V1 à POIRE #4 nt, 5 s # QUADRUPÉEDES. +. TOME SEMITEME J “R Est é Wu AE TIR | HISTOIRE +: 20 NATURELLE Par BUFF ON. \ { us - DÉDIÉE AU CITOYEN LACEPEDE, MEMBRE DE L'INSTITUT NATIONAL, QUADRUPEDES. TOME SEPTIEME. Ya 7 e8 7. é | Fssontan slt > op" RBICHMOND COLL ECTION. De à 7 Üon: al th use it ne De Par 2 ga A PARIS, M'A LA mu. hs STÉRÉOTYPE : »E P. DIDOT L’AÎNÉ, GALERIES DU LOUVRE, N° 5 3; Er Firmin DIDOT, RUE DE THIONVILLE, \e 116, AN VIE — 1799. Li HISTOIRE TATDURÉLLE NOMENCLATURE f \ DES SINGES. Le G OMME endoctriner des écoliers, ou parler à des hommes, sont deux choses différentes ; que les premiers reçoivent sans examen, et. même avec avidité, l'arbitraire comme le réel, le faux comme le vrai, dès qu’il leur est présenté sous la forme de documens ; que les autres, au contraire, rejettent avec de- goût ces mêmes documens , lorsqu'ils nesont pas fondés ; nous ne nous servirons d'aucune des méthodes qu'on a imaginées pour entasser À N 6 NOMENCLATURE : sous le même nom de sirges une multitude d'animaux d'espèces différentes et même très- éloignées. ho J'appelle sirge un animal sans queue, dont la face est applatie, dont les dents, les mains, les doigts et les ongles ressemblent à ceux de l’homme, etqui, comme lui, marche debout sur ses deux pieds. Cette définition, tirée de la nature même de l’animal et deses rapports avec celle de l’homme, exclut, comme l'on voit, tous les animaux qui ont des queues , _ tous ceux qui ont la face relevée ou le mu- 4 seau long, tous ceux qui ont les ongles cour- bés , crochus ou pointus, tous ceux qui mar- chent plus volontiers sur quatre que sur deux pieds. D’après cette notion fixe et pre- cise, voyons combien il existe d'espèces d’ani- maux auxquelles on doive donner le nom de singe. Les anciens n'en connoissoient qu'une seule; le pifhécos des Grecs, le sizria des La- tins , est un sizge, un vrai singe, et c'est celui sur lequel Aristote, Pline et Galien, ont institué toutes les comparaisons physiques et fondé toutes les relations du singe à l’homime: mais ce pithèque, ce singe des anciens, sk ressemblant à l’homme par la conformation DES SINGES. 7 extérieure, et plus semblable encore par l’or- ganisation intérieure, en diffère néanmoins par un attribut qui, quoique relatif en lui | _ même, n'en est cependant ici pas moins | essentiel ; c’est la grandeur. La taille de l'homme en général est au-dessus de cinq | pieds : celle du pithèque n’atteint guère qu’au quart de cette hauteur; aussi, ce singe eût-if | encore été plus ressemblant à l’homme, les anciens auroient eu raison de ne le resarder que comme un homoncule, un nain manque, un pygmée capable tout au plus de combattre avec les grues , tandis que l’homme sait dom- tet l’éléphant et vaincre le lion. Mais , dépuis les anciens, depuis la décou- | verte des parties méridionales de l'Afrique et des Indes, on a trouvé un autre singe avec cet attribut de grandeur ,unsingeaussihaut, aussi fort que l’homme, aussi ardent pour \ L les femmes que pour ses femelles, un singe _quisait porter des armes, quisesertdepierres pour attaquer, et de bätons pour se défendre, et qui d’ailleurs ressemble encore à l’homme plus que le pithèque ; car, indépendamment _de ce qu'il wa point de queue, de ce que sa face est applatie, que ses bras , ses mains, ses : £ | } (ŒMIY à Ut MON ris NOMENCLATURE doigts, ses ongles, sont pareils aux nôtres, et qu’il Ron toujours debout, il a une espèce de visage, des traits approchans de ceux de l'homme, des oreilles de la mème forme, des cheveux sur la tête, de la barbe au menton, et du poil ni plus ni moins que. _ l'homme en a dans l’état de nature : aussi Les, habitans de son pays, les Indiens policés, n’ont pas hésité de l’associer à l’espèce hnmainepar lenom d’orang-outang, hommesauvage, tan. dis que les Nèores, presque aussi sauvages, aussi laids que ces singes, et qui n’imaginent pas que pour être plus ou moins policé l’on soit plus ou moins homme, leur ont donné un nom propre (pozgo), un nom de bête et non pas d'homme; et cet orang-outang ou ce pongo n’est en effet qu’un animal, mais un animal très-singulier, que l’homme ne peut voir sans rentrer en lui-même , sans se reconnoître, sans se convaincre que son corps m’est pas la partie la plus essentielle de sa nature. Voilà donc deux animaux , le pithèque et Vorang-outang , auxquels on doit appliquer le nom de singe, et il y en a un troisième auquel on ne peut guère le refuser, quoiqu'il Ar L, D LUN He ai A EE Li 17 Eu. À | DES SINGES. ; soit difforme, et par rapport à l’homme, et par rapport au singe. Cet animal, jusqu’à présent inconnu , et qui a été apporté des Indes orientales sous le nom de gibbon, marche debout comme les deux autres, et a la face applatie : 1l est aussi sans queue; mais’ ses bras, au lieu d’être proportionnés comme ceux de l’homme, ou du moins comme ceux de l’orang-outaug ou du pithèque, à la hau- teur du corps, sont d’une longueur si déme- surée, que l'animal étant debout sur ses deux pieds , il touche encore Ia terre avec ses mains sans courber le corps et sans plier les jambes. Ce singe est le troisième et le der- nier auquel on doive donner ce nom; c’est, dans ce genre, une espèce monstrueuse, he- téroclite, comme l’est dans l'espèce humaine la race des hommes à grosses jambes, dite de Saint-Thomas *. _ Après les singes, se présente une autre famille d'animaux, que nous indiquerons sous le nom générique de babouin ; et pour les distinguer nettement de tous les autres, nous dirons que le babouin est un animal à * Voyez le Discours sur les variétés de lespèce humaine. / \ JA NOMENCLATURE queue'courte, à face alongée, à museau larçse et relevé, avec des dents canines plus grosses à proportion que celles de l’homme, et des callosités sur les fesses. Par cette définition, nous excluons de cette famille tous les singes qui n’ont poiut de queue, toutes les gue- nons, tous les sapajous et sagouius qui n'ont pas la queue courte, mais qui tous l’ont aussi longue ou plus longue que le corps, et tous les makis, loris et autres quadrumanes qui ont le museau mince et pointu. Les an— ciens n'ont jamais eu de ñom propre pour ces animaux : Aristote est le seul qui paroît avoir désigné l’un de ces babouins par lenom de simia porcaria*; encore n’en donne-t-1l qu’une indication fort indirecte. Les Italiens sont les premiers qui l’aient nommé Dabui- : les Allemands l’ont appelé bavion ; les * Cette dénomination, simia porcaria, qui ne se trouve que dans À ristote , et qui n’a été employée par aucun autre auteur, étoit néanmoms une irès- bonne expression pour désigner le babouin : car j’ai trouvé dans des voyageurs qui probablement n’a voient jamais lu Aristote, la même comparaison du museau du babouin à celui du cochon ; et d’ailleurs ces deux animaux se ressemblent un peu par la forme du corps. DES SINGES. jé François, babouin ; et tous les auteurs qui, dans ces derniers siècles, ont écrit en latin, l'ont désigné par le nom papio : nous l'ap+ pellerons nous-mêmes papion , pour le dis- tinguer des autres babouins qu'on a trouvés depuis dans les provinces meéridionales de rl +. et des Indes. Nous ete aa trois espèces de ces animaux : 1°. le pâpion où babouin proprement dit, dont nous venons de parler, qui se trouve en Libye, en Ara- bie , etc. et qui vraisemblablement est le simia porcaria d'Aristote; 2°. le z7andrill, qui est un babouin encore plus grand que le papion , avec la face violette, le nez et les joues sillonnées de rides profondes etobliques, qui se trouve en Guinée et dans les parties les plus chaudes de l'Afrique ; 3°. l'oande- rou, qui n'est pas si gros que le papion, ni si grand que le mandrill, dont le corps est moins épais, et qui a la tête et toute la face environnées d'une espèce de crinière très- longue et très-épaisse. Onde trouve à Ceylan, au Malabar , et dans les autres provinces mé- ridionales de linde Ainsi voilà trois singes et trois babouins bien definis, bien séparés, et tous six distinctement différens les uns des autres. Le 1 da VA | \ na x2 NOMENCLATURE Mais comme la Nature ne connoît pas nos définitions ; qu’elle n’a jamais rangé ses ouvrages par las, ni les êtres par genres ; que sa marche, au contraire, va toujours par degrés , et que son plan est nuancé par-tout et s'étend en tout sens ; il doit se trouver entre le genre du singe * et celui du babouin quelque espèce intermédiaire qui ne soit pré- cisément ni l’un ni l’autre, et qui cependant participe des deux. Cette espèce intermédiaire existe en effet, et c’est l'animal que nous appelons zagotf ; 1l se trouve placé entre nos deux définitions : il fait la nuance entre les singes et les babouins; il diffère des premiers, en ce qu'il à le museau alongé et de grosses dents canines ; 1l diffère des seconds , parce qu'il n’a réellement point de queue, quoi- qu'il ait un petit appendice de peau qui a l'apparence d’une naissauce de queue:iln’est pat conséquent n1 singe ni babouin, et tient en même temps de la nature des deux. Cet -* Le gibbon commence déja la nuance entre les singes et les babouins, en ce qu’il a des callosités - sur les fesses comme les babouins, et les ongles des. pieds de derrière plus pointus que ceux de l’orang- Outang, qui n’a point de vallosités sur les :esses, et qui a les ongles plats et arrondis comme l’homme. k DES SINGES © , 0 animal , qui est fort commun dans la haute Égypte , ainsi qu'en Barbarie, étoit connu des anciens ; les Grecs et Les Latinsl’ontnom- me cynocéphale, parce que son museau res= semble asiéz à celui d’un dogue. Ainsi, pour présenter ces animaux, voici l’ordre dans lequel on doit les ranger : l’'orang-oufang où pongo, premier singe ; le piihèque, second singe ; le g2bbo7., troisième singe , mais dif- forme ; le cynocéphale ou magot, quatrième singe ou premier babouin ; le papion, pre- mier babouin:; le mandrill, second babouin ; l'ouanderou , troisième babouin. Cet ordre me ni arbitraire ni fictif, mais relatif à "échelle même de la Nature. Après les AE et les babouins, se trouve les guenons ; c’est ainsi que j'appelle, d’a— près notre idiome ancien, les animaux qui ressemblent aux singes ou aux babouins, mais qui ont de longues queues, c’est-à-dire, des queues aussi longues ou plus longues aué le corps. Le mot gzenon a eu , dans ces derniers siècles, deux acceptions différentes de celle que nous lui donnons ici; l’on à employé ce mot gzenon généralement pour désigner Les singes de petite taille, eten même 2 #4: Na a 6 ‘14 NOMENCLATURE temps on l'a employé particulièrement pout nemmer la femelle du singe : inaïs plus an- ciennement nous appelions singes ou magots les singes sans queue , et g/enons on 770nes ceux qui avoient une longue queue; je pour- rois le prouver par quelques passages de nos voyageurs des seizièmeet dix-septièmesiècles : le mot même de gzenon ne s'éloigne pas et peut-être a été dérivé de fébos ou lépos, nom que les Grecs donnoient aux singes à longue queue. Ces fèbes ou guenons sont plus petites et moins fortes que les babouins et les singes ; elles sont aisées à distinguer des uns et des autres par cette difference , et sur-lout par leur longue queue. On peut aussi les séparer aisément des makis, parce qu’elles n’ont pas le museau pointu, et qu’au lieu de six dents incisives qu'ont les makis , elles n’en ont que quatre comme les singes et les babouins: Nous en connoissons neuf espèces , que nous indiquerons chacune par un nor différent , afin d'éviter toute confusion. Cesneuf espèces de guenons sont : 1°. les z7acaques ; 2°. les patas; 3°. les malbrouks ; 4°. les mangabeys ; 5°. la mone; 6°. le callitriche; 7°. le mous- tac ; 8°. le falapoin ; 9°. le douc. Les anciens es OR CRISE ME NO ES NT Grecs ne connoissoient que deux de ces gue- nons , la mone et le callitriche, qui sont originaires de l’Arabie-t des parties septen— trionales de l'Afrique ; ils n’avoient aucune notion desautres, parce qu’ellesnese trouvent que dans les provinces méridionales de l’'A- frique et des Indes orientales , pays entière- ment inconnus dans le temps d'Âristote. Ce grand philosophe, et les Grecs en général, étoient si attentifs à ne pas confondre les êtres par des noms communs et dès lors équi- voques , qu'ayant appelé pifhécos le singe -sans queue , ils ont nommé #ébos la guenon ou singe à longue queue : comme ils avoient reconnu que ces animaux étoient d'espèces différentes, et même assez éloignées, ils leur avoient à chacun donné un nom propre, et ce nom étoit tiré du caractère le plus appa- rent. Tous les singes et babouins qu’ils con- noissoient , c'est-à-dire, le pifkèque ou singe proprement dit, le cyrocéphale on magot, et le simnia porcaria ou papion, ont le poil d’une couleur à peu près uniforme : au con- traire, la guenou que nous appelons ici/zone, et que les Grecs appéloient #ébos "a le poil varié de couleurs différentes ; on l'appelle LA + "CERT CE TEA ÿ k o NOMENCLATURE même vulgairement le singe varié; 'c'étoit l'espèce de guenon la plus commune et la mieux connue du temps d’Aristote , et c’est de ce caractère qu’est dérivé le nom de #ébos, qui désigne en grec la variété dans les cou— leurs. Ainsi tous les animaux de la classe des singes, babouins ét guenons, indiqués par Aristote, se réduisent à quatre, le pithé- cos, le cynocephalos, le simia porcaria et le kébos, que nous nous croyons fondés à re- présenter aujourd'hui comme étant réelle- ment le pifhèque ou singe proprement dit, le magot, le papion ou babouin proprement dit, et la z20ne, parce que non seulement les caractères particuliers que leur donne Aris- tote leur conviennent en effet, mais encore parce que les autres espèces que nous ayons indiquées , et celles que nous indiquerons encore, devoient nécessairement lui être in— connues, puisqu'elles sont natives et exclu- sivement habitantes des terres où les voya- geurs grecs n'avoient point encore pénétré de son temps. Deux ou trois siècles après celui d’Aristote, on trouve dans les auteurs grecs deux nou veaux noms, Callithrix et Cercopithécos , tous 4 | DES SINGES. 2 NE deux relatifs aux gzerons ou singes à longue queue : à mesure qu'on" découvroit la terre et qu'on s'avançoit vers le Midi, soit en Afrique, soit en Asie, on trouvoit de nou— veaux animaux, d’autres espèces de guenons; et comme la plupartdeces suenonsn’avoient pas, comme le £ébos, les couleurs variées, les Grecs imaginèrent de faire un nom géné- rique cercopithécos, c'est-à-dire, singe à queue, pour désigner toutes les espèces de guenous ou singes à longue queue ; etayant remarqué parmi ces espèces nouvelles une guenon d'un poil verdätre et de couleur vive, ils appelèrent cette espèce callithrix, qui signifie beau poil. Ce callithrix.se trouve en effet dans la partie méridionale de la Mauri- tanie et dans les terres voisines du cap Verd: c'est la guenon que l’on connoit vulgaire- ment sous. le nom de si2ge verd; et comme nous rejetons dans cet ouvrage toutes les dénominations composées, nous lui avons conservé son nom ancien, cal/lithrix ou cal- litriche. | À l'égard des sept autres espèces de sue- nons que nous avons indiquées ci-dessus par les noms de zzacaque, patas, malbrouk , 2 L'ORR )) 44 ? ER l'a! di De GON LE M NOMENCLATURE OL | mangabey ; MOUSIEC , talapoin et douc, elles étoient inconnues des Grecs et des Latinis. Le macaque est natif de Congo ; le patas, du Sénégal ; le mangabey , de Madagascar; le malbrouk, de Bengale; le moustac, de Gui- née; le talapoin , de Siam; et le douc, de la Cochinchine. Toutes ces terres étoient égale- ment ignorées des anciens, et nous avons eu grand soin de conserver aux animaux qu'on y a trouvés, les noms propres de leur pays. Et comme la Nature est constante dans sa marche, qu'elle ne va jamais par sauts, et que toujours tout est gradué , nuancé, on trouve entre les babouins et les guenons une espèce intermédiaire, comme celle du magot l'est entre les singes et les babouins : l’animal qui remplit cet intervalle et forme cette es- pèce intermédiaire, ressemble beaucoup aux guenons, sur-tout aux macaques , et en même temps il a le museau fort large et la queue courte comme les babouins; ne lui connois- sant point de nom, nous l'avons appelé z7ai- mon pour le distinguer des autres. Il se trouve à Sumatra ; c’est le seul de tous cesanimaux, tant babouins que guenons, dont la queue soit dégarnie de poil, et c’est par cette raison - ù ? l ! ! ' ON MSI SINGER) | vy que les auteurs qui en ont parlé l’ont désigné par la dénomination de sizge à queue de co- chon ou de singe à queue de rat. : Voilà les animaux de l’ancien continent auxquels on a donné le nom commun de singe , quoiqu’ils soient non seulement d’es- pèces éloignées , mais même de genres assez différens; et ce qui a mis Le comble à l'erreur et à la confusion, c’est qu’on a donné ces mêmes noms de sz22e, de cynocéphale, de kébe et de cercopithèque , noms faits ily a quinze cents ans par les Grecs, à desanimaux d'un nouveau monde, qu’on n’a découverts que depuis deux ou trois siècles. On ne se doutoit pas qu’il n’existoit dans les parties méridionales de ce nouveau continent aucun des animaux de l'Afrique et des Indes orien- tales. On a trouvé en Amérique des bêtes : avec ts mains et des doigts; ce rapport seul a sufh pour qu’on les ait appelées si7ges, sans faire attention que, pour transférer un nom, il faut au moins que le genre soit le même, et que, pour l'appliquer juste, il faut encore que l’espèce soit identique : or ces animaux d'Amérique , dont nous ferons deux classes sous les nomsde sapajous et de sagouins, sont We ŒUIT LA 20. NOMENCLATURE très-différens de ‘tous les singes de l'Asie et de l’Afrique; et de la même manière qu'ilne se trouve dans le nouvéau continent ni singes, ni babouins, ni guenons, il n'existe aussi ni sapajous ni sagouins dans l’ancien. Quoique nous ayons déja posé ces faits en général dans ‘ . . À notre Discours sur les animaux des deux con- tinens, nous pouvons les prouver ici d'une manière plus particulière ,etdéemontrer que, de dix-sept espèces auxquelles on peut réduire tous les animaux appelés sirges daus l’ancien continent, et de douze ou treize auxquelles on à transféré ce nom dans le nouveau, au- cune n’est la même, ni ne se trouve égale- ment dans les deux : car, sur ces dix-sept espèces de l’ancien continent, il faut d’abord retrancher les trois ou quatre singes qui ne se trouveut certainement pointen Amérique, etauxquels les sapajous et les sagouins ne res- semblent point du tout; 2°. il faut en retran- cher les trois ou quatre babouins, qui sont beaucoup plus gros que les sagouins ou les sa pajous, et qui sont aussi d’une figure très-diffé- rente : il ne reste donc que les meuf guenons auxquelles on puisse les comparer. Or toutes les guenons ont, aussi-b en que les singes et » £ Se LE 206 GE " DES SINGES. 2€ les babouins , des caractères généraux et parti- culiers qui les séparent en entier des sapajous et des sagouins : le premier de ces caractères est d’avoir les fesses pelées, et des callosités naturelles et inhérentes à ces parties; le se- cond, c’est d’avoir des abajoues, c’est-à-dire, des poches au bas des joues, où elles peuvent sarder leurs alimens ; et le troisième, d’avoir la cloison des narines étroite , et ces mêmes narines ouvertes au-dessous du nez comme celles de l’homme. Les sapajous et les sagouins n’ont aucun de ces caractères; ils ont tous la cloison des narines fort épaisse, les narines ouvertes sur les côtés du nez et non pas en dessous ; ils ont du poil sur les fesses, et point de callosités ; ils n’ont point d’abajoues : ils diffèrent donc des guenons, non seulement par l'espèce, mais mème par le genre, puis- qu’ils n’ont aucun des cäractères généraux qui leur sont communs à toutes; et cette différence dans le genre en suppose nécessai- rement de bien plus graudes dans les espèces, et démontre qu’elles sont très-éloignées. C’est donc mal-à-propos que l’on a douné le nom de singe et de gzenon aux Sapajous et aux sagouins; il falloit Leur conserver leurs ip NOMEMR Le DNINROS OL RE MNART CPROTRE ANNEENAENCS ARE PAT RON D MEN D SR CPE ONE OS \ UNI 22 (NOMENCLATURE noms , et, au lieu de les associer aux singes, commencer par les comparer entre eux. Ces deux familles diffèrent l’une de l’autre par un caräctère remarquable : tous les sapajous se servent de leur queue comme d’un doigt pour S'accrocher, et même pour saisir ce qu’ils ne peuvent prendre avec la main; les sagouins, au contraire, ne peuvent se servir de leur queue pour cet usage ; leur face ,. leurs oreilles, leur poil, sont aussi différens. On peut donc en faire aisément deux génres dis- tincts el séparés. | | Sans nous servir de dénominations qui ne peuvent s'appliquer qu'aux singes, aux ba- bouins et aux guenons, sans empioyer des noms qui leur appartiennentet qu’on ne doit pas donner à d’autres, nous avons tâche d'in diquer tous les sapajous et tous les sagouins par les noms propres qu’ils ont dans leur pays natal. Nous connoissons six ou sept es— pèces de sapajous et six espèces de sagouins, dont la plupart ont des variétés; nous en donnerons l'histoire et la description dans ce volume. Nous avons recherche leurs noms ayec le plus grand soin dans tous les auteurs, e sur-tout dans les voyageurs qui les ont L DES SINGES. 23 indiqués les premiers. En général , lorsque nous n'avons pu savoir le nom que chacun porte dans son pays, nous avons cru devoir le‘tirer de la nature même de l'animal, c’est- à-dire, d’un caractère qui seul fût suffisant pour le faire reconnoitreet distinguer de tous les autres. L'on verra dans chaque article les . raisons qui nous ont fait adopter ces noms. Et à l'égard des variétés , lesquelles, dans la classe entière de ces animaux ; sont peut- être plus nombreuses qüe les espèces, on les trouvera aussi très-soisneusement comparées à chacune de leurs-espèces propres. Nous con- noissousiet nous avons eu, la plupartvivans, quarante de ces animaux plus ou moins dif- férens entre eux : il nous a paru qu’on devoit les réduire à trente espèces; savoir, trois singes , uné intermédiaire entre les singes et les babouïus: ‘trois babouins , une intermé- diaire entre les babouins et les guenons ; neuf guenons, sept sapajous, et six sagouins; et que tous les autres ne doivent , au moins pour la plupart, être considérés que comme des variétés. Mais comme nous ne sommes pas absolument certains que quelques unes de ces variétés ne puissent être en effet des 24. NOMENCLATURE espèces distinctes, nous tâcherons de ue donner aussi des noms qui ne seront que précaires , supposé que ce ne soient que des variétés, et qui pourront devenir propres et spécifiques si ce sont réellement des espèces distinctes et séparées. À l’occasion de toutes ces bêtes, dont quel- ques unes ressemblent si fort à l’homme, considérons. pour un instant les animaux de la terre sous un nouveau point de vue : c’est sans raison suffisante qu’on leur a donné gé- néralement à tous le nom de gzadrupèdes. Si les exceptions n’étoient qu’en petit nombre , nous n’attaquerions pas l’application de cette dénomination : nous avons dit et nous savons que nos définitions, nos noms, quelque gé- néraux qu'ils puissent être, ne comprennent jamais tout; qu’il existe toujours des êtres en-deçà ou au-delà ; qu’il s’en trouve de mitoyens; que plusieurs, quoique placés en apparence au milieu des autres, ne laissent pas d'échapper à la liste; que le nom général qu'on voudroit leur imposer est une formule. incomplète, une somme dont souvent ils ne font pas partie, parce que la Nature ne doit jamais être présentée que par umiles et non, DES SINGES. 25 par agrégats , parce que l’homme n’a imaginé les noms généraux que pour aider à sa mé- moire et tàcher de suppléer à la trop petite capacité de son entendement , parce qu’en- suite il en a fait abus en regardant ce nom général comme quelque chose de réel , parce qu'enfin il a voulu y rappeler des êtres et même des classes d'êtres qui demandoient un autre nom. Je puis en donner et l’exemple et la preuve sans sortir de l’ordre des quadru- pèdes, qui, de tous les animaux, sont ceux que l’homme connoît le mieux, et auxquels il étoit par conséquent en état de donner les dénominations les plus précises. | Le nom de guadrupède suppose que l'ani- mal ait quatre pieds : s'il manque de deux pieds comme le lamantin, il n’est plus qua- drupède ; s’il a des bras et des mains comme le singe, il n’est plus quadrupède; s’il a des ailes comme la chauve-souris , il n’est plus quadrupède, et l'on fait abus de cette déno- mination générale lorsqu'on l’applique à ces animaux. Pour qu'il y ait de la précision “daus les mots, il faut de la vérité dans les idées qu’ils représentent. Faisons pour les mains un nom pareil à celui qu’on a fait 26. NOMENCL Fe à . es FLO NN. 4 , pour les pieds, et alors nous dirons avec vé= rité et précision que l’homme est le seul qui soit bimane et bipède, parce qu'il est le seul qui ait deux mains-et deux pieds ; que le las mantiu n'est que binane , que la chauve- souris n’est que bipède, et que le singe est quadrumane. Mainteuant appliquons ces X nouvelles dénominations générales à tous les êtres particultersauxquelselles conviennent; car c'est ainsi qu’il faut toujours voir la Na- ture : nous trouverons que, surenviron deux cents espèces d'animaux qui peuplent la sur- face de la terre, et auxquelles on à donné le nom comimun de guadrupède, 11 y a d'abord trente-cinq espèces de singes, babouins, gue- nons,sapajous, sagouins et miakis, qu'on doit en retrancher , parce qu'iis sont quadru- manes; qu'a ces-trente-cinq espèces il faut ajouter celles du loris, du sarigue , de ia mar- mose, du éayopollin , du tarsier, du pha- langer , etc. qui sont aussi quadrumanes comme les singes , guenons, sapajous et sa— gouins ; que par cousequentla liste des qua- drumanes étant au moins de quarante es _pèces * , Le nombre réel dés quadrupedes est # Nous ne disons pas trop eu ne comptant que Re DES SINGES. 29 déja réduit d’un cinquième; qu’ensuite ôtant douze ou quinze espèces de bipèdes, savoir, les chauve-souris et les roussettes, dont les pieds de devant sont plutôt des ailes que des pieds, et en retranchant aussi trois ou quatre gerboises quine peuvent marcher que sur les pieds de derrière, parce que ceux de devant sout trop courts, en ôtant encore le laman— tin qui n’a point de pieds de derrière , les morses, le duson et les phoques, auxquels ils sont inutiles, ce nombre des quadrupèdes se trouvera diminué de presque un tiers; et si on vouloit encore en soustraire les ani maux qui se servent des pieds de devant comme de mains , tels que les ours, les mar- mottes, les coatis, les agoutis, les écureuils À les rats et beaucoup d’ autres , la dénomina- tion de guadrupède paroïitra mal appliquée à plus de la moitié des animaux : et en effet, "les vrais quadrupèdes sont les solipèdes et les pieds-fourchus; dès qu’on descend à la classe des fissipèdes, on trouve des quadrumanes x VUE Fun 4 quaranie espèces dans la liste des quadrumanes ; Car il y a dans les guenons, SApaIous SASOUINS, SA= rigues , e'C. plusieurs variétés qui pourroient bieu être des especes réellement distinctes. : NOMENCLATURE ou des quadrupèdes ambigus qui se servent LE ' à xl FAURE RO VAR y PUR de leurs pieds de devant comme de mains, et qui doivent être séparés ou distingués des autres. [l y a trois espèces de solipèdes, le cheval , le zèbre et l’âne; en y ajoutant l’é- léphant , le rhinocéros , l’hippopotame, le chameau , dont les pieds, quoique terminés par des ongles, sont solides et ne leur servent qu’à marcher , l'on a déja sept espèces aux- quelles le nom de gzadrupède convient par- faitement. Il y a un beaucoup plus grand nombre de pieds -fourchus que de solipèdes; les bœufs , les beliers , les chèvres, les ga- zelles , les bubales , les chevrotains, le lama, la vigogne, la girafe , l’élan , le renne, les cerfs, les daims , les cheyreuils , etc. sont tous des pieds-fourchus , et composent en tout un nombre d'environ quarante espèces. Ainsi voilà déja cinquante animaux, c’est-à- dire, dix solipèdes et quarante pieds-four- chus , auxquels le nom de gzadrupède a été bien appliqué. Dans les fissipèdes, le lion , le tigre, les panthères , le léopard, le lynx, le chat, le loup, Le chien, le renard, l'hyène, + les civettes , le blaireau , les fouines, les be- lettes, les furets, les porcs-épics, les héris= ( \ DES SINGES. 23 sons , les tatous, les fourmiliers et les co- chons qui font la nuance entre Lés fissipèdes et les pieds-fourchus, forment un nombre de plus de quarante autres espèces, auxquelles le nom de gzadrupède convient aussi dans toute la rigueur de l’acception, parce que, quoiqu'ils aient le pied de devant divisé en quatre ou cinq doigts, ils ne s’en servent - jamais comme de main : mais tous les autres fissipèdes, qui se servent de leurs pieds de devant pour saisir et porter à leur gueule, ne sont pas de purs quadrupèdes; ces espèces , qui sont aussi au nombre de quarante, font une classe intermédiaire entre les quadru- pèdes et les quadrumanes » et ne sont préci- sément ni des uns ni des autres. Il y a donc, dans le réel, plus d'un quart des animaux auxquels le nom de guadrupède disconvient, et plus d’une moitié auxquels il ne convient pas dans toute l’étendue de son acception. Les quadrumanes remplissent le grand in- tervalle qui se trouve entre l’homme et les quadrupèdes ; les bimanes sont un terme moyen dans la distance encore plus grande de l’homme aux cétacés *; les_bipèdes avec * Dans cette phrase et dans toutes les autres sem dos NOMENCLATURE | des ailes font la nuance des quadrupèdes aux 1 oiseaux ; et les fissipèdes qui se servent de leurs pieds comme de. mains , remplissent ‘tous les degrés qui se trouvent entre les qua- drumanes et les quadrupèdes. Mais c’est nous arrêter assez sur cette vue ; quelqu'utile qu'elle puisse être pour la connoissance dis- tincte des animaux , elle l’est encore plus par Vexemple, et par la nouvelle preuve qu’elle nous donne qu'il n’y a aucune de nos defini- tions qui soit précise, aucun de nos termes généraux qui soit exact, lorsqu'on vient à les appliquer en particulier aux choses ou aux êtres qu'ils représentent. : - Mais par quelle raison ces tcrmes généraux, qui paroissent être le chef-d'œuvre de la pen-. sée, sont-ils si défectueux ? pourquoi ces de- finitions, qui semblent n'ètre que les purs resultats de la combinaison des êtres, sont-- _* elles si fautives dans l'application ? Est - ce © erreur nécessaire, defaut de rectitude dans l'esprit humain ? ou plutôt n’est-ce pas simple incapacité, pure impuissance de combiner et blables, je n’entends parler que de l’homme phy- sique, c’est-à-dire, de la forme du corps de l’homme, comparée à la forme du corps des animaux. DES SINGES. 3e même de voir à la fois un grand nombre de choses ? Comparons les œuvres de la Nature aux ouvrages de l'homme, cherchons com ment tous deux opèrent, et voyons si l’es— . prit, quelqu'actif, qielqu'étendu qu’ilsoit; peut aller de pair et suivre la même marche sans se perdre lui-même, ou dans l’immen- sité de l’espace ,oudansles ténèbres du temps, ou dans le nombre infini de la combinaison des êtres. Que l’homme dirige la marche de son esprit sur un objet quelconque : s’il voit juste, il prend la ligne droite, parcourt le moins d'espace et emploie le moins de temps ai possible pour atteindre à son but. Combien ne lui faut-il pas déja de réflexions et de combinaisons pour ne pas entrer dans les lignes obliques, pouréviter les fausses routes; les culs-de-sac, les chemins creux, qui tous se présentent les premiers et en si grand nombre , que le choix du vrai sentier sup— pose la plus grande justesse de discernement ! Cela cependant est possible, c’est-à-dire, n'est pas au-dessus des forces d’un bon esprit; il peut marcher droit sur sa ligne et sans s’é- carter ; voilà sa manière d'aller la plus sûre et la plus ferme : mais il va sur une ligne \ + "fi NOMENCLATURE pour arriver à un point; et s’il veut saisir un autre point, il ne peut l’atteindre que par une autre ligne : là trame de ses idées est un fil délié qui s’étend en longueur sans autres dimensions. La Naturé, au contraire, ne fait pas un seul pas qui ne soit en tout sens : en marchant en avant, elle s'étend à côté et s'élève au-dessus; elle parcourt et remplit à la fois les trois dimensions ; et tandis que l’homme n'atteint qu’un point , elle arrive au solide, en embrasse le volume et pénètre la masse dans toutes leurs parties. Que font nos Phidias lorsqu'ils donnent une forme à la matière brute ? À force d’art et de temps, ils parviennent à faire une surface qui repré- sente exactement les dehors de l objet qu'ils se sont proposé; chaque point de cette surface qu’ils ont créée leur a coûté mille combinai- sons : leur génie a marché droit sur autant de lignes qu’il y a de traits dans leur figure; le moindre écart l’auroit déformée. Ce marbre si parfait ,-qu’il semble respirer, n’est donc qu'une multitude de points auxquels l'artiste n’est arrivé qu'avec peine et successivement, parce que l'esprit humain ne saisissant à la fois qu'une seule dimension, et nos sens ne Î - Fe DES SINGE6 35 s Éincot qu'aux surfaces ; nous ne pou- vons pénétrer la matière et ne savons que l'effleurer : la Nature, au contraire, sait la brasser , et la remuer à fond : elle produit ses formes par des actes presque instantanés ; elle les développe en les étendant à la fois dans les trois dimensions ; en même temps. que son mouvement atteint à la surface, les forces pénétrantes dont elle est animée opèrent à l’intérieur ; chaque molécule est pénétrée ; le plus petit atome, dès qu'elle veut l’employer, est forcé d’obéir : elle agit donc en tout sens ; elle travaille en avant, enarrière , en bas, en haut, à droite, à gauche, de tous côtés à la fois, et par conséquent elle embrasse non seulement la surface, mais le volume, la masse et le solide entier dans toutes ses parties. Aussi quelle différence dans le pro- duit ! quelle comparaison delastatueau corps organisé ! mais aussi quelle inégalité dans la puissance ! quelle disproportion dans les ins- trumens ! L'homme ne peut employer que la force qu’il a; borné à une petite quantité de mouvemens qu'il ne peut communiquer que par la voie de l'impulsion , il ne peut agir que sur les surfaces, puisqu’en général la Fo ! HS D 34. : NOMENICENEERE L force d’impulsion ne se transmet que par le « contact des superficies ‘ ilne voit, il ne touche donc que la surface des corps ; et lorsque, pour tâcher de les mieux connoitre, il les ouvre, les divise et les sépare , il ne voit et ne touche encore que des surfaces : pour pé- nétrer l'interieur , il lui faudroit une partie de cette force qui agit sur la masse, qui fait la pesanteur, et qui est le principal instru ment de la Nature. Si l’homme pouvoit dis- poser de cette force penétrante comme il dis-. pose de celle d’impulsion , si seuleinent 1l avoit un sens qui y füt relatif, il verroit le fond de la matière ; il pourroit l’arranger en petit comme la Nature la travaille en grand. C’est donc faute d’instrumens que l’art de Vhomme ne peut approcher de celui de la Nature; ses figures, ses reliefs, ses tableaux, ses dessins . ne sont que des surfaces ou des imilations de surfaces, parce que les images qu'il reçoit par ses sens sont toutes superfi- cielles , et qu'il n’a nul moyen de leur don- ‘mer du corps. | Ce qui est vrai pour les arts l’estaussi pour les sciences ; seulement elles sont moins bor- nées, parce que l'esprit est leur seul instru » Do SINGES 66 Le . ment, parce que dans les arts 1l est subor- donné aux sens, et que dans les sciences il leur commande, d'autant qu'il s’agit de con- noitre et non pas d'operer, de comparer et non pas d’imiter. Or l'esprit, quoique res— serré par les sens, quoique souvent abusé par leurs faux rapports, n’en est ni moins pur ni moins actif : l’homme qui a voulu savoir a commence par les rectifier, par dé- montrer leurs erreurs ; il les a traités comme des organes mécaniques , des instrumens qu’il faut mettre en expérience pour les vé- riñier et juger de leurs effets. Marchant en- suite la balance à la main et le compas de l'autre , il a mesuré et Le temps et l’espace; 1l a reconnu tous les dehors de la Nature, et, ne pouvant en pénétrer l’intérieur par les sens , il la deviné par comparaison ct jugé par analogie : il a trouvé qu'il exisloit dans la matière une force génerale, differente de celle d'impulsion , une force qui ne tombe point sous nos sens, el dont par conséquent mous me pouvons disposer , mais que la Na- ture emploie comme sou agent universel : il a démontré que cette force appartenoit à toute matière également, c’est-a-dire , pro- t DRE MP AVES oh ei ME, he ÿ LA RAA NES ki 1 PAT a 2 RAT HS 2 SALE LE A TE AE à FUN 36 | NOMENCLATURE | _portionnellement à sa masse ou quantité 4 ( réelle; que cette force, ou plutôt son action, s'étendoit à des distances immenses, en dé— croissant comme les espaces augmentent. En- suite tournant ses vues sur les êtres vivans, al a vu que la chaleur étoit une autre force nécessaire à leur production ; que la lumière étoit une matière vive, douée d’une élasti- cité et d’une activité sans bornes; que la for- mation et le développement des êtres organi- sés se font par le concours de toutes ces forces réunies ; que l’extension , l'accroissement des corps vivans ou végetans suit exactement les lois de la force attractive , et s’opère en effet en augmentant à la fois dans les trois dimen- sions ; qu'un moule une fois formé doit, par ces mêmes lois d’affinité, en produire d’autres tout semblables, et ceux-ci d’autres encore , sans aucune altération de la forme primitive. Combinant ensuite ces caractères communs, ces attributs égaux de la Nature vivante et vésétante, il a reconnu qu'il exis- toit et dans l’une et dans l’autre un fonds inépuisable et toujours réversible de subs- tance organique et vivante; substance aussi réelle, aussi durable que la matière brute ; ‘ a ‘DES SINGES. LL IP Ut substance permanente à jamais dans son état de vie comme l’autre dans son état de mort; substance universellement répandue , qui, passant des végétaux aux animaux par la voie de la nutrition, retournant des animaux aux végétaux par celle de la putréfaction , circule . incessamment pour animer les êtres. Il \a vu que ces molécules organiques vivantes exis— toient dans tous les corps organisés, qu’elles y étoient combinées en plus ou moins grande quantité avec la matière morte, plus abon- dantes dans les animaux où tout est plein de vie, plus rares dans les végétaux où la mort domine et le vivant paroît éteint, où l'organique surchargé par le brut n’a plus ai mouvement progressif, ni sentiment, ni chaleur, ni vie, et ne se manifeste que par le développement et la reproduction ; et réflé- chissant sur la manière dont l’un et l’autre s’opérent , il a reconnu que chaque être vi- vaut est un moule auquel s’assimilent Les substances dont il se nourrit ; que c’est par cette assimilation que se fait l'accroissement du corps; que son développement n’est pas une simple augmentation du volume, mais . aneextension dans toutes les dimensions, une. Quadrupèdes, N IX. 4 We : F \4 38 NOMENCLATURE - pénétration de matière nouvelle dans toutes les parties de la masse ; que ces parties aug— mentant proportionnellement au tout, et le tout proportionnellement aux parties, la forme se conserve et demeure toujours la même jusqu'à son développement entier ; qu’enfin le corps ayant acquis toute son éten- due, la même matière jusqu'alors employée à son accroissement est dès lors renvoyée, comme superflue , de toutes les parties aux- quelles -elle s’étoit assimilée , et qu’en se réunissant dans un point commun, elle ÿ forme un nouvel être semblable au premier, qui n’en diffère que du petit au grand, et qui a'a besoin, pour le représenter,que d'atteindre aux mêmes dimensions en se développant à son tour par la même voie de la nutrition. Il a reconnu que l’homme, le quadrupède, le cétacé, l'oiseau , le reptile, l’insecte ,: l'arbre, la plante, l'herbe, se nourrissent, : se développent et se reproduisent par cette: même loi, ‘et que si la manière dont s’exé=: cutent leur nutrition et leur génération pa- roît si différente, c’est que, quoique depen: : dante d’une cause générale et commune , elle: me peut s'exercer en particulier que d’uue CS PARA rt DES SINGES 39 façon relative à la forme de chaque espèce d'êtres; et, chemin faisant (car il a fallu des siècles à l'esprit humain pour arriver à ces grandes vérités ; desquelles toutes les autres dépendent), iln’a cessé decomparer les êtres; il leur a donné des noms particuliers pour les distinguer les uns des autres, et des noms généraux pour les réunir sous ‘un même point de vue: prenant son corps pour le mo- dule physique de tous les êtres vivans, et les ayant mesurés, sondés , comparés dans toutes leurs parties, il a vu que la formé de tout ce qui respire est à peu près la mème; qu'en disséquant le singe on pouvoit donner l’ana= tomie de l’homme ; qu'en prenant un autre animal, on trouvoit toujours le même fond d'organisation, les mêmes sens , les mèmes viscères, les mêmes os, la méme chair, le mème mouvement dans les fluides , lé même jeu, la même äâction dans les solides : il a trouvé dans tous un cœur, des veinés et des artères ; dans tous, les mêmes organes de circulation, de respiration, de digestion; de nutrition, d’excrétion; dans tous, üne char- pente solide, composée des mêmes pièces à peu près assemblées de la même manière : et A PDA PSN AE ONE : ll p - V : 7% 1 - 40 (NOMENCLATURE ce plan, toujours le même, toujours suivi de l’homme au singe, du singe aux quadru- pèdes, des! quadrupèdes aux cétacés , aux oiseaux, aux poissons, aux reptiles; ceplan, dis-je, bien saisi par l’esprit humain, est un exemplaire fidèle de la Nature vivante, et la vue la plus simple et la plus générale sous laquelle on: puisse la considérer : et lorsqu'on veut l’étendre et passer de ce qui » “vit à ce qui végète, on voit ce plan, qui d’a- bord n’avoit varié que par nuances, se deé- former par degrés des reptiles aux insectes, des insectes aux vers, des vers aux zoophytes, des zoophytes aux plantes, et, quoiqu'altéré dans toutes ses parties extérieures, conser- ver néanmoins le mème fond, le même ca- ractère , dont les traits principaux sont la autrition , le développement et la reproduc- tion ; traits généraux et communs à toute substance organisée: traits éternels et divins que le temps , loin d’effacer ou de détruire, ne fait que renouveler et rendre plus évi- dens. Si de ce grand tableau. des rene dans lequel l'univers vivant se présente comme ne faisant qu'une même famille, n, id t "0 DES SINGES. © . 4r nous passons à celui des différences, où chaque espèce réclame june place isolée et doit avoir son portrait à part, on reconnoitra qu’à l’ex- ception de quelques espèces majeures, telles que l'éléphant, le rhinocéros, l’hippopo— tame, le tigre , le lion, qui doivent avoir leur cadre, tous les autres semblent se réu- nir avec leurs voisins et former des groupes de similitudes dégradées, des genres que nos nomenclateurs ont présentés par un lacis de figures dont les unes se tiennent par les pieds, les autres par les dents ; par les cornes , par le poil, et pard'autres rapports encore plus petits ; et. ceux. même dont la forme: nous paroit la plus: parfaite, c’est-à-dire, la plus approchante-delæ nôtre; les singes, se pré- sentent ensemble et demandent déja des yeux attentifs pour être distingués les uns des autres , parce que c’estimoins à la forme qu’à Ja grandeur qu'est attaché le privilége de l’es- pèce isolée, et quel’homme lui-même; quoi- que d’espèce unique , infiniment différente de toutes celles des animaux, n’étant que d’une grandeur médiocre, ést moins.isolé, et a plus de voisins qué les grands ani maux. On verra dans l’histoire de l’orans- 4 ë 4 * X ” W 1 Hu ; "" Mr LEE A ie FR ù C \ Ÿ ay # NAT ddl A (NOMENCLATURE FT | _ outang, que si l’on ne faisoit attention qu'à la figure, on pourroit également regarder A cet animal comme le premier des singes ow le dernier des hommes , parce qu’à l'excep- tion de l’ame, ilme lui mânque rien de tout cé que nous avons. et parce qu’il diffère moins de l’homme pour le corps qu'il ne dif- fère des autres animaux auxquels on a donné le même nom de singes. | } . L'ame, la pensée,, la parole ; ne Laden donc pas de la forme ow:de l’organisation: du corps ; rien ne prouve mieux que.c'est un don particulier et fait à l’homme seul , puis- que l’orang-outang, qui weparle nine pense a néanmoins lecorps , les membres ,lessens, le cerveau et la langne entièrement sem blables à l’homme; puisqu'il: peut faire ow contrefaire tous les mouvemens, toutes les actions humaines , et que cependant 1k ne fait aucun acte de l’homme. C'est peut-être faute d'éducation ; c’est encore faute d'équité dans votre jugement. Vous comparez, dira t-on , fort injustement le singé des bois avec l’homme des villes; c’est à côté de l’homme sauvage, de l’homme auquel l'éducation n’a rien transmis, qu’il faut le placer pour les TE > » PDT ee = £ + SEE J Ke" | h: on ÉUDES SINGIHS.: 7 45. juger l’un et l’autre : et a-t-on une idée juste de l’homme dans l’état de pure nature? la tête couverte de cheveux hérissés ou d’une lâine crépue; la face voilée par une longue barbe, surmontée de deux croissans de porls “encore plus grossiers, qui, par leur largeut et leur saillie, raccourcissent le front et lui font perdre son caractère auguste, et non seulement mettent les yeux dans l’ombré, mais les enfoncent et les arrondissent comme ceux .des animaux ; les lèvres épaisses et avancées; letnez applati; le regard stupide ou farouche #:les oreilles, le. corps et les membres, velus ; la peau dure comme un cuir-noir où tanné; les ongles longs, épais et croclius; une semelle calleuse, en forme de corne ; sous la plante des pieds; et pour attributs du sexe, des mamelles longues et molles, la peau du ventre pendante jusqué sur les genoux; les me se vautrant dans Vorduré et se traînant à quatre, le père et la mère,assis sur leurs talons, toushideux, tous couverts d’une crasse empestée. Et cette esquisse tirée d’après le sauvage hottentot, est encore un portrait flatté; car il y a plus loin de l’homme daus l’état de pure naturë , 4 NOMENCLATURE à l'Hottentot , que de l'Hottentot: à nous : : chargez donc encore le tableau siVous voulez comparer le singe à l’homme; ajoutez-y les rapports à’ organisation, les;convenances de tempérament, l'appétit Véhément des singes me mâles pour les femmes, la même conforma- tion dans les parties génitales des deuxisexes, l'écoulement périodique dans les femelles, et les mélanges forcés ou volontaires des mé= gresses aux singes, dont le produit est rentré dans l’une ou l’autre espèce; et voyez, sup- _ posé qu'elles ne soient pas la même, com- ‘bien l'intervalle qui les M jé est difhicile à saisir. TO Je l'avoue, si l’on ne deb ; juger que-par la forme, l’espèce du singe pourroitêtre prise pour une _yariété dans l’espèce humaine’: Je Créateur n’a pas voulu faire pour le corps de l’homme un modèle absolument différent de celui de l’animal; il a compris ‘sa forme, comme celle de tous les animaux, dans un plan général : mais en mêmetemps qu'il lui a départi cette forme matérielle semblable à celle du singe, il a pénétré ce corps animal de son souffle divin. S'il eût fait la même faveur, je ne dis pas au singe, mais à l'espèce cd * DES SINGES. 45 la plus vile, à l'animal qui nous paroît le plus mal organisé, cette espèce seroit bientôt devenue la rivale de l’homme; vivifiée par l'esprit, elle eût primé sur les autres, elle eût pensé, elle eût parlé. Quelque /ressem— blance qu’il yait donc entre l’Hottentot et le singe, l'intervalle qui les sépare estimmense, puisqu’à l’intérieur il est rempli par la pen- sée et au dehoïs par la parole. Qui pourra jamais dire en quoi l’organisa- tion d’un imbécille diffère de celle d’un autre homme? le defaut est certainement dans les organes matériels, puisque l’imbécille a son ame comme un autre:or, puisque d'homme à homme, où tout est entièrement conforme et parfaitement semblable, une différence si petite qu'on ne peut la saisir, sufhit pour détruire la pensée ou l'empêcher de naître, doit-on s'étonner qu'elle ne soit jamais née dans le singe, qui n’en a pas le principe ? L’ame en ‘général a son action propre et indépendante de la matière : mais comme il a plu à son divin auteur de l’unir avec le corps , l'exercice de ses actes particuliers dé- pend de la constitution des organes maté xiels; et cette dépendance est non seulement { à eut je dt 6: NOMENCLATURE prouvée par l'exemple de l’imbécille, mais mème démontrée par ceux du malade en dé- lire, de l’homme en santé qui dort, de l'en fant nouveau né qui ne pense pas encore; et du vieillard décrépit qui ne pense plus; il : semble même que l’effet principal de l’édu- cation soit moins d'instruire l’ame ou de perfectionner ses opérations spirituelles, que de modifier les organes matériels, et de leur procurer l’état le plus favorable à l'exercice du principe pensant. Or il y a deux éduca+ ‘ tions qui me paroissent devoir être soigneu-— sement distinguées , parce que leurs produits sont fort differens : l'éducation de l'individu; qui est commune à l’ homme etauxanimaux; et l'éducation de l'espèce, qui n’appartienñt qu'à l'homme. Un jeune animal, tant par l'incitation que par l'exemple, apprend en quelqires semaines d'âge à faire tout ce que ses pêre et mère font : il faut des années à l'enfant, parce qu’en naissant il est sans comparaison beaucoup moins avancé, moins fort et moins formé que ne le sont les petits animaux ; il l’est mème si peu, que dans ce premier temps il est nul pour l'esprit relati= vement à ce qu'il doit être un jour. L'enfant ab Mois VA ON \ A ? DES SINGES 47 est donc beaucoup plus lent que l’animal à recevoir l'éducation individuelle : mais par cette raison même il devient susceptible de celle de l'espèce; les secours multipliés, les soins continuels qu’exige pendantlong-temps. _son'état de foiblesse, entretiennent, aug mentent l'attachement des père et mère, _et en soignant le corps ils cultivent l'esprit; le temps qu'il faut au premier pour se forti- fier, tourne au profit du second. Le commun des animaux est plus avancé pour les facultés du corps à deux mois, que l'enfant ne peut l'être à deux ans : il y a donc douze fois plus de temps employé à sa première éducation, sans compter les fruits de celle quisuit, sans considérer que les animaux se détachent de leurs petits dès qu’ils les*voient en état de se pourvoir d'eux-mêmes; que dès lors ils se séparent et bientôt ne se connoissent plus, en sorte que tout attachement, toute éduca- tion, cessent de très-bonne heure, et dès le moment où les secours ne sont plus néces- saires : or ce temps d'éducation étant si court, le produit ne peut en être que très-petit, et il est même étonnant que les animaux ac quièrent en deux mois tout ce qui leur est AE TO RONNNRNER & NOMENCLATURE jh UN nécessaire pour l'usage du reste de la vie: et si nous supposions qu'un enfant, dans ce … _ même petit temps, devint assez formé, assez fort de corps, pour quitter ses parens et s’en séparer sans besoin, sans retour, y auroitl une différence apparente et sensible entre cet enfant et l'animal? quelque spirituels que fussent les parens, auroient-ils pu, dans ce court espace de temps, préparer, modifier ses organes , etétablir la moindre communi- cation de pensées entre leur ame et la sienne? pourroient-ils éveiller sa mémbire, ni la tou- cher par des actes assez souvent réitérés pour y faire impression ? pourroient-ils même exercer ou dégourdir l’organe de la parole? H faut, avant que l’enfant prononce un seul mot, que son oreille soit mille et mille fois - fra ppée du même son ; et avant qu’il ne puisse l'appliquer et le prononcer à propos, il faut encore mille et mille fois lui présenter la même combinaison du mot et de l’objet au-! quel il a rapport : l'éducation, qui seule peut développer son ame, veut donc être sui- vie long-lemps et toujours soutenue; si elle. cessoit, je ne dis pas à deux mois, comme celle des animaux, mais même à un an d'âge, NICE S SENEES. | | 49 lame de l'enfant qui n’auroit rien reçu seroit sans exercice, et, faute de mouvement com- muniqué, demeureroit inactive comme celle de l’imbécille, à laquelle le défaut des or- ganes empêche que rien ne soit transmis; et à plus forte raison, si l'enfant étoit né dans ” Vétat de pure nature, s’il n’avoit pur insti- tuteur que sa mère hottentote, et qu’à deux mois d'âge il fût assez formé .de corps pour se passer de ses soins et s’en séparer pour toujours, cet enfant ne seroit-il pas au-des- sous de l’imbécille, et, quant à l’extérieur, tout-à-fait de pair avec les animaux? Mais dans ce même état de nature, la première éducation , l'éducation de nécessité, exige autant de temps que dans l’état civil, parce que dans tous deux l'enfant est également foible , également lent à croître; que par conséquent 1l a besoin de secours pendant un temps égal; qu'enfin il périroit s’il étoit «abandonné avant l’âge de trois ans. Or cette © habitude nécessaire, continuelle et commune entre la mère et l'enfant pendant un si long. temps, suffit pour qu’elle:lui communique tout ce qu'elle posséde ; et quand on voudroit supposer. faussement que celte mère dans 9 … fo NOMENCLATURE l'état de nature ne possède rien, pas même la parole, cette longue habitude âvec son enfant ne suffiroit-elle pas pour faire naître une langue? Ainsi cet état de puremature où Jon suppose l’homme sans pensée, sans pa- role, est un état idéal, imaginaire, qui n'a jamais existé; la nécessité de la longue ha- bitude des parens à l’enfant produit la so- .ciété au milieu du désert ; la famille s’entend et par signes et par sons, et ce premier rayon d'intelligence, entretenu, cultivé, commu niqué, a fait ensuite éclore tous les germes de la pensée : comme l'habitude n’a pu s'exercer, se soutenir si long-temps sans pro- duire des signes mutuels et des sons réci- proques, ces signes où ces sons, toujours ré pétés et gravés peu à peu dans la mémoire de l'enfant, deviennent des expressions cons- tantes; quelque courte qu’en soit la liste, c'est une langue qui deviendra bientôt plus étendue, si la famille augmente, et qui tou- jours suivra dans sa marche tous les progrès de la société. Dès qu’elle commence à se for- mer, l'éducation de l'enfant n'est plus une éducation purementindividuelle, puisque ses parçus lui communiquent non seulement ce ee A LU | | ; A di DES SINGES. 1 5e qu’ils tiennent de la Nature, mais encore ce qu'ils ont reçu de leurs aïeux et de la so+ ciété dont ils font partie : ce n’est plus uüé communication faite par des individus isolés, qui, comme daus les animaux, se borneroit à transmettre leurs simples facultés; c’est une institution à laquelle l’espèce entière a part, et dont le produit fait la base et Ie lien de la société. Parmi les animaux même, quoique tous dépourvus du principe pensant, ceux dont l'éducation est la plus longue sont aussi ceux qui paroissent avoir le plus d'intelligence : : l'éléphant, qui de tous est Le plus long-temps à croître, et qui a besoin des secours de sa mère pendant toute la première année, est aussi le plus intelligent de tous; le cochon d'Inde, auquel il ne faut que trois semaines d'âge pour prendre tout son accroissément et se trouver en état d'engendrer, est peut- être par cette seule ‘raison l’un des plus stu- pides; et à l'égard du singe, dont il s’agit ici de décider la nature, quelque ressem— blant qu’il soit à l’homme, il a néanmoins une si forte teïture d’animalité, qu’elle se reconnoit dès le moment de la naissance ; Ba NOMENCLATURE car il est à proportion plus fort et plus formé que l’enfant, il croit beaucoup plus vite, les secours de la mère ne lui sont nécessaires que pendant les premiers mois, il ne reçoit qu'une éducation purement individuelle, eë par conséquent aussi stérile que celle des autres animaux. Il est donc animal, et ralehé sa ressem- blance à l’homme, bien loin d’être le second dans notre espece, il n'est pas le premier dans l’ordre des animaux, puisqu'il n’est pas le plus intelligent : c’est uniquement sur ce rapport de ressemblance éorporelle qu’est appuyé le préjugé de la grande opinion qu'on s'est formée des facultés du singe : il nous ressemble, a-t‘ou dit, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur ; il doit donc non seulement nous imiter, mais faire encore de lui-même tout ce que nous faisons. On vient de voir que toutes les actions qu'on doit appeler Zu maines, sont relatives à.la société; qu’elles dépendent d’abord de l’ame, et ensuite de l'éducation, dont le principe physique est la nécessité de la longue habitude des pa- reus à l'enfant; que dans lesinge,cette habi- tude est fort courte; qu’il ne reçoit, comme DES SINGES: \ 153 les'autres animaux; qu'une éducation pure- - ment individuelle ; et qu’il n’est pas même susceptible de celle de l’espèce; par consé- quent , il ne peut rien faire de tout ce que _ l'homme fait, puisqu'aucune de ses actions n’a le même principe nila même fin. Et à l'égard de limitation , qui paroît être le ca- ractère le plus marqué, l’attribut le plus “frappant dé l'espèce du singe ,:et que le vul- gaire lui accorde comme un talent unique, il faut, avant de décider, examiner si cette imitation est libre ou forcée. Le singe nous ‘imite-t-il parce qu’il le veut, ou bien parce ‘que sans le vouloir 1l le peut? Jen appelle “sur céla/volontiers'à tous ceux: qui ont ob- servé cet animal sans prévention, et je suis convaincu qu'ils diront avec moi qu'il n’y a rien de libre, rienide volontaire, dans cette ‘imitation; le singé ayant des bras et des mains ; s’en sert comme nous, mais sans - songer à nous; la similitude des membres ét des organes produit nécessairement des mou- vemens et quelquefois même des suites de mouvemens qui ressemblent aux nôtres : étant conformé comme l’homme, le singe ne peut que se mouvoir comme lui; mais se à 4 * NOMENCLATURE mouvoir de même:n’esl pas agirpour imiter. Qu'on doune à deux corps bruts la même impulsion ; qu’on construise deux pendules, deux machines pareilles, elles se mouvront de mème, et l’on auroit tort de dire que cés corps bruts ou ces machines ne:se meüvent ainsi que pour s’imiter. Il en est dé même du singe relativement au corps de l’homime; ce sont deux machines construites, organi- sées de même, qui par nécessité de nature se meuvent à très-peu près de la même façon: néanmoins parité n'est pas imitation; l’une git dans la matière, et l’autre n’existe que par l'esprit: l’imitation suppose le: dessein d’imiter; le-singe est incapable de former ce dessein, qui demande une suite de pensées, et par cette raison l'homme peut, s’ le veut, imiter le singe , et le singe ne peut pas même vouloir imiter l’homme. Et cette parité, qui n’est que le physique de limitation , n’est pas aussi complète ici que la similitude, dont cependant elle émane comme effet immédiat. Le singe ressemble plus à l’homme par le corps et les membres que par l’usage qu’il en fait : en l’observant avec quelque attention ,'on s'apperceyra aisé Fe MODES SENGES.S 7 55. ment que tous ses mouvemens sont brusques, ‘intermittens , précipités , etquepour les com: parer à ceux de l'homme, il faudroit leur supposer une autre échelle, ou plutôt un mo- düle différent: Toutes les actions du singe tiennent de son éducation, qui est purement animale : : elles nous paroissent ridicules , inconséquentes , extravagantes, parce que nous nous trompons d'échelle en les rappor- tant à nous, et que l'unité qui doit leur. servir de mesure est très-différente de la nôtre. Comme sa nature est vive, son tem pérament chaud , son naturelpétulant, qu’au- cune de sés affections n’a été miligée par l'éducation, toutes ses habitudes sont exces- sives, ét ressemblent beaucoup plus aux mou- vemens d’un maniaque qu'aux'actions d’un homme, où même d’un animal tranquille. C’est par la même raison qué nous:le trou vons indocile , et qu’il reçoit difficilement les habitudes qu’on voudroit luitransmettre: il est insensible aux caresses, et n’obéit qu’au châtiment; on peut le tenir en captivité, mais non pas en domeésticité; toujours triste ou revêche, toujours répugnant, grimacçant, on le domte plutôt qu'on ne Le prive: aussi 6 NOMENCLATURE ! f NiRe # ÿ NAT { res \ Ÿ JAUN RUN l'espèce n’a jamais été domestique nulle part et par ce rapport il est plus éloigné de l’homme que la plupart dés animaux: car la docilité suppdse quelque analogie entre celui qui donine.et celui qui reçôit; c’est une qua- lité relative qui ne peut être exercée que lorsqu'il se trouve des deux‘parts un.certain ee A : Ai nombre de facultés communes, qui ne dif- - fèrent-entre elles que parce qu’elles sont actives dans le maître et passives dâns le sujet, Or le passif du singe-a moins de rap- port avec l'actif de l’homme que le passif du chien ou de l'éléphant, qu’il suffit de:bien traiter pour leur communiquer .les', senti- mens doux et même délicatsde l'attachement fidèle , de l’obéissance volontaire, du service gratuit et du dévouement sans réserve. Le singe est donc plus loin de l’homme que. la, plupart des autres animaux par lés qualités relatives; il en diffère aussi beau— coup par le tempérament. L'homme peut habiter tous les climats; 1l vit, il multiplie dans ceux du Nord et dans ceux du Midi: le singe a de la peine à vivre dans les con- ‘trées tempérées, et ne peut multiplier que dans les pays Les plus chauds. Cette différence ê DES SINGES. 57 dans le tempérament en suppose d’autres dans l’organisation, qui, quoique cachées, n’en sont pas moins réelles; elle doit aussi influer beaucoup sur le naturel : l'excès de chaleur qui est nécessaire à la pleine vie de cet animal, rend excessives toutes ses affec— tions, toutes ses qualités ; et il ne faut pas chercher une autre cause à sa pétulance, à sa lubricité et à ses autres passions , qui ioutes nous paroissent aussi violentes que désordonnées. Ainsi ce singe, que les philosophes, avec le vulgaire, ont regardé comme un être dif- icile à définir, dont la nature étoit au moins équivoque et moyenne entre celle de l'homme et celle des animaux, n’est dans la vérité qu'un pur animal, portant à l'extérieur un masque de figure humaine, mais dénué à l'intérieur de la pensée et de tout ce qui fait l’homme ; un animal au-dessous de plu- .sieurs autres par les facultés relatives, et encore essentiellement différent de l'homme par le naturel, par le tempérament, et aussi par la mesure du temps nécessaire à l’édu- cation, à la gestation, à l’accroissement du _ Corps, à la durée e la vi c'es par toutes les habitudes ré les qui € tuent ce qu'on appelle natures ui particulier. HR : f x $ D # « x L 4 f! + 1% 4 4 e. … i i a 14 j j j \ £ , rt PERL __ # LA d FRRTE i ® . cl . (ANR #1 1 « se à 3 443 % 4 mn ds Er 14 34233 * L “ à PE r- Zom 7. A | 1 Pauguer RES LES ORANGSOUTANGS, O U LE PONGO: sr LE JOCKO :. LÀ N OUS présentons ces deux animaux en- semble, parce qu’il se peut qu’ils ne fassent tous deux qu'une seule et même espèce. Ce. sout de tous les singes ceux qui ressemblent le plus à l’homme, ceux qui, par conséquent, sont les plus dignes d’être observés. Nous avons vu le petit orang-outang ou le jocko vivant, et nous en avons conservé les de- pouilles ; mais nous ne pouvons parler du pongo ou grand orang-outang que d’après les relations des voyageurs. Siellesétoient fidèles, 1 Orang-outang, nom de cet animal aux Indes orientales. — Pongo, nom de ce même animal à Lowaudo, province de Congo; kukurlacko dans quelques endroits des Jades orientales. 2 Jocko , enjocko, nom de cet animal à Congo; que nous avous adopté, éo HISTOIRE NATURELLE si souvent elles n’étoient pas obscures, fau- tives , exagérées, nous ne douterions pas qu'il ne fût d’une autre espèce que le jocko, d’une espèce plus parfaite et plus voisine encore de l'espèce de l’homme. Bontius, qui étoit médecin en chef à Batayia, et qui nous . f a . “ L2 LA ’ ® a laissé de bonnes observations sur l’histoire naturelle de cette partie des Indes, dit ex- pressément qu'il a vu avec admiration quel- ques ‘individus de cette espèce marchant debout sur leurs pieds, et entre autres une femelle (dont il donne la figure) qui sembloit avoir de la pudeur, qui se couvroit de sa main à l’aspect des hommes qu’elle ne con- noissoit pas, qui pleuroit, gémissoit et fai- soit les autres actions humaines, de manière qu’il sembloit que rien ne lui manquât quê. la parole. M. Linnæus dit, d’après Kjoep et. quelques autres voyageurs , que cette faculté même ne manque pas à l’orang-outang, qu'il pense, qu'il parle et s'exprime en sifflant ; il l'appelle Aomme nocturne, et en donne én même temps une description, par laquelle il ne seroit guère possible de décider si c’est un. animal ou un homme : seulement on doit. reruarquer que cet être, quel quil soit, n'a, DES ORANGS-OUTANGS. 6x selon lui, que la moitié de la hauteur de l’homme ; ;: et comme Bontius ne fait nulle mention de la grandeur de son orang-ou- tang, on pourroit penser, avec M. Linnæus, que c’est le même : mais alors cet orang-ou- tang de Linnæus et de Bontius ne seroit pas le véritable, qui est de la taille des plus grands hommes. Ce ne seroit pas non plus celui que nous appelons jocéo, et que j'ai vu vivant; car quoiqu'il soit de la taille que M. Linnæus donne au sien , il en diffère néanmoins par tous les autres caractères. Je puis assurer, l'ayant vu plusieurs fois, que non seulement il ne parle ni ne siffle pour s’exprimer, mais même qu'il ne fait rien qu'un chien bien instruit ne pût faire; et d’ailleurs il diffère presque en tout de la des- cription que M. Linnæus donne de |’ oxang— outang , et se rapporte beaucoup mieux à celle du satyrus de ce mème auteur. Je doute donc beaucoup de la vérité de la description de cet homme nocturne; je doute même de son existence, et C “est probablement un nègre blanc, un chacrelas *, que les voyageurs cités * Voÿez ce que nous ayons dit de cette race 6 se 6 HISTOIRE NATURELLE par M. Linnæus auront mal vu et mal dé crit ; car ces chacrelas ont en effet, comme l’homme nocturne de cet auteur ; les cheveux blancs , laineux et frisés, les yeux rouges, la vue foible, etc. : mais ce sont des hommes, et ces hommes ne sifflent pas et ne sont pas des pygmées de trente pouces de hauteur ; ils pensent, parlent et agissent comme les autres hommes, et sont aussi de la même gran deur. En écartant donc cet être mal décrit, en supposant aussi un peu d’exagération dans le récit de Bontius, un peu de préjugé dans ce qu'il raconte de la pudeur de sa femelle orang-outang , il ne nous restera qu’un ani- mal, un singe, dont nous trouvons ailleurs des indications plus précises. Edward Tyson, célèbre anatomiste anglois, qui a fait une très-bonne description tant des parties ex- térieures qu'intérieures de l’orang-dutang, dit qu’il y en a de deux espèces, et que celui qu’il décrit n’est pas si grand que l’autre appelé barris ou baris par les voyageurs, et d'hommes dans notre Discours sur les variétés de Pespèce humaine. NÉE LS PU N Ve td L | cé DES ORANGS-OUTANGS, 63 vulgairement d7i/] par les Anglois. Ce barris _ ou drill est en effet le grand orang - outang des Indes orientales ou le pongo de Guinée; et le pygmée décrit par Tyson est le jocko que nous ayons vu vivant. Le philosophe Gassendi ayant avancé , sur le rapport d’un voyageur nommé Saint- Amand, qu'il y avoit dans l'ile de Java une espèce de créa- ture qui faisoit la nuance entre l’homme et le singe, on n’hésita pas à nier le fait; pour le prouver, Peiresc produisit une lettre d’un M. Noël ( Natalis), médecin, qui demeu- roit en Afrique, par laquelle il assure qu’on trouve en Guinée de très-grands singés appe- lés barris, qui marchent sur deux pieds, qui ont plus de gravité et beaucoup plus d'intel- ligence que tous les autres singes , et qui sont très-ardens pour les femmes. Darcos, et en suite Nieremberg et Dapper, disent à peu près les mêmes choses du barris. Battel l’ap- pelle porpo, et assure « qu’il est, dans toutes «ses proportions , semblable à l’homme ; «seulement qu'il est plus grand, grand, « dit-il, comme un géant; qu’il a la face « comme l’homme, les yeux enfoncés, de « longs cheveux aux côtés de la tête, le ñ 0 pr NE 10e # ét 1 - 64 HISTOIRE N ATURELLE « visage nud et sans poil , aussi-bien que les «oreïlles et les mains, le corps légèrement « velu ; et qu'il ne diffère de l’homme à l’ex- « térieur que par les jambes, parce qu’il n’a « que peu ou qe de mollets ; que cependant Qil marche toujours debout; qu'il dort sur « Les arbres et se construit une hutte, un abri -« contre le soleil et la pluie; qu’il vit de fruit «et ne mange point de chair; qu’il ne peut «parler, quoiqu'il ait plus d’entendement « quelesautresanimaux; que quand les nègres -«< font du feu dans Les bois, ces pongos viennent « s'asseoir autour et se chauffer, mais qu’ils «n’ont pas assez d'esprit pour entretenirle « feu en y mettant du bois; qu’ils vont de « compagnie, et tuent quelquefois des nègres « dans les lieux écartés ; qu’ils attaquent « même l’éléphant, qu’ils le frappent à coups « de bâton et le chassent de leurs bois; qu’on « ne peut prendre ces pongos vivans , parce «qu'ils sont si forts, que dix hommes ne « suffiroient pas pour en domter un seul ; « qu’on ne peut donc attraper que les petits « tout jeunes ;, que la mère les porte mar- « chant debout, et qu’ils se tiennent attachés » à son corps avec les mains et les genoux; 2\ ais De ii #0 | DES ORANGS-OUTANGS. 65 «qu'il y à deux espèces de ces singes très- « ressemblans à l'homme, le pongo, qui èst _«caussi grand et plus gros qu'un homme ,'et « l’enjocko, qui estbeaucoup plus petit ; ete. » C’est de ce passage très-précis que j’ai:tiré les noms de pozso et de jocko: Baitel dit encore que lorsqu'un de ces animaux meurt , les autres couvrent son corps! d'un amas de branches et de feuillages. Purchass ajoute en forme de note, que ;, dans les conversations qu’il avoit eues avec Battel , il avoit appris de lui qu'un pongo turenleva un petitnègre, qui passa un an entier dans la société de ces animaux; quà son retour ce petit mêgre raconta qu’ils ne lui avoient fait aucun mal; que communément ils étoient de la hauteur de l’homme , mais qu’ils sont plus gros:et qu'ils ont à peu près le double du volume d'un homme ordinaire. Jobson assure avoir vu dans les endroits fréquentés par ces ani- maux, une sorte d'habitation composée de branches entrelacées , qui pouvoit servir du moins à les garantir de l’ardeur du soleil, « Les singes de Guinée, dit Bosman , que « l’on appelle szziffen en flamand, sont de « couleur fauve, et deviennent extrêmement 6 66 HISTOIRE NATURELLE « grands; j’en ai vu, ajoute-t-il , un demes « propres yeux quiavoit cinq pieds de haut..s « Ces singes ont une assez vilaine figure, « aussi-bien que ceux d’une seconde espèce « qui leur ressemblent én tout, si ce m’est « que quatre de ceux-ci seroient à peine aussi «gros qu'un de la première espèce... «On peut leur apprendre presque tout ce « que l’on veut ».... Gauthier Schoutendit « que les singes appelés par les Indiens orangs- « outangs, sont presque de la même figure et «de la même grandeur que les hommes, « mais qu'ils ont le dos et les reins tout cou- « verts de poil, sans en avoir néanmoins «au-devant du corps ; que les femelles ont « deux grosses mamelles; que tous ont le « visage rude, le nez plat, même enfoncé, « les oreilles comme les hommes; qu’ils sont _« robustes, agiles, hardis; qu’ils se mettent « en defense contre les hommes armés; qu’ils _« sont passionnés pour lesfemmes; qu'iln’ya « point de sûreté pour.elles à passer dans les « bois, où elles se trouvent tout d'un coup « atlaqueées et violées par ces singes». Dam- pier, Froger et d’autres voyageurs, assurent qu’ils enlèvent de petites filles de huit ou DES ORANGS-OUTANGS. 6; dix ans, qu'ils les emportent au-dessus des arbrés , et qu’on a mille peines à les leur ôter. Nous pouvons ajouter à tous ces téimoi- gnages celui de M. de la Brosse, qui a écrit son voyage à la côte d'Angole en 1758, et dont on nous a communiqué l'extrait. Ce voyageur assure « que les orangs -outangs « qu'il appelle guirmpezés, tâchent de sur- « prendre des négresses ; qu'ils les gardent «avec eux pour en jouir ; qu'ils les nour- «rissent très-bien. J'ai connu, dit-il, à « Lowango une négresse qui étoit restée trois « ans avec: ces animaux. Ils croissent de six « à sept pieds de haut: ils sont d’une force sans « égale ; ils cabanent et se servent de bâtons « pour se défendre ; ils ont la face plate, le «nez camus et épaté, les oreilles plates sans « bourrelet , la peau un peu plus claire que «celle d’un mulâtre , un poil long et clair- « semé dans plusieurs parties du corps, le « ventre extrèmement tendu , les talons plats « et élevés d’un demi-pouce environ par-der- « rière; 1ls marchent sur leurs deux pieds’, «et sur les quatre quand ils en ont la fan- « taisie. Nous en achetämes deux jeunes, «un mäle qui avoit quatorze lunes , et 68 HISTOIRE NATURELLE. «une femelle qui n avoit que douze. lunés . « d'âge, etc. » | “Voilà ce que nous avons trouvé de dis précis et:de plüs certain au-sujet du grand orañg-oufang où pongo : et comme la gran- deur est le seul caractère bien marqué par lequel il diffère du jocko , je persiste à croire qu'ils sont de la même espèce; car il y a ici deux choses possibles : la PES , que le jocko soit une variété constante, c’est-à- dire; une race beaucoup plus petite que cèlle du pongo. A la vérité, ils sont tous deux du même climat , ils vivent de la même façon, et devroient par conséquent se ressembler en tout, puisqu'ils subissent et reçoivent égale- ment les mêmes altérations, les mêmes in- fluences de la terre et du ciel. Mais n'avons- nous pas dans l'espèce humaine un exemple de variété semblable ? Le Lappon et le Fin- landois, sous le même climat, diffèrent entre eux presque autant par la taille, et beaucoup plus pour les autres attributs, que le jocko où petit orang-outang ne diffère du grand. La seconde chose possible, c’est que le jocko | ou petit orang-outang que nous avons vu vivant, celui de Tulpius, celui de Tyson, et 0 \ fa ; CA DES ORANGS-OUTANGS. 69 les autres qu'on a transportés en Europe, n’étoient peut-être tous que de jeunes ani- maux qui n’avoient encore pris qu'une partie de leur accroissement. Celui que j’ai vu avoit près de deux pieds et demi de hauteur ; le sieur Nonfoux , auquel il appartenoit, m’as- sura qu’il n’avoit que deux ans. Ilauroitdonc pu parvenir à plus de cinq pieds de hauteur s’il eût vécu , en supposant son accroissement proportionnel à celui de l’homme. L’orang- outang de Tyson étoit encore plus jeune; car il n’avoit qu'environ deux pieds de hauteur, et ses dents n'étoient pas entièrement for- mées. Celui de Tulpius étoit à peu près de la grandeur de celui que j'ai vu; ilen est de même de celui qui est gravé dans les G/a- nures de M. Edwards. IL est donc très-pro- bable que ces jeunes animaux auroient pris avec l’âge uh accroissement considérable, et que s'ils eussent été en liberté dans leur climat , ils auroient acquis la même hau- teur, les mêmes dimensions que les voya— geurs donnent à leur grand orang-outang. Ainsi nous ne considérerons plus ces deux animaux comme différens entre eux, mais comme ne faisant qu'une seule et même LA k 77 HISTOIRE NATURELLE espèce, en attendant que des contioistanéek tu FUME AA TUE AR ER RER CRIME LI 1 "F } Y “ # plus précises détruisen£ ou confirment. cette | opinion qui nous paroît fondée. … L'orang-outang que j'ai vu marchoit tou- jours debout sur ses deux pieds, même en portant des choses lourdes ; son air étoit assez triste, sa démarche grave, ses mouvemens . mesurés, son naturel doux et très-différent | » dercelui des autres singes ; il n’avoit ni l’im- patience du magot, ni la méchanceté du ba: bouin , ni l’extravagance des guenons. I avoit été, dira-t-on, instruit et bien appris; mais les autres que je viens de citer et que je lui compare, avoient eu de même leur édu= cation. Le signe et la parole suffisoient pour faire agir notre orang-outang ; il falloit le bâton pour le babouin, et le fouet pour tous lesautres, qui n’obéissent guère qu’à la force des coups. J'ai vu eet animal présenter sa main pour reconduire les gens qui venoient le visiter, se promener gravement. avec eux et comme de compagnie; je lai vu s'asseoir à table, déployer sa serviette, s’en essuyer les lèvres, se servir de la cuiller et de la fourchette pour porter à sa bouche, verser lui-même sa boisson dans un verre, le cha- DES ORANGS-OUTANGS. yr quer lorsqu'il y étoit invité, aller prendre une tasse et une soucoupe , l’apporter sur la table , y mettre du sucre, y verser du thé, le laisser refroidir pour le boire, et tout cela | sans autre instigation que les signes ou la parole de son maître, etsouvent de lui-même. 1 ne faisoit du mal à personne, s’approchoit même avec circonspection, et se présentoit comme pour demander des caresses. Il aimoit prodigieusement les bonbons : tout le monde lui en donnoit ; et comme il avoit une toux fréquente et la poitrineattaquée, cette grande quantité de choses sucrées contribua sans doute à abréger sa vie. Il ne vécut à Paris qu’un été,etmourutl’hiversuivant à Londres. 11 mangeoit presque de tout ; seulement il préféroit les fruits mûrs et secs à tous les autres alimens. IL buvoit du vin, maïs en petite quantité; il le laissoit volontiers pour du lait, du thé, ou d'autres liqueurs douces. : Tulpius, qui a donné uñe bonne description avec la figure d’un de ces animaux qu’on avoit présenté vivant à Frédéric -Henri prince d'Orange, en raconte les mêmes choses à peu près que celles que nous avons vues nous-mêmes, et que nous venous de + ÿ È Ce | A AS PL 72 HISTOIRE NATURELLE" rapporter. Mais si l’on veut reconnoître ce: qui appartient en propre à cet animal, et le distinguer de ce qu’il avoit reçu de son maître; si l’on veut séparer sa nature de son éducation, qui en effet lui étoit étrangère, puisqu’au lieu de la tenir de ses père et mère , il l’avoit reçue des hommes, il faut. comparer ces faits dont nous avons été té- moins, avec ceux que nous ont donnes les | voyageurs qui ont vu ces animaux dans leur état de nature, en liberté et en captivité. M. de la Brosse, qui avoit acheté d’un nègre deux petits orangs-outangs qui n’avoient qu'un an d'âge, ne dit pas si le nègre les avoitéduqués ; ilparoïit assurer, au contraire, que c’étoit d'eux-mêmes qu'ils faisoient une grande partie des choses que nous avons rap- portées ci-dessus. « Ces animaux, dit-il, ont « l'instinct de s asseoir à table comme les « hommes ; ils mangent de tout sans distinc- « tion ; ils se servent de couteau, de la cuiller « et de la fourchette pour couper et prendre « ce qu’on leur sert sur l'assiette : ils boivent « du viu et d’autres liqueurs. Nous les por- « times à bord : quand'ils étoient à table, » ils se faisoient entendre des mousses lors- DES ORANGS-OUTANGS. "3 « qu'ils avoient besoin de quelque chose; et « quelquefois quand ces enfans refusoient de «leur donner ce qu'ils demandoient, ils se « mettoient en colère, leur saisissoient les « bras , les mordoient et les abattoient sous «eux...... Le mâle fut malade en rade : il «se faisoitsoisner comme une personne; 1l . « fut même saigné deux fois au bras droit: « toutes les fois qu'il se trouva depuis in- « commode, il montroit son bras pour qu'on « le saignât, comme s’il eût su que cela lui « avoit fait du bien. » Henri Grosse dit « qu’il se trouve de ces « animaux vers le nord de Coromandel, dans «les forêts du domaine du raïa de Carnate: « qu'on en fit présent de deux, l’un mâle, « l’autre femelle, à M. Horne, gouverneur « de Bombay; qu’ils avoient à peine deux « pieds de haut, mais la forme entièrement « humaine; qu’ils marchoient sur leurs deux « pieds, et qu’ils étoient d’un blanc pâle, « sans autres cheveux ni poils qu'aux en= « droits où nous en avons communément ; « que leurs actions étoient très-semblables « pour la plupart aux actions humaines, et « que leur mélancolie faisoit voir qu’ils sen- Quadrupides, V 11. 7 + CAE ENT AE PANNES S Ge À HA 54 HISTOIRE NATURELLE « toient fort bien leur captivilé ; qu’ils fai-, « Soient leur lit avec soin dans la cage dans « laquelle on les avoit envoyés sur le vais- « seau ; que quand on les regardoit, ils ca- « choient avec leurs mains les parties que la « modestie empêche de montrer. La femelle, « ajoute-t-il, mourut de maladie sur le vais- « seau : et le mâle donnant toutes sortes de «signes de douleur, prit tellement à cœur «la mort de sa compagne, qu’il'refusa de «manger , et ne lui survécut pas plus de « deux jours. » François Pyrard rapporte « qu’il se trouve « dans la province de Sierra-Liona une es- « pèce d'animaux appelée baris, qui sont «gros et membrus , lesquels ont une telle «industrie, que si on les nourrit et instruit « de jeunesse, ils servent comme une per- « sonne“ qu’ils marchent d'ordinaire sur les « deux pattes de derrière seulement ; qu’ils « pilent ce qu'on leur donne à piler dans des «mortiers ; qu’ils vont querir de l’eau à «la rivière dans de petites cruches qu’ils « portent toutes pleines sur leur tète; mais « qu'arrivant bientôt à la porte de la maison, « si on ne leur prend bientôt leurs cruches, DES ORANGS-OUTANGS. 975 « ils les laissent tomber; et voyant la cruche « versée et rompue, ils se mettent à crier et « à pleurer ». Le père du Jaric, cité par Nieremberg, dit la même chose, et presque dans les mêmes termes. Le témoignage de Schouten s'accorde avec celui de Pyrard au sujet de l’éducation de ces animaux. «On « en prend, dit-il , avec des lacs; on les ap- « privoise ; on leur apprend à marcher sur « les pieds de derrière, et à se servir des pieds « de devant , qui sont à peu près comme des « mains , pour faire certains ouvrages, et «même ceux du ménage , comme rincer « des verres, donner à boire, tourner la « broche, etc. ». «J'ai vu à Java, dit le Guat, «un singe fort extraordinaire : c’étoit une « femelle ; elle étoit de grande taille, et « marchoit souvent fort droit sur ses pieds « de derrière ; alors ellé cachoit d'une de ses « mains l'endroit de son corps qui distin- « guoit son sexe ; elle avoit le visage sans « autre poil que celui des sourcils , et elle « ressembloit assez en général à ces faces gro- « tesques des femmes hottentotes que j'ai « vues au Cap : elle faisoit tous les jours « proprement son lit, s’y couchoit la tête sur Nr CAEN Dh 6 HISTOIRE NATURELDEE | UN «un oreiller et se couvroit d'une couver- « ture... Quaud elle avoit mal à la tête, elle «se serroit d'un mouchoir, et c'étoit un « plaisir dela voir ainsi coiffée dans son lit, « Je pourrois en raconter diverses autres pe- « tites choses qui paroissentextrèmementsin- « gulières ; mais j'avoue que je ne pouvois pas « admirer cela autant que le faisoit la mul- « titude, parce que n'ignorant pas le dessein « qu’on avoit de porter cet animal en Europe « pour le faire voir , j’avois beaucoup de « penchant à supposer qu'on l’avoit dressé à « la plupart des singeries que le peuple re- « gardoit comme lui étant naturelles : à la « vérité, c'étoit une supposition. Il mourut à « la hauteur du cap de Bonne-Espérance dans «un vaisseau sur lequel j’étois. Il est cer- « tain que la figure de ce singe ressembloit « beaucoup à celle de l’homme, etc. ». Ge- melli Carreri dit en avoir vu un qui seplai- gnoit comme un enfant, qui marchoit sur les deux pieds de derrière, en portant sa natte sous son bras pour se coucher et dor- mir. Ces singes, ajoute-t-il, paroissent avoir plus d'esprit que les hommes, à certdins égards : car, quand ils ne trouvent plus de DES ORANGS-OUTANGS. 57 fruits sur les montagnes , ils vont au bord de la mer, où ils attrapent des crabes, des huîtres et autres choses semblables. Il y a une espèce d'huîtres qu’on appelle faclovo, qui pèsent plusieurs livres et qui sont sou- vent ouvertes sur le rivage ; or le singe craignant que quand il veutles manger, elles ne lui attrapent la patte en se refermant , il _jetle une pierre dans la coquille qui l’em- pêche de se fermer , et ensuite il mange l'huître sans crainte. | « Sur les côtes de la rivière de Gambie, dit « Froger , les singes y sont plus gros et plus « meéchans qu’en aucun endroit de l'Afrique ; « les nègres les craignent, et ils ne peuvent « aller seuls dans la campagne sans courir «risque d’être attaqués par ces animaux, qui « leur présentent un bâton et les obligent à « se battre... Souvent on les a vus porter sur les arbres des enfans de sept à huit ans «qu'on avoit une peine incroyable à leur « Ôter. La plupart des néègres croient que « c'est une nation étrangère qui est venue « s'établir dans leur pays, et que s'ils ne « parlent pas, c’est qu’ils craignent qu'on ne « les oblige à travailler. » Lo) La) La) { n N 4 #7 JPA le , + » ‘ 78 HISTOIRE NATURELLE: «,On se passeroit bien , dit un autre voya- «geur, de voir à Macaçar un aussi grand « nombre de singes, car leur rencontre est «souvent funeste; il faut toujours être bien « armé pour s’en défendre... Îls n’ont point « de queue ; ils se tiennent toujours droits « comme des hommes , et ne vont Jamais que « sur les deux pieds de derrière. » Voilà du moins, à très-peu près, tout ce que les voyageurs les moins crédules et les plus véridiques nous disent de cet animal ; j'ai cru devoir rapporter leurs passages en entier, parce que tout peut paroilre 1mpor— tant dans l’histoire d’uñne bête si ressem— blante à l’homme; et pour qu'ompuisse prononcer avec encore plus de connoissance sur sa nature, nous allons exposer aussi toutes les différences qui éloignent cette es— pèce de l’espèce humaine , et toutes les con- formités qui l’en approchent. Il diffère de l'homme à l'extérieur par le nez qui n’est pas proéminent , par le front qui est trop court, par le menton qui n’est pas releve à la base ; il a les oreilles proportionnellement trop grandes , les yeux trop voisins l’un de l’autre ; l'intervalle entre le nez et la bouche DES ORANGS- OUTANGS. 79 est aussi trop étendu : ce sont-là les seules diffé- reunces de la face de l’orang-outang avec le vi- sage de l’homme. Le corps etles membres dif- fèrent en ce que les cuisses sont relativement trop courtes , les bras trop longs , les pouces trop petits, la paume des mains trop longue et Lrop serrée, les pieds plutôt faits comme des mains que comme des pieds humains : les parties de la génération du mâle ne sont différentes de celles de l’homme qu’en ce qu'il n'y a point de frein au prépuce; les parties de la femelle sont à l'extérieur fort semblables à celles de la femme. À l’intérieur, cette espèce diffère de l’es- pèce humaine par le nombre des côtes ; l'homme n'en a que douze, l’orang-outaug eu à treize : 1l a aussi les vertèbres du cou plus courtes, les os du bassin plus serrés ; les haüches plus plates, les orbites des yeux plus enfoncées ; il n’y a point d’apophyse épineuse à la première vertèbre du cou ; les reins sont plus ronds que ceux de l’homme, et les urelères ont une forme différente, aussi-bien que la vessie et la vésicule du fiel, _quisont plusétroites el plus longues que dans l'homme; toutes les autres parties du corps: 8o HISTOIRE NATURELLE | de la tête et des membres, tant extérieures qu'intérieures, sont si parfaitement sem blables à celles de l’homme, qu’on ne peut les comparer sans admiration, et sans être étonné que d'une conformation si pareille et d'une organisation qui est absolument la même , il n’en résulte pas les mêmes effets. Par exemple, la langue et tous les organes de la voix set les mêmes que dans l’homme, et cependant l’orang-outang ne parle pas; le cerveau est absolument de 1x même forme et de la même proportion, et il ne pense pas : y a-t-il une preuve plus évidente que la ma- tière seule, quoique parfaitement organisée, ne peut produire ni la pensée n1 la parole qui en est le signe, à moins qu'elle ne soit animée par un principe supérieur ? L'homme et l’orang-outang sont les seuls qui aient des fesses et des mollets , et qui par conséquent soient faits pour marcher debout; les seuls qui aient la poitrine large, les épaules appla- ties et les vertèbres conformées l’un comme l'autre; les seuls dont le cerveau , le cœur, les poumons, le foie, la rate, le pancréas, l'estomac , les boyaux, soient absolument pa- reils; les seuls qui aient l’appendice vermi- DES ORANGS-OUTANGS. 8&r culaire au cœcum. Enfin Le bn ressemble plus à l'homme qu'à aucun des animaux , plus même qu'aux babouins et - aux guenons , non seulement par toutes les parties que je viens d'indiquer, mais encore par la largeur du visage, la forme du cräne * des mâchoires , des dents, des autres as de la tête et de la face, par la grosseur des doists et du pouce , par la figure des ongles , par le nombre des vertèbres lombaires et sacrées, par celui des os du coccix, et enfin par la conformité dans les articulations , dans la grandeur et la figure de la rotule, dans celle du sternum , etc. ; en sorte qu’en comparant cet animal ayec ceux qui lui ressemblent le plus , comme avec le magot, le babouin ou la ouenon, il se trouve encore avoir plus de conformité avec. l’homme qu'avec ces ani- maux, dont les espèces cependant RL être si voisines de la sienne, qu ’on les a toutes désignées par le même nom de SINGES + ainsi les Indiens sont excusables de l'avoir associé à l'espèce humaine par le nom d’o- 7ang-outang , homme sauvage , puisqu'il ressemble à l'homme par le corps plus qu’il bi) ne ressemble aux autres singes ou à aucun & HISTOIRE NATURELLE autre animal. Comme quelques uns des faits que nous venons d'exposer, pourroient pa roitre suspécts à ceux qui n'auroient pas vu. cet animal, nous avons cru devoir les ap— puyer de l'autorité de deux célèbres anato- mistes, Tyson *etCowper, qui l'ont ensemble \ L’orang-outang ressemble plus à l’homme qu'aux singes OU aux puenoïge 1°. en ce qu’il a les das des épaules dirigés en bas et ceux des bras diri- gés en haut; 20. par la face, qui est plus semblable à celle de l’homme , étant plus large et plus applatie que celle des singes; 3°. par la figure de l'oreille , qui ressemble plus à celle de l’homme, à l’exception que la partie cartilagineuse est mince comme dans les singes ; 4°. par les doigts, qui sont proportion nellement plus gros que ceux des singes; 5°. en ce qu’il est à tous égards fait pour marcher debout, au lieu que les singes et les guenons ne sont pas con- formés à cette fin ; 6°. en ce qu’il a des fesses plus grosses que tous fé aulres singes ; 7°. en ce qu’il a des mollets aux jambes; 8°. en ce que sa poitrine et: ses épaules sont plus larges que celles des singes ; Y9°. son talon plus long; roc. en ce qu’il a la mem- brane adipeuse placée, comme l’homme, sous la peau ; 110. le péritoine entier, et non percé ou alongé, comme 1l l’est dans les singes; 120. les in- iestins plus longs que dans les singes; 13°. le canal DES ORANGS-OUTANGS. 83 disséqué avec une exactitude scrupuleuse , et qui nous ont donné les résultats des compa- raisons qu’ils ont faites de toutes les parties des intestins de différent diamètre, comme dans l’homme , et non pas égal ou à peu près égal, comme il l’est dans les singes; 14°. en ce que le cœcum a l’appendice vermiculaire comme dans l’homme, tandis que cet appendice vermiculaire manque dans tous les autres singes, et aussi en ce que le com- mencement du colon n’est pas si prolongé qu’il l’est dans les singes ; 15°. en ce que l’insertion du con- duit biliaire et du conduit pancréatique n’ont qu’un seul orifice commun dans l’homme et l’orang-outang, au lieu que ces insertions sont à deux pouces de distance dans les guenons; 16°. en ce que le colon est plus long que dans les singes; r70.6n ce que Je foie n’est pas divisé en lobes, comme dans les singes , mais entier et d’une seule pièce, comme dans l’homme; 160. en ce que les vaisseaux bihaires sont les mêmes que dans l’homme ; 190. la rate la même; 20°. le pancréas le même; 21°. le nombre des lobes du poumon le même; 220. le péricarde attaché au diaphragme comme dans l’homme, et non pas comme 1l l’est dans les singes ou guenons ; 230. le cône du cœur plus émonssé que dans les singes; 24°. en ce qu’il n’a point d’abajoues ou 84 HISTOIRE NATURELLE de son corps avec celui de l’homme. J'ai cri devoir traduire de l’anglois et présenter ici cet article de leurs ouvrages , afin que tout le \ poches au bas des joues , comme les autres singes et guenons ; 25°. en ce qu’il a le cerveau beaucoup plus grand que ne l’ont les singes, et, dans toutes ses- parties, exactement conformé comme le cerveau de l’homme ; 26°. le crâne plus arrondi et du double plus grand que dans les guenons ; 27°. toutes les sutures du crâne semblables à celles de l’hoïnme ; les os appelés ossa triquetra wormiana se trouvent dans la suture lamboïde, ce qui n’est pas dans les autres singes ou guenons; 280. il a l’os cribiforme et le crista galli, ce que les guenons n’ont pas; 290, la selle (se/la equina) comme dans l’homme, au lieu que dans les singes et guenons cette partie est plus élevée et plus proéminente; 300. le processus pterygoides comme dans l’homme; cette partie manque aux singes et guenons; 31°. les os des tempes et les os appelés ossa bregmatis comme dans l’homme; ces os sont d’une forme différente dans les singes et guenons; 329. l’os zygomatique petit, au lieu que dans les singes et guenons vet os est grand ; 330. les dents sont plus semblables à celles 7 de Phomme qu’à celles des autres singes, sur-tout Jes canines et les molares; 340, les apophyses trans- DES ORANGS-OUTANGS. 85 moude puisse mieux juger de la ressemblance presque entière de cet animal avec l’homme. J'observerai seulement, pour une plus grande verses des vertèbres du cou et les sixième et sep tième vertèbres ressemblent plus à celles de Phomme qu’à celles des singes et des guenons ; 35°. les ver- tèbres du cou ne sont pas percées comme dans les singes pour laisser passer les nerfs, elles sont pleines et sans trou dans l’orang-outang comme dans l’homme ; 36°. les vertèbres du dos et leurs apophyses sont comme dans lPhomme; et dans les vertèbres du bas il n’y a que deux -apophyses in- férieures, au lieu qu'il ÿ en a quatre dans les singes ; 37°. il n’y a que cinq vertèbres lombaires comme dans l’homme, au lieu que dans les guenons il y en a six ou sept; 36°. les apophyses épineuses des vertèbres lombaires sont droites comme dans Phomme ; 39°, los sacrum est composé de cinq vertèbres comme dans l’homme, au lieu que dans les singes et guenons il n’est composé que de trois; 40°. le coccix n’a que quatre os, comme dans J’homme, et ces os ne sont pas troués, au lieu que -dans les singes et guenons le coccix est composé d’un plus grand nombre d’os, et ces os sont troués ; 41. dans Porang-outang 1l n’y a que sept vraies côtes (cosiæ veræ), et les extrémités des fausses 8 7 ! 86 HISTOIRE NATURELLE. intelligence de cette note, que les Anglois ne sont pas réduits, comme nous, à un seul | nom pour désigner les singes ; ils ont, comme côtes (nothæ) sont cartilagineuses , et les côtes sont articulées au corps des vertèbres ; dans les singes et guenons il y a huit vraies côtes, et les extrémités des fausses côtes sont osseuses , et leur articu- lation se trouve placée dans l’interstice entre les vertèbres ; 42°, l’os du sternuin dans l’orang-outaug est large comme dans l’homme, ét non pas étroit comme dans les guenons ; 430. les os des quatre doigts sont plus gros qu’ils ne le sont dans Îles singes ; 44°. l'os de la cuisse, soit dans son articula- tion , soit à tous autres égards, est semblable à celui de l’homme; 45°. Ja rotule est ronde et non pas longue, simple et non pas double, comme elle Pest dans les singes ; 46°. le talon, le tarse et le méta- tarse de l’orang-outang sont comme ceux de l’homme; 45°. le doigt du milieu dans le pied n’est pas si long qu’il l’est dans les singes; 480. les muscles obliquus inferior capitis, pyriformis et biceps fe- moris, sont semblables dans l’orang-outang et dans l’homme, tandis qu’ils sont différens daus les singes et guenons, €EICe L’orang-outang diffère de l’homme plus que les 4 , . [e] 2 singes où gueuons : 1°. en & que le pouce est plus L 4 ( L DES ORANGS-OUTANGS. 8; les Grecs, deux noms différens, l’un pour - les singes sans queue, qu'ils appellent ape, et l’autre pour les singes à queue, qu'ils petit à proportion que celui de l’homme, quoique cependant il soit plus gros que celui des autres singes; 2°, en ce que la paume de la main est plus Jongue et plus étroite que dans Phomme ; 30. il dif- fère de l’homme et approche des singes par la lon- gueur des doigts des pieds ; 4°. 1l diffère de l’homme en ce qu’il a le gros doigt des pieds éloigné à peu près comme un pouce, étant plutôt quadrumane, comme les autres singes, que quadrupède ; 50. en ce qu’il a les cuisses plus courtes que homme ; 60. les . bra$ plus longs; 9°. en ce qu’il n’a pas.les bourses pendantes ; 8°. l’épiploon plus ample que dans l’homme; 92. la vésicule du fiel longue et plus étroite; ro°. les reins plus ronds que dans l’homme, et les _uretères différens ; 11°. la vessie plus longues 12°, en ce qu’il n’a point de frein au prépuce; 13°. les os de l’orbite de l’œilirop enfoncés; r4°. en ce qu’il n’a pas les deux cavités au-dessus de la selle du turc ( sella turcica ) ‘comme dans l’homme ; 19°, en ce que les processus mastoïdes et styloïdes sont très-petits et presque nuls; 16° en ce qu’il a les os du nez plats; 19°. 1l diffère de l’homme en se que [es vertèbres du cou sont courtes conime 88 HISTOIRE NATURELLE appellent #onkey. J'ai toujours'traduit lemot monkey par celui de gzenon, et le mot ape par celui de singe ; et ces de que Tyson dans les singes, plates devant et non pas rondes, et que leurs apophyÿses épineuses ne sont pas fourchues comme dans l’homme ; r8°. en ce qu’il n’y a point d’apophyse épineuse dans la première vertèbre du cou ; 19°. il diffère de l’homme en ce qu’il a treize côtes de chaque côté, et que l’homme n’en a que douze ; 20°. en ce que les os des îles sont parfaite- ment semblables à ceux des singes, étant plus longs, plus étroits et moins concaves que dans l’homme; 21°. 1l diffère de l’homme en ce que les muscles suivans se trouvent dans le corps humain et man- quent dans celui de l’orang-outang, savoir, occipi- tales, frontales, dilatatores alarum nast seu ele- - vatores labii superioris , interspinales coll: , glu- iœi minimi, extensor digiiorum pedis brevis et transversalis pedis; 22°. les muscles qui ne pa- voissent pas se trouver dans l’oreng-outang, et qui se lrouvent quelquefois dans l’homme, sont ceux qu’on appelle pyramidales, caro musculosa qua drata; le long tendon et le corps charnu du muscle palmaire, les muscles attollens et retrahens auri» culam ; 23°. les muscles élevateurs des clavicules sont dans l’orang-outang commeldans les singes, et DES ORANGS-OUTANGS. 89 désigne par le mot ape , ne peuvent être que ceux que nous avons appelés le pifhèque et le rragot ; et il y a même toute apparence _que-c’est au magot seul qu’on doit rapporter le nom ape ou singe de la comparaison de T'yson. Je dois observer aussi que cet auteur donne quelques caractères de ressemblance et de différence qui ne sont pas assez fondés : j'ai cru devoir faire sur cela quelques re- marques. On trouvera peut-être que ce de- tail est long; mais il me semble qu’on ne peut pas examiner de trop près un être qui, sous la forme d’un homme, n’est cependant qu un animal. | 1°. Tyson donne comme un cafactère par- ticulier à l’homme et à l’orang-outang, d’a- non pas comme dans l’homme; 24°. les muscles par lesquels l’orang-outang ressemble aux singes et diffère de l’homme, sont les suivans, longus colli, pectoralis, latissimus dorsi, glutœus maximus et medius, psoas mägnus et parvus, iliacus internus et gasteronamius internus ; 25°, il diffère encore de l’homme par la forme des muscles delioïdes, pronator radii teres et extensor pollicis brevis. (Anatomie de l’orang-outang, par Tyson; Lon- dres, 1699; 1n-40.) à 8 » A OA A Re ee es 9o HISTOIRE NATURELLE voir le poil des épaules dirigé en bas, et celui des bras dirigé en haut. IL est vrai que Ja plupart des quadrupèdes ont lé poil de toutes les parties du corps dirigé en bas ou en ar- rière ; mais cela n’est pas sans exception. Le paresseux et Le fourmilier ont le poil des parties antérieures du corps dirigé en arrière, et celui de la croupe et des reins dirigé en avant:ainsi ce caractère n’est pas d’un grand poids dahs la comparaison de cet animal à l'homme. FA | 2°, J'ai aussi retranché dans ma traduction les quatre premières différences, qui, comme celles-ci, sont trop légères ou mal fondées. La première, c’est la différence de la taille; ce caractère est très-incertain et tout-à-fait gratuit, puisque l’auteur dit lui-même que son animal étoit fort jeune : les seconde, troisième et quatrième ne roulent que sur la forme du nez , la quantité du poil , etsur d'autres rapports aussi petits. Il en est de même de plusieurs autresque j’airetranchées; par exemple, du vingt-unième caractère tiré du nombre des dents : il est certain que cet animal et l’homme ont le même nombre de dents , et que s’il n’en avoit que vingt-huit, DES ORANGS-OUTANGS. wr comme le dit l’auteur , c’est qu’il étoit fort jeune , et l’on sait que l’homme dans sa jeu- nesse n'en à pas davantage. | 3°. Le onzième caractère des différences de l'auteur est aussi très-équivoque : les enfans out les bourses fort relevées ; cet animal étant fort jeune ne devoit pas les avoir pen- dantes. | 4°. Le quarante-huitième câractère des ressemblances, et les trente, trente-unième, trente-deuxièine, trente-troisième et trente- quatrième caractères des différences, ne dési- guant que la présence ou la figure de certains muscles qui, dans l’espèce humaine, va- rient pour la plupart d’un individu à l’autre, ne doivent pas être considérées comme des caractères essentiels. | 5°. Toutes les ressemblances et différences tirées de parties trop petites, telles que les apophyses des vertèbres, ou prises de la po- sition de certaines parties, de leur grandeur, cle leur grosseur, ne doivent aussi être consi- dérées que comme des caractères accessoires, en sorte que tout le détail de cette table de - Fyson peut se réduire aux différences et aux ressemblances essentzelles que nous avons indiquées. ie HISTOIRE NATURELLE | . Je crois devoir insister sur quelques caractères plus généraux, dont les uns ont éte omis par Tyson, et les autres mal indi- qués. 1°. L’orang-outang est le seul de tous les singes qui n'ait point d'abajoues, c’est- a-dire , de poches au bas des joues ; touies les guenons , tous les babouins , et mème le inagot et le gibbon, ont ces poches, où ils peuvent garder leurs alimens avant de les avaler : l'orang-outang seul a cette partie du dedans de la bouche faite comme l’homme. 2°. Le gibbon, le magot , tous les babouins et toutes les guenons , à l’exception du douc, ont les fesses plates et des callosites sur ces parties : l’orang-outang est encore le seul qui ait les fesses rentlées et sans callositeés. Le douc les a aussi sans callosités ; mais elles sont plates et velues , en sorte qu’à cet égard le douc fait la nuance entre l’orang-outang et les guenons , comme le gibbon et le magot font cette même nuance à l'égard des aba- joues , et le magot seul à l’égard des dents canines et de l’alongement du museau. 5°. L’orang-outaug est le seul qui ait des mollets ou gras-de-jambes et des fesses char- nues : ce caractère indique quil est de tous } ! DESORANGS-OUTANGS. 3 le mieux conformé pour marcher debout ; seulement , comme les doigts de ses pieds sont fort longs, et que son talon pose plus difficilement à terre que celui de l’homme, il court plus facilement qu’il ne marche, et ilauroit besoin de talons artificiels plus éle- vés que ceux de nos souliers, si l’on vouloit le faire marcher aisément et long-temps. 4°, Quoique l’orang-outang ait treize côtes , et que l’homme n'en ait que douze, cette différencene l’approche pas plus des babouins oudes guenons qu’elle l’éloigne de l’homme, parce que le nombre des côtes varie dans la plupart de ces espèces, et que les uns de ces animaux en ont douze, d'autres onze et d'autres dix , etc. ; en sorte que les seules différences essentielles entre le corps de cet ammal et celui de l’homme se rédui- sent à deux , savoir, la conformation des os du bassin et la conformation des pieds ; ce sont-là les seules parties considérables par lesquelles l’orang-outang ressemble plus aux autres singes qu'il ne ressemble à l’homme. D’après cet exposé, que j'ai fait avec toute l'exactitude dont je suis capable, on voit ce que l'on doit penser de cet animal. S'il y . AU VRP ain ot HISTOIRE NATURELLE ns avoit un degré par lequel on püt descendre - de la nature humaine à celle des animaux, si l'essence de cette nature consistoit en en- tier dans la forme du corps et dépendoit de son organisation , ce singe se trouveroit plus prés de l’homme que d'aucun animal : assis au second rang des êtres , s’il ne pouvoit commander en premier , il feroit au moins sentir aux autres sa supériorité, et s'efforce- roit de ne pas obéir. Si limitation qui semble copier de si près la pensée, en étoit le vrat signe ou l’un des résultats, ce singe se trou=. veroit encore à une plus grande distance des auimaux et plus voisin de l'homme ; mais, comme nous l'avons dit, l’intervalle qui l'en sépare réellement n’en est pas. moins immense , et la ressemblance de la forme, la con formité de l’organisation, lesmouvemens d'imitation qui paroissent résulter de ces similitudes, ni ne le rapprochent de la na- ture de l’homme , ni même ne l’élévent au- dessus de celle des animaux. Caractères distinctifs de cette espèce. L'ORANG-OUTANG n’a point d'aba- = DES ORANGS-OUTANGS. 05 joues , c’est-à-dire , point de poches au-de- dans des joues, point de queue, point de cal- losités sur les fesses; 1l les a renfiées et char- nues : il a toutes les dents, et mème les ca- nines , semblables à celles de l’homme : il a la face plate , nue et basanée; les oreilles, les mains, les pieds, la poitrine, le ventre, aussi nuds : il a des poils sur la tête qui des- cendent en forme de cheveux des deux:côtés des tempes , du poil sur le dos et sur les lombes, mais en petite quantité ; il a cinq ou six pieds de hauteur, et marche toujours droit sur ses deux pieds. Nous n'avons pas élé à portée de vérifier si les femelles sont sujettes, comme les femmes, à l'écoulement périodique; mais nous le présumons, et, par analogie , nous ne pouvons guêre en douter. “ È SE LE PITHÈQUE*. « Er. ya, dit Aristote, des animaux dont la « nature est ambiguë, et tient en partie de « l’homme et en partie du quadrupède, tels «que les pithèques, les kèbes et les cynocé- « phales. Le kèbe est un pithèque avec une « queue. Le cynocéphale est tout semblable « au pithèque : seulement il est plus grand et «plus fort ; ik a le museau avancé, appro= - &chant presque.de celui du dogue, et c'est de «là qu'on a tiré son nom : il est aussi de « mœurs plus féroces , et il a les dents plus « fortes que le pithèque, et plus ressem- « blantes à celles du chien ». D’après ce pas- sage, il est clair que le pithèque et le cyno= céphale indiqués par Aristote n’ont ni l’un ni l’autre de queue, puisqu'il dit que les pi- thèques qui ont une queue s'appellent {ébes, et que le cynocéphale ressemble en tout au \ * Eau jaun, simia. APR ie L. CHR / . HISTOIRE NATURELLE, 7 pithèque, à l’exception du museau qu’il a plus avancé et des dents qu’il a plus grosses. Aristote fait donc mention de deux espèces de singes sans queue, le pithèque et le cyno= céphale, et d’autres singes avec une queue , _qu'il appelle #èbes. Maintenant, pour com- parer ce que nous connoissons avec ce qui étoit connu d'Aristote , nous observerons que nous avons vu trois espèces de singes qui n'ont point de queue , savoir , l’orang - ou- tang , le gibbon et le magot, et qu'aucune de ces trois espèces n'est le pithèque; car les deux premières, c'est-à-dire, l’orang-outang et le gibbon, n’étoient certainement pas connues d’Aristote, puisque ces animaux ne se trouvent que dans les parties méridionales de l’Afrique et des Indes qui n’étoient pas découvertes de son temps, et que d’ailleurs ils ont des caractères très-différens de ceux qu’il donne aù pithèque. Mais la troisième espèce , que nous appelons z2agof, est le cy- nocéphale d’Aristote ; il en a tous les carac- tères ; il n’æpoint de queue ; il a le museau comme un dogue, et les dents canines grosses. et longues : d’ailleurs il se trouve communé- ment dans l’Âsie mineure et dans les autres. 9 #27 PAL v8 HISTOIRE NATURÉLLE provinces de l'Orient qui étoient connues des Grecs. Le pithèque est du mêine pays ; mais nous ne l'avons pas vu : nous ne le connois= sons que par le témoignage des auteurs; et quoique depuis vingt ans que nous recher: chons les singes, celle espèce ne se soit pas rencontrée sous nos yeux, nous ne doutons cependant pas qu’elle n'existe aussi réelléz ment que celle du cynocéphale, Gesner et Jonston ont donné des figures de ce singe pithèque : M. Brisson l’a indiqué comme l'ayaut vu; il le distingue du cynocéphale ou magot , qu'il désigrre aussi comme l'ayant vu, et il confirme ce que dit Aristote, en assurant que ces deuxanimaux se ressemblent à tous égards , à l'exception du museau , qui est court dans le pithèque ou singe propre- ment dit, et alongé dans le cynocéphale. Nous avons dit que l’orang-outang, le pi- thèque , le eibbon et le magot, sont Les seuls animaux auxquels on doivé appliquer le nom générique de singe, parce qu’ils sont les seuls qui n’ont point de queue, et les seuls qui marchent plus volontiers et plus souvenE sur deux pieds que sur quatre. L’orans- outang et le gibbon sont très-différens du ! (YLINPEN " hs 4 er DU PITHEQUELIU Co pithèque et du magot; mais comamnie}! ceux-ci se. ressemblent en tout, à l'exception de la srandeur des mâchoires et de la grosseur des dents canines , ils ont souvent été pris l'un pour l’autre : on les a toujours indiqués par le nom commun de sirzge; et même dans les langues où il y a un nom pour les singes sans queue , et un autre nom pour les singes à queue, on na pas distingué le pithèque du magot ; on les appelle tous deux du niême nom af en allemand , ape en anglois : ce n'est que dans la langue grecque que ces deux animaux ont eu chacun leur nom ; encore le _ mot cyrocéphale ‘est plutôt une dénomina- tion adjective qu’un. substantif propre, et cest par cette raison que nous ne l’avons pee adopté. Il paraît, par les témoignages des anciens, que le pithèque est le plus doux, le plus do- cile de tous les singes qui leur étoient con- nus, et qu'il étoit commun en Asie aussi bien que dans la Libye et dans les autres provinces de l’Afrique qui étoient fréquen- tées par les voyageurs grecs et romains; c’est ce qui me fait présumer qu’on doit rapporter à cette espèce de singe les passages suivans de k CARRE AA) 4 lLf RARE roo HISTOIRE NATURELLE Léon l'Africain et de Marmol : ils disent que les singes à longue queue qu’on voit en Mau- ritanie , et que les Africains appellent 77o#es, viennent du pays des Nègres; mais que les singes sans queue sont naturels etse trouvent en très-srande quantité dans les montagnes de Mauritanie, de Bugie et de Constantine. « Ils ont, dit Marmol , les pieds, les mains, «et, s’il fautainsidire, le visage de l’homme, «avec beaucoup d'esprit et de malice. Ils « viveut d'herbes, de blé ét de toutes sortes «de fruits qu’ils vont en troupes dérober « dans les jardins ou dans les champs : mais «avant que de sortir de leur fort,ilyena «un qui monte sur une éminence, d’où il ñ découvre toute la campagne; et quand il a ne voit paroitre personne, il fait signe aux « autres par un cri pour les faire sortir, et ne « bouge de là tandis qu’ils sont dehors : mais « sitôt qu'il voit venir quelqu'un, il jette de « grands cris, et sautant d'arbre en arbre « tous se sauvent dans les montagnes : c’est «une chose admirable que de les voir fuir ; « car les femelles portent sur leur dos quatre « ou cinq petits, et ne laissent pas avec cela « de faire de grands sauts de branche en WI NE ARR Pa PAM # WF PITÉSOQUE..) 10 . «branche. IL s’en prend quantité par diverses «inventions , quoiqu'ils soient fort fins. « Quand ils deviennent farouches, ils mor- « dent ; mais pour peu qu’on les flatte, ils « s’'apprivoisent aisément. Éls font grand tort «aux fruits et au blé, parce qu'ils ne font « autre Chose que de cueillir, couper et jeter « par terre, soit qu’il soit mûr ounon,eten « perdent beaucoup plus qu’ils n’en mangent «et qu’ils n’en emportent. Ceux qui sont « apprivoisés font des choses incroyables , « imitant l’homme en tout ce qu’ils voient ». Kolbe rapporte les mêmes faits à peu près au sujet des singes du cap de Bonne-Espérance ; mais on voit, par la figure et la description qu'il en donne , que ces singes sont des ba-— bouins qui ont une queue courte, ke museau alongé, les ongles pointus, etc. et qu’ils sont aussi beaucoup plus gros et plus forts que ces. singes de Mauritanie *. On peut donc présu- mer que Kolbe a copié le passage dé Marmol, et appliquéaux babouins du cap les habitudes uaturelles des pithèques de Mauritanie. Le pithèque , le magot, et le babouin que nous avons appelé papion, étoient tous trois * Voyez ci-après l’article du PR or 102 HISTOIRE NATURELLE connus des anciens : aussi ces animaux se trouvent dans l’Asie mineure , en Arabie, dans la haute Égypte et dans toute la partie septentrionale de l’Afrique. On pourroit donc aussi appliquer ce passage de Marmol à tous trois : maïs il est clair qu’il ne convient pas au babouin, puisqu'il y est dit que ces singes n’ont point de queue; et ce qui me fait pre- sumer que ce nest pas du magot, mais du _pithèque, que cet auteur a parlé, c'est que le magot w’est pas aisé à apprivoiser, qu'il ne produit ordinairement que deux petits et non pas quatre ou cinq, comme le dit Mar- mol, au lieu que le pithèque, qui est plus petit, doit en produire davantage; d’ailleurs il est plus doux et plus docile que le magot, qui ne s'apprivoise qu'avec peine et ne, se prive jamais parfaitement. Je me suis con- vaincu par toutes ces raisons que ce n’est point au magot, mais au pithèque, quil faut appliquer ce passage des'auteurs afri- gains. Il en est de même de celui de Ru- bruquis, où il est fait mention des singes du Cathay. Il dit «qu’ils ont en toutes choses la « forme et les façons des hommes... qu’ils «ne sout pas plus hauts qu'une coudée, et DU PITHÈQUE. 103 « tout couverts de poils ; qu'ils habitent dans « des cavernes ; que, pour les prendre, on « y porte des boissons fortes etenivrantes..…. « qu’ils viennent tous ensemble soûter de ce « breuvage, en criant chinchin, dont on leur «a donné le nom de czinchin, et qu'ils « s’enivrent si bien qu’ils s’endorment, en « sorte que les chasseurs les prennent aise- «ment». Ces caractères ne conviennent qu'au pithèque, et poiut du tout au magot. Nous avons eu celui-ci vivant, et nous ne l'avons ; jamais entendu crier chinchin : d’ ail. leurs il a beauconp plus d’une coudée de hau- teur, et ressemble moins à l’homme que ne le dit l’auteur. Nous avons eu les mêmes rai- sons pour appliquer au pithèque, et non point au magot , la figure et l'indication de Prosper Alpin, par laquelle il assure que les pee singes sans queue qu'il a vus en Égypte, s'ap- privoisent plus vite et plus aisément que les autres , qu'ils ont plus d'intelligence et d’in- dustrie, et qu'ils sont aussi plus gais et plus plaisans que tous les autres. Or le magot est d’une grosse et assez grande taille ; 1lestmaus- sade, triste, farouche, et ne s’ apprivoise qu’ à demi. Les caractères que donne ici Prosper en 47 TE 104 HISTOIRE NATURELLE. Alpin à sonsinge sansqueue, ne conviennent donc en aucune manière au magot , et ne peuvent appartenir à un autre animal qu'au pithèque. Caractères distinctifs de cette espèce. LE pithèque n’a point de queue; il n’a point les dents canines plus grandes à pro- portion que celles de l’homme ; il a la face plate, les ongles plais aussi, et arrondis comme ceux de l’homme ; il marche sur ses deux pieds ; 1l a environ une coudée, c’est-à- dire, tout au plus un pied et demi de hau- teur ; son naturel est doux, et on l’appri- voise aisément. Les anciens ont dit que la femelle est sujette à l'écoulement périodique, et l’analogie ue nous permet pas d’en douter. VAIO Li C2" CO: ” À ÿ à L } Le > nn + vi pi Me die de np) 4 Zom FAR 0 LE PETIT GIBBON À daugu A éi LS ee | à ET 2 LE 2 & + À ? RENTE RL rer À sFpon 4iu LD D ON" \ / | | ; gibbon se tient toujours debout , lors mème qu'il marche à quatre pieds, parce que ses bras sont aussi longs que son corps et ses jambes. Nous l'avons vu vivant; il n’a- voit pas trois pieds de hauteur : mais il étoit * Gibbon, c’est le nom sous lequel M. Duplex nous a donné ce singe , qu’il avoit apporté des Indes orientales. J’ai d’abord cru que ce mot étoit imdienÿ mais en faisant des recherches sur la nomenclature des singes, j’ai trouvé dans une note de Daléchamp sur Pline, que Strabon a désigné le cephus par le mot keipon, dont il est probable qu’on a fait gui- . bon, gibbon. Voici le passage de Pline ; avec la uote de Daléchamp : Pompes Magni primum ludi ostenderunt ex Æthiopia quas vocant ce- phos*, quarum pedes posteriores pedibus humanis et cruribus, priores manibus fuere similes : hoc C3. 1 postea Roma non vidit. # (Cephos) Strabo, lib. XV, keipon vocat , esseque tradit facie satyro similem. (Dal. in Plin. Hist. nat, lib. VIII, cap. 19.) Il me paroïît que le cebus des Grecs et le cephus de Pline, qu'on doit prononcer kebus et Kkephus, pourroient bien venir originairement de Koph ou kophin, qui en hébreu et en chaldéen est le nom du singe. NE DR M j L 106 HISTOIRE NATURELLE jeune, il étoit en captivité; ainsi l’on doit présumer qu'il n'avoit pas encore acquis toutes ses dimensions, et que , dans l’état de nature , lorsqu'il est adulte, il parvient au moins à quatre pieds de hauteur. Il n’a nulle apparence de queue; mais le caractère qui le. distingue évidemment des quures singes, c’est cette prodigieuse grandeur de ses bras, qui sont aussi longs que le corps et Les jambes pris ensemble , en sorte que l'animal étant de- bout sur ses pieds de derrière, ses mains touchent encore à terre, et qu'il peut mar- cher à quatre pieds sans que son corps se penche. Il a tout autour de la face un cercle de poil ris , de manière qu’elle se présente comme si elle étoit environnée d’un cadre rond ; ce qui donne à ce singe un air très- extraordinaire. Ses yeux sont grands, mais enfoncés ; ses oreilles nues et bien bordées: sa face est applatie , de couleur tannée , et assez semblable à celle de l’homme, Le s1b- bon est, après l’orang-outang et le pithèque, celui qui approcheroit le plus de la figure humaine, si la longueur excessive de ses bras ne le rendoit pas difforme: car, dans l’état de nature, l'homme auroit aussi une mine bien % Ds DU GIBBON. 10® étrange ; Les cheveux et la barbe, s'ils étoient négligés , formeroient autour de son visage uu cadre de poil assez semblable à celui qui environne la face du gibbon. Ce singe nous a paru d’un naturel tran= quille et de mœurs assez douces; ses mouve: mens n’étoient ni trop brusques ni trop pré: cipités : il prenoit doucement ce qu’on lui donnoit à manger ; on le nourrissoit de pain ; de fruits, d'amandes, etc. Il craisnoit beau- coup le froid et l'humidité, et il n’a pas | vécu long-temps hors de son pays natal. Il est originaire des Indes orientales, particu- lièrement des terres de Coromandel, de Ma- laca et des iles Moluques *. Il paroît qu’il se * Le P. Lecomte dit avoir vu aux Moluques une espèce de siuge, marchant naturellement sur ses deux piees, se servant de ses bras comme un homme le visage à peu près COMME celui d’un Hottentot mais le corps tout couvert d’uve espèce de Doc. grise, étant exactement comme un enfant, et expri- ant parlaitement ses passions et ses appéuts. Il ajoute que ces singes sont d’un naturel très-doux ; que pour montrer leur affection aux personnes qu’ils connoissent, ils les embrassent et les baisent avec des transports singuliers ; que l’un dé ces singes qu’il a vu avoit au moins quatre pieds de hauteur, , F L" * y \s à Put a FETE AT n 4 NE: * L L Pr Ai ir à : 8 HISTOIRE NATURELLE trouve aussi dans des provinces moins méri= _dionales, et qu’on doit rapporter au gibbon je singe du royaume de Gannaure, frontière de la Chine, que quelques voyageurs ont indiqué sous le nom de fe/é*. Au reste, cette espèce varie pour la grandeur et pour les couleurs du poil. Il y en a deux au Cabinet, dont le second , quoiqu’adulte, est bien plus petit que le premier, et n'a que du brun dans qu’il étoit extrêmement adroit et encore plus agile. (Mémoires sur la Chine, par Louis Lecomte, page 510.) * « Dans le royaume de Gannaure, frontière de « la Chine, 11 se trouve un animal qui est fort rare, | « qu’ils nomment fefé : il a presque la forme hu- « maine, les bras fort longs, le corps noir et velu, « marche fort lésérement et fort vite. » (Recueil des voyages, etc.; Rouen, 1716; tome III, page 166.) Cr 1°. "Ce caractère des bras fort longs wappar- tient qu’à ce singe, et par conséquent indique assez clairement que le fefé est le même que le gibbon. 20. On peut présumer que le mot fefe vient de jesef ou sesef, nom du babouin dans les provinces de l'Afrique voisines de l’Arabie, et qu’on a transféré ce nom du babouin au gibbon; car le babouin w? pas les bras plus longs que les autres singes, sd \ tous les endroits où l’autre a du noir; mais comme ils se ressemblent parfaitement à tous autres égards , nous ne doutons pas qu’ils ne soient tous deux d’une seule et même espèce. h r Caractères distinctifs de cefte espèce. LE gibbon n’a point de queue; il a Les fesses pelées, avec de légères callosités ; ‘sa face est plate, brune, et environnée toutautour d’un cercle de poils gris ; il a les dents canines plus grandes à proportion que celles de l’homme ; il a les oreilles nues, noires et arrondies, le poil brun ou gris suivant l’âge ou la race; les bras excessivement longs; il marche sur ses deux pieds de derrière :ila deux pieds et demi où trois pieds de hauteur. La femelle est sujette, comme les femmes ; à un écoulement périodique de sang. Quadrupèdes, VI. 10 y Les" PET NAT NE RERRE D PTE ven Ad A VONT UE ARBRE RS ;: LE. MAGO TE C ET animal est de tous les singes, c’est-à= dire , de tous ceux qui n’ont point dequeue ?, celui qui s’accommode le mieux de la tue pérature de notre climat. Nous en avons. nourri un pendant plusieurs années ; l'été il se plaisoit à l'air, et l'hiver on pouvoit le tenir dans une chambre sans feu. Quoiqu'il ne füt pas délicat , il étoit toujours triste et souvent maussade ; il faisoit également la grimace pour marquer sa Colère ou montrer 1 Magot , nom ancien de ce singe en francois, et que nous avons adopté; momenet, selon Suds on l’a aussi appelé fartarin, parce qu’il est fort . commun dans la Tartarie inéridionale. / 2 Il est certain que ce singe est sans queue, quoi- qu’il en ait une légère apparence formée par un petit appendice de peau d’environ un demi-pouce de longueur , qui se trouve au-dessus de l'anus; mais cet appendice n’est point une queue avec des vertèbres, ce n’est qu’un bout de peau qui ne tient pas même plus particulièrement au coccix que le reste de Ja peau. Tom ZT 4. LE MAGOT. 1 —, J p auquel DE p TT RU LS “auquel. Ÿ. / SORT, ? # ! pat Hit ve x . 2 mea dater at ; Ch « [ES { \ HISTOIRE NATURELLE. ur son appétit : sesmouvemensetoient brusques, ‘ses manières grossières , et sa physionomie encore plus laide que ridicule; pour peu qu'il fût agité de passion , il montroit et grin- çoit les dents en remuant la mâchoire. IL remplissoit les poches de ses joues de tout ce qu’on lui donnoit, et il mangeoit générale- ment de tout , à l'exception de la viande crue, du fromage et d’autres choses fermentées ; il aimoit à se jucher, pour dormir, sur un bar- reau , sur une patte de fer. On le tenoit tou jours à la chaîne, parce que, malgré sa longue domesticité, il n’en étoit pas plus civilisé, pas plus attaché à ses maîtres : il avoit appa- remment été mal éduqué ; car jen ai vu d’autres de la même espèce qui en tout étoient mieux, plus connoissans, plus obeissans, même plus gais et assez dociles pour apprendre à danser , à gesticuler en cadence , et à se laisser tranquillement vètir et coiffer. Ce singe peut avoir deux pieds et demi ou trois pieds de hauteur lorsqu'il est debout sur ses jambes de derrière : la femelle est plus petite que le mâle. Il marche plus volontiers à quatre pieds qu’à deux. Lorsqu'il est en repos, 1l est presque toujours assis , et son \ 112 HISTOIRE NATURELLE corps porte sur deux callosités très — émi nentes qui sont situées au bas de la région où devroient être les fesses ; l'anus est plus éle- Vé : ainsi il est assis plus bas que sur le cul ; aussi son corps est plus incliné que celui d’un homme assis. Il diffère du pithèque ou singe proprement dit, 1°. en ce qu'il a le museau gros et avancé comme un dogue, au lieu que le pithèque a la face applatie; 2°. en ce qu'il a de longues dents canines, tandis que le pithèque ne les a pas plus longues à proportion que l’homme; 3°. en ce qu'il n’a pas les ongles des doigts aussi plats et aussi arrondis ; et enfin parce qu'il est plus grand, plus trapu et d'un naturel moins docile et moins doux. Au reste, il y a quelques variétés dans l'espèce du magot ; nous en avons vu de différentes grandeurs et de poils plus ou moins foncés et plus ou moins fournis : il paroït même que les cinq animaux dont Prosper Alpin a donné ies figures et les indications : sous le nom de cyrzocéphales, sont tous cinq des magots, qui ne diffèrent que par la gran- deur et par quelques autres caractères irop légers pour qu’on doive en faire des espèces Mans MU MAGOT. : E13 distinctes et séparées. IL paroît aussi que l'espèce en est assez généralement répandue dans tous les chimats chauds de l’ancien con- tinent , et qu'on la trouve également en Tartarie, en Arabie, en Éthiopie, au Mala- bar, en Barbarie, en Mauritanie, et jusque dans les terres du cap de Bonne-Espérance. Caractères distinctifs de cette espèce. LE magot n’a point de queue, quoiqu'il ait un petit bout de peau qui en ait l’appa- rence : il a des abajoues, de grosses callosités proéminentes sur les fesses, des dents canines beaucoup plus longues à proportion que celles de l’homme ; la face relevée par le bas en forme de museau , semblable à celui du dogue - il a du duvet sur la face, du poil brun ver- dâtre sur Le corps, et jaune blanchâtre sous le ventre ; il marche sur ses deux pieds de derrière , et plus souvent à quatre : il a trois pieds ou trois pieds et demi de hauteur, et il paroïit qu’il y a dans cette espèce des races qui sont encore plus grandes. Les femelles sont, comme les femmes, sujettes à un écoulement périodique de sang. | 1Q De LE PAPLION ei BABOUIN PROPREMENT DIT. D,+ s l’homme, la physionomie trompe, et la figure du corps ne décide pas de la forme de l'ame: mais, dans les animaux, on peut juger du naturel par la mine, et de tout l’in- térieur par ce qui paroît au dehors : par - exemple , en jetant les yeux sur nos singes et nos babouins, il est aisé de voir que ceux- ci doivent être plus sauvages, plus méchans que les autres; il y a les mêmes différences , les mêmes nuances dans les mœurs que dans les figures. L’orang-outang, qui ressemble le plus à l’homme, est le plus intelligent , le . plus grave, le plus docile de tous ; le magot ; * Papion, mot dérivé de papio, nom de cet ani- mal en latin moderne, et que nous avons adopté / pour le distinguer des autres babouins. Baoon en anglois, paryon en allemand. L , 4 ES TA N122 = ! j SN , à ‘ N'TE | Po ae Ho N D STATS EE OP PET AL UT 7 Ë k 4 4 2 AE 4 “w +. …— f COUR SRE * ET D EP < GRAND PAPION [A auquel ie J PrugutS PU 7 1) AGENT, CE nd (Au HISTOIRE NATURELLE. m5 x qui commence à s’éloiguer de la forme hu- maine, et qui approche par le museau et par les dents canines de celle des animaux, est brusque, désobéissant et maussade ; et les babouins, qui ne ressemblent plus à l’homme que par les mains, et qui ont une queue, des ongles aigus, de gros museaux, ele. ont l’air de bêtes féroces , et le sont en effet. J'ai vu vi- vant celui dont nous dennons ici la figure ; il v’étoit point hideux, et cependant il faisoit horreur : grinçant continuellement les dents, s’agitant, se débattant avec colère, on étoit obligé de le tenir enfermédansunecagedefer, dont il remuoit si puissamment les barreaux avec les mains , qu’il inspiroit de la crainte aux spectateurs. C’est un animal trapu ; dont le corps ramassé et les membres nerveux in- diquent la force et l’agilité, qui, couvert d'un poil épais et long , paroit encore beau- coup plus gros qu'il n’est, mais qui, dans le réel, est si puissant et si fort, qu’il viendroit aisément à bout d’un ou deplusieurs hommes, s'ils n’étoient point armés *. D'ailleurs il * Cest à cette espèce qu'il faut rapporter Pani- mal appelé tré tré 1ré tré à Madagascar. « Il est, « dit Flaccourt, gros comme un veau de deux ans; 116 HISTOIRE NATURELLE paroît continuellement excité par cette pas- sion qui rend furieux les animaux les plus doux : il est insolemment lubrique, et affecte de se montrer en cet etat, de se toucher, de _se satisfaire seul aux yeux de tout le monde: et cette action , l’une des plus honteuses de l'humanité, et qu'aucun animal ne se per- met, copiée par la main du babouin, rap pelle l’idée du vice, et rend abominable l'as- pect de cette bête , que la Natureparoïîtavoir particulièrement vouée à cette espèce d’im- pudence ; car dans tous les autres animaux, et même dans l’homme, elle a voilé ces par- ties : dans le babouin, au contraire , elles sont tout-à-fait nues, et d'autant plus évi- dentes que Le corps est couvert de longs poils; il a de même les fesses nues et d’un rouge couleur de sang , les bourses pendantes, las nus découvert, la queuè toujours levée. Il « il a la tête ronde et une face d'homme, les picds « de devant et de derrière comme un singe, le poil « frisotté, la queue courte , les oreilles comme celles « de l’homme ; il ressemble au 2amach décrit par & Ambroise Paré. C’est ün animal solitaire : les gens « du pays en ont grand’peur ». (Fayage & en dagascar, page 151.) DU PAPION. ? 117 semble faire parade de toutes ces nudités, présentant son derrière plus souvent que sa tête, sur-tout dès qu'il apperçoit desfemmes, pour lesquelles il déploie une telle effronte- rie, qu’elle ne peut naître que du desir le plus immodéré. Le magot et quelques autres ont bien les mêmes inclinations ; mais comme ils sont plus petits et moins pétulans, on les rend modestes à coups de fouet, au lieu que le babouin est non seulement incorrigible sur cela , mais intraitable à tous autres égards. | Quelque violente que soit la passion de ces animaux , ils ne produisent pas dans les pays tempérés ; la femelle ne fait ordinairement qu’un petit, qu’elle porte entre ses bras, et attaché, pour ainsi dire, à sa mamelle : elle est sujette, comme la femme, à l'évacuation périodique , et cela’ lui est commun avec toutes les autres femelles de singes qui ont . les fesses nues. Au reste, ces babouins, quoi- que méchansetféroces , ne sont pas du nombre des animaux carnassiers ; 1ls se nourrissent principalement de fruits, de racines et de grains : 1ls se réunissent et s'entendent pour piller les jardins; ils se jettent les fruits de 118 HISTOIRE NATURELLE Lu main en main et par-dessus les murs, et font de grands dégâts dans toutes les terres culti- yees. : Caractères distinctifs de cette espèce. LE papion a des abajoues et de larges cal- Josites sur les fesses, qui sont nues et de cou- leur de sang : il a la queue arquée et de sept ou huit pouces de long; les dents canines beaucoup plus longues et plus grosses à pro— portion que celles de l’homme ; le museau très-sros et Lrès-loug ; les oreilles nues, mais point hbordées ; le corps massif et ramassé ; les membres gros et courts; les parties géni- tales nues et couleur de chair; Le poil long et touffu , d’un brun roussâtre, et de couleur assez uniforme sur tout le corps. Il marche plus souvent à quatre qu’à deux pieds; il a trois ou quatre pieds de hauteur lorsqu'il est debout. Il paroît qu’il y a dans cette espèce des races encore plus grandes, et d’autres beaucoup plus petites. Le babouin que nous avons fait représenter est de la petite espèce; nous l'avons soisneusement comparé au grand babouin ou papion, et nous n'avons DU PAPION. 119 remarqué d'autre différence entre eux que celle de la grandeur ; et cette différence ne venoit pas de celle de l’âge, car le petit ba- bouin nous a paru adulte comme le’ grand. Les femelles sontsujettes, comme les femmes, à un écoulement périodique. (EST ORRENTT AISNE h M eh - + ñ LE MANDRILL* Cr babouin est d’une laideur désagréable et dégoûütante : indépendamment de son nez tout plat, ou plutôt de deux naseaux dont: découle continuellementune morve qu’il re- ! cueille avec la langue ; indépendamment de . son très-sros et long museau, de son corps trapu, de ses fesses couleur de sang, et de son anus apparent, et placé, pour ainsi dire, dans les lombes , il a encore la face violette etsillonnée des deux côtés de rides profondes et longitudinales qui en augmentent beau= coup la tristesse et la difformité. Il est aussi plus grand et peut-être plus fort que le pa- pion; mais il est en même temps plus tran- quille et moins féroce. Nous donnons ici la figure du mâle et de la femelle, que nous avons vus vivans : soit qu’ils eussent été. mieux éduqués , ou que naturellement ils * Mandrill, nom que les Anglois qui fréquentent la côte de Guinée, ont donné à cet animal, et que nous ayons adoptés MANDRILL LS yuguet f 1 Taguer.< HISTOIRE NATURELLE. r2r soient plus doux que le papion, ils nous ont paru plus traitables et moins impudens sans être moins désagréables, … Cette espèce de babouiïn se trouve à la côte d'Or et dans les autres provinces méridio- nales de l’Afrique, où les Nègres l’appellent . boggo , et les Européens zandrill. Il paroït qu'après l’orang-outang c’est ke plus grand de tous les singes et de tous Les babouins. Smith* raconte qu’on lui fit présent d'une femelle * Dans le même pays l’on appelle 300goc ou 2o2zo et mandrill l'animal dont il est ici ques- tion, et l'on appelle aussi pongo et drill lorang- outang : ces noms $e ressemblent, et sont vraisem= blablement dérivés les uns des autres. Et en effet, le pongo et le bogso , ou, si l'on veut , le drill et le mandeill, ont plusieurs caraclères communs : mais le premier est un singe sans queue et presque sans poil, qui à la face applatie et ovale ; au lieu que le second est un babouin avec une queue, de longs poils, etle museau gros et long. Le mot man, dans Îles langues allemande, angloise, etc. signihe l’homme en général ; et le mot drill, dans le jar- gou de quelques ünes de nos provinces de France, comme en Bourgogne, sionifie un homme vigou- réux et libertin : les paysans disent , c'est un bon drill, c’est un. maître drill. | 11 L4 2 HISTOIRE NATURELLE mandrill qui n'étoit âgée que de six mois : et qui étoit déja aussi grande à cet âge qu'un babouin adulte. Il dit aussi que ces mandrills marchent toujours sur deux pieds ,. qu'ils pleurent et qu’ils gémissent comme des hommes , qu’ils ont une violente passion. pour les femmes, et qu’ils ne manquent pas ! de les attaquer avec succès lorsqu'ils Les ue ‘vent à l'écart. Caractères distinchifs de cette espèce. LE mandrill a des abajoues et des callo= -sités sur les fesses : il a la queue très-courte, et seulement de deux ou trois pouces de long ; les dents caninés beaucoup plus grosses | et plus longues à proportion que celles de l’homme; le museau très-gros et trés-long , et sillonné des deux côtés de rides longitudi- males, profondes et très-marquées ; la face nue et de couleur bleuâtre; les oreilles nues, aussi-bien que le dedans des mains et des pieds; le poil long, d’un brun roussätre sur le corps, et gris sur la poitrine et le ventre: il marche sur deux pieds plus souvent que sur quatre. Il a quatre ou quatre pieds et es LÉ DU MANDRILL. ‘123 demi de hauteur lorsqu'il est debout : il pa= roit même qu’il y en a d’encore plus grands. Les femellessontsujettes ,commeles femmes, à l’écoulement périodique. (l L'OUANDEROU : ET LE LOWANDO: Quoreux ces deux animaux nous pa- roissent être d’une seule et même espèce, nous n'avons pas laissé de leur conserver à chacun le nom qu’ils portent dans leur pays natal , à Ceylan, parce qu'ils forment au moins deux races distinctes et constantes, 1 Ouanderou , wanderu , nom de cet animal à Ceylan , et que nous avons adopté. 2 Lowando, elwandu, nom de cet animal à Cey- lan, et que nous avons adopté. 1°. Il nous paroît n'être qu'une variété de l’ouan- derou; 29. il nous paroît qu'il y a une seconde va- riété dans ces animaux : l’ouanderou a le corps noir et la barbe grise; le. lowando a le corps gris et la barbe noire , et il y en a d’autres de même espèce , qui sont tout blancs , corps et barbe. Tom 7: FAT . IL OUANDEROU. Fauquet Ÿ- De ie td EU DNR { x HISTOIRE NATURELLE. 125 L’ouanderou a Le corps couvert de poils bruns : et noirs, ayec une large chevelure et une grande barbe blanche; au contraire lelowando _ale corps couvert de poils blanchâtres ,avecla chevelure et la barbe noires. Il y a encore dans le même pays une troisième race ou. variété qui pourroit bien être la tige com- mune des deux autres, parce qu’elle est d’une couleur uniforme et entièrement blanche, corps, chevelure et barbe. Ces trois animaux ne sont pas des singes, mais des babouins ; 1ls ‘en ont tous les caractères, tant pour la figure que pour le naturel ; ils sont farouches et même un peu féroces : ils ont le museau alonge, la queue courte, et sont à peu près de la même grandeur et de la même force que les papions ; ils ont seulement le corps moins ramassé, et paroissent plus foibles des parties de l'arrière du corps. Celui dont nous donnons la figure, nous avoit été pré- senté sous une fausse dénomination , tant pour le nom que pour le climat ; les sens auxquels il appartenoit nous dirent qu’il venoit du continent de l'Amérique méridio- nale, et qu’on l’appeloit cayouvassou. Je re- gonnus bientôt que ce motcayauvassou est ua | 11 126, HISTOIRE NATURELLE terme brasilien qui se prononce SajouOUGS= sou, et. qui signiñe sapajou, et que par conséquent ce nom avoit été mal appliqué, puisque tous les sapajous ont de très-longues queues, au lieu que l'animal dont il est ict question est un babouin à queue très-courte. D'ailleurs , non seulement cette espèce , mais méme aucune espèce de babouin , ne se trouve en Amérique, et par conséquent on s’étoit aussi trompé sur l'indication du cli- mat ; et celà arrive assez ordinairement, sur-tout à ces montreurs d'ours et de singes, qui, lorsqu'ils ignorent le climat et le nom d’un animal, ne manquent pas de lui appli- quer une dénomination étrangère, laquelle, vraie ou fausse, est également bonne pour l'usage qu'ils en font. Au reste, ces babouins- ouanderous , lorsqu'ils ne sont pas domtés, sont si méchans, qu'on est obligé de les tenir dans une cage de fer, où souvent 1ls s’agitent avec fureur ; mais lorsqu'on les prend jeunes, on les apprivoise aisément, et ils paroissent même être plus susceptibles d'éducation que les autres babouins. Les Indiens se plaisent à les instruire , et ils prétendent que les autres singes, c'est-à-dire, les guenons, respectent 2 ; . _ DE L’'OUANDEROU. 127 beauçoup ces babouins, qui ont plus de gra- _vité et plus d'intelligence qu’elles. Dans leur état de liberté, ils sont extrêmement sau- vages , et se tiennent dans les bois. Si l’on en croit les voyageurs , ceux qui sont tout blancs sont les plus forts et les plus méchans de tous. Ils sout très-ardens pour les femmes, et assez forts pour les violer lorsqu'ils les trouvent seules, et souvent ils les cutragent jusqu'à les faire-mourir. Caractères distinctifs de cette espèce. L'OUANDEROU a des abajoues et des callosités sur les fesses, la queue de sept ou * huit pouces de long, les dents canines plus longues et plus grosses que celles de l’homme, le museau gros et alonge, la tête environnée d’une large crinière et d’une grande barbe de poils rudes, le corps assez long et assez mince par le bas. Il y a dans cette espèce des races qui varient par la couleur du poil : les uns ont celui du corps noir etla barbe blanche: les autres ont le poil du corps blanchätre et Ja barbe noire. Ils marchent à quatre pieds æ } 128 HISTOIRE NATURELLE: . plus souvent qu’à deux, et ils ont trois pieds ou trois pieds et demi de hauteur lorsqu'ils sont debout. Les femelles sont sujettes à l'é- coulement périodique. LM NS AR at fr 76m 7 . Î Poouquetr x 4 PL... — LE MAIMON* Lss singes , les babouins et les guenons formént trois troupes qui laissent entre. elles _ deux intervalles ; le premier est rempli par le magot , et Le second par le maimon : celui- ci fait la nuance entre les babouius et les guenons, comme le magot la fait entre les singes et les babouins. En effet, le maimon ressemble encore aux babouins par son gros et large museau , par sa queue{courte €t arquée; mais il en diffère et s'approche des guenons par sa taille, qui est fort au-dessous de celle des babouins, et par la douceur de son naturel. M: Edwards nous a donné la figure et la description de cet animal sous la dénomination de sizge à queue de or * Maimon , maimonet, nom que Eu a dise dans les dermers siècles aux singes à queue courte ! et que nous avons appliqué à celui-ci en attendant qu’on soit informé du nom qu’il porte dans son pays natal, à Sumatra, et dans les autres provinces de J'Inde Riade | Ke) 4 LA PE. 13o HISTOIRE NATURELLE Ce caractère particulier suffit’ pour le faire reconnoître ; car il est le seul de tous les ba= bouius et guenons qui ait la queue nue, me- nue et tournée comme celle du cochon. Il est à peu près de la grandeur du magot, et res- semble si fortau macaque, qu’on pourroit le prendre pour une variété de cette espèce, sk sa queue n’étoit pas tout-à-fait differente. IL a la face nue et basanée , les yeux chätains, les paupières noires, le nez plat, les lèvres minces, avec quelques poils roides, mais trop. courts pour faire une moustache apparente. Il n’a pas, comme les singes et les babouins, les bourses à l'extérieur et la verge saillante; le tout est caché sous la peau : aussi le mai- mon, quoique très-vif et plein de feu, n’a rien de la peétulance impudente des babouins; ileest doux, traitable, et même caressant. On le trouve à Sumatra , et vraisemblablement dans les autres provinces de l’Inde méridio- nale : aussi souffre-t-il avec peine le froid de notre climat. Celui que nous avons vu à Paris, n’a vécu que peu de temps, et M. Edwards dit n'avoir gardé qu’un an à Londres celui qu'il a décrit. fa EF 4 Te} El VE NON LR * Le OR “ etes ET M A TM O Nc ee | LI . Caractères distinctifs de cette espèce. LE maimon a des abajoues et des callosités sur les fesses ; la queue nue, recoquillée et longue de cinq,ou six pouces ; les dents ca- . mines pas plus longues à proportion que celles de l’homme; le museau très-large ; les orbites des yeux fort saillantes au-dessus ; la face, les oreilles, les mains et les pieds die et de couleur de chair ; le poil d'un noir olive sur le corps;et d'un); jaune roussätre surleventre. Il marche tantôt sur deux pieds, et tantôt sur quatre; il a deux pieds ou deux pieds et demi dé hauteur lorsqu'il eët debout. La femelle est sujette à l'écoulement pério= dique. LE MACGAQUE!, ET? # L'AIGRETTE"» 4 ‘ES toutes les suenons ou singes à longue queue, le macaque est celui qui approche le plus des babouins; ila, commeeux, le corps court et ramassé, la tête grosse, le museau large, le nez plat, les joues ridées, et en. même temps. il est plus gros et plus grand que la plupart des autres guenons : il est 1 Macaque, macaquo , nom de cet animal dans son pays natal, à Congo , et que nous avons adopté. 8 RHarEe Cette guenon ne nous paroît être qu’une variété du macaque : nous l’avons appelée laigreite, parce qu "elle a un grand é épi de poil: au dessus de la tête. Nous croyons que C’est le même que l’aigula de M. Livnæus (Syst. nat. edit. X, pag. 27), indiqué par Osbeck sous la dénomina- tion simia caudata subbarbaia grisea, eminenti@ pilosé verticis longitudinali. (Ttiner. pag. 99.) Ps \ a 5% di), GR pré de avis bdd fig ge nv 5 res bat dater L’AIGRET TE. Zom 6, PL 0 LE MACAQUE. [4 auquel S° De agen mo she trs Lee Am ve Bye le 2 2 ct PR RE UE er Fa Re MDN SUR FRET CA My “bei tt NS HO MN +12 A \E ON à be D" 28 L HET 4 cpu Phs ba} dire BILAN NTI ve on Gratin eee: eh in de 2% 3 HISTOIRE NATURELLE. 133 aussi d’une laideur hideuse , en sorte qu’on pourroit le regarder comme une petite espèce de babouin, s’il n’en différoit pas par la queue qu'il porte en arc comme eux , ‘mais quiestlongueetbien touffue, aulieu que celle des babouins en général est fort courte. Cette espèce est originaire de Congo et des autres parties de l'Afrique méridionale ; elle est nombreuseet sujette à plusieurs variétés pour la grandeur , les couleurs et la disposition du poil. Celui qu'Hasselquist a décrit avoit le corps long de plus de deux pieds , et ceux que nous avons vus ne l’'avoient guère que d'un pied et demi. Celui que nous appelons ici l’aigrette, parce qu'il a sur le sommet de la tête un épi ou aigrette de poil, ne nous à paru qu'une variété du premier, auquel il ressemble en tout, à l'exception de cette dif- férence et de quelques autres légères variétés dans le poil. Ils ont tous deux les mœurs douces et sont assez dociles ; mais, indépen- damment d’une odeur de fourmi ou de faux musc qu'ils répandent autour d’eux, ils sont si mal-propres, si laids et même si affreux Jorsqu'ils font la grimace, qu’on ne peut les regarder sans horreur et dégoût. Ces guenons : 13 ia HISTOIRE NATURELLE vont-souvent par troupes, et se rassemblent sur-tout pour voler des fruits et des légumes. Bosman raconte qu'elles prennent dans cha- que-patte un ou deux pieds de milhio, au- tant sous leurs bras etautantdansleur bouche; qu’elles s’en retournent ainsi chargées, sau- tant continuellement sur les pattes de der- - rière , et que, quand on les poursuit , elles - jettent les tiges de milhio qu'elles tenoient dans les mains et sous les bras, ne gardant que celles qui sont entre leurs dents, afin de pouvoir fuir plus vite sur les quatre pieds. Au reste, ajoute ce voyageur , elles exa- | minent avec la dernière exactitude chaque tige de milhio qu’elles arrachent ; et si elle. ne leur plaît pas , elles la rejettent à terre et en arrachent d’autres, en sorte que, parleur bizarre délicatesse, elles causent beaucoup plus de dommage encore que par leurs vols. Caractères distinctifs de ces espèces. L £ macaque a des abajoues et des callosi- tés sur les fesses : 11 a la queue longue à peu près comme la tête.et Le corps pris ensemble, d'environ dix-huit à vingt pouces; la tête bo, DU MACAQUE. 135 grosse ; le museau très-gros ; la face nue, livide et ridée ; les oreilles velues; le corps courtet ramassé, les jambes courtes et grosses : le poil des parties supérieures est d’un cendré verdâtre , et sur la poitrine et le ventre, d’un gris jaunâtre. Il porte une petite crête de poil au-dessus de la tête ; il marche à quatre et quelquefois à deux pieds. La longueur de son corps, y compris celle de la tête ; est d'environ dix-huit ou vingt pouces. Il paroït qu’il y a dans cette espèce des races beaucoup plus grandes et d’ autres plus pete 2 telles que celle qui suit. | Hi L’aigrette ne nous paroït être qu’une va riété du macaque; elle est plus petite d’envi- ron un tiers dans toutes les dimensions : au lieu de la petite crête de poil qui se trouve au sommet de la tête du macaque, l'aigrette porte un épi droit et pointu. Elle semble différer encore du macaque par le poil du front, qui est noir, au lieu que sur le front du macaque 1l est verdâtre. IL paroît aussi que l’aigrette a la queue plus longue que le macaque, à proportion de la longueur du corps. Les femelles dans ces espèces sont su- jettes, comine les femmes, à l’écoulement panne LE PATTES L: patas est encore du même pays et à peu près de la même grosseur que le macaque : mais il en diffère en ce qu’il a le corps plus alongé , la face moins hideuse et le poil plus m1 11 TUNER MURS NUE è / beau ; il est même remarquable par la cou- leur brillante de sa robe, qui est d’un roux si vif, qu'elle paroit avoir été peinte. Nous avons vu deux de ces animaux qui font va=, riété dans l'espèce : le premier porte un ban- L2 L] # L2 deau de poils noirs au-dessus des yeux, qui s'étend d’une oreille à l’autre ; le second ne diffère du premier que par la couleur de ce bandeau , qui est blanc : tous deux ont du poil long au-dessous du menton et autour des joues , ce qui leur fait une belle barbe ; mais le premier l’a jaune, et le second l’a blanche. Cette variété paroît en indiquer d’autres dans la couleur du poil et je suis * Patas, nom de cette espèce de guenon ou singe 3 longue queue dans son pays natal, au Sénéoal, et que nous avons adopté. On l'appelle vulgaireraent le singe rouge du Sénégal | Ed 7 Ha: pee # Li NE " jai Zom 5. Vie ee NT PATAS À BANDEAU-BLANC. J Pougut d (il Pit Le 4 nl 4 HISTOIRE NATURELLE, 13 \ fort porté à croire que l’espèce de guenon couleur de chat sauvage dont parle Marmol, et qu'il dit venir du pays des Nègres, est une des variétés de l'espèce du patas. Ces guenons sont moins adroites que les autres, et en même temps elles sont extrèmement cu- rieuses. « Je les ai vues , dit Brue, descendre «du haut des arbres jusqu’à l'extrémité des « branches pour admirer les barques à leur « passage ; elles les considéroient quelque « temps , et, paroissant s’entretenir de ce « qu’elles avoient vu, elles abandonnoient la « place à celles qui arrivoient après; quel- « ques unes devinrent familières jusqu’à jeter « des branches aux François, qui leur répon- « dirent à coups de fusil. Il en tomba quel- «ques unes, d’autres demeurèrent blessées, « et tout le reste tomba dans une étrange « consternation ; une partie se mit à pousser « des cris affreux , une autre à ramasser des « pierres pour les jeter à leurs ennemis : quel- « ques unes se vidérent le ventre dans leur « main , et s’efforcèrent d'envoyer ce pré- « sent aux spectateurs; mais s’appercevant à « la fin que le combat étoit du moins inégal, « elles prirent le parti de se retirer. a 138 HISTOIRE NATURELLE IL est à présumer que c'est cette même espèce de guenon dont parle le Maire. «On «ne sauroit exprimer, dit ce voyageur , le « dégât que les singes font dans les terres du « Sénégal lorsque le mil et lés grains dont ils « se nourrissent sont en maturité. Ils s’as- « semblent quarante ou cinquante ; l’un d'eux « demeure en sentinelle sur un arbre, écoute « et regarde de tous côtés pendant que les « autres font la récolte : dès qu’il apperçoit « quelqu'un, il crie comme un enragé pour «avertir les autres, qui, au signal, s’en- « fuient avec leur proie, sautant d’un arbre « à l’autre avec une prodigieuse agilité ; les « femelles , qui portent leurs petits contre «leur ventre, s’enfuient comme les autres, «et sautent comme si elles n’avoient rien. » Au reste, quoiqu'il y'ait dans toutes les terres de l'Afrique un très-orand nombre d’espèces de singes, de babouins et de gue- hons , dont quelques unes paroissent assez semblables , les voyageurs ont cependant remarque qu'elles ne se mêlent jamais, v que, pour l'ordinaire, chaque espèce habite , an quartier différent. Le DÜ PATAS. 139 \ Caractères distinctifs de cette espèce. LE patas a des abajoues et des callosités sur les fesses ; sa queue est moins longue que la tête et le corps pris ensemble : il a le som- met de la tête plat , le museau long, le corps alongé, les jambes longues ; il a du poil noir sur le nez, et un bandeau étroit de même couleur au-dessus des yeux, qui s’étend d’une oreille à l’autre : le poil de toutes les parties supérieures du corps est d’un roux presque. rouge, et celui des parties de dessous, telles que la gorge, la poitrine et le ventre, est d'un gris jaunâtre. Il ya variété dans cette espèce pour la couleur du bandeau qui est au-dessus des yeux; les uns l’ont noir, et les autres , blanc. Ils n’agitent pas leur mâchoire comme le font les autres guenons lorsqu'elles sont en colère. Ils marchent à quatre pieds plus souvent qu’à deux, et ils ont environ un pied et demi ou deux pieds depuis le bout du museau jusqu’à l’origine dela queue. Il paroït, par le témoignage des voyageurs, qu’il y en a de plus grands. Les femelles sont sujettes, comme les femmes, à un écoule= ment périodique. ue MALBROUCK : ET LE BONNET- CHINOIS À Css deux guenons ou singes à longue queue nous paroissent être de la même espèce ; et cette espèce , quoique différente à quelques égards de celle du macaque, ne laisse pas d'en être assez voisine pour que nous soyons dans le doute si le macaque, l’aigrette , le malbrouck et le bonnet-chinois, ne sont pas quatre variétés, c’est-à-dire, quatre races cons- tantes d’une seule et même espèce. Comme ces animaux ne produisent pas dans notre climat, nous n’avons pu acquérir par l’expé- 1 Malbrouck, nom de cet animal dans son pays natal, à Bengale, et que nous avons adopté. 2 Bonnet-chinois, nom que l'on a donné à cette espèce de guenon ou siuge à longue queue, parce qu'elle a le poil du sommet de la tête disposé en forme de calotte ou de bonnet plat, comme le sont les bonnets des Chinois. LE MALBROUCK. NRORÈTES CRÉES PARA EE ERA CES WE HISTOIRE NATURELLE. x4r rience aucune connoissance sur l’unité ou la diversité de leurs espèces , et nous sommes réduits à en juger par la différence de la figure et des autres attributs extérieurs. Le macaque et V'aigrette nous ont paru assez semblables pour présumer qu'ils sont de la mème espèce. Il en est de même du mal- brouck et du bonnet-chinois ; mais comme ils diffèrent plus des deux premiers qu'ils ne _ diffèrent entre eux, nous avons cru devoir les en séparer. Notre présomption sur la di- versité de ces deux espèces est fondée, 1°. sur la différence de la forme extérieure; 2°. sur celle de la couleur et de la disposition du poil ; 3°. sur les différences qui se trouvent dans les proportions du squelette de chacun de ces animaux ; et enfin sur ce que les deux pre- _miers sont natifs des contrées méridionales de l'Afrique, et que les deux dont il s’agit ici sont du pays de Bengale. Cette dernière con- sidération est d’un aussi grand poids qu’au- cine autre; car nous avons prouvé que, dans les animaux sauvages et indépendans de l’homme, l'éloignement du climat est un in- dice assez sûr de celui desespèces. Au reste, le -mmalbrouck etle bonnet-chinoisnesont pas les $s - “% 14: HISTOIRE NATURELLE seules espèces ou races de singes que l’on trouve à Bengale* : il paroïît, par le témoignage des ; voyageurs, qu'il y en a quatre variétés; sa- voir, des blancs, des noirs, des rouges et des gris. [ls disent que Les noirs sont les plus aisés à apprivoiser : ceux-ci étoient d'un gris rous: sàtre , et nous ont paru privés et même PE dociles. « Ces animaux, disent les voyageurs; dé- « robent les fruits, et sur-tout les cannes de «sucre; l’un d’eux fait sentinelle sur un « arbre pendant queles autres se chargent du «butin: s'il apperçoit quelqu'un, il crie, «houp, Loup, houp, dune voix haute et «distincte; au moment delavis, tous jettent «les cannes qu’ils tenoient dans la main « gauche, et 1ls s’enfuient en courant à trois *_Je crois qu on peut rapporter au malbrouck de Bengale l’espèce de singe à poil grisitre de Calicut dout parle Pyrard. « Il est, dit ce VOYa= « seur, défendu de tuer aucun singe dans ce pays : « dé sont si importuns, si fâcheux et en si grand « nombre, qu'ils causent beaucoup de dommage, et « que les AÇUEr des villes et des campagnes sont « obligés de mettre des treillis à leurs fenêtres « pour les empêcher d'entrer dans les maisons »e (Foyages de Fr. Pyrard, tome I, page 427-) #!. 0 un. \ ‘ | “ DU MALBROUCK. r43 «pieds; et s'ils sont vivement poursuivis, « ils jettent encore ce qu'ils tenoient dans la ‘« main droite, et se sauvent en grimpant «sur les arbres, qui sont leurs demeures «ordinaires: ils sautent d'arbre en arbre; & les femelles, même chargées de leurs pe- «tits, qui les tiennent étroitement embras- « sées, sautent aussi comme les autres, mais « tombent quelquefois. Ces animaux ne s’ap- « privoisent qu'à demi; 1l faut toujours les « tenir à la chaine. Îls ne produisent pas dans «leur état de ‘servitude, même dans leur « pays ; al faut qu’ils soient en liberté dans « leurs bois. Lorsque les fruits et les plantes « succulentes leur manquent , ils mangent « des insectes, et quelquefois ils descendent « sur les bords des fleuves et de la mer pour «attraper des poissons et des crabes. Ils « mettent leur queue entre les pinces du « crabe; et dès qu’elles serrent, ils l’enlèvent « brusquement et l’emportent pour le man- «ger à: leur aise. Ils cueillent les noix de ‘«cocos , et savent fort bienentirerlaliqueur « pour la boire, et le noyau pour le manger: « Ils boivent aussi du zari qui dégoutte par « des hbamboches qu’on met exprès à la cime 44 HISTOIRE NATURELLE « des arbres pour en attirer la liquèur, et sis « se Servent de l’occasion. On les prend par « le moyen des noix de cocos où l’on fait. uné « petite ouverture ; ils y fourrent là pattéavec « peine, parce que le trou est étroit, et les «gens qui sont à l’affüt les prennent avant « qu’ils ne puissent se dégager. Dansles pro= « vinces de l’Inde habitées par les Bramans, « qui, comme l’on sait, eépargnent la vie de « tous les animaux, les singes, plus respec- « tés encore que tous les autres, sontlen «nombre infini; ils viennent en troupe dans a les villes ; ils entrent dans les maisons à « toute heure, en toute liberté, .en sorte que | « ceux qui vendent des denrées’, et sur-tout « des fruits, des légumes, etc. ont bien‘de la « peine à les conserver ». Il y a dans Ama- dabad, capitale du Guzarate, deux ouitrois hôpitaux d’auimaux , où l’on! nourrit les singes estropiés , invalides, et même ceux qui, sans êtré malades, veulent y demeurer Deux fois par semaine, les singes du voisi- nage de cette ville se rendent d'eux-mêmes tous ensemble dans les rues ; ensuite! ils montent sur les maisons, quiont chacune une petite terrasse où l'on va coucher pen DU MALBROUCK. 145 ant les grandes chaleurs : on ne manque pas de mettre, ces deux jours -Jà , sur ces petites terrasses, du riz , du millet , des cannes de sucre dans la saison, et autres choses sem blables ; car si par hasard les singes ne trou- voient pas leur provision sur ces terrasses, ils romproient les tuiles dont lé reste de la - maison est couvert, et feroient un grand désordre. Ïls ne mangent rien sans le bien sentir auparavant ; et lorsqu'ils sont repus , ils remplissent pour le lendemain les bockes de leurs joues. Les oiseaux ne peuvent guère nicher sur Îles arbres dans les endroits où il y a beaucoup de singes; car ils ne manquent jamais de détruire les nids et de jeter Les œufs par terre. Les ennemis les plus redoutables pour les singes ne sont ni le tigre ni les autres bêtes __féroces ; car ils leur échappent aisément par leur légéreté et par le choix de leur domicile au-dessus des arbres, où iln’ya que les ser- pens qui aillent les chercher et ones Les surprendre. «Les singes, ditun dur sont en pos- « session d'être maîtres des forêts; cariln'y «a ni tigres ni lions qui leur disputent le Quadrupèdes, NW LI, | 15 "CNE ARS SNS CPRCENARNN ETES 2 HAUT » ok FEI Re Ln! à La 1 M SUN VA L î ASIE ARTE 146. HISTOIRE NATURELLE v "# « terrain : ils n’ont rien à craindre que les. « serpens, qui nuit et jour leur font la guerre. « Il yen a de prodigsieuse grandeur, qui, tout « d'un coup, avalent un singe; d’autres, «moins gros, mais plus agiles, les vont « chercher jusque sur les arbres... ils épient « le temps où 1ls sont endormis, etc. » _ À A - Caractères distinctifs de cette espèce. ” LE malbrouck a des abajoues et des callo= sités sur les fesses, la queue à peu prèslongue comme la tête et le corps pris ensemble, les paupières couleur de chair, la face d'un gris cendré , les yeux grands , le museau large et relevé ; les oreilles grandes, minces et cou- leur de chair. Il porte un bandeau depoilsgris comme la mone ; mais au reste il a le poil d'une couleur uniforme, d’un jaune brun sur les parties supérieures du corps, et d’un gris jaunâtre sur celles du dessous. Il marche à quatre pieds, et il a environ un pied et demi de longueur depuis l'extrémité du mu. seau jusqu’à l’origine de la queue. Le bonnet-chinois paroiït être une variété du malbrouck ; il en diffère en ce qu'il a le DU MALBROUCK. 147 poil du sommet de la tête disposé en forme de calotte ou de bonnet plat, et que sa queue est plus longue à proportion du corps. Les femelles , dans ces deux races, sont sujettes, comme les femmes, à l'écoulement pério- dique. LE MANGABEY*, Nous avons eu deux individus de cette espèce de guenons ou singes à longue queue; tous deux nous ont été donnés sous la dénomi- nation de singes de Madagascar. Il est facile de les distinguer de tous les autres par un caractère très-apparent ; les mangabeys ont les paupières nues et d’une blancheur frap= pante; ils ont aussi le museau gros, large et alonge , et un bourrelet saillant autour des yeux. Ils varient pour les couleurs : les uns. ont le poil de la tête noir , celui du cou et du dessus du corps brun fauve , et le ventre blanc; les autres l’ont plus clair sur la tête et sur le corps, et 1ls différent sur-tout des * Mangabey, nom précaire que nous donnons à cet animal, en attendant qu’on sache son vrai nom. Comme 1l se trouve à Madagascar, dans les terres voisines de Maugabey, cette dénomination en rap- pellera Pidée aux voyageurs qui seront à portée de le voir, et de s’informer du nom qu’il porte dans cette île, qui est son pays natal, He Mer 6 l@i Apt TT NN 4 HISTOIRE NATURELLE. 145 premiers par un large collier de poils blancs qui leur environne le cou et les joues : tous deux portent la queue relevée et ont le poil long et touffu. Ils sont -du même pays que le vari ; et comme ils lui ressemblent par l'alongement du museau, par la longueur de la queue, par la manière de la porter, et par les variétés de la couleur du poil, ils me pa- roissent faire la nuance entre les makis et les L guenons. ! Caractères distinciifs de cette espèce. LE mangabey a des abajoues et des callosi- tés sur les fesses , la queue aussi longue que la tête et le corps pris ensemble. Ilaun bour- relet proéminent autour des yeux, et la paupière supérieure d’une blancheur frap- pante. Son museau est gros et long ; ses sour- cils sont d’un poil roide et hérissé ; ses oreilles sont noires et presque nues ; le poil des par- ties supérieures du corps est brun, et celui des parties inférieures est gris. Il y a variété dans cette espèce , les uns étant de couleur uniforme, et les autres ayant un cercle de pois blancs en forme de collier autour du cou 15 150 HISTOIRE NATURELLE PAL NIEE. et en forme de barbe autour des joues. sa marchent à quatre pieds, et ils ont à peu près un pied et demi de longueur depuis le bout du museau jusqu’à l’origine de la queue. Les femelles dans ces espèces sent sujettes, comme les ac ,» à un écoulement pério-= dique. (RS "43, ns 476: TA MONE. Û 2 LA MONE"*. N L, mone est la plus commune des guenons ou singes à longue queue. Nous l'avons ene vivante pendant plusieurs années. C’est, avec le magot, l'espèce qui s’accommode le mieux de la température de notre climat; cela seul suffiroit pour prouver qu’elle n’est pas origi-. naire des pays les plus chauds de l'Afrique et des Indes méridionales : et elle se trouve en effet en Barbarie, en Arabie, en Perse, et dans les autres parties de l'Asie qui étoient connues des anciens ; ils l’avoient désignée par le nom de #ébos , cebus, cephus, à cause de la variété de ses couleurs. Elle a en effet la face brune, avec une espèce de barbe mêlée de blanc, de jaune, et d’un peu de noir; le poil du dessus de la tête et du cou, mêlé de jaune et de noir ; celui du dos mêlé de roux et de noir ; le ventre blanchätre , aussi-bien * Mona, monina, mounina , est le nom des gue- nons ou singes à longue queue, dans les langues inoresque;, espagnole et provencale. 2:52 que l’intérieur de cuisses et pu Me l'ex- térieur des jambes et lesipieds noirs ; la queué d'un gris fonce ; deux petites taches blan- ches, une de chaque côté de l'origine de la queue; un croissant de poils gris sur le front; une bande noire depuis les yeux jusqu ’aux oreilles , et depuis les oreilles jusqu’à l'épaule et au bras. Quelques uns l’ont appelée nonne par corruption de z707e ; d’autres , à cause de sa barbe grise, l'ont appelée /e vreillard : mais la dénomination vulgaire sous laquelle la mone est Le plus connue, est celle de singe varié, et cette dénomination répond parfai- tement au nom kébos que lui avoient donné les Grecs, et qui, par la définition d'Aris- tote, désigne une gzeron ou singe à longue queue, de couleur variée. put En général, les guenons sont d’un naturel beaucoup plus doux que les babouins, et d'un caractère Rotes triste que les singes : elles sont vives jusqu’à l'extravagance et sans ferocite ; car elles deviennent dociles dès qu'on les fixe par la crainte, La mone en par- ticulier est susceptible d'éducation , et même d'un certain attachement pour ceux qui la sotonent : celle que noùs avons nourrie s6 L Sa ; G 184 4 “ # DE LA MONE. 153 laissoit toucher et enlever par les gens qu’elle connoissoit ; mais elle se refusoit aux autres, et mème les mordoit. Elle cherchoit aussi à se mettre en liberté : on la tenoit attachée avec une longue chaine; quand elle pouvoit ou la rompre ou s’en délivrer, elle s’enfuyoit à la campagne ; et quoiqu’elle ne revint pas d'elle-même, elle se laissoit assez aisément reprendre par son maitre. Elle manscoit de tout, de la viande cuite, du pain , et sur- tout des fruits :-elle cherchoit aussi les arai- gnées , les fourmis , les insectes. Elle rem- plissoit ses abajoues lorsqu'on lui donnoit plusieurs morceaux de suite. Cette habitude est commune à tous les babouins el guenons : auxquels la Nature a donné ces espèces de poches au bas des joues , où ils peuvent gar- der une quantité d’alimens assez grande pour se nourrir un jour ou deux. Caractères distinctifs de cette espèce. LA mone a des abajoues et des callosités sur les fesses ; elle a la queue d’environ deux pieds de longueur , plus longue d’un demi- pied que Ja tête et le corps pris ensemble, la 554 HISTOIRE NATURELLE. tête petite et ronde, le museau gros et court, la face couleur de chair basanée ; elle porte 4 un bandeau de poils gris sur le front, une bande de poils noirs qui s’étend des yeux aux oreilles, et des oreilles jusqu'aux épaules et aux bras; elle a une espèce de barbe grise formée par les poils de la gorge et du dessous du cou, qui sont plus longs que les autres; son poil est d’un noir roussâtre sur le corps, blanchâtre sous le ventre: l’extérieur des jambes et les pieds sont noirs ; la queue est d'un gris brun, avec deux taches blanches de chaque côté de son origine. Elle marche à quatre pieds, et la longueur de sa tête et de son corps pris ensemble , depuis l'extrémité du museau jusqu'à l’origine de la queue, est d'environ un pied et demi. La femelle est sujette, comme les femmes , à l'écoulement périodique. ME NO AT PR NEA PAR ENNEMI : UT PR à ' r?u ot Suque fe « #2 5 ñ { PACA LLETRICHE: C LLITHRI X est un terme employé par Homère pour exprimer en général la belle cou- leur du poil des animaux : ce n’est que plu- sieurs siècles après celui d'Homère que les Grecs ont en particulier appliqué ce nom à quelques espèces de guenons ou singes à longue queue, remarquables par la beauté des cou- leurs de leur poil; mais il doit appartenir de préférence à celui dont il est ici question. Il est d’un beau verdsurlecorps, d’un beau blanc sur la gorge et le ventre , et il a la face d'un beau noir : d’ailleurs il se trouve en Mauri- tanie et dans les terres de l’ancienne Carthage. Ainsi il y à toute apparence qu'il étoit connu : des Grecs et des Romains , et que c’étoit l'une des guenons ou singes à longue queué auxquels ils donnoient le nom de callithrix. Il y a d’autres guenons de couleur blonde dans les terres voisines de l'Égypte , soit du. côté de l'Éthiopie , soit de celui de l'Arabie, _quelesanciensentaussi désignées par le nom Prob HISTOIRE NATURELI LL: générique de callithrix. Prosper Fa et Pietro della Valle parlent de ces ‘callitriches | à de couleur blonde. Nous n'avons pas vu cette espèce blonde, qui n’est peut-être qu’une va- riété de celle-ci ou de celle de la mone, qui est très-commune dans ces mêmes contrées: Au reste, il paroît que le callitriche ou 4 singe verd se trouve au Sénégal aussi-bien qu’en Mauritanie et aux îles du cap Verd. M. Adanson rapporte que les environs des bois de Podor, le long du fleuve Niger, sont remplis de singes verds. « Je n’apperçus ces « singes, dit cet auteur, que par les branches « qu'ils Cassoient au haut des arbres, d'où «elles tomboient sur moi; car ils étoient « d’aidleurs fort silencieux et si légers dans « leurs gambades, qu’il eñt été difficile de « les entendre. Je n’allai pas plus loin, et « j'en tuai d'abord un, deux et même trois, « sans que les autres parussent effrayés : ce- « pendant, lorsque la plupart se sentirent « blessés , ils commencèrent à se mettre à « l'abri, les uns en se cachant derrière les « grosses branches , les autres en descendant. « à terre; d’autres enfin, et c’étoit le plus. « graud nombre, s’élançoient de la pointe & PA) \ j ML | DU:CADLITRICHE, \ 1: 187 « d'un arbre sur la cime d’un autre.....,.. « Pendant ce petit manége, je continuois «toujours à tirer dessus, et jen tuai jus- « qu’au nombre de vingt-trois en moins d’une «heure, et dans un espace de vingt toises, « sans qu'aucun d'eux eût jeté un seul cri, « quoiqu’ils se fussent plusieurs fois rassem- « bles par compagnie en sourcillant, srin- « çant des dents, et faisant mine de vouloir « m'attaquer *. » : Caractères distinctifs de cette espèce. Læ callitriche a des abajoues et des callo- sités sut les fesses, la queue beaucoup plus longue que la tête et le corps pris ensemble; il a la tête petite, le museau alongé, la face noire, aussi-bien que les oreilles; il porte une bande étroite, au lieu de sourcils, au bas du front, et cette bande est de longs - “porls noirs. Il est d’un verd vif mêlé d’un peu de jaune sur le corps, et d’un blanc jaunätre sur la poitrine et le ventre : ik * l’oyasge al Senegal ar M. Adanson Vas st» P 2 page 1 LE 3 Ÿ .. +4 “- » Sg | ue 2F \ 2 r É r : 1 ACER set TO Pa es NATU ... marche à à quatre pieds, et la longueur son corps, y compris celle de la tête, “et d'environ quinze pouces. La femelle est Su 4 jette à Ê écoulement périodique. À Au \ 3 on L M 5 . + F 4 + t L: 2} [l 4 Be 3 A0 C1 _ rr Ÿ & : L4 { À * \ \ ° be Ps. a " à / * LU | À ri, _ + h ñ % 1% ÿ Le 4 ' * j & Tom 7’ PU 22, LE MOUSTAC . [J- vague La à LE MOUSTAC*. L:s moustac nous paroit être du même pays que le macaque, parce qu’il a, comme lui, le corps plus court et plus ramassé que les autres guenons. C’est très-vraisemblablement le même animal que les voyageurs de Guinée ont appelé 6/anc-nez, parce qu’en effet il a les lèvres au-dessous du nez d’une blancheur éclatante, tandis que le reste de sa face est d'un bleu noirâtre : 1l a aussi deux toupets de poils jaunes au-dessous des oreilles, ce qui lui doune l'air très-singulier: et comme il est en même temps d'assez petite taille, c’est de tous les singes à longue queue celui qui nous a paru le plus joli. * Mustar , moustache : comme l4 guenon dont il est ici question n’a point été nommée, nous lui avous donné ce nom, qui sufbra pour la faire recon- puîire et distinguer de toutes les autres. Elle est en! effet très-remarquable par sa levre supérieure, qui, est nue ét d’une blancheur d’autant plus frappante, que le reste de sa face est noir. | : ’ dE, l À h ] + ÿ 160 HISTOIRE NATURELLE, | Caractères distinctifs de cetteespèce. LE moustac a des abajoues et des callosités sur les fesses ; la queue beaucoup plus longue que la tête et le corps pris ensemble , elle a dix-nenf ou vingt pouces de longueur. Il a la face d’un noir bleuâtre, avec une grande et large marque blanche en forme de che- vron au-dessous du nez et sur toute l'étendue de la lèvre supérieure, qui est nue dans toute cette partie ; elle est seulement bordée de poils noirs , aussi-bien que la lèvre inférieure tout autour de la bouche. Il a Le corps court et ramassé ; il porte deux gros toupets de poils d’un jaune vif au-dessous des oreilles; il a aussi un toupet de poils hérissésau-dessus de la tête; le poil du corps est d’un cendre verdâtre; la poitrine et le ventre d'un cendré blanchâtre : il marche à quatre pieds, et 1E n’a qu'environ un pied de longueur, la tête et le corps compris. La femelle est sujette à l'écoulement périodique. | S PL 7 - | PL. 23, YIISSS ÈS KE LE TALAPOIN Ne acquer” #. PDP AL AP OIN* \ Crrrr suenon est de petite taille, ‘et d'une assez jolie fisure. Son nom paroitroit indiquer qu'elle se trouve à Siam et daus les autres provinces de l'Asie orientale; mais nous ne pouvons l’assurer : seulement il est _ certain qu'elle est originaire de l'ancien con- tinent, et qu'elle ne se trouve point dans le nouveau, parce qu’elle a des abajoues et des callosités sur les fesses, et que ces deux ca- ractères n’appartiennent ni aux sagouins ni aux sapajous, qui sont les seuls animaux du nouveau monde qu’on puisse comparer aux guenons. Ce qui me porte à croire, indénendam= ment du nom, que cetle guenon se trouve plus communément aux Indes orientales qu'en Afrique, c’est que les voyageurs rap- portent que la plupart des singes de cette partie de l’Asie ont le poil d'un verd brun. * T'alapoin , nom sous lequel ce singe nous à été donné, et que nous avons adopté. \ +4 cs 16 HISTOIRE NATURELLE « Les singes du Guzarate, disent-ils, sont « d’un verd brun; ils ont la barbe et les « sourcils longs et blancs. Ces animaux, que «les Banianes laissent multiplier à l'infini « par un principe de religion, sont si fami- « liers, qu’ils entrent dans les imaisons à &« toute heure et en si grand nombre, que « les marchands de fruits et de confitures «ont beaucoup de peine à conserver leurs « marchandises. » ce M. Edwards a donné la figure et la des- cription d'une guenon sous le nom de s;z2ge xoir de moyenne grandeur, qui nous pa= roît approcher de l’espèce du talapoin plus _ que d'aucune autre. J'ai cru devoir en rap | porter ici la description *, et renvoyer à Ja * Ce singe étoit à peu près de la taille d’un gros chat; il étoit d’un naturel doux, ne faisant mal à personne... C’étoit un mâle, et il étoit un peu. vieux........ Sa tête étoit assez ronde; la peau de son visage toit d’une couleur de chair rembrunie, couverte de poils noirs assez clair-semés ; les oreilles étoient faites comme celles de Phomme; les yeux étoient d’une couleur de noïsette rougeûtre, avec les paupières noires : le poil étoit long au-dessous des yeux, et les sourcils se joïgnoient ; 1] étoit long aussl EU DALAPOIN. 163 figure donnée par M. Edwards, pour qu’on puisse comparer ces animaux : ON verra qu'à l'exception de la grandeur et de la couleur ils se ressemblent assez pour qu'on doive présumer que ce sont au moins deux espèces bien voisines, si ce ne sont pas des variétés de la même espèce. Dans ce cas, comme nous ne sommes pas sûrs qué notre talapoin soit natif des Indes orientales, et que M. Edwards assure que celui qu’il décrit venoit de Guinée, nous rendrions le talapoin à ce mème climat, ou bien nous supposerions que cette espèce se trouve également dans les terres du midi de l'Afrique et de l'Asie. C'est vraisemblablement cette même espèce sur les tempes, et couvroit en parte les oreilles : la tête, le dos, les jambes de devant et de derrière et la queue, étoient couverts d’assez longs poils d’un brun noirâtre, qui n'étoient ni trop doux ni trop rudes; la poitriue, le ventre, eic. éloient presque sans poils, d’une couleur de chair rembrunie, ayant des bouts de sein à la poitrine. Les quatre pattes étoient faites à peu près comme la main de l’homme, étant couvertes d’une peau douce et noire presque sans poils ; les ongles étoient plats. (Glanures d'Eéwards ; page 221.) ; | or Bosman sous le C neljes, et dont il dit que la pra f bonne fourrure, X 4 Ÿ # î 4 à 54 OUTRE MREREEACS = EL Eire lt ai r4 d 3 STATE ÿ * 3 3 PHDOUC* ; \ Le douc,est le dernier de la classe des ani- maux quenousayonsappelés si7ges, babouins et ZuUenons, Sans être précisément d'aucun de ces trois genres, il participe de tous; il tient des guenons par sa queue longue, des babouius par sa grande taille, et des singes par sa face plate : 1l a de plus un caractère particulier, et par lequel il paroit faire la nuance entre les guenons et les sapajous. Ces deux familles d'animaux diffèrent entreelles en ce que les guenons ont les fesses pelees, et que tous les sapajous les ont couvertes de poil. Le douc est la seule des guenons qui ait du poil sur les fesses comme les sapajous. Il Jeur ressemble aussi par l’applatissement du museau : imais en tout il approcheinfiniment plus des guenons que des sapajous , desquels * Douc, nom de cet animal à la Cochinchine, et que nous avons adopté. Ce nom, que nous 1gn0- rlons, nous a été donné par M. Poivre, aussi-bien que l’auimal méme. Sfac à Madagascar. 166 HISTOIRE NATURELLE il diffère en ce qu’il n’a pas la queue prenante, et aussi par plusieurs autres caractères essen— tiels. D'ailleurs l'intervalle qui sépare ces deux familles est immense , puisque le douc ét toutes les guenons sont. de l’ancien conti- nent, tandis que tous les sapajous ne se trouvent que dans le nouveau. On pourroit dire aussi, avec quelque raison, que le douce ayant une longue queue comme les suenons , et n'ayant pas comme elles des callosités sur les fesses, il fait la nuance entre les orangs- outangs et les suenons , comme le sibbon la fait aussi à un autre égard, n’ayant point de queue comme Les orangs-outangs , mais ayant des callosites sur les fesses comme les gue— nons. Indépendamiment de ces rapports géne- raux , le douc a des caractères particuliers par lesquels ‘il est très-remarquable et fort aisé à distinguer de tous les singes, babouins guenons ou sapajous, même au premier coup ne d'œil ; sa robe variée de toutes couleurs. semble indiquer l’ambiguité de sa nature, et en même temps différencier son espèce d'une manière évidente. Il porte autour du cou un collier d’un brun pourpre , autour des joues une barbe blanche; il a les lèvres et le tour £ | BUBOUC. 167 des yeux noirs, la face et Les oreilles rouges, : le dessus de la tête et le corps gris, la poiz trine et le ventre jaunes; les jambes blanches en bas, noires en haut ; la queue blanche avec une large tache de même couleur sur les lombes; les pieds noirs avec plusieurs autres nuances de couleur. Il me paroît que cet ant- mal, qu’on nous a assuré venir de la Cochin- chine, se trouve aussi à Madagascar, et que c’est le même que Flaccourt indique sous le mom de si/ac dans les termes suivans. : « À « Madagascar , il y a, dit-il, une autre « espèce de suenuche blanche, qui a un cha- « peron tanné , et qui se tient le plus souvent « sur les pieds de derrière ; elle a la queue « blanche etdeux taches tannées sur les flancs : «elle est plus grande que le vari (mococo), « mais plus petite que le varicossi (vari). « Cetteespèces’appelle s/fac ;elle vit de féves : « il y en a beaucoup vers Andrivoure, Dam- « bourlomb et Ranafoulchy ». Le chaperon ou collier .tauné , la queue blanche , les taches sur les Hancs , sont des caractères qui indiquent assez clairement que ce sifac de: Madagascar est de la mème espèce que ke douc de la Cochinchine ’ 368 | HISTOIRE NATURELLE LES voyageursassurentquelesgrandssinges des parties méridionales de l'Asie produisent des bézoards qu'ou trouve dans leurestomac, et dont la qualité est supérieure à celle des bézoards des chèvres et des gazelles. Ces grands singes des parties méridionales de l'Inde sont l’ouanderou et le douc ; nous croyons donc que c'est à ces espèces qu’il faut rapporter la production des bézoards. On prétend que ces bézoards de singe sont tou= jours d’une forme ronde, au lieu que les autres bézoards sont de différentes figures *. * « Comme les singes, aussi-bien que les chèvres, « mangent les boutons de certains arbrisseaux, il se. « produit dans leur ventre des pierrés de bézoard : « on en trouve souvent dans leurs excrémens , que « la peur qu ls ont d’être battus leur fait lâcher eu ÿ! «courant. Ces pierres de bézoard sont les plus « chères et les plus estimées de toutes celles qui se « trouvent dans les Indes ; elles sont aussi plus : « rondes que les autres, et ont bien plus de force : « on a éprouvé quelquefois qu’un grain de celles-ci « avoit autant d'effet que deux de celles qui viennent . « des chèvres. » (Description historique de Paca=. car, page 51.) + ER À CAP u DU DOUC. - 169 Caractères distinctifs de cette espèce. | S | LE douc n’a point de callosités sur les fesses ; il les a garnies de poil par-tout : sa queue, quoique longue, ne l’est pas autant que la tête et le corps pris ensemble, 1l a la face rouge et couverte d'un duvet roux, les oreilles nues et de même couleur que la face ; les lèvres brunes , aussi-bien que les orbites des yeux; le poil de couleurs très-vives et très-variées : il porte un bandeau et un col- lier d’un brun pourpre; il a du blanc sur le front, sur la tête, sur le corps, les bras, les jambes , etc. une espèce de barbe d’un blanc jaunûâtre ; il a du noir au-dessus du front et à la partie supérieure des bras ; les parties du dessous du corps sont d’un gris cendré et d’un jaune blanchätre; la queue est blanche, aussi-bien que le bas des lombes : il marche aussi souvent sur deux pieds que sur quatre, et il a trois pieds et demi ou quatre pieds de hauteur lorsqu'il est debout. J’ignore si les femelles dans cette espèce sont ee à à l'écoulement périodique. : Hu DE LA DÉGÉNÉRATION DES ANIMAU X. D: s que l’homme à commencé à changet de ciel, et qu'il s'est répandu de climats en climats, ea nature a subi des altérations : elles ont été légères dans les contrées tempé= rées, que nous supposons voisines du lieu de son origine; mais elles ont augmenté à me- sure qu’il s’en est éloigné ; et lorsqu'après des siècles écoulés, des continens traversés, et des générations déja dégénérées par l'influence des différentes terres , il a voulu s’habituer dans les climats extrèmes et peupler les sables du Midi et les glaces du Nord, les change mens sont devenus si grands et si sensibles, qu'il y auroit lieu de croire que le Nègre, le Lappon et le Blanc , forment des espèces dif. férentes , si, d’un côté, F’on n'’étoit assuré 4 (à à ER D : Hat té dj F4 « LFRR à | HISTOIRE NATURELLE. r7r qu'il n'y a eu qu'un seul homme de créé, et dé l’autre, que ce Blanc, ce Lappon et ce Nègre, si dissemblans entre eux, peuvent cependant s'unir ensemble et propager en commun la grande et unique famille de notre genre humain. Ainsi leurs taches ne sont point originelles ; leurs dissemblances n’é- taut qu'exterieures, ces alterations de nature | ne sont que superficielles, et il est certain que tous ne font que le même homme, qui s’est verni de noir sous la zone torride, et qui s'est tanné, rapetissé par le froid glacial du pole de la sphère. Cela seul sufroit pour nous démontrer qu’il y a plus de force, plus d'étendue, plus de flexibilité dans la nature de l’homme que dans celle de tous les autres êtres ; car les végétaux et presque tons les animaux sont confinés chacun à leur terrain, à leur climat : et cette étendue dans notre nature vient moins des propriétés du corps que de celles de l'ame; c’est par elle que l’homme a cherché” les secours qui étoient nécessaires à la délicatesse de son corps; c’est par elle quil a trouve Les moyens de braver l'inclémence de l'air et de vaincre la dureté de la terre: 1l s’est, pour ainsi Hire, soumis ÿ: Un AE NS SC OT REA _- SA EM st 0 AUR tr2 (DÉGÉNÉRATION les élémens ; par un seul rayon de son intel k\ ». ligence, il a produit celui du feu, quin’exis- | toit pas sur la surface de la terre; il a su se vêtir , s’'abriter, se loger; il a compensé par -. l'esprit toutes Les facultés qui manquent à la matière; ef, sans être ni si fort, ni si grand, ni si robuste que la plupart des ani= maux, il a su les vaincre, les domter, les subjuguer, les confiner, les chasser, et s’em- parer des espaces que la Nature sembloit leur avoir exclusivement départis. | La grande division de la terre est celle des deux continens ; elle est plus ancienne que tous nos monumens : cependant l'homme est encore plusancien ; carils’est trouvé le même dans ces deux mondes : l’Asiatique, l'Euro- . péen , le Nègre, produisent également avec Américain ; rien ne prouve mieux qu ils sont issus d'une seule et même souche que ec facilité qu’ils ont de se réunir à la tige com- mune : le sang est différent, mais le germe est le mème ; la peau, les cheveux, les traits, la taille, ont varié sans que la forme inté- rieure ait changé ; le type en est général et commun ; et s’il arrivoit jamais, par des révolutions qu'on ne doit pas prévoir, mais / DES ANIMAUX. 175 . seulement entrevoir dans l’ordre général des possibilités que le temps peut toutes amener ; s'il arrivoit, dis-je, que lhomme fût con- iraint d'abandonner les climats qu'il aautre- fois envahis, pour se réduire à sou pays natal, il reprendroit, avec Le temps, ses traitsorigi- naux , sa taille primitive et sa couleur natu- relle. Le rappel de l’homme à son climat ame- neroit cet effet : le melange des races l’ame- neroit aussi et bien plus promptement ; le blanc avec la noire, ou le noir avec la _ blanche, produisent également un mulâtre dont la couleur est brune, c’est-à-dire, mé- lée de blanc et de noir; ce mulâtre avec un blanc produit un second mulâtre moins brun que le premier; et si ce second mulâtres’unit Ge même à un individu de race blanche, le troisième mulâtre n’aura plus qu'unenuance Kgère de brun, qui disparoîtra tout-à-fait daus les générations suivantes. Il ne faut donc que cent cinquante ou deux cents ans. pour laver la peau d’un nègre par cette voie du mélange avec le sang du blanc ; mais il faudroit peut-être un assez grand nombre de siècles pour produire ce même effet par la seule influence du climat. Depuis qu’on trans | 1& LES NN En 174. DÉGÉNÉRATI [ON porte des nègres en Amérique, € 'est-à-dire Fee depuis environ deux cent cinquante ans, Von ne s’est pas apperçu que les familles noires qui se sont soutenues sans mélange, aient perdu quelques nuances de leur teinte originelle; il est vrai que ce climat de l'A- mérique méridionale étant par lui- même assez chaud pour brunir ses habitans , on ne doit pas s'étonner que lesnègres y demeurent noirs. Pour faire l’expérience du changement de couleur dans l’espèce humaine, il faudroit transporter quelques individus de cette race noire du Sénégal en Danemarck , où l’homme ayant communément la peau blanche, les cheveux blonds, les yeux bleus, la différence du sang et l'opposition de couleur est la plus grande ; il faudroit cloîtrer ces nègres avec leurs femelles, et conserver scrupuleusement teur race sans leur permettre de Ia croiser : ce moyen est le seul qu’on puisse employer pour savoir combien il faudroit de temps pour réintégrer à cet égard la nature de l’homme , et, par la même raison , combien il en à iii pour la changer du blanc au noir. j' DS €'est Fa la plus: srende altération que Le ciel DB AN LM A U X; 1 590 ait fait subir à l’homme, et l’on voit qu’elle n’est pas profonde. La couleur de la peau, des cheveux et des yeux, varie par la seule influence du climat : les autres changemens, tels que ceux de la taille, de la forme des traits et de la qualité des cheveux, ne me paroissent pas dépendre de cette seule cause; car, dans la race des nègres, lesquels, comme l'on sait, ont, pour la plupart, la tête cou- verte d’une laine crépue , le nez epaté, les lèvres épaisses , on trouve des nations entières avec de longs et vrais cheveux, avecdes traits réguliers ; et si l’on comparoit, dans la race des blancs, le Danois au Calmouck , ou seulement. le Finlandois au Lappon dont il est si voisin, on trouveroit entre eux autant de différence pour les traits et la taille qu’il y en a daus la race des noirs; par conséquent il faut admettre pour ces altérations, qui sont plus profondes que les premières , quel- ques autres causes réunies avec celle du cli- mat. La plus générale et la plus directe est la qualité de la nourriture; c’est principale- ment par les alimens que l’homme reçoit l'influence de la terre qu’il habite : celle de l'air et du ciel agit plus superfciellement ; 4 Ls l Se NO ps. à | F TOMATE 156 DÉGÉ * ÉR FA TI OT et tandis qu’elle altère la cure ka plus ex= térieure en changeant la couleur de la peau, la nourriture agit sur la. forme intérieure par ses propriétés, qui sont constamment relatives à celles de la terre qui la produit. On voit, dans le même pays, des différences marquées entre les hommes qui en occupent les hauteurs et ceux qui demeurent dans les lieux bas ; les habitans de la montagne sont toujours mieux faits, plus vifs et plus beaux que ceux de la vallée : à plus forte raison dans des climats éloignés du climat primitif, dans des climats où les herbes, Les fruits & les grains et la chair des animaux sont de qualité et même de substance différentes , les hommes qui s’en nourrissent doivent des venir différens. Ces impressions ne se font pas subitement, ni même dans l’espace de quelques années : il faut du temps pour que l'homme reçoive la teinture du ciel ; il em faut encore plus pour que la terre lui trans- melte ses qualités, et il a fallu des siècles, joiuts à un usage toujours constant des mêmes nourritures , pour influer sur la forme des traits, sur la grandeur du corps, sur la subs- tance des cheveux, et produire ces altéra= PP AN 1 M À U X 6 vo tions intérieures , qui, s'étant ensuite perpé- tuées par la génération , sont devenues les caractères généraux et constans auxquels on _ reconnoit les races et même les nations dif- férentes qui composent le genre humain. _ Dans les animaux , ces effets sont plus prompts et plus grands, parce qu’ils tiennent à la terre de bien plus près que l’homme; parce que leur nourriture étant plus uni- forme, plus constamment la même, et n’é- tant nullement préparée, la qualité en est « plus décidée et l’influence plus forte; parce que d’ailleurs les animaux ne pouvant ni se vêtir, nis’abriter, ni faire usage de l'élément du feu pour se réchauffer, ils demeurent nüment exposés et pleinement livrés à lac tion de l'air et à toutes les intempéries du climat : et c’est par cette raison que chacun d'eux a, suivant sa nature, choisi sa zone et sa contrée ; c'est par la mème raison qu'ils y sont retenus, et qu'au lieu de s'étendre ou de se disperser comme l’homme , ils demeu- rent, pour la plupart, concentrés dans les lieux qui leur conviennent le mieux ; et. lorsque, par des révolutions sur le globe ou par la force de l’homme, ils ont été con- 198 DÉGÉNÉRA traints d'abandonner leur terre natale, qu Pile ke ont été chassés ou relégués dans des climats éloignés, leur nature a subi des altérations si grandes et si profondes , qu’elle west pas reconnoissable à la première vue, et que, pour la juger, il faut avoir recours à l’ins- pection la plus attentive, et même aux ex- périences et à l’analogie. Si l’on ajoute à ces causes naturelles d’altération dans les ani- maux libres, celle de l'empire de l'homme sur ceux qu'il a réduits en servitude, on sera surpris de voir jusqu'à quel point la tyrannie peut dégrader, déligurer la Nature; on trou- vera sur tous les animaux esclaves les stig- mates de leur captivité et l'empreinte de leurs fers; on verra que ces plaies sont d'au tant plus grandes , d'autant plus incurables, - qu'elles sont plus anciennes, et que, dans l'état où nous les avons réduits, 1l ne seroit peut-être plus possible de les réhabiliter, ni de leur rendre leur forme primitive et les autres attributs de nature que nous leur avons enlevés. La température du climat, la qualité de la nourriture et les maux d’esclavage, voilà les trois causes de changement, d’altération et PME SNMAON D M À U X 15 de dégénération dans les animaux. Les effets de chacune méritent d’être considérés en particulier, et leurs rapports vus en détail nous présenteront un tableau au-devant du quel on verra la Nature telle qu’elle est au jourd'hui, et, dans le lointain, on apperce- vra ce qu’elle étoit avant sa dégradation. Comparons nos chétives brebis avec le mouflon dont elles sont issues : celui-ci, grand et léger comme un cerf, armé de cornes défensives et de sabots épais, couvert d’un poil rude, ne craint ni l'inclémence de l’air ni la voracité du loup ; il peut non seulement éviter ses ennemis par la légéreté de sä course; mais il peut aussi leur résister par la force de son corps et par la solidité des armes dont sa têle el ses pieds sont munis. Quelle différence de nos brebis; auxquelles il reste à peine la faculté d’exister en trou- peau, qui même ne peuvent se défendre par le nombre ; qui ne soutiendroient pas sans abri le froid de nos hivers, enfin qui toutes périroient si l’homme cessoit de les soigner et de les protéger ! Dans les climats les plus chauds de l'Afriqueet de l'Asie, le mouflon, qui est le père commun de toutes les races ï k à 218 Lt . aa RS ‘ ni in . 280 DÉC EE UN - de cette ‘espèce, paroît avoir moins dégénéré que par-tout ailleurs ; quoique réduit em domesticité, il a conserve sa taille et son poil : seulement il a beaucoup perdu sur la grandeur et la masse de ses armes. Les brebis © du Sénéeal et des Indes sont les plus grandes des brebis domestiques, et celles de toutes dont la nature est la moins dégradée : les brebis de la Barbarie, de l'Écypte, de l’Ara- bie, de la Perse , de l'Arménie , de la Cal- mouquie , etc. out subi de plus grands chan- gemens ; elles se sont, relativement à nous, perfectionnées à certains égards, et viciées à d’autres : mais, comme se perfectionner ou se vicier est la même chose relativement à la Nature, elles se sont toujours dénaturées : Jeur poil rude s’est changé en une laine fine; leur queue s'étant chargée d’une masse de graisse, a pris un volume incommode et si grand, que l’animal ne peut la traîner qu’a- vec peiue; et en même temps qu'il s’est bouffi d’une matière supertlue et qu’il s’est paré d’une belle toison , il a perdu sa force, son agilité, sa grandeur et ses armes ; car ces brebis à longue et large queue n’ont suère que la moitié de la taille du mouflou. Elles - PDE S'UAN I M'A UXUT xl ne peuvent fuir le danger ni résister à l’en= nemi ;: elles ont un besoin continuel des se cours et des soins de l'homme pour se coniser: ver et se multiplier. La dégradation de l’ess pèce originaire est encore plus grande dans nos climats : de toutes les qualités du mou- flon , il ne reste rien à nos brebis, rien à nôtre belier , qu'un peu de vivacité, mais si douce, qu’elle cède encore à la houlette d’une bergère ; la timidité , la foiblesse, et même la stupidité et l'abandon de son être, sont les seuls et tristes restes de leur nature dé- gradée. Si l’on vouloit la relever pour la force et la taille, 1l faudroit unir le mouflon avec notre brebis flandrine, et cesser de propager les races inférieures ; et si, comme chose plus utile, nous voulons dévouer cette espèce. à ne nous donner que de la bonne chairetde _ Ja belle laine, il faudroit au moins, comme l'ont fait nos voisins, choisir et propager la race des brebis de Barbarie, qui, transpor- tée en Espagne et même en Angleterre, a très-bien réussi: La force du corps et la grandeur de la taille sont des attributs mas- culins ; l’embonpoint et la beauté de la peati sont des qualités féminines. [l faudroit don£, Quadrupèdes, V 1L. 16 ! À a du ie 117 18 DÉGÉNÉ À ATION dans le procédé des mélanges, obrdtvet cette différence, donner à nos beliers des femelles de Barbarie pour avoir de belles laines , et donner le moutlon à nos brebis me en srele* ver la taille, ie +294 IL en seroit à cet égard de nos chèvres comme de nos brebis; on pourroit, en les 8 inélant avec la chèvre d’ Angora > changer leur poil, et le rendre aussi utile que la plus belle laine. L'espèce de la chèvre en général, quoique fort dégénérée, l’est cependant moins | que celle de la brebis dans nos climats ; elle paroît l’être davantage dans les pays chauds de l'Afrique et des Indes. Les plus petites et les plus foibles de toutes les chèvres sont. celles de Guinée, de Juda, etc.: et, dans ces. mêmes climats, l’on trouve au contraire les plus grandes et les plus fortes brebis. L'espèce du bœuf est celle de tous les ani- maux domestiques sur läquelle la nourriture paroit avoir Ja plus grande influence : il de- vient d’une taille prodigieuse dans les con- trées où le pâturage est riche et toujours re- naissant. Les anciens ont appelé faureaux- éléphans les bœufs d'Éthiopie et de quelques autres provinces de l'Asie, où ces animaux LS DES ANIMAUX. 1:83 approchent en effet de la grandeur de l’élé- phant. L’abondance des herbes et leur qua- lité substantielle et succulente produisent cet effet; nous en avons la preuve même dans notre climat ; un bœuf nourri sur les têtes _des montagnes vertes de Savoie ou de Suisse, acquiert le double du volume de celui de nos bœufs, et neanmoins ces bœufs de Suisse sont, comme les nôtres, enfermés dans l’é- table, et réduits au fourrage pendant la plus graude partie de l’année : mais ce qui fait cette grande différence, c’est qu’en Suisse on les met en pleine pâture , dès que les neiges sont fondues , au lieu que dans nos pro- vinces on leur interdit l'entrée des prairies jusqu’après la récolte de l’ herbe qu'on réserve aux chevaux. Ils ne sont donc jamais ni lar- gement ni convenablement nourris SIG TC seroit une attention bien necessaire , bien utile à l'État, que de faire un réglement à cet égard, par lequel on aboliroit les vaines pâ- tures en permettant les enclos. Le climat a aussi beaucoup influé sur la nature du bœuf: dans les terres du nord des deux conitinens, il est couvert d'un poil long et doux comme de la fine laine ; il porte aussi une grosse il DÉGÉNÉERA Tr Fe RL ; | 7 loupe sur les épaules , et cette difformité se irouve également dans tous les bœufs de PA- sie, de l'Afrique et de l'Amérique. Il n’y a que ceux d'Europe qui ne soient pas bossus ; cette race d'Europe est cependant la race pri- mitive, à laquelleles races bossues remontent par le mélange dès la première ou la seconde génération : et ce qui prouve encore que cette race bossue n’est qu'une variété-de la pre- . mière , c'est qu’elle est sujette à de plus grandes altérations et à des désradations qui paroissent excessives; car il y a dans ces bœufs bossus des différences énormes pour la taille ; le petit zébu de l'Arabie a tout au plus la dixième partie du volume du taureau- éléphant d’Éthiopie. En général , l'influence de la nourriture est plus grande et produit des effets plus sensibles sur les animaux qui se nourrissent d'herbes ou de fruits ; ceux , au contraire, qui ne vivent que de proie, varient moins par celte cause que par l’influence du climat, parce que la chair est un aliment préparé et déja assimilé à la nature de l’animal carnas- sier qui la dévore , au lieu que l'herbe étant le premier produit dela terre , elle en a toutes DES ANIMAUX. 185 les propriétés, et transmet immédiatement les qualités terrestres à l'animal qui s’en nourrit. | Aussi Le chien, sur lequel la nourriture ne paroît avoir que de légères influences, est néanmoins celui de tous les animaux carnas- siers dont l’espèce est la plus variée ; il semble suivre exactement dans ses dégradations les différences du climat : il est nud dans les pays les plus chauds, couvert d’un poil épais et rude dans les contrées du Nord, paré d’une belle robe soyeuse en Espagne, en Syrie, où la douce température de l’air change le poil de la plupart des animaux en une sorte de soie. Mais, indépendamment de ces variétés extérieures qui sont produites par la seule influence du climat, il y a d’autres altéra- tions dans cette espèce qui proviennent de sa condition , de sa captivité, ou, si l’on veut, de l’état de société du chien avec l’homme. L'augmentation ou la diminution de la taille viennent des soins que l’on a pris d'uniren- semble les plus grands ou les plus petits indi- vidus ; l’accourcissement de la queue, du museau , des oreilles, provient aussi de la main de l’homme. Les chiens auxquels, .. J6 É RENE ENE 4 LE NAN HAN 186 BÉGÉN EN SU | génération en cénération , on a coupé les oreilles et la queue, transmettent ces defauts, en tout ou en partie, à leurs descendans. J'ai vu des chiens nés sans queue, que je pris d’abord pour des monstres individuels dans l'espèce; mais je me suis assuré depuis, que cette race exisle, et qu'elle se perpétue par la sénération. Et les oreiiles pendantes, qui sout le signe le plus général et le plus certaim de la servitude domestique, ne se trouvent- elles pas dans presque tous les chiens ? Sur environ trente races différentes dont l’esnèce est aujourd'hui composée, il n’y en a que deux ou trois qui aient conservé leurs oreilles primitives. Le chien de berger , le chien loup et les chiens du Nord, ont seuls les’ oreilles droites. La voix de ces animaux a subi , comme tout le reste, d'étranges mu- tations. IL semble que le chien soit devenu criard avec l’homme, qui, de tous les êtres qui ont une langue, est celui qui en use et abuse le plus : car, dans l’état de nature, le chien est presque muet ; 1l n'a qu'un hur- lement de besoin par accès assez rares. IL a pris son aboiement dans son commerce avec l'homme, sur-tout avec l homme police; ca DES ANIMAUX. 187 lorsqu'on le transporte dans des climats ex- trêmes et chez des peuples grossiers, tels que les Lappons et Les Nègres , il perd son aboie- ment, reprend sa voix naturelle, qui est le hurlement, et devient même quelquefois ab- solument muet. Les chiens à oreilles droites, et sur—tout le chien de berger, qui-de tous est celui qui a le moins dégénéré, est aussi . celui qui donne le moins de voix. Comme il _ passe sa vie solitairement dans la campagne, et qu’il n’a de commerce qu'avec les moutons et quelques hommes simples, il est, comme eux, sérieux et silencieux, quoiqu'en même temps il soit très-vif et fort intelligent. C’est de tous les chiens celui qui a le moins de qualités acquises et le plus de talens natu- rels; c’est Le plus utile pour le bon ordre et pour la garde des troupeaux, et il seroit plus avantageux d'en multiplier , d'en étendre la race se celles des autres chiens, qui ne ser- vent qu'à nos amusemens , et dont le nombre est si grand, qu'il n'y a point de villes où l'on ne pût nourrir un nombre de familles des seuls alimens que les chiens consomment. L'état de domesticité a beaucoup countri- bué à faire varier la couleur des animaux: \ 108 DÉGÉNÉRATION. elle est en général, originairement fauve ou noire, Le chien, le bœuf, la chèvre, la bre bis, le cheval, ont pris toutes sortes de cou leurs ; le cochon a changé du noir au blanc, et 1l paroït que le blanc pur et sans aucune tache est à cet égard le signe du dermier degré de dégénération , et qu'ordinairement il est accompagné d’imperfections ou de de- fauts essentiels. Dans la race des hommes blancs, ceux qui le sont beaucoup plus que les autres, et dont les cheveux, les sourcils, la barbe, etc. sont naturellement blancs, ont souvent le défaut d’être sourds, et d’avoir en même temps les yeux rouges et foibles ; dans la race des noirs, les nègres blancs sont en- core d’une nature plus foible et plus défec- tueuse. Tous les animaux absolument blancs ont ordinairement ces mêmes défauts de l’o- reille dure et des yeux rouges : cette sorte de dégénération , quoique plus fréquente dans les animaux domestiques , se montre aussi quelquefois dans les espèces libres , comme dans celles des éléphans, descerfs, des daims, des guenons, des taupes, des souris ; et dans toutes, cette couleur est toujours accompa- guée de plus ou moiïvs de foiblesse de corps et d'hébétation des sens, < À AT D MRIT JfeR DT EN ES NL. DES ANIMAUX. 189 Mais l’espèce sur laquelle le poids de l’es- clavage paroît avoir le plus appuyé et fait les impressions les plus profondes, c’est celle du chameau. Il naît avec des loupes sur le dos, et des callosités sur la poitrine et sur les genoux : ces callosités sont des plaies évi- dentes occasionnées par le frottement ; car elles sont remplies de pus et de sang corrom- pu. Comme il ne marche jamais qu'avec une grosse charge, la pression du fardeau a com-— mencé par empêcher la libre extension et l'accroissement uniforme des parties muscu- leuses du dos , ensuite elle a fait gonfler la chair aux endroits voisins ; et comme, lors- que le chameau veut se reposer ou dormir, on le contraint d’abord à s’abattre sur ses jambes repliées, et que peu à peu il en prend l'habitude de lui-même, tout le poids de son corps porte, pendant plusieurs heures de suite chaque jour, sur sa poitrine et ses ge- noux, et la peau de ces parties, pressée, frottée contre la terre, se dépile, se froisse, se durcit et se désorganise. Le lama, qui, comme le chameau, passe sa vie sous le far- deau , et ne se repose aussi qu’en s’abattant sur la poitrine , a de semblables callosités 1» DÉGÉNÉRATION, A 2 qui se perpétuent de même par la génération. $ Les babouins et les guenons, dont la posture la plus ordinaire est d’être assis, soit en veillant, soit en dormant, ont aussi des cal- losités au-dessous de la région des fesses, et cette peau calleuse est même devenue inhé= rente aux os du derrière contre lesquels elle est continuellement pressée parde poids du corps; mais ces callosités des babouins et des guenons sont sèches et saines, parce qu’elles ne proviennent pas de la contrainte des en- traves ni du faix accablant d’un poids étran- ger, et qu’elles ne sont au contraire que les effets des habitudes naturelles de l'animal qui se tient plus volontierset plus long-temps assis que dans aucune autre situation. Il en est de ces callosités des guenons comme de la double semelle de peau que nous portons sous nos pieds ; cette semelle est une callo- sité naturelle que notre habitude constante à marcher ou rester debout rend plus ou moins épaisse, ou plus ou moins dure, selon le plus ou le moins de frottement que nous faisons éprouver à la plante de nos pieds. Les animaux sauvages, n'étant pas imme- diatement soumis à l'empire de l'homme , DES ANIMAUX. 19r ne sont pas sujets à d'aussi grandes altéra- tions que les animaux domestiques ; leur nature paroit varier suivant les différens climats, mais nulle part elle n’est dégradée. S’ils étoient absolument les maîtres de choi2 sir leur climat et leur nourriture, ces altéra- tions seroient encore moindres: mais comme de tout temps ils ont été chassés, relégués par l'homme, ou même par ceux d’entre eux qui ont le plus de force et de méchanceté, ! plupart ont été contraints de fuir, d’äban- donner leur pays natal et de s’habituer dans des terres moins heureuses. Ceux dont la nature s’est trouvée assez flexible pour se - prêter à cette nouvelle situation, se sont ré pandus au loin , tandis que Îes autres n’ont eu d'autre ressource que de se confiner dans les déserts voisins de leur pays. Il n’y a au- cuñe éspèce d'animal qui, comme celle de l’homme , se trouve généralement par-tout sur la surface de la terre : les unes, et en grand nombre , sont bornées aux terres mé- ridionales de l’ancien continent; les autres, aux parties méridionales du nouveau monde; d’autres, en moindre quantité, sont confi- nées dans les terres du Nord, et au lieu de 192. DÉGÉNÉRATION + s'étendre vers Les contrées du Midi, ci 4 | “passé d’un continent à l’autre par des routes jusqu’à ce jour inconnues ; enfin quelques autres espèces n’habitent que certaines mon- tagnes ou certaines vallées, et Les altérations de leur nature sont en général d'autant moins sensibles qu’elles sont plus confinées. Le climat et la nourriture ayant peu d’in- fluence sur les animaux libres , et l'empire de l’homme en ayant encore moins, leurs principales variétés viennent d'une autre cause ; elles sont relatives à la combinaison du nombre dans les individus, tant de ceux qui produisent que de ceux qui sont pro- duits. Dans les espèces, comme celle du chevreuil, où le mäles’attache à sa femelle et ne la change pas, les petits démontrent la constante fidélité de leurs parens par leur. entière ressemblance entre eux : dans celles au contraire où les femelles changent sou vent de mâle, comme dans celle du cerf, il se trouve des variétés assez nombreuses; ek comme dans toute la Nature il n y a pas un seul individu qui soit parfaitement ressem- : blant à un autre, il se trouve d'autant plus de variétés dans les animaux, que Ie uombre - DÉS ANIMAUX. 195 ‘de leur produit est plus grand et plus'fré- quent. Dans les espèces où la femelle pro- duit cinq ou six petits, trois ou quatre fois par an , de mâles différens , il est nécessaire que le nombre des variétés soit beaucoup plus grand que dans celles où le produit ‘est annuel et unique : aussi les espèces inférieures , les petits animaux qui tous produisent plus souvent et en plus grand mombre que ceux des espèces majeures, ‘sont-elles sujettes à plus de variétés. La grandeur du corps, qui ne paroit être qu'une quantité relative, a néanmoins des attributs positifs et des droits réels dans l’ordonnance de la Nature; le grand y est aussi fixe que le petit y est variable : on pourra s’en con- vaincre aisément par l’énumération que nous allons faire des variétés des grands et des petits animaux. ; Le sanglier a pris en Guinée des ou très-longues et couchées sur Le dos ; à la Chine, .un gros ventre pendant et des jambes fort courtes; au cap Verd, et dans d’autres en- droits, des défenses très-grosses et tournées comme des cornes de bœuf; dans l’état de domesticité , il a pris par-tout des oreilles 27 294 à demi pendantes, et ÉROe tu sr, les pays froids ou tempérés. Je ne compte ni le pecari ni le babiroussa dans les variétés de l'espèce du sanglier , parce qu’ils ne sont ni l'un ni l’autre de cette espèce, quoiqu’'ils en approchent de plus près que d’aucune autre. Le cerf, dans les pays montueux, secs et chauds , tels que la Corse et la Sardaigne , a perdu la moitié de sa taille, et a prisun pelage brun avec un bois noirâtre ; dans les pays froids ét humides, comme en Bohème et aux Ardennes, sa taille s’est agrandie, son pelage et son bois sont devenus d’un brun presque noir, son poil s’est alongé au point | de former une longue barbe au menton. Dans le nord de l’autre continent, le boïs du cerf s’est étendu et ramifié par des andouillers courbes. Dans l’état de domesticité!, le pelage change du fauve au blanc; et à moins. que le cerf ne soit en liberté et dans de orañds espaces , ses jambes se déforment et sé éourbent. Je ne compte pas l’axis dans les variétés de l’espèce du cerf; il approche plus de celle du daim, et n’en é6st DEUPCER qu’une variété, PAU MENT On auroit peine à se décider + sur l'origine D DS A NT M'A DS 108 de l'espèce du daim ; il n’est nulle part en- tièrement domestique, ni nulle part abso- lument sauvage ; il varie assez indifférem- ment et par-tout du fauve au pie et du pie au blanc : son bois et sa queue sont aussi plus grands et plus longs suivant les diffé- rentes races , et sa chair est bonne ou mau- vaise selon le terrain et le climat. On le trouve comme le cerf dans les deux conti- neus , et il paroit être plus grand en Vir- ginie et dans les autres provinces de l'Amé- rique tempérée, qu'il ne l’est en Europe. IL: en est de même du chevreuil, il est’ plus grand dans le nouveau que dans l’ancien continent : mais au resle toutes ses variétés se réduisent à quelques différences dans la couleur du poil, qui change du fauve au brun; les plus grands chevreuils sont ordinaire- ment fauves , et les plus petits sont bruns. Ces deux espèces, le chevreuil et le daim, sont les seuls de tous les animaux communs aux deux continens , qui soient plus grands et plus forts dans le nouveau que dans l’an- cien. : | L’âne a subi peu de variétés , même dans sa condition de servitude la plus dure ; car L Ré Da ut je EAP RS Le FR sa nature est dure aussi, et résiste ME | aux mauvais traitemens et aux incommo- dités d’un climat fâcheux et d’unencurriture grossière. Quoiqu'il soit originaire des pays chauds , il peüt vivre et même se multi- plier sans les soins de l’homme dans les climats tempérés. Autrefois il y avoit des onagres ou ânes sauvages dans tous les dé- serts de l’Asie mineure : aujourd’hui ils y sont plus rares, et on ne les trouve en grande quantité que dans ceux de la Tartarie. Le mulet de Daurie, appelé czigithai par les Tartares Mongoux, est probablement le même animal que l’onagre des autres pro- vinces de l'Asie; il n’en diffère que par la longueur et les couleurs du poil, qui, selon M. Bell, paroit ondé de brun et de blanc. Ces onagres czigithais se trouvent dans les forêts de la Tartarie jusqu'au cinquante- unième et cinquante-deuxième degré; et il ne faut pas les confondre avec les zèbres, dont les couleurs sont bien plus vives et bien autrement tranchées, et qui d’ailleurs forment une espèce particulière presque aussi différente de celle de l’âne que de celle du cheval. La seule dégénération remarquable » [L ” D OI VAE DES ANIMAUX. 1:97 dans l’âne en domesticité , c’est que sa peaw s'est ramollie et qu’elle a perdu les petits tubercules qui se trouvent semés sur la peau de l’onagre, de Hquéle les Levantins font le cuir grenu qu'on appelle chagrin. Le lièvre est d’une nature flexible etferme en même temps , Car il est répandu dans presque tous les climats de l’ancien conti- nent, et par-tout il est à très-peu près le même : seulement son poil blanchit pen- dant l'hiver dans les climats très-froïids, et il reprend en été sa couleur vaturelle , qui ne varie que du fauve au roux. La qualité de Ja chaïr varie de mème ; les lièvres les plus rouges sont toujours les meilleurs à manger. Maïs le lapin, sans être d’une nature aussi flexible que le lièvre, puisqu'il est beau- coup moins répandu , et que même il paroît confiné à de certaines contrées, est néan— moins sujet à plus de variétés, parce que le lièvre est sauvage par-tout , au lieu que le lapin est presque par-tout à demi domes- tique. Les lapins clapiers ont varie par la couleur du fauve au gris, au blanc, au noir ; ils ont aussi varié par la grandeuf , la quan tité, la qualité du poil. Cet animal, qui est 17 Pc E SE AFF ASANET Un Re UE. 298 DÉGÉNÉRATION originaire d’ Espagne , à pris A julie une queue longue, en Syrie du poil touffu et pe- lotonné comme du feutre , etc. On trouve quelquefois des lièvres noirs dans les pays froids. On prétend aussi qu'il y a dans la Norvésge, et dans quelques autres provinces | du Nord, des lièvres qui ont des cornes. M. Klein a fait graver deux de ces lièvres cornus. Il est aisé de juger, à l'inspection des figures, que. ces cornes sont des bois sem— blables au bois du chevreuil. Cette variété , | _si elle existe, n’est qu'individuelle, et ne se manifeste probablement que dans les endroits où le lièvre ne trouve point d'herbes, et ne peut se nourrir que de substances ligneuses, d'écorce, de boutons, de feuilles d'arbres, de lichens, etc. L’élan , dont l'espèce est confinée dans le nord des deux continens, est seulement plus petit en Amérique qu’en Europe; et l’on voit par les énormes bois que l’on a trouvés sous terre en Canada , en Russie, en Sibérie, etc., qu'autrefois ces animaux étoient plus grands qu'ils ne Le sont aujourd’hui : peut-être cela vient-1l de ce qu'ils jouissoient en toute tran- quillité de leurs forêts , et que n'étant point LH DES ANIMAUX. | 199 inquiétés par l'homme, qui n’avoit pas en- core pénétré dans ces climats, ils étoient maîtres de choisir leur demeure dans les en- droits ou l'air, la terre et l’eau leur conve- noient le mieux. Le renne, que les Lappons ont rendu domestique , a, par cette raison, plus changé que l’élan , qui n'a jamais été réduit en servitude. Les rennes sauvages sont plus grands, plus forts et d’un poil plus noir que les rennes domestiques : ceux-ci ont ‘beaucoup varié pour la couleur du poil, et aussi pour la grandeur et la grosseur du bois. Cette espèce de lichen ou de grande mousse blanche qui fait la principale nourriture du renne , semble contribuer beaucoup par sa qualité à la formation ét à l’accroissement du bois, qui proportionnellement est plus grand dans le renne que dans aucune autre | espèce ; eb c’est peut-être celte même nour- riture qui, daus ce climat, produit du bois sur la fête du lièvre, comime sur celle de la femelle du renne ; car dans tous les autres climats il n’y a ni lièvres cornus:, ni aucun animal dont la femelle porte du bois comme Je mâie. L'espèce de Féléphant est.Ja seule suL 200 ÉGÉNÉ ÉRATION quelle l’état de servitude on de domesticité Ne nt 4 Hu A # Qu Al 4 1 n'a jamais influé, parce que dans cet état he refuse de produire , et par conséquent de transmettre à son espèce les plaies ou les dé- fauts occasionnés par sa condition. Il n’y a dans l’éléphant que des variétés légères et presque individuelles : sa couleur naturelle est le noir ; cependant il s’en trouve de roux et de blancs, mais en très-petit nombre. L’éléphant varie aussi pour la taille suivant la longitude plutôt que la latitude du cli- mat; car sous la zone torride, dans laquelle il est, pour ainsi dire, renfermé, et sous la même ligne, il s'élève jusqu’à quinze pieds de hauteur dans les contrées orientales de l'Afrique, tandis que dans les terres occiden- tales de cette même partie du monde il n’at- teint guère qu’à la hauteur de dix ou onze pieds; ce qui prouve que quoique la grande chaleur soit nécessaire au plein développe- ment de sa nature, la chaleur excessive læ restreint et la réduit à de moindres dimen- sions. Le rhinocéros paroît être d’une taille plus uniforme et d’une grandeur moins va riable : il semble ne différer de lui-même que par le caractère singulier qui le fait différer. DES ANIMAUX. | set de tous Les animaux, par cette grande corne qu'il porte sur le nez ; cette corne est simple _dans les rhinocéros de l'Asie, et double dans ceux de l'Afrique. Je ne parlerai point ici des variétés qui se trouvent dans chaque espèce d'animal car- nassier , parce qu’elles sont très-lésères, attendu que de tous les animaux ceux qui se nourrissent de chair sont les plus indé- pendans de l’homme , ét qu'au moyen de - cette nourriture déja préparée par la Nature, ils ne reçoivent presque rien des qualités de * la terre qu'ils habitent; que d’ailleurs, ayant tous de la force et des armes , ils sont les _ maîtres du choix de leur terrain, de leur cli- mat , etc.; et que par conséquent les trois. causes de changement, d’altération et de de- génération, dont nous avons parlé, ne peuvent avoir sur eux que de très-pelits effets. Mais après le cou» d'œil que lon vient de jeter sur ces varietés qui nous indiquent les altérations particulières de chaque espèce, 1l se présente une considération plus impor tante et dont la vue est bien plus étendue; c'est celle du changement des espèces mêmes, c'est cette dégénération plus ancienne et de 202 DÉGÉNÉRATION tout temps immémoriale , qui paroît s 'êtré faite dans chaque famille, ou, $i l’on veut, dans chacun des genres sous lesquels on peut comprendre les espèces voisines et peu diffé- rentes entre elles. Nous n'avons dans tous les animaux terresires que quelques espèces is0- lées qui, comme celle de l’homme, fassent en même temps espèce et genre; l'éléphant, le rhinocéros, l'hippopotame, la gitale forment des genres ou des espèces simples qui ne se propagent qu'en ligne directe, et n'ont aucune, branche collatérale : toutes les autres paroissent former des familles dans lesquelles on remarque ordinairement une > souche principale et commune , de laquelle semblent être sorties des tiges différentes et d'autant plus nombreuses que les individus dans chaque espèce sont plus petits .et plus féconds. | Sous ce point de vue , le cheval , le zèbre et l'âne, sont tous trois de la même famille : si le cheval est la souche ou le tronc prin- cipal, le zèbre et l’âne seront les tiges colla- térales; le nombre de leurs ressemblances entre eux étant infiniment plus grand que : celui de leurs différences, on peut les regar- Le pi La _ DES ANIM AU X. 203 der comme ne faisant qu'un même genre, dont les principaux caractères sont claire- ment enonces et communs à tous trois : 11s sont les seuls qui soient vraiment solipèdes, c’est-à-dire, qui aient la corne des pieds d’une seule pièce sans aucune apparence de doigts ou d'ongles; et quoiqu'ils forment trois espèces distinctes , elles ne sont cepen- dant pas absolument ni nettement séparées, puisque l'âne produit avec la jument, le cheval avec l’ânesse , et qu'il est probable que si l’on vient à bout d’apprivoiser le zèbre et d’assouplir sa nature sauvage et récalci- trante , il produiroit aussi avec le cheval et Vâne, comme ils produisent entre eux. Et ce mulet qu'on a regardé de tout temps comme une production viciée , comme un monstre composé de deux natures, et que par cette raison l’on a jugé incapable de se reproduire lui-même et de former lignée, m'est cependant pas aussi profondément lésé qu’on se l’imagine d’après ce préjugé, puis- qu'il n’est pas réellement infécond , et que sa stérilité né dépend que de certaines cir- constances extérieures et particulières. On sait que les mulets ont souvent produit dans 204 DÉGÉNÉRATION les pays chauds; l’on en a même quelques | ‘exemples daus nos chmats tempérés : mais O1! ignore si cette génération est jamais pro- venue de la simple union du mulet et de la mule , ou plutôt si le produit n’en est pas dû à l’union du mulet avec la jument k ou encore à celle de l'âne avec la mule. Il y a deux sortes de mulets : le premier est le grand mulet ou mulet simplement dit, qui provient de la jonction de l’âne à la jument; ‘le second est le petit mulet provenant du cheval et de l’ânesse , que nous ap ellerons PP bardeau pour le distinguer de l'autre. Les anciens les connoissoient et les distinguoient comme nous par deux noms différens : ils appeloient z74lus le mulet provenant de l'âne et de la jument ; et ils donnoient les noms de yiwos, Zinnus , burdo, au mulet provenant du cheval et de l’ânesse. Ils ont assuré que le mulet, zulus, produit avec la jument un animal auquel ils donnoient aussi le nom de giznus ou Ainnus*. Ils ont assuré de même que la mule, #ula, conçoit * Le mot ginnus a été employé par Aristote en deux sens : le premier pour désigner généralement un animal APR EL ) UR avurion, un mulet nain, DES ANIMAUX, 204 assez aisément , mais qu'elle ne peut que rarement perfectionner son fruit ; et ils ajoutent que quoiqu'il y ait des exemples assez fréquens de mules qui ont mis bas, il faut néanmoins regarder cette production comme un prodige. Mais: qu'est-ce qu’un prodige dans la Nature , sinon un effet plus rare que les autres? Le mulet peut donc en- gendrer , et la mule peut concevoir, porter et mettre bas dans de certaines circonstances: ainsi il ne s’agiroit que de faire des expé- rieuces pour savoir quelles sont ces circons- tances, et pour acquérir de nouveaux faits dont on pourroit tirer de grandes lumières sur la dégénération des espèces par le mé- lange, et par conséquent sur l'unité ou la diversité de chaque genre. Il faudroit, pour réussir à ces expériences, donner le mulet à la mule , à la jument et à l’ânesse; faire la même chose avec le bardeau , et voir ce qui résulteroit de ces six accouplemens différens. IL faudroit aussi donner le cheval et l’âne à la mule, et faire la même chose pour la provenant quelquefois du cheval avec l'ânesse , ou de l'âne avec la jument ; et le second pour sigmifier le produit particulier du mulet et de Ja jumeut.. - , Ca 18. - { 5 26 DÉGÉ ÉNÉRATION petite mule ou | femelle du bardeau. Ces épreuves , quoiqu'assez simples, n’ont ja- mais été tentées duns la vue d’en tirer des lumières ; et je regrette de n'être pas à por- “ tée de les exécuter : je suis persuadé qu'il en résulteroit des connoissances que je ne fais qu’entrevoir, et que je ne puis donner que comme des présomptions. Je crois , par exemple, que de tous ces accouplemens, celui du mniulet et de la femelle bardeau, et celui du bardeau etdela mule, pourroient bien manquer absolument ; que celui du mulet et de la mule , et celui du bardeau et de sa femelle , pourroient peut-être réussir, quoique bien rarement : mais en même temps je présume que le mulet produiroit avec E jument ‘plus certainement qu'avec l’ânesse ; et le bardeau plus certainement avec l’ânessé qu'avec la jument ; qu’enfin le cheval et l’âne pourroient peut-être produire avec les deux mules , mais l’âne BTE sûrement qué le cheval. IL faudroit faire ces épreuves dans un pays aussi chaud pour’ Îe’ moins que l’est notre Provence, et prendre. des mulets. de sept ans, des chevaux de cinq, et des ânes . de quatre ans, parce qu’il y a cette différence DES ANIM AU *>. 207 dans ces trois animaux pour les âges de la pleine puberté. Voici les raisons d’analogie sur tesquellés sont fondées les présomptions que je: viens d'indiquer. Dans l'ordonnance commune de \ la Nature , ce ne sont pas les mâles, mais les femelles , qui constituent l'unité. des es- pèces : nous sayons par l’exemple de la bre bis, qui peut servir à deux mâles différens et produire, également du bouc.et du belier, que la femelle influe beaucoup plus que le mâle sur le spécifique du produit, puisque de ces deux mâles différens il ne naît que des agneaux, c’est-à-dire, des individus spé- cifiquement ressemblans à la mère : aussi le mulet ressemble-t-il plus à la jument qu’à ‘âne, et,le bardeau plus à J’ânesse qu’au cheval; dès iors le mulet: doit produire plus sûrement avec la jument qu'avec l’ânesse, et le bardeau plus sûrement avec l’ânesse. qu'avec la jument. De même le cheval et l’âne pourroient peut-être produire avec les deux mules, parce qu’'étant femelles elles ont , quoique viciées, retenu chacune plus de propriétés spécifiques que les mulets mâles : mais l’âne doit produire avec elles Fe NEA 208 DÉGÉNÉ ÉRATION Fit plus certainement que le cheval , parce qu’ on a remarqué que l’âne a plus de puissance pour engendrer, même avec la jument, que n’en a le cheval, car il corrompt et dé- truit la génération de celui-ci. On peut s'en assurer en donnant d'abord le cheval étalon à des jumens, et en leur donnant le lende- main, ou même quelques jours après, l'âne. au lieu du cheval ; ces jumens produiront presque toujours des mulets , et non pas des chevaux. Cetté observation , qui mériteroit bien d'être constatée dans toutes ses cir- constances , paroît indiquer que la souche ou tige principale de cette famille pourroit bien être l’âne et non pas le cheval, puisque l'âne le domine dans la puissance d’engen- drer , même avec sa femelle ; d'autant que le contraire w’arrive pas lorsqu'on donne l’âne en premier et le cheval en second à la jument; celui-ci ne corrompt pas la gé- nération de l’âne, car le produit est presque toujours un mulet : d'autre côté la même chose n'arrive pas quand on donne l'âne en premier et le cheval en second à l’ânesse; cat celui-ci ne corrompt ni ne détruit la génération de l’âne. Et à l'égard des aceou- @ : PMR EN APN M AU NE ds plemens des mulets entre eux, je‘les ai pré sumés-stériles, parce que de deux natures déja lésées pour la génération, et qui par leur mélange ne pourroient manduer de se léser davantage, on ne doit attendre qu’un pro- duit tout-à-fait vicié ou absolument nul. Par le mélange du mulet avec la jument, du bardeau avec l’ânesse, et par celui du cheval et de l'âne avec les mules, on obtien- droit des individus qui remonteroient à l’es- pèce et ne seroient plus que des demi-mulets, lesquels non seulement auroient, comme leurs parens, la puissance d’engendrer avec ceux de leur espèce originaire, mais peut ètre même auroient la faculté de produire entre eux, parce que n'étant plus lésés qu'à demi, leur produit ne seroit pas plus vicié que ne Le sont les premiers mulets; et si l’union de ces demi-mulets étoit encore stérile, ou que le produit en fût et rare et difhcile, il me paroît certain qu’en les rapprochant en core d’un degré de leur espèce originaire, les individus qui en résulteroient et qui ne . seroient plus lésés qu’au quart, produiroient entre eux, et formeroient une nouvelletige, qui ne seroit précisément ni celle du cheval 15 \ h 24 d fo . A AG be « » 7 ‘3 7 es F ue A à LA Pen FORCE 260. DÉGÉNÉRATION. | ni celle de l'âne. Or, comme tout ce qui peut être a été amené par le temps, et se trouve ou s’est-trouvé dans la Nature, je suis tenté de croire que le mulet fécond dont parlent les antiens, et qui, du temps d'Aristote, Le existoit en Syrie dans les terres au-delà de celles des Phéniciens, pouvoit bien être une race de ces demi-mulets ou de ces quarts de mulet qui s’étoit formée par les mélanges que nous venons d'indiquer; car Aristote dit expressément que ces mulets féconds ressem- bloient en tout, et autant qu’il est possible, aux mulets inféconds : il les distingue aussi très-clairement des o7agres ou dnes sau- vages, dont il fait mention dans le même chapitre, et par conséquent on ne peut rap- porter ces animaux qu’à des mulets peu vi- ciés, et qui auroient conservé la faculté de reproduire. IL se pourroit encore que le mu- let fécond de Tartarie, le czigifhai dont nous avons parlé, ne füt pas l’ozagre ou dne sauvage, mais ce mème mulet de Phé- uicie, dont la race s’est peut-être maïntenne jusqu'à ce jour; le premier voyageur qui pourra les comparer, confirmera ou détruira cette conjecture. Et le zèbre lui-même, qui DES JAMNTMAU Xi: are ie plus au mulet qu’au cheval et qu’à l’âfe, pourroit bien avoir eu une pa- reille origine ; la régularité contrainte et symmetrique des couleurs de son poil, qui sont alternativement toujours disposées par _ bandes noires et blanches, paroît indiquer qu'elles proviennent de deux espèces diffé- rentes, qui dans leur mélange se sont sépa- rées autant qu'il étoit possible; car dans aucun de ses ouvrages la Nature n’est aussi tranchée et aussi peu nuancée que sur la robe du zébre, où elle passe brusquement et alternativement du. blanc au noir et du noir au blanc sans aucun iutermède dans toute l’étendue du corps de l’animal. À Quoi qu’il en soit, il est certain, par tout ce que nous venons d'exposer, que les mulets en général, qu'on a toujours accusés d’im- _ puissance et de stérilité, ne sont cependant ni réellement stériles, ni généralement in- _féconds; et que ce n’est que dans l'espèce particulière du mulet provenant de l’âne et du cheval que cette stérilité se manifeste, puisque le mulet qui provient du bouc et de la brebis, est aussi fécond que sa mère ow sou père; puisque, dansiles oiseaux, la plu- 22 DÉGÉNÉRATION “part des mulets qui proviennent d'espèces. différentes, ne sont point inféconds : c’est donc dans la nature particulière du cheval et de l’âne qu’il faut chercher les causes de l’'infécondité des mulets qui en proviennent ; et au lieu de supposer la stérilité comme un. défaut général et nécessaire dans tous les mulets, la restreindre au contraire au seul mulet provenant de l'âne et du cheval, encore donner de grandes limites à cette restriction , attendu que ces mêmes mulets peuvent devenir féconds dans de certaines circonstances , et sur-tout en se rapprochant d’un degré de leur espèce originaire. Les mulets qui proviennent du cheval êt de l’âne, ont les organes de la génération tout aussi complets que les autres animaux: il ne manque rien au mâle, rien à la femelle; ils ont une grande abondance de liqueur sé- minale; et comme l’oû ne permel guère aux mâles de s’accoupler, ils sont souvent si pressés de la répandre, qu’ils se couchent sur le ventre pour se frotter entre leurs pieds de devant qu’ils replient sous Fa poi- trine : ces animaux sont donc pourvus de tout ce qui est nécessaire à l'acte de la géné- EE | t ” RE Ge URINCE MA OU XS7 ‘a ration; ils sont même très-ardens, et par, conséquent très-indifférens sur le choix; ils ont à peu près la même véhémence de goût pour la mule, pour l’ânesse et pour la ju- meut; il n’y a donc nulle difficulté pour les accouplemens. Mais il faudroit des atten— tions et des soins particuliers , si l’on vouloit rendre ces accouplemens prolifiques ‘ la trop grande ardeur, sur-tout dans les femelles, est ordinairement suivie de la stérilité, et la mule est au moins aussi ardente que l’änesse: or l’on sait que celle-ci rejette la liqueur séminale du mäle, et que pour la faire reté- nir et produire, il faut lui donner des coups ou lui jeter de l’eau sur la croupe, afin de calmer les convulsions d'amour qui sub- sistent après l'accouplement, et qui sont la cause de cette réjaculation. L’ânesse et la mule tendent donc toutes deux par leur trop grande ardeur à la stérilité. L’àâne et l’ânesse y tendent encore par une autre cause : comme ils sont originaires des climats chauds, le froid s’oppose à leur génération , et c’est par cette raison qu’on attend les chaleurs de l'été pour les faire accoupler ; lorsqu’on les laisse joindre dans d’autres temps et sur-tout en 214. DÉGÉNÉRATION hiver, il est rare que limprégnation Ne Faccouplement, même réitéré; ét ce choix du temps qui est nécessaire au succès de leur génération , l’est aussi pour la conservation du produit; il faut que l’ânon naisse dans un temps chaud, autrement il périt ou languit; et comme la gestation de l’ânesse est d’un an , elle met bas dans la même saison qu'elle a conçu : ceci prouve assez combien la.cha= leur est nécessaire, non seulement à la fecon- dité, mais même à la pleine vie de ces ani- maux. C'est encore par cette même raison de la trop grande ardeur de la femelle qu’on. Jui donne le mâle presque immédiatement après qu’elle a mis bas; on ne lui laisse que sept ou huit jours de repos ou d'intervalle entre l’accouchement et l'accouplement: l’à- nesse, a#oiblie par sa couche, est alors moins ardente; les parties n’ont pas pu, dans ce petit espace de temps, reprendre toute leur roideur ; au moyen de quoi la conception se fait plus sûrement que auand elle est en pleine force et que son ardeur la domine. On prétend que dans cette espèce, comme dans celle du chat, le tempérament de la femelle est encore plus ardent et plus fort } À f À \ du N (DES ANIMAUX. 215 Me celui du mâle : cependant l’âne est un grand exemple en ce geure; il peut aisément saillir sa femelle, ou une autre, plusieurs jours de suite et plusieurs fois par jour; les premières jouissances loin d’éteindre ne fon£ qu'allumer son ardéur; on en a vu s’exce- der sans y être incités autrement que par la force de leur appétit naturel; on en a vu moürir sur le champ de bataille, après onze ou douze conilits réitérés presque sans in- tervalle, et ne prendre pour subvenir à cette grande et rapide dépense que quelques pintes d’eau. Cette même chaleur qui le consume est trop vive pour être durable; l’âne-étalon bientôt est hors de combat et même de ser- vice, et c’est peut-être par cette raison que l’on a prétendu que la femelle est plus forte et vit plus long-temps que le mâle: ce qu'il y a de certain, c’est qu avec les ménagemens que nous avons indiqués, elle peut vivre trente ans, et produire tous les ans pendant _toute sa vie; au lieu que le mâle, lorsqu'on. ne le contraint pas à s'abstenir de femelles, abuse de ses forces au point de perdre en peu d'années la puissance d’engendrer. _ _ L'âne et l’ânesse tendent donc tous deux à 1 = rb DÉGÉNÉRATION la stérilité par des propriétés communes, et aussi par des qualités différentes; le cheval et la jument y tendent de même par d'autres voies. On peut donner l’étalon à la jument neuf ou dix jours après qu’elle a mis bas, et | elle peut produire cinq ou six ans de suite; mais après cela elle devient stérile. Pour en- tretenir sa fécondité, il faut mettre un,in- | tervalle d’un an entre chacune de ses portées, et la traiter différemment de l’ânesses" au lieu de lui donner l’étalon après qu’elle a mis bas, il faut le lui réserver pour l’année sui. vante, et attendre le temps où sa chaleur se manifeste par les humeurs qu’elle jette: et même avec ces attentions, ilest rare qu'elle ‘soit féconde au-delà de l’âge de vingt ans. D'autre côté, le cheval, quoique moins ar- dent et plus délicat que l’âne, conserve néan- moins plus long-temps la faculté d’engen- -drer. On a vu de vieux chevaux qui n’avoient plus la force de monter la jument sans l’aide du palefrenier, trouver leur vigueur dès qu’ils étoient placés, et engendrer à l’âge de trente ans. La liqueur séminale est non seulement. moins abondante , mais beaucoup moins sti-. mulaute dans le cheval que dans l’ane; car souvent le cheval s’accouple sans la répandre, sur-tout si oh lui présente la jument avant qu'il ne la cherche : il paroît triste dès qu’il a joui, et il lui faut d'assez grands intervalles de temps pour que son ardeur renaisse. D'ailleurs il s’en faut bien que dans cette espèce tous les accouplemens, mème les plus consommés , soient proli- fiques : il y a des jumens naturellement sté- riles, et d’autres en plus grand nombre qui sont très-peu fécondes ; il y a aussi des éta- Ions qui, quoique vigoureux en apparence, n’ont que peu de puissance réelle. Nous pou- vous ajouter à ces raisons particulières une preuve plus évidente et plus genérale du peu de fécondité dans les espèces du cheval et de l'âne; ce sont de tous les animaux domes-- tiques ceux dont l’espèce, quoique la plus soignée, est la moins nombreuse ; dans celles - du bœuf, de la brebis, de la chèvre, et sur= tout dans celles du cochon, du chien et du chat, les individus sont dix et peut-être cent fois plus nombreux que dans celles du che- val et de l’âne : ainsi leur peu de fécondité est prouvée par le fait, et l’on doit attribuer à toutes ces causes la stérilité des mulets | Quadrupèdes, VII. 19 DES ANIMAUX or | k en si da ne À 218 (DÉGÉNÉRATION qui proviennent du mélange de dés dète espèces naturellement peu fécondes. Dans les espèces au contraire qui, comme celle de la . chèvre et celle de la brebis, sont plus nom— breuses et par conséquent plus fécondes , iles mulets provenant de leur mélangene sont pas stériles, et remontent pleinement à à l’espèce originaire dès la première génération; au lieu qu'il faudroit deux, trois et peut-être quatre générations pour que le mulet pro- venant du cheval et de l’âne püût parvenir à ce même degré de réhabilitation de nature. On a prétendu que de l’accouplement du taureau et de la jument, il résultoit une autre sorte de mulet : Columelle est, je crois, le premier qui en ait parlé; Gesner le cite, et ajoute qu’il a entendu dire qu’il se trou- voit de ces mulets auprès de Grenoble, et qu’on les appelle en françois, /umarts. J'ai fait venir un de ces jumarts de Dauphiné, j'en ai fait venir un autre des Pyrénées, et j'ai reconnu, tant par l'inspection des par- ties extérieures que par la dissection des par- ties intérieures, que ces jumarts n'étoient que des bardeaux, c'est-à-dire, des mulets prove- mant'du cheval et de l’ânesse : je crois dont DES ANIMAUX. 219 être fondé, tant par cette observation que par l’analogie, à croire que cette sorte de mulet n’existe pas, et que le mot /wmart, n’est qu’un nom chimérique et qui n’a point d'objet réel. La nature du taureau est trop éloignée de celle de la jument, pour qu'ils puissent produire ensemble ; l’un ayant quatre eslomacs, des cornes sur la tête, le pied fourchu, etc. ; l’autre étant solipède et sans cornes, et n'ayant qu'un seul estomac. Et les parties de la génération étant très-dif- férentes tant par la grosseur que pour les proportions , il n’y a nulle raisou de présu- mer qu'ils puissent se joindre avec plaisir, et encore moins avec succès. 51 le taureau avoit à produire avec quelque autre espèce. que la sienne, ce seroit avec le buffle, qui lui ressemble par la conformation et par la plu- part des habitudes naturelles ; cependant nous n'avons pas entendu dire qu'il soit jamais né des mulets de ces deux animaux, qui néanmoins se trouvent dans plusieurs lieux, soit en domesticité, soit en/liberte. Ce que l’on raconte de l’accouplement et du produit du cerf et de la vache, m'est à peu près aussi suspect que l’histoire des LU we KL \ FI fav» ha TP «a À ; " ; NEUTRE : c - TE DTA # ME 220 DÉGÉ ÉNÉRATION. jumarts, quoique le cerf soit beaucoup moins. éloigné, par sa conformation, de la nature de la vache, que le taureau ne l'est de celle de la jument. R Ces animaux qui portent des ko! quoique xuminans ét conformés à l’intérieur comme ceux qui portent des cornes, semblent faire un genre, une famille à part, dans laquelle l'élan est la tige majeure, et le renne, le cerf, l’axis, le daim et le chevreuil sont les branches mineures et collatérales; car il n’y a que ces six espèces d'animaux dont la tête soit armée d’un bois branchu qui tombe et se renouvelle tous les ans; et indépendam-— ment de ce caractère générique qui leur est commun, ils se ressemblent encore beaucoup par la conformation et par toutes les habi= tudes naturelles : on obtiendroit donc plutôt des mulets du cerf ou du daim mêlé avec le renne et l’axis, que du cerf et de la vache. On seroit encore mieux fondé à regarder toutes les brebis et toutes les chèvres comme ne faisant qu’une même famille, puisqu'elles produisent ensemble des mulets qui re montent directement, et dès la première: gé- nération , à l'espèce de la brebis; on pourroit 4 " ° / # DES ANIMAUX. x _ même joindre à cette nombreuse famille des brebis et dés chèvres, celle des gazelles ét celle des bubales qui ne sont pas moins nom- _breuses. Dans ce genre qui contient plus de trente espèces différentes, il paroît que le mouflon, le bouquetiu', le chamois;, l’anti- lope, le bubale, le condoma, etc. sont les tiges principales, ét que les autres n’en sont que des branches accessoires , qui toutes ont retenu les caractères principaux de la souche dont elles sont issues , mais qui ont en même temps prodisieusement varié par les in- fluences du climat et les différentes nourri- tures , aussi-bien que par l’état de servitude et de domesticité auquel l’homme a réduit la plupart de ces animaux. | Le chien , le loup ; le renard, ‘le chacal'et l'isatis forment un autre genre, dont cha- cune des espèces est réellement si ‘voisine des autres et dont les individus sé ressem- blent si fort, sur-tout par la conformation intérieure et par les parties de la génération, | qu’on à peine à concevoir pourquoi ces ani= maux ne produisent point ensemble : il m'a paru, par les expériences que j'ai faites sur le mélange du chien avec le loup et avec le | 19 Le SN Le 4 . 1h ms PUR APS ALL ANT de Yi Ÿ jt pe ca: 222 DÉGÉNÉRATION renard, que la répugnance à l'accouplement. venoit du loup et du renard, plutôt que du chien, c’est-à-dire, de l'animal sauvagei'et non pas de. Lan a domestique; car, les chiennes que j'ai mises à l'épreuve, auroient volontiers souffert le, renard et le loup, au lieu: que. la louve et là femelle renard n’ont jamais voulu souffrir. les approches du chien. L'état de domesticité semble rendre les animaux plus libertins , c’est-à-dire, moins fidèles à leur espèce : il les rend aussi plus chauds et plus féconds; car la chienne peut produire et produit même assez ordi- nairement deux fois par an, au lieu que la louve.et la femelle renard. ne portent qu'une fois dans une année; et il est à présumer que les chiens sauvages, c’est-à-dire, des chiens qui ont été abandonnés dans des pays dé serts, et qui se sont multipliés dans l’île de Juan-Fernandès, dans les montagnes :de Saint-Domingue, etc. ne produisent qu'une fois par an comme le renard.etle loup : cé fait, s’il étoit constaté, confirmeroit pleine- ment l'unité du genre de ces trois animaux, qui se réssemblent si fort par la conformas tion, qu'on ne doit attribuer qu'à quelques rs | 4 V . DES ANEMAUX., 223 circonstances extérieures leur répugnance à se joindre. é Le chien paroît être l’espèce moyenne et commune entre celles du renard et du loup; les anciens nous ont transmis-comme deux faits certains, que le chien, dans quelques pays et dans quelques circonstances ».. PrO- - duit avec le loup et avec le renard. Jai voulu le vérifier; et quoique je n’aie pas réussi dans les épreuves que j’ai faites à ce sujet, on n’en doit pas conclure que cela soit impossible; car je n'ai pu faire ces essais que sur des ami- maux captifs, et l’on sait que dans la plupart d’entre eux la captivité seule suffit pour éteindre le desir et pour les dégoûter de l’ac- couplement, même avec leurs semblables ; à plus forte raison cet état forcé doit les em pêcher de s'unir avec des individus d’une espèce étrangère : mais je suis persuadé que dans l’état de liberté et de célibat, c’est-à- dire, de privation de sa femelle, le chien peut ,.en effet, s’unir au loup et au renard, sur-tout si, devenu sauvage, il a perdu son odeur de domesticité, et s’est en même temps rapproché des mœurs et des habitudes natu- relles de ces animaux, I n’en est pas de même PA TARN ” ‘ DIR" PRE URT 224 [(DÉGÉNÉRATION se COR PE Ds 410 7 SECHE à GER e { 444 de l'union du renard avec le loup,-je ne l& . crois guère possible; du moins dans là na ture actuelle le contraire paroît démontré par le fait, puisque ces deux animaux se trouvent ensemble dans lé même climat et dans les mêmes terrés , et que se soutenatit * chacun dans leur espèce Sans se chercher, sans se méler, il faudroit supposer üne dégé: uération plus ancienne que la mémoire des hommes pour les réunir à la même espèce: : c’est par cette raison que j'ai dit que celle du Chien étoit moyenne entre celles du rénard et du loup; ellé est aussi commune, puis- qu'elle peut se mêler avec toutes deux; et si. quelque chose pouvoit indiquer qu'originai- reément toutes trois sont sorties de là même souche, c'est ce rapport commun qui rap- proche le renard du loup, et me paroît en réunir les espèces de plus près que tous les autres rapports de conformité dans la figure ét l’organisation. Pour réduire ces deux és- pèces à l'unité, il faut donc remonter à un. état de nature plus ancien : mais, dans l’état actuel, on doit regarder le loup et Le renard comme les tiges majeures du genre dés cinq animaux que nous ayons indiqués ; Le chien. DES ANEMAUXIS 256 le chacal et l’isatis n’en sont que les branches latérales , et elles sont placées entre les deux premières ; le chacal participe du chien et du loup, et l’isatis du chacal et du renard : aussi paroît-il par un assez grand nombre de té- Mmoignages , que le chacal et le chien pro- _ duisent aisément ensemble ; et l’on voit par la description de l’isatis et par l’histoire de ses habitudes naturelles , qu’il ressemble presque entièrement au renard par la figure et par le tempérament , qu'il se trouve égale- ment dans les pays froids, mais qu’en même temps il tient du chacal le naturel, l’aboie- ment continu, la voix criarde, et l’ der. d’aller toujours en troupe. Le chien de berger, que j'ai dit être la souche première de tous les chiens, est en même temps celui qui approche le plusde la figure du renard ; il est de la même taille; il a, comme lui, les oreilles droites, le museau pointu, la queue droite et trainante; il approche aussi du renard par la voix, par l'intelligence et par la finesse de l'instinct: il se peut donc que ce chien soit originaire- ment issu du renard, sinon en ligne droite, au moins en ligne collatérale. Le chien - m6 DÉGÉNÉRATION. qu Aristote appelle canis laconicus, et qu vi | assure provenir du mélange du renard et du chien, pourroit bien être le même que le chien de berger, ou du moins avoir plus de rapport avec lui qu'avec aucun autre chien : on seroit porté à imaginer que l’épi- thète /aconicus, qu’Aristote n’interprète pas, n'a été donnée à ce chien que par la raison qu'il se trouvoit en Laconie, province de la Grèce, dont Lacédémone étoit la ville prin— cipale; mais si l’on fait attention à l’origine de ce chien laconic, que le même auteur dit venir du renard et du chien, on sentira que la race n’en étoit pas bornée au seul pays de Laconie, et qu’elle devoit se trouver égale- ment dans tous les pays où il y avoit des. _renards, et c’est ce qui me.fait présumer . que-l’épithète /aconicus pourroit bien avoir été employée par Aristote dans Le sens mo- ral, c'est-à-dire, pour exprimer la briéveté ou le son aigu de la voix; il aura appelé chien laconic ce chien provenant du renard, parce qu’il n’aboyoit pas comme les autres chiens, et qu’il avoit la voix courte et ola- pissante comme celle du renard. Or notre chien de berger est Le chien qu'on peut appe- D'ÉSRANNIIM AU XI dos ler Zaconic à plus juste titre; car c’est celui de tous les chiens dont la voix est la plus brève et la plus rare : d’ailleurs les carac- tères que donne Aristote à son chien laconic, conviennent assez au chien de berger, et c'est ce qui a achevé de me persuader que c'étoit le même chien. J’ai cru devoir rap- porter les passages d’Aristote en entier, afin qu’on juge si ma conjecture est fondée *. * « Laconici canes ex vulpe et cane generantur ». (Hist. anim. Mb. VIIL, cap. 28.) « Canum genera « plura sunt. Coït laconicum mense sux ætatis oc= « tavo, et Crus jam circa 1d tempus attollentes non- « nulli urinam reddunt..... Gerunt laconicæ canes « uterum parte sextâ anni , hoc est, sexagenis diebus « aut uno vel altero, plus minusve. Catelli cæci « gignuntur, nec ante duodecimum diem visum ac- « ciplünt. Coeunt canes posteaquam parerunt sexto « mense , nec ciius. Sunt quæ parte quintà anni « uterum ferunt, hoc est, duobus et septuaginta . « diebus, quarum catelli duodecim diebus luce ca- < rent : nonnullæ quartà parte anni, hoc est, tribus « mensibus ferunt, quarum catelli diebus decem « et sepiem luce carent, Lac ante diebus quinque quèm pariant, habent canes magnâ ex parte ; « verm nonnullis etiam seplemu aut quatuor ciebus anticipat : utile, statim ut pepererint, est: genus liconicum post coitum diebus triginta Pbers lac SJ À À L AN \ 228 DÉGÉNÉRATION Le genre des animaux “ntèl est fai des plus nombreux et des plus variés; le mal L « incipit..... Parit canis duodecim complurimüm, « sed magnûâ ex parte quinque aut sex. Unum etiam « aliquam peperisse certum est : läconicæ magnâ ex. « parte octo pariunt. Coeunt quandiu vivunt et « mares et feminæ : peculiare generis laconici est «ut cùm laborarint, coire meliüs quàm per .otium « possint. Vivit in hoc eodem genere mas ad annos « decem, femina ad duodecim : cæteri canes maximâ « quidem ex parte ad annos quatuordecim ; sed non- « nulli vel ad vigintui protrahunt vitam...... Laco- « hici sanè generis feminæ ; quia minüs laborant « quàm mares , vivaciores maribus sunt : at serd in « cæteris ; el si non latè admodum constal, tameu « Inares ivaciores sunt. » (Jdem, Hb. VI, cap. 20.) « Feminam et marem uatura distiuxit moribus: « sunt enim feminæ moribus mollioribus, mites- « cunt celerits et manum facilius patiuntur ; discunt « etiam imilanturque ingeniosiüs , ut 1n genere ca= « num laconico feminas esse sagaciores quèm mares « apertum est. Moloticum etiam genus venaticum « nibilo à cæteris discrepat, ac pecuarium longè « et magnitudine et fortitudine contra belluas præ- « stat : insignes verd anuno et industrià qui ex utroque , moloticum dico et laconicum, prode- rint. » (Idem, lib. IX > Cap. Le) : Il faut observer que le mot genus ne doit pas ñ « Gi DES ANIMAUX: \23 semble ici, comme ailleurs, se reproduire sous toutes sortes de formes et se revêtir de s’interpréter ici par celui d'espèce , maïs par le mot race. Aristote y distingue trois races de chiens : /a- conicus , moloticus et pecuarius. Le moloticus, qu'il appelle aussi »enaticus , est vraisemblable- ment notre levrier, qui, dans la Grèce et l'Asie mineure ,'est le chien de chasse ordinaire ; le pecua- rius, quil dit excéder de beaucoup les autres chiens paf la grandeur et par la forme, est sans doute le mâun, dont on se sert pour la ch et la défense du bétail contre les bêtes féroces; et le Zaconicus, duquel il ne désigne pas l'emploi, et qu'il dit _ seulement être un chien de travail et d'industrie, et qui est de plus petite taille que le pecuarius, ne peut être que le chien de berger, qui travaille en effet beaucoup à ranger, contenir et conduire les moutons , et qui est plus industrieux, plus attentif et plus soigneux que tous les autres chiens, Mais ce n'est pas là ce qu'il y a de plus difficile à en< tendre dans ces passages d’Aristote, c’est ce qu’il dit de la différente durée de la gestation dans les différentes races de chiens, dont, selon lui, les uns portent deux mois, les autres portent deux mois et demi, et les autres, trois mois : car tous nos chiens, de quelque race qu’ils soient, re portent également que pendant environ neuf se- maines, C'est-à-dire, soixante-un, soixante-deux 20 230 DÉGÉNÉRATION ju plusieurs natures. Le lion et le tigre, comme espèces isolées, sont en premièrelignëés toutes les autres, savoir, les panthères, les onces , les léopards, les guépards, les Ilynx, les ca racals, les jaguars, les conguars, les ocelots, les servals, les margais et les.chats, ne font qu'une même et méchante famille, dont les différentes branches se sont plus eu moins. étendues, et ont plus ou moins varié sui-. vant les différens climats : tous ces animaux se ressemblent par le naturel, quoiqu'ils soient très-différens pour la grandeur et par la figure; ils ont tous les yeux étincelans, le museau court, et les ongles aigus, courbés et rétractibles ; 1ls sont tous nuisibles, fé— roces , indomtables ; le chat, qui en est la dernière et la plus petite espèce, quoique réduit en servitude, n’en est ni moins per- fide ni moins volontaire; le chat sauvage a ou soixante-trois Jours, et Je ne sache pas qu’on ait remarqué de plus grandes différences de temps que celle de ces trois où quatre jours : mais Aris- : tote pouvoit en savoir sur cela plus que nous ; et si ces faits qu’il a avancés sont vrais, 1l en résul- teroit un rapprochement bien plus grand de cer« tains chiens avec le Joup ; « car les chasseurs assurent que la Jouve porte trois mois, ou trois mois et demi. RCE 1e SN TE DES ANIMAUX. D 14 conservé le caractère de la famille; il est aussi cruel, aussi méchant, aussi dépréda- teur en petit, que ses consanguins le sont en grand; 1ls sont tous également carnassiers, également ennemis des autres animaux. L'homme, avec toutes ses forces, n’a jamais pu les détruire ; on a de tout temps employé contre eux le feu, le fer, le poison, les piéges : mais comme tous les individus mul- tiplient beaucoup, et que les espèces elles- mêmes sont fort multipliées, les efforts de l’homme se sont bornes à les faire reculer et à les resserrer dans les déserts, dont ils ne sortent jamais sans répandre la terreur et causer autant de dégât que d’effroi. Un seul tigre échappé de sa forêt suffit pour alarmer tout un peuple et Le forcer à s’armer : que seroit-ce si ces animaux sanguinaires arri- voient en troupe, et s'ils s’entendoient, comme les chiens sauvages ou les chacals, dans leurs projets de déprédation ! La Nature a donné cette intelligence aux animaux ti- mides : mais heureusement les animaux fiers sont tous solitaires ; ils marchent seuls et ne consultent que leur courage, c’est-à-dire, la confiance qu’ils ont en leur force. Aristote 5% DÉGÉNÉRATION avoit remarqué avant nous, que de tous x: animaux qui ont des griffes, c'est-à-dire, des ongles crochus et rétractibles, aucun n'étoit sociable, aucun n’alloit en troupe: cette observation, qui ne portoit alors què sur quatre ou cinq espèces , les seules de ce genre. qui fussent connues de son temps, s’est éten- due et trouvée vraie sur dix ou douze autres espèces qu’on a découvertes depuis. Les autres animaux carnassiers, tels que les loups, les renards , les chiens, les chacals, les isatis, qui n’ont point de griffes, mais seulement des ongles droits, vont pour la plupart en troupe et sont tous timides et même lâches. En comparant ainsi tous les animaux et les rappelant chacun à leur genre, nous trouverons que les deux cents espèces dont nous avons donne l’histoire, peuvent se ré- duire à un assez petit nombre de familles ou souches principales, desquelles il n’est pas impossible que toutes les autres soient issues. Et pour mettre de l’ordre dans cette réduc- tion, nous séparerons d'abord les animaux des deux continens ; et nous observerons qu'on peut réduire à quinze genres et à neuf éspèces isolées, non seulement tous les ami } DES ANIMAUX. 233 - maux qui sont communs aux deux Conti nens , mais encore tous ceux qui sont propres et particuliers à l’ancien. Ces genres sont, 1°. celui des solipèdes proprement dits, qui contient le cheval, le zèbre, l'âne, avec les mulets feconds et 'infeconds : 2°. celui des grands pieds-fourchus à cornes creuses, sa voir, le bœufet le buffle avec toutes leurs va- riétés : 3°. la grande famille des petits pieds- fourchus à cornes creuses, tels que les brebis, les chèvres, les gazelles , les chevrotains, et toutes les’ autres espèces qui participent de leur nature : 4°. celle des pieds-fourchus à cornes pleines ou bois solides, qui tombent et qui se renouvellent tous les ans; cette famille contient l'élan, le renne, le cerf, le daim, l’axis et le chevreuil : 5°. celle des pieds-fourchus ambigus, qui ést composée du sanglier et de toutes les variétés du co= chon, telles que celui de Siam à ventre pen- dant, celui de Guinée à longues ‘oreilles pointues:et couchées sur le dos, celui des Canaries à grosses et longues défenses, etc. : 6°. le genre très-étendu des fissipèdes carnas- siers à griffes, c’est-à-dire, à ongles crochus et rétractibles, dans lequel on doit com LA 24 DÉGÉNÉRATION prendre les panthères Ÿ les léopards, les gué= pards, les. onces , les servals et Les chats, avec O toutes leurs variétés : 7°. celui des fissipèdes ï carnassiérs à ongles non rétractibles » qui contient le loup, le renard, le.chacal, lisa tis et le chien , avec toutes leurs variétés : &.. celui des fissipèdes carnassiers à ongles non rétractibles, avec une poche sous la queue; ce genre est composé de l’hyène, de la civette, du zibet, de la genette, du blai= reau , elc. : 9°. celui des fissipèdes carnassiers à corps très-alonge avec cinq doigts à chaque pied, et le pouce ou, premier ongle séparé des autres doigts; ce genre est composé des fouines, martes, putois, furets,; mangoustes, belettes, vansires, etc. : 10°. la nombreuse famille des fissipèdes:qui ont déux grandes dents incisives à chaque mAchoire e£ point de piquans sur le corps; elle; est composée des lièvres , des-lapins ét de toutes les:espèces d’écureuils,, de loirs, de marmottes et de. rats : 11°. .celui-des fissipèdes: dant: le corps est couvert de piquans, tels-queles porcs-épics et Les hérissons : 12°. celui des fissipèdes cou- verts d’écailles ; les pangolins et les phata= gins : 15°. le genre des fissipèdes amphibies, PEN l h » ! à ÿ 1 F6 à } "DES ANIMAUX. 235 qui contient la loutre, le castor, Le desman; les morses et. Les phoques : 14°. Le genre des quadrumanes , qui contient, Les singes, les babouins’, les suenons, les makis, les loris, etc. : 15°.enfin celui des fissipèdes ailés, qui contient les roussettes et les chauve-souris, avectoutes leurs variétés. Les neuf espèces isolées sont l'éléphant, le rhinocéros , l'hip- popotame , la girafe, le chameau , le lion ; le tigre, l'ours et la taupe, qui toutes sont aussi sujettes à un plus ou moins grand nombre de variétés, | ? -De ces quins le sx 1 € . E saïmiri est connü vulsairéinent sous le: 0 nom de sapajou aurore, de sapajou. orangé et de sapajou jaune ; il est assez commun à la Guiane , et c’est par cette raison que quelques voyageurs l’ont aussi indiqué sous la dénomination de sapajou de Cayenne. Par la gentillesse de ses mouvemens, par sa pe- tite taille, par la couleur brillante de sa robe, par la grandeur et le feu de ses yeux, par son pelit visage arrondi, le saïmiri a toujours eu la préférence sur tous les autres. sapajous; etc’est en effet le plus joli, le plus mi- gnon de tous : mais il est aussi le plus délicat ; le plus difficile à transporter et à conserver. Par tous ces caractères et particulièrement encore par celui de la queue, il paroît faire la nuance entre les sapajous et les sagouins : car la queue, sans être absolument inutile et lâche comme celle des sagouins, n’est pas aussi * Caymiri, nom de cet animal dans les terres du Maragnon, et que l’on doit prononcer saëmirie UE Es ON 5 : Ê | } * “HISTOIRE NATURELLE. 285 musclée que celle des sapajous ; elle n’est, pour ainsi dire, quà demi prenante; et quoiqu'il s’en serve pour s'aider à monter et descendre , il ne peut ni s'attacher fortement, ni saisir avec fermeté, ui amener à lui les’ choses qu’il desire; et l’on ne peut plus com- parer cette queue.à une main comme nous l'avons fait pour les autres sapajous. Caractères distinctifs de cette espèce. dr LE saïmiri n’a ni abajoues ni callosités sur les fesses; 1l a la cloison des narines épaisse, les narines ouvertes à côté ét non pas au-des- sous du nez; iln’a, pour ainsi dire, point de front ; son poil est d’un jaune brillant; il a deux bourrelets de chair en forme d’anneau autour des yeux; il a le nez élevé à la racine et applati à l'endroit des narines ; la bouche petite , la face plate et nue , Les oreilles sar- nies de poil et un peu pointues; la queue à demi prenante , plus longue que le corps. IL n’a guère que dix ou onze pouces de lon- sueur, dépuis le bout du museau jusqu'à Forisine de la queue. IL se tient aisément sur ses pieds de derrière; mais il marche or- dinairement à quatre pieds. La femelle n’est pas sujette à l'écoulement périodique. HAPACRNAE EE Ed BTS MU UE Ro ci Ma Te Liu JE Re ASE LU VE LL 0: à LU N 52 Ls saki , que l’on appelle vulgairement singe à queue de renard , parce qu'il a la queue garuie de poils très-longs , est le plus grand des sagouins ; lorsau’il est adulte, il a environ dix-sept pouces de longueur, au lieu que des cinq autrés sagouins , le plus grand n’en a que neuf ou dix. Le sakia le” poil très-long sur le corps , et encore plus long sur la queue ; il:a la face rousse et cou- verte d’un duvet blanchätre : il est aisé à reconnoître et à distinguer de tous les autres sagouins, de tous les sapajous et de toutes les suenons , par les caractères suivans. | Î “ Caractères distinctifs de cette espèce. LE saki n’a ni abajoues ni callosités. sur les fesses ; il a la queue läche, non prenante, et de plus d’une moitié plus longue que la tête et le corps pris ensemble ; la cloison entre les narines fort épaisse, et leurs ouver- 6 ÿ 7 Paqut x ! (. \ ol A RE LE Ep Ps tra (AE GAME “ - Are À, 0 @.4 Car « " . = ' ” Fa TO amsn bi a 5 on d'A OR U ER A DE Pt HISTOIRE NATURELLE. 287 tures à côté; la face tannée et couverte d’un duvet fin, court et blanchâtre ; le poil des parties supérieures du corps d’un brun noir, celui du ventre et des autres parties infe- rieures d’un blanc roussâtre ; le poil par-tout très-long et encore plus long sur la queue, dont il déborde l’extrémité de près de deux / pouces : ce poil de la queue est ordinaire- ment d'un brun noirâtre comme celui du corps. Il paroît qu'il y a variété dans cette espèce pour la couleur du poil, et qu’il se trouve des sakis qui ont le poil du corps et de la queue d’un fauve roussâtre. Cet animal marche à quatre pieds, et a près d’un pied et demi de longueur depuis l’extrémité du! nez jusqu’à l’origine de la queue. Les femelles dans cette espèce ne sont pas aujéties à l'E coulement pee ique. FRERE) ‘ LE TANMAR TN # deseepennesee er Carre espèce est beaucoup plus petite que la précédente, et en diffère par plusieurs ca- ractères , principalement par la queue, qui west couverte que de poils courts, au lieu que celle du saki est garnie de poils très- longs. Le tamarin est remarquable aussi par ses larges oreilles et ses pieds jaunes ; c’est un joli animal, très-vif, aisé à apprivoiser, mais si délicat, qu’il ne peut résister long= temps à l'intéempérie de notre climat. Es Caractères distinctifs de cette espèce.” LE tamarin n’a ni abajoues ni callosités … sur les fesses : il a la queue lâche , non pre- naute,etune fois plus longue que la tête et le corps pris ensemble; la cloison entre les * T'amarin, nom de cet animal à Cayenne, selon Antoine Binet, page 341; et Barrère, page rot. Tamary au Maragnon, selon le P. d'A bbeville. dont 7: j: 144); FA NA nat 4 { AA Ve ne rl x { HISTOIRE NATURELLE. 289 Mharines fort épaisse, et leurs ouvertures à côté : la face couleur de chair obscure : les oreilles quarrées , larges, nues et de la même - couleur ; les yeux châtains ; la lèvre supé- rieure fendue à peu près comme celle du lièvre ; la tête , le corps et la queue, garnis de poils d’un brun noir et un peu hérissés , quoique doux; les mains et les pieds couverts de poils courts d’un jaune orangé. Il a le corps et les jambes bien proportionnes ; ik marche à quatre pieds , et la tête et Le corps pris ensemble n’ont que sept ou huit pouces de longueur. Les femelles ne sont pas D ii à l'écoulement périodique. Quadrupides. VIT, . 2% Lun, a OUISTITI" Ne. L'ovursrirr est encore plus petit que le tanarin; il n’a pas un demi-pied de longueur, le corps et la tête compris, et sa queue à plus d’un pied de long : elle est marquée, comme celle du mococo, par des anneaux, alternativement noirs et blancs; le poil. Æ | est plus long et plus fourni que celui du mo- coco. L'ouistitz a la face nue et dréne adsleur de chair assez foncée ; il est coiffé fort singu- lièrement par deux toupets de longs poils blancs au-devant des oreilles , en sorte que quoiqu'elles soient grandes , on ne les voit pas en regardant l’animal en face. M. Par- sous a donné une très-bonne description de cet animal dans les Transactions philoso- phiques. Ensuite M. Edwards en a donné une bonne figure dans ses Glanures il dit en * Ouistiti, son articulé que cet animal fait en- tendre toutes les fois qu’il donne de la voix, et que uous lui avons donné pour nom. 1: 7 . Zont 7 LL GG ji te 4 à $ LS | but es 4 RTE tr ac h * Fees 4 RUN D | RON Loyer A Li £ { HISTOIRE NATURELLE. 20 avoir vu plusieurs, et que les plus gros ne pesoient guère que six onces, et les plus pe tits quatre onces et demie; il observe très judicieusement que c’est à tort que l’on a supposé que le petit singe d'Ethiopie, dont Ludolphe fait mention sous le nom de /onkes ou guereza , étoit le même animal que celui- ci : ilest en effet très-certain que l’ouistiti ni aucun autresagouin ne se trouvent en Éthio- -pie,etil est très-vraisemblable que le fonfes ou gzereza de Ludolphe estou le z20c0c0 ou le * doris ; qui se trouvent dans les terres méri- dionales de l’ancien continent. M. Edwards, dit encore que le sanglin (owistiti), lorsqu'il est en bonne santé, a le poil très-fourni et très-tou ffu ; que l’un de ceux qu'il a vus, et qui étoit des plus vigoureux, se nourrissoit de plusieurs choses, comme de biscuits, fruits , légumes , insectes , limaçons ; et qu'un jour étant déchaîné , il se jéta sur un petit poisson doré de la Chine qui étoit dans un bassin, qu’il le tua et le dévora avidèe- ment; qu'ensuite on lui donna de petites anguilles qui l’effrayèrent d’abord en s’en tortillant autour de son cou, mais que bien- tôt 11 s'en rendit maître et les mangea. Enfin ee 4 ANT NS MAC MEL AT LA "R ENT 292 HISTOIRE NA TORE LINE ae -M. Edwards ajoute un exemple qui prouvé que ces petits animaux pourroient peut-être se multiplier dans les contrées méridionales de l’Europe : ils ont, dit-1l, produit des pe- | tits en Portugal, où Le climat leur est favo= rable ; ces petits sont d’abord fort laids, ‘n'ayant presque point de poil sur le corps ; ils s’attachent fortement-aux tettes de leur mère; quand ils sont devenus un peu grands, ‘ils se cramponnernit fortement sur son dos ou sur ses épaules ; et quand elle est lasse de les porter , elle s’en débarrasse en se frottant contre là muraille ; lorsqu'elle les a écartés, le mâle en prend soin sur-le-champ et les laisse grimper sur son dos pour soulager la : femelle. | Î met Caractères distinctifs de cette espèce. L'ou1IsTITI n’a niabajoues ni callosites sur les fesses : il a la queue lâche, non prenante, fort touffue, annelée alternativement de noir et de blanc ou plutôt de brun et degris, et une fois plus longue que la tête et le corps pris ensemble ; la cloison des narines fort. épaisse, et leurs ouvertures à côté; Ja tète. DB P'QUESTITE "+608 ronde , couverte de poil noir au-dessus du front , sur le bas duquel il y a, au- destus-äu nez, une marque blanche et sans poil: s face est aussi presque sans- poil et d’une cou= presq leur de chair foncée; il a des deux côtés de la tête au-devant des oreilles deux toupets de longs poils blancs; ses oreilles sont arron- _dies , plates , minces et nues ; ses yeux sont d'un châtain rougeâtre ; le corps est convert d’un poil doux d'un gris cendré eb d’un gris plus clair, et mêlé d’un peu de jaune sur la gorge, laspoitrine et le ventre: il marche à quatre pieds; et n'a souvent pas un démi-pied de longueur depuis le bout du nez jusqu'à l’origine dela queue. Les femelles neisont pas pr à l'écoulement périoe vue LÉ MARIKINA®. “] Le Le à L E marikina est assez vulsairement connti | sous le nom de perit singe-lion : nous .n’ad- niettons pas cette dénomination composée ; parce que le marikina n’est point un singe ; mais un sagouin , et que d’ailleurs il ne res: semble pas plus au lion qu’une alouette ressemble à une autruche, et qu’il n’a de rapport avec lui que par l'espèce de crinière qu’il porte autour de la face, et par le petit flocon de poils qui termine sa queue. Ilæe poil touffu, long, soyeux et lustre; la tête ronde , la face brune, les yeux roux; és oreilles rondes, nues et cachées sous les longs poils qui environnent sa face : ces poils sont d’un roux vif, ceux du.corps et de la queue sont d’un jaune frès-pâle et presque blanc. Cet animal a les mèmes manières, la même vivacité et les mêmes inclinations que les autres sagouins, et il paroît être d’un tempeé- * Marikina , uom de cet animal au Maragnon, et que nous avons adopté. | ENT plie et NV t HISTOIRE NATURELLE. 295 xament un peu plus robuste; car nous en avons yu un qui a vécu Cinq ou six ans à Paris, avec la seule attention de le garder pendant l'hiver dans une chambre où tous les jours on allumoit du feu. Caractères distinclifs de cette espèce. LE marikina n’a ni abajoues ni callosités sur les fesses : il a la queue lâche, non pre nante, et presque une fois plus longué que Hà tête et le corps pris ensemble; la cloison entre les narines épaisse; et leurs ouvertures à côté : il a les oréilles rondes ét nues: de longs poils d’un roux doré autour de la face ; du poil presque aussi long, d’un blanc jau— nâtre et luisant, sur tout lé réste du corps , . avec un flocon assez sensible à l'extrémité de la queue : il marche à quatre pieds, et n'a qu'environ huit ou neuf pouces de longueur en tout. La femelle n’est pas sujette à l’écou- lement périodique. ( qu 4 AE N LS 7e D er +. s LR A P EL [LI : (4 ('X LT % r 4“ es 0; QAR La | n # 1 : nus LE f &: #4 { + L E piuche, quoique fort petit , l’est cepen- dant moius que l’ouistiti, et même que . le tamarin ; il a -énviron neuf pouces de long, la tête et le corps compris , et sa queue: est au moins uné fois plus longue: il est re marquable par l'espèce de chevelure blanche et lisse qu’il porte an-dessus et aux côtés de la tête, d'autant que cette couleur tranche merveilleusement sur celle de la face, qui est © noire et ombrée par un petit duvet gris; äb a les yeux tout noirs, la queue d'un roux vif à son origine et jusqu’à près de la moitié | de sa longueur, où elle change de couleur eË£ devient d’un noir brun jusqu’à l’extrémité:p le poil des parties supérieures du corps! est d’un brun fauve ; celui de la poitrine, du ventre, des mains et des pieds, est blanc; la peau est noire par-tout, même sous Les par= * Pinche, nom de cet ammal à Maynas, et que nous avons adopté LE PINCHE. L HISTOIRE NATURELLE. 297 ties où Le poil est blanc ; il a la gorge nue et noire comme la face. C’est encore un joli animal et d’une figure très-singulière ; ; sa voix est douce, et ressemble plus au chant d’un petit oiseau qu’au cri d’un animal ; il est très-délicat, et ce n’est qu'avec de grandes précautions qu’on peut le transporter d’Amé- rique en Europe, Caractères distinctifs de cette espèce. LE pinche n’a ni abajoues ni callosités sur les fesses : il a la queuelâche, non prenante, et une fois plus longue que la tète et le corps pris énsemble ; la cloison entre les narines épaisse, et D. ouvertures à côté; la face, la gorge et les oreilles noires , de longs poils blancs en forme de cheveux lisses ; le museau large, la face ronde; le poil du corps assez 1ong brun fauve ou roux sur le corps jus _qu’auprès de la queue où il devient orangé, blanc sur la poitrine, le ventre, les mains et les pieds , où 1l est plus court que sur le corps; la queue d’un roux vif à son origine et dans Ja première partie de sa longueur, ensuite d'un roux brun etenfin noir à son extrémité: ne sont pas sujettes à l'écoulemen 5 —. FE 5 À- 2 er. &e . Die un mer e: RE TR os de if mr ve ges re É mr LE MICO Li LE MIC.O*,. C'rsr à M. de la Condamine que nous Y . e 4 s devons la connoissance de cet animal : ainsi * Mico , nom que lon donne aux plus petites espèces de sagouins’dans les terres de l’Orénoque, selon Gumilla, pages 8 et 9. Nous l’avons appliqué à cette espèce, afin de la distinguer des autres. On voit, par un passage de J oseph d’'Acosta, que ce mot mco signifioit guenon , c’est-à-dire, singe à longue queue, et que de son temps on appliquoit également le nom de nico aux sapajous et aux sa- gouins. « Il y a, dit cet auteur, dans toutes les mon- « tagnes de la terre ferme dés Indes, un nombre < infini de micos ou &uenons, qui sont du genre des _« singes, mais différens en ce qu’ils ont une queue « noire fort longue. Il y en a entre eux quelques « races quisont trois fois plus grandes, voire quatre, æ que les autres ». Mais depuis le temps d’Acosta, 1] paroît qu’on a restreint Je nom de mico aux plus petites espèces; et c’est pour cela que J'ai cru pou- voir Je donner au petit sagouin dont il est ici question. 360 HISTOIRE NATURELLE nous ne pouvons mieux faire que de rappor- ter ce qu’il en écrit dans la relation de sont voyage sur la rivière des Amazones : «Celui= «ci, dont le gouverneur-du Para m’avoit «fait présent, étoit l'unique de son espèce & qu’on eût vu dans le pays. Le poil de sori « corps étoit argenté et de la couleur des plus « beaux cheveux blonds ; celui de sa queue œétoit d'un marron lustré approchant du «noir. Il avoit une autre singularité plus” & remarquable ; ses oreilles , ses joues et ES «museau étoient teints d’un vermillon si «vif , qu'on avoit peine à se persuader que «cette couleur fût naturelle. Je Vai gardé - «pendant un an, et il étoit encore en vie « lorsque j'écrivois ceci, presque à la vue «des côtes de France, où je me faisois un « plaisir de l’apporter vivant. Malgré les pré- «cautions continuelles que je prenois pour « le préserver du froid , là rigueur de la sai= « son l’a vraisemhlablement fait mourir... « Tout ce que j'ai pu faire, a été de le con « server dans l’eau-de-vie; ce pu suffira peut: « être pour faire voir que je n’ai rien exa- . « géré dans ma description ». Par ce récit de M. dé la Condamine, il est aisé de voir que ; 7 ra D'UUMNE CO: 6e 3ot la première espèce de ces animaux dont il parle, est celui que nous avons appelé arra- _rin, et que le dernier, auquel nous appli- quons le nom de rico, est d’une espèce très- différente et vraisemblablement beaucoup plus rare, puisqu'aucun auteur ni aucun voyageur avant lui n’en avoient fait men- tion , quoique ce petit animal soit très- remarquable par le rouge vif qui anime sa _ face, et par la beauté de son poil. Caractères distinctifs de cette espèce. . LE mico n’a ni abajoues ni callosités sur les fesses : il a la queue lâche, non prenante, et d'environ moitié plus longue que la tête et le corps pris ensemble; la cloison des na- rines moins épaisse que les autres sagouins, mais leurs ouvertures sont situées de même à côté et non pas au bas du nez : il a la face et les oreilles nues, et couleur de ver- millon; le museau court; les yeux éloignés l'un de l’autre ; les oreilles grandes; le poil d’un beau blanc argenté, celui de la queue d'un brun lustré gpupresque noir : il marche + 26 & ÿ F4 24 : à ne sont pas sujettes à l'écoulement se ‘ à: Fo ON ut : { dique. ons Fe NE SRE À D? à ): ; ; l'A Y ÿ (Ps ; j i \ é ba \ À T < $ { À = À pe 2 1 j ex ES i 19) # , Ca tr NES LEE w. / LS eu J : | L4 “ rré MU A ET MY - 4 ; x } LA n » 4 \ [l \ o à Dee \ 4 , I ; AT NL ti l F 3 ; PLU L } . A NME PURE l ) mn: 1 ce +} * 9 8 ER UE 1) 4 dx { % L\4 Fi ALI : ë ; (NU Î 1 fe » \ \ ! 1 ” | + à) "A lu ? & # ‘ "4 HAN CES A : { : “al. FE Ly f ‘A ” we} } \ DNOTLC.E.S DE QUELQUES ANIMAUX -Dont il n’a pas été fait mention expresse dans le cours de cet ouvrage. Couus nous avons achevé, autant qu'il est en nous , l’histoire des animaux quadru- pèdes , nous croyons que pour la rendre en- core plus complète, il convient dé'ne pas passer sous silence ceux dont nous n'avons pu nous procurer une connoissance exacte ; l’on verra qu’ils ne sont qu’en petit nombre, et que dans ce petit nombre il y en a beau- coup qu'il faut rapporter comme des variétés aux espèces dont nous avons parlé : aussi ce nest ni par l'utilité ni par l'attrait du sujet, mais uniquement pour éviter le re- proche de n'avoir pas dit, dans un ouvrage aussi étendu , tout ce que l’on sait ou que 4 É : : À 1 L L TRE Es OCR Es 41 €, 4. vor y x NE M RATES LRU nt dy ÿ / C t | HA F1 *: 304 NOTICES. pate Jon croit savoir sur les animaux , que je me, suis déterminé à ajouter les notices suivantes : NOTICE. PREMIÈRE. ge OURS BLANC. Ux animal nas de nos_terres les plus septentrionales , c’est l’ours blanc. Martens et quelques autres voyageurs en ont fait mention : mais aucun n'en a donne une assez bonne description pour qu’on puisse prononcer afñrmativement qu'il soit d’une espèce différente de celle de l’ours; il paroit seulement qu’on doit le présumer en sup- posant exact tout ce qu’ils nous en disent: mais comme nous savons d'ailleurs que les- pèce de l'ours varie beaucoup suivant les. différens climats, qu’il y en a de bruns , de noirs , de blancs et de mêlés , la couleur de-. vient un caractère nul, et par conséquent la dénomination d'ours blanc est insuffisante , si l’espèce est différente. J'ai vu deux petits - ours apportés de Russie qui étoient entière=. ment blancs *; néanmoins ils étoient très- * On trouve des ours blancs terrestres non seulé= Lui x* | hHÈÉ 4 # DE QUELQUES ANIMAUX. 3oÿ certainement de la même espèce que notre oursdes Alpes. Ces animaux varient beaucoup aussi pour la grandeur : comme ils vivent assez long-temps } et qu’ils deviennent très- gros et très-gras dans les endroits où ils ne ‘sont pas tourmentés , et où ils trouvent de quoi se nourrir Jargement, lé caractère tiré de la grandeur est encore équivoque : ainsE l’on ne seroit pas fondé à assurer que l'ours 1 des mers du Nord “est d’une espèce particu- lière, uniquement parce qu’il ‘est blanc et qu'il est plus grand que l’ours commun. La différence ‘dans és habitudes né me paroît : pas plus décisive que celle de la couleur et dé la grandeür. L’ours des mers du Nord”se nourrit de‘poisson; ilne quittepas les rivages dela mer’, “et souvent même . il habité en Rue eau sur des" ‘glaçons flottans : mais si ; ment en Russiè, mais en Pologne, | en D Shen et même en Tartarie. Les montagnes de la grande Tartarie fournissent quantité d’ours blancs, dit l’auteur dela relation de la grande Tartarie page 8. Ces ours de montagne ne fréquentent pas la: mer et cependant : sont blancs : ainsi cette couleur paroîé plutôt venir de ‘la différence du climat que de celle de élément qw’habitent ces animaux. | 26 4 ji D de EE La APM PNNUEE 306 :NOTICES | l’on fait attention que l'ours en gap né un animal qui se nourrit de: tout, et. qui, lorsqu'il est affamé, ne fait aucun choix, sk l’on pense aussi qu'il ne craint pas l’eau, ces habitudes ne paroîtront pas assez diffé— : rentes pour en conclure, que L'espèce n’es£ pas la même; car le poisson que mange l'ours _ des mers du Nord, est plutôt de la chair» c'est principalement les cadavres. des ba- leines , des morses.et des plioques, qui lui servent de päture , et cela dans un pays où il n'y à ni autres animaux, mi grains nk fruits sur la terre, et où par conséquent il ne peut subsister que des productions de la mer. N’est-il.pas probable que si l’on trans- portoit nos ours de Savoie sur les montagnes de Spitzherg, n'y trouvant nulle nourriture sur la terre; ls se jetterotent à la mer pour y chercher leur subsistance ? La couleur; la grandeur et la façon de vivre ne sufhsant pas, il ne reste pour carac— tères différentiels que ceux qi'on peut tirer de la forme : or tout ce que les voyageurs eu ont dit, se’ réduit à à ce que l'ours des mers du Nord a Ja tête plus longue que. notre ours, le corps plus alongé, Le poil plus long et le crâne { | DE QUELQUES ANIMAUX. 3o7 béaucoup plus dur. Si ces caractères ont été bien saisis, et si ces différences sont réelles et considérables, elles suffiroient pour cons iituer une autre espèce : mais je ne sais si Martens a bien vu, et si les autres qui l’ont copié n'ont pas exagéré. «Ces ours blancs, « dit-il, sont faits tout autrement que les « nôtres ; ils ont la tête longue, semblable à « celle d'un chien, et le cou long aussi; ils «a abôient presque comme des chiens quisont «enroués; ils sont avec cela plus déliés et « plus agiles que les autres ours; ils sont à « peu près\de la même grandeur ; leur poil «est long et aussi doux que de la laine; ils « ontlé museau, le nez et les griffes noirs... «On dit que les autres ours ont la tête fort « tendre; mais c'est tout le contraire pour «les: ours blancs : quelqués coups demassue « que nous leur donnassions sur la tête, ils « n’en-étoient point du tout étourdis, quoi- «que .ees COUPS eussent pu assomimer un «bœuf». On doit remarquer dans cette des- cription S 1°, que l’auteur ne fait pas ces ours plus-grands que les autrés ours, et que par conséquent on doit regarder comme suspect le témoignage de ceux qui ont dat que ces à Le: ue. cs me i Van + Ed 4 ce N rw: TICE CU ne | Are ours de mer avoient jusqu'à treize sh de” ; longueur ; 2°. que le poil aussi doux quede la laine ne fait pas un caractère qui dis tingue spécifiquement ces OuTs , puisqu'il suffit qu’un'animal habite souféent dans l'eau pour que son poil. devienne plus doux et même plus touffu : on voit cette même diffé- rence dans les castors d’eau et dans les cas- tors terriers ; ceux-ci, qui habitent plus la ‘terre que l’éau , ‘ont le poil plus rude ‘et moins fourni : et ée qui me fait présümer que les autres différences ne sont ni réelles ni même aussi apparentés que Le dit Martens, c'est que Dithmar Blefken, dans sa Descrip= tion! de l'Islande; parle de ces ours blancs, et assure en avoir vu tuer un en Groenland, qui se dressa sur ses deux pieds comme les autres ours ; et”, dans ce récit , ‘il ne dit pas un not qui puisse indiquer que! cet ‘ours. blanc du Groenland ne fût pas'éntièrement semblable aux autres ours. D'ailleurs, 16rs- que’ces animaux trouvent quelque proie sur terre , ils ne se donnent pas la peine d’aller chasser èn mé; ‘ils dévorent lés rennéset les autres bêtes qu'ils peuvent saisir; is at taquent même les hommes , et ne manquent DE QUELQUES ANIMAUX. 309 jamais de déterrer les cadavres : mais la di- sette où ils se trouvent souvent dans ces terres stériles et désertes, les force de s’habituer à l’eau; ilss’y jettent pourattraperdes phoques, de jeunes morses, de petits baleineaux ; ils se gitent sur des glaçons où ils les attendent, et d’où ils peuvent les voir venir, les observer de loin ; et tant qu'ils trouvent que ce poste leur produit une subsistance abondante, ils ne l’abandonnent pas , en sorte que quand les glaces commencent à se détacher au prin- temps, ils se laissent emmener et voyagent avec elles; et comme ils ne peuvent plus regagner la terre, ni même abandonner pour long-temps le glaçon sur lequel ils se trouvent embarqués , ils périssent en pleine mer; et | ceux qui arrivent avec ces glaces sur les côtes d'Islande ou de Norvége, sont affamés au point de se jeter sur tgut ce qu'ilsrencontrentpour le dévorer , et c'est ce qui a pu augmenter encore le préjugé que ces ours de mer sont d’une espèee plus féroce et plus vorace que l'espèce ordinaire. Quelques auteurs se sont même persuades qu'ils étoient amphibies comme les phoques , et'qu'ils pouvoient de- meurer sous l’eau toutaussilons-temps qu’ils fo / NÉ Ne dat d'u, 8ro. à NoTICES, 68 vouloient ; mais le contraire est évident, ef résulte dela manière dont on les chasse : 3 ils ne peuvent nager que pendant un petit temps, ni parcourir de suite un espace de plus d’une lieue ; on les suit avec une chaloupe, et on les force de lassitude : s'ils pouvoient se pas— ser de respirer, ils se plongeroient pour se reposer au fond de l’eau; mais s'ils plongent, ce n’est que pour quelques instans, et, dans la crainte de se noyer, ils se laissent tuer à fleur d’eau. La proie la plus ordinäire des ours blancs sont-les phoques, qui ne sont pas assez forts pour leur résister ; mais les morses, aux- quels ils enlévent quelquefois leurs petits, les percent de leurs défenses et les mettent * en fuite. [l en est de même des baleines: elles les assomment par leur masse et les chassent des lieux qu’elles habitent, où néanmoins ils ravissent et dévorent souvent leurs petits baleineaux. Tous les ours ont naturellement beaucoup de graisse, et ceux-ci, qui ne vivent que d'animaux chargés d'huile, en ont plus que les autres : elle est aussi à peu près semblable à celle de la baleine. La chair de ces ours n’est, dit-on, pas mauvaise à DE QUELQUES ANIMAUX. 31t manger , et leur peau fait une fourrure très- chaude et très-durable. II VACHE DE TARTARIE. , M. Gmelin a donné, dans les Nouveaux Mémoires. de l'académie de Pétérsbourg, la description d’une vache de Tartarie, qui pa roit, au premier coup d’&il, être d’une espèce différente de toutes celles dont nous Hu parlé à l’article du buffle. « Cette vache, dit- «il, quejaivuevivante et que j'ai fait dessi- « ner en Sibérie, venoit de Calmouquie ; elle « avoit de longueur deux aunes et demie de « Russie. Par ce module, on peut juger des « autres dimensions," dont le dessinateur a « bien rendu lés proportions. Le corps res- « semble à celui d'une vache ordinaire; les « cornes sont torses en dedans ; le poil du « corps et de la tête est noir, à l'exception , « du front et de l’épine du dos, sur lesquels « il est blanc ; le cou a une crinière, et tout « le corps, comme celui d’un bouc, est cou- « vert d’un poil très-long et qui descend 4 d - PORT PCM COURANTE LORS AUUE x! % LE Ne EN AI * UE \ mu 73 j ls À L < » a 4. À « jusque sur les genoux, en sorte que les « pieds paroissent très-courts; le dos s'élève «en bosse ; la queue ressemble à celle du « cheval ; elle est d’un poil blanc et très-four- «ni; les pieds de devant sont noirs, ceux . « de derrière blancs , et tous sont semblables «à ceux du bœuf; sur les talons des pieds de « derrière il ya deux houppes de longs poils, « l’une en avant, et l’autre en arrière, et sur «les talons des pieds de devant il n’y a « qu’une houppe en arrière. Les excrémens «sont un. peu plus solides que ceux des « vaches; et lorsque cet animal veut pisser, «il retire son corps en arrière. Il ne mugit « pas comme un bœuf; mais il grogne comme « un cochon. Il est sauvage et mème féroce; «car , à l'exception de l’homme qui lui « donne à manger, il donne des coups de tête « à tous ceux qui l’approchent. Il ne souffre « qu'avec peine la présence des vaches do- « mestiques; lorsqu’ilen voit quelqu’une, il « grogne : ce qui lui arrive très-rarement «en toute autre circonstance ». M. Gmelin ajoute à cette description, «qu'il est aisé de «voir que c’est le même animal dont Ru— « bruquis a fait meution dans sou Voyage de 4 #| ' FE AE PE mA Re her en é x DE QUELQUES ANIMAUX. 313. « Tartarie....: qu'il y en a de deux espèces «chez les Calmoucks: la première, nommée «sarluk, qui est celle même qu'il vient de « décrire; la seconde, appelée cainuk, qui « diffère de l’autre par la grandeur de la tête «et des cornes, et aussi en ce que la queue, «qui ressemble, à son origine, à celle d’un « cheval , se termine ensuite comme celle «d’une vache ; mais que toutes deux sont « de même naturel. » | . Jln’y a dans toute cette description qu'un seul caractère qui pourroit indiquer que ces vaches de Calmouquie sont d’une espèce particulière, c’est le grognement äu lieu du _ mugissement; car pour tout le reste, ces vaches ressemblent si fort aux bisons, que je ne-doute pas qu’elles ne soient de leur espèce ou plutôt de leur race. D'ailleurs, quoique l’auteur dise que ces vaches ne mugissent pas, mais qu'elles grognent, il avoue cepen- dant qu’elles grognent très-rarement, et c'étoit péut-être une äffection particulière de l'individu qu’il a vu, car Rubruquis et les auteurs qu'il cite ne parlent pas de ce grogne- ment; peut-être aussi les bisons, lorsqu'ils sont irrités, ont-ils u grognement de colère; A Re 27 SA de NS ERA ET ete ns à n 7 “4 4 EE | ; NE UN ÿ ÿ A INC TES ch At Ro: Fe da A NOTICES. nos taureaux même, sur-tout din le NE du rut, ont une grosse voix entrecoupée qui ressemble beaucoup plus à un grognement L= qu’à un mugissement. Je suis donc persuadé que cette vache grognante (vacca grunniens) de M. Gmelin n’est autre chose qu'un bison, et ne fait pas une espèce particulière. T1IE LE TOLAÏT CET animal, qui est fort commun dans les terres voisines du lac Baikal en Fartarie, est un peu plus grand qu'un lapin, auquel il ressemble par la forme du corps, par le poil, par les allures, par la qualité, la sa- veur, la couleur de la chair, et aussi par l'habitude de creuser de même la terre pour se faire une retraite : il n’en diffère que par la queue, qui est considérablement plus longue que celle du lapin; il est aussi con< formé de mème à l’intérieur : il me paroît donc assez vraisemblable que n’en différant que par la seule longueur de la queue , 1l ne fait pas une espèce réellement différente , mais une simple variété dans celle du lapin. … DE QUELQUES ANIMAUX. 315 Rubruquis, en parlant des animaux de Tar- tarie, dit: «Il y a des connils à longue queue, « qui ont au bout d’icelle des poils noirs et « blancs... Point de cerfs, peu de lièvres, « force gazelles, etc. ». Ce passage semble indiquer que notre lapin à courte queue ne . se trouve point en Tartarie, ou plutôt qu’il a subi dans ce climat quelques variétés et no- tamment celle d’une queue plus alongée; car le tolai ressemblant au lapin à tous autres égards, on ne peut guère douter que ce ne soit , en effet, un lapin à queue longue, et je ne crois pas qu'il soit nécessaire d’en faire une espèce distincte et séparée de celle dk lapin. X V. LE ZISEL. : QuELQUESs auteurs, et entre autres M. Line næus, ont douté si le zise/ ou zcesel (citillus) étoit un animal différent du hamster (cri- cetus) : il est vrai qu'ils se ressemblent à plusieurs égards, et qu'ils sont à peu près du même pays*; mais ils différent néanmoins %* Le Aamsier se trouve en Misnie, en Thu« 6 (NOTICES. ER par un assez grand nombre de caractères, pour que nous soyons convaincus qu'ils sont d'espèces réellement différentes. Le zisel est plus petit que le hamster ; il a le corps long et menu comme la belette, au lieu que le hamster a le Le assez gros et ramassé comme le rat. Il n’a point d'oreilles exté- rieures, mais seulement dés trous auditifs caches sous le poil : le hamster ,- à la vérité, a les oreilles courtes; mais elles sont très apparentes et fort larges. Le zisel est'd’umt gris, plus ou moins cendré et d’une couleur. uniforme : le hamster est marqué de cha- que côté , sur l'avant du corps, de trois grandes taches blanches. Ces différences, jointes à ce que ces deux animaux, quoi- qu’habitans des mêmes terres, ne se mêlent _ pas, et que les espèces subsistent séparées, suffisent pour qu’on ne puisse douter que ce . soient, eu effet, deux espèces différentes, et quoiqu’ils se ressemblent, en ce qu'ils ont tous deux la queue courte ; les jambes basses, les dents semblables à celles des rats, et les x xinge, dans le pays d’'Hanovre ; le zise] en Hon- grie, en Autriche, et en "HE où on re susël 4 A! : |" : DE QUELQUES ANIMAUX, 3:7 mêmes habitudes naturelles, come celles de: sé creuser des retraites, d’ y faire des ma- gasins , , de dévaster les! bles ; ‘etc: D'ailleurs ce qui n'auroit dû laisser aucun doute à des naturalistes un peu instruits quand méme ils n’auroient pas vu ces deux animaux, c’est qù'Agricola , auteur exact et judicieux, dans son petit traité sur les animaux souterrains ; donne la description de l’un'et de l’autre, et les distimgue' si clairement, qu ïl n est pas possible de les confondre, Ainsi tous pou vous donner pour certain que lé hamster et le zisel sont deux animaux différens, et peut-être d'espèces aussi éloignées" que celle de la belette l’est de celle du rat: : V: TX, 'B 9 LE ZEMNI.- IL ya en Pologne et en Russie’ un autre. animal appelé zzezzni ou zemni, qui est du même genre que le zise/, mais qui est plus grand, plus fort. et plus méchant; ilest un peu plus petit qu'un chat domestique; il a la tête assez grosse, le corps menu, les oreilles 27 ENS OT FEEE APS ER courtes et aan pc jp pts in- cisives qui lui sortent de la gueule, dont les deux de la mâchoire inférieure sontitrois fois plus longues que les deux de la mâchoire. SU. périeure ; les pieds très-courts et couverts de : poil, divisés en.cinq doigts et armés d'ongles courbes ; le poil moilet, court et de couleur, de atiarile- SOULIS ;, : la queue médiocrement \ | grande ; les yeux aussi petits et aussi cachés que ceux de la taupe. Rzaczynski a appelé cét animal perit.chien de terre (canicula sub- terranea) : cet auteur. me paroît être le seul qui ait parlé du zemni, qui néanmoins. est fort commun dans quelques provinces du ‘Nord. Son naturel et ses habitudes sont à peu près les mêmes que celles du hamster et du zisel ; il mord dangereusement, mange avi- dement, et deévaste les moissons et les jar- dins; il se fait un terrier; il vit de grains, de fruits et de légumes, dont il fait des ma- gasins dans sx retraite, où 1l passe tout le temps de l'hiver. DE QUELQUES ANIMAUX. 3r9 2 UT, LE POUC. LE mème auteur (Rzaczynski) fait men- tion d’un autre animal que les Russes ap pellent pouck : 1l est plus grand que le rat domestique ; 1l a le museau oblons; 1l creuse la terre, se fait un terrier et dévaste aussi les jardins. 11 y en avoit en si grand nombre auprès de Suraz en Volhinie, que les habi- tans furent obligés d'abandonner la culture de leurs jardins. Ce pouc: pourroit bien être le même que Seba nomme af de Norvége, et dont il donne la description et:la figure. NI LE PÉROUASCA. T1 y a encore en Russie et en Pologne, sur-tout en Volhinie, un animal appelé par les Russes perewiazka, et par les Polonois przewiaska, nom qu'on peut rendre par la dénomination de belerte à ceintures (mustela Es a or bb Y NT r NU au À RENE RÉ É NE præcincta), comme le dit Rzaczynski : cet. animal est plus petit que le putois ; il est couvert d’un poil blanchâtre, rayé transver- salement de plusieurs lignes d'un jaune roux, qui semblent lui faire autant de cein- tures:; il demeure däns les bois et'se creuse un terrier. Sa peau est recherchée « et fait une jolie Sepl pa : É os (VÉtE LE SOUSLIK. ON trouve à Casan et dans les provinces qu'arrose le Wolsa; et jusque dansP Autriche, ux petit animal appelé souslif en langue russe, dont on fait d’assez jolies fourrures. Il ressemble beaucoup au campagnol par là figure, il a comme lui la queue courte: mais ce qui le distingue du campagnol et de tous les autres rats, c'est que sa robe, qui est d’un gris fauve,estsemée par-toutde petites taches d’un blanc'vif et lustré; cesvpetites taches’ n'ont guère qu'une ligne de. diamètre, et. sont. à deux ou trois lignes de distance les uues des autres ; elles sont plus apparentes y , _ DE QUELQUES ANIMAUX. 32r et mieux terminées sur les lombes de l’ani- mal que sur les épaules et la tête. M. Pen- nant, gentilhomme anglois, très-versé dans l’histoire naturelle, et qui connoît très-bien les animaux, a eu la bonté de me donner un de ces sousliks qu’on lui avoit envoyé d’Au- triche, comme un animal inconnu des na turalistes , et qui n’avoit point de nom dans ce pays; je le reconnus pour être le même que celui dont j'avois une fourrure, et don£ M. Sanchès m'avoit fourni la notice sui- vante : «Les rats que l’on appelle sousliks, se « prennent en grand nombre sur les barques « chargées de sel dans la rivière de Xana, « qui descend de So/ikamskie, où sont les « salines, et vient tomber dans le Wolga, au- « déssus de la ville de Casan, au confluent « de Teluschin : le Wolga depuis Simbuski « jusqu’à Sorrtof est couvert de ces bateaux « de sel, et c’est dans les terres voisines de « ces rivières, aussi-bien que sur les bateaux, « qu'on prend ces animaux; on leur a donné « le nom de souslik, qui veut dire friend, _« parce qu’ils sont très-avides de sel.» ne $ £ À 14 0 VON CR RIPOSTE 19 322 NOTICES. I Pt 2 ; TAUPE DOREE. ENFIN, pour n’omettre aucun des animaux du Nord et même des plus petits, il paroît qu’il y a en Sibérie une sorte de taupe qu’on appelle {aupe dorée, et dont l’espèce pourroit être différente de celle de la taupe ordinaire, parce que cette taupe de Sibérie n’a point de queue et qu’elle a le museau court, le poil mêlé de roux et de verd, et qu’elle n’a que trois doigts aux pieds de devant et quatre aux pieds de derrière, au lieu que la taupe ordinaire a cinq doigts à tous les pieds. Nous ignorons le nom de cet animal, dont Seba a donné la figure. | # RAT D'EAU BLANC. Ox trouve en Canada le rat d’eau d'Eu- ryope, mais avec des couleurs différentes : il n'est brun que sur le dos, le reste du corps DE QUELQUES ANIMAUX. 323 est blanc et fauve en quelques endroits; la tête, et le museau même , sont blancs aussi- bien que l’extrémité de la queue. Le poil paroît plus doux et plus lustré que celui de notre rat d’eau; mais au reste tout est sem- blable, et l’on ne peut pas douter que ces deux animaux ne soient de la même espèce : le blanc du poil vient du froid du climat, et l'on peut présumer qu’en recherchant les animaux dans le nord de l’Europe, on y trouvera, comme en Canada, ce rat d’eau blanc. | | XL LE COCHON DE GUINÉE. Quoique cet animal diffère du cochon ordinaire par quelques caractères assez mar- qués , je présume néanmoins qu'il est de la même espècé, et que ces différences ne sont que des variétés produites par l'influence du climat; nous en avons l’exéemple dans le cochon de Siam, qui diffère aussi du cochon d'Europe, et qui cependant est certainement de la même espèce, puisqu'ils se mélent et À Ba NO TAC OO produisent ensemble. Le cochon de Guinée _est à peu près de la même figure que notre cochon, et de la même grosseur que le co- chon de Siam, c'est-à-dire, plus petit. que notre sanglier ou que notre cochon; il est originaire de Guinée, et a été transporté au brel, où il s’est multiplié comme dans son pays natal ; il y est domestique et tout-à-fait PrivES il a le poil court, roux et brillant; il n’a point desoies, pas même sur le dos; de cou seulement et la croupe près de l’ origine de la queue sont couverts de poils un His plus longs que ceux du reste du corps: il n’a pas la tête si grosse que le cochon d’ Europe, et il en diffère encore par la forme des oreilles, qu’il a très-longues, très-pointues et cou- chées en arrière le long du cou; sa queue est aussi beaucoup plus longue , elle touche presque à terre, et elle est sans poil jusqu’à son extrémité. Au reste, cette race de: co- chon, qui selon Marcgrave est originaire de Guinée, se trouve aussi en Asie, et parti-. culièrement dans l'ile de Java, d’où il paroît qu’elle a été transportée au cap de Bonne- Espérance par les Hollandois. En Le. ie TR ER ” DE QUELQUES ANIMAUX. 3:5 3 ak . LE SANGLIER DU CAP VERD. I y a dansdes terres voisines du cap Verd un autre cochon ou sanglier, qui, par le nombre des dents et par l’énormité des deux défenses de la mâchoire supérieure, nous paroit être d’une race et peut-être même d’une espèce différente de tous les autres co chons, et s'approcher un peu du babiroussa. Les defenses du dessus ressemblent plus à des cornes d'ivoire qu’à des dents; elles ont un demi pied de longueur, et cinq pouces de circouference a la base., et elles sont cour bées et recourbées à peu près comme les cornes d'un taureau. Ce caractère seul ne sufhroit pas pour qu'on dût regarder cesanglier comme uue espèce particulière ; mais ce qui semble fouder cetie presomption, c’est qu'il diffère encore de tous les autres cochons par la longue ouverture de ses narines, par la grande lar- geur et la forme de ses mâchoires , et par le” nombre et la figure des dents mâchelières, Cependant nous avons vu les défenses d’un. Quadruptdes, V LI. 28 AE LA RE à FAR gi Chan al Dos: - 326 ER ‘an sanglier tué dans nos bois de Bourgogne y qui approchoïent un peu de celles de ce san glier du cap Verd : ces défenses avoient envi- ron trois pouces et demi de long sur quatre pouces de circonférence à la base ; elles étoient contournees comme les cornes d'un taureau ; c’est-à-dire qu'elles avorent une double cour- bure , au lieu que les défenses ‘ordinaires n'ont qu'une simple courbure en portion de cercle; elles paroissoient être: ‘aussi d'un ivoire solide, et il est certain que ce sanglier devoit avoir la mâchoire plus large que les autres : ainsi nous pouvons présumer, avec quelque fondement, que ce sanglier du cap Verd est une simple variéte , une race parti- culière dans l'espèce du sanglier ordinaire. XIIL LE LOUP DU MEXIQUE. ComMmeE le loup est originaire des pays froids , il a passé par les terres du Nord, et se trouve également dans les deux continens. Nous avons parlé des loups noirs et des loups gris de l'Amérique septentriavale : 1l paroît 4 4 DE QUELQUES ANIMAUX. 327. que cette espèce s’est. répandue jusqu’à la nouvelle Espagne et au Mexique , et que, dans ce climat plus chaud, elle a subi des variétés , sans cependant avoir changé ni de nature ni de naturel; car ce loup du Mexique a la même figure , les mèmes appétits et les mêmes habitudes que le loup d'Europe ou le loup de l'Amérique septentrionale, et tous paroissent être d’une seule et même espèce. Le loup du Mexique, ou plutôt de la nou-— velle Espagne, où on le trouve bien plus communement qu'au Mexique, a.cinq doigts aux pieds de devant, quatre à ceux de der— rière, les oreilles longues et droites, et les yeux étincelans comme nos loups : mais il a la tête un peu plus grosse ,: le cou plus épais et la queue moins velue ; au - dessus de la gueule.il a quelques.piquans aussi gros, mais . moins roides que ceux du hérisson. Sur un quelques taches jaunes; la tête, de la même couleur que le corps, est traversée de raies brunes , et le front est taché de fauve ; les oreilles sont grises comme la tête et le corps ; il y a une longue tache fauve sur le cou , une seconde tache semblable sur la poitrine, et x Ju Si fe " SAS 3218 Ft NOTICES. ER la È une troisième sur le ventre ; Les sa Ut marqués de bandes transversales depuis le dos jusqu’au ventre ; la queue est grise et marquée d’une tache fauve dans son milieu; les jambes sont rayées de haut en bas de gris et de brun. Ce loup est, comme lon Voit, le plus beau des loups, et sa fourrure doit être recherchée par la variété des couleurs * : mais, au reste, rien n'indique qu'ilsoit d’une espèce différente des nôtres, qui varient du gris au blanc, du blanc au noir et au mêlé, saus pour cela changer d'espèce; et l’on voit, par le témoignage de Fernandès, que ces loups de la nouvelle Espagne, dont nous venons de donner la description d'après Recchi et Fabri, varient comme le loup d'Europe, puisque dans ce pays même ils ne sont pas tous marqués comme nous venons de le dire, et qu'ils'en trouve qui sont de couleur uni-. forme et mème tout blancs. \ À * On pourroit soupconner, à cause de la variété des couleurs , que ce loup du Mexique est un lynæ ou loup-cervier, dont l’espèce se trouve, aussi-bien que celle du loup, daus les deux continens : maisal sufit de jeter les yeux sur la igure que nous a donnée Recch1, PAYr reconnoitre qu elle ressemble tout-à-fait à celle du loup, et pemt qu tout à celle du Iynx. k … " h A (DE QUELQUES ANIMAUX. 329 RUN L'ALCO. Nous avons dit qu'il y avoit au Pérou et au Mexique, avant l’arrivée des Européens; des animaux domestiques nommés a/co, qui étoient de la grandeur et à peu près du même naturel que nos petits chiens , et que Les Espa- gnols les avoient appelés chiens du Mexique, chiens du Pérou, par cette convenance et parce qu'ils ont le même attachement, la même fidélité pour leurs maîtres. En effet , l'espèce de ces animaux ne paroît pas être essentiellement différente de celle du chien; et d’ailleurs il se pourroit que le mot a/co füt ‘un terme générique, et non pas spécifique. Recchi nous a laissé la figure d’un de ces alcos , qui s'’appeloit, en langue mexicaine, ytzcuinte porzotli; 11 étoit prodigieusement _ gras, et probablement dénaturé par l’état de domesticité et par une nourriture trop abon-" dante. La tête est représentée si petite, qu'eile n’a, pour ainsi dire, aucune proportion avec la grosseur du corps ; il a les oreilles pen- 28 AR ENT MAT MT * HO dde Et 2 Sue x FR , 4 du 0 NWOTICES- ‘dantes , tre signe de Peur de mu. seau ressemble assez à celui d’un chien; tout le devant de la tête est blanc, et les oreilles sont en partie fauves ; le cou est si court, qu'il n’y a point d'intervalle entre la tête et les épaules ; Le dos est arqué et couvert d’un poil jaune; la queue est blanche et courte, elle est pendante et ne descend pas plus bas que les cuisses ; le ventre est gros et tendu , marqué de taches noires, avec six mamelles très-apparentes ; les jambes et les pieds sont blancs , et les doigts sont comme ceux du chien , et armés d'ongles longs et pointus. Fabri, qui nous a donné cette description, conclut, après une très-longue dissertation, que cet animal est le même que celui.qu’ou appelle a/co , et je crois que son assertion est fondée; mais il ne faut pas la regarder comme exclusive, car il y a encore une autre race de chiens en Amérique à laquelléce nom con vient également. Outre les chiens, dit Fer- nandès , que les Espagnols ont transportés d'Europe en Amérique, on y en trouve trois autres espèces qui sont assez semblables aux nôtres par la nature et les mœurs, et qui n'en diffèrent pas iufiniment par la forme. DE QUELQUES ANIMAUX. 335 Le premier et le plus grand de ces chiens américains est celui qu'on appelle xoloitz- cuintli : souvent il a plus de trois coudées de longueur; et ce qui lui est particu= lier, c’est qu'il est tout nud et sans poil : il est seulement couvert d’une peau douce, unie et marquée de taches jaunes et bleues. Le second. est couvert, de poil, et, pour la grandeur, est assez. semblable à nos petits chiens de Malte ; il est marqué de blanc, de noir et de jaune : il est singulier et agréable par sa difformité , ayant le dos bossu et le. cou si court, qu'il semble que sa tête sorte immédiatement. des épaules ; on l’appelle michuacanens, du uom de.son pays. Le troi- sième de ces chiens se nomme fechichi : il est assez semblable à nos petits chiens ; mais il a la mine sauvage et triste. Les Améri- cains en mangent la chair. En comparant ces témoignages de Fabri et de Fernandès, il est clair que le second: chien que ce dernier auteur appelle z7ichuacanens, est le même que L'yfzcuinte porzotli, et que cétte espèce d'animal existoit en effet en Amérique avant l’arrivée des Européens : il doit en être de même de la troisième espèce me > CNOTICES. appelée #echichi. Je suis donc péril que le mot afco étoit un nom générique qui les désignqit toutes deux, et peut-être encore d’autres races 6u variétés que nous ne con- noissons Par Mais à l égard de la premiére, il me paroit que Fernandès s’est trompé sur. le nom et la chose: aucun auteur ne dit qu ’1l se trouve des chiéns nuds à la nouvelle -Es- pagne : cette race de chiens vulgairement appelés chiens turcs, vient des Indes et des autres pays les plus chauds de l’ancien 'conti- nent, et il est probable que ceux que Fér- mandès a vus en Amérique y avoient été transportés, d'autant plus qu’il dit expressé— ment qu’il avoit vu cette espèce en Espagne avant son départ pour l'Amérique. Ces deux raisons sont suffisantes pour qu’on doive. présumer que ce chien nud n’en étoit pas originaire , Mais y avoit été transporté ; et ce qui achève de le prouver, c'est que cet ani- mal n’avoit point de nom américain, et que Fernandès, pour luien donnerun, emprunte celui de xoloïtzcuintii, qui ést le nom du loup de Mexique. Ainsi des trois espèces où variétés des chiensaméricains dontcetauteur fait mention, il n’en reste que deux que l’on 4 \ ! ” DE QUELQUES ANIMAUX. 333 désignoit indifféremment par le nom d’a/co; car, indépendamment de l’alco gras et potelé qui servoit de chien bichon aux damés péru- viennes , il y avoit un alco maigre et à mine triste qu’on employoit à la chasse, et il est très-possible que ces animaux, quoique de races très-différéntes en apparence de celles de tous nos chiens, soient cependant issus de la même souche. Les chiens de Lapponie, de Sibérie, d'Islande, etc. ont dû passer, comme les renards et les loups, d’un continent à l’autre, et se denaturer ensuite, comme les autres chiens, par le climat et la domes- ticité. Le premier alco , dont le cou est si court, se rapproche du chien d'Islande, et le techichi de la nouvelie Espagne est peut- être le même animal que lé koupara ou chien- crabe de la Guiane, qui ressemble au renard par la figure, et au chacal par le poil. On l’a nommé chien-crabe, parce qu’il se nourrit principalement de crabes et d’autres crusta- cés. Je n’ai vu qu’une peau de cet animal de la Guiane, et je ne suis pas en état de déci- der s’il est d’une espèce particuliése, ou si l’on doit le rapporter à celles du chien, du renard ou du chacal. { LE TAYRA, ou LE GALERA. C£Tanimal, dont M. Brown nous a donné la description et la figure, est de la grandeur d'un petit lapin, et ressemble assez à la be- lette ou à la fouine. Il se creuse un. terrier ; il a beaucoup dé force dans les pieds de de- vant, qui sont considérablement.plus courts que ceux de derrière ; son museau estalonsé, un peu pointu et garni-d’une moustache; la mâchoire inférieure est beaucoup plus courte que la supérieure; il a six dents inci- sives et deux canines à chaque mâchoire, sans compter les mächelières ; sa langue est. rude comme celle du chat; sa tèteestoblongue; ses yeux, qui sontaussi un peu oblongs, sont à une égale distance des oreilles et de l’extre- mité du museau ; ses oreilles sont plates et assez semblables à celles de l’homme ; ses pieds sont forts et faits pour creuser; les métatarses sont alongés ; il y a cinq doigts à tous les pieds ; la queue est longue et droite, et va toujours en diminuant; le corps est DE QUELQUES ANIMAUX. 338 oblong , et ressemble beaucoup à celui d’un _ gros rat; il-est couvert de poils bruns, dont les uns sont assez longs, et les autres beau- coupplus courts. Cet animal nous paroît être une petite espèce de fouine ou de putois. M. Linnæus a soupçonné , avec quelque rai- son, que la belette noire du Bresil pourroit bien être le galera de M. Brown; et en effet les deux descriptions s'accordent assez pour qu’on puisse le présumer. Au reste, cette belette noire du Bresil se trouve aussi à la Guiane , où elle se nomme zayra ; et je | soupçonne que le nom ga/era, dont M. Browu ne donne pas l’origine, est un mot corrompu et dérivé de £ayra, qui est Le vrai nom de cet animal. EMI. LE PHILANDRE DE SURINAM. CET animal est du même climat et d’une espèce voisine de celle du sarigue, de la mar- mose, du cayopollin et du phalanger.Sibylle Mérian est le premier auteur qui en aitdonné la figure, avec une courte indication. Ensuite FR NT ER IOTNEE _ * v# 386: TL ue Seba a donné pour la femelle la figure mème de Mérian, ELpoure mie uuenouvelle figure | avec une espèce de description. Cet animal, dit-il, a les yeux très-brillans et euvironnés d’un cercle de poil brun foncé ; le corps couvert d’un poil doux , ou plutôt d’une es— pèce de laine d'un jaune roux ou rouge, clair sur le dos : le front, le museau , le ventre et les pieds sout d’un jaune blanchâtre ; les oreilles sont nues et assez roides ; il y a de longs poils en forme de moustaches sur la lèvre supérieure et aussi au-dessus des yeux ; ses dents sont, comme celles du loir, pointues et piquantes ; sur la queue, qui est nue et d’une couleur pâle, il y a dans le mäle des taches d'un rouge. obscur qui ne se remar- quent pas sur la queue de la SN : les t pieds ressemblent aux mains d'un singe ; ceux de devant ont les quatre doigts et le pouce garnis d'ongles courts eË obtus, au lieu que des cinq doigts des pieds de derrière il n'y a que le pouce qui ait un ongle plat et obtus , les quatre autres sont armés de petits ongles aigus. Les petits de ces animaux ont un groguement assez semblable à celui d’un. petit cochon de lait. Les mamelles de la DE QUELQUES ANIMAUX. 35; _ mère ressemblent à celles de la marmose. Seba remarque avec raison que dans la figure donnée par Mérian , les pieds et les doigts sont mal représentés. Ces philandres pro- duisentcinqousix petits; ils ont la queue très- longue et prenante comme celle des sapajous : les petits montent sur le dos de lenr mère et s’y tiennent en accrochant leur queue à la sienne ; dans cette situation qui leur est fa- milière , elle les porte et transporte avec autant de sûreté que de légéreté. X V EL L'ACOUCHI. L’AcoucuI ést assez commun à la Guiane et dans les autres parties de l'Amérique me ridionale ; il diffère de l’agouti, en ce qu'il a une queue, au lieu que l’agouti n’en a point ; Pacouchi est ordinairement plus petit que l’agouti, et son poil n’est pas roux, mais de couleur olivatre: voila les seules diffé- rences que nous connoissions entre ces deux .… animaux, qui néanmoins nous paroissent sufhsantes pour constituer deux espèces dis- tinctes et séparées. 33% NOTICES | XVIIL LE TUCAN. FERNANDÈS donne le nom de can à un petit quadrupède de la nouvelle Espagne , dont la grandeur, la figure et les habitudes naturelles approchent plus de celles de la taupe-que d'aucun autre animal : il me pa- roit que c’est le mème qu’a décrit Seba sous le nom de faupe rouge d'Amérique ; au moins les descriptions de ces deux auteurs s’ac— cordent assez pour qu’on doive le présumer. Le tucan est peut-être un peu plus grand que notre taupe; 1l est comme elle gras et charnu , avec des jambes si courtes que le ventre touche à terre : 11 a la queue courte; les oreilles petites et rondes ; les yeux si pe- tits, qu’ils lui sont, pour ainsi dire, inutiles: mais il diffère de la taupe par la couleur du poil, qui est d’un jaune roux ; et par le. nombre des doigts, n’en ayant que trois aux pieds de devant et quatre à ceux de derrière, au lieu que la taupe a cinq doigts à tous les pieds ; il paroit en différer encore , en ce que ‘ / | | DE QUELQUES ANIMAUX. 339 sa chair est bonne à manger , et qu’il n’a pas l'instinct de la taupe pour retrouver sa re- traite lorsqu'il en est sorti ; il creuse à chaque fois un nouveau trou, en sorte que daus de certaines terres qui lui conviennent, les trous que font ces animaux, sont en si grand * nombre, et si près les uns des autres, qu’on ne peut y marcher qu'avec précaution. 0 LA MUSARAIGNE DU BRESIL. Nous indiquons cet animal par la déno- mination de #usaraigne du Bresil, parce que nous en ignorons le nom, et qu’il res- semble plus à la musaraigne qu'à aucun autre animal ; il est cependant considérablement plus grand, ayant environ cinq pouces de- puis l'extrémité du museau jusqu’à l’origine. de la queue, qui n’a pas deux pouces, et qui par conséquent est plus courte à proportion que celle de la musaraigne commune; il a le museau pointu et les dents trèés-aiguës : sur un fond de poil brun, on remarque trois bandes noires assez larges qui s'étendent 340 NOTION longitudinalement depuis la tète jusqu'à la queue , au-dessous de laquelle on remarque aussi la bourse avec les testicules qui sont pendans entre les pieds de derrière. Cet ani- 1, dit Marcgrave, jouoit avec les chats, qui d’ailleurs ne se soucient pas de lé man= ger; et c'est encore une chose qu'il a de commun avec la musaraigne d'Europe , que les chats tuent, mais qu'ils ne mangent jamais. LD. à L'APÉRÉA. CET animal qui se trouve au Bresil, n’est ni lapin ni rat, et paroit tenir quelque chose. de tous deux; il a environ un pied de lon- gueur sur sept pouces de circonférence ; Le poil de la même couleur que nos lièvres, et blanc sous le ventre ; il a aussi la lèvre fen> due de même , Les grandes dents incisives, et la moustache autour de la gueule et à côté des yeux : mais ses oreilles sont arrondies comme celles du rat, et elles sont si courtes, qu'elles n’ont pas un travers de doigt de hau- DE QUELQUES ANIMAUX. 34e teur; les jambes de devant n'ont que trois pouces de hauteur , celles de derrière sont un peu plus longues; les pieds de devant ont quatre, € doigts couverts d’une peau noire et munis dé petits ongles courts ; les pieds de derrière n’ont que trois doigts, dont celui du milieu est plus long que les deux autres. L’apéréa n’a point de queue ; sa tête est un peu plus alongée que celle du lièvre, et sa . chair est comme celle du lapin , auquel ik ressemble par la manière de vivre. Il se recèle aussi dans des trous : mais il ne creuse pas la terre comme le lapin ; c’est plutôt dans des fentes de rocher et de pierre que dans des sables qu’il se retire : aussi est-il bien aisé à prendre dans sa retraite. On le chasse commèë un très-bon gibier, ou du moins aussi bon que nos meilleurs lapins. Il me paroiît que l’animal dont Oviedo, et après lui , Charle- voix et Duperrier de Montfraisier, font men- tion sous le nom de cori, pourroit bien être le même que l’apéréa ; que dans quelques endroits des fndes occidentales on a peut-être élevé de ces animaux dans les maisons où dans des garennes , comme nous élevons des Japins; et qu'enfin c’est par cette raison qu'il 29 » — FURREUE in, ; TU COMTESSE 34 A NO TFC ES TON ON s’en trouve de roux, de blancs, de noïrs, et de variés de couleurs différentes. Ma conjec- ture est fondée; car Garcilasso dit expressé- ment qu'il y avoit au Pérou des lapins champêtres et d’autres domestiques, qui ne ressembloient point à ceux d'Espagne. XXL LE TAPETL LE tapeti me paroit être une espèce très- voisine et peut-être une variété de celle du lièvre ou du lapin : on le trouve au Bresil et dans plusieurs autres endroits de l’'Amé- rique. Il ressemble au lapin d'Europe par la figure ; au lièvre par la grandeur et par le poil, qui seulement est un peu plus brun :il a lés oreilles très-longues et de la même forme; son poil est roux sur le front et blan- châtre sous la gorge : quelques uns ont un cercle de poil blanc autour du cou; tous sont blancs sous la gorge, la poitrine et le ventre: ils ont les yeux noirs, et des moustaches eomme nos lapins ; mais ils n’ont point de queue. Le tapeti ressemble encore au lièvre Le Le :s à DE QUELQUES ANIMAUX, 343 par sa manière de vivre, par sa fécondité, et par la qualité de sa chair, qui est très-bonne à manger ; il demeure dans les champs ow dans les bois comme le lièvre, et ne se creuse pas un terrier comme le lapin. Il me paroît que l’animal de la nouvelle Espagne indi- qué par Fernandès sous le nom de ciéli, est le même que le fapeti du Bresil, et que ces animaux ne-sont qu'une variété denoslièvres d'Europe, qui ont pu passer, par le Nord, d’un continent à l’autre. Iz y auroit bien encore quelques espèces d'animaux à ajouter à ceux qui sont compris dans les notices précédentes; mais ils sont si mal indiqués, qu’elles deviendroient trop in- certaines, et j'aime mieux me borner à ce que l’on sait avec quelque certitude, que de _ me livrer à des conjectures , et tomber dans l'inconvénient de donner pour existans des êtres fabuleux ; et pour des espèces réelles des animaux défigurés. Avec cette limite, et mal-- gré ce retranchement, quej'ai cru nécessaire, les personnes instruites s’appercevront aisé ment que notre Histoire des animaux ést aussi complète qu'on pouvoit l’espérer : elle 344 MR contient un cr 1000 d'en nous veaux, et il n’y en a aucun de ceux qui étoient anciennement connus , dontil ne soit fait mention dans le cours de cet ouvrage. Les notices précédentes , quoique compo- sées de vingt-un articles , ne, contiennent réellement que neuf ou dix espèces d'ani= maux différens , car tous les autresine sont que des variétés : l’ours blanc n’est qu’une variété de l’espèce de l'ours ; la vache de Tar- tarie, de celle du bison ; le cochon de Guinée et le cochon du cap Verd , de celle du co- chon , etc. Ainsi, en ajoutant ces dix espèces à cent quatre-vingts ou environ dont nous ayons donné l'histoire , le nombre de tous les animaux quadrupèdes dont l'existence est certaine et bien constatée , n’est tout au plus que de deux cents espèces sur la surface entière de la terre connue. Fin du tome septième, MALE Des articles contenus dans ce volume. | Nouex CLATURE des singes, page $. Les orangs-outangs, ou le pongo et le jocko, ge Le pithèque, 96. Le sibbon, ro5. Le magot, 110. Le papion, ou babouin proprement dit, rr44 : Le mandrill, 120,4 L’ouanderou, et le lowando, L24e Le maimou, 129. | Le macaque, et l'aigrette, 132. Le patas, 136. Le malbrouck, et le bonnet-chinois » T40S Le mangabey, 148. La mone, #51. Le calhitriche, 155. Le moustac, 159. Le talapoin, 161. | Le donc, 165... : di De la dégénération des animaux, 170. Les sapajous, et les sagouins, 255. L’ouarine, et lalouate, 260. 46. , TABLE Le ceaita, et lexquima , 64 ANSE Le sa) ou ; 270 À Le sai, 28r. ; Se Le saimiri, 284: | | Ames Le saki, 266. in Re NU Le tamarin, 288. qe, Re L’ouistiti, 290 EC Le marikina, 294 RMS Le pinche, 296, | À Le mico, 299 = Notices de quelques animaux 3or« Ours blanc, 304. Vache de Tartarie, 3cr. Le tolai, 5r4. Le zisel, 315. ’ Le zemni, 3r7. Le pouc, 3r9. Le pérouasca , 1bid. Le souslik, 320. Taupe dorée, 322. Rat d’eau blanc, z4:d. Le cochon de Guinée, 323: Le sanglier du cap Verd, 325. Le loup du Mexique, 6. L’alco , 329. | Le tayra, ou le galera, 334. Le philandre de Surinam, 335. © L'acouchi , 337 Le tucan , 236. La musaraigne du Bresil, 339e . . * L’apéréa, 340. Le tapeti, 342. DE L'IMPRIMERIE DE PLASSAN. PT T A B L EF. hr 347 à: DE ja raie 40 vigne à Ada ph PPT TT . # x” MAGEAIE AU AP