-- ment fur ce rapport de reffemblancô eotpo-' itelle qu'eft appuyé le préjugé de l» ^rande^ cj^iaion qju'on s'eil formée des facuttés de? 41 Hijîolre naturelle finge; il nous reflemble, a-t-on dit, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur , il doit donc non-feulement nous imiter, mais faire en- core de lui-même tout ce que nous faifons. On vient de voir que toutes les avions qu'on doit appeller humaines , font relatives à la fociété ; qu'elles dépendent d'abord de Tame & enfuite de l'éducation dont le principe phyfique eft la néceflité de la longue ha- bitude des parens à l'enfant ; que dans le fmge cette habitude eft fort courte , qu'il ne reçoit comme les autres animaux qu'une éducation purement individuelle , & qu'il n'eft pas même fufceptible de celle de î'efpèce : par conféquent il ne peut rien faire de tout ce que l'homme fait, puifqu'aucune de fes aélions n'a le même principe ni la même fin. Et à l'égard de l'imitation qui f>aroît être le caradère le plus marqué, 'attribut le plus frappant de I'efpèce du fmge , & que le vulgaire lui accorde comme •un talent unique , il faut, avant de décider, examiner fi cette imitation eft libre ou for- cée. Le finge nous imite-t-il, parce qu'il le veut , ou bien parce que fans le vouloir il le peut ? j'en appelle fur cela volontiers "à tous ceux qui ont obfervé cet animal fans prévention , & je fuis convaincu qu'ils diront avec moi , qu'il n'y a rien de libre , rien de volontaire dans cette imitation : le fmge ayant des bras & des mains, s'en fert comme nous, mais fans fonger à nous; la ftmrJi- tude des membres & des organes produit néceffai rement des mouvemens & quelque* fois même des fuites de mouvemens qui Nomenclature des Singes, 45 reffemblent aux nôtres ; étant conformé comme l'homme , le fmge ne peut que fe mouvoir comme lui; mais fe mouvoir de même n*eft pas agir pour imiter : qu'on donne à deux corps bruts la même impul» fion ; qu'on conftruife deux pendules, deux machines pareilles , elles fe mouvront de même, & l'on auroit tort de dire que ces corps bruts ou ces machines ne fe meuvent ainfi que pour s'imiter ; il en eft de même du fmge relativement au corps de l'homme 9 ce font deux machines conÔruites, organi- fées de même , qui par nécelTité de nature fe meuvent à très peu près de la même fa- çon : néanmoins parité ^n'eft pas imitation , l'une gît dans la manière & l'autre n'exifte que par l'efprit; l'imitation fuppofe le def- fein d'imiter; le finge eft incapable de for- mer ce deffein , qui demande une fuite de penfées , & par cette raifon l'homme peut, s'il le veut , imiter le fmge , & le fmge ne peut pas même vouloir imiter l'homme. Et cette parité qui n'eft que le phyfique de l'imitation, n'eft pas aufli complète ici que la fimilitude , dont cependant elle émane comme effet immédiat; le finge reffemble plus à l'homme par le corps & les mem- bres que par l'ufage qu'il en fait; en l'ob- fervant avec quelque attention on s'apper- cevra aifément que tous fes mouvemens font brufques , intermittens , précipités ; & que pour les comparer à ceux de l'homme, il faùdroit leur fuppofer wnQ autre échelle ou plutôt un module différent : toutes les adions du finge tiennent de fon éducatioa D % 44 Hljîolrc naturelle qui eft purement animale; elles nous p3- roiflent ridicules , inconféquentes , ex-tra- vagantes, parée que nous nous trompons d'échelle en les rapportant à nous, & que l'unité qui doit leur fervir de mefure eft très différente de la nôtre : comme fa nature eft vive, fon tempérament chaud, fon naturel pétulant, qu'aucune de ces afFe6rions n'a été mitigée par l'éducation , toutes fes ha- bitudes font exceffives & refTemblent beau- coup plus au mouvement d'un maniaque qu'aux actions d'un homme ou même d'ua animal tranquille; c'eft par la même raifoa que nous le trouvons indocile, & qu'il re- çoit difficilement les habitudes qu'on vou- droit lui tranfmettrc : il eft infenfible aux carefTes & n'obéit qu'au châtiment; on peut le tenir en captivité , mais non pas en do» mefticité ; toujours trifte ou revèche, tou- jours répugnant, grimaçant, on le dompte plutôt qu'on ne le prive: aidîi i'efpèce n'a jamais été domeftique nulle part; & par ce rapport il eil plus éloigné de l'homme que la plupart des animaux : car la docilité fup- pofe quelque anak)gie entre celui qui donne & celui qui reçoit; c'eft une qualité relative qui ne peut être exercée que lorfqu'il fe trouve des deux parts un certain nombre de facultés communes , qui ne diffèrent entr'elles que parce qu^elles font avives dans le maître & paffives dans le fujet. Or le pàlîif du fmge a moins de rapport avec ra(^îf c!e l'homnûe , que le palTif du- chien ou de l'éléphant qu'il fuffit de bien traiter pour leur commuai quej? les fentimens doux Nomenclature des Singes, 45 & même délicats de l'attachement fidèle, de TobéifTance volontaire , du fervice gratuit &,du dévouement fans rélerve. Le fmge eft donc plus loin de l'homme que la plupart des autres animaux par les qualités relatives : il en diffère auffi beau- coup par le tempérament; l'homme peut habiter tous les climats ; il vit , il multiplie dans ceux du Nord & dans ceux du midi ; le fmge a de la peine à vivre dans les con- trées tempérées , & ne peut multiplier que dans les pays les plus chauds : cette diffé- rence dans le tempérament en fuppofe d'au- tres dans l'organilation , qui , quoique ca- chées, n'en font pas moins réelles ; elle doit aulli influer beaucoup fur le naturel ; l'ex- cès de chaleur qui efî nécefTaire à la pleine vie de cet animal , rend excefîîves toutes fcs affeftions , toutes fes qualités : 6t il ne faut pas chercher une autre caufe à fa pétu- lance, à fa lubricité & à fes autres paffions qui toutes nous paroiffent aulîi violentes que défordonnées. Ainfi ce fmge , que les Philofophes , avec le vulgaire, ont regardé comme un être difficile à définir, dont la nature étoit aiï moins équivoque & moyenne entre celle dc" rhomme & celle des animaux , n'efl dans la vérité qu'un pur animal, portant à l'exté-^ rieur un mafque de figure humaine , mais^^ dénué à l'intérieur de la penfée & de tout ce qui fait l'homme; un animal au-deffouS' de plufteurs autres par les facultés relatives ,- &i encore effentieliement différent de l'hom- me, par le naturel, par le tempérament, &, aufli 46 Hiflolrc naturelle par la mefure du temps néceffaire à Téducation, à la geftation , à raccroiflement du corps , à la durée de la vie, c'eft-à-dire, par tou- tes les habitudes réelles qui conftituent ce qu'on appelle naturt dans un être parti-, çulier. iI*fc.Jocko, 2* ï^t^^ranA GiLhon. des 0 rangs • outangs y &c, 47 LES ORANGS-OUTANGS o u lePONGO(^)et le J0CK0(^> Voye^ Planche I y fig. 1 de ce Volume, iNous préfentons ces deux animaux en- femble , parce qu'il fe peut qu'ils ne faf- fent tous deux qu'une feule & même efpèce. (a) Orang-outang , nom de cet animal aux Indes orientales ; Pongo , nom de ce même animal à Lowan- do , province deiCongoj Kukurlacko, dans quelques endroits des Indes orientales , félon Kjoep, chapitre 86; cité par Linnîeus, Homo filvejlris. Orang-outang. Bontius pc^tf $4. fig. ibid. Nota. Cette figure reprélcnte plutôt une femme qu'une femelle de linge. Satyri filvefires. Orang-outang diSli Icônes ari>orum...,» ut & animalium. Lugd. Bat. apud Vanderaa. Tab. an* tepenule. du a figurx' Troglodites. Homo noclurnus. Linn. Syjiim. nat. edit, X, page 24. Ooran-outan. Capt. Beakmans Travel to Bornéo. Londcn , iji8 , fig. Oerangs - o étangs j de Ceylan, Voyages de Gauthier Schouttin aux Indes çrUntaUs, Amjiirdam , '707. 4 8 Hiflotri naturelle Ce font de tous les finges ceux qui refTembîerîf le plus à l'homme , Ceux qui par conféquenf font les plus dignes d'être obfervé?. Nous avons vu le petit orang-outang ou le jocka vivant, & nous en avons confervé les dé- pouilles ; mais nous rte pouvons parler du pongo ou grand orang-outang que d'après Drillj félon Charleton. Êxerck, p. i6. Smittcn, félon Bofman. Voyage de Guinée, p» Ja^r Barris , félon plufieurs Voyaj^eurs. Pongo f félon Battel , Purehaff & autres. {h ) Jockc. Enjocko , nom cle cet animal à Conga que nous avons adopté. En , eft l'article que nou* avons retranché. L'Empakaffa de Coago s'appelle Pw caffa ou Pacajfcy & par confécfuent on doit appellef VEnjocko , Jûckû. Paris ^ en Guinée félon Fr. Pyrard , page ■^(jQ, Se auiTi félon le P. du Jirric. Champ an^ée ^ Quimpc[ee , par les Anglois qui fréquentent la côte' d'Angûle ; on l'a auffi appelle Home fauvagç ; Homme des bois , comme le Pongo ; d'autres l'ont nommé Pig-' mJe de Guinée. Quo'jajmoras y dans quelques endroits- de l'Afrique, félon Dapper. Qjwjavoran , Ouirtomorrou félon d'autres ; Sclvago ou le Sauvage , par les Por* tuguais. Satyms Indicus. Tuîpïus. Ohferv. Tîied. lib. III, cap^ LVI , fig. ibid. Homo JiLveJlris , Ouran-outang. Tyion , Anaîomy of a Pigmie. Lcndon , i6<)^ , fÎ2. page îoS. Baris {ive Barris. Pygmeus Grùneenjts , Cfnmpanrer An^ glis. Defcrip. of fome curious créatures, ôcc. London y tjio , in-S'^^.fg. ^ The man vf the Woods ÎLdwardS Gleanings. Lenion g, r7;8, page 6, fig. ihid. Satyriis fimia eeaudata fubtus nudor, Linn. Syfi,. nat'a- edit. X, pa^s 2). Sîmla nirguibiis omniSus , ptanls 6- rotundatis ; c<£fari»' faciem cingcnU. . . , //o^zo yî/vc/?r/V,, l'Homme des bois,- BviSL Rtgn, aaim, page 189, des Orangs - outanp , &:. 4^ ΀S relations des Voyageurs ; û elles étoient jfidelles, fi fouvent elles n'étoient pas obf- cures, fautives, exagérées, nous ne doute- rions pas qu'il ne fût d'une autre eipèce que le jocko , d'une efpèce plus parfaite éi. plus voifme encore de l'efpèce de l'homme. Bontius qui éîoit médecin en chef à Batavia, & qui nous a îaifTé de bonnes obrervations fur THiftoire naturelle de cette partie des Indes, dit expreiTément (c) qu'il a vu avec admiration quelques individus de cette efpèce marchant debout fur leurs pieds , & entr 'autres une femelle ( dont il <5onne la figure) qui ieinbloit avoir de lai pudeur, qui fe couvroit de fa main à Faf- pett dçs hommes qu'elle ne connoilToit pas , qui pleuroit, gémiiîbit & faifoit les autres adtions humaines, de manière qu'il fembloitque rien ne lui manquât que la parole. M, Linna^us (d) dit d'après Kjoep & quelques autres ( c ^ Quod meretur admiration em , vidi ego allquot utrluf- ^ic fexus CT'-clc incedcnUs imptimis ( cv/ is ej^s^em hîc exhihco ) fjtyram fcmellam tantâ verecur.d.l ab isaotis fibi komir.îhus ccculcnum , tum quoque f-.cltm manibiis { liccat ita diccre) ugentem^ ubcrtimiji.t lacrymantem , ge- îàitvs cienum (f çettros humanos acius exprimemcm , ut nihd hurr.ani ci d.ejfi d'uercs yratcr loqueLm . . . No- ntjn ci indunt Ourci.g-outang qijod ii^minem filvx, figni' ficat. Jac. Bûnt. Hifi. nat. Ind. cap. XXXII, p.'ge^ 84 &. S 5 • ' {d} Homo noaurnus Homo filvzjfris Orarç - ourang Bcntii. Corpus album , incejfu eucl m , n.,{iro dimidio minus , pili albi cçntort-ipUccli , i-cu/i orbiculaîi, iridi piip'.iJaqi:- aurea. Halpcbrx anticc incumbcnus cum mem" hrar.a. n:Uit*; T^matts fpclunçis^ lÀun. fyjî, nat, edit. X, pag. 24. dts Orangs-outangs^ &jC, ^t cription AecQt homme noSurnc; je doute même de fon exiftence , & c'eft probablement un Nè- gre blanc , un chacrelas ( e) que les Voya- geurs, cités par M. Linnaeus , auront mal vu & mal décrit. Car ces chacrelas ont en effet , comme Vhomme no^urne de cet Au- teur , les cheveux blancs , laineux & frifés , ks yeux rouges, la vue foible, &c. mais ce font des hommes , & ces hommes ne fifflent pas & ne font pas des pigmées de trente pouces de hauteur; ils penfent, par- lent & agiffent comme les autres hommes , & font auffi de la même grandeur. Zn écartant donc cet être mal décrit, en fuppofant auffi un peu d'exagération d|as le récit de Boniius , un peu de préj^é dans ce qu'il raconte de la pudeur de fa fe- melle orang - outang, il ne nous reftera qu'un animal , un fmge , dont nous trou- vons ailleurs des indications plus précifes« Edward Tyfon ( /) » célèbre Anatomifte Anglois , qui a fait une très bonne defcription tant des parties extérieures qu'intérieures de Torang-oittang, dit qu'il y en a dedeuxefpèces, & que celui qu'il décrit n'eft pas fi grand que l'autre appelle 'barris (^) ou baris par {c) Voyez ce que nous avons dit de cette race d'hommes dans notre difcours fur 'es variétés de l'ef- pèce humïine. Vol V de cette nifioire naturdle. (/) The anatomy of a Pygmie. London, tC^Q , In^ ijuarto. • . {g) The Baris or Ba-ris, Which they defcribe to be much taller than our animal , probabîy may be v^'h.-^t 5ve «ail a Drill. Tyfon,, anat, ofa pygmie^ P^g- i JÈL 2 51 Hljïoirc naturdlt les Voyageurs , & vulgairement dnll par les Anglois. Ce harns ou drill eft en effet le grand orang-outang des Indes orientales ou ie pongo de Guinée, & le pigmée dé- crit par Tyfon eft le jocko que nous avons vu vivant. Le Philorophe GafTendi ayant avancé, fur le rapport d'un Voyageur nom- mé St. Amand ^ qu'il y avoit dans Tisle de Java unQ efpèce de créature qui faifoit la nuance entre l'homme & le finge , on n'hé- fita pas à nier le fait; pour le prouver, P^irefc produisit une lettre d'un M. Noël ( Natalis ^ Médecin qui demeuroit en Afri- que , par laquelle il aflure {h) qu'on trouve eivGuinée de très grands finges appelles hdrns , qui marchent fur deux pieds , qui ont plus de gravité & beaucoup plus d'intel- ligence que tous les autres finges , & qui font très ardens pour les femmes. Darcos, (fk enfuite Nieremberg (i) & Dapper {k) difent à-peu-près les mêmes chofes du barris. Battel (/j l'appelle pongo ^ & affure » qu*il — ■ ■ I ■ I I i -^ ^».^^— Il , ■ ( /i ) Sunt in Guincâ fimifi^ barhâ procera canaque iy pexâ prçfemoium vemrahilcs , inccdunt Umè ac videntur prx c-ctiris fapere ; Tni.ixirni Jhnt & Barris dicunvir ; pol- lent maxime judiclo , fcmsl dwntaxat quidpiam docendi. Vcfic induû illico bipcdes inceduat. S cite ludunt fi/lu la , cytiinrâ alii/que id gcnus Famiitz d<:niijUe in h's patiuntur mtnjtrua\ & mares muLlemm funt appetcn- ti/Jt.mi. Gaffencli, lib. V. ( i ) Nieremberg. Hiji. Nat. Fcregr. lib. IX , cap, 44 & 45* ( ^ ; Defcription de l'Afrique , par Dapper, page. (l) Pu-chajf Pi/grims, part. Il, Ib, vix, chap. m, Hiftoire générale d:s voyages , tome Y , page 89. dts Onw^S'OUtangs , &c, 5.^ eft dans toutes fes proportions fembîabîe à l'homme , reniement qu'il eft plus grand j grand ^ dit-il , comme un géant ; qu'il a la face comme l'homme, les yeux enfoncés, de longs cheveux aux côtés de la tête , le vifage nu ÔL fans poil , aufli-bien que les oreilles & les mains , le corps légèrement velu , & qu'il ne diffère de l'homme à l'extérieivr que par les jambes, parce qu'il n'a que peu ou point de mollets ; que cependant il marche toujours debout; qu'il dort fur les arbres 6c fe conftruit une hutte, un abri contre le foleil & la pluie , qu'il vit de fruits & ne mange point de chair ; qu'il ne peut parler quoiqu'il ait plus d'entendement que les au- tres animaux; que quand les Nèi];î'es (ont du feu dans les bois, ces pongos vieifent s'affeoir autour & fe chauffer , mais qu'ils n'ont pas affez d'efprit pour entretenir le feu en y mettant du bois ; qu'ils vont de compa- gnie , & tuent quelquefois des Nègres dans les lieux écartés ; qu'ils attaquent n:éme l'éléphant, qu'ils le frappent à coups de bâton & le chaffent de leurs bois ; qu'on ne peut prendre ces pongos vivans , parce qu'ils Ibnt fi forts , que dix hommes ne fuHiroienc pas pour en dompter un feuî; qu'on ne peut donc attraper que les petits tout jeunes ; que la mère les porte marchant debout, & qu'ils fe tiennent attachés à fon corps avec les mains 6l les genoux ; qu'il y a deux efpèces de ces fmges très reffemblans à l'homme, le pongo qui eft sulîi grand Se plus gros qu'un horime , &: l'enjocko qui eft beaucoup plus petit, &c. a : c'eft de ce £ 3 5)4 Hijioin nafurdU pafFage très précis que j'ai tiré les nortis «de "pongo & de jocko. Batrel dit encore que lorsqu'un de ces animaux meurt, les autres couvrent fon corps d'un amas de branches & de feuillages. PurchaiT ajoute en forme de note , que dans les converfa- tions qu'il avoit eues avec Battel, il avoit appris de lui qu'un pongo lui enleva un pe- tit Nègre qui paffa un an entier dans la fociété de ces animaux -, qu'à fon retour ce petit Nègfe raconta qu'ils ne luiavoient fait aucun mal ; que communément ils étoient de la hauteur de l'homme, mais qu'ils font plus gros & qu'ils ont à-peu près le dou- ble du volume d'un homme ordinaire. Job- foir affure avoir vu dans les endroits fré- quWités par ces animaux une forte d'habita- tion compolée de branches entrelafrées,qi*i pouvoit ièrvir du moins à les garantir de l'ardeur du foleil (m). 5> Les finges de Gui- née , dit Bo.fman , ( /z ) que Ton appelle fmit" un en Flamand , font de couleur fauve , &. deviennent extrêmement grands : j'en ai vu , ajoute-t-il , un de mes propres yeux qui avoit cinq pieds de haut Ces fmges ont une afTez vilaine figure , auC- fi-bien que ceux d'une féconde efpèce qui leur reffemblent en tout, fi ce n'eft que quatre de ceux-ci feroient à peine auffi gros «ju'un de la première efpèce Oa (m) Hiftoire générale des Voyages , tome III , page (n) Voyage de Guinée, par Byfman , /' aj?* '^dés Oranës - oiitangs , &€, 5 f fteut leur apprendre prefque tout ce que ron veut ....... Gauthier Schoutten (0) dit que les finges appelles par les In- diens oranp-ouungs , font prefque de la même figure & de la même grandeur que les hom- mes, mais qu'ils ont le dos & les reins tout couverts de poil , fans en avoir néanmoirw au-devant du corps ; que les femelles ont deux groffes mamelles; que tous ont le vi- fage rude , le nez plat, même enfoncé , les oreille" comme les hommes ; qu'ils font robuftes, agiles , hardis ^ qu'ils fe mettent en défenfe contre les hommes armés; qu'ils font palfionnés pour les femmes ; qu'il n'y a point de fiireté pour elles à pafler dans les bois , où elles fe trouvent tout d'un coup attaquées & -violées par ces fin|^s «. Dampier , Froger & d'autres Voyageurs affurent qu'ils enlèvent des petites filles de huit ou dix ans, qu'ils les emportent au-def- fus des arbres & qu'on a mille peines à les leur ôter. Nous pouvons ajouter à tous ces témoignages celui de M. de la Brofle , qui a écrit fon voyage à la côte d'Angole en 1738, & dont on nous a communiqué l'ex- trait : ce Voyageur advte m que les orangs- outangs qu'il appelle quimpe>^és , tâcheut de furprendre des Négreffes ; qu'ils les gardent avec eux pour en jouir ; qu'ils les nourrif- fent très bien: j'ai connu^ dit-il, à Lowango ( o ) Voyage de Gauthier Schoutten. Amfitrdam^ 4'jç-j , in 12. E4 5^ Hljîoirt naturtth une Négreffe qui étoit reftée trois ar« avec ces animaux; ils croiitent de fix à fept pied* de haut; ils font d'une force fans égale, ik cabanent, & fe fervent de bâtons pour fe défendre ; ils ont la face plate , le nez ca- mus & épaté, les oreilles plates, fans bourre- let , la peau un peu plus claire que celle d'un mulâtre ; un poil long & clair - femé dans plufieurs parties du corps , le ventre extrêmement tendu , les talons plats & éle- vés d'un demi pouce environ par- derrière y 'tu marchent fur leurs deux pieds, & fur les quatre quand ils en ont la fantaifie r nous en achetâmes (^eux jeunes, un mâle qui avoit quatorze lunes, & une femelle qui n'avoit que douze lunes d'âge, &c . Henri Grofîe (^) dit » qu'il fe trouve de ces animaux vers le nord de Coroman- del , dans les forêts du dom.aine du Raïa de Carnate ; qu'on en fit prêtent de deux , Tua maie, l'autre femelle, à M. Horne, Gouver- neur de Bombay; qu'ils avoient à peine deux pieds de haut , mais la forme en- tièrement humaine ; qu'ils marchoient fur leurs deux pieds , & qu'ils étoienr d'un blanc pâle , fans autres cheveux ni poils qu'aux endroits où nous en avons commu- nément ; que leurs adtions étoient très fem- blables pour la plupart aux aétions humai- nes, & que leur mélancolie faifoit voir qu'ils fentoient fort bien leur captivité; qu'ils fp.ifoient leur lit avec foin dans laçage dans laquelle on les avoit envoyés fur le vaiiTeau; que quand on les regardoit , ils cachoient îivec leurs mains les parties que la modef- tie empêche de montrer. La femelle , ajou- te-t-il, mourut de maladie fur le vaiffeau , & le mâle donnant toutes fortes de fignes ( q) Voynge aux Indes orientales , par Henri Grofle^ traduit de l'Ang'ois. Londres, ij^8 , pages 329 & fui- vantcs, t €% ff'ifloîre natitrcU-e» de douleur , prit tellement à cœur la mort de fa compagne , q«'il refula de manger & ne lui furvécut pas plus de deux jours «. François Pyrard (r) rapporte » qu'il fe trouve dans la province de Sierra-liona une efpèce d'animaux appelJée baris., qui font gros & membrus , lelquels ont une telle in- duftrie , que fi on les nourrit & inftruit de j^uneffe , ils fervent comme une perfonne; qu'ils marchent d'ordinaire fur les deux pat- tes de derrière feulement; qu'ils pilent ce qu'on leur donne à piler dans des mortiers , <5u'ils vont quérir de l'eau à la rivière dans de petites cruches qu'ils portent toutes pleines fur leur tête , mais qu'arrivant bien- tôt à la porte de la maifon , fi on ne leur prend bientôt leurs cruches ils les laiffent tomber , & voyant la cruche verfée &. rompue , ils fe mettent à crier & à pleurer »* Le Père du Jaric , cité par Nieremberg (/) , dit la même chofe & prefque dans les mêmes termes. Le témoignage de Schoutten (^) , 6'accorde avec celui de Pyrard au fujet de réducation de ces animaux ; « on en prend , dit-il, avec des lacs, on les apprivoife , on leur apprend à marcher fur les pieds de derrière & à fe fervir des pieds de devant. ( r) Voyages de François Pyrard de Lavais Paris ^ iiiQ , tome II. p. J3/. (/) Euf. Nieremberg. Hifl. nat. Pere.grin. lib. IX, cap. XLv. (f) Voyage de Gaut, Schoutten auxLnde* orientales* jimjierd, 7707, des O rangs - outangs , (S'c, 6 5 ^ui font à-peu-près comme des mains, pour faire certains ouvrages & même ceux du ménage , comme rincer des verres , don- ner à boire , tourner la broche , &c. » J'ai vu à Java, dit le Guat (w), un (inge fort extraordinaire ; c'étoit une femelle ; elle étoit de grande taille & marchoit fouvent fort droite fur fes pieds de derrière : alors elle cachoit d'une de i'es mains l'endroit de fon corps qui diftinguoit fon fexe ; elle avoit le vifage fans autre poil que celui des four- cils, & elle reffembloit aflez en général à ces faces grotefques des femmes Hottento- tes que j'ai vues au Cap : elle faifoit tous les jours proprement fon lit , s'y couchoit la tête fur un oreiller, & fe couvroit d'une couverture Quand elle avoit mal à la tête , elle fe ferroit d'un mouchoir, & c'étoit un plaifir de la voir ainfi coiffée dans fon lit. Je pourrois en raconter diver-. fes autres petites chofes qui paroiflent ex- trêmement fmgulières ; mais j'avoue que je ne pouvois pas admirer cela autant que le faifoit la multitude, parce que n'ignorant pas le defl'ein qu'on avoit de porter cet animal en Europe pour le faire voir , j'avois beaucoup de penchant à fuppofer qu'on l'a- voit dreflé à la plupart des fmgeries que le peuple regardoit comme lui étant natu- relles : à la vérité c'étoit une fuppofition. il mourut à la hauteur du cap de Bonne- (a) Voyage de Fr, k Guat. Tome II, pages <}6 C^ 97- 64 Hijîoin naniritU, «fpénince dans un vaiffeau fur lequel j'étois ; il tii certain que la figure de ce finge ref- lembloit beaucoup à celle de l'homme , &c ". Gemelli Careri dit en avoir vu un qui fe piaignoit comme un enfant, qui marchoit i'ur les deux pieds de derrière , en portant ia natte fous Ion bras pour fe coucher & dormir. Ces finges, ajoute-t-il, paroiffent avoir plus d'efprit que les hommes, à cer- tains égards: car, quand ils ne trouvent plus 4e fruits fur les montagnes , ils vont au bord de la mer oii ils attrapent des crabes, des huitres & autres. chofes femblables. Il y a une efpèce d'huîtres qu'on appelle taclovo qui pèfent plufieurs livres & qui font fou- vent ouverte^ iur le rivage ; or le finge craignant que quand il veut les manger, elles ne lui attrappent la patte en fe refer- mant , il jetîe une pierre dans la coquille qui l'empêche de fe fermer , ôc enfuite il mange l'huître fans crainte. ïî S\ir les côtes de la rivière de Gambie , dit Froger [x], les fmges y font plus gros & plus méchans qu'en aucun endroit de l'Afiique; les Nègres les craignent & ils ne peuvent aller ïeuls dans la campagne fans courir rifque d'être attaqués par ces animaux qui leur préfentent un bâton & les obligenc à f e battre Souvent on les a vus porter fur les arbres des enfans de (\) ReUtton du voyage de Gennes , par Froger, p. 4a & 4j- fept des O rangs - outangs , &c. 6 5 fept à huit ans qu'on avoit une peine incroya- ble à leur ôter; la plupart des Nègres croienc que c'eft une nation étrangère qui eft ve- nue s'établir dans leur pays , & que s'ils ne parlent pas , c'eft qu'ils craignent qu'on ne les oblige à travailler ». îj On fe pafferoit bien, dit un autre Voya- geur {y)i de voir à Macacar un auffi grand nombre de finges , car leur rencontre eft fouvent funefte ; il faut toujours être bien armé pour s'en défendre , . . ils n'ont point de queue , ils fe tiennent tou- jours droits comme des hommes , & ne vont jamais que fur les deux pieds de der- rière ic. Voilà, du moins à très - peu -près , tout ce que les Voyageurs les TTioins crédules & les plus véridlques nous difenr de cet ani- mal; j'ai cru devoir rapporter leurs pafia- ges en entier , parce que tout peut paroirre important dans Thiftoire d'une bête û reiTeni- blante à l'homme : & pour qu'on puiffe pro- noncer avec encore plus de connoiffance fur fa nature , nous allons expofer zuiVi toutes les différences qui éloignent cette ef- pèce de Tefpèce humaine , & toutes les conformités qui l'en approchent. Il diffère: de l'homme à l'extérieur par le nez qui n\{ï pas proéminent , par le front qui eil trop court, par le menton qui n'eft pas relevé à la bafe ; il a les oreilles proporîiannelle- (y) Defcriptron hiftorique du royavime de Macacar, Paris i t6$Sf p. 5/. F C6 HiJIolre naturelle ment trop grandes, les yeux trop voifuîS Vm\ de l'autre; l'intervalle entre le nez &î la bouche eft auflï trop étendu ; ce font-là les feules différences de la face de l'orang- outang avec le vifage de l'homme. Le corps & les membres diffèrent en ce que les cuif- fes font relativement trop courtes , les bras trop longs , les pouce trop petits ^ la pau- me des mains trop longue & trop ferrée , les pieds plutôt faits comme des mains que CDmme des pieds humains; les parties de la génération du mâle ne font différentes ([e celles de Thomme , qu'en ce qu'il n'y a point de frein au prépuce ; les parties de la fe- melle font à l'extérieur fort femblables à celles de la femme. A l'intérieur, cette efpèce diffère de Tef- pèce humaine par le nombre des côtes ; l'homme n'en a que douze, l'orang-outang en a treize; il a auffi les vertèbres du cou plus courtes, les os du baffin plus ferrés, les hanches plus plates, les orbites des yeux plus enfoncées ; il n'y a point d'apo- phyfe épineufe à la première vertèbre du cou ; les reins font plus ronds que ceux de l'homme , & les uretères ont une forme différente j auiîi-bien que la vefîie & la véfi- cule du fiel qui font plus étroites & plus longues que dans l'homme. Toutes les autres parties du corps, de la tête & des membres , tant extérieures qu'intérieures , font fi parfaitement femblables à ce'ilesde l'homme, qu'on ne peut les comparer fans admiration & fans être étonné que d'une conformation fj pareille & d'une organif^tion qui eft ab- Jci Ô rangs * outàngs ,> &c, 67 folument la même , il n'en réfulte pas le^ mêmes effets. Par exemple, la langue & tous les organes de ia voix font les mêmes que dans l'homme , & cependant l'orang- outang ne parle pas ; le cerveau eft abfolu- ment de la même forme & de la même pro- portion , & il ne penfe pas : y a-t-il une preuve plus évidente que la matière feule , quoique parfaitement organifée , ne peut λroduire ni la penfée ni la parole qui en ef^ e figne, à moins qu'elle ne foi t animée par un principe fupérieur? L'hamme & l'orang- outang font les feuls qui ayent des fefTes &: des mollets, & qui par conféquent foienr faits pour marcher debout ; les feuls qui ayent la poitrine large y les épauks apiaties- & les vertèbres conformées Tun commet l'autre ; les feuls dont le cerveau ,. le cceur> les poumons , le foie , la rate, le pancréas ^^ J'eftomac , les boyaux foient ablolum-en& pareils ; les feuls qui ayent l'appendice ver- miculaire au cpecum ; enfin l'orang-outane; refîembieplus a l'homme qu*à aucun des ani- maux , plus même qu'aux babouins & aux. gue- nons, non-feulement par toutes les parties qu^^' je viens d'indiquer, mais encore-par la largeur" du vifage, la forme du crâne , des mâchoi- res , des dents , des autres os de la tête & de la face , par la groffeur des doigts & du pouce, par la fj^ure des ongles , par le nombre d^s vertèbres lombaires ài facrées «. par celui des os du coccix, & enfin par la- «onformité dans les articulations, dans ];j grandeur 6l la figure de la rotule , dans celle-' «ufiernum 3 &c. En force- qu'en comparant cê-,* F 5. 69 Hipoirt naturillt animal avec ceux qui lui refTemblent Te plus, comme avec le magots le babouin ou la guenon , il fe trouve encore avoir plus de conformité avec l'homme qu'avec ces ani- inaux y dont les efpèces cependant paroiflenî être fi voifines de la Tienne , qu'on les a tou- tes défignées par le même nom de Jinges: ainii les Indiens font excufables de Tavoir affocié à l'efpèce humaine par le nom d'orang-outang , homme fauvage , puifqu'il reflemble à l'hom- me p3.r le corps plus qu'il ne reffemble aux autres iinges ou à aucun autre animal. Comme quelques-uns des faits que nous ve- nons d'expofer, pourroient paroître fufpefls à ceux qui n'auroient pas vu cet animal , nous avons cru devoir les appuyer de l'autorité de deux célèbres Anatomiftes , Ty- fon ({) ^ Cowper, qui l'ont enfemble dif- ( ^ ) L'Orang-outang refTemblc plus à l'homme qu'eaux fmges ou aux guenons; i^. en ce qu'il a les poils des épaules dirigés en bas & ceux des bras dirigés eni haut ; 2^. par la face qui eft plus femblable à celle de l'homme , étant plus large & plus aplatre que celle des finges ; 5*. par la fi cure de l'oretlle qui reffemble pins à celle de l'homme, à l'exception que la partie carti'a- gîneufe eft mince comme dans les linges; 4*. par les ôoigts qui font proportionnellement plus gros que ceux ^es finges; 5*^, en ce qu'il eft à tous égard-s fait pour marcher debout, au lieu que Is» finges & les guenons jie font pas conformés à cette fin ; 6**. en ce qu'il a des feffes plus grofTes que tous les autres finges ; 7*^. en ce quil a àts mollets aux jambes; 8^. en ce que fi poitrine 5i fes épaules font plus larges que celles des ûnges; 5»'. fon talon plus long; ro*. en ce qu'il « la BiembtaBe adîpeafe , placée eofiune riiomaa.8 fou» des O rangs - outangs , &c. 6<^ féqué avec une exa(5litude fcrupuleufe, & qui nous ont donné les réfultats des comparui- la peau; 11^. le péritoine entier & non percé ou alongé, comme il eft dans les finges ; 12*^. les inteftins plus longs que dans les finges; 13''. le canal des in- teftins de différent diamètre , comme dans l'homme, & ron pas égal ou à-peu-près égal comme il eft dans les fmges ; 14*^. en ce que le cœcum a l'appendice ver- wiculaire comme dans l'homme , tandis que cet appen- ciice vermiculaire manque dans tous les autres finges , êc aufTi en ce que le co-^mencement du colon n'ef^ pas fî prolongé qu'il Teft dans les fmges ; 15*^. en ce que rinfertion du conduit biliaire £< du conduit pan- créatique n'ont qu'un feul orifice commun dans l'homme & l'orang-outang, au lieu que ces infertions font à deux pouces de diftance dans les guenons ; 16^, en ce que le colon eft plus long que dans les finges; 17^. en ce que le foie n'eft pas divirà>.en lobes comme dans les finges , mais entier & d'une feule pièce comme dans l'homme ; 18'^. en ce que les vaifieaux bi- liaires font les mêmes que dans l'homme; 19*. la rate la même; lo*'. le panciéas le même; ai*', le nombre des 1 ibes du poumon le même; 21^. le péricarde at- taché au diaohragme comme dans l'homme, & non pas comme il Fcft dans les finges ou guenons ; 23*. le cône du cceur plus émoulTé que dans les finges ; 24^. en ce qu'il n'a point d'abajoues ou poches au bas des joues comme les autres finges & guerjons ; 2^^. en ce qu'il a le cerveau beaucoup plus grand que ne l'ont les finges, & dans toutes Tes parties exacte- ment conformé comme le cerveau de l'homme; 26^. le crâne plus arrondi & du double plus grand que dans les guenons ; 2.7". toutes les futures o-a crâne fembls- b'es à celles de l'homme; les os appelles offa trïquetm Worm'ûTia , fe trouvent dans la future lamboïde , ce qui n'eft pas dans les autres finges ou guenons; a8^, il a Tos cribifornre & le cn/îa galti, ce que les gue- nons n'ont pas; 2^^' la it\\ç fclU equina comw'.o. ààv.s l'homme ; au lieu que dans Us ilnge^ & guenons ceti« f 70 Hipoin naturtUt, fons qu'ils ont faites de toutes les parties de fon corps avec celui de l'homme. J'ai partie eft plus élevée & plus proéminente ; 30*^. le procejfus ptery^oidis comme nt ofl"eufes, 8i leur arti- Ciilâtion fe trauve placée dans l'inierflice entre les- veriobres ; 42*^. l'os du ûernum dans i'orang;-oiitafl^ des 0 rangs ' eut angs ^ &c, yi cru devoir traduire de l'Anglois, & préfen- ter ici cet article de leurs ouvrages , afia ed large comme dans l'homme , & non pas étroit comme dans les guenons ; 4^^. les os des quatre doigts font plus gros qu'ils ne le font dans les finges ; 44**. l'os de la cuiffe , foie dans fon articulation , foit à tous autres égards , eft femblable à celui de l'homme; 45*^. la rotule eft ronde & non pas longue , fimple & non ' pas double comme elle l'eft dans les finges ; 46^. le talon , le tarfe & le métatarfe de Torang-outang font comme ceux de l'homme ; 47^. Je doigt du milieu dans le pied n'eft pas fi long qu'il l'eft dans les finges ; 4^^. les mufcles obliquas infcrior caphls , pyrlformis & biceps fimoris font femblables dans l'orang-outang & dans l'homme, tandis qu'i's font difFérens dans les linges & guenons, &c. L'orang-outang diffère de l'homme plus que des fin» ges ou guenons; i'^. en ce que le pouce eft plus pe- tit à proportion que celui de l'homme; quoique cepen- dant il foit plus gros que celui des autres finges ; 2*?, en ce que ia paume de la main eft plus longue & plus étroite que dans l'hoT^me ; 3^. il diffère de l'homme & approche des finges par la longueur des doigts des pieds; 4*^. il diffère de l'homme en ce qu'il a le gros doigt des pieds éloigné à-peuprès comme un pouce ^ étant plutôt quadrumane comme les autres finges que quadrupède : 5**. en ce qu'il a les cuiffes plus courtes que l'homme ; 6". les bras plus longs ,• 7?. en ce qu'il n'a pas les bourfes pendantes ; 8*^. l'épiploon plus am- ple que dans l'homme ; 9**. la véficule du fiel longue & plus étroite; 10*. les reins plus ronds que dans l'homme & les uretères différens; 11^. la vefTie plus longue; 11*. en ce qu'il n'a point de frein au prépu- ce ; ij*'. les os de l'orbite de l'oeil trop enfoncés;, 14°. en ce qu'il n'a pas les deux cavités au-deffus de Il felle du turc {fclU turcica) comme dans l'homme;. 15*^. en ce que les pr^'ce£':is mafkïdcs & fiilû'idis font très petits & prefqae nuls; 16^. en ce qu'il a les os (lu nez plats ,• 17^, il diffère de l'homme, ec ce que 7 1 Hijîoîrc naturelle que tout le monde puifTe mieux juger cfer la reff^mblance prefque entière de cet ani- mal avec Thomme. J'obferverai feulement, pour une plus grande intelligence de cette note, que les Anglois ne font pas réduits, comme nous , à un feul nom pour défigner les finges;iîs ont > comme les Grecs, deux les vertèbres du cou font courtes comme dans les f ngc-s , p'ates devant & non p^s tondes , & que leurs apohyfes e'pineufes ne font pas fourchues comme dans l'hctnme; 18**. en ce qu'il n'y a point d'apophyTe épr- neufe dans ia première vertèbre r'.ucoui ip*'- il dirf-ère de l'homme en ce qu'il a treize côtes de chaque coté, & que l'homme n'en a que douze; 20°. en ce que IfS os des ifles foiit parfaitement femblab'es à ceux c'cs finges , étant plus longs, 7 lus étroits & moins conca- ves que dans rhomme; ii*^. il difTère de l'homme en ce que les mufcles fui/ans (B trouvent dans le corps humain & manquent dans celui de l'orang-outang ; ia« voir, occipitales , frontales, dihtatcrcs alarum n a fi. feu êlevatores lahii ftiperioris j inttrfplinalcs coUi , glutcti mc- Aiml , extenfor diptorum pcdis hrevis & tranfvcrfalis pe- dis ; az*'. les mufc'es qui ne paroiifent pas fe trouver dans ror?nv,-ûutang , & qui fe tronvent q.ielquçf. is dans riicmme font ceux qu'on appelle Pyramide fe.^ , €aro Mnfculofa quadrata ; le long tendoa & le corps charnu du mu^s-îe palmaire , les mufc'es aftolU^s S- rz-^ trahcns aurlcitlam ; 2.5^. les mufcles élévateurs d?s cUvirules font dans l'orang-outang, comme dans les lirges 6t non pas comme dans Thomme j 24^^ les muf- clés par lefquels l'orang-outang reffemble aux fmges ^ & diffère de l'homme font les fuivans lonius colli y pc^oralis , latryimus dor/i, glntaus maxîmi/s & medcus j Pfi.a': magnus & parvus zlcacus internus & ^afieronamiut intcrnus \ 75^. il diffijre encore de l'h/mme par la forme des mufcie?, ddtcides pronator rad'd lires &> eX' tenfor po/Ucis brcvis. Anatomie de l'orang- outang , par Tyfon, Londres '^pp, in-^", noms its Orangs ' outangs y Ê'C. 75 noms diffiérens , l'un pour les finges fans queue (<î), qu'ils appellent ape, & l'autre pour les finges à queue qu'ils appellent mon^ kïe. J'ai toujours traduit le mot monk'ie par celui de guenon , & le mot ape par celui de fin^e ; & ces fmges que Tyfon défigne par le mot ap€, ne peuvent être que ceux que nous avons appelles \q pitAè^ue & le ma^t^ & il y a même toute apparence que c'eft au magot feul qu'on doit rapporter le nom 4ipe ou/Inze de la comparaifon de Tyfon. Je dois obferver aufli que cet Auteur donne quelques caraftères de relTemblance & de xiiftérence qui ne font pas affez fondés : j'ai cru devoir faire fur cela quelques remar- ques ; on trouvera peut-être que ce détail eft long , mais il me femble qu'on ne peut pas examiner de trop près un être qui , fous la forme d'un homme , n'eft cependant qu'un animal. 1°. Tifon donne comme un cara£lère par^ ticulier à l'homme & à l'orang - outang , d'avoir le poil des épaules dirigé en bas , & celui des bras dirigé en haut; il eft vrai que la plupart des quadrupèdes ont le poil de toutes les parties du corps dirigé en bas ou en arrière , mais cela n'eft pas fans ex- ception. Le parefi'eux & le fourmiller ont le poil des parties antérieures du corps di- ra) Sîmla, Aividuntur in caniâ carentes qtia fimla fini'-' pliciter âiamtur 6* caudatas q'i(Z cercopith.ci appdlanturi <]ux priorîs çencris funt Anglice Apes d':cuntur\ qux pojl /.erJuris çnonkeys. Ray , Synopf. quadrap. p^^^. /4p. Qnadrupèdes , Tome Fil, G 74 m [loin naturelle rigé en arrière , & celui de la croupe &l des reins dirigé en avant : ainfi ce caraftère n'eft pas d'un grand poids dans la comparai- son de cet animal à 1 homme. a^. J'ai aufli retranché dans ma traduction les quatre premières différences, qui, comme celles-ci, font trop légères ou mal fondées; la première , c'eft la différence de la taille ; ee caraftère eft très incertain & tout-à-fait gratuit^ puifque l'Auteur dit lui-même que ion animal étoit fort jeune; les féconde , troi- fiême &' quatrième ne roulent que fur la forme du nez, la quantité du poilÔi fur d'autres rap- ports auffi petits. 11 en eft de même de plufieurs autres que j'ai retranchées, par exemple, du vingt-unième caradlère tiré du nombre des dents ', il eft certain que cet animal & l'hom- me ont le même nombre de dents , & que s'il n'en avoit que vingt-huit, comme le dit l'Auteur, c'eft qu'il étoit fort jeune, & l'on fait que l'homme dans fa jeuneffe n'en a pas davantage. 3^. Le onzième cara(5tère des différences de l'Auteur eft auiïi très équivoque; les en- fans ont les bourfes fort relevées , cet ani- mal étant fort jeune ne devoit pas les avoir pendantes. 4^, Le quarante- huitième cara£lère des refiemblances , & les trente, trente-unième, trente -deuxième , trente- troifième ^ tren- te-quatrième caraéières des différences, ne défignant que la préfence ou la figure de certains mufcles , qui dans l'efpèce humaine ygrient pour la plupart d'un individu à Tau- des Oranp - outangs y &c, 7 ç tfe, ne doivent pas être confidérés comme des cara^res efl'entiels. 5**, Toutes les reflemblances & différences tirées de parties trop petites, telles que les ;jpophyfes des vertèbres , ou prifes de la pofi- tion de certaines parties, de leur grandeur , de leur grofleur, ne doivent auiîî être confi- dérées que comme des cara^ères acceflbires, en forte que tout le détail de cette table de Tyfon peut fe réduire aux différences & aux. refTemblances efTentielles que nous avons indiquées. 6^. Je crois devoir infifter fur quelques caradères plus généraux , dont les uns ont été omis par Tyfon & les autres mal indi- qués; i^. L'orang-outang efl le feul de tous les fmges qui n'ait point d'abajoues , c'eft-à-di- re y de poches au bas des joues ; toutes les gue- nons , tous les babouins , & même le magot & Je gibbon ontces poches , où ils peuvent garder leurs alimens avant de les avaler : l'orang-ou- tang feul a cette partie du dedans de la bouche- faite comme Thomme. 2^. Le gibbon , le magot j tous les babouins & toutes les gue- nons , à l'exception du doue , ont les fefles plates & des callofités fur ces parties; l'o- rang-outang eft encore le feul qui ait les feiTes renflées & fans callofités ; le doue les a auili fans callofités , mais elles font plates & velues , en forte qu'à cet égard le doue fait la nuance entre 1 orang - outang & les guenons , comme le gibbon & le magot font cette nuance à l'égard des abajoues, & le magot feul à l'égard des dents canines & de Talongement du mufeau. 3^. l'orang-outang G 2 7 6 Hijîo'ire naturtlU eft le feul qui ait des mollets ou gras-de-jam- bes. & des feffes charnues; ce caraclère in- dique qu'il eft de tous le mieux conformé pour marcher debout ; feulement , comme les doigts de fes pieds font fort longs , & que fon talon pofe plus difficilement à terre que celui de l'homme , il court plus facile- rnent qu'il ne marche ^ & il auroit befoin de talons artificiels plus élevés que ceux de nos fouliers , fi Ton vouloit le faire marcher àifément& long-temps. 4^. Quoique l'orang- outang ait treize côtes, &que l'homme n'en ait que douze , cette différence ne l'approche pas plus des babouins ou des guenons , qu'elle l'éloi;^ne de l'homme , parce que le nombre des côtes varie dans la plupart de ces efpè- ces , & que les uns de ces animaux en ont douze, d'autres onze, & d'autres dix, &c ; çn forte que les feules différences efTen- tielles entre le corps de cet animal &. celui de l'homme , fe réduifent à deux , favoir la conformation des os du bafîin & là confor- Biation des pieds; ce font- la les feules par- ties confidérables par lefquejles l'orang-ou- tang refTemble plus aux autres finges qu'il ne refiemble à l'homme. D'après cef expofé que j'ai fait avec toute l'exaâitiîde dont J2 fuis capable, on voit ce que l'on doit penfer de cet animal ; s'il y avoit un degré par lequel on put defcendre de la nature humaine à celle des animaux , ft l'eiTence de cette nature confifcoit en en- tier dans la forme du corps & dépendoit de fon organifation , ce finge fe trouveroit plus des O rangs - outangs , &c, yj près de l'homme que d'aucun animal : affiS au fécond rang des êtres , s'il ne pouvoir commander en premier , il feroit au moins fentir aux autres fa fupériorité , & s'efForce- roit de ne pas obéir ; fi l'imitation qui fem- ble copier de fi près la penfée en étoit le vrai figne ou l'un des réfultats , ce fmge fe trouveroit encore à une plus grande diflance des animaux & plus voifin de l'homme ; mais , comme nous ra\ons dit , l'intervalle qui l'en fépare réeiiement n'en eft pas moins immenfe; & la refTemblance de la forme, la conformité de l'organilation , les mouve- mens d'irtiitation qui paroifîent réfulter de ces fimilitudes ^ ni ne le rapprochent de la nature de l'homme , ni même ne l'élèvent au- defîus de celle des animaux. Caracicrcs dijîincilfs de c&ttc efpece, L*orang-outang n'a point d'abajoues , c'eft- à-dire , point de poches au-dedans des joues , point de queue, point de callofités fur les lefles ; il les a renflées & charnues; il a toutes les dents & même les canines fem- blables à celles de l'homme ; il a la face plate , nue & bafanée ; les creilles , les mains , les pieds , la poitrine , le ventre aulîi nus ; il a des poils fur la tête qui defcen- dant en forme de cheveux des deux côtés des tempes, du poil fur le dos & fur les lom« bes , mais en petite quantité ; il a cinq ou fix pieds de hauteur, & marche toujours G} y s HiJ^cire nanirtlU droit ftir fes deux pieds. Nous n'avons pa§^ cré à portée de vérifier fi les femelles font fujertes comme les femmes à l'écoulement périodique , mais nous le préfumons , & par analogie iious ne pouvons guère en ik)u-t<:r. du Pithèqiie. 75 LE P I T H É Q U E [a]. " JL y a, dit Ariftote , des animau* dont la nature eft ambiguë , & tient en par- tie de l'Homme Si en partie du quadrupède , tels que les pithè^^ues ,\es Ktkes Si les Cynocé^ phaUs ; le kèbe eft un pithèque avec une queue ; le cynocéphale eft tout femblabîa au pithèque, feulement il eft plus grand ôc plus fort , &. il a le muf^au avancé , appro- chant prefqiie de celui du dogue , & c'efk delà qu'on a tiré foanom; il eft auiTi de {a] Pithèijue. lï^^THXof en Grec ; Simia en Latin } Chinchin , en Tartarie , félon Rubruquis ; 6c tSijï/*« , à la Chine, félon le P. de Halde. Pûhecus, Arift, Hi/l. Anint, Hb, II, cap. vnr, Simia, Gefner, Hiji. quad. page ^47, fig. ibiJ. Icon, quad. page 92, fig. ibid. Nota. Cèft la même figure copiée. Simia, Jonfton, d< qnad. tab. yp, dua figura, Simia fimpliciter dicta , cauda carens. Ray , Syn, quad, page 149. Figura prima efi earum fimiarum qux caudas non ha» hcnt : htz cateris facUius 6» citlus manfuefiunt ; ceterif^ que foUrtlori ingcnio pra/ian: , hilariorefquc & verjutiorct txiftunt. Profp. Alpin. Hifi. yîgypti^ lib. IV, tab. 10, fig- I . Simia uneuihus omnihus pîanis & rctnndads. ... * Le Singe. UriU'oa. r«gn. anim. page 1S8. G 4 8o Hijiolrz naturdU mœurs plus féroces , & il a les dents plus i'ortes que, le pithêque & plus refTemblantes à celles du chien, a D'après ce paflage, il eft clair que le pithêque & le cynocéphale indiqués par Ariflote n'ont ni Tun ni l'au- tre de queue , puifqu'il dit que les pithèques qui ont une queue s'appellent kkbes ; & que îe cynocéphale reiTemble en tout au pithê- que, à Texception du mufeau qu*il a plus avancé & des dents qu*il a plus groffes. Ariftore fait donc mention de deux efpèces de linges fans queue, le pithêque & le cy- nocéphale , & d'autres finges avec une queue qu'il appelle kèbes. Maintenant pour compa- rer ce que nous connoiflbns avec, ce qui étoit connu d'Ariflote , nous obferverons que nous avons vu trois efpèces de finges qui n'ont point de queue, favoir, l'orang- outang, le gibbon & le magot, & qu'au- cune de ces trois efpèces n*eft ïe pithêque; car les deux premières, c'eft-à dire, l'orang- outang & le gibbon n'étoient certainement pas connues d'Ariftote, puifque ces animaux ne fe trouvent que dans les parties méridio- nales de l'Afrique & des Indes qui n^étoient pas découvertes de fon temps , & que d'ail- leurs ils ont des caractères très différens de ceux qu'il donne au pithêque; mais la troi- fième efpèce que nous appelions magots eft le cynocéphale d'Ariftote, il en a tous les carac- tères, il n'a point de queue, il a le mnfeau com- me un dogue , & les dents canines groffes Ô: longues; d'ailleurs il fe trouve communément dans l'Afie mineure & dans les autres provinces de rOrient qui étoient connues des Grecs j V du Pithlquc, 8 î ïe phithêque eft du même pays , mais nous ne l'avons pas vu, nous ne «le connoiiTons que par le témoignage des Auteurs ; & quoi- que depuis vingt-ans que nous recherchons les fmges , cette efpèce ne fe foit pas ren- contrée fous nos yeux, nous rre doutons cependant pas qu'elle n^exifte auïïi réelle- ment que celle du cynocéphale. Gefner & Jonfton ont donné des figures de ce finge pithèque ; M. BrifTon l'a indiqué comme Payant vu , il le diftingue du cynocéphale ou magot , qu'il défigne aufTi comme l'ayant -vu , & il confirme ce que dit Ariftote , en affurant que ces deux animaux {b) {q ref- femblent a tous égards , à l'exception du mufeau qui eft court dans le pithèque ou fii^e proprement dit, & alongé dans le cynocé- phale. Nous avons dit que l'orang-outang, le pithèqwe , le gibbon ôt le magot font les (b) Race première des finges, ceujt qui n*ont point de queue, 8c qui ont le inufeav: court j i*. Le finge. J*ai vu plufiears finges qui ne différoient entr'eux que par la grandeur ; leur face, leurs oreilles & leurs or- gies font affei femblables au vifage , aux oreilles & aux ongles de l'homme ; le poil qui couvre tout leur corps , excepté les feffes qui font nues, eft mêlé He verdâtre & de jaunâtre j le verdâtre domine dans la partie fupérieure du corps , & le jaunâtre dans la par- tie inférieure Race féconde des finges , ceux qui n'ont point de queue & qui ont le mufeau alongé; i''. le finge cynocéphale, il ne diffère du fin- fe, que par fon mufeau alongé, comme celui d'un chien, d'aiHeurs il Kù reflemWe en tout. J'en ai vu plufieurs qui ne différoient entr'eux que par la gtaa* «Uur. Briif. K^n. anim» pa^e i8^ & 19 1. 82 Hijloln naturtllt* feuls animaux auxquels on doive appliquer le nom généâque de finge , parce qu'ils font les feuls qui n'ont point de queue , & les feuls qui marclient plus volontiers & plus fouvent fur deux pieds que fur quatre: l'orang-outang & le gibbon font très difFé- Tens du pithèque & du magot ; mais comme ceux-ci fe reffemblent en tout, à l'exception de la grandeur des mâchoires & de la grof- feur des dents canines, ils ont fouvent été pris l'un pour l'autre ; on les a toujours in- diqués par le nom commun àtfinge', & même dans les langues ou il y a un nom pour les finges fans queue , & un autre nom pour les fmges à queue , on n'a pas diftingué le pithèque du magot; on les appelle tous deux du même nom af\ en Allemand ;"^/?^, en Anglois ; ce n'eft que dans la langue Grec- que que ces deux animaux ont eu chacun leur nom; encore le mot cynocéphale eft plutôt une dénomination adjeftive qu'un fubftantif propre , & c'eft par cette raifon que nous ne l'avons pas adopté. Il paroît parles témoignages des Anciens , que le pithèque eft le plus doux , le plus do- cile de tous les finges qui leur étoient con- nus, & qu'il étoit commun en Afie aufli- bien que dans la Lybie & dans les autres provinces de l'Afrique , qui étoient fréquen- tées par les Voyageurs Grecs & Romains ; c'eft ce qui me fait préfumer qu'on doit rapporter à cette efpèce de finge les pafla- ges fuivans de Léon l'Africain & de Marmol ; ils difent, que les finges à longue queue qu'on voit en Mauritaaie, & que les Afri- du Pïthlque. ^1 cains appellent mones , viennent du pays des Nègres , mais que les finges fans queue font naturels & fe trouvent en très grande quantité dans les montagnes de Mauritanie , de Bugie & de Conftantine ; » ils ont , dit Marmol, les pieds, les mains, & s'il faut ainfi dire , le vifage de Thomme , avec beau- coup d'efprit & de malice; ils vivent d'her- bes, de blé & de toutes fortes de fruits qu'ils vont en troupes dérober dans les jar- dins ou dans les champs ; mais avant que de fortir de leur fort il y en a un qui monte fur une éminence , d'où il découvre toute la campagne , & quand il ne voit paroître perfonne , il fait figne aux autres par un cri pour les faire fortir, & ne bouge de là tandis qu'ils font dehors; mais fitôt qu'il voit venir quelqu'un , il jette de grands cris , & fautant d'arbre en arbre tous fe fauvent dans les montagnes; c'eft une chofe admirable que de les voir fuir, car les femel- les portent fur leur dos quatre ou cinq petits & ne laifîent pas avec cela de faire de grands fauts de branche en branche. Il s'en prend quantité par diverfes inventions quoiqu'ils foient fort fins; quand ils deviennent farou- ches, ils mordent, mais pour peu qu'on les flatte ils s'aprivoifent ailément; ils font grand tort aux fruits & au blé , parce qu'ils ne font autre chofe que le cueillir , cou- per & jeter par terre , foit qu'il foit mûf ou non , & en perdant beaucoup plus qu'ils n'en mangent & qu'ils n'en emportent ; ceux qui font apprivoifés font des chofes incroya- bles , imitant l'homme en tout ce qu'Us §4 Hijlolre naturtlU voient (c) «. Kolbe rapporte les mêmes faits à -peu-près au fujet des finges du cap de Bonneefpérance ; mais on voit par la figure & la defcription qu'il en donne , que ces finges font des babouins, qui ont une queue courte , le mufeau alongé , les ongles pointus , &c. & qu'ils font aulïï beaucoup plus gros & plus forts que ces finges de Mauritanie (^) : on peut donc préfumer que Kolbe a copié le paflage de Marmol , & appliqué aux babouins du Cap les habi- tudes naturelles des pithèques de Mauri- tanie. Le pithèqiie , le magot & le babouin que nous avons appelle paplon , étoient tous trois connus des Anciens ; auiïi ces animaux fe trouvent dans l'Afie mineure , en Arabie , dans la haute Egypte & dans toute la par- tie feptentrionale de l'Afrique ; on pour- noit donc auflî appliquer ce paflage de Mar- mol à tous trois; mais il eft clair qu'il ne convient pas au babouin, puifqu'il y eft dit que ces finges n'ont point de queue ; & ce qui me fait préfumer que ce n'eft pas du magot , mais du pithèque dont CQt Auteur a parlé , c'eft que le magot n'eft pas aifé à apprivoifer, qu'il ne produit ordinairement que deux petits , & non pas quatre ou cinq comme le dit Marmol ; au lieu que le pithè- que qui eft plus petit doit en produire da- vantage ; d'ailleurs il eft plus doux & plus (c) L'Afrique de Marmol, tome /, pagt jfj, \d ) Voyez ci après l'article du papion. du PitJâque, 85 docile que le magot qui ne s'apprîvoife qu'avec peine & ne fe prive jamais parfaite- ment : je me fuis convaincu par toutes ces raifons , que ce n'eft point au magot , mais au pithèque qu'il faut appliquer ce pafTage des Auteurs Africains j il en eft de même de celui de Rubruquis , où il eft fait mention des fmges du Cathay, il dit n qu'ils ont en toutes chofes la forme & les façons des hommes qu'ils ne font pas plus hauts qu'une coudée 6{ tout couverts de poils ; qu'ils habitent dans des cavernes; que pour les prendre on y porte des boiilons fortes & enivrantes. ...... qu'ils viennent tous enfemble goûter de ce breuvage , en criant chhichin , dont on leur a donné le nom de chinckin, & qu'ils s'eni- vrent fi bien qu'ils s'endorment; en forte que les chafTeurs les prennent aifément (e) », Ces cara6lères ne conviennent qu'au pithè^ que & point du tout au magot : nous ayons eu celui-ci vivant, & nous ne l'avons ja- mais entendu crier chinchin; d'ailleurs il a beaucoup plus d'i:ne coudée de hauteur & reffemble moins à l'homme que ne le dit l'Auteur; nous avons eu les riiémes raifons pour appliquer au pithèque & non point au magot la figure & l'indication de Profper Alpin , par laquelle il alTure .que les petits fmges fans queue qu'il a vus en Egypte s'apprivoifent plus vite & plus ailément que les autres , qu'ils ont plus d'intelligence (<) Relation de K\xbt\ici\ii5 , page 176 ^ fuir. B6 Hljlolrc n azur du & d^induftrie, & qu'ils font auflî plus gais & plus plaifans que tous les autres; or le magot eft d'une groffe & ailez grande taille , il eft mauffade , trifte , farouche & ne s*ap- privoile qu*àdemi; les caraâ:ères que donne ici Profper Alpin à Ion finge fans queue , ne conviennent donc en aucune manière au magot & ne peuvent appartenir à un au- tre animal qu'au pithèque. Caracicns dljiinclifs de cette efplce. Le pithèque n'a point de queue , il n*a point les dents canines plus grandes à pro- portion que celles de l'homme; il a la face plate , les ongles plats auflî , & arrondis comme ceux de l'homme ; il marche fur fes deux pieds; il a environ une coudée, c'eft- à dire , tout au plus un pied & demi de hauteur; fon naturel eft doux, & on l'ap- privoife aifément. Les Anciens ont dit que la femelle eft fujette à l'écoulement pério- dique , & l'analogie ne nous permet pas d'en douter. :ê ® S^ du Gibbon, Foy e^ planche I ,fig» 2 , & planche II fig. i de ce VoU •jr iiE Gibbon fe tient toujours debout, lors même qu'il marche à quatre pieds, parce que fes bras font aufli longs que fon corps & fes jambes ; nous l'avons vu vivant, il n'avoit pas trois pieds de hauteur, mais il étoit jeune, il étoit en captivité ; ainfi l'on doit prélumer qu'il n'avoit pas encore acquis toutes fes (a) Gihhon , c'cft le nom fous lequel M. DupIeJx «DUS a donné ce finge qu*il avoit apporté èes Indes orientales ; j'ai d'abord cru que ce root étoit Indien , mais en faifant des recherches fur la Nomenclature des finges , j'ai trouvé dans une note de Dalechamp fur Pline, que Strabon a défigné le Cephus par le mot Keipon , dont il eft probable qu'on a fait Guibon , Gibbon. Voici le paÀage de Plire, avec la note de Dalechamp : Pompeii magni , primàm ludl ojiendenint à un écoulement périodique de faog. Tom rVTL H -a I Le petit Gil3ljoa..îl,. Le Magot. 3 autre Mo^t BMdfll du Magot, 91 LE MAGOT [a). Voyei^ planche JI y fi^. 2 & ^ de ce volume, v>ET animal eft de tous les fmges > c'efî- à-dire, de tous ceux qui n'ont point de {a) Majget , nom ancien de ce Singe en françoi;, & «jue nous avons adopté. Momeriet , félon Jonfton ^ on l'a aufli appelle Tanarin ^ parce qu'il eft fort commurv dans la Tartarie méridionale. Cynocéphales. Ariftotelis. Hifi. anim. \\h. If, cap, vin. Cynocephahts primusi Xonfton ,^. tab. Ï.IX. Cynocepkalus alter. ProCp. Alpin. j£gypt. vol, lî y p. 241 , fig. tab. XVI. Simia cynocephaia omnibus ungnihus plants & rvtunds- tis. .... Le finge cynocéphale. Briif. Rt^f. anim, p. 191. Nota. Il nous paroit que M. Brillon s'eft tronfïpé fur la forme des ongles de ce fnge : il eft vrai que ceux des pouces des piads de devant & déj< pieds de derrière font plats & arrondis à-peu-;^rè$' comme ceux de l'homme ; mais les ongles des autre» doigts font courbés en forme tle gouttière ren- verfée. SylvanuSf ^mia ecauti^ta chmious tuherofocallofis. CiT-- fcpith'-cus y Jonl^on, quaà. tab. Lix , f.^. /• Vl\nvi. Syfl^ %at. edit. X, p. 7.5. Nota. Il nous paroît que M. Lin-- E3BUS s'eft trompé en rapportant cet animal au Cenuypi^ thecus de Jor-{îori , c'eft pîutôt le Cynocephalus de 1» Aème planche ; mais il eft vrai qu'on pourroit regar- der ce Cynocepkalus & ce Cercopltheois comme le mêmfe' animal y fi le poil de ce dernier n'étoit pas trop éyai» &. trop- long. 9 2 Hijtoirt nimrtîh queue (^), celui qui s'accommode le mieux de la température de notre climat : nous enr avons nourri un pendant piufieurs années j l'été it fe plaifoit à Pair, & Thiver on pou- voit le tenir dans une chambre fans feu. Quoiqu'il ne fût pas délicar, il étoit tou- jours trifte & fouvent mauffade ; il faifoit également la grimace peur marquer fa colère ou montrer fon appétit : fes mouvement ètoient brurques> fes manières groflières , & fa phyfionomie encore plus laide que ridi- cule ; pour peu qu'il fût agile de paiîion ii înontroit & grinçoit les dents en remuant la mâchoire ; il remplifîbit les poches de fes joues de tout ce qu'on lui donnoit, & il mangeoit généralement de tout, à l'ex- ception de la viande crue, du fromage & d'autres chofes fermentées : il ainwit à fe jucher pour dormir, fur un barreau , fur une patte de fer ; on le tenoit toujours à la chiîne , parce que malgré fa longue domef- ticitéj il n'en étoit pas plus civilifé, pas plirs attaché à fes maîtres ; il avoit appa- remment été mal éduqué : car j'en ai vu d'autres de la même efpèce , qui en tout étoient mieux , plus connoiffans , plus obéif- (t) Nota. H e(l certain que ce finge eft fans queue> quoiqu'il en ait une légère apparence formée par un {>etit appendice de peau d'environ un deifiif-pouce de ongueur, qui fe trouve au-defllis de l'anus, mai* cet appendice n'eft point une queue avec des vertè- bres , ce n'eft qu'un bcmt de peau qui ne tient pas même plus parùculiérement aa coc&ix que le cefte de h peau» du Mdgût, 95 fans, même plus gais, & affez dociles pour apprendre à danfer , à gefticuler en cadence &. à fe laifTer tranquillement vêtir & coif- fer. Ce finge peut avoir deux pieds & demi ou trois pieds de hauteur lorfqu'il eft debout fur fes jambes de derrière ; la femelle eft plus petite que le mâle : il marche plus vo- lontiers à quatre pieds qu'à deux : lorfqu'il eft en repos, il eft prefque toujours afiis, & fon corps porte fur deux callofités très èminentes qui font fituées au bas de la ré- gion où devroient être les feifes ; l'anus eft plus élevé; ainfi il eft afîis plus bas que fur le cul : aufïï fon corps eft plus incliné que celui d'un homme aifis ; il diffère du pitfùque ou finge proprement dit ; i^. en ce qu'il a le mufeau gros & avancé comme u» dogue, au lieu que le pithèque a la face aplatie; i^. en ce qu'il a de longues dents canines , tandis que le pithèque ne les a pas plus longues à proportion que l'homme y 3*^. en ce qu'il n'a pas les ongles des doigts aulTi plats & auffi arrondis , & enfin parce qu'il eft plus grand, plus trapu & d'un na- turel moins docile &: moins doux. Au refte, il y a quelques variétés dans TeTpèce du ma ot ; nous en avons vu de différentes grandeurs , & de poils plu^ ou moins foncés & plus ou moins four- nis ; il paroît même que les cinq ani- maux dont Profper Alpin a donné les figu- res & les indications lous le nom de cin^. 94 Hïftoin naturilU cépkaUs (c^, font tous cinq des magots, qtîl ne diffèrent que par la grandeur & par quelques autres caraûères trop légers pour qu'on doive en faire des efpèces diftin£les & féparées. Il paroît aufîi que l'efpèce en eft affez généralement répandue dans tous les climats chauds de 1 ancien continent, & qu'on la trouve également en Tartarie , en Arabie, en Ethiopie , au Malabar (d), ei¥ Barbarie , en Mauritanie & jufque dans les terres du cap de Bonne - efpéran- ce (O- (c) PrcTp. Aîpîrr. Hijf. rtat. ^Egypt. Vib. lV,tabv XV , fg. I i tab. XVI, XVU . XVIil & XIX. (/ans PHomme, la pfiyfionomie trompe» & la figure du corps ne décide pas de la (a ) Fapion , mot dérivé de yfetpio , îiom ds cet animal en latin moderne , 8c que nous avons adopte pour le difiingaer des autres Babouins. Bahoon , en Anelois j pa-i^on , en Allemand ; Choac-kama , au cap •de Donne-c-fpcrance , félon Kolbe. Pap/o. Gefner. Icon. Quad.:p4gey6 , Jtg-. ibîd. ffoTA^ 1^. Cette figure donnée par Gefner a été co^piée par Aldrovande. Quad. digit. p-age S,6c , & par Jonfton. 'Quad. tab. Cl., fub nomine papio primus. NùTa. a**. Gefner s'eft beaucoup trompé en prenairt cet animal pour i'Hy«ne. Eahou'm, Kolbe. Defcripàon ait rendus roides & engourdis. . . . J'ai vu qu'ils ne mangent ni poiffbn ni viande , fi elle n'a été premièrement cuite Ôc qi/elle ne foit accommodée de la manière dont les hommes la mangent , & qu'ils avalent fort avidement de la viande ou du poiflcn bien apprêtés Voici la manière dont ils pillent un verger, un jardin ou une vigne : ils font pour l'or- dinaire ces expéditions en troupes ; une partie entre dans l'enclos , tandis qu'une autre partie refte fur la cloifon en fentinelîe , pour avertir de l'approche de quelque danger j le refte de la troupe eft placé au de- hors du jardin à une diftance médiocre les uns des autres , & forme ainfi une ligne qui tient depuis l'en- droit du pillage jufqu'à celui du rendez-vous j tout étant ainfi difpofé, les babouins commencent le pilla- ge , & jettent à ceux qui font fur la cloifon les me- lons, les courges, les pommes, les poires, &c. à mefure qu'ils les cueillent ; ceux qui font fur la cloifon jettent ces fruits à ceux qui font au bas, & ainfi de fuite tout le long de la ligne , qui pour l'or- dinaire finit fur quelque montae;ne; ils font fi adroits, & ils ont la vue fi prompte &fi jufte, que rarement ils laiflent tomber ces fruits à terre en fe les jettant les uns aux autres : tout cela fe fait dans un profond filence & avec beaucoup de promptitude. Lorfque les fentinelles apperçoivent quelqu'un , elles pouffent un cri; à ce fignal , toute la troupe s'enfuit avec une vîtefie étonnante. Defcription du cap de Bonne - if^é* tance t par Kolhe t tome 111 , pages ^j & fuiv. i 3 101 H'ijîoîrc naturelle, callofitcs fur les fefles , qui font nues & de couleur de fang; il a la queue arquée & de fept ou huit pouces de long; les dents ca- , nines beaucoup plus longues & plus grolTes à proportion que celles de l'homme ; le mufeau très gros & très long; les oreilles nues, mais point bordées; le corps malTif & ramaffé, les membres gros & courts, les parties génitales nues 6i couleur de chair; le poil long & touffu , d'un brun rouftâtre & de couleur alTez uniforme fur tout le corps; il marche plus fouvent à quatre qu'a deux pieds ; il a trois ou quatre pieds de hauteur lorfqu'il eft debout; il paroît qu'il y a dans cette efpèce des races en- core plus grandes & d'autres beaucoup plus petites. Le babouin que nous avons fait re» préfenter eft de la petite efpèce , nous l'a- vons foigneufement comparé au grand j?j- houin ou Papion^ & nous n'avons remaïqué d'autres différences entr'eux que celle de la grandeur , & cette différence ne venoit pas de celle de l'âge ; car le petit babouin nous a paru adulte comme le grand. Les femelles font fujettes, comme les femmes , à un écou- lement périodique. ^ Tom VTI- Pl.4i du MandrilL iOJ LEMAN DR I L L (a)< Voye:^ planche IV, figure i & 2 de ce Volume» V>E Babouin eft d'une laideur défagréable & dégoûtante; indépendamment de Ton nez tous plat ou plutôt de deux nal'eaux dont découle (a) Mandnllt nom que les Ang'oîs qui fréquentent la côte cîe Guinée, ont donné à cet animal, ôc que TOUS avons adopté. Efpèce finguliere , que les Blancs de ce pays de Guinée appel'ent mandrill. Je ne faurois trop dire To- rigtne de ce nom , que je n'avois ismats entendu au» paravant j ceux mêmes qui le nomment tinfi n'en peu- vent indiquer la raifon, à moins que ce ne foit à caufe de la reffemblance de cet animal avec l'homme, pen» dant qu'il n'en a point du tout avec le finge. { Man ^ en An-;!ois, veut dire homme). Nouveau voyage de Guinée , par Smith. Paris , 175 1 , terne I , p. 104. Cercopithecus cynocephalus parte ccrporis anterîore long! s pilis objlta , nafo violaceo nudo , le Magot ou Tartarin. Briffon , regn. anim. page 214. Nota. Il me paroi: que M. Bàfion s'eft trompé, 1^. en donnant à ce finge le nom de magot ou de tartarin qu'il auroit dû appliquer à fon finge cynocéphale j 2^. en rappor- tant cet animal au cynocephalus de Gefner. Icon. j?». page 9j, au cynocephalus JecuT'dus de Jonfton , p. 100, tab. f 9 , ÔC au cynocephalus. Aq Clufius. Exotic. p. 570;. car les figures de ces trois Auteurs ne refTemblent point au babouin dont il eft ici queftion, qu'il eft ce— pendant aifé de diftinguer de tous les autres par le» filions longitudinaux v^u'U a fur la fûce , 6c que M, l 4 104 Hljiolre natuntU^ continuellement une morve qu'il recueiîîe avec la langue ; indépendamment de fon très gros & long mu(eau, de fon corps tra- pu y de fes feffes couleur de feng & de fon anus apparent , & placé , pour ainfi dire , dans les lombes j il a encore la face vio- lette & filionnée , des deux côtés , de rides profondes & longitudinales qui en augmen- tent beaucoup la triftefîe & ia difformité ; ifl eft auliî plus grand & peut-être plus fort que le papion, mais il eft en même temps plus tranquille & moins féroce : nous don- nons ici la figure du mâle ,& de la femelle que nous avons vus vivans; foit qu'ils euf- fent été mieux éduqués, ou que naturelle- ment ils foient plus doux que le papion ,, ils nous ont paru plus trsùîables & moins ïmpudens fans être moins dèfagréables. Cette efpèce de babouin fe trouve à la côte d'Or & dans les autres provinces mé- ridionales de l'Afrique , ou les Nègres l'ap- pellent hoz?,o & les Européens mAndrïU', i! paraît qu'après l'orang-outang , c'eft le plus grand de tous les fmges 6t de tous les babouins» Smith ( h) raconte qu'on lui fit préiènt d'un« Briffon indique lui- même tîans les termes fuirans: »v Son nez, dit il , eft fort gros , dénué de poils, can- ivelé félon fa longueur, & d'une coulsur violette»». Or ces carafteres ne conviennent point au cynocé- phale de Clufius , de Gefner & de Jcnfton. ( i ) Le corps du mandrill, lorfqu'il a pris fa croif- fan;.e , eft aufli gros en circonférence que celui d'uR homme ordinaire, les jambes font beaucoup p'us cour- tes^ & les pieds |j>la& loi^s; Ws bia& & Is^ m^ms ^oftt du Mandrill. 10 ^ femelîc mandrill , aui n'étoit âgée que de fix mois, & qui étoit oèjà aufl> grande à cet âge dans îa même proportion ; la tête eft d'une groffeur fnonftrueufe; la face large & plate, fans autres poils qu'aux fourcils ; le nez efl fort petit , la bouche large & les lèvres font très minces ; la face qui eft cou- verte d'une peau blanche , eft d'une laideur effroyable & toute ridée j les dents font larges & fort jaunes; les mains font fans poil ; tout le refte du corps , à l'exception du vifage & des mains , eft couvert de poil long &. noir comme celui de l'ours i ces animaux ne marchent jamais fur les quatre pattes comme les guenons; quand on les tourmente , ils crient précifé- ment comme les enfans : on prétend que les mâ'es cherchent fouvert à violer les femmes blanches, quand ils les rencontrent feules dans les bois ; ils ont pref- que toujours le nez morveux , & fe plaifent à faire entrer la morve dans la bouche On me fit pré- fent à Skerbro d'un de ces mandrills ; les gens d^ pays les appellent hoogoc ; c'étoit une femelle qui n'a- voit que fix mois, mais elle étoit déjà plus groîTe qu'un babouin, &c. Nouveau voyage en Guinée, par Smith, traduit de P Anglais. Paris, 1751 , tome l, p. iC4. Nota. Dans le même pays , l'on appelle donc hcogoe ou boggo 6c mandrill., l'animal dont il eft ici quefiion , & l'on appelle aufli pcngo & drill , Vûrang- PU tan g ; ces noms fe reflemblent , & font vraifeT.bla- blement dérivés les uns des autres ; & en effet le pongo & le boggo , ou fi l'on veut , le dritl & le man- drill ont plufieurs carafteres commiiBSj mais le pre- mier eft un finge fans queue & prefque fans poil, qui a la face applatie & ovale, au lieu que le fécond eft un babouin avec une queue, de longs poils , & le mufeau gros & long. Le mot marit dans les largues Allemande, AngloiPI , &c. fignifie l'Aownîs en général; & le mot drill, dans le jargon de quelques-unes de nos provinces de France comme en Bourgogne, figni- fie un homme vlgouTettx & libertin; les payfans difenti e'eji un bon drill, c*ijl ua mahre driil. lo6 Hijîolre naturelle, qu'un babauin adulte : il dit aufli que ces mandrills marchent toujours fur deux pieds, qu'ils pleurent & qu'ils gémiffent comme des hommes ; qu'ils ont une violente palîîon pour les femmes, & qu'ils ne manquent pas d; les attaquer avec l'uccès lorfqu'ils les trouvent à l'écart. Caracicrcs, dijlinclifs de cette efpïct. Le mandrill a des abajoues & des calloiî- tés fur les feiTes ; il a la queue très courte , & feulement de deux ou trois pouces de long; les dents canines beaucoup plus gref- fes 6t plus longues à proportion que celles de l'homme; le mufeau très gros & très long , & fillonné des deux côtés de rides longitudinales , profondes & très marquées ; la fice nue & de couleur bleuâtre ; les oreil- les nues, aulfi bien que le dedans des mains & des pieds; le poil long , d'un brun-rouf- sâtre fur le corps , & gris fur la poitrine & le ventre ; il marche fur deux pieds plus fouvent que fur quatre ; il a quatre ou quatre pieds & demi de hauteur Iorfqu*il eft debout ; il paroît même qu'il y en a d'en- core plus grands. Les femelles font fujet- tes, comme les femmes, à l'écoulement pé» riodique. Tom .^^U I I^' 0 iMtaierou, . 2» Le- Alaim.orv J du C Quand trou & du Lowando. 107 UOUANDEROU [a], ET LE LOW AN D O (b). Voye^ planch V ^ _/%. / di et Volume, i^uOîQUE ces animaux nous paroiiTent être d'une feule & même efpèce, nous n's- (tf) Ouanderou , Wanieru , nom de cet animal à Cey- lan , 8c que nous avons adoç*é. SimU ex JEgypto Venetlas diducla. Profp. A'pin. Ko/, J/, page 245 , tab. ao. Ouanderou, forte de finge à Ceylan , dont il paroit qu'il y a deux efpèces. Relation dt Ceylan , far Knox, terne I, pages lOf & m , fig. ibid, Cercoplthccus nlger harha incanâ promifsâ. Wanderu Zcylanenfibiis. Ray, Syft. qtiad. psg. 15S. Silenus fimia caudata , barhata , corpore nigro , harhd niveâ , proUxâ. lÀnu. fyji. nat. edit X, page 16. Nota, II me paroît que M. Linnaeus s'eft trompé en rappor- tant à cet animal le fimia caliitriches magnitudine cyno- cephalorum de Profper Alpin , page z^z : c'eft éviciem- inent celui de la page z^f , que nous venons d'indi- quer ; il ne faut, pour s'en affurer, que comparer la figure que nous en donnons ici, avec celle de Profper Alpin. Cercopithecus barhatus niger , barba incanâ, (inge noir k barbe blanche. BriflT. reg, anim, page aoy. Nota. Il nous paroît que le finge indiqué par M. Briflbn fous le nom de finge noir d'Egypte- page zo<} , eft le mêoie que celui-ci , d'autant plus qu'il y rapporte celui de profper Alpin , page z^j , que nous avons cité di- delfus. {b) Lowando^ Elwandu, nom de cet animal à Cey lo8 H'ijlmre natu telle vons pas laiffé Jf leur conferver à chacun le nom qu'ils portent dans leur pays natal , à Ceyian, parce qu'ils forment au moins deux^races diftindes & confiantes. L'ouan- derou a le corps couvert de poils bruns & noirs , avec une large chevelure & une grande barbe blanche; au contraire le lo- wando a le corps couvert de poils bîanchâ» très avec la chevelure & la barbe noires : il y a encore dans le même pays une troi- fième race ou variété qui pourroit bien être la tige commune des deux autres j parce qu'elle eft d'une couleur uniforme & en- tièrement blanche, corps, chevelure & bar- be : ces trois animaux ne font pas des fmges , mais des babouins ; ils en ont tous les caràftè- res , tant pour la figure que pour le naturel ; ils font farouches & même un peu féroces ; ils ont le mufeau alongé , la queue courte , & font à-peu-près de la même grandeur & de la même force que les papions , ils ont feule- ment le corps moins ramafTé, & paroifTent plus foibles des parties de l'arrière du corps: celui dont nous donnons la figure nous kn, & que nous avons adopté. Nota, i^. Il nous paroît n'être qu'une variété rfe l'ouanderou. Nota. 2". II nous paroît qu'il y a une féconde variété dans ces animaux, l'ouanderou a le corps noir & la barbe grife , le lowando a le corps gris ÔC la barbe noire, & il y en a d'autres de même efpèce qui font tout blancs, corps & barbe. Simîa alba feu incanis fî-l'is harhâ nigrâ promijfd. El- Winà\im Zeylanenjibus, K^y , fyji' quad. page 158. de t Ouandcrou 6* du Lowando, îOJ avoit été préfenté fous un« faufle dénomi- nation , tant pour le nom que pour le climat. Les gens auxquels il appartenoit, nous dirent . qu'il venoit du continent de l'Amérique mé- ridionale , & qu'on l'appelloit cayouvajfou. Je reconnus bientôt que ce mot cayouvajfou eft un terme brafilien qui fe prononce fajow ouajjou , & qui fignifie fapajou , & que par conféquent ce nom avoit été mal appliqué, puifque tous les fapajous ont de très longues queues , au lieu que l'animal dont il eft ici queftion , eft un babouin à queue très courte; d'ailleurs , non-feulement cette efpèce , mais même aucune efpèce de babouin , ne fe trouve en Amérique ; par conléquent on s'étoit auffi trompé fur l'indication du cli- mat , & cela arrive aflez ordinairement , fur- tout à ces Montreurs d'ours & de fm- ges, qui, lorfqu'ils ignorent le climat & le nom d'un animal , ne manquent pas de lui ^appliquer une dénomination étrangère , la- ' quelle vraie oufaulTe eft également bonne pour Tuiage qu'ils en font. Au refte, ces babou- ins-OLianderous , lorfqu'ils ne font pas domp- tés , ibnt fi méchans qu'on eft obligé de les tenir dans une cage de fer, où louvent ils s'agitent avec fureur; mais lorfqu'on les prend jeunes, on les apprivoife aifément, & ils paroiflent même êrre^plus fufceptible* d'éducation que les autres babouins ; les In- ciens fe plaifent à les inftruire , & ils pré* tendent que les autres fmges , c'eft - à - dire les guenons, refpe^Sent beaucoup ces ba- bouins , qui ont plus de gravité & plus d'intelligence qu'elles, Daas leur état de tiO Hifloirc naîurcVt liberté ( c ) , ils font extrêmement iauva- ges , & fe tiennent dans les bois {^d). Si l'on en croit les Voyageurs , ceux qui font tout blancs font les plus forts & les plus méchans de tous ; ils font très ar- dens pour les femmes , & affez forts pour îes violer lorfqu'ils les trouvent feules (c) , (c ) On trcnwe «u Malabar quatre efpèces de fm- ges i la première toute noire, le poil luifant, avec une barbe blanche qui lui ceint le menton, 6c qui a une palme & plus de longueur; les autres finges ont tant {le refpeft pour cette efpèce, qu'ils s'humilient en fa préfence comme s'ils écoient capables de reconroître ea «lie quelque fupériorité i les Princes & les G»'nnds eC- timent beaucoup ces Tinges à barbe, qui paroilTent avoir plus de gravité &. d'intelligence que les autres, on les éduque pour des cérémonies & des jeux , & ils s'en acquittent fi parfaitement, que c'eft une chofe. admirable. Voyage du Père Vincent Marie ^ cb. XIII , p. 40 <; , traduit par M. U Marquis de Montmirail. (d) A Ceyîan il fe trouve des finges auiFi grands- ■que nos épagneuls , qui ont le poil gris , le vifage noir avec une grancie barbe blanche d'une oreille à l'autre. , . . On en voit d'autres de la même groiTeur, mais d'une couleur cifT^Jrente ^ ils ont le corps, le vi- fsge & la barbe d'une blancheur éclatante ; cette dif- férence de couleur ne paroiifant pas changer l'efsèce, on les appelle également euanderous ; ils caufent peu -de ma! aux terres cultivées, & fe tiennent ordinaire- ment dsns les bois où ils ne vivent que de feuiMes & é du nom qu'il porte dans fon pays natal, à Sumatra 6c dans les autres provinces de l'Inde roé- tidionalc. Le finge à queue de cochon, GUnurtt d'Edwards , page S t fi g. ihid, baî>ouins du M ai mon, 1 1 1 babouins & guenons qui ait la queue nue, menue & tournée comme celle du cochon, li eft à-peu -près de la grandeur du magot & reflemble û fort au macaque qu'on pourroit le prendre pour une variété de cette efpèce , fi fa queue n'étoir pas tout-à-fait différente^ il a la face nue & bafanée, les yeux châ- tains , les paupières noires , le nez plat, les lèvres minces avec quelques poils roides , mais trop courts pour faire une mouftache apparente. Il n'a pas , comme les finges & les babouins , les bourfes à l'extérieur & la verge faillante , le tout eft caché fous la peau; aulîi le maimon , quoique très vif& plein de feu , n'a rien de la pétulance impu- dente des babouins : il eft doux , traitable & même careftant. On le trouve à Sumatra & vraifemblablement dans les autres provin- ces de l'inde méridionale; auffi foufFre-t-ii avec peine le froid de notre climat : celui que nous avons vu à Paris, n'a vécu que peu de temps , & M. Edwards dit n'avoir gardé qu'un an à Londres ceiu' qu'il a dé- crit (b). (J) Le finge à queue de cochon de l*ifle de Siv marra dans la mer des Indes , fat apporté en Angle- terre en 17^2 11 étoit extrêmenrent v'tî Si plein d'aftion : il étoit approchant de la groffeur d'un chat dotneftique ordinaire , . c'étoit un mâle, . . , il a vécu un an entre mes mains; je rencontrai une» femelle de la même efpèce qii'on montroit par curiofit<^ à Londres , eîle étcit la moitié plus grande il a comme eux,» {a) Macaque. Maca<[uo i nom dé cet animal dans^ fon pays naial , à Congo, & que nous avons adopté,- Ccrcopithccus Angolenfis major, in Confia vocaiur JVfa- (aqno. Marcg. Hi^i. nat. Brafd. page zz-j. Cercopithecus-cynocephalus ex viridcfcentibus & flayi^' tantibus viUs variegatus. Le cé'rcopiihèque-cynocéj.haleo BritT. Regn. anim. page ai^. Notiz. Il me fembie qae IVÎ. BriiVon a fait ici un double emploi , & que le fin- ge qu'ail indique dans l'article fuivant par !a déno.nina- tion de cercopithecus-cynosephalus naribus b:'Jidis , eladSf nurilus calvis ; le macaque eft le même animal. Simia ( JEgypdasa j cauda. clon%at'â . clunibus tubsrojîs- Kuàis. Voyrj;e d'HalTelquift. Roftock , 1762. Nota, L'épithète JÉeyptlaca a été mal appliquée à ce finge^: qui. ne s'eft trouvé en Egypte, que parce qu'il y avoit été apporté; ce que nous difons eft d'autant mi^uîc fondé que ce Voyageur fe contredit lui-même; cas" après avoir appelle cet animal Singe d'Egypte, il dtf dans le même article qu'il vient d'Ethiopie ; l'on fait i'Ailisurs qu'il n'y a aucune efpèce de un ce qai foi? Xv 2. ll6 Hijloîre naturelle !e corps court & ramalTé , la tête greffe , le mufeau large , le nez plat , les joues ridées , & en même temps il eft plus gros &. plus grand que la plupart des autres guenons ; il eft auffi d'une laideur hideufe , en forte qu'on pourroit le regarder comme une petite efpèce de babouin s'il n'en différoit pas par la queue qu'il porte en arc comme eux > mais qui eft longue & bien touffue : au lieu que celle des babouins en général , eft fort courte. Cette efpèce eft originaire de Congo & des autres parties de l'Afrique méridio- nale (c); elle eft nombreufe & fujette à plufieurs variétés pour ^a grandeur, les couleurs & la difpofitioa du poiL Celui naturelle 2x\ pays de l'Egypte , & que tous ceu^ qu'on» j voit viennent d'ailleurs par la voie du commerce^ Etfi in jEç^ypto ( dit Profper Alpin ) mdlnm fimianim fenns nafcatior , cujufTibet tamen gensris & ex ArabiS fiUci & ex ^thivpia. immenfx mercattine causa illuc tvnvehuntur. Hift. iSgypt. lib. IV ^ page 240. Cynamolgos. Simia caudata , imberbis , narihus hifidis *- itdtis , clunibus tuberofis^ Lînn. Syjl. nat. edit. X ,, page 2.8. {k ) Aigrette, cette gueiron re nous paroît être «qu'Une variété du Macaque ; nous l'iavons appeîlée V^digrette , parce qu'elle a uti grand épi de poil au- deffus de la tète i nous croyons que c'eft le même que VAi^ula de M. Linnseus. Syji. nat. edît. X, pag. zy , indiqué par Osbeck , fous la dénomination Simia cau- data fuh barbato grifea , emineTitia pilosd verùcis Longitu- dinali. Iriner. page 99. (c) Cercopithecus Angotenjis Macaquo. . . . Catidam portât arcuatam Cfamat hah , hah ; dentés habct e.lbijjîmci. Penem hahct humano JimiUm inj^dr fucii. Marcg. B'Ji', nat. Braf page 2^7. dû Macaque & de tArgntte, 117 qu'Haflelquift a décrit avoit le corps long de plus de deux pieds , & ceux que nous avons vus ne l'avoient guère que d'un pied & demi; celui que nous appelions ici VAî- g'- eue, parce qu'il a fur le fommet de la tête un épi ou aierette de poil , ne nous a paru qu'une variété du premier auquel ii refîemble en tout , à l'exception de cette différence & de quelques autres légères va- riétés dans le poil. Ils ont tous deux les mœurs douces & font affez dociles ; mais indépendamment d'une odeur de fourmi ou de faux mufc qu'ils répandent autour d'eux , ils font û mal - propres , fi laids & même fi affreux lorfquMls font la grimace y qu'on ne peut les regarder fans horreur & dégoût. Ces guenons vont fouvent par troupes & fe raffemblent , fur - tout pour voler des fruits & des légumes> Bofman ra- conte qu'elles prennent dans chaque patte un ou deux pieds de milhio , autant fou& leurs bras & autant dans leur bouche , qu'el- les s'en retournent ainfi chargées, fautant continuellement fur les pattes de derrière , & que quand on les pourfuit, elles jettent les tiges de milhio qu'elles tenoient dans les mains & fous les bras , ne gardant que celles qui font entre leurs dents , afin de pouvoir fuir plus vite fur les quatre pieds ; au refte ( ajoute ce Voyageur ), elks exa- minent ajvec la dernière exactitude chaque tige de milhio qu'elles arrachent, & fi elle ne leur plaît pas elles îa rejettent à terre & en arrachent d'autres : en forte que par leur bizarre délicateÛe eiUs caufent beau- I î 8 Hifîolre naturelle coup plus de dommages encore que par leurs vols (?, Au refte , quoiqu'il y ait dans toutes les terres de l'Afrique un très grand nombre d'efpèces de finges , de babouins & de gue- nons , dont quelques - unes paroifTent afîéz femblables, les voyageurs (^) ont cepen- dant remarqué qu'elles ne fe mêlent jamais ( J ) Voyages de le Maire , ^agcs ;oj & 104. ( « ) On s'engageroit dans un détail infini fi l'on vouloit décrire toutes les efpèces de finges qui fe trouvent depuis Arquin jufqu'à Sierra-Leona; ce qu'il y a de plus remarquable , c'eft qu'elles ne fe mêlent point & qu'on n'en voit jamais de deux fortes dans le même quartier, *HiJloirc générale des voyagçs ^ tome II , du Patas, 123 & que pour Tordinaire chaque efpèce habite un quartier différent. Carackns dijiinclifs dt cette efplce. Le patas a des abajoues & des callofités fur les feffes ; fa queue eft moins longue que la tête & le corps pris enfemble ; il a îe fommet de la tête plat , le mufeau long , le corps alongé , les jambes longues ; il a du poil noir fur le nez & un bandeau étroit de même couleur au- deffus des yeux, qui s'étend d'une oreille à l'autre; le poil de toutes les parties fupérieures du corps eft d'un roux prefque rouge , & celui des par- ties de delîbus, telles que la gorge, la poi- trine & le ventre, eft d'un gris -jaunâtre, li y a variété dans cette efpèce pour la cou- leur du bandeau qui eft au-delTus des yeux, les uns l'ont noir & les autres blanc. Ils n'agitent pas leur mâchoire, comme le font les autres guenons lorsqu'elles font en co- lère; ils marchent à quatre pieds plus fou- vent qu'à deux , & ils ont environ un pied & demi ou deux pieds , depuis le bout du mufeau jufqu'à l'origine de la queue. Il pa- roît , par le témoignage des Voiageurs , qu'il y en a de plus grands. Les femelles font fujettes , comme les femmes, à un écoulement périodique. L î 1 14 Hijloln naturelle LE MALBROUCK[a]. E T L E BONNET - CHINOIS (h). Voyei planche VIII y fig. ! ^ & 2 de ce Volume ^^ES deux Guenons ou Singes à longue ueue nous paroifTent être delà mêmeefpèce, tte efpèce, quoique diiïérente à quelques oueu &ce (a) Malbroiick , nom de cet animal dans fon pays nati!, à Bengale, & que nous avons adopté. Cercopithecus primus y CLufii Exotic. page 371. Nota, Clufius ed^e^uT qui ait donné la figure de ce finge, (BJrie Nîèremberg & Jonfton ont copiée : mais Clufius n'avoit pas vu l'animal, il en avoit feulement une fi- gure enluminée qu'il dit même avoir fait corriger par (oi\ Peintre, Je ne fais cette obfervation que pour fonder un doute que je crois très raifonnable , c'eft q ie le flocon de poil qui eft au bout de la queue eft Vne imagination du defiinateur ; de tous les finges à queue qui nous font connus, il n'y a que le Jagoin Marikina ou petit lion , qui ait un flocon de poils au bout de la queue , encore cela n'eft-il pas fort fenfible : en ôtant donc ce flocon de poils qui me paroît imaginaire dans la figure donnée par Clufius » ce finge fera notre malbrouck. Faunus, Linn, Syjî, nat, edit X, page 26; (h) Bonnet chinois ^ nom que l'on a donné à cette efpèce de gusnon ou fin^^ à longue queue, parce nrorr^:\rji. Pt 8 iè^^S^^. :&^ iLfc- MaXorottcK. 2»Lr€^Boruvtt CkuxotJ-. 5 Le. Man^aty/. du Malhrouck , &c, llj égards de celle du Macaque , ne îaifTe pas d'ert être affez voifine, pour que nous foyons.dans le doute fi le Macaque, TAigrette, le Mal^ brouck & le Bonnet - chinois ne font pas quatre variétés , c'eft - à - dire , quatre racts conftantes d'une feule & même efpèce» Comme ces animaux ne produifent pas dans notre climat, nous n'avons pu acquérir par Texpérience aucune connoifTance fur l'unité ou la diverfité de leurs efpèces, & nous fommes réduits à en juger par la différence de la figure & des autres attributs extérieurs. Le Macaque & l'aigrette nous ont paru affez femblables pour préfumer qu'ils font de la même efpèce ; il en eft de même du malbrouck & du bonnet-chinois: mais com- me ils diffèrent plus des deux premiers qu'ils ne diffèrent entr'eux, nous avons cru de- voir les en féparer. Notre préfomption fur la diverfrté de ces deux efpèces eft fondée 1*^. fur la différence de la forme extérieure , 4^. fur celle de la couleur & de la dif- pofition du poil, 3^. fur les différences qui le trouvent dans les proportions du fquelette de ces animaux, & enfin fur ce que les deux premiers font natifs des contrées méridiona- les de l'Afrique, & que les deux dont il s'agit ici font du pays de Bengale : cette dernière confidération eft d'un aufii grand poids qu'aucune autre ; car nous avons prou- qu'el^e a le poil du fommet de latêie dîfpofé en forme de calotte ou de bonnet plat , comme le font les bonr nets des Chinois. 1 16 Hijîoln naturelle» vé que dans les animaux fauvages & rndé- pendans de Thomme , l'éloignement du cli- mat eft un indice alTez iur de celui des efpè- ces : aurefte, le malbrouck & le bonrxct- chinois ne font pas les feules efpèces ou races de finges que l'on trouve à Bengale ( c) ; il paroît , par le témoignage des Voya- geurs, qu'il y en a quatre variétés > favoir, des blancs , des noirs y des rouges & des gris; ils difent que les noirs font les plus ai- fés à apprivoifer : ceux-ci étoient d'un gris* roufsâtre , & nous ont paru privés & même affez dociles. » Ces animaux , difent les Voyageurs ( ^), dérobent les fruits & fur - tout les can- nes de fucre; Tun deux fait fentinelle fuif un arbre > pendant que les autres fe char- gent du butin ^ s'il aperçoit quelqu*un , il crie koup ^ houp , houp , d'une voix haute 6c diftinde; au moment de l'avis, tous jettent îes cannes qu'ils tenoient dans la main gau- che , & ils s'enfuient en courant à trois pieds, & s*ils font vivement pourfuivis^ ils (c) Nota. Je croîs qu^^on peut rapporter au ma!» brouck de Bengale refpèce de (inge à poil grisâtre de Calicut dont parle Pyrard ; il eft ( dit ce Voyaeeur ) défendu de tuer aucun finge dans ce pays ; ils font ft impoftuns, fi fâcheux & en fi grand nombre qu'ils caufent beaucoup de dommage, & que les habitans des villes & des campagnes font obligés de mettre des. treillis à leurs fenêtres pour les empêcher d'entrer dan4 les maifonj. Voyages de Fr, Pyrard^ tome I , p, ^^y^t (d) Voyage d'Ionigo de BierviUas , partie I/c^ page ijî. du Malhrouck , &c, îlf jettent encore ce qu'ils tenoient dans la main droite , & fe fauvent en grimpant fur les arbres qui font leur demeure ordi- naire ; ils fautent d'arbres en arbres; les fe- melles même chargées de leurs petits , qui les tiennent étroitement embralTées , fautent auffi comme les autres , mais tombent quel- quefois. Ces animaux ne s*apprivoifent qu'à demi , il faut toujours les tenir à la chaîne; ils ne produifent pas dans leur état de fer- vitude , même dans leur pays^, il faut qu'ils foient en liberté dans leurs bois. Lorfque les fruits & les plantes fucculentes leur manquent, ils mangent desinfedes, & quel- quefois ils defcendent fur les bords des fleu- ves &i de la mer pour attraper des poiiTons & des crabes; ils mettent leur queue entre les pinces du crabe , & dès qu'elles ferrent, ils Tenlèvent brufquement & l'emportent pour le manger à leur aife. Ils cueillent les noix de cocos, & favent fort bien en tirer la liqu,eur pour la boire , & le noyau pour le manger. Ils boivent auiîi du :(ari qui dégoutte par des bamboches qu'on met exprès à la cîme des arbres pour en attirer la liqueur, & ils fe fervent de l'occafion. On les prend par le moyen des noix de co- cos où l'on fait une petite ouverture; ils y fourent la patte avec peine , parce que le trou eft étroit , & les gens qui font à l'afFùt les prennent avant qu'ils ne puifTent fe dégager. Dans les provinces de l'Inde ^ habitées par les Bramans , qui , comme l'on fait, épargnent la vie de tous les ani- maux ^ les fmges, plus refpe«Slés encore que L 4 1 2 s Hifwin naîUTttU TOUS îes autres^ font en nombre infini; ils viennent en troupe dans les villes, ils en'- trent dans les maifons à toute heure :, en toute liberté ; enforte que ceux qui vendent des denrées, & iur-tout des fruits, des lé-' gumes , &c. ont bien de la peine à les conferver «. Il y a dans Amadabad , capi- tale du Guzarate , deux ou trois hôpitaux d'animaux , où l'on nourrit les finges eftro- piés , invalides , & même ceux qui fans être malades veulent y demeurer. Deux fois par femaine les finges du voifmage de cette ville fe rendent d'eux - mêmes tous enfemble dans les rues, enfuite ils mon- tent fur les maifons qui ont chacune une petite terraffe, où Ton va coucher pendant les grandes chaleurs; on ne manque pas de mettre ces deux jours- là fur ces petites terraffes du riz, du millet, des cannes de fucre dans la faifon , &. autres chofes fem- blables; car fi par hafard les finges ne trouvoient pas leur provifion fur ces terraf- fes, ils romproient les tuiles dont le refte de la maifon eft couvert , & feroient un grand défordre. Ils ne mangent rien fans le bien iéntir auparavant; & lorfqu'ils font repus, ils rempliflent pour le lendemain les poches de leurs joues. Les oifeaux ne peuvent guère nicher fur les arbres dans les endroits où il y a beaucoup de fmges , car ils ne manquent jamais de détruire les nids & de jeter les œufs par terre ( e ). («) Voyez les voyages de la Boulaye-le Gouz,/>. du Malhroucky &c. 119 Les ennemis les plus redoutables pour les fmges ne lont ni le tigre ni les autres bêtes féroces , car ils leur échappent aifé- ment par leur légèreté &. par le choix de leur domicile au-deffus des arbres , où il n'y a que les ferpens qui aillent les chercher & fâchent les furprendre. Les finges, dit un Voyageur, font en poiTeflion d'être maîtres des forêts; car il n'y a ni tigres ni lions qui leur difputent le terrein y ils n'ont rien à craindre que les ferpens, qui, nuit & jour , leur font la guerre ; il y en a de prodigieufe grandeur , qui tout d'un coup avalent un fmge ; d'au- tres moins gros , mais plus agiles , les vont chercher jufque fur les arbres Us épient le temps où ils font endormis , &c. «(f). Caraclcres dijîincllfs de cette efpece. Le malbrouck a des abajoues & des cal- lofirés fur les fefTes, la queue à - peu - près longue comme la tète & le_ corps pris en- fembJe , les paupières couleur de chair, la face d'un gris-cendré, les yeux grands, le ijj j la relation de Thévenot , tome III ^ p. 20 ; le voyage de Gemelli Careri , tome V , p. i6^;\e vezueW des voyages qui ont fervi à l'établiffement de la Com- pagnie des Indes orientales, torni VII y P- 3^ i 1® voyage d'Orient du P. Philippe, p. -^iz^ ôc le voyage de Tavernier , tome lU , p. 64. (/; Delcription hiftorique du Macacar , p. 51, IJO Hijîo'ire naturdk mufeau large & relevé, les oreilles grandes, minces & couleur de chair : il porte un bandeau de poils gris, comme la mone; mais au refte il a le poil d'une couleur uni- forme, d'un jaune-brun fur les parties fu- périeures du corps, & d'un gris - jaunâtre lur celles du deffous; il marche à quatre pieds , & il y a environ un pied & demi de longueur depuis l'extrémité du mufeau jufqu'à l'origine de la queue. Le bonnet-chinois paroît être une variété du malbrouck ; il en diffère en ce qu'il a le poil du fommet de la tète dirpofé en forme de calotte ou de bonnet plat, & que fa queue eft plus longue à proportion du corps. Les femelles , dans ces deux races font fujettes, comme les femmes , à récoulement périodique. Torrv.'V^II Pt.^. Callttrtclve^ . du Mangahey, 1 3 î LE MANGABEY [a]. Voye^ planche VIII ^fi?;. 3, & planche IX fig. i de ce Volume, i%ous avons eu deux individus de cette cipèce de Guenons ou Singes à longue queue y tous deux nous ont été donnés fous la dénomination de Singes de Madagafcav.W eft facile de les dii^inguer de tous les au- tres par un caraétère très apparent. Les Mangabeys ont les paupières nues & d'une blancheur frappante; ils ont aufli le mufeau gros, large Ôc alongé ; & un bourrelet fail- fant autour des yeux. Ils varient pour les couleurs ; les uns ont le poil de la tète noir , celui du cou & du deiTus du corps brun- fauve , & le ventre blanc; les autres l'ont plus clair (ur la tête & fur le corps , & ils diffè« rent fur-tout des premiers par un large coU {a) M^r.gahcy y nom précaire que nous donnons i cet animal, en attendant qu'on fâche fon vrai nom | comme il fe trouve à Madagafcsr , dans les terres voi- fines de Mangabey , cette dénomination en rappellera i*idée aux Voyageurs qui feront à portée de le voir & de s'informer tiu nom qu'il porte dans cette ifle qui eîl fon pays natal, Mthiops , fimia caudaia imherhts , verticc pilis arrecîU lunuLâque frontis albis. . , . corpin fufcum , fubtus al- hum , cauda. reSa , fubtus alba , jupcrc'dia feu lunula albii iranfvcrfa , pa/pebra fupzrior nuda , alba , aures acutiuj" iulis. Linn, Syjî, nau edit. X , page l8. 131 HifloiTt naturelle lier de poils blancs qui leur environnent le cou & les joues : tous deux portent la queue relevée , & ont le poil long & touffu ; ils (ont du même pays que le vari ; & comme ils lui reffemblent par l'alongement du mufeau , par la longueur de la queue , par la manière de la porter , & par les varié- tés de la couleur du poil , ils me paroiffent faire la nuance entre les makis 6t les gue- nons. Caractères dijiinclifs de cette efpece. Le Mangabey a des abajoues & des cal- lofités fur les feffeSjla queue au ffi longue que la tête & le corps pris ehfemble. Il a un bourrelet proéminent autour des yeux Se la paupière fupérieure d'une blancheur frap- pante. Son mufeau eft gros & longj fes îburcils font d'un poil roide & hériffé, fes oreilles font noires & prefque nues ; le poil des parties fupérieures du corps eft brun , & celui des parties inférieures eft gris. Il y a variété dans cette efpèce; les uns étant de couleur uniforme, & les autres ayant un cercle de poil blanc en forme de collier autour du cou , & en forme de barbe autour des joues. Ils marchent à quatre pieds , & ils ont à-peu- près un pied & demi de longueur depuis le bout du mufeau juf- qu'à l'origine de la queue. Les femelles , dans ces efpèces font fujettes , comme les femmes, à un écoulement périodique. dz la Mont» 155 L A M O N E (a). Voyi^^ planche IX , figure 2 de ce volume» JLiA Mone eft la plus commune des gue- nons ou finges à longue queue, nous l'avons eu vivante pendant plufieurs années ; c'eft , avec le magot, l'eTpèce qui s'accommode ie mieux de la température de notre climat: (CXXXXXXXXXXXXXKX>CXXX'* LE CALLITRICHE [a]. Voy&l^ planche. IX y fig, j de ce Volume, K^ALLiTRix eft un terme employé par Homère, pour exprimer en général la belle couleur du poil des animaux : ce n'eft que plufieurs fiècles après celui d'Homère que les Grecs ont en particulier appliqué ce nom à quelques efpèces de guenons ou fin- ges à longue queue, remarquables parla beauté des couleurs de leur poil; mais il doit appartenir de préférence à celui dont il eft ici queftion. Il eft d'un beau vert fur le corps , d'un beau blanc fur la gorge & le ventre , & il a la face d*un beau noir; d'ailleurs il fe trouve en Mauritanie & dans les terres de l'ancienne Carthag^ : ainfi il y (â) Cercopithecus ex cinereo fiavefcens , genis longij pUis.. albis objitis. Le finge vert. Bnjf» regn. anim, page ao4. Le Tinge de l'ifle Saint- Jacques ; on donne fouvent à cet animal le nom de Singe vert , & nous le diftin- gu ns par ce nom ; nos gens de mer l'appellent en général le Singe de Saint- Jacques , paTce qu'il fe trouve dans cette isle du Cap-vert. Glanures d'Edwards , pa^, to , fig. ibid. Aux isles dû Cap-vert, il y a des linges à longue qtieue. qui ont le vifsge noir. Voyage de Vampier, terne IV t p. 54. M 1 3^ Illfioirc n&turelh a tout apparence qu'il étoit connu des Grecs: & des Romains , & que c'étoit l'une des guenons ou finges à longue queue , auxqueis^ ils donnoient Je nom de caliitrix; il y a d'autres guenons de couleur blonde dans les terres voifines de l'Egypte , foit du côté de r^thiopie, foit de celui de l'Arabie^ que les Anciens ont aufll défignées par li nom générique de caliitrix. Profper Alpin & Pietro délia Valle (^), parlent de ces callitriches de couleur blonde ; nous n'avons pas vu cette efpèce blonde , qui n'eft peut- être qu'une variété de celle-ci ou de celle de la mone , qui eft très commune dans ces mêmes contrées. Au refte, il paroît que le callhrîche ou- Jin^e vert fe trouve au Sénégal , aufli-bieii qu'en Mauritanie & aux isles du Cap-vert,. M. Adanfon rapporte que les environs des bois de Podor, le long du fleuve Niger, font remplis de fmges verts. » Je n'apper- <;us ces (inges, dit cet Auteur, que par les branches qu'ils caffoient au haut des ar* {b) Simîitm Callltrichum Cairi in tzdihiis hahùmus fc' Ittn magnjm qnad^mtenus magnicudine temulantem , pre^^ lixiori corporis figura , capitc pcrvo crat 6* rotvndo. . . , iorpore circa ULa gracilijjïmo , toto corpcre riifo rutilovs fpcBahatur , faciès vero humana fimilis fuit nlgra, undi- ^uc harhdta , fcd harha alhi erat coU-ris. . . . caudamque longam rutilamqus kabehat. Profp. Alp. JJiJf. Mgypty 3ib. IV, page 144, fi^. tab. XX , n^. 4 — J'ai vu nuiTi fians le Caire p'ufisurs animaux vivans , comme de$ Callitriches ou Guenons de cou'eur blonde, Viiyagt dé Pietro ddU ValUy tvmn /, page 40;,, du Catlitnche, I J 9 bres , d'où elles tombaient fur moi : car ils étoient d'ailleurs fort filencieux, & fi lé- gers dans leurs gambades , qu'il eût été difficile de les entendre ; je n'allai pas plus loin, & j'en tuai d'abord un, deux & même trois, fans que les autres paruflent effrayés > cependant iorfque la plupart fe fentirenc bleffés , ils commencèrent à fe mettre à l'a- bri , les uns en fe cachant derrière les grof- fes branches, les autres en defcendant à terre ; d'autres enfin , & c'étoit le plus grand nombre , s'élançoient de la pointe d'un arbre fur la cime d'un autre Pendant ce petit manège , je continuois tou- jours à tirer deffus , & j'en tuai jufqu'au nombre de vingt-trois en moins d'une heure & dans un efpace de vingt toifes , fans qu'au- cun deux eût jeté un feul cri : quoiqu'ils fe fuffent plufieurs fois raffemblés par compa- gnie en fourcillant, grinçant des dents & faifant mine de vouloir m'attaquer «. P^oyagg 4SU Sénégal y par M, Adanfon page ty8, Caracieres distlnclifs de cette cfps:e. Le callitrîche a des abajoues & des callo- fîtes fur les fefles , la queue beaucoup plus longue que la tête & le corps pris enfemble; il a la tète petite , le mufeau alongè, la face noire aufîi-bien que les oreilles; il porte une bande étroite au lieu de fourcils au bas du front, & cette bande eft de longs poils noirs. Il eft d'un vert vif mêlé d'ur^ peu de jaune fur le corps , & d'un blan^- M % 140 Hifiotre natunlli jaunâtre fur la poitrine & le ventre; il mar- che à quatre pieds, & la longueur de Ton corps , y compris celle de la tête , eft d'en- viron quinze pouces. La femelle eft fujette à l'écoulement périodique. TorTV-V^IE. Rio. iLC' Moajtac . 2. Lte^TaXouooirv. S Lt v- D du Moustac, 14' L E MO U S T^A C [a]. Voyci^ planche Xy fig, i de u Volume, J_je Mouftac nous paroît être du même pays que le Macaque , parce qu'il a , comme lui , le corps plus court & plus ramafle que les autres guenons; c'eft très vraifembla- blement le même animal que les Voyageurs de Guinée ont appelé Bianc-ne^ {b) , parce qu'en effet, il a les lèvres au-deffous du nez d'une blancheur éclatante , tandis que le refte de fa face eft d'un bleu-noirâtre; il a auiîi deux toupets de poils jaunes au-def- fous des oreilles , ce qui lui donne l'air très fmgulier ; & comme il eil en même temps d'aflez petite taille , c'eft de tous les (a) Mouftac. Muflax, Mouftache : comme la Gue- non dont il eft ici queftion n'a point été nommée, TOUS lui avons donné ce nom , qui fuffira pour la faire reconnoître & diftinguer de toutes les autres ; elle eft en effet très remarquable par fa lèvre fupé- rieure , qui eft nue & d'une blancheur d'autant plus frappante, que le refte de fa face eft noir, (è ) Il y a d^autres Singes à la côte d'Or, que Ton comme Blancs-ne\, parce que c'eft la feiile partie de leur corps qui foit de cette couleur : ils font puans fic farouches. Relation d'Artus ^ hifioire ^éairaU des voyages ^ time IV i page zjS» I4Î Hijloire namrtlU finges à longue queue celui qui nous a paru le plus joli. Caracîcres distinclifs de cette ejpïce. Le mouftac a des abajoues & des callofi- tés fur les feffes , la queue beaucoup plus longue que la tête & le corps pris enfem- ble , elle a dix -neuf ou vingt pouces de longueur; il a la face d'un noir bleuâtre avec une grande & large marque blanche en forme de chevron au-deffous du nez & fur toute rétendue de la lèvre fupèrieure , qui eft nue dans toute cette partie ; elle eft feulement bordée de poils noirs, auffi-bien que la lèvre inférieure tout autour de la bouche : il a le corps court & ramalTé ; \\ porte deux gros toupets de poil d'un jaune vif au-defîbus des oreilles; il a aufli un tou» pet de poil hérifle au-defTus de la tête \ le poil du corps eft d'un cendré - verdâtre ; la poitrine & le ventre d'un cendré- blanchâ- tre ; il marche à quatre pieds , & il n'a qu'environ un pied de longueur, la tête & le corps compris. La femelle eft fujette à l'é- coukment périodique. t du Talapoîn, 14J LE TALAPOIN (a). Voyei planche X fig, i de ce Volume^ i^ETTE Guenon eft de petite taille, & d'une affez jolie figure j fon nom paroîtroit indiquer qu'elle fe trouve à Siam & dans les autres provinces de TAfie orientale ; mais nous ne pouvons l'aiTurer ; feulement, il eft certain qu'elle eft originaire de Tan- cien continent & qu'elle ne ie trouve point dans le nouveau, parce qu'elle a des abajoues & des callofités fur les felTes , & que ces deux caraclères n'appartiennent ni aux fagoins ni aux fapajous , qui font les feuls animaux du nouveau monde qu'on; puiiTe comparer aux guenons. Ce qui me porte à croire indépendamment du nom , que cette guenon fe irouve plus communément aux Indes orientales qu'en Afrique , c'eft que les Voyageurs rapportent que la plupart des fmges de cette partie de i'Afie ont le poil d'un vert-brun^ n Les finges du Guzarate y difent-ils y font d'un vert brun , ils ont la barbe & les four- cils longs & blancs ; ces animaux que les (a) TaJapoin, nom fous îtqtie; ce Singe nous a été 144 Hijlolrt naturelle Banianes laiflent multiplier à l'infini par un principe de religion, font fi familiers, qu'iîs entrent dans les maifons à toute heure & en fi grand nombre que les marchands de fruits & de confitures ont beaucoup de peine à conferver leurs marchandifes (i) a. M. Edwards a donné la figure & la defcrip- tion d'une guenon , fous le nom de Singe noir de moyenne grandeur, qui nous paroît approcher de Tefpèce du talapoin plus que d'aucune autre. J'ai cru devoir en rapporter ici la defcription ( c ) , & renvoyer à la figure donnée par M. Edwards , pour qu'on puiffe comparer ces animaux ; on verra qu'à l'ex- (J) Hiftoire générale des voyages, tome X, p. 6j (c) Ce fmge étoit à-peu-près de la taille d'un gros chati il étoit d'un naturel doux, ne faifant mal à perfonne c'étoit un mâle , & il étoit un peu vieux fa tête étoit affez ronrfe; la peau de fon vifage étoit d'une couleur de chair rembrunie, couverte de poils noirs affez clair femés; les oreil'es étoient faites comme celles de l'homme j les yeux étoient d'une couleur de noifette- rougeatre avec les paupières noires ; le poil étoit long au deffcas éts yeux, & les fourcils fe joignoient ; il étoit long au(îi fiT les tempes & couvroit en partie les oreilles; la tête, le dos, les jambes de devant & de derrière ôc la queue étoient couverts d'afTez longs poils d'un brun- noirâtre , qui n*étoit ni trop doux ni trop rude ; la poitrine, le ventre, &c. étoient prefqwe fans poil, d'une couleur de chair rembrunie, ayant des bouts de fein à la poitrine. Les quatre pattes étoient faites à- peu-prè$ comme la main de l'homme , éfar.t couvertes d'une peau douce & noire prefque fans poils; les or.- gleî étoient plats. OlanuKs d'Edwards p. 221. ceptlon du Taîapoin, f4| Cèption de la grandeur & de la couleur > ils fe reffemblent afTez pour qu'on doive préfumer que ce font au moins deux eipè- ces bien voifmes , fi ce ne font pas des va- riétés de la même efpèce : dans ce cas , comme nous ne fommes pas fûrs que no- tre talapoin Toit natif des Indes orientales» & que AI. Edwards afiure que celui qu'il décrit venoit de Guinée , nous rendrions le talapoin à c€ même climat , ou bkn noas fuppoferions que cette efpèce fe trouve éga- lement dans les terres du midi de l'Afrique & de TAfie : c'eft vraifembhblement de cette même efpèce de fing^5 noirs, décrits par M. Edwards , donv parle Bofman , fous le nom de Baurdmannetjes , & dont il dit que la peau fait^ une bonne fourrure ( d ). ( i ) On trouve en Guinée une trolfième efpèce de 5rges parfnicement jolis , qui ont pour l'ordinaire deux ■pied, de hauteur i lear poil eft extrêmement noir, de U longueur d'an doigt & -davantage , avec une barbe blanche, d'ovi les Hol'andois les ont appelles Baurdman" fictfis : on fait des bonnets de leur peau , & chaque fourrure s'achette quatre écus. Voyage de BcfmaK » Qu^dntpldis , Tom. VU. H 146 Hljlolre naturclU LE D O U C [a]. Voyci^ planche X^ fig. j dt et Volume, J-JE Doue eft le dernier de la claffe des animaux que nous avons appelés S'inps , Babouins , & Guenons : fans être précifément d'aucun de ces trois genres , il participe de tous ; il tient des guenons par fa queue longue , des babouins par fa grande taille , & des fînges par fa face plate ; il a de plus un caradère particulier , & par lequel il paroît faire la nuance entre les guenons & les fapajous : ces deux familles d'animaux diffèrent entre elles , en ce que les guenons ont les feffes pelées, & que tous les fapa- jous les ont couvertes de poil; le doue eft la feule des guenons qui ait du poil fur les feffes comme les fapajous : il leur reffemble aulîi par l'aplatiffement du mufeau : mais en toutj il approche infiniment plus des (a) Doue t nom de cet animal à la Cochînchine, & «jue nous avons adopté : ce nom que nous ignorions nous a été donné par M. Poivre, aufTi- bien que l'a- nimal même, 5/^^c à Madagafcar. Cercopithecus cinereus^ genis longls pilis ex albo fiavi- fantibus ohfitis y torque ex cajianeo purpurafcenti. Le grand finge de la Cochinchine, Briflf. ngn, anim. pa^e du Doue, î 4^ g^uenons que des fapajous , defqueis il diftè- rs, en ce qu'il n'a pas Ja queue prenante,, & aufli par plufieurs autres cara6lères effen- tiels .* d'ailleurs l'intervalle qui fépare ces deux familles eft immenfe , puifque le doue & toutes les guenons font de Tancien con- tinent, tandis que tous les fapajous ne fc trouvent que dans le nouveau : on pourroit dire aufli , avec quelque raifon , que le doue ayant une longue queue comme les gue- nons , & n'ayant pas comme elles des callo- sités fur les feffes, il fait la nuance entre les orang-outangs & les guenons, comme le gibbon la fait aufli à un autre égard , n'ayant point de queue comme les orang- outangs 5 mais ayant des callofités fur les fefles comme les guenons. Indépendamment de ces rapports généraux , le doue a des caractères particuliers, par lefqueîs il eft très remarquable & fort aifè à diftinguer d« tous les finges , babouins , guenons ou fapa- jous, même au premier coup-d'ceil; fa robe variée de toutes couleurs , femble indiquer l'ambiguité de fa nature, & en même temp» différencier fon efpèce d'une manière évi- dente. 11 porte autour du cou un collier d'un brun-pourpre; autour des joues une barbe blanche; il a les lèvres 6: le tour des yeux noirs, la face & les oreilles rou- ges ; le defl'us de la tête & le corps gris , Ja poitrine & le ventre jaune, les jambes blanches en bas , noires en haut; la queue blanche avec une large tache de même couleur fur les lombes ; les pieds noirs avec plufieurs autres nuances de couleur, li me N a 148 Hijîolrc naturelle paroît que cet animal qu'on nous a afTurc venir de la Cochinchine fe trouve aufli à Madagafcar, & que c'eft le même que Flac- court indique fous le nom de fifac dans les termes fuivans : »» à Madagafcar, il y a , dit-il, une autre efpèce de guenuche blan- che , qui a un cliaperon tanné , & qui fe tient le plus fouvent fur les pieds de der- rière; elle a la queue blanche & deux ta- ches tannées fur les flancs ; elle eft plus grande que le vari ( mococo ) , mais plus petite que le varîcojji, (vari); cette efpèce sappelle fifac : elle vit de fèves ; il y en a beaucoup vers Andrivoure , Dambourlomb & Ranafoulchy (^), «. Le chaperon ou collier tanné, la queue blanche, les taches lur les flancs font des caradères qui indi- quent affez clairement que ce fifac de Mada- gafcar eil de la même efpèce que le doue de la Cochinchine. Les Voya^^eurs aflTurent que les grands finges des parties méridionales de l'Afie pro- duifent des bézoards qu'on trouve dans leur ellomac , & dont la qualité eft fupérieure à celle des bézoards des chèvres & des ga- zelles ; ces grands fmges des parties méri- dionales de l'Inde , font l'ouanderou & le doue; nous croyons donc que c'eft à ces efpèces qu'il faut rapporter la production des bézoards: on prétend que ces bézoards de finge font toujours d'une forme ronde , au {h) Voyage de Flaccourt,;»fl^e //j. dû Donc, 1 49 lieu que les autres bézoards font de diffé* rentes figures (c). Caracicrcs distinciifs de acte cfpece. Le doue n'a point de callofités fur les fefles, il les a garnies de poil par-tout; fa queue , quoique longue , ne l'eft pas autant que la tête & le corps pris enfemble ; il a la face rouge & couverte d'un duvet roux ^ les oreilles nues & de même couleur que Ja face, les lèvres brunes aufîî-bien que les orbites des yeux ; le poil de couleurs très vives & très variées ; il porte un ban- deau & un collier d'un brun - pourpre ; il a du blanc fur le front , fur la tête , fur le corps, les bras, les jambes, &c. une efpèce de barbe d'un blanc -jaunâtre ; il a du noir (e) Comme les fmges, aufTi bien que les chèvres, mangent les boutons de certains arbriffeaux , il fe produit dans leur ventre des pierres de bézoard : on en trouve fouvent dans leurs excrémens, que la peur qu'ils ont d'être battus leur fait lâcher en courant : ces pierres de bézoard font les plus chères & les plus «ftimées de toutes celles qui fe trouvent dans les In- lîes , elles font aufTi plus rondes que les autres, & ont bien plus de force : on a éprouvé quelquefois qu'ua grain de celles-ci avoit autant d'effet que deux de celles qui viennent des chèvres. Defcripdon hijîoriquc du Ma- cacar y pa^e fi. Nota. En comparant ce paffnge avec celui de Kr.ox, que nous avons rapporté à l'article de rOuanderou, il paroît que ce font les ouanderous qui vivent de boutons d'arbres , & que par conféquent ce font eux qui produjfent \% plus communément des bé- ^oards._ N 3 150 Hijiùire naîwrdlt au-deffii» dn front & à la partie fupérieure des bras; les parties du deflbus du corp& font d'un gris-cendré & d'un jaune-blanchâ- tre ; la queue eft blanche, auffi-bien que le bas des lombes : il marche aufîi fouvent fur deux pieds que fur quatre, & il a trois pieds &. demi ou quatre pieds de hauteur îorfqu*il eft debout. J'ignore fi les femelles dans cette efpèce font fujettes à l'écoulé- aaent péfriodique. Dégénération des animaux, 151 DELA DÉGÉNÈRATION DES ANIMAUX. JL/Ès que rhomme a commencé à changer de ciel , & qu'il s'eil répandu de climats en climats , fa nature a lubi des altérations : elles ont été légères dans les contrées tempérées , que nous luppofons voifmes du lieu de (oa origine : mais elles ont augmenté à mefure quM s'en eft éloigné ; & lorfqu'après des fiècles écoulés, des continens traveriés & des générations déjà dégénérées par Tin- fluence des différentes terres , il a voulu s'habituer dans les climats extrêmes, & peu- pler les labiés du Midi & les glaces du Nord, les changemens font devenus fi grands & fi fenfibles, qu'il y auroit lieu de croire que k Nègre , le Lappon & le Blanc forment des elpèces différentes, fi d'un côté l'on n'ètoit affuré qu'il n'y a eu qu'un feul Homme de créé , & de l'autre que ce Blanc , ce Lappon & ce Nègre , fi difiémbians en- tr'eux, peuvent cependant s'unir eniemble & propager en commun la grande & uni» que famille de notre genre humain. Ainfi leurs taches ne font point originelles ; leurs diffemblances n'étant qu'extérieures , cesalté- N 4 I ^ l Hiftoire nstureltt. rations de nature ne font que Tuperficielles % & il eft certain que tous ne font que î'e même homme qui s'eft verni dç noir fous la zone torride , & qui s'eft tanné , rape- tiffé par le froid glacial du Pôle de la fphère. Cela feul fuffiroit pour nous démontrer qu'>l^ y a plus de force, plus d'étendue, plus àé* flexibilité dans la nature de l'homme que dans celle de tous les autres êtres; car les végétaux & prefque tous les animaux font confinés chacun à leur terrein , à leur cli- mat : & cette étendue dans notre nature vient moins des propriétés du corps que de celles de l'ame ; c'eft par elle que rhom.me a cherché les fecours qui étoient néceffai- res à la délicatefFe de fon corps ; c'eft par elle qu^il a trouvé les moyens de braver l'inclémence de l'air , & de vaincre la du- reté de la terre. Il s^eft, pour ainfi dire > foumis les élémens ; par un feul rayon de fon intelligence , il a produit celui du feu qui n'exiftoit pas fur la furface" de la terre \ il a fu fe vêtir, s'abriter, fe loger; il a compenfé par l'eTprit toutes les facultés qui manquent à la matière; & fans être ni fl fort j ni fi grand, ni fi robufte que la plu- part des animaux , il a fu les vaincre , les dompter, les fubjuguer, les confiner, les chaffer & s'emparer des efpaces que la Na- ture fembloit leur avoir exclufivement dé- partis. La grande d"ivifion de la terre eft celle des deux continens; elle eft plus ancienne que tous nos monumens ; cependant l'hom- me eft encore plus anciens car il s'eft trouvé Deginération des Ammnvx. 153 le même dans ces deux mondes : l'Afiati^ que , l'Européen , le Nègre produifent éga- lement avec TAmericain ; rien ne prouve mieux qu'ils font iffus d'une feule & même fouche, que la facilité qu'ils ont de fe re- unir à la tige commune : le fang eft diffé- rent, mais le germe eft le même; la peau, les cheveux, les traits, la taille ont varie fans que la forme intérieure ait changé ; le type en eft général & commun : & s'il ar- rivoit jamais , par des révolutions qu'on ne doit pas prévoir, mais feulement entrevoir dans l'ordre général des poifibilités , que le temps peut 'toutes amener; s'il arrivoit, dis- je , que l'homme fût contraint d'aban-. donner les climats qu'il a autrefois envahis pour fe réduire à fon pays natal, il repren- droit avec le temps fes traits originaux , fa taille primitive & fa couleur naturelle : le rappel de l'homme à fon climat amèneroit cet effet, le mélange des races l'amèneroit auffi & bien plus promptement ; le Blanc avec la Noire, ou le Noir avec la Blan- che produifent également un Mulâtre dont la couleur eft brune, c'eft-à-dire , mêlée de blanc & de noir ; ce Mulâtre avec un blanc produit un fécond Mulâtre moins brun que le premier; & fi ce fécond Mulâtre s'unit de même à un individu de race blanche , le troifième Mulâtre n'aura plus qu'une nuance légère de brun qui difparoîtra tout - à - fait dans les générations fuivantes, U ne faut donc que cent cinquante ou deux cents ans pour laver la peau d'un Nègre par cette voie du mélange avec le fang du Blanc ; 1^4 Hijîoire naturelle^ mais il faudroit peut - être un affez grand nombre de fiècles pour produire ce mé.-ne effet par la feule influence du climat. De- puis qu'on tranfporte des Nègres en Améri- que , c'eft-à-dire depuis enviion deux cents cinquante ans, l'on ne s'eft pas aperçu que les familles noires qui fe font foutenues fans mélange , ayent perdu quelques nuan- ces de leur teinte originelle; il eft vrai que ce climat de l'Amérique méridionale étant par lui-même aflez chaud pour brunir fes habitans , on ne doit pas s'étonner que les Nègres y demeurent noirs : pour faire l'ex- périence du changement de couleur dans î'efpèce humaine , il faudroit tranfporter quelques individus de cette race noire du Sénégal en Danemarck , où 1 homme ayant communément la peau blanche, les cheveux blonds, les yeux bleus, la différence du fang & l'oppofition de couleur etl la plus grande. Il faudroit cloîtrer ces Nègres avec leurs femelles, & conferver fcrupuleufement leur race fans leur permettre de la croifer ; ce moyen eft le feul qu'on puiffe employer pour favoir combien il faudroit de temps pour réintégrer à cet égard la nature de l'homme; & par la même raifon , combien il en a fallu pour la changer du blanc au noir. C'eft-là la plus grande altération que le ciel ait fait fubir à l'homme , & l'on voit qu'elle n'eft pas profonde; la couleur de la peau, des cheveux &. des yeux, varie par la feule induence du climar; les autres changemens , tels que ceux de la taille ^ de la Dégénéranon des Animaux, i \ 5 forme, des traits & de la qualité des che- veux, ne me paroiffent pas dépendre de cette feule cauf^; car dans la race des Nè- gres , lefquels , comme l'on fait, ont pour h plupart la tête couverte d\me laine cre- . pue, le nez épaté, les lèvres épaiffes , on trouve des nations entières avec de ongs & vrais cheveux , avec des traits réguliers; & Ij l'on comparoit dans la race des Blancs le Danois au Calmouque , ou feulement le Finlandois au Lappon dont il eft fi voifin > on trouveroit entr'eux autant de différence pour les traits & la taille , qu'il y en a dans la race des Noirs : par conséquent il faut admettre pour ces altérations qui font plus profondes que les premières , quelques autres caufes réunies avec celle du climat. La plus générale & la plus direde eft la quantité de la nourriture ; e'eft principale- Hient par les alimens que l'homme reçoit l'influence de la terre qu'il habite : celle de l'air & du ciel agit plus fuperficiellement ; & tandis qu'elle altère la furface la plus extérieure en changeant la forme delà peau, la nourriture agit fur la forme intérieure par fes propriétés q.ui font conttamment re- latives à celles de la terre qui la produit. On voit dans le même pays des différences marquées entre les hommes qui en occu- pent les hauteurs , & ceux qui demeurent dans les lieux bas ; les habitans de la mon- tagne font toujours mieux faits, plus vifs & plus beaux que ceux de la vallée^ à plus forte raifon dans des climats éloignés éaa climat primitif» dans des climats où les 1^6 Hlflolre natunile, herbes, les fruits , les grains & la chair Je* animaux font de qualité & même de fubf- tance différentes , les hommes qui s'en nourriffent doivent devenir différens. Ces impreflîons ne fe font pas fubitement ni même dans TeTpace de quelques années; il faut du temps pour que l'homme reçoive la teinture du ciel, il en faut encore plus pour que la terre lui tranfmette Tes quali- tés ;& il a fallu des fiècles joints à un ufage toujours conAant des mêmes nourritures , pour influer fur la forme des traits , fur la grandeur du corps , fur la fubftance des cheveux , & produire ces altérations intérieures , qui s'étant enfuite perpétuées par la génération , font devenues les ca- raélères généraux & conftans auxquels on reconnoît les races & même les nations différentes qui compofent le genre hu- main. Dans les animaux , ces effets font plus prompts &plus grands , parce qu'ils tiennent à la terre de bien plus près que l'homme; parce que leur nourriture étant plus uni- forme, plus conftamment la même, & n'é- tant nullement préparée , la qualité en eft plus décidée & l'influence plus forte ; parce que d'ailleurs les animaux ne pouvant ni fe vêtir, ni s'abriter, ni faire ufage de l'élément du feu pour fe réchauffer , ils de- meurent nuement expofés, & pleinement livrés à l'aftion de l'air & à toutes les in- tempéries du climat : 8i c'eft par cette rai- fon que chacun d'eux a, fuivant fa nature, choiii fa zone ôt fa contrée; c'eft par la Digéncration dts Animaux» I57 même raifon qu'ils y font retenus , & qu*au lieu de s'étendre ou de fe diiperfer comme l'homme , ils demeurent pour la plupart concentrés dans les lieux qui leur convien- nent le mieux. Et lorfque par des révolu- tions (ur le globe ou par la force de Thom- me , ils ont été contraints d'abandonner leur terre natale ; qu'ils ont été chafTés ou relégués dans des climats éloignés , leur na- ture a fubi des altérations fi grandes & ft profondes , qu'elle n'eft pas reconnoiffable à la première vue, & que pour la juger il faut avoir recours à l'inTpeélion la plus at- tentive , & méine aux expériences & à l'a- nalogie. Si l'on ajoute à ces caufes natu- relles d'altération dans les animaux libres, celle de l'empire de l'homme fur ceux qu'il a réuuits en fervitude , on fera furpris de voir jiifqu'à quel point la tyrannie peut dé- grader, défigurer la Nature ; on trouvera ?ur tous les animaux elclaves, les ftigmates de leur captivité & l'empreinte de leurs fers ; on verra que ces plaies font d'autant plus grandes , d'autant plus incurables , qu'elles font plus anciennes, &. que dans l'état où nous les avons réduits, il ne feroit peut-être plus polTible de ïts réhabiliter, ni de leur rendre leur forme primitive, & les autres attributs de nature que nous leur avons enlevés. La température do climat , la qualité de la nourriture & les maux d'efclavage , voilà les trois caufes de changement , d'al- tération & de dégénération dans les ani- maux. Les effets de chacune méritent d'é- î ^ 8 Hijîoirc naturdU, tre confidérés en particulier , & leurs rap- ports vus en détail nous préfenteront un tableau au-devant duquel on verra la Na- ture telle qu'elle eft aujourd'hui , & dans le lointain on appercevra ce qu'elle étoit avant fa dégradation. Comparons nos chétives brebis avec le moufHon dont elles font iflues ; celui-ci , grand & léger comme un cerf, armé de cornes défenfives & de fabots épais , cou- vert d'un poil rude , ne craint ni l'inclémence de l'air , ni la voracité du loup : il peut non-feulement éviter fes ennemis par la lé- gèreté de fa courfe, mais il peut auffi leur refluer par la force de fon corps, & par la folidité des armes dont fa tête & fes pieds font munis : quelle différence de nos bre- bis auxquelles il refte à peine la faculté d'exifter en troupeau, qui même ne peu- vent fe défendre par le nombre, qui ne fou- tiendroient pas lans abri le froid de nos hivers , enfin qui toutes périroient fi l'hom- me ceffoit de les foigner & de les proté- ger l Dans les cUmats les plus chauds de l'Afrique & de l'Afie, le moufflon qui eft le père commun de toutes les races de cette efpèce , paroit avoir moins dégénéré que par-tout ailleurs; quoique réduit en domefti- cité, il a confervé fa taille & fon poil; feulement il a beaucoup perdu fur la gran- deur & la mafTe de fes armes ; les brebis du Sénégal & des Indes font les plus gran- des des brebis domeftiques & celles de toutes dont la nature eft la moins dégra- dée : les brebis de la Barbarie , de l'E- Diginération des Animaux, 1^9 gypte , de l'Arabie , de la Perfe , de l'Ar- ménie , de la Calmouquie , &c. ont fubi de plus grands changemens , elles fe font , rela- tivement à nous, perfectionnées à certains égards & viciées a d'autres ; mais , comime fe perfectionner ou fe vicier eft la même chofe relativement à la Nature 3 elles fe font toujours dénaturées ; leur poil rude s'eft changé en une laine fînej leur queue s'étant chargée d'une mafîe de graifl'e , a pris ua volume incommode & fi grand, que l'ani- mal ne peut la traîner qu'avec peine; & en même temps qu'il s'eft bouffi d'une matière fuperflue, & qu'il s'eft paré d'une belle toi- fon , il a perdu fa force , fon agilité, fa grandeur & fes armes : car ces brebis à longues & larges queues n'ont guère que la moitié de la taille du moufflon; elles ne peuvent fuir le danger ni réfifter à l'enne- mi ', elles ont un befoin continuel des fe- cours & des foins de l'homme pour fe conferver & fe multiplier : la dégradation de l'efpèce originaire eft encore plus grande dans nos climats ; de toutes les qualités du moufflon , il ne refte rien à nos brebis , rien à notre bélier, qu'un peu de vivacité, mais fî douce, qu'elle cède encore à la houlette d'une bergère : la timidité , la foiblelTe , & même la ftupidité & l'abandon de fon être font les feuls & triftes reftes de leur na- ture dégradée. Si l'on vouloit la relever pour la force & la taille , il faudroit unir ie moufflon avec notre brebis Flandrine , & ceffer de propager les races inférieures ; & fi , comme chofe plus utile , nous voulons dé- l6o Tfijloîn natuTiLU. vouer cette efpèce à ne nous donner que de la bonne chair & de la belle laine , il faudroit au moins, comme l'ont fait nos voifins , choifir & propager la race des bre- bis de Barbarie , qui tranfportée en Efpa- gne & même en Angleterre a très bien réuffi. La force du corps & la grandeur de la taille font des attributs mafculins, l'em- bonpoint & la beauté de la peau font des qualités féminines ; il faudroit donc dans le procédé des mélanges obferver cette diffé- rence \ donner à nos béliers des femelles de Barbarie pour avoir de belles laines , & donner le moufHon à nos brebis pour en relever la taille. Il en ieroit à cet égard de nos chèvres comme de nos brebis; on pourroit en les mêlant avec la chèvre d'Angora, changer leur poil & le rendre aufli utile que la plus belle laine. L'efpèce de la chèvre en général, quoique fort dégénérée, l'efl ce- pendant moins que celle de la brebis dans nos climats ; elle paroît l'être davantage dans ,les pays chauds de l'Afrique & des Indes ; les plus petites & les plus foibles de toutes les chèvres font celles de Guinée, de Juda, &c. & dans ces mêmes climats l'on trouve au contraire les plus grandes & les plus fortes brebis. L'efpèce du bœuf eft celle de tous les animaux domeftiques fur laquelle la nour- riture paroît avoir la plus grande influence: il devient d'une taille prodigieufe dans les contrées où le pâturage efl riche & tou- jours renaifîant ; les Anciens ont appelle taunaU'éUj^hans Desinération dzs Animaux, l6i "b tâureau'éléphans les bœufs d'Ethiopie & de quelques autres provinces de TAfie ^ où ces animaux approchent en effet de la gran- deur de l'éléphant ; l'abondance des herbes , & leur qualité fubûantielle & fucculente produifent cet effet ^ nous en avons la preuve même dans notre climat ; un bœuf nourri fur les têtes des montagnes vertes de Savoie ou de Suiffe , acquiert le double du volume de celui de nos bœufs, & néan- moins ces bœufs de Suiffe , font comme les nôtres , enfermés dans l'étable & réduits au fourrage pendant la plus grande partie de l'année ; mais ce qui fait cette grande dif- férence , c'eft qu'en Suiffe on les met en pleine pâture , dès que les neiges font fon- dues ; au lieu que dans nos provinces on leur interdit l'entrée des prairies jufqu'aprè» la récolte de l'herbe qu'on réferve aux chevaux : ils ne font donc jamais ni large- ment ni convenablement nourris , & ce fe- roit une attention bien néceffaire , bien utile à l'Etat que de faire un règlement à cet égard , par lequel on aboliroit les vai- nes pâtures en permettant les enclos. Le climat a auffi beaucoup influé fur la nature du bœuf: dans les terres du Nord des deux continens , il eft couvert d'un poil long & doux comme de la fine laine y il porte aufîi une groffe loupe fur les épaules , & cette difformité fe trouve également dans tous les bœufs de l'Afie , de l'Afrique & de l'A- mérique ; il n'y a que ceux d'Europe qui ne foient pas boffus ', cette race d'Europe eft cependant la race primitive à laquelii^ O ^6 ^ H^iflolre naturdk, » les races boffues remontent par le méFange dès la première ou la féconde génération "y. & ce qui prouve encore que cette race: bofTue n'eft qu'une variété de la première,, €'eft qu'elle eft fujette à de plus grandes altérations & à des dégradations qui paroif- fent exceflives ; car il y a dans ces bœufs. bolTus des différences énormes pour la tail- le ; le petit zébu de l'Arabie a tout au p}iis> la dixième partie du volume du taureau-éU^ fhant d'Ethiopie. En général , l'influence de la nourriture eft plus grande , &. produit des effets plus fenfibles.fur les animaux qui fe nourrifl^^nt d'herbes ou de fruits; ceux au contraire qui ne vivent que de proie , varient moins. par cette caufe que par l'influence du cli- mat; parce que la chair eft un aliment pré- paré & déjà alTimilé à la nature de l'aDimal carnaffier qui la dévore; au lieu que l'herbe, étant le premier produit de la terre , elle en a toutes les propriétés , & tranfmet im- médiatement les qualités terreftres à l'ani»- mal qui s'en nourrit. Auffi le chien , fur lequel la nourriture, ne paroît avoir que de légères influences ,. eft néanmoins celui de tous les animaux, carnaflîers dont l'efpèce eft la plus variée ; il femble fuivre exactement dans fes dégra- dations les différences du climat; il eft nu, dans les pays les plus chauds , couvert d'un, poil épais & rude dans les contrées dii; Nord , paré d'une belle robe foyeufe en. Efpagne ,. en Syrie , où la douce tempéra- lair.e, dsL l'air change, le goil ds. la plupart des, Di^iniraiion des Animaux, ^ îdi^ ^'iitiaux en une forte de foie ; mais indépen- damment de ces variétés extérieures qui font produites par la feule influence du climat , il y a d'autres altérations dans- CJtte efpèce qui proviennent de fa condi^ tion, de fa captivité, ou, fi l'on veut, de l'état de fociété du chien avec l'homme. L'augmentation ou la diminution de la taille viennent des foins que Ton a pris d'unir enfemble les plus grands ou les plus petits individus ; l'accourcifTement de la queue > du mufeau , des oreilles , provient aufîi de la main de l'homme ; les chiens auxquels de génération en génération on a coupé les oreilles & la queue, tranfmettent ces dé- fauts en tout ou en partie à leurs defcen- dans. J'ai vu des chiens nés fans queue ^ que je pris d'abord pour des monitres indi- viduels dans l'efpèce ; mais je me fuis af- furé depuis , que cette race exifte &. qu'elle fe perpétue par la génération. Et les oreil- les pendantes qui font le figne le plus gé- néral & le plus certain de la fervitude do- meftique, ne fe trouvent-elles pas dans preP que tous les chiens ? Sur environ trente races différentes , dont l'efpèce eft aujour- d'hui compofée , il n'y en a que deux ouf trois qui ayent confervé leurs oreilles primi- tives ; le chien de berger, le chien-loup &' ks chiens du Nord ont feuis les oreilles^ droites. La voix de ces animaux a fubi # comme tout le refte , d'étranges mutations y il femble que le chien foit devenu criari avec l'homme , qui de tous les êtres qu* ^at une langue eft c^lui qui en ufe Sô- 1^4 H'ijloire naturtlU\ abufe le plus ; car dans Tétat de nature le chien eft prefque muet, il n'a qu'un hur- lement de befoin par accès affez rares ; il a pris Ton aboiement dans {on commerce avec l'homme , fur-tout avec l'homme policé; car, lorfqu'on le tranfporte dans des climats extrê- mes & chez des peuples groffiers tels que les Lappons & les Nègres, il perd Ton aboie- ment , reprend fa voix naturelle qui eft le hurlement & devient même quelquefois ab- folument muet. Les chiens à oreilles droi- tes, &fur'tcut le chien de berger, qui de tous eft celui qui a le moins dégénéré , eft auffi celui qui donne le moins de voix r comme il palTe fa vie folitairement dans la campagne & qu'il n'a de commerce qu^avec les moutons & quelques hommes fimples y il eft comme eux férieux & fdentieux » quoiqu'en même temps il foit très vif & fort hifelligent ; c'eft de tous les chiens celui qui a le moins de qualités acquifes & le plus de talens naturels ; c'eft le plus •utile pour le bon ordre & pour la garde des troupeaux ; & il feroit plus avantagaux d'en multiplier , d'en éteridre la race que celles des autres chiens, qui ne ferven qu'à nos am»ufemens , & dont le nombre eft il grand qu'il n'y a point de villes où roft ne pût nourrir un nombre de familles des feuls alimens que les chiens confomment. L'état de domefticité a beaucoup contri- bué à faire varier la couleur des animaux r elle eft en général originairement fauve ou noire ; le chien, le bœuf, la chèvre, la larehis ^ le cheval ont pris toutes fortes d« Dègenération des Animaux, 165 couleurs ; le cochon a changé du noir au blanc , & il paroît que le blanc pur & fans aucune tache eft à cet égard le fiy;ne dû dernier degré de dégénération, & qu'or- dinairement il eft accompagné d'imperfec- tions ou de défauts effentiels : dans la race des hommes blancs , ceux qui le font beaucoup plus que les autres , & dont les cheveux, les fourcils, la barbe, &c. font naturellement blancs , ont fouvent le dé- faut d'être fourds, & d'avoir en même temps les yeux rouges & foibles : dans la race des noirs , les Nègres-bla^ncs font en- core d'une nature plus foible & plus dé- fe£lueufe. Tous les animaux abfolum^nt blancs ont ordinairement ces m.êmes défauts de l'oreille dure & des yeux rouge<;. Cette forte de dégénération , quoique plus fréquente dans les animaux domeftiques , fe montre aulîi quelquefois dans les efpèces libres , comme dans celles des éléphans, des cerfs , des dairas , des guenons, des taupes, des fouris ; & dans toutes , cette couleur eft toujours accompagnée de plus ou moins de foibleile de corps & d'hébétation des fens. Mais l'efpèce fur laquelle le poids de l'efclavage paroît avoir le plus appuyé & fait les impreflions les plus profondes , c'eft celle du chameau : il naît avec des loupes fur le dos , & des caîloutés fur la poitrine & fur les genoux r ces callofités îbnt des plaies évidentes occafionnées par le frottement : car elles font remplies de pus & de fang corrompu : comme il ne marche jamais qu'avec une grolTe charge , l66 Hijtoin naturdU, îa preffion du fardeau a commencé par em- pêcher la libre extenfion & raccroiflemenf uniforme des parties mufculeufes du dos ; enfuite elle a fait gonfler la chair aux en- droits voifins:& comme lorfque le chameau veut fe repofer ou dormir, on le contraint d'abord à s'abattre fur fes jambes repliées , & que peu à peu il en prend l'habitude de lui-même, tout le poids de ion corps porte pendant plufieurs heures de fuite, chaque jour, fur fa poitrine & fes genoux ; & la peau de ces parties prelîée , frottée contre la terre, fe dèpile , fe froiffe, fe durcit & fe déforganiie. Le lama qui , comme le cha- meau ,-paffe fa vie fous le fardeau ^ & ne fe repofe aulfi qu'en s'abattant fur la poi- trine , a de femblables callofités qui fe per- pétuent de même par la génération. Les babouins & les guenons dont la pofture la plus ordinaire eft d'être affis , foit en veillant, foit en dormant, ont aufii des cal- lofités au defTous de la région des feiTes , & cette peau calleufe eft même devenue inhé- rente aux os du derrière contre lefquels elle eft continuellement prefTée par le poids du corps ; mais ces callofités des babouins & des guenons font sèches & faines , parce qu'elles ne proviennent pas de la contrainte des entraves ni du faix accablant d'un poids étranger, & qu'elles ne font au contraire que les effets des habitudes naturelles de l'animal qui fe tient plus volontiers & plus lone;-temps affis que dans aucune autre fituation : il en eft de ces callofités des guenons comme de la double femelle de Déginération des Animaux ► î 6j pean que nous portons fous nos pieds : cette iemelle eft une callofité naturelle que no- tre habitude contante à marcher ou reftcr debout rend plus ou moins épaiffe , ou plus ou moins dure , félon le plu« ou moins^ de frottement que nous faifons éprouver à la plante de nos pieds. Les animaux fauvages n'étant pas immé- diatement foumis à i'empire de l'homme , ne lont pas fujets à d'auffi grandes altéra- tions que les animaux domeftiques ; leur nature paroît varier fuivant les différens climats , mais nulle part elle n'eft dégradée.. S'ils étoient abfolument les maîtres de choi- fir leur climat & leur nourriture , ces alté- rations feroient encore moindres : mais comme de tout temps ils ont été'chaffés ,. relégués par l'homme , ou même par ceux d'entr'eux qui ont le plus de force & de méchanceté , la plupart ont été contraints de fuir , d'abandonner leur pays natal , & de s^habituer dans des terres moins heureufes : ceux dont la nature s'eft trouvée aifez flexible pour fe prêter à cette nouvelle fi- tuation fe font répandus au loin , tandis que les autres n'ont eu d'autre reffource que de fe confiner dans les déferts voifins de leur pays. Il n'y a aucune efpèce d'animal y qui comme celle de l'homme fe trouve gé- néralement par-tout fur^ la furface de la terre ^ les unes , & en grand nombre font bornées aux terres méridionales de l'ancien continent ; les autres , aux parties méridio- nales du nouveau monde ; d'autres , en^ moindre quantité ,> font confinées dans les> l68 H'ijlôirc naturelle, terres du Nord , & au lieu de s'étendre vers les contrées du Midi , elles ont paiTé d'un continent à l'autre par des routes jufqu'à ce jour inconnues; enfin, quelques autres eîpèces n'habitent que certaines montagnes ou certaines vallées, & les altérations de leur nature ibnt en général d'autant moins fenfibles qu'elles font plus confinées. Le climat & la nourriture ayant peu d'influence fur les animaux libres, & l'em- pire de l'homme en ayant encore moins , leurs principales variétés viennent d'une autre caufe ; elles font relatives à la com- binaifon du nombre dans les individus , tant de ceux qui produifent , que de ceux qui font produits. Dans les efpèces , comme celle du chevreuil , où le mâle s'attache à fa femelle & ne ia change pas , les petits dé- montrent la confiante fidélité de leurs pa- rens par leur entière refTemblance entr'eux; dans celles, au contraire, où les femelles changent fouvent de mâle, comme dans celle du cerf, il fe trouve des variétés affez nombreufcs; & comme dans toute la Nature il n'y a pas un feul individu qui foit par- faitement reffemblant à un autre , il fe trouve d'autant plus de variétés dans les animaux, que le nombre de leur produit eft plus grand & plus fréquent. Dans les efpèces où la femelle prod^ût cinq ou ii\ petits , trois ou quatre fois par an , de mâles différens , il eft néceffaire que le nombre des variétés foit beaucoup plus grand que dans celles ou- ïe produit eit annuel &. unique ; auffi dans les efpèces inférieures , les petits a'aimaux qui tous Diginiratîon des Animaux, x6^ tous produifent plus fouvent & en plus grand nombre que ceux des efpèces majeu- res, font- elles fujettes à plus de variétés. La grandeur du corps qui ne paroît être qu'une quantité relative , a néanmoins des attributs pofitifs & des droits réels dans l'or- donnance de la Nature ; le grand y eft aufîi fixe que le petit y eft variable : on pourra s'en convaincre aifément par l'énumération que nous allons faire des variétés des grands éi des petits animaux.. Le fanglier a pris en Guinée des oreilles très longues & couchées fur le dos; à la Chine, un gros ventre pendant & des jam- bes fort courtes ,* au Cap-vert & dans d'au- tres endroits , des défenfes très grofles & tournées comme des cornes de bœufs ; dans l'état de domefticité , il a pris par-tout des oreilles à demi-pendantes , & des foies blan- ches dans les pays froids ou tempérés. Je ne compte ni le pécari ni le babiroufla dans les variétés de l'efpèce du fanglier , parce qu'ils ne font ni l'un ni l'autre de cette eipèce, quoiqu'ils en approchent de plus près que d'aucune autre. Le cerf, dans les pays montueux , fecs & chauds, tels que la Corfe & la Sardai- gne , a perdu la moitié de fa taille , & a pris un pelage brun avec un bois noirâtre; dans les pays froids & humides , comme en Bohème &. aux Ardennes , fa taille s'eft agrandie , Ton pelage & fon bois font de- venus d'un brun prefque noir; ion poil s'eft alongé au point de former une longue barbe au menton : dans le Nord de l'autre conti- (Quadrupèdes , Toni. VIL P 1 7 O Hîjloire namrtUe', nfent , le bois du cerf s'eft étendu & rami- fié par des andouillers courbes. Dans l'état de domefticité , le pelage change du fauve au blanc ; & à moins que le cerf ne foit en liberté & dans de grands efpaces , Tes jam- bes fe déforment & fe courbent. Je ne compte pas l'axis dans les variétés de l'ef- pèce du cerfi il approche plus de celle du daim & n*en eft peut-être qu'une variété. On auroit peine à fe décider fur l'origine de l'efpèce du daim ; il n'eft nulle part en- tièrement domeftique, ni nulle part abfo- lument fauvage : il varie affez indifférem- ment, & par-tout, du fauve au pie& du pie au blanc ; fon bois & fa queue font aulîi plus grands & plus longs fuivant les diffé- s-entes races, & fa chair eft bonne ou mau- vaife félon le terrein & le climat : on le trouve comme le cerf dans les deux conti- nens , & il paroît être plus grand en Vir- ginie & dans les autres provinces de l'A- mérique tempérée , qu'il ne Teft en Europe. Il en eft de même du chevreuil, il eft plus grand dans le nouveau que dans l'ancien continent : mais au refte toutes fes variétés fe réduifent à quelques différences dans la couleur du poil qui change du fauve au brun ; les plus grands chevreuils font or- dinairement fauves , & les plus petits font bruns. Ces deux efpèees , le chevreuil & le daim, font les feuls de tous les animaux communs aux deux continens , qui foient plus grands & plus forts dans le nouveau que dans l'ancien. yânç a fubi peu de variétés , même dans Dcginêratlon des Animau v. t 7 1 fa condition de fervitude la plus dure ; car fa nature eft dure aulH , & réfifte égale- ment aux mauvais traitemens & aux. incom- inodités d'un climat fâcheux & d'une nour- riture groffière ; quoiqu'il foit originaire des pays chauds , il peut vivre , & même fe multiplier fans les foins de l'homme dan» l^s climats tempérés ; autrefois il y avoir des onagres ou ânes fauvages dans tous les déferts de l'Afie mineure, aujourd'hui i^s y font plus rares , on ne les trouve en grande quantité que dans ceux de la Tar- carie : le mulet de Daurie {a) appelle cy\ptkd par les Tartares Mongoux, eit pro- bablement le même animal que l'onagre des autres provinces de l'Afie ; il n'en diffère ^ue par la longueur & les couleurs da poil, quia félon M. Bell, paroit onde de trun & de blanc [ /» ] : ces onagres ciipthah fe trouvent dans tes forêts de la Tartarie (a) Mxihis Daurlcus fœcundusj Czigithaî , Mongolo» Tïïm in Daurla. Muf. PetropoUtanum , page ^35. (b ) In thc forcft near Ku^ncrski on ihe River Tcw.q em of thc foiirus ofthc Bivcr Oby in Laf ^i & jz ars fViid ajfcs. l h&ve fcen many of thcir Skins; thcy are in ail refpecls the Shape of tU ead , tail and hoofs of the commun afs , hut their skin is JF'aved and undulatid •tvithe and hrown. Stll's ^ravcls~ tho Chii7a, Nota. Il fe pourroit que M. Bell, qui dit n'avoir obfervé «{ue les peauTt de c^i ammaux , ait vn àcs peaux èe zèbre ; car les autres Voyageurs ne rilent pas que les ciigithuis ouonagr^s de Daurie foient, comma le zèbre, rayés de brun Se de blanc j d'aiî'eurs, il y a au Ca- feinet de Pétersbourg des peaux de zèbre & des pezùx fcs czigithais^ qu'on montre également aux Voyageurs, P 2 jji Hipoirc naturelle, ju(qu*au cinquante - unième & cinquante- deuxième degré ; & il ne faut pas les con- fondre avec les zèbres , dont les couleurs font bien plus vives & bien autrement tran- chées , & qui d'ailleurs forment une efpèce particulière prefque aufli différente de celle de râne que de celle du cheval, La feule dégénération remarquable dans l'àne en do- mefUcité, c'eft que fa peau s'eft ramollie & qu'elle a perdu les petits tubercules qui fe trouvent femés fur la peau de Tonagre , de laquelle les Levantins font le cuir grenu qu*on appelle chagrin. Le lièvre eft d*une nature flexible 6t ferme en même temps , car il eft répandu dans prefque tous les climats de l'ancien continent , $i par-tout il eft à très peu près le même ; feulement fon poil blanchit pendant l'hiver dans les climats très froids, & il reprend en été fa couleur naturelle , qui ne varie que du fauve au roux : la qualité de la. chair varie de même ; les liè- vres les plus rouges font toujours les meil- leurs à manger. Mais le lapin , fans être d'une nature aulîî flexible que le lièvre , puifqu'il eft beaucoup moins répandu , 6c que même il paroît confiné à de certaines contrées , eft néanmoins fujet à plus de va- riétés , parce que le lièvre eft fauvage par- tout , au lieu que le lapin eft prefque par» tout à demi domeftique. Les lapins clapiers ont varié par la couleur du fauve au gris, au blanc , au noir ; ils ont aufli varié par la grandeur, la quantité, la qualité du poil: cet animal qui eft originaire d'Efpagne a Ué^lnèranon dis Animaux, lyf pris en Tartarie une queue longue, en Sy- rie du poil touffu & pelotonné comme du feutre V&c. On trouve quelquefois des liè- vres noirs dans les pays froids ; on prétend auiîi qu'il y a dans la Norwège & dans quelques provinces du Nord des lièvres qui ont des cornes. M. Klein (c) a fait gra- ver deux de ces lièvres cornus : il eft aifé de juger à Tinipeâion des figures que ces cornes font des bois femblables au bois du chevreuil : cette variété , fi elle exifte , n'eft qu'individuelle & ne fe manifefte pro- bablement que dans les endroits où le lièvre ne trouve point d'herbes , & ne peut fe nour- rir que de fubftances ligneufes^ d'écorce , de boutons , de feuilles d'arbres , de li- chens , &c. L'élan dont refpèce eft confinée dans le Nord des deux continens , eft feulement plus petit en Amérique qu'en Europe , & l'on voit par les énormes bois que l'on a trouvés fous terre en Canada , en Ruflie , en Sibérie , &c. qu'autrefois ces animaux étoient plus grands qu'ils ne le font aujour- d'hui : peut-être cela vient il de ce qu'ils jouiflbient en toute tranquillité de leurs fo- rêts , & que n'étant point inquiétés par l'homme qui n'avoit pas encore pénétré dans ces climats , ils étoient maîtres de choifir leur demeure dans les endroits où l'air, la (c) Klein, de quadrup. page J2, tab. III, fig, aâ, §. XXI. 174 Hij%îrc nazuTdky terre & Teau îear convenoient le mietrjf, î.e renne que les Lappons ont rendu domefU- que > a par cette raifon plus changé que l'élan, qui n'a jamais été réduit en fervi- tuder les rennes iauvages font plus grands, plus forts & d'un poil plus noir que les rennes domeûiques ; ceux-ci ont beaucoup ' varié pour la couleur du poil , & aufR pour la grandeur & la grofTeur du bois; cette efpèce de lichen ou de grande moufTe blan- che qui fait la principale nourriture du renne , fèmble contribuer beaucoup par fa qualité à la formation & à l'accroiffement du bois , qui proportionnellement eft plus grand dans le renne que dans aucune au- tre efpèce ; & c'eft peut-être cette même nourriture qui dans ce climat produit du bois fur la tête du lièvre , comme fur celle de la femelle du renne ; car dans tous les autres climats , il n'y a ni lièvres cornus , ni aucun animal dont la femeile porte du bois comme le mâle. L'efpèce de Téléphant eft la feule fur la- quelle Tétat de fervitude ou de domefticité n'a )amais infiué , parce dans cet état il re- fufe de produire , & par conféquènt de tranf- mettre à fon efpèce les plaies ou les dé- fauts occafionnés par fa condition ; il n'y a dans l'éléphant que des variétés légères & prefque individuelles ; fa couleur natu- relle eft le noir, cependant il s'en trouve de roux & de blancs > mais en très petit nombre. L'éléphant varie auiïi pour la taille fuivant la longitude plutôt que la latitude du climat^ car fous la Zone torride dans Dcgénératicfi dés 'Animaux, f^f laquelle il eft , pour ainfi dire j renfermé & fous la même ligne il s'élève jufqu'à quinze pieds de hauteur dans les contrées orientales de l'Afrique ; tandis que dans les terres occidentales de cette même partie du monde il n'atteint guère qu'à la hauteur de dix ou onze pieds ; ce qui prouve quô quoique la grande chaleur foit néceffairô au plein développement de fa nature , la chaleur exceffive la reftreint & la réduit à de moindres dimenfions. Le rhinocéros pa- roît être d'une taille plus uniforme & d'une grandeur moins variable ; il femble ne dif- férer de lui-même que par le cara^lère fin- gulier qui le fait différer de tous les ani- maux, par cette grande corne qu'il porte fur le nez ; cette corne eu fimple dans les rhinocéros de TAfie , Ôi double dans ceux de l'Afrique. Je ne parlerai point ici des variétés qui fe trouvent dans chaque efpèce d'animal carnaffier, parce qu'elles font très légères, attendu que de tous les animawx , ceux qui le nourriffent de chair font les plus indé- pendans de l'homme , & qu'au moyen de cette nourriture déjà préparée par la Na- ture , ils ne reçoivent pre(ique rien des qua- lités de la terre qu'ils habitent ; que d'ail» leurs ayant tous de la force & des armes ^ ils font les maîtres du choix de leur ter- rein , de leur climat, &c. & que par con- féquent les trois caufes de changement , d'altération & de dégénération dont nous avons parlé , ne peuvent avoir fur eux que de très petits effets, P 4 'iy6 Hî flaire natitnUe,, I Mais après le coup-d'œil que Ton vient de jetter fur ces variétés qui nous indi- quent les altérations particulières de chaque efpèce , il fe préfente une confidération plus importante & dont la vue eft bien plus étendue; c'eft celle du changement des ef- pèces mêmes, c'eft cette dégénération plus ancienne & de tout temps immémoriale , qui paroît s'être faite dans chaque famille , ou 11 l'on veut, dans chacun des genres fous lefquels on peut comprendre les efpè- ces voifmes & peu différentes entr'elles : nous n'avons , dans tous les animaux terref- tres , que quelques efpèces ifolées, qui , comme celle de l'homme , faffent en même temps efpèce & genre; l'éléphant, le rhi- nocéros , l'hippopotame , la giraffe forment des genres ou des efpèces fimples qui ne fe propagent qu'en ligne direâe , & n'ont aucunes branches collatérales ; toutes les autres paroiflent former des familles dans lefquelles on remarque ordinairement unfe fouche principale & commune, de laquelle femblent être forties des tiges différentes & d'autant plus nombreufes que les indi- vidus dans chaque efpèce font plus petits & plus féconds. Sous ce point de vue , le cheval , le zè- bre & l'âne font tous trois de la même famille ; {i le cheval eft la fouche ou le tronc principal , le zèbre & l'âne feront les tiges collatérales : le nombre de leurs ref- femblances entr^eux étant infiniment plus grand que celui de leurs différences, on peut les regarder comme ne faifant qu'un Dégénératîon des ^Animaux, lyj même genre , dont les principaux carac- tères font clairement énoncés & communs à tous trois : ils font les feuls qui foient vraiment folipèdes 5 c'eft-à-dire, qui ayent la corne des pieds d'une feule pièce fans au- cune apparence de doigts ou d'ongles ; & quoiqu'ils forment trois efpèces difiin^ies , elles ne font cependant pas abfolument ni nettement féparées , puifque l'âne produit avec la jument , le cheval avec l'àneiTe , & qu'il eft probable que fi l'on vient à bout d'apprivoiîer le zèbre , & d'afToupir fa na- ture fauvage & récalcitrante , il produiroit aulTi avec le cheval & l'âne , comme ils prcduifent entr'eux. Et ce mulet qu'on a regardé de tout temps comme une produôion viciée, comme un monftre compofé de deux natures , & que par cette raifon Ton a jugé incapable de fe reproduire lui-même & de former li- gnée , n^eft cependant pas auiîi profondé- ment léfé qu'on fe l'imagine , d'après ce préjugé, puifqu'il n'eft pas réellement infé- cond , & que fa ftérilité ne dépend que de certaines circonftances extérieuies & par- ticulières. On fait que les mulets ont lou- vent produit dans les pays chauds ; Ton en a même quelques exemples dans nos climats tempérés > mais on ignore fi cette généra- tion eft jamais provenue de la fimple union du mulet & de la mule , ou plutôt fi le produit n'en eft pas dû à l'union du mulet avec la jument , ou encore à celle de l'âne avec la mule. 11 y a deux fortes de mulets, le premier eft le grand mulet ou mulet ûm- ipS Hijlolfe. NatUrclU, plement dit , qui provient de la jonéliori de l'âne à la jument ; le fécond eft le pe- tit mulet provenant du cheval & de l'â- neffe , que nous appellerons bardeau pour le diftinguer de l'autre. Les anciens les con- noifloient & les diftinguoient comme nous par deux noms difFérens , ils appelloient mulus le mulet provenant de l'âne & delà jument , & ils donnoient les noms deT^vw, hlnnus , hurdo ^ au mulet provenant du cheval & de l'ânefle ; ils ont afîuré que le mulet, mulus {d) , produit avec la jument un animal auquel ils donnoient auflî le nom de g'mnus ou hîn- nus {e^ : ils ont affuré de même que la mule, mula , conçoit afTez ailement, mais qu'elle ne peut que rarement perfectionner fon fruit; &. ils ajoutent que quoiqu'il y ait des exemples aiïez fréquens de mules qui ont mis bas, il faut néanmoins regarder cette produâion comme un prodige. Mais qu*eft-ce qu'un prodige dans la Nature , finon un effet plus rare que les autres ? Le mulet peut donc engendrer, & la mule {d ) Mulits equa conjunclus mulum procreavit. . . . Mula. quoque jam facla gravida e/i , fed non quoad perficent at» que edcret proLm. Arift. Hi/Ï. anim. lib. VI, cap. 24.... £/? in annalibus nojiris mulas pcperijfe fotpe ; verum pro- digii loco hahitum. Plin. Hifi. nat. lib. VIII , cap. 44. {e) Nota. Le mot Ginnus a été employé par Ariftote en deux fens ; le premier pour défigner généralement un animal im|»arfait , un avorton, un mulet-nain, pro- venant quelquefois du cheval avec l'âneffe , ou de l'àne avec la jument j & le fécond pour fignifier la produit particulier du mulet âc de la jutn€r>t. ' Dé génération des Animaux, I79 peut concevoir , poTter & mettre bas dans de certaines circonftances ; ainfi il ne s'a- giroit que de faire des expériences pour fa- voir quelles font ces circonftances , & pour acquérir de nouveaux faits dont on pour- roit tirer de grandes lumières fur la dégé- nération des efpèces par le mélange, & par conféquent fur l'unité ou la diverfité de chaque genre ; il faudroit, pour réuffir à ces expériences, donner le mulet à la mu- le , à la jument & à rânelTe , faire la même chofe avec le bardeau :, & voir ce qui ré- fulteroit de ces fix accouplemens différens : il faudroit aulïï donner le cheval & l'âne à la mule, & faire la même chofe pour la petite mule ou femelle du bardeau : ces épreuves , quoiqu'alTez fimples , n'ont ja- mais été tentées dans la vue d'en tirer des lumières , & je regrette de n'être pas à por- tée de les exécuter; je fuis perfuadé qu'il en réfulteroit des connoiffances que je ne fais qu'entrevoir , & que je ne puis don- ner que comme des préfompiions. Je crois, par exemple , que de tous ces accouple- mens , celui du mulet & de la femelle bar- deau , & celui du bardeau & de la mule pourroient bien manquer abfolument ; que celui du mulet & de la mule, & celui du bardeau & de fa femelle pourroient peut- être réuffir , quoi<|ue bien rarement ; mais en même. temps j je préfume que le mulet pro- duiroit avec la jument plus certainement qu'avec l'âneffe &. le bardeau , plus certai- nement avec l'âneiTe qu'avec la jument ; qu'eniin le cheval & l'iuie pourroiçnt peut- l8o Hifloîre naturelU être produire avec les deux mules, mais l'àne plus sûrement que le cheval : il fau- droit faire ces épreuves dans un pays aufli chaud , pour le moins , que Teft notre Pro- vence , & prendre des mulets de fept ans , des chevaux de cinq & des ânes de quatre ans , parce qu'il y a cette différence dans ces trois animaux pour les âges de la pleine puberté. Voici les raifons d'analogie fur lequelîes font fondées les préfomptions que je viens d'indiquer. Dans l'ordonnance commune de la Nature , ce ne font pas les mâles , mais les femelles , qui conftituent l'unité des ef- pèces ; nous favons par l'exemple de la bre- bis qui peut fervir à deux mâles différens & produire également du bouc & du bé- lier , que la femelle influe beaucoup plus que le mâle fur le fpécifique du produit , puifque de ces deux mâles différens il ne naît que des agneaux , c'eft-à-dire , des indi- vidus fpécifiquement reffemblans à la mère; auffi le mulet reffemble-t-il plus à la jument qu'à râne , & le bardeau plus à l'âneffe qu'au cheval ; dès-lors le mulet doit produire plus jurement avec la jument qu'avec l'ânejfe f & le bardeau plus sûrement avec Vâneffe qu'avec la jument : de même le cheval & l'âne /joar- raient peut-être produire avec les deux mules , parce qu'étant femelles , elles ont , quoique vi- ciées , retenu chacune plus de propriétés fpécifiques que les mulets .mâles ; maïs râne doit produire avec elles plus certainement que le cheval, parce qu'on a remarqué que làne a plus de puiffance pour engendrer» Dégéncratîon des Animaux, 1 8 1 même avec la jument, que n'en a le che- val i car il corrompt & détruit la généra- lion de celui ci : on peut s'en affurer en donnant d'abord le cheval-étalon , à des jumens, & en leur donnant le lendemain, ou même quelques jours après , l'âne au lieu du cheval; ces jumens produiront pref- que toujours des mulets oi non pas des chevaux. Cette obfervation qui mériteroit bien d'être conftatée dans toutes fes cir- conitances , paroît indiquer que la Touche ou tige principale de cette famille pourroit bien être l'âne & non pas le cheval , puif- que râne le domine dans la puilTance d'en- gendrer , même avec fa femelle ; d'autant que le contraire n'arrive pas , lorfqu'on donne l'âne en premier & le cheval en fécond, à, la jument; celui-ci ne corrompt pas la génération de l'âne , car le produit en pref- que toujours un mulet; d'autre côté la même chofe n'arrive pas, quand on donne l'âne en premier & le cheval en fécond à l'â- nefle , car celui-ci ne corrompt ni ne dé- truit la génération de l'âne. Et à l'égard des acconplemens des mulets entr'eux , je les ai préfumé ftériles , parce que de deux na- tures déjà léfées pour la génération , & qui par leur mélange ne pourroient manquer de fe léfer davantage, on ne doit attendre qu'un produit tout- à fait vicié ou abfolument nul. Par le mélange du mulet avec la jument, du bardeau avec l'ânefle, & par celui du cheval & de l'âne avec les mules , on ob» tiendroit dss individus qui remonteroient 1^2, Nljlolrc naturelle, à l'efpèce &: ne feroient plus que des demi- mulets , lefquels non-feulement auroient , comme leurs parens , la puiffance d'ertgen- drer avec ceux de leur efpèce originaire , mais peut'être même auroient la faculté de produire entr'eux , parce que n'étant plus îéfés qu'à demi, leur produit ne feroit pas plus vicié que le font les premiers mulets ; & fi l'union de ces demi-mulets étoit en- core (lérile , ou que le produit en fût ti rare & difficile , il me paroît certain qu'en 2es rapprochant encore d'un degré de leur efpèce originaire , les individus qui en ré- fulteroient & qui ne feroient plus Iéfés qu'au quart, produiroient entr'eux , & for- meroient une nouvelle tige, qui ne feroit précifément ni celle du cheval ni celle de râne. Or , comme tout ce qui peut être a été smené, par le temps , & fe trouve ou 5"'eft trouvé dans la Nature , je fuis tenté fîe croire que le mulet fécond dont parlent les Anciens , & qui , du temps d'Ariftote , exiftoit en Syrie dans les terres au de là <*4e celles des Phéniciens, pouvoit bien être une race de ces demi-mulets ou de ces quarts de mulets , qui s'étoit formée par les mélanges que nous venons d'indiquer; car Ariftote dit exprefîément que ces mulets féconds reffemliîoient en tout , & autant qu'il eft pofTible , aux mulets inféconds (/) ; il f f) In terra Syrîâfupcr Phenîcem Mul(Z & coeunt fi» pariunt ; fed id genus diverfum quanquam fimîle. Ariftot. tii^t cnim, lib* Vi > cap. 24 St»it in Syriâ quo$ Dcf^eneration des Animaux, 183 les diftingue aufïï très clairement des onagres ou ânes fauvages dort il fait mention dans le même chapitre, & par conféquent on ne peut rapporter ces animaux qu'à des mulets peu viciés, & qui auroient confervé la fa- culté de reproduire. Il fe pourrpit encore que le mulet fécond de Tartarie , le ici^'nhais dont nous avons parlé , ne fût pas Vonagre ou âne fauvage , mais ce même mulet de Phénicie , dont la race s'eft peut-être main- tenus jufqu'à ce jour; le premier Voya- geur qui pourra les comparer, confirmera ou détruira cette conjeâ:ure. Et le zèbre iui-mênte qui reffemble plus au mulet qu'au cheval & qu'à l'àne, pourroit bien avoir eu une pareille origine, la régularité con- trainte & fy métrique des couleurs de fon poil , qui font alternativement toujours diC- pofées par bandes noires & blanches , paroît indiquer qu'elles proviennent de deux ef- pôces difTérentes, qui dans leur mélange fe font féparées autant qu'il étoit poffible ; car dans aucun de fes ouvrages la Nature n'eft aulTi tranchée & auiTi peu nuancée que fur îa robe du zèbre , où elle pafle brufquement riulos appellent , gnvis divcrfum ah eo quoi coïtu cquot & ajtni procreatnr ; fcd fimïU facit , quomodo ajîni fil' vefircs fimUifudim quadam nometi urhancrutn accepcu , 6' quidem ut afini iLli fcrl (le muli prce.Jiant cdcritate. Procréant cjufmodl muloc. fuo in génère, Citjus rci argU" mémo iHaJunt quai temporc Pharnaca pétris Phcma:^ahlm in tcrrcm rhrygiam venerunt qme adhuc cxtant. Trcs ta- mtn ex novtm quos numéro olim fuijfe alunt f firvantuf hoc tcwporti, Idsm, cap, j5. 1^4 Hijloire naturzlU, & alternativement du blanc au noir & du noir au blanc fans aucun intermède dans toute l'étendue du corps de ranimai. Quoi qu*il en foit , il eft certain par tout ce que nous venons d'expofer , que les mu- lets en général qu*on a toujours accules d'impuiflance & de ftérilité> ne font cepen- dant ni réellement ftériles , ni généralement inféconds; & que ce n'eft que dans refpèce particulière du mulet provenant de l'âne & du cheval , que cette ftérilité fe manifefte , puifque le mulet qui provient du bouc & de la brebis, eft aufli fécond que fa mère ou fon père ; puifque dans les oifeaux la plupart des mulets qui proviennent d'efpè- ces différentes ne font point inféconds. C'eft donc dans la nature particulière du cheval (& de l'âne , qu'il faut chercher les caufes de l'infécondité des mulets qui en provien- nent, &, an lieu de fuppofer la ftérilité coRMiie un défaut général & néceifaire dans tous les mulets , la reftreindre au contraire au feul mulet provenant de l'âne & du che- val , & encore donner de grandes limites à cette reflri£tion , attendu que ces mêmes mulets ;:.iuvent devenir féconds dans de certaines circonftances, & furtout en fe rapprochant d*un degré de leur efpèce ori- ginaire. Les mulets qui proviennent du cheval & de l'âne , ont les organes de la génération tout aufli complets que les autres animaux; il i)e manque rien au mâle , rien à la fe- melle : ils ont une grande abondance de li- queur féminale ; & comme l'on ne permet guère Dé génération des Animaux, 185 guère aux mâles de s'accoupler, ils Jbnt ibuvent fà prefles de la répandre , qu'ils fe couchent fur le ventre pour fe frotter en- tre leurs pieds de devant qu'ils replient fous la poitrine ; ces animaux font donc pourvus de tout ce qui ell néceffaire à l'aile de la génération; ils font même très ardens, & par conféquent très indifférens fur le choix ; ils ont à-peu-près la même véhémence de goût pour la mule, pour l'âneiTe & pour la jument; il n'y a donc nulle difficulté pour les accouplemens; mais il faudroit des at- tentions & des foins particuliers, A Ton vouloir rendre ces accouplemens prolifiques % la trop grande ardeur, furtout dans les fe- melles, ell ordinairement fuivie de la ftéri- lité , & la mule eft au moins aufîi ardente que râneffe : or l'on fait que celle-ci rejette la liqueur féminale du mâle , & que pour la faire retenir & produire, il faut lui donner des coups ou lui jetter de Peau fur la crou- pe , afin de calmer les convulfions d'amour qui fubfiftent après l'accouplement, & qui font la caufe de cette réjaculation, L'àneffe & la mule tendent donc toutes deux par leur trop grande ardeur à la ftérilité. L'âne & ràneite y tendent encore par une autre caufe : comme ils font originaires des cli- mats chauds , le froid s'oppofe à leur gé- nération , & c'eft par cette raifon qu'on at- tend les chaleurs de l'été pour les faire ac- coupler ; lorfqu'on les laifîe joindre dans d'autres temps & furtout en hiver, il efk rare que l'imprégnation fuive Taccouplement, loèiae réitéré ; & ce choix du temps qui eii Q l86 Hijîoirc naturdh, néceffaire au fuccès de leur généraîfoîT^ l'eft aufTi pour la confervation du produit; il faut que l'ànon naiffe dans un temps chaud", autrement il périt au languit; & comme la geftation de râneffe eft d'un an , elle met bas dans la même faifon qu^elIe a conçu : ceci prouve affez combien la chaleur eft né- eeffaire , non-feulement à la fécondité , mais même à la pleine vie de ces animaux ;^ c'eft encore par cette mêmie raifon de la trop grande ardeur de la femelle qu'on lui donne !e mate prefque immédiatement après qu'elles mis bas; on ne lui laiffe que lept ou huît jours de repos ou d'intervalle entre Taccou- chement & l'accouplement ; l'àneffe yafFoiblie par fa couche eft alors moins ardente : les par- ties n'ont pas pu dans ce petit efpace de temps- reprendre toute leur roideur; au moyen dft quoi la conception fe fait plus sûrement qus^ quand elle eft en pleine force & que fon ardeur la domine :on prétend que dans cette efpèce, comme dans celle du chat, le terc- pérament de la femelle eft encore plus ar- dent & plus fort que celui du mâle; ce- pendant l'àne eft un grand exemple en ce genre , il peut aifément faillir fa femelle ou une autre plufieurs jours de fuite & plu- iieurs fois par jour ; les premières jouiffan- ces, loin d^éteindre ne font qu'allumer fon ardeur; on en a vu s'excéder fans y être, incités autrement que par la force de leur appétit naturel ; on en a vu mourir fur la champ de bataille , après onze ou douze conflits réitérés prefque fans intervalle, & ne prendre pour Subvenir à cette grande & DégcrJration dès Animaux, 187 rapide dépenfe que quelques pintes d'eau» Cette même chaleur qui le confume eft trop vive pour être durable ; l'âneétalon bientôt eft hors de combat & même de fervice , & c'eft peut-être jar cette raifon que l'on a prétendu que la femelle eft plus forte & vit plus long-temps que le màle ; ce qu'il y a de certain , c'eft qu'avec les ménage^ mens que nous avons indiqués, elle peut vivre trente anSj & produire tous les ans pendant toute fa vie; au lieu que le mâle, lorfqu'on ne le contraint pas à s'abftenif de femelles , abufe de fes forces au point de perdre en peu d'années la puiflance d'en* gendre.r. ^ L'âne & TânefTe tendent donc tous ^QWt à la ftérilité par des propriétés communes, & auflî par des qualités différentes ; le cheval & la jument y tendent de même par d'autres- voies. On peut donner l'étalon à la )ument neuf ou dix jours après qu'elle a mis bas^. & elle peut produire cinq ou fîx ans de fuite j mais après cela elle devient ftérile^ pour entretenir fa fécondité , il faut mettrs un intervalle d'un an entre chacune de fe& portées , & la traiter différemment de l'a- neffe; au lieu de lui donner l'étalon après^ qu'elle a mis bas , il faut le lui réferver" pour l'année fuivante , & attendre le temps^ oii fa chaleur fe manifefte par les humeurs^ qu'elle jette ; & même avec ces attentions^ il eft rare qu'elle foit féconde au - delà à^ l'âge de vingt ans ; d'autre côté, le chevar^ quoique moins ardent & plus délicat que Vàtie, confçrve néanmoins plus long-temp;* 1 8 8 Hipoin natîirdU, ]a faculté d'engendrer.' On a yUv de vîeii% chevaux qui n'avoient plus la force de mon- ter la jument fans l^aide du Palfrenier , trou- ver leur vigueur dès qu'ils étoient placés , & engendrer à Tâge de trente ans, La li- queur féminale eft non - feulement moins abondante, mais beaucoup moins Simulante dans le cheval que dans Tâne ; car fouvent le cheval s'accouple fans la répandre, fur- tout fi on lui préfente la jument avant qu'il ne la cherche; il paroît trifte dès qu'il a joui, & il lui faut d'affez grands intervalles de temps pour que fon ardeur renaiffe. D'ailleurs , il s'en faut bien que dans cette efpèce tous les accouplemens , même les plus confommés , foient prolifiques ; il y a des jumens natu- rellement ftériles , & d'autres en plus grand nombre qui font très peu fécondes ; il y a auflî des étalons , qui , quoique vigoureux en apparence, n'ont que peu de puifîance réelle. Nous pouvons ajouter à ces raifons particulières une preuve plus évidente & plus générale du peu de fécondité dans les ef- pèces du cheval & de l'âne; ce font de tous les animaux domeftiques ceux dont l'ef- pèce , quoique la plus foignée , eft la moins nombre ufe ; dans celles du bœuf, de la bre- bis, de la chèvre, & furtout dans celles du cochon , du chien & du chat , les individus font dix & peut- être cent fois plus nom- breux que dans celles du cheval & de l'âne: ainfi leur peu de fécondité eft prouvée par le fait, & l'on doit attribuer à toutes ces caufes la ftérilité des mulets qui proviennent 4u joiêlange de ces deux efpèces naturelkr Digéniration dc^s Animaux, 189 fnenr peu fécondes.- Dans les efpèces au contraire qui, comme celle de. la chèvre & celle de la brebis , font plus nombreufes & par conTéquent plus fécondes , les mulets provenant de leur mélange ne font pas fté- riles , & remontent pleinement à l'effèce originaire dès la première génération ; au lieu qu'il faudroit deux , trois & peut - être quatre générations , pour que le mulet pro- venant du cheval & de Tâne pût parvenir k ce même degré de réhaoilitation de nature. On a prétendu que de raccouplement du taureau & de la jument, il réfultoit une au- tre forte de mulet : CoUimelle eft , je crois, le premier qui en ait parlé; Gefner le cite, & ajoute qu'il a entendu dire qu'il fe trou- voit de ces mulets auprès de Grenoble, & qu'on les appelle en françois , jumars. J'ai fait venir un de ces jumars du Dauphiné y j'en ai fait venir un autre des Pyrénées , &. j'ai reconnu, tant par l'infpeftion des parties extérieures que par la diffeétion des parties intérieures , que ces jumars n'étoient que des bardeaux, c'eft-à dire des mulets prove- nans du cheval & de l'ânelfe : je crois donc être fondé, tant par cette obfervation que par l*analogie , à croire que cette forte de mulet n'exifte pas, & que le mot jumar n'eft qu'un nom chimérique & qui n'a point d'ob- jet réel. La nature du taureau eft trop éloi- gnée de celle de la jument , pour qu'ils puii^ lent produire enfemble ; l'un ayant quatre eftomacs , des cornes fur la tête , le pied fourchu , &c. l'autre étant folipède 6& iâas içO Hïfioirt naturelle» cornes , & n*ayant qu'un feul eftomac. Et les parties de la génération étant très diffé- rentes tant par la grofTeur que pour les pro- portions , il n'y a nulle railon de préfumer qu'ils puiffent fe joindre avec plaifir , & encore moins avec fuccès. Si le taureau avoir à produire avec quelqu'autre efpèce que la fienne , ce feroit avec le buffle qui lui reffemble par la conformation & par la plupart des habitudes naturelles; cependant nous n'avons pas entendu dire qu'il foit ja- mais né des mulets de ces deux animaux, qui néanmoins fe trouvent dans plufieufs lieux, foit en domefticité, foit en. liberté. Ce que l'on raconte de l'accouplement, & du produit du cerf & de la vache , m'eft à-peu- près auflî fufpeâ: que l'hiftoire des jurnars , quoique le cerf foit beaucoup moins éloigné par fa conformation , de la nature de la vache , que le taureau ne l'eft de celle de la jument. Ces animaux qui portent des bois , quoi- que ruminans & conformés à l'intérieur comme ceux qui portent des cornes , fem- blent faire un genre, une famille à part, dans laquelle l'élan eft la tige majeure , & le renne , le cerf, l'axis , le daim & le che- vreuil font les branches mineures & colla- téralles ; car il n'y a que ces fix efpèces d'ani- maux dont la tête foit armée d'un bois- branchu qui tombe & fe renouvelle tous les ans ; & indépendamment de ce caraébere gé- nérique qui leur eft commun , ils fe relTem- blent encore beaucoup par la conformation 6i par toutes les habitudes naturelles-^ o» Dêgcncranon des Animaux. 191 obtiendroit donc plutôt des mulets du cerf ou du daim mêlé avec le renne & Taxis, que du cerf & de la vache. On feroit encore mieux fondé à regarder toutes les brebis & toutes les chèvres comme ne faifant qu'une même famille , puifqu'elles produifent eniêmble des mulets qui remon- tent direôement, & dès la première géné- ration 3 à l'efpèce de la brebis ; on pourroit même joindre à cette nombreufe famille des brebis & des chèvres , celle des gazelles & celle des bubales qui ne font pas moins nombreufes. Dans ce genre qui contient plus de trente efpèces difterentes , il paroît que le mouflon , le bouquetin, le chamois , l'an- tilope, le bubale, le condoma , &c. font les tiges principales , & que les autres n'en font que des branches acceffoires, qui tou- tes ont retenu les câraderes principaux de la fouche dont elles font iffues , mais qui ont -en même temps prodigieulément varié par les influences du climat & les différen- tes nourritures, aulîi bien que par l'état de fervitude & de domefticité auquel l'homme a réduit la plupart de ces animaux. Le chien , le loup , le renard , le chacal &. l'ifatis forment un autre genre , dont cha- cune des efpèces eft réellement fi voifme des autres , &. dont les individus fe refîem- blent fi fort, furtout par la conformation intérieure & par les parties de la généra- tion , qu'on a peine à concevoir pourquoi ces animaux ne produifent point enfemble ; il m'a paru par les expériences que j'ai fai- içi Hïjîoin natunlU, tes fur le mélange du chien avec le loup & avec le renard, que la répugnance à Tac- couplement venoit du loup & du renard plutôt que du chien, c'eft-à-dire , de l'ani- mal fauvage & non pas de Tanimal domef- tique; car les chiennes que j'ai mifes à Té- preuve, auroient volontiers foufFert le re- nard & le loup, au lieu que la louve & la femelle renard n'ont jamais voulu foufFrir les approches du chien; l'état de domefticité femble rendre les animaux plus libertins , c'eft- à-dire, moins fidèles à leur efpèce ; il les rend auffi plus chauds & plus féconds; car la chienne peut produire & produit même affez ordinairement deux fois par an » au lieu que la louve & la femelle renard ne portent qu'une fois dans une année ; & il eft à préfumer que les chiens fauvages , c'eft-à-dire , les chiens qui ont été a^bandon- nés dans des pays déferts , & qui Te .font multipliés dans l'iÔe de Juan-Fernandès , dans les montagnes de Saint-Domingue , &c. ne produifent qu'une fois par , an comme le re- nard & le loup; ce fait, s'il étoit conftaté, confirmeroit pleinement l'unité du genre de ces trois animaux , qui fe reffemblent fi fort par la conformation , qu'on ne doit attribuer qu'à quelques circonftances extérieures leur répugance à fe joindre. Le chien paroît être l'efpèce moyenne & commune entre celles du renard & du loup; les Anciens nous ont tranfmis comme deux faits certains, que le chien, dans quelques pays & dans quelques circonftances ^ produit avec Diginérat'ion dis Animaux, Î91 avec le loup & avec le renard (g). J'ai voulu le vérifier, & quoique je n'aie pas réufli dans les épreuves que j'ai faites à ce fujet, on ne doit pas conclure que cela foit impofîible ; car je n'ai pu faire ces eflaisque fur des animaux captifs, & l'on fait que dans la plupart d'entr'eux la captivité feule fufTic pour éteindre le defir & pour les dégoûter de l'accouplement , même avec leurs fem- blables ; à plus forte raifon cet état forcé doit les empêcher de s'unir avec des indivi- dus d'une elpèce étrangère. Mais je fuis per- fuadé que dans l'état de liberté & de célibat^ c'eft-à-dire , de privation de fa femelle, le chien peut en effet s'unir au loup & au re- nard, furtoutfi devenu fauvage, il a perdu fon odeur de domefticité, & s'eft en même temps rapproché des mœurs & des habitu- des naturelles de ces animaux. Il n'en eft 43as de même de l'union du renard avec le loup, je ne la crois guère polîible; du moins dans la nature aftuelle le contraire paroîr démontré par le fait, piiifque ces deux ani- maux fe trouvent enfemble dans le même (g) In Cyrentnfi. agro Lupi cnm Canlbus cosunt & Lacouici canes ec; vulpe & cane generantur. Ariftot. Jii/i. arJm. lib. VlII , cap. 28. .... Coennt arùmalit gineris c]uf,hm fccundum naturam , fed ea etlam quorum gcntts iiverfum qtddem , fed nattira non mulfum d'iflat > yt tnoio par magnitudo fit & tcmpore xquent ^raviditatis « rarb id Jît , fed tamen id jieri 6* in CanU'us &■ in Vu/pi- hus 6* in JLupis ccr-ium ejî. Idem, di gênerai, anim, iib, îl, cap. j. Quadrupèdes , Tome FIJ, R 1^4 Hiflolrc naturdltl climat & dans les mêmes terres, & que fe foutenant chacun dans leur efpèce fans fe chercher, fans fe mêler, il faudroit fuppo- fer une dégénération plus ancienne que la mémoire des hommes pour les réunir à la même efpèce ; c'eil par cette raifon que j'ai dit que celle du chien étoit moyenne entre celles du renard & du loup , elle eft auflii commune puîfqu'elle peut fe mêler avec toutes deux ; & fi quelque chofe pouvoit indiquer qu'originairement toutes trois font forties de la même fouche, c'eft ce rapport commun qui rapproche le renard du loup, & me paroît en réunir les efpèces de plus près que tous les autres rapports de con- formité dans la figure & l'organifation. Pour réduire ces deux efpèces à l'unité , il faut donc remonter à un état de nature plus an- cien : mais dans l'état aftuel , on doit re- garder le loup & le renard comme les tiges majeures du genre à^s cinq animaux que nous avons indiques ; le chien , le chacal 5c l'ifatis n*en font que les branches latérales, & elles font placées entre les deux premiè- res ; le chacal participe du chien & du loup , & rifatis du chacal & du renard : aufli pa- roît-il par un alTez grand nombre de té- moignages, que le chacal & le chien pro- duifent aifément enfemble ; & l'on voit par la defcription de l'ifatis & par Thiftoire de fes habitudes naturelles, qu'il relTemble pref- qu'entiérement au renard par la figure & par Je tempérament, qu'il fe trouve également dans \%s pa^s froids , mais qu*eiî même temps Dégénéraihn des Animaux^ 195 Il tient du chacal le naturel ^ Taboiement con^ tinu, la voix criarde & Thabitude d'aller toujours en troupe. Le chien de berger, que j*ai dit être la fouche première de tous les chiens , eft en même temps celui qui approcha le plus de la figure du renard; il eft de la même taille, il a comme lui, les oreilles droites, le mu- feau pointu , la queue droite & traînante ; il approche aulîî du renard par la voix , par l'intelligence & par la finefle de Tinftind ; il fe peut donc que ce chien foit originaire- ment ifîu du renard, fmon en ligne droite, au moins en ligne collatérale» Le chien» qu'Ariftote appelle canls - lacûnicus, & qu'il affure provenir du mélange du renard. & du chien , pourroit bien être le même que le chien de berger , ou du moins avoir plus de rapport avec lui qu'avec aucun autre chien : on feroit porté à imaginer que l'épi- thète lacoTÙcus qu'Ariftote n'interprète pas , n'a été donnée à ce chien que par la raifon quil le trouvoit en Laconie , province de la Grèce, dont Lacédémone étoit la ville principale ; mais fi l'on fait attention à l'o- rigine de ce chien Laconie , que le même Auteur dit venir du renard & du chien , on ientira que la race n'en étoit pas bornée au feul pays de Laconie, & qu^elle de voit fe trouver également dans tous les pays où il y avoit des renards , & c'eft ce qui me fait préfumer que Tépithète laconicus pourroit bien avoir été employée par Ariftote dans le fens moral, c*eft- à-dire, pour exprimer la brièveté ou le fon aigu dç la voix; il aura R % 1^6 Hijloire naturelle. TiippeWé chien lacoriic , ce chien provenant d* renard, parce qu'il n'aboyoit pas comme les autres chiens , & qu'il avoir la voix courte & glapifTante comme celle du renard : or notre chien de berger eft le chien qu'on peut appeller laconic à plus jufte titre ; car c*eft celui de tou» les chiens dont la voix eft la plus brève & la plus rare ; d'ailleurs les ca- raderes que donne Ariftote à fon chien laconic conviennent afTez au chien de ber- .ger, & c'eft ce qui a achevé de me perfua- der que c'étoit le même chien ; j'ai cru de- voir rapporter les palTages d' Ariftote en entier, afin au'on juge fi ma conjedure eft fon- dée (h). (A) Laconici cants ex Vulpc & Cane generantur. Hi^, anim. lib. VIII , cap. 28 Canum gênera p/ura funt. Coït Laconicum menfe fu & les ongles aigus, courbés & rétraftibles; ils font tous nuifibles , féroces , indompta- bles ; le chat qui en eft la dernière & la plus petite efpèce , quoique réduit en fervi- tude, n'en eft ni moins perfide ni moins volontaire; le chat ^uvage a confervé le rac:s des chiens, dont, félon îuî , lt <îejx p^oi-, les autres portent deux mois & demi, & les au- tres trois mois : car tous nos chiens de quelque rac& ^ir!>s foient ne portent également que pendant environ Beuf famajnes, c'eft à-dire, foixante-un , foixante-denx •u fcix.-îrte-trois *]Ours, & je ne fâche pas qu'on ait re- marqivé de plus grandes différences de temps que cel!e de ces trois ou quatre jours ; mais Arifto»e pouvoit en favoir fur cela plus que nous, 8c fi ces faits q-i'il a avancés font vrais j il en réfulteroit un rapproche- ment bien plus gran:i de certains chiens avec le loup : ear les chafteurs afforent que la lôuve pott€ treiswois ou ttois mois & àenoi. Diginiraîîôn des Animaux ^ 1 59 caraâere de la famille; il eft aufli cruel 3 auffi méchant, aufli déprédateur en petite que (es confanguins le font en grand; ils font tous également carnafliers, également ennemis des autres animaux. L'homme avec toutes fes forces n'a jamais pu les détruire ; on a de tout temps employé contre eux le feu , le fer , le poifon , les pièges ; mais comme tous les individus multiplient beau- coup, & que les efpèces elles-mêmes font fort multipliées, les efforts de l'homme fe font bornés à les faire reculer & à les ref- ferrer dans les deferts, dont ils ne fortent jamais fans répandre la terreur & caufer autant de dégât que d'effroi; un feul tigre échappé de fa forêt fuffit pour alarmer tout un peuple & le forcer à s'armer : que fc- roit-ce fi ces animaux fanguinaires arrivoient en troupe , & s'ils s'entendoient comme les chiens fauvages ou les chacals dans leurs projets de déprédation ? La Nature a donfté cette intelligence aux animaux timides , mais heureufement les animaux fiers font tous fo- litaires; ils marchent feuls & ne confulteat que leur courage , c'eft-à-dire , la confiance qu'ils ont en leur force. Ariflote avoit re- marqué avant nous , que de tous les animaux qui ont des griffes , c'eft-à-dire , des ongles crochus & rétradlibles , aucun R'étoit focial , aucun n'alloir en troupe (i) : cette obfer- vation qui ne portoit alors que fur quatre (/) Nullum animal cui ungues aduncif grcgatlU ejfc perpHidimus, Arift. H'fi, anim. lib. I, cap. i. R4 2QQ Hillolre naturtlh. ou cinq efpèces , les feules de ce gerrre qui fuffent connues de fon temps , s'eft étendue <& trouvée vraie fur dix qu douze autres efpèces qu'on a découvertes depuis y les au- tres animaux carnafliers , tels que les loups y îes renards , les chiens , les chacals , les ifatis, qui n'ont point de griffes, mais feu- lement des ong'es droïts , vont pour la plu- part en troupes , & font tous timides & même lâches. En comparant ainfi tous les animaux & îes rappellant chacun à leuï genre, nous trouverons que les deux cents efpèces dont nous avons donné l'hiftoire , peuvent fe ré- duire à un affez petit nombre de familles ou fouches principales , defqueîles il n*eft pas impoiTible que toutes les autres foient ilTues. Et pour mettre de Tordre dans cette ré- duction, nous féparerons d'abord les animaux des deux continens ; & nous obferverons qu'on peut réduire à (quinze genres & à neuf efpèces ifolées, non- feulement tous les ani- xnaux qui font communs aux deux conti- nens , mais encore tous ceux qui font pro- pres & particuliers à TancierL Ces genres font \^. celui des folipèdes proprement dits, qui contient le cheval , le zèbre , l'âne avec les mulets féconds & inféconds. 2*^. Celui des grands pieds-fourchus à cornes creufes ^ favoir, le bœuf & le buffle avec toutes leurs variétés. 3*. La grande famille des petits pieds-fourchus à cornes creufes , tels que les brebis , les chèvres, les gazelles, Us chevrotains & toutes les autres efpèces qui Diginiration des Animaux, loi participent de leur nature. 4^. Celle des pieds- fourchus à cornes pleines ou bois foli- Jes, qui tombent & qui fe renouvellent tous les ans ; cette famille contient l'élan ^ le renne, le cerf, le daim. Taxis & le che- vreuil. 5^. Celle des pieds - fourchus ambi- gus , qui eft compofée du fanglier & de tou- tes les variétés du cochon , telles que celui de Siam à ventre pendant , celui de Guinée à longues oreilles pointues & couchées fur le dos , celui des Canaries à grofles & lon- gues défenfes , &c. 6^. le genre très étendu des filfipèdes carnaffiers à griffes, c'eft-à- dire , à ongles crochus & rétraftibles , dans lequel on doit comprendre les panthères , les léopards, les guépards, les onces, les fervals & les chats ^ avec toutes leurs va- riétés. 7^. Celui des fiffipèdes carnalTiers à ongles non rétraé^ibles , qui contient le loup , le renard , le chacal , l'ifatis & le chien , avec toutes leurs variétés. 8°. Celui des fiffipè- des carnaffiers à ongles non rétra«5libles , avec une poche fous ta queue ; ce genre eft com- pofé de l'hysne , de la civette , du zibet , de la genette , du blaireau , &e. 9^. Celui des fiffipèdes carnaffiers à corps très alongé avec cinq doigts à chaque pied, & le pouce ou premier ongle féparé des autres doigts ; ce genre eil compofé des fouines, martes, putois , furets , mangouftes , belettes , van- îires, &c. 10^. La nombreufe famille des fif- fipèdes , qui ont deux grandes dents incifi- ves à chaque mâchoire & point de piquans fur le corps; elle eft compofée des lièvres» des lapins & de toutes les efpèces d'écureuils^ 101 Hijioin naturelU. de loirs, de marmottes & de rats. ii*'. Ce- lui des filfipèdes , dont le corps eft couvert de piquanSj tels que les porc-épics & les hériflbns. 12^. Celui des fiffipèdes couverts d'écailies, les pangolins & les phatagins. 13^. Le genre des fiffipèdes amphibies , qui con- tient la loutre , le caftor , le defman , les morfes & les phoques. 14^. Le genre des quadrumanes, qui contient les fmges, les babouins, les guenons, les makis , les lo- ris, &c. 15*'. Enfin celui des fifîipèdes ai- lés , qui contient les rouflettes & les chau- ve fouris, avec toutes leurs variétés. Les neuf efpèces ifolées , font Téléphant , le rhinocéros , l'hippopotame , la giraffe , le chameau, le lion, le tigre, l'ours & la tau- pe , qui toutes font aufli fujettes à un plus ou moins grand nombre de variétés. De ces quinze genres & de ces neuf ef- pèces ifolées , deux, efpèces & fept genres font communs flux deux continens ; les deux efpèces font, l'ours & la taupe; & les fept genres font, 1^. celui des grands pieds four- chus à cornes creufes; car le bœuf fe re- trouve en Amérique fous la forme du bifon. i^. Celui des pieds-fourchus à bois folides ; car l'élan fe trouve au Canada, fous le nom d'ongnal ; le renne fous celui de cari- bou , &. l'on trouve aufli dans prefque tou'^es les provinces de l'Amérique fcprentrionale des cerfs, des daims & des chevreuils. 3^. Celui des fiffipèdes carnaffiers à ongles non rétradibles; car le loup & le renard fe trou- vent dans le nouveau monde comme dans l'ancien. 4^. Celui des fiflipèdes à corps très Dègenératîon des Animaux. 10 j aîongé; la fouine > la marte, le putois fe trouvent en Amérique comme en Europe. 5^. L'on y trouve aufli une partie du genre des fiiîipèdes qui ont deux grandes dents incifi- ves à chaque mâchoire , les écureuils , les marmottes , les rats , &c. 6^. Celui des filîi- pèdes amphibies ; les morfes , les phoques , les caftors & les loutres exiftent dans le nord du nouveau continent, comme dans celui de l'ancien. 7^. Le genre des fiflipè- des ailés y exifte aufli en partie , car on y trouve des chauve-fouris & des vampires, qui font des efpèces de roufTettes. Il ne refte donc que huit genres & cinq efpèces ifolées , qui foient propres & parti- culiers à l'ancien continent : ces huit genres ou familles font, 1^. celle des folipèdes proprement dits ; car on n'a trouvé ni che- vaux , ni ânes, ni zèbres , ni mulets dans le nouveau monde. 2**. Celle des petits pieds- fourchus à cornes creufes, car il n'exiftoit en Amérique ni brebis , ni chèvres , ni ga- zelles , ni chevrotains. 3*^. La famille des cochons; car l'efpèce du fanglier ne s'eft point trouvée dans le nouveau monde, & quoique le pécari avec fes variétés doive te rapporter à cette famille, il en diffère cependant par des carafteres affez' remarqua- bles pour qu'on puifTe l'en féparer. 4^. Il en eft de même de la famille des animaux carnalîîers à ongles rétrad^ibîes ; on n'a trouvé en Amérique ni panthère , ni léo- pards, ni guépards, ni onces, ni fervals; & quoique les jaguars , couguars , ocelots &. marg;ais paroi^ent être de cette famille» 104 Hilioire na tun lit, il n'y a aucune de ces efpèces du nouveau monde qui fe trouve dans Tancien continent, & réciproquement aucune efpèce de l'ancien continent qui Te ioit trouvée dans le nouveau./ 5^. 11 en eft encore de même du genre des fiflipèdes dont le corps eft couvert de pi- quans; car, quoique le coendou & l'urforr foient très voifins de ce genre , ces efpèces font néanmoins très différentes de celles des porc-épics & des hérifTons. 6^. Le genre des filîipèdes carnalîiers à ongles non rétrac- tables , avec une poche lbu'5 la queue ; car l'hyéene, les civettes & les blaireaux n'exif- toient point en x4mérique. 7^. Les genres des quadrumanes ; car l'on n'a trouvé en Amérique ni finges , ni babouins, ri gue- nons, ni makis; & les fapajous, fagoins» farigues , marmofes , &c. quoique quadru- manes , diffèrent de tous ceux de l'ancien continent. 8^. Celui des fîflipèdes couverts d'écaillés , le pangolip ni le phatagin ne fe font point trouvés en Amérique ; & les fourmiliers auxquels on peut les comparer, font couverts de poil , & en diffèrent trop pour qu'on puiffe les réunir à la même fa- mille. Des neuf efpèces ifolées, fept, favoir , l'éléphant, le rhinocéros , l'hippopotame, la giraffe, le chameau , le lion & le tigre , ne fe trouvent que dans l'ancien monde ; & deux , favoir, l'ours & la taupe font com- munes aux deux continens. Si nous faifons de même le dénombre- ment des animaux propres & particuliers au riouveau monde , nous trouverons qu'il y en D égcnlration des Animaux, 10 Ç a environ cinquante efpèces différentes , que Ton peut réduire à dix genres & quatre ef- pèces ilblées; ces quatre efpèces' font le ta- pir, le cabiai , le lama & le pécari; encore n'y a-t-il que l'efpèce du tapir qui fbit ab- folument ifoiée, car celle du pécari a des variétés , & l'on peut réunir la vigogne au lama, & peut-être le cochon d'Inde au ca- biai. Les dix. genres font i^. les fapajous, huit efpèces; z^. les fagoins, fix efpèces; 3*^. les philandres ou farigues, marmofes , cayopoUinSj phalangers, tarfiers , &c; 4^. les jaguars , couguars , ocelots , margais , &c; 5^. les coatis, trois ou quatre efpèces; 6^. les mouffettes , quatre ou cinq efpèces; 7*'. Le genre de l'agouti, dans lequel je co-mprends l'acouchi , le paca , l'aperea & le tapeti; 8^. celui des tatous, qui efl com- pofé de fept ou huit efpèces; 9°. les four- miliers, deux ou trois efpèces; & 10^. les parefleux , dont nous connoiffons deux efpè- ces, favoir l'unau & l'aï. Or ces dix genres & ces quatre efpèces ifolées , auxquels on peut réduire les cin- quante efpèces d'animaux qui font particu- liers au nouveau monde , quoique toutes différentes de celles de l'ancien continent, ont cependant des rapports éloignés qui paroifTent indiquer quelque chofe de commun dans leur formation , & qui nous conduifent à remonter à des caufes de dègénération plus grandes & peut-être plus anciennes que toutes les autres. Nous avons dit qu'en général tous les animaux du nouveau monde étoient beaucoup plus petits que ceux de 106 H'ijîoîrt nattirdU, Tancien continent; cette grande diminution dans la grandeur, quelle qu'en foi t la cau- fe , eft une première forte de dégénération , qui n*a pu fe faire fans beaucoup~infliier fur la forme , & il ne faut pas perdre de vue ce premier effet dans les comparaifons que Ton voudra faire de tous ces animaux. Le plus grand eft le tapir, qui , quoiqu'il ne foit que de la taille d'un âne, ne peut cependant être comparé qu'à l'éléphant , au rhinocéros & à l'hippopotame ; il eft dans fon continent le premier pour la grandeur, comme l'éléphant l'eft dans le fien ; il a , comme le rhinocéros, la lèvre fupérieure mufculeufe & avancée , & comme l'hippo- potame , il fe tient fouvent dans l'eau. Seul , il les représente tous trois à ces petits égards , & fa forme qui en tout tient plus de celle de l'âne que d'aucune autre, fem- ble être aufli dégradée que (à taille eft di- minuée. Le cheval, l'âne, le zèbre, l'élé- phant, le rhinocéros & l'hippopotame n'exif- toient point en Amérique, & n'y avoient tnême aucun repréfentant, c'eft-à-dire , qu'il n'y avoit dans ce nouveau monde aucun animal qu'on pût leur comparer, m pour la grandeur ni pour la forme; le tapir eft ce- lui dont la nature fembleroit être la moins éloignée de tous, mais en même temps elle paroît fi mêlée & elle approche fi peu de chacun en particulier, qu'il n'eft pas pofti- ble d'en attribuer l'origine à la dégénération de telle ou telle efpèce; & que malgré les petits rapports que cet animal fe trouve «voir avec le rlùnocéros, l'hippopotame & Dègineratîon des Animauxl lOf rânç , on doit le regarder non - feulement comme étant d'une efpèce particulière, mais menue d*un genre fingulier & différent de tous les autres. Ainfi le tapir n'appartient ni de près ni - tant & plus^ ies uns des autres que de ceuia de l'autre continent : par exemple , la pan- thère de l'Afrique diffère moins du ja -.uar du Brefil , que celui-ci ne diffère du cou-^ guar qui cependant eft du même pays ; de même ie ferval de l'Afie & le margai de la Guiane font moins diff-érens entr'eux, qu'ils ne le font de tous ceux de leur propre con- tinent : on pourroit donc croire avec affez de fondement que ces animaux ont eu une ©rigiae commune , & fuppofer qu'ayant au- trefois paffé d'un continent à l'autre , leurs différences aûueiles ne font venues que de la longue influence de leur nouvelle Situa- tion. Les mouffettes ou puans d'Amérique , & le putois d'Europe paroiffent être du même genre. En général , lorfqu'un genre eft com- mun aux deux continens , les efpèces qui le compofent font plus nombreufes dans l'an- cien que dans le nouveau; ici c'eft tout le: contraire, on y trouve quatre ou cinq ef- pèces de putois , tandis que nous n'en avons qu'un , dont la nature paroît même infé- rieure ou moins exaltée que celle de tous les autres; en forte qu'à fon tour le nou- veau monde paroît avoir des reprefentans dans l'ancien ; & fi l'on ne jugeoit que pat le fait , on croiroit que ces animaux ont fait \à route contraire , & ont autrefois paffé d'Amérique en Europe. Il en ert de même de ipjelques autres efpices ; les chevreuils & les daims ^.aufîi bien que les mouffettes, font ylus nombreux tant pour les variétés que Dègcnêration des Animaux, aT^ ponr les efpèces, & en même temps plus grands & plus forts dans le nouveau conti- nent que dans l'ancien; on pourroit donc imaginer qu'ils en font originaires : mais coiiarae nous ne devons pas douter que tous- les animaux en général n'ayent été créés dans l'ancien continent, il faut néceflair épient admettre leur migration de ce continent à l'autre; & fuppofer en même temps, qu*au lieu d'avoir , comme tous les autres , dégé- néré dans ce nouveau monde , ils s'y font au contraire perfedionnés, & que par la convenance & la faveur du climat , ils ont furpaffé leur première nature. Les fourmiliers , qui font des animaux très finguliers , & dont il y a trois ou quatre efpèces dans le nouveau monde, paroiflent auili avoir leurs reprélèntans dans l'ancien^ le pangolin & le phatagin leur refl'emblent par le caractère unique de n'avoir point de dents , & d^être forcés comme eux à tirer la langue & vivre de fourmis ; mais fi l'on veut leur fuppofer une origine commune, il eft affez étrange qu'au lieu d'écaillé qu'ils portent en Afie , ils fe foient couverts de poil en Amérique. A l'égard des agoutis , des pacas & des autres du feptième genre des animaux par- ticuliers au nouveau continent , on ne peut les comparer qu'au lièvre & au lapin , def- quels cependant ils diffèrent tous par l'efpè-- ee ; & ce qui peut faire dauter qu'il y ait rien de commun dans leur origine , c'eft que ie lièvre s'eft répandu dans prefque tous les- cIÛBats de raacka continent^ fans que fa 1T4 Hlflolrc naturelle, nature fe foit altérée & fans qu'il ait fubî d'autres changemens que dans la couleur de fonpoil; on ne peut donc pas imaginer avec fondement que le climat d'Amérique ait fait ce que tous les autres climats n'ont pu faire, & qu'il eût changé la nature de nos lièvres au point d'en faire ou des tapetis ou des apérea> qui n'ont point de queue; ou des agoutis à mufeau pointu, à oreilles courtes & rondes; ou des pacas à grofTe tête, à oreilles courtes, à poil ras & rude, avec des bandes blanches. Enfin, les coatis , les tatous & les paref- ^eux font fi difFérens , non- feulement pour l'efpèce, mais auffi pour le genre de tous les animairx. de l'ancien conttnent, qu'on ne peut les comparer à aucun, & qu'il n'eft pas pofîîble de leur fuppofer rien de com- mun dans leur origine , ni d'attribuer aux effets de la dégénération les prodigieuies dif- férences qui fe trouvent dans leur nature, dont nul autre animal ne peut nous donner ni le modèle ni l'idée. Ainfi de dix genres & de quatre efpèGes àfolées, auxquels nous avons tâché de ré- duire tous les animaux propres & particulier» au nouveau monde, il n'y en a que deux, favoir , le genre des jaguars, des ocelots, &c. & l'efpèce du pécari avec fes variétés , qu'on puiffe rapporter avec quelque fonde- ment aux animaux de l'ancien continent \ les jaguars & les ocelots peuvent être re- gardés comme des efpèces de léopards oii de panthères , & le pécari comme une ef- pèce de cochon* £nfuite il y a cinq genres 'Dèçfcnlration âts Animaux, IfC &: une efpèce irolée ^ favoir, Tefpèce du lama , & les genres des fapajous , des Tagoins, des mouffettes , des agoutis & des fourmil- iers , qu'on peut comparer , mais d'une ma- nière équivoque & fort éloignée, au chameau, aux guenons, aux putois, au lièvre & aux pangolins; & enfin il refte quatre genres & deux efpèces ifolées, favoir, les philandres» les coatis, les tatous, les pareffeux, le ta- pir & le cabiai , qu'on ne peut ni rapporter ni même comparer à aucun des genres ou des efpèces de l'ancien continent. Cela femble prouver affez que l'origine de ces animaux particuliers au nouveau monde ne peut être attribaée à la finaple dégénération j quelque grands •, quelque puifTans qu'on vou- lût en fuppofer les effets, on ne pourra jamais fe perfuader avec quelqu'apparence de raifon que ces animaux ayent été origi- nairement les ménies que ceux de l'ancien; continent; il eft plus raifonnable de penfer qu'autrefois les deux continens étoient con- tigus ou continus , & que les efpèces qui s'étoient cantonnées dans ces contrées du nouveau monde , parce qu'elles en avoient trouvé la terre & le ciel plus convenables à leur nature, y furent renfermées & fépa- rées des autres par l'irruption des mers iorf^ qu'elles divisèrent l'Afrique de l'Amérique j cette caufe eft naturelle & Ton peut en ima- giner de femblables ^ & qui produiroient le même effet ; par exemple , s'il arrivoit ja- mais que la mer fît une irruption en A&e de l'orient au couchant , & qu'elle féparât du reûe du continent les terres méridionales lié Hijloin Naturelle, éQ TAfrique & de TAile, tous les animân* qui font propres & particuliers à ces conti- nens du Midi , tels que les éléphans , les rhinocéros, les giraffes, les zèbres, les orangs-outangs , Sic. fe trouveroient relati- ve.nent aux autres dans le même cas que le font aduellement ceux de l'Amérique mé- ridionale; ils feroient entièrement & abfo- lumcnt ieparés de ceux des contrées tempé- rées , & on auroit tort de leur chercher une origine commune & de vouloir les rappelkr aux efpèces ou aux genres qui peuplent ces contrées , fur le feul tondement qu'ils auroient avec ces derniers quelque refl'emblance im- parfaite ou qaelques rapports éloignés. 11 faut donc, pour rendre raifon de l'ori- gine de ces animaux , remonter aux temps où les deux continens n'étoient pas encore féparés ; il faut fe rappeller les premiers changemens qui font arrivés fur la furface du globe ; il faut en même temps fe repré- fenter les deux cents efpèces d'animaux qua- drupèdes réduites à trente-huit familles : & quoique ce ne foit point là l'état de la Na- ture telle qu'elle nous eft parvenue, & que nous l'avons repréfentée, que ce foit au contraire un état beaucoup plus ancien, & que nous ne pouvons guère atteindre qwe par des indudions & des rapports prefqu'aulîi fugitifs que le temps qui femble en avoir effacé les traces; nous tâcherons néanmoins de remonter par les faits & par les monu- mens encore exiftans à ces premiers âges de la Nature, & d'en préfenter les époques qui nous paroîtrom clairement indiquées* JLES ^es Sapajous & des Sapins, 1 1 7 LES L E S S A P A J O U S (^) E T LES S AG OINS [/.]. i^ ous paflbns aduellement d'un continent à Tautre ; tous les animaux quadrumanes dont nous avons donné la deicription , & tjue nous avons compris fous les noms gé- nériques de Singes, Babouins & Guenons , ap- partiennent exclurivement à l'ancien conti- nent , & tous ceux dont il nous refte à faire mention ne {e trouvent au contraire que dans le nouveau monde. Nous les diitin- guons d'abord par deux noms génériques., parce qu'on peut les divifer en deux clafTes ; la première efl celle des Sapajous, & la fé- conde celle des Sa^oms: les uns & les au- tres ont les pieds conformés à-peu-près comme ceux des finges, des babouins & des guenons; mais ils diffèrent des fmges. (a) Sapajou f mot dérivé de Cayouaffou ; nom ('e ces animaux au Bréfil , Se. qui te prononce Su-- jouaffou, (i) Sagoin , Sagouin ^ mot dérivé de Cspii , qui fe prononce Sagoui , écqui eft le nom de ces animaux dar.s leur pays natal au Brefil. Quadrupèdes, Tom, VIL T Iï8 Hijîolrc naturelle'» en ce qu*ils ont des queues; ils difFèrent des babouins & des guenons, en ce qu'ils n'ont ni poches au bas des joues , ni callo- fités fur les feffes; & enfin ils difFèrent de tous trois , c'eft à-dire des finges , des ba- bouins & des guenons, en ce que tous ceux- ci ont la cloifon du nez mince, & les nari- nes ouvertes à-peu-près comme celles de l'homme au-deffous du nez ; au lieu que les lapajous & les fagoins ont cette cloifon des narines fort large & fort épaiffe , & les ou- vertures des narines placées à côté & non pas au-deïïbus du nez : ainfi les fapajous & les fagoins font non-feulement (pécifiquement, mais même génériquement dinérens des fm- ges, des babouins -& des guenons. Et lorf- qu'enfuite on vient à les comparer entr'eux, on trouve qu'ils difFèrent aulii par quelques caractères généraux; car tous les fapajous ont \3. queue prenante , c'eft-à-dire , mufclée de manière qu'ils peuvent s'en fervir comme d'un doigt pour laifir & prendre ce qui leur plaît; cette queue qu'ils plient, qu'ils étendent , dont ils recoquillent ou dévelop- pent le bout à leur volonté, & qui leur fert principalement à s'accrocher aux branches par fon extrémité efl ordinairement dégarnie de poil en deffous 6i cous^erte d'une peau liiFe. Les fagoins au contraire ont tous la queue proportionnellement plus longue que les fapajous , &. en même temps ils Tout en- tièrement velue j lâche & droite; enforte qu'ils ne peuvent s'en fervir erj aucune ma- nière ni pour faifir ni pour s'accrocher : cette différence eft ft apparente qu'elle fuffit fçul$ d^ Sapajous & des Sagolns^ H<^ ^our qu'on puiffe toujours diftinguer un fapa- joa d'un fagoin. Nous -connoi lions huit fapajous que nous croyons pouvoir réduire à cinq efpèces; la première eft Vouarme ou gouarlha du Brefil : ce fapajou eft grand comme un renard, & il ne diffère de celui qu'on appelle ulouate a Cayenne que par la couleur : i'ouarine a ie poil noir & l'alouate Ta rouge, & comme- ils fe refîemblent à tous autres égards, je n'en fais ici qu'une feule & même efpèce ; 3a féconde eft le coaita qui eft noir -comme I'ouarine , mais qui n'eft pas fi grand & dont Vexquima nous paroît être une variété ; la troifième eft le f^jou ou fapajou propre- ment dit, qui eft de petite taille, d'un poil brun, & qu'on connoît vulgairement ibus le nom impropre de fino;e - capucin', il y a dans cette efpèce une variété que nous ap- pellerons le fajou gris , & qui ne diffère du fajou brun que par cette différence du poil : la quatrième efpèce eft le faï que les Voya- geurs ont appelle le pleureur, il eft un peu plus grand que k fajou , &. il a le mufeau plus large : nous en connoiftbns deux qui n^ diffèrent que par la couleur du poil, le premier eft d'un brun -noirâtre, & le fécond d'un roux-blanchâtre; enfin la cinquième ef- pèce eft lefaïmari , qu'on appelle vulgairement lejînge aurore OU fapajou orangé: celui-ci eft le plus petit & le plus joli des Sapajous. Nous connoiffons de ir.ême fix efpèces de fagoins ; le premier & le plus grand de tous eft le f^ki, qui a la queue couverte d'un poil fi long & fi touffu qu'on l'a nommé T 2 210 Hif.oiri natnrdlc fin^e à queue de renard', ilfemblequil y ait variéré dans cette eipèce pour la grandeur; j'en ai vu deux qui paroiffoient adultes , dont l'un étoit prefque une fois plus grand qu♦ Les Anges jaunes, dit cet Auteur » -qu'ils appellent arahata font un br^it infupportabîe ôt iî 1 gubre qu'ils font horreur. H'ifioirt de l'OrénoquCt far Gumilla , p. 8 »«. drcopithecus harhatiis maximiis ferrugineus fîentorofus, Alctiata , iinge rouge. Barrère , hlfi, nat. de la Fr, iqu'tn. p. 150. Ctrcophheais barhatns faturate fptidieeus. Le finge ïOvige de Cayenne. Brijf. res,. anlm. p. io6. (c) iVÎarcgrave. Hlji. Braf, ^,226, de ÛO narine & de ÛAlcuate. ilj par un autre figne de la main , il leur or- Gonne-'le filence ; que dans le moment ils obéifîent & fe taifent; qu'enfin, alors le premier reprend fon difcours ou fa chanfon, & que ce n'eft qu'après l'avoir encore écouté bien attentivement qu'ils fe féparent & rom- pent l'afîembiée : •>•> ces faits dont Marcgrave dit avoir été plufieurs fois témoin, pourroient bien être exagérés & affaifonnés d'un peu de merveilleux : le tout n'eft peut-être fondé que fur le bruit effroyable que font ces animaux ; ils ont dans la gorge une efpèce de tambour olTeux dans la concavité duquel le fon de leur voix grolîîtj, fe multiplie & forme des hurlemens par écho; auffi a-t-on diftingué ces fapajous de tous les autres par le nom de hurleurs : nous n'avons pas vu l'oua* rine , mais nous avons les dépouilles d'un alouate & un embryon defféché de cette même efpèce , dans lequel l'inftrument du grand bruit, c'eft-à-dire, l'os de la gorge efl déjà très fenfible (J). Selon Marcgrave, (d) Ce fingc Alouate, eft un animal fauvage, rou- ge bai , fort gros , qui fait un bruit efFroyable fem- b'able à un râlement qu'on entend de bien loin , & c'eft par le moyen de l'os hyoïde qui eft d'une ftruc» ture finguliere. B.trrhre , EJfais de Ihlfîoire na.turdU de la France Eqnin. p. ijo, — Dans rifie Grande ou l'ifle 5aint George, fous le Tropique, à àenx lieues du continent de l'Amérique , il y a des {îngfs grands comme des veaux, qui font un bruit fi étrange, que ceux qui n'y font pas accoutumés croient que les montagnes vont s'écrouler. ... Ils font très farouche», Vayagi di U Gentil , tome J , p. f 5 . T4 ^24 Hifloïn na tnrdU i'ûiiarine a la face large & carrée , les yeux noirs & brillans , les oreilles courtes & ar- rondies, la queue nue à fon extrémité, avec laquelle il s'accroche'& s'attache fermement à tout ce qu'il peut embralTer r les poils de tout le corps font noirs , longs, luifans & polis ; des poils plus longs fous le menton & fur la gorge lui forment une efpèce de barbe ronde j le poil des mains, des pieds & d'une partie de la queue eft brun. Le mâle eft de la même conleur de la femelle , & il n'en diffère qu'en ce qu'il eft un peu plus grand. Les femelles portent leurs petits fur le dos & fautent avec cette charge de branches en branches & d'arbres en arbres ; les petits embrallent avec les bras &.• les mains le corps de leur mère dans la partie k plus étroite , & s'y tiennent fermement attachés tant qu'elle eft en mouvement. Au refte , ces animaux font fauvages & mechans ,~ ©nne peut les apprivoiferni même les domp- ter; ils mordent cruellement, & quoiqu'ils ne foient pas du nombre des animaux car- nafliers & féroces , ils ne laifTent pas d'inf- pirer de la crainte , tant par leur voix ef- froyable, que par leur air d'impudence : comme ils ne vivent que de fruits, de lé- gumes , de graines & de quelques infeftes , leur chair n^eft pas mauvaife à manger ( e ), ( e) Les firges font le gibier le p'u$ ordinaire & le plus du goût c^^% Indiens de l'Amazone. ... Il y en a d'aulTi grands qu'un Lévrier. Voyage fur la rivkr& de l'Amazone j par M», di- lu Çondamim , pa^i iC^t. de tOuarinc & de t Alouatc, 215 «Les chaffeurs, dit Oexmelinj apportèrent fur le foir des finges qu'ils avoient tués dans les terres du c ip Gracias-a-Pio; on fit rô- tir une partie de ces finges &: bouillir l'au- tre , ce qui nous lemblafort bon \ la chair en eft comme celle du lièvre, mais elle n'a pas le même goût étant un peu douceâtre, c'eft pourquoi il y faut mettre beaucoup- de felenla failant cuire; la graifie en eft jaune comme celle du chapon, & plus même , ôc a fort bon goûr ; nous ne vécûmes que de ces animaux pendant tout le temps que nous — Cayenne eft le pays des finges Quand on a une fois vaincu fa répugnance pour en manger , il efi certain qu'on les trouve fort bons; leur chair eft blanche, & quoique peu chargée de graifTe pour l'or- dinaire, elle ne laiffe pas d'être tendre, délicate & de bon goûtj leurs têtes font de bonnes foupes, & on les l'ert delTus , comme un chapon bouilli , &c. Voyage de D ij marchais , tome III , pages pr & ^^8, — Il y a des guenons à Cayenne aulTi grofl'es que de grands chiens, de couleur rouge de-vache ; on les appeile les hurleurs , parce qu'étsnt en troupe , ils hurlent d'une façon , que d'abord ion croit que c'eft une troupe de pourceaux qui fe battent; ils font af- freux & ont une gueule fort large ; je crois qu'ils font furieux j files Sauvages les flèchent, ils retirent la flè- che de leur corps avec leur main comme une per- fonne ; la chair de ces hurleurs eft très bonne à man- ger, elle reffemble à la chair du mouton, il y a à manger pour dix perfonnes j ils ont un cornet intérieur en la gorge qui leur rend le cri effroyable. Voyage de Binet, pages ^^i & ^42. — Les Sauvages Achaguas de rOrénoque font friands de fmges jaunes , qu'ils ap- pellent arahata , lefqueis font matin & foir un bruit înfupportable, Hiftoire de l'Orénoquc , par Gumilla , fage Se 120 Hiffotre naturelle fumes là , parce que nous ne trouvions pas autre chofe; fi bien que tous les jours les chafîeurs en apportoient autant que nous en pouvions manger. Je fus curieux d'aller à cette chaffe , & Turprts de Tinflinâ: qu'ont ces bétes de connoître plus particulièrement • que les autres animaux ceux qui leur font la guerre, & de chercher les moyens , quand ils font attaqués , de fe fecourir & de fe dé- fendre. Lorfque nous les approchions , ils fe joignoient tous enfemble, fe mettoient à crier & faire un bruit épouvantable, & à nous jeter des branches sèches qu'ils rom* poient des arbres ; il y en avoir même qui faifoient leur faleté dans leurs pattes qu'ils nous envoyoient à la tête ; j'ai remarqué aufîi qu'ils ne s'abandonnent jamais, & qu'ils fautent d'arbres en arbres fi fubtilement que cela éblouit la vue ; je vis encore qu'ils fe jetoient à corps perdu de branches en bran- ches fans jamais tomber à terre ; car avant qu'ils puiffeht être à bas , ils s'accrochent ou avec leurs pattes ou avec la queue : ce qui fait que quand on les tire à coups de fufil, à moins qu'on ne les tue tout-à-fait, on ne les fauroit avoir ; car lorfqu'ils font blefîes, & même mortellement, ils demeu- rent toujours accrochés aux arbres , où ils meurent fouvent & ne tombent que par piè- ces. J'en ai vu de morts depuis plut de qua- tre jours, qui pendoient encore aux arbres, fi bien que fort fouvent on en tiroit quinze ou feize pour en avoir trois ou quatre tout au plus : mais ce qui me parut plus fingu- lier, c'eft qu'au moment que l'un d'eux eil de COuarlne & de t Alouate» iiy blefle, on les voit s'affembler autour de lui, mettre leurs doigts dans la plaie , & faire de même que s'ils la vouloient fonder ; alors s'ils voient couler beaucoup de fang, ils la tiennent fermée penlant que d'autres appor- tent quelques feuilles , qu'ils mâchent & pouffent adroitement dans l'ouverture de la plaie ; je puis dire avoir vu cela plufieurs lois, & l'avoir vu avec admiration. Les fe- melles n'ont jamais qu'un petit qu'elles por- tent de la même manière que les Négreffes portent leur enfant ; ce petit fur le dos de fa mère lui embrafle le cou par-deffus \&^ épaules avec les deux pattes de devant; & des deux de derrière , il la tient par le mi- lieu du corps : quand elle veut lui donner à teter, elle le prend dans fes pattes, & lui préfente la mamelle comme les femmes. . . On n'a point d'autre moyen d'avoir le petit que de vuer la mère , car il ne l'abandonne jamais ; étant morte , il tombe avec elle , & alors on le peut prendre. Lorfque ces animaux font embarralTés , ils s'entr'aident pour pafTer d'un arbre ou d'un ruiffeau à un autre , ou dans quelqu'autre rencontre que ce puiffe être. . . . On a coutume de les en- tendre de plus d'une grande lieue ^/V*' Dampierre (^), confirme la plupart de (/) Hiftoire des Aventuriers , par Oexmeîin , tomt II , p. 2;/ & fuivantes. (g) Le$ finges qui fe trouvent dans les terres de fa baie de Ompèche, font les plus laids que j'aie vus ce lyu Vie; iU ioat beaucoup plus ^ros qu'un lièvre 9 2i8 Hljloîre naturdlt ces faits, néanmoins il aflure que ces anî- maux prodiùfent ordinairement deux petite , & ont de grandes queues de près de deux pieds & demi de long; le deffous de leur queue eft fans poil, ôc la peau en eft dure & noire, mais le delTus, auflU- bien que tout le refte du corps, eft couvert d'un poil rude, long, noir & hérifte; ils vont de vingt ou trente de compagnie, roder dans les bois où ils fau- tent d'un arbre à l'autre ; s'ils trouvent une perfonne feule ils font mine c'.e la vouloir dévorer. Lors même que j'ai été feul , je n'ai pas ofé les tirer , furtout ia première fois que \z les vis^ il y en avoit une groffe troupe qui fe larçoient d'arbre en arbre par-defTu» ma têre , craqaetoient des dents & faifoient un bruit enragé j il y en avoit même plufieurs qui faifoient des grimaces de la bouche & des yeux, 6c mille poftures grotefques; qtie'qaesuns rompoient des branciies sè- ches & me les jecpient ; d'autres répandoient leur urine Ôi hurs ordures fur moi; à la fin, il y en eut un plus gros que les autres , qui vint fur une petite branche au deffus de ma tête & fauta tout droit con- tre moi, ce qui me fit reculer en arrière, mais il fe prit à la branche au bout de la queue , & il demeura- là fufpendu à fe brandiller & à me faire la moue; enfin, je me retirai, & ils me fuivirent jufqu'à nos bûtes avec les mêmes poftures menaçantes. Ces finges fe fervent de leur queue auftî-bien que de leurs pat- tes ; & ils tiennent auffi ferme avec elle. Si nous étions deux ou plufieurs enfemble ils s'enfuyoient de nous. Les femelles font fort embarraffées pour fauter après Jes mâles avec leurs petits ; car elles en ont ordinaire- ment deux, elles en portent un fous un de leurs bras, & l'autre qui eft aftis fur le dos fe tient accroché à leur cou avec fes deux pattes de devant : ces finges font les plus farouches que j'aie vus de ma vie, & il ne nous fut jamais pofTtble d'en apprivoifer aucun , quelqu'artifice que nous millions en oeuvre pour en venir à bout; il n'eft guère plus aifé de les avoir quand on les a tirés, parce que s'ils peuvent s'atta- cher à quelques branches avec la queae oi^ avec les de rOuarlnt & de l*Alouan, 219 & que la mère en porte un fous le bras & l'autre fur le dos. En général , les fapajous, ir.éme de la plus petite eipèce , ne produifent pas en grand nombre , & il eft très vrai- iemblable que ceux-ci qui font les plus grands de tous ne produifent qu'un ou deux petits. Caraclercs dljlincllfs d« ces efpeces, L'ouarine a les narines ouvertes à côté & non pas au-defTous du nez, la cloifon des narines très épaifîe; il n'a point d'abajoues, point de callofités fur les fefîes ; ces parties îbnt couvertes de poil comme le retle du corps. 11 a la queue prenante & très lon- gue , le poil noir & long , & dans la gorge un gros os concave ; il eft de la grandeur d'un lévrier, le poil long qu'il a fous le cou lui forme une efpèce de barbe ronde i il marche ordinairement à quatre pieds. L'alouate a les mêmes caraderes que l'oua- rine , & ne paroît en difFérar, qu'en ce qu'il n'a point de barbe bien marquée & qu'il a le poil d'un rouge -brun, au lieu que l'oua- rine l'a noir. J'ignore fi les femelles dans pattes , ils ne tombent point à terre pendant qu'il lewr refte le moindre foufïle de vie ; après en avoir tiré un , & quelquefois lui avoir caffé une jambe ou un bras, j'ai eu compaflion de voir cette pauvre bête re- garder (ixement , & manier la partie bleffée & la tourner d'un côté ou d'autre ; ces fmges font fort ra- rement à terre » il y en a même qui difent qu'ils n'y v«nt jamais. Tomi III , p. ^0^, î^O Hijîolre namrdît CQS efpèces font fujettes à récoiilement pé-» riodique ; mais par analogie , je préfume^que non , ayant obfervé généralement qu'il n'y avoit que les finies , babouins & guenons à feiies nues qui foient fujettes à cet écou- la ment. t t TorTL.-V^ir. K.nJ iLe Cocuta. Ji Le vS^arou. tratv. 5 Le »S^cyou- j^rt J'. ^ Le »5aÀ^. v5^ v^oi CL &or^e-t)laackt^ . ssscsainBgaa du Coalta 5* de rExquima 231 i&> 1^ jj^ jj^ j^ «^ ji^ jj^ ^ A^i^ <^;ij|!c 1^ j|<. ^ iX« jjjjft j|« ji^ i^ LE C O A I T A [a]. E T L* E X Q U I M A {b\ Foye^ planche II, fig, 1 dt ce Volume, Le Coaita eft , après TOuarine & TAlouate ; le plus grand des Sapajous ; je Tai vu vivant à l'hôtel de M, le Duc de Bouillon , où par ( P^ge 2.10, tab. 6, Circoplthecus barbatus Guineenfis , Marcgravii Habi- tat in G'jineâ , mas^nittido felis majorls ; ntgra punciîs albidis, Dorfum poftice fernigincum , feihora fiibtus hel~ vola , gula pecii/fque alba , frons pilis ereclis albis fajiip.ia- tis , lima tranfverfa in fotmam luncz crefcentis , barba fa(îigiata nigra fuhtus alba itijîdens f.iberi adipofo , linea alba ab ano ad genua ab extcriori latere fcmcrum ducîa, Ludibunda omnia dejlcit pcngrinos nutitar.do /alutat, irata ore hiat maxHUfque exagitqt ; vocata refpêndet greek. Linn. fyji, nat, edit. X , p. 26 & 27. y 2 ±l6 Hljîoîre naturdit» d'autres variétés moins fenfibles dans refpèce? du coaita ;. celui qu'a décrit M BrilTon ^ avoir du poil blanchâtre fur toutes les par- ties inférieures du corps ^ au lieu que ceux que nous avons vus étoier^t entièrement' noirs & n'avoient que très peu de poil fur ces parties inférieures , où l'on voyoit la- peau qui étoit noire comme le poil. Des deux coaitas dont parle M. Edwards {g), l*nn étoit noir & l'autre étoit brun ; on leur avoit donné, dit- il, le nom de fmge - araignée, k caufe de leur queue & de leurs membres qui éioient fort longs & fort minces : ces ani- maux font en eiïet fort éfilés du corps & des jambes, & mal proportionnés. On m'en préfenta un, il y a pîufieurs an- nées , fous le nom de clumeck ^ que l'on me dit venir des côtes du Pérou ; j^en fis pren- dre les niefures & faire une description {h): ( g ) Voyez GlanviTes , page z22. ( h ) Cet animal venoit de la cote de Bancet a» Pérou, il étoit âgé de treize mois, il pefoit environ- iix livres; il étoit noir partout le corps; la face nue, avec vme peau grenue & de couleur mulâtre; le poil de deux à trois pouces de longueur & un peu rude; les oreilles de même couleur que la face 8c aufTi dé- garnies ce poil , fort re {Semblantes à celles de l'hom- me; la queue longue d'an pied dix pouces, grofle ée cinq pouces de circonférence à la baz«, & de' onze lignes à Textrémité , elle étoit ronde & garnie de poil en deffus & en de-Ious à fon origine , f< i"u? une longueur de treize pouces, mais fans poil par-def- fûus fur une longueur de neuf pouces à Ton extré- mité, ou elle eft applatie par-defTous & (ilîonnée dani ioù BoUiçu , ôc ronde par-deffuj i. l'aïiinBal U îstt dft du Coaîta & de tExquima, 237 je la rapporte ici pour qu'on puiiTe la com- parer avec celle que A*. Daubenton a faite fa queue pour fe fufpendre 8c s'sccrocher ; il s'en fert aurti comme d'une cinquième inain pour faiir ce qu'il veut amener à lui; il avoit treize pouces de longueur, depuis le bout du nez iufqu'à l'origine de la queue ; neuf pouces & demi de cir'coriérence derrière les bras, & un pied un pouce fur la pointe du fternum qui eft très relevé, neuf pouces & demi devant les pattes de derrière; le cou avoit cinq pouces 6c demi de cir- conférence ; il n'y avoit que deux mamelles placées prefque fous les aiiTelles ;'la tête avoit cinq pouces de circonférence prife à Tendroit le plus gros , 8c deux pouces au defTous des yeux; le nez treize lignes de longueur; les yeux étoient fort reffemblans à ceux d'un enfant, ils avoient neuf lignes de longueur d'un angle à l'autre ; Tiris en étort brun ^ environné d'un petit cercle punâtre, la prunelle étoit grande, & i! y avoit d'un œil à l'autre huit lignes de diftance; l'o- reille avoit un pouce (ix lignes de longueur & dix li- gnes de largeur ; le tour de la bouche treize lignes ; les bras fix pouces trois lignes de longueur & trors pouces de circonférence ; l'avant-bras i:x pouces de longueur & deux pouces & demi de circonférence ;^ le refte de la main cinq pouces de longueur ; la paume de la main un pouce trois li!Î,nes de largeur; il avoit aux mains qortre grands doigts garnis d'ongles, & un petit pouce fans ongle qui n'étoit long que de deux lignes j l'index avoit deux pouces deux lignes de Ion i gusur ; le doigt du milieu deux pouces ôt demi ; l'an- Dulaire deux pouces quatre lignes , & le petit doigt deux poucs ; les ongles trois lignes $< demie à quatre lignes de longueur ; la jambe (ix pouces jufqu'au ge- nou ^ quatre -pouces huit lignes de circonférence au plus gros; depuis le genou jufqu'au talon cinq peu- ces quatre lignes , ôc trois pouces de circonférence; le pied cinq pouces & demi de longueur ; il avoit aux pieds cinq doigts mieux proportionnés que ceux des isauii j le pou and. on this It dépend^ for ils chief actions , for the creatun holds every thing by it y and fling itfclf ■with the greatift eafe front evcry tree and pojl by its means It is a n^^tive ofthe main continent ; and a part of the food ofthe Indians. Ruffel. hift. of^amaïca^ chap. V , feél. 5. (Jt) A l'isle de Gorgonia fur la côte du Pérou, je remarquai des finges qui venoient cueillir des huîtres lorfqoe la marée étoit bafTe, & qui les ouvroient de cette manière ; ils en prenoieat une qu'ils mettoient du Coaita & de tExqmma, î*^^ fe Tufpendent plufieurs les uns au bout des- autres, foit pour traverfer un ruiffeau , foit pour s'élancer d'un arbre à un autre ( /). Us ne produifent ordinairement qu'un ou deux petits , qu'ils portent toujours fur le dos , ils mangent du poiffon , des vers & des in- fères , mais les fruits font leur nourriture la plus ordinaire : ils deviennent très gras dans le temps de l'abondance & de la matu- rité des fruits; & l'on prétend qu'alors leur chair eft fort bonne à manger {m). fur une pierre , & avec une autre pierre ils la frappoieot jufqu'a ce qfu'iîs eufTent rompu récail!e en morceaux , en fuite ils en avaloient les poiffons. Voyage de Dam- pierre y tome IV, p. 288. (/) En allant à Panama, je vis en Capira, qu'une de ces guenons fauta d'un arbre à un autre , qoi étoit de l'autre côté de la rivière, ce qui ms fit beau- coup émerveiller j elles fautent où elles veulent, s'en- tortillant la queue en une branche pour fe branler , Se quand elles veulent fauter en un lieu éloigné & qu'elles ne peuvent y atteindre d'un faut , elles ufent alors d'une gentille façon , qui eft qu'elles s'attachent à la queue les unes des autres, & font par ce moyen comme une chaîne de plufieurs , puis après elles s'é- lancent Se fe jettent en avant, St la première étant ai- dée de la force des autres atteint où elle veut & s'attache à un rameau , puis elle aide ôc foutient tout le refte jufqn'à ce qu'elles foient toutes parvenues , attachées, comme je l'ai dit, à la queue les unes des autres, Hifiom Naturelle des Indes ^ par Jofeph d'Acofta , page 200. (m) Ces animaux font de taille médiocre, mais fort gras dans la belle faifon, lorfque les fruits font iriûrs j la chair en eft exquife, & nous en mangions bsaucoup. Voyage de Dampierrct tomi IV t f. zzs* 24^ Hîjloin natufdli't Caracicres dîstincllfs de as cfplCfS, Le Coaita n'a ni abajoues ni callofités fuf les fefles ; il a la queue prenante & très longue, la cloifon des narines très épailTe, & les narines ouvertes à côté & non pas au-delîous du nez; il n*a que quatre doigts aux mains ou pieds de devant ; il a le poil & la peau noires , la face nue & tannée ^ les oreilles aufîi nues & faites comme celles de rhomme ; il a environ un pied & demi de longueur^ & la queue eft plus longue que le corps & la téce pris enfemble ; il marche à quatre pieds. L'exquima eft à-peu près de la même gran- deur que le Coaita, il a comme lui la queue prenante ; mais il n'a pas de poil noir fur tout le corps; il varie pour les couleurs, il y en a de noirs & de fauves fur le dos , & de blancs fur la gorge & le ventre ; il a d'ailleurs une barbe remarquable : néanmoins ces différences ne m'ont pas paru fufîîfantes pour en faire deux efpèces féparées : d'au- tant qu'il y a des coaitas qui ne font pas tout noirs , & qui ont du poil blanchâtre fur la gorge & le ventre. Les femelles dans ces deux efpèces ne font pas fujettes à Té- coulement périodique. IZ dïï^ Sajott» Voyei planche XI, j%. 2 , 6» 3 dt ce Volume N. ous connoiflbns deux variétés dans cette «fpèce , le fajou briin qu'on appelle vulgai- rement le Singe-c.ipucin, Si. le lajou gris qui ne diffère du fajou brun que par les cou- leurs du poil; ils font de la mêiH 3 grandeur, de la même figure & du même naturel ; tous deux font très vifs , très agiles 2c très plai- ( û ) Sajou , mot abrégé de CcvouaJJcu ou Sajouaf- fou y nom de ces animaux au Mara>r.on. " Nota* Cayouaffou doitfe prononcer S^jouajfou , c*eil- là Porigine du mot Sapajou. Cayouajfou, Dans les terres du Marsgion : H y a d'autres guenons qui s'appellent Cayouajfou , que Von apporte & que l'on voit communément par-deçà. Miff. du P. d'AhhcvUlc , p. 2/2. Cer<:oplthc<:us fufcus capiîls vcrdce nigro. Le Sapajoa brun. BrijJ'. reg. anim.^ p. 19a. Nota. Je préfume que celui qu'indique M. BrifTon, p. 795 , fous !a dénomi- nation de Sapajcu cornu , n'eft qu'une variété de ce- lui - ci. Petit Singe de Ceylan, Seha , volume /, planche XLVIII, fig. 3. NOTA, Cet animal ne fe trouve point à Ceylan , mais en Amérique. Capucina Jiniia caudata imherbis , caudâ longi birfuta facie flavefcentc. Muf. A. d. Fr. 2 , tab. 6. Llnn. fyji, nat. edit. X, p. 29. Singe à queue touffue. Glanuui d'Edwards » n, zzz . fig. Ibid. Quadrupkdefi , Tom, VIL X 24 î HiftoiTC namnlU fans par leur adrefTe & leur légèreté ; nous les avons eu vivans , & il nous a paru que de tous les fapajous ce font ceux auxquels la température de notre climat difconvenoit le moins ; ils y fubfiftent fans peine & pen- dant quelques années , pourvu qu'on les tienne dans une chambre à feu pendant l'hi- ver; ils peuvent même produire, & nous en citerons plufieurs exemples : il eft né deux de ces petits animaux chez Mn^e la Marquife de Pompadour à Verfailles; un chez M. de Réaumur à Paris , & un autre chez M'^e. de Pourfel en Gâtinois (, ^ ) : mais chaque portée n'eft ici que d'un petit, au lieu que dans leur climat ils en font fou- vent deux. Au refte , ces fajous font fantaf- ques dans leurs goi'its & dans leurs affeâ:ions; (è) M. Sanches ci - devant premier Médecin à la Cour de Ruflîe , & que j'ai déjà eu occafion de citer avec reconnoiffance , m'a communiqué ce dernier fdit par une lettre de Mme. de Pourfel , dont voici l'ex- trait ; 5» à Bordeaux en Gat'nois , le 16 Janvier >jC'4» Le 15 de ce mois , la femelle fapajou a fait un petit, qui avoit la tête prefqu'aufTi greffe que celle de fa Kiere; elle a beaucoup fouffert pendant plus de deux heures , on fut obligé de lui couper la ceinture par laqu^elle on la tenoit attachée , fans cela elle n'auroit pu mettre basj rien de fi joli que de voir le père & la mère, avec leur petit, qu'ils tourmentent fans cefle , foit en le portant , foit en le careffant. Fernambuco ( on a donné ce nom au Sapajou mâle , qui eft venu de cette partie du Brefil l'été dernier 1763 à Lisbonne, & qu'on a apporté avec fa femelle à Paris au mois de Septembre fuivant) aime fon enfant à la folie; le père & la mère le portent chacun à leur tour , ôc qaan4 jl ne fe tient pas bien , il çft mordu bien ferré ♦«, du Sajou. 14 J ils paroiflent avoir une forte inclinarion pour de certaines perfonnes , & une grand-* averfion pour d'autres, & cela conftammenr. Nous avons obfervé dans ces animaux une fingularité , qui fait qu'on prend fou- vent les femelles pour les mâles ; le clitoris eft proéminent au dehors ôi paroit autant que la verge du mâle. Caraclcrcs dïstlnciifs de cate efphe. Les Sajous n'ont ni abajoues ni callofité!? fur les fefies , ils ont la face 6c les oreilles couleur de chair avec un peu de duvet par-deffus; la cloifon dès narines épaifîe, & les narines ouvertes à côté & non pas au-deffous du nez; les yeuxchâtains & pla- cés affez près l'un de l'autre ; ils ont la queue prenante , nue par-deffous à l'extré- mité , & fort touffue fur tout le refte de fa longueur ; les uns ont le poil noir & brun , tant autour de la face que fur toutes les par- ties fupérieures du corps ; les autres l'ont gris autour de la face , & d'un fauve-brun fur le corps; ils ont également les mains noires & nues ; ils n'ont qu'un pied de lon- gueur depuis l'extrémité du mufeau jufqu'à l'origine de la queue ; ils marchent à quatre pieds. Les femelles ne font pas fujettes à l'écoulement périodique. %% 144 Hijîolre naturelle LE S A I [ a ]. Voye:^ pi. XI , figures 4 &* ^ de ce volume, il ous avons vu deux de ces animaux qui nous ont paru faire variété dans l'efpèce ; le premier a le poil d'un brun-noirâtre; le fécond , que nous avons appelle Saï â gorge blanche, a du poil blanc fur la poitrine , fous le cou 6c autour des oreilles & des joues; il diffère encore du premier, en ce qu'il a la" face plus dégarnie de poil; mais, au refte ils fe reffemblent en tout, ils font du même naturel , de la même grandeur & de la même figure. Les Voyageurs ont indiqué ces ani- maux fous le nom de Pleureurs (b), parce qu'ils ont un cri plaintif, & que pour peu qu'on les contrarie , ils ont l'air de fe I3- Bienter; d'autres les ont appelles Singes muf» quésy parce qu'ils ont, comme le macaque. (a) Cay ^ que l'on doit prononcer Saï y nom de cet animal ^au Brefil , 8c que nous avons adopté. Cay , petite guenon noire que les Sauvages appellent Cay en cette terre du Brefii. Voyage de Jean Se Ley, Paris, 1758, p. tC^. (b) Dans l'isle Grande ou isie Saint-Georçe fous le Tropique, à deux lieues du continent de l'Amérique, il y a des Singes qu'on appelle Pleureurs, qui imitent les cris d'un enfant. Voyais de le Gentil ^ terne /, du SûL î^f une odeur ^e faux mufc ( c ) ; d'autres eni^n leur ont donné le nom de Macaque { d) ^ qu'ils avoient emprunté du macaque de Gui- née : mais les macaques font des guenons à queue lâche, & ceux-ci font de h famille des Sapajous, car ils ont la queue prenante. Ils n'ont que deux mamelles , & ne produi- fent qu'un ou deux petits ; ils font doux j dociles & fi craintifs , que leur cri ordinaire qui reffemble à celui du rat, devient un gémilTement dès qu'on les menace. Dans ce pays-ci ils mangent des hannetons & des limaçons (e) de préférence à tous les au- tres aiim.ens qu'on peut'leur préfenter; mais au Brefii , dans leur pays natal , ils vivent principalement de graines & de fruits fau- vages qu'ils cueillent fur les arbres {f^$ (c) Il y a dans les terres de la baie de Tous-les* Saints de petits iinges , qui font d'une laideur afFreu- fe, & qui Tentent beaucoup le mufc. Voyage de Dam-* pierre, tome IV, p. 69. ( d) T'ai vu à la baie de Tous-les-Saints deux efpè- ces de Singes, leà uns qu'on appelle Sagouins & lesr autres qu'on appelle Macaques. Les Sagouins font de la groffeur d'un écureuil, i'r y en a de grr$, & d'au- tres d'un poil iin & de couleur d'aurore ; ils font tout- à-fsit jolis, . . . Les macaques font plus gros & d'un poi! brunj ils pleurent toujours, &c. Voyage de de Gennes t par Frogcr , p. 1^0. (e ) Tous les finges de ce pays de l'Amérique méri- dionale vivent ce fruits & de fleurs, & de quelques înfeftes, comme cigales, &c. HiJIoire des Aventuriers , par Oex^elin , tome //, p. z<^6. (f) Le naturel des Cays (Sais) eu tel, que ne bougeant guère de delTus un arbre qui porte un fruit, ayant gouffe prefqae comme nos grolfes fèves , de quoi t^S ïiîjîoin natureiU où ils demeurent & d'où ih ne defcendent que rareinent à terre. Caracieres disùn&ifs de cette efpïce. Les Sais n'ont ni abajoues ni caîlofités fur les feffesj ils ont la cloifon des narines fort épaiffe , & l'ouverture des narines à côté ai non pas au-delTous du nez ; la face ronde & plate, les oreilles preTque nues; ils ont !a queue prenante , nue par-deflbus vers l'extré- mité, le poil d'un brun-noirâtre fur les par- ties fupérieures du corps , & d'un fauve-pâle ou même d'un blanc- faie fur les parties iii- i!$ fe nourriffent ; î!$ s'affemblent ordinairement par troupes , ôc pri..cipalement en temps de pluie ; c'eft un plaifir de les oi..ïr crier & mener leur fabat fur CQ% arbres. Au, refte , cet animal n'en porte qu'un d'une ventrée, mais le petit ayant cette iiïduftrie ce nature, que fi-tôt qa'il eft hors du ventre , il embraffe & tient ferme le cou du père ou de la mère : s'ils fe voyent pourchaffés des chafTeurs, fautant & l'empor- tant ainfi de branches en branches le fauvent de cette façon ; partant les Sauvages n'en pouvant guère pren- dre , ni jeunes ni vieux n'ont d'autres moyens de les avoir iinon qu'a coups ce tlèches , les abattent de def- fus les arb-es dort torribent étourdies & quelquefois bien bleilées , après r^a'iis les ojit guéries & un peur apprivoifées les changent pour quelques marchandifes j je dis nommément apprivoifées, car du commencement qu'elles font prifes elles font fi farouchss qu'elles iTjordent fi opin âtrement qu'il faut les nfîommer pour les faire lâcher prife. Voyage de de Lêry y page i6^. du Sa'L 147 férieures. Ces animaux n'ont qu'un pied ou quatorze pouces de grandeur ; leur queue eft plus longue que le corps &l la tète pris enfemble ; ils marchent à quatre pieds. Les femelles ne font pas fujettes à l'écoulement périodique. "K 248 Hijloln naturelle, LE S A I M I R I [al Voyt:^ planche XII ^ fi§, I de ce Volume, J-iE Saïmiri eft connu vulgairement fous îe nom de Sapajou aurore , de Sapajou orangé & de Sapajou jaune; il eft affez commun à (a) Ciiymiri , nom de cet ai^imrnl dans les terres dit Maragnon , & que Ton doit prononcer Saïmiri. Les autres s'appellent Cayntirt ou StJpajon , étant d'ua poil jaunâtre , xnè'.é He diverfes couleurs qui font bel- les & bien jolies. Miffion du f. d^Ahhsville , p. 1^2^ Cereopitkecus pîiis ex fulvo ftavefcenu & candicantc va- Tîegatis vcjiitus , ex f.avo rupfccntihus . Sap3)ou jaune» Sriff. regn, anim. page igy. Nota. Je crois qu'on doit rapporter à cette efpèce le Ccitaia ou Saïtaia de Marcgrave qu'il décrit en ces termes. C AIT AI A Brafilicnfihus pilo longiore ex filbido ftavefcentc caput habet fnbrotundum , frontcm haud tlatam aut pêne nulLam , nnfum parvient & compujfim» Caudam gejlat arcuatam : Tcdolct Mofchum. Jiac unica fpii incfi gratia. Mite traclari débet, alias altijjima vact clamât & facile ad iram concitari potcji. Alius ejufdcm fpeclel fed major & pilo magis fufco infiar "{cbeUinorum ttlam Mofchum redolet. Marcgr. hifi. nat. Brafd. p. 227, Le premier de ces deux animaux de Marcgrave me paroît être notre Saïmiri , & le fécond notre Sai i \» poil d'un jaune -blanchâtre , le front fi court qu'il pa- roît nul , font les deux cara^eres diftinftifs du faïmirii ïe poil d'un brun-noirâtre, & l'odeur du mufc me pa- roin"ent inc^iquer affez le faï , qui comme le faimiri eft Âijôt' à gésiir & crier pour peu qu*on le maltraite. du Saimiri, 149 h Guiane , & c'eft par cette raîfon que quelques Voyageurs l'ont auffi indiqué fous Ja dénomination de Sapajou de Cayenae. Par la gentillefle de fes mouvemens , par fa pe- tite taille, par la couleur brillante de fa robe, par la grandeur & le feu de fes yeux, par fon petit vifage arrondi , le faïmiri a toujours eu la préférence fur tous les autres fapajous ; & c'eft en effet le plus joli^, le plus mignon de tous : mais il eft aulîi le plus délicat (b), le plus difficile à tranfpor- ter & à conferver; par tous ces caraâeres & particulièrement encore par celui de la queue , il paroît faire la nuance entre les fapajous & les fagoins , car la queue fans être abiblument inutile & lâche comme celle des fagoins , n'eft pas aulîi mufclée que celle des fapajous ; elle n'eft , pour ainû dire , qu'à demi-prenante , & quoiqu'il s'en ferve pour s'aid'er à monter & defcendre , il ne peut ni s'attacher fortement, ni faifir avec fermeté , ni amener à lui les chofes qu'il defire ; & l'on ne peut plus comparer cette queue à une main comme nous l'avons fait pour les autres fapajous, Carjicicns distinctifs de utît ejphce. Le Saïmiri n'a ni abajoues ni caîlofirés fur >i ... — —^ (h) Le Sapajou de Cayenne eft une eTpèce de pe- tit fin^e d'un poi! jaunâtre; il a de gros yeux , la face blanche, le menton noir & la taille menue; il eft alerte & careiTant, mais il eft auili fenfible au froid que les fagoins du Brefi!. Relation du voyage ik d& Gcnnes , par Fngir, Paris, 1658, f» /(Jj* 1^0 Hijloîrt naturelle les fefTes; il a la cloiron des narines épaif- fe, les narines ouvertes à côté & non pas au-deflbus du nez; il n'a, pour ainfi dire, point de front; fon poil eft d'un jaune bril- lant , il a deux bourelets de chair en forme d'anneau autour des yeux ; il a le nez élevé à la racine & applaii à l'endroit des narines; la bouche petite , la face plate & nue , les oreilles garnies de poil & un peu pointues; la queue à demi-prenante , plus longue que le corps; il n'a guère que dix ou onze pou- ces de longueur, depuis le bout du mufeau jufqu'à l'origine de la queue ; il fe tient aifé- ment fur fes pieds de derrière, mais il mar- che ordinairement à quatre pieds. La fe- melle n'eft pas fujette à l'écoulement pé- riodique. du Saki, 1 5 ï LE S A K I (a). Voyei planche XII ^fig, i di u Volume. 1_jE Saki que l'on appelle vulgairement Sin^e à queue de renard, parce qu'il a la queue gar- nie de poils très longs , eft le plus grand des fagoins; lorfqu'il eft adulte, il a envi- ron dix-fept pouces de longueur ^ au lieu que des cinq autres fagoins, le plus grand n'en a que neuf ou dix. Le iàki a le poil très long fur le corps , & encore plus long fur la queue ; il a la face roulTe & cou- verte d'un duvet blanchâtre ; il eft aifè à (a) Saki. Simia minima capite albido dorfo fufcopone rujcfcentc caudâ crinitâ. Sakee V/inkee Brown's, hîji. nat of Jainaïca^ chap. y fecl. j. Nota. Sakee Winkee » doit fe prononcer Saki Winki ; nous avons adopté ce nom Saki , d'autant plus volontiers qu'il nous paroit dérivé du mot Cacuicn ^ qui doit fe prononcer Sacuien , lequel, félon Thevet , p. loj , étoit le nom des grands Sagoins dans plufieurs endroits de l'Amérique méridio- nale. Cagui major Brafilienjïhus , Pongi Congenfibus , Marcg, H'iji' nat. Braf. p. 217 , fig. ihid. Ccrcopitkccus pUis nigris , apice albido vejiitus ■, caudâ longijjiniis pilis nigris obfitâ Le fapajoa à queue de renard. Briff. rcgn. anlm. p. 195. Nota. i'. Le ca- raftere des poils noirs avec l'extrémité blacchâire, n'eft pas confiant, car cette efpèce varie par le poil, a**. Le nom de fapajou lui a été mal appliqué, parce «^u'iî n'a pas la queue prenanie. l.1JJ j: IJOuL/tiXt.-Z. Le JMoriJCuxcL. 5 Le Pirtclvr ^Le^-Mi-co de tOuiJlhî, a 55 U O U I S T I T I {a). P'oyt:^ planche Xîll y figure i de ce volume» J-< 'ouistiti eft encore plus petit que le Ta- marin, il n'a pas un demi- pied de longueur; le corps & la tête compris , & fa queue a plus d'un pied de long, elle eft marquée comme celle du Mococo par des anneaux al- (a) Ouijlitiy fon articulé que cet animal fait enten- dre toutes les fois qu'il donne de la voix , & que nous lui avons donné pour nom. Gaieopuhecus , Sagoia a Brafilienfibus nominatus, Gef- ner. Icon. quad. p. 96. fig. ibid. Sagouy. Il y a d'autres Guenons nommées Sagcuy^ qui ont un poil gris-argentin, ce font les plus petites & les plus mignones de toutes les autres. Mijf. au Ma- ragnon^par le P. d^/lhhevUle, p- 2/2. Cercopithzcus Brafilianus «em^f. Sagouin. Cluf. Exotic, Cagui minor. Marcgr. nijl, nat. Brajîl. pag. 227 , fig, ibid. Cebus Sagoin diclns. , . . Vlvus Gedani fuit ^ vide fig, tab. III. Klein , de quad. pag. 87. Cercopithecus teniis tranfverjîs alternatîm fufcis & a ci" nereo albis raricsatus, atiriculis pilis albis circumdatis. Le fagoin. Brîjf. reg. anim. page loî. Jacchus. Simia caudata auribus villofis patulis cauda hirfutljjintâ , unguibus fuhulatis ;pollicum rotundatis. Linn , fy% nat. edit. X, pag. 27. Cagui minor, Sanglin, Edwards Glanures , pag, 15, 1^6 Hijloin namrtlU ternativement noirs & blancs ; le poil en eft plus long & plus fourni que celui du moco- co : l'ouiftiti a la face nue & d'une couleur de chair afTez forrcée ; il eft coifFé fort fin- gulièrement par deux toupets de longs poils blancs au-devant des oreilles; en forte, que quoiqu'elles foient grandes, on ne les voit pas en regardant l'animal en face. M. Parfons a donné une très bonne defcription de cet animal dans les Tranfa£^ions Philofophiques (^). Enfuite M. Edwards en a donné une bonne figure dans les Glanures; il dit en avoir vu plufieurs, & que les plus gros ne pefoient guère que fix onces :, & les plus petits quatre onces & demie ; il obferve très judicieufement que c'eft à tort que l'on a luppofé que le petit finge d'Ethiopie , dont Ludolph fait mention fous le nom de Fon^ kes ou Guereia , étoit le même animal que celui-ci (c) ; il eft en effet très certain que l'ouiftiti ni aucun autre fagoin ne fe trouve en Ethiopie , & il eft très vraifemblable que ( 3 ) Tranfaaions rhilofophiques. Volume XLVII , (c) Jean Ludolph, dans fon hiftoire d'Ethiopie ou d'Abiflïnie , a *3nné deux figures de cet animal ; on ea trouve la defcription à la Tpagc 5 S de la traduftion An- par Ludolph , quoiqt. - -_ - ,, Hollandois du Brefil , qui leur appartenoit dans le temps de la publication de cette hiftoire de Ludolph, Glanw TC£ di M. Edwards , p. li, le de L^Ouiftln. 2^7 Je fonkes ou piere:;^a de Ludolph eft ou le mococo ou ie loris , qui fe trouvent dans les terres méridionales de l'ancien continent. M. Edwards , dit encore que ]^ langlin (ouiflhi), Jorfqu'il eft en bonne iânté , a le poil très fourni & très touffu ; que l'un de ceux qu'il a vus, & qui étoit des plus vigoureux, fe nourriffoit de plufieurs chofes , comme de bifcuits, fruits, légumes , infefles, limaçoos, & qu'un jour étant déchaîné, il fe jeta fur un petit poiffbn doré de la Chine qui étoiî dans un baflin , qu'il le tua & le dévora avi- dement; qu'enfuite on lui donna de petites anguilles qui reff"rayerent d'abord en s'en- tortillant autour de fon cou , mais que bien- tôt il s'en rendit maître & les mangea. Enfin M. Edwards ajoute un exemple , qui prouve que ces petits animaux pourroient peut-être fe multiplier dans les contrées méridionales de l'Europe;, ils ont, dit-il, produit des pe- tits en Portugal , où le climat leur eft favo- rable ; ces petits font d'abord fort laids , n'ayant prefque point de poil fur le corps ; ils s'attachent fortement aux tettes de leur mère ; quand ils font devenus un peu grands, ils fe cramponnent fortement fur fon dos ou fur fes épaules ; & quand elle eft lafîe de les porter, elle s'en débarraffe en fe frottant contre la muraille ; lorsqu'elle les a écartés , le mâle en prend foin fur le champ & le. 4=- -^. S!^ ^SS' %j# 264 Hljloire naturelle LE M I C O (a). Foyei planche XIII ^ fig, 4 de ce Volume, V^'est à M. de la Condamine à qui nous devons la connoiffance de cet animal : ainfi nous ne pouvons mieux faire que de rappor- ter ce qu'il en écrit dans la relation de fou voyage fur la rivière des Amazones : » Ce- lui-ci , dont le Gouverneur du Para m'avoit fait préfent , étoit l'unique de fon efpèce {a) Mico , nom que l'on donne aux plus petites ef- peces,de Sagoins dans les terres de l'Orérioqn?. fe'.on GiwixiWa, pages S & ç) ; nous l'avons appliqué à ce-te efpèce , afin de le diftinguer des autres. Nota. On voit par un pafTage de Jofeph d'Acofta , qae ce mot M'co {îgnifioit Guenon, c'eil-à dire, Sin^e à lonzje. ^ueue , & que de fon temps on appliquoit égrilem:at le nom de Mlco aux Sapajous & aux Sagoins >■> II y a ( dft cet Auteur ) dans toutes les montagnes de ia terre ferme des Ar.des, un nombre infini de micos ou guenons , qui font du genre èes finies, mais difFirens, en ce qu'ils ont une queue voire fort longue j il y ea a entr*eux quelques races qui font trois fois plus gran- des voire quatre que les autres *«. Mais depuis le temps ë'Acofta, il paroît qu'on a reftreint le nom de mico aux plus petites efpèces , & c'eft pour cela que j'ai cru pouvoir le donner au petit fagoin dont il eft ici queftion. Cercopithecus ex dncrco alhus argenfeus , facle aicricu- lifjiie rubris fplendentihus , caudâ caft^nei colons. Le pe- $it fwige de Pera. Briff. regn, anim, p. zoi, qu'on du M ICO, l5i fl[ii*on eût vu âans le pays; le poil de (on corps étoit argenté & de la couleur des plus beaux cheveux blonds, celui de fa queue étoit d'un marron- luftré approchant du noir. 11 avoit une autre fingularité plus remar- quable : fes oreilles , fes joues & ion mufeaii étoient teints d'un vermillon û vif qu'on avoit peine à Te perfuader que cette cou- leur fût naturelle ; je l'ai gardé pendant un an , & il étoit encore en vie lorfque j'écri- vois ceci, prefque à la vue des côtes de France , où je me faifois un plaifir de l'ap- porter vivant : malgré les précautions con* tinuelles que je prenols pour le préferver du froid, la rigueur de la faifon Ta vraifem- blablement fait mourir. . . . Tout ce que j'ai pu faire , a été de le conferver dans l'eau-de-vie, ce qui fufHra peut-être pour faire voir que je n'ai rien exagéré dans ma defcription (b),ti Par ce récit de M. de la Condamine , il eft aifé de voir que la pre- mière efpèce de ces animaux dont il parle , eft celui que nous avons appelle Tamarin , & que le dernier auquel nous appliquons le nom de Mico , eft d'une efpèce très diffé- rente & vraifemblablement beaucoup pluç rare , puifqu'aucun Auteur ni aucun Voya- geur avant lui, n'en avoit fait mention, quoique ce petit animal foit très remarqu^ible par le rouge vif qui anime fa face & par la beauté de fon poil. (h ) Voyage fur la rivière <^es Amazones ^ par AU de U Condamine, p. 'tfj & fulv. Quadrupèdes j Tome VIU T- 2,(f6 Hljloln natuTtlU Caractères distincllfs de cette ejphe. Le Mico n'a ni abajoues ni calIofRés fur les fefles ; il a la queue lâdie, non prenante & d'environ moitié plus longue que la tête & le corps pris enfemble ; la cloifon des na- rines moins épaiffe que les autres fagoins , mais leurs ouvertures font fituées de même à côté Si non pas au bas du nez ; il a la face & les ©reilles nues , & couleur de vermil- lon ; le mufeau court ; les yeux éloignés l'un de l'autre ; les oreilles grandes ; le poil d'un beau blanc-argenté, celui de la queue d'un brun-luftré & prefque noir; il marche à quatre pieds, & il n'a qu'environ fept ou huit pouces de longueur en tout. Les fe- melles ne font pas fujettes à l'écoulemeat périodique. Notices ii l[Uilqnes Aràmaux. î4^ NOTICES DE QUELQUES ANIMAUX, dont il na pas ht fait mention cxpnffi. dans li cours de cet Ouvrage, V>OMME nous avons achevé, autant qu'il lefl en nous, l'iiiiloire des animaux qua- drupèdes, nous croyons que pour là rendre encore plus complète , il convient de ne pas palTer fous filence ceux dont nous n'a- vons pu nous procurer une connoiffance cxaâ:e ; l'on verra qu*iis ne font qu'en petit nombre , & que dans ce petit nombre il y en a beaucoup qu'il faut rapporter comme des variétés aux efpèces dont nous avons parlé ; aufli ce n'eft ni par Tutilité ni par l'attrait du fujet , mais uniquement pour évi- ter le reproche de n'avoir pas dit dans un ouvrage auffi étendu tout ce que l'on fait ou que l'on croit (avoir fur les animaux , que je me fuis déterminé à ajouter les noti*. ces fuivantes. ■- Notice Première, OURS BLANC. Un animal fameux de nos terres reptén» Z a 268 H ivoire natuttlU, trionales, c'eft l'Ours blanc. Martens & quelques autres Voyageurs en ont fait men- tion , mais aucun n'en a donné une afTei bonne defcription pour qu*on puilTe pro- noncer affirmativement qu'il foit d'une ef- fièce différente de celle de l'ours ; il paroît feu- ement qu'on doitle préfumer en fuppofant exa6t tout ce qu'Us nous en difent: mais comme nous favons d'ailleurs que Tefpèce de l'ours varie beaucoup fuivant les différens climats , qu'il y en a de bruns , de noirs , de blancs & de mêlés , la couleur devient un caraâiere Rul , & par conféquent la dénomination ^ours hlanc eft infutfifante , fi l'efpèce eft dif- férente : j'ai vu deux petits ours apportés de RulTie qui étoit entièrement blancs (^); néan- moins ils étoient très certainement de la même efpèce que notre ours des Alpes. Ces animaux varient beaucoup aufli pour la grandeur; comme ils vivent affez long-temps & qu'ils deviennent très gros & très gras dans les endroits où ils ne font pas tour- mentés , & où ils trouvent de quoi fe nour- rir largement , le caractère tiré de la gran- deur eft encore équivoque ; ainfi Ton ne fe- ( elles fuiiiroient pour conftituer une autfe efpèce ;;, mais y je ne fais fi Martens a bien vu , ôc ii les autres qui l'ont copié n'ont pas exagéré. (c). «Ces ours blancs (dit -il) font faits tout autrement que les nôtres ; ils ont la x^t^ longue , femblable à celle d'un chien ^ & le cou long auiîi ;, ils aboient prefque comme, des chiens qui font enroués ; ils font avec cela plus déliés & plus agiles que les autres ©ursj ils font à- peu-près de la même gran- deur; leur poil eft long &. auffi doux que de la laine; ils ont le mufeau , le nez & les griffes noires On dit que les autres. ours ont la tête fort tendre ; mais c'eft tout (c) Anderfon , dans fon hiitoire d'îflande & de Groenland torru II , p. 4j. EHis dans foa voyage d© a baie de Hu.ûi."c;i, tom^ /> f- 5^* Notices de quelques Animaux, 2/1 le contraire pour les ours blancs ; quelques coups de malTue que nous leur donnaflions fur la tête , ils n'en étotent point du tout étourdis, quoique ces coups eufîent pu af- fommer un bœuf. « On doit remarquer dans cette defcription , i^. Que l'Auteur ne fait pas ces ours plus grands que les autres ours, 6i que par conféquent on doit regarder comme fufpeft le témoignage de ceux qui ont dit que ces ours de mer avoient jufqu'à treize pieds de longueur (i). 2^. Que le poil aufli doux que de la laine ne fait pas un carac- tère qui diftingue fpécifiquement ces ours^ puifqu'il fuffit qu'un animal habite fouvent dans l'eau, pour que fon poil devienne plus doux & même plus touffu; on voit cette même différence dans les caftors d'eau & dans les caftors terriers : ceux-ci qui habi- tent plus la terre que l'eau ont le poil plus rude & moins fourni , & ce qui me fait préfumer que les autres différences ne font ni réelles ni même auiîi apparentes que le dit Martens, c'ell que Dithmar Blefklein dans fa defcription de Tlflande , parle de ces ours blancs , 6l ail'ure en avoir vu tuer un en Groenland , qui fe dreffa fur fes deux pieds comme les autres ours; & dans ce ré- cit , il ne dit pas un mot qui puifle indiquer que cet ours blanc du Groenland ne fût pas {d) On porta à bord un ours bîanc qu'on avoit tué , fa peau avoit treize pieds de longueur. Troijième Voyage des HoUund^U pur U N^rd , p, j/. Z 4 17* Hijîoirc naturdU, ennérement femblable aux autres ours (^). D'ailkurs, lorfque ces animaux trouvent quelque proie fur la terre, ils ne fe don- nent pas la peine d'aller chaffer en mer; ils dévorent les rennes & les autres bêtes qu'ils peuvent faifir; ils attaquent même les hommes , & ne manquent jamais de dé- terrer les cadavres ( f) ; mais la difette où ils fe trouvent fouvent dans ces terres (îéri- les & défertes , les forcent de s'habituer à l'eau , ils s'y jettent pour attraper des pho- ques, des jeunes morfes , des petits balei- neaux ; ils fe gîrent fur des glaçons où ils les attendent, & d'où ils peuvent les voir venir , les obferver de loin ; & tant qu'ils trouvent que cepofte leur produit une fubfif- tance abondante, ils ne Tabandonnent pas, €n forte que quand les glaces commencent ( e ) Hahct Ifiandta coloris a[hi ingentis Urfos. • . , in Grosnlandiâ urfiim magnitm & alhum habuùnus oh- fiam qui neque nos timcbat neqne noftro clamore abigi ■potcrat , verum rccià ad nos tanquam ad certarn prmdatn ccntcndchat , cumquc proplus nos acc.^ffzjjct, is bombarda t'-ajecius y ihi demum ereËus , poflcriorlbus peddus tanquam homo Jlabat donec tertio trajiceretur , atqtic Ita ex anima' tus concidit, Ditlunar Blef^en. IJland, Ludg, B.at. 16070 page 64. (/) Les ours blancs vivent de baleines mortes, âc c'eft près de ces charognes que Ton en trouve le plus; ils mangent auflî les hcmmes en vie lorfqu'Ils en peu- vent furprendre ; s'ils viennent à fentir l'endroit où l'on a enterré un corps mort, ils favent fort bien le déterrer, ôter toutes les pierres dont la foHe eft cou- verte , & ouvrir enfuïte le cercueil pour manger ce feorps. Recueil dis yoyagei du No/d ^ terne JI , p. HfH* Notict< de quelques Animaux» 173 à fe détacher au printemps, ils Te laifTent emmener, & voyagent avec elles; & comme ils ne peuvent plus regagner la terre , ni même abandonner pour long-temps le gla- çon fur lequel ils fe trouvent embarqués ^ ils périffent en pleine mer; & ceux qui ar- rivent avec ces glaces fur \ts côtes dlflande ou de Norvège {s;)t font affamés au point 'de fe jeter fur tout ce qu'ils ren-contrent pour le dévorer, & c'eft ce qui a pu aug- menter encore le préjugé, que ces ours de mer font d'une efpèce plus féroce & plus vorace que Tefpèce ordinaire : quelques Au- teurs fe font même periuadés qu'ils étoient amphibies comme les phoques, & qu'ils pou- voient demeurer fous l'eau tout auffi long- temps qu'ils vouloient ; mais le contraire eft évident & réfulte de la m^iere dont on les chaffe ; ils ne peuvent nager que pendant un petit temps , ni parcourir de fuite un efpace de plus d'une lieue ; on les fuit avec une chaloupe , & on les force de laffitude ; s'ils pouvoient fe paffer de refpirer , ils fe plon- geroient pour fe repofer au fond de l'eau ; mais s'ils plongent , ce n'eft que pour quel- ques inftans; & dans la crainte de fe noyer, ( ?) Qiiar.H les glaces font ('éraché^s du Groenland feptentrional, & qu'elles font poufTées vers le midi, les ours b'?ncs qui fe trouvent deffas n*e!i ofent for- tir, &. comme ils abordent ou en Iflande ou en Nor- vège à l'endroit où les glaces les portent , ils devien- nent enragés de faim ; & l'on dit d'érranges hilloires des ravages que font alors ces animaux, RicuclU des voyages du Nord , tcmc I y f. lOO» *74 Hiflolre naturelle, Ils fe laiffent tuer à fleur - d*eau (^). La proie la plus ordinaire des ours blancs' font Jes phoques (i; , qui ne font pas affex forts pour leur réfifter; mais les morfes aux- quels ils enlèvent quelquefois leurs petits, les percent de leurs défenfes & les mettent en fuite; il en eft de même des baleines, elles les aiTomment par leur maffe & les chaflent des lieux qu'elles habitent, où néan- moins ils ravifTent & dévorent fouvent leurs petits baleinaux. Tous les ours ont naturel- lement beaucoup de graiffe, & ceux-ci qui ne vivent que d'animaux chargés d'huile en ent plus que les autres ; elle eft aulR à-peu- près femblable à celle de la baleine. La chair de ces cursn'eft, dit- on, pas mauvaife ■{k) Cet ours b^anc n3g«a en mer quafi l'efpace d'un Wilie ; nous le pourfiiivimes vivement avec trois efciaif^ , & après que nous l'eûmes laffé , il fut furmotué ôc tué. Trois navigations des HoUandois au Nord, par Gérard de Vera. Paris, l';99, p. iio. — Us nagent é\\ne pièce de glace i l'autre & p'onçent ; lorfque «ous les pourfuivions rians nc$ chaloupes, ils p!on- geoieiit à un bout & for-toient de IVau à l'autre exiré- mtté; ils favent auifi fort bien courir à terre. E.ttueiL% des voyages du Ncrd , tome II, p. ii6 — Sur la côte êe Spitzberg, u»i ours blanc entra dans l'eau & nagea plus d'une lieue au large , on le fuivit avec des cha- loupes, & on le tua, &c. Troificmc voyage du Hollan- dais, p. J4. (i) Quand on eut achevé de tuer cet ours blanc» on lui fendit le ventre, où l'on trouva des morceaux que c'eft le même animal dont Rubruquis a fait mention dans Ton voyage de Tarrarie. . . . qu'il y en a de deux efpèces ch|ez les Cal- mouquesi la première nommée Sarluk, qui cft celle même qu'il vient de décrire; la ié- conde appellée Chainuk , qui diffère de l'aurre par la grandeur de la tête & des cornes , & aulîi en ce que la queue qui reffemble à ion origine à celle d'un cheval , fe termine enfuite comme celle d'une vache ; mais que toutes deux font du même naturel». 11 n'y a dans toute cette defcription qu'un feul caradere qui pourroit indiquer que ce« vaches de Calmouquie font d'une cfpèce par- ticulière , c'eft le grognement au lieu du mugiffement ; car pour tout le refte , ces vaches reffemblent fi fort aux bifons que je ne doute pas qu'elles ne foient de leur e(- pèce ou plutôt de leur race : d'ailleurs, quoi- que l'Auteur dife que ces vaches ne mugif- fent pas, mais qu'elles grognent, il avoue cependant qu'elles grognent très rarement , & c'étoit peut-être une afFeéVion particulière de l^individu qu'il a vu, car Rubruquis & les autres qu'il cite ne parlent pas de ce grognement; peut-être aulîi les bifons lorf- qu'ils font irrités ont-ils un grognement de colère; nos taureaux même , furtout dans le temps du rut , ont une groffe voix entre- coupée qui reffemble beaucoup plus à un grognement qu'à un mugiffement. Je fuis donc perfuadé que cette vache grognaate ( Facca griMniens) de M. Gmelin n'eft autr« "i-yd Hijîoln natunUt, chofe qu'un bifon, & ne fait pas une ef^ce particulière. I IL Le T O L a L Cet animal qui eflj fort commun dans les terres voifmes du lac Baikal en Tartarie, eft un peu plus grand qu'un lapin , auquel il refîemble par la forme du corps, par le poil, par les allures, par la qualité, la fa- veur, la couleur de la chair, & aufli par. l'habitude de creu(er de même la terre pour ie faire une retraite ; il n*en diffère que par la queue qui eft confidérabîement plus lon- gue que celle du lapin, il eft aulîi conformé de même à l'intérieur («); il meparoîtdonc aiTtiz vraifemblable que n'en différant que par la feule longueur de la queue , il ne fait pas uni efpèce réellement différente, mais une fniple variété dans celle du lapin: Rubru- «j iis, en parlant des animaux de Tartarie, dit, j) il y a des connils à longue queue.. f n ) Cunïculus injîgnher caudatus coloris Leporini. , l C'.rca inurnas partes hac ohfcrvavi. CtZcum tolo paulo angiiftius erat Jhd lungius , titpute cclo polUcum longîtu- dincm aquans; prope iUi infcrtioncm c}5ort,ée dans la note précédente pour être très convaincus que cts d«UX «iMimaiUt Uïit lott éïSitiïti l'un de l'autre. A a 1^1 Utjloirc naturdh, animaî appelle Zientni ou Zemnx, qui c&.'ixx même genre que \q Zïfel, mais qui eft plus grand , plus fort & plus méchant ; il eft un; peu plus petit qu'un chat domeftique, il a ia tête aflez grofle , le corps menu ,Ies CH'eil- les courtes & arrondies , quatre grandes dents incifives qui lui fortent de la gueule, dont les deux de la mâchoire inférieure font trois fois plus longues que les deux de la mâchoire fupéri«ure , les pieds très courts & couverts de poiis, diviîes en cinq doigts & armés d'ongles courbes; le poil mol'et , court & de couleur de gris-de-fouris; 'a queue médiocrement grande ; les yeux aufîî petits & aulTi cachés que ceux de la taupe. Kzaczynski a appelle cet animal petit chun de terre {canicula Jubtcrranea ) : cet Auteur me paroît être le feul qui ait parlé du zemni, qui néanmoins eft fort commun dans quel- ques provinces du Nord (/). Son naturel éi fes habitudes font à peu- près les mêmes que celles du hamfter & du zifel ; il mord dangereufement, mange avidement, & dé- vafte les moiffons & les jardins; il fe fait un terrier ; il vit de grains, de fruits & de légumes , dont il fait des magafins dans fa retraite , où il paffe tout le teœps de l'hiver» ( / ) Rcperîmr hoc animal in PodoHa , Uhraîna , Vol- i':nia clrca 5ura^. Chodaki , Rienki , Nloffe\inica , S, jt*^ Zttwee & alihi; non raro eruilur ah A^ricolis ibidem yn'- Notices de quelques Animaux* zS^ V L Le P O U C. Le même auteur ( Rzaczynski ) fait men- tion d'un autre animal que les RulTes appel- lent Pouch : il eft plus grand que le rat do- meftique ; i^a le mufeau oblong; il creufe la terre, fe fait un terrier & dévafte aufîi les jardins ; il y en avoiten fi grand nombre au- près de Suraz en Volhinie , que les habitans furent obligés d'abandonner la culture de leurs jardins. Ce pouc pourroit bien être le même que Seba nomme Rat de Norvège , & ëont il donne la defcription & la figure (r). V I I. Le PÉF.OUASCA, II y a encore en Ruflîe & en Pologne , • fùrtout en Volhinie , un animal appelle par les Ruffes Per^wia^ka , & par les Polonois Pr^ewlaska (^w'),nom qu'on peut rendre par la ( r ) Mus ex Norvegia cintrto fufcus ; Rofiro gaudet fuiLlo , capits longixifculo , bnvibus latifque auriculis ,. promijfo myflace utrinque ad laura narium vigente , dor" fum ejus latum & incurvum eft , abdomen pendulum , fi • mora grojfa ; pcdum digUt lungz. acutis unguibus ad jo ■ diendum adaptatis j talparum enim irtfiar in ertitis j'ub terra antris degit i pilui> ex dilute cinerco fufcus eji, iyi^ bâ , volume II y page 6jf , fig tctbU 6^, fig. 5. («j K,iàcz.^aiîwi. Au4i. p. 318, A a a 284 Hijlolrc naturdlt, dénomination de Belette à ceintures ( mujlel^ prœcinSla ) , comme le dit Razczynski ; cet animal eft plus petit que le putois : il eft couvert d'un poil blanchâtre , rayé tranfver- falemant de plufieurs lignes d'un jaune-roux, qui femblent lui faire autant de ceintures; il demeure dans les bois & fe creufe un ter- rier. Sa peau eft recherchée & fait une jo- lie fourrure. VIII. Le s O U s L I K. On trouve à Cafan & dans les provinces qu'arrofe le Volga, & jufque dans l'Autri- che un petit animal appelle Soujllk en langue Ruffe, dont on fait d'affez jolies fourrures; il reflemble beaucoup au campagnol par la figure, il 3 comme lui la queue courte; mais ce qui le diftingue du campagnol & de rous les autres rats , c'eft que fa robe qui eft d*un gris-fauve eft lemée par-tout de petites- taches d'un blanc vif & luftré; C6S petites taches n'ont guère qu'une ligne de diamè- tre, & font à deux ou trois lignes de diftance les unes des autres , elles font plus appa- rentes & mieux terminées fur les lombes de l'animal que fur les épaules & la tête. M. Pennant (;c). Gentilhomme Anglois , très verfé dans l'Hiftoire naturelle, & qui connoit très bien les animaux , a eu la (* ) Thomas Pennant. Efir, am Powning in Fiinifhiet, Notices de quelques Animaux. 185 bonté de me donner un de ces fouiliks qu'on lui avoit envoyé d'Autriche comme un animal iiaconnu des Naîuraliûes , & qiîi n'avoit point de nom dans ce pays ; je le reconnus pour être le même que celui dont j'avois une fourrure, & dont M. Sanchez (y) m'avoit fourni la notice fuivante. «Les rats que l'on appelle foufllks , fe prennent en grand nom- bre fur les bavques chargées de fel dans la rivière de Kama , qui defcend de Solïkamskk où font les falines , & vient tomber dans le Volga au-defTus de la ville de Cafan, au confluent de Telufchîn : le Volga depuis Sïmhuskï jufqu'à Somtof eft couvert de ces bateaux de fel', & c'eil dans les terres voi- fmes de ces rivières, aufîi bien que furies bateaux qu'on prend ces animaux ; on leur a donné le nom fiuflîk , qui veut dire friand ^ parce qu'ils font très avides de fel<(, I X. TAUPE DORÉE. Enfin pour n'omettre aucun des animaux du Nord, & même des plus petits, il paroic qu'il y a en Sibérie une forte de taupe qu'on appelle Taupe dorée , & dont l'efpèce pour- roit être diferente de celle de la taupe or- dinaire, parce que cette taupe de Sibérie n'a (y) R' Sanchez, ci-devaBt premier Médfcin à U Cour de Rufl5e, lS6 Hijlolrc naturelle, point de queue & qu'elle a le mufeaii court, le poil mêlé de roux 6: de vert, & qu'elle n'a que trois doigts aux pieds de devant 6t quatre aux pieds de derrière, au lieu que la taupe ordinaire a cinq doigts à tous les pieds. Nous ignorons le nom de cet ani- mal, dont Seba a donné la figure (^). RAT n' E A u s L A K e. On trouve en Canada le rat d'eau d'Eur^y- pe i mais avec des couleurs différentes ; il n'eft brun que fur le dos, le refte du corps eft blanc & fauve en quelques endroits; la tête, & le mufeau même ^ font blancs aufîi- bien que l'extrémité de la queue ; le poil paroît plus doux & plus luflré que celui de notre rat d'eau ; mais au refte tout eft feni- felable, & l'on ne peut pas douter que ces deux animaux ne foient de la même efpèce : le blanc du poil vient du froid du climat ^ ôi l'on peut préfumer qu'en recherchant les animaux dans le nord de l'Europe, on y trouvera, comme en Canada, ce rat d'eau blanc» X I. Le cochon d s G u i n è £" Quoique cet animal diffère du cochon or- (^) Seba , Vol^ /, p» jf , tab, 32. Mai. %, 4. l'a^ Notices de qadquts Animanx. ^%'j; àÎTiaire par quelques caractères affez mar- qués ; je préfume néanmoins qu'il eft de la même elpèce , & que ces différences ne font que des variétés produites par l'influence du climat; nous en avons l'exemple dans le cochon de Siam , qoi diffère auffi du cochon; d'Europe >& qui cependant efl certainement de la même efpèce, puiTqu'ils fe mêlent & produifent enfemble ; le cochon de Guinée efl à- peu -près de la même figure que notre cochon & de la même groffeur que le co- chon de Siam, c'efl-à-dire, plus petit que notre fangller ou que notre cochon , il eft originaire de Guinée , & a été tranfporté au Brefil, où il s'efl multiplié comme dans^ fon pays natal ;. il y efl domeftique & tout» à- fait privé; il a le poil court; roux & brillant;; il n'a point de foies » pas même fur le dos ; le cou feulement & la croupe près de Torigine de la queue font couverts de poils un peu plus longs que ceux du refle du corps ; il n'a pas la tête fi groife que le cochon d'Europe, & il en diffère en- core par la forme des oreilles qu'il a très longues , très pointues & couchées en ar- rière le long du cou ; fa queue eft aulïi beaucoup plus longue y elle touche prefqu'à terre, & elle eft fans poil jufqu'à fon extré- mité (^) : au refte , cette race de cochon, qui félon Marcgrave eft originaire de Gui- née , fe trouve auiîi en Afie & particuliére- { a ) Marcgray, Uijl, nat, JSraf, page 320, ^, 2^8 Histoire naturelle, ment dans TiHe de Java (^), d'où il paroît qu'elle a été tranCportée au cap de Bonne- efpérance par les Hollandois ( c). XII. Le sanglier du cap-verb» Il y a dans les terres voifines du Cap» verd un autre cochon ou fan^lîer , qui par le nombre des dents & par l'énormité des deux défenfes de la mâchoire fupérieure, nous paroît être d'une race & peut - être même d'une efpèce différente de tous les autres cochons , & s'approcher un peu du babi- roufla : ces défenfes du deffus relTemblent plus à des cornes d'ivoire qu'à des ^ents , elles ont un demi-pied de longueur & cinq pouces de circonférence à la bafe , & elles îbnt courbées & recourbées à-peu près comme les cornes d'un taureau : ce carac- tère feul ne fuffiroit pas pour qu'on dût re- garder ce fanglier comme une efpèce par- {h) Leurs porcs (à l'isle de Java) n'ont point de poit , & font fi gras que leur ventre traîne à terre. V<.ya2,e de Mandelfio^ tome H y p. j4<>. ( c } Les cochons qui ont été apportés de Java au cap d<2 Bonne-efpérance , ont les ïambes fort courtes, & font noirs & fans foies ; leur ventre qui eft fort gros pend prefque jafqu'à terre ', il s'en faut de beau- coup que leur graiffe n'ait la confiftance qu'a celle des cochonî d'Etuope. ... La chair en eft très bonne à msnger. Dcfcriptîon du caf de Bonn6-efpéranc^ y par KolH , torui lU i p, 4^, ticuliere > Notices de quelques Animaux. 2^) ticulière ; mais ce qui femble fonder cette préfomption , c'eft qu'il diffère encore de tous les autres cochons par la longue ou- verture de (es narines, par la grande lar» ^eur & la forme de Tes mâchoires , & par le nombre & la figure des dents mâcheliè- res; cependant nous avons vu les défenfes d'un fanglier , tué dans nos bois de Bour- gogne , qui approchoient un peu de celles de ce fanglier du Cap-verd , ces défenfes avoient environ trois pouces & demi de long fur quatre pouces de circonférence à la bafe * elles étoient contournées comme les cornes d'un taureau, c'eft- à-dire , qu'elles avoient une double courbure, au lieu que les dé- fenfes ordinaires n'ont qu'une fimple cour- bure en portion de cercle ; elles paroiflbient être aufli d'un ivoire folide, & il eft cer- tain que ce fanglier devoit avoir la mâ- choire plus large que les autres ; ainfi nous pouvons préfumer avec quelque fondement que ce fanglier du Cap-verd eft une fimple variété, une race particulière dans l'efpècç 4u fanglier ordinaire. XIII. Le loup du m e X I (i u e: Comme le loup efl originaire des pays froids , il a paifé par les terres du Nord & fe trouve également dans les deux continens. Nous avons parlé des loups noirs & des loups gris de l'Amérique feptentrionale ; ij paoitque cette efpèce s'eft répandue jufqu'à QujdrupèJes , Tome FIL B b içd Hljlolre naturelle, la nouvelle Efpagne & au Mexique, & que dans ce climat plus chaud, elle a iubi des variétés , fans cependant avoir changé ni de nature, ni de naturel; car ce loup du Mexique a la même figure, les mêmes ap- pétits & les mêmes habitudes que le loup d'Europe ou le ioup de l'Amérique feptentrio- nale , & tous paroiffent être d'une léule & même efpèce. Le loup du Mexique ou plu^ tôt de la nouvelle Efpagne, où on le trouve bien plus communément qu'au Mexique , a cinq doigts aux pieds de devant , quatre à ceux de derrière; les oreilles longues & droites , & les yeux étincelans comme nos loups ; mais il a la tètQ un peu plus groffe , le cou plus épais & la queue moins velue : au-deffus de la gueule il a quelques piquans aulîi gros , mais moins roides que ceux du lierifîbn : fur un fond de poil gris , fon corps eil marqué de quelques taches jaunes; la tête de la même couleur que le corps eft traverfée de raies brunes , & le front eft taché de fauve; les oreilles font grifes comme la tête & le corps ; il y a une longue ta- che fauve fur le cou, une féconde tache femblable fur la poitrine & une troifième fur le ventre ; les flancs font marqués de ban- des tranfverfaîes depuis le dos jufqu'au ven- tre ; la queue eft grife & marquée d'une ta- che fauve dans fon milieu ; les jambes font j-ayées de haut en bas de gris & de brun id). Ce loup eft , comme l'on voit, le plus {d) XoloitTcuintli, Lupus Mcxicanus, Hernand. //^» Ait'.v, p, 479, fig. Il>id» Notices- de qiulquis Arv.matix, 191 Ibeau des loups, & fa fourrure doit être re- cherchée parla variété ^es couleurs (e); mais , au refte rien n'indique qu'il foit d'une .efpèce différente des nôtres, qui varient du gris au blanc , du blanc au noir & au mêlé , fans pour cela changer d'efpèce^ & l'on voit par le témoignage de Fernandès, que ces loups de la nouvelle Efpagne , dont nous venons de donner la defcription , d'après Recchi & Fabri , varient comme le loup d'Europe , puilque dans ce pays même ils ne font pas tous marqués comme nous ve- nons de le dire, & qu'il s'en trouve qui font de couleur uniforme & même tout blancs (/). X I V. V A L C O. Nous avons dit qu'il y avoit au Pérou & au Mexique , avant l'arrivée des Européens, (c) Nou. Onpourroît foupçonnet à caufe de lava» tiété des couleurs que, ce loup du Mexique eft wnlynx ou lotip'ccrvicr y dont l'efpèce fe trouve aufTi-bien que celle du loup dans les deux continens : mais il fuffit de jeter les yeux fur la figure que nous a donné Recchi pour reconnoître qu'elle refTemble tout-à-fait à cerie du loup & point du tout à celle du lynx. (/) Cu8tlach:U,yè" Xk;?^^ indlcus. Jo. Fabr. Xoloîtf- cuintli. Forma , colore , morihus &- mole corpotis lupo nofiratl fimîlis eji atque a(feo ejus (ut mihi quîdcm vi- detnr) fpccici , fcd ampUorl capits^ Tautos vcro ficut & noflras lupus aggreditur & Interditm etiam homines , rc- pcriuntur nonnulLi candcnUs. . . . Vlvit in calidis nom Hifpania locis, fernand, Jfiji, an'im, nov. Hïfpan* pas- 7i B b2 292 Hljlolrc natuulU. des animaux domeftiques nommés Alct , qui étoient de la grandeur & à-peu-près du même naturel que nos petits chiens, & que les Eipagnols les avoient appelles ChUns du, Mexique, Chiens du Pérou ^ par cette conve- nance & parce qu'ils ont le même attache- ment, la même fidélité pour leurs maîtres; en effet l'efpèce de ces animaux ne paroît pas être effentiellement différente de celle dont cet Auteur tait mention , il n'en refte que deux que l'on défignoit indifFéremmen; par le nom à'alcoi Car indépendamment de Talco gras & potelé , qui fervoit de chien bichon aux Dames Péruviennes, il y avoit tin alco maigre & à mine trifte qu'on em- ployoit à la chafîe ; & il eft très poffible que ces animaux > quoique de races très diffé- rentes en apparence de celles de tous nos chiens , foient cependant iffus de la même fouche. Les chiens de Lapponie, de Sibérie, d'iflande , &c. ont dû paffer comme les re- nards & les loups d'un continent à l'autre , & fe dénaturer enfuite comme les autres chiens par le climat & la domefticité. Le premier alco dont le cou eft fi court fe rap- proche du chien d'iflande j & le techichi de la nouvelle Efpagne, eft peut-être le même animal que le koupara (i'^ ou chien-crabe de la Guiane, qui reffemble au renard par la figure , & au chacal par le poil; on l'a nommé chien-crabe , parce qu'il fe nourrit principale- ment de crabes & d'autres cruftacées. Je n'ai vu qu'aune peau de cet animal de la Guiane , & je ne fuis pas en état de décider s'il eft d'une efpèce particulière, ou fi l'on doit le (i ) Canis férus , Major, Canycoftts , vnlgo dicius Ko"U= para. Barrère» EJpii d'HiJi» nœ. de la Fr. Equin.^, 14^. B b 3 29^ HiJIaln naturelle, rapporter à celles du chien , du renard eu du chacal. X V. Le TAYRA ot/ le GALERA. Cet animal dont M. Brown nous a donné la defcription & la figure , eft de la gran- deur d'un petit lapin, & reÂemble aflez à la belette ou à la fouine r il fe creufe un ter- rier, il a beaucoup de force dans les pieds de devant, qui font confidérablement plus courts que ceux de derrière; fon mufeau eft alongé, un peu pointu & garni d'une mouftache ; la mâchoire inférieure eft beau- coup plus courte que la fupérieure; il a fir dents incifives & deux canines à chaque mâ- choire , fans compter les machelières ; fa langue eft rude comme celle du chat; fa tête eftoblongue; fes yeux qui font auffi un peu oblongs iont à une égale diftance des oreil- les & de Pextrémité du mufeau; fes oreilles^ font plates & afî'ez femblables à celles de rhomme ; fes pieds font forts , & faits pour creufer; les métatarfes font aîongés ; il y * cinq doigts à tous les pieds; la queue eft longue & droite, & va toujours en dimi- nuant; le corps eft oblong & reflemble beau- coup à celui d*un gros rat; il eft couvert de poils bruns , dont les uns font affez longs & ies autres beaucoim plus courts (/:). Cet {k)The hijîory ofjamaïca hy Pat. Brown, L»ni, 17/^» cîiap, V , p* 4S4 , tab» XLIX^ fis. t^ Notices âe quelques Animaux, 297 animal nous paroît être une petite efpèce de fouine ou de putois. M. Linnaeus a foup- çonné, avec quelque raifon , que la belette noire du Brefil pourroit bien être le galera de M. Brown , & en effet les deux defcrip- lions s'accordent afïez pour qu'on puiffe le préfumer (/); au refte, cette belette noire du Brefil fç trouve aufîi à la Guiane où elle fe nomme tayra (w); & je foupçonne que le nom calera , dont M. Brown ne donne pas l'origine, eft un mot corrompu & dérivé de tayra , qui efl le vrai nom de cet animal. (/) MtiftcLt atra collo fuhtus macula albâ triloha, Hahitat in Brafilia Holmens. Conf&r, Browr». Jam. 455-, tab. XLIX , fig. i. Galera. Statura manis at nigra , pUis rigidioribus , auriculte. rotundœ viUoftz. Ar^a ante oculos c'merafcens , maculiz fub mcdio collo non rero fub gula. Mamm 301 liijîoln namrclU* de laquelle on remarque auflî la bourfe avec les tefticuies qui font pendans entre les pieds de derrière : cet animal , dit Marcgra- ve , joLioit avec les chats, qui d'ailleurs ne fe {oucient pas de le manger (/); & c'efl encore une chofe qu'il a de commun avec la mufaraigne d'Europe, que les chats tuent, mais qu'ils ne mangent jamais. XX. V A P É R E A. Cet animal qui fe trouve au Brefil , n'eft ni Japin ni rat, & paroît tenir quelque chofe ^e tous deux; il a environ un pied de lon- gueur fur fept pouces de circonférence ; le poil de la même couleur que nos lièvres, & blanc fous le ventre; il a aufli la Jèvre fendue de même ; les grandes dents incifives , & la mouftache autour de la gueule & à cbtk des yeux ; mais fes oreilles font ar- rondies comme celles du rat, & elles (ont fi courtes qu'elles n'ont pas un travers de doigt de hauteur; les jambes de devant n'ont que trois pouces de hauteur , celles de der- rière font un peu plus longues ; les pieds de devant ont quatre doigts couverts d'une peau noire & munis de petits ongles courts ; îes pieds de derrière n'ont que trois doigts dont celui du milieu eft plus long que les (/) Marcgrav. Hifi, nat, Braf, p. 225, Notices de, quelques Animaux, 303 ^eux autres ; J'apérea n'a point de queue ; fa tête eft un peu plus alongée que celle du lièvre , & fa chair eft comme celle da Japin, auquel il refTemble par la manière de vivre (f),. Il fe recèle au0i dans des trous, mais il ne creufe pas la terre comme le la- pin, c'eft plutôt dans des fentes de rochers & de pierres que dans des fables qu'il fe retire ; aulfi eft-il bien aifé à prendre dans fa retraite. On le chafTe comme un très bon gibier, ou du moins aufîi bon que nos meil- leurs lapins (w). Il me paroît que l'animal dont Oviedo, & après lui :, Charlevoix (at) &. du Perrier de Montfraifier font mention fous le nom de corï^ pourroit bien être le même que Yapérea (y), que dans quelques endroits des Indes occidentales on a peut- être élevé de ces animjjux dans les maifons (0 Marcgrav. HiA nat. Braf. p. 225 , fig. Ibid, (u) Pifon. Hiji. Braf. p. Ï05. {x) Oviédû dit, que le Cori eft comme un petit lapin, qu'il y en a de tout blancs ôc d'autres de cou- leurs mêlées. Hijloirc de Saint-Domingue par le Père Charlevoix i tome l, p. ^j. {y) Le Cori ( des Indes Efpagnoîes) eft un petit animal à quatre pieds , affez femblable à nos lapins & aux taupes; il a les oreilles petites, & ïes porte tel- lement couchées fur le dos qu'à peine les apperçoit» Oïl ; il n'a point de queue. Les uns font tout blancs, les autres tout noirs, les autres mouchetés de noir & ie blanc i il y en a de tout rouges & d'autres mou- chetés de rouge & de blanc. ... Ils font privés & ne font aucune ordure daits les maifons; ils mangent «le l'herbe & fe nourriffent de peu de chofe^ ils ont le goût & le fumet des meilleurs lapins. Hijîoire des voyages, par J^uperri^r de Montfraijier, Paris/ 1707, p. »04 Hijlolrt naturelU^ ou dans des garennes, comme nous élevons des lapins j & qu'enfin c'eft par cette raifon qu'il s'en trouve de roux, de blancs, de noirs & de variés de couleurs différentes ; ma conjeaure eft fondée ; car Garcilaffo dit expreffement, qu'il y avoit au Pérou des lapins champêtres & d'autres domeftiques, qui ne rellembloient point à ceux d'El- ^^^"'^^^- XXI. LE T A P E T L Le Tapeti (j^ me paroît être une efpèce très voifine, & peut-être une variété de celle du lièvre ou du lapin : on le trouve au Brefiî & dans plufieurs autres endroits de rAmérique; il reffemble au lapin d'Europe par la figure; au lièvre par la grandeur & par le poil, qui feulement eft un peu plus brun ; il a les oreilles très longues & de la même forme ; fon poil eft roux fur le front & blanchâtre fous la gorge; quelques-uns ont un cercle de poil blanc autour du cou , tous font blancs fous la gorge, la poitrine & le ventre; ils ont les yeux noirs, & des mouftaches comme nos lapins, mais us n'ont point de queue (b). Le tapeti reffem- ble encore au lièvre par fa manière de vi- ii ) Hifi. des Incas, tome 11, p. 267. (i ) Tapity, félon ie P. d'AbbeviUe. Ml(fion aa Ma- ib ) Marcerav. -«£/?, nat, B^af, p» 22^. fig, p. i^U- * ' vre» Noticis de quelques Anhnaux, 30^ Vf e , paf fa fécondité & parla qualité de fa chair, qui efl très bonne à manger; il de- meure dans les champs ou dans les bois comme le lièvre ^ & ne fe ereufe pas un terrier comme le lapin (c). Il me paroît que l'aniifial de la nouvelle Efpagne , indiqué par Fernandès , fous le nom de c'idi (d), effc le même que îe tapeti du Brefil , & que ces animaux rie font qu'une variété de nos liè- vres d'Europe , qui ont pu pafler par le Nord^ d'un continent à l'autre. Il y auroit bien encore quelques efpèces- d'animaux à ajouter à ceux qui font compris dans les Notices précédentes , mais ils font fi mal indiqués qu'elles deviendroient trcp incertaines , & j'aime mieux me borner à ce que Ton fait avec quelque certitude , que de "me livrer à des conje6lures, & tomber dans l'inconvénient de donner pour exiitans des êtres fabuleux , & pour des efpèces réelles des animaux défigurés : avec cette limite , & malgré ce retranchement , que j'ai cru ryéceffaire , les perfonnes inftruites s'ap- percevront aifément que notre Hiftoire des animaux eft aufli complète qu'on pouvoir l'efpérer : elle contient un grand nombre d'animaux nouveaux , & il n'y en a aucun de ceux qui étoient anciennement connus y ( c) Pifon. Hiji. Brafil. pag. 102. {(i) Citli Lepores nova HÏ/pania nofiratîhits' fimilts forma aîque alimento fed auriculis longijjimis prc iorpons magnltudlnc , latiffîml/jue, Fernandès , hiJi. animi- xov, Jiifp. p. a , cap. m, C ^ 3o6 Hiftoln namrdh. dont il ne foit fait meation dans le cours d«^ cet Ouvrage. Les^ notices précédentes , quoicjue compo- îées de vingt - un articles , ne contiennene réellement que neuf ou dix efpèces d'ani- maux difFérens , car tous les autres ne font que des variétés ; J'ours blanc n'eft qu'une variété de l'efpèce de Tours; la vache de Tartarie de celle du bifon ; le cochon de Guinée & le cochon du Cap-verd de celle du cochon, &c. Ainfi en ajoutant ces dix efpèces à cent quatre - vingt ou environ , dont nous avons donné l'hiftoire , le nombre de tous les animaux quadrupèdes , dont l'exiftence efl certaine & bien conftatee , n'eft tout au plus que de deux, cents elpèees iur la furface entière de ia terre connue* flN du fcptîhm< Volumth- TABLE De ce qui eft contenu dans ce Volume, JL^ OMENCLATURE des S'inges. - Page % Les Orang'OUtangs ou le Ponge & h Jççk», 47 Le Pithèque 79 Le Gibbon. 87 Le Magot. 9* Le Papïon ou Babouin, 97 Le Mandrill, 103 M^'Ouanderou & le Lowando, 107 Le Maïmon. 112 Le Macaque & V Aigrette. "5 Le Patas. 120 Le Malhrouck & le Bonnet'ihïnoîn 124 Le Mangabey, 131 La Mone. 135 Le Calïtrïche. nr Le Mûuflac. 141 Le Talapoîn. M3 Le Doue. 146 De la dégénération des AnimauXt M' Les Sapajous & les Sagoins, ai7 L'Ouarine & lAlouate. 221 Le Coaïta 6* rExquima» 231 Le Sajou, 241 Le Saï. 244 Le Saïmîrl. 248 y '} s TABLE. L'Ouifl'itl " «ff Le Marik'ma, 2.59 Le Pïnche. 261 Le Mîco, "" 264 JN onces de quelques Animaux dont lï na pas été fait mention dans le corps 'de cet Ouvrage, 2.67 Fifl de la table du Tome Vil,